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V22PY5 et 9

Marie Blaise

Notes pour lire La Route (2006)

L’extrait que vous aurez à commenter pour l’évaluation sera tiré soit de La chute de la Maison
Usher soit de La Route. Je vous conseille donc de vous familiariser autant que possible avec
ces textes. Le premier est court et bien connu. J’insiste donc sur le roman. Les indications de
pages correspondent à la traduction française (cf. bibliographie) mais je vous donne aussi,
pour plusieurs passages importants les références au texte anglais (et/ou le passage en
anglais).

The Road est le dixième roman de Cormak McCarthy. Le roman a reçu le prix Pulitzer
en 2007 ; jusque-là son auteur était souvent classé aux États Unis dans la catégorie des
écrivains du Sud (Southern Gothic) ou des romans de l’Ouest américain. On le présentait, et le
présente encore, comme le successeur de Melville et Faulkner. McCarthy a remporté avec The
Road le prix Pulitzer en 2007. À cette occasion il accepte de participer au talk show d’Oprah
Winfrey (alors qu’il ne quitte pratiquement jamais le Nouveau Mexique), vous trouverez assez
facilement cette interview (en anglais) sur le net.
Critiques et public sont unanimes pour saluer dans La Route le meilleur livre des vingt-cinq
dernières années. Curieusement ( ?) c’est le plus souvent en insistant particulièrement sur le
fait qu’il ne s’agit pas de science-fiction. Les épisodes d’horreur sont renvoyés à la « veine
épique » et The Village Voice, par exemple, écrit que c’est la « fable la plus pure jamais écrite
par Cormak McCarthy ». Le roman est aussi considéré comme une allégorie de la crise. Mais
il présente aussi un caractère biographique que son auteur se plaît à mettre en avant et qui le
rapproche du présent : dans l’interview donnée à la télévision (une première) McCarthy dit
que son fils, à qui le livre est dédié, en a été le co-auteur puisqu’une partie des dialogues entre
le père et le fils du roman serait issue de véritables dialogues entre John Francis et lui.

1
Le récit

Un événement global a eu lieu, peut-être une guerre nucléaire : le motif de la cendre,


l’image de la cautérisation qui revient souvent, les quelques éléments mémoriels pourraient
l’indiquer… mais apparaît aussi une combinaison de protection biologique [p. 59] et certains
lecteurs ont vu la chute d’un météore... Quel que soit cet événement (il ne sera jamais
identifié), il a détruit la Terre dans son ensemble. Un petit nombre de survivants essaie de se
nourrir dans ce monde détruit. Ces survivants ne sont pas présentés comme d’heureux
rescapés mais comme des malchanceux qui n’ont échappé à la mort que pour subir un destin
plus terrible encore, de violence et de souffrance extrêmes portées par le motif du
cannibalisme, omniprésent dans La Route.
La Route représente l’effondrement, la destruction radicale de la culture américaine
(et, au-delà occidentale). Le roman est écrit à la troisième personne, mais des fragments au
discours direct viennent souvent interrompre la narration déjà fragmentaire. La focalisation
est toujours interne ou presque – le dernier paragraphe du texte constituant une exception
remarquable.
Le roman se présente comme une succession de brefs paragraphes de quelques lignes
chacun, des fragments qui composent peu à peu la lente progression vers le Sud et la mer de
deux personnages, un père et son jeune fils, poussant un caddie avec leurs quelques
possessions. Trois moments du temps se dessinent peu à peu. Le temps d’avant la catastrophe
est uniquement présenté à travers les quelques souvenirs de l’homme et les objets trouvés.
Les années qui ont suivi la catastrophe sont communes aux deux personnages : l’enfant est né
après. Pendant un certain temps, sa mère a vécu avec eux et puis elle a choisi de se suicider.
L’homme n’a pas pu se résoudre à tuer son enfant, ni à l’abandonner, alors il est resté avec
lui. Dans les quelques années qui ont suivi la catastrophe, les survivants ont écumé les villes
comme les campagnes, toute nourriture a pratiquement disparu. Beaucoup de survivants sont
devenus cannibales. Le présent de la narration raconte la progression des personnages sur la
route.
La seule continuité apparente du récit est apportée par la marche, qui est aussi une
fuite.

2
Ce que le roman ne fait pas
Du point de vue de l’intrigue, La Route respecte, on le voit, les règles du genre post-
apocalyptique que notre début de XXIe semble tant affectionner (affectionnera-t-il autant ce
genre lorsque nous aurons traversé la crise actuelle ?). Mais il s’en distancie aussi par toute
une série de procédés, dont celui bien connu de la mise en abyme : « On est des morts vivants
dans un film d’horreur » [p. 55 – voir aussi fin p. 27, 28] qui pourraient représenter une
déconstruction du genre.

Le roman ne décrit pas comment le groupe de survivants essaie de reconstruire la


civilisation ; ni les efforts déployés en ce sens. Il se présente, paradoxalement, comme un huis
clos entre un père et son fils qui marchent vers le Sud dans un paysage désolé. C’est aussi un
roman de la route, un autre genre américain par excellence, comme le dit son titre. Mais
McCarthy prend la aussi le contrepied des poncifs du genre : si la marche est bien le fil du
récit, le principe de vraisemblance qui lie les évènements entre eux, il n’y a pas de découverte
ici de l’autre, de l’étranger, de la différence (sauf celles qui ont trait à l’horreur du
cannibalisme). Pas non plus de variété des paysages, tout est gris, uniformément recouvert
par la cendre des cataclysmes bibliques.
La progression des personnages s’effectue vers le Sud et non plus vers l’Ouest : c’est
le renversement du motif héroïque (et historique) de la Conquête de l’Ouest, et de la
Frontière ; de la victoire de la civilisation sur la nature et les « sauvages » qui la peuplaient (cf.
le motif de la wilderness, difficile à rendre en français). Il ne faut pas non plus négliger les
positions politiques du roman : au Sud, il y a le Mexique… Le roman de la route a d’ailleurs
été le roman d’une contestation sociale radicale aux États-Unis.

On the Road, de Jack Kerouac, est publié en 1957 mais aurait été écrit pendant trois
semaines en 1951. Largement autobiographique, le roman raconte les voyages de Kérouac lui-
même (sous le nom de Sal Paradise) et de quelques autres grandes figures de la littérature
contestataire américaine de l’après-guerre comme William Burroughs (Naked Lunch) ou Allen
Ginsberg (The Howl). La « Beat generation » (à la fois beaten, c’est à dire, battue, fatiguée, et
on the beat, en mesure, en rythme) est marquée par le rejet du matérialisme, l’intérêt pour
des spiritualismes orientaux ou amérindiens, l’expérimentation de drogues… Le roman a été
écrit sur un rouleau de papier de 37m de long, sans chapitre, ni paragraphe ni retour à la ligne.

3
Il a fallu à Kérouac six ans avant que l’éditeur accepte son texte et il a fallu attendre 2007 pour
que la version originale du roman soit publiée. Le titre du roman de Cormack McCarthy fait
aussi référence à ce mouvement, à la tradition qu’il a initiée, celle de la génération suivante,
de 68 et des communautés hippies qui revendiquaient le retour à la nature. Est-ce pour en
relever l’échec ou s’inscrire dans leur héritage ?

Si le roman de la route met en avant la différence et l’élan vers l’autre, rien de tel ici.
Absence de différence, limitation extrême des possibles, confusion entre le même et l’autre
sont les thèmes récurrents du texte de McCarthy. Et les motifs évidents du traitement
littéraire de l’angoisse.
Exemple : lire p. 31 : « Dans les premières années… »

Les règles du genre romanesque elles-mêmes en sont bousculées.

L’écriture, presque télégraphique mime l’absence de perspective et la discontinuité


des événements ; cette discontinuité est contrebalancée par la minutie quasi obsessionnelle
des détails avec laquelle chaque geste des personnages est décrit. Et dans cette
décomposition infinie des gestes, le temps de la lecture correspond presque au temps de
l’action.
When he got back the boy was still asleep. He pulled the blue plastic tarp off of him and
folded it and carried it out to the grocery cart and packed it and came back with their plates
and some cornmeal cakes in a plastic bag and a plastic bottle of syrup. He spread the small
tarp they used for a table on the ground and laid everything out and he took the pistol from
his belt and laid it on the cloth and then he just sat watching the boy sleep.
The Road, p. 3.
Quand il revint le petit était encore endormi. Il retira la bâche en plastique bleue sous
laquelle il dormait, la plia et l'emporta et la rangea dans le caddie de supermarché et revint
avec leurs assiettes et des galettes de farine de maïs dans un sac en plastique et une bouteille
en plastique contenant du sirop. Il déplia par terre la petite toile cirée qui leur servait de
table et y disposa le tout et prit le revolver qu'il portait à la ceinture et le posa sur la toile et
resta simplement assis à regarder le petit dormir. La Route, p. 11.

When it had cleared they went down to the cart and pulled away the tarp and got their
blankets and the things they would need for the night. They went back up the hill and made
their camp in the dry dirt under the rocks and the man sat with his arms around the boy
trying to warm him. Wrapped in the blankets, watching the nameless dark come to
enshroud them. The gray shape of the city vanished in the night's onset like an apparition
and he lit the little lamp and set it back out of the wind. Then they walked out to the road
and he took the boy's hand and they went to the top of the hill where the road crested and
where they could see out over the darkening country to the south, standing there in the
wind, wrapped in their blankets, watching for any sign of a fire or a lamp.. The Road, p. 8.

4
Ils attendirent une éclaircie pour repartir. Ils descendirent jusqu'au caddie et retirèrent la
bâche et prirent leurs couvertures et les affaires dont ils auraient besoin pour la nuit. Ils
remontèrent et établirent leur bivouac sur la terre sèche sous le surplomb et l'homme s'assit
en entourant le petit de ses bras pour tenter de le réchauffer. Enveloppés dans les
couvertures, surveillant l'obscurité sans nom qui viendrait les emprisonner dans son linceul.
La forme grise de la ville s'effaçait dans la nuit tombante comme une apparition et il alluma
la petite lampe et la posa dans un endroit abrité du vent. Puis ils retournèrent sur la route et
il prit la main du petit et ils montèrent en haut de la côte là où la route arrivait à la crête et
d'où l'on pouvait voir au sud les terres gagnées par l'obscurité, debout tous deux en plein
vent, enveloppés dans leurs couvertures, guettant un signe quelconque d'un feu ou d'une
lampe. La Route, p. 15.

They collected some old boxes and built a fire in the floor and he found some tools and
emptied out the cart and sat working on the wheel. He pulled the bolt and bored out the
collet with a hand drill and resleeved it with a section of pipe he'd cut to length with a
hacksaw. Then he bolted it all back together and stood the cart upright and wheeled it
around the floor. It ran fairly true. The boy sat watching everything.. The Road, p. 15-16.
Ils rassemblèrent quelques vieilles caisses et firent du feu à même le sol et il trouva des
outils et vida le caddie et s'assit pour réparer la roue. Il retira le boulon et perça la douille
avec une chignole et la rebagua avec un tronçon de tuyau avec un tronçon de tuyau qu'il
avait découpé à la bonne longueur à l'aide d'une scie à métaux. Puis il revissa le tout et
remit le caddie debout et fit le tour du garage en le poussant. Le caddie tenait plus ou moins
droit. Le petit avait observé chacun de ses gestes. », La Route, p.21.

Le seul point de vue est celui de l’homme, si l’on excepte les quelques fragments au
discours direct attribué à l’enfant. À la fin du roman, cependant, lorsque l’homme va mourir,
la troisième personne glisse et en vient à désigner l’enfant. Le dernier paragraphe du texte
présente une rupture de construction sur laquelle on reviendra.
Les personnages ne sont jamais nommés. Les deux personnages principaux ne font pas
exception : on ne saura pas leur nom. À noter que l’anglais utilise the boy pour désigner
l’enfant et non pas « le petit » comme le fait le traducteur français. La distanciation est plus
grande en anglais.
Une seule exception à cette règle, un vieillard rencontré sur la route affirme avoir
quatre-vingt-dix ans et s’appeler Elie (p. 150, 151 – 157). Dans la Bible, Élie est l’un des grands
prophètes d’Israël, annonciateur du Messie à la fin des temps ; c’est lui qui avertit le Roi Achab
de sa fin prochaine. Melville a utilisé le personnage et le motif dans Moby Dick. Outre l’allusion
à Melville, McCarthy reprend avec Élie une référence directe à l’Apocalypse et aux prophètes
qui l’ont annoncée [Voir p. 245 : « Regarde autour de toi, dit-il… »].

Le roman s’inscrit dans la tradition littéraire par tout un réseau de références : comme
je le disais, on rencontre Élie sous la figure d’un vieil ivrogne dans Moby Dick lorsque Ismahel

5
et Queequeg vont s’embarquer sur le navire du capitaine Achab. Il y a d’autres allusions au
roman de Melville dans le livre, d’autres aussi au poème de T.S. Eliot, The Waste Land, traduit
en français par Pierre Leyris sous le titre La Terre vaine, que j’évoquerai plus bas. Et, bien sûr,
des références à Kérouac.
Comme dans The Waste Land encore la construction et les références mêlent images
et objets issus de la culture populaire et allusions savantes. Ainsi les personnages principaux
pourraient être issus des récits de fin du monde et des multiples séries et films sur le thème.
Le père et le fils du roman de McCarthy appartiennent, le roman insiste sur ce point, à la
catégorie des « good guys » qui, dans les romans post-apocalyptiques, vont reprendre le
flambeau de la civilisation : les bons contre les méchants, et à la fin les bons gagnent toujours.
Ainsi lorsque le père tue l’un des cannibales, l’enfant demande s’ils sont toujours des « bons »
et le père répond qu’ils le seront « toujours » [p. 73 – 77]. La bonté indéfectible de l’enfant,
surtout, frappe. Mais, dans le roman, l’utilisation du motif des bons et des méchants interroge,
on va le voir.
Du point de vue de l’éthique, l’intertexte chrétien ne peut être négligé. The Road est
classé dans la catégorie récente (et florissante, je le disais plus haut) des romans post-
apocalyptiques. Or le motif des gentils et des méchants renvoie à l’Apocalypse, au Jugement
Dernier lorsque, à la fin des temps, Dieu séparera les bons des méchants avant l’advenue du
Royaume où les justes résideront éternellement dans la présence de Dieu. C’est le tribunal
suprême : Dieu, évidemment, ne commet pas d’erreur judiciaire. Dans le roman de McCarthy,
rien ne vient prendre cette place, pas même l’idée d’une « humanité » transcendante. On a
pu parler d’une « apocalypse sans Royaume ».
Or, plus l’homme s’approche de la mort, plus il compare l’enfant à un Dieu [Cf. p. 241.]
Voir aussi le passage, p. 246, où dans les derniers moments, il dit à l’enfant « Tu es le meilleur
des garçons » ; en anglais : « you’re the best guy » (p. 279).

Goog guys, bad guys

Dans le roman, le principe de distinction entre les bons et les méchants repose sur une
base extrêmement simple : les bons ne mangent pas d’autres gens. À quoi on peut peut-être
ajouter, à la toute fin du roman, le désir de l’enfant de ne pas laisser le cadavre de son père

6
exposé. Comme Antigone son frère, l’enfant veut au moins couvrir le mort [p. 251 et
suivantes]. Finalement le nouvel arrivant le recouvrira d’une couverture.
Je vous renvoie ici à la lecture d’Antigone par Lacan dans le Séminaire VII sur l’éthique
de la psychanalyse et la fonction du beau. Pour Lacan le beau est une « vraie barrière » au-
delà de laquelle règne la pulsion de mort et « qui arrête le sujet devant le champ innommable
du désir radical, pour autant qu’il est le champ de la destruction absolue […]1. » Le beau est-il
la dernière barrière avant l’horreur et la mort, avant « le champ de la destruction absolue » ?
La question est au centre du roman.

Si le père et l’enfant sont les « bons », qui sont les « méchants » ? Pour le père, la
réponse est simple : tous les « autres », sans distinction. Ainsi, lorsqu’il entend le bruit d’un
camion, il est frappé de terreur [cf. p. 59 etc.]. L’enfant, par contraste, est plus ouvert et c’est
d’ailleurs après la mort de son père qu’il rencontre (peut-être) d’autres « bons ».
Le père et le fils sont-ils les représentants de l’humanité face à ces « autres »,
déshumanisés, qui mangent de la chair humaine (notez l’escalade dans l’horreur : ils
pratiquent le meurtre, gardent des prisonniers qu’ils amputent pour se nourrir, mangent des
bébés qui viennent de naître) ? Ces « autres » sont-ils « les derniers hommes » ? Au sens de
Nietzsche ? les derniers représentants d’une culture morte ?
Le Dernier Homme est ainsi représenté dans Ainsi parlait Zarathoustra :
Et Zarathoustra parla au peuple en ces termes : […] Je vous le dis, il faut avoir encore du
chaos en soi pour enfanter une étoile dansante. Je vous le dis, vous avez encore du chaos
en vous. Hélas ! Le temps vient où l’homme deviendra incapable d’enfanter une étoile
dansante. Hélas ! ce qui vient, c’est l’époque de l’homme méprisable entre tous, qui ne
saura même plus se mépriser lui-même.
Voici, je vais vous montrer le Dernier Homme :
« Qu’est-ce qu’aimer ? Qu’est-ce que créer ? Qu’est-ce que désirer ? Qu’est-ce qu’une
étoile ? » Ainsi parlera le Dernier Homme, en clignant de l’œil.
La terre alors sera devenue exiguë, on y verra sautiller le Dernier Homme qui rapetisse
toute chose. Son engeance est aussi indestructible que celle du puceron ; le Dernier Homme
est celui qui vivra le plus longtemps.
[…]
Les cris et l’hilarité de la foule l’interrompirent. « Donne-nous ce Dernier Homme, ô
Zarathoustra, criaient-ils ; fais de nous ces Derniers Hommes ! Et garde pour toi ton
Surhumain !

1
J. Lacan, Le séminaire, Livre VII, L’éthique de la psychanalyse, Paris, Seuil, 1986, p. 256.

7
Le dernier homme qui « rapetisse toute chose », « celui qui vivra le plus longtemps »,
est-il désormais, de l’autre côté de la barrière qui le séparait du « champ innommable du désir
radical », à la fois le responsable de la catastrophe et le symptôme de sa conséquence ?
Rien, dans le roman, ne vient dire que les cannibales ont renoncé à leur « humanité » :
ce sont des bad guys, donc des guys tout de même. Est-ce alors l’humanité qui est
« mauvaise » - et cela signifie-t-il que sa fin peut-être, en quelque sorte, justifiée ? Au nom
de quoi ou quel idéal ? Le roman ne tranche pas, la relation entre le père et l’enfant semble
être le seul sujet du roman, la focale à travers laquelle tout le reste se voit. Et la distinction
radicale entre les bons et les méchants aussi.
Car la catégorie des good guys est bien certainement d’un usage ambigu : parce qu’elle
appartient au langage de l’enfant, elle représente une sorte de simplification radicale des
catégories morales (pour ceux qui suivent V21PY5, elle est comparable à « l’éducation » que
la mère de Perceval essaie de donner à son fils juste avant son départ dans le roman de
Chrétien de Troyes, j’y reviendrai). Mais, d’un point de vue plus large (littéraire, éthique,
philosophique…) peut-on fonder une culture (ou sa renaissance) sur une telle opposition, si
radicale ?

Résumons-nous. Il y a les bons, il y a les méchants. Les histoires que son père lui a
racontées, ont transmis à l’enfant une sorte de morale comparable à celle que possède
Perceval au début du roman de Chrétien de Troyes : Dieu et le Diable, le bien, le mal. Dans La
Route, il y a les good guys et les bad guys. Les premiers aident les autres ; ils ne mangent pas
de chair humaine, ils portent le feu.
Or, l’enfant remarque à plusieurs reprises dans le roman que, contrairement à ce qui
se passe dans les histoires, lui et son père n’aident pas les autres, et en conclut que « les
histoires ne sont pas vraies » : Those stories are not true.

L’intertexte chrétien est, de manière générale, ambigu. Dieu, dit le père, l’a chargé de
veiller sur son fils ; il lui a accordé, pour y parvenir, le permis de tuer. Mais Dieu, s’il existe, a
aussi permis la fin du monde, sans révélation ni royaume.
Quelques passages à travailler : p. 20, le flocon de neige (p. 16 pour l’anglais) ; notez
que le terme utilisé par McCarthy est christendom dont le sens est différent de celui de

8
christianity : christendom suppose le pouvoir temporel de l’église, le royaume de la chrétienté,
celui promis à la fin des temps dans l’Apocalypse).
Dans le paragraphe précédent, il faut aussi voir l’allusion à Voltaire. Cf. Les Cabales
(1772) : « Il est vrai, j'ai raillé Saint-Médard et la bulle ;/ Mais j’ai sur la nature encor quelque
scrupule. / L’univers m’embarrasse et je ne puis songer / Que cette horloge existe et n’ait pas
d’horloger. » (Voltaire fait allusion à l’attraction universelle de Newton).
Voir aussi le rêve du pingouin p.38/39. Lire p. 35 : « sur cette route il n’y a pas
d’hommes du Verbe ».
Que se passe-t-il dans une apocalypse si la fin, tant attendue dans le modèle chrétien,
ne révélait pas le « plan de Dieu » (Edgar Poe) ? Si aucun jugement, aucune salvation
n’advenaient ?

Si l’intertexte chrétien est ambigu reste l’image des porteurs de feu. Elle est,
récurrente dans le texte. On peut, pour la comprendre, faire référence à divers motifs
mythologiques mais aussi aux romans de la préhistoire, comme les Héritiers : les porteurs du
feu sont les inventeurs de la civilisation, ses gardiens. Ils sont au centre des « histoires » que
le père raconte à son fils. Bien sûr le saint Esprit étant représenté soit sous la forme d’une
colombe, soit sous celle d’une langue de feu (Pentecôte), McCarthy entretient là aussi la
pluralité des sens.
Mais, là encore, la perspective change lorsqu’on lit le passage de la rencontre, à la fin
du roman. L’homme qui vient chercher l’enfant (et qui porte sur lui toutes les marques des
héros barbares des séries populaires de fin du monde p. 248) le trouve « un peu dérangé »
(p.250) « kind of weirded out » (282) – weird out signifie « dérangé », certes mais parce qu’on
a été en contact avec un évènement ou une chose impossible à comprendre. C’est un mot
familier qui renvoie au trauma.

La mémoire et l’oubli

Le trauma, c’est à dire le souvenir de l’événement traumatisant, est toujours présent,


alors même qu’il semble parfois oublié : il se manifeste par des altérations de la mémoire et
de la conscience. Trace traumatique et traces mnésiques composent un présent corrompu,

9
impossible à vivre. De ce point de vue, le traumatisme repose sur l’impossibilité de l’oubli. Or
l’oubli est nécessaire à la vie. C’est le sens de ce passage qu’il faut lire, à partir de la p. 56 : le
souvenir de la dernière conversation de l’homme avec sa femme, en particulier :

On parlait de la mort autrefois, dit-elle. On n’en parle plus à présent. Et pourquoi ?


J’en sais rien.
Parce qu’elle est ici. Il ne reste plus de sujets de conversation. [je souligne]

De Platon à Freud2, l’image la plus familière en Occident, pour rendre compte du


rapport de la mémoire à l’oubli, est sans doute celle de l’impression sur un bloc de cire, ou
de l’ardoise magique.
Voir Platon, Théétète, 191.
Sigmund Freud, « Note sur le « bloc-notes magique », Résultats, idées, problèmes, II, [1925]

Pour la psychanalyse, le psychisme est organisé comme une sorte de machine-


mémoire qui permet à l’être humain d’agir (plus ou moins heureusement) selon sa propre
histoire.
Chaque événement nouveau est associé, dans cette machine-mémoire, avec des
évènements du passé, « réels », mais aussi avec des réminiscences imaginaires que nous lions
à ces évènements du passé. Enfin, et toujours dans l’après-coup, le tout est lié par des
éléments symboliques issus de la culture et de l’histoire de chacun qui permettent le
regroupement, le lien.
Tout cela se produit à chaque instant de la perception, à chaque nouvelle impression
qui est créée par un évènement extérieur et mobilise toutes les méthodes de rangement
évoquées. La mémoire consciente n’est donc qu’une partie de cette machine mémoire. Il y
des évènements que nous pouvons réactiver facilement et d’autres non, mais qui se laisseront
réactiver par des associations.
Dans le traumatisme, l’impression a été si forte que l’oubli a préservé l’événement de
l’usure continue du présent qui agit dans la mémoire consciente. Car mémoire et conscience,
affirme Freud, s’excluent. C’est l’image qu’utilise T.S. Eliot au début de La Terre vaine :

2
Platon, Théétète, 191.

10
mémoire et désir sont mélangés, faisant des habitants de la terre vaine des êtres « ni vivants,
ni morts » et qui « ne savent rien ». Comme les personnages rencontrés dans La Route. C’est
aussi le cas dans le traumatisme.
Dans l’appareil psychique, il y aurait donc une mémoire usuelle, dans laquelle la
représentation de l’événement s’use et une mémoire de l’oubli dans laquelle l’impression
demeure, aussi vivace que si le temps ne s’était pas écoulé3.

Dans La mémoire, l’histoire, l’oubli4, Paul Ricœur rappelle que l’oubli n’est pas le
contraire de la mémoire mais qu’il en est une forme. Il est nécessaire à la construction de la
mémoire comme, d’ailleurs, à toute construction. Dans le récit national, dans la construction
de la culture, dans la construction d’un texte….
L’histoire est ainsi une construction de la mémoire publique dans laquelle l’oubli joue
un rôle fondamental.

C’est aussi le sens de la courte parabole qu’offre Jorge Luis Borges dans l’une de ses
Fictions : Funes el memorioso5 (dans sa traduction française « Funes ou la mémoire » mais,
plus justement, Funes le mémorieux). Ireneo Funes se souvient de tout, chaque perception
est pour lui un événement qui trouve place dans sa mémoire avec des centaines de milliers
d’autres ; en conséquence, dans son monde surchargé, n’existent que des détails presque
immédiats et Funes, qui a appris sans effort l’anglais, le français, le portugais et le latin, n’est
pratiquement plus capable de penser. Comme le dit le texte

Non seulement il était difficile de comprendre que le mot générique chien embrassât tant
d’individus dissemblables et de formes diverses, cela le gênait que le chien de 9h14 (vu de
profil) eût le même nom que le chien de trois heures et quart (vu de face). Son propre visage
dans la glace, ses propres mains le surprenaient parfois.

En reprenant l’analogie du bloc de cire, on pourrait dire que, pour Ireneo Funes, la cire
est d’une qualité telle et l’impression si puissante que le bloc ne fonctionne plus. Lui qui peut
réciter mot à mot, dans la lettre du texte, l’intégralité de l’Histoire naturelle de Pline (qui fait

3
Sigmund Freud, « Note sur le « bloc-notes magique », Résultats, idées, problèmes, II, [1925], P.U.F., Paris, 1992,
p. 119.
4
Paul Ricœur, La Mémoire, l’histoire, l’oubli, collection « L’ordre philosophique », Paris, Seuil, 2000.
5
Jorge Luis Borges, « Funes el memorioso », Ficciones, 1944.

11
l’inventaire des grandes mémoires du passé : Cyrus, le roi de Perse qui savait le nom de chacun
de ses soldats, Mithridate Eupator qui rendait la justice dans les 22 langues de son royaume…),
est incapable de penser. Irineo, c’est l’antilittéraire. Pour lui non plus, il n’y a plus de sujets de
conversation.
La Route applique une manière de poétique du trauma où la forme s’affirme par sa
fragilité même.

Dans ce contexte le dernier paragraphe prend toute son importance. Et son mystère.
Le point de vue dans le dernier paragraphe du roman ne peut être attribué ni à
l’homme ni à l’enfant. Qui parle là alors ? Et quelle est la fonction de ces lignes, à la toute fin
du roman ?
Se donne-t-il comme une « morale » ? Qui conduirait alors à renverser la lecture : le
roman serait une « fable » ? Une allégorie ? Cf. le début : « ils étaient pareils aux vagabonds
de la fable » – sérieux problème de traduction, le texte dit « pilgrims » (like pilgrims in a fable)
les pèlerins. Image fondamentale dans la représentation américaine. Il s’agit des fondateurs
qu’on célèbre aujourd’hui à Thanksgiving.
Lire aussi p. 83 : §1 « Il essayait de trouver quelque chose à dire mais il ne trouvait
rien. »
Ou bien le dernier paragraphe agit-il comme la frontière dont parle Lacan ? Agit-il
comme « effet de beau » ? Qu’est-ce que l’image de cette truite qui portait sur son dos les
« cartes d’un monde en devenir » ?

Terres gastes

Pas de cause définie du cataclysme, pas de dénouement à la fin du livre, le roman de


Cormak McCarthy construit une temporalité particulière dans laquelle la chaine logique des
évènements n’est plus le moteur du récit. L’événement n’est pas décrit, seuls ses effets sont
présentés. La chaine causale est rompue. Or, dans notre monde occidental, depuis le XVIIe
siècle, la cause est présentée comme l’explication d’un fait ou d’un état. Ici le rapport au passé
est rompu. Les représentations qui conduisaient la vie sociale et morale aussi (motif de la terre
gastée pour ceux qui se souviennent du Conte du graal).
La forme même du texte épouse la discontinuité.

12
La narration recycle en permanence des objets du monde d’avant et des souvenirs du
père. Et, à la toute fin du texte, la description d’une truite, qui ne peut être faite par l’enfant
(né après la catastrophe), pose la question des formes de la mémoire dans le texte.
Le rapport de la mémoire à la structuration du récit est sans cesse en question.

Le roman présente le quotidien à travers l’épuisement du sens dans le rapport


particulier à la mémoire que constituent le traumatisme et l’impossibilité de l’oubli. Il
engage donc une narration qui mime les formes de l’après-coup.
- La parataxe (c’est-à-dire la juxtaposition sans mots de liaison de différentes
propositions) est la forme la plus utilisée dans La Route : elle juxtapose, là où la
syntaxe lie en explicitant ses procédés de liaison (complément de temps, de lieu de
cause etc.) et en subordonnant des éléments du discours à d’autres (propositions
subordonnées, indépendantes, principales), c’est–à- dire en ordonnant le discours.
Pas de cela ici. Ou très peu.
- Peu ou pas de ponctuation non plus : seul ou presque le point est utilisé. Lire, par
exemple, le dialogue p. 15 et 16. Même les apostrophes disparaissent dans les
formes élidées du verbe en anglais (dont, isnt etc) Les phrases sont très souvent
non verbales, parfois même elles sont composées uniquement d’adjectifs –
Exemple, p. 10 : « nu, silencieux, impie » ou p. 18 « solitaires et fourbus ».
« Solitary and dogged », « Cold and growing colder ».

La voix narrative semble ainsi partager le destin des personnages, être soumise elle
aussi à la mort du monde. Elle n’écrit pas seulement le traumatisme : elle écrit du point de vue
du trauma.

The Waste Land de T.S. Eliot a, selon Yves Bonnefoy, « formulé le vrai mythe de la
culture moderne »6. Écrit à la fin de la Première Guerre Mondiale, le poème a, d’un point de
vue formel, bouleversé le champ de la poésie occidentale. Mais, s’il a « formulé le vrai mythe
de la culture moderne », c’est parce qu’il ne présente pas seulement la dévastation matérielle

6
Yves BONNEFOY, « L’acte et le lieu de la poésie », L’Improbable et autres essais, Paris, Gallimard, collection
« Folio-essais », 1980, p. 123. La conférence a été publiée pour la première fois en 1959.

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du monde occidental au sortir du cataclysme de la Grande Guerre : si la terre est devenue
« vaine » - selon la traduction française de Pierre Leyris (titre emprunté à L’Ecclésiaste) – c’est
que l’Occident est atteint au cœur même de ses valeurs : la boucherie fratricide et ses millions
de morts ont rompu l’échelle des représentations qui avait soutenu l’idée de progrès. C’est la
« crise de l’esprit » que Paul Valéry commente, « le malaise dans la culture » qui inspire à
Freud sa seconde topique, « le déclin de l’Occident » selon Spengler.
Le modèle médiéval de la terre gaste offre à T.S. Eliot un modèle pour penser la crise
de l’Occident.
Et peut-être aussi au roman de Cormack MacCarthy qui renvoie explicitement au
poème d’Eliot et engage, au-delà des effets matériels du cataclysme, la dimension éthique du
ravage. Les lectures écocritiques actuelles, surtout américaines, renouent avec le motif à
travers l’exploitation du motif de la faute morale, liée à l’accélération de la dévastation de la
planète.

Dans La Route, nature et civilisation sont également « gastées ». Toute beauté a


disparu de la nature ; aucun ordre n’existe plus pour organiser et protéger les hommes.
La terre est couverte de cendres – la couleur majeure du roman est le gris,
omniprésent7. Il compose avec le noir des arbres carbonisés et des « poteaux électriques
noircis » l’obscurité dans laquelle baigne le récit. La pénombre, l’absence de lumière (ou la
lumière grise, the gray light) sont la règle – like the onset of some cold glaucoma dimming
away the world. » « Comme l’assaut d’on ne sait quel glaucome froid assombrissant le monde
sous sa taie » (p.9) Le glaucome est une maladie de l’œil qui attaque la vision en commençant
par la périphérie et en progressant vers le centre. Elle est irréversible.
Le « contre-spectacle du monde » (p. 242), sur lequel je vous invite bien sûr, à
réfléchir, se construit comme un rétrécissement. Où l’on retrouve le sens étymologique
d’angoisse.

Pas de couleurs : lorsqu’elles apparaissent, rarement, c’est presque toujours dans la


mémoire d’un événement du passé, parfois mais rarement à propos d’un objet : ainsi le bleu
de la bâche qui abrite un temps les personnages.

7
Cf « « The cold illucid world. The poetics of gray in C. McC’s The Road. » Styles of extinction. Murphet et Stevens,
Ed ; Continuum, 2012. Chris Danta relève 81 occurrences de l’adjectif gray.

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Plus rien ne pousse, plus rien ne vit, plus rien n’est produit. Toute vie a disparu du
monde, presque complètement brûlé ; quelques êtres humains, survivants d’une catastrophe
jamais explicitée, errent encore. Les rares objets qui ont échappé à la destruction témoignent
que l’époque où se place le récit est proche de la nôtre.
Mais ils témoignent aussi de l’épaisseur, de la durée de l’Histoire avant l’événement –
et de l’anéantissement de toute cette durée. Ainsi on rencontre des dolmens et l’homme
trouve des pointes de flèche qu’il veut donner à l’enfant avant de les jeter puisqu’elles ne
représentent plus rien ; même chose avec une pièce de monnaie. La catastrophe a fait surgir
un ancien voilier espagnol du fonds des mers... L’homme trouve un vieux sextant. Mais tous
ces objets sont abandonnés : ils n’ont plus de valeur. L’enfant ne les voit même pas. Non
seulement le rapport au passé est rompu mais rien de valeur ne peut en être en être sauvé.

Dans ce monde sans mouvement ni bruit, ni couleur, l’identité des hommes et des
choses s’estompe. On l’a vu, ni les personnages (sauf Élie, le prophète), ni les lieux n’ont de
noms ; aucune date ne vient ponctuer le récit. Le passage du temps est marqué par le retour
des moments qui se répètent : at evenings, in the morning. La pluie est omniprésente qui
contribue encore à confondre le ciel et la terre – la destruction du monde en vient alors à
évoquer sa création.
La succession des soirs et des matins rappelle en effet la création du monde dans la
Genèse. « Il y eut un soir et il y eut un matin ». Mais ici tous les matins sont sans différence
sous le même « indifférent soleil », invisible. La fin appelle le commencement dans une
manière de « contre-spectacle » qui est la négation de tout devenir :

Peut-être que dans la destruction du monde, il serait enfin possible de voir comment il
était fait. Les Océans, les montagnes. L’accablant contre-spectacle des choses en train de
cesser d’être. L’absolue désolation, hydropique et froidement temporelle. Le silence. [p.
242]

Et pour conclure, encore la terre gaste

La rhétorique particulière du roman se marque aussi dans le réseau des comparaisons


qui ouvre à la dimension de la parabole dans la description d’un monde d’où toute essence
divine a disparu.

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Les comparaisons, en effet, sont omniprésentes. Elles esquissent d’abord la
dévastation du monde dans une sorte de déploration de l’univers tout entier qui pleure la
terre morte. Ainsi :

By day the banished sun circles the earth like a grieving mother with a lamp» The Road,
p. 32.
« Le jour le soleil banni tourne autour de la terre comme une mère en deuil tenant une
lampe », La Route, p. 35.

Mais cette comparaison ne témoigne que d’un travail de mémoire : la compassion du


monde n’existe que dans l’esprit de l’homme : et l’on retrouve « the same indifferent sun» p.
234, « [le] même indifférent soleil ». Lire aussi p. 195.

La dévastation est présente comme une blessure à la fois physique : p. 19 « ce terrain


cautérisé » et mentale, « p. 20, « cette froide obscurité autiste » : «That cauterized terrain» ;
«that cold autistic dark».
Ainsi se retrouve le motif central des terres gastes et la blessure du Roi-Pêcheur : la
dévastation physique n’est qu’un symptôme de la dévastation éthique, dans la déroute du
système des représentations.

Je vous laisse sur une dernière question : dans ce monde gaste, la truite alors pourrait-
elle fonctionner comme le graal de Chrétien ?

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