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CROISSANCE ENDOGENE
ET CROISSANCE DES REGIONS
Vers une théorie de la croissance endogène spatialisce
Catherine BAUMONT*
octobre 1994
Résumé
L'objectif de cet article est de poser les différents principes préalables
à la construction d'une théorie spatiale de la croissance endogène. Dans ce
but, plusieurs étapes sont présentées.
1/ L'analyse des théories macroéconomiques de la croissance endogène permet
de mettre en évidence le rôle clé des externalités d'agglomérations.
2/ Mettre en parallèle, les mécanismes de croissance endogène et de
croissance régionale permet d'identifier les composantes spatiales de la
croissance. A cet égard, le concept de capital spatial est défini.
3/ Enfin, les principes fondamentaux attachés à la dynamique de population,
à l'accumulation du capital spatial et à l'émergence des économies
d'agglomération sont présentés.
Mots clés
Capital spatial, croissance endogène, espace, externalités d'agglomération,
facteurs de croissance, mobilité.
AVANT-PROPOS
1
Voir par exemple, les revues de synthèse réalisées par Lordon (1991),
Amable et Guellec (1992) et Artus (1993).
2
Pour une présentation plus technique et plus détaillée consulter, par
exemple, Abraham-Frois, 1991, p 253-328.
dans tous les pays. C'est l'idée du rattrappage de croissance qui se
matérialise par le processus de convergence des niveaux de revenus par
tête.
En effet, Young n e fait pas état des external ités marshal 1 iennes.
l'existence de complémentarités entre les firmes ou les activités.
Nous soutenons que l'existence de l'externalité est possible grâce à la
diffusion de la connaissance et donc de l'information, et qu'elle est
facilitée par l'agglomérat ion de firmes ou de secteurs complémentaires.
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Encore appelé développement endogène parce qu'il s'appuie sur des
potentialités locales, internes à l'espace considéré.
3/ La problématique des échanges
L'examen, de la nature et du contenu des échanges permet de cerner la
problématique des échanges régionaux.
a) La nature des échanges
Si on peut assimiler une région à un petit pays, le "reste du monde"
ne peut être considéré comme d'un seul tenant. Il faut en effet distinguer
les autres régions appartenant au même territoire national (c'est
1"anti-région" de Dendrinos, 1984) et les pays étrangers.
Cette distinction s'impose parce que les échanges ne sont pas
gouvernés de la même façon. Par exemple, sur le territoire national il y a
parfaite mobilité de tous les facteurs de production, alors qu'au moins une
restriction sur le facteur travail existe entre la nation et l'étranger.
Deux niveaux d'échange sont donc présents : le commerce interrégional
et le commerce international. Plusieurs conséquences en découlent.
• Chaque région se trouve placée en situation de verticalité de dépendance
et d'horizontalité de concurrence (Lacour, 1985) : la force des liens étant
plus marquée entre la région et le territoire national. L'examen des
relations de dépendance ou d'autonomie sont donc primordiales. En
particulier, dans l'évaluation de la croissance régionale, il importe de
distinguer 1' influence de la croissance économique de la nation et celle
des facteurs régionaux uniquement . De même les politiques publiques
peuvent être menées par des acteurs différents : l'Etat, la Région, voire
la CEE, de façon dépendante ou avec une relative autonomie.
• Chaque région dispose d'un marché à trois composantes : le marché local,
le marché national et le marché international, ce qui lui permet de
valoriser ses ressources dans trois directions.
Par exemple, en tenant compte des enseignements de la théorie de la base,
le secteur d'exportation s'appuiera sur la demande nationale et
internationale (celle-ci est exogène), tandis que le secteur hors base ou
local s'illustrera sur le marché local (de nature endogène). On peut même
"inverser la théorie de la base" en tenant compte cette fois-ci des
importations en provenance de la nation et de l'étranger; importation de
personnes essentiellement : résidants ou touristes.
• L'évaluation de la spécialisation de chaque région tient également compte
de ce double niveau d'échanges puisqu'il faudra construire trois types
d'indicateurs de spécialisation (Kuiper et Paelinck, 1981) :
- de la région par rapport aux autres régions nationales,
- de la région par rapport aux autres pays,
- et éventuellement du pays par rapport aux autres pays (cet
indicateur s'imposant si on estime que le commerce Région/Etranger est lié
fortement au commerce Nation/Etranger).
Il faut alors disposer de l'information nécessaire à l'évaluation de
ces spécialisations, de manière à cerner les possibilités d'application des
modèles de croissance endogène. A ce stade, les problèmes liés à
l'élaboration de comptabilités régionales apparaissent : il s'agit à la
fois de difficultés de définition et d'appréciation des agrégats régionaux
(par exemple, la distinction entre production nationale et production
intérieure est beaucoup plus importante dans le cas de la région du fait de
son ouverture sur l'extérieur (Démons, 1978, 1979) et de difficultés de
collecte d'informations.
1/ Définitions
"Le facteur d'agglomérat ion est un avantage ou une réduction du prix
de la production ou de la distribution qui résulte du fait que la
production est portée à un niveau considérable à un endroit" (Weber, 1909,
p 126). Béguin (1988) remarque alors que les économies d'agglomération
combinent deux effets : les économies d'échelle traditionnelles liées à la
taille de l'entreprise et les externalités liées à la présence dans un même
lieu de plusieurs firmes.
En fait, ce concept est déjà présent chez Marshall qui exprime que les
économies d'échelles peuvent trouver leur origine dans la manifestation
d'"économies internes" qui augmentent avec la taille des firmes, mais aussi
dans la manifestation d"économies externes" aux firmes dispensées par le
milieu économique dans lequel elles se situent et qui sont communes à
toutes les firmes (Catin, 1991, p 573).
Les économies d'agglomération sont donc externes aux firmes mais
internes à l'espace considéré. On peut les décomposer en deux grandes
catégories :
- les économie de localisation qui dépendent de ce que l'on trouve
dans le milieu (qualité de la main d'oeuvre, relations de complémentarité
entre les firmes en situation de proximité ... ).
- les économies d'urbanisation qui sont liées à la taille de
l'agglomération et sont donc corrélées avec les types d'activités localisés
dans les villes : infrastructures, services . . .
Ainsi, les externantes d'agglomération dépendent :
- de la façon dont les activités se localisent (concentration ou
dispersion); en ce sens elles sont essentiellement attachées au milieu
urbain,
- du lieu où elles se localisent dans ou à proximité des zones
urbaines (être à proximité de l'agglomération est une façon de profiter de
ses avantages sans en subir les inconvénients ).
2/ Modes d'expression
• La forte corrélation entre la ville et les économies d'agglomération
provient de la concentration d'activités diversifiées permettant aux
relations de complémentarité entre les firmes de s'exprimer (Hansen, 1990,
p 469).
• Les économies d'agglomération sont liées aux secteurs publics de R&D et
de fourniture d'infrastructures de transport et de communication, et aux
services publics car elles dépendent des facilités d'accès à tous les
services aux producteurs.
• Les économies d'agglomération permettent d'améliorer singulièrement la
productivité des firmes comme le soulignent les études empiriques réalisées
par Catin (1991). Par exemple, la productivité du travail se trouve être
améliorée par la taille de la ville.
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3.1.1. Structure d'un modèle de croissance endogène
1/ Fonction de production
On dispose d'une fonction de production à facteurs substituables qui
présente des rendements constants sur les facteurs privés et une
externalité portée par un facteur social : c'est le facteur de croissance
généralement défini comme un "stock de connaissances" au contenu plus ou
moins précisé par les auteurs.
Y = f (K, H, A)
2/ Equations de comportement
• On part de la condition d'équilibre sur le marché des produits, pour tout
instant t. Par exemple, si on considère que le facteur social est
représenté par du capital public, on aura :
Yt = Ct + It + Gt
où G sont les dépenses publiques consacrées à la production d'infra-
structures de communication et de transport, I désigne l'investissement et
C la consommation.
(Dans ce cas, on considère que les dépenses publiques sont financées par
une taxe proportionnelle au revenu Y)
t = 0
3/ Processus d'accumulation
On spécifie un ou plusieurs processus d'accumulation dans le temps de
facteurs de croissance :
- accumulation de capital physique,
4/ Facteurs exogènes
Les conditions initiales (valeur des variables au temps t = 0) et le
taux de croissance naturel de la population sont donnés de manière exogène.
5/ Résolution du modèle
Il s'agit de trouver les conditions optimales d'accumulation et de
croissance qui maximisent l'utilité intertemporelle des consommateurs
soumise aux contraintes de comportement et aux conditions d'accumulation.
n t
P(t) = P(0) e
1/ Le solde migratoire
Nous considérons ici le cas d'une région attractive. Par exemple,
dans l'option R(l), cela signifie que les individus se déplacent de
l'anti-région vers la région.
Les mouvements de population vont résulter de facteurs économiques
et sociologiques. Ces derniers correspondent par exemple aux changements de
goût des consommateurs et nous n'en tiendrons généralement pas compte.
Les facteurs économiques dépendent de l'attraction exercée par la
région : elle est mieux dotée en facteurs de croissance que 1'anti-région.
Pour les individus, cela signifie que la croissance économique y est plus
forte et donc qu'ils auront des avantages en terme d'opportunités d'emplois
et de revenus ou qu'ils disposeront d'un plus grand nombre de biens
différents . . .
M(t) = s [E(t-l)]
2/ Conséquences
Les conséquences étudiées sont celles relatives à la quantité de
facteur travail disponible dans la région et à la fonction d'utilité
intertemporelle.
Cette hypothèse peut tout aussi bien être assouplie en supposant que 0
varie dans le temps (on a alors 0t) ou abandonnée en conservant simplement
l'identité H(t) = H (t) + H (t).
Puisque la quantité de capital spatial dépend de la quantité de main
d'oeuvre qui lui est affectée, on a la relation suivante :
E(t) = h [Hi(t)]
1 + P
Hi(t+1) = ^ Hi(t) + s [E(t)]
a a
Hi(t+1) - Hi(t) J = s [E
P . yE(t) . . [yE(t)+6A(t)]
En posant c = g x et d = ^TT\A
^ t ôA(t) t i>R(t)
on peut écrire
[yE(t)+yE(t)/c ] t yE(t)(l+c ) t
d = =
t vRÎC) i>R(t)c.
t
1 + rElti
M M h - 3A(t)
[ 1 0 ] d
t * „R(t)
8A(t)
1/ Principes
On suppose que l'émergence d'externalités positives ou négatives est
subordonnée à la façon dont l'espace est occupé. On distinguera :
- le capital spatial E(t)
- les autres activités de production A(t) et les activités résidentielles
R(t).
t ÔA(t)
ÔA(t)
2/ Conséquences
L'existence d'externalités positives améliore la productivité des
autres facteurs de production et constitue un élément attractif pour la
population des autres régions.
Le solde migratoire est positif et est donc favorable à l'accumulation
d'activités de type E. Le rapport d'occupation se trouve modifié et peut
atteindre, au fur et à mesure de l'accumulation, le seuil de saturation.
Si, cela se produit, un processus inverse se produira du fait des
externantes d'agglomération négatives. Grâce à une modélisation plus
élaborée, il sera possible de mieux identifier les différentes trajectoires
possible de croissance des régions.
En particulier, les autres éléments suivants doivent être pris en
considération :
• il faut tenir compte de la taille de la région et donc de sa capacité
d'accueil des activités.
• la fonction d'utilité intertemporelle de consommation peut également être
affectée par les externalités d'agglomération.
CONCLUSION
RÉFÉRENCES
G.M. GROSSMAN and E. HELPMAN, 1990, Comparative Advantage and Long Run
Growth, The American Economie Review, September, 796-815.
G.M. GROSSMAN and E. HELPMAN, 1991, Quality Ladders in the Theory of
Growth, Review of Economic Studies, 58, 43-61.