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La gestion des risques en entreprise

Collection « L’essentiel pour agir »


La gestion des risques en entreprise
Identifier - Comprendre - Maîtriser

Édition 2011

Ouvrage conçu et réalisé sous la direction de Catherine FOURMOND

Auteur :
Jean-David DARSA

Suivi éditorial, conception graphique : GERESO Édition


Photo de couverture : © Shapecharge/Istockphoto.com

© GERESO Édition 2009, 2011


26 rue Xavier Bichat – 72018 Le Mans Cedex 2 – France
Tél. 02 43 23 03 53
Fax 02 43 28 40 67

www.la-librairie-rh.com
e-mail : edition@gereso.fr

Reproduction, traduction, adaptation interdites


Tous droits réservés pour tous pays
Loi du 11 mars 1957

Dépôt légal : novembre 2011


ISBN : 978-2-35953-083-4
EAN 13 : 9782359530834

GERESO SAS au capital de 160 640 euros – RCS B 311 975 577
Siège social : 28 rue Xavier Bichat – 72018 Le Mans Cedex 2 – France
Dans la même collection
• Comment faire d’une PME une entreprise performante

• Crédit et stratégie commerciale

• Discriminations en entreprise

• L’emploi des travailleurs handicapés

• L’entreprise au cœur du développement durable

• L’épargne salariale

• La gestion de crise en entreprise

• La gestion du risque crédit client

• La protection sociale en 200 questions

• La retraite des agents du secteur public

• La retraite des artisans commerçants

• La retraite des professions libérales

• La retraite des salariés

• Learning Management System pour l’entreprise

• Le contrat à durée déterminée

• Le départ négocié

• Le droit du travail en 360 questions

• Le management interculturel

• Les accidents du travail

• Management d’équipe projet

• Prévention et santé au travail

• Risques stratégiques et financiers de l’entreprise

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Signification des pictogrammes

À noter !

Exemple
« Tout ce qui ne fut pas sera, et nul n’en est à l’abri. »
LAO TSEU

Chapitre 1
La notion de risque

Un environnement risqué par nature

« Risk manager » des cavernes

L’environnement dans lequel nous vivons et, plus généralement,


l’espace socio-économique dans lequel évoluent les entreprises est,
par nature, risqué.

Fondamentalement, il est tout d’abord utile de rappeler que les risques


ne sont pas une invention du monde moderne.

Depuis que l’homme est homme, il est exposé aux risques. Le premier
gestionnaire des risques (ou risk manager, si l’on préfère) de l’Histoire
fut... l’homme des cavernes ! En effet, notre digne ancêtre avait fon-
damentalement tout compris à la logique de gestion des risques, afin
d’assurer sa pérennité :
- il observait son environnement, afin d’identifier les risques éventuels
susceptibles de remettre en cause sa survie individuelle, puis collective ;
- il organisait sa défense, et donc sa survie, contre les risques poten-
tiels ou avérés qu’il avait identifiés : animaux sauvages, ennemis de sa
tribu, éléments naturels (inondations, froid, feu), comme un véritable
gestionnaire des risques préhistoriques ;
- il mettait en œuvre les actions nécessaires pour garantir sa péren-
nité : installation dans les grottes, refuge en hauteur dans les arbres,
sédentarisation ou mobilité, maîtrise de l’actif « feu », évolution tech-
nologique des armes, des stratégies d’attaque et de défense... ;

29
LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE

- il avait défini son objectif : sa survie individuelle puis la survie collec-


tive de la tribu, avec plus ou moins de succès d’ailleurs.

Au final, et sans remettre en cause les analyses de nos plus illustres


paléontologues, nos lointains ancêtres, et plus précisément quel-
ques-unes de leurs ramifications les plus avancées, ont assuré une
parfaite maîtrise des risques à travers les âges : nous sommes tous là
pour en témoigner aujourd’hui ! Le premier risk manager de l’Histoire
a donc assuré sa pérennité en s’adaptant en permanence à un envi-
ronnement incertain, donc risqué.

Les risques, leur nécessaire identification, leur compréhension et leur


maîtrise ne constituent donc pas une invention récente. L’humanité a
toujours cherché à maîtriser ses risques, depuis la nuit des temps.

Hasard et nécessité
Poursuivons notre exploration historique plus en avant. De la même
manière que l’homme de la préhistoire, et sans verser dans le moindre
débat métaphysique, hors de propos ici, sur la relation de l’humanité au
hasard (Dieu joue-t-il aux dés ?) et des raisons de l’intérêt sans cesse
renouvelé pour les idées et les dogmes portés par les théologies, les
conceptions et aspirations métaphysiques, philosophiques, religieuses
ou initiatiques, force est de constater que l’homme a toujours recherché
le risk manager « optimal et omniscient » capable de le sécuriser, c’est-
à-dire de maîtriser le risque ultime auquel il pourrait être confronté de
manière anticipée : sa disparition personnelle, tant morale que physique.

Par croyance, par conviction, par éduction, par respect d’un cadre de
référence, qu’importe... Il est d’ailleurs surprenant d’observer que ce ris-
que ultime de disparition, objet permanent de conflits ethnico-religieux
redondants, sera par nature et par défaut toujours avéré in fine, mais à
plus ou moins longue échéance... ! Et ce, quels que soient les efforts de
création, de révélation, d’imagination, de croyances, de respect de cadres
de référence ou de création dogmatique, philosophique ou spirituelle !

Revenons à l’histoire et rapprochons-nous des grands conquérants.


Lorsque Christophe Colomb embarqua avec ses camarades pour
découvrir de nouveaux mondes, il prit des risques. Comme le firent les
grands argentiers qui soutinrent financièrement de telles expéditions
incertaines, dans l’espoir d’un intérêt et/ou d’un gain probable, de quel-
que nature que ce soit, à plus ou moins long terme. Tous, à leur niveau

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LA NOTION DE RISQUE

gérèrent des risques de toute dimension, avec échec souvent, mais


aussi réussite éclatante et panache parfois.

À cette époque, la notion de risque était intimement, pour ne pas dire


exclusivement, corrélée à la notion de prise de risque personnelle. En
effet, le risque supporté était limité (si l’on peut l’exprimer ainsi !) à
l’intégrité physique des explorateurs et à la perte de matériels et/ou de
biens confiés pour la réalisation de l’expédition. Et l’espérance de
gains, en cas de succès de telles expéditions des plus hasardeuses,
était immense : or, argent, pierres précieuses, épices, force de travail,
commerce, notoriété, pouvoir, empire colonial maritime, économique...

Quels que soient les objectifs initiaux recherchés, légitimes ou indignes,


il apparaît qu’à cette époque pas si lointaine, la notion de risque, évo-
quait toujours une dimension positive et héroïque. La prise de risque
était admirée, glorifiée, mais également critiquée. Toutefois, et fonda-
mentalement, la société humaine renvoyait à cette période de l’histoire
une connotation positive, valorisante et volontariste de la prise de risque.
Les aventuriers, donc les preneurs de risques, étaient des héros.

Le risque évolue
Or, si l’on observe, de manière macroéconomique et à l’échelle humaine,
les principaux risques auxquels l’humanité est exposée aujourd’hui, on
observe que ces risques ont profondément évolué.

Ils sont devenus pour l’essentiel l’expression de situations globales et


plus ou moins maîtrisées de dangers (maîtrise de l’atome, stockage des
déchets radioactifs, gestion de la pénurie alimentaire et des conflits
locaux ou régionaux, stratégie d’opposition multipolaire, chocs de civi-
lisation ou de cadres de référence, pandémies mondiales sanitaires,
développement durable et préservation des ressources...).

À l’ère de Christophe Colomb, le mot « risque » était associé à des


notions proches de courage et d’aventure, pas à un référentiel potentiel
de destruction massive tel qu’il est constaté aujourd’hui. On prenait des
risques au Moyen Âge avec panache.

Aujourd’hui, et à l’exception de quelques aventuriers des temps


modernes en quête permanente de performances donc de risques (par
exemple, l’aventurier américain récemment disparu Steve Fossett), cette
dimension d’héroïsme inhérente au rapport au risque semble presque
dépassée, pour ne pas dire obsolète.

31
LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE

Qui rêve encore devant les risques pris par des astronautes embarquant
dans un module spatial ? Qui, de nos jours, s’émerveille-t-il lorsque des
prises de risques significatives font progresser l’humanité ? De nos jours,
on essaye aujourd’hui, simplement, de maîtriser des risques... qui nous
dépassent. Il n’est de risques que d’hommes, la société essayant
désormais de maîtriser les risques sécuritaires que son développement
a engendrés.

La notion de risque a donc profondément évolué. Comme expliqué dans


l’un de ses remarquables ouvrages paru en France au lendemain des
attentats du 11 septembre 2001, le sociologue allemand Ulrich Beck
publie peu après la catastrophe de Tchernobyl un essai percutant inti-
tulé : La société du risque. Dans cet ouvrage, Ulrich Beck explique
notamment que l’on assiste à une véritable transformation sociologique
de la société. À une logique de répartition des richesses a succédé une
logique de répartition des risques. Le risque est devenu in fine la mesure
de nos actions de société.

En tant que penseur moderne et de la modernité, Ulrich Beck caractérise


la société du risque par un manque : celui de l’impossibilité d’imputer
des situations de menaces à des causes externes. Contrairement à
toutes les cultures et à toutes les phases d’évolution antérieures, la
société est aujourd’hui confrontée à elle-même.

La production de richesses est systématiquement corrélée à la produc-


tion de risques, mais l’attention portée aux risques induits s’accroît dès
lors que l’opinion est occupée à surmonter la pénurie. À partir du
moment où la situation de pénurie régresse, la société s’interroge plus
précisément sur ces risques.

Pour simplifier, lorsque l’humanité cherche à sécuriser sa survie alimen-


taire, elle ne se préoccupe pas des risques qu’elle est susceptible
d’engendrer en développant la recherche nucléaire.

Fondamentalement, et comme tout groupe humain en interaction


avec son environnement, il en va de même pour l’entreprise. À partir
du moment où elle maîtrise a priori les clés de sa survie, et qu’elle
gère donc et/ou maîtrise sa pénurie potentielle ou avérée, l’organi-
sation va - ou devrait - s’interroger sur ses risques avec une plus
grande acuité.

32
LA NOTION DE RISQUE

Il est également intéressant de remarquer que l’individu, le groupe,


l’entreprise, possèdent des richesses. Mais ils seront tous, indifférem-
ment, touchés par les risques. C’est la civilisation qui les assigne.

Dans les situations de menaces, c’est la conscience du risque qui


détermine l’action, et donc la capacité de résistance des organisations
confrontées au risque. De fait, notre société, la société de la connais-
sance, chère à Jacques Attali, implique donc la nécessaire capacité
d’identifier, de comprendre et de maîtriser la menace au niveau de
l’entreprise. Donc son exposition au risque.

Vers un système défensif

Si l’on considère à nouveau le vecteur « facteurs humains » dans cette


réflexion, il apparaît que la démarche de maîtrise des risques sera
considérée comme un système de valeur défensif et négatif. En effet,
il ne s’agit pas d’atteindre quelque chose de bien mais, nous le verrons
plus loin, d’empêcher que le pire ne se produise. Ou d’en minimiser
les impacts potentiels. Cette démarche introduit donc par nature un
réflexe naturel de survie, provoquant légitimement l’adhésion a priori
de tous vers un objectif commun et partagé : la pérennité.

Donc, au niveau du monde de l’entreprise, chaque collaborateur devrait


contribuer à la survie de l’organisation pour laquelle il travaille, en
conséquence chercher en permanence à assurer sa pérennité donc à
maîtriser les risques de l’organisation.

Cette dimension permet d’identifier que la mise en œuvre d’une cer-


taine solidarité de la peur, pour ne pas dire d’une réelle solidarité dans
la peur, sera a priori plus facile à déployer en entreprise, au-delà des
réflexes initiaux habituels et humains de la mise en place d’outils de
contrôle et de suivi des indicateurs de risques, qui seront par nature
potentiellement et maladroitement perçus ou déployés comme des élé-
ments de surveillance.

Nous reviendrons sur les dimensions nécessaires de communication


et de sensibilisation à mettre en œuvre, comme prérequis essentiel à
tout déploiement de dispositif efficient de gestion des risques en
entreprise.

Enfin, rappelons qu’un risque demeure un enjeu potentiel, susceptible


de prendre corps à tout moment. Il introduit donc, en démarche pré-

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« Si tu n’as pas en toi assez de ressources pour tirer parti
des maux qui t’arrivent, aie la prudence de les prévenir. »
PYTHAGORE

Chapitre 3
Les risques de l’entreprise

Comment présenter la multitude des risques existants de


manière logique et efficace ?

Après avoir défini de manière plus précise la notion de risque et de


gestion des risques, et maintenant que nous connaissons mieux le rôle,
l’organisation et la fonction du risk manager dans l’entreprise, nous
rentrons désormais dans le vif du sujet.

Afin de garantir la pérennité de l’entreprise, le risk manager va devoir


identifier, comprendre et maîtriser les risques susceptibles de fragiliser,
voire remettre en cause, sa viabilité. Mais... quels sont-ils en fait ?

Et là se pose une question majeure : comment présenter, de manière


efficace, exhaustive, précise, et complète les risques de l’entreprise,
compte tenu de la multitude des situations potentiellement aptes à
fragiliser toute organisation ?

Oui, comment présenter simplement, visuellement, avec sens et


conscience, la multitude des risques potentiels à couvrir ? Et comment
le rendre compréhensible et intelligible à vous, lecteurs, sans lourdeur
ni « inventaire à la Prévert » repoussant ?

De la diversité

Fondamentalement, il existe une extrême diversité des risques en


entreprise, pouvant remettre en cause sa pérennité au quotidien. Car,
même si la situation de déclaration de cessation des paiements (pre-
mier pas vers la fin de l’organisation) consacre une rupture de tréso-

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LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE

rerie structurelle ou accidentelle (cf. « Risques financiers »), et constitue


de facto le seuil primordial et unique qui déclenchera la mise en liqui-
dation judiciaire, en redressement judiciaire ou en anticipation d’une
procédure de sauvegarde, la rupture de trésorerie résultera au préala-
ble et essentiellement d’un faisceau de risques convergents non gérés.

Il s’avère donc nécessaire d’identifier, de comprendre et de maîtriser


tous les risques susceptibles, directement ou indirectement, de fragi-
liser l’entreprise. La rupture de trésorerie ne constitue qu’une résultante
technique de la concrétisation effective de risques non maîtrisés à
l’origine.

Profitons de l’occasion pour réaffirmer une réalité dure à accepter mais


fondamentale : la cessation d’activité d’une organisation, quelle qu’elle
soit, et quels qu’en soient les motifs, ne résulte pas exclusivement
d’une action ou d’une décision subjective défavorable des partenaires
bancaires et/ou financiers. Il y aura à l’origine, toujours, l’existence d’un
- ou d’une multitude de - risque(s) convergent(s), impactant et non
maîtrisé(s).

Pour chaque secteur d’activité existe un faisceau spécifique de risques


susceptibles d’impacter les entreprises intervenant dans ledit secteur,
de manière propre et spécifique. Et, pour chaque entreprise du même
secteur d’activité, le spectre des risques à couvrir sera spécifique, en
fonction de son histoire, de sa taille, de son ancienneté, de son organisa-
tion, de son mode de fonctionnement, de son encadrement, de la vision
de son équipe dirigeante, du profil individuel de chacun de ses salariés...

De même, chaque entreprise, chaque dirigeant, chaque acteur de cha-


que organisation présente, par nature, un profil risque particulier, bâti
en fonction de ses connaissances, de son expérience, de sa vision, de
son ancienneté dans l’entreprise, de son profil psychologique, de son
âge, de sa maturité professionnelle, de son appétence - ou son aver-
sion aux risques, de sa sensibilité individuelle aux enjeux, aux impacts,
de sa capacité de décision, de responsabilisation, etc.

Chaque processus, chaque sous-processus traduisant une activité


dans l’entreprise va être aussi exposé à un spectre de risques spéci-
fiques. Schématiquement, le processus « envoi du courrier » et le pro-
cessus « conduite d’un engin de transport de matières dangereuses »
ne seront pas exposés aux mêmes risques. Mais ils présenteront, cha-
cun, un spectre de risques particuliers, plus ou moins sévères.

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LES RISQUES DE L’ENTREPRISE

Chaque individu présente une appétence, une prédisposition face à la


problématique de la gestion des risques : risque adverse, preneur de
risque, indifférence au risque, forte sensibilité au risque, autant de
profils que d’individus.

Bref, comment prendre en compte tous ces critères, toutes ces


contraintes antinomiques et représenter, malgré tout, les différentes
classes de risques des entreprises de manière homogène, cohérente,
donnant du sens sans spécificité sectorielle, fonctionnelle et/ou tech-
nique ? Vaste challenge, en effet...

De cette interrogation, et après mûres réflexions, je vous propose une


approche qui permet, à mon sens, de manière simple et efficace, de
présenter une vision cohérente, complète et adaptable à toutes les
entreprises, de toute taille et de toute nature, à tous les secteurs d’acti-
vité, le spectre des risques auquel chaque organisation sera potentiel-
lement exposée.

Démarche de la pyramide

Tout d’abord, une réflexion. L’entreprise, quelle qu’elle soit, va être par
essence exposée à une multitude de risques. Chaque risque va impac-
ter l’entreprise à travers un coût économique et/ou financier, suscep-
tible de déstabiliser ses fondamentaux, d’obérer sa capacité de finan-
cement ou d’investissement, de remettre en cause de facto son
existence à court, moyen ou long terme, donc de fragiliser sa pérennité.

Partant de ce constat, l’image de la pyramide m’est apparue, visuali-


sant l’entreprise solidement ancrée sur ses fondations, a priori solides,
et devant maîtriser de grandes familles de risques, intrinsèques à sa
propre existence. L’équilibre étant représenté symboliquement par un
triangle, donc une pyramide en trois dimensions, je considère l’idée
d’une pyramide (plus précisément d’un triangle) comme visuel de
représentation des risques. L’équilibre, les bases fondamentales de la
pyramide, le visuel semble fonctionner a priori.

Puis, en poussant plus en avant la réflexion, j’imagine représenter les


différents risques de manière organisée autour de différentes grandes
« classes de risques », susceptibles de regrouper plusieurs théma-
tiques transversales, afin de faciliter une représentation pragmatique
mais exhaustive de la problématique à traiter.

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LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE

Ensuite, en réfléchissant aux différentes familles à aborder, je me suis


aperçu qu’il y avait une certaine logique à représenter les différents
risques selon deux approches :
- l’une, relative à l’homme : partir de l’individu, entité unique, le salarié,
le dirigeant, le client, le fournisseur... et progresser vers le groupe (la
somme collective des humains : l’équipe, le service, l’unité, le dépar-
tement, l’usine, la société, la collectivité, le pays, le monde, la société
humaine, etc.) ;
- l’autre, relative à l’environnement de l’entreprise elle-même : évoluer
des considérations et des dimensions macroéconomiques de l’envi-
ronnement de l’entreprise (le marché, les zones géographiques) vers
les entités microéconomiques (l’entreprise elle-même comme point
final).

Troisième dimension de la réflexion : cette représentation doit être


généraliste, non spécifique à un secteur d’activité, à un métier, à une
fonction managériale, ou à un processus. La vision de la pyramide
semble s’imposer, il ne reste plus qu’à identifier les différentes classes
de risques critiques, éligibles pour toute entreprise, sans spécificité
d’activité, de taille, de métier ou d’ancienneté.
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Au final, le fruit de cette réflexion permet de représenter les différentes


classes de risques auxquelles l’entreprise est exposée, de manière
structurelle, de la façon suivante :

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LES RISQUES DE L’ENTREPRISE

Structure de la pyramide

Sur la base de cette représentation (du macroéconomique vers le


microéconomique, de l’individu vers le groupe), de haut en bas ou de
bas en haut, il reste à définir puis positionner les différentes classes
de risques au sein de cette pyramide.

J’ai souhaité ensuite valider le mode de présentation visuelle des dif-


férentes classes de risques selon un vecteur compatible avec toutes
les entreprises, tous les secteurs d’activité, et ce quels que soient les
profils des organisations (ancienneté, taille, organisation, etc.).

De cette réflexion est née la pyramide présentée ci-après, représentant


de manière complète, originale, innovante et, j’ose l’espérer, percu-
tante, des grandes familles de risques auxquelles toutes les entreprises
sont - ou seront - potentiellement exposées.
- risques géopolitiques ;
- risques économiques ;
- risques stratégiques ;
- risques financiers ;
- risques opérationnels ;
- risques industriels ;
- risques juridiques (une famille de risques opérationnels spécifiques) ;
- risques informatiques (une famille de risques opérationnels
particuliers) ;
- risques sociaux et psychosociaux (famille baptisée « RH » par
commodité) ;
- risque d’image et de réputation ;
- risque de knowledge management (ou de « gestion de la
connaissance ») ;
- autres risques (famille à périmètre élargi : risque environnemental, de
surqualité, de défaillance de contrôle, de défaillance des dispositifs de
pilotage...) ;
- risque d’intégrité (le risque individuel ultime).

Sur cette base des 13 grandes classes de risques peut être ensuite
organisé le positionnement de chacune des classes. Cette pyramide

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LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE
f:\2000\image\140249\5

constitue in fine une présentation rapide et efficace des différents types


de risques auxquels toute organisation est - ou sera - potentiellement
exposée.

Si l’on parcourt la pyramide de bas en haut, les grandes familles de


risques, au nombre de 13, sont organisées de manière rationnelle,
témoignant d’une double volonté :
- assurer la cohérence de la démarche macro/micro et
individu/groupe ;
- positionner les risques financiers dans le centre de la pyramide, cha-
que classe de risques engendrant potentiellement, par nature et par
défaut, un impact financier ;
- présenter en haut de la pyramide le risque individuel ultime, directe-
ment lié à l’individu : son intégrité personnelle.

Il existe 13 grandes classes de risques au sein des entreprises.

Sans détailler dans cette section ces 13 classes de risques (qui sont
présentées et analysées en détail tout au long des pages suivantes),
voici une brève présentation synthétique des classes proposées.

76
LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE
f:\2000\image\140249\18

4 - Risques financiers

Positionnés tout de suite après les risques stratégiques, les risques


financiers figurent symboliquement au centre de la pyramide des
risques de l’entreprise. Et ce, de manière non fortuite.

En effet, chaque risque va potentiellement avoir une incidence, plus


ou moins significative, plus ou moins durable, sur la performance finan-
cière de l’entreprise. Donc, chaque risque, quel qu’il soit, va contribuer
à engendrer un risque financier additionnel. Le fait de positionner les
risques financiers au cœur de la pyramide traduit cet état de fait, cha-
cune des différentes classes de risques alimentant potentiellement la
classe des risques financiers.
f:\2000\image\140249\19

D’un point de vue schématique, nous pouvons représenter cette rela-


tion de cause à effet de la manière suivante :

134
LES RISQUES DE L’ENTREPRISE

Définition/Exemples

Avec certitude, nous pouvons affirmer qu’il existe des dizaines, pour
ne pas dire des centaines de risques financiers spécifiques différents
pouvant affecter, fragiliser ou remettre en cause la pérennité des
entreprises.

Afin de limiter notre propos, non spécifiquement dédié ici aux risques
financiers ou à la gestion financière des entreprises, il nous semble
judicieux de présenter globalement les grandes familles de risques
financiers, puis de concentrer notre propos sur les risques financiers
majeurs. Nous invitons le lecteur curieux à approfondir sa réflexion sur
les risques financiers à l’appui d’ouvrages spécialisés sur les questions
financières en entreprise.

Les différents risques financiers en présence


Voici la liste non exhaustive des principaux risques financiers auxquels
l’entreprise peut être exposée, et auxquels elle doit se préparer :
- Risque de liquidité (risque de trésorerie) : il s’agit du risque de rupture
de trésorerie, engendrant potentiellement la cessation des paiements
- son analyse vous est proposée ci-après.
- Risque de crédit : il s’agit du risque de pertes ou de coûts financiers
dus à la défaillance d’un client et de son encours lié - son analyse vous
est proposée ci-après.
- Risques de pertes financières : il s’agit du risque de concrétisation
de pertes financières suite à décisions impropres d’investissement,
d’exploitation ou de gestion.
- Risque de taux d’intérêt : il s’agit du risque financier lié aux évolutions
des taux d’intérêt et des modes de constitution de l’endettement de
l’entreprise - son analyse vous est proposée ci-après.
- Risque de taux de change : il s’agit du risque financier lié à une évo-
lution défavorable de devises, entraînant des pertes de change - son
analyse vous est proposée ci-après.
- Risque des marchés financiers : il s’agit du risque financier lié à l’évo-
lution des marchés financiers sur lesquels l’entreprise place des excé-
dents de trésorerie - son analyse vous est proposée ci-après.
- Risques comptables : il s’agit des risques liés à une mauvaise inter-
prétation ou utilisation, volontaire ou non, des normes et règles

135
LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE

comptables, pouvant remettre en cause la qualité, l’intégrité ou la vali-


dité des états financiers produits, diffusés ou utilisés. Parmi les points
de vigilance : changement de méthode comptable non justifié, amor-
tissement et dépréciation, reconnaissance des ventes, (re)valorisation
des actifs, modes de comptabilisation de certains produits ou cer-
taines charges, référentiels comptables éligibles (IFRS, IAS, Local
Gaap...), comptes consolidés.

- Risques fiscaux : il s’agit des risques liés à des opérations dont les
règles fiscales, non suivies, volontairement ou non, menacent une
requalification par les autorités fiscales, engendrant pertes financières,
pénalités et/ou redressements fiscaux significatifs. Parmi les points de
vigilance : TVA, impôt sur les sociétés, prix de transfert, amortisse-
ments, provisionnements, passage à perte, charges exceptionnelles,
comptes courants d’associés, autres charges externes.

- Risque de prise de contrôle : il s’agit du risque lié à la perte de tout


ou partie du contrôle capitalistique de l’entreprise, suite à dilution ou
mouvements de pactes d’actionnaires engendrant une perte de pou-
voirs ou de contrôle de l’organisation.

- Risque fournisseur : il s’agit du risque lié à la perte d’un fournisseur


critique par suite de difficultés financières ou d’interruption de relations
commerciales, impactant l’entreprise dans sa capacité à maintenir son
offre et/ou la structure de sa chaîne de valeur.

- Risque de sous-investissement : il s’agit du risque lié à l’incapacité


financière de l’entreprise de renouveler, accroître ou maintenir ses
équipements par suite de sous-investissements chroniques, engen-
drant perte de compétitivité et/ou d’efficacité, obsolescence des équi-
pements, dégradation des conditions d’exploitation ou de production...

- Risque de délinquance financière : il s’agit du risque lié à la commu-


nication ou la constitution d’informations financières erronées ou
incomplètes, ne traduisant pas la réalité des risques portés par l’entre-
prise, pouvant engager notamment la responsabilité pénale des
dirigeants.

- Risque d’opportunité de délocalisation : il s’agit du risque lié à l’évo-


lution défavorable de la structure des coûts de l’entreprise par suite
de volonté stratégique ou politique de maintenir certains centres de
compétences en zone à coût social élevé ; il s’agit d’un coût d’oppor-
tunité à estimer et à couvrir afin de maintenir la compétitivité de
l’entreprise.

136
LES RISQUES DE L’ENTREPRISE

- Risque d’arrêt d’activité : il s’agit du risque d’arrêt, partiel ou com-


plet, temporaire ou permanent, de tout ou partie de l’activité de l’entre-
prise, compte tenu de son incapacité financière à assurer son cycle
courant d’activité.
- Risque de structure des coûts : son analyse sera proposée ci-
dessous. Comme son nom l’indique, il s’agit du risque d’un déséqui-
libre dans la structure des coûts de l’entreprise.
- Risques de haut de bilan : risques liés à la structure de financement
et d’endettement de l’entreprise, pouvant obérer sa capacité d’endet-
tement et/ou de financement de sa croissance ; ce risque financier
résulte des niveaux de capitalisation et/ou d’endettement incohérents
de l’entreprise (capacité d’endettement obérée, sous-capitalisation,
exigibilité de la dette ou de son refinancement).
- Risque d’erreur d’investissement : il s’agit du risque lié à la consti-
tution de pertes ou de dégradation des conditions d’exploitation ou de
gestion suite à une erreur d’investissement, impactant lourdement les
capacités financières de l’entreprise.
- Risque de départ des actionnaires : il s’agit du risque de démobili-
sation de tout ou partie de la structure actionnariale de l’entreprise
suite à désaccord avec la stratégie conduite, déception de la rentabilité
offerte ou de la performance économique réalisée, désengagement
partiel ou total de membres de pacte d’actionnaires, OPA hostile, atta-
que boursière.

Nous pourrions continuer cet inventaire à l’infini, mais là n’est pas le


propos de cet ouvrage. Mais il existe bien des dizaines de risques
financiers spécifiques qu’il convient de maîtriser au mieux.

Intéressons-nous plus particulièrement à quelques risques financiers


spécifiques, et abordons-les selon la même démarche méthodologique
retenue précédemment.

137
LA GESTION DES RISQUES EN ENTREPRISE
f:\2000\image\140249\20

Le risque de liquidité
f:\2000\image\140249\21

Pour rappel, voici le mécanisme de constitution de ce qui est commu-


nément appelé la crise de croissance, source constante de crise de
trésorerie dans les entreprises en développement.

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LES RISQUES DE L’ENTREPRISE

La société développe son activité assez facilement. Son modèle straté-


gique est bon, bien positionné, et sa commercialisation démontre toute
son acuité. En conséquence, le chiffre d’affaires augmente vite, entraî-
nant une croissance très rapide des besoins en fonds de roulement (BFR
= créances clients + stocks - dettes fournisseurs). Ils se trouvent insuffi-
samment compensés par les dettes fournisseurs. Le BFR croît de
manière exponentielle, décorrélée de la croissance du fonds de roule-
ment de l’entreprise, par nature limitée (capitalisation et endettement) et,
le plus grave, déconnectée potentiellement de l’activité commerciale.

Les excédents de fonds de roulement ne couvrent plus les besoins


d’exploitation (le BFR). D’une situation positive, la trésorerie nette de
l’entreprise se détériore, aggravée par l’augmentation de l’activité
(stocks additionnels, créances clients mal ou pas gérées) et des
besoins en fonds de roulement associés, peu ou mal maîtrisés. Le
levier de la dette d’exploitation (décalage de règlement des fournis-
seurs, des charges fiscales et/sociales... limitées)

La spirale de rupture de trésorerie s’enclenche, non sécurisée par un


renforcement des éléments de haut de bilan qui permettraient de ren-
forcer le fonds de roulement (dettes long terme, recapitalisation). Et
l’entreprise court à sa perte, aveuglée par sa réussite commerciale (le
CA !), sans se soucier de sa trésorerie... Jusqu’au point de rupture, où
le prêteur, qui n’accepte pas de prendre plus de risques que l’action-
naire, ne suit plus les besoins quotidiens de trésorerie. Dès lors, arri-
vent un beau matin les premiers impayés (rejet de chèques, de traites,
de prélèvements) et, à très court terme, la fin de l’histoire...

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