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Module 2 — Aspects légaux et succession


Révision juin 2020

L'IQPF tient à remercier Me Caroline Marion, LL.M., D. Fisc., Pl. Fin. pour sa
collaboration à la rédaction.

Ont collaboré aux éditions précédentes :

Me Vincent Auclair, LL.L., D.D.N., Pl. Fin.

Me Sylvain Carpentier, LL.L., D.D.N., Pl. Fin.

Me Fabien Champagne, LL.B., D.D.N., Pl. Fin.

Me Jacinthe Faucher, LL.B., D.D.N., Pl. Fin.

Me Guylaine Lafleur, LL.B., D.D.N., Pl. Fin.

Me Caroline Marion, LL.M., D. Fisc., Pl. Fin.

Me François Rainville, notaire, Pl. Fin.

Éléments de compétence

Pour chaque module de La Collection de l'IQPF, quatre niveaux d'importance pour


chaque élément de compétence, à savoir essentiel 1, très important 2, important 3 et
utile 4, ont été identifiés. Le niveau d'importance traduit combien il est important d'avoir
une connaissance et une compréhension du sujet pour le planificateur financier. Ces
niveaux sont indiqués entre parenthèses, devant les titres.

Chapitre (4) 1 — Introduction

Pour le non-initié, il peut paraître étrange, de prime abord, d'intégrer le domaine juridique
à la planification financière. Il est vrai qu'en soi, une bonne connaissance du domaine
juridique ne contribuera pas à accroître la valeur du portefeuille de l'individu. Toutefois, le
planificateur financier possédant une bonne connaissance générale du domaine
juridique pourra aider son client à structurer son entreprise et ses affaires personnelles
de manière à préserver ce patrimoine si chèrement acquis.

Il est important pour le planificateur financier, en tant que «généraliste», d'avoir une vue

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d'ensemble des aspects légaux qui sont susceptibles d'influencer le patrimoine d'un
individu ou de son entreprise.

1.1 — Champ d'application du Code Civil du Québec

Lorsqu'il est question du «Code civil» dans cet ouvrage, cela fait référence au Code civil
du Québec1, en vigueur dans sa forme actuelle depuis le 1er janvier 1994. Cette loi
légifère sur la plupart des aspects juridiques des relations entre les personnes
domiciliées au Québec. C'est la base de notre droit.

Il se divise en dix livres (ou chapitres), chacun d'eux ayant pour but de régler un aspect
particulier de la vie juridique. L'ensemble de ces dix livres totalise 3168 articles. Le
second paragraphe de la «Disposition préliminaire» du Code civil, sorte de préambule,
énonce ce qui suit :
Le code est constitué d'un ensemble de règles qui, en toutes matières auxquelles se
rapportent la lettre, l'esprit ou l'objet de ses dispositions, établit, en termes exprès ou de
façon implicite, le droit commun. En ces matières, il constitue le fondement des autres
lois qui peuvent elles-mêmes ajouter au code ou y déroger.

En d'autres termes, en l'absence d'une loi spécifique, le Code civil régit les situations
courantes où le droit entre les personnes est concerné.

1.2 — Autres lois applicables

Bien que le Code civil constitue l'élément de base de notre droit, nous sommes
également régis par un très grand nombre d'autres lois émanant tant du gouvernement
provincial que du gouvernement fédéral, chacun légiférant dans les limites de sa
compétence constitutionnelle. Le Code civil constitue le fondement des autres lois qui
peuvent elles-mêmes ajouter au code ou y déroger. Ainsi ces autres lois visent à régler
certaines situations particulières, ou sujets particuliers, complétant ainsi le Code civil.
Certaines dispositions de ces autres lois peuvent parfois déroger au Code civil (p. ex., la
reconnaissance de l'union de fait par certaines lois, alors que le Code civil ne reconnaît
pas ce type d'union). Voici quelques-unes des très nombreuses lois adoptées par la
législature fédérale ou provinciale et qui viennent compléter le «paysage législatif»
québécois :

• Loi sur le régime de rentes du Québec (Québec)


• Loi sur les sociétés par actions (Québec)
• Loi canadienne sur les sociétés par actions (Canada)
• Loi sur les valeurs mobilières (Québec)
• Loi sur la distribution des produits et services financiers (Québec)
• Loi sur la faillite et l'insolvabilité (Canada)
• Loi sur les services de santé et les services sociaux (Québec)
• Loi sur l'assurance automobile (Québec)
• Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles (Québec)
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• Loi sur le curateur public (Québec)


• Loi sur les marques de commerce (Canada)
• Loi sur les biens culturels (Québec)
• Loi sur la Régie du logement (Québec)
• Loi de l'impôt sur le revenu (Canada)
• Loi sur les impôts (Québec)

Ainsi, aux dispositions générales du Code civil, viennent s'ajouter une foule de lois
(fédérales ou provinciales), le tout complété par un très grand nombre de règlements
adoptés en vertu de ces lois.

Dans sa pratique, le juriste québécois doit faire face à toutes ces dispositions
législatives. Il est fréquent qu'il lui faille se référer à plusieurs lois et règlements différents
pour résoudre un problème juridique.

1.3 — Sources du droit

En plus des Codes, lois et règlements, qu'on désigne généralement sous le vocable
«législation», le juriste québécois pourra aussi se référer à la «jurisprudence» et à la
«doctrine» pour compléter son analyse d'une situation.

La «jurisprudence», c'est l'ensemble des décisions des tribunaux, dont le rôle consiste à
interpréter la législation et son application à une situation particulière. Bien que les
tribunaux du Québec n'aient pas le pouvoir de créer des règles de droit, leur
interprétation des textes de lois dans la situation qui se présente devant eux permet aux
juristes de clarifier le sens de certaines dispositions législatives qui sont parfois rédigées
en termes très généraux. Il existe au Québec différents paliers de tribunaux.

Les tribunaux de première instance, soit ceux auxquels s'adressent les parties pour
présenter leur litige la première fois, se divisent d'abord en fonction de la valeur de la
réclamation, puis de la nature du litige. Il existe des tribunaux de droit commun et des
tribunaux spécialisés.

Les tribunaux de droit commun sont :

• La Cour du Québec — qui comporte quatre divisions :


– la division des petites créances, qui entend les litiges de nature civile pour
lesquels la valeur réclamée n'excède pas 15 000 $;
– la chambre civile, qui entend les litiges de nature civile pour lesquels la
valeur réclamée excède 15 000 $ sans dépasser 70 000 $ et les demandes
de révision judiciaire en provenance des tribunaux spécialisés;
– la chambre de la jeunesse, qui entend les litiges qui touchent notamment
les poursuites contre les jeunes contrevenants (14 à 18 ans), les demandes
relatives à la sécurité ou au développement des enfants qui impliquent la
direction de la protection de la jeunesse (DPJ) ou encore les causes relatives
à l'adoption, locale ou internationale;

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– la chambre pénale et criminelle, qui entend notamment les causes où il y a


eu contravention à des dispositions du Code criminel ou de toute autre loi à
caractère pénal, c'est-à-dire une loi qui impose des pénalités lorsqu'il y a
atteinte aux biens publics ou à la sécurité de la société.
• La Cour supérieure du Québec dont la juridiction s'étend :
– à tout litige civil dans lequel la valeur réclamée excède 70 000 $;
– à tout litige en matière familiale ou personnelle (divorce, réclamation de
pension alimentaire, requête en filiation, ouverture d'un régime de protection
pour une personne inapte);
– à tout litige en matière successorale (vérification, contestation ou
interprétation d'un testament, nomination ou destitution d'un liquidateur,
modification ou fin de fiducie, etc.);
– à tout litige de droit commun pour lequel aucune autre Cour n'a de
juridiction exclusive.

Les tribunaux spécialisés sont des tribunaux qui ont une vocation particulière et qui sont
généralement créés par une loi particulière afin d'entendre des litiges qui concernent
l'application précise de cette loi, par exemple :

• La Régie du logement
• Le tribunal des professions
• La Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail
• La Commission de protection du territoire agricole
• Les différents «comités de discipline» des ordres professionnels
• Le tribunal administratif du Québec
• La Cour municipale

Les décisions de ces tribunaux spécialisés peuvent parfois faire l'objet d'une révision
judiciaire par la Cour du Québec.

Lorsque la décision du tribunal de première instance ne satisfait pas les parties, il est
parfois possible de demander à un tribunal supérieur de revoir la décision. Les décisions
de la Cour du Québec, division des petites créances, sont finales et sans appel, alors
que les décisions de la Cour du Québec ou de la Cour supérieure du Québec peuvent
être révisées par un tribunal supérieur si les parties considèrent qu'il y a eu erreur dans
l'application du droit. On dira alors qu'on va «en appel» de la décision rendue. C'est la
Cour d'appel du Québec qui a juridiction pour rendre les décisions en deuxième
instance. La Cour d'appel du Québec est le plus haut tribunal de la province et elle peut
soit confirmer la décision de la cour inférieure ou infirmer cette décision, en tout ou en
partie.

Enfin, les parties insatisfaites d'une décision de la Cour d'appel du Québec peuvent
parfois porter cette décision en appel devant la Cour suprême du Canada, qui est un
tribunal pancanadien qui entend des litiges provenant de toutes les provinces
canadiennes. La Cour suprême du Canada choisit les litiges qu'elle accepte d'entendre.
Ainsi, on doit procéder en deux étapes : d'abord demander à la Cour la permission d'en
appeler d'une décision et, si la Cour accorde cette permission, on pourra présenter les
arguments des parties en troisième instance. Une décision de la Cour suprême du

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Canada n'est pas susceptible d'être révisée, elle est finale.

On comprendra aisément que plus une décision émane d'une instance supérieure, plus
elle a de poids quant à l'interprétation à donner à un texte de loi dans une situation
particulière.

Les juristes québécois ont aussi recours à la «doctrine», soit l'ensemble des écrits des
auteurs, pour interpréter tant la législation que la jurisprudence. Les professeurs et les
praticiens du droit commentent régulièrement les décisions des tribunaux et les
dispositions législatives et ces commentaires constituent une source importante
d'information légale. Des auteurs spécialisés traitent d'un sujet particulier en droit et
feront l'analyse des textes de loi et des décisions des tribunaux rendues en application
de ceux-ci. Leurs commentaires sur la législation et la jurisprudence peuvent inspirer les
tribunaux à rendre leurs décisions et même le gouvernement à modifier certains textes
de loi. En ce sens, la doctrine permet parfois de faire avancer le droit sur certains sujets
et permet aux juristes de se familiariser avec certains aspects. Le présent module
constitue de la doctrine puisqu'il explique certaines règles de droit applicables et cible
celles qui ont un impact sur la pratique du planificateur financier.

1.4 — Approche préconisée

Chacun des chapitres du présent module cerne les aspects juridiques que le
planificateur financier est le plus susceptible de rencontrer au cours de sa pratique. Il
s'agit en fait de dispositions juridiques pouvant affecter d'une manière ou d'une autre le
patrimoine des individus. Les auteurs font une synthèse de chacun des éléments
juridiques traités, de façon à permettre au planificateur financier qui n'est pas juriste
d'obtenir rapidement l'information générale dont il peut avoir besoin. Par le fait même, il
sera davantage apte à guider son client, tout en respectant toutefois les limites de ses
champs de compétence.

Par ailleurs, le domaine juridique étant, comme tous les autres domaines, en évolution
constante, le planificateur financier prendra soin de mettre à jour ponctuellement ses
compétences par le biais de la formation continue au cours de laquelle il pourra,
notamment, approfondir certains des aspects traités dans ce module.

Chapitre 2 — Analyse de situations juridiques


courantes et des documents légaux incidents

Les situations juridiques fréquemment rencontrées en pratique seront maintenant


traitées. Seront d'abord analysées successivement les implications de l'état civil et du
régime matrimonial, les dispositions relatives à la protection des personnes mineures et
des personnes majeures inaptes; l'étude se terminera par un survol des règles
concernant le mandat (communément appelé «procuration»).

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Dans le présent chapitre, le terme «époux» désigne les conjoints mariés ou unis
civilement.

(2) 2.1 — État civil

La naissance, le mariage ou l'union civile et la mort constituent les trois grandes étapes
de la vie d'une personne que la société enregistre officiellement et consigne sur papier.
Les actes de l'état civil, qui constatent ces événements, permettent la reconnaissance
de certains droits et privilèges dont peut bénéficier une personne et déterminent
également les obligations qui lui incombent. D'autres événements peuvent également
modifier l'état civil d'une personne : un divorce, une adoption, un changement de nom,
un changement de sexe.

Depuis la mise en vigueur du Code civil du Québec le 1er janvier 1994, seul le directeur
de l'état civil peut dresser un acte de naissance, de mariage, d'union civile ou de décès
et l'inscrire dans le registre de l'état civil dont il assure par ailleurs la garde et la publicité.

Connaître l'état civil d'une personne permet d'évaluer l'étendue de ses droits et de ses
obligations envers ses proches. En effet, une personne divorcée peut avoir des
obligations envers un ex-époux qu'une personne célibataire ne peut avoir envers un ex-
conjoint en vertu du Code civil. D'ailleurs, le divorce ou la dissolution de l'union civile ne
permet jamais la reprise du statut de célibataire aux fins de l'état civil.

Ainsi, les pouvoirs d'une personne mariée ou unie civilement quant à la gestion de ses
biens sont touchés alors qu'une personne veuve peut avoir des droits à faire valoir sur le
patrimoine de son défunt époux.

2.1.1 — Actes de l'état civil


Acte de naissance
L'acte de naissance sert à établir l'identité d'une personne, à prouver sa nationalité, son
nom, son sexe, son âge et ses liens de parenté. Il est aussi utilisé par les personnes qui
veulent se prévaloir de certains programmes gouvernementaux, ou bénéficier de
prestations diverses ou, encore, pour s'inscrire à l'école.

Acte de mariage ou d'union civile


L'acte de mariage ou d'union civile permet d'établir la légalité du mariage ou de l'union
civile et d'en assurer tous les effets civils, par exemple relativement à la pension
alimentaire, aux successions, à la présomption de paternité, etc.

Acte de décès
L'acte de décès permet de commencer le processus de règlement d'une succession,
d'établir à l'égard de la personne décédée le jour où les diverses prestations (rentes du
Québec, rentes privées, etc.) cessent de lui être versées et le moment où les
programmes gouvernementaux ne lui sont plus applicables.

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2.1.2 — Détermination de l'état civil


Les états civils reconnus légalement sont les suivants :

• Célibataire
• Marié(e)
• Uni(e) civilement
• Séparé(e) de corps
• Divorcé(e)
• Désuni(e) civilement
• Veuf(ve)

Cet état civil est généralement indiqué lorsqu'une personne est identifiée dans un acte
juridique comme un acte de vente de propriété, une hypothèque immobilière ou encore
un testament. En effet, il est parfois nécessaire de connaître et de comprendre les
répercussions de l'état civil d'une personne sur un acte qu'elle s'apprête à poser ou à
signer. Nous verrons ci-après que le mariage ou l'union civile peuvent avoir des
répercussions plus ou moins importantes sur les pouvoirs qu'ont les époux sur leurs
biens pendant l'union. De la même façon, le fait qu'un individu soit séparé, veuf, divorcé
ou désuni indique qu'une union précédente a été dissoute et qu'il est probable que cette
union précédente ait encore des répercussions sur les finances de cet individu. Ce serait
le cas si l'un des ex-conjoints versait une pension alimentaire à l'autre pour lui-même ou
pour les enfants nés de l'union.

Aussi, il importe de souligner que malgré qu'il soit possible que des individus vivent en
union de fait depuis plusieurs années, cet état n'est pas reconnu aux fins du Code civil
du Québec. En conséquence, les individus qui forment cette union demeurent, aux fins
civiles, sous leur état civil antérieur. Par exemple, Marie pourrait être divorcée d'un
premier mariage et vivre en union de fait avec Paul qui n'a jamais été marié ou uni
civilement. L'état civil de Marie serait «divorcée» alors que celui de Paul serait
«célibataire».

(1) 2.2 — Mariage (art. 365 et s. C.c.Q.)

Depuis le 20 juillet 2005, la loi fédérale qui régit les conditions de fond du mariage, à
savoir les exigences requises pour contracter un mariage valide, reconnaît que «Le
mariage est, sur le plan civil, l'union légitime de deux personnes, à l'exclusion de toute
autre personne.» (Loi sur le mariage civil, L.C. 2005, ch. 33). Ainsi, l'institution du
mariage n'est plus réservée aux seuls couples composés d'un homme et d'une femme,
comme c'était le cas avant cette date.

Le mariage, qu'il soit contracté dans le cadre d'une célébration civile ou religieuse, dans
la province de Québec ou à l'étranger, emporte des droits et des obligations pour les
époux. Certains de ces droits et obligations dépendent du contrat de mariage que
peuvent signer les époux avant ou après leur mariage, alors que d'autres, jugés
fondamentaux, s'appliquent obligatoirement à tous les époux qui sont domiciliés au
Québec, indépendamment de leurs conventions matrimoniales. Ce sont les règles que le
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Code civil définit au titre des «effets du mariage» et que les juristes qualifient de «régime
primaire».

D'ailleurs, le Code civil prévoit que les époux ne peuvent déroger à ces droits et devoirs
fondamentaux, quel que soit leur régime matrimonial.

Les principaux droits et devoirs imposés à tout époux, du seul fait du mariage, sont les
suivants (art. 392 et suivants C.c.Q.) :

• les époux ont en mariage les mêmes droits et les mêmes obligations;
• ils se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance;
• ils sont tenus de faire vie commune;
• chaque époux conserve son nom;
• ils assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille;
• ils exercent ensemble l'autorité parentale;
• ils choisissent ensemble la résidence familiale;
• ils contribuent aux charges du mariage en proportion de leurs facultés
respectives. Chaque époux peut s'acquitter de sa contribution par son activité au
foyer;
• une protection est accordée au lieu qui sert de résidence familiale et aux meubles
qui garnissent ou ornent celle-ci;
• un patrimoine familial est formé dès l'instant de l'union et devra être partagé en
cas de rupture du lien matrimonial;
• les époux sont assujettis à un régime matrimonial.

(1) 2.3 — Union civile (art. 521.1 et s. C.c.Q.)

Le 24 juin 2002, entrait en vigueur la loi instituant l'union civile2. Cette loi s'inscrivait dans
une démarche de reconnaissance des conjoints de même sexe qui souhaitaient
s'engager publiquement à faire vie commune. Le contexte constitutionnel ne permettait
pas au législateur québécois d'offrir aux conjoints de même sexe la possibilité de se
marier. Par conséquent, il a été décidé de créer cette nouvelle institution qu'est l'«union
civile», et de permettre à tous les couples, de même sexe ou de sexe différent, de s'unir
civilement au lieu de se marier.

2.3.1 — Effets de l'union civile


L'union civile produit les mêmes effets que le mariage et, conséquemment, entraîne les
mêmes droits et obligations pour les conjoints. Ainsi, outre le devoir mutuel de
respect, de fidélité, de secours et d'assistance, les personnes unies civilement se verront
entre autres assujetties aux règles du patrimoine familial, de l'obligation alimentaire, de
la prestation compensatoire et à la protection de la résidence familiale et des meubles
meublants. Il faut donc retenir que tous les droits et obligations des époux qui sont
décrits dans le présent module s'appliquent tant aux personnes mariées qu'aux
personnes unies civilement.

2.3.2 — Dissolution de l'union civile


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Les causes de dissolution de l'union civile énumérées à l'article 521.12 C.c.Q. sont le
mariage des mêmes conjoints (il y a alors continuité du lien; les effets de l'union civile
sont maintenus et considérés comme des effets du mariage), le décès du conjoint
(incluant le jugement déclaratif de décès en cas d'absence d'un des deux conjoints), le
jugement en dissolution rendu par un tribunal ou la déclaration commune notariée.

En cas de rupture, on voit que la dissolution de l'union civile peut être obtenue soit par
une démarche en justice ou par une déclaration notariée. Cette dernière avenue
constitue une innovation en droit québécois puisqu'elle permet aux conjoints qui
s'entendent sur le règlement des conséquences de leur séparation d'obtenir la
dissolution de leur union en s'adressant à un notaire, sans intervention du tribunal à
quelque niveau que ce soit.

Par contre, la dissolution devra être prononcée par le tribunal si les intérêts des enfants
communs sont en cause. Le tribunal veille alors à protéger les droits des enfants
notamment en ce qui a trait à leur garde, aux droits de visite et à la pension alimentaire.
Il est à noter que les enfants communs majeurs, s'ils étaient encore à la charge de leurs
parents, seraient également visés par cette protection.

2.3.3 — Union civile versus mariage civil


Il ne faut pas confondre union civile et mariage civil. Pour bien des gens, le solennel
mariage religieux constitue le seul gage solide de la reconnaissance sociale, et même
juridique, d'une union. Encore aujourd'hui, des couples remettent en question les effets
d'un mariage civil, lequel n'implique pourtant aucune différence d'un point de vue
juridique avec le mariage traditionnel. À cet égard, seule la forme de la célébration les
distingue.

L'article 365 C.c.Q. énonce que :


Le mariage doit être célébré publiquement devant un célébrant compétent et en
présence de deux témoins.

L'article 366 C.c.Q. précise qui sont des célébrants compétents. Ainsi, les greffiers, les
greffiers-adjoints de la Cour supérieure, les notaires et les ministres du culte habilités à
le faire par la société religieuse à laquelle ils appartiennent, pourvu qu'ils résident au
Québec sont des célébrants reconnus compétents.

Le mariage peut donc être uniquement civil, s'il est célébré par une personne autre qu'un
ministre du culte.

Le mariage dit «religieux» est celui célébré par un ministre du culte. Ce mariage dit
«religieux» inclut naturellement les effets civils du mariage.

Quant à l'union civile, elle peut aussi être célébrée par un ministre du culte (art. 521.2
C.c.Q.).

Le mariage civil est donc un mariage et l'union civile, une autre forme d'union qui se
distingue du mariage principalement quant à ses modalités de dissolution.

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2.3.4 — Union civile versus mariage


Il est facile de tomber dans le piège de dire que les règles et les effets de l'union civile
sont identiques à tout point de vue aux règles et effets du mariage. Tel n'est pas le cas.
Voici les principales différences que l'on peut soulever et qui existent entre ces deux
institutions :

• l'âge pour s'unir civilement est de 18 ans, alors qu'il est possible de se marier à
16 ans avec l'autorisation du tribunal;
• l'union civile n'est reconnue qu'au Québec;
• les modes de dissolution de l'union diffèrent : l'union civile se dissout par le
mariage des deux conjoints, par le décès de l'un des conjoints, par un jugement du
tribunal constatant la nullité ou la dissolution de l'union ou par une déclaration
commune notariée de dissolution (possible seulement si le couple n'a aucun
enfant). Le mariage se dissout par le décès de l'un des époux, l'annulation du
mariage ou le divorce;
• la séparation de corps n'est possible que pour les couples mariés.

(1) 2.4 — Patrimoine familial

Le 1er juillet 1989, entrait en vigueur la Loi modifiant le Code civil du Québec et d'autres
dispositions législatives afin de favoriser l'égalité économique des époux (L.Q. 1989, c.
55), laquelle créait un patrimoine familial. Ces dispositions, maintenant incorporées au
Code civil, font en sorte que, dorénavant, peu importe le régime matrimonial choisi, la
valeur de certaines catégories de «biens familiaux» est sujette à partage en cas de
séparation de corps, de dissolution ou de nullité du mariage ou de l'union civile. Ainsi, le
sort des biens faisant partie du patrimoine familial sera régi par les dispositions
spécifiques qui suivent. Rappelons cependant qu'il faut encore se référer au régime
matrimonial ou d'union civile pour déterminer le sort des autres biens advenant la
séparation de corps, la dissolution ou la nullité du mariage ou de l'union civile.

2.4.1 — Création du patrimoine familial


Au départ, une précision s'impose : malgré le qualificatif de «familial», le patrimoine
existe qu'il y ait des enfants ou non, et ce, peu importe lequel des deux conjoints est
propriétaire des biens.

Le Code civil considère que le patrimoine familial est créé par le seul fait du mariage ou
de l'union civile (art. 414 et 521.6 C.c.Q.).

Ce faisant, à l'égard des biens énumérés ci-après, les règles du patrimoine familial ont
préséance sur tous les autres régimes matrimoniaux ou d'union civile et s'appliquent
d'office aux couples mariés ou unis civilement. Cependant, certains d'entre eux ont pu se
soustraire aux règles du patrimoine familial avec, comme conséquence, que seul leur
régime matrimonial régira le sort réservé aux biens possédés par eux advenant
séparation de corps, dissolution ou nullité du mariage. Ainsi, ne sont pas soumis aux
règles du patrimoine familial :
er
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• les couples mariés avant le 1er juillet 1989 et qui ont signé une déclaration
notariée à cet effet au plus tard le 31 décembre 1990;
• les couples mariés avant le 1er juillet 1989 qui l'ont requis lors d'une instance en
séparation de corps, en divorce ou en nullité de mariage intentée au plus tard le 31
décembre 1990;
• les époux séparés de fait avant le 15 mai 1989 et qui ont réglé les conséquences
de leur séparation;
• enfin, les règles du patrimoine familial ne s'appliquent pas non plus aux époux qui
étaient en instance de séparation de corps, de divorce ou d'annulation de mariage
avant le 15 mai 1989.

Hormis ces exceptions, tous les couples mariés ou unis civilement sont soumis aux
règles du patrimoine familial en cas de dissolution de leur union survenant alors qu'ils
sont domiciliés au Québec.

2.4.2 — Biens composant le patrimoine familial (art. 415 C.c.Q.)


Le patrimoine familial est constitué des biens suivants, dont l'un ou l'autre des conjoints
est propriétaire :

• les résidences de la famille ou les droits qui en confèrent l'usage;


• les meubles qui garnissent ou ornent lesdites résidences et qui servent à l'usage
du ménage;
• les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la famille;
• les droits accumulés durant le mariage ou l'union civile au titre d'un régime de
retraite;
• les gains inscrits durant le mariage ou l'union civile en application de la Loi sur le
régime de rentes du Québec ou de programmes équivalents (sauf en cas de
décès).

Le Code Civil définit l'expression «régime de retraite» pour les fins de l'application du
patrimoine familial à l'alinéa 5 de l'article 415 C.c.Q. Cette disposition limite la portée de
cette expression aux RPA (incluant les RVER et RRI), régimes d'épargne-retraite
(REER, FERR, CRI et FRV) et aux autres instruments d'épargne-retraite comme les
rentes enregistrées. En sont ainsi exclus les régimes surcomplémentaires de retraite
(«top hat» ou SERP), les RPDB et les CELI (incluant les CELI collectifs).

2.4.3 — Biens exclus du patrimoine familial


Sont exclus du patrimoine familial :

• les biens acquis par succession ou donation avant ou pendant le mariage ou


l'union civile de même que toute plus-value accumulée relativement à ceux-ci;
• lorsque la dissolution découle du décès, les gains inscrits durant le mariage au
nom de chaque époux en application de la Loi sur le régime de rentes du Québec
ou de programmes équivalents;
• lorsque la dissolution découle du décès, les droits accumulés au titre d'un régime
de retraite régi ou établi par une loi qui accorde au conjoint survivant le droit à des
prestations de décès.

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Cette dernière exclusion fait l'objet d'une certaine controverse dans son interprétation.
De façon littérale, on peut résumer comme suit son application :

Si A décède Si B décède

Cotisant A (son régime Les droits accumulés de Les droits accumulés de


de retraite privé prévoit A sont exclus du A sont exclus du
des prestations1 au patrimoine familial. patrimoine familial.
conjoint survivant)

Le conjoint B reçoit la ou La prestation n'est pas


les prestations2. versée, le cotisant A
n'étant pas décédé2.

Cotisant B (son régime Les droits accumulés de Les droits accumulés de


de retraite ne prévoit pas B sont inclus dans le B sont inclus dans le
de prestations1 au patrimoine familial. patrimoine familial.
conjoint survivant)

1. Il peut s'agir d'une prestation forfaitaire si la rente n'a pas commencée à être servie au
moment du décès.
2. Le but de cette exclusion est d'éviter que, en raison des droits prioritaires accordés au
conjoint survivant en cas de décès d'un participant à un régime de retraite, le conjoint
survivant ne se retrouve avec 150 % de la valeur du régime à la suite du décès du
participant. En effet, si le survivant a droit à la prestation de décès du régime (100 %) et
qu'il avait aussi eu droit à la moitié de la valeur du régime au titre du patrimoine familial
(50 %), il aurait ultimement eu droit à 150 % de cette valeur. Cela dit, ce n'est pas
toujours le conjoint marié qui a droit à la prestation de décès du régime de retraite.

2.4.4 — Partage du patrimoine familial


La séparation de corps, le décès, la dissolution par divorce, par jugement du tribunal ou
par déclaration commune notariée et la nullité du mariage ou de l'union civile donnent
ouverture au partage du patrimoine familial. Il convient de souligner que le partage du
patrimoine familial s'opère en valeur et non en nature. Ainsi, les époux ne sont pas
copropriétaires indivis des biens composant le patrimoine familial. Au contraire, chaque
époux demeure titulaire du droit de propriété du bien lui appartenant et qui est inclus
dans le patrimoine familial. Le résultat des opérations du partage fera en sorte qu'un des
époux sera créancier de l'autre, la valeur de cette créance étant déterminée selon les
règles propres au partage du patrimoine familial. C'est la valeur du patrimoine familial
(plutôt que les biens qui le composent) qui sera partagée en parts égales entre les
conjoints (art. 416 C.c.Q.).

Le partage s'opère de la façon suivante :

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• On commence par établir la valeur des biens classifiés comme faisant partie du
patrimoine familial, peu importe que ces biens appartiennent à l'un ou l'autre des
conjoints.
– La valeur de chaque bien s'apprécie normalement au jour du partage. Le
jour du partage se réfère à la date du décès de l'époux ou à la date
d'introduction de l'instance en vertu de laquelle il est statué sur la séparation
de corps, le divorce, la dissolution ou la nullité de mariage ou de l'union civile,
selon le cas. À la demande de l'un des époux, le tribunal peut aussi décider
que la valeur sera établie à la date de cessation de la vie commune (art. 417,
al. 2 C.c.Q.). Les biens sont évalués à leur valeur marchande.
• On doit ensuite déduire de la valeur desdits biens le montant des dettes
contractées pour l'acquisition, l'amélioration, l'entretien ou la conservation de ces
biens (art. 416 C.c.Q.), ce qui donne la valeur nette des biens composant le
patrimoine familial.
• On déduit également de la valeur desdits biens (art. 418 C.c.Q.) :
– la valeur nette d'un bien du patrimoine familial qui était possédé au moment
du mariage ou de l'union civile, ainsi que la proportion de la plus ou moins-
value accumulée pendant le mariage sur ce bien qui est attribuable à cette
valeur nette possédée au moment du mariage;
– l'apport fait pendant le mariage ou l'union civile par l'un ou l'autre des époux
sur un bien du patrimoine familial lorsque cet apport a été fait à même des
biens échus par succession ou donation, ainsi que la proportion de la plus ou
moins-value accumulée pendant le mariage sur ce bien qui est attribuable à
cet apport; ou
– le remploi d'un bien du patrimoine familial possédé au jour du mariage ou
de l'union civile ou d'un apport fait pendant le mariage ou l'union civile sur un
bien du patrimoine familial à même des biens échus par succession ou
donation, ainsi que la plus ou moins-value proportionnelle y attribuable.

Attention, les déductions permises par l'article 418 C.c.Q. sont certes généreuses, mais
elles sont limitées. Ainsi, si un époux peut déduire la valeur nette d'un bien du patrimoine
familial possédé avant le mariage, il ne peut pourtant pas déduire la valeur d'un autre
type de bien (par exemple de l'argent comptant) possédé avant le mariage, mais utilisé
pendant le mariage pour acquérir un bien du patrimoine familial. Par exemple,
supposons que Monsieur possède 10 000 $ d'économies accumulées et qu'il se
questionne sur l'opportunité de faire une contribution REER avant ou après la date du
mariage. Dans l'hypothèse où la cotisation est faite avant le mariage, le 10 000 $ de
REER possédé avant le mariage et toute plus-value acquise pendant le mariage sur ce
bien ne fera pas partie de la valeur partageable des biens du patrimoine familial. À
l'opposé, si la contribution est faite pendant le mariage, il s'agira alors de «droits
accumulés pendant le mariage au titre d'un régime de retraite», lesquels sont
entièrement partageables, et aucune déduction ne sera permise en application de
l'article 418 C.c.Q. à l'encontre de la valeur partageable de ces droits.

Nous avons mentionné que l'article 418 C.c.Q. permet également de déduire de la
valeur partageable des biens du patrimoine familial la plus-value (ou la moins-value)
proportionnelle acquise pendant le mariage ou l'union civile, selon les règles suivantes :

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• lorsqu'il s'agit d'un bien du patrimoine familial possédé lors du mariage ou de


l'union civile :

valeur nette lors du mariage ou de l'union × plus-value (ou la moins-value)


civile acquise pendant le mariage ou
l'union civile

valeur brute lors du mariage ou de l'union


civile

ou
• lorsqu'il s'agit d'un apport fait pendant le mariage ou l'union civile sur un bien du
patrimoine familial à même des biens échus par succession ou donation ou leur
remploi :

valeur de l'apport × plus-value (ou la moins-value)


acquise depuis l'apport

valeur brute du bien lors de l'apport

Exemple 2-0.1
Jacques s'est marié avec Andrée le 1er avril 1996. Jacques avait acheté une résidence,
en 1990, au prix de 90 000 $. Il en avait acquitté une partie comptant et avait financé le
solde par un emprunt garanti par une hypothèque sur l'immeuble. Au moment du
mariage, l'immeuble avait une valeur de 100 000 $ et le solde de l'emprunt était à ce
moment de 50 000 $.

Jacques et Andrée pensent divorcer à l'amiable et se demandent quel serait l'effet du


patrimoine familial sur ce bien en considérant que, depuis leur mariage, ils contribuent
également à payer l'hypothèque. La valeur de l'immeuble est présentement de
150 000 $ et le solde de l'hypothèque est de 40 000 $. Se pose alors la question
suivante : Quelle serait la valeur partageable de ce bien en regard des règles sur le
patrimoine familial?

Premièrement :

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Valeur marchande lors du divorce (art. 417 C.c.Q.) 150 000 $

(-) Dettes pour acquisition (art. 417 C.c.Q.) 40 000 $

Valeur nette du patrimoine familial 110 000 $

Deuxièmement :

(-) Valeur nette au moment du mariage (art. 418 C.c.Q.) 50 000 $

(100 000 $ - 50 000 $)

(-) Plus-value acquise après mariage attribuable à la valeur nette 25 000 $*


au moment du mariage (art. 418 C.c.Q.)

* 50 000 $ × 50 000 $

100 000 $

Valeur partageable 35 000 $

Jacques devrait donc payer 17 500 $ à Andrée (35 000 $ ÷ 2 = 17 500 $)

Exemple 2-0.2
Marcel hérite avant son mariage d'une résidence évaluée lors de l'héritage à 100 000 $
et à 150 000 $ lors du mariage. Lors du mariage, le bien est libre de toute dette. En
cours de mariage, Marcel et son épouse habitent cet immeuble en tant que résidence
familiale. Cinq ans après leur mariage, Marcel vend cet immeuble 200 000 $. En utilisant
le plein produit de la vente du premier immeuble (remploi), il acquiert une nouvelle

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résidence familiale au coût de 300 000 $; la différence est financée à même un emprunt
garanti par une hypothèque sur ladite résidence. Lors du divorce quelques années plus
tard, la résidence familiale vaut 400 000 $ et est toujours grevée d'une hypothèque de
50 000 $.

Quel serait la valeur partageable de ce bien en regard des règles sur le patrimoine
familial?

Premièrement :

Valeur marchande lors du divorce (art. 417 C.c.Q.) 400 000_$

(-) Dettes pour acquisition (art. 417 C.c.Q.) 50 000_$

Valeur nette du patrimoine familial 350 000_$

Deuxièmement :

(-) Valeur de l'apport par remploi d'un bien échu par succession 200 000_$
(art. 418, al. 1 C.c.Q.)

(-) Plus-value proportionnelle acquise depuis l'apport (art. 418, al. 66 666_$*
2 C.c.Q.)

* 200 000 $ × 100 000 $

300 000 $

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Valeur partageable 83 333_$

Marcel devrait donc payer 41 666 $ à sa conjointe (83 333 $ ÷ 2 = 41 666 $).

Une fois ces règles de calcul opérées, l'exécution du partage s'effectue en numéraire
(paiement en argent) ou par dation en paiement (paiement par remise d'un bien).

Il est à noter qu'en certains cas, le tribunal peut, sur demande, déroger au principe du
partage égal et décréter que le partage se fera entre les époux en parts inégales (art.
422 C.c.Q.).

À la suite de ce partage du patrimoine familial, il y a lieu de régler le sort des autres


biens selon les règles du régime matrimonial.

2.4.4.1 — Doit-on considérer l'impôt sur les biens?


Le transfert de biens entre conjoints et ex-conjoints s'effectue par voie de roulement
fiscal (voir module 5, Fiscalité). Doit-on tenir compte de la facture fiscale latente sur un
bien lorsque l'on fait l'évaluation aux fins du calcul du patrimoine familial? Le Code civil
du Québec ne prévoit aucune disposition permettant de tenir compte des charges
fiscales pouvant être rattachées aux biens du patrimoine familial lors de l'évaluation de
sa valeur partageable. De ce strict point de vue, la valeur partageable du patrimoine
familial doit être évaluée indépendamment des caractéristiques fiscales des biens qui le
composent. Il faut dire qu'il serait difficile, voire impossible compte tenu du nombre de
variables dont il faudrait tenir compte, d'établir une valeur partageable «après impôt».

Toutefois, il semble que plusieurs auteurs et la jurisprudence soient d'avis que la charge
fiscale doit être prise en considération dans l'évaluation de la valeur nette, ainsi que
lorsque les modalités de partage sont établies, le tout pour obtenir un partage équitable.

Aussi, il faut distinguer l'étape de l'établissement de la valeur du patrimoine familial de


celle de l'exécution du partage.

Généralement, on ne tiendra pas compte de l'incidence fiscale à l'étape de


l'établissement de la valeur du patrimoine familial, sauf en ce qui concerne la tendance
des tribunaux à considérer le partage des régimes de retraite séparément des autres
biens3. D'ailleurs, le formulaire «Calcul de l'état du patrimoine familial» de la Cour
supérieure du Québec prévoit des calculs distincts pour les régimes de retraite, pour les
gains inscrits au RRQ et pour les autres biens4.

Cependant, il sera possible d'en tenir compte au moment de l'exécution du partage,


selon le cas5.

Exemple 2-0.3

Biens faisant partie du patrimoine familial

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Pierre Lucie

Résidence principale 400 000 $

Résidence secondaire 250 000 $

Automobiles 35 000 $ 35 000 $

REER 150 000 $

Total 585 000 $ 285 000 $

Par suite du partage, Pierre doit 150 000 $ à Lucie.

Pierre pourrait transférer 75 000 $ de REER par roulement fiscal et régler le 75 000 $
restant avec d'autres biens, tel de l'argent.

À cet égard, il est important de rappeler que lors de l'exécution du partage, les époux (ou
conjoints) peuvent convenir de se transférer la propriété d'autres biens que ceux
composant le patrimoine familial. Enfin, lorsque les conjoints sont propriétaires de plus
d'une résidence pouvant se qualifier à titre de résidence principale, il pourrait être utile
de suggérer aux époux (ou conjoints) de convenir immédiatement du partage entre eux
des années de désignation de chaque propriété à titre de résidence principale aux fins
de l'exonération de gains en capital sur une résidence principale (pour plus de détails,
consultez le chapitre 5 du module Fiscalité).

2.4.4.2 — Biens appartenant à une société par actions ou à une fiducie


Qu'en est-il des biens faisant partie du patrimoine familial (ex : résidence) qui
appartiennent ou auraient été transférés en cours de route à une société par actions ou
à une fiducie?

Rappelons que l'article 415 C.c.Q. stipule que le patrimoine familial est constitué des
résidences de la famille ou des droits qui en confèrent l'usage.

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Or, c'est justement le fait que l'un des conjoints conserve le droit d'utiliser la résidence de
par son statut d'actionnaire ou de bénéficiaire de la fiducie qui permet aux tribunaux6
d'inclure la valeur de ces droits (souvent équivalente à la valeur du bien) dans le calcul
du patrimoine familial, quoique ces biens appartiennent à un autre patrimoine juridique
(société ou fiducie).

Ainsi, un conjoint qui aurait transféré la résidence à sa société par actions dans le but de
la soustraire à un partage éventuel du patrimoine familial verrait sa manœuvre
inefficace, car la valeur de cette résidence serait quand même prise en compte dans le
calcul.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Pierre, célibataire, possède un bon compte en banque. Il envisage de se marier dans


quelques mois et il se demande s'il devrait faire l'acquisition de la résidence familiale
avant de se marier ou après, car de toute évidence, c'est lui qui paiera cette résidence
en totalité avec ses économies déjà accumulées.

Réponse : Il serait préférable qu'il acquière la résidence avant le mariage afin que sa
mise de fonds ne soit pas partageable advenant une dissolution éventuelle de leur
union. Si la résidence était acquise après le mariage, cette mise de fonds (ne provenant
pas d'un héritage ou d'une donation), ne pourrait être déduite dans le calcul de la valeur
partageable du patrimoine familial.

2.4.5 — Renonciation au partage


Il est bien sûr possible que les époux soumis aux règles du patrimoine familial renoncent
au partage de ce patrimoine. Cependant, cette renonciation ne peut se faire avant
l'événement y donnant ouverture (soit le décès, le jugement de divorce, de séparation de
corps ou de nullité de mariage ou la nullité ou la dissolution de l'union civile). Donc, il est
impossible de renoncer à l'avance, par contrat de mariage ou par un autre acte, au
partage du patrimoine familial. Ce n'est qu'à l'ouverture du droit au partage, soit une fois
qu'un des événements mentionnés précédemment sera survenu et que les calculs visant
à établir la valeur partageable auront été faits, que l'on pourra renoncer au partage du
patrimoine familial.

L'article 423 C.c.Q. édicte les modalités de cette renonciation. Celle-ci doit être faite par
acte notarié en minute ou par une déclaration judiciaire dont il est donné acte dans le
cadre de l'instance en divorce, en séparation de corps ou en nullité de mariage ou de la
nullité ou de la dissolution de l'union civile. De plus, cette renonciation doit être inscrite
au registre des droits personnels et réels mobiliers. Faute d'inscription de cette
renonciation dans un délai d'un an à compter du jour de l'ouverture du droit au partage,
l'époux renonçant est réputé avoir accepté le partage du patrimoine familial.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION
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Il n'est pas rare qu'une disposition testamentaire prévoie que le conjoint doit renoncer à
ses droits dans le partage du patrimoine familial et à ses autres droits matrimoniaux pour
profiter des legs ou des avantages qui lui sont conférés par le testament. Puisque cette
renonciation est sujette aux modalités de l'article 423 C.c.Q., le conjoint survivant a tout
intérêt à être informé de l'existence de cette condition et du fait que la renonciation doit
avoir lieu dans le délai d'un an suivant le décès. Autrement, le conjoint serait présumé
avoir accepté le partage et perdrait les avantages qui lui auraient autrement été conférés
par testament. Il est toutefois utile de noter qu'il peut s'avérer avantageux pour le
conjoint survivant de renoncer aux avantages testamentaires pour profiter de ses droits
matrimoniaux, notamment lorsque les avantages prévus au testament sont minimes par
rapport à la créance ou encore lorsque le testament prévoit avantager le conjoint par
l'entremise d'une fiducie plutôt qu'en pleine propriété.

2.4.6 — Transmissibilité
Dès l'instauration des règles concernant le patrimoine familial en 1989, la question à
savoir si le droit au partage était un droit transmissible aux héritiers s'est posée. Nous
avons assisté à une panoplie d'opinions doctrinales divergentes ainsi qu'à des
jugements totalement contradictoires sur ce point.

Cependant, en 2002, dans les affaires Lamarche c. Olé-Widholm7 et Banque Nationale


du Canada c. Sciascia-Trapani8, la Cour d'appel a tranché définitivement la question et a
reconnu le caractère transmissible de ce droit de créance tant en faveur des héritiers
que des créanciers du défunt. Imaginez un peu : Pierre est marié en secondes noces
avec Monique depuis 15 ans. Pierre avait eu deux enfants de sa première union.
Comme Pierre a peu d'actifs et que tous les biens (résidence, REER, meubles, etc.) sont
au nom de Monique, car elle était la seule à avoir un emploi vraiment rémunérateur, il
décide de léguer la totalité de ses quelques biens de très peu de valeur à ses deux
enfants nés de sa première union, se disant qu'au moins il leur aura laissé quelque
chose. En raison du caractère transmissible du droit au partage du patrimoine familial,
les deux enfants de Pierre pourraient réclamer de Monique la demie en valeur des biens
qu'elle possède et qui feraient partie du patrimoine familial. Injuste?

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Comment contrer les effets souvent néfastes du droit des héritiers de réclamer au
conjoint survivant leur part du patrimoine familial? Différentes solutions ont été avancées
au fil des ans :
Premièrement, il y a toujours la possibilité de demander au tribunal un partage inégal.
Bien que possible, il n'est pas certain que la demande soit acceptée.

Deuxièmement, les époux pourraient se léguer tous leurs droits dans le patrimoine
familial. Ainsi, le droit de créance serait ainsi légué au conjoint survivant, il y aurait donc
confusion des deux rôles, soit celui de débiteur et de créancier. C'est une bonne
solution, mais il ne faut pas oublier que le testateur peut toujours modifier son testament.

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Troisièmement, le legs aux héritiers pourrait être fait à condition qu'ils renoncent à leurs
droits de réclamer cette créance. Ici encore, le testament peut être modifié
unilatéralement et les héritiers peuvent préférer réclamer la créance plutôt que de
profiter des avantages qui leur sont autrement conférés par le testament.

Dans ces situations de seconde union ou si le conjoint n'est pas le légataire universel
des biens, une attention particulière doit être apportée à cet aspect de la planification
successorale.

Enfin, dans un contrat de mariage ou d'union civile, il est possible de faire une donation
à cause de mort irrévocable et réciproque des droits dans le patrimoine familial au
conjoint survivant.

Il peut en effet arriver qu'aux termes du testament du premier décédé, les légataires
universels soient des personnes autres que le conjoint survivant. Ce genre de situation
survient, notamment, lorsqu'il s'agit d'un remariage, alors que chacun des époux désire
avantager ses enfants nés d'une union précédente. Or ces derniers, à titre de légataires
universels, pourraient exercer les droits du conjoint décédé le premier et exiger le
partage du patrimoine familial. Ces droits étant transmissibles et dans l'hypothèse où le
conjoint survivant est celui des deux conjoints qui est propriétaire des biens ayant la plus
grande valeur partageable au titre du patrimoine familial, ce dernier deviendrait débiteur
de la succession de son conjoint prédécédé, ce qui n'est peut-être pas le résultat
anticipé par les conjoints. Si une disposition irrévocable pour cause de mort était prévue
dans le contrat de mariage des époux, cela ferait en sorte que, peu importent les termes
de leurs testaments présents ou à venir, les droits de requérir le partage du patrimoine
familial ne se transmettront à personne d'autre qu'au conjoint survivant. Notons
cependant que toutes ces solutions ne permettront jamais d'empêcher les créanciers du
conjoint décédé de réclamer du conjoint survivant la créance du patrimoine familial qui
pourrait être due au défunt.

2.4.7 — Pouvoirs du tribunal


Le Code civil accorde au tribunal des pouvoirs discrétionnaires afin de corriger certaines
situations qui pourraient causer préjudice à l'un des deux époux.

Ainsi, le tribunal peut :

• à la demande de l'un ou l'autre des époux ou de leurs ayants cause, décider que
la valeur nette du patrimoine familial sera établie selon la valeur de ces biens et de
ces dettes à la date où les époux ont cessé de faire vie commune plutôt qu'à la
date d'introduction de l'instance (art. 417 al. 2 C.c.Q.);
• permettre que l'époux débiteur exécute son obligation par versements
échelonnés sur une période qui ne dépasse pas dix ans (art. 420 al. 1 C.c.Q.);
• ordonner toute autre mesure qu'il estime appropriée pour assurer la bonne
exécution du jugement et, notamment, ordonner qu'une sûreté soit conférée à l'une
des parties pour garantir l'exécution des obligations de l'époux débiteur (art. 420 al.
2 C.c.Q.);
• lorsqu'un bien qui faisait partie du patrimoine familial a été aliéné ou diverti dans

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l'année précédant le décès de l'un des époux ou l'introduction de l'instance en


séparation de corps, divorce, annulation de mariage ou en nullité ou dissolution
d'union civile et que ce bien n'a pas été remplacé, ordonner qu'un paiement
compensatoire soit fait à l'époux à qui aurait profité l'inclusion de ce bien dans le
patrimoine familial (art. 421 al. 1 C.c.Q.);
• rendre semblable ordonnance également lorsque le bien a été aliéné plus d'un an
avant le décès de l'un des époux ou l'introduction de l'instance et que cette
aliénation a été faite dans le but de diminuer la part de l'époux à qui aurait profité
l'inclusion de ce bien dans le patrimoine familial (art. 421 al. 2 C.c.Q.);
• sur demande, déroger au partage égal et, quant aux gains inscrits en vertu de la
Loi sur le régime de rentes du Québec ou de programmes équivalents, décider
qu'il n'y aura aucun partage de ces gains lorsqu'il en résulterait une injustice,
compte tenu notamment de la brève durée du mariage ou de l'union civile, de la
dilapidation de certains biens par l'un des époux ou encore de la mauvaise foi de
l'un d'eux (art. 422 C.c.Q.).

(1) 2.5 — Régimes matrimoniaux ou d'union civile

Examinons maintenant les règles des régimes matrimoniaux. Les dispositions des
régimes matrimoniaux régiront le sort réservé aux biens autres que ceux faisant partie
du patrimoine familial, advenant dissolution de l'union matrimoniale ou civile. Toutefois, à
l'égard des couples qui ont pu se soustraire aux règles du patrimoine familial, les
dispositions des régimes matrimoniaux régiront le sort réservé à tous les biens.

Il faut noter que le régime matrimonial prend effet au jour de la célébration du mariage,
de l'union civile ou de la modification du régime.

Notez qu'il est possible de signer un contrat de mariage ou d'union civile après que le
mariage ou l'union civile ait été célébré (art. 443 C.c.Q.).

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Le régime matrimonial d'un couple marié sans contrat de mariage (après le 30 juin 1970)
est celui de la société d'acquêts. Ce couple pourrait avoir intérêt à signer un contrat de
mariage en cours d'union et à adopter le régime de la séparation de biens si, par
exemple, l'un des deux conjoints prévoit investir dans une entreprise (notamment à la
suite d'un gel successoral ou lors de la création d'une nouvelle entreprise avec un ou
plusieurs partenaires autres que le conjoint).

Le contrat de mariage qu'ils signeraient après le mariage prévoirait la dissolution du


régime de la société d'acquêts ayant existé depuis l'union et le couple repartirait à neuf
sous le régime de la séparation de biens.

Les régimes suivants seront successivement présentés :

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• le régime de la séparation de biens;


• le régime de la société d'acquêts;
• le régime de la communauté de meubles et d'acquêts.

2.5.1 — Régime de la séparation de biens


Le régime de la séparation de biens requiert la signature d'un contrat de mariage ou
d'union civile notarié. Il est donc impossible pour des époux d'être régis par le régime de
la séparation de biens selon les lois du Québec sans avoir signé de contrat de mariage
ou d'union civile.

Le régime de la séparation de biens est un régime «autonomiste». En effet, sous ce


régime, chaque époux est libre d'administrer, de jouir et de disposer de tous ses biens
(art. 486 C.c.Q.) sous réserve toutefois des dispositions régissant la résidence familiale
(art. 401, 402, 404 et 405 C.c.Q.).

En cas d'impossibilité pour un époux de se justifier d'un droit exclusif sur un bien, ce
dernier est présumé appartenir aux deux époux, indivisément, en parts égales (art. 487
C.c.Q.).

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Si les conjoints sont déjà propriétaires de biens lors de la signature du contrat de


mariage, il serait prudent d'annexer la liste des biens appartenant à chacun.

Conserver les preuves d'achat des biens de grande valeur afin d'être capable d'en établir
la propriété advenant une dissolution de l'union.

Chaque époux est également seul responsable de ses dettes, à l'exception toutefois des
dettes contractées pour les besoins courants de la famille (art. 397 C.c.Q.).

Le régime de la séparation de biens se dissout par les causes suivantes :

• le décès de l'un des conjoints;


• le changement conventionnel de régime pendant le mariage;
• le jugement prononçant le divorce ou la dissolution de l'union civile;
• la nullité de mariage ou de l'union civile (dans le cas où il aurait quand même
produit des effets).

À la suite de cette dissolution, chaque époux conserve les biens dont il est propriétaire;
en principe, aucun partage n'interviendra. Cependant, il y aura lieu de partager les biens
du patrimoine familial et les biens détenus en indivision, le cas échéant.

Exemple 2-0.4
Manon et Marc-André se sont mariés en 2004 et ont signé un contrat de mariage pour
adopter le régime matrimonial de la séparation de biens. Au moment de leur divorce en

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2014, ils détenaient les biens suivants :

Biens faisant partie du patrimoine familial

Marc-André Manon

Résidence principale 200 000 $ 200 000 $

Résidence secondaire 250 000 $

Automobiles 50 000 $ 35 000 $

REER 150 000 $ 100 000 $

Total 400 000 $ 585 000 $

Autres biens assujettis au régime matrimonial

Marc-André Manon

Compte bancaire 5 000 $ 5 000 $


conjoint

Entreprise 250 000 $

Terrain vacant 50 000 $

Placements non 150 000 $ 100 000 $


enregistrés

Total 205 000 $ 355 000 $

Lors du partage du patrimoine familial, Marc-André serait créancier pour une valeur de
92 500 $. Cependant, si on distinguait les biens enregistrés des biens non enregistrés,
on pourrait aussi affirmer que Marc-André serait créancier pour 117 500 $ en biens non

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enregistrés et Lucie serait créancière pour 25 000 $ en biens enregistrés. Afin d'effectuer
le partage en tenant compte des impacts fiscaux, Marc-André pourrait transférer
25 000 $ de REER à Lucie et cette dernière pourrait payer 117 500 $ en transférant à
Marc-André sa demie indivise de la résidence principale (200 000 $) à charge pour lui de
lui transférer 82 500 $ de placements non enregistrés. Enfin, même si les autres biens
assujettis au régime matrimonial ne sont, en principe, pas partageable, il demeure que
les conjoints devront fermer le compte conjoint, détenu en indivision, et s'en partager le
solde. Cependant, Manon n'aurait aucun droit à faire valoir quant au terrain vacant,
propriété de Marc-André, pas plus que ce dernier n'aurait de droits sur l'entreprise de
Manon.

2.5.2 — Régime de la société d'acquêts


La société d'acquêts constitue le régime légal au Québec depuis le 1er juillet 1970. Ainsi,
depuis cette date, la société d'acquêts est le régime des couples qui se sont mariés, ou
unis civilement, alors qu'ils étaient domiciliés au Québec, sans avoir signé de contrat de
mariage au préalable (à moins qu'ils aient par la suite modifié les dispositions de ce
régime).

Au sujet du domicile, l'article 77 C.c.Q. précise que :


La résidence d'une personne est le lieu où elle demeure de façon habituelle; en cas de
pluralité de résidences, on considère, pour l'établissement du domicile, celle qui a le
caractère principal.

Ainsi, le lieu de célébration du mariage importe peu et ne sera pertinent que si les
conjoints n'avaient pas de domicile commun au moment du mariage et n'ont pas été en
mesure d'établir un domicile commun par la suite.

Exemple 2-0.5
Marie-Ève et Rémi, tous deux domiciliés au Québec, bien que dans des villes
différentes, décident de s'envoler pour Cuba afin de célébrer leur mariage en 2015. Ils
ne concluent pas de contrat de mariage avant la célébration. Parce que les conjoints
étaient domiciliés au Québec avant le mariage, leur régime matrimonial sera la société
d'acquêts.

Il convient de mentionner qu'antérieurement au 1er juillet 1970, le régime légal au


Québec était la communauté de biens, lequel sera élaboré un peu plus loin.

Bien que la société d'acquêts soit le régime légal depuis le 1er juillet 1970, les époux
peuvent aussi conventionnellement adopter le régime de la société d'acquêts (c'est-à-
dire qu'ils peuvent signer un contrat de mariage, devant notaire, stipulant qu'il existera
entre eux une société d'acquêts).

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Pourquoi signer un contrat stipulant la société d'acquêts alors que la loi prévoit qu'elle

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existe d'office en l'absence d'un tel contrat? Entre autres, parce que le contrat de
mariage ou d'union civile permet aux époux d'identifier les biens qu'ils possèdent au
moment de l'union. Étant donné que, de nos jours, les situations de seconde union sont
fréquentes, il peut être intéressant — et même prudent — de soustraire les biens acquis
antérieurement au partage possible que la seconde union pourrait provoquer.

Le contrat de mariage ou d'union civile permet également de stipuler entre les époux
certaines donations entre vifs (p. ex. : les meubles meublants destinés à l'usage du
ménage) ou encore de stipuler une institution contractuelle révocable ou irrévocable
(clause testamentaire), ou d'autres dispositions destinées à régir leur union.

Biens inclus ou exclus de la société d'acquêts


Sous le régime de la société d'acquêts, le patrimoine de chaque conjoint se divise entre :

• les biens propres;


• les biens acquêts.

Biens propres
En vertu de l'article 450 C.c.Q., sont «propres» à chacun des époux les biens suivants :

• les biens que chacun possède au moment du mariage ou de l'union civile;


• les biens acquis par chacun pendant le mariage ou l'union civile par succession
ou donation;
• les fruits et revenus provenant des biens reçus par succession ou donation si le
testateur ou le donateur l'a expressément stipulé;
• les biens acquis en remploi (remplacement) d'un bien propre de même que les
indemnités d'assurance s'y rattachant;
• les droits ou avantages qui échoient à un époux à titre de titulaire subrogé, à titre
de bénéficiaire déterminé d'un contrat ou d'un régime de retraite, d'une rente ou
d'une assurance de personnes;
• les vêtements, les papiers personnels, les alliances, les décorations et diplômes
de chacun des époux;
• les instruments de travail nécessaires à la profession de chaque époux (il y aura
toutefois récompense due aux acquêts si ces biens sont acquis à même des
acquêts).

Sont également propres à chacun des époux :

• les biens acquis avec des propres et des acquêts, si la valeur des propres
employés est supérieure à la moitié du coût total d'acquisition du bien à charge de
rembourser («récompense») à la masse des acquêts la somme des acquêts qui a
servi à l'acquisition du bien et la plus-value y afférente. Dans le cas contraire, le
bien devient un acquêt à charge de récompense en faveur des propres (art. 451
C.c.Q.);
Exemple :

Lors de la dissolution de l'union de Pierre et Marie, Pierre était propriétaire d'un

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terrain. Sa valeur est présentement égale à son coût, soit 100 000 $. Pierre a payé
60 000 $ provenant de l'héritage de son père et 40 000 $ à même ses économies
effectuées après le mariage.

Le bien sera qualifié de propre à Pierre, mais il devra inclure 40 000 $ dans sa
masse d'acquêts partageable à titre de récompense.

• la portion indivise d'un bien acquis pendant le mariage ou l'union civile, alors que
l'autre fraction était déjà détenue à titre de propre, demeure un bien propre à
charge de récompense aux acquêts, sauf si la valeur des acquêts employés pour
cette acquisition est égale ou supérieure à la moitié de la valeur totale du bien,
celui-ci devenant alors acquêt à charge de récompense aux propres (art. 452
C.c.Q.);
• le droit de recevoir une pension alimentaire ou un autre avantage similaire.
Cependant, les avantages pécuniaires en découlant sont acquêts s'ils sont échus
ou perçus au cours du mariage ou de l'union civile ou s'ils sont payables au décès
aux héritiers et ayants cause de l'époux (art. 453 C.c.Q.);
• le droit de réclamer des dommages et intérêts, ainsi que l'indemnité reçue en
réparation d'un préjudice moral ou corporel. Il en est de même pour le droit et
l'indemnité découlant d'un contrat d'assurance (accident, maladie, maladie grave,
invalidité) ou d'un autre régime d'indemnisation (p. ex. : CSST, SAAQ, etc.) (art.
454 C.c.Q.);
• le bien acquis comme accessoire d'un bien propre, ainsi que les constructions,
ouvrages ou plantations faits sur un immeuble propre, restent propres à charge de
récompense aux acquêts, sauf si la valeur des acquêts employés pour cette
acquisition est égale ou supérieure à la moitié de la valeur du bien, auquel cas le
bien devient un acquêt à charge de récompense aux propres (art. 455 C.c.Q.);
• les valeurs mobilières acquises par suite d'une déclaration de dividendes sur des
valeurs propres à l'un des époux lui restent propres, à charge de récompense aux
acquêts. Il en est de même pour les valeurs mobilières acquises par suite de
l'exercice d'un droit de souscription, de préemption ou autres droits similaires (art.
456 C.c.Q.);
• les revenus provenant de l'exploitation d'une entreprise propre à l'époux lui
demeurent propres s'ils sont investis dans l'entreprise (le tout à charge de
récompense aux acquêts). Toutefois, aucune récompense n'est due aux acquêts si
cet investissement était nécessaire pour maintenir les revenus de l'entreprise (art.
457 C.c.Q.);
• les droits de propriété intellectuelle et industrielle sont propres à chacun des
époux mais tous les fruits et revenus en provenant sont des acquêts s'ils sont
perçus ou échus pendant le mariage ou l'union civile.

Biens acquêts (art. 449 C.c.Q.)


En règle générale, la majorité des biens acquis par les époux à compter de la mise en
vigueur du régime matrimonial (moment du mariage ou signature postérieure d'un
contrat de mariage comportant un changement de régime) sont catalogués comme des
acquêts. Le Code civil prévoit qu'est un acquêt tout bien qui n'est pas autrement déclaré
propre par la loi, et notamment :

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• le produit du travail de l'époux au cours du mariage ou de l'union civile;


• les fruits et revenus échus ou perçus pendant le mariage ou l'union civile,
provenant de tout bien (qu'il soit propre ou acquêt), sauf les fruits et revenus
provenant des biens reçus par succession ou donation si le testateur ou le
donateur l'a expressément stipulé.

Le Code civil édicte de plus une présomption qu'un bien est considéré comme un acquêt
à moins qu'on ne puisse prouver le contraire (art. 459 C.c.Q.).

Enfin, tout bien sur lequel aucun des époux ne peut prouver un droit de propriété exclusif
(qu'il s'agisse d'un propre ou d'un acquêt) est présumé détenu en copropriété indivise
par les époux en parts égales.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

• Si les conjoints sont déjà propriétaires de biens lors de la signature du contrat de


mariage ou d'union civile, il serait prudent d'y annexer la liste des biens
appartenant à chacun.
• Conserver les preuves d'achat des biens de grande valeur afin d'être capable
d'en établir la propriété advenant une dissolution de l'union.
• Même en l'absence de contrat de mariage ou d'union civile, il serait prudent pour
les époux de dresser une liste de leurs biens respectifs au moment de l'union.

Administration des biens et responsabilité des dettes


Administration des biens
En règle générale, sous le régime de la société d'acquêts, chaque époux est libre
d'administrer, de jouir et de disposer de ses biens, qu'ils soient propres ou acquêts (art.
461 C.c.Q.).

Le Code civil interdit cependant à tout époux de disposer de ses acquêts de son vivant,
à titre gratuit, sans le consentement du conjoint (à l'exception toutefois des biens de peu
de valeur ou de cadeaux d'usage).

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Lorsqu'un époux ou un conjoint uni civilement souhaite transférer des biens en fiducie
(notamment, de protection d'actifs), il est important d'obtenir l'information concernant son
régime matrimonial. En effet, le conjoint non propriétaire pourrait avoir à donner son
consentement au transfert.

Responsabilité des dettes


En ce qui concerne la responsabilité des dettes, le Code civil édicte que chaque époux
est responsable des dettes contractées par lui, que ces dettes soient créées avant ou

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pendant le mariage ou l'union civile. Cette responsabilité des dettes s'étend tant sur les
biens propres que sur les biens acquêts de l'époux (art. 464 C.c.Q.). Ainsi, pendant le
mariage ou l'union civile, aucun époux n'est tenu des dettes de l'autre conjoint. Une
exception est cependant faite pour les dettes contractées pour les besoins courants de
la famille, lesquelles dettes engageront les deux conjoints (art. 397 C.c.Q.).

Nous constatons que pendant la durée du régime, chacun des époux jouit d'une grande
autonomie dans la gestion et la disposition de ses biens (sous réserve des exceptions
mentionnées ci-dessus, ainsi que de la protection accordée à la résidence familiale,
sujet sur lequel nous reviendrons un peu plus loin).

En effet, c'est plutôt lors de la dissolution du régime de la société d'acquêts que la


distinction entre les biens propres et les acquêts de chaque individu prend son
importance.

Dissolution et liquidation du régime


Le Code civil du Québec énumère les causes donnant lieu à la dissolution de la société
d'acquêts. Ces causes sont :
1) le décès d'un époux;

2) le changement conventionnel de régime pendant le mariage ou l'union civile;

3) le jugement prononçant le divorce, la séparation de corps, la séparation de biens ou la


dissolution de l'union civile;

4) l'absence de l'un des époux (art. 89, 92, 96 et 97 C.c.Q.);

5) la nullité du mariage ou de l'union civile (dans les cas où il a quand même produit des
effets). Ex : erreur sur l'identité et sur les principales caractéristiques du ou de la
conjointe.9

Les effets de cette dissolution sont immédiats pour les causes de dissolution
mentionnées aux points 1, 2 et 4. En ce qui concerne les causes de dissolution
mentionnées aux points 3 et 5, ces effets remontent au jour de la demande en justice. Il
faut noter qu'une demande peut être faite au tribunal pour faire remonter les effets au
jour de la cessation de la vie commune.

Après la dissolution, chaque époux conserve ses biens propres et a la faculté d'accepter
le partage des acquêts de son conjoint ou d'y renoncer. La faculté de requérir le partage
des acquêts est donc un droit d'option que chaque époux exerce indépendamment l'un
de l'autre. Ainsi, l'un des époux pourrait renoncer au partage des acquêts de son
conjoint, alors que ce dernier pourrait demander le partage des acquêts de l'époux qui a
renoncé. Une telle renonciation au partage des acquêts ne serait pas opposable aux
créanciers du conjoint qui aurait renoncé. Lorsque la dissolution du régime résulte du
décès de l'un des conjoints, le droit d'option appartient d'abord et en priorité au conjoint
survivant. Ainsi, les héritiers de l'époux décédé n'auront la faculté d'accepter ou de
renoncer au partage des acquêts du survivant que si ce dernier a accepté le partage des
acquêts du défunt. Une renonciation du conjoint survivant est en outre opposable aux

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créanciers de l'époux décédé (art. 473 C.c.Q.).

Toute renonciation au partage des acquêts doit être faite par acte notarié en minute ou
par une déclaration judiciaire dont il est donné acte. De plus, cette renonciation doit être
inscrite au registre des droits personnels et réels mobiliers. En l'absence d'inscription à
ce registre après un an de la dissolution du régime, l'époux renonçant est réputé avoir
accepté le partage des acquêts de son conjoint. Quant à l'acceptation du partage des
acquêts, elle n'exige aucune forme particulière (art. 469 C.c.Q.).

En cas d'acceptation du partage des acquêts par les conjoints, il y a formation de deux
masses, l'une composée des propres et l'autre composée des acquêts de chaque
conjoint. On dresse ensuite un compte des récompenses dues par la masse des propres
à la masse des acquêts, et réciproquement. On agit ainsi pour les biens de chaque
conjoint.

Il est bien important de noter qu'il s'agit-là d'un partage en valeur (tout comme pour le
patrimoine familial). Ainsi, chaque conjoint demeure propriétaire des biens composant
ses acquêts. Il ne s'agit pas ici de copropriété «indivise» entre les conjoints.

Le conjoint débiteur lors du partage exécutera son obligation en faisant le paiement soit
en numéraire (paiement en argent) ou par dation en paiement (paiement par transfert
d'un bien au conjoint).

Il est à noter que si la dissolution résulte du décès ou de l'absence de l'époux titulaire du


patrimoine d'acquêts, son conjoint sera en droit d'exiger qu'on lui donne en paiement de
la créance la propriété de la résidence familiale et des meubles qui servent à l'usage du
ménage, ou tout autre bien à caractère familial pourvu que ces biens aient fait partie du
patrimoine d'acquêts ou encore aient été classés comme faisant partie du patrimoine
familial. On appelle ce droit de réclamer prioritairement un droit sur ces biens les
«attributions préférentielles».

Voici un exemple :
Richard et Claudette se sont mariés en 1975 sous le régime de la société d'acquêts.
Depuis cette époque, Richard a acquis un portefeuille boursier de 150 000 $. Il possède
aussi un compte bancaire aux États-Unis d'une valeur de 200 000 $ en dollars
canadiens.

Claudette pour sa part a hérité en 1999 d'un montant de 500 000 $ à la suite du décès
de sa grand-mère. Sur la base de ces informations, comment s'effectuerait le partage à
la suite de la dissolution du régime matrimonial?

Premièrement, il faut qualifier les biens de chaque époux. Ainsi, le portefeuille boursier
de Richard et ses placements aux États-Unis sont des acquêts. L'héritage reçu par
Claudette constitue un bien propre. Seul les acquêts de Richard devraient être pris en
compte pour le calcul. Par conséquent, si le partage des acquêts était accepté, Richard
devrait une somme de 175 000 $ à Claudette. Claudette conserverait de plus ses
500 000 $.

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ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Avant d'utiliser de l'argent reçu en héritage pour rembourser en partie ou en totalité


l'hypothèque qui grève un immeuble à revenus qui est la propriété du conjoint, il y aurait
lieu de consulter un conseiller juridique afin que des moyens soient mis en place
(reconnaissance de dette, transfert de propriété, etc.), pour que le client puisse recouvrir
son apport advenant une dissolution de l'union. En effet, l'apport est alors fait sur un bien
dont il n'est pas propriétaire. Or, les récompenses en société d'acquêts se font entre la
masse des propres et des acquêts de chaque conjoint et non entre la masse des
propres d'un conjoint et celle des acquêts de l'autre.

2.5.3 — Régime de la communauté de meubles et d'acquêts


Sans contrat de mariage
Le régime de la communauté de meubles et d'acquêts, souvent appelé «communauté
de biens», s'applique aux couples mariés avant le 1er juillet 1970, sans avoir signé de
contrat de mariage préalable, alors qu'ils avaient leur domicile au Québec (pourvu, bien
sûr, qu'ils n'aient pas modifié ce régime par la suite). Il s'agit en somme de l'ancien
régime légal.

Avec contrat de mariage


Les époux ont également pu choisir d'adopter conventionnellement (en signant un
contrat de mariage) le régime de la communauté de biens, et ce, peu importe qu'ils se
soient mariés avant ou après le 1er juillet 1970.

Il est à noter que le régime de la communauté de biens n'existe plus au Code civil du
Québec, mais que les dispositions qui étaient prévues au Code civil du Bas Canada
continuent de régir les couples mariés sans contrat de mariage avant le 1er juillet 1970
ou qui ont choisi conventionnellement (par contrat de mariage) ce régime, peu importe la
date de leur mariage. Il est donc important d'en connaître les principales dispositions.

Biens inclus et exclus de la communauté de biens


Sous le régime de la communauté de biens, les biens se divisent en trois catégories :

• les biens communs;


• les biens propres;
• les biens réservés.

Biens communs (art. 1272 et s. C.c.B.C.)


L'article 1272 du Code civil du Bas Canada (l'ancien Code civil) classifie au nombre des
biens communs, les biens suivants :

• les biens meubles possédés lors du mariage et ceux acquis pendant le mariage;
• les biens meubles acquis pendant le mariage par succession, legs ou donation
(sauf si le donateur ou testateur a exprimé le désir contraire);

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• les fruits et revenus provenant des biens énumérés ci-dessus;


• le produit du travail des époux pendant le mariage (voir les dispositions relatives
aux biens réservés dont il est question plus loin);
• les fruits et revenus provenant des biens propres lorsque échus ou perçus
pendant le mariage;
• les immeubles acquis pendant le mariage;
• les dettes mobilières des époux lors du mariage et les dettes de successions
échues;
• les dettes contractées par les époux pendant le mariage;
• les arrérages et intérêts des dettes personnelles des époux;
• les réparations usufructuaires des immeubles exclus de la communauté;
• les dettes pour aliments des époux, ainsi que pour l'éducation et l'entretien des
enfants et pour toute autre charge du mariage.

L'article 1273 du Code civil du Bas Canada énonce que tout bien est un bien commun, à
moins de preuve du contraire. Il y a donc une présomption favorable à l'égard des biens
communs. Ce n'est que par exception qu'un bien de l'un des époux constituera un bien
propre.

Biens propres (art. 1275 C.c.B.C.)


Le Code civil du Bas Canada déclare «propres» à chaque époux, les biens suivants :

• les immeubles possédés lors du mariage;


• les immeubles acquis pendant le mariage par succession légale (art. 1275 al. 1
C.c.B.C.);
• les immeubles donnés ou légués pendant le mariage par un ascendant de
l'époux, à moins de stipulation contraire;
• les immeubles donnés ou légués à l'époux pendant le mariage par une personne
autre qu'un ascendant, à condition qu'il y ait stipulation de propre;
• les immeubles acquis en remploi d'un immeuble propre, à la condition qu'une
déclaration de remploi soit faite dans l'acte d'acquisition;
• les immeubles acquis à titre d'échange d'un immeuble propre (sauf récompense
s'il y a lieu);
• les immeubles possédés en copropriété indivise avant le mariage et acquis par
partage pendant le mariage (sauf récompense);
• les indemnités perçues pendant le mariage à titre de dommages-intérêts pour
injures, torts et blessures corporelles.

Biens réservés (art. 1425a) C.c.B.C.)


Sous le régime de la communauté de biens, le mari, à titre de «chef de communauté», a
la responsabilité de l'administration des biens communs. Il est à noter que,
contrairement à la société d'acquêts où chaque époux possède son propre patrimoine
d'acquêts, les biens communs ne composent qu'un seul patrimoine, lequel devient
propriété indivise des époux lors de l'acceptation de la communauté par l'épouse. Cette
acceptation peut s'exercer lors d'un décès, d'un divorce, d'un jugement en séparation de
corps ou d'annulation de mariage. Compte tenu de cette indivision latente, les époux
signataires d'une convention entre actionnaires, ainsi que leurs partenaires d'affaires,

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auront intérêt à ce que le conjoint visé intervienne à la convention entre actionnaires afin
qu'elle lui soit opposable.

En contrepartie, on accorde à la femme mariée sous ce régime une certaine autonomie,


soit l'administration de ses biens dits réservés.

Le Code civil du Bas Canada classifie les biens suivants comme réservés à la femme
mariée sous ce régime :

• les produits de son travail personnel;


• les économies effectuées à même le produit de son travail personnel;
• les meubles ou immeubles acquis en remploi du produit de son travail ou de ses
économies.

L'épouse mariée sous le régime de la communauté de biens a l'administration de ses


biens réservés et peut en disposer sous réserve cependant qu'elle ne peut les aliéner à
titre gratuit, ni aliéner ou hypothéquer les immeubles réservés, ni aliéner ou nantir les
fonds de commerce et meubles meublants destinés à l'usage du ménage qui font partie
des biens réservés sans obtenir au préalable le consentement de son époux.

Responsabilité des dettes


Sous le régime de la communauté de biens, les dettes contractées par le mari pendant
le mariage sont garanties par les biens propres du mari ainsi que par les biens communs
(à l'exclusion des biens réservés à la femme mariée sous ce régime).

Les dettes contractées par l'épouse, sans opposition du mari, sont garanties par les
biens propres de la femme, par ses biens «réservés», ainsi que par les biens communs.
Si ces dettes ont été contractées malgré l'opposition du mari, elles sont garanties par les
mêmes biens, sauf que la contribution des biens communs aux dettes est limitée à
l'enrichissement (soit le profit) qu'ils en ont retiré.

Les dettes contractées par l'épouse, pour sa profession, engageront également la


communauté si l'époux y consent.

Administration des biens


Sous le régime de la communauté de biens, tel que mentionné précédemment, le mari
administre seul, en principe, les biens de la communauté (art. 1292 C.c.B.C.). Cette
capacité a cependant ses limites. Ainsi, le mari ne peut, sans le consentement de son
épouse, vendre, aliéner, hypothéquer les immeubles communs, les fonds de commerce
et meubles destinés à l'usage du ménage et ne peut disposer, à titre gratuit, des biens
de la communauté (sauf des sommes modiques ou «présents d'usage»).

En ce qui concerne les biens propres, chaque époux en a la pleine administration. Enfin,
tel que mentionné précédemment, l'épouse administre seule ses biens réservés.

Comme nous pouvons le constater, sous le régime de la communauté de biens,


l'administration du patrimoine commun (c'est-à-dire, dans la majorité des cas, le

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patrimoine acquis par les époux pendant le mariage) est laissée à l'entière discrétion du
mari. Ce n'est qu'exceptionnellement que la femme aura la gestion d'un patrimoine (soit
lorsqu'il s'agit de ses biens propres ou de ses biens réservés).

Dissolution et liquidation
Les causes de dissolution de la communauté de biens sont identiques aux causes de
dissolution de la société d'acquêts. À la suite de cette dissolution, il appartient à l'épouse
(ou à ses héritiers) de prendre option sur la communauté de biens. En effet, puisque
pendant le régime l'administration de la communauté de biens a été laissée au mari, il
est normal que, lors de sa dissolution, l'épouse ait le choix d'accepter ou de renoncer à
cette communauté. Ainsi, en cas de mauvaise administration du mari, l'épouse pourra se
libérer d'une contribution aux dettes en renonçant à la communauté. Au contraire, si
l'administration du mari a été profitable, l'acceptation de la communauté par l'épouse lui
fera bénéficier de la moitié de la valeur du patrimoine qui aura été acquis par les époux
durant le régime. L'époux, quant à lui, ne peut à cet égard exercer aucun droit.

Si l'épouse accepte la communauté :


1) Chacun des époux fait, le cas échéant, le rapport des sommes dues par lui à la
communauté (incluant les biens réservés de l'épouse). Sous le régime de la
communauté de biens, le mécanisme des «récompenses», qui a été vu précédemment
pour le régime de la société d'acquêts, s'applique également mais à la différence que les
récompenses se paient en fonction de l'apport seul, sans considération de la plus-value.

2) Une fois ce rapport fait, chaque époux prélève ses biens propres ou le prix de leur
aliénation, ainsi que les indemnités qui lui sont dues par la communauté.

3) Le surplus se partage ensuite par moitié entre les époux.

Si l'épouse renonce à la communauté :


1) Elle ne peut prétendre à aucune part dans la communauté.

2) Elle a cependant le pouvoir de conserver ses biens propres ou le prix de leur


aliénation et les indemnités qui lui sont dues par la communauté.

3) Elle est déchargée des dettes de la communauté, lesquelles sont supportées par le
mari.

4) Elle conserve ses biens réservés.

2.5.4 — Cumul de partage des biens ayant fait l'objet d'un partage en vertu du
patrimoine familial et du régime matrimonial
Lorsque le conjoint accepte le patrimoine familial, les biens ayant fait l'objet d'un tel
partage ne sont plus soumis à la liquidation subséquente du régime matrimonial. Seuls
les biens qui ne font pas partie de ce patrimoine pourront alors faire l'objet d'une
liquidation du régime matrimonial. Il faut noter que certains auteurs émettent des
opinions différentes en ce qui concerne les époux mariés sous le régime de la
communauté de biens. Cette divergence ne sera cependant pas étudiée dans le cadre

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du présent ouvrage.

(2) 2.6 — Régime matrimonial étranger (hors Québec)

Les personnes unies vivant au Québec ne sont pas toutes automatiquement soumises à
l'un des régimes matrimoniaux «québécois». Il se peut, par exemple, qu'un couple ayant
contracté mariage ou union civile alors qu'il était domicilié à l'étranger ait signé à cet
endroit une convention matrimoniale l'assujettissant à cette loi étrangère.

De même, en l'absence d'un contrat de mariage, les personnes qui n'étaient pas
domiciliés au Québec au moment de leur mariage ou de leur union civile sont très
souvent régies par une loi étrangère. L'article 3123 C.c.Q. reproduit les règles de droit
international privé généralement utilisées pour déterminer le régime matrimonial :

Le régime matrimonial ou d'union civile des conjoints qui se sont unis sans passer de
conventions matrimoniales ou d'union civile est régi par la loi de leur domicile au
moment de l'union.

Lorsque les conjoints sont alors domiciliés dans des États différents, la loi de leur
première résidence commune s'applique ou, à défaut, la loi de leur nationalité commune
ou, à défaut, la loi du lieu de la célébration de leur union.

Ainsi, selon les règles qui précèdent, des personnes mariées au Chili alors qu'elles
avaient leur domicile dans ce pays, sont régies par les lois du Chili en ce qui concerne
leur état et leur capacité. Le fait que ces personnes aient depuis établi leur domicile au
Québec ne fait pas en sorte qu'elles soient dorénavant régies par l'un des régimes
matrimoniaux «québécois». Il faut donc être prudent lors de l'exécution d'un acte par une
personne mariée ou unie civilement sous un régime matrimonial étranger. Étant donné
que les dispositions de cette loi étrangère sont souvent inconnues des juristes québécois
et qu'elles peuvent imposer des restrictions à la liberté de contracter d'un conjoint, il sera
prudent, dans la plupart des cas, d'obtenir l'intervention ou le consentement du conjoint
du signataire de l'acte.

De même, des personnes domiciliées au Québec, qui vont s'unir hors Québec, par
exemple à Las Vegas, seront soumis au régime matrimonial légal québécois dans
l'optique où ils n'auraient pas signé de contrat de mariage ou d'union civile
préalablement.

Notez qu'aux fins des règles de droit international privé, chacune des provinces
canadiennes est considérée comme un état souverain.

Lors de la dissolution (séparation, divorce, décès) d'une union ayant existé entre des
personnes assujetties à un régime matrimonial étranger, il faudra d'abord procéder au
partage du patrimoine familial (qui est un effet du mariage et non un régime
matrimonial). Ce n'est qu'en ce qui concerne les biens non assujettis au partage du
patrimoine familial que le régime matrimonial étranger sera pertinent et il sera

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généralement nécessaire de faire appel à un juriste de l'État étranger pour déterminer


les règles applicables au partage des biens entre les époux.

(2) 2.7 — Autres droits découlant du mariage ou de l'union


civile

2.7.1 — Protection de la résidence familiale et des meubles servant à l'usage


du ménage
Quel que soit le régime matrimonial ou d'union civile des époux, le Code civil du Québec
protège ces biens d'une manière particulière. Ces dispositions se trouvent aux articles
401 et suivants C.c.Q.

Ainsi, un époux ne peut, sans le consentement de son conjoint, vendre, hypothéquer ou


transporter hors de la résidence familiale les meubles qui servent à l'usage de la famille.
Le conjoint dont le consentement n'a pas été obtenu peut, selon les circonstances,
demander l'annulation de la transaction ou demander des dommages-intérêts à son
conjoint.

Il faut préciser que les meubles qui servent à l'usage du ménage ne comprennent que
les meubles destinés à garnir la résidence familiale, ou à l'orner, tels les ornements, les
tableaux et les œuvres d'art, mais ne comprennent pas les collections.

Le Code civil accorde en outre une protection particulière au lieu (logement ou


immeuble) qui sert de résidence familiale aux conjoints. Cette protection particulière
existe lorsqu'un seul des conjoints est propriétaire de la résidence familiale. La
résidence familiale est définie à l'article 395 C.c.Q. comme étant d'abord le lieu choisi de
concert par les époux (ou les conjoints unis civilement). En l'absence de choix exprès,
l'article 395, al. 2 C.c.Q. indique que la résidence familiale sera présumée être celle où
les membres de la famille habitent lorsqu'ils exercent leurs principales activités.

De plus, afin d'accorder une plus grande protection au conjoint non propriétaire de la
résidence, le Code civil lui permet d'inscrire une déclaration de résidence familiale
contre l'immeuble.

Cette inscription se fait au Bureau de la publicité des droits de la circonscription foncière


où est situé l'immeuble (registre foncier).

Il faut cependant faire une distinction entre les droits conférés au conjoint non
propriétaire selon que son époux est propriétaire d'un immeuble de moins de cinq
logements ou d'un immeuble de cinq logements et plus.

L'époux propriétaire d'un immeuble de moins de cinq logements qui sert, en tout ou en
partie, de résidence familiale ne peut, sans le consentement écrit de son conjoint,
l'aliéner, le grever d'un droit réel (p. ex. hypothéquer, consentir une servitude ou un
usufruit) ni en louer la partie réservée à l'usage de la famille. À moins qu'il n'ait ratifié

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l'acte, le conjoint qui n'y a pas donné son consentement peut en demander la nullité si
une déclaration de résidence familiale a été préalablement inscrite contre l'immeuble. À
défaut d'une telle inscription, le conjoint non propriétaire pourra seulement réclamer des
dommages-intérêts de son conjoint ou de toute autre personne qui, par sa faute, lui a
causé un préjudice.

L'époux propriétaire d'un immeuble de cinq logements ou plus qui sert, en tout ou en
partie, de résidence familiale ne peut, sans le consentement écrit de son conjoint,
l'aliéner ni en louer la partie réservée à l'usage de la famille. Il pourrait cependant
l'hypothéquer ou autrement le grever d'un droit réel sans le consentement de son
conjoint. Si une déclaration de résidence familiale a été préalablement inscrite contre
l'immeuble, le conjoint, qui n'a pas donné son consentement à l'acte d'aliénation, peut
exiger de l'acquéreur qu'il lui consente un bail des lieux déjà occupés à des fins
d'habitation, aux conditions régissant le bail d'un logement; aux mêmes conditions, celui
qui n'a pas donné son consentement à l'acte de location peut, s'il ne l'a pas ratifié, en
demander la nullité. Encore ici, à défaut d'avoir procédé à l'inscription d'une déclaration
de résidence familiale contre l'immeuble, le conjoint non propriétaire pourra seulement
réclamer des dommages-intérêts de son conjoint ou de toute autre personne qui, par sa
faute, lui a causé un préjudice.

La déclaration de résidence familiale peut être faite par les deux conjoints ou par un
seul. De plus, le conjoint qui fait cette déclaration n'est pas tenu d'en aviser l'autre.
L'inscription de cette déclaration ne confère pas de droit de propriété au conjoint non
propriétaire. Cependant, cette déclaration lui assure un droit de regard sur les
transactions éventuelles concernant la résidence familiale et la possibilité de se prémunir
contre une dilapidation inconsidérée des biens par son conjoint.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Une déclaration de résidence familiale devrait être considérée dans les situations
suivantes :

• Un seul conjoint est propriétaire de la résidence;


• Le conjoint non propriétaire n'occupe aucun emploi rémunérateur ou beaucoup
moins rémunérateur que son conjoint;
• De jeunes enfants habitent encore à la maison;
• L'union commence à battre de l'aile.

Idéalement, les deux conjoints devraient être propriétaires de la résidence. Notez qu'un
pourcentage différent de 50 %-50 % peut être accordé dans les droits de propriété.

Qu'en est-il si les époux ne sont pas propriétaires de leur résidence, mais sont locataires
d'un appartement?

Le Code civil a aussi prévu cette situation afin de ne pas laisser ces conjoints dans une
situation plus précaire que ceux qui ont l'avantage de posséder une résidence. Ainsi,

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l'époux locataire de la résidence familiale ne peut, sans le consentement écrit de son


conjoint, sous-louer, céder son droit, ni mettre fin au bail lorsque le locateur a été
avisé, par l'un ou l'autre des époux, du fait que le logement sert de résidence familiale.
Le conjoint qui n'a pas donné son consentement à l'acte peut, s'il ne l'a pas ratifié, en
demander la nullité.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

L'époux ou l'épouse non signataire du bail devrait songer sérieusement à aviser le


locateur par écrit que le logement sert de résidence familiale. Ce sera nécessaire,
notamment, si le mariage a lieu après la signature du bail initial. En effet, si l'époux seul
signataire d'un nouveau bail est marié à ce moment, il pourra en aviser le locateur sur le
formulaire de la Régie du logement qui prévoit expressément une section pour cet avis.

2.7.2 — Prestation compensatoire (art. 427 à 430 C.c.Q.)


L'article 427 C.c.Q. définit la prestation compensatoire en ces termes :

Au moment où il prononce la séparation de corps, le divorce ou la nullité du mariage, le


tribunal peut ordonner à l'un des époux de verser à l'autre, en compensation de l'apport
de ce dernier, en biens ou en services, à l'enrichissement du patrimoine de son conjoint,
une prestation payable au comptant ou par versements, en tenant compte, notamment,
des avantages que procurent le régime matrimonial et le contrat de mariage. Il en est de
même en cas de décès; il est alors, en outre, tenu compte des avantages que procure
au conjoint survivant la succession.

Lorsque le droit à la prestation compensatoire est fondé sur la collaboration régulière de


l'époux à une entreprise, que cette entreprise ait trait à un bien ou à un service et qu'elle
soit ou non à caractère commercial, la demande peut en être faite dès la fin de la
collaboration si celle-ci est causée par l'aliénation, la dissolution ou la liquidation
volontaire ou forcée de l'entreprise.

La prestation compensatoire, tout comme le patrimoine familial, est d'ordre public et


consiste essentiellement à rétablir l'équilibre entre les patrimoines des conjoints lorsque
l'un de ceux-ci a contribué d'une façon excessive à l'enrichissement du patrimoine de
son conjoint par l'apport à une entreprise de biens ou de services appartenant à ce
dernier.

Les motifs pouvant donner lieu à une prestation compensatoire sont entre autres le
travail accompli au commerce du conjoint, la collaboration à une entreprise, le paiement
de dépenses professionnelles ainsi que l'apport de l'un des conjoints en argent pour
l'acquisition ou la rénovation de biens meubles ou immeubles.

Le mode de détermination de cette prestation se fera par accord entre les parties ou, à
défaut, par le tribunal.

L'on constate donc que le droit à la prestation compensatoire peut être exercé par l'un

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des époux, et ce, en plus des autres avantages que lui procure le régime matrimonial ou
d'union civile, le contrat de mariage ou d'union civile ou le testament du conjoint décédé.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

• Lors de la rédaction du testament, il est possible d'écarter la possibilité d'un


recours de cette nature par un conjoint qui n'hériterait pas de la totalité des biens
en ajoutant une clause de renonciation à une telle prestation pour hériter des
biens.
• Si rien n'est prévu dans le testament, il faudra, lors de la liquidation de la
succession, obtenir une renonciation du conjoint survivant ou prévoir une réserve
(mise de côté) tant que cet aspect de la liquidation de la succession n'est pas
réglé.

2.7.3 — Obligation alimentaire


L'obligation alimentaire entre époux prévue à l'article 585 C.c.Q. est une suite logique à
l'article 392 al. 2 C.c.Q. qui mentionne que les époux se doivent mutuellement respect,
fidélité, secours et assistance.

Après la rupture, cette obligation alimentaire prend, la plupart du temps, la forme d'une
pension alimentaire.

Il arrive parfois qu'une somme forfaitaire soit versée après la rupture en remplacement
de la pension alimentaire (art. 589 C.c.Q.), ce qui limite les liens qui peuvent subsister
entre les ex-conjoints. Cette possibilité doit cependant être examinée en prenant en
considération le fait que la fiscalité associée au versement d'une somme forfaitaire n'est
pas la même que celle associée au paiement d'une pension alimentaire sur une base
périodique.

L'obligation alimentaire s'applique également de façon réciproque entre les parents et


leurs enfants au premier degré.

Les aliments sont accordés en tenant compte des besoins et des facultés des parties,
des circonstances dans lesquelles elles se trouvent et, s'il y a lieu, du temps nécessaire
au créancier pour acquérir une autonomie suffisante10.

En ce qui concerne l'obligation alimentaire des parents à l'égard de leurs enfants, la


contribution alimentaire parentale de base, établie conformément aux règles de fixation
des pensions alimentaires pour enfants édictées conformément au Code de procédure
civile, est présumée correspondre aux besoins de chaque enfant et aux facultés des
parents. Cette contribution alimentaire peut être augmentée pour tenir compte de
certains frais relatifs à leurs enfants prévus par ces règles, dans la mesure où ceux-ci
sont raisonnables eu égard aux besoins et facultés de chacun.

L'on trouvera dans le site Internet du ministère de la Justice du Québec la table de


fixation de la contribution alimentaire parentale11.

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(1) 2.8 — Séparation de corps (art. 493 à 515 C.c.Q.)

La séparation de corps n'est disponible que pour les personnes mariées; elle n'est pas
permise aux conjoints unis civilement.

Un jugement de séparation de corps est prononcé lorsque la volonté de vie commune


est gravement atteinte. Tel est le cas lorsque l'un des époux ou les deux rapportent la
preuve d'un ensemble de faits rendant difficilement tolérable le maintien de la vie
commune, lorsqu'au moment de la demande, les époux vivent séparés l'un de l'autre, et
lorsque l'un des époux a manqué gravement à une obligation du mariage12.

Les effets de la séparation de corps entre les époux sont les suivants :

• les époux, quoique toujours mariés, ne sont plus tenus de faire vie commune;
• ils sont soumis au régime de la séparation de biens. Ainsi, s'ils étaient mariés en
société d'acquêts ou en communauté de biens, le régime sera dissous et ils seront
pour l'avenir sous le régime de la séparation de biens;
• il y a partage du patrimoine familial;
• les donations consenties aux époux en considération du mariage ne sont pas
caduques (contrairement au divorce), sous réserve que le tribunal peut les déclarer
caduques, les réduire, ou différer le paiement des donations entre vifs;
• le versement des aliments (pension alimentaire) peut être ordonné par le tribunal;
• les désignations de bénéficiaires ou de titulaire subrogé d'un contrat d'assurance
vie ou d'une rente ne sont pas affectées (contrairement au divorce), sous réserve
que le tribunal peut les déclarer révocables ou caduques;
• les autres droits et devoirs des époux en mariage subsistent. Ainsi, les époux
continuent de se devoir mutuellement secours et assistance (ce qui pourrait avoir
pour effet qu'un des époux pourrait demander que la pension alimentaire soit
ajustée pour tenir compte de circonstances nouvelles) et les règles relatives à la
protection de la résidence familiale (vues précédemment) pourraient continuer de
trouver application dans certaines circonstances. Enfin, les époux demeurent parmi
les héritiers légaux l'un de l'autre en cas de décès sans testament.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Les conjoints ayant obtenus un jugement en séparation de corps devraient vérifier les
désignations de bénéficiaires de leurs assurances vie et rentes afin de s'assurer que ces
sommes iront aux personnes de leur choix.

Plusieurs autres lois peuvent prévoir que la séparation de corps emporte des effets, tel
que la Loi sur les régimes complémentaires de retraites13 qui prévoit que la personne qui
est judiciairement séparée de corps du participant au jour où s'établit la qualité de
conjoint n'a droit à aucune prestation, à moins qu'elle ne soit l'ayant cause du participant
ou que ce dernier ait transmis un avis conforme à cette loi. D'autres lois prévoient
cependant que les époux, quoique séparés de corps, sont toujours considérés comme
14
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mariés. Tel est le cas de la Loi de l'impôt sur le revenu14 Il importe donc de se référer à
la loi particulière pour connaître les effets du jugement de la séparation de corps entre
les conjoints.

À l'égard des enfants, la séparation de corps ne prive pas ces derniers des avantages
qui leur sont assurés par la loi ou par le contrat de mariage. Elle laisse subsister les
droits et les devoirs des père et mère à l'égard de leurs enfants. Ainsi, lorsqu'il prononce
la séparation de corps, le tribunal statue sur la garde, l'entretien et l'éducation des
enfants, dans l'intérêt de ceux-ci et le respect de leurs droits en tenant compte, s'il y a
lieu, des accords conclus entre les époux.

Si, à la suite du jugement, les époux reprennent la vie commune, la séparation de corps
prend fin. Les règles du patrimoine familial s'appliquent de nouveau, la date de reprise
de vie commune remplaçant la date du mariage. Cependant, la séparation de biens qui a
résulté du jugement de séparation de corps subsiste.

(1) 2.9 — Divorce

Le divorce, disponible uniquement pour les personnes mariées, constitue, tout comme le
décès de l'un des époux, une cause de dissolution du mariage.

La Loi sur le divorce15 est une loi de juridiction fédérale. Par contre, la procédure à
suivre en cette matière est de compétence provinciale.

Le divorce est prononcé par le tribunal lorsque l'échec du mariage est constaté pour les
motifs suivants :

• lorsque les époux ont vécu séparément pendant au moins un an avant le


prononcé de la décision sur l'action en divorce et vivaient séparément à la date
d'introduction de l'instance;
• depuis la célébration du mariage, l'époux contre qui le divorce est demandé a soit
commis l'adultère, soit traité l'autre époux avec une cruauté physique ou mentale
qui rend intolérable le maintien de la cohabitation.

Les effets du divorce entre les conjoints sont les suivants :

• il y a ouverture du droit au partage du patrimoine familial;


• le régime matrimonial est dissout et l'effet de cette dissolution remonte au jour de
la demande ou au jour où les époux ont cessé de faire vie commune;
• les donations à cause de mort consenties par contrat de mariage d'un époux à
l'autre sont caduques. Cependant, les autres donations à cause de mort, ou celles
entre vifs consenties aux époux par d'autres personnes en considération du
mariage ne sont pas rendues caduques, sous réserve que le tribunal peut déclarer
ces dernières caduques, les réduire ou ordonner que le paiement en soit différé
pour un certain temps;
• les legs testamentaires faits au conjoint antérieurement au divorce sont révoqués,

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à moins que le testateur n'ait, par des dispositions testamentaires, manifesté


l'intention d'avantager le conjoint malgré cette éventualité;
• la révocation de la désignation comme liquidateur de la succession du conjoint
divorcé;
• la caducité de toute désignation, même irrévocable, en faveur du conjoint du
titulaire à titre de bénéficiaire ou de titulaire subrogé d'un produit d'assurance.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

• Réviser les testaments;


• Si l'on veut maintenir l'ex-conjoint bénéficiaire des assurances vie et rentes, il
faudrait faire une nouvelle désignation;
• Envisager le recours à la médiation familiale pour permettre aux conjoints de
tenter de parvenir à une entente de divorce à l'amiable et de limiter au maximum
les inconvénients émotifs et pécuniaires d'un recours en justice.

À l'égard des enfants, le divorce produit les mêmes effets que la séparation de corps.

(1) 2.10 — Union de fait

Le Québec a connu un essor remarquable du nombre de couples décidant de vivre


ensemble «en dehors des liens du mariage». Le Recensement de la population de 2016
(Statistique Canada) révèle que 40 % des couples québécois vivaient en union libre
(21 % au Canada). L'union de fait représente de plus en plus un choix de vie et, comme
en toute chose, le droit est, là aussi, à la remorque de l'évolution.

La Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation (L.Q. 2002, c.
6) a introduit une définition du terme «conjoint» dans la Loi d'interprétation (RLRQ, c. I-
16) qui reconnaît désormais à certains égards le conjoint de fait au point de vue civil. Il
semble pertinent de reproduire ici cet article :

61.1. Sont des conjoints les personnes liées par un mariage ou une union civile.

Sont assimilés à des conjoints, à moins que le contexte ne s'y oppose, les conjoints de
fait. Sont des conjoints de fait, deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui
font vie commune et se présentent publiquement comme un couple, sans égard, sauf
disposition contraire, à la durée de leur vie commune. Si, en l'absence de critère légal de
reconnaissance de l'union de fait, une controverse survient relativement à l'existence de
la communauté de vie, celle-ci est présumée dès lors que les personnes cohabitent
depuis au moins un an ou dès le moment où elles deviennent parents d'un même enfant.

Les articles du Code civil du Québec font expressément référence aux personnes
mariées ou unies civilement. Par conséquent, plusieurs juristes sont d'avis que lorsque
le terme «conjoint» est utilisé dans le Code civil, les dispositions visées s'appliquent aux
conjoints de fait, à moins que le contexte ne s'y oppose.
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Le législateur québécois ne régit donc pas les unions de fait, c'est-à-dire qu'il laisse aux
couples la possibilité de convenir entre eux des droits et devoirs qu'ils désirent
s'accorder.

Par contre, le législateur reconnaît les deux types d'union, notamment lorsqu'il est
question des relations de l'État avec les personnes. De ce fait, plusieurs lois à caractère
social reconnaîtront un conjoint de fait à la condition que la relation entre les partenaires
ait été continue pendant une période de temps donnée (généralement un an ou trois
ans). Ainsi en est-il de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (L.R.C. (1985), ch. O-9), la
Loi sur l'assurance automobile (RLRQ, c. A-25), la Loi sur le régime de rentes du
Québec (RLRQ, c. R-9), la Loi sur les accidents du travail et les maladies
professionnelles (RLRQ, c. A-3.001), pour ne nommer que celles-là. Les durées de vie
maritale prévues dans ces lois ont préséance sur la durée prévue dans la Loi
d'interprétation qui n'agit qu'à titre de droit supplétif, c'est-à-dire lorsqu'une loi ou un
règlement québécois est silencieux sur la durée requise. Il serait prudent de se référer à
la loi concernée afin de connaître le sens à donner au terme «conjoint».

Voici quelques définitions à titre d'exemples :

Loi sur la sécurité de «conjoint de fait»


la vieillesse (L.R.C. La personne qui, au moment considéré, vit avec la
(1985), ch. O-9), art. personne en cause dans une relation conjugale depuis
2. au moins un an.

Loi sur l'assurance «conjoint»


automobile (RLRQ, c. La personne qui est liée par un mariage ou une union
A-25), art. 2. civile à la victime et cohabite avec elle ou qui vit
maritalement avec la victime, qu'elle soit de sexe
différent ou de même sexe et qui est publiquement
représentée comme son conjoint depuis au moins trois
ans, ou, dans les cas suivants, depuis au moins un an :

- un enfant est né ou à naître de leur union,

- elles ont conjointement adopté un enfant,

- l'une d'elles a adopté un enfant de l'autre.

Loi sur les normes du «conjoints»


travail (RLRQ, c. N- Les personnes
1.1), art. 1(3º).

a) qui sont liées par un mariage ou


une union civile et qui
cohabitent;

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b) de sexe différent ou de même sexe, qui vivent


maritalement et sont les père et mère d'un même
enfant;

c) de sexe différent ou de même sexe, qui vivent


maritalement depuis au moins un an.

Loi sur les accidents «conjoint»


du travail et les La personne qui, à la date du décès du travailleur :
maladies
professionnelles
(RLRQ, c. A-3.001),
art. 2.

1. est liée par un mariage ou une


union civile au travailleur et
cohabite avec lui; ou

2. vit maritalement avec le travailleur, qu'elle soit de


sexe différent ou de même sexe, et :

a. réside avec lui depuis au moins trois ans ou


depuis un an si un enfant est né ou à naître
de leur union; et

b. est publiquement représentée comme son


conjoint.

Vie conjugale ou vie maritale

La définition de conjoint dans plusieurs lois fait référence au concept de vie maritale ou
de relation conjugale plutôt qu'à celui de cohabitation ou de vie commune. Selon ces
définitions, le fait de vivre sous le même toit n'est donc pas un critère déterminant. Par
contre, la vie maritale est souvent plus facile à prouver lorsque les conjoints partagent le
même toit et, inversement, plus difficile à établir lorsque ce n'est pas le cas.

Le concept de «vie maritale» ou de «relation conjugale» repose généralement sur la


preuve d'une combinaison des éléments suivants :

• Partage d'un logement


• Intimité (fidélité, sentiments, communication)
• Services et répartition des tâches
• Relations sociales et représentation publique de l'union
• Soutien économique

2.10.1 — Durant l'union

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Malgré la reconnaissance de la notion de conjoint de fait, seuls quelques aspects de


l'union de fait sont régis expressément. Ces aspects sont les suivants :

• l'adoption (art. 555 C.c.Q.);


• le logement, particulièrement le droit au maintien dans les lieux à la suite d'une
rupture (art. 1938 C.c.Q.);
• le droit pour le conjoint de consentir aux soins requis par l'état de santé de son
conjoint lorsque ce dernier est inapte et qu'aucun mandataire, curateur ou tuteur
n'a été nommé (art. 15 C.c.Q.);
• le régime de protection du majeur (art. 266 et 269 C.c.Q.);
• l'intérêt assurable en assurance vie (art. 2419 C.c.Q.);
• le contrat de rente (art. 2380 C.c.Q.).

À part ces exceptions, le Code civil du Québec fait référence à des époux ou à des
conjoints unis par le lien du mariage ou de l'union civile pour préciser que seuls les gens
légalement mariés ou unis civilement sont visés par les dispositions en question.

Par conséquent, la situation juridique des conjoints de fait entre eux est toujours celle de
deux célibataires vivant ensemble. Ils n'ont ni droit ni obligation l'un envers l'autre. Ainsi,
il demeure que les conjoints de fait n'ayant pas convenu contractuellement de s'accorder
mutuellement des droits et des devoirs ne se doivent rien l'un envers l'autre,
contrairement aux couples mariés ou unis civilement qui ont entre eux les droits et
obligations suivants en vertu du Code civil du Québec :

• domicile distinct ne porte pas de ce seul fait atteinte aux règles relatives à la vie
commune (art. 82 C.c.Q.);
• droit de demander la liquidation des droits patrimoniaux après un an d'absence
(art. 89 C.c.Q.);
• effets du jugement déclaratif de décès sur le partage des droits (art. 95 et 96
C.c.Q.) et effets du retour sur le mariage, l'union et les droits des enfants (art. 97
C.c.Q.);
• déclaration de filiation à l'égard de l'enfant né de l'union (art. 114 C.c.Q.);
• effets du mariage et protection de la résidence familiale (art. 392 à 413 C.c.Q.);
• patrimoine familial (art. 414 à 426 C.c.Q.);
• prestation compensatoire (art. 427 à 430 C.c.Q.);
• régimes matrimoniaux (art. 431 à 492 C.c.Q.);
• mandat judiciaire en cas d'incapacité (art. 444 C.c.Q.);
• présomption de paternité (art. 525 C.c.Q.);
• obligation alimentaire (art. 585 à 596 C.c.Q.);
• succession légale (art. 653 et 654, 666 à 683 C.c.Q.);
• survie de l'obligation alimentaire (art. 684 à 695 C.c.Q.);
• irrévocabilité d'une désignation du conjoint ou de l'époux à titre de bénéficiaire
(art. 2449 C.c.Q.);
• insaisissabilité des droits conférés par le contrat d'assurance lorsque le conjoint
ou l'époux est désigné à titre de bénéficiaire (art. 2457 C.c.Q.);
• la prescription ne court pas entre les époux ou conjoints unis civilement pendant
la vie commune (art. 2906 C.c.Q.).

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Ces distinctions sont-elles discriminatoires? C'est la question qui s'est posée dans la
cause hautement médiatisée de «Lola» contre «Éric». Le jugement de première
instance, rendu par la juge Carole Hallée, mérite une lecture16. Ce jugement a été porté
en appel. Le jugement de la Cour d'appel du Québec17, rendu par les juges Beauregard,
Dutil et Giroux, confirme celui de première instance en ce qui concerne le partage des
biens (il n'est pas admis entre conjoints de fait), mais l'infirme sur la question de
l'obligation alimentaire. Les juges concluent que le fait de ne pas accorder cette
protection à caractère social aux conjoints de fait est discriminatoire et choisissent de
déclarer l'article 585 C.c.Q. inopérant pour cause d'invalidité constitutionnelle. Les juges
rappellent cependant que le droit de réclamer une pension alimentaire se distingue du
droit effectif d'en percevoir une. Encore faut-il pouvoir en justifier le besoin. Le 24 mars
2011, la Cour suprême du Canada (C.S.C.) a accordé la permission d'en appeler de la
décision de la Cour d'appel18 et, le 18 janvier 2012, les parties ont présenté leurs
arguments à la C.S.C. L'arrêt de cette Cour a été rendu le 25 janvier 201319. Dans une
décision très polarisée (quatre juges ont déposé des motifs distincts et les deux
questions constitutionnelles ont été tranchées à cinq contre quatre), la plus haute Cour
du pays a renversé les conclusions de la Cour d'appel du Québec en ce qui concerne le
droit de réclamer une pension alimentaire et a conclu à la constitutionnalité de
l'ensemble du modèle québécois. À la suite de ce jugement, les conjoints de fait
demeurent donc non assujettis aux protections accordées par le Code civil du Québec
aux conjoints mariés, incluant le droit de réclamer une pension alimentaire pour le
conjoint. Les conjoints de fait qui souhaitent s'accorder mutuellement des droits en cas
de rupture n'ont en conséquence d'autre choix que de se l'accorder de façon
contractuelle, de se marier ou de s'unir civilement.

2.10.2 — À la dissolution de l'union


L'ex-conjoint de fait ne peut demander de pension alimentaire pour lui-même, à moins
qu'une disposition de cette nature ait été prévue au préalable dans une convention de
vie commune. Par contre, une pension alimentaire peut être demandée pour les enfants
nés de l'union de conjoints de fait.

Cette situation peut entraîner de graves conséquences pour le conjoint qui serait
dépendant de l'autre financièrement. Cette absence d'obligation alimentaire entre
conjoints de fait accentue l'importance de la prévoir contractuellement, dans le cadre
d'une convention de vie commune.

Propriété des biens


Chacun des conjoints demeure seul propriétaire des biens qu'il a acquis avant et durant
la vie commune. Aucun partage n'est applicable, même si les biens servaient à l'usage
de la famille, à moins que les conjoints n'en soient copropriétaires.

Il arrive fréquemment qu'au cours de leur union, les conjoints de fait ne se préoccupent
pas ou peu de la nature des dépenses que chacun des deux conjoints assume. Cela a
pour effet de créer des déséquilibres dans l'accumulation des actifs au cours de la vie
commune. Ainsi, il arrive qu'un des deux conjoints assume les dépenses d'épicerie et
autres dépenses de consommation pendant que l'autre accumule de l'épargne et autres
actifs de valeur.
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Dans ces situations, il serait prudent de prévoir dans le cadre d'une convention de vie
commune le sort qui sera réservé aux biens acquis par les conjoints durant la vie
commune.

Recours utilisés
Au fil des ans, différents recours juridiques ont été utilisés dans certaines circonstances
par des conjoints de fait se considérant lésés lors d'une séparation :

Société tacite
Certains conjoints de fait ont prétendu qu'ils s'avaient formé une «société» entre eux.
Pour qu'une société soit formée, il faut la présence simultanée des trois éléments
suivants :

• l'esprit de collaboration dans l'exercice d'une activité commune;


• l'obligation de fournir un apport;
• le partage des bénéfices pécuniaires.

Les tribunaux n'ont pas retenu cette approche, considérant que la contribution d'un
conjoint à la vie commune ne pouvait être considérée comme un apport. De même,
qu'en est-il du partage des bénéfices pécuniaires?

Prête-nom
Le prête-nom est le contrat en vertu duquel le conjoint de fait non propriétaire dûment
inscrit d'un immeuble veut faire reconnaître son titre de propriété. Hormis les cas de
contrat écrit, cette prétention est très difficile à prouver, car il faut démontrer que le
conjoint propriétaire d'un bien agissait à titre de prête-nom pour l'autre.

Enrichissement injustifié
Il faut, dans le cadre de ce recours, démontrer qu'un conjoint de fait s'est appauvri, que
son conjoint s'est enrichi, qu'il y a une corrélation entre l'appauvrissement et
l'enrichissement et qu'il n'existe aucune autre justification à l'enrichissement ou à
l'appauvrissement. Ce recours a longtemps été difficile d'accès car les tribunaux avaient
tendance à considérer que l'obligation de participer aux dépenses du ménage constituait
en soi une justification à l'appauvrissement d'un conjoint. Cependant, au cours des
années 2000, ce recours a reçu des réponses de plus en plus favorables des tribunaux
en faveur des conjoints de fait désavantagés par une union de fait. Plus récemment, la
Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Kerr c. Baranow20, a même développé un
nouveau concept applicable aux couples en union de fait qui pouvait fonder un recours
en enrichissement injustifié : la coentreprise familiale.

Coentreprise familiale
Au paragraphe 60 de la décision Kerr c. Baranow21, la Cour suprême du Canada
précise :
[...] si une relation peut être décrite comme étant une «coentreprise familiale» et les
efforts conjoints des parties sont liés à l'accumulation de la richesse, on peut considérer
qu'il y a enrichissement injustifié lorsqu'une partie quitte avec une part disproportionnée

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des avoirs acquis conjointement.

Selon l'auteur Guy Lefrançois22, les critères développés par la Cour suprême du Canada
pour identifier une coentreprise familiale sont au nombre de quatre :

• Effort commun : les conjoints collaborent à la réalisation d'objectifs communs, ils


gèrent la famille en équipe.
• Intégration économique : les conjoints mettent en commun leurs économies,
partagent les dépenses et envisagent leur bien-être et leurs intérêts économiques
de manière intégrée plutôt qu'individuelle.
• Intention réelle de partager : la conduite des conjoints, ce qui peut même inclure
le plan de répartition des biens en cas de décès, laisse voir qu'ils se considèrent
comme de véritables partenaires conjugaux et économiques.
• Priorité accordée à la famille : les conjoints donnent priorité à la famille plus qu'à
leurs intérêts individuels dans le processus décisionnel en général. Des sacrifices
financiers ont pu être consentis par l'un ou l'autre des conjoints pour le bien-être de
l'unité familiale.

Comme il s'agit d'un arrêt rendu en considérant des faits qui se sont produits dans une
province autre que le Québec, il y avait lieu de questionner la possibilité d'importer ces
principes en droit québécois. Or, les tribunaux québécois ont depuis repris les principes
de cet arrêt et incorporé ces principes dans notre droit23.

Prestation compensatoire
Ce recours n'existe pas en faveur des conjoints de fait.

Garde des enfants et pension alimentaire


En cas de désaccord des parents, c'est le tribunal qui statuera, tout comme il statuera
pour les enfants de parents légalement mariés ou unis civilement. C'est l'intérêt de
l'enfant qui primera dans le choix du parent gardien.

Chacun des parents a une obligation alimentaire vis-à-vis de ses enfants. La façon
d'établir la pension alimentaire pour les enfants est exactement la même, que les
parents soient mariés, unis civilement ou conjoints de fait.

En ce qui a trait au droit de réclamer une pension alimentaire pour le conjoint de fait
séparé, la Cour suprême du Canada (affaire Lola) a statué que le conjoint de fait n'y
avait pas droit (voir ci-dessus).

Attribution d'un droit d'usage de la résidence familiale


En se basant sur le fait que :
1) «[l]es décisions concernant l'enfant doivent être prises dans son intérêt et dans le
respect de ses droits» (art. 33 C.c.Q.);

2) «[l]es père et mère ont, à l'égard de leur enfant, le droit et le devoir de garde, de
surveillance et d'éducation. Ils doivent nourrir et entretenir leur enfant» (art. 599 C.c.Q.),

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les tribunaux ont rendu plusieurs décisions qui octroyaient au parent gardien (conjoint de
fait) et à l'enfant, un droit d'usage de la résidence familiale. Ces décisions ont été
rendues dans plusieurs cas même si la résidence visée était la propriété exclusive du
parent non gardien.

Assurance vie
Auparavant, comme le conjoint de fait n'était aucunement reconnu civilement, il n'était
pas considéré avoir un intérêt susceptible d'assurance sur la vie de son conjoint. Par
conséquent, pour qu'un conjoint de fait puisse prendre une assurance sur la tête de son
conjoint, il lui fallait alors obtenir l'autorisation écrite de ce dernier. Depuis l'entrée en
vigueur de la Loi instituant l'union civile24, laquelle reconnaît le conjoint de fait en
certaines matières, l'intérêt assurable entre conjoints de fait semble reconnu. Il faut noter
qu'en pratique l'autorisation écrite de la personne majeure à assurer demeure
habituellement requise. Il ne faut cependant pas comprendre de cet «élargissement» au
niveau de l'intérêt assurable que les conjoints de fait ont désormais les mêmes droits
que les couples mariés ou unis civilement en matière d'assurance. En ce qui a trait aux
effets de la désignation du conjoint à titre de bénéficiaire d'un produit d'assurance, seule
la désignation du conjoint marié ou uni civilement est irrévocable à moins d'indication
contraire et entraîne, en principe, l'insaisissabilité du contrat. La désignation du conjoint
de fait à titre de bénéficiaire est donc révocable à moins d'indication contraire et seule sa
désignation de façon irrévocable entraîne les mêmes effets que la désignation du
conjoint marié ou uni civilement.

Non-révocation des liquidateurs, des désignations de bénéficiaires et des legs


Pour les personnes mariées ou unies civilement, le Code civil du Québec prévoit que les
legs faits au conjoint avant le divorce ou la dissolution de l'union civile sont révoqués. Il
en est de même des désignations de bénéficiaires de produit d'assurance faites en
faveur du conjoint. Ces révocations présumées ne s'appliquent pas aux conjoints de fait.

Non-révocation du conjoint au titre de mandataire


Ici, la situation est la même en ce qui concerne les personnes mariées, unies civilement
ou les conjoints de fait. Ainsi, le divorce, la séparation de corps, la dissolution de l'union
civile de même que la cessation de vie commune en union de fait, n'ont pas pour effet de
révoquer la désignation du conjoint au titre de mandataire dans un mandat en prévision
de l'inaptitude.

2.10.3 — Lors du décès


Le conjoint de fait n'étant pas reconnu par le Code civil du Québec en matière
successorale25, en l'absence d'un testament, un conjoint de fait n'aura aucun droit dans
la succession de son conjoint. De plus, les règles de partage du patrimoine familial et
des régimes matrimoniaux ne peuvent s'appliquer.

Par contre, plusieurs lois à caractère social accordent aux conjoints de fait les mêmes
droits qu'aux conjoints mariés en cas de décès. Ainsi en est-il de la Loi sur les accidents
du travail et les maladies professionnelles26, la Loi sur l'assurance automobile27, la Loi
sur le régime de rentes du Québec28, la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes
29 30
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criminels29 et la Loi visant à favoriser le civisme30. Les prestations prévues aux termes
de ces lois peuvent être versées au conjoint de fait survivant.

Droits des enfants


Si le Code civil n'impose pas de droits et d'obligations entre les conjoints de fait, il ne fait
aucune distinction quant au lien matrimonial des parents en ce qui concerne leurs
obligations envers leurs enfants. De ce fait, les droits et devoirs des enfants envers leurs
parents et des parents envers leurs enfants sont les mêmes, que ces parents soient des
personnes mariées, unies civilement ou des conjoints de fait.

Ainsi, les parents «conjoints de fait» ont, envers leurs enfants (et réciproquement),
l'obligation alimentaire; les dispositions du Code civil relatives à la tutelle de leurs
enfants mineurs leur sont applicables; les enfants sont les héritiers légaux de leurs
parents, conjoints de fait, décédés sans testament.

2.10.4 — Convention régissant les relations entre conjoints de fait


Étant donné l'état actuel du droit, le couple en union de fait qui veut prévoir des règles
s'appliquant à son union se doit de rédiger une convention de vie commune ou
convention d'union de fait.

Ainsi, il est permis aux conjoints de fait de rédiger une convention régissant les
modalités patrimoniales s'appliquant durant leur union ainsi que lors d'une rupture
éventuelle.

Convention de vie commune


Le contrat (cadre théorique) :

La convention de vie commune n'est soumise à aucune forme particulière. Elle pourrait
donc prendre la forme d'un contrat verbal, d'un écrit à la main ou dactylographié et signé
par les conjoints avec ou sans témoins ou encore d'un acte notarié. Le contrat écrit sera
évidemment plus facile à prouver que le contrat verbal. Puisque le Code civil n'en fait
pas un contrat nommé qui comporte des règles particulières, il s'agit d'un contrat auquel
les règles générales du droit des contrats s'appliquent. Ce type de contrat est bilatéral,
car les parties s'obligent réciproquement. De plus, comme il s'agit d'un document
juridique qui crée des droits et des obligations aux parties, il est préférable de le faire
rédiger par un juriste. Lors de la signature de la convention, les conjoints doivent être
aptes à consentir. Leur consentement doit être libre et éclairé. Il ne doit donc pas être
vicié par l'erreur, la crainte ou la lésion. En d'autres mots, les conjoints doivent
comprendre ce à quoi ils s'engagent, ils ne doivent pas se sentir obligés de signer, ni
être victimes de manœuvres déloyales de la part de l'autre les amenant à conclure une
entente à des conditions désavantageuses.

Le contrat de vie commune a pour principal objectif de décrire les ententes patrimoniales
des conjoints pendant la vie commune et en cas de rupture. Le couple a la pleine
discrétion en ce qui concerne les clauses à inclure dans le contrat pourvu que celles-ci
ne contreviennent pas à l'ordre public. Ainsi, les conjoints peuvent prévoir dans la

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convention des règles semblables ou identiques à celles applicables aux époux (mariés
ou unis civilement) en vertu de la loi, par exemple le partage des biens acquis pendant
l'union, ou prévoir que seules quelques-unes de ces règles s'appliqueront (règles du
patrimoine familial, de la société d'acquêts, etc.). Ils peuvent également, à leur choix,
inclure des règles semblables aux droits et devoirs des époux pendant le mariage
comme le partage des dépenses en fonction de leurs facultés respectives, le choix
commun de la résidence familiale, des obligations de secours et d'assistance, etc. Ce
type de contrat s'adapte à leurs besoins.

La convention de vie commune étant un contrat bilatéral (entre deux parties), elle ne
pourra pas être opposable aux tiers. Les obligations du contrat lient seulement les
parties à la convention. Par contre, cette convention aura priorité sur les dispositions
testamentaires si elle prévoit que la notion de rupture inclut le décès. Toutefois, il faut
faire attention à ce que les dispositions applicables au décès dans la convention de vie
commune ne soient pas assimilées à des dispositions testamentaires, car seuls le
testament et la disposition testamentaire dans un contrat de mariage sont reconnus dans
notre droit civil.

Les principales clauses que l'on retrouve dans la convention de vie commune31

1) Le choix de la résidence commune : Le couple peut faire le choix de la


résidence familiale dans la convention de vie commune. Il pourra même y désigner
plus d'une résidence. Les conjoints peuvent aussi prévoir que le conjoint unique
propriétaire ne pourra pas vendre, céder, louer ou hypothéquer cette résidence ou
ces résidences, sans le consentement du conjoint non propriétaire. Les conjoints
pourraient prévoir une pénalité monétaire en cas de contravention à ces ententes.
Par contre, il faut comprendre que de telles ententes ne seraient pas équivalentes
à la protection de la résidence familiale (art. 404 et 3062 C.c.Q.) offerte aux époux
par le Code civil en publiant une déclaration de résidence familiale au registre
foncier. En effet, le conjoint unique propriétaire pourra, malgré ce choix dans la
convention, vendre, céder, louer ou hypothéquer cette résidence sans avoir obtenu
le consentement de l'autre conjoint, et il ne sera pas possible pour le conjoint qui
n'aurait pas donné son consentement de faire annuler la transaction. Seule une
compensation monétaire pourra être consentie en cas de non-respect.
2) Contribution aux dépenses (charges) du ménage : Les conjoints peuvent prévoir
comment seront partagés les coûts pour les diverses dépenses communes de la
famille. La contribution de chacun peut être en fonction des revenus gagnés par
chacun des conjoints (si l'un des conjoints quittait son travail afin de s'occuper des
enfants, sa contribution aux dépenses pourrait être réduite) ou par catégorie de
dépenses, par exemple, l'un des conjoints paiera l'épicerie et les frais de scolarité
et l'autre conjoint assumera les coûts pour les services publics, les taxes
municipales et scolaires, l'habillement des enfants, etc. Il s'agit d'un point où la
contribution du planificateur financier peut s'avérer particulièrement utile, car la
répartition des dépenses entre les conjoints a des répercussions qui peuvent
s'avérer importantes sur l'évolution du patrimoine de chaque conjoint. Ainsi, en
fonction des volontés du couple, préférablement informé des conséquences de ses
choix, la contribution aux dépenses du ménage pourra être modulée.

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3) Déclaration du début de l'union de fait : Les conjoints peuvent affirmer dans la


convention la date du début de leur union. La fixation de cette date est pertinente
lorsque la convention prévoit qu'il y aura partage en cas de séparation de certains
biens meubles acquis pendant l'union. Par contre, il faut faire attention avec cette
affirmation dans la convention si, par exemple sur le plan fiscal, les conjoints se
déclaraient célibataires à cette date.
4) Administration et disposition des biens : Cette clause permet de prévoir les
dispositions applicables en matière d'administration et d'aliénation des biens
meubles et immeubles. Quand certains biens sont détenus en copropriété indivise,
il faut en tenir compte. La clause peut affirmer que chacun est libre de la gestion
des biens lui appartenant. Il pourra les céder, les vendre ou les hypothéquer sans
le consentement de l'autre. De plus, il est possible de prévoir la responsabilité de
chacun quant aux dettes rattachées à ces biens. Par exemple, lorsque l'automobile
servant à l'usage de la famille est la propriété de l'un des conjoints et que ce
dernier a contracté un emprunt pour en faire l'acquisition, le couple pourrait décider
de rembourser l'emprunt à parts égales. Par contre, pour une dette conjointe,
même si la convention prévoit qu'un seul des conjoints est responsable de celle-ci,
cette disposition ne sera pas opposable aux créanciers détenant la dette conjointe.
5) Biens meubles, immeubles et effets personnels : Dans cette section, les
conjoints peuvent inclure leur bilan personnel en date du début de l'union afin de
confirmer le propriétaire des biens meubles et immeubles et spécifier si ces biens
sont partageables ou non en cas de séparation. Ils peuvent également faire un
bilan des biens acquis pendant l'union, en date de la signature de la convention.
Dans ce dernier cas, la convention pourrait aussi prévoir que le bilan durant l'union
pourra être mis à jour avec l'accord des parties.
6) Donation : Si telle est la volonté des parties, la convention pourrait prévoir des
donations entre vifs. Pour les conjoints de fait, seule la donation entre vifs est
valide par contrat sur des biens présents, car la donation portant sur des biens à
venir est réputée faite à cause de mort (art. 1818 C.c.Q.) et la donation pour cause
de mort n'est valide que si elle est faite par contrat de mariage ou d'union civile
(art. 1819 C.c.Q.). Pour être opposable aux tiers, cette donation doit être publiée
au registre approprié (foncier ou RDPRM). De plus, pour être valide, la donation
d'un bien meuble ou immeuble doit être faite par acte notarié (art. 1824 C.c.Q.). Il y
a exception à l'exigence de l'acte notarié lorsque, s'agissant d'une donation d'un
bien meuble, le consentement des parties s'accompagne de la délivrance et de la
possession immédiate du bien par le donataire (art. 1824 C.c.Q.). Ainsi, les
conjoints qui désirent prévoir une donation d'un bien immeuble ou d'un bien
meuble sans délivrance et sans possession immédiate devront faire une
convention de vie commune notariée ou faire un acte de donation notarié à part.
7) Copropriété de la résidence commune : Les conjoints qui détiennent la
résidence en copropriété peuvent rédiger dans un acte spécifique une convention
d'indivision qui prévoit les règles applicables à la copropriété indivise. Ils peuvent
aussi prévoir ces règles dans la convention de vie commune. En résumé, les
principaux éléments que l'on retrouve dans la clause de copropriété indivise sont :
la désignation cadastrale de l'immeuble, la quote-part de chacun dans l'immeuble,
l'administration commune de l'immeuble et si telle est la volonté des parties, la
délégation de certains pouvoirs administratifs, la charge des dépenses et de

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l'entretien, les dépôts à faire par chacun dans un compte pour le paiement de
l'hypothèque et des autres dépenses communes comme les taxes, les primes
d'assurance, les coûts des services publics, etc., la vente ou la cession de la
quote-part (droit de préemption), la vente forcée en cas de faillite, le décès, la
vente de l'immeuble par les propriétaires et le partage du produit de la vente après
le paiement des divers déboursés suite à la vente (par exemple : hypothèque,
commission au courtier, etc.), le partage en cas de séparation.
8) Valeur marchande des biens : Afin d'éviter des conflits entre les parties et
comme il peut y exister plusieurs méthodes d'évaluation de la valeur pour les
biens, la convention de vie commune devrait prévoir la méthode à utiliser.
9) Acquisition de biens ultérieurement ou en remplacement d'un bien actuel : Les
conjoints pourraient prévoir que la convention de vie commune s'appliquera aux
biens qui seront acquis, conjointement ou non, et à tout bien qui remplacerait un
bien actuel et visé par la convention. Cette règle s'applique le plus souvent aux
biens immeubles.
10) Modification à la convention de vie commune : Cette disposition permet de
modifier la convention d'un commun accord des conjoints.
11) Rupture de la vie commune : Cette clause de la convention permet de prévoir
les règles en ce qui concerne le partage des biens meubles et immeubles, mais
sujette à toute convention spécifique, par exemple, une convention d'indivision
pour un immeuble. Par contre, si l'un des conjoints possédait la résidence
principale et l'autre conjoint la résidence secondaire pendant l'union, il serait
important qu'une clause concernant la désignation de la résidence principale aux
fins d'exonération du gain en capital soit prévue à la convention afin d'éviter tout
conflit relatif aux années de désignation lors d'éventuelles dispositions des
résidences en question. Il en serait de même si les conjoints étaient copropriétaires
de deux résidences et que, à la suite d'une rupture, chacun conservait une des
deux résidences.

De plus, si l'un des conjoints était propriétaire de la résidence commune, le couple


pourrait envisager de prévoir dans la convention un droit d'habitation, pour un certain
temps, du conjoint non propriétaire qui aurait la garde des enfants.

En ce qui concerne la garde des enfants, il faut savoir que le tribunal ne sera pas lié par
les règles prévues dans la convention en matière de garde. Les conjoints pourraient
aussi prévoir des règles pour le versement d'une indemnité de rupture (montant, durée,
continuité en cas de décès qui se produit avant terme) ou d'une somme forfaitaire à l'un
des conjoints.

Si les conjoints ont cotisé dans un REER, RPA, RRQ, CRI/REER IMMOBILISÉ, FRV,
CELI, le contrat de vie commune pourrait prévoir des règles de partage de ces régimes.
D'un point de vue fiscal, ce partage lors d'une séparation pourrait bénéficier d'un
transfert libre d'impôt. Les conjoints pourraient aussi considérer la charge fiscale de ces
régimes dans le calcul de partage lors d'une rupture.

Si un REEE était ouvert et que les parents étaient tous deux souscripteurs, la convention
pourrait réitérer qu'en cas de rupture, le régime continue et que les parents continuent à
contribuer au régime comme ils le faisaient avant la rupture.
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Aussi, les conjoints de fait exploitant une entreprise ensemble pourraient prévoir des
dispositions dans la convention de vie commune concernant l'exploitation de l'entreprise.
Par exemple, il s'agirait de référer à la convention entre actionnaires pour la société par
actions ou à la convention d'association dans le cas de la société de personnes ou à
défaut, prévoir des règles pour la continuité des affaires selon ce qui est permis par les
lois spécifiques (Loi sur les sociétés par actions et Code civil pour la société de
personnes).

2.10.5 — Conclusion
En résumé, le Code civil ne régit pas les droits et les obligations des conjoints de fait
entre eux. Cependant, les droits et obligations de ces personnes envers leurs enfants et
des enfants à l'égard de leurs parents sont reconnus par le biais des dispositions
relatives à la filiation.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Pour établir leurs droits et leurs obligations l'un envers l'autre, les conjoints de fait
doivent rédiger une convention de vie commune. Ce contrat a pour objectif de prévoir les
effets de leur union pendant sa durée et dans l'éventualité de sa dissolution. Aussi, ils
doivent rédiger un testament lorsqu'ils désirent se léguer tout ou partie de leur
patrimoine à leur décès. La rédaction d'un mandat de protection serait également
souhaitable.

Voir en annexe de ce module un tableau comparatif des différentes protections légales


du Code civil du Québec selon le statut des couples : mariés, unis civilement ou vivant
en union de fait.

(1) 2.11 — Administration du bien d'autrui, minorité et tutelle

Afin de protéger les intérêts présents et futurs de ses clients, le planificateur financier se
doit de saisir les subtilités concernant les règles applicables aux personnes que la loi
protège d'une manière spéciale, soit en raison de leur jeune âge, soit en raison de leur
manque d'autonomie. Qu'il s'agisse de la gestion des biens d'un mineur ou d'un majeur
inapte, le planificateur financier saura prodiguer les conseils et recommander les
documents adéquats.

2.11.1 — Administration du bien d'autrui


L'article 1299 du Code civil du Québec prévoit que toute personne qui est chargée
d'administrer un bien ou un patrimoine qui n'est pas le sien assume la charge
d'administrateur du bien d'autrui.

Le législateur a donc voulu instaurer un canevas de règles pour celui qui, à un moment
ou à un autre, est chargé d'administrer un bien ou un patrimoine qui n'est pas le sien.

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Toutes ces personnes, tuteurs, curateurs, fiduciaires, liquidateurs, mandataires, etc.,


gèrent et administrent des biens qui ne leur appartiennent pas.

Pour ce faire, le législateur a créé deux formes d'administration du bien d'autrui : une
plus restreinte, la simple administration, et une plus large, la pleine administration. La
distinction est importante puisque, dans certains cas, des pouvoirs élargis sont
nécessaires (p. ex., pouvoir de vendre ou d'aliéner des biens), tandis que, dans d'autres
circonstances, il est parfois dangereux que celui qui administre les biens ait autant de
pouvoirs; il vaut mieux alors qu'il soit limité à une administration se rapprochant plus
d'une simple gestion et conservation des choses.

Simple administration (art. 1301 à 1305 C.c.Q.)


L'administrateur chargé de la simple administration a une marge de manœuvre très
limitée. Le législateur attribue au responsable de la simple administration les obligations
suivantes :

• faire tous les actes nécessaires à la conservation du bien ou utiles pour maintenir
l'usage auquel le bien est normalement destiné;
• percevoir les fruits et revenus du bien qu'il administre;
• exercer les droits qui sont rattachés aux biens qu'il administre, notamment quant
aux valeurs mobilières;
• percevoir les créances soumises à son administration et en donner valable
quittance;
• continuer l'exploitation du bien qui produit fruits et revenus, sans en changer la
destination;
• placer les sommes d'argent qu'il administre, conformément aux règles relatives
aux placements présumés sûrs.

À ces obligations se greffent certains pouvoirs :

• possibilité de modifier les placements faits avant son entrée en fonction;


• possibilité d'aliéner un bien susceptible de se déprécier rapidement ou de dépérir;
• possibilité d'assurer les biens confiés à son administration;
• sujet à l'autorisation du bénéficiaire ou encore, le cas échéant, du tribunal, aliéner
le bien à titre onéreux ou le grever d'une hypothèque, lorsque c'est nécessaire
pour payer les dettes ou maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné
ou en conserver la valeur.

Pleine administration (art. 1306 et 1307 C.c.Q.)


L'administrateur chargé de la pleine administration jouit d'une plus grande marge de
manœuvre.

La pleine administration du bien d'autrui confère à l'administrateur la possibilité d'exercer


les droits et pouvoirs que possède une personne physique capable sur ses propres
biens.

La seule limite à son pouvoir réside dans l'aliénation d'un bien à titre gratuit.

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L'administrateur ne peut disposer à titre gratuit des biens qui lui sont confiés, à moins
qu'il ne soit de la nature de son administration de pouvoir le faire. Il peut cependant
donner un bien s'il a peu de valeur et que la disposition est faite dans l'intérêt du
bénéficiaire ou de la fin poursuivie par l'administration du bien d'autrui. L'administrateur
ne peut, sans contrepartie valable, renoncer à un droit qui appartient au bénéficiaire ou
qui fait partie du patrimoine à administrer.

L'administrateur limité à la simple administration doit faire tous les actes nécessaires à la
conservation du bien. À ce principe de la conservation du bien s'ajoutent les principes de
la fructification du bien et de l'accroissement du patrimoine pour celui qui possède la
pleine administration. Le rôle de l'administrateur est alors beaucoup plus grand; il ne
peut plus seulement agir pour tout simplement conserver le bien, mais il doit, si possible,
le faire fructifier et en accroître la valeur. Si l'administrateur agissant avec la pleine
administration a une somme d'argent à gérer, il ne peut pas tout simplement la garder et
la conserver; il doit faire des placements afin d'en assurer la fructification et en accroître
la valeur.

Placements présumés sûrs (art. 1339 C.c.Q.)


Le site Internet du Curateur public résume à sa façon les dispositions de l'article 1339
C.c.Q.

PLACEMENTS PRÉSUMÉS SÛRS1

DÉPÔT D'ARGENT

Comptes dans un L'argent doit pouvoir être rendu sur demande


établissement financier ou dans un délai maximal de 30 jours, à moins
(banque, caisse populaire, que le montant ne soit garanti par l'Autorité des
etc.) marchés financiers (maximum de 100 000 $ par
compte et par institution financière).

Si ces conditions ne sont pas remplies,


l'autorisation du tribunal est nécessaire
pour faire un tel dépôt.

ACHAT DE TITRES

Obligations Doivent être émises ou garanties par le


gouvernement du Québec ou d'une autre
province, du Canada, des États-Unis ou d'un de

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ses états, d'une municipalité, d'une commission


scolaire, de certaines entreprises de service
public au Canada, etc.

Actions ordinaires Doivent être :

• émises par une compagnie qui se conforme


depuis trois ans à la Loi sur les valeurs
mobilières;

• vendues par l'entremise de la Bourse de


Montréal, de Toronto, de Vancouver, de
l'Alberta ou de Winnipeg.

Actions privilégiées Doivent être libérées et émises par une société


dont les actions canadiennes sont des
placements présumés sûrs.

Actions d'une société Une part de 60 % du portefeuille doit être


d'investissement Parts de composée de placements présumés sûrs.
fonds communs de
placement ou d'une fiducie
d'utilité privé

Immeubles Font aussi partie des placements présumés


sûrs.

PRÊTS

Une hypothèque sur Doit être garantie ou assurée par le Québec ou


immeuble situé au Québec par une autre province canadienne.

OU

Ne doit pas excéder 80 % de la valeur de


l'immeuble.

1. La liste ci-dessus n'est pas exhaustive. En ligne : .

2.11.2 — Autorité parentale et minorité


2.11.2.1 — Autorité parentale
L'article 599 C.c.Q. définit ce que constitue l'autorité parentale de la façon suivante :
Les père et mère ont, à l'égard de leur enfant, le droit et le devoir de garde, de
surveillance et d'éducation. Ils doivent nourrir et entretenir leur enfant.

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Ces droits et ces obligations sont indépendants de l'état civil des parents ou de leur
situation matrimoniale. En fait, seules les formalités de reconnaissance de la paternité
diffèrent en fonction du statut matrimonial des parents, puisque la présomption de
paternité (par opposition à la reconnaissance volontaire) n'existe que pour les couples
mariés ou unis civilement.

L'article 600 C.c.Q. précise que les parents exercent ensemble l'autorité parentale, mais
que cette autorité peut être exercée par un seul parent lorsque l'autre est décédé ou
dans l'impossibilité de manifester sa volonté. Aussi, les deux parents n'ont pas besoin
d'être présents ou de manifester leur accord chaque fois qu'une décision doit être prise à
l'égard de l'enfant, puisque les tiers de bonne foi peuvent présumer qu'un parent agit
avec l'accord de l'autre lorsqu'il prend une décision relative à l'enfant32.

Ce principe d'exercice conjoint de l'autorité parentale demeure même lorsque les père et
mère vivent séparément. Alors, même lorsque la garde physique est confiée à un seul
parent, l'autre parent demeure titulaire de l'autorité parentale et conserve, au minimum,
le droit de surveiller l'entretien et l'éducation de son enfant. Toutefois, dans la plupart des
cas, les jugements ou les ententes de séparation prévoient que les deux parents
exercent l'autorité parentale, ce qui fait en sorte que le parent qui n'a pas la garde
physique de l'enfant doit être consulté lorsque des décisions importantes doivent être
prises à l'égard de l'enfant. Ce serait le cas par exemple, lors du choix d'un centre de la
petite enfance (CPE), lors de l'inscription de l'enfant à l'école ou encore si les parents
devaient consentir à des soins de santé à être prodigués à l'enfant. En cas de litige entre
les deux parents, le tribunal pourrait être amené à trancher la question.

Une demande en déchéance de l'autorité parentale peut être présentée par toute
personne intéressée33. Par contre, seuls des motifs graves, comme la violence ou
l'abandon, peuvent amener le tribunal, lorsque l'intérêt de l'enfant le justifie, à émettre un
jugement en déchéance de l'autorité parentale, c'est-à-dire à retirer à un parent les droits
et les devoirs inhérents à l'autorité parentale. Dans certains cas, le tribunal peut retirer
seulement un des attributs de l'autorité parentale, comme la garde de l'enfant. Parmi les
effets de la déchéance de l'autorité parentale, on retiendra que l'enfant est alors relevé
de son obligation alimentaire envers son parent34 et que le parent ne pourra pas
bénéficier de la succession de son enfant puisqu'il est alors indigne de succéder à son
enfant35.

2.11.2.2 — Minorité
De la conception à la naissance
Un enfant conçu mais non encore né n'est pas une personne au sens juridique du terme,
et sauf exception, il ne possède pas de droits. Toutefois, le Code civil du Québec prévoit
qu'un enfant conçu, mais non encore né, pourra succéder et être bénéficiaire d'une
donation directe ou fiduciaire dans la mesure où il naît vivant et viable36.

Les père et mère agissent alors, de plein droit, comme tuteur de leur enfant ainsi conçu
mais non encore né, et ils sont chargés d'agir pour lui dans tous les cas où son intérêt
patrimonial l'exige37.

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Principe
Le législateur québécois a fixé l'âge de la majorité à 18 ans38. Par conséquent, la
personne qui n'a pas atteint cet âge est incapable d'exercer pleinement tous ses droits
civils.

De ce principe découlent des exceptions : le degré de capacité du mineur varie selon


son âge, son discernement, la nature des actes à être posés et son revenu. Il faut donc
faire attention aux actes posés seul, par un mineur, car ils pourraient, dans l'éventualité
où le mineur en subirait un préjudice, être annulés pour cause de lésion39.

Mineur de 14 ans ou plus


Le mineur âgé de 14 ans ou plus sera réputé majeur pour tous les actes relatifs à son
emploi ou à l'exercice de son art ou de sa profession40. On lui permettra également de
poser seul les actes relatifs à ses besoins ordinaires et usuels41.

Relativement aux soins requis par l'état de santé du mineur, le consentement est donné
par le titulaire de l'autorité parentale ou par le tuteur. Cependant, pour les mineurs de 14
ans ou plus, il faut différencier les soins requis et les soins non requis par son état de
santé. Dans le premier cas, il peut consentir seul à ces soins. Dans le second cas, il peut
y consentir seul dans la mesure où ces soins ne présentent aucun risque sérieux pour
sa santé. Dans le cas contraire, le consentement du titulaire de l'autorité parentale ou du
tuteur serait nécessaire.

Pour l'exercice de tous ses autres droits civils, le mineur doit être représenté par son
tuteur. Ce dernier devra respecter le Code civil du Québec en ce qui concerne ses
pouvoirs d'administration et de représentation du mineur. Mentionnons que les pouvoirs
du tuteur sur les biens du mineur se limitent à la simple administration.

Mineur de 16 ans ou plus


Le mineur de 16 ans ou plus peut demander à son tuteur le droit d'exercer seul ses
droits civils. Il s'agit ici de la «simple émancipation» qui ne met pas fin à sa minorité et
ne lui confère pas tous les droits découlant de la majorité42.

La simple émancipation peut être :

• accordée par le tuteur (après que celui-ci ait pris l'avis du conseil de tutelle), par
le biais du dépôt d'une déclaration au curateur public; ou
• accordée par le tribunal, sur avis du tuteur et du conseil de tutelle.

Le mineur qui a ainsi obtenu la simple émancipation peut accomplir tous les actes de
simple administration43. Il peut donc :

• décider seul du lieu de son domicile44;


• signer seul des baux d'une durée de 3 ans ou moins à titre de locataire;
• donner ses biens, si cela n'entame pas de façon disproportionnée son capital.

La «simple émancipation» a également pour effet de libérer le mineur de l'autorité de ses


45
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père et mère45. Cependant, pour tous les actes excédant la simple administration, le
mineur doit être assisté par son tuteur, qui joue alors le rôle qu'aurait joué le conseil de
tutelle.

Par exemple, la renonciation à une succession46, l'acceptation d'une donation avec


charge, un prêt ou un emprunt considérable eu égard à la valeur des actifs du mineur
émancipé, ainsi que tout acte d'aliénation d'un immeuble ou d'une entreprise (p. ex. :
vente, donation), requièrent soit l'assistance du tuteur, soit l'autorisation du tribunal47.

La simple émancipation ne permet pas au mineur de rédiger son testament, sauf pour
des biens de peu de valeur.

Le Code civil du Québec traite également de la notion de «pleine émancipation». La


pleine émancipation a pour effet de reconnaître au mineur les mêmes capacités qu'une
personne majeure. Ainsi, malgré le fait que cette personne soit âgée de moins de 18
ans, la pleine émancipation lui confère les mêmes droits et obligations qu'une personne
majeure48. Toutefois, le mineur ne peut se procurer ni de l'alcool ni des produits du
tabac, et il ne peut participer à des jeux de loterie.

La pleine émancipation a lieu :

• lors de la célébration du mariage (à noter que le mineur doit être âgé d'au moins
16 ans pour contracter mariage et doit avoir obtenu le consentement du titulaire de
l'autorité parentale ou du tuteur); ou
• suivant un motif sérieux et sur demande du mineur : la pleine émancipation est
déclarée par le tribunal.

2.11.3 — Tutelle
Le but de la tutelle est d'assurer la protection de la personne du mineur, l'administration
de son patrimoine et, en général, l'exercice de ses droits civils. La tutelle est établie dans
l'intérêt du mineur.

La tutelle s'étend à la personne et aux biens du mineur. Un seul tuteur à la personne


peut être nommé, mais on peut en nommer plusieurs aux biens49.

Le Code civil du Québec établit deux formes de tutelle : la tutelle légale et la tutelle
dative.

Qualités requises pour être tuteur


La tutelle est une charge personnelle, accessible à toute personne physique capable
d'exercer pleinement ses droits civils et apte à exercer la charge50. Cette charge ne peut
donc être accomplie par :

• les mineurs non émancipés, même s'ils sont parents;


• les personnes morales (sauf à titre de tuteur aux biens si la loi les y autorise);
• les majeurs sous régime de protection;
• le père ou la mère déchu de l'autorité parentale.

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De plus, puisqu'il s'agit d'une charge personnelle, elle n'est pas transmise aux héritiers
du tuteur. Cependant, ces derniers sont tenus de rendre compte de leur administration
et, s'ils sont majeurs, de continuer l'administration du tuteur jusqu'à la nomination d'un
nouveau tuteur51.

Tutelle légale
La loi reconnaît de plein droit les père et mère comme tuteurs à leur enfant mineur52. En
principe, cette charge est exercée conjointement par les père et mère. Même lorsque la
garde de l'enfant fait l'objet d'un jugement (p. ex., dans le cas d'un divorce qui donnerait
la garde exclusive au père), la tutelle continue d'être exercée par les père et mère.

Si toutefois il survenait un désaccord entre les parents, le tribunal pourrait trancher le


débat. Il est également possible que la charge tutélaire soit exercée par un seul parent,
si l'autre est dans l'impossibilité de le faire ou est décédé.

Il est également possible que l'un des parents donne le mandat à l'autre de le
représenter dans les actes relatifs à la tutelle. À l'égard des tiers de bonne foi, ce
mandat est de toute façon présumé.

Cependant, le père ou la mère peut se voir retirer une partie ou la totalité de son autorité
parentale et, ainsi, perdre la tutelle de son enfant.

La perte de la tutelle a pour effet de retirer au parent déchu l'administration des biens, la
protection et l'exercice des droits civils de l'enfant mineur.

Tutelle dative
Depuis 1994, le Code civil du Québec permet au père ou à la mère de nommer un tuteur
à son enfant mineur, par une clause contenue dans le testament ou dans le mandat
donné en prévision de l'inaptitude, ou encore par une déclaration transmise au curateur
public53. Ce mécanisme permet aux parents de désigner eux-mêmes la personne qui
agira comme tuteur à leur enfant mineur qui se retrouverait sans père ni mère apte à
prendre soin de lui.

Le droit de nommer le tuteur n'appartient qu'au survivant des père et mère ou, selon la
situation, au dernier des deux parents apte à agir comme tuteur de l'enfant.
Exemple 2-1
Mise en situation
Gaspard est séparé de Bérengère depuis deux ans. Il a fait un testament dans lequel il
nomme son frère Jules comme tuteur datif de ses enfants. Bérengère a fait un testament
dans lequel elle nommait sa sœur Régine comme tuteur datif à ses enfants. Bérengère
décède avant Gaspard. C'est donc Jules qui sera tuteur datif des enfants mineurs de
Gaspard et Bérengère, dans l'éventualité du décès du dernier des parents. Dans
l'éventualité où Jules refusait la charge et que Gaspard n'avait pas prévu de remplaçant,
une requête au tribunal serait alors nécessaire pour nommer un tuteur aux enfants.

La tutelle dative peut également être déférée par le tribunal s'il y a lieu de nommer ou de
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remplacer un tuteur (dans l'éventualité où les parents n'y auraient pas pourvu eux-
mêmes), de nommer un tuteur ad hoc (soit lorsque les intérêts du tuteur sont en conflit
avec ceux du mineur) ou un tuteur aux biens, ou en cas de contestation du choix d'un
tuteur nommé par les père et mère.

L'on constate en pratique que la tutelle déférée par le tribunal est plus rare, étant donné
la tutelle légale conférée aux parents et le pouvoir pour ceux-ci de désigner eux-mêmes
un tuteur.

Lorsque le tribunal doit nommer un tuteur, il doit prendre l'avis du conseil de tutelle, sauf
lorsque la tutelle est demandée par le directeur de la protection de la jeunesse. En effet,
ce dernier peut lui-même demander au tribunal de nommer un tuteur pour un enfant
mineur sans représentant ou pour qui un retour au foyer parental mettrait la sécurité en
péril.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Les parents ayant des enfants mineurs devraient, lors de la rédaction de leur testament
et de leur mandat en prévision de l'inaptitude, procéder à la nomination d'un tuteur datif
au cas où ni l'un ni l'autre ne serait en mesure d'assumer cette tâche.

Administration du tuteur54
Qu'il s'agisse d'une tutelle dative ou légale, le tuteur agit à titre d'administrateur du bien
d'autrui, chargé de la simple administration55.

Contrairement à la «pleine administration», la notion de «simple administration» fait


davantage référence à la protection du patrimoine qu'à sa fructification. Le tuteur a donc
davantage un rôle de conservateur du patrimoine jusqu'à ce que le mineur puisse
légalement en assumer la gestion.

En règle générale, le tuteur doit, dans son rôle d'administrateur des biens de l'enfant
mineur :

• faire l'inventaire des biens;


• fournir une sûreté garantissant son administration;
• rendre compte de sa gestion annuellement;
• aviser le liquidateur d'une succession et le curateur public, dans le cas de la
tutelle dative, qu'il accepte ou refuse la charge56.

Toutefois, par exception, l'obligation de faire l'inventaire, de fournir une sûreté et de


rendre compte ne sera pas imposée lorsque :

• les tuteurs sont les père et mère de l'enfant mineur et que la valeur des biens à
administrer est inférieure à 25 000 $; ou
• la charge de tutelle est exercée par le curateur public.

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Tous les frais reliés à l'administration, à l'exercice des droits civils du mineur et aux
charges de la tutelle seront acquittés à même les revenus et les biens du mineur. Dans
le cas où la tutelle aux biens et la tutelle à la personne ne sont pas exercées par le
même individu, le tuteur aux biens veillera également à défrayer les frais reliés à
l'entretien et à l'éducation du mineur. Il devra également convenir, avec le tuteur à la
personne, des sommes nécessaires pour acquitter les charges y reliées. En cas de
mésentente sur la valeur ou le paiement de ces sommes, le conseil de tutelle ou, à
défaut, le tribunal, tranchera.

Les biens donnés ou légués à un mineur et administrés par un tiers (tel un liquidateur ou
fiduciaire) sont soustraits à l'administration du tuteur. Ainsi, si le mineur est héritier d'une
succession et que l'administration du patrimoine légué a été confiée au liquidateur de la
succession ou à un fiduciaire, le tuteur n'aura pour seul rôle que de veiller à l'entretien, à
l'éducation et aux soins médicaux du mineur.

En principe, le tuteur peut seul poser des gestes courants d'administration, ainsi
qu'accepter une donation faite en faveur de son pupille. Cependant, il ne peut seul
accepter une donation avec charge (laquelle acceptation requiert l'autorisation du
conseil de tutelle), transiger, poursuivre un appel, contracter un emprunt important eu
égard à la valeur du patrimoine administré, consentir une sûreté, aliéner un bien à
caractère familial, un immeuble ou une entreprise, ou provoquer le partage définitif des
immeubles possédés par indivision. Ces actes requerront que le tuteur obtienne tantôt
l'autorisation du conseil de tutelle, tantôt celle du tribunal. De même, l'aliénation d'un
bien dont la valeur excède 25 000 $ ne peut se faire sans l'évaluation d'un expert (ce qui
n'est cependant pas nécessaire pour les valeurs cotées en bourse).

Lorsque la valeur des biens excède 25 000 $, le liquidateur d'une succession dévolue ou
léguée à un mineur et le donateur d'un bien si le donataire est un mineur, ou, dans tous
les cas, toute personne qui paie une indemnité au bénéfice d'un mineur, doit déclarer le
fait au curateur public et indiquer la valeur des biens.

Au cours de son administration, le tuteur aura à compléter certains documents pour le


compte du mineur et à y apposer sa signature.

Conseil de tutelle
Rôle
Le rôle du conseil de tutelle57 est essentiellement de surveiller l'administration du tuteur.
Il doit :

• donner des avis et prendre des décisions dans les cas prévus par la loi58;
• s'assurer que le tuteur a fait l'inventaire des biens du mineur;
• s'assurer qu'il a fourni et maintenu une sûreté;
• recevoir le compte de gestion annuel du tuteur;
• conserver et transmettre, à la fin de la tutelle, le plus de renseignements
possibles sur l'administration des biens et sur les décisions prises relativement à la
personne du mineur.

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Constitution
Le conseil de tutelle doit être formé toutes les fois qu'il y a tutelle dative (déférée par les
parents ou par le tribunal) ou en cas de tutelle légale (celle exercée par les parents),
lorsque la valeur du patrimoine du mineur excède 25 000 $ (le père et la mère étant
alors tenus de faire un inventaire, de fournir une sûreté et de rendre un compte annuel
de leur gestion), ou lorsque le tribunal le décide à la suite d'une requête à cet effet.

Cependant, il n'y a pas lieu de créer un conseil de tutelle lorsque la tutelle est exercée
par le directeur de la protection de la jeunesse ou par le curateur public.

Toute personne intéressée peut demander à un notaire ou au tribunal de convoquer une


assemblée de parents, d'alliés ou d'amis afin de provoquer la constitution du conseil de
tutelle.

Le tuteur nommé par le père ou la mère du mineur ou les père et mère doivent
provoquer la constitution du conseil de tutelle.

Assemblée de parents, d'alliés ou d'amis


Doivent être convoqués lors de l'assemblée de parents, d'alliés ou d'amis, les père et
mère du mineur, ses autres ascendants, ainsi que ses frères et sœurs majeurs. Peuvent
être également convoqués les amis du mineur, s'ils sont majeurs.

Au moins cinq personnes doivent assister à cette assemblée. Il est souhaité que tant la
ligne maternelle que la ligne paternelle soient représentées.

C'est lors de cette assemblée que l'on désignera les trois membres du conseil de tutelle
et les deux suppléants. Exceptionnellement, le conseil de tutelle peut être formé d'une
seule personne, si le tribunal en décide ainsi.

On doit souligner que le tuteur ne peut être membre du conseil de tutelle59.

Mesures de surveillance de la tutelle


Le Code civil édicte les différentes mesures suivantes destinées à assurer la
surveillance de l'administration du tuteur par le conseil de tutelle :

• le tuteur doit faire un inventaire des biens du mineur et copie de cet inventaire
doit être transmise au curateur public et au conseil de tutelle. Toutefois, les parents
qui agissent comme tuteurs de leur enfant mineur ne sont pas tenus de procéder à
cet inventaire si la valeur des biens à administrer est inférieure à 25 000 $;
• le tuteur doit fournir une sûreté afin de garantir l'accomplissement de ses devoirs.
Il est ainsi tenu de souscrire une assurance ou de fournir une autre sûreté lorsque
la valeur des biens administrés excède 25 000 $. Il appartient au conseil de tutelle
de définir l'objet de la sûreté, ainsi que le délai pour la fournir. Bien sûr, les frais de
constitution de cette sûreté sont à la charge de la tutelle;
• le tuteur doit également rendre compte annuellement de son administration au
mineur âgé d'au moins l4 ans, au conseil de tutelle, ainsi qu'au curateur public;
• la loi impose au tuteur une reddition de compte finale au mineur devenu majeur.

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Une copie doit être également transmise au conseil de tutelle et au curateur public;
• le conseil devra faire nommer un tuteur ad hoc chaque fois que le mineur aura
des intérêts à discuter en justice avec son tuteur.

Remplacement du tuteur et la fin de la tutelle


Le conseil de tutelle, l'un de ses membres, ou tout autre intéressé, y compris le curateur
public, peut demander au tribunal le remplacement du tuteur qui ne peut exercer sa
charge ou qui ne respecte pas ses obligations.

Pendant l'instance, le tuteur continue à exercer sa charge, à moins que le tribunal n'en
décide autrement.

La tutelle prend fin lorsque le mineur a atteint l'âge de la majorité, lors de la pleine
émancipation ou au décès du mineur.

La charge de tuteur cesse à la fin de la tutelle, au remplacement du tuteur ou à son


décès. Le tuteur datif peut, pour un motif sérieux ou en respect des pouvoirs consentis
dans l'acte constitutif (testament ou mandat de protection), renoncer à sa charge; il doit
remettre un avis à cet effet au conseil de tutelle.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Il ne faut pas oublier que la tutelle au mineur cesse à 18 ans. Ainsi, dans le cas d'un
mineur souffrant d'une incapacité à administrer ses biens ou à prendre soin de sa
personne, temporairement ou de façon permanente, une requête devrait être présentée
au tribunal afin de faire établir à son égard un régime de protection qui prendrait effet à
ses 18 ans.

(1) 2.12 — Régimes de protection du majeur

Voyons maintenant comment la loi protège la personne qui, bien qu'ayant l'âge de
majorité, n'est pas apte à se prendre en charge en raison d'une incapacité quelconque.
Il est à noter qu'une personne mineure souffrant d'une pareille incapacité sera
représentée par son tuteur selon les règles précédemment établies jusqu'à ce qu'elle ait
atteint l'âge de majorité, moment à compter duquel les règles ci-après s'appliqueront à
son égard.

Le législateur prévoit ce qui suit à l'article 256 C.c.Q. :


Les régimes de protection du majeur sont établis dans son intérêt; ils sont destinés à
assurer la protection de sa personne, l'administration de son patrimoine et, en général,
l'exercice de ses droits civils.

L'incapacité qui en résulte est établie en sa faveur seulement.

Il est à noter que la loi instaure différents régimes de protection; le choix du régime
dépendra alors du degré d'inaptitude du majeur. Ainsi, selon le degré d'inaptitude du
60
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majeur à prendre soin de lui-même ou à administrer ses biens60, il lui sera nommé soit
un curateur ou un tuteur pour le représenter, soit un conseiller pour l'assister. C'est le
tribunal qui détermine le régime à accorder à la personne inapte sur la base des
évaluations médicale et psychosociale qui lui sont soumises.

2.12.1 — Ouverture d'un régime de protection (tutelle, curatelle, conseiller au


majeur)
Seul le tribunal a le pouvoir de prononcer l'ouverture d'un régime de protection à un
majeur. Malgré l'absence d'un jugement à cet effet, les actes faits par une personne
majeure dont l'inaptitude était manifeste ou connue par le cocontractant pourront être
annulés et les obligations qui en découlent réduites.
Exemple 2-2
Joseph souffre de la maladie d'Alzheimer. Il n'est plus apte à gérer ses biens. Lors de sa
visite quinquennale, son neveu Pierre-Paul, voyant dans cette situation une occasion
d'affaires, décide de lui faire rédiger un dernier testament en s'assurant que lui, Pierre-
Paul, soit nommé légataire universel et seul liquidateur.

Au décès de Joseph ou avant, si le stratagème est découvert, tout intéressé pourrait


faire annuler le testament en prouvant que Joseph n'avait plus la capacité de tester.

Considérations menant à l'ouverture d'un régime de protection


Différents critères sont évalués aux fins d'établir le type de régime de protection requis
par l'état d'inaptitude du majeur. Il est tenu compte, entre autres, de l'avis des personnes
pouvant former le conseil de tutelle, des preuves médicales et psychosociales et du
degré d'autonomie du majeur.

Le majeur visé par la procédure a le droit d'être entendu par le tribunal. Il pourra alors se
manifester au sujet du bien-fondé de la demande et du choix de la personne qui sera
chargée de le représenter.

Choix du curateur, tuteur ou conseiller


S'il peut se manifester, le majeur visé par la demande a le droit d'émettre son opinion
relativement à la personne qui sera chargée de le représenter ou de l'assister. Les
volontés que le majeur aurait exprimées dans un mandat en prévision de son inaptitude,
lequel mandat n'a pas été homologué, seront également prises en considération par le
tribunal.

Personnes pouvant demander l'ouverture d'un régime de protection


Les personnes suivantes peuvent demander l'ouverture d'un régime de protection :

• le majeur lui-même;
• son conjoint (marié, uni civilement, ou de fait);
• ses proches parents et alliés;
• toute personne qui démontre un intérêt particulier pour le majeur;
• tout autre intéressé;
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• le directeur général d'un établissement de santé ou de services sociaux61.


• le mandataire désigné par le majeur;
• le curateur public.

Obtention du jugement
Le jugement rendu par la Cour détermine le type de régime de protection applicable
(tutelle, curatelle ou conseiller au majeur). Ce jugement est susceptible de révision62.
Une fois rendu, le jugement doit être signifié au majeur que l'on veut protéger63.

2.12.2 — Trois différents types de régime de protection


Curatelle
Un curateur au majeur est nommé lorsqu'il est prouvé que son inaptitude à prendre soin
de lui-même et administrer ses biens est totale et permanente, donc potentiellement
irréversible, et qu'il a besoin d'être représenté dans l'exercice de ses droits civils64.

Le curateur agit alors comme administrateur du bien d'autrui chargé de la «pleine


administration». Toutefois, en matière de placement, le curateur est restreint aux
placements présumés sûrs, conformément aux règles de la «simple administration» du
bien d'autrui.

Si personne n'accepte la charge de curateur ou si le curateur nommé est décédé ou a


démissionné, le curateur public pourra agir à titre de curateur suppléant (art. 261 C.c.Q.).

Tutelle
Un tuteur au majeur est nommé lorsqu'il est établi que son inaptitude à prendre soin de
lui-même ou administrer ses biens est partielle ou temporaire, donc potentiellement
réversible, et qu'il a besoin d'être représenté dans l'exercice de ses droits civils (art. 285
C.c.Q.).

Les pouvoirs du tuteur peuvent s'étendre à la personne et aux biens du majeur, ou


encore être restreints soit à la personne soit aux biens du majeur (art. 285 al. 2 C.c.Q.).

Le tuteur aux biens agit comme administrateur chargé de la «simple administration».


Ses pouvoirs s'apparentent alors à ceux d'un tuteur au mineur; ils peuvent cependant
être modifiés par le tribunal, selon les circonstances.

Le régime de tutelle peut être adapté à la personne protégée et à son degré réel
d'inaptitude physique ou mentale. En effet, contrairement à la curatelle où le besoin de
protection est total, le tribunal peut déterminer, dans le cas d'une tutelle, le degré
d'incapacité du majeur (p. ex. : actes qu'il peut poser seul, actes qu'il ne peut poser
qu'avec l'assistance de son tuteur) (art. 288 C.c.Q.).

Ainsi, l'article 289 C.c.Q. décrète notamment que le majeur en tutelle conserve la gestion
du produit de son travail à moins que le tribunal n'en décide autrement. Le testament du
majeur pourrait même être confirmé (art. 709 C.c.Q.).

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Il est à noter qu'à l'instar de la curatelle, le curateur public peut agir comme tuteur
suppléant, dans le cas où personne n'accepte la charge de tuteur ou lors du décès ou de
la démission du tuteur nommé (art. 261 C.c.Q.).

Conseiller au majeur
Un conseiller au majeur est nommé lorsque celui-ci, bien que généralement apte à
prendre soin de lui-même et administrer ses biens, a besoin, pour certains actes ou
temporairement, d'être assisté ou conseillé dans l'administration de ses biens.

Ainsi, le conseiller n'exerce pas l'administration des biens du majeur protégé.


Cependant, il doit intervenir aux actes pour lesquels il doit l'assister.

Les actes requérant l'assistance du conseiller (ou ceux ne nécessitant pas cette
assistance) sont déterminés par le tribunal. À défaut d'indication, le conseiller doit
assister le majeur protégé dans tous les actes excédant la capacité du mineur
simplement émancipé.

2.12.3 — Administration du régime de protection


Outre les règles spécifiques s'appliquant aux régimes de protection du majeur, les règles
relatives à la tutelle au mineur s'appliquent à la tutelle et à la curatelle au majeur, en y
faisant les adaptations nécessaires. Tel est le cas de la constitution du conseil de tutelle
et des mesures de surveillance du régime de protection65.

2.12.4 — Réévaluation du régime de protection


Malgré le jugement rendu, le régime de protection désigné au majeur doit être révisé
tous les trois ans, dans le cas de tutelle ou de conseiller au majeur. Il est à noter que le
tribunal peut fixer un délai plus court en vertu de la discrétion qui lui est conférée par
l'article 278 C.c.Q.

Dans le cas de curatelle, le régime de protection doit être révisé tous les cinq ans.
Encore ici, le tribunal peut fixer un délai plus court en vertu de la discrétion qui lui est
conférée par l'article 278 C.c.Q.

Aux fins de révision, le curateur, le tuteur ou le conseiller doit voir à ce que le majeur soit
soumis à une évaluation médicale et psychosociale en temps voulu.

Enfin, mentionnons que le type de régime de protection peut également être révisé à
tout autre moment si des circonstances particulières le justifient (art. 277 C.c.Q.).

2.12.5 — Fin du régime de protection


Le régime de protection au majeur cesse par l'effet d'un jugement de mainlevée (si le
majeur recouvre ses capacités) ou par le décès du majeur protégé.

(1) 2.13 — Régime de protection privé

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2.13.1 — Mandat de protection en prévision de l'inaptitude


Le mandat de protection en prévision de l'inaptitude est un contrat par lequel le mandant
donne au mandataire le pouvoir d'agir en son nom, pour tous les actes que le
mandataire jugera à propos, y compris la protection de la personne et l'administration
des biens du mandant advenant son inaptitude.

Le mandat de protection en prévision de l'inaptitude est donc le moyen prévu par la loi
pour éviter l'ouverture d'un régime de protection (c.-à-d. la curatelle, la tutelle ou le
conseiller) tout en protégeant les droits de la personne en lui substituant un représentant
qu'elle aura elle-même choisi. On pourrait parler ici de régime privé de protection versus
les régimes imposés par le Code civil du Québec, en cas d'absence de mandat de
protection en prévision de l'inaptitude.

Pour être valide, le mandat de protection en prévision de l'inaptitude doit respecter l'une
des deux formes suivantes :

• mandat sous la forme notariée en minute;


• mandat en présence de deux témoins.

Les avantages et inconvénients des deux formes de mandats de protection en prévision


de l'inaptitude sont les suivants :

Tableau 2-1

Avantages et inconvénients des deux formes de mandats de protection en


prévision de l'inaptitude

Mandat notarié Mandat en


présence de deux
témoins

Avantages • acte authentique • il doit y avoir deux


témoins majeurs qui
n'ont pas d'intérêt à
l'acte66

• aucun témoin requis • les témoins doivent


constater l'aptitude
du mandant à agir67

• la capacité du • plus simple


mandant est vérifiée

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par le notaire

• conservé en lieu sûr • pas ou peu de frais

• inscrit au Registre • peut être écrit par un


des dispositions tiers, dactylographié
testamentaires et ou de type
des mandats de la formulaire
Chambre des
notaires du Québec

• généralement plus
complet et explicite
dans la description
des pouvoirs
accordés au
mandataire

Inconvénients • frais plus élevés • termes très


généraux
relativement aux
pouvoirs
d'administration et
requiert une
connaissance
juridique de la part
du mandataire et
des tiers

• peut être perdu ou


détruit

• l'un des témoins


peut être tenu de
prouver l'aptitude du
mandant lors de la
signature du mandat
advenant son
inaptitude

Homologation • requise • requise

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

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Il serait de mise également de faire signer une déclaration sous serment par l'un des
témoins, afin d'obtenir une preuve de la validité du mandat lors de son homologation
éventuelle par le tribunal ou le notaire.

Le mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude, qu'il soit notarié ou devant


témoins, peut être écrit par un tiers, dactylographié ou de type formulaire.

Contenu du mandat
Le mandant a toute la discrétion quant au contenu de son mandat :

• le mandat peut être spécial pour une affaire particulière, comme une procuration
bancaire;
• le mandat peut être général, pour toutes les affaires du mandant.

Éléments requis
Pour que le mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude du mandant68 soit
complet, on devrait y trouver les clauses suivantes :

• protection de la personne du mandant : clauses prévoyant l'éventualité où le


mandant n'est plus capable de prendre soin de lui-même, le mandataire étant
chargé de pourvoir à la garde et à l'entretien du mandant, s'il est manifeste qu'il ne
peut plus prendre soin de lui-même;
• administration des biens du mandant : clauses accordant au mandataire une
procuration générale, c'est-à-dire le pouvoir de gérer et d'administrer tous les biens
meubles et immeubles du mandant;
• consentement aux soins : clauses accordant au mandataire le pouvoir de
consentir à tous les soins exigés par l'état de santé du mandant, quelle qu'en soit
la nature;
• supervision du bien-être moral et matériel du mandant : clauses autorisant le
mandataire à accomplir tout acte visant à pourvoir aux nécessités de la vie du
mandant.

Mandat incomplet ou partiel


Il est possible que le contenu d'un mandat de protection donné en prévision de
l'inaptitude ne couvre pas tous les besoins de représentation de la personne inapte, soit
parce qu'il est limité à l'administration des biens du mandant, soit, au contraire, parce
qu'il ne se limite qu'aux dispositions visant à assurer la protection de la personne du
mandant. Si un tel scénario se présentait, on pourrait compléter le mandat par
l'établissement de l'un des régimes de protection prévus au Code civil du Québec69.

À ce moment, le mandat coexiste avec le régime de protection. En pareil cas, le majeur


inapte est représenté, tantôt par le mandataire (pour l'administration de ses biens), tantôt
par un tuteur ou un curateur (pour la protection de sa personne).

Il est donc préférable que le mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude soit
complet, c'est-à-dire qu'il couvre tant les aspects relatifs à l'administration des biens que
ceux ayant trait à la protection de la personne du mandant.

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Si la portée du mandat était douteuse (certaines dispositions du mandat pouvant être


obscures), le mandataire devrait les interpréter selon les règles relatives à la «tutelle au
majeur» et non selon les règles du mandat.

2.13.2 — Mandant
Capacité du mandant
Pour pouvoir signer un mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude, une
personne doit jouir de sa pleine capacité lors de la signature du mandat. Le Code civil
du Québec mentionne que le mandat de protection en prévision de l'inaptitude est donné
par une personne majeure70. Un enfant mineur pleinement émancipé pourrait donc faire
un mandat de protection en prévision de l'inaptitude, car il est réputé majeur (voir
supra)71.

Au contraire des autres types de mandat, le mandat de protection donné en prévision de


l'inaptitude ne prend pas effet lors de sa signature, puisque le mandant est alors apte à
prendre soin de lui-même et à administrer ses biens. Le mandat de protection donné en
prévision de l'inaptitude prend effet lorsque l'inaptitude du mandant est constatée
judiciairement ou par un notaire dûment accrédité (il s'agit de la procédure
d'homologation du mandat).

Notre droit civil établit que la capacité d'une personne est la règle et que c'est
l'incapacité qui doit être démontrée.

Ainsi, toute personne est présumée capable d'exercer ses droits civils jusqu'à preuve du
contraire.

Obligations du mandant envers le mandataire


Les obligations du mandant envers le mandataire sont identiques pour tous les types de
mandat. Le mandant aura comme obligation de rembourser au mandataire les frais
raisonnables que celui-ci a engagés72 pour réaliser son mandat, lui verser la
rémunération à laquelle il peut avoir droit et indemniser le mandataire qui n'a commis
aucune faute, pour tout préjudice qu'il pourrait encourir dans le cadre de l'exécution de
son mandat73.

Puisque le mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude prend effet lorsque le


mandant est déclaré inapte, la loi prévoit que le mandataire pourra, en cours de mandat,
exécuter certaines obligations à son profit74, c'est-à-dire se rembourser ses dépenses et
se verser une rémunération, s'il y a droit.

En pratique, il serait préférable de rédiger des clauses relatives à ces situations afin de
clarifier les droits du mandataire.

Si le mandat est silencieux au sujet de la rémunération et que le mandataire est un


professionnel, cette rémunération sera calculée à son taux horaire usuel facturé dans la
pratique de sa profession.

Il est à noter que la somme reçue à titre de rémunération par le mandataire devra être

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incluse dans son revenu pour les fins de sa déclaration de revenus.

Le fait qu'un mandataire ait agi à titre gratuit pourra être considéré dans la détermination
du montant des dommages devant être payés au mandant à la suite d'une faute
commise par le mandataire mais n'affecte en rien son niveau de responsabilité quant
aux obligations qu'il a envers le mandant75.

Le mandant peut limiter ou préciser les droits et les pouvoirs du mandataire dans son
rôle d'administrateur des biens d'autrui. Ainsi, il peut lui confier la simple ou la pleine
administration et lui préciser des pouvoirs très spécifiques, tel que vendre la résidence
principale, assurer les biens, etc.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Parmi les pouvoirs du mandataire qu'il est très important de spécifier au mandat, on
retrouve la possibilité d'utiliser les biens du mandant au profit et au bénéfice des
membres de sa famille et celle de continuer à faire des dons ou des cadeaux.

Obligations du mandant envers les tiers


Tous les actes posés par le mandataire à l'intérieur des pouvoirs consentis par le mandat
ou qui excèdent les limites du mandat mais qui sont plus avantageux pour le mandant,
lient le mandant envers les tiers comme s'il les avait lui-même posés.

2.13.3 — Mandataire
La portée du mandat ainsi que les pouvoirs donnés au mandataire sont réglés par les
dispositions du mandat lui-même. Le mandat peut donner au mandataire les pouvoirs les
plus étendus possibles ou encore apporter certaines restrictions à l'exercice de ces
pouvoirs. Il est donc loisible au mandant de prévoir que son mandataire pourra agir en
toutes choses, sans l'autorisation de quiconque.

Le mandant peut nommer un seul mandataire pour veiller à la fois sur sa personne et sur
ses biens, ou il peut nommer un mandataire à sa personne et un autre pour gérer ses
biens.

Il est possible pour le mandant de nommer plusieurs personnes pour agir conjointement
comme mandataires. Si tel est le choix du mandant, il devra prévoir dans le mandat des
règles claires quant à la prise de décisions des mandataires (majorité ou unanimité), la
possibilité de délégation de pouvoir entre eux, etc.

Seule une personne majeure (ce qui inclut le mineur émancipé) peut agir à titre de
mandataire.

Une personne morale pourrait également agir à titre de mandataire, mais ses pouvoirs
seraient limités à l'administration des biens du mandant. Toutefois, seules les personnes
morales dûment autorisées par leur loi constitutive peuvent agir comme mandataires aux
76
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biens. Par exemple, la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne76 donne
ce pouvoir aux sociétés de fiducie. Le même pouvoir n'est cependant pas accordé aux
sociétés régies par la Loi sur les sociétés par actions (Québec)77 ou la Loi canadienne
sur les sociétés par actions78.

Acceptation
Pour qu'il y ait existence d'un contrat, le mandataire doit accepter la charge prévue au
mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude du mandant. Son acceptation
peut être expresse (par un écrit) ou tacite (par les gestes posés : effectuer les
procédures d'homologation de mandat).

Il serait sage pour le mandant d'aviser les personnes pressenties pour agir à titre de
mandataires aux fins de les informer et de s'assurer, dans la mesure du possible, de leur
consentement à agir au besoin.

Mandataire remplaçant
Le mandat devrait prévoir des dispositions advenant le décès, l'incapacité légale ou le
refus d'agir du mandataire. La procédure de remplacement sera établie en respect des
volontés du mandant. Celui-ci pourra nommer autant de mandataires remplaçants qu'il le
jugera à propos. Il pourrait même prévoir que la nomination du remplaçant sera faite par
le dernier mandataire en fonction. On parlera alors de mandataire substitut79.

Cependant, il serait de bonne pratique d'insérer dans le mandat que :

• tout nouveau mandataire devra faire connaître son acceptation de la charge par
acte notarié portant minute ou devant témoins;
• tout mandataire pourra toujours renoncer à sa charge, même après l'avoir
acceptée, pourvu qu'il le fasse par acte, soit notarié portant minute soit devant
témoins, cet acte devant être accompagné d'une reddition de compte dont les frais
seront à la charge du mandant et pourvu qu'il ait assuré son remplacement.

Ces procédures sont importantes afin que le mandataire remplaçant ou substitut ait une
preuve à fournir aux personnes avec lesquelles il négociera au nom du mandant.

Il faut noter que le mandataire ne peut, malgré toute stipulation contraire, renoncer à son
mandat sans avoir au préalable pourvu à son remplacement si le mandat y pourvoit, ou
sans avoir demandé l'ouverture d'un régime de protection à l'égard du mandant.

Obligations du mandataire envers le mandant


Le mandataire devra agir en respect des termes et conditions de son mandat.

Le mandataire doit agir avec prudence et diligence; il doit également «agir avec
honnêteté et loyauté dans le meilleur intérêt du mandant et éviter de se placer dans une
situation de conflit entre son intérêt personnel et celui de son mandant80».

Le mandataire devra rendre compte de sa gestion à la fin du mandat81. Il n'existe


aucune mesure de contrôle de l'administration du mandataire. Le mandataire n'est pas

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tenu de rendre compte annuellement au curateur public et son administration n'est pas
surveillée par un conseil de tutelle. Le mandant peut l'obliger également à rendre compte
de son administration à une personne qu'il aura désignée durant la durée de son
administration.

Le mandant pourra exiger que le mandataire dresse un inventaire de ses biens lors de
l'acceptation de sa tâche.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Il serait cependant important de recommander au mandant d'intégrer dans son mandat


une clause de reddition de compte annuelle auprès d'une personne désignée afin
d'éviter les abus et la mauvaise gestion de la part du mandataire, ainsi qu'une clause
exigeant l'élaboration de l'inventaire des actifs du mandant.

Il ne faut pas négliger les obligations du mandataire à poser tous les gestes et actes
visant à assurer la protection de la personne du mandant et, en général, son bien-être
moral et matériel.

Obligations du mandataire envers les tiers


Le mandataire, qui agit en respect des pouvoirs qui lui sont consentis, pour et au nom du
mandant et dans les limites de son mandat, n'est pas personnellement tenu envers les
tiers82.

2.13.4 — Entrée en vigueur du mandat de protection en prévision de


l'inaptitude
L'entrée en vigueur du mandat de protection en prévision de l'inaptitude dépend d'une
seule chose : l'inaptitude du mandant. On parle ici de l'inaptitude constatée par le
tribunal. La connaissance de l'incapacité d'une personne, et ce, même par tous, ne
donne pas au mandataire la possibilité d'utiliser le mandat.

Procédure d'homologation du mandat


La requête en homologation d'un mandat de protection en prévision de l'inaptitude peut
être présentée à un juge, à un greffier ou à un notaire.

On doit y joindre le mandat, une évaluation médicale et une évaluation psychosociale


constatant l'inaptitude du mandant.

Il y a lieu de s'assurer qu'on est en possession du dernier mandat de protection en


prévision de l'inaptitude fait par le mandant. Une vérification préalable aux Registres des
dispositions testamentaires et des mandats de la Chambre des notaires du Québec et
du Barreau du Québec s'avérera nécessaire.

C'est également à ce moment qu'il y aura vérification de la validité du mandat devant


témoins quant au respect de la forme83.

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À la suite de la réception des documents, le juge, le greffier ou le notaire devra procéder


à un interrogatoire du majeur afin de constater s'il est apte à prendre soin de lui-même
ou à administrer ses biens84.

Un jugement sur conclusion sera transmis par la suite au majeur, au curateur public,
ainsi qu'au mandataire. Le mandat de protection en prévision de l'inaptitude sera alors
homologué.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Toute personne de 18 ans ou plus devrait rédiger un mandat de protection en prévision


de son inaptitude.

2.13.5 — Qu'en est-il de l'inaptitude partielle?


Il découle de l'essence même du mandat de protection que la survenance de l'inaptitude
est l'événement primordial pour son exécution.

Mais quel est le degré d'inaptitude requis par le tribunal?

Les tribunaux ont eu à se prononcer à quelques reprises sur cette question et d'ailleurs,
ils (les tribunaux) sont soucieux de s'assurer que le mandant est véritablement inapte et
non simplement en perte d'autonomie comme le souligne la juge Hélène LeBel :
(44) La capacité d'une personne doit s'apprécier en fonction de la réalité de tous les
jours. Et dans la réalité de tous les jours, des gens sont plus intelligents, d'autres moins.
Des gens sont instruits, des gens le sont moins. Des gens ont un bon jugement et des
gens en ont malheureusement peu. On n'ouvre pas un régime de protection à tous les
majeurs qui manquent de jugement ou qui n'ont pas assez d'expérience ou d'instruction
pour «bien» gérer leurs affaires ou pour prendre de sages décisions.

(45) De surcroît, il est important de s'interroger sur le genre de société dans laquelle on
vit et on veut vivre alors que de plus en plus de gens vont vivre de plus en plus vieux. Si
on établit un standard trop élevé ou disproportionné, eu égard aux conséquences à peu
près inévitables du vieillissement, cela signifie que la plupart des gens âgés finiraient par
être privés de leur autonomie. Le Tribunal ne croit pas qu'un tel résultat serait conforme
au modèle que nous propose la Charte des droits et libertés de la personne ou la Charte
canadienne des droits et libertés ou le Code civil du Québec.85

Dans un autre jugement, le juge Legris rejette la requête en homologation de mandat,


car il conclut que les problèmes de santé du mandant sont dus au stress provoqué par la
discorde familiale et non pas par son incapacité à gérer sa personne et ses biens.86

Ainsi, si l'inaptitude du mandant est partielle, le tribunal devra déterminer s'il y a ou non
lieu d'homologuer le mandat de protection. À cet égard, le tribunal a peu de latitude : il
ne peut qu'accepter ou refuser d'homologuer le mandat de protection. Contrairement aux
régimes de protection, il ne peut moduler les pouvoirs du mandataire selon le degré
d'inaptitude du mandat; tutelle, curatelle, conseiller au majeur.

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Au cours des années, la jurisprudence à évolué sur ce sujet et maintenant, la majorité


des auteurs s'entendent pour dire que l'on peut conclure que le mandat de protection
peut être homologué même si l'inaptitude du mandant est partielle. Cependant le tribunal
prendra sa décision :
(au) mérite en tenant compte notamment de l'intérêt du majeur, du respect de ses droits,
de la sauvegarde de son autonomie, son degré d'inaptitude, ses volontés, la
détérioration prévisible de son état de santé et la dynamique familiale.87

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

L'un des points importants dans la reconnaissance du mandat de protection en cas


d'inaptitude, lorsque cette inaptitude est partielle, est le respect des volontés du
mandant. Cette volonté s'exprimera à l'aide d'une déclaration en ce sens mentionnée au
mandat de protection.

(1) 2.14 — Mandat (procuration)

À la différence du mandat de protection donné en prévision de l'inaptitude, le mandat


(communément appelé «procuration») prend effet lors de sa signature. Malgré son effet
immédiat, le mandat ne dépouille pas celui qui l'a donné de l'exercice de ses droits de
propriété à l'égard de ses biens. Le mandant (celui qui donne le mandat ou la
procuration) conserve l'exercice de tous ses droits; il ne fait que se nommer un
représentant à qui il délègue des pouvoirs plus ou moins étendus de gestion et
d'administration, lesquels seront exercés par le mandataire en conformité avec les
directives données par le mandant, à qui le mandataire doit rendre compte.

Il faut porter attention à l'étendue des pouvoirs qu'on désire accorder au mandataire. Si
les parties conviennent en des termes généraux des pouvoirs du mandataire, celui-ci ne
pourra alors accomplir que des actes de simple administration88. Le mandat peut
également être fait de manière précise et décrire précisément les pouvoirs du
mandataire.

L'étendue du mandat peut porter sur une représentation entière du mandant (procuration
générale) pour tous ses actes juridiques ou seulement pour un acte précis (procuration
spécifique). À noter qu'une procuration générale bancaire est en fait une procuration
spécifique, car elle ne peut être utilisée que dans cette institution financière.

2.14.1 — Obligations du mandant


Le mandant doit collaborer avec le mandataire dans la poursuite de son mandat. Il doit
également payer au mandataire les honoraires prévus au contrat, ainsi que les frais
encourus dans le cadre de son mandat.

Le mandant se doit aussi de décharger le mandataire de toutes les responsabilités que


ce dernier a pu encourir envers les tiers alors qu'il agissait dans les limites du mandat
89
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qu'on lui a confié89.

Responsabilité envers les tiers


En règle générale, le mandant est toujours responsable envers les tiers des actes posés
par le mandataire. Cependant, ce dernier pourra parfois être tenu lui-même responsable
des actes qu'il a posés et qui excèdent les limites de son mandat90.

Si le mandant ratifie un acte conclu par le mandataire hors des limites de son mandat, la
ratification a pour effet de transférer la responsabilité du mandataire au mandant91. À cet
effet, mentionnons que le mandant est présumé avoir ratifié l'acte qui excède les limites
du mandat lorsque cet acte a été accompli d'une manière qui lui est plus avantageuse
que celle même qu'il avait indiquée92. Le mandant sera donc responsable de cet acte
face aux tiers.

Il peut survenir des situations où le mandataire agit sans pouvoirs et où le mandant ne


s'oppose pas aux agissements du mandataire. Nous sommes alors en présence d'un
mandat apparent93. En pareil cas, le mandant est alors responsable des agissements du
mandataire envers le tiers de bonne foi lorsque, par exemple, ce dernier croyait le
mandataire investi de pouvoirs lui permettant de conclure cet acte.

On peut également se trouver dans une situation de mandat apparent si le mandat a été
révoqué par le mandant ou si le mandat est terminé sans que le tiers n'en ait été avisé.
Le Code civil reconnaît alors la responsabilité du mandant pour les actes accomplis en
exécution du mandat94, s'il est possible de prouver que le mandant avait connaissance
des agissements du mandataire. La responsabilité du mandataire serait également
engagée en pareil cas.

Enfin, mentionnons que lorsqu'un mandataire représente une personne qu'il sait
insolvable, mineure ou placée sous un régime de protection, et qu'il omet de le
mentionner au tiers contractant avec lui, il s'engage personnellement quant aux
obligations découlant de la conclusion de cet acte95.

2.14.2 — Fin du mandat


Le mandat se termine pour les causes communes aux obligations en général (p. ex. : le
décès de l'une des parties). Le mandant peut révoquer en tout temps le mandat, tant
qu'il est apte et lucide, et remplacer son mandataire comme il l'entend.

Le mandat prend fin lors :

• du décès du mandant;
• de la révocation du mandat par le mandant s'il est apte et lucide;
• de la rédaction d'un nouveau mandat par le mandant (comme le testament, le
mandat le plus récent révoque le mandat antérieur) dans la mesure où le mandant
en a la capacité;
• de la renonciation du mandataire;
• de la faillite du mandataire (sauf s'il s'agit d'un mandat de protection donné à titre
gratuit);

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• du décès ou de l'inaptitude du mandataire, à moins que le mandat n'ait prévu son


remplacement; en cas de décès du mandataire, le liquidateur qui connaît
l'existence du mandat doit en aviser le curateur public et faire différer, dans les
affaires commencées, tout ce qui peut l'être sans risque de perte. Si le mandat
cesse par suite de l'inaptitude du mandataire, les mêmes devoirs incombent au
tuteur ou curateur du mandataire.

(1) 2.15 — Procuration générale jumelée au mandat de


protection

Il est possible de trouver dans le même document une procuration générale et un


mandat de protection. L'avantage est que le volet procuration entre en vigueur dès la
signature de l'acte et demeure valide jusqu'à l'homologation du volet mandat de
protection. Cette façon de faire permet d'éviter les délais qui peuvent parfois s'avérer
assez longs avant que le mandat de protection soit homologué.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Les situations où l'on conseille habituellement d'utiliser la procuration et le mandat sont :

• Couples âgés;
• Couples qui désirent vraiment écarter les délais que pourrait occasionner le fait
de n'avoir qu'un mandat de protection;
• Propriétaire d'entreprise où la pertinence d'une représentation rapide est évidente
pour assurer la continuité des opérations;
• Personnes absentes du pays pour une période importante.

D'ailleurs, plusieurs praticiens du droit hésitent à jumeler une procuration générale


d'administration à un mandat de protection, considérant trop étendus et larges les
pouvoirs qu'accordent généralement une telle procuration au mandataire.

Il est vrai que la prudence s'impose en la matière, car le mandataire à qui les pouvoirs
les plus étendus d'administration ont été confiés pourrait abuser d'une telle situation.
Pour éviter de tels abus, certaines solutions pourraient être envisageables, notamment :

• limiter les pouvoirs à la simple administration dans la procuration générale;


• soumettre l'exécution du mandat pour les pouvoirs qui excèdent la simple
administration à l'approbation d'un professionnel compétent en la matière (par
exemple un notaire), ou d'une autre personne de confiance;
• dans le cas de la procuration générale d'administration notariée, demander au
notaire qu'il n'émette aucune copie sans que le mandant ne lui ait donné
l'autorisation formelle et ne pas aviser le mandataire de l'existence d'une telle
procuration tant que le besoin ne se fait pas sentir;
• nommer deux ou plusieurs mandataires, dont un professionnel, et prévoir que

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ceux-ci doivent toujours agir à la majorité ou à l'unanimité, selon le cas.

Tableau 2-2

Distinctions entre une procuration générale et un mandat de protection

Procuration générale Mandat de protection en


prévision de l'inaptitude

Objet Administration des biens Administration des biens


et protection de la
personne

Entrée en vigueur Dès sa signature et Lorsque l'inaptitude du


acceptation par le mandant est constatée et
mandataire que le mandat est
homologué

Formalités Aucune Notarié en minute ou


devant 2 témoins non
intéressés et en mesure
de constater l'aptitude du
mandant

Révocation En tout temps par le • Par le mandant, tant


mandant ou le mandataire et aussi longtemps
qu'il est apte

• Par le mandataire;
possible s'il a pourvu
à son remplacement
ou demandé
l'ouverture d'un
régime de protection

• Par toute personne


intéressée lorsque le
mandat n'est pas
fidèlement exécuté

Fin • Révocation • Refus ou démission


de tous les

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mandataires

• Inaptitude du • Faillite du mandataire


mandataire ou du (sauf si donné à titre
mandant gratuit)

• Décès du mandataire • Par le décès du


mandant

• Faillite • Par le décès du


mandataire (sauf si
remplaçant)

• Par l'ouverture d'un


régime de protection
pour le mandant

2.15.1 — Biens situés à l'étranger


Comme les règles applicables dans d'autres juridictions sont souvent différentes de
celles de notre droit interne québécois, il est prudent lorsque l'on détient des biens
(mobiliers et immobiliers) à l'étranger, de s'assurer que nos documents juridiques
pourront s'y appliquer.

Dans le but d'éviter toute ambiguïté en matière de procuration, il est recommandé de


faire préparer par un juriste de la juridiction concernée, une procuration conforme à leur
droit interne, et dans la langue du pays, ce qui évitera des problèmes et des frais de
traduction.

(2) 2.16 — Testament biologique, clauses de traitement de fin


de vie et directives médicales anticipées

Outre les clauses d'administration des biens et de protection de la personne du


mandant, il est de plus en plus fréquent de trouver, dans un mandat de protection, des
clauses de traitement de fin de vie, clauses dites de «testament biologique». À titre
d'exemple, le mandant pourrait spécifier clairement à ses mandataires son désir d'éviter
tout acharnement thérapeutique.

Cependant, il est probable que le mandat de protection aux termes duquel le testament
biologique est rédigé ne soit pas encore homologué lors de la survenance d'un accident
ou d'une maladie donnant lieu à l'application de ces clauses. Bien que le testament
biologique n'ait pas besoin de cette homologation pour être valide, il est probable que
des tiers exigent cette homologation pour permettre au mandataire de faire valoir ces
volontés. Il est donc de bonne pratique de prévoir les clauses relatives aux volontés de
fin de vie dans un document distinct du mandat de protection s'il n'est pas assorti d'une

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procuration générale d'administration; ou de prévoir que ces clauses soient assimilées à


une procuration, afin que son application ne soit pas retardée, voire rendue inapplicable
parce que non exécutoire en temps opportun.

Qu'elles soient exprimées dans un mandat de protection, sous forme de procuration


générale ou spécifique ou dans un document distinct, les volontés exprimées dans un
testament biologique ne constituent juridiquement qu'un énoncé de volontés non
contraignantes. En d'autres termes, confrontées à la responsabilité médicale ou à une
volonté contraire d'une personne autorisée à consentir aux soins, elles pourraient ne pas
être respectées.

Le testament biologique permet essentiellement aux proches et au personnel médical de


connaître la position de la personne quant à l'administration de certains soins en
situation de fin de vie. Cette expression de volontés enlève souvent beaucoup de
pression des épaules des proches d'une personne en fin de vie qui ont souvent du mal à
prendre la décision de cesser l'administration de soins n'ayant pour but que de maintenir
une personne en vie ou encore d'autoriser une médication palliative qui pourrait
provoquer un décès plus hâtif.
Exemple 2-3 — Contenu d'une clause de traitement de fin de vie
Le mandataire aura le pouvoir de consentir à tous les soins exigés par l'état de santé du
mandant, quelle qu'en soit la nature, dans la mesure où ils sont bénéfiques malgré leurs
effets, qu'ils sont opportuns dans les circonstances et que les risques présentés ne sont
pas hors de proportion avec le bienfait espéré, en tenant compte des éléments suivants :

• l'opposition du mandant à tout acharnement diagnostique, soit des tests et


examens de tout ordre qui s'avèrent superflus, compte tenu de l'état du mandant;
• l'opposition du mandant à tout acharnement thérapeutique, soit l'utilisation de
moyens thérapeutiques ou l'administration de traitements qui, compte tenu de l'état
du mandant, sont disproportionnés et ne font que multiplier ou prolonger
inutilement les souffrances et l'agonie du mandant;
• le souhait du mandant de mourir dignement. Pour ce faire, le mandant doit
autoriser le mandataire à refuser qu'il soit maintenu en vie par des moyens
artificiels et il devra exiger que des soins palliatifs lui soient administrés,
notamment tout médicament susceptible de diminuer ses souffrances et de lui
procurer le confort requis, même si ces médicaments devaient hâter le moment de
sa mort.

La Loi concernant les soins de fin de vie96, en vigueur depuis le 10 décembre 2015,
vient pallier l'absence de cadre juridique clair relativement aux volontés de fin de vie et
«a pour but d'assurer aux personnes en fin de vie des soins respectueux de leur dignité
et de leur autonomie» (art. 1 L.S.F.V.). En effet, en plus d'encadrer les soins palliatifs et
l'aide médicale à mourir, la loi comprend des dispositions concernant les directives
médicales anticipées (DMA). Ces directives permettent à une personne d'indiquer si elle
accepte ou refuse de recevoir des soins dans des situations cliniques précises, dans le
cas où elle deviendrait inapte à y consentir. Il y a trois situations cliniques où les DMA
peuvent être appliquées :

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• situation de fin de vie : condition médicale grave et incurable, en fin de vie;


• situation d'atteinte sévère et irréversible des fonctions cognitives : état comateux
jugé irréversible ou état végétatif permanent;
• autres situations d'atteinte sévère et irréversible des fonctions cognitives :
démence grave, sans possibilité d'amélioration (par exemple, démence de type
Alzheimer ou autre type de démence à un stade avancé).

Les soins visés sont principalement des soins assimilés à de l'acharnement


thérapeutique : la réanimation cardio-respiratoire, la ventilation assistée par un
respirateur ou autre support technique, la dialyse, l'alimentation forcée ou artificielle et
l'hydratation forcée ou artificielle. De plus, la loi a créé un «registre des directives
médicales anticipées» auquel les professionnels de la santé ont accès. Ainsi, lorsque les
directives médicales anticipées ont été versées au registre, elles ont «la même valeur
que des volontés exprimées par une personne apte à consentir aux soins» (art. 58
L.S.F.V.). Les professionnels de la santé qui y ont accès ont donc l'obligation de les
respecter.

Les directives médicales anticipées doivent être données par une personne majeure et
apte à exprimer sa volonté, soit par acte notarié en minute ou au moyen du formulaire
prescrit signé devant deux témoins (art. 51 et 52 L.S.F.V.). Dans les deux cas, il est
possible de verser les directives au Registre des directives médicales anticipées auprès
de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ). Il est possible de se procurer
un formulaire personnalisé en ligne ou par téléphone.

Exprimer ses directives médicales anticipées ne constitue pas un acte irrévocable. Il est
possible de les révoquer au moyen du formulaire prescrit ou de les modifier par la
rédaction de nouvelles directives, soit par acte notarié ou par le biais du formulaire
prescrit. De plus, en cas d'urgence, lorsqu'une personne apte exprime verbalement des
volontés différentes de celles qui se retrouvent dans les directives rédigées, il y a
révocation (art. 54 L.S.F.V.).

Enfin, lorsque les volontés relatives aux soins exprimées dans un mandat de protection
et celles exprimées dans des directives médicales anticipées diffèrent, ces dernières
prévalent (art. 62 L.S.F.V.).

Il est à noter qu'il n'est pas possible de demander l'aide médicale à mourir lors de la
rédaction de directives médicales anticipées. Le 1er alinéa de l'article 26 L.S.F.V. prévoit
que:
26. Seule une personne qui satisfait à toutes les conditions suivantes peut obtenir l'aide
médicale à mourir :
1) elle est une personne assurée au sens de la Loi sur l'assurance maladie (chapitre A-
29);

2) elle est majeure et apte à consentir aux soins;

3) elle est en fin de vie;

4) elle est atteinte d'une maladie grave et incurable;

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5) sa situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de ses


capacités;

6) elle éprouve des souffrances physiques ou psychiques constantes, insupportables et


qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu'elle juge tolérable.

Évidemment, une demande d'aide à mourir n'est pas acceptée automatiquement. Elle
est analysée par le médecin traitant conformément à la loi avant d'y donner suite.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Il est important, alors que votre client est apte, de l'inviter à exprimer ses volontés en
prévision de son inaptitude à consentir à des soins et d'en discuter avec ses proches. Il
est possible pour votre client de rédiger des directives médicales anticipées, lesquelles
ne portent que sur des situations cliniques précises. Il est aussi possible de compléter
ces volontés ou d'exprimer des volontés non contraignantes par un «testament
biologique» rédigé aux termes d'un mandat de protection s'il est assorti d'une
procuration générale d'administration ou, à défaut, dans un document distinct.

Il y aura lieu d'encourager votre client à revoir périodiquement ses volontés puisque ses
valeurs peuvent évoluer selon les situations vécues, à des étapes particulières de sa vie,
comme à la suite d'une séparation ou de la mort d'un être cher, au moment d'un
diagnostic de maladie grave ou lors d'une détérioration de sa santé.

Tableau 2-3

Inaptitude avec ou sans mandat

Inaptitude sans mandat Inaptitude avec mandat

Procédures 1. Obtention des 1. Obtention des


judiciaires évaluations médicale évaluations médicale et
et psychosociale. psychosociale.

2. Convocation de 2. Interrogatoire du majeur


l'assemblée de par un notaire, un greffier
parents, d'alliés ou ou un juge.
d'amis.

3. Interrogatoire du 3. Jugement déclarant le


majeur par un notaire, majeur incapable (inapte)

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un greffier ou un juge. et homologation du


mandat de protection :
entrée en vigueur du
mandat de protection.

4. Assemblée de
parents, d'alliés ou
d'amis où un
tuteur/curateur est
proposé ainsi que les
membres potentiels
du conseil de tutelle.

5. Jugement déclarant le
majeur incapable
(inapte) et nomination
d'un curateur ou d'un
tuteur.

6. Avis au conseil de
tutelle.

Obligations 1. Rendre compte au 1. Pas d'obligation de


curateur public et au rendre compte de sa
conseil de tutelle. gestion, de fournir une
garantie ou de prendre
une assurance, sauf si
requis par le mandant.

2. Fournir une sûreté 2. Pas de conseil de tutelle.


garantissant son Il sera possible pour le
administration. mandant de prévoir un
mécanisme de
surveillance, en obligeant
le mandataire à rendre
compte à une personne
de confiance et à
procéder à la confection
de l'inventaire.

3. Dresser un inventaire 3. Le mandataire se voit


des biens de la généralement confier des
personne inapte. pouvoirs de pleine
administration qui lui
permettent de faire toute
espèce de placements.

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4. Limiter les placements


à ceux présumés
sûrs.

Le représentant 1. La personne inapte 1. Le mandant a le pouvoir


n'a pas le choix de de choisir ses
son mandataire, il lui représentants : des
est imposé. personnes de confiance.
Exemple :

2. La personne nommée • son fils pour la gestion de


à titre de représentant ses biens;
n'a pas toujours les
qualités d'un grand
gestionnaire.

• son épouse pour prendre


soin de sa personne.

2. Le mandant peut limiter


les pouvoirs du
mandataire.

Consentement Les soins seront autorisés Le mandant peut clairement


aux soins ou refusés selon la volonté manifester son choix par des
du représentant avec ou clauses de traitement de fin
sans connaissance des de vie intégrées dans le
volontés du majeur mandat.
protégé.

Le mandant peut donner des


Directives Médicales
Anticipées (DMA)
contraignantes dans un
document notarié en minutes
ou sur le formulaire prescrit
signé devant deux témoins.

Chapitre 3 — Formes juridiques d'entreprise et


contrats accessoires

Après avoir examiné certaines situations juridiques touchant l'individu, l'on se penchera
maintenant sur les formes juridiques les plus courantes utilisées pour exploiter une

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entreprise.

On peut exploiter une entreprise notamment selon l'une ou l'autre des formes juridiques
suivantes :

• l'entreprise individuelle;
• la société de personnes;
• la société par actions.

(2) 3.1 — Personnes morales

Le Code civil du Québec reconnaît la nécessité pour les individus de se regrouper afin
d'exercer certaines activités. Dans le but de faciliter la mise sur pied de tels
regroupements, le législateur a élaboré un concept purement fictif de personne, ayant
une existence propre, distincte de celle des personnes qui la constituent, soit la
«personne morale».

Les différentes formes que peuvent prendre les entreprises entraînent que certaines
d'entre elles auront pleinement la personnalité morale, tandis que d'autres ne l'auront
pas du tout. Ainsi la société par actions (compagnie) possède pleinement la personnalité
morale, l'entreprise individuelle ne la possède pas et la société en nom collectif en
possède une, mais elle est incomplète.

L'analyse des attributs de la personnalité morale est importante. Elle permet notamment
de déterminer la responsabilité personnelle des actionnaires, des administrateurs ou des
associés à l'égard des tiers qui transigent avec une entreprise. Par exemple, si une
personne signe un contrat avec un représentant d'une société qui agit alors pour et au
nom de cette entreprise, quels seront ses recours si le contrat s'avère frauduleux?
Pourrait-elle poursuivre la société et avoir un lien sur les biens de cette entreprise et
pourrait-elle poursuivre l'individu avec lequel elle a transigé?

3.1.1 — Attributs de la personnalité morale


L'article 301 C.c.Q. énonce que toute personne morale, dûment constituée en vertu des
lois du Québec, acquiert dès le moment de sa constitution la pleine jouissance des droits
civils. Une personne morale a aussi la capacité d'exercer ses droits. La capacité d'une
personne morale peut toutefois être restreinte en raison de sa nature ou d'une
disposition expresse de la loi. Une personne morale devra nécessairement agir par
l'entremise d'une personne physique, puisque son existence n'est que théorique ou
fictive. Dans une compagnie, par exemple, celle-ci va agir par son conseil
d'administration ou par l'assemblée de ses membres, ses dirigeants et ses autres
représentants et agents autorisés.

Une personne morale ne peut non plus exercer la tutelle ou la curatelle par rapport à une
personne. Il y a donc certains droits qu'elle ne peut exercer du fait même de sa
constitution. Le législateur lui a toutefois octroyé les attributs d'une personne distincte,
soit un nom, un domicile, une existence et un patrimoine propre.

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Les personnes morales ont un nom qui leur est donné au moment de leur constitution.
Elles exercent leurs droits et exécutent leurs obligations sous ce nom.

Conformément au Code civil du Québec, la personne morale a son domicile aux lieu et
adresse de son siège.

Le patrimoine est l'ensemble des biens, des droits et des obligations d'une personne,
appréciables en argent. Il en résulte que sitôt qu'une personne morale est formée, les
sommes qui y sont investies lui deviennent propres, les biens acquis par elle lui
deviennent propres à leur tour; il n'y a pas confusion de biens entre ceux de la personne
morale et ceux de ses membres; un jugement obtenu contre elle ne peut être exécuté
que sur les biens de cette dernière, ses membres ne pouvant être tenus responsables
des dettes de cette dernière que jusqu'à concurrence de la mise de fonds qu'ils ont
effectuée.

(2) 3.2 — Entreprise individuelle

L'entreprise individuelle est la forme juridique la plus simple, pour une personne seule,
qui désire exploiter une entreprise. Contrairement à la société par actions, cette forme
d'entreprise exige peu de formalités juridiques puisque c'est l'individu lui-même qui
l'opère.

Cependant, toute personne physique qui exploite une entreprise individuelle au Québec
sous un nom autre que le sien, qu'elle y soit domiciliée ou non, est assujettie à la Loi sur
la publicité légale des entreprises97. Elle doit donc s'immatriculer, à moins d'exploiter son
entreprise sous une dénomination sociale comprenant son nom de famille et son
prénom98 (p. ex. : l'entreprise «Line Bolduc pâtisserie» ne sera pas assujettie tant qu'elle
sera effectivement exploitée uniquement par Line Bolduc, tandis que «Les pâtisseries
Bolduc» sera assujettie).

Ainsi, lorsque requise, une déclaration d'immatriculation doit être produite lors de la
constitution de l'entreprise individuelle, de même qu'annuellement afin de mettre à jour
les informations.

Ce type d'organisation se rencontre surtout dans les petites entreprises où la


compétence et l'expérience du promoteur, plutôt que l'importance du capital investi,
jouent le rôle principal.

Ainsi, celui-ci a tous les pouvoirs et toutes les obligations en ce qui concerne la bonne
marche des opérations de son entreprise. Il est à la fois le propriétaire, l'administrateur
et l'employé de cette organisation. Cela signifie qu'il est la seule personne apte à signer
les contrats avec les tiers, les emprunts bancaires et les chèques.

Au point de vue juridique, ce qu'il est important de souligner, c'est la confusion du


patrimoine de l'exploitant avec celui de l'entreprise. Les différents ministères du revenu
confirment cette situation en ne requérant qu'une seule déclaration fiscale. L'exploitant

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répond personnellement de toutes les dettes de son entreprise. Lorsque l'exploitant


oblige son entreprise, il s'oblige personnellement par la même occasion.

Cette forme d'organisation permet aussi l'engagement d'employés, dont les membres de
sa famille, à la condition qu'il n'existe qu'un seul propriétaire.

Le fait que certains entrepreneurs utilisent une dénomination sociale différente de leur
nom personnel a bien souvent pour but premier de mieux identifier le produit ou le
service offert par l'entreprise.

L'entreprise individuelle ne possède donc pas la personnalité morale.

(2) 3.3 — Société

L'article 2186 du Code civil du Québec définit la société comme étant un contrat «par
lequel les parties conviennent, dans un esprit de collaboration, d'exercer une activité,
incluant celle d'exploiter une entreprise, d'y contribuer par la mise en commun de biens,
de connaissances ou d'activités et de partager entre elles les bénéfices pécuniaires qui
en résultent».

Pour qu'il y ait société, trois éléments sont requis :

• l'esprit de collaboration dans l'exercice d'une activité économique organisée99


commune;
• l'obligation de fournir un apport;
• le partage des bénéfices pécuniaires.

Pour qu'il y ait une société, on doit tout d'abord trouver l'intention des associés de
travailler ensemble; c'est l'esprit de collaboration. Cette intention doit être exprimée de
façon claire et sans aucune équivoque. L'esprit de collaboration se trouvera dans
l'exercice d'une activité commune par les associés.

On devra également pouvoir évaluer un apport, c'est-à-dire une mise en commun


consistant en biens, en connaissances ou en activités. Cet apport, égal ou inégal, peut
être :

• une somme d'argent (cette somme d'argent devra être fournie à la date
convenue, sinon le sociétaire peut être tenu de verser des intérêts à la société, en
plus de s'exposer à des dommages-intérêts);
• un transfert de bien à la société (ce transfert se fera à la juste valeur marchande
pour le sociétaire — gain en capital ou revenu imposable possible; le sociétaire
pourra cependant procéder à un roulement ou à un transfert à une valeur autre que
la juste valeur marchande);
• l'apport de connaissances ou l'exercice de certaines activités au profit de la
société.

En plus de l'exercice d'une activité commune et de l'obligation de fournir un apport, pour

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qu'il y ait existence d'une société, il faut un partage des bénéfices pécuniaires résultant
de la collaboration des associés. Ce partage peut être égal ou inégal. À titre d'exemple,
la mise en commun de services de secrétariat et le partage de dépenses d'exploitation
des locaux sans partage des bénéfices pécuniaires ne créent pas une société. Toutefois,
aux yeux des tiers, il peut y avoir apparence de société qui engendre la responsabilité
des personnes, car elles donnent l'illusion de former une société100. S'il y a absence de
l'un ou l'autre de ces éléments, il n'y a pas de société entre les personnes qui exploitent
individuellement leur entreprise.

(2) 3.3.1 — Constitution


La constitution d'une société ne se présume pas. Il n'est cependant pas nécessaire
d'avoir un contrat écrit pour la constituer.

(2) 3.3.2 — Types de société


Le Code civil reconnaît quatre types de sociétés :

• la société en nom collectif;


• la société en participation;
• la société en commandite;
• la société par actions.

(2) 3.3.3 — Fonctionnement juridique de la société


La société par actions est reconnue par le Code civil comme une personne morale101 et
jouit à ce titre d'une personnalité juridique distincte. Elle possède donc un nom et un
domicile qui lui sont propres. Elle possède également un patrimoine distinct de celui de
ses actionnaires, jouit de droits civils et est seule responsable de ses actes102.

Nous verrons dans les prochaines sections que les sociétés en nom collectif et en
commandite, bien qu'elles en possèdent la plupart des caractéristiques ne sont pas des
personnalités juridiques distinctes puisque les associés demeurent responsables des
actes posés par la société. Quant à la société en participation, il est clair qu'elle ne
possède pas de personnalité juridique distincte puisqu'elle ne bénéficie même pas d'un
patrimoine distinct de celui des associés.

En plus de devoir respecter le Code civil du Québec pour leur formation, toutes les
sociétés qui exercent ou exploitent une entreprise au Québec sont, comme l'entreprise
individuelle, assujetties aux règles relatives à la publicité légale103 prévues dans la Loi
sur la publicité légale des entreprises104. Elles doivent donc produire une déclaration
d'immatriculation auprès du Registraire des entreprises.

La déclaration d'immatriculation doit être produite lors de la formation de la société. Par


la suite, une déclaration annuelle doit être produite. Le but est de permettre d'identifier
les personnes pouvant agir au nom de l'entreprise.

Voici un tableau comparatif des différentes sociétés relativement aux attributs de la


personnalité juridique.

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Tableau 2-4

Personnalité juridique et attributs de divers types de soc

Nom Siège social Patrimoine Capacité


propre d'engager la
société

Société par actions Oui Oui Oui

Société en nom Oui* Oui Oui


collectif

Société en commandite Oui** Oui Oui

Société en participation Non*** Non Non

* Obligation de mentionner SENC


** Obligation de mentionner SEC
*** Associés contractent en leur nom personnel.

(2) 3.3.4 — Société en nom collectif


La société en nom collectif (SENC) est la société formée sous un nom commun
(dénomination sociale) par deux personnes ou plus dans le but d'exercer ensemble une
activité.

Une société en nom collectif est tenue de respecter les lois relatives à la publicité légale
des sociétés, c'est-à-dire qu'elle doit déposer une déclaration d'immatriculation. À défaut
de respecter ces règles, la société en nom collectif sera réputée être une société en
participation105.

Comme il a été mentionné précédemment, l'existence d'une société n'est pas


subordonnée à la rédaction d'un contrat. Cependant, on n'insistera jamais assez sur
l'importance d'un tel contrat entre les associés. Un document clair peut éviter plusieurs
conflits découlant de malentendus ou d'interprétations vagues.

Depuis 1994, le Code civil du Québec accorde à la société en nom collectif des attributs
qui en font une personne morale quasi parfaite. Ainsi, la société en nom collectif peut
poursuivre ou être poursuivie en justice106 sous son propre nom. Antérieurement à 1994,
ce sont les associés personnellement qui devaient poursuivre ou être poursuivis.

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L'article 2221 al. 1 C.c.Q. prévoit qu'«[à] l'égard des tiers, les associés sont tenus
conjointement des obligations de la société; mais ils en sont tenus solidairement si les
obligations ont été contractées pour le service ou l'exploitation d'une entreprise de la
société». Par exemple, si trois associés d'une société en nom collectif qui détiennent
chacun un tiers des parts sociales de la société ont contracté une obligation conjointe, le
créancier ne pourra réclamer que le tiers de la dette à chacun des associés. Cependant,
si cette obligation est solidaire, le créancier pourra exiger d'un seul d'entre eux le
paiement total de la dette.

L'une des particularités de la société est qu'elle possède un patrimoine distinct de celui
des associés107. Ainsi, un créancier ne pourra poursuivre un associé qu'après avoir
exercé ses droits sur les biens de la société. Si les biens de la société sont insuffisants
pour payer le créancier, celui-ci pourra alors poursuivre les associés. Sa créance sur les
biens de ces associés prendra rang après celle de ses autres créanciers. C'est cette
responsabilité subsidiaire, si l'on peut dire, qui fait défaut pour la qualification de cette
entité de personne morale parfaite.

Enfin, un contrat de société peut prévoir un partage inégal des profits, mais à l'égard des
tiers, tous les associés ont une responsabilité égale et solidaire. Cette caractéristique est
le principal élément qui différencie la société en nom collectif de la société en
commandite.

(4) 3.3.5 — Société en participation


Contrairement aux autres types de sociétés, la société en participation n'est assujettie à
aucune forme de publicité.

Chaque associé demeure propriétaire des biens constituant son apport à la société, ce
qui signifie que la société en participation ne possède pas un patrimoine distinct de celui
des associés. Les associés d'une société en participation sont toujours personnellement
responsables à l'égard des tiers avec qui ils ont contracté108.

Les associés ne peuvent engager la société109. De plus, ils doivent exercer leurs recours
en leur nom personnel.

Encore une fois, la convention entre associés serait souhaitable afin de déterminer le
fonctionnement, la gestion et les autres obligations des associés dans le cadre d'une
société en participation. Ce sont les dispositions qui régissent les sociétés en nom
collectif qui trouveront application en l'absence d'une telle convention.

En résumé, malgré l'existence de cette société et la création potentielle de droits et


d'obligations entre les associés, cette société n'existe pas à l'égard des tiers.

(4) 3.3.6 — Société en commandite


Le dernier type de sociétés est la société en commandite, où les associés lui fournissant
les fonds sont nommés commanditaires et où les administrateurs sont nommés
commandités. Tout comme les actionnaires d'une personne morale, la responsabilité des
commanditaires est limitée au capital investi dans la société. Même une stipulation qui

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obligerait le commanditaire à cautionner ou à assumer les dettes de la société au-delà


de l'apport convenu serait sans effet110.

Les commanditaires ne peuvent administrer la société sous peine de devenir


responsables des actes et des obligations de celle-ci111. Les seuls actes de gestion que
peut accomplir un commanditaire sont ceux de simple administration lorsque des
commandités ne peuvent agir.

Devant les tiers, les commandités ont de lourdes responsabilités puisqu'ils sont
personnellement responsables des dettes envers les créanciers en cas d'insuffisance
des biens de la société112.

Les sociétés en commandite sont un outil intéressant permettant aux petits investisseurs
de se regrouper afin de mettre sur pied un projet d'investissement commun; l'achat d'un
immeuble locatif à des fins spéculatives en est un exemple.

Cette société peut faire un appel public à l'épargne, en conformité avec la Loi sur les
valeurs mobilièresdu Québec113.

(4) 3.3.7 — Règles communes à toutes les sociétés


Le Code civil du Québec prévoit que l'existence de la société n'est pas limitée par le
maintien des associés et peut donc continuer d'exister après le retrait114 ou le décès
d'un associé115.

Lorsqu'un associé acquiert toutes les parts des autres associés, le Code civil lui accorde
un délai de 120 jours pour se trouver un nouvel associé et permettre la continuation de
la société116. En l'absence d'un deuxième associé, la société est alors dissoute et
l'entreprise peut continuer d'être exploitée individuellement.

(4) 3.3.8 — Dissolution de la société


La société peut être dissoute, notamment :

• selon les clauses du contrat de société;


• du consentement des associés;
• lors de l'accomplissement de l'objet du contrat ou par l'impossibilité de
l'accomplir;
• par le tribunal;
• par l'arrivée du terme;
• par la réunion des parts entre les mains d'un seul associé (sauf s'il y a un nouvel
associé dans les 120 jours).

(2) 3.4 — Personne morale (société par actions ou compagnie)

Tout le monde est familier avec ce type d'organisation juridique. La compagnie constitue
une personne juridique distincte de ses propriétaires, soit les actionnaires. En tant

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qu'entité distincte, la compagnie possède des droits et des privilèges et elle est sujette à
certaines obligations. Contrairement à une personne physique, elle a, par définition, une
durée de vie illimitée.

3.4.1 — Constitution
Les articles 298 à 333 du Code civil du Québec énoncent les règles essentielles à
l'acquisition de la personnalité juridique des personnes morales, et à son exercice.
D'autres lois, comme la Loi sur les sociétés par actions (Québec)117 et la Loi canadienne
sur les sociétés par actions (Canada)118, viennent compléter ces dispositions
fondamentales et précisent les modes d'organisation et de fonctionnement de ces
personnes morales.

Ainsi, le mode de constitution des sociétés par actions, tant au provincial qu'au fédéral,
s'effectue par la délivrance d'un certificat de constitution à la suite du dépôt de statuts de
constitution.

Ainsi, les statuts de constitution en personne morale peuvent être signés par un
fondateur ou par plusieurs fondateurs. Les fondateurs peuvent être des personnes
morales ou physiques et, dans ce dernier cas, ils doivent être âgés d'au moins 18 ans et
ne peuvent être des faillis non libérés.

Les statuts constitutifs doivent indiquer :

• la dénomination sociale (nom);


• le siège social;
• le capital social (capital-actions);
• les restrictions sur le transfert des actions :
– droit de préemption,
– prohibition d'appel public à l'épargne,
– restrictions quant au nombre d'actionnaires afin que la société demeure un
«émetteur fermé» au sens du Règlement 45-106 sur les dispenses de
prospectus adopté en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières119;
• le nombre d'administrateurs.

3.4.1.1 — Le choix de juridiction


Il est possible de constituer une société par actions sous le régime provincial ou sous le
régime fédéral. Il devient alors essentiel de consulter un juriste pour faire le meilleur
choix et pour procéder à la constitution de la société par actions. Depuis le 14 février
2011, date de l'entrée en vigueur de la Loi sur les sociétés par actions120 au Québec, il
existe peu de différences entre les deux cadres juridiques. Évidemment, lorsque les
activités de la société doivent s'étendre au-delà de la province du Québec, il est alors
pertinent d'envisager l'incorporation en vertu de la loi fédérale. Toutefois, les deux lois
prévoient la possibilité de migrer vers une autre juridiction, ce qui donne de la flexibilité
quant à l'évolution des activités de la société.

3.4.2 — Capitalisation

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L'action est une unité du capital d'une société par actions. Il existe différentes catégories
d'actions. L'action confère certains droits à son détenteur.

C'est l'acte constitutif qui crée les diverses catégories d'actions, en spécifiant les droits,
privilèges, conditions et restrictions attachés à chacune.

Les droits de base conférés aux actions sont les suivants :

• le droit de voter à toutes les assemblées d'actionnaires (actions votantes);


• le droit de recevoir tout dividende déclaré par la société;
• le droit au partage des biens lors de la liquidation de la société (actions
participantes).

Ainsi, lorsqu'on veut créer plus d'une catégorie d'actions, il faut énoncer spécifiquement
les droits que l'on veut accorder aux diverses catégories.

Il est obligatoire que les trois droits de base mentionnés ci-dessus soient attribués à au
moins une catégorie d'actions, sans pour autant qu'ils soient accordés à la même
catégorie. Habituellement, les actions dites «ordinaires» comportent les trois droits par
opposition aux actions dites «privilégiées», qui sont habituellement assorties d'un ou
deux de ces droits.

3.4.3 — Fonctionnement
Le fonctionnement de la société par actions est décrit dans chacune des lois
constitutives. Ainsi, elle agit notamment par son conseil d'administration et l'assemblée
d'actionnaires. Cependant, l'administration quotidienne peut être confiée à des
dirigeants, tels les directeurs, les chefs de service, les adjoints administratifs, etc.

Le conseil d'administration
Le conseil d'administration a donc le pouvoir de gérer, de gouverner et de diriger la
société. Les administrateurs sont élus par les actionnaires et doivent agir de bonne foi et
dans le seul intérêt de la société.

Le conseil d'administration s'exprime par résolution ou par règlement. On utilise la


résolution lorsqu'il ne s'agit que de disposer d'un cas particulier, ou d'un problème dont
les éléments de solution ont déjà été établis par règlement. Ainsi, si un règlement a déjà
été adopté pour indiquer que les administrateurs peuvent déclarer un dividende à leur
discrétion, il suffit alors d'une résolution pour déterminer ce dividende. En revanche,
c'est le règlement qu'il faut modifier afin d'établir une ligne de conduite pour l'avenir. Tous
les règlements adoptés par le conseil d'administration peuvent entrer immédiatement en
vigueur, mais doivent être ratifiés par l'assemblée des actionnaires, sauf pour la
nomination des officiers de la société.

Ni la loi québécoise, ni la loi fédérale n'exigent qu'il faille être actionnaire pour être
administrateur d'une société, mais il est possible de fixer cette exigence dans les statuts
constitutifs. Par contre, il faut posséder les qualités suivantes pour être administrateur :

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• être une personne physique;


• avoir dix-huit ans ou plus;
• ne pas être un failli non libéré;
• ne pas être sous un régime de protection;
• ne pas faire l'objet d'une interdiction d'administrer par suite d'une offense
criminelle.

À noter que la loi fédérale prévoit qu'un minimum d'administrateurs doivent être
résidents canadiens.

Le conseil d'administration procède à l'élection ou à la nomination des officiers. Doit être


nommé un président parmi les administrateurs. Un secrétaire et un trésorier peuvent
aussi être nommés parmi les administrateurs. Peut aussi être nommé un gérant ou un
directeur général de la société.

La responsabilité des administrateurs


La responsabilité des administrateurs est bien réelle. En effet, un administrateur est un
mandataire et à ce titre est soumis à certaines responsabilités. L'administrateur se doit
d'agir avec prudence, diligence et honnêteté envers la société, sinon sa responsabilité
pourrait être engagée.

La loi précise certaines situations où la responsabilité de l'administrateur est mise en


cause, telles :

• le dividende illégal : il est interdit à une société de déclarer un dividende qui


rend la société insolvable ou qui diminue la valeur de son actif sous un certain
niveau;
• le salaire des employés : les administrateurs sont solidairement responsables
envers les employés de la société, jusqu'à concurrence de six mois de salaires, et
ce, qu'il y ait faute ou non de leur part.

Cette responsabilité civile des administrateurs est aussi engagée dans plusieurs autres
situations que nous ne soulèverons pas ici.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Il faut s'assurer, avant d'agir à titre d'administrateur d'une société (à but lucratif ou non),
que celle-ci possède une bonne police d'assurance responsabilité.

L'assemblée des actionnaires


Les assemblées d'actionnaires se divisent en deux catégories : les assemblées
annuelles et les assemblées spéciales ou extraordinaires.

La loi exige qu'il y ait au moins une assemblée par année qui doit porter sur les points
suivants :

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• l'approbation des états financiers;


• l'approbation des règlements passés par le conseil d'administration;
• l'élection des administrateurs;
• la nomination des vérificateurs des comptes de la société.

Les deux lois permettent, lorsque les règlements de la société le prévoient, de tenir les
assemblées en utilisant des moyens de communication qui permettent à tous les
participants de communiquer adéquatement entre eux.

L'assemblée spéciale ou extraordinaire des actionnaires peut être convoquée lorsqu'en


cours d'année une ratification des actionnaires devient nécessaire, c'est-à-dire pour des
changements importants dans la vie de la société, comme lorsqu'il faut destituer ou élire
un administrateur ou un vérificateur.

Les actionnaires qui possèdent des catégories d'actions ayant le droit de vote et,
seulement eux, peuvent voter lors des assemblées. Les actionnaires peuvent déléguer
une autre personne pour les remplacer. En principe, les décisions sont prises à la
majorité absolue, soit 50 % des actions votantes plus un.

Cette règle de la majorité absolue s'applique généralement. Toutefois, il est possible de


prévoir dans les statuts ou la convention unanime d'actionnaires qu'une majorité plus
élevée est nécessaire pour adopter certaines résolutions des administrateurs ou des
actionnaires. La législation prévoit également certaines situations où une majorité
différente doit être obtenue. À titre d'exemple, il est nécessaire d'obtenir une approbation
par le 2/3 des voies pour que la société puisse changer de juridiction, c'est-à-dire
continuer à exister sous une autre loi. Ce serait le cas pour une société constituée en
vertu de la Loi sur les sociétés par actions121 qui voudrait continuer à exister en vertu de
la Loi canadienne sur les sociétés par actions122.

Les actionnaires sont donc ceux qui vont permettre ou non à la société de s'engager, de
grandir ou de se restreindre; ce sont eux qui en sont l'organe principal.

Responsabilité des actionnaires


La personnalité juridique fait de la personne morale une personne distincte de ses
membres, une personne responsable et ne peut lier ceux-ci lorsqu'elle agit dans son
propre intérêt (art. 309 C.c.Q.).

Ainsi, tel que présenté, il serait raisonnable de penser que les actionnaires n'encourent
aucune responsabilité pour les fautes, les erreurs ou les omissions commises par la
société par actions dont ils sont membres.

Il existe cependant une exception au principe de la non-responsabilité des membres de


la personne morale. En effet, l'article 317 du Code civil du Québec stipule ce qui suit :
La personnalité juridique d'une personne morale ne peut être invoquée à l'encontre
d'une personne de bonne foi, dès lors qu'on invoque cette personnalité pour masquer la
fraude, l'abus de droit ou une contravention à une règle intéressant l'ordre public.

L'article couvre donc deux catégories d'actes : ceux qui, comme la fraude et l'abus de

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droit, portent généralement atteinte à des intérêts privés, et ceux qui contreviennent à
des règles d'ordre public. Il pourrait en être ainsi, par exemple, de contraventions à la
réglementation en matière d'environnement, de sécurité publique, de communication ou
de services d'utilité publique.

La protection ainsi donnée aux actionnaires ou le «mur» existant afin d'éviter que des
tiers puissent atteindre la responsabilité des membres est désignée par l'anglicisme
«voile corporatif». Il s'agit en fait d'éviter de faire abstraction de la personnalité morale
distincte pour rechercher directement les personnes membres de la société par actions
responsables de la transgression.

Il est aussi parfois possible d'atteindre la responsabilité d'un membre dans certains cas
particuliers.

Ainsi, cela peut se faire de manière conventionnelle. Par exemple, le banquier de la


société par actions, qui craint l'insolvabilité de celle-ci, peut exiger que les actionnaires
endossent ou cautionnent les obligations de la société. En conséquence, si la société
faisait défaut de remplir ses obligations, le banquier pourrait alors faire valoir ses droits
auprès de la société par actions elle-même, mais aussi directement contre ses
membres.

(2) 3.5 — Avantages et inconvénients de la société par actions

Avantages

1) Limitation de responsabilité : les actionnaires d'une société par actions ne peuvent


en principe être tenus responsables au-delà de l'argent investi en contrepartie des
actions de la société.

2) Meilleur fonctionnement organique : la formation en société par actions permet une


meilleure gestion des affaires en regroupant les personnes en différents organes,
chacun ayant une fonction précise (p. ex. : conseil d'administration, assemblée générale
des actionnaires).

3) Existence perpétuelle : l'existence d'une société n'est pas affectée par le décès, le
retrait ou la démission d'un actionnaire (art. 314 C.c.Q.).

4) Possibilité de contracter avec ses propres actionnaires : une société étant une
entité juridique distincte de ses actionnaires, elle peut contracter avec qui bon lui
semble. Elle peut donc, par exemple, embaucher son principal actionnaire à titre
d'employé.

5) Divisibilité des parts et transférabilité : la propriété se transfère facilement par


vente d'actions et il suffit que la société émette de nouvelles actions pour que de
nouvelles personnes investissent dans la société.

6) Financement : la constitution en personne morale favorise l'apport de capitaux

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étrangers, l'accroissement du pouvoir d'emprunt, l'accès à certaines modalités de


financement et à certains programmes d'aide gouvernementale.

7) Contribuable distinct et personne distincte de ses actionnaires : la société est un


contribuable distinct de ses actionnaires et doit produire ses propres déclarations de
revenus. L'ajout d'un contribuable augmente le nombre de stratégies fiscales pouvant
être mises en place, ce qui peut, dans certaines situations, engendrer des économies
fiscales. Aussi, comme la société est une personne morale ayant un patrimoine qui lui
est propre, cette forme juridique d'exploiter une entreprise ouvre la porte à plusieurs
avenues de planification successorale ou de transfert d'entreprise.

Inconvénients

1) Frais de constitution : la constitution en personne morale entraîne certains frais


juridiques et comptables qui ne cessent pas une fois celle-ci réalisée.

2) Réglementation de l'État : le propriétaire exploitant une entreprise par l'entremise


d'une société par actions doit se soumettre à une règlementation plus contraignante que
s'il exploitait l'entreprise personnellement.

3) Fiscalité plus complexe : la multiplication des contribuables offre davantage de


possibilités de planifications fiscales, mais il n'est pas toujours possible de réduire
significativement le fardeau fiscal du groupe et les honoraires professionnels et les frais
d'administration peuvent augmenter le coût global. Aussi, la société étant un
contribuable distinct de son actionnaire, les pertes de la société ne peuvent être utilisées
afin de réduire les revenus personnels de l'actionnaire.

(2) 3.6 — Incorporation des professionnels

Il est à noter que le 21 juin 2001, l'Assemblée nationale adoptait le projet de loi nº 169
modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives concernant
l'exercice des activités professionnelles au sein d'une société.

Cette loi a modifié le Code des professions123, en permettant aux professionnels qui y
sont autorisés par leur ordre à exercer leurs activités professionnelles au sein d'une
société en nom collectif à responsabilité limitée (SENCRL) ou d'une société par actions
constituée à cette fin124.

Notez que la SENC est un cadre juridique qui est toujours disponible aux professionnels.

Tous les avantages cités précédemment pour la société par actions peuvent maintenant
être utilisés par les professionnels.

Le professionnel membre d'une SENCRL n'est pas responsable des obligations de la


société ou d'un autre professionnel résultant d'une faute ou négligence commise par cet
autre professionnel dans l'exercice de ses activités au sein de la société125. À part la
question de la responsabilité, la SENCRL obéit aux règles de la société en nom collectif
126
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édictées par le Code civil126.

Un associé peut être un individu ou une personne morale. Contrairement à l'actionnaire


d'une personne morale, l'associé peut contracter au nom de la société. D'ailleurs, si les
associés n'ont pas de contrat de société, ils sont réputés s'être donné mutuellement les
pouvoirs de gérer la société127.

Voici un tableau comparatif entre les deux différentes entités juridiques maintenant
autorisées pour ces professionnels.

Tableau 2-5

La société par actions et la société en nom collectif à responsabilité limitée

Société par actions Société en nom collectif


(SPA) à responsabilité limitée
(SENCRL)

Responsabilité Responsable de ses actes Responsable de ses actes


professionnelle professionnels, mais non professionnels, mais non
des actes d'un autre des actes d'un autre
professionnel professionnel

Responsable des fautes Responsable des fautes


déontologiques déontologiques

Responsabilité vis à Responsabilité limitée aux Responsabilité limitée aux


vis les créanciers garanties personnelles garanties personnelles
données et aux actifs de la données et aux actifs de la
SPA SENCRL

Administration Par le conseil Par un comité de gestion


d'administration

Frais annuels Généralement plus élevés Généralement moindre

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Détention des Sous réserve des Sous réserve des


actions ou parts règlements de l'ordre règlements de l'ordre
sociales professionnel, d'autres professionnel, d'autres
personnes que les personnes que les
professionnels peuvent professionnels peuvent
être actionnaires être associés

Contrat régissant les Convention entre Contrat de société


parties actionnaires

Avantages fiscaux Généralement plus Généralement moins


avantageux (taux avantageux
d'imposition moindre,
exemption sur le gain en
capital possible,
fractionnement du revenu,
gel successoral, choix de
l'exercice financier, etc.)

Déclaration de Deux déclarations de Une seule déclaration de


revenus revenus à produire revenus à produire

Pratique Autorisée Autorisée


multidisciplinaire ou
interjuridictionnelle

Selon le Code des professions (RLRQ, c. 26), les Ordres professionnels reconnus au
Québec sont :

1. Ordre professionnel des avocats du Québec;


2. Ordre professionnel des notaires du Québec;
3. Ordre professionnel des médecins du Québec;
4. Ordre professionnel des dentistes du Québec;
5. Ordre professionnel des pharmaciens du Québec;
6. Ordre professionnel des optométristes du Québec;
7. Ordre professionnel des médecins vétérinaires du Québec;

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8. Ordre professionnel des agronomes du Québec;


9. Ordre professionnel des architectes du Québec;
10. Ordre professionnel des ingénieurs du Québec;
11. Ordre professionnel des arpenteurs-géomètres du Québec;
12. Ordre professionnel des ingénieurs forestiers du Québec;
13. Ordre professionnel des chimistes du Québec;
14. Ordre professionnel des technologues en imagerie médicale et en radio-
oncologie du Québec;
15. Ordre professionnel des denturologistes du Québec;
16. Ordre professionnel des opticiens d'ordonnances du Québec;
17. Ordre professionnel des chiropraticiens du Québec;
18. Ordre professionnel des audioprothésistes du Québec;
19. Ordre professionnel des podiatres du Québec;
20. Ordre professionnel des infirmières et infirmiers du Québec;
21. Ordre professionnel des acupuncteurs du Québec;
22. Ordre professionnel des huissiers de justice du Québec;
23. Ordre professionnel des sages-femmes du Québec;
24. Ordre professionnel des géologues du Québec;
25. Ordre professionnel des comptables professionnels agréés du Québec;
26. Ordre professionnel des diététistes du Québec;
27. Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et
familiaux du Québec;
28. Ordre professionnel des psychologues du Québec;
29. Ordre professionnel des conseillers en ressources humaines et en relations
industrielles agréés du Québec;
30. Ordre professionnel des conseillers et conseillères d'orientation du Québec;
31. Ordre professionnel des urbanistes du Québec;
32. Ordre professionnel des administrateurs agréés du Québec;
33. Ordre professionnel des évaluateurs agréés du Québec;
34. Ordre professionnel des hygiénistes dentaires du Québec;
35. Ordre professionnel des techniciens et techniciennes dentaires du Québec;
36. Ordre professionnel des orthophonistes et audiologistes du Québec;
37. Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec;
38. Ordre professionnel des ergothérapeutes du Québec;
39. Ordre professionnel des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec;
40. Ordre professionnel des technologistes médicaux du Québec;
41. Ordre professionnel des technologues professionnels du Québec;
42. Ordre professionnel des inhalothérapeutes du Québec;
43. Ordre professionnel des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du
Québec;
44. Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec;
45. Ordre professionnel des sexologues du Québec;
46. Ordre professionnel des criminologues du Québec.

Voici les ordres professionnels qui ont complété le processus en vue de permettre à
leurs membres de s'incorporer :

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• comptables professionnels agréés (février 2003);


• avocats (mai 2004);
• notaires (décembre 2005);
• médecins (mars 2007);
• arpenteurs-géomètres (septembre 2007);
• optométristes (mai 2008);
• conseillers d'orientation et psycho-éducateurs (mai 2008);
• dentistes (juin 2008);
• pharmaciens (juin 2008);
• médecins vétérinaires (juillet 2008);
• denturologistes (juillet 2008);
• technologues en radiologie (mai 2009);
• huissiers de justice (juillet 2009);
• opticiens d'ordonnance (novembre 2009);
• audioprothésistes (22 juillet 2010);
• traducteurs, terminologues et interprètes agréés (janvier 2011);
• psychologues (mars 2011);
• administrateurs agréés (juin 2011);
• évaluateurs agréés (mars 2012);
• architectes (juin 2012);
• inhalothérapeutes (décembre 2012);
• chiropraticiens (avril 2013);
• géologues (avril 2013);
• physiothérapeutes (mars 2015);
• ergothérapeutes (mai 2015);
• agronomes (décembre 2015).

(2) 3.6.1 — Conditions applicables à la constitution en société


Chaque ordre professionnel impose par voie de règlement ses propres conditions que
ses membres doivent respecter lors de l'incorporation afin que cette dernière soit
acceptée. Sur ce point les professionnels ne disposent donc pas tous de la même
latitude.

Voici à titre d'exemple, les restrictions imposées concernant la détention des actions de
la société par l'ordre des dentistes et l'ordre des pharmaciens. Notez que chaque ordre
possède ses propres critères.

Dentistes : La totalité des droits de vote rattachés aux actions est détenue par soit :

• Au moins un membre de l'Ordre;


• Une personne morale, une fiducie ou toute autre entreprise dont les droits de vote
rattachés aux actions, aux parts sociales ou aux titres de participation ou autres
droits sont détenus en totalité par au moins un membre de l'Ordre.

La totalité des actions qui ne comportent pas de droit de vote est détenue par soit :

• Au moins un membre de l'Ordre;

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• Un parent, en ligne directe ou collatérale, d'un membre de l'Ordre détenant des


actions votantes dans la société;
• Par le conjoint d'un membre de l'Ordre détenant des actions votantes dans la
société;
• Une personne morale, une fiducie ou autre entreprise dont les droits de vote
rattachés aux actions, aux parts sociales ou aux titres de participation ou autres
droits sont détenus en totalité par ces mêmes personnes.

Les actions ne peuvent être transférées sans le consentement du conseil


d'administration.

Pharmaciens : Les actions sont détenues et sont la propriété exclusive d'un ou de


plusieurs pharmaciens et, en aucun temps, elles ne peuvent être détenues en fiducie, à
titre de prête-nom ou au nom d'un mandataire.

Les actionnaires ne votent ni ne transfèrent leurs actions suivant les instructions ou en


faveur d'une ou plusieurs personnes qui ne sont pas pharmaciens et actionnaires de la
société, ni ne leur transfèrent les droits de vote rattachés à leur actions, par procuration
ou autrement. Sauf si le mandataire est pharmacien et actionnaire de la société, le vote
par procuration aux assemblées des actionnaires est interdit.

La majorité des ordres professionnels ayant autorisé leurs membres à s'incorporer ont
des critères qui se rapprochent beaucoup de ceux énoncés ci-haut pour les dentistes, à
quelques petites différences près. En ce qui concerne les pharmaciens, ils sont très
limités par le règlement de leur Ordre. La description décrite ci-haut ne leur permet pas,
pour la partie officine de leur pratique, d'utiliser une compagnie de gestion, une fiducie et
même d'inclure des membres de la famille pour faire du fractionnement de revenus,
limitant ainsi la mise en place de structures fiscales intéressantes.

Pour prendre connaissance des règlements des différents ordres relativement aux
conditions applicables à la constitution en compagnie/société par actions, consultez le
site (bulletin de décembre 2009).

(3) 3.6.2 — Généralités


La continuation d'une SENC en SENCRL ne génère aucune conséquence fiscale liée à
la continuation. En effet, la SENCRL est réputée être la continuation de la SENC et il n'y
a aucun transfert des activités professionnelles ni des biens d'une SENC en SENCRL Il
existe toutefois des différences au niveau juridique qui sont très importantes. À cet effet,
il est important de consulter un conseiller juridique.

Si les praticiens œuvrent au sein d'une société de dépenses (ce qui n'est pas une
SENC), la formation d'une SENCRL n'est plus la continuation d'une SENC Il y aura lieu
d'envisager les règles du roulement fiscal à l'égard des actifs transférés à la SENCRL
Consultez le chapitre 20 pour en savoir plus sur les règles régissant les roulements
fiscaux.

Le transfert des activités professionnelles d'une SENC à une SPA est complexe, puisqu'il

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implique la création d'une nouvelle entité juridique à qui des droits et obligations sont
transmis. Une telle transmission de droits et obligations emporte diverses conséquences
tant sur le plan juridique que fiscal.

D'abord, comme il s'agit d'une nouvelle personne morale, la société par actions devra
être enregistrée auprès des autorités fiscales en regard de la TPS et de la TVQ (s'il y a
lieu) et des déductions à la source, ainsi qu'auprès des diverses autorités en matière de
relations de travail, comme la Commission de l'assurance-emploi du Canada et Retraite
Québec.

Ensuite, au moment de la conversion, les biens de la SENC, ou encore les parts


sociales détenues par chacun des associés de la SENC, selon la méthode utilisée pour
effectuer la conversion, devront être évalués. Les professionnels voudront s'assurer que
la conversion n'occasionne pas de conséquences fiscales imprévues.

L'évaluation des biens (par exemple un immeuble) peut s'effectuer par un professionnel
de l'évaluation. Cependant, certains actifs, comme l'achalandage, peuvent être plus
difficiles à évaluer. Une attention particulière devra être portée à l'évaluation de
l'achalandage du professionnel, car un achalandage non commercial n'a aucune valeur.

À ce moment, il faudra que les professionnels qui avaient antérieurement formé des
compagnies de gestion ou de services techniques s'interrogent sur la pertinence de
maintenir ces structures en place ou encore de fusionner toutes les activités,
professionnelles et non professionnelles, au sein d'une seule SPA. Le transfert des
activités professionnelles d'une SENC à une SPA ou encore d'un praticien seul à une
SPA est avant tout une décision d'affaires. Comme toute décision d'affaires, elle doit être
analysée en fonction de la réalisation d'objectifs prédéterminés.

La constitution en société présente plusieurs avantages et inconvénients, lesquels


doivent être évalués en fonction des objectifs poursuivis.

(2) 3.6.3 — Validité de la société


Une société n'est reconnue comme exerçant une activité professionnelle que si elle a la
capacité de le faire et si les critères légaux et commerciaux sont respectés. Les autorités
fiscales considèrent qu'une société est reconnue comme exerçant une profession
libérale uniquement lorsque la législation provinciale ou la réglementation le permet.

Le numéro 1 du bulletin d'interprétation IT-189R2, «Corporations utilisées par des


membres de professions libérales», décrit les critères permettant de s'assurer que c'est
la société qui exploite l'entreprise.

Ainsi, une entente écrite entre le professionnel et la société décrivant les services à
rendre à la société et l'établissement du salaire raisonnable eu égard aux services
rendus est un moyen décrit par les autorités fiscales qui permettra de démontrer que
c'est la société qui exploite l'entreprise professionnelle128.

Les avantages et inconvénients liés à la transformation d'une SENC (ou d'une entreprise
individuelle) de professionnels en société sont les mêmes que pour l'incorporation de
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toute entreprise. Une attention particulière doit être portée aux spécificités liées à
l'entreprise professionnelle.

(2) 3.6.4 — Multidisciplinarité


Les regroupements multidisciplinaires seront juridiquement possibles pour tous les
professionnels dont les ordres auront accepté ces regroupements. Cependant, certains
problèmes existent, comme la comptabilité des questions d'affaires, culturelles,
professionnelles et d'assurance.

(2) 3.6.5 — Responsabilité professionnelle


Bien que, dans certaines situations, la société limite la responsabilité personnelle, le
maintien de la responsabilité professionnelle demeure un enjeu de taille. Le Code des
professions, consacre le principe que le professionnel demeure imputable de ses actes
professionnels à l'égard de ses clients.

(2) 3.6.6 — Comptes à recevoir


Les comptes à recevoir peuvent être transférés à la société. Leur valeur pourra être
encaissée par le cédant sans conséquence fiscale. Un choix devra être effectué à l'aide
d'un formulaire prescrit afin d'assurer la continuité de la provision pour créances
douteuses.

(2) 3.6.7 — Achalandage


L'achalandage se présente sous deux formes, soit un achalandage personnel et un
achalandage commercial. Tel que noté précédemment, un achalandage personnel ne
peut prouver une valeur à un achalandage. L'achalandage personnel est tributaire de la
personne elle-même (compétence, expertise, relations d'affaires), alors que
l'achalandage commercial est tributaire de l'entreprise elle-même (emplacement,
services offerts, récurrence des clients, etc.). Puisqu'il peut s'avérer difficile de répartir la
valeur de l'achalandage global entre ces deux formes, il est fortement recommandé de
recourir à un expert dans le domaine afin d'établir un rapport en bonne et due forme.

(2) 3.6.8 — Sociétés de gestion


Actuellement, ces sociétés paient un taux réduit sur leur plafond de la déduction pour
petite entreprise (DPE). Généralement, leur revenu net est l'écart entre leurs frais
(services administratifs et non professionnels) et les frais de gestion payés par le
professionnel ou la SENC. Déjà, ces sociétés bénéficient des avantages de la société. Y
aurait-il plus d'avantages à exercer la profession par une société? Il faudra déterminer si
un montant plus élevé de revenu peut être accumulé dans la société ou faire l'objet d'un
fractionnement de revenu entre les membres de la famille lors de la prise de décision. Le
chapitre 14 du module 5, Fiscalité donne davantage d'information sur ce sujet.

Les professionnels qui désirent exercer leur profession en utilisant leur société de
gestion peuvent le faire en y transférant les actifs ou les parts de la SENC et continuer
l'exercice de leur profession. Toutefois, des modifications doivent être apportées aux
statuts constitutifs afin d'être conformes aux règlements de l'ordre professionnel

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concerné.

(2) 3.6.9 — Modalités de transfert


Plusieurs techniques peuvent être utilisées afin d'incorporer les activités d'une SENC de
professionnels. Il semble que la création d'une société, qu'il s'agisse d'une nouvelle
entreprise ou de la conversion d'une SENC en société, s'avère plus complexe dans le
cas des professionnels que dans le cas de tout autre type d'entrepreneur. Cette
complexité est due aux aspects fiscaux, mais surtout aux exigences réglementaires de
chaque ordre professionnel.

3.7 — Convention unanime d'actionnaires

Les actionnaires signent une convention unanime d'actionnaires lorsqu'ils désirent retirer
des pouvoirs aux administrateurs. Les pouvoirs ainsi retirés sont alors exercés par les
actionnaires.

Il faut souligner que pour être qualifiée de convention unanime, tous les actionnaires
sans exception — même ceux n'ayant pas droit de vote — doivent être parties à cette
convention.

La légalité de ce type de convention est reconnue par la Loi canadienne sur les sociétés
par actions129 de même que par la Loi sur les sociétés par actions130.

Parmi les pouvoirs que les actionnaires pourraient vouloir s'approprier, figurent
notamment ceux-ci :

• décider du montant et de l'opportunité de déclarer des dividendes;


• décider de l'émission de nouvelles actions;
• fixer eux-mêmes la rémunération des administrateurs et des dirigeants;
• adopter eux-mêmes certains règlements, comme les règlements d'emprunts;
• procéder à la nomination et à la révocation des dirigeants de la société;
• adopter, modifier ou abroger tout règlement;
• dissoudre ou procéder à toute réorganisation de la société.

Bien sûr, cette liste ne se veut pas une liste exhaustive des droits et pouvoirs qui
peuvent être retirés aux administrateurs par une convention unanime d'actionnaires.

Cette convention peut servir à rééquilibrer les forces entre l'actionnaire majoritaire et les
actionnaires minoritaires, pour prévenir une situation où l'actionnaire principal imposerait
ses décisions, sans possibilité pour les autres actionnaires d'intervenir. À titre
d'exemples, les actionnaires pourraient décider d'autoriser eux-mêmes l'émission de
nouvelles actions ou la déclaration des dividendes.

La convention unanime permet donc que l'administration de la société se fasse, en tout


ou en partie, par les actionnaires, permettant entre autres aux actionnaires minoritaires
d'exercer une plus grande influence au niveau de sa gestion.

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(2) 3.8 — Convention entre actionnaires

Même si le Code civil du Québec, la Loi sur les sociétés par actions (Québec) et la Loi
canadienne sur les sociétés par actions établissent les règles de base pour le
fonctionnement des sociétés par actions, il n'en demeure pas moins que tout ne peut
être prévu dans les moindres détails, d'où l'utilité d'une convention entre actionnaires.

Ce document juridique qu'est la convention entre actionnaires est facultatif. L'utilité


principale de la convention entre actionnaires est de prévoir à l'avance la façon de régler
différentes situations pouvant survenir entre les actionnaires, telles un décès, une
retraite, une invalidité temporaire ou permanente, ou un conflit. Pourquoi alors conclure
une entente de ce type lorsque tous les actionnaires voient la vie en rose devant leur
nouveau projet? On pourrait répondre à cette question en disant qu'un tel document
permet de déterminer maintenant (alors que la bonne entente règne) un règlement
efficace de conflits susceptibles de se produire si ce bel optimisme devait un jour
s'atténuer.

Les objectifs
Tel que déjà mentionné, la convention entre actionnaires vise à prévenir et à faciliter le
règlement des conflits éventuels entre actionnaires. S'il y a conflit, la convention devrait
fournir les moyens pour le solutionner.

La convention entre actionnaires complète les statuts et les règlements. Pour être
efficace, elle doit répondre d'une façon précise à la situation et aux besoins des
actionnaires.

Les conventions entre actionnaires visent habituellement l'un ou plusieurs des buts
suivants, dont certains se recoupent131 :

• assurer le maintien de la détention proportionnelle des actions entre les


actionnaires;
• conserver le caractère «fermé» de la société en empêchant des tiers d'en devenir
actionnaires sans le consentement des parties;
• assurer un marché pour les actions, bien que restreint;
• empêcher l'actionnaire ou les actionnaires minoritaires d'être lésés par les
décisions de l'actionnaire majoritaire ou du groupe d'actionnaires majoritaires;
• régler à l'avance certains points dans l'administration et dans l'exercice des
activités de la société susceptibles d'être des sources de conflit;
• conférer aux actionnaires le pouvoir décisionnel quant à certaines activités,
internes ou non, de la société.

(3) 3.8.1 — Convention d'achat-vente


Voici une liste non exhaustive des principales clauses qui se trouvent habituellement
dans ce type de convention :
1) droit de premier refus et droit de préemption;

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2) offre obligatoire;

3) clause «shotgun»;

4) clause d'évaluation;

5) conditions de paiement;

6) clauses d'assurance;

7) clauses de protection;

8) clause d'achat par la société;

9) clause de dépositaire;

10) clauses pénales;

11) clause d'entraînement ou de droit de suite;

12) priorité de la convention;

13) modification de la convention;

14) arbitrage;

15) financement;

16) remboursement des dépenses;

17) clause de vote;

18) clause de non-concurrence et de confidentialité;

19) interdiction d'hypothéquer.

1) — Droit de premier refus et droit de préemption (préférence d'achat)


Le droit de premier refus consiste à obliger l'actionnaire désirant se départir de ses
actions à les offrir tout d'abord aux autres actionnaires actuels. Cette clause permet donc
de restreindre l'arrivée de tiers à titre d'actionnaires de la société.

Il est possible de prévoir que les actions devront être acquises par les autres
actionnaires selon leur pourcentage de détention, de façon à maintenir les actionnaires
dans la même proportion de détention des titres de la société. Si ce n'était pas le cas, un
actionnaire pourrait ainsi augmenter le poids de sa participation et devenir actionnaire
majoritaire.

Les conditions quant à l'exercice ou au non-exercice de ce droit de premier refus doivent


être précisément établies de manière à ne pas empêcher systématiquement l'actionnaire

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désirant vendre de se départir de ses actions en faveur de tiers.

Cette clause n'accorde pas aux autres actionnaires un droit de propriété des actions
devant être cédées ou un droit absolu d'achat, mais elle représente une option d'achat
des actions disponibles.

Le droit de préemption, quant à lui, concerne l'émission de nouvelles actions de la


société. Une clause de cette nature stipule que, si la société procédait à une émission
d'actions, les actionnaires actuels auraient le privilège d'y souscrire en proportion de leur
participation actuelle.

2) — Offre obligatoire
Une clause de type «offre obligatoire» vise à obliger l'actionnaire à offrir ses actions aux
autres actionnaires dans certaines situations bien précises, comme au décès d'un
actionnaire ou au moment où il se retire des affaires.

Décès d'un actionnaire


Le décès d'un actionnaire est une des principales situations où la clause dite «d'offre
obligatoire» entre en jeu. Après le décès d'un actionnaire, ses actions font partie de son
patrimoine successoral et les héritiers en deviennent propriétaires. La clause dite
«d'offre obligatoire» vise à permettre aux actionnaires survivants d'acquérir, de façon
irrémédiable, les actions de l'actionnaire décédé.

La clause doit donc être rédigée de façon à en faire une offre faite irrévocablement à la
date de la convention, mais sujette à un terme suspensif, le décès d'un actionnaire. Il est
donc primordial que la clause contienne aussi l'acceptation des autres actionnaires pour
être complète.

Il est à noter qu'une clause de type «offre obligatoire» n'est pas la seule qui puisse régler
le sort des actions d'un actionnaire décédé. Par exemple, lorsque les actionnaires ont
des conjoints, il est parfois préférable, pour des raisons d'ordre fiscal, de stipuler à la
convention une clause appelée «options réciproques» ou «double option».

La clause dite «d'offre obligatoire» est en fait une promesse de vente faite mutuellement
par chaque actionnaire aux autres actionnaires, à laquelle correspond une promesse
d'achat faite par ces autres actionnaires, et dont l'exécution est soumise à la même
condition suspensive, soit le décès du «promettant-vendeur». La promesse de vente et
les promesses d'achat étant faites irrévocablement, elles lient les actionnaires ainsi que
leurs héritiers et ayants droit. Il s'agit en fait d'engagements mutuels d'achat-vente
conclus dès la signature de la convention, lesquels deviendront exécutoires lors du
décès de l'actionnaire «promettant-vendeur». Les engagements ci-dessus sont donc
contractés du vivant des individus, le décès n'étant ici que le terme (condition) leur
donnant effet.

Ainsi, au décès d'un actionnaire, ses héritiers ou représentants légaux n'ont d'autre choix
que de procéder à la vente des actions du défunt aux actionnaires survivants qui doivent
les acheter. Cet engagement réciproque protège les actionnaires survivants contre la

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présence des héritiers de l'actionnaire défunt dans les affaires de la société. Par ailleurs,
cet engagement garantit également aux héritiers de l'actionnaire décédé que ses actions
seront achetées par les actionnaires survivants à un prix prédéterminé, ce qui leur
permet de réaliser en argent la juste valeur des actions détenues par l'actionnaire
décédé.

Cependant, du point de vue fiscal, le mécanisme de l'«offre obligatoire» fait en sorte que
l'actionnaire défunt est présumé avoir disposé de ses actions à leur juste valeur
marchande, entraînant ainsi, à son décès, la réalisation immédiate du gain en capital
accumulé sur celles-ci (à moins que ces actions puissent bénéficier de la déduction pour
gains en capital accordée aux particuliers sur la disposition d'actions admissibles de
petite entreprise). Ainsi, alors même que le testament du défunt nomme son conjoint
comme seul légataire, la clause d'«offre obligatoire» oblige ce conjoint à disposer
desdites actions en faveur des autres actionnaires. Or le «roulement» prévu aux termes
des lois fiscales en faveur du conjoint n'est possible que lorsque les biens du défunt ont
fait l'objet d'une dévolution irrévocable en faveur de ce conjoint. Une clause d'offre
obligatoire ne permet pas cette dévolution irrévocable au conjoint.

Lorsque les actions de la société se qualifient d'actions admissibles de petite entreprise


(AAPE), que leur plus-value excède la déduction pour gains en capital à laquelle
l'actionnaire a droit et que l'actionnaire a un «conjoint» (au sens de la Loi de l'impôt sur
le revenu132 et de la Loi sur les impôts133) à qui il lègue ses actions (ou à une fiducie au
profit du conjoint), la planification suivante pourrait être envisagée :

• Dévolution irrévocable des actions au conjoint (ou à la fiducie à son profit) en


effectuant un choix fiscal afin que le produit de disposition présumée d'une partie
des actions corresponde à leur juste valeur marchande pour que le défunt puisse
réclamer sa déduction pour gains en capital. Les autres actions sont transférées
par roulement fiscal et elles conservent leur prix de base rajusté initial. Vente
subséquente de toutes les actions par le conjoint survivant aux autres actionnaires,
ce qui permet d'éviter l'imposition du gain en capital jusqu'à concurrence du
montant de déduction pour gains en capital que le conjoint survivant a le droit
d'obtenir.

Pour qu'il y ait «dévolution irrévocable» des actions d'un actionnaire décédé à son
conjoint, la convention entre actionnaires devra prévoir une clause dite de «double
option». Il s'agit en fait d'une clause donnant l'option (et non l'obligation) au conjoint de
l'actionnaire décédé d'exiger des actionnaires survivants qu'ils lui achètent les actions lui
ayant été dévolues par succession. Une fois cette option déclenchée par le conjoint, les
actionnaires survivants n'ont alors d'autre choix que d'accepter l'offre.

Cette première option est suivie d'une deuxième option des actionnaires survivants, soit
d'offrir d'acheter les actions du conjoint de l'actionnaire décédé. Ici aussi lorsque les
actionnaires survivants déclenchent cette offre, le conjoint n'a d'autre choix que de
l'accepter. Le résultat final est donc le même que lors d'une offre obligatoire, mais avec
la possibilité additionnelle d'utiliser deux fois la déduction pour gains en capital accordée
aux particuliers. Cette clause de double option, bien qu'elle puisse permettre un
avantage fiscal intéressant, nécessite une rédaction particulière afin de s'assurer que les

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buts recherchés soient atteints.

Retrait des affaires


Le retrait des affaires d'un actionnaire peut résulter de situations dépendantes ou non de
sa volonté. Ces situations doivent être prévues de façon précise à la convention entre
actionnaires. Voici une liste non exhaustive des événements pouvant entraîner un retrait
des affaires :

• invalidité d'un actionnaire;


• faillite de l'actionnaire;
• fraude commise par l'actionnaire contre la société;
• cessation de travail de l'actionnaire au sein de la société;
• retraite de l'actionnaire;
• concurrence déloyale à l'égard de la société;
• non-respect des dispositions de la convention :
• absence selon les règles du Code civil;
• mise en place d'un régime de protection pour un actionnaire;
• homologation d'un mandat de protection en prévision de l'inaptitude à l'égard d'un
actionnaire.

Le but visé est de faire en sorte que l'avènement d'une de ces causes entraîne
l'obligation pour l'actionnaire en cause de disposer de ses actions en faveur de ses
coactionnaires.

Quoique ces causes déclenchent une offre obligatoire de la part de l'actionnaire visé, les
autres actionnaires ont habituellement l'option d'accepter ou non.

Certaines de ces situations de retrait s'accompagnent souvent d'une clause pénale.

L'invalidité permanente d'un actionnaire fait souvent partie des causes de retrait des
affaires.

En effet, l'invalidité permanente d'un actionnaire peut, à bien des égards, être assimilée
à son décès. Si l'actionnaire ne peut, à cause de son invalidité, vaquer à ses
occupations habituelles pour la société, c'est comme s'il était mort du point de vue de la
société. Chose certaine, cette invalidité entraîne son retrait réel des activités de
l'entreprise, ainsi que toute possibilité pour lui de continuer à retirer un salaire de celle-ci.

Bien sûr, il est essentiel que l'invalidité dont il est question ici soit permanente et, sinon
totale, du moins suffisante pour empêcher l'actionnaire de fournir tout travail à la société.
Pour bien cerner la définition d'invalidité (totale ou permanente), la convention pourrait
s'en remettre à la définition de celle-ci telle qu'énoncée dans les polices d'assurance
invalidité ou toute autre définition convenue entre les parties.

Il existe des polices d'assurance invalidité qui prévoient qu'advenant l'invalidité d'un
actionnaire, l'assureur verserait des fonds pour le remboursement du rachat de la
participation de la personne invalide.

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Les primes d'une telle assurance ne soient pas déductibles aux fins fiscales et les
indemnités ne sont pas imposables.

Advenant la souscription de ce genre de protection, il y aurait quelques points essentiels


à insérer dans la convention :

• s'assurer que l'expiration du délai de carence de la police de rachat-invalidité


corresponde à la date du déclenchement du rachat précisée à la convention de
rachat;
• s'assurer que le mode de financement du rachat qui figure dans la convention est
le même que celui du paiement des indemnités prévu à la police de rachat-
invalidité (c.-à-d. paiement forfaitaire, paiements périodiques échelonnés sur 2, 3
ou 5 ans, ou bien une combinaison des deux modes);
• le titulaire du contrat doit être une personne physique, s'il s'agit d'un rachat par
les actionnaires; dans le cas d'un rachat par l'entreprise elle-même, le titulaire du
contrat doit être la société;
• la convention ne doit pas contenir de définition de l'invalidité, mais plutôt énoncer
que l'invalidité de la personne doit répondre aux conditions figurant dans la police
de rachat-invalidité pour que la demande d'indemnisation soit acceptée par
l'assureur.

Depuis maintenant quelques années, l'assurance contre les maladies graves est
souvent utilisée pour financer un rachat d'actions. Dans ce cas, il serait important de
dissocier dans la convention cet événement de celui de l'invalidité. En effet, ces deux
situations sont totalement différentes et reflètent des événements qui peuvent avoir des
conséquences opposées.

Ainsi, les dispositions visant les cas de maladies graves devraient notamment prévoir :

• qu'il sera laissé à l'actionnaire atteint d'une telle maladie (il s'agit ici des maladies
visées dans le contrat de protection et pour lesquelles une prestation serait versée)
le choix de déclencher le rachat de ses actions. Il se peut très bien que ce dernier
décide de demeurer actionnaire de la société. Il faudrait cependant inclure comme
condition de ne pas procéder au rachat, le fait que l'actionnaire est toujours
capable de remplir ses fonctions au sein de la société;
• un délai maximum pour que l'actionnaire exerce son choix;
• ce qu'il adviendrait des fonds dans le cas de non-rachat des actions de
l'actionnaire. Ces derniers pourraient être conservés par la société pour un délai
additionnel afin d'éliminer les risques de rechute ou encore servir à acquitter des
dettes de l'entreprise ou, tout simplement, être distribués aux actionnaires;
• ce qu'il adviendrait s'il y avait décès avant le paiement d'une telle prestation.
Souvent ces produits prévoient un remboursement de primes, et ce paiement
pourrait être appliqué en priorité au paiement des actions du défunt s'il y avait
insuffisance de fonds;
• ce qu'il adviendrait des sommes s'il y avait décès après le paiement d'une
prestation, mais avant le choix permis.

3) — Clause «shotgun»

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La clause «shotgun» a généralement pour but de mettre fin à un différend opposant


deux actionnaires. En vertu d'une telle clause, l'actionnaire offrant d'acheter les actions
de l'autre actionnaire pourrait plutôt être obligé de lui vendre les siennes au même prix
en cas de rejet de son offre, et ce, aux mêmes conditions.

Cette clause doit être rédigée de façon à ce que l'actionnaire qui déclenche le
mécanisme d'achat ou de vente envers son coactionnaire puisse se trouver dans la
position soit du vendeur soit de l'acheteur. La décision de l'autre actionnaire peut donc
inverser les rôles.

Cette clause peut être dangereuse lorsqu'il y a plus de deux actionnaires. En effet, l'offre
faite par un actionnaire de vendre ses actions aux autres actionnaires pourrait se muer
en obligation de sa part d'acquérir les actions de tous les autres actionnaires, ce qui
pourrait représenter un coût faramineux.

4) — Clause d'évaluation
La clause d'évaluation est probablement la clause la plus importante d'une convention
entre actionnaires, puisqu'elle vise à déterminer un prix juste et équitable pour les
actions vendues. Pour qu'elle soit efficace, la méthode d'évaluation choisie doit
permettre de déterminer rapidement la valeur des actions.

Il existe différentes méthodes d'évaluation, dont la valeur comptable conventionnelle ou


régularisée, la valeur déterminée par un évaluateur nommé par la convention ou la
valeur établie par les parties elles-mêmes et révisée annuellement.

Pour qu'elle soit efficace et fiable, il est primordial que la méthode choisie reflète la
valeur des actions de la société au cours des 12 derniers mois. Cette méthode peut
accorder un escompte quant à la valeur des actions détenues par un actionnaire
minoritaire. D'ailleurs, l'Agence du revenu du Canada (ARC) considère ce fait dans
l'établissement de la juste valeur marchande d'une action.

Il faut également considérer que l'ARC ou Revenu Québec pourrait revoir la valeur
établie pour les actions. La convention pourrait prévoir une compensation financière pour
l'actionnaire-vendeur qui devrait payer un supplément d'impôt à la suite d'une décision
des autorités fiscales modifiant à la hausse la valeur des actions.

5) — Conditions de paiement
Dans une convention entre actionnaires, il est nécessaire de prévoir les délais et les
modalités de paiement dans le cas de vente des actions. Le paiement peut être fait au
comptant ou être étalé sur une certaine période de temps. Les conditions de paiement
peuvent varier aussi selon la cause du retrait. En effet, il se peut fort bien que les
actionnaires décident d'imposer des conditions de paiements étalés sur une plus longue
période de temps à un actionnaire qui aurait fraudé la société, qu'à celui qui désire se
retirer de la société pour une réorientation de carrière.

6) — Clauses d'assurance
Les clauses d'assurance prévoient la possibilité pour les actionnaires ou la société de

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souscrire une assurance vie comme mode de financement d'achat ou de rachat des
actions d'un actionnaire décédé. La prestation de décès donne rapidement accès aux
liquidités nécessaires au paiement des actions de la personne décédée. Les
bénéficiaires peuvent être soit les actionnaires soit la société.

Il faut remarquer que le produit de l'assurance vie reçu par la société à la suite du décès
d'un actionnaire ne doit pas être pris en considération lors de l'évaluation des actions de
ce dernier134. En effet, les lois fiscales, tant fédérale que provinciale, stipulent que
l'actionnaire décédé est présumé avoir disposé de ses actions à leur juste valeur
marchande immédiatement avant son décès135, soit avant que le capital assuré ne soit
payable.

Par contre, la valeur de rachat d'une police d'assurance vie doit être prise en compte136
aux fins de l'évaluation des actions immédiatement avant le décès.

7) — Clauses de protection
En cas de vente des actions par un actionnaire qui se retire de la société, les protections
que doivent rechercher les actionnaires-acheteurs concernent les activités futures de
l'actionnaire-vendeur, afin qu'elles ne soient pas en concurrence avec celles de la
société (clause de non-concurrence et de confidentialité). Même en l'absence de vente,
une telle clause vise à s'assurer que les actionnaires engagés activement dans la
société consacreront tout le temps et les efforts nécessaires au succès de l'entreprise.

Le vendeur, quant à lui, doit pouvoir s'assurer du paiement du produit de la vente de ses
actions. Il doit également s'assurer que les acheteurs vont le libérer de ses obligations et
de ses endossements envers les tiers ou, lorsque c'est impossible, il doit obtenir un
engagement de la part des acheteurs qu'ils prendront fait et cause pour lui et qu'ils le
tiendront indemne lors de tout recours pouvant être intenté ultérieurement par des
créanciers de la société.

8) — Clause de rachat par la société


La convention peut prévoir que les actions d'un actionnaire qui se retire des affaires ou
qui décède seront rachetées par la société elle-même et non achetées par les
actionnaires restants.

Selon les circonstances donnant lieu à la disposition des actions, il peut parfois être
avantageux, du point de vue fiscal, que la société procède au rachat de ses actions.
Toutefois, le résultat fiscal d'un rachat d'actions n'est pas nécessairement aussi
avantageux pour une partie qu'il peut l'être pour l'autre. La décision de procéder au
rachat des actions dans un cas précis doit-elle être prise par l'acheteur ou par le
vendeur? Une convention bien rédigée devrait prévoir dans quelles circonstances le
rachat peut être initié par le vendeur ou par l'acheteur, selon un mécanisme tentant de
répartir le plus équitablement possible les avantages et les inconvénients fiscaux qui en
découlent.

Il faut souligner que tant la Loi sur les sociétés par actions (Québec) que la Loi
canadienne sur les sociétés par actions (Canada) exigent que certains critères de

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solvabilité soient rencontrés pour que la société puisse procéder à un rachat.

9) — Clause de dépositaire
La clause de dépositaire prévoit que les actionnaires déposent leurs actions entre les
mains d'un tiers pour faciliter l'exécution des dispositions de la convention entre
actionnaires. En effet, lorsqu'un tiers garde en dépôt les actions des actionnaires, cela
évite les délais dus à la négligence ou au refus d'agir de certains actionnaires pour
l'application de certaines clauses. Au point de vue légal, il est plus juste de parler de
cette personne comme étant un dépositaire et non un fiduciaire, un tel contrat étant un
contrat de dépôt et non une convention de fiducie.

10) — Clauses pénales


Les clauses pénales ont pour but de pénaliser l'actionnaire dans certaines situations
telles que le non-respect d'une clause de non-concurrence ou la commission d'une
fraude à l'égard de la société.

Lorsque se produit une situation à laquelle une clause pénale s'applique, il est fréquent
que l'actionnaire fautif doive se départir de ses actions. Souvent, le prix de vente des
actions est alors moindre que la valeur établie par la convention pour les autres
circonstances de transfert d'actions. Cette pénalité doit d'ailleurs être assez élevée de
façon à décourager un actionnaire de contrevenir à la convention.

L'inclusion d'une telle clause ne doit cependant pas empêcher la société ou les
actionnaires de prendre d'autres recours contre l'actionnaire fautif.

11) — Clause d'entraînement ou de droit de suite


La clause d'entraînement ou de droit de suite est souvent qualifiée de clause
«piggyback».

Le droit d'entraînement survient lorsqu'un tiers offre d'acheter les actions de l'actionnaire
majoritaire. Cette clause est rédigée en faveur de l'actionnaire majoritaire qui peut alors
forcer les actionnaires minoritaires à vendre leurs actions au tiers acquéreur.

Le droit de suite accorde quant à lui à l'actionnaire minoritaire l'option d'exiger que ses
actions soient vendues en même temps que celles de l'actionnaire majoritaire.

12) — Priorité de la convention


Ce type de clause prévoit qu'à l'exception des clauses concernant le transfert des
actions, la convention a priorité sur les statuts et règlements lorsqu'ils sont
incompatibles.

13) — Modification de la convention


La clause de modification de la convention prévoit les procédures à suivre lorsqu'il
devient nécessaire de la modifier.

14) — Arbitrage

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Les actionnaires peuvent convenir de référer un différend à un tiers neutre (p. ex. un
arbitre) au lieu de s'adresser à un tribunal137.

15) — Financement
Au-delà de la mise de fonds initiale, l'exploitation d'une entreprise peut exiger de
nouveaux apports de la part des actionnaires. Une clause de financement prévoit
généralement que toute nouvelle mise de fonds doit être faite par chaque actionnaire en
proportion de sa détention d'actions du capital-actions de la société (aucun intérêt
n'étant généralement stipulé en faveur de l'actionnaire), et que tout apport fait par un
actionnaire au-delà de la proportion à laquelle il est tenu se fera sous la forme d'une
créance portant intérêt en faveur de l'actionnaire-créancier ou sous la forme d'actions
privilégiées sans droit de vote et portant dividende.

16) — Remboursement des dépenses


Toute dépense effectuée par un actionnaire pour la société doit lui être remboursée.

17) — Clause de vote (élection des administrateurs)


La clause de vote peut prévoir que les actionnaires doivent exercer leur droit de vote
pour s'élire mutuellement administrateurs de la société. Ceci permet à chaque
actionnaire d'être administrateur lorsque le nombre d'actionnaires est restreint.

18) — Hypothèque
Le Code civil permet aux actionnaires d'hypothéquer leurs actions à titre de sûreté138. La
clause hypothécaire a pour effet d'empêcher un actionnaire d'hypothéquer ses actions
sans avoir obtenu le consentement des autres actionnaires. La constitution d'une sûreté
(p. ex. : hypothèque) par un actionnaire sur ses actions pourrait résulter en leur transfert
éventuel au tiers créancier dans le cas où ce dernier exercerait sa garantie à la suite
d'un défaut de son débiteur.

Il peut être sage non seulement d'interdire la cession en garantie des actions, leur
hypothèque ou leur engagement à titre de sûreté, mais d'assortir le manquement à cette
restriction d'une pénalité dissuasive.

3.8.2 — Contrat de société


À l'instar de la convention entre actionnaires, le contrat de société de personnes vise la
résolution de conflits éventuels et prévoit les règles concernant l'administration de la
société. Le Code civil permet d'ailleurs aux associés de conclure entre eux une
convention régissant les pouvoirs d'administration139.

Contrairement aux actionnaires d'une société par actions, les associés n'ont pas à
restreindre les pouvoirs des administrateurs de la société pour se les approprier puisque,
par définition, ils peuvent engager la société.

Voici quelques-uns des objectifs visés par le contrat de société de personnes (qui sont
comparables à ceux de la convention entre actionnaires) :

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• assurer un marché pour les parts de la société;


• contrôler l'arrivée de tiers à titre d'associés;
• réglementer la concurrence ou la fraude contre la société;
• maintenir la détention proportionnelle des parts entre les associés;
• définir le rôle des associés dans l'administration, l'opération et le financement de
la société.

Les clauses pouvant être prévues dans un contrat de société seront également
semblables à celles se trouvant dans une convention entre actionnaires. Il y a donc lieu
de se référer aux explications fournies pour la convention entre actionnaires, en y faisant
les adaptations nécessaires, l'associé remplaçant l'actionnaire et la société remplaçant
la société par actions.

Chapitre 4 — Succession

Le présent chapitre traite du décès. Il vise à familiariser le planificateur financier avec les
principales règles édictées par le Code civil du Québec en la matière, de façon à lui
permettre d'identifier les principaux «pièges» qui guettent le non-initié lors de la
liquidation d'une succession, de connaître les divers modes de transmission des biens
en cas de décès, telle la désignation de bénéficiaire et le testament, et d'approfondir ses
connaissances sur les fiducies testamentaires, le tout de manière à être en mesure de
conseiller le client de façon adéquate.

(1) 4.1 — Sommaire des règles applicables à toute succession


(testamentaire ou ab intestat)

Les règles du Code civil s'appliquant en matière de succession testamentaire ou non


testamentaire (souvent appelée «ab intestat») seront d'abord étudiées. Ces règles
servent à déterminer les lois applicables à la succession, les conditions requises pour
être considéré comme héritier, les conditions de transmission des biens composant l'actif
successoral et les droits de certains créanciers «spéciaux» de la succession.

4.1.1 — Ouverture d'une succession


Une succession s'ouvre au lieu du dernier domicile du défunt (et non pas au lieu où le
décès s'est produit). C'est donc au lieu du dernier domicile du défunt que les
procédures de règlement de la succession seront entreprises.

Loi applicable (art. 3098 C.c.Q.)


Dans la plupart des cas, une seule loi (soit le droit interne québécois) s'applique au
règlement de la succession du défunt. Cependant, dans certaines situations, il est
possible que des lois différentes puissent s'appliquer simultanément. Ainsi, notre Code
civil prévoit que la succession portant sur des biens meubles (les «biens meubles» étant
définis au Code civil comme étant tous les biens autres que des immeubles) est régie

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par la loi du dernier domicile du défunt, tandis que la succession portant sur des
immeubles est régie par la loi de leur situation.

Ainsi, si une personne de nationalité française, possédant des immeubles au Québec,


décède alors qu'elle est domiciliée en France, la loi québécoise s'appliquera à certains
aspects de la transmission de ces immeubles, tandis que la loi française s'appliquera
aux autres aspects du règlement de la succession du défunt. Il en sera de même pour
un Québécois qui décède alors qu'il possède un immeuble en Floride. Bien sûr, le défunt
peut toujours éviter, du moins en partie, l'application de lois différentes en désignant par
testament la loi applicable à sa succession, pourvu que la loi choisie ait un rattachement
quelconque avec le défunt (la loi de sa nationalité ou celle de son domicile, par
exemple).

Biens situés à l'étranger


Si un individu domicilié au Québec possède des biens situés à l'étranger, et que ceux-ci
ont une valeur relativement importante, il est parfois préférable de rédiger un testament
visant spécifiquement ces biens, lequel testament sera rédigé selon les règles de forme
et la formulation juridique acceptées dans le pays où ils sont situés. Cela facilitera leur
transmission en faveur du bénéficiaire visé, évitant ainsi les coûts et les délais pouvant
être encourus par la traduction du testament, ainsi que par le recours à des spécialistes
«étrangers» lorsque le système juridique, ainsi que la terminologie utilisée dans le pays
où se trouvent les biens, diffèrent sensiblement de ceux étant en usage au Québec.
Deux testaments coexisteront alors, soit le testament «québécois» à l'égard des biens
situés au Québec, et le testament «étranger» servant à faciliter la transmission de ces
biens «étrangers». Comme il est peu probable que ces testaments soient signés
simultanément, il faudra prendre garde que le testament signé le dernier n'utilise une
clause de révocation générale (du style : «Je révoque toutes dispositions testamentaires
antérieures»), cette clause ayant pour effet de révoquer le testament qui a été signé le
premier. Il est même préférable que chacun des testaments réfère à l'existence de l'autre
afin de faciliter de futures modifications, s'il y a lieu.

Détermination des successibles


C'est au moment de l'ouverture d'une succession que l'on déterminera l'identité des
successibles, soit que ces derniers aient été désignés par la loi (dans le cas d'une
succession non testamentaire) ou qu'ils aient été désignés par le testament (ou les
testaments) de la personne décédée. Cependant, pour hériter, il faut non seulement
avoir été désigné par la loi ou par le testament comme étant la personne ayant droit aux
biens légués (ou à une partie de ceux-ci), mais il faut également avoir survécu, ne serait-
ce que quelques instants, à la personne décédée.

Comme il peut parfois être impossible de déterminer ce fait (p. ex. : lorsqu'une
automobile contenant les cadavres de deux époux est retrouvée plusieurs jours après
leur disparition), l'article 616 du Code civil établit les critères à partir desquels on
considérera qu'il y a eu décès simultané. Il édicte que, si plusieurs personnes décèdent
sans que l'on puisse établir laquelle a survécu à l'autre, elles sont réputées décédées au
même instant, si au moins l'une d'entre elles est appelée à la succession de l'autre
(c'est-à-dire si au moins l'une de ces personnes était désignée par la loi ou par le

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testament comme un héritier de l'autre personne). Ainsi, chaque succession serait


réglée comme si l'autre personne n'avait jamais existé.

Exemple 2-4.1 —
Paul et Pauline, tous deux enfants uniques, étaient mariés en séparation de biens et
n'ont pas d'enfants. À la suite de l'incendie de leur résidence, leurs cadavres sont
retrouvés dans un état que ne permet pas de déterminer lequel des deux est décédé en
premier. Ils n'avaient pas rédigé de testament autre que la clause testamentaire
contenue dans leur contrat de mariage. Compte tenu de leur situation, leurs parents sont
leurs héritiers respectifs, en l'absence de conjoint marié, en fonction de la dévolution
légale prévue au Code civil.

Selon l'article 616 C.c.Q., on écarte la possibilité que Paul hérite de Pauline ou que
Pauline hérite de Paul selon le contrat de mariage.

Les biens de Paul iront donc à ses père et mère et les biens de Pauline à ses père et
mère.

Il est à noter cependant que plusieurs testaments contiennent une clause de survie à cet
effet, édictant que tout légataire doit survivre au testateur pour un délai plus ou moins
long (30, 60 ou 90 jours) afin de bénéficier du testament. Il s'agit en fait d'une condition
imposée par le testateur aux termes de laquelle le légataire doit survivre un certain
nombre de jours au testateur pour hériter. Si ce légataire devait décéder à l'intérieur de
cet intervalle, il n'aurait pas droit au legs qui lui était destiné, tout comme s'il était décédé
au même moment que le testateur.

4.1.2 — Qualités requises pour succéder


Pour hériter, une personne doit exister au moment de l'ouverture de la succession ou, en
cas de substitution ou de fiducie, exister au moment où la disposition prend effet à son
égard (art. 617 C.c.Q.). Si cela est généralement facile à déterminer, certaines situations
peuvent cependant être plus problématiques.

L'absent (art. 84 C.c.Q.)


Le Code civil traite du cas où une personne déclarée «absente» est désignée comme
héritier à une succession. Précisons que le Code civil définit «l'absent» comme une
personne qui a cessé de paraître à son domicile sans donner de nouvelles et sans qu'on
sache si elle vit encore. Une telle personne sera présumée vivante durant les sept
années qui suivent sa disparition (à moins bien sûr que son décès ne soit constaté dans
l'intervalle). À l'expiration de ces sept années, il sera possible d'obtenir un jugement
déclaratif de décès et cette personne sera, dès lors, réputée décédée. S'il s'ouvre une
succession en faveur d'un absent pendant la période où ce dernier est présumé vivant, il
recevra donc sa part de l'héritage, laquelle sera bien sûr administrée par une personne
désignée par la loi à cet effet (art. 617 C.c.Q.). Si l'absent réapparaît par la suite, il
pourra récupérer son patrimoine (incluant sa part de succession dont il aura hérité) (art.
97 à 101 C.c.Q.). Cependant, si par la suite l'absent décède (soit qu'une preuve de
décès est établie, soit qu'on obtienne un jugement déclaratif de décès), les biens dont il
aura hérité, faisant dès lors partie de son patrimoine, seront transmis à ses propres

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héritiers.

La mort présumée (art. 92 C.c.Q.)


L'article 92 stipule qu'une personne est présumée morte si :

• La personne est domiciliée au Québec ou présumée y être décédée;


• La mort peut être tenue pour certaine;
• Il est impossible de dresser un constat de décès.

On remarque ici que le facteur temps n'est pas pertinent. Il est donc possible d'obtenir
un jugement déclaratif de décès en tout temps après la disparition (ex. : explosion d'un
avion en vol).

Enfant conçu et non encore né


Qu'en est-il maintenant de l'enfant qui est conçu mais pas encore né au moment de
l'ouverture d'une succession? Le Code civil le reconnaît comme héritier, pourvu que tel
enfant naisse par la suite vivant et viable. Prenons, pour exemple, un grand-père qui
lègue tous ses biens à ses petits-enfants par testament. Si l'une de ses filles est
enceinte lors du décès de ce dernier, l'enfant à naître est considéré comme l'un des
héritiers du grand-père, à condition toutefois qu'il naisse par la suite vivant et viable.

Lorsqu'un testament contient une substitution ou une fiducie (qui suppose généralement
que les droits de certains bénéficiaires à l'égard des revenus ou du capital se
matérialiseront à une date ultérieure à celle du décès du testateur), alors les
bénéficiaires de cette substitution ou de cette fiducie doivent avoir les qualités requises
pour succéder (c'est-à-dire l'existence civile), non pas lors du décès du testateur, mais
plutôt lorsque la disposition produit effet en leur faveur.

Personne indigne
Le Code civil prévoit également que, pour hériter, une personne ne doit pas être
«indigne». Par exemple, on considérera qu'une personne est indigne d'hériter si elle a
été déclarée coupable d'avoir attenté à la vie du défunt (que l'attentat ait réussi ou non).
Une personne sera également déclarée indigne d'hériter si elle a exercé des sévices sur
le défunt ou si elle a eu envers lui un comportement hautement répréhensible.

De même, sera déclarée indigne une personne qui a recelé, altéré ou détruit de
mauvaise foi le testament du défunt, ainsi qu'une personne qui a gêné le testateur dans
la rédaction, la modification ou la révocation de son testament.

Le testateur peut néanmoins «confirmer» la personne autrement indigne dans ses


qualités d'héritier lorsque, connaissant ce fait, il a quand même avantagé cette personne
par testament ou n'a pas modifié le testament qui l'avantageait alors qu'il aurait pu le
faire.

4.1.3 — Transmission de la succession


En règle générale, les héritiers d'une personne décédée deviennent titulaires des droits

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dans son patrimoine au moment de son décès. Dans certains cas cependant, les droits
de ces héritiers se matérialiseront non pas au moment du décès mais au moment
indiqué dans le testament (tel que, par exemple, dans le cas d'un legs en substitution ou
en fiducie). Le Code civil appelle «saisine» le droit de possession ou d'administration
d'un héritier dans les biens d'une personne décédée.

La saisine des biens


Les héritiers d'une personne décédée acquièrent les droits dans les biens de cette
dernière dès l'instant de son décès, ou dès l'instant où la disposition testamentaire prend
effet en leur faveur.

Toutefois, cette saisine des héritiers est subordonnée à celle du liquidateur auquel le
Code civil accorde la possession des biens afin de procéder à la liquidation de la
succession (la nature de la charge du liquidateur sera examinée plus loin). En effet, le
liquidateur étant le maître d'œuvre de la liquidation d'une succession, il est normal que
sa saisine ait préséance sur celle des héritiers afin de lui permettre de s'acquitter
efficacement de sa tâche.

Ainsi, tant que la liquidation de la succession n'est pas achevée, les héritiers, bien que
«propriétaires» des biens de la succession, doivent laisser le liquidateur agir, ce dernier
pouvant même revendiquer des biens de la succession qui seraient déjà en la
possession de certains d'entre eux.

Lorsque les formalités civiles et fiscales du règlement de la succession seront achevées,


le liquidateur remettra alors les biens de la succession aux héritiers y ayant droit. C'est
donc dire que, tant et aussi longtemps qu'un bien n'a pas été formellement remis par le
liquidateur à l'héritier qui y a droit, c'est le liquidateur qui a la possession et
l'administration de ce bien.

4.1.4 — Obligation aux dettes du défunt (séparation ou confusion des


patrimoines)
En principe, les héritiers ne sont pas tenus aux dettes du défunt au-delà de la valeur des
biens qu'ils recueillent (principe de la séparation des patrimoines édicté par les articles
625, al. 2 et 782 C.c.Q.). Cela veut dire qu'ils ne seront pas tenus de payer les dettes du
défunt à même leurs propres biens, s'il s'avère que la succession est insolvable.

Cependant, la loi renverse ce principe en certaines circonstances, par exemple :

• lorsque les héritiers décident, d'un commun accord, de liquider la succession


sans suivre les règles prescrites par le Code civil du Québec pour la liquidation
(art. 779 C.c.Q.);
• lorsque les héritiers dispensent le liquidateur de l'obligation de procéder à
l'inventaire prévu par le Code civil (ne pas confondre avec la dispense de procéder
à un inventaire que l'on retrouve encore occasionnellement dans certains
testaments. Une telle clause est réputée non écrite) (art. 799 C.c.Q.);
• lorsque les héritiers négligent eux-mêmes de procéder à l'inventaire (alors que le
liquidateur a négligé de le faire) ou de demander au tribunal de remplacer le

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liquidateur ou de lui enjoindre d'y procéder (art. 800 C.c.Q.);


• lorsqu'ils confondent leurs biens personnels avec ceux de la succession avant
qu'il ne soit procédé à l'inventaire, à moins que cette confusion n'ait existé avant le
décès (par exemple en cas de cohabitation de l'héritier avec le défunt) (art. 801
C.c.Q.).

Les héritiers perdent de ce fait le bénéfice de la «séparation des patrimoines» et sont


alors tenus de payer les dettes du défunt à même leurs propres biens (au-delà de la
valeur des biens qu'ils recueillent), s'il s'avère que la succession de ce dernier est
insolvable. Il convient donc de souligner l'importance que revêt l'inventaire dans le
processus de liquidation d'une succession.

Cet inventaire doit par ailleurs satisfaire aux conditions édictées par le Code civil, à
défaut de quoi les héritiers ne bénéficieront pas de la protection offerte par la loi (et
deviendront quand même responsables des dettes du défunt si elles excédaient la
valeur des actifs de la succession). C'est l'article 1326 du Code civil qui établit les
modalités de l'inventaire auquel est tenu l'administrateur du bien d'autrui (le liquidateur
est un administrateur des biens d'autrui). Cet article se lit comme suit :
L'inventaire auquel peut être tenu l'administrateur doit comprendre l'énumération fidèle et
exacte de tous les biens qu'il est chargé d'administrer ou qui forment le patrimoine
administré.

Il comprend notamment :

1o La désignation des immeubles et la description des meubles, avec indication de


leur valeur et, s'il s'agit d'une universalité de biens meubles, une identification
suffisante de cette universalité;
2o La désignation des espèces en numéraire et des autres valeurs;
3o L'énumération des documents de valeur.

L'inventaire fait aussi état des dettes et se termine par une récapitulation de l'actif et du
passif.

L'article 1328 C.c.Q. donne également d'autres précisions concernant la façon


d'énumérer des effets personnels contenus à un inventaire :
Lorsqu'il se trouve, dans le patrimoine administré, des effets personnels du titulaire du
patrimoine ou, le cas échéant, du défunt, il suffit de les mentionner généralement dans
l'inventaire et de n'énumérer ou ne décrire que les vêtements, papiers personnels, bijoux
ou objets d'usage courant dont la valeur excède pour chacun 100 $.

Il ne s'agit donc pas d'un inventaire fait à la sauvette mais bien d'un inventaire fidèle et
exact des actifs et des passifs du défunt. Une fois l'inventaire terminé, un avis de sa
confection doit être donné dans un journal circulant dans la localité de la dernière
adresse connue du défunt et pareil avis doit également être publié au registre des droits
personnels et réels mobiliers. Cet avis mentionne le lieu, ainsi que les jours et heures où
l'inventaire peut être consulté. Le but de cet avis est de permettre aux créanciers de la
succession de consulter l'inventaire pour voir si leur créance y a été inscrite, et, dans la
négative, de produire leur réclamation.

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Ainsi, dans la mesure où un inventaire fidèle et exact des biens du défunt aura été fait
par le liquidateur ou, le cas échéant, par les héritiers, et que les avis de cet inventaire
auront été donnés de la manière prescrite ci-dessus, les héritiers seront protégés si des
créanciers du défunt, inconnus jusque-là, produisaient leurs réclamations et que ces
réclamations rendaient la succession insolvable.

À moins de savoir que la succession du défunt est déjà insolvable (auquel cas les
héritiers n'auraient qu'à renoncer à la succession aux fins de ne pas engager leur
responsabilité tel qu'il sera vu ci-après), ou à moins d'avoir la certitude que la
succession est manifestement solvable (ce qui nécessite la vérification minutieuse des
«papiers» du défunt et, notamment, de ses déclarations fiscales), on ne saurait donc
passer outre aux formalités de l'inventaire.

Il est particulièrement important de rappeler au liquidateur de la succession sa


responsabilité en cette matière. S'il décidait lui-même de ne pas procéder à l'inventaire
sans qu'une dispense à cet égard ne lui ait été donnée par les héritiers en toute
connaissance de cause, il pourrait voir sa responsabilité engagée et être poursuivi par
ces héritiers s'il s'avère par la suite que la succession est déficitaire et que les héritiers
ont dû régler le solde des dettes du défunt à même leurs biens personnels.

(2) 4.1.5 — Acceptation d'une succession


La question de savoir si une personne a accepté ou renoncé à une succession peut
parfois revêtir une grande importance, notamment à l'égard des créanciers de la
succession (surtout si cette dernière est insolvable et que les héritiers ne bénéficient pas
du principe de la séparation des patrimoines qui vient d'être étudié) ou à l'égard des
créanciers d'un héritier (ce dernier a-t-il acquis par succession des actifs
supplémentaires ou a-t-il plutôt volontairement renoncé à les recevoir au détriment de
ses créanciers?).

Le Code civil prévoit que l'acceptation d'une succession peut se faire de manière
«expresse», c'est-à-dire par la manifestation d'une intention claire (art. 637 C.c.Q.). Il
édicte également que cette acceptation peut être tacite quand le successible fait un acte
qui suppose nécessairement son intention d'accepter. Ainsi, sera considéré comme
comportant tacitement l'acceptation d'une succession le fait de renoncer à cette
succession au profit de certains cohéritiers seulement ou de céder ses droits successifs
dans telle succession. En effet, la renonciation au profit de certains cohéritiers
(renonciation in favorem) seulement ou la cession de droits successifs suppose au
préalable l'acceptation d'une telle succession. Notons que le fait de poser des actes
purement conservatoires de surveillance ou d'administration n'emporte pas acceptation
de la succession (art. 642 C.c.Q.).

Le Code civil prévoit également qu'une succession est considérée comme acceptée
lorsque le successible (la personne désignée comme héritier) :

• n'a pas renoncé à la succession dans les délais prescrits par la loi (en général six
mois à compter de l'ouverture du droit). Cela constitue une acceptation présumée,
acceptation dite «réfragable» parce qu'elle peut être renversée par une preuve

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contraire. Par exemple, un successible n'ayant pas formellement renoncé à la


succession et qui ferait l'objet d'une poursuite en justice au motif qu'il est l'un des
héritiers, pourrait demander au tribunal d'écarter la présomption d'acceptation en
démontrant qu'il n'a pas pu exercer son option plus tôt. En pareil cas, il pourra
obtenir du tribunal une prolongation du délai prescrit pour exercer son option;
• a dispensé le liquidateur de procéder à l'inventaire;
• a confondu les biens de la succession avec ses biens personnels. Ce dernier cas
(ainsi que celui mentionné précédemment) constitue une acceptation forcée (et
irréfragable, c'est-à-dire qu'elle ne peut être renversée par une preuve contraire). Il
s'agit ici de sanctionner un écart de conduite du successible ayant pour effet de
mettre en péril le principe de la séparation des patrimoines (principe qui vise à faire
en sorte qu'on puisse toujours différencier le patrimoine du défunt de celui des
successibles). Tout comportement ayant pour résultat de nuire à cette séparation
des patrimoines est ainsi sanctionné par la loi et le successible ne peut alors
prétendre renoncer à la succession. Qui plus est, le successible qui dispense le
liquidateur de procéder à l'inventaire ou qui, avant l'inventaire, confond les biens de
la succession avec ses propres biens, perd de ce fait l'avantage du principe de la
«séparation des patrimoines» et sera dès lors tenu aux dettes du défunt au-delà de
la valeur des biens qu'il recueille (c'est-à-dire qu'il devra payer telles dettes à
même ses propres biens si la valeur des biens de la succession est insuffisante à
cet égard). Notons que si la confusion des biens du successible avec ceux de la
succession survient après l'inventaire, l'obligation du successible aux dettes du
défunt ne vaudra que jusqu'à concurrence de la valeur des biens ainsi confondus;
• ou encore, procède à la nomination d'un liquidateur (notamment dans le contexte
d'une succession ab intestat);
• n'a pas procédé à l'inventaire sachant que le liquidateur ne l'a pas fait. Cela
constitue une acceptation forcée. Dans ce dernier cas, d'après les termes utilisés
par le législateur, il semble qu'il serait possible au successible de réfuter cette
présomption d'acceptation par une preuve contraire. Cette preuve serait cependant
difficile à établir.

EXEMPLE 2-4.2

Votre beau-frère vient de décéder sans testament. Il laisse dans le deuil ses trois enfants
âgés respectivement 18, 20 et 23 ans. Comme vous êtes leur oncle préféré, ils veulent
vous nommer liquidateur de la succession.

Vous rédigez donc un document signé par les trois enfants vous nommant liquidateur de
la succession. Quelles sont les conséquences?
1- Vous êtes effectivement le liquidateur, car ils viennent de vous déléguer ce pouvoir;

2- Une telle désignation n'a pas à être notariée;

3- Ce faisant, les trois enfants sont présumés accepter la succession;

4- Les enfants pourraient être responsables des dettes de la succession au-delà de la

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valeur des biens recueillis si l'inventaire n'était pas fait.

Pour vous nommer liquidateur sans pour autant être présumés accepter la succession,
les enfants auraient dû présenter une requête au tribunal afin que vous soyez nommé
liquidateur de la succession. Cette façon de faire n'entraîne pas la présomption
d'acceptation de la succession par les héritiers.

EXEMPLE 2-4.3

Votre grand-père est décédé la semaine dernière. Vous savez que vous êtes l'un de ses
héritiers. Sans tarder, vous vous rendez à son appartement pour prendre possession de
certains biens qui vous avaient été promis par ce dernier longtemps avant son décès.

Le fait de vous approprier certains biens du défunt sans faire l'inventaire présume une
acceptation de la succession et vous rend responsable de son passif, le cas échéant,
au-delà de la valeur des biens que vous aurez recueillis.

Il faut noter que la succession dévolue au mineur, au majeur protégé (personne déclarée
inapte) ou à l'absent est réputée acceptée à moins que le représentant légal du mineur,
du majeur protégé ou de l'absent n'y ait renoncé avec l'autorisation du conseil de tutelle.
Cette acceptation réputée n'est pas de nature à mettre en danger le mineur, le majeur
protégé ou l'absent, puisque le Code civil décrète qu'ils ne peuvent jamais être tenus au
paiement des dettes de la succession au-delà de la valeur des biens qu'ils recueillent
dans cette succession.

(2) 4.1.6 — Renonciation à une succession


Le Code civil favorise l'acceptation des successions. En effet, il voit à ce que la
détermination des successibles soit réalisée au plus tôt de façon à éviter que les biens
d'une succession puissent demeurer «sans maître». Ainsi, lorsqu'un individu a accepté
formellement une succession ou est considéré l'avoir acceptée, il ne peut revenir sur sa
décision pour y renoncer par la suite. Par contre, la renonciation à une succession est en
principe révocable. Il est donc normalement possible au successible qui a renoncé à une
succession de revenir sur sa décision et d'accepter cette succession à moins, bien sûr,
qu'un autre successible, appelé à la succession par suite de cette renonciation, ne l'ait
entre-temps acceptée.

La renonciation à une succession fait en sorte que le renonçant abdique sa qualité


d'héritier, perdant ainsi son droit d'en recevoir les biens. Par ailleurs, le renonçant
abdiquant sa qualité d'héritier se libère ainsi de toute responsabilité quant aux dettes de
la succession.

Il existe trois «types» de renonciations :

• la renonciation «expresse»;
• la renonciation «présumée»;
• la renonciation «forcée».

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La renonciation «expresse»
La renonciation expresse se fait par acte notarié en minute ou par une déclaration
judiciaire (jugement) dont il est donné acte (art. 646, al. 2 C.c.Q.). Il est à noter que la loi
ne permet aucun autre écrit comme preuve formelle de la renonciation expresse à une
succession.

Cette renonciation doit aussi être publiée au registre des droits personnels et réels
mobiliers.

La renonciation «présumée»
Le successible qui a ignoré sa qualité d'héritier à une succession ou ne l'a pas fait
connaître durant dix ans, à compter du jour où son droit s'est ouvert, est réputé avoir
renoncé à cette succession. Cette présomption est irréfragable, c'est-à-dire que le seul
écoulement du délai de dix ans emporte renonciation (art. 650 C.c.Q.).

La renonciation «forcée»
Le successible qui, de mauvaise foi, a diverti ou recelé un bien de la succession ou omis
de le comprendre dans l'inventaire est réputé avoir renoncé à la succession, malgré
toute acceptation antérieure (art. 651 C.c.Q.).

Il faut retenir de tout ce qui précède que le successible qui a renoncé à une succession
conserve, dans les dix ans depuis le jour où son droit s'est ouvert, la faculté d'accepter
cette succession si elle n'a pas été acceptée par un autre entre-temps (art. 649 C.c.Q.).
Toutefois, si la renonciation originale est une renonciation «présumée» ou «forcée»
(comme celles prévues aux articles 650 et 651 C.c.Q.), elle est alors irréfragable et le
«renonçant» ne pourra plus, par la suite, accepter cette succession.

4.1.7 — Survie de l'obligation alimentaire (art. 684 C.c.Q.)


Le principe de la survie de l'obligation alimentaire édicté par le Code civil a pour but
d'apporter une aide financière à des personnes qui dépendaient du défunt pour leur
soutien alimentaire lorsque ce dernier les a déshéritées ou ne leur a pas laissé
suffisamment de biens pour pourvoir à leurs besoins. Il s'agit-là en somme d'une sorte
de «réserve» au profit de certaines personnes qui étaient «dépendantes» du défunt au
moment de son décès.

Les personnes que le Code civil désigne comme bénéficiaires de ce soutien financier
sont :

• le conjoint marié ou uni civilement au défunt;


• les parents en ligne directe au premier degré du défunt, c'est-à-dire ses
ascendants et ses descendants (plus généralement, son père, sa mère et ses
enfants);
• l'ex-conjoint du défunt qui percevait une pension alimentaire lors du décès.

Ces personnes ont un délai de six mois à compter du décès pour «produire» leur
réclamation. Il est à noter que ce délai de six mois est de rigueur et qu'une réclamation

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faite une fois ce délai expiré ne saurait être acceptée.

L'établissement de la «contribution»
Quelle valeur une personne bénéficiant du principe de la survie de l'obligation
alimentaire peut-elle réclamer de la succession de la personne qui assurait son soutien
financier? Dans un cas, le Code civil établit cette contribution; dans les autres, il se
contente de déterminer les modalités servant à son établissement. Ainsi, à l'égard de
l'ex-conjoint qui percevait des aliments du défunt lors de son décès, cette contribution
est établie à 12 mois d'aliments (pension alimentaire) ou 10 % de la succession fictive et
ne peut être réduite même si cet ex-conjoint bénéficie d'une façon quelconque d'autres
avantages découlant du décès du débiteur alimentaire, des bénéfices d'une assurance
vie ou d'un legs particulier aux termes du testament.

EXEMPLE

Monsieur, divorcé et payant une pension alimentaire à son ex-conjointe de 2 000 $ par
mois, décède. Dans son testament, il lègue à son ex-conjointe une somme de 100 000 $
et le résidu de ses biens à ses trois enfants.

L'ex-conjointe a, dans les six mois suivant le décès de monsieur, le droit de réclamer à la
succession (trois enfants), un montant de 24 000 $, même si elle hérite d'un 100 000 $.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Indiquer dans le testament que le legs de 100 000 $ sera réduit de tout montant pouvant
être réclamé au titre de l'obligation alimentaire. Ainsi, l'ex-conjointe recevrait 100 000 $
et non 124 000 $, si telle est l'intention du testateur évidemment.

À l'égard des autres «créanciers» (par exemple, le conjoint non séparé, le conjoint
séparé de corps, les enfants et les parents du défunt), le Code civil n'établit pas la valeur
de cette contribution mais mentionne qu'elle doit être établie à l'amiable avec le
liquidateur, agissant avec le consentement des héritiers et des légataires particuliers. Si
une entente est impossible (il y a fort à parier que cela se produira en de nombreux cas),
il revient au tribunal d'établir le montant de cette contribution.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Il faut souligner que le testament peut étendre les pouvoirs du liquidateur et lui permettre
de transiger seul avec les «créanciers alimentaires» en cette matière, sans avoir à
obtenir l'approbation ou le consentement des héritiers et des légataires particuliers, ce
qui évitera de mêler les bénéficiaires du testament aux discussions et pourra, dans bien
des cas, accélérer la conclusion de l'entente entre ces «créanciers» et la succession.

Les critères servant à établir cette contribution

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Lorsque le montant de la «contribution alimentaire» n'est pas déterminé par le Code civil
(conjoint non séparé, conjoint séparé de corps, enfants, parents), les critères suivants
servent à établir le montant de la «contribution alimentaire» payable au «créancier»
d'aliments :

• l'actif de la succession;
• les avantages que retire le «créancier» de la succession;
• les besoins et facultés des héritiers et légataires;
• le droit d'autres personnes à recevoir des aliments;
• le fait que le «créancier» reçoive déjà une pension alimentaire;
• les besoins et facultés du créancier, ainsi que le temps jugé nécessaire pour lui
permettre d'acquérir une certaine autonomie.

Il est donc tenu compte des moyens financiers de la succession (le débiteur), des
besoins du «créancier», des avantages que ce dernier retire par ailleurs de la
succession (il n'est pas nécessairement complètement déshérité), des réclamations
d'autres «créanciers alimentaires», ainsi que des besoins des héritiers et des légataires
de la succession. Le Code civil tente donc d'apporter une aide financière aux
«créanciers alimentaires» visés par le principe de la survie de l'obligation alimentaire,
sans pour autant que cette aide soit disproportionnée compte tenu des moyens
financiers de la succession, et en respectant également les droits légitimes des héritiers
et légataires de la succession du défunt.

Règles particulières
Si le créancier est le conjoint ou un descendant du défunt, on tient compte non
seulement de l'actif successoral réel, mais aussi d'un actif successoral fictif (il s'agit-là
d'un actif «comptable» seulement) aux fins de déterminer le montant de la contribution.
L'actif fictif n'est donc pas un actif transmis dans la succession du défunt; il ne sert qu'à
déterminer le montant de la contribution alimentaire.

Cet actif fictif est composé de la valeur des libéralités (dons) entre vifs faites par le
défunt dans les trois ans précédant son décès, des libéralités entre vifs ayant pour terme
le décès (même si elles ont été faites plus de trois ans avant le décès), ainsi que des
avantages d'un régime de retraite au sens des règles propres au patrimoine familial ou
encore des avantages d'une police d'assurance vie qui aurait été versée à la succession
ou au «créancier alimentaire» lui-même, si le défunt n'avait pas désigné un titulaire
subrogé ou un bénéficiaire dans les trois ans précédant son décès.

À noter que le terme «libéralité» comprend également toute aliénation, sûreté ou charge
consentie par le défunt pour une prestation très inférieure à celle du bien au temps où
l'acte a été fait.
Exemple 2-5
Un individu marié se sépare «de fait» de sa conjointe en janvier 2000 (il est donc
toujours marié à cette dernière). Le produit de sa police d'assurance vie était jusqu'alors
payable à sa succession. En janvier 2001, il change cette désignation de bénéficiaire au
profit de sa nouvelle conjointe «de fait»; il décède en 2010. Son testament déshérite

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complètement sa conjointe «légale» et cette dernière produit une réclamation contre la


succession en invoquant, entre autres, le principe de la survie de l'obligation alimentaire.
Dans ces circonstances, on tiendra compte, lors de l'établissement de la valeur de la
contribution à être versée à la conjointe «légale», du produit de l'assurance vie, même si
cet actif ne fait pas, en principe, partie de la succession du défunt (en vertu du fait qu'il
existe un bénéficiaire désigné), car cette désignation a été faite moins de trois ans avant
son décès.

Le «plafond» de la contribution
Afin de ne pas appauvrir indûment la succession à la suite du versement des diverses
contributions alimentaires, le Code civil établit le montant maximal pouvant être versé à
chaque «type» de créancier alimentaire, et ce, peu importent les critères servant à
établir cette contribution dont il a été question précédemment.

Sans entrer dans tous les calculs, mentionnons que le maximum pouvant être réclamé
par un conjoint ou un enfant pourrait être l'équivalent de 50 % de la part qu'aurait reçue
ce conjoint ou cet enfant si toute la succession (fictive) avait été dévolue ab intestat.

Donc, si le conjoint aurait eu droit de recevoir 1/3 de la succession, le maximum qu'il


pourrait réclamer serait 1/6 de la succession (fictive) sujet aux critères précédemment
mentionnés.

Enfin, si le créancier est un ascendant du défunt, la contribution équivaut au moindre


de :

• six mois d'aliments;


ou
• 10 % de la valeur de la succession (y compris l'actif fictif tel que déterminé ci-
dessus).

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Comme le délai pour produire une telle réclamation est de six mois à compter de
l'ouverture de la succession, un liquidateur qui procéderait trop rapidement au
«règlement» de cette succession en faisant une distribution hâtive des biens aux
légataires mentionnés au testament pourrait se retrouver en fâcheuse position si une
telle réclamation était produite par l'ex-conjointe. Si les valeurs distribuées aux légataires
et héritiers aux termes du testament ne pouvaient être récupérées entre leurs mains, le
liquidateur pourrait voir sa responsabilité engagée et éventuellement être tenu lui-même
de payer ces valeurs aux personnes bénéficiant du soutien alimentaire.

Le testament doit donc faire l'objet d'une attention particulière aux fins de minimiser les
inconvénients dus aux réclamations éventuelles de «créanciers alimentaires» lors du
règlement de la succession. Ceci est particulièrement vrai lorsqu'il s'agit du testament
d'une personne vivant en «famille reconstituée».

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4.1.8 — Représentation (art. 660 C.c.Q.) ou accroissement


Le Code civil définit la représentation comme étant une faveur accordée par la loi, en
vertu de laquelle un parent est appelé à recueillir une succession qu'aurait recueillie son
ascendant, parent moins éloigné du défunt qui, étant indigne, prédécédé ou décédé au
même instant que lui, ne peut la recueillir lui-même.
Exemple 2-6
Paul, un veuf qui ne s'est jamais remarié, est décédé sans testament. Il a eu trois
enfants, et chacun d'eux a lui-même des enfants. La succession de Paul est donc
dévolue à ses descendants, d'après les règles de dévolution légale prévues par le Code
civil. Un des enfants de Paul l'ayant prédécédé, la part qu'il aurait reçue de la succession
de son père sera recueillie par ses propres enfants (les petits enfants du défunt) et cette
part se divisera en parts égales entre ces derniers. Ces petits-enfants héritent donc par
représentation de la part que leur père aurait reçue s'il avait survécu à Paul.

Il est à noter que la représentation est applicable aussi dans le cas d'une succession
testamentaire, mais cette fois, uniquement lorsque le legs est fait à tous les descendants
ou à tous les collatéraux du testateur qui auraient été appelés à sa succession s'il était
décédé sans testament.

Lorsque la représentation ne joue pas, on dit que les legs «accroissent» en faveur des
autres héritiers, normalement en proportion de leur part.

Exemple 2-7
Nicole rédige un testament dans lequel elle lègue tous ses biens en parts égales entre
son frère Roger et ses deux sœurs Sylvie et Aline. Or, les parents de Nicole sont encore
en vie, de même que son frère Jacques. Malheureusement, sa sœur Aline l'a
prédécédée. Puisque le legs n'est pas fait en faveur de tous les collatéraux de Nicole qui
auraient été appelés à sa succession si elle était décédée sans testament, les enfants
de sa sœur Aline ne peuvent la représenter à la succession de Nicole. La part d'Aline
sera plutôt dévolue par accroissement à ses co-héritiers, Roger et Sylvie.

Le testament peut également stipuler expressément que la représentation ou


l'accroissement sera applicable et en circonscrire les conditions. Enfin, le testateur peut
aussi exclure expressément la représentation aux termes de son testament. Dans tous
les cas, il est recommandé que le testament indique clairement la volonté du testateur à
l'effet d'appliquer ou non la représentation.

Sauf disposition contraire dans le testament, la représentation ne s'applique pas en


matière de legs à titre particulier. Leur caducité profite alors aux légataires universels.

(1) 4.2 — Dévolution légale des successions (succession


ab intestat)

Le terme «dévolution légale» fait référence à la façon dont est partagée la succession

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d'un individu décédé sans avoir fait de testament. Sa succession est dévolue au conjoint
survivant et à la famille du défunt, dans l'ordre cité ci-dessous.

Le Code civil établit un ordre de priorité entre les héritiers. En fait, il crée trois ordres de
dévolution. S'il y a des héritiers dans le premier ordre, ils éliminent automatiquement
ceux des deuxième et troisième ordres. S'il ne se trouve aucun héritier dans le premier
ordre, il faut alors regarder dans le deuxième ordre et, le cas échéant, ils auront priorité
sur ceux du troisième ordre. Il en va de même pour ceux du troisième ordre par la suite.

Regardons le lien qui unit les héritiers dans chacun des ordres.

4.2.1 — Premier ordre de dévolution : le conjoint survivant et les descendants


Le conjoint et les descendants
Il faut rappeler que le «conjoint» dont il est question au Code civil est le conjoint «légal»
et non le conjoint «de fait». Le conjoint «légal» est soit marié ou uni civilement au défunt.
Puisque le Code civil ne reconnaît pas le conjoint de fait en matière de succession, celui-
ci ne peut être un héritier légal. Il ne peut donc pas hériter en l'absence de testament.

Ainsi, si le défunt laisse un conjoint et des descendants, le conjoint survivant recueille un


tiers (1/3) de la succession et les descendants les deux autres tiers (2/3). Il faudra noter
que le conjoint survivant peut également cumuler les avantages de son contrat de
mariage, de son régime matrimonial et des dispositions relatives au partage du
patrimoine familial. Le conjoint survivant pourra donc, dans un premier temps, réclamer
les droits lui revenant dans le partage du patrimoine familial, de la société d'acquêts ou
l'exécution des donations prévues dans le contrat de mariage qui n'ont pas été
acquittées au moment du décès de son époux puisque ce décès met fin à leur mariage.
À ce titre, l'époux survivant est un créancier de la succession du conjoint décédé.

Une fois toutes les dettes de la succession acquittées (parmi lesquelles se trouvent
celles mentionnées au paragraphe précédent), le reste des biens de la succession se
partage entre les héritiers légaux et, à ce titre, le conjoint survivant reçoit un tiers (1/3)
de cette valeur résiduelle. Donc, si le conjoint survivant a des droits patrimoniaux et
matrimoniaux à faire valoir à l'égard de la succession de son conjoint, le cumul de sa
qualité de créancier et d'héritier pourrait lui permettre de recevoir, dans les faits, plus
qu'un tiers (1/3) de la succession du défunt.

Les descendants venant seuls à la succession


Par ailleurs, si le défunt n'a pas de conjoint ou si le conjoint est lui-même prédécédé ou
est décédé en même temps que le défunt, les descendants reçoivent toute la
succession.

4.2.2 — Deuxième ordre de dévolution : le conjoint survivant et les


ascendants ou collatéraux privilégiés
Notez que le conjoint participe au 1er et au 2e ordre de dévolution. Il s'agit ici d'une
exception au principe précédemment mentionné à l'effet que les héritiers du 1er ordre
éliminent ceux des ordres suivants.

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Le conjoint et les «ascendants privilégiés»


Le terme «ascendants privilégiés» désigne le père et la mère du défunt. Si le défunt ne
laisse aucun descendant mais laisse un conjoint et des ascendants privilégiés, le
conjoint survivant recueille les deux tiers (2/3) de la succession et les ascendants
privilégiés l'autre tiers (1/3). Notons que le conjoint survivant possède, ici aussi, le droit
de cumuler sa qualité de créancier et d'héritier, tel qu'il est mentionné à la sous-section
4.2.1 ci-dessus.

Le conjoint et les «collatéraux privilégiés»


Le terme «collatéraux privilégiés» désigne les frères et sœurs du défunt, ainsi que leurs
descendants au premier degré (neveux et nièces).

Si le défunt ne laisse ni descendants ni ascendants privilégiés, mais laisse un conjoint et


des collatéraux privilégiés, le conjoint survivant recueille les deux tiers (2/3) de la
succession et les collatéraux privilégiés l'autre tiers (1/3), sous réserve de la possibilité
pour le conjoint de cumuler ses droits de créancier à ceux d'héritier.

Le conjoint venant seul à la succession


Si le défunt ne laisse ni descendants, ni ascendants privilégiés, ni collatéraux privilégiés,
mais laisse un conjoint, ce dernier recueille toute la succession. Ainsi, le conjoint
survivant ne sera seul héritier légal que dans l'hypothèse où son époux prédécédé n'a
laissé aucun enfant (ou petit-enfant), ni père ni mère, ni frères ou sœurs, ni neveux ou
nièces.

Les ascendants et collatéraux privilégiés


Si le défunt ne laisse ni descendants ni conjoint, mais laisse des ascendants et des
collatéraux privilégiés, les ascendants privilégiés recueillent la moitié (1/2) de la
succession et les collatéraux privilégiés l'autre moitié (1/2).

Les collatéraux privilégiés venant seuls à la succession


À défaut de conjoint, de descendants et d'ascendants privilégiés, les collatéraux
privilégiés recueillent la totalité de la succession.

Les ascendants privilégiés venant seuls à la succession


À défaut de conjoint, de descendants et de collatéraux privilégiés, les ascendants
privilégiés recueillent la totalité de la succession.

4.2.3 — Troisième ordre de dévolution : les ascendants et collatéraux


ordinaires
Le terme «ascendants ordinaires» désigne le grand-père, la grand-mère, etc., du défunt,
alors que le terme «collatéraux ordinaires» désigne les petits-neveux, petites-nièces,
etc., du défunt. Les ascendants et collatéraux ordinaires ne sont appelés à la succession
qu'à défaut de conjoint, de descendants, d'ascendants privilégiés ou de collatéraux
privilégiés du défunt.

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4.2.4 — La fente successorale (art. 676 C.c.Q.)


Dans le contexte des familles reconstituées, il est approprié d'aborder brièvement une
notion qui fait des distinctions en matière de succession lorsque certains ou tous les
héritiers ne sont pas des parents germains (c'est-à-dire de la même mère et du même
père) du défunt.

La fente successorale est une opération par laquelle on divise en deux parts égales la
totalité ou une portion d'une succession pour les attribuer respectivement aux lignes
maternelle et paternelle du défunt.

Le principe de la fente n'est jamais appliqué entre descendants ou entre ascendants


privilégiés. Il s'applique entre les collatéraux privilégiés140 et entre les ascendants et les
collatéraux ordinaires141.

Voici un exemple d'application de la fente entre collatéraux privilégiés : le père d'Henri,


lorsqu'il était marié à Marie, a eu deux enfants, Henri et Simon. Lors d'une deuxième
union avec Jocelyne, est née Ginette. Ginette est donc la demi-sœur d'Henri. Au
moment du décès d'Henri, sa mère et son père sont prédécédés. Qui héritera de ses
biens et dans quelle proportion?

Les règles relatives aux ordres de dévolution ne nous permettent pas, à elles seules, de
résoudre ce problème.

Par conséquent, il faut avoir recours aux règles de la fente successorale. En fait, il
faudra préalablement «fendre» la succession en deux entre les lignes maternelle et
paternelle du défunt, avec la particularité que le parent germain (i.e. ayant le même père
et la même mère que le défunt) sera héritier dans les deux lignes. Ce faisant, vous
comprenez que la demi-sœur ou le demi-frère du défunt héritera d'un plus faible
pourcentage que son parent germain.
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Ainsi, si nous appliquons la fente successorale à notre exemple, l'héritier d'Henri du côté
maternel est Simon (même père, même mère) et les héritiers d'Henri du côté paternel
sont Ginette (demi-sœur) et Simon.

Nous avons mentionné que le parent germain d'Henri, Simon, était considéré héritier
dans les deux lignes, ce qui donnerait le résultat suivant :

Henri décède : 1/2 maternelle = • Simon

1/2 paternelle = • Simon

• Ginette

Simon : 3/4

Ginette : 1/4

4.2.5 — Liquidation d'une succession ab intestat


Même si l'on est en présence d'une succession non testamentaire, le Code civil prévoit
le mode de désignation des personnes qui agiront comme liquidateurs de cette
succession. Ainsi, si l'on est en présence d'un seul héritier légal, ce dernier est d'office
liquidateur de la succession en vertu de l'article 784 C.c.Q. Par ailleurs, si plusieurs
héritiers légaux viennent concurremment à la succession, ils sont tous désignés

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liquidateurs en vertu de l'article 785 C.c.Q. Cependant, ces derniers pourraient, par vote
majoritaire, désigner une personne pour agir à titre de liquidateur de cette succession.

Il est à noter que les règles ci-dessus s'appliqueraient même en matière de succession
testamentaire si le testament faisait défaut de pourvoir à la désignation d'un liquidateur.
Cependant, en règle générale, le testament (du moins s'il est rédigé par un juriste)
prévoit les modalités de désignation du liquidateur, ainsi que celles de son
remplacement. Lors de l'étude des dispositions testamentaires, les fonctions du
liquidateur de la succession seront examinées davantage.

L'article 776 du Code civil définit en ces termes la liquidation d'une succession :

La liquidation de la succession ab intestat ou testamentaire consiste à identifier et à


appeler les successibles, à déterminer le contenu de la succession, à recouvrer les
créances, à payer les dettes de la succession, qu'il s'agisse des dettes du défunt, des
charges de la succession ou des dettes alimentaires, à payer les legs particuliers, à
rendre compte et à faire la délivrance des biens.

L'on notera qu'en matière de succession ab intestat, l'identification des successibles


s'opère par le biais de la déclaration de transmission qui est en fait un document légal
préparé à la demande du liquidateur. En matière de succession testamentaire, c'est le
testament qui identifie les successibles.

L'on appelle «successible» l'héritier qui n'a pas encore accepté la succession. Dès son
acceptation, il est qualifié d'héritier.

Les règles de base en matière de dévolution légale des successions ayant été
examinées, l'on abordera maintenant de quelle façon un individu peut prévoir lui-même
les modalités de transmission de ses biens en cas de décès. Ainsi, les modes de
transmission suivants seront successivement étudiés, soit : la désignation de
bénéficiaire, le contrat de mariage et le testament.

4.2.6 — Liquidateur de la succession


Le liquidateur est le personnage central du processus de règlement de toute succession.
Il est chargé de voir aux intérêts des créanciers de la succession, ainsi qu'à ceux des
héritiers. Il est l'administrateur du patrimoine successoral et agit d'après les normes
définies par le testament ou par la loi (dans le cas d'une succession ab intestat).

Rappelons ici que la charge de liquidateur existe, que la succession soit de nature
testamentaire ou légale (ab intestat). En ce dernier cas, ou lorsque le testament ne
pourvoit pas à la désignation d'un liquidateur, le Code civil désigne les héritiers comme
liquidateurs de la succession, ces derniers pouvant, par décision majoritaire, confier
cette tâche à l'un d'entre eux, comme il a été vu précédemment.

Toutefois, un testament bien rédigé doit prévoir des dispositions relatives à la


désignation du liquidateur, au mode de son remplacement ainsi qu'aux pouvoirs dont il
sera investi dans l'exercice de sa charge.

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La désignation du liquidateur
Lorsqu'il a été question de la succession ab intestat (sans testament), la loi désigne les
héritiers. Dans le cas d'une succession testamentaire, les héritiers sont les légataires
universels ou à titre universel. Le légataire à titre particulier n'est pas un héritier. Son
statut s'apparente davantage à celui d'un créancier de la succession. Par ailleurs, le
testament peut prévoir des dispositions relativement à la désignation d'un liquidateur ou
de plusieurs liquidateurs de la succession. Un testament bien structuré prévoira
normalement de manière très détaillée de quelle façon s'opérera la désignation et le
remplacement du liquidateur ou des liquidateurs de la succession. Il faut donc vérifier
avec le testateur s'il désire que plusieurs personnes soient appelées à agir comme
liquidateurs de la succession.

Il faut comprendre ici que chaque cas est un cas d'espèce et que les dispositions du
testament relatives à la nomination et au remplacement du liquidateur peuvent varier
selon les circonstances. Ainsi, prenons le cas du testateur qui désire nommer son frère à
titre de liquidateur de sa succession, ce dernier étant un gestionnaire habile, possédant
de surcroît les disponibilités voulues pour s'acquitter efficacement de cette tâche.
Toutefois, advenant que ce dernier décède avant le testateur ou, pour une raison
quelconque, soit incapable d'accepter la charge de liquidateur ou de la remplir pendant
toute sa durée, il est possible que le testateur veuille, dans ces circonstances, nommer
non pas un, mais plusieurs remplaçants devant alors agir conjointement, soit parce qu'il
désire que ces personnes se répartissent entre elles les différentes tâches reliées au
règlement de la succession (ces personnes n'ayant pas les mêmes disponibilités que le
frère du testateur), soit pour toute autre raison.

Peu importent les volontés du testateur, le testament devra les énoncer de manière
claire et précise pour éviter toute interprétation.

Voici un autre exemple, celui du testateur qui désire nommer liquidateurs ses trois
enfants majeurs. Désire-t-il qu'il y ait trois liquidateurs pendant toute la durée de la
liquidation de la succession advenant le cas où l'un ou l'autre de ses enfants ne puisse
s'acquitter de cette tâche? Le testament devra énoncer clairement les règles à suivre.
Ainsi, dans le cas où le testateur désire s'assurer de la présence conjointe de trois
liquidateurs pendant toute la durée de la succession, le testament prévoira qu'en cas de
décès, refus ou incapacité quelconque de l'un ou l'autre des liquidateurs, on devra
procéder à son remplacement, et on indiquera le nom de ce successeur ou la procédure
par laquelle il devra être désigné.

Toutefois, si le testateur ne désire pas remplacer un liquidateur défaillant, le testament


précisera dans l'éventualité où un des liquidateurs nommés ne pourrait s'acquitter de sa
tâche, seuls les liquidateurs demeurant en fonction continueront d'agir à ce titre. On se
doit donc d'indiquer dans tous les cas si une vacance au poste de liquidateur
nécessitera un remplacement et, dans l'affirmative, indiquer les modalités de ce
remplacement.

À cet égard, le Code civil n'est pas limitatif, se contentant de mentionner que «le
testateur peut désigner un ou plusieurs liquidateurs; il peut aussi pourvoir au mode de

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leur remplacement» (art. 786 C.c.Q.). Ainsi, le testament pourra désigner nommément
une personne (ou plusieurs personnes) appelée à agir en remplacement d'un liquidateur
qui refuserait la charge ou dont les fonctions se termineraient avant le terme de la
liquidation de la succession.

Le testament pourrait également prévoir les modalités de remplacement (indiquant, par


exemple, que la désignation du liquidateur devra se faire par vote majoritaire des frères
et sœurs du défunt alors vivants, ou de toute autre manière prévue au testament). Si les
dispositions du testament à cet égard s'avèrent incomplètes ou inapplicables, les
héritiers pourront alors procéder à telle désignation.

Ultimement, le tribunal pourra, à la demande de tout intéressé, procéder à tout


remplacement de liquidateur, si les dispositions du testament s'avèrent inapplicables et
que les héritiers ne sont pas en mesure de pourvoir eux-mêmes à tel remplacement.

Aspects importants de la charge du liquidateur


Voici maintenant quelques facettes du rôle du liquidateur; seront successivement
considérées :

1) l'obligation de faire inventaire;

2) la garantie de l'exécution des obligations du liquidateur;

3) la reddition de compte;

4) les modalités de prise de décisions (si plusieurs liquidateurs agissent conjointement);

5) la délégation de pouvoirs (si plusieurs liquidateurs agissent conjointement);

6) la rémunération du liquidateur;

7) les pouvoirs du liquidateur.

1) L'obligation de faire inventaire


L'inventaire est maintenant d'une importance primordiale dans le processus de
règlement d'une succession et le défaut d'y procéder peut entraîner des conséquences
sérieuses pour les héritiers. En conséquence, le testateur ne peut relever son liquidateur
de l'obligation de procéder à la confection de l'inventaire requis par la loi. Cependant, le
testament peut prévoir une dispense de procéder à un inventaire formel, pourvu que la
succession soit manifestement solvable et que le consentement unanime des héritiers
soit obtenu.

2) La garantie de l'exécution des obligations du liquidateur


Le Code civil dispense le liquidateur de l'obligation de fournir une sûreté pour garantir
l'accomplissement de ses obligations (exemple de sûreté : la souscription d'une
assurance responsabilité). S'il est de la volonté du testateur d'imposer cette obligation au
liquidateur, le testament doit alors contenir une clause à cet effet.

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3) La reddition de compte
À la fin de son administration, le liquidateur doit rendre compte de sa gestion. Ce compte
doit être suffisamment détaillé pour permettre aux héritiers d'en vérifier l'exactitude. De
plus, si la liquidation d'une succession s'étend au-delà d'une année, il est du devoir du
liquidateur de produire un compte de sa gestion à la fin de cette première année et, par
la suite, au moins une fois l'an, et ce, tant que la liquidation n'est pas terminée.

4) Les modalités de prise de décisions (si plusieurs liquidateurs agissent conjointement)


À moins d'en être dispensées par le testament, les personnes qui agissent ensemble
comme liquidateurs doivent agir de concert (à l'unanimité), et ce, peu importe leur
nombre. Le testament peut cependant prévoir que les décisions des liquidateurs se
prendront à la majorité, ce qui peut parfois être préférable. Ainsi, si le testament désigne
trois liquidateurs sans aucune autre mention, ces derniers doivent agir à l'unanimité pour
tous les actes qu'ils posent. S'il est dans l'intention du testateur de permettre qu'une
majorité des liquidateurs (soit 2 sur 3) puisse agir, le testament devra le spécifier.

5) La délégation de pouvoirs (si plusieurs liquidateurs agissent conjointement)


En vertu du Code civil, l'administrateur du bien d'autrui qu'est le liquidateur peut déléguer
ses pouvoirs ou se faire représenter par un tiers pour des actes déterminés. Il peut aussi
déléguer ses pouvoirs de manière générale à ses coadministrateurs (coliquidateurs). Il
se peut cependant que le testateur souhaite confier la liquidation de sa succession à
plusieurs personnes conjointement et ne pas vouloir que certaines d'entre elles puissent
tout bonnement déléguer tous leurs pouvoirs aux autres. Si tel est le cas, il est possible
de limiter la portée des pouvoirs de délégation entre les coliquidateurs dans le
testament.

6) La rémunération du liquidateur
Le Code civil prévoit que tout liquidateur, qu'il soit ou non l'un des héritiers, a droit au
remboursement des dépenses encourues dans l'exécution de sa charge. S'il n'est pas
l'un des héritiers, il a également droit à une rémunération. S'il est héritier, il peut être
rémunéré, à la condition que le testament y pourvoie ou que les héritiers en conviennent.
Les règles énoncées par le Code civil aux deux phrases précédentes sont toutefois
supplétives et ne s'appliquent qu'en l'absence de dispositions expresses dans le
testament. Ce dernier pourra indiquer si le liquidateur a droit à une rémunération et,
dans l'affirmative, devra préciser le mode d'établissement de cette rémunération.

Ainsi, il sera possible pour le testateur d'indiquer qu'un héritier qui agit aussi comme
liquidateur ne sera pas rémunéré ou, qu'au contraire, il recevra la même rémunération
que celle qui serait attribuée à un liquidateur qui n'est pas un héritier. Il sera également
important que le testament établisse le mode de rémunération d'un liquidateur. Il pourra
s'agir, par exemple, d'un taux horaire déterminé par le testament, lequel pourra être
indexé, le cas échéant, ou du taux horaire alors chargé par la personne désignée
comme liquidateur de la succession. En d'autres cas, on pourra établir une rémunération
forfaitaire pouvant elle aussi être indexée, si désiré. Ce ne sont là que quelques
exemples de la manière de déterminer la rémunération d'un liquidateur.

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Quel que soit le type de rémunération souhaité, il est important que le testament
l'établisse clairement. À défaut par le testament d'établir les modalités de rémunération,
telle rémunération devra être déterminée par les héritiers ou, en cas de désaccord entre
les héritiers, par le tribunal. Il est donc préférable que le testament soit explicite sur toute
question concernant la rémunération du liquidateur.

7) Les pouvoirs du liquidateur


Les pouvoirs exercés par le liquidateur de la succession peuvent être regroupés en trois
catégories :

• l'administration des biens;


• l'aliénation des biens;
• le partage des biens.

L'administration des biens

Le Code civil donne au liquidateur les pouvoirs d'un administrateur du bien d'autrui
chargé de la «simple administration». Ce type d'administration étant empreint d'un souci
de protection des actifs, les pouvoirs de l'administrateur sont limités à des actes destinés
à conserver le bien ou à maintenir l'usage auquel il est normalement destiné.

Ainsi, l'administrateur chargé de la simple administration ne peut faire que des


placements présumés sûrs au sens de l'article 1339 du Code civil. Il est possible que,
compte tenu de la nature des biens composant la succession ou pour toute autre raison,
le testateur veuille étendre les pouvoirs du liquidateur. Si tel est le cas, son testament
doit donner au liquidateur des pouvoirs de pleine administration, lui permettant ainsi de
poser pratiquement tous les gestes se rapportant aux biens administrés et d'effectuer
tous les types de placement.

Comme le liquidateur est souvent choisi parmi les amis et la famille du défunt, il est de
pratique de ne pas leur imposer les devoirs de fructification et d'augmentation du
patrimoine.

L'aliénation des biens

Le Code civil restreint les pouvoirs du liquidateur d'aliéner (de disposer) les biens de la
succession. Ainsi, le Code civil édicte que le liquidateur peut disposer seul d'un bien
meuble susceptible de dépérir ou de se déprécier rapidement, ou simplement trop
dispendieux à conserver, mais qu'il ne peut cependant aliéner les autres biens de la
succession sans l'autorisation des héritiers ou, à défaut, sans celle du tribunal. Comme il
est souvent préférable que le liquidateur ait toute la latitude voulue en la matière, le
testament peut étendre ses pouvoirs en lui donnant expressément le pouvoir de
procéder seul à toute aliénation qu'il jugera nécessaire dans le cadre de la liquidation de
la succession.

Le partage des biens

En principe, le liquidateur n'est pas autorisé d'office par la loi à procéder lui-même au

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partage des biens de la succession entre les héritiers. Ces derniers peuvent cependant
lui demander de joindre une proposition de partage à sa reddition de compte. Ils peuvent
également lui demander de procéder lui-même au partage. Cependant, le testament
peut donner au liquidateur des pouvoirs étendus en la matière, incluant le pouvoir de
procéder seul à la composition, l'évaluation et à l'attribution des lots. Cette clause se
trouve généralement dans les testaments rédigés par des professionnels du droit.

(1) 4.3 — Désignation de bénéficiaire

Les modalités de désignation de bénéficiaire et les effets de pareille désignation seront


vus en traitant d'abord des produits d'assurance vie, ensuite des produits de rentes et
finalement des régimes de retraite et des régimes à imposition différée.

4.3.1 — Désignation de bénéficiaires en matière d'assurance vie


4.3.1.1 — Modalités de désignation de bénéficiaire en matière d'assurance vie
Le Code civil, aux articles 2445 à 2460 inclusivement, traite des modalités de
désignation de bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie, ainsi que des effets d'une telle
désignation. Nous vous invitons également à consulter les sections pertinentes du
module 3, «Assurance et gestion des risques».

L'article 2446 C.c.Q. prévoit qu'une désignation de bénéficiaire peut se faire dans la
police même ou dans un autre écrit revêtu, ou non, de la forme testamentaire. Il n'y a
donc pas de forme sacramentelle prévue pour la désignation d'un bénéficiaire. Cet écrit
doit cependant être notifié à l'assureur pour lui être opposable (art. 2452 C.c.Q.). À
défaut d'avoir été avisé, le paiement fait de bonne foi par l'assureur au dernier
bénéficiaire dont il avait connaissance le libérera de ses obligations (art. 2452 C.c.Q.).
Par contre, le bénéficiaire lésé pourra exercer des recours pour récupérer les sommes
reçues par le bénéficiaire qui avait été révoqué (et qui a donc reçu les sommes sans
droit).

Il faut savoir qu'une désignation de bénéficiaire d'une police d'assurance vie détenue
conjointement par deux titulaires (propriétaires) ne pourra se faire par testament
puisqu'elle requiert la signature des deux propriétaires. Cette particularité a également
pour effet de rendre impossible un changement de bénéficiaire à partir du moment où un
des deux titulaires devient inapte.

D'autre part, il faut mentionner que lorsque le conjoint est désigné comme bénéficiaire,
soit dans la police ou dans un écrit autre qu'un testament, cette désignation est
irrévocable, sauf stipulation contraire. Le conjoint dont il est question ici est le conjoint
légal (marié ou uni civilement) et non le conjoint «de fait». La désignation de toute autre
personne que le conjoint à titre de bénéficiaire est toujours révocable à moins d'une
stipulation contraire. Finalement, une désignation de bénéficiaire faite dans un testament
est toujours révocable, même si cette désignation est faite en faveur du conjoint.

Il est important de noter que toute désignation demeure révocable tant que l'assureur ne

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l'a pas reçue (art. 2451 C.c.Q.) et qu'au Québec, pour avoir accès à la valeur de rachat
de sa police d'assurance, le propriétaire n'a pas à obtenir l'autorisation du bénéficiaire
irrévocable, sauf si le contrat d'assurance le prévoit.

La désignation de bénéficiaire contenue dans un testament ne sera pas opposable à une


autre désignation faite postérieurement à la signature du testament. De plus, une
désignation de bénéficiaire faite par testament ne sera pas opposable à l'encontre d'une
désignation de bénéficiaire faite antérieurement à la signature du testament, à moins
que la désignation faite dans le testament ne mentionne la police d'assurance en cause,
ou que l'intention du testateur à cet égard ne soit évidente. En pratique, la plupart du
temps, la manière la plus simple et la plus sûre de procéder à une désignation de
bénéficiaire d'un produit d'assurance vie consiste à faire cette désignation dans la police
elle-même, ou subséquemment, dans un formulaire fourni par la compagnie
d'assurances en question.

Il est à noter que le principe de la représentation142 ne s'applique pas en matière


d'assurance. Lorsqu'un bénéficiaire prédécède l'assuré, le titulaire du contrat, s'il n'est
pas l'assuré, devient le bénéficiaire. Si l'assuré et le titulaire sont la même personne, la
prestation de décès est alors versée à la succession du titulaire. Il est toutefois possible
de désigner un bénéficiaire subrogé, soit une personne qui prend la place du bénéficiaire
lorsque ce dernier décède.

Également, si plusieurs bénéficiaires sont désignés pour un produit d'assurance vie en


parts égales sans qu'il n'y ait de mention de pourcentages et que plusieurs bénéficiaires
prédécèdent l'assuré, le produit d'assurance vie sera alors divisé entre les bénéficiaires
désignés survivants, à moins d'indication contraire. C'est ce qu'on appelle le principe de
l'accroissement en faveur des cobénéficiaires.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Si le titulaire du contrat voulait écarter cet accroissement, il pourrait procéder par une
désignation de bénéficiaires subrogés.

Qu'en est-il si plusieurs bénéficiaires sont désignés avec mention d'une répartition entre
eux selon des pourcentages (mêmes égaux) et que l'un de ces bénéficiaires prédécède
l'assuré?

Dans une telle situation, il n'y a pas accroissement aux cobénéficiaires survivants. La
part du bénéficiaire prédécédé reviendra au titulaire (ou à sa succession si le titulaire est
également l'assuré).

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Si le titulaire voulait qu'il y ait accroissement quand même, il faudrait qu'il le spécifie par

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une désignation de bénéficiaires subrogés.

De plus, si le titulaire et l'assuré sont deux personnes différentes et que le titulaire


décède avant l'assuré, les droits du titulaire seront transférés au titulaire subrogé, si le
titulaire en a désigné un, ou à défaut, ils feront partie de la succession du titulaire.

4.3.1.2 — Effets de la désignation de bénéficiaire en assurance vie


L'article 2455 du Code civil mentionne que la somme assurée payable à un bénéficiaire
ne fait pas partie de la succession de l'assuré. Il s'ensuit donc que dans le cas où une
personne décède sans avoir fait de testament, mais en ayant désigné un bénéficiaire du
produit de son assurance vie, ce bénéficiaire recevra le produit de la police alors que les
autres biens du défunt seront réglés suivant les règles de la succession ab intestat. De
même, si cette personne est décédée en ayant fait un testament, la personne désignée
bénéficiaire du produit d'assurance vie recevra ce produit d'assurance, lequel échappera
aux dispositions du testament.

Il est donc important, lors de l'analyse de la situation au décès, de toujours vérifier s'il
existe ou non des bénéficiaires des produits d'assurance vie et, dans l'affirmative, de
vérifier si cette désignation correspond bien aux volontés du titulaire ou de l'adhérent de
la police d'assurance en cause.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Par exemple, un individu rédige son testament et désire, aux termes de ce testament,
léguer la plus grande partie de ses biens à son conjoint survivant, mais voudrait que le
produit de la police d'assurance vie qu'il détient (et dont le produit est payable sans
incidences fiscales) soit transféré dans une fiducie permettant aux fiduciaires d'utiliser
les revenus (et au besoin le capital) pour les besoins d'instruction, d'éducation et de
soutien alimentaire de son enfant. Pour réaliser cette volonté, il est possible de prévoir la
création de la fiducie par testament et de diriger le produit de l'assurance dans la
succession qui remettra le montant à la fiducie143.

Il peut parfois s'avérer primordial que le produit d'assurance vie soit versé à un
bénéficiaire désigné pour ainsi éviter qu'il ne se trouve dans le patrimoine de la
succession et devienne le gage commun des créanciers du défunt (puisque le produit
d'assurance stipulé payable à un bénéficiaire désigné ne fait pas partie de la succession
de l'assuré). Il est donc nécessaire, dans le cadre de toute planification testamentaire,
de vérifier s'il existe un bénéficiaire du produit d'assurance vie et de s'interroger sur la
pertinence de cette désignation.

On peut résumer les dispositions qui précèdent de la façon suivante : la somme assurée
payable à un bénéficiaire ne fait pas partie de la succession de l'assuré (art. 2455
C.c.Q.). Donc, si le produit d'assurance vie est payable à un bénéficiaire désigné, tel
produit sera remis directement à ce bénéficiaire, sans égard aux stipulations du
testament ou à celles du Code civil (dans le cas où l'assuré est décédé sans testament).

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De plus, une telle disposition (la désignation d'un bénéficiaire) permettra de soustraire ce
produit d'assurance aux créanciers de la personne décédée puisque ce produit ne fait
pas partie de sa succession. Par contre, il deviendra saisissable par les créanciers du
bénéficiaire désigné.

Bien que certains jugements l'aient accepté, nous tenons à préciser qu'au Québec, il est
impossible de créer une fiducie par une désignation de bénéficiaire. Pour qu'une fiducie
testamentaire puisse être désignée comme bénéficiaire, il faut qu'elle ait été valablement
créée par testament144. Dans le même sens, dans le cas où un propriétaire assuré
désire que le produit d'assurance soit versé au bénéfice de son enfant mineur, il nous
semble à tout le moins risqué de tenter de nommer un administrateur indépendant dont
l'administration serait soustraite à l'administration du tuteur en vertu de l'article 210
C.c.Q. à moins que ce ne soit par testament.

Il faut également retenir que si le produit d'assurance est stipulé payable à la succession
de l'assuré, à ses ayants cause, héritiers, liquidateurs ou autres représentants légaux,
alors le produit d'assurance fera partie de la succession de l'assuré et n'aura pas pour
effet de soustraire ledit produit d'assurance aux créanciers de la personne assurée. La
dévolution de ce produit d'assurance s'opérera selon les règles prévues par le Code civil
(dans le cas d'une succession ab intestat) ou selon les termes du testament du défunt.

Par ailleurs, les dispositions du Code civil permettent également de protéger les droits
conférés par un contrat d'assurance vie (valeur de rachat et participations) lorsqu'une
désignation de bénéficiaire a été faite et que cette désignation correspond à certains
critères bien précis.

Ainsi, l'article 2457 C.c.Q. prévoit que, lorsque le bénéficiaire désigné de l'assurance est
le conjoint marié ou uni civilement, le descendant ou l'ascendant du titulaire de la police
ou de l'adhérent (lorsqu'il s'agit d'un contrat d'assurance collective), les droits conférés
par le contrat sont insaisissables tant que le bénéficiaire n'a pas touché la somme
assurée. Par ailleurs, l'article 2458 C.c.Q. mentionne que «[t]ant que la désignation à
titre irrévocable subsiste, les droits conférés par le contrat au titulaire, à l'adhérent et au
bénéficiaire sont insaisissables».

Donc, du vivant du titulaire ou de l'adhérent d'un contrat d'assurance vie, les droits
conférés par ce contrat pourront être protégés de la saisie des créanciers dudit titulaire
ou adhérent (en assurance collective) si le bénéficiaire désigné du produit d'assurance
vie est :

• le conjoint légal du titulaire ou de l'adhérent (que la désignation ait été faite à titre
révocable ou irrévocable);
• un ascendant du titulaire ou de l'adhérent (que cette désignation soit faite à titre
révocable ou irrévocable);
• un descendant du titulaire ou de l'adhérent (que cette désignation soit faite à titre
révocable ou irrévocable); et
• toute autre personne (à l'exception de celles mentionnées ci-dessus) à condition
que la désignation faite en faveur de cette personne soit irrévocable.

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Il est à noter qu'une désignation de bénéficiaire faite par testament n'a d'effet qu'au
décès du testateur à moins que l'assureur n'en ait été avisé. Par conséquent, les droits
conférés par un contrat dont le bénéficiaire n'a été désigné que par testament seront
saisissables même si la désignation a été faite en faveur d'une personne visée par
l'article 2457 C.c.Q.

Relativement à la désignation d'un conjoint légal à titre de bénéficiaire, il y a lieu de


préciser que c'est au moment où la désignation se fait que l'on évalue la qualité du
bénéficiaire145. et non au moment du décès de l'assuré. Par conséquent, la désignation
de bénéficiaire révocable faite en faveur du conjoint de fait, même si l'union de fait est
suivie d'un mariage ou d'une union civile, n'entraînera pas l'insaisissabilité des droits
conférés par le contrat. Comme il est fréquent qu'un mariage ou une union civile soit
précédé d'une période d'union de fait, il faudra porter une attention particulière au
moment où la désignation de bénéficiaire a été faite et valider cette information auprès
des compagnies d'assurance vie. Dans le doute, il serait de mise de procéder à une
nouvelle désignation de bénéficiaire.

Il est enfin utile de rappeler les dispositions du deuxième alinéa de l'article 2459 C.c.Q.
qui édicte que le divorce ou la nullité du mariage et la dissolution ou la nullité d'une union
civile rendent caduque (inopérante) toute désignation du conjoint à titre de bénéficiaire
ou de titulaire subrogé, que cette désignation ait été révocable ou irrévocable. Dans ces
cas, la révocation du conjoint à titre de bénéficiaire d'une assurance vie fait en sorte que
le produit de telle assurance deviendra payable à la succession du titulaire assuré, à
moins qu'un bénéficiaire subsidiaire ait déjà été prévu aux termes du contrat
d'assurance.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Le propriétaire d'un contrat qui est en situation d'insolvabilité ou de faillite non libérée et
qui est en voie de divorcer aura intérêt à procéder à la nomination d'un bénéficiaire
subrogé privilégié afin d'éviter la saisie des droits conférés par son contrat une fois que
son divorce aura été prononcé. Il pourrait également demander au juge prononçant son
divorce de maintenir la désignation de bénéficiaire en faveur de son conjoint.

Le fait que la qualité du bénéficiaire s'apprécie au moment où la désignation est signée


aura comme autres conséquences importantes, d'une part, qu'une désignation de
bénéficiaire faite en faveur du conjoint de fait avant le mariage ou l'union civile ne
bénéficiera pas de la révocation de désignation prévue à l'article 2459 C.c.Q. et, d'autre
part, qu'un changement de bénéficiaire fait par un conjoint marié ou uni civilement avant
le prononcé de son divorce, alors que l'ex-conjoint était désigné bénéficiaire irrévocable,
sera considéré comme nul et de nul effet.

Comme conséquence de l'application de l'article 2459 C.c.Q., si une personne mariée ou


unie civilement qui avait désigné son conjoint légal bénéficiaire d'une assurance prise
sur sa vie désirait, après son divorce ou la dissolution de son union civile, maintenir cet
avantage en faveur de la personne devenue son «ex-conjoint», il faudra procéder au

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moyen d'une nouvelle désignation de bénéficiaire faite en faveur de cet «ex-conjoint».

Par conséquent, dans l'exemple suivant, qui serait bénéficiaire?

Monsieur est propriétaire d'une assurance sur la vie de sa conjointe. Dans le contrat,
Monsieur est désigné comme bénéficiaire.

Le deuxième alinéa de l'article 2459 du Code civil du Québec stipule ce qui suit :
Le divorce ou la nullité du mariage et la dissolution ou la nullité d'une union civile rendent
caduques toute désignation du conjoint à titre de bénéficiaire ou de titulaire subrogé.

Qui serait alors bénéficiaire du contrat advenant un divorce ?

Réponse :

Il faut d'abord déterminer à quel conjoint se réfère l'article 2459, al. 2 C.c.Q. Dans les
règles relatives à l'assurance vie en droit civil, le lien s'établit toujours avec le titulaire
(propriétaire) du contrat. Ainsi, c'est au conjoint du titulaire que se réfère l'article 2459,
al. 2 C.c.Q. Donc, dans cet exemple, comme Monsieur ne peut être le conjoint de lui-
même, la disposition ne peut s'appliquer. Monsieur, à titre de titulaire, serait toujours le
bénéficiaire du contrat.

Il faut par ailleurs noter que la séparation de corps n'entraîne pas d'office la révocation
du conjoint à titre de bénéficiaire d'une assurance vie. Cependant, le tribunal peut, à sa
discrétion, opérer une telle révocation lors du prononcé du jugement de séparation de
corps.

Une autre situation entraîne la révocation automatique du bénéficiaire et du titulaire


subrogé. Il s'agit du cas de cession ou d'hypothèque d'un contrat d'assurance146. Si le
bénéficiaire est irrévocable, il faut alors obtenir son accord avant de procéder.

4.3.2 — Désignation de bénéficiaire en matière de rente


En plus des produits d'assurance vie, il faut souligner que certains types de placements
peuvent faire l'objet d'une désignation de bénéficiaire. Le deuxième alinéa de l'article
2393 du Code civil du Québec indique que «[l]es rentes viagères ou à terme, pratiquées
par les assureurs, sont assimilées à l'assurance sur la vie, mais elles demeurent aussi
régies par les dispositions du chapitre De la rente. Cependant, les règles [du chapitre de
l'assurance] sur l'insaisissabilité s'appliquent en priorité». De plus, le deuxième alinéa de
l'article 2379 C.c.Q. indique que «la désignation ou la révocation d'un crédirentier, au
titre de rentes pratiquées par les assureurs ou dans le cadre d'un régime de retraite, est
régie par les règles du contrat d'assurance relatives aux bénéficiaires et aux titulaires
subrogés, compte tenu des adaptations nécessaires»147. Le législateur, pour certaines
fins, assimile donc à l'assurance vie les rentes à terme ou les rentes viagères pratiquées
par les compagnies d'assurance vie, avec, comme conséquence, que les règles de
désignation de bénéficiaire établies pour l'assurance vie seront aussi applicables dans le
cas de rentes souscrites auprès de compagnies d'assurance vie. Nous vous référons
donc aux sections précédentes du présent module pour passer en revue ces règles. Il
est à noter que les fonds distincts ou les placements à terme offerts par les compagnies
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d'assurance sont des rentes différées à capital variable et sont par conséquent
également régis par ces articles du C.c.Q.

Par ailleurs, l'article 178 de la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne148
indique que les fonds constituant les rentes à terme fixe sont insaisissables entre les
mains de la société de fiducie comme s'il s'agissait de rentes à terme fixe pratiquées par
les assureurs.

De ce qui précède, on peut constater qu'il est possible, en cas de décès, de prévoir la
transmission de certains biens, tels les contrats d'assurance vie et certains types de
placements (rentes), par des moyens autres que la rédaction d'un testament, soit au
moyen de la désignation de bénéficiaire. Cette désignation, tant en matière d'assurance
vie que de rentes, aura pour effet d'exclure les sommes visées de la succession de
l'assuré et de rendre rapidement disponibles des liquidités au bénéficiaire lors de son
décès. Cette désignation sera également très utile dans les cas où on désire accorder
une certaine protection à ses biens à l'égard de créanciers éventuels.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Certaines personnes souhaitent que leur conjoint ou un proche ait rapidement accès à
certains montants d'argent à la suite de leur décès. Bien qu'il soit fréquent de proposer
un produit d'assurance-vie dans ces situations, il pourrait aussi être opportun de
proposer de remplacer un ou des placements traditionnels par un produit de rente à
capital fixe (placement à terme de compagnie d'assurance) ou à capital variable (fonds
distincts) sur lequel il est possible de faire une désignation de bénéficiaire. Par exemple,
un client pourrait remplacer un certificat de placement garanti de 5 000 $ par un produit
de placement à terme du même montant auprès d'une compagnie d'assurance et y
désigner son conjoint ou son enfant comme bénéficiaire en cas de décès. Ces liquidités
deviendront ainsi rapidement disponibles puisqu'elles seront versées directement au
bénéficiaire suivant le décès sans qu'il soit nécessaire d'attendre que l'inventaire de la
succession ait été dressé et que le liquidateur ait obtenu les autorisations fiscales
requises pour libérer les sommes.

4.3.3 — Désignation de bénéficiaire en matière de régimes de retraite (RPA)


Tout comme pour la rente et en vertu du deuxième alinéa de l'article 2379 C.c.Q.
mentionné à la section précédente, il est possible de désigner un bénéficiaire sur un
régime de retraite. Par contre, les différentes lois applicables aux régimes de retraite
accordent un droit prioritaire au conjoint. Nous vous invitons à consulter à cet effet le
module 7, «Retraite», en son chapitre 5.

4.3.4 — Désignation de bénéficiaire en matière de régimes enregistrés (REER,


FERR, CRI, FRV, CELI)
Mentionnons d'abord que c'est la Loi de l'impôt sur le revenu149 qui définit ce que sont
un «régime d'épargne-retraite» qui peut faire l'objet d'un enregistrement à titre de
«régime enregistré d'épargne-retraite»150 et un «arrangement admissible»151 qui peut
152
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être enregistré à titre de «compte d'épargne libre d'impôt»152. Ces définitions prévoient
essentiellement trois formes de «contrats» ou «d'arrangements» susceptibles d'être ainsi
enregistrés :

• un contrat de rente conclu entre un particulier et une société autorisée à exploiter


au Canada un commerce de rentes (rente REER ou rente CELI);
• un arrangement selon lequel un particulier verse, en fiducie153, à une société
autorisée à exploiter au Canada une entreprise consistant à offrir ses services au
public en tant que fiduciaire (fiducie REER ou fiducie CELI) un montant périodique
ou autre, à titre d'apport en vertu de la fiducie;
• un arrangement selon lequel un particulier verse un montant à titre de dépôt
auprès d'une banque ou d'une caisse de crédit (dépôt REER ou dépôt CELI).

Notons qu'aux fins de l'application de la L.I.R., les CRI et les FRV sont respectivement
des REER et des FERR.

Cependant, la loi fiscale ne définit pas ce que sont une rente, une fiducie et un dépôt, il
faut donc se référer aux lois applicables dans la province de résidence du particulier
pour déterminer les conditions de validité de ces contrats154.

Au Québec, les règles applicables aux différents contrats se trouvent dans le Code civil
du Québec. On y définit le contrat de rente155, la fiducie156 et le simple prêt157 qui est le
type de contrat qui régit la relation entre le déposant et l'institution financière lors d'un
dépôt bancaire.

De la même façon, lorsqu'il s'agit de déterminer s'il est possible de procéder à une
«désignation de bénéficiaire» ou de «titulaire subrogé» dans un REER, FERR ou CELI,
on doit se référer au droit applicable dans la province du rentier ou du titulaire. Au
Québec, les articles 2379 et 2445 C.c.Q. prévoient que les seuls contrats dans lesquels
il est possible de désigner un bénéficiaire ou un titulaire subrogé, sont les contrats
d'assurance, les contrats de rente et les régimes de retraite.

Il importe de noter que, dans ce contexte, le terme «régime de retraite» réfère


exclusivement aux «fonds de pension». En effet, les dispositions du Code civil, comme
celles de toute loi québécoise, doivent s'interpréter les unes par rapport aux autres158.
Or, au titre du patrimoine familial, le législateur distingue clairement les «régimes de
retraite» des «régimes d'épargne-retraite»159. Ainsi, dans le Code civil, un REER ou un
FERR est un «régime d'épargne-retraite» et non un «régime de retraite».

Les articles concernant la possibilité de désigner un bénéficiaire ou un titulaire subrogé


doivent être interprétés restrictivement puisqu'ils constituent une dérogation expresse
aux principes généraux prévus aux articles 653, 704 et 712 C.c.Q. Essentiellement,
l'article 653 C.c.Q. prévoit que la dévolution des biens au décès se fait selon les
dispositions du Code civil du Québec concernant les successions ab intestat à moins
que le défunt n'ait laissé des dispositions testamentaires à l'effet contraire. L'article 704
C.c.Q. définit le testament comme étant un acte juridique unilatéral, révocable et établi
dans l'une des formes prévues par la loi par lequel le testateur dispose, par libéralité, de
tout ou partie de ses biens, pour n'avoir effet qu'à son décès. Enfin, l'article 712 C.c.Q.

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prévoit qu'une personne ne peut tester que par testament notarié, olographe ou devant
témoins.

Il découle de ce qui précède qu'il ne sera possible de désigner validement un


bénéficiaire ou un titulaire subrogé d'un REER, d'un FERR ou d'un CELI au Québec que
si le contrat qui sous-tend ce véhicule fiscal est un contrat de rente.

Dans tous les autres types de contrats REER, FERR ou CELI, seule une mention
expresse au testament, généralement par le biais d'un legs à titre particulier des droits,
titres et intérêts du défunt dans ces régimes, permettra de s'assurer de rencontrer les
conditions d'un transfert libre d'impôt.

En terminant, il est important de mentionner que la majorité des provinces canadiennes


permettent la désignation d'un bénéficiaire dans un REER ou un FERR et que depuis
2009, la plupart, dont l'Ontario160 ont modifié leur législation afin de permettre la
désignation d'un bénéficiaire dans un arrangement CELI. Pour en faire autant au
Québec, il faudrait modifier le Code civil, ce qui, hélas, n'est pas une mince affaire!

4.3.5 — Insaisissabilité
Quant à l'insaisissabilité, les articles 2457 et 2458 C.c.Q. se lisent comme suit :
2457. Lorsque le bénéficiaire désigné de l'assurance est l'époux ou le conjoint uni
civilement, le descendant ou l'ascendant du titulaire ou de l'adhérent, les droits conférés
par le contrat sont insaisissables, tant que le bénéficiaire n'a pas touché la somme
assurée.

2458. La stipulation d'irrévocabilité lie le titulaire de la police, même si le bénéficiaire


désigné n'en a pas connaissance. Tant que la désignation à titre irrévocable subsiste, les
droits conférés par le contrat au titulaire, à l'adhérent et au bénéficiaire sont
insaisissables.

Conjugués à l'article 2393 C.c.Q. et à l'article 178 de la Loi sur les sociétés de fiducie et
les sociétés d'épargne161, ces deux articles établissent donc qu'il est possible de
procurer une protection contre les créanciers à des rentes à terme fixes ou viagères.

Il faut noter que cette protection est accordée que la rente soit enregistrée (REER) ou
non. En vertu de ces règles, ce n'est pas la qualification fiscale du véhicule de
placement (p. ex. REER) qui importe, mais le statut du véhicule juridique de placement,
soit la rente.

Ainsi, lorsque le souscripteur du REER (constitué d'un contrat de rente) a désigné un


bénéficiaire, les sommes accumulées dans ce REER seront payables à son décès à ce
bénéficiaire, soustrayant ainsi ce produit des dispositions du testament ou de la
succession légale, le cas échéant, et également de l'emprise de ses créanciers, puisque
les valeurs accumulées dans ce régime ne font pas partie de sa succession.

Il sera également possible de protéger les valeurs accumulées dans ce REER des
créanciers du souscripteur, du vivant de ce dernier, pourvu que le bénéficiaire désigné
du REER soit le conjoint légal (marié ou uni civilement) du souscripteur, ses ascendants,
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ses descendants ou toute autre personne si, dans ce dernier cas, cette personne est
désignée bénéficiaire irrévocable.

Cette protection sera opposable aux créanciers du souscripteur, que ce dernier soit en
faillite ou simplement en situation d'insolvabilité. Par contre, l'ARC ne pourra se faire
opposer cette insaisissabilité que si le titulaire est en faillite, puisqu'elle n'est pas
soumise au droit provincial relatif à l'insaisissabilité. Elle est par contre assujettie à ses
propres lois, dont la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

REER

Une protection encore plus étendue est accordée au REER. En effet, depuis 2008, les
modifications à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité162 portant sur la protection contre les
créanciers pour les REER et les FERR sont en vigueur. Cette protection s'étend aussi
aux régimes de participation différée aux bénéfices (RPDB). Ainsi :

• les REER, FERR et RPDB qui sont protégés d'une saisie par les créanciers au
titre d'une loi provinciale (y compris les contrats d'assurance et de rentes pour
lesquels on a désigné un bénéficiaire privilégié) continueront de l'être en cas de
faillite;
• les REER, FERR et RPDB qui ne sont pas protégés d'une saisie par les
créanciers au titre d'une loi provinciale le seront dorénavant, en cas de faillite, sous
réserve d'une récupération des cotisations versées au cours des 12 mois
précédant la faillite.

À noter que cette protection n'est offerte aux REER, FERR et RPDB que dans un
contexte de faillite, et ce, peu importe le véhicule de placement utilisé (rente, CPG, fonds
communs, etc.).

Toutefois, tout utile qu'elle soit, il faut souligner que la protection accordée, soit par une
désignation de bénéficiaire soit par les dispositions de la Loi sur la faillite et
l'insolvabilité, ne permettra pas de mettre ces biens à l'abri de tous les créanciers du
détenteur. À titre d'exemple, cette protection ne sera pas opposable à des créanciers
existants et elle souffrira de certaines limitations, notamment en ce qui concerne le
partage du patrimoine familial.

REEI

Contrairement aux REER, les REEI ne sont pas exempts de saisie par les créanciers en
cas de faillite. Le budget fédéral de 2019 a proposé de rendre ces sommes
insaisissables de la même façon et au même titre que les REER, sauf pour les
cotisations versées dans les 12 mois précédant la faillite.

(1) 4.4 — Dispositions testamentaires contenues dans un


contrat de mariage ou d'union civile
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Le Code civil stipule qu'il est possible, par contrat de mariage, de prévoir la transmission
de ses biens en cas de décès. En effet, l'article 1839 C.c.Q. permet de faire des
donations «à cause de mort» par contrat de mariage. Le Code civil ajoute que ces
donations peuvent être révocables ou irrévocables.

Dans la très grande majorité des cas rencontrés en pratique, lorsqu'un contrat de
mariage contient une telle disposition, il s'agit d'une donation à cause de mort mutuelle
et révocable de tous les biens composant la succession du premier décédé. Il s'agit-là
d'une disposition testamentaire simple, intégrée au contrat de mariage. Elle est aussi
connue sous le nom d'«institution contractuelle» ou de clause «au dernier vivant les
biens».

Il faut donc être prudent avant de conclure qu'une personne est décédée sans
testament. En effet, il se peut qu'on n'ait trouvé aucun testament proprement dit dans les
papiers de la personne décédée et qu'une recherche au Registre des dispositions
testamentaires et des mandats du Québec n'ait pas permis de retracer de testament
connu. Toutefois, si la personne décédée avait un contrat de mariage et que ce contrat
de mariage contenait une donation à cause de mort de tous les biens composant sa
succession, le défunt a, dans les faits, laissé une disposition testamentaire. Il est donc
toujours important de vérifier si la personne décédée avait un contrat de mariage et, le
cas échéant, d'en vérifier les dispositions avant de conclure que cette personne est
décédée sans testament, et d'appliquer en conséquence les règles de dévolution
prévues au Code civil pour la succession ab intestat.

Donation irrévocable
Il est peu fréquent de trouver une donation à cause de mort universelle et irrévocable
dans un contrat de mariage. Cependant, une donation à cause de mort irrévocable des
droits dans le patrimoine familial (et non pas des biens du patrimoine familial) faite au
conjoint survivant permet de s'assurer que nulle autre personne que le conjoint survivant
ne pourra exercer l'option sur le partage de la valeur du patrimoine familial à la suite du
décès de l'un des époux.

La loi assujettit la donation à cause de mort à des mesures de publicité.

Depuis la réforme du Code civil opérée en 1994, l'article 1824 du Code civil exige la
publication de l'acte de donation au registre des droits personnels et réels mobiliers
(RDPRM). Ce n'est pas une copie conforme du contrat qui est ici déposée, mais bien un
avis relatant seulement les éléments pertinents pour fins de publicité.

Donations entre vifs non exécutées


Il est relativement fréquent de trouver dans un contrat de mariage ou d'union civile, une
donation «entre vifs» de biens présents ou à venir. Il peut s'agir d'une donation de biens
meubles par un conjoint en faveur de l'autre par laquelle le conjoint donateur transfère
immédiatement la propriété de certains biens existants et s'engage par la suite à
acquérir d'autres biens jusqu'à concurrence d'une certaine valeur. On peut également
retrouver une donation d'une somme d'argent payable en tout temps pendant le mariage
ou, au plus tard, au décès.

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Ces donations sont généralement qualifiées de «donations entre vifs» et un testament


subséquent n'a pas pour effet de les révoquer. En conséquence, le liquidateur de la
succession du donateur devra nécessairement s'enquérir, au moment du décès, de
l'exécution ou non de ces donations. Le liquidateur aurait avantage à obtenir une
quittance — soit une reconnaissance de la bonne réception du bien ou de la somme
donnée — de la part du donataire. À défaut, le liquidateur devra acquitter le solde de la
donation à même les biens de la succession, le donataire devenant de ce fait un
créancier de la succession du défunt.

(1) 4.5 — Testament

4.5.1 — Capacité requise pour tester


En principe, toute personne peut, par testament, régler la dévolution de ses biens. Il faut
cependant qu'elle soit considérée apte à le faire par la loi.

En général, le mineur ne peut tester de ses biens. Cette règle souffre cependant de
certaines exceptions. Ainsi, quel que soit son âge, le mineur peut tester de biens de peu
de valeur, cette notion étant laissée à l'appréciation du tribunal, compte tenu de la
condition sociale du mineur. Le mineur simplement émancipé ne peut davantage
disposer de ses biens par testament, sous réserve de l'exception mentionnée ci-dessus.
Le mineur pleinement émancipé peut, quant à lui, disposer de ses biens par testament,
la pleine émancipation le rendant capable, comme le majeur, du plein exercice de ses
droits civils.

En ce qui concerne le majeur inapte soumis à un régime de tutelle, la validité du


testament qu'il pourrait faire après sa mise en tutelle est soumise à confirmation par le
tribunal (selon la situation et la nature des dispositions du testament). De son côté, le
majeur inapte soumis à un régime de curatelle ne peut faire de testament. Enfin, le
majeur pourvu d'un conseiller peut tester sans être assisté de ce conseiller.

4.5.2 — Formes de testament


Le Code civil reconnaît trois formes de testament :
1) le testament notarié;

2) le testament olographe;

3) le testament devant témoins.

1) Le testament notarié
Le testament notarié est reçu en minute par un notaire, assisté d'un témoin ou, en
certains cas, de deux témoins. L'original est toujours conservé au greffe du notaire et
une mention de son existence est inscrite aux Registres des dispositions testamentaires
et des mandats de la Chambre des notaires du Québec. Il ne peut donc être perdu ou
détruit.

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2) — Le testament olographe
Le testament olographe est entièrement écrit par le testateur et signé par lui, autrement
que par un moyen technique.

Il est possible de confier ce type de testament en dépôt à un notaire, qui inscrira


l'existence de l'acte de dépôt aux Registres des dispositions testamentaires et des
mandats de la Chambre des notaires du Québec, ou à un avocat, qui inscrira son
existence aux Registres des testaments et mandats du Barreau du Québec.

3) — Le testament devant témoins


Le testament devant témoins est écrit par le testateur ou par un tiers. Le testateur doit le
reconnaître comme sien, en présence de deux témoins qui signent également le
testament.

Lorsque ce testament est écrit par un tiers ou par un moyen technique, le testateur et les
témoins doivent parapher ou signer chaque page qui ne contient pas leur signature.

L'article 760 C.c.Q. prévoit ce qui suit :


Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les
autres dispositions du testament.

Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du
liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament, s'il agit
comme témoin.

Lorsqu'un testament porte la signature de témoins, il est préférable de vérifier que ces
derniers ne font pas partie des légataires.

Il est possible de confier la rédaction d'un testament à un avocat et ce testament prendra


la forme d'un testament devant témoins. Ainsi, l'avocat inscrira l'existence du testament
aux Registres des testaments et mandats du Barreau du Québec.

Il est également possible de confier ce type de testament en dépôt à un notaire, qui


inscrira l'existence de l'acte de dépôt aux Registres des dispositions testamentaires et
des mandats de la Chambre des notaires du Québec.

4.5.3 — Vérification des testaments faits sous la forme olographe ou devant


témoins
Au Québec, seul le testament notarié est dispensé de la formalité de vérification. En
effet, l'article 772 du Code civil du Québec prévoit que le testament olographe ou devant
témoins est vérifié, à la demande de tout intéressé, en la manière prescrite au Code de
procédure civile. La vérification du testament olographe ou devant témoins s'opère en
déposant une requête à cet effet à la Cour supérieure du district judiciaire où le testateur
avait son dernier domicile, ou à défaut de domicile au Québec, à la Cour supérieure du
district judiciaire où le testateur est décédé, ou encore, de celui où il a laissé des biens.

Dans le but de rendre plus expéditive la procédure de vérification, la loi permet

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dorénavant au notaire d'agir en lieu et place du greffier de la Cour supérieure pour la


quasi-totalité des procédures visant la vérification d'un testament. Il est donc possible
pour le justiciable de choisir entre la procédure conventionnelle (soit une requête
préparée par un notaire ou un avocat et devant être présentée au greffier de la Cour
supérieure) et une nouvelle procédure par laquelle le notaire, en tant qu'officier public,
se substitue au greffier. Le gouvernement du Québec estime que cette nouvelle façon de
faire devrait désencombrer l'appareil judiciaire en assurant un plus grand nombre de
«points de services» facilement accessibles au justiciable.

Le testament, une fois vérifié, est déposé au greffe de la Cour. Celle-ci peut ensuite en
délivrer des copies certifiées. L'effet de la procédure de vérification est de confirmer que
le document déposé émane bien de la personne décédée, et satisfait aux exigences de
formes prévues par la loi.

4.5.3.1 — Testaments non conformes (art. 713 et 714 C.c.Q.)


L'article 713 stipule que :
Les formalités auxquelles les divers testaments sont assujettis doivent être observées, à
peine de nullité.

Néanmoins, le testament fait sous une forme donnée et qui ne satisfait pas aux
exigences de cette forme vaut comme testament fait sous une autre forme, s'il en
respecte les conditions de validité.

Il pourrait donc être possible par exemple qu'un testament notarié, qui ne serait pas
reconnu comme tel (prenons le cas d'un notaire qui aurait procédé à la rédaction d'un
testament même en étant radié), puisse être reconnu comme testament devant témoins.
La signature du notaire serait ici considérée comme celle d'un témoin.

L'article 714 vient renforcer cette possibilité de reconnaître un testament qui, à première
vue, ne respecte pas les conditions de forme, en édictant :
Le testament olographe ou devant témoins qui ne satisfait pas pleinement aux conditions
requises par sa forme vaut néanmoins s'il y satisfait pour l'essentiel et s'il contient de
façon certaine et non équivoque les dernières volontés du défunt.

Les tribunaux ont fait appel à maintes reprises à cet article dans le but de reconnaître les
dernières volontés d'un défunt, même si le document contenant ces dernières volontés
s'apparentait plus ou moins à un testament respectant les formes prescrites par le droit
civil québécois.

Ainsi, un testament rédigé à la main sur un formulaire préimprimé a été accepté pour
vérification, car il fut jugé que le testament pouvait être considéré comme olographe, car
il comportait la signature de la testatrice et toutes les donations avaient été rédigées de
sa main163 .

Quoique l'article 714 accorde une certaine latitude aux tribunaux et comme chaque
situation est jugée à son mérite, il vaut mieux respecter en tout point les conditions de
forme requises pour la validité d'un testament.

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4.5.3.2 — Testament reçu à l'étranger


Avec la grande mobilité des personnes, il est pertinent de savoir si un testament rédigé à
l'étranger peut être reconnu valide au Québec.

À cet effet, les règles de droit international privé qui s'appliquent, ont comme objectif
principal, la validation de l'acte.

L'article 3109 du Code civil, démontre bien cette intention. Il stipule que la validité d'un
testament peut, indifféremment, être rattachée :

• Au lieu où il est fait


• À la loi applicable au fond du testament
• Au domicile ou à la nationalité du testateur, soit au moment de la disposition, soit
au moment du décès.

Face à un tel testament, il est préférable de consulter un juriste, car il devra


probablement être vérifié, comme ce serait le cas pour un testament olographe ou
devant témoins.

4.5.4 — Diverses espèces de legs


On appelle communément «don» ou «donation» un acte par lequel une personne remet
à une autre personne des biens de son patrimoine, sans aucune contrepartie.
Lorsqu'une pareille disposition est faite dans un testament (donc pour avoir effet au
décès du «donateur»), on parle alors d'un «legs».

Le Code civil reconnaît trois types de legs pouvant être contenus dans un testament,
soit :
1) le legs universel;

2) le legs à titre universel;

3) le legs à titre particulier.

1) — Le legs universel (Art. 732 C.c.Q.)


Le legs universel est celui qui concerne la totalité des biens d'une personne. Pour qu'un
legs soit qualifié d'«universel», il n'est cependant pas nécessaire que le légataire reçoive
effectivement tous les biens de la succession, mais il doit avoir vocation à les recevoir,
dans le cas du prédécès des légataires particuliers, par exemple. Ainsi, la disposition
suivante : «Je lègue l'universalité de mes biens meubles et immeubles à mon frère
Jean» est un legs universel, Jean ayant droit de recevoir, dès l'instant du décès du
testateur, tous les biens de sa succession. Prenons par ailleurs les dispositions
suivantes : «Je lègue ma résidence secondaire située à Mont-Tremblant à mon frère
Jean, et le résidu de tous mes biens meubles et immeubles à ma conjointe Monique.»
Dans ce dernier cas, Monique n'a pas droit, au décès du testateur, à tous ses biens (la
résidence secondaire étant attribuée à Jean), mais elle aurait cependant vocation à
recueillir cette résidence si Jean devait prédécéder le testateur, ou encore s'il renonçait à
ce legs. On parlera, dans ce dernier cas, d'un legs universel résiduaire, en ce sens que

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Monique héritera de tous les biens qui ne sont pas transmis spécifiquement à d'autres
légataires et aura également vocation à recueillir les biens spécifiquement transmis dans
le cas où le légataire à qui tel bien était destiné prédécéderait le testateur ou renoncerait
à le recevoir.

D'autre part, le legs universel peut être fait à plusieurs personnes conjointement. Ainsi,
la disposition suivante : «Je lègue l'universalité de mes biens meubles et immeubles, en
parts égales, à mes enfants au premier degré, Jean, Benoît et Guy, sans qu'il y ait lieu à
représentation au cas où l'un ou l'autre de mesdits enfants décède avant moi ou en
même temps que moi.» Le testateur a ainsi prévu que l'ensemble des biens de sa
succession se diviserait en parts égales entre trois légataires, ses enfants au premier
degré. Chacun d'eux étant un légataire universel, il a un droit potentiel de recevoir la
totalité des biens de la succession. Ainsi, si l'un ou l'autre des enfants au premier degré
du testateur ne lui avait pas survécu, la part qu'il aurait reçue dans sa succession serait,
par le simple fait de la loi, réattribuée aux deux autres enfants au premier degré du
testateur. De même, si deux des trois enfants du testateur l'avaient prédécédé, le seul
enfant au premier degré survivant serait admissible à recevoir la totalité de la succession
du testateur.

Il est à noter que la représentation ne s'appliquerait pas ici en cas de prédécès de l'un
ou l'autre des enfants du testateur, ce dernier l'ayant spécifiquement exclue.

2) — Le legs à titre universel (Art. 733 C.c.Q.)


Le legs à titre universel est celui qui donne droit à son bénéficiaire de recevoir :

• la propriété d'une quote-part de la succession;


• un démembrement du droit de propriété (usufruit ou nu-propriété) sur la totalité ou
sur une quote-part de la succession;
• la propriété ou un démembrement de ce droit sur la totalité ou sur une quote-part
de l'universalité des immeubles ou des meubles, des biens propres, communs ou
acquêts, ou des biens corporels ou incorporels.

Une illustration typique d'un legs à titre universel est la disposition suivante : «Je lègue
soixante-dix pour cent (70 %) de tous les biens composant ma succession à mon frère
Jean et je lègue trente pour cent (30 %) desdits biens à ma sœur Monique.» Par cette
disposition, le testateur a attribué à chacun de son frère et de sa sœur une quote-part de
sa succession. Ainsi, Jean recevra des biens de la succession du testateur représentant
70 % de la valeur totale de sa succession, alors que Monique recevra également des
biens équivalant à 30 % de cette valeur. Il faut noter que cette disposition, même si elle
attribue 100 % de la succession du testateur entre deux personnes, confère à chacun un
droit limité au pourcentage qui lui est destiné. Ainsi, dans le cas du prédécès de
Monique, Jean n'a pas droit de recueillir le 30 % qui aurait autrement été destiné à
Monique. À défaut d'une disposition de rechange dans le testament, la part n'ayant pu
être dévolue à Monique sera remise aux héritiers légaux du testateur (ses héritiers ab
intestat).

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ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Pour éviter une telle situation, le testament devrait prévoir une disposition de rechange
attribuant la quote-part destinée à chacun des légataires à titre universel à d'autres
personnes, advenant le prédécès de ce dernier.

Ainsi, reprenons l'exemple précédent en y ajoutant des dispositions différentes :


Exemple 2-8
«Je lègue soixante-dix pour cent (70 %) de tous les biens composant ma succession à
mon frère Jean et je lègue trente pour cent (30 %) desdits biens à ma sœur Monique.

Au cas où mon frère Jean décéderait avant moi, en même temps que moi ou dans les
trente (30) jours suivant mon propre décès, alors je lègue le pourcentage de l'ensemble
de mes biens lui étant attribué à ma sœur Monique.

D'autre part, au cas où ma sœur Monique décéderait avant moi, en même temps que
moi ou dans les trente (30) jours suivant mon propre décès, alors je lègue la part de
l'ensemble de mes biens lui étant attribuée à mon frère Jean.»

Ces dispositions de rechange permettraient donc à Jean d'hériter de la part de Monique


au cas où cette dernière ne pourrait la recevoir et inversement à Monique d'hériter de la
part de Jean au cas où ce dernier ne pourrait la recevoir.

3) — Le legs à titre particulier (Art. 734 C.c.Q.)


Tout legs qui n'est ni universel ni à titre universel est à titre particulier. Nous trouvons ici
une définition par la négative, puisqu'il faut se référer aux définitions d'un legs universel
et d'un legs à titre universel pour comprendre la portée du legs à titre particulier. En fait,
il est pratiquement impossible de bien définir ce qu'est un legs à titre particulier étant
donné les très grandes possibilités de ce type de legs. En effet, le legs à titre particulier
peut porter sur un bien déterminé, sur un ensemble de biens, une universalité de biens
ou une universalité d'actif et de passif. Retenons cependant que le légataire à titre
particulier a un droit limité à la chose ou à l'ensemble de choses léguées par le
testament.

Exemples de legs à titre particuliers

• Je lègue mon chalet à mon fils;


• Je lègue tous mes REER à mon conjoint;
• Je lègue mon immeuble locatif situé à Gaspé à mes trois sœurs.

Dettes reliées aux biens légués à titre particulier


Il est important de noter que le légataire à titre particulier n'est pas considéré comme un
héritier et, de ce fait, n'est pas tenu aux dettes du défunt, même celles ayant un rapport
avec le bien légué à titre particulier. Le légataire particulier est considéré comme un
créancier de la succession ayant droit de recevoir strictement l'objet de son legs. Ainsi,
les dettes du défunt (même celles rattachées au bien légué au légataire à titre

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particulier) devront être supportées par les légataires universels ou à titre universel selon
le cas, lesquels sont des héritiers et, en tant que tels, tenus aux dettes du défunt, à
moins que les autres biens de la succession ne suffisent pas à payer les dettes.
Toutefois, il est possible d'obliger le légataire particulier à assumer les dettes rattachées
au bien qui lui est légué (tel le solde d'un prêt ayant servi à acheter ou améliorer un
immeuble) ou les impôts sur les revenus générés par la disposition réputée d'un bien en
immobilisations) si le testateur en fait une condition rattachée au legs particulier. À
défaut d'une telle condition, le légataire particulier pourra revendiquer le bien, laissant le
soin aux légataires universels ou à titre universel, selon le cas, d'acquitter les dettes du
défunt se rapportant audit bien.
Exemple 2-9.1
Prenons la disposition suivante contenue dans le testament de Paul : «Je lègue, à titre
de legs particulier, mon immeuble à revenus situé sur la rue Berri à Montréal, à mon
frère Jean et le résidu de tous mes biens meubles et immeubles à ma conjointe
Monique.» Jean est un légataire à titre particulier ayant droit à l'immeuble de la rue Berri,
alors que Monique hérite du résidu des biens de la succession. Supposons que
l'immeuble de la rue Berri est affecté d'une dette garantie par hypothèque, sur laquelle
un solde de 60 000 $ demeure impayé lors du décès de Paul et qu'aucune assurance
vie n'assure le paiement du solde de cette dette à son décès. Jean, légataire à titre
particulier, est un créancier de la succession ayant droit de revendiquer la possession du
bien (l'immeuble à revenus de la rue Berri) mais n'a pas à assumer les dettes de Paul,
même celles ayant un rapport avec le bien qui lui est légué. C'est donc Monique, la
conjointe de Paul (et légataire universelle résiduaire) qui devra en principe assumer ou
rembourser la dette hypothécaire. Il en sera de même des impôts qu'une telle disposition
testamentaire pourrait entraîner, Paul étant, en pareil cas, réputé avoir disposé dudit
immeuble pour une contrepartie égale à sa juste valeur marchande au moment de son
décès, ce qui pourrait résulter en un gain en capital, ainsi qu'une récupération
d'amortissement, le cas échéant.

Ces dettes fiscales sont des dettes personnelles de Paul et devront également être
assumées par Monique.

Si l'intention réelle de Paul était de léguer l'immeuble à revenus à son frère Jean en
faisant en sorte que ce dernier assume le solde de la dette garantie par hypothèque sur
ledit immeuble, ainsi que les impôts sur le revenu pouvant être générés par le legs fait
en sa faveur, il faudrait que le legs fait à Jean soit assorti d'une condition l'obligeant à
supporter de telles dettes. Faute par Jean de respecter une telle condition (d'assumer
les dettes rattachées au bien), le legs fait en sa faveur deviendra donc caduc et Monique
recueillera alors ledit immeuble.

4.5.5 — Autres éléments d'un testament et leur utilité


Les autres clauses généralement contenues dans les testaments seront maintenant
traitées de manière succincte.

Clause de révocation
La clause de révocation énonce de façon expresse la révocation de toutes dispositions
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testamentaires antérieures. L'on trouvera une telle clause dans un testament lorsque
toutes les dispositions de ce dernier remplacent celles de tout testament existant.

Il faut souligner que, dans le cas où il s'agirait d'un simple amendement à un testament
antérieur (ce qu'on appelle parfois «codicille», même si cette expression est disparue du
Code civil), on n'utilisera pas une clause de révocation générale puisque les dispositions
du testament original, lesquelles ne sont pas incompatibles avec celles de
l'amendement, continueront d'exister. En ce cas, on prendra soin de ne révoquer que les
dispositions du testament original qui ne sont pas compatibles avec les dispositions de
l'amendement.

Dispositions funéraires
Une clause concernant les dispositions funéraires peut être insérée au testament.
Notons cependant que l'article 42 C.c.Q. permet à une personne de régler ses
funérailles et de décider du mode de disposition de son corps par un écrit autre qu'un
testament, ce qui est beaucoup plus pratique.

Clause de «biens propres»


La clause de biens propres insérée au testament vise à faire en sorte que les biens de la
succession transmis à un légataire marié, ainsi que les revenus que ces biens pourront
produire lui demeurent propres, les excluant donc de tout partage ultérieur pouvant
survenir lors de la dissolution de son régime matrimonial (telle dissolution pouvant
survenir, entre autres, à la suite d'un divorce). Rappelons notamment que, si un légataire
est marié sous le régime de la société d'acquêts, le capital reçu en héritage demeure
propre à ce légataire, mais les fruits et revenus accumulés sur ce capital seront des
acquêts de ce légataire (sauf si le testament les déclare propres au légataire). De
même, si le légataire est marié sous le régime de la communauté de biens, tout bien
meuble acquis par succession tombe dans le patrimoine commun; en ce qui concerne
les immeubles, ils seront tantôt considérés comme biens propres, tantôt comme biens
communs. La clause de biens propres permet donc de protéger les revenus accumulés
sur le capital hérité, ou le capital lui-même, à l'égard des légataires mariés sous un
régime matrimonial à masse partageable.

Insaisissabilité des legs


Le Code de procédure civile déclare insaisissables les biens donnés ou légués sous
condition d'insaisissabilité, ainsi que les sommes et pensions données ou léguées à titre
d'aliments. Cependant, la protection ainsi accordée n'est pas totale. En effet, le Code de
procédure civile mentionne que les sommes données ou léguées sous condition
d'insaisissabilité peuvent être saisies par les créanciers postérieurs à la donation ou à
l'ouverture du legs, avec la permission du juge et pour la portion qu'il détermine.
Néanmoins, l'insertion au testament d'une clause de ce type protégera davantage le
capital légué aux bénéficiaires. Toutefois, cette insaisissabilité doit être justifiée et limitée
dans le temps.

Mentionnons de plus que le légataire qui, à la suite du décès du testateur, voudrait se


prévaloir de la stipulation d'insaisissabilité contenue au testament de ce dernier, devra

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faire publier cette stipulation d'insaisissabilité pour la rendre opposable aux tiers. À
l'égard de tout immeuble légué, la stipulation d'insaisissabilité devra être publiée au
bureau de la circonscription foncière de la division d'enregistrement où est situé
l'immeuble concerné. À l'égard de tout autre bien légué, la stipulation d'insaisissabilité
devra être publiée au registre des droits personnels et réels mobiliers.

Nomination d'un tuteur au mineur


Depuis la réforme du Code civil, les parents peuvent, par testament, désigner un tuteur à
leur enfant mineur. Ils sont ainsi en mesure de choisir l'identité de la personne qui les
remplacera dans l'exercice de l'autorité parentale à l'égard de leur enfant mineur s'ils
devaient décéder tous les deux.

La clause testamentaire de l'administration prolongée


Depuis longtemps, on retrouve dans les testaments des clauses dites «d'administration
prolongée» au moyen desquelles le liquidateur se voit confier le mandat de gérer les
biens légués à certains légataires pour une période déterminée.

Le testateur peut prévoir que les biens légués à des personnes mineures ou inaptes au
moment de son décès seront administrés par la personne nommée comme liquidateur
par le testament. Dans le cas du légataire mineur, les biens ainsi légués et administrés
par le liquidateur sont soustraits à l'administration du tuteur. De plus, le testateur peut
prévoir que lesdits biens seront remis au bénéficiaire à un âge plus avancé que celui de
la majorité. Lorsque le testament attribue au liquidateur des pouvoirs suffisants à cet
effet, le liquidateur aura plus de latitude dans l'administration desdits biens que n'en
aurait eue le tuteur.

Exemple : Mon liquidateur aura l'administration de tous les biens légués par les
présentes à des légataires mineurs et il remettra à chacun de mes légataires leur part
respective à leur majorité.

Dans le cas du majeur inapte, le testament peut également prévoir que les biens seront
sous l'administration de la personne nommée comme liquidateur jusqu'à la cessation de
l'inaptitude, le cas échéant.

Nous ne parlons pas ici de fiducie, mais bien d'une administration prolongée du
liquidateur. Cette avenue est souvent préconisée pour son apparente simplicité et dans
les situations où, pour des raisons personnelles, la fiducie n'est pas retenue. Son
apparente simplicité? Rien n'est plus faux.

Bien que les auteurs et les tribunaux se soient prononcés à plusieurs reprises sur la
validité de telles clauses, il n'en demeure pas moins que ce régime d'administration
présente encore certaines incertitudes.

Sans entrer dans le détail des discussions doctrinales et jurisprudentielles, mentionnons


qu'il semble effectivement possible de confier au liquidateur ou à un administrateur
l'administration prolongée des biens légués à des légataires mineurs et majeurs en
utilisant un véhicule juridique différent de la fiducie.

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Cependant, il faut savoir que ce régime d'administration prolongée ne bénéficie pas d'un
encadrement aussi précis que la fiducie. En effet, la création, le fonctionnement et
l'extinction de ce mécanisme ne sont pas prévus au code. De là l'importance d'une
qualité de rédaction accrue de ces clauses, puisqu'elles se doivent d'être beaucoup plus
précises et détaillées que celle ci-haut mentionnée.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

L'administration prolongée pourrait être notamment envisagée dans les situations


suivantes :

• l'administration prolongée est pour une période relativement courte, soit deux,
trois ou quatre ans, ou ne doit pas se prolonger au-delà de la majorité du
bénéficiaire;
• la valeur du patrimoine à administrer est peu importante (cette notion est très
subjective);
• les modalités de la gestion des biens au bénéfice du légataire sont minimales, le
testateur voulant surtout s'assurer de la remise des biens à un âge précis ou aux
termes d'un certain (court) délai.

Legs à un organisme de bienfaisance


En raison de l'incertitude quant à la durée de la retraite, ce n'est souvent qu'au moment
de leur décès que les personnes sont en mesure de faire un don important à un
organisme de bienfaisance enregistré qui soutient une cause qui leur tient à cœur.

Le legs testamentaire constitue une solution particulièrement souple de faire un don


après le décès, étant donné qu'il est presque toujours possible d'annuler le don en
modifiant simplement son testament. En effet, certaines maladies dégénératives, comme
la maladie d'Alzheimer, peuvent amener une personne à devenir inapte et ainsi proscrire
tout changement à son testament. Il est aussi possible de donner un pourcentage de la
succession au lieu d'indiquer un montant d'argent précis.

Toutefois, le legs classique comporte des inconvénients. La part des biens que les
ayants droit pourront donner en fin de compte à l'organisme de bienfaisance choisi
pourrait bien être diminuée, voire totalement absorbée, par les créanciers, les frais de
gestion de la succession et éventuellement les impôts, qui n'auront pas été réduits
autrement ou annulés grâce au crédit d'impôts pour dons de bienfaisance pouvant
s'appliquer à la déclaration finale (le legs à un organisme de bienfaisance demeure un
legs à titre particulier). Il est aussi possible que les ayants droit ne puissent bénéficier
que d'une partie du crédit d'impôt associé au don si les revenus de l'année du décès et
ceux de l'année précédente (et ceux de la succession l'année où elle fait le don et
l'année précédente à partir de 2016) ne sont pas suffisamment élevés pour permettre
d'obtenir un crédit d'impôt sur l'ensemble des dons. Cela peut facilement se produire si
le décès survient au début de l'année, par exemple. En fait, des limites s'appliquent au
montant du revenu admissible au calcul du crédit d'impôt pour dons de bienfaisance,

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aussi bien au décès que du vivant du contribuable. Pour en savoir davantage sur les
règles fiscales relatives aux dons de bienfaisance, veuillez consulter les chapitres 9 et
13 du module 5, Fiscalité.

ÉLÉMENT DE PLANIFICATION

Si l'intention est de faire un legs à un organisme de bienfaisance, voici quelques


conseils :

• Identifier correctement la dénomination sociale de l'organisme, car il est fréquent


que plusieurs organismes aient des dénominations presque identiques.
• S'assurer que l'organisme est enregistré auprès de l'ARC et faire de cet
enregistrement une exigence pour recevoir le legs.
• Prévoir un deuxième organisme en sous-ordre au cas où le premier aurait cessé
d'exister au moment du décès ou aurait perdu son enregistrement au moment du
don.
• Pour éviter que les créanciers ou les frais amènent la réduction ou l'élimination du
legs, envisager l'utilisation de l'assurance vie. Lorsqu'une police d'assurance vie
comporte un bénéficiaire désigné, le capital-décès ne fait pas partie de la
succession.
• S'il s'agit d'un bien particulier, tel un chalet, ne pas oublier de modifier le
testament si le bien est vendu du vivant.
• Si l'intention est de faire un don assez important pour qu'il soit affecté à un usage
particulier, communiquer avec l'organisme afin de s'assurer au préalable qu'il peut
accepter un tel don.

Chapitre 5 — Fiducies

L'article 1260 C.c.Q. définit la fiducie comme résultant d'un acte par lequel une
personne, le constituant, transfère de son patrimoine à un autre patrimoine qu'il
constitue, des biens qu'il affecte à une fin particulière et qu'un fiduciaire s'oblige, par le
fait de son acceptation, à détenir et à administrer.

Ainsi, quatre éléments essentiels sont requis pour la création d'une fiducie :
1) la création d'un patrimoine;

2) le transfert d'un bien;

3) la détention par un fiduciaire; et

4) l'affectation à une fin particulière des biens en fiducie.

Les trois intervenants suivants participent à la création d'une fiducie :

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• le constituant, c'est-à-dire la personne qui transfère des biens dans le


patrimoine fiduciaire. Habituellement, un lingot d'or ou d'argent est transféré par le
constituant afin de concrétiser ce transfert de bien servant à créer la fiducie. Il est
préférable que le constituant soit un proche de la famille. Cependant, dans un
contexte de gel successoral, il est préférable que l'auteur du gel n'agisse pas à titre
de constituant afin d'éviter l'application des règles d'attribution;
• le fiduciaire, chaque fiduciaire est soit une personne physique pleinement
capable d'exercer ses droits civils, soit une personne morale autorisée par la loi.
Les personnes morales autorisées à agir à titre de fiduciaires sont généralement
les sociétés constituées en vertu de la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés
d'épargne (sociétés de fiducie, trusts corporatifs). Le fiduciaire a la maîtrise et
l'administration exclusive du patrimoine fiduciaire et agit à titre d'administrateur du
bien d'autrui chargé de la pleine administration;
• le bénéficiaire, c'est-à-dire la personne qui a droit aux fruits et revenus ou au
capital de la fiducie ou aux deux. Sa part est fixée par le constituant ou est laissée
à la discrétion du fiduciaire. Cette discrétion accordée au fiduciaire s'appelle
«faculté d'élire». À cet effet, le Code civil, à son article 1282, prévoit que : «Le
constituant peut se réserver ou conférer au fiduciaire ou à un tiers la faculté d'élire
les bénéficiaires ou de déterminer leur part.» Notez que le bénéficiaire n'a pas à
être déterminé au moment de la création de la fiducie, mais il doit être
déterminable. Exemple de bénéficiaire déterminé : Ma conjointe, Marie, mes
enfants, Pierre et Paul. Exemple de bénéficiaires déterminables : Mes enfants,
même ceux à naître, les enfants de mes enfants, le conjoint de mes enfants.

Bien qu'une même personne puisse cumuler plus d'un rôle, le Code civil exige qu'au
moins un fiduciaire soit «neutre», cela sous-tend qu'au moins un des fiduciaires n'est ni
le constituant, ni un des bénéficiaires de la fiducie. Cependant, le constituant ou un
bénéficiaire peuvent être fiduciaires, mais ils doivent agir conjointement avec un
fiduciaire qui n'est ni l'un ni l'autre164.

Aucun de ces intervenants n'a de droit de propriété sur les biens détenus en fiducie. En
effet, la fiducie est un patrimoine d'affectation autonome et distinct de celui de ses
intervenants165.

(1) 5.1 — Fiducie, patrimoine d'affectation

Jusqu'à l'adoption du nouveau Code civil, l'intégration du concept de fiducie à nos


principes de droit civil n'était pas toujours chose aisée. L'un des principaux «obstacles»
rencontrés était de déterminer la nature du droit du fiduciaire sur le patrimoine qu'il était
chargé d'administrer. La fiducie étant créée par le fait qu'une personne (le constituant) se
dessaisisse de certains biens qu'elle transfère à une autre personne (le fiduciaire) pour
être administrés par cette dernière au profit d'une personne (le bénéficiaire), on se
questionnait à savoir qui détenait le droit de propriété sur les biens transférés.
Certainement pas le constituant qui s'en était dessaisi; non plus que le bénéficiaire qui
n'exerçait aucun contrôle réel sur les biens en fiducie. Quant au fiduciaire, bien qu'ayant
le contrôle effectif du patrimoine en fiducie, il ne pouvait en disposer que conformément

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aux directives données par le document constituant la fiducie, ce qui était loin de
correspondre à une définition parfaite du droit de propriété. La jurisprudence a donc été
forcée d'élaborer un concept à partir duquel le fiduciaire était considéré détenir un droit
de propriété sui generis sur les biens en fiducie, sorte de droit de propriété tronqué,
lequel réconciliait tant bien que mal le fonctionnement d'une institution inspirée de la
common law aux notions civilistes du droit québécois.

Ainsi, lors de l'adoption du nouveau Code civil, dans un souci de rendre le concept de
fiducie plus flexible et plus efficace, bref, mieux adapté aux besoins modernes, et
voulant régler une fois pour toutes la question de la propriété des biens en fiducie, le
législateur québécois a codifié la thèse doctrinale du «patrimoine d'affectation».

Ce concept renverse complètement les bases de notre droit civil en matière


patrimoniale. En effet, selon la conception civiliste traditionnelle, un patrimoine ne peut
exister de façon autonome; il doit être rattaché à l'homme. À l'inverse, le concept du
patrimoine d'affectation, qui provient en partie du droit allemand, reconnaît qu'un
patrimoine peut exister sans relation avec un propriétaire. En vertu de ce concept, ce
patrimoine a une existence autonome, puisque c'est l'utilisation et non la propriété d'un
bien qui définit son régime juridique. Ainsi, un individu peut détacher certains biens de
son propre patrimoine pour les affecter à une fin particulière, sans qu'il soit nécessaire
de relier ce patrimoine à un propriétaire.

Selon le nouveau Code civil, les biens transférés en fiducie forment un patrimoine
autonome et distinct sur lequel ni le constituant, ni le fiduciaire, ni le bénéficiaire ne
détiennent de droits réels. Le fiduciaire jouit, quant aux biens en fiducie, des pouvoirs
d'un administrateur du bien d'autrui chargé de la «pleine administration», ce qui lui
confère tous les pouvoirs nécessaires pour réaliser l'affectation des biens composant le
patrimoine fiduciaire. L'article 1260 C.c.Q. résume ce concept :
La fiducie résulte d'un acte par lequel une personne, le constituant, transfère de son
patrimoine à un autre patrimoine qu'il constitue, des biens qu'il affecte à une fin
particulière et qu'un fiduciaire s'oblige, par le fait de son acceptation, à détenir et à
administrer.

5.1.1 — Principales règles de fonctionnement d'une fiducie


Il existe quelques règles importantes en matière de fiducie. Ces règles concernent :
1) les ordres de bénéficiaires d'une fiducie;

2) l'ouverture du droit d'un bénéficiaire d'une fiducie;

3) les modifications pouvant être apportées à une fiducie.

1) — Les ordres de bénéficiaires d'une fiducie


L'article 1271 C.c.Q. mentionne que «La fiducie personnelle constituée au bénéfice de
plusieurs personnes successivement ne peut comprendre plus de deux ordres de
bénéficiaires des fruits et revenus outre celui du bénéficiaire du capital; [...]».

C'est donc dire qu'il est possible que les revenus tirés des biens en fiducie soient

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employés pour pourvoir aux besoins de deux générations successives de bénéficiaires


et que le capital de la fiducie soit remis à la troisième génération. Il est impossible que la
fiducie persiste au-delà de cette troisième génération. Notons qu'il s'agit-là d'une règle
propre aux fiducies personnelles, puisque les fiducies d'utilité privée ou sociale (sujet
non abordé dans le présent module) peuvent, quant à elles, être perpétuelles (art. 1273
C.c.Q.).

2) — L'ouverture du droit d'un bénéficiaire d'une fiducie


Corollaire de la règle établie ci-dessus, l'article 1272 C.c.Q. prévoit que le droit du
bénéficiaire du premier ordre ne peut s'ouvrir plus de 100 ans après la constitution de la
fiducie, même si un terme plus long a été prévu. On précise en outre que lorsque le
bénéficiaire de la fiducie est une personne morale, les bénéfices qu'elle peut retirer de la
fiducie sont limités à une période de 100 ans. Le législateur désire ainsi éviter que des
biens soient indéfiniment détenus dans une fiducie personnelle.

Il ne faut pas confondre la durée prévue au Code civil du Québec avec la règle «des 21
ans» prévue à des fins fiscales. En effet, en vertu des lois fiscales (tant fédérale que
provinciale), les biens d'une fiducie sont réputés faire l'objet d'une disposition puis d'une
réacquisition immédiate, tous les 21 ans, à leur juste valeur marchande du moment.
Cette règle vise à éviter qu'on utilise une fiducie pour reporter indéfiniment l'imposition
des gains en capital accumulés sur les biens en fiducie. À quelques exceptions près, la
fiducie doit donc s'imposer sur le gain en capital déclenché par la disposition présumée
tous les 21 ans, sans pour autant qu'elle cesse d'exister civilement.

3) — Les modifications pouvant être apportées à une fiducie


Reconnaissant le fait qu'une fiducie puisse avoir une existence relativement longue, le
Code civil du Québec désire lui donner la souplesse nécessaire pour lui permettre de
s'adapter aux situations changeantes.

Ainsi, l'article 1294 C.c.Q. permet au tribunal d'apporter des modifications à une fiducie
existante de façon à mieux respecter la volonté du constituant de la fiducie ou pour
favoriser l'accomplissement de ses dispositions.

Serait-il possible que le document constituant la fiducie (le testament dans le cas d'une
fiducie testamentaire) donne aux fiduciaires le pouvoir de modifier les dispositions de la
fiducie sans recourir au tribunal? Dans l'état actuel du droit, il n'est pas encore déterminé
si les fiduciaires peuvent modifier les termes de la fiducie de manière unilatérale.

En effet, il n'est pas clairement établi si, oui ou non, l'article 1294 C.c.Q. est une
disposition d'ordre public. Dans l'affirmative, on ne pourra éviter d'avoir recours au
tribunal si l'on désire modifier les termes de la fiducie. Toutefois, si l'article 1294 C.c.Q.
n'était pas jugé d'ordre public, il serait possible, pour autant que le document constituant
la fiducie le permette, d'autoriser les fiduciaires à apporter eux-mêmes des modifications
à l'acte de fiducie.

Malgré l'incertitude qui perdure actuellement, plusieurs testaments donnent aux


fiduciaires le pouvoir de modifier les dispositions de l'acte de fiducie, dans l'hypothèse où

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le législateur lui-même ou nos tribunaux en viendraient ultérieurement à statuer que le


recours au tribunal n'est pas obligatoire lorsque l'acte de fiducie accorde aux fiduciaires
les pouvoirs nécessaires aux fins d'apporter les modifications voulues à la fiducie.

Il faut toutefois mentionner que, lorsque l'acte de fiducie accorde de tels pouvoirs aux
fiduciaires, leur discrétion quant aux modifications pouvant être apportées à la fiducie
n'est pas absolue. Ainsi, on ne permettra pas aux fiduciaires d'apporter des
modifications quant à l'identité des bénéficiaires de la fiducie, seules les modifications
permettant de mieux respecter la volonté première du constituant ou favorisant
l'accomplissement de la fiducie étant possibles.

5.1.2 — Fiduciaire
Le fiduciaire est la personne chargée d'administrer les biens en fiducie et d'en réaliser
l'affectation. Pour ce faire, le Code civil lui donne des pouvoirs de pleine administration
du bien d'autrui (art. 1306 et 1307 C.c.Q.).

Parmi les devoirs et pouvoirs attachés à la «pleine administration» du bien d'autrui se


trouvent :

• le devoir d'accroître le capital sous gestion;


• le pouvoir de vendre des biens sans l'intervention des bénéficiaires;
• le pouvoir de faire des placements autres que les placements «présumés sûrs»
au sens des articles 1339 et suivants du Code civil.

Il est loisible au constituant de nommer plusieurs fiduciaires et pourvoir à leur mode de


remplacement. Il est à noter qu'une personne ne peut être seule fiduciaire d'une fiducie
dont elle est bénéficiaire ou constituante. Elle peut agir comme fiduciaire d'une telle
fiducie à la condition qu'un fiduciaire «neutre» (c'est-à-dire un fiduciaire qui n'est ni un
bénéficiaire actuel ou éventuel de cette fiducie, ni le constituant) soit également nommé.
À titre d'illustration, l'on peut prendre l'exemple d'une personne qui désire, dans son
testament, créer une fiducie au bénéfice de son conjoint. Le conjoint bénéficiaire pourra
être fiduciaire de la fiducie, mais il devra agir avec un cofiduciaire qui n'est pas lui-même
bénéficiaire actuel ou éventuel de cette fiducie. Ainsi, en pareil cas, si les termes de la
fiducie attribuent au conjoint, sa vie durant, les revenus et l'accès au capital et que le
capital résiduaire doit, au décès du conjoint, être remis aux enfants du testateur, le
testateur pourrait nommer comme fiduciaires son conjoint et son beau-frère. Cependant,
il ne pourrait pas nommer comme fiduciaires son conjoint et l'un de ses enfants, puisque
ces derniers seront éventuellement bénéficiaires du capital de ladite fiducie.

L'acte de fiducie donne généralement au fiduciaire des pouvoirs discrétionnaires


importants, étant donné la flexibilité requise par l'administration fiduciaire. Voici quelques
exemples de pouvoirs discrétionnaires quelquefois attribués au fiduciaire :

• la possibilité de distribuer ou de retenir le revenu provenant des biens en fiducie;


• la possibilité de déterminer les bénéficiaires participant à la distribution du revenu
et ceux participant à la distribution du capital;
• le choix d'abandonner l'exercice d'un ou de plusieurs pouvoirs;

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• le choix de déterminer la fin de la fiducie;


• la possibilité d'exercer certains choix fiscaux, comme les choix prévus aux
paragraphes 104(13.1) et (13.2) L.I.R., qui permettent, lorsque la fiducie peut
déduire une perte, d'imposer la fiducie plutôt que le bénéficiaire sur certaines
sommes autrement attribuées ou distribuées à ce bénéficiaire, ainsi que le choix
du «bénéficiaire privilégié» qui permet de faire imposer dans les mains du
bénéficiaire des sommes qui ne lui ont pas été effectivement versées (et qui sont
conservées en fiducie). Le choix du «bénéficiaire privilégié» peut uniquement
s'appliquer à l'égard des bénéficiaires atteints d'une déficience mentale ou
physique.

5.1.3 — Définition de «revenu»


L'acte de fiducie (ou le testament fiduciaire) peut élargir le sens civil du mot «revenu» et
permettre au fiduciaire de considérer comme revenu tout gain en capital réalisé par la
fiducie. En effet, bien que le gain en capital soit partiellement inclus au revenu en vertu
des lois fiscales, il est, sur le plan du droit civil, considéré comme un accroissement de la
valeur du capital (et non comme un revenu). Si le testament ne permet pas au fiduciaire
de traiter un gain en capital comme du revenu au sens civil, cela limitera le type de
placement qu'il peut faire ou encore la possibilité pour le fiduciaire d'utiliser le produit
d'un gain en capital réalisé par la fiducie pour le distribuer comme revenu à un
bénéficiaire. Il sera donc généralement préférable, si cela est conforme à la volonté du
testateur, que le testament donne au fiduciaire le pouvoir de considérer comme un
revenu tout gain en capital réalisé par la fiducie, ce qui donnera plus de souplesse à son
administration.

5.1.4 — Types de fiducie


La fiducie est établie soit par un contrat, soit par un testament, soit par la loi ou par
jugement166. Elle est constituée dès l'acceptation du fiduciaire ou, s'ils sont plusieurs, de
l'un d'eux. Cette affectation dessaisit le constituant des biens et oblige le fiduciaire à
veiller à l'affectation et à l'administration du patrimoine fiduciaire.

L'affectation à une fin particulière des biens en fiducie étant un élément essentiel à sa
création, il est important que cette affectation soit précisée dans l'acte de fiducie.

Exemple 2-9.2
Le constituant par les présentes constitue un patrimoine fiduciaire au bénéfice des
enfants au premier degré, présents et futurs de M. X afin de subvenir à leurs besoins
personnels et leurs études jusqu'à l'âge de 28 ans.

Suivant le Code civil du Québec, il existe différents types de fiducies :

• la fiducie personnelle : constituée à titre gratuit, elle a pour but de procurer un


avantage au bénéficiaire. Si elle est constituée au bénéfice de plusieurs personnes
successivement, elle ne peut comprendre plus de deux ordres de bénéficiaires des
fruits et revenus, outre celui du capital. Les fiducies de gel, de protection d'actifs et
testamentaires, sont généralement des fiducies personnelles;

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• la fiducie d'utilité sociale : cette fiducie a pour but un intérêt général, à


caractère culturel, éducatif, philanthropique, religieux ou scientifique167. Elle n'a
pas pour but de réaliser un bénéfice ou d'exploiter une entreprise. Ce type de
fiducie peut avoir une existence perpétuelle;
• la fiducie d'utilité privée : elle a pour but l'érection, l'entretien ou la conservation
d'un bien corporel, soit à l'avantage indirect d'une personne ou à sa mémoire, ou
elle est établie dans un autre but de nature privée168. Elle peut aussi être
constituée à titre onéreux (RPA, REER de type fiduciaire) dans le but de faire des
profits sur des placements, de pourvoir à une retraite au constituant ou aux
personnes qu'il désigne169. Tout comme la fiducie d'utilité sociale, la fiducie d'utilité
privée peut être perpétuelle.

Bien que le Code civil catégorise les fiducies uniquement selon ces trois différents types,
la pratique, de même que certaines lois fiscales, utilisent un vocabulaire varié pour faire
référence au type de fiducie mis sur pied, vocabulaire qui renvoie plutôt à l'affectation de
la fiducie, à sa raison d'être.

Notez qu'à l'inverse d'une société par actions, le transfert de biens à une fiducie entraîne
généralement une disposition à la juste valeur marchande pour l'auteur du transfert, ce
qui peut engendrer la réalisation d'un gain en capital ou d'une récupération
d'amortissement. Exceptionnellement, il sera possible d'effectuer un transfert de biens à
une fiducie sur une base de roulement fiscal, dans la mesure où la fiducie respecte
l'ensemble des règles fiscales permettant le roulement. Ces fiducies, auxquelles il est
possible de transférer des biens sur une base de roulement fiscal, sont décrites aux
articles 70(6) et 73 L.I.R. et sont généralement désignées par la doctrine par les noms
suivants : fiducie alter ego, fiducie mixte au profit de l'époux ou du conjoint de fait, fiducie
au profit du conjoint et fiducie pour soi sans limites d'âge. À l'inverse, l'attribution de
biens de la fiducie à un bénéficiaire se fait généralement par voie de roulement fiscal à
moins qu'un choix soit produit par le fiduciaire afin que le transfert déclenche une
disposition à la juste valeur marchande pour la fiducie.

(2) 5.2 — Fiducies entre vifs

Contrairement à la fiducie testamentaire, la fiducie entre vifs est créée du vivant du


constituant et a un effet immédiat, tant sur le plan du transfert des biens que sur celui de
la création d'un patrimoine autonome et distinct.

Voici une liste non limitative des types de fiducie rencontrés fréquemment.

Fiducie alter ego (ou fiducie en faveur de soi-même)


Fiducie entre vifs créée par un constituant de 65 ans ou plus à son bénéfice qui peut être
utilisée dans un but de protection d'actifs. Il est possible de transférer des biens à cette
fiducie par roulement fiscal.

Fiducie mixte au profit du conjoint

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Fiducie entre vifs créée par un constituant de 65 ans ou plus à son bénéfice et celui de
son conjoint. Elle peut être utilisée dans un but de protection d'actifs. Il est possible de
transférer des biens à cette fiducie par roulement fiscal.

Fiducie de protection d'actifs


Fiducie entre vifs habituellement utilisée afin de mettre ses biens à l'abri des créanciers
dans le cadre d'une planification à long terme. Une fois opéré le transfert de ses actifs à
la fiducie, ces actifs n'appartiennent plus au constituant, mais font partie du patrimoine
autonome et distinct qu'est la fiducie.

Une fiducie de ce type confère généralement des pouvoirs discrétionnaires étendus au


fiduciaire quant à l'attribution des revenus et du capital. Ces pouvoirs discrétionnaires
permettent, entre autres, en cas d'insolvabilité ou de faillite du constituant, que ce
dernier ne puisse recevoir ni le revenu provenant des biens ainsi transférés ni les biens
eux-mêmes. Il peut même être permis au fiduciaire d'attribuer ultimement ces biens à
des personnes de la famille proche du constituant. Le constituant, qui est également l'un
des bénéficiaires de la fiducie, ne peut être seul fiduciaire et doit agir avec une ou
plusieurs personnes n'étant pas bénéficiaires de cette fiducie.

Comme tous les mécanismes de protection d'actifs, il est inutile de mettre en place une
telle fiducie lorsque l'auteur du transfert est déjà insolvable au moment du transfert des
biens à la fiducie ou lorsque le transfert à la fiducie a pour effet de rendre l'auteur du
transfert insolvable. Il s'agit davantage d'une méthode préventive qui pourrait être
utilisée par une personne qui se lance nouvellement en affaires, particulièrement dans
un secteur où les poursuites en responsabilité sont fréquentes.

Fiducie de pension alimentaire


Fiducie constituée entre vifs ou par un jugement dans le cadre d'une séparation des
conjoints. Cette fiducie est habituellement utilisée afin de garantir un paiement à l'ex-
conjoint bénéficiaire.

Fiducie de fractionnement de revenu


La fiducie entre vifs est souvent utilisée dans le cadre de la mise en place d'une
structure corporative dont l'un des objectifs est le fractionnement des revenus entre les
membres de la famille.

Il est à noter ici que ce n'est pas en soi la constitution de la fiducie qui permet à un
individu de fractionner son revenu. Par exemple, un individu qui désire fractionner les
revenus provenant d'une entreprise pourrait exploiter son entreprise par l'entremise
d'une société et faire participer ses enfants directement à l'actionnariat. L'avantage de la
fiducie est d'assurer au parent qui exploite l'entreprise d'exercer un contrôle accru sur sa
gestion en faisant en sorte qu'une fiducie soit propriétaire des actions et non ses
enfants, par ailleurs bénéficiaires de la fiducie. Cependant, les multiples règles
d'attribution et anti-évitement inhérentes aux lois fiscales limitent les possibilités de
fractionnement. La mise en place d'une structure corporative complexe nécessite la
collaboration de plusieurs spécialistes, notamment un juriste et un fiscaliste. Consultez le

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chapitre 14 du module 5, Fiscalité pour en savoir plus sur les différentes règles
d'attribution.

Ce qui n'est pas une fiducie


Certaines pratiques commerciales font en sorte que l'on pourrait croire être en présence
d'une fiducie. Tel est le cas du compte bancaire, ouvert en fiducie pour un enfant mineur,
ainsi que la désignation de bénéficiaire d'assurance vie «en fiducie». Une fiducie ne peut
être créée par l'entremise d'un simple formulaire, puisque les conditions requises pour
sa création ne sont pas remplies, c'est-à-dire que le constituant ne peut être fiduciaire à
moins qu'il n'agisse conjointement avec un autre fiduciaire. De plus, il n'y a pas de
transfert de biens à un patrimoine distinct, puisque le mineur est propriétaire des
sommes.

5.2.1 — Règles fiscales relatives à la fiducie entre vifs


Bien que, du point de vue civil, la fiducie entre vifs obéisse sensiblement aux mêmes
règles que la fiducie testamentaire, il n'en est pas de même au point de vue fiscal. Ainsi,
lors de la création d'une fiducie entre vifs, il faut tenir compte, entre autres, des règles
fiscales suivantes :
1) les règles d'attribution; et

2) le taux d'imposition.

1) — Règles d'attribution
La fiducie entre vifs présente un problème qui ne se présente pas dans le contexte d'une
fiducie testamentaire, soit l'application possible de plusieurs règles fiscales d'attribution.
L'une d'entre elles prévoit que le revenu (ou la perte) ou tout gain (ou perte) en capital
réalisé à l'égard d'un bien transféré à une fiducie, ou provenant d'un bien qui est
substitué au bien transféré, sera attribué à la personne de qui les biens ont été reçus.

Cette règle d'attribution s'applique lorsque :

• les biens transférés à la fiducie peuvent revenir à la personne de qui ils ont été
reçus; ou
• les biens transférés à la fiducie peuvent être remis à une personne désignée par
la personne de qui ils ont été reçus après la création de la fiducie; ou
• du vivant de ladite personne, la disposition des biens de la fiducie ne peut se faire
qu'avec son consentement préalable ou suivant ses instructions.

À l'origine, la fiducie est créée par un transfert de biens fait par le constituant à un
patrimoine fiduciaire qu'un fiduciaire accepte et s'oblige à gérer. Il est donc important,
lorsque la fiducie est créée dans le cadre d'un gel successoral et que l'auteur du gel
désire agir comme fiduciaire d'une fiducie «discrétionnaire», que l'auteur du gel ne soit
pas également le constituant de la fiducie, de façon à ne pas se voir attribuer les
revenus tirés des biens en fiducie. En pratique, la fiducie entre vifs est créée par le don
d'un bien non productif de revenus (un don fait par les grands-parents des bénéficiaires
du gel, par exemple) à un patrimoine fiduciaire. La fiducie peut ensuite, si nécessaire,

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contracter un emprunt bancaire pour acquitter le coût d'acquisition des actions


participantes émises dans le cadre du gel.

D'autres règles d'attribution sont également susceptibles de s'appliquer dans un contexte


de création d'une fiducie entre vifs (à cet égard, se référer au module 5, Fiscalité).

2) — Taux d'imposition
La fiducie entre vifs est imposée au taux marginal le plus élevé applicable aux
particuliers. Ainsi, il peut être préférable de ne pas déclarer de dividendes sur les actions
détenues en fiducie, à moins qu'il ne soit possible par la suite d'attribuer ces revenus aux
bénéficiaires de la fiducie, de façon à ce que les dividendes soient imposés entre leurs
mains, souvent à un taux inférieur à celui de la fiducie.

5.2.2 — Fiducie entre vifs dans le cadre d'un gel successoral


En soi, le principe du gel successoral est relativement simple : un individu, réalisant
l'importance de son patrimoine, désire atténuer l'impact fiscal que provoquera son décès
ou la vente éventuelle de son entreprise en interrompant l'accroissement de son
patrimoine. Le gel successoral (total ou partiel) permet de ralentir ou de stopper cet
accroissement. Pour y arriver, l'auteur du gel (la personne qui désire «geler»
l'accroissement de son patrimoine (ne pas confondre avec le constituant de la fiducie))
doit se départir juridiquement de la propriété de ce patrimoine, faisant en sorte que son
augmentation future ne se réalisera pas entre ses mains. De manière générale, un gel
successoral est surtout utilisé par les entrepreneurs dont la valeur de la participation, qui
s'est considérablement accrue au fil des ans, est encore susceptible de s'accroître de
manière significative dans le futur. À défaut d'agir, telle augmentation future sera
imposable à son décès (ou au décès de son conjoint) ou lors de la vente de l'entreprise.
Cette participation étant présumée avoir été disposée à sa juste valeur marchande
lorsqu'elle est transmise à d'autres personnes que le conjoint. Il peut donc être
intéressant pour un tel individu ayant lui-même des enfants de faire en sorte que
l'augmentation future se réalise plutôt entre les mains de ses enfants. Il n'est pas
question ici d'expliquer les différentes techniques utilisées pour réaliser un gel
successoral, que ce soit au moyen d'une conversion d'actions, d'un transfert à une
société de gestion, d'un gel renversé, d'un remaniement de capital, d'un roulement
interne, etc. La méthode utilisée peut varier, mais l'objectif du gel demeure le même.

Voici un exemple de gel successoral. L'auteur du gel transfère ses actions «ordinaires»
(participantes) qu'il détient dans l'entreprise familiale (OPCO) à cette même société en
échange d'actions privilégiées de gel (non participantes) dont la valeur de rachat
correspond à la valeur des actions ordinaires en date du gel. Ce transfert se fait très
souvent en se prévalant de l'option prévue par le paragraphe 85(1) L.I.R. et peut
permettre, si tel est l'objectif de l'auteur du gel, d'éviter le déclenchement d'un gain en
capital. Ces actions privilégiées de gel possèdent certaines caractéristiques qui ne
seront pas énumérées ici. Les actions ordinaires de l'auteur du gel sont annulées et
OPCO émet de nouvelles actions ordinaires qui sont acquises par les bénéficiaires du
gel, très souvent les enfants de l'auteur du gel, pour une valeur nominale.
L'accroissement de valeur subséquent de l'entreprise familiale (qui se reflètera dans les
nouvelles actions ordinaires) se fera entre les mains des bénéficiaires du gel, tandis que
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l'auteur du gel restera en possession d'actions privilégiées «gelées», c'est-à-dire dont la


valeur correspond à celle de l'entreprise au moment du gel. L'auteur du gel peut
continuer à tirer des revenus de l'entreprise familiale, notamment par le biais des
dividendes rattachés à ses actions de gel. Il peut également conserver le contrôle de
l'entreprise familiale, le plus souvent en détenant des actions dites «de contrôle», soit
des actions auxquelles sont rattachés un très grand nombre de droits de vote. Il peut
être opportun pour l'auteur du gel d'incorporer une société de gestion (GESCO) et de lui
«rouler» à l'aide du paragraphe 85(1) L.I.R. ses actions privilégiées de gel d'OPCO en
échange d'actions ordinaires de GESCO.

Bien que cette illustration paraisse simple, il existe, en pratique, de nombreux facteurs
d'ordre fiscal à considérer afin que le gel ne donne pas naissance à d'autres problèmes.
Les conditions d'application (surtout fiscales) du gel successoral en font une opération
sophistiquée.

Dans le cadre d'un gel successoral, la fiducie entre vifs peut être utilisée pour détenir les
actions participantes émises en faveur des bénéficiaires du gel, plutôt que de les faire
détenir personnellement par ces derniers. Cette solution s'avère particulièrement
avantageuse lorsque les bénéficiaires du gel sont mineurs ou trop jeunes pour détenir
ces actions participantes. Elle s'avère aussi utile lorsque l'auteur du gel n'est pas certain
que ses enfants sont aptes à prendre la relève. La flexibilité de la fiducie permet alors de
reporter à une date ultérieure la répartition des actions participantes entre les
bénéficiaires du gel. La fiducie entre vifs est donc utilisée ici principalement comme
véhicule de détention des actions ordinaires, évitant dès lors que ces actions soient
remises directement aux enfants de l'auteur du gel. Il est donc toujours possible pour ce
dernier, par le biais d'une fiducie discrétionnaire, de «décider» du moment où ces
actions seront effectivement remises aux bénéficiaires de la fiducie et même de décider

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des proportions dans lesquelles ces bénéficiaires recevront les actions le moment venu.
La fiducie de type «discrétionnaire» permettrait même de remettre la totalité des actions
ordinaires à un seul des bénéficiaires à l'exclusion des autres, si l'acte de fiducie le
permettait. Notez qu'il est préférable que l'acte de fiducie prévoit que les enfants n'auront
aucun droit de recevoir le revenu ou le capital de la fiducie tant qu'ils seront mineurs,
afin, notamment, d'éviter l'application des règles d'attribution au détriment de l'auteur du
gel.

Les principaux avantages d'une telle structure sont :

• La transmission de la valeur future de l'entreprise à d'autres bénéficiaires;


• La possibilité de multiplier la déduction pour gain en capital par le nombre de
bénéficiaires;
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• La protection des actifs à l'encontre des créanciers.

Les possibilités d'avantages fiscaux par le fractionnement de revenu sont


considérablement réduites depuis l'élargissement des règles de l'impôt sur le revenu
fractionné.

5.2.3 — Observations
De tout ce qui précède, on peut retenir que la fiducie entre vifs peut se révéler
avantageuse lorsqu'un individu désire se déposséder de certains actifs aux fins,
notamment, de réaliser un gel successoral ou un fractionnement du revenu, ou de les
mettre à l'abri de ses créanciers futurs. La fiducie servira alors de véhicule de détention
de ces actifs au moyen duquel la personne s'en étant dessaisie pourra néanmoins
exercer un droit de regard sur leur administration et leur disposition. Ainsi, dans le cadre
du gel successoral expliqué précédemment, cette personne pourra déterminer à quel
moment et à quels bénéficiaires seront remises les actions ordinaires de la société dans
laquelle le gel s'est opéré. Dans le cas d'une fiducie de protection d'actifs, cette
personne pourra éventuellement devenir à nouveau propriétaire des actifs lorsque plus
aucun créancier ne menacera son patrimoine.

Par ailleurs, les «concepteurs» de la fiducie devront prendre garde aux règles
d'attribution et à l'impôt sur le revenu fractionné.

(1) 5.3 — Fiducie testamentaire

La fiducie testamentaire ne peut être créée que dans un testament, celui du constituant.

Le testament fiduciaire doit donc contenir toutes les clauses nécessaires ou utiles pour
créer la fiducie et pour pourvoir à la réalisation de l'affectation donnée aux biens qui
doivent y être transférés et déterminer les bénéficiaires du revenu et du capital.

Le bénéficiaire du revenu est celui qui a le droit de bénéficier des revenus produits par
les biens (le capital) de la fiducie. Ainsi, le fiduciaire peut utiliser ces revenus pour le
bénéficiaire, les lui verser, ou encore faire l'une et l'autre chose, selon les directives du
testament.

De son côté, le bénéficiaire du capital a vocation de recevoir les biens de la fiducie lors
de sa dissolution ou en tout temps pendant son existence. Ceci n'exclut pas pour autant
qu'il ne puisse également bénéficier des revenus de la fiducie.
Exemple 2-10
Aux termes de son testament, Paul a créé une fiducie au bénéfice de son fils Jean. Les
termes de cette fiducie énoncent que le fiduciaire doit utiliser les revenus de la fiducie de
la manière qu'il jugera la plus appropriée pour le soutien et le bien-être de Jean. Le
testament mentionne qu'au décès de Jean, les revenus de la fiducie devront être utilisés
selon les mêmes critères pour les enfants de Jean et que les biens en fiducie leur seront
remis lorsque le plus jeune de ces enfants aura atteint l'âge de 28 ans.

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Dans cet exemple, Jean est donc bénéficiaire du revenu et les enfants de Jean sont à la
fois bénéficiaires du revenu et du capital.

Si le testament de Paul avait plutôt mentionné que les revenus de la fiducie devaient être
utilisés au bénéfice de Jean et que le capital devait être remis à Jean lorsqu'il atteindrait
l'âge de 28 ans, Jean serait à la fois bénéficiaire du revenu et du capital.

5.3.1 — Fiducie testamentaire au point de vue fiscal


Les lois fiscales assimilent les fiducies à des particuliers, mais ces dernières n'ont jamais
droit aux crédits personnels. Depuis 2016, les fiducies testamentaires sont imposées de
la même façon que les fiducies entre vifs, c'est-à-dire que la totalité des revenus sont
imposés au taux marginal le plus élevé applicable aux particuliers. Cette règle comporte
deux exceptions :

• Succession
Les revenus d'une succession sont imposés en fonction des taux progressifs
applicables aux particuliers pour une période n'excédant pas 36 mois à partir du
décès du particulier.
• Fiducie admissible pour personne handicapée
Les fiducies testamentaires ayant comme bénéficiaire une personne ayant droit au
crédit d'impôt pour personnes handicapées au cours d'une année d'imposition et
qui en font le choix conjointement avec le bénéficiaire, sont imposées en fonction
des taux d'imposition progressifs applicables aux particuliers.

5.3.2 — Utilité de la fiducie testamentaire


La fiducie testamentaire peut se révéler très utile, notamment dans les circonstances
suivantes :

• Le testateur désire s'assurer que les biens ne seront transmis à ses héritiers que
lorsqu'ils auront atteint la maturité nécessaire pour gérer un patrimoine important.
Le testament peut prévoir des critères quant au moment où le capital devra ou
pourra être remis au bénéficiaire. Ces critères peuvent notamment faire référence
à l'âge du bénéficiaire. Aussi, le capital fiduciaire n'étant pas la propriété du
bénéficiaire, son administration n'est pas faite par le représentant légal d'un
bénéficiaire mineur ou inapte.
• Les héritiers éventuels du testateur sont ou pourraient être dans une situation
financière précaire.
Comme les biens en fiducie forment un patrimoine «autonome et distinct» de celui
du bénéficiaire, l'utilisation d'une fiducie protège le patrimoine légué contre les
créanciers du bénéficiaire.
• Le testateur veut choisir la personne qui administrera le patrimoine légué.
C'est le testateur qui nomme le fiduciaire lors de la rédaction de son testament, il
est donc en mesure de nommer une personne en qui il a confiance ou encore de
fixer des critères afin de guider le choix du fiduciaire.
• Le testateur désire que son capital soit utilisé dans un but précis.
Le testament fiduciaire prévoit l'affectation des biens en fiducie, soit les fins
auxquelles ils doivent être employés.
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• Le testateur désire déterminer à qui bénéficiera son patrimoine après le décès du


bénéficiaire de premier ordre.
Il est possible de prévoir jusqu'à deux ordres de bénéficiaires des fruits et revenus
en plus du bénéficiaire du capital. La fiducie testamentaire est donc une façon très
utile pour subvenir aux besoins du conjoint du testateur tout en s'assurant qu'un
éventuel surplus (capital restant au décès du conjoint survivant) soit dévolu aux
enfants du testateur.

Ainsi, on aura recours à la fiducie testamentaire surtout dans un souci de protection du


capital légué ou lorsque le testateur voudra contrôler les modalités de transmission de
ses bien longtemps après son décès.

En effet, les biens transmis en fiducie constituant un patrimoine distinct de celui du


bénéficiaire, il est ainsi possible pour le testateur de régir lui-même la manière dont ces
biens se transmettront. Les biens demeurant en fiducie ne tombant pas dans le
patrimoine du bénéficiaire, ce dernier ne pourra en disposer autant de son vivant qu'à
son décès. C'est donc le testateur qui, par le biais de son testament, contrôle la
dévolution du capital fiduciaire.

D'autre part, comme la fiducie constitue un patrimoine distinct de celui du bénéficiaire,


elle est parfois utilisée comme moyen de protéger les actifs légués à l'encontre des
créanciers de ce bénéficiaire. Si, par exemple, le testament confère aux fiduciaires des
pouvoirs discrétionnaires quant à l'utilisation des revenus et du capital pour un
bénéficiaire donné, il leur sera possible de soustraire ces revenus et ce capital à la saisie
des créanciers de ce bénéficiaire en s'abstenant de remettre le capital ou les revenus
directement au bénéficiaire (ils pourront cependant eux-mêmes utiliser ces revenus ou
ce capital pour payer certaines dépenses du bénéficiaire).

L'aspect discrétionnaire que l'on peut accorder à une fiducie peut parfois être utile dans
certains contextes. Pensons à une personne inapte ou prestataire de certains
programmes sociaux dont les prestations sont fonction de la valeur du patrimoine ou des
revenus du bénéficiaire. Comment faire en sorte que ces personnes se voient
avantagées par un testament sans perdre ces bénéfices?

Le programme de solidarité sociale issu de la Loi sur l'aide aux personnes et aux
familles (RLRQ, c. A-13.1.1) prévoit qu'une personne présentant des contraintes sévères
à l'emploi en raison d'un handicap physique ou mental peut recevoir jusqu'à
203 000 $170 à la suite d'une succession (incluant le bénéfice d'une police d'assurance
vie) sans que ses prestations soient affectées171.

Habituellement, dans une telle situation, il est recommandé d'adopter un legs fiduciaire
discrétionnaire. Ce type de fiducie est mieux connu sous le nom de fiducie Henson.
Ainsi, le fiduciaire n'a pas l'obligation de remettre des revenus ou des biens aux
bénéficiaires, mais il a la discrétion de le faire à sa guise. La remise peut donc se faire
advenant certaines périodes critiques dans la vie du bénéficiaire et n'a pas pour effet de
le disqualifier automatiquement du droit aux subventions auxquelles il a droit.

Cependant, dès que le bénéficiaire aura reçu plus de 203 000 $ de la fiducie, ses

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prestations pourraient être modifiées. Cela n'est malheureusement pas aussi simple et
plusieurs autres aspects devront être pris en considération. Il y aura lieu de consulter un
spécialiste avant d'élaborer une planification en ce sens.

Le raisonnement derrière cette planification est que la fiducie est un patrimoine


autonome et distinct sur lequel le bénéficiaire ne peut prétendre de droit de propriété, à
plus forte raison si elle est discrétionnaire.

Par contre, au Québec, la jurisprudence rendue dans ce domaine, est très peu favorable
aux bénéficiaires, même en présence de fiducies discrétionnaires. Ces décisions,
souvent rendues par des tribunaux administratifs, ont tendance à favoriser
l'administration.

5.3.2.1 — Quelques cas typiques d'utilisation d'une fiducie testamentaire


La fiducie au bénéfice du conjoint
La fiducie au profit du conjoint peut parfois être utilisée lorsque le testateur désire que
ses biens servent à la subsistance et au maintien du niveau de vie de son conjoint, mais
désire par ailleurs s'assurer, qu'au décès de ce dernier, les biens qui resteront seront
dévolus aux personnes choisies par le testateur lui-même (par exemple, ses enfants) et
non par le conjoint du testateur. Le testateur peut ainsi éviter que les biens transmis au
conjoint se retrouvent, au décès de ce dernier, dans d'autres mains que celles choisies
par le testateur.

Un autre exemple typique d'utilisation d'une fiducie testamentaire ayant pour objectif
principal le maintien du contrôle sur les biens légués est la personne mariée en
secondes noces et ayant des enfants issus d'un premier mariage. Lorsque le testateur
veut, d'une part, avantager son conjoint, mais, d'autre part, s'assurer qu'au décès de ce
dernier, les actifs utilisés à la satisfaction des besoins de ce conjoint soient transférés à
ses propres enfants, la fiducie testamentaire est l'outil de prédilection.

La fiducie «d'éducation»
Est communément appelée «fiducie d'éducation» la fiducie dont le but est de permettre
de pourvoir aux besoins de jeunes enfants. Ainsi, un testament pourra prévoir qu'au cas
de décès des deux conjoints, les biens seront transférés à une fiducie créée pour le
bénéfice des enfants du testateur, dont les fiduciaires pourront à leur discrétion employer
les revenus ou le capital pour subvenir aux besoins de ces enfants (instruction,
éducation, entretien, soins médicaux, etc.) et dont le capital sera remis aux enfants
lorsqu'ils seront suffisamment «matures» pour gérer eux-mêmes ce capital.

Bien que lui soit accolé le nom «éducation», les revenus et le capital des biens de ce
type de fiducie servent généralement à bien d'autres besoins que les seuls besoins
scolaires, le terme «éducation» étant ici pris dans son sens le plus large. Il pourra
également être avantageux de créer une fiducie d'éducation, non seulement dans le
contexte où les deux parents sont décédés, mais également dans le contexte où l'un des
parents survit au testateur.

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Cette stratégie pourra présenter des avantages, surtout lorsque le parent survivant
gagne des revenus substantiels et est imposé à un niveau élevé. En pareil cas, l'on
pourra léguer en fiducie des biens ne générant aucune imposition malgré le fait qu'ils
sont transmis à une fiducie créée au bénéfice des enfants (tels que titres à revenu fixe
ou produits d'assurance vie). Le conjoint survivant pourra être fiduciaire de cette fiducie
avec une personne nommée par lui (ce cofiduciaire pourra aussi être désigné par le
testateur lui-même) et ces fiduciaires auront des pouvoirs discrétionnaires d'utilisation
des revenus et du capital pour le bénéfice des enfants du testateur. En ce faisant, les
revenus générés par les biens en fiducie pourront être fractionnés entre les enfants du
testateur plutôt que d'être ajoutés au revenu imposable du conjoint survivant ayant la
charge desdits enfants. Des économies pourront être réalisées en imposant les enfants
au lieu du conjoint survivant.

Par ailleurs, le capital de cette fiducie pourra être remis soit aux enfants à un âge où ils
auront atteint une plus grande maturité, soit encore au conjoint à un moment où les
enfants ne seront plus à sa charge.

Annexe 1 — Classification des protections légales du


Code Civil du Québec selon le statut des couples :
mariés, unis civilement ou vivant en union de fait172

Notes explicatives

Ce tableau présente les principaux points de comparaison entre les protections légales
offertes par le Code civil du Québec selon le statut des couples, qu'ils soient mariés, unis
civilement ou vivant en union de fait. Il permet d'obtenir rapidement une vue d'ensemble
des dispositions applicables et leur référence. Il fait état d'alternatives possibles pour
remédier, le cas échéant, à l'absence de protection. Ce tableau n'est nullement exhaustif
et demande à être utilisé avec prudence. La consultation des textes législatifs est
toujours requise. L'adaptation à la situation factuelle des clients est nécessaire et le
choix de déterminer l'acte approprié dans les circonstances appartient au rédacteur.

Annexe 1 — Classification des protections légales du Code


civil du Québec

Protection légale Couple marié ou uni civilement

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Droits et obligations durant la vie


commune obligations
fin de la

Résidence Meubles à Un époux ne L'époux qui n'a pas Le tribunal p


familiale l'usage du peut sans le consenti à l'acte attribuer à l'u
Les époux ménage consentement pour lequel son des époux
choisissent de de son consentement était propriété o
concert la conjoint : requis peut l'usage
résidence a) aliéner; réclamer des meubles de
familiale. b) hypothéquer; dommages-intérêts conjoint.
En l'absence de c) transporter de son conjoint ou (art.
choix exprès, la hors de la de toute autre
résidence résidence personne qui, par sa
familiale est familiale faute, lui a causé un
présumée être les meubles qui préjudice.
celle où les servent à l'usage (art. 408 C.c.Q.)
membres de la du ménage.
famille habitent (art. 401 C.c.Q.)
lorsqu'ils
exercent leurs
principales
activités.
(art. 395 C.c.Q.)

Résidence L'époux locataire L'époux qui n'a pas Le tribunal p


familiale louée de la résidence consenti à l'acte attribuer au
familiale ne peut, pour lequel son conjoint du
sans le consentement était locataire le b
consentement requis peut de la résiden
de son réclamer des familiale.
conjoint : dommages-intérêts (art.
a) sous-louer; de son conjoint ou
b) céder son de toute autre
droit; personne qui, par sa
c) mettre fin au faute, lui a causé un
bail lorsque le préjudice.
locateur a été (art. 408 C.c.Q.)
avisé du fait que
le logement
servait de
résidence
familiale.
(art. 403 C.c.Q.)

Résidence Immeuble de L'époux qui n'a pas Le tribunal p

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familiale dont moins de 5 consenti à l'acte attribuer, à


un conjoint est logements : pour lequel son l'époux auqu
propriétaire L'époux consentement était accorde la g
propriétaire ne requis peut d'un enfant,
peut, sans le réclamer des droit d'usage
consentement dommages-intérêts la résidence
de son de son conjoint ou familiale.
conjoint : de toute autre L'usager est
a) l'aliéner; personne qui, par sa dispensé de
b) le grever d'un faute, lui a causé un fournir une
droit réel; préjudice. sûreté et de
c) en louer la (art. 408 C.c.Q.) dresser un
partie réservée à inventaire de
l'usage de la biens, à moi
famille. que le tribun
(art. 404 C.c.Q.) n'en décide
autrement.
(art.

Immeuble de 5 L'époux qui n'a pas Le tribunal p


logements ou consenti à l'acte attribuer à
plus : pour lequel son l'époux auqu
L'époux consentement était accorde la g
propriétaire ne requis peut d'un enfant u
peut, sans le réclamer des droit d'usage
consentement dommages-intérêts la résidence
de son conjoint, de son conjoint ou familiale.
a) l'aliéner de toute autre L'usager est
b) en louer la personne qui, par sa dispensé de
partie réservée à faute, lui a causé un fournir une
l'usage de la préjudice. sûreté et de
famille. (art. 408 C.c.Q.) dresser un
(art. 405 C.c.Q.) inventaire de
biens, à moi
que le tribun
n'en décide
autrement.
(art.

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Déclaration de La déclaration de Meubles à l'usage ..........


résidence résidence du ménage : Le
familiale familiale est faite conjoint qui n'a pas
par les époux ou donné son
l'un d'eux. consentement alors
Elle peut aussi qu'il était requis peut
résulter d'une demander la nullité
déclaration à cet de l'acte.
effet contenue (art. 402 C.c.Q.)
dans un acte Résidence familiale
destiné à la louée : Le conjoint
publicité. qui n'a pas donné
(art. 407 C.c.Q.) son consentement
alors qu'il était
requis peut
demander la nullité
de l'acte.
(art. 403 C.c.Q.)

Résidence
familiale don
conjoint est
propriétaire
(immeuble d
moins de 5
logements)
Le conjoint q
n'a pas donn
son
consenteme
alors qu'il ét
requis, peut
demander l
nullité de l'a
(art.
Résidence
familiale don

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conjoint est
propriétaire
(immeuble d
logements o
plus) :
Le conjoint q
n'a pas donn
son
consenteme
a) à l'acte
d'aliéna-tion
peut exiger
l'acquéreur q
lui consente
bail des lieu
déjà occupé
des fins
d'habitation;
b) à l'acte de
location : pe
demander la
nullité.
(art.

Contribution Les époux contribuent aux charges du ......


aux charges du mariage à proportion de leurs facultés
ménage respectives.
Chaque époux peut s'acquitter de sa
contribution par son activité au foyer.
(art. 306 et 521.6 C.c.Q.)

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La propriété, Constitution Le mariage et l'union civile emportent La valeur du


l'administration d'un patrimoine constitution d'un patrimoine familial patrimoine
et la disposition familial formé de certains biens des époux sans familial,
des biens égard à celui des deux qui détient un déduction fa
droit de propriété sur ces biens. des dettes
(art. 414 et 521.6 C.c.Q.) contractées
Le patrimoine familial est constitué des l'acquisition,
biens suivants : l'amélioratio
a) résidences de la famille; l'entretien ou
b) meubles qui les garnissent ou les conservation
ornent; biens qui le
c) véhicules automobiles utilisés pour les constituent,
déplacements de la famille; divisée en p
d) les droits accumulés durant le égales entre
mariage au titre d'un régime de retraite; époux.
e) les gains inscrits, durant le mariage, (art.
au nom de chaque époux en application
de la Loi sur le régime de rentes du
Québec ou de programmes équivalents.
Sont toutefois exclus : les biens échus à
l'un des époux par succession ou
donation avant ou pendant le mariage.
(art. 415 C.c.Q.)
Une fois établie la valeur nette du
patrimoine familial, on en déduit la valeur
nette, au moment du mariage du bien
que l'un des époux possédait alors et qui
fait partie de ce patrimoine.
(art. 418, al. 1 C.c.Q.)

Régimes Les époux qui, avant la célébration du Après la


matrimoniaux mariage n'ont pas fixé leur régime dissolution d
matrimonial par contrat de mariage sont régime, cha
soumis à la société d'acquêts. époux conse
(art. 432 et 521.8 C.c.Q.) ses biens
Chaque époux a l'administration, la propres.
jouissance et la libre disposition de ses Il a la faculté
biens propres et de ses acquêts. d'accepter le
(art. 461 C.c.Q.) partage des
acquêts de s
conjoint ou d
renoncer,
nonobstant
convention
contraire.
(art.
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Obligation Les époux et conjoints unis civilement se Les aliments


alimentaire doivent des aliments. payables so
entre conjoints (art. 585 C.c.Q.) forme de
Les aliments sont accordés en tenant pension; le
compte des besoins et des facultés des tribunal peu
parties, des circonstances dans exceptionne
lesquelles elles se trouvent et, s'il y a nt remplace
lieu, du temps nécessaire au créancier compléter ce
pour acquérir une autonomie suffisante. pension
(art. 587 C.c.Q.) alimentaire p
une somme
forfaitaire
payable au
comptant ou
versements
(art.

Le couple en tant Égalité des Tous les enfants dont la filiation est Idem
que parents enfants établie ont les mêmes droits et les
mêmes obligations quelles que soient les
circonstances de leur naissance.
(art. 522 C.c.Q.)
L'enfant reste sous l'autorité de ses père
et mère jusqu'à sa majorité ou son
émancipation.
(art. 598 C.c.Q.)
Les père et mère ont, à l'égard de leur
enfant, le droit et le devoir de garde, de
surveillance et d'éducation.
Ils doivent nourrir et entretenir leur
enfant.
(art. 599 C.c.Q.)

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Obligation Les parents en ligne directe au premier Idem


alimentaire degré se doivent des aliments.
envers les (art. 585 C.c.Q.)
enfants Les aliments sont accordés en tenant
compte des besoins et des facultés des
parties, des circonstances dans
lesquelles elles se trouvent et, s'il y a
lieu, du temps nécessaire au créancier
pour acquérir une autonomie suffisante.
(art. 587 C.c.Q.)
En ce qui concerne l'obligation
alimentaire des parents à l'égard de leur
enfant, la contribution alimentaire
parentale de base, établie conformément
aux règles de fixation des pensions
alimentaires pour enfants édictées en
application du Code de procédure civile,
est présumée correspondre aux besoins
de l'enfant et aux facultés des parents.
Cette contribution alimentaire peut être
augmentée pour tenir compte de certains
frais relatifs à l'enfant prévus par ces
règles, dans la mesure où ceux-ci sont
raisonnables eu égard aux besoins et
facultés de chacun.
(art. 587.1 C.c.Q.)

Autorité Les père et mère exercent ensemble Idem


parentale l'autorité parentale.
Si l'un d'eux décède, est déchu de
l'autorité parentale ou n'est pas en
mesure de manifester sa volonté,
l'autorité est exercée par l'autre.
(art. 600 C.c.Q.)

Médiation .......... Les couples


familiale enfants peu
bénéficier de
services d'u
médiateur
professionne
lors de la
négociation
règlement d
séparation.

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Décès Dévolution légale .......... À moins de


des successions dispositions
testamentair
la successio
dévolue au
conjoint surv
qui était lié a
défunt par
mariage ou
civile, aux
enfants et a
parents du d
(père, mère,
frères, sœur
oncles, tante
cousins,
cousines, et
dans l'ordre
suivant les r
établies au
civil du Qué
À défaut
d'héritier jus
8e degré, el
échoit à l'Éta
(art.
C.c.Q.)

Inaptitude Consentement Lorsque l'inaptitude d'un majeur à ..........


aux soins consentir aux soins requis par son état
de santé est constatée, le consentement
est donné par le mandataire, le tuteur ou
le curateur. Si le majeur n'est pas ainsi
représenté, le consentement est donné
par le conjoint, qu'il soit marié, en union
civile ou en union de fait, ou, à défaut de
conjoint ou en cas d'empêchement de
celui-ci, par un proche parent ou par une
personne qui démontre pour le majeur
un intérêt particulier.
(art. 15 C.c.Q.)

Mandat donné en Le mandat donné par une personne ..........


prévision de majeure en prévision de son inaptitude à
l'inaptitude prendre soin d'elle-même ou à
administrer ses biens est fait par acte
notarié en minute ou devant témoins.

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Son exécution est subordonnée à la


survenance de l'inaptitude et à
l'homologation par le tribunal, sur
demande du mandataire désigné dans
l'acte.
(art. 2166 C.c.Q.)

1. L.Q. 1991, c. 64 [ci-après «C.c.Q.»].

2. Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation, L.Q. 2002, c.
6.

12. Art. 494 C.c.Q.

13. RLRQ, c. R-15.1.

14. L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), (ci-après «L.I.R.»).

15. L.R.C. (1985), ch. 3 (2e suppl.).

60. Art. 259 C.c.Q.

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61. Art. 270 C.c.Q.

62. Art. 277 C.c.Q.

63. Art. 883 C.p.c.

88. Art. 2135 C.c.Q.

96. RLRQ, c. S-32.0001 (ci-après L.S.F.V.)

97. RLRQ, c. P-44.1.

98. Ibid., art. 21.

99. Art. 1525 C.c.Q.

100. Art. 2222 et 2253 C.c.Q.

129. L.R.C. (1985), ch. C-44, art. 146(1) (ci-après «L.C.S.A.»).

130. RLRQ, c. S-31.1 (ci-après «L.S.A.»).

131. BARREAU DU QUÉBEC, Collection de droit 2009-2010, vol. 9, Entreprises,


sociétés et compagnies, Cowansville, Yvon Blais, 2009, p. 233.

164. Art. 1275 C.c.Q.

165. Art. 1261 C.c.Q.

172. Source : Chambre des notaires du Québec.

3. L. (D.) c. La. (J.), (2000) [2001] R.D.F. 83 REJB 2000-22397 (C.S.).

4. Ce formulaire est accessible sur le site de la Cour supérieure du Québec à l'URL


suivant, consulté le 4 juin 2017 : .

5. Droit de la famille — 1747, [1993] R.D.F. 227 EYB 1993-74041; (C.S.).

6. B. (L.) c. M. (C.), REJB 1999-16122 ((sub nom Droit de la famille — 3511) [2000]
R.D.F. 93 (C.S.)
K. (V.) c. D. (S.), EYB 2007-122768 (sub nom Droit de la famille — 0719938) [2007]
R.D.F. 711 (C.S.).

7. [2002] R.J.Q. 1173, REJB 2002-31329 (C.A.)

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8. REJB 2002-31337 (C.A.)

9. B. (A.) v. S. (Am.), EYB 2009-156702, (sub nom. Droit de la famille — 09645) [2009]
R.D.F.349, 2009 QCCS 1283.

10. Art. 587 C.c.Q.

11. .

32. Art. 603 C.c.Q.

33. Art. 606 C.c.Q.

34. Art. 609 C.c.Q.

35. Art. 620 C.c.Q.

36. Art. 617 et 1814 C.c.Q.

37. Art. 192 C.c.Q.

38. Art. 153 C.c.Q.

39. Art. 163 C.c.Q.

40. Art. 156 C.c.Q.

41. Art. 157 C.c.Q.

42. Art. 170 C.c.Q.

43. Art. 1301 et s. C.c.Q.

44. Art. 171 et 602 (a contrario) C.c.Q.

45. Art. 80, 171, 598 C.c.Q.

46. Art. 173 C.c.Q.

47. Art. 174 C.c.Q.

48. Art. 176 C.c.Q.

49. Art. 185 et 187 C.c.Q.

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50. Art. 179 C.c.Q.

51. Art. 181 C.c.Q.

52. Art. 192 C.c.Q.

53. Art. 200 et s. C.c.Q.

54. Art. 208 à 221 C.c.Q.

55. Art. 1299 et s. C.c.Q.

56. Art. 203 C.c.Q.

57. Art. 222 et s. C.c.Q.

58. Art. 233 C.c.Q.

59. Art. 228 C.c.Q.

64. Art. 281 C.c.Q.

65. Art. 266 C.c.Q.

66. La première exigence relativement aux témoins est qu?ils ne doivent pas avoir d?
intérêt dans l?acte, c?està- dire qu?ils ne sont pas nommés à titre de mandataires,
mandataires remplaçants, ou à titre de tiers ayant droit à la reddition de compte du
mandataire, etc. De plus, les témoins doivent signer le mandat en présence du mandant,
soit dès que ce dernier a apposé sa signature en leur présence ou qui leur a reconnu sa
signature préalablement apposée au mandat.

67. Les témoins doivent être en mesure de constater l?aptitude du mandant à agir.

68. Art. 2131 C.c.Q.

69. Art. 2169 C.c.Q.

70. Art. 2166 C.c.Q.

71. Art. 176 C.c.Q.

72. Art. 2151 C.c.Q.

73. Art. 2154 C.c.Q.

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74. Art. 2171 C.c.Q.

75. Art. 2148 C.c.Q.

76. RLRQ, c. S-29.01, art. 170, al. 1 par. 1º.

77. RLRQ, c. C-31.1.

78. L.R.C. (1985), ch. C-44.

79. Art. 2140 C.c.Q.

80. Art. 2138 C.c.Q.

81. Art. 2184 C.c.Q.

82. Art. 2157 et 2158 C.c.Q.

83. Art. 2167 C.c.Q.

84. Art. 884 C.p.c.

85. D. (G.) c. D. (R.), EYB 2006-103624, [2006] R.J.Q. 1442 (C.S.).

86. F. (J.) c. F. (J.-M.), EYB 2006-107597 (C.S.).

87. P. (L.), Re, EYB 2004-81257 (C.S.).

89. Art. 2152 C.c.Q.

90. Art. 2152, 2157, 2158 et 2160 C.c.Q.

91. Art. 2152 C.c.Q.

92. Art. 2153 C.c.Q.

93. Art. 2163 C.c.Q.

94. Art. 2162 C.c.Q.

95. Art. 2159 C.c.Q.

101. Art. 2186 C.c.Q.

102. Art. 301 à 320 C.c.Q.


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103. Art. 2189, al. 2 C.c.Q.

104. RLRQ, c. P-44.1.

105. Art. 2189 C.c.Q.

106. Art. 2225 C.c.Q.

107. Ferme C.G.R. enr. (Faillite de), EYB 2010-172527 (C.A.).

108. Art. 2252 et 2253 C.c.Q.

109. Société qui se présente exclusivement comme une société de comptables ou de


notaires ou d'arpenteur-géomètres. D'autres critères s'appliquent aux sociétés détenues
avec d'autres professionnels.

110. Art. 2246 C.c.Q.

111. Art. 2244 et 2245 C.c.Q.

112. Art. 2246 C.c.Q.

113. Art. 2237 C.c.Q.

114. Art. 2228 C.c.Q.

115. Art. 2226 C.c.Q.

116. Art. 2232 C.c.Q.

117. RLRQ, c. S-31.1.

118. L.R.C. (1985), ch. C-44.

119. RLRQ, c. V-1.1.

120. RLRQ, c. S-31.1.

121. RLRQ, c. S-31.1.

122. L.R.C. (1985), ch. C-44.

132. L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1.

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133. RLRQ, c. I-3.

134. Art. 70(5.3) L.I.R.; art. 450.2 L.i.

135. Art. 70(5) L.I.R.

136. Art. 148(9) L.I.R.; art. 966d L.i.

137. Art. 2638 C.c.Q.

138. Art. 2677 C.c.Q.

139. Art. 2212 C.c.Q.

140. Art. 676 C.c.Q.

141. Art. 679 C.c.Q.

142. Voir la sous-section 4.1.8

144. Voir à cet effet l'article intitulé «La désignation d'un fiduciaire sur une police
d'assurance vie au Québec», La Cible, édition août 2010, vol. 18, nº 2.

146. Article 2462 C.c.Q.

147. Voir module 3, Assurance et gestion des risques, chapitre 10, pour une définition de
«rente».

148. RLRQ, c. S-29.01.

149. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) et ses modifications (ci-après : «L.I.R.»). Dans le
cadre du présent texte, toute référence à une disposition de la loi fédérale vaut aussi
référence aux articles correspondants de la Loi sur les impôts, RLRQ, c. I-3 et ses
modifications (ci-après : «L.I.»), qui sont généralement harmonisées, à moins
d'indication contraire.

150. Paragraphe 146(1) L.I.R.

151. Paragraphe 146.2(1) L.I.R.

152. Paragraphe 146(5) L.I.R.

153. Il ne s'agit pas nécessairement toujours d'une fiducie au sens de l'article 1260
C.c.Q., mais plutôt d'un «arrangement en fiducie», soit un contrat écrit régi par le droit de

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la province de Québec présenté à titre de déclaration de fiducie dans le but d'être


enregistré en tant que régime enregistré. Un tel contrat est réputé être une fiducie fiscale
en application du paragraphe 248(3.2) et de l'alinéa 248(3)c) L.I.R.

154. Article 8.1 de la Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21 : «8.1 Le droit civil et la
common law font pareillement autorité et sont tous deux sources de droit en matière de
propriété et de droits civils au Canada et, s'il est nécessaire de recourir à des règles,
principes ou notions appartenant au domaine de la propriété et des droits civils en vue
d'assurer l'application d'un texte dans une province, il faut, sauf règle de droit s'y
opposant, avoir recours aux règles, principes et notions en vigueur dans cette province
au moment de l'application du texte.»

155. Art. 2367 C.c.Q. : «Le contrat constitutif de rente est celui par lequel une personne,
le débirentier, gratuitement ou moyennant l'aliénation à son profit d'un capital, s'oblige à
servir périodiquement et pendant un certain temps des redevances à une autre
personne, le crédirentier.»

156. Art. 1260 C.c.Q. : «La fiducie résulte d'un acte par lequel une personne, le
constituant, transfère de son patrimoine à un autre patrimoine qu'il constitue, des biens
qu'il affecte à une fin particulière et qu'un fiduciaire s'oblige, par le fait de son
acceptation, à détenir et à administrer.»

157. Art. 2314 C.c.Q. : «Le simple prêt est le contrat par lequel le prêteur remet une
certaine quantité d'argent ou d'autres biens qui se consomment par l'usage à
l'emprunteur, qui s'oblige à lui en rendre autant, de même espèce et qualité, après un
certain temps.»

158. Loi d'interprétation, RLRQ, c. I-16, art. 41.1.

159. Art. 415 C.c.Q.

161. RLRQ, c. S-29.02.

162. L.R.C. (1985), ch. B-3.

163. Poulin (Succession de) c. Duchêne, REJB 1999-14617, AZ-50067626 (C.A.).

170. Montant pour l'année 2015, indexé annuellement.

171. Chambre des notaires, Communiqué, 7 juillet 2015.

143. Certains sont d'avis qu'il est également possible de désigner comme bénéficiaire la
fiducie testamentaire qui aurait été créée par testament. Comme l'enfant ne serait pas
nommément désigné, les droits conférés par le contrat ne seraient pas insaisissables.
Par contre, le produit d'assurance versé ne ferait pas partie de la succession de l'assuré.
Nous invitons cependant les planificateurs financiers à la prudence, car il n'est pas

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assuré que cette désignation serait acceptée d'un point de vue civil. Pour plus de sûreté,
nous croyons qu'il serait préférable de faire cette désignation de la fiducie testamentaire
à titre de bénéficiaire de la police par testament et de l'assortir d'un legs particulier de la
police visée qui s'appliquerait si la désignation de bénéficiaire n'était pas reconnue. Il est
à noter que cette façon de faire n'aurait pas pour effet de faire perdre à la fiducie son
statut fiscal de fiducie testamentaire. Voir à cet effet l'interprétation technique 2005-
0132271C6, «Fiducie et Police d'assurance-vie», 7 octobre 2005.

145. Couture c. Desjardins Sécurité Financière, compagnie d'assurance vie, 2010


QCCQ 7194, EYB 2010-177989 (C.Q.).

166. Art. 1262 C.c.Q.

167. Art. 1270 C.c.Q.

168. Art. 1268 C.c.Q.

169. Art. 1269 C.c.Q.

123. RLRQ, c. C-26 (ci-après «C.P.»).

124. Art. 187.11 C.P.

125. Art. 187.14 C.P.

126. Art. 187.12 C.P.

127. Art. 2215 C.c.Q.

128. Art. 1262 C.c.Q.

16. Droit de la famille — 091768, [2009] R.J.Q. 2070 EYB 2009-161578 2009 QCCS
3210.

17. Droit de la famille — 102866, [2010] R.J.Q. 2259 EYB 2010-181371 2010 QCCA
1978.

18. Procureur général du Québec c. A., 24 mars 2011, nº 33990 (C.S.C.).

19. Québec (Procureur Général) c. A., [2013] 1 R.C.S. 61 2013 CSC 5.

20. [2011] 1 R.C.S. 269 2011 CSC 10.

21. Kerr c. Baranow, [2011] 1 R.C.S. 269 2011 CSC 10.

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22. Guy LEFRANÇOIS, «Famille – Revue sélective de jurisprudence 2012», (2013)


115(1) R. du N. 1, 6.

23. Voir notamment : Belley c. Lidy, EYB 2012-207863 2012 QCCS 2671 et Grégoire c.
St-Arnaud, EYB 2012-201279 2012 QCCS 173; conf. par EYB 2012-212409 2012 QCCA
1852.

24. Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation, L.Q. 2002, c.
6; art. 2419 C.c.Q.

25. Art. 653 C.c.Q.

26. RLRQ, c. A-3.001.

27. RLRQ, c. A-25.

28. RLRQ, c. R-9.

29. RLRQ, c. I-6.

30. RLRQ, c. C-20.

31. Convention régissant les relations entre conjoints de fait, «famille», répertoire de
droit, document nº 2, Montréal, Chambre des notaires du Québec.

160. Succession Law Reform Act, L.R.O. 1990, c. S.26, art. 50 à 54.1 telle qu'elle sera
modifiée à la suite de l'annonce faite dans le budget 2009 de l'Ontario déposé le 16 juin
2009. En ligne : .

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