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KENITRA
L’école classique de
l’organisation
PREAMBULE :
Dans cette perspective de recherche Gaston Bachelard rappelle que tout fait scientifique est
conquis (sur les préjugés), construit (par la raison), et constaté (dans les faits).
Par conséquent, une précaution minimale consiste à parler des théories des organisations, au
pluriel. La notion de paradigme, due à Thomas S. Kuhn, est utile. A un moment donné, au
sein d’une communauté scientifique, un paradigme est généralement dominant. Il fournit alors
des points de repères cohérents pour tous ceux qui opèrent dans la discipline concernée : le
paradigme se voit exposé dans les manuels, est enseigné et sert de guide aux travaux de re-
cherche pour continuer à explorer plus avant le domaine de connaissances. Il est vrai que la
suprématie d’un paradigme n’est jamais définitive : la pensée scientifique n’évolue pas de
façon continue, par accumulation. Le processus tient davantage de la rupture : c’est alors un
changement de paradigme dominant qui marque le temps de la révolution scientifique. La
situation des théories des organisations est à cet égard particulière : en partie parce qu’elles
se placent au confluent de plusieurs sciences humaines, ces théories sont multiparadigma-
tiques : elles tolèrent la coexistence de plusieurs paradigmes (on dit qu’elles sont inache-
vées).
1
Kuhn T.-S, « La structure des révolutions scientifiques ». Flammarion, Col., champs, Paris 1983.
INTRODUCTION
Les théories aident à la compréhension des processus implicites et, de cette manière, elles
aident le choix d’actions appropriées. Une théorie est un ensemble cohérent de propositions
qui servent à expliquer un ensemble de faits observables (réels). Des théories validées (tes-
tées) nous permettent ainsi de comprendre une classe de phénomène voire prévoir ce qui peut
arriver sous certaines conditions. Avec ce savoir, il est possible d’appliquer différentes théo-
ries managériales à différentes situations.
Les théories donnent différentes visions d’une même situation réelle, permettant ainsi d’avoir
plusieurs angles d’approche d’une série de problèmes. Il arrive aussi que l’on soit plus à l’aise
avec une théorie par rapport à une autre, il convient alors de savoir qu’aucune des théories
managériales ne peut prétendre la suprématie ou l’unification d’un champs disciplinaire. Il
convient donc d’adopter une approche éclectique (qui consiste à utiliser les principes de dif-
férentes théories telle que les circonstances le demandent). Dès lors, il est une nécessité ab-
solue d’être familier avec les différentes théories managériales.
Cela dit, de l’école classique à l’école de la gestion par les systèmes, chaque mouvement
s'est développé en réaction, et non en opposition à celui qui le précédait en l’intégrant plus
ou moins partiellement. Ainsi, par enveloppements successifs les différents mouvements
forment un tout. D’une école à l’autre, d’un mouvement à l’autre, les frontières sont plus ou
moins floues et l’appartenance d’un auteur à l’un ou l’autre est plus ou moins arbitraire et
discutable.
1 - L’ECOLE CLASSIQUE
Conséquence de la révolution industrielle amorcée au 19éme siècle et de la concentration
des moyens de production, une nouvelle forme de production émerge au début du 20ème siè-
cle. Le secteur industriel attire une nombreuse main-d’œuvre agricole peu adaptée à la pro-
duction technique et qu’il va falloir intégrer.
C’est dans ce contexte que l’école classique se développe, principalement dans deux direc-
tions. Le premier mouvement, d’inspiration managériale, regroupe:
• L’organisation scientifique du travail avec l’américain Frederick Winslow TAYLOR
(1856-1915) qui s’intéresse à la production dans les ateliers,
• L’organisation administrative du travail avec le français Henri FAYOL (1841-1925).
Parallèlement, l’allemand Max WEBER (1864-1920), avec ses théories sur la bureaucratie,
sera à l’origine d’un deuxième mouvement d'inspiration sociologique.
Il résume ainsi ses constatations : « le plus grand mal dont souffrent à la fois les ouvriers
et les patrons est la flânerie systématique qui est presque universelle dans les systèmes cou-
Les oppositions de Taylor qui fondent l’OST s’articulent autour de deux axes principaux :
• La rationalisation du travail
• Le système des salaires stimulants.
• La rationalisation du travail :
Analyse des mouvements et des opérations élémentaires du travail
Examen critique de chaque élément du travail
Synthèse et recomposition des mouvements. On détermine la meilleure fa-
çon de réaliser le travail « One best Way »
Mise en œuvre dans les ateliers de contrôle.
Cette rationalisation du travail conduit à une extrême division des tâches : le travail est par-
cellisé, en « miettes ». Elle conduit aussi à distinguer le travail d’exécution : « tout travail
intellectuel doit être enlevé à l’atelier pour être concentré dans les bureaux de planification
et d’organisation ».
Schéma N°.1 - La structure de l’entreprise selon l’OST
DIRECTION GENERALE
Contremaître
Ouvrier 3 Ouvrier 4
de l’atelier 2
Liaisons hiérarchiques
Liaisons fonctionnelles
Salaires
L’ensemble de ces réactions (absentéisme, conflits…) de la part des salariés ne permet pas
aux organisations d’être performantes.
• Les principes :
Spécialisation des travailleurs et division du travail,
Niveau 2
D°. Production D°. Personnel D°. Vente
Niveau 3
Niveau 4
Passerelle
1.3.1- PREVOIR :
C’est scruter l’avenir et le préparer, la prévoyance est la qualité maîtresse du chef, son ins-
trument le plus efficace est le programme d’action qui doit respecter l’unité, la continuité, la
flexibilité et la précision.
• L’unité : le programme d’action peut se diviser en plusieurs parties afférentes aux divers
services, mais toutes doivent être soudées entre elles de manière à former un ensemble
unique.
• La flexibilité : le programme d’action doit être assez souple pour se plier aux modifica-
tions nécessaires.
• La précision : il doit être précis que le permet l’inconnu et l’avenir. La prévoyance a donc
pour but de réduire dans la limite du possible la part de l’imprévu.
1.3.2- ORGANISER :
Organiser une entreprise considérée comme un corps social, c’est constituer les cadres, dé-
finir les attributions, déterminer la hiérarchie, établir la division du travail. Pour cela Fayol
recommande vivement de représenter l’organisation par un « tableau d’organisation » c'est-
à-dire un organigramme.
Ainsi, dans les grandes organisations le chef s’appuie sur un ensemble de collaborateurs que
Fayol dénomme « Etat Major » -comme dans l’armée- et qui apporte au directeur la docu-
mentation dont il a besoin.
1.3.3- COMMANDER :
Le commandement est l’art de manier les hommes, c’est faire fonctionner le corps social
constitué, l’actionner, le diriger et régler la marche de l’organisation. Pour cela, Fayol a
tracé le portrait idéal du chef qui commande : L’homme « capable d’ordonner, c'est-à-dire
non point seulement de donner des ordres, mais de faire de l’ordre. ».
1.3.4- COORDONNER :
C’est relier, harmoniser tout les actes, tous les efforts de manière à faciliter le fonction-
nement d’une organisation et en garantir le succès. Et pour que la coordination soit effec-
tive, une conférence hebdomadaire des chefs est organisée afin que chaque service marche en
accord avec les autres, et que tous soient exactement renseignés sur leur coopération à l’œuvre
commune et sur l’aide mutuelle qu’ils auront à prêter.
1.3.5- CONTROLER :
C’est vérifier si tout se passe conformément au programme adopté, aux ordres donnés et
aux principes admis.
Il a pour but de signaler les fautes et les erreurs afin qu’on puisse les préparer et en
éviter le retour.
Pour être efficace, le contrôle doit être fait en temps utile et suivi de sanctions.
Dans les grandes organisations, le contrôle est confié à des agents spéciaux possédant
les connaissances techniques et administratives correspondant à leur mission.
• Elle a pour but d’arriver à produire plus et mieux avec le même effort. Elle permet de
réduire le nombre d’objets sur lesquels l’attention et l’effort doivent se porter .Elle ne
s’applique pas seulement aux besognes techniques mais à tous les travaux qui mettent
en jeu un plus au moins grand nombre de personnes.
La division du travail a ses limites que l’expérience accompagnée de l’esprit de mesure, ap-
prend à ne pas franchir.
On ne conçoit pas l’autorité sans responsabilité, c’est à dire sans sanction – récompense ou
pénalité – qui accompagne l’exercice du pouvoir. La responsabilité est un corollaire de
l’autorité : la responsabilité est généralement aussi redoutée que l’autorité soit recherchée.
1.4.3. Discipline :
La discipline, c’est essentiellement l’obéissance, l’assiduité, l’activité, la tenue, les signes
extérieurs de respect réalisés conformément aux conventions établies entre l’organisation et
ses agents. Ainsi Fayol a cité dans son ouvrage : « Lorsqu’un problème de discipline se ma-
nifeste ou lorsque l’entente entre chefs et subordonnées laisse à désirer, il ne faut point se
borner à en rejeter négligemment la responsabilité sur le mauvais état de la troupe ; la plu-
part du temps ; le mal résulte de l’incapacité des chefs. »
Le mode de rétribution du personnel peut avoir une influence considérable sur le fonctionne-
ment des organisations. Ce que l’on cherche généralement dans le mode de rétribution c’est :
• Qu’il assure une rémunération équitable.
• Qu’il encourage le zèle en récompensant l’effort inutile.
• Qu’il ne puisse conduire à des excès de rémunération dépassant la limite raisonnable.
1.4.8. Centralisation :
La centralisation est un fait d’ordre naturel ; celui-ci consiste en ce que dans tout orga-
nisme, animal ou social, les sensations convergent vers le cerveau ou la direction, et que du
cerveau ou de la direction partent les ordres qui mettent en mouvement toutes les parties de
l’organisme.
Trouver la mesure qui donne le meilleur rendement total, tel est le problème de la centralisa-
tion et de la décentralisation. Par ailleurs, la valeur absolue et relative du chef et des agents
étant en perpétuelle transformation, on comprend que la mesure de centralisation ou de dé-
centralisation puisse être elle-même constamment variable.
1.4.9. Hiérarchie :
La hiérarchie est la série des chefs qui va de l’autorité supérieure aux agents inférieurs. La
voie hiérarchique est le chemin que suivent, en passant par tous les degrés de la hiérarchie, les
communications qui partent de l’autorité supérieure ou qui lui sont adressées. Ce chemin est
imposé à la fois par le besoin d’une transmission assurée et par l’unité de commandement.
1.4.10. Ordre :
• Ordre matériel. Pour que l’ordre matériel règne, il faut qu’une place ait été réservée à
chaque objet et que tout objet soit à sa place. De plus, il faut que la place ait été bien
choisie. L’ordre doit avoir pour résultat d’éviter les pertes de matière et des pertes de
temps. La propreté est un corollaire de l’ordre. Aucune place n’est réservée à la saleté.
• Ordre social. Pour que l’ordre social règne dans une organisation, il faut, qu’une place
soit réservée à chaque agent et que chaque agent soit à la place qui lui a été assignée.
L’ordre parfait exige de plus que la place convienne à l’agent et que l’agent
convienne à sa place.
1.4.11. Équité :
Pourquoi équité et non justice ?
La justice est la réalisation des conventions établies. Mais les conventions ne peuvent tout
prévoir ; il faut les interpréter ou suppléer à leur insuffisance. Pour que le personnel soit en-
couragé à apporter dans l’exercice de ses fonctions toute la bonne volonté et le dévouement
dont il est capable, il faut qu’il soit traité avec bienveillance ; l’équité résulte de la bien-
veillance avec la justice.
1.4.13. Initiative :
C’est la liberté de proposer et d’exécuter. Elle contribue au développement d’une dynami-
que car à tout niveau de l’échelle sociale, le zèle et l’activité des agents sont accrus par
l’initiative.
• L’autorité traditionnelle est fondée sur les précédents et les usages (les « tabous »
traditionnels de la société). « Le leader tient son autorité du statut social dont il a hé-
rité et l'extension de cette autorité est fixée par la coutume ».
Dans l’esprit de M. WEBER, le terme de bureaucratie n’a rien de péjoratif. C’est, d’après lui,
la forme la plus efficace d’organisation. Elle s’appuie sur :
• Une stricte définition des objectifs, des tâches et de l’autorité de chacun,
• Une structure hiérarchique qui contrôle tout,
• Un système cohérent de règles abstraites applicables à chaque cas particulier,
• Des relations réduites, impersonnelles et formalistes, entre fonctions et non entre
personnes,
• Un emploi qui dépend des qualifications professionnelles et de l’existence de
possibilités d’avancement.
Les principes Taylor, Fayol, Études des aspects Analyse des fonc- L’entreprise est une
classiques de formels de tions de manage- mécanique précise
l’organisation Gantt, l’organisation. Af- ment : planifier, dans laquelle chaque
firmation de princi- organiser, comman- rouage doit être à sa
Gilberth, pes universels de der, contrôler. La place pour que
management. The bonne organisation l’ensemble soit effi-
Bedeaux, Ur- one best way repose sur la division cace.
du travail et une
wick, Gulick hiérarchie de coordi-
Type idéal nation.
d’organisation qui
garantit l’efficience • une hiérarchie
de l’activité et claire
l’équité pour les • la spécialisation
acteurs et les usagers des tâches
Weber • la formalisation
des règles et des
procédures
Impact
Négatif : l’École des relations humaines s’est constituée pour réagir contre les princi-
pes classiques et bureaucratiques qui, à ses yeux, sont à l’origine de frustrations chez
les individus, de gaspillage de talents et de perte d’efficacité.
Conclusion générale :
Malgré leurs limites, il faut rappeler que ces doctrines étaient bien adaptées à l’esprit et aux
conditions de leur époque. Comme le note B. LUSSATO, l’école classique a vieilli ; néan-
moins, « certains de ses principes demeurent valables et il est indispensable de bien les con-
naître avant d’entreprendre toute action d’organisation ». En effet, l’école classique de-
meure un cadre de référence essentiel par rapport auquel de nombreuses écoles se défini-
ront ultérieurement, par affirmation ou par négation.