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Fondateurs
N. Aïn-Séba, G. Aumassip, F. Benouis, N. Benseddik, Y. Chaïd-Saoudi, S. Chergui, N. Chérif
Comité scientiique
Aïn-Séba Nagète, préhistorienne, Institut d’Archéologie, Alger
Aït Amara Ouiza, historienne, Bouzareah, Alger
Aumassip Ginette, préhistorienne, Alger
Chaïd-Saoudi Yasmina, préhistorienne, Institut d'Archéologie, Alger
Desanges Jehan, historien, Académie des Inscriptions et Belles Lettres (France)
Ghaki Mansour, archéologue, Universita degli studi di Napoli « L’Orientale » (Italie)
Heddouche Abdelkader, préhistorien, CNRPAH, Alger
Rédaction
F. Benouis, directrice
N. Aïn-Séba, G. Aumassip
© AASPPA
ISSN n°2170-1016
Logo D. Sadaoui
Conception couverture et infographie
Rym Mokhtari
Notes et travaux
rodrigue A. : Les industries préhistoriques des amas coquilliers de Tarfaya (Maroc
saharien atlantique).................................................................................................................139
Bernezat J.-L. : L’abri de l’oryctérope en Immidir.......................................................................148
BoukHenouf A., kerkacHe L. : Canons de la Citadelle d’Alger (Casbah)…...............................152
Benouis F. : L’aqueduc de Aïn Zeboudja, une restauration en deux temps..................................159
Marini S. : Grecs et Romains face aux populations libyennes. Des origines à la in
du paganisme (VIIe s. av. J.-C. – IVe s. ap. J.-C.)...................................................................166
ميلة،" ال ّس ور البيزنطي لمدينة "مياف.مج اني ع ّ ...................................................................................................184
Hommage
aïn-séBa N. : L’œuvre de H.-J. Hugot….....................................................................................189
Comptes rendus….....................................................................................................................195
Résumés.......................................................................................................................................201
Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien :
Les cent premières années de recherches sur Sedrata
(Ouargla, Algérie), 1845-1945.
Cyrille aiLLet*
En 1960, Marguerite van Berchem (1892-1984) publiait un excellent article (van Berchem,
1960) où elle retraçait l’histoire de la découverte et des fouilles successives de Sedrata, un site
archéologique majeur pour l’histoire du Maghreb et du Sahara médiévaux, situé à une dizaine de
kilomètres au sud d'Ouargla. Notre intention, dans ce premier d’une série d’articles que nous aime-
rions consacrer au dossier de Sedrata pour la revue Ikosim, n’est donc pas de tisser la même trame,
mais de mobiliser les résultats de nouvelles recherches sur ce sujet et d’adopter un point de vue
différent (voir notre article préparatoire : Aillet et Gilotte, 2012).
Depuis 2010, nous nous sommes en effet repenchés, avec Patrice Cressier et Sophie Gilotte1,
sur l’histoire et l’archéologie de ce carrefour du Sahara médiéval2. La lecture exhaustive des écrits
disponibles et la consultation d’un nombre important de documents d’archives nous ont permis
de compléter le panorama dressé par l’archéologue suisse, et de le prolonger jusqu’à la in du XXe
siècle. Nous avons également soumis l’œuvre de M. van Berchem à un examen critique, et tenté
d’évaluer les apports des travaux antérieurs, mais aussi leurs limites et leurs présupposés. L’essor,
depuis plusieurs décennies, des études sur la science coloniale nous a naturellement facilité la
tâche. Il n’en demeure pas moins vrai que l’une des conditions essentielles du renouvellement de
l’historiographie relative au Maghreb semble résider dans la réappropriation critique du corpus
scientiique, ou parascientiique, élaboré depuis le XIXe siècle. Cette littérature contient en effet
une somme d’informations et d’observations inédites, et mérite donc d’être valorisée comme une
1 - Tous deux archéologues chargés de recherche au CNRS et membres du CIHAM-UMR 5648 (Lyon).
2 - Dans le cadre d’un projet spéciique inancé par la Fondation Max van Berchem (Genève) et d’un programme plus
large intitulé « Maghribadite » et soutenu par l’Agence Nationale de la Recherche. Nos activités doivent déboucher
prochainement sur la publication par la Casa de Velázquez d’une monographie intitulée Sedrata : Histoire et archéo-
logie d’un carrefour du Sahara médiéval. Nous réservons donc pour cet ouvrage une partie de la documentation
inédite.
* Maître de Conférences en Histoire des mondes musulmans médiévaux à l’Université Lumière-Lyon 2, membre du
CIHAM-UMR 5648 et de l’Institut Universitaire de France (cyrilleaillet@yahoo.fr).
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Ikosim
source à part entière pour l’historien ou l’archéologue. Mais par ailleurs, c’est grâce au décryptage
des enjeux qui la travaillent et des discours qui la traversent qu’une nouvelle histoire du Maghreb
pourra continuer à émerger.
Le cas de Sedrata s’avère très instructif à cet égard. Avec la Qalʻa des Banou Hammad3, la ville
ensevelie a constitué l’une des priorités de l’archéologie médiévale algérienne à l’époque coloniale. Sa
position géographique et son rôle passé dans le commerce transsaharien lui ont par ailleurs conféré
une place particulière dans l’entreprise française de pénétration au Sahara, et dans le corpus idéo-
logique et scientiique qui en a découlé. Perçue tour à tour comme une réalisation excentrée de l’art
islamique oriental, comme la manifestation d’une culture berbère que l’on jugeait intemporelle, ou
comme une héritière de Tahert, la capitale de l’ibadisme maghrébin, Sedrata témoigne des débats et
des projections intellectuelles qui ont façonné l’historiographie du Maghreb. Enin, son cas illustre
aussi le fait que des pans entiers de l’histoire du Sahara médiéval sont encore plongés dans l’obscurité.
Cette contribution retracera les travaux sur lesquels Marguerite van Berchem, qui mit pour
la première fois le pied dans l’oued en 1950, s’est appuyée. Il sera question de la découverte du
site et des premières fouilles, qui s’inscrivent dans le contexte des grands voyages d’exploration
du Sahara de la in du XIXe siècle. Nous nous intéresserons aussi aux premières tentatives d’in-
terprétation académique, qui reposent sur les grilles d’interprétation ethnicisantes et culturalistes
alors en vigueur dans l’historiographie de l’Algérie. Enin, nous évoquerons un épisode méconnu
de l’histoire de Sedrata, mais pourtant crucial dans la détermination des choix futurs de M. van
Berchem : les fouilles menées par l’architecte Faucher entre 1942 et 1945, en pleine seconde guerre
mondiale. Ce premier compte-rendu introduira notre prochaine publication, consacrée aux activités
de Marguerite van Berchem, déterminantes pour la connaissance de ce complexe archéologique.
Comme le souligne M. van Berchem, dans les premières décennies de la domination française
sur l’Algérie, conquête et exploration scientiique allaient de pair, sur le modèle de l’Expédition
d’Égypte. Le Sahara constituait alors une terra incognita, dont on chercha dès le milieu des années
1840 à repérer les axes de pénétration, les points d’eau et les pôles de sédentarité. L’objectif était
en effet de faire la jonction entre la Méditerranée et l’Afrique noire, tout en apprivoisant un espace
que l’on percevait comme menaçant car il servait de refuge à bien des opposants et abritait des
populations farouchement hostiles à la nouvelle puissance qui régnait dans le nord : les Touaregs
en étaient le meilleur exemple.
Contrairement à ce que Marguerite van Berchem écrivait (van Berchem, 1960, p. 290), Sedrata
s’immisce dans les esprits avant même l’occupation de la région par les Français. Nommé par le
3 - À la demande de la revue, les termes arabes usuels dans la culture algérienne seront translittérés en français de la
manière la plus simple possible.
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Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
maréchal Bugeaud à la direction des affaires arabes, le lieutenant-colonel Eugène Daumas (1803-
1871) fut un précurseur dans la collecte d’informations orales sur le Sahara (Pouillon, 2008, p. 258-
259). Dans son portrait du Sahara algérien, dédié au duc d’Isly et paru en 1845 après deux ans
d’enquêtes menées auprès de plus de deux mille informateurs indigènes, Ouargla occupait une
place de choix (Daumas, 1845, p. 78-88). Les informations lui venaient d’une source locale, en la
personne d’un notable nommé al-Hadj al-Maʻiza, membre de l’assemblée ( jamaʻa) du quartier des
Banou Waguin. La description attribuée à cet homme, venu à Alger observer les nouveaux occu-
pants du pays, ixe les grands repères du paysage local, qui reviendront désormais sous la plume
des premiers voyageurs français : le plateau désolé de la Hamada, auquel s’oppose l’océan de ver-
dure de l’oued ; les masses géométriques épurées de la ville moderne qu’entourent son fossé et ses
murailles, et que dominent le minaret de la grande mosquée et la qasba du sultan :
Du sommet aride et nu de Chabetel-Meh’al4, le voyageur a sous les pieds une forêt de dattiers,
échelonnée sur le versant sud de la montagne, et qui, gagnant la plaine, s’étend jusqu’à une lieue plus
loin dans un sol marécageux.
À mesure qu’on avance, la physionomie devient différente : les dattiers sont moins pressés, des
arbres fruitiers de toute espèce leur disputent le terrain, et des carrés de culture annoncent l’action
de la main de l’homme.
Dans le centre à peu près de cette forêt devenue jardin, une muraille crénelée, couronnée de
quarante forts à deux étages, en terrasses, crénelés eux-mêmes, enceint un immense périmètre,
coupé de jardins intérieurs, semé de cinq ou six cents maisons blanchies au plâtre, que dominent
trois mosquées et une k’asbah’ ; c’est Ouargla [...]. Comme Tougourt, elle est protégée par un fossé
parallèle à sa muraille d’enceinte, et que l’on peut à volonté remplir d’eau.
D’emblée surgit l’image d’un certain déclin : la région est rongée par le paludisme, les ruines
s’emparent de la ville, et le commerce saharien s’est tari : seuls « quelques Touaregs » et « quelques
rares individus » de Ghadamès rapportent encore de la poudre d’or, de l’or fondu en torsades, des
défenses d’éléphants et des esclaves. Ouargla n’est plus qu’un modeste « entrepôt du désert » où les
tribus s’approvisionnent, et le temps des « marchands voyageurs » et des orfèvres juifs itinérants
s’est éteint. Un protocole descriptif se met en place : autour de la ville, le regard scrute les manifes-
tations de la vie sédentaire. La liste des cinq qsour est ainsi dressée : Rouissat et son oasis prospère,
le village de marabouts de Sidi Khouiled, les localités d’El Hadjadja et de Ayn Amer, et la Gara
Krima. Sur celle-ci, on ne manque pas de signaler l’existence du puits, et les vestiges « d’un village
que la dificulté de la position aura sans doute fait abandonner ». Témoin d’un passé dont on traque
déjà les moindres traces, Sedrata fait sa première apparition :
À une lieue plein nord de Krima s’élève une autre montagne nommée Djebel el Ao’bad5, et
à une lieue est de Djebel el Ao’bad se trouvent les débris d’une grande ville abandonnée que l’on
nomme Sedrata, et qui, selon la tradition, aurait été détruite par un chérif du Maroc, appelé K’aïd
4 - Sha ͑abat al-mahall. Le terme sha ͑abat désigne, en contexte saharien, une ravine creusée sur les lancs d’un plateau
par les eaux de ruissellement.
5 - La « montagne des dévôts », Djebel al-ʻOubbâd.
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Ikosim
el-Mans’our. Sous les lots de sable on distingue encore les restes de la muraille d’enceinte et les
ruines d’une mosquée. Une source très abondante, et qui se divise en quatre petits ruisseaux, coule
à quelque distance de ces ruines.
Dans ce « K’aïd el-Mans’our », on reconnaît bien évidemment le personnage évoqué dans l’un
des manuscrits rapportés de Ouargla par Harold Tarry (Duveyrier, 1883, p. 211-212). Le Sahara
algérien, livre de chevet des premiers explorateurs du Sahara, introduit la légende de Sedrata dans
les esprits. Quant à la quête de Ayn Sfa, la source qui alimentait autrefois l’aire d’habitat de Sedrata,
ou continue d’alimenter ses ruines selon le témoignage recueilli par E. Daumas, elle ne fait que com-
mencer. Dès l’année suivante, l’hydrologue François Jacques Jaubert de Passa (1785-1856) l’évoque
dans sa monumentale enquête sur les structures hydrauliques dans le monde (1846, vol. 4, p. 234).
Les premiers éclaireurs ne tardent pas à afluer vers ces conins. En 1850, guidé par la quête
chimérique des vestiges de la romanité – qui marquent les limites de la « civilisation » dont la France
se veut la restauratrice (Modéran, 2003, introduction) – Louis-Adrien Berbrugger (1801-1869), l’un
des fondateurs des grandes institutions académiques coloniales, avance vers le Sud. Comme le rap-
pelle M. van Berchem, il arrive jusqu’à l’oued Righ et jusqu’au Mzab, mais n’atteint pas Ouargla et
doit reconnaître que sa recherche n’a été qu’une « série de désappointements » (Berbrugger, 1857,
p. 296 ; van Berchem, 1960, p. 290-291). Deux ans plus tard, la prise de Laghouat fait de Ouargla
un enjeu militaire d’autant plus important que l’oasis est devenue un foyer de résistance que dirige
le sultan Muhammad b. ʻAbd Allah, principal animateur du djihâd contre ces nouveaux envahis-
seurs (Colomieu, 1863, p. 162). Une intervention le déloge de son qsar de Rouissat en 1853 au proit
d’un « aghalik » de la tribu alliée des Awlad Sidi Shaykh, Sidi Hamza, et c’est à l’occasion de cette
première incursion que l’oficier tirailleur Corneille Trumelet (1817-1892) observe pour la première
fois la région et recueille des éléments supplémentaires de son histoire, sans toutefois s’arrêter sur
l’existence du site archéologique (Trumelet, 1885, p. 24-32, 457-480). Ouargla entre dans la sphère
d’inluence française, tout en échappant encore à la domination directe. En 1854, l’anglais John
Reynell Morell, auteur d’une synthèse bien documentée sur l’Algérie française et d’une carte « éta-
blie selon des documents oficiels », localise Ouargla en dehors du territoire contrôlé par l’Hexa-
gone, à l’extrémité méridionale. À l’ouest, bien loin de son emplacement réel, igure « Cedrata »
(Reynell Morell, 1854, p. 18).
Les premières recherches sérieuses commencent sur place vers 1860. Elles concernent d’abord
les anciens systèmes d’irrigation, que les troupes coloniales tentent de remettre en service. Le
fameux « puits éboulé » de Ayn Sfa – réputé alimenter les oasis mortes du sud de Ouargla – est en
grande partie désensablé, mais les travaux doivent s’arrêter au bout de quatre mois, après que l’on
ait atteint l’eau à une profondeur de 19,80 mètres (Ville, 1868, p. 501-502). L’ingénieur des Mines
Ludovic Ville (1820-1877), sur laquelle M. van Berchem s’arrête plus longuement, recense alors
les ressources hydriques du bassin ain d’étudier les possibilités d’une revitalisation des espaces
agraires (Ville, 1868, p. 481-512 ; van Berchem, 1960, p. 292-294).
En parallèle, Henri Duveyrier (1840-1892) explore lui aussi le sud de l’Algérie pour préparer
son voyage en pays touareg en recueillant des informations sur les étapes caravanières vers le grand
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Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
Sud (Pouillon, 2008, p. 340-342). Le projet de réunir l’Afrique du Nord aux possessions françaises
du Sénégal et de s’emparer du commerce transsaharien implique la conquête de ces immenses
espaces, encore insoumis. Les notes que cet aventurier consacre à Ouargla insistent sur le rôle
autrefois actif de l’oued dans les échanges panafricains. S’appuyant sur une enquête orale, il date de
l’époque moderne le déclin de ce centre naguère lorissant, et l’explique par le détournement de la
voie commerciale Agadez-Ouargla au proit de nouvelles routes, polarisées au sud par Kano et Kat-
sina, au nord par Ghat, Ghadamès et El Oued. Nourri par la lecture d’Ibn Khaldoun, il rappelle aussi
l’importance de l’élément berbère dans l’histoire locale, tout en soulignant que les « Banî Ouarglâ »
sont eux-mêmes le produit d’une « fusion des races » : mêlés aux populations « sub-éthiopiques »
ou « garamantiques », ils se sont intégrés à cette « civilisation nègre très avancée » qui aurait autre-
fois forgé l’unité et la prospérité des contrées sahariennes6. De cette rêverie historique sur les ves-
tiges d’un passé que l’on idéalise déjà, se dégage la conclusion suivante, maintes fois martelée par la
littérature coloniale : ces ruines d’une civilisation défunte ne peuvent appartenir ni à l’Islam, ni aux
Arabes. Tout en reconnaissant que la région pourra fournir une excellente halte pour les caravanes,
il conclut avec pessimisme : « Aujourd’hui, Ouarglâ est une ville morte, et nul ne la ressuscitera, je
le crains » (Duveyrier, 1864, p. 279-280, 284-290).
Il est vrai que, sur place, la situation est troublée : il faut plusieurs années avant que la domina-
tion coloniale s’afirme. En 1862, la pax gallica est de nouveau imposée par une colonne militaire
partie de Géryville : « nos jeunes peintres et nos savants étaient de la partie », note le Commandant
Victor Colomieu (Colomieu, 1863, p. 181). Constatant l’état de délabrement de la ville, l’abandon de
nombreux puits et la misère des populations, il médite sur le passé glorieux d’une région tombée
dans un déclin inexorable qu’il attribue à « l’oisiveté » indolente de ses habitants. En 1865, l’agha
appointé par la France ayant fait défection une nouvelle fois, une autre expédition est lancée. Le
docteur Charles-Victor Sériziat, qui l’accompagne, oppose de nouveau la ruine du présent à la pros-
périté d’un passé reculé dont il ne perçoit que des bribes. Il cherche toutefois dans les « vestiges des
anciennes plantations » les traces d’une « oasis primitive », qu’il situe le long du plateau rocheux
occidental, à l’écart de la « ceinture délétère » des chotts, responsables selon lui des miasmes qui
empoisonnent la population. Les qsour à moitié dissous lui semblent incarner une forme d’avertis-
sement : « Il me sembla que c’était là la limite infranchissable aux efforts modernes, les colonnes
d’Hercule de la France ! ». Cette angoisse du vide est toutefois balayée par un grandiose projet
saint-simonien : changer les règles du climat saharien en faisant sortir les oasis du sable, élargir le
« cercle de l’humanité » en fécondant le désert (Sériziat, 1880, p. 901-905).
Les trois décennies suivantes dissipent déinitivement ces doutes et donnent à Ouargla une
fonction éminente dans la politique saharienne de la France. La découverte de témoignages archéo-
6 - Le baron Henri Aucapitaine (1832-1867) est le seul auteur de cette période à avancer l’hypothèse que Sedrata aurait
été fondée au Xe siècle par les ibāḍites, qu’il appelle « Beni M’zabs » et fait venir du Ğabal Nafūsa : Aucapitaine,
1861, p. 142.
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Ikosim
logiques alimente le mythe d’un passé disparu où le Sahara était verdoyant, traversé par les courants
marchands. De 1871 à 1872, Charles Féraud (1829-1888) recueille pour la première fois des légendes
sur l’ancienne « Isedraten », nom qui aurait été donné à sept localités fondées par la tribu berbère
des « Sadrâta » et étagées entre l’actuelle Ouargla, au nord, et la Gara Krima, au sud (Pouillon,
2008, p. 383 ; van Berchem, 1960, p. 294-296). Une autre tradition, transcrite sur deux feuillets d’un
Coran de la mosquée de Ngoussa, porte à trois cent vingt-cinq le nombre de « villages » qui parse-
maient l’étendue de l’oued (Féraud, 1868, p. 205-206). Sur le terrain, ses observations se resserrent
autour de Sedrata, auquel il associe la Gara Krima et Djebel al-ʻOubbad, et soulèvent de nouveau la
question du réseau hydraulique qui alimentait cette zone. Le passage, auquel M. van Berchem fait
elle aussi allusion, mérite d’être transcrit plus longuement (Féraud, 1886, p. 269) :
En parcourant ces lieux, aujourd’hui solitaires et envahis par les sables, surtout la zone appe-
lée Issedraten, on retrouve encore une telle quantité de ruines d’habitations, de débris de poterie et
d’ustensiles de ménage ; des conduites et des aqueducs encore très apparents qui menaient les eaux
d’une grande fontaine à ciel ouvert dite Aïn Sfâh, qu’on peut se faire une idée de l’importance de
cette population disparue. Des pieds et des racines de palmiers et autres arbres fruitiers, que l’on
dirait carbonisés à l’action du soleil, indiquent l’étendue des cultures. Enin, dans le lit de la rivière
morte, où l’on dirait que les eaux coulaient encore la veille et fournissaient des irrigations faciles
et abondantes, j’ai trouvé une ininité de coquilles d’eau bivalves ressemblant à la clovisse ou à la
praire de nos côtes de Provence.
Une tradition locale afirme que jadis les habitations étaient si nombreuses dans tout ce pays
que lorsque des cris d’alarme étaient poussés des maisons voisines du djebel Eïbad, la voix répétée
de village en village était transmise en quelques instants à travers les quarante lieues séparant Ouar-
gla de Tagourt [Tugurt]. Sur le plateau du djebel Krima, on trouve encore des vestiges d’habitations :
c’était assurément un lieu de refuge imprenable, puisque inaccessible de tous côtés par la raideur de
ses escarpements, on ne pouvait y parvenir que par un sentier taillé à corniche et facile à défendre.
Le puits de cette citadelle naturelle creusé au centre du plateau n’a pas moins de quatre à cinq mètres
de diamètre et environ cent mètres de profondeur. Il est également à sec aujourd’hui.
Animé par l’espoir de faire revivre ce passé prospère, il considère toutefois que le plateau de
Ba Mendil, au nord-ouest de Ouargla, s’avèrera plus salubre pour constituer le « centre d’action
saharien » qu’il appelle de ses vœux (Féraud, 1887, p. 41).
Avec Victor Largeau (1842-1897), chargé d’étudier sur place le trajet du chemin de fer trans-
saharien, l’exploration de l’oued aboutit aux premières excursions archéologiques (Breillat, 2006 ;
Van Berchem, 1960, p. 296-300). Comme le signale M. van Berchem, entre mai et septembre 1877,
il dresse le premier inventaire des sites dépeuplés de l’oued Mya, en établissant une distinction entre
le fond de la vallée et les établissements perchés, aménagés d’après lui à l’époque préhistorique
par le « peuple des garas » au-dessus du vaste leuve qui aurait coulé en contrebas (Largeau, 1879,
p. 193-194).
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Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
Dans l’oued, il inspecte « les ruines de Ceddrata, ville berbère détruite lors de l’invasion des
Arabes nomades », repère les traces des anciens « jardins et canaux », et distingue deux noyaux
de constructions. Au sud-est, il est le premier à décrire le cimetière de Sedrata (1879, p. 268-272).
Enin, il pénètre dans un bâtiment qu’il croit pouvoir identiier au « temple » qui, selon les témoi-
gnages qu’il recueille, fait l’objet d’un pèlerinage ibadite annuel : « Les Arabes m’ont afirmé que,
chaque année, un grand nombre de Beni Mzab vont se lamenter sur les ruines de ce temple » (1879,
p. 187-188). Il juge toutefois la sculpture de Sedrata « grossière » et se contente de reproduire un
seul fragment, conservé de nos jours au musée du Quai Branly, héritier du musée de l’Homme7.
Sa visite lui inspire les conclusions suivantes (1879, p. 153-154) :
Ce pays était riche et ses habitants vivaient en paix. Puis les Arabes sont venus et il a été
transformé en désert... Les musulmans ont tout détruit au nom du Dieu clément et miséricordieux,
de même qu’en Amérique tout fut détruit plus tard par les chrétiens au nom du Dieu de paix et de
charité.
[...] n’en déplaise à maint ignorant de France ou d'Afrique, les vallées sahariennes, qui toutes
furent autrefois peuplées et cultivées, peuvent être aujourd'hui repeuplées et recultivées [...] : car
l’eau abonde partout dans ces vallées à une faible profondeur.
Sedrata n’est d’ailleurs pour lui que l’un des témoins de ce passé enfoui, et il dresse une géo-
graphie des sites dépeuplés, s’intéressant notamment aux structures rupestres qui, à l’image de
Kehf el-soltan (Largeau, 1879, p. 184-185), parsèment les parois rocheuses de l’oued. Il enquête
aussi sur la Gara Krima et recueille le témoignage de l’un des anciens habitants du village qui y
était encore implanté au début du XIXe siècle (p. 190-192).
Sedrata devient insensiblement l’emblème d’un passé imaginaire qui alimente les utopies du
parti colonial. Dans sa communication à la section de géographie du Congrès de l’association fran-
çaise pour l’avancement des sciences, à Reims en 1880, Henri Coudreau (1859-1899) – mieux connu
pour sa future exploration de la Guyane – souligne que, sous la surface stérile de l’oued, coule un
véritable leuve. Il sufirait de fertiliser les dunes par le creusement de puits pour faire de ce coin de
désert une « Pampa saharienne », ou même une nouvelle Australie (Coudreau, 1881, p. 7-11, 33) :
73
Ikosim
Ce sont ces croisades qu’il faut entreprendre dans notre siècle, croisades saintes de la civilisa-
tion contre la barbarie et les déserts !
La grande entreprise du Transsaharien fait alors connaître Ouargla auprès d’un large public
(van Berchem, 1960, p. 300-302), car l’oasis acquiert le statut de nœud ferroviaire incontournable.
Comme l’avait bien souligné M. van Berchem, plusieurs missionnaires du rail s’y rendent à partir
de 1879, avec la bénédiction du ministre Charles de Freycinet. Grâce à la mission Choisy, le premier
relevé topographique (au 1/20.000e) voit le jour, dessiné par l’ingénieur des mines Georges Rolland
(1852-1910) dans le but de déterminer le meilleur itinéraire possible pour le futur chemin de fer
(Rolland, 1883, p. 7). G. Rolland en publie une reproduction en couleur, et au 1/80.000e (Fig. 1),
dans l’ouvrage de synthèse qu’il fait paraître en 1890 ([b], pl. VII ; [a] ; 1894). Il mène aussi des
recherches géologiques et hydrologiques approfondies dans le bassin de Ouargla, estimant que
le creusement de puits artésiens « fera peut-être renaître l’ancienne splendeur de la plaine ». À
Sedrata, il localise de nouveau l’emplacement de l’ancien puits de Ayn Sfa, et afirme pouvoir dis-
tinguer « à la surface du sol, les traces des anciens canaux d’irrigation ». Il recommande d’ailleurs
d’effectuer les nouveaux sondages « là où on a la certitude qu’il existait jadis des puits artésiens jail-
lissants indigènes, comme à Sedrata » (1883, p. 8 et 15). Pour sa part, le docteur Henri Weisgerber
préconise d’assainir l’oued et d’y développer l’habitat en hauteur, ain de protéger la population des
ièvres. Chargé également de l’étude des « antiquités », il récolte aussi du matériel dans les ruines
de Sedrata et de la Gara Krima. En revanche, comme ne le précise pas M. van Berchem, les stucs
le laissent parfaitement indifférent. Il les juge monotones et tous semblables, aussi les rassemble-t-il
tous en une « pyramide » de deux à trois mètres de haut :
Nous ne croyons pas devoir attacher une grande antiquité à ces fragments de plâtre, très nom-
breux et qui proviennent des ruines de la mosquée.
Enin, la mosquée de Sedrata ne lui semble pas plus ancienne que les sanctuaires qu’il a pu
observer à Touggourt ou à Tamasin (1881, p. 17-18) :
[…] attribuer cent ans à ces ruines est beaucoup ; les restes des murs des habitations sont
encore nets, quoique formés de pisé, se désagrégeant facilement sous l’action des pluies et du vent :
ce sont des monuments de date relativement récente, et dont l’étude ne saurait trouver ici sa place.
Jusqu’ici assez diffus, l’intérêt pour le site de Sedrata va cependant occuper le devant de la
scène grâce à l’activité fébrile d’Harold Tarry (van Berchem, 1960, p. 302-305).
M. van Berchem retrace les conditions de son arrivée à Ouargla, mais s’abstient d’entrer dans
les détails de son séjour. Animé par l’espoir de développer des plantations de palmiers dans la vallée
« que les traditions nous représentent comme ayant été d’une fertilité merveilleuse, et que le génie
74
Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
Fig. 1 : Carte géologique de l’oasis de Ouargla établie en 1880 pour la mission Choisy
par G. Rolland et reproduite au 1/80.000e dans Rolland, 1890(b), pl. VII.
75
Ikosim
dévastateur des Arabes a converti en un désert aride et brûlant » (Tarry, 1883, p. 22), l’inspecteur
des inances parcourt le désert à la recherche de la source qui aurait irrigué jadis cet espace inhos-
pitalier. Suivant les traces de Victor Largeau, il prospecte de nouveau les sites dépeuplés de l’oued,
dresse les seuls plans connus à ce jour des grottes de Kehf el-soltan (1883, p. 24-25) et explore la
Gara Krima (1884, p. 24-27) et le Djebel al-ʻOubbad (1883, p. 28). Ses efforts se concentrent cepen-
dant sur Sedrata, où il mène les premières fouilles à l’aide d’une véritable « escouade » d’ouvriers
qu’il organise en plusieurs équipes, dirigeant les manœuvres à cheval. Les opérations, menées dans
la plus grande improvisation, portent sur une trentaine de « points d’attaque ». Leur but n’est pas
tant d’aboutir à un compte-rendu scientiique minutieux que d’exhumer cette « Pompéi » des sables,
composée selon lui de plusieurs « villes » à la manière de la Pentapole mozabite. L’archéologue
amateur exhume ainsi plusieurs pièces à conviction. Dans ce qu’il appelle la « première ville », un
noyau de peuplement pourvu d’une enceinte, il commence par dégager partiellement la mosquée,
celle peut-être que Victor Largeau avait pu observer sans recourir à un désensablement. Malheu-
reusement, il n’en livre qu’une description sommaire et néglige d’en dresser les plans (1883, p. 34 ;
1884, p. 6-7). Ses travaux laissent toutefois percevoir pour la première fois l’organisation du peu-
plement. Il fouille en tout quinze maisons, mais il n’en décrit que six, dont trois dans la « deuxième
ville », à un kilomètre à l’ouest de la première. Certaines de ces demeures contiennent encore du
matériel domestique, des stucs, voire des grafitis et des dessins. Malheureusement, les illustrations
qui accompagnent le récit de ses découvertes se limitent à trois plans et quelques croquis (1884,
p. 8-14), mais sa description de l’ensemble monumental qu’il baptise « palais », agrémentée d’un
plan et de la reconstitution d’un panneau de stuc, complète l’image d’une cité patricienne prospère
et contribue à forger la réputation des décors (1884, p. 39-44).
Les sondages d’Harold Tarry conirment aussi l’importance du réseau hydraulique. Outre des
observations ponctuelles, l’aventurier entreprend avec succès de remettre en service un ancien puits,
probablement celui que les auteurs des années 1860 identiiaient à Ayn Sfa, bien qu’il soit recouvert
d’une haute dune de sable. Depuis ce puits jaillissant, une canalisation se dirigeait vers Ouargla, dans
laquelle les ouvriers purent avancer sur plus de quatre-vingt mètres, tandis que lui-même suivait à
cheval son tracé sur « plusieurs kilomètres » en se repérant aux trous des regards encore visibles à la
surface (Tarry, 1884, p. 20-24). Cette découverte achève de convaincre l’inspecteur des inances de
la possibilité de ressusciter l’âge d’or dont lui parlent ces ruines (Anonyme, 1882 [a], p. 6-7) :
Il n’y a qu’à frapper la terre pour en faire sortir de tous côtés des villes magniiques [...]. Il n’y
a qu’à y donner des coups de sonde pour y faire couler comme autrefois de véritables rivières et
ramener à la surface du sol ce grand leuve qui se jetait dans la Méditerranée8.
Installé dans une maison qu’il a désensablée, il demande aux autorités la concession du péri-
mètre de Sedrata9 :
8 - N’oublions pas que l’une des utopies de l’époque était de créer une vaste « mer saharienne » connectée à la Médi-
terranée (Le Châtelier, 1877).
9 - Voir l’article qui est consacré à ses fouilles dans Anonyme, 1881, sous le titre : « La nouvelle Pompéi du sud ».
76
Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
M. le Gouverneur Général,
J’ai l’honneur de vous demander une concession dans la vallée de l’oued Mya, au sud et au
dehors de Ouargla et des oasis qui l’environnent, dans un endroit absolument désert et sans eaux et
où je me propose, si le gouvernement veut bien favoriser mon entreprise, de créer une ville ou plu-
tôt d’en faire sortir une toute faite du sol et de faire jaillir dans le voisinage des nappes artésiennes
capables de répandre la richesse et la vie dans ces espaces désolés.
Mais l’affaire devient politique, car les tribus arabes s’inquiètent de cette intrusion sur leur ter-
rain de parcours, et les Mozabites, alertés par les fouilles de la mosquée, revendiquent leurs droits
historiques sur ce lieu qu’ils considèrent comme sacré (Anonyme, 1882 [b]) :
Les Mozabites se sont beaucoup préoccupés des fouilles que je faisais à cet endroit ; ils crai-
gnaient que je ne m’emparasse de ce lieu consacré par leurs prières ou que je ne leur rendisse qu’en
me faisant rembourser l’argent que je dépensais pour les remblais : lorsqu’ils ont eu l’assurance que
je ne leur réclamerais rien et que je ne leur contesterais pas leurs droits de propriété, bien qu’ils
n’eussent aucun titre à faire valoir, ils se sont montrés très reconnaissants et leur chef religieux m’a
remercié devant tous les tolbas assemblés dans la mosquée de Beni Isguen où je les avais fait convo-
quer à mon retour pour leur rendre compte de ce que j’avais fait « pour leur bien ».
Les bureaux arabes, qu’il qualiie de « Société protectrice des Indigènes », rejettent catégori-
quement ses prétentions et le font rappeler à Alger au début de l’année 1881. Revenu en France, il
met en récit ses exploits mais doit abandonner ses ambitions, après avoir contribué à braquer les
projecteurs sur Sedrata.
Comme le déplorait déjà M. van Berchem, la documentation publiée par Harold Tarry s’avère
assez maigre au regard de l’ampleur du chantier, qu’il dit pourtant avoir mobilisé en utilisant les
techniques de la photographie et de l’estampage (Tarry, 1884, p. 44) :
De retour à Alger, j’ai fait compléter mes croquis, à l’aide de mes photographies et estampages,
par un dessinateur et la vue générale des sculptures de la paroi AB se trouve au Musée d’Ethnogra-
phie du Trocadéro.
Georges Marçais s’inspira de certaines de ces photographies pour dessiner les igures consa-
crées à l’art de Sedrata dans son Manuel d’art musulman (Marçais, 1926-1927, vol. 1, p. 83), mais
à de rares exceptions près, cette collection semble avoir été dispersée. Dans les fonds de la Société
de Géographie on ne trouve que deux croquis légués par Harold Tarry en 188610. L’un d’entre eux
représente une pièce du « palais », avec sa niche d’angle et son mur tapissé de stucs au-dessus
desquels court une frise épigraphique partiellement détruite. Il existe enin une photographie très
intéressante de ce décor, prise par Alfred Le Châtelier en 1883 à la suite des excavations (Dervaux,
2002, p. 22)11.
10 - Avec pour titres « Fouilles de Sedrata (au sud de Ouargla) : plans d'une maison et mur intérieur d'une maison »,
et « Fouilles de Sedrata (au sud de Ouargla) : mur intérieur d'une maison ».
11 - Nous devons à Jean-Pierre Laporte de nous avoir signalé cette publication.
77
Ikosim
De même, les fouilles occasionnèrent d’importants prélèvements in situ (Tarry, 1884, p. 44) :
J’ai en outre ramené à Laghouat deux charges de chameau de pierres sculptées qui ont été
envoyées aux musées de Constantine, d’Alger et du Trocadéro.
Que sont devenus ces chargements de stucs ? En 1950, le musée de Constantine répondit à
Marguerite van Berchem qu’il n’en possédait pas la moindre trace12. Le docteur Hamy, fondateur
du musée d’ethnographie, avait effectivement reçu une caisse entière en 188213 :
[…] suivant votre désir, je vous ai expédié hier, pour le musée d’ethnographie, une caisse qui
contient des fragments de parois intérieures sculptées d’une des maisons que j’ai fait fouiller à
Sedrata, ou plutôt dans une ville voisine située à deux kilomètres au nord-ouest dans la vallée de
l’oued Mya. Je vous enverrai une photographie d’un dessin que j’ai fait et qui représente le plan de
l’édiice et le développement d’une portion de mur avec toutes ses sculptures, qui peuvent occuper
une supericie de deux cent mètres carrés.
En 1950, Marguerite van Berchem ne trouva au musée que le décor offert par Victor Largeau
vers 1877. Sur le registre d’entrée du musée igurait pourtant, à la date du 14 mars 1882, le signa-
lement d’un fragment issu des fouilles d’H. Tarry (« n° 8692 : sculpture de Sedrata »), mais il n’en
restait qu’une reproduction photographique14. L’enquête mériterait d’être poursuivie, et prolongée par
l’identiication des fonds conservés au Musée national des Antiquités et des Arts islamiques d’Alger.
La notoriété conférée à Ouargla et à Sedrata par les travaux d’Harold Tarry ne fut pas sans
effet, puisque dans les années 1880-1890 les travaux concernant l’oued Mya se multiplièrent sous
l’effet conjugué d’une systématisation et d’une institutionnalisation de l’effort scientiique.
En 1883, Henri Duveyrier faisait paraître une étude historique qui complétait celle de Charles
Féraud. Encore imprégnée par les légendes locales, elle puisait désormais aussi dans des sources
ibadites, à savoir les Siyar d’al-Shammakhi qu’il s’était procurés dans le Djebel Nafousa en 1860
(Duveyrier, 1883 ; van Berchem, 1960, p. 291-292).
L’installation d’un cercle militaire en 1883, puis la construction du « bordj » Chandez en 1887,
paciièrent déinitivement l’oued (Cote, 2006, p. 162-164). Les premiers colons ne tardèrent pas à
12 - Lettre d’A. Berthier, conservateur du Musée G. Mercier de Constantine, à Marguerite van Berchem, 12 décembre
1950 (AFVB).
13 - Cité dans la lettre d’Yvonne Redon, bibliothécaire au musée de l’Homme, à Marguerite van Berchem, 8 sep-
tembre 1950 (AFVB). Ce document se trouve aussi dans Tarry, 1882, p. 357.
14 - Elle décrit ainsi ce fragment : « une feuille de vigne (?) à trois lobes réguliers se répète dans des losanges », Van
Berchem,1950(b), p. 1 (AFVB).
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Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
arriver par la route, désormais carrossable, et avec eux un jeune oficier chargé du « bureau arabe »,
Alfred Le Châtelier (1855-1929). Chargé par Alger de rédiger un Projet de reviviication de l’Oued
Mya15, il travailla à l’élaboration d’une première monographie régionale qui alimenta les « Notes
pour servir à l’historique de Ouargla » (1885)16. Il fut d’une aide précieuse lorsque le spécialiste de
langue berbère René Basset (1855-1924) fut mandaté à Ouargla par le gouverneur général d’Algérie
Louis Tirman et par l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres pour y recueillir des éléments
du patrimoine linguistique zénète (Basset, 1893) et pour dresser l’inventaire des bibliothèques des
zaouias locales (Basset, 1885). Alfred Le Châtelier it copier plusieurs manuscrits à la demande de
R. Basset, comme on peut le constater dans la collection de cet orientaliste, actuellement conservée
à la bibliothèque de l’Université de Leyde aux Pays-Bas.
Ain de rallier la population à l’effort « civilisateur » de la métropole, l’accent fut cependant
placé sur l’étude des anciens équipements hydrauliques, elle-même conçue pour servir de support à
la recherche de nouvelles ressources aquifères et au creusement de puits artésiens qui devaient per-
mettre de soulager les populations, de développer les cultures et de mettre en scène le progrès tech-
nologique dispensé par la métropole. Outre l’ouvrage du capitaine Léon Bajolle (1856-1945) [Bajolle,
1887], une liste systématique de tous les puits du bassin de Ouargla fut établie pour le Gouvernement
général en 188917. L’année suivante vit la parution des volumes monumentaux de la mission Choisy
(Choisy, 1890 ; Rolland, 1890 [b]). Encore inédite, l’étude réalisée en 1896 par le lieutenant Durieux,
chef de poste à Ouargla, complète ce panorama. Il s’agit d’une enquête approfondie, illustrée par
des croquis personnels, sur les matériaux, les outils et les modes de construction utilisés pour le
forage des puits. Elle contient en particulier de nouveaux détails sur Ayn Sfa (Durieux, 1896, ff.
19-23). La pensée historique – au demeurant assez frustre – qui nourrit cet essai relète parfaitement
l’arrière-plan idéologique de ce que l’on pourrait appeler la diplomatie française du puits artésien
au Sahara. Dressant pour la première fois une carte des sites dépeuplés de l’oued, il réfute à l’Islam
la paternité de ce système d’approvisionnement en eau : « deux peuples seuls peuvent s’en disputer
l’invention : les Garamantes et les Romains » (Durieux, 1896, fº 8) ». À ce passé autochtone idéalisé
s’oppose mécaniquement la dévastation perpétrée par les Arabes et l’Islam, accusés d’avoir détruit
l’ancien système hydraulique. La conclusion est donc toute tracée (Durieux, 1896, fº 47) :
Partout où l’élément Français passera, il devra y laisser, à l’exemple des Romains, des travaux
durables, et les générations indigènes apprécieront les bienfaits d’un peuple uniquement guidé par
les droits et les devoirs de la civilisation.
L’arrivée sur scène en 1898 de Paul Blanchet (1870-1900), jeune érudit à l’âme explora-
trice qui avait dans ses bagages les premiers travaux archéologiques menés sur le site de la
15 - Nous n’avons pas retrouvé ce mémoire inédit de 315 pages, pourtant décrit par Lethielleux (1984 p. 80), qui l’avait
consulté à Alger.
16 - Attribuées au « Service des affaires arabes », elles ne furent publiées qu’en 1923, par la Revue africaine (Service
des affaires arabes, 1923).
17 - Notes sur le pays d’Ouargla. Nous n’avons pas trouvé cet ouvrage, mais nous avons pu consulter le compte-rendu
de lecture qu’en a fait Marguerite van Berchem (AFVB).
79
Ikosim
18 - Le seul article qu’il ait publié sur l’oasis d’Ouargla porte sur les populations de l’oued : Blanchet, 1900(a).
19 - Nous en avons eu conirmation par Jean-Yves Sarazin, le directeur du département des cartes et plans, en
octobre 2012.
20 - Nous tenons à cette occasion à remercier vivement l’ancienne conservatrice du département des Arts de l’Islam,
Sophie Makariou, et sa collaboratrice Claire Delery, pour nous avoir communiqué ces documents et ces informations.
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Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
phies s’ajoutent celles de la mission Foureau-Lamy21 qui, chargée d’étudier le tracé du Transsaha-
rien, installa son campement à proximité des ruines et d’un puits toujours en fonctionnement en
octobre 1898 (Foureau, 1905, vol. 1, p. 15). Ce lot de documents visuels immortalise la conservation
spectaculaire et le décor rafiné de ces monuments que le Père Blanc Antoine Giacobetti eut lui
aussi l’occasion de visiter en 1900 (Giacobetti, 1900, p. 1-2) :
Leur ville principale [il s’agit des « Issedraten »] était Sedrata dont les ruines ensevelies sous
les sables se voyent à cinq kilomètres au Sud-Est d’Ouargla. J’ai eu l’occasion de les visiter le 28
septembre dernier. Sur une vaste étendue d’au moins un kilomètre, on distingue parfaitement l’em-
placement et la forme des maisons. Sur un monticule, M. Blanchet en a déblayé une, encore bien
conservée. Autour d’une cour intérieure se trouvent trois colonnes aux chapiteaux ornés de mou-
lures. D’un côté une vaste salle avec des divans en pierre et des moulures en plâtre sur les murs. Aux
quatre coins, des coquilles marines en plâtre, bien imitées. Puis l’on pénètre dans des chambrettes et
des cellules minuscules, toutes ornées de panneaux très intéressants où l’on peut admirer plusieurs
motifs de moulure bien conservés.
La première moitié du XXe siècle vit le nombre de publications sur Ouargla et Sedrata dimi-
nuer. Les découvertes – ou plutôt faudrait-il parler de redécouvertes – de Paul Blanchet eurent
un fort impact sur le monde académique en alimentant le Manuel d’art musulman de l’architecte
Henri Saladin (1851-1923), publié à Paris en 1907 (Pouillon, 2008, p. 858-859). Premier ouvrage
en langue française à embrasser de façon synthétique l’art et l’architecture musulmans d’Orient et
d’Occident, il it sortir de l’anonymat les ruines de Sedrata pour les placer aux côtés de la capitale
califale de Madinat al-Zahra (Saladin, 1907, p. 231-236, ig. 152-153). La description des salles du
« palais » de Sedrata fut d’ailleurs reprise et commentée dans la publication ultérieure de Georges
Marçais (1876-1962), directeur depuis les années 1920 du Musée des Antiquités algériennes et de
l'Art musulman d’Alger (Marçais, 1926-1927, vol. 1, p. 81-93, ig. 45-52 ; Pouillon, 2008, p. 640-
641). L’auteur, que Marguerite van Berchem côtoya à de nombreuses reprises, comme nous le ver-
rons, situe l’art de Sedrata entre celui des Aghlabides et celui des Fatimides, datant explicitement
ses stucs du Xe siècle, comme dans son Album de pierre, plâtre et bois sculpté (Marçais, 1909-1916,
p. 3-4, pl. I et II, ig. 1-4). La notoriété déjà bien établie de cet archéologue arabisant contribua à
consolider l’importance du statut de Sedrata dans l’histoire de l’art islamique à un moment où,
paradoxalement, le volume d’informations disponibles était somme toute extrêmement modeste.
La diffusion très rapide des données (Berque, 1930, p. 52-53) participa à asseoir des théories
souvent encore d’actualité malgré la faiblesse de leur fondement (Grabar, 2000, p. 260 et 271). En
effet, les questions qui auraient pu être soulevées sur l’histoire du site et les problèmes liés à sa fon-
dation, à son abandon et à son organisation spatiale furent totalement évacuées. Seuls importaient
quelques traits jugés caractéristiques de son architecture, en premier lieu les stucs. P. Blanchet
81
Ikosim
avait été le premier à détecter dans ces décors pariétaux une iliation supposée avec l’art byzantin
implanté en Afrique du Nord durant l’Antiquité tardive, niant toute l’inluence de l’Islam oriental.
Cette quête des origines déboucha sur plusieurs théories qui établissaient des parallèles avec l’art
des textiles et le travail du bois et soulignaient la prédominance de racines berbères locales qui
auraient puisé dans un ancien registre chrétien (Saladin, 1907, p. 236 ; Marçais, 1909-1916, p. 4 ;
1926-1927, vol. 1, p. 86). G. Marçais discernait aussi des rapports avec l’Égypte copte, l’Ifriqiya
aghlabide et l’Iraq abbasside, pour conclure cependant que ce mélange d’inluences débouchait sur
une facture véritablement unique, dont on ne connaissait pas l’aire de diffusion. Seul Paul Blanchet
avait cru pouvoir constater l’existence de stucs similaires à Tobna, au nord-ouest de Biskra, sans
toutefois en publier de reproduction (Blanchet, 1900 [b], p. 291).
Malgré tout leur intérêt, ces analyses participent donc à créer une image lisse et uniforme
du site, en admettant pour sûre la datation du Xe siècle. Elles se focalisent sur la mosquée et le
« palais », étudiés successivement par H. Tarry et P. Blanchet et devenus en quelque sorte les bâti-
ments phares du site, sa carte d’identité. Or, l’interprétation fonctionnelle proposée pour ces édiices
– d’ailleurs pratiquement les seuls mis au jour – repose plus sur des traditions locales et des idées
préconçues que sur une analyse critique des formes architecturales.
Ces publications, qui avaient souligné l’évidente richesse archéologique de Sedrata, eurent
sufisamment d’écho pour motiver la décision du directeur des Antiquités et des Beaux-Arts, Louis
Leschi (1893-1954), de reprendre les excavations. Cette fois-ci, ce fut un architecte, Maurice Fau-
cher, qui fut envoyé sur place, alors que la Seconde guerre mondiale battait son plein en Europe,
et bientôt aussi en Afrique du Nord23. Il vint effectuer une première mission de reconnaissance
en septembre 194224. Installé à Ouargla, il semble avoir conduit la première campagne de fouilles
intensives entre février et avril 194425. Assisté par le Commandant militaire du Territoire des
Oasis, Maurice Vigourous26, il guida alors sur le chantier « l’évêque du Sahara » Georges Mercier,
en charge des diocèses de Ghardaïa puis de Laghouat entre 1941 et 1968. M. Faucher disposait
d’une main d’œuvre « indigène » réquisitionnée contre son gré et obligée le plus souvent de par-
courir plus de huit kilomètres à pied en plein désert pour atteindre le site, faute de disponibilité du
camion militaire. Sa rémunération dérisoire consistait apparemment en rations de blé. M. Faucher
fut donc confronté à des formes de résistance passive et à des désertions massives qui ralentirent
23 - Les documents inédits que l’on conserve sur ses activités se trouvent dans les archives personnelles de Margue-
rite van Berchem (AFVB) : rapports à Louis Leschi et lettres diverses (le tout au nombre de onze documents), plan
du site archéologique établi et annoté de sa plume, plan et coupe de la mosquée. Quelques rares photographies (nous
en avons compté cinq) accompagnent cet ensemble. L’archéologue suisse avait consulté ces documents une première
fois en 1940 (van Berchem, 1949), puis les avait récupérés au « service des Antiquités » du Gouvernement Général à
Alger en mars 1950 (van Berchem,1950 [a]).
24 - M. Faucher, rapport du 30 septembre 1942 à Louis Leschi (AFVB).
25 - Id., lettres du 21 février, 09 mars, 04, 12 et 30 avril 1944 à Louis Leschi (AFVB).
26 - Id., lettres du 01 mars 1944 à Maurice Vigourous, et de ce dernier à Louis Leschi le 07 mars 1944 (AFVB).
82
Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
considérablement ses opérations. Il ne put d’ailleurs pas venir à bout de la lourde tâche qui lui avait
été coniée.
Il dirigea cependant des prospections extensives qui lui permirent de repérer et de cartogra-
phier pour la première fois les zones de carrières, de cimetières, de jardins ainsi que différentes
agglomérations emmuraillées, qui laissaient entrevoir une complexité d’occupation jusqu’ici passée
sous silence. À l’automne 1943, puis de février à avril 1944, il s’attaqua de nouveau à la mosquée
(S3 bis), dont il dressa un plan et une élévation partiels. Les résultats de ce sondage sont toute-
fois inconnus faute de documentation supplémentaire, comme le remarquait Marguerite van Ber-
chem après avoir recueilli les souvenirs du colonel Vigourous à Alger en avril 1950 (van Berchem,
1950 [a], p. 101-102) :
Voici encore quelques renseignements donnés par Vigourous. La mosquée avait été dégagée
par Faucher jusqu’au sol, les deux étages de la mosquée avec leurs arcades avaient été mis au jour (je
me demande si le colonel ne voit pas cela un peu à travers son imagination). Aucune photo n’a mal-
heureusement été prise, c’était au sortir de la guerre, on ne pouvait encore à Ouargla se procurer des
ilms. Vigourous prétend avoir vu le mihrab. Je déplore le manque de documents. Pourquoi Faucher
n’avait-il pas au moins fait faire des dessins du monument ainsi dégagé ? Je ne puis m’empêcher de
penser que le dégagement n’était pas aussi total que le dit le colonel.
27 - Van Berchem, « Mission archéologique à Sedrata, 24 mars-8 avril 1950 ». Rapport envoyé à Louis Leschi, Le
Caire, 12 mai 1950, p. 6-7 (AFVB).
28 - Voir aussi van Berchem, lettre du 12 mai 1950 à Louis Leschi (AFVB).
29 - M. Faucher, lettre du 13 novembre 1944 à Louis Leschi (AFVB).
83
Ikosim
il expédie vers la capitale de nouveaux objets. Après avoir été qualiié par le colonel Vigourous
de « milicien30 », conformément à la nomenclature vichyste, l’architecte se présente à partir
de 1945 comme un « goumier », un terme habituellement réservé aux hommes du contingent
« indigène » musulman et qui semble dénoter son affectation à des tâches militaires31. Alors
qu’en février 1945 il espérait proiter de la main-d’œuvre gratuite qu’aurait pu lui fournir l’arri-
vée à Ouargla d’une « compagnie d’exclus » provenant du camp d’internement de Ben Chicao32,
il ne reçut jamais le renfort escompté et dut suspendre ses travaux, sans que l’on sache pourquoi
ni dans quelles conditions.
Cette entreprise obscure ne donna lieu à aucune publication, et la documentation préservée
grâce à Marguerite van Berchem semble bien dérisoire en comparaison de l’ampleur des opérations.
Maurice Faucher avait en effet mené des prospections et des fouilles beaucoup plus systématiques et
ambitieuses que ses prédécesseurs. Grâce à l’installation de bornes de signalisation (« redjems33 »)
des principaux monuments, il put établir la première triangulation du site et en dresser un premier
plan sommaire.
Lors de ses premières prospections, Marguerite van Berchem allait littéralement marcher sur
ses traces, reprenant le même zonage et les mêmes repères pour établir son propre plan, encore
inédit, du site (van Berchem, 1950[a]). L’ambition de ce chantier de fouilles, et l’engagement du
Gouvernement Général, en la personne de Louis Leschi, préiguraient l’entreprise de l’archéologue
suisse. Lorsque celle-ci retourna admirer les stucs de Sedrata au musée Stéphane Gsell en avril
1949, après une première découverte d’Alger en novembre 1946, elle recueillit d’ailleurs une somme
de témoignages et de documents concernant les travaux de son prédécesseur.
CONCLUSION
Une décennie à peine après le débarquement français en Algérie, la légende de Sedrata s’insi-
nuait dans l’imaginaire des auteurs impliqués dans la conquête et l’exploration du Sahara. Ce n’est
toutefois qu’en 1877 que Victor Largeau identiia clairement un site archéologique répondant à ce
nom. Sedrata ne cesserait dès lors d’être au cœur des utopies sahariennes de la période coloniale. La
ville engloutie apparaissait comme la preuve tangible d’un passé mythique, jugé pendant longtemps
étranger à l’islam, où le Sahara était encore verdoyant et prospère. Or les partisans de la conquête du
désert prétendaient précisément revitaliser les oasis et restaurer cette défunte prospérité grâce aux
armes du « progrès » technique. Sedrata leur servit donc de pièce à conviction.
30 - M. Vigourous, lettre du 07 mars 1944 à Louis Leschi (AFVB).
31 - M. Faucher, lettres du 31 janvier et 03 février 1945 à Louis Leschi (AFVB).
32 - Nous ignorons dans quelles circonstances ces détenus sont arrivés à Ouargla. De 1940 à 1943, le camp de Ben
Chicao, situé à quelques kilomètres au sud de Médéa, avait servi à l’internement des femmes des réfugiés espagnols
de la région d’Oran accusés d’appartenir au camp anti-franquiste (républicains, communistes et anarchistes, voir
Martínez-Lopez, 2004, p. 174. À partir d’août 1944, ce furent des Français accusés d’avoir collaboré avec le régime
de Vichy qui y furent enfermés (Baldacci, 1983, p. 177).
33 - En arabe, la racine radjama désigne le jet de pierres, la lapidation. Le terme s’applique aussi aux tas de pierres, à
l’exemple de ceux qui matérialisent le rite de la lapidation de « Satan » lors du pèlerinage.
84
Cyrille Aillet - Archéologie, savoirs coloniaux et projet saharien
À l’orée du XXe siècle, le site fut cependant récupéré par la tradition académique. Trois cam-
pagnes de fouilles, jusqu’à celles que l’architecte Faucher dirigea en pleine seconde guerre mon-
diale, déplacèrent progressivement l’intérêt des savants vers les décors de stuc qui ornaient les
édiices, eux-mêmes choisis pour répondre aux éléments jugés les plus signiicatifs d’une ville
musulmane : la « mosquée », le « palais » ou « tribunal », et quelques demeures privées. Isolé de
son contexte immédiat (le bassin de Ouargla), le site semblait ainsi résumé par ses stucs, dont on
rechercha pendant longtemps des parallèles dans l’art chrétien, copte ou nord-africain ain de réaf-
irmer le caractère autochtone et occidental de cette production artistique dont on ressentait déjà la
nature exceptionnelle.
Marguerite van Berchem allait à cet égard se montrer novatrice, en évoquant au contraire l’hy-
pothèse de l’origine orientale de ces décors, et en s’efforçant de mener des fouilles plus rigoureuses
que ses prédécesseurs, à l’aide de techniques de prospection nouvelles.
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88
RÉSUMÉS
201
Ikosim
202
Résumés
de la plus haute Antiquité au début du XVIIe siècle. A partir des témoignages visuels de Gramaye, je me pro-
pose de relever et de décrire ici ce qui pouvait caractériser alors Alger au faîte de sa puissance : sa topographie,
ses remparts et son fossé, ses ouvrages de défense (portes, îlots, forteresses et bastions) armés de canons, expli-
quant ainsi sa renommée d’al-Mahrûsa (la Bien-gardée), puis celle d’al-Mansûra (la Victorieuse).
ABSTRACTS
POSTURAL BALANCE OF HOMINIDS FROM ALGERIA AND THE MAGHREB AND
THEIR CRANIOFACIAL ARCHITECTURAL RELATIONSHIPS WITH MODERN POPULA-
TIONS by Djillali Hadjouis
The simple architectural study of the skull and the face brings remarkable information provided that
the dynamics of the main bone scales and of their deep structure are viewed through imaging (2D tele-ra-
diography or 3D scanner). Thus, not only the form and the function are put to contribution, but in some
cases the phenomena of cause and effect are researched especially for pathological affections, asymmetries
or defects related to a cranio stenosis. In terms of occlusion or dental articulation of fossil hominids, the
study is limited to conservation of adults relics found in excavations, which sometimes include incomplete
remains. However, the highlighting of the initial states of occlusion, namely the occluso-postural balance
and the orientation of the anterior guide, are certainly made for adults but also among the growing up
young. Indeed, the determination of the occlusal balance evolution among only adult Hominids, can lead
to confusion, if the periods of growth and their pace in children and adolescents are not taken into account.
Many maxillo-mandibular sets in decidual teeth or in mixed teeth showed occlusions different from those
of adults while being in the same category. In addition to that, some mechtoids or proto-mediterranean indi-
viduals (with or without an avulsion of incisors) have shown teeth which occlusion suggested para-mastica-
ting functions. These two aspects are treated here based on a development of standards both on the muscles
of mastication and on the anterior incisor guide.
Keywords - Maghreb, Sahara, Mechta-Afalou , Mechtoids, Protomediterranaens, Occlusion, dental
articulation, Para-function, Methodology.
203
Ikosim
The Paleolithic period is very abundant - particularly the Acheulean and the Aterian - and very diversiied.
The Neolithic is frequent, on the one hand in the areas where water is present; on the other hand on trafic
paths , Northern and Southern inluences intersect. But the Neolithic has been little studied and is barely
dated. More than the rock art, the lithic industry and the funerary monuments are good ways to grasp the
different cultures. However it is on the frindge that the main information is located: Saoura, Seguiet el
Hamra, Oued Draa, Tiris, Zemmour, Adrar, Taoudenni Basin. Researches are therefore absolutely neces-
sary in the region that this article presents.
Keywords - Paleolithic, Neolithic, Rock art, Monuments, Tindouf, Iguidi, Hamk, Seguiet el Hamra, Erg Chech.
204
Abstracts
205
ملخصات
التــوازن الوضعــي أشــباه البشــر الجزائرييــن والمغاربــة والعاقــة المعماريــة لجماجمهــم ووجوههــم مــع الســكان
العصرييــن بقلــم جيالــي حاجويــس
يكشــف التحليــل المعمــاري البســيط للجمجمــة والوجــه عــن معلومــات ا ريــب فيھــا شــريطة أن يتــم تحليــل حركيــة القشــر العظمــي وبنيتھــم العميقــة
عــن طريــق التصويــر اإشــعاعي عــن بعــد ) (D2أو ماســح ضوئــي .D3وبذلــك فإننــا ا نســتفيد مــن الشــكل والوظيفــة فحســب بــل يتــم البحــث فــي بعــض
اأحيــان عــن ظواهــر العلــة والنتيجــة خاصــة اإصابــات المرضيــة ،عــدم الثماثــل أو خلــل فــي التركيــب يُعــزى إلــى تعظــم الــدروز الباكــر.
اقتصــرت الدراســة فيمــا يخــص إطبــاق أو إغــاق أشــباه البشــر اأحفورييــن أســنانھم علــى حفــظ البقايــا البالغــة التــي وجــدت فــي أعمــال التنقيــب
ممــا يشــمل فــي بعــض اأحيــان بقايــا غيــر كاملــة .أو تســليط الضــوء علــى بــوادر اإطبــاق أي التــوازن اإطباقــي الموضعــي و توجيــه الموجــه اأمامــي.
وهــذا يحــدث بالفعــل فــي آن واحــد مــع البالغيــن ولكــن أيضــا مــع الشــبان قيــد النمــو .قــد يــؤدي تحديــد تطــور التــوازن اإطباقــي لــدى أشــباه البشــر وحدهــم
فــي الواقــع لالتبــاس إن لــم يتــم أخــذ فتــرات النمــو ووترتھــا لــدى اأطفــال والشــبان بعيــن ااعتبــار.
أظھــرت مجموعــات متعــددة مــن الفكــوك العلويــة والســفلية لأســنان اللبنيــة أو المختلطــة إطباقــا مختلفــا عــن إطبــاق البالغيــن مــع كونھــم فــي المرتبــة
نفســھا .عــاوة علــى ذلــك فقــد ظھــرت عنــد بعــض اأفــراد مــن المشــتويين و البروتومتوســطيين )مــع أو دون قواطــع مقتلعــة( أســنانا يوحــي اإطبــاق
فيھــا بالوظائــف الشــبيھة بالمضــع .يتــم التعامــل مــع هذيــن العامليــن هنــا اســتنادا إلــى تعديــل المعاييــر علــى مســتوى الجھــاز الماضــغ أو الموجــه اأمامــي
القاطــع.
الكلمات الرئيسية -المغرب،الصحراء ،مشتة أفالو ،المشتويون ،البروتومتوسطون ،اإطباق ،إطباق اأسنان ،الخلل الوظيفي ،المنھجية.
نظرة حول منطقة مجهولة تقع على الحدود الصحراوية الشمالية الغربية لفترة ما قبل التاريخ بقلم روبرت فيرني
فبالرغــم مــن أهميــة المنطقــة المعنيــة بالدراســة و تدفــق عليھــا عــددا كبيــرا مــن الرحالــة منــذ اكثــر مــن قــرن ،اا أنھــا بقيــت مجھولــة فــي
اابحــاث ااثريــة الخاصــة بفتــرة مــا قبــل التاريــخ للشــمال الغربــي للصحــراء .ومــن مواصفــات المنطقــة أنھــا كانــت شــبه خاليــة مــن الســكان وقاحلــة و
الميــاه بھــا نــادرة ،كمــا هــو الشــأن اليــوم .و يعــود تواجــد اإنســان فــي المنطقــة الــى فتــرة األدوايــن ) .(Oldowayenوتميــز العصــر الحجــري القديــم
باانتشــار والتنــوع ،اســيما العاتــري و اأشــولي منــه ،ونجــده أكثــر شــيوعا فــي أماكــن توفــر الميــاه وفــي مناطــق التقــاء التأثيــرات الشــمالية بالجنوبيــة،
إا أن الدراســات حولھــا قليلــة أنھــا لــم تحــض باهتمــام أكثــر لــدى المختصيــن.
وتعــد الصناعــة الحجريــة و الفنــون الصخريــة وكــذا المعالــم الجنائزيــة مــن أنجــع الوســائل لفھــم مختلــف الثقافــات العصريــة ،إا أن المــادة ااثريــة
تعتبــر أكثــر انتشــارا فــي المناطــق النائيــة المجھولــة بمقارنتھــا لغيرهــا ،فنجدهــا مثــا فــي كل مــن الســاورة وســاقية الحمــراء وواد دراع وتيريــس وزمــور
وأدرار وحــوض تاودنــي .و بالتالــي فمــن الضــروري ااهتمــام بھــذه المناطــق ودراســتھا.
الكلمات الرئيسية -العصر الحجري القديم ،العصر الحجري الحديث ،صخري ،صرح ،تندوف ،إغيدي ،حامك ،ساقية الحمراء ،عرق شاش.
الحمامات الصغيرة والعاب المدرج بمنطقة سطيف خال الفترة المتأخرة بقلم جون بيير ابورت
ان اكتشــاف رســوم أصليــة فــي وثائــق لــوي رونييــه ) (Louis Rénierالمحفوظــة بالســوربون ،و التــي تخــص الحمامــات الصغيــرة للفتــرة
المتأخــرة لمنطقــة ســطيف ،أمــرا مكمــا و مثريــا لملــف دراســة الموضــوع المذكــور ،الــذي أهمــل منــذ زمــن طويــل .فباإضافــة إلــى أهميــة الحمامــات
مــن الجانــب المعمــاري ،فتعتبــر زخرفتھــا مثــاا حيــا اســتعمال cochleaفــي ألعــاب المدرجــات .ويؤكــد اامــر علــى ميــول الشــعوب القديمــة لألعــاب
العنيفــة ،التــي عرفــت تغيــرا بفعــل تأثرهــا بفاســفة الملحديــن والنصرانييــن المناديــن باأخــاق ،و بســبب نــدرة الحيوانــات المفترســة وارتفــاع ســعرها.
الكلمات الرئيسية -الجزائر ،سطيف ، Cochlea ،ألعاب المدرج ،العصور القديمة المتأخرة ،الحمامات.
علــم اآثــار ،معــارف اســتعمارية ومشــروع الصحــراء :المائــة ســنة اأولى مــن البحث حــول ســدراتة )(1945/1845
بقلــم ســيريل أييه
تنــدرج ســدراتة ضمــن مشــروع مناصــري غــزو الصحــراء مباشــرة بعــد العشــرية ااولــى مــن ااحتــال الفرنســي للجزائــر .بعــد اكتشــاف موقــع
ســدراتة بفضــل مجھــودات فيكتــور ارجييــون Largeauســنة .1877اســتمرت المنطقــة المحتلــة فــي اعتبارهــا كرمــز للمثاليــة الصحراويــة و كدليــل حقيقــي
إحيــاء مــاض اســطوري بســلح الحضــارة .ومــع ذلــك تــم اســترجاع الموقــع فــي مســتھل القــرن 20بالتقليــد اأكاديمــي .وقــد ســجلت ثــاث حمــات تنقيبيــة الى
حملــة المھنــدس المعمــاري فوشــي Faucherفــي مســتھل الحــرب العالميــة الثانيــة .واهتــم العلمــاء تدريجيــا بفــن زخرفــة الجــص ،والــذي بحــث عــن نظيــره
207
Ikosim
فــي الفــن النصرانــي والقبطــي و الشــمال اإفريقــي إعــادة ااعتبــار للفــن و التأكيــد مــن طابــع انتمائــه اأصلــي والغربــي و مــن ميزتــه ااســتثنائية.
الكلمات الرئيسية -علم آثار مغرب القرون الوسطى ،علم اآثار والمعارف ااستعمارية ،غزو الصحراء ،ورقلة ،سدراتة.
تاريخ مياه اأمطار :الجزائر العاصمة ومناطق أخرى بقلم بوليفة الحبيب طاهاري
تمنــح مدينــة الجزائــر ،ســنة ،1830نموذجــا معتبــرا لدراســة التســيير الحضــري لميــاه اأمطــار .يحمــل هــذا التســيير فــي طياتــه إشــكالية كبــرى ،إذ
كانــت لھــذه المدينــة خصلتــان مورفولوجيتــان شــكلتا فــي نفــس الوقــت عائقيــن رئيســيين .فمــن جھــة ،كان جــزء كبيــر مــن المدينــة يقــع علــى ســفوح الجبــال
شــديدة اانحــدار حيــث كان المنحــدر المتوســط يقــارب .% 20ومــن جھــة أخــرى فقــد تميــزت المدينــة بشــبكة طرقــات وأزقــة ضيقــة ومتشــابكة والتــي
يمكــن أن نخمــن ســلفا أنھــا كانــت لتجعــل تســيير ميــاه اأمطــار فــي الوســط الحضــري أكثــر إشــكاا وخاصــة أثنــاء العواصــف شــبه الجارفــة التــي كانــت
تحــدث باســتمرار خــال فصــول الشــتاء فــي الجزائــر.
يتضمــن هــذا المقــال دراســة موضــوع حصيلــة ميــاه اأمطــار بمدينــة الجزائــر وإبــراز مھــارة و خبــرة ســكانھا القدمــى فــي تســيير ميــاه اأمطــار .و
يســمح هــذه الحصيلــة باإقــرار علــى أن شــبكة طرقــات مدينــة الجزائــر كانــت تخضــع لمنطــق وتناغــم عــام ا شــك فيــه.
الكلمــات الرئيســية -المورفولوجيــا الطبيعيــة )تضاريــس( ،المورفولوجيــا الحضريــة ،الھيدروغرافيــا الطبيعيــة ،الھيدروغرافيــا الحضريــة ،التســيير
الحضــري لميــاه اأمطــار.
الحصون والقاع الجزائرية المحروسة في مستهل القرن السابع عشر بقلم عبد الھادي بن منصور
حــل بالجزائــر فــي أيار/مايــو 1619رجــل ذو أهميــة وهــو جــون باتيســت غرامــي ،Jean-Baptiste Gramayeوهــو فلمنكــي – مفكــر اســباني
– تــم أســره علــى يــد قراصنــة جزائرييــن .نشــر مــدة مقامــه فــي العاصمــة الجزائريــة لســتة أشــھر يوميــة اأحــداث التــي طــرأت فــي الجزائــر العاصمــة
ونشــر إثــر ذلــك :إفريقيــا موضحــة فــي 10كتــب
وتمنــح لنــا هــذه اأعمــال المكتوبــة بالاتينيــة مخزنــا مــن المعلومــات حــول تاريــخ الجزائــر وافريقيــا مــن أقــدم العصــور الــى مســتھل القــرن .18
واعتــزم هنــا ،انطاقــا مــن الشــھادات المرئيــة لغرامــي إماطــة اللثــام ،وصــف مــا كان مــن الممكــن أن تتميــز بــه الجزائــر بخصــوص قوتھــا وطوبوغرافيتھــا
ومتاريســھا وخنادقھــا ومــا صنعتــه للدفــاع )كاأبــواب والجــزر الصغيــرة والحصــون والمعاقــل( ،المســلحة بالمدافــع ...ممــا يفســر أيضــا شــھرة المحروســة
ومــن بعــد المنصــورة.
الكلمات الرئيسية -الجزائر العاصمة ،الجزائر ،الوصاية على العرش ،القرن 16و ،17المتاريس ،الحصون ،القاع ،المعاقل ،غرامي.
206