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: FONDEMENTS THEORIQUES DU
MANAGEMENT
Les théories managériales ont pour objet de décrypter le fonctionnement des organisations afin
d’en permettre une meilleure compréhension. L’ampleur du sujet pousse souvent les auteurs à se
focaliser sur un aspect particulier de l’organisation (les motifs de son existence, les conditions de
survie, sa structuration, la répartition des activités, les moyens d’améliorer ses performances, les
rôles respectifs de ses membres, la façon de diriger une organisation…) au détriment d’une
approche globale relativement difficile, étant donné la complexité du phénomène étudié. L’étude
des organisations nécessite aussi de mobiliser différentes disciplines (sociologie, psychologie et
psychanalyse, anthropologie, histoire, économie, gestion, sciences politiques…) qui sont autant
d’angles d’analyse pertinents. Néanmoins, cette multitude de perspectives et de champs
théoriques conduit à percevoir le champ managérial comme étant extrêmement hétérogène
(points de vue divergents, confits d’interprétation, objets d’études variés…), ce qui empêche
toute présentation synthétique.
Dans le cadre de ce chapitre nous aborderons de façon non exhaustive les courants de pensée à la
fois classique et des Ressources humaine. Ce qui nous permettra de faire une brève comparaison ;
I - L’ECOLE CLASSIQUE
L’école classique (ou école formelle) des organisations regroupe des courants de pensée aux
préoccupations très différentes, mais marquées par une même approche de l’organisation, à
savoir la recherche de la rationalité. En relation avec la révolution industrielle (mécanisation,
urbanisation, concurrence accrue), cette école donne une place prépondérante à la production et
aux ingénieurs. Dans le but d’améliorer la productivité, les premières réflexions sur l’organisation
portent sur la rationalisation du travail, des structures, de la direction et cherchent à donner une
solution unique et universelle aux problèmes rencontrés par les entreprises dans la gestion de
leurs activités. Selon cette logique, il est possible de distinguer trois principales contributions
associées à ce courant : la rationalité productive (F.W. Taylor), la rationalité administrative (H.
Fayol) et la rationalité structurelle (M. Weber).
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A/ RATIONNALITE PRODUCTIVE : LES PRINCIPES DU MANAGEMENT
SCIENTIFIQUE
F.W. Taylor (États-Unis, 1856-1917) est considéré comme l’un des membres fondateurs de la
théorie des organisations. Son parcours personnel permet de comprendre l’origine des travaux et
son cadre d’analyse. Issu d’une famille aisée, il doit renoncer à des études prestigieuses pour
raisons de santé. Cela le conduit à débuter sa carrière comme simple ouvrier dans une entreprise
métallurgique. Il va ensuite gravir rapidement les échelons hiérarchiques de cette entreprise
jusqu’à devenir ingénieur chef. Ce parcours le conduit à maîtriser les différents aspects du travail
productif (rôle opérationnel, rôle d’encadrement et rôle de conception) et à développer une vision
globale du travail en atelier.
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La formation (perfectionnement des connaissances), le suivi et le contrôle permanents du
personnel ;
La mise en place d’un système de salaires proportionnel au rendement.
(Taylor fixe un seuil minimum de production dans la journée en dessous duquel le
salarié est renvoyé et qui donne droit à un salaire fixe. Si le salarié dépasse ce seuil, il
va toucher un paiement différentiel sur la base des pièces produites supplémentaires
qui peut lui permettre de dépasser largement son salaire fixe. Néanmoins, le salaire
variable est plafonné car le salarié risque de mal utiliser son argent (boisson, jeu…).)
De fait, en cas de surplus de productivité, les fonds sont alloués aux œuvres sociales
de l’entreprise chargées de pourvoir aux logements et à l’éducation notamment de la
famille des ouvriers ;
La séparation rigoureuse des tâches entre ceux qui conçoivent (les ingénieurs dans• les «
bureaux de planification et d’organisation ») et ceux qui exécutent (les ouvriers dans les
ateliers). Cette séparation est qualifiée de « division verticale » du travail. Deux niveaux
d’encadrement sont donc distingués : les contremaîtres chargés de tâches
fonctionnelles et de la supervision des équipes et les membres du bureau d’études
chargés de préparer le travail et son exécution ainsi que la circulation des produits et
des matériaux. Ce service se charge, en outre, de l’embauche, de la paie et de la
discipline.
La gestion scientifique repose sur l’idée selon laquelle le processus de production de l’entreprise
peut être organisé et optimisé, afin d’obtenir une meilleure efficacité dans le travail (le one best
way : la meilleure façon de faire). Les propositions de F.W. Taylor qui fondent l’organisation
scientifique du travail1 (OST) s’articulent autour de quatre axes principaux :
- L’implication des dirigeants dans le management qui ne peuvent ignorer les conditions de
travail de leurs employés et doivent à ce titre concevoir et mettre en place des méthodes
qui augmentent leur efficacité. Les dirigeants ont également la responsabilité de s’assurer
de l’utilisation de ces méthodes et de veiller à leur bonne application ;
- La rationalisation du travail qui doit permettre l’introduction d’une gestion scientifique du
travail dans les ateliers et résoudre ainsi le problème de l’inefficacité des méthodes
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empiriques. Il s’agit en particulier d’évaluer la durée nécessaire à l’exécution de chaque
tâche grâce à une étude critique du contenu du travail, à l’analyse scientifique des
mouvements (en trois catégories : recherche, exécution, attente et repos) et l’étude des
temps d’exécution (par observation directe et chronométrage d’une part et l’utilisation des
tables de temps d’autre part). Chaque poste est optimisé (regroupement de tâches
spécifiques) ;
- La mise en place d’un système de contrôle très strict qui s’assure que les méthodes• sont
suivies sans déviation par tous les salariés qui auront à l’exécuter et ceci dans le temps
fixé ;
- L’élimination des comportements de freinage volontaire par la mise en place d’un•
système de salaires différentiels aux pièces ( A Piece Rate System), devant à terme
remplacer le management traditionnel fondé sur une « gestion de l’initiative et de
l’incitation ».
Contexte■ Henri Fayol (France, 1841-1925), contrairement à Taylor, centre son analyse sur le
métier de dirigeant. Cela tient sans doute à son parcours qui le voit, après avoir débuté à 19 ans
comme ingénieur dans une société minière, en devenir le directeur général, poste qu’il occupe
pendant trente ans. Son ouvrage Administration industrielle et générale (1916) est le fruit de son
expérience professionnelle et élabore des principes et des règles de management qui sont avant
tout des conseils pratiques.
■ H. Fayol considère que pour être efficace, le management d’une entreprise doit obéir à certains
principes d’administration.
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2) Autorité : les managers doivent pouvoir donner des ordres. L’autorité qu’ils incarnent
leur confère ce droit. Mais ils sont tenus d’assumer en même temps les responsabilités qui
en découlent.
3) Discipline : les employés doivent observer et respecter les règles qui régissent le
fonctionnement de l’entreprise.
4) Unité de commandement : chaque employé doit recevoir ses ordres que d’un seul chef.
5) Unité de direction : il ne doit y avoir qu’un seul chef et qu’un seul programme pour un
ensemble d’opérations visant un même but.
6) Subordination des intérêts individuels à l’intérêt général : les intérêts d’un employé ou
d’un groupe d’employé ne doivent jamais prendre le pas sur l’intérêt général de
l’entreprise.
7) Rémunération : les salariés doivent recevoir un juste salaire en contrepartie de leurs
services.
8) Centralisation : cette notion se rapporte au degré d’implication des subordonnées dans le
processus décisionnel. Un dosage s’impose ;
9) Hiérarchie : la chaine de commandement qui s’étend de l’autorité supérieure aux agents
inférieurs porte le nom de hiérarchie et représente une voie de communication privilégiée.
10) Ordre chaque chose et chaque personne doivent toujours se trouver à la bonne place au
bon moment.
11) Equité : les managers doivent se montrer bon et juste envers leurs subordonnés.
12) : stabilité du personnel une rotation élevée du personnel est cause d’inefficacité.
13) Initiative : les employés incités à suggérer et à mettre en œuvre de nouvelles idées ont
tendance à s’investir davantage.
14) Union du personnel : la promotion du travail d’équipe favorise l’unité du personnel et
l’harmonie relationnelle au sein de l’entreprise.
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Max Weber (Allemagne ; 1864-1920) est un des pères de la Sociologie et un auteur majeur de la
théorie des organisations. Contrairement à Taylor et Fayol, il n’a aucune pratique managériale.
Après des études de droit (mais il étudie également l’économie, la philosophie, l’histoire et la
théologie) et avoir été avocat à Berlin, il est nommé professeur de droit à l’université de Berlin
puis professeur d’économie politique. Il se fait connaître par la rédaction d’ouvrages fondateurs
aussi bien en sociologie générale (l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme), qu’en
sociologie juridique (Sociologie du droit). Dans le champ managérial, c’est son ouvrage
Économie et société sur les types de domination et le rôle de l’État qui constitue sa principale
contribution. Il y présente trois thèmes principaux : l’identification des caractéristiques clés d’une
forme d’organisation particulière (la bureaucratie) la description des raisons de son
développement au cours de l’histoire (faire le lien entre les formes organisationnelles et les
changements sociaux), et enfin la démonstration de la supériorité de la bureaucratie à l’ère
moderne sur les autres formes possibles d’organisation.
En dehors de toute démarche prescriptive, M. Weber a cherché, à travers ses réflexions sur la
légitimité de l’autorité, à développer une théorie de l’action rationnelle dans les entreprises. Selon
M. Weber, trois critères définissent la rationalité : d’abord une idée de calcul et d’efficacité
(gestion et anticipation), puis une idée d’autonomisation et de spécialisation des tâches (division
du travail), enfin l’universalisation et la formalisation des rapports sociaux (utilisation de règles et
procédures formelles). Selon cette perspective, M. Weber trace le chemin menant à la
rationalisation des organisations, caractérisée par une logique obéissant au calcul, à la prévision,
à l’évaluation et à la volonté d’efficacité. Il montre ainsi que « le type le plus pur de domination
légale est la domination par le moyen de la direction administrative bureaucratique » (Weber,
1971, p. 226). Dans ce système, seul le chef du groupement occupe la position de détenteur du
pouvoir, soit en vertu d’une appropriation, soit en vertu d’une élection ou d’un successeur
désigné. Ses attributions de détenteur du pouvoir constituent des « compétences légales ».
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professionnelle révélée par l’examen et attestée par le diplôme. Les fonctionnaires considèrent
leur fonction comme unique ou principale profession et sont payés par des appointements fixes
qui sont avant tout gradués suivant le rang hiérarchique et les responsabilités assumées dans le
cadre de leur activité. Les acteurs de l’organisation sont en outre soumis à une discipline stricte et
homogène de leur fonction et à un contrôle rigoureux.
Les travaux de E. Mayo ont permis de mettre en évidence l’existence au sein des organisations
d’un système implicite de relations et d’interactions, basées sur les comportements et les affinités
des individus entre eux (les salariés sont dominés par la logique du sentiment). Les nombreuses
expériences touchant à la redéfinition des postes, à l’aménagement du temps de travail quotidien
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et hebdomadaire, à l’introduction de périodes de repos ainsi qu’aux avantages comparés des
grilles de salaires individuelles et collective. L’une de ces expériences vise par exemple à évaluer
l’influence d’un système de rémunération à la pièce sur le rendement d’un groupe. Les résultats
démontrent qu’un tel système est loin d’avoir autant d’impact que la pression et le consentement
du groupe ainsi que l’effet sécurisant que ce dernier induit. les normes et références sociales du
groupe semblent donc constituer les déterminants essentiels du comportement des individus dans
la sphère professionnelle.
Les conclusions de Mayo soulignent l’existence d’un lien étroit entre sentiments et
comportements, de même que l’importance du poids du groupe sur les comportements
individuels ou l’impact des normes collectives sur le rendement des ouvriers.
Elles mettent aussi en avant le fait qu’en matière de productivité, l’argent pèse bien moins que les
normes, les sentiments et la sécurité du groupe – un ensemble de constatations que les normes,
les sentiments et la sécurité du groupe résumées sous l’appellation d’« effet Hawthorne ». Ces
conclusions suscitèrent un nouvel intérêt pour le facteur humain eu égard au fonctionnement de
l’entreprise et à la réalisation de leurs objectifs. Mais elles entrainèrent également un regain de
paternalisme dans la pratique du management
■ Dans le prolongement des travaux de E. Mayo, A. Maslow met en avant l’analyse des besoins
humains dans les organisations, en s’intéressant aux origines de la motivation de l’homme au
travail. Pour ce faire, A. Maslow établit une pyramide des besoins, en distinguant cinq catégories
de besoins hiérarchisée (figure 1.1). En effet, les facteurs physiologiques, psychologiques,
sociaux et culturels peuvent être abordés en termes de besoins primaires et secondaires. Selon ces
travaux, un individu peut éprouver de nombreux besoins qui n’ont pas tous la même importance
et peuvent donc être hiérarchisés et ordonnés. On peut ainsi hiérarchiser cinq besoins
fondamentaux1 : les besoins physiologiques (besoins vitaux) ; • les besoins de sécurité (physique
ou psychique) ; • les besoins d’appartenance ; • les besoins d’estime/de reconnaissance ; • les
besoins de réalisation et d’accomplissement.
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Les besoins sont souvent représentés sous la forme d’une pyramide qui témoigne de la
hiérarchisation des besoins et de la relative difficulté de satisfaire les besoins supérieurs. Selon
ces travaux, un individu cherche d’abord à satisfaire le besoin qui lui semble le plus vital (cf.
besoin physiologique). Dès que ce besoin est satisfait, l’individu cherche dans ce cas, à satisfaire
le second besoin le plus important. Par conséquent, l’hypothèse centrale de A. Maslow est qu’un
besoin de niveau supérieur ne se manifeste que lorsque les besoins de niveau inférieur ont été
satisfaits. Dès qu’un besoin est satisfait, il cesse d’être essentiel pour l’individu et un autre besoin
de niveau supérieur apparaît alors, qui sera déterminant aussi longtemps qu’il n’est pas satisfait.
À l’inverse, le retour à l’insatisfaction d’un besoin inférieur est censé entraîner la disparition des
besoins supérieurs.
Comme pour les travaux de Mayo, cette hiérarchie des besoins met en évidence les limites du
stimulant financier et l’impact du contenu du travail en tant que tel indépendamment des
conditions qui l’entourent pour motiver les salariés.
L’école classique et l’école des relations humaines s’opposent sur de nombreuses dimensions. Il
est donc fréquent de mettre en avant leurs points de divergences. Il n’en reste pas moins qu’elles
partagent une vision commune (celle d’identifier un idéal-type : meilleure manière de piloter et
de structurer l’organisation) et poursuivent le même objectif (amélioration de la performance). Le
tableau 1.2 présente les deux écoles en les confrontant sur plusieurs critères.
Au-delà des deux écoles traditionnelles, de nombreuses écoles managériales ont vu le jour. Il
semble opportun d’en d’étudier quelques-unes de ces contributions (théorie de la décision, théorie
de la contingence structurelle, théorie de l’acteur stratégique et théories de l’économie
industrielle) avant d’évoquer de façon plus synthétique d’autres courants de recherche.