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Chapitre IV

Les cours d’eau

I – Notion de cycle de l’eau

L’eau est le seul corps naturellement présent à la surface de la Terre sous ses trois états.
L’essentiel de l’eau terrestre est de l’eau salée occupant le volume des océans et des mers
marginales (environ 1340.106 Km3). L’eau douce ne représente que 3% du volume des eaux
salées. Elle se retrouve essentiellement sous forme de glace continentale et pour le reste sous
forme d’eau souterraine (tabl. 1).
Sous ses trois états, l’eau participe d’un vaste cycle (fig. 30). Le processus endothermique
d’évaporation se produit essentiellement à la surface des océans. La vapeur d’eau est transportée
au gré des vents, jusqu’au moment où le seuil de saturation est atteint. Il se forme par
condensation des gouttes d’eau ou des cristaux de neige, avec libération d’énergie dans la
troposphère.

Tableau 1 : Principaux réservoirs d’eau sur Terre (d’après P.H. Gleick, 1996 ; in S. Marshak -
Terre, portrait d’une planète- 2è édition 2014)
Réservoir d’eau Volume (Km3) % de l’eau % de l’eau douce
totale
Océans et mers 1 338 000 000 96,5 -
Glaciers, calottes glaciaires, 24 064 000 2,05 68,7
neige
Eaux salées souterraines 12 870 000 0,76 -
Eaux douces souterraines 10 500 000 0,94 30,1
Pergélisol 300 000 0,022 0,86
Lacs d’eau douce 91 000 0,007 0,26
Lacs salées 85 400 0,006 -
Humidité du sol 16 500 0,001 0,05
Atmosphère 12 900 0,001 0,04
Marécages 11 470 0,0008 0,03
Fleuves et rivières 2 120 0,0002 0,006
Organismes vivants 1 120 0,0001 0,003

II – Actions des eaux de ruissellement

La destinée de l’eau de pluie atteignant le sol est triple :


- l’infiltration,
- le ruissellement,
- l’évaporation (à partir de surfaces d’eau libre) et l’évapotranspiration (par la végétation).
L’action des eaux de ruissellement ou eaux sauvages dépend moins de la pluviosité moyenne
que de la quantité d’eau précipitée dans un minimum de temps. Les pluies d’orages font ainsi
des eaux de ruissellement l’agent le plus actif de l’érosion des continents.
Avant le ruissellement, il y a l’impact des gouttes d’eau de pluie sur le sol nu. Il provoque
l’érosion pluviale ou splash très active dans les savanes et sur les sols de culture (dans la région
de Dapaong, on connaît des impacts de gouttes de pluies précambriennes fossilisées dans les
sédiments de séquences inférieures du bassin des Volta). Elle dépend de plusieurs facteurs
comme la puissance des jets, la pente, la densité sèche, la perméabilité, la croûte de battance, la
présence de végétation.

Fig. 30 : Cycle de l’eau

1 – Le ruissellement en terrain homogène

– le ravinement
En terrain argileux, marneux ou schisteux, les eaux sauvages élargissent progressivement les
fissures en rigoles puis en chenaux parallèles qui fusionnent après et provoquent par recul
l’érosion régressive. Ce ravinement est à l’origine de paysages de « bad-lands » (fig. 31).

– Les lapiez
En pays calcaires, certains plateaux sont creusés de sillons profonds (centimétriques à
métriques) formant un réseau correspondant aux diaclases : ce sont des lapiez ou lapiaz.

2 - Le ruissellement en terrain hétérogène

Les eaux sauvages ont tendance à évacuer les matériaux les plus fins, les plus meubles ou les
plus solubles pour laisser en saillie les parties résistantes ou insolubles.
- Les cheminées de fées (fig. 32) apparaissent surtout dans les dépôts morainiques ou
volcaniques à forte hétérométrie. Leur développement est dû à une érosion linéaire liée au
ruissellement et non à la pluie (alignement des cheminées sur les crêtes de ravins parallèles).
- Les chaos des régions granitiques sont dus à l’entraînement de la matrice argileuse de l’arène
dégageant les boules non altérées, empilées en désordre.
- Les édifices volcaniques résultent du dégagement des anciennes cheminées ou necks, des
murailles de laves ou dykes.
- Les paysages ruiniformes se développent grâce à la différence de dureté des roches (exemple
des ruines quartzitiques d’Alédjo).
Fig. 31 : Paysage de bad-lands

Fig. 32 : cheminée de fées


III – Action érosive des cours d’eau

Les eaux de pluie, après avoir ruisselé, se rassemblent dans un chenal bien délimité appelé
torrent (temporaire), rivière ou fleuve (permanent).

1 – Quelques notions d’hydrodynamique

* Le débit liquide d’un cours d’eau est le volume d’eau traversant sa section pendant l’unité de
temps. La baisse du débit constitue l’étiage. Au contraire son augmentation donne les crues.
Le débit moyen n’est pas déterminant dans l’activité géologique, mais le débit maximal le plus
fréquent (crues).
* Le débit solide ou charge est la quantité de matériel qui traverse la section pendant l’unité de
temps (40Kg/s soit environ 4000 t / j pour le Rhône, France).
* La capacité est le débit solide maximal.
*L’énergie développée par un cours d’eau, c’est-à-dire sa potentialité d’érosion est
proportionnelle à son débit et au carré de sa vitesse : e = 1/2mv2.
*Théoriquement la vitesse d’écoulement devrait être un mouvement uniformément accéléré,
mais intervient un coefficient de rugosité C, le rayon hydraulique R et la pente I ; V = C RI .
Il existe dans un cours d’eau plusieurs types d’écoulement :
- l’écoulement laminaire (tranquille, en nappes parallèles donnant des surfaces lisses) ;
- l’écoulement turbulent (les filets d’eau s’entrecroisent et des tourbillons apparaissent
notamment provoqués par la présence d’obstacles comme les piles des ponts. L’affouillement
du lit qui en résulte peut être un facteur d’instabilité du pont) ;
- l’écoulement par chute (caractérisé par des jets animés d’une grande vitesse ce qui confère à
l’eau une rigidité avoisinant celle des solides).
*La capacité et la compétence sont fonctions de la vitesse et du type d’écoulement. Les
substances insolubles peuvent être transportées par flottaisons si leur densité est inférieure à 1,
par suspension dans la masse liquide, par roulement, saltation ou glissement au voisinage du
fond (fig. 33).
Fig. 33 : Modes de transport dans un cours d’eau

- La vitesse de sédimentation V, d’une particule en suspension répond à la loi de Stokes :

2 2 d-d'
Vs = r g
9 
(r = dimension de la particule, (d – d’) = différence entre les densités de la particule et du fluide,
g = accélération de la pesanteur,  = viscosité).
En fonction de la vitesse du courant et de la dimension des particules, Hjulström a établi un
diagramme délimitant les trois domaines de géodynamique externe : érosion, transport,
sédimentation (fig. 34).

Bassin de
réception
A
Chenal
d’écoulement

Point d’inflexion
Point fixe
Cône de déjection

Fig. 35 : Différentes parties du


Fig. 34 : Diagramme érosion – transport – cours d’un torrent
sédimentation (d’après Hjulström)
Une particule solide est retenue en place par son poids et la somme des forces de liaison avec
les particules voisines (Fp). La force du courant (Fc) ne peut entraîner cette particule que si Fp
est inférieure à Fc. L’érosion est donc fonction de la taille des particules et de la vitesse du
courant.
Courbe A : vitesse minimale nécessaire pour enlever et transporter une particule de taille
donnée. On constate qu’il faut une vitesse élevée pour éroder les particules de petite taille à
cause de leurs forces de liaison très importantes.
Courbe B : vitesse maximale d’un courant nécessaire pour déposer une particule d’une taille
donnée. Elle ne commence pas à zéro puisque la vitesse de sédimentation des particules fines
est négligeable.
Le domaine entre les deux courbes correspond au domaine des vitesses pour lesquelles des
particules érodées continuent à être transportées.

2 – Les torrents

Un torrent comprend trois parties (fig. 35) :


- le bassin de réception qui est le lieu de rassemblement des eaux de ruissellement et où
prédomine l’érosion ;
- le chenal d’écoulement, étroit, en V aigu, rectiligne et à pente forte, sans affluent, avec érosion
mais surtout transport.
- le cône de déjection correspondant au lieu essentiel de dépôts appelés colluvions.
Les quelques modalités d’action des torrents sont : l’érosion régressive (creusement qui se fait
en remontant à partir d’un point fixe), l’évolution du profil longitudinal vers une courbe
d’équilibre concave ou profil d’équilibre (fig. 36). L’érosion régressive est plus rapide si la
pente initiale est importante et le débit plus abondant.

Fig. 36 : Profil longitudinal et profils transversaux d’un torrent

Le moyen le plus efficace de combattre l’action dévastatrice des torrents est de respecter le
couvert végétal ou de le rétablir (reboisement), de manière à éliminer le ruissellement.

3 – Les cours d’eau permanents

Ils forment un réseau hiérarchisé (bassin hydrologique) de rivières convergent vers un fleuve
qui peut soit se diriger vers la mer (exoréisme) ou aboutir à un lac ou lagune (endoréisme). Les
eaux des rivières représentent 0,0001% des réserves mais leur action est fondamentale dans la
géomorphologie des surfaces continentales.

a) – L’érosion régressive

A la recherche de leur profil d’équilibre, les cours d’eau creusent les vallées par érosion
régressive. Ce creusement remonte le versant, fait reculer la source ce qui entraîne le
phénomène de capture.
On appelle capture le détournement de la partie amont d’un cours d’eau par un autre dont la
tête recule par suite d’une érosion (régressive) plus intense. Ex. : capture du Niger, capture de
la Meuse (fig. 37)
Fig. 37 : Exemple de capture : capture Meuse – Moselle

La capture est favorisée par des différences de pentes ou par la superposition de couche
d’inégale dureté.

b) – L’érosion verticale

C’est le creusement du substratum du lit du cours d’eau lui donnant une forme qui dépend de
la nature de la roche. En terrains meubles et homogènes on obtient des profils transversaux en
V. En terrains massifs et dures (calcaires, granites) des lits en U ou canyons et des gorges. On
appelle clue ou cluse une entaille ayant généralement l’aspect d’une gorge assez étroite sur une
courte distance et qui recoupe transversalement une structure plissée. Elle permet à la rivière
de passer d’une vallée à une autre en « défiant » les lois naturelles de disposition géométrique
et structurale des terrains (fig. 38).

Fig. 38 : Cluse ou clue (gorge qui recoupe une structure plissée et permet à la rivière de passer
d’une vallée à une autre)

Sur un substratum dur il se développe des marmites de géants (fig. 39).


Fig. 39 : Développement d’une marmite de géant sur un substratum dur. Les cailloux et les
grains de sables entraînés par l’eau qui tourbillonne dans la cavité du lit, contribuent à
approfondir cette cavité, qui devient ainsi une marmite.

Lorsque le cours d’eau traverse des zones d’inégale dureté, l’affouillement des couches tendres
conduit à la formation des chutes (ex. chutes du Zambèze).
La surimposition ou épigénie se définit lorsque par suite de l’érosion de son lit un cours d’eau
s’enfonce dans son substrat. Par suite du déblaiement des couches tendres il arrive que le cours
d’eau rencontre des couches dures qu’il incise en gorges escarpées.
Il y a antécédence lorsqu’un cours d’eau qui a établi son cours avant un mouvement tectonique,
le maintient en s’enfonçant au fur et à mesure du soulèvement. Il en résulte un cours qui apparaît
mal adapté au relief environnant (cas de la majorité des fleuves himalayens).

c) – L’érosion latérale

Elle est manifeste et maximale en zone de plaine (à pente faible) où le cours d’eau a tendance
à dessiner des sinuosités appelées méandres (fig. 40).

Fig. 40 : Méandres et évolution

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