3,40 € mardi 14 février 2023 le figaro - N° 24 411 - www.lefigaro.

fr - France métropolitaine uniquement Première édition

lefigaro.fr

SecteS eNqUête
cOmmeNt LeS détectIVeS Le cOût de La traNSItION
PrIVéS PISteNt écOLOGIqUe eSt-IL SUPPOrtaBLe
LeS NOUVeaUx GOUrOUS PAGE 8 POUr NOtre écONOmIe ? PAGE 13

ROyAuME-uNi
Polémique
sur les déficiences Médecins libéraux en grève :
les raisons du grand malaise
de l’armée
britannique PAGE 5
TuNiSiE
Un week-end
d’arrestations PAGE 6 Alors que les négociations sur le relèvement du prix de la consultation sont dans l’impasse,
AcciDENT les tentatives parlementaires de légiférer sur la liberté d’installation font monter la tension.
Pierre Palmade : Une nouvelle fois, des cabi- le jour de l’An, la colère ne quand le collectif Médecins professionnels de santé, les le sport, pour la crèche,
drogue, vidéo et nets médicaux resteront retombe pas. De nombreux pour demain réclame son blouses blanches souhaite- pour le travail, autant de
téléphonie au cœur portes closes ce mardi. médecins ont pris comme doublement. Au-delà de la raient récupérer du temps tâches qui leur semblent
Après la grève des 1er et un geste de mépris la pro- tarification des actes et des pour le consacrer aux ma- absurdes quand on sait que
de l’enquête PAGE 7 2 décembre, puis la ferme- position de l’Assurance- questions liées à l’organisa- lades plutôt qu’à des tâches 6 millions de Français pei-
ture observée par des prati- maladie de revaloriser la tion des soins, qui ne satis- administratives qui les ac- nent à trouver un médecin
fOOTbALL ciens libéraux entre Noël et consultation de 1,50 euro fait ni les patients ni les caparent. Certificats pour traitant.
Ligue des champions: è tarifs de la consultation, liberté d’installation... la colère monte d’un cran page 18 et l’éditorial
Paris, la peur du bide
PAGE 10

AéRiEN
La France veut Retraites :
produire plus
de biocarburants
les députés
U.s. navy Photo by Mass coMMUnication sPecialist 1st class tyler thoMPson

PAGE 20 Insoumis
MiNES multiplient les
L’état vole
au secours du nickel provocations
néo-calédonien À chaque jour son incident ma-
PAGE 21 jeur. La stratégie de La France
insoumise semble bien rodée.
cONcERTS Dernier événement en date, ce
lundi, avec un député LFI,
« tribute bands » :
des copies plus ou Chine - États-Unis : Aurélien Saintoul, qui a en-
flammé l’Hémicycle en quali-
moins conformes
PAGE 26
la traque des ballons fiant en séance le ministre du
Travail d’« imposteur » et

espions s’intensifie d’« assassin ». La volonté de

faire monter la tension lors de
l’examen de la loi sur les retrai-
Vendée :
champs libres

tes pose question jusqu’au sein

après la guerre, même de la Nupes. LFI a-t-elle
les massacres vraiment envie qu’un vote ait
« à froid » lieu sur l’article 7 de la loi qui
Après le ballon espion détruit le 4 février, trois autres objets volants ont été abattus ces trois derniers jours par les fait passer de 62 à 64 ans le dé-
n
Les tribunes Américains. Entre accusations mutuelles et dénégations, les relations entre Pékin et Washington sont au plus bas. PAGE 4 part à la retraite ? PAGES 2 Et 3
de Yaël Braun-
Pivet et de
thierry Lentz édItOrIaL par Gaëtan de capèle gdecapele@lefigaro.fr
La chronique Gallimard
Donnant, donnant
n

présente
de renaud

À
Girard
n
L’analyse l’ombre des retraites, un autre dix et douze ans d’études pour facturer une J. M. G. LE CLÉZIO

conflit, inédit, oppose le gouver-
de Paul Sugy nement aux médecins libéraux.
PAGES 12, 14 Et 15 L’enjeu de ce bras de fer n’est pas
consultation au prix d’une coupe chez le coif-
feur ? Et pour utiliser une partie grandissante AVERS
Des nouvelles
de son temps en paperasserie au lieu de l’occu- des indésirables
Photo F. Mantovani © Gallimard

mince : concilier une amélioration per à soigner ?

@
de leurs conditions d’exercice avec une
Figaro oui meilleure organisation des soins en France. La
Figaro non discussion tournant au dialogue de sourds, les
praticiens, d’ordinaire peu remuants, ont dé-
Dans une France où il devient de plus en plus
difficile de consulter un généraliste, quasiment
impossible de voir certains spécialistes, le gou-
vernement doit à l’évidence répondre au ma- GALLIMARD

réponses à la question cidé d’organiser une nouvelle journée portes laise des libéraux. Sans leur concours, il ne ré-
de lundi : closes de leur cabinet. C’est dire leur mécon- soudra jamais la
Emmanuel Macron tentement, qu’il faut entendre. Le prix de la La crise question des dé-
J.M.G.
doit-il davantage consultation, fixé à 25 euros, n’a pas été revu à existentielle serts médicaux

LE CLÉZIO
s’impliquer pour défendre la hausse depuis sept ans et reste l’un des plus ni celle de l’en-
la réforme des retraites ? bas d’Europe. À ce niveau, il ne permet pas à de la médecine gorgement des
OUI NON un médecin, une fois l’inflation et les charges libérale nourrit urgences. Mais
55 % 45 % prises en compte, de se verser une rémunéra-
tion conforme à ce qu’est en droit d’attendre celle des
les médecins,
eux aussi, doi- Avers
TOTAL DE VOTANTS : 152 479 un professionnel aussi qualifié. Refuser d’en
vocations vent prendre la Des nouvelles des indésirables
doubler le montant, comme le demandent les mesure de leurs
Votez aujourd’hui plus en pointe, relève du bon sens lorsque les responsabilités. En se rendant plus disponibles « Le Clézio est un fabuleux conteur. »
3’:HIKKLA=]UXYU]:?a@m@b@o@a";

sur lefigaro.fr caisses de l’État sont vides. Proposer une reva- en dehors des horaires de bureau et les jours fé- Mohammed Aïssaoui, Le Figaro Littéraire
Grève des médecins : lorisation symbolique de 1,50 euro ne peut riés. En s’organisant pour exercer un temps
faut-il revaloriser qu’attiser la rancœur d’une médecine libérale, dans des endroits où les Français n’ont pas suf- « Un hymne magnifique à une humanité
M 00108 - 214 - F: 3,40 E

le tarif de la consultation autrefois synonyme d’aisance et de prestige, fisamment accès aux soins. En consentant à ce qui est aussi la nôtre. »
chez les généralistes ? qui vit aujourd’hui avec le sentiment d’un dé- que certains actes puissent, sous condition, être Gilles Heuré, Télérama
classement. Cette crise existentielle nourrit délégués à d’autres. Cela s’appelle le donnant,
DeDMityay - stock.aDobe.coM ;
celle des vocations. Quel intérêt de faire entre donnant et tout le monde a à y gagner. ■
Jean-Francois baDias/aP
A

AND : 4,10 € - BEL : 3,50 € - CH : 4,40 FS - CZ : 115 CZK - D : 4,00 € - ESP : 4,10 € - GR : 3,60 € - LUX : 3,50 € - MAR : 37 DH - MTQ/GLP : 4,10 € - PORT.CONT : 4,20 € - REU : 4,50 € - TUN : 11,00 TND ISSN 0182.5852
 mardi 14 février 2023 le figaro
2 l'événement
Nupes :
la stratégie
de la tension
LUDOVIC MARIN/AFP
Si les
oppositions
en débat
souhaitent que L’attitude de La France insoumise
nous puissions lors de l’examen du projet de loi
parler d’âge, il
ne tient qu’à elles sur les retraites provoque des
de retirer leurs divergences avec le PS et EELV.
amendements
d’obstruction wally Bordas £@wallybordas
pour que nous et sophie de ravinel £ @S2RVNL
puissions arriver
à l’article 7
olivier dussopt,
» « VOUS êtes un imposteur et un as-
sassin ! » Lundi encore, la voix des
Insoumis a lourdement résonné
Ministre du travail dans l’enceinte de l’Assemblée na-
tionale. Au micro, Aurélien Sain-
toul (Hauts-de-Seine) s’en est pris
en fin d’après-midi au ministre
Olivier Dussopt, chargé des retrai-
tes. Suspension de séance, excuses
de l’accusateur (lire ci-dessous).
Agitation, confusion et heures
perdues dans un temps très
contraint par choix de la majorité
présidentielle. Les Insoumis sont
SARAH MEYSSONNIER/REUTERS
accusés de « bordéliser » le débat,
selon les mots du ministre de l’In-
térieur, Gérald Darmanin. Alors au
sein de la Nupes, les relations se
L’Insoumis Aurélien
Nous
souhaitons
Saintoul qualifie Olivier
qu’il y ait un vote
sur l’article 7,
Dussopt d’« assassin »
afin que chaque Claire Conruyt£@ClaireConruyt
député puisse et w. B.
s’exprimer À l’ASSEMBLÉE nationale, la vio-
sur le report lence verbale a atteint des sommets.
de 62 à 64 ans
philippe Martinez,
» Après une première semaine mar-
quée par de grandes tensions, alors
que se déroule l’examen de la réfor-
secrÉtaire gÉnÉral me des retraites, une nouvelle
de la cgt saillie a entraîné l’indignation des
parlementaires, lundi. Tandis que
les députés débattaient de l’index
senior prévu dans le texte du gou-
vernement, mesure vivement criti-
quée par l’opposition de gauche qui
la considère comme insuffisante,
l’Insoumis Aurélien Saintoul a pris
la parole, prenant directement à
partie Olivier Dussopt.
« Puisque vous avez voulu parler
des morts du travail, je vous donne
les chiffres parce que vous avez
menti encore une fois », a cinglé le
député LFI, pointant la « félonie »
LUDOVIC MARIN/AFP
du ministre du Travail avant de le
traiter d’« imposteur » et d’« as-
sassin ». Des propos qui ont entraî-
né une vive protestation depuis les
bancs des parlementaires, entraî-
nant une suspension de séance de
L’Assemblée quinze minutes.
De retour dans l’Hémicycle,
nationale
Aurore Bergé, patronne du groupe
doit être le lieu Renaissance, a déploré cette « esca-
lade verbale » tout en exigeant
du débat, pas d’Aurélien Saintoul des « excuses
celui des injures. claires et sincères ». Tour à tour, les
différents groupes de la Nupes, mis à
Ceux qui insultent part LFI, se sont désolidarisés des
ne sont pas propos tenus. « Je tiens à dire à quel
point nous sommes choqués par les
à la hauteur propos qui ont été tenus », a lancé,
des Français grave, le président du groupe com-
muniste, André Chassaigne. Applau-
qui les ont élus dissements, debout, de l’ensemble
ni du débat des parlementaires, excepté les In-
soumis. « Je me sens blessé, même
démocratique humilié, je le dis. Tenir de tels propos
qu’ils attendent
Élisabeth borne,
» est inacceptable. (…) Le débat démo-
cratique est un échange d’idées pas un
échange d’injures », a-t-il ajouté.
preMière Ministre Au socialiste Boris Vallaud de
poursuivre : « Il faut ici défendre
A
avec conviction, passion et colère,
mais jamais avec des mots qui peu-
tendent aussi. Car tous ne suivent
pas la ligne de la majorité des In-
soumis et la tension monte pour
cette ultime semaine des débats
avant le passage au Sénat. Ces der-
niers jours, ces tensions se sont
publiquement exprimées.
« Quoi ? Je dis ce que je veux…
Vous allez m’exclure, moi aussi ? » Il
est 22 heures, vendredi soir à l’As-
semblée. Sophie Chikirou, députée
LFI de Paris, proche de Jean-Luc
Mélenchon, est levée, vindicative.
Elle s’adresse à la socialiste Valérie
Rabault (Tarn), qui préside la séan-
ce ce soir-là. Elle tentera vaille que
vaille de faire chuter le degré de
tension. Quelques heures plus tôt,
l’Insoumis Thomas Portes a écopé
de deux semaines d’exclusion du
Palais Bourbon, la plus lourde sanc-
tion disciplinaire pour un député.
vent blesser ou heurter. » L’écologis-
te Cyrielle Chatelain a considéré
quant à elle que « les mots ont un
sens et ne peuvent pas être utilisés à la
légère ». « Ici, aucun de nous est un
assassin. » Après avoir apporté son
« soutien » à Olivier Dussopt, Mari-
ne Le Pen a indiqué qu’« en politi-
que, on n’a pas d’ennemis, on a des
adversaires ». Le président du grou-
pe LR, Olivier Marleix, considère
enfin que « rien ne justifie l’insulte ».
Un peu plus tard, Aurélien Sain-
toul a reconnu avoir eu « des mots
que l’émotion m’a fait mal choisir et
qui sont déplacés ». « Je souhaite les
retirer et adresser des excuses publi-
ques au ministre. »
“ Les mots peuvent
être vifs, je préfère
mille fois les débats
de fond les plus ardus à
tout autre emportement
ou excès
olivier dussopt
” un vrai
Après avoir déploré des « violen-
ces physiques » et « verbales », le
ministre Olivier Dussopt a regretté :
« Les mots peuvent être vifs, je préfè-
re mille fois les débats de fond les plus
ardus à tout autre emportement ou
excès. (…) Monsieur le député, j’en-
tends vos excuses, elles ont le mérite
d’être présentées et elles permettent
que le débat se poursuive. » Et de
conclure : « Traiter d’assassin ne se
pardonne pas. » Le vice-président
de l’Assemblée Sébastien Chenu
(RN), qui dirigeait les débats, a pro-
noncé un rappel à l’ordre avec ins-
cription au procès-verbal.
La première ministre, Élisabeth
Borne, s’est montrée ferme, appor-
tant son « soutien » à Olivier
Dussopt et indiquant sur Twitter
que « l’Assemblée nationale doit être
le lieu du débat, pas celui des inju-
res ». « Ceux qui insultent ne sont pas
à la hauteur des Français qui les ont
élus ni du débat démocratique qu’ils
attendent. » ■
Le député LFI La veille, il s’était affiché en photo proche d’Arthur Delaporte et lui
Aurélien Saintoul dans un tweet, écharpe en bandou- lance, excédée : « Je ne suis pas là
prend la parole, lundi, lière sur sa doudoune rouge, le pied pour co-construire la destruction du
dans l’Hémicycle.
LUDOVIC MARIN/AFP
posé sur un ballon de foot à l’effigie système des retraites. Ce ne sont pas
d’Olivier Dussopt, ministre en
charge de la réforme des retraites.
les socialistes qui vont me dire com-
ment me comporter ».
Plus tôt, lors de la réunion excep-
« Ils se sont entretués » tionnelle du bureau des présidents,
La sanction est jugée injuste par les socialistes et écologistes qui sou-
l’état-major insoumis, qui ne sou- haitaient une sanction moins lourde
haite pas en rester là. Depuis la re- pour Thomas Portes se sont abste-
prise des débats le vendredi, Chiki- nus lors de la proposition de Yaël
rou tempête ainsi en direction des Braun-Pivet, la présidente de l’As-
rangs macronistes. Sur les bancs du semblée, d’exclure l’Insoumis. Ce
PS, des parlementaires s’agacent. choix a indigné les Insoumis qui at-
Guillaume Garot secoue la tête pour tendaient un soutien total à leur ca-
dire sa réprobation. Arthur Dela- marade. Ils l’ont fait savoir. « Ils se
porte fait signe à l’Insoumise de se sont entretués », assure le témoin
calmer. L’épisode du ballon a pro- d’un conciliabule « très tendu »
voqué assez de vagues, inutile d’en après la réunion du bureau.
+ » Lire aussi
PAge 14
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
rajouter. Sophia Chikirou ne goûte
pas cette attitude. Elle se lève, s’ap-
D’autant plus tendu que cette affai-
re s’est greffée sur celle des applau-
CONTRE-POINT
PAR GUILLAUME TABARD £@GTabard
Qui a intérêt à un vote
à l’Assemblée nationale ?
L
e compte à rebours est Faute de pouvoir réunir
enclenché. Et c’est la Nupes une majorité de vote contre,
qui tient le chronomètre.
Vendredi soir, quoi qu’il
LFI pourra entonner l’hymne
aux droits du Parlement bafoués
arrive, la discussion du projet de loi et à la démocratie foulée
s’arrêtera à l’Assemblée nationale
et le texte partira au Sénat. Dès lors,
une première question se pose :
aux pieds. En espérant ainsi attiser
l’animosité de l’opinion
contre le gouvernement.
l’examen des vingt articles sera-t-il Mais cette technique faite
À raison achevé, permettant un premier pour étirer au maximum un débat
vote des députés ? Si ce n’est pas parlementaire a pour nom
d’un le cas, la discussion aura-t-elle obstruction, ce qui ne donne jamais
incident au moins permis d’aller jusqu’à
l’article 7, cœur de la réforme
une image glorieuse du Parlement.
C’est même une « connerie »,
par jour, qui prévoit la passade de 62 à 64 ans a considéré Laurent Berger, qui,
de l’âge légal de départ ? comme Philippe Martinez, tient
il ne sera Si l’examen ne va pas à une discussion et à un vote
pas jusqu’au terme du texte, qu’il soit
interrompu avant l’article 7,
sur ce fameux article 7. Forts
et fiers de la mobilisation qu’ils ont
difficile
de dire
à l’article 8 ou à l’article 19, un vote
solennel sur la totalité du projet
de loi sera impossible et le
obtenue dans la rue, les syndicats
ne veulent pas être accusés d’être
dans l’agitation politicienne.
vendredi gouvernement aura tout loisir Cette prise de distance des
de transmettre aux sénateurs soit syndicats est une mauvaise nouvelle
qui aura sa version initiale, soit une copie pour les amis de Jean-Luc
empêché corrigée des seuls amendements Mélenchon. Pour eux, mobilisation
qu’il aura retenus. Mais
symboliquement, ce n’est pas la
même chose. Examiner l’article 7,
sociale et confrontation politique
étaient les deux faces d’une même
médaille et ils espéraient toucher
débat c’est au moins débattre de la raison les dividendes des succès de rue.
de fond d’être de cette réforme. Qu’ils soient désavoués est d’autant
C’est pour cela que la pression plus mauvais pour la gauche
sur les
»
est forte sur la Nupes, et plus que cette obstruction s’ajoute
retraites particulièrement sur La France à la bascule dans l’indécence
insoumise pour qu’elle retire ses une nouvelle fois démontrée
milliers d’amendements portant sur avec l’insulte d’« assassin » lancée
les premiers articles. « On ne va pas par un autre LFI, Aurélien Saintoul,
leur faire le cadeau de nous adapter à Olivier Dussopt. Cette violence
à leur calendrier », a rétorqué verbale, même si elle a été corrigée
Éric Coquerel, le président (LFI)
de la commission des finances.
par des excuses, finit par occulter
le débat de procédure. À raison
Cette formulation sous-entend que d’un incident par jour, il ne sera pas
c’est le gouvernement qui a avant
tout besoin de cette discussion
difficile de dire vendredi qui aura
empêché un vrai débat de fond
dans l’Hémicycle. Mais comme sur les retraites.
dans une partie de bonneteau,
tous les repères sont brouillés.
Jouer la montre, en conservant le
nombre suffisant d’amendements,
c’est un moyen pour les
mélenchonistes de dire que la
procédure choisie par l’exécutif
(l’article 47-1 qui limite la durée
de l’examen) a empêché
une discussion approfondie.

dissements, mardi dernier, des dé-
putés du cercle de Jean-Luc Mélen-
chon lors de la prise de parole
d’Adrien Quatennens, la première
depuis sa condamnation pour vio-
lences conjugales… Plusieurs dépu-
tés LFI cependant ne se sont pas le-
vés et des députés écologistes ont
quitté l’Hémicycle pour signifier
leur désapprobation.
Ces tensions mettent-elles en
péril l’alliance Nupes en pleine ré-
forme des retraites ? Nullement,
rassurent les intéressés. « C’est
normal, les moments de tension. Nos
relations sont chaleureuses, fluides,
et surtout, nous sommes en capacité
de discuter. C’est parce qu’on dialo-
gue que l’on peut évoquer nos diver-
gences de vues et œuvrer pour les
faire converger », jure le socialiste
Arthur Delaporte. « C’était un ven-
Réduit au silence dans l’Hémicycle,
le RN prend son mal en patience
marylou magal £@marylou_magal
COMME un effet de masse. Une se-
maine, déjà, que le projet de réfor-
me des retraites est examiné à l’As-
semblée nationale. Et, pour les
observateurs, la conclusion est
unanime : dans l’Hémicycle, on
n’entend que la gauche. En forma-
tion resserrée, les députés de la
Nupes ont opté pour la tactique de
l’assaut permanent. À tel point
que, par comparaison, les autres
groupes d’opposition paraissent
bien mutiques. Pourtant, sur le
texte du gouvernement, Nupes et
Rassemblement national partagent
le même constat : le projet de loi est
injuste et ne doit pas voir le jour.
Deux groupes en lice, mais un seul
fauteuil de premier opposant. Cha-
cun mise donc sur sa stratégie. À la
Nupes l’obstruction parlementaire
et le dépôt de plusieurs milliers
d’amendements ; au RN la posture
revendiquée d’opposition respon-
sable et d’absence de sectarisme.
Mais, sur la première semaine, la
gauche semble rafler la mise, face à
un RN de moins en moins audible.
Depuis le 7 février, le groupe
frontiste a subi de plein fouet sa dé-
cision de ne déposer qu’un nombre
réduit d’amendements (près de
Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement National,
et Marine Le Pen, le 7 février, à l’Assemblée nationale. LUDOVIC MARIN/AFP
l'événement
dredi, après deux semaines épui-
santes, la diplomatie n’était peut-
être pas au rendez-vous mais c’est
tout », relativise de son côté l’éco-
logiste Sandra Regol. « Ces tensions
ne sont pas plus importantes que
celles que nous rencontrons dans nos
propres formations. » Comme
d’autres, elle n’a pas apprécié la
mise en scène de Thomas Portes.
« Mettre la tête d’un ministre sur
une balle de chamboule-tout, on l’a
vu 10 000 fois, c’est habituel dans les
mobilisations… Mais dans un
contexte politique tendu et après Sa-
muel Paty, ça change la percep-
tion. » La députée écologiste de
Strasbourg dénonce en revanche
« une instrumentalisation » de l’af-
faire par la majorité présidentielle.
« Sa sanction n’aurait pas dû être
traitée en séance, occasionnant
250). Conséquence directe : la ré-
duction drastique de leur temps de
parole dans l’Hémicycle, et la pos-
sibilité de ne s’exprimer quasiment
que via des rappels au règlement.
Dès le premier jour des débats, le
député de Haute-Saône Émeric
Salmon a tenté de demander à la
présidente de l’Assemblée qu’il n’y
ait qu’un seul orateur par groupe,
dénonçant l’obstruction parle-
mentaire de la Nupes. Retoqué.
“ La Nupes raconte
toujours la même
chose de façon
caricaturale (...)
nous intervenons
sur le fond
”
renaud labaye, secrétaire général
du groupe rn à l’assemblée
Sur le projet de réforme, le der-
nier coup d’éclat du RN remonte au
même jour, au moment où le grou-
pe lepéniste a dénoncé le sectaris-
me de la gauche, qui a refusé de
voter la motion référendaire pré-
sentée par le RN. Depuis, quasi-
ment réduits au silence, certains
députés ont l’impression de regar-
der passer le train depuis le fond de
leur siège. « De toute façon, on est
le figaro mardi 14 février 2023
3
quatre heures de perdues sur un
temps déjà contraint… »
Ce temps contraint via l’article
47.1 qui limite le débat est à l’origine
d’autres tensions au sein de la Nu-
pes, portant sur les 13 000 amende-
ments des Insoumis. La majorité
des LFI ne veut pas aller au vote de
l’article 7 qui porte sur le relève-
ment de la limite d’âge. Elle craint
de démobiliser la rue, le Sénat ris-
quant ensuite de suivre.
« Comportements indignes »
Les socialistes eux, souhaitent ce
vote. « Nous voulons mettre les dé-
putés de la majorité au pied du mur,
indique le président de leur groupe,
Boris Vallaud. Sont-ils prêts devant
les électeurs à voter un impôt sur la
vie alors que nous avons prouvé qu’il
existe d’autres modes de finance-
ment ? » Écologistes et communis-
tes sont partagés.
Mais depuis que le patron de la
CGT, Philippe Martinez, a dit ce
week-end son souhait d’un vote sur
l’article 7, comme Laurent Berger,
son homologue de la CFDT, la ba-
lance penche pour une disparation
par paquets des amendements LFI.
C’est ce qui aurait validé lundi lors
d’une réunion inter-Nupes. « On
va y arriver au vote de l’article 7 si les
organisations le veulent mais on veut
faire vivre le débat », défend le dé-
puté PCF Pierre Dharréville. De
quoi espérer apaiser un peu les dé-
bats. À condition que la majorité
présidentielle elle-même ne fasse
pas obstruction. « Eux-mêmes ne
veulent pas voter l’article 7, croit sa-
voir Sandra Regol. Ils ne veulent pas
de leur nom sur cette loi. Ils veulent
qu’elle passe par décret. » Le socia-
liste Guillaume Garot, comme
d’autres, s’inquiète des tensions.
« Chez LFI comme dans la majorité,
il y a des comportements indignes de
députés, qui ne passent pas auprès
des citoyens. » L’élu de Mayenne en
appel à un retour « à des règles élé-
mentaires de respect et d’écoute ». ■
coincés, on ne peut pas surenchérir
sur de l’obstruction », reconnaît un
frontiste. « En quantité, certes, on
est inaudibles ; en qualité, en revan-
che, on est plus audibles puisque la
Nupes raconte toujours la même
chose de façon caricaturale, et que
nous intervenons sur le fond » tem-
père le secrétaire général du grou-
pe RN Renaud Labaye.
Contraints par les circonstances,
les députés lepénistes conservent
donc la même stratégie pour la
semaine à venir : tenter de parler
du fond. En réalité, ils restent sus-
pendus à la décision de la Nupes de
retirer, ou non, ses nombreux
amendements, pour permettre
l’examen des différents articles du
projet de loi, notamment le numé-
ro 7, qui prévoit le report de l’âge
légal de départ à 64 ans. En atten-
dant, un argumentaire a été arrêté :
« Dénoncer le sectarisme de la
gauche, et sa responsabilité dans
l’élection d’Emmanuel Macron, et
détailler notre contre-projet »,
précise Renaud Labaye.
Et, puisque l’accès au micro de
l’Hémicycle est restreint, le parti à
la flamme change de canal et inves-
tit les plateaux médiatiques. Les
orateurs du texte, Thomas Ménagé
et Laure Lavalette se relaient dans
les médias, épaulés par les deux bras
droits de la patronne à l’Assemblée
S DE
DANS LES LISTE
Jean-Philippe Tanguy et Sébastien
Chenu. Jordan Bardella porte égale-
ment la position du parti plusieurs
fois par semaine et Marine Le Pen
NTES
MEILLEURES VE
prendra sa part, dans une matinale
radio, cette semaine. Optimiste, le
parti à la flamme ne désespère pas
non plus de récolter les fruits des
mobilisations de la rue. « Il ne s’agit
pas que de revendications syndicales,
veut croire un élu. Parmi les partici-
pants, beaucoup font partie de notre
électorat, c’est pour cela que, même
sans y participer, nous soutenons
ceux qui font le choix de la rue. »
Marine Le Pen, quant à elle, préfère
se projeter : « Oui, nous avons des
armes pour nous battre à l’Assem-
blée, et j’y crois. Mais, si la réforme
des retraites est votée, il n’y a qu’une
nouvelle majorité législative qui
A
pourrait la défaire et moi je m’enga-
gerai à la défaire. » ■
 mardi 14 février 2023 le figaro
4 InternatIonal
De mystérieux objets volants traversent
l’espace aérien de l’Amérique du Nord
Après avoir abattu un ballon chinois, l’aviation des États-Unis est intervenue à plusieurs reprises le week-end
dernier pour neutraliser au moins trois de ces aérostats, dont les débris seront également analysés.
Adrien JAulmes £@AdrienJaulmes
Correspondant à Washington
Défense Une première alerte a eu lieu
vendredi 10 février, quand un objet a
été repéré au-dessus de l’Alaska. Il a été
abattu par un chasseur américain F-22
Raptor au-dessus de la banquise de
Prudhoe Bay, près du village de Dead-
horse. Samedi, un deuxième objet
volant a été détecté survolant la petite
ville de Mayo, dans la province cana-
dienne du Yukon. Il a été vaguement
décrit par les autorités militaires améri-
caines comme un aérostat équipé d’une
nacelle cylindrique, mais « pas aussi
grand que le premier ballon espion
chinois ».
Le premier ministre canadien, Justin
Trudeau, a demandé aux forces améri-
caines et canadiennes d’intervenir pour
intercepter cet « objet non identifié vio-
lant l’espace aérien canadien ». Deux
chasseurs américains F-22 Raptor ont
décollé de la base d’Elmendorf-Ri-
chardson en Alaska, et deux F-18 cana-
diens de la base de Cold Lake en Alberta,
avec pour mission d’abattre l’intrus. Il a
été détruit par un Raptor, qui a tiré un
missile AIM-9X alors qu’il volait à envi-
ron 12 000 mètres d’altitude. Trudeau a
remercié le Norad, le commandement
de la surveillance de l’espace aérien en
Amérique du Nord, pour sa réaction.
Le même jour, une troisième incur-
sion a été signalée dans le ciel du Mon-
tana. Les autorités aériennes américai-
nes ont fermé l’espace aérien au-dessus
de la ville de Havre, signalant un « objet
susceptible d’interférer avec le trafic aé-
rien commercial ». Des chasseurs F-15
ont décollé de Portland, dans l’Oregon,
mais sans parvenir à établir le contact
avec l’objet.
Celui-ci a refait son apparition di-
manche matin sur les écrans radars du
Norad au-dessus de la région des
Grands Lacs. Vers 14 heures, deux chas-
seurs F-16 de la Garde nationale améri-
caine ont décollé de la base de Madison,
dans le Wisconsin, et ont abattu de nou-
veau avec un missile air-air AIM-9-X
un objet « de forme cylindrique » à envi-
ron 6 000 mètres d’altitude au-dessus
de la péninsule du Nord-Michigan. Les
débris sont tombés dans le lac Huron.
« Pas d’explications crédibles »
« Sa trajectoire et son altitude suscitaient
des inquiétudes, et pouvaient constituer
un danger pour l’aviation civile », a indi-
qué dimanche le Pentagone. « L’empla-
cement choisi pour l’abattre nous a per-
mis d’éviter des retombées sur des
personnes au sol, tout en augmentant les
chances de récupération des débris. Rien
n’indique que des civils aient été blessés
ou même touchés. »
« Nous n’avons pas estimé qu’il s’agis-
sait d’une menace militaire directe pour
quoi que ce soit au sol, a dit le Pentagone
dimanche soir. Il s’agissait cependant
d’un danger pour la sécurité des vols civils
et d’une menace en raison de ses capacités
de surveillance potentielles. Nos équipes
vont maintenant s’efforcer de récupérer
l’objet afin d’en savoir plus. »
Mais les autorités militaires américai-
nes sont restées très vagues sur la nature
de ces objets, décrits comme beaucoup
plus petits que le ballon espion chinois,
détecté le 2 février dernier et abattu le 4.
« Ils sont de taille similaire, de vitesse si-
milaire, à peu près celle du vent, a déclaré
dimanche le commandant du Norad, le
général Glen VanHerck. En ce qui
concerne les formes spécifiques, nous de-
vons mettre la main sur ces objets pour
décrire avec fidélité les détails de leur for-
me, comment ils se déplacent dans l’air,
s’ils ont une propulsion. Toutes ces choses
restent à déterminer. »
7 H -9 H
©CAPA Pictures / Europe 1
EUROPE MATIN
Dimitri Pavlenko
Retrouvez l’Edito politique à 7h53 avec Alexis Brézet
A
et Vincent Trémolet de Villers du Figaro
Le général n’a pas voulu les appeler
des ballons. « Ce sont des objets. Je ne
suis pas capable d’expliquer comment ils
restent en l’air. Il pourrait s’agir de bal-
lons à l’intérieur d’une structure ou d’un
système de propulsion. Mais clairement,
ils sont capables de voler. »
Ces mystérieuses apparitions en série,
et ces interventions successives de la
chasse américaine, sans précédent en
temps de paix, suscitent des préoccu-
pations à Washington, politiquement,
militairement et diplomatiquement.
Les États-Unis n’ont cette fois pas
accusé directement la Chine d’être à
l’origine de ces dernières incursions
dans leur espace aérien. « J’hésiterais à
les attribuer à un pays spécifique, a aussi
dit le général VanHerck. Nous n’en sa-
vons rien. C’est pourquoi il est si impor-
tant de mettre la main sur ces engins afin
de pouvoir les évaluer et les analyser. »
La Chine ne s’est pas montrée aussi
prudente. Plutôt que de reconnaître
Les radars occidentaux défiés par les ballons espions
nicolAs BArotte £@NicolasBarotte
TROIS « objets volants non identifiés »
ont été abattus dans le ciel américain en
trois jours. Quelques jours après l’épi-
sode du ballon espion chinois survolant
le Montana, l’incertitude sur la caracté-
risation de ces engins alerte et étonne.
Ces objets ont apparemment pu déjouer
les capacités des radars américains et
les procédures d’identification. « Les
radars filtrent l’information en se basant
essentiellement sur la vitesse », a expli-
qué lundi le général VanHerck, qui
commande le Norad.
Depuis l’épisode de début février, les
capteurs américains ont adapté leurs
filtres pour s’intéresser à des objets aus-
si lents que des ballons, qui se déplacent
à la vitesse des vents. Les radars ont dû
explorer les basses fréquences pour les
quoi que ce soit sur les incursions dans
l’espace aérien nord-américain, elle a
retourné les accusations en annonçant
que c’étaient les États-Unis qui avaient
violé le sien. « Depuis l’année dernière,
les ballons américains à haute altitude
ont survolé illégalement l’espace aérien
de la Chine à plus de dix reprises sans
l’approbation des autorités chinoises »,
a déclaré lundi le porte-parole du
ministère des Affaires étrangères, Wang
Wenbin. Les États-Unis devraient
« d’abord réfléchir sur eux-mêmes et
changer de cap, plutôt que de salir les
autres et d’instiguer une confrontation »,
a aussi dit le porte-parole.
À Washington, la porte-parole du
Conseil national de sécurité, Adrienne
Watson, a rejeté en bloc ces accusations.
« C’est la Chine qui a un programme de
ballons de surveillance à haute altitude
pour la collecte de renseignements, lié à
l’Armée populaire de libération, qu’elle a
utilisé pour violer la souveraineté des
apercevoir, alors que les systèmes de
défense, jusqu’à présent, étaient da-
vantage préoccupés par des avions ou
des missiles.
Les ballons espions suscitent de nou-
veaux défis pour les capacités des Occi-
dentaux, qui n’avaient pas, ou peu, an-
ticipé le défi. Sur le papier, les moyens
existent. Si elles sont équipées d’une
structure métallique, les nacelles des
ballons disposent d’une « surface équi-
valent radar » détectable à plusieurs
centaines de kilomètres. Mais les objets
dont il est question demeurent peu vo-
lumineux… Des techniques de furtivité,
appliquées aux avions, permettent aussi
de réduire cette surface pour la faire
ressembler à celle d’un oiseau. Pour dé-
tecter un objet, l’empreinte thermique
joue pour sa part un faible rôle. Elle en-
tre en ligne de compte quand il s’agit de
l’intercepter avec un missile guidé par
un faisceau infrarouge. Reste la percep-
tion visuelle. De nuit ou par temps cou-
vert, les ballons deviennent invisibles.
Après l’épisode du premier ballon,
« nous avons examiné de plus près notre
espace aérien à ces altitudes, notamment
en améliorant notre capacité radar, ce
qui peut expliquer, du moins en partie,
l’augmentation du nombre d’objets que
nous avons détectés au cours de la se-
maine dernière », a expliqué au Penta-
gone lundi Melissa Dalton, responsable
pour la sécurité intérieure. « Nous sa-
États-Unis et de plus de quarante pays sur
cinq continents, a-t-elle dit. C’est la
dernière tentative en date de la Chine pour
s’efforcer de limiter les dégâts. Elle a
affirmé à plusieurs reprises, et à tort, que
le ballon espion qu’elle a envoyé au-dessus
des États-Unis était un ballon météo-
rologique, mais à ce jour, elle n’a pas
réussi à offrir d’explications crédibles
pour son intrusion dans notre espace
aérien et dans celui d’autres pays. »
Une crise bizarre et confuse
L’absence de détails fournis par le Pen-
tagone ou l’Administration Biden ren-
dent cette crise internationale, déjà très
inhabituelle, encore plus bizarre et
confuse. Ni la Maison-Blanche, ni le
Pentagone, ni le gouvernement cana-
dien n’ont donné d’explications claires
à ces événements, ni en quoi consistent
exactement les engins abattus.
Le chef de la majorité au Sénat, Chuck
Schumer, a laissé entendre, dimanche
vons également que toute une série d’en-
tités, dont des pays, des entreprises et des
organismes de recherche, exploitent des
objets à ces altitudes à des fins de recher-
ches légitimes », a-t-on ajouté. Certains
échos radars peuvent ainsi être consi-
dérés comme de simples anomalies.
“ Nous savons que
toute une série d’entités
exploitent des objets
à ces altitudes à des fins
de recherches légitimes
melissa dalton, responsable
”
pour la séCurité intérieure au pentagone
Si l’espace aérien sous l’altitude de
20 km est régulé et surveillée, et si l’es-
pace exoatmosphérique au-delà de
100 km est observé, « la tranche inter-
médiaire était jusqu’à présent peu em-
ployée et donc peu regardée », explique
un haut gradé français. Les Occiden-
taux ont donc dû « modifier leurs régla-
ges », ajoute l’officier. Depuis plusieurs
années, les états-majors commencent à
s’interroger sur l’utilité et l’emploi de
ballons à des fins d’espionnage à moin-
dre coût, comparé à un satellite, et qui
peuvent être camouflés aisément en
ballon d’étude météorologique. Ces ob-
jets difficiles à caractériser entrent dans
la zone grise de la compétition.
dans un entretien à la chaîne ABC, que
les objets abattus au-dessus des territoi-
res américain et canadien ces derniers
jours étaient des ballons, citant un brie-
fing du conseiller à la sécurité nationale
du président Biden, Jake Sullivan.
Les républicains, qui ont reproché à
l’Administration Biden d’avoir laissé le
premier ballon survoler tout le terri-
toire des États-Unis avant de l’abattre
critiquent à présent le manque d’infor-
mations données au Congrès. « J’ai be-
soin de réponses, et le peuple américain
a besoin de réponses, a dit le représen-
tant républicain du Montana, Matt Ro-
sendale, dont l’État a été survolé par au
moins deux ballons. Cela ne me rassure
pas beaucoup de savoir que ces appareils
sont plus petits… Je suis très préoccupé
par les données cumulées qui sont col-
lectées », par ces appareils. Interrogé
sur l’hypothèse d’activités liées à des
extraterrestres, le général VanHerck
n’a pas écarté cette possibilité. ■
Courtesy of the fBI
À Quantico (Virginie), des équipes
spécialisées du FBI prennent
en charge les restes du ballon
chinois repêchés au large
de la Caroline du Sud, le 9 février.
Les États-Unis ne sont sans doute pas
les seuls à être concernés. Le survol de
ballons a été identifié dans de nom-
breuses régions du monde, au-dessus
de Taïwan par exemple. Il en vient
« fréquemment », a confié un responsa-
ble de Taipei au Financial Times.
En France, où quelque 70 radars
scrutent constamment le ciel, l’état-
major assure ne pas avoir identifié de
traces de passage d’un ballon espion
dans le ciel. Cette surveillance est cou-
plée avec celle des autres États euro-
péens, permettant d’anticiper les me-
naces quand elles approchent.
Un rapport doit cependant être rendu
au commandement sur les menaces
dans la très haute altitude. L’armée de
l’air et de l’espace doit aussi ébaucher
une stratégie pour la haute altitude d’ici
à l’été prochain. « On a lâché les freins
sur le sujet », promet le chef d’état-ma-
jor de l’armée de l’air, le général Mille.
La réponse à apporter, y compris en
matière de détection, reste cependant à
écrire.
Aux États-Unis, la question des objets
non identifiés est prise au sérieux. De-
puis deux ans, elle fait l’objet d’un rap-
port du renseignement américain qui a
rapporté, dans sa dernière édition de
2022, 510 cas d’objets non identifiés.
Sur les 366 cas étudiés l’année dernière,
163 ont été caractérisés comme des bal-
lons ou des simili-ballons. ■
 le figaro mardi 14 février 2023

internAtionAL 5

« Dronisation »
de la guerre :
la tactique
bouleversée

LAurent VAn Der Stockt/getty imAgeS

En offrant une possibilité d’observer
le terrain en permanence
et de harceler l’adversaire, les drones
ont modifié les opérations militaires.
Nicolas Barotte
£@NicolasBarotte
défense Sur les chaînes de dis-
cussion Telegram, révélées par le
camp ukrainien, des forces russes
expriment leur inquiétude. Les
drones adverses qui survolent la li-
gne de front ont changé l’environ-
nement de la guerre en faisant pe-
ser un regard quasi permanent sur
le champ de bataille, lit-on. La
menace est persistante. Les qua-
dricoptères civils reconvertis à des
fins militaires scrutent les mouve-
ments. Parfois ils peuvent être
équipés d’une munition pour se
transformer en drones suicides. Ou
bien ils permettent de guider un tir
d’artillerie ou la frappe d’un autre
drone comme les TB2 à longue
portée. L’une des conséquences de
cette tactique est aussi immatériel-
le : il s’agit de la peur qui paralyse
le soldat, lit-on.
Les experts militaires ont trouvé
un nom pour cette méthode de
harcèlement qui pèse sur les com-
bats : « L’isolement du champ de
bataille. » Les fantassins hésitent à
quitter leur position, déstabilisant
leur tactique et épuisant leurs res-
sources. « Les petits drones ne sont
pas seulement utilisés pour du ren-
seignement et du combat mais aussi
comme arme psychologique »,
note l’expert Samuel Bendett,
spécialiste des drones et de la Rus-
sie au Centre d’analyses navales
(CNA). « Nul doute que l’armée
russe copiera cette tactique ukrai-
nienne », prévient-il.
Après la guerre entre l’Arménie
et l’Azerbaïdjan, l’Ukraine est le
nouveau laboratoire de la « droni-
sation » de la guerre. On y a vu
l’emploi de drones de théâtre
comme le TB2 turc, de drones ka-
mikazes, comme les Shahed 136
iraniens ou de munitions rôdeuses,
comme les Switchblade améri-
cains, et d’autres encore. « On ne
pensait pas que les munitions rôdeu-
ses seraient aussi performantes »,
décrypte une source militaire
française qui suit le conflit russo-
ukrainien. « Les Ukrainiens ont fait
un usage disruptif des drones. Pour
suivre les mouvements russes ou en
utilisant des drones civils pour leurs
attaques », ajoute-t-on.
« Effets psychologiques »
Si les combats se mènent toujours à
coups d’artillerie, grâce aux chars
ou bien l’arme au poing, les drones
ont transformé la façon de rem-
porter des batailles. En Arménie,
en 2020, ils avaient permis à
l’Azerbaïdjan de remporter une
victoire sans appel. Ils permettent
le harcèlement de l’adversaire à
bas coût.
« Avec l’exploitation des masses
de données disponibles en source
ouverte, les drones contribuent à
la transparence du champ de ba-
taille » qui oblige les forces à adap-
ter leurs modes de déplacement et
leurs approches, explique une
source militaire française. « On a
coutume de dire que le terrain com-
mande. Il est une contrainte pour le
fantassin. Mais les drones permet-
tent d’observer l’ennemi, de le trou-
ver, de le suivre et voir son atti-
tude », expliquait le lieutenant-
colonel Benoit Angelotti, de la
Brigade des forces spéciales air,
Une unité lors d’un colloque organisé par
du renseignement l’armée de l’air début février à
aérien ukrainien Cognac sur l’usage des drones.
près de Bakhmout, « Ces vecteurs peuvent rester en vol
en novembre 2022. au-dessus de la tête des adversai-
res. Il y a des effets physiques mais
aussi psychologiques d’être en per-
manence sous l’observation d’un
objet insaisissable », ajoutait-il.
L’argument est valable pour les
petits drones tactiques comme
pour les drones Male qui peuvent
voler des heures à haute altitude.
Le Reaper, « c’est une forme de
doigt de Dieu », expliquait le colo-
nel Romain Desjars lors du même
colloque, en racontant son usage
par l’armée française contre les
groupes djihadistes au Sahel. L’in-
dustriel américain General Ato-
mics, qui les produit, a proposé
d’offrir à l’armée ukrainienne un
Reaper et un Grey Eagle pour un
dollar symbolique (auquel il faut
ajouter le coût d’acheminement et
d’entretien). Les Ukrainiens n’ont
pas donné suite, faute d’usage sur
le terrain de ces armes coûteuses.
L’intérêt du drone est d’être rapi-
dement remplacé. La durée de vie
des microdrones quadricoptères
est en moyenne de 4 vols sur le
champ de bataille et celle des mi-
nidrones de type planeur de 6
vols, dit-on au sein de l’armée
française.
En Ukraine, chaque camp a dû
adapter sa défense. « Les Russes ne
peuvent pas faire de mouvement
sans bouger leur bulle de protection.
C’est devenu un boulet qu’ils tirent
au pied. C’est extrêmement contrai-
gnant », poursuit l’officier français
spécialiste des drones. Face à de
petits engins de quelques kilo-
grammes les moyens de neutra-
lisation sont limités, sauf à lan-
cer un brouillage généralisé. La
connexion entre le drone et son
télépilote constitue le principal
point faible de ces armes.
Derrière la terminologie du dro-
ne se cache une multitude de vec-
teurs aux effets différents, dont le
prix varie de quelques milliers de
dollars à plusieurs millions mais
qui ont un point commun, celui
d’être opérés à distance depuis le
sol. L’arme est ancienne puisque
les États-Unis ont commencé à en
employer il y a plus de vingt ans en
Afghanistan contre al-Qaida. Les
drones Male ont fait leurs preuves
dans les guerres asymétriques.
Dans des environnements de haute
intensité, pourvus de défense sol-
air, leur efficacité est contestée.
Les yeux du fantassin
D’un coût beaucoup moins élevé,
les drones tactiques, comme le
turc TB2, ont en revanche fait des
ravages en échappant au début de
la guerre aux moyens de détection
russes grâce à leurs vols en basse
altitude. Au plus près du front, ce
sont des mini ou des microdrones,
comme les modèles chinois DJI,
qui sont utilisés. L’Ukraine a aussi
reçu des Puma, qui peuvent assu-
rer des missions de surveillance et
de ciblage. Les États-Unis ont
aussi fourni des munitions rôdeu-
ses Switchblade ou Phoenix
Ghost, spécialement conçues par
l’armée américaine pour les be-
soins ukrainiens.
Fin janvier, le gouvernement a
annoncé consacrer près de
550 millions d’euros pour l’acqui-
sition de drones de 16 modèles dif-
férents. Si les drones tactiques
comme les TB2 servent à mener
des frappes à plusieurs centaines
de kilomètres, les microdrones ap-
puient les unités au plus près du
front en devenant leurs yeux. Ces
drones FPV, « first person view »,
sont commandés à partir d’une
sorte de tablette. Ce sont les yeux
du fantassin. « Si la portée de ces
drones peut aller jusqu’à 40 km,
nous les utilisons dans un rayon de 5
ou 10 km, afin de conserver de
l’autonomie », décrypte le sergent
Lucas du CPA30, les forces spécia-
les air. Certains modèles peuvent
emporter une charge de plusieurs
kilogrammes. L’armée française
les utilise pour transporter des
trousses médicales d’urgence par
exemple. Elle n’emploie pas enco-
re de munitions même si le brico-
lage, sur le terrain, offre toute sorte
de liberté. En Ukraine, des drones
commerciaux ont été transformés
en engins mortels en fixant sim-
plement une grenade.
Pour le même type d’usage, la
Russie dispose notamment de dro-
nes Lancet. L’Iran fournit des Sha-
hed 136 pour des frappes longue
distance et remplacer des missiles
plus coûteux. Fin janvier, le prési-
dent du conseil de sécurité russe,
Dmitri Medvedev a annoncé l’ac-
croissement des capacités de pro-
ductions de drones de reconnais-
sance et de d’attaque lors de la
visite d’une usine de l’entreprise
Kalachnikov. Les Iraniens prévoi-
raient aussi de construire une usine
en Russie capable de produire
6 000 drones. De quoi inonder le
ciel ukrainien. ■

Polémique sur les déficiences de l’armée britannique

arNaud de la GraNGe
£@arnodelagrange
Correspondant à Londres
UNE POIGNÉE de jours, guère
plus de cinq. C’est la durée pen-
dant laquelle les forces britanni-
ques pourraient tenir en cas de
guerre, face à la Russie par
exemple. Le constat est cruel et
vient d’une voix autorisée, celle
de Tobias Ellwood, ancien offi-
cier, député conservateur et pré-
sident de la commission de la
défense de la Chambre des com-
munes. Une sonnerie d’alerte et
une pression accrue sur Rishi
Sunak pour qu’il muscle le bud-
get de la Défense.
Depuis quelques jours, la polé-
mique fait rage autour de l’état
de l’armée britannique, long-
temps considérée comme la plus
sérieuse d’Europe avec celle de la
France. Au Financial Times, To-
bias Ellwood a expliqué que les
coûts de remplacement des ar-
mes et matériels envoyés à
l’Ukraine comme l’inflation éle-
vée avaient créé « un tableau
vraiment sombre ».
Les réserves seraient sérieuse-
ment entamées, au point de ren-
dre délicat un engagement ma-
jeur. L’armée manquerait de
missiles sol-air et antichar, four-
nis en nombre à l’Ukraine. La
Grande-Bretagne aurait déjà en-
Les déclarations d’Ellwood
s’inscrivent dans les grandes
manœuvres pour faire augmenter
les dépenses de Défense, alors
que le chancelier de l’Échiquier
peaufine son budget, qui doit être
dévoilé le mois prochain. Sans
rien promettre, Jeremy Hunt
s’est engagé à regarder de près
ces appels à un effort de défense
accru. Mais au Trésor, on rappelle
que Rishi Sunak, quand il était le
grand argentier de Boris Johnson
en 2020, a déjà promis une aug-
mentation de 16 milliards de li-
vres pour la Défense sur quatre
ans, ce qui a été salué comme la
plus grande augmentation des
dépenses militaires depuis la
guerre froide.
Un sujet très politique
L’été dernier, toutefois, Rishi Su-
nak avait refusé de s’aligner sur
les promesses de ses rivaux pour
la succession de « BoJo » de por-
ter les dépenses de défense à 3 %
du PIB d’ici à 2030, contre un peu
plus de 2 % actuellement. Le gou-
vernement dit attendre la version
révisée de la « Revue intégrée »
de mars 2021, qui fixe la politique
étrangère, de défense et de sécu-
rité britannique. Le document de
2021 mettait en exergue un « vi-
rage vers l’Asie-Pacifique » mais,
depuis, la guerre est revenue en
Europe.
Le sujet est devenu très politi-
L’année dernière, cette figure
respectée du parti tory avait déjà
fait campagne pour obtenir des
financements supplémentaires.
Au Parlement la semaine derniè-
re, il a déclaré que le Royaume-
Uni avait « sous-financé et trop
amaigri » ses forces armées. Le
constat de Wallace a été repris au
vol par l’opposition travailliste.
John Healey, chargé de la défense
au Labour, y a vu « l’aveu de
l’échec de treize années de gouver-
nement conservateur ».
Les investissements ont été di-
rigés en priorité vers des capaci-
tés innovantes, comme les satel-
lites, la guerre électronique, le
cyber et les drones. L’accent a
aussi été mis sur les capacités de
frappe conventionnelles et nu-
cléaires et la Royal Navy a été
l’année (ici, des artilleurs
plutôt bien traitée, afin de servir
l’ambition post-Brexit du « Glo-
bal Britain ». Mais cet effort a été
compensé par des coupes dans les
rangs, touchant surtout l’armée
de terre dont les effectifs doivent
être réduits de 10 000 hommes,
pour atteindre 72 500 soldats, ce
qui la mettra au plus bas niveau
Le Royaume-Uni est depuis trois cents ans. L’an der-
censé prendre la relève nier, un ancien chef d’état-major
de l’Allemagne à la tête des armées, lord Richards of
de la force rapide Herstmonceux, a averti que la
de l’Otan à la fin de
Grande-Bretagne n’aurait plus les
britanniques moyens de reprendre les Falkland
à l’entraînement, (îles Malouines) ou de mener une
le 7 février, sur la base nouvelle guerre du Golfe.
militaire de Tapa,
en Estonie). « Fausses rumeurs »
Sergei gritS/AP La polémique sur ces déficiences a
été nourrie par la presse alleman-
de, affirmant que des responsa-
bles de l’Otan craignaient que les
forces britanniques ne soient pas
aptes à être en première ligne de
défense face à la Russie.
Le Royaume-Uni doit en effet
prendre la relève de l’Allemagne
à la tête de la force de réaction
rapide de l’Otan à la fin de
l’année. Mais des journaux ont
affirmé que l’Alliance avait de-
mandé à Berlin d’en garder la
responsabilité une année supplé-
mentaire, la Grande-Bretagne
étant à la peine pour fournir les
5 000 hommes nécessaires. Selon
le Daily Mail, des sources britan-
niques ont confirmé ces informa-
tions. Le ministère de la Défense
s’est pourtant insurgé contre ces
« fausses rumeurs », affirmant
que la 7e brigade d’infanterie se
préparait à la relève. Et pointant
que Londres a déployé 8 000 sol-
A

voyé plus de 2,3 milliards de li- que. Le ministre de la Défense, dats au sein de l’Otan pour la seu-
vres d’aide militaire à Kiev. Ben Wallace, est monté au front. le année dernière. ■
 mardi 14 février 2023 le figaro
6 InternatIonal
Week-end d’arrestations en Tunisie
Cinq personnalités,
dont des hommes
politiques et des
magistrats, ont été
appréhendées
par la police.
Maryline DuMas £@Maryline_Dumas
Tunis
Maghreb Khayam Turki a été arrêté
le premier, samedi matin à 6 heures.
Plusieurs fois cité pour devenir premier
ministre, le quinquagénaire a vu un
groupe de policiers en civil débarquer
chez lui. Sa maison a été perquisition-
née avant qu’il ne soit emmené. « Il
s’agit d’un enlèvement puisque le par-
quet n’était pas au courant jusqu’à
13 heures samedi, indique Lazhar Akre-
mi, l’un de ses avocats. Ce n’est qu’à
16 heures que nous avons été appelés
pour nous annoncer qu’il se trouvait à la
brigade criminelle. » Dans la nuit de sa-
medi à dimanche, Khayam Turki, issu
du parti Ettakatol (formation sociale-
démocrate, alliée du mouvement isla-
miste Ennahdha entre 2011 et 2014), a
été transféré à la police anti-terroriste.
Différents médias tunisiens affirment
qu’il serait accusé de « complot contre
la sûreté de l’État ». Lundi matin, La-
zhar Akremi n’avait toujours pas été
mis au courant des accusations contre
son client, mais il avait déjà son opi-
nion : « Cela fait suite à des réunions
qu’il a faites chez lui pour rassembler
l’opposition face au président ».
Kamel Eltaïef, qui a fait fortune dans
le BTP et éminence grise de l’autocrate
Ben Ali (1987-2011), ainsi qu’Abdelha-
La justice brésilienne
affûte ses armes
contre Jair Bolsonaro
L’ancien chef d’État, actuellement en Floride,
est poursuivi pour son rôle dans les attaques
du 8 janvier et visé dans seize enquêtes électorales.
ÉlÉonore HugHes
Rio de JaneiRo
aMérique latine Depuis que Jair
Bolsonaro a quitté le pouvoir le 1er jan-
vier, les ennuis judiciaires de l’ex-pré-
sident d’extrême droite s’accumulent.
Un sénateur l’a récemment accusé
d’avoir participé à une réunion dont
l’objectif était d’annuler le résultat des
élections présidentielles du mois d’oc-
tobre, remportées par son adversaire de
gauche, Luiz Inacio Lula da Silva. Un
nouvel élément qui complique encore
plus la situation de l’ancien militaire,
impliqué dans une centaine de procès
selon la presse brésilienne. Réfugié en
Floride depuis la fin de son mandat, il
risque l’inéligibilité, ou même l’empri-
sonnement, mais a clamé samedi der-
nier encore son « intention de retourner
au Brésil dans les semaines qui vien-
nent ».
Les ennuis de Bolsonaro avec la justi-
ce ne datent pas d’hier. Des soupçons
d’emplois fictifs ainsi qu’une accusa-
tion d’apologie de viol, entre autres,
pesaient sur l’ancien chef d’État avant
son mandat présidentiel de 2019 à 2022.
À ces affaires s’ajoutent des potentiels
crimes commis lorsqu’il était président,
notamment la dissémination de fausses
informations et la mise en cause de la
fiabilité des urnes électroniques.
Les informés
de Jean-François Achilli,
du lundi au vendredi à 20h
1h de décryptage et d’analyse de l’actualité
chaque mardi
avec
A
Un mois avant cette vague d’arrestations, la célébration de la révolution tunisienne, le 14 janvier, avait été marquée
par une manifestation contre le pouvoir en place, sur fond de pénurie et de flambée des prix. YaSSIne MaHJoUB/nUrPHoto vIa aFP
mid Jlassi, ancien dirigeant d’Enna-
hdha, ont été arrêtés le même jour.
L’épouse de ce dernier a évoqué, di-
manche matin, un « kidnapping » sur
une radio locale. « Ils l’ont conduit vers
une destination inconnue. (…) Nous
n’avons aucune nouvelle de lui. Mon
mari est malade, il souffre d’un cancer.
Je fais porter la responsabilité de toute
dégradation de son intégrité physique au
chef de l’exécutif et au pouvoir en pla-
ce », a indiqué cette ancienne députée
d’Ennahdha.
Concernant le mouvement insurrec-
tionnel du 8 janvier à Brasilia, la Cour
suprême a inclus Bolsonaro dans son
enquête. L’ex-président est aussi accu-
sé du « génocide » du peuple indigène
Yanomami, et pourrait encore être
poursuivi pour sa gestion de la pandé-
mie de Covid-19.
Tant que Bolsonaro était président, il
était protégé par son immunité et seule
la Cour suprême pouvait mener des en-
quêtes. Ce vendredi, la plus haute juri-
diction du pays a transmis sept deman-
des d’enquêtes aux tribunaux de
première instance. Ces affaires concer-
nent notamment des discours lors de la
fête d’Indépendance du 7 septembre
2021 : il avait alors qualifié les élections
de « farce » et proféré une série de me-
naces contre des juges de la Cour suprê-
me. Désormais les procureurs fédéraux
décideront d’engager des poursuites,
ou pas, concernant ces demandes d’en-
quête.
Les menaces du 7 septembre 2021
« sont le premier jalon de la confrontation
de Bolsonaro avec la Cour suprême, qui
est allée crescendo pour s’attaquer plus
largement à la démocratie », estime
Wallace Corbo, professeur de droit à la
Fondation Getulio Vargas. Le président
Lula va plus loin : « Je le dis haut et fort :
(Bolsonaro) a préparé le coup d’État. »
Cette accusation intervient au lende-
chaque mardi avec
Pour Elyes Ben Sedrine, conseiller ju-
ridique à Avocats sans frontières, ces
arrestations n’ont pas eu lieu dans les
règles : « Même si ces personnes sont
sous le coup de la loi anti-terroriste et
qu’elles n’ont pas accès à un avocat pen-
dant 48 heures, il y a un minimum d’in-
formation à transmettre aux proches ».
L’expert note que ce type d’interpella-
tions visant des personnages politiques
ou des avocats est nouveau : « Je n’avais
jamais assisté à cela auparavant. Cela a
commencé à l’été 2021 (lorsque le chef
Jair Bolsonaro, le 3 février, était l’invité de l’association d’extrême-droite Turning Point
USA pour une conférence dans un hôtel de Miami, propriété de la Trump Organization.
main des révélations du sénateur Mar-
cos do Val le 2 février. Selon cet ancien
allié de l’ancien président, ce dernier a
participé à une réunion dont l’objectif
était d’enregistrer à son insu le juge de
la Cour suprême, Alexandre de Moraes,
tout en tentant de faire reconnaître un
abus de pouvoir pendant l’élection pré-
sidentielle. Bolsonaro aurait pu alors
démettre le juge et annuler le résultat
des urnes, selon le plan décrit par do
Val à l’hebdomadaire Veja.
Une peine d’inéligibilité
Lors de ses premières déclarations, do
Val accusait Bolsonaro d’avoir tenté de
le contraindre à participer à ce strata-
gème. Avant de finalement faire mar-
che arrière en réduisant le rôle de Bol-
sonaro à celui d’un spectateur passif.
Dans les deux cas, même si le projet
semble assez rocambolesque juridique-
ment, les déclarations de do Val aggra-
vent la situation de l’ex-président. Il est
« très probable que Bolsonaro soit empri-
sonné lors de son retour au Brésil », esti-
me Sergio Praça, politologue de la Fon-
dation Getulio Vargas.
Autre indice qui semble indiquer que
Bolsonaro manigançait un plan pour
empêcher la prise de fonction de Lula :
la découverte, au domicile de son an-
cien ministre de la Justice, Anderson
Torres, d’un décret jamais publié qui
aurait pu permettre l’annulation du
scrutin. Bolsonaro a demandé à la justi-
ce électorale, qui enquête pour savoir
s’il s’est livré à un abus de pouvoir pen-
Brahmi, deux leaders de la gauche tuni-
sienne. Le second est accusé de corrup-
tion. « Ces deux arrestations auraient dû
avoir lieu bien plus tôt. Ce sont des dos-
siers qui traînent depuis longtemps. La
concomitance avec les arrestations de
Turki, Jlassi et Eltaïef est bizarre. Pour
moi, il s’agit d’un coup de com », estime
un observateur international.
Un symbole de la corruption
de la justice tunisienne
Ces interpellations interviennent un an
après la dissolution du Conseil supérieur
de la magistrature par le président de la
République. Cet organe, responsable de
la carrière des magistrats et garant de
l’indépendance de la justice, était poin-
té du doigt comme un symbole de la
corruption et de l’inaction de la justice
tunisienne. Il a été remplacé par un
Conseil supérieur de la magistrature
temporaire, nommé par le président.
Mais les choses ne se sont pas amélio-
rées depuis. « La ministre de la Justice
intervient directement dans les dossiers
en cours. Et le président s’exprime publi-
quement sur des affaires. Il y a une cer-
taine peur chez tous les collègues qui ren-
dent des jugements », explique un juge.
Vendredi, à la veille des arrestations,
Kaïs Saïed avait justement rencontré sa
ministre de la Justice, Leïa Jaffel. Selon le
communiqué de la présidence, il aurait
été question, pendant l’entretien, des
de l’État, Kaïs Saïed, a gelé le Parle- affaires judiciaires qui traînent depuis
ment, NDLR) avec les personnes qui ont des années, dont celle de Chokri Belaïd
été placées en résidence surveillée hors de et Mohamed Brahmi. Pour les opposants
leur domicile. Nous n’avions aucune in- à Kaïs Saïed, le lien est clair : le président
formation à leur sujet. » aurait remis une liste de personnalités
Deux magistrats, Béchir Akremi, an- à arrêter à sa ministre. « Je m’attends
cien procureur de la République, et à d’autres arrestations cette semaine »,
Taïeb Rached, ancien premier prési- assure Lazhar Akremi. Pour l’avocat, il
dent de la Cour de cassation, ont égale- s’agit de détourner l’attention : « Il y a les
ment été arrêtés dimanche. Le premier pénuries, la flambée des prix. La vie des
est accusé d’avoir dissimulé des preu- Tunisiens devient infernale, donc qu’est-
ves dans l’enquête sur les meurtres, en ce qu’on fait ? On dit que c’est la faute des
2013, de Chokri Belaïd et Mohamed traîtres et on les met en prison. » ■
zoom
revers pour Scholz à berlin
Le Parti social-démocrate
du chancelier allemand, Olaf
Scholz, a subi un cuisant revers
dimanche lors d’une élection
locale hautement symbolique
à Berlin, son fief depuis plus
de vingt ans, en étant devancé
par l’opposition conservatrice.
Même si cette défaite s’est jouée
surtout sur des enjeux locaux,
elle intervient alors qu’au plan
national Olaf Scholz est critiqué
notamment pour ses hésitations
en vue de soutenir militairement
Marco Bello/reUterS
l’Ukraine. La CDU est arrivée
en tête de l’élection avec autour
de 28 % des suffrages
(+10 points), contre environ
18 % pour le SPD.
en bref
dant la campagne présidentielle, de ne Chypre : Christodoulides
pas tenir compte du document. Mais la élu président
demande a été rejetée. Nikos Christodoulides, ancien
Pour Rogério Arantes, politologue à ministre des Affaires étrangères
l’université de São Paulo, le caractère élu dimanche président
inédit de nombreux chefs d’accusation de la République de Chypre,
et la complexité de la justice brésilienne a travaillé des années au sein
éloignent le risque d’un emprisonne- du gouvernement conservateur
ment prochain. Concernant les atta- du chef de l’État sortant avant
ques du 8 janvier, par exemple, Rogé- de s’en démarquer et se présenter
rio Arantes estime que « démontrer la comme « indépendant ». Âgé
contribution concrète de Bolsonaro va de 49 ans, cet homme soutenu
prendre beaucoup de temps ». D’autant par des partis du centre est le plus
plus que certains magistrats « pensent jeune chef d’État jamais élu
qu’il vaut mieux ne pas arrêter Bolsonaro à la tête de cette île divisée
car cela pourrait révolter la population », de Méditerranée orientale,
souligne Sergio Praça. Lors du deuxiè- membre de l’Union européenne.
me tour de l’élection présidentielle, il
avait récolté 49,1 % des voix. burkina : au moins 19 civils
Même s’il n’est pas emprisonné, la tués dans deux attaques
justice électorale pourrait infliger à Au moins dix-neuf civils, dont
l’ancien président une peine d’inéligibi- neuf supplétifs de l’armée, ont été
lité de huit ans. Bolsonaro est la cible de tués lors de deux attaques
seize enquêtes du tribunal supérieur perpétrées jeudi et dimanche dans
électoral. Depuis la victoire de Lula, il le nord-ouest et l’est du Burkina
n’a pas reconnu sa défaite, mais n’a pas Faso, selon des sources locales
non plus formellement remis en cause le et sécuritaires. Dimanche,
résultat des urnes. Un positionnement aux environs de 16 heures (locales
qui risque d’être insuffisant pour le pro- et GMT), « un groupe de terroristes
téger d’une condamnation, selon Wal- a attaqué les populations de
lace Corbo. Pour le moment, Bolsonaro Yargatenga. Au moins dix hommes
est toujours réfugié aux États-Unis, où il ont été lâchement assassinés »,
a fait une demande de visa de tourisme selon un habitant de cette localité,
pour six mois. Mais l’ancien parachutis- située à la frontière du Togo
te a d’ores et déjà déclaré son intention et du Ghana. Les raids meurtriers
de revenir dans le jeu avec la présiden- attribués à des djihadistes
tielle de 2026 en ligne de mire. Reste à se multiplient ces dernières
savoir si la justice le permettra. ■ semaines au Burkina.

Société
Pierre Palmade :
drogue, vidéo
et téléphonie
au cœur
de l’enquête
Présents dans la voiture de l’humoriste
lors du drame, deux individus ont pris
la fuite après la collision.
MArgAux d’AdhéMAr
£@m_dadhemar
faitS diveRS Trois jours après
l’effroyable accident de la route
provoqué par Pierre Palmade, le
pronostic vital d’une des victi-
mes, un enfant de 6 ans, était
toujours engagé lundi soir. Les
deux autres personnes présentes
à bord de la voiture percutée par
celle de l’humoriste sont désor-
mais hors de danger. Mais la pas-
sagère, enceinte de six mois, a
perdu son enfant à naître. Le
conducteur, un homme âgé d’une
quarantaine d’années, a été opéré
du cœur durant le week-end à
l’hôpital Beaujon de Clichy, dans
les Hauts-de-Seine. Conscient
lors de l’arrivée des secours,
Pierre Palmade, lui, avait été
hospitalisé au Kremlin-Bicêtre,
dans le Val-de-Marne, avec un
pronostic vital engagé. Lundi,
son état de santé s’était stabilisé.
Selon les premiers éléments de
l’enquête, vendredi 10 février
vers 19 heures, la voiture de Pier-
À Paris, colère et mobilisation après l’annonce
de suppressions massives de classes
Pour justifier ces fermetures, le rectorat évoque la « baisse importante » du nombre d’élèves dans la capitale.
Aude bAriéty £@AudeBariety
éducation Cent cinquante-cinq
postes et 178 classes en primaire,
182 équivalents temps plein (ETP)
en collège-lycée. Depuis quelques
jours, la suppression annoncée de
classes et de postes dans la capitale à
partir de la rentrée de septembre
2023 suscite l’émoi chez les parents,
enseignants et élus parisiens, nom-
breux à dénoncer une « saignée ».
Plusieurs mouvements de protesta-
tion ont déjà eu lieu, notamment
devant les écoles Brèche-aux-
Loups (12e) et Houdon (18e) ou le
collège Raymond-Queneau (5e).
À l’appel des syndicats d’ensei-
gnants et de la Fédération des
conseils de parents d’élèves (FCPE),
un « rassemblement bruyant » est
par ailleurs prévu ce mardi matin
devant le rectorat de Paris, situé
boulevard d’Indochine, dans le
19e arrondissement. « On s’attend à
une grosse mobilisation, à la fois des
écoles concernées qui seront reçues
par le rectorat, mais aussi des autres
écoles et des parents d’élèves », es-
père Audrey Bourlet de la Vallée,
co-secrétaire départementale du
SNUipp-FSU Paris.
Les protestataires peuvent en tout
cas compter sur le soutien de la mai-
rie. Patrick Bloche, maire adjoint
chargé de l’éducation, a déploré une
décision « brutale et inédite ». La
maire, Anne Hidalgo, a quant à elle
envoyé une lettre au ministre de
l’Éducation nationale, Pap Ndiaye.
« Au nom des familles parisiennes, et
dans l’intérêt de tous nos élèves, je
tiens à vous dire que ce projet n’est
pas acceptable et constitue une me-
nace pour l’école publique à Paris »,
écrit celle qui demande une « ren-
contre » avec le locataire de la Rue
re Palmade roulait sur la route
départementale D372, non loin de
Villiers-en-Bière en Seine-et-
Marne. Au volant, le comédien se
trouve alors à environ huit kilo-
mètres de sa résidence, à Cély-
en-Bière, où il aurait fait la fête
durant près de 24 heures. Sa voi-
ture s’est soudainement déportée
sur la voie de gauche, percutant
un véhicule qui circulait en sens
inverse. À l’intérieur de celui-ci
se trouvent le conducteur, son fils
et sa belle-sœur enceinte. Une
troisième voiture, conduite par
un octogénaire, est, par la suite,
venue s’encastrer dans celle de la
famille, provoquant un suracci-
dent. Prise en charge par les se-
cours, cette quatrième victime a
été plus légèrement blessée.
Des seringues
à son domicile
Une enquête, confiée au commis-
sariat de police de Melun, a été
ouverte pour « homicide et bles-
sures involontaires ayant entraîné
une incapacité totale de travail su-
périeure à trois mois, par conduc-
de Grenelle. Relevant notamment
que les établissements classés en
éducation prioritaire « seraient par-
ticulièrement touchés », ce qui ris-
querait de « dégrader le nombre
d’élèves par classe dans les établisse-
ments où les publics sont les plus fra-
giles socialement et scolairement »,
Anne Hidalgo évoque une « régres-
sion majeure ». « Une classe en moins
chez nous, ce n’est pas possible »,
souffle une institutrice d’une école
de la Goutte-d’Or (18e). « À quoi ça
sert de dédoubler des CP-CE1 pour
ensuite plonger des élèves en grande
difficulté dans de grosses classes ? »
« Manque de dialogue »
De son côté, Emmanuel Garot, pré-
sident de la Fédération des parents
d’élèves de l’enseignement public
(Peep) de Paris et porte-parole de la
Peep nationale, regrette avant tout
le « manque de dialogue et de
communication en amont » du
rectorat. « Je ne pense pas que le
ministère et le rectorat veuillent cas-
Pierre Palmade teur sous l’emprise de produits
(ici à Strasbourg, stupéfiants ». Le délit d’homicide
le 21 mai 2019) involontaire peut être puni de cinq
qui conduisait sous ans d’emprisonnement et de
l’emprise de la cocaïne 75 000 euros d’amende, mais cette
risquerait jusqu’à peine peut être alourdie jusqu’à
sept ans sept ans d’emprisonnement et
d’emprisonnement 100 000 euros d’amende en cas de
et 100 000 euros
circonstance aggravante telle que
d’amende.
Roses Nicolas/aBaca
la conduite sous stupéfiants. Or,
les analyses toxicologiques réali-
sées sur Pierre Palmade ont dévoi-
lé que le comédien conduisait sous
l’emprise de la cocaïne, a indiqué
le procureur de la République de
Melun, Jean-Michel Bourlès.
Selon plusieurs témoins, deux
personnes qui se trouvaient à bord
de la Peugeot 3008 de l’humoriste
ont pris la fuite après la collision.
Filmés en train de s’éloigner de la
route par la caméra embarquée
d’un automobiliste présent sur les
lieux du drame d’après Le Pari-
sien, ces deux jeunes hommes
étaient activement recherchés
lundi et pourraient être poursuivis
pour « non-assistance à personne
en danger ». La porte-parole du
ministère de l’Intérieur Camille
178 classes en primaire ser l’enseignement public, comme
devraient être supprimées certains le disent ; j’en veux pour
dans la capitale preuve, par exemple, la récente réfor-
dès la rentrée me d’Affelnet (la procédure d’affec-
de septembre prochain. tation en lycée public, NDLR). Mais
lev dolgachov/
on a extrêmement peu d’éléments
syda PRoductioNs-
stock.adoBe.com
tangibles pour pouvoir mesurer la lé-
gitimité de ces fermetures », explique
le représentant de la Peep, qui n’ap-
pelle pas ses adhérents à se rendre au
rassemblement de mardi matin.
Dans le détail, 68 classes de
maternelle et 110 d’élémentaire
devraient être supprimées à la
prochaine rentrée. Le nord-est de
la capitale est particulièrement
concerné, avec près d’une soixan-
108 538
taine de fermetures dans les 18e, 19e
et 20e arrondissements. Soulignant
que 16 classes seront par ailleurs
enfants ouvertes, le rectorat rappelle qu’à
Paris, dans le premier degré, la
étaient scolarisés
moyenne actuelle d’élèves par clas-
en primaire
dans le public se est « très favorable » : 19,9 contre
fin septembre 2022, 21,7 à l’échelle nationale.
soit -3,6 % qu’en 2021 L’argument du rectorat pour jus-
tifier les 178 suppressions de classes
Chaize a appelé les fuyards à se
rendre. « C’est important dans le
cadre de l’enquête judiciaire (…). Il
faut que l’on puisse les entendre
pour vraiment reconstituer les
faits », a-t-elle déclaré.
Le téléphone de Pierre Palmade
a par ailleurs été saisi dans le cadre
d’une autre enquête ouverte pour
« infraction à la législation sur les
stupéfiants », a précisé au Figaro le
procureur de Melun. Cette autre
procédure est en lien avec la dé-
tention et la consommation de co-
caïne par le comédien. Des serin-
gues auraient été retrouvées à son
domicile. Contrairement à la pre-
mière enquête liée à l’accident
routier, les investigations ont été
confiées à la gendarmerie, qui dé-
tient aujourd’hui son téléphone.
Celui-ci, en cours d’exploitation,
pourrait apporter de précieuses
informations concernant les
heures qui ont précédé l’accident.
Et peut-être mener les enquêteurs
jusqu’aux fugitifs, qui pourraient
être, selon Le Parisien, d’an-
ciens escort-boys rencontrés par
l’artiste sur les réseaux sociaux. ■
– contre une cinquantaine en 2022 -
est simple : Paris se vide de ses
élèves, et ce, depuis plusieurs
années. Fin septembre 2022,
108 538 enfants étaient scolarisés en
primaire dans le public. C’est 4 093
de moins qu’en 2021 (- 3,6 %). En
dix ans, au total, la capitale a perdu
27 500 élèves de primaire, soit 20 %
de ses effectifs. Le second degré est
également concerné. Entre 2021 et
2022, 1 250 jeunes ont quitté les
collèges et 448 les lycées publics
parisiens. Et ce phénomène est
appelé à se poursuivre ces
prochaines années.
« Renforcer
notre école publique »
Pourquoi cette diminution ? D’abord
et surtout en raison de la baisse de la
natalité, particulièrement forte à
Paris. Mais aussi pour des raisons
diverses : départ pour des motifs
professionnels des parents, pression
immobilière, coût (en hausse) et
qualité (en baisse) de la vie… La pan-
démie de Covid-19 a aussi poussé de
nombreuses familles à quitter la
capitale. « Bien sûr, la démographie
scolaire est en baisse, à Paris, comme
dans toutes les grandes villes de
France », concède Anne Hidalgo
dans sa lettre. « Mais plutôt que d’y
voir une source d’économies à réaliser
sur nos enfants, il faut en profiter pour
renforcer notre école publique, qui
souffre tellement aujourd’hui. »
Contacté pour connaître les sui-
tes réservées à la missive de la maire
de Paris, le ministère de l’Éducation
nationale n’a pas souhaité réagir, se
contentant de renvoyer vers le
rectorat. Ce dernier communiquera
jeudi, après le comité social
d’administration (CSA) et le conseil
départemental de l’Éducation
nationale (CDEN). ■
le figaro mardi 14 février 2023
7
zooM
tabac à chauffer,
cigarette électronique :
trop de publicité illicite
dans les points de vente
De nouveaux produits
tels que le tabac chauffé
ou les cigarettes électroniques,
en particulier jetables, font
l’objet d’une forte promotion,
le plus souvent illicite,
chez les buralistes
et dans les boutiques
de vapotage, s’inquiète
une association antitabac.
En France, l’interdiction
de la publicité en faveur du
tabac sur le lieu de vente est
« globalement respectée »,
estime le Comité national
contre le tabagisme (CNCT) au
terme d’une étude basée sur des
visites mystères. Mais ce n’est
pas le cas pour les nouveaux
produits du tabac et de la
nicotine, selon l’association :
le tabac à chauffer du
cigarettier Philip Morris, Iqos,
lui, est « massivement promu » :
près d’un débit de tabac visité
sur deux (47 %) était
« en infraction ». Et « 84,5 %
des buralistes faisant de la
publicité » pour la cigarette
électronique « sont en
illégalité », selon le CNCT, tout
comme 72 % des boutiques
de vapotage inspectées.
en bRef
Paris : un morceau de corps
de femme retrouvé dans le
parc des Buttes-chaumont
Un morceau de corps
de femme découpé a été
retrouvé lundi dans le parc
des Buttes-Chaumont, dans
le XIXe arrondissement de Paris.
Selon une source proche de
l’enquête, il s’agit du tronc
de la victime, découvert dans
un sac. La brigade criminelle
de la police judiciaire parisienne
a été chargée de l’enquête.
cRS en feu à Rennes :
ouverture d’une enquête
pour tentative d’homicide
Le parquet de Rennes a ouvert
une enquête pour tentative
d’homicide volontaire après
qu’un CRS a été blessé samedi
par un cocktail Molotov
lors de heurts en marge
de la mobilisation contre
la réforme des retraites.
Le préfet d’Ille-et-Vilaine
a dénoncé des « violences
inacceptables » commises
dans la capitale bretonne.
Seine-et-Marne : la mort
d’un loup confirmée
Les analyses génétiques
ont confirmé que le grand
canidé percuté par un véhicule
le 11 janvier en forêt de
Fontainebleau est bien un loup,
a annoncé lundi la préfecture
de Seine-et-Marne. Selon
l’expertise d’un laboratoire
spécialisé, l’animal était un mâle
venant de l’Est, « probablement
A
originaire d’Allemagne
ou de Belgique ».
 mardi 14 février 2023 le figaro
8 société
Passés maîtres dans l’art d’authentifier les affaires relevant de dérives sectaires, les détectives privés demandent à être reconnus comme de véritables experts par les acteurs qui œuvrent dans ce domaine : la police, la justice...
Sectes : comment les détectives privés
pistent les nouveaux gourous
Saisis par des familles inquiètes qui ne peuvent se tourner vers la justice, ces enquêteurs dévoilent leurs méthodes.
angélique négroni
£@AngeNegroni
justice La belle villa avec piscine
occupée par Bernard B. a fait
l’objet d’une surveillance sans
relâche. Et la planque, assurée
pendant plusieurs jours à tour de
rôle avec un collègue, a permis à
Raphaël Diaz de récolter de
précieuses informations. Le
détective privé mène l’enquête
pour Oriane B., l’épouse de
l’homme dont il scrute les allers et
venues. Bien que le couple B.
batte de l’aile et que de l’argent
disparaisse des caisses de l’entre-
prise familiale, tout laisse à penser
qu’il ne s’agit pas d’une « simple »
affaire d’adultère.
Différents éléments tissent, en
effet, la trame d’une tout autre
histoire dont le limier aux vingt
années d’expérience doit encore
préciser les contours. Pour le
moment, Oriane B. ne peut pas se
tourner vers la justice. Elle ne va
pas déposer plainte sous prétexte
que son mari, qui a brusquement
cessé ses traitements médicaux,
se prend de passion pour la
médecine alternative et com-
mande à tour de bras d’étranges
produits sur internet. Et pas
davantage parce qu’il a quitté
brutalement le foyer pour élire
domicile dans cette propriété du
Vaucluse.
“ Pour moi,
il y avait
indiscutablement
emprise mentale.
J’ai remis mon rapport
d’enquête à ma cliente.
J’avais achevé
ma mission
”
rAphAël diAz, détective
Chargé de rassembler les pièces
du puzzle, Raphaël Diaz pressent
que sa planque va le conduire vers
l’une de ces affaires d’emprise
mentale pour lesquelles sa
profession est de plus en plus
sollicitée. Bernard B., un entre-
preneur de 62 ans, qui a toujours
mené son monde à la baguette,
pourrait bien être pris au piège
d’une secte. Il ne serait pas le
premier, en dépit d’un caractère
A
bien trempé, à se retrouver sous
la férule d’un gourou.
Depuis la crise sanitaire et les
confinements successifs, les cas
de manipulateurs qui assujettis-
sent leurs victimes se multiplient
et donnent du grain à moudre aux
acteurs de la lutte contre les sec-
tes. Mais avant d’être portées à la
connaissance de la justice, nom-
bre d’affaires sont passées au
tamis des détectives privés. Saisis
par des familles inquiètes, ces
derniers s’assurent que les fils de
l’intrigue qu’ils tirent discrète-
ment dans l’ombre les mènent
jusqu’à la matérialisation d’une
emprise mentale. Des preuves ir-
réfutables que la personne qu’ils
surveillent a perdu tout libre arbi-
tre. « Comme on parle de plus en
plus de ces gourous qui investissent
internet pour attraper leurs proies,
les proches qui nous demandent
d’enquêter voient de l’emprise
mentale partout. Ce terme est sur
toutes les bouches, comme celui de
pervers narcissique », signale Maël
Jan, autre détective privé spécia-
liste de ce type de dossier.
Dans le cas de Bernard B., l’in-
tuition de Raphaël Diaz ne l’a pas
trahi. Depuis sa voiture où traînent
victuailles et bouteilles d’eau
nécessaires pour assurer une sur-
veillance de la maison « H24 », il
verra un beau matin trois person-
nes entrer dans la fameuse villa. Ils
n’en sortiront que trois mois plus
tard. Puis l’enquête conduira le
détective jusque dans le Gard et
une cahute misérable, au beau mi-
lieu d’un domaine viticole, abri-
tant une chambre et une cuisine.
L’antre du trio. « Trois types
connus dans le coin pour ne rien
faire, si ce n’est que l’un d’eux
s’était autoproclamé énergéticien »,
raconte le limier. En débusquant
cette adresse, il touche au plafond
de verre de l’affaire : car au-dessus
du trio, pas d’autre responsable.
« Il faut toujours avoir en tête que
des suspects peuvent appartenir à
une organisation et que ce sont
d’autres qui, en réalité, tirent les
ficelles », explique-t-il. Le gourou
du Gard n’avait pas d’autre maître
que lui-même et plumait tranquil-
lement sa victime isolée dans sa
belle demeure en lui soutirant de
l’argent. « Pour moi, il y avait in-
discutablement emprise mentale.
J’ai remis mon rapport d’enquête à
ma cliente. J’avais achevé ma
mission », poursuit le détective.
D’autres situations se révèlent
plus complexes, situées dans une
zone grise, à la frontière entre
emprise mentale et manipulation.
« On croit partir sur la piste d’un
gourou et on aboutit à des histoires
différentes mais tout aussi dévasta-
trices pour les victimes », indique
Maël Jan. Dans l’une d’entre elles,
le détective avait enquêté sur la
surprenante métamorphose d’un
ancien PDG, soudainement passé
du costume-cravate au « pier-
cing-tatouage ». Derrière la bru-
tale transformation d’Antoine G.,
fraîchement retraité et en mal de
compagnie, Maël Jan a mis au jour
le rôle joué par une femme à la
réputation d’ensorceleuse. Outre
son nouveau look, le senior fortu-
né a rompu du jour au lendemain
avec sa fille – qui a mandaté le
détective – et avec ses petits-
enfants, gratifiant au passage sa
nouvelle compagne d’une belle
assurance-vie, avec promesse de
Dans mariage et d’une nouvelle vie à
le respect des l’étranger financée par la vente de
impératifs de plusieurs de ses domaines.
La prédatrice n’en était pas à
confidentialité son coup d’essai. « Elle avait capté
liés à notre
métier, nous
pourrions
l’héritage d’un autre homme, ne
laissant au fils, le seul héritier, que
sa part légale », glisse Maël Jan,
fournir des qui découvrira, au cours d’une
surveillance, que l’ancien PDG,
informations alors parti pour un court séjour à
utiles à ceux l’étranger, avait aussitôt été rem-
qui combattent placé dans le « cœur » de sa nou-
velle amie. Le plus délicat restait
ce phénomène
et faire gagner
du temps à
des enquêteurs
alors à faire : « Comment exfiltrer
cet homme de sa fausse histoire
d’amour sans l’anéantir ? »
Pour ramener les victimes à la
qui, parfois,
méconnaissent
réalité, le détective n’agit pas seul.
Il travaille au sein de la société
les ressorts
française de recherche et
d’analyse de l’emprise mentale
de ce type (SFRAEM). Installée à Bordeaux,
d’affaires »
AlexAndre lAverze,
cette association a acquis au fil des
années une solide réputation. Son
fondateur, Me Daniel Picotin, était
secrétAire du syndicAt
intervenu dans l’affaire dite « des
nAtionAl des Agents
de recherches privées
(snArp)
reclus de Monflanquin », une
famille de nobles tombée sous la
coupe d’un gourou, Thierry Tilly.
Avec l’aide de psychologues, la
SFRAEM a pris en charge Antoine
G. « Dans cette affaire, on est en fait
sur de la manipulation, car la
victime pouvait encore, par
moments, penser par lui-même »,
indique Me Mikaël Sainte-Croix,
l’avocat de l’association. Même si
la « mante religieuse » tenait les fi-
celles de sa vie, sa proie, bien que
terriblement affaiblie, avait encore
un reste de libre arbitre. Une
plainte pour escroquerie a depuis
été déposée.
Mais il arrive que des familles
dénonçant des faits d’emprise
mentale, soient en fait à l’origine
de leur rupture avec un proche.
Naviguant au cœur des secrets de
famille, c’est ce que décèle parfois
Maël Jan. Ce fut le cas avec une
jeune femme partie rejoindre une
autre, fuyant une relation dou-
loureuse avec des parents dans le
déni et criant à l’emprise mentale.
« Il faut savoir alors résister aux
injonctions de clients qui persistent
à croire à l’existence d’une secte. Il
est bien difficile de leur ouvrir les
yeux sur leur propre histoire »,
raconte le détective. « Il y a aussi
le cas de relations toxiques qui se
nouent au sein d’un couple qui
brusquement s’isole. Les proches
accusent alors le conjoint d’être
embrigadé dans un mouvement
sectaire. Si ce n’est pas le cas, on
ne peut rien faire face à ce type de
relations », indique Me Mikaël
Sainte-Croix.
“ Il faut savoir résister
aux injonctions de
clients qui persistent
à croire à l’existence
d’une secte. Il est bien
difficile de leur ouvrir
les yeux sur leur
propre histoire
MAël JAn, détective
”
Passés maîtres dans l’art
d’authentifier les affaires relevant
de dérives sectaires, ces
détectives privés demandent
aujourd’hui à être reconnus
comme de véritables experts par
les acteurs qui œuvrent dans ce
domaine : la police, la justice, les
associations mais également la
Miviludes (Mission intermi-
nistérielle de vigilance et de lutte
contre les dérives sectaires).
« Qu’il y ait un référent au sein
de ces structures pour un
échange d’informations », propose
Alexandre Laverze, secrétaire du
Syndicat national des agents de
recherches privées (SNARP).
Cette structure, majoritaire au
sein de la profession, milite pour
la création d’un circuit d’infor-
mation encadré. « Chacun serait
gagnant, poursuit le détective.
Dans le respect des impératifs de
confidentialité liés à notre métier,
nous pourrions fournir des infor-
mations utiles à ceux qui combat-
New AfricA-stock.Adobe.com
tent ce phénomène et faire gagner
du temps à des enquêteurs qui,
parfois, méconnaissent les ressorts
de ce type d’affaires. Inversement,
la Miviludes pourrait nous informer
de manière utile, notamment sur
les signalements qu’elle recense et
qui visent un groupe ou une
personne. Ce sont de précieuses
informations qui pourtant nous
échappent. »
Pour Maël Jan, ce continuum
est d’autant plus nécessaire que la
tâche devient, pour tous, de plus
en plus ardue. « Nous avons
affaire à une kyrielle de gourous
qui sévissent un peu partout en se
servant des réseaux sociaux et qui
forment des mini-groupes, loin des
grandes structures habituelles que
l’on connaît. Quand le scénario de
l’emprise se noue dans un apparte-
ment, il est très difficile de savoir ce
qui se passe derrière ses murs »,
dit-il. Dans ce genre d’affaires,
infiltrer les lieux est quasi impos-
sible. Me Sainte-Croix n’y est
d’ailleurs pas favorable : « C’est
trop risqué car on marche sur des
œufs. Si l’infiltration est mise au
jour, c’est pire que tout et l’on perd
contact avec la personne que l’on
voulait sauver. »
Certains sautent quand même
le pas. Sous une fausse identité,
Benoît Judde, qui s’est fait spécia-
liste des dérives thérapeutiques,
approche les gourous et leurs
affidés sur la toile, puis investit
des groupes et participe à des
stages. Dans cette plongée au
cœur de croyances obscures, il
traque ce qui relève des dérives
sectaires et ce qui peut aussi inté-
resser un client. « Dans le cas
d’une séparation, on peut me man-
dater pour aller voir ce qui se passe
au sein d’une structure qui abrite
des pratiques ésotériques et que
fréquente le conjoint qui réclame la
garde des enfants », confie-t-il.
Dans les guerres au sein des
couples, ses rapports d’enquête
atterrissent alors sur le bureau
d’un juge aux affaires familiales.
En cas d’emprise mentale, le
procureur peut être aussi alerté.
En travaillant avec sa caméra ca-
chée, Benoît Judde prend le risque
de se faire repérer plus faci-
lement. « Mais en cas de contes-
tation de mon rapport d’enquête
par une partie adverse, les vidéos
sont utiles », souffle-t-il. Vision-
nées par un huissier, elles consti-
tueront la preuve, par l’image,
d’un joug souvent indécelable. ■
 le figaro mardi 14 février 2023

ScienceS 9

Sûreté nucléaire : une mue sous tension

Le projet de fusion entre le gendarme indépendant du secteur, l’ASN, et l’expert technique, l’IRSN, pose question.

Marc cherki
mcherki@lefigaro.fr

énergie Depuis une vingtaine

d’années, la sûreté des centrales
nucléaires françaises repose sur
deux piliers : une autorité indépen-
dante de l’État et des industriels,
l’ASN (Autorité de sûreté nucléai-
re), et une expertise indépendante
de cette autorité, l’IRSN (Institut de
radioprotection et de sûreté nu-
cléaire). C’est cet équilibre qui est
remis en question par le gouverne-
ment, qui organise à marche forcée
une fusion entre les deux organis-
mes. Dès le 20 février, une feuille
de route devrait être donnée au
gouvernement par Bernard Do-
roszczuk, le président de l’ASN,
Jean-Christophe Niel, le directeur
général de l’IRSN, et François Jacq,
l’administrateur général du CEA
(Commissariat à l’énergie atomi-
que et aux énergies alternatives).
En pratique, l’IRSN s’apprête à
être démantelé. L’établissement
public à caractère industriel et
commercial (Epic), fort d’environ
1 800 salariés, a convoqué ce jeudi
un conseil d’administration afin
d’aborder le projet de scission en-
tre l’ASN, le CEA (pour quelques
activités de recherche) et la
DSND, l’homologue de l’ASN Le 10 février, l’Autorité l’ASN, le gendarme du secteur. “dual” adopté en France, avec un ter, par exemple, des Ehpad ou des me, car il trouve le système actuel
chargé des installations nucléaires de sûreté nucléaire « L’ASN n’a jamais été aux ordres dialogue technique entre l’IRSN, les services publics essentiels. » efficace. C’était l’aboutissement
militaires. Ce mardi 14 février, un (ASN) a annoncé du gouvernement », martèle Ber- exploitants nucléaires et l’ASN, est Le président de l’ASN rappelle d’un « consensus de vingt-cinq
comité social extraordinaire est qu’une nouvelle fuite nard Doroszczuk, son président. de fournir une décision au meilleur qu’il existe plusieurs modèles dans ans », acquiesce Thierry Charles,
aussi prévu par la direction avec radioactive avait été « Mon prédécesseur ou moi-même niveau de la science et des connais- le monde pour contrôler la sûreté ancien directeur général adjoint
les représentants du personnel. déclarée le 12 janvier avons pris des décisions pour des sances techniques du moment. Cet- nucléaire. Pour lui, « le plus ré- de l’IRSN, qui redoute que cette
C’est la ministre de la Transition
par EDF à la centrale raisons de sûreté pour les popula- te sûreté n’est pas limitée à la pandu est celui d’une autorité indé- fusion puisse « créer un risque de
nucléaire du Bugey
écologique, Agnès Pannier-Runa- (Ain), près de Lyon. tions et l’environnement et pas pour conformité à la réglementation ». pendante qui intègre l’expertise défiance de la population ».
cher, qui a annoncé dans un com- JEAN-PHILIPPE KSIAZEK/AFP
des raisons économiques. Ces déci- Le gouvernement souhaite ren- technique. C’est le cas pour la NRC Selon le délégué syndical de la
muniqué le 8 février cette volonté sions ont conduit à des retards pour dre la prise de décisions plus flui- (Nuclear Regulatory Commission) CFDT à l’IRSN, ces décisions pro-
de réforme de l’IRSN. Ces déci- la mise en service de l’EPR, à l’arrêt de. Mais il peut exister des diffé- aux États-Unis. Et c’est déjà un peu voquent en outre « une grande in-
sions s’inscrivent dans la ligne de de 4 réacteurs du Tricastin en 2017, rences entre l’expertise technique le cas en France, puisque l’expertise quiétude parmi le personnel de
celles prises par Emmanuel Ma- et à des examens approfondis après et l’avis d’une autorité, même in- des équipements sous pression pour l’IRSN. Elles créent une belle pa-
cron à l’issue du Conseil de politi- la corrosion de circuits sous pres- dépendante du pouvoir politique. les chaudières nucléaires est déjà gaille parmi les salariés qui font
que nucléaire, le 3 février, qui vise sion signalée récemment par l’ex- « Par exemple, en cas de canicule, hébergée en France par l’ASN. » leur CV pour chercher du travail.
à « la relance de la filière nucléaire ploitant. L’ASN a prouvé qu’elle l’IRSN rend son avis technique sur Mais ce modèle français de sé- Ce désordre ne va pas faciliter les
française et la construction de six était une autorité indépendante et ce qu’il faudrait faire pour que les paration des pouvoirs « avait fait prises de décision rapide et sereine
nouveaux réacteurs de type EPR ». elle le restera. » centrales restent exploitées de ma- l’objet d’un large consensus politi- pour l’avenir et la sûreté du nu-
Il est prévu de faire voter le texte nière sûre, ajoute le représentant que ». La loi de la transparence de cléaire en France. » Le président
le 25 février dans le projet de la loi Rendre la prise de de la CFDT. Cela peut exiger de re- l’énergie nucléaire, « votée en de l’ASN se veut lui plus rassu-
sur le nucléaire ou, au plus tard, à décisions plus fluide jeter de l’eau à une température dé- 2006 à l’époque de Jacques Chirac, rant : « Nous avons fait expertiser
l’automne, via le projet de loi de « Nous sommes surpris par la rapi- passant les normes de rejet. L’ex- avait été reprise après avoir été ré- la question du maintien des salariés
finances pour 2024. Son entrée en dité et la violence de ces déci- pert technique se prononce sur la digée par Dominique Voynet, mi- de droit privé, embauchés à l’IRSN.
vigueur est espérée dans un an à sions », déplore quant à lui Fran- sûreté, l’ASN intègre d’autres exi- nistre du gouvernement de Lionel Dans la nouvelle structure, nous
dix-huit mois. çois Jeffroy, délégué syndical gences pour décider de continuer à Jospin », rappelle Yves Marignac, pourrons avoir des salariés de droit
La plupart des activités civiles central de la CFDT à l’IRSN. Il rap- faire fonctionner les réacteurs selon expert du nucléaire à l’association privé qui pourront donc conserver
de l’IRSN seraient absorbées par pelle que « la force du système les besoins d’énergie pour alimen- négaWatt. Il est opposé à la réfor- leur statut actuel. » ■

zoom
Le CNRS brade-t-il en France, le lynx
semble condamné

un joyau de son
Le lynx boréal, qui a fait
son retour en France dans les
années 1970 depuis la Suisse,

parc immobilier ?
Des opposants dénoncent la vente du site
historique de Meudon-Bellevue pour plusieurs
millions d’euros en-dessous du prix du marché.
Vincent BordenaVe
vbordenave@lefigaro.fr
recherche Le 15 mars prochain,
les derniers agents du CNRS tra-
vaillant sur le site historique de
Meudon-Bellevue auront dû plier
bagage. Un déménagement précipi-
té qui, selon les syndicats, se fait au
détriment de la recherche française.
« Dans cette histoire, la direction du
CNRS est prise au piège, juge Josiane
Tack, ingénieur de recherche au
CNRS et cosecrétaire générale du
syndicat CGT de la recherche publi-
que. Le 25 janvier 2023, la ministre de
l’Enseignement supérieur et de la Re-
cherche, Sylvie Retailleau, a demandé
par courrier au président du CNRS de
vendre le site à un promoteur immo-
bilier. Il ne peut que se conformer aux
directives ministérielles. Ce sont les
intérêts du privé qui passent en pre-
mier, puisque la vente se fera en deçà
de la valeur du site. » La vente a ainsi
été entérinée par le conseil d’admi-
nistration du CNRS du 10 février
dernier par 12 voix contre 8.
unique sur Paris, a été cédé en 1920
par la danseuse Isadora Duncan à
l’Office des inventions qui devien-
dra Office national des recherches
scientifiques et industrielles et des
inventions (ONRSI), l’ancêtre du
CNRS. C’est dans ces locaux presti-
gieux qu’est notamment conservé
un de plus gros électroaimants au
monde, 120 tonnes, conçu par le
physicien Aimé Coton et inauguré
en 1928, qui a servi dans l’étude des
matériaux et de la radioactivité.
Le permis de construire
expire dans deux mois
Le projet du démantèlement du site
remonte en fait à une douzaine
d’années. Le produit de la vente de-
vait servir au CNRS pour construire
de nouveaux locaux, plus moder-
nes. Initialement, le terrain devait
être cédé pour 46,7 millions d’euros
à Vinci. « S’il ne reste aujourd’hui
qu’une cinquantaine d’agents sur le
site, c’est d’ailleurs parce qu’un cer-
tain nombre de laboratoires ont déjà
été transférés, explique Josiane
Tack. Mais le projet a connu une suc-
CNRS, voté en octobre, n’intégrait
ainsi aucun déménagement dans les
prochains mois. » Et pour cause,
l’institution refusait l’offre définiti-
ve de Vinci, qui avait revu ses ambi-
tions à la baisse et était passée à un
montant de 38,8 millions d’euros,
soit presque 8 millions de moins que
le montant initial. C’est finalement
ce montant qui a été accepté lors du
vote du 10 février.
« Le CNRS a demandé en parallèle
une estimation indépendante et celle-
ci considère que le terrain vaut
43,7 millions d’euros, rappelle Jo-
siane Tack. On reste donc sur une
vente à 5 millions en dessous. » Sur
ce point, le ministère de la Recher-
che affirme de son côté avoir procé-
dé à une estimation de la valeur vé-
nale des terrains. Les services de
Sylvie Retailleau assurent qu’il leur
est impossible de rendre ces
conclusions publiques « alors que la
vente n’est pas encore conclue »,
laquelle le prix de vente proposé par
les promoteurs serait “très inférieur”
à l’estimation du terrain ».
Mais comment expliquer une telle
précipitation ? Le calendrier dans
lequel s’inscrit la réalisation du pro-
jet est contraint par la date de validi-
té du permis de construire, qui a été
délivré en 2015 et qui arrive à expi-
ration le 14 avril 2023. Pendant plu-
sieurs années, ce permis a fait l’objet
de nombreux recours des riverains.
Il est aujourd’hui dit « purgé de tout
recours ». « Si cette échéance n’est
pas respectée, un nouveau projet de-
vra être entièrement repris à zéro
alors que le site est aujourd’hui par-
tiellement inexploité et en voie de dé-
labrement », assure le ministère. De
son côté, le CNRS ne donne pas plus
d’éléments, mais assure travailler
« pour préserver au maximum les
conditions de travail de la quarantai-
ne de personnes concernées ainsi que
pour limiter au maximum l’impact sur
Le site historique
du CNRS
de Meudon-Bellevue
(Hauts-de-Seine).
Ces locaux abritent
l’un des plus gros
électroaimants au
monde (120 tonnes),
qui a servi dans l'étude
des matériaux
et de la radioactivité.
OLIVIER BOITET/PHOTOPQR/
LE PARISIEN/MAXPPP
risque à nouveau de disparaître
d’ici à trente ans en raison
d’une consanguinité
extrêmement élevée, selon
une association de protection
de la faune sauvage (Centre
Athénas) qui publie une étude
dans la revue Frontiers
in Conservation Science.
La population du plus grand
félin sauvage d’Europe est
aujourd’hui estimée à environ
150 individus en France,
principalement dans les Alpes
et le Jura. Les chercheurs
ont comparé les gènes de lynx
français et ceux de lynx suisses
à partir de poils et de
sang collectés entre 2008
et 2020. Ils concluent que seuls
38 félins sont à même de se
reproduire avec une diversité
génétique suffisante pour
assurer la survie de l’espèce.
De ce fait, ils estiment qu’un
nouveau matériel génétique
serait nécessaire de toute
urgence, faute de quoi
la population s’effondrera.
Les chercheurs notent que
l’introduction de nouveaux
lynx est politiquement difficile
en France. D’autres facteurs
ayant déjà contribué à sa
précédente disparition mettent
en péril la survie de cette
espèce, comme le braconnage,
la perte de leur habitat
et les collisions avec
A

L’immeuble, perché sur les hau- cession de reports et d’annulations. mais « que ces dernières contredi- les activités scientifiques et adminis- les voitures (à l’origine
teurs de Meudon et doté d’une vue Le dernier budget rectificatif du sent totalement l’affirmation selon tratives concernées ». ■ de 21 décès en 2022).
 mardi 14 février 2023 le figaro

10 Sport
Ligue des champions : Paris, la peur du bide
Entre blessures et doutes, le PSG ne se présente pas dans les meilleures dispositions face au Bayern, ce mardi.
dernières semaines. La Coupe de trois victoires. Ils arrivent lancés Sur la forme du moment, les Ba- disposera « d’un effectif beaucoup
christophe remise £@Cremise77 France s’est déjà envolée. Il reste à Paris. Lequel Nagelsmann s’ap- varois partent avec la faveur des plus complet que sur les matchs
encore la Ligue 1 et la C1. « Ce n’est puiera sur une attaque de feu, pronostics. D’autant qu’ils n’ont précédents » et que ses «joueurs
football «Chaque match a son pas la crise, mais une mauvaise certes sans Sadio Mané, mais avec connu qu’une élimination à ce sont habitués aux grands rendez-
histoire. » C’est ce que les Pari- passe, un moment difficile », pro- notamment deux ex-Parisiens, stade de la compétition sur les vous ».
siens se plaisent à répéter ces der- met Presnel Kimpembe, de retour Éric Maxim Choupo-Moting, bu- 11 dernières saisons, pour sept ap- Un grand rendez-vous qu’on
nières semaines. Et c’est encore samedi après trois mois d’absen- teur à l’aller et au retour en 2021, paritions dans le dernier carré, imagine ouvert dans le jeu, avec
heureux. C’est ce qui leur permet ce. N’empêche, Galtier est « in- lors du quart de finale européen trois finales et deux titres (2013, deux équipes mariées au déséqui-
de ne pas partir vaincus d’avance quiet». « Ce serait grave si je ne qui a opposé les deux équipes, et 2020). Dans le même temps, Paris libre. Une chose est sûre : avec ou
face au Bayern Munich, en 8es de lionel Messi, Marco l’étais pas», soufflait-il au Stade le titi Kingsley Coman, bourreau n’a passé le cap des quarts qu’à sans leur sauveur bondynois, les
finale de Ligue des champions. verratti, gianluigi Louis II. Il y a de quoi. du PSG en finale, à Lisbonne, en deux reprises. Parisiens devront opérer un chan-
Match aller au Parc des Princes ce Donnarumma, Kylian Et ce, d’autant plus que le 2020. Mais on le sait bien, les pronos- gement radical dans l’attitude par
mardi (21 heures, sur Canal+ et Mbappé et neymar Bayern retrouve des couleurs. Le Une chose est sûre : à l’issue de tics ne valent pas forcément rapport aux dernières semaines, et
participent, lundi
RMC Sport), retour le 8 mars à sextuple champion d’Europe a cette double confrontation, un grand-chose en Ligue des cham- notamment aux derniers matchs.
matin, à une séance
Munich. Les belles promesses de d’entraînement toussé à la reprise, sur le terrain « gros » passera à la trappe. Reste pions. La preuve avec le rétablis- Sans quoi, la campagne européen-
la fin de l’été sont loin, très loin. au centre de saint- (3 nuls) et en dehors, sans parler à savoir lequel. « On n’est pas là sement express de Kylian Mbap- ne (et la saison ?) aurait toutes les
Invaincus lors de la première pha- germain-en-laye. des blessures. Depuis, les joueurs pour se promener, on veut gagner pé. « C’est du 50-50 », martèle chances de s’arrêter en 8es de fina-
se, les Rouge et Bleu souffrent de- FRANCK FIFe/AFP de Julian Nagelsmann ont aligné tous les titres », martèle Neymar. Galtier, glissant au passage qu’il le, comme l’an dernier. ■
puis la reprise après la Coupe du
monde. Déjà quatre revers (Lens,
Rennes, Marseille, Monaco) et
14 buts encaissés en 11 matchs,
contre 16 en 22 rencontres avant
le Qatar. La décompression post-
Mondial était prévisible. Pas à ce
point…
Individuellement et collective-
ment, Paris se cherche. Les cols
blancs ont bien du mal à enfiler le
bleu de chauffe, à l’image du
match de Coupe de France au
Vélodrome mercredi dernier (dé-
faite 2-1), où les Parisiens ont été
croqués dans l’engagement et
l’intensité. Les recrues estivales
peinent à convaincre, pas de ren-
fort au mercato d’hiver, les nerfs à
vif dans le vestiaire, à l’image du
coup de gueule de Luis Campos à
Monaco samedi (défaite 3-1), en-
tre les joueurs (Neymar et Vitinha)
et dans les tribunes (Kimpembe a
tenté de calmer le jeu)…

Tout le monde sur le pont

Il y a le feu. « C’est le mois le plus
excitant de ma carrière », jubilait
Galtier avant d’attaquer une folle
série (OM, Monaco, Bayern, Lille,
OM). C’était sans compter sur ce
trou d’air à rallonge, et la
traditionnelle poisse qui ne lâche
pas le PSG à l’approche des grands
rendez-vous européens, avec un
virus avant Monaco et des pépins
physiques en cascade (Messi, Ver-
ratti, Neymar, Mbappé…). Bonne
nouvelle ? Hormis Nordi Mukiele
et Renato Sanches, tout le monde
est sur le pont. Même… Kylian
Mbappé, initialement annoncé out
pour trois semaines. Reste à savoir
si le crack de Bondy peut et/ou
doit débuter la rencontre…
En tout cas, son retour repré-
sente évidemment un énorme
Benjamin Pavard, le rebond après un Mondial morose
plus pour Paris, dans les têtes mais du monde désolante sur le plan per- s’est pas privé pour lui dévoiler le sur les 6 matchs de Munich en 2023).
aussi tactiquement, même s’il baptiste desprez sonnel. Pour lui, son avenir en club fond de sa pensée lors d’une séance Suffisant pour l’imaginer prolonger
£@batdesprez
n’entre qu’à la fin du match. Gal- (il est en fin de contrat en juin 2024) vidéo. l’aventure entamée à l’été 2019 en
tier assure en tout cas qu’il ne sera et en sélection, les retrouvailles avec Pendant cette entrevue à trois Bavière ? Cet hiver, le Barça, l’Inter,
pas sur le banc « pour faire de la LE FOOTBALL est impitoyable. un club français s’avancent comme avec Deschamps et Stephan, Benja- la Juventus et le Real se sont rensei-
figuration » : s’il y est, c’est pour Chaque saison est là pour le rap- un tournant dans sa saison. Et dans min Pavard a fait comprendre qu’il gnés sur son cas. En vain. Du côté de
jouer. Cela ne doit toutefois pas peler. Il y a un peu plus de quatre sa carrière ? « Il a les crocs et veut prenait moins de plaisir à évoluer Pavard, toutes les portes sont ouver-
faire oublier aux Parisiens qu’il ne ans, Benjamin Pavard sortait de montrer qui il est », souffle l’un de ses dans le couloir droit. Réaction im- tes et le club qui lui proposera un
manquait pas que Mbappé ces la Coupe du monde 2018 proches. médiate de « DD » : poste de défenseur cen-

5
aux anges et affublé mise au placard. Le tral aura une longueur
d’un statut de coque- Distancé par Dayot haut niveau n’accep- d’avance.
luche de l’équipe de Upamecano tant pas les états d’âme. Quid de son avenir en
Choc aC Milan- France après son Sa prestation sera scrutée avec at- « Je considère qu’il n’est sélection ? Les échanges
Tottenham « but de bâtard »
contre l’Argen-
tention par Guy Stéphan, l’adjoint de
Didier Deschamps, présent à la Porte
pas dans de bonnes dis-
positions », cinglait le titularisations ne sont pas rompus avec
les Bleus, le Nordiste a
tine, élu le plus de Saint-Cloud mardi en vue de la technicien basque au sur les 6 matchs d’ailleurs apprécié de
Champion d’Italie en titre, beau du tour- prochaine liste des Bleus du 16 mars sujet d’un élément qu’il de Munich en 2023 recevoir certains mes-
le club lombard reste noi. Ce mardi, prochain. Avec une incertitude ma- a lancé en sélection. Au pour le Français sages de membres du
sur cinq défaites lors le natif de jeure quant à sa titularisation au Parc Qatar, s’il a tenté de qui conserve staff ces dernières se-
de ses sept dernières Maubeuge se des Princes. Dans un système à qua- donner le change et de la confiance maines. Mais la concur-
rencontres. Le club rappellera au bon souvenir du pu- tre défenseurs, il semble distancé par garder son sourire de son entraîneur, rence au poste d’axial
de Londres enchaîne blic français, s’il est titulaire, lors Dayot Upamecano, monstrueux au après les victoires, l’an- Julian Nagelsmann droit est colossale (Upa-
lui aussi les résultats du 8e de finale aller de la Ligue des Qatar et Matthijs de Ligt, quand sa cien joueur de Stuttgart mecano, Konaté, Saliba,
en dents de scie, avec champions contre le Paris SG avec le présence dans une défense à cinq a vécu la séquence la plus traumati- Disasi, Fofana, Kalulu, Todibo…)
trois revers en six matchs. Bayern Munich. Mais entre l’épopée s’impose au poste d’axial. Ici réside sante de sa vie en Bleu. Après la fi- malgré la retraite de Raphaël Varane.
Cinquièmes de leurs russe et le rendez-vous au Parc des aussi toute la complexité du cas de nale du Mondial perdue contre l’Ar- À droite, en dehors de Jules Koundé,
championnats respectifs, Princes, le statut du défenseur inter- l’ancien Lillois. Et sans doute de ses gentine (3-3, 2 tab à 4), Benjamin non spécialiste du poste, tout semble
les deux clubs sont hors course national a pris un sacré éclat après un choix futurs. Pavard, très déçu, s’est isolé avec sa beaucoup plus ouvert. Au sein de la
pour le titre et peuvent sauver Mondial passé quasi exclusivement Dans son esprit, « Benji » souhaite compagne quelques jours à Oman, sélection, ce choix de revendiquer
leur saison en Ligue des sur le banc des remplaçants. s’installer définitivement à ce poste avant de retrouver Doha pour la un poste de défenseur plus axial,
champions. Pour les Français, Le principal intéressé rêvait d’une de défenseur central, quitte à remet- préparation hivernale du Bayern contrairement à ce qu’a pu faire Li-
c’est du côté de Milan confirmation au Qatar, pour au final tre en cause sa polyvalence au poste Munich. Au sein de l’institution ba- lian Thuram vingt ans plus tôt, inter-
qu’il faudra regarder. Les arrivé y connaître une remise en question de latéral droit… À bientôt 27 ans (il varoise, après des zones de tumulte roge. Pour ne pas dire plus. Charge à
Mondialistes Théo Hernandez à Munich totale. Et une mise à l’écart implaca- les aura le 28 mars prochain), le avec la perte de son permis de Benjamin Pavard de dissiper les dou-
et Olivier Giroud devraient être en 2019, ble. Durant l’épopée des Bleus, il vainqueur de la Coupe du monde conduire pour état d’ivresse ou en- tes et d’envoyer un signal fort.
titulaires, tout comme le jeune le défenseur aura joué le rôle plus que secondaire 2018 n’est plus un gamin, s’estimant core ses envies d’ailleurs, le calme L’heure du rebond a sonné. ■
Pierre Kalulu (22 ans). français sera en fin d’homme de vestiaire, sorti du onze à un moment charnière de sa carriè- semble être revenu.
Mike Maignan est toujours de contrat au bayern de départ après sa prestation ratée re. Et compte démontrer ses qualités Affectueux et sensible, désireux
à l’infirmerie, ainsi en juin 2024. contre l’Australie en ouverture (4-1). à un poste différent de celui qui l’a d’être papa comme il l’évoquait dans
8es de finale aller
mardi
qu’Hugo Lloris, habituel MAJA HITIJ/GeTTy IMAGes Avant de ne plus jamais quitter le fait connaître aux yeux du public nos colonnes le 2 décembre dernier, paris sg
21 h C+ rMC
bayern
gardien des Spurs, vIA AFP banc des remplaçants. Autant dire français. C’est d’ailleurs pour l’une Pavard a apprécié récemment le ges- Milan aC bein tottenhaM
qui a récemment que ce double rendez-vous face au de ces raisons qu’il a été placardisé te chaleureux et les félicitations du DortMunD mercredi 21 h Chelsea
annoncé PSG (aller ce mardi, retour le 8 mars) par Didier Deschamps lors du séjour directeur sportif Hasan Salihamidzic bruges - benfiCa
sa retraite est coché depuis de longues semaines au Qatar. Après son erreur de mar- après un match du Bayern. Tout liverpool 21 février real MaDriD
internationale. par le principal intéressé, désireux quage et quelques manquements qui comme le fait que son coach, Julian franCfort - naples
A

t. G. de basculer sur autre chose et de n’ont pas plu au sélectionneur lors Nagelsmann, le considère comme un inter Milan 22 février porto
prouver ses qualités après une Coupe du premier match, ce dernier ne joueur important (5 titularisations leipzig - Man. City
 le figaro Mardi 14 Février 2023

LE CARNET DU JOUR 11
Gwénaëlle, Béatrice, Samuel Mme Hubert Rouy, Savigny-lès-Beaune

Les éditions du Figaro

Les annonces sont reçues de Carné, en union avec (Côte-d'Or).
deuils ses enfants, M. Hubert Rouy (†),
avec justification d’identité en union de prière avec M. et Mme François Pichon, Patricia et Jean-Louis (†)
Pascale, M. et Mme Benoît Hugues, Michau,
du lundi au vendredi
de 9h à 13h et de 14h à 18h
M. et Mme Grégoire
Gervais d'Armagnac,
son fils et sa belle-fille,
née Salmon-Legagneur,
son épouse,
le baron et la baronne
Bénigne de Drouas,
ses filles et ses gendres,
Alix et Patrick Albrand,
Claude et Frédéric
Jousset-Drouhin,
En vente actuellement
ont l'immense douleur François de Nicolay
César, Auguste et Arthur, de vous faire part ses 17 petits-enfants et Floriane Maucourant,
(excepté les jours fériés) ses petits-fils, de l'appel à Dieu et leurs conjoints, ses enfants,
dans l'espérance Jean-Baptiste, Axel et Audrey,
et tous les dimanches le comte et la comtesse Henri de la Résurrection de ses 44 arrière-petits-enfants Félix et Alexandra,
d'Armagnac de Castanet, Edwige et Geoffroy, Steven,
de 9h à 13h. son frère et sa belle-sœur, font part du rappel à Dieu de la Zoé, Mathieu, Aliénor,
Arthur, Elisa, Hadrien, Olivia, Michel Romane (†), Gabriel, Oscar,
ses neveux et nièces, de CARNÉ-CARNAVALET Pauline, Alice, Mahaut,
Elles doivent nous parvenir
journaliste honoraire, vicomtesse Bruno du JEU Bertille,
le comte Nicolas officier de la Légion d'honneur, née Anne ses petits-enfants,
avant 16 h 30 d'Armagnac de Castanet, croix de la Valeur militaire, de Lentaigne de Logivière, Victoire, Théodore, Héloïse,
son frère, grand officier Augustin, Margot, Louis,
pour toutes nos éditions Louis et Sacha, de l'ordre équestre du Edouard,
ses neveux, Saint-Sépulcre de Jérusalem, le 10 février 2023, ses arrière-petits-enfants,
du lendemain,
à l'âge de 94 ans.
les familles ont la tristesse
avant 13 h les dimanches. d'Armagnac de Castanet, le 11 février 2023, Une messe sera célébrée de vous faire part
Gervais, Lefèbvre, Massicard, dans sa 91e année. le mercredi 15 février, du rappel à Dieu de la
Fénéon, Perrot, à 15 heures, en l'église
Courriel Jochaud du Plessix, Besombes La cérémonie religieuse Saint-François-Xavier, comtesse Aymard-Claude
et Valentin de NICOLAY
carnetdujour@media.figaro.fr sera célébrée
le jeudi 16 février, à 14 h 30,
Paris (7e),
et née Nadine Soudée,
ont la douleur en l'abbatiale Notre-Dame- le jeudi 16 février, à 15 heures,
Téléphone de vous faire part en-Saint-Melaine, à Rennes. en l'église de La Comelle le 10 février 2023,
du rappel à Dieu de (Saône-et-Loire), dans sa 88e année.
01 56 52 27 27 Anne
L'inhumation aura lieu
dans l'intimité,
suivie de l'inhumation.
La cérémonie religieuse
le vendredi 17 février, sera célébrée
sur notre site d'ARMAGNAC de CASTANET à 16 heures, au cimetière le jeudi 16 février, à 9 h 30,
de Passy, Paris (16e). en l'église Saint-Cassien,
carnetdujour.lefigaro.fr décédée brutalement
à Savigny-lès-Beaune, suivie
de l'inhumation au cimetière
le 10 février 2023, de Savigny-lès-Beaune.
Tarif de la ligne € TTC : dans sa 61e année. Hervé et Francine Muzart,
Denys (†) et Martine Muzart, Ni fleurs ni couronnes.
Du lundi au jeudi In memoriam Marie-Laure et Guillaume (†)
sa mère, Laurent Gignoux, Deneuville,
26 € jusqu’à 25 lignes Vivi Massicard d'Armagnac son époux, ses enfants,
(1931-2000),
24 € à partir de 26 lignes son père, le ses enfants, ses petits-enfants, Paris (16e).
Vendredi ou samedi comte Jean Caroline, Alexandre, Sabine ses arrière-petits-enfants
d'Armagnac de Castanet et Jenny, Mme Elvire Clamageran,
29 € jusqu’à 25 lignes (1937-2011). et leurs conjoints, et toute sa famille Mme Isabelle Muñoz,
Murielle, Steve et Keith, M. Alexandre de Rochefort,
27 € à partir de 26 lignes La cérémonie religieuse ses petits-enfants, font part du rappel à Dieu de ses enfants,
sera célébrée Mattias, Selma, Oksana,
Réduction à nos abonnés : en la basilique Sainte-Clotilde, Yanis, Guillaume, Eloïse, ont la douleur
23 bis, rue Las Cases, Paris (7e), Lyra et Sören,
nous consulter le jeudi 16 février, à 10 h 30.
Mme Christiane MUZART de faire part du décès de
née Hermand,
ont la tristesse Hervé PASTÉ de ROCHEFORT
Naissances, Commémoration, L'inhumation aura lieu de vous faire part du décès,
Adoptions, Signatures, le même jour, à 15 h 30, à Villejuif, de le 11 février 2023, le 10 février 2023, à Lisbonne.
au cimetière à Soissons,
Baptêmes, Départsen de Champigny-sur-Yonne. Kerstin GIGNOUX à l'âge de 93 ans. Les obsèques auront lieu au
Fiançailles, retraite, née Nilsson,
Vœux, cimetière de Passy, Paris (16e),
Mariages, La cérémonie religieuse dans l'intimité familiale.
Anniversaires, Deuils, le 12 février 2023. aura lieu le jeudi 16 février,
Centenaires, Condoléances, Ses fils, à 15 heures,
FêtedesMères, Remerciements, Pierre, François, Raoul, La cérémonie religieuse en la cathédrale de Soissons.
et leurs conjointes, sera célébrée
FêtedesPères, Souvenirs, en l'église suédoise,
Saint-Valentin, Messeset Christine Quénelle,
ses petits-enfants, rue Médéric, Paris (17e), son épouse,
Noces, anniversaires, le jeudi 16 février, à 10 h 30.
Lou, Suzanne, Mathilde, Benjamin et Denis Quénelle,
Communica- Officesreligieux, Florentine, Bérénice ses fils,
tionsdiverses, Prised’habit, et Samson,
Conférences, Jubilé, ont la tristesse d'annoncer
Thèses, Jubilésacerdotal, ont la profonde douleur M. et Mme Alexandre Nepveu, le décès, le 9 février 2023, de
Portesouvertes, de vous faire part du décès de M. Dominique Nepveu,
Ordination,
Distinctions, Saint-Malo. ses enfants, Alain QUÉNELLE
Vœux chevalier
Nominations, monastiques. Vancouver (Canada).
Mme Anne CÉLÉRIER Rennes. Paris. Thibault, Vladimir, Amaury, de la Légion d'honneur,
née Griffault, Maxime, diplômé de l'École spéciale
ses petits-fils, des travaux publics,
Reprise des annonces sur : Nous somme priés
ingénieur et cadre dirigeant
de vous annoncer le décès de
survenu le 11 février 2023, ont la tristesse de Total.
carnetdujour.lefigaro.fr dans sa quatre-vingt-douzième de vous faire part
M. André HUCHET
année. du rappel à Dieu de Une cérémonie sera organisée
www.dansnoscoeurs.fr le samedi 22 avril 2023,
survenu le 7 février 2023,
La cérémonie religieuse à l'âge de 87 ans. à 10 heures, en l'église
aura lieu le vendredi 17 février, Mme Isabelle NEPVEU Saint-François-Xavier,
à 10 heures, en l'église De la part de : née Personnaz, Paris (7e).
de Léognan (Gironde), Virginie, sa nièce,
Saint-Valentin suivie de l'inhumation
au cimetière de la Chartreuse,
ainsi que toute sa famille
le 11 février 2023,
benjaminquenelle@hotmail.com
denis.quenelle@hotmail.fr
et ses amis.
à Bordeaux. à l'âge de 82 ans.
Notre histoire a 15 ans... La cérémonie religieuse
Notre vie est de plus en plus sera célébrée La cérémonie religieuse
belle, je te souhaite une ce mardi 14 février, sera célébrée le jeudi 16 février,
merveilleuse Saint-Valentin à 10 heures, en l'église à 10 h 30, en l'église
Antoine et Monique Dernis,
Saint-Ideuc de Saint-Malo, Notre-Dame-de-Grâce-
Dominique et Michel
Clément suivie à 14 h 30, de l'inhumation de-Passy, Les membres de
Durand,
au cimetière de l'Est, à Rennes. 10, rue de l'Annonciation, l'association TPA
Michel et Karen Dernis,
Avec tout mon amour Paris (16e). (TotalEnergies Professeurs
Véronique Dernis,
Charlotte Marie-Pascale Dernis La famille remercie Associés)
toutes les personnes
ont la tristesse de faire part qui prendront part à sa peine. ont la profonde tristesse
Mon Michel du décès de leur sœur aînée de vous faire part du décès de
et belle-sœur, Cet avis tient lieu de faire-part.
Il paraît qu'il y a Alain QUÉNELLE
une journée officielle son fondateur
pour célébrer l'amour. Odile DERNIS Mme de Nomazy, et ancien président,
Eh bien, ajoutons la née Monique Harlé d'Ophove,
aux 364 autres journées son épouse, survenu le 9 février 2023.
que l'on célèbre tous les jours. survenu le 9 février 2023,
Joyeuse Saint-Valentin. dans sa 84e année. Le capitaine de vaisseau (c.r.) Pierre et Cécile de Nomazy, Alain Quénelle était un
Murielle Patrick Millet, Hubert et Arièle de Nomazy, professeur engagé auprès des
La messe sera célébrée son mari, Marc et Laurence de Nomazy, jeunes générations pour leur
ce mardi 14 février, à 14 h 30, Claire et Yannick Tabarly, transmettre ses connaissances,
À en l'église de Guéthary M. Philippe Millet, ses enfants, son savoir-faire et son
Pauline (Pyrénées-Atlantiques). M. et Mme Antoine Millet, expérience dans les domaines
M. et Mme Jean Millet, ses quatorze petits-enfants industriel et de l'énergie.
avec tout mon amour L'inhumation aura lieu M. et Mme Nicolas Millet, Charismatique et éternellement
en ce jour merveilleux. le mercredi 15 février, M. et Mme Antoine Fournier, font part du décès de optimiste il a entraîné avec lui,
à 16 heures, au cimetière ses enfants, au sein de TPA, de nombreux
Paul du Montparnasse, à Paris (14e). bénévoles qui contribuent
Benoit, Pierre, Amaury, Xavier Michel de NOMAZY à la formation pratique
et Emmanuel Millet, colonel d'artillerie (e.r.), des étudiants en France
Alban, Martin, Inès, Alix Saint-Cyr et dans le monde entier.
et Raphaël Millet, promotion Général Leclerc,
M. et Mme Arthur Belo, Nos pensées vont à sa famille
Anne-Sophie, Guénola, commandeur et à ses proches.
Bénédicte, Delphine, Nicolas de la Légion d'honneur,
et Brieuc Millet, commandeur
Yann, Gwendolyne et Antoine de l'ordre national du Mérite,
Millet, croix de guerre des TOE,
Marie, Clément et Romain croix de la Valeur militaire,
Fournier, condoléances
ses petits-enfants, ancien élève
du Command and General
Paul Belo, Staff College,
son arrière-petit-fils, ancien élève L'Amitié Judéo-Chrétienne
du Centre de perfectionnement de France (AJCF)
ont la tristesse aux affaires, s'associe à la peine
de vous faire part président d'honneur de la communauté juive
du rappel à Dieu de des officiers de réserve à l'occasion du décès du
spécialistes d'état-major
(ORSEM), grand rabbin
Mme Patrick MILLET René-Samuel SIRAT
née Nicole grand rabbin de France
de Trogoff du Boisguezennec, survenu à Paris, de 1981 à 1988,
le 10 février 2023. directeur de la section
d'études hébraïques et juives
le 12 février 2023, à Rennes, La cérémonie religieuse à l'Inalco de 1965 à 1992,
dans sa 81e année. sera célébrée le jeudi 16 février, acteur infatigable du dialogue
à 14 h 30, en l'église entre juifs et chrétiens,
La messe d'obsèques Saint-Thomas-d'Aquin, membre du comité
sera célébrée le jeudi 16 février, Paris (7e). d'honneur de l'AJCF
FIANÇAILLES à 10 heures, à Rennes,
en l'abbatiale Notre-Dame- Une messe du souvenir
depuis 1993,
prix AJCF 1997 remis en 1998.
en-Saint-Melaine, aura lieu le samedi 18 février,
Annoncez-les suivie de l'inhumation à 11 heures, L'AJCF lui exprime sa profonde
dans le Carnet du Jour au cimetière de Locquénolé en l'église Saint-Cornély, reconnaissance.
(Finistère), à 15 heures. à Carnac (Morbihan).
Téléphone : 01 56 52 27 27 « Que son âme reste attachée
carnetdujour@media.figaro.fr 142, rue d'Antrain, Ni fleurs ni couronnes, au faisceau des vivants. »
35700 Rennes. des prières et des messes. Samuel 1, 25, 29.
 mardi 14 février 2023 le figaro
12 champs libres
récit
Guillaume Perrault
£@GuilPerrault
L
e film Vaincre ou mourir, actuellement
dans les salles, qui décrit les guerres de
Vendée du point de vue des révoltés et
en dépeignant le chef le plus flamboyant
de « l’armée catholique et royale »,
Charette, a suscité des attaques acrimo-
nieuses mais a aussi rencontré son pu-
blic. En invitant à affronter des faits qui dérangent
toujours, les auteurs de ce film auront réalisé une
œuvre utile et méritoire. L’insurrection vendéenne,
de nature populaire, on l’a vu (nos éditions d’hier),
naît en mars 1793 comme une révolte contre la
conscription. Au refus de quitter leurs foyers pour
rejoindre les armées de la Révolution qui a déclaré la
guerre aux principales monarchies européennes se
sont ajoutés, pour les insurgés, des motifs religieux et
souvent sociaux. Après les premières victoires des
« blancs », Barère, membre du Comité de salut pu-
blic, annonce le 1er août aux députés que le Comité,
« suivant votre autorisation, a préparé des mesures qui
tendent à exterminer cette race rebelle ». Il faut, expli-
que l’orateur, ravager la Vendée par une politique de
terre brûlée. Toutefois, « les femmes, les enfants et les
vieillards seront conduits dans l’intérieur », avait pré-
cisé le Comité cinq jours plus tôt.
Mais, après la défaite d’une troupe d’élite face aux
insurgés, le 19 septembre, la rhétorique purificatrice
et, il est permis de le dire, exterminatrice, de Barère
n’a plus de limites. Le 1er octobre, à la Convention, Ba-
rère dépeint, une fois encore, un gigantesque complot
dont la Vendée serait le cœur, alors que nombre
d’autres villes du pays se sont elles aussi révoltées, les
mois précédents, contre Paris. « C’est à la Vendée que
se rapportent les vœux coupables de Marseille, la vénali-
té honteuse de Toulon, les cris rebelles des Lyonnais, les
mouvements de l’Ardèche, les troubles de la Lozère, les
conspirations de l’Eure et du Calvados, les espérances de
la Sarthe et de la Mayenne, le mauvais esprit d’Angers et
les sourdes agitations de quelques départements de l’an-
cienne Bretagne. » Barère poursuit : « Détruisez la Ven-
dée, Valenciennes et Condé ne sont plus au pouvoir de
l’Autrichien. Détruisez la Vendée, l’Anglais ne s’occupe-
ra plus de Dunkerque. Détruisez la Vendée, et le Rhin
sera délivré des Prussiens. (…) La Vendée, et encore la
Vendée, voilà le charbon politique qui dévore le cœur de
la République française. »
Le 17 octobre 1793 : l’armée paysanne est défaite au
nord de Cholet. À la vue de leur chef blessé à mort, le
marquis de Bonchamps, les Vendéens se débandent.
L’agonisant arrache à ses camarades la promesse de ne
pas tuer, par vengeance, les 5 000 prisonniers républi-
cains qu’ils traînent de longue date à leur suite. Le fils
d’un de ces miraculés, David d’Angers, construira plus
tard un cénotaphe en l’honneur du général vendéen
en l’abbatiale de Saint-Florent-le-Vieil.
Climat de déshumanisation de l’ennemi
Privée de la plupart de ses meilleurs chefs, effrayée
par la démonstration de la supériorité de l’armement
des républicains, l’armée paysanne est prise de pani-
que. Ces insurgés, souvent accompagnés de leurs
femmes et enfants (estimés au total à 80 000 person-
nes au moins) quittent soudain le refuge du bocage
malgré les objurgations de Charette. Ils passent au
nord de la Loire dans l’espoir de parvenir à marche
forcée à Granville, en Normandie, où une flotte an-
glaise est censée mouiller au large. Ce qu’on a appelé
« la virée de Galerne » commence. Les Vendéens, ar-
rivés à Granville après un périple de 150 kilomètres,
ne parviennent pas à prendre le port (14 novembre).
Épuisés, minés par la dysenterie, contraints de re-
prendre la route en sens inverse jusqu’à Laval, ils
prennent figure de civils errants et finissent écrasés
au Mans (12-13 décembre).
Là se livre un massacre plus qu’une bataille. Une
partie importante des Vendéennes sont violées et
tuées, malgré les efforts du général républicain Mar-
ceau pour les protéger. On a tant répété aux soldats
« bleus » que les Vendéens, hommes et femmes,
étaient des bêtes fauves et des monstres qu’il s’avère
impossible de rétablir la discipline militaire. On
compte 2 000 à 5 000 tués parmi les paysans, et 10 000
sur la route entre Le Mans et Laval. Les pertes des ré-
publicains sont négligeables.
Au Mans, la mémoire locale avait refoulé la tuerie,
jusqu’à l’exhumation d’un charnier. Selon le rapport
de l’Institut national de recherches archéologiques
préventives, ce charnier compte 70 hommes, 30 fem-
mes, 28 adultes au sexe impossible à préciser, et
23 adolescents ou enfants (le plus jeune avait 3 à 4 ans).
Les coups ont été majoritairement portés par l’arrière,
assénés à des personnes en train de fuir, explique l’his-
torien Alain Gérard dans un ouvrage crucial, Vendée :
les Archives de l’extermination (Centre vendéen de re-
cherches historiques, 2013). L’historien examine le cas
no 514 de la fosse 5. Il s’agit d’un adolescent dont les
cartilages disent qu’il n’a pas achevé sa croissance.
L’arrière du crâne témoigne de l’acharnement mis à le
tuer (huit coups de sabre) et deux balles dans le bassin
et le crâne, peut-être le coup de grâce.
L’insurrection expire après la destruction des der-
niers vestiges de « l’armée catholique et royale » à
Parthenay, le 23 décembre 1793. Les vaincus se ren-
dent en masse. La plupart sont tués sur-le-champ.
Plus de 1 200 prisonniers « blancs » seront ainsi fu-
sillés à Noirmoutier le mois suivant. Écœuré, un jeune
volontaire « bleu » de 20 ans, témoin de la grâce ac-
cordée aux prisonniers républicains par Bonchamps,
écrira : « La reconnaissance, cette mémoire du cœur,
était un crime à leurs yeux (les Montagnards) lors-
qu’elle avait pour objet un ennemi de leur système de
gouvernement. » D’autres prisonniers sont remis à la
A
justice révolutionnaire qui, les mois suivants, les
condamne à mort et les fait exécuter.
Vendée : après la guerre,
les massacres « à froid »
Le film « Vaincre ou
mourir », de Paul Mignot
et Vincent Mottez,
a heurté ce qui demeure
un tabou dans une partie
de l’opinion : dépeindre
les guerres de Vendée du
point de vue des insurgés.
Le film, pourtant, rend
compte fidèlement
des faits, plaie béante
dans la mémoire
française. Deuxième volet
de notre grand récit
historique en trois parties.
Vous devez également prononcer
d’avance sur le sort des femmes
et des enfants que je rencontrerai
dans ce pays révolté
le général turreau, commandant en chef de l’armée de l’ouest
A-t-on alors tanné des peaux humaines ou s’agit-il
d’une légende postérieure ? Si l’on en croit des témoi-
gnages concordants figurant aux archives, recueillis
après la chute de Robespierre, lors du démantèle-
ment de l’arsenal terroriste et la mise en cause de cer-
tains de ses acteurs, témoignages qui ont convaincu
des historiens de sensibilités diverses, le fait est isolé,
mais véridique. À Angers, un officier de santé aurait
fait écorcher une trentaine de fusillés et en aurait en-
voyé la peau chez des tanneurs, qui refusèrent de les
travailler, sauf un, qui collabora sous la menace. Des
culottes et pantalons destinés à des officiers auraient
ainsi été confectionnés. Un fait, répétons-le, isolé,
démesurément grossi après coup dans le cadre de la
guerre des mémoires des « blancs » et « bleus » qui
sévit depuis deux siècles, mais qu’on est cependant
en droit de considérer comme un indice du climat de
déshumanisation de l’ennemi qui régnait fin 1793,
temps de violence pure et d’arbitraire.
Certes, à l’époque, quelques chefs, Charette, La
Rochejaquelein et Stofflet, entourés d’une poignée de
fidèles, font encore le coup de feu, échappent tou-
jours à leurs poursuivants, et se cachent. Mais la po-
pulation, elle, traumatisée par les massacres de civils
perpétrés par les « bleus » dans la « Vendée militai-
re » reconquise à partir d’octobre 1793 (des villages
entiers ont été passés au fil de l’épée), se terre.
Un semblant de calme revient dans la région. Toute
résistance significative a cessé. Les administrateurs
révolutionnaires reprennent possession des villes de
Vendée qu’ils avaient dû fuir, reconstituent leurs
gardes nationaux et, parfois, font arrêter et livrer à la
justice révolutionnaire les sympathisants supposés
des anciens insurgés. Les troupes républicaines s’ins-
tallent. La guerre civile est terminée.
Punir, purifier, remodeler la Vendée
Cependant, la Convention ne marque aucune inten-
tion de pacifier la Vendée et de panser les plaies. Il
s’agit, pour les révolutionnaires, selon leurs propres
termes, de la punir, la purifier, la remodeler. Dès le
7 novembre, à la tribune, Merlin de Thionville salue la
victoire totale en Vendée mais lance : « Il faut se hâter
qu’elle ne renaisse de sa cendre. » Le député préconise
de rebaptiser la Vendée « le département Vengé » - sa
proposition sera adoptée – et de le repeupler avec des
cultivateurs pauvres venus de toute la France. Un dé-
puté du département, Fayau déplore : « On n’a point
encore incendié dans la Vendée : la première mesure à
prendre est d’y envoyer une armée incendiaire. Il faut
que pendant un an nul homme, nul animal, ne trouve de
subsistances sur ce sol. »
C’est dans ce contexte que le Comité de salut public
nomme, le 28 novembre 1793, un nouveau comman-
dant en chef de l’armée de l’Ouest, le général Tur-
reau. Arrivé sur place, Turreau réclame des instruc-
tions et n’en obtient pas. Jugeant que c’est le vœu de
la Convention, il conçoit alors un plan qu’il soumet au
Comité de salut public, consistant à faire traverser la
»
Active MuseuM/Le PictoriuM/MAxPPP
le général louis-marie
Turreau, commandant
en chef de l’armée de l’Ouest.
Détail d’une peinture
attribuée à louis hersent.
Vendée par douze colonnes « pour assurer l’anéantis-
sement des rebelles » et repeupler ensuite avec des ré-
publicains. Mais, très soucieux de se couvrir (à l’épo-
que, tout général républicain, surveillé par des
députés en mission, joue sa tête), il se présente com-
me l’exécutant des décisions qu’il appartient à la
Convention d’assumer. Aussi Turreau réclame-t-il
comme une « nécessité absolue », le 19 décembre,
une convocation à Paris de tous les généraux en chef,
où chacun « recevra l’ordre qu’il doit suivre ». Aucun
indice de cette réunion ne nous est parvenu.
Projet de destruction totale
Turreau écrit alors plusieurs courriers au ministre de
la Guerre, entre le 26 décembre 1793 et le 15 janvier
1794, sans réponse. Livré à lui-même depuis un mois,
le nouveau général en chef de l’armée de l’Ouest
« doit admettre qu’il ne recevra aucun ordre écrit du
Comité de salut public », explique l’historien Alain
Gérard. L’officier supérieur hésite. Mais serait-il sans
risque pour lui de ne rien faire ?
Le 16 janvier 1794, il finit par décider d’entamer de
sa propre initiative la destruction totale de la popula-
tion civile, conformément au projet qu’il a soumis en
termes clairs et précis au Comité un mois plus tôt, et
en harmonie avec les projets identiques assumés par
écrit par les députés en mission Francastel et Carrier.
À défaut d’un ordre écrit de Paris, Turreau écrit aux
représentants en mission pour s’assurer au moins de
leur assentiment explicite. Il annonce qu’il va incen-
dier toute la Vendée, et, la mise à mort de tous les
hommes allant de soi, le général en chef les met en de-
meure de façon très franche : « Vous devez également
prononcer d’avance sur le sort des femmes et des en-
fants que je rencontrerai dans ce pays révolté. S’il faut
les passer tous au fil de l’épée, je ne puis exécuter une
pareille mesure sans un arrêté qui mettre à couvert ma
responsabilité. » Il ne reçoit aucune réponse. Jugeant
avoir pris toutes les précautions possibles, Turreau es-
time moins risqué pour lui d’agir que de continuer à
ne rien faire. Après tout, qui ne dit mot consent, pour-
ra-t-il objecter en cas de critique ultérieure.
Conformément à son plan, douze colonnes ga-
gnent leurs positions et s’ébranlent le 21 janvier 1794
- jour anniversaire de l’exécution de Louis XVI un an
plus tôt- depuis Chalonnes, Saint-Florent, Brissac,
Doué, Argenton, Parthenay et Saint-Maixent. En ap-
plication des ordres reçus, officiers et soldats incen-
dient méthodiquement le pays et tuent systémati-
quement les hommes qu’ils rencontrent, y compris,
dans une partie des cas, les partisans locaux de la Ré-
volution. Des officiers municipaux, venus à eux en
arborant leur écharpe tricolore de maire, sont fusillés
(on les suspecte de convictions insincères ou de cher-
cher à « couvrir » leurs parents compromis).
Les femmes sont, en grande partie, massacrées
(fréquemment après avoir été violées, le cas échéant
de façon collective). Les enfants souvent tués. Un
agent en chef des subsistances militaires, Jean-Bap-
tiste Beaudesson, qui a pour mission de pénétrer
dans les métairies pour confisquer les denrées qui s’y
trouveraient encore, décrira ce qu’il a vu : « Des
pères, des mères, des enfants de tout âge et de tout
sexe, baignés dans leur sang, nus, et dans des postures
que l’âme la plus féroce ne pourrait envisager sans
frémissement. » ■
Retrouvez demain la suite de notre grand récit
historique.

La transition écologique
sera-t-elle supportable
sur le plan économique ?
Anne de Guigné
£@adeguigne
politique économique La répé-
tition d’étés caniculaires ces dernières
années a permis à chacun d’expéri-
menter le réchauffement climatique.
En Europe, un large consensus a ainsi
émergé sur le fait que les activités hu-
maines influent sur ce dérèglement, et
qu’il est nécessaire de rectifier le tir.
Bruxelles décline cette aspiration en un
objectif ambitieux : une réduction d’au
moins 55 % des émissions nettes de gaz
à effet de serre en 2030 par rapport à
1990. Ces gaz (dioxyde de carbone, mé-
thane, protoxyde d’azote…) qui retien-
nent une partie de la chaleur reçue par
le soleil dans l’atmosphère sont massi-
vement générés par la combustion
d’énergie fossile, certains procédés in-
dustriels ou encore l’élevage intensif.
En France, les activités les plus émet-
trices sont, par ordre décroissant, selon
l’Insee: le transport routier, l’agricul-
ture, l’industrie manufacturière et la
construction, l’usage des bâtiments, les
industries de l’énergie…
Une addition de petits efforts indivi-
duels ne suffira donc pas à réduire de
manière substantielle les émissions. Un
changement de tendance suppose une
réorganisation drastique de l’activité
humaine. Jusqu’à présent, sur ce sujet,
l’essentiel de la réflexion économique
tournait autour de deux axes : la fixa-
tion du bon prix du carbone permettant
une pondération juste entre le bien-
être de la génération présente et celui
des générations futures ; et une ré-
flexion sur les régulations à adopter :
interdiction de la voiture thermique,
nouvelles normes de construction… Ces
deux sujets étant considérés dans une
perspective de moyen à long terme.
Pourtant, il paraît aujourd’hui évident
que les conséquences économiques de
la transition écologique ne vont pas
attendre des décennies pour se mani-
fester. Elles vont très rapidement
bousculer la politique économique en
provoquant un choc d’offre, une aug-
mentation de l’inflation et des inéga-
lités…. La facture s’annonce dantesque.
La puissance publique devra, pour y
faire face, revoir ses modes d’interven-
tion, en s’appuyant sur l’innovation,
afin de bâtir une alternative crédible à
la décroissance. Un concept qui suscite
un élan enthousiaste en France, essen-
tiellement d’ailleurs dans les milieux
aisés, mais dont l’application plonge-
rait une bonne partie de la population
dans la pauvreté.
❙ un choc d’offre
massif
Le coût de la transition fait régulière-
ment l’objet de chiffrages. Selon Chris-
tian Gollier, économiste à la Toulouse
School of Economics (TSE) et coauteur
des quatrième et cinquième rapports
du groupe d’experts intergouverne-
mental sur l’évolution du climat (Giec),
il s’élève à plus de 50 milliards par an
pour la France. Cette estimation rejoint
les calculs effectués par l’institut Rexe-
code pour le Medef. Pour ces écono-
mistes, la décarbonation de l’économie
nécessitera d’investir entre 2,1 et
2,9 points de produit intérieur brut
(PIB) supplémentaire annuels en 2030
soit de 58 à 80 milliards d’euros. La
facture atteindrait 31 milliards à
43 milliards d’euros par an pour les
entreprises et entre 27 milliards et
37 milliards d’euros par an pour les
particuliers. Un fardeau difficile à sup-
porter pour les groupes à faible renta-
bilité et pour les ménages peu aisés,
mais qui dépasse aussi largement les
capacités de la sphère publique.
L’économiste Jean Pisani-Ferry, prési-
dent de l’Institut de l’économie pour le
climat, compare ce qui attend l’écono-
mie à un violent choc d’offre négatif. Si
on valorise le prix du carbone à 75 dol-
lars la tonne pour 2030, une valeur qui
n’a rien d’extravagant, le palier à fran-
chir représente environ 3 % du PIB
mondial. Jean Pisani-Ferry a été chargé
en septembre dernier par Élisabeth
Des dizaines
de milliards d’euros
devront être
dépensés chaque
année, en France,
pour réussir
la décarbonation
de l’économie.
Les conséquences
sur la dette, l’emploi
ou encore l’inflation
s’annoncent
drastiques.
Borne d’une mission pour évaluer les
impacts macroéconomiques de la tran-
sition climatique. Présentant ses axes
de recherche avec Selma Mahfouz, de
l’inspection générale des finances, il
expliquait il y a quelques semaines que
la transition revenait, « conceptuel-
lement, à mettre un prix (explicite ou
implicite) sur une ressource (un climat
stable) qui était auparavant disponible à
coût nul ». La sortie des énergies fossiles
supposera à la fois de financer des in-
vestissements massifs mais aussi, ce qui
n’est pas plus aisé, de détruire du ca-
pital existant. Un double mouvement
qui devrait soutenir l’inflation pendant
de longues années tout en tirant les
salaires moyens et donc le pouvoir
d’achat à la baisse.
❙del’innovation
au secours
l’industrie
L’industrie apparaît aujourd’hui à la
pointe de ce mouvement de décarbona-
tion. La pression s’accélère, comme le
secteur l’automobile l’illustre bien : il y
a quelques années, les constructeurs
étaient priés de réduire leurs émissions.
Il leur faut désormais changer de pro-
duction et passer à l’électrique. L’État
accompagne cet effort. « 6,2 milliards
d’euros de fonds publics ont déjà été
fléchés pour aider l’industrie à financer
ses projets de décarbonation non ren-
tables. 5 milliards supplémentaires pour-
ront être alloués en contrepartie de l’ac-
célération des efforts demandés par le
président de la République en novembre
dernier aux industriels, détaille ainsi
Thomas Courbe, le patron de la direc-
tion générale des entreprises à Bercy. Au
total cela représente environ un tiers des
financements nécessaires à la réalisation
des projets financés ». Demeurent donc
plus de 20 milliards d’euros à fournir par
les industriels, pour les seuls projets non
rentables, un effort colossal d’autant
qu’il ne se traduit par aucune augmen-
tation des capacités de production.
mardi 14 février 2023
champs libres
le figaro
ÉCONOMIE 13
1 Les émissions projetées sont
supérieures aux objectifs
de neutralité carbone en France
LES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE ET LA TRAJECTOIRE
DE LA SNBC (STRATÉGIE NATIONALE BAS-CARBONE)
Émissions brutes en millions de tonnes équivalent CO2
2023
600 Émissions historiques
500
L’équation du verdissement de l’appa-
reil industriel a ainsi été posée. Les Prévisions
sujets de transformation des transports
ou de rénovation des bâtiments don-
400 - 20 % d’émissions
nent davantage de fil à retordre aux
services de l’État. « Dans l’industrie,
300
contrairement à d’autres secteurs, la
grande concentration des émissions fa- 200
Objectif
cilite la planification des actions de
décarbonation : les 50 premiers sites 100
SNBC
représentent plus de la moitié (55 %) des
émissions totales de l’industrie », précise
0
en effet Thomas Courbe.
Tous les regards sont donc tournés vers
1990 1995 2000 2005 2010 2015 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050
l’innovation, qui tend à se verdir depuis
quelques années sous l’effet de poli-
La SNBC définit une trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu’à 2050 et fixe
des objectifs à court-moyen terme : les budgets carbone. Elle a deux ambitions : atteindre la neutralité
tiques de soutien spécifiques, car,
comme l’ont démontré les travaux de
carbone à l’horizon 2050 et réduire l’empreinte carbone de la consommation des Français.
Philippe Aghion, le progrès technique
peut être orienté. La productivité appa- 2 Les investissements nécessaires
rente des activités traditionnelles pol-
luantes s’explique ainsi par le fait que
dans les sept principaux secteurs
pendant des décennies des brevets et
des innovations ont été accumulés dans
émetteurs de CO2 pour atteindre
ces secteurs. Le déploiement de l’inno-
vation dans le vert a déjà commencé à
la neutralité carbone
changer le paysage du capitalisme, INVESTISSEMENTS Usage des terres Déchets
comme la valorisation boursière des SUPPLÉMENTAIRES
entreprises énergétiques dans le renou- ANNUELS MOYENS 1,8
velable le démontre bien. Dans ce 1,7
EN FRANCE Industrie
domaine, la France n’a pas à rougir. Se- ET CUMULÉS 4,9
lon l’Agence internationale de l’éner- POUR LA PÉRIODE
gie, grâce au CEA, à l’IFP Énergies et au 2023-2050
CNRS, Paris se classe en tête pour les Répartition en %
dépôts de brevets liés aux technologies Bâtiment
bas carbone. Transport
34,1 31,5
❙ une
transition
inégalitaire
L’augmentation du prix du carbone, les
réglementations et les incitations au
verdissement de l’innovation per- 0,8 Énergie
mettent donc peu à peu de contraindre 11,9
le marché à s’adapter aux enjeux de la Agriculture
transition écologique. Comme nous
l’avons vu, cette adaptation sera dou-
loureuse. Elle mobilisera massivement
les finances publiques, au prix d’une
3 Le coût mondial
augmentation de la dette, ou plus vrai- du verdissement de l'économie
semblablement, dans le cas français, de
INVESTISSEMENTS ÉNERGÉTIQUES MONDIAUX « BRUNS » ET « VERTS »
l’abandon de certaines dépenses alter-
SELON DIFFÉRENTS SCÉNARIOS, en milliards de dollars
natives. Du côté des entreprises, de
nombreux petits acteurs ne parvien- INVESTISSEMENTS...
dront sans doute pas à prendre le tour- ... « BRUNS » Charbon Gaz naturel Pétrole
nant de la décarbonation. Si les actions
sont bien calibrées, la plupart des ... « VERTS » Électricité et combustibles Efficacité et usages
grands groupes devraient néanmoins 3 SCÉNARIOS
réussir à sauter l’obstacle au prix d’une Plus de 6 000
baisse temporaire de leur rentabilité, milliards de dollars
qui sera répercutée sur les actionnaires, d'investissements Maintien Respect Objectif
les clients et les salariés… seront nécessaires des politiques des accords de neutralité
Une période chahutée s’ouvre donc. Et pour que les accords publiques de Paris* carbone
le plus délicat pour la puissance pu- de Paris soient
respectés actuelles en 2050
blique sera d’embarquer dans cette
transition les plus modestes. Les habi-
8 000
tants des zones rurales ou périurbaines
risquent en effet de payer au prix fort ce
combat pour le climat. On le constate
très concrètement dès aujourd’hui. Les 6 000
aides publiques pour l’achat de véhi-
cules propres ou la rénovation thermi-
que des habitations ne suffisent pas à
compenser les efforts des ménages les 4 000
moins aisés s’ils doivent renoncer à leur
vieille voiture ou leur passoire thermi-
que. Les polémiques autour des zones à
faibles émissions (ZFE), instaurées dans 2 000
une dizaine de villes depuis le début de
l’année, qui accroissent les rentes des
détenteurs de logements en centre-ville 0
et maintiennent les habitants des zones 2021 2025 2030 2025 2030 2025 2030
suburbaines et rurales à distance, s’ins-
crivent dans cette tension. * L'accord de Paris a été adopté en décembre 2015, son objectif est de limiter le réchauffement climatique
à un niveau bien inférieur à 2, de préférence à 1,5 degré Celsius, par rapport au niveau préindustriel.
La transition écologique creusera aussi
les inégalités sur le terrain de l’emploi.
Le choc pourrait même s’apparenter à
celui qu’avait connu le pays lors de la
4 Les entreprises innovent
fermeture des sites sidérurgiques. Cer-
taines zones industrielles, qui étaient
dans la décarbonation
structurées notamment autour des PART DES BREVETS RELATIFS À LA RÉDUCTION OU À LA CAPTURE DES ÉMISSIONS
sous-traitants automobiles, peineront SUR L'ENSEMBLE DES BREVETS DÉPOSÉS PAR LES ENTREPRISES DES PAYS DE L'OCDE
à se reconvertir, obstruant l’horizon En %
professionnel des salariés concernés. Échec de la conférence 2015 :
Pour l’instant, l’État semble considérer 25 %
avec un certain détachement cette va- de Copenhague fin 2009 Accords de Paris
gue qui s’annonce. Des mesures sont 20 %
prises bien sûr de ci, de là, comme les
programmes d’aides au verdissement 15 %
de l’industrie. Manque toutefois une vi-
sion macroéconomique d’ensemble, 10 %
notamment en ce qui concerne l’avenir
5%
des salariés dont les entreprises sont
destinées à péricliter. Le travail de Jean 0%
Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, attendu 2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 2019
A
dans les prochaines semaines, suscitera
Sources : AIE (2022), World Energy Outlook 2022, OCDE, Rexecode France Stratégie Infographie
peut-être cette prise de conscience. ■
 mardi 14 février 2023 le figaro
14 champs libres
Débats
+ » Lire aussi pages 2 et 3
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
Zadifier le Parlement, ce serait ruiner
la démocratie !
J
’ai le droit, alors que
«
je viens dans un débat
qui passionne toutes
les consciences dire
toute ma pensée,
j’ai le droit de demander
qu’on n’en trouble pas l’expression
par des interruptions continuelles
et systématiques », s’exclamait
Jean Jaurès le 22 janvier 1898.
En pleine affaire Dreyfus, couvert
d’insultes, le chef de file de l’extrême
gauche réclamait comme un droit
et une sauvegarde le respect de
l’orateur. Peu de temps après, il était
boxé à la tribune par un royaliste
et la séance finissait en bagarre
générale…
Cet épisode nous montre
la violence des débats d’autrefois.
Il nous rappelle aussi qu’à cette
époque, les violences verbales
ou physiques venaient d’abord
des ennemis de la République,
qui jugeaient illégitimes et dérisoires
les cadres du débat parlementaire.
Entre républicains au contraire,
on avait le goût de la discussion
et le même Jaurès, bousculé
spirituellement par Clemenceau,
savait lui répliquer
avec brio,
yaëL BRauN-PiveT le 19 juin 1906 :
« Messieurs,
alors que le député insoumis Thomas Portes je monte à cette
vient d’être exclu temporairement de l’hémicycle tribune tout hérissé
pour avoir posé sur une photo le pied sur un ballon des flèches
qu’une main habile
représentant la tête du ministre du Travail, et toujours jeune
Olivier Dussopt, et que son groupe multiplie m’a décochées.
les obstructions parlementaires, Je n’essayerai pas
la présidente de l’assemblée nationale de les arracher
en appelle à la bonne tenue des débats. de moi
Les Insoumis mettraient-ils la Terreur
à l’ordre du jour s’ils le pouvaient ?
D
e Sandrine Rousseau
à Jean-Luc Mélenchon,
en passant par Alexis
Corbière, François
Ruffin, Raquel Garrido
ou l’impayable Louis
Boyard, les Insoumis et leurs inféodés
socialistes aiment à croire qu’ils sont
la moderne réincarnation
des jacobins des années chaudes
de la Révolution française.
Ils se travestissent volontiers
en Robespierre, Saint-Just ou
Couthon (membre du gouvernement
révolutionnaire qui est un des héros
de l’ouvrage Jacobins ! de
M. Corbière) et actualisent – du moins
le pensent-ils - leurs promesses
d’un homme nouveau. On serait
portés à en sourire si nos médias et,
hélas, bien des citoyens, ne prenaient
dessins fabien clairefond
pour des lanternes robespierristes
ce qui ne sont que des vessies
populistes, reprise brouillonne
d’interprétations de la Terreur
par la gauche, de la doxa marxiste-
léniniste et d’un nuage du trotskisme
de leur jeunesse.
Plus ils « déparlent »,
plus on les écoute.
ThieRRy LeNTz L’un veut
supprimer
Les insoumis aiment se comparer aux jacobins. (comment ?)
Pour l’historien, qui rappelle les massacres les milliardaires,
et les exécutions liés à la Terreur, les députés l’autre aime que
l’on veuille
mélenchonistes, par leurs invectives
« décapiter Macron
et leurs menaces, figurent en réalité davantage comme on l’a fait
ceux qu’on appelait les « exagérés » pour Louis XVI »,
ou « hébertistes » pendant la Révolution. un troisième joue
A
et de les retourner à mon redoutable
contradicteur. D’abord, à ce jeu
des polémiques et des épigrammes,
je serais sans doute vaincu. Puis,
j’ai un souci plus haut que notre
controverse : c’est de dégager, moi
aussi, les conditions dans lesquelles l’anarchiste Vaillant, et il entra dans
pourra s’exercer ici une action
républicaine de réformes sociales. »
« Tout le génie du parlementarisme
consiste à organiser
la circulation de la parole,
pour que des adversaires, réunis
dans un même lieu, se parlent
et s’écoutent dans le respect mutuel
On ne peut mieux dire la stérilité ni sans une certaine correction.
des invectives : c’est bien plutôt
d’arguments, de projets, de visions
que doit s’armer l’orateur.
L’attaque ad hominem, l’injure,
les claquements de pupitre ne font
pas une politique et n’expriment que
le désarroi de ceux qui ne peuvent
exposer une alternative.
À la Convention, les représentants du café du commerce sans doute,
du peuple siégeaient armés,
tant le danger était présent, et mon
prédécesseur Boissy d’Anglas, en
1795, se leva du fauteuil présidentiel
pour saluer la tête du député Féraud, de quinze jours ont été prononcées
qu’on lui présenta au bout
d’une pique. Qui veut revoir cela ?
En 1880, mon prédécesseur
Gambetta fit appel à la troupe
pour saisir le député royaliste
Baudry d’Asson, si animé contre
la République qu’il le fit enfermer
vingt-quatre heures au « petit
au football avec l’effigie de la tête
de M. Dussopt
(ce qui, avouons-le ressemble plus
aux pratiques de Daech qu’à celles
des jacobins), un autre encore voit
dans une manifestation contre
les retraites une nouvelle « marche
des femmes » d’octobre 1789.
Tous estiment que leur parti est
le seul à représenter le peuple. Et ce
peuple n’a raison que parce qu’eux
seuls savent interpréter ses désirs et,
le jour venu, sauront les mettre
en action. Détenant la vérité
et la vertu, même lorsqu’ils réservent
une standing ovation
à M. Quatennens,
ils rejettent hors du débat, et
peut-être demain hors de l’humanité
nouvelle, ceux qui ne pensent pas
comme eux. Ils estiment, comme
leurs devanciers, qu’il ne faut
« pas de liberté pour les ennemis
de la liberté », dans la presse,
l’audiovisuel et même désormais
le cinéma. Mettraient-ils la Terreur
à l’ordre du jour s’ils le pouvaient ?
On n’est pas si sûr que la réponse soit
négative lorsqu’on entend les propos
glaçants de Mme Rousseau,
les harangues singulières
de M. Mélenchon ou les désolantes
saillies de M. Boyard.
Loin d’être les robespierristes
qu’ils croient, nos Nupistes figurent
en réalité ceux qu’on appelait
les « exagérés » ou « hébertistes »
pendant la Révolution. Leur leader,
Jacques-René Hébert, était
un pamphlétaire débraillé et vulgaire
UN COUP DE POUCE POUR ANTICIPER
VOTRE JOURNÉE SUR
local », l’ancienne cellule ni la tête de l’adversaire un jouet.
de dégrisement du Palais Bourbon. Je souhaite un parlementarisme
Qui voudrait rétablir cela ? responsable, dans lequel le droit
En 1893, mon prédécesseur Charles d’amendement est regardé comme
Dupuy vit même exploser une une conquête démocratique
bombe, lancée dans l’Hémicycle par qu’on ne peut dégrader pour
le simple plaisir de s’entendre parler.
l’histoire pour cette parole sobre Un parlementarisme adulte,
et nette : « Messieurs, la séance dans lequel on légifère pour préparer
continue. » l’avenir et non pour briller quelques
C’était signifier secondes sur les réseaux sociaux.
qu’aucune forme
de violence ne
devait empêcher
le débat
Un parlementarisme respectueux
des personnes enfin, qui ne désigne
pas de victimes expiatoires
à la vindicte populaire.
démocratique On sait par quel drame finit Jaurès.
entre élus Lui-même l’avait pressenti
» de la nation,
qui ne peut avoir
lieu sans ordre
d’ailleurs, dès 1913, quand il dénonça
en séance ce « perpétuel appel
à l’assassinat » dont il faisait l’objet.
Comme lui, refusons « de couvrir
Tout le génie du parlementarisme, de soupçons et d’injures devant
en effet, consiste à organiser le pays, de proche en proche et par
la circulation de la parole, une sorte de contagion de calomnies
pour que des adversaires, réunis et d’outrages », ceux qui ont
dans un même lieu, se parlent le malheur de penser autrement.
et s’écoutent dans le respect mutuel. Zadifier le Parlement, ce serait
Cette forme de débat, codifiée, ruiner la démocratie, tout
ritualisée, n’a pas la spontanéité simplement. Ne laissons pas
la violence régir les rapports
mais elle constitue un véritable politiques. La langue française
acquis de civilisation auquel il serait nous donne assez de ressources
irresponsable de renoncer.
Déjà deux exclusions temporaires
pour débattre avec verve et vigueur,
mais avec tenue et retenue aussi ;
à cet exercice, il n’est d’ailleurs pas
depuis le début de la législature. interdit d’avoir du talent.
C’est trop et, plutôt que de devoir Soyons dignes de Jaurès et de
multiplier les sanctions de ce genre, Clemenceau : sachons nous opposer
j’en appelle maintenant à la raison. avec esprit, en beau langage
Comme tous les Français, et dans les règles de l’art, sans appel
je souhaite un parlementarisme au meurtre et sans invectives.
civilisé, dans lequel la couleur Ainsi serons-nous pleinement
de peau n’est pas un argument, républicains. La séance continue !
(mais là n’est pas toujours le point à la Terreur, ses 16 000 exécutions,
commun), patron notamment ses massacres sans nom (pas seulement
du journal Le Père Duchesne. en Vendée) et la perversion des idées
Sa feuille, qu’il rédigeait dans les plus généreuses.
la fièvre de ses frustrations, se disait Ne nous y trompons pas, avec
elle-même « bougrement en colère », ces slogans et cette grossière synthèse
ce qui explique sans doute que le mot de ce que fut le jacobinisme pluriel,
« foutre ! » ponctuait quasiment tous nos Robespierre au petit pied croient
les paragraphes. Chaque adversaire vraiment qu’ils sont sur le vrai
chemin. Pendant
ce temps, nous
« Ne nous y trompons pas, avec
ces slogans et cette grossière
les laissons faire,
sans réagir
ni les combattre
synthèse de ce que fut le jacobinisme comme
pluriel, nos Robespierre au petit pied ils le mériteraient,
croient vraiment qu’ils sont sur le vrai implacablement.
Les modérés,
chemin. Pendant ce temps, les libéraux
nous les laissons faire, sans réagir ni et même leurs
les combattre comme ils le mériteraient, alliés de gauche
somnolent, les
implacablement » laissent aligner
leurs billevesées.
avait droit à sa bordée quotidienne Ils se disent sans doute que,
d’insultes ; chaque catégorie jugée vraiment, personne
modérée se voyait promettre ne peut y croire. Que, tôt ou tard,
« la cravate (au bourreau) Sanson » ; la raison reprendra le dessus,
la moindre tiédeur était une preuve en même temps que les réalités
d’incivisme. Aucun programme, s’imposeront. Inutile donc
pas de projets concrets, rien que de combattre de telles sornettes :
de l’exaspération, des invectives le système représentatif,
et des menaces autour de la certitude la Constitution, l’action publique
autoproclamée de parler au nom (même contestée) auront toujours
du peuple. Avant d’être lui-même plus de noblesse et l’oreille du peuple
conduit à la guillotine sur ordre de que les excitations de tribunes
Robespierre et ses amis, Hébert avait et de places du marché.
tout de même contribué à aveugler Qu’ils relisent Montesquieu :
l’opinion et à donner à la Révolution « L’oppression commence toujours
ce tour absurde et cruel qui conduisit par le sommeil. »

chronique
Renaud Girard Les bombes tuent, les sanctions aussi
L
rgirard@lefigaro.fr
e lundi 6 février 2023, deux
heures avant l’aube, un séisme
très puissant frappait le sud
de la Turquie et le nord
de la Syrie. Les secours
internationaux se sont, très
heureusement, précipités vers la Turquie,
et notamment vers Antakya (Antioche),
où ils ont pu sauver de nombreuses vies.
Le même phénomène ne s’est hélas pas
produit pour Alep, la grande ville du nord
de la Syrie. L’isolement forcé du pays,
provoqué par les sanctions internationales
qui durent depuis une décennie,
est responsable de ce « deux poids,
deux mesures ». Tout pour les victimes
turques, presque rien pour les Syriennes.
Quatre jours après la première
secousse, les États-Unis ont décrété
la suspension, pour 180 jours,
@
100 000 citations
et proverbes sur evene.fr ENTRE GUILLEMETS
analyse
Paul Sugy
£@PaulSugy
Emily in the ZAD
P
ar souci d’authenticité, peut-
être aussi pour se soustraire
aux diktats du patriarcat, Lily
Collins aurait laissé tomber
son rouge à lèvres - le sourire
de la vedette américaine
ne perdrait pas pour autant
de son charme. Mais, en lieu et place
d’un béret et d’une baguette de pain,
on l’aurait affublée d’un sarouel
et d’une truelle. Ce serait toujours Emily
in Paris, oui, mais la jeune femme
de Chicago sarclerait un plan de lentilles
dans le potager bio en permaculture
du « jardin sauvage » de Ménilmontant,
cette ZAD en plein cœur
du 11e arrondissement que David Belliard
décrit sur Twitter avec extase comme
« un espace devenu jardin, forêt, espace
de jeux » (et dire que ces crétins
de touristes continuent, le nez vissé
sur leur Guide vert, de faire la queue
devant le Père Lachaise voisin
alors qu’en face du vieux cimetière
se dresse cet écolieu que Le Nôtre
lui-même n’aurait pas renié…).
C’est sans doute le scénario dont aurait
rêvé l’adjoint de la maire de Paris
en charge des transports
et de la transformation de l’espace
public. Soyons honnête, il n’est pas
le seul à voir dans la série à succès
une juxtaposition de clichés étalés
en couleurs vives sur des plans
dont la tour Eiffel est rarement absente
plus de quelques secondes de suite. Tous
les critiques snobs, et jusqu’au New York
Times, ont du reste assez dénoncé
le fantasme caricatural que véhicule
cette superproduction Netflix.
Cela n’empêche pas la série Emily in Paris
de faire un carton d’audience, et pas
qu’aux États-Unis…
Mais ce n’est pas seulement
la réduction de Paris à l’image d’Épinal
de la capitale du romantisme qui agace
David Belliard : dans une tribune
chez Libé, il a étrillé aux côtés
Dassault Médias SOCIÉTÉ DU FIGARO SAS Directeur des rédactions Jacques-Olivier Martin (directeur Directeur artistique
(actionnaire à plus de 95 %) (société éditrice) Alexis Brézet de la rédaction du Figaro.fr),
14, boulevard Haussmann 14, boulevard Haussmann
Étienne
“Sans la liberté de blâmer il n’est point d’éloge flatteur” Beaumarchais
Dassault Médias SOCIÉTÉ DU
75009 Paris 75009 Paris (actionnaire à plus de 95 %) (société éditrice)
Littéraire),
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75009 Paris 75009 ParisVincent (Culture, Télévision),
Président Gaëtan de Capèle (Économie),
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audiovisuel), Anne-Sophie
Dassault, Olivier
Olivier Costa de Beauregard, Sciences), Vincent
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Directeur général, von Costa
Claer de Beauregard,
(Style, Art Benoît
de
Habert, Bernard Monassier,
vivre, F),
Directeur général,
directeur de la publication Philippe directeur de
de la Villers (Politique,
Rudi Roussillon Gélie (International),
Rudi Roussillon
Débats
Marc Feuillée
Marc Feuillée Anne Huet-Wuillème (Édition,
Photo, Révision, DA),
champs libres
OpiniOns
de leurs sanctions à l’égard de la Syrie.
C’était trop tard pour les familles
ensevelies sous les décombres,
mais espérons qu’il y a là un début de prise
de conscience chez nos alliés américains.
Les sanctions générales contre la Syrie
prises par les États-Unis, aussitôt suivis
par les Européens, se sont révélées
contre-productives. L’ingérence
occidentale dans la guerre civile syrienne
avait pour but ultime le bien-être
de la population. Or ces sanctions
– qui rendent impossible toute transaction
financière entre résidents syriens
et l’étranger – ont un effet dévastateur
sur la population.
Pour changer une simple pièce
défectueuse sur son endoscope, il a fallu
un an et demi au Dr Nabil Antaki,
gastro-entérologue alépin, président
14 février 842 : à Strasbourg, Louis le Germanique et Charles,
petit-fils de l’empereur Charlemagne, concluent une alliance
militaire contre leur frère aîné, Lothaire. Il s’agit du premier
document rédigé en ancien français et non plus en latin.
www.bridgemanimages.com
Serment de Louis le Germanique
Je secourrai
ce mien frère Charles
par mon aide»
de plusieurs lieutenants d’Anne Hidalgo
cette mise en scène d’une « capitale
du déni climatique » dans laquelle « un
Paris immuable, un Paris Disneyland » est
présenté « sans contexte ni contrainte ».
Et David Belliard de lister ce qui,
dans ce Paris de carte postale, devra tôt
ou tard être transformé : les perspectives
monumentales (qui empêchent
de construire des pistes cyclables
et des Abribus) ou encore les fameux toits
de la ville, qui pour être susceptibles
d’entrer un jour au Patrimoine mondial
de l’Unesco (c’est la mairie de Paris qui
freine la procédure), n’en sont pas moins
« des fours insupportables en période
de fortes chaleurs ». Ainsi comme la Reine
de cœur de Lewis Carroll fait repeindre
les roses en rouge, la reine de Paris fait
savoir qu’il faudra bientôt repeindre
les toits en blanc… La chose
«
89 % des américains qui ont visité que ceux de droite. Quand
Paris au cours des dix dernières
années jugent que l’image
qu’en donne « emily in Paris »
est conforme à la réalité !
est donc entendue : « La dimension
patrimoniale peut s’avérer être un frein
à l’adaptation des villes aux dérèglements
climatiques », conclut David Belliard.
Il aurait peut-être tort de condamner
trop vite les scénaristes d’Emily in Paris, David Belliard ne regarde que
qui ont rendu tout de même un fier
service à la capitale française : d’après
un sondage Ifop que révèle en exclusivité
lefigaro.fr, les Américains sont désormais
73 % à avoir « une bonne image » de Paris
- ils n’étaient que 39 % à en dire autant il se réjouissait-elle sur Franceinfo
y a quinze ans. L’effet de la série est sans de l’exode de 120 000 Parisiens
appel : cette proportion culmine à 86 %
chez les Américains qui ont vu la série,
contre 67 % de ceux qui ne l’ont pas vue.
On moquera évidemment la crédulité
des « binge-watchers » de séries
FIGAROMEDIAS
Pierre Bayle 9, rue Pillet-Will, 75430 Paris Cedex 09 93290 Tremblay-en-France
Rédacteur en chef Tél. : 01Directeur
56 52 20
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FIGARO SAS des rédactions
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Bayle
HaussmannBertrand de Saint-
Alexis Brézet
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(Figaro Littéraire),
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du pôle news Frédéric Picard (Web) Fax : 01 56 52 23 07 Pour
Directeurs adjoints de la rédaction Bertrand de Saint-VincentPrésident-directeur
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(Culture, Aurore Domont
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Opinions) Tél. :
(Politique, Société, Débats Opinions)01 57 08
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direction.redaction@lefigaro.fr
mardi 14 février 2023
le figaro
15
de la magnifique ONG Les Maristes bleus. ses infrastructures électriques (touchées
Car, en sa qualité de résident syrien, par les bombes américaines),
il était bloqué par les banques ni moderniser ses installations pétrolières.
internationales, qui vivent toutes Faute de soins, de nombreux enfants
dans une peur bleue des possibles irakiens sont morts. Les bombent tuent,
représailles du Trésor américain. les sanctions aussi. Le pire est que
Le Dr Antaki nous a également relaté les Américains ont compris, après
que de très nombreux malades étaient leur invasion de l’Irak en 2003,
morts du Covid en Syrie, faute qu’il n’y avait pas la moindre arme
de respirateurs dans les hôpitaux. de destruction massive cachée
Les sanctions généralisées, visant dans le pays.
à isoler une population entière, Aujourd’hui, les sanctions infligées
ne sont pas seulement inhumaines. à la Syrie empêchent tout investissement,
Elles sont aussi inefficaces. En Syrie, toute reconstruction du pays.
elles n’ont pas fait avancer d’un iota C’est dommage car beaucoup
les négociations de paix entre le régime de financements sont prêts, originaires
baasiste et les rebelles. Les États-Unis ont, des pétromonarchies du Golfe.
dès 1960, installé des sanctions contre Est-ce à dire que toutes formes
Cuba. Leur but était de faire tomber de sanction seraient à bannir dans la vie
le régime castriste, coupable internationale ? Non. Car il existe
de nationalisations dans le secteur des sanctions ciblées qui sont à la fois
agricole. Fidel Castro est mort dans son lit justes et efficaces. Notamment contre
à La Havane en 2016, et ce sont toujours les criminels de guerre. Dans les guerres
des castristes qui gouvernent la grande île balkaniques des années 1990, le Tribunal
des Caraïbes. pénal international de La Haye avait
En Syrie, les sanctions sont de surcroît inventé l’excellente formule de la liste
injustes. Elles appauvrissent secrète d’inculpations. Les criminels
toute la population, à l’exception de guerre, qui étaient aussi de grands
des trafiquants, de mèche avec les services voleurs, n’osaient plus sortir de leurs pays
de douane et de police. 90 % des Syriens pour dépenser leur argent, pétris de peur
vivent aujourd’hui sous le seuil à l’idée d’être arrêtés à leur descente
de pauvreté de l’ONU. Les conventions d’avion.
de Genève, dont tous les pays occidentaux Les mercenaires de Wagner,
sont signataires, interdisent pourtant qui sévissent en Syrie, en Libye, au Mali,
en RCA, comme en Ukraine, cumulent
les punitions collectives.
Après l’avoir chassé du Koweït en 1991,
l’Amérique et ses alliés ont imposé à l’Irak
souvent crimes de guerre et prédations.
L’interdiction de voyager et le gel de leurs
un très sévère régime de sanctions.
L’idée était, pour les lever, d’attendre
avoirs sont des mesures légitimes. Elles
peuvent dissuader de nouvelles vocations.
des rapports concluants Ce ne sont pas les sanctions qu’il faut
sur son désarmement atomique, chimique bannir, c’est leur généralité. Le grand
et biologique. Ces rapports ne sont jamais paradoxe des sanctions générales
venus, en raison de la mauvaise volonté décrétées en Occident est qu’elles sont
des inspecteurs américains. À cause prises au nom du bonheur des populations
des sanctions, l’Irak n’a pas pu étrangères, et qu’elles finissent toujours
reconstruire pendant douze ans par en faire le malheur.
VOX
…Napoléon
qui prennent tous les clichés de Netflix
pour argent comptant… Pourtant, 89 % « En 1813, Napoléon
des Américains qui ont visité Paris
au cours des dix dernières années jugent était trop vieux
que l’image qu’en donne Emily in Paris
est conforme à la réalité ! pour faire la guerre »,
Alors c’est sûr, ils auront
probablement passé plus de temps entretien avec l’historien
au Trocadéro et sur le Champ-de-Mars
qu’à s’asseoir sur les palettes recyclées Charles-Éloi Vial.
du Hasard Ludique, sous les voûtes
taguées d’une ancienne gare à l’abandon
de la petite ceinture. D’ailleurs,
67 % d’entre eux pensent que
« Paris est une ville propre »,
les rencontres
et 35 % croient même qu’il « n’y pas
de rats dans les rues ». On se pince…
du figaro
Il n’empêche que le Paris des beaux
quartiers, celui des bistrots chics
et des monuments éternels,
fait considérablement plus rêver
les Américains de gauche
fabien clairefond
la gauche écolo parisienne
rêve de « redéfinir
collectivement les critères
du beau » (David Belliard
» dans Libé, toujours), plus
de la moitié de la gauche
progressiste américaine MICHEL ONFRAY
déclare vouloir vivre un jour à Paris ET SONIA MABROUK
(contre seulement 29 % L’humanisme et le sacré
des conservateurs américains). le 12 avril à 20 h salle gaveau.
Enfin quand Netflix lui montre
sous un jour idéal sa commune,
Tarif : 25 €.
réservations : 01 70 37 18 18
les bourgeois. S’il veut transformer Paris, ou www.lefigaro.fr/rencontres.
quitte au passage à « sortir de la nostalgie
d’une ville stéréotypée »,
c’est pour « ne pas la dédier seulement
aux plus riches ». Ainsi Anne Hidalgo
en dix ans, un gage de « dédensification »
selon elle. C’est oublier que l’exode Ce soir à 20h sur le site
concerne avant tout les ménages du Figaro,
Figaro présenté
avec enfants, aux revenus modestes. par Yves Thréard
Encore la faute à Netflix ?
Impression L’Imprimerie, 79, rue de Roissy FR
00 Midi Print, 30600 Gallargues-le-Montueux ce journal
artistique FIGAROMEDIAS ISSN 0182-5852Impression L’Imprimerie, 79, rue de Roissy se compose de :
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 mardi 14 février 2023 le figaro

16
Frédéric de Monicault
fdemonicault@lefigaro.fr

É
loges des loges (Éditions Autrement)

Aude de
est un titre trompeur : l’ouvrage
d’Aude de Tocqueville, de Jean-
Michel Djian, journaliste et produc-
teur à la radio, et de Margot Lançon

Tocqueville :
(photographe) n’est pas une plongée
dans la franc-maçonnerie, mais dans les arcanes
du logement social. Ses héros sont les gardiennes
et gardiens du parc social parisien, qui couvre un
quart des logements dans la capitale. Cette série de

« Les gardiens
portraits est autant d’instantanés criants de vérité,
en prise directe avec la réalité de la société.

LE FIGARO. - Pourquoi avoir voulu

d’immeuble
rendre hommage, comme vous le soulignez,
aux gardiens d’immeuble ?
Aude de TOCQUEVILLE. - Parce ce qu’ils sont des
acteurs majeurs de la vie urbaine et qu’ils restent
pourtant très méconnus. Leur rôle sur le plan

nous éclairent
« Installer des digicodes

RENCONTRE
social est considérable. On s’arrête encore à des
coûte toujours moins
clichés, véhiculés depuis des lustres. Ainsi le per- cher que de devoir
sonnage de Madame Pipelet, une adepte des com- financer un emploi.
mérages, dans Les Mystères de Paris d’Eugène Mais depuis quelques

sur nous-mêmes »
Sue : un livre écrit au XIXe siècle et peu amène

François BoUCHon/Le Figaro

pour la profession. Après la Seconde Guerre mon-
diale, le député parisien Édouard Frédéric-Dupont
s’est révélé un tout aussi mauvais ambassadeur :
« Dupont des loges », comme le surnommaient ses
adversaires, s’était attiré les faveurs de concierges
en supprimant les cordons - reliés aux portes
cochères - qui les obligeaient à se réveiller plu-
sieurs fois par nuit pour ouvrir. En contrepartie, il
avait constitué une petite clientèle d’indicateurs.
Tout cela est bien fini. Comme l’affirme avec
malice une gardienne du livre : « La bouche, c’est
comme une maison, on la garde fermée ! »
Un point de sémantique : le mot « concierge »
a-t-il encore droit de cité ?
Les gardiennes et gardiens détestent ce mot. J’ai
rencontré une gardienne explicite à ce sujet :
« Quand quelqu’un me demande où se trouve la
concierge, je réponds qu’il n’y en a pas ! » Une autre
ne l’est pas moins : « Une bonne gardienne n’a rien
d’une concierge. » Au quotidien, le mot tend à
disparaître.
Comment devient-on gardien ?
Y a-t-il un profil type ?
Il y a une majorité de femmes : 59 %. L’âge moyen
est de 48 ans, avec environ quatorze années d’an-
cienneté. Ce sont souvent des personnes d’origine
NOUVEAU
L’auteur, passionnée par le patrimoine et l’histoire, effectue une plongée dans le logement
social à Paris au travers d’une profession qui joue un rôle clé dans la vie urbaine.
modeste, familières de ce métier car elles peuvent
être cooptées par un membre de leur famille qui l’a
exercé. Pendant les années 1970, la crise économi-
que dans le bassin houiller a incité de nombreux
habitants du nord de la France à se reconvertir
comme gardien à Paris. La communauté portugai-
se est aussi largement représentée. Aujourd’hui,
les pays de l’Est, le Maghreb ou encore l’Afrique
noire ont pris le relais : cette diversité est la bien-
venue, en phase avec la grande mixité culturelle
des logements sociaux. J’ajouterai que c’est un
métier où la personnalité compte plus que la
technicité, surtout ces dernières années.
Éloge des loges montre à quel point
les intéressés sont en première ligne
face à la dureté des réalités sociales…
Sur le site de l’Insee, la profession de gardien est
décrite à peu près de la façon suivante :
« Salarié peu qualifié s’occupant de nettoyage et
assurant le respect du règlement intérieur d’un
logement. » Quelle vision rétrograde au regard de
l’évolution du métier ! Et je ne parle même pas de
sa vocation technique et administrative. Je parle
surtout de la proximité avec une population
fragile, en proie pêle-mêle au chômage, à la
solitude, au racisme, à la drogue… Par leur
années, les bailleurs
sociaux ont pris
la mesure de l’action
sociale des gardiennes
et gardiens. Ils ont
compris que rien
ne remplacera jamais
l’humain. »
position au cœur de la vie d’un immeuble, dont ils
sont véritablement le pilier, les gardiennes et
gardiens voient tout à la loupe - c’est pour cela,
d’ailleurs, que leur parole est si forte. Ce qui fait
qu’au gré des situations, ils se muent en
psychologue, en assistante sociale, en auxiliaire de
vie, en confident… Sans oublier le contact avec la
mort : ils ouvrent très souvent la porte aux pompes
funèbres. Certaines histoires sont parti-
culièrement tragiques : ainsi cette femme sans
papiers dont la petite fille a péri après avoir été
défenestrée par son grand frère handicapé mental.
La gardienne l’a accompagnée avec une magni-
fique constance pour effectuer toutes les procé-
dures nécessaires… Ils sont au cœur de l’humain,
avec tout ce que cela comporte de générosité mais
aussi de violence.

Sont-ils préparés pour cela ?

Pendant longtemps, aucune formation acadé-
mique en particulier ne prédisposait au métier de
gardien. Depuis quelques années, un CAP a été mis
présente sur les rails. Ce diplôme n’est pas obligatoire pour
exercer, mais les jeunes sont à l’affût de compé-
tences, notamment relationnelles : comment
maintenir le contact avec un locataire belliqueux,
PARFOIS IL NE SUFFIT comment être diplomate, comment appréhender
différentes cultures ? Les bailleurs sociaux ont

QUE DE QUELQUES MOTS… intégré cette demande de montée en savoir-faire :

un éventail de formations plus large est désormais
proposé. Les anciens voient moins l’utilité de ces
qualifications : ils capitalisent sur leur expérience.

Une idée pertinente Les bailleurs sociaux peuvent-ils

plutôt que bonne.
Un propos sibyllin
« etCescesfemmes
hommes
faire l’économie des gardiens ?
Pendant un temps, l’heure a pu être aux
économies, avec des postes non remplacés.
mieux que mystérieux. font un travail Installer des digicodes coûte toujours moins cher
social incroyable, que de devoir financer un emploi. Mais cette
Concomitant avec une pudeur option a fait long feu : depuis quelques années, les
plus original que simultané. bailleurs sociaux ont pris la mesure de l’action
et une discrétion sociale des gardiennes et gardiens. Ils ont compris
Archétype rares : que rien ne remplacera jamais l’humain. Notre
plus élégant qu’exemple. des qualités enquête fourmille d’exemples où les locataires
qui vont disposent d’une aide précieuse de leur part. Ainsi
Célérité cette femme, déboussolée par les confinements,
plus inédit que vitesse.
à l’encontre qui achetait des carottes au supermarché pour les
de notre société replanter dans les plates-bandes, ce qui agaçait
Laconique
plus gracieux que bref et concis.
exhibitionniste » fortement ses voisins. Avec l’aide de services
sociaux, la gardienne a réussi à la faire soigner.

Chimère Vous parlez aussi de la fierté affichée

plus chic qu’illusion. par les gardiens ?
Cela va de pair avec leur épanouissement
Spartiate professionnel, qui est la règle pour la plupart
moins utilisé que sévère. d’entre eux : ils disent se sentir utiles à la société,
précisant qu’on leur demande beaucoup tout en
Œcuménique ajoutant qu’ils reçoivent humainement beaucoup
plus érudit qu’universel. aussi. Une grande partie de leurs locataires, bien
heureusement, leur sont reconnaissants de leurs
actions.

Sous la plume de Jean Pruvost, professeur émérite et éminent linguiste, Votre enquête a-t-elle contribué à modifier
retrouvez 100 mots et la manière de les employer pour redonner avec humilité votre propre regard sur cette profession ?
Comment pourrait-il en être autrement ? Ces
un peu de richesse à un discours, une conversation ou un simple propos.
femmes et ces hommes font un travail social
incroyable, avec une pudeur et une discrétion
rares : des qualités qui vont à l’encontre de notre

9€ 150 pages, EN VENTE ACTUELLEMENT société exhibitionniste. Jean-Michel et moi-même

,90 Chez tous les marchands de journaux et sur www.figarostore.fr
avons compris à quel point cette profession,
pratiquée par certains comme une vocation, nous
éclaire sur nous-même, sur la façon dont évolue
A

notre société et, fatalement, sur les obstacles

auxquels elle doit faire face. ■
 mardi 14 février 2023 le figaro - N° 24 411 - Cahier N° 2 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

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lefigaro.fr/economie L’europe
approuve
L’« hydrogèNe
aviatioN iNFLatioN NuCLéaire »
La FraNCe veut Les restaurateurs Après un an de bras de fer franco-
produire pLus de peiNeNt à digérer Les allemand, Paris a finalement eu gain
bioCarburaNts Page 20 hausses de Coûts Page 22 de cause devant la Commission
européenne. Celle-ci a adopté deux
textes (« actes délégués ») définis-
sant ce qu’est l’hydrogène renouve-
lable dans l’Union. Tout le débat op-

Honoraires, bureaucratie...
posant Paris à Berlin était de savoir
si l’hydrogène produit en utilisant de
l’électricité nucléaire pouvait être
considéré comme vert. « La déci-

la colère des médecins monte

sion de la Commission reconnaît le
caractère décarboné du mix électri-
que français », souligne le cabinet
d’Agnès Pannier-Runacher, ministre
de la Transition énergétique, saluant
Les praticiens appellent à la grève ce mardi. Ils maintiennent la pression, alors « une victoire ». Pour celle-ci, le but
à atteindre, c’est la décarbonation,
que les négociations avec l’Assurance-maladie, sur les tarifs notamment, patinent. quel que soit le moyen de production
mobilisé. « Cela permet de corriger
Arrêts de travail, attestations han- consacrent en moyenne entre une firment avoir des difficultés à trou- tant qui vient s’ajouter à la colère une première absurdité : les capaci-
dicap, certificats en tout genre… La heure et demie et deux heures cha- ver un médecin traitant, les profes- des médecins sur la revalorisation tés existantes vont pouvoir être
bureaucratie s’est largement instal- que semaine à rédiger ces certifi- sionnels s’agacent de devoir ainsi de leurs honoraires, l’accès direct comptabilisées », se félicite-t-on au
lée dans le quotidien des médecins. cats. En pleine pénurie de soignants, bêtement perdre du temps sans vé- aux paramédicaux ou la remise en ministère. Ainsi, l’hydrogène sera
Le ministère de la Santé l’admet : ils alors que 6 millions de patients af- ritables raisons médicales. Un irri- cause de la liberté d’installation. « vert » si l’électrolyseur (qui sépa-
è tarifs, liberté D’installation, accès Direct : les raisons Du granD malaise Page 18
re l’hydrogène de l’eau) est alimenté
à partir d’un réseau électrique où la
part d’énergies décarbonées a at-
teint au moins 90 % l’année précé-
dente. Ce qui devrait être le cas pour
l’État vole la production d’électricité française,
à l’exclusion de l’année 2022, qui af-

au secours fiche un plus mauvais bilan carbone

du fait de l’indisponibilité d’une gran-
F. BOUCHON/Le FigarO ; F. SCHeiBer/HaNS LUCaS via aFP ; SLN

du nickel
de partie de son parc nucléaire.
D’autres enjeux demeurent, néan-
moins. « Il faudra s’assurer que les
néo-calédonien nouvelles productions électriques
qui seront mises en place pour pro-
duire de l’hydrogène vert rempla-
le gouvernement accorde cent bien de l’hydrogène carboné »,
alerte néanmoins le ministère de la
un prêt de 40 millions Transition énergétique, soucieux
à la SlN, filiale d’eramet, d’éviter les effets de bord. Car un
des autres impératifs de l’Europe est
en grande difficulté. d’augmenter la part d’hydrogène
ce poumon de l’économie consommée par certaines industries
très gourmandes en gaz naturel,
locale accumule les pertes. comme les aciéries. ELSA BEmBAron
Page 21

l'histoire
La Macif acquiert un réparateur auto
pour faire baisser les prix
Comment, pour un assureur, faire baisser réparations de pare-brise, évaluée à 6 %
le prix des réparations auto, qui pèse sur par an depuis 2015. Cela se répercute
les tarifs d’assurance ? En acquérant un sur les tarifs d’assurance auto, en hausse
spécialiste de la réparation. C’est ce que de 3 % à 5 % en moyenne en 2023.
vient de faire la Macif, premier assureur « L’inflation de la réparation des bris
auto en France. La mutuelle niortaise a de glace est due au contexte économique,
déboursé 103 millions d’euros pour mettre aux évolutions technologiques et à
la main sur Mondial Pare-Brise, le numéro certaines pratiques commerciales »,
trois de la réparation de pare-brise dans précise la Macif. Le marché français
l’Hexagone. « C’est la première fois qu’un de la réparation et du remplacement
assureur acquiert un réparateur de cette de pare-brise est dominé par Carglass.
ampleur », assure le directeur général « Les services de l’enseigne sont de bonne
de la Macif, Jean-Philippe Dogneton. qualité, mais leurs tarifs sont plus élevés
Les enjeux d’une telle opération sont que sur le reste du marché, souligne
importants. La Macif représente 300 000 Cyrille Chartier-Kastler, fondateur de ANNÉE BDL REMPART ESTER
des 2,5 millions d’interventions annuelles Facts & Figures. Tout l’enjeu pour la Macif 2022 +14,9 % 0%
pour des bris de glace en France. est de parvenir à orienter les réparations 45%
2021 +16,1 % -0,5 %
2020 -6,4 % -0,5 %
La charge est évaluée à 200 millions vers Mondial Pare-Brise, dont les prix sont
2019 +6,9 % -0,4 %
d’euros par an par l’assureur du groupe moins élevés. » Avec, à la clé, pour les 2018 -9,1 % -0,4 %
Aéma. Un montant qui ne cesse de croître assurés, une moindre augmentation des 25%
2017 +2,9 % -0,4 %
en raison de la forte inflation du coût des tarifs d’assurance auto. ■ Danièle guinot 2016 +0,8 % -0,3 %
2015 +7,4 % -0,1 %
5% 2014 +4,0 % +0,1 %
2013 +12,7 % +0,1 %

LA SÉANCE DU LUNDI 13 FÉVRIER 2023 le PLUS 2022 3 ans 10 ans

du
CAC 40
7208,59 +1,11%
EUROSTOXX 50
4243,57 +1,09% FIGARO
écO
DOW JONES FOOTSIE
34161,27 +0,86% 7947,60 +0,83% Écologie
Les éditeurs de presse
ONCE D’OR NASDAQ s’engagent
1858,50 (1864,10) 12488,11 +1,49%
pour la transition
PÉTROLE (lond) NIKKEI Page 24
A

86,140 (86,590) 27427,32 -0,88%

 mardi 14 février 2023 le figaro
18 l'événement
La médecine libérale
sous le poids de la bureaucratie
Complexité administrative et paperasserie font perdre un temps précieux aux soignants.
Cela s’ajoute aux raisons de fond qui les incitent à la grève ce mardi.
MaRie-CéCile Renault £@Firenault
Santé Ce matin-là, dans le cabi-
net du médecin, arrivent une mère
et sa fille de 15 ans, grippée. « La
mère n’est pas inquiète, elle sait quoi
faire. Mais il y a un devoir surveillé au
lycée et un zéro d’office en cas d’ab-
sence sans certificat médical », se
désole le généraliste. Puis, c’est au
tour d’une mère avec son bébé, un
peu fiévreux, de venir chercher « un
certificat pour la crèche », nécessaire
pour se faire rembourser le déjeuner
à 4 euros du bambin… « Non seule-
ment nous perdons du temps sans
raison médicale, mais cela fait sup-
porter à la Sécu une consultation à
25 euros pour rattraper un repas à
4 euros. Les bras m’en tombent », se
désespère le médecin. Chez un
confrère, le même scénario se répè-
te : un jeune homme débute un stage
et son employeur exige un certificat
attestant que tous les vaccins sont à
jour. « Il est obligé de venir me voir
car une photocopie du carnet de santé
ne suffit pas. En voilà du temps médi-
cal bien utilisé ! », s’irrite là encore le
médecin. Autre cas tout aussi
ubuesque : une femme se présente
car son office HLM veut changer le
sol de son appartement. Mais elle
souffre du dos et ne peut bouger les
meubles. L’office HLM lui réclame
un certificat médical « de contre-in-
dication au déplacement de meu-
bles ». « Vraiment content de m’être
levé pour ça un samedi matin »,
s’agace le praticien.
Voyage en absurdie
Autant d’exemples qui pourraient
être déclinés à l’infini et prêter à rire,
s’ils ne gâchaient un temps précieux.
Les médecins consacrent en moyen-
ne entre une heure et demie et
deux heures chaque semaine à rédi-
ger ces certificats, admet le ministère
de la Santé. En pleine pénurie de soi-
gnants, alors que 6 millions de pa-
tients affirment avoir des difficultés à
trouver un médecin traitant, les pro-
fessionnels s’agacent de perdre du
temps sans véritables raisons médi-
cales. Autant de rendez-vous qui
auraient pu être attribués à d’autres
patients. « Les élus locaux, qui nous
rendent responsables des déserts mé-
dicaux, sont les premiers à exiger des
certificats pour l’école, la crèche ou le
centre aéré, c’est délirant. Qu’ils
changent les règles », s’indigne le
Dr Jean-Paul Hamon, généraliste à
Clamart (Hauts-de-Seine), membre
du syndicat FMF.
Beaucoup de temps est passé à re-
nouveler les dossiers réclamés par la
Maison départementale pour les
personnes handicapées (MDPH).
« Ce sont des dossiers complexes, de
8 pages. Or, on nous demande de les
reremplir à intervalles réguliers,
même quand il s’agit d’un handicap
Tarifs de la consultation, liberté d’installation… Les raisons du grand malaise
La colère des médecins monte en-
core d’un cran. Après la grève des
1er et 2 décembre, puis la fermeture
des cabinets la semaine entre Noël
et le jour de l’An, les médecins se-
ront à nouveau en grève ce mardi.
Une partie d’entre eux se rendront
à Paris pour manifester devant le
Sénat et témoigner de leur opposi-
tion à la proposition de loi Rist qui,
après avoir été votée en première
lecture à l’Assemblée, arrive dans
l’hémicycle au Sénat.
Ce texte, porté par la députée
Renaissance Stéphanie Rist - aussi
rapporteur du texte de réforme
des retraites - vise à permettre un
accès direct du patient à certains
paramédicaux sans passer par le
médecin traitant. Les généralistes
y voient la disparition de leur rôle
A
de coordinateur du parcours de
soins, et le risque d’un dévelop-
congénital ou d’une maladie incura-
ble qui n’a aucune chance de dispa-
raître. C’est absurde », s’étonne le
Dr Corinne Le Sauder, généraliste
près d’Orléans (FMF).
À cela s’ajoutent toutes les
consultations en vue d’établir des
arrêts de travail : afin de gagner du
temps, les médecins proposent que
pour des arrêts courts, type grippe
ou gastro-entérite, les patients
puissent s’auto-déclarer sans en-
combrer inutilement les cabinets
médicaux. « C’était le cas pendant le
Covid et ça a très bien fonctionné. De
toute façon, les patients ne sont pas
payés les trois premiers jours, durant
la période de carence, donc ça limite
les abus », fait valoir le Dr Luc Du-
quesnel, généraliste en Mayenne
(CSMF). Mais le patronat s’y oppose,
certaines entreprises prenant en
charge la période de carence.
Le voyage en absurdie ne s’arrête
pas là. Les médecins s’arrachent
aussi les cheveux avec les « flux dé-
gradés », ces feuilles de soins papier
qu’ils doivent remplir quand le pa-
tient oublie sa carte Vitale ou est
en AME (aide médicale d’État,
accordée aux étrangers en si-
tuation irrégulière). « On doit
télétransmettre l’acte pour être
payé par la Sécu, éditer un borde-
reau et doubler tout cela par l’en-
voi courrier des liasses de feuilles
papier. Mais bien sou-
vent, la Sécu les perd
pement d’une médecine à deux
vitesses.
Autre raison de la colère: une
énième proposition de loi, porté
par le député PS Guillaume Garot,
25
visant à limiter la liberté d’installa-
tion des médecins et les obliger à
s’installer dans les « déserts médi-
caux ». Une proposition similaire
devait être présentée à l’Assemblée
euros mercredi par le député Horizons
Tarif de la consultation Frédéric Valletoux, ancien prési-
médicale pour un dent de la Fédération hospitalière
généraliste en France de France… avant d’être subite-
(contre 45 euros en ment retirée lundi, à la veille de la
moyenne en Europe) grève. « Le dialogue est bloqué », a
constaté Frédéric Valletoux, qui
prévoit cependant de déposer un
texte retravaillé d’ici à un mois. Et
ce, malgré l’opposition du gouver-
nement, qui juge les mesures coer-
citives non seulement inefficaces
mais contre-productives, car elles
et nous demande de rembourser les
consultations. Les envoyer en accusé
de réception ou les porter soi-même
sur place n’y change rien. C’est in-
supportable », se désole le Dr Agnès
Giannotti, généraliste dans le 18e ar-
rondissement de Paris (MGFrance).
Les spécialistes ne sont pas épar-
gnés. « L’Assurance-maladie nous
complexifie les documents de sortie
après une hospitalisation, explique le
Dr Sophie Bauer (SML), chirurgien
thoracique et cardio-vasculaire à
Melun (Seine-et-Marne). Avant, on
rédigeait un courrier avec les mots-
clés et le médecin traitant recevait un
courrier synthétique. Aujourd’hui, on
doit faire une lettre de 4 pages en re-
prenant des informations qu’il
connaît déjà et qui noie l’essentiel. »
Mesures de simplification
Quant au « Ségur numérique », qui
oblige les médecins à mettre leur in-
formatique en conformité, il se tra-
duit davantage aujourd’hui par des
bugs que par des avancées. « Pour
accéder au nouvel espace de santé nu-
mérique, il faut mettre le prénom du
patient en majuscules et pas en
minuscules sinon ça ne va pas. Si c’est
un nom composé il ne faut pas de ti-
rets, sinon on ne retrouve
pas le patient,
incitent les jeunes à ne pas s’instal-
ler. « Je suis opposé à la coercition à
l’installation des médecins. Pas par
dogme, mais parce que ça ne mar-
che pas », répète le ministre de la
Santé, François Braun.
Déconventionnements
Enfin, et surtout, les médecins
montent au front, car leurs discus-
sions avec l’Assurance-maladie
sont au point mort, pour établir la
prochaine convention médicale
qui établira les tarifs de la profes-
sion pour les cinq prochaines an-
nées. Après plusieurs semaines de
tractations, Thomas Fatôme, di-
recteur de l’Assurance-maladie, a
proposé d’augmenter leurs hono-
raires de… 1,50 euro. Les médecins
ont aussitôt crié au « mépris » et à
« l’humiliation », alors que le tarif
de la consultation, fixé à 25 euros,
témoigne le Dr Jean-Paul Hamon. Le
type qui a inventé ça ne veut pas que
ça marche ! Le discours ministériel
sur la simplification, c’est du vent. »
Ces irritants administratifs vien-
nent accroître la colère des méde-
cins, en grève ce mardi, pour pro-
tester sur des sujets de fond :
revalorisation des honoraires, accès
direct aux paramédicaux, remise en
cause de la liberté d’installation (lire
ci-dessous). Face à la fronde des li-
béraux, le ministre de la Santé,
François Braun, a annoncé la semai-
ne dernière 15 mesures de simplifi-
cations administratives, reprenant
les conclusions d’une mission flash
lancée en janvier. Les « règles en
matière de demande de certificat mé-
dical seront clarifiées avant la fin du
premier trimestre 2023 » afin que ce
dernier devienne « une exception »,
a promis François Braun. Le minis-
tre assure que la transmission des
pièces justificatives à l’Assurance-
maladie sera simplifiée, afin de ten-
dre vers le « zéro papier ». L’appli-
cation carte Vitale sur smartphone
(ApCV) sera déployée pour limiter
les oublis des patients, etc. Encore
faut-il que ces bonnes résolutions
soient mises en œuvre. Les méde-
cins sont sceptiques. « Il y a onze ans,
j’avais participé à un gros travail au
ministère en vue d’une simplification
administrative, mais tout est resté
lettre morte, regrette le Dr Le Sau-
der. Il ne s’est rien passé… » ■
l’un des plus bas d’Europe (45
euros en moyenne), n’a pas été ré-
visé depuis 2016, et que la hausse
proposée ne couvre pas l’inflation.
« Cette grève montre la désespé-
rance des médecins, qui sont en très
grande souffrance. Les patients
sont en colère, car ils ne trouvent
pas de médecin ; nous en prenons de
plus en plus, mais la situation est in-
supportable. Nous demandons les
moyens de pouvoir embaucher des
assistants médicaux pour voir plus
de patients », explique le Dr Luc
Duquesnel, généraliste en Mayen-
ne. Son syndicat, la CSMF, plaide
pour passer l’acte simple à
30 euros et que les consultations
complexes qui prennent du temps
avec des patients polypathologi-
ques soient valorisées 60 euros.
Excédés, des médecins ont
monté un collectif sur les réseaux
Je veux
qu’on puisse
continuer
à supprimer
toutes les
tâches inutiles,
comme certains
certificats,
qu’on puisse
développer la
télé-expertise,
la télé-
surveillance,
qui est une
bonne chose
EmmanuEl macron,
»
lors dE sEs vœux
aux soignants,
lE 6 janviEr 2023
Les médecins consacrent
en moyenne entre une heure
et demie et deux heures
chaque semaine à rédiger
des certificats, admet
le ministère de la Santé.
lordn/stock.adobe.com
sociaux, baptisé «médecins pour
demain», qui réclame un double-
ment du tarif à 50 euros. Un syndi-
cat, l’UFML, organisera en mars
les assises du déconventionne-
ment : les médecins seraient libres
de pratiquer le tarif qu’ils veulent,
leurs patients, eux, ne seraient
plus remboursés. Un choix jus-
qu’au-boutiste que beaucoup de
praticiens refusent. Mais la petite
musique monte, signe du ras-le-
bol profond de la profession.
Alors que la négociation a débuté
en novembre, et doit être signée le
28 février, rien n’est abouti. La
pression monte sur l’Assurance-
maladie : alors que les kinés et les
sages-femmes ont refusé de signer
leur convention, un nouvel échec
avec les médecins, navire amiral du
système conventionnel, risque de
mettre le feu aux poudres. ■ M.-C. R.
 le figaro mardi 14 février 2023

économie 19

En dépit de chocs exceptionnels, l’Europe

devrait échapper de justesse à la récession
Les nouvelles prévisions de Bruxelles sont meilleures qu’à l’automne grâce à la baisse du prix du gaz.

Anne rovAn £@AnneRovan
CorreSpondante à BruxelleS
CoNJoNCTUre En dépit de la
guerre en Ukraine, l’Union euro-
péenne devrait échapper in extre-
mis à la récession. C’est le scénario
privilégié par la Commission dans
ses prévisions économiques d’hi-
ver publiées lundi.
La croissance atteindrait ainsi
cette année 0,8 %, soit 0,5 point de
plus qu’envisagé à l’automne.
Pour les pays de la zone euro, il est
question d’une augmentation de
PIB de 0,9 %, soit 0,6 point de
mieux. L’année prochaine, en
2024, la croissance s’établirait à
1,6 % dans l’UE et à 1,5 % dans la
zone euro, sans changement par
rapport aux prévisions d’automne.
L’économie européenne doit
son salut à une année 2022
meilleure que prévue, avec un
taux de croissance de 3,5 %, au
lieu de 3,2 % attendus. Elle « est
entrée en 2023 sur des bases plus
saines que prévu et semble prête à
échapper à la récession », a résumé
le commissaire à l’Économie Paolo
Gentiloni, parlant d’une « vigueur
remarquable ».
Dans le détail, seule la Suède
verrait son économie se gripper en
2023, avec un PIB en recul de
0,8 %. « Il faut bien voir que l’éco-
nomie suédoise avait relativement
peu reculé en 2020, de seulement
2,2 %, et fortement rebondi en
2021, de 5,1 % », a toutefois rassu-
ré Paolo Gentiloni.
Cette année comme en 2024, la
France devrait faire mieux que
l’Allemagne, avec des prévisions
de croissance de 0,6 % puis 1,4
contre 0,2 % et 1,3 %. Toutefois,
les deux grandes économies de
l’UE seront en deçà de la moyenne
européenne. L’Espagne tire ainsi
très bien son épingle du jeu. Grâce
à la forte reprise du tourisme, son
économie devrait connaître une
croissance de 1,4 % en 2023 puis
de 2 % en 2024. Quant à l’écono-
mie italienne, elle pourrait croître
de 0,8 % cette année puis de 1 %
l’an prochain, tirée par le plan de
L’inflation reste plus élevée à l’Est
PRÉVISION DU TAUX D'INFLATION POUR L'ANNÉE 2023, en %
0à5% 5à7% 7 à 10 %
4,4 %
3,1 %
France
5,2 %
5,4 %
4,4 %
Source : Commission européenne
relance européen dont elle est le
premier bénéficiaire.
Paolo Gentiloni avance plu-
sieurs explications à ces prévisions
plus positives qu’attendu. D’abord
Un bouclier énergétique de près de 700 milliards d’euros
Face à la flambée des prix
du pétrole, du gaz
et de l’électricité amorcée
dès l’automne 2021,
les États européens ont
déployé ce que l’on a appelé
en France, des boucliers
énergétiques, afin de protéger
les entreprises et les
ménages. Les dépenses des
gouvernements des Vingt-
La Commission revoit une plus grande sobriété des
Européens. « Rétrospectivement,
à la hausse ses prévisions la résilience des ménages et des en-
Plus de 10% PRÉVISION DE VARIATION DU PIB, en % pour l'année 2023 treprises de l’UE est impression-
nante. De janvier à novembre 2022,
Prévisions publiées Différence en points par rapport la consommation de gaz naturel
le 13 février 2023 aux prévisions publiées dans l’UE a été constamment infé-
le 11 novembre 2022
rieure à la moyenne 2017-2021, la
consommation en octobre et no-
Espagne + 1,4 + 0,4
vembre étant inférieure de 25 % à la
4,2 % Grèce + 1,2 + 0,2 moyenne 2017-2021, dépassant
ainsi l’objectif de réduction convenu
6,3 % Portugal +1 + 0,3 au niveau de l’UE », se félicite le
6,2 % commissaire.
Zone euro + 0,9 + 0,6 Autre motif de satisfaction, l’UE
7,9 % ZONE dispose actuellement de réserves
4,4 % EURO
8,7 % Pays-Bas + 0,9 + 0,3 élevées, avec des stockages rem-
5,6 %
plis à 66 %. Un niveau jamais at-
4,5 % Union européenne + 0,8 + 0,5 teint à cette période de l’année.
6,3 % 11,7 %
4,3 % S’ajoute à cela le redémarrage
Belgique + 0,8 + 0,6 progressif de l’économie chinoise.
9,3 %
9,7 % À la clé, moins de ruptures dans
6,6 % Italie + 0,8 + 0,5 les chaînes d’approvisionnement.
16,4 %
9,7 %
France + 0,6 + 0,2 Vents contraires
6,5 %
+ 0,4
persistants
6,1 % 6,1 % 7,8 % Pologne - 0,3 Toutefois, la Commission reste
extrêmement prudente face à
Allemagne + 0,2 + 0,8
« des vents contraires forts », no-
4,5 % + 0,2 tamment une incertitude élevée
Finlande 0
sur l’évolution de la guerre en
4,3 % - 0,8 Suède -0,2 Ukraine et « les tensions géopoliti-
4%
ques plus larges ». « Mieux que
Infographie prévu ne veut pas dire bon », a éga-
lement mis en garde Gentiloni.
et surtout, la baisse notable des janvier à ses niveaux d’avant la Ainsi, les consommateurs et les
prix du gaz. Après la flambée guerre en Ukraine, soit 55 euros entreprises vont devoir continuer
historique qu’il avait connue à par MWh. Une baisse qui s’expli- à composer avec des prix du gaz
l’été 2022, le TTF, indice de réfé- que en partie par des températu- trois fois plus élevés qu’en 2019 et
rence pour l’UE, est revenu fin res plus clémentes, mais aussi par une inflation sous-jacente (infla-
tion hors énergie et produits ali-
mentaires non transformés) enco-
re en hausse en janvier.
« Avec la persistance des pres-
sions inflationnistes, le resserre-
ment monétaire devrait se poursui-
Sept s’élèvent, selon le dernier La France, toujours selon a été déboursée. Le plan vre, pesant sur l’activité des
calcul du cercle de réflexion l’estimation de Bruegel, a allemand à 200 milliards entreprises et freinant l’investisse-
Bruegel, à 681 milliards engagé 92 milliards d’euros. d’euros qui avait suscité ment », souligne l’exécutif euro-
d’euros. L’Allemagne, Soit 3,7 % de son PIB, à les critiques d’autres États péen. La commission ne s’attend
première puissance comparer à un soutien massif, membres, redoutant une pas à voir l’inflation baisser rapi-
de l’Union européenne de la part des Allemands, concurrence déloyale, est loin dement. Elle passerait de 9,2 % en
se taille, sans surprise, de 7,5 % du PIB annuel. d’avoir été totalement 2022, à 5,6 % en 2023 puis 2,5 % en
la part du lion, mais dans des À noter, les experts prennent décaissé. Rapporté au PIB, 2024 dans la zone euro. Les prix
proportions impressionnantes : en compte les mesures c’est la Slovaquie qui a fourni devraient continuer à augmenter
elle a annoncé un soutien annoncées, ce qui ne signifie l’effort public le plus important, plus fortement cette année à l’est
de 268 milliards d’euros. pas que toute l’enveloppe à hauteur de 9,3 %. F. n.-l. du bloc, dans les pays qui n’ont pas
adopté l’euro comme monnaie. ■

Début de détente commerciale entre l’Australie et la Chine

Les livraisons de charbon australien ont repris pour la première fois après trois ans de bagarre diplomatique.
GréGory Plesse £@gplesse
Sydney
CommerCe La guerre commer-
ciale lancée par la Chine à l’encon-
tre de l’Australie est-elle sur le
point de se terminer ? C’est ce
qu’une partie du gouvernement et
des exportateurs australiens veu-
lent croire, alors que pour la pre-
mière fois depuis deux ans,
72 000 tonnes de charbon à coke,
extrait des mines du Queensland,
ont été débarquées dans un port
chinois la semaine dernière.
Et cette livraison pourrait être
rapidement suivie d’autres, à en
croire le Sydney Morning Herald ce
lundi, selon qui, en Chine, trois
centrales thermiques, ainsi qu’un
sidérurgiste sont de nouveau for-
mellement autorisés à acquérir du
charbon australien. Il cite en paral-
lèle plusieurs producteurs, en Nou-
velle-Galles-du-Sud et dans le
Queensland, qui confirment être de
nouveau contactés par des ache-
teurs chinois, désireux de signer
des contrats d’approvisionnement.
Certains médias chinois proches du
pouvoir évoquent pour leur part la
levée prochaine des sanctions vi-
sant le bois et le bœuf australiens.
Entre Pékin et Canberra, oppo-
sés idéologiquement sur presque
tout, le ton était monté très haut
pendant près de trois ans. Agacé
par les critiques du précédent gou-
vernement australien concernant
la répression dans le Xinjiang com-
me à Hongkong et les opérations
d’influence chinoises dans le Paci-
fique mais aussi par la réclamation
de l’ouverture d’une enquête sur
les origines du Covid-19 à l’Orga-
nisation mondiale de la santé,
Pékin avait répliqué par une série
de sanctions commerciales. Hausse
considérable des droits de douane,
voire interdiction pure et simple
d’importation visant, outre le
charbon, l’orge, le vin en bouteille,
le homard ou encore la viande de
La chine représente
à elle seule 30 %
des exportations de
Canberra. Ci-dessous :
une mine de charbon
à Mount Pleasant,
près de la ville
de Muswellbrook.
EyEvinE Guardian nEws/
aBaCa
bœuf australienne, privés du jour
au lendemain de leur principal dé-
bouché, soit un manque à gagner
estimé à plus de 13 milliards
d’euros.
La Chine est en effet, et de loin, le
principal partenaire commercial de
Canberra, avalant à elle seule 30 %
de ses exportations, soit plus que
les trois autres pays suivants (Ja-
pon, Corée du Sud et Inde) avec qui
l’Australie échange le plus.
Mais ces sanctions, à l’exception
du secteur viticole, qui n’a pas
réussi à trouver de substitut à
l’énorme marché que représentait
la Chine, n’ont pas eu beaucoup
d’effets sur l’économie australien-
ne. Les autres secteurs impactés se
sont tournés vers d’autres clients et
ont aussi bénéficié de la hausse des
cours des matières premières. C’est
particulièrement vrai du charbon,
qui malgré des exportations en lé-
gère baisse en volume, a vu son
montant en valeur tripler, pour at-
teindre 72 milliards d’euros en
2021-2022. Par ailleurs, malgré ces
sanctions, les exportations austra-
liennes vers la Chine ont continué à
progresser, tirées notamment par
les prix élevés du fer.
L’OMC saisie
Pour l’ancien premier ministre
Malcolm Turnbull, le fait que ce
minerai, premier produit d’expor-
tation australien, dont 83 % de la
production est vendue à la Chine,
n’ait pas été visé par des mesures
punitives démontre que ces sanc-
tions commerciales étaient avant
tout « performatives ». Et comme
le ministre du Commerce, Don Far-
rell, qui a échangé la semaine der-
nière avec son homologue chinois,
il prédit « une reprise complète des
échanges » à courte échéance.
Richard McGregor, spécialiste de
la Chine au Lowy Institute, est
moins optimiste. « C’est assez typi-
que de la Chine d’entrebâiller la por-
te et de prétendre qu’elle est grande
ouverte. Mieux vaut attendre et voir.
Aukus (l’alliance militaire entre
l’Australie, les États-Unis et le
Royaume-Uni, NDLR) très pro-
chainement, donc je doute que les re-
lations commerciales entre les deux
pays se rétablissent rapidement. »
Il reconnaît néanmoins que de-
puis l’arrivée au pouvoir des tra-
vaillistes en mai dernier, et les ef-
forts déployés par ces derniers pour
renouer le contact avec Pékin, les
relations entre les deux pays se sont
nettement améliorées, malgré le
fait que sur le fond « la politique des
travaillistes est à peu près la même
(que celle des conservateurs,
NDLR). En revanche, le ton est très
différent, moins accusateur ». Enfin
il note que « de façon perverse, la
guerre en Ukraine a rehaussé la va-
leur stratégique des exportateurs de
matières premières. Or l’Australie
est un pourvoyeur majeur de matiè-
res premières pour la Chine ».
Dans l’attente d’un dégel plus af-
firmé, l’Organisation mondiale du
commerce, saisie par l’Australie en
décembre 2020, doit se prononcer
en milieu d’année sur les droits de
douane de 80 % imposées à l’orge
australienne, et ceux, frôlant les
200 %, imposés au vin en bouteille.
La Chine a également déposé
courant 2021 un recours devant
l’OMC, pour dénoncer les droits de
douane appliqués par l’Australie
aux éoliennes, éviers et roues de
A

ces dernières années, avant que le Qui plus est, l’Australie doit faire des chemin de fer en acier inoxydable
contact soit totalement rompu annonces importantes concernant embouti… ■
 mardi 14 février 2023 le figaro
20 économie
Aérien : la France doit faire vite pour
rattraper les États-Unis sur le kérosène vert
Le gouvernement veut en accélérer la production, alors que les avions sont contraints d’en utiliser davantage.
elsa bembaron £@ElsaBembaron
et jean-yves guérin £@jyguerin
énergie Cette fois, il va falloir être
efficace. En juillet 2021, Jean-Bap-
tiste Djebbari, alors ministre des
Transports, lançait la création en
France d’une filière carburant du-
rable pour l’aviation. Le fameux
kérosène vert indispensable pour
rendre propres les trajets aériens,
avant l’arrivée éventuelle de
l’avion à hydrogène. Mais cette ini-
tiative a fait pschitt. Ce mardi, trois
membres du gouvernement (Clé-
ment Beaune en charge des Trans-
ports, Agnès Pannier-Runacher
pour la Transition énergétique et
Roland Lescure pour l’Industrie)
remettent ce sujet sur le métier.
Alors que les États-Unis passent à
l’offensive.
Compagnies aériennes, énergé-
ticiens, gestionnaires d’aéroports,
avionneurs, motoristes… tous les
acteurs de l’écosystème aéronauti-
que français sont conviés à une
grand-messe sur ces carburants
appelés aussi SAF (sustainable al-
ternative fuel). Au premier rang, les
leaders tricolores comme Air Fran-
ce-KLM, TotalEnergies, Airbus,
ADP, Safran… « Nous allons de-
mander à cette task force de nous
dire d’ici le salon du Bourget en juin
combien nous pourrions produire de
carburants durables en France et en
Europe d’ici 2030, et avec quelle ré-
partition entre des biocarburants et
du kérosène synthétique, explique
au Figaro Clément Beaune. Pour
l’instant, il y a un goulet d’étrangle-
ment en matière de production. »
Selon des estimations qui de-
mandent à être affinées, les besoins
européens en carburants durables
pour l’aviation devraient atteindre
les deux millions de tonnes en
2030, alors qu’à peine plus de
200 000 tonnes sont produites sur
le Vieux Continent aujourd’hui.
Il y a urgence à établir cette
feuille de route : si la France exige
depuis l’année dernière l’incorpo-
ration de 1 % de carburant durable
dans les réservoirs d’avions,
l’Union européenne devrait dans
les prochains mois mettre la barre
plus haut. Et fixer à 6 % la propor-
tion de kérosène vert obligatoire en
2030. « Notre objectif est clair :
avoir suffisamment de carburant
durable produit en Europe pour que
les compagnies aériennes n’aient
pas à se fournir ailleurs, avance Clé-
ment Beaune. C’est une question de
souveraineté industrielle. »
Un pari loin d’être gagné car les
États-Unis ont pris de l’avance
dans ce domaine. Dans le cadre du
gigantesque programme de soutien
à l’industrie américaine baptisé
« lesréduire
IRA (Inflation Reduction Act), les
producteurs de carburant durable
locaux bénéficient de généreuses
subventions et les transporteurs
aériens de crédits d’impôt quand ils
en achètent. Résultat, à moins d’un
électrochoc, le pays de l’Oncle Sam
pourra produire en 2030 quatre fois
plus de kérosène vert que l’Europe.
Une histoire qui rappelle celle de la
voiture électrique, où la Chine par-
tie plus tôt nous inonde désormais
avec ses modèles low cost.
Pour éviter pareille mésaventu-
re, l’exécutif veut faire feu de tout
bois. Un coup de pouce des pou-
voirs publics sera indispensable
pour combler le retard sur les
États-Unis. « Quand la task force
nous aura remis la feuille de route
carburant durable, nous verrons
quels seront les bons leviers pour la
mettre en place, reconnaît Clément
Beaune. Par exemple, s’il faut sou-
tenir les implantations industrielles
ou bâtir un programme d’aide euro-
péen comme sur les batteries. »
« Le principal défi est de créer la
filière et d’amener les acteurs, d’un
côté les avionneurs, de l’autre les
énergéticiens, à se parler. Or, ils
n’en ont pas l’habitude, résume
Benoît Calatayud, directeur de la
A
transition énergétique chez Capge-
mini. L’aviation civile doit réduire
son impact environnemental, pour
répondre à des impératifs réglemen-
taires, mais aussi aux injonctions de
consommateurs ».
Un point que les acteurs de
l’énergie ont bien compris. « L’en-
jeu est de produire un carburant vert
qui puisse être directement utilisé
par un moteur d’avion, sans avoir à
changer les équipements, explique
Florence Delprat-Jannaud, direc-
trice du Centre de Résultats Pro-
duits Energétiques IFPEN. La limite
physique actuelle est de 50 % de bio-
carburant ». Les carburants fossiles
restent nécessaires au bon fonc-
tionnement des appareils. « Ils ap-
portent ce qu’on appelle des molécu-
les aromatiques. Elles permettent
notamment aux joints des avions de
supporter les changements de tem-
pérature », précise Florence Del-
prat-Jannaud.
Les industriels ont déjà com-
mencé à investir dans le domaine.
En France, TotalEnergies y tra-
vaille, avec en ligne de mire « la
réduction de 80 à 90 % des émis-
sions des CO2, par rapport à son
équivalent fossile », explique Valé-
rie Goff, directrice business unit
biofuel, TotalEnergies.
Huile de cuisson à La Mède
Plusieurs technologies, avec des
déchets agricoles ou des déchets
alimentaires, sont en cours de dé-
veloppement pour répondre à cet
impératif. La compagnie française
a misé sur l’Hefa (hydroprocessed
esters and fatty acids) visant à pro-
Tous les acteurs
de l’écosystème
chets d’origine animale ou alimen-
taire », précise Valérie Goff. Une
renouvelable et bas carbone, affi-
chant une capacité de 20 000 ton- en bref
duire ces carburants à partir d’hui- aéronautique français partie de la production de biocar- nes par an. Avec l’objectif d’utiliser
les de cuisson usagées et de résidus sont conviés burant de raffinerie de La Mède cet hydrogène pour en faire un
de graisses animales. En effet, les par le gouvernement (Bouches-du-Rhône) et de celle de carburant durable pour l’aviation,
L’indemnité
à une grand-messe carburant
biocarburants dans leur ensemble Normandie est destinée à l’aérien. avec une autre technique.
sur les carburants
font souvent l’objet de critiques dès durables. De quoi répondre aux besoins de ce Décidé à sonner la mobilisation proLongée
lors que leur production concur- F. BoUcHon/Le Figaro secteur, avant l’entrée en produc- générale, Clément Beaune ajoute : jusqu’à fin mars
rence l’industrie agroalimentaire. tion de la raffinerie reconvertie de « Nous demanderons à Engie, voire
Il s’agit donc d’exploiter des « mi- Grandpuits, en région parisienne. à EDF ou d’autres acteurs s’ils sont £ Le ministre de l’Économie,
nes » de déchets sans perturber la TotalEnergies, qui a investi volontaires pour se développer sur ce Bruno Le Maire, a annoncé
chaîne alimentaire. 500 millions d’euros dans ce projet, créneau. » lundi la prolongation
« Un des défis est de disposer de prévoit d’y produire 210 000 ton- Toutes ces techniques pour fa- d’un mois, jusqu’à la fin mars,
suffisamment de matières premières nes de SAF par an - ce qui nécessite briquer des carburants durables de l’indemnité carburant
comme les huiles de cuisson et ani- 400 000 tonnes d’intrants. C’est sont aujourd’hui coûteuses : les de 100 euros disponible depuis
males. Nous nous sommes donc as- aussi sur ce site qu’Air liquide in- plus abouties sont encore quatre mi-janvier pour les 10 millions
sociés avec Saria, une entreprise vestit 130 millions d’euros dans une fois plus chères. Mais il est indis- de foyers fiscaux les plus
spécialisée dans la collecte de dé- unité de production d’hydrogène pensable d’y investir. ■ modestes utilisant la voiture
pour aller travailler, mais que
seul un tiers des bénéficiaires
potentiels ont déjà perçue.
Des billets plus chers à cause des biocarburants des assises des
finances pubLiques
nitaire qui les a affaiblis, les trans- plus globale, l’idée fait son chemin prévues en avriL
décryptage porteurs aériens n’ont pas l’inten- de faire financer le surplus « carbu- £ Des assises des finances
jean-yves guérin tion de payer la note. En tout cas pas rant durable » d’abord par les pas- publiques seront organisées en
tout seuls. « Réduire les émissions sagers de classe affaires. « Les gens avril sous l’égide du ministère
£@jyguerin
carbone augmente les coûts. Les riches dans cette salle devront payer de l’Économie et des Finances
compagnies ne peuvent pas l’absor- la transition énergétique dans l’avia- pour faire « un point d’étape »
Voler propre a un coût. Les clients
des compagnies aériennes vont ra-
ber. Il doit y avoir un impact sur le
prix des billets », estimait fin 2022
Willie Walsh, directeur général de
tion », estimait il y a quelques mois
John Holland Kaye, directeur géné-
ral de l’aéroport de Heathrow
sur une revue lancée en vue
de rétablir les dépenses
publiques, a indiqué Bercy
émissions pidement s’en apercevoir. L’incor- l’Iata (Association internationale du (Londres). ce lundi. Ces assises - qui
carbone poration de carburant durable à la transport aérien). En mai 2021, le doivent réunir des économistes,
place du kérosène classique ren- PDG de TotalEnergies, Patrick Pou- Garder les clients des témoins internationaux,
augmente chérira le prix des billets d’avion. yanné, n’était pas plus rassurant Les transporteurs aériens, eux, se des représentants du monde
les coûts. Les L’explication ? Qu’il s’agisse du pour les passagers. « Il faudra bien posent une question : même en ex- économique, des parlementaires
compagnies biocarburant issu de la biomasse ou que la transition énergétique et éco- pliquant qu’ils relèvent leurs prix et des élus locaux - avaient
carburant de synthèse (fabriqués à logique soit financée, pas seulement pour protéger la planète, ne ris- été initialement annoncées
ne peuvent partir d’électricité décarbonée), ces par les compagnies aériennes ou les quent-ils pas de perdre des clients ? pour le mois de février.
pas produits peu émetteurs de gaz à ef- énergéticiens, mais aussi par l’en- Pour une fois, les ultra low cost
l’absorber. fet de serre sont chers, très chers : semble de la chaîne, y compris les (Ryanair, Wizz Air…) qui ont fondé
quatre à huit fois plus que le carbu- clients », affirmait-il. leur réussite sur des prix riquiqui, russie : moins de gaz
il doit y avoir rant classique. Bien sûr, on peut es- Il y aurait bien une autre solution sont les plus exposées. Comme sou- exporté en 2022
un impact pérer qu’en se structurant, la filière pour éviter de trop pénaliser les vent, la réponse est nuancée. Selon
£ Les exportations de gaz russe
sur le prix arrivera à baisser les tarifs de cette passagers : faire comme aux États- une étude menée en 2019 par les
ont chuté de 25,1 % en volume
des billets
Willie Walsh,
» énergie verte. Mais il restera tou-
jours un surcoût.
Or les carburants constituent un
Unis, où les acteurs de la filière
« carburant durable pour l’aviati-
on » (industriels, compagnies…) re-
universités américaines de Harvard
et d’Embry Middle Aeronautical,
les clients étaient prêts à des haus-
en 2022 tandis que celles de
pétrole ont augmenté de 7,6 %,
directeur général a annoncé lundi le vice-premier
poste de dépense essentiel pour les çoivent des subventions. Mais on ses justifiées par des raisons envi-
de l’iata ministre russe en charge
compagnies aériennes : en moyen- n’en prend pas le chemin en Fran- ronnementales allant jusqu’à 15 %
de l’Énergie, Alexandre Novak.
ne 25 % sur un vol moyen-courrier, ce, puisque le verdissement passe maximum.
Les Européens ont réduit
encore plus sur un long-courrier. par le respect d’une norme d’incor- Or, même s’il est difficile de faire
leurs achats de gaz tandis que
Au fur et à mesure que la proportion poration de kérosène vert, ou à dé- des prévisions, l’ajout de carburant
le sabotage, fin 2022,
de carburant durable obligatoire faut par le paiement d’une taxe. Le durable dans les dix prochaines an-
des gazoducs Nord Stream 1 et 2,
augmentera dans le réservoir, la prix des billets a donc commencé à nées ne devrait pas provoquer
dans la mer Baltique,
facture gonflera inexorablement. croître. d’augmentation supérieure à 10 %
a interrompu des livraisons qui
Sur chaque vol au départ de Dès janvier 2022, Air France a in- selon les experts. Une autre donnée
représentaient environ le tiers
France, la loi prévoit depuis l’année troduit une surcharge allant de 1 à peut rassurer les compagnies : l’an-
des exportations vers l’Europe.
dernière que 1 % du carburant doit 4 euros en classe éco, de 1,50 à née dernière, une augmentation des
+@
être durable. Cela passera à 2 % en 12 euros en classe affaires et en pre- tarifs de 20 % en France n’a pas em-
» Quelle indemnisation
2025 et à 5 % en 2030. L’Europe mière. Le mois dernier, la compa- pêché le trafic aérien de redémarrer chômage pour les seniors
planche sur un texte qui rendrait gnie tricolore a prévenu ses clients très vigoureusement. Une flambée proches de la retraite ?
obligatoire 2 % de carburant dura- que leur contribution pourrait être des tarifs liée à l’incorporation de » Immobilier locatif :
ble en 2025 et 6 % en 2030. Avec plus importante : de 1 à 8 euros en kérosène vert, mais aussi à la hausse les meilleures villes où investir
une montée en puissance jusqu’à éco et de 1,50 à 24 euros en classe généralisée de coûts (carburants dans la région de nantes
85 % en 2050. Or, après la crise sa- affaires et en première. De façon classiques…). ■ www.lefigaro.fr/economie

EntrEprisEs
L’État vole
au secours
du nickel
néo-calédonien
Le gouvernement a décidé d’accorder
un prêt de 40 millions à la SLN,
la filiale d’Eramet, en grande difficulté.
EmmanuEl Egloff £@eegloff
Mines C’était une bouffée d’oxy-
gène absolument indispensable.
« L’État a décidé d’apporter un
nouveau soutien financier de court
terme à la SLN, qui prendra la for-
me d’un prêt de 40 millions
d’euros », a annoncé lundi le mi-
nistère de l’Économie. La SLN
(pour Société Le Nickel) est la plus
ancienne société minière exploi-
tant le nickel dans le monde,
fondée en 1880 en Nouvelle-Calé-
donie. C’est aussi un poumon
indispensable à l’économie locale,
avec 2 200 emplois directs et
8 000 emplois indirects et induis.
Sauf que ce poumon respire très
mal, depuis des années. La SLN
devrait afficher des pertes pour la
onzième année consécutive au
titre de son exercice 2022.
Malgré les cours élevés du nic-
kel, la société pâtit de l’envolée
des coûts de l’énergie et de condi-
tions d’exploitation délicates, no-
tamment en raison de pluies dilu-
viennes. Conséquence : « La SLN
se trouve dans une situation de ren-
tabilité et de trésorerie très diffi-
cile », confie-t-on à Bercy. Le
gouvernement a donc décidé de
soutenir la société. Le premier ac-
tionnaire de la SLN avec 56 % du
capital, le groupe français Eramet,
contribue également au sauve-
tage, en « élargissant l’autori-
sation de découvert existante entre
le groupe et sa filiale ». Bercy re-
grette que « les deux autres action-
naires de la SLN, la STCPI, action-
naire à 34 % de la société et
représentant les provinces de Nou-
velle-Calédonie et Nippon Steel,
aient en revanche refusé d’apporter
un soutien financier à la SLN ». Et
ce « malgré les sollicitations ». La
STCPI, notamment, dispose d’une
participation dans Eramet valo-
risée 120 millions d’euros qu’elle a
décidé de ne pas mobiliser.
La somme débloquée par l’État
ne va pas régler durablement les
problèmes de l’entreprise. « Il
s’agit d’une aide de court terme,
qui va permettre à la SLN de fonc-
tionner pendant quelques mois »,
concède-t-on à Bercy. Le gouver-
nement veut cependant aller plus
loin, et « mettre en place une so-
lution pérenne ». Pour y parvenir,
il a demandé « à l’Inspection gé-
nérale des finances et au Conseil
général de l’économie d’établir un
diagnostic de la filière nickel en
Nouvelle-Calédonie ».
« Il n’est pas question de remet-
tre de l’argent dans le même sys-
30 millions d’euros d’aides pour
deux projets de recyclage de batteries
Lundi 13 février, le ministre
délégué à l’Industrie, Roland
Lescure, s’est rendu en Alsace
sur le site où Eramet compte
produire du lithium, en partenariat
avec Électricité de Strasbourg,
d’ici la fin de la décennie.
Roland Lescure en a profité
pour faire des annonces,
non pas sur le projet Eramet,
mais sur le recyclage de batteries
automobiles dont on peut tirer
plusieurs métaux (lithium,
cobalt, nickel…). Trente millions
d’euros vont être attribués
à deux projets portés par Veolia-
Solvay-Renault d’une part,
le figaro mardi 14 février 2023
21
tème », indique-t-on à Bercy. En
clair : il faut réellement changer
les choses car, au fil des années,
beaucoup d’argent a été déversé
sur le nickel néo-calédonien. En
2016, l’État avait ainsi accordé un
prêt de 325 millions d’euros et
Eramet un autre de 200 millions
d’euros. Des sommes qui sont
aujourd’hui totalement consom-
mées. Sans que la SLN ait pu re- Le centre minier SLN de Tiébaghi, en Nouvelle-Calédonie. Jean-Claude COuTauSSe/divergenCe
trouver un équilibre économique.
La mission confiée à l’Inspec-
tion des finances est de regarder
l’ensemble de la filière nickel néo-
calédonienne. Il existe trois usines
de raffinage sur le territoire. Celle
de la province Nord, à Koniambo,
propriété du géant du négoce
Glencore associé aux autorités
locales, rencontre également de
grandes difficultés économiques.
La deuxième, dans la province
Sud, vient de changer de mains,
“ La SLN se trouve
dans une situation
de rentabilité
et de trésorerie
très difficile
Bercy
”
vendue par le brésilien Vale à
Trafigura, concurrent de Glen-
core. Elle fait l’objet actuellement
d’un plan de redressement.
Mais la priorité porte bien sur la
SLN. Et il existe un certain nombre
de voies, pas encore mises en
œuvre. Il serait possible de sépa-
rer les activités de raffinage de
l’extraction de minerai propre-
ment dite ; d’investir pour avoir
accès à de l’énergie à un coût
stable et pérenne ; ou encore de
profiter du développement des
véhicules électriques pour pro-
duire du nickel destiné aux batte-
ries, plutôt que du ferronickel, qui
sert à faire de l’acier inoxydable
comme c’est le cas actuellement.
La dernière solution, qui fait fi-
gure de tabou, tient à une possible
sortie d’Eramet. Certes, le nickel
néo-calédonien a longtemps été
stratégique pour le groupe minier
français. Mais il ne contribue plus
aux résultats, puisque la SLN est
en perte. Surtout, Eramet a décidé
de focaliser ses investissements
sur les métaux de la transition
énergétique, notamment le nickel
pour batterie en Indonésie, le li-
thium, en Argentine et en Alsace,
et le recyclage de batterie. Une
chose est sûre, le gouvernement
n’entend pas abandonner la filière
nickel en Nouvelle-Calédonie. ■
et Mecaware-Verkor d’autre
part, dans le cadre du plan France
2030. Le premier projet prévoit
la construction d’une usine
de recyclage de batteries d’une
capacité de 10 000 tonnes par an
en 2023, suivie d’un deuxième
déploiement « trois fois plus
important en 2028 », précise
un communiqué de Bercy.
Le second projet, associant
le recycleur lyonnais Mecaware
et le fabricant de batteries
grenoblois Verkor, vise
à construire une « unité
industrielle de recyclage
A
des rebuts de production ». E. E.
 mardi 14 février 2023 le figaro

22 EntrEprisEs

Les restaurateurs peinent à digérer l’inflation

Prix en hausse, portions réduites, cartes resserrées… Les professionnels cherchent la recette pour tenir les marges.
mathilde visseyrias
£@MVisseyrias
restauration Des prix en nette
hausse, des plats rayés de la carte et
des corbeilles de pain qui n’arrivent
plus… Les sorties au restaurant ré-
servent de plus en plus de (mauvai-
ses) surprises. Au risque de déce-
voir les clients, les professionnels
changent leur carte, repensent les
recettes et passent au crible tous les
postes de dépenses. Confrontés à
une hausse inédite des coûts (ma-
tières premières, énergie, salai-
res…), ils cherchent par tous les
moyens à tenir les marges.
Il y a quelques mois encore, on
pouvait facilement trouver des for-
mules (entrée-plat ou plat-dessert)
à moins de 15 euros, pour le déjeu-
ner. Aujourd’hui, c’est quasiment
mission impossible. Selon le Grou-
pement des hôtelleries et restaura-
tions de France (GHR), les prix au
restaurant ont augmenté d’environ
8 % aux troisième et quatrième tri-
mestres 2022. C’est beaucoup, mais
cela ne suffisant pas, tous redou-
blent d’initiatives pour limiter les
frais. « Grosso modo, les profession-
nels répercutent un euro sur deux
d’inflation auprès des clients », ré-
sume Franck Trouet, délégué géné-
ral du GHR.
Les cartes raccourcissent pour
que soient négociés de meilleurs
prix avec les fournisseurs sur un
nombre réduit de produits, les plus
nobles d’entre eux disparaissent
(comme la sole), des fournisseurs
ont été changés pour faire jouer la
concurrence et baisser les prix
d’achat de denrées alimentaires…
Selon le GHR, 14 % des restaura-
teurs ont mis en place un plat du
jour qui n’existait pas ; 25 % d’entre
eux ont diminué le grammage des
plats ou modifié les recettes.
« Les hausses de coûts sont par-
tout : sur les matières premières
(nourriture et boisson), tous les
abonnements (logiciels de caisse, fi-
ches de paie), les travaux (l’inox, le
bois pour les cuisines…) », témoigne
Charles Perez, cofondateur de Nou-
velle Garde, qui compte trois bras-
series dans Paris. Tous les mois, il
analyse avec ses équipes la carte, et
fait les comptes. « Notre ratio est de
1 pour 4, confie le professionnel. Ce
que nous achetons 1, nous devons le
revendre 4. En dessous, ce n’est pas
tenable économiquement. » Cette
règle a coûté à la côte de bœuf sa
place sur la carte, depuis deux mois.
« Il aurait fallu la revendre 90 euros,
pour deux personnes. C’est trop cher
pour notre clientèle. À la place, nous
travaillons d’autres produits, comme
l’épaule d’agneau confite ou la côte
de cochon », détaille Charles Perez.
Quelques entrées (qui étaient ven-
dues 5-6 euros) ont augmenté de
1 euro. En revanche, les grands
classiques (saucisse-purée, croque-
monsieur, steak frites) n’ont pas
bougé.
Changer les habitudes n’est pas
facile. Dans un contexte de consom-
mation tendue, l’exercice s’appa-
rente à un jeu d’équilibriste pour qui
veut préserver le rapport qualité-
prix et l’image de marque de son af-
faire. Mais le statut quo n’est plus
une option. Malgré des aides massi-
ves pendant le Covid, le secteur res-
te fragile. En plus des prêts garantis
par l’État (PGE) à rembourser, la
concurrence est sévère.
Traquer les coûts n’a pas com-
mencé en cuisine. « Cette crise
énergétique à une vertu : elle a per-
mis de mettre fin à de mauvaises
habitudes, comme allumer toutes
les lumières le matin. Nous avons
par exemple réduit de 20 % notre
consommation énergétique en allu-
mant uniquement ce qui doit l’être,
explique Stéphane Manigold, pré-
sident de l’Umih Grand Paris et
dirigeant de Groupe Éclore (huit
restaurants). Mais cela ne pas suf-
fit pas. Depuis mars-avril 2022, le
prix de toutes les matières premiè-
res explose. » Le restaurateur a
mis le holà sur les poissons d’eau
de mer, et leur préfère des pois-
sons d’eau douce moins chers,
comme la truite. Les langoustines
et le homard désertent les cartes,
alors que la coquille Saint-Jacques
revient en force. « La saint-jac-
ques est d’excellente qualité et il y a
en a en quantité exceptionnelle, à
cause des éoliennes en mer qui les
attirent, raconte Stéphane Mani-
En février, une étude gold. Le prix au kilo n’a pas baissé,
de The Fork, mais il n’a pas augmenté non
une plateforme plus. »
de réservation Les quantités de sucre et de beur-
de restaurant en ligne, re ont été réduites : c’est bon pour le
révélait que 80 %
porte-monnaie, et en plus, c’est
de ses restaurateurs
abonnés prévoyaient mieux pour la santé. « Nous prépa-
d’augmenter leurs rons de plus en plus de sauces à base
tarifs, de 5 à 10 % pour de légumes et moins de viande et
la moitié d’entre eux. beurre », explique le professionnel.
Julia - stock.adobE.com Les légumes n’ont jamais été autant
valorisés (assiette de légumes raci-
nes, risotto d’épeautre avec des
champignons de Paris). L’addition
est, elle, plus salée. Il faut dire que,
dès le mois d’avril 2022, Stéphane
Manigold avait incité ses confrères
à augmenter de 10 % leurs tarifs,
pour ne pas mettre en danger leurs
entreprises. Aujourd’hui, il appelle
à l’aide. « S’il veut défendre les vrais
restaurateurs, nous attendons que le
législateur augmente la TVA à 20 %
sur les produits industriels, et impose
de la transparence sur les plats (in-
dustriels ou faits maison), déclare le
professionnel. Il y va de l’avenir des
artisans restaurateurs, menacés par
le fast-food et la malbouffe. C’est un
choix de société. 2023 sera une année
charnière. »
La restauration rapide, incontes-
tablement, se porte mieux que la
restauration traditionnelle. L’arri-
vée attendue de nouvelles ensei-
gnes américaines, comme Wen-
dy’s, en est une preuve. Les fast-
“ Les hausses de coûts
sont partout : sur les
matières premières
(nourriture et boisson),
tous les abonnements
(logiciels de caisse,
fiches de paie),
les travaux (l’inox,
le bois...)
”
Charles perez, CofondaTeur
de nouvelle garde
foods gagnent d’autant de plus de
terrain que le pouvoir d’achat des
consommateurs recule. Mais eux
aussi s’adaptent. « Depuis un an,
nous avons augmenté les prix de
10 %, ce qui n’a pas empêché de faire
un effort sur les marges, affirme
Frédéric Levacher, président exé-
cutif de Quick, dont la fréquenta-
tion des 117 restaurants augmente
encore depuis janvier. Parallèle-
ment, l’enseigne a multiplié les
opérations promotionnelles (un
burger à 2 euros). Depuis dix jours
aussi, elle vend un menu junior
Giant, moins cher que le menu
phare Giant (burger frites, boisson).
Les mois qui viennent n’annon-
cent rien de bon. Le risque de failli-
tes de restaurants grandissant, les
consommateurs vont devoir aug-
menter leur part d’effort. The Fork,
une plateforme de réservation de
restaurant en ligne, a interrogé
371 restaurateurs partenaires en fé-
vrier : 80 % prévoient d’augmenter
(encore) leurs tarifs, de 5 à 10 %
pour la moitié d’entre eux. Au pays
de la baguette, les amateurs de pain
pourraient s’étrangler. « On voit
des restaurants ne plus servir la cor-
beille de pain qu’à la demande », té-
moigne Damien Rodière, directeur
général Europe de The Fork. Envi-
ron 17 % des restaurateurs interro-
gés par la plateforme hésiteraient
même à le facturer. ■

Le mirage indien des constructeurs automobiles occidentaux

Renault-Nissan va lancer de nouveaux véhicules sur ce marché, où Stellantis et Volkswagen sont à la peine.
décoller leurs ventes. En 2022, Les perspectives de croissance particulièrement bas - environ Tiruvallur). Elles produisent des

« opportunité
La grande
valérie collet £@V_Collet

automobile L’Inde les fait tous

pour l’Inde rêver : Renault et son allié Nissan,
serait comme Stellantis avec ses marques
Jeep et Citroën, Volkswagen et sa
de pouvoir filiale Skoda… Lundi, le numéro
vendre deux de Nissan, Ashwani Gupta,
des voitures lui-même citoyen indien, est venu
en personne annoncer l’ambition
compactes de l’Alliance dans ce pays si pro-
électriques metteur.
à un prix Ensemble Renault et Nissan vont
investir environ 600 millions de
abordable, dollars en Inde, conformément à
en préservant leur ambition annoncée la semaine
la rentabilité. dernière, lors de la conférence de
relance de l’Alliance, de se renfor-
C’est ce que cer sur ce marché, où ils comptent
nous sommes lancer chacun trois nouveaux mo-
en train dèles, dont un électrique. Comme à
d’élaborer
Carlos Tavares,
» l’échelle mondiale, les deux alliés
ont décidé de rééquilibrer leur
participation dans ce pays, où ils
direCTeur général emploient 15 000 personnes. Ainsi
du groupe sTellanTis
Renault était actionnaire de l’usine
de Chennai à hauteur de 30 % et
Nissan de 70 %. Le Losange va
grimper à 49 %. À l’inverse, dans
l’ingénierie, Renault fera davanta-
ge de place à Nissan, qui passera de
33 % à 49 %.
Ces prochaines années, tous
deux vont proposer au marché in-
dien, avide de nouveautés, des vé-
A
Renault était le seul constructeur
occidental à percer dans le top 10
des ventes, en 8e position, avec ses
modèles Triber, Kwid et Kiger.
Faibles parts de marché
Mais le Losange n’y a décroché
qu’une part de marché de 2,14 %.
Celle de son allié japonais ne par-
vient même pas à atteindre 1 %.
Leur usine de Chennai est pourtant
capable de produire un demi-mil-
lion de véhicules par an. Or
Renault n’en a vendu que 81 000 en
2022 et Nissan 35 000.
du marché indien sont appétissan-
tes pour les constructeurs occi-
dentaux. D’autant plus après la dé-
route de certains en Chine (Renault
et Stellantis), le premier marché
automobile mondial, dont ils se
sont retirés faute de succès. L’an-
née dernière, les ventes de véhicu-
les particuliers neufs ont atteint
3,8 millions d’unités dans le sous-
continent. C’est peu à l’échelle
d’une population de 1,4 milliard
d’habitants. La classe moyenne est
en forte croissance et, avec un taux
d’équipement des ménages indiens
30 véhicules pour 1 000 habitants,
alors qu’il atteint 102 pour
1 000 habitants en Chine -, tous les
espoirs sont permis.
Mais l’arithmétique ne gouverne
pas le marché indien. En effet, la
croissance du marché profite avant
tout aux constructeurs implantés
de longue date. À eux deux, les lea-
ders Maruti et Hyundai représen-
tent plus de 55 % des ventes. Les
six premiers constructeurs (in-
diens, coréens et japonais)
concentrent 90 % du marché.
Les géants mondiaux, comme
Volkswagen et même Stellantis,
conservent néanmoins leur déter-
mination à y percer, même s’ils
n’ont toujours pas trouvé les clés de
la réussite dans ce pays. Avec sa
marque phare, le groupe Volkswa-
gen est en 11e position en nombre
de véhicules vendus, derrière sa fi-
liale tchèque, Skoda. Pourtant, il y
a trois ans, le groupe allemand
avait lancé une offensive indus-
trielle et commerciale. Avec ses
deux marques et des modèles tout
spécialement conçus pour le pays,
il espérait atteindre 5 % de part de
marché en 2025. Il n’a pas atteint
3 % en 2022. Stellantis aussi peine à
décoller. Carlos Tavares, le direc-
teur général du groupe, a annoncé
en mai dernier « le début d’une nou-
Jeep (4 modèles) et des Citroën. Le
groupe né de la fusion de PSA et
Fiat Chrysler revendique le fait d’y
avoir investi plus de 1 milliard
d’euros depuis 2015. L’implanta-
tion de Stellantis en Inde com-
prend, outre ses trois usines, un
complexe dédié aux technologies
de l’information et de la communi-
cation (Hyderabad) et un centre
software (Bangalore), ainsi que
deux sites de R&D, à Chennai et
Pune. Mais sa part de marché s’éta-
blit à 0,51 % en 2022. Il compte à
présent sur le lancement de sa C3
électrique pour séduire les clients
indiens.
Le groupe Stellantis tout comme
Renault et Nissan pourraient égale-
ment exploiter leur outil industriel
en exportant les véhicules qui se-
raient produits en Inde à moindre
coût. En novembre dernier, Carlos
Tavares l’avait déclaré aux journa-
listes indiens à Chennai dans le cen-
tre de R&D du groupe : « Jusqu’à
présent, l’Europe est incapable de fa-
briquer des véhicules électriques
abordables. La grande opportunité
pour l’Inde serait donc de pouvoir
vendre des voitures compactes élec-
triques à un prix abordable, en pré-
servant la rentabilité. C’est ce que
nous sommes en train d’élaborer. »
À force d’essayer, les Occiden-

hicules inédits, notamment élec- Le SUV Renault Kiger, l’un des modèles pensés pour séduire le marché velle ère » en Inde, où il dispose de taux finiront peut-être par trouver
triques et bon marché, pour faire indien. rEnault Group trois usines (Ranjangaon, Hosur, la recette du succès en Inde. ■
 le figaro mardi 14 février 2023

Tech 23

la pression
s’intensifie sur le
secteur des cryptos
aux états-unis
La SEC multiplie les enquêtes et sanctions. Celle sur
la société Paxos impacte le géant mondial Binance.
se (ou un panier de devises), ou

« pas
Paxos n’est
capable
inGriD verGara £@Vergara_i

cryptoactiFs Les actes suivent

d’un actif comme l’or. Ces crypto-
actifs sont de plus en plus utilisés
par des investisseurs et des épar-
d’administrer les mots. Les régulateurs finan- gnants, que ce soit pour se proté- La plus grande plateforme d’échange de cryptoactifs au monde se retrouve fragilisée. charnsitr/tock.adobe.com

le stablecoin ciers américains avaient prévenu ger de la volatilité des marchés

que le scandale de la plateforme crypto ou comme moyens de rè-
de Binance FTX ne serait pas sans conséquen- glement (transactions transfron- tions de contrôle des risques et du téral du stablecoin BUSD sont sans cadre juridique clair, la déci-
d’une ce pour le secteur crypto. Après talières ou au sein de protocoles travail de « due diligence » envers composées d’espèces et de bons sion jette l’industrie crypto dans le
manière sûre avoir forcé, la semaine dernière, la blockchain). Avec une capitalisa- Binance. Avec cette enquête, Bi- du Trésor américains. flou. « Compte tenu de l’incertitude
et solide
Le département
» plateforme d’échange Kraken à
fermer une de ses offres aux États-
Unis et à payer une pénalité de
tion de 16 milliards de dollars, le
BUSD était devenu le troisième
stablecoin le plus utilisé au monde.
nance, la plus grande plateforme
d’échange de cryptoactifs au
monde, se retrouve donc indirec-
L’annonce de l’enquête a déclen-
ché des ventes massives de BUSD
sur le marché, faisant logiquement
réglementaire qui règne actuelle-
ment sur certains marchés, nous
examinerons d’autres projets dans
des services 30 millions de dollars, la Securities tement en première ligne. « BUSD décrocher sa parité avec le dollar. ces juridictions afin de nous assurer
financiers
and Exchange Commission (SEC) a Question des réserves est un stablecoin entièrement déte- Paxos a rassuré les détenteurs de que nos utilisateurs sont à l’abri de
de new York
ouvert une enquête sur Paxos. Paxos est dans le viseur de la SEC nu et géré par Paxos (…) qui a éga- BUSD (ils sont environ 6,2 mil- tout autre préjudice injustifié », a
Cette société, réglementée par le pour avoir émis le BUSD à partir lement assuré que les fonds sont lions), qui pourront échanger indiqué Binance. En contraignant
département des services finan- de 2019 sans l’avoir enregistré en sûrs, et entièrement couverts par leurs jetons jusqu’en février 2024. la semaine dernière la société Kra-
ciers de New York, est notamment tant que titre financier (« security des réserves dans leurs banques », Mais cette mort programmée du ken à fermer son offre de « sta-
l’émettrice d’un « stablecoin » token »), ce qui enfreint, selon a rappelé lundi Binance. La ques- BUSD aura des répercussions à king » aux États-Unis (un service
appelé le BUSD, utilisé dans l’éco- elle, la protection des investis- tion des réserves et de la capacité court terme pour les traders et les qui permet à une plateforme de
système du géant mondial Binance seurs. « Paxos n’est pas capable des stablecoins à maintenir leur investisseurs qui l’utilisent, le rémunérer des utilisateurs pour
et au-delà. À la différence d’une d’administrer le stablecoin de Bi- parité avec des devises est au cœur temps pour eux de les convertir en l’immobilisation temporaire de
cryptomonnaie dont le cours nance d’une manière sûre et soli- des préoccupations des régula- d’autres actifs. Le président de la leurs cryptoactifs), la SEC avait
- volatil - varie en fonction de de », a expliqué le département teurs, depuis l’effondrement au SEC, Gary Gensler, plaide depuis envoyé un autre signal fort à l’en-
l’offre et de la demande, un « sta- des services financiers de New printemps 2022 d’un autre stable- plusieurs années pour une sur- semble des grands acteurs centra-
blecoin » est un cryptoactif dont York. Sans donner plus de préci- coin, le TerraUSD, qui était fondé veillance plus stricte des stable- lisés. Seul acteur coté en Bourse, le
l’objectif est de maintenir une va- sions pour l’instant, il a ajouté que sur un tout autre fonctionnement. coins, qu’il traitait en 2021 de « je- cours du géant Coinbase a
leur stable par rapport à une devi- la société avait failli à ses obliga- Selon Paxos, ses réserves en colla- tons de poker au casino ». Mais d’ailleurs chuté de 20 % depuis. ■

de grandes familles françaises au capital de rothschild & Co

Les Dassault, Peugeot, Wertheimer s’allient aux Rothschild pour retirer la banque de la Bourse.
Rothschild à 3,75 milliards banque d’affaires de la rue de Mes- taine d’associés de la banque (Par- privée et le capital-investissement,

3,75
Danièle Guinot £@danieleguinot d’euros. sine à Paris. « Peugeot Invest (…) tners), qui verront leur part doubler nécessitent peu de capitaux.
À l’issue de l’opération, décidée il pourrait détenir, en cas de succès de (passant de 5 % à 10 %). Les mem- « Il s’agit d’une transformation lo-
Finance Le retrait de la Bourse de y a quelques semaines et qui doit l’offre, jusqu’à 5,1 % du capital de bres du « concert » s’engagent sur gique dans l’histoire de Rothschild
Rothschild & Co commence à pren- encore obtenir l’aval des autorités, Rothschild and Co », a confirmé le long terme. « Ils seront liés par un & Co. Ce n’est pas une rupture, ex-
dre forme. De grands noms de l’in- Concordia renforcera son contrôle dans un communiqué la famille pacte prévoyant notamment une pé- plique un proche du dossier. Son
milliards dustrie française (Dassault, Peu- sur la banque d’affaires : elle dé- Peugeot. « D’autres investisseurs et riode d’incessibilité des titres d’une ADN est celui d’une société familiale
geot, Wertheimer, Maurel…) tiendra 55 % du capital. À ses côtés, des membres de la famille Rothschild durée de huit ans », précise Roths- non cotée, dont le développement re-
d’euros devraient soutenir la dynastie ban- un nouveau concert d’actionnaires, anglaise, dont Hannah Rothschild », child & Co. Et ils n’ont pas d’assu- pose sur la croissance organique et
Valorisation caire pour financer ce projet et de- représentant l’excellence française seront également actionnaires, rance de pouvoir s’en séparer en- les petites acquisitions. » Après une
de la banque venir actionnaires de « long ter- sera formé. La famille Dassault, déjà précise la banque. Au total, ces fa- suite, la liquidité n’étant pas année 2021 exceptionnelle et alors
Rothschild me » du prestigieux établissement. actionnaire de Rothschild & Co dé- milles détiendront conjointement garantie, a précisé François Pérol. que le marché des fusions-acquisi-
Il y a tout juste une semaine, tiendra environ 5 % du capital de 35 % du capital de Rothschild & Co. tions ralentissait, la banque a vu ses
Concordia - le holding de la famille l’établissement. Idem pour l’entre- « Ce sont des investisseurs de long Transformation logique bénéfices fondre de 21 % en 2022 à
Rothschild, emmenée par David et preneur italien Giammaria Giuliani, terme, qui partagent les mêmes La banque qui a forgé les plus 606 millions d’euros. « Un niveau
son fils Alexandre, qui est à la tête la famille Maurel et Édouard de convictions quant au développement grands mariages industriels depuis historiquement élevé », précise le
de 38,9 % du capital de la banque Rothschild. La famille Peugeot ainsi d’une société comme la nôtre », ex- plus de quarante ans, expliquait la groupe. Le chiffre d’affaires a, lui,
d’affaires - annonçait le lancement que la famille Wertheimer (via plique François Pérol, associé et co- semaine dernière ne pas avoir be- progressé de 1 % à près de 3 mil-
d’une OPA au prix de 48 euros par Mousse Partners), propriétaire de la président du comité exécutif de la soin de la Bourse pour se financer. liards d’euros. « Ce sont des résul-
action. Ce qui valorise l’établisse- maison de haute couture Chanel, banque d’affaires. Le solde du capi- Ses trois grands métiers, le conseil tats solides pour une année très cha-
ment créé en 1983 par David de vont, elles, entrer au capital de la tal sera entre les mains d’une cen- en fusions et acquisitions, la banque hutée », fait valoir François Pérol. ■

la séance du lundi 13 février la valeur du jour vcollet@lefigaro.fr

LE CAC JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12

AIR LIQUIDE ........................... 144,72

AIRBUS .............................................. 115,6
+1,69 144,92
+1,64 116,42
142,4
114,2
0,096
0,157
+9,31
+4,13
MICHELIN ..............................................
29,425
ORANGE ..............................................9,701
+0,39
+0,13
29,61
9,764
29,2
9,669
0,161 +13,24
0,209 +4,53
les coûts industriels et logistiques
ALSTOM ..............................................26,9
ARCELORMITTAL SA ...........................
AXA .............................................. 28,4
27,12
-0,04 26,98
+0,15 27,295
-0,09 28,59
26,78
26,79
28,385
0,218
0,32
0,157
+17,88
+10,36
+9
PERNOD RICARD ...........................
PUBLICIS GROUPE SA .....................
188,7

RENAULT ..............................................
74,12
41,535
+1,13
+0,05
+1,56
189,3
74,38
41,725
187,2
73,9
40,75
0,109 +2,69
0,218 +24,74
0,378 +32,81
ont flambé chez Michelin
BNP PARIBAS ACT.A ........................... 63,32 -0,42 63,91 63,18 0,175 +18,91 SAFRAN ..............................................132,56 +1,98 132,76 130,54 0,13 +13,38
BOUYGUES ..............................................30,74 +0,75 30,74 30,43 0,253 +9,63 SAINT GOBAIN ........................... 52,68 +0,44 52,91 52,5 0,135 +15,4 Michelin a brûlé plus de cash que prévu vité principale supérieur à 3,2 milliards,
CAPGEMINI ..............................................
184,4 +0,71 184,7 182,15 0,152 +18,24 SANOFI ..............................................87,65 -1,18 89,15 87,4 0,127 -2,44
pour faire face à l’inflation de ses coûts celui-ci ayant atteint 3,4 milliards en
CARREFOUR ..............................................
16,095 -1,23 16,375 16,095 0,35 +2,91 SCHNEIDER ELECTRIC ..................... 153,46 +2,29 153,84 149,18 0,104 +17,4
CREDIT AGRICOLE ...........................11,544 -0,17 11,646 11,534 0,168 +17,42 SOCIETE GENERALE ........................... 26,45 +0,76 26,65 26,085 0,351 +12,65 en 2022. Le numéro un mondial du 2022. La hausse des prix des pneuma-
DANONE ..............................................50,59 +0,84 50,64 50,18 0,148 +2,76 STELLANTIS NV ........................... 15,4 NC NC NC NC +16,05 pneumatique a dégagé un cash-flow li- tiques a permis de limiter l’impact sur la
DASSAULT SYSTEMES ........................... 37,46 +1,22 37,46 36,81 0,074 +11,84 STMICROELECTRONICS ..................... 45,385 +1,01 45,425 44,765 0,177 +37,55 bre structurel de 378 millions d’euros marge opérationnelle, qui ressort tou-
ENGIE .............................................. 13,13 -0,58 13,282 13,12 0,187 -1,93 TELEPERFORMANCE ........................... 266,6 -0,41 267,6 265 0,184 +19,71 CLÔTURE alors qu’il avait prévu en octobre tefois en baisse à 11,9 %, contre 12,5 %
ESSILORLUXOTTICA ...........................
EUROFINS SCIENT. ...........................67,5
172,1 +2,02 172,5
+0,03 67,76
168,6
66,86
0,067
0,18
+1,71
+0,66
THALES ..............................................
TOTALENERGIES ...........................59,54
125 +2,46
+0,32
127,05
59,72
122,3
58,92
0,179 +4,78
0,175 +1,52 DU CAC 40 700 millions. À fin décembre, le cash- en 2021. Elle a aussi permis de com-

+ 1,11 %
HERMES INTL ........................... 1711,5 +2,18 1714,5 1673 0,049 +18,44 UNIBAIL-RODAMCO-WE ..................... 60,05 +0,37 60,49 59,21 0,375 +23,48 flow libre était quant à lui négatif de penser la baisse des volumes liée à l’ar-
KERING ..............................................566,6 +1,27 569,4 556,1 0,142 +19,16 VEOLIA ENVIRON. ........................... 28 +1,08 28,03 27,67 0,179 +16,67 180 millions, contre un montant positif rêt des opérations en Russie et aux
L'OREAL ..............................................
389,65 +3,74 389,65 377,5 0,071 +16,8 VINCI .............................................. 108,18 +2,95 108,18 105,12 0,163 +15,96 de 1,357 milliard un an plus tôt. L’inflation perturbations en Chine dues au Covid-
LEGRAND ..............................................87,28 +1,72 87,6 85,34 0,187 +16,65 VIVENDI SE ........................... 9,78 0 9,802 9,74 0,144 +9,72 à 7 208,59 points des matières premières, de l’énergie et 19. Le chiffre d’affaires annuel de Mi-
LVMH .............................................. 810,3 +1,59 812,9 798 0,049 +19,18 WORLDLINE ..............................................
39,75 -1,22 41,3 39,69 0,306 +8,81
des charges liées à la main-d’œuvre a chelin a ainsi augmenté de 20,2 %, à
généré un coût record de 2,7 milliards 28,6 milliards.
LES DEVISES MONNAIE 1 EURO=
LʼOR VEILLE 31/12 l’an dernier, alors que Michelin avait pré-
vu entre 2,5 et 2,6 milliards. « Le qua-
En Russie, Michelin, dont le cours a
augmenté de 13,24 %, à 29,24 euros, de-
AUSTRALIE ................................................................................
DOLLAR AUSTRALIEN 1,5388 AUD
Cotation quotidienne assurée par Or en Cash
CANADA ................................................................................
DOLLAR CANADIEN 1,4263 CAD https://www.orencash.fr/investissement/ trième trimestre a été pénalisé d’envi- puis le début de l’année, continue de tra-
GDE BRETAGNE ................................................................................
LIVRE STERLING 0,8828 GBP ron 300 millions d’euros par une baisse vailler « sur différents scénarios de dé-
Lingot 1KG ................................. 55 619,12€ +1,45 %
HONG KONG ................................................................................
DOLLAR DE HONG KONG 8,3885 HKD
JAPON ................................................................................
YEN 141,65 JPY
Lingot 100g ................................. 5 573,91€
Lingot 50g ................................. 2 792,46€
-3,77 %
-4,82 %
des achats et des ventes de décembre sengagement, y compris la cession à
SUISSE ................................................................................
FRANC SUISSE 0,9849 CHF 1 741,04€
Lingot ONCE (31,10g) ................................. -4,86 % supérieure aux prévisions. Ce montant tiers », a-t-il dit. Pour 2023, le groupe
ETATS-UNIS ................................................................................
DOLLAR 1,0686 USD
TUNISIE ................................................................................
DINAR TUNISIEN 3,3322 TND
Lingot 10g .................................
Lingot 2,5g .................................
566,39€
149,77€
-5,13 %
-7,6 %
est décalé au premier trimestre 2023 », prévoit - sur la base d’un scénario de
MAROC ................................................................................
DIHRAM 11,103 MAD 2OFr NAPOLÉON .................................346,23€ +1,24 % a aussi fait valoir Michelin pour expliquer demande stable du marché - un résultat
TURQUIE ................................................................................
NOUVELLE LIVRE TURQUE 20,1377 TRY 20Fr SUISSE ................................. 342,35€ +1,29 % le recul de son cash-flow libre structurel. opérationnel de son activité principale à
EGYPTE ................................................................................
LIVRE EGYPTIENNE 32,6881 EGP SOUVERAIN ................................. 433,09€ +1,9 %
KRUGGERAND ................................. 1 850,84€ -0,92 % Le groupe clermontois est néan- 3,2 milliards à taux de change constant
A

CHINE ................................................................................
YUAN 7,293 CNY
50 PESOS ................................. 2 210,67€ +1,31 %
INDE ................................................................................
ROUPIE 88,395 INR 10 DOLLARS ................................. 904,55€ +0,96 % moins parvenu à atteindre son objectif et un cash-flow libre avant acquisitions
ALGERIE ................................................................................
DINAR ALGERIEN 146,3198 DZD 20 DOLLARS ................................. 1 807,09€ +1,07 % d’un résultat d’exploitation de son acti- supérieures à 1,6 milliard. ■

VALEURS LIQUIDATIVES EN EUROS (OU EN DEVISES), HORS FRAIS

VALEUR DATE DE
LIQUID. VALORISAT.
Cybèle Asset Management
37 av. des Champs-Elysées
 mardi 14 février 2023 le figaro
24 médias et publicité
Écologie : les éditeurs de presse
s’engagent pour la transition
La filière
lance ce mardi
son livre blanc.
Elle souhaite
aussi renforcer
sa couverture
éditoriale du défi
climatique.
CLAUDIA COHEN £@ClaudiaECohen
PRESSE La filière entame son
« tournant vert ». En ce mois de fé-
vrier 2023, les différentes familles
de presse française, représentées
par leurs syndicats sous l’égide de
l’Alliance pour les chiffres de la
presse et des médias (ACPM), lan-
cent un livre blanc afin de mettre
en avant leurs engagements à
l’heure de la transition écologique.
Il vise à décrire les grands chantiers
d’ores et déjà mis en œuvre par les
éditeurs, ainsi que ceux à venir,
« auprès à la fois des citoyens, des
annonceurs, mais aussi des pouvoirs
publics », commente Jean-Paul
Dietsch, directeur général adjoint
de l’ACPM. Ce livre blanc a été réa-
lisé dans le cadre de la commission
« la presse s’engage pour l’environ-
nement », fondée l’an passé.
L’aggravation du dérèglement
climatique ces dernières années,
dont les conséquences ne cessent
de faire l’actualité (canicules, sé-
cheresses, inondations…) et de
s’imposer dans le débat politique,
pousse les éditeurs à renforcer leur
couverture éditoriale des enjeux
environnementaux. « La filière
s’engage à informer de manière fia-
ble, approfondie et régulière sur ces
thématiques », est-il ainsi écrit
dans le livre blanc. En 2022,
5 000 articles en moyenne par mois
ont été publiés sur ces sujets par la
presse d’information, soit 10 % de
NOUVEAU
7€
EN VENTE ACTUELLEMENT
,50 Chez tous les marchands de journaux et sur www.figarostore.fr
A
plus sur un an, selon l’étude Aday
ObSoCo. En dix ans, leur nombre a
ainsi été multiplié par trois. Dans
son dernier rapport, le Giec souli-
gnait « le travail déterminant » des
médias traditionnels dans la com-
préhension des enjeux climatiques
par les citoyens, mais également
« leur volonté à agir ». En septem-
bre dernier déjà, une centaine de
médias (des journaux, aux côtés de
chaînes de télévision et de stations
de radio) signaient une charte
« pour un journalisme à la hauteur
de l’urgence écologique ». Au fil des
mois, les formations au sein des ré-
dactions se sont également multi-
pliées, pour sensibiliser les journa-
listes aux enjeux environnemen-
taux.
Comme nombre d’entreprises
tricolores, la presse planche par
ailleurs sur la réduction de son em-
preinte carbone. « La situation
énergétique inédite qui frappe l’Eu-
rope et le monde nous impose de ré-
duire notre empreinte en repensant
en profondeur nos processus et nos
usages », précise la filière. Pour ce
faire, une bonne partie des éditeurs
de presse s’équipent en « calcula-
teur carbone ». L’an passé, 70 %
des titres de l’Apig, qui représente
300 titres nationaux et régionaux,
ont réalisé un bilan de leur émis-
sion de CO2. Certains se sont aussi
engagés dans des démarches de
sobriété énergétique, en revoyant
la performance thermique de leurs
locaux, en récupérant de l’énergie
dans les imprimeries ou en
mettant en place des dispositifs de
télétravail.
Production vertueuse
Parmi leurs priorités, les éditeurs
s’engagent à « produire de façon
plus durable », en accélérant par
exemple le taux de recyclage des
journaux et des magazines. Ils sou-
haitent également « optimiser la
distribution des titres pour favoriser
la sobriété environnementale ». La
branche service courrier-colis de
La Poste, qui a mutualisé la distri-
bution de la presse avec celle du
« croyons
MARTIN BUREAU/AFP
Les éditeurs s’engagent courrier, ambitionne par exemple
à « produire de façon de migrer d’ici à 2030 vers des
plus durable », énergies bas carbone, grâce à un
en accélérant le taux de investissement de 400 millions
recyclage des journaux d’euros. De leur côté, les éditeurs
et des magazines.
misent aussi sur des solutions
Rodolphe Saadé au conseil
de surveillance de M6
Le PDG de CMA CGM détient plus de 8 % du groupe.
PHILIPPE LArrOqUE £@Philarroque
audioviSuEl Un partenaire du-
rable. Rodolphe Saadé va rejoindre
le conseil de surveillance de M6 : la
cooptation du PDG de l’armateur
CMA CGM sera proposée aux ac-
tionnaires du groupe audiovisuel
lors de l’assemblée générale du
25 avril prochain. Son mandat en
qualité de membre indépendant ar-
rivera à échéance en 2024, a précisé
lundi le groupe présidé par Nicolas
de Tavernost.
Rodolphe Saadé, qui « regarde de
nous
dans
possibles opportunités d’affaires »
dans les médias depuis plusieurs
mois, a mis un pied chez M6 en dé-
cembre dernier en franchissant le
la stratégie seuil de 5 % d’actions de la filiale de
de m6 et nous l’allemand Bertelsmann. Depuis,
souhaitons l’armateur marseillais est monté à
plus de 8 % en achetant des actions
l’accompagner. sur le marché. « Nous croyons dans
nous n’avons la stratégie de M6 et nous souhaitons
pas vocation l’accompagner. Nous n’avons pas
vocation à en prendre le contrôle »,
à en prendre avait-il alors précisé. Les routes de
le contrôle
Rodolphe Saadé
» M6 et CMA CGM s’étaient déjà croi-
sées lors de la mise en vente de la
chaîne gratuite. Après la fusion
avortée avec TF1 en septembre der-
nier, M6 avait reçu trois offres de
rachat dont une émanant du trio
Banijay-CMA CGM-Fimalac. Déjà
propriétaire à 100 % du quotidien
régional La Provence à Marseille
après une âpre bataille avec Xavier
Niel, Rodolphe Saadé pousse ainsi
ses pions dans les médias. Le mil-
liardaire aurait formulé, selon Les
Échos, une offre d’investissement
conjointe dans le média en ligne
Brut avec Xavier Niel, le fondateur
de Free. L’opération ne serait pas
encore bouclée.
La marge progresse encore
Pour M6, cette arrivée au conseil de
surveillance est la preuve de la pé-
rennité de son modèle et de ses
perspectives de développement.
Après avoir renouvelé les cinq
membres de son directoire pour une
durée de trois ans, dont Nicolas de
Tavernost, 72 ans, le groupe privé a
publié lundi de solides résultats.
Certes le chiffre d’affaires ressort en
retrait de - 2,4 %, à 1,357 milliard
d’euros en 2012, marqué par un re-
cul de ses recettes publicitaires
d’envoi à découvert, c’est-à-dire
sans emballage. Dans cette veine,
la presse travaille également à ren-
dre « plus sobre » sa diffusion nu-
mérique, qui représente aujour-
d’hui le nerf de la guerre pour le
secteur. L’idée étant de repenser
par exemple le choix des serveurs
et la nature de l’électricité les ali-
mentant, ou d’optimiser le poids
des vidéos en fonction du support
(ordinateur, tablette, téléphone…)
sur lequel elles sont regardées. En-
fin, le rôle de la presse dans la tran-
sition écologique va de pair avec
celui du secteur de la publicité.
« La filière s’engage à contribuer à
une communication responsable des
annonceurs et des agences », peut-
on lire dans le livre blanc.
En marge de leurs engagements,
les éditeurs se battent actuellement
pour le maintien du « dispositif
vertueux d’éco-contribution en na-
ture, dont la disparition est prévue
en 2023 ». En effet, depuis le début
de l’année, ils ne sont plus censés
pouvoir verser leur éco-contribu-
tion Citeo sous forme d’encarts
destinés à informer le consomma-
teur sur la nécessité de favoriser le
geste de tri et le recyclage. La fin de
ce régime dérogatoire pourrait
ainsi se traduire par une taxe sur les
éditeurs estimée à 22 millions
d’euros en 2023. ■
(- 4,7 %) dans un contexte de dé-
gradation de l’environnement éco-
nomique, mais son résultat opéra-
tionnel courant atteint « son plus
haut niveau historique » à 334,4 mil-
lions d’euros (retraité des aides pu-
bliques) contre 326,7 millions un an
plus tôt. Sa marge opérationnelle
grimpe encore à 24,6 %, contre
23,5 % en 2021 et 19,5 % en 2019.
Preuve s’il en fallait, des talents de
gestionnaire de Nicolas de Taver-
nost et des « synergies mises en place
entre les antennes du groupe ».
Rodolphe Saadé peut aussi s’avé-
rer un allié de poids dans la bataille
que Nicolas de Tavernost livre à Xa-
vier Niel pour la fréquence hert-
zienne du canal 6. Mercredi, les
deux hommes s’affronteront de-
vant l’Arcom dans le cadre de l’ap-
pel à candidatures pour le renou-
vellement de l’autorisation
d’émettre de M6 sur la TNT pour
une durée de dix ans, à compter du
6 mai prochain.
Le patron de CMA CGM pourra
aussi accompagner M6 qui finalise
« un projet stratégique, principale-
ment axé sur la poursuite et l’accélé-
ration de ses projets en matière de
streaming (AVOD) ». En particulier
sur la plateforme 6Play, qui reven-
diquait 17 millions d’utilisateurs par
mois en 2022. ■
zoom
Rugby : TF1 meT
la main suR les TesT-
maTchs des bleus
£ La filiale de Bouygues vient
d’acquérir les quatre matchs de
préparation du XV de France à la
Coupe du monde de rugby, qui
se déroulera en France, ainsi que
les test-matchs des Bleus lors des
Tournées d’automne de 2024
et 2025. Soit dix matchs au total.
TF1 s’offre ainsi une belle rampe
de lancement juste avant le
Mondial, dont elle est partenaire.
Et elle a la possibilité de sous-
licencier les rencontres qui
se dérouleront ultérieurement.
France Télévisions, qui diffuse
traditionnellement ces matchs,
n’aurait pas apprécié de se faire
damer le pion par TF1.
 mardi 14 février 2023 le figaro - N° 24 411 - Cahier N° 3 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

style Dessin
Les escarPins vénitiens et Les Beaux-arts de Paris céLèBrent
faits main de rené caoviLLa Le griBouiLLage dans toute
aux Pieds des stars Page 30 sa sPLendeur et sa diversité Page 28

« TribuTe bands »
des copies
plus ou moins
conformes
pink FloyD, U2,
beatles… les
Porsche - herVe FABre - rené cAoVillA ArchiVes - inhA

groUpes inspirés
par les stars
DU rock monDial
FleUrissent. Une
manière incertaine
De prolonger
la légenDe. Page 26

porsche lance la 911 dakar,

pensée pour la neige
eT le sable page 29

eUgène Walckiers, Un Flûtiste chez napoléon

●
Classique alexis kossenko exhUme en qUatre cD les œUvres De ce compositeUr oUblié, à la vie aUssi haUte en coUleUr qUe sa mUsiqUe.
●

réputé pour ses relectures passion- de Beethoven à Rossini, en passant Des créations aussi singulières que siteur. Pris sous l’aile du grand
Thierry hillériTeau £@thilleriteau
nées de Rameau, n’avait décidé de le par Wagner (pour son sens de l’at- pouvait l’être Walckiers lui-même. Boieldieu, et vivant confortablement

C
faire sortir de l’oubli. mosphère) ou Berlioz (pour son goût Quel destin ! Orphelin à l’âge de de ses arrangements pour flûte de

«
oup de langue moel-
leux. En chauffant.
Avec un gracieux ba-
lancement et un peu
d’abandon… » Ce n’est
pas un extrait du Premier baiser pour
les nuls ou du Guide de survie du par-
fait ado un soir de Saint-Valentin,
mais un exemple des innombrables -
et fantaisistes - didascalies dont
Eugène Walckiers parsemait ses par-
titions. Le compositeur, né en 1793,
serait sans doute resté un inconnu si
Convaincu, après avoir parcouru
les 110 opus de son catalogue, qu’il y
avait en Walckiers « un homme de
goût et de génie », l’interprète n’a pas
hésité à lui dédier un coffret de quatre
disques. S’entourant d’une équipe de
chambristes d’exception, dont la jeu-
ne altiste Léa Hennino, le violoncel-
liste Christophe Coin ou Nicolas
Baldeyrou à la clarinette. Le coffret
donne un juste aperçu de la variété
stylistique des œuvres chambristes de
Walckier. Empreintes de légèreté et
des musiques traditionnelles), elles
restent éminemment personnelles.
Une vie romanesque
Comme le soulignent leurs modula-
tions parfois fantaisistes, leurs brus-
ques changements de climat (le Trio
op. 97, oscillant entre légèreté sau-
tillante et profondeur mélancoli-
que)… Ou ce goût de la théâtralité et
de l’ « authenticité » à l’œuvre dans
les Délassements pour flûte solo (fasci-
nant rondeau auvergnat, où la flûte
10 ans. Laissé sans le sou par un père
spéculateur. Placé chez un géomètre
arpenteur. Enrôlé dans l’armée de
Napoléon pour servir dans la musique
militaire. Perdu en pleine déroute de
Waterloo. Récupéré par les Russes
comme comptable. Revenu à Paris un
an plus tard, de nouveau enrôlé sous
les drapeaux comme sous-chef de
musique, cette fois dans l’Aisne… Ce
n’est qu’à l’aube de la quarantaine, au
terme de cette première carrière mi-
litaire mouvementée, qu’il pourra
grands airs d’opéras à la mode !
Une vie romanesque, traversée par
un demi-siècle de bouleversements
de facture instrumentale. Et notam-
ment par le passage de la flûte traver-
sière « ordinaire » en bois, à celle en
métal, promue à la fin des années
1830… Occasion, pour Kossenko, de
se livrer à un passionnant exposé sur
l’histoire de la flûte traversière au
cours du XIXe siècle, sur pas moins de
sept flûtes différentes ! ■
Eugène Walckiers l’iconoclaste,
A

le flûtiste et chef Alexis Kossenko, d’élégance, mais aussi d’influences, se fait musette). enfin se fixer à Paris comme compo- 4 CD, Aparté.
 mardi 14 février 2023 le figaro
26 l'événement
Faux Pink Floyd mais vrai concert
Ben Donoghue
Olivier Nuc £@oliviernuc
N
ous en avons recensé dix-
neuf. Soit autant de groupes
qui, aux quatre coins du
monde, jouent le répertoire
d’une formation qui a don-
né son dernier concert en 2005 : Pink
Floyd. Le 2 juillet de cette année-là,
David Gilmour, Roger Waters, Nick
Mason et Richard Wright se réunis-
saient pour la première fois en vingt-
quatre ans sur une même scène londo-
nienne, dans le cadre du festival de
charité organisé par Bob Geldof, Live 8.
Vingt ans après son départ fracassant,
Roger Waters, membre fondateur du
groupe, avait ponctuellement enterré la
hache de guerre avec le guitariste David
Gilmour, qui avait pris le leadership de
la formation en son absence. Il y a quel-
ques jours, les deux hommes sont réap-
parus en conflit ouvert sur les réseaux
sociaux, après les propos scandaleux de
Waters, soutien prorusse dans le conflit
ukrainien. David Gilmour, qui a réacti-
vé l’an passé Pink Floyd le temps d’en-
registrer un single de soutien à la com-
munauté ukrainienne, a vu rouge.
Autant dire que les chances de refor-
mation d’un des groupes les plus em-
blématiques de la pop et du rock anglais
sont désormais très minces. Ce qui lais-
se un boulevard aux « tribute bands »
qui jouent leurs chansons.
La semaine dernière, deux d’entre
eux se produisaient justement à Paris.
The Australian Pink Floyd Show était à
l’affiche du Palais des congrès de Paris
les 4 et 5 février. Active depuis 1988, la
formation est la plus ancienne du genre.
Elle est aussi considérée comme la
meilleure. Opportunément, alors que
l’album phare Dark Side of The Moon est
réédité à la faveur des 50 ans de sa sor-
tie, la formation présente un nouveau
spectacle dans lequel l’album est joué en
intégralité. Écran circulaire, bruitages,
images surréalistes, l’esthétique Pink
Floyd est conviée. Musicalement, on est
dans la reproduction ultra-fidèle des
arrangements du groupe. Nick Mason,
batteur du Floyd, nous avait livré cette
formule au sujet des groupes de repri-
ses : « Ils sont tellement fidèles à nos en-
registrements qu’ils reprennent même
nos erreurs ! » Le musicien a lui-même
assemblé quelques amis pour rejouer le
répertoire du Pink Floyd des premières
années, alors que le groupe était dirigé
par le génial Syd Barrett, qui a dû être
débarqué de l’aventure après avoir suc-
combé à la folie. Il a laissé un chef-
d’œuvre, l’album The Piper at the Gates
of Dawn, et une poignée de singles. See
Emily Play fait partie des morceaux
joués par The Australian Pink Floyd.
Son leader, Jason Sawford, clavier, a
troqué ses études scientifiques pour fai-
A
re le tour du monde avec la musique des
Anglais. « Je voulais jouer dans un grou-
Dix-neuf formations pe. À Adelaide, j’ai vu une petite annonce
de types qui cherchaient un pianiste pour
reprennent
jouer Pink Floyd dans les pubs. J’avais
21 ans, j’ai foncé. » Aujourd’hui âgé de
56 ans, l’homme est entouré de musi-
aujourD’hui sur ciens plus jeunes, qui ont progressive-
ment remplacé les autres fondateurs de
scène le répertoire l’aventure. Sa formation peut se targuer
d’être la seule à s’être produite devant
De pink floyD. un son modèle. « David Gilmour nous a vus
dans les années 1990, il est venu frapper à
recorD qui n’empêche notre porte après le concert pour nous in-
viter à jouer lors de son cinquantième an-
niversaire. » Une reconnaissance qui
pas les autres ajoute au prestige de l’orchestre. Il don-
ne une centaine de concerts par an de-
groupes De rock, puis trois décennies.
Vendredi 10 février, c’était au tour
comme les Beatles du groupe français So Floyd de se pré-
senter devant le public parisien, et ce
ou u2, D’avoir aussi
pour la première fois de sa carrière. Là
aussi, un écran circulaire assure la
plusieurs « clones »
continuité avec le modèle. L’accent est
mis sur la production des années 1980-
1990, pourtant pas la plus mémorable
à travers le monDe. de Pink Floyd, et aucun titre de Syd Ba-
rett n’est au programme. Dommage. Si
Des « triBute BanDs » le chanteur de The Australian Pink
Floyd Show a le bon goût de rester dis-
plus ou moins cret, peut-être même un peu trop, celui
de So Floyd, un sosie d’Alex Kapranos,
convaincants. le guitariste de Franz Ferdinand, en lu-
nettes noires, se prend pour une rock
star. Ce qui est hors sujet : dans Pink
Floyd, les musiciens ont toujours su
s’effacer derrière la dimension visuelle
de leurs spectacles, sans se mettre en
avant. The Great Gig in the Sky et Us and
Them, pièces maîtresses de la geste
floydienne, souffrent de la comparai-
son avec les originaux, bien sûr, mais
aussi avec les Australiens, dont le son
est très proche de Pink Floyd. À la Salle
Pleyel, celui-ci était brouillon, mettant
les percussions et la batterie au premier
plan, au détriment des guitares, des
voix et des claviers.
“ Ils sont tellement fidèles
à nos enregistrements
qu’ils reprennent même
nos erreurs !
”
NiCk MASON, BATTeuR de PiNk FLOyd
Pink Floyd, groupe universellement
reconnu pour la richesse de son réper-
toire, est une des formations qui se prê-
tent le mieux à l’exercice de la reprise.
Mais les recordmen du genre demeu-
rent les Beatles. The Bootleg Beatles,
fondés en 1983, sont peut-être bien le
plus vieux « tribute band » de l’histoire.
Si leurs légendaires modèles se sont
produits sur scène moins de dix ans,
cela fait quatre décennies que ces An-
glais sillonnent le monde. Ils seront en
tournée française la première quinzaine
du mois de juin. Les Rabeats, assemblés
à Amiens, poursuivent leur route depuis
1999. Queen, Led Zeppelin, AC/DC,
The Australian Pink Floyd Show
a donné deux concerts au Palais
Kiss, tous les groupes de classic-rock
font l’objet de « tribute bands ».
des congrès de Paris,
les 4 et 5 février.
Alors que les formations originales
arrivent au bout de la route, ces musi-
ciens comblent les demandes des fans.
Ce qui est en train de faire du rock une
musique de répertoire, pas très loin du
classique. Dans les années qui viennent,
alors que les formations assemblées par
les baby-boomeurs dans les années
1960 et 1970 ne seront plus qu’un sou-
venir, il sera encore possible d’écouter
leurs tubes joués par des clones plus ou
moins convaincants. Car, à la différence
du répertoire classique, dont il existe
par essence des dizaines d’interpréta-
AGENDA
tions, la musique populaire est connue
le plus souvent dans des versions origi-
● So Floyd
nales. Un orchestre aura beau jouer les
chansons à la note près, avec le même
Le 9 mars à Clermont-Ferrand,
le 10 à Grenoble, le 11 à Saint-
matériel, le toucher et la voix des inter- Étienne, le 16 à Montpellier,
prètes originaux demeurent uniques. le 17 à Toulouse,
Ainsi, un musicien aussi raffiné que Da- le 25 au Cannet,
vid Gilmour, immense chanteur et gui- le 5 avril à Montbéliard,
tariste, est doté d’un son inimitable. le 6 à Strasbourg,
C’est Roger Waters, qui joue les mor-
ceaux de Pink Floyd avec trois musi-
le 7 à Amnéville, le 11 à Rennes,
le 12 à Angers, le 13 à Niort,
ciens pour pallier l’absence de son frère
ennemi, qui en a fait le premier l’expé-
le 14 à Orléans.
www.sofloyd.com
rience. Afin de provoquer Gilmour, il
était allé jusqu’à embaucher Eric Clap-
● The Dire Straits
ton à la guitare dans les années 1980.
Déjà une nouvelle vague de groupes
experience
Le 14 novembre 2023
est l’objet d’hommages. C’est le cas de
U2, né au début des années 1980 et tou- à Saint-Omer, le 15 à Amiens,
jours actif. À Dublin, Beyond The Music le 17 à Reims, le 18 au Havre,
a choisi d’honorer l’album emblémati- les 19 et 21 à l’Olympia (Paris)…
que de 1987, The Joshua Tree, entouré
d’un orchestre de douze cordes et de dix ● The Australian Pink Floyd
choristes. Nigel Connell, chanteur, ex- Show
plique le projet. « Notre volonté est de Le 14 février à Annecy,
partir d’un album classique de la pop et le 16 à Lyon, le 19 à Maxéville.
de le revisiter en intégralité. Comme nous
sommes Irlandais, nous avons choisi de ● Beyond The Music-
commencer par un disque de notre pays. The Sound of u2
Mais nous pourrons la prochaine fois Le 28 février à Toulouse,
nous emparer d’un album de Bruce le 1er mars à Tours,
Springsteen ou de Pink Floyd », précise-
le 2 à Bordeaux, le 3 à la Salle
t-il. Les membres de U2, qui annoncent
de leur côté un album de nouvelles in-
terprétations de leurs titres, ont donné
leur bénédiction à l’initiative. Il y a
Pleyel (Paris), le 6 à Nantes,
le 7 à Saint-Brieuc,
le 9 à Marseille,
quelques années, ils avaient eux-mê- le 10 à Montpellier…
mes effectué une tournée pendant la-
quelle ils interprétaient l’album en inté-
gralité. « La voix de Bono avait beaucoup
● The Bootleg Beatles
Le 1er juin à Caen, le 2 à Lille,
changé en trente ans, et rendait le le 3 à Metz, le 4 à Nantes,
concert très différent de ce que j’avais vu le 6 à la Salle Pleyel (Paris),
à Dublin en 1988 », explique Nigel le 7 à Tours, le 8 à Rennes,
Connell, qui se plaît à penser que leur le 9 à Bordeaux, le 10 à Lyon,
relecture séduira Bono, The Edge, le 13 à Annecy.
Adam Clayton et Larry Mullen Jr. Re-
portée plusieurs fois à cause de la pan-
démie, leur tournée française commen-
cera le 28 février à Toulouse pour se
terminer le 21 mars à Amnéville. « À
force, nous avions fini par penser que
nous ne parviendrions jamais à nous pro-
duire en France. C’est d’ailleurs en va-
cances dans votre pays avec mes parents
que j’étais tombé sous le charme de
The Joshua Tree, il y a trente-cinq ans. »

Culture
« Coupures » : Une
partie de campagne
très actUelle
derrière son ton enGaGé, cette pièce, qui conte
les tribulations d’un Maire de villaGe écoloGiste
et de ses adMinistrés, n’oublie pas de faire rire. chapeau !
aNthoNy Palou apalou@lefigaro.fr
A
vant de commencer cette
critique, il serait aimable de
revenir sur les quelques
mots que tint, il y a une se-
maine, à la fin de la repré-
sentation, Samuel Valensi entouré de sa
compagnie, la Poursuite du bleu. Ce
trentenaire rendit un vibrant hommage
au journaliste et directeur de théâtre
Philippe Tesson, disparu mercredi 1er fé-
vrier. De mémoire, Samuel Valensi dit
ceci : « Mon père, vétérinaire, soignait les
chats d’un certain Philippe Tesson. Les
chats de ce dernier m’ont donc présenté à
leur maître et j’ai eu un coup de cœur pour
cet homme espiègle, drôle, vif, intelligent
(…). Il m’a proposé de devenir son assis-
tant de production au Théâtre de Poche-
Montparnasse. Il va devenir mon mentor,
je vais devenir son bras droit. Il m’a donné
cet amour du théâtre et l’envie de m’y
consacrer (…). Je lui dédie cette représen-
tation. » Applaudissements soutenus
dans la salle. Philippe Tesson, on le sa-
vait, flairait le talent. Il avait édité dans
son Avant-scène, Coupures.
Il est vrai que le théâtre de Samuel Va-
lensi et Paul-Eloi Forget a un côté salu-
taire, un théâtre qui sort de ces petites
histoires contemporaines psycho-senti-
étincelante « daMe de la Mer » au vieux coloMbier
Géraldine Martineau Met en scène avec Maestria le chef-d’œuvre d’ibsen, pièce où elle endosse éGaleMent le rôle de l’héroïne traGique.
Nathalie SimoN nsimon@lefigaro.fr
L
a pièce s’ouvre sur un tableau
flamand nimbé par les bru-
mes d’un fjord. Superbe ! En-
tre la terrasse attenante à une
maison qu’on ne voit pas et
une vieille barque échouée, un peintre
(Alain Lenglet) croque un paysage dans
lequel il songe à ajouter une sirène.
Avec un jeune sculpteur (Adrien Si-
mion), il évoque Ellida Wangel (Géral-
dine Martineau), fille de gardien de
phare, une femme surprenante mue par
des « forces mystérieuses » qui a l’habi-
tude de se baigner chaque matin quel
que soit le temps. Comme pour fuir son
existence « douce », mais monotone.
Les habitants la surnomment « La dame
de la mer ». Elle est la seconde épouse
d’un mari aimant, le docteur Wangel
(Laurent Stocker), déjà père de Bolette
et de Hilde (respectivement Elisa Erka
et Léa Lopez). Plus âgé qu’elle, il l’a en-
traînée loin de sa mer patrie.
POUR LA SAINT-VALENTIN, FAITES-LUI UNE SURPRISE DE TAILLE !
EN AVANT-PREMIÈRE AUJOURD’HUI DANS TOUTE LA FRANCE !
mentalo-nombriliste. Coupures, donc :
nous sommes dans un village tout cham-
boulé par la future installation d’anten-
nes relais. Un jeune paysan, Frédéric
(Samuel Valensi), est aussi le maire écolo
(pistes cyclables, circuit court, festival
de musique débranchée et tout le trala-
la…) d’une petite municipalité. Il est ma-
rié à Sahar (June Assal), père d’une
fillette, et possède une exploitation qui
bat de l’aile, surendettée, se heurtant
aux difficultés à obtenir les aides de
Bruxelles. Élu, il se doit d’être à la hau-
teur des attentes de ses électeurs, mais
tout se complique lorsqu’un représen-
tant d’un opérateur lui annonce le dé-
ploiement d’antennes relais dernière
génération. On le croyait intègre, il
s’avérera corruptible, comme les autres.
Faux cul-terreux sympathique, il déci-
dera seul en son âme et mauvaise
conscience l’implantation des antennes.
Folle énergie
Voilà une pièce engagée, mais qui porte
en elle tous les ingrédients de la farce.
Nous passons du présent au passé, mais
pour quel avenir ? Les scènes caracolent.
De la salle polyvalente de la commune, à
une salle de maternité, d’une banque aux
bureaux de la préfecture, ou encore dans
un hangar ou dans le cerveau stressé de
Frédéric, qui cauchemarde. Ne se voit-il
Pour sa seconde mise en scène à la
Comédie-Française, après La Petite Si-
rène d’Andersen, Géraldine Martineau
a choisi de monter le chef-d’œuvre du
dramaturge norvégien Henrik Ibsen et
de jouer elle-même cette héroïne tra-
pas – scène hilarante – en participant
d’un jeu télévisé, « La Roue de la fortune
agricole » ? Il y a dans cette pièce redou-
tablement bien huilée une mise en scène
d’une rare ingéniosité.
Quant aux acteurs et actrices, atten-
tion, ils lâchent les chevaux ! À l’excep-
tion de Samuel Valensi, tous endossent
plusieurs rôles. D’une opératrice à une
infirmière, d’un infirmier à un serru-
rier, d’un conseiller à un déménageur,
d’un huissier à une préfète, d’une ban-
quière à une secrétaire, d’un deman-
deur d’emploi à un facteur, ils « frégoli-
sent » sans relâche. On pense souvent à
« la mécanique Michalik », à cette folle
énergie, à ce rythme toujours croissant,
à tous ces subterfuges qui font l’étoffe
d’un théâtre vivant. Pour un peu, le
spectateur quitterait son fauteuil pour
grimper sur la scène, mettre son grain
La mise en scène de Géraldine
Martineau restitue l’esprit
de la pièce de Henrik Ibsen.
Raphaël GaIllaRDE/GaMMa RaphO
de sel dans cette histoire rocambolesque
d’antennes relais. Être maire ne va pas
sans sacrifices. Cela entraîne inélucta-
blement le paiement d’une lourde
dîme : le reniement de soi.
Il faudrait insister sur la prestation de
June Assal, qui interprète aussi Séverine,
la secrétaire du maire. Une prestation qui
décoiffe. Quant à Valérie Moinet, lors-
qu’elle revêt les oripeaux de l’huissier,
on n’en mène pas large. Parodie, humour
noir, bons et mauvais sentiments, tout
est électrique dans ce monde agricole
broyé dans l’enfer politico-administra-
tif. N’oublions pas la musicienne Lison
Favard. Son violon donne le la d’une so-
ciété dodécaphonique. Un pur moment
de théâtre engageant. ■
Coupures, jusqu’au 30 avril au Théâtre
de l’Œuvre (Paris 9e). Tél. : 01 44 53 88 88.
www.theatredeloeuvre.com
gique. Ellida a du mal à s’adapter à la
société du « peuple terrien », la mer lui
manque, elle va s’émanciper. Elle
confie à son mari qu’elle s’est fiancée
autrefois à un marin américain (Clé-
ment Bresson) qu’elle voit ressurgir tel
un fantôme dans le brouillard. Elle
avait signé un pacte avec lui, il avait
promis de revenir la chercher. Sa pré-
sence irrationnelle la pousse dans ses
contradictions.
Une atmosphère mystérieuse
À la fois sociologue et psychologue, fé-
ministe avant l’heure, Ibsen traite de
la condition de la femme au XIXe siè-
cle, du mariage impliquant des de-
voirs, mais également de liberté. Ellida
hésite, s’interroge, cherche sa vérité.
Elle est partagée entre le désir d’être
fidèle à Wangel, mais est attirée et à la
fois effrayée par son ancien préten-
dant. Ses belles-filles ont également
envie d’un autre monde, en particulier
Bolette qui voudrait mener sa vie com-
me elle l’entend.
le figaro mardi 14 février 2023
27
À un rythme toujours croissant,
Samuel Valensi et sa compagnie
offrent une représentation
décoiffante, avec l’étoffe
d’un théâtre vivant.
JulEs DEspRETZ
Géraldine Martineau restitue claire-
ment la langue et l’esprit de l’auteur de
ce « drame moderne » dans la traduc-
tion de Maurice Prozor. Elle a de nou-
veau fait confiance à la scénographe
Salma Bordes qui réussit à créer une
atmosphère mystérieuse digne d’un
conte de Grimm ou d’un film de Tim
Burton. Sous sa direction bienveillan-
te, les comédiens évoluent comme
dans un ballet sur un tapis de feuilles
vertes recouvert d’un halo de buée.
On découvre un Benjamin Lavernhe
en amoureux éconduit tout en ambi-
guïtés. Par la grâce d’un micro, Clé-
ment Bresson a une voix d’outre-tom-
be qui sied bien au marin. Laurent
Stocker est aussi juste que la musique
de Simon Dalmais. Quant à Géraldine
Martineau, elle est entièrement au ser-
vice de son personnage. Vulnérable et
déterminé. Un beau spectacle. ■
La Dame de la mer, au Théâtre du Vieux
Colombier (Paris 6e), jusqu’au 12 mars.
Texte aux Éditions Les Cygnes.
Tél. : 01 44 58 15 15.
A
 mardi 14 février 2023 le figaro
28 Culture
Aux BeAux-Arts de PAris, hommage au gribouillage
D’artistes ou D’anonymes,
150 brouillons, graffitis,
formes bâclées ou Dessins
machinaux forment
une histoire De la pulsion
graphique De la renaissance
à nos jours.
éric Biétry-riVierre
ebietryrivierre@lefigaro.fr
Z
igouigouis, tortillons, bar-
bouillages… Il flotte comme
un joyeux parfum de liberté
dans les espaces d’exposition
de l’École nationale supérieu-
re des beaux-arts de Paris. Une équipe
de choc (Francesca Alberti, directrice
du département d’histoire de l’art à la
Villa Médicis, Diane Bodart, qui ensei-
gne cette matière à la Columbia Univer-
sity de New York, Anne-Marie Garcia,
en charge des collections maison, et
Philippe-Alain Michaud, conservateur
au Centre Pompidou) a réuni dans la
vaste nef de la salle Melpomène, ainsi
qu’à l’étage, dans l’imposante salle
Foch, quelque 150 pièces, œuvres ou
documents graphiques de la Renaissan-
ce à nos jours.
Avec des photos et des films expéri-
mentaux, ils racontent cette pulsion
universelle qu’est le gribouillage. Celle
qui s’épanche négligemment dans les
marges des cahiers d’écolier (extraor-
dinaire, celui du jeune Delacroix, ou le
premier « M. Patate » réalisé par le futur
Louis XIII à l’âge de 6 ans), sur les blocs-
notes à côté du téléphone, ou que sem-
ble appeler tout pan de mur urbain, de
ceux des bas-fonds de la Rome baroque
à ceux de la taverne Ramponneau, en
passant par ceux du métro. Et l’on se
rend compte à quel point ce geste qu’on
croyait négligeable face au « disegno »,
le tracé intentionnel, concept majeur
du classicisme, est intense. Aussi uni-
versel qu’intemporel.
Ainsi, au fil de la visite, parmi ces
échantillons de « formes graphiques
régressives, instinctives, incontrô-
lées » (dixit les commissaires), on
croise un des tout premiers relevés
d’une peinture rupestre préhistorique
par l’abbé Breuil. Ou bien une ins-
« avant l’orage », quanD les artistes se lâchent sur la nature
belle promenaDe symbolique et poétique en 20 propositions à la bourse De commerce pour réponDre à la crise climatique et à ses terribles Dégâts.
Valérie Duponchelle £@VDuponchelle
L’
été dernier, la sécheresse
et les incendies rava-
geaient les monts
d’Arrée et la forêt de
Huelgoat, aux roches
granitiques jadis couvertes de mousse
bien verte. Le 13 juillet, François Pi-
nault, peu disert d’ordinaire, expliquait
au Télégramme pourquoi il soutenait le
travail de reconstitution de la lande et
de mise en valeur de la chapelle de
Saint-Michel-de-Brasparts (aujour-
d’hui en cours). « En 1990, après l’in-
cendie de la forêt de Brocéliande, j’avais
eu à cœur de participer à son reboise-
ment. Aujourd’hui, c’est un autre des
hauts lieux naturels et spirituels de la
Bretagne qui est frappé. Le Breton que je
suis se sent tout naturellement concer-
né. » Sa réponse est aussi parisienne.
C’est « Avant l’orage ».
Marqué par cette catastrophe,
l’homme d’affaires, mécène et collec-
tionneur, a voulu donner la parole aux
artistes de sa collection que la question
taraude. Ils ont traduit la nature, ses
miracles, ses débordements, son re-
A
cription balafrant un morceau de gra-
din du Colisée. Ou encore, ethnologi-
ques, des copies faites par Marcel
Griaule en Abyssinie.
Ici les palimpsestes d’une fresque pi-
sane du XVe siècle témoignent de la vie
gaillarde des ouvriers sur leurs échafau-
dages. Là on surprend Giacometti enca-
drant une des mille et une formes ébau-
chées sur l’un des murs de son atelier.
Ici un moine copiste du Moyen Âge a
laissé un bonhomme hirsute dans un
manuscrit d’abbaye. Là un autre, égale-
ment anonyme, s’est amusé à caricatu-
rer François Ier dans un registre comp-
table de la ville de Blois.
Se délier la main
Au rayon des portraits-charge le Bernin
triomphe. Son stupéfiant cardinal Sci-
pione Borghese, exécuté en trois coups
de cuillère à pot, semble préluder aux
trognes d’un Dubuffet se moquant mé-
chamment du Tout-Paris de l’après-
guerre. Mais le grand caravagesque José
de Ribera n’est pas en reste. Publié ou
porté en peinture, son profil outré d’un
nouveau dans des œuvres symboli-
ques, comme les nuages de Tacita
Dean ; métaphoriques comme les pê-
cheurs qui étreignent leurs proies, de
Jonathas de Andrade (O Peixe, 2016) ;
minimalistes, comme les vitrines
d’Edith Dekyndt, ou incarnées, comme
les lampes corps de feu Alina Szapocz-
nikow ; parfois prémonitoires, comme
les femmes bleues en feu de Judy
Chicago, la pionnière (Women and
Smoke, 1972). Et, sans doute sous l’effet
de cette motivation et de l’actualité
alarmante sur le réchauffement clima-
tique, il y a un souffle particulier à la
Bourse de Commerce. Les vingt artistes
se succèdent dans des installations
souvent saisissantes, plongeant leurs
racines dans la poésie et la philosophie,
magnifiant le dénuement d’où tout re-
part, sorte de cadavre exquis qui célè-
bre la fin des temps et la victoire de la
nature qui reprend ses droits.
Douceur inquiétante
Il n’est pas toujours facile de créer un
vrai lien entre les œuvres d’une collec-
tion privée, si phénoménale soit elle. Et
d’ouvrir au grand public l’accès à des
mondes artistiques parfois terriblement
jésuite vers 1640 lui aurait sûrement
valu des problèmes.
Et Léonard ? Il a bien sûr couché pêle-
mêle dans ses papiers quantité d’ébau-
ches d’idées ou d’exercices pour se dé-
lier la main. On admire par exemple un
de ses fameux profils de vieillard en cas-
se-noisettes à côté d’une étude d’anato-
mie pour l’Homme de Vitruve. Aujour-
d’hui, on appelle de tels motifs répétés
machinalement sur un coin de carnet
des « doodles ». Le Toscan a également
été le premier à recourir systématique-
ment au gribouillis en prélude à ses ta-
bleaux. Il a même baptisé la méthode le
« componimento inculto » (« composi-
tion inculte »), oxymore consistant à
ce que la main cherche la forme frénéti-
quement jusqu’à ce que celle-ci se fixe au
cœur du fouillis généré. Deux magnifi-
ques exemples en sont montrés ici, l’un
de Raphaël l’autre du Guerchin.
Biffures, griffonnages utiles à l’ajus-
tement de l’encre dans la plume, images
latentes illisibles, formes prolongées en
cadavre exquis (Alechinsky), exploitées
pour devenir des grotesques ou quelque
Elysia Chlorotica (2019-2023), par Anicka Yi.
codés. À ce titre, Les Intempéries, le
texte savant du philosophe le plus en
vogue dans l’art contemporain, Ema-
nuele Coccia, dans le fort savant catalo-
gue est un modèle du genre, unique-
ment pour amateurs. L’émotion reste le
meilleur vecteur qui attire, intrigue, sé-
duit et pousse à aller plus loin. L’arrivée
du visiteur dans la rotonde, boulever-
sée par les arbres sculptures de l’artiste
dano-vietnamien, Danh Vo, est tout
simplement spectaculaire. Son formi-
dable sens de l’espace, la confrontation
du grand et du petit, du tronc mort et
de la fleur, du naturel et du sculpté par
l’homme produit une vision hors nor-
me, digne d’un cimetière des élé-
phants. Sa commissaire, Caroline Bour-
geois, avait déjà exposé avec délicatesse
à la Pointe de la douane, à Venise, en
2015, cet artiste entre art minimal et
À gauche : Alberto Giacometti encadrant
un graffiti dans son atelier parisien,
photographié par Inge Morath en 1958.
inGe Morath/MaGnuM Photos ; fondation dubuffet/adaGP, Paris ; Cy twoMbly foundation
Ci-contre : Henri Calet (1947),
par Jean Dubuffet.
En bas : Delian Ode n° 19 (1961),
par Cy Twombly.
insecte fantastique (le mot gribouillage
venant de l’italien scarabocchio, lui-
même dérivé du mot scarabée) : les
commissaires proposent un ordre, ten-
tent de classer. En vain : le phénomène
est absolument anarchique. Il inclut le
dessin d’enfant (collectionné par un
Kandinski, cité comme modèle par un
Paul Klee), la caricature potache, le
graffiti obscène souillant la porte des
toilettes ou encore le dessin bâclé (mais
parfois génialement) au revers d’une
toile ou au verso d’une belle feuille.
Il englobe les griffonnages médium-
niques. Et encore, une fois le gri-
bouillage revendiqué comme tel, auto-
nomisé par les modernes avec sa part
de hasard, les travaux automatiques
des surréalistes, les dessins sous mes-
caline d’Henri Michaux ou ceux d’un
Dali travaillant avec sa main gauche
tandis qu’il se fait du bien avec la droi-
te. Curiosité : en 1952, Aragon imagine
ce que pourraient donner les buvards à
la sortie du Conseil des ministres. C’est
hilarant. Voilà en somme, selon le
mot des organisateurs, un vrai
« carnaval graphique ».
Aux essais de pierre noire d’un
Luca Signorelli, aux hachures des
graveurs testant leur ciseau au dos de
leurs plaques de cuivre, aux poissons
et chimères parasitant une étude de
saint Matthieu par Annibal Carrache,
au flux exploratoire d’un Michel-Ange
derrière la sanguine d’un de ses Escla-
ves, à celui d’Ingres oubliant un instant
ses jeux de drapés antiques (il recom-
mandait à ses élèves de commencer par
un dessin volontairement maladroit et
grossier avant d’aborder le beau motif)
répondent, installés dans le double es-
calier en pierre, des photographies de
tags des Beaux-Arts en Mai 68. Le degré
le plus instinctif de l’art ? Entre vandalis-
me et créativité, assurément. ■
« Gribouillage, scarabocchio,
de Léonard de Vinci à Cy Twombly »,
au Palais des beaux-arts (Paris 6e),
jusqu’au 30 avril. Catalogue Villa Médicis-
Beaux-Arts de Paris, 400 p., 39 €.
www.beauxartsparis.fr
l’artiste coréenne de New York Anicka
Yi repose ici ses cocons en algues trans-
lucides grands comme des lanternes,
dans lesquels volent et se heurtent des
papillons animatroniques (créature ani-
mée ou robotisée réalisée en général
avec une peau en latex et des mécanis-
mes internes permettant de lui donner
une apparence de vie). Le léger vrom-
bissement donne la sensation du vivant,
comme le son de la pluie brésilienne
chez Dominique Gonzalez-Foerster qui
remplace l’eau.
Mais c’est l’image en mouvement qui
crée l’illusion la plus troublante de la
nature. La courbe vidéo de l’artiste ma-
rocain Hicham Berrada, qui fut pen-
sionnaire de la Villa Médicis, du Cent
Quatre et de la résidence d’artiste de la
Pinault Collection à Lens, plonge le
Courtesy of the artist and Gladstone Gallery spectateur dans un aquarium fascinant
où rien ne se perd, rien ne se crée, tout
sculpture, régénéré par son jardin à se transforme (Présage, 2018). Les mé-
50 km de Berlin. taux précipités dans le liquide semblent
Et la promenade prend forme avec ces être la vie même. Comme les abeilles et
hôtes des bois qui racontent, chacun à sa le chien tatoué à patte rose qui habitent
manière, ce que la nature lui a donné. la nuit l’installation de l’artiste français
Emma Lavigne y imprime sa marque, à Pierre Huyghe à la Documenta de Kas-
la fois structurée et sensible. Le soleil est sel (A Way in Untilled, 2012). Ou le singe
en sang avec feu Cy Twombly, le « graf- masqué, seul survivant du site dévasté
feur érudit » mort en 2011 à 83 ans, dont de Fukushima qui dit la fragilité du
les traces sont toujours énigmatiques. monde et l’entêtement du vivant (Unti-
Série de dix tableaux de 2 mètres de tled [Human Mask], 2014). Ou la casca-
haut, sa Coronation of Sesostris III (2000) de encagée dans le corps même de
est d’une douceur inquiétante que ren- l’homme du sculpteur américain Ro-
force la confrontation avec les sculptu- bert Gober (Waterfall, 2015-2016). Ou
res fragiles en branche de fougère et les offrandes à toutes les mers du mon-
feuille séchée de Daniel Steegmann de de l’artiste sud-africaine Dineo
Mangrané, 46 ans, artiste catalan de Rio. Seshee Bopape. Les coussins attendent
Très remarquée à la Biennale de Venise les contemplatifs. ■
2019, avec ses deux installations Biologi- « Avant l’orage », jusqu’au 11 septembre
zing the Machine (terra incognita) et Bio- à la Bourse de Commerce. Catalogue
logizing the Machine (tentacular trouble), (Dilecta/Bourse de Commerce, 45 €).

Automobile
Le constructeur aLLemand
crée La surprise avec
une version grimée
en baroudeuse, qui
nous renvoie au temps
des succès sur Les routes
du monte-carLo et dans
Le désert du sahara.
sylvain reisser sreisser@lefigaro.fr
O
n ne refuse rien à Walter
Röhrl, le double champion
du monde des rallyes de-
venu ambassadeur et pilote
d’essai et de développe-
ment Porsche. Il a suffi que le pilote al-
lemand fasse part de son enthousiasme
auprès des décisionnaires de la marque,
après avoir conduit cette drôle de 911
surélevée, pour que la situation se dé-
bloque. Depuis dix ans, Thomas Kric-
kelberg, le responsable du développe-
ment de la 911, et son équipe se
désespéraient d’essuyer le veto d’une
direction des ventes et du marketing
peu encline à prendre des risques. Elle
n’a pas eu à le regretter puisque la série
limitée de 2 500 exemplaires numérotés
est presque déjà épuisée, en à peine
quelques semaines de commercialisa-
tion. Une autre version serait déjà à
l’étude, la preuve que le concept de
cette sportive à moteur en porte-à-
faux arrière est inépuisable.
Commencée avec la précédente gé-
nération 991, la genèse de cette 911 très
spéciale fut loin d’être un fleuve tran-
quille. Faute de pouvoir disposer d’un
coupé, les ingénieurs ont ainsi débuté
leurs travaux avec un cabriolet prélevé
sur la chaîne. Et comme il était écrit que
rien ne leur serait facilité, même le
choix du nom a donné du fil à retordre.
L’idée initiale de la baptiser « Safari »,
en référence aux exploits des 911 dans
l’épreuve africaine au cours des années
1970, s’est heurtée au refus du
constructeur indien Tata, propriétaire
du nom. Après négociation avec ASO,
la société organisatrice de l’épreuve
portant le nom de la capitale du Séné-
gal, l’appellation « Dakar » l’a empor-
tée. Une décision judicieuse qui renvoie
aux deux succès de Porsche dans la
classique africaine en 1984 et 1986. Voi-
ci comment la gamme 911 s’est enrichie
d’une version capable, aussi bien, d’af-
fronter les dunes de sable que de patau-
ger dans un gué ou de traverser un che-
min forestier enneigé.
La Dakar joue vraiment sur les ressorts
de la nostalgie. Au premier regard, cette
version passe pour la petite-fille des 911 en-
gagées dans les épreuves africaines. C’est
encore plus vrai avec la décoration sembla-
ble à celles des voitures engagées à l’East
Africain au début des années 1970
(+ 4 200 €) ou à la Martini de 1978
(+ 6 000 €) ou à celles des victoires au Da-
kar avec René Metge (+ 26 280 € avec le toit
carbone et divers équipements). La recette,
simple, est celle à laquelle Audi, par exem-
ple, recourt pour ses modèles Allroad.
Sous le capot
Moteur
Cylindrée 2 981 cm
Type 6 cyl. à plat biturbo
Puissance 480 ch à 6 500 tr/min
Couple 570 Nm de 2 300
à 5 000 tr/min
Transmission
Type Intégrale
Boîte Auto. PDK 8 vitesses
Dimensions/poids
L/l/h 4 530 x 1 864 x 1 338 mm
Coffre 132 litres
Poids 1 605 kg
Performances
0-100 km/h 3,4 secondes
Vitesse 240 km/h
Consommation /émissions
Mixte UE 11,3 l/100 km
CO2 256 g/km
Prix 226 689 €
le figaro mardi 14 février 2023
29
Porsche 911 Dakar, un air de nostalgie
À partir d’une coque élargie de La Dakar adopte facilement grâce à l’efficacité de ses sys-  Notre avis
911 Carrera 4 GTS, la Dakar adopte la la panoplie du parfait tèmes électroniques comprenant les
panoplie du parfait baroudeur à base de baroudeur, adaptée aussi quatre roues motrices et directrices et Et si c’était ça la 911 aujourd’hui ? Une
passages de roue soulignés d’un jonc en bien aux pistes africaines des barres antiroulis pilotées. Un tour voiture de grand tourisme polyvalente,
plastique noir, de protections de bas de qu’aux routes verglacées avec le grand Röhrl finit de nous capable de vous emmener n’importe où
caisse latéraux en acier, de sabots avant des Alpes. Porsche convaincre : la Dakar s’embarque dans et de vous procurer, à la première esca-
et arrière et d’un soubassement partiel- de larges dérives parfaitement maîtri- pade hors des sentiers battus, des sen-
lement caréné. Elle y ajoute un angle sées par une action coordonnée au vo- sations fortes. Cela n’a pas de prix par
d’attaque et de sortie en tout-terrain lant et à l’accélérateur. Au volant de cet- les temps qui courent. ■
supérieur à celui du Cayenne grâce à te 911 qu’il a d’ores et déjà commandé, le
son empattement court. Une perfor- champion allemand semble retrouver
mance obtenue lorsque les suspensions une nouvelle jeunesse. ■
à grands débattements sont en position
haute. Dans ce cas, déjà rehaussée de
50 mm de série par rapport à une Car-
rera dotée du châssis sport, la garde au
sol gagne encore 30 mm pour atteindre
191 mm. Une position qu’elle peut tenir
jusqu’à 170 km/h. Au-delà, c’est-à-di-
re jusqu’à 240 km/h, la vitesse autori-
sée par les pneumatiques Pirelli Scor-
pion à gros crampons et flancs
renforcés développés spécifiquement
pour la voiture, la garde au sol reprend
sa position initiale. Porsche n’a rien né-
gligé : au cas où la bête viendrait à s’en- VOUS RÉVÈLE LES DESSOUS DE LA CULTURE
liser, des crochets à l’avant et à l’arrière
permettront de remorquer la Dakar. Si
la situation devenait vraiment critique,
il sera même possible de compter sur
des plaques de désensablement
(+ 246 €) et une pelle pliante (+ 181 €), à
condition d’avoir coché l’option galerie VERMEER, PEINDRE LE SILENCE
de toit avec projecteurs facturée
5 400 euros. La Jeune Fille à la perle et La Laitière sont devenues
des icônes, leur auteur reste pourtant singulièrement
En prise directe avec la route méconnu. Son art est une énigme, une parenthèse
En dépit de ces modifications, la prise de hors du temps, qui nous ferait presque oublier le siècle
poids se limite à dix kilos grâce à l’em- et les lieux qui l’ont vu naître. Ils sont pourtant bien
ploi d’un capot avant et d’un aileron ar-
définis : le Siècle d’or hollandais, à la première moitié
rière fixe en plastique renforcé de fibres
de carbone mais également d’une inso- du XVIIe siècle, période de prospérité, de commerce
norisation allégée, d’un vitrage aminci et d’ouverture au vaste monde, fut certainement
et de la suppression des sièges arrière. déterminant dans l’éclosion de talents comme ceux
Cela se traduit dès les premiers kilomè- de Vermeer, Rembrandt, Peter De Hooch, Frans Hals…
tres par la sensation d’être en prise di- A l’occasion de la plus grande rétrospective jamais
recte avec la route et ses imperfections. organisée sur Vermeer, au Rijksmuseum d’Amsterdam,
La Dakar tourne le dos à l’univers asep- Le Figaro Hors-Série lui consacre un numéro double :
tisé de la 992. Des remontées vibratoires
qui fut le génial artiste qui ne quitta jamais Delft et se
et la sonorité du flat-six en échappe-
ment sport envahissent l’habitacle et contenta, pour l’essentiel, de peindre des intérieurs
donnent l’impression de conduire une bourgeois ? Quels furent ses rivaux ? D’où vient la magie
voiture de course. C’est encore plus vrai de sa peinture, qui transforme une scène de genre au
avec le pack sport rallye (+ 3 558 €) as- XVIIe siècle en Hollande en un instant miraculeusement
sociant un arceau de sécurité, des har- suspendu, rendu unique par l’échange des regards,
nais de sécurité et un extincteur. N’allez la circulation de l’air autour des personnages, le
pas en déduire que la particule Dakar a
léger flflou
ou qui les entoure, l’impression du spectateur
rendu la 911 inconfortable. En raison de
de les surprendre en pleine action ? Une plongée,
ressorts de suspension assouplis pour
somptueusement illustrée, dans le mystère du sphinx
sortir des sentiers battus, les mouve-
de Delft.
ments de caisse sont plus importants. Le
mode Sport de la suspension pilotée les
endigue, au prix d’une certaine fermeté.
En tournant vers la droite le bouton
rotatif situé sur le volant, on peut acti-
ver deux nouveaux modes de condui-
te : « rallye » pour les sols meubles et
« offroad » pour les sols sablonneux et
rocailleux. Le premier nous accompagne
pour quelques pas de danse sur une piste
verglacée, près de Zell Am See, le fief
autrichien de la famille Porsche. On dé-
couvre une 911 dotée d’un train arrière
plus permissif mais qui s’apprivoise très
13,90
€ 164 pages, actuellement disponible
chez votre marchand de journaux et sur www.fi
www.figarostore.fr/hors-serie
garostore.fr/hors-serie
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A
 mardi 14 février 2023 le figaro
30 Style
René Caovilla, l’art de chausser
À quelques kilomètres
de Venise, la griffe familiale
fondée en 1934 fabrique
À la main des souliers
plébiscités par les tapis
rouges dans le monde
entier. mais sa Vraie star
reste son escarpin cleo,
qui fête ses cinquante ans
de féminité.
Marie-GaBrielle Graffin
mggraffin@lefigaro.fr
D
envoyée spéCiale à Fiesso D’aRtiCo
errière la vitre, à sa table, où
sont éparpillés cristaux,
broderies de soutaches et
croquis d’escarpins, René
Caovilla, 85 ans, surveille
ses artisans. Non loin, assise à son établi,
Anna, la doyenne (85 bougies elle aussi),
supervise et forme la jeunesse. L’atmos-
phère est paisible au studio, où l’on s’ac-
corde sur les dégradés de brillants qui
feront les prochaines collections. Sur les
étagères, des escarpins à brides Cinde-
rella en dentelle piquée de pierres et de
cristaux attendent le contrôle qualité.
Une ouvrière très concentrée fixe des
strass à chaud sans appliquer la moindre
colle, sur les lanières bombées d’une
sandale. Entre la fabrication d’une san-
gle et l’assemblage d’une paire, il faut
compter quatre heures et demie et une
centaine de gestes chirurgicaux, perpé-
tués depuis presque cent ans, à 30 kilo-
mètres de Venise, à Fiesso d’Artico, le
fief de la chaussure italienne.
« Mon père, Edoardo Caovilla, est arri-
vé ici pour apprendre le métier auprès
d’un des premiers fabricants de la région.
Puis, il a lancé l’affaire familiale en 1934,
bien avant que les autres chausseurs de
luxe y installent leurs ateliers », raconte
René Caovilla. Rapidement, son nom est
sur toutes les lèvres, celles des divas de
La Fenice, des vedettes de la Mostra fraî-
chement créée, des clients de l’hôtel
Excelsior et même de la noblesse véni-
tienne, qui pose ses valises d’été dans les
villas palladiennes non loin de son ate-
lier. Une aubaine pour le jeune créateur.
« L’allure raffinée de ses souliers artisa-
naux détonnait pour l’époque, à l’instar
de sa première création, Rita, du nom de
ma mère : un escarpin en cuir blanc au dé-
colleté ajouré », ajoute-t-il.
Après avoir étudié le design, découvert
la haute couture parisienne et le Swin-
ging London, René Caovilla prend, au
début des années 1960, les rênes de la
les joailliers Voient la Vie en pierres roses
les diamants n’ont plus le monopole des cœurs. spinelles, rhodolites et tourmalines déVoilent leurs charmes en cette saint-Valentin.
Élodie Baërd ebaerd@lefigaro.fr
L’
information a régalé les
initiés au début du mois :
Tiffany & Co. a mis la
main sur un lot de 35 dia-
mants roses. Leur poids
n’est pas spectaculaire, oscillant entre
0,35 et 1,52 carat (soit, pour les plus
grosses, la taille d’un petit grain de café)
mais leur valeur est inestimable. Pour-
quoi ? Parce qu’elles sont issues de la
mine d’Argyle, en Australie, seule sour-
ce au monde à donner ce type de pierre,
de cette qualité et de cette teinte, dont la
production annuelle tient dans une cou-
pe de champagne ! Ce qui rend ce lot en-
core plus précieux, c’est que la mine
n’en donnera plus jamais, puisqu’elle a
définitivement fermé ses portes en no-
vembre 2020, ses ressources s’étant ta-
ries après presque quarante ans d’ex-
ploitation. Tiffany & Co. a donc réussi à
empocher ce que l’on considère être les
dernières pierres d’Argyle, dont la va-
leur promet de grimper au fil des années,
qui serviront assurément à sertir des pa-
rures de haute joaillerie.
Si le commun des mortels n’aura ja-
mais la chance d’admirer un de ces spéci-
mens, une autre pierre rose, prestigieuse
et d’une teinte beaucoup plus soutenue, a
A
la cote en ce moment : le spinelle. Les plus
beaux bruts de cette gemme longtemps
Ci-dessus, Coco Rocha au Festival
de Cannes, en mai 2022, portait les
escarpins Ellabrita (à partir de 1 030 €).
En haut à droite, les fameuses Cleo
réalisées pour le MoMA de New York
en 1975 (à partir de 755 € les modèles
sur renecaovilla.com ou à la boutique
du 25, rue du Faubourg Saint-Honoré,
Paris 8e). Francois G. DuranD/Getty imaGes,
rené caovilla, steFano GuinDani/sGP
confondue avec le noble rubis sont
extraits en Birmanie, au Vietnam, au
Sri Lanka et en Tanzanie. Si elles peuvent
refléter toutes les couleurs, du bleu au
jaune, mais les rouges et les roses (qui en
outre subissent très peu de traitements)
sont les plus recherchées. Leur prix
s’est envolé ces dernières années.
Cartier, dans sa collection Beautés
du monde présentée début janvier,
a monté un dégradé éblouissant de
pierres fuchsia, tombant en casca-
de sur le buste.
Les grandes maisons sont également
très friandes des saphirs roses (du lilas dé-
licat au quasi fluo en passant par le sau-
mon), notamment proposés aux fian-
cés chez Mellerio, joaillier historique
de la rue de la Paix qui, ce mois-ci,
l’intègre dans sa collection Les Mu-
ses, plus accessible, sur une série de
bagues, colliers et bracelets.
Mettre du rose aux joues
L’hégémonie des quatre pierres pré-
cieuses dans leur couleur « classique »
que sont le diamant blanc, le rubis rou-
ge, l’émeraude verte et le saphir bleu
a fait long feu. Désormais, les tein-
tes se multiplient et la palette des
pierres utilisées s’est élargie pour
des raisons créatives, mais aussi
économiques et techniques. La
joaillerie veut parler au plus grand
nombre avec un choix accru, grâce à
2001. C’est la griffe de l’hyperféminité, du
glamour et du rêve fait main. Notre savoir-
faire a séduit les couturiers comme
Valentino Garavani en 1970 et les maisons
Dior et Chanel avec qui nous avons
collaboré dans les années 2000. »
Cet héritage fait l’objet, à l’étage de la
manufacture, d’un petit musée. Quatre
mille paires sont soigneusement rangées
dans une pièce secrète où tourne en bou-
cle O mio babbino caro de Puccini. « Un
sanctuaire pour les designers, sourit René
Caovilla. Mon ami Roger Vivier, John Gal-
liano, Maria Grazia Chiuri et Pierpaolo
Piccioli du temps de leur duo pour Valen-
tino, sont venus ici pour comprendre nos
gestes et notre approche toujours artisti-
que du soulier. Manolo Blahnik s’est même
agenouillé en entrant ! » Autre clou du
spectacle : la bibliothèque où les livres de
joaillerie, de photographies de mode et
de défilés côtoient ceux des parures
massaï, des constructions de Frank
Gehry, des tapis kilim… Et de Venise.
« La recherche de l’art est mon moteur et
elle guide chacune de mes créations. C’est
pour cette raison que je travaille encore à
mon âge. J’ai de l’argent, une ferme en
Toscane, je pourrais m’arrêter ! Si des
idées me sont venues des drapés des Trois
Grâces de Botticelli, des entrelacs du cor-
sage d’Éléonore de Tolède ou des broderies
du boléro d’un torero, c’est Venise qui res-
te ma plus grande source d’inspiration »,
raconte le designer, qui a même chaussé
dans les années 1960, une autre amou-
reuse de la Sérénissime, Peggy Guggen-
heim, de curieuses sandales sans bride
entre les orteils (il est d’ailleurs depuis
2014, l’un des sponsors du célèbre musée
sur le Grand Canal, mais aussi des Gug-
genheim de Bilbao et de New York).
“
Chacun de leurs
pas doit être
un rêve. Mais les
rêves des femmes
ne durent jamais plus
d’une saison. Il faut
se réinventer sans cesse
René Caovilla ”
« Regardez, on reconnaît le sol en mo-
marque à laquelle il substitue au prénom saïques de la basilique Saint-Marc sur le
de son père, le sien. Il lui insuffle son idée cannage de ces escarpins, poursuit-il. Et
de la sophistication en introduisant aux les lustres du Palais des doges sur les cris-
gestes des artisans, des perles, des strass, taux en pampilles de cette Cleo. » La Cleo,
des nœuds et autres tissus de luxe. L’es- la star de la maison. Deux ans après sa
sor est fulgurant et les chaussures bijoux création en 1973, cette paire de talons à
font leur chemin jusqu’à Hollywood no- lanière à ressort qui tourne autour de la
tamment sur les talons de Sofia Loren et cheville rentre dans les collections du
Claudia Cardinale. « Toutes les femmes MoMA à New York. « Son motif sinueux
qui avaient le monde à leurs pieds portaient vient d’un bracelet romain en or figurant
du Caovilla, reprend « Il Cavaliere », un serpent, signe de noblesse, datant du
comme l’appelle son équipe depuis qu’il a Ier siècle avant Jésus-Christ à Pompéi et
obtenu le titre de chevalier du Travail, en gardé au Musée archéologique national
1
2
3 Saint-Valentin.
1. Collier Le Petit
Cactus, en or et
saphirs, Mellerio,
1 890 €. 2. Bracelet une exploration des richesses de la terre
Link to Love, en or plus efficace, bien que tributaire des res-
blanc et rubellite, sources naturelles. Ainsi quartz, opale,
4 Gucci, 2 600 €. calcédoine attisent la gourmandise,
3. Bague Gem Dior comme sur les déclinaisons de la collec-
en or, diamants, œil de tion Les Berlingots de Cartier. Rhodolites
tigre, cornaline et opale et rubellites reprennent des couleurs, sur
rose, Dior Joaillerie, la ligne Link to Love de Gucci. La tour-
13 200 €. 4. Bague
Les Berlingots, en or, maline rose, précieuse mais accessible, a
calcédoine rose, conquis le cœur de nombreux créateurs
grenat, Cartier, comme récemment Hanna Darmon pour
3 250 €. 5. Bague sa marque fabriquée à Paris Mansano.
5 Ella double, en or et Et puisque le charme de la joaillerie
tourmaline taille poire, réside également dans les histoires qu’elle
Mansano, 1 500 €. raconte, la morganite et la kunzite, très en
de Naples. J’ai même essayé de recréer
cette spirale avec le bracelet de ma montre
que finalement j’ai cassée. Cette technique
complexe afin d’obtenir le mouvement
sensuel sur la cheville requiert une tempé-
rature du cuir si particulière que les arti-
sans doivent tendre et détendre la sangle
mille fois pour assurer son maintien. »
Unique en son genre mais réinterprétée
à de maintes reprises, la Cleo célébrera
cinq décennies de succès la semaine
prochaine lors de la Fashion Week de
Milan, où l’entreprise a son showroom
et ses bureaux. Emblème de la marque
familiale, elle représente aussi ses plus
grosses ventes : 60 % du chiffre d’affai-
res de Caovilla !
Cultes notamment aux États-Unis, au
Moyen-Orient et en Asie, les stilettos
aux semelles à paillettes ont foulé les
tapis rouges les plus glamour, aux pieds
de Sharon Stone (une grande fierté),
Julia Roberts, Kim Kardashian, Emily
Ratajkowski et Rihanna. « Chacun de
leurs pas doit être un rêve. Mais les rêves
des femmes ne durent jamais plus d’une
saison. Il faut se réinventer sans cesse. »
Aux côtés des Cleo, on trouve donc dé-
sormais des sandales plates, des snea-
kers, des cuissardes en cachemire et des
mules en Plexi… toutes twistées de
strass. « Mon père voit la beauté avec des
yeux d’enfant, conclut Giorgia Caovilla,
qui l’accompagne depuis 1998 dans le
développement international de la mar-
que. Il remarque le détail d’un bijou ou un
bouton doré de veste qui fera la différence,
peu importe sa valeur. Au studio de créa-
tion, c’est lui qui trouve la touche finale,
ce petit rien qui fait que nos paires de
chaussures se distinguent toujours. » ■
vogue depuis quelques
années, savent sé-
duire les âmes
d’aventuriers, et
pourront met-
tre du rose aux
joues de l’être
aimé pour cette
Elles font partie
des pierres réperto-
riées plus récem-
ment, par George Frede-
mellerio, Gucci, Dior, antoine PiviDori/cartier, mansano
rick Kunz, passionné et
infatigable globe-trotteur. Ce gem-
mologue marqua l’histoire en s’intéressant
à d’autres spécimens que les bien connus
saphirs et diamants. En 1902, il découvre
ainsi en Californie un silicate rose pastel
auquel il donne son nom, la kunzite,
utilisée longtemps par les joailliers améri-
cains, tel Tiffany & Co. pour lequel il
travaillait. Kunz est aussi à l’origine de
l’intérêt porté aujourd’hui par profession-
nels et créateurs à la morganite, ce béryl
rose de Madagascar baptisé ainsi en 1910 en
hommage au banquier J. P. Morgan,
collectionneur unique, qui fit don au
Muséum d’histoire naturelle de New York
de ses minéraux, que l’on peut encore ad-
mirer aujourd’hui. ■
 le figaro mardi 14 février 2023

Télévision 31

Comédie romantique
l’amour
dans tous ses états
pour la saint-valentin, netflix et amazon prime dévoilent
« toi Chez moi et viCe-versa » et « someBody i used
to Know », des versions opposées du retour de flamme.
travers cet échange d’appartements des
constance jamet £@constancejamet facettes cachées et confronter leurs re-

G
enre phare des années 1990 et
2000 (De Coup de foudre à
Notting Hill à Love Actually en
passant par Comment se faire
larguer en dix leçons), la co-
médie romantique est tombée en désué-
tude à la décennie suivante. Pas assez no-
ble, trop populaire. Jusqu’à la demande de
douceur née du Covid et du confinement.
Au cinéma, Tickets to Paradise, qui réu-
nissait Julia Roberts et George Clooney, a
grets. Tout est prévisible dans ce long-
métrage formaté aux décors et aux gags
de sitcom, malgré l’irruption d’une ex et
d’un soupirant rival.
L’étincelle retrouvée
Sur le même thème, la comédienne Alison
Brie (Glow) et son époux l’acteur Dave
Franco (The Afterparty), qui passe à la
réalisation, livrent avec Somebody I Used
To Know une partition plus humble mais
qui pétille mille fois plus. Productrice de

2022 Netflix, iNc. ; AmAzoN Prime Video

rempli les salles. Cette manne ne saurait
être ignorée des plateformes, déjà à la tête
d’un stock inépuisable de téléfilms de
Noël. Pour cette Saint-Valentin, Netflix
dévoile Toi chez moi et vice-versa. Ama-
zon Prime Somebody I Used To Know. Des
variations opposées du retour de l’amour.
Porté par des cadors de la romcom,
Reese Witherspoon et Ashton Kutcher,
Toi chez moi, et vice-versa surfe sur le
charme de ses interprètes et leur capacité
d’abattage. Amants d’un soir, Debbie et
Peter ont préféré forger une solide amitié
que de poursuivre sur la voie charnelle.
Vingt ans après, leurs aspirations ont bien
changé. La blonde Californienne est
comptable et mère célibataire. Lui,
consultant, phobique de l’engagement,
s’est exilé à New York pour fuir les séis-
mes. Quand Debbie a besoin d’un point
de chute pour une formation, Peter lui
cède son appartement et va jouer les ba-
bysitters à Hollywood. Pénétrant dans
l’intimité de l’autre, ils vont découvrir à
téléréalité à Los Angeles, Ally (Alison
Brie) part se ressourcer dans sa ville natale
du fin fond de l’État de Washington. Un
soir au bar, elle retrouve son amour du ly-
cée, Sean. Les anciens tourtereaux pas-
sent une nuit à échanger cocktails et
confidences. Ally en est certaine : c’est le
signe qu’elle doit reconquérir Sean… Sauf
que ce dernier est sur le point de se marier
avec Cassidy, musicienne si épanouie
qu’Ally se trouve bien incapable de la
détester. Que faire ?
Connaissant par cœur les classiques de
Julia Roberts qu’elle cite avec malice dans Reese Witherspoon et Ashton Kutcher avaient laissé filer le prince charmant en ils se retrouvent dans la situation de ces hé-
son film, Alison Brie ne plagie pas Le Ma- à l’affiche de la comédie Toi chez moi rompant avec un ex ? Tout d’un coup, tout ros dans la vie ? » Pas question de jouer sur
riage de mon meilleur ami. À travers une et vice-versa (en haut). était de leur faute. Leur mémoire devenait le ressort de la farce. « Les romcoms cultes
Ally, elle prêche l’estime de soi et la possi- Jay Ellis et Alison Brie dans le film sélective, oubliant ce qui n’allait pas dans de ma jeunesse étaient jouées comme des
bilité de retrouver l’étincelle qui donne Somebody I Used To Know (ci-dessus). cette relation. Il y avait une reconstruction drames ; on souhaitait retrouver cette pat-
envie de croquer la vie à pleines dents. « Je complète de leur mémoire , raconte Alison te, cet ancrage dans la nature. »
suis fascinée par le concept de celui qu’on a Brie. J’ai voulu aller à contre-courant et Au-delà de son authenticité, Somebody
laissé passer dans les mailles du filet. Mes moderniser les rebondissements. Nos per- I Used to Know surprend par un dénoue-
amies célibataires, lorsque la solitude se fait sonnages vivent en 2023. Ils ont vu Quand ment honnête et lucide jusqu’au bout.
trop lourde à porter, regardent en arrière et Harry rencontre Sally, Nuits blanches à Une fable pour les femmes indépen-
se laissent gagner par les regrets. Et si elles Seattle : comment peuvent-ils réagir quand dantes d’aujourd’hui et les autres.

« Gazprom, l’arme parfaite » : l’allemaGne dans les rets de poutine

Cette riChe enquête analyse les dessous de la relation nouée par Berlin aveC mosCou afin de BénéfiCier de ses immenses réserves de Gaz.
afin de bénéficier de son gaz, peu oné- énergétique. » La venue de Gerhard Gazprom. Le sujet de la thèse de ble et souvent utilisé Gazprom comme
Benjamin Puech bpuech@lefigaro.fr reux. L’invasion de l’Ukraine y a mis un Schröder au conseil de surveillance de Vladimir Poutine, rédigée à la fin des moyen de pression au cours de ses bras

L
e consultant de l’Adminis-
tration américaine se gratte la
tête. Il ne s’explique pas une
telle apathie. « Le Kremlin
s’est servi du gaz comme d’une
arme d’une manière si spectaculaire,
qu’il est sidérant qu’aucun changement
de politique n’ait eu lieu en Europe de
l’Ouest… » Il est de ceux qui parlent
avec le plus d’hostilité de la relation de
dépendance nouée par l’Allemagne
avec la Russie ces dernières décennies
coup d’arrêt, ainsi qu’au développe-
ment du gazoduc Nord Stream 2.
Le véhément ancien ministre des
Affaires étrangères polonais Radoslaw
Sikorski qualifie ainsi cette relation :
« Il y avait effectivement une interdé-
pendance : comme il y en a entre un loup
et un agneau. » L’ancien président alle-
mand du Parlement européen Martin
Schulz défend à plusieurs reprises la
politique de son pays. « En Europe, tout
le monde se réjouissait que les Allemands
garantissent un haut niveau de sécurité
Mardi 14 février
Gazprom en 2005 devait aussi servir,
assure-t-il, les intérêts européens. Le
téléspectateur allemand risque de
tressauter : une spécialiste américaine
affirme dans Gazprom, l’arme parfaite
que la Russie a tenté, outre-Rhin, de
corrompre des dirigeants influents.
Bras de fer diplomatiques
L’enquête d’Anna Sadovnikova et Dirk
Laabs, revient cinquante ans en arrière.
Elle montre l’implication du KGB puis
du FSB dans les entreprises comme
années 1990 ? Les dépendances énergé-
tiques et la façon dont celles-ci peuvent
être exploitées en politique étrangère.
Tous les interlocuteurs le disent, le vrai
patron de Gazprom, c’est lui. Le film
analyse sa trajectoire depuis le Dresde
des années 1980. « Le président russe a
une vraie passion pour l’énergie »,
confirme l’universi-
taire Angela Stent.
Le successeur de
Boris Eltsine a donc
○○○◐
20.25
joint l’utile à l’agréa-
Mardi 14 février
de fer diplomatiques. En suspendant les
livraisons ou en augmentant les prix.
Le documentaire, qui manque peut-
être de nuances sur ce chapitre, donne
les exemples de la Géorgie, en 2005, et
de l’Ukraine, en 2014. Preuve récente
que Gazprom est fortement lié au
Kremlin, celui-ci l’a autorisé début
février à créer… sa propre
compagnie militaire. Kiev
y dénonce la naissance
d’un nouveau groupe,
jumeau de Wagner.

MOTS CROISÉS Par Vincent Labbé BRIDGE Par Philippe Cronier www.lebridgeur.com
1 2 3 4 5 6 7 8
PROBLÈME N° 6214 PROBLÈME N° 3312 : SOLUTION DU PROBLÈME N° 3311 : Touchez la prime !
HORIZONTALEMENT 1 Défaut d’attention
1. Tendent à détendre. - 2. Elle fixe notre sort. - 3. Contrat : Sud joue 5 Carreaux.
Plat comme une limande. Cinq francs d’autrefois. - 4. 2 Entame : 10 de ♠ pour le Roi d’Est pris de l’As.
Exprimée par des signes de la main. - 5. Cherche la A543
bonne occase. Revient souvent dans les commentaires 3 A63 L’entame est excellente… pour la défense ! Elle est désormais à la tête de
LIGNE 1 : OTARIE, VERRAT, RÉPARÉ, TREMPE, OUATER, ORMEAU.

-
LIGNE 2 : RELAIS, RÉGALE, AÉRAGE, MÉDIRE, TIMIDE, ENNEMI.

de César. - 6. Produit pour la peau. Ne se livre pas. - 7. deux levées noires.

Penchant spontané. - 8. Mistral lui donna un nouveau 4  A D 10 9 8 7 L’impasse au Roi de ♦ est-elle pour autant votre seule chance de gain ? Dans
souffle. Devant Lennox en musique, devant Hall au N l’absolu, elle s’impose, c’est le meilleur maniement et de loin pour faire toutes
cinéma. - 9. N’ont rien à se reprocher. Révolution 5 O E les levées (ce n’est qu’à onze cartes qu’on tire en tête).
SOLUTION DU NUMÉRO PRÉCÉDENT

française. - 10. A fait grand tort. Font le tour du stade.
- 11. Engager la poursuite. Normand au canon. - 12.
Sudiste jaune.
VERTICALEMENT
1. Par le cœur attachés. - 2. A des pépins de guigne. - 3.
Matrilinéaires. Champion du non-alignement. - 4. Tissu
chatoyant. Point d’accumulation. Gaston d’Orléans fut
S Pourtant ici, vous devez jouer le Valet de ♦ pour l’As ! En effet, si rien ne vient,
6 R762 vous tenterez l’impasse au Roi de ♥ pour faire disparaître illico votre ♠ perdant.
D Tes que sont les jeux, vous touchez la prime : Est a le Roi d’atout sec. Vous
7 A R D V 9 5 avez pensé à jouer sur deux tableaux et êtes
72
V4 récompensé de votre sens du cumul.
8 5
AD8765
9  R D V 10
Contrat : Sud joue 6 Piques  D 10 9 8 R54
N
RONDE DES MOTS© :

(après une ouverture de RV9  10 7 6 3 2

son comte. - 5. Alluvial sur les berges. Mamelon usé. 10 32
O E
R
Se fait une réputation par le bouche à oreille. - 6. Réfutée. 1♦ en Sud). S
9742 A865
Du balai. - 7. Précision du règlement. Petite route 11 AV63
de campagne. - 8. Abandonnée et un peu obsolète. Entame : 8 de ♦. AD84
Monnaie d’âne. 12  V 10 9 4
3

SOLUTION DU PROBLÈME N° 6213

HORIZONTALEMENT 1. Mélanger. - 2. Aculéate. - 3. Crieuses. - 4. Cas. Foui. - 5. Abat. Ils. - 6. Rondelet.
- 7. Tut. PS. - 8. Hissa. - 9. Yl. Arrêt. - 10. Slip. Ève. - 11. Tenantes. - 12. Érotisés.

VERTICALEMENT 1. Maccarthyste. - 2. Écrabouiller. - 3. Luisants. Ino. - 4. Ale. TD. Sapât. - 5. Neuf.

A

Épar. Ni. - 6. Gasoils. Rets. - 7. Éteule. Levée. - 8. Résiste. Tess.

 mardi 14 février 2023 le figaro

32 Télévision Tous les programmes

dans TV Magazine et sur l’appli TV Mag

ÉPHÉMÉRIDE St-Valentin
À LA DEMANDE Soleil : Lever 07h59 - Coucher 18h09 - Dernier croissant de Lune

21.10 21.10 21.10 MATIN

S.W.A.T. La fête Le voyageur Encore heureux 0
Série. Policière de la chanson d’amour Téléfilm. Policier 30
0
-1 -1 -1
1 -1
-1 -1
5
0 -2 -2
-2
-1
0 -1 -1
0
EU. 2022. Saison 5. Avec Shemar Variétés Fra. 2022. Avec Bruno Debrandt, Marie, Sam et leurs deux enfants
Moore. 2 épisodes. Inédit. L’équipe Prés. : Laury Thilleman et André Fleur Geffrier, Maëlle Mietton. mènent la grande vie dans un 30 -2
appartement cossu. Mais les -1
est appelée pour un cambriolage Manoukian. 2h15. Que cela soit pour La vallée de la peur. Lorsqu’il apprend 1
dans une maison qui a mal tourné. déclarer sa flamme, pour se consoler qu’Yves Cesnoz a été remis en revenus de Sam, cadre supérieur 1
Les criminels, en quête de trois d’une rupture mais aussi pour liberté et qu’il est de nouveau accusé au chômage, ne sont plus à la 2 -1
statues d’une immense valeur, ont s’évader en amoureux, les chansons d’enlèvement, Yann se rend au Pays hauteur de leur statut social. Marie -1 6
soumis les propriétaires à d’atroces d’amour règnent en maitre. basque. Il croit Ceznoz innocent. a de plus en plus de mal à sauver 1
tortures avant de les assassiner. les apparences. Sam s’enfonce 3 3
23.25 Il était une fois l’amour 22.40 Le voyageur. Téléfilm. Policier.
dans des combines de plus en 5 5
22.45 S.W.A.T. Les soldats du feu . à la française. Documentaire. Au bout de la nuit.
plus insignifiantes. Si bien que 4 10
Marie songe à le quitter pour un
beau ténébreux en costume chic. 4
Quand la riche voisine du dessous APRÈS-MIDI
rend l’âme, Sam décide de profiter
21.00 20.55 21.10 de l’aubaine. Alléchant en soi,
20
12
Football : Gazprom : L’arme parfaite Anniversaire surprise l’argument de cette comédie n’est
12
Ligue des champions Documentaire chez les Bodin’s encore rien quand on sait que les
rôles principaux sont tenus par 12 11 12
14 13
Sandrine Kiberlain et Edouard
13 11
Baer. Tous deux donnent relief et 13
crédibilité à ce couple pris dans un 13 14 13
12
engrenage de plus en plus absurde. 14
14 14 12
15

Sport All. 2022. Réal. : Anna Sadovnikova, Spectacle 16 16

8e de finale aller : Paris-SG - Bayern Dirk Laabs. L’invasion de l’Ukraine par Depuis sa naissance, les fêtes d’anni-
Mardi 14 février, 30 17 16
Munich. En direct. Les choses la Russie a brutalement mis en évi- versaire de Christian Bodin ont été de sur lefigaro.fr 15 17
sérieuses se précisent pour le PSG : dence les dangers que représentent véritables catastrophes ! Mais, cette
➜17 heures : « Le Buzz TV » 15 14
ce 8e de finale contre les Bavarois la dépendance des pays européens fois-ci, pour les 50 ans de son fils, Maria 12
aux importations de gaz russe.
(avec TV Magazine)
du Bayern, est un véritable test pour Bodin va lui réserver une surprise. 19 15
– Invité : André Manoukian,
les hommes de Christophe Galtier. 14 14
22.25 Ukraine-Russie et la guerre 00.00 Bienvenue chez les Bodin’s. animateur de « La Fête
22.56 Canal Champions Club le debrief. de propagande. Documentaire. Spectacle. de la chanson d’amour » sur 15 10
France 2. Interviewé par Sarah
14
Lecœuvre et Damien Canivez.
➜ 18 heures : « Points de vue ». T (en °c)
Présentation : Alban
<-10 à 0 0 à 10 10 à 20 20 à 30 30 à >40
Barthélemy. Avec François
20.33 Touche pas à mon poste ! Div. 19.50 Les apprentis aventuriers. 20.45 Quotidien. Divertissement. Roudier, porte-parole de la PFA
Prés. : Yann Barthès. Inédit. (plateforme de la filière
21.19 Seuls sont les indomptés 21.05 Pretty Woman
21.25 90’ Enquêtes automobile) sur les innovations
Film. Western. EU. 1962. Réal. : David Film. Comédie. EU. 1990. Réal. : Garry ALGER 9/17 AMSTERDAM 3/10 ATHÈNES 3/13
Miller. 1h43. Avec Kirk Douglas, Gena Marshall. Avec Richard Gere. Une Magazine. Prés. : Tatiana Silva. 1h20. du Salon international
de l’automobile de Genève ; BARCELONE 3/14 BELGRADE 1/7 BERLIN 0/6
Rowlands. Inédit. La dérive, dans jeune prostituée se métamorphose Pizza, kebab : que mangeons-nous
François de Singly, professeur BERNE -2/11 BRUXELLES 1/12 BUDAPEST 0/7
les années 1960, d’un cow-boy des en femme du monde après être deve- vraiment ? La France, pays de
temps modernes épris de liberté et nue l’accompagnatrice d’un homme la grande gastronomie, est aussi émérite de sociologie, COPENHAGUE 1/3 DUBLIN 9/13 LISBONNE 10/16
nostalgique d’un passé révolu. Par d’affaires aussi séduisant que fortuné. devenu en quelques années sur la vie de couple en France LONDRES 3/12 MADRID 5/12 PRAGUE -2/4
romantisme, il devient un hors-la-loi. l’eldorado de la restauration rapide. depuis 1975 ; et l’anthropologue RABAT 15/18 ROME 0/15 TUNIS 7/15
23.20 4 mariages et un coup de foudre. Florence Bergeaud-Blackler
23.22 L’éphéméride. Magazine. Téléfilm. Avec Kimberley Sustad. 22.45 90’ Enquêtes. Magazine. pour son livre : Le Frérisme
et ses réseaux (Odile Jacob). MERCREDI JEUDI VENDREDI
➜ 20 heures : « Le Club
1/11 4/11 9/12
Le Figaro Politique ».
20.00 C à vous la suite. Talk-show. 18.50 Wheeler Dealers France. Doc. 20.20 C’est un complot ! Doc. Présentation Yves Thréard. 4/13 1/12 7/12 1/11 11/13 4/10
Invitée : Céline Bracq, directrice
21.00 La noisette : 20.00 Wheeler Dealers France 20.50 La bombe secrète générale et cofondatrice 2/13 3/13
le casse du siècle Doc. Fra. 2020. Réal. : Marcel Belan- d’Hitler 6/13
d’Odoxa. Avec Judith
Documentaire. Fra. 2023. Réal. : ger. Datsun 240Z. Pour Gerry, Doc. Aus. 2021. Réal. : Adam Geiger. Waintraub, grand reporter 4/15 6/13 3/15 5/13 5/14 4/15
Valentine Amado. 0h52. Inédit. De sa acheter une Datsun 240Z est 1h. À la fin de la Seconde Guerre au Figaro Magazine ; Ivan
production en France, en Italie et en un passage obligé, un retour mondiale, à quel point les nazis et le Letessier, rédacteur en chef
Turquie, à sa transformation en huile, aux sources, une affaire de famille. Japon étaient-ils proches de créer
en pâte à tartiner ou en bonbon
21.10 Les grandes heures de l’auto-
la bombe nucléaire qui leur aurait
du Figaro économie chargé du
pôle entreprise ; et Guillaume lachainemeteo.com
de chocolat, gros plan sur la noisette. permis de remporter la guerre ? Perrault, rédacteur en chef Par téléphone : LIVE 24/24 Sur L’APPLI
mobile allemande. Documentaire.
des pages histoire du Figaro. GRATUITE
21.50 Sous le bio la malbouffe. Doc. Réal. : Nicolas Schumacher. Inédit. 21.50 La voleuse de la Bombe A. Doc. 2,99 €/appel La Chaîne Météo

MOTS FLÉCHÉS DU FIGARO N°3445

MEMBRE AFFICHER BRILLE AU DE AMBU- PRÉNOM DÉMONS- RÉPONSE GRAS- CHAÎNE QUI N’EST ABATTUS
DE L’U.E. À L’ÉCRAN SOLEIL VIEILLES LANTS DE RENAUD INSTRU- TRATIF DE CELUI SOUILLET FRANCO- PAS GRENU
MENTS SUISSE LA LOI DU
ESPACE BOUTS DE BANDES Y BON À FLEUR INDIENS QUI EST FIGURE
DE VIE ALOURDI COURONNE DORMENT L’USAGE FRAÎCHE ADJACENT DÉÇU DE STYLE CAJOLERIE TRAME SILENCE
NOUR- ARTI-
RISSANTE CULATION
CACHE UN C’EST LE
BUTIN MATIN
FONCTION RÉGIME
VITALE SÉVÈRE
DU GENRE RENVOYER
CHAFOUIN AU SÉNAT
CAPI-
TONNER
ENCARTAI
CASSE-
TÊTE
ÉCORCE ÉRUDITE ANNEAU DONNE LE
AIRS JOUÉS
PRIS SUR DE CHÊNE PROFÉRER PREMIER
LE COMPTE M’AMU- DES CE QUI COUP
SUBSISTE STIMULANT
SERAI INSULTES ARTICLE
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DU PIN CHEF DE NEL
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F U R I B O N D R E M A R I A G E E U N E C T E
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TERME DES IL SE IL FAUT
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VIDE
ALTIER RÈGLE TENIR P A R T E R R E S A I D A N T C U T I
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ENTRE IL EST
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SANTS S’Y REMENT NORD HONORÉ EN N I E R T R E F I L E L E S S I V E
ET EST BIGORRE
CROISENT ÉNERVÉ D E R A L E A S T A R T E L E T T E S
 le figaro mardi 14 février 2023

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dre le métier de tailleur. Par chance,

Jean-Claude GrumberG
j’en ai été incapable, sinon je serais de-
venu un retraité de la confection. Je n’ai
rien appris pendant ma formation,
c’était bien pour se lancer dans le théâ-

le plus précieux
tre qui me paraissait inaccessible. »
Si, selon Jean-Claude Grumberg,
Beckett a ouvert la porte à sa généra-
tion, sans Tchekhov, il n’aurait pas

des auteurs
pris la peine de coucher des mots sur
une page blanche : « Il a écrit modes-
tement, il n’avait pas la même ambition
que Tolstoï, il n’avait pas besoin de ga-
gner sa vie. Mon premier travail a été
d’adapter l’une de ses nouvelles, Le
PORTRAIT Tandis que Duel. J’espérais devenir comédien,
mais quand j’ai vu que j’avais beaucoup
sa pièce « VoTre maman » de temps libre, je me suis mis à écrire. »
Tolstoï est pour lui une « référence ab-
esT jouée à paris, solue », une « autorité morale ». « Il
l’écriVain eT dramaTurge s’est aperçu que les enfants de ses serfs
ne savaient pas lire. Il a tout arrêté
VoiT son célèbre conTe pour écrire des manuels de lecture à
leur intention. »
« la plus précieuse
Inspiré par Tolstoï
des marchandises » Inspiré par son exemple, Grumberg a
adapTé au cinéma également écrit des contes. Et par
ailleurs, exaucé son désir de fouler les
par michel hazanaVicius. planches avec L’Atelier et Zone libre.
« Je connaissais l’auteur, je me suis
donné les rôles principaux, plaisante-
Nathalie Simon t-il. J’ai vu à quel point c’était épui-

Serge KribuS
nsimon@lefigaro.fr sant… J’aurais aimé jouer Hamlet ou
Le Misanthrope, mais je n’ai pas de re-
gret. » Il reste reconnaissant envers

J
ceux qui lui ont tendu la main. À
l’instar de Pierre Dux, qui était direc-
e vais vous lâcher car vous Gérard Philipe. On a été très gâté. En 1942, dans un train de marchan- Arrêté devant lui, son père est mort à teur du Théâtre de l’Odéon et y a fait

«
avez sans doute mieux à faire
qu’à écouter les ratiocinations
d’un vieux monsieur ! », lance
d’une voix bonhomme Jean-
Claude Grumberg. «À
83 ans, je suis un auteur à la
retraite », ajoute-t-il. Pas
tout à fait. Il sort un nouveau livre De
Pitchik à Pitchouk. (Seuil, le 7 avril).
Une troupe joue actuellement Votre
maman, sa « petite pièce en un acte »
en lice pour les Molières, sur une fem-
me dont la mémoire s’estompe (au
Studio Hébertot jusqu’au 19 avril).
« Seulement les mardis et mercredis,
mais je suis très content de l’adapta-
tion, observe-t-il. Si on m’avait dit
qu’un jour les pièces seraient jouées les
mardis et mercredis et à des horaires
différents… »
Celui auquel on doit L’Atelier re-
grette l’époque de Jean Vilar, la fonc-
tion sociale du théâtre. « Avant, il y
avait des week-ends au TNP pendant
lesquels trois pièces étaient program-
mées. Après, il y avait un bal, se sou-
vient-il. C’était autre chose que d’aller
voir une vedette. Notre vedette, c’était
Quand j’ai commencé à écrire, l’auteur
était la personnalité la plus importante,
aujourd’hui, il a de plus en plus de mal
à exister. » Jean-Claude Grumberg a
pourtant pas mal de raisons « d’exis-
ter » ces temps-ci.
« Faire rire et pleurer »
Le metteur en scène Charles Tordj-
man reprend en tournée son célèbre
conte La Plus Précieuse des marchan-
dises : le 30 mars à Rousset (Bou-
ches-du-Rhône) et les 5 et 6 avril, au
Théâtre Liberté, à Toulon. Et Michel
Hazanavicius transpose l’histoire en
film d’animation avec les voix de
Jean-Louis Trintignant, Gérard De-
pardieu et Dominique Blanc. « Jean-
Claude est un grand humaniste,
brillantissime », estime cette derniè-
re. « Ma fille Olga lit souvent ce
conte », signale l’auteur pas peu fier.
Pierre Arditi en a également donné
une lecture lors de sa publication
(Éditions du Seuil, 2019). « Je n’ai
pas pu m’empêcher de verser quelques
larmes lors de la première lecture »,
a-t-il confié.
dises acheminé de Drancy, un dépor-
té jette un bébé emmailloté dans un
châle avec l’espoir de le sauver. Il est
recueilli par une « pauvre bûcheron-
ne ». « Ce livre est une sorte de phéno-
mène planétaire inattendu, il a été tra-
duit dans une vingtaine de langues et
existe dans une version destinée aux
scolaires », semble s’étonner Jean-
Claude Grumberg que « rien » ne des-
tinait au théâtre et à l’écriture.
« Quand j’ai commencé, je n’avais ja-
mais vu de pièce et je jouais devant des
gens qui n’en avaient pas vu non plus,
raconte-t-il. Ma mère m’avait emme-
né voir une sorte de comédie musicale
au Châtelet. Cela ne m’avait pas plu du
tout, je préférais Brassens ! »
Né en 1939, le dramaturge n’a pas
oublié que sa maman, son frère et lui-
même ont failli être « raflés » en 1942.
Auschwitz. Il ne reverra pas non plus
son grand-père paternel déporté à
Drancy. « J’ai mis qutre-vingts ans à
comprendre ce qui s’est passé. » Toute
son œuvre traite de la Seconde Guerre
mondiale. À commencer par Dreyfus
qui se déroule avant le génocide, puis
L’Atelier, qui se passe dans un atelier
de confection, de 1945 à 1952. « J’ai
essayé de faire rire de ma propre his-
toire, du drame, en racontant ma vie,
celle de mon père et de ma mère. Le
but, c’est de faire rire et pleurer à la
fois », explique-t-il.
Fils et petit-fils de tailleurs, le jeune
garçon a quitté l’école à 14 ans. Il n’a
d’autre choix que de marcher dans les
pas de ses aînés. « Je suis né dans un
atelier, j’étais apprenti. J’ai balayé et
allumé le feu pendant un an. En plus, on
n’était pas payé, on était censé appren-
jouer quatre de ses pièces. « Il m’a fait
confiance. » Simone Signoret lui a ré-
clamé un scénario alors qu’il était en
dépression. Ça a été l’inoubliable
Thérèse Humbert réalisé par Marcel
Bluwal. « C’était la première fois que
j’écrivais pour la télévision. » Costa-
Gavras l’a sollicité pour son film
Amen (César du meilleur scénario).
Enfin, contre toute attente, le regret-
té Maurice Olender, éditeur au Seuil
disparu en octobre dernier, a publié
La Plus Précieuse des marchandises.
« On en a vendu 100 000, mais il
aurait été aussi content si on n’en avait
vendu que 2 500 », assure Jean-
Claude Grumberg. « Auteur, vous êtes
chez vous devant une feuille de papier.
Avec un peu de chance quelqu’un vous
lit, a envie de monter votre pièce ou
d’éditer votre livre. » ■

UN derNier mot
edemontety@lefigaro.fr
Par étienne de Montety Lancez-vous dans la formidable aventure de l’écriture !
Les mardis 4, 11, 18 et 25 avril 2023 de 18h à 22h
Cocaïne (ko-ka-i-n’) n. f.
Fait facilement dérailler.

P
ierre Palmade a provoqué un dramatique accident de voiture,
alors qu’il était sous l’emprise de la cocaïne.
Le mot vient de l’aymara (Pérou) coca, et désigne un arbuste dont les feuilles
produisent une substance qui donne la cocaïne.
GRÉGOIRE DELACOURT
Il n’y a pas dans ce domaine de coca light. Or, ces derniers temps, Palmade, qui fut
la coqueluche des salles de spectacle, avait en stock plus de coke que de sketchs. Grégoire Delacourt publie son premier article
Il sortait de moins en moins souvent de sa coquille, et passait des soirées coquines, le jour de ses 18 ans avant d’entamer une
le genre où on se lance à la poursuite de toutes les coquecigrues.
Sa vie avait les apparences de la cocagne, mais était on ne peut plus chaotique : carrière publicitaire durant laquelle
il est passé du coq à l’âne, de l’humour à l’inconscience coupable. il lèguera de nombreux slogans
En effet, cette existence de coq en pâte lourdement coké s’est soldée l’autre soir
par une terrible collision : coquards pour les uns, cocarde pour lui, celle de la police.
publicitaires. Récompensé lors de son
Et plusieurs victimes. tout premier roman en 2011, il sort
Et là, Coco, ça n’a plus rien de cocasse. ■ l’année suivante le célèbre « La liste
de mes envies » qui donnera lieu
FIGARO-CI ... FIGARO-LÀ à diverses adaptations au cinéma
et au théâtre. De nombreux
Une nouvelle ambassadrice autres romans, tous à succès,
pour la Fondation des Bernardins compléteront sa bibliographie avant
Crédit photo : Emmanuelle Hauguel

La Fondation des Bernardins, présidée la sortie en mars 2023 de « Une nuit

par Jean-Marc Liduena, a nommé Mariella
Bertheas (photo) en qualité d’ambassadrice. particulière » chez Grasset.
Forte de ses nombreuses expériences
de déléguée générale de fondations
(Jacques Douce, 3 Suisses, Espace
Déjà animateur de plusieurs ateliers
Kronenbourg) et de son rôle de chargée d’écriture pour le Figaro littéraire, il transmet
de mission auprès de Christine Lagarde avec passion, pédagogie et bienveillance.
dans différents ministères, elle organisera
des événements qui rassembleront,
sous la grande nef du Collège des Bernardins,
des artistes, des personnalités publiques,
des membres du Collège et des nouveaux
TwiTTer Mariella berTheaS

mécènes. Ces rencontres insolites contribueront au rayonnement

du Collège des Bernardins. Elles seront la première étape de la création Modalités et inscriptions sur www.lefigaro.fr/ecriture ou en scannant le QR code
de L’Incubateur d’espérance, nom du nouveau programme de la Fondation, Plus d’informations en envoyant un message à ateliersdecriture@lefigaro.fr
qui a pour objectif de soutenir des projets vertueux. La première soirée
a eu lieu la semaine dernière, en présence de nombreux entrepreneurs Les ateliers se déroulent dans les locaux du Figaro, à Paris
comme Charles Beigbeder, François de la Baume, Philippe Rambal
ou François Marion, de l’avocat Pierre Masquart, du producteur Attention, le nombre de places est limité
A

Pierre-François Decouflé ou encore de l’architecte Chafik Gasmi.

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