Vous êtes sur la page 1sur 84

UNIVERSITE DE KISANGANI

FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES ET DE


GESTION

COURS D’INSTITUTIONS ET
MARCHES FINANCIERS
INTERNATIONAUX
Notes de cours destinées aux étudiants de deuxième
licence en Economie monétaire

Professeur Didier MUMPAMBALA LUZOLO

Année Académique 2020-2021

INTRODUCTION
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Le mode de financement d’une économie varie d’un type


d’économie à un autre. Pour une économie des marchés financiers, le
financement se fait essentiellement par le marché des fonds prêtables
(finance directe), en revanche pour une économie d’endettement, il se fait à
travers le système bancaire.

Le système financier international a été caractérisé au début des


années 1980 par l’avènement de trois "D" (Décloisonnement,
Dérèglementation et Désintermédiation). Ces phénomènes marquaient
l'avènement de la globalisation financière ou de l'internationalisation du
capital financier.

Le Décloisonnement consiste, sur le marché des capitaux, en la


suppression des barrières entre les métiers de la finance, entre les différents
produits et entre les différents marchés. La Dérèglementation consiste, au
sens strict, en la suppression de contrôle à l'entrée ou à la sortie de
capitaux. La Désintermédiation ou la marchéisation est ce processus
caractérisé par le recours de plus en plus prononcé des agents au
financement direct (par voie de marché) qu'au financement indirect (crédit
bancaire). Elle se traduit ainsi par l'accroissement de la sensibilité des
intermédiaires financiers aux risques de marché.

A ces jours, les parts de financement par les marchés ont gagné en
importance par rapport à celles du système bancaire. Les agents à capacité
de financement ont un accès direct aux marchés des capitaux sans passer
par les intermédiaires traditionnels, à savoir les banques.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

La globalisation financière s'est ainsi développée à la faveur de


la dérégulation. Elle est marquée par les levées progressives des contrôles
sur les mouvements internationaux des capitaux consacrant de ce fait leur
mobilité.

Le cours de « institutions et marchés financiers » est un cours


d’option, dispensé aux finalistes de deuxième cycle en Economie
monétaire, donc, aux futures analystes des questions monétaires et
financières. Il vise à préparer ces derniers à la compréhension et à l’analyse
du financement des économies modernes qui, à l’ère actuelle passe par le
marché financier.

La compréhension et la maitrise de ce cours nécessitent une


bonne base en : Management bancaire, économie monétaire internationale
et économie bancaire (cours dispensés en première licence),… Le présent
cours est complémentaire au cours d’institutions financières au Congo.

L’objectif principal de cet enseignement est de doter les


étudiants et/ou les lecteurs des compétences dans l'analyse et la maitrise du
mode de fonctionnement des institutions et des marchés financiers. En
clair, il s’agit d’aider les étudiants et/ou les lecteurs à :

 saisir la différence nette qui existe entre le système financier et le


marché financier ;
 circonscrire à partir d'une analyse sommaire et objective, les risques
attachés aux opérations financières ;
 maitriser l’organisation du marché financier ainsi que les produits
qui s’y échangent ;
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

 comprendre et maitriser les notions de « euromarché, euro-obligation


et euro-dollars »;
 comprendre et maitriser comment le taux d’intérêt se mesure sur le
marché obligataire ;
 maitriser la théorie de la demande d’actif ;
 comprendre et maitriser le fonctionnement de marché des fonds
prêtables ;
 comprendre et maitriser la structure par risque et par terme du taux
d’intérêt ;
 comprendre comment évaluer le prix d’une action ;
 comprendre et maitriser la théorie d’anticipation rationnelle et
d’efficience de marché.

Il sied de signaler que La préparation de ces notes de cours a été faite en s’inspirant de
l’ouvrage« Banques, monnaie et marchés financiers » de Frederic Mishkin.

La structure de cet enseignement sur base des objectifs ci-haut


se présente comme suit :
CHAPITRE 1. COMPRENDRE LE SYSTEME FINANCIER ET LE
MARCHE FINANCIER

Section 1 : Le Système financier et organisation des marchés financiers


Section 2 : Les produits (instruments) financiers
Section 3 : Les fonctions du marché financier

Section 4 : L’internationalisation du marché financier

CHAPITRE 2. LE TAUX D’INTERET SUR LE MARCHE


OBLIGATAIRE
Section 1 : Mesurer le taux d’intérêt
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Section 2 : Distinction entre taux d’intérêt et rendement


Section 3 : Taux d’intérêt réel et taux d’intérêt nominal

CHAPITRE 3. L’OFFRE ET LA DEMANDE D’ACTIF FINANCIER


Section 1 : Théorie de la demande d’actifs
Section 2 : L’offre et la demande sur le marché des obligations

Section 3 : Le marché des fonds prêtables

CHAPITRE 4. LA STRUCTURE PAR RISQUE ET LA


STRUCTURE PAR TERME DES TAUX
D’INTERET
Section 1 : Structure par risque du taux d’intérêt
Section 2 : La structure par terme des taux d’intérêt

CHAPITRE 5. MARCHE BOURSIER, THEORIE DES


ANTICIPATIONS RATIONNELLES ET
HYPOTHESE D’EFFICIENCE DES MARCHES
Section 1 : Evaluer le prix d’une action
Section 2 : Théorie des anticipations rationnelles
Section 3 : L’hypothèse d’efficience des marchés : les anticipations
rationnelles sur les marchés financiers

CHAPITRE 1 :
COMPRENDRE LE SYSTEME FINANCIER ET LE
MARCHE FINANCIER
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Destiné aux titres à long terme dont l’échéance est


généralement supérieure à sept ans, le marché financier se compose de
deux compartiments : le marché primaire où sont émis les titres (actions,
obligations, etc.) et le marché secondaire ou se négocient les titres anciens.

Ces deux compartiments sont complémentaires : un agent


n’achète des titres « neufs » qu’à condition d’avoir la garantie de pouvoir
les liquider en cas de besoin. En d’autres termes, le marché du « neuf » (le
marché primaire) est inséparable du marché de « l’occasion » (le marché
secondaire). Sur le premier, les émissions de titres ont pour objet de
transférer des moyens de financement des épargnants vers les emprunteurs.
En revanche, sur le second, les négociations sur des titres anciens assurent
aux prêteurs la liquidité de leurs placements. Nous pouvons donc
considérer qu’à la différence du marché primaire qui favorise les
emprunteurs ayant un besoin de financement, le marché secondaire
favorise les prêteurs ayant un besoin de liquidité.

Le marché financier sera présenté en quatre points : sa


définition et son organisation tout d’abord, les produits qui y sont proposés
ensuite, ses fonctions puis, son internationalisation enfin.

1.1. Système financier et organisation des marchés financiers


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Il est question dans cette première section de comprendre ce qu’on


attend par un marché financier (premier point) et comment, il est organisé
(deuxième point).

1.1.1. Définitions
Le système financier est un ensemble d'établissements financiers
qui échangent des fonds via une organisation relativement informelle : les
marchés financiers, comme le crédit bancaire ou les marchés boursiers. Le
comportement de ces établissements est régulé par la banque centrale et les
autorités financières.

Un système financier regroupe des marchés et des intermédiaires


qui assurent le transfert d’actifs (financiers, réels) ou de risques sous différentes
formes entre entités, dans le temps et dans l’espace.

Les investisseurs ont recours au système financier pour différentes


raisons : épargner, emprunter, lever des capitaux, gérer leurs risques ou obtenir
des informations en vue d’organiser des échanges de produits ou de services.

En aidant les investisseurs à adjuger un prix au risque qu’ils


prennent, le système financier contribue en théorie à ce que, la demande de
capital (investissement) s’équilibre avec l’offre de capital (épargne), et aide à la
meilleure affectation possible du capital (pour peu que le système financier soit
relativement efficient ou qu’il soit correctement régulé).

Le capital n’est pas toujours une denrée abondante. Sa rareté


signifie qu’il a un coût. Le rôle du système financier est d’orienter le capital vers
le meilleur usage possible.

Au sein d’un système financier, de nombreux types d’actifs sont


échangés : obligations, actions, titres monétaires, devises, contrats financiers
(dérivés), matières premières, actifs réels (immobilier), etc.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

On peut également y trouver des fonds d’investissement (FCP, SICAV, hedge


funds…), mais aussi des titres cotés ou non cotés.

Les intermédiaires financiers sont aussi divers et nombreux que les


instruments financiers qu’ils contribuent à faire circuler (dans le désordre) :
courtiers, banques d’investissement, Bourses, système de trading alternatifs,
traders, dealers, titriseurs (ils créent des produits financiers qui réassemblent des
instruments financiers existants), dépositaires, sociétés de services financiers,
banques de détail, compagnies d’assurance, chambres de compensation...

Un système financier bien huilé doit permettre de trouver des


solutions de financement pour des projets d’investissement et contribuer à la
gestion des risques financiers (risque de change, de taux…). Pour cela, le
système financier doit permettre aux agents d’échanger facilement et rapidement
leurs capitaux, avec des coûts de transaction faibles.

1.1.2. Organisation des marchés financiers


Le marché financier est organisé au tour de quatre compartiments :
le marché de dette et le marché de fonds propres, Marché primaire et marché
secondaire, Marchés organisés et marchés de gré à gré, marchés monétaire et
marché des capitaux.

1.1.2.1. Marchés de dettes et marchés de fonds propres


Il y a deux manières pour une entreprise d’obtenir des fonds sur un
marché financier :

Première manière: émettre un titre à revenu fixe, représentatif


d’une dette, par exemple une obligation. Cette dernière est un engagement
contractuel de l’émetteur de l’obligation à payer au détenteur des versements
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

(les intérêts et le remboursement du principal) déterminés à intervalles fixes


jusqu’à une certaine date appelée échéance.

On appelle maturité d’une dette la durée restant à courir jusqu’à l’échéance. Une
dette est à court terme si la maturité est inférieure ou égale à un an; et elle est à
long terme si celle-ci est supérieure à 10 ans. Entre les deux échéances, on parle
de dette à moyen terme.

Deuxième manière: émettre des actions ou des parts sociales; le


produit de l’émission entre alors dans les fonds propres de la société car, les
actions sont des fractions de son capital. Elles donnent des droits sur les revenus
nets (après dépenses et impôts) et sur les actifs de cette société.

Les dividendes sont les versements (annuels ou semestriels) qu’effectuent en


général les sociétés à leurs actionnaires lorsqu’elles distribuent des bénéfices.
Les actions n’ont pas de date d’échéance, elles sont donc des titres à long terme.
Elles donnent un droit de propriété collectif sur la société, et celui d’élire les
dirigeants et de voter lors des assemblées générales.

Le principal inconvénient de détenir des actions plutôt que des


obligations est pour l’actionnaire de n’être qu’un bénéficiaire résiduel.

Les actions et les obligations représentent pour l’investisseur des


placements alternatifs en valeurs mobilières qui entrent, selon ses choix
financiers, en proportions variables dans son portefeuille.

1.1.2.2. Marché primaire et marché secondaire


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

On appelle marché primaire le marché financier sur lequel les


nouvelles émissions de titres, actions ou obligations, sont proposées par les
sociétés ou les Etats émetteurs à des acheteurs appelés souscripteurs. La vente
initiale sur ce marché primaire n’a pas lieu en public. Elle est organisée pour le
compte de l’émetteur-emprunteur par une banque d’affaires (ou banque
d’investissement).

Par contre, le marché secondaire est, quant à lui, un marché


financier sur lequel s’échangent des titres précédemment émis. Les Bourses sont
des marchés secondaires sur lesquels un certain nombre de titres sont cotés et
échangés.

Les plus importants marchés boursiers au monde sont : New York


Stock Exchange (Wall Street), Bourse de Tokyo, London Stock Exchange et
Euronext (Regroupant Bourses de Paris, de Bruxelles, d’Amsterdam et de
Lisbonne).
Des marchés de gré à gré (comme le Nasdaq) ainsi que des
cotations alternatives (comme les services multilatéraux de négociation, des
plates-formes électroniques) concurrencent les bourses traditionnelles.

Le marché secondaire a deux fonctions importantes :

 il permet d’augmenter la liquidité en facilitant et en accélérant la vente et


l’achat des titres déjà émis, ce qui rend les titres plus attractifs aux yeux
des souscripteurs ;
 il détermine un cours pour chaque titre. Celui-ci fournit à l’investisseur
une évaluation de son actif et indique à l’entreprise à quel prix elle peut
émettre de nouveaux titres sur le marché primaire. Cela influence donc le
montant à lever qui sera plus important avec un cours élevé.

COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

1.1.2.3. Marchés organisés et marchés de gré à gré


Les marchés secondaires peuvent être organisés de deux manières :

 Les Bourses institutionnalisées réunissent en un lieu unique (réel ou


virtuel) acheteurs et vendeurs de titres (directement ou via leurs agents,
sociétés de Bourse, agents de change, courtiers ou brokers).
 Le marché de gré à gré, ou over-the-counter (OTC), n’est pas
formellement organisé. Des teneurs de marché (ou dealers) localisés à
différents endroits tiennent à jour des listes de titres pour lesquels ils sont
disposés à vendre ou acheter à toute personne prêt à accepter leur prix. Ils
sont en contact permanent par réseaux informatiques.

1.1.2.4. Marché monétaire et marché des capitaux


En fonction de la maturité des titres, on distingue:

 Le marché monétaire est un marché financier sur lequel seuls les


instruments à court terme (dont l’échéance originelle est inférieure à un
an) sont échangés. Ce marché est souvent plus liquide car, les instruments
à court terme sont en général beaucoup plus échangés que les titres à long
terme.
 Le marché des capitaux voit au contraire s’échanger les titres à plus long
terme et les actions.

1.2. Les produits (instruments) financiers

1.2.1. Les produits du marché financier


Depuis les origines du marché financier, il n’existe que deux
types de produits, les obligations et les actions. A la fin du deuxième
millénaire, de nombreux titres mixtes sont apparus.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

1.2.1.1. Les obligations


Les obligations sont des titres émis par les entreprises
publiques ou privés, l’Etat ou les établissements de crédit. Pour les
souscripteurs, il s’agit de créances sur leurs émetteurs, donnant droit à une
rémunération, en principe fixe, déterminé par le taux en vigueur au
moment de l’emprunt.

Le marché des obligations est devenu très actif au cours des


deux dernières décennies, en raison :

- d’un nouveau mode de gestion de la dette publique (par


l’intermédiaire des procédures d’adjudication des bons du Trésor) ;
- de l’accroissement des besoins des entreprises publiques ;
- des emprunts des établissements de crédit, encouragés par les
autorités monétaires à augmenter leurs ressources à long terme.

Les intérêts versés sur les obligations reflètent notamment les


différences de solvabilité entre les émetteurs considérés. Ces différences
traduisent la capacité ultérieure des émetteurs d’assurer le service de leur
dette (remboursement des intérêts et du principal) ; cette capacité étant
évaluée par des agences spécialisées dans la notation des sociétés.

Il est à noter que marché des obligations ne portent plus sur un


produit homogène, longtemps caractérisé par une durée unique, un taux
fixe et un remboursement par annuités constantes. Depuis quelques années,
de multiples innovations ont vu le jour dans le but de mieux couvrir, à long
terme, les deux risques encourus (de manière inverse) par les émetteurs et
les souscripteurs :
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

- le risque de variation des prix de biens : achetant une obligation de


1000 € rapportant un coupon annuel fixe de 100 € pendant dix ans,
tout souscripteur court un risque de hausse des prix (baisse de son
pouvoir d’achat), aussi bien sur les coupons annuels que sur le
capital remboursé au terme des dix ans ; inversement, l’émetteur
d’obligations court un risque en cas de baisse des prix ;
- le risque de variation des taux d’intérêt : un émetteur d’obligation au
prix de 1000 € à 10 % annuel sur dix ans, court un risque si, entre
temps, le taux d’intérêt baisse (l’émetteur réalise alors qu’il aurait dû
attendre pour emprunter à moindre taux) ; inversement, le
souscripteur court un risque de hausse de taux (en achetant une
obligation à 10 % sur dix ans, le regret peut être grand de ne pas
avoir attendu un an de plus pour profiter des nouveaux emprunts
émis à 11%.

Dans le but de couvrir ces différents risques, la famille des


obligations s’est largement développée en offrant des produits adaptés aux
objectifs et aux moyens des épargnants.

Dans cette famille, on peut citer les obligations à taux


variable. Le taux et le coupon annuel de ce type d’obligation varient en
fonction du taux pris comme référence.

En France, les premiers emprunts à taux variables ont été indexés sur le
taux moyen mensuel du marché monétaire, mais ils peuvent l’être à partir
de très nombreuses références sur les marchés monétaire et obligataire.

L’émetteur garantit généralement un taux d’intérêt minimum et limite son


risque en fixant un taux maximum. Il en émet en cas d’anticipation à la
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

baisse des taux et revient aux émissions à taux fixe dans le cas inverse. Ce
type d’obligation apporte une sécurité à l’épargnant puisque les variations
du taux se répercutent sur les coupons qui sont variables, mais non les
prix ; les risques de perte en capital sont donc quasiment nuls en théorie.

Dans cette famille, on peut aussi citer les obligations indexées.


En période d’inflation, les obligations classiques perdent leur pouvoir
d’achat ; une clause d’indexation peut atténuer un tel risque. Depuis une
ordonnance de 1958, toute forme d’indexation sur le coût de la vie était
interdite, mais était admise si elle avait un rapport direct avec l’activité de
la société émettrice (exemple de certains emprunts de la SNCF indexés sur
le prix km/voyageur).

Une autre variante est constituée des obligations convertibles


en actions. Ces produits financiers ont connu un vif essor en raison des
avantages qu’ils procurent aussi bien à leurs souscripteurs qu’à leurs
émetteurs.

Pour les premiers, elles permettent d’obtenir un revenu fixe, de


conserver son pouvoir d’achat et de se protéger en cas de baisse de
l’action. En effet, lorsque le cours de l’action est supérieur au prix de
remboursement de l’obligation, le souscripteur peut exercer son droit
d’option et devenir actionnaire. Dans le cas contraire, il récupère le
montant investit parfois augmenté d’une prime de remboursement.

Pour les émetteurs, l’obligation convertible est un produit de


substitution avantageux par rapport aux actions et aux obligations
classiques. Notamment, le taux d’intérêt servi aux obligations convertibles
est inférieur à celui des obligations ordinaires.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Enfin, parmi bien d’autres variantes, on notera les obligations à


bons de souscription. Parmi celles-ci, on distingue : les obligations à bons
de souscription d’obligations (OBSO) donnant droit à souscrire de
nouvelles obligations à un prix fixe préalablement déterminé (le
souscripteur est gagnant, si les prix des obligations s’élèvent, perdant dans
le cas inverse) ; les obligations spéciales à coupon à réinvestir (OSCAR),
le coupon pouvant être réinvesti dans l’achat (sans frais) d’une obligation
du même type.Enfin, créées en 1983, les obligations à bons de
souscriptions d’actions (OBSA) donnant droit aux détenteurs de ces titres
d’acheter des actions de la société émettrice à un prix préalablement
déterminé (intéressant si le prix de l’action s’élève).

Comme nous le constatons dans le tableau n°1 ci-dessous,


47,1% de l’encours des obligations émises ont pour origine l’Etat, celles-ci
ne constituent donc pas le mode de financement privilégié par les sociétés
non financières (14,7 %).

Tableau 1. Encours des émissions d’obligations sur le marché Français en fin 2013
Emetteurs Encours (en milliards Proportion (en %)
d’euros)
Administrations publiques 1 589 47,1
(dont Etat)
Etablissements de crédit et 1 284 38,1
assimilés
Sociétés non financières 494 14,8
TOTAL 3 367 100
Source : Banque de France, 2013
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

La diversification des titres est, pour une bonne part, à l’origine de


l’expansion du marché financier ; partant du principe que sont proposés des
titres pour tous les gouts et pour toutes les bourses.

En la matière, la principale innovation a concerné la procédure


d’assimilation qui est désormais utilisé pour tous les emprunts d’Etat.

Par cette procédure, le Trésor peut émettre des tranches complémentaires


d’un emprunt à des conditions identiques à celles de l’émission initiale
(échéance, taux, amortissement, etc.). L’émission d’OAT répond à un
double objectif : étaler les émissions dans le temps d’une part, assurer une
meilleure liquidité des titres en Bourse d’autre part.

1.2.1.2. Les actions


Une action est un titre de propriété qui correspond à une part
du capital social d’une société. Les actions sont émises lors de la
constitution des sociétés ou de l’augmentation de leur capital. Elles sont les
contreparties d’un apport de « fonds propres » et donnent droit aux
actionnaires (en fonction de leurs apports respectifs) :

- un droit de vote aux assemblés permettant d’exercer une influence


sur la gestion de l’entreprise ; et
- à recevoir des dividendes liés aux résultats de la société, ainsi qu’à sa
politique en matière de redistribution de ceux-ci.

Les actions peuvent être émises par appel privé ou public à


l’épargne. Dans le premier cas, il peut s’agir d’actions non cotées et de
capital de développement, tandis que, dans le second cas, les actions sont
cotées en Bourse. Les émissions d’actions par appel privé à l’épargne
correspondent à des investissements dans les titres non cotés des sociétés
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

privées et publiques. Le capital de développement est souvent apporté par


des investisseurs fournissant généralement les fonds nécessaires au
démarrage des sociétés à risque élevé (notamment dans le secteur des
nouvelles technologies) en échange d’une participation au capital et d’un
siège au conseil d’administration des sociétés en question afin d’exercer
une influence sur le processus de décisions de leurs dirigeants.
Progressivement, ces sociétés peuvent décider de remplacer leurs actions
non cotées par des actions cotées. Une telle cotation permet en effet un
meilleur accès au marché des capitaux dans la mesure où les investisseurs
potentiels obtiennent des informations de meilleure qualité en raison de la
transparence accrue et de la publication d’informations nécessaires à
l’inscription à la cote.

Comme pour le marché obligataire, le marché des actions s’est


fortement développé depuis le début des années quatre-vingts ; les sociétés
non financières sont les principaux émetteurs (à raison de 88 % du total des
encours).

Tableau 2. Encours des émissions d’actions Français en fin 2013.


Emetteurs Encours Proportion (en %)
(en milliards d’euros).
Institutions financières 162,4 11,86
Sociétés non financières 1 202, 2 88,13
TOTAL 1 364,6 100
Source : Banque de France, 2013

Le total des émissions a été ainsi multiplié par neuf en vingt


ans. Malgré les crises boursières en 1987 et 2008, cette évolution a
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

notamment été possible grâce à la multiplication des titres de la famille des


actions, en notant principalement :

- Les actions à bons de souscriptions d‘actions (ABSA) qui sont


émises à un prix supérieur à la cote, mais qui permettent d’acheter
ultérieurement d’autres titres de la même société au même prix ou à
un prix faiblement supérieur (procédure intéressante si, entre temps,
le cours de l’action monte) ;
- Les actions à dividendes prioritaires sans droit de vote
(ADPSDV) créées en 1978. En acceptant de recevoir des dividendes
supérieurs à ceux obtenus sur des actions ordinaires, le souscripteur
renonce en contrepartie au droit de vote ( ce dernier pouvant
cependant être rétabli en cas de non-versement des dividendes
prioritaires au cours de trois exercices) ;
- Les dividendes-titres (ou actions « accumulantes ») créées en 1983,
se caractérisent par des dividendes payés en actions et non en
monnaie. Cette procédure permet aux entreprises d’augmenter leurs
capitaux propres sans puiser dans leur capacité d’autofinancement.

En augmentant le « menu financier », proposé aux agents


économiques, il a été permis ainsi le développement de ce mode de
financement de l’économie.

1.2.1.3. Les titres mixtes

Les certificats d’investissement et les titres participatifs


créées en 1983, empruntent des caractéristiques propres aux actions et aux
obligations. Ils ont permis aux entreprises nationalisées en 1982 de
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

renforcer leurs fonds propres en intervenant directement sur le marché des


capitaux.

Toutes les sociétés par actions, publiques ou privées, peuvent


émettre des certificats d’investissements (ne pouvant cependant excéder
le quart de leur capital social). Ces derniers sont divisés en deux éléments :
un certificat de droit de vote (librement négociable 1988) et un certificat
d’investissement négociable représentant les prérogatives de l’actionnaire
(droit aux bénéfices et aux réserves, à l’information). En définitive, l’action
est reconstituée de plein droit lorsque les deux éléments sont entre les
mains d’un même titulaire.

Réservés aux sociétés anonymes du secteur public depuis 1983,


aux établissements publics à caractère industriel et commercial et aux
coopératives depuis 1985. Les titres participatifs sont considérés comme
fonds propres. Ne conférant pas de droit de regard dans la gestion de la
société, ils assurent une rémunération comportant une partie fixe et une
partie variable avec les bénéfices de la société.

Pour leurs émetteurs, ces titres sont assimilables à des actions


puisqu’ils ne sont pas remboursables qu’en cas de liquidation de la société
où à l’expiration d’un délai ne pouvant être inférieur à sept ans (dans des
conditions prévues au moment de l’émission).

Proches des titres participatifs, nous trouvons les titres


subordonnés. Pour les entreprises émettrices, ils sont considérés comme
des fonds propres. En effet, le remboursement de ces titres a lieu lorsque
l’entreprise le désire ou en cas de liquidation. Cette émission permet ainsi
une recapitalisation de l’entreprise sans, véritablement, une augmentation
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

de l’endettement et sans création de nouvelles actions (pouvant diluer le


pouvoir). Pour les détenteurs de tels titres ; ils sont rémunérés par un
intérêt qui est subordonné (d’où leur appellation) au versement d’un
dividende.

A contrario, une entreprise ne réalisant pas de bénéfices et (ou)


ne distribuant pas de dividendes, n’a pas à verser d’intérêts sur ces titres
subordonnés. C’est notamment ainsi que l’Etat est intervenu pour
recapitaliser les banques françaises à la suite de la crise financière de 2008.

Pour compléter la panoplie des produits offerts, nous pouvons


mentionner ceux émis par les OPCVM qui permettent aux épargnants de
bénéficier des avantages de la gestion collective des valeurs. En bénéficiant
d’économie d’échelle, d’une meilleure appréciation et gestion du risque, en
disposant d’une meilleure information ; les OPCVM offrent des produits
variés assurant la diffusion de toute la gamme des valeurs mobilières
auprès des agents qui, isolés, n’achèteraient sans doute pas des tels titres.
Par ailleurs, en raison de leur valeur unitaire élevé (150 000 euros,
généralement), les titres du marché monétaire, non directement accessibles
aux particuliers, le deviennent par l’entremise des OPCVM monétaires.

En offrant un très grand nombre de choix pour toutes les


bourses et tous les gouts, les OPCVM participent à la volonté de
développer les marchés financiers en adaptant les produits offerts aux
besoins et aux souhaits de la clientèle. En rendant plus consistant le « menu
financier » proposé aux agents économiques, les OPCVM aident à une
meilleure adéquation entre l’épargne et l’investissement. Leur succès est
confirmé par l’évolution rapide des encours, multipliés par quarante en
vingt ans. On dénombre, actuellement, près de 20 000 OPCVM.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

1.2.2. Les produits du marché monétaire


On distingue plusieurs titres négociables sur le marché monétaire,
mais les titres qui font plus l’objet des transactions sont : (i) les bons du trésor ;
(ii) les billets de trésorerie ; (iii) les certificats de dépôts négociables ; (iv) les
billets à ordre négociables.
1.2.2.1. Bons du Trésor
Titres de dette émis par le Trésor public et utilisés quasiment dans
toutes les économies modernes, les bons du Trésor sont les plus vieux titres
publics du marché monétaire. Ils sont catégorisés en :
 Bons du Trésor à Taux Fixe (B.T.F) dont la maturité n’excède pas un
an. Les investisseurs qui les achetent, peuvent les revendre à chaque
instant sur le marché secondaire, par l’intermédiaire des Spécialistes en
Valeurs du Trésor (SVT), et
 Bons du Trésor à Intérêts Annuels (B.I.A.N), qui ont les mêmes
caractéristiques que le BTF. Cependant, leur originalité réside dans
l’échéance, qui varie entre 2 et 7 ans.

1.2.2.2. Billets de trésorerie (BT)


Ce sont des titres privés, d’une échéance inférieure à 2 ans, émis par
les entreprises pour couvrir leur besoin de financement à court terme. Les
investisseurs peuvent acheter ces titres à l’émission ou bien sur le marché
secondaire, où leur cotation donne lieu à la formation du taux des billets de
trésorerie publié quotidiennement.

1.2.2.3. Certificats de dépôts négociables (CDN)


Les certificats de dépôts négociables sont des titres, d’une maturité
inférieure à sept ans, émis par les banques en reconnaissance de dépôts collectés
auprès des investisseurs. Ils peuvent aussi être négociables sur le marché
secondaire.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

1.2.2.4. Billets à ordre négociables (BON),


Un BON est une matérialissation de la reconnaissance d’une dette
de la part de la banque émettrice. Son avantage pour le prêteur est qu’il peut être
négociable sur le marché secondaire. En effet, sur le marché monétaire au sens
strict (le marché interbancaire), les banques de dépôts se prêtent et s’empruntent
entre elles des liquidités généralement de courtes échéances. Certaines
transactions portent même sur une journée (marché au jour le jour : call money
market). Le BON est uniquement utilisé dans ce cadre. Il est distingué :
 les opérations overnight, correspondant à des prêts- emprunts d’une
journée, entre le moment où l’opération est conclue et le lendemain et, le
taux en vigueur, c’est le fameux J.J. (Taux au jour le jour publié
largement par la presse) ;et
 les opérations tom- next (tomorrow-next), correspondant à des prêts-
emprunts d’une journée, entre le lendemain du jour où l’opération est
conclue et le surlendemain.
Outre ces quatre supports examinés du marché financier, il s’échange, dans
d’autres économies, d’autres produits, notamment :
 des bons de caisse (BC) : sont des titres représentatifs de créance remis
à un particulier en contrepartie du prêt qu'il a accordé à une banque.
 des lettres de change (LC) : sont des effets de commerce dans lesquels
une personne désignée, le tireur, donne l’ordre à une autre personne
désignée le tiré, de régler à une date convenue (par exemple dans 60,
90 ou 120 jours) une somme déterminée à un bénéficiaire
nominalement désigné au porteur de la lettre. Il est un instrument de
crédit et de paiement, payable à terme.

1.3. Les fonctions du marché financier


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Le marché financier a une fonction d’allocation des ressources,


mais aussi une fonction d’information des agents économiques. Des
dysfonctionnements peuvent cependant entraver le bon déroulement des
opérations.

1.3.1. Le marché financier et la fonction d’allocation

Cette fonction se concrétise dans la rencontre entre


l’investissement et l’épargne, et dans les procédures de restructuration
d’entreprises.

Dans le but de maximiser son utilité, lorsqu’un agent souhaite


reporter une partie de son revenu dans le futur, il le fait en raison d’un
certain taux subjectif de préférence pour le temps (taux mesurant le prix
subjectif de renonciation à la consommation présente). De la même façon,
lorsqu’un agent souhaite investir, il le fait en fonction de son estimation du
taux de rentabilité de l’investissement.

Sur le marché, la confrontation des préférences individuelles


pour le temps d’une part et, des diverses possibilités d’investissement
d’autre part, permettent de déterminer un taux unique, à la fois « prix pour
le temps » et « taux de rentabilité » ; le taux d’intérêt auquel peuvent se
référer tous les agents économiques souhaitant prester ou emprunter.
L’investisseur n’a pas à rechercher l’épargnant et, inversement, l’épargnant
n’est pas obligé de se livrer lui-même à des opérations productives. Cette
dissociation des décisions d’investissement et de consommation (et
d’épargne) est rendue possible grâce au marché financier. En permettant,
par le groupage des liquidités disponibles entre les mains de certains
investisseurs, de combinaisons des moyens de production qui, sans cela,
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

n’auraient pas été réalisables, le marché financier augmente l’efficacité du


système économique.

En permettant la constitution d’entreprises, entités


juridiquement distinctes des individus, pouvant se financer pour des
montants parfois importants, le marché financier élargit les possibilités de
démultiplication du système productif. Par ailleurs, à travers de
nombreuses procédures de prises de contrôle (ramassage boursier, OPA,
OPE, etc.), il constitue pour toute société le lieu privilégié pour mener une
politique de restructuration ou de redéploiement, de recentrage des
activités ou de diversification de celles-ci, d’ouverture de nouveaux
marchés ou d’extensions des marchés existants.

Le marché financier constitue bien un véhicule essentiel de la


dynamique du système productif (industriel, commercial et financier) dès
lors qu’est admise la relation positive entre les choix stratégiques des
entreprises et la croissance de celles-ci.

1.3.2. Le marché financier dans sa fonction d’information

Nos économies sont incertaines, au sens de « non


probabilistes ». En l’absence de marchés à terme complets, le marché
financier constitue le lieu privilégié où les agents viennent estimer « l’état
de la confiance » et la rentabilité estimée des différents capitaux. Puisqu’il
n’ya pas de méthode scientifique pour appréhender le futur, les agents vont
devoir estimé la rentabilité de leurs projets (« activité d’entreprise » au
sens de Keynes), mais corriger ce calcul en tenant compte de la
psychologie du marché, la confiance est évalué en Bourse.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Si nous admettons que le prix d’un titre (action ou obligation)


correspond à la valeur actualisée des revenus qu’il peut procurer dans le
futur, ce prix s’élève :

- Si les revenus futurs escomptés augmentent en raison de


l’amélioration de la situation de la société émettrice ;
- Si le taux d’actualisation ou taux d’intérêt diminue, ce taux
diminuant avec la baisse de la préférence pour la liquidité et celle-ci
pouvant baisser en raison d’une amélioration de l’état de confiance.

En Bourse, le prix d’un titre varie en fonction des offres et des


demandes, c'est-à-dire des positions que prennent les agents en termes
d’estimation des revenus futurs et de préférence pour la liquidité.

Ainsi, le prix d’un titre augmente parce qu’une majorité


d’agents se porte acheteur pensant que la situation de la société cotée va
s’améliorer dans le futur. Le prix d’un titre en Bourse mesure l’évaluation,
par le marché, du capital de l’entreprise cotée.

Ce prix va constituer un indicateur pour l’évaluation des


projets d’investissement. Il représente, en quelque sorte, un prix de
demande, c'est-à-dire, le prix maximum que les agents sont prêts à payer
pour obtenir une part du capital de la société cotée.

Ce prix de demande donne une évaluation des « capitaux


anciens, d’occasions » (des capitaux antérieurement crées). Quant aux
capitaux nouveaux, ils seront estimés en tenant compte de leur coût de
production, mais aussi de la marge que souhaitent appliquer leurs
producteurs ; on parlera d’un prix d’offres. Deux situations sont alors
envisageables.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Si le prix de demande est supérieur au prix d’offre, cela signifie, d’une


part qu’il coûte moins cher d’acheter des capitaux nouveaux (donc
d’investir), que d’acquérir des titres représentatifs des capitaux anciens, et
d’autre part que la majorité des investisseurs en Bourse achetant ces titres
pensent que les investissements dans le secteur concerné ont toutes les
chances d’être rentables dans le futur. Cela donne deux raison pour
relancer les investissements.

Si le prix de demande est inférieur au prix d’offre, cela signifie, d’une


part qu’il coûte plus cher d’acheter des capitaux anciens, d’autre part que la
majorité des investisseurs en Bourse vendant ces titres pense que les
investissements dans le secteur concerné risquent d’être moins rentables
dans le futur. Cela donne deux raisons pour reporter les investissements et
leur préférer les placements financiers liquides permettant de conserver une
position d’attente.

Pour reprendre la terminologie de J. R. Hicks, la liquidité est


cette propriété qu’ont certains actifs de permettre à leur détenteur de « faire
marche arrière » en les vendant, alors qu’un investissement réel réduit
nécessairement la gamme des choix. Dit autrement, il est plus facile de
liquider des actions représentatives d’un capital réel que de vendre
directement ce dernier.

Par la confrontation des prix d’offre et de demande, un marché


parfait devrait permettre l’égalité entre ceux-ci. Dans un monde incertain,
la Bourse permet la détermination du prix du capital, lui-même
conditionnant largement le volume d’investissement, et donc le niveau
d’activité de l’économie.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Sans la Bourse des valeurs, le comportement des entrepreneurs


pourrait être comparé à celui d’individus qui, ayant les yeux bandés
avanceraient qu’à petit pas. Retirant ce bandeau et bien que pouvant
trébucher (c'est-à-dire se tromper dans leur choix), les entrepreneurs
avancent plus rapidement, et par là, leur croissance est beaucoup plus
dynamique. Cependant, le marché financier est loin d’entre parfait.

1.4. L’internationalisation du marché financier


Le développement des marchés financiers a d’abord été une réalité
américaine. C’est au cours des années 1980 que les marchés se sont développés
au Japon, puis en Europe.

1.4.1. Le marché obligataire international : Euro-obligations et Eurodevises

L’obligation étrangère a été l’instrument traditionnel du marché


financier international. C’est une obligation vendue dans un pays étranger tout
en étant libellée dans la monnaie de ce pays.

Plus récemment est apparu l’obligation internationale, libellée


dans une monnaie différente de celle du pays où elle est vendue. On parle
alors d’Euro-obligation.

Les Euro-devises sont les devises étrangères déposées dans des


banques situées en dehors de leur pays d’émission. La plupart de ces euro-
dépôts, sont des euro-dollars.

1.4.2. Le marché financier mondial

Une intégration des marchés nationaux s’est progressivement


mise en place pour aboutir à une mondialisation financière. Henri Bourguinat
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

a introduit la notion des 3D pour expliquer la survenance de cette


mondialisation financière. Il s’agit de :

 Décloisonnement: l'abolition des frontières segmentant les marchés


financiers : segmentation des divers marchés nationaux, d'une part ;
mais aussi segmentation, à l'intérieur d'un même pays, entre divers
types de marchés financiers.
 Déréglementation : processus d'assouplissement ou de suppression
des réglementations nationales régissant, et restreignant, la
circulation des capitaux.
 Désintermédiation: accès direct des entreprises aux financements par
émission de titres plutôt que par un endettement auprès des
intermédiaires financiers

CHAPITRE 2 :
LE TAUX D’INTERET SUR LE MARCHE OBLIGATAIRE
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Le taux d’intérêt est l’un des facteurs déterminants la détention des


produits du marché obligataire. Mais, comment on le mesure ? En quoi il est
différent du rendement ? Et, quelle différence pouvons-nous établir entre le taux
d’intérêt réel et le taux d’intérêt nominal ? Ces questions trouveront des
réponses dans trois sections qui seront analysées dans ce chapitre.

2.1 Mesurer le taux d’intérêt

Les différents instruments de crédit diffèrent par les flux de


paiements (cash-flow) qu’ils impliquent et les dates de survenance de ces
paiements. Pour les comparer, on utilise les concepts de valeur actuelle.

2.1.1. Valeur actualisée.


L’idée de base est que 1 euro à recevoir dans un an a moins de
valeur que 1 euro reçu tout de suite ne serait-ce que parce que 1 euro reçu
aujourd’hui peut être placé dans un compte d’épargne qui rapporte un intérêt, et
permet donc d’avoir plus de 1 euro dans un an.

Si on désigne par VA la valeur d’aujourd’hui et par VF, la valeur


future, par i le taux d’intérêt et par n la maturité, la formule de l’actualisation
est:
VF
VA = (1+i) n

Exemple: Un prêt simple de 100 euros à un emprunteur qui doit rembourser le


principal et verser un intérêt de 10 euros à l’échéance. Le taux d’intérêt est alors
de 0,1 ou 10%. En effet, le taux est i = 10 euros/100 euros = 0,1 ou 10%. Le
prêteur aura après un an 100 x (1 + 0,1) = 110 euros.

Si le même prêt de 100 euros est à présent octroyé pour 3 ans au taux fixe de
10%, le prêteur aura :

100 x (1 + 0,1)3 = 133 euros.


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Donc pour disposer de 133 euros dans trois ans, il faudrait placer 100 euros
aujourd’hui car
133
3 = 100
(1+10 %)

En généralisant : après n années, les 100 euros deviennent, au taux de 10%: 100
x (1+0,1)n. Le calcul de la valeur d’aujourd’hui de montants à recevoir dans le
futur s’appelle l’actualisation.

2.1.2. Les principaux instruments de crédit

Généralement, on distingue quatre principaux instruments de


crédit : prêt simple, le crédit à versements constants, l’obligation classique et
l’obligation zéro-coupon.

Comment les comparer alors qu’ils prévoient des paiements à des


moments différents? On peut le comparer en utilisant le taux actuariel.

2.1.3. Le taux actuariel

Taux actuariel ou rendement actuariel (yield to maturity) ou


encore taux de rendement interne (internal rate of return) est le taux d’intérêt
qui égalise la valeur actuelle des flux de paiements futurs imposés par un
instrument financier et sa valeur aujourd’hui.

a) Pour le Prêt simple


Montant de 100 euros, maturité d’un an et 10 euros d’intérêts. Le
taux actuariel est calculé comme suit :
110 110
100 = (1+i)❑ 1+i = 100 i= 1,1-1=0,1 ou 10%

Le taux actuariel du prêt simple est égal au taux nominal, soit 10%.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

b) Pour le prêt à versements fixes (à mensualités ou annuités constantes)

Le taux actuariel est calculé en égalisant la valeur actuelle et la


valeur actualisée des paiements futurs :

V V V V
Valeur du prêt = ❑+ 2+ 3+ … + n
(1+i) (1+i) (1+i) (1+i)

Avec V le montant du versement annuel constant, et n le nombre


d’années jusqu’à la maturité ; on trouve i si la maturité et la valeur actuelle du
prêt sont connues.

Exemple : un prêt de 1000 euros, remboursé en 25 versements de 126 euros.

126 126 126 126


1000 = ❑+ 2+ 3+ … + 25
(1+i) (1+i) (1+i) (1+i)

Le taux actuariel calculé est de 12%

c) Pour l’obligation classique

L’obligation classique prévoit le paiement annuel d’un montant


fixe correspondant aux intérêts jusqu’à la maturité du prêt, et le règlement à
cette date d’un montant correspondant en général au remboursement du
principal.

La valeur faciale, valeur nominale ou pair est le montant de la


dette nominale par rapport auquel on calcule l’intérêt. Le coupon est le
montant payé annuellement. Le taux nominal ou taux de coupon est le ratio
du coupon sur la valeur faciale.

La prime de remboursement est la différence entre le montant


payé à maturité et la valeur faciale, alors que la prime d’émission est la
différence entre la valeur faciale et le montant effectivement remis par le
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

prêteur à l’emprunteur. Remboursement in fine si c’est totalement à


l’échéance.

Plus généralement, pour toute obligation classique:

C C C C F
P = (1+i)❑ + (1+i)2 + (1+i)3 + … + (1+i)10 + (1+i)10

Où, P est le prix de l’obligation, C le coupon annuel, F la valeur faciale, n le


nombre d’années jusqu’à la date de maturité. Si on connaît toutes ces
variables (P, C, F et n) on peut calculer le taux actuariel i.

Exemple : soit une obligation remboursée in fine au pair avec coupons de


100 euros pour une maturité de 10 ans une valeur faciale de 1000 euros. On
égalise la somme des valeurs actualisées des coupons et du versement final
avec le prix actuel de l’obligation, noté P :

100 100 100 100 1000


P = (1+i)❑ + (1+i)2 + (1+i)3 + … + (1+i)10 + (1+i)10

Le tableau ci-dessous, donne quelques exemples de taux actuariels


en fonction du prix actuel P

Tableau n°2. Prix de l’obligation et taux actuariel

Prix de l’obligation (euros) Taux actuariel (%)

1200 7,13

1100 8,48

1000 10

900 11,75

800 13,81
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Trois observations découlent de la lecture de ce tableau :

 quand le prix actuel est égal à la valeur de remboursement final et à la


valeur nominale, le taux actuariel est égal au taux nominal, ici 10 %.
 quand le taux actuariel augmente, le prix de l’obligation baisse. Donc, le
prix actuel de l’obligation est une fonction décroissante de son rendement
actuariel ;
 quand le prix de l’obligation est en dessous de sa valeur faciale, le taux
actuariel est supérieur au taux de coupon nominal.

Pour les obligations perpétuelles :

C C
P= ii= P

d) Obligation zéro-coupon

L’obligation zéro-coupon est émise à un prix inférieur à sa valeur


faciale. Elle ne verse pas de coupon et est remboursée à échéance à sa valeur.

De manière générale, le taux actuariel d’une obligation zéro-coupon


à un an peut s’écrire :

F−P
i= P

Où, F est la valeur faciale, et P le prix actuel. On constate que lorsque taux
actuariel diminue, le prix de l’obligation zéro-coupon augmente.

Le taux actuariel pour une obligation zéro-coupon est identique à celui d’un prêt
simple.

Exemple : Soit une obligation remboursable à 1000 euros dans un an. Si le prix
d’achat est de 900 euros, on obtient:

1000 1000−900
900 = 1+i i = 900 ; i = 0,11
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

2.1.4. Taux d’intérêt apparent

Le taux d’intérêt apparent est l’approximation du taux actuariel qui


est souvent utilisée sur les marchés obligataires car, il est aisé à calculer. On le
définit comme le rapport du coupon sur le prix d’un titre:

C
ic = P

Où ic est le taux d’intérêt apparent, P le prix de l’obligation et C le coupon


versé. Ce taux est le même que celui des obligations perpétuelles.

Les obligations éloignées (20 ans) de leur échéance peuvent être


assimilées aux obligations perpétuelles surtout si les taux d’intérêt sont
relativement élevés. Le taux d’intérêt apparent est une approximation du taux
actuariel d’autant plus acceptable que l’échéance est éloignée et que le prix est
proche du pair. Les deux évoluent dans tous les cas dans la même direction.

2.2. Distinction entre taux d’intérêt et rendement

La mesure correcte de ce qu’on a gagné en détenant un titre durant


une période donnée est appelée le rendement, plus exactement le taux de
rendement.

Le rendement de la détention d’un actif se définit comme la somme


des paiements versés durant la période de détention et le gain en capital lors de
la revente finale (ou du remboursement) rapportée au prix initial. Le rendement
résultant de la détention d’une obligation peut donc être différent de son taux
d’intérêt. Le rendement est le résultat a posteriori d’un placement, alors que le
taux d’intérêt actuariel est celui auquel peut s’attendre a priori quelqu’un qui
s’apprête à détenir un actif.

De manière générale, le rendement résultant de la détention d’un


actif durant une période de t à t+1 (une année de détention) peut s’écrire:
(C+Pt+1+P
t)
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

R=

Où, R est le rendement de la détention de t à t+1, Pt est le prix en t, Pt+1 est le


prix en t+1 et C est le coupon payé.

On obtient:
(C+Pt+1+P
C
R= + t)

qui est la somme du taux d’intérêt apparent i c = (C/Pt) et du taux de gain en


capital ou plus-value g= (Pt+1 – Pt)/Pt.

Donc R = ic + g.

Où ic est le taux d’intérêt apparent et g le taux de gain en capital.

Ainsi, même pour un titre pour lequel le taux d’intérêt apparent est
proche du taux actuariel, le rendement peut différer sensiblement de celui-ci, si
des fluctuations des prix des titres produisent des gains (ou des pertes)
importants en capital.

Pourquoi une hausse des taux d’intérêt conduirait-elle à une perte ?

Une hausse des taux d’intérêt conduirait à une perte parce que la
hausse des taux d’intérêt fait baisser le prix des obligations émises avant cette
baisse. La hausse des taux offre une opportunité de gain supérieur en plaçant le
montant dans un compte bancaire ou alors en acquérant une obligation émise à
un prix inférieur. Donc la hausse des taux entraîne des pertes en capital.

On peut éviter de réaliser de telles pertes en prolongeant la


détention d’une obligation jusqu’à la maturité. Mais on « loupe » quand même
une opportunité de gain supérieur du placement.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

2.2.1. Maturité et volatilité du prix des obligations: le risque de taux


d’intérêt

Les prix des obligations à maturité éloignée réagissent donc


davantage aux changements des taux d’intérêt. Ainsi, la volatilité des cours des
obligations à long terme est supérieure par rapport à celle des titres à plus court
terme. Les variations des taux d’intérêt rendent donc risqués les placements en
obligations à long terme. C’est le risque de taux d’intérêt.

Les titres à court terme ont peu de risque de taux d’intérêt, mais ont
bien un risque de réinvestissement: celui de devoir replacer son argent à la fin
d’une période pour la période suivante.

2.2.2.Taux équivalent et taux proportionnel

Il y a deux manières de considérer des périodes infra-annuelles :

 Le taux proportionnel calcule la fraction du coupon couru en considérant


que les intérêts ne se capitalisent pas au sein de l’année. Si i est le taux
annuel et n le nombre de jours, le taux proportionnel est:
njour
Tproport = i × 365

 Le taux équivalent suppose au contraire que les intérêts sont capitalisés au


jour le jour au sein de l’année. Il vaut donc:
Téquiv = (1+i)njour/365– 1

2.3. Taux d’intérêt réel et taux d’intérêt nominal

2.3.1. Les taux d’intérêts réels


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Le taux d’intérêt nominal, jusque-là considéré dans le cours ne tient


pas compte de l’inflation. Il se distingue du taux d’intérêt réel (ex ante) qui est
calculé en déduisant le taux d’inflation anticipé pour mieux refléter le coût ou le
revenu réels d’un crédit.

On définit le taux d’intérêt réel, i r, par l’équation de Fischer avec i


le taux nominal et πa le taux d’inflation anticipé:

(1+i) = (1+ir) × (1+ πa) i = ir +πa + (ir × πa)


i = ir + πa
ir = i - π a
La distinction entre i et ir est importante. C’est elle qui doit au mieux refléter les
incitations à emprunter ou à prêter.

2.3.2. Les taux d’intérêts nets d’impôt

Le véritable gain que prévoit le prêteur n’est pas le taux d’intérêt


déduit de l’équation de Fisher, mais bien le taux d’intérêt net d’impôt (ou après
impôt).

De manière générale, le taux d’intérêt réel net est égal à:

i(1-t) – πa

Où t est le taux d’imposition.

Exemple : si le taux d’imposition est égal à t = 35% et le taux d’intérêt d’un prêt
i = 10 %, alors le taux d’intérêt nominal net d’impôt est de 6,5% = [10 % x (1 -
0,35)]. Et si on anticipe une inflation de 2 %, le coût réel de l’emprunt est de 4,5
% (= 10% x (1 - 0,35) – 2 %).
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

CHAPITRE 3 :
L’OFFRE ET LA DEMANDE D’ACTIF FINANCIER

Après avoir analysé le taux d’intérêt dans le chapitre précédent, il


est question d’aborder dans ce troisième chapitre, l’offre et la demande d’actif
financier. Sur ce, il sera analysé tour à tour la théorie de la demande d’actif,
l’offre et la demande sur le marché obligataire et le marché de fonds prêtables.
3.1. Théorie de la demande d’actifs
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Un actif est un bien qui peut servir de réserve de valeur (monnaie,


actions, obligations, terres, immeubles, œuvres d’art etc.). Plusieurs
déterminants influencent les choix de détention d’actifs par les individus,
comme la richesse, le rendement anticipé, la liquidité et le risque.

3.1.1. La richesse (ou patrimoine)

C’est la totalité des biens possédés par l’individu. Quand la richesse


d’un individu s’accroît, ses ressources disponibles pour acheter tout actif
augmente, de sorte que la demande doit s’accroître pour tout actif. Toutes choses
égales par ailleurs, une augmentation de la richesse accroît la quantité demandée
d’un actif quel qu’il soit.

3.1.2. Rendement anticipé

Le rendement d’un actif (par exemple une obligation) mesure le


gain résultant de sa détention durant une période donnée. L’achat d’un actif est
influencé par le rendement que l’acheteur anticipe de cet actif.

Ainsi, pour une action donnée, si l’on anticipe deux possibilités,


une récession qui conduit à un rendement de 5%, et une croissance qui amène un
rendement de 15%, chacun avec une probabilité d’un demi, le rendement
anticipé est la moyenne de ces rendements, soit 10% (0,5 X 15% + 0,5 X 5%).

Si la perspective de récession disparaît et que de ce fait le


rendement anticipé de cette action augmente par rapport à celui des autres actifs,
il devient plus intéressant d’en détenir, et donc la demande pour cette action
augmente, toutes choses égales par ailleurs. La même chose se produit si le
rendement anticipé des autres actifs diminue, tandis que celui de cette action
reste stable ou diminue moins. Donc, l’augmentation du rendement anticipé d’un
actif relativement à celui des autres actifs conduit à un accroissement de la
demande de cet actif, toutes choses égales par ailleurs.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

3.1.3. Liquidité

Un actif est liquide si le marché sur lequel il est échangé a de la


profondeur et de la largeur, c’est-à-dire s’il y a beaucoup d’acheteurs et de
vendeurs en permanence. On peut vendre facilement sans brader et à moindre
coût de transaction. Plus un actif est liquide relativement aux autres actifs, plus
la demande pour cet actif augmente.

Un autre facteur affectant la demande d’un actif est la facilité et la


vitesse avec laquelle, il peut être converti en monnaie, sa liquidité. Les
immeubles sont relativement peu liquides car, il peut être difficile de trouver un
acheteur rapidement, et un vendeur pris par l’urgence peut être obligé de le
brader. En outre, les coûts de transaction (frais de notaire par exemple) sont
importants. Nombre des titres ont au contraire des marchés très liquides, les plus
liquides étant ceux des titres publics comme les bons et obligations du trésor.
Plus un actif est liquide relativement aux autres actifs, plus la demande pour cet
actif augmente.

3.1.4. Risque

Le degré de risque ou d’incertitude qui affecte le rendement d’un


actif influe aussi sur la demande pour cet actif. Entre l’actif dont le rendement
est certain et un actif, comme l’action évoquée ci-dessus, dont le rendement
anticipé est égal en moyenne mais incertain et qui peut varier sensiblement selon
la situation économique ou d’autres considérations, un agent économique ayant
une aversion envers le risque, spécialement dans leurs décisions en matière
financière, et donc que, toutes choses égales par ailleurs, plus le risque d’un actif
relativement aux autres actifs augmente, plus la demande pour cet actif diminue.

Toutes choses égales par ailleurs, la demande d’un actif est :


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

 fonction croissante de la richesse ;


 fonction croissante de son rendement anticipé relativement aux autres
actifs ;
 fonction décroissante de son risque anticipé relatif ;
 fonction croissante de sa liquidité relative.

3.2. L’offre et la demande sur le marché des obligations

Pour comprendre comment est déterminé le taux d’intérêt, il


convient d’examiner l’offre et la demande sur le marché des obligations. En
premier lieu, on dérive une courbe de demande, qui résume la relation entre la
quantité d’obligations demandée et leur prix, toutes choses égales par ailleurs.

3.2.1. La courbe de la demande


On considère la demande pour une obligation zéro-coupon qui ne
verse aucun coupon et est remboursable à 1000 euros au terme d’un an. Si la
période de détention est égale à un an, alors, comme on l’a vu au chapitre
précédent, le rendement est connu avec certitude et est égal au taux actuariel.
(F−P)
i = Ra ¿ P
Où, i est le taux d’intérêt actuariel, R a est le rendement anticipé, Fest la valeur
faciale (à laquelle l’obligation doit être remboursée), et P le prix d’achat.

On peut en utilisant cette formule calculer le taux d’intérêt


correspondant à chaque prix de l’obligation. Quand ce prix est égal à 950 euros,
le taux d’intérêt actuariel et le rendement anticipé sont égaux à :
1000−950
950
= 0,053 = 5,3%

Si l’on connait la valeur de la demande d’obligation à chaque prix,


on peut tracer la figure qui représente la relation entre quantité demandée et prix.
Pour permettre de lire cette figure à la fois en termes de prix et en termes de taux
d’intérêt, on représente deux axes ordonnés, l’un à droite pour le taux d’intérêt
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

et l’autre à gauche pour le prix des obligations. Le deux sont reliés de manière
univoque par l’équation précédente, et croissent en direction opposée : quand le
prix des obligations augmente, le taux d’intérêt diminue (voir graphique 4).
Ainsi quand le prix des obligations baisse de 950 à900 euros, le taux d’intérêt
passe de 5,3% à :

1000−900
900
= 0,111 = 11,1%

Comme ce rendement anticipé est supérieur, si toutes les autres


variables sont constantes (revenu, rendement anticipé des autres actifs, risque et
liquidité relatif), la demande d’obligations est supérieure.

Graphique 1.

A
950

Quantités d’obligations (B)


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Ainsi, le graphique ci-dessus, représente des demandes


respectivement de 100 et 200 milliards aux points A et B correspondant aux taux
d’intérêt 5,3 et 11,1% et aux prix 950 et 900 de l’obligation. Les points suivants
C, D et E correspondent à des prix encore plus bas et des taux d’intérêt encore
plus élevés, et donc des quantités demandées encore beaucoup plus importantes.
La courbe Bd qui relie ces points est la courbe de demande d’obligations. Elle est
décroissante en fonction du prix comme le sont habituellement les courbes de
demande, indiquant que, toutes choses égales par ailleurs, la demande est
d’autant plus élevée que le prix est plus bas.

3.2.2. La courbe d’offre


On dérive la courbe d’offre d’obligations sous la même hypothèse
essentielle que pour la courbe de demande, à savoir que toutes les variables
autres que le prix (et le taux d’intérêt) sont constants. La courbe d’offre exprime
la relation entre la quantité d’obligations offertes et le prix, toutes choses égales
par ailleurs.

Du point F au point G, le prix augmente de 750 à 800, ce qui implique une


baisse du taux d’intérêt de 33,3 à 25 %. Le coût de l’emprunt est plus faible, cela
pousse les entreprises à s’endetter, donc à émettre plus d’obligations. L’offre
d’obligations augmente de 100 à 200 milliards d’euros.

Bs, la courbe d’offre d’obligations est croissante en fonction du prix. Plus le prix
est élevé (le taux d’intérêt bas), plus les entreprises ne souhaitent vendre
d’obligations.

3.2.3.Equilibre du marché
L’équilibre du marché est obtenu quand l’offre et la demande sont
égales pour un prix donné, soit, sur le marché des obligations, quand l’offre et la
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

demande d’obligations sont égales (Bd = Bs) pour un prix (et donc un taux
d’intérêt) donné.
Sur le graphique ci-dessus, l’équilibre a lieu au point C où les
courbes se croisent, pour un taux d’intérêt dit d’équilibre de 17,6%
correspondant à un prix d’équilibre 850 euros et pour une quantité de 300
milliards d’euros.

Les concepts d’équilibre de marché et de prix ou de taux d’intérêt


sont utiles parce que le fonctionnement du marché tend à y conduire. Ainsi, sur
le graphique sous étude, si le prix des obligations est supérieur au prix
d’équilibre (par exemple s’il vaut 950 euros), la quantité d’obligations offerte
(point I) est supérieure à la quantité demandée (point A). On dit qu’il y a une
offre excédentaire ou un excès d’offre, du fait que l’offre est supérieure à la
demande, le prix des obligations tend à baisser comme l’indique la flèche près
du point A. Cette situation d’offre excédentaire se maintient tant que le prix est
supérieur au prix d’équilibre.
Symétriquement, si le prix est inférieur au prix d’équilibre (par
exemple s’il vaut 750 euros), la quantité demandée (point E) est supérieure à la
quantité offerte (point F), de sorte qu’il y a une demande excédentaire ou un
excès de demande d’obligations qui tend à faire augmenter le prix (flèche près
du point F). Ce phénomène se poursuit tant que le prix est inférieur au prix
d’équilibre.
Le même raisonnement peut être mené en terme du taux d’intérêt, et
montrer que lorsque le taux d’intérêt est en dessous de son niveau d’équilibre,
on observe un excès d’offre d’obligations qui tend à faire monter le taux
d’intérêt, tandis que l’inverse est vrai si le taux d’intérêt est au-dessus de son
niveau d’équilibre. Taux d’intérêt et prix convergent donc vers leurs valeurs
d’équilibre.

3.3. Le marché des fonds prêtables


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

L’analyse en termes d’offre et de demande d’obligations menée ci-


dessus et représentée au graphique 1 peut également être développée en termes
d’offre et de demande de fonds prêtables. Il convient de bien comprendre qu’il
ne s’agit pas d’une théorie différente, mais d’une terminologie différente qui
peut être utilisée alternativement pour représenter la même théorie.

L’inconvénient de la représentation utilisée au graphique 1 est que


le taux d’intérêt est représenté sur l’ordonné de droite comme décroissant de bas
en haut, ce qui est inhabituel et peut déranger des économistes plus habitués à
raisonner en termes de taux d’intérêt que des prix des obligations.

Si on préfère une représentation dans laquelle l’axe des taux


d’intérêt croît de bas en haut, on aboutit au graphique 2, sur laquelle les courbes
Bd et Bs ainsi que les points A à I du graphique 1 ont été reportés pour faciliter la
lecture.

Dans le cadre du graphique 2, un autre élément devient bizarre : la


courbe de demande Bd devient croissante, tandis que la courbe d’offre Bs devient
décroissante. Cela résulte naturellement du fait que l’offre est croissante en
fonction du prix et donc décroissante en fonction du taux d’intérêt, comme on
l’a vu précédemment, l’inverse étant vrai pour la demande.
Une manière de retrouver l’habituelle pente décroissante de la
courbe de demande et l’habituelle pente croissante de la courbe d’offre est de
renommer l’abscisse et les courbes d’offre et de demande.

Quand une entreprise offre des obligations, elle demande un prêt, de


sorte que la courbe d’offre d’obligations peut être réinterprétée comme une
courbe de demande des capitaux empruntés, ou demande de fonds prêtables. Si
on rebaptise l’abscisse comme représentant les quantités de fonds prêtables
échangées, on observe que la demande de fonds prêtables est bien décroissante
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

en fonction du taux d’intérêt, car les entreprises empruntent d’autant moins que
les taux d’intérêt sont moins élevés. Symétriquement, la courbe de demande
d’obligations peut être réinterprétée comme une courbe d’offre de capitaux que
les épargnants sont disposés à prêter, c’est-à-dire comme une offre de fonds
prêtables, car acheter une obligation consiste bien à prêter de l’argent
disponible. Cette courbe est bien fonction croissante du taux d’intérêt car les
prêteurs sont disposés à prêter d’autant plus que les taux d’intérêt sont élevés.

Taux d’intérêt (i) Graphique 2.


Demande d’obligations BS
(Offre de fonds prêtables Ls)

A
33
B I
25
C H
i*= 17,6
5,3 D
11,1 F Offre d’obligation Bd
G
E (Demande de fonds prêtables Ld)
100 200 300 400 500
Quantités d’obligation B
(Quantités de fonds prêtables Ld)

Lorsque le prix augmente, la demande diminue ou l’offre augmente.


Et lorsque le prix baisse, on observe des mouvements inverses. Ces
changements se traduisent par des déplacements le long des courbes de demande
et d’offre.

Toute autre variable faisant, toutes choses égales par ailleurs,


augmentée (baissée) la demande ou l’offre, provoque un déplacement à droite (à
gauche) des courbes de demande et d’offre.

Les déplacements de la demande ou de l’offre provoquent à leur


tour un changement du prix d’équilibre; et pour le marché des obligations, celui
du taux d’intérêt également.

3.3.1. Déplacements de la demande d’obligations


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Sur base de la théorie de la demande d’actifs, on peut déterminer les


facteurs pouvant influencer la demande d’obligations: richesse, rendement
anticipé relatif, risque relatif, et liquidité relative (cfr. Section 1).

3.3.1.1. Richesse

En période de croissance économique, le revenu et la richesse


augmentent, de sorte que la quantité d’obligations demandées s’accroît à tout
niveau de prix. La courbe de demande d’obligations, B d, se déplace à droite de
Bd 1 à Bd 2.

3.3.1.2. Rendement anticipé (RA)

Pour des obligations de maturité supérieure à un an (et


contrairement aux obligations zéro-coupon), le RA peut différer du taux
d’intérêt. Si on anticipe que les taux d’intérêts vont monter, le RA de la
détention d’obligations à long terme baisse, et la quantité demandée de telles
obligations diminue. De manière générale, l’anticipation de taux d’intérêt plus
élevés dans le futur diminue le RA des obligations à long terme, diminue leur
demande et déplace la courbe de demande vers la gauche. Et vice versa.

Une modification de l’inflation anticipée affecte le rendement des


actifs physiques (ou actifs réels) comme les automobiles ou les maisons. Cela
modifie aussi la demande d’obligations. Une hausse de l’inflation anticipée
diminue le rendement réel anticipé des obligations et réduit donc leur demande.

3.3.1.3. Risque

Si les prix sur le marché des obligations deviennent plus volatils, le


risque associé aux obligations augmente, et les obligations deviennent moins
attractives en comparaison d’autres actives. Une augmentation du risque des
obligations diminue leur demande et déplace la courbe de demande vers la
gauche.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

3.3.1.4. Liquidité

L’accroissement de la liquidité conduit à une augmentation de la


demande d’obligations à prix ou taux d’intérêt donné. La baisse de la liquidité a
l’effet inverse. Exemple: une réduction des commissions des intermédiaires sur
le marché des actions devrait accroître la liquidité sur ce marché et entraîner une
baisse de la demande d’obligations.

3.3.2. Déplacements de la courbe d’offres

Certains facteurs peuvent aussi déplacer la courbe d’offres


d’obligations. Les plus importants sont: la rentabilité anticipée des
investissements des entreprises, l’inflation anticipée, la politique budgétaire de
l’Etat.

3.3.2.1. Rentabilité anticipée de l’investissement des entreprises

En période de croissance économique, les occasions


d’investissements considérés comme rentables sont nombreuses, et donc l’offre
d’obligations pour tout niveau de prix (ou de taux d’intérêt) augmente. La
courbe d’offre d’obligations se déplace vers la droite. En récession, les
occasions d’investissements rentables sont moins nombreuses. C’est donc l’effet
inverse.

3.3.2.2. Inflation anticipée

Le coût réel de l’emprunt est mieux mesuré par le taux d’intérêt


réel. Une hausse de l’inflation anticipée réduit, à taux nominal inchangé, le coût
réel de l’emprunt et augmente le nombre d’entreprises souhaitant emprunter.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Une hausse de l’inflation anticipée augmente l’offre d’obligations et déplace la


courbe d’offre vers la droite.

3.3.2.3. Politique budgétaire de l’Etat.

Si le Trésor émet des obligations pour financer un déficit


budgétaire, il accroît l’offre d’obligations pour tout niveau des prix
d’obligations. Les déficits budgétaires déplacent donc la courbe d’offre
d’obligations vers la droite. Il en est de même si l’émission provient des
collectivités et établissements publics.

CHAPITRE 4
LA STRUCTURE PAR RISQUE ET LA STRUCTURE PAR
TERME DES TAUX D’INTERET

Le chapitre précédent (chapitre 3) a cherché à expliquer les


variations du taux d’intérêt dans le temps pour un même type d’obligation. Ce
chapitre (chapitre 4) a pour but d’expliquer les différences de taux d’intérêt entre
différents types d’obligation pour une même date.

Il cherche en particulier à expliquer pourquoi, en général, les taux


d’intérêt sont plus faibles pour les ´Etats que pour les entreprises, sont plus
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

faibles à court terme qu’à long terme, fluctuent davantage à court terme qu’à
long terme

4.1. Structure par risque du taux d’intérêt

Les taux d’intérêt entre diverses catégories d’obligations de même


maturité diffèrent pour une même date ; et ces différences (en anglais les
spreads) varient dans le temps.

Pa ailleurs, il sied de signaler que les taux des obligations


municipales sont général supérieurs à ceux des obligations du gouvernement.
Les taux des obligations privées notées Baa (plus risquées que des Aaa) sont
supérieurs aux autres.

4.1.1. Risque de défaut

Une caractéristique de toute obligation, qui influence son taux


d’intérêt, est son risque de défaut qui est le risque de voir son émetteur dans
l’incapacité de payer les intérêts ou de rembourser le principal lors de son
échéance.

Le défaut peut être partiel ou total. En général, lorsque l’émetteur


est un ´Etat, ce risque est faible car le gouvernement peut, s’il le faut, payer ses
dettes en augmentant les impôts ou en émettant de la monnaie. C’est pourquoi
les obligations du Trésor sont souvent appelées obligations sans risque. Mais ce
n’est pas toujours le cas, comme le montre l’exemple récent de la Grèce au sein
de la zone euro. Les obligations émises par des entreprises présentent un risque
de défaut en général plus important. Ce risque est plus élevé pour une entreprise
ayant de pertes importantes qu’une entreprise en bonne santé.

L’analyse en termes d’offre et de demande sur le marché des


obligations permet d’expliquer pourquoi une obligation qui comprend un risque
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

de défaut paye toujours une prime de risque positive, et pourquoi cette prime
augmente avec le risque de défaut.

La différence de taux d’intérêt entre obligations à risque et


obligations sans risque est appelée prime de risque.Une obligation présentant un
risque de défaut paie une prime de risque positive, d’autant plus grande que le
risque est élevé.Cette prime reflète l’intérêt additionnel que doit recevoir le
détenteur de l’obligation pour accepter de la détenir plutôt que de détenir des
obligations sans risque.

Par exemple, aux Etats-Unis, de fin juillet 2007 à mi-octobre 2008,


le taux d’intérêt sur les obligations Baa ont augmenté de 2,80 points de
pourcentage (ou 280 points de base), passant de 6,63% à 9,43%, le taux d’intérêt
sur les bons du Trésor ont diminué de 0,80 points de pourcentage (ou 80 points
de base), passant de 4,78% à 3,98%.

Ceci a entraîné une augmentation de 3,60 points de pourcentage (ou 360 points
de base) du spread Baa-bons du Trésor, qui est passé de 1,85% à 5,45%
(l’augmentation sur 15 mois la plus élevée depuis les années 1930).

Autre exemple : aux ´Etats-Unis, en décembre 2001, lorsque la société Enron


(7ème entreprise du pays par la taille) a été déclarée en faillite, le spread Baa-
Aaa s’est accru de 44 points de base en quelques jours.

Le graphique 3 ci-dessous montre une situation de départ où les prix


d’obligations et les taux d’intérêt sur le marché des obligations privées
(respectivement Pc et ic) sont égaux à ceux du marché des obligations du Trésor
(respectivement PT et iT). Ainsi on a :

P1C = P1T et i1C =i1T

La prime de risque (i1C - i1T) est donc nulle.Graphique 3. Effet de


l’augmentation du risque de défaut

Taux d’intérêt, i
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

ST

Lorsqu’apparaît une éventualité de défaut pour une entreprise, le risque de


défaut augmente, ce qui diminue le rendement anticipé sur les obligations de
cette entreprise. En outre, ce rendement devient plus incertain. La courbe de la
demande pour l’obligation privée se déplace vers la gauche dans la partie (a) du
graphique 3, de D1C à D2C.

En même temps, le rendement anticipé relatif de l’obligation du Trésor sans


risque de défaut par rapport à celui de l’obligation privée. La demande de
l’obligation du Trésor; sa courbe de demande va vers la droite : deD1T à D2T.

Le prix d’équilibre pour les obligations privées augmente de P 1C à P2C, alors que
celui des obligations de Trésor augmente de P 1T à P2T, le taux d’intérêt
d’équilibre pour les obligations privées augmente pendant que celui des
obligations du trésor diminue. Leur différence (i 1C à i2T), qui apparaît, mesure la
prime de risque apparue sur les obligations privées.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Ainsi, une obligation qui comporte un risque de défaut a toujours une prime de
risque positive, et une augmentation du risque de défaut conduit à un
accroissement de la prime de risque.

4.1.2. Liquidité

La liquidité influence également le taux d’intérêt. Plus un actif est


liquide (convertissable en monnaie rapidement et à faible coût), plus sa
détention est désirable toutes choses égales par ailleurs. Dans la plupart des
pays, les obligations du Trésor de long terme sont plus liquides que les
obligations privées car, une entreprise n’émet pas autant d’obligations que
l’Etat.

Soit une situation de liquidité équivalente et de similitude d’autres


caractéristiques. Si les obligations privées deviennent moins liquides, alors leur
demande diminue, leur prix baisse et leur taux d’intérêt augmente.
Symétriquement la demande des obligations du Trésor augmente car leur
liquidité augmente relativement à celle des obligations privées. Leur prix
augmente et leur taux d’intérêt diminue.

Une prime de risque (qu’on devrait plutôt qualifier de prime de


risque et de liquidité) apparaît comme sur le graphique 3. Car, l’effet d’une
baisse de la liquidité des obligations privées est qualitativement identique à
l’effet d’une hausse du risque de défaut sur ces obligations.

4.1.3 Fiscalité

Les obligations municipales sont plus risquées et moins liquides


que les obligations du Trésor. Or, aux Etats-Unis, leur taux d’intérêt a été plus
faible que celui des obligations du Trésor de même maturité entre 1940 et 2000
environ.Cela est dû au fait que les intérêts qu’elles versent sont exonérés de
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

l’impôt fédéral sur le revenu, contrairement aux intérêts que versent les
obligations du Trésor.

Un individu imposé à 35% et ayant le choix entre détenir une


obligation du Trésor versant un coupon de 100 dollars (option A), une obligation
municipale versant un coupon de 80 dollars (option B), peut choisir l’option B
car l’option A lui donne un coupon net d’impôt de 65 dollars.

Le taux d’imposition sur le revenu a été plus élevé entre 1940 et


2000 qu’avant 1940 et après 2000. Le taux d’imposition relativement faible
après 2000 est essentiellement dû à une réforme fiscale de l’administration Bush
en 2001 (prévoyant une baisse progressive du taux d’imposition maximal de
39% à 35% en 10 ans), partiellement et temporairement prolongée par
l’administration Obama en 2010.

Cette différence de fiscalité contribue à expliquer pourquoi le


spread entre obligations municipales et obligations du Trésor a été positif ou nul
avant 1940 et après 2000, négatif entre 1940 et 2000.

Le raisonnement en termes d’offre et de demande permet d’illustrer


l’impact de la fiscalité sur le graphique 4.

On suppose au départ que les obligations des municipalités (m) et


du Trésor (T) sont identiques tel que leurs prix et leurs taux sont identiques (on a
donc P1m =P1T et i1m =i1T). La prise en compte de l’avantage fiscal des obligations
municipales accroît leur rendement relatif anticipé net d’impôt. Leur demande
augmente (la courbe se déplace de D 1màD2mdroite) alors que celle des obligations
du Trésor diminue (la courbe se déplace de D 1TàD2T à gauche). Le prix des
obligations municipales augmente (son taux d’intérêt diminue), alors que
l’inverse se produit pour les obligations du Trésor.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

En somme, la structure par risque des taux d’intérêt, c’est-à-dire la relation entre
les taux d’intérêt d’obligations de même maturité, s’explique par trois facteurs :
le risque de défaut, la liquidité, la fiscalité.

4.2. La structure par terme des taux d’intérêt

On s’intéresse maintenant à la structure par terme des taux d’intérêt,


c’est-à-dire à la façon dont ils varient entre obligations de même risque,
liquidité, fiscalité, mais de maturités différentes.

La représentation des taux d’intérêt d’obligations de maturités différentes, toutes


choses égales par ailleurs, s’appelle courbe des taux (yield curve).

La courbe des taux peut être :

 croissante (taux à long terme supérieurs aux taux à court terme) ;


 plate (taux à long terme égaux aux taux à court terme) ;
 décroissante ou inversée (taux à long terme inférieurs aux taux à court
terme).

Ou prendre une forme plus compliquée.

Les études empiriques ont mis en évidence les trois faits stylisés suivants :
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

 les taux d’intérêt pour des obligations de maturités différentes varient


habituellement ensemble dans le temps ;
 la courbe des taux est plus fréquemment croissante lorsque le taux à court
terme est bas, plus fréquemment inversée, lorsque le taux à court terme est
élevé (ou, de manière équivalente, les taux à court terme fluctuent en
général davantage que les taux à long terme) ;
 la courbe des taux est habituellement croissante.

Quatre théories ont été mises en avant pour expliquer la structure


par terme des taux d’intérêt : (i)la théorie des anticipations, qui peut expliquer
les faits 1 et 2; (ii)la théorie des marchés segmentés, qui peut expliquer le fait 3;
(iii)la théorie de la prime de liquidité et la théorie de l’habitat préféré, qui
peuvent expliquer les faits 1, 2, et 3.

4.2.1. La théorie des anticipations.

Le point de départ est que le taux d’intérêt d’une obligation à long


terme est égal à la moyenne des taux d’intérêt à court terme que les agents
économiques prévoient d’observer au cours de la vie de l’obligation.

La théorie des anticipations fait l’hypothèse que les agents


souhaitant prêter pendant n périodes n’ont pas de préférence entre acheter des
obligations d’une maturité plutôt que d’une autre de même rendement. De ce
point de vue, les obligations de maturité différente sont parfaitement
substituables.

Soient deux stratégies d’investissement :

 Acheter une obligation à un an, et en acheter une nouvelle, également à un


an, lorsqu’elle arrive à maturité ;
 Acheter une obligation à deux ans et la détenir jusqu’à sa maturité.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Pour que les deux obligations soient détenues, elles doivent avoir le
même rendement anticipé, et donc le taux d’intérêt de l’obligation à deux ans
doit être égal à la moyenne des deux obligations à un an.

Si, le taux d’intérêt à un an est de 1% et le taux anticipé dans un an


est de 3%, la première stratégie conduit à un rendement anticipé sur deux ans de
(1%+3%)/2, soit 2%. Un acheteur n’est indifférent entre les deux stratégies que
si le taux d’intérêt de l’obligation à deux ans est de 2% également.

Plus généralement, soient :

- it = taux d’intérêt aujourd’hui (temps t) d’une obligation de maturité une


période ;
- iet+1 = taux d’intérêt anticipé aujourd’hui pour la période prochaine (temps
t+1) d’une obligation dont la maturité est d’une période ;
- i2t = taux d’intérêt aujourd’hui (temps t) d’une obligation de maturité deux
périodes.

Par approximation, le rendement anticipé d’un placement de 1 euro en


obligations à deux périodes gardé pendant les deux périodes est 2i2t.

Toujours par approximation, le rendement anticipé d’un placement consistant à


acheter successivement deux obligations de maturité d’une période est i t + iet+1.

Du fait des possibilités d’arbitrage, il n’y aura des détenteurs pour toutes ces
obligations que si les rendements de ces deux stratégies de placement sont
identiques, à savoir si :

2i2t = it + iet+1 donc sii2t = it + iet+1/2

Autrement dit, le taux de l’obligation de maturité de deux périodes


doit être égal à la moyenne des deux taux pour une période.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Pour des obligations d’une maturité plus importante et pour un nombre de


périodes aussi important qu’on le souhaite, on trouve le taux d’intérêt i nt, d’une
obligation de maturité n périodes:
it+ iet+1 + iet+2 + … + iet+(n-
int = 1)

D’après cette théorie, la courbe des taux est croissante quand on anticipe une
hausse future des taux courts, plate quand on anticipe une stagnation future des
taux courts, inversée quand on anticipe une baisse future des taux courts.

Historiquement, on observe une persistance du niveau des taux


courts dans le temps : en moyenne, suite à une hausse, les taux courts ne
reviennent pas à leur valeur initiale avant plusieurs périodes.

La théorie des anticipations peut donc expliquer le fait stylisé 1 :


une hausse des taux courts se répercute sur les taux à plus long terme, ce qui
conduit à des variations parallèles.

Historiquement, on observe aussi une tendance des taux courts à revenir


(graduellement) vers leur moyenne (mean reverting) : un taux court élevé
aujourd’hui aura tendance à décroître dans le futur, un taux court bas
aujourd’hui aura tendance à croître dans le futur.

La théorie des anticipations peut donc expliquer le fait stylisé 2 : la


courbe des taux a tendance à être croissante quand les taux sont bas et inversée
quand ils sont élevés.

Mais la théorie des anticipations ne peut pas expliquer le fait stylisé


3, qui dit que la courbe des taux est en général croissante.

En effet, selon cette théorie, ce fait impliquerait que l’on anticipe


habituellement une hausse future des taux courts. Or, historiquement, les taux
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

courts n’ont pas de tendance systématique à la hausse : il faudrait donc supposer


des erreurs systématiques d’anticipation, ce qui semble peu acceptable.

La théorie des anticipations prédit à la place que la courbe des taux


devrait en général être plate.

4.2.2. La théorie des marchés segmentés

A l’opposé de la théorie des anticipations, la théorie des marchés


segmentés fait l’hypothèse que les obligations de maturités différentes ne sont
pas du tout substituables.

Les marchés d’obligations de maturités différentes sont donc


entièrement séparés (ou “segmentés”) et indépendants entre eux. L’idée est que
les investisseurs ont des raisons importantes de préférer une maturité à une
autre.

Par exemple, ils peuvent avoir une durée précise de placement en tête (suivant
l’horizon de leurs dépenses prévues) et souhaiter que la maturité de leur
placement soit identique pour supprimer le risque.

Il semble raisonnable de penser que les investisseurs ont en général


une préférence pour des durées de placement plus courtes que les durées
d’emprunt souhaitées par les emprunteurs.

En ce cas, le taux d’intérêt d’équilibre sur le marché des obligations à court


terme doit en général être plus bas que celui sur le marché des obligations à long
terme.

La théorie des marchés segmentés peut donc expliquer le fait stylisé


3 : la courbe des taux est en général croissante.

En revanche, cette théorie ne peut pas expliquer les faits stylisés 1 et 2.

4.2.3. La théorie de la prime de liquidité et la théorie de l’habitat préféré


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

La théorie de la prime de liquidité affirme que le taux d’intérêt


d’une obligation à long terme est égale à la moyenne des taux d’intérêt à court
terme anticipés sur la vie de l’obligation, augmentée d’une prime de liquidité qui
dépend des conditions d’offre et de demande pour cette obligation.

Hypothèse clé: les obligations de différentes maturités sont


substituables, le rendement anticipé d’un type d’obligation influençant le prix
des obligations d’un autre type, mais cette substituabilité est imparfaite car, il
peut y avoir une préférence pour une maturité particulière.

Comme les investisseurs préfèrent des obligations à court terme,


moins risquées, ils ne les détiennent que si leur rendement comprend une prime
de liquidité positive.

La théorie des anticipations est modifiée par l’ajout d’une prime de


liquidité:

it+ iet+1 + iet+2 + … + iet+(n-


int = 1) + lnt

Où lnt est la prime de liquidité d’une obligation de maturité n périodes à l’instant


t. Ce terme est toujours positif et croissant avec la maturité n.

La théorie de l’habitat préféré est proche de la théorie de la prime


de liquidité. Elle suppose que les investisseurs ont une préférence pour des
obligations d’une certaine maturité, qu’elle appelle leur « habitat préféré ». Les
investisseurs ont comme habitat préféré des obligations de maturités courtes.
Pour détenir des obligations de long terme, il faudrait que leurs rendements
anticipés soit supérieurs. On aboutit à la même équation que ci-dessus.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Graphique n°5.Relation entre prime de liquidité et théorie des anticipations

La théorie de la prime de liquidité (théorie de l’habitat préféré)


permet d’expliquer les trois faits stylisés. Le premier membre de l’équation (3)
explique les deux premiers faits alors que la prime de liquidité explique le fait
que les courbes de taux soient généralement croissantes.

La théorie de la prime de liquidité permet de dégager les


anticipations du marché sur les taux d’intérêt à court terme futurs à partir de
l’observation de la courbe des taux :

- une courbe fortement croissante indique des taux courts anticipés à la


hausse (a) ;
- une courbe légèrement croissante indique une stabilité des taux de court
terme anticipés (b) ;
- une courbe plate indique une faible baisse des taux de court terme
futurs (c) ;
- une courbe de taux inversée indique l’anticipation d’une forte baisse (d) .

Graphique n°6. Courbe des taux : instrument de prévision


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

4.3. Les agences de notation

Une bonne évaluation du risque de défaut est essentielle pour les


prêteurs car, il varie beaucoup et joue un rôle important dans la détermination du
taux d’intérêt sur une obligation donnée. Les structures habilités à satisfaire le
besoin d’évaluation du risque de défaut des prêteurs, des entreprises appelées
agences de notation (rating agencies).

Les trois principales agences sont Moody’s (République


Tchèque),Standard and Poor’s (………), et Fitch (………), qui représentent
aujourd’hui 94% du chiffre d’affaires mondial de cette activité.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Les agences fournissent des appréciations sur la qualité des


obligations des entreprises ou des institutions publiques en termes de probabilité
de défaut.

Aux Etats-Unis : une qualité minimale de Baa ou BBB est


nécessaire pour obtenir la mention investment grade, condition légale pour que
les banques puissent y investir les dépôts de leur clientèle; les autres obligations
sont appelées obligations spéculatives, ou pourries (junk bonds) ou à haut
rendement (high-yield bonds).

Les agences de notation (ou de rating) fournissent des appréciations


sur la qualité des obligations des entreprises ou des collectivités publiques. Lors
de la crise de 2008, le rôle de ces agences a été décrié. Un problème de conflit
d’intérêt a été évoqué.

4.3.1. Qu'est-ce que la notation

La notation (rating) donne une opinion sur la capacité


d'un émetteur à remplir ses obligations vis-à-vis de ses créanciers, ou d'un titre à
générer les paiements de capital et d'intérêts conformément à l'échéancier prévu.
Les entités notées sont donc potentiellement tous les agents financiers ou non
financiers émetteurs de dette : Etats, organismes publics ou semi-publics,
établissements financiers, entreprises non financières. La notation peut
également porter non sur un émetteur en général, mais sur un titre en particulier .

Différentes échelles de notation existent suivant les agences, les


entités notées et la période considérée (long terme ou court terme). A titre
d'exemple, voici l'échelle de notation utilisée par Fitch Ratings pour la notation
long terme des émetteurs, que nous nous sommes permis de traduire en Français.

Tableau n°4. Echelle de notation utilisée par Fitch Ratings


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Notation Description
AAA La notation 'AAA' correspond à la plus faible possibilité de risque
Qualité de crédit la de défaut. Elle n'est attribuée que dans le cas d'une capacité
meilleure exceptionnellement élevée à respecter les engagements financiers.
Il est hautement improbable que cette capacité soit affectée
négativement par des événements prévisibles.
AA La notation 'AA' correspond à une possibilité de très faible risque
Qualité de crédit très de défaut. Elle dénote une capacité très élevée à respecter les
élevée engagements financiers. Cette capacité n'est pas significativement
vulnérable à des événements prévisibles.
A La notation 'A' correspond à une possibilité de risque de crédit
Qualité de crédit élevée faible. La capacité à respecter les engagements financiers est
jugée forte. Cette capacité peut néanmoins être plus vulnérable à
des conditions commerciales ou économiques défavorables que
dans le cas de notations plus élevées.
BBB La notation 'BBB' indique que les possibilités de défaut de crédit
Bonne qualité de crédit sont actuellement basses. La capacité à respecter les engagements
financiers est considérée comme satisfaisante mais des conditions
commerciales ou économiques défavorables sont davantage
susceptibles de porter atteinte à cette capacité.
BB La notation 'BB' indique une vulnérabilité élevée au risque de
Spéculatif défaut, notamment en cas d'évolutions défavorables des
conditions commerciales ou économiques. Cependant, des marges
de manœuvre commerciales ou financières existent et permettent
de soutenir le service des engagements financiers.
B La notation 'B' indique que le risque de défaut concret est présent,
Hautement spéculatif mais une étroite marge de sécurité subsiste. Les engagements
financiers sont actuellement tenus; cependant, la capacité durable
de paiement est vulnérable à une dégradation de l'environnement
commercial ou économique.
CCC Le défaut de paiement est une possibilité réelle.
Risque de crédit
substantiel
CC Un défaut de paiement de quelque nature apparaît probable.
Risque de crédit très
élevé
C Le défaut de paiement est imminent ou inévitable, ou l'émetteur
Niveau est en suspension de paiement (standstill).
exceptionnellement
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

élevé de risque de crédit


RD L'émetteur a connu un défaut de paiement persistant sur une
Défaut de paiement obligation, un prêt ou toute autre dette financière concrète, mais
restreint (Restricted n'est pas entré en dépôt de bilan, sous administration judiciaire ou
Default) sous toute autre procédure officielle de liquidation, et n'a par
ailleurs pas cessé ses activités.
D L'émetteur est en dépôt de bilan, sous administration judiciaire ou
Défaut de paiement une autre procédure officielle de liquidation, ou a par ailleurs
cessé ses activités.

4.3.2. Ce que ne dit pas la notation

Les agences insistent beaucoup sur le fait que le rating représente


une opinion, et non une quelconque forme de garantie ou d'engagement de leur
part, ce qui au regard de la loi américaine les met à l'abri de poursuites de la part
des investisseurs. Par ailleurs le rating permet une évaluation relative des
différents émetteurs, mais ne constitue pas une évaluation de la probabilité de
défaut absolue d'un émetteur. Cette remarque a d'ailleurs une certaine pertinence
si l'on considère que, dans l'absolu, des conditions économiques adverses
peuvent être susceptibles de fragiliser l'ensemble des agents sans nécessairement
modifier leur positionnement relatif.

Le rating constitue une évaluation du risque de crédit à l'exclusion


de tout autre risque. Il ne donne aucune indication sur la rentabilité potentielle
d'un investissement, ni sur la volatilité des titres émis. Le rating ne dit rien non
plus sur la liquidité d'un titre, c'est-à-dire la possibilité de trouver un prix et une
contrepartie de marché pour acheter ou vendre ce titre. Cet aspect s'est fait
cruellement sentir lors de la dernière crise financière quand de nombreux
investisseurs se sont trouvés dans l'impossibilité de liquider leurs positions sur
des titres pourtant notés « triple A ».
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Le rating ne donne pas d'indication sur la probabilité de défaut


d'un émetteur, ni sur la perte potentielle en cas de défaut. Il ne donne pas non
plus d'avis sur la qualité d'un émetteur en tant que contrepartie, autre que le
risque de crédit qu'il représente.

Depuis les accords de Bâle II établis en 2004 sous l’égide de la


Banque des Règlements Internationaux (BRI), les notes données par ces agences
sont prises en compte dans la régulation prudentielle du système bancaire, ce qui
donne à ces notes un rôle très important. Les agences n’anticipent pas toujours
correctement les cessations de paiement (par exemple celles d’Enron ou de
General Motors). Elles ont été sujettes à un conflit d’intérêt dans les années
2000 car elles conseillaient des clients sur la façon de structurer des instruments
financiers complexes versant des revenus à partir de portefeuilles de crédit
immobiliers hypothécaires risqués (mortgage subprimes); elles notaient ces
mêmes produits dans le même temps.

4.3.3. Les agences de notation et la crise financière

Les agences de notation sont accusées d'avoir participé au


déclenchement de lacrise financière de 2007-2009 pour deux raisons. Tout
d'abord elles ont eu tendance à noter bien trop complaisamment des titres qui
finalement se sont avérés « toxiques », en dépit des montages financiers
sophistiqués sur lesquels ils reposaient. Quand les conditions du marché
immobilier ont commencé à se dégrader aux Etats-Unis, elles ont réagi en
abaissant brutalement le rating de nombreuses émissions (« downgrading »),
contribuant à la spirale baissière dans laquelle était entrainé le marché.

Auparavant, les agences avaient déjà suscité les critiques lors de


faillites retentissantes qu'elles avaient été totalement incapables d'anticiper :
Parmalat, Enron, Worldcom, etc. Aujourd'hui, elles sont de nouveau pointées du
doigt dans la crise de la dette grecque.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

CHAPITRE 5.
MARCHE BOURSIER, THEORIE DES ANTICIPATIONS
RATIONNELLES ET HYPOTHESE D’EFFICIENCE DES MARCHES

La globalisation financière repose sur l’hypothèse fondamentale


d’autorégulation de marché au regard de leur efficience à travers l’ajustement
instantané des prix et des anticipations rationnelles. Il est question dans ce
chapitre d’examiner les différents modèles de détermination du prix de
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

l’action (section 1) en mettant un accent particulier sur la théorie des


anticipations rationnelles (section 2) et celle de l’efficience des marchés (section
3)

5.1. Evaluer le prix d’une action

Les détenteurs d’actions d’une entreprise possèdent une fraction de


celle-ci. La détention d’actions leur donne, entre autres, le droit de vote et le
droit résiduel sur tous les revenus de l’entreprise. Le droit de vote se traduit en
temps normal par le versement d’une partie du résultat net de l’entreprise aux
actionnaires: c’est le dividende dont le montant est décidé par le conseil
d’administration. En plus de ces droits; l’actionnaire a la possibilité de revendre
ses actions. A quel prix vendre? Il faudrait évaluer le prix de l’action.

L’un des principes fondamentaux de la finance conduit à valoriser


un actif quelconque à la valeur actualisée de tous les flux de revenus générés par
cet actif au cours de sa durée de vie. Par exemple, un immeuble de bureaux sera
vendu à un prix équivalant aux flux nets de revenus que l’on peut
raisonnablement espérer de son exploitation (sommairement, les loyers moins
les coûts d’entretien) au cours de sa durée de vie. De même, la valeur d’une
action est la valeur actualisée des flux financiers futurs qu’elle produira. Ces
flux peuvent être des dividendes, le prix de revente de l’action, ou bien les deux.

Pour introduire la théorie de l’évaluation des actions, considérons le


scénario le plus simple : un agent procède à l’achat d’une action, il la conserve
pendant une période, et touche un dividende puis revend l’action. C’est donc un
modèle d’évaluation mono périodique.

5.1.1. Le modèle d’évaluation mono périodique

Supposons qu’un agent dispose de fonds inutilisés et qu’il soit prêt


à les investir pendant un an. Après lecture de la presse financière, il décide
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

d’acheter les actions de la société générale. Il appelle son courtier et apprend que
l’action coûte 50 euros. Elle distribue un dividende annuel de 2 euros, et les
analystes prévoient pour l’année à venir une augmentation de 10 euros du cours
de cette action. L’agent doit-il acheter cette action ?

Pour répondre à cette question, il faut tout d’abord déterminer, si le


prix actuel de l’action reflète bien les anticipations des analystes. Pour évaluer la
valeur de l’action, il faut déterminer la valeur actualisée des flux futurs. Le taux
d’actualisation est le taux de rendement exigé par les actionnaires. Les revenus
futurs sont le dividende et le prix de vente final. La valeur actualisée d’une
action est :

¿1 P1
P0= (1+ K ) + (1+ K ) (1)
e e

Avec

P0 = Prix actuel de l’action. L’indice indique que l’on se situe en t = 0, l’instant


présent.

Div1 = Dividende payé à la fin de la première année.

Ke = taux de rentabilité exigé par les actionnaires.

P1 = prix de l’action à la fin de la première année. C’est évidemment une


anticipation de la part de l’agent.

Si, après divers calculs, l’agent pense qu’un taux de rentabilité de 12% est
satisfaisant compte tenu de l’investissement qu’il projette, il est possible à l’aide
de l’équation (1) de calculer le prix d’une action Société générale.

Donc ke = 0,12. D’autre part, Div1= 2, P1 = 60. On peut donc calculer la valeur
actuelle théorique de l’action Société générale, sous l’hypothèse d’un taux de
rentabilité de 12% :
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

2 60
P0 = 1+ 0 ,12 + 1+ 0 ,12 = 55,36 €

D’après l’analyse de l’agent, la valeur actualisée des revenus liée à


la détention de l’action pendant un an est de 55,36 euros. Le prix de marché
actuel de l’action est de 50 euros, il est donc rentable d’acheter celle-ci.
Toutefois, si l’action est cotée effectivement moins de 55,36 euros, il doit y
avoir une raison : les autres investisseurs peuvent par exemple estimer que le
risque inhérent aux revenus futurs justifie un taux d’actualisation supérieur à
12%, ou bien que les perspectives de dividendes ou d’augmentation du cours de
l’action sont supérieurs aux prévisions des analystes.

5.1.2. Le modèle généralisé d’évaluation par les dividendes

Il est difficile d’étendre le modèle d’évaluation mono périodique au


cas de plusieurs périodes, en suivant le même raisonnement. La valeur actualisée
d’une action est en effet toujours égale aux revenus actualisés qu’elle générera.
Ces revenus sont, sur n périodes, la série de n dividendes (un par période) et le
prix de la revente de l’action, à la fin de la n-ième période. La formule
généralisée à n périodes d’évaluation des actions s’écrit donc :

D1 D2 Dn Pn
P0= 1 + 2 +…+ n + n (2)
(1+ K e ) (1+ K e ) (1+ K e ) (1+ K e )

Utiliser l’équation (2) pour évaluer une action nécessite de faire


une hypothèse sur le cours de l’action lors de sa revente. En d’autres termes, il
faut connaître Pn pour trouver P0. Toutefois, si n est grand, c’est-à-dire si le
revenu Pn survient à une date éloignée, l’hypothèse a peu d’impact sur P 0. Par
exemple, la valeur actualisée du produit de la vente d’une action qui vaudra 50
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

euros dans 75 ans, au taux d’actualisation de 12%, est d’un centime d’euro

[ 50 €
(1+0 , 12)
75
]
=0 , 01 € .

La conséquence de ce raisonnement est qu’il est possible de


calculer la valeur de l’action à partir de la seule valeur actualisée des flux de
dividendes. Le modèle généralisé d’évaluation d’une action par les dividendes
peut donc s’écrire :

Dt
P0 = ∑ (3)
t −1 (1+ K e )t

L’équation (3) signifie que le prix d’une action peut être évalué
uniquement grâce à la valeur actualisée des dividendes, et rien d’autre.
Toutefois, beaucoup d’entreprises ne distribuent pas des dividendes. Comment
alors estimer la valeur des actions de ces entreprises ?

Les actionnaires pensent que ces entreprises distribueront, un jour,


des dividendes. La plupart du temps, une entreprise se met à distribuer des
dividendes dès lors que la phase de croissance rapide de son cycle de vie
s’achève.
Le modèle généralisé d’évaluation d’une action par les dividendes
nécessite donc l’actualisation d’un flux infini de dividendes, ce qui peut être
pour le moins délicat. Des modèles simplifiés ont donc été développé, comme le
modèle de Gordon-Shapiro, qui suppose un taux de croissance constant des
dividendes.

5.1.3. Le modèle de Gordon-Shapiro


La plupart des entreprises essaient de verser tous les ans un
dividende qui croît à un taux constant. L’équation (4) transforme l’équation (3)
en intégrant cette hypothèse supplémentaire :
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »
1 2 ∞
D0 (1+ g) D0 (1+ g) D0 (1+ g)
P0 = 1 + 2 +… + ∞ (4)
(1+ K e ) (1+ K e ) (1+ K e )

D0= dernier dividende versé par l’entreprise.


g = taux de croissance anticipé du dividende
Ke = taux de rentabilité exigé par l’actionnaire.

L’équation (4) peut être simplifiée, cela donne alors l’équation (5)
D0 (1+ g) D1
P0= K −g = ( K −g) (5)
( e ) e

Ce modèle est très précieux pour évaluer une action, malgré


quelques hypothèses simplificatrices, à savoir :
 les dividendes sont supposés croître à l’infini à taux constant. De fait, il suffit
que cette hypothèse de croissance à taux constant soit vérifiée pendant une
période suffisamment longue pour que le modèle donne les résultats
satisfaisant. En effet, des erreurs commises sur qui seront versés dans un futur
lointain ont peu d’importance, puisqu’une fois actualisées, elles deviennent
très faibles.
 le taux de croissance des dividendes est supposé inférieur au taux de
rentabilité exigé par les actionnaires. Myron Gordon, qui a développé ce
modèle, a démontré que cette hypothèse était acceptable : si ce n’était pas le
cas, à long terme, l’entreprise pourrait théoriquement croître sans limites.

5.1.4. Relation politique monétaire et cours boursiers

Les analystes de marché suivent tous les faits et gestes des


gouverneurs de la Banque Centrale, parce qu’ils savent que la politique
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

monétaire est un déterminant important du prix des actions. Quel est le lien entre
la politique monétaire et le cours des actions ?

L’équation (5) du modèle de Gordon-Shapiro montre en effet que la


politique monétaire peut faire varier les cours des actions de deux manières.
Tout d’abord, lorsque la Banque Centrale décide de baisser son taux directeur, la
rentabilité des obligations (et des placements alternatifs aux actions) baisse. Les
actionnaires sont donc prêts à accepter une rentabilité plus faible de leurs
actions. Ke baisse donc, ce qui réduit le dénominateur de l’équation (5) et
conduit à une augmentation de P0(augmentation du prix des actions). D’autre
part, une baisse du taux d’intérêt est susceptible de relancer l’économie, donc
d’accroître le taux de croissance de dividendes g. Cette augmentation de g
conduit ainsi à une baisse du dénominateur dans l’équation (5) et une
augmentation de P0.

L’influence de la politique monétaire sur le prix des actions est l’un


des canaux par lequel la politique monétaire agit sur l’économie.

5.2. Théorie des anticipations rationnelles

Les principes fondamentaux de l’évaluation des actions montrent


ainsi que cette évaluation dépend des anticipations des agents, particulièrement à
propos des dividendes futurs. En fait, l’état de tous les secteurs économiques
dépend fondamentalement des anticipations des agents. Il est crucial de
comprendre la façon dont les agents forment leurs anticipations. La théorie des
anticipations rationnelles est la plus utilisée actuellement pour décrire la façon
dont les agents économique forment leurs anticipations, qu’ils soient dirigeants
d’entreprise ou simple consommateurs.

Dans les années 1950 et 1960, les économistes considéraient que les
agents formaient leurs anticipations à partir de leurs expériences passées
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

exclusivement. L’anticipation du taux d’inflation futur, par exemple, était vue


comme la moyenne des taux d’inflation passés. Les anticipations formées de
cette façon par les agents sont dénommées anticipations adaptatives, parce que
les changements dans les anticipations des agents se font lentement et de
manière progressive. Par exemple, si les taux d’inflation passés sont de 5%,
l’anticipation de l’inflation future sera de 5%. Si le taux d’inflation grimpe à
10%, l’anticipation de l’inflation future grimpera à 10%, mais progressivement.
La première année, l’inflation anticipée sera de 6%, l’année suivante de 7%, etc.

L’erreur des anticipations adaptatives consiste à considérer que les


agents économiques utilisent exclusivement les valeurs passées de la variable
anticipée pour prévoir ses valeurs futures. Néanmoins, leurs anticipations de
l’inflation future seront presque certainement affectées par leurs anticipations
des décisions futures de politique monétaire, et pas seulement par les décisions
de politique monétaire présentes et passées. De plus, les agents peuvent réviser
et révisent effectivement leurs anticipations rapidement, à la lumière de
nouvelles informations. Pour dépasser les insuffisances des anticipations
adaptatives, John Muth a développé une théorie alternative des anticipations,
appelée théorie des anticipations rationnelles : les agents utilisent toute
l’information disponible pour former leurs anticipations. Ces anticipations sont
identiques à la prévision optimale (la meilleure prévision possible).
L’anticipation, pour être qualifier de rationnelle, n’a pas besoin d’être parfaite (il
y a toujours des erreurs de prévision) ; il suffit qu’elle soit la meilleurs possible
compte tenu des informations disponibles au moment où l’anticipation est
formée. Une anticipation rationnelle est égale à la meilleure prévision
possible en utilisant toute l’information disponible à l’instant où
l’anticipation est formée, mais une prévision fondée sur une anticipation
rationnelle ne sera pas toujours exacte.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Deux raisons peuvent donc expliquer qu’une anticipation ne soit


pas formée de façon rationnelle :

 les agents peuvent avoir à leur disposition toute l’information, mais


simultanément juger que cela serait trop coûteux pour eux (en temps par
exemple) de traiter toute cette information pour l’intégrer dans leur
anticipation ;
 les agents peuvent ignorer une information pertinente, donc leur prévision du
futur ne sera pas la meilleure possible.

Néanmoins, il est important de souligner qu’une information non disponible,


même si elle aurait eu des conséquences importantes sur les anticipations des
agents, n’empêche pas les anticipations formées d’être rationnelles.

5.2.1. Développement formel de la théorie


Il est possible de présenter la théorie des anticipations rationnelles
de manière plus formelle. Si X est la variable dont le comportement doit être
anticipé (dans l’exemple précédent, le temps de trajet), X e l’anticipation de cette
variable par un agent, X0 la meilleure prévision de X qui utilise toute
l’information disponible. L’hypothèse d’anticipations rationnelles dit que :
Xe = X0 (6)

Cela signifie que l’anticipation de X correspond à la meilleure


prévision possible, compte tenu de l’information disponible. Les individus
essaient donc de former des anticipations aussi proches que possible de la
prévision optimale tenant compte de toute l’information disponible, puisqu’ils y
sont clairement incités.
Les incitations à former les anticipations égales à la prévision
optimale sont particulièrement fortes sur les marchés financiers. En effet, sur ces
marchés, les agents ayant les meilleures prévisions deviennent les plus riches.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

La théorie des anticipations rationnelles s’applique donc de manière


extrêmement pertinente aux marchés financiers. Sur les marchés financiers,
l’hypothèse d’anticipations rationnelles se dénomme hypothèse d’efficience des
marchés.

5.2.2. Conséquences de la théorie des anticipations rationnelles


La théorie des anticipations rationnelles a deux conséquences sur le
mode de formation des anticipations, déterminantes dans l’analyse de
l’économie globale.

Tout d’abord, s’il y a un changement dans la manière dont une


variable évolue, le mode de formation des anticipations de l’évolution de cette
variable change également. Cette implication de la théorie des anticipations
rationnelles peut être facilement comprise au travers d’un exemple.

De plus, les erreurs de prévision des anticipations sont en moyenne


nulles et ne peuvent être prédite. L’erreur de prévision d’une anticipation est la
différence entre la valeur réelle de la variable et sa valeur anticipée, X - X e.

Ainsi, la théorie des anticipations rationnelles implique qu’on ne peut pas


prévoir une erreur de prévision.

5.3. L’hypothèse d’efficience des marchés : les anticipations rationnelles


sur les marchés financiers

Le nom donné par les économistes financiers à la théorie des


anticipations est différent : ils l’appellent hypothèse d’efficience des marchés.
Cette théorie n’est rien d’autre que l’application des anticipations rationnelles au
mode de formation des prix des actifs financiers.
L’hypothèse d’efficience des marchés s’appuie sur le postulat suivant : le prix
des actifs sur les marchés financiers reflète l’intégralité de l’information
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

disponible. Depuis le chapitre 2, on sait que le taux de rentabilité d’un actif


financier est la somme des gains en capital (changement de prix) et des flux
financiers divisé par le prix d’achat initial de l’actif :

P t +1−Pt +C
R= Pt
(7)

Avec
R = taux de rentabilité de l’actif détenu de la période t à la période t+1
Pt +1= prix de l’actif en t+1, lors de sa revente.

Pt = prix de l’actif en t, lors de son achat.

C = flux financiers survenus entre t et t+1 (dividende ou coupon).

Quelle est l’anticipation du taux de rentabilité de l’actif à l’instant


t, début de la période de détention de l’actif ? Le prix courant Pt et les flux
financiers C sont connus en t.
La seule variable qui intervient dans le calcul du taux de rentabilité, dont la
valeur n’est pas certaine à l’instant t, est le prix de l’actif à la fin de la période de
détention Pt +1. Si l’on note le prix anticipé de l’actif en t+1 Pet +1, le taux de
rentabilité anticipé Re est :

e
P t +1−Pt −C
R=
P1

L’hypothèse d’efficience des marchés considère que l’anticipation


du prix futur est égale à la meilleure prévision possible du prix futur, compte
tenu de toute l’information disponible au moment où l’anticipation est formée.
En d’autres termes, les anticipations du marché à propos du prix futur de l’actif
considéré sont supposées rationnelles, ce qui signifie que :
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »
e 0
Pt +1=Pt +1
Le taux de rentabilité anticipé de l’actif est donc égal à la meilleure
prévision possible du taux de rentabilité :
e
R =R
0
(8)

Malheureusement, il est impossible d’observer Re ou Pet +1. Les


équations dérivées de l’hypothèse des anticipations rationnelles ne suffisent
donc pas à décrire le fonctionnement du marché financier. Toutefois, s’il était
possible, de quelque manière que ce soit, de mesurer Re , ces équations seraient
d’une grande importance pour comprendre la façon dont évoluent les prix sur les
marchés financiers.

L’analyse en termes d’offre et de demande du marché obligataire


montre que la rentabilité anticipée d’un actif financier (le taux d’intérêt dans le
cas des obligations) a tendance à fluctuer jusqu’à ce que s’égalisent la quantité
demandée et la quantité offerte. L’analyse en termes d’offre et de demande
permet donc de déterminer la rentabilité anticipée d’un actif financier comme le
résultat d’une condition d’équilibre : la rentabilité anticipée d’un actif, Re , est
égale à la rentabilité d’équilibre, R¿ ,qui égalise l’offre et la demande pour cet
actif. Cela signifie que :

e
R =R
¿
(9)

Les chercheurs spécialistes des marchés financiers étudient les


facteurs qui influencent le taux de rentabilité d’équilibre des actifs financiers (le
risque ou la liquidité, par exemple).
En ce qui nous concerne, il suffit de savoir que l’on peut déterminer
la rentabilité d’équilibre et donc de déterminer la rentabilité anticipée d’un actif
sous condition d’équilibre du marché.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

Il est possible d’obtenir une équation pour décrire le comportement


des prix sur un marché efficient en utilisant la condition d’équilibre et en
¿
remplaçant R par R dans l’équation des anticipations rationnelles (8). On
e

obtient alors :

0
R =R
¿
(10)
Cette équation montre que le prix actuel d’un actif sur un marché financier
est tel que la prévision optimale du taux de rentabilité utilisant toute
l’information disponible est égale à la rentabilité d’équilibre de l’actif. Les
économistes disent cela plus simplement : le prix d’un actif reflète toute
l’information disponible.

5.3.1. Fondements de l’hypothèse d’efficience des marchés

Utilisons le concept d’arbitrage dans lequel des intervenants sur le


marché, appelés des arbitragistes, éliminent des opportunités de profit non
exploitées par le marché. L’arbitrage conduit à l’hypothèse d’efficience des
marchés. Supposons le taux annuel de rentabilité d’équilibre d’un actif (une
action) est de 10%. Si le prix actuel de l’action, P t, est si faible par rapport à la
prévision optimale du prix futur, P0t +1, et que la prévision optimale du taux de
rentabilité annuel atteigne 50% (Ro>R*), alors il existe des opportunités de gain
inexploitées. Il y aura achat de l’action, le prix va augmenter et la rentabilité
optimale va baisser.

On aura : Ro>R*Pt P0et

Ro ‹ R*PtP0 jusqu’à ce que Ro=R*.

Donc: sur un marché efficient, toutes les opportunités inexploitées de profit


seront éliminées.
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

5.3.2. La forme forte de l’hypothèse d’efficience des marchés

Le marché efficient est celui sur lequel les agents forment des
anticipations rationnelles, mais en plus c’est celui sur lequel le prix d’un actif est
égal à la vraie valeur de l’actif (valeur intrinsèque).

Ainsi, les prix sur le marché efficient sont toujours justes. Ils
reflètent les fondamentaux du marché (éléments ayant des conséquences directes
sur les flux futurs de revenus des actifs financiers).

Implications :

 Sur le marché efficient un investissement est tout aussi bon que les autres
puisque les prix de tous les actifs reflètent leur vraie valeur.
 Le prix d’un actif reflète toute l’information disponible à propos de la
valeur intrinsèque de cet actif.
 Les prix des actifs peuvent être utilisés par le dirigeant d’une entreprise
pour établir le coût du capital. Le prix des actions peut ainsi être utilisé
pour juger de la rentabilité et de l’opportunité d’un investissement.

BIBLOGRAPHIE
1. Alexis Direr, Cours de macroéconomie financière, Paris, 2007
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

2. Arolla, Introduction à la finance de marché, Mastering Software


Development, 2007
3. Biales C. et al, Dictionnaire d’économie et des sciences sociales, éd,
Foucher, Paris, 1996
4. Christophe Barraud, de l’efficience des marchés financiers À la finance
comportementale, analyse financière n° 35, juin 2010
5. Frederick Mishkin, Monnaie, banque et marchés financiers, 9 ème éd.
Pearson, Paris, 2008
6. Gregorie Mankiw, Macroéconomie, 3 ème éd. Deboek, Paris, 2003
7. Honoré Nyembwe, Cours d’institutions et marchés financiers, L2
Ecomon, Unikin/Faseg, 2014.
8. J. Mathis, Monnaie et financement dans l’économie, 3 ème éd. Hachette,
Paris, 1992
9. Michel Aglietta, Laurent Berrebi, et Audrey Cohen, Banques Centrales
et globalisation, groupama asset management, octobre 2009.

TABLE DES MATIERES


COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

INTRODUCTION................................................................................................................................2
CHAPITRE 1. COMPRENDRE LE SYSTEME FINANCIER ET LE MARCHE FINANCIER. 6
1.1. Système financier et organisation des marchés financiers.................................................7
1.1.1. Définitions.....................................................................................................................7
1.1.2. Organisation des marchés financiers...........................................................................8
1.2. Les produits (instruments) financiers...............................................................................11
1.2.1. Les produits du marché financier..............................................................................11
1.2.2. Les produits du marché monétaire............................................................................21
1.3. Les fonctions du marché financier....................................................................................23
1.3.1. Le marché financier et la fonction d’allocation........................................................23
1.3.2. Le marché financier dans sa fonction d’information...............................................24
1.4. L’internationalisation du marché financier......................................................................27
1.4.1. Le marché obligataire international : Euro-obligations et Eurodevises.................27
1.4.2. Le marché financier mondial.....................................................................................27
CHAPITRE 2. LE TAUX D’INTERET SUR LE MARCHE OBLIGATAIRE............................29
2.1.Mesurer le taux d’intérêt.........................................................................................................29
2.1.1. Valeur actualisée...............................................................................................................29
2.1.2. Les principaux instruments de crédit..............................................................................30
2.1.3. Le taux actuariel...............................................................................................................30
b) Pour le prêt à versements fixes (à mensualités ou annuités constantes).........................31
2.1.4. Taux d’intérêt apparent...................................................................................................34
2.2. Distinction entre taux d’intérêt et rendement.......................................................................34
2.2.1. Maturité et volatilité du prix des obligations: le risque de taux d’intérêt....................36
2.2.2. Taux équivalent et taux proportionne.............................................................................36
2.3. Taux d’intérêt réel et taux d’intérêt nominal........................................................................37
2.3.1. Les taux d’intérêts réels...................................................................................................37
2.3.2. Les taux d’intérêts nets d’impôt......................................................................................37
CHAPITRE 3.L’OFFRE ET LA DEMANDE D’ACTIF FINANCIER.........................................39
3.1. Théorie de la demande d’actifs...............................................................................................39
3.1.1. La richesse (ou patrimoine)..............................................................................................39
3.1.2. Rendement anticipé..........................................................................................................39
3.1.3. Liquidité............................................................................................................................40
3.1.4. Risque................................................................................................................................41
3.2. L’offre et la demande sur le marché des obligations.............................................................41
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

3.2.1. La courbe de la demande.................................................................................................41


3.2.2. La courbe d’offre..............................................................................................................43
3.2.3.Equilibre du marché..........................................................................................................44
3.3. Le marché des fonds prêtables...............................................................................................45
3.3.1. Déplacements de la demande d’obligations....................................................................47
3.3.2. Déplacements de la courbe d’offres.................................................................................48
CHAPITRE 4. LA STRUCTURE PAR RISQUE ET LA STRUCTURE PAR TERME DES
TAUX D’INTERET...........................................................................................................................50
4.1. Structure par risque du taux d’intérêt...................................................................................50
4.1.1. Risque de défaut..........................................................................................................50
4.1.2. Liquidité......................................................................................................................53
4.1.3. Fiscalité........................................................................................................................54
4.2. La structure par terme des taux d’intérêt........................................................................55
4.2.1. La théorie des anticipations.......................................................................................56
4.2.2. La théorie des marchés segmentés.............................................................................59
4.2.3. La théorie de la prime de liquidité et la théorie de l’habitat préféré......................60
4.3. Les agences de notation......................................................................................................63
4.3.1. Qu'est-ce que la notation............................................................................................63
4.3.2. Ce que ne dit pas la notation......................................................................................65
4.3.3. Les agences de notation et la crise financière...........................................................66
CHAPITRE 5. MARCHE BOURSIER, THEORIE DES ANTICIPATIONS RATIONNELLES
ET HYPOTHESE D’EFFICIENCE DES MARCHES....................................................................68
5.1. Evaluer le prix d’une action....................................................................................................68
5.1.1. Le modèle d’évaluation mono périodique.................................................................69
5.1.2. Le modèle généralisé d’évaluation par les dividendes..............................................70
5.1.3. Le modèle de Gordon-Shapiro...................................................................................72
5.1.4. Relation politique monétaire et cours boursiers.......................................................73
5.2. Théorie des anticipations rationnelles...............................................................................73
5.2.1. Développement formel de la théorie..........................................................................75
5.2.2. Conséquences de la théorie des anticipations rationnelles.......................................76
5.3. L’hypothèse d’efficience des marchés : les anticipations rationnelles sur les marchés
financiers.........................................................................................................................................76
5.3.1. Fondements de l’hypothèse d’efficience des marchés..............................................79
5.3.2. La forme forte de l’hypothèse d’efficience des marchés..........................................80
BIBLOGRAPHIE...............................................................................................................................81
COURS DE « INSTITUTIONS ET MARCHES FINANCIERS »

TABLE DES MATIERES.................................................................................................................82

Vous aimerez peut-être aussi