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Résumé
Cet article s’intéresse à la spécificité du traitement comptable des contrats de financement
islamique, a commencé par montrer l’importance de la comptabilité dans la vie de tout agent
économique. En effet, la comptabilité dont le rôle consiste à répondre aux besoins d’informations
financières aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’organisation, lui permet de justifier ses
situations et de collaborer en toute confiance avec ses partenaires. Une bonne comptabilité nécessite
des règles bien élaborées et c’est ce que l’AAOIFI tente depuis sa création en 1991 d’en avoir pour
une bonne gestion comptable des institutions financières islamiques. En comparaison aux normes
IFRS de la comptabilité classique, les normes FAS de l’AAOIFI tendent à mettre l’accent sur le
fond et la mesure des droits et obligations des parties prenantes en conformité avec la charia. Le cas
des contrats de Mourabaha et de Moudharaba a été sommairement présenté dans cet article, sous
forme de schémas d’écritures comptables pour chacun de ces deux contrats.
Mots clés : Comptabilité- normes comptables- charia-Mourabaha- Moudharaba
Abstract
This article, which looked at the specificity of the accounting treatment of Islamic finance
contracts, began by showing the importance of accounting in the life of any economic agent. In fact,
accounting, whose role is to respond to the needs for financial information both inside and outside
the organization, enables it to justify its situations and collaborate with confidence with its partners.
Good accounting requires well-developed rules and this is what the AAOFI has been trying since its
inception in the year 1991 to have for good accounting management of Islamic financial
institutions. Compared to IFRS standards accounting, the AAOIFI FAS standards tend to emphasize
the substance and extent of the rights and obligations of stakeholders in accordance with Sharia law.
The case of the Murabaha and Moudharaba contracts has been summarily presented in this article,
in the form of accounting records for each of these two contracts.
Key words: Accounting- accounting standards- sharia- Mourabaha- Moudharaba
Citation : Ilboudo H-M. (2019), Le traitement comptable des contrats de financement islamique : quelles
spécificités ? Recherches et Applications en Finance Islamique, Volume 3, Numéro 2, pages : 189-204.
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Introduction
Toute activité qui occasionne l’existence de flux économiques entre agents économiques
nécessite la tenue d’une comptabilité. En effet, c’est la comptabilité qui permet de suivre les
mouvements et de déterminer avec précision et fiabilité les droits et obligations nés des
transactions entre les agents économiques.
Selon le dictionnaire Larousse, la comptabilité est un « instrument fondamental de la
connaissance des phénomènes économiques par l’établissement et la tenue des comptes,
l’enregistrement et le classement des mouvements de valeurs impliqués dans une activité
économique ». La comptabilité est alors un système organisé pour la collecte, le classement,
l’enregistrement et le traitement de données chiffrées par un agent économique, dans le but de
produire et de diffuser l’information financière relative à une activité impliquant des flux
économiques.
Dans une entreprise, la comptabilité poursuit les trois grands objectifs suivants :
- suivre pour enregistrer tous les mouvements de flux économiques impliquant
l’entreprise ;
- fournir après traitement approprié les informations financières relatives à la situation
économique de l’entreprise ;
- permettre à l’entreprise de satisfaire à ses obligations légales et fiscales, notamment en
matière de production et de diffuser de l’information financière.
La comptabilité sous sa forme actuelle moderne, est apparue en Italie en 1494 avec
l’avènement de la partie double développée par Luca Pacioli dans son ouvrage intitulé «Traité
particulier des comptes et des écritures ». En effet, depuis son apparition datant de la période
de l’antiquité, les techniques et les règles pour la tenue de la comptabilité n’ont cessé
d’évoluer avec le temps. A partir du XXème siècle, l’internationalisation des marchés
(globalisation) a imposé que la comptabilité devienne un objet de droit harmonisé et lisible
par tous de la même manière et qu’elle constitue donc un langage commun.
Deux faits marquent très fortement l’évolution contemporaine de la comptabilité des
entreprises :
- d’une part, la normalisation et la réglementation de la comptabilité générale
- et d’autre part, le développement de la recherche comptable.
La comptabilité des entreprises est aujourd’hui normalisée, ce qui signifie qu’elle s’appuie
sur une terminologie et des règles communes et produit des documents de synthèse dont les
présentations sont identiques d’une entreprise à l’autre. La normalisation des comptabilités est
antérieure à la seconde guerre mondiale et procède de la volonté des Etats d’avoir des
informations homogènes sur les entreprises de façon éventuellement à exercer sur elles un
contrôle économique et fiscal.
Les efforts de normalisation comptable ont commencé bien longtemps, on peut citer par
exemple :
- dès 1900, les compagnies d’assurances américaines tenaient leurs comptabilités selon
des règles communes ;
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Ce présent article essaie de donner une réponse à cette question et pour cela, les objectifs
poursuivis sont les suivants :
Pour la réalisation de cette étude de nature aléatoire sur un sujet nouveau, l’analyse
documentaire a été mise en avant pour présenter les règles comptables applicables aux
institutions financières islamiques. Le travail est organisé en deux sections, dont la première
présente brièvement les règles comptables de l’Accounting and Auditing Organization for
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IASB depuis 2001
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Islamic Financial Institutions (AAOIFI) et la deuxième propose les schémas comptables pour
la Mourabaha et la Moudharaba.
L’AAOIFI est une organisation internationale indépendante à but non lucratif. Elle a
pour mission l’élaboration et la publication des normes pour les IFI. Il s’agit surtout des
normes comptables et d’audit, des normes de gouvernance et d’éthique et des normes de la
charia. L’AAOIFI a été fondé en mars 1991 par 5 membres fondateurs: La Banque Islamique
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de Développement (BID), les banques Dallah Al Baraka, Dar Al Mal Al Islami, Al Rajhi
Bank, et Kuwait Finance House. Le dernier membre à avoir rejoint le groupe des membres
fondateurs est la Fondation malaise Al Bukhary en 2005. En tant qu’organisation
internationale indépendante, l’AAOIFI est soutenue par les membres institutionnels au
nombre de 200 provenant de 45 pays, dont des banques centrales, des IFI et autres
participants à l’industrie de la finance islamique à travers le monde entier (Bennani, 2015).
Les normes élaborées par l’AAOIFI prennent l’appellation de FAS (Financial Accounting
Standards). L’AAOIFI publie des normes charia, des normes comptables, normes de
gouvernance et des codes de déontologie. Nous nous intéressons ici aux normes comptables.
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Selon les normes AAOIFI, la comptabilité financière doit poursuivre les objectifs
suivants :
- déterminer les droits et obligations de toutes les parties liées ;
- participer à la protection des actifs et des droits des différentes parties liées ;
- respecter les principes de la charia au niveau de toutes les transactions financières ;
- présenter des informations utiles à tous les utilisateurs des états financiers ce qui leur
permettra de prendre leurs décisions en connaissance de cause.
1.4.3 Les objectifs des états financiers selon les normes de l’AAOIFI
Les états financiers des IFI doivent comprendre des informations sur:
- La conformité par rapport aux principes de la charia, afin de pouvoir identifier clairement au
niveau des états de synthèse les dépenses et les revenus interdits par la charia, et le cas
échéant, indiquer la manière dont ils ont été éliminés ;
- Les ressources économiques de la banque islamique afin de permettre aux utilisateurs des
états financiers d’évaluer la capacité de la banque islamique à supporter les pertes et les
risques commerciaux, et le risque inhérent à ses investissements, ainsi que le degré de
liquidités de ses actifs et ses besoins en liquidités pour faire face à ses autres obligations ;
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- l’estimation des flux de trésorerie qui pourraient être réalisés par la banque islamique, le
temps de réalisation de ces flux et les risques associés à leur réalisation. L’information doit
principalement aider l’utilisateur à évaluer la capacité de la banque islamique à générer des
revenus et à les transformer en flux de trésorerie, ainsi que l’existence de flux de trésorerie
suffisants pour assurer la distribution de bénéfices aux actionnaires et aux titulaires de
comptes d’investissement ;
Les hypothèses de base pour l’élaboration des états de synthèse sont au nombre de quatre
selon les normes de l’AAOIFI. Ce sont :
- La pertinence
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- La fiabilité
- La comparabilité
- La permanence des méthodes
- La compréhensibilité (capacité à être comprises et assimilées)
Pour que l’information comptable soit pertinente et fiable, certaines contraintes sont à
prendre en considération. Les normes AAOIFI en retiennent trois:
- l’importance relative ;
- le rapport coût avantages: les avantages obtenus de l’info doivent être supérieures au
coût qu’il a fallu consentir pour la produire ;
Pour la mesure de la valeur des actifs, passifs, produits et charges, la norme FAS 1 de
l’AAOIFI retient trois valeurs possibles, le coût historique, la juste valeur et la valeur
probable de réalisation.
La juste valeur ou fair value en anglais est défini par les normes IAS/IFRS comme le
montant auquel un actif pourrait être échangé (ou un passif éteint), entre des parties dans le
cadre d’une transaction se déroulant dans des conditions normales de concurrences normales
(hors frais de cession et estimation de leur valeur d’utilité. Le coût historique correspond à la
valeur du bien au moment où il est entré dans le patrimoine. La valeur probable de réalisation
est le prix de vente estimé réalisable dans des conditions normales de vente. Cette valeur de
réalisation peut être nette en déduisant les coûts estimés nécessaires pour achever le bien et
réaliser la vente.
Après avoir évoqué les règles générales de comptabilité financière des institutions
financières islamiques selon les normes de l’AAOIFI, nous proposons dans la présente section
les schémas d’écritures comptables de deux contrats de la finance islamique, à savoir le
contrat Mourabaha et le contrat Moudharaba. Les schémas comptables de tous les principaux
produits de finance islamique seront abordés dans une série d’articles. Le choix de la
Mourabaha et de la Moudharaba pour ce tout premier article sur le sujet s’explique par le fait
que la Mourabaha reste à l’heure actuelle, le produit le plus disponible au niveau des IFI
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(Ilboudo, 2019). Pour le choix de la Moudharaba, il est considéré comme le plus ancien
contrat de l’esprit de la finance islamique dont la pratique remonte à la période préislamique.
- La promesse de vente
- L’acquisition du bien par la banque
- L’avance client et/ou dépôt de garantie
- L’arrêté comptable
- La conclusion ou dénouement du contrat
- Le paiement du prix de vente
La promesse de vente est comptabilisée en hors bilan dans un registre ouvert à cet
effet
L’acquisition du bien par la banque
La possession du bien par la banque est une étape incontournable et obligatoire, qu’elle
soit physique ou juridique ou documentaire. Le principe en finance islamique est qu’on ne
peut pas vendre ce qu’on ne possède pas. Cette possession est traduite au niveau des comptes
comptables comme suit :
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Le dépôt de garantie est un montant versé à la banque par le client lors de la conclusion de
la promesse de vente. Le client précise à la conclusion de la promesse comment la banque
peut utiliser le dépôt de garantie. Deux cas peuvent se présenter:
- le dépôt de garantie est remis à la banque en tant que dépôt dans un compte courant ;
- Le dépôt est remis avec possibilité d’être utilisé par la banque dans un investissement
ou placements en attente de la vente finale, dans ce cas un contrat Moudharaba est
conclu entre la banque et le client.
Si le contrat final Mourabaha est conclu et le client souhaite que son dépôt soit
transformé en avance sur le prix à payer, on n’a l’écriture suivante :
Arrêté comptable
A chaque arrêté comptable un inventaire physique doit être établi et une évaluation du
stock est effectuée. Une écriture de dépréciation de stock doit être comptabilisée si la banque
constate une perte probable de valeur de son stock.
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Cette vérification est à effectuer aussi pour les créances clients Mourabaha. Si valeur probable
de réalisation est inférieure à la valeur comptable, on a une dépréciation à comptabiliser
comme suit:
Dotations aux provisions pour dépréciation de Dépréciation des stocks de biens Mourabaha
stocks Mourabaha
Et/ou
Et/ou
Dépréciation des créances clients Mourabaha
Dotations aux provisions pour dépréciation des
clients Mourabaha
Et/ou
Clients Mourabaha
Sortie du stock
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Eventuellement Régularisation du compte de profit (contrat sur plus d’un exercice comptable)
Les normes FAS 3 (financement Moudharaba) et FAS 6 (droits des titulaires des
comptes d’investissement et assimilés) fixent les règles concernant le processus comptable lié
à la Moudharaba.
La Moudharaba est un partenariat à but lucratif entre le capital d’un rab al maal et le
travail d’un Moudharib. Les caractéristiques de contrat stipulent que:
- le ratio de partage des bénéfices entre rab al maal et moudharib est convenu d’avance ;
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Arrêté comptable
A la fin de chaque exercice social, les capitaux investis dans les financements moudharaba
doivent être évalués pour s’assurer ou non de leur dépréciation. Plusieurs cas peuvent se
présenter:
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Et/ ou
A la clôture d’un exercice comptable, il convient d’évaluer si les fonds Moudharaba ont
réalisé des profits ou des pertes:
- en cas de perte, la quote-part des pertes de la banque doit être enregistrée dans ses
comptes
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Conclusion
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Bibliographie
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