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2,90 € jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO - N° 23 523 - www.lefigaro.fr - France métropolitaine uniquement Première édition

lefigaro.fr
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais

RENCONTRE ENQUÊTE
L’ODE DE J. M. G. LE CLÉZIO DE MARSEILLE À L’ÉLYSÉE,
À LA BRETAGNE COMMENT RAOULT SÉDUIT
PAGE 15 LES POLITIQUES PAGE 19

LE FIGARO
CHEZ VOUS Les réanimations vont-elles
manquer de médicaments ?
LIRE, RELIRE, VOIR,
ÉCOUTER, CUISINER,
S’ÉVADER…
PAGES 11 À 18

Indispensables aux patients placés sous respiration artificielle, les hypnotiques, myorelaxants
FAMILLE et anti-infectieux sont soumis à une explosion de la demande partout dans le monde.
CES COUPLES QUI
VIVENT SÉPARÉMENT À mesure que l’épidémie
s’étend partout sur la planète,
services de réanimation sub-
mergés de patients, on com-
tiques et d’antibiotiques sont
au plus bas. Les autorités sani-
ou des médicaments vétéri-
naires pourraient même être
soignants rivalisent d’imagi-
nation, tandis qu’un formida-
LE CONFINEMENT les menaces de pénurie des mence à manquer des médi- taires et les industriels cher- mis à contribution… Quant au ble élan de solidarité se met en
PAGE 12 produits les plus indispensa- caments essentiels : les chent des solutions tous azi- matériel médical ou de pro- place pour leur fournir des so-
bles s’amplifient. Dans les réserves de curares, d’hypno- muts ; d’anciennes molécules tection, il manque aussi, et les lutions de fortune.

è LES PRINCIPALES MOLÉCULES UTILISÉES EN « RÉA » è A LA RECHERCHE DE SOLUTIONS POUR ÉVITER LA PÉNURIE è RÉMI SALOMON : « CERTAINS PRODUITS ESSENTIELS
EUROPE VONT MANQUER » è LE FORMIDABLE ÉLAN DE SOLIDARITÉ POUR COMBLER LES PÉNURIES DE MATÉRIEL PAGES 2, 3 ET L’ÉDITORIAL
L’ubuesque
Biélorussie
nie être touchée
par l’épidémie PAGE 10
Afrique : la vulnérabilité Covid-19 :
FOOTBALL
du continent inquiète le monde les raisons de
Marseille a perdu
son « Pape » PAGE 23 l’exception
À TRAVERS LA allemande
FRANCE CONFINÉE Jusqu’ici, le coronavirus tue en
À la Castellane, Allemagne cinq fois moins de
les dealers personnes qu’en France, vingt
déconfinés PAGE 27 fois moins qu’en Italie et en
Espagne. Certes, l’épidémie a
déjà fait 788 victimes outre-
ÉNERGIE Rhin, mais les autorités pa-
Le marché du raissent mieux maîtriser la
pétrole plongé dans situation.
Cette exception en Europe peut
une crise sans s’expliquer par une politique
KOLA SULAIMON/AFP

précédent PAGES 30 ET 31 de dépistage massif, qui

concerne déjà plus de
TÉLÉVISION 300 000 personnes par semai-
ne, et par des infrastructures de
Les jeunes santé plus développées que
retrouvent dans les pays voisins, avec no-
Un scénario catastrophe se profile pour l’Afrique, désormais touchée par le coronavirus. S’ils ne sont pas aidés,
le petit écran PAGE 36 de nombreux pays pauvres où le confinement est impossible risquent d’offrir un réservoir à la maladie, d’où elle pourrait
tamment trois fois plus de lits
de réanimation que chez nous.
nous revenir en boomerang. PAGES 6, 7 ET 8 PAGE 9
Un entretien
CHAMPS LIBRES

avec Jean-
Pierre Cabestan ÉDITORIAL par Gaëtan de Capèle gdecapele@lefigaro.fr
n
Les tribunes
d’Éric Naulleau
et de Stéphane Maîtriser notre destin

A
Ratti
La chronique près les masques, les respira- tion bien sûr, mais aussi les technologies ART MODERNE
& CONTEMPORAIN
n

teurs, les tests, allons-nous sensibles d’avenir comme l’espace, l’infor-

de Luc Ferry maintenant manquer de médi- matique quantique ou les données numéri-
PAGES 25 ET 26 caments ? La France était censée ques… Dans un monde dominé par les deux
disposer du système de soins le empires américain et chinois, cette ambition

@
plus performant du monde. On découvre, passe nécessairement en grande partie par
FIGARO OUI avec le coronavirus, son extraordinaire vul- l’Europe.
FIGARO NON nérabilité : tout ce dont elle a urgemment be- La reconquête de notre souveraineté est un

Réponses à la question
de mercredi :
Le confinement a-t-il des
bons côtés pour vous ?
OUI
Et si vous en profitiez
soin se trouve entre d’autres mains, souvent grand dessein, mais elle ne se décrète pas,
chinoises. Cette cruelle expérience nourrit de comme l’imaginent Marine Le Pen et Jean-
légitimes questions sur « le monde d’après ». Luc Mélenchon,
À commencer par la nécessité d’en finir non La souveraineté en fermant les pour nous demander
pas avec la mondialisation - elle existe de fait ne se décrète frontières et en
NON et nul ne pourrait aujourd’hui s’en passer -,
pas, elle se
exigeant de
des expertises ?
Maurice de VLAMINCK La rivière, circa 1913-1914 (détail)

64 % 36 % mais avec ses excès. À dire vrai, la correction produire en

TOTAL DE VOTANTS : 118 422

a déjà commencé, sous la pression du mou-
vement environnemental et de la guerre
construit France. Elle se
construit. Par Inventaires à distance
commerciale entre Washington et Pékin. une vigilance de tous les instants envers les en visio 06 16 60 09 87
Votez aujourd’hui En France, Emmanuel Macron appelle à un appétits extérieurs sur nos pépites industriel-
sur lefigaro.fr sursaut de souveraineté, pour ne plus dépen- les et technologiques. Mais aussi en créant un ou sur photos
3’:HIKKLA=]UW^U[:?a@o@k@c@a";

Médicaments, masques : dre de personne dans les secteurs de « pre- environnement favorable au développement expertise@millon.com
croyez-vous que la mière nécessité ». C’est le moins que l’on des entreprises. La compétitivité économi-
production sera puisse exiger après l’expérience navrante du que d’un pays est assurément le meilleur
M 00108 - 402 - F: 2,90 E

relocalisée en France Covid-19. Plus jamais ça ! Cette maîtrise de moyen d’éviter les délocalisations et d’en-
après la crise ? notre destin doit prévaloir pour tous les do- courager l’investissement et l’innovation. La
maines touchant à l’intérêt national : la san- vérité oblige à dire que, là aussi, nous avons Catalogues en préparation
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

2 L'ÉVÉNEMENT
Il est très
important
Tensions sur les médicaments
que les patients et Avec l’explosion de la demande. les produits indispensables aux patients actuellement
les professionnels
de santé n’utilisent
la chloroquine CÉCILE THIBERT £@Cecilethibss
et l’hydroxy-
chloroquine APRÈS les masques, les équipe-
ments de protection pour les soi-
que dans gnants, les tests, ce sont désormais
les indications les médicaments indispensables
aux services de réanimation qui
autorisées viennent à manquer. Dans un do-
ou dans le cadre cument confidentiel du ministère
de l’Intérieur daté du 25 mars que
d’essais cliniques Le Figaro s’est procuré (et dont Me-
ou de programmes diapart avait dévoilé quelques pa-
ges vendredi), il est indiqué que
d’urgence « les hôpitaux civils n’ont qu’une se-
maine d’approvisionnement, tandis
au niveau national que les hôpitaux militaires n’ont plus
pour le traitement que 2,5 jours de stock, contre 15 jours
du Covid-19
AGENCE EUROPÉENNE
» en temps normal. » À court terme,
indique ce rapport, « il conviendra
de s’appuyer sur les stocks d’hôpi-
DU MÉDICAMENT (EMA) taux des départements peu impac-
tés ». On y apprend également que
« les vétérinaires, détenteurs de ce
type de médicaments, sont égale-
ment mis à contribution : c’est déjà
tension sur quasiment tous les médi-
caments, même les antibiotiques qui
permettent de traiter les infections
nosocomiales. »
Trois types de produits sont essen-
tiels pour qu’un patient puisse être
mis sous ventilation mécanique : les
hypnotiques, qui plongent dans un
coma artificiel ; les dérivés de la
morphine, qui sont de puissants an-
tidouleurs ; et les curares, des pro-
duits paralysants (voir l’encadré).
« La consommation de ces médica-
ments est délirante, et elle ne cesse de
s’accroître », s’inquiète le médecin.
Et pour cause : la grande majorité
des patients en réanimation ont be-
soin de ces produits tout au long de
leur séjour. Ce qui explique pour-
quoi leur consommation a été mul-
tipliée par 20 (+ 2 000 % !), comme
l’a indiqué le ministre de la Santé,
Olivier Véran. Autre problème :
« Pour une raison encore pas com-
plètement élucidée, les patients ont
besoin de doses très élevées de cer-
Un patient atteint
du Covid-19 à la clinique
Ambroise-Paré
de Neuilly-sur-Seine
avec, à côté de lui,
les nombreux
pousse-seringues
électriques
indispensables
à sa réanimation.
LUC NOBOUT/IP3
me et nouvelles pour certains soi-
gnants, qui doivent alors se former.
Par souci d’économie, certains
hôpitaux sont aussi plus regardants
sur les quantités administrées.
« Pour l’instant, nous ne manquons
pas de matériel, mais nous avons une
utilisation plus parcimonieuse
des médicaments. Nous essayons
par exemple d’utiliser moins de cu-
rares », explique le Pr Nicolas
de Prost, médecin réanimateur à
l’hôpital Henri-Mondor à Créteil.
« Nous avons des machines très
sophistiquées qui nous permettent de
doser précisément la quantité de
médicament nécessaire, mais nous
n’en aurons pas pour tous les pa-
tients », indique le Pr Montravers.
Le médecin se veut optimiste : « On
trouvera toujours des solutions,
même si cela passe par des techni-
ques plus rustiques. S’il le faut, nous
réduirons des comprimés en poudre
pour les injecter dans l’estomac.
Mais nous n’en sommes pas là. »
Nombre de médecins ont rappor-
té au Figaro que, plus encore que les
médicaments, ce sont certains ma-
tériels pour les administrer qui font

905 279 le cas de l’école vétérinaire de

Maisons-Alfort ». Sidérant.
Interrogé sur la question des
CAS stocks lors d’une conférence de
presse samedi dernier, le premier
CONFIRMÉS ministre, Édouard Philippe, a indi-
qué que les inquiétudes ne portaient
dans le monde, pas tant sur la pénurie de médica-
hier à 20 h ments que sur l’explosion de la
(Source : Johns Hopkins demande. « Comme le monde entier
University) se trouve confronté à une situation où
les besoins en réanimation explosent
tains médicaments, en proportion
plus importante que la moyenne des
patients de réanimation en temps
normal. Ceci multiplié par le volume
de patients actuel crée en effet une
très forte demande à l’échelle mon-
diale », estime la Dr Élise Morawiec,
du service de pneumologie, méde-
cine intensive et réanimation à
l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
Un retour à la normale
espéré pour septembre

6 017
à un rythme jamais constaté, nous
avons et nous pouvons avoir dans les
semaines et les jours qui viennent des
tensions d’approvisionnement », a-
Et la situation est partie pour durer.
« Nous sommes actuellement en phase
d’augmentation, nous atteindrons

personnes
t-il déclaré, fataliste.
Si la situation est encore sous
étaient en réanimation contrôle dans la plupart des hôpi-
taux français, certains commen-
en France mercredi cent déjà à être en difficulté. En
soir sur 24 639 particulier les établissements fran-
hospitalisées ciliens, qui comptaient mercredi
(Source : DGS) plus de 2 000 patients en réanima-
tion. « Nous sommes en alerte depuis
un peu plus d’une semaine. Nous
n’avons pas de rupture, mais des
tensions assez importantes sur tous
les médicaments de sédation », rap-
porte le Pr Jean-Michel Constantin,
anesthésiste réanimateur à l’hôpital
de la Pitié-Salpêtrière à Paris (AP-
HP). Même constat pour le Pr Phi-
lippe Montravers, médecin anes-
thésiste-réanimateur à l’hôpital
Bichat à Paris : « À l’heure actuelle,
nous ne manquons de rien. Mais nous
nous préparons à être en énorme
prochainement un plateau qui va du-
rer deux ou trois semaines à ce ryth-
me », estime le Pr Jean-François
Timsit, chef du service de réanima-
tion et maladies infectieuses à l’hô-
pital Bichat (AP-HP), qui table sur un
retour à la normale en septembre.
Face au risque de pénurie, cer-
tains services sont déjà passés au
système D. « Nous faisons les fonds
de tiroir, témoigne le Pr Constantin.
Nous nous remettons à utiliser d’an-
ciennes molécules dont il restait en-
core un peu de stock, comme c’est le
cas du gamma-OH, un produit
d’anesthésie que tout le monde
connaît sous le nom de GHB. Cela
nous permet de diminuer les doses
des autres produits. » Ces alternati-
ves ne sont heureusement pas
moins efficaces, simplement plus
longues à éliminer pour l’organis-

Les principales molécules utilisées en « réa » À la recherche

profit de la respiration assistée que étranger, en l’occurrence le tube en
TRISTAN VEY £@veytristan l’on impose au patient. » Les princi- plastique du respirateur », explique KEREN LENTSCHNER £@Klentschner

Les dérivés LA PRISE en charge en service de

morphiniques réanimation de nombreux malades
permettent en syndrome de détresse respira-
toire aiguë (SDRA) pour de longues
de contrecarrer durées (parfois plusieurs semaines)
la résistance
que les malades
fait craindre des pénuries pour cer-
taines molécules-clé indispensa-
bles à l’intubation et au maintien
opposent des patients sous respiration artifi-
cielle. Nous revenons ci-dessous
naturellement sur le rôle joué par chacun de ces
produits.
aux respirateurs
artificiels. u Les dérivés morphiniques
(type Fentanyl)
Il faut faire céder Ce n’est pas de la morphine qui est
la respiration utilisée en réanimation ou au bloc
opératoire, mais des dérivés de
spontanée synthèse beaucoup plus puissants.
au profit « Ils ont une double vertu : ils
sont analgésiques (anti-douleurs,
de la respiration NDLR) et induisent une dépression
assistée
que l’on impose
respiratoire en agissant sur le bulbe
rachidien, la partie inférieure du
tronc cérébral », précise François
au patient »
DOCTEUR FRANÇOIS CHAST,
Chast, président honoraire de
l’Académie nationale de pharmacie
et ancien responsable des services
PRÉSIDENT HONORAIRE de pharmacie des hôpitaux de
DE L’ACADÉMIE NATIONALE Paris, Bicêtre, Hôtel-Dieu, Cochin
DE PHARMACIE et Necker. Cela peut paraître con-
X. RENAULT/SDP tre-intuitif, mais c’est une proprié-
té essentielle : « Cela permet de
contrecarrer la résistance que les
malades opposent naturellement aux
A
pales molécules utilisées sont le
fentanyl, le sufentanil ou le rémi-
fentanil. Toutes ces molécules sont
des opioïdes.
u Les benzodiazépines
(type Midazolam)
Outre les opioïdes de synthèse,
la sédation du patient (endormisse-
« agissent
ment et apaisement) est assurée par
un benzodiazépine, généralement
le midazolam. Cette molécule est
à la fois un anxiolytique (au même
titre que le Valium), un hypnotique
(qui induit le sommeil) et un myo-
relaxant (relâchement musculaire)
qui réduit à ce titre l’activité du
centre respiratoire. « C’est une mo-
lécule qui agit ainsi en parfaite sy-
nergie avec l’opioïde de synthèse »,
précise François Chast. L’objectif
est de mettre le patient dans les
meilleures conditions possible pour
supporter la respiration artificielle.
u Les curares
Ce sont des molécules qui agis-
sent au niveau de la jonction neu-
romusculaire : elles bloquent la
transmission du signal nerveux et
empêchent ainsi la contraction des
muscles. En d’autres termes, elles
ont un effet paralysant sur le pa-
tient. « On les utilise notamment au
moment de l’intubation pour inhiber
le spasme laryngo-pharyngé, un
le Pr François Chast. Quand le ma-
lade essaie de lutter contre le respi-
rateur en dépit de l’importante
sédation-analgésie qui lui est ad-
ministrée, ce qui semble fréquent
chez les patients atteint par le
Les curares Covid-19, le patient est « curarisé »
de manière prolongée.
au niveau
de la jonction u Les antibiotiques
Un passage en réanimation est
neuro- synonyme de pratiques invasives.
Le patient est généralement intubé,
musculaire : sous sonde urinaire et cathéter vei-
ils bloquent neux ou artériel. Autant de portes
d’entrées pour des infections bac-
la transmission tériennes nosocomiales. « Beau-
du signal coup de malades qui arrivent en réa-
nerveux nimation sont par ailleurs souvent
et empêchent surinfectés et en stress métabolique
ainsi
(leurs défenses immunitaires natu-
relles sont affaiblies, NDLR) »,
la contraction ajoute François Chast. Les patients
des muscles » sont ainsi fréquemment mis sous
un cocktail d’antibiotiques, cer-
tains à spectre large (les bêta-lac-
tamines et les aminosides par
exemple, deux familles d’antibioti-
ques qui s’attaquent à tous types de
bactéries) et d’autres plus spécifi-
ques, tels que les glycopeptides, qui
s’en prennent aux streptocoques
ou aux staphylocoques. Ces traite-
ments peuvent s’accompagner
d’autres anti-infectieux, tels que
des antifongiques, en particulier
DIPRIVAN, Cisatracurium, Mida-
zolam… Les noms de ces médica-
ments, utilisés aux urgences ou en
réanimation, sont inconnus du
grand public. Ils sont commandés
aux laboratoires pharmaceutiques
par les pharmacies centrales des
établissements hospitaliers dans le
cadre d’appels d’offres de marchés
publics. Depuis un mois, les indus-
triels font face à une augmentation
sans précédent des achats de ces
produits : sédatifs, anesthésiques,
antibiotiques, morphine… « La de-
mande en curare et sédatifs a été
multipliée par dix », témoigne un
poids lourd de l’industrie.
Face à l’urgence de la situation,
les laboratoires se retrouvent en
première ligne. Parmi eux, des Big
Pharma comme Pfizer ou des géné-
riqueurs comme Mylan, qui entraî-
nent dans leur sillon une multitude
de façonniers. Chaque semaine,
voire chaque jour en cas de tension
importante, ils doivent communi-
quer à l’Agence nationale de sécu-
rité du médicament (ANSM) l’état
des stocks de ces médicaments.
L’ANSM a établi, en effet, une liste
de médicaments critiques pour les
patients atteints du Covid-19, ce
qui permet « d’agir au plus vite
lorsque des tensions sont détec-
tées », indique l’ANSM. « Nous col-

respirateurs artificiels. Il faut faire blocage réflexe au niveau de la gorge pour les personnes immuno-dé- laborons étroitement avec les autori-
céder la respiration spontanée au destiné à empêcher l’entrée du corps primées. ■ tés, comme l’ANSM, notamment
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de réanimation
sous respiration artificielle commencent à manquer.
déjà cruellement défaut. « Nous
manquons de pousse-seringues, à tel
point que nous devons mélanger cer-
tains produits dans la même seringue
pour les économiser », raconte le
Dr Damien Barraud, réanimateur à
l’hôpital de Metz-Thionville, qui in-
dique vivre « avec une épée de Da-
moclès ». « On manque de tout, mais
nous arrivons encore à tout récupérer
pour le moment. C’est la grande dé-
brouille », résume le Pr Timsit, qui a
appelé lui-même une firme phar-
maceutique mardi pour obtenir des
médicaments. « Les entreprises font
de solutions pour éviter la pénurie
dans la répartition des stocks entre
les hôpitaux et la ville », explique
Christophe Maupas, président de
Mylan France.
Centraliser les commandes
La responsabilité des laboratoires,
mais aussi des pouvoirs publics, a
vite été pointée du doigt par cer-
tains. « Le problème n’est pas lié à
un manque de stocks ou à un défaut
d’anticipation, mais à une demande
mondiale inédite, se défend un
cadre de l’industrie pharmaceuti-
que. Tout le monde fait la chasse
aux médicaments aujourd’hui. » La
France pâtit-elle de sa dépendance
en matière de production à l’égard
de l’étranger ? « Face à l’ampleur
de la crise et des besoins, avoir da-
vantage d’usines de médicaments
en France n’aurait pas changé la
donne », ajoute ce cadre. Certains
élus comme Alexis Corbière, dé-
puté La France insoumise, ont ap-
pelé l’État à « réquisitionner » des
sites. « Il faut plusieurs mois pour
reconvertir une chaîne de produc-
tion de médicaments, explique un
fabricant. Il s’agit de produits de
haute technologie. »
La première réponse des indus-
triels a consisté à augmenter de fa-
çon significative leurs capacités de
production. C’est le cas de Mylan,
qui a ainsi accéléré la cadence dans
l’ensemble de ses sites, y compris
dans ses trois usines françaises, à
commencer par celle de Saint-
Priest (Rhône). C’est là qu’il pro-
ce qu’elles peuvent, mais nous som-
mes en train de tout vider. »
Dans ce contexte, l’Agence na-
tionale du médicament est évidem-
ment mobilisée. Ses missions sont
d’« évaluer les risques de ruptures de
stock, de valider et de coordonner, si
nécessaire, les actions qui doivent
être menées par les laboratoires
pharmaceutiques, afin de sécuriser
l’accès à ces médicaments pour les
patients », a-t-elle indiqué, préci-
sant qu’elle pourrait être amenée à
« prendre des mesures exceptionnel-
les si cela s’imposait ».
duit le sédatif Midazolam, le curare
Cisatracurium et l’analgésique Re-
mifentamil. « Toutes les équipes de
Mylan sont mobilisées à l’extrême
pour couvrir au mieux les besoins de
production et de distribution de l’en-
semble des traitements clés dans
cette crise sanitaire », confie le pré-
sident de sa filiale française. Même
chose chez Pfizer, qui a vu dans
l’Hexagone la demande pour l’an-
tibiotique Zithromax et le sédatif
Atracurium monter en flèche ces
dernières semaines. Ce dernier est
encore disponible aujourd’hui mais
« dans des conditions d’approvision-
nement très restreintes compte tenu
de l’accroissement très rapide de la
demande », reconnaît Pfizer. « Nous
avons mis en place un plan sans pré-
cédent pour contrôler et augmenter
les activités de nos sites de produc-
tion », répond le laboratoire, qui dit
échanger « quotidiennement » avec
les autorités sanitaires françaises.
« Ces actions comprennent une aug-
mentation de la production et une
réorientation vers les médicaments
les plus critiques. »
L’autre levier consiste sans doute
à gérer plus efficacement la de-
mande. « Aujourd’hui, chaque hôpi-
tal se débrouille par ses propres
moyens et passe commandes aux in-
dustriels de façon désordonnée, ra-
conte un dirigeant de l’industrie
pharma. Cela n’empêche pas cer-
tains établissements de surstocker
certains médicaments ou de passer
commande d’un même médicament
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Dimanche, plusieurs ONG, dont
l’Observatoire de la transparence
dans les politiques du médicament
(OTMeds), ont déposé un recours au
Conseil d’État, demandant au gou-
vernement d’agir. « Les entreprises
ont en grande partie délocalisé leur
production en Inde et en Chine, ce qui
nous rend dépendants de ces impor-
tations », indique Pauline Londeix,
cofondatrice de l’OTMeds. « Que se
passera-t-il si ces pays cessent d’ex-
porter ? Il faut agir dès maintenant en
produisant à nouveau sur notre terri-
toire. Chaque jour compte. » ■
à plusieurs fournisseurs. Il n’y a
aucune centralisation des comman-
des. » Selon nos informations, les
pouvoirs publics réfléchiraient à un
dispositif permettant d’avoir une
vision globale des commandes pas-
sées afin de mieux gérer les stocks.
Parmi les autres moyens à dispo-
sition des laboratoires, figure l’im-
« ingénieurs
portation dans l’Hexagone de mé-
dicaments de leur portefeuille
n’ayant pas encore d’autorisation
de mise sur le marché (AMM) en
Europe. L’ANSM encourage ainsi
les industriels à faire venir en Fran-
ce des spécialités comparables dis-
ponibles à l’étranger. Elle doit pour
cela procéder à l’« analyse des élé-
ments relatifs à la qualité pharma-
ceutique du produit destiné à être
importé et, après analyse du risque
patient (composition, dosage, forme
pharmaceutique, etc.) », elle peut
autoriser son importation à titre
dérogatoire. Face à l’urgence liée
au coronavirus et au risque de pé-
nurie sur certains produits, les la-
boratoires se sont engouffrés dans
la brèche. L’ANSM aurait ainsi
donné son feu vert ces derniers
jours à des produits indiens d’anes-
thésie. D’autres devraient suivre.
Enfin, parmi les pistes à l’étude,
celle de puiser dans les stocks
d’anesthésiques destinés aux…
animaux, qui contiennent le même
principe actif mais des excipients
différents. L’ANSM évalue la sécu-
rité de leur administration à
l’homme. ■
L'ÉVÉNEMENT
« Certains produits
essentiels vont manquer »
LE PROFESSEUR Rémi Salomon
est néphrologue pédiatrique à
l’hôpital Necker et représentant de
la communauté médicale de l’As-
sistance publique-Hôpitaux de Pa-
ris (AP-HP). Depuis une dizaine de
jours, il monte au créneau pour
alerter sur le risque imminent de
pénurie de médicaments. Il est no-
tamment à l’initiative d’une lettre
signée par les neuf plus grands hô-
pitaux d’Europe, envoyée mardi
31 mars aux dirigeants européens
pour alerter sur ce risque.
LE FIGARO. - Vous alertez depuis
Aujourd’hui, le 20 mars via les réseaux sociaux
dans nos sur un risque de pénurie de
médicaments. Quelle est la
hôpitaux, situation à l’AP-HP ?
nous en Rémi SALOMON. - La liste des mé-
consommons dicaments en tension est considé-
rable. Mais le risque de rupture est
dix à vingt particulièrement important pour
fois plus que ceux utilisés par les services de réa-
d’habitude. nimation. Il s’agit des curares, des
myorelaxants nécessaires à la ven-
On imagine tilation assistée, des sédatifs, indis-
facilement pensables pour plonger les patients
qu’il va dans un coma artificiel, ainsi que
certains antibiotiques. En temps
y avoir un normal, nous sommes habitués à
problème
PROFESSEUR
» fonctionner avec des stocks peu
conséquents, un peu à flux tendu.
RÉMI SALOMON Là, nous avons encore de quoi tenir
(HÔPITAL NECKER)
quelques jours, mais je n’ai aucune
visibilité au-delà. Nous surveillons
TWITTER
cela de très près. Certains médecins
ont même proposé des protocoles
qui permettent d’être plus écono-
mes. On essaie de faire au mieux
avec le moins possible.
À quoi faut-il s’attendre
dans les prochaines semaines ?
Ces molécules sont utilisées par
les services de réanimation du
monde entier. Aujourd’hui, dans
nos hôpitaux, nous en consom-
mons dix à vingt fois plus que
d’habitude. On imagine facilement
qu’il va y avoir un problème,
d’autant plus que nous ne sommes
qu’au début de l’épidémie. La
consommation va encore croître
en France comme partout dans le
monde, donc le risque de pénurie
est important. Je sais que l’armée
et les industries pharmaceutiques
disposent de stocks, mais je ne sais
pas dans quelle mesure. Nous
Le formidable élan
de solidarité pour combler
le manque de matériel
DELPHINE CHAYET £@DelChayet
DES BLOUSES, des masques, des
seringues et même des seaux…
« On manque de tout » dans les
services de réanimation en ce
moment, mais un élan de solida-
Les
rité sans précédent adoucit l’ef-
froi de la crise sanitaire. « Cela a
commencé par du café et des
gâteaux offerts pour nous récon-
proposent forter pendant la garde, raconte le
d’acheter Dr Nicolas Weiss, réanimateur
des ponchos médical à l’hôpital de la Pitié-
Salpêtrière, à Paris. Deux semai-
anti-pluie nes plus tard, on nous propose de
réutilisables quoi remplacer tout ce qui manque
et adaptés dans le service ! »
Les idées fusent sur le groupe
à nos WhatsApp créé par le médecin.
contraintes
DOCTEUR
» Mi-mars, un ami, dirigeant de
start-up à New York, achète
NICOLAS WEISS, 20 000 masques en Chine et par-
RÉANIMATEUR vient à les envoyer aux hôpitaux
À L’HÔPITAL
DE LA PITIÉ-SALPÉTRIÈRE,
de Strasbourg et de Colmar. Des
À PARIS ingénieurs du Centre national
d’études spatiales de Toulouse
proposent au réanimateur de fa-
briquer avec une imprimante 3D
des raccords permettant, en cas
de situation de crise, de ventiler
deux patients sur un même res-
pirateur. « Ils se disent prêts à en
fournir à tous les services de réa-
nimation en mobilisant le réseau
des imprimantes 3D », indique le
Dr Weiss. D’autres se penchent
sur les pousse-seringues électri-
ques, qui sont aussi en nombre
insuffisant dans ce service où le
nombre de lits a été multiplié par
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
3
avons peut-être des réserves pour
quelques semaines tout au plus.
À court terme, nous pouvons envi-
sager de faire venir des médica-
ments depuis des hôpitaux moins
touchés. Mais il faudrait avoir
une vision nationale de l’état
des stocks. Il faut aussi penser aux
traitements qui font actuellement
l’objet d’essais thérapeutiques.
Certains vont peut-être montrer
leur efficacité d’ici quelques
semaines, je l’espère en tout cas.
Or le jour où l’on apprendra qu’un
médicament est efficace, la
demande mondiale va exploser. Il
faudra être en mesure d’en pro-
duire rapidement en très grande
quantité.
Comment expliquer ces tensions ?
Nous avions déjà fréquemment des
pénuries de certains médicaments
auparavant. Le problème est lié au
fait que les matières premières sont
essentiellement fabriquées en
Chine et en Inde. La pression pour
obtenir ces produits monte de jour
en jour. Il est indéniable que les
États-Unis vont chercher à peser
de tout leur poids pour se procurer
ces médicaments absolument es-
sentiels. D’autant qu’ils risquent
d’être fortement frappés par l’épi-
démie car une part très importante
de la population souffre de diabète,
de surpoids ou encore d’hyperten-
sion artérielle, autant de facteurs
de risque de développer une forme
grave du Covid-19.
Quelles sont les solutions
envisagées ?
Il me semble nécessaire que l’Eu-
rope se fasse entendre d’une seule
voix. Emmanuel Macron a dit qu’il
fallait produire ces médicaments
sur le sol français ou européen.
Je suis tout à fait d’accord. Mais
comment fait-on ? Je n’ai pas en-
tendu de réponse claire sur ce
sujet. Il faut aller plus vite, plus
loin. Il faut que les chefs d’État se
réunissent de toute urgence pour
se mettre d'accord. Pas la semaine
prochaine. Cette semaine. Même si
les industries pharmaceutiques se
parlent et essaient de faire au
mieux, il me semble que c’est le
rôle des gouvernements de coor-
donner cette action. ■
PROPOS RECUEILLIS PAR C. T.
deux depuis le début de l’épidé-
mie. Le service manque même
de balais et de seaux pour net-
toyer les chambres des mala-
des… « Cela peut sembler idiot,
mais il faudrait au moins un balai
par chambre pour désinfecter le
sol sans risquer de disséminer le
coronavirus, qui survit plusieurs
heures sur les surfaces », souli-
gne le Dr Weiss.
Le groupe se mobilise bientôt
pour trouver des surblouses, car
le stock de cet équipement de
protection indispensable pour
protéger les personnels de santé
diminue aussi. « Les ingénieurs
proposent d’acheter des ponchos
antipluie réutilisables et adaptés
à nos contraintes », témoigne
le médecin, qui devait recevoir
ce mercredi dans la journée les
patrons des futures surblouses.
« À midi, les restaurateurs du
quartier nous livrent des crêpes,
des bols de riz, des pizzas », salue
enfin le réanimateur médical.
Le Pr Élie Azoulay, chef de
service à l’hôpital Saint-Louis à
Paris, se réjouit de son côté de-
vant les renforts humains qui se
pressent dans son unité de réa-
nimation, où le nombre de lits a
triplé depuis le début de la crise.
« On a remobilisé l’ensemble des
médecins et infirmiers avec qui on
a travaillé ces vingt dernières an-
nées, les jeunes comme les vieux,
indique-t-il. C’est la première
fois que j’assiste à un tel élan de
A
solidarité dans ma carrière de
médecin. » ■
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
4 L'ÉVÉNEMENT
« On est
au bord
de la noyade,
il faut changer
de braquet »
Frédéric Valletoux, président de la
Fédération hospitalière de France
(FHF), appelle le gouvernement
à prendre des mesures massives
pour désengorger les services de
réanimation les plus en souffrance.
PROPOS RECUEILLIS PAR
MARIE-CÉCILE RENAULT
£@Firenault
FRÉDÉRIC VALLETOUX est prési-
dent de la Fédération des hôpitaux
de France (FHF), qui représente
plus de 1 000 hôpitaux et environ
3 800 établissements médico-so-
ciaux publics.
LE FIGARO. - Vous lancez
un appel au secours. On est arrivé
au bord des capacités ?
Frédéric VALLETOUX. - On est au
bord de la noyade, on est en train
de perdre pied. Deux régions sont
en très grande difficulté, le Grand
Est et l’Île-de-France où les hos-
pitaliers sont en très grande souf-
france. Il faut changer d’échelle et
prendre des mesures beaucoup
plus radicales. Après le directeur
de l’ARS Île-de-France hier, je
lance à mon tour un appel. Un ou
deux TGV médicalisés par semai-
ne, ce n’est plus adapté. Si la stra-
tégie est d’extraire les patients,
alors il faut amplifier les trans-
ferts, et organiser des transports
beaucoup plus massifs vers les ca-
pitales régionales ou européennes.
Les transferts sont coûteux.
Est-ce la bonne solution ?
Plutôt que des trains de patients
qui partent, faut-il mettre des
trains de soignants qui viennent
des régions les moins touchées ? Je
ne sais pas. C’est aux autorités de
trancher. L’ampleur de l’épidé-
mie fait que le sujet du transfert de
patients n’a pas été posé en
amont, et qu’il y a encore cinq
jours ce levier ne devait pas être
activé en Île-de-France. Si le
transfert de patients en train est la
bonne solution, alors il faut pous-
ser plus loin. Sinon, il faut ampli-
fier l’appel au volontariat des per-
sonnels soignants venant des
autres régions, afin de les faire ve-
nir dans le Grand Est et l’Île-de-
“
Il faut
L. MARIN/AFP
amplifier les
transferts, et
organiser des
transports beaucoup
plus massifs vers les
capitales régionales
ou européennes
”
FRÉDÉRIC VALLETOUX, PRÉSIDENT DE LA
FÉDÉRATION DES HÔPITAUX DE FRANCE
France. Je ne sais pas s’il y a une
solution optimum, ni s’il y a une
seule solution qui résout tout.
Mais quelle que soit l’option rete-
nue, l’urgence appelle à ce que
l’on change de braquet pour sou-
lager les régions en très grande
souffrance. Car potentiellement
ce sont des patients que l’on ne
pourra plus prendre en charge.
On ne peut pas laisser faire cela.
Qui doit décider de la stratégie
A
à adopter ?
Le pilote, c’est forcément le gou-
vernement, la régulation nationa-
le, les autorités sanitaires… Ça se-
rait bien que le ministre ou la
Direction générale de la santé ex-
plique quelle est la stratégie qui
prévaut en matière de transferts :
à partir de quand on transfère ?
Quels types de malades on trans-
fère ? Mais il faut aussi agir à
l’échelle européenne. Si des TGV
peuvent aller à Brest ou Bordeaux,
ils peuvent aussi aller dans le nord
de l’Europe et dans des pays
moins touchés. Dans certains pays
l’épidémie n’atteint pas encore
des proportions telles qu’on les
connaît en France, en Italie ou en
Espagne. Aujourd’hui, les trans-
ferts européens se limitent à des
coopérations transfrontalières
comme on a pu le voir avec l’Alle-
magne, le Luxembourg ou la Suis-
se. Là aussi il faut changer
d’échelle.
S’appuie-t-on assez
sur les cliniques privées ?
Certaines affirment avoir des lits
vides et attendre les patients…
Tout le monde est sur le pont. Il
n’y a pas une clinique où il y aurait
un lit de réa qui ne soit pas mis à
contribution. Tout le monde mar-
che main dans la main. Mais cela
ne suffit pas.
Vous avez déjà fait appel
au volontariat. Les soignants
ne répondent pas ?
Nous avons fait appel aux ren-
Comment le coronavirus s’attaque
aux organes vitaux
DAMIEN MASCRET £@dmascret
EN PREMIÈRE LIGNE, il y a les
symptômes respiratoires de l’in-
fection au coronavirus. Mais, en
coulisse, l’impact du virus est pal-
pable sur d’autres organes vitaux.
Seul le cerveau semble épargné,
même si l’atteinte du nerf olfactif
(odorat) est souvent décrite.
Le 14 mars, dans la revue Liver
International, des chercheurs de
l’université des sciences et tech-
nologies de Wuhan, en collabora-
tion avec l’Institut de virologie
d’Essen (Allemagne), signalaient
des lésions du foie qui pourraient
être causées par le coronavirus.
« Elles peuvent avoir été causées
par l’infection à Sars-CoV-2 ou par
les médicaments utilisées pour la
traiter », écrivent-ils. « Une élé-
vation des enzymes hépatiques est
possible chez les patients infectés,
mais le mécanisme reste incertain,
soit par effet direct cytotoxique
(détruisant la cellule, NDLR) soit
par la réaction immunitaire engen-
drée par le virus », ajoute le Pr Sé-
bastien Dharancy (hépatologie
transplantation, CHRU de Lille).
Côté cœur, en plus du manque
d’oxygène (hypoxie), qui peut
provoquer un arrêt cardiaque,
https://t.me/WorldAndNews
Un hélicoptère
de l’armée s’apprête
à transférer vers
la Suisse des patients
sous assistance
respiratoire, lundi
à Strasbourg.
J.-F. BADIAS/AP
forts, au volontariat, mais la mo-
bilisation reste régionale. L’Île-
de-France a appelé les
professionnels de sa région, il faut
passer à une mobilisation natio-
nale. Si des personnels viennent
d’autres régions, on trouvera des
lits pour les patients, ce n’est pas
cela le problème. Il y a plein de
bâtiments vides qu’on peut rou-
vrir. Le problème ce n’est pas
l’espace, mais les forces humaines
et le matériel. Là encore, c’est au
gouvernement d’organiser cet
appel à mobilisation. Dans toutes
les villes qui accueillent des hôpi-
taux, il faut mobiliser les collecti-
vités locales pour qu’elles trou-
vent des logements pour ces
soignants qui viennent d’autres
régions. Les possibilités sont
nombreuses. Il faut que les collec-
tivités se mobilisent, suggèrent
des solutions, à l’instar de Valérie
une réaction immuno-inflamma-
toire n’est pas rare. « On voit une
augmentation de la troponine,
marqueur biologique d’une souf-
france myocardique, dans près de
15 % des cas de Covid-19 hospita-
lisés, explique le Dr Pierre Aubry,
cardiologue à Paris (hôpital Bi-
chat), le plus souvent par un in-
farctus du myocarde de type 2 ou
par une myocardite (inflammation
du cœur). » « On observe aussi des
douleurs thoraciques de type péri-
cardites (inflammation du sac qui
entoure le cœur, NDLR) qui du-
rent deux à trois semaines chez
certains malades », explique au
Figaro le Dr Florian Zores, car-
diologue à Strasbourg, membre
du groupe insuffisance cardiaque
et cardiomyopathies de la Société
française de cardiologie. « En re-
vanche, ajoute-t-il, alors que des
premières données expérimentales
avaient fait craindre un risque ac-
cru de syndrome de détresse respi-
ratoire aiguë (SDRA) avec certains
antihypertenseurs (inhibiteurs de
l’enzyme de conversion et antago-
nistes de l’angiotensine 2), on se
demande aujourd’hui si ça n’est
pas plutôt protecteur. »
Les reins sont également tou-
chés avec de grosses protéinuries
(fuites de protéines dans l’urine),
Pécresse qui a proposé de mettre à Après avoir été intubés
disposition des soignants les in- et placés sous
ternats de lycées qui sont aujour- respirateur (ici,
d’hui désertés. De nombreuses le 26 mars, au Centre
solutions existent, rien ne doit hospitalier Métropole
Savoie, à Chambéry),
faire obstacle à la mobilisation des
les patients qui sortent
personnels. de réanimation
ont besoin d’un
Vous appelez aussi à pousser plus accompagnement,
loin la solidarité de toute notamment
la population. C’est-à-dire ? psychologique, après
Je fais un appel aux dons alors que cette expérience
nombreuses collectes sont orga- traumatisante.
nisées, que beaucoup de gens VINCENT ISORE/IP3 PRESS/
veulent donner pour améliorer le
quotidien des hospitaliers. La FHF
s’est associée à la Fondation des
hôpitaux de France présidée par
Brigitte Macron, pour allouer des
dotations aux hôpitaux en souf-
france. Ces sommes serviront à fi-
nancer du petit matériel. Chaque
hôpital appréciera en fonction de
sa situation. ■
et pas seulement via la défaillan-
ce multiviscérale parfois obser-
vée en réanimation. « Une étude
chinoise montre que ces patients
développent facilement une insuf-
fisance rénale aiguë (27 %) avec
nécrose tubulaire aiguë sévère et
infiltration lymphocytaire, surtout
lorsqu’ils sont âgés et ont des co-
morbidités telles qu’une hyperten-
sion artérielle ou une insuffisance
cardiaque », explique le Dr Bri-
gitte Lantz, néphrologue à Paris
(hôpital Necker-Enfants mala-
des), secrétaire général de la
Fondation du rein. « Ce qui plaide
pour une atteinte immunologi-
que », remarque-t-elle.
Retard au diagnostic Un membre du sociation Aides aux jeunes diabé-
Dernier organe vital, le pancréas, personnel médical tiques (AJD). Mais ce qui inquiète
qui produit de l’insuline, n’est de l’hôpital aussi le Dr Carine Choleau, direc-
pas directement affecté, mais il de Crémone, trice de l’association, c’est le ris-
l’est indirectement chez les dia- en Italie, fait passer, que accru de retard au diagnostic
le 23 mars dernier,
bétiques. En effet, lors d’une in- dans un contexte où on demande
un scanner
fection, les besoins en insuline de la poitrine au grand public de ne pas aller
augmentent. Or le pancréas d’un à l’un de ses chez le médecin ou à l’hôpital si
diabétique n’en produit plus. collègues, infecté les symptômes ne semblent pas
« C’est pourquoi, en cas de diabè- par le Covid-19. urgents. « Les premiers symptô-
te, il faut vérifier plus souvent sa F. MANGIATORDI/ mes du diabète (envie fréquente
glycémie et augmenter le cas FRANCE_EXA/VIA d’uriner et de boire, NDLR) n’in-
échéant ses doses d’insuline, REUTERS citent pas à le voir comme une ur-
même si on mange peu », alerte le gence, explique-t-elle. Le risque
Dr Marc de Kerdanet, pédiatre de coma et d’acidocétose mortel
diabétologue et président de l’as- est pourtant bien réel. » ■
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020

L'ÉVÉNEMENT 5

Après avoir été intubé, une longue convalescence

en perspective
GUILLAUME MOLLARET
£@Newsdusud
ET MARIE-CÉCILE RENAULT
£@Firenault
UN PATIENT ne sort pas comme ça
de réanimation sur ses deux jambes
pour rentrer chez soi… La récupé-
ration est longue. Elle nécessite au
moins des soins infirmiers et de la
kinésithérapie pour reprendre une
activité cardiaque et respiratoire
normale. Après leur séjour en
« réa », les patients sont ainsi
orientés vers des centres de soins
de suite et de réadaptation (SSR).
« Au sortir des soins intensifs les pa-
tients arrivent avec des neuropathies
“postréa”, car le corps a été long-
temps immobilisé, sans mouvement
et sous assistance », explique Re-
naud Coupry, directeur général de
la Chataigneraie, centre privé non
lucratif de SSR, qui accueille cinq
premiers patients Covid-19 dans
son établissement du Val-d’Oise.
« En clair, le corps ne répond plus,
les patients sortent épuisés, ils ont
des difficultés à marcher, à manger,
à déglutir, à parler, etc. On a alors
besoin de tous les métiers de nos
SSR : orthophonistes, ergothérapeu-
tes, kiné, neuropsychiatres. » Les
patients ont également besoin d’un
accompagnement psychologique
après cette expérience traumati-
sante. « Résultat, les séjours en SSR
devraient être assez longs, plusieurs
semaines à quelques mois », pour-
suit Renaud Coupry.
En Seine-Saint-Denis, la clini-
que du Bourget (groupe Ramsay
Santé) a reçu dans son service de
SSR huit premiers patients Covid-
19 postréa vendredi dernier. Elle
en reçoit quatre autres ce mercredi
matin. « Cela a nécessité chez nous
beaucoup de préparation et de vigi-
lance. Nous avons dû isoler une aile
du bâtiment, bouger des patients
d’un étage à l’autre. Cela secoue les
habitudes, nous avons arrêté les vi-
sites, et faisons beaucoup d’efforts
pour rassurer les autres patients et
leurs familles », indique Loïc Wa-
cogne, directeur général de la cli-
nique du Bourget.
A priori, les patients ne sont plus
contagieux quand ils sortent de
l’hôpital, mais les SSR doivent
quand même observer des procé-
dures de confinement et d’hygiène
strictes. « Il faut encore un confine-
ment renforcé qui dépend du jour
d’apparition des premiers symptô-
mes et de certains paramètres respi-
ratoires. Donc nous avons organisé
un secteur où sont regroupées les
chambres des patients Covid-19, ex-
plique Renaud Coupry. Comme
dans les Ehpad, les visites sont inter-
dites, les patients restent le plus pos-
sible en chambre, on a supprimé les
repas en commun. » Comme tout le
système sanitaire, les SSR ont dû
s’adapter très vite. « On a vidé notre
établissement de 25 % à 30 % de son
activité habituelle, on le remplit avec
des patients Covid-19, et on observe
des procédures de confinement et
d’hygiène complets », poursuit le
directeur. Il faut aussi organiser la
logistique et le transfert des pa-
tients. En Île-de-France, l’ARS et
l’AP-HP sont en train de monter
une plateforme d’orientation des
patients vers les SSR.
Dans le Grand Est, les premiers
patients sont arrivés lundi. « On
en compte une dizaine. Les cas
aujourd’hui sont des cas modérés
mais ceux qui vont arriver la se-
maine prochaine seront plus lourds.
On ignore le temps que prendra
leur rééducation. Pour certains,
plusieurs mois car ils présentent
des pathologies multiples liées au
temps de sédation et d’alitement.
Ces patients combinent en effet
souvent troubles locomoteurs, neu-
rologiques, nutritionnels, respira-
toires et parfois cardiaques », té-
moigne le Pr Jean Paysant,
directeur médical de l’Institut ré-
gional de réadaptation de Nancy
(appartenant au groupe Ugecam
de l’Assurance-maladie). « Ac-
tuellement, seize patients se trou-
vent dans nos établissements. Mais
nous imaginons à terme qu’ils re-
présenteront 150 lits sur notre ca-
pacité totale d’accueil qui s’élève à
343 places », estime pour sa part
Laurent Vivet, le directeur géné-
ral de l’Institut universitaire de
réadaptation Clemenceau (Uge-
cam également), structure médi-
cale partenaire des centres hospi-
taliers alsaciens.
Handicap neurocognitif
Du côté des services de réanima-
tion, une attention particulière est
portée sur ces patients fraîche-
ment extubés. « Le risque que nous
courons actuellement est de voir
sortir un tombereau de patients qui
vont survivre avec un risque de han-
dicap neurocognitif important. Cet-
te prise en charge conjointe avec les
services de médecine physique et de
réadaptation (MPR), mais aussi les
psychiatres, les pneumologues et les
neurologues, est importante »,
analyse le Pr Jean-Michel Constan-
tin, chef du service de réanimation
à la Pitié-Salpêtrière.
En temps normal, ces centres de
soins de suite reçoivent des pa-
tients atteints de pathologies chro-
niques (maladies cardiovasculai-
res, obésité, Parkinson, etc.) ou
sortant de l’hôpital suite à un épi-
sode aigu. La France compte ainsi
120 000 lits et places de SSR répar-
tis dans 2 000 établissements pri-
vés ou publics. Donc pas de goulot
d’étranglement comme en réani-
mation. « Aujourd’hui toutes les
unités de SSR des CHU ont fait sortir
leurs patients non urgents. Les
équipes de MPR se réinventent car
nous avons peu de recul sur cette
prise en charge des patients post-
Covid-19. Nous allons apprendre au
jour le jour grâce au travail réalisé
par nos confrères de l’Est et de ré-
gion parisienne », détaille la Pr Isa-
belle Laffont, présidente de la So-
ciété française de médecine
physique et de réadaptation (Sof-
mer), et médecin au CHU de
Montpellier.
Pour les patients ne nécessitant
qu’une réhabilitation respiratoire,
cette dernière pourra en revanche
être menée par les pneumologues.
Le hic ? « Il nous a été demandé ces
dernières années de fermer des lits
dans toutes les régions car il ne
s’agissait pas d’une priorité. Nous
devions jusqu’ici batailler pour gar-
der cette activité. Du coup, l’offre
est assez inégale sur le territoire na-
tional », regrette la Pr Chantal Ra-
herison-Semjen, présidente de la
société de pneumologie de langue
française (SPLF) et médecin au
CHU de Bordeaux. ■

Quelles séquelles après

un passage en réanimation ?
ANNE PRIGENT £@AnnePrigent1
EN FRANCE plus de 5 000 person-
nes infectées par le Covid-19 sont
virus NDLR) », poursuit le
Pr Alain Mercat. Les antibiotiques
sont les seuls médicaments admi-
nistrés pour éviter une surinfec-
tion bactérienne.

5personnes
000
actuellement en réanimation. Les
plus gravement atteintes sont mi-
ses sous respiration artificielle.
Pour celles, nombreuses qui vont
parvenir à passer ce cap critique,
existe-t-il un risque de séquelles ?
infectées par
Il est encore trop tôt pour le sa-
le Covid-19
voir exactement, même si la pa-
sont actuellement
en réanimation thologie la plus grave provoquée
en France par le Covid-19, le syndrome de
détresse respiratoire aiguë, est
une affection bien connue des
réanimateurs. Toute maladie ou
tout état qui lèse les poumons,
comme une pneumonie, une sep-
Après cette terrible épreuve,
est-ce que les poumons peuvent
récupérer ? « Dans l’immense ma-
jorité des syndromes de détresse
respiratoires aiguës, les poumons
guérissent de manière très impres-
sionnante. En quelques semaines
on constate une normalisation des
radios. La fonction respiratoire re-
vient à un niveau très proche de la
normale. Ce qui veut dire qu’on ne
constate pas de séquelles respira-
toires majeures », affirme le
Pr Alain Mercat. Cependant, avec
le Covid-19, les cas de fibrose

Même sans complication grave, la ticémie ou encore un traumatis-

me grave peuvent entraîner cette
complication.
pulmonaire, une forme de cica-
trisation pathologique du pou-
mon, responsable d’insuffisance

maladie peut se révéler éprouvante « Pour faire simple, le SDRA est

ANNE PRIGENT £@AnnePrigent1
gne Alain. Ce Parisien vivant seul
précise avoir été très angoissé cer-
une inflammation diffuse, extrê-
mement brutale, des deux poumons
respiratoire, semblent plus fré-
quents. « Cela reste néanmoins à
confirmer », tempère le Pr Alain
enjeu que de développer une re- qui va entraîner l’apparition d’un Mercat.
cherche en médecine de ville pour œdème pulmonaire et un déficit

DEPUIS LE DÉBUT de l’épidémie,

on entend beaucoup parler des
formes les plus graves de la mala-
die. Et c’est normal. Dans l’ur-
gence de la situation, les méde-
cins étudient en priorité ces
formes, responsables de troubles
de la respiration menant à l’hos-
pitalisation et parfois au décès.
Mais 80 à 85 % des patients infec-
tés par le coronavirus ne vont pas
être hospitalisés. Reclus chez
eux, ils vont parfois être surpris
par la violence des symptômes
qu’ils affrontent.
« La fièvre fluctue. Chaque ac-
tion me demande un effort énorme,
l’impression d’être passée sous un
rouleau compresseur. Je ne pensais
pas que cela pouvait être aussi long
et dur », raconte par SMS Hélène,
malade depuis plus de dix jours.
« Un mal de tête qui n’a fait
qu’empirer, l’impression d’avoir
les poumons en feu, de ne pas voir
le bout du tunnel », souffle Juliette
au téléphone.
« Après 12 jours particulièrement
difficiles, je n’ai plus de fièvre ni de
douleurs, mais demeurent l’immen-
taines nuits : « Je me disais : là,
c’est bon, mais, si je me mets à suf-
foquer, comment je fais ? »
Tous ces symptômes des formes
non compliquées sont désormais
de mieux en mieux connus des
médecins. « La fièvre inconstante,
les courbatures plus importantes
que dans un épisode de grippe, la
difficulté à avaler, la très grande
fatigue, la perte de goût et d’odorat
sont effectivement très souvent dé-
crits par les patients que nous sui-
vons à domicile », confirme la
Pr France Cazenave-Roblot, in-
fectiologue au CHU de Poitiers.
« Développer une recherche
en médecine de ville »
Mais il a fallu que la France soit
touchée pour commencer à les
découvrir. La perte d’odorat, par
exemple, a été repérée par les
ORL français et n’avait pas été dé-
crite de manière isolée chez les
premières victimes en Chine. Ce
qui s’explique par la nature du
système de santé chinois, centré
sur l’hôpital. « C’est la raison pour
laquelle nous ne savons pas grand-
chose de la maladie à la phase ne
avoir des données sur les patients
ne nécessitant pas une hospitalisa-
tion », précise le Pr Olivier Saint-
majeur d’oxygénation du sang »,
explique le Pr Alain Mercat, chef
du département de réanimation
“ On ne constate
pas de séquelles
Lary, responsable scientifique du médicale au CHU d’Angers. Mais respiratoires
Collège national des généralistes alors que ce syndrome est classé majeures
enseignants (CNGE).
On sait déjà que les personnes
âgées et celles ayant certaines
en trois catégories, léger, modéré
ou sévère, « avec le Covid-19, la
plupart des malades ont des formes
”
PR ALAIN MERCAT, CHEF DU
DÉPARTEMENT DE RÉANIMATION
MÉDICALE AU CHU D’ANGERS
comorbidités sont plus à risques sévères », affirme le Pr Alain Mer-
de développer des formes graves. cat. Ce qui explique l’inquiétude Mais même si les poumons ré-
Il s’agit aujourd’hui d’identifier des réanimateurs face à l’afflux de cupèrent plutôt bien, passer plu-
les signaux faibles permettant de patients qui nécessitent une sur- sieurs semaines en réanimation
repérer très vite les patients à veillance de tous les instants pen- va entraîner une dénutrition, une
hospitaliser. « Pour le moment, ce dant plusieurs semaines. perte de poids et de masse mus-
que l’on surveille le plus, c’est Que se passe-t-il pendant cette culaire. « C’est une véritable
l’apparition d’une dyspnée. C’est période ? Les malades sont placés épreuve pour le corps humain qui
ce signe qui amène les patients à sous ventilation. Cela signifie va mettre du temps à récupérer »,
l’hôpital », explique le Pr Pierre qu’un respirateur fournit de l’air prévient le Pr Xavier Monnet,
Tattevin, président de la Société comprimé riche en oxygène via réanimateur à l’hôpital Bicêtre.
de pathologie infectieuse de lan- un tube, introduit dans la trachée S’y ajoutent des séquelles psy-
gue française. par la bouche. Les patients sont chologiques. De nombreux pa-
Or certains malades semblent sédatés, c’est-à-dire anesthésiés, tients vont subir un stress post-
s’aggraver alors même qu’ils ne et couchés sur le ventre. Des étu- traumatique, « parce qu’ils sont
souffrent pas d’une dyspnée très des ont en effet montré que cette anesthésiés pendant plusieurs jours
marquée. « La mesure de la satu- position, dite de décubitus ven- et n’ont aucun souvenir de cette
ration sanguine en oxygène est en tral, améliorait l’oxygénation et période dramatique », précise le
revanche un marqueur fiable », ex- diminuait la mortalité des formes Pr Monnet. Pour les malades du
plique le Pr Olivier Saint-Lary. graves. « Pour le moment, c’est le Covid-19, ce vide ne pourra pas
Une mesure qui devrait être pré- seul traitement à notre disposition. être rempli par les familles puis-
conisée par le Haut comité en san- Même si la recherche est très active qu’elles ont l’interdiction de se
té publique dans ses recommanda- nous n’avons pas de traitement de rendre à leur chevet. Ce qui ris-
A

se fatigue, la toux, les nausées et la nécessitant pas d’hospitalisation. tions sur la prise en charge du la cause à notre disposition (une que d’aggraver le syndrome de
perte d’odorat et de goût », témoi- C’est donc aujourd’hui un véritable Covid-19 en médecine de ville. ■ molécule qui s’attaque au corona- stress post-traumatique. ■
https://t.me/WorldAndNews
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
6 L'ÉVÉNEMENT
Scénario catastrophe pour l’Afrique
S’il n’est pas aidé, ce continent, où le confinement est impossible, risque de servir de réservoir au virus,
TANGUY BERTHEMET £@Tanguyber
COVID-19 L’épidémie de coronavi-
rus descend lentement au sud, ga-
gnant peu à peu toute l’Afrique.
Désormais seuls 5 États sur 54 sont
indemnes, et encore, ces données
sont sujettes à caution. Dans le petit
archipel de Sao-Tomé-et-Princi-
pe, le gouvernement reconnaît
qu’il n’a aucune capacité de test,
tandis que les Comores s’attendent
à être touchées très vite. L’Afrique
sera entièrement frappée et le virus
progresse maintenant très vite,
Le continent africain
face au Covid-19
Maroc
Sénégal
Cap-Vert
Gambie
Guinée-Bissau
Sierra Leone
Liberia
La propagation de la maladie
NOMBRE DE CAS ET DE MORTS
(situation le 1 avril 2020)
er
Cumul des cas de covid-19...
... et nombre de décès
Source : Center for Systems Science and Engineering (CSSE) - Johns Hopkins University (JHU)
« On risque d’avoir une mortalité beaucoup plus élevée qu’en Europe »
AUGUSTIN AUGIER est le directeur
de l’ONG médicale Alima, active
dans les pays d’Afrique de l’Ouest et
Centrale.
LE FIGARO.- Quelle est la situation
des pays africains vis-à-vis
du Covid-19 ?
Augustin AUGIER.- Aujourd’hui, le
Covid-19 est en Afrique et nous
n’avons pas d’éléments scientifi-
ques laissant penser que nous
n’aurons pas la même courbe épi-
démique en Afrique que dans le res-
te du monde. On a le devoir de se
préparer en fonction des connais-
sances scientifiques que nous
avons. L’un des problèmes, que l’on
voit avec beaucoup d’autres patho-
logies en Afrique, c’est l’invisible.
Ce sont souvent des cas invisibles.
Dans la plupart des pays d’Afrique,
il n’y a qu’un laboratoire capable de
tester et qui peut faire au mieux 500
tests par jour. Il est évident que dans
les zones rurales, les malades ne
peuvent être détectés. Les gens
n’ont pas l’habitude d’aller dans les
centres de santé quand ils sont ma-
lades, et de toute façon il n’y aura ni
kit de prélèvement ni de chaîne lo-
gistique pour le transférer vers un
laboratoire. Donc ce que l’on voit
des cas en Afrique ne reflète sans
doute qu’une infime proportion des
cas réels. Une autre spécificité afri-
caine est que la population est jeu-
ne. Mais on sait qu’un tiers des gens
hospitalisés en France ont moins de
65 ans et ont d’autres pathologies.
A
Et cette population-là existe en
Afrique. La deuxième particularité
souligne l’Organisation mondiale
de la santé (OMS). Même si les cas
restent relativement peu nombreux
officiellement - 5 287 le 31 mars
pour 172 morts - le directeur de
l’OMS, Tedros Adhanom Ghe-
breyesus, appellent les États afri-
cains à réagir « fortement » et vite.
Comme le souligne la Fondation
Mo Ibrahim, dans un rapport publié
de 30 mars, l’Afrique « est la plus
faible capacité » de réponse, et « si
le virus se répand, les dégâts seront
substantiels sur les citoyens et sur
l’économie ». Les signes qui pous-
sent à l’optimisme sont rares. La
Algérie
Mali
Mauritanie
Burkina Faso
Niger
Guinée
Bénin
Nigeria
Cameroun
Togo
Côte Ghana
d’Ivoire Guinée équat.
Sao Tomé-et-Principe
Gabon
Congo
1 353 (Afrique du Sud)
1 000
750
500
Namibie
250
100
50
10
1
Afrique du Sud
est la fragilité aiguë des systèmes de
santé, notamment en Afrique de
l’Ouest et Centrale, avec beaucoup
moins de lits d’hospitalisation et
beaucoup moins de professionnels.
Donc, la population des moins de 65
ans, que l’on arrive à bien soigner
en Europe, on risque de ne pas y
parvenir en Afrique, et donc d’avoir
une mortalité beaucoup plus élevée.
Nous n’avons pas de modèle épidé-
miologique qui nous permette de
faire des projections sur cette mor-
talité. C’est une maladie nouvelle et
inédite par son ampleur. On ne sait
pas comment cela va se passer.
Pensez-vous que le confinement
pratiqué dans le reste du monde est
une possibilité en Afrique ?
C’est la troisième grande spécificité.
Dans une majorité de pays africains,
notamment les plus fragiles, ce
confinement des populations est
rendu impossible par leur fragilité
et leur vulnérabilité. On voit bien
dès lors qu’on ne peut leur deman-
der de rester à domicile pendant
trois semaines. Sauf si on leur ap-
porte des moyens de subsistances,
comme on le fait en Europe ou aux
États-Unis pour compenser. Les
États-Unis viennent de prendre des
décisions en ce sens. Il faut donc
aborder la question de la même fa-
çon avec les pays africains. C’est
possible. Il y a des moyens de distri-
buer de l’argent, à large échelle, en
ciblant les plus faibles. Cela peut se
faire notamment grâce aux nouvel-
les technologies et aux transferts
monétaires par téléphone qui sont
https://t.me/WorldAndNews
question de la chaleur, qui pourrait
être un barrage au développement
du Covid, n’a jamais été démon-
trée. La démographie pourrait cer-
tes représenter un avantage.
L’Afrique est un continent très jeu-
ne. L’âge médian est de moins de 20
ans et les plus de 65 ans, qui repré-
sentent la majorité des cas sévères,
compte pour moins de 3 %. Mais
ces bonnes données sont contreba-
lancées par des facteurs aggra-
vants, notamment la forte présence
de maladies pulmonaires, comme
la tuberculose ou de maladies en-
démiques, à commencer par le pa-
Tunisie
Égypte
Libye
Tchad Soudan
Soudan
du Sud
Rép. centrafricaine
Ouganda
Rwanda
Rép. dém
du Congo Burundi
Zambie Malawi
Angola
Zimbabwe
Botswana
Mozambique
Eswatini
Lesotho
très répandus aujourd’hui en Afri-
que, en particulier dans les grandes
villes qui risquent d’être très affec-
tées. L’opérationnalisation de ce fi-
let social qui permet le confinement
est possible. La difficulté est d’avoir
la volonté politique des États afri-
cains et la solidarité internationale
pour les fonds.
Est-ce réaliste de mobiliser si vite
de tels moyens ?
Le directeur de l’OMS et l’Union
africaine ont prévenu que la situa-
tion en Afrique est particulièrement
inquiétante et qu’il fallait s’attendre
au pire. Pour autant, on constate
que la stratégie de lutte contre le
ludisme, qui affaiblissent l’organis-
me.
Surtout, la possibilité de se cal-
quer sur le modèle asiatique ou
européen pour endiguer l’épidémie
est peu réaliste. Le confinement,
appliqué dans une vaste partie du
globe, est un défi pour les mégalo-
poles africaines. Dans les bidonvil-
les, la promiscuité comme la pau-
vreté sont extrêmes. Le président
du Bénin, Patrice Talon, l’a recon-
nu, lundi, sans ambages. « Com-
ment peut-on, dans un tel contexte
où la plupart de nos concitoyens
donnent la popote avec les revenus
Érythrée
Djibouti
Éthiopie
Somalie
Kenya
Seychelles
Tanzanie
Comores
Madagascar
Maurice
Infographie
Une infirmière à l’entrée
de l’hôpital Fann
de Dakar (Sénégal),
le 27 mars. ZB950/
PHOTOSHOT / PANORAMIC
de la veille, décréter sans préavis, un
confinement général de longue du-
rée ? », s’est-il interrogé, évoquant
le risque « d’affamer tout le mon-
de ». Moins directs, bien des prési-
dents sont arrivés à des conclusions
identiques, et ont donc opté pour
des solutions intermédiaires afin de
limiter la circulation dans les villes : Le 30 mars à Abuja,
fermeture des aéroports, des lieux la capitale du Nigéria,
de culte et des bars, couvre-feu, les gens font
barrages… mais pas de confinement la queue à un poste
complet. Les Congolais qui de- de contrôle
vaient l’appliquer quatre jours par
pour vérifier
leur température.
semaine, à partir de vendredi, à AFOLABI SOTUNDE/REUTERS
l’immense Kinshasa, près de
Le personnel médical
NOMBRE DE
MÉDECINS POUR
10 000 HAB.
Plus de 10
De 3 à 10
De 1 à 3
Moins de 1 Source : OMS
Les hôpitaux
NOMBRE DE
LITS POUR
10 000 HAB.
Plus de 30
De 20 à 30
De 10 à 20
Moins de 10 Source : OMS
La réponse des gouvernements
CONFINEMENT ?
Général
Partiel
AUTRES MESURES
Couvre-feu,
état d’urgence Sources :
Écoles fermées Unesco et médias
Covid-19 est plutôt une somme de en 2014 en Afrique de l’Ouest. Des
stratégies nationales qu’une vision milliers de volontaires étaient ve-
globale. Cette vision globale néces- nus appuyer les collègues locaux et
siterait de comprendre que l’on ne trois milliards de dollars avaient été
peut pas gagner contre le Covid mobilisés pour ces seuls trois pays.
uniquement en se battant en Euro-
pe. Si on éradique la maladie là, Mais ni l’Europe ni les États-Unis
mais qu’elle circule ailleurs, cela ne n’ont de médecins disponibles
sert à rien. Cette nécessité de stra- aujourd’hui…
tégie globale va donc bien au-delà Ce n’est évidemment pas pensable
des impératifs humanitaires évi- de demander à des médecins fran-
dents. Il faut donc une triple solida- çais d’aller aider en ce moment en
rité : une solidarité financière, une Afrique. Ils ont des urgences à trai-
solidarité en termes de matériel, ter en France. Mais une fois que la
pour que chacun n’achète pas du vague sera passée, comme c’est le
matériel de son côté, et enfin une cas de la Chine ou en Corée du Sud
solidarité en termes de ressources aujourd’hui, alors devra s’installer
humaines. On l’avait vu avec Ebola, cette solidarité entre les personnels
médicaux. La Chine, pays produc-
teurs de biens médicaux, doit se
mobiliser immédiatement et de-
main les pays qui le pourront.
Sans cette mobilisation, à quoi doit-
on s’attendre ?
C’est très difficile de faire des pro-
jections sur ce qui peut arriver. On
n’a pas connu en Afrique de précé-
dent d’épidémie qui se répande
aussi vite. Ce que l’on peut imagi-
ner, d’après ce que l’on sait de cette
maladie, c’est une mortalité élevée
et il faut redouter des conséquences
économiques, politiques et géopoli-
tiques. Là, on entre dans un grand
inconnu. Les épidémies, quand elles
ne sont pas contrôlées provoquent
des changements dont on ne peut
imaginer l’amplitude surtout sur un
continent qui connaît déjà beau-
coup de conflits. ■
PROPOS RECUEILLIS PAR T. B.
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
désormais touchée
qui reviendra alors dans les pays du Nord.
12 millions d’habitants dont plus de
la moitié dans la grande pauvreté,
ont finalement reculé. Le risque
d’émeutes était trop grand. L’Afri-
que du Sud, à la capacité sanitaire
supérieure, s’y est risqué, mais non
sans difficulté. Le Nigeria a aussi
annoncé un arrêt total des activités
des 21 millions de résidents de la
tentaculaire Lagos.
Pour éviter le pire, l’Afrique a
besoin d’une « réponse unique »,
analyse John Nkengasong, le direc-
teur de Centres for Disease Control
(DCD) Africa, une structure de
l’Union africaine. Mais, pour l’ins-
Alerte sur un risque
de crise alimentaire
ANNE CHEYVIALLE
£@AnneCheyvialle
AU-DELÀ des ravages sanitaires et
des nombreuses victimes, l’épidé-
mie de coronavirus met en péril la
sécurité alimentaire. Trois institu-
tions multilatérales ont lancé
l’alerte mercredi sur le risque de
« pénurie alimentaire » : l’organi-
sation des Nations unies pour l’ali-
mentation et l’agriculture (FAO),
l’Organisation mondiale de la santé
(OMS) et l’Organisation mondiale
du commerce (OMC). C’est assez
rare pour être souligné, les trois di-
rigeants signent un communiqué
commun. Conséquence de la mon-
dialisation des dernières décennies,
« des millions de personnes à travers
le monde dépendent du commerce
international pour leur sécurité ali-
mentaire et leurs moyens d’existen-
ce », écrivent en préambule le
Chinois Qu Dongyu (FAO), l’Éthio-
pien, Tedros Adhanom Ghebreye-
sus (OMS) et le Brésilien Roberto
Azevedo (OMC).
Ils finissent par cette mise en
garde : « Nous devons nous assurer
que notre réponse face à la pandémie
de Covid-19 ne crée pas, de manière
involontaire, des pénuries injustifiées
de produits essentiels et n’exacerbe
pas la faim et la malnutrition ». Les
pays les plus pauvres, la plupart en
Afrique, qui dépendent beaucoup
des importations y compris sur les
tant, par manque de moyens tech-
niques et financiers, rien n’avance.
« Il faut faire de l’Afrique une priori-
té absolue de la communauté inter-
nationale avec un investissement
massif », a souligné mardi le secré-
taire général de l’ONU, Antonio
Guterres, dans un rapport. Les ex-
perts estiment qu’il faut une mobi-
lisation pour aider les finances des
pays les plus faibles, au risque de
connaître « des millions et des mil-
lions de contaminations ». L’ONU
estime à 3 000 milliards de dollars
la somme nécessaire, tant pour
combattre l’épidémie que pour
denrées de base, sont les plus expo-
sés aux risques de pénurie et d’aug-
mentation des prix.
Les mesures barrière appliquées
un peu partout visant à freiner la
pandémie handicapent les chaînes
d’approvisionnement, de la pro-
duction à la commercialisation. Les
trois organisations s’inquiètent du
« ralentissement de la circulation
des travailleurs de l’industrie agri-
cole et alimentaire » qui bloquent de
nombreuses agricultures occiden-
tales, et des « retards aux frontières
pour les containers » de marchan-
dises qui entraînent un « gâchis de
produits périssables et une hausse du
gaspillage alimentaire ».
Pénurie de riz
La réponse passe par plus de coo-
pération internationale. Au
contraire, commente Christopher
Debik, chef économiste de Saxo
Bank, « certains États commencent
à appliquer des restrictions aux ex-
portations ». Des pénuries com-
mencent à se faire sentir sur le riz,
aliment de base pour la moitié de la
population mondiale. Les deux
grands producteurs, l’Inde et la
Thaïlande, sont sous confinement
et la production thaïlandaise a aussi
souffert d’une sévère sécheresse.
« Le Vietnam, troisième producteur,
a instauré des stocks d’urgence et
suspendu provisoirement les nou-
veaux contrats d’export », complè-
te l’économiste. ■
https://t.me/WorldAndNews
soutenir l’économie des pays en
voie de développement. Il faut aussi
3 000
un moratoire sur la dette africaine
et une nette augmentation des ca-
pacités d’action du Fonds monétai-
re internationale (FMI).
Face à de tels besoins, la mobili- milliards de dollars
sation internationale est pour l’ins- Somme nécessaire
tant très loin du compte. Pour An- tant pour combattre
tonio Guterres, il faut pourtant se l’épidémie que pour
presser : « Plus il y aura de malades soutenir l’économie
et plus le risque de mutation du virus des pays en voie
est grand. Dès lors, tous les investis- de développement
sements faits sur un vaccin seront selon l’ONU
perdus et la maladie reviendra du
Sud vers le Nord. » ■
Le virus est-il moins agressif
quand le climat est chaud ?
VINCENT BORDENAVE
£@bordenavev
LA MÉTÉO pourrait-elle freiner la
progression du Covid-19 ? Cette
Des millions question est omniprésente depuis
le début de l’épidémie. L’idée est
de personnes non seulement importante pour
à travers juger la progression du virus en
le monde Afrique, mais aussi pour envisager
dépendent
un été libérateur en Europe. Une
nouvelle étude menée par des
du chercheurs australiens et français
commerce des laboratoires d’épidémiologie
Ausvet, tente de donner quelques
international éléments sur le sujet. Publiée mi-
pour leur mars sur le site medRxiv (qui ras-
sécurité semble des publications non en-
core relues par la communauté
alimentaire scientifique), ces travaux indi-
et leurs quent que des températures exté-
moyens rieures situées entre 20 et 30°C ré-
d’existence
LE CHINOIS QU DONGYU
» duiraient l’agressivité du virus.
« Cette étude mériterait de pas-
ser par les canaux de relecture
(FAO), L’ÉTHIOPIEN classique, commente Camille Le-
TEDROS ADHANOM barbenchon, chercheur au labo-
GHEBREYESUS (OMS) ratoire Processus infectieux en
ET LE BRÉSILIEN
milieu insulaire et tropical de
l’université de La Réunion. Il y a
ROBERTO AZEVEDO
plusieurs biais. Ne serait-ce que la
(OMC)
période très courte sur laquelle a été
mené l’étude et le faible nombre de
cas analysés. » Des biais que les
auteurs reconnaissant eux-mêmes
en grande partie. Ils expliquent
d’ailleurs que ces travaux ont vo-
cation à renforcer l’efficacité des
L'ÉVÉNEMENT
À Abidjan, excès de zèle
à l’heure du couvre-feu
JENNA LE BRAS £@JennaLBs
À ABIDJAN
20 H 53. Un spot de prévention gré-
sille sur Radio Treichville. « Lavez-
vous régulièrement les mains, toussez
dans votre coude… » Dans la capitale
ivoirienne, les gbakas (minibus) rou-
lent à tombeau ouvert sur des rubans
de bitume déserts pour déposer leurs
derniers passagers. Les étals de pa-
payes et d’attiéké sont levés à toute
vitesse. Les cendres de barbecue où
grillaient quelques minutes plus tôt
des poulets braisés disparaissent.
Soudain, une chape de silence enclo-
che la ville. On n’entend plus que les
oiseaux et quelques sirènes hurlantes
au loin. Ça y est, l’heure du couvre-
feu a sonné.
Face à l’aggravation de l’épidémie
qui enregistre désormais 179 cas de
Covid-19 et un premier mort en Côte
d’Ivoire, le gouvernement tente de
colmater la propagation du virus en
prenant des mesures jugées drasti-
ques mais nécessaires. Après la fer-
meture des écoles, des frontières et la
mise en quarantaine de la capitale,
3 000 gendarmes et policiers sont
désormais déployés pour faire res-
pecter le couvre-feu qui s’étire de
21 heures à 5 heures. Si le confine-
ment total des populations n’a pas
encore été décidé, il est demandé aux
habitants d’Abidjan, épicentre de
l’épidémie dans le pays avec 90 %
des cas enregistrés, de rester chez
eux. Si on ne sait pas bien comment
interdire à la population, vivant pour
la majeure partie de débrouille dans
le secteur informel, de vaquer à ses
occupations en journée, on tente de
limiter les contacts là où ils sont
moins essentiels : dans les maquis et
les bars, fermés jusqu’à nouvel ordre,
que les Ivoiriens viennent habituelle-
ment « gâter » tous les soirs de la se-
maine sur des rythmes saccadés de
rap ivoirien et de coupé-décalé.
Mais depuis le premier jour de
l’application de cette mesure, la co-
lère de la population a surgi avec la
diffusion de vidéos tournées pendant
les heures mortes. Là, deux adoles-
cents sont chargés à l’arrière d’un
pick-up et forcés à s’embrasser.
« Faites ça bien ! Allez, embrassez-
vous bien là! », peut-on entendre de
la part de policiers hilares. Ici, un
jeune homme est sorti manu militari
de son utilitaire et tabassé par trois
« corps habillés ». La scène est filmée
en catimini depuis un balcon : « Voilà
ce qui arrive à ceux qui ne respectent
pas les règles, ils se font sérieusement
mesures de confinement qui per-
mettent de se protéger, et à ne pas
compter sur l’augmentation des
températures pour une diminu-
tion marquée du nombre de cas.
L’idée a pourtant le mérite, non
seulement d’être
20°C
séduisante et rassu-
rante, mais aussi de
s’appuyer sur des
faits scientifiques
avérés. La plupart
des virus sont Température benchon.
mieux conservés à partir de laquelle
par le froid, alors le Covid-19 serait
que la chaleur, l’hu- moins virulent, selon mars, alors que la tem-
midité et les UV une récente étude
peuvent réduire franco-australienne élevée. Si l’épidémie
leur temps de per-
sistance sur les sur-
faces. Ce qui explique la circula-
tion plus discrète des virus
responsables de la grippe et des
rhumes durant l’été. Le Sras (syn-
drome respiratoire aigu sévère),
cousin très proche du nouveau co-
ronavirus, a d’ailleurs disparu à
l’arrivée des beaux jours en
juillet 2003, neuf mois après son
émergence. « C’est vrai pour de
nombreux virus, mais c’est très loin
d’être une vérité absolue, nuance
Camille Lebarbenchon. Des cas
d’infections par le virus du Mers,
qui est aussi un coronavirus, trans-
mis du dromadaire vers l’homme,
sont documentés toute l’année en
Arabie saoudite alors qu’il y fait
particulièrement chaud. »
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
7
chicoter », commente l’auteur de la
vidéo. Des attitudes héritées de la
crise de 2011 pour Arthur Banga, his-
torien spécialiste des questions de sé-
curité. « L’Ivoirien associe l’état d’ur-
gence à la guerre, pas sanitaire mais
politique. Population comme forces de
sécurité ont l’impression de s’affronter
en ennemis C’est certainement la logi-
que inconsciente derrière ces déborde-
ments », analyse-t-il. Les multiples
exemples, parfois violents, souvent
humiliants qui alimentent les réseaux
sociaux ont d’ailleurs forcé les auto-
rités à réagir. La Préfecture de police
a rappelé que la situation exception-
nelle ne justifiait aucune violation des
droits de l’homme.
« Patrouille médiatique »
Soucieux d’essuyer rapidement les
critiques, Siaka Dosso, le préfet
d’Abidjan a organisé une opération
de communication pour redorer le
blason de ses troupes, baptisée « pa-
trouille médiatique » : l’occasion pour
les journalistes de prendre part aux
maraudes nocturnes et de constater
par eux-mêmes la bonne conduite
des forces de sécurité. « Nous allons
raccompagner chez eux les contreve-
nants au couvre-feu, aider les person-
nes en détresse et assurer le bon ache-
minement des camions de
marchandises. Les récalcitrants, il ne
faut pas les brimer », explique-t-il
lors d’un brief à ses équipes.
Dans des gros pick-up, une bonne
cinquantaine de soldats sans masque
se serre et ouvre la marche d’un
convoi d’une quarantaine de voitu-
res, tous feux allumés avec à sa tête le
4x4 de la ministre des Droits de
l’homme. Ce soir-là, pas de tabassa-
ge, pas d’insulte mais un zèle chauffé
à blanc par des équipes souvent plus
démunies que mal intentionnées. À la
boulangerie Top Baguette, dans le
quartier de Yopougon, le gérant reste
pantois devant une meute de camé-
ras braquées sur lui pendant qu’un
haut gradé le prie avec fermeté de
faire son pain les lumières éteintes
pour ne pas donner l’impression qu’il
défie l’autorité.
Toute la nuit, la patrouille charge-
ra des dizaines de personnes. Un jeu-
ne vendeur de déodorants - « il n’a
que 16 ans… », souffle, agacé, un sol-
dat dans le dos de son chef. Une
vieille dame désorientée « qui ne sait
même pas où elle va », ricane un
grand flic sous l’opprobre médiati-
que. En une semaine, les autorités
s’enorgueillissent d’avoir arrêté
« 457 personnes responsables d’ac-
tes d’incivisme ». ■
Concernant le Covid-19, la pro-
pagation de l’épidémie depuis
plusieurs semaines n’indique pas
que la température soit un frein.
« Bien entendu, il est encore trop tôt
pour en être absolument certain,
mais on voit que l’épidé-
mie se repend assez rapi-
dement en Afrique du Sud
et en Amérique latine »,
analyse Camille Lebar-
canciers
Plusieurs va-
de retour
d’Égypte sont revenus en
France contaminé début
pérature y était plutôt
semble pour l’instant un
peu plus clémente dans
l’hémisphère Sud et en Afrique,
c’est probablement que le virus y a
circulé plus tardivement et que la
mise en place des tests y est plus
lente. « Si ce coronavirus est réelle-
ment affaibli par la chaleur, cela ne
signifie pas qu’il disparaîtra cet été,
conclut Camille Lebarbenchon. Il
pourrait suivre le même chemin que
la grippe en circulant pendant l’hi-
ver austral dans l’hémisphère Sud
et revenir après l’automne au nord.
D’autres paramètres tels que l’im-
munité des populations et l’évolu-
tion du virus doivent également être
pris en compte si l’on souhaite faire
des prédictions fiables sur la circu-
A
lation du Covid-19 dans les mois qui
viennent. » ■
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
8 L'ÉVÉNEMENT
L’Afrique du Sud craint d’être submergée
Les médecins
s’inquiètent tout
particulièrement
pour les
7,5 millions
de séropositifs.
CAROLINE DUMAY
AU CAP
C’EST UNE GUERRE dont les ci-
toyens sont les soldats. Le président
sud-africain Cyril Ramaphosa s’affi-
che presque tous les jours sur les an-
tennes de la télévision nationale pour
marteler le message. Il porte la tenue
de combat devant ses troupes, mais
arbore le costume de ville devant ses
ministres. Avec cinq morts et 1 354
malades, le pays de Nelson Mandela
est le plus touché du continent par la
pandémie. Les responsables de
l’ANC (Congrès national africain), au
pouvoir depuis 1994, considèrent
qu’un confinement total de 21 jours
est un mal nécessaire pour « éviter
des dizaines de milliers de morts ».
Dans un pays qui compte plus de
7 millions et demi de séropositifs, le
corps médical craint l’hécatombe.
À Khayelitsha, banlieue pauvre
du Cap, les écoles sont fermées. Mais
on garde portes et fenêtres grandes
ouvertes. Comme si le soleil et le
vent allaient aider à se débarrasser
du coronavirus. « On fait avec les
moyens du bord », confie Ishrene
Davids, directrice de l’ONG Ikamva
Labantu. Elle s’occupe habituelle-
ment de 7 000 personnes, très fragi-
les sur le plan immunitaire. Elle leur
a conseillé de rester chez eux et de se
laver régulièrement les mains.
Beaucoup lui ont répondu qu’ils
n’avaient pas de savon. « Il nous faut
absolument rester en contact avec eux
afin qu’ils continuent à prendre leurs
médicaments… », précise-t-elle.
Dans un pays où 20 % des adultes
sont séropositifs, prendre ses médi-
caments, en ces temps de coronavi-
La solidarité intéressée de
l’UE envers les Africains
ANNE ROVAN £@AnneRovan
CORRESPONDANTE À BRUXELLES
C’EST À L’AFRIQUE que la prési-
dente de la Commission européen-
ne, Ursula von der Leyen, avait
consacré son tout premier dépla-
cement, après sa prise de fonction,
en décembre 2019. Et c’est notam-
ment à ce continent voisin particu-
lièrement fragile face au coronavi-
rus, que l’UE veut apporter son
aide. « La solidarité doit s’exprimer
au sein de l’Union entre les États
membres mais aussi à l’extérieur »,
a martelé la semaine dernière la
présidente de l’exécutif européen,
alors que commençaient à apparaî-
tre de profondes fractures entre les
Vingt-Sept. Cette solidarité n’est
pas sans arrière-pensées.
Car l’objectif est aussi d’éviter
de « réimporter » le Covid-19 en
Europe. « Nous ne pouvons pas
nous concentrer uniquement sur les
problèmes en Europe, car les pro-
blèmes dans d’autres régions se-
ront, tôt ou tard, nos propres pro-
blèmes », mettait en garde
récemment le haut représentant
pour les Affaires étrangères, Josep
Borrell. Jean-Yves Le Drian n’a pas
dit autre chose dimanche sur RTL.
« Il faut aider l’Afrique par solidari-
té. Il faut aussi l’aider par sécurité,
parce que le risque majeur, c’est
l’effet boomerang, la réimporta-
tion », a analysé le ministre des
Affaires étrangères.
Les besoins de ce continent se-
ront colossaux. Les Nations unies
ont chiffré ceux de l’ensemble des
pays en développement, dont
l’Afrique constitue une grande par-
tie, à 2 500 milliards d’euros. Quel-
ques premières aides d’urgence ont
A
d’ores et déjà été versées. Mais elles
sont encore très modestes alors que
rus, est aussi important que de se la-
ver les mains. Les cliniques ont
exceptionnellement permis aux pa-
tients d’emporter avec eux plusieurs
semaines d’antirétroviraux, au cas
où le confinement prévu jusqu’au
16 avril se prolongerait. « Nous
avons eu beaucoup plus de patients
ces deux dernières semaines et nous
nous assurons d’avoir suffisamment
de stock », précisait mardi Fanie
Hendriksz, directeur de Right Care.
Quatre millions et demi de séro-
positifs sont traités gratuitement en
Afrique du Sud, soit 60 % environ de
la population infectée. « A priori, les
malades sous traitement résisteront
mieux au coronavirus que les autres »,
précise une infirmière. Reste les 40 %
restants, soit plus 3 millions de per-
sonnes. Et puis il y a aussi tous ceux
qui sont séropositifs et qui ne le sa-
vent pas encore. Beaucoup d’activis-
la Commission a fait de la coopéra-
tion avec l’Afrique une des priorités
des cinq années à venir. L’UE a ain-
si débloqué 115 millions d’euros
pour l’OMS, enveloppe dont une
partie va être affectée à l’Afrique.
S’ajoute à cela, une aide de 15 mil-
lions, dont 5 pour l’antenne de
l’Institut Pasteur de Dakar destinés
à financer notamment la sur-
veillance épidémiologique.
D’autres fonds ont été versés di-
rectement à certains pays : le Ma-
roc a ainsi touché 150 millions
d’euros. La Commission promet en
outre d’utiliser « toute la flexibilité
possible pour réorienter 300 millions
d’euros des fonds alloués au Maroc,
vers la réponse à la pandémie ».
Une réponse globale
Quant à la Tunisie, elle a déjà béné-
ficié d’une aide de 250 millions. Ce
n’est qu’un début. Bruxelles, qui
appelle à une coordination inter-
nationale avec le G20 et la Banque
mondiale notamment, travaille ac-
tuellement « à l’identification des
besoins en lien avec ses délégations
implantées en Afrique », confie un
fonctionnaire européen.
Une réponse globale devrait être
proposée dans les prochains jours,
alors qu’une réunion des ministres
européens des Affaires étrangères
est programmée vendredi et
qu’une visioconférence entre leurs
homologues au Développement est
prévue la semaine prochaine.
Lorsque le virus Ebola avait frappé
l’Afrique, l’UE avait mobilisé au to-
tal deux milliards d’euros d’aides.
« Mais c’était en 2014 et nous étions
alors au début du cycle budgétaire
européen. Cette fois, nous sommes
en fin de cycle », prévient-on à
Bruxelles où il faut identifier l’en-
semble des fonds non engagés et,
donc, encore à disposition. ■
https://t.me/WorldAndNews
tes ont suggéré au ministère de la Fusil à pompe en joue,
Santé de coupler le dépistage du co- un policier sud-africain
ronavirus avec celui du sida. intime à la population
l’ordre de respecter
« Bombe à retardement » les distances
de sécurité devant
« C’est une bombe à retardement », ne
un surpermarché,
cesse de répéter le Pr Glenda Gray, qui samedi à Yeoville,
s’est isolé dans sa villa de Kenilworth, une banlieue
banlieue cossue du Cap. La présidente de Johannesburgh.
du Medical Research Council (MRC) MARCO LONGARI/AFP
cherche partout des fonds pour la re-
cherche. Mais il lui faut aussi s’assurer
que les hôpitaux aient accès aux mas-
ques, gants, respirateurs, oxygène ou
tout autre matériel nécessaire à la lut-
te contre le virus.
Il y a vingt-cinq ans, Glenda Gray
était une jeune doctoresse basée à
Soweto. Elle s’était battue corps et
âme pour que les séropositifs aient
accès à la Nevirapine, un médica-
ment qui permet encore aujourd’hui
d’éviter la transmission du VIH de la
En attendant « Takuba », « Barkhane »
poursuit ses opérations au Sahel
2milliards
500
NICOLAS BAROTTE £@NicolasBarotte
LES COMBATS se poursuivent.
« Pour l’instant », dit-on prudem-
ment au sein de l’état-major des ar-
d’euros mées, la crise du coronavirus n’af-
fecte pas l’opération « Barkhane ».
Montant estimé Au Sahel, la guerre continue contre
par l'ONU les groupes terroristes, et plus par-
des besoins ticulièrement l’État islamique au
qu’auront les pays Grand Sahara (EIGS), désigné com-
en développement me adversaire principal. « À ce sta-
pour faire face de », ajoute-t-on aussi, le Mali n’a
à la crise du Covid-19 pas été touché « significativement »
par l’épidémie de Covid-19. La si-
tuation peut évoluer rapidement,
évidemment. Les armées françaises
s’y préparent et s’organisent en
conséquence.
« Des mesures de quatorzaine sont
Appuyés par les forces
prises avant l’entrée sur le théâtre
maliennes et
nigériennes, les soldats d’opération dans des zones dédiées
de la force Barkhane (ici, sur place ou en France », explique-
pratouillant à Menaka t-on. Les mesures barrières appli-
en mars 2019) ont mené quées depuis longtemps entre sol-
avec succès une vaste dats pour éviter les maladies locales
opération, le mois sont suivies plus strictement enco-
dernier au Sahel. re. Barkhane n’a pas décrété de trê-
DAPHNE BENOIT/AFP ve contre les djihadistes.
mère à l’enfant. Mais cette experte,
qui a l’impression d’avoir fait toutes
les guerres, est un peu interloquée.
« La tuberculose touche 300 000
Sud-Africains. Si une épidémie de co-
ronavirus s’ajoute à ça, et au sida, les
effets ne seront pas additifs mais ex-
ponentiels », assure-t-elle.
Aucune étude scientifique n’a me-
suré l’impact du Covid-19 sur les pa-
tients atteints de VIH. « Personne n’a
fait cette expérience. On ne peut
qu’imaginer, explique le Pr Salim
Adool Karim, directeur du centre de
recherches pour le sida en Afrique du
Sud (Caprisa). Nous craignons de voir
des taux de mortalité importants chez
des patients jeunes atteints de VIH, des
taux comparables à ceux des popula-
tions européennes de 60 ou 70 ans… »
La question des liens entre sida et
coronavirus est d’autant plus com-
plexe que certains scientifiques
La stratégie politique et opéra-
tionnelle continue tant bien que mal.
Vendredi, une étape décisive a été
franchie avec le lancement de la
nouvelle task force « Takuba ».
Constituée de forces spéciales euro-
péennes, Takuba sera placée sous le
commandement de Barkhane, qui
rassemble déjà 5 100 hommes. Elle
sera déployée au Mali dans la région
du Liptako. « Elle conseillera, assiste-
ra et accompagnera les forces armées
maliennes (FAMa) », ont annoncé les
pays qui y participeront. Takuba de-
vrait permettre d’améliorer l’enca-
drement parfois défaillant des FAMa.
Une course de vitesse
Promise depuis l’été 2019, Takuba
aura mis de longs mois à sortir des
limbes. L’envergure s’est aussi ré-
duite. Finalement, seuls six pays ont
annoncé leur contribution : la Fran-
ce, la Belgique, le Danemark, l’Esto-
nie, les Pays-Bas et le Portugal. La
Suède envisage de rejoindre le grou-
pe avec 150 hommes. Le processus
parlementaire de validation est en
cours à Stockholm. Concrètement, la
France fournira donc toujours la plus
préconisent des médicaments anti-
rétroviraux pour lutter contre le
coronavirus. Au Japon et en
Thaïlande, les traitements à base de
Lopinavir et de Ritonavir font partie
des protocoles. « En Inde, ils utili-
sent le Kaletra. Mais nous, si on utili-
se le Kaletra, on n’en aura plus suffi-
samment pour nos malades du
sida », fait remarquer le Pr Gray.
En Afrique du Sud, il n’y aurait
pour l’instant que 3 000 lits d’hôpi-
tal pour 58 millions d’habitants. La
propagation très rapide de la pan-
démie terrifie les autorités. « Heu-
reusement, nous avons réussi à asso-
cier le secteur privé au secteur public,
ce qui renforce considérablement nos
capacités hospitalières », fait remar-
quer Alan Winde. Le gouverneur de
la province du Cap prévoit le pic
épidémique à la fin mai. La course
contre la montre a commencé. ■
large part des quelque 500 soldats
envoyés sur le terrain. La Belgique ou
les Pays-Bas, par exemple, n’enver-
ront qu’une poignée d’officiers.
Le déploiement opérationnel de
Takuba a aussi été reporté. Prévu
pour l’automne 2020, il est renvoyé
à début 2021. Une éternité. Peu im-
porte pour Paris, car l’intérêt de la
task force est d’abord symbolique.
Elle souligne la « prise de conscien-
ce » européenne de la gravité de la
situation au Sahel. À voir. L’Allema-
gne, le Royaume-Uni, la Norvège ou
la République tchèque « soutiennent
politiquement » l’opération, mais
sans y participer. À Oslo, il n’y a pas
de consensus politique ; à Berlin, le
gouvernement d’Angela Merkel a
décliné plusieurs fois ; à Londres, on
n’envisage pas d’augmenter son en-
gagement au Sahel. L’armée britan-
nique fournit déjà des hélicoptères
Chinook.
Au Sahel, une course de vitesse
semble s’être engagée. Les groupes
terroristes sont tentés de jouer la
montre en attendant l’épuisement
politique des Européens. Alors, sans
le dire, Barkhane cherche à faire
basculer rapidement le rapport de
force au Sahel pour éviter l’enlise-
ment ou devancer un retrait éven-
tuel des forces américaines. Tout au
long du mois de mars, une vaste opé-
ration inédite dans son ampleur s’est
déroulée dans la région des Trois
Frontières. Quelque 5 000 hommes
ont ratissé le terrain : 1 700 de la force
Barkhane, 1 500 de la Force conjointe
du G5 Sahel et 1 500 des forces ar-
mées du Niger. Pour l’état-major,
« Monclar » a été un succès qui a dé-
montré la capacité de coordination
des armées. Après la mise en place
mi-mars d’un « poste de comman-
dement conjoint » à N’Djamena, au
Tchad, l’opération a constitué une
démonstration de force. ■
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
L’exception allemande se confirme
Plusieurs paramètres expliquent que le coronavirus tue cinq fois moins de personnes outre-Rhin qu’en France.
PIERRE AVRIL
pavril@lefigaro.fr
CORRESPONDANT À BERLIN
Avec la régularité d’un métronome,
les statistiques quotidiennes de
l’épidémie confirment l’exception
allemande : le coronavirus tue 5 fois
moins de personnes outre-Rhin par
rapport à la France, et 20 fois moins
qu’en Italie et en Espagne. Selon
l’université John Hopkins, 788 pa-
tients sont déjà décédés dans le
pays, contre 3 523 en France et
12 428 en Italie. Pourtant, l’Allema-
gne compte respectivement
16 et 23 millions d’habitants de plus
que l’Hexagone et l’Italie. Et les ex-
perts, autrefois plus perplexes, affi-
nent leur argumentaire : « La rai-
son pour laquelle l’Allemagne compte
si peu de décès par rapport au nom-
bre de personnes infectées peut s’ex-
pliquer par le fait que nous faisons
beaucoup de diagnostics en labora-
toire », explique Christian Drosten,
le virologue de l’hôpital berlinois de
la Charité.
Le virus tue, mais les autorités
sanitaires semblent le maîtriser. Se-
lon un sondage de RTL, 55 % des
« Les Länder réagissent
en ordre dispersé »
REINHARD BUSSE est directeur du
département « management de la
santé » à l’Université technique de
Berlin.
LE FIGARO.- Les autorités
sanitaires allemandes mettent
en avant trois principaux facteurs
pour expliquer le relatif faible taux
de mortalité dans le pays :
le dépistage massif, la proportion
plus importante de jeunes patients
et la qualité du système de santé.
Lequel d’entre eux est le plus
pertinent ?
Reinhard BUSSE.- À ce stade, il
s’agit clairement des tests. Pour la
seule semaine dernière, environ
350 000 tests ont été conduits, dont
seulement 24 000 étaient positifs et
nous bénéficions d’un tableau plus
réaliste que dans les autres pays.
Ces tests ne nous disent pas seule-
ment combien de patients ont été
testés au total, mais ils définissent le
ratio entre vieux et jeunes. En Italie,
ce sont les personnes âgées qui ont
été testées, mais pas leur entourage.
En Allemagne, à la fois les jeunes et
les personnes de contact sont tes-
tées, si bien que nous avons une dis-
tribution d’âges différente dans la
population.
La question se pose de qui doit
pratiquer ces tests. En France, la
procédure est très réglementée…
Nous avons été aussi confrontés à ce
problème. Au début, les gens pen-
saient qu’ils devaient aller à l’hôpi-
tal, mais ce dernier est désormais
réservé aux personnes vraiment
malades. Les médecins généralistes
de ville - nous en avons 50 000 -
n’en pratiquent quasiment plus. En
revanche, chacun des 300 districts
de région est équipé d’un à deux
centres de tests.
Les hôpitaux allemands
risquent-ils d’être débordées
par la vague ?
Naturellement, il faut être prêt à
tout, mais nous avons du temps.
L’Allemagne dispose actuellement
de 28 000 lits de soins intensifs dont
seulement 1 200 sont occupés par
des malades souffrant du coronavi-
rus et environ la moitié de cette ca-
pacité est dédiée à cette pathologie.
Si le nombre de cas devait doubler
tous les cinq jours, on aurait un pro-
blème. Mais ce ne sera probable-
ment pas le cas. Si nous réussissons
à incurver la courbe, ça devrait al-
ler. Par ailleurs, les aides-soignan-
tes frontalières, polonaises ou tchè-
ques, n’ont pas cessé leur travail. Le
Land du Brandebourg (frontalier de
Berlin, NDLR) a demandé aux Polo-
naises de rester, moyennant une
aide journalière de 65 euros.
Allemands se disent favorables à un
renforcement des mesures de sécu-
rité mises en place par le gouverne-
ment : la plupart des magasins sont
fermés et il est interdit de se réunir à
plus de deux dans l’espace public.
Mercredi, devant la flambée des
nouvelles contaminations (+ 5453,
soit 67 366 au total, selon l’institut
Robert Koch), Angela Merkel a an-
noncé que les restrictions aux dé-
placements seront prolongées au
moins jusqu’au 19 avril. Ce qui n’a
pas empêché les promeneurs berli-
nois de se regrouper, le week-end
dernier, dans les parcs de la capita-
le, sacrifiant selon Bild à la très ger-
manique « folie du printemps ».
Très réputé, le système de santé
accueille, en temps ordinaire, deux
fois plus de patients que les autres
pays européens, explique Reinhard
Busse, spécialiste à l’université
technique de Berlin (lire ci-dessous).
Et il attire au-delà de ses frontières,
jusqu’à la Russie. Confronté à une
forte demande, il bénéficie d’une loi
entrée en vigueur le 1er mars, favori-
sant l’immigration choisie de per-
sonnel qualifié, ce qui est déjà le cas
pour de nombreuses aides-soignan-
tes issues des Balkans. En ces temps
Que pensez-vous du mode
de communication
du gouvernement ? La chancelière
s’exprime peu…
On se rend compte, pour la premiè-
re fois, que les politiques ne savent
pas exactement ce qui est juste et
comment agir. Et il est bien que
ceux-ci ne prétendent pas tout sa-
voir. Le médecin de référence, de
l’hôpital de la Charité, a pronosti-
qué par exemple que 60 % à 70 %
de la population sera infectée par le
virus. Un chiffre repris ensuite par
Angela Merkel. Mais aujourd’hui,
on met en doute cette évaluation,
nous voulons faire baisser ce ratio,
et le message change. Néanmoins,
les Allemands sont plutôt satisfaits
de cette communication publique.
Ils font confiance aux hommes poli-
tiques. Au début, ils ne prenaient
pas les choses très au sérieux, mais
ce n’est plus vraiment le cas.
Est-ce que le fédéralisme allemand,
où les régions décident elles-mêmes
de leur politique sanitaire, ne
représente pas
un handicap dans cette crise ?
Le principe selon lequel chaque ré-
gion a le pouvoir de décider est po-
sitif. Mais l’inconvénient, dans cet-
te situation, est que les Länder
évaluent différemment les choses,
et réagissent en ordre dispersé alors
que le problème auquel ils sont
confrontés est identique. Ainsi, le
Mecklembourg Poméranie, qui est
excentré, est le seul Land à avoir
fermé ses frontières avec ses voisins
et la police y contrôle tous les pas-
sages. Mais cette possibilité dont
dispose le Mecklembourg Poméra-
nie, Berlin ne l’a pas. Les gens ne
comprennent pas bien pourquoi un
ministre-président autorise tout le
monde à sortir pendant que l’autre
dit l’inverse. La direction à suivre
devrait être la même. Malgré tout je
pense que nous acceptons cette dif-
férence.■
PROPOS RECUEILLIS PAR P. A.
https://t.me/WorldAndNews
de crise, le système allemand se per-
met même d’accueillir des malades
issus de France et d’Italie, en parti-
culier via le Bade Wurtemberg et la
Rhénanie-du-Nord-Westphalie.
Or, ces deux régions concentrent
déjà le plus grand nombre de per-
sonnes infectées (28 000), derrière
la Bavière.
Du personnel Surveillance
médical pratique de la téléphonie mobile
un prélèvement
de dépistage sur Malgré ses tâtonnements dans la
un automobiliste gestion de la crise, le gouvernement
dans un « Corona Merkel peut se prévaloir du soutien
drive » mardi de la classe politique et de l’opinion
à Hanovre. publique. Son parti, la CDU, en fâ-
POOL/REUTERS cheuse posture il y a seulement un
mois, grimpe à présent dans les
La politique du dépistage de masse
UN ÉCOUVILLON, cette espèce
de coton-tige, dans la bouche, et
le tour est joué. Le Dr Martin von
Bergh a beau être équipé de pied
200 000 en cap, le visage entièrement re-
couvert d’un casque, le geste mé-
tests par jour dical que pratique ce médecin à
travers la vitre d’une voiture a le
Objectif à terme
mérite de la simplicité. Depuis
affiché par le ministère
qu’il a racheté un terrain disponi-
de l’Intérieur allemand
ble, dans le centre de Diez, dans
l’ouest de l’Allemagne, pour le
reconvertir en « Corona Auto Sta-
tion », le praticien voit passer
dans son centre de dépistage im-
provisé, ouvert de 9 heures à
13 heures, cinquante à cent auto-
mobilistes par jour. «Mais on est
loin d’avoir atteint nos limites»,
précise-il au Frankfurter Neue
Press, tandis que son père s’occu-
pe des cas hors corona dans le ca-
binet familial, spécialisé dans la
médecine générale.
À Coblence, Munich, Hanovre
ou Duisbourg, les Corona Drive se
Des médecins développent à l’image d’une va-
se forment à l’utilisation gue de dépistage que l’Allemagne
d’un respirateur se félicite d’avoir, très tôt, enga-
au centre médical gée. Selon les autorités sanitaires,
universitaire de la multiplication de ces opéra-
Hambourg-Eppendorf,
tions prophylactiques permet
le 25 mars.
POOL/VIA REUTERS
d’afficher des taux de morbidité
plus bas qu’en Italie ou en Espa-
gne, tandis que le gouvernement
français est accusé de ne pas en
conduire assez. « Nous effectuons
un demi-million de tests chaque
semaine dans le pays », déclare
Christian Drosten, virologue à
l’hôpital de la Charité, l’un des
principaux experts de référence.
En réalité, l’affirmation est diffi-
cilement vérifiable, les sources se
contredisant à de multiples repri-
ses. Pour sa part, la Fédération
des associations de médecins
conventionnés (KBV) avance,
pour la semaine dernière, le chif-
fre de 314 000 dépistages, en
hausse de 18 % par rapport à la
semaine précédente.
L'ÉVÉNEMENT
sondages. Son principal et plus en-
combrant opposant au Bundestag,
le parti d’extrême droite Alternati-
ve pour l’Allemagne (AfD), a voté
sans difficultés le plan de soutien à
l’économie. Dans le Spiegel, un pro-
fesseur de statistiques à l’université
de Fribourg estime que les chiffres
officiels « ne sont absolument pas
fiables », mais de telles voix restent
encore isolées. La Fédération des
associations de médecins conven-
tionnés (KBV) critique le manque
de masques, de blouses ou de gants
mis à la disposition des praticiens.
L’Opéra de Berlin lui-même a com-
mencé à en coudre. La ville de Iéna,
dans l’est du pays, entend rendre
son port obligatoire dans les trans-
À la différence de la France, qui
ne teste que des cas avérés, et
principalement à l’hôpital, les
critères établis outre-Rhin sont
plus souples : présenter des
symptômes et avoir été en
contact dans les quatorze jours
précédents avec une personne
contaminée. Le ministère de l’In-
térieur préconise même, dans le
futur, de se limiter à une seule des
deux conditions, afin de pouvoir
tester 200 000 personnes par
jour. Mais ces objectifs sont « illu-
soires », estime l’Association des
médecins de laboratoire (BDL).
Dans les faits, il reste difficile
d’accéder aux tests par les voies
officielles, les standards du 116 et
du 117 étant surchargés. Le
13 mars, soit à un stade encore
initial de l’épidémie, un patient
décrit au Figaro, sous couvert
d’anonymat, ses multiples tenta-
tives infructueuses pour joindre
les autorités sanitaires de la ville.
Cette source, qui avait été en
contact proche avec une person-
ne malade, a finalement atterri
chez un généraliste, qui a accepté
de pratiquer le test. « Cela a duré
deux minutes, il m’a demandé de
ne pas faire de publicité pour son
cabinet avant de me congédier »,
raconte le patient, dont le témoi-
gnage est corroboré par de multi-
ples sources.
« Faux positifs »
La brièveté du prélèvement - ef-
fectué dans la gorge - est devenue
la norme. Néanmoins, cette mé-
thode ne respecte pas les recom-
mandations émises par l’Institut
Robert-Koch. « Les échantillons
doivent être prélevés dans les voies
respiratoires supérieures et infé-
rieures en parallèle si possible, en
fonction de la situation clinique »,
préconise en effet l’établissement
berlinois, qui pilote l’épidémie en
conformité avec les recomman-
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
9
ports en commun. Gardons-les
plutôt pour le personnel soignant,
rétorque le ministre des Finances
Olaf Scholz. À titre individuel, des
aides-soignants s’indignent de cet-
te pénurie. Mais la polémique est -
pour l’instant - contenue.
Mercredi, le débat politique se
focalisait surtout autour du projet
du gouvernement d’utiliser les
données de la téléphonie mobile
afin d’intensifier la campagne de
dépistage. Un député libéral du
FDP, Manuel Höferlin, s’en inquiè-
te : « Même en temps de crise, les
droits civiques ne doivent pas être
restreints à la légère. » Le coronavi-
rus a beau la frapper, l’Allemagne
ne perd pas le nord. ■
dations de l’OMS. Et l’institut de
citer « le frottis oropharyngien »,
au même titre que « le lavage
broncho-alvéolaire » ou l’utilisa-
tion des « sécrétions trachéales ».
Campés sur une ligne orthodo-
xe, les praticiens français s’en
tiennent aux « aspirations naso-
pharyngées », un geste relative-
ment traumatique mais qui,
conduisant jusqu’aux expectora-
tions du patient, garantit une ex-
trême fiabilité. Selon les experts
interrogés par Le Figaro, cette
méthode représente néanmoins
« un frein au dépistage de masse »,
privilégié pour sa part outre-Rhin.
« Le simple frottis dans la gorge,
cela me paraît un peu hasardeux et
je ne le pratiquerais certainement
pas », critique, sous couvert
d’anonymat, un médecin hospita-
lier français attaché à une plate-
forme de dépistage du Covid-19.
Plus que les « faux positifs », ces
praticiens redoutent les « faux né-
gatifs » dont les conséquences
peuvent se révéler fatales.
En Allemagne, des sociétés
proposent même aux clients, vi-
déos à l’appui, de réaliser des
tests par correspondance, à
l’image de l’entreprise de logisti-
que Gorilla, qui a développé le
site MeineRezept.de (« monor-
donnance.de). « Le test est
conduit par un laboratoire de
Hambourg et correspond aux
standards de l’OMS, qui sont dé-
veloppés à la Charité », précise la
société dans un mail. « Les tests
sont fiables », renchérissent les
autorités sanitaires allemandes,
peu contredites jusqu’à présent.
« Testez, testez, testez ! », avait
récemment encouragé le direc-
teur général de l’OMS, Tedros
Adhanom Ghebreyesus. Cette in-
jonction, l’Allemagne l’a effecti-
vement prise au pied de la
A
lettre. ■
P. A.
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

10 L'ÉVÉNEMENT
L’ubuesque
Biélorussie nie
être touchée
par l’épidémie
Le président Alexandre Loukachenko
encourage la pratique des sports collectifs,
« le médicament le plus naturel ». Le président de Biélorussie, Alexandre Loukachenko, a participé à un match de hockey sur glace, le 28 mars, à Minsk. BELTA/VIA REUTERS

NICOLAS VIGNE
LES VOISINS russes et occidentaux de la
Biélorussie se claquemurent, la pandé-
mie ne cesse de faucher des vies en Eu-
rope mais le président de cette ancien-
ne république soviétique, Alexandre
Loukachenko, au pouvoir depuis vingt-
six ans, « préfère mourir debout que de
vivre à genoux ». Cet ancien apparat-
chik amateur de hockey sur glace en a
donné la preuve le week-end dernier,
crosse en main, sur la glace de la pati-
noire de Minsk, lors d’un match offi-
ciel, entouré de tribunes bondées. « Ici
il n’y a aucun virus, c’est comme un fri-
go », s’est réjoui le chef de l’État, pour
qui la pratique du sport est le « médica-
ment le plus naturel ». Dans cette nation
de 9 millions d’habitants, il en va de
même pour les matchs de football, la
culture et la gastronomie : stades, res-
taurants, théâtres et cinémas restent
ouverts, à l’exception des écoles. Il est
vrai que les vacances scolaires ont dé-
buté lundi. « Notre établissement est
plein », lâche l’hôtesse d’accueil de
l’Hôtel Alexandria, situé dans le village
natal éponyme du président, avant de
raccrocher sèchement le combiné.
Dans ce bourg de 1 400 habitants aux
allures de village Potemkine, les habi-
tants se méfient des curieux qui évo-
quent le coronavirus. Partout dans le
pays, on manie le thème avec précau-
tion. Les médias officiels en parlent
abondamment tout en minimisant le
phénomène. Un bulletin du ministère
de la Santé, en date du 31 mars, se
contente d’expliquer que dans les der-
nières 24 heures, onze patients ont été
accueillis à l’hôpital et « 128 en sont sor-
tis ». Certes, le pays a enregistré mardi
son premier mort, mais ce dernier souf-
frait d’abord d’une « pneumonie », a
expliqué le président à la télévision.
Une rasade de vodka
Une partie de la population se rassure à
la lecture des statistiques et à l’écoute
du chef de l’État : Alexandre Louka-
chenko, qui a reproché à son voisin
russe de fermer les frontières, réduit
l’épidémie à une « psychose » - suscep-
tible d’être endiguée avec une rasade de
vodka - et menace les entreprises
privées qui licencieraient leurs em-
ployés de les expulser du pays. Suivant
ces recommandations, le président de
la Fédération de football, un ancien mi-
litaire, a ordonné la poursuite du
championnat national. L’armée ajoute
qu’aucun de ses soldats n’a été infecté
et l’agence de presse officielle Belta re-
laie d’étranges compliments adressés à
la nation par le Margaret Harris, res-
Dr
ponsable de la communication de
l’OMS. Faisant fi de toutes les règles
prudentielles inhérentes à son institu-
tion, le médecin de l’institution gene-
voise explique que la Biélorussie « fait
superbement face » au coronavirus, et
qu’il est « indispensable » de continuer
à faire fonctionner l’économie. Contac-
tée par Le Figaro, l’intéressée dément :
« Je n’ai pas dit cela. Ça semble être un
problème de traduction. »
L’autre partie de la population pres-
sent qu’il y a un problème. La fréquen-
tation du métro de Minsk a baissé de
200 000 personnes en mars, et son por-
te-parole en est navré. Sans jamais citer
le coronavirus, Andreï Drob rappelle
que la compagnie « fait appel à des
moyens de lavage et de désinfection, net-
toie les rampes, le sol, les vitres et les
ouvertures de fenêtres ». « Le régime
gère cette crise comme autrefois la
catastrophe nucléaire de Tchernobyl. La
propagande affirme que tout va bien.
C’est comme avec les radiations, on ne
voit rien, et s’il y a des décès, on peut
toujours dire que les gens sont morts
d’autre chose », s’insurge Vladimir
Kolos, directeur d’une école privée de
Minsk et dissident. Les derniers jours
précédant les vacances scolaires, son
établissement avait renvoyé ses élèves à
la maison.
La centrale nucléaire ukrainienne,
qui avait explosé en 1986, est frontalière
de la Biélorussie. Les autorités soviéti-
ques de l’époque avaient longtemps
censuré l’événement, avec pour consé-
quence d’alourdir le bilan. Trente-qua-
tre ans plus tard, l’ancien secrétaire gé-
néral de sovkhoze Alexandre
Loukachenko espère toujours conjurer
la pandémie. ■

Venezuela : le plan Sergueï Sobianine, bras armé

de Washington
Les États-Unis proposent des élections
en échange d’un allègement des sanctions.
PATRICK BELE pbele@lefigaro.fr
LE SECRÉTAIRE d’État américain
Mike Pompeo a présenté mardi
31 mars un plan nommé « cadre
démocratique pour le Venezuela ».
Il s’agit d’un agenda pour sortir de
la crise politique frappant le pays
depuis plusieurs années, et qui a
des répercussions dramatiques sur
la situation économique et sociale
des Vénézuéliens. Des émeutes
ont éclaté ces dernières heures
dans plusieurs régions du pays
pour protester contre les pénuries
de carburant. Celles-ci sont dues
au délabrement des installations
pétrolières, alors que la produc-
tion, qui était de plus de trois
millions de barils par jour, a chuté
à probablement moins de 500 000
aujourd’hui.
Le plan prévoit la dissolution de
l’Assemblée nationale constituan-
te, composée exclusivement de
chavistes, pour redonner le pou-
voir législatif à l’Assemblée
nationale. Celle-ci sera chargée de
désigner un conseil de gouverne-
ment de cinq membres, qui assu-
mera le pouvoir exécutif et l’orga-
nisation d’une élection présiden-
tielle dans les six à huit mois.
Nicolas Maduro, président re-
connu par la Chine, l’Iran, la Tur-
quie et la Russie, et Juan Guaido,
président intérimaire et de l’As-
semblée nationale reconnue par
une soixantaine de pays dont les
États-Unis, devront chacun aban-
donner leur poste. Ils ne pourront
participer au conseil de gouverne-
ment mais pourront se présenter
aux élections. L’Assemblée natio-
nale devra désigner un nouveau
conseil national électoral et un
nouveau tribunal suprême de jus-
tice. En échange, Washington
propose un allégement des sanc-
tions.
La réponse des autorités chavis-
tes a été rapide. Et sans surprise.
Comment Caracas, même sous la
pression de la pandémie de Covid-
19 et de la chute des cours de pé-
A
négociation ? Dans un message
adressé aux chefs d’État du monde
entier, Nicolas Maduro exhorte à
faire pression sur la Maison-Blan-
che pour que les sanctions contre
son pays soient levées : « Pendant
la pandémie, le gouvernement des
États-Unis, au lieu de se focaliser
sur les politiques de coopération
mondiale en matière de santé et de
prévention, a renforcé les mesures
coercitives unilatérales et refusé les
demandes de la communauté inter-
nationale de lever ou d’assouplir les
sanctions illégales ».
La semaine dernière, la Haute
commissaire aux Droits de l’hom-
me de l’ONU, Michelle Bachelet, a
demandé un assouplissement des
sanctions contre le Venezuela,
l’Iran et Cuba, pour permettre à
ces pays de faire face à la pandé-
mie de Covid-19. Si les sanctions
ne visent pas directement l’ap-
provisionnement en médicaments
et en matériels médicaux, elles en
compliquent l’importation.
Peu de données sanitaires
Pour Colette Capriles, professeur
de Sciences politiques à l’univer-
sité Simon Bolivar de Caracas,
« les déclarations de Pompeo ren-
forcent Guaido en reprenant une
partie du plan qu’il avait présenté, il
y a quelques jours, pour affronter le
coronavirus. »
Le gouvernement Maduro a pris
des mesures strictes de confine-
ment. Officiellement, moins de
300 Vénézuéliens ont contracté le
virus et moins de 10 décès ont été
enregistrés.
Un bilan largement remis en
cause notamment parce que les
organismes de collecte de données
sanitaires ont été démantelés de-
puis longtemps. Impossible de
mesurer les graves épidémies
préexistantes de dengue, de mala-
ria et de rougeole.
La chercheuse estime que « le
paradoxe, c’est que les Vénézué-
liens vivent depuis longtemps dans
un état d´exception et que les mesu-
res de confinement et de contrôle
du Kremlin contre le Covid-19
Le maire de Moscou, jusqu’alors peu médiatisé, s’est mué à la faveur
de la crise en un « premier ministre bis » plus visible que Poutine.
À LA MANŒUVRE
ALAIN BARLUET £@abarluet
CORRESPONDANT À MOSCOU
DEPUIS que Vladimir Poutine l’a
nommé le mois dernier pour pilo-
ter la lutte contre la propagation
du Covid-19, le maire de Moscou,
Sergueï Sobianine, est en première
ligne. Ce technocrate de 61 ans, né
en Sibérie et jusqu’à présent sans
Sergueï Sobianine, grand charisme médiatique, est
maire de Moscou, désormais plus visible que le pré-
lors d’une réunion sident lui-même ou que le chef du
sur le Covid-19, gouvernement, Mikhaïl Michous-
le 27 mars, à Moscou. tine, qui œuvre au soutien de
DMITRY ASTAKHOV/AFP l’économie. Alors que le nombre
de personnes infectées par le virus
grimpe chaque jour dans le pays -
2 777 cas mercredi, 440 de plus
que la veille -, l’édile de la capitale
est de facto devenu un premier
ministre bis, voire selon certains,
le numéro deux du pouvoir.
Dimanche dernier, c’est lui qui
a annoncé aux Moscovites un
confinement strict, dès le lende-
main, sous le contrôle d’un « sys-
tème intelligent » comprenant des
caméras de surveillance (100 000
à Moscou) et, jeudi, le traçage nu-
mérique – des « QR code » char-
gés sur smartphone et permettant
de suivre les personnes. Ce confi-
nement sévère est progressive-
ment étendu aux régions.
En montant au créneau pour
« boucler » chez eux ses adminis-
trés, Sergueï Sobianine a donné
l’impression d’agir plus vite et
plus fermement que Vladimir
Poutine. Le président n’avait pas
parlé de confinement mais avait
appelé les Russes à « rester à la
maison » durant une semaine
chômée, du 28 mars au 5 avril.
“ Un homme
de vision pour sa ville,
un bâtisseur doté
d’une impressionnante
force de travail
”
MAURICE LEROY, ANCIEN MINISTRE
FRANÇAIS DE LA VILLE, CONSEILLER
DE SERGUEÏ SOBIANINE
Quelques jours auparavant,
M. Sobianine avait exhorté le chef
du Kremlin à prendre des mesu-
res fortes, révélant pour la pre-
mière fois que les autorités
n’avaient pas une « image claire »
de l’avancée de la pandémie alors
qu’on la disait officiellement
« sous contrôle ».
Si Sergueï Sobianine a obtenu
ses galons de commandant en
chef contre le Covid-19, c’est
avant tout pour sa loyauté jamais
démentie à l’égard de Vladimir
Poutine et son activisme à la mai-
l’administration présidentielle au
Kremlin, il a été nommé à la tête
de la capitale russe - 15 millions
d’habitants -, qu’il a entrepris de
transformer en profondeur, mo-
dernisant les voies publiques et les
transports, construisant des parcs
- tel Zaradié, près de la place
Rouge -, et des habitations pour
reloger les habitants d’anciens
immeubles soviétiques.
« En tant que maire de la capita-
le, - qui regroupe les deux-tiers
des personnes infectées dans le
pays, Sergueï Sobianine dispose
d’une perception publique de la cri-
se, mais aussi de ressources
financières sans équivalents »,
souligne Andreï Kolesnikov, ex-
pert au centre Carnegie. Pour
l’ancien ministre français de la
Ville, Maurice Leroy, qui collabo-
re sur place depuis un an et demi à
la réalisation du « Grand Mos-
cou » développé par Sobianine, ce
dernier est avant tout un « homme
de vision pour sa ville, un bâtisseur
doté d’une impressionnante force
de travail ». Il y a peu de chance
que Vladimir Poutine laisse partir
M. Sobianine à un autre poste, car
« il a trop besoin de lui là où il
est », estime encore Maurice
Leroy.
Le défi n’en est pas moins grand
pour Sergueï Sobianine. Possible
« sauveur de la nation » s’il par-
vient à faire front, son étoile
pourrait en revanche sérieuse-
ment pâlir d’une mauvaise ges-
tion de la vague qui vient. Les jeux
d’influence politique sont déjà à
l’œuvre. Tandis que certains sur
Internet l’encensent et le voient
en futur premier ministre - poste
pour lequel il a d’ailleurs été plu-
sieurs fois pressenti -, d’autres le
critiquent et lui contestent le droit
de décréter un confinement. Les
« structures de force » sont en
embuscade. Très actif, le ministre
de la Défense Sergueï Choïgou,
dont les services construisent ac-
tuellement quinze hôpitaux de
campagne en région, entend bien
ne pas laisser au maire de Moscou

trole pourrait-elle accepter un social prises par le gouvernement rie de Moscou. En 2010, après le monopole de la gestion de
plan qui n’a fait l’objet d’aucune ne font que l’approfondir ». ■ deux années comme directeur de l’épidémie. ■
https://t.me/WorldAndNews
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
chez vous
Cuisiner, jardiner,
lire, relire, voir,
LE CLÉZIO : SON ENFANCE,
revoir, écouter…
un temps
pour se distraire
et se cultiver.
SES LECTURES, LE PRIX RENAUDOT...
PAGE 15
EN COUPLE,
CONFINÉS... MAIS DANS UN AN ET DEMI, OÙ SERONS-NOUS ?
À DISTANCE QU’EN SERA-T-IL DES LIVRES ?
Ces amoureux
■ J’ai toujours eu le fantasme des pha-
qui apprennent à vivre res. Être planté dans la mer, au milieu
loin l’un de l’autre de la tempête, quand l’écume lèche les
vitres d’une pièce circulaire, tel un îlot
pendant le confinement
de granit au cœur du déluge : pour un
PAGE 12 romancier, quoi de plus inspirant ? La
tempête est bel et bien arrivée, avec
son cortège de malheurs, de peurs et de
HENRY ROY/ALMAVIVA, FRANÇOIS BOUCHON/LE FIGARO, LEONARDO CENDAMO/LEEMAGE
« NIGHTSONGS » plaies. La houle est invisible, le ressac
impalpable, mais le mal est pourtant là
DE YAEL NAIM
qui rôde et frappe au hasard. Carté-
sienne par nécessité, la France avance
masquée.
Pour son premier À l’approche du confinement, j’ai
hésité. Partir ? Rester ? Les images ro-
disque en solo, manesques d’un Paris rendu au silence
la chanteuse est allée puiser et aux oiseaux ont titillé mes obsessions
littéraires de la France occupée. Mais le
au fond d’elle-même besoin de grand air a été le plus fort.
PAGE 14 Sachant mes enfants à l’abri d’une vas-
te retraite normande, je n’avais plus de
raison de rester parisien et j’ai sauté
RAYMOND ARON
dans le premier train pour le grand
sud…
Étrange fumet d’exode ; ces valises
L’un des plus grands trop lourdes, ces regards suspicieux,
ces visages enrobés. Pour une fois, la
penseurs du XXe siècle crève burqa fait école. Paris, Avignon, Car-
l’écran dans un documentaire pentras ; un détour pour récupérer une
voiture (moi qui ne conduis qu’une fois
diffusé sur Public Sénat
tous les huit ans !) ; un plein éléphan-
PAGE 16 tesque dans un Carrefour encore vierge
de razzia ; puis, l’air pur. Aux confins
du Vaucluse et de la Drôme, nous voilà
https://t.me/WorldAndNews
(car je confine à deux) nichés dans une
bergerie à flanc de colline, à l’orée des
Baronnies. Derrière la maison, les rui-
nes d’un vieux village scrutent l’hori-
zon avec une morgue médiévale. Sous
nos fenêtres, les collines s’étirent pres-
que à l’infini, dans un doux camaïeu
gris-vert. À gauche, le
mont Ventoux, ce « géant
de Provence », garde sa LA JOURNÉE
DE
pose de dinosaure assoupi.
Ici, pour l’instant, rien n’a
changé. Nicolas
S’imposer une routine
est plutôt facile. Comme à
d’Estienne
Paris, je me lève à 5 heures d’Orves
pour écrire. Je prépare une
biographie romancée
d’Arletty qui sortira à
l’automne 2021, chez Cal-
mann-Lévy. Mais déjà mes
doigts s’immobilisent au-
dessus du clavier : dans un
an et demi, où serons-
nous ? Qu’en sera-t-il des
livres ? Mon nouveau ro-
man, Ce que l’on sait de
Max Toppard, devait sortir
chez Albin Michel le 29 avril. Le bon à
tirer devait même partir le 16 mars,
jour de l’annonce du confinement.
Autant dire que tout est flou ; et puis
mes pauvres livres, en comparaison…
Mais arrêter d’écrire, c’est comme
VÉHICULES IMMOBILISÉS :
NOS CONSEILS POUR
BIEN REDÉMARRER
cesser de respirer. L’absence de chapi-
tre quotidien est pour moi aussi suffo-
cante que la menace d’un virus. Alors
je m’installe sur la petite terrasse enco-
re glacée, je butine mon cappuccino
Nescafé et j’allume mon ordinateur.
Pas simple de se concentrer : les
messages de la nuit (les
amis qui n’ont pas eu la
chance de partir, ou n’ont
pas voulu), les mails, les
articles terrifiants qu’on
ne peut s’empêcher de
lire, les morts en rafale, le
manque des enfants, et la
seule pensée de ce qui ad-
viendra ensuite… Un après
est-il possible ? Par diver-
sion, je lève le nez : la lune
s’estompe, l’horizon de-
vient mauve, les oiseaux
s’éveillent timidement, un
coq chante au loin, des
chiens hurlent par à-
coups, un âne pousse son
cri de trompette. Et puis le
soleil, qui gifle enfin le
paysage.
Devant un tel spectacle, comment
croire que le monde vacille ? On se sent
à la fois élu et coupable. Je songe à la
phrase de Billy Wilder, qui disait qu’en
1939 les pessimistes étaient partis pour
Hollywood et les optimistes pour Aus-
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
PAGE 13
chwitz. Bien sûr c’est incomparable,
mais la vision quotidienne des actuali-
tés télévisées offre un tel contraste : la
détresse urbaine, les rixes des super-
marchés, les interventions policières,
la folie de certains dirigeants, et puis
ces admirables médecins, héros abso-
lus qui tentent de faire respirer l’hu-
manité… Suis-je dans un monde paral-
lèle, coupé des réalités ? Ou bien dans
ce phare dont j’ai tant rêvé ?
D’ailleurs la tempête s’épaissit. Il y a
quelques jours, un de mes meilleurs
amis journaliste me dressait par télé-
phone le tableau de ce qui peut selon
lui arriver : la rage, les émeutes, les
pillages, la banlieue qui prend d’assaut
la ville, une police dépassée, une mé-
decine démembrée, le chaos… À l’en-
tendre, cette fin du monde que j’ai plu-
sieurs fois décrite dans mes romans se
met en place. Et ce matin, devant cette
aube si douce, je songe au Dernier
Homme de Mary Shelley, qui parcourt
une planète décimée par la peste, ulti-
me représentant de son espèce. Je crois
aussi être ce bonze du film 2012 qui,
depuis les cimes de l’Himalaya, voit
s’avancer la vague qui va le submerger.
Même les phares succombent à la tem-
pête. Mais quand les plaies atteindront
notre éden, nous aurons bu le paradis
A
jusqu’à la dernière goutte. ■
Nicolas d’Estienne d’Orves est écrivain.
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
12 LE FIGARO CHEZ VOUS
CÉLIBATAIRE
ET RECLUS :
LA DOUBLE PEINE
Le célibat non choisi peut être
supportable lorsqu’on est entouré
d’amis, accaparé par son travail,
pris par les affaires du monde.
En temps de confinement,
la blessure est plus vive.
Twitter, comme d’habitude,
foisonne de facéties sur le sujet :
« Célibat + confinement = manque
de second degré », écrit
un internaute, « Mesure officielle
du gouvernement : les journées
de cette période ne seront pas
comptabilisées en plus
pour les célibataires. Si vous étiez
à 100 jours de célibat,
vous resterez à 100 jours jusqu’à
la fin du confinement », plaisante
Moon. « Je me lisse les cheveux
et je me maquille pour aller faire
les courses, on arrive à un stade
critique », admet Anne.
« J’ai testé pour vous le célibat
juste avant le confinement… bah
ça confine beaucoup beaucoup
beaucoup plus, du coup »,
témoigne Yellocab. Des blagues
qui feraient peut-être sourire
Marine. À 24 ans, la jeune femme
est contrainte de passer cette
période entourée de deux couples.
Son frère et sa sœur ont convié
leurs conjoints à la maison
et vivent donc « leur meilleur
confinement ». « Moi je suis seule,
raconte-t-elle avec tristesse,
c’est dur de voir les autres
heureux quand on ne l’est pas. »
Pour évacuer sa peine, elle appelle
des amies - dont une songe
« à rappeler son ex » -, fait du
sport et envisage de commander
des compléments alimentaires
pour ressortir « plus fraîche »
de cette période.
A
CES COUPLES QUI VIVENT
SÉPARÉMENT LE CONFINEMENT
MADELEINE METEYER
«
J
e m’en fous, tu te prends trois
amendes et tu rappliques ! » Voi-
ci le chaleureux message que
Marion, 34 ans, a envoyé à son
mari Vincent. Au bout d’une
semaine de confinement. S’il fallait, devant
un tribunal, défendre cette incitation à en-
freindre la loi, Marion aurait quatre bonnes
excuses : leurs enfants, âgés de 2 à 7 ans.
Lorsque la fermeture des écoles a été an-
noncée, elle les a conduits en Bretagne,
dans la maison familiale. Depuis, Marion
découvre les joies de la monoparentalité en
même temps que celles du télétravail. Alors
oui, évidemment que son mari lui manque.
Mais elle sait que l’affaire est pliée. Lui ne
peut diriger son entreprise à distance.
Pour les couples au long cours, la sépara-
tion du confinement, si elle est rarement
volontaire – ceux qui sont mariés se sont
engagés mutuellement à « une commu-
nauté de vie » – est moins douloureuse que
pour les jeunes tourtereaux. Ils savent, eux,
que la mise en garde d’Anatole France, « il
n’est pas d’amour qui résiste à l’absence »,
ne les concerne pas. Prenez Constance* et
Jean-Luc*, deux quinquagénaires mariés
depuis trente-deux ans et parents de six
enfants. Elle est en Normandie, lui à Paris
où ses supérieurs - il travaille pour l’État -
exigent qu’il demeure. L’absence de l’autre
leur fait certes un pincement au cœur : « Je
voudrais qu’il me rejoigne, on philosopherait
s’il était là », regrette Constance. « Plus
personne ne me fait de massages et je dois
sortir les poubelles », s’émeut Jean-Luc.
Mais ils n’imaginent pas une seconde que le
confinement puisse endommager leur re-
lation. Ils en ont vu d’autres ! Et des pires !
Sonia et Daniel, des septuagénaires pari-
siens ensemble depuis dix ans, ressentent,
eux, le besoin de s’appeler « toutes les deux,
trois heures » mais peuvent très bien, à
cette condition, vivre l’un sans l’autre pen-
dant un mois. Au contraire de François*,
23 ans, qui s’inquiète : « Si le confinement
dure encore cinq semaines », Florence* lui
enverra-t-elle encore des messages ? Ces
deux-là ne forment pas encore un couple
solide. À peine un couple, en fait. Amou-
reux dans leur jeunesse, ils ont, le vendredi
juste avant le confinement, repris les cho-
ses où ils les avaient laissées… mais à dis-
tance. S’ils vivent tous les deux à Clamart, il
y a 1,5 km entre leurs deux logis, soit
« 500 m d’illégalité entre nous », sourit le
https://t.me/WorldAndNews
QU’ILS L’AIENT
OU NON CHOISI,
CERTAINS VIVENT
CETTE PÉRIODE ÉTRANGE
LOIN DE L’ÊTRE
QU’ILS PRÉFÈRENT.
UNE SÉPARATION
QUI EFFRAIE DAVANTAGE
LES DUOS
LES PLUS RÉCENTS.
« SE FIXER DES RENDEZ-VOUS JOURNALIERS »
PROPOS RECUEILLIS PAR
STÉPHANE KOVACS £@KovacsSt
Caroline Kruse est thérapeute de couple,
auteur d’Il faut qu’on parle. 60 sujets à
aborder en couple avant qu’il ne soit trop
tard (Éditions du Rocher, 2019).
LE FIGARO. - Pour les couples
qui vivent ce confinement séparés,
comment gérer le manque de l’autre ?
Caroline KRUSE. - Il faut peut-être
d’abord en discuter ensemble : « Qu’est-
-ce qui te ferait plaisir ? Qu’est-ce qui te
rassurerait ? » Établir une routine, dans le
bon sens du terme, des rendez-vous
journaliers, par téléphone ou vidéo, par
exemple le matin au réveil, le soir au cou-
cher et, si possible, aussi un moment dans
la journée. C’est important pour éviter les
moments de flottement dus à la perte de
repères : « Que se passe-t-il ? Il n’a pas
jeune homme. Pour le moment, l’affaire est
assez romantique. François vit seul, Flo-
rence avec ses parents, « très carrés sur les
règles sanitaires » et qui surveillent ses sor-
ties ; pour se retrouver, ils doivent tromper
leur vigilance et celle des policiers, enfiler
des joggings et repérer de petites ruelles où
s’embrasser sans se prendre une amende.
« J’ai besoin d’être proche d’elle, je ressens
des trucs de fou, justifie François. C’est la
seule personne que je vois… » Mais François
s’imagine parfois des « scénarios abracada-
brants » où cet ersatz de relation lasse Flo-
rence.
Manque de spontanéité
Lucie*, 22 ans, confinée avec sa mère à
Troyes, essaie aussi de maintenir son lien
avec Hadrien*, un camarade de classe de-
venu davantage trois jours avant le confi-
nement. Comme ils sont « très très loin »
d’oser se téléphoner – c’est intime, un coup
de fil –, ils s’envoient des textos. Mais l’étu-
diante en hôtellerie est fâchée du manque
de « spontanéité » des échanges écrits et n’a
pas le sentiment qu’ils font « vraiment
connaissance ». Heureusement, Hadrien l’a
rassurée. « Il y a quelques jours, il m’a dit
qu’il avait hâte de me retrouver, que le confi-
répondu à mon appel… » Rien n’interdit
d’en faire plus, de s’envoyer des photos
ou des petits mots pour se dire qu’on
s’aime, mais en gardant les moments
fixes où l’on est assuré que l’autre sera
présent au rendez-vous. Et, bien sûr,
prévenir si pour une raison ou une autre
le rendez-vous n’est pas possible.
Comment gérer l’angoisse,
si par exemple l’un est soignant
et risque d’être contaminé ?
Là aussi, il faut établir une routine de ren-
dez-vous fixes. Au moins un par jour,
parce que le besoin d’être en lien est en-
core plus vital. Par ailleurs, il faut que
chacun accepte que l’autre ne soit pas
dans la même situation que lui-même.
Celui qui prend des risques doit com-
prendre, même si elle lui paraît
secondaire par rapport à ce qu’il vit, l’an-
goisse de son partenaire, son sentiment
d’impuissance, son besoin d’être rassuré.
ROCKETCLIPS/STOCK.ADOBE.COM
nement lui pesait parce que ça avait inter-
rompu notre truc… », s’attendrit Lucie.
S’il n’y a pas d’amour mais « que des
preuves d’amour », c’est plus vrai encore
quand l’être aimé est loin. Surtout en cette
période où l’ennui de l’autre se confond
avec l’ennui tout court. Aussi, Stéphane*,
28 ans, se décarcasse pour montrer à So-
lange*, sa copine depuis dix mois, qu’il n’a
de pensées que pour elle : « Je lui ai envoyé
un puzzle, elle aime bien ça, je lui écris des
lettres, je lui fais des dessins, je les prends en
photos et je lui envoie par mail… »
Marion, la confinée bretonne, a elle
consenti à téléphoner à son mari. D’habi-
tude, elle déteste ça – l’attention de Vin-
cent serait défaillante – et constate qu’il lui
manque vraiment puisqu’elle n’a « pas en-
vie de lui raccrocher au nez au bout de deux
minutes ». Camille, 27 ans, qui « versait
toutes les larmes de son corps » au début de
la séparation avec Antoine, son copain de-
puis deux ans, s’est assagie au bout de
quinze jours : « J’avais peur que nos senti-
ments s’atténuent, qu’on se rende compte
que nos vies sont plus sympas l’un sans
l’autre. Mais en fait il est plus attentionné
qu’il y a deux semaines. » ■
* Ces prénoms ont été changés.
Mais ce dernier doit aussi prendre garde à
ne pas ajouter de l’angoisse à l’angoisse
de celui qui est en première ligne mais se
donner pour mission de le soutenir, de lui
dire qu’il est fier de lui ou d’elle. C’est une
manière de vaincre l’impuissance : lui si-
gnifier qu’on est dans ce combat au moins
par la pensée, à ses côtés.
Est-ce que vivre ce confinement
séparés peut être finalement source
de rapprochement ou risque de rupture ?
Le confinement, qu’on le vive ensemble
ou séparés, est une épreuve, et dans les
deux cas il faut se méfier des prédictions
autoréalisatrices qui menacent les cou-
ples de rupture. Certes, il vaut mieux évi-
ter d’en profiter pour ressasser les
rancœurs du passé. Mais si on maintient
un lien confiant, attentif aux besoins ex-
primés de chacun, et sans exiger de soi et
de l’autre l’impossible, cette expérience
pourra être source de rapprochement. ■
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
Panne de batterie, fuite d’huile,
pneus dégonflés, autant de scénarios
que les automobilistes veulent
à tout prix éviter lorsque
le confinement sera levé.
FRANÇOIS BOUCHON/LE FIGARO
5
ans
Durée de vie moyenne
d’une batterie.
Effectuer son remplacement
seulement après les premiers
signes de faiblesse.
0,5 bar
Surplus de pression préconisé
dans les pneumatiques
SYLVAIN REISSER sreisser@lefigaro.fr
L
e moteur ne démarre plus ou il
émet une sonorité inhabi-
tuelle ; les pneus sont dégonflés
et avachis ; une mare d’huile ou
d’eau s’est déclarée sous la voi-
ture. Ce sont des scénarios que les auto-
mobilistes veulent à tout prix éviter
lorsque le confinement sera levé et que
l’on pourra reprendre la route. Chacun
le sait : une voiture qui ne roule pas se
dégrade. Si l’on n’y prend pas garde, les
véhicules pourraient subir des domma-
ges à la suite de leur immobilisation pro-
longée. Pour se prémunir de ce genre de
désagrément et maintenir leur bon état
de marche, voici quelques précautions
d’usage à suivre.
Du fait d’une immobilisation prolon-
gée, la batterie est le premier organe du
véhicule qui peut se trouver détérioré.
C’est particulièrement vrai pour les mo-
dèles récents bardés d’électronique : les
accumulateurs peuvent se décharger
très vite. Pour éviter de vous retrouver
en panne et s’assurer que le moteur
s’ébroue au premier coup de clé, vous
pouvez soit débrancher la batterie - la
borne négative suffit -, soit brancher la
batterie à un mini-chargeur (maintien
de charge) alimenté sur le secteur.
FENOUIL ET POIRE RÔTIS AU MAGRET FUMÉ
D’AMANDINE CHAIGNOT
• LA RECETTE DU CHEF • CHAQUE JOUR, UN GRAND CUISINIER NOUS CONFIE LES SECRETS D’UN PLAT RÉCONFORTANT.
ALICE BOSIO £@alicebosio
«D
epuis deux semaines, je
poste à partir de mon
mobile des recettes
simples sur YouTube,
“Les tutos des potes”,
au départ pour aider des copains peu
doués en cuisine. Dans les commen-
taires, un internaute m’a demandé une
recette avec du fenouil : la voici, je
viens juste de l’imaginer ! Je vis dans un
petit appartement parisien, avec une
cuisine de 3 mètres sur 2. Donc, à la
maison, je vais à l’essentiel, sans y pas-
ser trop de temps. Je ne suis pas végéta-
rienne, mais je mange beaucoup de lé-
gumes et j’adore les travailler. Dans
mon restaurant Pouliche, ouvert depuis
octobre dernier dans le 10e, il y a tou-
jours un plat végétarien au menu, et, le
mercredi, c’est journée 100 % veggie !
Je cuisine souvent les légumes rôtis au
four, pour concentrer les goûts. C’est
rapide et facile, avec un rendu toujours
intéressant. Le fenouil a tendance à être
soit fade, soit un peu écœurant quand
son côté anisé prend le dessus. L’asso-
ciation avec un fruit qui n’est pas domi-
CELA FAIT DÉJÀ TROIS
SEMAINES QUE NOS VÉHICULES
N’ONT PAS QUITTÉ
LEUR EMPLACEMENT.
IL EST TEMPS DE S’OCCUPER
D’EUX POUR ÉVITER
LES MAUVAISES SURPRISES
LORS DE LA LEVÉE
DU CONFINEMENT.
■ INGRÉDIENTS, pour 4 personnes :
4 bulbes de fenouil, 2 poires, 2 ou
3 kumquats, 1 poignée de pistaches
mondées, une pincée d’origan, 1 magret
fumé tranché, 100 g de gingembre,
1 cébette, huile d’olive,
sel et poivre. AMANDINE CHAIGNOT
https://t.me/WorldAndNews
Dans le cas d’un véhicule moderne,
nous conseillons la connexion d’un
maintien de charge car le débranchement
d’une cosse de batterie va couper l’ali-
mentation du calculateur électronique de
la voiture et remettre à zéro l’ordinateur
de bord. Les modèles dotés d’un accès
main libre avec reconnaissance de la clé
électronique pourraient connaître
d’autres complications. S’agissant d’un
véhicule 100 % électrique doté de batte-
rie lithium-ion, il faut s’assurer que le ni-
veau des accumulateurs ne descend pas
sous les 10 %, ce qui aurait pour consé-
quence de mettre en défaut les contrô-
leurs électroniques des cellules et des
modules dont la mission est justement de
vérifier l’état de la batterie. L’inverse est
également vrai : maintenir la charge en
permanence et stocker 100 % d’énergie
est à éviter. Cela entraînerait un vieillis-
sement prématuré des cellules. Il est
conseillé de veiller à ce que le niveau de
charge se situe entre 50 et 75 %.
Les véhicules électriques sont égale-
ment sensibles aux amplitudes de tem-
pérature. Un mercure trop bas affecte la
capacité de la batterie. Dans la mesure
du possible, il serait souhaitable que vo-
tre véhicule zéro émission puisse trou-
ver refuge dans un parking fermé. Dans
le cas de batteries lithium-métal-poly-
mère, qui équipent notamment les Bol-
nant, comme la poire (pas trop mûre,
pour éviter que ce soit trop sucré), ra-
mène une pointe de sucrosité et d’aci-
dité, pour un résultat tout en subtilité et
en fraîcheur.
Coupez les fenouils en gros quartiers
et taillez les poires en six dans la lon-
gueur. Déposez le tout dans un plat
allant au four. Assaisonnez généreuse-
ment d’huile d’olive, salez, ajoutez une
pincée d’origan et
les pistaches. Met-
tez au four à 180°
pendant 20 minu-
tes. Ajoutez le gin-
gembre taillé en
julienne et la cé-
bette ciselée. Re-
mettez au four
3 minutes. Taillez
le kumquat en jolis
morceaux, en en-
levant les pépins,
et disposez sur les
fenouils rôtis. Rou-
lez les tranches de
magret de canard
fumé sur elles-mê-
mes et disposez-les
également sur les
LE FIGARO CHEZ VOUS
MON AUTO
VA-T-ELLE
REDÉMARRER ?
loré Bluecar et Citroën e-Mehari, les
dispositions à prendre sont différentes.
Ces modèles doivent être branchés en
permanence pour maintenir une
température de l’ordre de 70 degrés.
Deux jours sans branchement suffisent à
vider la batterie.
La mémoire du pneu
Tout le monde n’a pas un fil à la patte.
Pour les véhicules à moteur thermique, il
est préconisé de faire tourner régulière-
ment le moteur pendant plusieurs minu-
tes pour maintenir le niveau de la batte-
rie. Cette dernière opération est de toute
façon impérative pour maintenir le bon
état des organes mécaniques. Au moins
une fois par semaine et pendant un bon
quart d’heure, de manière à ce que le mo-
teur atteigne sa température de fonction-
nement et que les fluides circulent et as-
surent une parfaite lubrification de
l’ensemble des pièces. Les systèmes de
dépollution modernes n’apprécient guère
de ne fonctionner que quelques minutes à
froid. Après avoir pris soin de consulter le
manuel de bord, ce sera l’occasion de vé-
rifier le niveau d’huile et d’eau de votre
moteur. Pensez aussi à desserrer le frein
avant (engager une vitesse) afin d’éviter
que les garnitures collent.
Si votre véhicule dispose d’une cli-
matisation, n’oubliez pas de la faire
fenouils. Terminez avec quelques
petites pluches de vert de fenouil et un
tour de moulin à poivre. Mettez le plat
sur la table et régalez-vous !
Cela constitue un plat complet en
portion généreuse ou, pour les carni-
vores, une garniture (sans le magret)
autour d’une viande blanche ou même
de veau. Je suggère d’utiliser la poire
Conférence, qui n’est pas granuleuse et
se tient bien. L’origan ou sa cousine la
marjolaine sont faciles à trouver dans le
commerce et poussent dans toutes les
campagnes de France, sur les talus ou
les bords de champ. J’en ai même vu
récemment à Saint-Ouen ! Mais vous
pouvez les remplacer par du thym ou
du romarin.
Quand j’étais petite, tous les étés, je
partais ramasser des herbes en mon-
tagne. C’est d’ailleurs une habitude
que j’ai gardée. L’origan dans ce plat
est un clin d’œil à mes vacances de
jeunesse. Je dégusterais ce plat
avec un sauvignon Mademoiselle M
d’Alexandre Bain, un vigneron atypi-
que très talentueux installé sur l’aire
d’appellation pouilly-fumé, qui en-
tretient son vignoble avec un cheval
de trait ! » ■
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
13
fonctionner. Cela va permettre une
bonne lubrification du compresseur et
de tous les joints, car l’huile est véhicu-
lée par le fluide frigorigène.
Enfin, il faudra veiller à surgonfler les
pneumatiques en ajoutant autour de
0,2 à 0,5 bar. En raison de l’immo-
bilisation du véhicule pendant plusieurs
semaines, ceux-ci vont nécessairement
perdre un peu de pression. Si l’immo-
bilisation venait à se prolonger au-delà
d’un mois, il est préconisé de gonfler
les pneumatiques à 3 ou 4 bars de
manière à éviter qu’ils se retrouvent
presque à plat. Cela entraînerait une
trop grande déformation de la bande
de caoutchouc. Or, ce que l’on sait
moins, c’est que le pneu possède
une mémoire. Il se souvient ainsi
d’avoir été malmené. Un pneu qui
a subi un plat ne retrouve jamais sa for-
me originelle. Dans ce cas, il sera indis-
pensable de procéder à leur rempla-
cement.
Les deux ou trois-roues motorisés ne
sont pas exemptés des opérations de
maintenance. Attention toutefois, la
batterie nécessite un maintien de char-
ge adapté. L’ampérage ne devra pas
excéder 5 A. Un tour de clé ou un coup
de kick une fois par semaine sera égale-
ment bienvenu pour préserver les orga-
nes de sa machine. ■
ZOOM
BACCHUS
À LA MAISON
Voici un excellent flacon très
facile à dénicher près de chez soi.
La cave coopérative
bourguignonne La Chablisienne
a créé la marque Union
des viticulteurs de chablis,
spécialement dédiée aux hyper
et supermarchés. Paré d’une
robe jaune pâle à reflets d’argent,
le 2018 donne à l’amateur
de chablis tout ce qu’il en
attend. La bouche vive
et énergique, citronnée,
ne trahit pas le nez
marqué par les agrumes
et la minéralité. La tension
s’étire jusqu’en finale,
longue et savoureuse,
fraîche, épicée.
Notons que, dans le
vignoble chablisien,
2018 fut qualifié
de « meilleur
millésime depuis
vingt ans ».
Et tout cela à un prix
très correct.
VALÉRIE FAUST
La Chablisienne,
Union des viticulteurs
de chablis,
chablis 2018, 10,95 €
A
(Leclerc, Casino,
Intermarché)
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
14 LE FIGARO CHEZ VOUS
À REVOIR
UNE FÊTE
SELON BÉJART
Les danseurs prennent encore
leur barre dans les locaux
du Béjart Ballet Lausanne mais
ils ont rangé leurs chaussons
de spectacle. Cependant le site
internet de la compagnie divulgue
un cinéma des grandes pièces.
Avec séances
à heures fixes.
PASCAL VICTOR/ARTCOMPRESS VIA LEEMAGE
Must du
moment,
du 2 au
5 avril, Béjart
fête Maurice.
Gil Roman,
directeur
de la
compagnie,
a signé
ce premier
opus en se
souvenant du
goût insensé
de Béjart pour
les grandes cérémonies. N’avait-il
pas organisé un ballet à la torche
sur les canaux de Venise avec final
sur la place Saint-Marc et un autre
pour les Nuits blanches de Saint-
Pétersbourg ? Pour Béjart, qui se
serait bien vu chez le Roi-Soleil
en intendant des menus plaisirs,
la fête était ce moment où le réel
cesse de mordre pour devenir
magie. En hommage à ces bouffées
d’absolue légèreté, Gil Roman
agence un patchwork d’extraits,
méticuleusement choisis parmi
ses voyages dans ces lointains d’où
il tirait une partie de sa puissance.
Le Dibbouk, Bhakti, Héliogabale
pour les fondamentaux. Chéreau
orchestre la rencontre de Mishima
et d’Eva Peron pour l’inattendu.
En final, le troisième mouvement
de la fameuse Neuvième
symphonie, qui appartient
à sa propre légende. Un voyage
qui donne des ailes en ces temps
immobiles.
ARIANE BAVELIER
www.bejart.ch
À DÉVORER
« LA GRANDE BOUFFE »
« Quel endroit romantique ! »,
s’exclame Andréa Ferréol.
Effectivement : les toilettes
explosent, Piccoli fait des pets,
Mastroianni convoque des
professionnelles, Noiret a droit
à une gâterie. Tognazzi est le plus
sage, qui se contente d’être aux
fourneaux et de se déguiser en
Brando du Parrain. Dans une villa
du XVe siècle,
quatre
bourgeois
décident
de se suicider
par
indigestion.
En 1973,
Marco Ferreri
se frottait
les mains :
LE FIGARO
il a obtenu
son scandale.
Revoir La
Grande Bouffe
en cette
saison de confinement où la
nourriture constitue le principal
souci lui donne un éclairage
nouveau. On oublie la laideur de
l’image (le tout est filmé comme
une fiction de M6). On passe sur
les facilités (« La vie, c’est une
farce », assure le cuistot devant
une volaille). On supporte
les longueurs (126 minutes), les
galipettes (tarifées), les séances
de colique (gratuites). Derrière
ces braves provocations se cache
une fable presque touchante sur
la fin d’un monde, une pochade
d’une mélancolie troublante. Un
journaliste parle par citations. Un
vieux garçon regrette sa nourrice.
Un pilote de ligne bichonne
une Bugatti bleue. La mort
a le physique d’une institutrice
replète. Se gaver au son du piano
de Philippe Sarde, tel était le sort
de l’Occident en ces années
repues. Les plats étaient signés
A
Fauchon. On ne s’embêtait pas.
ÉRIC NEUHOFF
OLIVIER NUC £@oliviernuc
E
n septembre dernier, Yael
Naim conviait quelques pri-
vilégiés à venir écouter ses
nouvelles chansons en
avant-première aux studios
Ferber. Seule au piano, entourée d’un
chœur, la chanteuse offrit un moment
suspendu, plein de grâce et de lumière.
C’est dans ce temple de la musique pa-
risien qu’elle a gravé son nouvel al-
bum, Nightsongs, son premier disque
en solo. « J’avais besoin de vivre quel-
que chose de nouveau, dit-elle. C’est
une forme de recherche de soi-même. »
De cette envie de se mettre en dan-
ger, Yael Naim a puisé la matière à un
petit chef-d’œuvre. Après quatre al-
bums composés avec David Donatien,
la jeune quadragénaire a cherché à re-
nouer avec la musique sans demander
son avis à quelqu’un d’autre. « Je ne
savais faire les choses qu’à moitié, il
fallait que je porte le projet jusqu’au
bout. » Nightsongs ou une petite musi-
que composée la nuit, en ouvrant la
porte de l’inconscient. « Je savais que
ce ne serait pas un projet efficace », dit-
elle. Elle doute même intéresser sa
maison de disques avec ces titres à re-
bours des canons radiophoniques. « Je
me suis vraiment retrouvée isolée après
avoir fait écouter une vingtaine de mor-
ceaux à mon entourage. »
« AU THÉÂTRE CE SOIR » RETROUVE SA MISSION
COMÉDIE-FRANÇAISE, BOUFFES DU NORD, LA COLLINE… LES SALLES SE MOBILISENT POUR INVITER LES ACTEURS DANS VOTRE SALON.
PHILIBERT HUMM phumm@lefigaro.fr
U
ne sonnerie retentit, les
spectateurs s’installent, les
trois coups résonnent, le ri-
deau s’ouvre… « Au théâtre
ce soir » accompagna les
Français, de 1966 à 1986. Effet du confi-
nement, il revient, sous une autre forme
et un autre nom. Ainsi, France 5 s’est as-
socié avec la Comédie-Française pour
donner une fois par semaine une repré-
sentation tirée de son catalogue de capta-
tions. Tous les dimanches, dès 20 h 50, le
public peut assister au lever de rideau
depuis son salon, avec « Au théâtre chez
soi ». Annoncé ce dimanche, L’Avare,
mis en scène par Catherine Hiegel en
2009, avec Denis Podalydès dans le rôle-
titre ; et dimanche 12 avril, Un fil à la pat-
te, mis en scène par Jérôme Deschamps,
qui triompha aux Molière 2011.
« Proposer chaque dimanche en prime
time une captation de cette très grande
institution est un honneur, un devoir et une
mission de service public », a déclaré Del-
phine Ernotte, directrice de France Télé-
visions. Mais la Comédie-Française ne
s’arrête pas là, qui a inauguré en début de
semaine sa webtélé éphémère baptisée
« La Comédie continue ! ». Chaque jour,
un ou une sociétaire en composent le
menu. Ce soir, Elsa Lepoivre présentera à
20 h 30 le Cabaret Georges Brassens, qui
https://t.me/WorldAndNews
YAEL NAIM
TENDRE EST LA NUIT
POUR « NIGHTSONGS »,
SON NOUVEL ALBUM,
LA CHANTEUSE A TRANSFORMÉ
SES DOUTES ET SES DOULEURS
EN UNE MATIÈRE CRÉATIVE
D’UNE GRANDE PUISSANCE.
avait fait le bonheur du Studio-Théâtre
en mai 2014. Six comédiens et trois musi-
ciens pour rendre un hommage espiègle
au chanteur sétois. Suivront pêle-mêle
L’Hôtel du libre-échange de Feydeau, mis
en scène par Isabelle Nanty et capté salle
Richelieu en juin 2017 ou le Peer Gynt
d’Henrik Ibsen proposé ce samedi soir à
la demande de Denis Podalydès.
Captations à toute heure
« C’est pour répondre à ce manque crois-
sant, pour garder un lien avec le public et
pour tenter de mettre du sens et de la légè-
reté dans cette épreuve dont la violence
sourde nous sidère », explique l’adminis-
trateur général du Français, Éric Ruf, qui
C’est à ce moment-là que le déclic
intervient, qui permet à Yael, qui se
sent alors poussée dans ses retranche-
ments, de se dépasser. « J’ai aussi ac-
cepté de laisser entrer un peu de lumière
dans ces Nightsongs. Il est très difficile
de parvenir à laisser parler sa petite
voix intérieure, confie-t-elle aujour-
d’hui. C’est génial d’être toute seule au
début, mais au moment où il faut pren-
dre des décisions, c’est plus dur. » Dans
le cheminement, la jeune femme
prend conscience de ses limites, assu-
me ses doutes et en tire une matière
créative d’une grande richesse.
Vivre autrement
L’album est un marqueur puissant
dans la carrière de la chanteuse. « J’ai
commencé à sentir une rupture en moi.
Le côté plus sombre était caché, il m’a
fallu l’accepter, reconnaître mes
failles. » La mort de son père accélère
ce processus, tout comme la crise de la
quarantaine. « Être face à la mort et
donner naissance en même temps m’a
obligée à me questionner. » Elle refuse
de reprendre la cadence album-tour-
née qu’elle vit depuis quinze ans pour
Pour ceux qui n’ont pas pu voir
L’Hôtel du libre-échange de Feydeau
dimanche soir sur France 5,
la pièce sera visible sur la webtélé
de la Comédie-Française le 3 avril.
BRIGITTE ENGUÉRAND, COLL. COMÉDIE-FRANÇAISE
Yael Naim est allée puiser au fond
d’elle-même des trésors mélodiques
qui font tout le sel de Nightsongs,
un album chanté en anglais
et en français, parfois mélangés
dans un seul morceau. YL N
vivre autrement. Les chœurs sont en-
registrés par douze chanteurs classi-
ques dans une église du 11e arrondisse-
ment de Paris, tandis qu’elle investit
un studio professionnel pour la pre-
mière fois de sa carrière. « Je pouvais
me débarrasser de la technique pour me
concentrer sur les performances. »
C’est après une carte blanche à la
Philharmonie que Yael Naim a eu en-
vie d’écrire pour un chœur classique.
« J’avais fantasmé sur l’Islande avant
de choisir ces artistes. » Pendant ce
temps, David Donatien signe la réali-
sation de l’album d’Angélique Kidjo
en hommage à Celia Cruz - un disque
qui lui vaudra un Grammy Award.
« Je suis vraiment admirative de son
travail. Pour la première fois, j’ai pu
lui demander son avis sur mon album
sans nécessairement en tenir compte.
Nous sommes deux fortes têtes », ex-
plique-t-elle, radieuse, dans un
grand sourire.
Chanté en anglais et en français,
parfois au sein du même morceau,
Nightsongs est le meilleur disque de la
chanteuse, déjà récompensée plusieurs
fois aux Victoires de la musique. Une
merveille de délicatesse qui prouve
qu’elle a eu raison de sortir de sa zone
de confort pour aller puiser au fond
d’elle-même des trésors mélodiques
qui font le sel de ce disque. Un récon-
fort en ces temps troublés. ■
Nightsongs (Tôt ou Tard).
rappelle au passage qu’il ne s’agit pas là
de théâtre à la demande mais bien d’un
rendez-vous donné aux spectateurs : tous
les jours à partir de 16 heures sur le site de
la Comédie-Française, et malheur aux
retardataires.
Ceux-là devront se rabattre sur les ini-
tiatives d’autres théâtres plus souples sur
l’horaire… Ils sont nombreux à ouvrir leurs
archives : les Bouffes du Nord mettent à
disposition les captations de spectacles
« qui ont contribué à faire l’histoire du théâ-
tre, de 1974 à nos jours ». En ligne notam-
ment, Beckett by Brook, Traviata ou l’ex-
cellent documentaire Les murs parlent,
condensé de trois jours de débats et de
projections durant lesquels Peter Brook et
sa complice Marie-Hélène Estienne fai-
saient revivre la longue aventure des
Bouffes. La Comédie de Caen, le Nouveau
Théâtre de Montreuil, la MC93, le Théâtre
de La Colline ou l’Opéra de Lille ne sont pas
non plus en reste, comme le petit théâtre
montmartrois du Funambule, qui met à
disposition ses captations pour 48 heures.
Quant aux nostalgiques de l’émission
primitive, ceux qui n’ont pas digéré la dis-
parition de Pierre Sabbagh et regrettent
Jacqueline Maillan, ils pourront se
connecter à Madelen, la nouvelle platefor-
me de l’Institut national de l’audiovisuel
(INA). Les trois premiers mois d’abonne-
ment sont offerts et cent numéros d’« Au
théâtre ce soir » sont déjà en ligne. Rien ne
vaut les décors de Roger Harth… ■
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
J.M.G. LE CLÉZIO
« LA BRETAGNE EST LE SEUL PAYS STABLE DE MA VIE »
RENCONTRE À PARIS, JUSTE
AVANT LE CONFINEMENT, AVEC
LE PRIX NOBEL DE LITTÉRATURE
À L’OCCASION DE LA PARUTION
DE « CHANSON BRETONNE ».
L’ÉCRIVAIN NOUS PARLE DE SON
ENFANCE AU PAYS BIGOUDEN
MAIS AUSSI DE LA CHINE OÙ
IL ENSEIGNE, DE SES LECTURES
ET DU PRIX RENAUDOT
QU’IL VA SANS DOUTE QUITTER.
U
PROPOS RECUEILLIS PAR
ISABELLE SPAAK
n mercredi, vers la
mi-mars, avant le grand confinement.
Dans un salon des Éditions Gallimard, le
vieux parquet craque, la vue surplombe
le jardin de l’hôtel particulier. Gazon,
jonquilles, prunus en fleurs. Un coin de
nature préservé en plein Paris. Le soleil
est éclatant, le velours râpé du canapé
assorti à la couleur du ciel. Un effet de
miroir avec le regard presque délavé de
Jean-Marie Gustave Le Clézio. Des yeux
couleur océan. À la veille de ses 80 ans,
l’écrivain publie Chanson bretonne suivi
de L’Enfant et la Guerre. Un hymne ra-
dieux à la terre de ses ancêtres. De passa-
ge dans la capitale, ce sans domicile fixe a
mis en suspens ses voyages aux États-
Unis et en Chine où il se rend régulière-
ment. Au milieu du chaos planétaire,
instant rare avec un homme solaire qui
rend hommage à l’enfance, aux grandes
vacances et, aux femmes. Leur fantaisie,
leur courage. Le respect qu’on leur doit.
LE FIGARO. - La Chine est un pays
que vous connaissez bien pour y avoir
enseigné. Vous avez notamment donné
des conférences à Wuhan...
J.M.G. LE CLÉZIO. - C’est une jolie mé-
tropole de 11 millions d’habitants au
bord du fleuve bleu, le Yang Tsé. Je n’y
enseigne pas à proprement dit. Ce sont
plutôt des échanges - exclusivement en
anglais – à propos de philosophie, d’art,
de littérature. Quand je suis invité en
Chine, j’en profite pour visiter ce qui
m’intéresse. En ce moment, la dynastie
Tang (618-907). Je suis en train d’écrire
un petit livre sur cette civilisation, l’une
des plus importante et la seule qui fut di-
rigée par une impératrice, Wu Zeitan
(624-705). Femme autoritaire mais assez
équilibrée. Sa première mesure fut de
commander une anthologie de la poésie
féminine. Une décision très en avance à
une époque où les femmes n’avaient pas
voix au chapitre dans la plupart des pays
du monde.
Effectivement, c’est audacieux. Mais
vous-même citez souvent des écrivaines,
Colette, Nathalie Sarraute, Flannery
O’Connor…
J’ai été initié à la littérature et au féminis-
me par ma grand-mère maternelle. Ali-
ce. Personnalité remarquable, stupéfian-
te d’originalité, d’imagination. Elle est
née dans une vieille famille de cultiva-
teurs de betteraves dans l’est de la Fran-
ce. Quand mon père était en Afrique,
c’est elle et, accessoirement ma mère,
qui nous a élevés, mon frère et moi. Elle
nous a appris à coudre et à tricoter en
même temps qu’à lire et écrire. Elle ne
voyait aucune raison pour que les hom-
mes ne le sachent pas. Grâce à elle, je sais
donc tricoter. Elle nous a initiés à son
sens aigu de la justice envers les femmes.
La littérature au secours de l’actualité…
Comme La Peste de Camus dont
les ventes explosent en ce moment…
C’est un beau livre de Camus. Mais le
Journal de l’année de la peste, de Daniel
Defoe, est encore plus stupéfiant.
L’auteur de Robinson Crusoé raconte au
jour le jour la violence de l’épidémie de
peste noire à Londres en 1665. Montée de
l’angoisse face à une maladie inconnue,
comportements complètement absur-
des, gens réfugiés sur des bateaux au mi-
lieu de la Tamise, monnaie plongée dans
des seaux de vinaigre… C’est très actuel.
Contrairement aux guerres qui finissent
toujours par se résoudre, la crise du co-
J.M.G Le Clézio :
« Je n’éprouve pas
de sympathie
pour la nostalgie. »
LEEMAGE VIA AFP
Chanson bretonne,
de J.M.G. Le Clézio,
Gallimard,
160 p., 16,50 €.
CHRONOLOGIE
ronavirus est une histoire ouverte. Le
plus inquiétant est de ne pas savoir com-
ment tout cela va finir.
1940 Dans ce panorama anxiogène,
Naissance à Nice votre Chanson bretonne agit comme
d’un père britannique un antidote.
et d’une mère française. J’avais très envie de raconter quelque
chose d’heureux. Et les souvenirs de
Bretagne sont extrêmement positifs. Un
1963 bonheur de chaque instant qui m’a ame-
Prix Renaudot pour né à rendre compte dans L’Enfant et la
Le Procès-verbal. Guerre de la période difficile qui l’avait
précédé. Durant ma petite enfance à Ro-
quebillière, dans l’arrière-pays niçois,
1967 j’ai souffert de la faim. Jamais je ne pour-
Service militaire en Thaïlande, rais l’oublier. Mais aussi de l’enferme-
d’où il est expulsé pour avoir ment. Sans parvenir à l’identifier en tant
dénoncé la prostitution enfantine.
1970-1974
UNE ENFANCE ENTRE OLIVIERS ET MENHIRS
Partage la vie de tribus indiennes
au Panama. Puis s’installe
à Albuquerque (États-Unis),
où il enseigne.
CHAQUE ANNÉE durant les trois mois
1980 d’été de leurs vacances scolaires, J.M.G
Le Clézio et son frère courent les che-
Grand Prix de littérature
mins creux à bicyclette « entre Sainte-
Paul-Morand de l’Académie Marine et Combrit en allant vers Pont-
française pour Désert. Labbé ». Ajoncs, fougères, troupeaux
de vaches « cornes en avant », à travers
2007-2008 champs et bosquets. Une géographie
Enseignant à l’Université minuscule mais formidable d’aventures
des femmes Ewha, à Séoul. et de liberté pour les petits Parisiens des
années cinquante, ballottés le reste du
temps entre l’évocation des racines
2008 mauriciennes de leur père, l’enferme-
Prix Nobel de littérature. ment avec leur mère dans le haut pays
Publication de Ritournelle niçois durant la guerre et, un an dans la
de la faim, consacré à sa mère. brousse au Nigeria.
Enfants de la Méditerranée, oliviers,
palmiers et criquets, ils deviennent
ceux de la lande rase, des menhirs, toits
https://t.me/WorldAndNews
LE FIGARO CHEZ VOUS
qu’enfant, nous savions que l’extérieur
était dangereux. Dehors, on pouvait
mourir. À l’âge de 6 ou 8 ans, la Bretagne
m’est apparue d’autant plus heureuse,
une leçon d’optimisme. J’ai eu envie de
juxtaposer les deux sentiments dans ce
recueil.
Entre le temps de la guerre dans
l’arrière-pays niçois et la Bretagne,
il y a eu l’Afrique. Et la rencontre avec
votre père, pourtant absent de ce texte.
La Bretagne, c’était la reconnexion de
ma mère avec ce pays qu’elle imaginait
être celui de notre famille. Elle faisait
partie de ces jeunes femmes des années
1930 qui pédalaient cheveux au vent, se
baignaient hiver comme été. C’était son
de chaume, remous de l’océan et, du
vent dans les haies de tamaris. Sur la
terre de leurs ancêtres, Le Clézio vient
de ar kleuziou (bosquets) en breton, les
copains s’appellent « Yanik, Mikel,
Pierrik, Ifik, Paol, Erwan, Fanch, Soi-
zik ». Près de cinquante ans plus tard, le
Nobel se souvient d’eux tous. Il recrée
leur camaraderie de gosses à Saint-Ma-
rine. Parties de pêche quand rien ne lui
paraît plus délicieux au monde que le
frémissement de l’hameçon (higenn) au
bout de la ligne, tournées d’eau potable
à la pompe communale, courses de do-
ryphores, feu de varech à l’abri des ro-
chers, crevettes attrapées à marée bas-
se, goûter de crêpes dans la masure de
Mme Le Dour… Paysages, situations,
traditions, personnages. La Bretagne
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
15
pays de cœur. Elle nous a intoxiqués avec
son amour, mon frère et moi. Nous nous
y rendions autant pour y passer des va-
cances heureuses que pour renouer avec
notre passé lointain, nos ancêtres. Une
sorte de pèlerinage affectif.
Si ce sont des souvenirs si heureux,
pourquoi avoir si peu évoqué la Bretagne
jusqu’à présent ?
Elle est en filigrane. Dans le contexte
d’une famille qui envisageait à chaque
instant de s’en aller de l’endroit où elle se
trouvait, la Bretagne est le seul pays sta-
ble de ma vie. C’est pourquoi l’amenui-
sement de la langue et de la culture bre-
tonne m’a beaucoup affecté quand j’y
suis retourné à l’âge adulte. Comme si on
m’avait retiré les seuls éléments fixes de
mon existence. Ma sécurité.
La Bretagne est donc très importante
dans votre géographie personnelle
et littéraire ?
Elle m’a donné confiance en moi, en ma
capacité d’exister, d’affirmer mon indi-
vidualité, mon identité. Celle que je me
suis créée. Ma coquille, mon petit mon-
de. Même si j’ai le regret de ce qui a dis-
paru, reste l’impression d’ivresse et le
bonheur total d’avoir connu ces paysa-
ges, cette fermière, ce patron pêcheur
qui peignait des tableaux le dimanche.
Tout cela était tellement étonnant que
j’ai envie que ça continue et le seul
moyen pour moi, consiste à l’écrire.
Pour autant, sans nostalgie.
Je n’éprouve pas de sympathie pour la
nostalgie. L’enfance est une période qui
m’est chère car je crois comme Flannery
O’Connor que ce que l’on exprime dans
la vie a été formé entre le moment où on
est conscient, c’est-à-dire vers 7-8 ans,
jusqu’à l’adolescence, vers 13-14 ans.
Cette période est le socle de tout ce qui
suit. Proust a dit « il n’y a pas d’imagina-
tion, il n’y a que la mémoire ». Mémoire,
pour la plus grande partie, inventée, re-
crée. Il ne s’agit pas ici d’une histoire li-
néaire où l’on suivrait un enfant depuis
un certain âge jusqu’à un autre. Aucun
élément psychologique ne témoigne des
changements qui s’opèrent en lui. C’est
une sorte de continuum indifférencié
entre vrai et faux, un mentir-vrai.
Comme dans les contes ?
Je tenais à cette forme. La Bretagne s’y
prête. J’aime ces écrits qui mêlent la vie,
l’imaginaire, les légendes. Exprimer mes
sentiments par des images. Comme les
poètes de l’époque Tang avec la nature.
En Bretagne, elle était rassurante sans
rien d’hostile ni de malveillant. Une ma-
gie de la beauté, de la plénitude. Avec le
bémol des situations précaires, enfants
mis en nourrice, alcoolisme. Derrière
l’enchantement, un aspect sombre. Mais
serait-ce un enchantement, sinon ?
Vous faites partie du jury du prix
Renaudot qui a couronné Gabriel
Matzneff…
Je m’y suis opposé avec force. On ne m’a
pas écouté. Séraphin, c’est la fin ! est une
apologie du viol. Je l’ai lu avec beaucoup
de dégoût.
Jérôme Garcin a cédé sa place
dans ce jury avec l’espoir
d’être remplacé par une femme…
Je vais le suivre. Depuis des années, je
suggère que le jury soit féminisé. Mais
chacune de mes listes a été retoquée. ■
racontée par Le Clézio est celle d’un
monde rural disparu comme s’est éva-
nouie la langue bretonne lorsque l’écri-
vain a redécouvert la région après avoir
parcouru le monde durant vingt-cinq
ans. L’idiome éteint, comme se serait
éteinte une flamme. Succession de
courts tableaux, fables dans la fable. Le
passé entremêlé au présent, les impres-
sions et images d’hier ressurgissent une
à une à la faveur d’une plume frottée
aux souvenirs de « ce temps à la fois si
bref et si long de l’enfance ». Car nulle
nostalgie d’un paradis perdu dans ce
conte breton. Moins pauvre qu’hier, la
Bretagne est changée, modernisée.
Mais restée formidablement vivante
A
dans le cœur de J.M.G Le Clézio. Un
« secret précieux ». ■ I. S.
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

16 LE FIGARO CHEZ VOUS

BIEN VU
Anthony Palou
apalou@lefigaro.fr « L’AMIE PRODIGIEUSE » :
Des chauve- QUITTER NAPLES
souris et
des hommes
ET REVIVRE
ADAPTÉE DE LA TÉTRALOGIE D’ELENA FERRANTE, LA SÉRIE
« Le surf de l’info » PREND UN TOURNANT VIBRANT AVEC CETTE SAISON 2, LORSQUE
RTL | 6 h 43 | Mercredi
LES HÉROÏNES S’AFFRANCHISSENT PEU À PEU DE LEUR QUARTIER.

C’ est la ville de
la commedia dell’arte
qui, au XVIe siècle,
CONSTANCE JAMET £@constancejamet
son, puisé notamment chez Vittorio De
Sica, succède une pulsion de vie enivran-

donna naissance à quelques
célèbres personnages masqués.
Ainsi Arlequin, Polichinelle,
Pierrot et Colombine, Fracasse,
Scapin, Pantalon et Mezzetin…
Nous sommes à Bergame,
en Lombardie, foyer italien
du Covid-19. Une ville
de 120 000 habitants située
à 50 kilomètres au nord-est
de Milan. Les masques ont changé
d’allure. Un téméraire reporter
de TF1 («Journal de 20 heures »)
arpente les rues de la ville
martyre. On entend
une trompette, une sonnerie
aux morts, hommage aux
disparus. Le journaliste : « Il y a
là le maire et quelques policiers
sur la place centrale. On observe
une minute de silence mais ici
le bruit a disparu depuis plusieurs
semaines. » Nous voici devant
le cimetière dont l’accès est
interdit aux visiteurs : « De loin,
nous apercevons cette femme.
Elle ne peut pas accompagner
le défunt. Le dernier au revoir se fait
à travers la vitre du corbillard. »
Puis nous voilà au sein de la
rédaction du journal local – L’Eco
di Bergamo -, à la rubrique
nécrologie. Elle est passée de deux
à dix pages. La mort durant la vie.
Bon, un peu d’air, quoique.
Mercredi, à 6 h 43, sur RTL,
la toujours savoureuse chronique
E
n quittant l’adolescence, les
traits et les caractères s’affi-
nent, s’affirment. L’adaptation
par HBO et la Rai de la tétralo-
gie napolitaine d’Elena Ferran-
te suit la même transformation que ses
héroïnes dans une deuxième saison d’une
beauté, d’une émotion et d’une maîtrise
exceptionnelles.
Dans L’Amie prodigieuse – Le Nouveau
Nom à découvrir sur Canal+, les œillères
de l’enfance sont tom-
bées. À 17 ans, au tour-
nant des Sixties, Lila et
Lena aspirent à une vie
meilleure. Les voisines ○○○○
d’immeubles voient ce-
pendant leurs chemins diverger face à la
prison patriarcale et mafieuse que consti-
tue leur quartier populaire et miséreux.
Lila est engluée dans un mariage violent
et sans amour auquel elle avait consenti
dans l’espoir de s’élever socialement.
Elena est encouragée par des professeurs
bienveillants à surpasser ses modestes
attentes. Hélas, son ambition suscite plus
de railleries que d’encouragements.
La Camorra, symbolisée par les frères
Solara (mauvais garçons aux cheveux
gominés), les coups qui pleuvent, les
corps usés par le labeur et les grossesses à
répétition… Rien ne change ou presque.
Au néoréalisme gris de la première sai-
te à la faveur de vacances sur l’île d’Is-
chia. Elena y a accompagné Lila, partie se
reposer après une fausse couche. Elle re-
trouve son camarade de classe Nino Sar-
ratore qu’elle aime en secret. Las, le bel
étudiant intellectuel prône la révolution
et n’a d’yeux que pour son amie prodi-
gieuse !
Parenthèse d’amour et d’azur
Inspiré par la spontanéité, les ruptures de
ton de la Nouvelle Vague, Saverio Cos-
tanzo multiplie les jeux
de miroirs - une course
21.05 dans les escaliers, une
main qui glisse sur le
carrelage, un regard
absent lorsqu’il faut cé-
der sa virginité à des brutes - pour mieux
souligner comment Lila et Elena vivent à
des épisodes d’écart les mêmes expérien-
ces. De cette énergie furieuse, rythmée
par la bande originale hypnotique de Max que ce soit leur premier rôle devant la Dans ce second volet de la saga
Richter, se détache la parenthèse édéni- caméra, Margherita Mazzucco et Gaia Gi- napolitaine, les deux amies Elena
que d’Ischia. Saverio Costanzo a passé les race rendent, avec autant de clarté que la et Lila ont grandi. Leurs chemins
rênes à la réalisatrice Alice Rohrwacher plume d’Elena Ferrante, les atermoie- vont bientôt se séparer.
FREMANTLE/EDUARDO CASTALDO
(Heureux comme Lazzaro). Le soleil et le ments d’Elena et Lila. Mais aussi l’ambi-
bleu de l’eau sont si éclatants, le flux et le valence de leur amitié, mêlée de rivalité
reflux des vagues si entêtants que l’on intellectuelle et amoureuse. La perfor-
s’enivre de ce spectacle d’amour et mance rageuse et sensuelle de celle qui ne
d’azur. La délicatesse des sentiments, les doute jamais de son chemin vers l’éman-
premiers jeux de séduction, la morsure cipation est pourtant indissociable de la
brûlante du désir sont exposées à vif discrétion et du silence observateur de
comme dans Call Me By Your Name. Bien l’autre, effrayée par sa propre ombre. ■

RAYMOND ARON,
de Cyprien Cini. De quoi
s’agissait-il ? Écoutez, ça vaut
le détour. « Les vétérinaires ont

LE GOÛT DE LA VÉRITÉ
lancé un nouveau cri d’alarme
et c’est très sérieux : arrêtez
de laver vos animaux au gel
hydroalcoolique, ce n’est pas bon
pour eux. Il ne faut pas frotter
Médor avec ça. » C’est si bête.
Autre effet indésirable raconté
PORTRAIT FABRICE GARDEL RETRACE MAGNIFIQUEMENT LE
par cette véto : nos amis les chats DESTIN DE L’UN DES PLUS BRILLANTS PENSEURS DU XXE SIÈCLE.
seraient parfois victimes de coma
éthylique à force de se lécher
les papattes nettoyées à l’alcool, BLAISE DE CHABALIER £@dechab

E
de se faire les griffes comme

la femme se fait les ongles.
L’homme a souvent une cervelle
d’oiseau. En Chine, on se serait
remis à table. Au menu,
«
st-il si difficile pour
Rachel Brosnahan (au centre), irrésistible Mme Maisel. EVERETT/RUE DES ARCHIVES des grands intellectuels
d’accepter que deux et
deux font quatre et que

LE FABULEUX DESTIN
sur les marchés : des chiens, le Goulag ce n’est pas
des chats et des chauves-souris. la démocratie ? », confiait Raymond
En y réfléchissant bien, Aron en pleine guerre froide. La lu-

DE MRS MAISEL
dans « chauve-souris », cidité sans faille de celui qui fut l’un
n’y aurait-il pas les mots des plus grands penseurs du
« souche » et « virus » ? XXe siècle crève l’écran au fil du
beau portrait que lui consacre Fabri-
ce Gardel dans Aron, le chemin de la
RATTRAPAGE POURQUOI FAUT-IL ABSOLUMENT DÉCOUVRIR liberté, diffusé ce soir sur la chaîne

+ @ SUR LE WEB
» « Top chef » : comment sont
sélectionnés les candidats ?
» Coronavirus : la saison 16
LES TROIS PREMIÈRES SAISONS DE CETTE SÉRIE IRRÉSISTIBLE ? Public Sénat. Philosophe, journaliste
(notamment au Figaro), professeur
au Collège de France, c’est un infati-
fluide, rapide, virevoltante, a souvent des gable défenseur de la démocratie,
CÉLINE FONTANA £@CelineFontana accents de comédie musicale. dénonçant sans relâche toutes les

de « Grey’s Anatomy » bientôt
déprogrammée sur TF1
» Coronavirus : Thomas Sotto
exaspéré par la lâcheté de ceux
qui demandent aux soignants
de déménager
» « Eurovision 2020 » : une émission
de télé spéciale pour remplacer
l’édition annulée
» « Corona », le premier film
sur la pandémie, est déjà de sortie
» À voir ou à revoir : « Casino Royale »,
le coup de poker de James Bond
tvmag.lefigaro.fr
et www.lefigaro.fr/culture
A
N
Au-delà de l’élégance des décors et des formes de totalitarisme, qui apparaît
ew York, 1958. Miriam Maisel costumes, les auteurs tirent à boulets rou- dans ce documentaire. Un film riche
est la parfaite ménagère. Jui- ges sur la société de l’époque, son hypo- d’images d’archives qui font revivre Raymond Aron en 1970 devant
ve de bonne famille vivant crisie, la place des femmes, le sexe ou les le grand homme, sa voix posée, gra- la Fondation Maison des sciences
dans l’Upper West Side, un faux dévots du judaïsme avec des dialo- ve et chaleureuse, son sourire serein de l’homme. BOTTI/STILLS/GAMMA
physique et une éducation ir- gues souvent crus, irrésistibles de drôle- et bienveillant.
réprochables, une classe folle, cette mère rie, qui évoquent le meilleur des comédies stalinisme et hitlérisme. Le nazisme,
de deux enfants apporte un soutien in- américaines des années 1930-1940. Sartre scandalisé le jeune Aron l’a vu de très près. En
conditionnel à son mari, homme d’af- Dans l’après-guerre, face au soutien 1930, il a 25 ans quand il part étudier
faires qui, comme dans la chanson, aurait Pétillante Rachel Brosnahan du bloc soviétique par les intellectuels en Allemagne, à Cologne puis à Berlin.
voulu être un artiste. Il tente en effet de Découverte dans House of Cards, l’héroïne, de gauche, Raymond Aron combat « J’étais sorti de la formation intellec-
percer comme humoriste. la délicieuse et pétillante Rachel Brosnahan seul. Son arme ? Sa pen- tuelle française en
Mais quand cet époux la quitte pour sa (qui a reçu le Golden Globe de la meilleure sée claire et percutante, bon idéaliste, en bon
secrétaire, c’est pour Mme Maisel
l’heure d’une grande remise en
question. Et si, finalement, c’était
actrice dans une série comique
deux fois d’affilée, en 2018 et 2019)
fait preuve d’un bel abattage. Elle
qu’il expose notamment
en 1955 dans son livre
L’Opium des intellectuels. ○○○○
22.00 naïf inconscient (…),
et j’ai découvert la
politique en voyant la
elle qui avait ce talent pour la co- forme un duo digne d’un « buddy Un ouvrage qui scanda- montée de l’hitléris-
médie ? La voilà qui se lance dans ○○○○ movie » avec son inénarrable ma- lise beaucoup de « belles âmes », en me », dira-t-il des années plus tard.
le stand-up. Avec son amie Susie, nageuse (Alex Borstein), prolo dé- particulier Jean-Paul Sartre, son « pe- Le jeune intellectuel est témoin, hor-
qui s’improvise agent, elle enchaîne les brouillarde mais pas féminine pour deux tit camarade » de l’École normale su- rifié, des autodafés nazis et d’un anti-
clubs miteux. Outre les sarcasmes dont sous. La série, c’est une autre de ses forces, périeure de la rue d’Ulm avec lequel il sémitisme féroce. Il assiste à des mee-
elle est l’objet, elle est arrêtée pour at- offre une galerie de personnages secon- a toujours confronté ses idées. « Sartre tings de Hitler et de Goebbels. Il
teinte aux bonnes mœurs. Avant d’obte- daires bien dessinés – parents, beaux-pa- savait qu’il avait un adversaire (…) in- comprend que la guerre sera inévita-
nir une certaine reconnaissance et de rents, ex-mari – dans des contextes co- tellectuellement (…) plus puissant que ble. En juin 1940, il choisit la résistan-
partir en tournée des palaces de Vegas à casses. Comme lors de ce séjour dans un lui », confie Raphaël Enthoven. Dans ce et devient le patron, à Londres, de
ceux de Floride, où elle assure les premiè- Paris de carte postale ou ces vacances d’été son brillant essai, Raymond Aron, qui la Revue de la France libre. Mais, face
res parties d’un crooner à succès. The dans les Catskills, destination incontour- fut major de l’agrégation de philoso- au général de Gaulle, comme avec
Marvellous Mrs Maisel est un véritable nable de la bonne société juive… On ne phie, analyse la fascination qu’exerce tous les hommes politiques qu’il ren-

bonheur. Avec des plans séquences et des connaît pas de meilleur antidote à la moro- le communisme sur tant d’esprits. Et il contrera et soutiendra parfois, il exer-
travellings virtuoses. Sa mise en scène, sité ambiante que ces trois saisons. ■ établit un parallèle saisissant entre cera toujours son esprit critique. ■
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20.40
Le Premier ministre
face à la crise
Émission. Spéciale
Prés. : Gilles Bouleau. 1h25. Inédit.
Une soirée spéciale avec le Premier
ministre Edouard Philippe pour faire
le point sur la crise sanitaire majeure
que traverse le pays avec le corona-
virus. Edouard Philippe répond aux
questions de Gilles Bouleau.
22.05 Profilage. Série. Policière.
21.05
L’amie prodigieuse
Série. Dramatique
Ita/EU. 2020. Saison 2. Avec Gaia
Girace. 2 épisodes. Inédit. Lila et
Elena ont désormais 16 ans. Si Lila se
conforme tant bien que mal à son rôle
d’épouse, Elena découvre une nou-
velle ville et une autre vie possible.
22.55 The Affair. Série. Dramatique.
00.45 Crawl. Film. Action.
20.40 Touche pas à mon poste
21.15 Ce que veulent
les femmes
Film. Comédie sentimentale.
EU. 2000. Réal. : Nancy Meyers.
2h07. Avec Mel Gibson. Un macho
invétéré s’électrocute dans sa bai-
gnoire. Ce choc lui donne la clé des
pensées secrètes des femmes.
23.25 Salt. Film. Action.
19.55 Les 100 lieux qu’il faut voir.
20.50 Du soleil et des hommes
Documentaire. Fra. 2017. Réal. :
François Barré. 1h30. Morphologie,
couleur de peau, rapport au temps
ou encore développement des
sciences : l’Homme est totalement
dépendant du Soleil, qui est partout
et à l’origine de tout.
22.20 C dans l’air. Magazine.
« SKAM », « MENTAL », « STALK », LA RÉALITÉ ADOLESCENTE EN SÉRIES
• EN FAMILLE • LES FICTIONS COURTES DE FRANCE.TV SLASH RENCONTRENT UN FORMIDABLE SUCCÈS CAR ELLES NE CARICATURENT PAS CET ÂGE QUE L’ON DIT « INGRAT ».
JULIA BAUDIN £@BaudinJ
L
e quotidien d’un lycée comme
il en existe des milliers, une
matière inépuisable pour la
série Skam. L’épreuve de
l’enfermement psychiatrique
dans Mental. Ou la revanche d’un geek,
spécialiste du hacking dans Stalk. Les
problèmes des 13-23 ans ont sinon leurs
solutions, du moins leur représentation
fidèle sur la plateforme web France.tv
Slash à travers ces trois séries.
L’amour, les addictions, le harcèle-
ment, l’effondrement de la société,
l’estime de soi, les discriminations, la
radicalisation, la sexualité, la religion,
les troubles mentaux, mais aussi les
normes sociales ou encore le réchauf-
fement climatique. Les peurs de nos
adolescents sont aussi violentes que
leurs désirs et, pour peu que le sujet
soit maîtrisé et le traitement suffi-
samment réaliste, le format d’une sé-
rie courte consommable rapidement
apparaît comme une bonne béquille.
Tous les programmes
dans TV Magazine et sur l’appli TV Mag
21.00
Coronavirus :
l’état d’urgence
Magazine. Information
Prés. : Elise Lucet et Jacques Cardoze.
2h30. Les magazines «Envoyé
Spécial» et «Complément d’En-
quête» se mobilisent et proposent
une soirée d’information. Au som-
maire : Face au danger / Comment
vaincre ? / Une lueur d’espoir.
23.30 Scan. Magazine. Reportages.
20.55
Dos au mur
Série. Policière
Dan. 2019. Saison 3. Avec Thomas
Hwan. 2 épisodes. Inédit. Anna
emploie les grands moyens pour
contrecarrer Nete, qui a décidé de
coopérer avec la police. Lala tente de
son côté de se rapprocher de Marco
sans l’aval de Nicky...
22.55 Dos au mur. Série. 2 épisodes.
19.50 Les Marseillais aux Caraïbes.
21.05 Les 100 vidéos qui ont
fait rire le monde entier
Divertissement. Prés. : Issa Doumbia.
1h55. Inédit. Pendant 100 sé-
quences, Issa Doumbia, ses invités
et ses chroniqueurs découvrent
le meilleur du petit écran.
23.00 Les 100 vidéos qui ont fait rire
le monde entier. Divertissement.
19.50 Vintage Mecanic. Téléréalité.
20.55 Vintage Mecanic
Téléréalité. Austin Healey - Ferrari
330. Inédit. François Allain s’attaque
à la voiture la plus souriante des
roadsters anglais: l’Austin Healey
Sprite Frogeye, de 1960. Le véhicule,
va pourtant donner du fil à retordre
aux restaurateurs.
23.00 Vintage Mecanic. Téléréalité.
Lauréna Thellier dans Mental, la série
qui plonge le spectateur dans une unité
psychiatrique pour adolescents.
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
LE FIGARO CHEZ VOUS 17
À LA DEMANDE ÉPHÉMÉRIDE Ste-Sandrine
Soleil : Lever 07h23 - Coucher 20h23 - Lune croissante
21.05 MATIN
3h10 pour Yuma Marie- 3
Film. Western Antoinette 20
1
1 0 0
2 3
0 0
6
1 1 0
1
1
2 1 2
1
EU. 2007. Réal. : James Mangold. Film. Sofia Coppola, la fille du
2h02. Avec Christian Bale. Fermier cinéaste Francis Ford Coppola 30 2 4
placé au bord de la ruine par la (« Apocalypse Now »), a de qui 2
sécheresse, Dan Evans participe à tenir. Après « Virgin Suicide » 6
l’arrestation d’un dangereux bandit. (1999) et « Lost in Translation » 7 5
Contre une prime lui permettant (2003), elle retournait en 2006 5 7
de sauver son ranch, il accepte derrière la caméra pour livrer ce film 7
de faire partie de l’escorte. inclassable qui alterne entre la 7 5
retenue et l’exubérance. La jeune 10 5
23.13 Loin des quartiers nord. Doc.
princesse Marie-Antoinette rejoint 9 30
la France pour y épouser celui qui
deviendra Louis XVI. Dans les 7
couloirs feutrés de Versailles, APRÈS-MIDI
elle peine à s’habituer à l’étiquette
21.05 de la cour. Le faste, les fêtes
20
11
Why Women Kill l’attirent et nuisent à sa réputation.
10
Série. Humoristique Récompensée d’un Oscar pour
ses costumes, cette biographie 10 9 11
10 10
intelligente mêle des musiques
11 12
new wave et des anachronismes 10
intéressants, qui rendent la reine 10 11 11
11
exécutée en 1792 plus familière. 12
12 12 12
12
EU. 2019. Saison 1. Avec Lucy Liu. ➜ « Le Buzz », « Le Talk », 13 14
Tango. Inédit. Alors que Beth Ann « Les Décrypteurs », 30 12 14
cherche à éloigner Rob d’April, Tommy « Points de vue » et « Audition 16 15
se montre jaloux envers Simone, et publique »… Par mesure de
prudence, toutes nos émissions 16 12
Taylor découvre que Jade a des rela- 14
tions avec d’autres personnes. en direct avec des invités sont 14 15
suspendues pour le moment. 12
21.55 Good Girls. Série. Dramatique. 11
Retrouvez les décryptages 30
Borderline - Bombe atomique Inédit. de la rédaction, nos reportages 13
et tout le reste de nos 13
programmes sur Figaro Live.
T (en °c)
<-10 à 0 0 à 10 10 à 20 20 à 30 30 à >40
20.10 Quotidien. Divertissement.
APPLICATION
21.15 Arthur 3 : La guerre
des deux mondes ALGER 13/17 AMSTERDAM 3/10 ATHÈNES 9/14
Film. Aventures. Fra. 2010. Réal. : Verticale 8 :
BARCELONE 10/12 BELGRADE 1/11 BERLIN 2/9
Luc Besson. 1h41. Un petit être et réunion de quartier -1/11
ses minuscules amis cherchent un
BERNE 1/11 BRUXELLES 2/10 BUDAPEST
moyen de grandir afin de pouvoir COPENHAGUE 5/9 DUBLIN 6/10 LISBONNE 9/17
combattre un cruel ennemi... LONDRES 3/14 MADRID 3/13 PRAGUE -3/11
ERTE
22.50 Arthur et la vengeance APPLIC ATIONNOFIFF
NEMENT
RABAT 12/17 ROME 0/13 TUNIS 10/15
de Maltazard. Film. Aventures. PENDANT LE CO
VENDREDI SAMEDI DIMANCHE
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18.45 Enquêtes au Moyen Age. Doc. 4/12 3/12 3/15 2/14 9/17 4/19
20.40 Le dernier souper Michel Laclos, mots croisés du Figaro,
4/13 2/17
Film TV. All. 2018. Réal. : Florian Fre-
mots fléchés, mots mêlés, sept lettres… 6/20
Découvrez ou retrouvez les jeux
richs. 1h20. Avec Bruno Eyron. Inédit. de lettres exclusifs du Figaro. 5/14 8/16 3/20 7/16 8/21 8/17
En janvier 1933, une famille juive
L’intégralité de Figaro jeux
allemande se retrouve pour dîner : est incluse dans les abonnements
Adolf Hitler vient d’arriver au pouvoir.
Le danger semble partout...
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Documentaire. 2,99 €/appel La Chaîne Météo
Avec une fonction cathartique évi- Plus sombre et violente par son postu- comme un seuil vers de nécessaires
dente, ces séries apparaissent comme lat, et comme l’indique son slogan changements. Surtout, elles sont éclai-
autant de preuves que nos grands en- (« Vous n’êtes pas encore parano ? Ça va rantes et sortent ce que les Anglo-
fants ne sont pas seuls au monde avec venir ! »), Stalk raconte comment Lux, Saxons nomment teen drama des limbes
leurs angoisses. étudiant en école d’ingénieur humilié, de la niaiserie et du consensuel après
trouve vengeance - et l’illusion de sa des décennies de confinement dans des
Marqueurs d’une époque toute-puissance - en piratant le contenu cases horaires indéfinies (retours
Le succès de Skam (« honte », en fran- des disques durs de ses camarades. Dou- d’école, mercredis après-midi, etc.).
çais) en témoigne. Les cinq premières blement récompensée au Festival de la Les chaînes et les plateformes l’ont
saisons de cette série adaptée d’un for- fiction de La Rochelle, brillamment compris, les ados détestent être pris
mat norvégien ont cumulé 110 millions conçue et interprétée, la série (dix épiso- pour des imbéciles. Face au succès des
de vidéos vues et 12 millions d’interac- des de 23 minutes) illustre le naufrage séries de France.tv Slash, elles multi-
tions sur les réseaux sociaux (chaque d’un gamin de 20 ans que la solitude, plient ainsi les nouvelles créations. En
personnage de cette fiction a son l’addiction aux écrans et une certaine cette période de rapprochement forcé,
compte Instagram !). France Télévi- paranoïa vont précipiter aux enfers. les parents peuvent les regarder avec
sions s’apprête à livrer un sixième volet Mental démarre, elle, un peu dans la leurs ados. C’est un bon moyen d’ouvrir
JEAN-PHILIPPE BALTEL / FTV
à cette série dramatique qui met en scè- veine des Bracelets rouges, la série hospi- avec eux des discussions, surtout les
ne une bande de copines scolarisées talière de TF1. Mais il est question ici d’in- plus délicates. Et de prendre la mesure
dans un « bahut » de banlieue pari- ternement dans une unité psychiatrique de l’orage, ce n’est pas un vain mot, que
sienne. Chaque saison d’une dizaine pour adolescents. Marvin, un délinquant traverse leur progéniture.
d’épisodes de 25 minutes est centrée sur juvénile de 17 ans y a été placé. Plus ten- Quant au genre lui-même, s’il est de
l’une des demoiselles, autour de la- dre que Stalk, plus drôle que Skam, cette plus en plus plébiscité, notamment
quelle gravitent la bande, les profs et les fiction aborde avec rigueur la souffrance dans les festivals, il est à l’univers sériel
parents. Au départ moins « punchy » psychique à laquelle sont confrontés ce que le court est au long-métrage
que sa sœur scandinave, elle est deve- chaque année de nombreux enfants. dans le cinéma : un vivier formidable
A
nue la référence de centaines de milliers Ces trois fictions sont les marqueurs d’auteurs, de réalisateurs et d’acteurs
de jeunes. d’une époque que certains décrivent de talent. ■
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

18 LE FIGARO CHEZ VOUS

JEUX DE LOGIQUE
FUBUKI KEMARU TAKUZU BUZZ MOYEN
Placez dans les grilles les pions colorés Une grille est composée de zones de 1 à 5 cases entourées de gras. Remplissez les grilles avec les chiffres 0 et 1. En partant des chiffres déjà inscrits, remplissez
disposés sur la gauche, de façon à obtenir - Complétez la grille avec les chiffres manquants sachant qu’une zone d’une Chaque ligne et chaque colonne doivent contenir la grille afin que chaque ligne et chaque colonne
la somme indiquée à l’extrémité de chaque ligne case contient forcément le chiffre 1, une zone de deux cases contient les autant de 0 que de 1. Il ne doit pas y avoir plus de contienne une seule fois tous les chiffres de 1 à 6
et de chaque colonne. chiffres 1 et 2, une zone de trois cases contient les chiffres 1, 2 et 3, etc. deux 0 ou 1 placés l’un à côté ou en dessous de A vous de trouver les chiffres manquants, en vous
- Deux chiffres identiques ne peuvent se toucher (par un côté ou un angle). l’autre. Les lignes ou colonnes identiques sont aidant des signes placés dans la grille
GRILLE 1 FACILE interdites.
1 2
GRILLE FACILE GRILLE MOYEN
Exemple :
1
0
0 0
1
1
0
1
0
0
1 1 4 >
3 9 1 2 = 6 2 4 0
1 1 0
0
1
0
1
1
0
1
0 ^
1 5 GRILLE 1 FACILE < 1 6
4 = 21
3
0 0 1
6
7 5 = 18 1 1 ^
8 5 4 1 0 0 0
= = = > > 3 6
17 13 15 4 3 4 2 0 1 ^ v ^ ^
1 1 2
2 5 2 4 1 3
GRILLE MOYEN
0 0 v v
1 8 7 = 12
GRILLE 3 MOYEN
0 0 5 >
2 5 0 0 0 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 1 1 0 1 0 1 0 1 0

2 9 = 11 1 0 0 1
0 1 0 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 1 0 0 1 1 0 0

SOLUTIONS
6 3 2
1 1 0 1 0 1 0 1 0 0 0 1 0 1 0 1 0 0 1 1
0 0 1 1 0 0 1 0 1 1 1 0 1 0 1 0 1 0 0 1

0 0 0
1 1 0 0 1 0 1 1 0 0 0 1 0 0 1 1 0 1 1 0

3
1 0 0 1 0 1 0 0 1 1 1 0 0 1 0 1 0 1 1 0
0 0 1 0 1 1 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 1 0 0 1

5 = 22 5 4 0 1 1 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 1 0 1 0 0 1 1

2
1 1 0 1 0 1 0 0 1 0 1 1 0 0 1 0 1 1 0 0
GRILLE MOYEN
4
1 0 1 0 1 0 1 1 0 0 2 1 0 0 1 0 1 0 1 0 1 1
= = = 2
TAKUZU
0
3 5 2 6 1 4

17 19 9
4 3 5 1 2 6 5 3 1 4 2 3 2 3 1 4
2 1 6 3 4 5
1 1
4 2 5 3 1 5 1 4 2 3
1 6 4 2 5 3

3
6 4 1 5 3 2 1 3 1 4 2 4 2 3 1 4
GRILLE DIFFICILE MATOKU MOYEN 5+ 20x 5/ 0
5 2 3 4
BUZZ
6 1 2 5 2 3 1 3 1 4 5 2 3
Placez dans chaque case
0
3 5 1 2 4 2 1 2 5 3

2 6 1 = 16 un chiffre de 1 à 5. Il ne peut
12x 9+ 5+
5 4 3 2 1 4 2 4 5 3 5 3 4 1 2
y avoir deux fois le même
0 0 0
4 3 2 1 5 1 3 1 2 1 4 1 5 3 4
chiffre sur une ligne ou une 2 1 5 4 3 2 4 5 3 5 2 3 4 2 1

3 7 = 12 colonne. Le chiffre inscrit en 2x 1 1

3 2 1 5 4
5 1 2 1 4 1 5 1 3 4
haut à gauche de chaque bloc
1 5 4 3 2
2 4 3 5 3 2 2 3 4 2 1 1
est le résultat de l’opéra- 0 0 0
MATOKU
4 9 tion (addition, soustraction, 10x 3 9+
KEMARU

8 = 17 multiplication ou division) 0
21 11 13 9 19 17 15 13 17

5
8 17 2 7 5 22 9 8 5 18 6 7
effectuée avec les chiffres du
= = = 1 0 1
Jeudi 2 avril
4 12 3 5 3 11 6 2 8 21 4 9
même bloc. 2 12x
13 11 21
9 16 6 3 1 1 12 4 2 7 2 6 3 1 1
1 0 0 FUBUKI

MOTS CROISÉS Par Vincent Labbé SU DO KU

1 2 3 4 5 6 7 8 GRILLE 3223 MOYEN GRILLE 3224 CHAMPION
PROBLÈME N° 5316
HORIZONTALEMENT 1
1. Prononcer le renvoi. - 2. Rendis plus difficile à rencontrer. 9 1 5 3 4
- 3. Très petite quantité. Coupe sèche sur la toile. - 4. 2
Il écoute la voix de son maître. - 5. Fleur bleue et tête 2 6 2 7
de linotte. A dû subir un nouvel examen. - 6. Mis bout 3
à bout. On sépare le blanc du jaune. - 7. A une fiancée
4
1 4 6 9 4 9 1
chez Rimski-Korsakov. Part souvent en ballon. - 8. Sortie
de centrale. - 9. Terre des hommes. - 10. Se lovent à
bord. Un halogène, symboliquement. - 11. En forte dose 5 5 9 2 3 5 2 4
à Fukushima. Dépôt sous le manteau. - 12. Hommes
d’appareil. 6 8 9 6 1 8 3
VERTICALEMENT
7 7 1 3 4 7 3 5
1. Lanceurs de carreaux. - 2. Espace privatif à cultiver
(deux mots). - 3. Goût prononcé pour les bains turcs.
8 1 5 7 2 6 7 1 8
- 4. Met la gomme sur la route à contresens. Inventeur 9
du téléphone sans fil. - 5. Marianne. Travail au choix. 4 5 9 3
Annula la sentence. - 6. Une ville d’Asie Mineure qui fut 10
tout un symbole. Norme vidéo. S’élevait sur l’Euphrate. 6 2 5 8 7 6 2
- 7. Élément de gouttière. Conduit. Garçon d’honneur. 11
- 8. Airs renouvelés.
12
SOLUTION DU NUMÉRO PRÉCÉDENT MOTS À MOT
En regroupant et en mélangeant les lettres des
MOTS À CASER deux mots de trois lettres proposés, composez
E S T AM P A G E C Y G N E 4 3 2 1 5 6 8 9 7 2 1 6 5 7 4 8 3 9 un troisième mot de six lettres.
SOLUTION DU PROBLÈME N° 5315
SOLUTION DU N°3222

1 8 5 3 9 7 4 6 2 3 5 7 8 9 1 2 4 6
SOLUTION DU N°3221

L A I C C L A R T E R A S
Y U C C A E R E I N T A G E 9 7 6 2 4 8 3 5 1 4 8 9 3 2 6 7 1 5
HORIZONTALEMENT 1. Vêlement. - 2. Italique. - 3. Ladanums. - 4. Lt. Noies. - 5. Est. INRI. - 6. Pures.
On. - 7. Inès. Ut. - 8. nitaP. Ex. - 9. Tee. Ogre. - 10. Onagre. - 11. Inuit. Su. - 12. Sextants.
S M U S B
E O R S A L
R
I
G E
V E
O D
T A
E
R D
8
3
5
4
9
7
4
6
7
2
1
5
2
1
3
8
6
9
5
6
2
4
3
8
6
2
8
1
9
7
1
9
7
5
4
3
K I T +CE T = T
VERTICALEMENT 1. Villepintois. - 2. États-Unienne. - 3. Lad. Tréteaux. - 4. Élan. ESA. Gît. - 5. Minois.
E N T O I L A
N E T T E C
G
U
E S
I S I
O T
N I
O
E R
2
6
6
2
1
4
8
9
3
8
9
3
5
7
7
1
4
5
9
7
7
6
1
5
4
9
3
4
5
8
6
3
8
2
2
1
ORE + LOB= L
5 9 3 7 1 4 6 2 8 1 9 2 7 5 3 4 6 8
Porta. - 6. Équin. Gê. - 7. Numéroter. St. - 8. Tessin. Xérus. N A
E U H
E G O
E N S
E N O L
E N T
O
E N
S E
T E 7 1 8 5 6 2 9 4 3 8 3 4 1 6 2 5 9 7 B A L +MOU = U

MOTS FLÉCHÉS DU FIGARO N°2554

FAIRE LA CORPS COLÈRES ALLEZ, LA PLAINES AGENCE PLURIEL BEAU IL AIME LA RELATIVE À ENCHAN- BIEN BREVET
GRASSE CÉLESTES MESSE IRRIGUÉES TOURNÉE DE PENNY PARLEUR CORRIDA UNE TEMENTS CACHÉE TECHNIQUE
MATINÉE APPEL- VILLE EST DITE EN VERS FACILE À HAUT EN HORS DU INDUSTRIE PETITE GUÈRE EN
DURABLE LATION D’ITALIE PARENTE ESPAGNE L’ESPACE ENTAMER COULEUR TEMPS COSTAUD DIRECTION DOSE GUERRE
CAUSE DE CHIC ET
GOUTTE ÉLÉGANCE
REVUE À PRODUITS
LA BAISSE DE BAINS
FEMME DE REMAR-
LA PLÈBE QUABLES
NOIE FAMEUX
POUSSER CHÂTEAU
MARCHE UNE EN NOR- ÉVACUE
SANS BUT EXCLAMA- MANDIE PAR LES
PORES
TION (S’) PRÉNOM
POUSSE- CIRCONS-
QUI MÉRITE CAFÉ CRIT HAMEAUX
UNE COR- ANTILLAIS
RECTION VILLAS DE ABRASIF
LA MÉDINA SUR TOILE
S’ATTA- FLEUVE DÉFER- FILET
QUER AU COMME LA ITALIEN LEMENT D’EAU
COMTÉ COUPE
PLEINE APPELA À DANS
RADIUM LA BARRE À TOI LE PRÉ
DEUX À CONDEN- QUI
OSTIE SER CONTIENT
MUSÉE DE OPUS EN HISTOIRE DE LA
MADRID FAIBLE ABRÉGÉ FIGURE DE DE GRIMM SOUDE
LUEUR COLMAR CŒUR
BESACE ACCES- SOLUTION DU NUMÉRO PRÉCÉDENT
SOIRE DE IL NE FAIT
UNITÉ DESSIN OPÉRERAI PAS LA I O N A F V K S H I A T F
D’ANGLE PAIRE ! O V A T I O N N E R I N S P E C T E R S E R T I
LE BROME
O R A N I E N I S S E I C O M P E T I T I O N
DISCIPLE ESPA-
GNOLS CHANT P I G I S T E S T O U T B O U L E O L A N

BELLE DE LATIN DE R E T I R E R E U E A O U T R A R E M E N T
D’AUTRE- LOUANGE
CONCOURS FOIS G I N S I S S I P L E V R E M O R S A R E U
E T E T A A N T E C I D S A N T A L S R E
VÉRIFIE LA
A

A N I M A L E D E S I L L U S I O N D
JEU DE BONNE
CARTES MESURE
N E O N P A R T E N A I R E S E V E
M E R I T O I R E R O T E T E S O R

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LE FIGARO jeudi 2 avril 2020

L'ÉVÉNEMENT 19

De Marseille à l’Élysée, comment

Didier Raoult a séduit la classe politique
Approché par la gauche comme par la droite, le directeur de l’IHU-Méditerranée cherche à polir son image.

ARTHUR BERDAH £@arthurberdah

ET MARCELO WESFREID
£@mwesfreid

IL A DISPOSÉ les photos les unes

au-dessus des autres. Et les a soi-
gneusement encadrées, comme on
empile des trophées. Ces clichés
tiennent une place à part dans le
cœur du professeur Didier Raoult,
le savant que le monde entier hésite
à qualifier de génie ou d’imposteur.
Ils trônent sur le mur de son bureau,
au 4e étage de l’Institut hospitalo-
universitaire (IHU) de Marseille.
On peut y voir Didier Raoult,
cheveux alors disciplinés, avec Jac-
ques Chirac. Sur une autre, il est sa-
lué par Nicolas Sarkozy. Sur la troi-
sième, il reçoit l’accolade de
François Hollande dans la salle des
fêtes de l’Élysée. Un petit mot ma-
nuscrit, signé du socialiste, accom-
pagne ce souvenir. Enfin, une photo
immortalise la rencontre avec Em-
manuel Macron, au Palais, le 5 mars
2020. Changement d’ambiance. Le
professeur Raoult arbore sa cheve-
lure de druide désormais célèbre.
Les sourires sont crispés.

“ Didier Raoult est trop

mal aimé par les belles
personnes pour ne pas
éveiller l’intérêt
JEAN-LUC MÉLENCHON,
”
CHEF DE FILE DES INSOUMIS

Ce jour-là, le président de la Ré-

publique réunit pour la première
fois des scientifiques pour faire une
évaluation de la menace. « Emma-
nuel Macron a imposé la présence de
Didier Raoult, qui n’était pas forcé-
ment prévu dans le casting initial de
cet échange, raconte-on aujour-
d’hui à l’Élysée. Le président a exi-
gé sa présence, parce qu’il a bien
senti la résistance de l’establishment
parisien. » Le chef de l’État a en-
tendu parler du chercheur mar-
seillais aux milliers de publications
scientifiques. Il ne veut exclure
aucune piste, ni solution, alors que
se profile un défi inédit. Mais il
connaît aussi la réputation sulfu-
reuse du personnage, ses méthodes
iconoclastes, son ego incontrôla-
ble. « Si Didier Raoult a raison, il
sera Prix Nobel, plaisante-t-on
dans les couloirs de la présidence.
Puis un cours portera son nom à
Marseille. Puis il deviendra maire de
la ville, président d’honneur de
l’OM… Et peut-être qu’on renom-
mera l’aéroport, et qu’un bateau de
croisière portera son nom. »
En attendant, Emmanuel Macron
le « traite », comme on dit dans le
jargon politique. II multiplie les ap-
pels, les textos et les messages sur
WhatsApp avec le lauréat du grand
prix de l’Inserm en 2010. Une ap-
proche qui tranche avec la frilosité
et les doutes d’une partie de la ma-
jorité. De son côté, le professeur
Raoult a directement téléphoné à
Brigitte Macron pour lui donner des
nouvelles d’une patiente, amie de la
première dame. Quant au ministre
de la Santé Olivier Véran, l’une de
ses premières initiatives après sa
nomination le 16 février est de
contacter le patron de l’IHU. Les
deux hommes échangent, depuis,
plusieurs fois par semaine. Didier
Raoult lui fait parvenir en avant-
première ses résultats.
Parfois, la tension monte. Com-
me ce 27 mars, quand le gouverne-
ment autorise le recours à la fameu-
se hydroxychloroquine, mais
seulement pour les cas graves, en
milieu hospitalier et après « déci-
sion collégiale des médecins ». Di-
dier Raoult voit rouge. Lui qui pré-
fère toujours s’adresser à Dieu
plutôt qu’à ses saints proteste en
haut lieu. « Occupez-vous de
Raoult », ordonne Emmanuel Ma-
cron à Olivier Véran. Le ministre de
la Santé rassure l’intéressé : malgré
Le professeur ministrer son protocole à des pa-
Didier Raoult, lors tients sans formes sévères.
d’une visite de l’Institut Qu’il est loin le temps où Agnès
hospitalo-universitaire Buzyn boudait le chercheur. « Di-
Méditerranée Infection, dier Raoult a essayé deux fois de lui
le 2 mars à Marseille.
parler au début de la crise, et il n’a
POUPART JULIEN/ABACA
pas eu de réponse », assure un bon
connaisseur du sujet. Il faut dire que
leur relation est glaciale, sur fond de
haines recuites entre l’ex-patron de
l’Inserm Yves Lévy, le mari de l’an-
cienne ministre de la Santé, et Di-
dier Raoult.
Fin janvier, Agnès Buzyn se rend
à Carry-le-Rouet (Bouches-du-
Rhône), à une trentaine de kilomè-
tres de Marseille. C’est là que sont
placés en quarantaine les Français
rapatriés de Wuhan, épicentre de
l’épidémie en Chine. La future can-
didate à la mairie de Paris salue les
médecins, la Croix-Rouge, la réser-
ve sanitaire. Elle évoque le cas d’un
« J’avais suivi
son travail,
passager « transféré à l’hôpital de la
Timone ». Il est en réalité à l’IHU,
l’institut spécialisé en maladies in-
qui est fectieuses, doté de chambres à
impressionnant.
Avant l’épidémie,
confinement total, qui va procéder
aux tests de dépistage de tous les
expatriés. Mais pas question de pro-
il m’avait noncer le nom maudit de Didier
invité à visiter Raoult… « Pour l’inauguration de
l’IHU, le 28 mars 2018, j’ai été très
son institut surprise de voir qu’il n’y avait pas un
à Marseille. seul représentant de l’exécutif ! Où
J’avais accepté était la ministre de la Santé ? », sou-
ligne la députée LR du coin, Valérie
mais ce projet Boyer.
a été bien sûr Depuis, l’eau a coulé. Et surtout,
repoussé l’encre des journaux du monde en-
tier, transformant Didier Raoult en
à la suite du vedette médiatique. Un jour, c’est
confinement. l’ex-premier ministre australien
Je n’ai pas Tony Abbott qui appelle l’institut.
Un autre, c’est le gouvernement de
échangé la Géorgie qui envoie un message
avec lui depuis. via le compte Facebook d’un mem-
Je laisse chacun bre de l’équipe. D’éminents méde-
cins italiens et espagnols viennent
travailler et aussi aux nouvelles.
œuvrer du mieux Bien qu’il ait alerté dès 2003,
qu’il peut » dans un rapport officiel, sur le
« danger incontestable » de voir ap-
pal équivalent à celui de la grippe es-
pagnole transmissible par aérosol,
qui se répandrait extrêmement rapi-
dement par les voyages et serait sus-
ceptible d’entraîner une épidémie
aux conséquences incalculables »,
Didier Raoult a longtemps sous-
évalué le risque du coronavirus,
qu’il a lui-même qualifié de « grip-
pette ». « C’est juste du délire ! Les
gens n’ont pas de quoi s’occuper
alors ils vont chercher en Chine de
quoi avoir peur […]. C’est pas sé-
rieux ! », a-t-il cru bon d’ironiser
dans l’une de ses vidéos sur YouTu-
be. Avant de carrément affirmer, en
février, que l’épidémie n’était « pas
mondiale du tout ».
Conscient que ces archives peu-
vent miner sa crédibilité, Didier
Raoult a décidé de reprendre sa
communication en main. Même s’il
s’en défend, car « on a trop de tra-
vail quotidiennement », Didier
Raoult communique allégrement.
Livres, rencontres, tribunes, inter-
views : le microbiologiste de 68 ans
est tout sauf un savant fou, enfermé
dans son laboratoire. Sa spécialité:
le contre-pied des idées reçues.
Non sans une certaine suffisance,
dénoncent ses détracteurs. Pour
gagner la bataille de l’opinion sur
ses méthodes, le voilà qui calibre
mieux ses expressions et profes-
sionnalise ses sorties. Son équipe
prend l’avis de communicants ex-
térieurs. Un compte certifié à son
nom a même été créé dans l’urgen-
ce sur Twitter. En quelques jours, il
totalise déjà 250 000 abonnés.
« C’est impressionnant ! », relève la
présidente LR de la métropole et du
département, Martine Vassal.
Traitée à la chloroquine par l’IHU
après avoir été testée positive au
coronavirus, la candidate LR à la
mairie de Marseille se félicite
d’avoir été « parmi les premières à
soutenir » l’infectiologue. À tel
point qu’elle a profité d’une visite
de l’ancien ministre de la Santé Xa-
vier Bertrand, fin février, pour le
et caméra ». Comme elle, la quasi-
totalité de la droite locale revendi-
que une certaine admiration - qui
vire parfois à la fascination - pour le
professeur. C’est le cas de Valérie
Boyer, qui se souvient avoir pré-
senté Didier Raoult à François Fillon
dès 2012, durant la campagne pour
la présidence de l’UMP.
Soignée à l’IHU après avoir été
contaminée par le virus, la députée a
eu la surprise de tomber nez à nez
avec le candidat LREM Yvon Berland
lors d’une visite de contrôle la se-
maine dernière. Néphrologue de
profession et ex-président de l’uni-
versité Aix-Marseille - avant de se
lancer dans la course aux municipa-
“ Quand j’étais
président d’université,
les politiques me
recevaient poliment
mais s’en foutaient
de ce que je disais
PR DIDIER RAOULT
” gnant, il embarque sur un cargo
les -, le macroniste a lui aussi tenu à
se faire soigner par son ancien ca-
marade de fac, Didier Raoult. À
l’époque, déjà, l’infectiologue en de-
venir savait se faire remarquer.
« J’ai huit ans de moins que lui, donc
nous n’étions pas dans la même pro-
mo. Mais j’étais représentant des étu-
diants, et je me souviens très bien de
nos discussions », rapporte le prési-
dent LR de la région Paca, Renaud
Muselier, qui a renfilé sa blouse
blanche le temps de la crise. Idem
pour le cardiologue Philippe Dous-
te-Blazy, qui a recontacté Didier
Raoult vingt-cinq ans après l’avoir
croisé pour la première fois, lorsqu’il
était ministre de la Santé.
À gauche, l’enthousiasme a été
plus tardif. Et les contacts moins di-
rects. Le premier secrétaire du PS
Olivier Faure a écrit une lettre au
médecin. Quant à Jean-Luc Mélen-
26 mars. « Didier Raoult est trop mal
aimé par les belles personnes pour ne
pas éveiller l’intérêt », écrit le chef de
file des Insoumis dans son blog. Les
deux hommes ont fait connaissance
par hasard dans le TGV Paris-Mar-
seille, en juin 2017. Le médecin lui
avait alors tendu sa carte de visite.
De son côté, Arnaud Montebourg
dépeint un homme « ostracisé par la
technostructure ». Dans la même
veine, Ségolène Royal regrette la
« virulence des attaques des institu-
tions contre lui ». Seule exception :
François Hollande. L’ancien prési-
dent raconte au Figaro : « J’avais
suivi son travail, qui est impression-
nant. Avant l’épidémie, il m’avait in-
vité à visiter son institut à Marseille.
J’avais accepté, mais ce projet a été
bien sûr repoussé à la suite du confine-
ment. Je n’ai pas échangé avec lui de-
puis. Je laisse chacun travailler et
œuvrer du mieux qu’il peut. »
Inclassable Didier Raoult. Jeune,
il est tenté par l’anarchisme. Avant
d’embrasser la profession de soi-
pour gagner sa vie. Aujourd’hui, il
cultive des amitiés transpartisanes.
Les chapelles ne l’intéressent pas.
En revanche, il veut convaincre les
décideurs. Faire parler de lui est un
bon moyen d’y parvenir. « Quand
j’étais président d’université, les po-
litiques me recevaient poliment, mais
s’en foutaient de ce que je disais. Leur
activité principale, c’était de se ruer
sur la presse », commente-t-il en
2013. « Il a des relations plutôt ami-
cales avec ceux qui sont susceptibles
de faire avancer ses dossiers. Sinon,
il ne perd pas son temps et passe à
autre chose Il n’a jamais été engagé
politiquement. Il n’est ni de droite, ni
de gauche. C’est un pur produit
scientifique et un pur produit du
gaullisme », décrypte Renaud Mu-
selier. Dans le bureau de Didier
Raoult, une autre photo arrête
d’ailleurs le regard. On y voit son
père, le médecin André Raoult qui
travailla naguère pour l’OMS, à côté
A

ce texte, l’administration le laissera
tranquille. Il pourra continuer à ad-
FRANÇOIS HOLLANDE,
ANCIEN PRÉSIDENT paraître, « surtout en Asie », un conduire à l’IHU pour « une discus- chon, député de Marseille, il s’est du général de Gaulle. Côtoyer les
nouveau virus « ou un mutant grip- sion d’une heure et demie, hors micro entretenu avec le professeur le politiques, une affaire de famille. ■
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DE LA RÉPUBLIQUE
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
20 L'ÉVÉNEMENT
Macron et Le Pen rejouent leur bras de fer
En promouvant la « souveraineté nationale
et européenne », le chef de l’État a relancé l’affrontement
idéologique qui l’oppose à son adversaire du RN.
FRANÇOIS-XAVIER BOURMAUD
£@fxbourmaud
C’EST UNE vieille obsession d’Em-
manuel Macron. En fonction des
événements, elle s’exprime avec
plus ou moins d’intensité. Avec la
crise du coronavirus, elle se retrouve
en haut de l’affiche. La souveraineté
française. L’épidémie qui ravage le
pays a mis en lumière la dépendance
de la France à l’égard de l’étranger,
notamment pour la production de
masques.
Fortement critiqué pour ne pas
avoir anticipé la pénurie, Emmanuel
Macron s’est rendu mardi à Angers
dans la plus grosse usine de masques
française, l’usine Kolmi-Hopen pour
délivrer un discours sur la souverai-
neté. « Il nous faut produire davanta-
ge en France, sur notre sol, a assuré le
président de la République. Pour
certains produits et certains maté-
riaux, le caractère stratégique impose
d’avoir une souveraineté européenne,
pour réduire notre dépendance ». Au-
delà de la question sanitaire, l’enjeu
est aussi politique.
Depuis l’élection présidentielle,
Emmanuel Macron et Marine Le Pen
se disputent le flambeau de la défen-
se de la souveraineté française. La vi-
rulence des attaques de la présidente
du Rassemblement national n’est
d’ailleurs pas étrangère au combat
que se livrent les deux finalistes de
2017. Après les propos du chef de
l’État tenus à Angers, Marine Le Pen
La ligne de LR en débat
MARION MOURGUE
£@MarionMourgue
FACE à ce que Christian Jacob quali-
fiait dans nos colonnes, mardi, de
« crise nationale et mondiale sans
précédent », la ligne idéologique des
Républicains semble évoluer. Avec
cette question centrale : est-ce
conjoncturel ou structurel ? Il faut
« poser la question d’une évolution
profonde de notre modèle social et
économique », avançait le président
des Républicains en posant aussi « la
question de l’effacement partiel de
dette pour accompagner les entrepri-
ses et de l’assouplissement des critè-
res d’endettement ».
« Ce qui est sûr, c’est que vu la gra-
vité du moment, les réponses ne peu-
vent plus être celles d’avant », ac-
quiesçait au même moment le
numéro trois de LR Aurélien Pradié,
dans une interview à Libération, en
appelant à « renverser la table ».
« On n’évitera pas d’interroger le li-
béralisme, c’est une évidence », ajou-
tait-il, en jugeant que le concept
avait été collectivement dévoyé.
« La question fondamentale est là :
l’idée que l’argent serait la seule
échelle de valeur et que l’État n’a plus
aucun rôle à jouer. On a tué l’idée
d’État. On a dit qu’il était un problè-
me, on l’a dépouillé et disqualifié. La
crise le démontre, par exemple avec la
question des masques », développait
encore Aurélien Pradié en plaidant
pour un État puissant plutôt qu’om-
nipotent sans exclure, si besoin, le
recours à « la planification ».
Si de nombreux élus LR, à l’instar
d’Aurélien Pradié et du numéro 2
des Républicains Guillaume Peltier,
prônaient déjà la redéfinition du lo-
giciel idéologique de la droite avant
même le début de l’épidémie - en
insistant notamment sur la question
des salaires et du pouvoir d’achat -,
d’autres comme Bruno Retailleau ou
Éric Woerth n’y voient qu’une ré-
ponse de circonstance. « Évidem-
ment, dans cette période-là, on est
obligé de lâcher du lest et d’injecter de
l’argent un peu partout. L’activité
partielle, c’est une nationalisation des
salaires », rebondit Éric Woerth.
« Mais on ne va pas jeter la mondiali-
sation et le libéralisme avec l’eau du
A
bain. Tous ceux qui disent qu’il faut
abandonner l’orthodoxie budgétaire
a d’ailleurs immédiatement ironisé
dans un tweet : « Après avoir, comme
conseiller de Hollande puis ministre de
l’Économie, et enfin président de la
République, vendu à l’étranger beau-
coup de nos fleurons industriels, Em-
manuel Macron fait mine de redécou-
vrir le concept de souveraineté… !
Pourquoi le croire ».
« Pacte productif »
En arrière-plan de la crise du coro-
navirus, Emmanuel Macron et Mari-
ne Le Pen poursuivent leur affronte-
ment sur la souveraineté du pays.
Leurs visions sont radicalement op-
posées. Pour Marine Le Pen, la crise
du coronavirus est l’occasion de re-
venir à la charge sur la rupture
qu’elle prône avec l’Europe. La lea-
der d’extrême droite demande au
chef de l’État de se montrer beau-
coup plus exigeant vis-à-vis de
Bruxelles « qui reste totalement blo-
quée dans une idéologie du libre-
échange total, de la recherche de la
rentabilité à tout prix, y compris au
prix de notre santé, c’est-à-dire de la
délocalisation massive de notre indus-
trie dans des pays ou cette production
coûte moins cher ». Bref, pour Marine
Le Pen, l’Europe est un frein à la sou-
veraineté française. Pour Emmanuel
Macron, c’est l’inverse.
Le président de la République est
persuadé que la reconquête de la
souveraineté française passe par
l’Europe. « Nous avons confondu
souverainisme et nationalisme, expli-
quait déjà en 2017 Emmanuel Macron
se trompent lourdement de diagnos-
tic, il n’y en a jamais eu ! », affirme le
président de la commission des af-
faires économiques de l’Assemblée.
« Cela fait quarante ans qu’on n’est
pas en équilibre budgétaire. À un mo-
ment donné on ne peut pas continuer à
vivre à crédit : c’est comme les vol-
cans, quand ils explosent, ça fait très
très mal ! », s’inquiète l’ex-ministre
du Budget qui avait dû gérer la crise
de 2008.
« Protéger les Français »
« Entre l’orthodoxie budgétaire et la
réponse à la crise, il faut clairement
privilégier la réponse à la crise »,
plaidait mi-mars Bruno Retailleau,
dans une interview aux Échos. Le
président du groupe LR au Sénat se
disant même prêt à laisser filer
« provisoirement » les déficits face à
la gravité de l’épidémie et de ses
conséquences. « Entre deux maux, il
faut choisir le moindre. Le rôle de
l’État, c’est d’abord de protéger les
Français et de garantir l’avenir »,
développait-il pour éviter qu’à la
crise sanitaire ne s’ajoute une crise
économique et sociale. Pour autant,
Bruno Retailleau juge nécessaire de
faire preuve de « bon sens ». « On a
fait croire aux Français que la qualité
des services publics dépendait du seul
niveau de la dépense publique. C’est
faux. Sans réforme, notre système de
santé s’écroulera », rappelle Bruno
Retailleau auprès du Figaro. « Si
nous voulons dégager des marges de
manœuvre notamment pour notre
système de santé et pour obtenir de
nouveaux traitements, cela nécessite-
ra de faire des économies dans
d’autres champs et d’investir dans des
champs nouveaux », ajoute-t-il. Il
met en garde « ceux qui veulent nous
ramener en arrière avec toujours plus
d’État, plus de dépenses publiques, un
système toujours plus pesant qui en-
traînera la France dans le déclin ».
Autant de questions qui seront au
cœur des débats LR au lendemain de
la crise. « Là où il y a un sujet pour la
droite, c’est sur le dogme de la réduc-
tion des effectifs, notamment dans la
fonction hospitalière », plaide Da-
mien Abad, le président du groupe
LR à l’Assemblée. « Je crois qu’elle
doit être exonérée de cette réduction
sans pour autant échapper à toute lo-
gique comptable. C’est une évolution
que nous devons avoir. » ■
https://t.me/WorldAndNews
dans son livre de campagne Révolu-
tion. « Je le dis : les vrais souverainis-
tes sont les pro-européens ; l’Europe
est notre chance pour retrouver notre
pleine souveraineté ».
Une vision mise en œuvre avant la
crise du coronavirus sur le dossier
des réseaux téléphoniques 5G par
exemple. Dans un entretien accordé
en novembre 2019 à The Economist,
le président de la République avait
déploré que l’Europe n’ait pas col-
lectivement défendu sa souveraineté
face à la Chine et son constructeur
Huawei. Et la France avait agi seule
en imposant aux opérateurs de faire
valider leurs choix d’équipementiers
réseau par l’administration.
Cette tentative de reconquête de la
souveraineté française devait être au
cœur de la deuxième partie du quin-
quennat. Il y a un an, Emmanuel
Macron avait chargé Bruno Le Maire
de construire un « pacte productif »
destiné à « relocaliser les industries
les plus stratégiques, pour à la fois être
indépendants et en même temps plus
vertueux du point de vue de l’environ-
nement ». La violence de l’épidémie
de coronavirus laisse-t-elle de la
place pour la nuance ? « Il ne s’agit
pas de tout relocaliser, explique un
proche du chef de l’État. Nous
n’allons pas nous enfermer dans nos
frontières pour nous mettre à fabri-
quer nos t-shirts et nos Airbus.
Fermer les frontières, ce serait la faci-
lité ». Mais une facilité audible, celle
que défend Marine Le Pen depuis le
début de la crise. ■
Fasquelle : « L’État doit mettre ses actes en accord avec
PROPOS RECUEILLIS PAR
EMMANUEL GALIERO
egaliero@lefigaro. fr
DANIEL Fasquelle est vice-prési-
dent de la commission des affaires
économiques à l’Assemblée.
LE FIGARO.- Que pensez-vous
du plan d’aide aux entreprises ?
Daniel FASQUELLE . - Ces mesures
sont indispensables, mais il y a eu
beaucoup trop d’atermoiements. Il
est nécessaire de clarifier le dispositif
et de le compléter, comme je le de-
mande depuis le 24 mars. La question
du chômage partiel a été la plus pro-
blématique. On a demandé aux en-
La gauche veut changer de logiciel
SOPHIE DE RAVINEL £@S2RVNL
« MACRON a ce génie absolu de pren-
dre les mots du temps. Or le mot de ce
temps, c’est la souveraineté. Reste à
savoir ce qu’il met dedans et surtout le
« sommes
concernant, comment cela se traduira
en acte ! » Raphaël Glucksmann a
des doutes sur ce point. Mais le dé-
puté européen du groupe socialiste
est aussi convaincu que la crise,
« véritable désastre », doit être
« l’occasion de restaurer notre souve-
raineté ». C’est même « un enjeu
absolu, qu’il s’agisse de souveraineté
nationale ou européenne ». « Nous
sommes incapables de produire des
masques, des tests, et bientôt nous fe-
rons face à une pénurie de médica-
ments dans les services de réanima-
tion. Le problème est paneuropéen »,
martèle Glucksmann. Quand nous ne
parvenons plus à produire des molé-
cules simples pour les médicaments,
c’est que nous avons délégué à l’Inde
ou à la Chine notre souveraineté
industrielle, sanitaire et politique ».
Pour les temps à venir, il prédit « de
très fortes remises en cause » et
souhaite des transformations dès
aujourd’hui, prenant l’exemple de
Taïwan. « Ils ont réorienté la politique
industrielle dès le début de la crise
sur décision politique. Et ce n’est pas
un pays anticapitaliste », fait-il
remarquer, s’interrogeant entre
Le président Emmanuel
Macron lors de sa visite
à l’usine de masques
Kolmi-Hopen, mardi,
à Saint-Barthélemy-
d’Anjou, près d’Angers.
POOL/REUTERS
treprises de reprendre le travail
après leur avoir dit de tout arrêter.
Les discussions tendues avec le sec-
teur du BTP ont parfaitement illustré
ce manque de lisibilité. Sur le terrain,
la mise en œuvre du plan reste très
inégale, chaotique, et la question du
financement reste posée. De toute
évidence, le gouvernement a sous-
estimé les besoins. L’État doit mettre
ses actes en accord avec ses paroles.
Daniel Fasquelle, Votre proposition de loi pour
vice-président la reconnaissance de l’état
de la commission des de catastrophe sanitaire n’a pas été
affaires économiques retenue…
à l’Assemblée. FACEBOOK Malheureusement non, alors que
cela aurait permis de faire intervenir
les assureurs pour les pertes d’ex-
autres, sur « la réquisition des indus-
tries stratégiques… »
Olivier Faure, le premier secrétai-
re du PS, estime de son côté que « la
Nous crise du coronavirus n’est pas une cri-
se de l’échange, il ne faut pas se ra-
conter d’histoires ». Mais il convient
incapables que « sur certaines activités nécessai-
de produire res et vitales, il faudra retrouver une
souveraineté nationale et européen-
des masques, ne ». Faure juge ainsi « gravissime »,
des tests, et d’être « totalement dépendant d’en-
bientôt nous treprises qui sont extérieures à l’Eu-
rope et peuvent fermer leurs portes à
feront face à tout moment… » Dans la ligne de
une pénurie de mire du député de Seine-et-Marne
médicaments se trouve la Chine, dont « nous som-
mes devenus trop dépendants ».
dans les Chez les souverainistes tradition-
services nels de la gauche, la satisfaction est
de réanimation. évidente à observer les ralliements, à
commencer par celui du chef de
Le problème l’État. « Il commence à compren-
est dre », a ironisé Jean-Luc Mélen-
paneuropéen
RAPHAËL GLUCKSMANN,
» chon. « La mondialisation est termi-
née », a déclaré de son côté Arnaud
Montebourg dans une interview au
LE DÉPUTÉ EUROPÉEN
DU GROUPE SOCIALISTE Figaro. L’ex-ministre de l’Écono-
mie, désormais entrepreneur, esti-
me qu’il va falloir « avec nos propres
ressources reconstruire notre indé-
pendance économique, technologique
et productive. Nous devrons assumer
de protéger nos intérêts collectifs
avant toute forme d’intérêts particu-
liers en réarmant l’État, notre outil
collectif. » ■
ploitation de nombreuses entrepri-
ses. La Fédération française des as-
surances s’est contentée de
répondre qu’elle travaillerait avec le
gouvernement « à la conception
d’un produit d’assurance en cas de
crise sanitaire majeure ». Tout cela
est profondément choquant, car ce
qui importe c’est la très grave crise
que nous vivons aujourd’hui.
Quel risque avez-vous identifié sur
les loyers des petites entreprises ?
Le président de la République avait
annoncé leur suspension, mais
aucun texte n’a donné corps à cette
annonce. Sauf bonne volonté des
bailleurs, les commerçants et indé-
pendants seront tenus de payer. Si le
Le RN savoure
idéologique du
CHARLES SAPIN £@csapin
« ILS AURONT désormais du mal à
dire que nous sommes des crétins, des
nullités en économie et à continuer de
nous faire ce procès en sorcellerie dont
nous sommes victimes depuis tant
d’années ! » C’est avec un large sou-
rire que Marine Le Pen, confinée à
son domicile des Yvelines, a écouté,
mardi, le chef de l’État. Dans un
contexte de crise sanitaire - et d’im-
portantes pénuries d’équipements
de protection pour s’en prémunir -
le libéral Emmanuel Macron a donné
à son discours des accents souverai-
nistes jamais aussi appuyés : « Nous
devons rebâtir notre souveraineté
nationale… », a-t-il martelé sur le
site d’un fabricant de masques, non
loin d’Angers.
Sur Twitter, la députée du Pas-de-
Calais a préféré douter de la sincérité
de celui qui a « vendu à l’étranger
beaucoup de nos fleurons industriels »
avant de faire « mine de redécouvrir le
concept de souveraineté. » Ce qui
n’empêche pas la chef du RN de sa-
vourer ce virage de l’Élysée, qu’elle
interprète comme autant de satisfe-
cit donnés à ses idées. « Nous sommes
dans un basculement total, livre Mari-
ne Le Pen au Figaro. Voilà vingt-cinq
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sur la souveraineté
ses paroles »
confinement dure, de nombreuses
boutiques sans aucune recette ne
pourront pas se relever.
Pourquoi la responsabilité des chefs
d’entreprise vous semble-t-elle
engagée ?
Le gouvernement leur a demandé de
prendre des risques non négligeables
pour continuer à faire fonctionner
les services essentiels. Leurs salariés
sont donc très exposés. Les qualifier
de héros ne suffira pas. Viendra le
moment où le gouvernement devra
rendre des comptes et nous expli-
quer pourquoi le confinement n’a
pas été décidé plus tôt et pourquoi
rien n’a été anticipé sur la fabrication
du matériel de protection. ■
le virage
président
ans que nous réclamons des solutions.
Aujourd’hui, au bénéfice de cette crise,
le gouvernement prend conscience que
tout ce que nous avions demandé, ré-
clamé, suggéré, est exactement ce
qu’il fallait faire… De l’arrêt des délo-
calisations d’éléments stratégiques à
la possibilité de nationaliser nos entre-
prises quand elles sont en difficulté,
sans oublier d’arrêter cette folie qu’est
le pacte de Maastricht. À partir du
moment où vos adversaires se mettent
à défendre la même chose que vous,
c’est un gage de crédibilité. » Alors
que nul ne peut prévoir quand le pays
sortira de l’épidémie, la candidate
déjà déclarée à la présidentielle de
2022 a demandé à ses troupes de pré-
parer l’après. Proches conseillers
comme les « Horaces » - ce cercle de
hauts fonctionnaires et d’experts
censés la nourrir en notes - font des
points réguliers à distance pour ren-
dre compte de leurs travaux.
« Logiquement, après cette crise,
tout devrait tomber. Des traités de
libre-échange jusqu’à cette idéologie
européiste fédérale, se persuade
l’eurodéputé RN Jean-Paul Garraud.
Le seul risque c’est que les Français
soient tellement heureux d’en sortir
vivants qu’ils oublient de tirer toutes
les conséquences de ce qu’a révélé
l’épidémie. » ■
CONTRE-POINT
PAR GUILLAUME TABARD £@GTabard
Macronisme rimerait-il
avec souverainisme ?
P
our ses contempteurs,
il était le plus enragé
des libéraux. Emmanuel
Macron est-il devenu
le plus zélé des souverainistes ?
Son appel à rapatrier en France
la production de masques et
de vaccins a été présenté comme
une conversion. Façon saint Paul
ébloui sur le chemin de Damas,
le chantre de la mondialisation
heureuse serait devenu, par
la grâce d’un virus, l’apôtre
de la relocalisation.
Comme souvent, le besoin de
catégories tranchées conduit à
tordre la réalité. Ultralibéral hier
ce président qui a certes fluidifié
le marché du travail et la fiscalité
mais ne s’est jamais attaqué à la
réduction de la dépense publique -
et ne risque plus de le faire
maintenant ? Souverainiste
aujourd’hui ce chef de l’État qui,
à Angers, n’a parlé que de ce qui
entrait dans le périmètre sanitaire
des intérêts stratégiques vitaux
du pays ? L’opposition est donc
réductrice, mais après tout,
Emmanuel Macron a sa part
de responsabilité dans cette
simplification sémantique du
débat. Tout comme le libéralisme
ne se résume pas à un « laisser
faire, laisser passer » sans
intervention de la puissance
politique, le souverainisme
n’est pas non plus synonyme de
nationalisme lui-même synonyme
de rejet des autres, comme
il en a accrédité l’idée. Maintenir
l’exclusivité du duel de 2017
avec Marine Le Pen est un des
éléments qui interdit la nuance
(lire ci-dessus).
Il n’en est pas moins vrai que
la soudaineté et la violence de la
crise économique à venir ont fait
évoluer le discours des dirigeants
du monde entier. D’Emmanuel
Macron à Donald Trump.
Remiser toute règle d’orthodoxie
budgétaire, déverser des milliards
d’argent public, ouvrir tous
les airbags sociaux possibles,
envisager des nationalisations,
https://t.me/WorldAndNews
Il est
probable que
nous ne nous
acheminons
pas vers un
déconfinement
général
et absolu,
en une fois,
partout
et pour tout
le monde
ÉDOUARD PHILIPPE,
PREMIER MINISTRE
suspendre toutes les réformes,
celle des retraites comprise : tout
cela, il est vrai n’était pas dans
le kit macroniste de la campagne
de 2017. Mais pas plus que le grand
emprunt et les mesures salvifiques
prises par Nicolas Sarkozy en 2008
pour éteindre l’incendie de la crise
financière mondiale n’étaient
dans le logiciel sarkozyste.
S’adapter à un contexte hors
norme, quitte à changer d’outils,
cela a pour nom pragmatisme
et non revirement.
Il reste que le regard
sur le libéralisme a subi bien
des traumatismes. Rappelons
qu’au pays de Louis XI, Colbert
et de Gaulle, le mot a toujours été
suspect. Et a toujours divisé
et la droite et la gauche. À droite,
l’échec - pour d’autres raisons -
de François Fillon a provoqué
un retour de balancier vers
un tranquille étatisme. À gauche,
l’émancipation macronienne
a poussé à la rupture avec
les derniers feux du social-
libéralisme.
Quant à Macron, la crise du
coronavirus n’est pas le premier
événement venant ébranler
son assurance réformiste. La crise
des « gilets jaunes », le grand
débat national, la contestation
de la réforme des retraites : tout
cela est venu lui rappeler le besoin
exacerbé de protection ;
et de protection par l’État. Reste
à trouver une voie de passage.
Entre libéralisme (mondial)
et souverainisme (national),
Emmanuel Macron veut
inventer une « souveraineté »
(européenne). Rêve ou projet ? ■
L'ÉVÉNEMENT
Philippe amorce la phase
de déconfinement
MATHILDE SIRAUD £@Mathilde_Sd
C’EST la première fois qu’un mem-
bre du gouvernement abordait pu-
bliquement la question sensible du
déconfinement. Le premier minis-
tre a réservé la primeur des ré-
flexions de l’exécutif sur ce sujet
GEOFFROY VAN DER HASSELT/AFP
aux députés de la mission d’infor-
mation sur l’épidémie de coronavi-
rus, réunis, pour la première fois,
mercredi après-midi. Édouard Phi-
lippe répondait à une question du
président de l’Assemblée, Richard
Ferrand, relayant une interrogation
des Français « qui ont compris l’en-
trée et qui veulent pouvoir en conce-
voir la sortie ». « Il est probable que
nous ne nous acheminons pas vers un
déconfinement général et absolu, en
une fois, partout et pour tout le mon-
de », a déclaré le chef du gouverne-
ment, annonçant qu’une « stratégie
de déconfinement » pourra être pré-
sentée « dans les jours, la semaine »
à venir. Celle-ci sera « discutée », a
promis Philippe, et prendra en
compte « les impératifs de santé ».
« Plusieurs équipes travaillent » sur
ce sujet, a assuré le premier minis-
tre, évoquant la possibilité d’un dé-
confinement « régionalisé », « sujet
à une politique de test », ou encore
»
« en fonction des classes d’âge ».
« Nous expertisons des scénarios en
fonction des hypothèses », a-t-il ex-
pliqué. Cette stratégie dépendra
« de notre capacité à tester », « de la
façon dont le virus aura circulé ».
« Nous sommes dans un combat
contre un virus, un combat long qui
va durer, un combat difficile qui im-
pliquera des mauvaises nouvelles
parfois, des déceptions dont je ne
veux pas cacher, à aucun de nos
concitoyens, la dureté », a insisté
Philippe, rappelant que les déci-
sions sont prises « sur le fondement
L’union nationale peine
à s’imposer dans l’opinion
PIERRE MAURER £@PMaurer_
DEPUIS le début de l’épidémie de
Covid-19, les gestes inédits de soli-
darité envers les soignants se multi-
plient dans un grand élan de ci-
toyenneté. Mais l’union nationale
autour de l’exécutif peine, elle, à
faire l’unanimité parmi la popula-
tion. Les Français sont divisés en
deux parts pratiquement égales :
51 % sont favorables à l’union na-
tionale et 48 % affirment qu’il ne
faut pas hésiter à manifester les dé-
saccords, selon une étude menée les
31 mars et 1er avril auprès d’un mil-
lier de Français par Odoxa avec
Dentsu Consulting, pour Le Figaro
et Franceinfo.
Une division qui s’exprime enco-
re mieux d’un point de vue partisan.
Les soutiens des partis dits « de
gouvernement » poussent pour
l’unité nationale - 84 % de soutien à
LREM, 69 % chez LR -, les extrêmes
la rejettent clairement - 69 % chez
LFI, 65 % au RN. Les soutiens de
Jean-Luc Mélenchon et Marine Le
Pen estiment d’ailleurs majoritaire-
ment que la France sortira plus divi-
sée de la crise du coronavirus.
Au flou de la parole gouverne-
mentale sur les stocks de masques et
de produits sanitaires s’est greffé le
manque de clarté des oppositions
FACE À L’ÉPIDÉMIE, ESTIMEZ-VOUS
QU’EMMANUEL MACRON ET
LE GOUVERNEMENT EN FONT…
NI TROP NI TROP
PAS ASSEZ 4%
43%
+12 pts*
-12 pts*
* depuis le 27 mars, Baromètre politique Odoxa-CGI
Enquête réalisée auprès d’un échantillon de Français interrogés par Internet les 31 mars et 1 avril 2020. Échantillon de 1 003 Français représentatif de la
population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon est assurée par la méthode des quotas appliqués aux variables suivantes :
sexe, âge, niveau de diplôme et profession de l’interviewé après stratification par région et catégorie d’agglomération.
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
21
d’informations parfois incomplètes et
souvent contradictoires ».
Le premier ministre, et le minis-
tre de la Santé Olivier Véran, ont
ensuite répondu aux nombreuses
questions des députés, qui partici-
paient à cette première audition par
visioconférence. Interrogé par la
présidente de la Commission des
lois, Yaël Braun-Pivet (La Républi-
que en marche), Édouard Philippe a
indiqué que le gouvernement « ne
travaillait pas aujourd’hui sur des
instruments qui rendraient obliga-
toire le tracking », à savoir l’utilisa-
tion de la géolocalisation pour sui-
vre la circulation du virus. « Ce
dispositif n’existe pas en France,
parce qu’il ne serait pas légalement
permis », a affirmé le premier mi-
nistre, n’excluant pas, toutefois,
d’utiliser ces méthodes « sur le fon-
dement d’un engagement volontai-
re ». Le sujet de l’organisation du
baccalauréat a aussi fait l’objet
d’une longue mise au point du chef
du gouvernement. « Il ne sera pas
possible d’organiser dans des condi-
tions normales le bac 2020 », a, sans
surprise, affirmé Philippe, préci-
sant que la date du 4 mai avancée
par le ministre de l’Éducation Jean-
Michel Blanquer pour la reprise des
cours n’était, à ce stade, qu’une
« hypothèse ». « Plusieurs options
sont sur la table », concernant le
baccalauréat, comme la possibilité
d’organiser un contrôle continu ou
bien de tenter de conserver, a mini-
ma, une seule épreuve. Le premier
ministre a également fait savoir
qu’il s’entretiendrait jeudi avec le
président de La Poste, pour aborder
la question de la distribution du
courrier. La garde des Sceaux Nico-
le Belloubet et le ministre de l’Inté-
rieur Christophe Castaner seront
auditionnés, à leur tour, la semaine
prochaine. ■
sur leurs positions, selon l’opinion
publique. Toutes les oppositions sont
ainsi jugées majoritairement « pas à
la hauteur », et leur parole est large-
ment « méconnue » des Français,
alors qu’Édouard Philippe réunit ce
jeudi matin les chefs de parti en vi-
sioconférence. Que ce soit sur le
confinement ou le maintien du pre-
mier tour des élections municipales,
les volte-face des responsables poli-
tiques ont ajouté à la confusion.
Concernant Emmanuel Macron,
qui a opéré un changement de ton
face à la propagation du virus et a
déclaré un véritable état de « guer-
re », 53 % des Français estiment
toujours qu’il n’en fait pas assez. Le
jugement pour l’exécutif est cepen-
dant moins sévère par rapport à la
semaine dernière où 65 % des Fran-
çais étaient persuadés que le gou-
vernement n’avait pas fait le néces-
saire pour bien équiper les hôpitaux
et les soignants face à l’épidémie.
En déplacement mardi dans une
usine française fabriquant des mas-
ques, le chef de l’État a fustigé les
« irresponsables », « ceux qui cher-
chent à faire des procès, alors que
nous n’avons pas gagné la guerre ».
« Le temps est à s’unir et à se tenir les
coudes pour terrasser ce virus », a-
t-il exhorté. Pour le moment, il ne
semble avoir été entendu que par
une moitié du pays. ■
SI LES PARTIS D’OPPOSITION ONT
DES DÉSACCORDS SUR LA FAÇON
DONT LE GOUVERNEMENT LUTTE
PAS CONTRE L’ÉPIDÉMIE, DOIVENT-ILS
ASSEZ SELON VOUS…
Eviter de manifester ces désaccords
pour le moment car il ne faut pas
remettre en cause l’union nationale
51%
53%
Ne pas hésiter à manifester ces
désaccords car c’est leur rôle
48%
NSP 1 %
er
A
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
22 L'ÉVÉNEMENT
Gourault : « Évitons les querelles inutiles »
Loi 3D, municipales, polémique Buzyn… La ministre des Territoires sort du silence.
PROPOS RECUEILLIS PAR
EMMANUEL GALIERO
egaliero@lefigaro.fr
Jacqueline Gourault est ministre de
la Cohésion des territoires et des
Relations avec les collectivités
territoriales.
LE FIGARO.- Comment
vivez-vous cette crise ?
Jacqueline GOURAULT.- À la fois
comme une ministre qui est sur le
pont, et comme une citoyenne qui
respecte les règles sanitaires.
L’inquiétude s’invite comme dans
toutes les familles dès que l’on a
soi-même des connaissances
contaminées, comme mon fils et
ma belle-fille, heureusement sortis
d’affaire.
Comment les missions de votre
ministère sont-elles impactées ?
Notre manière de travailler est
bouleversée, mais la continuité de
l’action républicaine est assurée. Le
gouvernement, autour du premier
ministre, est à la tâche sans relâche.
Notre administration réalise un
immense travail, et l’État n’a ja-
mais été aussi présent.
La loi 3D était en préparation,
mais a-t-elle un avenir ?
Je ne vais pas vous dire que les cho-
ses ne sont pas bousculées, car
comme le président de la Républi-
que l’a dit, il faudra tirer toutes les
conséquences de cette crise. C’est
ainsi que, par exemple, le pacte de
Cahors, qui encadrait les dépenses
de fonctionnement, a été tempo-
rairement levé, car on sait bien que
cette crise engagera des dépenses
supplémentaires et des recettes
minorées. Toutefois, l’esprit de la
loi 3D demeure et se révèle très
précieux puisqu’il s’agira de per-
mettre aux collectivités de
construire des réponses rapides et
spécifiques à leurs problématiques
propres, sans jamais perdre de vue
la solidarité nationale. Ainsi, toutes
les concertations que j’avais me-
nées ne seront pas vaines.
Municipales : les oppositions jugent
déplacées les critiques de la majorité au stade 3
MARION MOURGUE £@MarionMourgue
ET SOPHIE DE RAVINEL £@S2RVNL
« LA FRANCE est composée de gens
bien, qui se tiennent et qui font face
mais à un moment, des comptes se-
ront demandés… » A la sortie vir-
tuelle du bureau national du PS,
mardi, certains esprits s’échauf-
fent. « Jamais, jamais l’avis d’Oli-
vier Faure n’a été sollicité sur une
éventuelle annulation du premier
tour des municipales », s’agace un
proche du premier secrétaire, réa-
gissant aux propos de François
Bayrou.
Dans nos pages, lundi, le maire
de Pau accusait « les oppositions
d’avoir poussé de hauts cris en
criant au déni de démocratie ». Des
protestations qui, à entendre le
président du MoDem, auraient
empêché le président de la Répu-
blique d’annuler ces élections
comme il l’aurait souhaité. La te-
nue du premier tour, le 15 mars
pourrait avoir été, pour nombre
d’élus, un vecteur de transmission
du virus.
Pourtant, trois jours plus tôt,
l’ensemble des partis s’était re-
trouvé autour du premier ministre,
des ministres de l’Intérieur et de la
Santé. « Personne alors, ni au gou-
vernement ni dans aucune forma-
tion politique, n’a évoqué de diffi-
cultés particulières pour la tenue du
scrutin », rappelait Christian Ja-
cob, mardi, dans Le Figaro. À ce
moment-là, les écoles comme les
restaurants sont ouverts et le
confinement n’est pas évoqué.
« François Bayrou va à la res-
cousse d’Emmanuel Macron et veut
A
rendre l’opposition responsable,
mais c’est absolument faux », mar-
Quelles libertés les ordonnances
accordent-elles aux collectivités ?
Elles mettent en œuvre, de manière
très pratique, l’état d’urgence au
niveau local. Après une ordonnan-
ce qui assure la continuité budgé-
taire, financière et fiscale des
collectivités, j’en présente une
nouvelle sur la gouvernance des
assemblées délibérantes. Les pré-
fets conservent un contrôle de lé-
galité, mais l’objectif est de faciliter
la vie des exécutifs en leur évitant
au maximum d’avoir à se réunir
physiquement. Les présidents se
voient confier automatiquement
l’intégralité des pouvoirs qui pou-
vaient auparavant leur être délé-
gués. Bien sûr, en parallèle, ils ont
le devoir d’informer leurs assem-
blées, y compris les élus du 1er tour
qui ne siègent pas encore comme le
prévoyait déjà la loi d’urgence.
L’objectif est de permettre aux col-
« duÀ partir
moment
où on passait
du stade 2
tèle le député PS des Pyrénées-At-
lantiques, David Habib. « C’est
Emmanuel Macron, indique Habid,
qui avaient les éléments. Aujour-
d’hui, nous sentons qu’il aurait fallu
annuler, mais au moment où cela
était possible, nous étions dépourvus
d’informations scientifiques. »
La tentative d’En marche !
Même réaction du côté des écolo-
gistes. « La vérité, c’est que per-
sonne ne nous a demandé notre
avis, explique le secrétaire natio-
nal d’EELV Julien Bayou. Si on
nous avait dit que les conditions
n’étaient pas réunies, nous nous se-
rions rangés à cet avis ! » Bayou,
pour le moment, estime n’avoir
aucun moyen d’affirmer si le chef
de l’État pouvait mesurer les ris-
ques. Mais lui aussi assure que « le
temps des commissions d’enquête
viendra ».
À droite aussi, on commence à
https://t.me/WorldAndNews
lectivités de respecter les consignes
en garantissant l’efficacité de l’ac-
tion publique.
Une manière de reconnaître
que l’État ne peut pas agir seul ?
Mais c’est une évidence ! Avec
l’État, les collectivités forment la
République. Elles ont une capacité
d’imagination absolument géniale.
Non seulement nous encourageons
les initiatives locales, mais nous les
mettons en relation.
Malgré un élan de solidarité
général, des élus proposent des
solutions, mais ont le sentiment
d’être bridés. Quel est votre avis ?
Les agences régionales de santé
jouent un rôle essentiel pour coor-
donner la gestion de la crise dans
les territoires, avec les préfets. Elles
adaptent les réponses aux besoins.
Peut-être existe-t-il des fonction-
s’agacer. « On voit bien la tentative
d’En marche ! et du pouvoir de reje-
ter la responsabilité sur le dos des
oppositions. Ce serait bien la pre-
mière fois qu’Emmanuel Macron
s’en remettrait à l’avis des opposi-
tions pour prendre une décision ! »,
ironise Bruno Retailleau.
« C’est le premier ministre qui a
pris la décision de maintenir le pre-
mier tour en se fondant sur la
consultation et l’avis du Comité
scientifique », affirme Christian
Jacob. Et Les Républicains de rap-
peler qu’à ce moment-là, l’entou-
rage d’Emmanuel Macron affirme
que ce sont « les scientifiques qui
ont eu le dernier mot ». « À partir
du moment où on passait du stade 2
au stade 3 avec la fermeture des
restaurants et des bars, le samedi
soir, il aurait fallu prendre la déci-
sion de reporter les élections », sou-
ligne Bruno Retailleau renvoyant
la responsabilité… à la majorité. ■
■ nicipal. Le maire m’a dit qu’il ne vou-
« Notre nements plus ou moins fluides,
administration réalise mais les choses sont bien tenues. En
un immense travail période de crise, les décisions
et l’État n’a jamais s’adaptent au fil des jours.
été aussi présent »,
explique Jacqueline Le maintien du 1er tour des
Gourault, ministre municipales a-t-il été une erreur ?
de la Cohésion Je me suis interrogé comme beau-
des territoires
coup. Le président de la République
et des Relations
avec les collectivités avait mis cette question du report
territoriales. sur la table mais le Conseil scienti-
JEAN-CHRISTOPHE fique comme l’ensemble des forces
MARMARA/LE FIGARO politiques consultées par le premier
ministre ont souhaité son maintien.
Comment avez-vous analysé
les propos d’Agnès Buzyn sur
la « mascarade » des municipales
laissant penser que
le gouvernement a mesuré
l’ampleur de cette crise très tôt ?
Si Agnès Buzyn a accepté d’être
candidate à Paris, c’est qu’elle pen-
sait que la campagne aurait lieu. Je
Cohabitation difficile
entre maires élus et battus
avec la
fermeture des TRISTAN QUINAULT-MAUPOIL
£@TristanQM
restaurants
et des bars (...)
il aurait fallu PAS SIMPLE de gérer la crise du co-
ronavirus dans les communes où le
prendre maire sortant a été battu dès le pre-
la décision mier tour des élections municipales.
de reporter Bien que les mandats de ces édiles
les élections
BRUNO RETAILLEAU
» ont été prorogés, leurs futurs suc-
cesseurs ont des fourmis dans les
jambes. Une ordonnance adoptée
PRÉSIDENT DU
GROUPE LR AU SÉNAT
mercredi en Conseil des ministres
stipule d’ailleurs que les nouveaux
élus doivent être informés des déci-
sions prises par les battus. Ce qui
n’empêche pas les cohabitations
douloureuses…
À Chilly-Mazarin (Essonne), la
La tenue du premier socialiste Rafika Rezgui a battu
tour, le 15 mars,
Jean-Paul Beneytou (DVD). « J’ai
pourrait avoir été,
pour nombre d’élus, appelé le maire intérimaire pour lui
un vecteur demander de mettre en place une
de transmission coordination. À ma grande stupéfac-
du virus. SÉBASTIEN tion, ma proposition a été refusée de
SORIANO/LE FIGARO fait. Il n’est pas revenu vers moi », se
désole la socialiste.
« Ça se passait bien jusqu’à la dé-
cision du gouvernement de reporter
l’installation du nouveau conseil mu-
lait plus me voir, que je ne devais plus
mettre les pieds à la mairie », témoi-
gne Lionel Marie (DVG) qui a vaincu
l’édile de Blainville-sur-Orne (Cal-
vados), Daniel Françoise (PS). « Il ne
m’intègre pas à la cellule de crise »,
peste le futur maire qui a contacté le
préfet pour s’en plaindre.
Même difficulté à Auby (Nord) où
Christophe Charles (PRG) a plu-
sieurs fois essayé de contacter Fred-
dy Kaczmarek, le communiste en
place depuis 2001. Sans succès : le
maire sortant a surtout déposé un
recours pour annuler le 1er tour.
« N’y avait-il pas plus urgent ? »,
s’étrangle Christophe Charles. Il
trouve curieux qu’elle s’exprime
ainsi a posteriori. C’est une contra-
diction.
Le calendrier pour la dotation
globale de fonctionnement
est-il maintenu ?
Cette dotation est toujours portée à
la connaissance des élus au début
du mois d’avril. Notre administra-
tion a tenu les délais et nous serons
en capacité d’informer chaque col-
lectivité dès la semaine prochaine.
Le montant global a été préservé,
comme l’État s’y est engagé. Com-
me nous le faisons depuis deux ans
tout sera expliqué dans une totale
transparence, sachant que l’État
peut toujours intervenir de maniè-
re exceptionnelle, en cas de diffi-
culté particulière.
Après la crise, envisagez-vous
des renégociations sur les moyens
des collectivités ?
Il est certain qu’il faudra regarder
l’impact de la crise sur leurs finan-
ces.
Qu’attendez-vous
de la commission d’enquête ?
C’est le rôle classique du Parle-
ment. J’en attends un travail sé-
rieux qui devra nous servir d’outil
pour engager de bonnes réformes.
Quel moment fort
vous a marquée depuis le début
du confinement ?
L’implication des gens dans le
Grand Est, la région la plus meur-
trie, m’a beaucoup émue. Certains,
comme le maire de Saint-Nabor,
François Lantz, sont morts. Il est
très dur d’imaginer tout ce qu’ils
sont en train de vivre. Mais dans le
malheur, il y a aussi des signes
d’optimisme. Quand on voit ces
malades français hospitalisés en
Allemagne, en Suisse ou au Luxem-
bourg, on se dit que, malgré tout,
l’Europe a du bon.
Quelle leçon retiendrez-vous ?
Il faut toujours rester sur l’essen-
tiel. Évitons les querelles inutiles. ■
s’étonne également de ne pas avoir
été mis au parfum du couvre-feu
décidé localement. À Châtillon-sur-
Indre (Indre), l’écologiste Gérard
Nicaud, qui a remporté le scrutin,
peut compter sur la directrice des
services du bourg pour faire le lien
avec le maire sortant. Les deux
hommes ne se parlent pas…
Un climat « froid et lourd »
À Tonnerre (Yonne), la maire sor-
tante Dominique Aguilar (DVD) as-
sure que « les habitants sont con-
tents » qu’elle gère la crise. « Il est
important d’avoir une continuité dans
cette période » d’autant plus que son
tombeur, Cédric Clech « n’a jamais
été élu » avant sa victoire surprise le
15 mars. Depuis ce jour, « pas de
son, pas d’image » du prochain édi-
le, jure-t-elle pour justifier le man-
que de concorde avec la prochaine
équipe municipale.
À Saint-Germain-au-Mont-d’Or
(Rhône), le maire Renaud George
(LREM) a recadré l’écologiste victo-
rieuse Béatrice Delorme : « Elle m’a
appelé le lundi 16 mars à 8 heures
pour me dire qu’elle souhaitait ren-
contrer le personnel municipal à
9 heures, je lui ai répondu que ça ne se
passait pas comme ça » d’autant
plus « qu’elle n’est pas attendue
comme le Messie par tous les habi-
tants ». Depuis, l’intéressée évoque
un climat « froid et lourd » avec ce-
lui qui est aussi le directeur de cam-
pagne de Gérard Collomb.
D’autres maires battus adoptent
une attitude plus conciliante. « J’ai
bien digéré ma défaite. Je suis passé à
autre chose même si je suis toujours le
maire et que je m’occupe évidemment
des affaires courantes », lance Gré-
gory Labille (Hams, Somme) qui a
associé le prochain maire aux déci-
sions du quotidien. ■
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020

L'ÉVÉNEMENT 23
DISPARITION Pape
Diouf, le populaire
patron de l’OM Marseille
a perdu
des années 2000,
est mort à Dakar
du coronavirus.
PAR YVES THRÉARD
ythreard@lefigaro.fr son « Pape »

E
N QUELQUES JOURS,
Marseille a perdu son hi-
dalgo et son pape. Le pre-
mier avait la noblesse du
verbe ; le second, la gen-
tillesse du regard. Michel
Hidalgo, le prince de l’OM
des années 1980-1990, s’en
est allé le 26 mars dernier, affaibli par le Pape Diouf au Stade-Vélodrome
poids des années. Mabada-Pape Diouf, le 9 décembre 2008,
l’éminence du club des années 2000, vient lors d’un match de Ligue
de le rejoindre, cinq jours plus tard. Victi- des champions entre Marseille
me du coronavirus. et l’Atlético Madrid. PHILIPPE
PERUSSEAU/ICON SPORT/ STARFACE
À l’heure où cette maladie s’abat sur
l’Afrique, la disparition de cet homme de
68 ans à l’impressionnante carrure appa-
raît comme un sombre présage. Hospitalisé 1951 famille et ses confrères, il avait le cœur sur la d’hui inconsolables. « Tu étais le meilleur bienveillant avec les faibles. C’est générale-
CHRONO

à Dakar, Pape Diouf devait être transféré
d’urgence mardi soir en France. La gravité
de son état ne l’a pas permis. Il était déjà
trop tard. Son ami Bernard Tapie s’était
pourtant démené comme un beau diable
toute la journée pour préparer son arrivée à
Nice, dans le service du professeur Baquet.
Comme tous les pays du continent, le Séné-
gal s’inquiète de ses capacités à pouvoir fai-
re face à cette pandémie qui risque de faire
des centaines de milliers de morts. Après le
saxophoniste camerounais Manu Dibango,
Pape Diouf est donc la deuxième figure afri-
caine, connue du monde entier, à être em-
portée par le Covid-19 (lire pages 6, 7 et 8).
Né au Tchad, où son père, militaire, di-
rigeait le garage de l’armée française, à
Fort-Lamy, le futur président de l’OM, en-
core bébé, rejoint le Sénégal, le pays de sa
famille d’ethnie sérère. Il y effectue sa sco-
larité avant d’être envoyé à Marseille pour
passer son baccalauréat. Il fréquente un
temps l’Institut des sciences politiques
d’Aix-en-Provence puis travaille aux PTT.
Naissance au Tchad, dans main, se rappelle Michel Montana. Il pou-
une famille sénégalaise. vait avoir des coups de gueule. Sous des allu-
1969 res bonhommes, c’était aussi un impulsif. »
Arrive à Marseille et Avec son sourire éclatant et son œil taquin,
devient journaliste. Diouf devient le journaliste sportif de réfé-
2005 rence de la Cité phocéenne. Taille patron.
Nommé président De la vie de l’OM, des vestiaires du Stade
de l’OM. Vélodrome au centre d’entraînement de la
2014 Commanderie, rien ne lui échappe. Il est
Candidat à la mairie de toutes les confidences, il sait tout de
de Marseille. l’humeur des joueurs et du staff. Il est telle-
2020 ment bien informé qu’il est embauché par
Meurt, à l’hôpital le journal parisien Le Sport, brillant mais
Fann de Dakar, éphémère concurrent de L’Équipe, à la fin
du coronavirus. des années 1980.
Le journalisme menant à tout à condi-
tion de savoir en sortir, Pape Diouf se
transforme en agent de joueurs, un nou-
Mais c’est l’actualité sportive qui le pas- veau métier. Il comptera, parmi ses pou-
sionne. Le football surtout. Il frappe alors à lains, quelques-unes des gloires - beau-
la porte du quotidien communiste La Mar- coup d’origines africaine ou antillaise - qui
seillaise. Il y restera douze ans, sous le re- rayonneront sur le championnat français :
gard paternel de son directeur. « C’était un Basile Boli, Joseph-Antoine Bell, William
gars très dynamique, très généreux avec sa Gallas, Didier Drogba… Ils sont aujour-
d’entre nous et un modèle pour moi. Tu res-
teras à jamais dans mon cœur Pape. Je
t’aime », a tweeté, mercredi, son compa-
triote Mamadou Niang, meilleur buteur
marseillais, l’année du dernier sacre de
champion de France de l’OM, en 2010.
Tapie : « Chapeau l’artiste ! »
Cette année-là, Pape Diouf se cherche un
nouvel avenir. Car il a été viré un an avant
de son club de cœur où Robert Louis-
Dreyfus, l’actionnaire, l’avait recruté
comme président en 2005. Pendant son
magistère, l’équipe termine toujours dans
le quinté de tête du championnat et atteint
deux finales de Coupe de France. « Pape a
marqué l’histoire de l’OM, confiait mercre-
di, au Figaro, Bernard Tapie. Ce type avait
beaucoup de consistance et une grandeur
d’âme exceptionnelle. Il pouvait être d’une
mauvaise foi totale, mais il avait des convic-
tions. Ses attaches communistes du début
s’étaient un peu évaporées, mais ce qui est
sûr, c’est qu’il était fort avec les forts et
ment le contraire chez beaucoup de gens. À
l’OM, il en avait assez des jalousies autour
de lui, alors il est parti, sans faire de scanda-
le. Chapeau l’artiste ! »
Diouf avait la ville de Marseille chevillée
au cœur et au corps. Tellement qu’en 2014,
il voudra en devenir le maire. Ses concur-
rents prennent peur, Jean-Claude Gaudin
le premier, mais il récolte un piètre score.
Sa liste, estampillée société civile, obtient
5,6 % des voix ! Il s’en relève sans bobo.
Pape, il est aux yeux de tous, Pape de la
Cité phocéenne, il le restera toujours. Son
seul regret, il le confiera à l’hebdomadaire
Jeune Afrique en 2008 : « Je suis le seul pré-
sident noir d’un club en Europe. C’est un
constat pénible. » Lui le musulman, consa-
cré « Pape » de couleur en terre blanche et
judéo-chrétienne, il vivait pourtant com-
me un échec sa gloire en solitaire. Le fier
sérère était amer de cela. Même s’il en par-
lait peu, il n’avait pas oublié ses origines.
L’Afrique avait été son berceau. Elle sera
donc aussi sa dernière demeure. ■

Les golfeurs tentent BONNES AFFAIRES

de garder la forme
Victor Perez, Mike Lorenzo-Vera et Romain
Langasque racontent leur confinement.
LIONEL VELLA £@lionel_vella Players Championship, annulé après un Décoration RENOVATION AVEC GAVO FINI
tour, il a pu encore arpenter le samedi
21 mars le célèbre parcours de Carnoustie. PONCAGE LES CORVÉES
À L’INSTAR de la moitié de la population Mais depuis, les choses ont sensiblement NETTOIE VITRIFICATION D'AMEUBLEMENT !
mondiale, les golfeurs professionnels sont changé. « Je ne fais pas grand-chose, avoue RENOVE, RAVIVE
confinés à leur domicile. Au « chômage le Tarbais. Je continue à faire un peu de
technique » sur le Tour européen depuis le sport. On glande. On a le droit de sortir une     
8 mars, ils tentent de garder la forme. C’est
le cas de Romain Langasque, 121e au classe-
fois par jour pour faire un peu de vélo, courir,
aller marcher… J’ai une pièce à la maison que
  
ment mondial, cloîtré chez son père, près j’ai réaménagée en mini-salle de sport et
Votre Parquet
de Grasse (06). « J’y suis depuis le 14 mars, j’essaie de m’entretenir physiquement. À REMIS à NEUF
Spécialiste depuis 1939
Tapis, Rideaux du Nettoyage
explique-t-il. C’est le seul endroit qui me mon avis, quand la saison va reprendre, on Moquettes, Stores ê
d'ameublement.
permet de m’entraîner correctement. Si on devra enchaîner beaucoup de tournois. La Tentures Murales, Ancien - Traditionnel
Massif - Vieilli Décroche et raccroche
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peut appeler ça correctement. Je m’accorde préparation physique sera donc très impor- ê vos rideaux.
une heure de sport le matin et une heure le tante. En ce moment, on peut continuer à CONFECTION Finition Ravive vos tapis,
Brillante - Brute
soir dans la salle installée dans le garage où il travailler physiquement et mentalement. En canapés, moquettes,

y a plein d’outils pour travailler. Sinon je revanche, golfiquement, c’est impossible. » RESTAURATION Traitement
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l’ordre du mérite européen fin 2019, s’est que. Et je m’entretiens aussi grâce à des 75008 - Paris

quand même installé un drapeau dans le jar- exercices que j’effectue depuis toujours. Je 01.47.20.78.64.
din paternel et tente à une distance de qua- poursuis également mon travail mental
rante mètres de placer ses balles le plus près avec Meriem Salmi. On fait pas mal de vi- CRÉEZ RENOVATION
possible de la cible. « Avec mon préparateur sualisations… Mais c’est assez intense à la
CONFECTION VOTRE TAPIS CRISTALLISATION
physique, David Baudrier, on a mis en place maison en ce moment. Avec mes enfants et
un programme physique, reprend-il. On a ceux de ma belle-sœur… » A VOS MESURES !
réparti le travail en deux phases. La première Quand espèrent-ils tous reprendre la
est basée sur beaucoup de cardio, de transpi- compétition ? Keith Pelley, le patron du
ration avec une perte de poids recherchée. On Tour européen, a avancé prudemment la
glissera ensuite sur plus d’explosivité. Quand fin du mois de mai, mais l’Irish Open
on a deux mois devant soi, on peut moduler ça (28 au 31 mai) a été finalement reporté. RÉALISATION DE MARBRE - TRAVERTIN
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tranquillement. C’est très positif. Mais ça va… « On n’a aucune visibilité, conclut Loren-
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jeudi 2 avril 2020

24 LE CARNET DU JOUR
Antoine et Vanessa Bénichou, Valérie Brunissen, Monique David, Huilly-sur-Seille Paris (16e). Flancourt-Catelon (Eure).
son fils et sa belle-fille, son épouse, née Latreille, son épouse, (Saône-et-Loire).
Les annonces sont reçues Clara, Mathias et Raphaël, Ludivine, Pascal et Delphine, Véronique Cochois, Robert Léon, Isabelle, Philippe,
ses petits-enfants, ses enfants, Patrick David, Les familles d'Ivernois, Jean-Pierre Léon, ses enfants,
avec justification d’identité Charlotte, Julie et Louis, Nicolas David (†), Panafieu et Prudhomme leur famille ses petits-enfants
Vincent et Sylvain Lindon, ses neveu et nièces, ses enfants,
du lundi au vendredi ses beaux-fils, Marie France et Geneviève, Cécile, Florentine, Jules, ont la douleur ont la douleur et toute la famille
ses cousines, Etienne, Mathilde, Sébastien de faire part du décès de de faire part du décès de
de 9h à 13h et de 14h à 18h Christiane Lambert, Jeannick Calmettes, et Emilie, ont la tristesse
sa compagne, sa tante, ses petits-enfants, Pierre LÉON de vous faire part du décès de
la famille Vaillant, Mme Jacques d'IVERNOIS avocat honoraire
(excepté les jours fériés) ont la douleur d'annoncer le docteur et Mme Paul Prunet, ont la tristesse au barreau de Paris,
née
le décès de ses beaux-parents, de vous faire part du décès de Colette Bouthillon de la Serve, commandant de réserve M. Michel VARIN
et tous les dimanches Stéphane Prunet, de l'armée de l'air,
Pierre BÉNICHOU son beau-frère, et ses enfants Jean-Léo DAVID chevalier
de 9h à 13h. journaliste, et tous ses fidèles amis survenu le 27 mars 2020, de la Légion d'honneur, survenu le mardi 31 mars 2020,
le 31 mars 2020, à l'âge de 92 ans. à l'âge de 89 ans.
survenu le mardi 31 mars 2020, ont l'immense tristesse à l'âge de 82 ans. survenu le 27 mars 2020,
à son domicile, de vous faire part du décès de Molaise, à l'âge de 96 ans, à Paris. La cérémonie religieuse
par courriel 109, rue de l'Université, La cérémonie religieuse 71290 Huilly-sur-Seille. sera célébrée
75007 Paris. Dominique BRUNISSEN aura lieu le vendredi 3 avril, aliettedepanafieu@gmail.com Les obsèques auront lieu le vendredi 3 avril, à 11 heures,
carnetdujour@media.figaro.fr en l'église de Viroflay, dans au cimetière du Père-Lachaise, en l'église de Flancourt,
En raison des circonstances survenu le 23 mars 2020, la plus stricte intimité familiale. à Paris (20e), dans l'intimité familiale.
par téléphone actuelles, la crémation aura
lieu dans la plus stricte intimité.
à l'âge de 75 ans.
Une messe en son souvenir
dans l'intimité familiale,
le samedi 4 avril 2020. Cet avis tient lieu de faire-part.

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Il repose désormais en paix, son
courage et sa détermination
vivront à travers les siens.
Une cérémonie aura lieu
ultérieurement à Courbevoie.
Mme Jacques Bezard-Falgas,
M. et Mme
Arnaud Bezard-Falgas,
Mme Olivier Bezard-Falgas,
Rachecourt-Suzémont
M. et Mme
(Haute-Marne).
Christophe Bezard-Falgas, Montpellier (Hérault).
ses petits-enfants
Dominique, Philippe,
et son arrière-petite-fille
Jean-Luc, Isabelle,
ses enfants,
ont la douleur et leurs conjoints,
de faire part du décès de Cécile et Claire,
ses petites-filles,
M. Jacques BEZARD-FALGAS
et leurs conjoints,
chevalier
Ninon, Joseph, Rémi,
de la Légion d'honneur,
ses arrière-petits-enfants,
croix de la Valeur militaire,
Monique Chalot,
chevalier du Mérite agricole,
sa sœur,
les familles Chalot, Burgeat,
survenu le 31 mars 2020,
Brocard, Tillot-Lemaignen
à Lassalle, Montauban.
ont la grande tristesse
En raison de la crise sanitaire,
de vous faire part du décès de
les obsèques auront lieu dans
la plus stricte intimité familiale.
Marie-Joseph CHALOT
Une cérémonie à sa mémoire veuve du
sera célébrée ultérieurement.
colonel François GRIGAUT
survenu dans sa 95e année.
La cérémonie aura lieu
dans l'intimité familiale.
sera célébrée ultérieurement.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Mme Jean-Pierre Dufour,
née Bernadette de Vergès,
son épouse,
M. et Mme Vincent Dufour,
Mme Martine Dufour (†),
M. et Mme Nicolas Dufour,
Mme Catherine Dufour,
ses enfants et leurs conjoints,
Jean et Caroline Dufour,
Elise, Agathe,
Yves et Chloé Dufour,
Arthur, Alice,
Kelvin Pimont,
John-Elliot, Margot,
Amélie Pimont,
Aurélien, Marie, Pauline,
Elie, Ezéchiel
et Zacharie Dufour,
Mathieu et Pauline Tisseuil,
Camille, Clément,
Thomas Tisseuil,
Pierre et Claire Tisseuil,
Victor,
ses petits-enfants
et arrière-petits-enfants,
M. Max Piot,
Mme Denis Baschet,
Mme Maxwell Stevenson,
ses sœurs et beau-frère,
Cet avis tient lieu de faire-part.
Le Chesnay.
Logonna-Daoulas (Finistère).
21, avenue Pierre-1er-de-Serbie,
75116 Paris.
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Dominique et Hervé,
Annie et Patrice, Mme Georges Wessels,
François et Anne, née Martine Dausenheim,
ses enfants, Paris.
ses petits-enfants, Guillaume et Ana Rea Wessels,
Louestault (Indre-et-Loire).
ses arrière-petits-enfants ses enfants,
M. et Mme Bruno de Gavelle Roxane Wessels,
ont la grande tristesse sa petite-fille,
et leurs enfants,
de vous faire part du décès du
M. et Mme Thierry de Gavelle
le docteur Gilles Wessels,
et leurs enfants,
son fils,
Mme Bernard Labourdette
médecin général en union avec Anne-Laure, Stéphane
inspecteur (2S) M. Bernard Labourdette (†) et Noémie,
Jean KERMAREC et leurs enfants, ses enfants,
professeur agrégé ses six petits-enfants
ses neveux et petits-neveux,
de l'École du Val-de-Grâce,
officier de la Légion d'honneur, ont l'immense douleur
ont la tristesse
grand officier de vous faire part du décès de
de vous faire part
de l'ordre national du Mérite,
du rappel à Dieu,
officier
le 31 mars 2020, de
des Palmes académiques, M. Georges WESSELS
ancien président X 48,
M. Jacques de LEURY
de l'ASP fondatrice, officier de la Légion d'honneur,
chevalier
chevalier
de la Légion d'honneur,
de l'ordre national du Mérite,
chevalier dans
mort dans l'Espérance officier du Mérite maritime,
l'ordre national du Mérite,
le 27 mars 2020, croix du combattant volontaire
à l'âge de 90 ans. de la Résistance,
survenu le 27 mars 2020,
médaille vermeil
Les dates et heures dans sa 93e année.
de la Ville de Paris,
des obsèques seront
communiquées à l'âge de 99 ans, muni Une prière sera dite
à l'issue du confinement.
Jean voulait
des sacrements de l'Église.

La cérémonie religieuse
en la paroisse
Notre-Dame-de-Grâce-
de-Passy, Paris (16e),
Le docteur Etienne leurs enfants et petits-enfants, que soient remerciés
La famille remercie aura lieu à Neuvy-le-Roi le samedi 4 avril 2020,
du Mesnil du Buisson, tous ceux qui l'ont aimé
toutes les personnes (Indre-et-Loire), où il reposera durant sa crémation
son mari, Valentine van der Vorm, et les malades qui lui ont
qui prendront part à sa peine. au cimetière dans le caveau au crématorium
Priscille Guillaume, accordé leur confiance. du cimetière du Père-Lachaise.
deuils Pascale du Mesnil du Buisson,
Cet avis tient lieu de faire-part.
Aymeric,
de la chapelle familiale.
Marie-Ange Ludovic et Sylvie Des dons peuvent être adressés Une messe sera célébrée
du Mesnil du Buisson van der Vorm, à l'Association des en sa paroisse
Ses enfants, et Christian Nguyen-Van-Yen, Victor et Aurélia, Soins Palliatifs de Châteaulin. La comtesse Notre-Dame de-Grâce-
ses petits-enfants, Christian du Mesnil du Buisson, Juliette van der Vorm,
Bruno de Montalembert, de-Passy, dont la date
sa compagne Charlotte du Mesnil du Buisson Marie-Lou, Rosita, Joséphine,
Sophie et Nicolas Drevon, son épouse, sera annoncée ultérieurement.
et sa famille et Pierre Ménal, Clémentine van der Vorm,
ses enfants, Frédéric et Florence Clavel, Marie et Alexis
Mathéo, Minia, Qu'il repose en paix.
Marie-Laure et Joël de Montalembert,
ont la tristesse ses beaux-enfants Priez pour lui.
Nouch, Dora et Gabriel, de Rémond du Chélas, ses enfants,
de vous faire part du décès de et leurs enfants,
Emilie et François, ses enfants,
Hervé et Virginie Lasseigne, ses sœurs et belles-sœurs,
David, Pierre ADIJÈS Benjamin et Hà, M. et Mme Jean Gérard,
ses 8 petits-enfants, Margot et Arthur Fulconis, ses frères et beaux-frères
Clara et Julien, M. et Mme Olivier de Vergès,
ses 4 arrière-petits-enfants Alice Lasseigne,
le 27 mars 2020, Adeline, Raphaël, M. et Mme Didier de Vergès, ses enfants et petits-enfants, vous font part
dans sa 86e année. Gabriel et Elise,
ses petits-enfants, et toute sa famille
M. Henri de Vergès en union avec du rappel à Dieu du condoléances
et Mme Noëlle Michelle, son épouse,
Il sera inhumé au cimetière Morand-Monteil, et Thierry, son fils,
Timothée, ont la tristesse
le professeur et Mme
comte Bruno
parisien de Pantin, de vous faire part de MONTALEMBERT de CERS
le vendredi 3 avril 2020, son arrière-petit-fils, Bertrand Doré,
du rappel à Dieu de Monique Lasseigne, Henri Loyrette,
à 14 heures, M. et Mme sa belle-sœur,
Jeanne Bigot Lochmann le 1er avril 2020, président de la
Ni fleurs ni couronnes. Guillaume de Vergès, et sa famille
et Marie-Paule Bigot Vallet, Mme Jean-Claude CLAVEL ses beaux-frères
à l'âge de 70 ans, Cité internationale des arts
ses sœurs, née Solange de La Forge, à Paris, à l'hôpital les membres
La famille remercie par avance et belles-sœurs, ont la tristesse de faire part de la Pitié-Salpêtrière, muni du conseil d'administration,
toutes les personnes qui leurs enfants et petits-enfants, du décès de
Jean-Charles, Odile, François, le 28 mars 2020, du sacrement des malades. Bénédicte Alliot,
prendront part à sa peine, ainsi à l'âge de 88 ans.
que les personnels médicaux Antoine du Mesnil du Buisson, Mme Romy directrice générale,
Berthe Burgelin, La cérémonie religieuse et l'équipe
pour leur dévouement Lasserre-Saint Maurice Philippe LASSEIGNE
ses beaux-frères La cérémonie religieuse aura lieu le vendredi 3 avril,
et leur bienveillance. et toute l'équipe président d'honneur
et belles-sœurs, sera célébrée ce jeudi 2 avril, à 15 heures, ont appris
de l'ACPPA Péan de la FENTISS
à 14 h 30, en l'église en l'église Sainte-Geneviève, avec une immense tristesse
de Saint-Quay-Portrieux, Fédération Nationale du Tissu, à Héricy (Seine-et-Marne) la disparition de
ont le chagrin font part du rappel à Dieu de
suivie de l'inhumation officier en union de pensée
de vous annoncer la mort,
au cimetière Bel-Air de la Légion d'honneur, et de prière
Besançon (Doubs). à l'âge de 85 ans, de Jean-Pierre DUFOUR
de Saint-Quay-Portrieux, officier avec tous ses proches et amis. André LARQUIÉ
avocat honoraire de l'ordre national du Mérite,
Mme Gérard Françoise BIGOT dans la plus stricte intimité. président de la
au barreau de Paris,
d'Auber de Peyrelongue, du MESNIL du BUISSON anne.demontalembert Cité internationale des arts
ancien membre
docteur en médecine, Des dons sont possibles @gmail.com de 2006 à 2015.
du Conseil de l'ordre, survenu le 31 mars 2020,
ses enfants, docteur en histoire, à la Fondation Covid-19
ancien secrétaire dans sa 96e année.
ses beaux-enfants, psychanalyste (Société ou à France Alzheimer.
de la Conférence,
ses petits-enfants psychanalytique de Paris) Leurs pensées vont à sa famille
En raison des circonstances, Mme Ulrika Swiderski, et à ses proches.
et ses arrière-petits-enfants de 1970 à 1994, officier de la Légion d'honneur, la crémation aura lieu dans
à Paris puis à Vannes. chevalier la stricte intimité familiale. M. et Mme Patrick Swiderski, Un hommage lui sera rendu
font part du rappel à Dieu du de l'ordre de Dannebrog,
Nous avons aimé sa lucidité Anne et Paul Elkaïm, Stella et Arthur ultérieurement.
sa nièce et son neveu, Une messe sera célébrée
général Gérard et son courage intellectuel, décédé le 28 mars 2020. ultérieurement.
d'AUBER de PEYRELONGUE son respect des personnes, sa famille et ses amis ont la tristesse
commandeur le dynamisme gai qui la de faire part du décès de
Les obsèques a eu lieu famille@lasseigne.fr
ont la douleur de faire part
de la Légion d'honneur, poussait toujours en avant,
son amour du Beau. du décès de
le mercredi 1er avril,
dans la plus stricte intimité
M. Jacques SWIDERSKI messes
le 28 mars 2020, Nous avons aussi aimé
Claudette ELKAÏM
familiale, au cimetière
juge au tribunal de commerce
de Paris,
et anniversaires
à l'âge de 84 ans, à Besançon. son regard, du Père-Lachaise, Paris (20e).
ses immenses sourires, sa voix. chevalier
La cérémonie religieuse Merci. de l'ordre national du Mérite, survenu le 30 mars 2020,
Une messe de requiem
a été célébrée chevalier à l'âge de 80 ans, à Paris.
sera célébrée ultérieurement, Une messe sera célébrée
en l'église des Fontenottes, L'inhumation a eu lieu des Palmes académiques, Les Moutiers-en-Retz, Nantes
quand les circonstances en l'église
à Montlebon (Doubs), dans la plus stricte intimité, (Loire-Atlantique).
le permettront. Saint-Jacques-du-Haut-Pas,
le mardi 31 mars 2020, au vieux cimetière d'Urville, survenu le 23 mars 2020,
Paris (5e), ce jeudi 2 avril 2020,
dans la plus stricte intimité Regnéville-sur-Mer (Manche), dans sa 91e année, Mme Ginette Legendre, Bégadan (Gironde).
Priez pour lui ! à l'intention de
familiale, en raison le mercredi 1er avril 2020. après un long combat son épouse,
des circonstances actuelles. contre la maladie. Béatrice et Marc Le Clerc, Antoine SAMARA
166, rue de Grenelle, Christine et Jacques Bureau, Xavier (†) et Betty Pagès,
Cet avis tient lieu de faire-part. 75007 Paris. Brigitte et Didier Tridard, Alain et Marie-Christine Pagès, décédé le 2 avril 2012.
Françoise et Michel Quimbert, Blandine et Alain
Caroline et Bruno Braure, Richer de Forges, Pour notre fils et frère
Compiègne. Crépy-en-Valois. Garches (Hauts-de-Seine). ses enfants,
bien-aimé parti trop tôt.
ses petits-enfants, leurs enfants, beaux-enfants Nous ne t'oublierons
Mme Catherine Cresp, Son épouse, ses arrière-petits-enfants et petits-enfants jamais notre Antoine adoré.
son épouse, Françoise Girault-Anthonioz, Jacques, Marie-José, Stéphane.
Ludovic et Aurélie Cresp, ses enfants, et toute la famille ont la très grande tristesse
Souvenirs, Messes... Delphine et Denis Gandon,
Sophie et Eric Dauge,
Benoît, Olivier, Philippe,
Marie-Agnès, ont la profonde douleur
de vous faire part
du rappel à Dieu de Granny,
Partagez le souvenir d’un être cher dans le carnet du jour Sébastien et Julie Cresp, et leurs conjoints, de vous faire part du décès du leur maman, grand-mère
ses enfants, ses petits-enfants et arrière-grand-mère,
ses 14 petits-enfants
et toute la famille
et arrière-petits-enfants,
sa famille colonel Jacques LEGENDRE Agnès PAGÈS
souvenirs
Saint-Cyr, promotion née Bonnel,
ont la tristesse ont la tristesse Général Laperrine,
de vous faire part du décès de de faire part du décès de officier de la Légion d'honneur, au château La Tour de By,
officier le 31 mars 2020, Il y a dix ans, le 2 avril 2010,
M. Michel CRESP Jean-Paul GIRAULT de l'ordre national du Mérite, à l'âge de 97 ans.
croix de la Valeur militaire, André Almo DEL DEBBIO
survenu le 28 mars 2020, survenu le 31 mars 2020, chevalier La célébration religieuse
à l'âge de 79 ans. à l'âge de 87 ans, à Garches. des Palmes académiques, aura lieu nous quittait,
dans l'intimité familiale, à l'âge de 102 ans, au terme
La cérémonie religieuse La cérémonie religieuse le vendredi 3 avril, à 9 h 30, d'une vie dédiée à la sculpture.
© Gettyimages

sera célébrée sera célébrée en l'église survenu à Nantes, au cimetière de Bégadan.

le samedi 4 avril,
dans la stricte intimité familiale
liée au contexte actuel,
en l'église Saint-Denis
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Cet avis tient lieu de faire-part.
Saint-Louis, à Garches,
dans l'intimité familiale,
le vendredi 3 avril 2020.
L'inhumation aura lieu
au cimetière de Toury
(Eure-et-Loir).
Une messe de requiem aura
lieu quand les circonstances
le permettront.
le mardi 31 mars 2020,
à l'âge de 86 ans.
Compte tenu des
circonstances particulières,
la cérémonie aura lieu dans
la plus stricte intimité familiale,
le vendredi 3 avril, à 11 heures,
au cimetière
des Moutiers-en-Retz.
Sa famille propose
que grands et petits
se joignent par la prière,
le même jour, à la même heure,
en allumant une bougie.
Château La Tour de By,
1, route de La Tour de By,
33340 Bégadan.
Une pensée est demandée
pour son épouse,
Anael Topenot Del Debbio
artiste peintre,
décédée le 7 octobre 2018.
Son fils,
Christophe-Emmanuel.

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« En Chine, le régime sort probablement
renforcé de la crise sanitaire »
PROPOS RECUEILLIS PAR
EUGÉNIE BASTIÉ £EugenieBastie
LE FIGARO.- Selon de nouvelles
estimations et témoignages, le nombre de
morts du Covid-19 à Wuhan aurait été
largement sous-estimé. Que faut-il penser
des chiffres officiels donnés par le régime ?
Jean-Pierre CABESTAN.- Je pense que les
chiffres officiels donnés par les autorités
chinoises sous-estiment l’ampleur de
l’épidémie du coronavirus, à la fois pour la
province du Hubei et pour le reste de la
Chine dans le but sans doute de favoriser
une reprise de l’économie le plus rapide-
ment possible. Certaines revues chinoises
comme Caixin le 26 mars, y ont déjà fait al-
lusion, indiquant que dans un seul quartier
(jiedao en chinois) de Wuhan, au 24 mars,
69 personnes étaient mortes du Covid-19.
Or, pour la seule zone urbaine de Wuhan, il
y a 108 quartiers : le nombre de morts serait
donc plus proche de 7 500 que de 2 531, le
chiffre donné alors par le gouvernement.
En février, au pic de la crise, le personnel
des maisons funéraires de Wuhan tra-
vaillait 19 heures par jour. De surcroît, les
autorités chinoises ont décidé de ne plus
comptabiliser les malades qui restent chez
eux et de limiter les tests, en outre difficiles
à obtenir pour des raisons logistiques. Un
épidémiologiste de Hongkong, sur la base
d’un modèle, estime le nombre de cas en
Chine à 230 000 et non 82 290, chiffre offi-
ciel au 1er avril. D’ailleurs, le même jour, le
gouvernement chinois a décidé de désor-
mais inclure les cas de coronavirus asymp-
tomatiques dans ses statistiques (1 541 of-
ficiellement le 30 mars) afin de répondre
aux préoccupations de la société chinoise
et de réduire les risques de nouvelles
contaminations. Ce que démontre cette
polémique est que la socié-
té chinoise a encore moins
confiance que nous dans
JEAN-PIERRE CABESTAN son gouvernement.
Il est probable que Pékin a beaucoup minimisé
La Chine semble sortir
le nombre de morts du Covid-19 en Chine.
de la crise. Quelle est
Pour autant, le monopole du pouvoir l’ampleur des dégâts
du Parti communiste chinois n’est nullement du point de vue
menacé, argumente le sinologue*. économique et social ?
Plongeons-nous dans de grandes œuvres
littéraires pour temps de confinement
À
moins de limiter cette
pratique au moyen de passer
le temps entre deux rêveries
à bord d’un train ou
d’occuper le bref intervalle
qui sépare le nouvel épisode
de votre série préférée du moment où vos
yeux se ferment pour la nuit, la lecture
exige persévérance et continuité.
Autrefois, seules les grandes vacances, la
maladie ou la retraite offraient la possibilité
d’aborder dans la durée certaines œuvres
au long cours, de partir pour des voyages
immobiles où l’exotisme naissait non plus
du pays de destination, mais du pays
d’origine retrouvé avec beaucoup
d’étonnement quand on reposait enfin son
livre après des heures passées entre la
Terre et la Lune ou entre la Guerre et la
Paix. La claustration subie par des millions
de Français offre une chance paradoxale
d’élargir cette opportunité à un plus vaste
lectorat, de placer la plus grande littérature
à portée du plus grand nombre.
C’est évidemment le nom de Proust,
écrivain du confinement volontaire entre
quatre murs tendus de liège, qui vient
en premier à l’esprit. D’abord parce que
le temps constitue la matière même de sa
cathédrale textuelle, ce temps à présent
comprimé ou distendu pour beaucoup
d’entre nous, modifié dans tous les cas,
DESSINS CLAIREFOND
selon que l’on combatte aux urgences sur
le front de l’épidémie ou que l’on reste
cloîtré chez soi en possession d’un pécule
d’heures soudain vacantes. Ensuite parce
qu’il a lui-même décrit ces stations dans
une dimension parallèle en ouverture de la
célèbre préface à Sésame et
les lys de John Ruskin : « Il
n’y a peut-être pas de jours
ÉRIC NAULLEAU de notre enfance que nous
La suspension du cours ordinaire des jours ayons si pleinement vécus
que ceux que nous avons cru
est l’occasion d’explorer des cathédrales
laisser sans les vivre, ceux
de mots pour y trouver intelligence et réconfort, que nous avons passés avec
raconte le chroniqueur et essayiste*. un livre préféré. » Et enfin
https://t.me/WorldAndNews
CHAMPS LIBRES
DÉBATS
L’économie chinoise a été au ralenti et tota- d’avoir fait taire et réprimé les lanceurs
lement à l’arrêt dans la province du Hubei
pendant deux mois au moins. La perte
d’activité a été de 30 à 50 % pour le premier Keqiang, officiellement responsable de la
trimestre 2020. Évidemment, certains esti-
ment qu’au deuxième trimestre l’économie
redémarrera et pourrait connaître un taux
de croissance de 8 %. Mais pour l’ensemble
de l’année, la croissance économique
chinoise sera bien inférieure aux prévisions
(6,1 %) et devrait tourner autour de 2,5 %.
Sur le plan social, les dégâts sont bien plus l’épidémie : figurez-vous qu’au moins
difficiles à évaluer : la crainte du virus et 5 millions de personnes ont quitté la région
l’isolement ont été durement ressentis par
la population ; les élèves qui doivent passer avant le 23 janvier, date de l’introduction
un examen vont être pénalisés par la sus-
pension des cours en bonne et due forme ;
beaucoup de Chinois disent que sans inter-
net, ils n’auraient pas pu supporter cette
« La comparaison avec Tchernobyl
n’est pas pertinente. Et j’ajouterais que sant tomber un cer-
Xi n’a rien d’un Gorbatchev, au contraire, tain nombre de têtes
il est le prototype d’un anti-Gorbatchev
ou si vous voulez, d’un nouveau Brejnev aux critiques expri-
épreuve ; en tout cas, il est clair qu’inter- sociaux en lançant une enquête qui a blan-
net les a aidés à la traverser et, en Chine
comme en Europe aujourd’hui, à mainte-
nir le lien social.
Politiquement, comment juger l’impact
de cette crise sur le pouvoir central ?
La réponse à cette question est malaisée,
car le système politique chinois est comme
on le sait particulièrement opaque. Le Parti
communiste est aussi passé maître pour
cacher ses faiblesses et taire, grâce à la
censure des médias et de la Toile, les criti- nommer ses propres protégés. Et il a jeté en
ques éventuelles de la population.
Je crois cependant que l’on peut avancer
plusieurs choses : le régime de parti unique
n’est en rien menacé et est probablement
sorti renforcé d’une crise sanitaire où il a
démontré sa capacité administrative à la
fois de protection et de contrôle. En revan-
che, Xi Jinping a fait l’objet de multiples
critiques, saisies au vol sur la Toile car ra- voulez, d’un nouveau Brejnev.
pidement supprimées par les censeurs. On
lui reproche en particulier d’avoir masqué
l’épidémie pendant trop longtemps,
parce que la descente sans escales, à peine
quelques pauses pour ravitaillement, du
long fleuve d’À la recherche du temps perdu
est l’une des plus mémorables expériences
intérieures qui se puissent concevoir.
Il est d’ailleurs frappant de constater
à quel point la grande forme romanesque,
telle qu’illustrée par des auteurs fort
divers, entre en résonance avec
une époque placée sous le signe du
coronavirus. Commençons par le plus
anecdotique, à savoir la domination
accrue, réclusion oblige, des séries
sur l’imaginaire planétaire. Leur
consommation augmente en flèche
par tous écrans interposés, chaînes
de télévision ou plateformes, parfois sous
des formes extrêmes comme le « binge-
watching » qui consiste à visionner jusqu’à
l’intégralité d’une saison en une seule fois.
Le bon moment pour rappeler à tous les
accros que la meilleure série de l’histoire
est française, disponible sur papier, et
s’intitule Le Comte de Monte-Cristo, signée
d’Alexandre Dumas et Auguste Maquet.
Et que tout Hollywood réuni peut toujours
s’accrocher pour concevoir pareille suite
de rebondissements, au sujet desquels
on ne recommandera cependant pas
le « binge-reading », tant monte le regret
à mesure que diminue le nombre
de pages encore à tourner.
Certains amoureux de la chose écrite, et
je suis du nombre, placent L’Homme sans
qualités de Robert Musil au plus haut des
cieux littéraires. Résumé : en août 1913,
un cercle de personnalités viennoises
baptisé « l’Action parallèle » s’interroge
sur la meilleure manière de célébrer
les soixante-dix années du règne de
François-Joseph, ce qui suppose avant
tout de déterminer sur quelle idée forte
repose la double monarchie, ce qui unit
en profondeur des sujets d’origines
très diverses. Faute d’y parvenir, Ulrich
et les autres échouent dans leur tâche.
Comment ne pas voir que « l’archipel
d’alerte et de ne s’être rendu à Wuhan qu’à
la mi-mars, laissant le premier ministre Li
lutte contre l’épidémie, et d’autres y aller
au plus fort de la crise et lorsque le danger
était le plus grand.
De même, les responsables locaux de la
province du Hubei et de la ville de Wuhan
portent une importante responsabilité
dans la gestion initialement défectueuse de
contaminée, dont certains pour l’étranger,
du confinement.
Pour autant, rien ne démontre pour l’ins-
tant que Xi Jinping a été affaibli par cette
crise : il est certainement plus contesté, y
compris au sein du
Parti. Mais il a su réa-
gir rapidement en fai-
au Hubei et à Wuhan ;
il a aussi su répondre
» mées dans les réseaux
chi et pour ainsi dire réhabilité le principal
lanceur d’alerte, le Dr Li Wenliang, mort du
Covid-19 début février ; il s’est finalement
rendu à Wuhan afin d’y faire l’éloge de la
population et de répondre à l’émotion
qu’avait provoquée au sein de celle-ci la
campagne de remerciements du Parti et de
son principal leader qu’avait lancée peu
avant les autorités de la ville. Enfin, Xi reste
clairement maître du jeu : aux postes laissés
vacants au Hubei et Wuhan, il a réussi à
prison ceux qui appelaient à sa démission,
par exemple l’activiste Xu Zhiyong et
l’homme d’affaires Ren Zhiqiang. Toutes
ces raisons me conduisent à penser que la
comparaison avec Tchernobyl n’est pas
pertinente. Et j’ajouterais que Xi n’a rien
d’un Gorbatchev, au contraire, il est le pro-
totype d’un anti-Gorbatchev ou si vous
Au plan international, la Chine
s’est distinguée en mettant en avant
français » est aujourd’hui confronté
au même défi qu’autrefois la mosaïque
austro-hongroise ? À la défaveur du
coronavirus, en dépit des actes et des
paroles de solidarité, nos îles s’éloignent ou à leurs occupations en entraînant avec
davantage encore les unes des autres.
Aux multiples fractures déjà recensées
s’ajoutent de nouvelles oppositions et
parfois même confrontations entre des
smicards en première ligne (infirmières,
caissières, livreurs, chauffeurs routiers…) chez son père, instituteur à Montmartre,
et des professions moins exposées et
mieux payées, entre premiers et derniers
de cordée, entre provinciaux et parisiens
réfugiés par milliers dans leurs résidences mais que ses confidences ont maintes fois
« La vaste fresque des « Hommes
de bonne volonté » de Jules Romains était né. Si unanimité
invite à méditer sur la « fraternité »
inscrite au fronton de nos édifices
secondaires au risque d’exporter
la pandémie dans les bagages. Lire
ce monumental roman ne revient pas
seulement à découvrir un chef-d’œuvre,
mais aussi à réfléchir sur l’urgence de
recomposer une nation, faute de quoi
triomphera ce que Musil nomme
« l’anarchie des atomes ». Et pour situer
cette urgence, qu’il suffise de dire
que les palabres de « l’Action parallèle »
précèdent d’à peine un an
l’engloutissement de l’Autriche-Hongrie
dans la Première Guerre mondiale.
Un remède à ce poison de la discorde
peut se trouver dans une entreprise
tentaculaire, modestement définie par son
auteur comme « un roman de dimensions
inusitées » : Les Hommes de bonne volonté
de Jules Romains. Le confinement,
l’occasion ou jamais de se lancer dans les
vingt-sept volumes nés d’une illumination
ainsi évoquée par Jean d’Ormesson lors
de son discours de réception à l’Académie
française où il fut élu au fauteuil de Jules déborde » (Stock, 2018).
jeudi 2 avril 2020
LE FIGARO
25
l’aide matérielle qu’elle a apportée
notamment à l’Italie. Comment
interpréter ce geste ?
Après avoir été à l’origine de l’épidémie, la
Chine tente de récupérer la situation à son
avantage. Elle profite aussi de l’absence de
tout engagement international des États-
Unis et des retards de l’Union européenne
pour à la fois se montrer généreuse, pro-
mouvoir ses méthodes et défendre son ré-
gime autoritaire supposé plus efficace dans
la gestion de telles crises, même si les faits
ont démontré l’inverse.
Donald Trump ne cesse de parler de
« virus chinois ». Le fait que l’épidémie
trouve son origine en Chine peut-il lui
coûter sur la scène internationale ?
Trump a qualifié le virus de « chinois »
parce que le porte-parole du ministère
chinois des Affaires étrangères, donc une
personnalité on ne peut plus officielle, a
accrédité la thèse d’un complot des États-
Unis, dont les militaires auraient apporté le
virus à Wuhan. Il a donc rendu à Xi la
monnaie de sa pièce. En outre, ce genre de
discours nuit directement au soft power
que Pékin s’efforce dans le même temps de
déployer. L’origine probable du virus met
en lumière le caractère encore très tradi-
tionnel de certaines pratiques alimentaires
en Chine (la consommation de viande
d’animaux sauvages) qui tranchent avec la
volonté de modernité et de puissance de
ses dirigeants. Le gouvernement de Pékin
tente de mettre en place une « route de la
soie sanitaire » avec les pays qui acceptent
l’aide chinoise comme l’Italie. Mais le ra-
lentissement économique chinois va
contribuer à réduire la voilure d’un projet
ambitieux qui est déjà depuis deux ans
revu à la baisse. Plus largement, les nou-
veaux risques que cette crise sanitaire a
mis en lumière vont favoriser un décou-
plage plus net des économies chinoises et
occidentales et conduire de nombreux
pays à revoir la manière dont ils conce-
vaient la mondialisation et ses bienfaits.
*Directeur de recherche au CNRS
et professeur à l’Université baptiste
de Hongkong. Auteur de « Demain
la Chine : démocratie ou dictature ? »
(Gallimard, 2018, prix Guizot 2019).
Romains : « En ce soir d’automne parisien,
dans la rue d’Amsterdam pleine de couleur
et de mouvement, encombrée de voitures et
de passants qui se rendaient à leurs plaisirs
eux, dans une sorte de mouvement brownien
invisible et pourtant réel, leurs pensées
innombrables, leurs ambitions, leurs
craintes, leurs rêves à peine formulés,
le jeune Louis Farigoule, qui rentrait
eut une illumination : il éprouva,
en une véritable intuition d’ordre mystique
dont il ne reste aucune trace écrite,
évoquée, un sentiment de
fraternité et de totalité. »
L’unanimisme littéraire
n’est pas et ne sera
jamais français,
» se pourrait-il que
l’unanimisme connaisse
un renouveau ? En plus d’en goûter
l’abondance romanesque, la vaste fresque
des Hommes de bonne volonté invite
à méditer sur la « fraternité » inscrite au
fronton de nos édifices et sur la « totalité »
perdue, fragmentée, éparpillée au gré
des intérêts particuliers, égoïstes et
concurrents.
Au temps du coronavirus, lire peut
ainsi vouloir dire beaucoup plus que lire.
D’enfin se plonger dans certaines œuvres
hors normes, autour desquelles on s’est
parfois contenté de tourner par manque de
loisir, permet non seulement de renouer
avec les vertus malmenées par la
modernité de l’attention, de l’intériorité et
de la persistance, de décrocher des écrans,
mais aussi d’identifier certains thèmes
anciens qui continuent de travailler en
profondeur notre présent. En matière de
lecture non plus, le jour d’après ne saurait
tout à fait ressembler au jour d’avant.
A
* Dernier ouvrage paru : « Quand la Coupe
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

26 CHAMPS LIBRES
OPINIONS
CHRONIQUE
Luc Ferry
luc.ferry@yahoo.fr
Mai 68 à l’envers

N
www.lucferry.fr
on, nous ne sommes pas
en guerre. La métaphore
visait surtout à faire taire
les critiques, à obtenir
qu’on « fasse bloc »
derrière le « chef ».
Ni restrictions alimentaires,
ni mobilisation générale (hormis dans
la santé ou la sécurité), ni sacrifice
suprême en vue (en 1917, il y eut parfois
plus de 25 000 morts en une seule
journée !), plutôt démobilisation dans
les familles et « souci de soi » sur fond
d’un confinement accepté de bonne
grâce par 95 % des Français.
Si l’on veut décrire ce que nous
vivons, ce n’est ni 1914, ni 1940, mais
plutôt l’inverse de Mai 68. À l’époque
tout s’est arrêté aussi. Il y avait des
millions de manifestants, trente fois
plus que de « gilets jaunes ».
L’économie était comme morte. Mais
les gens étaient dehors, ils refaisaient
le monde, dialoguaient sans fin,
militaient pour la libération sexuelle
et l’Internationale. On faisait la fête
dans les théâtres, les universités,
les cafés. On se croyait chez Dionysos,
on se retrouve chez les effondristes.
Douche froide !
À l’unisson de ces écolos que le krach
économique enchante parce qu’il nous
oblige à la décroissance, ce sont
les souverainistes qui, tout en la
déplorant, se réjouissent de la situation
actuelle. La critique de la
mondialisation et des sociétés ouvertes
a le vent en poupe. On leur accordera
volontiers que la nation est bien
évidemment le lieu de nos solidarités.
Reste que la coopération mondiale est
vitale pour nous. La Chine a sa part
de responsabilité dans la crise, mais
sans les masques et les respirateurs
qu’on lui achète, nous serions dans
la panade la plus épaisse.
La première leçon de cette crise,
c’est l’invraisemblable retard pris par
nos politiques. Nos dirigeants n’ayant
aucune culture scientifique, ils ont eu
un mal fou à comprendre les données
médicales et statistiques du problème.
Face à la complexité du monde,
ce handicap n’est plus possible.
Le président Macron, sous la pression
de chefs de partis qui ne voyaient rien
venir, a maintenu les élections.
Or la question n’était pas seulement
celle des normes de sécurité dans
pendant des semaines, sur les
frontières et sur les masques. Je ne fais
pas ces observations pour stigmatiser,
c’est trop tôt ou trop tard, mais parce
qu’il est urgent, s’agissant notamment
des grandes écoles, de repenser
la formation des élites et d’introduire
dans les premiers cycles universitaires
un grand cours obligatoire d’histoire
des sciences. La sociologie électorale
et la com, ça ne suffit pas !
La deuxième leçon, elle aussi déjà
visible, c’est que le confinement,
malgré internet, oblige au repli sur
cette famille encore honnie dans les
années 1968, comme en témoignait
parmi d’autres le fameux film de Ken
Loach, Family Life. Autant les petits-
bourgeois qui se la jouaient
révolutionnaire étaient d’une
effroyable myopie sur les effets mortels

@
les bureaux de vote (des assesseurs sont
aujourd’hui contaminés), mais d’une
100 000 citations
et proverbes sur evene.fr ENTRE GUILLEMETS décision qui posait quatre problèmes
lourds de conséquences : autoriser
les trajets de dizaines de millions
2 avril 1791 : Mirabeau, le plus grand orateur de la Constituante, meurt prématurément. d’électeurs entre ces bureaux et leurs
domiciles était pure folie ; le message
nous demandant « en même temps »
Correspondance secrète de sortir et de rester chez nous était
de Mirabeau avec Louis XVI illisible ; il était d’emblée évident que
le confinement stopperait la campagne,
Je promets au roi rendant impossible le deuxième tour ;
une abstention artificiellement
du marxisme-léninisme, autant le repli
actuel sur la sphère privée risque
à terme d’être délétère. J’ai toujours
aimé et défendu la famille. J’ai expliqué
dans mes livres les raisons pour
lesquelles elle était le lieu d’une
admirable sacralisation de l’humain,
elle-même liée à l’histoire du mariage
d’amour. Mais le travail est
l’indispensable complément de la vie
privée. S’il est parfois fastidieux, voire
pénible, il reste malgré tout le principal
vecteur d’une socialisation que

loyauté, zèle, activité, provoquée fausse les résultats, le télétravail ne saurait remplacer.
BRIDGEMAN IMAGES/LEEMAGE

ce qui est antidémocratique. Avec le confinement, l’alcoolisme

énergie et un courage
Du reste, si Emmanuel Macron avait
eu le cran de résister aux injonctions
des chefs de parti, il aurait raflé la mise
dont peut-être on est une semaine plus tard, car les chiffres
de l’épidémie lui auraient vite donné
et les violences conjugales augmentent
de manière inquiétante. Espérons que
ceux qui plaidaient depuis 1968 pour
un revenu universel de base finiront
par comprendre que la société

loin d’avoir une idée» raison. Comme l’a fort bien dit Alexis
Brézet, non pas après coup, mais bien
du temps libre à l’infini qu’ils appellent
de leurs vœux serait aussi
avant, maintenir ces élections était tout mortellement vide que tragiquement
simplement ubuesque. Même flou individualiste.

Comment Byzance se releva de la peste

«
I
l y eut en ces temps-là une
maladie contagieuse, qui
manqua de peu d’emporter
la totalité du genre
humain ». C’est par ces
mots terribles que
l’historien byzantin du VIe siècle
Procope entame un tableau
apocalyptique de la peste de 541, dite
peste de Justinien du nom de l’empereur
de Constantinople dont le long et riche
règne courut de 527 à 565.
Ce fut une peste authentique et non
une épidémie de variole : les symptômes
crûment décrits par Procope ne laissent
pas de place au doute : « Il paraissait
un charbon à la cuisse, ou à la hanche,
et quelquefois sous l’aisselle, ou à l’oreille.
Voilà ce qui arrivait presqu’à tous ceux qui
étaient surpris de ce mal » écrit-il.
DESSIN CLAIREFOND
emporté chaque jour pendant trois mois
cinq mille personnes et dix mille
sur la fin. L’historien byzantin estime
le nombre de morts dans la capitale
orientale de l’Empire à trois cent mille,
soit entre 40 et 50 % de la population.
Les plus graves conséquences
économiques étaient liées
à la dépopulation des campagnes qui
n’étaient pas épargnées et au manque
de main-d’œuvre. La production agricole
chuta, mais, pire encore, le cynisme fiscal
bien connu des Romains fit peser sur les
exploitations encore en état de produire
les impôts des propriétés voisines
dépeuplées. L’inflation, due à la pénurie,
provoqua un triplement des prix. Elle ne
fut enrayée que difficilement, notamment
grâce à la politique interventionniste de
Justinien qui régula les prix par décret.
ce que cette thèse avait d’excessif
et même parfois de farfelu (Le Figaro
du 9 mars 2019). Il est parfaitement exact
qu’une série impressionnante
de séisme et de phénomènes naturels
inhabituels se produisirent peu de temps
avant la peste et pendant son
développement, par exemple le fameux
voile qui obscurcit le soleil durant dix-
huit mois en 536. Il est non moins exact
que ces phénomènes ont entraîné
des destructions de récoltes et donc
des mouvements de population. Mais
rien ne prouve à ce jour que des rats
porteurs du virus aient migré
en même temps que les populations
ou les barbares entrés à cette occasion
dans les frontières de l’Empire.
Demeure enfin la grande question :
peut-on croire qu’une épidémie
davantage de la peste. Au VIe siècle,
l’école de Gaza, en Palestine, bien
connue désormais grâce à des travaux
récents, réinventa la rhétorique
d’apparat autour de son chef Chorikios.
La littérature latine, de son côté, fit
fructifier l’héritage de Boèce
et de Cassiodore jusqu’en Espagne avec
Isidore de Séville. Un peu plus tard
à Byzance, au IXe siècle, le patriarche
Photios est un témoin précieux
de la vitalité des études historiques
et philologiques et un grand professeur
d’histoire littéraire qui nous a laissé
le compte rendu critique de ses vastes
lectures dans une œuvre inestimable
pour les historiens et qui porte ce titre
si éloquent qui ravit les lecteurs
de Jorge Luis Borges : La Bibliothèque.
Ainsi, la cité frappée par la peste

Tout commença à Péluse, dans
les bouches du Nil, en Égypte,
et la pandémie, importée d’Abyssinie,
connut, selon les spécialistes d’histoire
épidémiologique, au moins dix-huit
épisodes ou résurgences entre 541 et 750,
soit au cours de deux siècles et demi qui
STÉPHANE RATTI virent, au cours de crises
de quelques années, toutes les régions de
L’historien de l’Antiquité l’ancien Empire romain être touchées
tardive* raconte combien tour à tour, de la Syrie à l’Espagne,
Byzance, durement éprouvée de la Mésopotamie à l’Afrique du Nord
par la peste au VIe siècle, selon une voie de progression bien
observée qui suivait les littoraux
retrouva ensuite un rôle et les fleuves. Procope rapporte ainsi que
politique, économique la peste « avançant toujours, et avec une
et intellectuel éminent démarche réglée, courut toute
pendant plusieurs siècles. la Terre. Elle semblait garder une mesure
Les civilisations peuvent égale, s’arrêter un certain temps en
connaître un nouvel essor chaque pays. Elle s’étendit jusqu’aux
nations les plus éloignées, et il n’y eut point
en réaction aux pandémies de coin, pour reculé qu’il pût être,
les plus cruelles, démontre où elle ne portât sa corruption. Elle n’en
l’érudit. exempta ni île, ni montagne, ni caverne ».
À Constantinople la peste, selon
Procope, qui était alors sur place, aurait
On ignorait généralement à l’époque
la possibilité de la contagion, si bien que
les médecins conseillaient à tous
d’appliquer le fameux aphorisme
attribué à tort au médecin Galien (mort
vers 201, il écrivait en grec) qui
préconisait la fuite : « Fais vite, fuis au
loin et ne reviens pas avant longtemps ! »
On retrouve trace de cette formule
abrégée en trois lettres sur les portes des
pestiférés au Moyen Âge : CLT pour les
trois mots latins: Cito ! Longe ! Tarde !
soit « Vite ! Loin ! Tard ! ». Les centres
urbains se sont de fait vidés au profit des
campagnes, où les citadins ne furent pas
toujours bien accueillis.
On s’est depuis longtemps interrogé
sur les causes de la peste de 541. Il est bon
d’y revenir ici car un ouvrage
d’un universitaire américain connut
ces derniers mois un certain succès
commercial en liant, en amont, la peste
de Justinien à un refroidissement
spectaculaire de la planète et, en aval, au
supposé déclin de l’Empire romain. Nous
avons pu dire dans ces colonnes
affaiblisse une civilisation au point de
provoquer sa disparition ? L’empire
de Justinien, s’il connut alors un frein
dans la reconquête de l’unité perdue
entre l’Orient et l’Occident, ne mourut
pas de la peste. Les échanges
économiques reprirent
et Constantinople prit la place de Rome
comme métropole importatrice de blé,
de vin, d’huile. Si bien des cités comme
la capitale des juristes, Beyrouth,
ne se relevèrent jamais vraiment
de l’épreuve de la peste, d’autres
comme Thessalonique, Césarée, Apamée
retrouvèrent une vraie prospérité.
À Constantinople même on put voir
longtemps les stigmates des destructions
et de l’appauvrissement, mais
Sainte-Sophie dont la coupole s’était
effondrée fut reconstruite, entre 558
et 562, plus haute et plus belle. L’art
byzantin n’est lui non plus pas mort
de la peste et après les églises couvertes
de mosaïque, de Byzance à Ravenne,
l’on vit fleurir l’art nouveau des icônes.
La littérature grecque ne mourut pas
deviendrait quelques décennies plus
tard, et pour plusieurs siècles, la plaque
tournante par laquelle transiteraient non
seulement biens et marchandises, mais
surtout manuscrits et livres.
On viendrait de partout chercher
à Byzance les œuvres des auteurs
du passé, soigneusement recopiés
et archivés dans les bibliothèques puis
les monastères. Les lettrés et les érudits
deviendraient les promoteurs
de nouveaux échanges culturels, actifs
dans les deux sens, d’Orient en Occident
et inversement. Rien de moins confiné
que le monde byzantin qui survécut pour
longtemps à la peste de Justinien.
*Agrégé de lettres classiques,
le professeur des universités est l’auteur
de nombreux ouvrages remarqués,
comme « Le Premier saint Augustin »
(Les Belles Lettres, 2016) et « Les Aveux
de la chair sans masque » (Éditions
universitaires de Dijon, 2018), analyse
de l’interprétation discutable, par Michel
Foucault, de textes des pères de l’Église
sur la sexualité.

“Sans la liberté de blâmer il n’est point d’éloge flatteur” Beaumarchais

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À la Castellane, les dealers déconfinés
Dans la cité des quartiers nord
de Marseille, les habitants s’efforcent
de respecter le confinement, alors
que les « jeunes » poursuivent leurs trafics.
PATRICK SAINT-PAUL £@psaintpaul
ENVOYÉ SPÉCIAL À MARSEILLE
COVID-19 L’imposante tour K, qui mar-
que l’entrée de la cité de la Castellane, do-
mine la mer Méditerranée et offre une vue
imprenable sur le port. L’endroit, qui
grouille d’activité en temps normal et qui
est réputé comme étant l’un des plus gros
points de vente de stupéfiants dans les
quartiers nord de Marseille, est presque
désert. Installé dans son fauteuil couleur
crème, tout de noir vêtu, portant un
masque noir et une casquette de la même
couleur, un « chouffe » fait le guet, prêt à
prévenir son réseau de deal de l’arrivée de
la police.
Étrangère à la cité, notre voiture est re-
pérée sur-le-champ. D’autres jeunes ob-
servent à distance, prêts à intervenir si be-
soin. L’avenue Yves-Giraud, qui mène vers
l’intérieur de la Castellane, est barrée par
un caddie de supermarché. Trois jeunes,
« masqués », gèrent le barrage. Nous fai-
sons demi-tour et entrons par l’avenue
Henri-Roure. Nous nous garons devant la
poste. Un jeune dealer de drogue en survê-
tement s’approche de la voiture et fait si-
gne de baisser la vitre. « T’as besoin d’un
truc ? Tu veux du shit, frère ? », demande-t-
il. « Merci, je fais mes courses au magasin
d’alimentation », lui répondons-nous en
nous dirigeant vers le petit commerce.
Revêtue d’une combinaison en plastique
blanc, de gants et d’un masque, Saleha, la
charismatique patronne, filtre les entrées
de sa supérette, pour faire respecter les rè-
gles de distanciation. « J’ai eu le temps de
revenir d’un voyage au Vietnam, dit-elle
avec un fort accent marseillais. Peuchère,
que j’étais plus rassurée là-bas ! Ils ont tous
des masques et des gants. » Un client ado-
lescent réclame un café. « Allez, va dehors,
je vais te le servir à l’extérieur », ordonne-t-
elle. « On veut pas que ça devienne comme
en Italie, ici, peuchère, lâche-t-elle en se
tournant vers nous. Tout le monde a peur du
virus, ici. »
Un autre client, Khader, intervient. « À
New York, ils sont 3 000 à se prendre des sel-
fies devant le bateau-hôpital. Et après, on se
moque de nous parce que, soi-disant, on ne
respecte pas le confinement ! », s’exclame-t-
il. Âgé de 56 ans, cet employé municipal qui
habite la Castellane depuis 1974 sort son at-
testation et affirme ne pas être sorti de chez
lui depuis deux jours. « Les
gens respectent le confinement,
ici. Les rues sont vides par
rapport à d’habitude, affirme
Khader. Si on respecte pas les rè-
gles, c’est l’anarchie. » Et les jeunes ?
« Les jeunes, c’est un autre problème »,
dit-il, avant de changer de sujet alors que
des guetteurs se sont approchés pour écou-
ter. « Plus on va se confiner à la maison, plus
on va battre le corona, coupe Saleha. Je le dis
à tout le monde, y compris aux jeunes. »
Les clients de la supérette se plaignent du
manque de médecins à la Castellane, qui
s’est muée peu à peu en désert médical. Il y
a vingt ans, ils étaient encore sept praticiens
À TRAVERS
à exercer dans cette cité de 7 000 résidents,
contre un seul aujourd’hui. « Les cabinets
médicaux se sont installés plus loin, et on est
LA FRANCE
accueillis dans de meilleures conditions, mais
il faut prendre le bus pour consulter. Et, en ce
moment c’est pas simple, raconte Saleha.
CONFINÉE
Tenez, ce matin, il y a eu deux morts dans la
cité. Personne ne sait de quoi, et il n’y a pas de
médecins pour rassurer les gens. »
https://t.me/WorldAndNews
Chauffeur de bus municipaux, de trans-
ports d’enfants et de personnes âgées,
Khader a cessé le travail le 16 mars et s’est
confiné dans son petit appartement avec
MARSEILLE ses trois enfants âgés de 5, 9 et 12 ans.
« Je fais l’école à la maison, je tente d’ins-
truire les enfants comme je peux, dit-il. On
fait des jeux de société, et il y a aussi la télévi-
sion et Netflix pour les distraire. On regarde
pas trop les chaînes d’information, parce que
quand on voit des gens se battre pour acheter
des pâtes ou du papier toilette, on a l’impres-
sion que le pays est en guerre. Et puis, on voit
ces querelles de clocher pour savoir si le pro-
fesseur Raoult est un charlatan ou un génie.
On s’informe comme on peut. Même les jeu-
nes qui ne croyaient plus à la politique écou-
tent les responsables. Là, on est tous recen-
trés sur le problème du Covid-19. »
Certaines familles nombreuses sont en-
fermées dans des appartements parfois in-
salubres qui ne sont pas conçus pour cela. À
la supérette, on cite l’exemple d’une fa-
mille de sept personnes dans un T3. Les
chambres servent de dortoirs, on y étale les
matelas la nuit. La salle de séjour sert de
salle commune. On regarde la télévision,
on y prend ses repas, et les enfants y font
leurs devoirs. « Les gens du quartier avaient
peur qu’on ferme la supérette, dit Saleha, qui
s’interrompt pour vendre cinq feuilles de
papier à rouler à un jeune en lui demandant
On a peur
de rien, ici.
On a pas peur
du virus. C’est
une maladie
de Blancs.
Ici, ça change
rien.
C’est business
comme
avant » temps. On continue de patrouiller dans les
de ne pas entrer dans la boutique. Si on n’a
pas de voiture, on ne peut pas aller faire ses
courses chez Carrefour. Et la plupart des
gens ici n’ont pas de voiture. » Autre problè-
me : avec le confinement, les aides alimen-
taires fournies par les associations ont cessé
du jour au lendemain, alors que 50 % de la
population en dépend. La sénatrice des
quartiers nord, Samia Ghali, a déposé un
amendement pour mettre en place dans les
quartiers défavorisés des cellules d’aide
alimentaire d’urgence.
Un adolescent pose son joint sur le re-
bord de la fenêtre à l’entrée et s’invite dans
la conversation à l’intérieur. « C’est mieux
que les débats sur BFM, ici, se réjouit-il.
Alors, écoutez, le journaliste : on le vit mal, ce
confinement. On peut pas rester chez nous,
on veut pas écouter ces ordres. On était dans
la rue avec les amis, on jouait au foot. On est
que des humains, et c’est humain, d’attraper
un microbe. » Avant de nous laisser partir,
Saleha nous conseille d’éviter les « jeunes »
de la cité. « Si vous avez un problème, vous
m’appelez », dit-elle.
Nous faisons quelques pas à la sortie et
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
27
Un « chouffe » (guetteur) monte
la garde à l’entrée de la Castellane,
prêt à alerter son réseau de deal
à l’arrivée de la police. LE FIGARO
passons sous un porche, où est garée une
voiture, pour accéder au parvis qui donne
sur la mer. Les deux dealers installés à
l’avant tirent la capuche de leur sweat-
shirt pour masquer leur visage et bondis-
sent de leur véhicule. « Vas-y, tu veux quoi,
ici ? », apostrophent-ils en nous emboîtant
le pas. On leur demande comment se passe
le confinement pour eux. « Vas-y, il y a pas
confinement, ici, dégage ! », nous répond
l’un, sur un ton menaçant.
L’adolescent de la supérette a repris son
joint en sortant et intervient. « C’est un
journaliste. » « Vas-y, ferme ta gueule, toi.
On t’a dit de pas parler », lui répond l’un
des dealers. « Il a un truc dans la poche.
C’est une caméra, il filme en cachette. » De la
poche, nous sortons une canette de Coca
Zéro acheté à la supérette. « Vous avez déjà
été filmés avec une canette ? » Et d’essayer à
nouveau : « Alors, ça change quoi, ce confi-
nement pour vous ? Vous n’avez pas peur du
virus ? » « Vas-y, dégage ! On a peur de rien,
ici. On a pas peur du virus. C’est une maladie
de Blancs. Ici, ça change rien. C’est business
comme avant. Casse-toi. Va voir dans les
banlieues à Paris ! » Une dizaine de jeunes
sont maintenant regroupés autour de nous.
De plus en plus agités, ils cherchent à inti-
mider. « C’est quoi, la marque de tes lunet-
tes ? Vas-y, donne », lance l’un. « Vas-y
prends ta voiture de merde et casse-toi, si-
non on la brûle », menace un autre.
Renonçant à l’idée de les faire poser pour
une photographie de groupe, nous déci-
dons de partir. Lorsque nous repassons
pour aller vers la sortie, une dizaine de jeu-
nes bondissent sur le véhicule et frappent la
carrosserie. L’un s’accroche à la portière,
l’autre au coffre, avant de lâcher prise.
Nous faisons le tour de la cité par l’extérieur
pour prendre une photographie du
« chouffe » devant la tour K… avant d’être
pris en chasse par deux voitures jusqu’à
l’autoroute. « Dans les quartiers nord, le
confinement n’est pas respecté, commente
Rudy Manna, secrétaire départemental du
syndicat Alliance. Les dealers veulent conti-
nuer de faire leur business et considèrent que
c’est une maladie de Blancs. Aujourd’hui, les
policiers sont mobilisés pour faire respecter
le confinement. Ça prend 80 % de notre
cités. On essaie d’expliquer aux dealers
qu’ils vont emboucaner le monde et qu’ils
risquent de donner le virus à leurs parents et
leurs frères et sœurs. Mais ils ne veulent rien
entendre. »
Dans le centre-ville, seuls quelques vé-
hicules sont visibles sur des boulevards ha-
bituellement surchargés. Le Vieux-Port est
désert, tout comme la Corniche et la Cane-
bière. « Pour une ville comme Marseille, dont
tout le monde pensait qu’elle ne respecterait
pas le confinement, cela se passe plutôt bien,
souligne le préfet de police, Emmanuel
Barbe. Hormis à Noailles et Belsunce, qui
sont des lieux de regroupement où la popula-
tion a du mal à respecter les consignes. Dans
les quartiers sensibles, bien que la mission
soit recentrée sur le confinement, on ne laisse
pas se réinstaller le trafic. Les trafiquants de
drogue ne respectent pas la loi en général et
c’est aussi vrai pour le confinement. Mais
leurs affaires sont perturbées. Les acheteurs
se déplacent moins pour acheter dans les ci-
tés et les dealers ont des problèmes de logisti-
que et de ravitaillement. » ■
A
RETROUVEZ DEMAIN :
Les vignes de Rully, en Bourgogne
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merci
à tous
les héros
des
quotidiens
Nous souhaitons témoigner notre reconnaissance aux dépositaires de presse
et à l’ensemble des marchands de presse qui assurent
tous les jours la distribution de nos journaux et de nos magazines
dans des conditions particulièrement difficiles.

Le Figaro salue l’engagement et le courage

de ces acteurs au service de nos lecteurs.

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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO - N° 23 523 - Cahier N° 2 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

> FOCUS
lefigaro.fr/economie CHÔMAGE
PARTIEL : DÉJÀ
3,6 MILLIONS
AUTOMOBILE TÉLÉVISION DE SALARIÉS
CHUTE DES VENTES, USINES À LES CHAÎNES Depuis le début de la crise liée au
L’ARRÊT : LES CONSTRUCTEURS ATTIRENT DE NOUVEAU coronavirus, plus de 337 000 entre-
DANS LA TOURMENTE PAGE 33 LES JEUNES PAGE 36 prises, représentant peu ou prou
3,6 millions de salariés, ont deman-
dé à bénéficier du dispositif de chô-

économie
mage partiel, a annoncé mercredi
Muriel Pénicaud. En l’espace de cinq
jours, ce sont ainsi pas moins de
1,4 million de salariés supplémentai-
res qui ont été placés en activité
partielle, l’autre nom de la mesure
dont l’exécutif a fait son fer de lance
pour préserver l’emploi. Et ce, pour
reprendre les mots du président de
la République, « quoi qu’il en coûte ».
Concrètement, le chômage partiel
permet à une entreprise de mainte-
nir, grâce à une indemnisation de
l’État, environ 84 % du salaire net de
ses salariés. Les entreprises dispo-
sent de trente jours pour déposer
leur demande, avec effet rétroactif,
auprès des services du ministère du

La pandémie
Travail. Le dispositif permet avant
tout d’éviter les licenciements. Car
c’est bien là le nerf de la guerre : plus
les employeurs auront recours au

provoque un choc
chômage partiel, plus les compé-
tences seront préservées dans les
entreprises et l’économie pourra
redémarrer rapidement.

pétrolier inédit
La facture de ce dispositif massif de
protection de l’emploi, qui concerne
désormais un salarié sur cinq, va
être lourde et sans nul doute dé-
passer les 8,5 milliards d’euros bud-
La guerre des prix déclenchée par la Russie et l’Arabie gétés dans le projet de loi de finan-
ces rectificative. Au rythme actuel
saoudite et l’épidémie de coronavirus ont provoqué une de progression du nombre de béné-
ficiaires, la note finale pourrait en
chute historique du baril. Rien ne laisse imaginer une
STOCK.ADOBE.COM, JACQUES WITT/SIPA,

effet atteindre sur trois mois les…

remontée à court terme. Les producteurs américains 11 milliards d’euros. « Ces coûts sont
un investissement, il en va de notre
de pétrole de schiste sont au bord de la faillite. PAGES 30 ET 31 rebond pour repartir le plus vite
possible après la crise », a estimé la
ministre du Travail. Sans, « le coût
serait encore plus important », du
fait d’un « chômage massif », a-t-
elle encore complété. W. P.

COMMUNIQUÉ FINANCIER | 1er avril 2020 WWW.SYNERGIE.COM

L'HISTOIRE
Daniel AUGEREAU

La confection de masques, nouveau

Président du Directoire

RÉSULTATS ANNUELS 2019

business pour des milliers de Cubains Chiffre d’affaires 2.642M€ – Résultat net : 63,4M€

C’
Le Directoire de SYNERGIE, sous la Présidence de Consolidés - en M€ 2019 2018
est la révolution et les médias écrits officiels donnent 1er M. Daniel AUGEREAU, s’est réuni le 30 mars 2020 et
Chiffre d'affaires 2.642,3 2.551,1
des masques. Les Cubains, régulièrement des conseils sur la manière Groupe français a arrêté les comptes annuels au 31 décembre 2019.
Les procédures d’audit de ces comptes ont été réalisées Ebitda 138,5 137,2
indépendant de
désormais largement de réaliser les « nasobucos », mais aussi services RH et le rapport correspondant est en cours d’émission. Résultat opérationnel courant* 121,7 128,4
confinés pour cause de lutte sur les précautions sanitaires à prendre Résultat avant impôts 112,6 117,6

contre le coronavirus, avant de pouvoir les réutiliser. Leur port 5e CHIFFRE D’AFFAIRES DE 2.642,3M€
SYNERGIE, cinquième groupe européen en Gestion des
Charge d'impôt (49,3) (35,1)
Réseau Résultat net** 63,4 82,5
Ressources Humaines affiche un chiffre d’affaires de
se sont lancés depuis une quinzaine est obligatoire lors des rares sorties européen
2.642,3M€ en 2019, en hausse de 3,6% par rapport à 2018 * Avant amortissement et dépréciation des incorporels
de jours dans la confection de masques autorisées dans des rues, aujourd’hui 17 (+2% à périmètre et devises constants). ** Impact de la transformation du CICE sur le résultat net : -20,4M€

En France, il s’établit à 1.280,7M€ en croissance de 6% (4,6%

chirurgicaux artisanaux. Le son des
machines à coudre à pédale se mêle à celui
de la salsa dans les quartiers. Objectif
des ménagères devenues couturières ?
Fabriquer des masques en tissu vendus
entre 20 pesos cubanos (1 euro) et
50 pesos cubanos (2,50 euros) l’unité
à leurs compatriotes. Si les ventes
s’effectuaient il y a encore peu
dans les kiosques ambulants
des « cuentapropistas » (entrepreneurs
à leur compte), les habitants écoulent
aujourd’hui leur production dans leurs
foyers, quarantaine oblige. La télévision
LA SÉANCE DU MERCREDI 01 AVRIL 2020
largement désertes. Mieux,
les « nasobucos » sont une source
de profit pour des milliers de familles
désormais sans autres revenus.
L’industrie touristique, l’une des principales
sources d’entrée de devises du pays,
est à l’arrêt, et des centaines de milliers
de travailleurs doivent vivre d’expédients.
Dans un Cuba au ralenti, les autorités
ont mobilisé des centaines d’ateliers
de couture pour réaliser des milliers
de masques et tenter de sauver
une économie cubaine au plus mal. ■
HECTOR LEMIEUX (À LA HAVANE)
le PLUS
Pays dans à périmètre constant), avec une très bonne performance du
le monde
travail temporaire (+4,7%) dans un marché en retrait de 1,1%
selon Prism’Emploi).
750 L’International atteint 1.361,6M€ (51,5% de l’activité
Agences consolidée) et progresse de 1,4% (-0,3% à périmètre et
devises constants), avec des performances contrastées selon
4 100 les zones géographiques : Europe du Sud +4,1% ; Europe du
Collaborateurs Nord et de l’Est -3,5%.
permanents La diversification engagée depuis juin 2018 dans les activités
de services numériques à forte valeur ajoutée s’établit à 47M€
de chiffre d’affaires en 2019 (+82,4%).
EVOLUTION DE LA LÉGISLATION FISCALE
La transformation, en France, du Crédit Impôt Compétitivité
Emploi (CICE) en allègements de charges sociales en
2019 a eu un impact défavorable de 6,7M€ sur le résultat
opérationnel courant (effet de la participation des salariés) et
de 13,7M€ sur la charge d’impôt soit globalement 20,4M€ sur
le résultat net du Groupe.
APPLICATION DE L’IFRS16
L’application de l’IFRS16 à compter du 1er janvier 2019, a eu
pour conséquence d’augmenter les actifs de 40,5M€ ; l’impact
s’élève à +10,6M€ sur l’ebitda, se limitant à +0,7M€ sur le
résultat opérationnel courant et +0,1M€ sur le résultat net.
LE RÉSULTAT NET
SYNERGIE affiche un résultat opérationnel courant consolidé
de 121,7M€ contre 128,4M€ en 2018.
développement des outils IT et des actions de formation ciblées.
La charge financière hors impact IFRS16 (0,6M€) s’est élevée
à seulement 0,7M€ contre 1,7M€ en 2018.
Compte tenu de ces éléments et d’une charge d’impôt de
49,3M€ (effet de la suppression du CICE 13,7M€), le résultat
net s’est élevé à 63,4M€, contre 82,5M€ en 2018.
UNE STRUCTURE FINANCIÈRE TRÈS SOLIDE
La structure financière s’est ainsi renforcée, avec des capitaux
propres de 544,7M€ au 31 décembre 2019, une variation du
besoin en fonds roulement positive sur l’exercice de 50,1M€
et une trésorerie nette de tout endettement de 161M€ (y
compris créances CICE mobilisables),
PERSPECTIVES 2020
Le Groupe affiche à fin février 2020 un chiffre d’affaires de
même niveau qu’en 2019.
L’épidémie de coronavirus, dont les conséquences sur l’activité
de nos clients et de SYNERGIE est difficile à appréhender
à ce jour, apporte un élément d’incertitude important et
la société a décidé de ne pas formuler de perspectives en
termes d’activité, dans l’attente d’une meilleure visibilité.
Les mesures de confinement prises récemment ont conduit
le Groupe à adapter son organisation avec beaucoup de
réactivité, afin de préserver ses équipes tout en assurant
un service aux clients poursuivant leur activité. Des plans
d’action spécifiques par pays ont été mis en place, intégrant
une mise en application de dispositifs gouvernementaux

CAC 40 EUROSTOXX 50 du PROCHAIN

En France, il s’élève à 70,3M€ ; l’effet favorable de la
progression de l’activité a en effet été atténué par l’impact de
destinés à préserver l’emploi et à soutenir les entreprises
(chômage partiel, différés de paiement...).
4207,24 -4,30% 2667,77 -4,27% FIGARO RENDEZ-VOUS
Publication
la transformation du CICE (6,7M€).
A l’International, le résultat opérationnel courant s’établit
Avec une structure financière très solide, se matérialisant par
une trésorerie élevée et la possibilité de céder les créances

DOW JONES FOOTSIE ÉCO du chiffre

d’affaires du
1er trimestre 2020
à 51,4M€ contre 49,3M€ en 2018, démontrant une belle
résistance dans un environnement économique plus tendu
en Allemagne et en Grande-Bretagne, où des réductions de
CICE à l’actif de son bilan (123M€), SYNERGIE dispose d’atouts
considérables qui lui permettent de rester confiant dans sa
capacité à traverser cette crise.
21222,21 -3,17% 5454,57 -3,83% le mercredi coûts de structure ont été opérées. DIVIDENDES
29 avril 2020 Les investissements réalisés les années précédentes ont ainsi Un prochain Directoire se prononcera courant mai sur la

ONCE D’OR NASDAQ NÉGOCIATION après Bourse. porté leurs fruits avec la création d’agences spécialisées et
le recrutement de consultants, ainsi que la digitalisation et le
détermination d’un montant de dividende et le Groupe
informera le marché de cette décision par voie de communiqué.

1608,95 (1618,30) 7614,55 -2,55% Pénicaud légalise CAPITAL SOCIAL : 121 810 000 € - EURONEXT PARIS COMPARTIMENT B - ISIN FR0000032658 - MNÉMO : SDG - REUTERS : SDGI.PA - BLOOMBERG : SDG:FP
par ordonnance CONTACT : SYNERGIE Direction Financière - Yvon Drouet - Tél. +33(0)1 44 14 90 20 - yvon.drouet@synergie.fr

PÉTROLE (lond) NIKKEI le dialogue social 2.0

18065,41 -4,50%
A

25,000 (22,710) PAGE 32

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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

30 L'ÉVÉNEMENT
CHUTES
LIBRES Le marché du pétrole plongé dans
Moscou, Riyad et Washington discutent pour mettre fin à la guerre des prix. La chute
-67 % Chute du prix ARMELLE BOHINEUST
ET FABRICE NODÉ-LANGLOIS
L’or noir à un plancher inédit depuis dix-huit ans
COURS DU BARIL DE PÉTROLE BRENT, EN DOLLAR
du baril de brent £@armelella @Fnodelanglois
depuis le début 150
146,1 Printemps arabe Mars 2020
et guerre de Libye Crise du coronavirus
de l’année PANDÉMIE Le Covid-19 a bel et sep. 2008 126,6 11 avril 2011
bien contaminé le marché mondial Après une forte
du pétrole. L’or noir dont les prix 120 spéculation,

- 16 %
sont historiquement volatils a certes la crise financière 2018 9 octobre
connu des chocs et des contre- fait chuter le cours L’Opep et la Russie 2018
chocs sévères, mais celui-ci est à nul contribuent à faire
90 85
autre pareil. Depuis le début de l’an- remonter le cours
Recul du prix moyen née, le prix du baril de brent, parti 2005
du litre de gazole de 65 dollars, a perdu les deux tiers 0uragan Katrina
de sa valeur. Il restait sous 25 dollars Le pétrole franchit
en France depuis 60 la barre des 70 $
mercredi après être passé la veille
le début de l’année, sous les 23 dollars, au plus bas de- janvier 2016
21
à 1,23 € le 27 mars puis dix-huit ans. Cet effondrement 2 janvier 2002 Le pétrole de schiste
est le résultat d’une guerre des prix américain crée un
30 36,6 excès d’offre ; craintes
surprise déclenchée début mars par 24 décembre 2008
la Russie et l’Arabie saoudite, dou- sur la demande 27,9
25,21

-9,8 %
chinoise 20 janvier 2016
blée d’une contraction sans précé- 1er avril 2020
0
dent de la demande mondiale de
brut. 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
Dès la mi-janvier, la glissade du Source : Bloomberg Infographie
Recul du prix moyen baril a commencé. C’était alors sur-
du litre de SP95 en tout la paralysie de la Chine, qui ab- sie, associés dans l’Opep+. Objectif : de pétrole de schiste américains, tions, et de véritables promotions
France depuis le début sorbe 13 % de la demande de pétro- réduire la production, ensemble, dont les coûts de production sont sur ses livraisons. « L’Arabie saou-
de l’année, à 1,48 € le, qui pesait sur les cours. Le pour soutenir les cours. Sauf que la élevés (lire ci-dessous). Le surlende- dite ne s’est pas lancée dans cette
6 mars, réunion entre l’Opep à Russie refuse. Elle privilégie la sau- main, l’Arabie saoudite prend tout guerre des prix de gaieté de cœur,
le 27 mars Vienne, cartel emmené par l’Arabie vegarde de sa part de marché, tout le monde par surprise en annonçant décrypte Francis Perrin, spécialiste
saoudite, et onze pays dont la Rus- en visant à affaiblir les producteurs une augmentation de ses exporta- du pétrole à l’Iris. Les Saoudiens es-

6 MARS
Lors de la réunion dite Opep Plus, qui réunit à Vienne les pays de l’Opep emmenés par l’Arabie saoudite et
onze pays conduits par la Russie, Vladimir Poutine (photo) refuse de se joindre à l’initiative proposée par Riyad
de réduire la production pour soutenir les cours, mis à mal depuis janvier par la baisse de la demande chinoise.
SPUTNIK PHOTO AGENCY/REUTERS; HO/AFP; JONATHAN ERNST/REUTERS

8 MARS
Coup de théâtre. Riyad, où rien ne se décide sans l’aval du prince héritier Mohammed
Ben Salman (photo), choisit de défendre ses parts de marché : les vannes de la
production sont ouvertes en grand et les prix, bradés. Ce qui précipite la chute du baril.

-20%
Ce pourrait être
Un choc à géométrie variable pour les pays producteurs
face. À l’inverse, la situation au Ve- plan du FMI, également sous perfu- grâce à ses dépenses, ce petit État a
la baisse de la demande ANNE CHEYVIALLE nezuela, en Iran, en Libye, en Afri- sion de Pékin, et elle se finance à tardé à mettre en place des réfor-
mondiale de pétrole £@AnneCheyvialle
que centrale, au Cameroun, au coût élevé sur les marchés obliga- mes, comme la création d’une TVA.
entre février et avril, ET A. BOH
Gabon, au Congo ou au Tchad se dé- taires. « C’est le pays qui a fait le plus Bahrein est encore plus endetté
selon plusieurs grade, autant de pays déjà sous as- défaut dans son histoire », souligne mais bénéficie de l’assistance finan-
experts Le double choc du pétrole et du co- sistance du FMI. D’autres, fragilisés, Ariel Emirian de la Société générale. cière de l’Arabie saoudite.
ronavirus frappe de plein fouet les peuvent en revanche compter sur « Il a déjà fait un ajustement impor-
pays producteurs alors que beau- des réserves encore conséquentes, tant avec un pétrole à 65 dollars ; ce Les plus résilients
coup d’entre eux ne se sont pas re- en particulier dans le Golfe et en sera rude à moins de 30 dollars. » Parfois, les réserves accumulées
mis du précédent de 2014-2015 (voir Asie centrale. dans les fonds souverains sont
l’infographie). Leur potentiel de ré- Des réserves qui fondent confortables. C’est le cas pour le
sistance varie selon leur dépendan- Alerte rouge L’Algérie, secouée depuis plus d’un Kazakhstan, important producteur
ce à l’or noir et leur santé financière, L’Irak, qui subit d’intenses tensions an par une vague de protestations d’Asie centrale, dont 20 % du PIB
leur capacité à déprécier ou non leur sociales, sera durement impacté. Le contre le pouvoir en place, vit du dépend de l’or noir, qui nécessite
devise, très différents d’un État à paiement des fonctionnaires et des gaz et du pétrole qui représentent la un baril à 60 dollars pour être à
l’autre. Autre facteur clé, le climat retraites entraînera « un déficit quasi-totalité de ses exportations. l’équilibre.
Une offre excédentaire L'offre est politique et social. Il conditionne la mensuel de 4 milliards de dollars. Le Les réserves, qui fondent à un ryth- L’Arabie saoudite, le premier ex-
largement capacité des gouvernements à ap- pays pourrait devoir recourir à l’aide me inquiétant malgré les quotas portateur mondial, à l’origine de la
PRODUCTION ET DEMANDE MONDIALES DE PÉTROLE
En million de barils par jour excédentaire et pliquer des mesures d’ajustement du FMI », redoute Fatih Birol, di- d’importation et les droits de doua- guerre des prix en cours, en souffri-
le restera car on forcément impopulaires. recteur général de l’Agence inter- ne, ne représentent plus qu’un an et ra davantage que la Russie. En dépit
n'arrête pas les Le prix du baril minimum pour nationale de l’énergie. demi d’importations, contre cinq des mesures d’économie mises en
Production puits du jour au équilibrer les budgets publics est un En Afrique, l’Angola et le Nigeria ans auparavant. « C’est une écono- place, le royaume va devoir baisser
105 102,4
100 lendemain indicateur clé, pointent les écono- se trouvent en première ligne. En mie typique de rente avec une forte encore ses dépenses et puiser dans
mistes. Il dépasse largement dépit d’une faible dette et d’une population et des besoins sociaux im- ses réserves. Il a besoin d’un baril à
101,4
30 dollars dans la plupart des pays. économie relativement diversifiée, portants, confrontée à une faible 82 dollars pour équilibrer son bud-
Consommation Pour équilibrer ses comptes, l’Algé- le Nigeria dépend beaucoup des re- croissance et un chômage élevé », get, sans compter les investisse-
90
rie a besoin d’un baril à 100 dollars, venus du pétrole. Un défaut de commente Ariel Emirian. ments massifs nécessaires pour fi-
l’Iran, pénalisé par l’embargo amé- paiement n’est pas à exclure. Le Deux pays du Golfe, Oman et nancer son ambitieux plan de
89 ricain, d’un baril à 200 dollars. gouvernement prévoit des coupes Bahrein - sont aussi très fragilisés développement. Le Koweït, en re-
La demande a chuté La Russie, le pays le plus capable budgétaires, tout comme l’Angola, car très endettés et ont besoin d’un vanche, « peut continuer à dépenser
de plus de 10% en mars de résister à l’effondrement des qui a fait appel au FMI en 2018 et dé- pétrole cher (90 et 100 dollars) pour grâce à ses quelque dix années de ré-
selon Goldman Sachs. cours, malgré sa forte dépendance pend du soutien financier de la limiter le déficit. Oman subit une serves », estime Jan Friederich.
75
Cette chute pourrait au brut, peut vivre avec un baril à Chine. Le risque est de donner un envolée des taux sur les marchés de Quant aux Émirats arabes unis, qui
atteindre 20% en avril 40 dollars (lire ci-contre). « Depuis coup de frein aux efforts de réforme la dette et va devoir puiser davanta- ont emboîté le pas à l’Arabie dans la
2014, des ajustements ont permis de et de diversification de ces écono- ge dans ses réserves de change. guerre des prix, ils ont d’énormes
réduire la dette publique, d’augmen- mies. « Oman a du mal à réduire son défi- réserves. De quoi financer, selon
60
ter l’excédent courant et d’instaurer En Amérique latine, c’est l’Équa- cit », de l’ordre de 8 % à 9 % du PIB, Capital Economics, leur déficit cou-
A

déc. 2019 janv. 2020 févr. 2020 mars 2020 avril 2020 un change flexible », note Julien teur qui inquiète le plus. Son écono- explique Jan Friederich de Fitch rant pendant trente-cinq ans avec
Source : AIE Marcilly, le chef économiste de Co- mie très « dollarisée » est déjà sous Ratings. Maintenant, la paix sociale un baril à 25 dollars. ■
https://t.me/WorldAndNews
Infographie
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une crise sans précédent
inédite de la demande liée au Covid-19 leur complique la tâche.
pèrent bien que l’effondrement des
prix poussera la Russie et l’Opep+ à
revenir à la table des négociations. »
Comme Francis Perrin, Didier
Houssin, président de l’Institut
français du pétrole énergies nouvel-
les (Ifpen) est convaincu qu’« une
partie de poker s’est jouée entre deux
ego ». Ce ne sont pas les compagnies
Rosneft et Aramco qui ont déclen-
ché cette guerre des prix. L’aval est
venu de Vladimir Poutine et de
l’homme fort du royaume saoudien,
le prince héritier Mohammed Ben
Salman.
L’Arabie saoudite a voulu rejouer
l’épisode de 2014-2015, sur fond
d’offre mondiale excédentaire, où
Riyad et Moscou avaient fini par
s’entendre, en 2016, sur le dos des
producteurs américains, pour ré-
duire leur production. Sauf que cet-
te fois, ni les Russes ni les Saoudiens
n’ont vu venir « l’effondrement sans
précédent de la demande mondiale »,
estime Didier Houssin. Avec près de
la moitié de l’humanité confinée
pour combattre le coronavirus,
l’économie mondiale est quasi à
l’arrêt. Goldman Sachs évalue à plus
de 10 % la contraction de la
consommation d’or noir en mars et
31 MARS
Donald Trump (photo) peut se satisfaire de prix bas pour ses consommateurs, mais pas pour l’industrie
pétrolière américaine, menacée par un baril à 20 dollars. Il téléphone à Vladimir Poutine et prend contact
avec les dirigeants saoudiens dans l’espoir de mener une action concertée pour stabiliser les prix.
Les compagnies américaines paniquent
La plongée du prix du baril à
20 dollars pour le WTI, la référence
du marché américain, du jamais vu
depuis dix-huit ans, met les com-
pagnies pétrolières américaines
sous très forte pression. Visées par
la guerre des prix déclenchée par
Moscou et Riyad, elles ont vu leurs
titres dégringoler en Bourse.
L’essor soudain du pétrole de
schiste, il y a maintenant une di-
zaine d’années, a redonné aux
États-Unis la première place mon-
diale avec environ 12 % de la pro-
duction de la planète, devant
l’Arabie saoudite et la Russie, qui
voient leur part de marché fondre.
Mais à moins de 25 dollars le baril,
« il y aura un tel recul de la produc-
tion que les États-Unis abandonne-
ront leur place de numéro un mon-
dial », avertit le cabinet IHS Markit
qui prévoit que, fin 2021, la pro-
duction américaine sera en déclin
d’un tiers par rapport à celle de dé-
but 2020.
Le nombre de puits actifs, envi-
ron un million, devrait enregistrer
une chute drastique. Inquiètes, des
compagnies actives au Texas, com-
me Parsley Energy, qui s’attend à
une chute d’au moins 50 % de sa
production, réclament aux autori-
tés locales une réduction obligatoi-
re de 20 % de la production, afin
que tous soient logés à la même en-
seigne.
Le forage du pétrole de schiste
est une activité aux coûts élevés. Si
prédit près de 20 % en avril.
Il y a encore quelques mois, Do-
nald Trump qui réclamait sur Twit-
ter à l’Opep de faire baisser les prix
se serait réjoui de leur chute, favo-
rable aux consommateurs qui sont
autant d’électeurs. Mais à 25 dollars
le baril, c’est l’industrie pétrolière
américaine, très concentrée au
Texas, qui menace de s’effondrer,
entraînant la Bourse avec elle.
« Alors que fin 2018, la poussée de
fièvre sur le marché pétrolier avait
poussé le Congrès américain à sortir
des tiroirs une vieille proposition de loi
anti-Opep, des sénateurs et des pro-
ducteurs pétroliers ont demandé ré-
cemment que le Texas fixe des quotas
à la production locale et se rapproche
du trust pétrolier ! », raconte Antoi-
ne Rostand, président du cabinet
Kayrros.
Un baril à prix négatif !
Les trois premiers producteurs
mondiaux - États-Unis, Russie,
Arabie saoudite - ont des intérêts
objectifs à s’entendre pour stabiliser
les prix.
C’est à cet effet que Donald
Trump a téléphoné mardi à Vladi-
mir Poutine et s’entretient réguliè-
le prix du baril de WTI reste infé-
rieur à 35 dollars à moyen terme,
peu de producteurs généreront as-
sez de liquidités pour couvrir leurs
dépenses et leurs investissements.
Aux États-Unis, c’est le cas de seu-
lement seize compagnies, estimait
mi-mars le cabinet norvégien Rys-
tad Energy. Au-delà de la produc-
tion, il faut en effet couvrir les
charges de l’entreprise, payer les
intérêts de la dette, en général éle-
vée, et rémunérer les actionnaires.
Chute de la production
« Avec 60 % de la dette à moyen
terme du secteur pétrolier aux
États-Unis jugée spéculative par
l’agence de notation Moody’s, les
compagnies américaines auront du
mal à lever d’autres fonds », estime
l’assureur-crédit Coface. Elles en
ont besoin pour leurs activités en
cours et pour forer de nouveaux
puits, car, en général, ceux-ci -
c’est une grande différence avec le
pétrole conventionnel - épuisent
80 % de leur potentiel en un an.
« Beaucoup d’entreprises devraient
faire faillite », pronostiquait Coface
quand le baril valait encore plus de
30 dollars. Les banques qui leur ont
avancé l’argent vont se retrouver
dans de grandes difficultés.
En Amérique du Nord, les com-
pagnies pétrolières et les spécialis-
tes des pipelines doivent rembour-
ser plus de 200 milliards de dollars
de dette d’ici à 2024, estime Moo-
https://t.me/WorldAndNews
rement avec les dirigeants saou-
diens. « Un rapprochement pourrait
produire ses effets quand la demande
redémarrera », avance Antoine
Rostand. Cela n’aura pas lieu avant
six ou neuf mois. Mais alors, les
cours augmenteront brutalement,
suppute le dirigeant de Kayrros.
L’Arabie et la Russie, éventuelle-
ment associés aux États-Unis,
chercheront à faire remonter les
prix à 60 ou 80 dollars d’ici un an.
En attendant, en ce début avril, la
capacité disponible de stockage ne
dépasse pas 1,5 milliard de barils,
assure Antoine Rostand. D’ici quel-
ques semaines, les stocks mondiaux
pourraient saturer. Des producteurs
devront réduire leur exploitation,
au Brésil, en mer du Nord ou dans le
golfe du Mexique. Une décision lon-
gue et coûteuse.
La thrombose de brut est telle que
dans certaines régions des États-
Unis, des prix sont négatifs. Autre-
ment dit, des producteurs sont prêts
à payer pour écouler leur brut parce
qu’arrêter leurs puits leur coûterait
plus cher encore. Le baril de WTI
texan ou le brent, pourraient à leur
tour, selon plusieurs experts, affi-
cher des prix en dessous de zéro ! ■
dy’s. Beaucoup, parmi les compa-
gnies américaines, qui emploient
des centaines de milliers de sala-
riés, ont coupé dans leurs dépenses
et leurs projets et tentent de négo-
cier avec leurs créanciers.
Mais les faillites paraissent inévi-
tables. En 2016, après la chute du
baril de 118 à 28 dollars, 70 produc-
teurs nord-américains de gaz et de
pétrole auraient déposé le bilan.
Depuis, les entreprises se couvrent
mieux. Près de 43 % de la produc-
« d’entreprises
Beaucoup
tion 2020 était en partie couverte
fin 2019, estime Goldman Sachs.
devraient
Mais les prix ont tellement plongé
que cette forme d’assurance, qui
faire faillite
COFACE
» d’extraction de la planète.
consiste, dans sa version simple, à
acheter une option permettant de
vendre le pétrole à une date don-
née à un prix prédéfini, quel que
soit celui du marché, ne suffira pas.
« Beaucoup d’entreprises ne pren-
nent que des protections partielles et
ne sont plus couvertes en dessous du
seuil qu’elles choisissent, générale-
ment autour de 30 ou 35 dollars »,
résume Antoine Rostand, prési-
dent du cabinet spécialisé Kayrros.
Deutsche Bank prédisait un dé-
faut sur 15 % de la dette à haut ren-
dement du secteur énergétique
américain avant la crise. Ce sera
bien pire. Mais l’industrie du schis-
te américaine, qui a démontré en
2014 sa résistance et sa capacité à
abaisser ses coûts de production,
survivra à nouveau, pronostiquent
nombre d’observateurs. ■ A. BOH
L'ÉVÉNEMENT
La Russie, moins « accro »
à l’or noir, reste fragile
ALAIN BARLUET £@abarluet
CORRESPONDANT À MOSCOU
La « forteresse Russie » tiendra-t-
elle le choc face à la guerre des prix
du pétrole qu’elle a engagée avec
l’Arabie saoudite et alors que se
profile une récession mondiale sur
fond de Covid-19 ? Inflexible jus-
qu’à récemment sur ce front, Vla-
dimir Poutine est tout de même
convenu, au téléphone avec Do-
nald Trump, mardi, de l’importan-
ce de la stabilité des prix de l’or
noir.
Le premier ministre russe,
Mikhaïl Michoustine, affiche un
certain volontarisme lorsqu’il esti-
me que la plongée des prix et la vo-
latilité des marchés offrent de nou-
velles opportunités pour la
politique de substitution des pro-
duits russes aux importations – une
priorité depuis la mise en place des
sanctions américaines et euro-
péennes consécutives à l’annexion
de la Crimée en 2014.
Les experts sont beaucoup plus
mesurés et redoutent un impact
conséquent, notamment sur les
grands projets lancés par le gou-
vernement, si la crise devait se
prolonger au-delà de l’été. « À
court terme, les équilibres macro-
économiques et budgétaires ne pa-
raissent pas menacés, le rouble flot-
tant jouant son rôle de soupape »,
note Arnaud Dubien, le directeur
de l’Observatoire franco-russe.
« Un baril autour de 35 dollars est
soutenable, à condition que cela ne
dure pas trop longtemps », estime
pour sa part Evgueni Gavrilenkov,
rédacteur en chef de la revue de la
Haute École de l’économie (HSE).
Le baril est actuellement 10 dollars
sous ce seuil. « La part des hydro-
carbures a été réduite à 39 % des re-
cettes du budget fédéral. Nous pou-
vons puiser dans les réserves
(estimées à 570 milliards de dol-
lars, NDLR) et emprunter sur le
marché », ajoute-t-il.
Le ministère des Finances a
même affirmé que le seul fonds
souverain (150 milliards de dollars)
permettrait de maintenir un bud-
get sans déficit « pour cinq à dix
Le secteur parapétrolier
s’attend à une tempête
FRÉDÉRIC DE MONICAULT
fdemonicault@lefigaro.fr
Tempête sur le parapétrolier. Le
baril qui s’effondre a eu pour effet
immédiat de contraindre les « ma-
jors » de l’or noir à annoncer une
baisse significative de leurs inves-
tissements : 20 % en moyenne, et
jusqu’à 30 % pour les spécialistes
des « shales », les hydrocarbures
non conventionnels (gaz et pétrole
de schiste). Par ricochet, les socié-
tés parapétrolières sont immédia-
tement affectées par cette chute
drastique : elles sont les chevilles
ouvrières des grands projets d’ex-
ploration-production, actives avec
leurs équipements et leurs services
d’ingénierie dans tous les bassins
Le spectre des années 2014-2016
ressurgit à l’horizon, selon Olivier
Appert, conseiller du centre éner-
gie de l’Institut français des rela-
tions internationales (Ifri). Les pays
producteurs bataillaient alors pour
préserver leur part de marché au
détriment des producteurs améri-
cains, préambule à une véritable
onde de choc pour l’industrie pa-
rapétrolière. En quelques semai-
nes, le brut avait dégringolé de
110 dollars à une fourchette os-
cillant entre 30 et 40 dollars. « À
l’époque, les mêmes facteurs de la
crise pétrolière étaient déjà là, avec
un marché largement surapprovi-
sionné : aujourd’hui, le coronavirus
renforce les inquiétudes. »
Cette fois encore, le marché
nord-américain devrait être le
premier où le parapétrolier sera
ébranlé. Olivier Appert prédit une
LE FIGARO jeudi 2 avril 2020
31
ans », si le baril chutait de 25 à
30 dollars le baril…
Ces affichages peinent à
convaincre. « Si la situation mon-
diale s’avère plus grave que prévu,
les réserves du gouvernement fon-
dront très rapidement », prévient
Ivan Nikolaev, directeur de l’ana-
lyse stratégique chez FBK Grant
Thornton. Or la tendance est, selon
lui, « sans équivoque : ni le pétrole ni
le rouble ne retrouveront leurs ni-
veaux précédents ».
Agenda social compromis
Considéré comme un libéral au
sein du système, le président de la
Cour des comptes et ancien minis-
tre Alexeï Koudrine établit un dia-
gnostic sévère : « Avec un baril à
35 dollars et un taux d’environ
72 roubles pour 1 dollar, la croissan-
ce pourrait être nulle en 2020 et le
déficit budgétaire atteindre un peu
moins de 2 % du PIB », déclarait-il
début mars avant l’accélération de
la pandémie en Russie et aux États-
Unis. Comme dans le reste du
monde, les prévisions de croissan-
ce des derniers mois n’ont plus de
sens. Celles-ci devraient être re-
vues, pour la Russie, d’ici au
9 avril.
« Dans un contexte où la Russie a
amélioré ses fondamentaux macro-
économiques l’an dernier, le Covid-
19 pourrait avoir des effets per-
vers », estime Johan
Vanderplaetse, le président de
l’Association européenne des affai-
res (AEB) qui regroupe 500 entre-
prises implantées en Russie. « Il y a
deux types de scénario, dit-il. Selon
le premier, optimiste, le virus dispa-
raît cet été et la situation revient à la
normale à l’automne. Dans le second
scénario, pessimiste, une seconde
vague du virus sévit cet automne,
avant qu’un vaccin ne soit prêt. Les
affaires seraient alors gravement
touchées. » Les plans gouverne-
mentaux, et notamment l’agenda
social annoncé par Vladimir Pouti-
ne en janvier dernier, pourraient
être compromis si le gouverne-
ment réoriente massivement les
réserves des fonds de stabilisation
pour soutenir le rouble, lutter
contre le chômage et les faillites. ■
baisse d’activité qui pourrait grim-
per jusqu’à 50 %.
La production des hydrocarbu-
res non conventionnels a ceci de
caractéristique que les étapes qui
mènent à l’exploitation d’un puits
– forage, fracturation hydraulique,
mise en production - s’enchaînent
rapidement : en quinze jours-trois
semaines, un projet est mis sur les
rails. « En contrepartie, la décision
d’arrêter un programme se concré-
tise dans les mêmes délais, poursuit
Olivier Appert, dans les autres bas-
sins, les investissements sont lourds
et longs à réaliser. Il arrive un mo-
ment où il est plus coûteux d’arrêter
ou de geler un projet plutôt que de le
poursuivre. »
Concentrations à venir
Pour les entreprises parapétroliè-
res, la descente aux enfers des an-
nées 2014-2016 a entraîné des ré-
ductions de coût impitoyables.
C’est seulement en 2018 que les
carnets de commandes ont com-
mencé – timidement - à se rem-
plir : dans l’intervalle, les plans de
sauvetage se sont multipliés, avec
plusieurs sociétés – comme les
français CGG et Bourbon – au bord
du gouffre. Quant à Technip, il a
fini par fusionner avec l’américain
FMC, ce qui fait dire aujourd’hui à
de nombreux observateurs que la
France a perdu son seul fleuron du
secteur.
« Il est encore un peu tôt pour dire
si la crise actuelle va engendrer une
série de concentrations, termine
Olivier Appert. Pour les plus petits,
la vague s’annonce sévère, à moins
A
qu’ils soient positionnés sur des
marchés de niche. » ■
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

32 ÉCONOMIE
L’État a accéléré le remboursement des crédits d’impôt
Les entreprises qui en font la demande peuvent parfois gagner ainsi jusqu’à six mois de trésorerie.

91 %
ANNE DE GUIGNÉ £@adeguigne
FISCALITÉ L’État met vraiment
les moyens pour aider les entre-
prises à traverser la tempête du
des entreprises coronavirus. Parmi le panel de
bénéficiaires mesures prévues par la loi d’ur-
du crédit impôt gence votée le 23 mars (report ou
recherche (CIR) étalement des échéances fiscales
sont des PME ou des cotisations sociales, modu-
lation des acomptes de prélève-
ment à la source des indépendants,
création d’un fonds de solidarité
pour les TPE et les indépendants…)
pour les aider à supporter ce mo-
ment, l’accélération du rembour-
sement des crédits d’impôt n’a pas
fait couler beaucoup d’encre. Cette
mesure, qui avait déjà été enclen-
chée pendant la crise de 2008, peut
pourtant se révéler vitale pour
certaines PME, à commencer par
les plus innovantes.
Tous les crédits d’impôt sur les
sociétés (IS) restituables en 2020
- impôt recherche (CIR), compéti-
tivité et emploi (CICE, non encore
imputé), pour dépenses de
production d’œuvre artistique,
pour la formation des diri-
geants… - sont ainsi concernés par
ce remboursement anticipé. Cha-
que année, les directeurs finan-
ciers des entreprises dont les
comptes sont bouclés fin décem-
bre attendent le dépôt de la décla-
ration des résultats et de la liasse
fiscale à la mi-mai pour lancer leur
demande de remboursements.
Remboursement de TVA
Et les virements du Trésor public
arrivent traditionnellement entre
octobre et novembre. Avec cette
disposition d’urgence, les
entreprises peuvent lancer les
procédures de remboursement dès
qu’elles auront calculé leur mon-
tant d’IS et ainsi gagner jusqu’à six
mois de trésorerie.
« L’administration est très réac-
tive. Certaines entreprises reçoi-
vent le remboursement au bout de
trois ou six jours, c’est très impres-
sionnant, avance Julien Pierre-
pont, le directeur innovation du
cabinet de conseil Leyton. Les de-
mandes ont aussi été simplifiées,
car les contrôles seront effectués a
posteriori. Cette souplesse était vi-
tale pour beaucoup de PME, no-
tamment de la tech, dont les reve-
nus, pour les plus jeunes entités,
sont encore faibles. » Selon les
derniers chiffres publics disponi-
bles, la créance moyenne au titre
du CIR des PME, les premières
concernées par les rembourse-
ments, s’élevait à 131 000 euros,
un montant non négligeable.
Gérald Darmanin a également
ouvert le 22 mars la possibilité
pour les entreprises de demander
à la Direction générale des finan-
ces publiques (DGFiP) un traite-
ment accéléré des rembourse-
ments de TVA. Pour les
opérations de mars, les entrepri-
ses pourront déposer dès début
avril leur dossier. En revanche,
les échéances de TVA pour le mois
de février n’ont pas pu être re-
poussées, elles étaient attendues
entre le 15 et le 24 mars… ■

Pour pouvoir
signer des accords,
Pénicaud autorise
le dialogue social 2.0
La ministre du Travail légalise les moyens
En période de confinement, il faut réussir à discuter, et à conclure, des accords alors que les locaux sont vides,
de communication à distance pour pouvoir négocier. tout ou partie des négociateurs ayant été mis en chômage partiel ou au télétravail. DEEPOL/PLAINPICTURE

« àTravailler
distance,
ANNE-HÉLÈNE POMMIER
£@ahpommier1
c’est compliqué DIALOGUE SOCIAL Le législateur
lorsqu’on ne n’avait pas anticipé (rien n’est écrit
connaît pas les dans la loi), il a fallu s’adapter en
urgence… Et pour cause : dans les
interlocuteurs, entreprises, pour les employeurs
mais là, tout comme pour les représentants des
va se régler salariés, négocier en pleine
pandémie de coronavirus, c’est
en bonne écrire un peu une nouvelle page de
intelligence
PHILIPPE PORTIER,
» l’histoire du dialogue social. Le
gouvernement a donc décidé de
EN CHARGE DU DIALOGUE jouer les facilitateurs.
SOCIAL À LA CFDT En cette période inédite, il faut
réussir à discuter, et à conclure, des
accords alors que les locaux sont
vides et que tout ou partie des
négociateurs ont été mis en chôma-
ge partiel ou priés de télétravailler.
L’ordonnance présentée mercredi
consacre ainsi la validité des
nouveaux moyens de communica-
tion et les pratiques que beaucoup
avaient spontanément adoptées de-
puis le début du confinement. Pour
débattre, les employeurs et les co-
mités sociaux et économiques (CSE)
vont pouvoir utiliser la visioconfé-
rence, l’audioconférence mais aus-
si, l’application WhatsApp. De quoi,
selon le ministère du Travail, ré-
pondre rapidement aux impératifs
des entreprises.
Cette adaptation du cadre légal,
« temporaire » précise la Rue de
Grenelle, était devenue d’autant
plus impérieuse que la loi d’urgence
votée le 23 mars demande aux par-
tenaires sociaux de s’entendre pour
modifier l’organisation des entre-
prises. Le texte autorise en effet
l’employeur à déroger au code du
travail pour imposer ou modifier les
dates de congés payés dans la limite
de six jours ouvrables. D’un mois, le
délai de prévenance des salariés
passe ainsi à un jour ouvré, seule-
ment si un accord d’entreprise ou
de branche est conclu.
La mesure était attendue par les
entreprises dont l’activité a ralenti
voire cessé. Quelques jours après
l’entrée en vigueur de la loi, beau-
coup de patrons avaient déjà mis en
place les bases de la discussion,
souvent avec l’aval des organisa-
tions syndicales. La CFDT a même
publié un guide de bonnes prati-
ques pour encourager ses militants
à dialoguer. Dans l’industrie,
l’UIMM (la fédération patronale) et
les quatre syndicats représentatifs
(CGT, CFDT, CFE-CGC et FO) ont
signé une déclaration commune
rappelant leur volonté d’agir pour
préserver la santé des salariés et
l’activité économique. « On note un
vrai souci de trouver des solutions
pour garantir la pérennité des em-
plois. Tout le monde se rend compte
que la situation est très difficile y
compris pour les employeurs », af-
firme Caroline André-Hesse asso-
ciée au cabinet Ayache Salama.
L’UIMM discute
Si, depuis les ordonnances
Pénicaud de 2017, les échanges à
distance des CSE sont possibles
dans des cas très particuliers, il
fallait absolument en préciser les
aspects techniques qui avaient été
relégués au second plan. Sauf dans
les grandes entreprises plus rodées
à l’exercice. « Travailler à distan-
ce, c’est compliqué lorsqu’on ne
connaît pas les interlocuteurs, mais
là, tout va se régler en bonne intelli-
gence », assure ainsi Philippe Por-
tier à la CFDT, sans aller jusqu’à
dire pour autant « que tout serait
plus simple par téléphone qu’autour
d’une table ».
À l’UIMM, on est plutôt confiant
sur l’aboutissement de ces
discussions 2.0. Mardi, la plus
puissante des fédérations du Medef
a entamé avec ses syndicats la
négociation express d’un accord de
branche sur l’aménagement des
congés. La deuxième séance, en
visioconférence, est prévue ce
jeudi et la conclusion espérée en fin
de semaine.
Reste que la vraie question n’est
pas tant la méthode ou la validité de
la signature électronique que
l’objet même des accords. « Nous
vivons une période où les salariés
sont traités de façon différente selon
leur fonction dans l’entreprise :
télétravail, chômage partiel, réqui-
sition, rappelle Frédéric Guzy, di-
recteur général du réseau de
conseil en RH Entreprise & Per-
sonnel. Il ne faudrait pas que les né-
gociations soient faites de façon
idéologique et que l’effort sur les
congés soit demandé aux plus inves-
tis. Ce serait un non-sens et un ris-
que pour le climat social. » ■
Les élections dans
les TPE reportées
de six mois
Leur report était annoncé.
Les élections professionnelles
dans les petites entreprises de
moins de 11 salariés ne se tiendront
pas comme prévu en fin d’année
2020, mais « sans doute au cours du
premier semestre de l’année 2021 »,
a annoncé mercredi le ministère
du Travail. Ce décalage, « d’environ
six mois », lié à la crise sanitaire
devrait permettre d’organiser
les élections dans de meilleures
conditions afin que les 4,6 millions
de salariés concernés puissent élire
leurs représentants. Conséquence
directe, le ministère a annoncé
la prolongation d’un an du mandat
des juges prud’homaux.
Le calcul de la représentativité des
organisations syndicales, qui dépend
en partie des résultats des élections
dans les TPE, est nécessaire
pour renouveler les collèges. A.-H. P.

Les CCI en première ligne pour soutenir les entreprises

Grâce à leur réseau, les chambres consulaires sont des relais utiles de l’État auprès des entrepreneurs.

CORINNE CAILLAUD
£@corinnecaillaud
ENTREPRISE Pour limiter les
répercussions du Covid-19 sur
l’activité des entreprises, la mobi-
lisation de tous les acteurs écono-
miques, à commencer par les
chambres de commerce et d’in-
dustrie (CCI), est indispensable.
Dès le 17 mars, les CCI ont ainsi été
missionnées par le gouvernement
comme interlocutrices de premier
rang dans la crise. Une tâche qu’el-
les mènent avec d’autant plus d’ar-
deur et de sérieux qu’elles ont été
malmenées depuis 2017 par l’exé-
cutif qui, pour dégager des écono-
mies, a taillé dans leurs recettes af-
fectées… Et l’occasion rêvée de
démontrer leur utilité à un pouvoir
qui en doute.
Certains services déconcentrés du
A
partiel) ont ainsi basculé leurs stan-
dards téléphoniques sur les CCI, où
2 000 collaborateurs en télétravail
sont sur le pont et se relaient sept
jours sur sept. « On répond aux ques-
tions des entreprises, on fait de la pé-
dagogie sur les différents dispositifs
mis en œuvre. Nous assurons aussi un
rôle de courroie de transmission entre
Bercy et les dirigeants qui nous font
remonter certains dysfonctionne-
Délais de paiement : l’explosion se confirme
Plus que jamais, le non-respect
des délais de paiement,
qui représente pour les PME
un défaut de trésorerie
de 13 milliards d’euros par an,
est une menace pour
l’économie. Et ce d’autant que
ments », indique Pierre Goguet, le
président de CCI France.
Comme les dirigeants du Medef
et des autres organisations profes-
sionnelles, le patron des CCI a donc
alerté très tôt Bercy sur les mesures
mal paramétrées de son plan d’ur-
gence et donc à côté des besoins
des TPE ou des PME. Il en va ainsi
du seuil des 70 % de perte de chiffre
d’affaires en mars 2020, finalement
d’un quart des défaillances Visnovsky, celui du crédit.
dans le pays… Pour éviter En deux semaines, l’équivalent
un dérapage préjudiciable, de trois mois de signalements
l’exécutif a monté en urgence leur a ainsi été remonté. Les
un « comité de crise » sur grandes entreprises fautives,
ce sujet codirigé par Pierre sur lesquelles le comité
Pelouzet, le médiateur va se pencher, ne bénéficieront
ramené mardi à 50 %, pour déclen-
cher l’aide promise de 1 500 euros.
« Mais il y a encore des trous dans
la raquette. Pour les travailleurs
non salariés indépendants, les
1 500 euros versés par le fonds de so-
lidarité ne suffiront pas », prévient
Pierre Goguet. Ses services plan-
chent également avec ceux de Ber-
cy sur le lancement d’une platefor-
me permettant d’accéder à des
commandes de masques homolo-
gués et au juste prix, afin que les
entrepreneurs qui en ont besoin
puissent équiper leur personnel.
Soutien psychologique
Les CCI sont également en liaison
avec la Fédération bancaire fran-
çaise (FBF) et veillent à la bonne
exécution des demandes de nou-
velles lignes de crédit. « Alors que
les entrepreneurs ont besoin de ré-
ponses immédiates et concrètes, des
qu’ils sont évidemment dans l’im-
possibilité de fournir compte tenu de
la situation, pointe Pierre Goguet.
Ces pratiques sont intenables. »
Au 30 mars, plus de 80 000
contacts émanant de TPE-PME,
commerçants, micro-entrepreneurs
et indépendants ont ainsi été traités
par les cellules d’accompagnement
du réseau des CCI, dont certaines
antennes ont mis en place des cellu-
les de soutien psychologique. Les
initiatives des chambres dans les
territoires sont d’ailleurs multiples et
les bonnes pratiques infusent rapi-
dement. À Marseille, par exemple,
un système de géolocalisation des
commerces encore ouverts a été lan-
cé pour en informer les habitants.
Les CCI, comme toutes les orga-
nisations professionnelles, tentent
enfin de préparer le rebond, à la fin
du confinement. Un groupe de ré-
flexion est en cours de constitution

ministère du Travail (les Direccte, cette pratique est à l’origine des entreprises, et Frédéric pas des aides de l’État. CO. C. agences bancaires réclament à cer- pour être force de propositions
qui gèrent les demandes de chômage tains un prévisionnel de trésorerie, auprès du gouvernement. ■
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LE FIGARO jeudi 2 avril 2020

ENTREPRISES 33

L’automobile foudroyée par une crise historique

Les constructeurs espèrent rouvrir leurs usines au plus vite mais la demande ne sera peut-être pas au rendez-vous.
Décrochage Entre 14 et 18 millions de ventes
MARCHÉ FRANÇAIS perdues au niveau mondial
DES VÉHICULES PARTICULIERS
En nombre de ventes PRÉVISIONS DE PERTES EN 2020 PAR RAPPORT À 2019
En milliers de véhicules

240 000
Volume perdu 619 418
1 031
2 109
2 087
Europe
2 226
200 000 3 057
2019
4 447
160 000
Amériques

120 000 2020

Chine

80 000
Reste du
monde
40 000
janvier février mars jan. fév. mars avril mai juin juil. août sep. oct. nov. déc.
Source : CCFA / AAA DATA Source : AlixPartners Infographie

VALÉRIE COLLET £@V_Collet
AUTOMOBILE Un piqué net. En
mars, la courbe des ventes de
voitures neuves en France a litté-
ralement plongé : la chute a at-
teint 72 %. Les livraisons de véhi-
cules se sont effondrées, avec
moins de 63 000 voitures neuves
immatriculées, contre près de
226 000 en mars 2019, selon des
chiffres publiés mercredi par le
Comité des constructeurs français
d’automobiles (CCFA). Et ce mou-
vement se poursuivra au moins
jusqu’en avril prochain.
Comment pourrait-il en être
autrement ? Les concessionnaires
sont fermés. Et beaucoup de
Français s’interrogent sur leur si-
tuation et sur celle de leur em-
ployeur au lendemain de la crise.
L’achat d’une nouvelle voiture
n’est plus d’actualité.
« C’est historique. On n’a jamais
eu une baisse comme celle-là », a
commenté François Roudier, por-
te-parole du CCFA. L’organisation
professionnelle anticipe une chute
de 20 % sur l’ensemble de l’année
dans l’Hexagone.
Agences de notation, cabinets de
conseil en stratégie tentent déjà de
prévoir l’ampleur de la catastrophe
à l’échelle européenne et mondiale.
D’après Moody’s, en 2020 les ven-
tes d’automobiles pourraient chu-
ter de 14 % au niveau mondial, et
de 21 % en Europe. « C’est sensible-
ment plus que nos précédentes prévi-
sions qui anticipaient un déclin de
4 % en Europe, estime Moody’s.
C’est principalement à cause de la
chute de la demande liée au corona-
virus. Nous nous attendons à une
contraction de 2,2 % du PIB de la
zone euro en 2020 ».
De son côté, le cabinet d’études
en stratégie AlixPartners a écha-
faudé plusieurs scénarios, plus ou
moins optimistes, sur l’impact de
la crise du Covid-19 sur l’industrie
automobile. Le premier anticipe
une reprise rapide et un redémar-
rage économique dès le deuxième
semestre. Les usines rouvrant leurs
portes après un mois de fermeture.
À l’échelle globale, la chute du
marché se situerait entre 8 et 12 %.
Le CCFA (Comité
des constructeurs
français d’automobiles)
anticipe une chute
de 20 % des ventes
de voitures neuves
sur l’ensemble de l’année
dans l’Hexagone
(ci-dessus : l’usine PSA
de Mulhouse).
SÉBASTIEN BOZON/AFP
Le deuxième, plus sombre,
table sur un déclin mondial qui
frapperait durement l’Europe. La
réouverture des usines automo-
biles aurait lieu au bout de deux à
trois mois. La trésorerie des
entreprises serait sous tension,
avec des risques de faillites. La
consolidation du marché serait
accélérée. Dans cette perspecti-
ve, les ventes plongeraient de 14 à
18 % à l’échelle mondiale, et de
20 % en Europe. Des chiffres as-
sez proches des prévisions de
Moody’s. Enfin troisième scéna-
rio, l’industrie serait à l’arrêt
pendant trois mois. L’impact
toucherait l’année 2021. Les ven-
tes mondiales accuseraient un
recul de 20 à 25 % cette année.
Durée des fermetures mais aussi
ampleur de la reprise sont au cœur
de toutes les interrogations.
« Beaucoup veulent croire que la
demande va redémarrer après une
sorte de parenthèse, observe Ber-
nard Jullien, professeur à l’univer-
sité de Bordeaux et directeur du
groupe d’études et de recherche
permanent sur l’industrie et les sa-
lariés de l’automobile (Gerpisa).
Mais qui piaffe d’impatience pour
s’acheter une nouvelle voiture ?
Faut-il s’attendre à ce qu’à l’issue
de cette période de confinement, une
frénésie de consommation puisse
s’étendre à l’automobile ? ». Le
chercheur en doute.
Au lendemain de cette période
d’austérité, les clients pourraient
se tourner plus volontiers vers les
stocks de voitures d’occasion, déjà
très importants avant l’arrivée du
coronavirus et qui seront bradés
dans les prochains mois.
Demande d’actions
de soutien
« C’est clairement la pire crise qui
ait jamais frappé l’industrie auto-
mobile, a déclaré Eric-Mark Hui-
tema, le directeur général de
l’ACEA (Association européenne
des constructeurs automobiles).
Avec tous les fabricants à l’arrêt et
les réseaux commerciaux fermés,
l’emploi de 14 millions d’Euro-
péens est en jeu ». L’organisation
européenne a demandé que des
actions coordonnées soient lan-
cées à l’échelle nationale et euro-
péenne pour soutenir la trésore-
rie des constructeurs, leurs
fournisseurs et les distributeurs.
En attendant ces éventuels plans,
les dirigeants du monde de
l’automobile ne veulent pas cé-
der à l’immobilisme. Ils prépa-
rent la reprise, quitte à paraître
décalés par rapport à la situation
sanitaire, l’épidémie n’ayant
toujours pas atteint son pic en
France. PSA et Renault tra-
vaillent ainsi à la réouverture de
leurs usines. « Il faut absolument,
sans aucun compromis sur la santé
de nos collaborateurs, qu’on se
prépare au redémarrage de nos
usines probablement dans la
deuxième moitié du mois d’avril »,
a estimé de son côté le patron de
l’équipementier Valeo, Jacques
Aschenbroich sur BFM Business.
Les industriels du secteur cher-
chent à rebondir le plus vite possi-
ble et à relancer leur activité. Les
constructeurs souhaitent notam-
ment sauver les commandes sou-
vent importantes en mai, et livrées
à la veille des vacances d’été. ■

Renault : les cols blancs solidaires

Une nouvelle fois, les cols blancs de ils perçoivent 100 % de leur ré-
« des
L’ensemble
36 000
Renault seront solidaires de leurs
collègues cols bleus. Il y a exacte-
ment onze ans, au lendemain de la
munération en chômage partiel,
selon la convention collective de
la métallurgie.

salariés crise financière qui l’avait ébranlé,
de Renault Renault inventait le « contrat so-
en France cial de crise ». Une mesure per-
mettant d’assurer aux ouvriers et
SAVE
Techniquement, l’ensemble des
36 000 salariés de Renault en Fran-
ce vont donner, pendant six se-
maines, une journée de congé par

vont donner,
pendant
aux techniciens en chômage par-
tiel une rémunération correspon-
six semaines, dant à 100 % de leur salaire, grâce à
l’aide de tous les salariés.
une journée Cette fois, la crise n’est plus fi-
de congé nancière mais sanitaire, et ses ré-
par semaine, percussions sont d’autant plus dif-
ficiles à évaluer que nul ne sait
ou une demi- quand la demande sera de nouveau
journée au rendez-vous.
s’ils sont À l’heure actuelle, toutes les
usines du groupe sont fermées en
en chômage
DATE *
semaine, ou une demi-journée s’ils
sont en chômage partiel à 50 %. S’y THE
ajoutera une journée de plus pour
amorcer le système.
Dons de jours de congé
Ce système de « dons » de jours de
congé, permis par ce « contrat
d’avenir », doit rapporter 8,5 mil-
lions d’euros qui viendront s’ajou-
ter aux 4,5 millions d’euros qui
restaient dans les caisses du « fonds

France. Les ouvriers de Renault
partiel à 50 % » dans l’Hexagone sont donc tous en
chômage technique à 100 %. Quant
aux salariés des fonctions
tertiaires, ils sont pour la plupart
en chômage partiel à 50 % depuis
le 30 mars.
Le « contrat social de crise »,
aujourd’hui rebaptisé « contrat
de solidarité et d’avenir », a
donc été remis sur la table. Après
deux réunions entre syndicats et
direction, cet accord devrait ob-
tenir jeudi matin le feu vert des
syndicats, et notamment de la
CFDT et de la CFE-CGC qui re-
présentent à elles seules près de
55 % des voix. Il doit permettre
une nouvelle fois le maintien de
la rémunération nette de tous les
salariés, alors que les ouvriers en
chômage technique n’auraient
dû toucher que 70 % de leur sa-
laire brut, et 84 % de leur net.
Pour les cadres et les techniciens
5
chômage ». Renault a en effet mis
en place en 1986 un prélèvement
permanent de 0,15 % sur l’ensem-
ème
ble des salaires destiné à compen-
ser les mesures de chômage partiel
régulièrement prises au sein du
groupe. Au total, le groupe va donc
édition du Big Bang Santé du Figaro :
réunir 13 millions d’euros pour la transformation au cœur de la santé
maintenir la rémunération nette
de l’ensemble des salariés.
« Nous avons projeté ce contrat
pour deux mois et demi, explique
Franck Daoût, délégué central
Maison de la Chimie - Paris MERCREDI
21
CFDT chez Renault. Et si la période de 8h30 à 17h30
de chômage partiel devait durer plus
longtemps, nous nous reverrions. »
L’accord soumis aux syndicats
concerne aussi deux autres sujets :
OCTOBRE
2020
le report des mesures salariales
prévues en 2020, mais aussi la pré-
paration de la reprise des activités
après la crise. L’objectif est de pro-
poser l’ouverture de négociations
sociales à l’échelle d’une filiale ou
*Réservez votre journée
d’un établissement, notamment
A

au forfait, ce problème du man- sur le temps de travail, pour ré-

que à gagner ne se pose pas car pondre à la demande. ■ V. C.
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jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO
34 ENTREPRISES
Xerox renonce à son
OPA de 35 milliards
de dollars sur HP
La tempête causée par le Covid-19 a eu raison du
projet risqué du leader mondial des photocopieurs.
« sanitaire
La crise INGRID VERGARA £@Vergara_i
INFORMATIQUE Une fin brutale
mondiale pour un feuilleton à rebondisse-
ainsi que ments qui avait démarré mi-
2019. Xerox, le leader mondial
la tourmente des photocopieurs a purement et
macro- simplement retiré dans la nuit de
économique mardi à mercredi son offre publi-
que d’achat de 35 milliards de
et financière dollars sur le fabricant américain
causée par d’ordinateurs personnels et
le Covid-19 d’imprimantes HP. « La crise sa-
nitaire mondiale actuelle ainsi que
ont créé un la tourmente macroéconomique et
environnement financière causée par le Covid-19
qui n’est pas ont créé un environnement qui
n’est pas propice à la poursuite de
propice nos efforts pour racheter HP », a
à la poursuite expliqué la direction de Xerox
de nos efforts dans un communiqué, qui renon-
ce aussi « à proposer notre liste de
pour racheter candidats hautement qualifiés au
HP »
LA DIRECTION DE XEROX
conseil d’administration de HP
(…). Même si c’est décevant, nous
faisons passer en priorité la santé,
la sécurité et le bien-être de nos
employés », ajoute-t-elle. L’heu-
La crise sociale se fait déjà sentir dans la distribution
Inquiets pour leur pouvoir d’achat, les Français n’achètent que le strict nécessaire.
24 %
MARIE BARTNIK £@mariebartnik
DISTRIBUTION Après s’être rués
dans les petites, moyennes et
Baisse grandes surfaces alimentaires, les
Français font de nouveau atten-
des ventes
tion à leur budget et achètent
dans les hypermarchés
moins. Plusieurs acteurs de la
du 16 au 22 mars
grande distribution constatent ces
derniers jours que les ventes dé-
crochent, signe que la crise éco-
nomique est déjà là.
« Depuis quelques jours, nous
constatons un recul de la
consommation, assure un patron
d’enseigne. Celui-ci ne s’expli-
que pas seulement par le ressac
après la période de surstockage.
L’impact du chômage partiel et
du chômage total se fait déjà sen-
tir. Ajoutez à cela la hausse des
dépenses contraintes liées à la
fermeture des cantines et restau-
rants d’entreprises, vous abou-
tissez à une forte baisse du pou-
Les efforts inédits de Sodexo face à la crise
Les dirigeants du géant de la restauration collective renoncent en partie à leurs salaires.
20
MATHILDE VISSEYRIAS
£@MVisseyrias
RESTAURATION Sodexo s’adapte
millions tous azimuts à la crise du coronavi-
rus. « Il y a énormément d’écoles,
d’euros d’universités et de quartiers géné-
Effort de solidarité raux d’entreprise fermés, raconte
des dirigeants Denis Machuel, le directeur général
de Sodexo du numéro deux mondial de la res-
tauration collective. Chaque jour,
tout évolue très vite d’un pays à
l’autre. À côté de cela, il y a une mo-
bilisation extraordinaire des équipes
dans les hôpitaux, les Ehpad, les éco-
les où nous accueillons les enfants de
soignants. Les gens parfois considé-
rés en deuxième ligne sont aujour-
d’hui en première ligne. »
En Amérique du Nord et en Euro-
pe, 4 000 collaborateurs ont été réaf-
fectés dans des hôpitaux et maisons
A
de retraite. « Notre obsession est la
sécurité de tous, nos collaborateurs et
re est donc au recentrage sur la
gestion de la crise.
Désireux de rebondir dans un
marché de la photocopie structu-
rellement en déclin, le groupe Xe-
rox s’était lancé mi-2019 dans une
ambitieuse entreprise : se marier
avec le leader mondial de l’im-
pression, HP, une cible cinq fois
plus grosse que lui en termes de
capitalisation boursière et qui gé-
nère six fois plus de chiffre d’af-
faires. Très rapidement, les dis-
cussions se crispent et les
échanges épistolaires publics en-
tre les directions des deux sociétés
prennent un tour très violent.
« Pilule empoisonnée »
Fermement opposée à ce rappro-
chement dans lequel elle estime
n’avoir rien à gagner, la direction
de HP a tout mis en œuvre pour
l’empêcher. En février, elle avait
adopté, en plus d’une « pilule em-
poisonnée » (un dispositif classique
pour tenter d’éviter une OPA), un
plan de rachat d’actions d’une va-
leur de 15 milliards de dollars.
voir d’achat, qui se fait déjà
sentir en rayons. »
Chez ce distributeur, les ventes
ont particulièrement décroché le
week-end dernier. Elles restent
positives, surtout dans les maga-
sins de proximité, car la plupart
des clients font leurs courses pour
trois repas par jour à la maison,
contre deux avant le confinement.
Nielsen estime ce surplus de
consommation à 10 % des ventes
habituelles.
Mais les habitudes de consom-
mation ont changé, et les clients
font plus attention au prix de ce
qu’ils mettent dans leur panier.
S’ils achètent plus en volume
parce qu’ils mangent plus à la
maison, la valeur des produits
achetés diminue. « Ils achètent
plus de produits de marques de dis-
tributeur et de produits secs »,
constate le distributeur.
Chez Monoprix, les ventes de
levure, sucre, farine ou petits pois
nos consommateurs »,insiste le diri-
geant. Dans les sites industriels en-
core ouverts, la vente à emporter se
développe et les horaires de table
sont élargis afin d’éviter les contacts ;
bars à salades et corbeilles de fruit
ont disparu. Par ailleurs, les menus
ont été simplifiés pour tenir compte
des difficultés d’organisation. Le
groupe, qui présentera ses résultats
semestriels le 9 avril, a déjà prévenu
que les mesures de confinement,
amputeraient son chiffre d’affaires
de 2 milliards d’euros en 2019-2020.
Sodexo active aussi la solidarité.
Dans L’Hexagone, 26 tonnes de
fruits et légumes ont été données à
une centaine d’hôpitaux d’Île-de-
France et du Grand Est. Plusieurs
centaines de tablettes ont été offertes
à des patients hospitalisés. À défaut
d’organiser des réceptions, Lenôtre,
le traiteur maison de Sodexo, a fait
don de 1 200 repas pour les soignants
des hôpitaux d’Île-de-France.
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En février, Xerox tente un
nouveau coup pour mener à bien
son projet risqué. Il améliore son
offre de 22 à 24 dollars par action
et lance officiellement quelques
semaines plus tard son offre pu-
blique d’achat auprès des ac-
tionnaires de HP. Xerox compte
aussi réussir à imposer ses per-
sonnalités au conseil d’adminis-
tration lors de l’assemblée géné-
rale de HP, prévue le 12 mai,
en conserves décollent. Le
panéliste IRI ne fait pas d’autre
constat. « Les achats se concen-
trent sur les produits de base au dé-
triment des produits plaisir. Les
spiritueux ou le champagne ne se
vendent plus », explique Emily
Mayer, directrice chez IRI.
Invendus en forte hausse
D’autres distributeurs font le
même constat. Chez Lidl, « les ven-
tes ont cessé de progresser depuis la
première minute du confinement,
constate Michel Biero, le directeur
du distributeur en France. Nous
avons clairement beaucoup moins
de clients, même s’ils achètent plus
en volume. Il est très difficile de pré-
voir les ventes, tout est complète-
ment déréglé. » Les invendus sont
en forte hausse. « Nous donnons des
palettes de plats préparés et de sa-
lades aux hôpitaux et des fleurs aux
Ehpad », explique Michel Biero. Le
phénomène est particulièrement
Surtout, les dirigeants de Sodexo
ont décidé de contribuer à cette soli-
darité, en renonçant à une partie de
leur rémunération. Leur contribu-
tion, d’un montant de 20 millions
d’euros, ira aux collaborateurs les
plus impactés par la perte de leur
emploi : malgré les efforts mis en
œuvre par le groupe, ils seront plu-
sieurs milliers dans ce cas dans le
monde, notamment aux États-Unis.
Renoncement à 50 %
du salaire fixe
Sodexo emploie actuellement
470 000 personnes dans 67 pays. Et
dans certaines parties du monde,
être licencié peut entraîner une
descente aux enfers, faute de cou-
verture sociale suffisante. « C’est un
vrai élan de solidarité des dirigeants,
même si cela ne comblera pas tout,
explique Denis Machuel. Ce pro-
gramme de 30 millions au total (il est
abondé à hauteur de 10 millions par le
pour peser davantage dans le
rapport de force.
Las, la crise déclenchée par le
coronavirus a fait exploser tous
ses plans en vol. Les conditions et
le contexte économique actuels
rendaient quasiment impossible
la mission de convaincre les ac-
tionnaires de HP, déjà peu en-
thousiastes, de l’intérêt de le sui-
vre dans cette opération. Par
ailleurs, pour être en mesure
marqué dans les hypermarchés,
qui souffrent des restrictions de
déplacement et de la fermeture de
centres commerciaux. Les ventes y
ont reculé de 24 % du mardi 16 au
dimanche 22 mars, selon Nielsen.
Conscient de l’inquiétude crois-
sante des clients, Leclerc a bloqué
les prix de 4 000 produits Marque
Repère jusqu’à la fin du confine-
ment. « Dans un contexte économi-
que et social éprouvant, de nom-
breux ménages français s’inquiètent
pour leur pouvoir d’achat », expli-
que le distributeur.
Toute la question, désormais,
est de savoir quel sera le compor-
tement des consommateurs à l’is-
sue de la période de confinement.
« Si la crise perdure, cette tendance
à consommer moins de produits de
luxe et plus de MDD (marques de
distributeurs) perdurera elle aussi,
dans la lignée de ce que nous avions
constaté en 2008 », anticipe un
distributeur. ■
groupe) va être orchestré dans les
prochains jours sur l’ensemble de nos
pays, notamment là où les filets de
sécurité sont les plus faibles lorsque
vous perdez votre emploi. »
Le directeur général de Sodexo
renonce à 50 % de son salaire fixe sur
les six prochains mois ainsi qu’à sa
rémunération variable de l’exercice
2019-2020 (clos fin août). Sophie
Bellon, présidente du conseil d’ad-
ministration, renonce elle aussi à
50 % de son salaire des six prochains
mois. Les membres du comité exé-
cutif réduisent de 10 % leur salaire
des six prochains mois, ainsi qu’à
leur variable annuelle. Enfin, les
200 principaux dirigeants du groupe
tirent un trait sur leur rémunération
variable annuelle. « Nos équipes sont
notre atout le plus précieux, insiste
Sophie Bellon. Dans l’adversité, elles
font preuve d’un professionnalisme
sans faille. Je souhaite leur apporter
mon soutien. » ■
Xerox (ici le siège
du groupe à Norwalk,
dans le Connecticut)
a retiré dans la nuit
de mardi à mercredi
son offre publique d’achat.
M. NAGLE/BLOOMBERG
d’avaler son compatriote, Xerox
devait alourdir sa dette de
24 milliards de dollars, après
avoir contracté auprès d’un grou-
pement de banques l’un des plus
gros emprunts jamais réalisés
dans le secteur technologique. Un
poids difficilement supportable
en période d’extrême incertitude
sur les conséquences de la crise
actuelle sur l’avenir des marchés
des deux acteurs.
Xerox a perdu beaucoup de plu-
mes dans cette histoire. Sa capita-
lisation boursière a fondu à
3,8 milliards de dollars contre
8 milliards de dollars en novem-
bre 2019, au moment de l’annonce
du projet. L’incertitude sur son
avenir économique n’a jamais été
aussi grande. Les marchés ne s’y
sont pas trompés, qui ont mal ac-
cueilli cet épilogue. L’action Xe-
rox perdait plus de 3 % à l’ouver-
ture de la séance mercredi à Wall
Street, tandis que celle de HP s’ef-
fondrait, elle, de plus de 10 %.
Autre grand perdant de cette
opération tuée dans l’œuf : le
financier Carl Icahn, qui détient
11 % du capital de Xerox et 4 % de
celui de HP. L’homme avait
appuyé de ses deux mains ce
rapprochement, dont il espérait
beaucoup pour dynamiser son
investissement. ■
EN BREF
LA FRANCE PROPOSE
UN FONDS EUROPÉEN
CORONAVIRUS
£ Le ministre de l’Économie
Bruno Le Maire réfléchit
à proposer à ses homologues
européens un « fonds qui
serait limité dans le temps
avec une possibilité
d’endettement comme réponse
de long terme à la crise ».
Cette solution vise
à contourner l’hostilité
de plusieurs pays, dont
l’Allemagne ou les Pays-Bas,
au sein de la zone euro
au concept de coronabonds.
L’ÎLE-DE-FRANCE
SOUTIENT LES TPE/ETI
QUI SE MOBILISENT
£ La région Île-de-France
va accorder une aide de
800 000 euros aux TPE,
PME et ETI franciliennes pour
soutenir des projets permettant
de créer, transformer
ou renforcer les capacités
de production pour des biens
ou services stratégiques
pour lutter contre la crise
(fabrication de gels
hydroalcooliques, masques,
respirateurs…) ou pour faciliter
leur reprise d’activités après le
retour à la normale. Cette aide
exceptionnelle est valable
jusqu’au 31 décembre 2020.
COUP DE POUCE
DE L’ÉTAT AU
TRANSPORT AÉRIEN
£ Le gouvernement a décidé
d’accorder aux compagnies
aériennes un moratoire
sur le paiement de certaines
taxes dues entre mars et
décembre 2020 qui touchent
le transport aérien : la taxe
de l’aviation civile et la taxe
de solidarité sur les billets
d’avion. Leur paiement
sera reporté à 2021 et 2022.
Une décision avalisée par
la Commission européenne.
+@
» Comment
le gouvernement compte
éviter les loyers impayés
» Coronavirus : le gouvernement
planche sur des applications
pour suivre et alerter les Français
www.lefigaro.fr/economie
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LE FIGARO jeudi 2 avril 2020

TECH 35

La reprise
des chantiers
de construction se
fait encore attendre
Le guide des bonnes pratiques, qui devait permettre
le retour au travail des ouvriers, a pris du retard.
travailleurs, puis aux ministères
EMMANUEL EGLOFF £@eegloff de la Santé et du Travail, pour va-
ET GUILLAUME MOLLARET Difficultés
£@newsdusud lidation. « Les modifications ap-
portées par les pouvoirs publics ont de circulation
et d’accès
été suffisamment importantes pour
aux copropriétés,
CONSTRUCTION C’était le guide qu’elles soient acceptées tel quel, manque de matériel :
qui devait permettre le redémarra- décrypte-t-on du côté d’un grand les sous-traitants
ge des chantiers de BTP. Sauf qu’il acteur du BTP. Ce qui a fait prendre des opérateurs
se fait attendre. Ses initiateurs l’es- du retard. » télécoms
péraient avant la fin de la semaine Cela ne provoque guère d’émoi sont à la peine.
dernière, puis le début de l’actuel- du côté des professionnels. ORANGE
le. Mercredi 1er avril, il n’était tou- « Aujourd’hui, il semble difficile de
jours pas publié, même si « nous dire à tous les ouvriers de revenir
sommes bientôt au bout », explique
Jacques Chanut, président de la
Fédération française du bâtiment.
sur les chantiers alors que nous
sommes au pic de l’épidémie, pré-
cise la FNTP. Il vaut mieux attendre
Confinement oblige, le déploiement
Lors de la mise en place du
confinement, la quasi-totalité des
un peu et avoir le soutien des syndi-
cats et du ministère de la Santé. » de la fibre en France est presque à l’arrêt
chantiers se sont retrouvés à l’ar- Pour la FFB, Jacques Chanut
rêt du jour au lendemain. « Nous confirme que « nous ne sommes
avons fait un sondage auprès de nos pas à une semaine près ». Il ne nie tion française des télécoms (FFTélé- économique et opérationnelle qui sera
adhérents, et 80 % à 90 % d’entre pas que « les conséquences finan- ELSA BEMBARON £@elsabembaron coms) et secrétaire général de SFR. très différente de celle d’avant »,
eux reconnaissent qu’ils ont cessé cières seront terribles pour les en- Les entreprises chargées de dé- ajoute Arthur Dreyfus. Avant le
toute activité », précise-t-on du treprises, mais la priorité doit être Jamais accéder à un réseau doté ployer la fibre sur le terrain, surtout confinement, 19 000 prises étaient
côté de la Fédération nationale des la santé de nos gars ». d’un bon, voire très bon débit, les plus petites d’entre elles, ren- déployées par jour, essentiellement
travaux publics (FNTP). La pro-
portion est sans doute très similai-
re dans le bâtiment. Or le gouver-
Urgences assurées
Dans ce contexte, le retour sur le
« quences
Les consé-
n’aura été aussi essentiel pour
autant de Français. L’accès à la fibre
optique prend tout son sens en cette
contrent des difficultés à mettre en
place les mesures barrières contre le
virus. Elles ne disposent pas de suf-
par Orange, SFR et leurs sous-trai-
tants. Aujourd’hui, ce chiffre est
proche de zéro. La FFTélécoms de-
nement, qui sait le poids du BTP terrain sera forcément délicat. période de confinement. Mais pour fisamment de masques ou n’en ont mande à ce que « tout soit mis en
dans l’économie française, sou- « La publication de ce guide des
financières profiter de cette technologie qui pas du tout. Même chose pour le gel œuvre pour les aider à déployer » ap-
haitait un redémarrage du secteur bonnes pratiques ne va pas provo- seront permet des débits supérieurs à hydroalcoolique. Travailler en res- pelant à la mobilisation de tous les
le plus rapidement possible. Bruno quer un redémarrage des chantiers terribles 1 Giga bit par seconde et pouvant pectant un mètre de distance entre partenaires publics. Enedis est aussi
Le Maire, le ministre de l’Écono- par un coup de baguette magique », aller jusqu’à 10 Gb/s, encore faut-il chaque collaborateur relève du cas- sollicitée par les opérateurs télé-
mie, puis Muriel Pénicaud, la mi- tempère-t-on d’ailleurs du côté
pour les y avoir accès. Plus de 7,1 millions de se-tête. Par exemple, effectuer une coms. L‘énergéticien donne la prio-
nistre du Travail, l’ont demandé. d’un grand du BTP. entreprises, lignes sont raccordées à la fibre, soudure de fibre dans un boîtier im- rité à la maintenance de son réseau.
Provoquant une déclaration com- Aujourd’hui, seules les urgences mais selon l’Autorité des télécoms. Or, plique une certaine proximité entre Or les télécoms ont besoin de rac-
mune des trois fédérations profes- sont assurées. Le gouvernement a confinement oblige, le déploiement deux intervenants. cordements électriques supplé-
sionnelles (FNTP, Fédération défini certains chantiers prioritai-
la priorité de la fibre en France est proche du mentaires pour leurs nouvelles ins-
française du bâtiment et Capeb, res. Et ça fonctionne. Le groupe de doit être point mort. Filière en danger tallations, comme les armoires de
qui rassemble les artisans du BTP) travaux publics NGE participe à la santé de Mercredi matin, les entreprises « De nombreux sous-traitants qui ef- rue, les nœuds de raccordement
demandant un arrêt de tous les
chantiers. La passe d’armes s’est
conclue, le 21 mars, par une trêve
deux d’entre eux. « L’un concerne
une route nationale dans les Pyré-
nées-Orientales. Il reprend jeudi
nos gars
JACQUES CHANUT,
» des télécoms se sont entretenues
avec Jacqueline Gourault, la mi-
nistre de la Cohésion des territoires
fectuent des raccordements pour le
câblage sont des TPE. Si rien n’est fait,
elles sont toutes mortes ! », alerte
optique (NRO). « Si nous parvenons
à maintenir une petite activité, avec
une remontée en puissance avant la
PRÉSIDENT
entre les professionnels et les pou- 2 avril, explique Antoine Metzger, DE LA FÉDÉRATION
et des Relations avec les collectivités Étienne Dugas, président d’Infra- fin du confinement, on pourrait espé-
voirs publics. Les parties prenan- le président de NGE. L’autre, pour FRANÇAISE territoriales et son secrétaire d’État, Num, une fédération qui regroupe rer un retour à la normale à l’autom-
tes s’étaient entendu sur la rédac- le compte de SNCF Réseau, a redé- DU BÂTIMENT (FFB) Julien Denormandie. Leurs difficul- plus de deux cents entreprises. Il re- ne. Mais si tout le monde est à l’arrêt,
tion de ce guide des bonnes marré. Il concerne des travaux sur tés quotidiennes étaient au menu doute purement et simplement la cela va prendre douze mois pour re-
pratiques, qui devait permettre un talus qui s’est effondré sur une des discussions. Comme les entre- disparition de certaines entreprises prendre un niveau normal » tranche
aux ouvriers de retourner tra- voie ferrée à proximité de la gare de prises de travaux publics, les opéra- du secteur. « Il faudra des mois pour Étienne Dugas. Certaines activités
vailler en toute sécurité. Sèvres-Ville-d’Avray, dans les teurs télécoms peinent à réaliser les reconstituer ce tissu industriel. La sont toutefois maintenues pour faire
Sauf qu’il se fait attendre. Une Hauts-de-Seine. Douze personnes travaux. D’autant que dans certains situation est d’autant plus préoc- face aux situations les plus urgentes.
première mouture a été élaborée y travaillent, contre vingt-cinq en cas, quand il faut creuser des tran- cupante que les grandes entreprises Orange précise ainsi qu’il continue à
par l’Organisme professionnel de temps normal afin de respecter les chées pour déposer des câbles, rien ne disposent pas d’assez de main- déployer de la fibre dans des cas
prévention du bâtiment et des gestes barrières. » Et les entrepri- n’est possible sans entreprises du d’œuvre en propre pour compen- précis, notamment pour équiper
travaux publics (OPPBTP). Le tra- ses de travaux publics sont BTP. « Certaines mairies interdisent ser », ajoute-t-il, demandant un des hôpitaux, des médecins, des en-
vail est complexe compte tenu de aujourd’hui dans l’attente d’une la délivrance d’autorisation de tra- soutien financier pour permettre de treprises sensibles ou des personnes
la spécificité de chaque chantier et remontée d’information des pré- vaux voire refusent de donner des sauver cette filière. Il a fallu des fragiles. Le maintien de malades à
du nombre de métiers différents fets départementaux qui doivent autorisations de circulation. L’accès mois au secteur pour mettre en pla- domicile repose sur les équipements
impliqués. Cette première version préciser au gouvernement les aux immeubles est souvent interdit ce une véritable « machine indus- télécoms et le déploiement de la
a ensuite été envoyée aux organi- chantiers à reprendre en priorité par les copropriétés », ajoute Arthur trielle pour déployer la fibre ». « Il télémédecine fait apparaître de
sations syndicales représentant les sur leur territoire. ■ Dreyfus, le président de la Fédéra- faudra la relancer avec une réalité nouveaux besoins en connexion. ■

LA SÉANCE DU MERCREDI 1ER AVRIL

LE CAC JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 LES DEVISES MONNAIE 1 EURO=
L’OR JOUR VEILLE 31/12
AUSTRALIE ................................................................................
DOLLAR AUSTRALIEN 1,8053 AUD
ACCOR .............................................. 23,97 -4,12 25,26 23,97 0,492 -42,59 ♣
MICHELIN .............................................. 79,84 -1,51 82,44 76,6 0,352 -26,82 CANADA ................................................................................
DOLLAR CANADIEN 1,5601 CAD
COTATION QUOTIDIENNE ASSURÉE PAR LOOMIS-CPOR
♣
AIR LIQUIDE .................................. 114 -2,27 114,85 112 0,457 -9,67 ORANGE ..............................................10,875 -2,33 11,125 10,7 0,389 -17,11
www.cpordevises.com
GDE BRETAGNE ................................................................................
LIVRE STERLING 0,8846 GBP
AIRBUS .............................................. 52,2 -12,03 58,8 52,1 0,708 -59,99 PERNOD RICARD .................................. 128,6 -0,66 132,95 125,95 0,278 -19,32 HONG KONG ................................................................................
DOLLAR DE HONG KONG 8,4781 HKD
LINGOT DE 1KG ENV .....................................................
50400 49990 +15,15
JAPON ................................................................................
YEN 117,55 JPY
NAPOLEON ..................................................... 274,2 274,2 +5,91
ARCELORMITTAL SA .................................. 8,035 -7,23 8,4 7,989 0,237 -48,63 PEUGEOT ..............................................11,375 -6,49 12,03 11,33 0,466 -46,6 PIECE 10 DOL USA .....................................................
880 880 +12,82
ATOS .............................................. 60,38 -2,2 62,12 59,42 0,349 -18,76 ♣ 25,19
PUBLICIS GROUPE SA ............................. -3,56 25,67 24,03 0,549 -37,59 SUISSE ................................................................................
FRANC SUISSE 1,0564 CHF PIECE 10 FLORINS .....................................................
300 304 +11,98
ETATS-UNIS ................................................................................
DOLLAR 1,0936 USD PIECE 20 DOLLARS .....................................................
1745 1745 +16,41
AXA .............................................. 14,734 -6,68 15,308 14,444 0,578 -41,32 RENAULT .............................................. 16,312 -7,88 17,48 16,312 0,575 -61,33
TUNISIE ................................................................................
DINAR TUNISIEN 3,162 TND PIECE 20F TUNISIE .....................................................
295 287 +13,51
BNP PARIBAS ACT.A .................................. 25,87 -5,96 26,9 25,82 0,651 -51,03 SAFRAN ..............................................66,96 -16,45 76,82 66,96 0,636 -51,35 MAROC ................................................................................
DIHRAM 11,103 MAD PIECE 5 DOL US (H) .....................................................
458 458 +15,95
BOUYGUES .............................................. 24,37 -8,79 26,21 24,25 0,769 -35,67 SAINT-GOBAIN .................................. 21,58 -2,64 22,08 21 0,33 -40,88 TURQUIE ................................................................................
NOUVELLE LIVRE TURQUE 7,2925 TRY PIECE 50 PESOS MEX .....................................................
1800 1910 +8,56
CAPGEMINI ..............................................73,62 -4,39 77,4 73,62 0,342 -32,4 SANOFI ..............................................78,94 -1,5 79,55 76,12 0,254 -11,92 EGYPTE ................................................................................
LIVRE EGYPTIENNE 17,4 EGP PIECE FR 10 FR (H) .....................................................
172 170 +16,45
CARREFOUR ..............................................14,24 -1,21 14,445 13,98 0,328 -4,75 SCHNEIDER ELECTRIC ............................. 73,54 -6,41 77,24 72,48 0,348 -19,63 CHINE ................................................................................
YUAN 7,7653 CNY PIECE SUISSE 20F .....................................................
290,9 290,9 +13,63
PIECE LATINE 20F .....................................................
302 309,9 +18,99
CREDIT AGRICOLE .................................. 6,344 -5,17 6,57 6,25 0,375 -50,92 SOCIETE GENERALE ♣ ..................................
13,886 -9,53 14,9 13,886 0,964 -55,23 INDE ................................................................................
ROUPIE 83,6004 INR SOUVERAIN ..................................................... 373 360 +13,37
DANONE ..............................................56,56 -3,55 57,98 55,98 0,416 -23,46 SODEXO ..............................................59 -4,28 60,98 58,16 0,315 -44,16 ALGERIE ................................................................................
DINAR ALGERIEN 137,12 DZD KRUGERRAND .....................................................
1695 1675 +16,01
DASSAULT SYSTEMES .................................. 132,45
ENGIE .............................................. 8,976
-1,89
-4,63
137,4
9,254
128,55
8,91
0,146
0,468
-9,62
-37,67
STMICROELECTRONICS .............................
THALES ..............................................73,4
18,97 -4,55
-3,9
19,525
77,52
18,835
72,88
0,38
0,25
-20,86
-20,67
SICAV ET FCP
VALEURS LIQUIDATIVES EN EUROS (OU EN DEVISES), HORS FRAIS
ESSILORLUXOTTICA .................................. 93,78 -4,58 96,26 92,04 0,519 -30,94 TOTAL .............................................. 35,2 -0,54 35,96 33,135 0,587 -28,46 VALEUR DATE DE
Cybèle Asset Management
HERMES INTL ..................................592 -5,85 622,2 592 0,094 -11,14 UNIBAIL-RODAMCO-WE ............................. 49,13 -4,71 51,66 48,75 0,981 -65,07
RETROUVEZ
LIQUID. VALORISAT.
37 av. des Champs-Elysées
42 rue d’Anjou, 75008 Paris
KERING ..............................................455 -4,39 474 450,15 0,208 -22,25 VEOLIA ENVIRON. .................................. 18,29 -6,08 19,695 18,29 0,476 -22,86 75008 Paris
Tél. : 01 55 27 94 94
Tel. : 01 56 43 62 50

VINCI♣.............................................. 67,06 -11,06

www.palatine.fr
L'OREAL ..............................................233,3 -2,34 240,3 229 0,149 -11,63 72,2 66,98 0,468 -32,26 BETELGEUSE ................................................
37,74 30/03/20
LEGRAND ..............................................56,76 -2,94 59,64 56,16 0,324 -21,86 VIVENDI ..............................................19,93 +2,07 20,34 19,065 0,516 -22,81 SICAV BELLATRIX C ................................................
281,51 30/03/20 SITE D’INFORMATIONS EXCLUSIVES
LVMH .............................................. 324,65 -4,08 332,55 321,1 0,206 -21,62 WORLDLINE .............................................. 51,66 -3,8 52,8 50,4 0,377 -18,19 UNI HOCHE C ................................................
225,29 30/03/20 SIRIUS ................................................45,15 30/03/20 WWW.WANSQUARE.COM

L’INQUIÉTUDE REVIENT EN FORCE SUR LES MARCHÉS hrousseau@lefigaro.fr

Le trimestre débute bien mal en Bourse. de 3,94 % et Londres de 3,83 %. Wall effet que le Covid-19 devrait faire entre jours difficiles qui nous attendent (…) Avec la débâcle boursière, son offre
Les marchés ont piqué du nez dès Street, qui vient de boucler son pire 100 000 et 240 000 morts dans le pays ce sont deux semaines très très qui était boudée par certains minori-
l’ouverture mercredi. Le CAC 40 a ter- trimestre depuis 1987, cédait égale- si les restrictions actuelles étaient res- douloureuses » qui s’annoncent a taires, est soudainement devenue
miné en baisse de 4,30 % à 4 207,24 ment à l’inquiétude. En séance, le Dow pectées. Le nouveau virus a déjà tué prévenu le président des États-Unis, attractive et Capgemini détient dé-
points. Sur les trois premiers mois de Jones pliait de 2,7 % et le Nasdaq, riche plus de 43 000 personnes dans le mon- Donald Trump mardi soir. sormais environ 98 % d’Altran. Lors
l’année, miné par l’épidémie de corona- en valeurs technologiques, de 2,3 %. de, dont les trois-quarts en Europe, et À Paris, le groupe français de l’in- d’une première phase de l’OPA à
virus, l’indice phare de la Bourse de Les investisseurs étaient secoués la pandémie menace désormais de sub- formatique Capgemini est finalement l’automne, Capgemini n’avait réussi à
A

Paris avait déjà plongé de plus de 27 %. par les dernières prévisions de la merger les États-Unis. « Je veux que parvenu à prendre le contrôle total rassembler qu’un peu plus de 54 %
Ailleurs en Europe, Francfort a reculé Maison-Blanche. Washington estime en chaque Américain soit prêt pour les du groupe de technologie Altran. des actions d’Altran. ■ H. R.
https://t.me/WorldAndNews
 Stay Safe&Protect Your Families in the Coronavirus Pandemic. @WorldAndNews
jeudi 2 avril 2020 LE FIGARO

36 MÉDIAS et PUBLICITÉ
Les jeunes reprennent le chemin de la télé
Durant le confinement, les 15-24 ans sont plus nombreux devant le poste. Ils le regardent aussi plus longtemps.
CAROLINE SALLÉ £@carolinesalle
TÉLÉVISION On les pensait déses-
pérément perdus pour la cause té-
lévisuelle. Un billet sans retour en
poche, destination Netflix. C’est
raté. Depuis le début de l’épidémie
de coronavirus, les jeunes sont de
retour devant le petit écran. Au
mois de mars, à la faveur du confi-
nement, la durée d’écoute de la té-
lévision des 15-24 ans a atteint
1 h 29 contre 1 h 03 un an plus tôt.
La semaine qui vient de s’écouler,
ce temps s’est même élevé à 1 h 46,
ce qui équivaut à un bond de 86 %
comparé à la même période en
2019, d’après les chiffres de Média-
métrie. Il y a un an, 36,5 % de cette
TF1 ne versera pas
de dividendes
TF1 renonce à donner des objectifs
pour 2020. Le groupe a annoncé
mercredi qu’il n’atteindra pas un taux
de marge à deux chiffres cette
année. Et le coût des programmes,
estimé à 985 millions d’euros,
sera revu à la baisse, afin d’adapter
la grille au contexte économique.
Enfin, TF1 a décidé de ne pas verser
de dividendes lors de l’assemblée
générale du 17 avril, mais pourrait
réévaluer cette décision en août.
La filiale de Bouygues a constaté,
ces derniers jours, « une nette
accélération des annulations de
campagnes publicitaires s’étendant
à l’ensemble des secteurs.
L’absence de visibilité sur l’évolution
du marché publicitaire et la poursuite
attendue de cette tendance sur
le 2e trimestre, devraient fortement
impacter nos performances pour
la première partie de l’année ». C. S.
tranche d’âge allumaient la télé.
Actuellement, ils sont plus de
57 %, soit un bond de 58 % En
clair, non seulement les 15-24 ans
sont plus nombreux devant la télé,
mais ils la regardent aussi plus
longtemps.
Un revival que ce média n’avait
pas connu depuis des années
auprès de cette frange de la popu-
lation. La tendance est certes plus
générale, puisque les Français dans
leur ensemble ont passé chaque
jour en moyenne 4 h 29 à regarder
la télé, un niveau jamais atteint en-
core, avec 44 minutes de plus qu’il
y a un an, selon Médiamétrie. Il
n’empêche, ce regain d’intérêt
auprès d’une cible aussi volatile est
assez spectaculaire.
Et ce sont principalement les
chaînes historiques qui en profitent.
TF1, par exemple, dit avoir vu son
audience augmenter de près de
60 % sur la cible élargie des moins
de 35 ans, les fameux millennials.
Quant à la nature des programmes
consommés, les jeunes picorent un
peu de tout. De l’information, no-
tamment. Ainsi, le 20 heures de
France 2 attire-t-il depuis le 16 mars
quelque 380 000 téléspectateurs
Depuis le début âgés de 15 à 24 ans, contre 170 000
du confinement,
en moyenne entre le 15 mars et le
« Koh-Lanta 2020 :
L’île des héros » mois de septembre dernier. Sur la
a attiré un tiers cible plus large des 15-34 ans, le gain
de 15-24 ans est quasiment d’un demi-million en
supplémentaires plus : ils sont désormais 830 000
sur TF1. chaque soir, contre 350 000 aupa-
PHILIPPE LE ROUX/ALP/TF1 ravant. Sur TF1, le coup de jeune est
encore plus frappant. Le JT de
20 heures a séduit 300 000 indivi-
dus âgés de 15-24 ans en plus depuis
le 16 mars. Et chaque soir, 1,3 mil-
lion de 15-34 ans suivent tour à tour
Gilles Bouleau et Anne-Claire
Coudray, ce qui représente une
augmentation de 765 000 personnes
sur cette tranche d’âge !
La recherche de réconfort
Les émissions de divertissement
ainsi que les grands films patrimo-
niaux sont également privilégiés par
les ados et les jeunes adultes.
« Comme leurs aînés, les jeunes sont
en recherche de réconfort. Revenir
devant les chaînes de télé tradition-
nelles et, par exemple, revoir des
films de comédie patrimoniaux per-
met de rassurer tout le monde. Cela
s’appelle l’effet de simple exposition.
Le fait de connaître déjà la fin, de sa-
voir que cela se termine bien permet
d’appréhender le programme dans un
état d’esprit relaxé et positif. Un peu
comme quand on mange un gratin de
coquillettes au beurre, on se remémo-
re un petit bonheur passé », explique
une experte de l’audiovisuel.
« C’est également le principe de
l’écoute conjointe. Actuellement, plu-
tôt que d’être chacun sur sa tablette ou
son ordinateur, les membres de la fa-
mille veulent être réunis tous ensemble
devant des programmes fédéra-
teurs », explique le cadre d’une
chaîne. Diffusé dimanche dernier
dans l’après-midi sur France 2, le
film culte La Grande Vadrouille a ainsi
attiré près de 500 000 millennials,
soit 23 % de l’audience sur cette
cible. Le public de « Koh-Lanta » sur
TF1 était déjà constitué en partie par
des jeunes. Ce qui ne l’empêche pas
de faire de la reconquête sur cette
cible. Depuis le début du confine-
ment, le programme séduit 34 %
de 15-24 ans supplémentaires.
« N’oublie pas les paroles », présenté
par Nagui en access prime time sur
France 2, dénombre en ce moment
535 000 millennials, soit 200 000 de
plus qu’en temps normal. Idem pour
M6, dont l’audience sur cette cible a
augmenté de 20 % pour « Pékin Ex-
press » et 39 % pour « Top Chef »,
entre la dernière diffusion avant
confinement et la première, après.
Faut-il voir dans tous ces chiffres
un simple changement conjonc-
turel ou un phénomène plus struc-
turel ? « Cela ne va pas rebattre in-
tégralement les cartes, confie un
acteur du secteur. Mais il y aura
peut-être un effet piqûre de rappel
auprès des jeunes : oui, la télévision
propose aussi plein de programmes
intéressants pour eux. » ■

La Poste améliore son dispositif pour distribuer la presse

Les tournées des postiers devraient passer de trois jours actuellement à quatre puis cinq par semaine.
ter à cinq le nombre de tournées des la presse, nous allons faire évoluer vis des lecteurs, estimant que jus- dienne nationale (SPQN) et direc-

5
ALEXANDRE DEBOUTÉ £@axel_deb
PRESSE Vivement critiquée depuis
l’annonce, la semaine dernière, de
jours la réduction du nombre hebdoma-
daire de ses tournées de postiers à
Objectif de tournées trois jours (les mercredis, jeudis et
hebdomadaires vendredis), La Poste est en train de
des postiers revoir sa copie. Elle a annoncé mer-
pour distribuer credi soir qu’elle travaillait à un
les titres de presse nouveau dispositif spécifique pour
la distribution de la presse qui doit
être mis en place la semaine pro-
chaine. Celui-ci vise, dans un pre-
mier temps, à ajouter un jour de
tournée (la semaine prochaine et la
suivante, sachant que le lundi
13 avril est férié) puis, dans un se-
cond temps, deux jours, pour por-
postiers, du lundi au vendredi.
« Notre priorité est la sécurité et la
santé de nos milliers de postiers, ex-
plique Philippe Wahl, PDG du
groupe La Poste. Il faut bien voir que
notre organisation est complexe,
avec 17 100 points de contacts,
10 000 partenaires (retrait chez les
commerçants, NDLR), 2 400 points
de contact industriels, et une pro-
miscuité dans nos activités qui n’était
plus possible en l’absence de gel hy-
droalcoolique ou de savon et d’eau. Il
fallait respecter les règles fixées par
les médecins du travail. Nous avons
d’abord garanti un premier socle
d’activités pour assurer les livraisons
de courses, repas ou médicaments
aux personnes âgées. S’agissant de
notre dispositif pour éviter le tunnel
de quatre jours, entre le samedi et le
mardi, qui pénalisait en particulier la
distribution des quotidiens. »
« Une erreur »
La décision unilatérale de La Poste
de réduire la voilure avait été très
mal accueillie par les éditeurs de
presse, qui s’étaient alarmés de ses
conséquences sur la distribution
des journaux et magazines à leurs
abonnés, pour eux souvent cru-
ciale. L’Alliance de la presse d’in-
formation générale, par la voix de
son président Jean-Michel Baylet,
avait dénoncé un « coup de poi-
gnard dans le dos » et une « rupture
d’engagement contractuel » vis-à-
qu’à 500 000 abonnés de la presse
quotidienne nationale et régionale
seraient impactés.
Le temps de s’organiser, en
liaison quotidienne avec les organi-
sations syndicales, La Poste a donc
finalement mis de l’eau dans son
vin. « Nous avons fait une erreur en
ne mettant pas assez de moyens pour
livrer la presse cette semaine », re-
connaît Philippe Wahl, qui assure
que d’autres mesures seront an-
noncées dans les prochains jours.
« Les discussions que nous avons en-
tamées avec La Poste sont construc-
tives. Nous nous reparlons, nous
avançons », se félicite de son côté
Marc Feuillée, président du Syn-
dicat national de la presse quoti-
teur général du Groupe Figaro.
Pour assurer la « continuité de ses
services », comme la distribution
de la presse, mais aussi du courrier
et des colis, tout en « garantissant
dans la durée la sécurité et la santé
de ses salariés », La Poste prévoit
d’accroître le nombre de ses bu-
reaux ouverts. Ils devraient passer
de 1600 à 1850, en faisant appel à
des renforts, 3 000 salariés sup-
plémentaires, notamment issus de
sa filiale Mediapost (distribution de
prospectus publicitaires) qui
connaît actuellement une chute
d’activité, et des volontaires au sein
du groupe. Philippe Wahl assume
que La Poste manque de moyens
humains. ■

EN BREF
Les ventes de consoles et de jeux vidéo bondissent CAPGEMINI CONTRÔLE
ALTRAN À 98 %
Les achats de consoles ont progressé de 140 % en France juste avant le confinement. £ Mission réussie pour
Capgemini : le groupe de services
informatiques détient 98 %
des anciens comptes Xbox revenir prend aussi les jeux de société, est le aussi jongler avec les flux logistiques,

180 %
CHLOÉ WOITIER £@W_Chloe
JEUX VIDÉO Entre leurs achats de
pâtes, de papier toilette et de car-
Croissance touches d’encre, les Français ont
des ventes aussi fait leurs réserves de jeux vi-
déo. Révélées par le site Gamesin-
de jeux vidéo dustry, les données du panel GSD,
au format digital créé par les éditeurs de jeux vidéo
pour mesurer le marché européen,
montrent une forte hausse des
ventes en France la semaine du
16 mars. Les achats de Nintendo
Switch, PlayStation 4 et Xbox One
se sont ainsi envolés de 140 % par
rapport à la semaine précédente.
Une performance, alors que les
achats de consoles avaient chuté
de 20 % en 2019. « Tous les voyants
A
en ligne, preuve que des foyers re-
branchent leurs consoles. »
Les achats de jeux au format phy-
sique ont, eux, bondi de 70 %. Cette
croissance est due à Animal Cros-
sing : New Horizons, une nouveauté
de Nintendo sortie le 24 mars et nu-
méro un des ventes. « C’est Ninten-
do qui tire le marché », confir-
me-t-on chez Fnac Darty. Son jeu
de courses Mario Kart 8 Deluxe est
numéro deux des ventes. Les Fran-
çais se sont aussi tournés vers des
valeurs sûres comme le jeu de foot-
ball FIFA 20 (3e) et le jeu militaire
Call of Duty Modern Warfare (4e),
déjà au sommet des ventes en 2019.
Fnac-Darty note aussi un haut
niveau de précommandes pour
quatrième segment le plus perfor-
mant en ventes derrière la bureauti-
que, le parascolaire et l’électromé-
nager », poursuit le distributeur.
« Le contexte est particulier », sou-
ligne Emmanuel Martin, délégué
général du Sell, qui représente
l’industrie du jeu vidéo en France.
« Beaucoup de personnes ont vou-
lu s’assurer avant le confinement
d’avoir du contenu pour s’occuper et
se changer les idées », explique-t-il.
Pic des ventes digitales
Mais entre la fermeture des magasins
spécialisés et le ralentissement des li-
vraisons, le marché physique va ra-
pidement décrocher. En Italie et en
Espagne, ce dernier s’est écroulé de
qui priorisent désormais les produits
de première nécessité.
L’industrie peut s’appuyer sur les
ventes digitales pour prendre le re-
lais. Déjà, ces dernières ont bondi
de 180 % en France la semaine du
16 mars, et ce sans compter les
achats sur la plateforme Nintendo
eShop : Nintendo ne communique
pas ses ventes digitales à GSD.
L’Italie et l’Espagne connaissent des
niveaux de croissance similaires.
Mais ce report sur le digital risque
de profiter en priorité aux locomo-
tives du marché. Les jeux de milieu
de tableau peuvent souffrir de l’ab-
sence de visibilité que leur offraient
les rayonnages et les conseils de
distributeurs spécialisés, comme
du capital d’Altran au terme
de son OPA amicale, toutefois
mouvementée par un bras de fer
avec le fonds Elliott. La société
d’ingénierie va être retirée
de la cote, a indiqué l’Autorité
des marchés financiers.
BEIN SPORTS STOPPE
SES PAIEMENTS
À LA LIGUE DE FOOT
£ Quelques jours après Canal+,
beIn Sports a écrit à la LFP
pour lui signifier qu’il ne paiera
pas l’échéance du 5 avril
des droits de la L1 et de la L2
en raison de l’arrêt
de ces championnats.

sont au vert », confirme-t-on chez Final Fantasy 7 Remake, prévu pour 50 % si on retire du calcul les ventes Micromania, et se faire oublier des Le montant de l’échéance
Microsoft. « Nous voyons même le 10 avril. « L’univers jeu, qui com- d’Animal Crossing. Le secteur doit consommateurs. ■ est de 32 millions d’euros.
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