Vous êtes sur la page 1sur 2

Trouvant sa place au sein des études philosophiques, des romans fantastiques, La Peau de

chagrin met en scène le mythe fondamental de la Comédie humaine : fresque gigantesque


du XIXe siècle qui fait évoluer 2000 personnages il entend « faire concurrence à l’Etat civil »
et analyser des systèmes de relations ou de pensées. Le thème central de ce roman est le
conflit entre désir et longévité. Il s’agit ici d’un roman fantastique et philosophique. La peau
de Chagrin écrite en 1830 pendant les révolutions de Juillet fait partie des Etudes
Philosophiques. Cette œuvre peut être considérée comme le premier grand succès de
Balzac. Dans l’incipit, nous pouvons remarquer que l’identité du personnage central ne nous
est pas révélée.
En quoi ce flottement est-il constitutif d’effets de réel ?
Nous verrons que ce texte possède des éléments du réel, puis nous étudierons les
changements qui transforme cet extrait pour en faire un réquisitoire contre les jeux.
I) Les premiers mots marquent une incertitude de date dont le roman tire un effet de
réel « vers la fin du mois d’octobre dernier » L1. Il y a une impression de proximité. Le
décalage imaginaire est réduit. Une même impression de flou est développée avec l’absence
d’identité du personnage : c’est un jeune homme, quelqu’un que l’on pourrait croiser. Un
autre effet accroche le lecteur : c’est le cadre qui est très précis une catégorie
d’établissement définie « le Palais Royal » L2, un numéro « numéro 36 » L5, une référence
d’un cadre administratif de l’époque « conformément à la loi » L3. De plus, les commentaires
frustrés de l’auteur sur l’actualité de son temps renforcent encore cet effet de réel « la loi
commence à vous dépouiller… » L10. Puis Balzac pause de nombreuses questions
rhétoriques qui témoignent de son insatisfaction quant aux lois qui dépouillent. Il y a ici une
mise en garde du narrateur : et il fait allusion à la police « Est-ce la police tapie dans tous les
égouts sociaux qui tient à savoir le nom de votre chapelier » L15-16. Tous ces effets de réel
vont dans le même sens, on a l’impression de lire par endroits un article de presse satyrique,
Balzac va même intégrer les préoccupations de son temps, en termes de psycho
morphologie « prendre la mesure de votre crane et dresser une statistique » L18

II) Certains indices de trouble viennent s’immiscer vers l’impression de réalité :


L’allusion avec la parabole et l’allusion au « contrat infernal » L13 nous invite à lire le texte
autrement. Par ailleurs, Balzac nous prévient une nouvelle fois « sachez-le bien » L20. Et
par une périphrase, l’auteur désigne l’entrée du Palais Royal, ce qui crée une dimension de
mystère. De plus, par un parallélisme ironique, il nous enseigne l’emprise que les jeux
portent sur les jeunes personnes : « déjà votre chapeau ne vous appartient pas plus que
vous ne vous appartenez » et Balzac rajoute « à vous-même » à la fin de sa phrase L22.
C’est un pléonasme qui renforce cette influence des jeux. Par une énumération, l’auteur
souligne tous ce qu’il est possible de perdre pour effrayer le lecteur et l’inciter à ne pas jouer
à des jeux de hasard : « votre fortune, votre coiffe, votre canne et votre manteau » L23. Par
ailleurs, il personnifie les jeux pour montrer qu’il a pris l’identité de la personne qu’il a
dépouillée « le jeu vous démontrera » L24. Et pour finir, l’auteur utilise l’ironie et témoigne de
la clémence des jeux pour en réalité les dénoncer : « il vous laisse encore quelque chose en
vous rendant votre bagage » L25.

Pour conclure, on voit bien ce qui menace le jeune homme : la passion du jeu. La fin de l’extrait
prouve que le jeune homme n’a pas su lire les menaces et les indices d’inquiétudes que le
lecteur à décelé : l’inconnu n’écouta pas ce conseil, il entra résolument dans la salle. Nous
pouvons rapprocher cet incipit à Lorenzaccio de Musset, roman dans lequel le héros est un
débauché. Le jeune garçon arrive ici à une extrémité de sa vie lorsqu’entre lui et la mort il ne voit
plus que son dernier écus. Les processus naturels ayant été épuisés, le jeune homme
s’adonnera ensuite au moyen surnaturel. Or ce jeune homme correspond non seulement aux
profils tourmentés de tous les jeunes gens de l’époque romantique mais encore à une allégorie :
Raphael est le nom religieux qui désigne le motif lui-même romantique de l’ange déchu. Le but
est de rendre compte de la prévention du héros, attiser la curiosité du lecteur par réflexion et
livrer la vision de l’homme et du monde de l’auteur.

Vous aimerez peut-être aussi