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Graphème
plus petite unité déterminant un
sens dans un langage écrit

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En linguistique, un graphème est la plus petite entité d'un système d'écriture.

En linguistique

C'est l’unité graphique correspondant en général à l'unité orale qu'est le phonème[1]


(contre-exemple en français le graphème complexe ‹ oi › qui renvoie à deux phonèmes).
Contrairement à l'unité « lettre », le graphème correspond ainsi mieux à la phonologie
d'une langue.

Cela est particulièrement visible dans le cas des graphèmes dits « complexes ». Les
graphèmes peuvent se distinguer en deux sous-types :

graphème simple : graphème composé d'une lettre ;

graphème complexe : graphème composé de deux ou trois lettres. (exemple des


:
ligatures).

En français, par exemple, le graphème complexe ‹ ou › correspond à un même phonème


/u/, le graphème complexe ‹ ch › renvoie au phonème /∫/ (voir l'article Alphabet
phonétique international).

Exemples de graphèmes complexes en français : ‹ au ›, ‹ eau ›, ‹ ou ›, ‹ oi ›, ‹ ch ›,


‹ on ›, ‹ an › et tous ceux impliquant une lettre finale silencieuse tels que ‹ op › dans le
mot « trop ». Exemples de graphèmes complexes en anglais : ‹ ea ›, ‹ ee ›, ‹ sh ›, ‹ ch ›,
‹ ow ›, ‹ ai ›.

Selon le type d’écriture, le graphème se réalise visuellement et phonétiquement de


diverses manières. Voici un modèle théorique :

alphabets : un graphème = une lettre (ou un digramme, un trigramme) = un phonème ;

syllabaires : un graphème = une syllabe ;

alphasyllabaire : un graphème = une consonne et une voyelle ou un phonème seul ;

abjad : un graphème = une lettre = une consonne ;

écriture logographique : un graphème = un logogramme [réf. souhaitée] = un élément


graphique représentant un élément concret de la réalité (pictogramme) ou un élément
abstrait de la réalité (idéogramme).

Dans la plupart des cas, rien n'indique, dans un logogramme, son signifiant (comment il
doit être prononcé). En d'autres termes, c'est la plus petite unité significative du
langage comme signe graphique unique qui représente un mot complet,
indépendamment de la langue. Exemple, le signe € est le logogramme du mot « euro ».

Historiquement, le graphème représente l’étape-clé entre l’oral et l’écrit.[1] (http://www.


archaeometry.org/graphe.htm)  [archive]

On peut appliquer, pour savoir si un caractère est un graphème ou non, le même test
que pour les sons, à savoir celui des paires minimales :

en français, ‹ a › et ‹ e › sont des graphèmes puisque « sa » et « se » s’opposent ;

‹ a › et ‹ a › ne sont pas des graphèmes car « sa » ne s’oppose ni à « sa » ni à « sa ».
Ce sont donc des variantes libres ;

en revanche, ‹ a › n'est pas le seul graphème associé au phonème /a/ (de car). En
effet, par exemple, le mot couenne peut se prononcer parfois /kwan/ et le phonème /a/
y est alors représenté par le digramme < en >. Le graphème < en > représente dans
notre écriture actuelle au moins trois sons : les nasales /ɑ̃/ et /ɛ̃/ (comme dans
« Agen ») et la voyelle /a/ ou être muet (« ils parlent »).
:
Parmi les variantes non pertinentes des graphèmes, on compte principalement des
variations de mise en forme (gras, italique, etc.), des variantes contextuelles et des
variantes conjointes.

De plus, pour qu'une suite de lettres (dans les alphabets) forme un graphème
(digramme, trigramme), il faut que cette combinaison soit reliée à un phonème
identifiable. Par exemple, et n’est pas un graphème en français puisqu'il se réalise de
manières différentes, /e/, /εt/, /ε/ et ne note pas un phonème unique, au contraire de au,
qui représente la plupart du temps /o/.

En psycholinguistique

Un des domaines de la psycholinguistique consiste à comprendre les mécanismes


associés à la reconnaissance visuelle de mots, un des processus engagés dans la
lecture. Récemment, Arnaud Rey et ses collaborateurs (Rey, Ziegler & Jacobs, 2000[2])
ont montré que le graphème constitue une des unités sublexicales (plus petites que le
mot) activées lors de la lecture d'un mot. En effet, ils ont montré qu'il était plus difficile
(et plus lent) d'identifier une lettre insérée dans un graphème complexe que dans un
graphème simple.

Ainsi, s'il est demandé aux participants de l'expérience de détecter la présence/absence


de la lettre ‹ o ›, il est plus délicat de répondre correctement et rapidement lorsque le
mot présenté est COIN (dans lequel la lettre o appartient au graphème complexe ‹ oin ›)
par rapport à la condition où le mot présenté est ROBE. Cela peut indiquer une
compétition entre le traitement des lettres et le traitement des graphèmes. Lors de la
présentation d'un graphème complexe comme ‹ oin ›, chacune des lettres est
initialement traitée mais aussi le graphème complexe, ce qui ralentit le traitement. Ces
résultats ont été confirmés en français et en anglais et dans des diverses études.

En sémiologie de l'image

Pour écrire un texte, il faut des lettres qui forment des mots, lesquels se combinent en
une phrase. C’est le principe de la double articulation qui permet de combiner un
nombre restreint d’éléments de base non significatifs en une multitude d’unités
possédant chacune une signification distincte.

Le linguiste français André Martinet a souligné ce trait commun à toutes les langues
naturelles (par opposition aux langages formels). L’existence du même système dans le
code iconique – l’image – a été démontrée par Claude Cossette dans son ouvrage « Les
images démaquillées » publié en 1982. Celui-ci s’appuyait notamment sur la
:
démonstration de Jacques Bertin en 1967 dans son ouvrage « Sémiologie Graphique.
Les diagrammes, les réseaux, les cartes », dans lequel il explique qu’il existe un
répertoire de six graphèmes, ou plus précisément de familles graphémiques, pour créer
des iconèmes : la forme, la valeur, la taille, le grain, l’orientation et la couleur.

Essentiellement, le fonctionnement de la double articulation est le suivant.

Premier niveau, la fonction de distinction :

pour la parole, un répertoire limité de sons ;

pour l’écrit, un répertoire limité de lettres ;

pour l’iconique, un répertoire limité de graphèmes.

Deuxième niveau, la fonction de signification :

pour la parole et l’écrit, une multitude de mots qui sont formés à partir des sons et des
lettres ;

pour l’iconique une multitude d’iconèmes qui sont formés à partir des graphèmes.

Le principe se poursuit à un troisième niveau, la fonction de sens :

pour la parole et l’écrit, les mots se combinent pour créer des phrases ;

pour l’iconique, les iconèmes se combinent pour créer des images.

Enfin, on atteint un quatrième niveau, la fonction de raisonnement :

pour la parole et l’écrit, les phrases s’agencent dans les différentes formes de
discours ;

pour l’iconique, les images s’agencent dans une mosaïmage (une mosaïque d’images
regroupées en un seul ensemble) ou dans des successions ordonnées (sur plusieurs
supports fixes ou en animation sur un support unique).

En reconnaissant la logique de la double articulation dans le code iconique, on identifie


les graphèmes et les iconèmes comme les deux matériaux de base pour construire des
images. Les premiers sont l’équivalent des lettres, c’est-à-dire des éléments qui n’ont
guère de signification ni d’existence lorsqu’ils sont considérés individuellement. Par
contre, ce sont eux qui rendent possible la création des éléments significatifs que sont
les iconèmes. Ceux-ci s’avèrent les mots de l’image, avec tout ce que cela comporte de
possibilités créatives, de puissance d’évocation... et de pièges quant à leur signification.

Ainsi, pour décrire un élément visuel, nous pouvons dire qu’il présente telle forme, telle
valeur, telle taille, telle orientation, tel grain et telle couleur. Ce sont les variables
graphémiques. Pour modifier cet élément, nous pouvons intervenir sur l’une ou l’autre
:
de ces caractéristiques.

Par ailleurs, les graphèmes se chargent d’une dimension supplémentaire, celle de la


personnalité propre à leur utilisateur. La comparaison avec la parole est dans ce cas très
éclairante. Toutes les personnes utilisent les mêmes sons pour parler. Par exemple, en
français il y a quatre voyelles nasales : ɑ̃, comme dans rang, avant ; ɛ̃, comme dans rein,
brin, pain ; ɔ̃, comme dans bon, ton ; œ̃ , comme dans brun, un. Ce sont les mêmes sons,
les phonèmes. Cependant, à l’audition de ces phonèmes, on reconnaît la personne qui
parle si elle nous est familière. On peut aussi identifier qu’elle nous est étrangère, mais
du même groupe linguistique ou non en raison de son accent.

La façon exacte de créer et d’utiliser les phonèmes est propre à un individu ou à un


groupe d’individus. Il en va de même pour les graphèmes. La façon particulière d’utiliser
les six variables graphémiques crée le style graphémique qui permet de différencier les
images réalisées par Michel-Ange de celles de Picasso, de Van Gogh ou de Lemieux, et
ce, de la même manière qu’on reconnaît les voix d’individus particuliers. D’une extrême
richesse et d’une subtilité extraordinaire, le style graphémique permet aussi de faire la
distinction entre une photo de publicité ou de journal, une œuvre récente et un
document ancien, un travail d’amateur et de professionnel.

En création de noms de marques

La question des graphèmes intervient lorsque l’on questionne le rapport image/son dans
la création d’un nom de marque ou d'un slogan afin d’en manipuler consciemment le
sens, le son ou l’image. En effet, ces derniers ont pour principal objectif d’influer sur le
comportement du récepteur du message. Pour cela, les publicitaires ont recours à une
utilisation particulière des signes. Nous entendons par là que les formes que l’on
retrouve dans le système linguistique peuvent y être manipulées morphologiquement et
sémantiquement comme dans la plupart des écrits poétiques[3]. Ainsi le graphème
« oo » pour noter le son « ou », insolite en français (sauf dans « zoo »), sera très
fréquent en anglais, et sera porteur d'une indéniable connotation anglo-saxonne.

On peut citer la mode des marques utilisant le graphème « ou » pour noter le son « ou »
(Noos, wanadoo, taboo, etc.) ou encore la mode du graphème « k » pour noter le son
« qu » (Kelkoo, Kiloutou, Kiri, Kadeos).

En création typographique

Dans le travail de conception et de dessin de caractères typographiques, le terme


« graphème » est utilisé, tout comme le mot « glyphe », pour différencier clairement la
:
forme des caractères, leur son, et la manière de les utiliser.

Cette nuance est très importante lors de la création de polices de caractères disposant
d'accentuation peu usitée en France (comme les accents des langues d'Europe de
l'Est) : il faut clairement établir, par exemple, la différence entre un Ş (s cédille), utilisé
en turc, en kurde et en azéri, et un Ș (s à virgule souscrite) que l'on retrouve dans les
alphabets romains et moldaves. Ces deux signes, bien que très proches graphiquement,
sont deux graphèmes différents et doivent donc être traités séparément, en lien avec
des traditions et usages typographiques singuliers.

On peut également noter qu'une ligature typographique est la fusion de deux


graphèmes pour n'en former qu'un seul nouveau. L’esperluette (&) est à l’origine une
ligature esthétique de « et » servant d’abréviation. Elle est devenue un véritable
logogramme, au même titre que les chiffres dits « arabes ». Selon la langue, on la lira,
entre autres, et, y, and ou und.

Références

1. Berndt, Reggia & Mitchum, 1987. Références complètes BERNDT, R.S., REGGIA,
J.A., & MITCHUM, C.C. (1987). Empirically derived probabilities for grapheme-to-
phoneme correspondences in English. Behavior Research Methods, Instruments, &
Computers, 19 (1), 1-9.

2. Rey, A., Ziegler, J. C, & Jacobs, A. M. (2000). Graphemes are perceptual reading
units. Cognition, 75, B1-B12

3. La motivation submorphologique de quelques noms de marques et slogans (http://


halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00784878)  [archive] écrit par Michaël
GRÉGOIRE, « Laboratoire de Recherche sur le Langage » Université Blaise Pascal –
Clermont-Ferrand 2

Voir aussi

Articles connexes

Acrophonie

Écriture

Grammatologie

Graphématique

Graphologie
:
Signe | Symbole

Sémiologie graphique

Liens externes

Écriture

Alphabet phonétique
(http://membres.multimania.fr/clo7/grammaire/api.htm)  [archive]

Page web de Arnaud Rey (http://gsite.univ-provence.fr/gsite/document.php?pagendx=


4790&project=lpc)  [archive]. Voir publications

Article de Rey, Ziegler & Jacobs, 2000 (http://gsite.univ-provence.fr/gsite/Local/lpc/dir


/rey/articles/RZJ2000cognition.pdf)  [archive]

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Dernière modification il y a 2 jours par Floflo


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