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Chapitre 6 Travail et emploi.

Introduction :
Le marché du travail est en évolution permanente. Depuis plus de quatre décennies,
l'économie française est globalement créatrice d'emplois. Même si chaque année, des milliers
d'emplois disparaissent dans l'agriculture, le bâtiment, l'industrie, alors que, dans le même
temps, des milliers d'autres sont créés dans le secteur tertiaire, le solde de ces créations et
suppressions d'emplois reste positif ; mais il cache d'importantes disparités.
Les emplois traditionnels à temps complets et à durée indéterminée ont peu progressé alors
que les emplois précaires se sont accrus rapidement.
Des décalages se sont produits dans l'évolution de la population active homme/femme et dans
celle de l'emploi. Ainsi la population active masculine est restée stable alors que l'emploi
masculin chutait dans le secteur agricole, du bâtiment et de l'industrie, secteur à forte
prépondérance masculine. A l'inverse la population active féminine a fortement progressé
parallèlement à l'emploi tertiaire mais dont la croissance a été toutefois moins forte.
De ce fait, la structure de l'emploi ne cesse de se modifier, par secteurs, par qualifications, par
sexes, par statuts ou par régions.
En France, comme dans la plupart des pays développés, la tendance lourde de ces dernières
décennies est à l'augmentation du chômage de masse.
L'origine de ce chômage donne lieu à des analyses et à des recommandations contrastées, en
raison de profondes divergences idéologiques sur la question.
Malgré la mise en œuvre par le pouvoir politique de mesures tendant à faire baisser le
chômage, celles-ci se révèlent inefficaces.
Il serait certainement faux de parler de " fin de l'emploi " ou de " disparition du travail " mais
il est incontestable que de nombreuses transformations caractérisent le marché du travail et
l'organisation même du travail.

I Les changements du marché du travail


A Les évolutions de l'emploi
a) Les transformations sociales
Depuis un demi-siècle, l'emploi en France a connu des évolutions significatives :
- Au niveau des professions et catégories socioprofessionnelles (PCS) : dans l'ensemble la
population active occupée a augmenté de 2,5% entre 1995 et 2013. Cette hausse résulte de
l'augmentation des cadres supérieurs et moyens, ainsi que des employés.
Les PCS "employés" et "ouvriers" restent majoritaires. Par contre les PCS " agriculteurs " et
" artisans, commerçants, chefs d'entreprise " ont vu le nombre de leur actif diminuer.
- Au niveau de la salarisation : cette évolution de long terme s'est renforcée. Fin 2015 en
France, les salariés étaient au nombre de 23 846 000 personnes soit 89,42% de la population
active totale. Les non-salariés étaient de 2 819 000 personnes. Ils représentaient 10,57% de la
population active.
- Au niveau de la féminisation : en 2015, les femmes représentaient, en France, 47,7 % de
l'emploi total (55 % de l'emploi tertiaire, mais seulement 29 % de l'emploi industriel et 29 %
de l'emploi agricole). L'augmentation des services marchands (commerce, banques, tourisme,
santé, hôtellerie...) et non marchands (fonction publique, enseignement, formation...) joue un
rôle important puisque les 3/4 des employés sont des femmes. la scolarisation féminine au
niveau secondaire et supérieur incite les femmes à l'activité professionnelle ; de même une
faible fécondité permet un accès plus facile au marché du travail.

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- Au niveau de l'accroissement du niveau moyen de qualification des emplois : le niveau
de qualification a augmenté de la part de la population active. La part des personnes sans
diplôme a diminué. Même si le pourcentage de personnes possédant un CAP reste majoritaire
parmi les actifs non qualifiés (l'emploi non qualifié reste encore important dans le secteur
tertiaire), le pourcentage de diplômés du 1° et 2° cycle connaît la progression la plus rapide.
Trois facteurs expliquent l'élévation de la qualification :
- l'allongement de la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans et le plus grand accès au BAC
depuis les années 1980 ainsi que l'augmentation du nombre de diplômés qui arrivent sur le
marché du travail.
- le tertiaire et l'industrie ont besoin d'une main d'œuvre de plus en plus qualifiée ce
qui exclut les travailleurs non qualifiés.
- enfin les différentes crises que traverse l'économie poussent l'individu dans une
compétition où le diplôme est un atout.

b) Les transformations économiques

Le poids de la population active dans les différents secteurs économiques s'est profondément
modifié :

- Au niveau de la tertiarisation : Ce sont surtout les progressions de l'emploi dans le secteur


tertiaire qui expliquent l'augmentation des actifs occupés.
Il s'agit, là encore, d'une évolution longue qui s'est confirmée. En 2015, le secteur tertiaire
regroupait 77 % environ de l'emploi total (contre 21 % environ pour l'industrie et la
construction et 3 % pour l'agriculture et la pêche).
Le progrès technique y remplace plus difficilement les emplois non qualifiés et les besoins
sociaux et de loisirs sont illimités. Enfin les entreprises des autres secteurs utilisent de plus en
plus de services.
Exemple : une entreprise va faire faire sa comptabilité par un bureau d'experts comptables.

- Au niveau de la précarisation : Les emplois précaires (formes particulières d'emploi pour


l'INSEE) regroupent toutes les formes d'emplois qui ne sont pas des contrats à durée
indéterminée. Leur caractéristique est donc de fournir un emploi et donc un revenu pour une
durée déterminée. Ce sont par exemple, des stages, des emplois intérimaires, des emplois avec
un Contrat (sous-entendu de travail) à Durée Déterminée (CDD), etc.
Le développement de ce type d'emplois qui comporte un élément d'instabilité, s'est accentué
depuis une trentaine d'années. Les contrats à durée déterminée l'intérim, les stages, le temps
partiel subi concernent aujourd'hui près d'un quart des salariés français et cette précarité
touche en particulier les femmes et les jeunes.

Ces évolutions se retrouvent, avec des nuances, dans la plupart des grands pays développés.
Certains témoignent cependant de spécificités liées à des conditions historiques,
géographiques, sociales ou culturelles particulières. Par exemple l'Allemagne conserve une
proportion plus importante d'emplois industriels ; le travail à temps partiel est beaucoup plus
répandu aux Pays-Bas qu'en France où il s'agit souvent d'un temps partiel involontaire.

B La montée du chômage
a) Définition :

Le chômage est la situation dans laquelle se retrouvent les personnes, en âge de travailler
(plus de 15 ans), privées d'un emploi, en recherchant un et immédiatement disponible afin de
l'occuper. Cette définition donnée par le BIT (bureau international du travail) est celle retenue

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par l'INSEE. Ses limites sont difficiles à circonscrire, car elle ne semble pas exclure l'inactivité
et donc le chômage volontaire. En effet, ceux qui ont délibérément quitté leur emploi afin d'en
trouver un mieux rémunéré appartiennent à cette population. C'est pourquoi autour du
chômage subsiste un phénomène de halo.

La comptabilisation du chômage est donc difficile à obtenir et n'est pas toujours très fiable. En
France, deux méthodes sont retenues : les statistiques mensuelles du ministère du Travail
et de l'Emploi sont remontées à partir des fichiers du Pôle emploi recensant les chômeurs.
C'est le taux qui est annoncé mensuellement par le gouvernement.

Le BIT retient d'autres critères. C'est la méthode employée par l'INSEE, adoptée par un
ensemble de pays et qui permet de réaliser des comparaisons internationales plus fiables. Le
chômeur au sens du BIT, en plus de la définition donnée précédemment, doit répondre à trois
critères :
 ne pas avoir travaillé ne serait-ce qu'une heure de travail rémunéré au cours de la
semaine de référence,
 être disponible pour travailler suivant toute proposition d'emploi,
 avoir recherché activement un emploi.
Trimestriellement, l'INSEE mène une enquête auprès de 75 000 chômeurs pour savoir si
elles correspondent aux critères précédemment cités sur la période de référence. Elle établit,
de cette manière, le niveau de chômage en France.

b) Le taux de chômage

Il établit le rapport entre le nombre de chômeurs et la population active totale (Population


ayant un emploi et population à la recherche d'un emploi) soit :

nombre de chômeurs
Taux de chômage = ---------------------------- × 100
population active totale

A la fin du mois de décembre 2016, le taux du chômage en France se situait aux alentours de
10 % de la population active totale (en légère baisse par rapport au début de l'année 2015), à
10,5% pour les pays de la zone euro et 8,9 % pour l'ensemble de l'Europe à 28 (Source : Le
monde, 16 février 2017 ).

Ce dernier est directement influencé par l'importance du déséquilibre qui résulte de la


rencontre de l'offre et de la demande de travail. Plus l'offre est importante et plus le taux de
chômage est élevé. Il convient également de noter qu'en France le chômage des jeunes et des
seniors est plus marqué. Le premier est la conséquence directe d'un manque d'expérience,
voire de qualification. En ce qui concerne les seniors, les entreprises sont moins enclines à
embaucher du personnel trop âgé considérant que ceux-ci peuvent être moins impliqués dans
la vie économique de leur employeur. .

c) Le chômage, son évolution en France et ailleurs

La grande caractéristique des quatre dernières décennies est la montée du chômage de masse
qui, en France comme dans la plupart des pays, approche voire dépasse la barre des 10 % de
la population active.

La fin de la Seconde guerre mondiale a été marquée par le début d’une période de forte
croissance économique (appelée « Trente glorieuses ») et de quasi plein emploi. Le facteur
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humain était rare (conséquence de la Seconde guerre mondiale) et le marché du travail était
largement en faveur des salariés (offreurs de travail). Le taux de chômage se situait aux
alentours de 2%.
Mais partir des années 1970, le chômage va progresser régulièrement. De plus la durée du
chômage (mesure du temps écoulé entre l’entrée et la sortie du chômage) va augmenter,
passant de 7 mois en moyenne en 1973 à 16 mois actuellement. On parle désormais de
chômage de longue durée et ce chômage est d’autant plus fragilisant que les indemnités
de chômage se réduisent fortement au-delà du cap des 12 mois.

Ce début de XXIe siècle est marqué par une politique économique orientée vers la lutte contre
le chômage qui a permis une amélioration de la situation (diminution du nombre de chômeurs
qui est passé en dessous de la barre des 2 500 000 en 2006 - attention les chômeurs de plus de
18 mois de chômage n'étaient pas pris en compte). Mais cette "amélioration" s’est
accompagnée du développement des emplois précaires et du temps partiel et a été de courte
durée. La crise de 2008 et ses plans de licenciements ont plombé ces effets positifs et fin
2016 l'INSEE comptait plus de 3 700 000 chômeurs.

Le chômage devient inquiétant par son ampleur et son évolution (plus de 34 millions de
chômeurs dans l'OCDE, plus de 18,5 millions en Europe en 2016). Il n'épargne plus les pays
modèles comme la Suède et l'Allemagne, il semble s'installer partout et devient durable.

De plus la France est maintenant à la traîne de l'Europe, alors que dans les principaux pays
européens, sous l'effet de politiques publiques efficaces, le chômage a commencé à baisser, la
France reste confrontée à un taux de chômage élevé et persistant.

Les pays européens ont un taux de chômage supérieur à celui des USA et du Japon et ils ont
une politique de traitement social du chômage qui pallie la rigueur du marché (allocations
chômage).

Le chômage aux USA et au Royaume Uni dépend des fluctuations de l'économie de marché
car l'intervention de l'Etat y est moindre. Aussi les salaires sont flexibles et les petits boulots y
sont plus nombreux.

d) Les formes de chômage

Dans les pays capitalistes industrialisés plusieurs formes de chômage coexistent :

- le chômage conjoncturel : c’est un chômage temporaire lié à une baisse ponctuelle de


l’activité économique (exemple : fermeture d’une unité de production due à la perte d’un
client important). Plus cette dernière ralentit et plus le taux de chômage est élevé. En effet, les
entreprises afin d'anticiper la baisse de la demande des biens et services qu'elles produisent
vont, à court terme, agir sur le facteur travail en licenciant. La récession devient alors la cause
directe de ce type de chômage. Selon Arthur Malvin Okun, économiste américain, conseiller
du président Kennedy en 1962, en période de récession la production baisse plus que
proportionnellement par rapport à l'emploi.

- le chômage structurel : c’est l’absence durable d’emplois sur le marché du travail. Ce type
de chômage est la conséquence des mutations de l’économie. En effet, l’offre d’emplois se
modifie en raison principalement des changements technologiques. Face à ces modifications,
un grand nombre de travailleurs se trouve en inadéquation avec les offres du marché de
l’emploi et les qualifications demandées.

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- le chômage frictionnel : c’est le temps relativement court que va mettre une personne pour
retrouver un nouvel emploi (période intermédiaire entre deux emplois).

- le chômage technologique : c’est le chômage généré par une plus grande utilisation du capi-
tal technique dans le processus productif (robotisation dans l’industrie automobile).

Il existe également le chômage volontaire : c'est une situation voulue par son auteur. C'est
donc délibérément que celui-ci décide de quitter son emploi (totalement ou partiellement) soit
parce qu'il souhaite en obtenir un à un meilleur salaire, soit par ce qu'il souhaite accorder
davantage de temps à ses loisirs… Il semble que son taux soit intimement lié à la conjoncture.
La perspective de la récession devrait rendre les individus prudents et les encourager à
conserver leur emploi. Cependant, d'autres facteurs interviennent ici. Tout d'abord, le salarié
peut refuser de s'adapter aux conditions de l'emploi et va alors considérer que son salaire ne
justifie pas la pénibilité du travail effectué. Enfin, dans une optique libérale, les prestations
complémentaires vont être un vecteur du chômage volontaire. C'est d'ailleurs l'une des
principales critiques formulées par les libéraux à l'égard du traitement social du chômage.

C Les causes du chômage


a) Les explications économiques du chômage
- Le progrès technique et la recherche de la productivité : le progrès technique a permis
aux entreprises de remplacer les hommes par les machines et de gagner en productivité.
Ce facteur explique donc pour une part la montée du chômage.
Toutefois, si à court terme, la machine supprime des emplois, elle est aussi un extraordinaire
moyen de progrès économique et social : élévation du niveau de vie, diminution de la durée
du travail et de la fatigue...
En outre, le progrès technique crée également des emplois dans la maintenance, le dépannage,
la conception, l'organisation.

- Le ralentissement de la croissance et la crise économique : depuis 1973, la crise


économique a généré un ralentissement de la croissance à l’origine de l’augmentation du
chômage. En effet, lorsque le marché stagne (demande insuffisante), les entreprises
ralentissent, voire diminuent leur production ; elles n’embauchent plus ; d’autres, incapables
d’affronter le durcissement de la concurrence font faillite. C’est incontestablement une cause
importante du chômage. Croissance et emplois sont donc fortement liés.

Quelle peut-être la politique de l'emploi à mener pour réduire ce chômage, appelé chômage
keynésien ou chômage par insuffisance de la demande ?
Une politique de relance de la demande pour créer des emplois et réduire le chômage (voir
page 7)

- Les délocalisations d’entreprises et la concurrence des pays à faible coût de main-


d’œuvre : les pays en voie de développement (PVD) et particulièrement les pays du Sud-Est
asiatique, grâce à leur production à bas prix, ont fortement concurrencé certaines industries
des pays développés (textile, chaussure, horlogerie...) et ont donc participé à la disparition de
nombreuses entreprises dans ces secteurs. De plus, de nombreuses firmes (Adidas, Nike,
Swatch, Philips, Thomson...) ont délocalisé leur production des pays développés vers ces pays
à faible coût de main-d’œuvre. Plusieurs milliers d’emplois sont ainsi menacés en France.

- Les contraintes juridiques : les réglementations juridiques et fiscales dissuadent parfois les
entreprises d’embaucher davantage de main-d’œuvre en raison du coût qu’elles génèrent

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(législation sur le salaire minimum, les conventions collectives, le droit du travail, les règles
de sécurité et d’hygiène, les cotisations patronales....).

b) Les explications sociologiques du chômage


- Le développement du travail féminin : plusieurs facteurs ont conduit au développement du
travail féminin : le progrès du contrôle des naissances (ex : pilule), la recherche d’un second
salaire, l’élévation du niveau de formation des femmes qui recherchent de plus en plus un
épanouissement personnel.
Ce phénomène irréversible, entraîne toutefois certains risques dont le principal est le déclin
démographique inquiétant à l’origine du vieillissement de la population des pays développés.

- Le chômage d’incohérence : malgré un fort taux de chômage, des employeurs recherchent


et ne trouvent pas de salariés soit en raison d’une formation insuffisante ou de qualifications
inadaptées au marché du travail, soit parce que certains demandeurs d’emploi refusent
d’occuper certains postes qu’ils considèrent comme dévalorisants (surtout emplois manuels)
ou trop pénibles (BTP, Bâtiment et Travaux publics) ou trop mal rémunérés et astreignants
(restauration). Il s’agit là d’une cause importante du chômage qui nécessiterait une meilleure
adaptation des formations aux demandes des entreprises et une revalorisation du travail
manuel.

- L’évolution démographique : depuis 1975, le nombre d’actifs a régulièrement augmenté


avec l’arrivée des enfants du baby-boom à l’âge de travailler. Ainsi, il faudrait créer plusieurs
milliers d’emplois chaque année pour absorber le poids de ces nouveaux entrants. Toutefois,
cette situation risque de ne pas perdurer étant donné l’évolution démographique actuelle
(papy-boom dès 2006, faiblesse du taux de natalité même s’il est l’un des plus élevés
d’Europe).

D Les analyses du chômage


Le chômage donne lieu à des interprétations causales divergentes et à des propositions
contrastées de politiques d'emploi.

a) L'analyse d'inspiration libérale considère que le chômage s'explique par un coût


trop élevé du travail, dissuadant les entreprises d'avoir recours à ce facteur de production, en
lui préférant les modes de production utilisant plus de capital technique, (substitution du
travail par le capital) ou les incitant à se délocaliser vers les régions du monde où le prix du
travail est plus faible.
Les solutions proposées par les politiques d'inspiration libérale sont donc de faire baisser le
coût du travail, d'abord en s'attaquant à l'idée même d'un salaire minimum (qui empêcherait le
coût du travail d'atteindre son « niveau naturel de marché »). Une autre direction consiste à
diminuer les charges sociales pesant sur les salaires et destinées à financer la protection
sociale, mais qui renchérissent le coût du travail. Enfin, ce courant d'analyse préconise
également l'abaissement voire la suppression des dispositifs d'aide financière aux chômeurs
(indemnités de chômage, revenu minimum…) qui dissuaderaient les chômeurs de rechercher
activement un emploi, le gain marginal de la reprise d'emploi étant supposé peu incitatif par
rapport au montant de l'aide. Ces dispositifs d'aide sont qualifiés par cette analyse de « trappes
à inactivité ».

b) L'analyse d'inspiration keynésienne considère que le sous-emploi est lié à


l'insuffisance de la demande globale, les entreprises alignant leur demande de main-d'œuvre
sur leurs anticipations des carnets de commandes. Le courant d'analyse keynésien préconise
donc la mise en œuvre de politiques de relance par la demande, en agissant sur les deux

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leviers majeurs que constituent la consommation des ménages et l'investissement des
entreprises. Ces politiques considèrent que le cercle vertueux de la consommation et de
l'investissement (la deuxième variable étant largement déterminée par l'évolution de la
première) ne peut, en période de crise, être remis en mouvement que par une action
volontariste dont le principal acteur est l'État. Celui-ci, en accroissant ses propres dépenses
(investissements publics, dépenses de protection sociale…), enclenche le mécanisme du
« multiplicateur d'investissement », qui est censé engendrer des vagues successives de
distribution de revenus (salaires et profits) remettant en dynamique l'activité économique.
Une politique de relance peut concerner aussi bien la politique budgétaire que la politique
monétaire (voir chapitre 1)
La politique budgétaire correspond à l’ensemble des modifications de l’imposition ou des
dépenses publiques.
La politique monétaire est une politique de baisse des taux d'intérêt de la Banque Centrale.
Cette baisse des taux d'intérêt devrait logiquement se traduire par un accès moins coûteux aux
liquidités pour les banques de second rang qui elles-mêmes devraient baisser leurs propres
taux d'intérêt pour les prêts qu'elles accordent ou accorder de manière plus large des crédits
aux clients demandeurs, ménages comme entreprises. Par conséquent, la consommation et
l'investissement des ménages comme celui des entreprises peuvent augmenter ce qui relance
donc les achats de biens et services de consommation et les achats de biens de production.
Ainsi, la production est relancée dans ces deux secteurs d'activité et la croissance redémarre
ou s'accélère. Les entreprises doivent donc embaucher ce qui réduit le chômage

Les limites de ces politiques keynésiennes sont, d'une part, l'endettement public antérieur (qui
limite les possibilités de dépenses nouvelles), le risque d'apparition de tensions inflationnistes
(en raison du gonflement de la masse monétaire en circulation), et enfin le rythme des gains
de productivité. En effet, le lien entre croissance et création d'emplois n'est pas mécanique. Si
les gains de productivité sont rapides, la croissance de la production peut se faire sans
créations nettes d'emplois.

Enfin, face à la persistance du chômage de masse, certaines analyses considèrent qu'il s'agit,
pour une large part, d'un chômage structurel, engendré par le fonctionnement trop rigide du
marché du travail et par une inadaptation qualitative de l'offre de travail par la population
active à la demande de travail émanant de l'appareil productif. Une des préconisations est
alors de flexibiliser le marché du travail en éliminant les rigidités qui empêcheraient les
ajustements. Globalement, ces politiques s'inscrivent, elles aussi, dans une perspective libéral,
et elles prônent la flexibilisation des contrats de travail (par exemple en remplaçant les
contrats à durée indéterminée par des contrats temporaires), la libéralisation des procédures de
licenciement, la déréglementation de la durée de travail et l'introduction de la souplesse dans
la négociation des salaires. Ces politiques ont largement été mises en œuvre dans les trente
dernières années et le bilan qu'on peut tirer aujourd'hui de leurs effets sur la lutte contre le
chômage est, le plus souvent, très décevant.

Il reste enfin à envisager les politiques visant à réduire l'inadaptation qualitative de l'offre et la
demande de travail. Ces politiques passent par des programmes de requalification de la main-
d'œuvre, le développement des filières de formation adaptées aux technologies nouvelles,
mais aussi l'aide à la mobilité professionnelle ou à la mobilité géographique. Ces mesures
supposent des procédures d'individualisation du traitement du chômage pour favoriser
l'intégration ou le retour à l'emploi.

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E Le nouveau fonctionnement du marché du travail : Flexibilité et dualisme
a) La flexibilité et ses formes
La flexibilité désigne l'ensemble des moyens dont dispose une entreprise pour adapter son
organisation productive aux évolutions économiques.
Il existe différentes formes de flexibilité du travail
- La flexibilité quantitative externe : il s'agit de faire varier les effectifs de l'entreprise, on
externalise les besoins en main d'œuvre par l'appel à des entreprises de travail temporaire.
- La flexibilité quantitative interne : il s'agit ici de moduler le temps de travail (variations
des horaires, du temps partiel, des heures supplémentaires.
- La flexibilité fonctionnelle : il s'agit ici d'employer les travailleurs à des fonctions
différentes selon les besoins de l'entreprise. Elle exige la polyvalence des salariés, des
travailleurs liés à un effort de formation.
- La flexibilité des revenus : il s'agit de répercuter sur les salaires, les variations du chiffre
d'affaires de l'entreprise ou de ses coûts en fonction de la conjoncture.

b) Pourquoi la flexibilité du travail ?


La rigidité du marché du travail qui se manifeste par l'existence du salaire minimum, la
réglementation sur les licenciements ou la rigidité du temps de travail a pour les libéraux 3
inconvénients majeurs :
- Des coûts salariaux trop élevés qui freinent les profits des entreprises en réduisant leur
compétitivité,
- Des prix de vente en hausse qui risquent de provoquer l'inflation,
- enfin une offre de travail supérieure à la demande de travail, source de chômage.
Aussi pour permettre au marché de remplir son rôle de régulateur automatique, il est
important de rétablir la flexibilité des prix, donc des salaires qui affectent le marché du travail.
La théorie libérale a connu un renouveau dans les années 1980 avec le développement de la
flexibilité et de la précarité des emplois qui visent à diminuer les coûts des entreprises et à
augmenter leur compétitivité sur les marchés.
Les emplois précaires sont un exemple de la flexibilité externe des entreprises. 12,3 % des
emplois sont précaires, ce qui représente 3,2 millions de personnes.
Ils se caractérisent par l'instabilité des statuts, le faiblesse des revenus, les passages répétés
par le chômage. On peut trouver les CDD qui occupent la part la plus importante dans
l'ensemble des emplois précaires (plus de 46% en 2015, 7 % du total des emplois), les stages
qui sont les formes d'emplois précaires les plus courants, le temps partiel imposé ou non
imposé, l'intérim (2,1% du total des emplois) et l'apprentissage.

c) Avantages et inconvénients de la flexibilité.


- Les avantages : Pour les entreprises, la baisse du coût salarial global qu'elle soit obtenue par
la baisse des salaires comme aux USA ou par l'augmentation du chômage comme en Europe
permet aux entreprises d'augmenter leur compétitivité. En effet dans un contexte de
concurrence internationale et de mondialisation des économies, les entreprises en pratiquant la
flexibilité et en recherchant de nouveaux gains de productivité tentent de garder ou d'accroître
leur part de marché. L'augmentation des exportations contribue à l'augmentation du PIB.
De plus la flexibilité permet aux entreprises de s'adapter rapidement aux variations de la
demande sans la contrainte d'éventuels sureffectifs

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- Les inconvénients :
- au niveau macro-économique :
La flexibilité une du salaire et une du chômage du revenu
global de la demande des ménages du PIB donc un freinage de la
croissance économique.

- au niveau social :
La flexibilité augmente les inégalités entre les ménages, c'est le travail non qualifié qui est
surtout concerné par le chômage et les baisses de salaire alors que le travail qualifié est moins
touché (voir la segmentation du marché du travail). Enfin la flexibilité augmente l'instabilité
du travail en multipliant les mouvements entre les périodes d'emploi et de chômage.

d) Le dualisme ou segmentation du marché du travail.


La théorie de la segmentation du marché du travail repose sur l'hypothèse d'une dualité du
système économique et du marché du travail.
Ainsi le système économique serait composé d'un secteur central monopolistique avec les
grandes entreprises et d'un secteur périphérique avec les PME sous-traitantes et soumises à
la concurrence.
Le marché du travail se présenterait de la même manière :
– le marché primaire, regroupant les emplois typiques, c’est-à-dire stables, à durée
indéterminée (CDI), bien rémunérés, bénéficiant d’une bonne protection sociale, peu exposés
au chômage ; on y retrouve la plus grande partie des salariés
– le marché secondaire, regroupant les emplois atypiques ou précaires (contrats à durée
déterminée – CDD –, intérim, stages, temps partiel imposé…), vulnérables face au chômage
(une part croissante des actifs voit sa vie professionnelle faite d’alternance de périodes de
chômage et d’emplois précaires)
Sur le marché secondaire, les femmes et les jeunes sont surreprésentés. Pour ces derniers, le
passage par ce segment est souvent une étape de l’insertion professionnelle.
La stabilisation d’une partie de la main-d'œuvre est recherchée par les entreprises elles-mêmes
afin de renforcer l’adhésion à leur culture et fixer leurs propres règles de gestion des emplois
(progression de carrière, par exemple).
Aujourd'hui même les grandes entreprises ont recours aux emplois précaires. Seuls quelques
salariés dont les qualifications sont indispensables à la vie de l'entreprise bénéficient des
avantages du travail typique (CDI, plan de carrière, promotion etc.)
La France a choisi une flexibilité quantitative externe pour lutter contre le chômage. Les CDD
ou l'intérim peuvent être considérés comme des périodes d'essai par l'employeur et peuvent
constituer une passerelle vers un emploi typique surtout pour les jeunes hommes adultes.
Cependant on constate que pour les salariés peu ou pas qualifiés il y a peu d'espoir car la
flexibilité ne cesse de s'accroître parallèlement au chômage.
En Suède la sauvegarde de l'emploi est passée par la flexibilité interne alors que le Japon a
choisi la flexibilité fonctionnelle.
Aux USA, la généralisation des emplois à bas salaires a permis la baisse des taux de chômage
et l'exclusion massive par le chômage a pu être évitée ; mais par contre les disparités de
revenus et la pauvreté ont fortement progressé.

En conclusion on peut dire que les politiques de l'emploi qui se sont succédées, ces quarante
dernières années, de courant libéral ou keynésien, ont montré les limites de leur efficacité face
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au triple défi que constituent la mondialisation, la révolution technologique hyper accélérée et
le ralentissement indéniable et chronique de la croissance économique.
Mais l'expérience accumulée au cours de cette période nous apprend que les politiques
d'emploi ne peuvent se résumer à des recettes.
La précarité et plus encore le chômage ont des conséquences sociales et politiques détestables,
dont les pouvoirs publics ne peuvent se désintéresser. La perte durable d'emploi fragilise
l'intégration sociale du chômeur par la pauvreté qu'elle engendre et par la perte de l'identité
sociale. Elle peut aussi conduire à l'affaiblissement de la cohésion sociale.

II L'organisation du travail

L'organisation du travail est une des clefs de la croissance par les effets qu'elle a sur
l'augmentation de la productivité du travail. Adam Smith a été l'un des premiers économistes
à montrer l'importance de l'organisation du travail : en étudiant le fonctionnement d'une
manufacture d'épingles, il a établi que la division du travail (subdivision les tâches et
spécialisation des travailleurs) était source de gains de productivité. Grâce à une productivité
du travail plus forte, on peut produire en plus grande quantité et réaliser des économies
d'échelle. C'est sur ces principes que se sont développés différents types d'organisation du
travail au XX° siècle.

A Les principes d'organisation du travail taylorien et fordiste

Frederick Winslow Taylor, ingénieur américain du début du XX° siècle a cherché à organiser
scientifiquement le travail. Il se fixe pour objectif d'améliorer l'efficacité de la production
dans l'intérêt commun des salariés et des patrons. En effet les ouvriers auraient tendance à
flâner entre chaque opération et c'est cette "fallacy" que Taylor va combattre en mettant en
place l'organisation scientifique du travail (OST) qui repose sur trois principes
fondamentaux :
- le premier principe est d'instaurer une double division du travail, une division horizontale
du travail (les tâches sont fragmentées et parcellisées) et une division verticale du travail c'est-
à dire la séparation entre la conception dans les bureaux (les « cols blancs ») de l'exécution
dans les ateliers (les « cols bleus »)
- le deuxième principe consiste à optimiser le temps grâce au chronométrage des tâches (le
one best way) ;
- le troisième principe, enfin, est celui de la rémunération des ouvriers à la pièce (système
de rémunération qui se veut plus motivant).

Henry Ford, constructeur automobile américain va bientôt appliquer à son entreprise les
principes du taylorisme en les optimisant.
Il introduit tout d'abord le travail à la chaîne, qui permet, en fixant l'ouvrier à son poste de
travail, d'augmenter la productivité du travail (réduction des déplacements, cadence imposée)
et de lutter contre la flânerie.
Ensuite, il généralise la standardisation des produits : en produisant en grand nombre des
séries identiques (l'emblématique Ford T), les coûts unitaires diminuent. C'est le principe de la
production de masse.
Enfin, Ford institue le five dollars day, c'est-à-dire une rémunération journalière en nette
augmentation par rapport à ce que les ouvriers percevaient auparavant (salaire journalier de
3,5$). Cette mesure permet de limiter les risques de rejet de l'OST et d'éviter une

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surproduction relative (l'accroissement du pouvoir d'achat des ouvriers rend possible une
consommation de masse).

Le fordisme serait donc un mode d'organisation industrielle dont Taylor et Ford ont été les
pionniers. Mais pour les théoriciens de la régulation, le fordisme désignerait le mode de
fonctionnement des économies occidentales dans la période de forte croissance des Trente
Glorieuses.

Ce « mode de régulation » reposait sur trois piliers principaux :


- le système de production tayloro-fordien assurant de forts gains de productivité et des
accroissements importants de pouvoir d'achat ;
- une intervention massive de l'État dans l'économie, notamment à travers une redistribution
des revenus vers les catégories modestes et la mise en place d'une large protection sociale
(État-providence) ;
- ces éléments débouchant sur l'extension de la consommation de masse et sur une forte
croissance économique.

On a parlé alors du cercle vertueux du fordisme qui peut se résumer à l'aide du schéma ci-
dessous :

Le fordisme a donc permis une forte croissance de la productivité dont les gains ont pu
profiter aux travailleurs sous forme de progression du pouvoir d'achat, aux entrepreneurs par
l'augmentation des profits réinvestis dans le capital. La demande globale étant stimulée, il s'en
est suivi un processus de croissance économique qui fut particulièrement forte entre 1950 et
1973.
Mais le fordisme a rencontré des limites

B La remise en cause du fordisme


a) Les causes
Au début des années 1970, le tayloro-fordisme perd de son efficacité, il a tendance à
démotiver les travailleurs. Il ne laisse ni autonomie ni responsabilités aux ouvriers et il a
confirmé l’émergence d’ouvriers déqualifiés qui ne produisent qu’une petite partie d’une

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production souvent sans explications « le travail en miette » monotone, répétitif et fatiguant
est confirmé.
L'hostilité croissante, le ras le bol des travailleurs se manifeste alors par l’augmentation du
nombre de conflits sociaux : des grèves, des revendications, de l'absentéisme, un important
turnover, la remise en cause de la hiérarchie, le développement d'un travail improductif.
Gaspillages, malfaçons et accidents du travail sont également de plus en plus fréquents et cela
par une conjugaison de causes : accélération des cadences, parcellisation excessive du travail,
surmenage et lassitude des salariés.
Au niveau économique, on est donc dans une situation de saturation de certains marchés,
de diversification de la demande et d’augmentation de la concurrence internationale. La
production s'avère trop rigide face à la variabilité du marché : lourdeur des investissements
insuffisamment productifs, épuisement des gains de productivité dans l'industrie, délais de
réaction trop importants, stocks trop lourds.
De plus on observe une augmentation très nette du décalage entre l'élévation du niveau de
formation et d’instruction et le travail demandé. En effet, le niveau général de formation de la
population a augmenté et les nouveaux ouvriers ne correspondent plus aux ouvriers des
années 50. Il y a refus de cette organisation du travail surtout de la part des jeunes.
Dans les années 1980 le fordisme est dépassé par l'automatisation liée au développement
de l'informatique ; automatisation qui permet une adaptation rapide de la production aux
variations du marché alors que le fordisme s'accommode mal du changement.
La rencontre entre la machine-outil et l’ordinateur révolutionne le système de production.
La naissance du robot a un impact sur le mode de production et participe à la remise en cause
du tayloro-fordisme. L’atelier traditionnel fabrique des pièces identiques avec le principe que
toute modification de la production doit s’accompagner du remplacement du matériel et donc
de nouveaux investissements. Le robot lui peut produire des objets différents à l’aide d’un
simple changement de programme : l’atelier flexible est né avec son ensemble d’automates
produisant les pièces les plus variées sous la commande d’un ordinateur. La précision de cet
ordinateur évite les rebus qui existaient auparavant. Ce sont les prémisses d’une production
avec 0 défaut.

Enfin le tayloro-fordisme est remis en cause par les nouvelles formes de gestion des
ressources humaines axées sur l'implication des travailleurs. En effet de nouvelles théories se
développent basées sur les bonnes relations humaines (Elton Mayo) dans l'entreprise qui
seraient un moteur de motivations et de productivité.
Il y aurait peut-être une autre façon de produire !

b) La recherche de solutions

L'idée de produire d'une autre façon va mener, dans un premier temps, à la mise en place de
nouvelles formes d'organisation du travail comme l'élargissement des tâches, l'enrichissement
des tâches, le travail en groupe semi-autonome et pour finir les cercles de qualité qui
poussent au dialogue entre acteurs de l’entreprise.

Dans un deuxième temps, une nouvelle forme d'organisation du travail apparaît, le toyotisme.
Le toyotisme est dérivé de la critique du mode d'organisation tayloro-fordiste. Il est né
d'une critique de la production en chaîne aux USA, ce type de production impliquant une
accumulation de stocks de produits semi-finis et finis, coûteuse pour l'entreprise.
Il vaudrait mieux produire par petits lots en ajustant la production à la demande, de manière à
éliminer les stocks.

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Dans les années 1950, le constructeur automobile Toyota, sous l'impulsion de son
ingénieur T. Ohno, met en place une nouvelle organisation de la production fondée sur le
juste-à-temps et l'autonomisation.
- Le juste-à-temps est une logique de production dans laquelle la demande réelle déclenche la
production, selon un processus orienté vers l'élimination de tous les gaspillage. Il s'agit ici du
système des cinq zéros : zéro stock, zéro délai, zéro panne, zéro défaut, zéro papier. Dans
une optique de réduction des coûts, les problèmes doivent être repérés et traités dans les délais
les plus courts.
Le contexte économique devenant de plus en plus concurrentiel, il s'agit alors de répondre à la
demande avec plus de flexibilité
- L'autonomisation exprime la conjonction de l'automation (technique) et de l'autonomie (des
salariés). Le groupe de production est responsable de la qualité : chaque ouvrier peut arrêter la
chaîne lors d'incidents ou d'une dégradation de la qualité. Des groupes de réflexion se
réunissent au niveau de l'atelier pour perfectionner les modalités de travail et réduire les coûts.
Ce dispositif se combine avec le développement de la polyvalence des salariés.
L'ouvrier toyotiste est polyvalent, plus qualifié, plus responsabilisé, notamment en terme de
qualité, et l'organisation est tournée sur les besoins de plus en plus différenciés des
consommateurs.

C Les effets de cette organisation du travail sur l'emploi et les conditions de travail
a) Les changements de qualification

La qualification met en relation 2 éléments


- d'une part la qualification des individus définie comme un ensemble des capacités :
diplômes, expériences, personnalité.
- d'autre part la qualification des postes de travail définie comme un ensemble de qualités que
l'on doit posséder pour les occuper.
Cette relation s'est modifiée avec le temps/
Avant la mise en place du mode d'organisation fordiste; la qualification implique la maîtrise
d'un métier après l'apprentissage. Le tayloro-fordisme remet en cause la qualification ouvrière
en remplaçant l'ouvrier de métier par un ouvrier non qualifié ou ouvrier spécialisé.
Pendant les 30 Glorieuses, la qualification renvoie à la possession d'un diplôme. Celui-ci joue
un rôle encore plus important avec la crise pour accéder à l'emploi. Aussi des personnes sans
diplôme sont exclus de l'emploi et les jeunes diplômés ont un premier emploi ne
correspondant pas à leur qualification. Cette situation s'est poursuivie jusqu'à la fin des
années 1990 où est apparue la notion de compétences.
Pour l'employeur il s'agit de déconnecter les titres scolaires de la classification dans une grille
salariale. Il évalue lui même les compétences du salarié et fixe son salaire selon sa
contribution aux résultats de l'entreprise. Ainsi la notion de compétences rejoint logiquement
celle de l'individualisation des salaires.

b) La modification des rapports sociaux dans l'entreprise


L'automatisation modifie les rapports sociaux car une panne du système automatisé est plus
grave et plus coûteuse qu'une panne humaine. Aussi le personnel employé est formé, il
possède une capacité d'initiatives et de responsabilités accrues.
Pour s'attacher ce personnel qualifié et le motiver, l'entreprise est plus attentive à ses
conditions de travail et à sa rémunération. La conséquence en est une montée du dualisme
avec d'une part des salariés bien intégrés, bien payés et d'autre part des travailleurs précaires,
peu qualifiés et mal payés.

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c) Critiques du toyotisme et autonomie dans ce travail

Des études ont montré que cette organisation du travail permet des rapports cadres-ouvriers
plus égalitaires et une participation des ouvriers aux décisions plus importante. Il y a
également polyvalence des tâches mais le développement du stress, l'usure nerveuse liée au
rythme du travail et la peur de la perte de l'emploi si les objectifs ne sont pas atteints y sont
très forts
Les capacités de décisions et d'initiatives sont plus étendues mais le personnel d'exécution a
en réalité peu de libertés par rapport aux consignes du travail et est davantage soumis à des
cadences, des normes, des délais ainsi qu'aux autorisations des chefs.

En conclusion on peut dire que face à la crise du mode d'organisation tayloro-fordiste, les
entreprises ont cherché de nouvelles formes d'organisation du travail parmi lesquelles le
toyotisme, dont les firmes des pays industrialisés se sont inspirées. Cependant, on observe que
l'organisation du travail des salariés contient toujours des aspects fordiens.

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