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INTRODUCTION

L’Etat et les collectivités locales – Wilayas et Communes – possèdent en tant que


personnes morales, des bien mobiliers et immobiliers qui forment leur patrimoine :
celui-ci constitue ce que l’on appelle leur « domaine »

Nous avons ainsi au niveau de l’Etat, le domaine de l’Etat, au niveau de la wilaya,


le domaine de la wilaya et au niveau de la commune, le domaine communal.

Ces trois éléments patrimoniaux composent ce que l’on appelle le Domaine


Nationale et l’ensemble des règles régissant cette propriété publique forme le
Droit Domanial qui est une branche du droit administratif (1). C’est ce que certains
auteurs appellent le droit administratif des biens.

A ce titre, le droit administratif peut être considéré comme « l’une des plus
importante, sinon la plus importante des branches du droit » en Algérie et ce pour
deux raisons essentiels (1) .

- la première résulte de l’héritage consacré sur le plan juridique par la loi n°


62-157 du 31 décembre 1962 tendant à la reconduction, jusqu’à nouvel
ordre de la législation en vigueur au 31 décembre 1962, sous réserve des
dispositions contraires à la souveraineté nationale, d’inspiration colonialiste
ou discriminatoire portant atteinte à l’exercice normal des libertés
démocratiques(2).
- la seconde raison découle de l’orientation politique et économique choisie
par l’Algérie indépendante qui implique l’intervention de l’Etat, de
l’administration à tous les niveaux et dans tous les secteurs.

Ces deux raisons contradictoires vont longtemps sous tendre l’action domaniale de
l’Etat et des collectivités publiques ce qui rend malaisée l’étude de cette matière.

 D’un côté l’intervention de l’Etat dans la politique économique et sociale du


pays a entraîné une appropriation publique de plus en plus importante et ce
dès les premières années de l’indépendance par la récupération des « biens
vacants » et des richesses nationales.
 D’un autre côté, la conception traditionnelle de la propriété publique
fondée sur la distinction domaine public – domaine privé s’est trouvée de
plus en plus inadaptée et la redéfinition de la législation en la matière a été
introduite très lentement et de manière éparse.

A cet effet, nous allons présenter dans cette introduction, l’évolution de la


législation domaniale, la distinction domaine public – domaine privé ou la
conception domaniale liée à la nature libérale de l’Etat, l’inadaptation de la
(1)
Le droit administratif est constitué par l’ensemble des règles définissant les droits
et obligations de l’administration.
(1)
cf Ahmed MAHIOU « cours d’institutions administratives » OPU ALGER 1979, 2ème
édition (p 5)
(2)
JORADP du 11 janvier 1963 p 18.
distinction traditionnelle au modèle algérien de développement ou la conception
domaniale retenue par la loi n° 84-16 du 30 juin 1984 et le retour à la conception
traditionnelle du domaine national.

I – L’évolution de la législation domaniale.

Elle a suivi trois étapes, dont il convient de présenter les principaux aspects.

1 – La reconduction de la réglementation en vigueur au 31 décembre 1962.

C’est la loi n° 62-157 du 31 décembre 1962 (3) qui a reconduit la réglementation en


vigueur jusqu’à cette date et notamment pour ce qui concerne la domanialité, les
principes de la gestion de la propriété publique posés par l’ordonnance du 13 avril
1943 et les textes d’application qui ont suivi.

2 – La coexistence des deux systèmes juridiques.

C’est l’étape la plus longue. Elle va durer de 1963 à 1975, période pendant laquelle
on va assister à la naissance d’un droit intermédiaire, combinant le droit hérité et
celui en élaboration.

En effet le législateur algérien va adopter plusieurs textes pour régler des


problèmes touchant des secteurs particuliers de la propriété de l’Etat et qui vont
remettre en cause les principes mêmes hérités de la période coloniale.

Nous aurons ainsi la coexistence de deux systèmes juridiques, l’un reconduit par la
loi n° 62-157 du 31 décembre 1962 et donc libéral et l’autre socialiste c'est-à-dire
conforme à la voie de développement choisie par l’Algérie et inauguré par les
différents décrets de 1963 intervenus pour protéger un certain nombre de biens
laissés, à leur départ, par les personnes physiques ou morales étrangères.

C’est ainsi qu’un certain nombre de textes vont être pris par le législateur
notamment :

- l’ordonnance n° 66-102 du 6 mai 1966 portant dévolution à l’Etat de la


propriété des bien vacants (4) ;
- l’ordonnance n° 67-281 du 20 décembre 1967 relative aux fouilles et à la
protection des sites et monuments historiques et naturels (5) ;
- l’ordonnance n° 68-653 du 30 décembre 1968 relative à l’autogestion
agricole (6).

3 – L’algérianisation du système juridique.

C’est la dernière étape d’un processus d’évolution de tout le système juridique


algérien.

(3)
JORADP du 11 janvier 1963, p 18
(4)
JORADP n° 36 du 6 mai 1966.
(5)
 JORADP n° 7 DU 23 JANVIER 1968
(6)
JORADP n° 15 du 15 février 1968.
En effet, l’ordonnance n° 73-29 du 5 juillet 1973 (7) a abrogé tous les textes
antérieurs au 3 juillet 1962 et ce à compter du 5 juillet 1975.

L’effort de codification va conduire le législateur algérien à poser des principes


fondamentaux en matière domaniale.

a) les articles 688 et 689 de l’ordonnance n° 75-58 du 26 septembre 1975


portant code civile (8) vont d’une part énumérer les biens immobiliers
appartenant à l’Etat et d’autre part doter tous ces biens de la protection
spéciale caractérisant, dans l’ancien droit, uniquement le domaine public.
Tous les biens de l’Etat son inaliénable, insaisissables et imprescriptibles.
b) les articles 14 et 15 de la Constitution de 1976, promulguée par
l’ordonnance n° 76-97du 22 novembre 1976, vont donner une énumération
plus étendue des biens propriétés de l’Etat.
c) d’autres textes vont intervenir pour déterminer la nature et les régimes
juridiques de certains biens ou la procédure applicable à certaines
opérations. C’est le cas, par exemple, de l’ordonnance n° 76-80 du 23
octobre 1976 portant code maritime (9) ou de l’ordonnance n° 76-48 du 25
mai 1976 fixant les règles relatives à l’expropriation pour cause d’utilité
publique (10).
d) enfin, l’aboutissement de ce système est constitué par d’abord, la loi n° 84-
16 du 30 Juin 1984 relative au domaine national (11) ensuite par la loi n° 90-
30 du 1er décembre 1990 portant loi domaniale (12) qui vont préciser les
principes devant gouverner la composition et la gestion de ce patrimoine
public considérable.

Le premier texte va abandonner la distinction domaine public – domaine privé,


héritée de la période coloniale au profit d’une autre basée sur l’unité juridique du
domaine national.

Le second va par contre, avec l’intervention de la Constitution de 1989, reprendre


la distinction domaine public – domaine privé que la Constitution de 1996,
actuellement en vigueur va confirmer.

II – La distinction domaine public – domaine privé ou la conception domaniale


liée à la nature libérale de l’Etat.

A) Origine de la distinction.

La distinction entre domaine public et domaine privé n’a pas toujours existé.

(7)
JORADP n° 62 du 3 août 1973.
(8)
JORADP n° 78 du 30 septembre 1975.
(9)
JORADP n° 29 du 10 avril 1977.
(10)
JORADP n° 1er juin 1976 p 56.
(11)
JORADP n° 87 du 3 juillet 1984 p 678.
(12)
JORADP n° 52 du 2 décembre 1990 p 1416.
Sous l’ancien régime, le domaine, qui comprenait tous les biens de la couronne,
quelle que soit leur nature ou leur destination, était considéré comme un des
éléments majeurs de la richesse nationale et une source de revenus. Le roi, qui
s’identifiait à l’Etat, était un propriétaire qui gérait sa fortune, essentiellement
foncière, et la préoccupation principale que l’on avait alors, était qu’il la gère aux
mieux des intérêts nationaux et qu’il ne la dilapide pas.

La Révolution française de 1789, tout en nationalisation le domaine, a conservé à


son égard les mêmes soucis et ce n’est qu’au cours du 19 ème siècle qu’une évolution
décisive s’est produite.

PARDESSUS, en 1806 dans son « Traité des servitudes » avait bien ébauché une
esquisse de distinction. Mais il a fallu attendre PROUDHON, pour qu’une approche
globale et théorique de la différence entre les deux domaines soit effectuée (13).

La doctrine en adoptant par la suite cette distinction, allait sensibiliser aussi bien
la jurisprudence que le législateur.

Le terme domaine public, entendu selon sa nouvelle acception a été employé pour
la première fois dans la loi du 16 juin 1851 sur la constitution de la propriété en
Algérie, qui dispose en son article 1er que « le domaine national comprend le
domaine public et le domaine privé de l’Etat ».

Il existe aujourd’hui deux sources où on peut trouver les critères de la domanialité


publique ceux que définit la loi pour certains biens et ceux que qualifie la
jurisprudence pour les autres.

Cependant, même si le législateur n’a pas manqué d’exercer sur cette dernière une
influence en contribuant, par l’incorporation de tel ou tel bien au domaine public,
à colorer le contenu de la notion. C’est la construction de la doctrine et de la
jurisprudence – enrichie de justification plus dogmatiques et plus fructueuse que
celles qui avaient été dégagées à l’origine – qui reste encore aujourd’hui la plus
féconde.

B) Les critères doctrinaux de la distinction.

A bien des égards, le mouvement qui a conduit à la notion de domaine public peut
se rattacher à celui qui est à l’origine de la notion de service public. Sans doute
parce qu’elles trouvaient d’abord, à s’appliquer à des biens dont l’usage collectif
était dominant, mais parce qu’elles s’inscrivaient dans un contexte qui voyait se
dégager l’autonomie de service public, les prérogatives de puissance publique que
supposait le statut de la domanialité publique ont été affirmés beaucoup moins au
profit du pouvoir qu’à celui de tous.
C’est ainsi que plusieurs solutions, proposées par la doctrine, ont permis de
dégager des critères de distinction.

Proudhon – « Traité du domaine public » 1ère édition Dijon 1833 – 1834 (tome 1).
(13)

Voir également pour un rappel historique complet de l’évolution de la notion de


domaine public l’article de Pierre SANDEVOIR « La notion d’aménagement spécial
dans la détermination du domaine public »
1) Le critère de l’affectation à l’usage de tous.

Le domaine public a d’abord été limité aux biens affectés à l’usage de tous et qui
par leur nature, ne sont pas susceptibles d’appropriation privative ; c’est la
conception d’HAURIOU.

Ainsi en est-il des ports, des routes, des fleuves, des places publique etc…

Tout le reste des biens de l’Etat relève de son domaine privé ; bâtiments
administratifs affectés aux services publics et qui ne sont pas mis à la disposition
du public, objets mobiliers etc…

Cependant, cette conception a connu tout de suite des limites pour deux (02)
raisons :

a) Il n’y a pas de différence de nature entre les biens du domaine public et


ceux des propriétés privées : voies privées (chemin de terre battue) et voies
publiques (chemin vicinal) ;
b) La notion d’affectation à l’usage de tous s’est révélée trop étroite lorsque
sont apparus de nouveaux biens administratifs telles les voies ferrées qui ne
sont pas affectées directement au public mais qui exigent néanmoins la
protection spéciale du domaine public.

2) Le critère de l’affectation au service public.

Pour certains auteurs, le domaine public concerne tous les biens affectés aux
services publics et à l’usage du public : c’est la conception de DUGUIT.

L’affectation de biens à un service public implique que la domanialité publique


d’après ce critère, n’apparaît pas comme la conséquence de la nature des biens,
mais de la volonté de la puissance publique. Cependant, si les auteurs admettent le
critère de l’affectation à l’usage du public, ils estiment que l’affectation aux
services publics est trop large en ce sens qu’on aboutit à une véritable
hypertrophie du domaine public car on y ferait entrer les choses insignifiantes ou
d’importance secondaire (mobilier de bureau par exemple).

Ainsi, pour certains auteurs, un biens ne fait partie du domaine public que s’il est
affecté à un service public et joue dans le fonctionnement de ce service un rôle
essentiel et prépondérant : une caserne, une école, le siège d’une administration
ne sont pas du domaine public, car ces biens n’ont pas un rôle primordial, alors
qu’une route, un chemin de fer, une fortification sont des dépendances du
domaine public car ils jouent un rôle essentiel et principal dans le fonctionnement
du service public.

Donc, le critère de l’affectation du service public n’est opérant que si le bien est
celui dont « la mise en œuvre constitué l’objet même du service » (LATOURNERIE).
3) Le critère de l’aménagement spécial.

Pour le professeur WALINE, c’est le critère de « l’aménagement spécial » qui devait


en définitive prévaloir. (14)

Pour cet auteur « un bien du domaine public est un bien dont l’administration a
besoin. Pour qu’il en fasse partie, il faut et il suffit que sa possession par
l’administration soit indispensable, soit au fonctionnement d’un service public, soit
à la satisfaction d’un besoin public… Il faut … que ce bien … ne puisse être
remplacé sans inconvénient par aucun autre ».

D’ailleurs, ce critère va trouver son expression dans les travaux de la commission


de réforme du code civil français qui,dans sa séance du 6 novembre 1947, a adopté
la rédaction suivante : « Sauf disposition contraire de la loi, les biens des
collectivités administratives et des établissements publics ne sont compris dans le
domaine public qu’à la condition soit d’être mis ou laissés à la disposition directe
du public usager, soit d’être affectés à un service public, pourvu qu’en ce cas ils
soient, par nature ou par des aménagement particuliers, adaptés exclusivement ou
essentiellement au but particulier de ces services ».

Ce texte de réforme du Code Civil n’ayant jamais été voté par le législateur, ne
possède donc aucune valeur juridique. Bien que la définition avancée n’a jamais
été introduite dans le droit positif, la Cour de Cassation s’y est rapidement ralliées,
puis le Conseil d’Etat s’en est fortement inspiré.

C) Les critères jurisprudentiels de la distinction.

Les tribunaux ont été et peuvent être appelés à intervenir sur la qualification de la
domanialité publique. La jurisprudence qui a paru longtemps s’en tenir à des
solutions empiriques, a tout de suite, consacré la position de la commission de
réforme du code civil.

Cependant, le Conseil d’Etat en appliquant cette définition l’a quelque peu


infléchie puisque, faisant de la notion d’aménagement spécial un accueil plus large
que celui qu’avaient imaginé ses promoteurs. Il l’applique, désormais, non
seulement aux biens qui sont affectés à l’usage public mais également à ceux
affectés au service public, de telle sorte que l’ont peut retenir comme définissant
le domaine public les critères de l’affectation à l’usage public ou au service public,
et de l’aménagement en vue de ces usages.

S’agissant de l’affectation au service public, c’est une décision du 19 octobre 1956


Société Le Béton (15) que l’on situe en général l’origine de l’évolution qui a suivi.

Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat, a admis que se trouvait dans le domaine public
une partie du port fluvial de la Société Le Béton à Bonneuil sur Marne qui avait été
concédée à l’office national de la navigation en admettant que ce terrain,

(14)
cf. sa thèse sur « les mutations domaniales » (Dalloz 1925).
(15)
C.E. du 19 octobre 1956 Sté Le Béton (Recueil des GAJA p 447 – Sirey 1969)
cependant loué à l’usage privatif d’une société privée, était affecté « au même
titre que les autres parties de ce port…à l’objet d’utilité générale qui a déterminé
la concession de l’office national de la navigation de la totalité de ces terrains et
en raison duquel ceux-ci sont trouvés incorporés, du fait de cette concession, dans
le domaine public de l’Etat ». Le mot de service public ne s’y trouve pas prononcé,
mais l’idée y est.

On retrouve cette idée exprimée clairement dans une seconde décision du 11 mai
1959 dans l’arrêt de Dauphin (16) qui a classé une allée, dénommée des Alyscamps
située à Arles, dans le domaine public, bien qu’il ne s’agisse pas d’une voie
publique, en ses fondant sur ce qu’elle était affectée à un service public de
caractère culturel et touristique et a fait l’objet d’aménagement spéciaux en vue
de cet usage. Cette allée était non seulement une promenade, mais un site classé à
la fois comme monument historique et comme site artistique.

La jurisprudence a eu ainsi à intervenir dans plusieurs autres décisions pour


qualifier des biens de la domanialité publique :

 un stade municipal, édifié en vue de permettre le développement d’activités


sportives d’éducation physique présentant un caractère d’utilité générale
fait partie en raison de son affectation et de son aménagement, du domaine
public communal ;
 des promenades publiques, font partie du domaine public, parce qu’elles
sont affectées en cette qualité l’usage du public et aménagées à cette fin.

Il faut noter enfin que la loi algérienne a donné une énumération des dépendances
du domaine public (17).

D) L’intérêt de la distinction.

En résumé il conviendrait de préciser que :

1) La distinction n’a pas seulement un intérêt académique mais entraîne des


conséquences pratiques importantes :

a) en cas de conflit entre l’administration et un administré, la compétence


juridictionnelle sera différente selon qu’il s’agit d’un bien du domaine public ou du
domaine privé.

L’Etat et les collectivités publiques agissent soit comme de simples particuliers


dans les différends sur les bien relevant de leur domaine privé soit usent de leurs
prérogatives de puissance publique lorsqu’il s’agit de bien composant leur domaine
public.

b) le régime de la domanialité publique est particulièrement protecteur pour les


bien qui y sont soumis puisque ceux-ci sont inaliénables, imprescriptibles et

(16)
C.E. du 11 mai 1959 Arrêt le Dauphin (Dalloz 1959, II,, 314)
(17)
cf. art. 15 et 16 de la loi n° 90-30 du 1er décembre 1990.
insaisissables et les atteintes qui leur sont portés sont souvent sanctionnés selon
des règles pénales spéciales.

2) Le droit de la propriété publique n’est pas neutre. Il s’inscrit dans le système


politique libéral qui s’efforçait de limiter au maximum les empiétements de l’Etat
à l’égard de l’initiative privée.

Ainsi d’un côté nous avons la propriété privée considérée, en droit français (18)
comme un droit absolu et sacré et garantie et protégé par le droit algérien (19) et de
l’autre le principe de la liberté du commerce et de l’industrie (20) qui ne peuvent
s’accommoder d’un système de développement qui met en place la socialisation
des moyens de production et la suppression des moyens d’exploitation de l’homme
par l’homme.

Mais cette évolution de la domanialité en France s’est faite sous le poids de


nécessités économiques et sociales en raison notamment des deux guerres
mondiales et de la crise économique de 1929 qui ont obligé l’Etat à intervenir et
diriger l’économie.

De l’Etat gendarme il passe à l’Etat interventionniste.

III – L’inadaptation de la distinction traditionnelle au modèle algérien de


développement et la conception domaniale retenue par la loi n° 84-16 du 30
juin 1984 relative au domaine national.

A) L’inadaptation de la distinction traditionnelle au modèle algérien de


développement.

Depuis l’indépendance, le domaine de l’Etat et des collectivités publiques a connu


un accroissement considérable aussi bien qualitatif que quantitatif à la suite de
l’abandon de leurs biens par les personnes physiques et morales étrangères, de la
récupération des richesses nationales et de la politique de socialisation de
l’économie nationale.

L’intervention de l’Etat dans la politique économique et sociale du pays a entraîné


une appropriation publique de plus en plus importante et une redéfinition de la
fonction de ce patrimoine est introduite.

Dans cette optique, la conception du domaine national, héritée de la période


coloniale a subi une grande évolution rendant inadaptée la législation en la
matière.

En effet, par suite de la reconduction de la réglementation en vigueur au 31


décembre 1962 par la loi n° 62-157, la distinction traditionnelle du domaine public
– domaine privé de l’Etat a continué à s’appliquer.

(18)
art. 17 de la déclaration de 1789 et art.544 du code civile français.
(19)
art.20 et 52 de la Constitution de 1996.
(20)
art. 37 de la constitution de1996
On pouvait distinguer :

o les biens du domaine public, inaliénables, imprescriptible et insaisissables ;


o les biens du domaine privé placés sous la gestion de l’Etat et pouvant faire
l’objet d’aliénation.

Or, après l’indépendance, c’est le domaine privé de l’Etat qui a subi une
augmentation patrimoniale importante : « bien vacants » à usage professionnel et
d’habitation, terres agricoles dépendant d’unités autogérées et de coopératives
d’anciens moudjahidine, unités industrielles et commerciales intégrées par la suite
au patrimoine des entreprises socialistes ou publiques, etc.

D’autres biens par le biais des nationalisations sont venus encore accroître la
propriété étatique : nationalisation des sociétés pétrolières, du commerce
extérieur, des terres agricoles dans le cadre de la révolution agraire, etc.

Tous ces biens à caractère économique dont l’intérêt n’est plus à démontrer,
doivent être à l’évidence protégés spécialement et donc être insusceptibles
d’appropriation privative conformément à l’option socialiste du pays.

D’autre part, les préoccupations de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme,


dans le cadre du système planifié de développement mis en place, ont fait du
domaine foncier un élément important de la richesse nationale dont la mise en
valeur s’impose. C’est le cas, notamment, des immeubles servant d’assiette à la
construction d’usines, de cités d’habitation et de tout autre bien d’intérêt
économique, social ou culturel.

Ainsi, le rôle fondamental de l’Etat, son intervention dans tous les secteurs
d’activité du pays en tant que « représentant des travailleurs », a amené le
législateur à remettre en cause la conception libérale du domaine de l’Etat en
vigueur en Algérie avant 1962.

L’ordonnance n° 68-653 du 30 décembre 1968 relative à l’autogestion dans


l’agriculture annonçait le tournant déjà pris par le législateur en 1966 (18) en ce qui
concerne le régime juridique applicable aux biens appartenant à l’Etat et faisant
partie des exploitations autogérées agricoles puisqu’il a prévu que ceux-ci sont
inaliénables, imprescriptibles et insaisissables.
On remarquera ainsi que des biens qui, d’après la distinction traditionnelle sont du
domaine privé, sont dotés des caractéristiques de la domanialité publique :
inaliénabilité, imprescriptibilité et insaisissabilité.

D’autres textes sont venus par la suite confirmer ce principe :

Ordonnance n° 66-102 du 6 mai 1966 portant dévolution à l’Etat de la propriété


(18)

des biens vacants.


1) soit pour des secteurs déterminés :

 Ordonnance n° 71-73 du 8 Novembre 1971 portant révolution agraire. (19)


L’article 22 de cette ordonnance prévoit que « les terres incorporées au
fonds national de la révolution agraire, sont la propriété de l’Etat. Elles
sont inaliénables, imprescriptibles, incessibles et insaisissables…. ».
 Ordonnance n° 76-80 du 23 octobre 1976 portant code maritime (20)
L’article 9 de ce code prévoit que « le domaine public maritime est
inaliénable, insaisissable et imprescriptible ».

2) soit d’une façon générale :

Ce sont les articles 688 et surtout 689 de l’ordonnance n° 75-58 du 26 septembre


1975 portant code civil qui vont achever cette évolution. (21)

L’article 688 prévoit que « sont propriété de l’Etat, les biens qui, en fait ou en
vertu d’un texte législatif sont affectés soit à un usage collectif soit à une
administration ou un service public, un établissement à caractère administratif,
une entreprise socialiste, une unité autogérée une coopérative dans le cadre de la
révolution agraire ».

Ces biens de l’Etat, nous précise l’article 689, « sont inaliénable, insaisissables et
imprescriptibles. Toutefois les lois qui les affectent à un des organismes cités à
l’article 688 déterminent les conditions de gestion et éventuellement les conditions
d’aliénabilité de ces biens ».

Il est à remarquer que l’énumération prévue à l’article 14 de la Constitution de


1976 est plus complète que celle de l’article 688 du code civil.

C’est ainsi que les dispositions de cet article, complété par celles de l’article 25 de
la même Constitution, affirme le principe de l’irréversibilité de la propriété d’Etat
et contient une énumération des biens appartenant à la collectivité nationale
personnifiées par l’Etat que les constituants n’ont pas eu la prétention de donner
complète. (22)

Cet article qui est l’aboutissement d’une évolution lente sur la conception d’une
domanialité conforme au modèle algérien de développement, consacre les
différentes dispositions légales intervenue depuis l’indépendance et annonce celles
contenues dans la loi n° 84-16 du 30 juin 1984 relative au domaine national.

(19)
JORADP n° 97 du 30 novembre 1971.
(20)
JORADP n° 29 du 10 Avril 1977.
(21)
JORADP n° 78 du 30 septembre 1975.
(22)
Article 25 de la Constitution de 1976 (édition du parti FLN p 20) – « La
souveraineté de l’Etat algérien s’exerce sous la totalité de son espace terrestre, de
son espace aérien et de ses eaux territoriales. Elles s’exerce également sur les
ressources de toutes natures situées sur ou dans son plateaux continental et sa
zone économique exclusive ».
B) La conception domaniale retenue par la loi n° 84-16 du 30 juin 1984 relative
au domaine national.

Pour cette loi, « le domaine national est constitué de l’ensemble des biens et
moyens appartenant à la collectivité nationale et détenus, sous forme de
propriété d’Etat, par l’Etat et ses collectivités locales conformément à la Charte
Nationale, la Constitution et la législation en vigueur régissant le fonctionnement
de l’Etat, l’organisation de son économie et la gestion de son patrimoine » (23).

Ce domaine national, constitué par celui de l’Etat, de la wilaya et de la commune


« est inaliénable, imprescriptible et insaisissable » (24)

Ainsi défini, le régime de la propriété d’Etat, contenue dans la loi n° 84-16 et tous
les textes de droit positif intervenus jusqu’alors, est caractérisé par les principes
fondamentaux suivants :

1°) unité juridique du domaine national fondée sur l’inaliénabilité générale et


absolue sauf dispositions légales contraire : (25).

L’article 8 de la loi n° 84-16 du 30 juin 1984 prononce donc l’inaliénabilité de tout


le domaine national et en même temps les corollaires de ce principe à savoir :
a) l’imprescriptibilité :la prescription n’est qu’un mode d’acquisition selon
l’article du code civil et par la même que les biens sont inaliénables,ils
sont imprescriptibles.

b) L’insaisissabilité : étant donné qu’on ne saisit que pour vendre , celle-ci est
la conséquence de l’inaliénabilité .

2) droit éminent de l’Etat sur tous les biens détenus, possédé ou utilisé à
quelque titre que ce soit en son nom par les autres personnes morales :
Wilaya, commune, entreprise socialistes, exploitations agricoles autogérées
et tout établissement ou organisme public auquel la loi accorde la
personnalité morale.

Ce droit de l’Etat, en tant qu’émanation de la collectivité nationale,apparaît


très clairement dans la quasi-totalité des dispositions de la loi n°84- 16 sous
différentes formes et surtout dans l’article 1 er et 9 comme suit : «  détenus sous
forme de propriété d’Etat par l’Etat et les collectivités locales »

« L’Etat, la wilaya et la commune détiennent et gèrent au nom de la collectivité


nationale, les biens composant leur patrimoine respectifs »

(23)
Article 11 de la loi n° 84-16 du 30 juin 1984.
(24)
Article 8 de la loi n° 84-16 du 30 juin 1984.
(25)
cf. art.689 du code civil et art 8 al 2 de la loi n° 84-16 du 30 juin 1984. ce dernier
alinéa prévoit que « toutefois certains biens et dépendances domaniales peuvent ,
en raison de leur nature, de leur destination on de la fonction qui leur est réservée au
profit de la collectivité nationale, être aliénés dans les conditions et formes
expressément prévues par la loi.
« la représentation de l’Etat dans les actes de gestion afférents au domaine
national est assurée par les ministres concernés, les walis, les présidents d’ APC et
autres autorités gestionnaires, conformément aux attributions qui leur son conférés
par les lois et règlements.
La représentation de l’Etat dans les actions en justice portant sur le domaine est
assurée par le ministre chargé des finances, le wali et le président d’ APC
conformément à la loi »

D’ailleurs, la formulation « l’Etat et ses collectivités locales » revient souvent dans


la rédaction des dispositions de la loi n°84 - 16.

3°) La division du domaine national et son intérêt :

La division traditionnelle en domaine public (inaliénable sauf déclassement) et


domaine privé (aliénable et prescriptible) ne pouvait survivre à la nouvelle unité
juridique du domaine national.

La loi 84-16 substitue une nouvelle répartition : son article 11 précise à cet effet
que le domaine national se compose du domaine public ; du domaine économique,
du domaine particulier, du domaine militaire et du domaine externe.

L’intérêt de la division repose, non plus sur le régime juridique puisque le domaine
national est inaliénable, imprescriptible et insaisissable mais principalement sur le
régime de la gestion qui est profondément différent selon la catégorie de la
dépendance domaniale considérée ou le statut juridique spécial de certaines
dépendances.

Cependant, cette nouvelle vision, adaptée au modèle de développement choisi par


l’Algérie au lendemain de son indépendance, conçue et développée depuis plus de
vingt ans n’a pas été longtemps appliquée, puisque la nouvelle constitution de 1989
confirmée par celle de 1996 va complètement modifier cette vision et revenir à la
conception traditionnelle du domaine national applicable dans les pays libéraux
particulièrement la France.

IV- le retour à la conception traditionnelle du domaine national.

C’est le dispositif patrimonial prévu par la loi n°90-30 du 1 er décembre 1990


portant loi domaniale et en vigueur actuellement a été fondé sur la nouvelle vision
constitutionnelle de la domanialité.

Ainsi, les articles 17 et 18 de la constitution de 1996,ont défini le cadre de cette


domanialité en prévoyant que :

L’article 17 définit la propriété publique comme un bien de la collectivité


nationale et qui comprend : « le sous-sol, les mines et les carrières, les sources
naturelles d’énergie, les richesses minérales, naturelles et vivante des différentes
zones du domaine maritime national,les eaux et les forêts.
Elle est, en outre établie sur les transports ferroviaires, maritimes et aériens, les
postes et les télécommunications, ainsi que sur d’autres biens fixés par la loi »
l’article 18 précise que «  le domaine national est défini par la loi.
Il comprend les domaines public et privé de l’Etat, de la wilaya et de la commune.
La gestion du domaine national s’effectue conformément à la loi »

Pour le législateur, le domaine national qui «  recouvre l’ensemble des biens et


droits immobiliers détenus, sous forme de propriété publique ou privée, par l’Etat
et ses collectivités territoriales »,comprend le domaine public et privé de l’Etat,
de la wilaya et de la commune.

Donc le législateur revient à la conception traditionnelle du domaine national avec


sa division en domaine public et en domaine privé.
DEFINITION DU DOMAINE PUBLIC

Le domaine public comprend «  les droits et les biens meubles et immeubles qui
servent à l’usage de tous et qui sont à la disposition du public usager, soit
directement, soit par l’intermédiaire d’un service public pourvu qu’en ce cas, ils
soient par nature ou par des aménagements spéciaux, adaptés exclusivement ou
essentiellement au but particulier de ce service »

Par cette définition le législateur reprend et consacre toutes les possibilités


envisagées par la doctrine classique sur la destination susceptible d’entraîner le
régime de la domanialité publique pour un bien.

C’est ainsi que le bien appartenant à une collectivité publique qui était affecté soit
exclusivement et directement à l’usage de public ( HAURIOU) soit par
l’intermédiaire d’u service public ( DUGUIT) soit à l’un ou l’autre (BONNARD) fait
partie du domaine public pourvu qu’en ce cas en raison de sa configuration
naturelle ou par aménagement spécial il soit adapté exclusivement ou
essentiellement au but particulier de ces services (WALINE)

Le domaine public se subdivise en deux catégories : le domaine public naturel et le


domaine artificiel.

1 le domaine public naturel :

L’article 15 de la loi n° 90-30 du 1 décembre 1990 portant loi domaniale donne


une liste de référence, donc incomplète, des biens qui relèvent du domaine
public naturel puisque ce sont notamment :
« - les rivages de la mer ;
-le sol et le sous sol de la mer ;
- les eaux maritimes intérieures ;
- les lais et relais de la mer ;
- les cours d’eau et les lits des coirs d’eau, les lacs et autres plans d’eau
compris ou espace compris dans leurs limites , tels que définis par la loi portant
code des eaux
- l’espace aérien territorial ;
- les richesses et ressources naturelles du sol et du sous sol, à savoir les
ressources hydrauliques de toute nature, les hydrocarbures liquides ou
gazeux, les richesses minérales ou produits extraits des mines et carrières,
les richesses de la mer ainsi que les richesses forestières, situées sur la
totalité des espaces terrestre et maritime du territoire national en surface
ou en profondeur, sur ou dans le plateau continental et les zones maritimes
sous souveraineté ou juridiction algérienne »

Cette liste appelle trois remarques :


1 à la simple lecture de la liste, les dépendances du domaine public
naturel relèvent entièrement du domaine public de l’Etat, comme
nous allons le constater ;
2 Le domaine public naturel comprend tous les biens dont la
domanialité publique n’est due qu’à de simples causes physiques
indépendantes de la volonté de l’homme ;
3 On peut regrouper les biens qui le composent en deux grandes
catégories principales : le domaine public maritime naturel et le
domaine public hydraulique naturel.

Le domaine public maritime naturel.

Le code maritime de 1976 a fixé la consistance du domaine public maritime sans


opérer une distinction entre dépendances naturelles et celles artificielles de ce
domaine, c’est la modification de ce texte intervenue en 1998 qui l’a
introduite.

C’est ainsi que le domaine public maritime naturel comprend « dans la limite
des eaux territoriales :

- les eaux territoriales et sol et sous – sol de mer territoriale ;


- les eaux intérieures qui se situent en de ça de la ligne à partir de laquelle
est mesurée la mer territoriale .Elles comprennent les baies, les rivages de
la mer qui englobent la zone littorale recouverte par le pus haut flot de
l’année dans des circonstances météorologiques normales, les lais et relais
de la mer ….. »

A/ les eaux territoriales et le sol et le sous -sol de la mer territoriale .

L’intégration du sol et du sous –sol de la mer territoriale dans le domaine public


maritime est une innovation de l’ordonnance n° 65-301 du 6 décembre1965.
Les eaux et les terres immergées ne faisaient pas partie auparavant du
domaine maritime
Parce que l’on admettait que les Etats n’avaient pas sur la mer territoriale un
entier droit de souveraineté mais seulement un droit de police qu s’exerçait
dans certains domaines particuliers (Défense, douanes, pêche ….) et qui ne
faisait pas obstacle au passage « inoffensif » des navires étrangers .

Mais depuis quelques années cette doctrine avait été contestée et les thèses
soutenues depuis longtemps déjà par quelques juristes, en faveur d’un droit de
souveraineté des Etats riverains sur la mer territoriale, faisaient quelques
progrès.

L’utilité qui était apparue de contrôler l’exploitation des fonds marins (et
surtout celle des hydrocarbures) était venues renforcer ce mouvement.

Enfin, l’une des quatre conventions sur le droit de la mer négociées à Genève
en 1958, celle sur la mer territoriale, avait reconnu le droit de souveraineté des
Etats sur la mer territoriale, son sol et son sous sol.
L’ordonnance n° 65- 301 du 6 décembre 1965, a donc transformé notre
législation en la matière, mais elle n’a compris dans le domaine public que le
sol et le sous sol, et non l’eau de la mer territoriale.

Ce principe a été repris aussi bien par le code maritime que la loi portant loi
domaniale.

La mer, quant à elle, n’appartient à personne, elle est à la disposition de tout


le monde.
Elle ne peut faire l’objet d’aucun commerce ni d’aucune appropriation privée
ou publique : elle ne fait pas partie du domaine public.

Il en est de même des eaux territoriales sur lesquelles les Etats riverains
n’exercent qu’un pouvoir de police compatible avec le droit de « passage
inoffensif » des navires étrangers .

Pendant longtemps, la largeur des eaux territoriales a été déterminée par la


portée du canon. Des lois et des conventions internationales l’avaient fixée à
trois milles marins soit 5556 mètres. L’Algérie par décret n° 63-403 du 12
octobre 1963 a fixé la largeur de ses eaux territoriales à douze (12) milles
marins.

B / Les eaux intérieures comprennent :

C’est la partie du sol qui est alternativement couverte et découverte par les
eaux lors des plus grands flots qui déterminent la limite du rivage.
Les relais sont des portions du rivage antérieurement couvertes, mais que les
plus grands flots ont cessé de recouvrir.
Jusqu'à l’intervention de l’ordonnance n° 65- 301 du 6 décembre 1965 les lais et
relais de la mer faisaient partie du domaine privé de l’Etat , ce qui avait pour
conséquence,qu’il pouvaient être concédés a des particuliers à certaines
conditions spéciales .

Cette ordonnance a modifié ces règles en décidant l’appartenance au domaine


public des lais et relais de la mer.

Ce principe a été repris aussi bien par le code civil, le code maritime et la loi
portant loi domaniale.

- Les eaux maritimes intérieures.


Ce sont toutes les portions de mer de peu d’étendue qui se trouvent enclavées
dans les terres et qui peuvent être soumises d’une façon permanente et exclusive
à l’action de la puissance publique. Elles font partie du domaine public.

Ce sont les havres, golfs, rades, baies et détroits de peu d’étendue et le cas
échéants les étangs salés ayant une libre communication naturelle directe et
permanant avec la mer.
Le domaine public hydraulique naturel :

Selon qu’un pays est pauvre ou riche en eau, selon que l’eau présente pour lui plus
ou moins d’intérêt, pour l’irrigation, pour la circulation ou pour l’énergie qu’elle
peut procurer, selon qu’elle est ou non génératrice de dangers (inondations….), le
statut des eaux varie et l’emprise du droit public se fait sentir à des degrés divers.

Ainsi le droit romain a placé tous les fleuves hors du régime de la propriété privée
comme le font aujourd’hui la plupart des législations méditerranéennes.

En Algérie, l’importance nationale de l’eau n’est plus a démontrer compte tenu d


l’utilisation qui en est faite dans différents secteurs d’activité du pays : usage
domestique (ménager, consommation courante…..) agricole (irrigation, mise en
valeur des terres ….)

Or, la demande importante de cette richesse n’est pas compensée par l’apport
naturel : faible pluviométrie et irrégularité des oueds.

Aussi, le régime juridique de l’eau a t-il subi une évolution surtout depuis la mise
en œuvre de la politique de révolution agraire dans des zones de mises en valeurs
où les mesures « concernant l’utilisation des ressources en eau trouveront une
application privilégiée »

En outre, toute forme de commerce spéculatif sur les ressources en eau à usage
agricole est abolie.

Il faut attendre septembre 1975, avec la parution du code pour voir se préciser le
régime juridique de l’eau.

En effet, l’article 692 de ce texte, en reprenant le principe posé par l’ordonnance


portant Révolution agraire selon lequel «  la terre appartient à ceux qui la
travaillent » ajoute que «  toutes les ressources en eau sont propriété de la
collectivité nationale »

Ce principe va être confirmé par la constitution, par le code des eaux et par la loi
portant loi domaniale ;

Les lacs, les cours d’eau et les sources.

Aux termes du code des eaux et de la loi portant loi domaniale, le domaine public
hydraulique naturel comprend :
1- Les eaux souterraines, de sources, minérales, thermales et
superficielles.
2- Les eaux de mer déminéralisées par l’Etat ou pour le compte
de l’Etat dans un but d’utilité publique
3- Les lits des cours d’eau même desséchés, des lacs, des étangs,
des sebkhas et chotts ainsi que des terrains et végétations
compris dans leurs limites,
4- Les alluvions et atterrissements ou dépôts des matières
terreuses, dans les limites des cours d’eau.
5- Les îles et les cours d’eau.
La domanialité publique s’étend non seulement aux lits et aux eaux, mais
également aux berges recouvertes par les eaux coulant à plein bord avant de
déborder.
«L’usage du domaine public hydraulique naturel donne lieu, dans tous les cas, à
concession ; »
Les eaux souterraines
Antérieurement au principe général édicté par le code civil et aux règles posées
par le code des eaux, les eaux souterraines avaient un régime particulier qui tenait
comte des spécificités de leur situation.

C’est ainsi que la jurisprudence avait conféré à ces eaux la domanialité publique
mais la loi du 12 août 1933 complétée par un décret du 30 octobre 1935 avait
modifié la situation en considérant :
1. Dans les territoires du sud, les eaux souterraines jaillissantes qui sont
amenées à la surface par leur seule force ascensionnelle et
indépendamment de tout moyen mécanique font partie du domaine public.
2. En Algérie les eaux souterraines amenées à la surface du sol par le fait de
l’homme appartiennent, sous réserve des droits des tiers à l’auteur des
travaux.
Cependant, dans le cas ou leur extraction n’est effectuée que par suite des
nécessités d’une exploitation du sous –sol, elles ne deviennent la propriété de
l’exploitant que dans la mesure où elles peuvent être utilisées sur les terrains
afférents à l’exploitation. Elles tombent pour le surplus dans le domaine public.

Le code des eaux ne reprend pas cette solution.


Les eaux souterraines font partie du domaine public : ce sont les modalités sur les
opérations de jouissance les concernant qui sont différentes.
Ainsi, pour protéger les ressources en eau au plan quantitatifs et qualitatif,
l’utilisation, la consommation, les travaux de recherche et de captage d’eau sont
soumis, dans tous les cas, à la concession.

Cependant, à l’intérieur des zones d’urbanisation la réalisation de puits à usage


personnel et familial destinés à la consommation humaine est soumise à une simple
autorisation ;

Le domaine public artificiel.

Le domaine public artificiel est entièrement l’oeuvre de l’homme, il résulte de la


destination qui est donnée aux biens

Il n’est pas possible de donner une liste complète des biens dépendant du domaine
public artificiel, le contenu d’une telle liste varierait dans le temps car il est
fonction de l’évolution générale et de la collectivité publique en charge de cette
catégorie de bien.

Il s’agit en effet, de déterminer les biens qui, à un moment donnée, sont


considérés comme servant à la satisfaction des besoins primordiaux de la
collectivité nationale d’une façon directe ou par l’intermédiaire d’un service
public, pour qu’ils méritent, à l’égard de ce qui pourrait les détourner de leur
destination, la protection particulière découlant de la notion de domanialité
publique.

C’est ainsi que l’article 16 de la loi portant loi domaniale fait relever du domaine
public artificiel notamment :
« - les terrains artificiellement soustraits à l’action des flots ;
- les voies ferrées et dépendances nécessaires à leur exploitation ;
- les pots civils et militaires et leurs dépendances grevés de sujétion au profit
de la circulation maritime ;
- les aéroports et aérodromes civiles et militaires et leurs dépendances bâties
ou non bâties grevés de sujétions au profit de la circulation aérienne ;
- les routes et autoroutes et leurs dépendances ;
- les ouvrages d art et autres ouvrages et leurs dépendances exécutés dans un
but d’utilité publique ;
- les monuments publics, les musées et les sites archéologiques ;
- les parcs aménagés ;
- les jardins publics ;
- les œuvres d’art et collections classées ;
- les infrastructures culturelles et sportives ;
- les archives nationales ;
- les droits d’auteurs et les droits de propriété intellectuelle tombés dans le
domaine public ;
- les édifices publics abritant les institutions nationales ainsi que les
bâtiments administratifs spécialement conçus ou aménagés pour l’exécution
d’un service public ;
- les ouvrages et moyens de défenses destinés à la protection terrestre,
maritimes et aérienne du territoire. »

Il est à souligner que le législateur est revenu sur la conception retenu en 1984
qui avait permis au domaine militaire qui, traditionnellement faisait partie du
partie du domaine public, de constituer une catégorie à part devant être régie
par des lois particulières dans l’esprit, au plans des principes, de la loi portant
loi domaniale 
Par ailleurs, l’article 16 ci-dessus ne répartit pas les biens entre les
collectivités publiques gestionnaires Etat, wilaya et commune.

Enfin, on peut relever que certains biens sont affectés directement à l’usage du
public (routes, jardins public ….) alors que d’autres le sont indirectement par le
biais d’un service public, (domaine public ferroviaire, portuaire ou
aéroportuaire, parcs aménagés ….), mais on peut classer ces biens suivant leurs
importance en distinguant le domaine public de la circulation de celui
monumentale

LE DOMAINE PUBLIC DE LA CIRCULATION

A- La circulation maritime :
Font parie du domaine public maritime «les ports avec les installations
immédiates et nécessaires, les rades qui servent normalement au
chargement, au déchargement et au mouillages des navires, les ouvrages
publics et d’une manière générale les lieux aménagés et affectés à l’usage
public.»

L’infrastructure du port et d’une manière générale l’ensemble de son


domaine et des ouvrages qui y sont installés, appartiennent à l’Etat et
dépendent de son domaine public artificiel.

On peut citer comme installations et ouvrages nécessaires : Les digues, les


môles, les jetées, les bassins, les phares, les balises, etc.

B- LA CIRCULATION TERRESTRE :

Le réseau routier public de circulation terrestre comprend toutes les vois de


communications terrestre à la charge de l’Etat avec toutes leurs
dépendances.

Ces voies comprennent principalement les autoroutes et routes nationales et


le réseau ferré.

1-Le domaine public routier :

Le réseau routier est réparti en principe entre l’Etat et les collectivités


locales.

Chaque catégorie de route pose des problèmes qui lui sont propre, non
seulement en raison de la personnalité des collectivités propriétaires mais
aussi parce que les besoins techniques appellent l’attention sur des points
différents.

Font partie du domaine public artificiel national toutes les routes nationales
et autoroutes avec leurs dépendances (trottoirs, fossé, égouts talus, tunnels,
ponts et passerelles ou ouvrages d’art…..) ainsi que les rues des villages et
villes leurs faisant suite.

En effet, une route nationale (comme une route de Wilaya) conserve, afin de
ne pas rompre son unité, son statut juridique propre, lors de la traversée
d’une agglomération.

2-Le domaine public ferroviaire.

Les biens affectés à l’exécution du service public du chemin de fer font


partie du domaine public si au moins ils sont la propriété d’une personne
publique et non d’un concessionnaire.

La domanialité publique s’applique à la voie ferrée elle même, mais encore


aux dépendances qui sont absolument nécessaires à son exploitation (gares,
signaux, maison de garde barrière, passages à niveau, ponts, tunnels, talus
etc.)

Pour les autres biens il faut rechercher s’il sont affectés au service public du
chemin de fer, dans l’affirmative il faut que les biens en question aient reçu
un aménagement spécial.

Ainsi les bâtiments situés en dehors des clôtures de la voie ferrée et servant
à l’exploitation commerciale aux service financiers ou au logement du
personnel ne fons pas partie du domaine public.

Du point de vue de la gestion de ces biens la Société Nationale des Chemins


de fer Algériens (SNCFA) dont les statuts ont été approuvés par le décret
n°63-184 du16mai 1963 s’est substituée à l’administration des Chemins de
fer Algériens (CFA).

La SNCFA a été dissoute par l’ordonnance n°76-28 du 25 mars 1976 qui a


créé une Entreprise Nationale à caractère économique dénommée Société
Nationale des Transports Ferroviaires (SNTF).

L’entreprise des transports ferroviaires, dotée de la personnalité civile et de


l’autonomie financière, est chargée d’exploiter l’ensemble des voies ferrées
d’intérêt générales et de gérer le domaine du chemin de fer.

L’administration des domaines, pas plus qu’un autre service de l’Etat n’a en
règle générale à intervenir dans cette gestion .Toutefois, «lorsqu’un terrain
aura cesser d’être indispensable à l’exploitation du chemin de fer, la
Société nationale des transports ferroviaires devra le remettre gratuitement
au service compétent des domaines ».

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