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UNIVERSITE AUBE NOUVELLE

BOBO-DIOULASSO

SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

LICENCE :OPTION DROIT PRIVE

COURS DE DROIT DES MARCHES FINANCIERS

Par
Waogabamba Patrice ZOUNDI

Magistrat

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COURS DE DROIT DES MARCHES FINANCIERS

SOMMAIRE

INTRODUCTION

CHAPITRE I : CADRE GENERAL DU MARCHE FINANCIER

Section 1-Concept de marché financier


Section 2-Les acteurs

A- Les investisseurs
B- Les émetteurs
C- Les intermédiaires
D- Les analystes financiers

Section 3- La typologie des marchés

A-Du marché primaire au marché secondaire


B- les marchés des titres

1-Le marché des actions


2-Le marché de l’emprunt obligataire
3-Le marché des produits dérivés
C- marché organisé et marché de gré à gré

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CHAPITRE II : LE DROIT DES MARCHES FINANCIERS DANS
L’ESPACE OHADA

Section I - L’acte uniforme et la transparence des opérations sur les


Marchés financiers

A - Les fondements du dispositif de transparence des opérations

B - Le contenu du dispositif de transparence des opérations

1°) L’obligation d’établir un document d’information destiné au public


2°)L’obligation de publication d’informations occasionnelles et périodiques
3°) L’encadrement de la profession des commissaires aux comptes

Section II - l’acte uniforme et le financement des opérations sur les


Marchés financiers

A – Les émetteurs autorisés à faire appel public à l’épargne

1°) Le principe : l’appel public à l’épargne est interdit sauf autorisation expresse
2°) Les groupements autorisés à faire appel public à l’épargne

B – Les valeurs mobilières dont l’émission est autorisée

1°) L’émission de valeurs mobilières traditionnelles


2°) L’émission de valeurs mobilières composées

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INTRODUCTION

Communément le mot marché désigne pour les économistes, un lieu de confrontation de


l’offre et de la demande. D’un point de vue juridique le marché peut d’abord être considéré
comme un débouché économique pour différents types de biens. C’est dans ce sens que l’on
fait appel à la notion de marché pertinent, c'est-à-dire, un marché de référence permettant
d’apprécier notamment une éventuelle position dominante et qui comprend tous les produits
ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en
raison de leurs caractéristiques, de leur prix et de l’usage auquel ils sont destinés. Le marché
peut être aussi considéré comme un lieu, un espace public où il est possible de vendre et
d’acheter un certain nombre de biens. Traditionnellement un tel lieu correspond à un endroit
concret dûment matérialisé, même s’il pouvait être ouvert à tous vents.
Désormais la notion de marché gagne de l’ambigüité, il est souvent devenu un espace virtuel,
notamment lorsqu’il s’agit d’échanger des biens incorporels ou lorsque les biens sont
dématérialisés, ce qui est justement le cas en présence d’instruments financiers et, donc du
marché financier. Certes, lorsqu’on parle de marchés financiers on pense en premier lieu à des
organisations spécifiques, « les Bourses de valeurs » dédiées à l’échange des titres, mais
aujourd’hui ces derniers ne représentent que le cœur visible du marché financier. Ce dernier
n’a plus d’existence physique en raison de la dématérialisation des titres causée d’une part,
par la saturation des traitements manuels des transactions et, d’autre part, par la diversification
internationale des portefeuilles. L’informatisation des marchés et des transactions
transfrontalières ainsi que la création des plates-formes électroniques ont conduit à une
interconnexion des marchés financiers, à une grande concurrence et un mouvement de
concentration des places financières.
Devenu idéologie, désignant la dernière utopie occidentale, les marchés financiers étant un
outil de financement direct ont désormais tissé des réseaux qui réduisent la distance à l’instant
et donnent de nouveau repère à l’universel en le rendant petit, réduit à des prix, des taux, des
quantités, et un capital.
Actuellement considéré comme le maitre de la globalisation et normalisateur des politiques
économiques, le marché financier suscite toutes les attentions amenant la nôtre à s’interroger
sur cette industrie financière, comment est-elle organisée ? Et qu’est-ce qu’elle représente en

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termes d’acteurs et de moyens ? Avant de passer au peigne fin le droit du marché financier
burkinabé qui est confondu à celui de l’espace OHADA ,il convient de connaitre au préalable
le cadre général du marché financier.

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CHAPITRE I : CADRE GENERAL DU MARCHE FINANCIER

Section 1-CONCEPT DE MARCHE FINANCIER:

Marché financier, marché monétaire, marché des capitaux, ce sont autant de mots qui sont
utilisés au sein de la communauté non financière comme synonymes. Cette erreur serait peut
être due au fait que la finance est un système extrêmement obscur réservé aux spécialistes que
le commun des mortels ne pourrait appréhender, soit que le mettre en pleine lumière risquerait
de pousser les esprits éclairé à se rebeller. Ainsi il règne un flou artistique savamment
entretenu qu’il convient de braver. Alors avant de se lancer dans la définition du marché
financier mettons la lumière
sur la différence entre ces notions.
Certes, les trois dénominations ont un rôle de financement, ils mettent en relation directe les
agents à excédent de financement avec ceux qui ont un besoin et là on parle de marché de
capitaux. Ce dernier, est composé d’un marché de capitaux à court terme qu’on dénomme
marché monétaire sur lequel se négocient des capitaux dont l’échéance est
inferieure a une année et, d’un marché de capitaux a long terme appelé communément marché
financier. Alors qu’en est-il de ce dernier?
Afin de dégager une notion théorique et limpide, referons-nous à quelques définitions données
par des économistes :
D’après Sébastien NEUVILLE : « Le marché financier est habituellement défini comme le
marché des capitaux disponibles, c'est-à-dire des capitaux offerts par des investisseurs pour
répondre à un besoin de financement. Un tel besoin de financement peut provenir
d’entreprises ou même d’organismes publics ».

D’après Michelle De MOURGUES : « Le marché financier est le lieu d’émission et de


négociation des titres à long
terme mobilisant l’épargne nationale et internationale et de toutes les opérations destinées à
faciliter et à accompagner cette mobilisation».

D’après A.CHOINEL et G.ROUYER : « Le marché financier est tout d’abord un marché de


valeurs mobilières qui constitue une forme nouvelle de la richesse dont l’importance est allée

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en grandissant, celle-ci sont des titres négociables qui représentent soit des droits d’associés
soit des droit de créances, qui sont susceptibles de procurer des revenus à leur détenteurs ».

Et enfin d’après Pierre Cyrille HAUTECOEUR : «En théorie, les marchés financiers incluent
l’ensemble des moyens par lesquels les instruments financiers sont échangés librement, que
ce soit entre un prêteur (marché financiers primaire) ou entre détenteur de ces titres (marché
secondaire)
D’après ces définitions : Le marché financier est un segment du marché des capitaux qui
organise la rencontre directe entre les agents économiques ayant des excédents de capitaux
avec ceux ayant des besoins de capitaux afin de financer leur investissement, l’expansion de
leur activité ou leur
déficit. Un tel besoin de financement peut provenir d’entreprises ou même d’organismes
publics. On parle alors de financement direct ou désintermedié et de ce fait le marché
financier est un marché de l’épargne longue.
Pour assurer ce besoin de financement ces différentes entités sont amenées à émettre
notamment des actions ou des obligations appelées valeurs mobilières, ainsi elles vont
chercher à vendre ces titres, ce qui a pour corollaire qu’elles vont tendre à se vendre elles-
mêmes au moyen de la communication financière auprès d’investisseurs potentiels (qu’ils
s’agisse de particuliers, d’entreprises ou d’investisseurs institutionnels) ainsi le marché
financier n’est pas seulement un lieu de financement mais aussi un lieu de placement qui
permet aux particuliers d’accroitre
leurs richesses en devenant les associés des entreprises par l’achat des actions ; ou les
créanciers de ces sociétés et de collectivités publiques en achetant des obligations. Autrement
dit, le marché financier peut être défini comme le point de rencontre entre l’offre et la
demande de valeurs mobilières, il s’équilibre par les prix qui déterminent le coût des capitaux
que les investisseurs peuvent se procurer.
En plus d’être un lieu de financement et de placement, on peut reprocher aux auteurs suscités
d’avoir donné des définitions simplistes et ont omis le rôle subtil dévolu au marché financier
qui est la gestion des risques. En effet, de la déréglementation financière et la forte
concurrence qui ont caractérisé le monde à partir des années 1980, est issu un réel
décloisonnement et éclatement entre les titres de propriété et les titres de créance pour donner
naissance a une multitude d’actifs financiers dont le nombre n’est limité qu’à l’imagination
des financiers. La plus large partie de ces actifs est destinée à la gestion

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des risques, auxquels sont confrontés les différents agents dans le cadre de leurs activités
économiques, tels les risques de taux ou les risques des changes...
Désormais, ces innovations financières nous permettent de définir le marché financier comme
étant un lieu d’émission et d’échange d’instruments financiers.
Par ailleurs, pour que l’offre et la demande des titres se rencontrent dans les meilleurs
conditions, divers intermédiaires sont appelés à intervenir, comme il est aussi nécessaire que
le marché soit dotés d’une certaine organisation.

Section 2-LES ACTEURS:

Plusieurs intervenants agissent chaque jour sur les marchés financiers afin d’en assurer le
fonctionnement, l’efficience, la sécurité et la transparence, dans un cadre réglementé et
contrôlé par les autorités de marché.

A- Les investisseurs :

Il s’agit de toutes personnes physiques ou morales qui souhaitent acheter ou vendre


des instruments financiers. On retrouve les trois catégories suivantes : les particuliers, les
entreprises et les investisseurs institutionnels.
Les particuliers sont des personnes physiques. Elles peuvent agir seules ou par l’intermédiaire
des clubs d’investissement. On peut également mentionner le développement de l’actionnariat
salarié.
L’actionnaire salarié possède des actions de sa société soit en direct, soit par l’intermédiaire
d’un plan d’épargne entreprise.
Les entreprises concernent les sociétés désirant progressivement prendre tout ou partie du
contrôle d’une autre entreprise ou tout simplement les sociétés en quête de placement.
Les investisseurs institutionnels, surnommés « les zinzins » regroupent les banques, les
compagnies d’assurances, les caisses de retraite qui placent une partie de leurs ressources en
valeurs mobilières afin de faire face à leurs engagements vis-à-vis de leurs clients, les fonds
de pensions ou les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).
Ce sont les principaux intervenants en termes de volume traité.
Il convient de signaler l’importante présence des investisseurs non-résidents sur certains
marchés. Par exemple, en France on estime que la capitalisation boursière est détenue à plus

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de 40% par ces investisseurs. C’est un élément à considérer à l’heure où les fonds peuvent se
déplacer très rapidement d’un marché à l’autre.

B- Les émetteurs :

Les principaux émetteurs sont l’Etat, les collectivités ainsi que les entreprises publiques et
privées. Ces émetteurs sont des demandeurs de capitaux qui font appel aux épargnants pour
obtenir des fonds. Ils sont soumis à des règles strictes en matière d’information des
investisseurs, d’animation de leurs titres ou de leurs procédures.
Les marchés financiers se présentent de manière directe ou indirecte pour les émetteurs
comme pour les investisseurs.
De manière directe. Un émetteur, c'est-à-dire une société, un Etat ou un établissement
financier représentant ou non ses clients, peut se présenter sur le marché pour emmètre soit
des titre de capital, soit des titres monétaires ou obligataires. L’intérêt des émissions de titres
sur le marché est évident ; elles permettent de lever des volumes très importants avec une
grande souplesse dans les modalités et une réactivité considérable. De la même manière, un
investisseur -particuliers, institution, société- peut se présenter directement sur le marché pour
acquérir des actions, des obligations, des options ou leurs hybrides.
De manière indirecte. Un grand nombre d’acteurs économiques sont des émetteurs financiers
sans le savoir. En effet, « chaque citoyen d’un Etat dont les finances publiques enregistrent un
déficit et qui émet sa dette sur le marché est un émetteur malgré lui, cet endettement pouvant
représenter plus d’une année du revenu moyen par habitant ! ».Les sociétés privées comme les
particuliers emprunteurs peuvent eux aussi être des émetteurs indirects, quand leur
intermédiaire financier place sur le marché financier sous forme de titres des ensembles de
créances regroupées par durée d’engagement et par classe de risque. Il s’agit alors de « titriser
des créances » pour les rendre négociables sur un marché secondaire.
L’accès indirect au marché est surtout la règle pour tous les détenteurs de parts de fonds
mutuels, de fonds d’épargne retraite ou de fonds de pension, de contrat d’assurance...etc.

C- Les intermédiaires :

Les investisseurs et les émetteurs ont recours à des services de professionnels afin d’intervenir
en bourse. Différentes entités jouent leur rôle d’intermédiaires prestataire de services
d’investissement. C’est le cas des établissements de crédit et des entreprises d’investissement

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(sociétés de bourses, sociétés de gestion de portefeuille). Ceux-ci peuvent exercer les activités
qui suivent :
-La collecte et la transmission d’ordres : les intermédiaires centralisent les ordres des
intervenants sur le marché et les transmettent au passeur d’ordres ;
-l’exécution des ordres : les intermédiaires ont un accès au système sur marché et transmettent
à ce système les ordres des investisseurs ;
-la compensation : les établissements sont chargés des opérations de règlement-livraison afin
que les différentes contreparties soient livrées et payées dans les délais imposés par la
réglementation une fois les ordres exécutés ;
-la gestion du portefeuille qui consiste à collecter les fonds des investisseurs. Les sociétés de
gestion de portefeuilles investissent pour le compte de clients dans des titres en fonction de
règles prédéterminées répondant au profit du client

.
D- Les analystes financiers :

Ils sont chargés d’analyser les sociétés afin d’établir des recommandations sur les titres cotés.
Afin de mener à bien leur travail, ils analysent les facteurs tels que les bénéfices, les
perspectives de croissance, la situation financière, la valeur estimée des actifs mais également
les méthodes de gestion, les stratégies de développement. Ainsi que la rentabilité des secteurs
d’activité concernés. Ces analystes financiers, on peut les classer dans la catégorie des
intermédiaires d’information à coté des agences de notation qui se chargent d’apprécier et de
noter les émetteurs publics et privés d’obligation ; les fabricants d’indices boursiers et les
auditeurs et commissaires aux comptes. Sans
une information financière honnête et fiable, un marché ne peut fonctionner.

E- Les instances de régulation et d’organisation :

La bourse est un marché réglementé, organisé et contrôlé par des autorités de tutelle. Il existe
plusieurs instances propre à chaque marché qui ont pour objet de veiller au bon déroulement
des échanges comme la gestion des systèmes informatiques au l’admission des valeurs sans
oublier la protection des investisseurs. A titre d’exemple on peut citer l’Autorité des Marchés
Financiers (France), La Commission Bancaire et Financière (Belgique), la Securities and

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Exchange Commission (Etats Unis), la Securities and Exchange Surveillance Commission
(Japon), la
Financial Services Authority (Royaume Uni) et le Conseil Régional de l’Epargne Public et de
Marchés Financiers (Burkina Faso).

Section 3-LA TYPOLOGIE DES MARCHES:

Les classifications des marchés peuvent être variées. D’un point de vue financier, il est
opportun de distinguer les marchés à création de richesses et les marchés à somme nulle. Les
premiers correspondent aux marchés de titres, tandis que les seconds sont des marchés de
produits dérivés, à cet effet c’est une classification selon les titres négociés. Les marchés
financiers peuvent ensuite être plus ou moins contrôlés par une autorité étatique. Ainsi, des
marchés réglementés peuvent être opposés à des marchés non règlementés, en ce sens que ces
derniers ne reçoivent pas un label d’une autorité étatique. Cela n’exclut pas que ces marchés
bénéficient d’une certaine organisation (marché organisé), même si ils peuvent exister
indépendamment d’une quelconque organisation (marché de gré à gré).
Le marché peut ensuite être un marché au comptant ou un marché à terme. Lorsque
l’opération est au comptant, le règlement et la livraison de l’instrument financier s’opèrent
immédiatement
après la négociation. Lorsque l’opération est à terme, le règlement et la livraison sont retardés
à une date ultérieure. Enfin l’émission et la cotation d’un instrument financier conduisent à
opérer une distinction entre le marché primaire et le marché secondaire, cette segmentation est
le principe de tout marché financier.

A-Du marché primaire au marché secondaire :

Action ou obligation, toute valeur mobilière est d’abord émise sur le marché primaire.
Appelé communément « marché du neuf », car c’est le marché où s’effectue l’émission de
nouveaux titres en contre partie des fonds remis par les épargnants. De ce fait, en permettant
aux différentes entités émettrices de lever les fonds nécessaires pour financer leurs
investissements en faisant appel à l’épargne publique, le marché primaire se place au départ

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de toutes les opérations de bourse: c’est lui qui est directement consacré au financement. En
d’autres termes, il permet de lever du capital et de transformer l’épargne des ménages en
ressources longues pour les collectivités publiques et privées.
Souvent négligée, l’activité sur le marché primaire est la respiration d’un marché. La vigueur
de ce marché est l’un des indicateurs premiers du dynamisme et de la bonne santé d’une
entreprise de marché. L’attraction des valeurs sur leurs systèmes de cotation et dans leurs
listes de valeurs cotées est devenue l’une des premières fonctions des entreprises de marché
qui déploient des trésors d’ingéniosité commerciale pour inciter les grandes sociétés à émettre
sur leur marché. Comme le NYSE, qui a réussi à coter une part prépondérante des grandes
sociétés mondiales et le Nasdaq qui est devenu le centre de la cotation des valeurs de
technologie à forte croissance.

Le marché secondaire n’a pas d’effet direct sur le financement de l’économie, il concerne
seulement les négociations des titres ; c'est-à-dire les achats et les ventes de valeurs déjà
émises, il s’agit ici d’organiser une confrontation entre :
-d’une part ceux qui détiennent des titres (actions ou obligations) et qui veulent les céder
avec, si possible, une plus-value, de manière à se désengager et à retrouver leurs fonds ou
encore à se replacer sur d’autres titres ;
-et, d’autre part, les épargnants investisseurs qui désirent acheter ces titres.
Les transactions sur ce marché n’engagent pas l’émetteur et elles se font sur un prix déterminé
par la confrontation de l’offre et de la demande.
Appelé souvent marché de « l’occasion » vu qu’il assure la liquidité de l’émission ; cette
appellation certes pas péjorative, n’empêche qu’elle est toutefois dangereuse car elle ne rend
pas compte d’un phénomène essentiel : le marché secondaire n’assure pas uniquement la
liquidité des actifs cotés ; il vient surtout déterminer le coût actuel du capital- un peu comme
si le prix du neuf dépendait de la cote du véhicule sur le marché de l’occasion. Il advient que
le prix sur le marché secondaire détermine le prix auquel il pourra émettre, à quel taux émettre
les obligations et à quel montant émettre les actions. L’échange de titre est enfin révélateur
d’informations concernant les perspectives de réussite de tel ou tel projet et la capacité des
émetteurs de les mener à bien.
La distinction entre marché primaire et marché secondaire est uniquement conceptuelle, ces
deux formes ne font pas référence a deux segments de marché, ils sont, par essence,
complémentaire. Ces deux marchés ne vont pas, en effet, l’un sans l’autre ; l’épargnant
investisseur doit pouvoir, dans les meilleurs conditions possibles se défaire, c'est-à-dire céder

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les placements en titres précédemment achetés, sinon il se sentirait piégé, enfermé dans son
emplacement et ne viendrait donc pas investir en Bourse. Dit en terme technique, il n’y aurait
pas de marché primaire susceptible d’intéresser les investisseurs prêt à s’engager à long terme
s’ils ne disposaient pas d’un marché secondaire, efficace et suffisamment actif -marché
liquide- leur permettant de trouver des contreparties à leurs ordres de vente et ainsi de
récupérer leur argent. La possibilité offerte aux investisseurs de céder leurs titres sur le
marché secondaire constitue d’ailleurs une forme de résolution des conflits.

B- les marchés des titres :

La deuxième distinction se situe naturellement entre les titres. L’éventail des titres n’est pas le
même pour chaque émetteur, soumis à des conditions règlementaires différentes.
On distingue essentiellement les titres de propriété et les titres de dettes. C’est peu de dire
que ces valeurs mobilières ont fait l’objet, depuis plus de trente ans, d’innovations qui, sous la
pression des entreprises et de la concurrence entre places financières du monde entier, en ont
singulièrement enrichi le domaine au résultat de greffes sur le tronc principal desdites valeurs.
Ainsi on a vu naitre des produits appelés dérivés. On classifie alors les titres en marché des
actions, marché des obligations et celui des produits dérivés (marché conditionnel).

1-Le marché des actions :

Certains parents ou certains amis des créateurs d’une entreprise commerciale, industrielle ou
de services acceptent parfois de se jeter dans l’aventure en fournissant les capitaux, mais ils le
font en quelque sorte, à fonds perdus, car ils ne sont absolument pas sûrs de les retrouver ; une
contrepartie s’impose donc : l’initiateur du projet de société leur remet, contre leur apport en
argent ou en biens indispensables (terrains, matériels, etc.) et, proportionnellement, des titres
appelés actions.
Selon Erwan LE SAOUTE : « l’action est un titres financier représentatif d’une part de
propriété d’une société. Elle est attribuée en rémunération d’un apport fait à la société soit lors
de sa création, soit à l’occasion d’une augmentation de capital. L’apport peut s’effectuer en
numéraire ou en nature ou à la suite d’une conversion d’une créance sur la société en actions».
Ainsi, l’action représente une fraction du capital social, proportionnelle à la somme apportée
(apport en espèces), ou à la valeur de l’apport en nature (immobilisations). Elle confère à son

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détenteur un droit d’associé d’où l’appellation « titre d’associé ». Sur le plan financier, elle
présente principalement deux sources espérées de revenus pour l’actionnaire qui accepte de
prendre le risque avec la volonté de gagner de l’argent :
-les dividendes futurs qui représentent une fraction du bénéfice de l’entreprise à la fin de
l’exercice, ce qui fait de l’action un titre à revenu variable, fonction des bénéfices de la
société et de la décision des associés de les distribuer ou non ;
-ou bien une éventuelle plus-value lors de la revente du titre sur le marché boursier, si le prix
de vente est supérieur à celui de l’achat.
On peut considérer une action comme un ensemble de droits. Les droits conférés à
l’actionnaire en sa qualité de copropriétaire de la société peuvent être regroupés en deux
catégories : une première d’ordre pécuniaire et une seconde d’ordre politique qui a trait aux
droits d’interventions dans la vie de la société,
-Les actions ordinaires ou action de capital. Emise lors de la création de la société (apport en
numéraire), lors d’une augmentation de capital (apport en numéraire) ou lors d’une
distribution d’actions gratuites ;
-Les actions d’apport : attribuées lors d’un apport matériel. Les droits sont identiques à ceux
des actions de capital ;
-Les actions à bon de souscription d’actions : elles permettent à leurs détenteurs de souscrire
ultérieurement d’autres actions, à un prix convenu a l’avance ;
-Les actions à dividende prioritaire sans droit de vote. Elles offrent en principe un dividende
plus élevé que les autres en contrepartie d’une absence partielle ou totale du droit de vote.
Leur nombre ne peut excéder un quart du nombre d’actions constituant le capital social ;
-Les actions à droit de vote double.
Seules les sociétés anonymes et les sociétés en commandité par actions ont la faculté
d’émettre des actions.
L’action a une valeur vénale résultante du cours de bourse. Ce dernier varie selon l’offre et la
demande sur le marché, avec un système modérateur destiné à éviter que les cours ne soient
trop erratiques. Par ailleurs, il ne faut pas confondre entre la valeur d’une action et la valeur
nominale. Le nominal correspond à la valeur de l’apport entrant dans la composition du
capital social. A l’occasion d’une augmentation de capital, la valeur nominale diffère
généralement de la valeur d’émission. Ainsi si la valeur du titre est égale à 10.000FCFA et
que la valeur d’émission est de 25.000FCFA, le souscripteur paie une prime d’émission de
15.000FCFA.

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2-Le marché de l’emprunt obligataire :

L’obligation, ce produit à toute son importance dans la gamme des instruments financiers à
long terme. De plus sa technique et son maniement pourront apparaitre plus simple pour une
personne profane que l’action.
Les obligations sont « les titres émis en représentation d’un emprunt lancé par l’entité
émettrice. L’offrant de capitaux est un simple prêteur, un créancier, dénommé en langue
boursière un créancier obligataire »
La créance obligataire présente un caractère collectif : elle nait d’un emprunt unique conférant
aux différents prêteurs des droits identiques et pour une même valeur dite nominale.
Lorsqu’un investisseur se porte acquéreur d’une obligation, il prend le risque d’un banquier
qui accorde un prêt. Il est créancier vis-à-vis de l’émetteur. Il ne dispose d’aucun droit sur la
gestion de l’entreprise mais il possède les droits naturels du prêteur : remboursement du
capital et versement d’un intérêt sur le montant emprunté tout au long du prêt. Contrairement
aux actions qui ne peuvent être émises que par des sociétés de capitaux, les obligations
peuvent être émises par des collectivités de statuts juridiques divers:
-Un Etat dans sa propre monnaie, au titre des émissions du trésor public, on parle alors
d’emprunt d’Etat ; Un Etat dans une autre monnaie que la sienne, on parle alors d’obligations
souveraines ;
-Un organisme public, une collectivité locale ou entreprise du secteur public, on parle alors
d’obligation du secteur public ;
-Une personne morale de droit privée, on parle alors d’obligations corporate.
-Les établissements financiers notamment dans le cadre d’opérations de titrisation.

Il existe plusieurs modes de remboursement d’une obligation :


-Le remboursement in fine : consiste à rembourser l’intégralité du capital emprunté à
l’échéance, ce qui requière pour l’émetteur un montant en trésorerie considérable au moment
du remboursement. A cet effet, cette technique est plus répandue chez les émetteurs les plus
solides, notamment les émetteurs souverains ;
-Le second mode consiste à rembourser de manière fractionnée le capital emprunté jusqu’à
l’échéance. Dans ce cas l’emprunteur procède à un tirage au sort de la série d’obligation qui
va être remboursée. Ainsi l’émetteur peut opter soit pour un remboursement par annuités

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constantes ou bien par amortissement constant donc par annuité qui fluctue d’une année sur
l’autre ;
-Il y a d’autres modes de remboursement liés a des obligations particulières dites hybride.
Il existe une grande diversité d’obligations, elles diffèrent notamment par leurs échéances,
leurs modes de remboursement, et la nature de leurs taux d’intérêt. Diverses modalités
touchent le taux d’intérêt telle l’obligation à coupon zéro où le titulaire du titre ne perçoit pas
d’intérêt, mais en contrepartie, l’emprunt est émis en dessous de sa valeur nominale.
L’émetteur peut choisir entre l’augmentation de capital (conversion en actions existante) ou la
recapitalisation (échange contre des obligations existantes).

-Les obligations remboursées en actions : le remboursement de l’obligation en fin de vie ne


peut se faire qu’en actions. C’est un moyen pour l’émetteur de transformer sa dette en
capitaux propres. Le porteur a la qualité d’obligataire jusqu'à l’échéance de l’obligation.

-Les obligations échangeable en actions : elles sont émises par une société et remboursable en
actions d’une autre société dans laquelle l’émetteur détient une participation. A l’échéance si
l’échange est favorable pour le détenteur, le remboursement se fera en actions dans le cas
contraire il se fera en liquidités.
-Les obligations à bon de souscription d’actions: ce sont des obligations assorties d’un bon
qui donne le droit de souscrire à une ou plusieurs actions. Une fois émise, le bon de
souscription est dissocié de l’obligation et est valorisé par le marché, ce qui permet à
l’émetteur de proposer un taux d’intérêt inferieur à une obligation classique.

3-Le marché des produits dérivés :

Les marchés financiers permettent aux agents de mieux gérer les risques financiers auxquels
ils doivent faire face dans le cadre de leurs activités économiques. Ces risques, peuvent être
classés en différentes catégories : risque de marché, risque de contrepartie, risque de liquidité
et autre risques.

•Le risque de marché nait dès qu’une position acheteuse ou vendeuse est prise sur le marché
et que l’intervenant se trouve en position de subir une évolution défavorable des cours. Tous
les actifs monétaires ou financiers sont sujets au risque de marché ; dans le cas des devises, on

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parle de risque de change, dans le cas des titres de dette, de risque de taux. La gestion des
risques de
marché a connu un essor important depuis le milieu des années 1970 avec l’abandon des
changes fixes qui s’est accompagné d’une plus forte volatilité des taux de change, des taux
d’intérêt et in fine, du prix des actifs cotés sur les marchés financiers.

•Le risque de contrepartie (risque de signature, risque de défaut) tient à l’éventualité que la
partie cocontractante (entreprise, particulier, établissement financier ou pays) ne puisse
remplir ses obligations. La défaillance de la contrepartie peut avoir des origines très diverses,
difficiles à prévoir. Parmi les causes possibles l’insolvabilité, des causes internes, mais aussi
des causes externes comme des bouleversements politiques, des catastrophes naturelles, etc.
•Le risque de liquidité est le risque de ne pouvoir liquider ou dénouer sa position. Ce
risque se réalise lorsque le manque de profondeur du marché ne permet pas de trouver
une contrepartie. C’est le cas par exemple, en période de crise, le marché et ainsi submergé
par les ordres de vente.
•Enfin, parmi les autres risques, on peut citer : les risques techniques (une panne informatique
qui peu paralyser une salle de marché), les risques juridiques (clauses ambigües ayant des
effets négatifs sur le respect d’un contrat d’autant que les montages financiers sont de plus en
plus complexes), ainsi que les risques de malversation (manipulation frauduleuse par un trader
comme c’était le cas de la société générale en 2007).
Ces risques ne sont pas indépendants l’un peut entrainer l’autre. Par exemple, à mesure que
les variations de prix des actifs s’amplifient, le risque de marché et le risque de liquidité
s’élèvent, ce qui peut entrainer la défaillance de contreparties et inciter les agents à adopter
des comportements frauduleux.
A ces risques individuels, il convient d’ajouter le risque de système qui entraine l’ensemble
des intervenants dans un effet domino, il n’est pas une simple juxtaposition de risques
individuels, donc sa gestion justifie l’intervention de pouvoirs politiques.
La question qui se pose est la suivante : Comment les agents utilisent-ils les marchés
financiers afin de gérer au mieux les risques auxquels ils sont exposés?
•Soit en utilisant l’éventail des actifs proposés sur le marché afin de diversifier leurs sources
d’approvisionnement ou de revenus ;
•Soit en transférant les risques qu’ils courent à d’autres individus disposés à les assumer.
C’est cette dernière technique qui est généralement mise en avant lorsqu’on évoque la
fonction de gestion des risques.

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Le transfert des risques par le marché financier s’exerce via l’utilisation de contrat à terme.
Ces derniers permettent, à n’importe quel moment, de fixer les conditions d’un prêt d’un
emprunt ,d’un achat ou d’une vente futurs de matières premières, de devises, d’actions ou
n’importe quel autre actif financier ou non.

Parce que la valeur d’un contrat à terme dépend du cours d’un actif ou d’un indice de
référence, le sous-jacent, en d’autres termes, on parle de produits dérivés (de l’anglais
dérivatives).
Les produits dérivés « sont des instruments financiers dont le prix dépend de l’évolution du
cours d’un autre actif financier appelé sous-jacent. Ils sont employés principalement en tant
qu’instruments d’assurance (de couverture) ou en tant qu’instrument spéculatifs ».

Le transfert de risque s’opère d’un individu qui souhaite se couvrir à un autre qui accepte de
supporter ce risque. Alors que le premier appelé « hedger »utilise les produits dérivés
comme instrument de couverture, le second peut les utiliser comme instrument de spéculation
car il agit dans le seul but de diversifier son portefeuille et de réaliser un gain. La
confrontation entre ces deux types d’agents permet d’ailleurs de faire émerger un consensus
quant au prix à terme anticipé, ce qui participe à la diffusion des informations par le marché.
Une liste non exhaustive des innovations financières majeures apparues depuis le début des
années 1970 comporterait : les futures, les forwards, les options, les warrants, les caps, les
floors ,les swaps, etc. sont tous des produits dérivés. Les différences tiennent principalement à
la nature du contrat (ferme ou optionnel) et au sous-jacent (actions, de
vises, taux d’intérêt, indice,...). Ainsi on peut décomposer ce marché en deux sous ensemble :
le marché des contrats optionnel et le marché des contrats fermes.
Sur le marché optionnel on cite les principaux produits tels :

-L’option :est un instrument financier qui donne le droit d’acheter (ou vendre) à un prix, à une
date future, une certaine quantité d’une marchandise. Toute cession d’un droit a fait l’objet, de
la part d’une contrepartie, d’un engagement irrévocable à vendre (ou acheter) la marchandise
au détenteur de l’option si celui-ci désir exercer son droit.
Une option donne le droit mais non l’obligation d’acheter ou de vendre un « bien ». Les deux
types de contrats négociés sur les marchés d’options sont les options d’achat call, et les
options de vente put.

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Un call donne à l’acheteur le droit d’acheter un nombre déterminé d’unités d’actif support
appelé sous-jacent à un prix déterminé (appelé prix d’exercice ou strike-price) et à une date
déterminée (appelée date d’échéance du contrat ou strike-date). L’acheteur d’un call exerce
son option uniquement s’il est gagnant donc, si le prix de marché de l’actif sous-jacent à la
date d’exercice est supérieur au prix d’exercice.
Un put donne à l’acheteur le droit de vendre un nombre déterminé d’unités d’actif support, à
une échéance déterminée et à un prix déterminé à l’avance.
L’acheteur d’un put exerce son option dans le cas où le prix de marché de l’actif sous-jacent
est inferieur au prix d’exercice. Toutefois, il est possible de réaliser en même temps plusieurs
combinaisons d’options, qui ont des noms aussi colorés que stellages ou straddles, strips,
straps et butterfly spreads.
Un stellage est la combinaison d’un put et d’un call du même actif, avec le même prix
d’exercice.
Un strip est la combinaison d’un call et de deux puts avec le même prix d’exercice et même
date d’échéance.
Un strap est la combinaison de deux calls et d’un put avec les même caractéristiques. Une
combinaison plus complexe introduit calls et puts avec différentes dates d’expiration...etc. Le
but de ses opérations est de profiter de variations des cours ou du niveau de la volatilité, ou
tout simplement d’assurer un portefeuille d’actifs.
Le prix d’une option appelé prime fluctue en permanence selon l’offre et la demande sur le
marché, ainsi qu’en fonction de la valeur et la volatilité de l’actif sous-jacent et d’autres
paramètres tels : la valeur temps et la valeur intrinsèque de l’option. La prime est très inferieur
au prix de l’actif support.
Les options sont classées aussi selon deux styles, l’option qualifiée d’américaine lorsque sont
détenteur peut exercer son droit à n’importe quel moment avant la date d’échéance. Si
l’option est de style européen, son détenteur ne peut exercer son droit qu’à la date d’échéance.
Ces deux styles se traitent partout dans le monde.
On peut également rencontrer des options de style « bermudien ». Ces dernières, peuvent être
exercées à des dates prédéterminées avant la date d’échéance.
Les principaux marchés d’options sont le Chicago Board Option Exchange (CBOE), le
Chicago Mercantil Exchange Group, EUREX et Euronext.Liffe. Avant 1973 et la création de
CBOE, les options étaient des contrats privés entre deux co-contractants, ce qui rendais
difficile et onéreux de chercher quelqu’un pour racheter (ou revendre) un contrat spécifique.

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Mais l’introduction de la chambre de compensation révolutionna les négociations des options
et stimula le marché mondial, car elle joue un rôle fondamental en standardisant les contrats.
Elle permet à qui conque de fermer sa position en vendant l’option détenue, pendant qu’un
acheteur peut garder sa position ouverte. Si l’acheteur exerce son option la chambre de
compensation sélectionne de manière aléatoire un vendeur d’option, et lui notifie la demande
de livraison.

- les warrants :produits optionnels émis par les grands établissements du secteur financier, qui
se couvrent des risques qu’ils supportent en achetant ou en vendant, selon le cas, des actifs
sous-jacents correspondants (principalement actions, titre d’Etat, indices boursiers, taux de
change...). Apparus en Suisse en 1985 lors d’opérations lancées par Citicorp, de façon à
faciliter l’accès des investisseurs internationaux aux actions d’entreprises japonaise. Le
warrant est un produit représentatif d’option donnant le droit et non l’obligation d’acquérir ou
de céder un élément sous-jacent à un prix fixé dans le contrat d’émission, ou de percevoir un
règlement en espèces appelé soulte. Celle-ci correspond, lorsqu’il s’agit d’un call warrant, à la
différence positive entre le cours de l’élément à a date d’exercice du warrant et le prix
d’exercice fixé dans le contrat d’émission. La différence est inverse lorsqu’il s’agit d’un put
warrant. L’émetteur du warrant est indépendant de l’émetteur du sous-jacent et son émission
est indépendante de toute opération financière de l’émetteur ou de son groupe.
Très appréciés en Allemagne, les warrants sont un produit essentiellement européen. Il n’y a
pas de véritable marché outre-Atlantique, du fait de l’existence de marché organisé d’options
et de contrainte réglementaire qui limitent la faculté d’en émettre aux Etats-Unis.

- Le bon de souscription :les entreprises émettent également des instruments financiers dont
le cours dépend de la valeur du cours du sous-jacent. Une obligation ou une action à bon de
souscription est une valeur mobilière à laquelle sont attachés lors de l’émission, un ou
plusieurs bons de souscription, qui confèrent à leur détenteurs le droit d’acquérir une autre
valeur mobilière (le sous-jacent), pendant une période déterminée (la période de validité du
bon), à un prix spécifié (le prix d’émission), selon une parité définie mais modifiable lors des
opérations sur le capital. Une fois l’émission de la valeur support achevée, les bons de
souscription sont cotés séparément. Les bons ont les caractéristiques suivantes :
-les bons de souscription sont séparément négociables (bons de suscription d’actions et
bons de souscription d’obligations) ;
-la période d’exercice elle va de moins d’un an à 8 ou 9 ans (souvent entre 2 et 5 ans) ;

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-le prix d’exercice (prix d’émission) détermine le coût d’acquisition du sous-jacent
(action) fixé par l’émetteur (en cas d’exercice de remise d’actions nouvelles) ;
-la parité entre le nombre de bons et le nombre de titres par exemple : 1 action contre 3 bons.

A coté du marché optionnel on y trouve le marché à terme, sur ce marché sont négociés des
instruments financiers appelés contrats à terme. « Un contrat à terme est un engagement
irrévocable à acheter ou à vendre à un certain prix, à une date future, une certaine quantité
d’une marchandise »

Cette offre est ferme est définitive. Contrairement aux options, l’achat ou la vente du sous-
jacent est obligatoire quel que soit sont cours au jour de l’échéance. Avant ces contrats
portaient sur le
s matières premières, mais à partir de 1979, l’essentiel des volumes se porte sur des
instruments financiers variés, les indices boursiers et les taux. Il existe deux types de contrats :
le contrat forward et le contrat futures.

-Le contrat forward :prenons l’exemple d’un agriculteur américain qui produit du colza.
Entre le moment de la récolte en Aout N et celui de la vente, en décembre N, l’agriculteur est
soumis à un risque de baisse des cours. Dans ce cas la livraison différée est possible, de gré à
gré, si l’agriculteur parvient à trouver un acheteur appelé contrepartie, qui s’engage
contractuellement à prendre livraison du colza fin décembre à un prix P. Si le prix spot sur le
marché fin décembre P’ baisse, l’agriculteur réalise un profit dans le cas contraire il réalise
une perte équivalente au gain de l’acheteur du contrat, ainsi le risque est symétrique. Ce
contrat est appelé contrat « forward ».
Cette solution permet à l’agriculteur de se protéger contre une baisse des cours, elle lui
interdit cependant de profiter d’une éventuelle hausse au-delà de P des cours entre Aout et
décembre, vu que les engagements ne peuvent pas être revendu ou si il peuvent l’être c’est
avec beaucoup moins de simplicité. Par ailleurs, le règlement et la livraison interviennent à
l’échéance, ce qui met les deux contractants face à un risque de défaut. A cet effet, il existe le
marché à terme organisé autrement dit des futures.

- Les futures :comme le forward, le futures présent un profil de risque symétrique. Mais
à l’inverse du forward, le risque de crédit c'est-à-dire risque de défaut, peut être complètement
éliminé grâce à deux mécanismes spécifiques : le dépôt de garantie et l’appel de marge d’une

21
part, l’existence d’une chambre de compensation et la standardisation des contrats d’autre
part. Les opérateurs ne passent aucun contrat directement entre eux. Toutes les opérations
s’effectuent par l’intermédiaire d’une chambre de compensation qui s’intercale
automatiquement comme contrepartie de l’acheteur d’une part et du vendeur d’autre part.
Ainsi en cas de défaillance de l’un d’eux, ce serait à la chambre de compensation d’honorer le
contrat. En revanche, elle exige un dépôt de garantie afin de s’assurer que chaque partie
respecte son engagement. Le montant de ce dépôt dépend de la volatilité du sous-jacent et de
la nature de l’investisseur. La position du futur est valorisée au jour le jour (market to
market). Si la position de l’intervenant évolue défavorablement, il réalise une perte potentielle
et son deposit sera diminué d’autant, au deçà d’un seuil, la chambre de compensation lance un
appel de marge
afin de remettre à niveau son dépôt et de couvrir donc sa perte potentielle
. Si l’intervenant ne
peut pas répondre à l’appel de marge, la chambre de compensation clôt sa position en puisant
sur le deposit pour couvrir les pertes. Inversement, si la situation de l’intervenant s’améliore
après qu’il est répondu à l’appel de marge, la chambre de compensation effectue un appel de
marge créditeur. Cette compensation quotidienne fait que le contrat futures est assimilable à
une succession de contrats forwards.

Il existe une autre catégorie de contrats à terme qu’on dénomme swap.


SWAP :c’est un contrat par lequel on échange deux ensembles de valeurs financières ; les
swaps ne sont pas stricto sensu des instruments financiers mais on les considère souvent
comme tels.
Le développement massif des swaps remonte au début des années 1980. Le swap le plus
répondu est le swap de devises qui« représente un contrat de gré à gré entre deux contre
parties qui s’échangent des dettes contractées dans des devises différentes ».
Un swap de devises permet donc de modifier la monnaie dans laquelle s’exprime une dette
(ou un
placement). Il permet également d’en modifier le taux ou la nature du taux. Pour conclure un
swap, les cocontractants précisent divers éléments :
-Le montant du contrat, exprimé dans une des deux devises
-La parité retenue pour procéder à l’échange
-La duré du contrat
-Les modalités de calcul des intérêts (éventuellement intérêts fixes ou variables).

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La distinction précédente repose entièrement sur la nature des titres. On peut toutefois y
ajouter d’autres distinctions qui font référence aux caractéristiques même des marchés sur
lesquels ces titres sont traités.
On distingue notamment les marchés organisés et marchés de gré à gré ou OTC (Over The
Counter)
.
C- marché organisé et marché de gré a gré :

Le marché réglementé ou organisé se distingue par l’existence d’un règlement général de


marché édicté et appliqué par une entreprise de marché généralement agrée par les pouvoirs
publics ou les régulateurs.
L’objet affiché de la règlementation est la protection des souscripteurs et des investisseurs.
Pour intervenir sur ce marché il est nécessaire d’être adhérent ; les procédures d’échange, de
compensation et de règlement-livraison des titres obéissent à des standards clairement définis.
En particuliers sur les marchés organisés où la chambre de compensation vient s’interposer
entre les acheteurs et les vendeurs pour limiter le risque de contrepartie et diminuer les coûts
de transaction. Sur un tel marché, l’établissement financier est un intermédiaire agissant pour
le compte de son client. Leurs intérêts sont alignés. Le marché règlementé fait intervenir donc
l’épargne publique et donne un label (qualité, sécurité, garantie).
A l’inverse, le marché libre ou de gré à gré se caractérise par l’inexistence d’un règlement
général des opérations réalisées. Il n’y a pas d’autres clauses que celles qui figurent sur le
contrat qui lie les deux parties. Les opérations sont faites sur mesure pour le client et les
négociations sont réalisées par téléphone ou par ordinateur. En pareille situation,
l’établissement financier est la
contrepartie directe d’un intervenant. Leurs intérêts sont donc opposés. En générale, les
risques sont plus élevés que sur les marchés organisés : compte tenu de l’absence de chambre
de compensation et de réglementation, aucun mécanisme de solidarité n’est prévu en cas de
risque de contrepartie et, le risque de liquidité et beaucoup plus important puisque les contrats
ne sont pas standardisés. A cet effet, ces marchés sont réservés aux professionnels. Toutefois,
il existe des organismes qui essaient d’imposer des règles engageant les différents
intervenants. On peut citer à titre d’exemple l’International Swaps and Derivatives
Association
Le marché des actions est pour l’essentiel un marché organisé. Néanmoins, les actions qui

23
ne sont pas admises à la cote peuvent s’échanger sur le marché libre. A l’inverse le marché
des changes n’est qu’un vaste marché de gré à gré. Pour ce qui est des produits dérivés, la
situation est intermédiaire ; marché organisés et marché de gré à gré coexistent et se partagent
les produits : les produits les plus classiques se trouvent sur les marchés organisés, les
produits les plus exotiques sur les marché de gré à gré.

Enfin, au-delà de l’opposition entre marché organisé et de gré à gré, il existe bien d’autres
caractéristiques permettant de distinguer les marchés boursiers tel le mode de cotation.

Au terme de cette présentation du marché financier sa notion, ses acteurs et son organisation,
nous pouvons considérer les marchés financiers comme un système industriel de collecte, de
transformation et d’allocution des ressources financières. Le marchés financier est
devenu avec le temps un système généralisé dans un monde où il se confond parfois avec une
condition de succès de développement et pourquoi pas de survie pour les économies. Devenue
idéologie, désignant la dernière utopie occidentale, il est désormais considéré comme le grand
normalisateur des politiques économiques et le maître de la globalisation.

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CHAPITRE II : LE DROIT DES MARCHES FINANCIERS DANS
L’ESPACE OHADA

L’émergence, en Afrique noire francophone, d’un droit uniforme des affaires, dans le cadre de
l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), constitue,
pour les pays membres, l’un des événements juridiques majeurs de la fin du XXème siècle
dont l’onde de choc est encore perçue à travers leur espace géographique. L’adoption du
Traité de l’OHADA et des Actes uniformes a donné lieu, en effet, à de véritables
bouleversements. Elle a ainsi entraîné l’abrogation, pas toujours certaine au demeurant, de
textes quelquefois centenaires. De ce vaste mouvement de réforme, est résulté une plus grande
visibilité du droit applicable à la vie des affaires, une simplification et une meilleure
adaptation des règles, davantage de sécurité juridique et judiciaire, bien que, sur ces divers
points, des progrès notables soient encore attendus. A bien des égards, en dépit d’indéniables
avancées, l’œuvre d’uniformisation entreprise n’a pas apporté toute la simplicité souhaitée et
a laissé surgir des difficultés, qui ont interpellé la doctrine, notamment sur le terrain de
l’interprétation et de l’application des règles. Ces difficultés concernent, entre autres sujets, le
champ d’application matériel du droit uniforme, son application dans le temps et la portée de
ses dispositions. Elles engendrent, ipso facto, une insécurité juridique, liée aux incertitudes
quant aux modalités d’application et de mise en oeuvre du droit uniforme.

Ces difficultés et incertitudes sont d’autant plus déplorables que l’institution de l’OHADA
visait notamment à remédier à l’insécurité juridique et judiciaire, jadis décriée par les
praticiens du droit africain des affaires et surtout par les investisseurs intervenant dans les

25
Etats parties. En effet, comme on a pu l’observer, « c’est cette double sécurité juridique et
judiciaire, facteur de consolidation de l’Etat de droit, que le Traité OHADA a entendu assurer
aux opérateurs économiques à travers les missions confiées à la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage ».
Il convient de rappeler l’adoption, à partir des années 1990, du Traité OHADA et de ses actes
uniformes, ainsi que de textes instituant, dans le même espace géographique, des marchés
financiers communautaires, de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA),
d’une part, et de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC),
d’autre part.
Or, tous ces textes ont été élaborés de façon parallèle et sans coordination d’ensemble.
La mise en place de ces organisations s’est réalisée dans un contexte caractérisé par la
mondialisation de l’économie et des marchés financiers, laquelle, on le sait, a imposé des
défis nouveaux à différents pays et régions du monde, et notamment en Afrique, lesquels,
pour endiguer ce mouvement, se sont vus contraints d’œuvrer pour le renforcement de leur
intégration régionale.
Dès lors, le législateur de l’OHADA, dans son œuvre de construction d’un espace
d’intégration juridique stimulateur de croissance et de développement économiques, a-t-il pris
en compte et intégré toutes les exigences liées au phénomène de mondialisation de l’économie
et à l’émergence de marchés financiers communautaires en zone OHADA ?
La mondialisation de l’économie s’est notamment traduite par la globalisation financière et
l’internationalisation des marchés financiers. Il en est résulté un accroissement exponentiel
des transactions sur les marchés financiers internationaux, grâce à l’apparition de nouvelles
technologies de l’information et de la communication et à la faveur d’une interconnexion.
accrue des marchés financiers. Les pays africains étant confrontés à une insuffisance des
investissements, doivent, pour accroître la confiance des investisseurs, moderniser leurs
économies et leurs marchés et offrir aux investisseurs un cadre réglementaire et des
conditions, sinon meilleures, du moins équivalentes à celles de pays réputés attractifs.
Aborder les aspects de droit des marchés financiers de l’Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique suppose au préalable des
précisions d’ordre conceptuel visant à éclairer le domaine et les contours de la réflexion.
Que désigne alors le droit des marchés financiers ?
Le droit des marchés financiers peut être décrit comme un ensemble de règles régissant
l’organisation et le fonctionnement des marchés financiers et qui, dans ce cadre, définit les
institutions et structures des marchés, les opérations de marché et organise les relations entre

26
les différents intervenants ou acteurs des marchés financiers : émetteurs, investisseurs,
autorités, infrastructures de marché, intermédiaires, etc.
La dénomination « droit financier » est jugée préférable par certains auteurs pour définir le
droit applicable aux activités réalisées sur les marchés financiers. Cette opinion ne fait pas
l’unanimité, d’autres auteurs admettant le caractère dominant de l’appellation « droit des
marchés financiers », notamment du fait que le contenu de la discipline est alimenté par les
problématiques liées au fonctionnement des marchés, cette dernière appellation offrant
davantage de visibilité à la matière et étant d’une commodité indéniable, s’imposera dans la
présente étude. Quoiqu’il en soit, il ne sera pas question, dans le cadre de la présente étude,
d’aborder toutes les préoccupations de la matière. Sans éluder la complexité du cadre normatif
des marchés financiers en général et dans l’espace OHADA en particulier, nous limiterons
notre réflexion à certaines des questions fondamentales de droit des marchés financiers
soulevées dans l’Acte uniforme.
Le droit des sociétés et le droit des marchés financiers entretiennent des relations très étroites
qui, à divers égards, illustrent une certaine imbrication. Le développement fulgurant des
marchés financiers au cours des trente dernières années a d’ailleurs entraîné une mutation en
profondeur des règles régissant le fonctionnement des marchés et renforcé la porosité entre les
deux disciplines. Les sociétés cotées se caractérisent, plus qu’auparavant, par le rôle majeur
que joue le marché dans leur fonctionnement. Comme on a pu le relever, « le droit des
sociétés cotées trouve un principe de cohérence dans la prise en compte des exigences de la
détermination de la valeur de la société par le marché ». En outre, les deux corps de règles
sont étroitement sollicités pour l’encadrement des transactions et opérations qui se déroulent
sur les marchés financiers. Il convient également de préciser que les réglementations
combinées de l’appel public à l’épargne et des valeurs mobilières, contenues dans l’Acte
uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales, visent, en grande partie, à
optimiser le financement des sociétés par actions, grâce notamment à la possibilité qui leur est
offerte de regrouper une multitude d’actionnaires et ainsi, d’exercer un véritable « pouvoir de
concentration ».
L’Acte uniforme comporte ainsi certaines dispositions qui ressortissent au droit des marchés
financiers. Il s’agit des dispositions relatives aux sociétés faisant appel public à l’épargne. Ces
dernières sont dites « ouvertes », dans la mesure où elles recourent à l’épargne publique pour
assurer le financement de leurs investissements, par opposition aux sociétés dites « fermées »,
qui, elles, ne font pas appel public à l’épargne.

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Les dispositions de l’Acte uniforme relevant du droit des marchés financiers concernent
notamment : le document d’information (prospectus) exigé des émetteurs faisant appel public
à l’épargne, les obligations d’informations imposées à ces émetteurs, le domaine d’application
des règles de l’appel public à l’épargne, le régime des valeurs mobilières.
L’examen de ces différentes dispositions met en évidence deux préoccupations pour le moins
contradictoires du législateur OHADA, relatives aux marchés financiers : d’une part, une
ferme volonté d’encadrement et d’appréhension des opérations réalisées sur les marchés
financiers, à travers l’expression d’un impératif de transparence, et d’autre part, une relative
circonspection dans la consécration de mécanismes de financement des sociétés intervenant
sur les marchés financiers.
Ces constats nous conduisent à aborder successivement :
- L’AUDSC et la transparence des opérations sur les marchés financiers (I) ;

- L’AUDSC et le financement des opérations sur les marchés financiers (II).

Section I- - L’ACTE UNIFORME ET LA TRANSPARENCE DES OPERATIONS SUR


LES MARCHES FINANCIERS

Les opérations financières des entreprises sur les marchés financiers, qui prennent la forme de
levées de fonds (offres publiques de vente, augmentations de capital, emprunts obligataires,
etc.) par appel public à l’épargne, constituent, d’une certaine manière, la « sève » des marchés
financiers, tant il est vrai qu’en réalité, sans elles, il n’y a point de marché. En effet,
traditionnellement, le marché financier comprend, d’une part, un marché primaire, qui est
celui de l’émission des titres, encore appelé marché du neuf et, d’autre part, un marché
secondaire, ou la bourse, marché de l’occasion, sur lequel les titres déjà émis s’échangent
entre vendeurs et acheteurs, sur la base d’un prix représenté par le cours du titre. Le régime de
l’appel public à l’épargne défini dans l’Acte uniforme, comprend un ensemble d’obligations
d’information qui s’appliquent dès l’émission des titres sur le marché primaire. Outre le
législateur OHADA, les autorités boursières complètent ce dispositif, en exigeant également
des informations financières exhaustives pendant toute la vie boursière des titres, ou tant que
l’entreprise garde son statut d’émetteur faisant appel public à l’épargne.
Les opérations des émetteurs étant la principale source d’alimentation de l’activité sur les
marchés financiers, leur encadrement se révèle d’une impérieuse nécessité, dans la mesure où,
par ce biais, il s’agit d’assurer le bon fonctionnement des marchés.

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Dans les lignes qui suivent, sont abordés successivement les fondements du dispositif de
transparence des opérations, qui procèdent avant tout d’un impératif de sécurité et de bon
fonctionnement du marché (A) et le contenu de ce dispositif (B).

A - Les fondements du dispositif de transparence des opérations

Le régime de l’appel public à l’épargne défini dans l’AUDSC s’articule notamment autour
d’un principe de transparence destiné à guider les conditions et la mise en oeuvre des
opérations financières sur les marchés, ainsi que les obligations des intervenants à ces
opérations.
Ce faisant, le législateur de l’OHADA a indubitablement intégré ou anticipé, quoique de
manière circonspecte et timorée, l’émergence de marchés financiers dans son espace
géographique. Son mérite est réel, car la notion d’appel public à l’épargne, en dépit de son
abandon sous d’autres cieux, s’impose comme une notion essentielle en droit des marchés
financiers en ce qu’elle détermine la mise en œuvre des règles concourant à la protection des
investisseurs et du marché. Ces règles prennent essentiellement la forme d’obligations
d’information imposées aux émetteurs et aux autres acteurs du marché pour, d’une part,
satisfaire l’exigence de transparence et, d’autre part, assurer un bon fonctionnement du
marché, dans l’intérêt général de ses intervenants, de ses acteurs et du public.
La transparence, en effet, postule la diffusion, dans le cadre des opérations de marché, d’une
information pertinente, exacte, précise et sincère sur l’émetteur, visant à permettre aux
investisseurs de prendre leur décision d’investissement en toute connaissance de cause.
Il convient de rappeler que, traditionnellement, la transparence est considérée comme le
paramètre de l’efficience des marchés financiers, l’élément déterminant une bonne
connaissance des risques. En traduisant l’exigence d’une bonne information financière et
comptable, l’impératif transparentiel vise à satisfaire l’intérêt supérieur du marché, en
assurant une information d’ordre systémique, qui soit exacte, précise et sincère d’une part, et
accessible à tous les acteurs et intervenants du marché d’autre part.
A la faveur des crises financières de la dernière décennie et des scandales qui ont émaillé le
mouvement de globalisation financière, l’exigence de transparence a été renforcée avec
l’accroissement du rôle de la coopération, de la régulation microéconomique et de la
surveillance macroéconomique.
Il peut paraître surprenant de relever la place centrale réservée dans le droit OHADA des
sociétés aux principes du droit des marchés financiers et en particulier au principe de

29
transparence. En dépit de la grande proximité existant entre ces deux branches du droit, le
droit des sociétés poursuit, traditionnellement, une ambition conceptuelle et normative propre,
distincte de celle qui s’affirme en droit des marchés financiers.
Le droit des sociétés, en effet, dégage une logique et des principes spécifiques, qui visent
l’organisation des rapports intra-sociétaires, « dans l’intérêt commun des associés », alors que,
substantiellement, les principes du droit des marchés financiers s’articulent autour de
l’impératif de bon fonctionnement du marché.
Cependant, comme on a pu le relever, « cette nécessité de faciliter le bon fonctionnement des
marchés financiers a conduit le droit financier à instrumentaliser d’autres branches du droit :
ainsi du droit des sociétés devenu aujourd’hui, pour une large part, le servant du droit
financier ».
La doctrine range parmi les « principes tutélaires du droit boursier » le principe de
transparence. Ce principe s’impose, en effet, comme une donnée réelle et rationnelle dont la
prééminence sur différentes normes du droit des marchés financiers est très nettement établie.
Ce principe représente à la fois « le gage de l’efficience du marché et le fondement de la
confiance des différents intervenants ». De sorte qu’à travers les différentes applications du
principe de transparence dans l’Acte uniforme, le législateur OHADA s’est, en réalité,
préoccupé du bon fonctionnement des marchés financiers alors en cours de création dans la
zone, en mettant en place un cadre concourant à l’établissement de marchés efficients.
Le fondement du dispositif de transparence des opérations étant précisé, il convient d’en
examiner le contenu, afin de cerner les différentes déclinaisons de l’exigence de transparence
des opérations de marché prévues dans l’Acte uniforme.

B - Le contenu du dispositif de transparence des opérations

L’Acte uniforme offre, à travers diverses dispositions applicables aux sociétés faisant appel
public à l’épargne, diverses illustrations de l’exigence de transparence dans les opérations
initiées par lesdits groupements.
Parce que les sociétés faisant appel public à l’épargne interviennent sur les marchés et que
leurs titres sont très souvent inscrits à la cote d’une bourse des valeurs, elles sont soumises à
une stricte obligation de transparence qui, dans l’Acte uniforme, se traduit par l’exigence d’un
document d’information soumis au visa préalable de l’autorité de régulation du marché
financier (1°) et par l’obligation de publication d’informations périodiques ou occasionnelles
(2°).

30
L’impératif de transparence grevant le régime de l’appel public à l’épargne, ne se limite
cependant pas aux obligations d’information prescrites aux émetteurs. Il se traduit également
par un encadrement spécifique de la profession des commissaires aux comptes (3°),
encadrement téléologiquement inspiré par l’exigence d’une bonne régulation de l’information
financière.

1°) L’obligation d’établir un document d’information destiné au public

Toute opération par appel public à l’épargne (introduction en bourse, offre au public de titres
par émission, offre au public de titres par cession) donne préalablement lieu à une information
du marché. Cette information est rassemblée dans le document d’information que doit établir
l’émetteur des titres, c’est-à-dire l’entreprise ou l’entité qui propose ses titres au public en
contrepartie des fonds qu’elle se propose de lever sur le marché.
L’obligation d’établir un document d’information est fondamentale en droit des marchés
financiers et c’est ce qui conduit certains auteurs à y voir un « principe général », compte tenu
du fait qu’elle s’applique à tout type d’opération d’appel public à l’épargne et à toute entité y
procédant.
L’établissement d’un document d’information est prescrit à l’article 86 de l’Acte uniforme,
qui dispose :

«Toute société qui fait publiquement appel à l’épargne doit, au préalable, publier dans l’Etat
partie du siège social de l’émetteur et, le cas échéant, dans les autres Etats parties dont le
public est sollicité, un document destiné à l’information du public .Le document contient
toutes les informations qui, compte tenu de la nature particulière de l’émetteur et des valeurs
mobilières offertes au public ou admises à la négociation sur une bourses des valeur d’un
Etat partie ,sont nécessaires pour permettre aux investisseurs d'évaluer en connaissance de
cause Ie patrimoine ,la situation financière, les résultats et les perspectives de I’ émetteur et
des garants éventuels, ainsi que les droits attaches à ces valeurs mobilières .Ces informations
sont précisées par I ‘autorité compétente de chaque Etat partie et présentées sous une forme
simple et compréhensible »

En dépit de toute sa clarté, cette disposition soulève une interrogation : quels sont les cas
nécessitant l’établissement d’un document d’information ?

31
Le document d’information doit être établi à partir du moment où une opération entre dans le
champ de l’appel public à l’épargne. Le champ d’application de l’appel public à l’épargne est
défini à l’article 81 de l’Acte uniforme, qui dispose :
« Sont réputées faire publiquement appel à l’épargne :

- les sociétés dont les titres sont inscrits à la bourse des valeurs d’un Etat partie, à dater de
l’inscription de ces titres ;
- les sociétés qui, pour offrir au public d’un Etat partie des valeurs mobilières ,dans les
conditions énoncées à l'article 83 ci-après.
Lorsqu'un marché financier couvre plusieurs Etats parties, ceux-ci sont considérés comme
constituant un seul Etat partie pour les besoins du présent titre ».
A la lecture de cette disposition ,l’on constate que la présomption d’appel public à l’épargne
fondée sur le nombre d’investisseurs a été supprimée de l’acte uniforme (l’appel public à
épargne était réputée dès lorsqu’il y avait diffusion des titres au-delà d’un cercle de cent
(100) personnes).

Il convient d’observer que ces critères énoncé sus dessus sont alternatifs. Il en résulte que si
un seul desdits critères est établi, la société concernée sera considérée comme soumise au
régime de l’appel public à l’épargne avec toutes les conséquences qui en découlent
notamment en matière d’information financière.

* Le critère de la cotation en bourse

S’agissant du premier critère de l’appel public à l’épargne, quand bien même la périphrase «
sociétés dont les titres sont inscrits à la bourse des valeurs… » figurant à l’article 81 semble
viser les sociétés déjà cotées en bourse, ce premier critère vise d’abord les sociétés qui
sollicitent leur introduction en bourse, autrement dit l’admission de leurs titres à la
négociation sur un marché boursier, tel celui de la Bourse des Valeurs Mobilières de l’Afrique
Centrale (BVMAC), située à Libreville, ou encore celui de la Bourse Régionale des Valeurs
Mobilières (BRVM), établie à Abidjan .Le premier critère vise en outre les sociétés qui, étant
déjà cotées en bourse, envisagent une opération d’émission ou de cession de titres au public.

*Le critère de l’offre de titres au public

32
S’agissant du second critère, qui vise l’offre de titres au public, l’article 83 de l’Acte uniforme
précise que cette offre « s’entend du placement de titres dans le cadre soit d’une émission soit
d’une cession ». L’émission de titres dans le public ne soulève aucune difficulté particulière.
Elle vise la création des titres par l’émetteur, c’est-à-dire la société concernée. En effet, alors
que cette émission de titres dans le public est nécessairement le fait de la seule société
émettrice, la cession desdits titres peut, en revanche, être réalisée à l’initiative d’un
actionnaire quelconque de la société. En ce qui concerne l’émission des titres dans le public,
si l’émission est adressée au public, par recours à un établissement de crédit ou un agent de
change (intermédiaire en bourse), ou à un procédé de publicité ou au démarchage, on est en
présence d’un appel public à l’épargne En revanche, une incertitude existe en ce qui concerne
la cession des titres dans le public. Lorsque la cession des titres émane d’un seul actionnaire
qui, motu proprio, décide de céder ses titres au public ou sur le marché, doit-on en déduire
qu’il y a appel public à l’épargne de la société et qu’en conséquence, ladite société doit se
soumettre aux obligations qui en découlent vis-à-vis du marché, alors même qu’elle n’est pas
à l’origine de l’opération, voire, qu’elle s’y est opposée ? Une telle cession est quelquefois
désignée « cession dissidente ». L’hypothèse est rarissime, dans la mesure où, en règle
générale, la société approuve la cession de ses titres au public, même lorsque ladite cession
émane d’un seul de ses actionnaires. Néanmoins, pour la doctrine, s’il apparaît que les titres
sont effectivement offerts au public ou sur le marché, l’on doit considérer qu’il y a bien appel
public à l’épargne de la société.
Raisonnons à propos de la publicité visée à l’article 81 de l’Acte uniforme comme procédé
d’offre au public. La publicité vise à informer le public de la réalisation d’une émission ou
d’une cession de titres. En effet, la publicité liée au régime de l’appel public à l’épargne doit,
de manière non équivoque, faire mention de valeurs mobilières dont l’émission ou la cession
est proposée au public. Cette publicité peut prendre plusieurs formes : insertion dans la presse,
affichage public, radio, télévision, internet, etc. Comme on le voit, la publicité ne produit les
effets de l’appel public à l’épargne que lorsqu’elle consiste à porter à la connaissance du
public l’émission ou la cession des titres en proposant à ce même public la souscription
desdits titres. Une question surgit alors : quid de la société qui informe, par voie de presse, ses
propres actionnaires, d’une émission ou d’une cession de titres ? Une telle publicité est-elle
susceptible de soumettre ladite société aux règles de l’appel public à l’épargne ? Une réponse
positive nous paraît s’imposer. L’on peut prendre appui sur la publicité de l’émission de titres,
qui est strictement réglementée en ce qui concerne les sociétés situées hors du champ de
l’appel public à l’épargne. En effet, l’article 598 de l’Acte uniforme prévoit que les

33
actionnaires sont informés de l’émission d’actions nouvelles et de ses modalités par un avis
contenant différentes indications relatives à la société, aux caractéristiques des titres à
émettre, aux modalités de souscription, etc. L’article 599 du même texte dispose : « L’avis
prévu à l’article 598 du présent Acte uniforme est porté à la connaissance des actionnaires
par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis de
réception (…) ». On voit bien que la publicité est exclue pour les sociétés ne faisant pas appel
public à l’épargne, lesquelles doivent avoir recours soit à une lettre au porteur, soit à une lettre
recommandée. Ce qui permet de déduire que pour les sociétés dites « fermées », le recours à
la publicité est de nature à entraîner l’application des règles de l’appel public à l’épargne.

*Visa de l’autorité du marché

Si l’obligation d’établir un document d’information est fondamentale, encore faut-il, pour


pouvoir le diffuser dans le public et lever les fonds sollicités sur le marché, que ce document
soit, préalablement, soumis au visa de l’autorité de marché.
C’est ce que prévoient les dispositions de l’article 90 de l’Acte uniforme.
En conférant un tel rôle aux autorités de régulation des marchés financiers, l’article 90
consacre la prise en compte, par le législateur OHADA, de l’existence ou de l’émergence de
marchés financiers dans son espace géographique. Dès lors, n’y avait-il pas lieu de procéder
d’emblée à une véritable distribution des rôles ? En effet, ces autorités de régulation boursière
sont dotées de pouvoirs normatifs et quasi-juridictionnels dans leur domaine de compétence,
lequel couvre le régime de l’appel public à l’épargne. Cette situation rend, en conséquence,
possibles des conflits de compétence, compte tenu de la juxtaposition, dans la zone OHADA,
des normes relatives à l’appel public à l’épargne et des organes chargés de les appliquer ou
d’en contrôler l’application.
L’exigence du visa de l’autorité de contrôle de la bourse des valeurs ne saurait surprendre.
Elle participe directement de la mise en œuvre du principe de transparence, car elle impose
aux émetteurs de communiquer très largement sur leur situation, leur activité, leurs résultats et
leurs perspectives. L’exigence du visa ressortit en outre directement des missions principales
des autorités de régulation, à travers le triptyque bien connu : protection de l’épargne –
contrôle de l’information financière – garantie du bon fonctionnement du marché.
Bien que soumis au visa préalable de l’autorité de régulation financière, le document
d’information doit, en outre, obéir à des règles de forme.

34
*Forme du document d’information
Le document d’information peut prendre la forme d’un document unique ou comprendre deux
documents distincts. Dans la première hypothèse, le document unique est dit, selon les pays
ou les marchés, « document d’information », « note d’information » ou « prospectus ». Dans
la seconde hypothèse, le premier élément du document d’information est souvent désigné «
document de référence ». Le second élément est alors la note d’opération. Il convient de
préciser que lorsqu’un émetteur choisit la formule d’un document d’information comprenant
les deux éléments précités, seul le document de référence est visé par l’autorité compétente.
Dès lors, les émetteurs qui envisagent de solliciter de manière récurrente le marché pourraient
avoir intérêt à établir chaque année un document de référence.
En ce qui concerne le contenu de ces documents, le document de référence doit renseigner sur
les éléments généraux concernant la situation de l’émetteur, visés à l’article 86 de l’Acte
uniforme, à savoir : l’organisation de l’émetteur, sa situation financière, son activité, ses
perspectives, etc.. La note d’opération, qui complète le document de référence, doit renseigner
essentiellement sur la nature et les caractéristiques des titres offerts, les modalités d’émission
desdits titres, les éléments comptables nouveaux et les éléments concernant les faits nouveaux
significatifs, susceptibles d’avoir une incidence sur l’évaluation des titres offerts.
La mise en oeuvre du principe de transparence doit-elle se limiter à la publication
d’informations, fussent-elles exhaustives, au bénéfice des investisseurs ? La pratique montre
que les documents d’information, qui comportent souvent une masse de données sur les
émetteurs et les caractéristiques de leurs opérations, se révèlent quelquefois indigestes et ne
sont pas toujours exploités à bon escient par leurs destinataires. L’impératif transparentiel ne
commande-t-il pas de satisfaire un objectif d’accessibilité et d’intelligibilité des informations
publiées? Le législateur de l’OHADA a-t-il porté à son terme la logique de protection des
investisseurs destinataires des informations en intégrant une préoccupation d’efficacité de la
production informationnelle prescrite aux émetteurs faisant appel public à l’épargne ? Même
si une réponse négative s’impose ici avec évidence, il n’y a là rien de bien troublant, mais
simplement, à notre sens, la confirmation d’un choix en faveur d’une distribution des rôles
avec les autorités des marchés financiers, en se contentant de fixer un cadre général et en
abandonnant aux autorités boursières les considérations liées à l’impératif d’une protection
efficace de l’épargne publique.
Outre l’obligation d’établir un document d’information, le statut d’émetteur faisant appel
public à l’épargne commande la publication d’informations périodiques et occasionnelles.

35
2°) L’obligation de publication d’informations occasionnelles et périodiques.

L’Acte uniforme, dans sa logique déjà évoquée de prise en compte, voire d’anticipation de
l’émergence des marchés financiers dans la zone OHADA, a consacré tout un dispositif de
production informationnelle incombant aux sociétés anonymes faisant appel public à
l’épargne, parmi lesquelles figurent le sociétés dont les titres sont inscrits à la bourse des
valeurs. Ce dispositif s’articule autour d’informations occasionnelles d’une part et
d’informations périodiques d’autre part.

a-L ’obligation de publication d’informations occasionnelles

L’obligation de publication d’informations occasionnelles prescrit aux sociétés anonymes


faisant appel public à l’épargne la publication de notices ou d’avis dans des circonstances
particulières. Ainsi, l’Acte uniforme prescrit la publication d’une notice en cas de constitution
d’une société anonyme par appel public à l’épargne, en cas de modification du capital
social44 et en cas de placement d’obligations.
Dans le cadre de la constitution d’une société par appel public à l’épargne, l’Acte uniforme
exige la publication, avant la phase de souscription des titres, d’une notice y afférente dans les
journaux d’annonces légales.

Cette notice doit comporter un ensemble de renseignements d’ordre juridique sur la société,
ainsi que des éléments concernant notamment les principales caractéristiques des actions
offertes à la souscription, la description des apports en nature, avec leur évaluation, les dates
d’ouverture et de clôture des souscriptions, l’adresse et le nom ou la dénomination sociale du
notaire ou de la banque qui assure la réception des fonds provenant des souscriptions, etc.
Outre la publication de la notice, la constitution d’une société par appel public à l’épargne
doit donner lieu à l’établissement de circulaires, qui sont destinées notamment à renseigner le
public sur les modalités d’affectation et d’utilisation des fonds provenant des souscriptions.
La publication d’une notice peut intervenir également en cas de modification du capital social
d’une société faisant appel public à l’épargne. Dans cette hypothèse, la notice doit comporter
des indications d’ordre juridique sur la situation de la société, ainsi que des renseignements se
rapportant notamment au montant de l’augmentation de capital, aux dates d’ouverture et de
clôture des souscriptions, aux caractéristiques des actions émises, etc.

36
L’Acte uniforme exige, en outre, la publication d’une notice en cas de placement
d’obligations. L’on rappellera que l’activité de placement de titres consiste à rechercher des
souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d’un émetteur ou d’un cédant de valeurs
mobilières. Cette opération est réalisée par un prestataire de services d’investissement ou
société de bourse (société de gestion et d’intermédiation sur le marché financier ouest
africain), agissant en vertu d’un mandat conféré par l’émetteur ou le cédant des titres.
La notice prévue à l’article 842 de l’Acte uniforme en cas de placement d’obligations doit
comporter des indications relatives notamment aux caractéristiques des titres obligataires à
émettre, au montant de l’émission, au taux et au mode de calcul des intérêts et autres produits
ainsi que les modalités de paiement, aux garanties conférées, le cas échéant, aux obligations,
aux conditions de remboursement et, éventuellement, aux conditions de rachat des
obligations, etc.
Outre la publication de notices dans les hypothèses précitées, l’Acte uniforme exige d’autres
publications occasionnelles, liées à la convocation des réunions des assemblées d’actionnaires
et d’obligataires.
Ainsi, avant la réunion de l’assemblée générale des actionnaires, un avis doit être publié dans
un journal habilité à recevoir les annonces légales. Cet avis doit notamment contenir des
informations sur la société, sur l’ordre du jour de l’assemblée, sur les projets de résolutions
présentés à l’assemblée, etc. L’avis de convocation des obligataires à leur assemblée générale
doit obéir aux mêmes conditions de publicité et doit, hormis les informations sur la société,
préciser notamment la dénomination de l’emprunt souscrit par les obligataires dont la masse
est convoquée en assemblée.
Il convient de relever que ce dispositif d’informations occasionnelles consacré par le
législateur de l’OHADA peut être considéré comme non exhaustif. En effet, les autorités de
régulation des marchés financiers de l’espace OHADA prévoient, en la matière, un plus large
éventail d’obligations, pour tenir compte des exigences d’une saine protection de l’épargne et
d’un bon fonctionnement du marché financier. C’est ainsi qu’elles prévoient par exemple,
l’obligation pour tout émetteur dont les titres sont inscrits en bourse de publier un
communiqué de presse dès la survenance d’un changement ou événement important
susceptible d’exercer une influence notable sur le cours ou la valeur de ses titres. De même,
lorsqu’une personne prépare une opération financière susceptible d’avoir une incidence
significative sur le cours d’une valeur, elle doit, sans délai, informer le public des
caractéristiques de ladite opération. Outre les informations occasionnelles, les émetteurs sont
tenus à la publication d’informations périodiques.

37
b-L ’obligation de publication d’informations périodiques

L’Acte uniforme met à la charge des sociétés dont les titres sont inscrits à la cote d’une bourse
des valeurs, aux articles 846 et suivants, la publication d’informations périodiques.
La publication de ces informations périodiques doit obligatoirement se faire dans des
journaux habilités à recevoir des annonces légales. Les informations à publier dans ce cadre
portent essentiellement sur l’activité et les résultats de la société. Ces informations
périodiques comprennent des publications annuelles, des publications semestrielles55 et des
publications concernant les filiales des sociétés cotées. La publication des états financiers de
synthèse approuvés doit obligatoirement être revêtue de l’attestation des commissaires aux
comptes, qu’il s’agisse des comptes de la société cotée elle-même ou des comptes consolidés
si la société a des filiales ou participations.
L’exigence de transparence des opérations d’appel public à l’épargne commande également
une forte implication des professionnels du contrôle légal des comptes.

3°) L’encadrement de la profession des commissaires aux comptes

Si, comme on l’a vu, l’impératif de transparence s’exprime fondamentalement à travers les
nombreuses obligations informationnelles prescrites aux sociétés faisant appel public à
l’épargne, le législateur de l’OHADA semble affirmer une volonté de renforcement de la
transparence par l’extension du périmètre de la régulation de l’information financière.
L’Acte uniforme consacre des exigences particulières concernant les commissaires aux
comptes et qui visent à renforcer le dispositif de contrôle des comptes et de l’information
financière des sociétés faisant appel public à l’épargne.
En effet, alors que les sociétés anonymes de droit commun doivent désigner un seul
commissaire aux comptes titulaire et un suppléant, l’article 702 de l’Acte uniforme impose la
présence de deux (2) commissaires aux comptes titulaires et de deux (2) suppléants dans les
sociétés faisant appel public à l’épargne.
L’on peut considérer cette dernière exigence comme l’illustration topique d’une volonté de
renforcer la fiabilité et donc la qualité de l’information financière des sociétés faisant appel
public à l’épargne, dans l’intérêt des investisseurs et du marché. Cette exigence du co-
commissariat aux comptes pourrait également être perçue comme la volonté de consacrer des

38
pratiques ayant aujourd’hui valeur de standards internationaux et qui sont éprouvées sur les
places financières internationales.
Une autre règle consiste dans l’intervention de commissaires aux comptes dans chaque Etat
dont le public est sollicité dans le cadre d’opérations financières.
Il convient d’observer que c’est davantage dans la réglementation adoptée par les autorités de
régulation des marchés financiers que l’on retrouve l’inclination la plus marquée à
l’encadrement de la profession des commissaires aux comptes.

Section II - L’ACTE UNIFORME ET LE FINANCEMENT DES OPERATIONS SUR


LES MARCHES FINANCIERS

Avec l’émergence de marchés financiers en zone OHADA, l’appel public à l’épargne, qui
constitue une technique de financement des entreprises et autres entités y ayant recours, est
appelé à jouer un rôle croissant dans le financement des entreprises et de l’économie.
Faire appel public à l’épargne consiste en effet, pour un émetteur, à placer dans le public des
valeurs mobilières et à recevoir, en contrepartie, des liquidités nécessaires à ses
investissements, puisque les sommes collectées au moment du placement des titres dans le
public viennent gonfler les fonds propres desdites entreprises.
Cependant, l’appel public à l’épargne est une technique de financement qui n’est pas ouverte
à toutes les catégories d’émetteurs.
Dès lors, dans sa logique de prise en compte de l’émergence des marchés financiers dans sa
zone, le législateur de l’OHADA a-t-il mis en place les conditions permettant aux émetteurs
sollicitant le marché d’optimiser leur financement ?
La réponse à cette question commande des précisions préalables sur les catégories
d’émetteurs autorisés à faire appel public à l’épargne (A°).
La réponse commande en outre une appréciation du régime des valeurs mobilières mis en
place afin d’apprécier son degré de souplesse et juger si le législateur de l’OHADA a offert
suffisamment de liberté tant en matière de création que de gestion de ces valeurs mobilières
afin de permettre aux entreprises d’adapter constamment leurs ressources en fonds propres à
leurs besoins réels de financement. Quelques éléments de réponse peuvent être apportés en
examinant les valeurs mobilières dont l’émission est autorisée par l’Acte uniforme (B°).

A – Les émetteurs autorisés à faire appel public à l’épargne

39
On l’a vu, l’appel public à l’épargne se traduit par une levée de capitaux provenant des
investisseurs et du public. Dès lors, ses modalités font l’objet d’une stricte réglementation,
établie dans le souci d’assurer une efficace protection de l’épargne, tant il est vrai qu’en
Afrique, l’appel public à l’épargne a souvent donné lieu à des escroqueries et autres abus.
Dans sa logique de strict encadrement de l’appel public à l’épargne, le législateur de
l’OHADA a ainsi entendu encadrer la possibilité de recours à l’appel public à l’épargne en
limitant les catégories d’émetteurs autorisés.

1°) Le principe : l’appel public à l’épargne est interdit sauf autorisation expresse

L’article 82 de l’Acte uniforme dispose :


« Il est interdit aux sociétés n’y ayant pas été autorisées (…) de faire publiquement appel à
l’épargne.
II est également interdit à toute personne de procéder a la cession par appel public à I'
épargne des titres d'une société n'étant pas autorisée à faire publiquement appel à l'épargne
par Ie présent acte uniforme.
Toute opération effectuée en violation des dispositions du présent article est nulle ».

Ainsi, l’appel public à l’épargne est interdit, sauf lorsque la loi l’autorise expressément. Le
principe est donc celui de l’interdiction. L’exception au principe est établie en cas
d’autorisation expresse de la loi.
Ce principe d’interdiction repose sur la nécessité de s’assurer que les émetteurs envisageant
de mobiliser l’épargne publique présentent des garanties de solvabilité permettant de
préserver la valeur des titres acquis par l’investisseur en contrepartie de son apport de fonds.
L’on pourrait également observer qu’en énonçant ce principe d’interdiction, le législateur de
l’OHADA a entendu préserver, en toutes circonstances, la confiance du public à l’égard des
émetteurs autorisés, parce que présentant, par définition, des garanties de solvabilité.
Quelles sont alors les émetteurs autorisées par l’Acte uniforme à faire appel public à l’épargne
?

2°) Les groupements autorisés à faire appel public à l’épargne

40
Les sociétés anonymes constituent l’unique catégorie de sociétés commerciales expressément
autorisée par l’Acte uniforme à faire appel public à l’épargne. Il n’y a là rien de bien
surprenant. La société anonyme constitue le modèle par excellence de la société par actions.
Elle est en effet traditionnellement constituée en vue de drainer un maximum de capitaux et
regrouper de nombreux apporteurs de fonds. Un auteur a d’ailleurs, dans sa thèse de doctorat
soutenue en 1961, mis en évidence le « pouvoir de concentration »comme une particularité de
ce type de société. Dans le même ordre d’idées, l’on a pu voir dans l’appel public à l’épargne
le « critère de distinction des sociétés de capitaux », dont font partie les sociétés anonymes.
L’appel public à l’épargne permet en effet de mobiliser des fonds émanant d’investisseurs
multiples. En outre, parmi les sociétés commerciales consacrées dans l’Acte uniforme, la
société anonyme est la seule à pouvoir émettre des titres négociables. Bien que la société par
action simplifiée a emprunter la plus part des règles de la société anonyme ,il demeure que
l’acte uniforme a exclu la possibilité pour cette nouvelle forme de société de faire appel public
à l’épargne.
La négociabilité est considérée par la doctrine comme « le caractère distinctif essentiel des
titres financiers au sein de la catégorie des instruments financiers ». Or ces titres financiers
recouvrent les valeurs mobilières, lesquelles comprennent, classiquement, les actions et les
obligations.
La négociabilité s’entend traditionnellement de la qualité attachée à un titre représentatif d’un
droit ou d’une créance qui en permet une transmission rapide et simple parce que dispensée
des formalités de la cession de créance relevant du droit civil. Il est vrai que le
fonctionnement normal d’un marché financier, qui est tributaire d’une mobilisation optimale
de capitaux, ne saurait s’accommoder d’entraves à la libre transmission des titres et à la
circulation desdits capitaux. Comme l’observe un auteur, la négociabilité garantit « un produit
pur de toute scorie juridique ou aspérité de régime de nature à contrarier la mise en œuvre, par
le cessionnaire, des prérogatives de ses titres ».
L’Acte uniforme consacre un titre et plusieurs chapitres aux dispositions spécifiques relatives
à l’appel public à l’épargne des sociétés anonymes. Dans son élan visant à conforter les
garanties de solvabilité des émetteurs autorisés à faire appel public à l’épargne, le législateur
OHADA a édicté des exigences de capital social minimum, en fixant à cent millions
(100.000.000) de francs CFA le capital social minimum des sociétés anonymes cotées en
bourse ou faisant appel public à l’épargne.

41
Sur la question des groupements autorisés à faire appel public à l’épargne, si, concernant les
sociétés anonymes, le doute n’est pas de mise, une opinion isolée a semblé entrevoir des
possibilités d’appel public à l’épargne par d’autres formes de sociétés ou de groupements.
Ainsi, est-il permis à une société autre qu’une société anonyme de faire appel public à
l’épargne?

Une réponse négative paraît, à notre sens, s’imposer. En effet, nulle part dans l’Acte
uniforme, l’on ne retrouve une autorisation expressément consacrée dans ce sens pour les
groupements autres que les sociétés anonymes.
Les dispositions de l’article 824 alinéa 2 de l’Acte uniforme doivent cependant être
rappelées :
« Le capital social (de la société cotée en bourse ou faisant appel public à l’épargne) ne peut
être inférieur au montant prévu à l’alinéa précédent (100.000.000 de francs CFA), à moins
que la société ne se transforme en société d’une autre forme. »
Faut-il en déduire qu’une société autre qu’une société anonyme est en mesure de faire appel
public à l’épargne ? En faveur d’une réponse positive, il est soutenu qu’une société anonyme
faisant appel public à l’épargne et dont le capital social deviendrait inférieur à 100.000.000 de
francs CFA, devrait obligatoirement, en vertu de cette disposition, se transformer en société
d’une autre forme « sans pour autant, semble-t-il, être interdite d’appel public à l’épargne ».
Cette opinion semble admettre d’une part, l’appel public à l’épargne même pour une société
dont le capital est inférieur au montant minimum de 100.000.000 de francs CFA fixé dans
l’Acte uniforme et, d’autre part, l’appel public à l’épargne d’une société autre qu’une société
anonyme.
Sur ces deux points, cette position n’emporte pas l’adhésion.
Sur le premier point, concernant le niveau de capital social requis pour pouvoir faire appel
public à l’épargne, l’Acte uniforme énonce un « capital minimum », ce qui amène à exclure
toute possibilité d’appel public à l’épargne à l’émetteur dont le capital passe en dessous du
seuil légal de 100.000.000 de francs CFA. L’article 824 dans son second alinéa indique
simplement que lorsque le capital social devient inférieur au seuil légal, la société doit se
transformer en société d’une autre forme, ce qui signifie qu’elle perd, par voie de
conséquence, son statut d’émetteur faisant appel public à l’épargne, dans la mesure où l’une
des conditions essentielles pour accéder à ce statut et donc le conserver, consiste dans le
niveau de capital social. Le niveau de capital social requis des émetteurs de cette catégorie
n’est, en effet, pas anodin. Il doit apporter des garanties de solvabilité aux investisseurs, dont

42
la confiance ne doit pas être rompue. Qui plus est, il serait pour le moins hasardeux de
reconnaître une telle possibilité à des groupements autres que les sociétés anonymes, ne
remplissant aucun des deux principaux critères prévus, à savoir l’autorisation expresse de
l’Acte uniforme et le capital social minimum de 100 millions de francs CFA. La
reconnaissance d’une telle possibilité aux émetteurs autres que les sociétés anonymes est
d’autant moins justifié qu’en l’absence d’autorisation expresse dans l’Acte uniforme, l’appel
public à l’épargne par d’autres groupements pourrait être qualifié d’irrégulier et serait
susceptible de tomber sous le coup de sanctions pénales, si, par exemple, les éléments
constitutifs traditionnels de l’infraction d’escroquerie étaient réunis.

Sur le second point, qui concerne les catégories de groupements expressément autorisés par
l’Acte uniforme à faire appel public à l’épargne, l’Acte uniforme n’autorise expressément
l’appel public à l’épargne « qu’aux seules sociétés anonymes dont le capital social n’est pas
inférieur à 100 millions de francs CFA ». Dès lors, la seule catégorie de société autorisée étant
la société anonyme, une société d’une autre forme ne saurait valablement à notre sens,
recourir à cette technique de financement sans pouvoir se prévaloir d’une autorisation
expresse prévue dans l’Acte uniforme.
Le régime de l’autorisation expresse de la loi est classique en France, où il est consacré à
l’article 1841 du Code civil, qui dispose :
« Il est interdit aux sociétés n’y ayant pas été autorisées par la loi de faire publiquement appel
à l’épargne ou d’émettre des titres négociables, à peine de nullité des contrats conclus ou des
titres émis ».
Cette dernière disposition, qui a visiblement inspiré, quoique de manière partielle, la rédaction
de l’article 82 précité de l’Acte uniforme, nous paraît plus satisfaisante notamment parce
qu’elle rattache à l’interdiction qu’elle édicte une sanction radicale, la nullité. Le risque
d’annulation nous paraît de nature à dissuader les tentatives de fraude pouvant émaner des
émetteurs non expressément autorisés par la loi à faire publiquement appel à l’épargne. A cet
égard, l’absence de sanction prévue à l’article 82 de l’Acte uniforme limite substantiellement
l’efficacité de l’interdiction énoncée.
On le voit, le législateur de l’OHADA se montre particulièrement circonspect en ce qui
concerne les catégories d’émetteurs autorisés à faire appel public à l’épargne. Qu’en est-il en
matière de valeurs mobilières ?

B – Les valeurs mobilières dont l’émission est autorisée

43
Les marchés financiers de la zone OHADA, principalement celui de l’Afrique de l’ouest
d’une part et celui de l’Afrique Centrale, d’autre part, organisent la convergence entre l’offre
et la demande d’un bien particulier qui fait l’objet de négociations : la valeur mobilière. La
notion de valeur mobilière, même si elle paraît avoir quelque peu perdu de son imperium sous
d’autres cieux, occupe une place centrale dans le régime des sociétés par actions de l’espace
OHADA, au sein duquel les notions d’instrument financier et de titre financier n’ont pas, à ce
jour, été consacrées.
La notion de valeur mobilière dans la zone OHADA n’a pas, pour l’heure, suscité un
enthousiasme débordant au sein de la doctrine. Les études consacrées à cette notion
fondamentale brillent notamment par leur rareté, il est vrai contrebalancée par la pertinence et
la profondeur de certaines réflexions ayant contribué à circonscrire l’état actuel des données
de la matière, à en recenser les notions essentielles et à en faciliter la compréhension76.
Pourtant, la notion de valeur mobilière dans l’espace OHADA est au cœur des mécanismes de
financement des sociétés faisant appel public à l’épargne ou dont les titres sont admis en
bourse.
Les valeurs mobilières peuvent être considérées comme le véritable dénominateur commun
des marchés financiers de la zone OHADA, dans la mesure où, d’une part, les marchés
financiers sont traditionnellement définis comme des marchés de valeurs mobilières et parce
que, d’autre part, la définition de leur régime détermine les règles de protection des
épargnants et les mécanismes de sécurisation des transactions de marché.
Comme on a déjà eu à le déplorer, l’Acte uniforme régit les valeurs mobilières sans en
proposer une définition erga omnes. Certes, l’article 744 de l’Acte uniforme, comme on le
verra, en précise les caractéristiques, mais de manière incomplète, puisqu’il ne rend pas
compte de certaines caractéristiques fondamentales, telles la vocation d’instruments de
financement et la négociabilité, qui participent de l’essence de la notion. Pourtant, des
catégories diversifiées de valeurs mobilières peuvent être négociées sur les marchés
financiers. Cette diversification des valeurs mobilières est-elle, cependant, consacrée avec
évidence dans l’Acte uniforme ? Rien n’est moins certain. Pourtant, la compétitivité des
places financières repose sur leur capacité à offrir aux investisseurs les véhicules
d’investissement et de placement les plus diversifiés, leur permettant de procéder à des
arbitrages et de rechercher la meilleure rentabilité de leurs placements. Cette nécessaire
diversification est au cœur du fonctionnement des marchés financiers. Il y a lieu d’examiner si

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les catégories de valeurs mobilières dont l’émission est autorisée dans l’Acte uniforme sont
diversifiées.
En dépit de l’absence de définition générique des valeurs mobilières dans l’Acte uniforme,
l’on peut cependant s’accorder, par la combinaison des articles 744 et suivants du même texte,
pour voir dans les valeurs mobilières des titres négociables, identiques par catégorie, cotés ou
susceptibles de l’être, émis par une même personne morale, en contrepartie d’un apport de
capitaux, qui traduit la vocation fondamentale d’instruments de financement des valeurs
mobilières.
L’analyse du régime des valeurs mobilières sera volontairement partielle dans le cadre de la
présente étude. Elle vise essentiellement à apprécier la pertinence du dispositif mis en place,
au regard des exigences de développement des marchés financiers institués dans l’espace
OHADA. Cela permettra de vérifier si le législateur OHADA a, peu ou prou, optimisé les
moyens et instruments de financement auxquels peuvent recourir les émetteurs faisant appel
public à l’épargne.
L’Acte uniforme consacre deux catégories principales de valeurs mobilières dont l’émission
est expressément autorisée. Il s’agit des catégories traditionnelles de valeurs mobilières (1°), à
savoir les actions et les obligations. La question de la possibilité d’émettre des valeurs
mobilières composées a été à un moment donné controversée mais la révision de l’acte
uniforme en 2014 a permis de mettre fin à cette controverse(2°).

1°) L’émission de valeurs mobilières traditionnelles

L’article 744 alinéa premier énonce :


« Les sociétés anonymes émettent des valeurs mobilières ainsi que d'autres titres financiers.
Au sens du présent Acte uniforme, les valeurs mobilières émises par les sociétés anonymes
comprennent :les titres de capital ;les titres de créance autres que les titres du marché
monétaire. La forme, le régime et les caractéristiques des titres du marché monétaire sont
définis par I ‘organe compétant de chaque Etat partie…. »

a – L’émission d’actions ordinaires et d’actions de préférence

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L’Acte uniforme ne donne aucune définition substantielle des actions. Tout au plus, il en
définit les formes, précise les droits qui y sont attachés, les conditions de leur négociabilité, de
leur transmission, etc.
L’on peut néanmoins définir les actions comme des valeurs mobilières émises par les sociétés
par actions en représentation de leur capital social. L’expression « titres de capital » trouve là
toute sa justification. Les actions sont également des titres attribués aux personnes qui
réalisent un apport en fonds propres à la société.
L’ensemble formé par les actions comprend principalement des actions ordinaires et des
actions de priorité ou de préférence.
Les actions ordinaires :
Les actions ordinaires seront, dans le cadre de la présente étude, examinées principalement
sous l’angle des droits qu’elles incorporent. L’attention sera portée, sans doute arbitrairement,
sur la question des droits pécuniaires, parmi lesquels le droit aux dividendes occupe une place
de choix.
Les actions confèrent, en effet, à leurs titulaires, des prérogatives sur l’actif social. C’est ainsi
que lorsqu’un bénéfice apparaît à la fin d’un exercice social et que l’assemblée générale des
actionnaires décide de le mettre en distribution, chaque actionnaire en recevra une fraction
sous forme de dividende. A cet égard, il convient de rappeler que le bénéfice distribuable est
constitué par le bénéfice de l’exercice diminué des pertes antérieures reportées ainsi que des
sommes portées en réserve en application de la loi ou des statuts et augmenté, le cas échéant,
du report bénéficiaire.
La distribution des dividendes doit être effectuée, en principe, proportionnellement à la
quotité de capital détenue par chaque actionnaire. Toutefois, comme on le verra, l’émission
d’actions de priorité ou de préférence, peut se traduire par la stipulation de privilèges sur les
bénéfices et donc par une distribution inégale desdits bénéfices.
S’agissant de la forme que doivent revêtir les dividendes, l’Acte uniforme n’énonce aucune
exigence particulière. Dès lors, est-il possible d’effectuer un paiement du dividende en actions
?
Cette modalité de versement du dividende présente divers avantages, tant pour la société que
pour les actionnaires. Le paiement du dividende en actions permet en effet à la société de
renforcer ses fonds propres et aux actionnaires de réaliser des plus-values en cas de cession de
leurs titres, avec, toutefois, un inconvénient, puisque les actionnaires qui ne consentent pas à
cette technique subiront une dilution de leurs droits sur le capital social.

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L’article 146 de l’Acte uniforme confère à l’assemblée générale des actionnaires le pouvoir de
fixer les modalités de paiement des dividendes. Toutefois, en vertu des mêmes dispositions,
l’assemblée générale peut déléguer ce pouvoir à la direction générale de la société.
Dès lors que l’Acte uniforme n’énonce aucune exigence particulière liée à la forme que
doivent revêtir les dividendes, leur paiement pourrait, de notre point de vue, prendre la forme
d’un paiement en espèces, en nature, ou encore en actions de la société. En l’absence de
précision dans le texte, faut-il considérer que l’assemblée générale a toute latitude pour
décider et imposer la forme que devront revêtir les dividendes ?
Même si l’assemblée générale le décide en vertu des dispositions de l’article 146 précité de
l’Acte uniforme, le paiement du dividende en actions nous paraît envisageable seulement
lorsque les statuts ont prévu une telle modalité de paiement. Il faudra, bien entendu, en outre,
obtenir le consentement des bénéficiaires, de sorte qu’en tout état de cause, il ne nous paraît
pas possible d’imposer à un actionnaire une telle modalité de paiement du dividende qui lui
revient.
Les actions de priorité ou de préférence :
Ces actions de préférence sont d’un grand intérêt pour les sociétés ayant des besoins de
financement en fonds propres, dans la mesure où elles sont généralement émises « pour attirer
– principalement – les investisseurs financiers, lesquels n’ont pas toujours la volonté de se
comporter comme de véritables associés ». Les bénéficiaires de ces actions de préférence sont
en effet généralement des investisseurs davantage guidés par les capacités de retour sur
investissement de la société, que par l’idée d’affectio societatis. Leur intérêt est également tiré
du fait qu’elles organisent « une répartition particulière entre le pouvoir et la finance au sein
de la société, soit dans le sens d’une dissociation pour ne pas diluer le contrôle concentré entre
les mains des actionnaires pivots tout en ménageant une forte rémunération aux simples
bailleurs de fonds, soit dans le sens d’un cumul pour favoriser, au contraire, la pression
exercée sur le management ». Ces actions offrent ainsi aux sociétés émettrices « de multiples
possibilités de distribuer de manière inégalitaire les prérogatives pécuniaires et extra-
pécuniaires ».
Quelles sont, dès lors, les différentes priorités ou préférences autorisées dans l’Acte
uniforme ? En d’autres termes, quelles sont les catégories d’actions de préférence dont
l’émission est admise ?

Traditionnellement, les avantages inhérents aux actions de préférence peuvent concerner des
prérogatives pécuniaires, ou extra-pécuniaires.

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*S’agissant des avantages extra-pécuniaires, si, en France, l’Ordonnance du 24 juin 2004
autorise l’émission d’actions « avec ou sans droit de vote » .Même si cette possibilité avait été
exclu par le législateur OHADA ,la révision de 2014 a fini par la consacré .
Désormais ,les deux catégories de préférence de nature extra-pécuniaire consacrée dans
l’Acte uniforme concerne les actions à droit de vote double, également dénommées « prime
de fidélité » et les actions de préférence sans droit de vote .

Les sociétés par actions peuvent, en effet, attacher à leurs actions un droit de vote double. Le
droit de vote double permet de verrouiller le contrôle de la société au profit d’un actionnaire
ou d’un groupe minoritaire. Ce dispositif est également utilisé, dans certains pays, comme un
moyen de défense contre les offres publiques d’acquisition (OPA) inamicales. La création
d’actions à droit de vote double n’est toutefois possible qu’à la condition qu’elle soit prévue
dans les statuts ou autorisée par l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires. En
outre, les sociétés ne peuvent conférer un tel avantage qu’au profit de ceux de leurs
actionnaires qui détiendraient leurs titres sous la forme nominative depuis au moins deux ans.
Il en résulte qu’en cas de conversion d’actions nominatives en actions au porteur, le droit de
vote double doit être supprimé.

Concernant les actions à dividende prioritaire sans droit de vote qui constitue une valeur
mobilière d’inspiration anglo-saxonne, l’article L. 228-35-3 alinéa 3 du Code de commerce
français dispose : « Les titulaires d’actions à dividende prioritaire sans droit de vote,
bénéficient des droits reconnus aux autres actionnaires, à l’exception du droit de participer et
de voter, du chef de ces actions, aux assemblées générales des actionnaires de la société ».
Pour compenser la suppression de leur droit de vote, les porteurs de ces titres bénéficient d’un
dividende prioritaire.
Cette catégorie a pour objet la faculté de dissocier le pouvoir de contrôle, c’est-à-dire les
prérogatives politiques de l’actionnaire d’une part, et les droits pécuniaires attachés à l’action,
d’autre part.
En France, les actions à dividende prioritaire sans droit de vote avaient d’ailleurs été instituées
« pour aider les entreprises françaises à résoudre le paradoxe résidant dans la volonté de
réduire un endettement excessif obérant leur capacité d’investissement sans dilution du
contrôle de l’actionnaire majoritaire».
L’une des innovations de l’acte uniforme révisé est la consécration de la possibilité de créer
des action de préférence sans droit de vote à travers l’article 778-1 « Lors de la constitution

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de la société ou au cours de son existence, il peut être créé des actions de préférence, avec ou
sans droit de vote, assorties de droits particuliers de toute nature, It titre temporaire ou
permanent. Ces droits sont définis par les statuts dans le respect des articles 543,623 et751 ».

*S’agissant des avantages pécuniaires, l’Acte uniforme prévoit la possibilité de créer des
actions de préférences assorties de privilèges ou avantages dans les bénéfices. L’article 755
dispose en effet :
« Nonobstant les dispositions de l’article 754 du présent Acte uniforme, lors de la constitution
de la société ou au cours de son existence, il peut être créé des actions de priorité jouissant
d’avantages par rapport à toutes les autres actions. Ces avantages peuvent notamment être
une part supérieure dans les bénéfices ou le boni de liquidation, un droit de priorité dans les
bénéfices, des dividendes cumulatifs ».
Il apparaît que les sociétés par actions peuvent notamment émettre des actions bénéficiant
d’un dividende prioritaire ou préciputaire, lequel sera payé aux actionnaires privilégiés
(porteurs d’actions de priorité ou de préférence) avant tout service du dividende ordinaire,
voire même en complément de la part qui revient normalement au titulaire dans le bénéfice
distribué. En effet, l’article 755 précité n’ayant pas défini la nature des avantages pouvant être
associés aux actions de priorité, il y a lieu, à notre sens, de considérer que le législateur
OHADA a entendu, en cette matière, laisser libre cours à la liberté contractuelle. Au surplus,
le texte, en visant, parmi les privilèges pouvant être reconnus, « notamment une part
supérieure dans les bénéfices ou le boni de liquidation, un droit de priorité dans les bénéfices,
des dividendes cumulatifs » n’a, manifestement, pas entendu limiter les catégories
d’avantages susceptibles d’être attribués aux porteurs d’actions de priorité.
L’acte uniforme autorise également la stipulation d’un dividende cumulatif, c’est-à-dire
prélevé sur les bénéfices ultérieurs si les bénéfices ou réserves de l’année en cours sont
insuffisants et ne permettent pas de servir les droits des actionnaires privilégiés.
Dans le même élan, est-il possible de créer des actions à dividende majoré ?
Ce dispositif n’est pas défini dans l’Acte uniforme.
La pratique du dividende majoré consiste à attribuer une majoration de dividende dans la
limite d’un pourcentage défini, à tous les actionnaires justifiant, à la clôture de l’exercice,
d’une inscription nominative, depuis deux ans au moins, des actions entièrement libérées
qu’ils détiennent. C’est ainsi que l’on évoque, à propos des actions à dividende majoré, l’idée
de « prime de fidélité », liée à la période de stage de deux ans préalable à l’attribution de la
majoration de dividende.

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Bien que le dispositif du dividende majoré ne soit pas défini dans l’Acte uniforme, la
stipulation d’un tel privilège nous paraît en conformité avec l’esprit et la lettre de l’article 755
précité dudit Acte uniforme. En effet, d’une part, l’article 755 postule une liberté dans la
création de catégories d’actions privilégiées, dans la mesure où, on l’a observé, les avantages
visés dans ce texte ne sont pas limitatifs mais susceptibles de comporter plusieurs variantes.
D’autre part, là encore, la notion d’avantages n’étant pas définie, ni même circonscrite dans
l’Acte uniforme, il n’existe pour l’heure aucune limitation de principe à la création, dans
l’espace OHADA, d’actions à dividende majoré.

b – L’émission d’obligations ordinaires

Les obligations sont définies dans l’Acte uniforme comme « des titres négociables qui dans
une même émission, confèrent les mêmes droits de créance pour une même valeur nominale
». Ces titres sont émis en vertu d’un contrat d’emprunt obligataire conclu entre, d’une part, un
émetteur, demandeur de capitaux, et, d’autre part, des souscripteurs, offreurs de capitaux,
également appelés obligataires En vertu dudit contrat, le souscripteur se voit conférer un droit
de prêteur, qui induit un droit au remboursement à l’échéance fixée au contrat et un droit de
percevoir un intérêt.
Traditionnellement, plusieurs catégories d’émetteurs recourent à des émissions obligataires
pour assurer le financement de leurs activités. Ainsi, outre les sociétés commerciales, il n’est
pas rare qu’une collectivité publique sollicite le marché obligataire, notamment par voie
d’appel public à l’épargne.
L’Acte uniforme n’encadre que les émissions obligataires des sociétés commerciales. A cet
égard, la seule catégorie de société visée est la société anonyme.
En effet, on l’a vu, les obligations sont, à l’instar des actions, définies comme des titres
négociables. Or, l’article 58 de l’Acte uniforme énonce que les sociétés anonymes émettent
des titres négociables. Aucune disposition de l’Acte uniforme ne confère aux autres formes
sociales une telle faculté. Au demeurant, traditionnellement, seules les sociétés par actions,
donc, dans l’espace OHADA, les sociétés anonymes, peuvent émettre des valeurs mobilières.
Faut-il, dès lors, en déduire que seules les sociétés anonymes sont habilitées, dans l’Acte
uniforme, à émettre des obligations ?
Le caractère d’ordre public des dispositions de l’Acte uniforme amène à considérer qu’en
l’absence de dispositions habilitant expressément d’autres formes de groupements à émettre
des obligations, une réponse positive paraît, au stade actuel, s’imposer.

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Si, comme on l’a vu, l’Acte uniforme autorise l’émission de valeurs mobilières ordinaires,
dont les caractéristiques sont traditionnelles, qu’en est-il des valeurs mobilières composées ?

2°) L’émission de valeurs mobilières composées

Dans le cadre des efforts tendant à moderniser les sources de financement des entreprises et
autres organismes faisant appel public à l’épargne ou dont les titres sont susceptibles d’être
inscrits à la cote d’une bourse des valeurs de l’espace OHADA, les valeurs mobilières
composées ou complexes pourraient constituer un dispositif pertinent. En effet, ces
instruments connaissent un succès à l’étranger et permettent de réaliser de multiples
combinaisons, dans un but d’optimisation du financement des émetteurs et afin d’offrir aux
investisseurs une panoplie de solutions d’investissement et de placement prenant en compte
leurs différentes préoccupations.
Avant la révision de l’acte uniforme en 2014, le législateur de l’OHADA n’avait pas défini
les valeurs mobilières composées, ni même organisé leur régime ,ce qui suscitait d’énormes
controverses. Pour mettre fin à ladite controverse l’article 822 de l’acte uniforme révisé a fini
par prévoir expressément les valeurs mobilière composées en ces termes « Les sociétés par
actions peuvent émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital ou donnant droit à
I' attribution de titres de créance ».

Avant tout, que faut-il entendre par valeurs mobilières composées ?


Il est possible de voir dans ce concept toute combinaison de titres associant, suivant des
modalités diverses, différentes catégories de titres de capital et/ou de créances existant ou à
créer. ainsi des « obligations à bons de souscription d’obligations » (OBSO), dont le régime
est directement inspiré de celui des obligations à bons de souscription d’actions (OBSA).
Désormais ,dans l’Acte uniforme, les valeurs mobilières prévues et dont le régime est défini
sont les actions et les obligations et les valeurs mobilières composées.

S’il y a lieu, bien entendu, de se réjouir de la consécration, par le législateur de l’OHADA, de


mécanismes inhérents à l’organisation et au fonctionnement des marchés financiers, la
question de la prise en compte, dans l’Acte uniforme, de l’émergence de marchés financiers
dans la zone OHADA laisse, toutefois, l’observateur perplexe.

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Si, en matière d’obligations de transparence des émetteurs faisant appel public à l’épargne ou
dont les titres sont inscrits à la cote d’une bourse des valeurs, le législateur de l’OHADA se
montre pointilleux et cohérent, à travers un ensemble de dispositions illustrant, sans
équivoque, une volonté nette d’imposer un encadrement des opérations, en revanche, en
matière de financement desdits émetteurs, le résultat est en deçà de ce qu’il y a
raisonnablement lieu d’attendre pour pouvoir œuvrer efficacement dans le sens de
l’attractivité, la compétitivité et le développement des marchés financiers de l’espace
OHADA.

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