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INTRODUCTION

La délinquance économique est un phénomène en expansion continue


dans le monde des affaires. L’introduction du pénal dans le droit des
affaires s’est de ce fait imposé au législateur.
Il a ainsi mis en place des incriminations afin de mieux sanctionner les
auteurs de pratiques déshonorantes pour la vie des affaires et des
comportements prohibés par la loi.
Parmi ces infractions économiques celui du délit d’initiés a retenu notre
attention et fait l’objet de notre étude. Il est l’un des plus récents.
En effet, avec l’avènement des marchés boursiers, le monde des affaires
a connu une nouvelle infraction ; le délit d’initié en matière boursière.
La législation qui régit le marché boursier repose sur l'égalité de
l'information des investisseurs. Certaines personnes « initiées »
disposent d'informations privilégiées et peuvent les utiliser ou les faire
utiliser pour réaliser des opérations boursières, et ce, avant que le public
n'en ait connaissance. Il s'agit du délit d'initié qui constitue
une infraction pénale relative à la vie des affaires.
Dans la suite de notre travail, nous expliciterons les notions d’initié et
d’informations privilégiées, puis nous verrons les éléments constitutifs de
l’infraction, et enfin les sanctions qui y sont relatives.
I- LES NOTIONS D’INITIE ET D’INFORMATIONS
PRIVILEGIEES

1- L’initié
Le délit d’initié́ est, de manière générale, défini comme l’infraction par
laquelle une personne dite « initié » fait usage d’une information
privilégiée afin de réaliser directement ou indirectement une opération
sur un marché́ financier, afin d’en retirer un profit indu.
Les initiés peuvent être initiés directs (primaires) ou indirects
(secondaire).

1.1- L’initié direct


Les initiés directs sont aussi appelés les initiés de ‘’première main’’ ou
initiés ‘’par nature’’. Ce sont les personnes qui acquièrent directement
l’information privilégiée en raison de leurs fonctions. Il s’agit notamment
du Directeur Général, du Président du Conseil d’Administration, du
Président Directeur Général, des administrateurs. Sont exclus de la
qualification d’initiés, les conjoints non séparés de corps de ces
dirigeants. Il faut ajouter à la liste des initiés primaires les personnes qui
détiennent une part significative dans le capital de l’émetteur car, ces
personnes qui contrôlent une société sont au courant des informations
les plus confidentielles.

1.2- L’initié indirect


Il s’agit des personnes qui à l’occasion de leur profession ou de leurs
fonctions disposent d’informations privilégiées. Cette catégorie est très
large. Elle comprend tout d’abord ceux qui, sans exercer de fonctions de
direction travaillent dans la société dont les titres ont été négociés. Elle
comprend ensuite toutes les personnes extérieures à la société dont les
fonctions ont cependant un lien direct ou indirect avec la société : le
liquidateur, journaliste, architecte, banquier, mais aussi, les
commissaires aux comptes, experts, avocats, conseils. On estime qu’il
pèse sur ceux-ci une obligation de loyauté d’origine contractuelle ou
d’origine déontologique qui interdit l’exploitation dans un intérêt
personnel d’informations obtenues dans le cadre professionnel. Cette
information provient de l’accès à certains documents.
La loi punit également ceux qui par voie de confidence amicale ou par
hasard détiennent et exploitent des informations privilégiées. Le délit
d’initié ne vise plus seulement ceux qui détiennent une information
privilégiée à l’occasion de l’exercice de leur fonction, mais aussi, ceux
qui détiennent une information privilégiée en dehors de toute relation
professionnelle.

2- Informations privilégiées
Le délit est constitué́ si l’information détenue est une information dite
privilégiée. Il est également nécessaire, en droit pénal, que l’auteur de
l’infraction connaisse le caractère privilégié de l’infraction. Cela constitue
en effet l’élément intentionnel de l’infraction.
L’information privilégiée, pour constituer le délit d’initié, doit être
confidentielle, précise, de nature à agir sur les cours et déterminante des
opérations réalisées.
Le délit d’initié suppose au préalable que l’information soit confidentielle,
c’est-à-dire non connue du public. L’information privilégiée dont l’usage
constitue l’élément matériel du délit d’initié doit être précise et non
encore divulguée. Il a été jugé que ne présente pas ces caractères
l’information sur le montant des dividendes très éloignée de la réalité et
des données sur le patrimoine déjà portées à la connaissance des
actionnaires. Sont par exemple imprécis, de simples bruits, les rumeurs
et les suppositions.
L’information privilégiée doit être précise. La notion de précision ne doit
pas être confondue avec celle de certitude. Le caractère de précision est
un élément constitutif de la définition de l’information, en ce qu’il permet
de la distinguer de la rumeur. Il peut par exemple concerner le montant
exacte des pertes qui seront annoncées ou au contraire connaître le
montant exacte des dividendes versés aux actionnaires, la connaissance
que l'on a de la signature d'un contrat, la connaissance de
restructuration, la connaissance de l'acquisition, la participation dans
d'autres sociétés.
Le privilège quant à lui, consiste à détenir des informations
déterminantes avant que le grand public y ait connaissance. Il réside
dans l'antériorité de la connaissance et par le nombre de ceux qui
partagent l'information.

II- LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE L’INFRACTION

La constitution de l’infraction suppose la présence de l’élément matériel


(il faut un acte ou une abstention de la part de l’auteur) et de l’élément
moral (l’auteur doit avoir eu l’intention de commettre l’infraction).

1- L’élément matériel

Il s'agit de toute opération boursière ayant eu pour but de réaliser un


gain ou d'éviter une perte, peu importe sa nature : achat, échange, levée
d'option. Elle peut avoir été réalisée par les initiés pour leur compte ou
par personnes interposées.

Remarque :
Commet un délit d'initié la personne qui réalise ou permet de réaliser sur
le marché boursier, soit directement, soit par personnes interposées, une
ou plusieurs opérations avant que le public ait connaissance de ces
informations.

2- L’élément moral ou élément intentionnel

Il réside dans la connaissance de réaliser des opérations interdites. La


mauvaise foi est alors caractérisée. Les personnes visées par cette
infraction sont présumées initiées en raison de la place occupée dans la
société. Une présomption de connaissance de l'information privilégiée
pèse sur les personnes.
III- LES SANCTIONS EN MATIERE DE DELIT D’INITIE

Le délit d'initié est généralement puni d'une amende assortie d'une peine
d'emprisonnement. La tentative du délit peut être, comme en droit
français, puni des mêmes peines que l'infraction elle‐même. Les
sanctions varient d'une juridiction à l'autre. Elles peuvent aller de 6 mois
à 2 ans d'emprisonnement et 1 million à 10 millions de francs CFA
(environ 1 520 à 15 200 €) d'amende au Cameroun, à 5 ans
d'emprisonnement et 100 millions d'euros en France ou encore 10 ans
d'emprisonnement et 50 millions (3 millions d'Euros) en Afrique du Sud.
Certaines juridictions comme le Maroc accordées une amende
proportionnelle pouvant aller jusqu’à 5 fois le montant du profit indument
réalisé, avec un minimum, de 200 000 dirhams (environ 18 400 €).
D'autres pays enfin, comme l'Argentine, délivré une peine
d'emprisonnement de 1 à 4 ans et une amende seulement égale au
montant du profit réalisé. Cette dernière sanction parait cependant peu
dissuasive. Plusieurs juridictions désignées des sanctions plus sévères
quand l'auteur de l'infraction est une personne morale. En Côte d’Ivoire,
est passible d'une peine privative de liberté et/ou d'amende supérieure à
360.000 selon l’article 4 du Code Pénal.
CONCLUSION

Les marchés doivent fonctionner sur des bases égalitaires. L’intégrité


des marchés financiers passe par la sanction des comportements qui ont
pour objet de fausser cette égalité entre investisseurs. La répression du
délit permet de rendre plus dissuasive le système de répression des
abus des marchés et participer à la transparence des marchés.
SOURCES
(1) GATCHOUP TCHINDA Désiré, Le délit d’initié dans les marchés boursiers de
l’espace OHADA, Revue de l’ERSUMA N°4- Septembre 2014.
(2) WORLD BANK, Les Infractions En Matière Boursière Sur Le Marché Financier
Régional De L’UMOA, Abidjan, le 9 juillet 2019.
(3) Code monétaire et financier Français, Ed. 2022-01-01
(4) Code pénal Ivoirien

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