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HENRI BOSCO: L'ENFANCE TOUJOURS 111

Covadonga Grijalba Castaños


Universidad de Almería

Une approche de l'oeuvre d'Henri Bosco, dévoile d'immédiat, et comme


conséquence naturelle, une vision panoramique de l'âge enfantine. Et notre affirmation
est axée sur trois points clés:
1. D'abord, parce qu'il compte, parmi les titres de sa vaste bibliographie,
plusieurs destinés à ce public, et dont le héros est un enfant. C'est une production "sur"
ou "pour" l'enfance, ce qui pourrait suffire pour justifier une première approche.
2. En deuxième lieu parce que, même s'il n'a pas écrit une autobiographie
proprement dite, les seuls souvenirs -quoique un peu romancés-, qu'il a publiés,
comprennent l'étape d'enfance.
3. Finalement parce que c'est un sujet non épuisé dans les livres destinés aux
enfants ou "dits enfantins"; on y retrouve l'enfance là où elle est plus évidente, mais
sans doute qu'elle peut également être découverte, déguisée un peu partout, dans le
reste de sa production.
Nous voulons montrer que la relation entre l'auteur et l'enfant est permanente,
qu'elle se continue dans la vie de l'adulte qui fouille dans ses lointains souvenirs pour
essayer de s'expliquer le moment présent, de suivre le cours de ses préoccupations, et
d'interpréter et comprendre ses propres sentiments. Car, tel qu'il explique, son écriture:

"C'est un approfondissement de moi-même que j'ai cherché en


composant les récits que j'ai écrit (...) Cela m'a permis d'avoir avec
moi-même un dialogue, qui m'a permis de mieux me connaître"1

Place de l'enfance dans l'oeuvre de Bosco


On a parfois la tentation de diviser son oeuvre en deux cycles: les livres
d'enfance et les autres. Mais, nous sommes de l'avis qu'il n'y a qu'une et unique
oeuvre, parcourue par un sujet obsédant qui rapproche les deux sections. De
l'importance qu'il accorde à l'enfance est un exemple le fait de lui avoir attribué d'être
la cause de son changement de style d'écrivain: "Dans mon cas, l'enfance est décisive,
elle a véritablement déterminé ma vocation d'écrivain"2 Et il va encore préciser un
peu plus dans un intéressant entretien:

"Avant les romans d'enfance, je n'écrivais pas de la même façon. Il a


fallu que surgisse devant moi l'enfant que je portais en moi (...) et

1
BOSCO, H.- Hommage à Bosco pour ses 80 ans. L'Astrado, Toulon 1971. p. 19/20.
2
BOSCO, H.- Manifestation faite à CUFFON, Cl.- "Rencontre avec Henri Bosco". En Lettres
Françaises, 10 février 1966.
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qu'il m'a dit des choses auxquelles je ne pensais pas et qui, ma foi,
m'ont intéressé. Et c'est pour cela que je les ai racontés3 "

Dans les héros bosquiens on peut reconnaître tous les traits que la Psychologie
signale entre les plus représentatifs de l'enfance. Bosco a su les conjuguer et, en se
déguisant en narrateur-enfant, se situe, soit comme lui-même, soit comme son double.
Car il essaie de parler en enfant et il va utiliser le reste qu'il conserve en lui du petit
qu'il a été. C'est évident que Bosco a aimé son enfance et il l'évoque étant adulte
comme une inépuisable source de sujets. Elle a été la matière première de beaucoup de
ses récits, et une vraie force créatrice; il s'est mis à la hauteur de l'enfant mais il le
surpasse et se situe finalement comme un conteur d'histoires plus ou moins véridiques:

"Nourri et pris de romanesque dans mon enfance, je suis resté tel


dans mon âge mûr, et même aujourd'hui j'ai envie d'inventer et
d'écrire des histoires. J'ai un besoin vital de raconter"4

L'enfance occupe la place initiale dans toute son oeuvre, et non parce qu'elle
ait été nécessairement écrite en premier lieu, [sauf L'Âne Culotte (1937), les autres sont
postérieures à son oeuvre maîtresse] - ce n'est pas l'aspect chronologique qui compte -,
mais parce qu'elle précède les intrigues et reproduit, en quelque sorte, le schéma de
toute vie humaine.
De la même façon que l'Enfant et la rivière précède à Malicroix en tant que
roman sur l'eau et sur le fleuve, ou bien Pascal enfant de Le Mas Théotime apparaît
avant le Pascal Dérivât de la même oeuvre5, on pourrait multiplier les exemples. Cela
nous montre que les héros de l'enfance se retrouvent parmi les adultes, comme le
développement naturel des premiers dans ceux qui suivent. C'est-à dire que, son récit
s'élabore comme le prolongement, ou la transformation d'un ou des précédents, même
si, comme dans la Trilogie d'Hyacinthe, les titres semblent être en marge les uns des
autres; L'Âne Culotte va déclencher Hyacinthe et Le Jardin d"Hyacinthe', et, sans qu'il
y existe une parfaite correspondance temporelle, il y a des liens obscurs qui les
unissent, et surtout celui de l'enfance:

"Au milieu des vastes étendues dépouillées par l'oubli, luisait


continuellement cette enfance merveilleuse qu'il me semblait jadis
que j'avais inventée. Je revoyais le verger, les collines, le jardin du
vieil homme et l'enfant Hyacinthe assise sagement sur le seuil de la
cabane Noir-Asile. Et comme de tout mon passé, récent ou lointain,
cela seul survivait en moi, sans que j'eusse de ma vraie vie antérieure

3
BOSCO, H.-"Entretiens avec Monique Chabanne". En Cahiers Henri Bosco n° 27, 1987. p. 72.
4
BOSCO, Henri.-"Remarques sur le Roman". En CAUVIN, J.P.-Op. cit. Annexe C. p. 259.
5
Ce Pascal, pour s'expliquer lui-même doit reprendre son enfance qu'il remémore au début de l'oeuvre, ce
qui situe les deux bouts du personnage dans le même récit.
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conservé la plus fugitive réminiscence, peut-être n'avais plus d'âme,


mais je possédais enfin ma jeunesse"6

Les héros adultes ont les mêmes goûts et les mêmes préoccupations. Ainsi, le
mythe du paradis perdu qui fait l'objet de la Trilogie, se retrouvera dans les oeuvres
postérieures.

"C'était bien le jardin perdu, où tout au moins une parcelle de ses


fabuleuses délices échappées par miracle à la déchéance du monde"7

Il est parti de cette étape d'enfance, et après sa disparition, il s'achemine vers


la terre promise qui n'est autre que l'Eden primitif que vient fermer le cercle de
l'innocence originelle. Car cette position initiale c'est aussi une allusion aux sources de
l'homme, à un état d'innocence, de naïveté, de communion avec la nature, de vie
simple et pure. Joies de vivre que sont le refuge des héros-enfants et de l'ensemble des
personnages qui ont atteint l'âge adulte.

Caractères de l'enfant bosquien


"L'enfant bosquien n'est pas un irréel antipathique des histoires classiques ni
l'innocent primitif sans "corps", mais un être qui vit selon ses propres désirs, comme
"un adulte à l'aube de sa vie"8 Certes, le garçon est ce que l'on peut définir comme un
enfant normal marqué par le goût des lieux clos, des refuges, des cachettes etc. Mais il
est aussi un peu spécial, par sa capacité d'observation, attitude favorisée para la
solitude et le silence qui règne autour de lui. Avec une inclination naturelle vers les
rêves, les songes, la rêverie; apparemment passif mais d'une activité imaginative inouïe
et en liaison avec tout un monde magique et symbolique. Cependant, il ne faut pas
interpréter que l'enfance bosquienne soit une étape tranquille, de repos idyllique, et
même un peu ennuyeuse; l'auteur évoque aussi la grande tristesse de sa solitude, le
tourment des obsessions et de la peur, des troubles par des événements imprévus
comme la maladie ou la transgression que va affecter l'univers réglé et paisible, et qu'il
aime désigner comme "paradis" Sortir de cet espace proche pour découvrir le monde
de l'au-delà n'est pas facile, car la décision comporte la peur envers l'inconnu,
mélangée avec l'immense curiosité que va incliner fatalement le désir à son
accomplissement.
Ce paradis est présenté comme l'équivalent d'état primaire et pur. Il s'agit
d'habitude de grandes étendues peuplés d'arbres et d'oiseaux où l'eau y trouve sa place
comme symbole de vie et de mort. Ils sont aussi l'expression de la nostalgie de
l'enfance perdue qui entraîne avec elle la nostalgie de la pureté. Il va adopter des noms
vraiment beaux et suggestifs: "Fleuriade", "Roqueselve" ou "Almuradiel" Ces lieux

6
BOSCO, H.- Hyacinthe. P. 50.
7
g BOSCO, H.- Un Rameau de la Nuit. p. 395.
HARPAZ, Ephraim.- "Tonalités". En L'Art d'Henri Bosco. Actes Colloque International Henri Bosco.
Paris, José Corti, p. 284.
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sont un reflet du vieux paradis terrestre où les héros de toute âge vont se retrouver, ou
bien le but vers où s'oriente leur vie future. Le narrateur veut signaler là le retour aux
sources de l'innocence. L'éloignement du but, du paradis, est la naissance à un autre
monde, après avoir franchi un seuil réel, et un autre symbolique, ce que va avoir
comme conséquence un déchirement dans l'âme enfantine ayant perdu un paradis
irremplaçable. Les seuils sont parfois très bien définis: le pont de la Gayolle pour
Constantin, la rivière pour Pascalet et le mur pour Antonin, trois enfants qui s'unifient
avec l'enfance vécue para Henri Bosco, lui-même, et duquel ils constituent le double
imaginaire: "En vérité (...) sont une seule et même personne. C'est à dire, moi-même"9
Ces obstacles ou frontières vont marquer la division entre le côté proche,
chaleureux, familier, sûr, préservé et intime face à l'au-delà ouvert, incertain,
d'aventure, nouveau, inconnu; s'opposent le refuge de l'enfance et l'exil vers la vie
adulte, le paradis et le hors-paradis.
Le drame de cet enfant est qu'il ne peut pas éviter de traverser ce seuil, pour
avancer en choisisant ou en détruisant les barrières et la curiosité; la hantise le pousse
en avant pour découvrir après qu'il a abandonné un monde d'impossible retour et il se
voit comme Adan et Eve en disgrâce avec le terrible sentiment de douleur d'être exclu
des lieux heureux.
Cet enfant est assujetti à l'autorité d'un adulte qu'il accepte en bon enfant
sage. Mais la désobéissance fait aussi partie de toute enfance et entraînera des
conséquences pour lui et pour son entourage familial et social. Comme première et non
dédaignable, la perte de l'innocence, ce qui comporte la sortie du cercle de l'enfance.
L'exil est parfois réel, il doit abandonner la maison, et partir, faire un vrai voyage loin
du milieu connu, et être exclu du paradis sûr et confortable.
On pourrait interpréter que l'enfant n'est pas complètement heureux chez-moi
et qu'il cherche ailleurs ce qui lui manque en commençant para les parents, absents
dans les oeuvres, et fréquemment éloignés de la vie de l'auteur. Car les parents assurent
le développement naturel de la psychologie enfantine, mais son absence ou
l'éloignement vont propicier que l'enfant dans sa solitude va chercher des substituts: les
servants, les bergers, les grands parents. Par contre, il verra comblé son besoin de
bonheur lorsque toute la famille est réunie, ce qu'il met en relief par l'exceptionnalité
de la situation.

L'enfant-fille
Dans une analyse du garçon bosquien, il y a des troubles que, normalement,
viennent d'une autre enfance, celle de la fille, invariablement retrouvée auprès de
l'eau10 ou d'un jardin, au sein de la nuit.
La fille, rarement occupe la place relevante d'héroïne. Elle apparaît à côté du
garçon sans atteindre le statut principal et non plus comme un compagnon de jeux; elle
envahit l'intimité et sa présence est toujours troublante; elle incomode et inquiète le
garçon qui règne en solitaire dans la plupart des oeuvres. Apparaît subitement et il la

9
BOSCO, H.- "Entretien avec Monique Chabanne" Cahier Henri Bosco, n° 27, 1987. p. 42.
10
En claire relation avec les études de Bachelard et Durand.
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reçoit avec une évidente hostilité, et un sentiment instinctif de rejet, en éprouvant le


besoin irréfrénable de la gifler (Pascalet à Mâche, à Cyprienne, et Pascal enfant à
Geneviève dans Le Mas Théotime). Mais le passage de cette fille est brève, elle
disparaîtra physiquement lorsqu'elle aura atteint l'adolescence, à l'âge où le garçon, lui,
touche aussi aux débuts de l'adolescence et qu'un étrange sentiment commence à
s'ouvrir dans son coeur; l'annulation de la fillette symbolise l'enfance, le paradis, la
nostalgie et l'innocence que l'on veut conserver encore.
Les relations, ou possibles amours enfantins, ne réussisent jamais, car les filles
apportent la malédiction, les séductions et tentations, des sentiments exclus de l'univers
de Bosco. "Les appréhensions de l'amour qui bientôt troublent l'enfant aux premiers
signes de l'adolescence"11

Transitions
Ce passage de l'enfance à l'étape suivante est présenté dans Mon Compagnon
de Songes, que va débuter avec ces mots où l'on retrouve la même idée que vient d'être
citée:

"Vers ma quinzième année j'ai senti que tout doucement se retirait


de moi une partie du monde, la plus fraîche, la plus colorée. Et j'en
éprouvais un malaise"12

Car évidemment il va être ému par des sensations nouvelles, inconnues, qui
lui inquiètent et cette idée va la développer dans les paragraphes qui suivent comme:
quelque chose changeait en moi, et il ne peut pas bien l'expliquer, ni les conséquences
que ce changement entraîne: "Je n'en savais pas davantage mais sans doute était-ce une
perte puisque j'en souffrais"
À ce moment là, il était difficile de s'auto-analyser, mais quand l'auteur écrit
l'oeuvre il peut déjà comprendre l'ampleur du changement: "Or je sais aujourd'hui que
j'étais en train de perdre un trésor, mon enfance. Un trésor irrécupérable"
Car finalement on arrive au leitmotiv de son oeuvre, une des grandes
préoccupations de sa vie, une catastrophe de conséquences imprévues. Et les ressources
que héros-auteur vont utiliser pour échapper à la perte de ce qui ne voulais pas mourir,
pour sauver l'enfance sera, à travers une transformation, une transposition ou
sublimation de l'état réel à l'état de rêve, et l'accompagner de la découverte du monde,
de la terre et de ses propres rêves, car Bosco "éprouvait pour l'enfant comme pour tous
les êtres de son univers, arbres, maisons, hommes et bêtes, les mêmes craintes et la
même tendresse"13
Si l'on considère que, l'expérience première a une valeur inégale dans toutes
les personnes, car c'est la première mémoire qui s'inscrit d'une façon indélébile, on

11
BOSCO, H .-Le Jardin des Trinitaires. p. 247.
12
BOSCO, H.- Mon compagnon de Songes p. 13.
13
DUPUY, René, J.- "Henri Bosco conteur pour ses amis". En Cahier Henri Bosco, n° 11, avril-octobre
1976. p. 71.
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comprend rattachement de Bosco à ses premières années et aux rêves: "Rien n'a valu,
rien ne vaut encore, cette découverte de l'Univers par les songes, au temps de mon
enfance..."14
C'est à la manière d'une confession qu'il nous signale quelle a été sa
préoccupation suprême.

Évocation ou réalité
À côté de l'enfance réelle, vécue, il y a l'autre dimension, l'imagée, celle qu'il
invente ou récrée: "Cette enfance de 8 à 10 ans où j'aime revenir, qui est celle que je
préfère"15
L'enfant est normalement fils unique, comme Henri Bosco, comme
l'adolescent ou l'adulte célibataire, solitaire, mais comblé par l'entourage; c'est le
centre de la famille et l'objet de la préoccupation des siens. Il est aussi aimé ou admiré
par les filles, comme expression du désir inlassable d'être aimé et de remplir un
manque d'affection.
L'univers enfantin marqué par le désir d'introspection, la quête de l'âme,
l'attente, la solitude, le silence, les présences sensibles de la lumière et de l'ombre, les
éléments naturels, la nuit, les rêves et le salut, font un ensemble prolongé en Malicroix,
Le Récify ou Le Mas Théotime.
Les personnages reviennent une et une autre fois, il n'a pas cessé de raconter,
ou de romancer la matière enfantine, avec les mêmes prénoms ou la même personnalité
occulte sous un autre nom. On dirait qu'il ne veut pas, qu'il ne peut pas, s'en
débarrasser. Son évocation repetée est comme un signe de retour au paradis de
l'enfance. C'est pour cela que Germain exprime: "Bien sûr pourrait-on dire, d'un
roman à l'autre c'est toujours Henri Bosco qui parle (...) identité profonde de l'homme
présente sous celle des oeuvres"16 Mais cette récréation constante de l'enfant ne veut
pas dire que ses oeuvres soient identiques. Cette répétition de sujets contribue à faciliter
la compénétration avec les héros et leur péripétie. Et, en tout cas, c'est un auteur qui
expose ses préoccupations les plus importantes. Le narrateur de Mon Compagnon de
Songes paraît montrer la difficulté de s'éloigner de l'enfance:

"Mon viatique, ce fut mon enfance, et ma chance fut de le


comprendre. Présente ou cachée, elle serait là. Nous étions elle et
moi inséparables"17

Les livres d'enfants sont comme des exercices d'auto-analyse de l'auteur, tel
qu'il a témoigné, dans son Journal inédit:

14
BOSCO, H.- Mon Compagnon de Songes, p. 14.
15
BOSCO, H.- Le Chemin de Monclar. p. 35.
16
GERMAIN, Gabriel.-"Visites invisibles à l'ami invisible" En Cahier Henri Bosco. n° 11, avril-octobre
1976, p. 33.
17
BOSCO, Henri.-Mo/i Compagnon de Songes p. 27.
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"Cet enfant qu'on fut, qu'on cherche en soi, qu'on y perd et qu'on y
retrouve, qu'on aime -car on l'aime- et qui vous aime comme votre
propre enfant"18

L'auteur en créant ses fictions redevient véritablement pendant le temps de sa


création, l'enfant songeur d'autrefois. L'enfance exerce son influence sur Henri Bosco
âgé, sur l'écrivain, quand il ressuscite ses rêves d'enfant. "Cet âge d'or, rempli de
vertus extraordinaires revit sans cesse sous la plume de l'écrivain et invite à la
simplicité de coeur celui qui veut en goûter les charmes"19
Aussi les images, les thèmes ou les ressorts de son récit comme la perspective
choisie ou les sujets et les mythes se répètent. Ils sont repris dans l'oeuvre pour adultes,
cachés sous un premier niveau de lecture, comme il avait fait dans les titres pour
enfants. Depuis son premier conte, écrit à l'âge de sept ans et à cause de sa situation de
solitude, Bosco a inventé des vies et des personnages:

"Enfant, je n'ai cessé de m'imaginer quelques autres enfances. Plus


tard, l'enfance passée, j'ai conservé ce pli, et ce sont des vies
d'homme que j'ai inventées20"

CONCLUSION
Henri Bosco reprend l'enfance en tant que telle comme souvenir, mais il la ré-
crée toujours; il ne se résigne pas à l'avoir perdue et il paraît qu'il veut garder quelques
bribes de sa vie d'enfant, bien par attachement ou fixation, ou peut-être aussi parce que
l'auteur ne se décide à mettre fin: "Pour moi, tout recommence, rien ne finit. J'ai
horreur du mot "fin" 21 " Pourtant, noms, caractères, personnages principaux ou
secondaires, lieux, situations, sont repris de temps en temps. L'auteur ne veut pas
abandonner une étape que, même avec ses solitudes et éloignements, avait été si chère
et qu'il compte encore retrouver à travers des symboles, des mythes et des rêves.
Ces récits peuvent être compris par les enfants et aimés par les adultes, car ils
comportent plusieurs plans et cachent des symboles sous l'apparence de simplicité,
mais, sans doute, que "Un bon livre pour enfants est un livre pour tous"22

18
BOSCO, Henri.- Journal 1954. Citée par NEISS, Benoît en Cahier Henri Bosco, n° 13, juin 1977. p.
66.
POITRAS, Lionel .-Henri Bosco et la participation au monde. Fribourg, Ed. Universitaires, 1971. p.
17.
20
BOSCO, Henri.- Journal inédit 1954. Citée par NEISS, Benoît. Cahier Henri Bosco n° 13, juin 1977.
p. 13.
21
BOSCO, Henri.-"Entretien du 7 octobre 1962" En CAUVIN, J.P.- Op. cit. p. 235. Annexe A.
22
WAGNER, habéile.-Thèmes et mythes dans la littérature enfantine d'Henri Bosco. Mémoire de
Maîtrise. Université Paris X-Nanterre, 1980. p. 134.

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