Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
59. JU p. 299.
60. En supposant d6finie une topolosie sur cet ensem ble et en supposant
continue cette fonction, rabsence d'on maxiJDUID p e ut 8tre due soit à
ce que l'ensemble des mondes possibles n'es pas b m6, soit à ce
t o
qu'il n'est pas ferm6. La p remiàre J)OS811>ili1' - bien que trop prkise -
est sana doute celle qui correspond le mie� à la pe�. scol�stique ;
on vena au chapitre suivant que la deUXl�e po111bilit6 n est pas
enti6rcment à exclure.
61. A. ARNAULD, Rl/lexlon.r PhllolophiqUU et Th"'loglque1 B&lr le
Nouveau Syatime u la Nature et de la Gr4ce, Cologne 1685, t. 1, p. 44.
Le pauap compl et est cit 6 plus loin.
L'ENTREPRENEUR DIVIN 187
incomparables; dans un rapport d'ordre lexicographique. On
a vu ci-dessus que l'entreprise qui détermine le volume à produire
sans faire entrer le rapport entre les coûts et les revenus, s'éloi
gne de la rationalité capitaliste et instrumentale. Or une fois
choisi ce volume, on peut s'efforcer de le produire de la manière
la moins coûteuse; alors, dans la phrase de Weber, c ist das
ffandeln nur in seinen Mittel zweckrational a >. En quatrième
lieu vient la théologie de Malebranche, qui affirme hardiment
que c Dieu pouvait sans doute faire un monde plus parfait
que celui que nous habitons, [mais] pour faire ce monde plus
parfait, il aurait fallu qu'il edt changé la simplicité de ses
voies a >. S elon cette position, la perfection brute de l'univers
aurait pu être plus grande, mais aux coftts d'une dépense
supplémentaire qui serait plus grande encore et qui laisserait
donc une perfection nette moins élevée.
Afin de bien comprendre la logique - parfois difficile - de
la maximisation, on nous permettra une brève digression pour
analyser l'oppo sition Arnauld-Malebranche en termes de la
théorie moderne de l'équil ibre économique général ... Dans
cette théorie le but est de démontrer l'existence d'un équilibre
de marché, en imposant certaines conditions au comportement
des agents économiques. Il faut notamment démontrer l'existence
(pour un vecteur-prix donné) d'un maximum de profit pour
chaque entreprise et d'un maximum d'utilité pour chaque consom
mateu r, en tenant compte de la possibilité qu'il peut y avoir
plusieurs vectems-marchandises qui réalisent ce maximum. Pour
Malebranche et Leibniz Dieu est comparable à l'entrepreneur
qui cherche à réaliser le maximum de profit. Pour Leibniz il
faut que ce maximum soit réalisé par un seul monde parmi les
mondes possibles, puisque autrement Dieu n'aurait pas de raison
pour son choix entre les plusieurs mondes qui réaliseraient le
maximum ; par contre rien dans la théologie de Malebranche
n'exclut, autant que nous sachions, que ce maximum soit atteint
dans plusieurs des mondes possibles, à perfection égale et
maximale. Pour Arnauld Dieu cherche plutôt à réaliser le
maximum de production, ce qui peut aussi se faire de plusieurs
préexistent aux choses et aux forces qui les rempll55ent 109• Comme
on l'a vu déjà au chapitre précédent, Leibniz ie sert ici de
deux raisonnements difficilement compatibles. D'une part il
veut rendre compte de la constitution du tem� et de l'espace
par les choses, d'autre part il essaie de déterminer l'utilisation
optimale du temps et de l'espace, comme s'ils prétxistaient aux
choses. Tout se passe ici comme si la force de l'analogie écono
mique détruit la rigueur de la pensée leibnizienne, au moins dans
les textes que nous avons cités. En toute rigueur métaphysique
ce sont les lois de compossibilité qui déterminent \e maximum,
le temps et l'espace n'étant que les règles de succession et de
coexistence de ce maximum. Sous l'impact de la pensée éco
nomique Leibniz tend néanmoins à affirmer qu'il s'agit pour
Dieu d'utiliser au maximum des ressources spatio-temporelles
données 1°'.
Cette ambiguïté signalée, observons maintenant qu'il est très
difficile de donner ici un sens à la notion d,un coflt, définie 1
comme une quantité à soustraire à une autre quantité. Il n�
s'agit pas de dépenser de l'énergie afin d'en produire plus ; il 1
n'y a pas deux formes d'énergie dont rune est positive et l'autre
est négative. Le mal métaphysique est simplement la privation,
l'absence de quelque chose, la négation passive. Par contre le
mal physique et le mal moral - la souffrance et le péché -
constituent des quantités négatives réellement existantes, com me
on le verra plus loin à propos d'un texte de Kant. Ce n'est
donc que dans l'économie morale que la notion de coût peut
· st
103. Citons en note un passage additionnel : c Semper sci'li cet em
in rebus principium determinationis quod a Maximo Minimo�e p � eten du
est, ut nempe maximus praestetur effectus, minimo ut sic dicam s :
Et hoc loco tempus, locus, aut ut verbo dicam, receptivitas vel °!di!�im
mundi baberi potest pro sumtu sive terreno, in quo quarn comOm
C mmoditatei
est aedificandum, formarum autem varietates respondent abet ut in
aedüicü multitudinique et eleaantiae camerarum. Et sese re: s secundum
lubis quibusdam, cum loco omnia in Tabula sunt replen 'is exclusus
certas leges, ubi niai artificio quodam utare, postremo spatl volebas >
iniquis, plura cogeris loca relinquere vacua, quam poteras vel 1
(GP VU, pp. 303-304.) 0 t d
t 04. La distinction peut . se prkiser, en e.xaminant .la e û fa�dr.:
mondes possibles non actualisâ. Dana I analogie konoauqu
'
ce tri
croire que tous les univers possal>les comportent le meine :n':es non
dimensionnel et qu'ils diffèrent seulement en ce que _ tes ':iboptimale
actualisâ utilisent et remplissen� cet espace de ,.mam�re111ondes possi:
Dana une pen8'e plus rigoureuse il faut admettre 1 id6e de edt un espace
blea avec un espace bi-dimemionnel qui ne serait pas seuleJP
tri-dimensionnel mal rempli.
210 LA FORMATION DE L'ESPRIT CAPITALISTE
1
1
le problème des crises périodiques. Nous examinerons dans 1
l'ordre ces trois questions, avec pourtant la particularité suivante. 1
Les textes qui ne font aucune mention explicite du temps
peuvent porter soit sur les théodicées instantanées soit sur les
théodicées en toute généralité, y compris les théodicées tem
porelles. Ces textes seront cités à l'appui de nos remarques
sur le premier des trois problèmes distingués, même s'ils ont
padois une portée plus large.
Tout lecteur de la Confessio Philosophi et de la Théodicée
connaît les formules leibniziennes : la consonance qui se dégage
grâce aux dissonances, la peinture dont la lumière demande un
fond d'ombre, la répétition qui diminue la perfection, l'impos
sibilité métaphysique d'une égalité parfaite de toutes choses, le
fait que deux nombres impairs donent un nombre pair, que deux
corps froids donnent parfois de la chaleur, que deux fluides peu
vent former un solide, que l'union de deu� choses insignifiantes
peut être supérieure à l'union de deux choses admirables, qu'il
faut connaître l'aigre afin d'apprécier le doux, la maladie pour
apprécier la santé, que le repentir demande le châtiment, que
le plaisir que nous prenons d'un roman ou d'une comédie vient
de l'apparence initiale de chaos ou de danger qui est ens uite
écartée. On retrouve la plupart de ces métaphores chez les
contemporains de Leibniz, bien qu'elles occupent chez lui une
place particulièrement importante. Or il est clair que ces phrases
décousues ne constituent pas une philosophie, puisque seule
une formulation mathématique est susceptible d'exprimer avec
précision le rapport entre l'optimal et le suboptimal. En entre
prenant l'étude des textes où est proposée l'analogie mathéma
tique de la t héodicée, on s'aperçoit pourtant d'une confusio�
assez surprenante. Il s'agit de situer le principe suivant : l'o�ti
malité du tout exige l'optimalité de chaque part ie. Ce pri�c1�
est à interpréter en deux univers distincts : l'univers quantitatif
des mathématiques, l'univers qualitatif des esp rit s. Sur la
question de savoir si ce principe est valable dans l'un ou l'autre
des deux univers, Leibniz semble osciller entre trois positions
distin ctes. En premier lieu on peut citer le texte célèbre ��
Tentamen Anagogicum sur lequel s'appuie Couturat u lorsq� il
parle de c l'origine logico-mathématique de l'optimisme le1b
nizien >