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Instrumentation interne

des réacteurs
par Jean-Lucien MOURLEVAT
Adjoint du Chef du Département Performances Cœur à Framatome - ANP

1. Fonctionnement des REP. Rappel......................................................... BN 3 452 - 2


1.1 Instrumentation interne des REP ................................................................ — 2
1.2 Dynamique de variation du flux neutronique............................................ — 3
1.3 Notions de distribution de puissance......................................................... — 3
2. Exigences fonctionnelles associées à l’instrumentation des
REP — 4
2.1 Fonctions de l’instrumentation neutronique ............................................. — 4
2.2 Exigences associées au système d’instrumentation de référence........... — 5
2.3 Exigences associées à l’instrumentation temps réel ................................ — 7
2.4 Bases de conception des matériels associés
au système d’instrumentation de référence .............................................. — 7
2.5 Exigences de sûreté. Classement ............................................................... — 7
3. Description des matériels ...................................................................... — 8
3.1 Architecture générale et implantation géographique ............................... — 8
3.2 Mesures de flux ............................................................................................ — 8
3.3 Mesures de température ............................................................................. — 13
4. Configurations et fonctionnement du système ............................... — 14
4.1 Premier montage des doigts de gant ......................................................... — 14
4.2 Réalisation d’une carte de flux.................................................................... — 14
4.3 Retrait des doigts de gant au déchargement............................................. — 15
4.4 Extraction d’un doigt de gant...................................................................... — 15
5. Exploitation de la mesure ...................................................................... — 15
5.1 Notions de carte de flux............................................................................... — 15
5.2 Nécessité des passes d’intercalibration ..................................................... — 16
5.3 Rôle du calculateur de tranche KIT ............................................................. — 16
5.4 Traitement des mesures de flux.................................................................. — 16
5.5 Résultats finaux ............................................................................................ — 20
5.6 Traitement des mesures de température ................................................... — 20
6. Essais périodiques associés au système............................................ — 20
7. Places du système RIC dans les spécifications d’exploitation.... — 20
7.1 Exigences relatives à l’exécution de cartes de flux ................................... — 20
7.2 Indisponibilités du système RIC.................................................................. — 20
8. Systèmes d’instrumentation interne chez d’autres
constructeurs — 21
8.1 Système Aeroball de Siemens .................................................................... — 21
8.2 Système Fixed Incore de Babcock et Wilcox ............................................. — 23
8.3 Autres constructeurs.................................................................................... — 25
9. Développements et évolutions ............................................................. — 26
9.1 Développement des thermomètres gamma .............................................. — 26
9.2 Développement de collectrons chemisés .................................................. — 26
9.3 Expérimentation de collectrons rhodium sur un REP français................. — 27
9.4 Évolution vers un système de surveillance des conditions
préaccidentelles............................................................................................ — 27
9.5 Système retenu pour le réacteur franco-allemand EPR............................ — 27
10. Conclusions................................................................................................ — 27
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. BN 3 452

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie nucléaire BN 3 452 − 1
INSTRUMENTATION INTERNE DES RÉACTEURS ______________________________________________________________________________________________

L a conduite et la sûreté des réacteurs nucléaires, de quelque filière qu’ils


soient, nécessitent de mesurer l’énergie fournie par les fissions des noyaux
d’uranium 235, donc la puissance nucléaire.
Dans tous les cas, la mesure de cette puissance fait intervenir des mesures
des rayonnements émis par le cœur du réacteur et plus particulièrement du
flux de neutrons. Les paragraphes qui suivent vont donc décrire comment on
mesure le flux de neutrons à l’intérieur du cœur, mais avant d’entrer dans une
description détaillée, il convient de s’attarder sur une particularité fondamen-
tale des réacteurs nucléaires.
Les lois de la physique neutronique veulent que la puissance ou le flux neu-
tronique ne se répartissent pas de façon uniforme à l’intérieur du volume du
réacteur. Il existe des endroits où la puissance est plus élevée qu’en d’autres,
typiquement au centre du réacteur par comparaison à la périphérie. On parle
alors de points chauds.
C’est bien sûr aux points chauds que la puissance fournie se rapproche le
plus des limites de conception, voire de sûreté d’où l’obligation de connaître
parfaitement la valeur de la puissance et donc de mesurer le flux neutronique
en ces points. Ce phénomène de répartition non uniforme de la puissance doit
être compris comme un phénomène physique se produisant au sein du réac-
teur dans tout son volume. On parle alors de distribution de puissance en trois
dimensions ou plus simplement de distribution de puissance 3D. Il existe éga-
lement un autre phénomène physique limitatif associé à la distribution de puis-
sance mais plus particulièrement lié à la puissance moyenne de chaque crayon
(intégrale de la puissance de chaque crayon suivant la direction axiale) plutôt
qu’à la puissance locale, qui est l’apparition du phénomène de caléfaction. Ce
phénomène, en créant un film de vapeur isolant qui réduirait l’échange ther-
mique entre une partie du crayon combustible et le fluide primaire, pourrait
provoquer, s’il se produisait, une augmentation de la température de la gaine
entraînant une dégradation des propriétés mécaniques de celle-ci ainsi qu’une
réaction d’hydruration de l’alliage métallique (Zircalloy) la constituant.
La distribution de puissance est un paramètre qui évolue dans le temps avec
une constante de temps à court terme, liée essentiellement aux variations de
puissance réalisées chaque jour par l’exploitant lors des opérations de conduite
du réacteur, et une constante de temps à long terme dépendant de l’épuisement
du combustible. Elle peut donc se distordre plus ou moins rapidement. Au cours
de ces déformations, le ou les points chauds se déplacent dans le cœur et
changent à la fois d’amplitude et de localisation.
L’instrumentation neutronique a pour fonction non seulement de mesurer le
niveau de puissance mais aussi la distribution de puissance ou de flux neutro-
nique en 3D et, en particulier, la valeur de la puissance locale fournie aux points
chauds. Dans la suite de l’exposé, on assimilera, en première approximation,
distribution de flux et distribution de puissance.

1. Fonctionnement des REP. La matière choisie pour subir cette interaction va se consommer
et disparaître à une vitesse qui est fonction de l’intensité du flux
Rappel neutronique et de la probabilité d’occurrence de la réaction (sec-
tion efficace d’absorption). Plus cette probabilité sera élevée et
plus le courant fourni sera fort mais, en contrepartie, plus la
matière sensible va disparaître vite ce qui, à terme, nécessitera de
remplacer le capteur très rapidement.
1.1 Instrumentation interne des REP Le problème de l’épuisement de la matière sensible se pose de
manière cruciale pour un capteur neutronique situé à l’intérieur du
La mesure d’un flux de neutrons, donc de particules non char- cœur, région dans laquelle le flux est très élevé, de l’ordre de
gées, fait toujours intervenir, une interaction neutron/matière qui, 1014 n · cm–2 · s–1.
elle, va créer des particules susceptibles de produire un courant La conception des systèmes d’instrumentation interne que nous
électrique mesurable. Après chaque absorption d’un neutron, les connaissons aujourd’hui, date de la fin des années soixante : elle
atomes de cette matière sensible vont se transformer et n’existent reflète le savoir-faire et l’expérience que les constructeurs de cen-
plus en tant que tels. trales nucléaires avaient acquis à cette époque.

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Il était très difficile, il y a une trentaine d’années, de trouver un Sur un réacteur de type REP (réacteurs à eau pressurisée) indus-
capteur neutronique capable de fournir un courant mesurable dans triel, la plage de variation du flux neutronique est très importante.
des conditions industrielles, donc délivrant une intensité plutôt éle- Après le chargement des assemblages combustible, la valeur du
vée, et doué d’une durée de vie d’au moins quatre à cinq ans per- flux neutronique dans le cœur est proche de 103 n · cm–2 · s–1 puis
mettant d’éviter des opérations de remplacement trop fréquentes. elle atteint environ 1014 n · cm–2 · s–1 lorsque le réacteur fonctionne
Une autre contrainte à prendre en compte, plus mécanique à puissance nominale. Une telle plage de onze décades (1011) est
celle-là, est liée à la température moyenne de fonctionnement considérable et vouloir mesurer le flux neutronique sur une telle
proche de 300 oC. dynamique pose de sérieux problèmes technologiques.
Comme la plupart des constructeurs, Framatome - ANP a choisi Quel que soit le niveau de puissance ou de flux en absolu, il
de ne pas laisser à demeure les capteurs en position de mesure existe une distribution de ce flux en trois dimensions dans le
dans le cœur et d’envoyer ceux-ci dans le réacteur uniquement volume du réacteur. Pour être réalisée dans les meilleures
quand on a besoin de faire des relevés. C’est pourquoi l’instrumen- conditions de précision, toute mesure doit donc prendre en compte
tation interne est dite « mobile ». Les capteurs ont donc à effectuer à la fois la contrainte propre au niveau absolu et celle inhérente au
des trajets de longueur non négligeable entre leur lieu de stockage phénomène de distribution dans l’espace.
hors de la cuve et leur emplacement de mesure dans le cœur. Une
partie importante du système de mesure interne est constituée par
les dispositifs de mise en mouvement des détecteurs. Le fait que 1.3 Notions de distribution de puissance
les capteurs soient mobiles entraîne aussi quelques difficultés
technologiques supplémentaires au niveau du transport du signal Comme indiqué dans l’introduction, les réacteurs nucléaires sont
électrique. sujets au phénomène de répartition non uniforme de la puissance
Afin d’éviter une usure trop importante des pièces mobiles, on dans le cœur d’où la notion de distribution de puissance. Elle est
évite de faire fonctionner un tel système de manière continue. Les mesurée en unité normalisée et non en unité absolue comme, par
campagnes de mesures vont être séparées par des périodes d’arrêt exemple, en nombre de fissions ou en watts. Elle s’exprime par un
plus ou moins longues pendant lesquelles les détecteurs sont nombre sans dimension : si un élément de volume (dx, dy, dz ) du
stockés dans une position de repos à l’extérieur de la cuve. Le sys- réacteur produit une puissance égale à 1,25, cela veut dire qu’il
tème d’instrumentation interne mobile est un système qui fonc- fournit une puissance égale à 1,25 fois la puissance moyenne du
tionne à la demande, par conséquent, il ne peut pas être utilisé cœur.
pour effectuer une surveillance continue du cœur et, a fortiori, pour Aux points chauds et en fonctionnement normal, la puissance
assurer des fonctions de protection du réacteur. fournie localement est typiquement égale à environ 2 fois la puis-
Pour atténuer les conséquences d’une mesure intermittente par sance moyenne du cœur.
« campagnes individuelles », des thermocouples ont été installés à
position fixe à la sortie du cœur. La température mesurée est une Exemple : pour un réacteur de 1 300 MWe fonctionnant à puis-
indication de la puissance moyenne fournie par l’assemblage sance nominale (100 % PN), la puissance linéique moyenne est égale
au-dessus duquel se situe un thermocouple. La distribution de à 170,3 W/cm ; aux points chauds, la puissance fournie correspond
température en sortie des assemblages représente bien la donc à une puissance linéique de 341 W/cm. Si le réacteur fonctionne
composante horizontale en (x, y ) de la distribution de puissance à à 10 % de la puissance nominale, cette valeur est alors égale à
l’intérieur du cœur. 34 W/cm.
C’est pourquoi le système d’instrumentation interne Framatome Les réacteurs de type REP présentent des variations relativement
comprend non seulement une partie mesure de flux mais aussi importantes de la composante axiale de la distribution puissance
une partie mesure de température. dues au fait que la répartition axiale de la densité d’eau se modifie
Une évolution importante des fonctionnalités est intervenue à la lorsque la température de sortie varie avec le niveau de puissance.
fin des années 1970. En effet, l’accident de la centrale américaine À puissance nulle, température de sortie et température d’entrée
Three Miles Island a mis en évidence la nécessité de mettre à la sont égales, il n’y a pas de gradient de température ni de densité
disposition de l’opérateur des informations pertinentes en cas d’eau sur la hauteur du cœur. Ce n’est plus le cas lors du fonction-
d’accidents. Ceci a eu pour conséquences d’étudier la possibilité nement en puissance car la partie haute du cœur, plus chaude que
d’effectuer de nouvelles mesures comme le niveau d’eau dans la la partie basse, est moins bien modérée du fait de la densité d’eau
cuve ou d’élaborer des informations de type variables d’état, plus faible, donc moins réactive, d’où un déséquilibre amenant le
comme par exemple la marge à la saturation, en réalisant des trai- pic de flux vers le bas du cœur. Bien sûr, l’effet inverse se produit
tements sophistiqués (une marge à la saturation négative indique quand on réduit la puissance.
que l’eau du circuit primaire est portée à ébullition et qu’à terme, Des variations de la distribution axiale de puissance apparais-
le cœur va s’assécher). Le système d’instrumentation interne par- sent aussi chaque fois que les grappes de contrôle se déplacent
ticipe à cette évolution et a été modifié à cet effet. puisque celles-ci, introduites par le haut du cœur, provoquent une
Mais avant de décrire plus en détails le système d’instrumenta- inhomogénéité axiale dans les propriétés neutroniques du cœur.
tion interne, il est nécessaire de préciser les fonctions exactes que Quelle que soit leur cause, les variations de la distribution de puis-
celui-ci doit remplir et pour cela, quelques rappels sur le fonction- sance peuvent être amplifiées du fait de l’instabilité axiale du cœur
nement des réacteurs à eau pressurisée (REP) sont utiles. liée à la cinétique de l’empoisonnement xénon.
Bien qu’elles puissent être d’une amplitude relativement impor-
tante car elles sont divergentes, les oscillations de la distribution
1.2 Dynamique de variation axiale de puissance dues aux oscillations xénon ne deviennent
du flux neutronique gênantes sur le plan de la sûreté que si elles ne sont pas
contrôlées. Pour ce faire, l’opérateur manœuvre les grappes de
Les différentes phases de fonctionnement d’un réacteur couvrent contrôle qu’il peut positionner au niveau du pic de flux, de préfé-
une plage commençant lors des opérations de chargement des rence quand celui-ci se trouve dans le haut du cœur.
assemblages combustible dans le cœur jusqu’au fonctionnement à Les effets précédents sont des effets observés à court terme. Les
puissance nominale, voire un peu au-dessus si l’on considère que constantes de temps mises en jeu sont de quelques secondes pour
la puissance peut atteindre la valeur des seuils d’arrêt d’urgence les mouvements de grappes, de quelques minutes pour les varia-
réglés, en général, à une valeur supérieure à la puissance nomi- tions du niveau de puissance et de quelques heures pour les
nale. oscillations xénon.

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La composante azimutale de la distribution de puissance [dans Lors de la conception originelle des réacteurs de type REP, on
un plan horizontal (x, y )] est également sujette à des variations en s’est rendu compte qu’il était très difficile, compte tenu des diffi-
fonction du niveau de puissance, mais présente un comportement cultés technologiques que représente la mesure du flux neutro-
stable vis-à-vis des oscillations xénon (azimutales) ; elles sont auto- nique à l’intérieur du réacteur, de mesurer par le même système le
amorties et ne risquent donc pas d’induire ultérieurement des pics niveau absolu et la distribution de la puissance, tout en respectant
de flux prohibitifs. Il faut remarquer que, vis-à-vis de la distribution les exigences de précision et de temps de réponse souhaitées.
de puissance (x, y ), l’opérateur ne dispose d’aucune capacité de Il a paru plus simple de séparer les fonctions en faisant appel à
contrôle car la position géographique des grappes absorbantes à deux systèmes d’instrumentation :
l’intérieur d’un groupe ou d’un sous-groupe de grappes est parfai-
tement symétrique en ( x, y ) et respecte la symétrie en 1/8 e de — l’un serait conçu et optimisé pour mesurer avec une très
cœur. bonne précision et un « moins bon » temps de réponse la distribu-
tion de puissance en trois dimensions ;
En plus des phénomènes de variation précédents, observables à
— l’autre serait chargé de mesurer la distribution de puissance
court terme, il existe une cause de variation à long terme, liée à
et le niveau de puissance avec un très bon temps de réponse et
l’épuisement du combustible. Les atomes d’uranium 235 vont dis-
une « moins bonne » précision.
paraître plus vite dans la région où le flux neutronique est le plus
élevé. C’est pourquoi un système interne, mesurant le flux neutronique
à l’intérieur du cœur, et un système externe placé à l’extérieur de
Exemple : si l’on considère le problème sous l’aspect répartition la cuve coexistent. La terminologie habituellement retenue pour
axiale et si le pic de flux se situe en bas du cœur en début de cycle, nommer les systèmes à partir de trigrammes utilise l’appellation
il se repositionnera en haut du cœur dans la seconde moitié du cycle RIC (réacteur instrumentation cœur) pour le premier et RPN (réac-
car cette région se trouve alors moins épuisée. Le même phénomène teur protection nucléaire) pour le second.
s’observe également en (x, y ).
Le système RIC mesure la distribution relative en 3D de la puis-
L’amplitude associée aux variations de la distribution de puis- sance à l’intérieur du cœur du réacteur avec une très bonne pré-
sance à long terme reste dans le même ordre de grandeur que cision liée à un procédé de mesure interne au réacteur. C’est
celui observé sur les variations à court terme et ne remet pas en pourquoi on l’appellera par la suite système de référence. La
question la plage de variation du flux balayée lors des transitoires constante de temps associée n’est pas une exigence forte ; elle
de puissance. dépendra de l’architecture du système et de la technologie utilisée.
On constate ainsi que, vis-à-vis des problèmes de sûreté que Le système RPN mesure le niveau absolu de puissance et la dis-
posent les déformations de la distribution de puissance, c’est la tribution relative de puissance en temps réel. La mesure du niveau
composante axiale qu’il faut mesurer en continu à cause du risque de puissance est ajustée sur une mesure faite par bilan enthalpique
d’instabilité xénon ; par contre, c’est la distribution de puissance au secondaire. Un ajustement périodique (calibrage) est nécessaire
3D dans son ensemble donc avec ses deux composantes axiale et car la proportionnalité entre la mesure externe et le niveau de puis-
horizontale [au sens (x, y )] qu’il faut mesurer pour en suivre et sance réel du réacteur dépend de la composante (x, y ) de la distri-
vérifier les évolutions à long terme. bution de puissance qui, on l’a vu, varie avec l’épuisement du
combustible. La mesure de la distribution relative de puissance est
scindée en deux mesures, l’une de la composante en (x, y ) et
l’autre de la composante axiale.
2. Exigences fonctionnelles La mesure de la composante (x, y ) revient à surveiller l’écart qui
existe entre les valeurs indiquées par les quatre chambres externes
associées à l’instrumentation niveau puissance placées autour de la cuve. En effet, une discor-
des REP dance, entre quatre signaux qui devraient être identiques, est le
reflet d’une déformation de la distribution (x, y ) de puissance. La
surveillance d’une éventuelle discordance est réalisée dans l’unité
de surveillance (palier N4) ou dans l’équipement de surveillance
2.1 Fonctions de l’instrumentation des distributions de puissance (palier 1 300 MWe) du système RPN.
neutronique En ce qui concerne la mesure de la composante axiale, celle-ci
est obligatoire compte tenu des phénomènes mis en jeu à court
L’instrumentation nucléaire a deux objectifs qu’elle doit remplir terme ; elle est assurée par 6 chambres montées verticalement
simultanément : l’une au-dessus de l’autre (paliers N4 et 1 300 MWe) ou par
— le premier est de mesurer le niveau de puissance en absolu 2 chambres (paliers CP0 et CPY (900 MWe)) qui mesurent en per-
ce qui revient à mesurer le flux neutronique global. En général, manence le flux de neutrons émis verticalement par le cœur.
l’unité est la fraction de puissance nominale ou % PN ; Nota : les chambres externes des paliers 1 300 MWe (PQY) et 1 450 MWe (N4)
— le deuxième est, comme on vient de le voir, la mesure de la comportent 6 détecteurs individuels.
distribution de puissance (ou de flux) en 3D à l’intérieur du réac- Compte tenu du procédé de mesure externe, cette mesure est
teur. Elle est exprimée en valeur relative c’est-à-dire avec un moins précise qu’une mesure interne mais l’exigence fonctionnelle
nombre sans dimension. prioritaire assignée au système RPN est le temps de réponse c’est
À ces deux types de mesures sont associées des exigences en pourquoi le compromis précision/temps de réponse a été orienté
précision et temps de réponse suivant l’utilisation qui est faite du en faveur du temps de réponse pour ce système. Dans la suite du
signal correspondant. texte, ce système RPN est appelé système d’instrumentation
temps réel.
Exemple : on conçoit que pour une utilisation du signal dans le
système de protection chargé de faire chuter le plus rapidement pos- La figure 1 présente une vue générale du système d’instrumen-
sible les grappes de contrôle pour réduire la puissance en cas d’acci- tation interne mobile pour les tranches du palier CPY.
dent, les exigences en temps de réponse soient très contraignantes.
On conçoit également que pour piloter le réacteur, l’opérateur ait
besoin d’une mesure du niveau de puissance aussi précise que pos- Les coordonnées (x, y, z ) qui sont utilisées dans le texte cor-
sible, car un pour-cent d’incertitude oblige à fonctionner un pour-cent respondent à un système référentiel placé au centre du cœur et
en dessous de la puissance maximale autorisée ce qui entraîne un permettant de positionner une maille (x, y, z ) à la cote axiale z
manque à gagner au niveau de la puissance produite. dans un assemblage de coordonnées horizontales (x, y ).

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Colonne de
thermocouple

Thermocouple

Doigt de gant

Cuve

Châssis
support

Tube de
guidage

Vanne Buselure
manuelle

Groupe
motoréducteur

Vanne Sélecteurs
automatique de groupe

Pénétration Voies de Boîtier de Sélecteurs de


Figure 1 – Vue générale du système
protection fin de course groupe de voie
d’instrumentation interne mobile.
Système RIC (palier CPY)

2.2 Exigences associées au système — calibrer les détecteurs niveau puissance de l’instrumentation
externe (RPN) en distribution axiale de puissance ;
d’instrumentation de référence — détecter une éventuelle erreur de chargement ;
— délivrer des informations sur la distribution de puissance qui
2.2.1 Rôles de l’instrumentation interne du cœur participent à la qualification des codes et méthodes utilisés dans
les calculs de conception.
Le système d’instrumentation interne a pour rôle de mesurer la ■ En cours de cycle et en fonctionnement normal, l’instrumen-
distribution de puissance en 3D à l’intérieur du cœur, de mesurer tation interne est utilisée pour :
la distribution de température en sortie du cœur et de délivrer des
informations nécessaires au calcul de la marge à la sous-saturation — vérifier que la distribution de puissance et en particulier les
et du niveau d’eau dans la cuve. facteurs de points chauds évoluent en fonction du temps comme
les calculs de conception l’ont prévu ;
■ Pendant les périodes d’essais de démarrage au premier — vérifier et/ou calibrer les détecteurs niveau puissance de l’ins-
cycle ou après chaque rechargement ou en périodes d’essais trumentation externe (RPN) en distribution axiale de puissance ;
particuliers, l’instrumentation interne est utilisée pour : — fournir la distribution axiale de facteur radial Fxy (z ) [facteur
— vérifier que la distribution de puissance en début de cycle est de pic radial ou maximum de puissance en (x, y ) dans un plan de
conforme aux calculs de conception et en particulier que la valeur cote z] pour la zone sans grappes dite TGE (toutes grappes extrai-
des facteurs de points chauds respecte les hypothèses de tes), information nécessaire pour le système de protection des
conception ; réacteurs 1 300 MWe et 1 450 MWe (appelé SPIN) ;

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— détecter et/ou confirmer la présence d’anomalies sur la distri- — ou bien peut-on se contenter d’un seul capteur auquel cas ce
bution de puissance dans le cœur en cas d’alarmes de déséquilibre temps est long voire rédhibitoire puisqu’il faut plusieurs passages
de puissance azimutal initiées par le système RPN ou en cas de fonc- du même détecteur.
tionnement dégradé de celui-ci (partie flux et partie température) ; La solution raisonnable est d’opter pour un compromis : le
— calculer la distribution d’épuisement des assemblages concepteur a choisi d’utiliser plusieurs détecteurs mais en petit
combustible en fin de cycle, en particulier celle qui servira à définir nombre, par exemple cinq ou six. En conséquence, un détecteur
le nouveau plan de chargement ; doit pouvoir explorer plusieurs assemblages. Un système
— fournir les informations nécessaires pour calculer la marge à « d’aiguillage » est alors à prévoir afin de guider les sondes
la saturation et le niveau d’eau dans la cuve pour vérifier que ces mobiles dans les assemblages qui leur sont affectés. Pour des rai-
informations sont disponibles (pour la partie mesure de tempé- sons évidentes de maintenance, le système d’aiguillage ne peut
rature). être situé qu’en dehors de la cuve.
■ En fonctionnement accidentel, les mesures de température Une autre conséquence est le fait qu’une campagne de mesure
en sortie assemblage fournissent les informations nécessaires au demandera un temps non négligeable puisque chaque détecteur
calcul de la marge à la saturation et à celui du niveau cuve (pour aura à effectuer plusieurs passages dans le cœur pour explorer
la partie mesure de température). tous les assemblages qui lui sont affectés.
Du fait de son utilisation « à la demande », la partie mesure de Le niveau de puissance et la distribution de puissance devront
flux du système RIC ne joue aucun rôle immédiat de sûreté. En par- donc être parfaitement stables entre le premier et le dernier
ticulier, le système RIC ne participe à aucune génération d’alarmes assemblage exploré pour ne pas perturber la mesure et dégrader
en vue de participer à la surveillance du respect des conditions la précision. L’obtention des conditions de stabilité du cœur est une
préaccidentelles ou en d’autres termes, des hypothèses initiales contrainte forte sur l’exploitation du réacteur.
des études d’accidents. La proportion d’assemblages pouvant recevoir le passage d’un
C’est pourquoi, en cas d’indisponibilité d’une partie du système détecteur mobile — on parle d’assemblages instrumentés — est
mesure de flux, le fonctionnement du réacteur peut se poursuivre d’environ 30 % sur les tranches françaises.
normalement jusqu’à ce que les spécifications techniques d’exploi-
tation requièrent l’exécution d’une nouvelle carte de flux.
2.2.3 Gamme de mesure
Il en est de même pour la partie mesure de température qui sert
uniquement à confirmer l’existence d’un déséquilibre de puissance Pour mesurer la distribution de puissance présente à l’intérieur
azimutal quand un tel événement est détecté par les chambres du cœur, à un niveau de puissance absolu donné, la plage de
externes ou en cas de défaillance partielle de celles-ci. mesure est, bien sûr, moins grande que onze décades mais s’étend
Par contre, en fonctionnement accidentel, le système RIC, par la tout de même sur deux décades : de 0,10 à 2,50 environ. Sachant
mesure de température en sortie assemblage, est à l’origine de que l’on veut faire des mesures de distribution de puissance à
deux informations capitales pour la conduite de type approche par « bas niveau » soit à un niveau de puissance égal à 0,1 % PN, et au
état (APE), que sont la marge à la saturation et le niveau cuve. « niveau puissance », soit jusqu’à 100 % PN, cela représente une
À ce titre uniquement, on peut considérer que cette partie du dynamique de mesure de trois décades soit au total cinq décades.
système RIC a un rôle sur le plan sûreté. L’électronique d’acquisition du système RIC doit avoir des perfor-
mances cohérentes avec cette plage de variation.

2.2.2 Précision 2.2.4 Temps de réponse


Le fait qu’un détecteur mobile doive explorer plusieurs assem-
Définir une exigence sur la précision requise est une tâche diffi- blages implique que l’exécution d’une campagne de mesure
cile. Il est tentant de vouloir mesurer la puissance dans un grand couvrant tout le cœur dure un certain temps. En effet, pour explo-
nombre d’assemblages car il est logique de penser que l’obtention rer un assemblage puis un autre, la sonde mobile doit effectuer un
d’une précision satisfaisante est directement liée au nombre aller jusqu’en haut de l’assemblage concerné, puis se retirer hors
d’assemblages susceptibles d’être explorés par les détecteurs de la cuve jusqu’au dispositif d’aiguillage. Celui-ci oriente alors le
mobiles, et donc d’exiger un volume d’instrumentation important. détecteur en vue de lui faire prendre le cheminement correspon-
Cette exigence découle de la constatation suivante : plus la préci- dant à l’assemblage suivant. Compte tenu des distances mises en
sion de mesure de la distribution de puissance dans le cœur sera jeu (environ une trentaine de mètres pour un aller et retour), effec-
bonne et moins il sera nécessaire de prendre des marges pour cou- tuer ces trajets prend du temps, environ cinq minutes.
vrir une connaissance imparfaite de la valeur des pics de puissance
Il faut distinguer le temps d’acquisition des signaux, associé à
aux points chauds. La valeur de la précision va donc se répercuter
une campagne de mesure couvrant tout le cœur, du temps de
dans toute la conception du réacteur et sur les marges de sûreté.
réponse individuel du capteur. Même si celui-ci est très court, ce
Mais mesurer la puissance dans un grand nombre d’assembla- qui est le cas des chambres à fission, l’exécution d’une carte de
ges implique de percer le nombre correspondant de trous dans le flux complète va consommer un temps de l’ordre d’une heure.
fond de la cuve ce qui, sur les plans économique et technologique,
Il faut ensuite prendre en compte le temps nécessaire à la mise
est inenvisageable. Dans ces conditions, il faut admettre de ne pas
en forme des données et au dépouillement ce qui peut conduire à
pouvoir mesurer la puissance dans tous les assemblages et seule
un délai de restitution des résultats de quelques heures voire de un
l’exploration d’un nombre « réduit » d’assemblages est
ou deux jours.
concevable. La question qui se pose ensuite est de fixer le nombre
de capteurs mobiles. Le temps nécessaire à l’acquisition d’une
mesure sur tout le cœur en dépend directement ainsi que le nom- 2.2.5 Mesures de température en sortie cœur
bre des équipements mécaniques chargés de les mettre en
mouvement : Pour pallier cet inconvénient, une mesure de la composante
— faut-il prévoir un capteur dédié par assemblage auquel cas le (x, y ) de la distribution de puissance est réalisée par des thermo-
temps nécessaire à l’exploration des assemblages sélectionnés est couples positionnés à cote fixe au-dessus du cœur c’est-à-dire, en
court puisqu’un seul passage de tous les détecteurs simultanément fait, en bas des internes supérieurs de cuve. Dans ce cas, puisque
permet de faire une mesure sur tout le cœur ; la mesure est continue, seul le temps de réponse du capteur est à

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considérer, soit quelques secondes. Sur le palier N4, le nombre de niveau de qualification des matériels, les secondes à définir un
thermocouples est de 54 (51 sur les réacteurs de 900 MWe, 50 sur niveau de qualité.
les réacteurs de 1 300 MWe).
Les mesures de température en sortie du cœur ont un double
Les niveaux de qualification, définis par les appellations Ki
rôle :
(de K1 à K3, en allant du plus au moins contraignant) sont choi-
— les signaux correspondants sont utilisés pour calculer la marge sis en fonction des conséquences d’une défaillance éventuelle
à la saturation et permettraient de surveiller le cœur en conditions d’une ou des parties du système. Au niveau K1, correspondent
accidentelles. La plage de mesure doit être cohérente avec ces les critères d’essais de qualification les plus difficiles à satis-
conditions et couvrir une large gamme s’étendant de 0 à 1 200 oC. faire.
C’est la fonction ébulliomètre. Suivant les paliers, tout ou partie des
Les niveaux de qualité Qi (de Q1 à Q2) définissent le pro-
thermocouples est utilisé dans l’ébulliomètre ;
gramme d’assurance de la qualité à respecter depuis la rédac-
— ces signaux servent également à la détection d’anomalies sur tion des exigences fonctionnelles jusqu’aux essais de mise en
la distribution de puissance (x, y ) en cas d’indisponibilité d’une service après montage.
chambre RPN externe. La plage de mesure est alors centrée autour
de 300 oC. Il existe aussi un classement vis-à-vis du séisme pour les
parties du système remplissant une fonction pendant de telles
Deux thermocouples sont positionnés dans le volume situé sous conditions. Les classes correspondantes sont i I (I voulant dire
le couvercle en vue d’élaborer une correction pour la mesure du Intégrité requise sous séisme ).
niveau cuve.

Le système RIC doit être considéré sous deux aspects : comme


un système mécanique mais aussi comme un système électrique.
2.3 Exigences associées Deux parties sont particulièrement importantes vis-à-vis de l’appli-
à l’instrumentation temps réel cation de ces règles :
— la première est la partie du RIC qui constitue un prolonge-
On aura compris que la mesure du niveau de puissance et celle ment du circuit primaire et, à ce titre, participe à la fonction étan-
de la composante axiale de la distribution de puissance sont effec- chéité du circuit primaire (encadré 1) : elle est composée des tubes
tuées par l’instrumentation externe, seul système capable de faire de guidage, des doigts de gant, des vannes d’isolement manuelles,
ces mesures en continu et en temps réel. des buselures d’étanchéité ainsi que de deux robinets d’arrêt de la
Le présent chapitre étant consacré à l’instrumentation interne mesure du niveau cuve (la description de ces composants est faite
donc au système RIC, on se reportera au chapitre associé à l’ins- au paragraphe 3.2.4) ;
trumentation externe (Instrumentation hors cœur des réacteurs par — la deuxième est formée par les baies (armoires) de
J.P. Burel) pour avoir plus de détails sur le système RPN. contrôle/commande contenant l’électronique associée à la fonction
ébulliomètre (encadré 2).
Par partie primaire, on entend le sous-ensemble des matériels
2.4 Bases de conception des matériels en contact avec le fluide primaire (encadré 1). La classe de sûreté
associés au système d’instrumentation correspondante est 2.
de référence
Encadré 1 – Exigences de conception
Le système est conçu pour pouvoir effectuer un nombre de car- de la partie primaire du RIC
tes de flux correspondant à une cadence maximale d’une carte
complète par semaine. Il peut fonctionner entre deux arrêts pro- • Critère de conception : résistance à la défaillance unique
grammés pour rechargement sans intervention humaine dans le (critère de défaillance unique) :
bâtiment réacteur et effectue la surveillance permanente de la pré- — respecté pour les thermocouples sortie cœur et les piqua-
sence éventuelle de fuites à travers les pièces mécaniques qui réa- ges d’instrumentation de la mesure du niveau d’eau dans la
lisent l’étanchéité avec le circuit primaire. cuve.
Les matériels sont conçus pour supporter les conditions • Classement sismique :
d’ambiance des locaux où ils sont implantés : — châssis de maintien des tubes de guidage : 1 I ;
— jusqu’à 50 oC et 95 % d’humidité pour les matériels situés — châssis de maintien des vannes manuelles et buselures :
dans le bâtiment réacteur ; 1I;
— jusqu’à 30 oC et 70 % d’humidité pour les matériels situés à — partie primaire : 1 I.
proximité de la salle de commande. • Règles de conception et de construction :
Le système RIC dispose de procédures de secours qui permet- — pour les matériels mécaniques de la partie primaire :
tent d’exécuter une carte de flux c’est-à-dire d’explorer la totalité RCC-M niveau 2 ;
des assemblages instrumentés, même en cas de défaillance d’un — pour les matériels électriques (armoires de contrôle/
capteur ou du système qui les propulse (unité de commande). commande) : RCC-E.
• Qualification :
— thermocouples : K1 (au sens RCC-E) ;
— armoires de contrôle/commande : RCC-E.
2.5 Exigences de sûreté. Classement • Assurance qualité :
— partie primaire (sauf doigts de gant) : Q1 ;
Des textes réglementaires définissent les règles à appliquer lors — doigts de gant : Q1 ;
de la conception, de la réalisation, du montage des équipements — châssis de maintien de la partie primaire : Q2.
appartenant à une centrale nucléaire ainsi que les règles d’assu-
rance qualité à suivre pendant le déroulement du projet. Ces règles • Critères d’exploitation :
dépendent des fonctions remplies par les équipements : si l’équi- — inspection en service ;
pement considéré est utilisé pendant un accident, les règles vont — essais périodiques ;
être très contraignantes. Les premières conduisent à définir un — protection contre la malveillance.

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Encadré 2 – Exigences de conception


de la fonction ébulliomètre 0° BR
0° Cuve
• Critère de défaillance unique : A B C D E F G H J K L M N P R S T
— respecté pour l’ensemble du matériel. 17 39
• Classe de sûreté : 16 40 3 30
— thermocouples : 2 E ; 15 42 22
— baies d’électronique : 2 E.
14 44 31 60 1 12
• Classement sismique : 13 21 10
— baies d’électronique : classées séisme.
• Règles de conception et de construction : 12 52 41 37 2 29 19
— RCC-E. 11 35 50 17 11
• Qualification : 10 53 51 38 13
— thermocouples et câbles associés : K3 ; 270° 9 45 54 32 4 7 9 90°
— baies d’électronique : K3 (au sens RCC-E). 8 43 24 28 16
• Assurance qualité : 7 46 34 33 18 20
— baies d’électronique : Q1. 6 55 57 14
• Critères d’exploitation : 5 47 23 27 6
— inspection en service ;
4 56 58 49 15 8
— essais périodiques ;
— protection contre la malveillance. 3 36 26 5
2 48 59
1 25
180°
3. Description des matériels
Figure 2 – Répartition géographique dans le cœur et numérotation
3.1 Architecture générale des assemblages instrumentés
et implantation géographique
Le système d’instrumentation interne qui est décrit dans les
paragraphes ci-après est celui des tranches du palier N4. utilise comme matière sensible aux neutrons, l’uranium. Celui-ci,
enrichi à 90 % en uranium 235, est déposé sous forme d’une
Le système d’instrumentation interne se compose de deux couche d’oxyde. Chaque détecteur, on parle aussi de sonde à fis-
ensembles, l’ensemble des mesures de flux et l’ensemble des sion ou de sonde mobile, est constitué d’une électrode centrale
mesures de température, qui vont être présentés dans les paragra- (anode), d’une deuxième électrode (cathode) qui détermine le
phes qui suivent. Chacun d’eux comprend des capteurs, des câbles volume de mesure, et d’une enveloppe de protection externe. Le
véhiculant le signal, des éléments mécaniques en interface avec le gaz de remplissage est l’argon.
circuit primaire et la cuve, des armoires de contrôle/commande et
pour l’ensemble flux, un dispositif de mise en mouvement et Les particules ionisantes sont les produits ou fragments de la fis-
d’aiguillage des sondes mobiles. sion de l’uranium 235 ; ces particules, émises avec une énergie très
élevée, ont un grand pouvoir d’ionisation. Les charges électriques
Ces matériels sont localisés soit dans la cuve du réacteur, soit créées dans le gaz sont accélérées par le champ électrique dû à la
dans un local spécifique appelé salle d’instrumentation située dans tension de polarisation et sont reçues sur l’électrode centrale puis
le bâtiment réacteur au voisinage du puits de cuve, soit dans la mesurées sous forme d’un courant moyen correspondant à
salle calculateurs à proximité de la salle de commande. l’ensemble des charges collectées par seconde.
Le dispositif de mise en mouvement et d’aiguillage de Les chambres à fission sont des détecteurs robustes, relati-
l’ensemble des mesures de flux permet de déplacer simultanément vement bon marché et capables de fournir des courants
six détecteurs mobiles de neutrons dans des tubes étanches appe- « importants » même sous des dimensions faibles, car elles possè-
lés doigt de gant placés dans le tube d’instrumentation de dent une bonne sensibilité due à la valeur forte de la section effi-
60 assemblages combustible sélectionnés à cet effet (figure 2). Le cace de fission de l’uranium 235. La sensibilité des chambres
détecteur mobile 1 explore les assemblages numérotés de 1 à 10, utilisées dans le système RIC est de l’ordre de :
le détecteur 2 les assemblages 11 à 20 et ainsi de suite. Les tubes
doigt de gant sont insérés dans les tubes de guidage soudés à la 10–17 A/(n · cm–2 · s–1)
cuve et pénètrent dans celle-ci par le fond ; ils cheminent à travers
les internes inférieurs puis dans les assemblages combustible à Le courant émis à 100 % PN est de l’ordre du milliampère, ce qui
l’intérieur du tube d’instrumentation jusqu’au haut de celui-ci. Les est très satisfaisant dans le cadre d’une installation industrielle.
tubes de guidage sont ainsi un prolongement de l’enceinte sous
En dépit de la forte section efficace de fission, la perte de sensi-
pression que constitue la cuve puisqu’ils sont soudés à celle-ci.
bilité liée à l’épuisement du dépôt d’uranium n’est pas élevée
puisque les détecteurs ne séjournent pas longtemps dans le cœur
lors d’une campagne de scrutation : la durée de séjour cumulée sur
3.2 Mesures de flux un an est d’environ une douzaine d’heures en moyenne par détec-
teur. La durée de vie des détecteurs est en fait limitée par l’usure
mécanique et non par l’épuisement neutronique, et c’est en nom-
3.2.1 Détecteurs mobiles bre de cycles d’insertion dans le cœur qu’il faut l’exprimer.
Les détecteurs mobiles sont du type chambres à fission. Ce type Mais pour des raisons de précision de la mesure, il est néces-
de capteur neutronique est une chambre d’ionisation classique et saire de tenir compte de l’évolution respective de la sensibilité de

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chacun des détecteurs même si elle est faible, et il faut les recali-
brer périodiquement (voir § 5.2). Tableau 1 – Caractéristiques des détecteurs
Nota : la recalibration est une opération qui consiste à agir sur le gain électrique de la
chaîne de mesure afin de compenser la diminution du courant délivré par le capteur avec
Grandeur Caractéristique
l’épuisement et de conserver constante la valeur indiquée.
Constructeur ............................... Photonis
Le temps de réponse d’une chambre à fission est excellent. Il Type ............................................ CFUF 43
correspond à la collection des électrons et des ions positifs créés Diamètre extérieur ..................... 4,70 mm
dans l’argon et accélérés par le champ électrique dû à la tension
Longueur .................................... 70 mm
de polarisation. Ce temps est de l’ordre de 10–4 seconde.
Longueur de dépôt d’uranium .. 25 mm
La mesure est affectée par des phénomènes de bruit. Il y a deux Sensibilité neutrons ................... 10–17 A/(n · cm–2 · s–1)
sources essentielles de bruit dans les chambres à fission :
Sensibilité gamma ..................... < 2 × 10–12 A · Gy–1 · h–1
— l’effet du rayonnement gamma en provenance du réacteur
Tension de polarisation ............. de 50 à 200 V
(l’effet dû à l’activation et aux produits de fission dans la chambre
est négligeable) ; Résistance d’isolement.............. 1012 Ω à 20 oC
— le courant de fuite. Gamme de mesure .................... de 109 à 1,5 × 1014 n · cm–2 · s–1
Linéarité ...................................... < 3 % de la mesure effectuée
Les photons gamma en provenance du cœur réagissent avec les dans la gamme ci-dessus
matériaux de la chambre en donnant des électrons par effet
photoélectrique, mais surtout par effet Compton. Les électrons
Compton vont ioniser le gaz de remplissage et produire un courant
parasite. Bien que la probabilité d’interaction d’un photon gamma 3.2.2 Câbles de propulsion
soit faible et que le taux d’ionisation dû à un photon soit égale-
ment faible, le bruit gamma représente une composante dont il Le câble de propulsion auquel est rattaché le détecteur mobile
faut tenir compte du fait des forts débits de dose régnant dans le doit jouer le triple rôle de propulseur du détecteur mobile, de
cœur. L’énergie moyenne des rayons gamma du cœur est d’envi- conducteur de la tension de polarisation et de conducteur du signal
ron 1 MeV, l’énergie communiquée à un électron Compton est de de mesure. Le câble de propulsion est creux et est fait de brins tor-
l’ordre de 0,5 MeV et un électron de cette énergie crée environ sadés à grand pas, de type Teleflex . Sa surface extérieure est
6 paires d’ions par millimètre de parcours dans l’argon à la pres- crantée et il contient, à l’intérieur, le câble électrique de type
sion atmosphérique ce qui est à comparer aux 2,5 × 105 paires coaxial assurant le transport du signal de mesure et celui de la ten-
d’ions créées dans les mêmes conditions par un fragment de sion de polarisation. L’âme du câble coaxial est reliée à l’anode du
fission. détecteur et la gaine à la cathode.
La résultante est un courant parasite d’environ 1 % du courant C’est un élément important du système : l’influence de ses pro-
total à puissance nominale. Cette sensibilité empêche d’effectuer priétés électriques a été vue à travers le choix du matériau isolant,
des cartes de flux à très bas niveau de puissance sur un cœur mais ses propriétés mécaniques sont tout aussi déterminantes.
ayant fonctionné (cartes que l’on exécute lors des essais physiques Trop rigide, il ne pourrait circuler dans le tube de guidage des
de démarrage en début de cycle). pénétrations de fond de cuve et en particulier « prendre le virage »
L’existence de courants de fuites entre anode et cathode est liée sous la cuve ; trop souple, il ne pourrait assurer la propulsion de
d’une part, à la baisse de la résistivité des isolants de la chambre la sonde sans présenter des « oscillations » (phénomène de mise
et du câble sous l’effet du rayonnement et de la température, et en « serpentin »), auquel cas le déplacement linéaire du câble
d’autre part, à la tension de polarisation. Si l’influence de la tempé- devant le capteur qui mesure le défilement de celui-ci, n’est plus
rature est bien connue, celle du rayonnement l’est moins et le représentatif de la cote physique du détecteur dans le cœur.
choix des matériaux isolants prend une importance particulière en De plus, des risques de coincement ne seraient pas à exclure
particulier pour le câble coaxial : c’est la raison pour laquelle l’alu- dans ce cas.
mine (Al2O3) a été préférée à la magnésie (MgO) pour la consti-
tution de celui-ci.
Les chambres à fission fonctionnent sous une tension de polari- 3.2.3 Électromécanismes de commande
sation de l’ordre de 110 V, mais sous l’influence de l’apparition de
produits de fission gazeux dont la concentration dans le volume de 3.2.3.1 Description d’ensemble
remplissage augmente avec le temps, celle-ci évolue vers des
valeurs de plus en plus élevées. L’ensemble du système électromécanique de commande permet
l’introduction, par la partie inférieure de la cuve, et la conduite, au
Compte tenu d’une résistance d’isolement proche de 10 8 Ω à moyen d’un système de sélection, de six détecteurs mobiles simul-
300 oC, la tension de polarisation est responsable d’un courant de tanément dans six des soixante doigts de gant installés.
fuite de l’ordre du microampère.
Cet ensemble est réparti sur six chaînes et comprend :
Le principal inconvénient des sondes à fission est l’activité éle- — six moteurs et leurs accessoires, appelés unité de commande
vée de celles-ci une fois qu’elles ont servi : il est impossible de les ou UC ;
manipuler sans précaution compte tenu de la présence des pro- — six systèmes d’aiguillage composés chacun d’un sélecteur de
duits de fission radioactifs. Lorsqu’elles ne sont pas utilisées, elles groupes, d’un sélecteur de groupes de voies et d’un sélecteur de
doivent être stockées dans des endroits spécifiques situés sous la voies.
cuve, appelés voies de protection, afin de limiter le débit de dose
dans la salle d’instrumentation. Les éléments correspondants sont installés en permanence dans
une salle appelée salle d’instrumentation, située au niveau infé-
Les caractéristiques des détecteurs sont données dans le rieur du bâtiment réacteur près du puits de cuve. À l’intérieur d’une
tableau 1. même chaîne, UC et sélecteurs sont reliés entre eux par des tubes
L’ensemble composé du détecteur mobile, du câble de propul- de liaison dans lesquels circule la sonde mobile.
sion et du câble de mesure est appelé sonde de mesure de flux. Le La figure 3 présente une vue d’ensemble par le haut pour un
constructeur est la société ATEA, filiale de Framatome. réacteur de type N4.

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Buselures Voies de protection

Vannes manuelles Vannes automatiques Unités de sélection de voie

Capot Sélecteurs statiques Unités de sélection de groupe

Potence

6
6
5
5
4
4

3
3
2
2
1
1

Unités de commande

Château de Coffrets fuites Coffrets fuites doigt de gant


plomb buselures

Les unités de commande (et les détecteurs mobiles) sont numérotées de 1 à 6 du bas vers le haut

Figure 3 – Système d’instrumentation interne mobile (RIC) N4 (vu par le haut)

3.2.3.2 Unités de commande déplace à vitesse maximale ainsi que durant les changements de
grande à petite vitesse (et inversement) et à l’occasion des mises
Chaque unité de commande (UC) pousse ou tire le câble dit de en marche et à l’arrêt.
propulsion (le câble Teleflex ® évoqué précédemment) qui est
creux, et à l’extrémité duquel est fixée la sonde à fission. Ce câble L’enrouleur est équipé de contacts tournants permettant de sortir
mécanique comporte à sa surface extérieure des crans gravés avec vers l’extérieur des signaux électriques issus du détecteur.
un pas hélicoïdal et contient le câble électrique coaxial véhiculant Des sécurités placées à l’extérieur permettent d’éviter que la
le signal de mesure. sonde mobile ne soit en contact avec la roue d’entraînement du
L’unité de commande assure donc un rôle de propulsion, mais câble. Dans le cas où celles-ci n’auraient pas fonctionné, un dernier
aussi un rôle de stockage du câble quand la sonde est complè- système de sécurité, constitué par un minirupteur, couperait l’ali-
tement retirée hors du cœur et mise en voie de protection. mentation électrique ce qui freinerait et arrêterait la roue.
La propulsion est réalisée par un moteur électrique appelé Un dernier dispositif très important pour l’interprétation fonc-
groupe motoréducteur entraînant une roue dentée sur laquelle tionnelle du signal est un dispositif de mesure de la position du
s’engrène le câble de propulsion par l’intermédiaire des crans. Le détecteur mobile dans le cœur et plus généralement au cours de
groupe motoréducteur confère deux vitesses au détecteur mobile son trajet. En effet, il ne suffit pas de mesurer la valeur du flux,
et ce dans les deux sens : une petite vitesse égale à 3 m/min et une mais il faut aussi connaître la cote dans le cœur à laquelle cette
grande égale à 18 m/min. Il possède un frein intégré et est capable valeur correspond. Cette mesure est associée à la roue d’entraîne-
de démarrer sous un couple maximal correspondant à la voie la ment de manière à transmettre la position du détecteur mobile tout
plus longue (environ une vingtaine de mètres) donc à l’enroule- au long de son trajet (y compris en dehors du cœur). Les informa-
ment de câble le plus lourd. En régime continu, le groupe moto- tions servent à l’affichage d’une part, et à la comparaison à des
réducteur fournit la puissance nécessaire pour pousser le câble et valeurs de position prédéterminées utilisées dans la commande
le détecteur dans n’importe laquelle des voies qui lui sont des séquences opérationnelles d’autre part.
affectées. La transmission de la position de la sonde de mesure de flux est
La roue dentée est l’organe d’entraînement du câble de propul- réalisée par un ensemble de synchroémetteur et synchrorécepteur.
sion. Appelée roue d’entraînement, elle est mise en mouvement Le premier est solidaire mécaniquement de la roue d’entraînement
par le groupe motoréducteur à travers un réducteur de couple. Le et retransmet électriquement sa position au second qui est placé
câble s’engrène avec la roue sur un arc de 90o ; il est plaqué sur la dans l’armoire de contrôle-commande située à proximité de la
roue par une chaîne démontable à tension réglable. salle de commande. La transmission des signaux se fait par une
Le dispositif de stockage du câble mécanique est constitué par liaison électrique passant par les traversées enceinte.
un tambour enrouleur dont le couple de rappel est dimensionné Le synchrorécepteur transmet enfin l’information de position à
pour empêcher que le câble ne se dévide lorsque celui-ci se un codeur de position optique absolu dont la résolution est voisine

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de 1 mm (pas codeur), valeur qui détermine la précision de la posi- envoient en retour un signal de conformité jusqu’à l’armoire de
tion de la sonde. Cette recopie de position au moyen du couple répartition (voir § 3.2.5.1).
synchroémetteur et synchrorécepteur permet d’éloigner le codeur Les sélecteurs sont raccordés entre eux par des tubes de liaison
optique sensible aux rayons gamma émis par la sonde à fission (voir § 3.2.4.7) à l’intérieur desquels circulent les sondes de mesure
sans perte de précision. de flux. Ils sont situés dans la salle d’instrumentation et sont mon-
L’ensemble des éléments de l’unité de commande est monté sur tés sur des supports fixés au sol, entre les unités de commande et
un châssis muni de fixations au sol, de dispositifs de manutention le châssis qui porte les vannes d’isolement automatiques, de telle
et de connecteurs électriques (séparation des alimentations de sorte que les tubes de liaison soient positionnés à l’horizontale.
puissance, des mesures de flux, des mesures de position et du
contrôle/commande).
3.2.4 Interfaces mécaniques avec le circuit
3.2.3.3 Dispositif de sélection primaire
Le dispositif de sélection est un élément très important du RIC : 3.2.4.1 Tubes de guidage
c’est le système d’aiguillage qui permet de diriger les détecteurs
mobiles d’un assemblage à l’autre au cours d’une carte de flux. Le Les tubes de guidage (figure 4) font la liaison entre le fond de la
système est conçu de manière à pouvoir orienter chaque détecteur cuve et les vannes d’isolement manuelles. Ils constituent en
mobile depuis l’unité de commande vers quatre types de trajet : quelque sorte un prolongement de la cuve et sont donc soumis à
— les voies normales d’exploration correspondant aux dix assem- la pression primaire. Ils sont raccordés par soudure aux pénétra-
blages qui sont affectés à un détecteur donné ; tions fond de cuve, côté cuve, et aux vannes manuelles d’isole-
ment, côté salle d’instrumentation. Ils sont fabriqués en acier
— ou les voies dites « de secours » qui correspondent à dix
inoxydable, étirés à froid sans soudure et livrés à l’état hyper-
autres assemblages normalement affectés à un autre détecteur qui
trempé.
est le détecteur voisin de rang immédiatement supérieur ;
— ou la voie permettant d’explorer les assemblages normale- Leurs dimensions sont les suivantes :
ment affectés au détecteur 4, dans le cadre de la procédure — diamètre intérieur .................... 13,2 mm ;
d’intercalibrage ; — épaisseur................................... 6,1 mm ;
— ou la voie dite de protection permettant un stockage en posi-
tion de repos dans un château de plomb situé hors de la salle d’ins- — longueurs .................................. comprises entre 7,4 et 11,3 m.
trumentation dans le puits de cuve. Ils sont cintrés sous un rayon de courbure d’environ 2,5 m à
À chacun de ces trajets correspond une fonction du système et angle droit dans le plan vertical et suivant un angle variable dans
la procédure d’exploitation associée. le plan horizontal.

Le dispositif de sélection comprend les éléments suivants


(figure 3) : 3.2.4.2 Supportage et pénétrations
— six sélecteurs de groupes à une direction d’entrée et quatre Les tubes de guidage sont maintenus à leur extrémité inférieure
ou trois directions de sortie permettant de conduire respective- par un châssis coulé dans le béton et servant de pénétration dans
ment les détecteurs depuis l’unité de commande vers les quatre le mur de protection séparant le puits de cuve de la salle d’instru-
trajets indiqués ci-dessus ; mentation.
— des sélecteurs statiques de groupes de voies à deux ou six Ce châssis se présente comme un ensemble de fourreaux hori-
directions d’entrée et une direction de sortie permettant de zontaux qu’empruntent les tubes de guidage. Le point fixe des
conduire les détecteurs de flux vers les sélecteurs de voies corres- tubes de guidage se trouve dans la salle d’instrumentation et est
pondants ; réalisé par des bouchons étanches soudés aux tubes et aux four-
— des sélecteurs de voies à une direction d’entrée et dix direc- reaux. Le diamètre des fourreaux et le positionnement de la péné-
tions de sortie permettant de conduire les détecteurs de flux vers tration au moment du bétonnage sont étudiés pour que les tubes
les tubes de liaison correspondant à chaque chaîne. de guidage n’entrent pas en contact avec les parois des fourreaux
Les sélecteurs statiques de groupes de voies et les sélecteurs de compte tenu des mouvements possibles des tubes de guidage dus
voies sont contigus. à la dilatation observée pendant le fonctionnement du réacteur.

La figure 3 met bien en évidence la particularité associée à la Un second châssis de pénétration est installé à côté du premier.
chaîne 4, particularité qui explique les dissymétries du nombre des Il comporte trois fourreaux de pénétration superposés ; les deux
entrées/sorties de sélecteur de groupe entre les chaînes. On verra fourreaux supérieurs sont mis à la disposition du système de
par la suite que, pour les besoins de la procédure de recalibrage ou mesure du niveau d’eau dans la cuve, le troisième à celle du
d’intercalibration qui consiste à comparer toutes les sondes entre système KIR (système d’écoute des corps migrants, fourniture
elles afin de déterminer leur sensibilité relative respective, celles-ci EDF).
doivent pouvoir explorer le même assemblage afin d’y mesurer le Il existe enfin, un troisième châssis de pénétration pour les voies
même flux. Pour des raisons pratiques, cet assemblage appartient de protection (stockage des détecteurs en dehors des périodes de
au groupe d’assemblages normalement affectés à la chaîne 4, ce mesure).
qui explique les liaisons chaîne k /chaîne 4. Cette liaison est la Une structure de maintien des tubes de guidage est prévue dans
liaison normale pour la chaîne 4 donc il n’y a pas besoin d’une le puits de cuve afin de limiter l’amplitude des débattements
liaison particulière. La chaîne 4 étant secourue par la chaîne 3 dans consécutifs à un séisme, à une valeur compatible avec la tenue
le cadre de la procédure de secours, la liaison chaîne 3/chaîne 4 mécanique des tubes de guidage.
existe déjà. Ceci explique pourquoi il n’y a que trois sorties sur les
sélecteurs de groupe des chaînes 3 et 4 au lieu de 4 sur les autres
sélecteurs. 3.2.4.3 Vannes d’isolement manuelles
Les sélecteurs sont des barillets tournants qui permettent de Les vannes d’isolement manuelles sont soudées entre la partie
mettre face à face des lumières à travers lesquelles vont pouvoir postérieure des tubes de guidage et les buselures d’étanchéité
passer les détecteurs mobiles. Chaque sélecteur est commandé par (voir § 3.2.4.1). Par voie de mesure, la vanne d’isolement manuelle
un motoréducteur muni d’un embrayage. La sélection et le et la buselure d’étanchéité forment un ensemble rigide placé sur
contrôle d’arrêt sont réalisés au moyen de minirupteurs qui un châssis de maintien.

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Tube doigt de gant


Vanne motorisée
d'isolement

Vanne manuelle Buselure


Tube de
d'isolement d'étanchéité
guidage

Eau de circuit primaire

Figure 4 – Vue d’une ligne RIC

Ce sont des vannes à boisseau sphérique livrant passage aux Chaque buselure est constituée de deux ensembles de joints en
tubes doigt de gant lorsqu’elles sont en position ouverte. Inverse- série entre lesquels est installé un dispositif de détection de fuites.
ment, elles ne peuvent être fermées si les tubes doigt de gant sont Ces joints sont serrés axialement par des écrous. Ils viennent por-
présents. ter sur la surface interne du corps de la buselure d’une part et sur
la surface externe du doigt de gant d’autre part, obstruant ainsi
3.2.4.4 Tubes doigt de gant l’espace annulaire compris entre le doigt de gant et le tube de
guidage.
Ce sont des tubes réalisés en acier inoxydable étirés à froid, sans
soudure, livrés à l’état écroui (figure 4). Les dimensions sont les Ces joints assurent, en position serrée, une résistance à la pres-
suivantes : sion primaire de fonctionnement soit 155 bar (étanchéité statique) ;
en position desserrée, ils réalisent une étanchéité à la pression
— diamètre extérieur...................... 9,50 mm ;
hydrostatique correspondant à la hauteur d’eau dans la piscine
— diamètre intérieur....................... 5,20 mm ; réacteur et permettent, en même temps, le glissement du tube
— longueur ...................................... 15,00 m environ doigt de gant lors de l’introduction ou du retrait de ces derniers,
(comprise entre 14,2 et 18,2 suivant leur place dans le cœur). opérations effectuées lors du déchargement/rechargement des
Ils sont insérés à travers la buselure d’étanchéité dans les tubes assemblages combustible (étanchéité dynamique).
de guidage ; ils subissent donc un cintrage équivalent à celui des Les buselures sont entièrement réalisées en acier inoxydable.
tubes de guidage avant de pénétrer dans la cuve (rayon de cour-
bure égal à 2,50 m). Ils sont terminés à leur extrémité supérieure Sur le corps de la buselure et en amont de celle-ci, est monté un
par une ogive soudée et à leur extrémité inférieure, par une pièce raccord de contre-pression permettant, lors des opérations de
en forme de collerette servant de liaison avec la buselure d’étan- maintenance, le nettoyage des tubes de guidage par injection
chéité. Une longueur de 6,9 m en partant de la collerette comporte d’eau sous pression.
un revêtement antifriction pour empêcher le tube de gripper pen-
Deux buselures sont équipées d’une ligne de pression pour l’ins-
dant les opérations d’insertion et d’extraction.
trumentation de mesure du niveau cuve.
Le jeu compris entre l’enveloppe extérieure du tube doigt de
gant et la face intérieure du tube de guidage contient de l’eau du
circuit primaire à la pression de fonctionnement : soit 155 bar dans
3.2.4.6 Vannes d’isolement automatiques
les conditions nominales, soit la pression correspondant à la hau-
teur d’eau, de la piscine réacteur pleine, quand le réacteur est à
l’arrêt, piscine pleine. Ces vannes sont placées sur chaque ligne en aval des buselures
(en partant de la cuve). Leur fermeture obstrue le doigt de gant. En
Le tube doigt de gant constitue avec la buselure d’étanchéité effet, en cas de rupture de la gaine du tube doigt de gant, l’eau du
(voir § 3.2.4.5), la frontière du circuit primaire. circuit primaire remplit celui-ci. Les vannes automatiques d’isole-
ment sont prévues pour arrêter une telle fuite d’eau ou une fuite de
3.2.4.5 Buselures d’étanchéité vapeur.
Les buselures d’étanchéité sont des composants très importants Elles sont équipées d’un dispositif de détection de fuite (bougie).
car elles constituent une barrière du circuit primaire et, à ce titre, Dans le cas où ce dispositif détecterait une trace d’humidité à
sont conçues pour résister à la pression primaire. Elles prolongent, l’extrémité du tube doigt de gant, la vanne correspondante est ver-
par l’intermédiaire des vannes manuelles, les tubes de guidage et rouillée fermée et la voie de mesure correspondante est déclarée
sont traversées par les tubes doigt de gant. indisponible.

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3.2.4.7 Tubes de liaison des signaux de mesure, conversion analogique/numérique de


ceux-ci, liaison avec l’automate de chaîne associé ;
Des tubes de liaison en acier inoxydable relient individuellement — trois tiroirs codeurs assurant la mesure de position des sondes
l’entrée de chaque vanne d’isolement automatique à chacune des donc un tiroir pour deux chaînes. Les informations de position sont
sorties du sélecteur de voies afin de guider les sondes mobiles et transmises en code GRAY sur 16 bits ; elles sont affichées en face
le câble associé (voir figures 1 et 3). avant des armoires ;
En sortie de chacun des six sélecteurs de voies, un tube de — un ensemble appelé superviseur réalisé autour d’un micro-
liaison se prolonge jusqu’à la traversée du béton du puits de cuve processeur, permettant :
où chacun d’eux peut être connecté indifféremment sur deux tubes • de recevoir les données de mesure des six automates,
pénétrant dans le puits de cuve grâce à des raccords démontables. • d’effectuer certains traitements (voir § 5.4.4.1 l’élimination des
Dans le puits de cuve, ces tubes, appelés voies de protection, valeurs aberrantes),
sont regroupés en deux groupes de six. L’un est appelé groupe de • d’assurer la liaison et le dialogue avec le calculateur de tran-
stockage normal des sondes et de leur câble, l’autre groupe de che KIT (traitement centralisé de l’information),
secours. Ces voies de protection assurent le stockage des détec- • d’assurer les fonctions d’interface homme/machine,
teurs mobiles en position de repos lorsqu’ils ne sont pas envoyés • d’assurer les fonctions de gestion et d’activation des séquences
dans le cœur. de mesures de flux.
Ces tubes (voies de protection) cheminent alors en demi-cercle L’armoire centrale comprend le superviseur ainsi que deux
sous la cuve et redébouchent au travers d’autres pénétrations dans écrans vidéo et un clavier avec touches fonctions. Un écran est
la salle d’instrumentation, à l’intérieur d’une enceinte en plomb fer- dédié à l’affichage des instructions en cours (écran de service),
mée de type château de plomb. Le château de plomb réalise la pro- l’autre (en couleurs) à celui des résultats de mesures sous forme
tection biologique de la salle d’instrumentation qu’il faut assurer de courbes appelées traces axiales (figure 5). Une imprimante gra-
compte tenu de l’activité des sondes à fission une fois irradiées. Il phique est également prévue.
doit être démontable afin de permettre l’accès exceptionnel aux
Les deux armoires latérales comprennent les six automates de
fins de course d’extrémité des voies de protection.
chaîne, les six tiroirs de flux (trois couples par armoire) et les trois
tiroirs codeurs.
3.2.4.8 Châssis support
L’ensemble du calculateur RIC comprend donc sept microproces-
Les vannes automatiques d’isolement sont montées sur un sup- seurs dont les caractéristiques sont les suivantes :
port mécanique afin, d’une part, d’assurer leur positionnement — INTEL 80486 ;
géométrique par rapport aux extrémités inférieures des doigts de — 8 Mo RAM ;
gant et, d’autre part, de pouvoir être déplacées en vue de dégager — horloge 16 MHz ;
l’espace nécessaire à l’arrière des buselures lors du retrait obliga- — système d’exploitation MS-DOS.
toire des doigts de gant pendant une opération de déchargement
des assemblages combustible (voir § 4.3). Un huitième processeur a été rajouté à Civaux, chargé de gérer
le synoptique dédié à l’interface homme/machine (à Chooz, cette
interface est gérée par une carte spécifique devenue obsolète).
3.2.5 Équipements de contrôle/commande Le stockage des instructions système (tables de fonctionnement)
est réalisé sur un disque dur qui joue le rôle de mémoire de masse
3.2.5.1 Équipements dans le bâtiment réacteur du système. Les mesures de flux, une fois numérisées, sont stoc-
kées également sur ce disque mais peuvent être transférées sur
Les fonctions de contrôle/commande assurées dans le bâtiment une disquette en vue d’un traitement hors ligne ultérieur
réacteur sont réalisées par des matériels regroupés dans une seule (voir § 5.4.4).
armoire située dans l’espace annulaire (près du puits de cuve),
Trois systèmes d’alimentation en 380 V, 220 V et 48 V sont pré-
appelée armoire de répartition.
vus. Les unités de commande sont alimentées en 380 V et les élec-
Les fonctions assurées sont les suivantes : tromécanismes en 48 V.
— multiplexage et démultiplexage des commandes et des infor- Un point important à souligner est la liaison informatique de
mations tout-ou-rien (TOR) telles que électromécanismes, fuites type série asynchrone avec le calculateur de tranche EDF. Elle
doigts de gant et buselures, vannes d’isolement automatiques ; transmet au calculateur de tranche l’ensemble des informations
— alimentation et relayage des électromécanismes ; qui sont nécessaires à celui-ci pour élaborer le fichier servant au
— alimentation et relayage des unités de commande ; dépouillement des cartes de flux. En effet, il ne faut pas perdre de
— bornier de raccordement des synchrotransmetteurs de vue que le calculateur RIC ne délivre pas le fichier qui sera traité
mesure de position des sondes mobiles. par les utilisateurs.

3.2.5.2 Équipements en salle calculateurs


Le contrôle/commande du système et les traitements des 3.3 Mesures de température
signaux de mesures sont effectués par un calculateur multiproces-
seur. Celui-ci ainsi que les autres matériels tels que les périphé- Le système de mesure des températures de l’eau primaire à
riques associés sont placés dans trois armoires placées côte à côte la sortie des assemblages combustible se compose de 54 ther-
et situées dans la salle calculateurs à proximité de la salle de mocouples mécaniquement solidaires des équipements internes
commande. supérieurs.
La conception du calculateur est modulaire et multiprocesseur. Ces mesures doivent répondre aux exigences associées à la
L’architecture en est la suivante : fonction ébulliomètre c’est-à-dire au calcul de la marge à la satu-
— six automates de chaîne construits à partir de microproces- ration. Cette information est utilisée dans les procédures post-
seurs ; ils se présentent individuellement sous forme de racks. Ils accidentelles qui prévoient de mesurer les températures sortie
commandent et surveillent les électromécanismes associés à cœur jusqu’à 1 200 oC.
chaque chaîne ; L’électronique de traitement de la fonction ébulliomètre est loca-
— six tiroirs d’acquisition des mesures de flux comportant les lisée dans deux armoires spécifiques. L’ébulliomètre est un équipe-
circuits suivants : polarisation des sondes, acquisition analogique ment redondant et satisfait le critère de séparation en deux voies

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A et B contenant chacune la moitié des thermocouples. Le chemi- montés laissant un accès facile à l’entrée de la buselure d’étan-
nement des conduits contenant les thermocouples à l’intérieur des chéité.
internes supérieurs a été étudié pour respecter ce critère de sépa- Une fois le cœur chargé, les doigts de gant sont présentés
ration. devant la buselure d’étanchéité puis introduits et poussés à la main
Deux thermocouples supplémentaires ont été positionnés dans à travers la buselure d’étanchéité, jusqu’à la vanne d’isolement
les internes supérieurs à une cote leur permettant de mesurer la manuelle. La vanne d’isolement manuelle est alors ouverte, ce qui
température de l’eau sous le couvercle de la cuve. Ces thermo- a pour effet de reporter la pression statique (due à la hauteur d’eau
couples sont de type Chromel-Alumel. Leur précision est de + ou depuis le sommet de la piscine) jusqu’à la buselure d’étanchéité.
– 1,5 oC de 0 oC à 375 oC et de 0,4 % de la mesure au-dessus de
Le couple de serrage de la buselure est alors ajusté pour per-
375 oC. Tous les thermocouples sont sélectionnés pour présenter
mettre l’introduction du doigt de gant et réaliser simultanément
une dispersion maximale entre eux de 0,8 oC pour une tempéra-
l’étanchéité alors que le doigt de gant circule dans la buselure.
ture comprise entre 200 et 370 oC.
C’est la fonction étanchéité dynamique dont nous avons parlé au
Les boîtiers de soudure froide, au nombre de 2, sont placés dans paragraphe 3.2.4.5, qui est ici assurée.
les armoires de l’ébulliomètre (un dans chaque armoire). Le boîtier
Après introduction complète du doigt de gant, le couple de ser-
de soudure froide est constitué par une boîte isotherme permettant
rage de la buselure est ajusté à la valeur qui permet de résister à
de conserver une température constante.
la pression primaire nominale soit 155 bar. C’est alors la fonction
Les thermocouples sont introduits dans la cuve au travers des étanchéité statique qui est réalisée.
pénétrations dans le couvercle et se positionnent au niveau de la
plaque supérieure du cœur par des goussets.
Ils sont guidés à l’intérieur de la cuve par des conduits fixés de 4.2 Réalisation d’une carte de flux
manière permanente aux internes supérieurs. Les conduits sont
supportés par les colonnes entretoises des internes supérieurs
entre leur partie inférieure et la plaque support des tubes guides de En l’absence de campagne de mesure dans le cœur, les sondes
grappes puis par quatre colonnes vissées à la plaque support des à fission mobiles sont stockées dans les voies de protection. Les
tubes guides de grappes. vannes d’isolement automatiques sont fermées pour réaliser
l’étanchéité du circuit primaire en cas de fuite éventuelle due à une
Deux colonnes contiennent 13 conduits, deux 14. Chacune rupture d’un doigt de gant.
d’entre elles sort au travers du couvercle par des manchettes.
L’étanchéité se fait en trois points : Le démarrage d’une campagne de mesure, ou carte de flux,
consiste à retirer les sondes depuis cette position jusqu’aux unités
— entre colonne et manchette du couvercle : l’étanchéité princi-
de commande c’est-à-dire en amont du premier aiguillage (sélec-
pale est réalisée par un joint conique pris entre deux portées
teur de groupe). Les sélecteurs de groupe sont alors positionnés
elles-mêmes coniques, l’une solidaire de la manchette, l’autre de la
sur la voie de mesure et les sondes, à travers les sélecteurs de
partie supérieure de la colonne. La partie haute de la manchette est
groupe puis les sélecteurs de voie positionnés sur la voie corres-
constituée de deux parties entre lesquelles l’étanchéité est réalisée
pondant au premier assemblage à explorer, parviennent jusqu’à la
par un joint élastique d’acier inoxydable. Ce sont ces deux joints
vanne d’isolement automatique.
qui sont démontés à chaque ouverture de cuve lors des opérations
de déchargement/chargement ; Un test permet de vérifier, grâce à la bougie prévue à cet effet,
— entre conduits et colonne : la liaison entre la partie supérieure l’absence d’humidité dans le doigt de gant. Si tel est le cas, la
des conduits et la colonne se fait par une pièce en forme de vanne d’isolement automatique est autorisée à s’ouvrir et la sonde
barillet dans laquelle les conduits sont dudgeonnés et soudés peut pénétrer dans le doigt de gant pour effectuer la mesure du
définitivement ; flux dans l’assemblage concerné. Dans le cas contraire (présence
— entre thermocouples et conduits : cette étanchéité se réalise d’une fuite), l’ouverture de la vanne est interdite et la sonde ne
à l’extrémité supérieure des conduits par un raccord réducteur. Ce pourra explorer l’assemblage correspondant. On dit que la voie est
raccord n’est démonté que pour remplacer un thermocouple condamnée.
défaillant. Un connecteur permet le raccordement avec le câble de La sonde pénètre dans le doigt de gant en grande vitesse
prolongation. Ce connecteur est d’un type particulier dans la jusqu’au sommet de celui-ci ; un ordre logique va l’arrêter avant
mesure où il est qualifié dans les conditions associées à l’accident qu’elle ne percute l’ogive terminale. Cet ordre est initié à partir
de référence (ADR). d’un test sur la distance parcourue par la sonde, mesurée par le
codeur optique, par comparaison avec une distance de référence
mesurée par pigeage lors du montage. Cette distance de référence
est entrée en mémoire dans le calculateur.
4. Configurations et Les sondes n’arrivent pas toutes en même temps en haut du
cœur puisque chacune d’entre elles parcourt un trajet qui lui est
fonctionnement du système propre, fonction de la longueur du doigt de gant, elle-même fonc-
tion de l’emplacement de celui-ci dans le cœur. Les premières arri-
vées vont attendre la dernière et les sondes ne repartiront toutes
ensemble vers le bas qu’une fois que la dernière aura atteint le
4.1 Premier montage des doigts de gant haut du cœur.
Les doigts de gant n’ont pas la rigidité suffisante pour tenir ver- Les sondes descendent ensuite simultanément en « petite
ticalement dans le cœur sans support extérieur. On ne peut donc vitesse » jusqu’en bas du cœur, phase pendant laquelle les signaux
les introduire qu’après le chargement lorsque les assemblages émis sont enregistrés et traités. Pour être tout à fait complet, il faut
combustible sont en place. préciser qu’une mesure dite de bruit de fond est effectuée à un
mètre sous le cœur, en petite vitesse. L’information logique corres-
Avant et pendant le premier chargement, la piscine réacteur est pondant à la position bas du cœur provient toujours de la compa-
pleine : pour éviter un écoulement d’eau dans la salle d’instrumen- raison de la distance parcourue mesurée par le codeur avec une
tation, la vanne d’isolement manuelle est fermée et obstrue le pas- distance de référence (également entrée en mémoire). Cette
sage permettant l’introduction des doigts de gant. mesure est utilisée lors du dépouillement pour faire une correction
Les vannes d’isolement automatiques ainsi que les tubes de de signal en soustrayant ce bruit de fond d’origine électronique dû
liaison les reliant aux unités de commande ne sont pas encore à la chaîne de mesure.

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Une fois la mesure de bruit de fond faite, les sondes partent en Le niveau d’activité régnant dans la salle d’instrumentation n’est
grande vitesse jusqu’en amont du sélecteur de voie. donc pas augmenté du fait de la présence de cette partie des
doigts de gant.
Le sélecteur de voie va alors s’incrémenter pour sélectionner la
voie associée au deuxième assemblage à mesurer et le cycle Une fois le rechargement effectué, les doigts de gant sont
recommence. repoussés dans le cœur. Toutes les opérations de retrait et d’intro-
duction des doigts de gant sont possibles grâce à la fonction étan-
chéité dynamique de la buselure d’étanchéité.
Un trajet complet s’appelle une passe ; dix passes sont
nécessaires pour réaliser une scrutation complète du cœur.
4.4 Extraction d’un doigt de gant
À la fin de la dixième passe, est exécutée une passe supplémen-
taire dite d’intercalibration (voir § 5.2). Tous les sélecteurs de Il se peut que, à cause d’une usure due à des vibrations et/ou des
groupe s’orientent vers la position de secours qui permet à cha- frottements, un doigt de gant vienne à se fissurer. Sous l’effet de
cune des sondes d’aller explorer les assemblages normalement la pression primaire, l’eau du circuit primaire va pénétrer dans le
mesurés par la sonde de rang immédiatement supérieur (excepté doigt de gant ; la fuite est alors contenue par la vanne d’isolement
la sonde 6 qui, par permutation circulaire, va explorer les assem- automatique qui est maintenue en position fermée en dehors des
blages normalement affectés à la sonde 1). Ainsi, au cours des campagnes de scrutation du cœur. Son ouverture est interdite
onze passes, tous les assemblages auront été explorés deux fois : puisque la bougie de détection des fuites aura décelé une présence
une fois au cours des dix passes par la sonde normalement affec- d’eau. Le fonctionnement du réacteur est autorisé dans ces condi-
tée puis une deuxième fois, au cours de la onzième passe dite tions jusqu’à l’arrêt de tranche suivant au cours duquel le change-
d’intercalibration, par la sonde de rang inférieur. On peut donc ment du doigt de gant incriminé doit se faire.
comparer la sonde 1 avec la sonde 2, la 2 avec la 3, la 3 avec la 4, L’opération d’extraction a lieu pendant l’arrêt de tranche, piscine
la 5 avec la 6 et la 6 avec la 1 ; les sensibilités relatives des sondes réacteur pleine, cuve ouverte, cœur déchargé. Celle-ci commence
sont ensuite calculées en prenant la sonde 1 pour référence en lui par un retrait du doigt de gant par la salle d’instrumentation sur
affectant la valeur arbitraire de un. une longueur telle que 8 m environ soient encore situés dans la
On aurait pu également envoyer chaque sonde individuellement cuve et les tubes de guidage, c’est-à-dire dans une partie située
dans un assemblage particulier choisi à cet effet. Cet assemblage dans le puits de cuve. La partie irradiée, celle qui était située dans
appartient, par construction (voir § 3.2.3.3) au groupe d’assem- le cœur, n’apparaît donc pas dans la salle d’instrumentation.
blages normalement exploré par la sonde 4. Auquel cas, la phase Au fur et à mesure que le doigt de gant est retiré, il est découpé
d’intercalibration aurait duré l’équivalent de six passes au lieu de par morceau de 1 m environ et chacun de ces morceaux est stocké
une ce qui correspond à une perte de temps non négligeable. dans un fût.
Il se peut qu’une unité de commande ait été défaillante et que la Puis, à l’aide d’un outil pousseur, la partie du doigt de gant res-
sonde correspondante n’ait pu être manœuvrée. Dans ce cas, une tante est repoussée dans la cuve jusqu’à ce que son sommet appa-
procédure de secours est initiée. Le sélecteur de groupe associé à raisse au-dessus de la plaque inférieure de cœur sur une hauteur
la chaîne de mesure de rang immédiatement inférieur à la chaîne de quelques centimètres, suffisante pour être agrippée ultérieure-
défaillante (par exemple 2 si la chaîne défaillante est la 3) est ment par un outil. Sa longueur correspond aux 8 m non découpés,
orienté vers la position de secours. La sonde 2 va alors pouvoir, à évoqués précédemment.
travers le sélecteur de voies de la sonde 3, explorer les assem- Cette partie est ensuite saisie, sous eau, par un outil de type
blages normalement explorés par la sonde 3. Le nombre de passes pince manipulé par le pont polaire puis est retournée afin que la
correspondant est de dix au cours desquelles, seule, la sonde 2 cir- partie irradiée (qui est apparue la première) soit placée en fond de
cule dans le cœur. piscine en vue de diminuer les risques d’irradiation. Grâce à une
À la fin de la scrutation, les sélecteurs de groupe sont orientés cisaille, on procède à un découpage en deux morceaux et ceux-ci
vers la position voie de protection et les sondes sont envoyées sont recueillis dans un carquois. Ce carquois qui a la forme et les
dans leur position de stockage de longue durée dans le château de dimensions d’un assemblage est ensuite transporté par la machine
plomb où elles vont rester jusqu’à la prochaine campagne de de chargement jusqu’au dispositif de transfert dans le bâtiment
mesure. combustible, puis transféré dans le bâtiment combustible pour y
être stocké.

4.3 Retrait des doigts de gant


au déchargement 5. Exploitation de la mesure
On a vu que les doigts de gant ne pouvaient séjourner dans le
cœur sans que les assemblages combustible soient présents. Il faut
donc les retirer avant le déchargement. 5.1 Notions de carte de flux
Les vannes d’isolement automatiques et les tubes de liaison les
reliant aux sélecteurs de voies sont démontés et posés sur des tré- On appelle carte de flux, le résultat du dépouillement des mesu-
teaux prévus à cet effet. On a ainsi accès à l’embase des doigts de res effectuées par le système d’instrumentation interne mobile lors
gant qui vont être retirés sur une longueur d’environ 4 m. Cette de la scrutation des 60 assemblages sélectionnés à cet effet,
longueur correspond à la hauteur du cœur, par conséquent l’ogive c’est-à-dire une distribution de puissance en trois dimensions sur
terminale des doigts de gant va effleurer la plaque inférieure de le cœur.
cœur : il n’y a donc plus de doigts de gant dans le cœur. La partie Exécuter ou relever une carte de flux consiste donc à effectuer
des doigts de gant qui apparaît dans la salle d’instrumentation les onze passes (dix passes normales plus une passe d’intercalibra-
après le retrait, était située dans le puits de cuve avant le retrait : tion) nécessaires pour explorer les 60 assemblages avec les six
elle n’avait pas subi une forte irradiation puisqu’elle n’a jamais été sondes à fission. En cas de besoin, la procédure de secours peut
située dans le cœur. être employée.

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On distingue deux types de cartes de flux : luer différemment des autres puisqu’elle reçoit une fluence qui lui
— les cartes de flux complètes qui consistent à explorer les est propre, fonction de la puissance des assemblages qu’elle
60 assemblages ; explore.
— les cartes de flux partielles pendant lesquelles on explore un Cette différentiation des sondes mobiles est de nature à apporter
nombre réduit d’assemblages. une complication supplémentaire. Supposons que l’on observe
que la puissance mesurée dans deux assemblages symétriques,
donc en principe égale par conception mais mesurée par deux
5.1.1 Cartes de flux complètes sondes différentes, ne soit pas identique : est-ce une anomalie sur
le cœur ou bien a-t-on affaire à une différence de sensibilité entre
Les cartes de flux complètes sont celles qui délivrent l’informa- les deux sondes ? Le seul moyen de lever le doute est de comparer
tion distribution de puissance avec la meilleure précision puisque les sondes entre elles.
le nombre d’assemblages mesurés est maximal. Elles sont effec-
On voit que la mesure d’une distribution de puissance implique
tuées chaque fois que l’on a besoin d’une mesure de référence, en
la connaissance des différences de sensibilité des sondes. Cepen-
général, pour démontrer la conformité du cœur c’est-à-dire vérifier
dant, il ne faut pas oublier que l’information distribution de
que la valeur des facteurs de points chauds et leur évolution en
puissance est une information relative et non absolue et que l’on
fonction de l’épuisement sont conformes aux calculs prévisionnels
n’a pas besoin de connaître les sensibilités en A / (n · cm –2 · s– 1)
de conception.
mais simplement en différences relatives. Si l’on affecte la valeur
Ces cartes de flux sont exécutées pendant les périodes d’essais 1,0 à la sonde 1 il suffit de savoir que la sonde 2 est, par exemple,
de démarrage et en cours de cycle. 1,025 fois plus sensible que la sonde 1 et ainsi de suite (voir § 4.2).
Le temps d’exécution est de l’ordre de l’heure, ce qui implique Les passes d’intercalibrage ont donc pour fonction de permettre
que la distribution de puissance dans le cœur n’évolue pas pen- la mesure des sensibilités relatives. La détermination des sensibi-
dant la mesure. La seule façon de respecter cette condition est de lités doit se faire avant chaque carte de flux complète et elle est
placer le cœur dans les conditions d’équilibre xénon qui, seules, obligatoire.
permettent d’obtenir une parfaite stabilité. La recherche des condi-
tions d’équilibre xénon n’est pas sans conséquences sur l’exploita-
tion de la tranche puisqu’elle nécessite de fonctionner à puissance
constante donc de retirer la tranche du suivi de réseau (ce qui prive 5.3 Rôle du calculateur de tranche KIT
l’exploitant d’une capacité réglante pour le réseau) et de contrôler
toute oscillation axiale de xénon qui pourrait être en cours. Suivant La connaissance des valeurs du flux à une cote donnée et de la
que le réacteur a fonctionné en suivi de charge intensif ou unique- cote associée, qui découle de l’acquisition des signaux émis par les
ment en réglage de fréquence avant la carte de flux, la recherche sondes mobiles, ne suffit pas pour dépouiller une carte de flux. En
de la stabilité peut demander de quarante-huit à quelques heures. effet, bien que le cœur soit placé dans des conditions de stabilité,
Ces actions font l’objet d’actions de conduite que l’opérateur doit il se peut que le niveau de puissance moyen évolue légèrement
mener. entre la première et la dernière passe ainsi que pendant les passes
d’intercalibration. L’information niveau de puissance moyen du
cœur est donc nécessaire pour effectuer les corrections qui s’impo-
5.1.2 Cartes de flux partielles sent au niveau de l’interprétation du résultat, or la mesure du
niveau de puissance n’est pas faite par le système RIC.
Une carte de flux dite partielle ne comporte qu’un nombre réduit Il faut donc ajouter au fichier, qui contient les mesures de flux,
d’assemblages mesurés. La réduction du nombre d’assemblages à des mesures supplémentaires en provenance d’autres équipe-
explorer correspond au souci de diminuer le temps d’acquisition et ments de la tranche. Le niveau de puissance mesuré par les cham-
donc de pouvoir faire un relevé sur un cœur non stabilisé. bres externes en est une, la position des grappes en est une autre.
Le nombre d’assemblages mesurés découle d’un compromis D’autres mesures sont également ajoutées à titre d’information
entre la perte de précision liée à la réduction du volume de mesure comme les températures par boucle...
et le temps d’acquisition. L’expérience a montré qu’un temps Il existe donc une liaison numérique de type liaison série asyn-
d’acquisition égal à une demi-heure était acceptable vis-à-vis d’une chrone dont le rôle est fondamental, entre le système RIC et le cal-
évolution du xénon (en distribution spatiale). culateur de tranche KIT.
Ce temps correspond à cinq passes ce qui représente la moitié Les mesures analogiques en provenance des sondes mobiles
des assemblages instrumentés. Le choix des assemblages à explo- sont conditionnées, transformées en tension, numérisées par le
rer au cours d’une carte partielle et l’ordre de scrutation dépendent système RIC puis transmises au calculateur KIT. Celui-ci va complé-
de l’objectif assigné à cette carte : en général, ces cartes de flux ter le fichier en ajoutant les mesures évoquées ci-dessus. Parado-
sont effectuées pour calibrer les chambres externes RPN niveau xalement, les mesures des températures des thermocouples sortie
puissance en distribution axiale de puissance. Dans ce cas, seule la cœur, faites par le système RIC, figurent sur le fichier non parce
mesure de la distribution axiale moyenne de puissance est néces- qu’elles y ont été émises par le système RIC mais par le calculateur
saire, et la mesure de la moitié des assemblages permet d’obtenir de tranche qui les a, lui-même, reçues de l’ébulliomètre.
une précision suffisante sur ce paramètre.
C’est donc le fichier KIT qui est traité par les utilisateurs. Celui-ci
est écrit sur un support informatique de type disquette.

5.2 Nécessité des passes


d’intercalibration 5.4 Traitement des mesures de flux
On a vu au paragraphe 3.2.1 que la quantité de la matière sensi-
ble, sujette à l’interaction avec les neutrons, diminuait avec la 5.4.1 Remarque préliminaire
durée d’irradiation du détecteur ou plus exactement de la fluence
reçue par celui-ci. La sensibilité c’est-à-dire le rapport entre le cou- Bien que mesurant la distribution de puissance dans un grand
rant émis et le flux vu par le détecteur va évoluer avec le temps : nombre d’assemblages combustible (on rappelle que la proportion
une correction est donc nécessaire au niveau du dépouillement d’assemblages instrumentés est proche de 30 %), le système RIC
pour tenir compte de cette variation. Chaque sonde mobile va évo- ne couvre pas tout le cœur. Si le facteur de point chaud se trouve

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dans un assemblage non instrumenté, il échappe à la mesure. Il est


donc obligatoire de compléter l’information délivrée par les détec-
teurs mobiles.
Le complément d’information est apporté par le calcul.
Le dépouillement d’une carte de flux fait donc toujours appel à
une combinaison d’informations expérimentales et d’informations
calculées.

5.4.2 Mesures mises à disposition


Les mesures délivrées le sont sous la forme d’un fichier de
valeurs numériques comprenant un groupe de mesures RIC soit
60 × 612 valeurs de flux et autant pour les positions axiales asso-
ciées, un groupe de mesures en provenance d’autres équipements
de la tranche ainsi que des informations concernant la séquence de
scrutation : numéro de passes, d’assemblages...
Le groupe de 612 valeurs représente la forme axiale du flux dans
un assemblage mesurée par une sonde mobile, après numérisa-
tion du signal analogique et discrétisation. On appelle cette série
de 612 valeurs trace axiale (figure 5). Il y en a 60 soit autant que
d’assemblages instrumentés.
La discrétisation en 612 points correspond à une moyenne des Figure 5 – Traces axiales de flux
valeurs mesurées sur 8 pas codeur. L’unité de distance mesurée
par le codeur ou pas codeur est voisine de 1 mm. Cette valeur est
issue du codage sur 1 024 points d’une longueur de 1 m. On dispose ainsi d’une fonction analytique en (x, y, z ) qui per-
met de calculer des écarts calculs/mesures dans toutes les posi-
tions.
5.4.3 Principes du dépouillement
Ces écarts sont utilisés pour corriger en tous les points les
valeurs théoriques. Après normalisation sur l’ensemble du cœur,
Le dépouillement d’une carte de flux repose sur un proces- on obtient une distribution de puissance reconstruite sur tout le
sus mathématique d’extension des mesures sur tout le cœur volume du réacteur.
afin d’inventer des mesures dans les positions non instrumen- In fine, tout se passe comme si on forçait le calcul à passer par
tées là où il n’y en a pas. C’est pourquoi on préfère employer les points de mesure, la distribution de puissance reconstruite
les termes de distribution de puissance reconstruite plutôt que n’étant autre que la distribution de puissance issue de ce forçage.
de distribution de puissance mesurée.

On suppose que l’on dispose d’un calcul de la distribution de 5.4.4 Description des traitements effectués
puissance dans les mêmes conditions de fonctionnement que
celles existant lors de l’exécution de la carte de flux. Ce calcul est Le traitement des mesures est effectué en plusieurs phases qui
effectué en bureau d’études. Soit ce calcul a été fait avant la réali- sont détaillées précisément dans l’annexe du « Pour en savoir
sation de la carte de flux auquel cas la procédure d’exécution plus » [Doc. BN 3 452]. On ne rappellera ci-après que les princi-
de celle-ci a précisé les conditions de fonctionnement du cœur pales étapes.
requises et il ne faut pas s’en éloigner, soit ce calcul est fait a pos-
teriori , une fois connu l’état du cœur pendant la carte de flux 5.4.4.1 Prétraitement des traces axiales
auquel cas le délai d’exécution de ce calcul augmente le délai de
La première étape consiste à réaliser des tests de validité afin de
restitution des résultats.
détecter et d’éliminer les valeurs aberrantes. Ce traitement est fait
Le processus d’extension qui est explicité ci-après, consiste tout par le calculateur RIC lui-même, en ligne. Les traitements suivants
d’abord à calculer les écarts entre les valeurs mesurées et les sont effectués hors ligne lors du dépouillement des cartes de flux.
valeurs calculées pour chaque assemblage instrumenté par le sys- Puis on procède éventuellement à une correction de positionne-
tème RIC. ment axial des traces. En effet, il n’est pas sûr que la première des
Compte tenu de l’existence du calcul, on connaît, pour les 612 valeurs inscrites sur le fichier (pour chacun des assemblages
60 assemblages instrumentés, à la fois la valeur de la puissance instrumentés) corresponde au haut de la colonne combustible.
mesurée par les sondes mobiles et la valeur calculée dans des Malgré la mesure faite, lors du montage, de la distance parcou-
conditions aussi proches que possible des conditions expérimen- rue par une sonde jusqu’en haut du cœur, il est possible que
tales et ce, sur chacune des mailles axiales. Comme le courant déli- celle-ci se soit arrêtée soit trop tôt (avant le haut du cœur), soit trop
vré par les détecteurs mobiles est proportionnel au taux de la tard (après le haut du cœur). Dans ces conditions, il est quelquefois
réaction de fission dans le détecteur et non directement à la puis- nécessaire de décaler la trace axiale soit vers le haut, soit vers le
sance, on préfère parler d’activité et non de puissance ; une phase bas du cœur, d’une distance qui correspond à quelques pas codeur.
de transposition activité/puissance sera introduite ultérieurement Dans le premier cas, il manque des valeurs : les valeurs manquan-
dans le dépouillement. tes sont calculées par extrapolation. Dans le deuxième, il y en a
On détermine ensuite un polynôme que l’on choisit de degré 3 trop : elles sont supprimées. La distance de décalage, c’est-à-dire le
en (x, y, z ), capable de représenter la distribution des écarts acti- nombre de valeurs à ajouter ou à supprimer, est déterminée grâce
vités calculées/activités mesurées sur tout le cœur. Le procédé à une comparaison entre la position axiale d’une dépression de
utilisé est un procédé classique de minimisation des écarts sur les flux due à la présence des grilles des assemblages combustible et
60 positions instrumentées, et pour chaque cote axiale, entre la vue sur la trace, et la position théorique connue de la grille. La
valeur mesurée et la valeur donnée par le polynôme. figure 5 montre bien les dépressions de flux vues par les sondes

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mobiles : on choisit arbitrairement une grille pour laquelle la puissance n’étant pas mesurée (puisque l’on ne mesure que l’acti-
dépression de flux est nette, vers le centre du cœur par exemple la vité), il faut donc disposer d’un moyen permettant de passer de
cinquième (en partant du bas). l’activité à la puissance. Ce point fait l’objet du § 5.4.4.3.2.
Un algorithme simple va déterminer à quelle cote axiale se pro- Le troisième est appelé terme de structure fine puisqu’il permet
duit le maximum de dépression sur la trace, comparer à la cote de passer de la puissance moyenne à la puissance de n’importe
théorique connue puis procéder au décalage nécessaire. En fait, on quel crayon de l’assemblage. Une hypothèse supplémentaire devra
utilise maintenant une méthode multigrille qui s’appuie sur être faite pour terminer le traitement : la composante de structure
l’ensemble des grilles centrales. fine à superposer à la composante macroscopique reconstruite par
Une correction visant à éliminer le bruit de fond électronique est l’extension des activités est égale à la composante de structure fine
ensuite effectuée ; elle consiste à soustraire à chaque valeur axiale calculée. Il faut signaler, à ce stade, que l’aptitude du code utilisé
de la trace, la valeur du flux mesurée à l’extérieur et en bas du à calculer une composante de structure fine a été qualifiée sur des
cœur à une distance de l’ordre de un mètre dans une zone où il n’y expériences critiques effectuées en laboratoire.
a pas de flux. Si l’on veut maintenant calculer la puissance reconstruite dans
En dernier, est effectuée la correction de sensibilité relative des tous les points non instrumentés du réacteur, il faut trouver un pro-
sondes. cédé permettant d’inventer des mesures là où il n’y en a pas. C’est
l’objet du procédé d’extension exposé au paragraphe suivant.
5.4.4.2 Distribution de puissance théorique
5.4.4.3.1 Procédé d’extension : méthode des surfaces
Le signal issu de la mesure par les détecteurs à fission est pro- généralisées
portionnel à un taux de fission dans la partie sensible du détecteur,
c’est-à-dire au produit : En chaque position instrumentée, il est possible de calculer
section efficace de fission × flux l’écart entre l’activité mesurée et l’activité théorique.
Il est nécessaire de calculer la section efficace de fission pour On suppose ensuite que la distribution ( X, Y ) des écarts à la
pouvoir remonter au flux reçu par le détecteur. Les modèles théo- cote z entre l’activité théorique et l’activité mesurée pour tous
riques utilisés doivent être capables de modéliser explicitement le les assemblages peut être approchée par une surface S (X, Y, z )
doigt de gant et le tube d’instrumentation afin de représenter les d’un degré k à choisir (degré 3).
conditions exactes de la mesure. Les coefficients du polynôme caractérisant cette surface sont
U235
La section efficace de fission σ f est calculée en prenant en déterminés en minimisant une fonction d’erreurs F à plusieurs
compte les conditions locales du spectre autour du tube d’instru- variables dont chacune est un des coefficients que l’on cherche. Le
mentation et en représentant explicitement le doigt de gant et le processus de minimisation est un processus classique des
tube d’instrumentation pour le calcul du flux. Ce calcul est fait pour moindres carrés effectué à chaque cote axiale et rendant minimale
chaque assemblage instrumenté par un code de cellule. la différence entre les écarts obtenus précédemment et les écarts
Framatome - ANP utilise le code APOLLO 2F qui est un module de calculés grâce au polynôme sur tous les assemblages instru-
la chaîne de conception neutronique SCIENCE. mentés.
La distribution de flux est ensuite calculée par un code de diffu- 5.4.4.3.2 Transposition puissance/activité
sion. Framatome - ANP utilise le code nodal tridimensionnel
SMART appartenant lui aussi à la chaîne SCIENCE. Les informa- Tout détecteur de neutrons mesure un taux de réaction ou acti-
tions calculées sont les suivantes : vité de forme Σ Φ et non directement la puissance. De plus, la réac-
— la distribution 3D des puissances moyennes par assemblage. tion d’absorption des neutrons par la matière sensible du détecteur
Cette distribution de puissance PM CAL (X, Y, z ) intervient dans la se fait dans une bande d’énergie caractéristique de celle-ci. La
phase de transposition ; connaissance de la quantité de neutrons appartenant à cette bande
— l’ensemble des puissances maximales crayons intégrées sur d’énergie par rapport au nombre total de neutrons est un problème
la hauteur active du cœur. Pour chaque assemblage, il n’est retenu de spectre neutronique.
qu’un seul crayon, celui qui porte la puissance intégrée la plus Le rapport P /A ou puissance/activité est un paramètre issu de
élevée. Cet ensemble, noté P CAL ∆H (x, y ), est utilisé dans la phase calculs de cœur effectués en 3D pour tous les assemblages.
de superposition et permet de calculer le facteur d’élévation Ces calculs tiennent compte à la fois des effets de spectre locaux
d’enthalpie du cœur F∆H ; par l’intermédiaire du système de contre-réactions neutroniques et
— l’ensemble des puissances maximales locales. Pour chaque de la distribution de flux. Ces rapports sont actualisés en fonction
plan situé à la cote z et pour chaque assemblage, il n’est retenu de l’épuisement pour prendre en compte l’évolution des concentra-
qu’un seul crayon, celui qui porte la puissance locale maximale. tions isotopiques au sein de l’assemblage.
Cet ensemble désigné P CAL (x, y , z ) intervient dans la phase de On fait une hypothèse qui consiste à écrire que les rapports
superposition dans le calcul des facteurs de points chauds du entre valeurs calculées et valeurs reconstruites sont égaux pour les
cœurs FQ , FXY (z ). deux variables activité et puissance.
Toutes les grandeurs moyennes utilisées, qu’elles soient d’ori-
gine expérimentale ou théorique sont normalisées sur le volume 5.4.4.3.3 Superposition de la composante de structure fine
du réacteur, car le résultat recherché est une distribution de puis- On suppose ensuite que, pour un assemblage donné, le rapport
sance relative donc sans dimension. entre la puissance d’un crayon et la puissance moyenne de
l’assemblage auquel appartient ce crayon est indépendant de l’ori-
5.4.4.3 Reconstruction de la distribution de puissance gine de cette puissance, reconstruite ou calculée.
mesurée
En outre, une correction est appliquée en fonction des écarts
Le processus de reconstruction de la distribution de puissance calcul/mesure sur les puissances moyennes observés autour de
mesurée fait intervenir trois termes. l’assemblage. Cette correction conduit à effectuer une interpolation
Le premier est, bien sûr, le taux de réaction de fission dans le linéaire à deux dimensions de type plan. L’interpolation est faite à
détecteur encore appelé activité. chaque cote z .
Le deuxième fait intervenir le rapport entre la puissance Les traitements peuvent se faire sur les écarts absolus ou rela-
moyenne d’un assemblage instrumenté et l’activité vue par un tifs. Un exemple de distribution de puissance reconstruite sur tout
détecteur circulant dans le doigt de gant de cet assemblage. La le cœur est donné sur la figure 6.

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Figure 6 – Distribution (x , y ) de puissance relative reconstruite sur tout le cœur et écarts calcul/mesure après extension

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5.5 Résultats finaux téristique des chambres d’ionisation et possède un plateau ,


c’est-à-dire une zone pour laquelle l’intensité est indépendante de
la tension (sur une certaine plage de variation de la tension de
Les résultats des traitements précédents sont concrétisés par des
polarisation HT). Cette allure particulière est en effet la marque de
tableaux et figures. L’information la plus représentative est donnée
bon fonctionnement du capteur ou encore sa signature. L’éven-
sur la figure 6 qui représente la distribution de puissance (x , y )
tuelle absence du plateau permet de détecter un mauvais fonction-
reconstruite. On peut y voir la puissance moyenne reconstruite et
nement d’une sonde.
les écarts calcul/reconstruction pour chaque assemblage ainsi que
la valeur d’autres paramètres tels que le pic de puissance total FQ ,
le facteur d’élévation d’enthalpie et les indices de dissymétrie
(x , y ) encore appelés tilts.
La précision obtenue sur la reconstruction du facteur total de 7. Places du système RIC
point chaud F Q est de 5 % et celle sur le facteur d’élévation
d’enthalpie est égale à 4 %. dans les spécifications
La carte de flux présentée correspond à une carte de flux faite d’exploitation
sur la tranche de Chooz B2, en début de vie du cycle 1, à puissance
nominale, toutes grappes extraites.

7.1 Exigences relatives


5.6 Traitement des mesures à l’exécution de cartes de flux
de température L’exécution d’une carte de flux est requise dans trois cas
essentiellement.
Les mesures de température ne font pas l’objet d’un traitement
aussi sophistiqué au sens de l’obtention d’une distribution de tem- Le premier est la nécessité de vérifier la conformité du cœur par
pérature sur le cœur, que celui qui vient d’être exposé. rapport aux calculs prévisionnels de conception. À ce titre, des
cartes de flux complètes sont réalisées lors des essais physiques
Les mesures de température sont transmises via les armoires de de redémarrage après redivergence (essais à caractère neutro-
l’ébulliomètre, au calculateur de tranche qui va en assurer une pré- nique) puis, chaque mois, en cours de cycle.
sentation synthétique sous forme d’une carte de température sur le
cœur, mais uniquement aux positions correspondant aux assem- Deux points attirent particulièrement l’attention : la vérification
blages instrumentés par les thermocouples. d’une absence d’erreur de chargement faite par une carte de flux
relevée à 8 % PN et celle de l’évolution des facteurs de points
Des calculs simples sont effectués de manière à élaborer des chauds du cœur en fonction de l’épuisement, faite par une série de
informations globales telles que déséquilibres azimutal, radial... cartes de flux exécutées tous les mois à puissance nominale.
Le deuxième est le calibrage de l’instrumentation externe en dis-
tribution de puissance c’est-à-dire la détermination des coefficients
des matrices de sensibilité et de transfert de chaque chaîne RPN
6. Essais périodiques associés niveau puissance.
au système Pour ce faire, il est nécessaire de générer dans le cœur plusieurs
distributions axiales de puissance. Le plus simple est alors de
lancer une oscillation axiale de xénon par une légère insertion d’un
Les essais périodiques principaux associés à l’utilisation du RIC groupe de grappes de contrôle (compensée par une dilution du
sont les suivants. bore de l’eau du circuit primaire pour rester à puissance cons-
tante). Ce procédé est le seul qui permette de faire varier la com-
Un essai de requalification fonctionnelle est effectué après les
posante axiale de la distribution de puissance sans perturber la
opérations de démontage et remontage des doigts de gant réali-
composante radiale qui a un effet sur les chambres externes. Le
sées pour permettre les opérations de déchargement/recharge-
cœur est donc volontairement placé dans des conditions d’instabi-
ment des éléments combustible. Il s’agit simplement de vérifier
lité. Des cartes de flux partielles sont effectuées périodiquement
que le remontage des doigts de gant a été fait correctement et que
pour obtenir un échantillon représentatif de formes axiales (envi-
le fonctionnement mécanique est conforme aux spécifications. Cet
ron une dizaine). Seules des cartes de flux partielles sont réali-
essai est réalisé une fois par cycle avant chaque redémarrage.
sables puisque le cœur est en évolution xénon.
Un autre essai est la vérification des isolements électriques des
L’exécution de cartes de flux est également requise en cas
lignes des thermocouples ; cet essai est exécuté à chaque redémar-
d’alarmes de déséquilibre azimutal de puissance générée par le
rage. Il peut être accompagné, si nécessaire, par un recalage iso-
système RPN ou en cas de fonctionnement dégradé de ce système.
therme des thermocouples. Une fois atteintes les conditions
Dans le premier cas, il faut lever le doute entre un problème phy-
nominales de température et de pression mais avant la première
sique affectant la distribution de puissance et un défaut matériel
divergence, on procède au recalage des thermocouples. En
affectant les chambres externes. Dans le deuxième, l’indisponibilité
l’absence de puissance neutronique et donc du phénomène de dis-
d’une chambre empêche le système RPN d’accomplir sa fonction
tribution de puissance, tous les thermocouples doivent indiquer la
de surveillance de la distribution azimutale de puissance.
même valeur égale à la température d’entrée du cœur ; ils sont
recalés, le cas échéant, afin de donner tous une mesure identique.
Des coefficients de correction sont calculés et introduits dans
l’ébulliomètre et le calculateur de tranche. Cet essai est effectué 7.2 Indisponibilités du système RIC
une fois par cycle.
Un essai de bon fonctionnement des détecteurs est réalisé avant L’indisponibilité du système RIC n’a pas une incidence immé-
chaque carte de flux complète soit, en principe, tous les mois. Il diate ni sur le fonctionnement du réacteur ni sur la sûreté de la
s’agit de déterminer la tension de polarisation des sondes et donc tranche, mais il faut distinguer la partie mesure de flux de la partie
de tracer les courbes intensité débitée en fonction de la tension de mesure de température car les fonctions associées ne sont pas les
polarisation appliquée. La forme de ces courbes I = f (HT) est carac- mêmes.

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L’impossibilité d’effectuer une carte de flux mensuelle à la date dans la cuve par le couvercle. Les trains de billes sont mus par de
prévue est acceptable sous réserve de retrouver la disponibilité de l’azote comprimé.
la fonction sous un mois ce qui laisse largement le temps de La mesure de flux repose sur l’activation des billes lorsqu’elles
réparer. sont placées sous flux de neutrons ; le comptage de l’activité de
Il existe un nombre minimal d’assemblages à explorer pour celles-ci se fait au moyen de détecteurs fixes placés sur des râte-
qu’une carte de flux soit décrétée valide. Cette valeur est fixée à liers situés à l’extérieur de la cuve mais dans le bâtiment réacteur.
80 % des assemblages, ce qui correspond à 10 assemblages per-
dus (après arrondi). Compte tenu de l’existence des procédures de
secours, ce cas se rencontre extrêmement rarement. 8.1.2 Détecteurs. Comptage
En ce qui concerne les mesures de température, il est nécessaire Les billes sont faites en alliage d’acier avec 1,5 % de vanadium ;
de séparer l’aspect carte de température de l’aspect marge à la leur diamètre est de 1,7 mm. Elles circulent sous forme de
saturation. « trains » dans des tubes creux de 3 mm de diamètre extérieur ; il
Dans le premier cas, l’indisponibilité du système RIC n’a pas faut environ 2 500 billes pour couvrir la hauteur d’un cœur de réac-
d’incidence immédiate ni sur le fonctionnement ni sur la sûreté teur 1 300 MWe. Il y a autant de trains de billes que d’assemblages
puisque les cartes de température ne sont pas utilisées en fonc- à explorer soit 28 sur un réacteur de type Convoy ; ils sont envoyés
tionnement normal ; ces cartes ne sont utilisées que lorsque le sys- tous en même temps ce qui veut dire qu’il suffit d’une seule passe
tème RPN est indisponible dans sa fonction surveillance du pour effectuer une carte de flux complète.
déséquilibre azimutal de puissance, afin de détecter et/ou confir- Sous flux de neutrons, les billes s’activent suivant la réaction :
mer une éventuelle dissymétrie de puissance.
Dans le deuxième cas, une indisponibilité est hautement impro- 51 ( n, γ ) 52
V & V
bable puisque la fonction ébulliomètre est redondante d’ordre 2.
De plus, le nombre de thermocouples acquis dans chacune des (la période du vanadium 52 est de 3,7 min).
deux voies est supérieur au nombre qui est nécessaire pour avoir
une bonne représentativité de la température sortie cœur. Une voie Leur temps de séjour dans le cœur est de 3 min environ.
est considérée comme indisponible si plus de la moitié des Le vanadium a été choisi car sa période est petite, ce qui permet
thermocouples est hors service, ce qui laisse une bonne marge. En d’attendre la décroissance complète du vanadium avant de refaire
cas d’indisponibilité des deux voies de l’ébulliomètre, le réacteur une carte de flux et d’enchaîner plusieurs cartes de flux à la suite.
doit être conduit à l’arrêt à froid ou ne peut être redémarré s’il se
Après activation, les trains de billes sont envoyés vers les râte-
trouve à l’arrêt.
liers de comptage. Il est important de noter que le nombre de
râteliers de comptage (7) est inférieur au nombre de trains de
billes (28). Comme on ne peut mesurer l’activité que d’un seul train
de billes à la fois, il s’ensuit que les trains doivent attendre leur
8. Systèmes d’instrumentation tour avant de pénétrer sur le râtelier de comptage. Pour éviter la
complexité mécanique liée aux aiguillages qui permettraient de
interne chez d’autres faire passer un train de billes de son conduit d’attente au conduit
de mesure, il a été décidé que les trains de billes resteraient tou-
constructeurs jours dans le même conduit depuis le cœur jusqu’au râtelier : le
conduit de circulation dans le cœur, le conduit de liaison entre le
cœur et la position d’attente, et le conduit de liaison entre la
Les systèmes d’instrumentation internes qui sont présentés position d’attente et le râtelier de comptage ne font qu’un afin
ci-dessous sont des systèmes de référence chargés de mesurer, de d’assurer une continuité mécanique tout le long du parcours. Ceci
façon intermittente, la distribution de puissance en 3D dans le a pour conséquence que chaque râtelier de comptage ne possède
cœur avec la précision optimale. À ce titre, ils sont donc directe- pas un conduit de mesure mais quatre disposés à égale distance
ment comparables au système RIC français sur le plan fonctionnel. du détecteur. Il suffit ensuite de gérer la séquence de comptage
On retiendra deux solutions ayant valeur d’exemples représen- pour qu’un seul train de billes soit présent lors du comptage.
tatifs dans leur domaine respectif, l’une existant dans les réacteurs L’activité γ des billes est une image de la distribution de flux
allemands construits par la Société Siemens et l’autre installée dans l’assemblage. Dans chaque râtelier, la mesure du taux de
dans les réacteurs construits par la Société Babcock et Wilcox aux comptage est assurée par 32 détecteurs individuels (pour un cœur
États-Unis. 1 300 MWe) collimatés de telle sorte que l’activité des billes voi-
sines n’interfère pas avec la mesure faite par chaque détecteur.
De même, les râteliers de comptage sont séparés par des blin-
8.1 Système Aeroball de Siemens dages appropriés. Les mesures des taux de comptage, soit
32 valeurs par trace axiale, sont envoyées à un calculateur.
Ce système est en fait dérivé du premier système d’instrumen- Le dépouillement des mesures suit le même principe que celui
tation interne mis au point par la Société américaine Westinghouse décrit plus haut (§ 5.4) pour les sondes à fission : il faut toujours
dont Siemens fut licencié au début des années 1970. Un tel sys- passer d’une activité à une puissance puis d’une puissance sur N
tème a également existé sur la première centrale construite par assemblages à une distribution de puissance sur tout le cœur. Des
Framatome, la centrale franco-belge des Ardennes, SENA, qui a corrections sont faites pour tenir compte :
divergé en avril 1967 puis fut arrêtée en 1992. La Société Siemens
— du temps de transit dans le cœur de chaque bille puisque
a apporté diverses améliorations essentiellement sur le plan méca-
celui-ci dépend de la place de la bille dans le train (la première bille
nique pour en améliorer la fiabilité.
est la première introduite et la dernière retirée) ; ce processus est
itératif car il dépend du profil axial de flux dans l’assemblage, profil
que l’on cherche à mesurer ;
8.1.1 Description d’ensemble
— du temps de transit entre le cœur et la position d’attente ;
Le système Aeroball est un système d’instrumentation mettant — du temps écoulé en position d’attente.
en jeu des pièces mobiles constituées par des trains de billes en Le processus complet incluant l’activation dans le cœur, les
acier. Ces trains de billes qui circulent dans des conduits, pénètrent temps de transit, d’attente, de comptage et de stockage informa-

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tique des mesures est de l’ordre de 15 min. La très faible valeur du L’intérêt mécanique des trains de billes est leur absence totale de
temps d’activation dans le cœur permet de faire une véritable pho- rigidité ce qui leur permet de circuler dans des conduits qui possè-
tographie instantanée du cœur et celui-ci n’a pas besoin d’être dent des rayons de courbure très faibles tels qu’on les rencontre
placé dans des conditions de stabilité. Ce temps de 15 min corres- dans les internes supérieurs.
pond justement à la décroissance complète du vanadium, ce qui Ces conduits, dont le diamètre extérieur est de 3 mm, sont pla-
permet d’enchaîner les cartes de flux si besoin. cés dans des conduits concentriques qui vont assurer le passage
La réalisation d’une séquence complète est entièrement auto- du gaz comprimé. Le diamètre extérieur du conduit extérieur est de
matique. 6 mm. Ces conduits sont regroupés en grappes de trois ou quatre
introduites à l’intérieur d’une colonne (shaft ) verticale. Chaque
Les trains de billes sont stockés à l’extérieur de la cuve et des colonne est connectée à une lance horizontale (yoke ) à l’intérieur
râteliers en dehors des campagnes de mesure. de laquelle chemine la grappe de conduits ; ces conduits vont se
séparer pour descendre ensuite verticalement dans un doigt de
gant (finger ) fixé à la lance. Il y a autant de doigts de gant que de
8.1.3 Aspects mécaniques conduits dans la colonne et la lance. Le doigt de gant est inséré
dans un des vingt-quatre tubes-guides de l’assemblage situé à son
Les trains de billes pénètrent dans la cuve par le couvercle et aplomb. Ce tube n’occupe pas la position centrale de l’assemblage
sont ensuite acheminés à travers les internes supérieurs de cuve (figure 7).
dans 28 assemblages (pour un réacteur de 1 300 MWe) ce qui Les colonnes traversent le couvercle et les orifices de sortie sont
représente une proportion d’environ 15 % d’assemblages instru- munis de joints d’étanchéité. Il y a huit colonnes et huit lances
mentés. dans un cœur de réacteur 1 300 MWe.

Colonne
d'instrumentation
Étanchéité

Orifice
d'instrumentation

Entonnoir de
manchette

Barre
d'instrumentation
« Yoke »

Doigt de gant
avec collectron
au cobalt et
thermocouple

Doigt de gant
avec sonde

Colonnes, orifices d'instrumentation du cœur Figure 7 – Éléments mécaniques


de l’instrumentation « Aeroball »
du réacteur EPR (internes supérieurs)

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360° 0°

17
16
15
14
13
12
11
10
270° 90°
9
8
7
6
5
4
3
2
1

180°

A B C D E F G H J K L M N P R S T

241 assemblages combustibles 89 assemblages de contrôle

12 doigts de gant avec collectrons


40 sondes ABP au cobalt et thermocouples
Figure 8 – Répartition géographique
12 orifices sur le couvercle des assemblages mesurés par un train de billes
permettant le passage des colonnes 12 barres d'instrumentation « Yokes »
(Aeroball Probes ) ou par des collectrons
cobalt (PDD) pour le réacteur EPR

À la sortie des colonnes, les conduits assurant le transport des tige creuse à l’intérieur de laquelle sont installés 6 collectrons au
billes et du gaz se séparent et sont connectés, suivant leur fonc- cobalt (PDD ou Power Density Detectors ). La répartition géogra-
tion, à d’autres tubes dits tubes de liaison installés à demeure réa- phique des assemblages explorés par un train de billes [ABP ou
lisant, pour les uns la liaison mécanique avec les positions Aeroball Probes (sondes)] ou mesurés par les collectrons cobalt
d’attente et les râteliers de comptage, pour les autres la liaison (PDD) est indiquée sur la figure 8.
avec le système de mise en pression du gaz. La description et le rôle d’un collectron est faite au paragraphe
Lors des opérations de déchargement, les connexions entre les 8.2.1.
conduits et les tubes de liaison sont défaites, les joints d’étanchéité
Ces collectrons cobalt sont capables de délivrer une mesure de
entre les colonnes et le couvercle sont desserrés et le couvercle
flux en continu et assurent la fonction protection (remplie par les
enlevé. L’ensemble colonne-lance-doigts est extrait hors du cœur
chambres externes sur les réacteurs français). De ce fait, ils n’appar-
de manière solidaire. L’encombrement vertical total est d’environ
tiennent pas au système de référence et leurs fonctions dans les
11 m. De cette façon, aucun raccord ni connexion, électrique ou
réacteurs allemands ne seront pas décrites plus précisément.
mécanique, ne se trouve dans la cuve, sous eau.
Les opérations inverses sont effectuées pour le rechargement.
L’ensemble colonne-lance-doigts est introduit après avoir posi-
tionné les internes supérieurs au-dessus du cœur. Un dispositif de 8.2 Système Fixed Incore
guidage permet d’introduire sans difficultés les doigts de gant de Babcock et Wilcox
dans les tubes guides des assemblages.
Pour être tout à fait complet, il faut ajouter que les lances Ce système a été mis au point au début des années 1970 et a
comportent un doigt spécifique (donc un conduit) occupé par une équipé dès leur construction initiale, les tranches que la société

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Babcock et Wilcox a construites aux États-Unis pendant cette La composante Ie est instantanée alors que la composante Iβ est
décennie. Il est caractérisé par l’installation de capteurs situés à influencée par la période de désintégration radioactive du ou des
cote fixe dans le cœur et capables de délivrer une information en isotopes B.
continu. Les capteurs sont du type collectrons au rhodium. Suivant l’importance de l’une ou l’autre de ces deux compo-
Les mesures sont traitées directement en ligne par un calcula- santes, les collectrons sont classés en deux catégories : les collec-
teur intégré ou par un calculateur de tranche. Le temps de réponse trons lents pour lesquels la composante Iβ est majoritaire et les
du système dépend essentiellement des performances de ce calcu- collectrons rapides pour lesquels c’est l’inverse.
lateur qui déterminent le temps de calcul. Après de nombreux essais en laboratoire, quelques matériaux se
Ce système ne comporte strictement aucune pièce mobile. sont imposés :
— le rhodium, le vanadium pour les collectrons lents ;
— le platine, le cobalt pour les collectrons rapides.
8.2.1 Principes de mesures d’un collectron
Comme indiqué en début de cet article (§ 1.1), le problème prin-
cipal à résoudre, outre l’obtention de la nécessaire tenue mécani-
8.2.1.1 Généralités que aux conditions de fonctionnement d’un réacteur industriel et
Le mot collectron est un mot d’origine française qui signifie d’une bonne faisabilité industrielle, est le compromis entre sensi-
collection d’électrons. Placé dans un flux de neutrons, un corps bilité et durée de vie.
peut émettre des électrons. Il s’agit simplement d’un processus
d’activation bien connu des spécialistes en instrumentation 8.2.1.3 Sensibilité et durée de vie
nucléaire. L’originalité d’un collectron réside dans le fait que, sous
La sensibilité des collectrons dépend des paramètres physiques
des dimensions extrêmement réduites, le courant délivré est assez
suivants :
élevé et que les électrons émis sont collectés (d’où le nom) et
mesurés dans un processus continu sans tension de polarisation — section efficace de l’émetteur ;
extérieure. — volume et forme géométrique de l’émetteur ;
— nombre et énergie des particules β– ;
Les Anglo-Saxons utilisent la terminologie Self Powered Neutron — spectre γ de capture ;
Detector ou SPND qui indique bien cette propriété. — épaisseur massique de l’isolant ;
Un collectron se présente sous la forme d’un câble coaxial de — autoabsorption de l’émetteur.
très petit diamètre de l’ordre de 1 à 2 mm. L’âme centrale se Elle est de l’ordre de 10– 21 à 10– 23 A · cm–1/ (n · cm– 2 · s–1). Un
compose de deux parties : collectron rhodium de 40 cm de longueur placé dans un REP fonc-
— l’une, située en tête de câble est constituée par l’isotope qui tionnant à la puissance nominale, produit un courant d’environ
génère les électrons ; sa longueur est d’environ 20 à 40 cm. Cette 1 µA.
partie sensible est appelée émetteur ;
Il est plutôt difficile de trouver un modèle permettant de pré-
— l’autre est constituée par un câble métallique relié mécani- dire la sensibilité d’un collectron car les phénomènes mis en jeu
quement et électriquement à l’émetteur, chargé de véhiculer le dans l’émetteur sont très complexes mais on verra dans le para-
signal utile. graphe 8.2.1.6 qu’il est possible de remplacer un modèle théo-
L’âme centrale est entourée d’un isolant, lui-même contenu dans rique par un modèle empirique.
une gaine extérieure. La gaine extérieure recueille les électrons qui Sensibilité et durée de vie sont deux paramètres qui s’opposent
ont eu l’énergie suffisante pour traverser l’isolant et joue le rôle car la durée de vie d’un collectron est inversement proportionnelle
d’électrode collectrice. L’appareil de mesure boucle le circuit : il y à la section efficace de l’émetteur.
a bien circulation d’électrons sans source de polarisation exté-
rieure. La mesure est représentative d’un débit de fluence neutro- Le rhodium est à classer dans les collectrons à forte sensibilité
nique. et à durée de vie moyenne : toujours dans le cas d’un REP indus-
triel, un collectron rhodium devra être remplacé tous les 7 à 8 ans
Le développement de la géométrie coaxiale et l’adoption d’un suivant l’historique de fluence qu’il aura reçu.
isolant minéral sont à l’origine de l’essor de cette technologie de
mesure dans l’industrie des réacteurs nucléaires, technologie qui
est, sous bien des aspects, très séduisante. 8.2.1.4 Temps de réponse
Ces développements datent du milieu des années 1960. Le temps de réponse est gouverné par le ou les phénomènes
physiques mis en jeu dans l’émetteur. Les collectrons dont la
réponse est majoritairement due à une ou plusieurs voies de désin-
8.2.1.2 Principe de fonctionnement
tégration β– subissent l’influence de la période de désintégration.
L’émetteur contenant le corps A est le siège d’une réaction Quand le corps B est sujet à plusieurs voies de désintégration
nucléaire de type : radioactives, le temps de réponse est équivalent à la somme des
décroissances exponentielles. Les collectrons qui produisent des
( n, γ ) électrons par effet Compton ont un temps de réponse immédiat.
A –→ B
Il faut aussi tenir compte des caractéristiques de la liaison
Les électrons sont produits par deux processus principaux : électrique : résistance et capacité globales, qui déterminent la
— le ou les isotopes du corps B formés peuvent émettre un constante de temps du circuit (RC), dépendent du produit longueur
rayonnement β– dont les particules ont une certaine probabilité, par résistance et capacité linéiques.
qui est fonction de leur énergie, de quitter l’émetteur, de traverser Le temps de réponse peut atteindre des valeurs de l’ordre de
l’isolant et d’atteindre la gaine ; appelons Iβ cette composante du 1 min pour le rhodium, de 5 min pour le vanadium.
courant délivré ;
Les moyens informatiques modernes permettent de réaliser des
— les photons γ de la capture initiale donnent naissance par traitements d’accélération du signal qui sont inclus dans la chaîne
effet photo-électrique ou effet Compton à des électrons qui peu- de mesure elle-même. Ces traitements consistent généralement à
vent atteindre la gaine, soit Ie cette composante. inverser en ligne la fonction de transfert du collectron. Un des
Le courant total est donc égal à : avantages du rhodium est l’extrême simplicité des processus de
production d’électrons : deux voies de désintégration β– respon-
I T = Iβ + Ie sables de 94 % du signal total et une voie rapide à hauteur de 6 %.

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Ces traitements amplifient le bruit et détériorent le rapport En toute rigueur, chaque collectron devrait être étalonné par rap-
signal/bruit, ce qui demande de refiltrer après l’inversion d’où un port à un détecteur de référence puis comparé avec les autres. Ce
retard qui fait perdre une partie de l’intérêt du traitement d’accélé- détecteur étalon serait alors mobile pour ne pas séjourner dans le
ration. Des traitements plus modernes tels que les filtres de cœur et ne pas subir le phénomène d’épuisement, et devrait cir-
Kalman sont utilisables. culer à proximité de chaque capteur fixe. Un tel dispositif serait
d’une grande complexité mécanique.
8.2.1.5 Bruit C’est pourquoi tous les constructeurs utilisant des collectrons
rhodium ont cherché à établir des lois empiriques permettant de
Le problème du bruit sur le signal collectron est un problème prédire l’évolution de sensibilité en fonction d’un paramètre mesu-
délicat car les sources de bruit sont nombreuses : les principales rable qui ne soit pas le flux. Bien sûr, l’établissement de cette loi a
sont liées à l’activation des matériaux voisins, aux rayonnements nécessité de faire au moins une fois l’expérience décrite ci-dessus
β et γ des produits de fission et aux rayonnements γ de fission et mais le dispositif expérimental construit pour ces mesures a été
de capture. De plus, une certaine catégorie de rayonnements γ démonté dès la fin de l’expérience et n’a pas été conservé dans la
étant différée, l’influence de ceux-ci se traduit par une dégradation phase d’exploitation industrielle. Outre les dispositifs de mise en
du temps de réponse. La conséquence est que, dans tous les cas, mouvement du détecteur étalon mobile, d’acquisition et d’enregis-
le rapport signal/bruit d’un collectron est plus mauvais que celui trement des signaux, il a fallu concevoir une canne comportant un
d’une chambre à fission. trou central permettant le passage du détecteur étalon, autour
On distingue le bruit sur l’émetteur et le bruit sur le câble. Tous duquel sont distribués les collectrons fixes. La réalisation d’une
les composants sont affectés : l’émetteur, le fil conducteur dans le telle canne a constitué une tâche difficile.
câble, l’isolant et la gaine. Il y a donc production d’électrons para-
sites dans la gaine et le bruit est toujours la résultante de deux flux
opposés d’électrons. 8.2.2 Aspects système
Par convention, on affecte un signe positif pour le courant d’élec- Les collectrons sont rassemblés pour constituer un faisceau
trons allant de l’émetteur vers la gaine. introduit dans un tube creux fabriqué en Inconel. Cet ensemble est
La composante du bruit, due à l’activation de la gaine par le appelé canne. Suivant la hauteur active du cœur, il y a six à huit
rayonnement γ incident, est toujours négative. Par contre, la collectrons placés les uns au-dessus des autres. Par l’embase infé-
composante résultante liée au rayonnement γ peut avoir un signe rieure de la canne, sortent douze à seize fils connectés pour l’un au
positif ou négatif car le sens du courant parasite dépend de deux câble relié à l’émetteur, pour l’autre au câble de compensation.
facteurs : Une telle configuration est consommatrice de traversées enceinte
puisqu’il y a plusieurs centaines de fils à sortir du bâtiment réac-
— des numéros atomiques Z des matériaux constituant l’émet- teur (contrairement au système RIC français qui ne demande que
teur et la gaine ; six fils).
— de leur diamètre relatif donc des épaisseurs en présence.
Le système d’instrumentation industriel installé sur les réacteurs
Le spectre d’énergie a aussi une importance dans la mesure où Babcock et Wilcox ne comporte aucune pièce mobile. Il se
l’atténuation γ est une fonction de Z 2 ou Z 3 suivant l’énergie. compose de 52 cannes insérées dans 52 assemblages du cœur qui
Un bruit négatif aura pour conséquence de diminuer la sensibi- en possède 177 soit une proportion d’assemblages instrumentés
lité du collectron. d’environ 30 %. Chaque canne contient sept collectrons rhodium
bifilaires.
Il faut noter également que l’influence du rayonnement γ en pro-
venance du cœur n’est pas constante dans le temps : elle varie Les cannes sont toujours fabriquées avec le trou central, vestige
avec l’augmentation de la quantité de produits de fission et celle du passé et témoin de la phase de développement qu’il a fallu faire
des captures dans tous les matériaux de structure du réacteur. en son temps. Bien que ce trou ne serve plus à rien, il a été
conservé afin de ne pas avoir à modifier les cannes dont la quali-
Sur un plan industriel, le problème a été résolu ou tout au moins fication mécanique avait été acceptée par la NRC (Autorité de
rendu acceptable, de deux façons : la première par des dispositions sûreté américaine). Du fait de la présence de ce trou, le diamètre
matérielles, la deuxième par des corrections apportées par logiciel. extérieur de la canne est trop grand pour que celle-ci soit insérée
En ce qui concerne la première voie : dans le tube d’instrumentation. La canne fait donc office de doigt
— en jouant sur la longueur de l’émetteur et les diamètres res- de gant. Ces cannes sont insérées dans des tubes de guidage en
pectifs de l’émetteur et de la gaine ; forme de U dont la longueur permet d’installer les buselures
— en installant un câble dit de compensation, placé à côté du d’étanchéité au niveau du plancher du bâtiment réacteur.
câble relié à l’émetteur, de même longueur et de même nature que Comme pour le système RIC français, ces cannes sont retirées
celui-ci. Ainsi les courants parasites générés dans le câble de d’environ 4 m avant chaque déchargement puis réinsérées (depuis
compensation et dans le câble véhiculant le signal utile sont égaux. le plancher).
Les deux courants émis par les deux câbles sont ensuite soustraits Les signaux sont traités en ligne dans le calculateur de tranche.
en analogique dans un amplificateur différentiel en courant, de Après la correction de sensibilité, un calcul de reconstruction de la
telle sorte que, en sortie, on obtienne un courant égal au courant distribution de puissance 3D (analogue dans son principe à celui
produit dans l’émetteur. qui a été décrit au paragraphe 5.4.4.3) est effectué. Les distribu-
Les corrections apportées par logiciel consistent essentiellement tions de puissance théoriques sont précalculées et stockées en
à faire un recalage périodique sur une instrumentation de réfé- mémoire. Suivant les performances de ce calculateur, le traitement
rence sensible uniquement aux neutrons. complet demande environ 6 min.

8.2.1.6 Évolution de la sensibilité


en cours de fonctionnement 8.3 Autres constructeurs
Les collectrons placés à cote fixe dans le cœur ont pour fonction
de mesurer la distribution de puissance en continu. Comme on l’a Deux types de collectrons ont eu un destin industriel sur les REP
déjà dit, cette mesure requiert la connaissance des sensibilités de industriels modernes.
chaque collectron, or celle-ci évolue avec le temps, de manière dif- Le premier type est le collectron rhodium appartenant à la caté-
férente pour chaque collectron en fonction du flux qu’il reçoit. gorie des collectrons lents. L’utilisation d’un câble de compen-

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sation est une pratique généralisée. L’accélération par logiciel n’est Si l’on dispose plusieurs absorbeurs les uns au-dessus des
pas faite par tous les constructeurs car une utilisation en instru- autres dans une canne, ce qui revient à fabriquer un tube creux
mentation de référence ne le justifie pas. On en trouve dans les comportant axialement, à intervalles réguliers, plusieurs sections
réacteurs construits par les sociétés Babcock et Wilcox et d’une épaisseur plus importante que celle du tube et au centre des-
Combustion Engineering ainsi que dans les réacteurs russes de quelles est disposé un thermocouple différentiel, il est possible de
type VVER. Dans la catégorie des collectrons à réponse lente, on mesurer un profil axial d’échauffement, image du profil axial du
trouve également les collectrons au vanadium utilisés dans les flux gamma.
réacteurs canadiens CANDU. La précision de la mesure dépend essentiellement des pertes
Le deuxième type est le collectron cobalt qui est un collectron calorifiques qui sont inévitables. Comme il n’est pas possible de
rapide. Le collectron cobalt est plus gros que le précédent du fait les prédire analytiquement, il a été installé un système de calibrage
de sa plus faible sensibilité. On utilise également un câble de in situ par fil chauffant. Connaissant exactement la chaleur déga-
compensation. gée par effet Joule dans ce fil et mesurant l’écart de température
Le collectron cobalt possède une particularité importante : au T 2 – T 1 dans chaque section axiale, il est possible de calculer des
signal prompt, se superpose un signal parasite retardé dont coefficients de correction.
l’amplitude varie avec le temps, proportionnelle à la fluence reçue, Le temps de réponse n’est pas négligeable et atteint des valeurs
dû à la formation dans l’émetteur, de cobalt 60 qui est un isotope de l’ordre de plusieurs dizaines de secondes. Il est proportionnel
radioactif β. au carré de la longueur des sections. Finalement, il faut déconvo-
Cette composante parasite va croître jusqu’à représenter plus de luer le signal représentatif d’un flux gamma pour déterminer un
la moitié du signal utile. Cependant, la période du cobalt 60 étant flux de neutrons et l’on sait que ce rapport n’est pas constant dans
de 5,3 ans, l’influence de cet isotope peut être considérée comme le temps.
nulle sur la dynamique utile du signal. Il suffit alors de la retran- Un tel système est robuste sur le plan mécanique, le signal est
cher périodiquement du courant total, en particulier avant chaque facile à exploiter sur le plan électrique et sa durée de vie est, en
divergence après rechargement. Cette correction peut se faire soit principe, infinie.
par une compensation analogique soit par logiciel. Malgré tous les efforts qui ont été consacrés à ce développe-
Les réacteurs construits par la société Siemens sont équipés de ment, comme par exemple l’installation du fil chauffant, il n’a pas
cannes cobalt pour une utilisation s’apparentant à une utilisation été possible de concevoir un système capable d’apporter une amé-
en protection. lioration significative de la précision par rapport à celle du système
Dans la catégorie des collectrons à réponse rapide, les collec- RIC, ce qui aurait justifié le remplacement de celui-ci sur le plan
trons platine ou hafnium ont été testés, mais n’ont pas encore fait économique.
l’objet d’une utilisation industrielle.

9.2 Développement de collectrons


chemisés
9. Développements
On aura compris que les collectrons sont capables de délivrer
et évolutions une information continue ce qui est particulièrement appréciable
mais au détriment d’une précision et d’un temps de réponse moins
bons que les chambres à fission. Il est donc tentant d’améliorer les
performances en diminuant l’influence des sources de bruit.
9.1 Développement
Le CEA a travaillé sur les collectrons cobalt, qui sont intrinsèque-
des thermomètres gamma ment rapides, et a cherché à diminuer l’influence des rayonne-
ments β et γ incidents. Pour ce faire, l’utilisation de chemisages
Ce développement a été effectué dans les années 1980 sous entourant l’émetteur apporte des améliorations intéressantes.
l’impulsion d’EDF. Une installation expérimentale comportant huit
cannes a été testée sur une tranche 900 MWe pendant plusieurs Bien que considérés comme rapides, les collectrons cobalt pos-
cycles. Il n’a donné lieu à aucune application industrielle, mais pré- sèdent une composante différée provenant de la décroissance
sente un intérêt sur le plan des techniques d’instrumentation. radioactive d’isotopes présents dans l’émetteur lui-même ainsi que
dans sa gaine et les matériaux en acier qui l’entourent (gaine de la
Le principe de base est une mesure de type calorimétrique. On canne, doigt de gant...). Cette composante différée se traduit par
utilise la propriété qu’a le rayonnement gamma de perdre une par- un courant négatif. Afin de minimiser cette composante, l’idée est
tie de son énergie dans les matériaux qu’il traverse. Cette énergie de la compenser par un courant positif produit par les mêmes réac-
est transformée en chaleur et l’élévation de température est tions (n,β) que celles que l’on cherche à combattre. Pour ce faire,
proportionnelle à l’énergie déposée. En l’absence de pertes calo- l’émetteur est chemisé avec un matériau de revêtement en acier.
rifiques, le système se comporte comme un calorimètre adiaba- De plus ce chemisage joue le rôle d’écran vis-à-vis des électrons
tique ; comme ce n’est pas le cas et si l’on suppose qu’il y a parasites nés dans l’émetteur : sa masse surfacique est calculée
équilibre entre le flux de chaleur évacué et le flux incident, alors la pour absorber les rayonnements β de faible énergie et ne laisser
différence de température entre le milieu ambiant et le matériau passer que les électrons prompts qui sont à haute énergie.
absorbeur est proportionnelle au débit de dose incident.
Un second chemisage est installé (surchemisage) afin de réduire
L’absorbeur est un barreau métallique dont une extrémité est l’influence du rayonnement γ incident en provenance du cœur.
fixée à un support dont la température T 1 est celle de l’eau du cir- L’objectif est de créer, par effet Compton dans le surchemisage, un
cuit primaire. Si T 2 est la température du barreau, l’écart de tem- courant de sens opposé au courant créé par le rayonnement γ
pérature T 2 – T 1 peut être mesuré par un thermocouple différentiel. incident sur le cobalt. L’épaisseur doit être d’autant plus faible que
L’écart de température observé sur un REP est de l’ordre de quel- le numéro atomique est élevé pour ne pas créer une surcompen-
ques dizaines de degré Celsius. Il dépend de l’énergie déposée, de sation. Les longueurs correspondent à la longueur de l’émetteur.
la longueur de l’absorbeur et de sa conductivité thermique. Sur le papier, une telle solution est séduisante. Cependant, cette
L’énergie déposée elle, dépend du débit de dose gamma que l’on compensation n’est pas énergétiquement équilibrée : les électrons
cherche à mesurer, d’un coefficient d’absorption des photons et de de compensation n’ont pas la même énergie que les électrons
leur énergie. parasites que l’on cherche à supprimer. La compensation n’est

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donc pas forcément exacte. De plus, il n’est pas sûr qu’elle soit sta- Exemple : une des stratégies envisagée est d’implanter dans le
ble dans le temps vu que la proportion de rayons γ incidents aug- cœur un plan de chargement dit « à faibles fuites » qui permet, en
mente avec l’épuisement du cœur. diminuant les fuites neutroniques, d’augmenter la longueur de cycle.
Une expérimentation dans le cœur du réacteur expérimental du Cependant, un tel plan de chargement provoque une augmentation
CEA à Saclay, OSIRIS, est en cours. des facteurs de points chauds ce qui diminue les marges de fonction-
nement.
Le nouveau système de surveillance envisagé apporte le gain en
précision qui permet de restaurer les marges de fonctionnement en
9.3 Expérimentation de collectrons compensant l’augmentation des facteurs de points chauds par l’amé-
lioration de la précision du calcul des marges de fonctionnement.
rhodium sur un REP français
Le système envisagé comporterait seize cannes à huit collectrons
rhodium. Le système RIC n’explorerait plus que 42 assemblages. Il a
L’intérêt, sur le plan fonctionnel, de disposer en continu d’une été vérifié que, d’une part la précision obtenue avec seize cannes per-
mesure de la distribution de puissance en 3D à l’intérieur du cœur mettait d’atteindre l’objectif fixé en terme de gain et que, d’autre part,
est évident. La démonstration de l’intérêt économique d’une telle la perte de précision résultant d’une mesure sur 42 assemblages était
mesure l’est beaucoup moins. Cette difficulté, combinée au fait que très faible. L’information serait traitée en ligne dans deux armoires
le système RIC fonctionne parfaitement et délivre une information redondantes, indépendantes du calculateur de tranche. Chacune des
avec une très bonne précision, a fait qu’aucune évolution notable deux armoires contiendrait outre les unités d’acquisitions de signaux,
de l’instrumentation interne des REP français n’a vu le jour. les unités de traitement effectuant le calcul de la reconstruction de la
Cependant les choses sont en train de changer car EDF a accepté distribution de puissance tel qu’il a été décrit plus haut (§ 5.4). Ce calcul
que Framatome - ANP réalise une expérimentation de collectrons nécessite la connaissance de distributions de puissance théoriques ;
rhodium dans un de ses réacteurs. celles-ci seraient délivrées grâce à un modèle neutronique 3D tournant
en ligne. La redondance d’ordre 2 permet de réaliser la sauvegarde
Deux cannes comportant chacune huit collectrons rhodium ont
réciproque des informations calculées dans les deux armoires et en
été installées en août 1997 dans le réacteur de Golfech 2 (réacteur
particulier, la sensibilité des collectrons rhodium et la distribution
de 1 300 MWe, 4 boucles) pour une durée de deux cycles de quinze
d’épuisement du cœur.
mois. L’expérimentation s’est terminée en avril 2000.
Le temps de réponse du système est alors déterminé par le temps
Les collectrons et les cannes ont été fabriqués par la société FCF de calcul plus que par le temps de réponse des collectrons rhodium.
(Framatome - ANP - Inc.) filiale américaine de Framatome - ANP. Pour un système de surveillance, un temps de réponse de l’ordre de la
Cette société, issue de la société Babcok et Wilcox, fabrique minute est acceptable. Les progrès des microprocesseurs permettent
aujourd’hui les cannes rhodium de remplacement pour de nom- d’envisager de descendre à quelques dizaines de secondes d’ici la
breuses centrales Babcok et Wilcox ou C-E aux États-Unis. commande d’équipements de série.
Les résultats ont confirmé toutes les observations faites aux
États-Unis et montrent qu’un tel capteur peut être utilisé dans les
conditions d’exploitation en suivi de réseau qui caractérisent les
tranches françaises. 9.5 Système retenu pour le réacteur
franco-allemand EPR

9.4 Évolution vers un système Une hypothèse de conception fondamentale a été retenue pour
le futur réacteur franco-allemand EPR : dans un souci d’améliorer
de surveillance des conditions la sûreté, les pénétrations en fond de cuve doivent être suppri-
préaccidentelles mées. La conséquence immédiate est que l’instrumentation interne
doit pénétrer par le couvercle.
Une fois acquise la certitude que des collectrons rhodium pou- Le système de mesure interne, de référence, de l’EPR sera donc
vaient être utilisés dans les conditions d’exploitation des tranches un système de type Aeroball puisque ce système est le seul qui
françaises, il est alors possible de concevoir un système de mesure pénètre par le haut et qui bénéficie d’une expérience industrielle.
interne qui offre un intérêt économique. Afin de valoriser la mise Il est prévu de pouvoir explorer 40 assemblages (figure 8).
à disposition en continu d’une mesure de la distribution de puis- Comme c’est déjà le cas sur les réacteurs allemands de type
sance en 3D dans le cœur, il a été décidé de concevoir un système Convoy, des collectrons cobalt, donc à réponse rapide, seront uti-
de surveillance capable de veiller au respect des conditions pré- lisés dans le système de protection pour mesurer la distribution de
accidentelles donc de calculer en continu les marges de fonction- puissance en temps réel. Douze cannes comportant chacune huit
nement. collectrons cobalt seront insérées dans le cœur par le couvercle. Le
Sur les tranches 1 300 MWe, les marges de fonctionnement sont traitement des mesures vise à reconstruire la distribution de puis-
actuellement calculées dans le système RPR (ou SPIN) à partir du sance dans le canal le plus chaud appartenant à chacune des douze
profil axial de puissance mesuré par les chambres externes à six « macrorégions » situées autour des douze cannes.
sections du système RPN et de facteurs de pic de puissance radial
Fxy prétabulés, conservatifs.
Paradoxalement, il s’agit de remplacer les chambres externes du
système RPN dans leur fonction de mesure de la distribution axiale
de puissance et non le système RIC. Un tel système de surveillance 10. Conclusions
est un système temps réel et n’appartient donc pas à la même
catégorie fonctionnelle que le système interne mobile RIC qui est
un système de référence. Le système d’instrumentation interne mobile RIC bénéficie d’un
Une mesure faite à l’intérieur du cœur, en 3D, est capable retour d’expérience extrêmement favorable d’un millier d’années-
d’apporter un gain en précision important par rapport à la méthode réacteurs environ.
actuelle. Ce gain est immédiatement et directement transformable Sur le plan fonctionnel, il est doué d’un pouvoir de résolution
en % de marge de fonctionnement qu’EDF peut valoriser de élevé et permet d’atteindre un niveau de précision remarquable.
plusieurs façons. On peut signaler la détection, en juillet 1979 lors des essais phy-

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INSTRUMENTATION INTERNE DES RÉACTEURS ______________________________________________________________________________________________

siques à puissance nulle de la tranche de Bugey 5, d’une anomalie été observés au démarrage du palier 1 300 MW ; ils étaient dus à
particulière survenue sur les crayons de poisons consommables une usure mécanique provoquée par des phénomènes vibratoires
réalisés en Pyrex (verre silico-boraté). Ces crayons étaient fabri- situés dans les internes inférieurs. Depuis, des modifications ont
qués en deux parties ; celles-ci s’étaient séparées lors du transport, été apportées et tout est rentré dans l’ordre.
laissant apparaître un vide qui avait provoqué un pic de flux au
Cet ensemble de raisons fait qu’EDF n’a pas été enclin à faire
milieu du cœur. De même, la détection d’une légère dissymétrie de
évoluer ce système qui a donné toute satisfaction. Seule l’obsoles-
la distribution de puissance (x, y ), lors du démarrage du palier
cence des composants électroniques de technologie numérique
1 300 MW, dissymétrie maintenant constatée sur toutes les
amènera à faire des modifications.
tranches, est à mettre au crédit du système RIC. Cette dissymétrie,
due à de légères variations géométriques affectant le cœur pen- L’évolution qui se fait jour vers un système de surveillance des
dant le fonctionnement, est maintenant prise en compte dans les conditions préaccidentelles, traduit un changement du cahier des
études. Le seul inconvénient que l’on puisse déplorer est le temps charges. Ce changement est motivé par la recherche de marges de
d’acquisition qui reste de l’ordre d’une heure. fonctionnement, rendue elle-même nécessaire par l’introduction en
réacteur de gestions du combustible de plus en plus performantes
Sur le plan mécanique, le fonctionnement est irréprochable et sur le plan économique. De même, l’adoption d’un système de
aucune fuite n’est à signaler ni au niveau des buselures ni à celui type Aeroball sur le réacteur franco-allemand EPR est la consé-
des vannes d’isolement. Deux percements de doigts de gant ont quence d’une évolution des exigences de sûreté.

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