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L’industrie pharmaceutique par Annick Escoffier d’Attac Aubagne

Les dépenses de médicaments dans le budget de la Sécurité Sociale


représentent 20% des dépenses d’ensemble, c’est le poste qui augmente
le plus rapidement. Est-ce au bénéfice des assurés ? L’industrie
pharmaceutique (ou IPH), rebaptisée par elle-même “Les entreprises du
médicament” (ou LEEM),pratique-t-elle des prix abusifs?

A.Prix des médicaments – Essais cliniques

1)Prix et progrès thérapeutiques


L’OCDE (organisation de coopération et de développement économique)
admet que la hausse des dépenses de santé provient des nouveaux médicaments
plus coûteux. En effet depuis 1975, le budget de la consommation
pharmaceutique des Français s‘est accru de 900%, essentiellement à cause de
l’augmentation du prix des médicaments : le prix moyen d’un médicament a
doublé de 1987 à 1999; les nouveaux médicaments sont vendus 10, 15, 20 fois
plus cher que les précédents , dits de référence, sans avoir un meilleur
service médical rendu c’est-à-dire sans être plus efficaces ou mieux
tolérés ; ce sont pour la plupart de fausses innovations, présentées comme
de vraies nouveautés par l’industrie pharmaceutique pour justifier
l’élévation des prix.Prenons trois exemples:
- L’anti-inflammatoire Celebrex vendu très cher car il permettrait une
meilleure tolérance digestive a les mêmes effets secondaires à long terme
que les anciens anti-inflammatoires (et il aurait en plus des conséquences
au niveau cardiaque, comme le Vioxx qui a été supprimé en 2005).
- Le Copaxone (contre la sclérose en plaques), sorti en 2003, est vendu
1000 euros la boîte de vingt-huit doses quotidiennes sans apporter un
progrès thérapeutique véritable d’après la revue Prescrire (seule revue
médicale française indépendante des Leem.Son objectivité est une rareté
dans la littérature médicale)
- Des nouveaux anti-cancéreux en Amérique sont vendus 40.000 dollars le
traitement pour un mois ;or ils prolongent la vie du patient de cinq mois
environ,bénéfice certes non négligeable mais qui ne représente pas la
révolution thérapeutique qui excuserait un tel prix.

2)Les dépenses de recherche.


L’IPH justifie également le prix élevé de ses nouveaux médicaments en
invoquant le coût exorbitant de la “ recherche et développement” d’un
médicament, qui coûterait selon ses propres estimations 800 millions de
dollars, somme certainement exagérée et qui inclut le plus souvent les
dépenses de marketing.

3)Un peu d’histoire


L’IPH a connu une période de grandes innovations thérapeutiques
(sulfamides, pénicilline, antibiotiques, cortisone, psychotropes) de 1935
aux années 70, période où il n’y avait pas ou peu d’exigences de tests de
toxicité ou de recherche d’effets néfastes, mais ce laxisme a provoqué des
scandales de santé publique, en particulier celui de la Thalidomide,
tranquillisant donné à des femmes enceintes et qui ont accouché d’enfants
mal formés (la toxicité de la Thalidomide est visible sur les embryons de
souris,lapin,poulet singe et invisible sur ceux du rat, or c’est sur cette
seule espèce qu’ont été réalisés les tests!).
Les Etats ont alors imposé l’obligation d’études cliniques en quatre
phases, que les laboratoires ont acceptées à condition d’en être les seuls
maîtres. Les agences du médicament chargées de l’AMM (autorisation de mise
sur le marché) jugent donc d’après les dossiers fournis par les
industriels, sans les contrôler car aucun Etat n’a mis en place des
laboratoires indépendants.
4)Les essais cliniques
Ils doivent amener la preuve que la balance avantages/effets
secondaires est acceptable et que le candidat médicament est plus efficace
qu’un placebo ou le médicament de référence. Mais les études comparatives
avec les médicaments déjà autorisés (moins chers évidemment) ne sont pas
nécessaires en vue d’obtenir l’AMM. Les industriels produisent donc en
majorité des dossiers contenant les essais contre placebo et la balance
positive avantages/effets secondaires, mais sans la comparaison avec les
remèdes anciens ;ainsi peuvent-ils appeler innovation et à ce titre vendre
très cher des médicaments dont le service médical rendu est à peine
supérieur aux précédents (exemple du Vioxx et du Celebrex).

Les quatre phases d’essais cliniques (Cf page 22 du livre Le grand secret
de l’industrie pharmaceutique de Ph.Pignare) coûtent très cher car il faut
réaliser de multiples tests sur des patients volontaires de plus en plus
nombreux. Notons que plus faible est l’apport thérapeutique du candidat-
médicament, plus grand doit être le nombre de patients nécessaire pour
mettre en évidence ce petit apport nouveau,et plus coûteux devient donc
l’essai!

5)Quelques remarques :
-Les études comparatives avec les médicaments déjà existants, si elles ont
été publiées, peuvent être biaisées ( par exemple essai limité à six mois
pour masquer l’inefficacité du traitement d’un an).
-Les industriels évitent les études comparatives sur de longues périodes,
menées sur des populations non sélectionnées dans le cadre de la vie réelle
, en effet elles révèlent des résultats bien différents de ceux du dossier
et moins positifs .
-Les effets secondaires indésirables sont très souvent passés sous silence
ou tempérés auprès des médecins et des agences du médicament. De plus c’est
après de longues années d’utilisation sur des milliers ou des millions de
patients qu’un médicament se révèle éventuellement plus néfaste qu’utile.
-Tous les essais ne sont pas publiés par les industriels qui dévoilent
seulement ceux favorables aux candidats-médicaments. Mais quand des
chercheurs indépendants peuvent avoir accès à toutes les données de ces
essais, ils s’aperçoivent que les résultats sont différents et globalement
inférieurs.
-En France, on compte 130.000 hospitalisations par an pour accident
iatrogène (provoqué par un médicament).
-Certes les études cliniques coûtent très cher, mais les aides des Etats
les financent en partie : les Etats-Unis par exemple ont créé une agence à
cet effet.La recherche publique a joué un rôle essentiel dans la découverte
des antiprotéases contre le sida, mais c’est l’industrie pharmaceutique qui
a réalisé les bénéfices sur leur vente.

Conclusion
Le prix élevé des nouveaux médicaments n’est pas justifié. Il devrait
être fixé en fonction de la réelle valeur ajoutée thérapeutique .La revue
indépendante Prescrire estime que, sur 1996 nouveautés vendues en vingt
ans, sept seulement sont réellement innovantes !! Il faudrait donc plus
d’études auprès de populations non choisies pour les essais cliniques et
plus de suivi après la mise sur le marché.

B.Influence et puissance de l’IPH

Leurs multinationales, en particulier celles des Etats Unis,


soutenues par les politiques ultra-libérales de la mondialisation, ont
acquis une puissance extraordinaire qui concurrence le pouvoir des Etats.
Les gouvernements ne peuvent que capituler devant leurs exigences de prix:
Pfizer (USA) n°1 mondial, menace de se retirer de France si ses prix ne
sont pas acceptés ; naguère, le ministre de la santé Mattéi abolit le
décret, pourtant négocié avec les industriels qui devait baisser de 30% le
prix des nouveaux anti-inflammatoires au bout de trois ans de mise sur le
marché.
Le syndicat de la Médecine Générale et la revue Pratique dénoncent
l’influence majeure de l’IPH sur toute la chaîne de décision depuis les
experts de l’AMM jusqu’aux consommateurs en passant par les prescripteurs
et les pharmaciens, la formation initiale et continue des médecins, la
presse professionnelle ou non. La Recherche ,revue scientifique française
de haut niveau, constate: « La soumission progressive de la littérature
scientifique aux intérêts commerciaux pose la question majeure de la
qualité et de l’indépendance de cette littérature ». Les revues médicales
sont toutes financées par l’IPH sauf Prescrire .
Les experts des agences du médicament sont des personnalités éminentes mais
trop souvent sous l’influence des laboratoires pharmaceutiques, ou liées à
leurs intérêts.
Le rapport de la Cour des Comptes constate : « La quasi-totalité de
l’information reçue par les prescripteurs provient des laboratoires dont
l’intérêt est de promouvoir les médicaments plus chers et multiplier les
ventes ».Le médecin Martin Winkler déclare dans le Monde Diplomatique et
lors de sa chronique sur France-Inter (avant qu’elle ne soit
supprimée!!)que l’influence des Leem sur le corps médical est phénoménale
et “éhontée”.Face à des visiteurs médicaux rompus à toutes les techniques
de marketing, les médecins sont désarmés. Prescrire affirme que les
informations transmises par les visiteurs médicaux sont systématiquement
biaisées. La Recherche affirme que les industriels parviennent à construire
un marché lucratif grâce à des campagnes d’information auprès des
médecins.La stratégie marketing permet d’ancrer une image positive d’un
médicament dépourvu de pertinence clinique.
Les dépenses de promotion et de marketing des groupes pharmaceutiques
atteignent en moyenne 35% de leur budget, soit le double des moyens
accordés à la recherche ! Les laboratoires dépensent environ 20.000 à
25.000€ par an et par médecin pour leur « formation » et leur
« information » (c’est-à-dire le plus souvent en congrès, séminaires,
cadeaux, aides à publication, ..). Est-ce un hasard si en France une
ordonnance compte en moyenne cinq médicaments contre un en Allemagne ou aux
Pays-Bas? Entre 1990 et 2001, les dépenses de médicaments ont crû de 63% en
France (contre 17% en Allemagne et 28% en Italie).
A-t-on entendu parler par les gouvernements de ces chiffres étonnants et
de leurs conséquences sur le “trou de la Sécu”?

L’absence de transparence des agences du médicament, chargées de l’AMM et


de la fixation des prix, est une évidence: quand les experts ne sont pas
d’accord entre eux pour l’AMM, le public n’en sait rien et croit au
consensus sur ce médicament. Cette opacité favorise le poids du lobby
pharmaceutique.

Conclusion
Deux mesures assez simples pourraient être adoptées pour faire baisser
les prix et contrebalancer la formidable influence des lobbies: ouvrir les
commissions des agences du médicament aux journalistes et au public, rendre
obligatoires les études cliniques de tous les nouveaux médicaments par
rapport aux anciens.
Le marché économique du médicament est faussé car il n’y a pas d’équilibre
entre l’offre très importante, bien organisée et puissante et la demande
inorganisée.

C.Politiques et stratégies de l’IPH

Les industriels de la pharmacie sont des financiers, sans


préoccupation éthique, pour qui un médicament représente une marchandise
comme les autres, soumise à la loi du marché. L’IPH est entraînée dans une
course où la rentabilité (jusqu’ici la plus élevée de toutes les
industries) doit être forte et immédiate, et les échecs bannis, afin de
rapporter des dividendes aux actionnaires, pour qu’ils continuent à
investir dans une recherche qui coûte de plus en plus cher mais qui est en
plein déclin. Elle est en phase de rendement décroissant, c’est ce
ralentissement que paient, pour compenser, les assurés sociaux et les
malades du Sud.
En 2000, elle intente un procès à l’Afrique du Sud, qui a voté une loi
pour réduire le prix des médicaments anti-sida (quatre millions de
personnes atteintes dans ce pays). La révolte de l’opinion publique
internationale la force à abandonner la procédure. Depuis elle a changé sa
communication devenue plus éthique, mais sa politique de prix élevés reste
la même pour les pays en voie de développement( PED). Elle partage ainsi la
terrible responsabilité de contribuer à la mort de personnes qui décèdent
par millions,faute d’avoir accès aux médicaments efficaces mais trop chers
pour eux.
Le déclin de l’innovation pharmaceutique et la stagnation de l’invention
effraient les industriels car la découverte de molécules innovantes est une
question de vie ou de mort pour leurs laboratoires. Cette situation les
rend parfois capables du pire, comme ce procès intenté à l’Afrique du Sud
ou les essais thérapeutiques pratiqués sur les populations du Tiers-Monde,
enfants compris,dans des conditions d’information,de morale et de sécurité
réduites au minimum; là-bas, les éventuels dégâts humains ne leur coûtent
pas très cher.
Le choix de recherches sur tel ou tel autre médicament est fait par des
financiers qui privilégient le projet le plus rentable dans les pays les
plus rentables, c’est à dire là où les patients sont solvables et nombreux:
Amérique du nord, Europe, Japon ; il s’agit de médicaments relatifs au
bien-être, au meilleur vieillissement, à l’obésité, à la dépression ...
comme le Prozac ou le Viagra. Ils négligent désormais les maladies
infectieuses, que l’on rencontre surtout au Sud. Ils oublient les maladies
dites orphelines( c’est à dire celles qui atteignent un petit nombre de
malades) et celles qui déciment les PED (paludisme,leishmaniose, maladie
du sommeil....) car les patients sont peu nombreux ou trop pauvres pour
acheter leurs remèdes. Ils recherchent le “blockbuster” ,c’est le
médicament qui rapporte plus de 1 milliard de dollars. Ni la sécurité
sociale qui finance les remboursements, ni les citoyens, ni les patients
ne participent à ces choix. Ils s’intéressent essentiellemnt aux
pathologies qui leur offrent un marché important et mènent une stricte
politique financière!! Mais leurs discours en appellent à l’éthique :
« Les profits d’aujourd’hui sont les médicaments de demain », justifiant
l’augmentation du prix des médicaments actuels par la nécessité de gagner
de l’argent pour financer la recherche de médicaments nouveaux.
L’industrie pharmaceutique est affolée par la menace de voir tomber dans
le domaine public la plupart des médicaments anciennement innovants,
susceptibles d’ être copiés et de devenir des génériques qui sont vendus
moins cher et perdent leur nom de marque au profit de celui de la molécule.
Dix-neuf des vingt médicaments les plus vendus sont concernés en France.
Les laboratoires livrent une course contre la montre pour trouver de
nouveaux médicaments ,fausses innovations au bénéfice infinitésimal; pour
garder le plus longtemps possible le monopole des ventes, grâce aux
brevets; pour augmenter les quantités vendues. Ils vont même jusqu’à
“inventer” des maladies en jouant sur la peur (le docteur Knock a fait
école)et créer ainsi un marché juteux. Le Monde diplomatique d’avril 2006
dénonce leurs “stratégies marketing (qui) ciblent dorénavant les bien-
portants de manière agressive. Les hauts et les bas de la vie de tous les
jours sont devenus des troubles mentaux, des plaintes somme toute communes
sont transformées en affections effrayantes et de plus en plus de gens
ordinaires sont métamorphosés en malades” (Lire la Recherche d’août 2004
concernant les troubles obsessionnels compulsifs ou l’hyperactivité des
enfants soignée avec la Ritaline). Pour découvrir de nouvelles molécules,
ils organisent le pillage de la biodiversité des pays du Sud et brevètent
des plantes qui ne leur appartiennent pas, par exemple l’ayahuasca (plante
culte des Indiens d’Amazonie) ou le neem (appelé aussi margousier).
Les fusions-concentrations sont faites ,elles-aussi, pour garder un niveau
élevé de profits. Nombreuses par le passé, elles continuent avec Sanofi-
Synthelabo/Aventis car elles permettent des économies d’échelle grâce à la
concentration de la recherche et du marketing, mais les victimes en sont
les salariés et les équipes de chercheurs qui ,une fois cassées, mettront
des mois voire des années à reconstruire leur unité et leur efficacité.
Aventis a fermé dans la région parisienne son centre de maladies
infectieuses, nous avons déjà parlé de la paralysie de cette recherche. La
vague des fusions n’a pas enrayé le déclin des innovations et ne crée pas
de richesses, mais accroît la force de frappe commerciale et la pression
sur les gouvernements.

D.Deux stratégies particulièrement odieuses

Deux stratégies des laboratoires pharmaceutiques pour enrayer leur


déclin et la chute de leurs profits peuvent se révéler criminelles envers
les populations pauvres du Tiers-monde qu’ils privent d’accès aux
médicaments.

1°)L’OMC et les brevets


Sous leur pression, l’Organisation mondiale du Commerce(OMC) a rédigé
en 1994 l’ADPIC (Accord sur les droits de propriété intellectuelle):tous
les Etats membres de l’OMC ont accepté l’adoption de cette nouvelle
législation qui prolonge à vingt ans la durée de validité des brevets sur
les médicaments (auparavant cinq à quinze ans selon les pays), tout en
laissant libre la fixation des prix. Avant l’ADPIC, chaque Etat avait sa
propre législation. Voici un bel exemple de l’intervention de l’OMC dans
notre vie quotidienne ! En effet, l’ADPIC provoque une augmentation
considérable des prix qui ruine les systèmes de santé nationaux et décime
les populations du Sud car les médicaments leur deviennent inaccessibles
(5% seulement des 40 millions de personnes atteintes du sida sont soignées
et toutes ou presque se trouvent au Nord!).
L’IPH et les gouvernements occidentaux invoquent deux arguments pour
justifier cette politique odieuse.D’une part,les firmes assurent qu’elles
ne peuvent faire autrement sans compromettre les recherches de demain ;or
nous avons vu quelle recherche, celle favorable aux populations aisées,
qui laisse ainsi mourir les populations pauvres du Sud, pour garantir une
meilleure santé et un meilleur vieillissement au Nord, tout en enrichissant
les actionnaires.Choix CRIMINEL et cynique auquel s’ajoute le mensonge
puisque le marketing et la promotion coûtent plus cher dans leur budget
que la recherche.
D’autre part, dit l’IPH, puisqu’elle opère dans un marché global, elle a
besoin d’un système global de brevets et d’un prix mondial unique, pour
éviter que les bas prix du Sud n’influencent à la baisse les prix élevés du
Nord; en effet, un médicament fabriqué avec la protection d’un brevet peut
coûter 12.000 dollars, mais être vendu 400 quand il est fabriqué par une
entreprise du Sud qui fait fi du brevet ! La préoccupation première est
bien mercantile et non pas sanitaire.
Les conférences ministérielles de l’OMC à Doha et Cancun en 2001 et 2003,
l’intervention de l’ONU en 2000 et 2001 ont laissé croire que cette
situation inique allait s’améliorer et que les pays du Sud pourraient
fabriquer des médicaments à bas prix, au moins contre le sida, le paludisme
et la tuberculose, les trois grandes pandémies. En réalité l’IPH a tout
fait pour bloquer les accords et multiplier les contraintes qui empêchent
cette production dans les pays du sud. A grand renfort de publicité et de
beaux discours, elle préfère mettre en avant quelques actions charitables
qui touchent en vérité très peu de personnes.Dans les faits l’ADPIC est
toujours opérationnel: l’accord de Cancun obtenu avec l’aide des Etats-Unis
et de la Commission européenne et malgré l’opposition des pays de l’ACP
(Afrique,Caraïbes et Pacifique) n’a rien amélioré et menace au contraire
l’existence des médicaments génériques car il institue un encadrement
mondial de leur marché limitant leur fabrication et leur exportation. Les
Etats-Unis et l’Europe ont fait céder les pays de l’ACP grâce à des
menaces, un peu de corruption et d’autres moyens aussi indignes que
révoltants quand il s’agit de vie ou de mort pour des millions de
personnes.
2°).Lutte contre les génériques
L’industrie des génériques est encore très peu développée. Elle
manque de moyens financiers, pour leur promotion notamment; elle inquiète
pourtant beaucoup les grands laboratoires car certains pays du Tiers-monde
possèdent déjà leurs propres usines de fabrication et représentent une
grave menace ; en effet, si les médicaments qui tombent dans le domaine
public à l’extinction du brevet ne sont pas remplacés par de nouveaux
produits plus performants, les génériques envahiront le marché. Le sort de
la plupart des firmes est suspendu à quelques médicaments « blockbuster »
protégés par des brevets. Ainsi Synthelabo a été absorbé par Sanofi quand
il a été obligé de retirer son produit-phare Anaxyl (anxiolytique) à cause
de ses dangereux effets secondaires. Aux Etats-Unis la vente des génériques
représente près de 50% du marché total (la France présente en ce domaine un
grand retard). Sur une liste, élaborée par l’OMS, de 270 médicaments
indispensables, , 265 sont « génériquables ». L’IPH tremble à juste titre
pour ses profits. Elle se bat donc pour obtenir un allongement de la durée
légale des brevets et organise la résistance aux génériques .Voici quelques
exemples :
les laboratoires deviennent eux-mêmes producteurs de génériques. Ils
empêchent ainsi d’autres productions de génériques à plus bas prix; ou ils
portent plainte contre les « génériqueurs » et gagnent ainsi plusieurs mois
de sursis, pendant lesquels ils continuent la vente à prix fort; ou ils
interdisent l’accès à leurs études cliniques, obligeant ainsi le
génériqueur à procéder à de mêmes études fort chères et inutiles.
Ils jouissent aussi de la protection des gouvernements.L’Europe a ainsi
adopté le règlement qui proroge de cinq ans les droits liés aux brevets.

Et pendant ce temps meurent des milliers ou des millions d’êtres humains:


30.000 par jour à cause de maladies infectieuses pour lesquelles existent
des traitements efficaces.

E.Conclusion

«Il faut réorienter l’IPH vers des objectifs compatibles avec les
améliorations de la santé et de la qualité de vie plutôt qu’avec la seule
expansion économique et le profit »((Germain Velasquez,coordinateur à
l’Organisation Mondiale de la Santé).
Mais attaquer l’IPH ne sert à rien si on ne crée pas autre chose, en
partant d’idées simples : à qui appartient le médicament, à son
inventeur ? au fabriquant ? au patient qui en a besoin ? ou à
l’intermédiaire qui l’achète et le revend ?
Pour nous, c’est un bien commun de l’humanité et il n’est pas une
marchandise. Les priorités pour la recherche devraient être fixées, non par
rapport au marché mais en fonction des besoins réels de santé, par l’OMS
ou un consortium public international. Pour financer cette institution qui
prendrait en charge la recherche, pourraient être créés un impôt sur toutes
les ventes mondiales pratiquées par l’IPH et/ou une taxe Tobin, fer de
lance d’Attac, sur les mouvements de la spéculation financière.

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Sources : débats sur France Inter, France Culture, revue La Recherche,
les livres de Philippe Pignare, des articles du Monde Diplomatique ou de
revues mutualistes et certaines chroniques de M.Winkler sur France Inter …

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