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 6-040-L-40

Insuffisance respiratoire chronique


et son traitement instrumental
(oxygénothérapie et ventilation
mécanique)
M. Canuet, E. Weitzenblum, R. Kessler

L’insuffisance respiratoire chronique (IRC) est une cause importante de morbidité et de mortalité. Elle
a pour cause essentielle la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). L’IRC est définie par
l’incapacité de l’appareil respiratoire à assurer correctement l’hématose : présence d’une hypoxémie
(PaO2 < 70 mmHg) persistant à distance d’un épisode aigu ; l’hypercapnie n’est pas obligatoire et
elle est rare dans certaines formes étiologiques d’IRC (pneumopathies interstitielles). La cause princi-
pale de l’hypoxémie est représentée par les inégalités ventilation-perfusion, très caractéristiques de la
BPCO (atteinte de l’« échangeur » pulmonaire). Dans les atteintes de la « pompe » ventilatoire (maladies
neuromusculaires, scoliose) l’hypoxémie-hypercapnie est la règle. Le tableau clinique de l’IRC dépend
principalement de l’affection causale ; la dyspnée d’effort est présente dans tous les cas. Le type du
déficit ventilatoire, révélé par les explorations fonctionnelles, permet de classer les IRC en obstructives
(essentiellement la BPCO) restrictives et « mixtes » ; il faut y ajouter les IRC d’origine « centrale », plutôt
rares. Le syndrome obésité-hypoventilation (SOH), qui est en revanche fréquent, est difficile à classer.
L’évolution de l’IRC est émaillée d’exacerbations grevées d’une mortalité importante. Le pronostic de
l’IRC est particulièrement mauvais dans les fibroses diffuses. Il est plus favorable dans la BPCO et dans
le SOH. L’oxygénothérapie de longue durée est le traitement logique de l’IRC. C’est dans la BPCO qu’elle
donne les meilleurs résultats (amélioration de l’espérance de vie). Elle est indiquée lorsque la PaO2 est
inférieure à 55-60 mmHg de façon persistante. Le traitement doit être d’au moins 16 h/24. La ventila-
tion non invasive est le traitement de référence des insuffisances respiratoires restrictives hypercapniques
(affections neuromusculaires, cyphoscoliose, SOH) : elle permet une amélioration de l’espérance de vie
et de la qualité de vie. Elle est également utilisée avec succès dans les exacerbations de BPCO mais le
bénéfice d’un traitement au long cours dans la BPCO n’est pas établi.
© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Insuffisance respiratoire chronique ; Bronchopneumopathie chronique obstructive ; Hypoxémie ;


Hypoxémie-hypercapnie ; Oxygénothérapie de longue durée ; Ventilation non invasive

Plan  Introduction
■ Introduction 1 L’insuffisance respiratoire chronique (IRC) est une cause impor-
■ Aspects physiopathologiques et cliniques 2 tante de morbidité et de mortalité. On estime qu’en France
Définition 2 150 000 personnes au moins souffrent d’IRC sévère et que 20 000
Épidémiologie 2 environ décèdent chaque année, ce qui souligne bien la gravité
Physiopathologie : mécanismes des troubles des pronostique de l’IRC. Il y a lieu de tenir compte également de son
échanges gazeux 2 coût élevé pour la société, résultant notamment des conséquen-
Conséquences physiopathologiques de l’hypoxémie chronique 3 ces de l’absentéisme, de la mise précoce en invalidité et de la prise
Classification 3 en charge par la sécurité sociale de thérapeutiques au long cours
Tableau clinique et fonctionnel. Investigations complémentaires 4 coûteuses comme l’oxygénothérapie et la ventilation à domicile.
Évolution et pronostic 5 La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est de

très loin la cause la plus fréquente de l’IRC (environ 80 % des cas)
Traitement instrumental 6
mais l’IRC peut être consécutive à un grand nombre d’affections
Oxygénothérapie de longue durée 6
respiratoires et extrarespiratoires. Compte tenu de la prédomi-
Traitement par ventilation non invasive 8
nance de la BPCO, une part importante de cette mise au point lui
Ventilation invasive par trachéotomie 13
est consacrée. Nous envisageons successivement les aspects phy-
■ Conclusion 14 siopathologiques et cliniques de l’IRC et la deuxième partie de cet
article est consacrée au traitement instrumental de l’IRC qui, dans

EMC - Pneumologie 1
Volume 9 > n◦ 2 > avril 2012
http://dx.doi.org/10.1016/S1155-195X(12)48018-5
6-040-L-40  Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)

la BPCO comme dans les autres formes étiologiques d’IRC, repose reçoivent une oxygénothérapie de longue durée à domicile et sont
sur l’oxygénothérapie de longue durée et sur la ventilation méca- donc en principe insuffisants respiratoires. La plupart (80 % envi-
nique non invasive ou invasive. Les traitements médicamenteux ron) ont une BPCO et la prédominance masculine est nette, même
qui varient naturellement en fonction de l’étiologie de l’IRC ne si elle a tendance à s’atténuer depuis 20 ans.
sont pas abordés. Une étude conduite il y a plus de 20 ans au Royaume-
Uni, à Sheffield [3] , a recherché la prévalence de la bronchite
chronique hypoxémiante (volume expiratoire maximal seconde
 Aspects physiopathologiques [VEMS] < 50 % de la valeur prédite, PaO2 < 55 mmHg) dans la
population générale. Appliqués à l’Angleterre et au Pays de Galles,
et cliniques les résultats indiquent qu’il y a environ 60 000 sujets avec BPCO et
IRC sévère. Ces chiffres peuvent être transposés à la France dont la
Définition population est proche de celle du Royaume-Uni. Il faut y ajouter
les IRC provenant d’autres causes que la BPCO, les IRC peu sévères
L’IRC est généralement définie comme l’incapacité de l’appareil sur le plan gazométrique (PaO2 comprise entre 55 et 70 mmHg),
respiratoire à assurer normalement l’hématose. Une autre défini- et il faut tenir compte par ailleurs de l’augmentation de la préva-
tion, assez proche de la précédente est l’existence d’une hypoxé- lence de la BPCO depuis 20 ans. On peut estimer qu’il y a environ
mie chronique d’origine respiratoire intrinsèque [1] . L’hypercapnie 150 000 à 200 000 patients IRC en France.
n’est pas obligatoire et selon les étiologies de l’IRC on peut obser- La mortalité liée à l’IRC est difficile à établir. Celle de la BPCO est
ver une hypercapnie, une normocapnie, voire une hypocapnie. de l’ordre de 15 000 décès/an et la BPCO représentait la cinquième
Il n’y a pas de consensus sur la définition de l’hypoxémie cause de décès en France en 1997 [2] . La mortalité en rapport avec
qui caractérise l’IRC. Avec la Société de pneumologie de langue l’IRC est sans doute proche de 20 000 décès par an.
française nous la définissons par une pression partielle en oxygène
du sang artériel (PaO2 ) inférieure à 70 mmHg [2] . Une confusion
a été introduite récemment par les recommandations de la Glo- Physiopathologie : mécanismes des troubles
bal Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease (GOLD) [2] qui
indiquent le seuil de 60 mmHg pour la PaO2 , mais il s’agit claire- des échanges gazeux
ment de la définition de l’IRC sévère et non pas de l’IRC de façon L’hypoxémie chronique, qui caractérise l’IRC, peut relever de
générale. quatre causes : inégalités ventilation-perfusion (effet-shunt),
L’hypercapnie, définie par une pression partielle de gaz carbo- shunt, troubles de la diffusion de l’oxygène et hypoventila-
nique dans le sang artériel (PaCO2 ) supérieure ou égale à 45 mmHg tion alvéolaire. Les trois premières entraînent une hypoxémie
n’est pas obligatoire mais elle est souvent présente dans les IRC isolée ; l’hypoventilation alvéolaire entraîne une hypoxémie-
obstructives (BPCO) et dans de nombreuses formes étiologiques de hypercapnie.
l’IRC. L’hypercapnie suffit d’ailleurs à établir la présence d’une IRC Dans les hypoxémies isolées la PO2 alvéolaire (PAO2 ) et la PCO2
puisqu’elle est nécessairement associée à une hypoxémie, laquelle alvéolaire (PACO2 ) sont normales. La chute de la PaO2 est liée à
peut être très discrète en cas d’hypoventilation homogène (cf. un élargissement de la différence PAO2 -PaO2 qu’on appelle le gra-
infra). dient alvéoloartériel de PO2 (AaDO2 ). Trois mécanismes peuvent
Il faut souligner que le caractère chronique, c’est-à-dire per- entraîner une augmentation de l’AaDO2 (dont la valeur normale
sistant, de l’hypoxémie est un élément important ; il doit être n’excède pas 10-15 mmHg). Le plus important est l’effet-shunt.
vérifié par des mesures de gaz du sang (GDS) artériel pratiquées à 1
mois d’intervalle, à distance d’un épisode aigu [1] . Les hypoxémies
« extrinsèques », par exemple dans les shunts droit-gauche des car- Inégalités ventilation-perfusion : effet-shunt
diopathies congénitales, sortent du cadre de l’IRC, tout comme À l’état normal il existe une bonne adéquation de la venti-
l’hypoxémie liée à l’altitude, du fait de la baisse de la pression lation de l’unité fonctionnelle, qui est l’alvéole pulmonaire, à
partielle de l’oxygène inspiré (PIO2 ). L’IRC suppose une atteinte sa perfusion qui est assurée par un capillaire pulmonaire. On
de la fonction respiratoire ou, beaucoup plus rarement, un dys- peut schématiquement admettre que le rapport ventilation alvéo-
fonctionnement des centres nerveux respiratoires. La mesure des laire/perfusion capillaire, qu’on dénomme généralement rapport
gaz du sang artériel est indispensable pour affirmer le diagnostic V̇ A/Q̇, est de 1 [4] , que ce soit au niveau de l’unité fonctionnelle
d’IRC et, à cet égard, la mise en évidence d’une hypoxémie par élémentaire ou des poumons dans leur totalité. La ventilation
oxymétrie de pouls n’est pas suffisante. alvéolaire des poumons, plus basse que la ventilation totale qui
Ainsi, la définition de l’IRC est plutôt biologique (troubles chro- inclut la ventilation de l’espace mort, est de l’ordre de 5 à 6 l/min,
niques de l’hématose) mais il existe presque toujours des signes c’est-à-dire en gros identique à la perfusion globale des poumons
cliniques, le plus important et le plus fréquent étant la dyspnée, qui n’est autre que le débit cardiaque (5-6 l/min).
et des stigmates d’atteinte fonctionnelle respiratoire. Dans un certain nombre d’affections respiratoires chroniques
Comme l’indique le Tableau 1, on peut classer les IRC en fonc- génératrices d’IRC et en particulier dans la principale d’entre elles,
tion de la sévérité de l’hypoxémie, de l’existence ou non d’une la BPCO, il existe des inégalités V̇ A/Q̇ liées à la conservation d’une
hypercapnie et du type de déficit ventilatoire (cf. infra). bonne perfusion au niveau de zones non ventilées ou plus souvent
hypoventilées (ces zones se situent à la périphérie des poumons
et correspondent aux bronches de petit calibre [< 1-2 mm]). Au
Épidémiologie niveau de ces zones dont la distribution est hétérogène, le rap-
On dispose de données épidémiologiques pour la BPCO mais on port V̇ A/Q̇ est donc diminué, d’où un effet court-circuit, qu’on
ignore le nombre de patients BPCO qui présentent une hypoxé- appelle effet-shunt, générateur d’hypoxémie. La PaCO2 n’est pra-
mie chronique. On sait qu’en France 100 000 patients environ tiquement pas influencée par cet effet-shunt et le résultat est une
hypoxémie isolée sans hypercapnie. Ce n’est qu’ultérieurement,
avec la progression de la BPCO, que l’extension des zones à bas
Tableau 1. rapport V̇ A/Q̇ entraîne l’apparition d’une hypercapnie.
Classification des insuffisances respiratoires. Les inégalités V̇ A/Q̇ ne sont pas spécifiques de la BPCO,
Gravité de Existence ou non Type de déficit elles représentent la cause prédominante de l’hypoxémie isolée
l’hypoxémie d’une hypercapnie ventilatoire (c’est-à-dire sans hypercapnie) dans la plupart des affections res-
piratoires chroniques (pneumopathies interstitielles, dilatations
Grave : Pa02 < 50 mmHg Hypoxémie : Obstructif
des bronches, mucoviscidose, etc.).
Sévère : Pa02 Pa02 < 70 mmHg Restrictif
Comment affirmer qu’une hypoxémie isolée est liée à des inéga-
50-60 mmHg Hypoxémie- Mixte
lités V̇ A/Q̇ ? Pour simplifier, c’est presque toujours le cas car
Modérée : Pa02 hypercapnie : PaC02 ≥ Absent (atteintes
60-70 mmHg 45 mmHg « centrales »)
les deux autres mécanismes, décrits ci-dessous, ont une place
secondaire dans l’IRC. Il existe une méthode d’exploration et de

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quantification des inégalités V̇ A/Q̇, c’est la méthode dite des gaz Conséquences physiopathologiques
inertes (appelée MIGET [multiple inert gas elimination technique]),
mise au point au début des années 1970 par Wagner et al. [5, 6] . de l’hypoxémie chronique
Cette investigation très invasive et très lourde n’est malheureu- L’hypoxémie chronique est une cause classique de polyglobulie.
sement pas réalisable en routine ; elle est réservée à la recherche La polyglobulie ne s’observe généralement qu’en cas d’hypoxémie
clinique et d’ailleurs un nombre très limité de centres ont accès à la franche (PaO2 < 55 mmHg) et persistante. Elle est plus fréquente
MIGET (trois en France à notre connaissance). Cette méthode per- lorsque l’hypoxémie est liée à un shunt droit-gauche mais cette
met d’analyser de façon quantitative la distribution des inégalités éventualité est plutôt rare dans l’IRC. La polyglobulie est loin
V̇ A/Q̇ et de déterminer si l’hypoxémie est liée de façon prépon- d’être constante et certains patients sont au contraire anémiques,
dérante ou exclusive aux inégalités V̇ A/Q̇. en particulier lorsque l’IRC est consécutive à une maladie inflam-
matoire chronique.
Shunt vrai Le transport de l’O2 aux tissus est le produit du débit cardiaque
Le shunt ou court-circuit joue un rôle tout à fait négligeable, (Q̇) et du contenu en oxygène du sang artériel (CaO2 ). Ce dernier
voire nul, dans le déterminisme de l’hypoxémie isolée des insuf- dépend du taux d’hémoglobine (Hb) et de la saturation en O2 du
fisants respiratoires. Quand une hypoxémie est liée à un shunt, sang artériel (SaO2 ). Dans l’IRC évoluée, la chute de la SaO2 est par-
dont la démonstration est obtenue par échocardiographie avec fois compensée par une polyglobulie réactionnelle (augmentation
injection de bulles ou par des mesures de PaO2 sous 100 % d’Hb) et le transport d’O2 peut également bénéficier d’une éléva-
d’oxygène (O2 ), la cause la plus fréquente est un shunt droite- tion de Q̇, mais ces mécanismes d’adaptation peuvent s’avérer
gauche intracardiaque et il ne s’agit pas alors d’une insuffisance insuffisants lors d’exacerbations de l’IRC entraînant un tableau
respiratoire au sens strict. d’insuffisance respiratoire aiguë (IRA) sévère avec SaO2 très basse,
et le transport d’O2 aux tissus peut alors être compromis mais cette
éventualité est plutôt rare.
Troubles de la diffusion de l’O2
L’hypoxémie chronique est l’une des causes de l’hypertension
Nombre d’affections respiratoires chroniques sont en mesure pulmonaire (HTP) qui peut compliquer certaines IRC évo-
d’amputer la zone des échanges gazeux (située à la périphérie luées, notamment dans le cas de la BPCO, du syndrome
des poumons) et notamment le lit capillaire pulmonaire. On obésité-hypoventilation (SOH), de la cyphoscoliose, etc. [11] . Le
peut vérifier alors que la capacité de transfert du monoxyde de mécanisme en cause est plus un remodelage vasculaire pulmo-
carbone (CO) est abaissée, voire effondrée. Les principales affec- naire qu’une action vasoconstrictrice, laquelle intervient plutôt
tions en cause sont les pneumopathies interstitielles diffuses et en dans des situations aiguës. Le remodelage entraîne une éléva-
particulier les fibroses pulmonaires diffuses et l’emphysème (sur- tion des résistances vasculaires pulmonaires qui aboutit à l’HTP.
tout l’emphysème panacinaire). Mais on sait depuis longtemps Il est comparable à celui qu’on observe chez les sujets sains
qu’un trouble isolé de la diffusion de l’O2 n’est pas en mesure vivant en haute altitude dont la PaO2 physiologique est géné-
de générer une hypoxémie de repos significative [7] , mais qu’il ralement inférieure à 55-60 mmHg [12] . Il n’est pas totalement
peut jouer en revanche un rôle important dans l’accentuation réversible lorsque l’hypoxémie est corrigée par l’administration
de l’hypoxémie à l’exercice très caractéristique de ces affections, d’O2 au long cours [13] . L’HTP des affections respiratoires chro-
liée au raccourcissement de contact air-sang. L’hypoxémie de niques peut évoluer vers une insuffisance cardiaque droite,
repos des fibroses pulmonaires diffuses est liée principalement aux mais ce n’est pas pour autant la règle, d’une part parce que
inégalités V̇ A/Q̇ [8] et la méthode des gaz inertes a permis de le l’HTP est le plus souvent modérée [14, 15] et d’autre part parce
confirmer de façon convaincante [9, 10] . qu’elle est influencée favorablement par l’oxygénothérapie pro-
longée [16, 17] qui est prescrite aux patients IRC avec hypoxémie
Hypoxémie-hypercapnie importante.
L’hypoxémie-hypercapnie est synonyme d’hypoventilation
alvéolaire. Elle est en effet caractérisée par une chute de PAO2
dont la valeur normale est de 100 mmHg et par une élévation de la
Classification
PACO2 dont la valeur normale est de 40 mmHg. Deux cas de figure On peut classer les IRC en fonction du type et de la gravité des
doivent être distingués : dans le premier cas l’hypoventilation perturbations gazométriques, mais on les classe le plus souvent en
alvéolaire est dite homogène car elle affecte de façon identique fonction du type du déficit ventilatoire (Tableau 1) : le déficit est
la PAO2 et la PACO2 et, par voie de conséquence, la PaO2 et dit obstructif lorsque le VEMS et le rapport VEMS/capacité vitale
la PaCO2 . Dans ce cas l’AaDO2 reste normale. La diminution sont abaissés alors que la capacité pulmonaire totale (CPT) est nor-
de la ventilation alvéolaire (V̇ A) résulte d’une diminution de la male ou élevée. L’obstruction bronchique est actuellement définie
ventilation globale (V̇ E). C’est ce qu’on observe dans certaines par un rapport VEMS/capacité vitale forcée (CVF) inférieur à 70 %.
affections neuromusculaires et dans la cyphoscoliose (cf. infra). Le déficit ventilatoire est dit restrictif lorsque les volumes pulmo-
On peut alors relever des valeurs des gaz du sang artériel du type : naires (capacité vitale et surtout CPT) sont abaissés (CPT < 80 %
PaO2 = 80 mmHg, PaCO2 = 50 mmHg. de la valeur prédite) alors que le rapport VEMS/capacité vitale
Dans le deuxième cas, l’hypoventilation alvéolaire est dite dis- reste normal. Le déficit ventilatoire est dit mixte lorsqu’on a à
tributive ou hétérogène. Elle ne résulte pas d’une chute de la la fois une chute du rapport VEMS/capacité vitale et de la CPT.
ventilation globale mais d’une diminution du rapport V̇ A/V̇ E, Certaines IRC ne sont pas associées à un déficit ventilatoire mais
donc de l’efficacité ventilatoire, traduisant une augmentation de cette éventualité est rare.
l’espace-mort alvéolaire. L’hypoventilation alvéolaire distributive Par ailleurs, on distingue :
est caractéristique de la BPCO évoluée, elle est la conséquence • les IRC par atteinte de la « pompe » (ou du « soufflet »), c’est-
d’une extension des zones à bas rapport V̇ A/Q̇. Alors que la venti- à-dire la cage thoracique et les muscles respiratoires (ces IRC
lation globale est maintenue ou même augmentée, la ventilation sont d’emblée hypercapniques avec hypoventilation alvéolaire
alvéolaire d’un grand nombre de territoires est diminuée du fait homogène et présence d’un déficit ventilatoire restrictif) ;
de la sévérité de l’obstruction bronchique. L’AaDO2 est élevée, • et les IRC par atteinte de l’ « échangeur pulmonaire », c’est-à-
parfois très élevée (> 30 mmHg). On peut alors observer des gaz dire les voies aériennes périphériques et la zone des échanges
du sang artériel du type : PaO2 = 55 mmHg, PaCO2 = 50 mmHg. gazeux : ces IRC sont de type obstructif (BPCO) ou restrictif
L’hypoxémie est proportionnellement beaucoup plus importante (fibrose pulmonaire diffuse) ; elles sont initialement hypoxé-
que l’hypercapnie. miques sans hypercapnie, l’hypercapnie n’apparaissant que
De façon schématique, lorsque l’hypoventilation alvéolaire est tardivement (BPCO) ou n’apparaissant pas même à un stade
la conséquence d’une atteinte de la « pompe » ventilatoire elle très évolué de l’IRC (fibroses diffuses).
est homogène ; lorsqu’elle est la conséquence d’une atteinte de Les deux types d’atteinte peuvent coexister, dans le cas par
l’« échangeur » pulmonaire, elle est hétérogène, (distributive) (cf. exemple d’une BPCO se greffant sur une cyphoscoliose sévère ;
infra). l’IRC est alors mixte.

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Tableau 2. Tableau 3.
Classification étiologique des insuffisances respiratoires chroniques. Cette Échelle à cinq grades de la dyspnée d’effort (la plus souvent utilisée par
liste n’est pas exhaustive. les pneumologues). Cette échelle est très proche de l’échelle britannique
du Medical Research Council (MRC) (graduée de 0 à 4).
Insuffisances respiratoires chroniques obstructives
BPCO b (bronchite chronique obstructive, emphysème et leur Grade 1 Dyspnée survenant pour des efforts plus importants
association) que la montée d’un étage
Asthme chronique avec obstruction bronchique permanente Grade 2 Montée d’un étage, marche sur terrain en pente
Bronchiolite oblitérante
Bronchectasies diffuses Grade 3 Marche à allure normale pour l’âge
Mucoviscidose Grade 4 Marche lente
Insuffisances respiratoires chroniques restrictives Grade 5 Efforts minimes (toilette, habillage, etc.)
Atteinte de la « pompe »
D’origine neuromusculaire : séquelles de poliomyélite, sclérose latérale
amyotrophique, myopathies, paralysie diaphragmatique bilatérale, etc.
l’une générant un déficit obstructif (par exemple une BPCO) et
D’origine ostéoarticulaire : scolioses et cyphoscolioses sévères,
l’autre entraînant un déficit restrictif (par exemple une cypho-
cyphoses, séquelles d’interventions chirurgicales mutilantes
scoliose) ; soit il s’agit d’une maladie respiratoire susceptible de
Atteinte de l’« échangeur » pulmonaire produire à la fois une atteinte obstructive et une atteinte restric-
Suites de pneumonectomie
tive (ceci peut être observé dans les bronchectasies étendues, dans
Séquelles graves de tuberculose pulmonaire
les séquelles importantes de tuberculose pulmonaire, dans cer-
Sarcoïdose au stade de fibrose pulmonaire
taines pneumoconioses, notamment la silicose, et surtout dans
Pneumoconioses
Fibroses pulmonaires interstitielles
les sarcoïdoses évoluées au stade de fibrose).
Autres pneumopathies interstitielles (collagénoses, alvéolites Aux IRC de type « central » dont le prototype est l’hypoven-
allergiques extrinsèques, etc.) tilation alvéolaire centrale, nous avons rattaché (Tableau 2) le syn-
drome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) et le SOH, ce qui
Insuffisances respiratoires chroniques « mixtes » (obstructives et peut se discuter. Nous l’avons fait car une IRC peut se rencon-
restrictives) trer dans ces deux affections en l’absence de déficit ventilatoire
Bronchectasies diffuses notable. C’est rare dans le SAOS mais c’est moins exceptionnel
Pneumoconioses : silicose surtout dans le SOH qui est l’insuffisance respiratoire hypercapnique des
Séquelles importantes de tuberculose pulmonaire obèses (c’est l’ancien « syndrome de Pickwick ») que l’on considère
Sarcoïdose au stade de fibrose actuellement comme une affection assez fréquente et comme une
Insuffisances respiratoires de type « central » et les affections des causes importantes d’IRC [18, 19] , loin derrière la BPCO, il est
apparentées vrai. Certains malades SOH n’ont pas de déficit ventilatoire et une
Hypoventilation alvéolaire centrale du nourrisson et de l’adulte diminution franche de la réponse ventilatoire au stimulus CO2 a
Syndrome obésité-hypoventilation (anciennement syndrome de été mise en évidence chez quelques malades. On estime cepen-
« Pickwick ») a dant que la cause prépondérante de l’hypercapnie est la faiblesse
Syndrome d’apnées du sommeil des muscles respiratoires et l’augmentation du coût énergétique
de la ventilation.
a
Causes fréquentes d’insuffisance respiratoire chronique.
b
Causes très fréquentes d’insuffisance respiratoire chronique.
Tableau clinique et fonctionnel.
Certaines IRC sont difficiles à classer, c’est notamment le cas du Investigations complémentaires
SOH. Nous l’avons inclus (Tableau 2) dans le groupe des insuffi-
sances respiratoires de type « central » mais cela est discutable : il Le tableau clinique dépend surtout de l’affection causale
s’agit généralement d’une atteinte de la « pompe » mais le déficit et peut varier considérablement en fonction de l’étiologie de
ventilatoire restrictif fait parfois défaut et on peut évoquer alors l’insuffisance respiratoire. Ainsi, des malades au stade de l’IRC,
une composante « centrale » de l’IRC. atteints respectivement de BPCO emphysémateuse, de fibrose pul-
Le Tableau 2 regroupe les principales étiologies de l’IRC. Il n’est monaire diffuse et de cyphoscoliose ont peu de points en commun
pas exhaustif. Les IRC obstructives sont dominées par la BPCO (morphologie, examen de la sphère pulmonaire, radiologie tho-
qui représente à elle seule plus des deux tiers des cas d’IRC. L’IRC racique, résultats des explorations fonctionnelles respiratoires), si
de la BPCO est initialement hypoxémique, liée aux inégalités ce n’est la dyspnée d’effort et les perturbations gazométriques.
V̇ A/Q̇. Elle n’est que tardivement (et inconstamment) hyper- La dyspnée d’effort peut être absente dans certaines formes
capnique, mais à ce stade l’hypoventilation alvéolaire n’est pas rares d’IRC (hypoventilation alvéolaire « centrale »). Elle est géné-
homogène et l’hypoxémie est proportionnellement plus impor- ralement importante, de grade 3-5/5 de la classification en cinq
tante que l’hypercapnie. L’asthme est une affection très fréquente grades (Tableau 3). La dyspnée de repos permanente est rarement
(prévalence supérieure à celle de la BPCO) mais une cause relati- observée sauf dans les stades terminaux des BPCO et des fibroses.
vement rare d’IRC. Dans la mucoviscidose, l’IRC est constante à Certains index composites ont été proposés pour apprécier
un stade évolué de la maladie, elle est la cause principale de décès. de façon simple la gravité de l’IRC [20, 21] . Ainsi, l’index « body
Les IRC restrictives regroupent deux types d’affections très dif- mass index, obstruction, dyspnea, exercise » (BODE) [20] (Tableau 4)
férentes : d’une part les atteintes de la « pompe » comprenant les regroupe le niveau de la dyspnée, la sévérité de l’obstruction bron-
maladies neuromusculaires (myopathies, sclérose latérale amyo- chique, la distance parcourue au test de marche de 6 minutes et
trophique [SLA], paralysie diaphragmatique bilatérale, etc.) et les l’index de masse corporelle, mais il n’est utilisable que dans la
atteintes de la cage thoracique (cyphoscoliose) ; d’autre part, les BPCO. Il n’existe pas actuellement d’index de gravité utilisable
affections pulmonaires diffuses qui sont, elles, des maladies de pour l’ensemble des IRC.
l’« échangeur » pulmonaire. Les pneumopathies interstitielles dif- L’examen clinique, variable d’une affection à l’autre, recherche
fuses sont les plus fréquentes et les fibroses pulmonaires diffuses les signes éventuels de retentissement cardiaque droit (œdèmes
en représentent la forme la plus grave. Dans les atteintes de la des membres inférieurs). La respiration à lèvres pincées et les mou-
« pompe », l’hypoventilation alvéolaire (hypoxémie-hypercapnie) vements paradoxaux de la cage thoracique sont caractéristiques
est homogène et souvent précoce. Dans les pneumopathies des emphysèmes sévères. La cyanose des extrémités est tardive et
interstitielles diffuses l’hypoxémie est isolée, l’hypercapnie est inconstante (en dehors des exacerbations).
rarement présente. Les principaux examens complémentaires requis apparaissent
Les IRC mixtes, à la fois obstructives et restrictives ne sont pas sur le Tableau 5. Ils dépendent de l’étiologie de l’IRC. Certaines
fréquentes. Elles peuvent être observées dans deux circonstances : investigations sont indispensables dans tous les cas : radio-
soit il s’agit de l’association fortuite de deux affections différentes, graphie thoracique, gaz du sang artériel (prérequis), examens

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Tableau 4. Tableau 6.
Index « BODE » permettant de coter la sévérité de l’insuffisance respi- Résultats comparatifs de l’exploration fonctionnelle respiratoire chez deux
ratoire. Cet index n’a été validé que dans la bronchopneumopathie malades en insuffisance respiratoire chronique.
chronique obstructive [20] .
BPCO avec Scoliose
Points index BODE emphysème
0 1 2 3 Capacité vitale lente (% de 3 000 ml 1 000 ml
la valeur théorique) (75 %) (30 %)
VEMS (%) ≥ 65 50-64 36-49 ≤ 35
VEMS (% de la valeur 750 ml (27 %) 750 ml
Distance test de marche ≥ 350 250-349 150-249 ≤ 149
théorique) (32 %)
6 minutes (m)
VEMS/capacité vitale lente 25 % 75 %
Échelle de dyspnée MRC 0-1 2 3 4
Volume résiduel 4 500 ml 1 500 ml
IMC (kg/m2 ) ≥ 21 ≤ 21
Capacité pulmonaire totale 7 500 ml 2 500 ml
Résultat : de 0 à 10
(% de la valeur théorique) (125 %) (50 %)
BODE : body mass index, obstruction, dyspnea, exercise ; VEMS : volume expira- PaO2 58 mmHg 60 mmHg
toire maximal seconde ; MRC : Medical Research Council ; IMC : indice de masse
corporelle. PaCO2 48 mmHg 55 mmHg
Capacité de transfert de 7 ml/min/mmHg 10 ml/min/
Tableau 5. l’oxyde de carbone (% de la (30 %) mmHg
Quelles investigations demander chez un patient insuffisant respiratoire valeur théorique) (50 %)
chronique ? Pression artérielle 29 mmHg 25 mmHg
Dans tous les cas pulmonaire moyenne
repos
Examen fonctionnel respiratoire (spirographie conventionnelle ou
pléthysmographie) Un malade présente une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO)
Radiographie thoracique avec emphysème sévère et l’autre une scoliose très évoluée. Le malade BPCO
Électrocardiogramme, échocardiographie avec mesure de la PAP emphysémateux a un déficit ventilatoire obstructif sévère avec élévation de la
systolique capacité pulmonaire totale. À l’opposé, le malade scoliotique présente un défi-
Gaz du sang artériel cit ventilatoire restrictif important avec effondrement de la capacité vitale et
Test de marche de 6 minutes (avec mesure oxymétrique de la saturation de la capacité pulmonaire totale, mais le rapport volume expiratoire maximal
seconde/capacité vitale (VEMS/CV) est normal (pas d’obstruction bronchique).
en oxygène) Les résultats des gaz du sang artériel et de l’hémodynamique pulmonaire sont
Dans certains cas à peu près comparables chez ces deux malades (hypoxémie-hypercapnie ; dis-
crète hypertension pulmonaire). PaO2 : pression partielle en oxygène ; PaCO2 :
Examens morphologiques : pression partielle de gaz carbonique dans le sang artériel.
- tomodensitométrie thoracique : pneumopathies interstitielles,
pneumoconioses, emphysème
Fonction respiratoire (en fonction de la gravité et des caractéristiques de comparative les résultats de l’EFR dans une IRC obstructive sévère
l’IRC) : (BPCO avec emphysème) et dans une IRC restrictive (cyphosco-
- test de réversibilité de l’obstruction bronchique liose évoluée). Alors que les résultats des gaz du sang sont à peu
- capacité de transfert du CO près comparables chez ces deux malades, les déficits ventilatoires
- gaz du sang au repos + effort révélés par la spirographie sont de nature radicalement différente.
- cathétérisme cardiaque droit
Isotopes :
- scintigraphie pulmonaire ventilation-perfusion Évolution et pronostic
Explorations lors du sommeil :
- oxymétrie nocturne : adaptation de l’oxygénothérapie ; examen de Complications évolutives : exacerbations aiguës
dépistage des apnées Les exacerbations aiguës sont surtout caractéristiques de la
- polygraphie nocturne ; polysomnographie : suspicion d’apnées du BPCO, souvent déclenchées par un épisode infectieux broncho-
sommeil pulmonaire. Elles réalisent un tableau d’IRA sur fond d’IRC et
PAP : pression artérielle pulmonaire moyenne ; IRC : insuffisance respiratoire elles associent une hypoxémie sévère (PaO2 souvent < 50 mmHg)
chronique. à une hypercapnie franche (PaCO2 > 50 mmHg). En fait, l’IRA est
à la fois définie par une aggravation clinique (accentuation de la
dyspnée) et par une aggravation gazométrique par rapport à l’état
fonctionnels respiratoires (EFR) complets incluant la mesure de base du patient. Les exacerbations de la BPCO peuvent recon-
des volumes pulmonaires statiques (CPT), échocardiographie naître d’autres causes que l’infection bronchopulmonaire et dans
pour rechercher l’hypertension pulmonaire, test de marche de près de 30 % des cas l’origine de la décompensation aiguë ne peut
6 minutes. D’autres investigations ne sont requises que dans être décelée.
des cas particuliers : tomodensitométrie (TDM) thoracique dans Le tableau clinique de l’IRA sur fond d’IRC est dominé par
la BPCO avec emphysème et, surtout, dans les pneumopathies la dyspnée. Il s’agit souvent d’une dyspnée de repos. La cya-
interstitielles diffuses ; polygraphie ou polysomnographie en nose est inconstante. Des signes de retentissement cardiaque droit
cas de SOH car des apnées obstructives du sommeil sont pré- (œdèmes des membres inférieurs) sont assez souvent relevés. Les
sentes dans près de 75 % des cas et ont une incidence sur le signes de gravité clinique de l’IRA sont l’encéphalopathie respira-
traitement. Le cathétérisme cardiaque droit n’est justifié que si toire et l’épuisement des muscles respiratoires.
l’échocardiographie permet de suspecter une HTP importante ou Des exacerbations aiguës peuvent émailler l’évolution des
« disproportionnée » par rapport à l’insuffisance respiratoire [22] . autres formes étiologiques d’IRC. Les exacerbations des fibroses
En cas d’IRC il existe le plus souvent un déficit ventilatoire pulmonaires diffuses, de description relativement récente [23] sont
important, obstructif, restrictif ou mixte. Ainsi, lorsqu’un malade redoutables et souvent irréversibles. Elles s’accompagnent d’une
BPCO atteint le stade de l’insuffisance respiratoire, le VEMS est aggravation parfois spectaculaire des opacités radiologiques pul-
franchement abaissé, inférieur à 1 500 ml, souvent inférieur à monaires.
1 000 ml. Dans les IRC restrictives d’origine pariétale ou neuro- En dépit des progrès thérapeutiques, la mortalité de l’IRA sur
musculaire l’hypoxémie-hypercapnie ne survient que lorsque la fond d’IRC reste élevée : 10 % des cas environ lorsqu’une ven-
capacité vitale et la CPT sont très abaissées (capacité vitale < 1- tilation mécanique n’est pas nécessaire ; plus de 20 % des cas
1,5 litre). À titre d’illustration, le Tableau 6 représente de façon nécessitant l’intubation et la ventilation endotrachéale.

EMC - Pneumologie 5
6-040-L-40  Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)

Hypertension pulmonaire et retentissement


cardiaque droit
Nous avons vu que l’IRC peut favoriser le développement d’une
“ Points forts
HTP pouvant conduire au retentissement cardiaque droit. Le rôle
de l’hypoxie alvéolaire dans la genèse de l’HTP est prédominant • L’IRC est caractérisée par l’incapacité du système
dans la BPCO, dans le SOH, mais aussi dans certaines IRC restric- respiratoire à assurer correctement l’hématose ; elle
tives (cyphoscoliose par exemple). Dans les fibroses pulmonaires est définie par la présence d’une hypoxémie persis-
diffuses, en revanche, c’est l’amputation du lit vasculaire pulmo- tante (PaO2 < 70 mmHg à distance d’un épisode aigu) ;
naire qui est la cause principale d’HTP. l’hypercapnie (PaCO2 > 45 mmHg) n’est pas obligatoire.
Dans l’IRC, et en particulier dans l’IRC obstructive (BPCO), • Dans la BPCO, première cause d’IRC, l’hypoxémie est
l’HTP est généralement modérée avec une pression artérielle liée principalement à des inégalités ventilation-perfusion.
pulmonaire moyenne (PAP) le plus souvent comprise entre 20
Comme dans les pneumopathies interstitielles, c’est
et 35 mmHg [14, 22] . Des HTP dites « disproportionnées » ont été
décrites dans la BPCO [22, 24] caractérisées par une PAP supérieure à l’atteinte de l’« échangeur » pulmonaire qui prédomine
35-40 mmHg. Elles sont plutôt rares et le mécanisme n’en est pas alors que dans les maladies neuromusculaires et la cyphos-
bien élucidé. coliose il s’agit d’une atteinte de la « pompe » ventilatoire
L’HTP de la BPCO, en général modérée au cours d’une période génératrice d’hypoventilation alvéolaire (hypoxémie-
stable de la maladie, peut s’accentuer de façon importante et bru- hypercapnie). On peut en rapprocher le SOH.
tale au cours des épisodes d’IRA, de l’exercice musculaire et de • En fonction de la nature du déficit ventilatoire révélé par
certaines phases du sommeil [11] . Ces « à-coups » hypertensifs pul- les EFR, on classe les IRC en obstructives (principalement
monaires peuvent favoriser le développement d’une insuffisance la BPCO), restrictives (pneumopathies interstitielles, sco-
cardiaque droite. liose, maladies neuromusculaires, etc.) et mixtes. Les IRC
En fait le schéma classique conduisant de l’HTP à
d’origine « centrale » sont rares. Le SOH, cause fréquente
l’hypertrophie-dilatation des cavités droites, puis à la dys-
fonction ventriculaire droite (systolique et/ou diastolique) et de l’IRC, est difficile à classer.
enfin à l’insuffisance cardiaque droite (ICD) clinique (œdèmes • Le tableau clinique de l’IRC varie beaucoup en fonction
des membres inférieurs, signes auscultatoires cardiaques, etc.), est de l’affection causale. La dyspnée (d’effort) est presque
discuté et ne représente pas la règle [15, 25] . Certains auteurs [15] ont constante, le plus souvent sévère. Le bilan de l’IRC
mis en doute la possibilité pour les malades BPCO de développer comporte obligatoirement des EFR complètes. L’évolution
une ICD car leur HTP est trop modérée, mais cette position paraît est émaillée par des exacerbations aiguës qui peuvent
excessive et il y a lieu de tenir compte de la durée de l’HTP conduire à un tableau d’IRA et dont la mortalité n’est pas
(quelques années par exemple) et de l’incidence des « à-coups » négligeable. L’hypertension pulmonaire complique sou-
hypertensifs pulmonaires évoqués ci-dessus [11] . vent l’IRC mais l’insuffisance cardiaque droite n’est pas la
En tout cas, des œdèmes des chevilles ne sont pas synonymes
règle.
d’ICD et peuvent reconnaître d’autres causes (l’insuffisance rénale
• Le pronostic de l’IRC est lié surtout à la maladie cau-
fonctionnelle par exemple). Le diagnostic de l’ICD repose sur la
conjonction d’éléments cliniques et échocardiographiques. sale : il est particulièrement sombre dans les fibroses
pulmonaires diffuses et dans certaines maladies neuromus-
culaires. Il est nettement plus favorable dans la BPCO et
Pronostic dans le SOH, en tout cas lorsque les patients font l’objet
d’un traitement adéquat.
L’évolution de l’IRC est liée à l’affection causale et le cours de
la maladie varie en fonction de l’étiologie. Ainsi, l’évolution est
plus rapidement défavorable dans les fibroses pulmonaires dif-
fuses que dans la BPCO où une survie prolongée est la règle. La
thérapeutique a parfois transformé l’évolution et le pronostic de Oxygénothérapie de longue durée
certaines affections : c’est en particulier le cas des cyphoscolioses
L’IRC étant définie par la présence d’une hypoxémie chronique,
sévères mais aussi du SOH grâce à la ventilation non invasive
il est logique que la correction de l’hypoxémie, par adminis-
(VNI) nocturne. Dans la BPCO, l’oxygénothérapie de longue
tration prolongée d’O2 , représente l’un des traitements majeurs
durée a amélioré considérablement l’espérance de vie des formes
de l’IRC sévère. Ce traitement s’est imposé d’abord dans la
sévères d’IRC. On admettait, avant l’ère de l’oxygénothérapie,
BPCO [26, 27] , mais il est appliqué également dans d’autres formes
que l’espérance de vie à 5 ans de la BPCO au stade de l’IRC
d’IRC.
était d’environ 50 %. Ces chiffres ont été notablement amélio-
rés par l’oxygénothérapie. Les facteurs prédictifs de la survie dans
la BPCO au stade de l’IRC sont l’âge, la distance parcourue au Justifications de l’oxygénothérapie de longue
test de marche de 6 minutes, l’état nutritionnel, la sévérité de durée
l’atteinte spirographique (VEMS) [20] , mais aussi le degré des per-
Alors que l’hypoxémie chronique a des effets délétères connus,
turbations gazométriques (PaO2 , PaCO2 ) et la présence et le degré
l’oxygénothérapie de longue durée (OLD) améliore l’espérance
d’une HTP.
de vie des patients BPCO au stade de l’IRC et a en outre des
effets physiologiques favorables (Tableau 7). La meilleure justi-
fication de l’OLD est la mise en évidence d’une amélioration de
l’espérance de vie chez les malades sous O2 . L’OLD est d’ailleurs
 Traitement instrumental le seul traitement dont on a pu démontrer qu’il a de ce point de
vue une influence significativement favorable chez les patients
Les traitements médicamenteux de l’IRC qui varient en fonc- BPCO avec IRC sévère. L’étude britannique du Medical Research
tion de l’étiologie et qui sont très limités et décevants dans Council (MRC) [27] , remontant à 1981, a montré que les courbes
certaines étiologies (fibrose pulmonaire diffuse par exemple), ne de survie de patients BPCO franchement hypoxémiques (PaO2
sont pas abordés dans notre revue, pas plus que la réhabilita- moyenne de 50 mmHg), recevant ou non une OLD, s’écartaient
tion respiratoire et que les traitements chirurgicaux (chirurgie très significativement à partir de 500 jours. L’étude nord-
de réduction volumétrique dans l’emphysème, transplantation américaine Nocturnal Oxygen Therapy Trial (NOTT), publiée
pulmonaire uni- ou bilatérale) qui méritent des développements quelques mois plus tôt [26] a montré que l’OLD « continue » (en
spécifiques. Nous nous limitons au traitement au long cours par fait > 18 h/j) améliorait significativement la survie de maladies
oxygénothérapie et par ventilation mécanique. BPCO très hypoxémiques (PaO2 moyenne environ 50 mmHg)

6 EMC - Pneumologie
Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)  6-040-L-40

Tableau 7.
Effets délétères de l’hypoxie chronique comparés aux effets bénéfiques de l’oxygénothérapie de longue durée (chez les malades atteints d’une bronchopneu-
mopathie chronique obstructive).
Effets délétères d’une hypoxémie chronique importante Effets bénéfiques d’une oxygénothérapie de longue durée
(PaO2 < 55 mmHg) administrée pendant au moins 15 heures par 24 heures
Espérance de vie :
- médiocre - amélioration significative de l’espérance de vie
Qualité de vie :
- possibilités d’exercice (marche) limitées - amélioration du périmètre de marche
- troubles neuropsychologiques - amélioration des troubles neuropsychologiques
- hospitalisations fréquentes - réduction de la fréquence des hospitalisations
Effets physiologiques :
- diminution du transport de l’oxygène - amélioration du transport de l’oxygène
- polyglobulie (en fait inconstante) - diminution (mais rarement correction) de la polyglobulie
Circulation pulmonaire :
- développement et aggravation progressive d’une hypertension - régression ou stabilisation de l’hypertension pulmonaire ;
pulmonaire précapillaire atténuation de la progression de l’hypertension pulmonaire

PaO2 : pression artérielle en oxygène.

Tableau 8.
Indications de l’oxygénothérapie de longue durée dans l’insuffisance respiratoire chronique.
Indications faisant l’objet d’un consensus
PaO2 en état clinique stable (deux mesures séparées par au moins 4 semaines) ≤ 55 mmHg (ce qui équivaut à SaO2 ≤ 88 %)
PaO2 dans l’intervalle 55-59 mmHg, en présence de :
- polyglobulie (hématocrite > 55 %)
- hypertension pulmonaire (PAP ≥ 25 mmHg ; signes ECG d’hypertrophie ventriculaire droite) ; signes documentés d’insuffisance cardiaque droite (œdèmes)
- accentuation significative de l’hypoxémie au cours du sommeil (SaO2 nocturne moyenne ≤ 88 %)
Indications discutées
Hypoxémie modérée (PaO2 > 55 mmHg en l’absence des signes énoncés ci-dessus)
Hypoxémie franche présente à l’exercice (PaO2 ≤ 55 mmHg) alors que l’hypoxémie de repos est modérée ou absente (PaO2 > 60 mmHg)
Hypoxémie significative pendant le sommeil (SaO2 nocturne moyenne ≤ 88 %) alors que l’hypoxémie diurne est discrète ou absente (PaO2 > 60 mmHg)

PaO2 : pression artérielle en oxygène ; SaO2 : saturation de l’hémoglobine en oxygène dans le sang artériel ; PAP : pression artérielle pulmonaire ; ECG : électrocardiogramme.

en comparaison de l’OLD purement « nocturne » (10-12 h/nuit). observée dans certaines BPCO très hypoxémiantes, régresse géné-
Ces deux études « historiques », contrôlées (présence d’un groupe ralement, mais les résultats sont discordants. La poursuite du
témoin dans chaque étude), sont à la base du développement de tabagisme, avec persistance d’une carboxyhémoglobinémie éle-
l’OLD depuis 30 ans. Une étude ultérieure, non contrôlée [28] , avec vée, empêche la correction de la polyglobulie sous OLD [32] .
une période de suivi plus longue, a montré que le taux de survie à L’OLD permet de stabiliser et parfois même d’améliorer l’HTP
5 ans, sous OLD, est de 62 % alors que dans l’étude MRC le groupe de la BPCO [16, 17, 26, 27] , ce qui est assez logique puisque l’hypoxie
témoin non traité par O2 n’avait une survie à 5 ans que de 16 %. alvéolaire chronique est la cause principale de l’HTP (cf. supra).
L’amélioration de l’espérance de vie sous OLD de patients Cependant, la PAP retrouve rarement une valeur normale. Plus
BPCO très hypoxémiques (PaO2 < 55-60 mmHg) est donc bien la durée quotidienne de l’OLD est longue (≥ 18 h/j), meilleurs
démontrée mais son mécanisme n’est pas établi avec précision. sont les résultats hémodynamiques [26] . L’OLD est ainsi le traite-
Il est probablement multifactoriel (amélioration du transport de ment le plus logique de l’HTP de la BPCO, d’autant plus que les
l’O2 , de l’oxygénation tissulaire, de l’hémodynamique pulmo- traitements médicamenteux (vasodilatateurs pulmonaires) se sont
naire). L’amélioration du pronostic sous OLD ne concerne que des avérés jusqu’à présent décevants.
patients BPCO franchement hypoxémiques et ne peut être trans-
posée à des patients moins hypoxémiques : une étude polonaise
plus récente [29] a indiqué que l’OLD ne modifiait pas l’espérance Indications de l’OLD
de vie de malades BPCO modérément hypoxémiques (PaO2 ini- Les études contrôlées sur les effets de l’OLD, qui expliquent le
tiale comprise entre 56 et 65 mmHg avec une valeur moyenne développement considérable de ce traitement, n’ont concerné que
de 63 mmHg) comparés à des témoins identiques non traités par la BPCO [26, 27] . Les critères gazométriques requis pour la mise en
OLD. route d’une OLD s’appliquent aux BPCO mais par extension on
Lorsque les études de référence NOTT et MRC [26, 27] ont été les utilise dans d’autres formes d’IRC telles que les fibroses pul-
réalisées, il n’y avait pas encore de questionnaires de qualité de monaires diffuses, les pneumoconioses, etc. L’expérience montre
vie. On dispose cependant d’arguments « indirects » pour affirmer que les résultats de l’OLD sont généralement moins bons que
que la qualité de vie est améliorée sous OLD : amélioration du dans les BPCO, et ceci est particulièrement vrai pour les fibroses
périmètre de marche chez les patients équipés d’O2 portable ; amé- pulmonaires diffuses.
lioration de l’état neuropsychologique démontrée dans l’étude Le critère requis pour l’initiation d’une OLD (Tableau 8) est
NOTT [30] ; réduction du nombre et de la durée des hospitalisa- l’existence d’une hypoxémie franche (PaO2 ≤ 55 mmHg) et per-
tions. La seule étude utilisant le questionnaire de qualité de vie sistante à distance (> 1 mois) d’une exacerbation. Une PaO2
St-Georges n’est pas réellement contrôlée et n’a concerné que 41 inférieure à 55 mmHg correspond à une saturation en O2 infé-
patients en tout [31] , ses résultats sont négatifs. L’amélioration de rieure ou égale à 88 %, c’est-à-dire à une hypoxémie significative
la dyspnée d’effort sous OLD n’est pas établie : la dyspnée d’effort susceptible de retentissement sur le transport de l’O2 et sur
dans la BPCO est liée principalement à la limitation ventilatoire la circulation pulmonaire. L’OLD peut également être prescrite
et elle continue à s’accentuer avec le temps en dépit de l’OLD [28] . si l’hypoxémie est moins sévère (PaO2 dans l’intervalle 55-
Sur le plan des effets physiologiques, l’oxygénothérapie amé- 60 mmHg) mais en présence de polyglobulie ou d’HTP ou de
liore le transport et la fourniture d’O2 aux tissus. La polyglobulie, retentissement cardiaque droit documenté (Tableau 8).

EMC - Pneumologie 7
6-040-L-40  Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)

La stabilité de l’hypoxémie doit être vérifiée par un contrôle de l’O2 à l’aide de tamis moléculaires. Ils fonctionnent sur le sec-
gazométrique après 3-4 semaines [33] . Plusieurs contrôles sur teur électrique et leur entretien est simple. Les appareils actuels ne
une période d’observation de 2-3 mois sont préférables lorsque sont plus bruyants. L’inconvénient majeur est le caractère relative-
l’hypoxémie n’est pas trop sévère (PaO2 proche de 55 mmHg) [34] . ment « fixe » de cette source d’O2 , mais il est possible d’équiper les
Il faut s’être assuré qu’une thérapeutique optimale (bronchodila- patients avec de petites bouteilles d’O2 gazeux pour la déambu-
tateurs, réhabilitation) n’a pas permis d’améliorer suffisamment lation. Par ailleurs, des concentrateurs miniaturisés et portables
l’hypoxémie. L’indication de l’OLD ne peut reposer sur des ont été développés récemment : leur coût est très élevé et ils ne
mesures purement oxymétriques (précision insuffisante de la SaO2 sont utilisés actuellement que sur une très faible échelle. En pra-
mesurée par oxymétrie de pouls ; nécessité de la connaissance de tique les concentrateurs d’O2 et l’O2 liquide sont les modalités
la PaCO2 ). principales (et pratiquement exclusives) de l’OLD en France. Le
Les indications énoncées ci-dessus font l’objet d’un consensus raccordement au patient se fait par des sondes nasales (lunettes)
international [35] et peuvent être considérées comme indiscu- qui sont préférées au masque facial dont l’emploi est rare (gros
tables. En revanche, certaines indications sont très discutées débits d’O2 ).
(Tableau 8) et ne peuvent être retenues que dans des cas parti-
culiers [2, 35, 36] . C’est le cas de l’hypoxémie importante au cours de Conduite pratique de l’OLD
l’exercice chez des patients dont la PaO2 de repos est supérieure à Une période d’observation d’au moins 4 semaines est nécessaire
60 mmHg. C’est le cas de l’hypoxémie liée au sommeil de patients afin de vérifier la stabilité de l’hypoxémie. Le choix de la source
BPCO peu hypoxémiques le jour (PaO2 > 60 mmHg) car le béné- d’O2 dépend de plusieurs facteurs : l’âge du patient, le débit d’O2 ,
fice d’une OLD purement nocturne n’a pu être démontré chez ces l’activité du patient et ses besoins de déambulation. Si le patient
patients [37] . C’est enfin le cas des hypoxémies diurnes modérées est relativement jeune, actif et se déplace souvent, on donne la
(PaO2 > 60 mmHg) : il n’est pas rare que ces patients soient mis préférence à l’O2 liquide. Chez les patients plus âgés, se déplaçant
sous OLD [38] alors que l’intérêt de l’OLD en matière d’espérance peu, il est plus logique de prescrire un concentrateur d’O2 auquel
de vie n’a pu être démontré dans cette sous-population de malades on peut adjoindre des bouteilles d’O2 gazeux portable pour la
BPCO [29] . déambulation. Le débit d’O2 nécessaire est déterminé en fonction
Il n’y a pas de contre-indications formelles à l’OLD, mais on des résultats gazométriques et oxymétriques sous O2 (cf. supra). Il
est réticent à l’entreprendre lorsque la coopération du malade est se situe le plus souvent entre 1,5 et 3 l/min.
insuffisante ou en cas de poursuite d’habitudes tabagiques. Une L’OLD est prise en charge intégralement par la sécurité sociale
hypercapnie chronique sévère (PaCO2 ≥ 60 mmHg) n’est pas une lorsque les critères concernant le niveau de l’hypoxémie sont
contre-indication. Lorsque l’hypoxémie est liée à un shunt droit- réunis. La fourniture de l’O2 et du matériel adéquat (sondes
gauche intracardiaque ou intrapulmonaire, l’OLD a peu d’intérêt nasales) ainsi que la surveillance et l’entretien des appareils
car même des débits considérables d’O2 sont souvent inopérants, (concentrateurs, O2 liquide) sont assurés par des prestataires spé-
mais nous avons vu que ces cas sortent du cadre de l’IRC. cialisés (système associatif de l’Antadir ou prestataires « privés »).
Le problème majeur de l’OLD est l’observance du traitement par
les patients. Elle est souvent insuffisante, sans doute du fait des
Modalités de l’OLD contraintes liées à l’oxygénothérapie. La durée effective du traite-
Règles générales ment est fréquemment inférieure de 3-4 heures à la durée prescrite.
La règle la plus importante concerne la durée de l’OLD dans Pour perfectionner l’observance il faut d’abord améliorer la forma-
le nycthémère : supérieure à 16 h/24 et, si possible, supérieure à tion des médecins. Il est démontré que si la durée quotidienne du
18 h/24 car il est établi que les résultats objectifs sont meilleurs traitement prescrit par le médecin augmente, la durée du traite-
quand l’OLD est plus longue [26, 39] . Il faut éviter, si possible, les ment effectif augmente parallèlement [40] . L’éducation des patients
« fenêtres » thérapeutiques de 3 heures et plus. L’OLD couvre obli- est également prioritaire : l’observance peut être améliorée par des
gatoirement la période de sommeil qui est souvent caractérisée, programmes éducatifs appropriés assurés par des médecins et des
dans la BPCO, par une accentuation de l’hypoxémie. L’OLD doit kinésithérapeutes [41] . Il faut enfin tout faire pour maintenir et, si
inclure les périodes d’activité (surtout la marche) qui voient la possible, améliorer la qualité de vie sous OLD, en permettant en
désaturation en O2 s’accentuer. particulier la déambulation, les sorties et les activités souhaitées
La PaO2 sous OLD doit être d’au moins 60-65 mmHg et de pré- grâce à l’équipement des patients en O2 portable (équipement qui
férence de 70-75 mmHg. Les débits habituels (1,5-3 l/min) d’O2 ne pose plus de problème grâce aux progrès techniques considé-
permettent d’obtenir sans difficulté ce niveau de PaO2 dans la rables dans ce domaine).
BPCO, mais il peut en aller différemment dans les fibroses pul-
monaires ou dans certaines BPCO à un stade avancé de l’IRC. La
SaO2 sous OLD peut être contrôlée aisément par oxymétrie de Traitement par ventilation non invasive
pouls (elle doit être supérieure à 90-92 %). Il n’est pas nécessaire Le traitement par VNI concerne presque exclusivement les
généralement d’augmenter le débit d’O2 pendant le sommeil. Pour insuffisances respiratoires chroniques hypercapniques. Par oppo-
la déambulation et d’autres formes d’exercice il faut en revanche sition à la ventilation invasive, qui est pratiquée chez un patient
augmenter le débit d’O2 de 1-3 l/min, sous contrôle oxymétrique. intubé et sédaté ou chez un patient éveillé par l’intermédiaire
d’une canule de trachéotomie, la VNI est effectuée à l’aide
Sources d’oxygène
d’une interface qui est en général un masque nasal ou facial.
Il y a trois sources possibles d’oxygène : l’O2 gazeux, l’O2 liquide, Les indications les plus courantes sont les insuffisances respira-
les concentrateurs ou extracteurs d’O2 . L’O2 gazeux, seule source toires restrictives liées aux déformations pariétales thoraciques
disponible en France jusqu’en 1980, n’est plus utilisé aujourd’hui et aux maladies neuromusculaires, à l’origine d’une hypoven-
que pour la déambulation : « petites » bouteilles d’O2 gazeux dont tilation alvéolaire, l’insuffisance respiratoire hypercapnique de
l’autonomie est d’ailleurs limitée. L’O2 liquide a l’avantage de per- l’obèse (SOH) et enfin les insuffisances respiratoires chroniques
mettre le stockage d’O2 sous un volume beaucoup plus faible que obstructives.
les cylindres gazeux. Le réservoir principal (libérator), installé à
domicile et réapprovisionné une fois par semaine, permet le rem-
plissage d’un réservoir mobile (stroller) que le patient utilise pour
Maladies neuromusculaires
la déambulation avec une autonomie d’au moins 4 heures pour Les maladies neuromusculaires représentent un groupe hété-
un débit de 3 l/min. Le stroller peut être rempli aussi souvent que rogène de pathologies dont le pronostic et l’évolution naturelle
le patient le souhaite. L’O2 liquide est donc la meilleure solution sont très variés. On y regroupe des affections génétiques comme
pour des patients qui déambulent beaucoup. Des « économiseurs » les myopathies, des atteintes dégénératives comme la sclérose
d’O2 , limitant l’apport d’O2 au temps inspiratoire, peuvent être latérale amyotrophique, mais également les tétraplégies post-
utilisés en cas de forts débits d’O2 , en particulier lors de la marche. traumatiques avec atteinte des muscles respiratoires, ainsi que
Les concentrateurs (ou extracteurs) d’O2 sont avec l’O2 liquide les séquelles de poliomyélite. C’est d’ailleurs avec les épidémies
la principale source d’O2 . Ils permettent la séparation de l’azote et de poliomyélite que se sont développées dans les années 1950

8 EMC - Pneumologie
Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)  6-040-L-40

Mécanismes d’action de la VNI

“ Points forts Plusieurs mécanismes ont été proposés pour expliquer


l’amélioration clinique et des gaz du sang artériel sous VNI, les
trois principaux étant :
• L’OLD est l’un des traitements majeurs de l’IRC sévère. • la mise au repos des muscles respiratoires permettant
d’augmenter leur force et leur endurance lors de la reprise de
Plus de 30 ans après les études « historiques » qui ont
la ventilation spontanée sans assistance ;
montré qu’elle améliorait significativement l’espérance de
• les modifications de la mécanique pulmonaire ;
vie des malades présentant une BPCO avec hypoxémie • enfin, la restauration d’une sensibilité des centres respiratoires
franche, l’OLD est entrée dans la routine, du fait notam- à l’hypercapnie.
ment des améliorations technologiques (concentrateurs, La fatigue des muscles respiratoires est considérée habituel-
oxygène liquide, systèmes portables). lement comme un des facteurs les plus importants dans le
• Les indications de l’OLD dans la BPCO sont bien codi- développement de l’insuffisance respiratoire. L’évaluation de la
fiées : hypoxémie sévère (PaO2 inférieure à 55-60 mmHg) fatigue musculaire est toutefois difficile en clinique courante et les
et persistante, à distance (plus de 1 mois) d’une exacerba- différentes études non contrôlées rapportent des résultats contra-
tion et en dépit d’un traitement médicamenteux optimal. dictoires quant au bénéfice de la VNI sur la fatigabilité musculaire,
• Par extension, l’OLD peut être prescrite dans d’autres certaines ayant retrouvé un effet bénéfique modeste [47–49] , d’autres
pas [50, 51] .
formes étiologiques d’insuffisance respiratoire que les
La VNI permet une amélioration des gaz du sang du fait de la
BPCO (fibroses pulmonaires diffuses, mucoviscidose, etc.) majoration de la ventilation alvéolaire et de la levée d’éventuelles
mais en respectant les mêmes critères gazométriques ; les microatélectasies, limitant ainsi la contribution des zones à
résultats sont cependant moins bons que dans la BPCO. bas rapport ventilation-perfusion (V/Q) qui peuvent aggraver
• La durée quotidienne de l’oxygénothérapie est un élé- l’hypoxémie et l’hypercapnie. L’amélioration des gaz du sang
ment fondamental : les meilleurs résultats en matière diurnes, contrôlés à distance de la VNI, semble être liée principale-
d’espérance de vie et d’amélioration hémodynamique ment à la restauration de stimuli hypoxémique et hypercapnique
pulmonaire ont été observés pour des OLD de plus de grâce à la correction de l’hypoventilation nocturne au cours du
18 h/24. Il faut prescrire des OLD d’au moins 16 h/24. sommeil, surtout prononcée pendant le sommeil paradoxal. Plu-
sieurs études ont montré que, lorsqu’on interrompt le traitement
L’oxygénothérapie doit couvrir la durée totale du som-
par VNI chez des patients en état stable, on voit réapparaître
meil et les périodes d’activité physique (essentiellement
rapidement la dyspnée, les céphalées et une somnolence diurne
la marche). excessive, et on observe une majoration de l’hypercapnie [50–52] .
• Il est essentiel de parvenir à une bonne observance Certaines données suggèrent toutefois qu’une ventilation exclu-
du traitement par les patients (au moins 15-16 h/j) mais sivement diurne effectuée chez des patients éveillés permet
l’expérience montre combien il est difficile de faire accep- d’obtenir des résultats similaires à la ventilation administrée au
ter, en tout cas au début du traitement, une longue durée cours du sommeil [53] .
quotidienne d’une thérapeutique qui reste astreignante
en dépit des progrès technologiques considérables des 30 Quand instaurer une ventilation non invasive ?
dernières années. La VNI peut être proposée lorsque les patients présentent des
symptômes en rapport avec l’hypoventilation nocturne, à savoir
des céphalées matinales, une fatigue ou une somnolence diurne
excessive, associés à une hypercapnie (PaCO2 > 45 mmHg) perma-
les techniques de ventilation à pression négative (par « poumon nente ou survenant seulement au cours du sommeil [54] . Dans
d’acier ») et de ventilation invasive sur canule de trachéotomie, ce dernier cas, l’indication de VNI est habituellement retenue
permettant une amélioration de l’espérance et de la qualité de lorsqu’on constate une désaturation sous 88 % de SaO2 pendant
vie de ces patients. Les méthodes de VNI, effectuées à l’aide d’un plus de 5 minutes consécutives, ou lorsque plus de 5 % du temps
masque, ont émergé dans les années 1980, notamment grâce aux de sommeil est passé sous une SaO2 à 90 %.
travaux de Rideau et al. [42] en France, puis de Bach et al. aux États- Par ailleurs, bien que la situation idéale soit de débuter une VNI
Unis [43] . La fiabilisation et la miniaturisation des respirateurs ainsi chez un patient déjà suivi régulièrement et en état stable, celle-ci
que l’optimisation des masques ont contribué à l’essor de la VNI est fréquemment initiée (dans près de 30 % des cas) à l’occasion
ces dernières années. d’un épisode d’IRA [55, 56] conduisant parfois au diagnostic initial
de l’insuffisance respiratoire restrictive.
Mécanisme de l’insuffisance respiratoire
Dans ce type d’affection, il consiste essentiellement en une Particularités liées au type d’atteinte neuromusculaire
hypoventilation, liée a l’atteinte de la « pompe », à laquelle L’évolution naturelle de la myopathie de Duchenne, mala-
peuvent s’ajouter des inégalités ventilation-perfusion liées à die récessive liée à l’X est relativement prévisible. La baisse des
un encombrement ou à des troubles ventilatoires localisés. volumes pulmonaires se voit en général une fois le patient confiné
L’oxygénothérapie seule ne constitue pas le traitement de ce type au fauteuil roulant et l’insuffisance respiratoire se manifeste vers
d’insuffisance respiratoire et peut même, dans certains cas, aggra- l’âge de 18 ans. Lorsque l’hypercapnie apparaît, l’espérance de vie
ver l’hypercapnie des patients. Le traitement par VNI permet de n’est que de 9 à 10 mois si aucune assistance ventilatoire n’est
majorer la ventilation alvéolaire et ainsi d’améliorer les échanges mise en route [57] . Une évaluation régulière de la fonction res-
gazeux. piratoire est donc indispensable chez ces patients, comportant
une mesure des débits et volumes pulmonaires, du débit expira-
Bénéfice attendu de la VNI toire à la toux, ainsi que des pressions inspiratoires et expiratoires
L’effet bénéfique de la VNI sur les symptômes et l’hématose maximales [58–60] . Par ailleurs, du fait de l’aspect de la courbe de
diurne et nocturne chez ces patients a été bien démontré [44, 45] . La dissociation de l’hémoglobine, on peut constater dans ce type
ventilation mécanique permet également d’améliorer la qualité de d’atteinte ventilatoire une hypercapnie alors même que la SaO2
sommeil [46] (en diminuant l’hypoventilation alvéolaire nocturne mesurée à l’oxymétrie de pouls est encore normale. On ne peut
et la fragmentation du sommeil), et également la qualité de vie [45] . donc se contenter chez ces patients d’une simple mesure de la
Enfin, plusieurs études de cohortes ont montré un gain important saturation mais une capnographie et une mesure des gaz du sang
en termes de survie, que ce soit chez les patients présentant une artériel doivent être effectuées afin d’estimer le niveau de la PaCO2.
atteinte neurologique stable, comme c’est le cas dans les séquelles La VNI permet actuellement chez ces patients un gain en termes
de poliomyélite ou chez les patients atteints de pathologies lente- d’espérance de vie, plus de 70 % des patients étant encore vivants
ment évolutives comme la myopathie de Duchenne [44, 45] . 5 ans après l’initiation de la ventilation [44, 45] .

EMC - Pneumologie 9
6-040-L-40  Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)

Tableau 9.
Bilan fonctionnel respiratoire indiqué dans le suivi de la sclérose latérale amyotrophique [62] .
Explorations fonctionnelles Fréquence
Spirométrie Mesure de la CVF et CVL, position assise et allongée 3 mois
Mesurée du DEP à la toux
Gaz du sang En air ambiant, dépistage d’une hypercapnie Bilan initial puis en fonction de l’évolution
PImax, SNIP Évaluation de la force musculaire 3 mois
Oxymétrie nocturne Recherche de périodes d’hypoventilation au cours 6 mois
du sommeil notamment paradoxal
Polysomnographie En cas de somnolence diurne excessive En cas de signe d’appel

CVF : capacité vitale forcée ; CVL : capacité vitale lente ; DEP : débit expiratoire de pointe ; PImax : pression inspiratoire maximale ; SNIP : pression inspiratoire sniff.

La sclérose latérale amyotrophique, ou maladie de Charcot,


est une maladie neurodégénérative qui apparaît plus tardive- Respiration normale
ment, l’âge moyen de survenue étant de 56 ans. Son évolution
est également plus rapidement fatale que dans la myopathie de
Duchenne avec une médiane de survie de seulement 2,5 ans [61] .
L’apparition de l’insuffisance respiratoire signe en général la phase Troubles respiratoires au cours
terminale de la maladie et est la plupart du temps à l’origine du sommeil paradoxal
du décès des patients. Un suivi rapproché pneumologique doit
donc être mis en place précocement devant l’évolutivité de la
maladie [62] . Ce suivi doit comporter un examen clinique et des
explorations fonctionnelles respiratoires [54, 62] . Les modalités de ce CVF < 40 %
Troubles respiratoires au cours
suivi sont décrites dans le Tableau 9. Une diminution de la capa- du sommeil paradoxal
valeur prédite
cité vitale lors du passage en position allongée témoigne d’une et du sommeil lent
atteinte diaphragmatique. Le débit expiratoire de pointe à la toux
renseigne sur les capacités du patient à expectorer. Une valeur
inférieure à 270 l/min signe une altération du mécanisme de toux
et doit inciter à mettre en place des techniques d’aide à la toux Apparition d'une
CVF < 20 %
insuffisance respiratoire
et de désencombrement bronchique. La mesure de la pression valeur prédite
diurne
inspiratoire maximale et de la pression inspiratoire sniff (SNIP)
permet d’évaluer la force musculaire. Enfin, comme pour les autres
atteintes neuromusculaires, une mesure des gaz du sang (arté-
riel ou artérialisé) est nécessaire afin de dépister une éventuelle
Décès
hypercapnie y compris lorsque la SaO2 est normale.
La VNI permet chez ces patients une amélioration de la survie Figure 1. Évolution vers l’insuffisance respiratoire dans les maladies
et de la qualité de sommeil ainsi que de la qualité de vie [63] . En cas neuromusculaires. CVF : capacité vitale forcée.
de ventilation plus de 12 heures par jour le patient doit pouvoir
disposer d’un second ventilateur de secours, pouvant fonction- que la capacité des muscles respiratoires et notamment du dia-
ner sur batterie. Lorsque la VNI devient insuffisante, notamment phragme est fréquemment diminuée [66] . Le risque de développer
en raison d’un encombrement bronchique trop important, se une insuffisance respiratoire hypercapnique devient élevé lorsque
pose la question de la réalisation d’une trachéotomie qui per- la capacité vitale chute sous les 1-1,5 l, mais peut survenir plus tôt,
met d’effectuer des aspirations et de ventiler le patient de manière notamment en cas d’obésité ou d’obstruction bronchique asso-
invasive sur canule. La décision de trachéotomie ou de limitation ciée [65] . L’hypercapnie apparaît initialement au cours du sommeil
des soins devrait pouvoir être prise en concertation avec le patient, paradoxal, puis se manifeste lors des autres stades du sommeil, lors
en amont d’un épisode d’IRA, ce qui n’est pas toujours facilement de l’effort, pour finalement devenir permanente au repos [65, 67] .
réalisable en pratique.
D’autres affections neuromusculaires peuvent aboutir à une Effets physiologiques de la VNI dans les atteintes pariétales
IRC restrictive telles que certaines myopathies ou atteintes spi- Sous VNI on observe une baisse de la PaCO2 et une augmen-
nales. La Figure 1 représente l’histoire naturelle de l’évolution tation de la PaO2 [66, 68] , mais ces effets sont également observés à
vers l’insuffisance respiratoire des patients avec une atteinte neu- distance de la VNI, qui est généralement administrée pendant la
romusculaire, la rapidité d’évolution étant extrêmement variable nuit [47, 53, 66, 68] . Cette amélioration des GDS artériels peut se main-
d’une maladie à l’autre. tenir plusieurs années après l’initiation du traitement [47] . La VNI
permet dans ce type d’atteinte, comme pour les maladies neuro-
Atteintes pariétales thoraciques musculaires, de diminuer le travail des muscles respiratoires et de
restaurer une sensibilité des centres respiratoires à l’hypercapnie.
On classe dans ce groupe les anomalies de la paroi thoracique La VNI permet également de soulager les symptômes en rapport
associées à une restriction des volumes pulmonaires et/ou de la avec l’hypoventilation [52, 69] et d’améliorer l’architecture du som-
compliance thoracique conduisant à une insuffisance respiratoire meil [70] . Une étude portant sur l’hémodynamique pulmonaire a
hypercapnique. Les séquelles de thoracoplastie et la cyphosco- de plus constaté une diminution significative de l’hypertension
liose sévère représentent les principales étiologies de ce type pulmonaire de repos chez ces patients, la PAPm passant de 33 ± 10
d’insuffisance respiratoire [64] . On observe habituellement chez ces à 25 ± 6 mmHg après 1 an de traitement par VNI [71] .
patients une diminution harmonieuse de l’ensemble des volumes
pulmonaires, conduisant à un trouble ventilatoire restrictif pur. Impact de la VNI sur l’évolution de l’insuffisance respiratoire
Lorsque la déformation apparaît tôt dans la vie elle peut éga- Il n’existe pas d’essai contrôlé portant sur la survie des
lement aboutir à un défaut de développement du parenchyme patients ventilés mais plusieurs études ont retrouvé une sur-
sous-jacent [65] . Les rapports ventilation/perfusion sont en géné- vie d’environ 90 % à 1 an et 80 % à 5 ans [47, 72] et sont en
ral préservés dans ce type d’atteinte et l’hypercapnie ne survient faveur d’un effet bénéfique de la VNI sur l’espérance de vie.
que très tardivement, lorsque la force des muscles respiratoires D’autres essais non contrôlés montrent également une nette
ne parvient plus à contrebalancer la charge de travail impo- diminution du risque d’hospitalisation après instauration de la
sée par la diminution de la compliance thoracique, d’autant ventilation chez les patients présentant une IRC sur cyphoscoliose

10 EMC - Pneumologie
Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)  6-040-L-40

Tableau 10. Tableau 11.


Indications de mise en route d’une ventilation non invasive dans les Critères cliniques et fonctionnels suggérant la mise en route d’une ven-
atteintes pariétales et neuromusculaires. tilation non invasive chez les patients avec une insuffisance respiratoire
chronique obstructive sévère (d’après [55] ).
Symptômes (fatigue, somnolence, céphalées matinales, etc.)
Symptômes Critères physiologiques (un des critères
ET un des éléments suivants :
suivants)
- PaCO2 > 45 mmHg
- oxymétrie nocturne montrant une SaO2 < 88 % pendant 5 minutes Asthénie PaCO2 ≥ 55 mmHg
consécutives Dyspnée PaCO2 entre 50 et 54 mmHg et présence de
- pression inspiratoire maximale < 60 cmH2 O ou CVF < 50 % valeur désaturations nocturnes (SaO2 mesurée à
prédite a l’oxymétrie de pouls ≤ 88 % pendant 5 minutes
consécutives sous un débit d’O2 ≥ 2 l/min)
PaCO2 : pression partielle de gaz carbonique dans le sang artériel ; SaO2 : satu-
ration de l’hémoglobine en oxygène dans le sang artériel ; CVF : capacité vitale Céphalées matinales, PaCO2 entre 50 et 54 mmHg et hospitalisations
forcée. somnolence, etc. en rapport avec des épisodes d’insuffisance
a
Pour les maladies neuromusculaires progressives.
respiratoire hypercapnique (≥ 2 sur une période
de 12 mois)
ou séquelle de thoracoplastie [47, 73] . Enfin, l’instauration de la VNI PaCO2 : pression partielle de gaz carbonique dans le sang artériel ; SaO2 : satura-
permet d’obtenir assez rapidement une amélioration de la qua- tion de l’hémoglobine en oxygène dans le sang artériel.
lité de vie, dès le mois qui suit l’instauration du traitement,
qui se maintient au bout de 1 an. Les composantes pour les-
quelles l’amélioration est la plus nette sont les « symptômes d’éviter le collapsus bronchique lors de l’expiration et favorise
respiratoires », le « fonctionnement physique », l’anxiété et le ainsi une expiration plus prolongée.
sommeil [74] . La VNI devrait être utilisée prioritairement au cours du sommeil,
La VNI est débutée dans ce type d’atteinte, comme pour durant lequel on observe les périodes d’hypoventilation les plus
les maladies neuromusculaires, lorsqu’il existe une hypercapnie marquées, notamment lors du sommeil paradoxal pendant lequel
diurne ou une hypoventilation alvéolaire associée à des symp- seul le diaphragme participe au travail ventilatoire.
tômes (Tableau 10). Résultats concernant l’utilisation au long cours dans la BPCO
Alors que le bénéfice de la VNI dans les exacerbations de BPCO
VNI de la BPCO est clairement établi, les quelques essais contrôlés et méta-analyses
portant sur l’intérêt de la VNI au long cours dans la BPCO n’ont
Le traitement de l’insuffisance respiratoire de la BPCO repose pas mis à ce jour en évidence de manière formelle un gain en
comme nous l’avons vu sur l’OLD qui permet, lorsqu’elle est termes de survie [79–81] . La mise en route d’une ventilation au long
administrée plus de 16 heures par jour d’améliorer l’espérance de cours dans la BPCO doit être donc discutée au cas par cas. Les
vie. La VNI a montré un effet bénéfique chez les patients admis patients sévèrement hypercapniques, qui présentent des épisodes
pour une décompensation de BPCO, permettant une réduction d’IRA, et une hypoventilation marquée au cours du sommeil, ou
du risque d’intubation et de transfert en réanimation ainsi que de une obésité associée représentent sans doute les meilleurs candi-
la durée d’hospitalisation avec également une diminution de la dats. Une conférence de consensus publiée en 1999 a établi des
mortalité [75, 76] . Plusieurs études ont montré que l’existence d’une critères de sélection des patients pouvant bénéficier d’une VNI
hypercapnie chez ces patients constituait, à fonction respiratoire au long cours (Tableau 11) [55] . Même si ces recommandations
comparable, un facteur de mauvais pronostic [77] . Il existe donc prônent l’instauration d’une VNI lorsque la PaCO2 est supérieure
un rationnel pour l’utilisation de la VNI au long cours dans la à 55 mmHg, l’hypercapnie per se, lorsqu’elle est stable et bien tolé-
BPCO dont l’efficacité n’est toutefois actuellement pas clairement rée ne constitue pas une indication absolue de VNI au long cours.
établie. Par ailleurs, les signes d’hypoventilation et la qualité de sommeil
sont sans doute plus difficiles à interpréter chez ces patients que
Intérêt physiologique dans les insuffisances respiratoires restrictives. De nouvelles don-
Dans la BPCO, plusieurs phénomènes participent à l’apparition nées et recommandations portant sur l’intérêt de la VNI dans la
de l’hypercapnie et peuvent être améliorés par une VNI. Tout BPCO sont donc souhaitables.
d’abord, l’obstruction bronchique et la diminution de la pression D’autres affections respiratoires chroniques obstructives beau-
de rétraction élastique du parenchyme pulmonaire observées dans coup moins fréquentes que la BPCO peuvent aboutir à une
la BPCO sont à l’origine d’une réduction des débits expiratoires et IRC, comme la mucoviscidose ou les bronchectasies. Dans la
conduisent à une hyperinflation thoracique présente au repos et mucoviscidose, l’insuffisance respiratoire est initialement liée aux
qui s’accentue encore à l’effort. Cette distension pulmonaire place anomalies du rapport ventilation/perfusion puis apparaît une
les muscles respiratoires dans une « position géométrique » défa- hypoventilation liée à l’atteinte parenchymateuse mais également
vorable : la force du diaphragme, principal muscle respiratoire, à la faiblesse musculaire (en partie expliquée par la malnutrition
qui se retrouve aplati et donc dans une configuration méca- pouvant être consécutive à l’insuffisance pancréatique exocrine).
nique désavantageuse, est moins importante. Le recrutement des Il existe alors, comme dans la BPCO une augmentation de la
muscles respiratoires accessoires entraîne alors une augmentation charge du travail respiratoire. La VNI est efficace dans les exa-
du coût en oxygène du travail respiratoire et participe à la fatigue cerbations infectieuses, permettant d’améliorer la dyspnée et les
musculaire [55] . La charge de travail peut être également accen- échanges gazeux [82, 83] et peut être également proposée au long
tuée par l’existence d’une pression expiratoire intrinsèque positive cours dans les suites d’un épisode d’IRA. Il est toutefois impor-
(PEPi) expliquée par l’hyperinflation. tant de signaler que l’apparition d’une insuffisance respiratoire
Les mécanismes d’action de la VNI dans la BPCO sont donc hypercapnique représente un tournant évolutif et doit inciter à
multiples : envisager chez les patients une inscription sur liste de transplan-
• elle permet de diminuer la charge de travail des muscles respi- tation pulmonaire.
ratoires, qui sont mis « au repos » pendant les périodes au cours
desquelles la ventilation est effectuée ; Insuffisance respiratoire hypercapnique
• la VNI pourrait également permettre de restaurer le chémosen-
sibilité des centres respiratoires pour des niveaux de PaCO2 plus
de l’obèse : SOH
bas [78] ; L’insuffisance respiratoire hypercapnique de l’obèse représente
• par ailleurs, la pression expiratoire positive appliquée lors la actuellement une des principales causes d’insuffisance respiratoire
VNI permet de lutter contre la PEPi et diminue ainsi le travail et constitue une excellente indication de VNI.
inspiratoire. Cette pression expiratoire positive peut également L’action bénéfique de la VNI peut être expliquée par plusieurs
participer à la diminution de l’hyperinflation en permettant mécanismes :

EMC - Pneumologie 11
6-040-L-40  Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)

courant fixe est encore toutefois utilisée chez certains patients,


notamment dans le cadre des pathologies neuromusculaires. La
Syndrome ventilation en mode barométrique, ou biphasic positive airway
obésité-hypoventilation pressure (BiPAP) consiste à délivrer deux niveaux de pression posi-
tive : une pression inspiratoire (PIP) et une expiratoire (PEP). Ce
mode ventilatoire permet une compensation plus importante des
éventuelles fuites non volontaires que la ventilation en mode
IAH < 30 IAH > 30
volumétrique. La PEP permet la « vidange » du gaz carbonique
(CO2 ) exhalé dans le circuit pendant la phase expiratoire par
une fuite calibrée, intentionnelle, présente le plus souvent sur
le masque. Ainsi, on ne peut en général pas baisser sur ce type
VNI PPC
de respirateur la PEP à moins de 3 ou 4 cmH2 O afin d’éviter une
réinhalation de CO2 expiré. La PEP peut également permettre,
comme nous l’avons vu précédemment, de lutter contre une éven-
Réponse à la Réponse insuffisante tuelle PEPi, comme c’est le cas fréquemment dans la BPCO, et son
PPC à la PPC niveau est alors fixé en fonction de l’adaptation du patient à la
VNI. Les autres paramètres configurables sur ces respirateurs sont
la fréquence respiratoire minimale dite « de rappel », le « trigger »
inspiratoire et expiratoire, la pente d’insufflation et les alarmes (de
Poursuite PPC VNI haute et basse pression notamment). De nombreux respirateurs,
souvent de petite taille, ont été développés ces dernières années,
permettant de faciliter la VNI au domicile des patients avec une
IRC.
Stabilisation Circuit. Les respirateurs de soins continus utilisent sou-
sous VNI vent des circuits doubles (un circuit inspiratoire et un autre et
expiratoire associé à une valve) permettant de séparer les gaz ins-
Figure 2. Arbre décisionnel. Algorithme thérapeutique possible dans le piratoires et expiratoires. D’autres utilisent un circuit unique avec
syndrome obésité-hypoventilation. IAH : index apnées-hypopnées ; VNI : valve, placée au plus proche du patient afin d’éviter le plus possible
ventilation non invasive ; PPC pression positive continue. la réinhalation de CO2. Cette valve est ouverte durant l’expiration
et fermée à l’inspiration. Enfin, la plupart des circuits simples sont
dépourvus de valve, l’évacuation du gaz carbonique au cours de la
phase expiratoire s’effectuant au niveau du masque par une fuite
• une diminution de la charge de travail respiratoire sous VNI ; calibrée.
• la restauration d’une chémosensibilité à l’hypercapnie des Interface. L’interface entre le respirateur et le patient est un
centres respiratoires ; élément crucial pour la réussite de la VNI. Celle-ci doit être confor-
• la correction des troubles respiratoires du sommeil, notamment table pour le patient et adaptée pour éviter les fuites et assurer
les phénomènes apnéiques et d’hypoventilation, plus mar- l’efficacité de la ventilation. Les principales interfaces utilisées
qués au cours du sommeil paradoxal et à l’origine de périodes sont les masques nasaux (couvrant simplement le nez) ou naso-
d’hypoxémie et d’hypercapnie plus importante. buccaux (couvrant le nez et la bouche) mais d’autres interfaces
C’est fréquemment à l’occasion d’une hospitalisation pour un sont disponibles comme les embouts narinaires ou buccaux ou
épisode d’IRA que le diagnostic de SOH est porté et une VNI mise encore d’autres types de masques recouvrant intégralement le
en place [18] . visage. Les masques sont généralement constitués de deux par-
ties : une armature rigide et une partie souple, le plus souvent
Modalités et impact de la VNI en silicone qui est appliquée contre la peau. Il existe selon les
Le traitement optimal du SOH reste incertain. Un syndrome modèles plusieurs tailles de masque, ce qui permet de s’adapter
d’apnées du sommeil étant retrouvé associé au SOH dans 80 % à aux différentes morphologies de visage. Le masque doit être placé
90 % des cas [18, 84] , une ventilation de type pression positive conti- le mieux possible afin d’éviter les fuites non voulues, tout en évi-
nue (PPC) est souvent débutée mais peut s’avérer insuffisante si tant un appui trop important, notamment sur l’arête nasale qui
l’hypercapnie reste importante et/ou s’il persiste d’importantes peut occasionner l’apparition de lésions cutanées susceptibles de
plages de désaturation sous PPC au cours du sommeil. Dans ce compromettre la poursuite de la ventilation.
cas, une ventilation à deux niveaux de pression est préférée, éven- On initie fréquemment une ventilation avec un masque nasal
tuellement associée à une oxygénothérapie nocturne. Le niveau qui pourra être remplacé par un masque facial en cas de fuites par
de la PEP est alors adapté pour essayer de corriger les événe- la bouche trop importantes.
ments obstructifs au cours du sommeil, tout en maintenant une
aide inspiratoire (PIP-PEP) suffisante pour assurer une ventilation Modalités de mise en œuvre de la VNI
alvéolaire permettant de corriger l’hypercapnie. La Figure 2 repré- La VNI peut être est initiée à l’occasion d’un épisode d’IRA ou
sente un algorithme thérapeutique possible dans la prise en charge lors du suivi d’une IRC déjà connue.
du SOH. Après avoir choisi le type de respirateur et l’interface les mieux
Le traitement par VNI permet de réduire la morbimortalité de adaptés au patient et au type d’atteinte ventilatoire, on effectue un
ces patients [84] . Une perte de poids importante, éventuellement essai sur une courte période afin de juger de la tolérance de la venti-
favorisée par une chirurgie bariatrique, toutefois risquée chez ces lation. L’adaptation des paramètres au lit du patient est une phase
patients, peut permettre de corriger l’insuffisance respiratoire, et essentielle durant la période initiale de ventilation. On s’attache à
les troubles respiratoires du sommeil. Une prise en charge globale détecter des fuites non voulues au niveau du masque (notamment
de ces patients est donc nécessaire [85] . au niveau des yeux et du menton), à vérifier si la coordination
entre le respirateur et le patient est correcte, à savoir si toutes les
Matériel de VNI manœuvres d’inspiration par le patient sont suivies d’une insuf-
La mise en place d’une ventilation nécessite plusieurs éléments : flation donnée par la machine, et s’il n’y a pas d’insufflation
un respirateur, un circuit et une interface. supplémentaire pendant la phase expiratoire. L’adaptation est éga-
lement jugée sur l’utilisation ou non par le patient des muscles
Matériel respiratoires accessoires sous VNI.
Respirateur. Les deux types de ventilateurs utilisés sont les L’efficacité de la ventilation va être évaluée sur l’amélioration
ventilateurs de type volumétrique ou barométrique même si des GDS. On peut suivre initialement l’évolution de la SaO2 sous
les dernières années ont vu un essor important du mode baro- VNI mais un contrôle des GDS artériels doit donc être effectué
métrique. La ventilation volumétrique qui délivre un volume après 1 ou 2 heures de ventilation afin de juger du niveau de la

12 EMC - Pneumologie
Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)  6-040-L-40

PaO2 et de la PaCO2 . L’adaptation des paramètres et notamment respiratoires restrictives d’origine pariétale ou neuromusculaire
de l’aide inspiratoire s’effectue alors en fonction de l’évolution qui sont d’évolution lentement progressive, lorsque la VNI s’avère
clinique et gazométrique sous VNI. En cas de persistance d’une insuffisamment efficace.
hypoxémie sous VNI, le débit d’oxygène est adapté afin d’obtenir Beaucoup plus fréquemment, c’est à l’occasion d’une exacer-
une SaO2 au-dessus de 92-94 % tout en contrôlant l’évolution de bation de l’insuffisance respiratoire conduisant à une intubation
la PaCO2 par de nouvelles mesures. orotrachéale et à un séjour en réanimation qu’est discutée la
trachéotomie. Celle-ci est effectuée lorsqu’on suspecte qu’une
ventilation mécanique prolongée sera nécessaire, le plus sou-
Ventilation invasive par trachéotomie vent après une semaine d’intubation et au cours des 3 premières
semaines, afin d’éviter les complications mécaniques laryngées
Indications consécutives à l’intubation orotrachéale, ou les sténoses sous-
La pratique de la trachéotomie s’est développée lors des années glottiques ultérieures. C’est parfois également après plusieurs
1950 avec les épidémies de poliomyélite alors qu’elle était indi- échecs d’extubation (nécessité de réintubation rapide) que la tra-
quée essentiellement jusque-là dans les cas d’obstruction des voies chéotomie est effectuée. Cet acte thérapeutique doit bien entendu
aériennes supérieures. Le développement de canules de trachéo- être discuté en fonction du contexte clinique et du profil évolutif
tomie bien tolérées et adaptées aux patients a également participé de l’insuffisance respiratoire. La trachéotomie peut être réalisée
à l’essor de la technique. Jusqu’au développement des techniques par voie chirurgicale ou percutanée. Plusieurs techniques percu-
de VNI, la trachéotomie associée à la ventilation invasive était tanées ont été mises au point, certaines perforant la trachée de
d’ailleurs la seule solution thérapeutique destinée aux patients l’extérieur vers l’intérieur d’autres effectuant le contraire. Elles
présentant une insuffisance respiratoire restrictive et sa pratique s’effectuent le plus souvent sous contrôle endoscopique afin de
a permis une amélioration importante de leur espérance de vie. faciliter la procédure et d’éviter les complications.
La VNI lui est actuellement préférée, tout au moins en première
intention, car elle ne nécessite pas d’effraction cutanée, ce qui
facilite la parole et permet une meilleure qualité de vie. Toute- Matériel
fois, dans les cas où la VNI s’avère inefficace ou contre-indiquée,
Choix de la canule
une trachéotomie est réalisée, permettant la ventilation invasive
sur canule. Cela peut être le cas lorsque la durée de ventilation Les tubes en métal utilisés initialement ont été remplacés pro-
est trop importante, lorsque la VNI est insuffisante pour soula- gressivement par des tubes en plastique de différents modèles,
ger les symptômes ou corriger les anomalies gazométriques, et longueurs et diamètres, permettant de s’adapter au mieux au pro-
enfin lorsqu’on constate des fausses routes ou un encombrement fil du patient. Le diamètre de la canule doit être suffisamment
bronchique important. important tout en permettant une mise en place facilement réa-
Dans certaines pathologies neuromusculaires, la réalisation de lisable. Les canules sont identifiées en fonction de leur diamètre
la trachéotomie aide à soulager les symptômes et à normaliser la interne (ID pour inner diameter), leur diamètre externe (OD pour
PaCO2. En outre, elle permet d’aspirer plus facilement les sécré- outer diameter) et leur longueur. Chez un adulte on utilise habituel-
tions présentes dans l’arbre bronchique, notamment chez les lement une canule avec un OD de 10 ou 11 mm. Les différentes
patients dont la toux n’est plus efficace. L’utilisation d’une canule longueurs de la canule permettent de s’adapter aux dispositions
à ballonnet permet d’éviter les fausses routes chez les patients qui anatomiques de chaque patient. Certaines de ces canules sont
présentent des troubles de la déglutition, ce qui est habituellement constituées de silicone, renforcé par une spirale métallique évitant
le cas lorsqu’il existe une atteinte bulbaire. leur éventuel collapsus ou coudure.
Dans les atteintes restrictives pariétales, la trachéotomie peut
être indiquée à un stade avancé de la maladie. Sa simple réa- Canules fenêtrées
lisation permet souvent de diminuer la PaCO2 avant même le Les canules fenêtrées sont identiques aux autres à l’exception
recours à une ventilation invasive. En effet, en court-circuitant d’une ouverture, ou fenêtre, située dans la portion de la canule
une partie des voies aériennes supérieures, on diminue l’espace au-dessus du ballonnet. Ces canules sont munies de chambres
mort d’environ 80 à 100 ml et on augmente ainsi la ventila- internes avec ou sans fenêtre. Lorsqu’on utilise une chambre
tion alvéolaire, ce qui est souvent suffisant pour corriger, au interne fenêtrée, l’air passe lors de l’expiration au travers de la
moins partiellement, l’hypercapnie. Ce « court-circuit » des voies fenêtre puis entre les cordes vocales ce qui permet la phona-
aériennes supérieures permet également de diminuer les résis- tion. Cette dernière est aidée par le dégonflement du ballonnet
tances à l’écoulement de l’air, présentes normalement au niveau et l’utilisation d’une valve phonatoire (qui ferme la canule à
du nez et de la bouche, et ainsi de baisser théoriquement le l’expiration mais permet à l’air de pénétrer pendant l’inspiration,
travail respiratoire. Ceci est toutefois contrebalancé par la dimi- permettant ainsi d’augmenter le débit aérien entre les cordes
nution du calibre de la lumière trachéale, dont le diamètre est vocales lors de l’expiration). Il est préférable de ne laisser la
d’environ 20 mm normalement, alors que le diamètre interne chambre interne fenêtrée que temporairement afin d’éviter cer-
d’une canule de trachéotomie est en général plus petit, de taines complications mécaniques.
7 à 10 mm. Au total, dans ce type d’insuffisance respiratoire,
même si la simple réalisation de la trachéotomie permet une
amélioration des échanges gazeux, une ventilation invasive lui Chambre interne
est le plus souvent associée, notamment au cours des périodes L’utilisation de canules munies d’une chambre interne permet
de sommeil. d’éviter le dépôt de sécrétions épaisses dans la lumière interne
Dans les pathologies respiratoires obstructives comme la BPCO, de la trachée, ce qui est susceptible de gêner l’écoulement de
la trachéotomie n’est habituellement pas indiquée mais est par- l’air. Ces chambres internes peuvent être facilement remplacées
fois effectuée au décours d’un séjour en réanimation chez des et nettoyées. Elles sont destinées aux patients qui présentent des
patients admis pour une décompensation respiratoire et chez qui sécrétions relativement abondantes ou collantes et qui nécessitent
le sevrage de la ventilation s’avère difficile. Lorsqu’une trachéo- des aspirations fréquentes.
tomie est effectuée, la « décanulation » des patients et le sevrage
de la ventilation sont souvent difficiles, ce qui compromet leur
retour à domicile. Ballonnet
Les canules peuvent être munies ou non d’un ballonnet. Celui-
ci permet de combler l’espace entre la canule et la trachée et ainsi
À quel moment la trachéotomie doit-elle être de protéger les voies aériennes basses des sécrétions laryngées. Il
réalisée ? permet de plus de faciliter la ventilation en éliminant les fuites. Le
Dans les situations où le patient est suivi régulièrement pour ballonnet doit être suffisamment gonflé afin d’éviter les fuites tout
son IRC, on peut être amené à proposer la réalisation program- en évitant de dépasser la pression de 25 mmHg afin de prévenir
mée d’une trachéotomie. Cela peut être le cas des insuffisances une ischémie de la muqueuse trachéale.

EMC - Pneumologie 13
6-040-L-40  Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental (oxygénothérapie et ventilation mécanique)

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affections est une hypoventilation, consécutive à l’atteinte perfusion relationships in interstitial lung disease. Eur J Respir Dis
de la « pompe » pulmonaire. 1986;68:39–49.
• La VNI permet, en augmentant la ventilation alvéolaire, [11] Weitzenblum E. Chronic cor pulmonale. Heart 2003;89:225–30.
de normaliser ou au moins d’améliorer les GDS artériels. [12] Penaloza D, Sime F, Banchero N, Gamboa R, Cruz J, Marticorena E,
et al. Pulmonary hypertension in healthy men living at high altitude.
Elle permet également, grâce à la restauration de la sensi- Med thorac 1962;19:449–60.
bilité des centres respiratoires et à une diminution du coût [13] Wilkinson M, Langhorne CA, Heath D, Barer GR, Howard P. A patho-
du travail respiratoire d’améliorer l’hématose à distance physiological study of 10 cases of hypoxic cor pulmonale. Q J Med
des périodes de ventilation. C’est dans ces indications que 1988;66:65–85.
le bénéfice de la VNI, notamment sur la survie et la qualité [14] Weitzenblum E, Hirth C, Ducolone A, Mirhom R, Rasaholinjanahary
J, Ehrhart M. Prognostic value of pulmonary artery pressure in chronic
de vie a été le mieux démontré.
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• Dans la BPCO, le bénéfice de la VNI, parfaitement établi [15] Richens JM, Howard P. Oedema in cor pulmonale. Clin Sci
lors des décompensations aiguës, est moins bien démon- 1982;62:255–9.
tré lorsque celle-ci est pratiquée au long cours chez des [16] Weitzenblum E, Sautegeau A, Ehrhart M, Mammosser M, Pelletier A.
patients en état stable. La VNI est donc généralement Long-term oxygen therapy can reverse the progression of pulmonary
réservée aux patients les plus sévères, qui présentent une hypertension in patients with chronic obstructive pulmonary disease.
Am Rev Respir Dis 1985;131:493–8.
hypercapnie importante et des exacerbations répétées. [17] Zielinski J, Tobiasz M, Hawrylkiewicz I, Sliwinski P, Palasiewicz G.
• Enfin, une des indications actuellement les plus fré- Effects of long-term oxygen therapy on pulmonary hemodynamics in
quentes de mise en route d’une VNI est l’insuffisance COPD patients: a 6-year prospective study. Chest 1998;113:65–70.
respiratoire hypercapnique de l’obèse, ou SOH. [18] Kessler R, Chaouat A, Schinkewitch P, Faller M, Casel S, Krieger J,
• La ventilation invasive, pratiquée par le biais d’une et al. The obesity-hypoventilation syndrome revisited: a prospective
canule de trachéotomie placée dans la trachée, est study of 34 consecutive cases. Chest 2001;120:369–76.
[19] Weitzenblum E, Kessler R, Canuet M, Chaouat A. Obesity-
aujourd’hui plutôt une technique de recours. Elle est en hypoventilation syndrome. Rev Mal Respir 2008;25:391–403.
effet mise en œuvre en deuxième intention, en cas d’échec [20] Celli BR, Cote CG, Marin JM, Casanova C, Montes de Oca M, Mendez
ou de contre-indication à la VNI et sa réalisation doit RA, et al. The body-mass index, airflow obstruction, dyspnea, and
être discutée en fonction du profil du patient et du type exercise capacity index in chronic obstructive pulmonary disease. N
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Les possibilités thérapeutiques ne sont donc pas négligeables, nary disease. Am J Respir Crit Care Med 2005;172:189–94.
en particulier pour ce qui est de la BPCO dont les formes sévères [23] Collard HR, Moore BB, Flaherty KR, Brown KK, Kaner RJ, King Jr
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bénéficient, depuis plus de 30 ans, de l’OLD à domicile qui a des
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effets très positifs sur l’espérance de vie. Les maladies neuromus- [24] Thabut G, Dauriat G, Stern JB, Logeart D, Levy A, Marrash-Chahla
culaires, les atteintes de la paroi thoracique (cyphoscoliose) et le R, et al. Pulmonary hemodynamics in advanced COPD candidates
SOH bénéficient plutôt de la VNI qui a connu un très large essor for lung volume reduction surgery or lung transplantation. Chest
au cours de ces dernières années. La VNI est également utilisée 2005;127:1531–6.
avec succès dans les exacerbations des BPCO. Son intérêt est plus [25] MacNee W. Pathophysiology of cor pulmonale in chronic obstruc-
discuté pour le traitement au long cours de l’IRC de la BPCO. tive pulmonary disease. Part One. Am J Respir Crit Care Med
Les résultats de l’oxygénothérapie et de la VNI sont en revanche 1994;150:833–52.
décevants dans les fibroses interstitielles diffuses. [26] Nocturnal Oxygen Therapy Trial Group. Continuous or nocturnal oxy-
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Service de pneumologie, Nouvel Hôpital Civil, CHU de Strasbourg, 67091 Strasbourg cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Canuet M, Weitzenblum E, Kessler R. Insuffisance respiratoire chronique et son traitement instrumental
(oxygénothérapie et ventilation mécanique). EMC Pneumologie 2012;9(2):1-16 [Article 6-040-L-40].

Disponibles sur www.em-consulte.com


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