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Université Assane Seck de Ziguinchor

UFR des Sciences Économiques et Sociales

Département d’Économie-Gestion

Master FINDEV

Module

MACROECONOMIE DU DEVELOPPEMENT

Première parte : Problématiques du développement

Mamadou Bobo Barry

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Avec la révolution industrielle qui marque l'avènement d'un processus continu


d'accroissement de l'activité économique, l'intérêt de certains penseurs s'est porté sur l'étude
des phénomènes économiques.

«Durant le siècle qui suivit la publication de l’ouvrage « Recherche sur la nature et les causes
de la Richesse des Nations » d'Adam Smith, le développement du capitalisme a été au centre
de la pensée économique; c'était la préoccupation fondamentale de l'économie politique
classique».

Par la suite, le processus de croissance manifestant une tendance à l'auto-entretien, la théorie


économique a pu se désintéresser des problèmes spécifiques du développement au profit
d'analyses centrées « sur les conduites des producteurs individuels et des consommateurs sur
des marchés parfaits ou imparfaits, ainsi que ... l'instabilité cyclique du capitalisme».

« A la même période, à la suite des premiers jalons jetés par Marx, la pensée marxiste
élaborera la théorie de l'impérialisme mais celle-ci, si essentielle qu'elle soit pour la
compréhension du sous-développement, ne constitue que l'introduction à l'analyse de celui-
ci».

Ce n'est qu'après la deuxième guerre mondiale que le développement reprend sa place au sein
de la pensée économique. Mais il s'agit, dès lors, du développement des pays n'ayant pas
atteint le stade industriel que l'on qualifie de sous-développés.

Toutes ces analyses économiques, se sont généralement fixé comme objectif fondamental
d’expliquer l’amélioration du niveau de vie des individus.

Cependant, il existe plusieurs controverses sur la manière d’y arriver mais aussi sur
l’appréhension de ce dernier (sa mesure). Toutes les réflexions sur le développement
soulèvent des controverses et des clivages théoriques relatifs à la caractérisation du sous-
développement et aux stratégies à mettre en œuvre pour en sortir.

Aujourd’hui, les concepts de croissance et de développement sont les plus utilisés pour
apprécier la performance des économies et l’amélioration du niveau de vie des populations.
Toutefois, le concept de développement apparait plus englobant que le concept de croissance.
En effet, la croissance économique est un phénomène quantitatif, et se définit comme
l’accroissement ou l’expansion de la production (quantité des biens et services produits) selon
un rythme soutenu, régulier et en longue période.

Le développement économique est plutôt un phénomène qualitatif qui s’opère par la


modification des structures économiques, sociales et mentales. D’une façon générale, le
développement correspond à une évolution durable des mentalités et des structures. En
particulier, le développement exige l’accroissement de la production et une meilleure
répartition des revenus. Donc : Développement = croissance + Une distribution plus égalitaire
des revenus grâce à une modification des structures économiques et sociales.

Chapitre 1 : LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE

Faits stylisés :

• Fortes inégalités de revenus (par habitant) d’un pays à l’autre.


• Large dispersion des profils de performance en matière de croissance.

• Croissance économique dans le monde : phénomène relativement récent (deux siècles).

Questionnements :

- Comment, donc peut-on appréhender la croissance économique, sa mesure et ses


facteurs ?
- En quoi la croissance est-elle différente du développement ?
- Comment peut-on expliquer les différences et les inégalités entre les différents pays du
monde ?
- Et Pourquoi existe-t-il une grande disparité dans les profils nationaux de revenus par
habitant?

I. LA CROISSANCE EXOGÈNE

• Théorie néoclassique

Le modèle néoclassique de la croissance est principalement dû à Solow (1956) et Swan


(1956).

- Source de la croissance: progrès technique exogène.


- Rendements marginaux décroissants du capital.
- Rôle limité de l’État.

• Éléments du cadre analytique

- Fonction de production agrégée, combine travail et capital, rendements marginaux


décroissants, rendements d’échelle constants
- Technologie croît à taux constant exogène

Le modèle de Solow repose sur cinq hypothèses :

- le marché est en situation de concurrence pure et parfaite


- une fonction de production à deux facteurs, le travail et le capital : Y = f (L, K)
- les facteurs de production sont substituables
- les rendements factoriels sont décroissants à partir d'un certain seuil => par
exemple, à quantité de travail inchangée, une augmentation de la quantité du facteur
capital engendre une hausse de la production moins que proportionnelle => la
productivité marginale du capital est décroissante.
 Les rendements factoriels relient la production à une combinaison de facteurs
dont l'un est fixe.
- les rendements d’échelle sont constants : la production augmente au même rythme
que les facteurs de production qui varient dans la même proportion
Ex : un doublement de la quantité de travail et de la quantité de biens d’équipement
s'accompagne d'un doublement de la production
 Les rendements d'échelle relient la production à une combinaison de facteurs
qui varient dans la même proportion.

• Le modèle néoclassique de Solow permet de faire deux prédictions :

- il envisage le rattrapage des pays développés par les pays les moins développés =>
convergence
- en raison des rendements décroissants des facteurs de production, les économies vont
atteindre un point où toute augmentation des facteurs de production n'engendrera plus
d'augmentation de la production : c'est l'état stationnaire dont parlait D.Ricardo.

• Solow note toutefois que cette troisième prédiction est irréaliste : en fait, les économies
n'atteignent jamais l'état stationnaire, en raison du progrès technique qui augmente la
productivité des facteurs et permet donc de contrecarrer la décroissance des rendements
factoriels.

• Dans ce modèle le progrès technique est un facteur exogène, c'est-à-dire indépendant de


l'activité économique : il semble donc « tombé du ciel », il est le fruit du hasard et reste de ce
fait inexpliqué (R.SOLOW ne dit rien sur ses origines).

Les analyses du rôle du progrès technique comme source de croissance ont été profondément
renouvelées depuis le début des années 80. Le changement réside dans la manière
d’expliquer l’origine de la croissance économique.
II. LES NOUVELLES THÉORIES DE LA CROISSANCE : la croissance
endogène
- Source de la croissance: technologie endogène.
- Rendements non-décroissants: facteurs cumulables, présence d’externalités.
- Rôle actif de la politique économique.
 Dans les années 1980, d'autres économistes contemporains (Paul Romer, Robert Barro et
Robert Lucas, Philippe Aghion et Peter Howitt) endogénéisent le progrès technique dans
la croissance.

• Ils se fondent sur l'hypothèse que la croissance génère par elle-même le progrès
technique qui est à la fois une cause et une conséquence de la croissance.

• Ainsi, il n'y a plus de fatalité des rendements décroissants, l'investissement dans les sources
de progrès technique produit des externalités positives qui permettent des rendements
d'échelle croissants.

• La croissance économique trouve donc sa source dans l’accumulation de différentes


formes de capitaux :

- le capital physique productif: capital fixe et capital circulant (P.ROMER, 1986)

- le capital technologique => investissement dans la R&D (P.ROMER, 1987)

- le capital humain : terme utilisé par G.Becker et désignant un stock de connaissances, de


savoir-faire et savoir être incorporé par chaque individu et pouvant être utilisé à des fins
productives ; il peut être amélioré par des effets d'apprentissage ou « learning by doing »
(P.ROMER, 1986) (R.LUCAS, 1988)

- le capital public => investissement dans les infrastructures publiques (R. BARRO, 1990)

• Le progrès technique dépend donc des décisions volontaires et rationnellement fondées


des agents économiques d'investir dans différentes activités qui permettent l'émergence de
l'innovation.

• Cette thèse de la croissance endogène remet en cause la théorie libérale néo-classique sur
plusieurs points :
1er point : le processus de croissance est donc cumulatif et auto-entretenu

Les économies ne vont donc pas tendre vers un état stationnaire => la croissance endogène
contredit l’idée de la convergence des économies.

2ème point : les pouvoirs publics doivent stimuler et encourager l'innovation et


l'accumulation de capital => politique structurelle à long terme :

- protéger l’innovation par le biais de droits de propriété (ex : brevets) qui donnent un
monopole d’exploitation temporaire (explication : les agents sous-investissent dans les projets
qui ont un rendement privé inférieur au rendement social).

- financer lui-même l'effort de R&D (recherche fondamentale et appliquée)

- réaliser des investissements publics,

- inciter économiquement les agents (entreprises, ménages) à investir ou à chercher ou à


s’éduquer en subventionnant les externalités positives

III. CLASSIFICATION DES FACTEURS DE LA CROISSANCE

Par définition, la croissance économique suppose une augmentation quantitative de la


production, laquelle production dépend des facteurs traditionnels : Ressources naturelles,
capital et travail (force humaine).

Outre ces facteurs, la croissance économique nécessite, aujourd’hui, d’autres Facteurs


d’efficacité.

A. LES FACTEURS TRADITIONNELS

A.1 Les ressources naturelles

Ces dernières englobent essentiellement

 La terre : les surfaces cultivables (sols), le sous-sol avec ses richesses minérales, les
forêts... etc.
 Les eaux : eau potable, l’eau pour l’irrigation des plantations... etc.
 Les métaux : Fer, Or, argent,…
 Le pétrole, le phosphate, le gaz naturel, …etc.
A.2 La population

Deux thèses s’opposent quant à la contribution de la population à la croissance économique :

- Une première thèse considère qu’un grand effectif de la population constitue des
bouches supplémentaires à nourrir.

Ce problème prend davantage d’ampleur dans les pays où les disponibilités


alimentaires sont faibles.

Dans ces pays, la sécurité alimentaire n’est pas assurée : Ils dépendent de l’étranger
dans leur approvisionnement en produits alimentaires.

Donc, tant qu’une société ne s’est pas libérée de la contrainte alimentaire,


l’expansion démographique y retarde la possibilité de décollage économique (cas
des pays les moins avancés : Angola, Bangladesh, etc...)

- Une deuxième thèse considère, au contraire, qu’une population en expansion


représente une source de création de richesses car la population active constitue un
facteur de production d’autant plus productif qu’il est formé et qualifié.

De plus, cette population représente une demande supplémentaire pour les


productions qui trouvent ainsi des débouchés.

Ceci assure au marché national des biens et services une plus grande taille et favorise
ainsi la croissance de l’offre des entreprises.
Cette thèse s’applique surtout à partir d’un certain niveau de développement
économique et social (cas des pays développés) ou encore dans le cas des pays de
l’Europe, après la deuxième guerre mondiale.

A.3 Le capital

De tous les facteurs de la croissance, le capital est celui dont l’accroissement est le plus
rapidement réalisable. Ceci dépend des possibilités de l’économie de dégager, dans le
revenu national, un financement suffisant pour les investissements : Encore faut-il que les
circonstances soient favorables à l’investissement : épargne abondante, progrès technique ?
B. Les facteurs d’efficacité

Dans un état donné de la technologie, il arrive un moment où le rythme de la croissance


économique s’essouffle. Le plafonnement de la production ne peut être relevé qu’en
améliorant l’efficacité des combinaisons productives. Plusieurs facteurs entrent dans ce cadre
: il s’agit essentiellement des facteurs suivants :

B.1 Le progrès technique

ce dernier concerne

 La façon de produire : Il permet un accroissement de la productivité ou des


rendements des facteurs
 La nature des produits : il permet essentiellement la production de biens nouveaux
assurant une meilleure ou une plus large satisfaction des besoins.

B.2 Le développement de la connaissance scientifique

Il est clair que c’est là la source de tout progrès. En particulier, le développement de la


fonction Recherche et Développement dans les entreprises et les universités est un moyen très
efficace pour la découverte de nouvelles technologies.

B.2 L’éducation et la formation

• L’éducation intervient pour assurer au facteur humain un niveau d’instruction nécessaire à


l’adaptation aux techniques modernes.

• La formation assure une qualification minimale aux travailleurs et permet d’entretenir leurs
aptitudes professionnelles.

B.2 Les échanges extérieurs

L’ouverture sur l’extérieur permet, par le biais des échanges, de bénéficier des progrès
réalisés ailleurs (transfert technologique).

La libéralisation des échanges extérieurs, permet d’ouvrir de nouvelles débouchées à la


production nationale. À ce titre, la croissance des exportations d’un pays devient une
condition nécessaire à la croissance.

B.2 Un contexte favorable à la croissance


Un ensemble de facteurs ont en commun de créer une ambiance favorable à la croissance. Ce
sont notamment :

- L’innovation et l’esprit d’entreprise : l’innovation est un facteur incontournable de


progrès. Elle implique une imagination fertile et des recherches continues. L’esprit
d’entreprise est l’aptitude à créer et à gérer des entreprises : l’entrepreneur type ne
craint pas le risque de perte inhérent à tout projet. Il est fonceur, dynamique et
courageux.
- L’épargne : condition nécessaire à la réalisation de l’accumulation du capital.
- La souplesse (flexibilité): elle facilite l’adaptation aux changements qui accompagnent
la croissance.
Encadré 1 : Les étapes de la croissance

C’est dans les travaux de Rostow que l’on trouve de façon très significative l’idée
selon laquelle chaque économie passe par cinq étapes successives de croissance
économique. Ces cinq étapes peuvent être schématisées comme suit :

La société • Organisation de type féodale et


autarcique
traditionnelle
• Économie basée sur l’agriculture

• Peu de progrès technique

Les conditions • Essor agricole

préalables au • Augmentation des profits agricoles

décollage • Développement de l’épargne et du

développement

• Amélioration des connaissances

Le décollage • Diffusion de nouvelles techniques

• Industries nouvelles ayant un rôle


moteur
• Essor agricole libérant la main
d’oeuvre

vers l’industrie

• Taux d’investissement supérieur à 10%

La marche vers la maturité • Progrès technologiques continus

• Industrialisation généralisée à tous les

secteurs

• Urbanisation et exode rural

• Taux d’investissement supérieur à 20%

L’ère de la consommation de masse • Besoins fondamentaux satisfaits

• Développement du rôle de l’Etat

• Apogée du secteur tertiaire ( de


services)

IV. Analyse conceptuelle : Croissance , progrès, expansion et développement

IV.1 Croissance et expansion

Alors que la notion de croissance se rapporte à des phénomènes se situant sur les moyens et
longs termes, celle de l’expansion désigne également une hausse de la production mais dans
une vision à court terme et qui peut se réaliser sans changement de structures.

IV.2 Croissance et progrès


Le progrès se définit généralement comme étant un état jugé meilleur par rapport au passé. La
notion de progrès économique se définit à la fois par l’idée de croissance (accroissement
quantitatif des richesses) et par une meilleure efficacité (productivité, progrès technique,
meilleure organisation de la production...).

IV.3 Croissance et développement

Croissance et développement sont deux notions dépendantes : la croissance mène au


développement qui favorise la croissance. Mais une croissance déséquilibrée, ou dont les
gains sont mal répartis, ne conduit pas au développement. La croissance est une condition
nécessaire mais non suffisante pour le développement : Toute croissance n’est pas profitable.

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