Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
de la Pensée Economique
2005-2006
Plan du cours
2ème Partie : Pensée économique au 19ème
Chapitre 1 : Les développements de l’économie politique libérale
1.1. L’école anglaise
1.2. L’école française
Chapitre 2 : Les réactions à l’économie politique libérale
2.1. Les socialistes français
2.2. Les socialistes allemands
2.3. Autres réactions à la pensée économique libérale
2
2ème Partie
La pensée
économique au
19ème
3
PREAMBULE : COMMENT CARACTERISER LE
1 9 EM E ?
4
Certes la méthode est bigarrée mêlant des considérations empiriques avec
des considérations théoriques ; mélangeant le ton scientifique avec le ton
polémique.
Il n’en demeure pas moins que le travail est d’une amplitude et d’une
cohérence remarquable. ET c’est en ce sens que Smith a contribué à faire
de l’économie un domaine de spécialisation au sein des sciences morales.
Ce lien entre éthique et pure économique, c’est sans doute ce que perdront
les néoclassiques et même ses successeurs plus immédiats tel Ricardo.
Notons encore que Smith n’est pas pour autant le libéral naïf, ou angélique
que l’on croit. Il ne se trompe sur la nature de l’homme et n’est pas d’un
parti plutôt qu’un autre. Ni les propriétaires fonciers, ni les industriels, ni
les commerçants n’ont sa faveur.
5
Smith n’a rien découvert. Il a tenté de comprendre. Il n’a pas inventé « le
marché ». L’économiste est celui qui tente d’ouvrir les yeux de ses
concitoyens sur la façon dont fonctionnent les interactions, sur la nature
des incitations.
Smith, c’est à noter, n’a pas été excellent dans ses prévisions. Après tout,
une révolution industrielle est en train de poindre et il ne l’aperçoit pas !
Mais cela n’est pas fondamental parce que, précisément, sa force réside
dans la prise de conscience des limites de sa connaissance.
Et pour autant il n’est pas résigné ! On dit même parfois que Smith est à
classer parmi les libéraux optimistes.
optimistes Y a t il chez lui et chez ses disciples
directs (Say, par exemple) un optimisme aveugle ?
D’où vient cette confiance ? Cette assurance ?
6
dans un contexte de concurrence entre des unités économiques et
politiques fragmentées, produisant des institutions économiques et des
structures politiques qui produirent à leur tour la croissance économique
moderne.
7
ANNEXE 1 : Socialisme/rousseau
Retour en arrière ? Sans doute, mais avec souvent une admiration non
voilée pour le progrès technique. La communauté et les sciences : tels sont
les deux piliers de ces révolutionnaires réactionnaires.
8
Thomas Campanella
La cité du Soleil (1602)
Moine dominicain né à Calabre en 1568.
Provoque une insurrection contre les Espagnols avec l’aide des turcs.
Sa cité est plus centralisée encore que celle de More. La liberté en est
presque totalement absente. La propriété est collective. Les familles sont
dissoutes, et les rapports sexuels sont gérés par les magistrats.
Comme d’habitude, il suffira de travailler quatre heures par jour…
Pour certains, c’est aussi une façon de montrer ce qu’ils perçoivent comme
une perversion dans nos sociétés modernes.
Notez au Paraguay, entre 1583 et 1768 l’expérience menée par des jésuites
qui créent la République de Guaranis, comptant jusqu’à 130 000 personnes
organisées en « réduction », c’est-à-dire en phalanstères.
9
ROUSSEAU ou l’anti économique ou anti humaniste
Peu de temps après (1755) il écrit son Discours sur les origines et les
fondements de l’inégalité parmi les hommes. Il se retire alors des milieux
mondains et écrit La Nouvelle Héloïse, l’Emile, le Contrat Social. Notons
encore que c’est lui qui écrit l’article Economie Politique pour
l’Encyclopédie.
10
Mais ces écrits sont condamnés par les Parlements de Paris et le Conseil
de Genève. Commence alors une vie errante, qui le conduit en Suisse, puis
en Angleterre (invitation de Hume), pour terminer à Paris où il meurt en
1778.
11
« Dieux : que sont devenus ces toits de chaume et ces foyers rustiques
qu’habitaient jadis la modération et la vertu ? Quelle splendeur funeste a
succédé à la simplicité romaine ? Quel est ce langage étranger ? Quelles
sont ces mœurs efféminées ? Que signifient ces tableaux, ces statues, ces
édifices ? Insensés, qu’avez-vous fait ? »
Et voici la prière finale pour conclure ce sujet : « Dieu tout-puissant, toi qui
tiens dans ta main les esprits, délivre-nous des Lumières et des funestes
arts de nos pères, et rends-
rends-nous l’ignorance, l’innocence et la pauvreté,
pauvreté les
seuls biens qui puissent faire notre bonheur et qui soient précieux devant
toi ».
Plutôt édifiant de la part de celui qui est parfois considéré comme le père
de l’école laïque républicaine !!
12
La réponse de Rousseau est que les hommes naissent égaux, que l’inégalité
est contraire à la loi naturelle, et que cette inégalité est un produit
malheureux du développement des sociétés modernes.
Cet homme naturel (le bon sauvage) n’est pas soumis aux passions. Il ne
songe pas non plus à se perfectionner. « Ses désirs ne dépassent pas ses
besoins physiques ; les seuls biens qu’il connaisse dans l’univers sont la
nourriture, une femelle et le repos. »
Dans ce contexte simple et rude (cf. Sparte) les plus robustes résisteront.
La médecine n’a rien apporté à ce sujet. Ecoutons plutôt :
13
« La médecine, de toute façon, ne rallonge pas la vie humaine. Et la
civilisation fait que les riches mangent trop et les pauvres pas assez, tous
vivent moins longtemps qu’ils ne vivraient à l’état de nature. On ne trouve
guère d’animaux infirmes : les animaux blessés soit meurent, soit
guérissent parfaitement. D’ailleurs les animaux domestiques sont
beaucoup moins beaux et bien portants que les animaux sauvages ».
Mais ce n’est pas tout. Autre vertu des hommes à l’état naturel : ils ne
pensent pas !!
« J’ose presque assurer que l’état de réflexion est un état contre nature, et
que l’homme qui médite est un animal dépravé. »
Voilà donc notre homme naturel. Il n’est pas sauvage au sens de Hobbes.
Rousseau insiste : « N’allez pas conclure avec Hobbes que pour n’avoir
aucune idée de la bonté, l’homme soit naturellement méchant ».
Cet homme n’est ni bon, ni méchant. Il est instinctif, farouche, sain, …
heureux ?
Notons enfin que dans cet état de nature les hommes sont égaux. Certes, il
y en a de plus forts que d’autres ! Mais le plus faible peut toujours fuir. Ce
sont les institutions de la société qui vont réellement nous aliéner.
14
« Il me reste à considérer et à rapprocher les différents hasards qui ont pu
perfectionner la raison humaine, en détériorant l’espèce, rendre un être
méchant en le rendant sociable.
sociable »
15
On se retrouve alors dans la situation de Hobbes. Et d’après Rousseau,
tout du moins ici, les lois vont alors être dictées par les puissants, les
riches, qui vont fixer dans la loi leur pouvoir usurpateur.
C’est la seule partie achevée d’un grand traité sur les Institutions
Politiques que projetait Rousseau.
16
Son rôle va être de passer un second contrat social. Ce second contrat doit
pallier les défauts dus à l’éloignement de la nature.
« Efforçons nous de tirer du mal même le remède qui doit le guérir »,
cherchons « dans l’art perfectionné, la réparation des maux que l’art
commencé a fait à la nature ».
Mais l’Etat ne peut-il pas se tromper. Non répondra Rousseau. Mais même
si tel était le cas « s’il lui plaît de se faire mal à lui-même, qui est-ce qui a
le droit de l’en empêcher ? »
La volonté générale
Némo offre une belle démonstration qui permet de voir la cohérence, à dire
pas si facile à déceler, de Rousseau.
17
Tout passe par la distinction entre amour de soi et amour propre. L’amour
de soi va dans le bon sens, celui des instincts naturels. L’amour propre
part dans tous les sens. Lors d’un vote collectif, les amours propres
s’annulent et dominent l’amour de soi, commun à tous les hommes.
C’est pour cette raison que l’on doit me forcer, pour mon bien, à me plier à
la décision du peuple.
Mais, attention, cette décision peut être faussée par l’existence de partis
politiques qui ôtent à la diversité des points de vue et peuvent faire
ressortir l’amour propre. C’est pourquoi Rousseau sera contre les
« brigues » comme il les appelle. On retrouve une technique bien connue de
la suppression des états intermédiaires.
La mise en œuvre
18
« Le peuple anglais pense être libre, il se trompe fort ; il ne l’est que durant
l’élection des membres du Parlement : sitôt qu’ils sont élus, il est esclave,
il n’est rien. Dans les courts moments de sa liberté, l’usage qu’il en fait
mérite bien qu’il la perde. »
19
CHAPITRE 1
LES DEVELOPPEMENTS DE L’ECONOMIE POLITIQUE
LIBERALE (LES CLASSIQUES)
20
Section 1
L’école anglaise
En 1793 débute une série de conflits armés contre la République française, puis contre
Napoléon. Le financement de ces conflits conduit à une plus grande inflation. En
1797, de nombreuses banques locales font faillites ou suspendent la convertibilité de
leur monnaie (The Restriction Act). La panique touche même les clients de la Banque
d’Angleterre. Le gouvernement décide de suspendre la convertibilité.
S’en suit une très longue période de cours forcé de la livre sterling: 1797-1821.
Cela permet la poursuite d’une politique inflationniste. Les résultats sont sans surprise.
Le change britannique se détériore (la monnaie anglaise perd de sa valeur dans les
échanges).
Différences :
• ils sont plus déductifs qu’inductifs,
• économie = gestion de la rareté,
• ils sont plus radicalement encore industrialiste (la nature est avare).
Physiocratie à rebours (Gonnard)
Similitudes :
21
• foi dans les lois naturelles,
• confiance en l’individu,
• cosmopolitanisme.
Bilan :
« Un pessimisme ‘quiétiste’ qui, pratiquement, aboutit aux mêmes conclusions
que l’optimisme Smithien, puisqu’il considère que le meilleur ordre (ou le moins
mauvais) est celui qui s’établit de lui-même sous un régime de liberté. » Gonnard
158
Libéralisme « subi ».
A. Biographie et bibliographie
l'homme :
- fils d’un gentilhomme campagnard
- études à Cambridge
- Pasteur protestant, en charge d'une paroisse
- nommé en 1805 professeur d’histoire moderne et d’économie politique au
collège d’Hayleibury près d’Hertford (première chaire d’économie
politique créée en Angleterre) (Bourcier de C., p. 121) Collège fondé par
la Compagnie des Indes Orientales.
- marié à 38 ans
- élu membre de nombreux clubs d’intellectuels à Londres, Paris et Berlin.
- Meurt subitement en 1834
Outre l’Essai sur le Principe de Population, dans ses effets sur le bonheur futur de la
Société, accompagné de remarques sur les idées de M. Godwin, M. Condorcet et
autres écrivains publié pour la première fois en 1798 sans nom d’auteur et suivi de 5
nouvelles éditions, il a aussi écrit des Principes d’économie politique, considérés sous
22
le rapport de leur application pratique en 1820 et des Définitions en économie
politique (1827).
Les problèmes des Poor Laws (cf. en particulier la discussion dans Smith)
Exemple de loi (Malthus, p.224) texte d’un édit
Réaction de Malthus : alors qu'il avait écrit un 1er livre (que son père l’avait dissuadé
de publier) The Crisis en faveur des Poor Laws réaffirmées par Pitt (1er ministre de
1783 à 1801 puis 1804-1806) dans lequel il développait essentiellement les idées de
son père, Godwin le pousse à prendre le contre-pied, car, étant pasteur, il connaît le
problème des pauvres. "Essai sur le principe de la population" (1798) puis 2ème
édition en 1803. Pour lui les réformes sociales proposées seront vaines, voire
désastreuses.
Et son célèbre ouvrage va donc être construit pour « faire peur » aux réformateurs
sociaux. C’est ainsi qu’il est plus déductif qu’inductif. Malthus sait ce qu’il cherche à
démontrer par les données. D’ailleurs la première édition ne contient que des faits
recueillis de façon indirecte dans les travaux de Hume, Wallace, Smith, Price (il le dit
lui-même dans la préface de la seconde édition).
B. Le principe de population
B1. La méthode
Pour beaucoup Malthus est remarquable par sa méthode qui est nettement plus
« scientifique » que celle utilisée par ses prédécesseurs.
Ainsi, il reprochera à Ricardo (Principes publiés en 1817) et à Say de ne pas être assez
rigoureux,
23
• soit parce que, par désir de simplification, ils recherchent une cause unique là
où il peut bien y en avoir plusieurs,
• soit parce qu’ils répugnent à confronter leurs théories au feu de la vérité,
révélée par les faits.
On peut se demander toutefois s’il a bien appliqué cette méthode à lui-même.
B2. Le principe
Malthus écrit sur la pauvreté des nations, après Smith qui lui avait écrit sur la richesse
des nations…
« L’homme le plus funeste de son siècle » écrit Molinari (voir la citation complète
page 125, 126 de BdC)
Mais les excès de la Révolution vont provoquer une réaction. L’ouvrage typique de
cette réaction est celui de Edmond Burke : Réflexions sur la Révolution de France.
Malthus s’inscrit dans cette réaction (Molinari dit de son ouvrage que ce n’est à la
base qu’un pamphlet anti-socialiste).
24
tous les vingt-cinq ans, tandis que les moyens de subsistance augmentent au mieux
selon une progression arithmétique. »
« le malthusianisme » :
« Un homme qui naît dans un monde déjà occupé, si sa famille ne peut le nourrir, ou si
la société ne peut utiliser son travail, n’a pas le moindre droit à réclamer une portion
quelconque de nourriture, et il est réellement de trop sur la terre. Au grand banquet de
la nature, il n’y a point de couvert mis pour lui. La nature lui commande de s’en aller,
et elle ne tarde pas à mettre elle-même cet ordre à exécution » (Gonnard 162)
BdC nous dit qu’il enleva cette phrase des éditions qui suivirent la première édition.
La misère des classes les plus pauvres est à attribuer à leur faiblesse morale…
L’héritage légué :
- Il a fondé l'économie sur la rareté disent certains
- Père de la démographie moderne disent d’autres ?
Père des thèses catastrophistes ?
Surtout nous apprenons de son erreur
25
explication de son erreur : Chiffres pour l’Angleterre
De toutes façons, Malthus reste un libéral car l'Etat ne peut rien changer par son
intervention.
Il a, de l’avis même de l’intéressé, inspiré Darwin qui croit à un processus de sélection
naturel (les + intelligents trouvent à se nourrir) chose que rejetait Malthus.
Mentionner Becker et Lemennicier - voir de Molinari, p.129.
Keynes fervent admirateur de Malthus car il voit le remède du chômage — qui
succède à Waterloo (1815) — dans une augmentation de la demande effective.
Ouvrage quelque peu oublié, éclipsé par l’Essai sur le principe de population. Keynes
a contribué à sa réhabilitation.
C’est une synthèse de ses réflexions, et de ses discussions avec ses collègues : James
Mill, Ricardo, Say.
C’est un ouvrage écrit en temps de crise (tout comme celui de Keynes). La crise est
celle que traverse l’Angleterre après les guerres Napoléoniennes (1815)
« Je ne puis tomber d’accord avec vous, écrit-il à Ricardo, que, selon votre
observation, le désir d’investir créera une demande aussi effectivement que le désir de
consommer ».
Il faudrait pour bien faire présenter les Principes de Ricardo avant cet ouvrage, tant il
est vrai que Malthus tient compte des écrits de Ricardo (en particulier sa théorie de la
26
rente). Il tient aussi compte des deux ouvrages de Sismondi que nouys croiserons plus
tard dans ce cours.
Ce qui ne change pas par rapport à Smith c’est l’idée des profits décroissants. Par
contre, il relativise très ingénieusement la théorie du salaire de subsistance.
Sur le salaire de subsistance, il note à juste titre qu’une hausse des salaires ne conduira
pas nécessairement à une hausse de la population. Ce n’est qu’une possibilité, l’autre
étant que les individus cherchent à accroître leur niveau de vie.
Nous avons là un Malthus très « libéral optimiste ». Les individus chercheront à
accroître leur niveau de vie s’ils sont dans le bon contexte institutionnel (ce n’est plus
le Malthus de sa jeunesse). En particulier, les libertés civils, qui vont de pair avec les
libertés politiques, sont indispensables (p. 137).
L’éducation joue également en ce sens.
Sur le profit, il est moins bon. Pour ce qui est des profits dans l’agriculture, il reprend
essentiellement la thèse de Ricardo basée sur les rendements décroissants. Mais cette
baisse des profits va être contagieuse. Les capitaux moins rentables dans l’agriculture
vont se diriger vers l’industrie et le commerce. Ils vont là permettre d’accroître les
productions et donc vont conduire à la baisse des profits par la baisse des prix.
Notons encore une position intéressante sur ce que l’on appelle encore le travail
improductif (celui qui ne concourt pas directement à la production d’un produit
matériel): les soins personnels (médecin, avocats, etc.). Ils gonflent la demande
effective et ainsi servent à promouvoir le développement.
• Donc, les produits ne s’échangent pas contre des produits. S’il n’y a pas un
pouvoir d’achat correspondant, ces produits resteront sans acquéreur. Malthus
s’oppose donc à Say. Malthus voit bien la dynamique de l’économie : la
richesse entraîne des dépenses qui entraînent de la production qui est distribuée
et génère des dépenses et de la production supplémentaire. Et ainsi de suite.
27
Mais, pour lui, le moteur c’est la dépense. Sans dépense la machine peut
s’arrêter. C’est pourquoi il n’a rien contre les dépenses « de luxe », et supporte
les programmes de travaux publics.
• Il faut cependant noter que Malthus n’est pas obtu au point de ne pas percevoir
le rôle de l’épargne. Il pense seulement qu’en ce domaine il faut trouver le
juste milieu. « Je crois qu’il faut admettre comme une vérité que tous les
grands résultats en économie politique, relativement à la richesse, tiennent à
des proportions. » (142)
A. Biographie et bibliographie
28
- fait fortune dès 25 ans (il deviendra quarante fois millionnaire) (connaît bien la
question bancaire)
- se consacre alors aux "études"
- connaît Bentham, James Mill, Malthus et Say
- membre du Parlement
- le"théoricien" des classiques - esprit plutôt déductif - abstrait diront certains
- champion des industrialistes (# avec Smith)
- 1815 : "Essai sur l'influence du bas prix du blé sur les profits"
idée : faciliter les importations de grains c'est briser le cercle fatal de la chute des
profits car on arrête ainsi la hausse des salaires
- Principes d’Economie Politiqueet de Fiscalité (1918) : "Peut-être le livre le plus
puissant de toute l'histoire des doctrine économiques" (Villey, p.92) mais d'autres
diront "le plus clair dans ce livre ..... c'est l'index !" (cf. Carbon)
B - Répartition
C - Commerce international
D - La monnaie
Théorie de la valeur-travail
" Les choses, une fois reconnues utiles par elles-mêmes, tirent leur valeur échangeable
de deux sources : la rareté, la quantité de travail nécessaire pour les acquérir".
29
* il inclut dans la valeur le travail nécessaire à la production des machines et le travail
incorporé dans le capital de façon plus générale (capital fixe et circulant)
* il reconnaît comme Smith qu'il existe différentes qualités de travail et que celui-ci
peut être plus ou moins abondant.
dans le C.T. : offre de travail est fixe - (fonds de salaire ?) fluctuations de la demande.
Bémol :
"L'ouvrier anglais regarderait son salaire comme au-dessous du taux
naturel et insuffisant pour maintenir sa famille, s'il ne lui permettait
d'acheter d'autre nourriture que des pommes de terre, et d'avoir pour
demeure qu'une misérable hutte de terre ; et néanmoins cela paraît
suffisant aux habitants des contrées où la vie est bon marché", et où
l'homme n'a que des besoins aussi modérés que faciles à satisfaire".(les
principes, Flammarion, p..86)
30
3. la population augmente ce qui nécessite le défrichage et la mise en culture d'un
nombre toujours plus grand des terres.
Les dernières terres mises en culture vont réclamer pour la production d'une quantité
de blé donnée une plus grande quantité de travail car elles sont moins fertiles que les
premières terres exploitées.
Or le prix du blé est unique ! (Jevons : loi du prix unique, arbitrage).
Donc il devra être tel que l'exploitation de la terre la moins fertile soit profitable (i.e.,
aussi profitable que les autres activités envisageables pour le fermier).
Donc les exploitants des terres les plus fertiles, à ce prix là, réalisent une rente.
Pour résumer : Plus de terres étant mises en culture et nécessitant plus de travail, le
prix du blé augmente. La rente des propriétaires de bonnes terres augmente de même.
Le prix du blé se renchérissant, les salaires nominaux augmentent (pas les salaires
réels). Quant au profit, étant un résidu, il souffre de l’accroissement des salaires.
31
Notons l’absence du rôle de l’entrepreneur, et de façon générale, une place moins
grande (comparée à Say et Smith) pour le problème de la connaissance. On tombe
dans le mécanicisme. Ricardo prépare le terrain pour les néoclassiques.
La tendance générale est que « la condition de l’ouvrier empirera, tandis que celle du
propriétaire foncier s’améliorera ».
« Voilà donc les lois qui règlent les salaires et qui régissent le bonheur de l’immense
majorité de la société. Ainsi que tout autre contrat, les salaires doivent être livrés à la
concurrence, franche et libre, du marché et n’être jamais entravés par l’action du
gouvernement ». (deux citations que l’on trouve chez Gonnard, 172)
Généralisation : même si un pays est désavantagé pour la production de tous les biens
il a intérêt à commercer, exportant les produits pour lesquels il est comparativement
moins désavantagé et important les autres :
1. Assume that we have two countries, England and Portugal, which can
produce one of two products, wool or wine, or both. Each country has
the necessary technology to produce each item, but England is not as
efficient as Portugal. As indicated in the table below, in an hour of time
England produces 2 kilos of wool, while Portugal can produce 3
kilograms. And the same holds for Wine: while England can produce 2
litters of wine an hour, Portugal can produce three times more.
32
in England 2 kilos 2 litters
in Portugal 3 kilos 6 litters
If labour is the only thing it takes to produce wool and wine,1 then why
should Portugal trade with England? After all, whatever they would buy
from England would be cheaply produced in Portugal. England has
nothing interesting to sell to Portugal, it has no advantage. This is what
our intuition tells us. But this is plainly wrong! As we will show (or
rather as Ricardo showed), a “technologically backwarded” country
gains from trading with a most advanced one, and the reverse is equally
true.
Une notion importante : celle de coût d'opportunité que nous avons déjà mentionnée
pour évaluer le temps (ressource rare). Mais tout coût est un coût d’opportunité !
2. If you are not convinced, it might be useful to use some graphs. On the
graph we draw what economists call the production frontier for each
country assuming each country is endowed with 100 hours of labour.
With those 100 hours, England can produce everything on the blue line
or below. Portugal, on the other hand, can produce everything which lies
on the red line, or below. What they will decide to produce depends upon
their preferences. Let us assume that England choose to produce 100
litres of wine and 100 kilograms of wool. This is the brown point E on
the graph. Meanwhile, Portugal may choose to produce 180 litres of
1
Or, if you prefer, we assume that for England and Portugal, labour is the only scarcity constraint in the
sense that they have a huge amount of land, sun, water, grass, and everything necessary to make wool
and wine.
33
wine and 210 kg of wool. This is the brown point P. So far, no trade is
taking place. Each country lives in autarky.
P*(190, 250)
600
200
34
Améliorations apportées :
• rôle des facteurs de production (sans valeur travail) (Heckscher et Oblin,
suédois)
• introduction de la demande internationale (J.S. Mill)
• plusieurs biens et plusieurs pays et recherche du prix international (J.S.Mill)
Notez, qu'à la base de cette théorie se trouve la théorie quantitative de la monnaie. Une
augmentation de la monnaie se traduit tôt ou tard par une augmentation des prix (ce
qui n'est, comme nous le verrons plus tard, qu'en partie vrai).
35
D. Les controverses monétaires
Banque d’Angleterre, créée en 1694. Elle n’avait pas le monopole de l’émission, mais
elle avait néanmoins de nombreux privilèges.
. elle recevait tous les fonds publics
. elle était la seule corporate bank a pouvoir exister. Les autres étaient limitées
à des « partnership » de moins de 7 personnes
Les autres banques pouvaient émettre des billets, utilisant la monnaie de la Banque
d’Angleterre pour réserve (il y avait près de 400 banques locales dans les années 1790)
. La Banque d’Angleterre quant à elle avait une monnaie convertible en or, mais
maintes fois avait suspendu cette convertibilité au cours du 18ème siècle. Ses privilèges
(d’après Rothbard) lui donnaient la possibilité de faire de l’inflation.
En 1793 débute une série de conflits armés contre la République française, puis contre
Napoléon. Le financement de ces conflits conduit à une plus grande inflation. En
1797, de nombreuses banques locales font faillite ou suspendent la convertibilité de
leur monnaie (The Restriction Act). La panique touche même les clients de la Banque
d’Angleterre. Le gouvernement décide de suspendre la convertibilité.
S’en suit une très longue période de cours forcé : 1797-1821 de la livre sterling.
Cela permet la poursuite d’une politique inflationniste. Les résultats sont sans surprise.
Le change britannique se détériore (la monnaie anglaise perd de sa valeur dans les
échanges).
N.B. : le billet Banque d’Angleterre n’est pas « valeur l’égale » (legal tender) avant
1812)
Schumpeter has a different approach: according to him, the Bank of England was an
easy target.
36
La lettre renferme une analyse monétaire avancée : définition plus claire de la masse
monétaire, analyse des effets (asymétriques) d’une création monétaire, théorie de la
parité des pouvoirs d’achat des monnaies dans un régime de monnaies fiduciaires. La
conclusion est que la Banque d’Angleterre et la suspension de la convertibilité sont
responsables de tous les maux.
(Notons que Boyd en écrivant cette lettre retournait sa veste puisqu’il avait pendant
plusieurs années supplié la Banque d’Angleterre de lui accorder un prêt pour le sauver
de la faillite. C’est l’opposition de Pitt qui fit que le prêt ne fut pas accorder et Boyd
qui du liquider son affaire).
La réplique ne tarda pas. Francis Baring s’opposa à Boyd (1801). Il était d’abord un
marchand extrêmement riche, puis un banquier. Bien que prudent dans un premier
temps, il décide de prendre la défense de la Banque d’Angleterre.
Le clan des bullionistes allait par la suite se renforcer avec King et Ricardo. Il allait
aussi recevoir l’appui, beaucoup plus modéré de Henri Thornton (qui fut directeur de
Banque), pourtant dans un premier temps anti-bullioniste (son ouvrage fit reference
dans le camp des anti bullionistes).
C’est le secteur réel qui commande les prix et la monnaie doit suivre l’évolution du
secteur réel en réduisant l’émission monétaire on bride le secteur réel
les banques doivent être libre d’émettre en fonction de la demande
les banques s’autorégulent pour éviter la faillite
Ricardo en fait partie. En 1809 il publie un article sur « The Price of Gold »,
suivi d’un court ouvrage regroupant ses articles : « « The High Price of Bullion ». Son
objectif : convaincre Thornton, alors un anti-bullioniste.
• c’est la quantité de monnaie qui détermine le niveau des prix
• l’idée d’une pénurie de liquidité est fausse : tout niveau de monnaie est
optimal.
C’est suite à la publication de cet ouvrage que sera formé au Parlement le « bullion
commettee » qui doit examiner les causes de l’inflation du prix de l’or.
C’est à ce moment que Thornton va passer dans le camp des bullionistes modérés.
37
contrôle de l’émission est nécessaire
réserves métalliques importantes
séparation émission et activité bancaire.
Ricardo voudrait maintenir la convertibilité mais en la limitant :
convertibilité en lingot (Gold bullion standard)
La victoire pour les bullionistes intervient avec le resumption act de 1819. Mais
l’Angleterre traverse alors une période de crise et l’or se fait rare. Il s’apprécie donc.
Certains blâment de nouveau la Banque d’Angleterre pour sa mauvaise gestion. C’est
le marasme. Les choses iront mieux en 1830-35. C’est la reprise et les découvertes
d’or : Californie, Australie, Russie.
Ricardo défend ses positions en prenant une position de long terme. Il écrit à Malthus
entre 1811 et 1813 : « Vous avez toujours à l’esprit les effets immédiats et
temporaires. Je fixe mon attention sur l’état permanent des choses qui en résultera ».
Ce faisant, Ricardo exagère sans doute la dichotomie entre le réel et le monétaire.
Le taux de change est quant à lui, toujours d’après Ricardo, entièrement déterminé par
la quantité de papier monnaie dans le cas d’une monnaie non-convertible. Si la
monnaie est convertible alors ce taux sera déterminé par la quantité de métaux
précieux disponible.
NB ! Les Principes sont publies en 1817 et Ricardo rentre au parlement en 1819. Il est
alors l economiste le plus fameux en Angleterre.
38
Pennington est le premier à avoir énoncé ce principe. L’idée est que la convertibilité
est insuffisante pour assurer la stabilité monétaire. Il conseille l’octroi d’un monopole
d’émission à la Banque d’Angleterre et une politique de réserve qui la contraigne à
adopter une gestion équivalente à celle d’une émission sans réserve fractionnaire
(c.à.d., avec une réserve à 100%). Ainsi la valeur du billet suivra la quantité du stock
d’or dont dispose la Banque centrale.
Cet argument s’appuie entre autres choses sur l’idée que la création monétaire va au-
delà de l’émission de papier monnaie ; en accordant des crédits on arrive au même
résultat.
Anti-Corn Law league se forme après sa mort (1828) sous le règne de Victoria (1846)
Victoire : Acte de Peel, 1844 : séparation des activités commerciale et d'émission
monétaire de la banque d'Angleterre.
Ricardo : "Le meilleur des impôts est celui dont le montant est le plus faible"...
Pour ceux qui doutent de son libéralisme !
39
Section 1.3. John SUTART MILL :
Chez les anciens il y a l’idée de deux classes aux intérêts conflictuels : les
gouvernants et les gouvernés. Le gouvernant est toléré mais on sait qu’il peut
être tenté de jouer ses intérêts contre ceux du peuple. La liberté se définit alors
comme un affranchissement du pouvoir arbitraire du gouvernant. C’est la
possibilité de ne pas souffrir d’un régime autoritaire, de contrôler,
éventuellement par des Chartes ou des constitutions les droits des gouvernés
face aux gouvernants.
Mais cette situation est jugée insatisfaisante et il va être avancé que la véritable
liberté consisterait à être son propre gouvernant. Si le peuple gouverne, il serait
par essence libre puisque aucun conflit d’intérêt ne saurait intervenir entre le
peuple et lui-même. Malheureusement, cette liberté des modernes présente des
dangers évidents puisque le gouvernement n’est plus du tout contrôlé. (Mill a à
l’esprit le cas français, et en particulier l’épisode de la Terreur).
40
Section 2
L’école française
Nous nous sommes arrêtés la fois dernière sur J.S. Mill et sa brillante
distinction entre deux conceptions de la liberté : celle des anciens et celle
des modernes. Mill : le dernier des classiques dit-on parfois (j’aurais pour
ma part envie de clamer : Smith, le dernier des classiques!)
A présent nous revenons en arrière pour découvrir l’école libérale
française. Mais avant d’aborder les deux grands piliers de cette école que
sont Say et Bastiat, revenons une fois encore sur Rousseau, afin de mieux
comprendre ce que Mill appelle la liberté des modernes. Après Rousseau
nous retracerons rapidement l’histoire d’un autre grand mouvement
intellectuel qui marque ce début du 19ème : les idéologues.
41
Préambule à la section :
Le paysage intellecuel du début du 19ème
ème
C’est la seule partie achevée d’un grand traité sur les Institutions
Politiques que projetait Rousseau.
Son rôle va être de passer un second contrat social. Ce second contrat doit
pallier les défauts dus à l’éloignement de la nature.
2
Rousseau : Né à Genève, alors République indépendante, le 28 Juin 1712. Son père
modeste artisan, mais instruit. Mais il est exilé pour raisons politiques. Rousseau se
retrouve chez un pasteur pendant deux ans, puis apprenti. A 16 ans il quitte Genève et
reçoit la protection d’une dame charitable, Madame de Warens. Elle le convertit pour un
temps au catholicisme (il retournera au Calvinisme). En 1741 il se rend à Paris, devient
l’ami de Diderot et intègre les cercles intellectuels. Lié avec Thérèse Levasseur, il aura
des enfants qui seront confiés aux enfants perdus.
En 1750, il devient célèbre après avoir remporté un concours organisé par l’Académie de
Dijon et pour lequel il avait écrit un Discours sur les sciences et les Arts.
Peu de temps après (1755) il écrit son Discours sur les origines et les fondements de
l’inégalité parmi les hommes. Il se retire alors des milieux mondains et écrit La Nouvelle
Héloïse, l’Emile, le Contrat Social. Notons encore que c’est lui qui écrit l’article Economie
Politique pour l’Encyclopédie.
Mais ces écrits sont condamnés par les Parlements de Paris et le Conseil de Genève.
Commence alors une vie errante, qui le conduit en Suisse, puis en Angleterre (invitation
de Hume), pour terminer à Paris où il meurt en 1778.
42
« Efforçons nous de tirer du mal même le remède qui doit le guérir »,
cherchons « dans l’art perfectionné, la réparation des maux que l’art
commencé a fait à la nature ».
Mais l’Etat ne peut-il pas se tromper. Non répondra Rousseau. Mais même
si tel était le cas « s’il lui plaît de se faire mal à lui-même, qui est-ce qui a
le droit de l’en empêcher ? »
La volonté générale
Némo offre une belle démonstration qui permet de voir la cohérence, à dire
pas si facile à déceler, de Rousseau.
Tout passe par la distinction entre amour de soi et amour propre. L’amour
de soi va dans le bon sens, celui des instincts naturels. L’amour propre
part dans tous les sens. Lors d’un vote collectif, les amours propres
s’annulent et domine l’amour de soi, commun à tous les hommes.
C’est pour cette raison que l’on doit me forcer, pour mon bien, à me plier à
la décision du peuple.
Mais, attention, cette décision peut être faussée par l’existence de partis
politiques qui ôtent à la diversité des points de vue et peuvent faire
ressortir l’amour propre. C’est pourquoi Rousseau sera contre les
« brigues » comme il les appelle. On retrouve une technique bien connue de
la suppression des états intermédiaires.
La mise en œuvre
43
Comment mettre en œuvre ce gouvernement de la volonté générale. Le
problème de l’œuf et la poule. Les bonnes lois font le bon peuple, et seul un
bon peuple peut faire de bonnes lois.
Rousseau en sort en faisant appel à l’homme providentiel, le leader éclairé,
Le Législateur ainsi qu’il le nomme. Evidemment c’est là une entorse très
profonde à son système. (Rappelons qu’il a écrit une Constitution pour la
Corse et la Pologne).
44
B: Les idéologues et la (les) Révolution(s)
Ils sont connus pour avoir jouer un rôle important dans les premiers écrits
constitutionnels (droits de l’homme), mais aussi pour leurs idées sur le
développement des sciences et l’éducation.
Origine de l’appellation :
C’est Destutt de Tracy, auteur des Elements d’idéologie qui donna le nom
à l’école. Pour Tracy, l’idéologie est la science des idées (physiologie,
psychologie, logique de la connaissance. Il s’agit donc d’une réflexion
épistémologique devant déboucher sur une méthode pour l’enseignement
des sciences, voire même pour développer les bonnes institutions
politiques.
« La connaissance de la génération de nos idées est le fondement de la
grammaire, de la logique, de l’instruction et de l’éducation, de la morale et
de la politique » Tracy.
1ère génération :
Rappel historique : Rappel sur les causes de la révolution (Hilton Root : La
construction de l’Etat moderne en Europe,
Europe, chap.8)
Incapacité du gouvernement à lever l’impôt.
Pourquoi ?
Pouvoir discrétionnaire engendre incertitude, qui engendre une méfiance de la
part des préteurs. Cela se traduit par des taux d’intérêts anormalement élevé et
donc un frein à l’investissement.
Les détenteurs d’offices ou de titres d’Etat vivaient toujours sous la menace de
paiement différé des gages ou intérêts qui leur étaient dus.
Smith et plus tard Say ont noté que la capacité guerrière des français n’avait pour
seule limite que leur incapacité à financer ces guerres.
45
La leçon est que l’absence de gouvernement représentatif aggrave le problème
financier en diminuant la confiance.
Les Etats Généraux sont réunis pour tenter de mettre fin à la crise financière.Très
vite, les États généraux ouverts à Versailles le 5 mai 1789 échappent à l'intention
première du roi et de ses ministres : imaginer de nouvelles ressources financière
pour la monarchie. Le 17 juin 1789, 1789 les députés bourgeois du tiers-état,
"considérant qu'ils représentent 96% de la nation", se proclament Assemblée
nationale.
nationale Louis XVI tente de disperser l'Assemblée par la force, ce qui suscite le
Serment du Jeu de Paume de donner une Constitution au royaume, avant de
céder et d'ordonner aux députés du clergé et de la noblesse de se fondre dans
l'Assemblée nationale. Le 9 juillet, celle-
celle-ci se proclame Assemblée constituante.
Assemblée constituante : Sieyès, Destutt de Tracy, Cabanis, Roederer (disciple de
Turgot), Dupont de Nemours et d’autres moins connus
Dans les provinces, d'autres municipalités, dotées de leur garde nationale, ont
succédé à l'administration royale. Surtout, en juillet, la Grande Peur s'empare des
campagnes. Alarmés par des rumeurs de brigandage, de destruction de leur récolte,
les paysans s'en prennent au château voisin pour y brûler les terriers, les registres
recensant les droits seigneuriaux. Pour tenter de couper court aux désordres, les
députés, à l'initiative d'une noblesse effrayée, décident dans la nuit du 4 août
l'abolition des privilèges.
privilèges Certes, seule la servitude personnelle est immédiatement
supprimée, les autres droits seigneuriaux devant être rachetés par les paysans,
mais c'est la fin de la division de la société en trois ordres qui est proclamée. Une
véritable révolution sociale vient de succéder à la révolution politique. D'autant
plus que l'assise financière du premier ordre du royaume est ébranlée, avec la
nationalisation, autrement dit la confiscation en novembre 1789 des biens fonciers
et immobiliers du clergé.
En ayant fini avec ce que les révolutionnaires appellent l'Ancien Régime, les
députés s'attellent à définir les principes de la société nouvelle, contenus dans la
Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789. 1789 Les Français ne
sont donc plus des sujets, mais des citoyens. Ils bénéficient de l'égalité des droits
(abolition des privilèges), de la liberté, d'aller et de venir, d'exprimer son opinion, de
pratiquer ou non une religion (le protestantisme est reconnu), de posséder (y
compris des esclaves, dans les colonies, malgré les efforts abolitionnistes de
46
Robespierre et de la Société des Amis des Noirs). Tous ces principes sont garantis
par la Loi, qui émane nécessairement de la nation souveraine (et non plus du roi ou
de Dieu).
47
Marquis de Laplace
Laplace (1749-1827). Le célèbre Mathématicien, astronome et
physicien était également un homme politique actif. Il entre au Sénat en
1799 et en est élu Président en 1803. Il sera fait Comte de l’Empire et
Louis XVIII le fera marquis et pair de France.
Cabanis, Médecin
Benjamin Constant
Nous y reviendrons
Jean-Baptiste Say
Nous y reviendrons
Lamark
L’un des pères de la pensée évolutionniste. Il est botaniste et zoologiste de
formation.
Augustin Thierry
Stendhal
Sainte-Beuve
48
Vie intellectuelle des idéoloques
Action politique
49
Section 2.1 Jean-
Jean-Baptiste
Baptiste Say
A1. Biographie
Biographie
Jean-Baptiste Say, 1767-1832
50
• "Letters to Thomas Robert Malthus on Political Economy and
Stagnation of Commerce", 1821, (transl. of 1820), The Pamphleteer
Le reste de cette présentation sur Say sera essentiellement centré sur son
traité :
- se veut une vulgarisation de Smith mais c'est plus que cela
- pour Schumpeter c'est le maillon entre Cantillon-Turgot et
Walras
Notre plan sera :
51
A2. La méthode de Say
52
croissants, s'étendre sur certaines nations jusqu'à des sommes
effrayantes; et après avoir vu ces nations plus riches, plus
populeuses, plus puissantes qu'au temps où elles faisaient librement
le commerce, et où elles ne supportaient presque pas de charges, le
vulgaire a conclu qu'elles étaient riches et puissantes, parce qu'on
avait surchargé d'entraves leur industrie, et parce qu'on avait grevé
d'impôts les revenus des particuliers ; et le vulgaire a prétendu que
cette opinion était fondée sur des faits, et il a relégué parmi les
imaginations creuses et systématiques toute opinion différente.
(page 13)
3
On sait, par exemple, que le prix d'une marchandise est d'autant plus élevé qu'elle est offerte en
moins grande quantité relativement à la quantité qu'on en demande; mais pour déterminer d'après cette
règle le prix auquel se vendront les vins l'année prochaine, quelle foule de données ne faudrait-il pas
réunir ! L'abondance de la récolte pendante, les variations de l'atmosphère, les capitaux des marchands,
les droits d'entrée que les étrangers établiront ou supprimeront, les provisions qui resteront des années
précédentes, les variations qui peuvent survenir dans le nombre, les goûts et la richesse des
consommateurs; et une foule d'autres circonstances dont quelques-unes même sont impossibles à
prévoir. Si, dans l'impossibilité de réunir les données nécessaires, on se borne à en admettre seulement
quelques-unes et avec l'influence qu'on leur suppose, on ne peut tirer aucune application utile de ces
suppositions gratuites.
53
déterminent la plupart des actions de la vie. Il posera nettement les
questions, cherchera les éléments immédiats dont elles se
composent, et, après les avoir établis avec certitude, il évaluera
approximativement leurs influences réciproques avec le coup d'œil
d'une raison éclairée, qui n'est elle-même qu'un instrument au
moyen duquel on apprécie le résultat moyen d'une foule de
probabilités qu'on ne saurait calculer exactement 4.
4
Cabanis, en décrivant les révolutions de la médecine, fait une remarque parfaitement analogue
à celle-là : « Les phénomènes vitaux, dit-il, dépendent de tant de ressorts inconnus, tiennent à tant de
circonstances, dont l'observation cherche vainement à fixer la valeur, que les problèmes, ne pouvant être
posés avec toutes leurs données, se refusent absolument au calcul ; et quand les mécaniciens ont voulu
soumettre à leurs méthodes les lois de la vie, ils ont donné au monde savant le spectacle le plus étonnant
et le plus digne de toute notre réflexion. C'est par les procédés uniformes et rigoureux de la vérité, mais
employés hors de saison, qu'ont été établis les systèmes les plus faux, les plus ridicules et les plus
divers. »
D'Alembert, dans son Hydrodynamique, convient que la vitesse du sang et son action sur les
vaisseaux se refusent à toute espèce de calcul. Senebier fait des observations analogues dans son Essai
sur l'Art d'observer (tome I, page 81).
Ce que de savants professeurs, des philosophes judicieux disent, relativement aux
sciences physiques, s'applique, à plus forte raison, à une science morale, et explique pourquoi l'on s'est
égaré en économie politique toutes les fois qu'on a voulu s'en rapporter aux calculs mathématiques. C'est
dans ce cas la plus dangereuse des abstractions.
54
faits particuliers, et en déduisaient des règles ; ce qui les engagea
dans la défense de maximes évidemment contraires au bon sens et à
l'expérience des siècles (En note de bas de page il donne un
exemple : Lorsqu'ils soutiennent, par exemple, que la baisse des
denrées de première nécessité est une calamité publique).
55
Pour terminer cette exposé de la méthode suivie par J.B. Say, j’ai envie de
dire que c’est celle du Prof. d’université ! Un mélange d’érudition, de
reformulation, de création, d’observation ; un mélange aussi d’hardiesse et
de prudence ; le tout guidé par le désir de rendre la réalité un peu plus
compréhensible à ses interlocuteurs.
56
A3. Traité d’économie politique ou simple exposition de la manière dont se
forment, se distribuent et se consomment les richesses.
• Tout ce qui est utile mérite d'être appelé richesse (agri, industrie,
services du médecin...) page 43 : La valeur que les hommes
attachent aux choses a son premier fondement dans l'usage qu'ils en
peuvent faire. ce qui n'est bon à rien, ils n'y mettent aucun prix.
Page 44 : Cette faculté qu'ont certaines choses de pouvoir satisfaire
aux divers besoins des hommes, qu'on me permette de la nommer
utilité.
• Je dirai que créer des objets qui ont une utilité quelconque, c'est
créer des richesses, puisque l'utilité de ces choses est le premier
fondement de leur valeur, et que leur valeur est de la richesse. (44)
• Critique de Smith auquel il reproche d’avoir une vision encore trop
matérialiste de la valeur, et ce, bien qu’il ait correctement perçu
l’erreur mercantiliste. Paradoxalement, nous dit Say, Smith ne voit
pas de valeur dans les choses immatérielles, et pourtant,
curieusement, il veut choisir le travail comme mesure de la valeur !
Page 28 : « Smith a borné le domaine de cette science en réservant
exclusivement le nom de richesses aux valeurs fixées dans des
substances matérielles. Il devait y comprendre aussi des valeurs
qui, bien qu'immatérielles, n'en sont pas moins réelles, comme sont
tous les talents naturels ou acquis. De deux personnes également
dépourvues de biens, celle qui a le plus de talent est moins pauvre
que l'autre. Celle qui a acquis un talent au prix d'un sacrifice annuel
jouit d'un capital accumulé ; et cette richesse, quoique immatérielle,
est néanmoins si peu fictive qu'on échange journellement l'exercice
de son art contre de l'argent et de l'or. » ((capital humain, dirions
nous dans notre jargon moderne)
57
• (page 109) « Smith a combattu les Économistes qui n'appelaient du
nom de richesse que ce qu'il y avait dans chaque produit de valeur
en matière brute ; il a fait faire un grand pas à l'économie politique,
en démontrant que la richesse était cette matière, plus la valeur
qu'y ajoutait l'industrie ; mais puisqu'il a élevé au rang des
richesses une chose abstraite, la valeur, pourquoi la compte-t-il pour
rien, bien que réelle et échangeable, quand elle n'est fixée dans
aucune matière ? Cela est d'autant plus surprenant qu'il va jusqu'à
considérer le travail, en faisant abstraction de la chose travaillée,
qu'il examine les causes qui influent sur sa valeur, et qu'il propose
cette valeur comme la mesure la plus sûre et la moins variable de
toutes les autres » 5.
Rôle de l’entrepreneur
Ce qu’il est important de noter c’est que le commerçant est ici mis au
même niveau que l’agriculteur où l’industriel (au sens moderne du terme).
5
Quelques auteurs, qui n'ont peut-être pas donné une attention suffisante à ces démonstrations,
ont persisté à nommer les producteurs des produits immatériels des travailleurs improductifs. Mais on
ne gagne rien à lutter contre la nature des choses. Ceux qui entendent un peu l'économie politique sont
forcés de rendre, malgré eux, hommage aux principes. M. de Sismondi, par exemple, après avoir parlé
des dépenses qu'on fait en salaires d'ouvriers improductifs, ajoute : Ce sont des consommations rapides
qui suivent immédiatement la production. (Nouveaux principes d'Économie politique, tome II, p. 203.)
Ainsi, voilà des ouvriers improductifs qui produisent!
58
préjugé est le même que celui qui soulève la populace contre les négociants
en grains. »
La répartition ; page 63
Le paiement d'une industrie prêtée se nomme un salaire.
Le paiement d'un capital prêté se nomme un intérêt.
Le paiement d'un fonds de terre prêté se nomme un fermage ou un
loyer.
Ici on pourrait croire qu’il n’y a pas de place pour le profit entrepreneurial.
Sauf si c’est un résidu. Une autre possibilité est qu’il donne au terme
salaire un sens large. Je crois que c’est le cas.
Le passage le plus explicit sur l’entrepreneur est sans doute celui-ci que
l’on retrouve à la page 65-66 au début d’un chapitre 6 intitulé : Des
opérations communes à toutes les industries.
« En observant en eux-mêmes les procédés de l'industrie humaine,
quel que soit le sujet auquel elle s'applique, on s'aperçoit qu'elle se
compose de trois opérations distinctes.
Pour obtenir un produit quelconque, il a fallu d'abord étudier la
marche et les lois de la nature, relativement à ce produit. Comment
aurait-on fabriqué une serrure, si l'on n'était parvenu à connaître les
propriétés du fer, et par quels moyens on peut le tirer de la mine,
l'épurer, l'amollir et le façonner ?
Il a fallu ensuite appliquer ces connaissances à un usage utile, juger
qu'en façonnant le fer d'une certaine façon on en ferait un produit qui
aurait pour les hommes une certaine valeur.
Enfin il a fallu exécuter le travail manuel indiqué par les deux
opérations précédentes, c'est-à-dire forger et limer les différentes pièces
dont se compose une serrure.
Il est rare que ces trois opérations soient exécutées par la même
personne.
Le plus souvent un homme étudie la marche et les lois de la nature.
C'est le savant.
Un autre profite de ces connaissances pour créer des produits
utiles. C'est l'agriculteur,
l'agriculteur, le manufacturier ou le commerçant ; ou,
pour les désigner par une dénomination
dénomination commune à tous les trois,
59
c'est l'entrepreneur d'industrie, celui qui entreprend de créer pour son
compte, à son profit et à ses risques, un produit quelconque 6.
Un autre enfin travaille suivant les directions données par les deux
premiers. C'est l'ouvrier. »
J'ai donc lieu de croire que Smith n'a pas en ce point donné une idée
complète du phénomène de la production ; ce qui l'a entraîné dans cette
fausse conséquence : c'est l'idée que toutes les valeurs produites
représentent un travail récent ou ancien de l'homme, ou, en d'autres
termes, que la richesse n'est que du travail accumulé ; d'où, par une
seconde conséquence qui me paraît également contestable, le travail est la
seule mesure des richesses ou des valeurs produites. (60)
6
Les Anglais n'ont point de mot pour rendre celui d'entrepreneur d'industrie; ce qui les a peut-
être empêchés de distinguer dans les opérations industrielles, le service que rend le capital, du service
que rend, par sa capacité et son talent, celui qui emploie le capital ; d'où résulte, comme on le verra plus
tard, de l'obscurité dans les démonstrations où ils cherchent à remonter à la source des profits.
La langue italienne, beaucoup plus riche à cet égard que la leur, a quatre mots pour
désigner ce que nous entendons par un entrepreneur d'industrie : imprenditore, impresario,
intraprenditore, intraprensore.
60
consommateurs. Ce commerce tend, comme on voit, à transporter, pour
ainsi dire, la marchandise d'un temps dans un autre, au lieu de la
transporter d'un endroit dans un autre. S'il ne donne point de bénéfice, s'il
donne de la perte, c'est une preuve qu'il était inutile, que la marchandise
n'était point trop abondante au moment où on l'achetait, et qu'elle n'était
point trop rare au moment où on l'a revendue. On a aussi appelé les
opérations de ce genre commerce de réserve, et cette désignation est
bonne. Lorsqu'elles tendent à accaparer toutes les denrées d'une même
espèce, pour s'en réserver le monopole et la revente à des Prix exagérés, on
nomme cela des accaparements. Ils sont heureusement d'autant plus
difficiles que le pays a plus de commerce, et par conséquent plus de mar-
chandises de tout genre dans la circulation.
61
une consommation active qui multiplie les ventes et soutienne les prix.
Mais si on leur demande quelles circonstances, quelles causes sont
favorables au placement de leurs produits, on s'aperçoit que le plus grand
nombre n'a que des idées confuses sur ces matières, observe mal les faits
et les explique plus mal encore, tient pour constant ce qui est douteux,
souhaite ce qui est directement contraire à ses intérêts, et cherche à
obtenir de l'autorité une protection féconde en mauvais résultats.
62
En termes plus vulgaires, beaucoup de gens ont moins acheté, parce
qu'ils ont moins gagné 7 ; et ils ont moins gagné, parce qu'ils ont trouvé des
difficultés dans l'emploi de leurs moyens de production, ou bien parce que
ces moyens leur ont manqué.
7
Les gains se composent, dans tous les États, depuis le plus gros négociant jusqu'au plus simple
manœuvre, de la part qu'on obtient dans les valeurs produites. Les proportions suivant lesquelles cette
distribution se fait forment la matière du second livre de cet ouvrage.
8
Il est facile à tout lecteur d'appliquer ces observations générales aux pays et aux époques dont
il a connaissance. Nous en avons eu un exemple bien frappant en France, dans les années 1811, 1812 et
1813, où l'on a vu marcher de front le prix exorbitant des denrées coloniales, du blé, et de plusieurs
autres produits, avec l'avilissement de beaucoup de denrées qui ne trouvaient que des débouchés
désavantageux.
9
Ces considérations, qui sont fondamentales pour tout Traité ou Mémoire écrit sur des matières
commerciales, et pour toute opération de l'administration relative aux mêmes objets, y sont restées
jusqu'à présent presque entièrement étrangères. Il semble qu'on n'ait rencontré la vérité que par hasard,
et qu'on n'ait pris la bonne route (quand par bonheur on l'a fait) que par un sentiment confus de ce qui
convenait, sans être convaincu, et sans avoir le moyen de convaincre les autres.
M. de Sismondi, qui paraît n'avoir pas bien entendu les principes établis dans ce
chapitre et dans les trois premiers chapitres du livre Il de cet ouvrage, cite, comme une preuve que l'on
peut trop produire, cette immense quantité de produits manufacturés dont l'Angleterre surcharge les
marchés étrangers. (Nouveaux Principes, etc., livre IV, chap. 4.) Cette surabondance ne prouve autre
chose que l'insuffisance de la production aux lieux où les marchandises anglaises surabondent. Si le
Brésil produisait assez pour acheter les produits anglais qu'on y porte, ces produits ne s'y engorgeraient
pas. Il faudrait pour cela que le Brésil fût plus industrieux, qu'il possédât plus de capitaux, que ses
douanes laissassent toute latitude sur le choix des marchandises qu'on juge à propos d'y porter, que les
douanes anglaises ne fussent plus un obstacle à l'entrée en Angleterre des marchandises du Brésil, et
laissassent toute liberté sur le choix des retours.
Le sens de ce chapitre-ci n'est pas qu'on ne puisse pas produire d'une certaine
marchandise trop en proportion des besoins, mais seulement que ce qui favorise le débit d'une
marchandise, c'est la production d'une autre.
63
La monnaie n’est qu’un voile
Lorsque vous ne vendez pas facilement vos produits, dites-vous que
c'est parce que les acquéreurs manquent de voitures pour les emporter ?
Eh bien ! l'argent n'est que la voiture de la valeur des produits. Tout son
usage a été de voiturer chez vous la valeur des produits que l'acheteur
avait vendus pour acheter les vôtres ; de même, il transportera, chez celui
auquel vous ferez un achat, la valeur des produits que vous aurez vendus
à d'autres.
Le long terme est un peu flou. Son analyse est valide dans la mesure où
il ne présente les choses que comme une possibilité. Il est certain que
d’après lui un phénomène de productivité marginale décroissante est à
l’œuvre. Mais son erreur, voir le dernier paragraphe, semble surtout être
de nature psychologique (par opposition à économique) qu’il croît que les
gens vont se lasser de consommer, que l’intensité des besoins va baisser
une fois
fois les besoins essentiels satisfaits.
On voudra savoir peut-être quel serait le terme d'une production
croissante et où des produits, chaque jour plus considérables,
s'échangeraient constamment les uns contre les autres ; car enfin ce n'est
que dans les quantités abstraites qu'il y a des progressions infinies, et
dans la pratique la nature des choses met des bornes à tous les excès. Or,
c'est l'économie politique pratique que nous étudions ici.
64
L'expérience ne nous a jamais offert encore l'exemple d'une nation
complètement pourvue de tous les produits qu'elle est en état de créer et
de consommer ; mais nous pouvons étendre par la pensée à tous les
produits, successivement, ce que nous avons observé sur quelques-uns. Au-
delà d'un certain point, les difficultés qui accompagnent la production, et
qui sont en général surmontées par les services productifs, s'accroissent
dans une proportion plus rapide, et ne tardent pas à surpasser la satis-
faction qui peut résulter de l'usage qu'on fait du produit. Alors on peut
bien créer une chose utile, mais son utilité ne vaut pas ce qu'elle coûte, et
elle ne remplit pas la condition essentielle d'un produit, qui est d'égaler
tout au moins en valeur ses frais de production. Quand on a obtenu d'un
territoire toutes les denrées alimentaires qu'on en peut obtenir, si l'on fait
venir de plus loin de nouvelles denrées alimentaires, leur production peut
se trouver tellement dispendieuse que la chose procurée ne vaille pas ce
qu'elle coûte. Si le travail de trente journées d'hommes ne pouvait les
nourrir que pendant vingt jours, il ne serait pas possible de se livrer à une
semblable production ; elle ne favoriserait pas le développement de
nouveaux individus, qui par conséquent ne formeraient pas la demande de
nouveaux vêtements, de nouvelles habitations, etc.
In Say's language, "products are paid for with products" (1803: p.153) or "a
glut can take place only when there are too many means of production
applied to one kind of product and not enough to another", (1803: p.178-
9.). Or:
65
"It is worth while to remark, that a product is no sooner created, than it,
from that instant, affords a market for other products to the full extent of
its own value. When the producer has put the finishing hand to his
product, he is most anxious to sell it immediately, lest its value should
diminish in his hands. Nor is he less anxious to dispose of the money he
may get for it; for the value of money is also perishable. But the only way
of getting rid of money is in the purchase of some product or other. Thus
the mere circumstance of creation of one product immediately opens a vent
for other products." (J.B. Say, 1803: p.138-9)
Page 98 il y revient :
66
Parmi beaucoup d'autres causes de la misère et de la faiblesse où l'on
voit des États soumis à la domination ottomane, on ne peut douter que la
quantité de capitaux qui y sont retenus dans l'inaction n'en soit une des
principales. La défiance, l'incertitude où chacun est sur son sort futur,
engagent les gens de tous les ordres, depuis le pacha jusqu'au paysan, à
soustraire une partie de sa propriété aux regards avides du pouvoir ; or, on
ne peut soustraire une valeur à la vue que par son inaction. C'est un
malheur partagé à différents degrés par tous les pays soumis au pouvoir
arbitraire, surtout lorsqu'il est violent. Aussi remarque-t-on dans les
vicissitudes que présentent les orages politiques un certain resserrement
de capitaux, une stagnation d'industrie, une absence de profits, une gêne
universelle, lorsque la crainte s'empare des esprits ; et, au contraire, un
mouvement, une activité très favorables à la prospérité publique, du
moment que la confiance tenait. (106)
La propriété
67
Il y a des vérités tellement évidentes, qu'il parait tout à fait superflu
d'entreprendre de les prouver. Celle-là est du nombre. Qui ne sait que la
certitude de jouir du fruit de ses terres, de ses capitaux, de son labeur, ne
soit le plus puissant encouragement qu'on puisse trouver à les faire valoir
? Qui ne sait qu'en général nul ne connaît mieux que le propriétaire le
parti qu'on peut tirer de sa chose, et que nul ne met plus de diligence à la
conserver ? Mais en même temps combien, dans la pratique, ne s'écarte-t-
on pas de ce respect des propriétés qu'on juge si avantageux en théorie!
Sur quels faibles motifs n'en propose-t-on pas souvent la violation ! Et
cette violation, qui devrait exciter naturellement quelque indignation,
qu'elle est facilement excusée par ceux qui n'en sont pas victimes ! tant il y
a peu de gens qui sentent avec quelque vivacité ce qui ne les blesse pas
directement, ou qui, sentant vivement, sachent agir comme ils savent
penser !
10
Ce passage a été écrit à une époque où l'or du peuple anglais contribuait à enchaîner et à abrutit
les nations de l'Europe. Postérieurement son cabinet a suivi les conseils d'une politique plus sage, mais
qui n'empêche pas que de très lourds abus ne pèsent sur les classes les plus nombreuses de la société, et
ne les exposent à plus de privations que les mêmes classes n'en éprouvent chez des nations moins
industrielles et moins opulentes.
68
capitaux et l'industrie des particuliers ; aussi toutes les fois qu'elles
excèdent la somme indispensable pour la conservation de la société, il est
permis de les considérer comme une spoliation.
C’est pourquoi les violations doivent être aussi rares que possible : (120)
11
Peut-être, au reste, que, sans les guerres maritimes dont les unes ont pour cause des vanités
puériles, et les autres des intérêts mal entendus ; peut-être, dis-je, que le commerce fournirait à très bon
compte les meilleurs bois de marine, et que l'abus de réglementer les forêts particulières n'est que la
conséquence d'un autre abus plus cruel et moins excusable. On peut faire des réflexions du même genre
sur les vexations et le monopole auxquels donnent lieu en France l'extraction du salpêtre et la
fabrication de la poudre. En Angleterre, où ces abus n'existent pas et où le gouvernement achète sa
poudre aux particuliers, il n'en a jamais manqué et elle ne lui revient pas aussi cher.
12
Le traducteur américain de cet ouvrage observe en cet endroit, dans une note, qu'il convient de
se méfier beaucoup des motifs sur lesquels on s'appuie quand il s'agit de gêner une exploitation
quelconque; car des motifs tout aussi spécieux peuvent être allégués pour opposer des entraves à une
multitude d'autres travaux.
69
Le caractère pervers et improductif de la protection des emplois
13
Sans restreindre pour un temps et dans certains endroits l'emploi des nouveaux procédés et des
nouvelles machines, ce qui serait une violation de la propriété acquise par l'invention et l'exécution des
machines, une administration bienveillante peut préparer d'avance de l'occupation pour les bras
inoccupés, soit en formant, à ses frais, des entreprises d'utilité publique, comme un canal, une route, un
grand édifice; soit en provoquant une colonisation, une translation de population d'un lieu dans un autre.
L'emploi des bras qu'une machine laisse sans occupation est d'autant plus facile que ce sont pour
l'ordinaire des bras accoutumés au travail.
70
3° Le sort du consommateur, et par conséquent de la classe ouvrière qui
souffre, est amélioré par la baisse de la valeur du produit même, auquel
elle concourait.
Voilà pour ce qui est de l'effet prochain qui résulte de l'introduction des
nouvelles machines. Quant à l'effet ultérieur, il est tout à l'avantage des
machines. (vers 74)
Financement de la recherche
recherche par l’impôt :
71
Ici Say développe un argument du type externalité positives financées par
l’impôt.
72
Say dit que l’Acte pouvait avoir deux buts : militaire ou économique.
(Rappelons que pour Smith, c’est avant tout militaire). Il dit que du point
de vue militaire cela avait peut-être sa raison d’être (voir surtout la note
de bas de page à ce sujet). Mais d’un point de vue économique cela n’a pas
de sens.
14
Aux États-Unis, le traducteur de cet ouvrage, M. Biddle; en Angleterre, M. Horner et les
auteurs de la Revue d'Édimbourg nient que l'acte de navigation ait en rien contribué à la puissance
maritime de l'Angleterre. Je conviens, qu'à parler dans le sens des intérêts de l'Angleterre, c'était une fort
mauvaise mesure; mais je ne conviens pas qu'il n'ait rien servi à sa prépondérance militaire.
73
(154) Un gouvernement qui défend absolument l'introduction de
certaines marchandises étrangères établit un monopole en faveur de
ceux qui produisent cette marchandise dans l'intérieur, contre ceux
qui la consomment ; c'est-à-dire que ceux de l'intérieur qui la
produisent, ayant le privilège exclusif de la vendre, peuvent en élever
le prix au-dessus du taux naturel, et que les consommateurs de
l'intérieur, ne pouvant l'acheter que d'eux, sont obligés de la payer
plus cher 15.
Et il est bon de remarquer que chacun se croit plutôt dupeur que que
dupé; car, quoique chacun soit consommateur en même temps qu'il
dupé
est producteur, les profits excessifs qu'on fait sur une seule espèce de
denrée, celle qu'on produit, sont bien plus sensibles que les pertes
multipliées, mais petites, qu'on fait sur mille denrées différentes que
l'on consomme.
15
David Ricardo, dans un livre qu'il a publié en 1817, sous le titre de Principes de l'Économie
politique de l'impôt, observe avec raison, à l'occasion de ce passage, que le gouvernement ne saurait,
par une prohibition, élever un produit au-dessus de son taux naturel; car alors les producteurs de
l'intérieur, en se livrant à ce genre de production, en ramèneraient bientôt, par leur concurrence, les
profits au niveau de tous les autres. Je dois donc, pour expliquer ma pensée, dire que je regarde le taux
naturel d'une marchandise comme étant le prix le plus bas auquel on peut se la procurer, sois par la voie
du commerce ou par toute autre industrie. Si l'industrie commerciale peut la donner à meilleur marché
que les manufactures, et si le gouvernement force à la produire par les manufactures, il force dès lors à
préférer une manière plus dispendieuse. C'est un tort qu'il fait à ceux qui la consomment, sans qu'il
résulte pour le fabricant indigène un profit équivalent à ce que le consommateur paie de plus; car la
concurrence intérieure force le fabricant à réduire ses profits au taux général des profits qu'on peut faire
sur ce genre de manufactures. Il ne jouit d'aucun monopole. C'est sous ce point de vue que la critique de
Ricardo est fondée; mais la mesure que je combats n'en est que plus mauvaise. Elle augmente, au
détriment des consommateurs, la difficulté naturelle qui s'oppose à la satisfaction de nos besoins, et c'est
sans profit pour personne.
74
Même les traités de baisse des tarifs, dans la mesure où ils sont bilatéraux
et non généraux, sont dangereux.
75
(159) Le commerce, suivant une expression de Fénelon, est
semblable aux fontaines naturelles qui tarissent bien souvent quand
on veut en changer le cours16.
L’optimisme
16
La convention nationale de France défendit l'entrée des cuirs bruts d'Espagne, sous prétexte
qu'ils nuisaient au commerce de ceux de France. Elle ne fit pas attention que la France renvoyait en
Espagne ces mêmes cuirs après qu'ils étaient tannés. Les Espagnols, obligés de consommer eux-mêmes
leurs cuirs bruts, s'appliquèrent à les tanner, et cette industrie passa en Espagne avec une bonne partie
des capitaux et des ouvriers français. Il est presque impossible qu'un gouvernement puisse, je ne dis pas
se mêler utilement de l'industrie, mais éviter, quand il s'en mêle, de lui faire du mal.
76
idées, d'abord chez les hommes qui savent observer et penser, et par
suite, chez tout le monde.
C'est ainsi que les espérances marchent de front avec les obstacles, et
que l'impulsion qui porte les sociétés humaines vers un meilleur
avenir aura tout son effet. »
Ou encore
Un grand Monsieur, un grand professeur (qui envoyait son fils lire ses
notes aux étudiants). Un penseur d’une grande clarté.
77
Section 2.2 Frédéric BASTIAT
1801-1850
Harmonies économiques
C'est un libéral croyant (cf. Libéral et Croyant) dont au delà d'un optimisme
sans faille et d'un libéralisme humanitaire, on notera :
* la primauté du consommateur sur l'Etat et les producteurs "Pétition des
marchands de chandelles ... contre la concurrence déloyale du Soleil" (mandarines
espagnoles)
* une excellente analyse de la vie politique, et des décisions administrées.
* peut être un pressentiment du rôle de l'information et des connaissances : "Ce
qu'on voit et ce qu'on ne voit pas"
Les mêmes fins que les socialistes de son temps, mais des moyens opposés.
78
Charles Dunoyer
1786-
A fondé et dirigé avec Charles Comte Le Censeur. Les libéraux contre la Restauration
des Bourbons.
« L’économie politique est la science de la liberté » écrivait saint Simon dans le
Censeur.
La morale comme pièce essentielle de l’appareil économique.
L’Etat n’a qu’un rôle, celui de producteur de sécurité.
Dénonce une nouvelle forme de Colbertisme issu de la Révolution française et de
l’Empire.
1845 : De la liberté du travail (période du rapport Villermé)
Moralisme bourgeois et conservatisme social le caractèrisent d’après Villey.
D’après Rothbard, Dunoyer et Comte (et Augustin Thierry, leur disciple) auraient
développé une théorie de la fragmentation de la société en classes. Mais ici, le critère
de démarcation serait entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l’ont pas, entre ceux
qui tiennent les reines de l’Etat et ceux qui subissent.
On m’a parlé de l’analyse des marchés de Coquelin qui serait très proche de celle de
kirzner.
→ des pensées très diverses (cf. Bastiat et John Stuart Mill), mais une même
conclusion quand à l'éco. politique : "Longtemps après eux, on ne pourra parler
d'"économiste libéral" sans paraître faire un pléonasme" (villey). S'il n'en n'est plus de
même aujourd'hui (quoique .. aux Etats Unis cela demeure vrai) en grande partie) ;
c'est que les socialistes - sutout français - sont passés par là.
→ même si l'ordre d'une éco. de marché n'est pas parfait (et ils le reconnnaissent) ;
l'intervention de l'Etat ne peut qu'aggraver le mal (à quelques exceptions prêts, ex. :
Smith et L'acte de Navigation, Ricardo et le contrôle de l'émission ...)
79
Annexer : extraits de F Bastiat
Ce qu'on voit
et
ce qu'on ne voit pas
Frédéric Bastiat
http://bastiat.org/
• Introduction
• I. La vitre cassée
• II. Le licenciement
• III. L'impôt
• IV. Théâtres, Beaux-Arts
• V. Travaux publics
• VI. Les Intermédiaires
• VII. Restriction
• VIII. Les Machines
• IX. Crédit
• X. L'Algérie
• XI. Épargne et Luxe
• XII. Droit au Travail, Droit au Profit
Dans la sphère économique, un acte, une habitude, une institution, une loi
n'engendrent pas seulement un effet, mais une série d'effets. 1 De ces effets, le premier
seul est immédiat; il se manifeste simultanément avec sa cause, on le voit. Les autres
ne se déroulent que successivement, on ne les voit pas; heureux si on les prévoit.
80
Entre un mauvais et un bon Économiste, voici toute la différence: l'un s'en tient à
l'effet visible; l'autre tient compte et de l'effet qu'on voit et de ceux qu'il faut prévoir.
Mais cette différence est énorme, car il arrive presque toujours que, lorsque la
conséquence immédiate est favorable, les conséquences ultérieures sont funestes, et
vice versa. — D'où il suit que le mauvais Économiste poursuit un petit bien actuel qui
sera suivi d'un grand mal à venir, tandis que le vrai économiste poursuit un grand bien
à venir, au risque d'une petit mal actuel.
Du reste, il en est ainsi en hygiène, en morale. Souvent, plus le premier fruit d'une
habitude est doux, plus les autres sont amers. Témoin: la débauche, la paresse, la
prodigalité. Lors donc qu'un homme, frappé de l'effet qu'on voit, n'a pas encore appris
à discerner ceux qu'on ne voit pas, il s'abandonne à des habitudes funestes, non-
seulement par penchant, mais par calcul.
I. La Vitre cassée
Or, il y a dans cette formule de condoléance toute une théorie, qu'il est bon de
surprendre flagrante delicto, dans ce cas très-simple, attendu que c'est exactement la
même que celle qui, par malheur, régit la plupart de nos institutions économiques.
81
À supposer qu'il faille dépenser six francs pour réparer le dommage, si l'on veut dire
que l'accident fait arriver six francs à l'industrie vitrière, qu'il encourage dans la
mesure de six francs la susdite industrie, je l'accorde, je ne conteste en aucune façon,
on raisonne juste. Le vitrier va venir, il fera besogne, touchera six francs, se frottera
les mains et bénira de son cœur l'enfant terrible. C'est ce qu'on voit.
Mais si, par voie de déduction, on arrive à conclure, comme on le fait trop souvent,
qu'il est bon qu'on casse les vitres, que cela fait circuler l'argent, qu'il en résulte un
encouragement pour l'industrie en général, je suis obligé de m'écrier: halte-là! Votre
théorie s'arrête à ce qu'on voit, ne tient pas compte de ce qu'on ne voit pas.
On ne voit pas que, puisque notre bourgeois a dépensé six francs à une chose, il ne
pourra plus les dépenser à une autre. On ne voit pas que s'il n'eût pas eu de vitre à
remplacer, il eût remplacé, par exemple, ses souliers éculés ou mis un livre de plus
dans sa bibliothèque. Bref, il aurait fait de ces six francs un emploi quelconque qu'il ne
fera pas.
La vitre étant cassée, l'industrie vitrière est encouragée dans la mesure de six francs;
c'est ce qu'on voit. Si la vitre n'eût pas été cassée, l'industrie cordonnière (ou toute
autre) eût été encouragée dans la mesure de six francs; c'est ce qu'on ne voit pas.
Et si l'on prenait en considération ce qu'on ne voit pas parce que c'est un fait négatif,
aussi bien que ce que l'on voit, parce que c'est un fait positif, on comprendrait qu'il n'y
a aucun intérêt pour l'industrie en général, ou pour l'ensemble du travail national, à ce
que des vitres se cassent ou ne se cassent pas.
Dans la première hypothèse, celle de la vitre cassée, il dépense six francs, et a, ni plus
ni moins que devant, la jouissance d'une vitre. Dans la seconde, celle où l'accident ne
fût pas arrivé, il aurait dépensé six francs en chaussure et aurait eu tout à la fois la
jouissance d'une paire de souliers et celle d'une vitre.
Or, comme Jacques Bonhomme fait partie de la société, il faut conclure de là que,
considérée dans son ensemble, et toute balance faite de ses travaux et de ses
jouissances, elle a perdu la valeur de la vitre cassée.
Par où, en généralisant, nous arrivons à cette conclusion inattendue: « la société perd
la valeur des objets inutilement détruits, » — et à cet aphorisme qui fera dresser les
cheveux sur la tête des protectionnistes: « Casser, briser, dissiper, ce n'est pas
encourager le travail national, » ou plus brièvement: « destruction n'est pas profit. »
82
Que direz-vous, Moniteur industriel, que direz-vous, adeptes de ce bon M. de Saint-
Chamans, qui a calculé avec tant de précision ce que l'industrie gagnerait à l'incendie
de Paris, à raison des maisons qu'il faudrait reconstruire?
Je suis fâché de déranger ses ingénieux calculs, d'autant qu'il en a fait passer l'esprit
dans notre législation. Mais je le prie de les recommencer, en faisant entrer en ligne de
compte ce qu'on ne voit pas à côté de ce qu'on voit.
Il faut que le lecteur s'attache à bien constater qu'il n'y a pas seulement deux
personnages, mais trois dans le petit drame que j'ai soumis à son attention. L'un,
Jacques Bonhomme, représente le Consommateur, réduit par la destruction à une
jouissance au lieu de deux. L'autre, sous la figure du Vitrier, nous montre le
Producteur dont l'accident encourage l'industrie. Le troisième est le Cordonnier (ou
tout autre industriel) dont le travail est découragé d'autant par la même cause. C'est ce
troisième personnage qu'on tient toujours dans l'ombre et qui, personnifiant ce qu'on
ne voit pas, est un élément nécessaire du problème. C'est lui qui bientôt nous
enseignera qu'il n'est pas moins absurde de voir un profit dans une restriction, laquelle
n'est après tout qu'une destruction partielle. — Aussi, allez au fond de tous les
arguments qu'on fait valoir en sa faveur, vous n'y trouverez que la paraphrase de ce
dicton vulgaire: « Que deviendraient les vitriers, si l'on ne cassait jamais de vitres? » 3
V. Travaux publics
Qu'une nation, après s'être assurée qu'une grande entreprise doit profiter à la
communauté, la fasse exécuter sur le produit d'une cotisation commune, rien de plus
naturel. Mais la patience m'échappe, je l'avoue, quand j'entends alléguer à l'appui d'une
telle résolution cette bévue économique: « C'est d'ailleurs le moyen de créer du travail
pour les ouvriers. »
L'État ouvre un chemin, bâtit un palais, redresse une rue, perce un canal; par là, il
donne du travail à certains ouvriers, c'est ce qu'on voit; mais il prive de travail certains
autres ouvriers, c'est ce qu'on ne voit pas.
Voilà la route en cours d'exécution. Mille ouvriers arrivent tous les matins, se retirent
tous les soirs, emportent leur salaire, cela est certain. Si la route n'eût pas été décrétée,
si les fonds n'eussent pas été votés, ces braves gens n'eussent rencontré là ni ce travail
ni ce salaire; cela est certain encore.
Mais est-ce tout? L'opération, dans son ensemble, n'embrasse-t-elle pas autre chose?
Au moment où M. Dupin prononce les paroles sacramentelles: « L'Assemblée a
adopté », les millions descendent-ils miraculeusement sur un rayon de la lune dans les
83
coffres de MM. Fould et Bineau? Pour que l'évolution, comme on dit, soit complète,
ne faut-il pas que l'État organise la recette aussi bien que la dépense? qu'il mette ses
percepteurs en campagne et ses contribuables à contribution?
Étudiez donc la question dans ses deux éléments. Tout en constatant la destination que
l'État donne aux millions votés, ne négligez pas de constater aussi la destination que
les contribuables auraient donnée — et ne peuvent plus donner — à ces mêmes
millions. Alors, vous comprendrez qu'une entreprise publique est une médaille à deux
revers. Sur l'une figure un ouvrier occupé, avec cette devise: Ce qu'on voit; sur l'autre,
un ouvrier inoccupé, avec cette devise: Ce qu'on ne voit pas.
84
EXTRAIT DE BALANCE DU COMMERCE
Or, un négociant de mes amis, ayant fait deux opérations dont les résultats ont été fort
différents, j'ai été curieux de comparer à ce sujet la comptabilité du comptoir à celle de
la douane, interprétée par M. Lestiboudois avec la sanction de nos six cents
législateurs.
Cependant, que disent à M. Lestiboudois les chiffres que la douane a recueillis sur
cette opération? Ils lui apprennent que la France a exporté 200,000 fr. et qu'elle a
importé 352,000 fr.; d'où l'honorable député conclut « qu'elle a dépensé et dissipé les
profits de ses économies antérieures, qu'elle s'est appauvrie, qu'elle a marché vers sa
ruine, qu'elle a donné à l'étranger 452,000 fr. de son capital. »
Quelque temps après, M. T... expédia un autre navire également chargé de 200,000 fr.
de produits de notre travail national. Mais le malheureux bâtiment sombra en sortant
du port, et il ne resta autre chose à faire à M. T... que d'inscrire sur ses livres deux
petits articles ainsi formulés:
Profits et pertes doivent à marchandises diverses fr. 200,000 pour perte définitive et
totale de la cargaison.
85
Pendant ce temps-là, la douane inscrivait de son côté fr. 200,000 sur son tableau
d'exportations et comme elle n'aura jamais rien à faire figurer en regard sur le tableau
des importations, il s'ensuit que M. Lestiboudois et la Chambre verront dans ce
naufrage un profit clair et net de 200,000 fr. pour la France.
86
Chapitre 2 :
Les réactions
à l’économie politique libérale
87
2.1. Les socialistes français
Sont-ils contre le libéralisme ou contre ce qu’ils pensent être le libéralisme, i.e., une
forme de bouleversement, parfois miséreux, qu’ils interprètent comme étant le résultat
du libéralisme (urbanisation, nouvelles formes de travail, éclatement de certains tissus
sociaux (comme les corporations)) ?
Sont-ils socialistes ? Tout dépend de la définition du socialisme.
Socialisme plus difficile à définir que le capitalisme…. L’ambiguïté peut parfois faire
la force, surtout lorsqu’il faut rassembler contre quelque chose ou quelqu’un.
Trois thèmes :
1. La propriété. Saint-Simon n’est pas favorable à l’égalité des conditions.
Proudhon a horreur de l’Etat.
2. L’organisation ; pas de main invisible, l’harmonie des intérêts n’est pas
naturelle.
3. Les inégalités. Mais l’égalité n’est pas spontanée. D’où autorité. Problème de
fond : si l’homme est profondément bon et si l’égalité est profondément
souhaitable, pourquoi ce besoin d’autorité.
Sont-ils anti-cléricaux ? Oui bien souvent ils recherchent une « nouvelle religion ».
Nouveaux temps, nouvelle religion ! Mais il y a aussi des catholiques socialistes au
19eme.
17
La Terreur fut d’abord économique ! Elle est en effet précédée par le vote, par la convention, du
« Maximum général » (29 Septembre 1793). Une loi qui impose des prix maximums pour les prix et les
salaires et qui donne lui à une véritable panique. Les contrevenants sont sévèrement punis. Cette
88
nouvelle société, ou peut-être un nouvel homme... Ces individus se retrouvent à
l’Institut National, fondé en 1795, et se nomment eux-mêmes : les « idéologues ».
Parmi leurs chefs on trouve : Destutt de Tracy. Parmi les inspirateurs admirés :
Condorcet. Mais leur pensée emprunte également beaucoup à Descartes.
Pour eux, la société, y compris la moral, doit être étudiée de façon « scientifique », en
s’attachant aux observations (ils s’inspirent bien entendu des sciences naturelles). Ils
sont donc des promoteurs des sciences humaines (l’économie étant une branche des
sciences humaines).
L’un des traits importants de cette philosophie est le rejet de tout ce qui est religieux.
La religion abrutit et oppresse l’individu.
première tentative d’économie administrée tourne à la catastrophe. 10 0ctobre Saint-Just fait inscrire la
Terreur comme nouvelle politique de la convention. Cela consacre la dictature du Comité de Salut
Public. Les Montagnards avaient quelques mois auparavant fait voté le cours forcé des assignats et lancé
un « emprunt forcé ».
89
A. Le Saint-Simonisme
Analyse
1. Des classiques (Smith, Say) il tire la foi dans le progrès, grâce à l’industrie.
C’est ainsi qu’il participe au Censeur. « L’économie Politique c’est la science
de la liberté » écrit-il. Cet enthousiasme le démarque totalement des futurs
collectivistes, en particulier de Marx. Mais quoi qu’il en soit, Saint-Simon
n’est pas un libéral cohérent. Il affirme : « On administrera les choses au lieu
de gouverner les hommes » (cité par Gonnard).
90
2. Ainsi donc son enthousiasme le conduira à faire de l’industrialisme une
religion. Il va aussi abandonner l’idée d’ordre spontané pour basculer dans le
constructivisme. Il n’est pas libéral.
3. 1803 : Lettre d’un habitant de Genève. Il faut organiser les Sciences avec une
hiérarchie : les conseils de Newton. Et Temple de Newton. Il faut de la
rationalité, de l’organisation dans les sciences. La parabole des 500 plus grands
notables et des 500 plus grands scientifiques : la technocratie.
4. Le pouvoir ne doit pas appartenir aux ouvriers : Lettre à Messieurs les ouvriers
(1821). Voici le langage à tenir à votre patron : « Vous êtes riches et nous
sommes pauvres : vous travaillez de la tête et nous des bras. Il résulte de ces
deux différences fondamentales que nous sommes et que nous devons être vos
subordonnés ».
5. Sur la propriété : elle doit être au service du progrès. Reconnaissance du
mérite. Egalité au point de départ mais pas nécessairement à l’arrivée. « A
chacun selon sa capacité », « A chacun selon ses oeuvres ». Il est contre
l’héritage.
6. Concurrence= gaspillage. La concurrence c’est l’anarchie. Il faut organiser tout
cela : rôle des banquiers, rôle de la formation technique.
La propriété privée des capitaux est alors considérée comme le dernier vestige de la
féodalité. Saint-Simon voulait « organiser » la propriété, eux veulent la supprimer.
91
Enfanin s’en prendra de plus en plus aux deux « erreurs » que sont selon lui l’égalité et
la liberté.
A noter aussi que ces saint-simmoniens sont contre les élections : quel gâchi que de
laisser des ignorants choisir les chefs ! C’est ainsi que Enfantin se raprochera sans
vergagne de napoleon III quand il verra en lui un bon chef !
Les réalisations :
Canal de Suez : tout un symbole, unité de l’Orient et de l’Occident, développement du
monde nouveau indstriel. Cela ne marche pas. Fredinand de Lesseps (qui n’est pas de
leur bod) reprendra le projet.
Le crédit doit être nationalisé aussi. Jacob-2mile Péreire fonde le Crédit mobilier.
Paris : Haussman, préfet de Police de Napoleon III)
l’industrie, sauf les protestants (Schneider, Peugeot)
les innovations financières : Credit Mobilier de Pereire, Crédit Lyonnais de Germain
l’emprunte technocratique
• effet sur l’enseignement et au delà sur l’éducation : A ce propos, Gonnard
remarque que cette pensée est bien celle d’hommes qui ont négligé les
humanités. Il écrit (273) : « Les hommes dont la formation intellectuelle a
été principalement technique ou scientifique, dès qu’ils portent leur
pensée vers les grands problèmes métaphysiques, versent aisément dans
les pires divagations : ils n’ont pas, pour se garer de ces feux follets de
l’ombre, le clair flambeau des humanités.
prolongement en Angleterre avec la Fabian Society
92
Auguste Comte (1798-1857), Montpelliérain, Secrétaire de Saint-Simon.
Polytechnicien, interné en 1820, rédige un Cours de philosophie positive.
Distingue trois âges : théologique (Dieu est la source), métaphysique (la Nature),
positif (loi = constatation, pas de principe absolu)
Saint-Simon distinguera quant à lui les périodes organiques (du Moyen Age à Saint-
Simon,…) et les périodes critiques (le 19ème).
93
B. L’utopisme de Charles Fourier
94
C. Le dilemme de Proudhon
Analyse
« Entre la propriété et la communauté, c’est-à-dire entre l’économie libérale et le
socialisme d’association, je construirai un monde »
Justice = égalité. Y compris égalité économique.
La propriété perpétue les inégalités. La propriété c’est le vol !
Qui a fait la terre ? Dieu ! En ce cas, propriétaire, retire-toi !
L’intérêt et la rente sont des droits d’aubaine.
Violente hostilité à l’intérêt : l’argent ne fait pas de petits.
Il faut se débarrasser de l’intermédiaire monétaire et revenir au troc…. (cf. Owen)
Ne voit pas le rôle de la monnaie et, plus grave encore, le rôle des prix.
Rejeter la propriété est une chose. Mais que mettre à la place. Mais le vol ne nécessite-
t-il pas une définition de la propriété ?
Proudhon n’apprécie pas les communistes : « Loin de moi, communistes, vous m’êtes
une puanteur et votre vue me dégoûte !».
D’où l’idée de possession. L’usus et le fructus mais pas l’abusus.
Qui sera le propriétaire en dernier ressort ? Dans un premier temps (année 1840),
Proudhon pense que ce peut être l’Etat.
Mais Proudhon n’a guère de respect pour l’Etat qu’il trouve amorale. Il est en effet,
contrairement à Proudhon, très moraliste et traditionnel et défenseur de la famille.
C’est pourquoi il rendra dans un premier temps la possession héréditaire.
Et puis, après le coup d’Etat de Napoléon III qui incarne pour Proudhon l’autorité
arbitraire, il fait volte-face et redevient un apologiste de la propriété (cf. son ouvrage
posthume).
95
Les suites
Autres socialistes
Blanqui (à ne pas confondre avec le libéral du même nom)
Cabet (Voyage en Icarie)
96
2.2. Les socialistes allemands
Biographie :
Né en 1789 (Würtemberg)
Vie agitée : exil, prison
1816 : fonctionnaire de rang moyen
1817 : professeur d’administration publique à Tubingen, élu à la
Diette. Trop contestataire, il doit immigrer.
1825-1832 : aux USA. Il est un écrivain journaliste agitateur.
Revient comme conseil des Etats-Unis à Hambourg.
Il œuvre pour le Zollverein (artisan de l’unité allemande). Fondé en
1834, il s’agit d’une union douanière constituée autour de la Prusse.
Une de ses grandes batailles sera les chemins de fer.
1841 : Le Système National d’Economie Politique (publié en France
où il séjourne) : rencontre un grand succès.
Suicide en 1846.
Théorie
Libéral, mais la « théorie de l’Ecole », comme il aime à dire, doit être
adaptée.
Rois reproches sont adressés à Smith :
1. Mettre l’intérêt « du monde » davant celui de la Nation
2. Smith gave mor importance to the consommuners’ needs while
what should come first is the economic power of the nation.
3. Le libre échange est souhaitable seulement une fois un certain
stade de développement attaint!
97
Une dimension sociale doit être ajoutée. L’homo oeconomicus fait
partie, est porté par un groupe, une patrie.
A la production matérielle il faut rajouter des choses telles que
l’éducation.
98
2.2. B. Karl MARX et le socialisme doctrinaire
a - L'homme :
99
des manufactures en Prusse et à Manchester. Engels dirige la branche
Manchestérienne des affaires familiales. Il est profondément touché par la
misère des ouvriers, en particulier la pauvreté urbaine. Bien que lui-même
soit un théoricien (dès 1844 il avait rédigé une "Ebauche d'une critique du
nationalisme économique" et en 1845 un ouvrage intitulé "la condition de
la classe ouvrière en Angleterre", mais il fut parfois accusé de plagiat - cf.
Carbon p.406) ; Engels laissa à Marx le travail théorique et se consacra
plus nettement que Marx à l'agitation politique.
b - La philosophie :Dialectique
: et matérialisme historique
100
D'où la dialectique, succession de thèse, d'antithèse et de synthèse. C'est
l'exemple de la dialectique du maître et de l'esclave. Ce système porte en
lui-même sa contradiction. Car le maître vit du travail de l'esclave.
L'esclave pourra donc se révolter, dépensant ainsi la contradiction qui
existait entre maître et esclave. Il sera alors citoyen libre et assurera sa
propre protection physique. Cette approche se retrouvera chez Marx.
Mais alors que Hegel pensait que l'idée était toujours première et que les
institutions, le droit, les rapports de production en découlaient, Marx
inversera l'ordre hégélien. Il suivra en en cela les travaux d'un autre
philosophe allemand, disciple de Hegel lui aussi : Ludwig Feuerbach.
Feuerbach Pour
ce dernier, et donc pour Marx : "L'être est sujet, et la pensée attribut".
Alors que chez Hegel la thèse c'était l'Idée, pour Feuerbach à l'origine de
toute chose se trouve l'homme : l'homme créa Dieu à son image... L'homme
s'est aliéné lui-même à une pensée.
"Dans toutes les sociétés de l'histoire ayant existé, disait Engels, la façon
dont la richesse est répartie et la société divisée en classes ou en ordres,
dépend des produits, du mode de production, et de l'échange des produits.
C'est à partir de là qu'on doit chercher les causes politiques : non dans les
cerveaux des hommes, ni dans la connaissance humaine plus approfondie
de la vérité éternelle et de la justice, mais dans les transformations des
modes de production et d'échange" (cité par Carbon p.385)
101
ni Engels c'est la façon dont évolue le système de production (comparer à
Schumpeter..). Par hasard ? Déterminisme absolu ? C'est sans doute là,
dans ce que l'on nomme le déterminisme historique,
historique que la cassure avec
les classiques et néoclassiques est consommée. Car pour ces derniers,
l’économie est avant tout la science des choix mis en oeuvre pour lutter
contre toutes formes de rareté. C'était en filigrane chez des classiques tel
Smith ou Say, ce sera évident chez les auteurs de 1870 jusqu'à nos jours, à
l'exception peut-être de quelques macroéconomistes.
Chez Marx au contraire - comme chez beaucoup de sociologues qui ont bâti
leurs théories dans le sillage des études de Marx - l'homme est aliéné et ne
peut guère que freiner ou accélérer, par la résistance de l'ordre bourgeois
et par la révolution, le déroulement inéluctable de l'histoire. C'est la
résistance des superstructures.
Il est bon d'ailleurs d'insister sur un point souvent occulté : Pour Marx,
non seulement les prolétaires (pour reprendre ses termes) mais aussi bien
les capitalistes sont aliénés. Les premiers, car ils sont obligés de vendre
leur force de travail, c'est à dire de se vendre eux-mêmes car le travail est
ce qui fait la valeur de l'homme. Les seconds car "n'ayant perdu ou bien
n'ayant jamais trouvé le sens de l'activité humaine première qu'est le
travail, ils sont amenés à reporter illusoirement leur liberté sur des
activités inférieures et animales". Le capitaliste accumule et exploite mais
il est lui aussi victime. Il sera plus heureux, car libéré, dans le monde
futur sans classe, sans propriété ; une société ou à un travail
essentiellement collectif (voulu par la division du travail) correspondra
enfin une superstructure appropriée c'est-à-dire basée sur une propriété
collective.
102
et sur les conseils de Engels (vers l'âge de 27 ans). Et l'un des "manuels"
d'économie les plus populaires de l'époque c'est bien sûr les Principes
d'Economie Politique de Ricardo. C'est donc à partir d'une charpente
classique, évidemment quelque peu modifiée, que Marx tentera d'illustrer
sa philosophie en montrant que la superstructure capitaliste - dont il
analyse les mécanismes - est vouée à l'autodestruction, car elle porte,
comme dirait Hegel, sa contradiction en soi....
103
Deuxième loi centrale chez Marx la baisse tendancielle des profits
profits.
rofits
De cette loi, nous le verrons, découlent la plupart des prédictions
catastrophiques de l'auteur. (sous-entendu, catastrophiques dans le moyen
terme). Pour exposer cette loi, il nous faut dans un premier temps
introduire une distinction centrale chez Marx : Celle entre capital variable
et capital constant (là encore Marx reprend en la modifiant la distinction
de Ricardo entre capital circulant - qui inclut les matières premières -, et
capital fixe).
Le capital variable (V) c'est le capital qui permet de rémunérer le travail ;
c'est le fonds des salaires.
Le capital constant c'est le reste : matières premières, machines, terrain et
locaux (notons le C).
Si K désigne le capital dans son ensemble alors K = C+ V.
Notons encore P, la plus-value accumulée par le capitaliste grâce au
surtravail des ouvriers.
P
Marx définit le taux de profit comme étant le rapport .
C +V
Une fois ces termes définis il nous faut, pour en arriver à la loi de la baisse
tendancielle des profits, introduire les effets du progrès technique (dont, je
le rappelle, on ne connaît pas l'origine).
Ce progrès technique va avoir deux effets : il augmentera la quantité de
capital constant utilisée dans la production, c'est à dire C, il augmentera
également la productivité de sorte que la quantité de travailleurs
employés et donc de salaires versés augmentera moins vite que C. En
d'autres termes la production devient plus "capitalistique", augmente
(composition organique du k).
P
p
Le taux de profit, t = , pouvant aussi s'écrire t = V , on voit que ce
c+v C
+1
V
c p
taux diminuera lorsque augmente, à moins que n’augmente à son
v v
tour, c’est-à-dire, à moins que la plus-value augmente de façon à
c
compenser l'augmentation de .
v
Mais le taux de plus-value peut-il augmenter indéfiniment ? Non, bien sûr,
car le sur-travail sera tôt ou tard limité par le temps disponible dans une
journée ! Si la force de travail est rémunérée au taux de 4 heures de
travail par jour, alors, même en exploitant le travailleur 24 heures par
jour, la plus-value plafonnera à une valeur de 20 heures de travail.
104
p
Donc l'accroissement de ne pourra éternellement compensé la
v
c
croissance de et le taux de profit va progressivement baisser. Ainsi
v
s'obtient la loi de la baisse tendancielle des profits.
Peut-on sauver Marx ? Voilà la question que bien des femmes et des
hommes se sont posée pendant plus d'un siècle. Non que Marx ait été le
seul à promulguer des lois dont le démenti par les faits est difficilement
contestable. Malthus avec sa loi de la population ou Ricardo avec sa loi de
la valeur-travail ont eux aussi fait fausse route. Mais Marx était plus
rigoureux, ou du moins se voulait-il plus rigoureux dans son approche.
D’ailleurs il qualifiait son socialisme de scientifique pour le démarquer du
socialisme de Proudhon et autres rêveurs français. Avec la survie du
105
capitalisme, c'est toute l'économique de Marx et la philosophie qu'elle
prétendait illustrer qui semblent s'effondrer.
Et cependant il ne fait aucun doute que cette pensée a laissé son
empreinte sur les générations à venir qui retiendront de Marx un idéal,
certes éternel mais réaffirmé avec force, et une vision dynamique de nos
sociétés.
L'idéal est celui d'un monde où les fruits du progrès seraient
partagés équitablement par des hommes généreux, sans convoitise. Inutile
d'insister, mais il me semble évident que cette vision du paradis terrestre
n'est pas sans paternité ! La nouveauté c'est que Marx nous décrit cet état
comme éminent.
Il faut noter cependant que Marx dit très peu de choses sur l’après
capitalisme. Il semble que le socialisme, en tant qu’oppression par le
peuple, ne soit qu’une étape intermédiaire guère préférable à l’oppression
par les bourgeois. L’idéal arriverait... après le socialisme. (Voir Rothbard
à ce sujet).
106
2.2. C. L’école historique : contre l'abstraction et les lois
Karl Knies (1821-1898) va plus loin dans le rejet des lois. Pour lui, il n'y a
même pas de lois dans l'évolution. L'histoire procède par analogies. On
rassemble des données, de façon aussi précise que possible et on les classe.
Epoque des monographies. Toujours rigueur et connaissance. Sa spécialité
c’est l’histoire des monnaies et des banques (1885) et bien sur des écrits
sur la méthode (1853) .
107
N.B. : Max Weber wrote an essay on Rscher and Knies.
En 1890, John Neville Keynes écrit un ouvrage dans lequel il reprend ces
débats méthodologiques : « The Scope and Method of Political economy ».
Un ouvrage considéré comme un classique sur la question (Robbins, 251)
Mentionner encore que cette école a fait des économistes allemands une
classe à part, pratiquement jusqu'à la seconde guerre mondiale. Cette
école à eu des prolongements en particulier aux Etats-Unis avec les
« institutionnalistes » : Veblen, en particulier.
(Il faudrait des infos sur le lien entre école historique et naissance de
l’Etat Allemand).
Ne peut on aussi voir dans cette pensée Allemande (avec List déjà) une
expression nouvelle du pragmatisme en matière de politique économique
qui déboucherait ici sur un pragmatisme en économie politique : il n’y a
pas de loi pour la politique économique, il n’y a pas plus de loi en matière
d’économie politique ?
108
Conclure sur la figure de Bismark
Bismark
109
2.3. Les Autres réactions à la pensé libérale classique
Analyse :
1. désaccord avec Say. Redoute une crise de sur-consommation : ce qui ont des
besoins n’ont pas d’argent. Il ne croit pas dans les mécanismes régulateurs, il
les juge en tout cas trop lents.
2. Dénonce le machinisme. La machine prend du travail aux hommes, la division
du travail en diminue la valeur humaine. La valeur d’échange prime sur la
valeur d’usage.
3. Théorie de la paupérisation et de la concentration croissante
Solution
Les Suisses n’aiment pas l’idée d’un Etat fort…
La solution c’est la législation sociale. Le garantisme. Exemple : le salarié rattaché
durablement à son entreprise, y compris dans les périodes de crise.
Il influencera de nombreux penseurs ; y compris John Stuart Mill.
B. Carey
110
Henri Charles CAREY sera l'avocat du protectionnisme dans les Etats-unis naissants.
(4 juillet 1776 = Indépendance, 1787 = Constitution fédérale, 1848 = conquête du
Texas, Nouveau-Mexique et Californie sur les mexicains). Aux Etats-Unis la pensée
libérale était largement divulguée : le Traité de Jean-Baptiste Say fut réédité 13 fois
entre 1821 et 1859 ... Aussi Carey était-il libéral optimiste, du moins à ses débuts.
Mais sa pensée allait faire volte-face suite à une prise de position ouverte en faveur du
libéralisme. En effet, alors que les Etats-Unis s'orientaient vers un plus grand
protectionnisme (r 1842), Carey en bon libéral, prédisait une période de récession pour
l'économie nationale. Or cette récession ne vint pas.
Il se lança alors dans des études empiriques et crut découvrir une loi selon laquelle
protectionnisme et prospérité seraient inséparables. Le tarif devenait alors pour Carey
un mal nécessaire. Et puis, après tout, Adam Smith n'avait-il pas approuvé l'Acte de
Cromwell ! Carey va même jusqu'à développer une nouvelle théorie dans le but
d'asseoir le protectionnisme qu'il préconise maintenant : Il existe une masse constante
de matière organique qui suit un cycle du sol - produit agricole - animaux - hommes -
sol de nouveau. Donc, en exportant nos matières premières au Royaume-Uni et en
important leurs produits manufacturés, nous nous vidons de notre matière organique. Il
faut donc que ce commerce cesse.
Ainsi Carey développe-t-il une théorie toute aussi "conjoncturelle", et même plus, que
celle des classiques anglais qui préconisaient le libre-échange. Ce ne sera pas la
dernière fois que cette fédération si riche se repliera sur elle-même.
111
Conclusion sur le rejet du libéralisme
3. Notons enfin que dans l'ensemble ces auteurs "réactionnaires" restent assez
silencieux sur le rôle de l'Etat. L'individu demeure le personnage central. C'est
curieusement alors que se développent les démocraties modernes que le rôle de l'Etat
va devenir prépondérant, jusqu'à centraliser, et orienter, si ce n'est diriger, la majorité
des activités économiques.
Un auteur socialiste français de la deuxième moitié du 19ème Charles Brook Dupont-
White, commencera à vanter les mérites de l'Etat dans l'esprit de la fin du XIXè, début
XXè :
"L'humanité est meilleure dans l'Etat que dans les
individus ; elle s'épure, parce qu'elle s'élève, dans cet
être collectif".
Cette idée selon laquelle l'Etat serait meilleur que les individus sera réexaminée plus
tard dans le cours.
Mais, même parmi les opposants à la pensée classique, l'image dominante de l'Etat
semble plutôt être celle de Bastiat :
"L'Etat, cette grande fiction à travers laquelle tout le
monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde".
4. Force est de constater que dans le L.T., ce sont les classiques qui avaient raison : au
cours du 19ème il y a une très forte amélioration du niveau de vie de la population. La
pensée libérale régnera en maître des années de1848 à 1870 (période victorienne,
dernière partie du règne de Napoléon III)
112
3ème Partie : Pensée économique au 20ème
Chapitre 1 : La révolution marginaliste : une unanimté trompeuse
1.1. Les causes et la nature de la révolution
1.2. Les trois écoles
1.3. Une unité trompeuse
Chapitre 2 : Les débats théoriques
2.1. Les questions monétaires
2.2. Le rôle de l’Etat
Chapitre 3 : Les grands débats d’économie politique
3.1. La question de la monnaie
3.2. Le New Deal
3.3. L’économie d’après guerre
3.4. La gobalisation du 20ème
113
Préambule
114
Point de vue classique Point de vue début 20ème
Economie = science de la Economie = science du « bien-
richesse être ». ce qui nous intéresse ce
(objets matériels qui satisfont n’est plus l’objet mais la
les satisfaction
Besoins
Valeur est fondée sur les coûts= Valeur est fondée sur l’utilité,
la signification économique doit l’usage qui sera fait de l’objet.
être cherché dans le passé Valeur tournée vers le futur
(donc incertaine)
Vue macroéconomique : la Vue microéconomique :
valeur-travail sert de base à Economie est la science des
l’agrégation des carottes et des choix
porcelaines !
Vue dynamique : à la recherche Vue statique : prédominance
des sources du progrès du concept d’équilibre
Recherche de lois à partir d’une Recherche de lois exactes à
méthode hypothético-déductive partir de l’outil mathématique
laissant une marge place à
l’observation des faits
115
C'est un peu la thèse de Khun. En particulier la théorie de la valeur
semblait boiteuse.
Les précurseurs
EN France :
- Jules DUPUIT
DUPUIT (1804-1866) : théorie de l’utilité marginale, courbe de
consommation, équilibres partiels et l'optimum. Beaucoup de Marx aussi.
C’est un ingénieur civil qui avait eu à se pencher sur la tarification de
certains « services publics » comme les ponts. En 1844 il écrit un article
« De la mesure de l’utilité des travaux publics »
116
En Allemagne :
- Von THÜNEN
THÜNEN (1783-1850) en Allemagne, avait attaqué la théorie de la
rente de Ricardo (son contemporain ... mais THUNEN est fermier en
Allemagne de l’Est !) Un ouvrage en deux volumes : L’Etat isolé (vol. 1,
1826, vol. 2 1850). Dans le premier volme il développe un modèle
permettant de comprendre les mécanismes de la rente. Le marché se
trouve au centre et des terres d’égale fertilité se trouvent situées dans des
bandes circulaires plus ou moins éloignées du centre. Dans le second
volume on trouve la théorie selon laquelle le travail est rémunéré à sa
productivité marginale (il était si fière de sa formule qu’il voulait qu’elle
soit gravée sur sa tombe !)
En Angleterre :
117
Le fruit classique était mûr !
118
Une nouvelle théorie de la valeur
Si tous les historiens s'accordent sur un point, et c'est rare, c'est pour
reconnaître à 3 auteurs le mérite d'avoir découvert les fondations de la
science économique moderne : le calcul à la marge.
B. Utilité marginale :
119
1. 2. Les trois écoles
- toujours eux !
- le plus grand nom n'est pas JEVONS mais Alfred MARSHALL dans cette
école
- MARSHALL se voit continuateur des classiques
- tel n'est pas le cas de JEVONS.
120
i. l’échange : à ce propose il suppose qu’une même marchandise ne
saurait commander deux prix (Loi de Jevons). Il poursuit ensuite
pour montrer comment, dans un échange bilatérale, on va
atteindre le point où les TMS des différents individus sont égaux
et cela même est égal au rapport des quantités échangées.
ii. Le travail : A l’équilibre, la désutilité marginale du travail doit
être égale à la productivité de ce travail. (voir le graphique dans
Robbins)
iii. Le capital : là encore il raisonne à la marge. Le capital peut
accroître la production et donc l’utilité par sa quantité et la
durée de son emploi. Cela le conduit à une théorie mi-
autrichienne (préférence pour le présent), mi-néoclassique
(productivité marginale). Le taux d’intérêt est la productivité
marginale du temps (de la durée de l’investissement).
b. En statistique :
Il a deux ouvrages The Coal Question (1865), « A serious fall in the value
of gold ascertained, and its social effects set forth » (1863)
Le premier le rendît célèbre.
Le ton et le contenu sont totalement Malthusien (cela fait toujours
recette !). Depuis Malthus la libéralisation du commerce des grains a
éloigné la perspective d’une pénurie de blé. Mais l’Angleterre va voir sa
marche en avant stoppée par une autre avarice, peut-être plus grave
encore car la chose est non renouvelable : la pénurie de Charbon. Jevons
l’affirme « les nouvelles utilisations du charbon sont d’un caractère
illimité”. La solution préconisée est sans surprise : « Dans la mesure ou
notre progrès et notre richesse dépendent du contrôle que nous avons sur
le charbon, un retour en arrière est inévitable. »
Dans son étude sur l’influence de l’accroissement de l’or (Californie) sur le
prix des denrées, il tente, ce qui est remarquable pour l’époque de mettre
au point un indice des prix. Sa conclusion est que le pouvoir d’achat de l’or
a chuté de 10% entre 1845 et 1850.
121
En 1882 il rédige : The State in Relation to Labour.
Ses positions sont assez hétéroclites. Il demeure largement en faveur du
libre échange et d’un impôt proportionnel. Il sait également que les
opinions quant à ce qui accroîtrait le bonheur général sont subjectives.
Cela ne l’empêche pas de développer un pragmatisme dans le domaine de
l’intervention de l’Etat. « L’Etat est fondé lorsqu’il vote une loi, ou lorsqu’il
agit, si cela, sans conséquence ultérieure, accroît la somme totale de
bonheur humain ».
Ainsi, en principe, et pour reprendre ses propres termes : « il n’y a
pratiquement aucune limite aux interventions du législateur ».
Il supportera la nationalisation des services postaux, les chemins de fer
nationaux en Russie (mais s’opposera à la nationalisation des chemins de
fer en Angleterre).
a. Biographie rapide
(Villey note l’absence d’unité entre les thèses théoriques et les idées plus
politiques.)
122
Sa philosophie n’est pas Benthamienne, mais plutôt naturelle. Ce qui
l’intéresse c’est de décrire le fonctionnement d’une économie qui
fonctionnerait selon des principes justes.
b. L’économie pure
L’influence, en sus de celle de son père, est ici celle de Cournot. Walras se
propose comme lui d’utiliser les mathématiques. Mais il va aller plus loin
que Cournot : il explique la demande, et il s’intéresse à l’équilibre général,
général
non plus seulement l’équilibre sur un marché.
Pour lui les mathématiques permettent d’arriver directement à la solution
que les marchés atteindront par un processus de tâtonnement.
Il mentionne l’entrepreneur comme élément important dans ce processus
de tâtonnement. A l’équilibre, les profits sont nuls.
A noter qu’il rejette, comme Jevons, la théorie du fond des salaires. Le
salaire est déterminé par la productivité du travail, ou plus précisément,
par la satisfaction que ce travail permet d’obtenir.
En matière monétaire, Walras est assez novateur (pour ce qui est d’insérer
la monnaie dans un modèle d’équilibre). Il mentionne plusieurs concepts
qui allaient être repris, ou redécouverts, par la suite : l’idée que la
monnaie est demandée car elle rend des services, l’idée d’une demande
d’encaisse réelle (keynes).
Sur la méthode :
123
Villey : « Prenons par exemple la question des rapports entre le coût et le
prix. Les classiques enseignent que le coût est la cause du prix ; Menger et
son école, que le prix est la cause du coût. Grâce à l’algèbre, les
économistes de l’école de Walras peuvent écrire que le coût égale le prix,
sans préjuger comment cette égalité s’établit, ni par quelles relations,
réciproques ou à sens unique. »
Chez Gonnard on trouve aussi dans le chapitre sur l’économie
mathématique un auteur qui présente l’abandon de la causalité comme un
progrès. L’économie est complexe et très souvent A influence B comme B
influence A…
124
C.Carl
C.Carl Menger (1840-
(1840-1921)
Il est tuteur du Prince (que l’on retrouve dans Mayerlin, il se suicide avec
sa femme à la fin)
Deuxième chose : les autres choses, celles qui ne satisfont pas directement
un besoin, peuvent néanmoins être considérées comme des biens. Mais ce
sont des biens d’ordre supérieur.
supérieur Ces choses sont des biens car elles
permettent de produire d’autres choses qui satisfont des besoins.
125
1ère 10 9 6 5
unité
2ème 8 7 4 3
unité
3ème 6 5 3 2
unité
4ème 5 2 1 0
unité
Prix et échange
L’échange crée de la valeur puisque l’échange permet de satisfaire des
besoins qui ne seraient pas satisfaits sinon. L’échange s’arrête lorsque
l’une des parties ne perçoit plus de gain à l’échange.
Le prix ne fait pas l’objet d’une attention particulière. Dans le cas d’un
échange simple, il se situera quelque part entre les deux valeurs de
réservation. Dans le cas d’un monopole il correspondra à la maximisation
du profit. Dans le cas de la concurrence il aura tendance à être plus bas.
126
Ces thèmes sont également développés dans les principes, mais ils sont
tellement originaux—on pourrait presque dire révolutionnaires—qu’ils
nécessitent un traitement à part.
Enfin , il faut bien noter que ces institutions n’ont pas été inventées. Elles
sont organiques : le fruit de l’action humaine mais non pas d’un dessein
humain. On retrouve l’idée de conséquence non intentionnelle.
c. Méthode
127
Contre eux il va soutenir l’existence de lois exactes (donc irréfutables). Le
débat n’est don pas tant un débat entre induction et déduction, mais un
débat sur la nature du savoir de l’économiste.
D’où son opposition aussi avec Walras. 1. Les mathématiques ne sont pas
le langage de la causalité et 2. Walras travaille avec des systèmes
d’équations simultanées. Là encore on passe à côté de l’essentiel.
Notons enfin que Menger n’est pas un naïf. Il sait que les lois exactes
dégagées par l’économiste ne suffisent pas à prédire. Il y a place pour
l’erreur dans les comportements humains. Plus tard Mises opposera
praxéologie (le domaine des lois exactes) et histoire.
- pour les autrichiens dans le concept d'Utilité, ce qui compte les plus c'est
l'utilité qui est subjective.
c'est pourquoi on appelle cette école : l'école psychologique. Alors que
Walras s’intéresse au quantitatif, les autrichiens sont intéressés par le
qualitatif.
128
1.3. Une unité trompeuse
129
développe ce concept d’analyse partielle. La clause ceteris
paribus devient symbolique de cette approche.
Quelques analyses :
1. Le prix des denrées. Marshall n’a pas une théorie des prix, mais
plusieurs selon l’horizon temporel que l’on donne à l’analyse.
Ainsi, dans le très court terme, les quantités produites sont
données et l’ajustement se fera entièrement sur la demande
(courbe d’offre verticale), sauf si le bien peut être stocké. Dans ce
cas la courbe d’offre devient plus élastique. Sa forme sera
déterminée par les anticipations de prix des offreurs. Dans le
court terme, les entreprises ne peuvent pas modifier les
investissements fixes, mais peuvent modifier le niveau de
production. Le prix dépendra du coût marginal de court terme.
Enfin dans le long terme, il y a la possibilité de rendements
croissants et d’économie d’échelle (courbe d’offre décroissante).
décroissante
Mais, il faut bien noter que pour Marshall, le long terme n’est
pas synonyme d’équilibre où plus rien ne se passe. Le long terme
est tout autant l’occasion de changements, d’évolution. C’est
pourquoi il introduit le concept de la firme représentative.
2. La distribution. Sa théorie est basée essentiellement sur la
productivité marginale des facteurs de production. Il critique
aussi la théorie du fond des salaires pour en venir à une théorie
que certains rapprochent de celle de la demande effective de
Keynes. La demande dépend de l’offre. Il est souvent considéré
comme le père du concept du surplus du consommateur qu’il
appelle « rente du consommateur » en faisant un parallèle avec la
rente du propriétaire terrien. Mais attention : il ne recherche pas
une mesure « précise » de l’accroissement du bien-être.
3. Le progrès économique dépend d’une façon intéressante du
progrès morale. C’est là une théorie originale de Marshall
tentant de réconcilier tous les classiques. Comme Smith il pense
que le progrès est lié à la division du travail et à l’accumulation
du capital. Mais il y a la logique Malthusienne qu’il ne faut pas
oublier : si la crainte de la famine s’est définitivement éloignée, il
y a toujours le risque pense Marshall d’une hausse des salaires
qui produirait un recul car elle serait non couplée avec un
accroissement de la productivité (cf. Sa théorie de la
rémunération à la productivité marginale) et conduirait en toute
logique à la baisse des profits et à la fuite des capitaux. La
130
solution se trouve dans la nature de la consommation : il faut
que la richesse nouvelle soit consacrée à l’éducation, à
l’amélioration des capacités productives. C’est donc des valeurs
morales, en dernier recours, que dépendront notre survie et notre
développement. Les valeurs morales sont la source du
développement durable dirait-on aujourd’hui !
4. Le rôle de l’Etat :
i. Il y a des arguments en faveur de l’intervention.
Comme Edgeworth après lui, il développe l’idée qu’en
prenant au riche pour donner au pauvre on accroît la
satisfaction globale en raison de la décroissance de
l’utilité marginale du revenu. De plus une bonne
fiscalité devrait pouvoir encourager les secteurs à
rendements croissants aux dépens des secteurs à
rendements décroissants. Enfin, il faut éviter les
monopoles qui tendent à accroître les prix et baisser les
quantités (la fameuse théorie…)
ii. Mais pour autant Marshall n’est pas un apologiste de
l’Etat. Car il ne faut pas limiter l’homme à sa
dimension économique. On retrouve la l’inspiration
Smithienne : l’homme recherche l’approbation de son
entourage. Et précisément la liberté d’entreprendre va
lui donner la possibilité de développer cette dimension.
Il y a un sens du devoir et un altruisme qu’il convient
d’encourager. C’est ainsi qu’un monopole n’est pas
forcément mauvais. Les employeurs ne forment-ils pas
les employés ? Les parents n’éduquent-ils pas leurs
enfants ? C’est pourquoi il demeure opposé au
socialisme administrateur, à une régulation étatique de
la production et aux nationalisations. Il faut rappeler
que Marshall voit d’autres puissances (tel l’Allemagne
ou les US, en pleine expansion : ce n’est pas le moment
de freiner l’esprit d’entreprise en Angleterre !)
iii. La liberté d’entreprendre forge le caractère. Même si
d’un point de vue purement économique elle était
imparfaite, il importe de la préserver pour des raisons
morales. C’est l’entrepreneur de la période victorienne :
sobre, travailleur, précautionneux qui fait l’admiration
de Marshall. Pour les pauvres, il suggère une fiscalité
progressive (qui ne doit pas cependant freiner
131
l’entreprise). Les plus démunis seront pris en charge
soit par la charité privée soit par un « filet social
minimum ».
iv. S’il reconnaît les dangers que décrivait Malthus, il
pense que la loi du salaire minimum vital, n’est ni une
loi, ni quelque chose de désirable. Il importe par contre
de faire en sorte que les individus développent leur
« standard de vie » (pour lui, éducation, intelligence,
raison) plus que leur standard de confort.
Extrait de son annexe matyhématique (où l’on trouve force integrals et calcul
differential)
It would be possible to extend the scope of such systems of equations
as we have been considering, and to increase their detail,
until they embraced within themselves the whole of the demand
side of the problem of distribution. But while a mathematical
illustration of the mode of action of a definite set of causes may
be complete in itself, and strictly accurate within its clearly defined
limits, it is otherwise with any attempt to grasp the whole
of a complex problem of real life, or even any considerable part
of it, in a series of equations. For many important considerations,
especially those connected with the manifold influences
of the element of time, do not lend themselves easily to mathematical
expression: they must either be omitted altogether, or
clipped and pruned till they resemble the conventional birds and
animals of decorative art. And hence arises a tendency towards
assigning wrong proportions to economic forces; those elements
being most emphasized which lend themselves most easily to
analytical methods. No doubt this danger is inherent in every
application not only of mathematical analysis, but of analysis of
any kind, to the problems of real life. It is a danger which more
than any other the economist must have in mind at every turn.
132
But to avoid it altogether, would be to abandon the chief means
of scientific progress: and in discussions written specially for
mathematical readers it is no doubt right to be very bold in the
search for wide generalizations.
Pour des avis différents sur Marshall, voir la citation de Samuelson, très
critique, et celle de Taussig, élogieuse !
* l'optimum : définition :
une situation est optimale si l'on ne peut améliorer la condition d'un ou
plusieurs individus sans aggraver celle d'un ou plusieurs autres individus.
En fait s’il n’y a pas de redistribution à partir de cette situation qui ferait
l’unanimité.
Avantage : ce concept ne nécessite pas de comparaison des utilités de
différents individus.
133
C. L’école Autichienne
Wieser et Böhm-
Böhm-Bawerk
Bawerk (B-B!,beau-frères, bonjour les repas de famille...)
Eugen von Böhm-Bawerk a eu son livre traduit en anglais. C’est alors que
les pays de langue anglaise vont découvrir les analyses Autrichiennes.
Il est également connu à l’époque pour son étude critique des théories de
Marx. Son Karl Marx and the Close of his System, (1896) constituera la
réfutation “classique”.
134
Ses travaux sont à relier à ceux de Knut Wicksell (économiste Suédois
comme l’était Gustav Cassel, un disciple de Walras). Chez Wicksell on
trouve une réflexion sur la structure du capital (cf. Lachmann). On trouve
également le désir d’intégrer théorie monétaire et théorie de la production.
Les fluctuations de la masse monétaire affectent les prix indirectement à
travers un écart entre taux naturel de l’intérêt et taux du marché.
Schumpeter,
Schumpeter admirateur aussi de Walras et Marx et quelque peu
socialisant : innovation source de progrès, de dynamique
né en Moravie (Tchécoslovaquie)
étudie à Vienne
Ministre des finances de l'Autriche → banquier malheureux →
Harward (+ 1950)
Théorie du développement économique, 1912.
Le personnage central en est l'entrepreneur innovateur (ni risque, ni
incertain, mais du caractère !).
Les sources du progrès :
nouvelle matière première
produit nouveau (grappes d’innovations)
nouvelle combinaison productive
nouvelle organisation ou débouchés nouveaux
- puis Mises L.
- Hayek → L.S.E. → chicago
* économie (capital, prix)
* D.L.L.
- Lachmann → + grand subjectivisme : surtout subjectivisme des
anticipations
- Kirzner. Théorie de l'entrepreneur, prise chez Mises
→ processus de marché
135
Ce qui était prévu :
Chapitre 2 : Les débats théoriques
2.1. Les questions monétaires
2.2. Le rôle de l’Etat
Chapitre 3 : Les grands débats d’économie politique
3.1. La question de la monnaie
3.2. Le New Deal
3.3. L’économie d’après guerre
3.4. La gobalisation du 20ème
Conclusion du cours
136
chômage). De plus il est clair que le gouvernement n’est pas perturbé par la
recherche de profit. (contraste avec Kirzner).
En 1929, dans un article de l’AER, Fred Taylor insiste : non seulement une
économie socialiste peut faire aussi bien ; elle peut même faire mieux. L’une
des raisons est qu’elle peut jouer sur la répartition initiale des richesses.
Abba Lerner
Né en Russie, élevé à Londres
1929 entre à LES, à cette époque Fabian Socialists (famille Webb)
Très brillant.
Support de Keynes
P=MC
Lerner était convaincu de la beauté et de l’efficacité du l’équilibre général
parétien.
The Economics of Control (1944)
B. La réponse Autrichienne
Mises
Disciple de Menger, il travaille à la chambre de commerce de Vienne (où il aura
Hayek comme assistant) et donne un sémnaire à l’Université (Schumpeter,
Oskar Morgenstern,…)
Les Autrichiens sont réputés pour leurs études sur les cycles.
137
Exilé autour de la seconde guerre mondiale : Genève (il rencontre Kelsen,
auteur de Théorie positive du Droit). Il resterons amis. Après la Suisse, il se
retrouve comme beaucoup des membres du club de Vienne aux Etats-Unis. Vit
à New York. Séminaire à la Business School de NYU. Meurt dans les années
70.
Ouvrages majeurs : Bureuacracy, Socialism, Human Action
138
Citation de Trotsky
139
2.2. Débat autour des crises et de la question monétaire
Les faits
Jevons avait « établi » l’existence de cycles de 10-11 ans.
Juglar a introduit la terminologie.
Plus tard, les travaux de Mitchell et du NBER (fondé en 1920)
Le taux naturel est celui qui égalise l’offre d’épargne et la demande de prêt pour
investissement. Il est grossièrement égal au taux de rendement espéré des
nouveaux investissements.
Dans une économie de crédit simple, sans intermédiation bancaire, les deux
taux ne risquent pas de diverger. Par contre dans une économie de crédit
organisé, il peut y avoir écart entre les deux. Il peut y avoir une inflation des
crédits.
140
- Dans une économie de crédit simple, si le taux monétaire est inférieur au
taux naturel, les fonds se font plus rares ; les emprunts vont dépasser
l’épargne. La demande de biens va donc dépasser l’offre de biens. Les
prix vont augmenter, et le taux monétaire rejoindre le taux naturel.
- Dans une économie bancaire, les banques vont retarder l’ajustement en
continuant de prêter, se substituant aux épargnants.
Début de l’école Suédoise.
Cette théorie sera par la suite enrichie par les Autrichiens (Böhm-Bawerk,
Mises, Hayek). Pour eux le taux naturel dépend de la préférence pour le temps.
La banque peut déformer ces préférences.
La première, celle qui a vraiment donné l’impulsion aux théories modernes des
cycles est celle de Tugan Baranovsky. Son problème est de savoir comment la
Russie peut se développer. Cela le conduit à un réexamen de la dynamique du
capitalisme. Il en conclut, avec Lénine et contre Marx, que le capitalisme peut
très bien perdurer. L’accumulation du capital n’aura pas forcément de fin.
141
Seulement cette accumulation est irrégulière. Il y a en particulier des périodes
récurrentes de sur-production. Elles apparaissent lorsque le taux d’intérêt
s’enflamme suite à un épuisement des fonds prêtables (emprunt de
consommation difficile ?). Il faut alors attendre que ce fonds se reconstitue.
Industrial Crises in England, 1894.
Spiethoff avance la même année une autre explication, basée cette fois-ci sur
des vagues d’innovation. Ces vagues accroissent les perspectives de profit et
donc les investissements en capital. Les prix des biens de consommation
demeurent élevés. Tôt ou tard ces prix vont baisser et les investissements
s’arrêter car les nouvelles machines sont en place, c’est la dépression qui
attendra une nouvelle vague d’innovations.
B .1. Le contexte
142
Entre 29 et 32, la production industrielle mondiale recule de plus de moitié, les
prix de plus d’un tiers, 30 millions de chômeurs en 1933 dans les pays
industrialisés.
Herbert Clark Hoover : Le new Deal avant l’heure. Taxes douanières.
Franklin D. Roosevelt (élu en 1932) : NIRA (National Industrial Recovery Act)
American Federation of Labour. Wagner Act (nouveau droit social)
"Cela est probablement vrai à la longue. Mais cette manière d'étudier les choses
est une mauvaise méthode d'étudier les évènements actuels. A la longue nous
serons tous morts. Les économistes se donnent une tâche trop facile et trop
inutile, si dans une période orageuse, ils se contentent de nous dire que lorsque
la tempête est passée, l'océan redevient calme".
2 - La théorie générale
143
* I gouverné par deux facteurs
a) e.m.c. - variable elle aussi subjective
-↓ dans le temps (cf. les classiques)
- explique les crises car vague pessimisme → e.m.c. ↓ → D ↓ (théorie
psychologique des crises)
b) i = prix de la renonciation à la liquidité
- donc dépend de la préférence pour la liquidité (cf. Marshall, demande
d’encaisses réelles)
- liquidité dépend 3 motifs - transaction
- précaution
- spéculation (Keynes insiste)
Notons bien que la demande de monnaie est très instable dans cette théorie monétaire
(c’est l’opposé chez Friedman).
- instrument :
* politique budgétaire = augmentation du déficit ou réduction
côté recettes : politique fiscale avec baisse ou hausse des impôts
144
Tabac
}5%
Alcool
N.B. : les cotisations sociales ne sont pas incluses dans les recettes fiscales. Elles
représentent à elles seules autant que toutes les recettes fiscales combinées (resp. ;
1.400 mds Fcs et 1.500 Mds de Fcs)
* politique monétaire :
- encadrement du crédit (taux d'i)
- émission de monnaie
- dévaluation (1981-82-83) / réévaluation
- inconvénients :
Mais l'inconvénient le plus grave est de donner l'impression que l'on peut manipuler
assez aisément l'évolution économique.
La macroéconomie, qui comme nous le verrons peut avoir son utilité tant qu'elle reste
fondée sur la compréhension des comportements individuels, n'est pas à mettre entre
toutes les mains.
145
Keynes , qui dénonçait les illusions et esprits irrationnels (animal des spéculateurs), a
promu la grande illusion de la 2ème moitié de ce siècle : il est possible de gouverner
l'économie.
NB On pourra utiliser ici les transparents basés sur Laffer qui comparent Kennedy et
Nixon.
146
1.3. Monétarisme et nouvelle économie classique : retour à la rationalité
147
2 ) L'école de Chicago :
F. Hayek :
* Autriche →L.S.E. (Robbins) → Chicago→ Fribourg
* Walter Lipman - société du Mont Pélerin
* théorie monétaire et théorie des cycles (B.B.)
* la route de la servitude
* rôle de l'information
* fondement juridiques et philosophiques de l'ordre spontané
libéral.
Milton Friedman
* réponse à Keynes sur la monnaie qui est "neutre"
* réponse à Keynes sur la consommation
→ effets de multiplicateur ne sont pas aussi efficace que
le pensait Keynes (fondation de consommation)
→ économie de l'offre
148
→ doublé par l'école de Virginie :
* le marché politique
* les mécanismes de vote ...(Buchanan; Tullock)
149
2.3. L’économie publique ancienne et nouvelle et le Public
Choice
(de Pigou à Laffont)
150
- sur la possibilité d'avoir une fonction d'utilité collective dérivée de fonctions
individuelles ; Arow (Prix Nobel 1972), reprenant le paradoxe de Condorcet,
montrera que cela est impossible.
Le problème de l'agrégation des utilités demeurent entier et fait toujours l'obejt
de débats.
151