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COMPTE
RENDU:
L’auteur, spécialiste de la Renaissance, est professeur à la
Queen Mary University de Londres. Renaissance, dont Global
Interests. Ce livre ne s’adresse clairement pas aux seuls
spécialistes de la Renaissance qui n’y apprendront sans doute
aucun élément nouveau. Cet ouvrage constitue le premier volume
d’une nouvelle collection intitulée « L’histoire-monde » dont
l’objectif est de donner un écho éditorial au mouvement dit de «
l’histoire globale » qui a connu ces dernières années des
développements spectaculaires.
Sylvain Gouguenheim minimisait la contribution du monde
islamique à l’histoire de la culture européenne, ce qui suscita une
importante controverse, de nombreux spécialistes ayant refusé
d’accepter une telle présentation de l’histoire.
L’objectif de l’ouvrage de Brotton est de mettre en évidence les
contributions de l’Orient au sens large dans cette phase
essentielle de l’histoire européenne que l’on appelle « Renaissance
». Dans tout son livre, l’historien entend défendre une conception
de la Renaissance non pas en termes de conflits de civilisation
mais en mettant l’accent sur les échanges culturels ou
commerciaux. Il se livre ainsi à une analyse iconographique du
célèbre tableau Les Ambassadeurs d’Holbein qui constitue une
remarquable mise en abyme de la Renaissance telle que l’entend
Botton, à la croisée de l’Orient et de l’Occident. À une vision
oppositionnelle entre « Orient » et « Occident », Brotton entend
substituer une conception plus continuité de cet espace en mettant
l’accent descriptif sur les échanges inséparablement
culturels, commerciaux et, bien sûr, guerriers.
Ayant des valeurs élitistes, ces auteurs étaient peu à même
d’envisager correctement la dimension proprement commerciale
des échanges de cette époque. À rebours de la thèse
d’Elias, Panofsky considérait que l’art de cette époque possédait
une vitalité émotive plus vive qu’au Moyen Âge.
L’ouvrage de Brotton se décompose en six chapitres. L’influence
de l’Orient s’observe particulièrement bien à Venise où tous les
arts, à commencer par l’architecture, étaient fortement influencés
par l’Orient. Brotton conteste l’idée que le « capitalisme » soit
d’essence européenne. Il pose également l’idée que les
connaissances dans le domaine des mathématiques ou encore de la
géographie ont été fortement encouragées par les pratiques
commerciales, mettant à distance l’idée colportée par l’Art pour
l’Art et ratifiée par la sociologie critique, selon
laquelle la connaissance s’élève à mesure que la distance à la
nécessité grandit.
L’adoption des chiffres indo-arabes fut déterminante et constitua
une rupture essentielle avec l’archaïsme des systèmes
européens. De même, Brotton réfute l’idée selon laquelle la
grandeur de l’art dépendrait de sa distance aux nécessités
économiques. Les Européens qui furent d’abord catastrophés par
la chute de Constantinople envoyèrent très vite des émissaires
commerciaux afin d’y faire des affaires. Le fait que les
antagonismes politiques pouvaient être grands n’empêchait
jamais les échanges matériels et intellectuels.
Dans le second chapitre, Brotton propose de renouveler l’image
que nous avons de l’« humanisme » avec son retour à l’Antiquité
et ses traductions. Elle encouragea la Réforme, facilita la diffusion
des langues vernaculaires et contribua à favoriser les identités
nationales. Si certains humanistes avaient si à cœur de valoriser la
culture classique, ce n’était pas seulement parce que ce savoir
rendait plus « humain » mais aussi parce qu’il pouvait être mis au
service de leur carrière ou de leur domination : le savoir
humaniste était très profondément « hétéronome ». Aussi n’était-il
pas étonnant que ces mêmes puissants financent leurs institutions
’enseignement. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le
savoir humaniste était plutôt conservateur.
Brotton examine ensuite la question des liens entre l’Église et
l’État. La Renaissance est le moment où l’Église connut une
importante crise avec la Réforme qui balaya tout le nord de
l’Europe. Constantinople mit par ailleurs un terme aux tentatives
de réunion de l’Église d’Orient et d’Occident. À Rome, on fit
bâtir à partir du début du XVe siècle de nombreux bâtiments afin
de célébrer la gloire de l’Église catholique.
Mais c’est bien sûr à Mozart que l’on doit l’opéra « turc » le plus
célèbre, L’Enlèvement au sérail, qui avait été commandé par
Joseph II pour célébrer la levée du siège de Vienne par l’Empire
ottoman. On voit clairement que la présence de l’Orient en
Occident était une caractéristique fondamentale de l’art musical
qui dépassait de très loin une simple mode. J’ajoute que cette
tradition se poursuit jusqu’à nous, et pas seulement dans
l’opéra. Certains des meilleurs spécialistes de la musique baroque
européenne ont fait dialoguer musiques anciennes d’Orient et
d’Occident.
Chaib wissal
Groupe 03