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La chaine d’union (planche maçonnique)

11 DÉCEMBRE 2020

     4.94/5 (16)

La chaine d’union en franc-maçonnerie : symbolisme. Comment interpréter ce


moment fort des tenues maçonniques ?

LE VÉNÉRABLE MAÎTRE
Mes Frères, les Travaux de ce jour sont terminés. Nous avons droit au repos. Il ne nous
reste plus, suivant l’usage ancien, que d’enfermer nos secrets dans un lieu sûr et sacré, et
de nous unir en Fraternité.

Le V.M. porte la main droite à son cœur.

LE VÉNÉRABLE MAÎTRE, donnant un coup de maillet


Debout mes Frères, Veuillez vous déganter, formons la Chaîne d’Union.

Tous observent un instant de recueillement. Le V.M. peut, s’il le désire, prononcer à cet
instant quelques mots.

Mes Frères, bien au-dessus des soucis de la vie matérielle, s’ouvre pour le Franc-maçon, le
vaste domaine de la pensée et de l’action.
Avant de nous séparer, élevons-nous ensemble vers notre Idéal.
Qu’il inspire notre conduite dans le monde profane, qu’il guide notre vie, qu’il soit la
Lumière sur notre chemin.
Mes Frères, éprouvons, puis ouvrons la Chaîne.

Rituel de fermeture des travaux, 1er degré REAA

La chaine d’union est un moment particulièrement fort des tenues maçonniques. Elle a
lieu juste avant la fermeture des travaux, au paroxysme de l’égrégore, dans un espace-
temps particulier. Les membres de l’atelier connectent leurs mains dégantées, formant
ainsi une chaine fermée.

Traditionnellement accompagnée d’une musique calme, la chaine d’union réunit tous les
membres actifs de l’atelier, mais aussi les membres absents, les membres passés à
l’Orient éternel, et au-delà, tous les franc-maçons du monde, pour un instant d’harmonie,
de communion et de recueillement.

La chaine d’union a donc une signification aussi bien concrète que symbolique ; elle
relève autant du vécu que de l’Idéal, de l’action que de la pensée, de la matière que de
l’Esprit.

Notons que la chaine d’union peut prendre différentes formes :


 longue : c’est le format classique,
 courte (bras croisés, celui de droite passant sur celui de gauche) à l’occasion
de la communication des mots de semestre : c’est une chaine resserrée autour
du « secret »,
 ou encore la chaine formée à l’aide des serviettes de table lors du banquet
d’ordre de la Saint-Jean.

Entrons dans le symbolisme et la signification de la chaine d’union maçonnique.

La chaine d’union et sa signification symbolique.


Pour former la chaine d’union, les franc-maçons présentent leur main droite paume vers
la Terre et leur main gauche paume ouverte vers le Ciel, comme pour relier le nadir (la
plongée en soi) et le zénith (l’accès aux mystères supérieurs). On peut aussi y voir le
symbole d’une main qui donne et de l’autre qui reçoit, évoquant la transmission et
la fraternité.

Cette fraternité ne s’arrête pas aux membres formant physiquement la chaine : elle est
destinée à rayonner bien au-delà et à éclairer l’humanité tout entière.

Loin d’un « entre-soi », la chaine d’union est donc un cercle voué à être le plus large
possible, le plus englobant, le plus universel.

Pourtant, la chaine d’union ne peut être formée que par des hommes et des femmes qui y
sont prêts : il faut avoir été initié. A ce titre, l’inclusion du néophyte dans la chaine
d’union constitue un moment essentiel de la cérémonie d’initiation.

La chaine d’union lors de la cérémonie d’initiation.

Après avoir subi les différentes épreuves de l’initiation et s’être rhabillé, le néophyte est
réintroduit en loge ; il est alors placé directement dans la chaine d’union, les yeux bandés.
Chose remarquable, c’est dans la chaine qu’il reçoit la Lumière.

LE PREMIER SURVEILLANT
Vénérable Maître, le Néophyte est dans la Chaîne d’Union et il désire la Lumière.

LE VÉNÉRABLE MAÎTRE
Puisqu’il en a été jugé digne, elle lui sera donnée à mon troisième coup de maillet.
Pourtant, Néophyte, je vous poserai une dernière question.
Vous avez connu beaucoup d’hommes. Vous avez peut-être des ennemis. Si vous en
rencontriez dans cette assemblée ou parmi les Francs-Maçons, seriez-vous disposé à leur
tendre la main et à oublier le passé ?

Après avoir répondu positivement, le néophyte se voit retirer le bandeau.


LE VÉNÉRABLE MAÎTRE
(…) Vous n’apercevez que des Frères formant une Chaîne d’Union, qui symbolise l’union
de tous les Francs-Maçons répandus sur la surface de la terre.

S’en suit la scène du miroir. Puis le Vénérable Maître conclut :

LE VÉNÉRABLE MAÎTRE
Néophyte ! Nos mains vous unissent à nous et à l’Autel de la Vérité ! Leur étreinte vous
annonce que nous ne vous abandonnerons pas, aussi longtemps que la Vérité, la Justice, la
Discrétion et l’Amour fraternel vous resteront sacrés.

Cette première chaine d’union est donc pour le néophyte une épreuve déterminante, au
cours de laquelle il fait le choix d’abandonner ses passions et ses rancœurs pour s’unir à
des individus dont il n’a pas encore vu le visage.

Le néophyte prend donc un risque, qu’il surmonte par le lâcher-prise : il accepte de


mourir à son passé profane pour se transformer. Désormais, il s’engage à considérer tous
les hommes comme ses égaux, comme ses Frères. Il ne se met plus au centre, mais forme
le cercle de ceux qui regardent vers le centre, vers la Vérité universelle. A présent, il est
digne de faire partie du grand édifice humain.

La « dédicace » du Vénérable Maître.

Revenons à la chaine d’union telle qu’elle se tient normalement en fin de tenue.

Une fois la chaine formée, le Vénérable Maître peut prononcer quelques mots, qui
concernent le plus souvent les membres absents, malades ou passés à l’Orient éternel.

Ce sont des mots de charité et d’Amour qui nous incitent à dépasser notre individualité
pour nous ouvrir aux autres. Ainsi, le chemin de la Vérité passe par l’autre : nous ne
sommes rien sans les autres, notre bonheur dépend des autres, nos destins sont liés. « Je
suis l’Autre ».

Parfois, le Vénérable Maître choisit de rester silencieux pour renforcer la solennité du


moment et inviter chacun à méditer.

Enfin, le Vénérable Maître conclut en invitant chacun à s’élever vers « l’Idéal » commun.


Quel est-il ? En réalité, la chaine d’union offre l’image la plus aboutie de cet Idéal : une
communauté d’individus solidaires, humbles et sages, libérés de leurs illusions, heureux
de communier ensemble. Voilà ce que l’humanité devrait être.

Cet Idéal ne doit pas être oublié une fois la chaine rompue. Au contraire, il doit « inspirer
notre conduite dans le monde profane, guider notre vie, être la Lumière sur notre
chemin ». Cet Idéal doit donc éclairer nos pensées et nos actions au quotidien.
A ce titre, les mots du Vénérable Maître peuvent être considérés comme une dédicace au
sens bouddhique du terme, à savoir la « formulation d’un souhait en vue d’orienter la
pensée et l’action vers l’accomplissement d’un objectif bénéfique ». Dit de manière plus
simple, cette dédicace sème les graines de l’action vertueuse.

L’ouverture de la chaine d’union.

L’ouverture de la chaine d’union ne peut se faire qu’après l’avoir « éprouvée », c’est-à-


dire testée en secouant les mains par trois fois. Ainsi, on ne peut rompre la chaine qu’après
avoir vérifié qu’elle était parfaitement solide et ses maillons absolument solidaires.

C’est aussi un moyen de s’assurer que l’énergie de la chaine ne se perdra pas une fois
celle-ci ouverte. En effet, la chaine et les valeurs qu’elle véhicule ont vocation à survivre à
la séparation momentanée des membres de l’atelier.

Autres parallèles symboliques.

Le symbolisme de la chaine d’union évoque :

 le cercle : symbole de l’Esprit qui précède toute action, le cercle représente


aussi l’unité, l’harmonie, l’infini cosmique, l’ouroboros ou encore le
caractère cyclique de la vie. Dans le taoïsme, il exprime la vacuité, la voie,
le tao…
 le centre du cercle : c’est la Source, le point de Vérité ultime. Rappelons que
la chaine d’union englobe l’Autel des serments, aussi appelé « Autel de la
Vérité » : la Vérité se cache peut-être dans notre manière de prêter serment,
c’est-à-dire de nous engager à renoncer à nos mauvais penchants, à nos
passions égoïstes,
 les lacs d’amour : la corde à nœuds qui décore la loge évoque le multiple qui
se fond dans l’unité, l’interdépendance, le chemin qui passe par soi-même
autant que par les autres,
 les pierres formant l’édifice de l’humanité : les pierres dénuées de leurs
défauts, devenues cubiques, peuvent enfin s’insérer dans le grand édifice
universel. Enfin à sa place, à égalité parmi les siens, l’Homme accède à la
sagesse et à la sérénité.

Conclusion sur la chaine d’union et son symbolisme maçonnique.


Au sens commun, le mot « chaine » est synonyme d’attachement ou d’emprisonnement ;
au sens maçonnique, la chaine d’union exprime au contraire une voie de libération. C’est
en effet en occupant notre juste place au sein de l’édifice humain que nous pouvons nous
épanouir et nous réaliser.

La chaine d’union recèle un immense potentiel d’harmonie universelle. Elle permet de


resserrer les liens de fraternité, de renouveler nos engagements et de raviver les valeurs
qui nous animent.
C’est le moment où chacun peut se recharger de la Lumière d’Amour, Lumière qu’il
pourra ensuite porter à l’extérieur.

Ainsi, la chaine d’union représente la force absolue de l’Amour qui transcende toute
chose. La chaine relie le dedans et le dehors, le sacré et le profane, la pensée et l’action.
Elle permet d’expérimenter concrètement les grands enseignements maçonniques.

Au final, former la chaine d’union, c’est créer un espace sacré au sein de l’espace sacré,
un Saint des saints au sein du Temple. Ce lieu étant créé, chacun peut enfin boire à
la Source de Vérité.

Voir aussi notre liste de planches au 1er degré.

Chaque trait de mon pinceau est l'aboutissement de l'énergie la plus profonde de mon cœur
Le Blog du Rite Français
 
12 novembre 2015

La Chaîne d'Union - I

Nos très vifs remerciements au TVF Bernard R. pour ce morceau d'architecture.


*
*     *
La chaîne d'union qui figure à chaque  clôture de nos travaux est le point d’orgue de la tenue. Voyons ensemble ce qui
explique sa grande importance.
Je ne parlerai que de celle, rituelle, qui clôt la tenue. Je ne parlerai pas des chaînes que l’on peut faire aux Agapes
(avec les serviettes) ou lors des St Jean, ni des chaînes funèbres pas plus que des chaines ratées… ce qui,
cependant, ne manquerait pas d’intérêt... Je n’évoquerai  pas non plus la notion d’énergie, notre B.·.A.·.F.·. Alain B.  l’a
traitée bien mieux que je ne saurais le faire.
Dans ce qui suit je partirai du langage courant avant de me pencher sur le Rituel lui-même puis  sur le symbolisme
avant quelques mots de conclusion.
 

1. Les mots, l’expression

 Chaîne= Suite d'anneaux   engagés les uns dans les autres (chaînons ou maillons) servant à orner, à attacher,
à transmettre un mouvement, etc.

Notion de limite: chaîne pour clôturer ou limiter un terrain,


Dans le bâtiment: la chaîne d'angle relie deux murs en angle, le chainage, horizontal lui, rend le mur plus solide,
En mécanique: chaîne de transmission dans un moteur, chaîne de vélo,
Aspect positif, aspect négatif :  chaîne de solidarité d’un côté et, en négatif, les chaines de l’esclave, celles du
prisonnier.

 Union : Relation, jonction de différentes choses ou de personnes, fait de former un couple, il sous-entend une
entente, la concorde des sentiments ou des pensées.  
 Quelle origine? Vu les nombreux allers-retours entre le Compagnonnage et la Maçonnerie il parait difficile 
d’affirmer une antériorité de l’un sur l’autre. Ce serait les modernes qui l’auraient  introduite en F.·.M.·.  d’où
son importance au Rite Français. On en  trouve trace dès les constitutions d’Anderson (1723).
 Une analogie : lors de notre tenue de février dernier notre F.·.H.·. Michel évoquait le soufisme et dans le blog
des meuniers en avril on trouvait une allusion à Rumi (1207-1273) mystique persan, maître soufi, fondateur
d'une confrérie de derviches tourneurs : lors de leur cérémonie les derviches sont disposés en cercle et
tournent sur eux-mêmes, on y reviendra…
 

2. Le Rituel

La chaîne est formée, sur le sol de la L.·.,  à partir du Vénérable à qui revient la responsabilité de la diriger, chacun se
dégante et se place autour du pavé mosaïque et des trois chandeliers, avec au centre le tableau de L.·.
On peut l’accompagner de musique au tempo et au volume appropriés, ne gênant ni l’écoute ni la concentration.
Si l’assistance est modeste la chaîne est dite « longue » : les frères se tiennent à mains nues, simplement,  la main
gauche de l’un dans la main droite de l’autre, comme des enfants faisant la ronde. Dès que l’effectif le permet on la
fait  «courte» : toujours en cercle fermé, les frères se tiennent aussi à mains nues, mais les bras croisés, bras droit sur
bras gauche, main gauche en dessous tournée vers le haut, main droite au-dessus, tournée vers le bas. Ils se
concentrent en silence, ils  écoutent le texte dit avec calme et solennité par le V.·.M.·. . Je ne le rappelle pas
entièrement:
« Mes Frères, n'oublions jamais que l'amour fraternel  est "la base, la pierre angulaire, le ciment et la gloire de notre
vieille confrérie". Que nos cœurs se rapprochent en même temps que nos mains ; (que l'Amour fraternel unisse tous
les maillons de cette Chaîne formée librement par nous.
Comprenons la grandeur et la beauté de ce rite ancestral; pénétrons-nous de son sens profond. Cette Chaîne nous
unit à tous nos frères heureux ou malheureux répandus sur la surface de la terre. En elle, sont toujours présents ceux
qui la formaient hier.
Qu’elle soit l’emblème de la Tradition que nous avons régulièrement reçue, que nous maintenons sans faillir et que
nous transmettrons dans sa plénitude aux générations à venir.)
Elevons notre esprit vers le G.·.A.·.D.·.L.·.U.·. qui est Dieu et jurons de travailler sans relâche au grand œuvre de la
Fraternité universelle. »
Tous ensemble : « Nous le jurons ! »
Suit un moment de silence et de recueillement (éventuellement à l’intention particulière proposée par le V.·.M.·. , en
tout cas guidé par ce qui précède).
Lorsque le V.·.M.·. déclare « Mes FF .·. rompons la chaîne » tous les FF .·. secouent trois fois les mains avant de la
rompre.
Notons que c'est le jour même de son initiation que le nouveau F .·.   la découvre, et très vite il la ressentira comme un
moment fort.

La Chaîne d’Union, un geste Rituel


La chaîne, associée au premier chef à l'idée d'emprisonnement, d'esclavage, est, d'après la
croyance antique symbole des liens entre le ciel et la terre. Platon fait allusion à "la corde
lumineuse" enchaînant l'univers. Cette chaîne d'or aurait pour but de relier le Ciel et la Terre.
D'une façon générale, la chaîne est le symbole des liens de communication, d'union, de toute
action commune.
Que représente t'elle En Franc-maçonnerie ?
En 1817, on rapporte que "le lien de la chaîne" existait déjà dans les anciens rituels et que le
nouvel adepte qui "découvrait la lumière" voyait ses frères "former une chaîne".

La Chaîne d'Union, simple, émouvante, est pour moi, un des actes essentiels de notre rituel. 
Initiée au Rite Français, sa découverte en tant qu'Apprentie, fut pour moi, plus qu'un signe,
formée obligatoirement à chaque tenue, avant la clôture des travaux, elle est la révélation du
message de fraternité universelle que nous souhaitons vivre et transmettre.

La Chaîne d'Union relève d'un geste rituel :

Représentation vivante de la Loge, elle est formée, sur invitation de la Vénérable Maîtresse. Sous
la forme d'un cercle ou d'une boucle complète fermée, l'ensemble des participants se donne
mutuellement les mains dégantées, en ayant préalablement croisé les bras sur leur poitrine, (bras
droit croisé sur bras gauche).Seule, la Vénérable Maîtresse, située au bas des marches de l'Orient,
donne les mains sans les croiser.
Nos bras sont croisés, nos mains nues enlacées, sans protection, geste fort, lourd de symbole,
comme un orchestre jouant une musique qui nous rassemble.
Toutes les conditions sont alors rituellement réunies pour qu'un magnétisme dynamique se
développe du fait que cette chaîne est constituée par des êtres vivants, tenant leurs mains
entrelacées et croisées.
Ce geste rituel, nous renvoie par le détour, aux lois physiques, des polarités positives et polarités
négatives, au monde de l'Energie, de l'immatériel.
Chaque Maçonne, à tour de rôle, sans distinction de grade et de qualité, devient centre
d'émission, de réception et de transmission. L'Energie qui circule, réchauffe, réconforte, crée des
vibrations qui s'intensifient, dépassant le groupe. La communion s'opère : nous sommes les
maillons vivants d'une chaîne universelle. Les paroles du texte d'invocation prononcé par la
Vénérable Maîtresse résonnent alors en nous :

"Que nos cœurs se rapprochent en même temps que nos mains; que l'Amour fraternel unisse tous
les anneaux de cette chaîne formée librement par nous. Comprenons la grandeur et la beauté de
ce symbole, inspirons nous de son sens profond…"  

La Chaîne d'Union nous unit symboliquement, dans le temps et dans l'espace, à tous les Maçons,
qu'ils appartiennent au monde visible ou invisible.

Dans le Temps, elle nous unit à la Tradition maçonnique, à travers l'histoire, depuis les confréries
de bâtisseurs qui transmettaient leur savoir faire professionnel par la cooptation et l'initiation.
Puis, les premiers Maçons spéculatifs qui s'associaient pour forger et enrichir l'idée d'une
politique de progrès de l'humanité tout au long du 18 ème et 19ème  siècles.

Lorsque les mots de semestre circulent de l'une à l'autre dans la Chaîne, ne retrouve t'on pas cette
transmission secrète des valeurs de la Franc-Maçonnerie, identique aux secrets professionnels
des maçons bâtisseurs de cathédrales ?
Le passage d'une transmission d'ordre technique à une transmission d'ordre philosophique et
symbolique nous rappelle comment, au fil des temps, des hommes ont cherché à comprendre le
monde et la place de l'homme dans l'Univers, à travailler au perfectionnement de cette humanité.
Comme elle nous relie au Passé, cette chaîne est illimitée dans l'avenir et nous transforme, nous
aussi, en bâtisseurs.
Peu à peu, je crois percevoir mes responsabilités vis-à-vis de vous mes sœurs. A la fois soutenue
et soutien par et pour vous : en référence à mes voyages initiatiques que je n'oublierai pas, où la
confiance en l'Autre d'emblée, s'imposait à moi avec une force lumineuse.
Ce que nous voulons évoquer et transmettre, en formant la chaîne d'union, c'est le sentiment de la
relation de fait entre les générations comme entre les individus, et c'est une façon de formuler
l'engagement que nous prenons de garder le contact avec tous nos Frères et nos Sœurs.

Ce soir, nous ouvrons nos mains à deux nouveaux maillons et nous préparons déjà à accueillir
ceux qui un jour viendront parmi nous, agrandir notre Union.

Dans l'Espace, cette chaîne nous unit à tous les Francs-Maçons, proches ou lointains, de toute la
terre, de toutes obédiences, de toutes confessions qui, comme nous, oeuvrent à l'amélioration de
l'Etre humain, utilisant les rituels, les symboles qu'ils contiennent, pour amener l'Initié(e) à la
lumière et à l'harmonie. 
Cette Chaîne vivante représente une communauté de pensée qui dépasse de très loin, le petit
groupe qui la forme en réalité, une force spirituelle qui dépasse largement la capacité de la
somme de chaque maillon qui la compose.
Plus encore, le cercle fermé qui constitue cette chaîne, n'évoque t'il pas la vaste ceinture
d'humanité qui enveloppe la planète ?

Nous sommes comme aspirées vers un Principe transcendant, une énergie, une lumière.
N'est-ce pas une façon rituelle de vivre un retour à l'Unité ?
L'Etre unifié crée un nouveau monde : celui de la Fraternité Universelle.

Cette Chaîne symbolise l'Universalité de la Franc-Maçonnerie, rappelle la Communication


effective entre les Etres et la Dépendance dans laquelle ils se trouvent les uns par rapport aux
autres.
Par le rapprochement sensible de la poignée de main, elle rapproche ceux que la vie quotidienne
tenait dans l'ignorance l'un de l'autre et elle provoque la Reconnaissance de ce "Prochain". 
Nous formons ainsi une chaîne, une unité, à partir de ce qui nous réunit mais aussi de ce qui nous
distingue.

La Chaîne d'Union, moment de recueillement et de recentrage à la fin des travaux, est l'occasion
de renouveler notre promesse de travailler à réaliser la Fraternité Universelle.

J'ai dit,

  La Chaîne d’Union 


Introduction
Lorsque j’étais Apprenti, j’avais tracé une petite planche au sujet de la
« Chaîne d’Union ». Dix ans plus tard, j’avais déjà souhaité refaire le point sur
ce rite, reconsidérer mes premières réflexions, bref, « remettre ma planche sur
le métier ». J’en ai donc rédigé une nouvelle version au cours de l’année
2007 !
En 2008, au sein d’un nouvel Atelier et dans le cadre d’un Rite que je
commençais seulement à découvrir et à apprécier, j’ai remis une nouvelle fois
cet ouvrage sur le métier car une planche peut toujours être améliorée : la
réflexion, les recherches se poursuivent ; les expériences vécues se partagent
et apportent de nouvelles idées, de nouvelles possibilités de développement.
Depuis que je me suis impliqué dans le Rite Écossais Rectifié, j’ai découvert
que le Vénérable Maître nous invite à participer à ce rite par la formulation
« Avant de nous séparer, formons la Chaîne de l'union fraternelle ! », alors
qu’au Rite moderne qui m’a initié, le Vénérable Maître se contente de dire
simplement « Mes Frères, formons la Chaîne d’Union » !
Apparemment, la « Chaîne d’Union » incarne un concept très proche, très
simple et très accessible : celui de la fraternité des êtres humains. Il me
semble assez évident que la « Chaîne d’union » unisse des êtres qui se
donnent la main. Or, donner la main à quelqu'un, c’est l’aider. Mettre la main à
quelque chose, c’est y participer. La conception maçonnique de la « Chaîne
d’Union » comme expression d’une fraternité universelle d’entraide et de
participation vient sans doute de là.
La « Chaîne d’Union », reprise par bon nombre d’obédiences de la Franc-
maçonnerie, symbolise ce que devrait être sur la terre une fraternité humaine
permanente et profonde.
Le terme « chaîne » viendrait du latin catena, qui aurait donné le mot cadenas,
évoquant ainsi la Tradition dans le sens d’un secret bien gardé puisque nul ne
peut s’y introduire s’il n’en possède pas la clef. Ainsi, c’est bien dans le secret
de la Loge que nous formons la « Chaîne d’Union », pas dans le monde
profane avec des inconnus.
Puisque au sens propre, une chaîne est une succession de maillons, et qu’au
sens figuré il s’agit d’un objet composé d’éléments successifs solidement liés,
ou une suite de personnes qui se transmettent quelque chose, plusieurs idées
ressortent donc de ce terme : celle de lien, celle d’une succession
ininterrompue d’éléments, et celle de transmission.
Qu’est-ce que la « Chaîne d’union » ? Quelles sont ses origines ? Que signifie
ce rituel ? Quand le pratique-t-on ? Pourquoi ? Comment le pratiquer
correctement pour qu’il soit efficace ? Quel symbolisme véhicule-t-il ? Tentons
à nouveau de faire la lumière !

Les origines de la Chaîne d’Union


La « Chaîne d’Union » nous vient d’un lointain passé. Pour Jean Ferré, la
« Chaîne d’Union » est un usage issu des rites des gens de Métiers qui
continue à être pratiqué par le Compagnonnage et la Franc-maçonnerie. La
première description maçonnique de la Chaîne d’Union semble apparaître en
1696 dans un manuscrit des archives d’Edimbourg.
Pour aider le lecteur à se repérer dans la forêt des symboles
maçonniques, Jean Ferré s'est attaché à faire ressortir la diversité des
interprétations, sans toutefois privilégier une école aux dépens d'une autre, et
a pris appui sur les textes fondateurs (anciens devoirs, manuscrits, rituels...)
pour retrouver les racines du symbole, sa progression historique, sa richesse.
Il a étudié chaque outil, précisé le rôle des officiers et détaillé les divers rites en
vigueur. Son « Dictionnaire des symboles maçonniques » est une
remarquable synthèse sur le monde maçonnique. Il est à la fois un outil de
travail pour le Franc-maçon soucieux d'approfondir le sens de sa démarche et
un instrument de réflexion pour le Profane désireux de pénétrer un monde
imprégné de secret.
Par sa ressemblance formelle avec les lacs d’amour ornant la houppe
dentelée, la Chaîne d’Union, qu’on trouve d’ailleurs évoquée en 1723 dans une
chanson maçonnique imprimée à la fin des Constitutions d’Anderson, semble
une réalisation concrète de la houppe dentelée et de ses lacs d’amour
symbolisant la solidarité et l’amour qui unit chacun des Frères de la Chaîne.
Cette chaîne puissante de fraternité qui unissait les Compagnons bâtisseurs
du moyen âge explique comment les monuments édifiés en Europe sont d’une
grande ressemblance. Beaucoup des constructeurs de cette époque avaient
acquis leurs connaissances à une même école, celle de l’université de
Cordoue où les musulmans avaient apporté leurs richesses culturelles dans
des domaines aussi variés que la littérature, la poésie, les sciences exactes et
l’architecture.
Ils observaient les mêmes lois de l’architecture et de la géométrie. Ils
dirigeaient leurs travaux et leurs constructions d’après des principes et des
traditions ésotériques.
Grâce à leur chaîne d’union fraternelle, les Maçons disséminés dans toute
l’Europe étaient toujours en contact les uns avec les autres. Ils transmettaient
leur art et ses améliorations connues. De cette manière, ils étaient intégrés aux
techniques de toute la corporation. Ce bel exemple d’échanges des Francs-
maçons opératifs du moyen âge a permis la construction des édifices que nous
admirons. Ils se sont unis pour construire une œuvre commune et leur pierre
comme la nôtre va s’insérer dans une construction : le Temple Idéal de
I’Humanité.

Comment bien pratiquer la Chaîne d’Union


?
Les Frères assemblés rituellement et formant une chaîne tout autour du Tapis
de Loge porte le nom de « Chaîne d’Union » qui se pratique « longue » ou
« courte » selon l’importance de l’assemblée.
Sa constitution répond à une exigence particulière : les mains, mises à nu, se
tiennent entrelacées et croisées droite/gauche et gauche/droite rappelant ainsi
la forme du huit couché, emblème de l’infini.
Pour Irène Mainguy, la « Chaîne d’Union » relève d’un geste rituel, d’une mise
en relation active par l’union des mains de tous les participants d’une Loge,
contrairement à la corde à nœuds avec laquelle elle est souvent confondue et
qui, elle, est une représentation statique.
N.B. : Irène Mainguy est bibliothécaire-documentaliste, diplômée d'État,
responsable de la Bibliothèque maçonnique du Grand Orient de France à
Paris.
Elle est vice-présidente de la Société Française d'Études et de Recherches sur
l'Écossisme (SFERE).

La « Chaîne d’Union » courte


La « Chaîne d’Union » dite « croisée » se forme en croisant les bras, celui de
droite passant sur celui de gauche, les mains dégantées, les pieds en équerre.
En d’autres termes, chaque Frère, déganté, croise son bras droit par-
dessus son bras gauche. Avec sa main droite, il prend la main gauche du
Frère situé côté cœur. De sa main gauche, il tient la main droite du Frère placé
à sa droite. Ainsi, tous les membres de l’Atelier se tiennent par la main, avant-
bras droit par-dessus l’avant-bras gauche. Généralement, le Vénérable ne
croise pas les bras. Il donne les mains sans les croiser.
Toutes les conditions sont alors réunies intentionnellement pour que circule,
entre les participants, comme un véritable courant magnétique, régulateur
d’énergie. Les mains doivent être dégantées pour optimiser le contact et
éliminer les isolants de toute nature pouvant gêner la qualité de cette
précieuse communion.
J’ajouterais que, pour moi, idéalement, il conviendrait en plus de se prendre
réciproquement le pouls afin de favoriser au maximum la circulation du flux
d’énergie.
Cette chaîne est la matérialisation de la solidarité, de la fraternité qui lie les
Maçons. Quand la Loge œuvre bien, quand le Vénérable a su bâtir l’unité dans
son Atelier, il y a « un courant qui passe ». Il se crée un phénomène dont
chaque maillon est à la fois émetteur et récepteur.
Avant de former la « Chaîne d’Union », certains Vénérables Maîtres donnent
un thème, souvent une idée maçonnique, sur lequel les Frères concentrent
leur esprit.

La « Chaîne d’Union » longue


Selon Christian Guigue, il est aussi possible d’envisager une « Chaîne
d’Union » « longue ». Dans ce cas, elle se fait bras écartés, les mains se
tenant simplement.
N.B. : Christian Guigue est Franc-maçon, historien et éditeur à Mons-en-
Barœul (France)
A ce stade de mon exposé, quelques remarques s’imposent :
o La « Chaîne d’Union » est vécue par tous les membres présents, sans
distinction de grade.
o J’observe que la « Chaîne d’Union » est formée facultativement avant la
Clôture des Travaux dans nombre de Loges de notre Obédience
mais obligatoirement pour l’incorporation d’un nouvel Apprenti à la Loge.
o Il ne me semble pas qu’il existe une règle précise quant à l’obligation de
la former à l’issue des Travaux. Je remarque cependant qu’au Rite
Ecossais Rectifié, elle est toujours pratiquée en fin de Tenue et qu’elle
est l’occasion pour le Vénérable Maitre d’y réciter la prière de Clôture.
o Remarquons que la Maçonnerie anglo-saxonne ne pratique pas la
« Chaîne d’Union » et qu’elle ferme les Travaux par des chants.

Approche du symbolisme de la Chaîne


d’Union
Pour Irène Mainguy, la « Chaîne d’Union » remplit auprès de chaque Maçon
le double rôle de bouclier protecteur et d’appareil émetteur / récepteur
d’influences bénéfiques. Cette chaîne unit les Francs-maçons en dehors de
l’espace et du temps. Le monde des apparences tient les êtres physiquement
prisonniers, mais les esprits sont libres au-delà des murs du temple, des
frontières et des mers. Les mains jointes dans une « Chaîne
d’Union » établissent la pérennité de la fraternité qui devrait régner de façon
permanente et profonde entre tous sur la terre.
Le mot « chaîne » exprime aussi une notion de transmission. En faisant le
geste de se réunir dans la « Chaîne d’Union », chaque Maçon incarne l’idée
de transmission qui symbolise la vie et l’énergie créatrice. Cette chaîne
formée de personnes de bonne volonté représente une communauté de
cœur et de pensée. Tous les Maçons du monde forment une seule et même
famille dans le temps et dans l’espace.
Dans le mot « chaîne » se perçoit aussi une notion de lien
indissoluble comme celui qui unit chaque Maçon par un serment prêté reliant
chacun dans une chaîne d’union fraternelle sur toute la surface du globe. La
chaîne est formée de maillons animés par une soif de Vérité et de
Lumière.
Cette chaîne apparaît essentiellement comme le symbole d’une solidarité
humaine, mieux encore comme celle d’une réconciliation universelle. Il
s’agit en quelque sorte d’une intégration de tout être dans la société humaine
idéale et l’intégration consciente à un univers dont chacun est un maillon actif.
La « Chaîne d’Union » se forme par une boucle complète fermée en cercle.
Pour notre bien aimé Frère Guy Boisdenghien, la main droite, active, émet et
transmet le fluide magnétique à la main gauche passive. La droite est
considérée comme emblème d’avenir tandis que la gauche représente le
passé sur lequel l’homme n’a plus d’emprise.
Dans la « Chaîne d’Union » maçonnique, on aime à considérer que la main
droite est émettrice, qu’elle transmet à la main gauche, qualifiée alors de
réceptive, l’énergie reçue et transmise par le Vénérable Maître. Voilà pourquoi
il convient de bien respecter les dispositions précises de ce rite, la manière
correcte d’effectuer la chaîne. Ce n’est que dans ces conditions que l’énergie
peut se propager auprès de chaque maillon, chargeant chaque participant d’un
potentiel collectif, celui de tous les éléments confondus de cette chaîne.
Cette conception n’est pas exhaustive. Guillaume de Saint Thierry,
commentant le Cantique des Cantiques, y exprime que la Droite est la marque
de la sagacité et de la raison qui s’exercent dans l’effort. La Gauche, amie du
repos, désigne la vie contemplative et la sagesse se réalisant dans la paix et
le silence.
N. B. : Natif de Liège, Guillaume de Saint Thierry poursuivit ses études à
Laon très probablement, avant de devenir moine à Saint-Nicaise de Reims. Il
fut ensuite abbé de Saint-Thierry, près de Reims, de 1119-1120 à 1135.
Homme d'action, il se dépensa pour le bien de son abbaye et pour le succès
du renouveau monastique ; il fut surtout un penseur qui a écrit ses premières
œuvres, florilèges et traités, durant son abbatiat. Retiré finalement chez les
Cisterciens de Signy, il y termina sa carrière littéraire, polémique et mystique
que la mort vint interrompre le 8 septembre 1148.
Pour notre bien aimé Frère Guy Boisdenghien, le côté gauche conditionne la
vie elle-même car elle est le siège du cœur.
Beaucoup considèrent que la « Chaîne d’Union » ne peut pas être limitée à la
présence physique des seuls participants, estimant que sa force relève aussi
de celle de tous les Initiés qui les ont précédés et qui sont passés dans
l’invisible. La Chaîne d’Union inclut symboliquement dans sa mémoire
tous les membres de la Loge et par extension de l’Ordre, depuis sa
fondation !
L’idéal symbolique voudrait que, dans ce geste, le rythme de chacun des
participants se mette à l’unisson, dans un souffle commun, rappelant le Verbe
de l’Origine.
Pour notre bien aimé Frère Guy Boisdenghien, qui, comme vous le savez
sans doute, a exercé des responsabilités au sein du Grand Prieuré de
Belgique,  la Chaîne d’Union, composée d’une suite d’anneaux engagés les
uns dans les autres, est l’emblème de l’action commune. En Franc-
maçonnerie, elle prend la forme théorique du cercle – qui symbolise le Ciel –
et les mains entrelacées font passer de Frère en Frère l’influx conjugué de la
Loge.
Pas en usage au Rite Français et facultative au Rite moderne belge, sauf lors
des cérémonies solennelles de Réception, de Passage ou d'Élévation, la
Chaîne d’Union termine par contre toute Tenue du Rite Écossais Rectifié. Elle
prend particulièrement toute sa valeur lorsque l’Atelier vient de s’enrichir d’un
nouveau Frère. Elle se met en place autour du Tableau de Loge où les Frères
s’assemblent en croisant les bras.
Pour Christian Guigue, le rite de la « Chaîne d’Union » s’effectue autour du
point central de la Loge qui, situé au milieu du Pavé mosaïque, au milieu du
Tableau de la Loge, figure l’axis mundi ou Centre du Monde.
Avatar de l’arbre de vie ou arbre cosmique, il permet l’accès aux trois zones
cosmiques correspondant aux mondes de la réalité, de la vie sans limite et de
la sacralité. Lieu privilégié de l’ascension collective, cet ombilic devient
l’athanor où s’opèrent la transcendance et la libération. Car l’esprit n’a pas
vocation à se trouver prisonnier du corps, de la chair, de ce monde de la
matière. Il est lumière, énergie, vie. Il a le désir de réintégrer son univers mais
pour cela il lui faut parvenir à abandonner cette enveloppe corporelle : c’est ce
qui s’opère par la fusion, cette forme de l’extase collective, au moyen des rites
dits d’envol, ou d’ascension, qui prouvent la réalité du dépassement de la
condition humaine par le « céleste » ou la spiritualité la plus épurée, d’où la
nécessité de l’invocation au G.A.D.L.U. faite en préambule et en ce milieu.
Dans ce geste rituel, la transmission s’opère parce que à chaque niveau on est
trois : chacun, à tour de rôle, devient un centre qui prend vie par la grâce du
pôle énergétique représenté et constitué par le Frère qui se trouve à la droite
comme par celui qui se situe sur la gauche. Mais ceci ne dure que la brièveté
d’un éclair car nous nous fondons tous pour ne faire qu’un.
Les participants sont simultanément conscients d’une situation limitée où les
identités sont séparées et d’une prééminence extatique divine où les identités
sont similaires.
Pour parvenir à cet état, nous quittons nos gants, forme symbolique du
dénuement pour s’oublier à soi, quitter la chair, et former le cercle en nous
tenant par les mains nues. Nos doigts se serrent, nos êtres se fondent. Ce
contact énergétique crée une sorte de fluide qui se répand dans la chaîne et
s’élève.
Ce courant réchauffe, réconforte, apaise à l’instar des mains magiques qui
bénissent, baptisent et guérissent. Ce fluide qui circule et nous aspire vers le
haut est Amour. Or cet Amour, cette immense compassion, qui vibre
universellement en chacun de nous, nous relie à tous nos Frères répandus sur
la surface de la terre comme là-haut avec ceux qui ont gagné l’Orient éternel. Il
se densifie par cette fusion rituelle et collective mais il brûle toujours en nous,
comme une petite particule aimantée qui croît en énergie chaque jour
davantage pour se laisser attirer naturellement vers la Lumière, car, bien que
nous n’ayons guère conscience, nous n’aspirons qu’à une chose : la victoire
sur la mort et sur la matière ; nous n’aspirons qu’à passer du microcosme vers
le macrocosme, de l’animalité humaine à la déité. C’est par la lumière que se
manifeste la vie. Sans ce centre tout devient chaos.
Pour Christian Guigue, la « Chaîne d’Union » est une communion
spirituelle collective réalisée par les Frères présents, liés physiquement et
immatériellement par l’âme et le cœur des uns et des autres. C’est cette
conjonction particulière que l’on nomme égrégore. Elle provoque
l’ébranlement vibratoire d’une énergie « spiritueuse » par la réalisation
du triple cercle symbolique, par la chaîne constituée aux trois niveaux et
plans particuliers.
Tentons d'expliquer ce point de vue !
Les pieds se touchant les uns les autres réalisent le premier niveau de contact,
celui de la communauté de l’incorporisation de l’esprit dans la chair, de
l’identité de quête vers la lumière à travers le parcours terrestre, comme celui
du même devoir d’accomplissement personnel.
Les mains nues se tenant les unes aux autres constituent le deuxième cercle,
celui du renoncement, de la libération des contraintes, de l’affranchissement
des contraires : c’est l’éveil de l’esprit.
Cet acte évoque l’ouverture vers les hommes et le monde. Il indique
la générosité, le don sans contrepartie, les actes à accomplir sans que nous
recherchions le moindre fruit ou quelque bénéfice matériel que ce soit, ni
même la satisfaction d’une récompense morale toujours apte à célébrer une
vanité ou un orgueil trop prompts à s’éveiller. Les mains jointes expriment
notre solidarité, notre identité car, tous, nous sommes créés sur la même
image : celle du Créateur. Le cercle du renoncement apparaît au plan
initiatique comme étant le plus difficile à réaliser et franchir, car il faut parvenir
auparavant à se libérer mentalement de l’activité intellectuelle inhérente à
notre système de valeur occidental établi sur l’avoir et l’être extérieur, et des
diverses contraintes sociales.
Il ne s’agit pas ici d’une liberté physique, mais de la prise de conscience de la
présence vivifiante de ce feu intérieur qui se trouve refoulé, ignoré ou rejeté, et
de la nécessité qu’il y a de se mettre en retrait du monde pour parvenir à
l’exalter souverainement et amorcer le processus de la Quête qui commence
alors.
Vient ensuite le troisième contact de la Chaîne d’Union: celui des esprits ou
des âmes, de la puissance spirituelle, de la lumière du monde sensible, qui
constitue une force particulière d’action fluidique. Ici, l’avis de Christian
Guigue rejoint le point de vue d’Irène Mainguy : à la fois créatrice et
réceptive, la « Chaîne d’Union » remplit auprès du Franc-maçon le double rôle
de bouclier protecteur et d’appareil récepteur d’influences bénéfiques. De
tous les gestes, de tous les rites, la « Chaîne d’Union » est peut-être le plus
important, au point de vue occulte comme au point de vue symbolique.
La « Chaîne d’Union » prend une force considérable si le Vénérable Maître
signale à tous les maillons un but commun, ce vers quoi chacun doit diriger sa
pensée. Pour quelle raison forme-t-on la Chaîne ? Le Vénérable Maître peut la
destiner à un Frère dans la souffrance ou dans la détresse, à un nouvel Initié,
à un Frère passé à l’Orient Éternel. Il peut aussi inviter tous les Frères
participants à prendre conscience d’un évènement important pour la Loge, tel
celui que nous avons vécu le soir de notre première Tenue ici-même dans ce
temple.
Chaque Frère de la Chaîne reprend mentalement le ou les mots prononcés par
le Vénérable Maître en les répétant intérieurement. Tout Frère peut aussi faire
le vide en lui pour devenir « neutre », laisser passer le fluide sans l’affaiblir,
pour ne pas réduire à néant la chaîne ainsi formée.
Lorsque le Vénérable Maître joint une intention particulière à son invocation,
celle-ci revêt une forme solennelle qui, au mieux, peut demeurer dans les
pensées, imprégnée dans chacun au-delà même de l’enceinte du temple.
Tous les chaînons sont égaux : le Vénérable comme l’Apprenti, l’intellectuel
comme le manuel. Tous sont au même diapason en une présence
indispensable à la solidité de la chaîne, responsables individuellement de sa
continuité.
Par la constitution de la « Chaîne d’Union », la puissance magnétique se
diffuse au-delà de chaque participant puisque la Loge, c’est-à-dire l’ensemble
des Frères, ne forme plus qu’un. Tous les enseignements de la Tenue se
synthétisent dans la « Chaîne d’Union » établie justement autour du Tableau
de Loge. Elle est un cercle considéré en son absolu, manifestation de
l’Univers.
Au Rite Écossais Rectifié, la force magnétique ainsi créée a un but précisé par
le Vénérable Maître dans la prière de clôture qu’il récite précisément pendant
la Chaîne d’Union : « … et que la Chaîne d’une amitié parfaite et fraternelle
soit désormais si forte entre nous que rien ne puisse jamais l’altérer ».
L’invocation constitue « l’ouverture » de la chaîne. La « clôture » s’opère en la
rompant, après trois balancements verticaux des bras et en pressant fortement
les mains avant de les lâcher.
Dans certaines Loges, le Vénérable Maître prend parfois l’initiative de dire :
« Rompons la Chaîne d’Union en trois temps, mes Frères, mais que celle de
nos cœurs ne se brise jamais ! ».
Même si elle se tient à la fin de nos Tenues, ne pourrions-nous pas considérer
que la « Chaîne d'Union » occupe une place centrale dans le Travail
maçonnique ? C’est le point de vue de Jacques Tornay, membre de la
Respectable Loge « ALPINA » que je vais à présent vous exposer brièvement.

La Chaîne d'Union : une place centrale


dans le Travail maçonnique
Le premier élément à considérer au sujet de la « Chaîne d’Union », c’est
le cercle, le cercle d'alliance et son riche symbolisme avec ses points de
convergence, ses repères et ses références obligatoires liés à la Tradition.
Parmi ses propriétés à caractère universel, on note l'homogénéité, l'absence
de division – donc l’unité – et une aspiration commune dirigée vers la
perfection de soi et de toute chose.
Les participants tendent à ne former qu’un seul corps, une force unique dans
laquelle convergent les énergies de la terre et du ciel. Le temple convient
particulièrement à cette opération puisqu'il a été bâti en fonction de lois
cosmiques connues et qu’il reflète concrètement en son sommet un univers
sans exclusive.
Ce que nous faisons à ce moment précis de la Tenue, où nous sommes liés
physiquement l’un à l’autre par la chaleur de nos mains, est désigné par la
voûte immensément céleste au-dessus de nos têtes, espace démesuré que
l’on imagine peuplé d’astres différents de par leur nature, leur composition,
leurs fonctions et leur mouvement perpétuel. Les uns sont le miroir des autres.
L’identification est possible grâce à cette projection hors de soi vers l’illimité. La
division entre le haut et le bas s’abolit d’elle-même et l’individu regagne pour
un instant sa pleine intégrité.
Il est relativement facile de s’abîmer dans l’infini ; il l’est moins de se pencher
sur son Frère avec la sollicitude que nous lui devons. Sur ce plan très tactile de
la chaîne, les divisions n’existent pas non plus car nous voici réunis, solidaires,
en nos grades et qualités, chacun nanti de son parcours de vie aussi différent
qu’une étoile l’est de sa voisine. Doigts et paumes apportent et transmettent
une confiance qui anime le cercle.
Ainsi, au terme d’une Tenue qui nous a demandé un effort d’attention, voilà
que la « Chaîne d’Union » exige de chacun un effort encore plus grand,
un recueillement actif et une réflexion d’autant plus profonde qu’elle sera de
courte durée ! Et nous nous en souvenons longtemps après la sortie du
temple. Il n’est sans doute pas inutile de rappeler que si la « Chaîne d’Union »
s’enracine dans le carré long de nos rencontres et nous concerne en premier
lieu, elle doit aller plus loin et englober l’humanité, où trop d’êtres anonymes et
inconnus ont besoin de fraternité, ne serait-ce qu’en pensée. Mais, pour cela
nous devons absolument croire au pouvoir des ondes bienfaisantes.
Pour conclure, du moins,
provisoirement…
Permettez-moi à présent de conclure, du moins, encore une fois,
provisoirement ! Lorsque le Récipiendaire apprend qu’il vient d’être admis dans
la Franc-maçonnerie, il est invité à entrer dans la « Chaîne d’Union ». C’est
sans doute bien plus qu’un simple signe que le nouveau Frère découvre
intuitivement dans cette cérémonie rituelle : il reçoit la révélation d’un message
de fraternité universelle transmis par ses Frères.
La fraternité implique les notions de partage, de loyauté, de fidélité et
d’amour entre les êtres humains, entre les membres d’une société en
particulier la nôtre. La fraternité n’est pas forcément innée mais la structure de
la Loge maçonnique est favorable à l’épanouissement fraternel et, par
conséquent, propice aux développements de qualités telles que la charité,
l’indulgence, l’humilité, la fidélité, la tolérance.
Le Frère Apprenti, cherchant et travailleur, parviendra à assimiler, à
perfectionner ces valeurs en faisant preuve d’abnégation, en abandonnant ses
convictions pour se mettre entièrement à l’écoute de l’autre et se remettre
constamment en question, pour progresser lui-même et ensuite pour le
rayonnement de sa Loge et de la Franc-maçonnerie.
Par ce geste rituel que constitue la « Chaîne d’Union », la Franc-maçonnerie
nous permet de créer l’unification de l’énergie des Frères. En effet, si lors
d’une Tenue, une énergie, une atmosphère se dégage déjà par l’orientation du
Temple et la disposition des Frères selon leur fonction, cette atmosphère
s’accentuera lors la « Chaîne d’Union » où tous les Frères se donnent la main
en formant idéalement un cercle, symbole d’unité.
Il se dégage alors une puissante énergie. Les Frères transmettent leur
énergie un peu comme en physique les particules dans un accélérateur. De
même, chaque Frère apporte sa propre énergie en même temps qu’il reçoit
celle de ses Frères.
La « Chaîne d’Union » est le moyen charnel de nous rassembler. Elle
symbolise notre unité. Réservée à quelques êtres qui ont traversé des
épreuves rituelles pour en arriver là, la « Chaîne d’Union » corporifie un
instant de cohérence, celui de la fraternité de la Loge vibrant à l’unisson de
celle du ciel.
La « Chaîne d’Union » est pour moi ce lien mystique puissant qui nous
permet instantanément d’aimer de parfaits étrangers. Car c’est à ce moment-là
où véritablement nous nous sentons davantage Frères, que passe une onde
indéfinissable que beaucoup appellent l’égrégore. Puisse cette chaîne
s’allonger à l’infini !
Que nos cœurs se rapprochent en même temps que nos mains ! Que l’amour
fraternel unisse tous les anneaux de cette chaîne que nous formons librement.
Comprenons la grandeur et la beauté de ce symbole. Inspirons-nous de son
sens profond. Cette chaîne nous lie dans le temps comme dans l’espace : elle
nous vient du passé et tend vers l’avenir. Par elle, nous sommes rattachés à la
lignée de nos Frères passés à l’Orient Éternel, nos Maîtres qui la formaient
hier. Par elle, doivent s’unir les Francs-maçons de tous les rites et de tous les
pays. Enrichissons-la de nombreux et solides anneaux et, élevant nos esprits
vers l’idéal de notre Ordre, efforçons-nous de rapprocher tous les hommes par
la fraternité.
R:. F:. A. B.
 

Bibliographie
Baudouin Bernard - Dictionnaire de la Franc-maçonnerie
Editions De Vecchi, Paris, 1995
Berteaux Raoul - La symbolique au grade d'Apprenti
Editions Edimaf, 1986
Boisdenghien Guy - La vocation initiatique de la Franc-maçonnerie
Sentiers de la Tradition - Editions L’Etoile, Bruxelles, 1999
Boucher Jules - La symbolique maçonnique
Editions Dervy, Paris, 1995
Ferré Jean - Dictionnaire symbolique et pratique de la Franc-maçonnerie
Editions Dervy, Paris, 1994
Guigue Christian - La formation maçonnique
Editions Guigue, Mons-en-Baroeul, 1996
Guigue Christian - Les Planches de l’Apprenti
Editions Guigue, Mons-en-Baroeul, 1996
Mainguy Irène - La symbolique maçonnique du troisième millénaire
Editions Dervy, Paris, 2001
Nefontaine Luc - Symboles et symbolisme dans la Franc-maçonnerie,
Tome 2
Editions de l’Université de Bruxelles, Bruxelles, 1997
Onofrio Jean - La Chaîne d’Union
La Maison de Vie, Fuveau, 2006
Plantagenet Edouard E. - Causeries initiatiques pour le Travail en Loge
d'Apprentis
Dervy-Livres, Paris, 1988
Spaeth Marcel - Le symbolisme de la Chaîne d’Union
Editions Detrad, Paris, 1998
Wirth Oswald - La Franc-maçonnerie rendue intelligible à ses adeptes
Tome I « L'Apprenti » - Editions Dervy,  Paris, 1994
 

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