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La moitié des nouveaux médicaments mis sur le marché n'ont pas de valeur

thérapeutique ajoutée

Date de publication : 21 juillet 2023

Lison Segue indique dans Le Monde que « des chercheurs se sont penchés sur tous les
médicaments mis sur les marchés américain et européen entre 2011 et 2020 et leur
évaluation par la Haute Autorité de santé et son équivalent allemand ».
La journaliste observe ainsi que « moins de la moitié des médicaments approuvés par les
autorités européenne et américaine entre 2011 et 2020 ont une valeur ajoutée substantielle
pour leur première indication thérapeutique – maladie ou symptômes pour lesquels ils sont
développés – par rapport aux produits déjà existants ».
« Les secondes indications thérapeutiques, obtenues ensuite et qui élargissent le champ
d’application de la molécule, sont quant à elles 37% moins susceptibles d’être à forte valeur
thérapeutique que la première indication », relève-t-elle.
Lison Segue explique que cette étude, parue dans le British Medical Journal et menée par la
Pre Kerstin Vokinger (université de Zurich, Suisse), « s’appuie sur les évaluations des
médicaments réalisées par la HAS en France et celles du Comité mixte fédéral, son équivalent
allemand. [Les chercheurs] ont analysé les rapports d’évaluations de 149 indications
thérapeutiques initiales et 386 indications thérapeutiques complémentaires de produits
approuvés par la FDA et/ou par l’EMA. La majorité concerne des traitements anticancéreux
(58%). Suivent ensuite les immunomodulateurs (10%) et les anti-infectieux (9%) ».
La journaliste poursuit : « Comme le soulignent les auteurs […] il est «essentiel que les
médicaments anticancéreux approuvés aient une grande valeur thérapeutique pour les
patients qu’ils sont censés soigner». Pourtant, leurs conclusions montrent une réalité quelque
peu différente, notamment en ce qui concerne les indications supplémentaires ».
Eric Baseilhac, directeur accès, économie et export du syndicat Les Entreprises du
médicament (LEEM), précise : « Beaucoup de traitements anticancéreux sont développés
d’abord en dernière ligne de la stratégie thérapeutique, lorsque tous les traitements existants
ont cessé d’être efficaces : il est plus facile à ce stade de démontrer une augmentation de la
survie et donc d’obtenir une très bonne note ».
« Les indications qui viendront par la suite concernent les premières lignes de traitement […],
pour lesquelles démontrer un impact sur la survie est évidemment difficile, voire impossible, à
court terme. Il leur sera plus difficile d’obtenir une très bonne note », continue le
responsable.
Lison Segue remarque que « certains médicaments présumés «d’innovation thérapeutique»
– et pouvant potentiellement aider les patients en situation d’impasse thérapeutique – sont
enregistrés en procédure accélérée par l’EMA, après un nombre limité d’essais cliniques.
Ainsi, au moment de l’évaluation, la HAS ne dispose pas toujours d’études comparatives,
randomisées, pour conclure que ces traitements ont une valeur thérapeutique ajoutée ».
La journaliste note en outre que « beaucoup de médicaments nouvellement autorisés sur le
marché – qu’il s’agisse de leur primo-inscription ou d’une extension d’indications – ne sont
pas vraiment nouveaux ».
Dominique Deplanque, président de la Société française de pharmacologie et de
thérapeutique (SFPT), explique que « ce sont les médicaments d’une même classe. Ils sont
appelés des “me too”, c’est-à-dire qu’ils sont assez semblables à ceux déjà existants sur le
marché, et leur but principal est parfois de grignoter quelques parts de marché ».
Lison Segue relève que « pour ces molécules, la valeur thérapeutique ajoutée est
logiquement faible, voire absente. C’est, par exemple, le cas des inhibiteurs de la pompe à
proton, utilisés pour réduire la sécrétion d’acide gastrique, dont la molécule initiale,
l’oméprazole, a été quelque peu modifiée pour proposer quatre autres copies sans valeur
thérapeutique ajoutée, comme l’ésoméprazole ou le pantoprazole ».
La journaliste conclut que « cette nouvelle étude évoque en tout cas la nécessité de
transparence auprès du public et des patients ». Florian Naudet, professeur de
thérapeutique à l’université de Rennes, souligne ainsi qu’« un médicament innovant ne veut
pas automatiquement dire qu’il s’agit d’un médicament innovant au plan thérapeutique. Il
faut juste les informer ».

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