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Mathématiques financières

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Les mathématiques financières (aussi nommées finance quantitative) sont une
branche des mathématiques appliquées ayant pour but la modélisation, la
quantification et la compréhension des phénomènes régissant les opérations
financières d'une certaine durée (emprunts et placements / investissements) et
notamment les marchés financiers. Elles font jouer le facteur temps et utilisent
principalement des outils issus de l'actualisation, de la théorie des probabilités,
du calcul stochastique, des statistiques et du calcul différentiel.

Antériorité[modifier | modifier le code]
L'actualisation et l'utilisation des intérêts composés et des probabilités remontent à
plusieurs siècles.
Cela dit Louis Bachelier, par sa thèse intitulée Théorie de la spéculation en 1900, est
considéré comme le fondateur des mathématiques financières appliquées aux
marchés. La théorie moderne des marchés financiers remonte au MEDAF et à
l'étude du problème d'évaluation des options et autres contrats financiers dérivés
dans les années 1950-1970.

Nature aléatoire des marchés[modifier | modifier le code]


L'observation empirique du cours des actifs financiers montre que ceux-ci ne sont
pas déterminés de façon certaine par leur histoire. En effet, les nombreuses
opérations d'achat ou de vente ne sont pas prévisibles, elles font souvent intervenir
des éléments nouveaux. Le cours de l'actif financier est donc souvent représenté par
un processus stochastique. Benoit Mandelbrot a établi par des considérations
statistiques qu'un modèle aléatoire ordinaire, par exemple gaussien, ne convient pas.
L'aléa reste cependant souvent modélisé par un mouvement brownien1, bien que des
modèles plus élaborés (par exemple, le modèle de Bates) tiennent compte de la non-
continuité des cours (présence de sauts (gaps) dus à des chocs boursiers), ou de la
non-symétrie des mouvements à la baisse et à la hausse.

Hypothèse d'absence d'opportunité


d'arbitrage[modifier | modifier le code]
L'une des hypothèses fondamentales des modèles usuels est qu'il n'existe aucune
stratégie financière permettant, pour un coût initial nul, d'acquérir une richesse
certaine dans une date future. Cette hypothèse est appelée absence d'opportunités
d'arbitrage. Elle est justifiée théoriquement par l'unicité des prix caractérisant un
marché en concurrence pure et parfaite. Pratiquement, il existe des arbitrages qui
disparaissent très rapidement du fait de l'existence d'arbitragistes, acteurs sur les
marchés dont le rôle est de détecter ce type d'opportunités et d'en profiter. Ces
acteurs créent alors normalement une force qui tend à faire évoluer le prix de
l'actif vers son prix de non-arbitrage. Ces opérations d'arbitrage sont effectuées
instantanément et ne doivent pas être confondues avec des opérations par
lesquelles un investisseur joue le retour à moyen ou long terme d'un actif vers des
fondamentaux historiques. En conséquence, l'existence de bulles et de krachs ne
remet pas en cause cette hypothèse (mais elle remet en revanche en cause
l'hypothèse d'efficience des marchés).

Hypothèse de complétude des marchés[modifier | modifier le code]


Une autre hypothèse, beaucoup plus remise en question, est que tout flux à venir
peut être répliqué exactement, et quel que soit l'état du monde, par un portefeuille
d'autres actifs bien choisis. Les modèles ne comprenant pas les hypothèses de non
arbitrage et de complétude des marchés sont dits modèles de marchés imparfaits.

Probabilité risque-neutre[modifier | modifier le code]


Une des conséquences des hypothèses de non-arbitrage et de complétude des
marchés est l'existence et l'unicité à équivalence près d'une mesure
de probabilité dite probabilité martingale ou « probabilité risque-neutre » telle que le
processus des prix actualisés des actifs ayant une source de risque commune est
une martingale sous cette probabilité. Cette probabilité peut s'interpréter comme
celle qui régirait le processus de prix des sous-jacents de ces actifs si l'espérance du
taux de rendement de ceux-ci était le taux d'intérêt sans risque (d'où le terme risque-
neutre: aucune prime n'est attribuée à la prise de risque).
Un processus stochastique est une martingale par rapport à un ensemble
d'information si son espérance en date t conditionnelle à l'information disponible en
date s < t est égale à la valeur du processus en date s, c'est-à-dire qu'un
processus A(u) est une martingale si l'espérance conditionnelle de A(t) par rapport à
la filtration F(s) est A(s) (i.e : ).

Le problème d'évaluation des produits


dérivés[modifier | modifier le code]
L'évaluation2 des produits dérivés se ramène souvent au calcul du prix aujourd'hui
d'un actif dont on ne connaît le prix qu'à une date future. Il se ramène donc au calcul
d'une espérance conditionnelle. Le modèle Black-Scholes est un exemple de solution
analytique au problème d'évaluation des options d'achat (call) ou de vente (put)
d'un actif sous-jacent. Dans le cas d'un call, le problème s'écrit :
,
où  est le cours de l'actif,  est le prix d'exercice (ou Strike),  est le taux d'intérêt
instantané sans risque à la date s,  est la date « d'aujourd'hui »,  est la maturité de
l'option, c’est-à-dire la date à laquelle la décision d'exercice peut être prise.
La formule de Black et Scholes est un exemple de solution analytique à ce problème,
sous des hypothèses restrictives sur la dynamique du sous-jacent. Voir aussi option.
Une obligation convertible peut s'évaluer comme un lot comprenant une option
d'achat et une obligation classique.

Taux d'intérêt et dérivés de taux d'intérêt[modifier | modifier le


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Les modèles simples supposent que le taux d'intérêt, c'est-à-dire le loyer de l'argent
est constant. Cette hypothèse est centrale, car sous l'hypothèse d'absence
d'opportunités d'arbitrage, un portefeuille non risqué rapporte ce taux d'intérêt. Or
cette approximation n'est évidemment plus admissible dès que le cours de l'actif est
essentiellement lié au niveau du taux d'intérêt (par exemple, le cours des obligations
à taux variable, des swaptions…, ne peuvent être expliqués par un modèle à taux
d'intérêt fixe).
On modélisera donc le taux d'intérêt par un processus aléatoire, auquel on
demandera :

 d'être au mieux compatible avec l'ensemble des courbes des


taux observables ;
 d'avoir des propriétés réalistes, comme de ne pas autoriser des taux
négatifs, de rendre compte de l'effet de retour à la moyenne (mean
reversion)…
Les travaux de Vasicek ont permis d'exhiber un processus, dérivé du processus
d'Ornstein-Uhlenbeck, cohérent, dont le loyer de l'argent ne dépend que du taux
instantané (overnight) mais autorisant des taux négatifs. Des modèles plus élaborés
(processus CIR…), faisant partie de la famille dite des modèles affines de taux court,
ont permis de remédier à cette lacune, mais ne satisfont pas vraiment les
spécialistes du fait de la difficulté d'interprétation financière des paramètres de
diffusion et de leur incapacité à épouser exactement la courbe des taux zéro-coupon
spot. Heath, Jarrow et Morton ont proposé une famille de modèles cohérents, dont la
dynamique ne dépend que d'une fonction facilement interprétable (la volatilité du
taux forward), et capables de rendre compte de n'importe quelle courbe de taux
donnée. Des modèles dits de marché (BGM ou Libor Forward) connaissent un
certain succès dans l'explication du prix des caps et des floors.
Toutefois, à la différence du marché des dérivés d'options où le modèle de Black et
Scholes, plus ou moins arrangé pour le débarrasser de ses imperfections (volatilité
constante, taux d'intérêt constant…) occupe une place prépondérante, aucun modèle
de taux ne fait l'unanimité des spécialistes. Les taux d'intérêt sont en effet soumis à
des pressions exogènes très importantes, qui rendent caduques très rapidement
toutes les calibrations possibles. À l'heure actuelle, les publications et les recherches
à ce sujet sont abondantes.

Dérivés de crédit[modifier | modifier le code]


Les dérivés de crédit sont des produits dérivés dont les flux dépendent d'événements
de crédits intervenant sur un sous-jacent. Ces produits servent à prévenir la
dégradation de la qualité de signature d'une contrepartie, c'est-à-dire son aptitude à
assumer ses obligations de paiement (« CDS » ou Credit default swap, « CLN » ou
« Credit linked Notes »). Ils peuvent servir également à améliorer la qualité de
signature d'une partie d'un panier d'actifs (« CDOs » ou « Collateralized debt
obligations »).

Dérivés climatiques[modifier | modifier le code]


Article détaillé : Dérivé climatique.
Les dérivés climatiques sont des produits financiers dont les flux dépendent d'un
événement totalement indépendant de la structure des marchés financiers, lié à un
événement climatique. Par exemple, un produit peut assurer à son détenteur une
rente dans le cas où la température relevée en un lieu fixé par contrat dépasse ou
reste en dessous d'une température de référence considérée comme normale. Ces
produits — récents — ont pour vocation de permettre à des entreprises touristiques
ou agricoles de se prémunir contre des aléas climatiques. Ils s'apparentent donc à
des produits d'assurance, négociés directement sur les marchés financiers.

Au-delà du pricing de dérivés[modifier | modifier le code]


Si les mathématiques financières se sont développées autour de la question du
pricing des produits dérivés sur tous les types de sous-jacent, de nombreux autres
sujets font aujourd'hui partie des mathématiques financières. Il en est ainsi de l'étude
de la microstructure de marché, de la question de l'exécution optimale ou encore des
stratégies à haute-fréquence, notamment pour le market making.

Rôle des mathématiques financières dans la crise


économique des années 2008 et suivantes[modifier | modifier le
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Certains économistes pensent que les modèles de mathématiques financières ont
joué un rôle dans la crise économique mondiale des années 2008 et suivantes. Par
exemple, pour Jon Danielsson de la London School of Economics, la « finance n'est
pas la physique ; elle est plus complexe »3 et les financiers jouent avec les modèles,
ce que ne fait pas la nature. Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie considère que
« les financiers ont failli par incompétence et cupidité » et sont la cause principale de
la crise.
Selon Christian Walter, ce qui serait en cause est la représentation brownienne du
risque, largement utilisée dans les banques et les marchés financiers, et qui
apporterait une illusion de maîtrise du risque financier 4.
Toujours selon Christian Walter, la ligne de défense des mathématiciens selon
laquelle les modèles sont éthiquement neutres est « non seulement totalement
fausse dans ses présupposés fondamentaux, mais de plus extrêmement dangereuse
(...). Elle est fausse car elle s’appuie sur une conception inexacte et dépassée du
rapport entre modèle et monde concret. Elle est dangereuse car elle conduit à
reporter sur les seuls usagers la garantie de fiabilité finale du système. Dire
qu’un modèle mathématique en finance serait éthiquement neutre et que seul son
mauvais usage serait à l’origine des problèmes rencontrés relève
d’un positivisme datant de la fin du XIX  siècle, une épistémologie complètement
e

caduque aujourd’hui »5.
Christian Walter a lancé en juin 2015, avec la Fondation Maison des sciences de
l'homme, un programme de recherche sur la représentation brownienne du risque 6.

Notes et références[modifier | modifier le code]


1. ↑ Les caprices de marchés financiers : régularité et turbulences [archive], Conférence de Jean-
Philippe Bouchaud à l'Université de tous les savoirs, 2000
2. ↑ on dit aussi pricing ou, à tort, « valorisation » qui signifie « augmenter la valeur ».
3. ↑ Christian Chavagneux, Banques  : des risques mal calculés, Alternatives
économiques no 283, septembre 2009, p. 52.
4. ↑ Christian Walter, « La représentation brownienne du risque : une faute morale collective ? »,
Finance & Bien Commun 2/2008 (No 31-32) , p. 137-144 DOI : 10.3917/fbc.031.0137, lire en
ligne [archive]
5. ↑ Christian Walter, « Le pouvoir démiurgique des mathématiques financières », Libération, 21
mai 2012, lire en ligne [archive]
6. ↑ Laurent Chemineau, « Il faut repenser les systèmes d’évaluation des risques », L'Agefi, 3
juillet 2015, lire en ligne [archive]

Voir aussi[modifier | modifier le code]


Bibliographie[modifier | modifier le code]

 Pierre Bonneau, Mathématiques financières, Coll. Economie, Paris,


Dunod, 1980.
 Jean-Marcel Dalbarade, Mathématiques des marchés financiers, Ed. Eska,
2005, (ISBN 2-7472-0846-X).
 Benoît Mandelbrot & Richard Hudson, Une approche fractale des
marchés, éditions Odile Jacob, 2005
 Mathieu Le Bellac & Arnaud Viricel, Mathématiques des marchés
financiers: Modélisation du risque et de l'incertitude, Ed. EDP Sciences,
2012.
 Gustave Bessière, Contre l'inflation et ses risques Dunod Paris 1933
Sur les autres projets Wikimedia :
 Mathématiques financières, sur Wikiversity

Articles connexes[modifier | modifier le code]

 Analyse quantitative
 Calcul stochastique
 Produit dérivé
 Mouvement brownien
 Tracking error
 Modélisation financière
Liens externes[modifier | modifier le code]

 (fr) Cours du Dea de Probabilité, option finance  [archive] du


professeur Nicole El Karoui.
 (en) Exemples d'application en ligne en finance quantitative (pricing
d'options à travers plusieurs méthodes) [archive] pricing-
option.com Christophe Rougeaux.
 [masquer]
v · m
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Risque de crédit  Risque de concentration
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 Dérivé de crédit
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Risque de marché  Risque sur les marchés d'actions (en)
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élémentaires  Risque de marché
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 Danger
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 Investment management (en)
 Financial economics (en)
 Mathématiques financières

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