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Introduction
[Présenter le contexte] Le XVIIe siècle fait de la littérature l'espace privilégié d'une réflexion
sur les valeurs et les comportements. Les œuvres littéraires se doivent d'édifier leurs
lecteurs.
[Situer le texte] La publication de La Princesse de Clèves fait date dans l'histoire littéraire :
cette œuvre est considérée comme le premier roman d'analyse psychologique. Au
croisement de l'esthétique classique et du courant de la préciosité, le récit y met en scène
une jeune femme vertueuse confrontée aux tourments de la passion amoureuse. À la
présentation de la cour d'Henri II qui sert de décor au roman succèdent plusieurs portraits,
dont celui de l'héroïne.
L'entrée à la cour, où la jeune fille doit être présentée, est une scène théâtralisée marquée
par le jeu des regards qui convergent sur la nouvelle venue (elle « attir[e] les yeux de tout
le monde ») : son entrée semble une apparition qui crée surprise et « admiration ».
Le portrait est évasif : seule la « beauté » de la Princesse de Chartres (qui n'est même pas
nommée) est mentionnée au début. L'emploi de la tournure impersonnelle « il parut » ainsi
que des articles indéfinis (« une beauté parfaite ») accentuent ce caractère. La métonymie1
« une beauté » souligne la perfection physique de l'héroïne, qui semble surpasser les «
belles personnes » qui fréquentent habituellement la cour.
Après un bref portrait de Madame de Chartres, la mère de l'héroïne, caractérisée par ses
qualités morales hors du commun, l'extrait s'attache ensuite à l'éducation qu'elle a
prodiguée à sa fille. La mère de la Princesse s'est ainsi retirée de la cour « plusieurs années
» pour éduquer elle-même sa fille au lieu de la confier à un couvent ou des précepteurs, à
rebours des usages de son époque. Le soin apporté à cette éducation transparaît dans le
lexique employé : « ses soins », « elle travailla », « elle songea aussi ». Les imparfaits à
valeur d'habitude (« elle faisait », « elle lui montrait », etc.) montrent que cette éducation
passe par de fréquents entretiens.
L'éducation reçue par la princesse vise à « cultiver son esprit et sa beauté », autrement dit
à développer les qualités qui lui permettront de tenir son rang à la cour, mais « pas
seulement », puisque sa mère s'efforce de « lui donner de la vertu ».
1
La métonymie est une figure de style par laquelle on désigne un objet ou un concept en utilisant un terme qui y est associé par un
rapport logique (d'inclusion par exemple).
L'éducation à la vertu de l'héroïne semble porter en premier lieu sur les dangers de la
passion amoureuse. Madame de la Fayette s'inscrit dans une réflexion bien de son temps
sur l'éducation des jeunes filles. Elle critique implicitement l'éducation que « la plupart des
mères » donne généralement aux jeunes filles, qui les laisse ignorantes des dangers de la
« galanterie » et de la séduction. L'emploi du présent de vérité générale (« où plongent », «
ce qui seul peut faire ») signale l'adhésion de Madame de La Fayette au programme éducatif
de son personnage.
Ce passage introduit la réflexion morale sur l'amour qui est au centre du roman. L'amour
apparaît comme incompatible avec la vertu, à moins de s'accomplir dans le mariage. « Les
engagements », c'est-à-dire les relations amoureuses hors mariage sont associées aux «
tromperies » des hommes et
aux « malheurs domestiques » : les femmes ont tout à y perdre selon Madame de Chartres.
L'amour est ainsi mis du côté du danger et du « malheur », tandis que la vertu est associée
à la « tranquillité » et à « l'élévation ».
Il y est question des « mariages » qu'on lui a déjà proposés. L'exigence de sa mère, qualifiée
d'« extrêmement glorieuse », vient renforcer le portrait flatteur de la jeune fille, « un des plus
grands partis qu'il y eût en France ».
C'est seulement à cet endroit que le lecteur apprend l'âge de la jeune fille (« dans sa
seizième année »), et que le personnage est finalement nommé.
Conclusion