Vous êtes sur la page 1sur 26

LA TRANSMISSION DES INEGALITES

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


La transmission des inégalités

• Le rôle de l’éducation
• L’importance de la famille dans les phénomènes de
reproduction
• L’enchaînement des inégalités dans les trajectoires
individuelles

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle de l’éducation
• Les travaux de William Sewel et al. à partir du Wisconsin Longitudinal
Study (panel U du Wisconsin qui suit environ 10 000 personnes aux USA
depuis 1957) confirme l’importance de la réussite éducative dans la réussite
professionnelle (= Blau et Duncan), mais le rôle propre de l’école apparaît
– important qu’on ne le pensait ; mise en évidence du rôle pas très
important mais persistant des capacités cognitives sur la réussite
professionnelle
• Les aléas du modèle : comment les interpréter ? Rôle du hasard ? Ou oubli
de variables pertinentes décrivant l’environnement dans lequel vivent les
personnes ? Mise en évidence, par exemple, par les économistes (Hanushek
et Rivkin) de l’ampleur des différences estimées de qualité des enseignants
et de leur effet sur la réussite : les enseignants situés au sommet de la
distribution de qualité peuvent faire gagner une année d’étude à leurs
étudiants par rapport à ceux situés en bas de la distribution
• Rôle également des attentes des professeurs : ils attendent plus des enfants
des classes sup. => meilleures performances

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle de l’éducation
• L’école comme vecteur privilégié de la reproduction
– Critique beaucoup + radicale du modèle Blau-Duncan=fondamentalement
l’école jouerait un rôle de « reproduction » de la structure sociale, et non
d’atténuation des inégalités
– Travaux de Basil Bernstein sur l’enseignement secondaire britannique dans
les années 60 qui montraient que la façon d’enseigner et le curriculum
(découpages disciplinaires étanches, forte distance entre élèves et
enseignants, évaluations discriminantes de la valeur scolaire) =>
reproduction d’une société de c moyennes traditionnelles, relativement
fermée et hiérarchique
– Pierre Bourdieu : la méritocratie est une illusion qui dissimule la réalité du
privilège social ; les capacités repérées sont associées au milieu social
d’origine ; l’école maintient et reproduit une « culture légitime » qui permet
aux groupes sociaux dominants de maintenir leur domination
– Aux USA Bowles & Gentis Schooling in Capitalist America (1976) ; thèse
fondamentale : plutôt que des connaissances, l’école transmet des
dispositions adaptées au fonctionnement du marché du travail dans
l’économie capitaliste ; la réussite prof. ne dépend que modérément des
capacités cognitives acquises à l’école, et plus de l’acquisition de traits de
personnalité
Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel
Le rôle de l’éducation
• Le rôle de l’école : un bilan désenchanté
– Au terme de 30 ans de recherches, le rôle du système éducatif comme une
institution qui, à travers la démocratisation de son accès, privilégierait le
mérite sur la loterie de la naissance dans la réussite est revu à la baisse
– Une des raisons principales : la famille constitue une force de rappel
essentielle. Dans une société inégale, la transmission des parents aux enfants
d’avantages et de désavantages liés à ces positions inégales est un processus
très difficile à combattre (Christopher Jencks, 1972).

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle de la famille
• L’importance de la famille dans les phénomènes de reproduction
– Le poids de la petite enfance : dès le plus jeune âge, les enfants des familles
du haut de la hiérarchie sociale ont compétences en moyenne plus fortes que
ceux de milieux moins favorisés, et cet écart s’accroît au fur et à mesure que
l’enfant grandit
Fig 1.A cademic skills by parents class position

Source: Feinstein (2003), Data: 1970 British Cohort Study

Paris IV\– A quoi


Séminaire attribuer
Sociologie cet écart ? A l’environnement
des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemelfamilial ou au patrimoine
Patrimoine génétique et environnement familial
• Cette distinction environnement familial/patrimoine génétique suggère deux ordres de
facteurs dont une simple analyse de variance permettrait d’évaluer les poids relatifs. C’est
l’approche de The Bell Curve

• L’idée est maintenant qu’il existe des interactions complexes patrimoine


génétique/environnement et que l’expression des gènes est tellement dépendante de
l’environnement qu’il est bien difficile de séparer les deux composantes. « Genes and
environment cannot be parsed meaningfully by traditional linear models that assign
variance to each component. » Cunha & Heckman (2007).

• Bradley et Corwyn (2002, “Socioeconomic status and child development”, ARP)


distinguent trois catégories de facteurs, différences génétiques à part:
 les « ressources » matérielles et psychologiques: nourriture, soins de santé, qualité
du logement, expériences stimulantes, attentes des parents, etc.;
 les réactions aux stress divers, instantanés ou systématiques ;
 enfin, les conséquences des comportements et styles de vie pertinent en matière de
santé.
Démêler le poids relatif de tous ces facteurs est bien difficile. Des procédures statistiques
élaborées sont nécessaires. Exemple.

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Fig 1.Academic skills by parents class position
Un exemple d’analyse

d’après Raviv & al. (2004), p. 532

On voit la complexité du modèle et l’enchevêtrement des causalités. Dans le cas d’espèce, les
auteurs concluent à l’existence d’effets de médiation.

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Ou doit-on faire des investissements ?
La toute petite enfance est essentielle, c’est là que s’acquièrent des bases qu’il sera très
difficile de récupérer ensuite. Deux mécanismes à l’œuvre :
 Les seuils d’âge des enfants au delà desquels certaines capacités ne peuvent plus
s’acquérir (exemple, une cataracte au delà de 1 an).
 L’effet d’auto-multiplication : une compétence acquise à un âge donné permet d’en
acquérir d’autres, ou de les développer, à un âge plus avancé.

Les travaux de James Heckman (2008), synthétisent tous ces éléments. A tout âge, un
investissement s’avère rentable, mais la courbe montre à quel point la période de la petite
enfance est essentielle.

L’ « école maternelle » scolarisation préscolaire pourrait s’averer fondamentale.


En evaluer les effets n’est pas simple. Il faut analyser des modèles de status–attainment,
mais avec des complexités car les parents jouent un rôle primordial dans le choix d’inscrire
leurs enfants dans une école et dans le choix de l’école 

Pour ce qui est de l’amélioration des capacités cognitives et linguistiques, les effets d’une
scolarisation pré-scolaire semblent positifs. Les résultats sont plus incertains pour ce qui est
des comportements. Comme l’influence positive est plus marquée pour les enfants de milieu
modeste, il y a donc sans doute un effet égalisateur, mais ces effets sont faibles et, en tout
état de cause, modestes par rapport à ceux de l’environnement familial à domicile.

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


L’importance ultérieure du soutien familial

• L’impact de l’origine familiale sur le développement des


capacités pourrait être compensé par un soutien
psychologique, financier et informationnel à partir de
l’adolescence
• Un type d’aide important avec une transition vers l’âge adulte
plus longue et plus incertaine
• Il n’en est rien : les parents n’ayant pas fait d’études n’ont pas
les moyens d’apporter cette aide
• Les inégalités de départ sont ainsi renforcées, comme le
montrent diverses enquêtes

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


L’enchaînement des inégalités dans les trajectoires individuelles

• L’école et la famille jouent un rôle important dans la


transmission des inégalités, mais les facteurs
traditionnellement associées à cette transmission – acquisition
de capacités cognitives, reproduction du statut social – ne
suffisent pas à rendre compte de la variabilité des trajectoires
(les aléas du modèle de Blau-Duncan)
• Plus récemment d’autres facteurs pouvant expliquer cette
variabilité individuelle ont été étudiés, notamment :
– Le rôle des capacités non cognitives dans la réussite
– Le rôle des aléas, risques et chocs dans les vies individuelles

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des capacités non cognitives

• Bowles & Gentis avaient eu cette intuition du rôle des traits de


personnalité dans la réussite, mais n’avaient pas conduits de
travaux empiriques de première main à ce sujet
• Les psychologues, suivis par des économistes (James
Heckman) l’ont fait ; dès le début du 20ème siècle Alfred Binet
note que l’intelligence seule ne suffit pas pour réussir à l’école
: il faut aussi de l’attention et une continuité dans l’effort
• Plus tard classification + systématique de ces qualités = le
« Big Five » = le caractère consciencieux, l’ouverture d’esprit,
l’extraversion, la capacité à coopérer, la stabilité émotionnelle
• Ces traits possèdent une certaine stabilité même s’ils ne sont
pas fixés une fois pour toute ; ils évoluent à travers un
processus d’apprentissage lié à l’environnement et aux
interactions sociales ; le + souvent avant l’âge adulte

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des capacités non cognitives

• Quel pouvoir prédictif de ces capacités sur un certain nombre


de performances individuelles dans le domaine éducatif,
économique et social ?
• Dans de nombreux domaines de réalisation, les traits de
personnalité sont aussi prédictifs que le QI, même en
contrôlant le contexte familial ; le caractère consciencieux est
le plus prédictif pour les performances dans le domaine des
études et du travail ; stabilité émotionnelle (estime de soi,
locus of control) prédit certaines réalisations sur le marché du
travail (effort de recherche d’emploi)
• Effets également sur l’état de santé : caractère consciencieux +
prédictif de l’espérance de vie que l’intelligence ou le statut
social (comportements liés à la santé : tabac, exercice
physique, alimentation)

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des capacités non cognitives

• Donc de fortes associations entre traits de personnalité et des


réalisations éducatives, professionnelles, dans le domaine de la
santé et aussi celui de la délinquance ; cependant le caractère
causal de la personnalité n’est pas fermement établi par ces
études de corrélation (Almlund et al.)
• Quelles conséquences pour les stratégies de remédiation en
faveur des moins favorisés ?
– Les interventions visant à améliorer les capacités cognitives ont
d’autant + d’efficacité qu’elles interviennent tôt dans l’enfance ; dès
l’adolescence leur efficacité décroît très vite
– Par contre la personnalité : plus malléable tout au long du cycle de vie
=> des interventions peuvent avoir un impact même à un stade +
avancé du cycle de vie
– Exemple du Perry Preschool Program

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des capacités non cognitives
• Travaux de psychologues et d’économistes : ne cherchent pas à
expliquer le rôle du contexte sur les capacités non cognitives
• Un ensemble de travaux sociologiques ou anthropologiques y
contribuent
• Travaux recensés par Farkas (2003) : impact des ressources
familiales sur les capacités et habitudes des enfants non encore
scolarisés, ressources qui varient en fonction de la classe sociale
et de l’origine ethnique
– Conditions matérielles du logement, soutien cognitif et affectif apporté par
les parents
– Soutien surtout important dans les comportements quotidiens, ex. lire des
livres à son enfant (+ que les activités culturelles, musée ou concert)
• Effet du contexte local sur la réussite scolaire : adoption de
comportements conformes aux normes des communautés
d’appartenance (« ghetto-related-behaviors ») : « code de la rue »
en compétition avec la culture de l’école
Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel
Le rôle des aléas et chocs dans les vies individuelles
• Idée initialement introduire par un sociologue allemand,
Ulrich Beck (La société du risque, 1986) : selon lui, avec le
développement industriel et technologique, le développement
de la précarité, la disparition des solidarités de classe, la
montée de l’individualisme, la question centrale devient celle
de la répartition du risque ; « j’ai peur a remplacé j’ai faim »
• De « nouveaux risques » apparaitraient à côté des « anciens
risques »
– Anciens risques : relativement prédictibles, liés à un modèle de cycle
de vie standardisé et une redistribution essentiellement horizontale des
actifs vers les enfants et les personnes âgées
– Nouveaux risques résultent de la « déstandardisation du cycle de vie »,
de l’entrée des femmes sur le marché du travail (fin du modèle du mâle
apporteur de ressources, nouvel équilibre entre les rôles familiaux et
professionnels) et de la mondialisation (importance accrue du K
humain, de l’adaptabilité et de la flexibilité)

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des aléas et chocs dans les vies individuelles

• Y-a-t-il des confirmations empiriques de ces évolutions et de


leur impact sur les risques encourus et leur distribution dans
l’espace social ? Affaiblissement des déterminants standards
de la stratification sociale ?
• Confirmation sur un point : des nouveaux risques engendrant
une + grande instabilité des itinéraires personnels sont bien
apparus
• Vérifié dans le domaine de l’emploi (travaux essentiellement
aux USA), vrai également en matière d’instabilité familiale, -
évident en matière de santé

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des aléas et chocs dans les vies individuelles
• Des travaux d’économistes et de sociologues montrent que la
variabilité des revenus à l’intérieur de groupes présentant les
mêmes caractéristiques sociodémographiques s’est accrue
depuis les années 70 : accroissement de la volatilité des
salaires et même de la volatilité du revenu des ménages
(indicateur + pertinent pour mesurer la stabilité du bien-être)
• Déclin de la stabilité d’emploi bien documenté aux USA (pas
de tendance similaire en Europe), contribuant à la montée
d’une insécurité économique (Western et al. 2008)
• Travaux sur la dynamique d’entrée dans la pauvreté qui s’est
accrue depuis les années 70 et qui est associée à des adverse
events (perte d’emploi, rupture familiale)

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des aléas et chocs dans les vies individuelles
• Autre source d’insécurité : la montée du divorce et des
séparations, évènements identifiés comme des risques
importants de pauvreté pour les femmes et les enfants
• Cette montée de l’instabilité familiale est bien documentée ;
elle touche plus des femmes peu diplômées et en situation
moins favorable sur le marché du travail, souvent seules avec
enfants
• Instabilité familiale = facteur qui accroît les risques
individuels de baisse de revenu ou même d’entrée dans la
pauvreté ; certains analystes considèrent que ce phénomène
touche une part importante des familles (le tiers inférieur aux
USA) et constituerait un risque majeur pour l’éducation des
enfants (mécanisme de reproduction intergénérationnelle des
inégalités)

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le rôle des aléas et chocs dans les vies individuelles
• Troisième facteur pouvant impacter le cours de la vie et
augmenter l’insécurité économique : la santé
• Traditionnellement les sociologues ont étudié l’impact du statut
socioéconomique sur la santé ; perspective inversée : étudier
l’impact économique de la survenue de pbs de santé chez des
travailleurs de 50-60 ans
• Proba d’apparition d’un « choc de santé » (Health Schock) assez
élevée à cet âge (1/3 pour des chocs de santé graves ) => proba
élevée de sortie du M du W => importantes pertes de revenu pour
les familles touchées ; pertes non compensées par un surcroît
d’activité de l’autre membre du ménage (soins à apporter)
• Au total : processus de désinstitutionalisation du M du W et de la
famille génère des risques nouveaux + individualisés –
facilement compensés par l’Etat providence , et qui constituent
des éléments aussi importants de compréhension de la
stratification sociale que les indicateurs habituels de position
Paris IV\sociale
Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel
Le rôle des aléas et chocs dans les vies individuelles
• Ces nouveaux risques contribuent-ils pour autant à affaiblir, voire
à annihiler, l’effet des déterminants traditionnels de la
stratification sociale ?
• Annihiler certainement pas : étude par ex. de Whelan et Maître
(2008) sur la variation d’indicateurs de pauvreté en fonction des
étapes-clefs du cycle de vie et de la classe sociale ; prendre en
compte simultanément les deux facteurs et leur interaction
• Affaiblir ? La question reste posée
• Nécessité d’études longitudinales pour mesurer à quel point la
persistance des risques de pauvreté généré par des évènement
perturbateurs est socialement stratifiée
• Une étude (Vandecasteele, 2009) montre que la pauvreté
transitoire le serait – que la pauvreté de LT (assez en phase avec
les travaux sur l’individualisation des risques de pauvreté) ; à
confirmer par d’autres études
Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel
La controverse autour de la Bell Curve (1/2)
Richard Herrnstein et Charles Murray,
The Bell Curve : Intelligence and Class in the American Life, 1994.

Deux parties essentielles

a. une enquête longitudinale sur des jeunes de 15 à 20 ans, comparant (sans aucune
variable de contrôle) pouvoir explicatif du niveau social d’origine et du QI pour
rendre compte d’une large gamme de situations et comportements (abandon de
la scolarité, avoir un diplôme de « collège », être sans emploi, en situation de
pauvreté, etc). La valeur du QI est un bien meilleur prédicteur que l’origine
sociale.

b. une étude des différences de QI entre groupes ethniques (noirs, juifs ashkénazes,
immigrants asiatiques) et des liens éventuels avec des indicateurs socio-
économiques.
Le QI moyen dans la population noire est plus faible et, pour nombre
d’indicateurs, mais pas tous, la différence permet de rendre compte des
différences de réussite. L’interprétation en terme d’héritage génétique a été
principalement retenue et a suscité des réactions très fortes.
Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel
La controverse autour de la Bell Curve (2/2)
Le point de fond est évidemment de déterminer si l’on peut considérer
l’évaluation par des tests de type QI, chez un ensemble de jeunes d’une petite
vingtaine d’années, comme une mesure d’aptitude d’origine génétique
indépendant des effets du milieu social.

Les tentatives des généticiens pour essayer d’associer le niveau du QI à des


gènes sont infructueuses (cf. Pierre Roubertoux, 2004).

Il n’est pas évident que le QI soit une réelle « mesure »  de l’ «intelligence ». Il


y a certainement une part d’héritage génétique mais, il semble que l’on n’ait,
dans l’état actuel des connaissances, guère de moyens d’en apprécier la part, si
tant est que cela ait un sens. Classiquement, on utilise la pondération
moitié/moitié, mais ce partage a été critiqué et est considéré comme obsolète.
Un ouvrage récent prend d’ailleurs le contre-pied de The Bell Curve en tentant
d’expliquer les différences des moyennes des QI dans différents groupes
ethniques par des différences de culture : Richard Nisbett, date.

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


La courbe d’Heckmann

Cette courbe évalue la « rentabilité » en termes d’acquisition de « capacités cognitives » d’un


investissement de montant donné suivant la période du cycle de la vie de la personne qui en
est bénéficiaire (en faisant par ailleurs des hypothèses sur ce qui se passe durant les autres
périodes).
Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel
Les inégalités devant l’aide des parents à partir de l’adolescence

• Les étudiants disposent d’un net avantage en matière d’aides


familiales : prise en charge du loyer totale ou partielle pour les
¾ d’entre eux ; plus de 60% des étudiants ont leur propre
logement (OVE)
• Les peu diplômés sont plus souvent contraints de continuer à
vivre chez leurs parents
• Les jeunes ayant au moins le bac ont reçu 3 fois plus souvent
de l’aide de parents au cours de 12 derniers mois que les
jeunes < bac (enquête ERFI)
• Les jeunes peu diplômés sont plus souvent déprimés et
convaincus d’être isolés et sans soutiens (enquête ERFI)

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel


Le Perry Preschool Program
• Ce programme visait à améliorer la vie d’enfants noirs de bas
revenus au QI <85 à l’âge de 3 ans
• Acquisitions de compétences sociales dans des séances de
travail où on leur demandait de planifier des tâches, puis bilan
avec des professeurs et camarades = apprendre à travailler avec
d’autres pour résoudre des problèmes ; + visites à domicile pour
promouvoir les interactions parents-enfants
• Résultats : pas d’effet important sur les capacités cognitives,
mais amélioration des acquis à un stade + avancé du cycle de
vie, à travers les effets sur la personnalité
• Comparaison avec un groupe témoin : meilleurs résultats aux
tests de capacités non cognitives (motivation, autodiscipline),
études + longues, - souvent au chômage, - souvent délinquants

Paris IV\ Séminaire Sociologie des inégalités\2014-2015\ O Galland & Y Lemel

Vous aimerez peut-être aussi