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Les cinq voyages du Compagnon

18 FÉVRIER 2020

4.85/5 (13)

Les cinq voyages du Compagnon : interprétation. Quel est le sens de ces


voyages ? Voici une planche maçonnique au deuxième degré REAA.

L’initiation au deuxième degré consiste en cinq voyages qui


s’accomplissent dextrorsum, chacun étant associé au contenu d’un cartouche :

 le premier voyage s’accomplit avec le maillet et le ciseau ; il est associé


au cartouche des 5 sens,
 le deuxième voyage se fait avec la règle et le levier ; il est associé aux 5
ordres d’architecture,
 le troisième voyage s’effectue avec le fil à plomb et le niveau ; il est
associé aux 7 arts libéraux,
 le quatrième voyage se fait avec l’équerre ; il est associé aux 5 grands
Initiés,
 enfin, le cinquième voyage s’effectue les mains libres ; il est associé au
cartouche « Gloire au Travail ».

Le voyage est l’un des thèmes majeurs du deuxième degré maçonnique. On


pense naturellement au voyage des Compagnons du Devoir (le « Tour de
France ») : l’Apprenti part à la découverte des techniques et des méthodes de
travail, il apprivoise la matière et élargit ses facultés intellectuelles.

Voyager, c’est donc parcourir le monde, se confronter aux autres, s’enrichir et


travailler. Ce sont ces voyages qui permettront à l’Apprenti de devenir
Compagnon.

Il y a donc 5 voyages et 5 cartouches, comme il y a 5 sens, 5 ordres


d’architecture, 5 grands Initiés et 5 branches à l’étoile flamboyante. Le chiffre
5 ponctue l’initiation : il évoque une dimension supplémentaire par rapport au
rythme ternaire de l’Apprenti.

Tentons d’interpréter les cinq voyages du Compagnon franc-maçon.

Voir aussi le rituel d’initiation au grade de Compagnon, 2ème degré


REAA.

Les cinq voyages du Compagnon : interprétation.


Au premier abord, il n’est pas évident de trouver un fil conducteur aux cinq
voyages du Compagnon. Mais à y regarder de plus près, l’enchainement paraît
logique :

 le premier voyage rappelle le travail de base : la taille de la pierre brute,


que l’on peut associer au Connais-toi toi-même,
 le deuxième voyage introduit la notion d’architecture : c’est l’assemblage
des pierres taillées, le début de la construction de l’édifice universel,
 le troisième voyage consiste à parfaire l’édifice en faisant appel à
différentes techniques et savoir-faire ; le thème est la Connaissance,
 le quatrième voyage évoque un travail de vérification à l’aide de
l’équerre ; le thème est la sagesse,
 enfin, le cinquième voyage évoque un aboutissement voire un
couronnement par la sentence « Gloire au Travail ».

Tentons d’aller plus loin.

Le premier voyage du Compagnon.

Ce voyage s’effectue avec le ciseau et le maillet, qui sont les outils de


façonnage par lesquels l’Apprenti dégrossit la pierre brute (lui-même), dans une
logique de connaissance de soi.

En effet, la connaissance de soi reste le point de départ de la démarche : il faut


sans cesse retourner dans le cabinet de réflexion et répéter l’effort qui consiste
à plonger en soi-même, à visiter sa propre matière pour opérer un tri, un
discernement.

Une fois débarrassée de ses imperfections, la pierre brute devenue cubique


pourra trouver sa place dans l’édifice. Autrement dit, l’introspection permet à
l’individu de comprendre qui il est, à savoir un être humain égal à tous les êtres
humains. Cette démarche nous permet de voir au-delà des fausses évidences ;
elle permet de dépasser notre orgueil et nos passions.

Ce voyage est associé au cartouche des cinq sens, comme pour questionner la
nature de nos perceptions. En effet, ce que nous voyons, entendons ou sentons
ne doit pas être pris pour la réalité : nous devons nous méfier de nos
propres perceptions.

Le deuxième voyage.

Ce voyage s’effectue avec la règle et le levier.

Le levier démultiplie la force et permet de déplacer les pierres destinées à


l’érection du Temple universel. C’est l’instrument actif par excellence, qui doit
être complété de la règle qui, représentant la loi morale, nous préserve de
l’ambition et du fanatisme.
La règle, c’est encore le respect de l’ordre, ici l’ordre d’architecture. En effet,
l’édifice que nous commençons à construire doit respecter un modèle, un style,
un idéal.

Rappelons les 5 ordres d’architecture inscrits sur le cartouche du deuxième


voyage :

 dorique (associé à la Force et au Premier surveillant),


 ionique (associé à la Sagesse et au Vénérable Maître),
 corinthien (associé à la Beauté et au Second Surveillant),
 toscan,
 composite.

Ainsi, Sagesse, Force et Beauté président à la construction de notre édifice


intérieur autant qu’à celle de l’édifice de l’humanité. Le Temple doit reposer sur
des valeurs inaltérables : il est de notre devoir de les cultiver.

Le troisième voyage.

Le troisième voyage du Compagnon s’effectue avec le fil à plomb et le niveau ;


il est associé aux sept arts libéraux, à savoir la grammaire, la rhétorique, la
logique, l’arithmétique, la géométrie, la musique et l’astronomie.

Le fait d’associer le fil à plomb (outil de contrôle de l’axe d’élévation) et


le niveau (outil de contrôle de la stabilité) véhicule un symbolisme fort :
l’harmonisation du vertical et de l’horizontal suggère un équilibre mais aussi
un point de correspondance entre le haut et le bas, l’humain et le divin, la
matière et l’esprit, le physique et le spirituel. Ce centre constitue sans doute la
clé des mystères (voir aussi le symbolisme de la croix).

Quant aux arts libéraux, ils représentent dès l’Antiquité les connaissances que
l’Homme peut acquérir. Ces disciplines sacrées sont de deux sortes :

 le trivium (grammaire, rhétorique, logique) rassemble les outils de


langage et de raisonnement indispensables à la pratique des arts et des
sciences,
 le quadrivium (arithmétique, géométrie, musique, astronomie) regroupe
les arts et sciences qui permettent d’accéder aux lois de l’harmonie
cosmique.

Ces 7 arts libéraux sont le moyen d’accéder à la Connaissance à partir de la


matière : ils constituent une voie d’élévation sur des bases solides, ils
réconcilient là encore le physique et le spirituel.

Le quatrième voyage.

Le quatrième voyage du Compagnon se fait équerre en main ; il est associé aux


cinq grands Initiés : Moïse, Pythagore, Socrate, Jésus et Confucius.

L’équerre est l’outil de contrôle de l’angle droit : elle permet la vérification,


voire la rectification, ce qui rappelle le Rectificando de
l’acronyme V.I.T.R.I.O.L.

Le maniement de l’équerre demande une constante remise en question : voilà en


quoi consiste la sagesse des Grands Initiés. Car on ne peut avancer sans reculer,
on ne peut construire sans se déconstruire, on ne peut trouver sans abandonner :
tel est l’enseignement des grandes traditions de sagesse universelle.

Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien.


Socrate

Le chemin qui avance semble reculer.


Lao-Tseu

Ainsi l’équerre nous recentre, nous réharmonise, nous protège de nous-même.

Le cinquième voyage du Compagnon franc-maçon.

Le cinquième voyage du Compagnon s’effectue les mains libres. Il se conclut


par la révélation du cartouche « Gloire au Travail » qui précède la révélation de
l’étoile flamboyante, symbole de l’homme accompli.
Ce cinquième voyage constitue un aboutissement, non pas dans le sens d’une
victoire définitive, mais par le fait que l’initié a compris la démarche
maçonnique.

Cette démarche, cette méthode, c’est le travail. Autrement dit, les progrès ne
peuvent apparaître qu’au cours de l’effort. Cesser le travail, c’est retomber dans
l’erreur et l’illusion, c’est voir la Connaissance s’éloigner. Ainsi, rien n’est
définitivement acquis. C’est pourquoi l’effort doit être constant, la remise en
cause permanente, la lutte continuelle : telle est la condition de l’accès à
la liberté.

Ce cinquième voyage est accompli sans outil, comme pour montrer que seule la
volonté permet de progresser : on ne pourra s’appuyer sur rien d’autre que soi-
même.

Conclusion sur les cinq voyages du Compagnon.


Se connaître, cultiver des valeurs et un idéal, travailler dans la Justice et
l’équilibre, avancer vers la Connaissance et la sagesse en rectifiant constamment
sa trajectoire dans le monde, voilà ce que nous propose le rituel d’initiation au
Deuxième degré.

Le Compagnon dispose pour cela de tous les outils possibles. Mais seule la
ferme volonté de progresser lui ouvrira les portes de la sagesse et de la
Connaissance.

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