Vous êtes sur la page 1sur 54

Califes bien guidés

premier califat islamique, dirigé par


quatre califes de 632 à 661

Califat des
Rachidoune
(ar)‫اﻟﺨﻼﻓﺔ اﻟﺮاﺷﺪة‬
/ al-ḵilāfa ar-
rāšida
632–661
Le califat des
Rachidoune à son
extension maximale, en
654.
Informations
générales
Statut Califat
Capitale Médine
(632 -
656)
Koufa
(656 -
661)
Langue(s) Arabe
Religion Islam
Monnaie Dinar
Histoire et
événements
632 À la mort de
Mahomet,
Abou Bakr
est désigné
calife.
642 Fin de la
conquête
de la Perse
et de la
Syrie
byzantine.
646 Fin de la
conquête
de l'Égypte
byzantine.
647 Première
expédition
contre
l'exarchat
de
Carthage.
656-661 Première
fitna.
661 Assassinat
du calife Ali
et
instauration
de la
monarchie
héréditaire
des
Omeyyades.
Califes
632-634 Abou
Bakr
634-644 Omar
644-656 Othman
656-661 Ali

Entités Entités
précédent suivantes 
es : :

Arabie
préisla Califat
mique omeyya
de de
Empire Damas
sassani
de
Royau
me
Ghassa
nide
Égypte
byzanti
ne
Palaest
ina
Prima

Les Califes bien guidés (en arabe :


‫ اﻟﺮاﺷﺪون‬/ ar-rāšidūn, pluriel de ‫ اﻟﺮاﺷﺪ‬/ ar-
rāšid) sont les quatre premiers califes,
qui régnèrent de 632 à 661. Cette période
est aussi parfois nommée le califat
Rashidun.

Cette appellation vient du fait qu'ils sont


considérés dans l'islam sunnite comme
des chefs modèles qui ont suivi
scrupuleusement la voie de Mahomet. Ils
étaient des compagnons proches du
prophète. Le concept, le récit et la
dénomination de « califes bien guidés »
ont été créés postérieurement, par la
dynastie abbasside.

Récit traditionnel
Cette section ne cite pas
suffisamment ses sources (mars
2020). 
Pour l'améliorer, ajoutez des
références de qualité et vérifiables
(comment faire ?) ou le modèle
{{Référence nécessaire}} sur les
passages nécessitant une source.

Dans l'ordre, les quatre premiers califes[1]


ont été :

Abou Bakr As-Siddiq (632-634) ;


Omar ibn al-Khattab (634-644) ;
Othman ibn Affan (644-656) ;
Ali ibn Abi Talib (656-661).

Abou Bakr as-Siddiq


Article détaillé : Abou Bakr As-Siddiq.

Peu après la mort de Mahomet, lors d'un


rassemblement d'Ansars et de Muhadjir,
Abou Bakr est nommé successeur pour
guider la oumma, ce qui fait de lui le
premier calife de l'histoire. Certaines
tribus arabes se révoltent à la suite de
cette décision et refusent de payer la
Zakât tout en continuant de faire la
prière. Abou Bakr insiste sur le fait
qu'elles doivent s'acquitter de ces deux
obligations sans quoi, elles ne
remplissent pas leurs devoirs religieux.
C’est le début des guerres d'apostasie
(arabe : ‫[ ﺣﺮوب اﻟﺮدة‬houroub al-ridda]).
Il doit aussi faire face à Musaylima, un
homme se prétendant prophète contre
lequel il envoie une armée commandée
par Khalid ibn al-Walid. Dans cette
bataille, 1 200 musulmans dont 39
grands compagnons et 70 maîtres-
récitateurs meurent. Lorsque les
musulmans finissent par reprendre
l'avantage et que Musaylima se fait tuer,
Khalid reçoit une lettre de reproche
d'Abou Bakr car, après la victoire, il a
négocié le butin avec le restant de
l'armée de Musaylima[2].

Après que ces problèmes furent dissipés


et que la paix fut revenue, Abou Bakr se
concentra sur les empires perses et
byzantins [réf. nécessaire]. Certains récits
montrent que durant cette période, Abou
Bakr contribue également à préserver
sous forme écrite le Coran et qu'il est le
premier à ordonner de compiler le recueil
des révélations sacrées [réf. nécessaire] dont
il confie la tâche à Zayd ibn Thâbit. En
effet, la « collecte » du Coran en un
véritable mushaf (composition écrite
entre deux couvertures) « aurait été
réalisée [...] au temps des califes, d'Abû
Bakr à 'Uthmân, entre 632 et 656, donc
après la mort de Muhammad. »[3]

Après avoir consulté les compagnons qui


étaient proches de Mahomet, Abou Bakr
prend soin de nommer `Omar ibn al-
Khattâb comme successeur, peu de
temps avant de mourir en 634 à Médine.

`Omar ibn al-Khattab

Article détaillé : Omar ibn al-Khattâb.

`Omar règne dix ans[4] et est nommé


calife par le processus d'élection utilisé
précédemment [réf. nécessaire] pour nommer
Abou Bakr à la tête de l'Oumma. Durant
son califat, Omar met un terme aux
hostilités avec les Perses sassanides, et
conquiert la Mésopotamie (l'actuelle
Irak), l'Égypte, la Palestine, la Syrie[5],
l'Afrique du Nord, l'Arménie[6] et les deux
tiers de l'Empire romain d'Orient[7] tout en
laissant aux peuples et aux territoires la
liberté de pratiquer leur culte, sans forcer
leur conversion à l'islam[8]. Ce succès va
faire d'Omar un des grands
génies [réf. nécessaire] politiques de
l'histoire. Il utilise en effet l'exacte
tolérance religieuse qui aidait les armées
romaines à se faire accepter des peuples
conquis.

Le ton général social et moral de la


société musulmane à l'époque est illustré
par un Égyptien [Qui ?] envoyé comme
espion parmi les musulmans lors de leur
invasion de l'Égypte. Il
déclare [réf. nécessaire] :
« J'ai vu un peuple dont chacun
aime la mort plus que la vie. Ils
cultivent l'humilité plutôt que
la fierté. Rien n'est développé à
des fins matérielles. Leur mode
de vie est simple… Leur
commandant est leur égal. Ils
ne font aucune distinction
entre supérieurs et inférieurs,
entre maître et esclave.
Lorsque le moment de la prière
approche, aucun ne reste en
arrière… »

`Omar est également connu dans la


communauté sunnite pour sa simplicité
et son mode de vie austère. Plutôt que
d'afficher ses richesses comme le font
les dirigeants de l'époque, il continue à
vivre comme pendant la période où les
musulmans étaient pauvres et
persécutés. En 639, quatre ans après
avoir été nommé calife, il décrète que les
années de l'ère islamique devraient
désormais commencer à la première
année de l'Hégire, en 622. `Omar meurt
en 644, après avoir été poignardé par
Pirouz Nahavandi, ancien esclave perse
capturé durant la bataille d'Al-Qadisiyya,
dans la grande mosquée de Médine
pendant qu'il préside la prière[9].
Durant son règne, `Omar fonde la Bayt al-
Mal  (en) (institution financière que l'on peut
assimiler au trésor public responsable de
l'administration des impôts dans les
États islamiques, tels que la Zakât
prélevée sur les musulmans ou bien la
Jizya et le Haraj pour les non-musulmans
vivant en terre d'islam aussi appelés
dhimmis). `Omar l'élargit ensuite et
renforce le gouvernement mis en place
pour admininistrer les finances de
l'État[10].

Dans la plupart des cas, à la suite de la


conquête d'une terre, les califes se
chargent de construire et de faire
entretenir des routes et des ponts en
échange de la loyauté politique de la
nation vaincue[11].

Sur son lit de mort, il est invité à choisir


un successeur mais refuse de le faire. Il
réunit cependant un comité de six
personnes devant choisir parmi eux le
troisième calife dans les trois jours
suivants, composé en partie de membres
que Mahomet avait désignés comme les
dix promis au paradis (Al-Ashara
Mubashara). Othmân ibn Affân est l’élu
de ce comité.

`Othmân ibn Affân

Article détaillé : Othmân ibn Affân.


`Othmân règne pendant douze ans en
tant que calife. Durant son règne, toute la
Perse, la plupart de l'Afrique du Nord, le
Caucase, Chypre sont conquis et
incorporés dans l'empire islamique. Son
règne est caractérisé par un contrôle
plus centralisé des revenus des
provinces, aidé par des gouverneurs
issus pour la plupart de sa propre famille,
le clan des Omeyyades et il nomme
plusieurs de ses parents comme
gouverneurs des nouveaux domaines.
Certains d'entre eux sont accusés de
corruption et de mauvaise gestion.

Othmân est célèbre dans l'histoire de


l'islam pour son implication à compiler le
texte du Coran tel qu'il existe aujourd'hui
et dont celui-ci le suit toujours mot pour
mot et lettre pour lettre[12]. À l'époque,
certains peuples des régions de Syrie et
d'Irak se disputent sur les différentes
prononciations de certains mots du
Coran, tandis que les nouveaux
musulmans des provinces en dehors
d'Arabie ne savent pas bien prononcer
l'arabe. Percevant les risques de division,
`Othmân décide alors d'officialiser un
type unique de prononciation de l'arabe
du texte coranique et d'établir une
classification unique des sourates les
unes par rapport aux autres en
commençant par demander à Hafsa bint
Omar, veuve depuis la mort de Mahomet,
de lui faire parvenir son exemplaire du
manuscrit du Coran. Il confie ensuite à
Zayd ibn Thabit ainsi qu'à d'autres[13] d'en
préparer plusieurs copies et de les
envoyer dans chaque ville et d'autres
lieux importants du territoire musulman
et fait détruire les versions non
conformes[14]. Quelques-uns de ces
exemplaires existent encore de nos jours,
notamment au British Museum de
Londres, au Caire (Égypte) ou encore à
Sanaa (Yémen).

Il meurt à Médine le 17 juin 656 dans sa


propre maison[15], après avoir reçu neuf
coups de poignards assénés par un
groupe d'insurgés venant de Koufa,
Bassora et d'Égypte et qui venaient
contester la manière qu'il avait de gérer
les finances de l'empire musulman.

`Ali ibn Abi Talib

Article détaillé : Ali ibn Abi Talib.

Après l'assassinat d'Othmân, Médine est


en pleine crise politique pendant un
certain nombre de jours. Beaucoup de
compagnons proches d'Ali lui conseillent
de remplir le rôle de calife.

Après sa nomination comme calife, `Ali


renvoie plusieurs gouverneurs de
province, dont certains étaient des
proches d'Othmân, et les remplace par
des aides de confiance comme Malik al-
Achtar. Il déplace ensuite sa capitale à
Koufa, ville musulmane de garnison et
qui est aujourd'hui en Irak. Damas,
capitale de la province de Syrie, est
gouvernée par Mu`âwiya, lui-même
parent d'Othmân[16].

Son califat coïncide avec une guerre


civile qui éclate entre musulmans de 656
à 661. Elle commence avec l'assassinat
du troisième calife `Othmân, se propage
durant le califat d'Ali et ne s’achève que
lors de l'ascension au pouvoir de
Mu`âwiya. Cette guerre civile, souvent
appelée « première Fitna », met fin à
l'unité de la Oumma, la nation islamique.
Cette guerre civile crée des divisions
permanentes au sein de la communauté
musulmane et les musulmans se
querellent sur la légitimité de la personne
qui occupe le poste de calife[17].

Ali est aussi connu pour ses nombreux


sermons et discours, dont beaucoup ont
été compilés dans un livre intitulé Nahj al-
Balaghah (Le Sommet de l'éloquence).

Selon la tradition musulmane, trois


musulmans qui ont été appelés plus tard
Kharijites tentent d'assassiner `Ali,
Mu'âwiya et `Amr qu'ils considèrent
comme les principaux responsables de
la Fitna. Toutefois, seul l'assassinat d'Ali
réussit. `Ali meurt le 21 du mois de
ramadan dans la ville de Koufa (Irak) en
661.

Fin des « califes bien guidés »

Article détaillé : Omeyyades.

Hasan ibn Ali est nommé calife en 661


après la mort de son père, `Ali. Il est
également considéré comme un
souverain juste par l'ensemble des
musulmans sunnites mais, à l'époque,
seule la moitié de l'empire islamique
reconnaît sa souveraineté et son pouvoir
est contesté et finalement retiré par le
gouverneur de la Syrie, Muawiya Ier
(Muâwiya ibn Abi Soufyan).
Critique historique
Article détaillé : Histoire de l'islam.

Les années suivant la mort de Mahomet


voient des évolutions importantes au
Proche-Orient comme la mise en place
d’un corpus textuel, d’une religion et d’un
système politique nouveau, le califat, son
expansion territorial et celle de l'aire
arabophone. L’étude de cette période
reste complexe pour des raisons
méthodologiques et relatives aux
sources. Par exemple, la plupart des
sources musulmanes mentionnant cette
e
période remontent au  siècle et
proviennent de personnes extérieures à
la péninsule arabique. Tandis que les
sources non-musulmanes et plus
anciennes connaissent un intérêt
nouveau. Un débat méthodologique
existe sur leur réception et questionne le
récit traditionnel[18].

Un récit construit a posteriori

« Ce passé primordial arabo-musulman


se donne, en effet, à lire comme un récit
composé a posteriori et visant à légitimer
un pouvoir musulman confronté à ses
propres divisions et à la splendeurs des
empires passés »[18]. Ce récit historique
e
est construit à partir du  siècle et
e
jusqu'au  siècle. Les récits des
conquêtes ainsi étudiés, que l'on appelle
les futūḥ, trahissent parfois des buts
politiques propres à leur époque[18]. C'est
par exemple le cas des écrits laissés par
Al-Balâdhurî (Livre des conquêtes des
pays et Livre de la généalogie des nobles)
dans lesquels son auteur se concentrait
sur les questions fiscales des conquêtes
califales. Certains de ces textes
mentionnent des figures et des
évènements pourtant historique (du
e
 siècle de l’Hégire) qu’il est parfois
difficile à mettre au jour[18].

D'après les traditions musulmanes, la


période antérieure au califat Omeyyade
voit la succession de plusieurs califes
surnommés « bien guidés ». Ce récit se
lit comme un édifice narratif et pour el-
Hibry comme une parabole. Humphrey,
cité par Antoine Borrut explique que les
récits au sujet de cette période sont
construits selon un principe de pacte-
trahison-rédemption[18]. Ce sont les
e
abbassides, au  siècle, qui vont
qualifier ces premiers califats de
rashidun (en arabe, ce terme signifie bien
guidé) et ce récit se fonde sur la
nostalgie d'une unité du monde
musulman qu'ils perçoivent comme un
âge d’or. C'est sur cette même période
que les premières vulgates s'écrivent
comme des récits fondateurs[18].

Éléments historiques
Il devient dès lors difficile de déterminer
l’histoire des premières conquêtes
musulmanes en ne s'appuyant que sur
ces sources. Par exemple, il devient
difficile de dater avec exactitude la prise
de Jérusalem (636 ou 638) et les
premières conquêtes, donc de savoir si
elles se sont déroulés du vivant de
Mahomet[18], les sources étant
divergentes à ce sujet. Le problème est
rendu plus complexe par leur
indétectabilité. Ainsi, les recherches
historiques montre la mise en place d'un
état « qui se définit progressivement
comme musulman »[18].
Les recherches permettent d’attester tout
de même qu’un fond historique existe.
Omar ibn al-Khattâb et Othmân ibn Affân
sont cités dans des graffiti. Ainsi, un
graffiti sur la pierre écrit par un inconnu
du nom de Zuhayr et daté de l'an 24 de
l'hégire (644-645) a été découvert à l’est
d’al-ʿUlâ en Arabie, il indique la date de la
mort d'Umar : "C’est moi, Zuhayr ! J’ai
écrit à l’époque de la mort de ʿUmar, en
l’année 24." Il est à remarquer que celui-ci
ne possède aucune référence religieuse,
qu'Umar ne porte ni le titre de khalîfa
(calife), ni celui d’amîr al-mu’minîn
(Commandeur des croyants) que la
tradition lui attribue et n'est associé à
aucune formule eulogique[19]. Sur les
monnaies, en effet, le titre de
commandeur des croyants semble avoir
été introduit par le calife Muʿāwiya[20] et
la première attestation du titre de calife
remonte quant à elle au règne d'Abd al-
Malik[21].

Par ailleurs, selon les dynasties et/ou les


traditions religieuses, le titre de calife
« bien guidé » et l'importance de cette
charge semblent varier. En effet, durant la
période des omeyyades, les premières
listes califales provenant de textes
syriaques confirment une supériorité de
la figure politique, le calife en place, par
rapport aux figures religieuses, comme
Ali ibn Abi Talil (cousin de Mahommet),
contrairement à ce que laisse entendre la
tradition [18], sauf à considérer que cela
s'inscrive déjà dans un processus de
critique d'Ali[22]. Les alides semblaient
quant à eux conférer moins d'importance
aux califes[18], [page à préciser], alors
dépositaires du pouvoir politique. Chez
les ibadistes, seuls Abou Bakr et Omar
ibn al-Khattab sont considérés comme
califes « bien guidé ». Enfin, pendant la
période ottomane, Soliman le Magnifique
(1494-1566) et Abdülhamid Ier (1725-
1789) sont considérés comme des
califes « bien guidé ». Cette catégorie de
calife semblant être devenue un titre
symbolique analogue à d'autres religions
du Moyen-Orient [réf. nécessaire].
Une période de troubles
Article détaillé : Histoire de l'expansion
de l'islam.

Au cours de la période des Rashidun, le


califat musulman est devenu le plus
puissant État du Moyen-Orient. C'est à
partir du règne du deuxième calife, `Omar
ibn al-Khattab, que l'Empire des Perses
sassanides ainsi que l'Empire byzantin
sont conquis (partiellement pour le
second). Il est aussi caractérisé par une
période de grands troubles. On désigne
par Grande discorde ou Première Fitna,
les évènements et la guerre civile entre
musulmans à l’origine de la séparation
entre sunnites, chiites et kharidjites.

La période de mise en place du Coran


est, d'après des sources musulmanes,
une période de grandes violences et de
guerres civiles. Selon Amir-Moezzi, les
sources religieuses sunnites ont eu
tendance à cacher et atténuer cette
violence afin de légitimer l'arrivée au
pouvoir d'Abu Bakr[23]. Dans le chiisme,
les sources présentent Ali comme le
successeur légitimement désigné par
Mahomet selon un schéma classique de
successions des prophètes bibliques[23].
Pour Madelung, l'étude des textes
sunnites permettraient à eux seuls de
prouver le coup d'état illégitime d'Abu
Bakr au détriment d'Ali[24]. Le monde
musulman sera rythmé, du premier
jusqu’aux abbassides, de guerres civiles,
de répressions violentes, de
massacres[22]

Bataille du Chameau, première grande guerre civile entre musulmans à la suite de l'assassinat du calife Othmân ibn
Affân. Cette guerre intestine est également appelée la Première Fitna.

Pour Amir-Moezzi, une étude historique


ne se basant que sur les écrits sunnites
ne correspond pas aux critères d'une
recherche scientifique. Bien que teintées
d'idéologie (comme les premiers écrits
sunnites), les sources chiites concordent
davantage avec la recherche historico-
critique[25]. Pour Amir Moezzi, le point de
vue des vaincus converge avec les
données historiques connues et
transparaît dans certains écrits sunnites
« malgré la censure »[26]. À suivre ces
données, « afin de justifier ces exactions,
le pouvoir califal […] altéra tout d'abord le
texte coranique et forgea tout un corpus
de traditions faussement attribuées au
Prophète […] »[27].

La mise en place d'une


nouvelle religion

Mise en place de la doctrine

Article détaillé : Genèse de l'islam.

Contrairement à l'historiographie
traditionnelle, les études scientifiques
menées sur la naissance de l'islam
défendent une mise en place longue de
celle-ci. Ainsi, dans L'Islam en débats[28],
Françoise Micheau précise qu'« Il faut
e
attendre la fin du  siècle pour trouver
le nom de Muhammed ». Bien que
critiquées dans ses conclusions, les
données de cette thèse ont été
réétudiées par Frédéric Imbert pour qui
cette apparition tardive témoigne
davantage d'une évolution dans
l'expression de la foi[29].

Si la prédication d'une nouvelle doctrine


se développe du vivant de Mahomet,
William Montgomery Watt écrit « on
estime en général que le dogme ne s’est
développé qu’à partir du califat de
ʿAlī »[30], quatrième calife dans la seconde
e
moitié du  siècle.Cette canonisation
serait liée à la séparation de l'islam en
différents courants. En effet, au
e
 siècle, naissent les trois courants :
sunnisme, chiisme et kharidjisme[31] Ces
oppositions et divisions ont entraîné
«une grande diversité de doctrine» à
laquelle les courants ont répondu dans
l'énonciation du dogme et par le
développement de la réflexion
théologique. Cette réflexion permit de
répondre aux questions, contradictions et
problèmes posés par le texte coranique
et permit de «définir l'orthodoxie
sunnite»[32] Pour Sabrina Mervin,
«l'adoption de l'ach'arisme [ e- e
siècles]
acheva la construction de l'orthodoxie
sunnite»[32].

La question de la naissance du dogme a


fait l'objet de nombreuses recherches
e
dès le début du  siècle. Ainsi, Ignaz
Goldziher considère dans son ouvrage Le
Dogme et la Loi dans l'Islam que : « Ce
n’est que dans les générations suivantes,
[...], que prennent corps, tant par des
processus internes au sein de la
communauté que sous les influences du
milieu ambiant, les aspirations de ceux qui
se sentent appelés à être les interprètes
des prédications prophétiques, comblent
les lacunes de la doctrine du Prophète,
l'expliquent, — très souvent de façon
inadéquate, — l'interprètent.»[33]

L'élaboration du Coran

Article détaillé : Recherches sur la


datation du Coran.

Pour François Déroche, « Lorsque l'on


analyse les points de vue traditionnels,
on y distingue une volonté collective
tenace, dont nous pouvons observer le
cheminement de ‘Uthmān à al-Bukhārī,
en faveur d'une simplification de la
situation en ce qui concerne le Coran, ou
pour être plus précis, en faveur d'un texte
légitimement unique »[34]. Amir-Moezzi
rappelle que le récit de l'orthodoxie
majoritaire d'associer des collectes à
Abu Bakr et à Uthman est un moyen de
présenter un écrit ayant peu de chance
d'être altéré[35].

Toutes les traditions de compilation sous


Abu Bakr et celle d'Othman remontent à
Ibn Shihāb al-Zuhrī, comme cela a été
démontré par Harald Motzki[36] selon une
méthodologie dite " Isnad-Cum-Matin
Analysis " qui consiste à reconstituer les
chaines de transmission des récits de la
tradition, jusqu'au rapporteur principal
qui se trouve être, le fameux Ibn Shihāb
al-Zuhrī mais pour François Déroche, « il
n'est pas totalement certain que le récit
d'al-Zuhrī ne soit pas le résultat sinon
d'une falsification totale, du moins d'une
réécriture de l'histoire »[34]. L'examen de
fragments, pourtant censés être
postérieurs à Othman, montre que
l'écriture manque encore de précision.
L'absence de diacritique sur toutes les
lettres laisse « la porte ouverte aux
divergences »[34].
« La nature de l'intervention du calife
‘Uthmān serait donc différente de celle
que la tradition lui attribue. » Pour
Déroche, si son implication dans la
transmission du texte coranique ne
semble pas remise en cause, son rôle
semble davantage « dans la mise en
place d'un modèle qui donne une identité
visuelle », dans la formation et la
sauvegarde d'une vulgate. « La « vulgate
‘uthmānienne » en revanche, soutenue
par l'autorité califienne — par ‘Uthmān
d'abord, puis par les Omeyyades et les
Abbassides, contrôlée et éditée sur la
durée, a débouché sur un texte stable
dont les manuscrits coraniques
contemporains du parisino-
petropolitanus contiennent les éléments
fondamentaux »[34].

Articles connexes
Liste des califes
Omeyyades
Abbassides
Conquête musulmane de la Perse
Origines de l'islam

Liens externes
Cette section est vide, insuffisamment
détaillée ou incomplète. Votre aide est la
bienvenue ! Comment faire ?

Notes et références
1. Ibn Kathir, Al-Bidayah wa al-Nihayah,
part 7.
2. Tabari, op. cit., « Abou Bekr »,
p. 50-62.
3. Michel Cuypers et Geneviève
Gobillot, Le Coran : idées reçues sur
le Coran, Le Cavalier Bleu Editions,
2015, 128 p.
(ISBN 978-2-84670-667-4, lire en
ligne (https://books.google.fr/books?
id=dAwNCgAAQBAJ&printsec=frontc
over&redir_esc=y#v=onepage&q&f=f
alse)  [archive]), p. 17-18
4. Ahmed, Nazeer, Islam in Global
History: From the Death of Prophet
Muhammad to the First World War,
American Institute of Islamic History
and Cul, 2001, p. 34
(ISBN 0-7388-5963-X).
5. Juan Eduardo Campo, Encyclopedia
of Islam (https://books.google.fr/boo
ks?id=OZbyz_Hr-eIC&lpg=PP1&pg=P
P1&redir_esc=y#v=onepage&q&f=fal
se)  [archive], Infobase Publishing,
2009, p. 685.
6. (en) William Ochsenweld et Sydney
Nettleton Fisher, The Middle East : a
history, New York, McGraw Hill, 2004,
6e éd., 768 p.
(ISBN 978-0-07-244233-5).
7. Hourani, p. 23.
8. JewishVirtualLibrary : The Caliphat (h
ttp://www.jewishvirtuallibrary.org/jso
urce/History/Caliphate.html)  [archiv
e].
9. Juan Eduardo Campo, Encyclopedia
of Islam (https://books.google.fr/boo
ks?id=OZbyz_Hr-eIC&lpg=PP1&pg=P
P1&redir_esc=y#v=onepage&q&f=fal
se)  [archive], Infobase Publishing,
2009, p. 686.
10. Nadvi (2000), p. 411.
11. Nadvi (2000), p. 408.
12. Mohammad Abdallah Draz, Initiation
au Coran, publié par les éditions
Beauchesne, 2005
(ISBN 2-7010-1451-4), p. 67 livre en
ligne (https://books.google.fr/books?
id=fevrvonbUrgC&pg=PA69&dq=%C
3%A9criture+du+coran+fut+par+ath
mane#PPA67,M1)  [archive].
13. Il s'agit d'Abdullah ibn az-Zubayr,
Sa`id ibn al-As, et Abdur Rahman ibn
Harith ibn Hisham.
14. Selon Al-Bukhari, hadith no 4 702.
15. The Many Faces of Faith: A Guide to
World Religions and Christian
Traditions, par Richard R. Losch.
16. Shi`â `Ali (http://www.wsu.edu:8080/
~dee/SHIA/ALI.HTM)  [archive],
Richard Hooker (1996).
17. Voir Lapidus (2002), p. 47 - Holt
(1977a), p. 70-72 - Tabatabaei
(1979), p. 50-57.
18. Borrut A., "De l'Arabie à l'Empire -
conquête et construction califale
dans l'islam premier", dans Le Coran
des historiens, t. 1, 2019, p. 249-289.
19. Frédéric Imbert, « L’Islam des
pierres : l’expression de la foi dans
les graffiti arabes des premiers
siècles », Revue des mondes
musulmans et de la Méditerranée
129 | juillet 2011. en ligne sur
revues.org, lire juste après la note 5
(http://remmm.revues.org/7067#bod
yftn28)  [archive]
20. Jeremy Johns, « Archaeology and the
History of Early Islam: The First
Seventy Years », Journal of the
Economic and Social History of the
Orient, vol. 46, no 4, 2003, p. 411–436
(ISSN 0022-4995, consulté le
22 octobre 2019)
21. Heidemann S., "The Evolving
Representation of the Early Islamic
Empire and its Religion on Coin
Imagery", The Qurʾān in Context:
Historical and Literary
Investigations..., Brill, 2010.
22. Amir-Moezzi M. « Le shi’isme et le
Coran », Le Coran des Historiens, t. 1,
2019, p. 919 et suiv.
23. M.A Amir Moezzi, Le Coran
silencieux et le Coran parlant,
p. 16-19 et suiv.
24. Jan M.F. Van Reeth, « Le Coran
silencieux et le Coran parlant :
nouvelles perspectives sur les
origines de l'islam », Revue de
l'histoire des religions, 3 | 2013, 385-
402.
25. M.A Amir Moezzi, Le Coran
silencieux et le Coran parlant,
p. 19-27 et suiv.
26. M.A Amir Moezzi, Le Coran
silencieux et le Coran parlant, p. 54 et
suiv.
27. Mohammad Ali Amir-Moezzi, Le
Coran silencieux et le Coran parlant,
histoire de l'écriture à travers l'étude
de quelques textes anciens, dans :
sous la direction de Mehdi Azaiez et
la collaboration de Sabrina Mervin,
Le Coran, nouvelles approches, CNRS
éditions, 2013, 1557 (sur Kindle).
28. Françoise Micheau, L'Islam en
débats, Téraèdre, 2012.
29. Frédéric Imbert, « L’Islam des
pierres : l’expression de la foi dans
les graffiti arabes des premiers
siècles, Écriture de l’histoire et
processus de canonisation dans les
premiers siècles de l'islam » in Revue
des études du monde musulman et
de la Méditerranée, 129, juillet 2011.
30. Watt, W. Montgomery, “ʿAḳīda”, in:
Encyclopédie de l’Islam
31. Sabrina Mervin, Histoire de l'islam ,
Flammarion, 2000, p.  114 et suiv.
32. Sabrina Mervin, Histoire de l'islam:
Fondements et doctrines, chapitre 5 ;
l'élaboration de la théologie.
33. I. Goldziher, Le Dogme et la Loi dans
l'Islam: Histoire du développement
dogmatique et juridique de la religion
musulmane, Paris, 1920, p. 61 et
suivantes.
34. François Déroche, « Cours : La voix et
le calame. Les chemins de la
canonisation du Coran », Histoire du
Coran. Texte et transmission, 2015-
2016 (lire en ligne (https://www.colle
ge-de-france.fr/media/francois-deroc
he/UPL4806792168864000919_415_
430_Deroche.pdf)  [archive] archive
(http://archive.wikiwix.com/cache/?u
rl=https%3A%2F%2Fwww.college-de-
france.fr%2Fmedia%2Ffrancois-dero
che%2FUPL4806792168864000919_
415_430_Deroche.pdf) )
35. Kohlberg E., Amir-Moezzi M.,
Revelation and Falsification, Brill,
2009, p. 2 et suiv.
36. Harald Motzki, « The collection of the
Qur'an. A reconsideration of Western
views in light of recent
methodological developments », Der
Islam, 78, 2000, p. 1-34

Portail de l’islam
Portail du haut Moyen Âge

Ce document provient de
« https://fr.wikipedia.org/w/index.php?
title=Califes_bien_guidés&oldid=199800354 ».

La dernière modification de cette page a été faite


le 25 décembre 2022 à 12:39. •
Le contenu est disponible sous licence CC BY-SA
3.0 sauf mention contraire.

Vous aimerez peut-être aussi