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Le schéma narratif et le schéma actantiel :

Outils pour analyser ou construire une histoire


Frédéric Buffa
Droits d'auteur - 2018 Frédéric Buffa
Tous droits réservés
Illustration couverture : Le Petit Chaperon rouge, Gustave Doré
Table des matières

Introduction
À qui s'adresse cet ouvrage ?
Préambule : récit, histoire et narration
Chapitre 1 : Le schéma narratif
Qu'est-ce que le schéma narratif (quinaire) ?
Comment identifier les éléments du schéma narratif ?
Représentation synthétique du schéma narratif
Exemples d'application du schéma narratif
Remarques sur le schéma narratif
L'intérêt du schéma narratif pour les auteurs
Chapitre 2 : Le schéma actantiel
Qu'est-ce que le schéma actantiel ?
Comment identifier les éléments (actants) du schéma actantiel ?
Les trois axes du schéma actantiel
La théorie des trois épreuves
Exemples d'application du schéma actantiel
Application du schéma actantiel à deux archétypes
Remarques sur le schéma actantiel
L'intérêt du schéma actantiel pour les auteurs
Chapitre 3 : Exemples d'application du schéma narratif et du schéma actantiel
Cendrillon
Candide ou l'optimisme, Voltaire
Le dernier jour d'un condamné, Victor Hugo
L'île au trésor, Robert Louis Stevenson
Pour finir...
Introduction

À qui s'adresse cet ouvrage ?


Ce petit livre s'adresse en premier lieu à tous ceux qui souhaitent
utiliser le schéma narratif et le schéma actantiel comme outils d'analyse
littéraire, notamment dans le cadre de travaux scolaires. Il évoque leurs
origines, détaille leurs éléments constitutifs et explique comment les
appliquer à différents textes, tout en fournissant plusieurs exemples.

S'ils conviennent particulièrement aux contes traditionnels à partir


desquels ils ont été conçus, le schéma narratif et le schéma actantiel peuvent
aussi servir à analyser un grand nombre de fictions contemporaines (romans,
nouvelles, films, etc.).
À travers quelques conseils spécifiques, l'ouvrage est également
susceptible d'intéresser les auteurs de fiction débutants qui désirent s'appuyer
sur des schémas éprouvés pour bâtir leurs histoires sur des bases solides.

Toute histoire s'appuie sur une intrigue[1] et des personnages. Alors


que le schéma narratif permet d'explorer la première en exposant sa structure,
le schéma actantiel met en lumière le rôle des seconds et leurs interactions.
Ce sont donc deux outils remarquablement complémentaires pour analyser ou
construire une œuvre de fiction, que nous nous proposons de présenter dans
ce livre.

Préambule : récit, histoire et narration


Avant de décrire le schéma narratif dans le détail, et afin d'en faciliter
la compréhension, il peut s'avérer utile de clarifier au préalable la différence
entre récit, histoire et narration.
Le récit est défini comme un « développement oral ou écrit rapportant
des faits vrais ou imaginaires » par le dictionnaire de français Larousse
(http://www.larousse.fr). Il s'agit donc du signifiant ou du contenant (les mots
d'un discours ou d'un texte, les images et dialogues d'un film) qui raconte les
événements, c'est-à-dire l'histoire.
L'histoire est en effet une succession d'événements et de faits
marquant l'évolution d'un ou plusieurs personnages. Par rapport au récit, c'est
le signifié ou le contenu, ce qui est raconté. Nous verrons au chapitre suivant
que le schéma narratif permet de décomposer le déroulement de l'histoire en
cinq étapes.
Le récit et l'histoire sont imbriqués comme les deux faces d'une même
pièce, mais il peut être utile de différencier leurs temps respectifs. Le récit ne
rapporte pas obligatoirement les événements dans l'ordre chronologique de
l'histoire. Nous y reviendrons dans le chapitre suivant. De plus, le temps du
récit (la mise en texte) ne coïncide généralement pas avec celui de l'histoire
(le déroulement temporel des actions), car il dépend du rythme de la
narration. Le récit peut s'étendre sur plusieurs pages pour décrire un
événement bref (un ralenti) ou, au contraire, résumer en quelques lignes
plusieurs années de l'histoire (un sommaire). Il est même possible de passer
certains pans de l'histoire sous silence (une ellipse). L'auteur ne raconte
jamais toute l'histoire dans le détail, mais seulement quelques morceaux
choisis. Inconsciemment, le cerveau du lecteur se charge de boucher les trous
du récit pour préserver l'illusion de la continuité. Jean-Philippe Arrou-Vignod
compare ce phénomène à la persistance rétinienne qui nous permet de voir un
film continu à partir d'une succession d'images fixes[2].
Le dictionnaire Larousse définit la narration comme une « action de
raconter, d'exposer une suite d'événements sous une forme littéraire »
(http://www.larousse.fr). La narration apparaît comme un « acte producteur »
ou un « acte énonciateur », car elle constitue l'ensemble des procédés utilisés
pour représenter l'histoire. C'est le fait même de raconter et surtout la manière
dont l'histoire est racontée.
En résumé, l'histoire est l'ensemble des événements, le récit ce que
l'on raconte de l'histoire et la narration, la façon dont on la raconte.
À ces trois dimensions correspondent trois entités qu'il convient de ne
pas confondre : l'auteur (à l'origine du récit), le ou les personnages
(protagonistes de l'histoire) et le narrateur (l'instance narrative du récit, celui
qui raconte). Ces divisions ne sont pas absolues, car un auteur peut également
être le narrateur (dans une autobiographie), voire un personnage (cas de
l'autofiction[3]). Le narrateur s'identifie parfois à l'un des personnages de
l'histoire, c'est ce que l'on appelle un récit à « focalisation interne ». On parle
de « focalisation externe » lorsque le narrateur est un observateur externe et
de « focalisation zéro » dans le cas d'un narrateur omniscient.

L'auteur est le créateur tout-puissant du récit, puisque c'est lui qui


choisit les éléments de l'histoire qu'il va rapporter, comment il va les raconter
et dans quel ordre.
Chapitre 1 : Le schéma narratif

Qu'est-ce que le schéma narratif (quinaire) ?


Issu de la linguistique structurale[4] dans les années 1960-1970 et
modélisé par Paul Larivaille[5], le schéma narratif est un outil d'analyse
littéraire qui met l'accent sur l'action. Il fournit une grille de lecture qui
décompose le déroulement d'une histoire en une succession logique et
chronologique de cinq éléments essentiels :

· La situation initiale (ou incipit)

· L'élément déclencheur (ou élément perturbateur)

· Les péripéties (ou les aventures, ou le déroulement)

· Le dénouement

· La situation finale (ou explicit)


Ce modèle est parfois qualifié de « schéma narratif quinaire » ou
« schéma quinaire », en raison de ses cinq parties. Cependant, le terme le plus
couramment utilisé pour le désigner est simplement « schéma narratif »,
même s'il ne s'agit en fait que d'un type de schéma narratif parmi d'autres, car
c'est celui qui s'est imposé comme la référence dans le monde francophone.
Chaque fois que nous emploierons l'expression « schéma narratif » dans ce
texte, nous ferons implicitement référence au « schéma narratif quinaire »
proposé par P. Larivaille.
Comme tous les outils d'analyse, le schéma narratif permet de prendre
de la hauteur par rapport au texte. Il facilite la compréhension de l'histoire en
dégageant sa structure, la trame de la fiction, et en faisant apparaître les
moments clés dans l'enchaînement des événements. Il réunit tous les éléments
pour l'élaboration d'un résumé.
Le schéma narratif est facilement applicable au conte, mais aussi à
pratiquement tous les types d'œuvres littéraires de fiction (fable, roman,
nouvelle, etc.). Beaucoup de scénarios de films reposent aussi sur cette
structure traditionnelle en cinq actes.
Le schéma narratif présuppose que dans toute histoire, un ou des
personnages tentent de résoudre un « problème » (un bien difficile à atteindre
ou un mal difficile à éviter), qui augmente au fur et à mesure jusqu'à un point
culminant et finit par se résoudre d'une façon ou d'une autre.

Comment identifier les éléments du schéma narratif ?


Nous allons maintenant détailler les caractéristiques des cinq éléments
essentiels du schéma narratif afin que vous puissiez les reconnaître
facilement.
Conseil : Si vous avez du mal à identifier les différentes parties dans
l'ordre chronologique, essayez de repérer d'abord la situation finale puis la
situation initiale, ensuite l'élément déclencheur et le dénouement, et en
dernier les péripéties.

La situation initiale (ou incipit)


La situation initiale décrit le début de l'histoire et représente
généralement une situation stable où il y a peu ou pas d'action.
Elle plante son décor et présente les éléments essentiels à sa
compréhension en répondant aux questions Qui ? Quoi ? Où ? et Quand ? :

· Qui ? On présente les principaux personnages[6] et leurs


interactions.

· Quoi ? Le contexte dans lequel évolue le personnage principal


est dévoilé. À ce stade, on donne généralement des indications
sur le genre littéraire concerné : un conte (« Il était une fois...
»), un roman policier, un roman historique, une nouvelle de
science-fiction, etc.

· Où ? Une description du lieu, réel ou imaginaire, où se


déroule l'action est normalement fournie.

· Quand ? Certaines informations permettent de situer l'époque


du récit (passée, contemporaine, future ou indéterminée).
Le contexte de la situation initiale peut être :

· Positif. Exemple : Edmond Dantès, jeune officier prometteur


prévoit de se marier avec la belle Mercedes Herrera (Le Comte
de Monte-Cristo) ;
ou

· Négatif. Exemple : Cendrillon est exploitée et maltraitée par


sa belle-mère et les deux filles de celle-ci.
Dans les deux cas, on se trouve dans une situation d'équilibre. Même
lorsque le contexte est négatif, les personnages ne sont pas encore en mesure
de changer leur condition.
Pour un récit au passé, on emploiera principalement l'imparfait, le
temps par excellence pour décrire une situation et son contexte, les
circonstances et l'arrière-plan de l'histoire. Exemple : « Cela se passait en
plein hiver et les flocons de neige tombaient du ciel comme un duvet léger. »
(Blanche-Neige).

L'élément déclencheur (ou élément perturbateur)


L'élément déclencheur vient rompre l'harmonie et l'équilibre de la
situation initiale, bouleversant le statu quo et mettant ainsi l'histoire en
mouvement.

Ce bouleversement peut être :

· Négatif, lorsque le contexte de la situation initiale est positif.


L'élément déclencheur est malvenu et représente l'irruption
d'un problème. Exemple : Injustement accusé de complot,
Edmond Dantès est emprisonné au château d'If le jour de son
mariage (Le Comte de Monte-Cristo) ;
ou

· Positif, lorsque le contexte initial est négatif. L'élément


déclencheur est bienvenu et pousse les personnages à chercher
une solution au problème qui les accable. Exemple : Le bal,
auquel toutes les filles du royaume sont invitées, offre une
opportunité à Cendrillon de se libérer de sa situation misérable.
L'élément déclencheur constitue donc un point de rupture et aussi de
non-retour : les choses ne seront plus comme avant.
Confronté au problème, le personnage principal s'engage alors dans sa
mission (sa quête) pour tenter de le résoudre.

Le type d'élément déclencheur est très variable et dépend notamment


du genre littéraire : un accident, un décès, une disparition, une rencontre, une
catastrophe naturelle, une révélation, une découverte, un sortilège, etc. Il
s'agit le plus souvent d'un événement extérieur au personnage principal, mais
un événement intérieur (une décision importante) est également possible.
L'impact de l'élément déclencheur est de nature variée (physique,
psychologique, émotionnelle, etc.). Son effet peut être circonscrit au
personnage principal ou s'exercer sur une population plus ou moins grande,
voire s'appliquer à l'univers tout entier.
Cet élément est généralement décrit en utilisant le passé simple de
l'indicatif, temps privilégié du récit. Il est souvent introduit par un marqueur
de temps : Un jour, Soudain, Tout à coup, etc. Exemple : « Au bout d'une
année, le roi épousa une autre femme. » (Blanche-Neige).

L'élément déclencheur est le premier événement d'une série. Ces


événements consécutifs, qui découlent de lui, constituent les « péripéties »[7].

Les péripéties (ou les aventures, ou le déroulement)


Cette partie constitue le cœur de l'histoire et représente l'essentiel de
son développement. Elle comprend les actions, aventures et événements qui
font suite à l'élément déclencheur et en sont la conséquence dynamique.
Les péripéties représentent les épreuves que le personnage principal et
les autres protagonistes devront affronter pour relever les défis et résoudre le
problème, les conflits auxquels ils seront exposés pour rétablir une situation
d'équilibre. Elles sont généralement décrites au passé simple (ou
éventuellement au présent de l'indicatif, pour rendre l'action plus vive).
Cet élément du schéma narratif se termine normalement sur un point
culminant, appelé aussi « climax ». La tension accumulée au cours des
péripéties successives atteint alors son point de rupture, qui va déboucher sur
le dénouement de l'intrigue et la résolution du problème.

Le dénouement (ou élément de résolution, ou élément réparateur)


En principe, le dénouement constitue la dernière action ou dernière
péripétie du récit, celle qui dénoue l'intrigue.
Il implique souvent un moment spectaculaire : un affrontement final,
des retrouvailles intenses, une décision forte, etc.
Le problème trouve alors sa solution, positive ou négative, la mission
ou quête du personnage principal s'achève sur un succès ou un échec,
débouchant sur la situation finale. La résolution est aussi la conclusion
émotionnelle de l'histoire.
Dans la tragédie grecque, le dénouement était souvent dû à une
intervention divine, procédé connu aujourd'hui sous le nom de « Deus ex
machina », locution latine que l'on peut traduire par « Dieu sorti de la
machine ». Un mécanisme, grue ou trappe, permettait de mettre en scène
cette irruption de la divinité dans l'histoire. En dramaturgie[8], cette
expression désigne plus largement « l’événement inattendu et improbable qui
vient régler les problèmes du protagoniste à la dernière minute »[9].

La situation finale (ou explicit)


Cet élément représente la fin de l'histoire, le retour à un état stable. Ce
nouvel équilibre est différent (meilleur ou pire) de celui de la situation
initiale.
Cette phase permet de dresser un bilan en mettant en évidence la
façon dont les péripéties ont transformé les protagonistes. L'issue peut être
positive, négative ou plus contrastée.
On peut présenter quatre types de fins possibles en distinguant le
problème général de l'histoire qui affecte tous les personnages et le bilan
personnel qu'en tire le héros :

· La résolution du problème général et le bilan personnel du


personnage principal sont tous les deux positifs. C'est souvent
le cas dans les contes : le chevalier a libéré la princesse et en
plus ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Hollywood
est également très friand du Happy end[10] : le héros parvient
à repousser l'attaque extraterrestre et retrouve vivante celle
dont il est tombé amoureux durant les péripéties.

· Le problème général est résolu, mais le personnage principal


paie un lourd tribut personnel : la bataille a été remportée, mais
le héros meurt à la fin du combat ou perd un être cher.

· Le problème général n'est pas résolu, mais le personnage


principal en tire un bilan positif, peut-être parce que ses
priorités ont changé.

· Le problème général n'est pas résolu, et en plus le jugement


du héros est négatif : c'est la tragédie classique.
On peut également imaginer des fins ambiguës où l'auteur laisse
planer le doute quant à la résolution du problème général et/ou au bilan
personnel du personnage principal. Une situation finale semblable à la
situation initiale est envisageable, mais cela donnerait un caractère futile aux
péripéties.

À noter que dans la nouvelle, la conclusion intervient tout de suite


après le climax. C'est ce que l'on appelle la « chute ». Le dénouement et la
situation finale sont réduits à leur plus simple expression.

Représentation synthétique du schéma narratif


Exemples d'application du schéma narratif
Nous prendrons ici pour exemples le schéma narratif de trois œuvres très
distinctes : un conte traditionnel, un roman du XIXe siècle et un film à
suspense des années soixante.

Le Petit Poucet
Le Petit Poucet est un conte traditionnel dont la version de Charles
Perrault fut publiée pour la première fois en 1697, dans Les contes de ma
mère l'Oye, sous le règne de Louis XIV, dans un contexte de grandes
famines.
1. La situation initiale :
« Il était une fois un Bûcheron et une Bûcheronne qui avaient sept
enfants tous Garçons ». Le plus jeune, âgé de sept ans, est chétif, ce qui lui
vaut le surnom de Petit Poucet. Souffre-douleur de la famille, l'enfant parle
peu et on le croit idiot, alors qu'il est en fait le plus intelligent de la fratrie.
2. L'élément déclencheur :
« Il vint une année très fâcheuse, et la famine fut si grande, que ces
pauvres gens résolurent de se défaire de leurs enfants ». Le bûcheron et sa
femme décident d'abandonner les sept garçons au cœur de la forêt.

3. Les péripéties :
Le Petit Poucet parvient à ramener ses frères à la maison grâce aux
petits cailloux blancs qu'il a semés sur le chemin. Le répit est de courte durée,
car la misère contraint les parents à remettre leur plan à exécution. Privé de
cailloux, le Petit Poucet sème des miettes de pain, mais celles-ci sont
mangées par des oiseaux. Perdus dans les bois, les enfants frappent à la porte
d'une chaumière qui s'avère être celle d'un ogre. Victime d'un stratagème du
Petit Poucet, ce dernier dévore ses sept filles en croyant manger les enfants
du bûcheron. Poursuivis par l'ogre qui a chaussé ses bottes de sept lieues, les
sept garçons doivent s'enfuir dans la nuit.
4. Le dénouement :
Les enfants se cachent sous un rocher sur lequel l'ogre, fourbu, vient
se reposer. Profitant de son sommeil, le Petit Poucet met ses frères à l'abri et
s'empare des bottes de sept lieues.
5. La situation finale :
Devenu messager du roi grâce aux bottes de sept lieues, le Petit
Poucet pourvoit son père et ses frères d'une situation.

Le Colonel Chabert
Le Colonel Chabert est un court roman d'Honoré de Balzac publié en
1844.
1. La situation initiale :
Abandonné lorsqu'il était enfant, Hyacinthe Chabert s'est bâti une
situation en obtenant le grade de colonel dans la Garde impériale de
Napoléon 1er. Il a fait fortune et épousé Rose Chapotel, une ancienne fille de
joie.
2. L'élément déclencheur :
Gravement blessé à la tête pendant la bataille d'Eylau, en février 1807,
le Colonel Chabert est déclaré mort et enseveli vivant sous une montagne de
cadavres.

3. Les péripéties :
Étant parvenu à s'extraire du charnier, Chabert est recueilli par des
paysans allemands. Il survit finalement à ses blessures et entreprend de
rentrer en France pour retrouver son rang et sa fortune. S'en suivent une
dizaine d'années d'errance avant qu'il ne se présente à l'étude de l'avoué
Derville (début du récit). Celui-ci est disposé à l'aider et propose de négocier
auprès de son ex-épouse. Celle-ci s'est remariée à un aristocrate, le Comte
Ferraud, grâce à la fortune de Chabert. Elle n'a pas répondu aux lettres de son
premier mari de peur de perdre sa situation privilégiée et prétend qu'il s'agit
d'un imposteur. Elle finit par reconnaître qu'il n'a pas menti et consent à une
transaction. Consciente que Chabert l'aime encore, elle use de séduction pour
le tromper sur ses véritables intentions.
4. Le dénouement :
Se rendant compte que Rose a tenté d'abuser de sa naïveté, Chabert
décide de renoncer à son nom et à son argent, puis disparaît.
5. La situation finale :
Derville revoit Chabert vingt ans plus tard à l'hospice des vieillards,
indigent et à moitié fou.

Les Oiseaux
Les Oiseaux, The Birds en anglais, est un thriller américain d'Alfred
Hitchcock. Sorti en 1963, il est inspiré d'une nouvelle éponyme de Daphne du
Maurier publiée en 1952.
1. La situation initiale :
Melanie Daniels est une belle et riche jeune femme célibataire, qui vit
à San Francisco.
2. L'élément déclencheur :
Melanie rencontre Mitch Brenner, un jeune avocat, chez un marchand
d'oiseaux. Ce dernier cherche un couple d'inséparables pour les onze ans de
sa sœur et fait semblant de prendre Mélanie pour une vendeuse.

3. Les péripéties :
Intriguée, Melanie se rend à l'appartement de Mitch le lendemain avec
deux inséparables qu'elle compte lui offrir. Elle apprend qu'il est parti à
Bodega Bay pour le week-end et décide d'y aller. Après avoir déposé
discrètement les oiseaux à la ferme des Brenner, elle est attaquée par une
mouette près du port. Mitch, qui a assisté à la scène de loin, lui porte secours
et l'invite à dîner. Mélanie fait la connaissance de Lydia, la mère dominatrice
de Mitch, et de Cathy, sa jeune sœur. Melanie décide de rester à Bodega Bay
et loge chez Annie, l'institutrice du village et ancienne petite amie de Mitch.
Les deux femmes sont surprises par un grand bruit et trouvent un goéland
mort qui s'est écrasé contre la porte.
Le dimanche, pour l'anniversaire de Cathy, les invités sont attaqués
par des mouettes et doivent se mettre à l'abri. Le lendemain soir, des
moineaux entrent par la cheminée de la ferme des Brenner. Le matin suivant,
Lydia trouve son voisin mort, les yeux arrachés par les oiseaux. Melanie
propose alors d'aller chercher Cathy à l'école. Des corbeaux sont massés tout
autour. Annie et Melanie décident d'évacuer les enfants et les oiseaux se
jettent sur eux, blessant plusieurs d'entre eux, avant de se retirer.
Mitch retrouve Melanie dans un restaurant où les clients parlent des
incidents récents. Les oiseaux commencent alors à attaquer les gens dans la
rue et provoquent l'incendie de la station-service. Les mouettes s'en prennent
aux personnes qui essaient d'éteindre le feu. Attaquée, Melanie se réfugie
dans une cabine téléphonique. Elle est secourue par Mitch qui la ramène dans
le restaurant. Une femme accuse Melanie d'être à l'origine des problèmes.
Mitch et Melanie se rendent chez Annie et découvrent qu'elle a été
tuée en mettant Cathy à l'abri. Ils partent se barricader dans la maison des
Brenner où ils essuient plusieurs attaques de différentes espèces. Durant une
accalmie, pendant la nuit, Melanie entend du bruit et monte dans la chambre
de Cathy. Les oiseaux ont fait un trou dans le toit pour envahir la pièce. Elle
est violemment attaquée et Mitch vient à son secours. Melanie est
sérieusement blessée et Mitch propose de l'emmener à l'hôpital à San
Francisco.

4. Le dénouement :
Mitch sort la voiture de Melanie du garage et va chercher les trois
femmes dans la maison. Mitch, Melanie, Lydia et Cathy, accompagnés du
couple d'inséparables, s'éloignent très lentement de la ferme, entourés de
milliers d'oiseaux à l'affût...
Ce qui semble être le début du dénouement s'interrompt brusquement
avec la fin du film, avant une quelconque résolution, comme pour laisser le
spectateur imaginer la suite. Les oiseaux vont-ils attaquer ou retourner à leur
vie d'avant ? On ne le saura jamais.
5. La situation finale :
On ne connaît pas la situation finale, puisque le récit est interrompu
avant la fin du dénouement.

Remarques sur le schéma narratif


La symétrie du schéma narratif
On notera la symétrie des éléments du schéma narratif :
La situation initiale et la situation finale, l'ouverture et la clôture de
l'histoire, se caractérisent par la stabilité et l'équilibre.

L'élément déclencheur et le dénouement marquent le début et la fin


du déséquilibre causé par le problème qui emballe le récit. Ils encadrent les
péripéties qui constituent la partie centrale et principale de la fiction.

Schéma narratif et chronologie du récit


L'ordre du schéma narratif suit la chronologie des événements, donc
de l'histoire, mais ne coïncide pas forcément avec celle du récit, car cela
dépend du type de narration choisi par l'auteur. Comme nous l'avons souligné
en introduction, l'ordre dans lequel sont racontés les événements (l'ordre du
récit) ne respecte pas obligatoirement l'ordre chronologique (l'ordre de
l'histoire, et donc du schéma narratif).
Prenons d'abord le cas du conte traditionnel à partir duquel a été
élaboré le schéma narratif. Celui-ci se caractérise par sa linéarité temporelle,
la chronologie du récit suit invariablement celle de l'histoire. On commence
toujours en racontant le début de l'histoire, Il était une fois..., et on termine
par la fin, Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants.
En dehors du conte, la chronologie du récit ne s'aligne pas
nécessairement sur celle de l'histoire. Ainsi, il n'est pas rare qu'une œuvre
littéraire ou cinématographique débute par le milieu de l'action, « in media
res »[11], avant de revenir sur la situation initiale et tout ce qui précède par le
biais d'un retour en arrière (une analepse[12] en littérature, un flash-back au
cinéma). C'est le cas par exemple de L'Iliade d'Homère, puisque la guerre de
Troie est engagée depuis dix ans lorsque le récit commence. De même dans
Le Colonel Chabert de Balzac, dont nous avons vu le schéma narratif, le
début du roman met en scène l'arrivée du vieux soldat à l'étude de maître
Derville, une dizaine d'années après l'événement déclencheur, sa supposée
disparition à la bataille d'Eylau.
Un cas particulier du début « in media res » est celui des romans qui
commencent par l'événement déclencheur (une scène de crime dans un polar,
par exemple) ou juste après cet élément perturbateur.
Parfois, c'est même la situation finale qui ouvre le récit, « in ultima
res », tous les éléments antérieurs étant racontés ensuite par analepse. Le film
Citizen Kane, qui débute par la mort du magnat de la presse et ses dernières
paroles énigmatiques, en est le parfait exemple.
À l'inverse, le récit peut évoquer un événement qui se produira
ultérieurement, c'est-à-dire une anticipation (on parle de prolepse en
littérature, de flash-forward au cinéma).
Certains éléments du schéma narratif peuvent être omis dans le récit
(une ellipse), comme dans le film Les Oiseaux d'Alfred Hitchcock, ou comme
on le verra au dernier chapitre avec Le dernier jour d'un condamné de Victor
Hugo.

Applications et limites du schéma narratif


Bien qu'il puisse s'appliquer à la plupart des récits, le schéma narratif
ne convient pas à tous les textes et notamment à certains romans modernes et
expérimentaux. On citera le cas du Nouveau roman, un mouvement littéraire
du milieu du XXe siècle, qui fait passer l'intrigue et les personnages au
second plan. Celui-ci se prête peu à ce type d'analyse, puisqu'il remet en
cause la structure traditionnelle du récit, héritée de l'Antiquité, sur laquelle
repose le schéma narratif.

Le schéma narratif peut porter sur une séquence narrative[13]


particulière à l'intérieur du texte ou sur l'ensemble du récit. Dans le cas de
textes longs et complexes (des romans, par exemple), l'imbrication de
différentes séquences narratives rend l'application du schéma narratif au récit
tout entier parfois difficile. Le recours systématique au schéma narratif
comme outil d'analyse littéraire au collège ne semble d'ailleurs pas faire
l'unanimité dans le corps enseignant.
Le schéma narratif, comme tous les schémas, se caractérise par un
côté réducteur en ramenant le texte à une structure. Il est donc préférable de
l'associer à d'autres outils d'analyse littéraire afin de mettre en évidence toute
l'originalité du récit.

L'intérêt du schéma narratif pour les auteurs


Un outil de construction intuitif
La structure est un élément essentiel de toute fiction, qu'elle soit
élaborée de façon instinctive ou par le biais d'un effort conscient. Le schéma
narratif peut aider les auteurs à élaborer l'architecture de leur histoire et à en
rédiger le plan général sur la base d'un modèle qui a fait ses preuves. Il
permet de bâtir une ossature qui servira de fil conducteur au récit en montrant
le cheminement de l'intrigue du début à la fin, étape par étape. On pourra
alors réfléchir à la chronologie du récit et à la narration. Ce travail réalisé en
amont facilitera grandement l'écriture du premier jet et réduira l'étendue de la
phase de réécriture.
Ce schéma est, somme toute, très intuitif. On peut faire du schéma
narratif sans le savoir, à la manière de monsieur Jourdain. Depuis La poétique
d'Aristote, on dit que toute histoire doit avoir un début, un milieu et une fin
(la structure en trois actes, voir ci-dessous). Pour maintenir l'intérêt du
lecteur, il est évidemment préférable qu'il se passe quelque chose dans le
milieu.

On peut rapprocher le schéma narratif d'autres modèles, en particulier


de la célèbre structure en trois actes dont il découle. Encore très utilisée
aujourd'hui, notamment pour l'écriture de scénarios, cette structure trouve son
origine dans la tragédie grecque :
Acte 1 (le début) = 1. La situation initiale + 2. L'élément déclencheur ;
Acte 2 (le milieu) = 3. Les péripéties ;

Acte 3 (la fin) = 4. Le dénouement + 5. La situation finale.


Le schéma narratif permet de poser les fondations sur lesquelles la
créativité et l'originalité pourront s'exprimer. Il ne doit pas pour autant se
transformer en un carcan. On peut bien entendu jouer avec, l'aménager, voire
le transgresser (un récit sans résolution, par exemple), mais il est toujours
préférable de le faire en connaissance de cause. Comme l'explique Elizabeth
George, « il n'y a pas de règles, il n'y a que des décisions raisonnées »[14].

Quelques conseils aux auteurs


Écrire implique de faire des choix. Ces quelques conseils relatifs aux
différents éléments du schéma narratif peuvent contribuer à votre réflexion.
1. La situation initiale :

La première décision que vous devrez prendre concerne le début du


récit. Commencerez-vous à raconter votre histoire à partir de la situation
initiale ou in media res ? Autrement dit : commencerez-vous avant, pendant
ou après l'élément déclencheur ?
Si la situation initiale ouvre le récit, ne cherchez pas à donner toutes
les informations sur les principaux personnages et le contexte dès le début,
cela risque d'être très indigeste. Certains éléments pourront être distillés au
fur et à mesure du développement de l'intrigue, contribuant ainsi à l'entretien
du suspense tout au long du texte. Ménagez vos effets de surprise !
L'équilibre de la situation initiale n'implique pas que tout soit parfait.
Nous avons d'ailleurs souligné que le contexte initial pouvait être négatif.
Même dans le cadre d'un contexte positif, cas le plus courant, des problèmes
ou des conflits plus ou moins latents peuvent affleurer. Cette situation initiale
prépare la suite en attisant la curiosité du lecteur qui doit sentir qu'il va se
passer quelque chose...
Dans tous les cas, soignez particulièrement votre incipit. Il doit
accrocher le lecteur et donner le ton de ce qui va suivre. Si vous envisagez de
soumettre votre manuscrit à des éditeurs, le début sera forcément lu. C'est ce
qui les incitera (ou pas) à lire le reste...
2. L'élément déclencheur :
Étant donné que l'élément déclencheur lance véritablement l'histoire,
veillez à ne pas le placer trop loin du début du livre et faites-en un moment
fort du récit.
Lorsque vous introduisez le problème général de l'histoire avec
l'élément déclencheur, prenez conscience de sa nature émotionnelle. Tout
problème a une face extérieure au personnage et une face intérieure. Il
implique généralement une opposition entre une attente du personnage
principal et une réalité qui résiste à s'y conformer.
3. Les péripéties :
Le problème général de l'histoire, apparu avec l'élément déclencheur,
doit prendre de l'ampleur durant les péripéties pour faire monter la tension
émotionnelle (essentielle au plaisir du lecteur) jusqu'à son point culminant
(qui sera atteint lors de la résolution). Tous les événements, toutes les scènes
doivent s'enchaîner logiquement et converger vers la résolution de ce
problème, un peu comme dans un effet domino. Attention, donc, de ne pas
multiplier à l'excès les péripéties et de ne pas perdre de vue l'objectif du
personnage principal. À l'opposé, la quête du héros pour résoudre le problème
doit être suffisamment ardue pour entretenir le suspense. Il s'agit de trouver le
bon équilibre.
Veillez à varier le type de péripéties afin qu'elles n'apparaissent pas
comme trop prévisibles. Vous pouvez également maintenir l'intérêt du lecteur
en alternant narrations descriptives et dialogues, ralentis et sommaires
(séquences longues et séquences brèves), temps forts et temps faibles.
Vers la fin des péripéties, le personnage principal est généralement
amené à prendre une décision importante et risquée qui conduit au climax. La
tension dramatique est alors à son comble.
4. Le dénouement :
Lors du dénouement, toutes les pièces du puzzle qui ont été posées au
fil du récit doivent s'emboîter de manière cohérente, sans laisser de place au
hasard. Le désir de logique du lecteur doit être satisfait. Évitez donc le
recours à un « Deus ex machina » pour la résolution de votre intrigue. Le
terme a acquis une connotation péjorative, car on le considère dorénavant
comme une solution de facilité à proscrire, le symptôme d'une écriture non
aboutie.
Avec le dénouement arrive le moment de tirer des conclusions.
Assurez-vous d'avoir répondu à toutes les interrogations relatives à l'histoire,
d'avoir refermé toutes les portes ouvertes au cours du récit.
Pour l'auteur, il s'avère souvent préférable de commencer par définir
le début et la fin de l'histoire avant de construire l'intrigue qui lie les deux.
5. La situation finale :
La situation finale va vous permettre de mettre en évidence la façon
dont la vie des personnages a été affectée par les péripéties.
Ne vous épanchez pas trop sur cette phase, elle doit être relativement
brève, mais ne la bâclez pas. Elle contribue grandement à l'impression
générale du lecteur. De plus, et tout comme pour la situation initiale, elle est
généralement lue attentivement par les éditeurs en quête de manuscrits.
Si vous envisagez une suite à votre roman, vous pouvez en poser les
prémices dans cette partie. Il est possible que le problème principal n'ait pas
été totalement résolu, ou bien qu'un nouveau problème commence à émerger.
Songez à Harry Potter qui n'a pu venir à bout de Voldemort qu'au septième
volume.
Chapitre 2 : Le schéma actantiel

Qu'est-ce que le schéma actantiel ?


Le schéma (ou modèle) actantiel, parfois écrit « actanciel », est un
concept formalisé en 1966 par le linguiste et sémioticien[15] Algirdas Julien
Greimas (1917-1992) à partir des travaux de Vladimir Propp sur les contes
merveilleux de tradition russe.
Cet outil d'analyse littéraire est souvent présenté en complément du
schéma narratif. Contrairement à ce dernier, il ne suit pas l'ordre
chronologique de l'histoire.
L'analyse actantielle porte sur une action, réelle ou fictionnelle, et
permet de classer les forces en présence, appelées « actants[16] », sur la base
de leur rôle dans l'histoire et des relations qui les lient.
Il existe six classes ou catégories actantielles, six ensembles d'actants,
qui peuvent contenir zéro, un ou plusieurs éléments.

Comment identifier les éléments (actants) du schéma


actantiel ?
Le schéma actantiel comprend les six ensembles d'actants suivants :

· Le Sujet

· L'Objet

· Le(s) Destinateur(s)

· Le(s) Destinataire(s)

· Les Opposants

· Les Adjuvants
L'action principale qui lie les actants entre eux est appelée la
« Quête ».

Les actants représentent les forces motrices du récit. Ils peuvent être
incarnés par des personnages, mais aussi par des animaux ou des créatures
fantastiques, voire par des choses (objets, sentiments, idées, désirs, etc.). Un
actant peut être individuel ou collectif (une famille, la société, etc.).

Le Sujet
Le Sujet est généralement le personnage principal, le « héros ». Il a
pour mission de réaliser la Quête, c'est-à-dire de résoudre un problème.

L'Objet
L'Objet représente ce que le Sujet convoite, l'objectif de la Quête. Il
s'agit parfois d'un objet matériel (un trésor, une épée magique, etc.), mais il
peut se manifester aussi à travers un élément abstrait (l'amour, le pouvoir, la
gloire, la libération d'une princesse, etc.).

Le(s) Destinateur(s)
Le ou les Destinateurs, appelés aussi « Émetteurs » ou
« Énonciateurs », représentent ce, celui ou ceux qui indiquent au Sujet sa
quête, qui la commanditent. Ils apparaissent plutôt dans la première partie du
récit et sont souvent à l'origine de l'élément déclencheur. Dans le conte, le
Destinateur est généralement un acteur souverain (un monarque, un dieu,
l'État, un idéal, etc.) garant des valeurs collectives. À la fin du récit, c'est
celui qui reconnaît la réussite ou l'échec du Sujet dans la Quête.
Exemples :

· Destinateur - personnage : Un roi qui charge un chevalier


d'une mission (libérer la princesse).

· Destinateur - chose : L'idéal de justice qui pousse le héros à se


rebeller contre le tyran.

Le(s) Destinataire(s)
Les Destinataires sont les bénéficiaires de la Quête, ceux qui en
reçoivent l'Objet ou en tirent un avantage. Ils sont donc plutôt mis en
évidence vers la fin du récit.
Le Sujet lui-même peut être un Destinataire, grâce à l'obtention de
l'Objet de la Quête. Exemple : le chevalier qui épouse la princesse après
l'avoir délivrée du dragon.

Les Destinateurs peuvent également devenir des Destinataires.


Exemple : le roi qui retrouve sa fille après sa libération.

Les Opposants
Les Opposants, ou « Adversaires », représentent tous les obstacles
(personnages ou autres éléments) qui entravent le Sujet dans sa Quête, dans la
réalisation de sa mission. En insufflant leur énergie négative, ils jouent un
rôle fondamental dans le suspense de l'histoire et obligent le Sujet à se
dépasser. Pas de grand héros sans grand méchant !

Les Adjuvants
Les Adjuvants, ou « Aidants », ou « Auxiliaires », sont tous les
personnages ou autres éléments qui favorisent, volontairement ou non,
l'accomplissement de la Quête, palliant parfois les défaillances du
Sujet. Exemple : Pensez au rôle capital de Ron et Hermione dans les
aventures de Harry Potter.

Les trois axes du schéma actantiel


Les six actants peuvent être positionnés suivant trois axes, trois oppositions
(ou paires de catégories actantielles), qui les relient de manière significative :
Axe Sujet - Objet
L'axe qui relie le Sujet à l'Objet est appelé l'axe de la quête, l'axe du
désir ou l'axe du vouloir. L'actant Sujet est orienté vers l'actant Objet par la
Quête. L'établissement de la relation entre ces deux actants s'appelle la
« jonction ».
Axe Destinateur – Destinataire
Sur l'axe de la communication, appelé aussi axe de la transmission ou
axe du savoir, l'actant Destinateur demande que la jonction entre le Sujet et
l'Objet soit établie au bénéfice de l'actant Destinataire.

Axe Adjuvant – Opposant


L'axe du pouvoir relie les actants Adjuvants (le pouvoir positif mis au
service de la Quête) et les actants Opposants (le pouvoir négatif visant à
contrecarrer la Quête).

La théorie des trois épreuves


Le schéma actantiel peut être complété par la théorie des trois
épreuves. Celles-ci ont lieu dans l'ordre suivant :

· L'épreuve qualifiante : celle au cours de laquelle un des


personnages apparaît comme le Héros (le Sujet).

· L'épreuve principale : celle de la Quête de l'Objet par le Héros


(le Sujet).

· L'épreuve glorifiante : celle qui voit le Héros (le Sujet)


remettre l'Objet au(x) Destinataire(s).

Exemples d'application du schéma actantiel


Nous prendrons ici pour exemples le schéma actantiel de trois œuvres très
distinctes : un conte traditionnel, un roman du XIXe siècle et un film
d'animation des années deux mille.

Le Petit Chaperon rouge


Le Petit Chaperon rouge est un conte traditionnel d'origine française.
Charles Perrault en publia la première version en 1697 dans Histoires ou
contes du passé, avec des moralités. La version définitive des frères Grimm
parut en 1857.
Schéma actantiel :
Le Petit Chaperon rouge (Sujet) est chargé par sa mère (Destinateur)
de porter une galette (Objet de la quête) à sa grand-mère (Destinataire).
Le Grand méchant loup (Opposant), rencontré en chemin, dévore la
grand-mère, puis le Petit Chaperon rouge (fin du récit dans la version de
Charles Perrault).
Le Petit Chaperon rouge et sa grand-mère sont finalement délivrées,
dans la version des frères Grimm, par un chasseur (Adjuvant).

L'assomoir
L'assomoir est un roman réaliste d'Émile Zola consacré au monde
ouvrier. Il a été publié en feuilleton dès 1876, puis en livre en 1877.
Schéma actantiel :
Poussée par l'aspiration naturelle au bonheur (Destinateur), Gervaise
(Sujet) poursuit un idéal (Objet de la quête) pour le bien de ses enfants, de
son mari (Coupeau) et d'elle-même (Destinataires) : « Mon idéal, ce serait de
travailler tranquille, de manger toujours du pain, d’avoir un trou un peu
propre pour dormir, […] un lit, une table et deux chaises, pas davantage […] ;
je voudrais aussi élever mes enfants, en faire de bons sujets, si c’était
possible. »
La quête de Gervaise est contrecarrée par Lantier, le premier
compagnon de Gervaise, son mari Coupeau (après son accident du travail), sa
propre faiblesse de caractère et surtout l'alcoolisme (Opposants) qui frappe
Lantier, Coupeau et Gervaise elle-même.
La bonne volonté de Coupeau (avant son accident) et la générosité du
voisin Goujet (Adjuvants) ne peuvent empêcher la déchéance et la misère
dans lesquelles meurt Gervaise.
Le voyage de Chihiro
Le voyage de Chihiro est un film d'animation de 2001 écrit et réalisé
par Hayao Miyazaki. Plus grand succès du cinéma japonais, ce film
fantastique qui explore la relation entre modernité et tradition a remporté de
nombreux prix internationaux.
Schéma actantiel :
Égarés sur une route, Chihiro Ogino, une petite fille d'une dizaine
d'années, et ses parents, Akio et Yuko, entrent par mégarde dans le monde
des esprits. Avides de nourriture, les parents sont transformés en porcs par la
sorcière Yubaba (Opposant). Par amour pour eux (Destinateur), Chihiro
obtient un travail dans les thermes de Yubaba, afin de pouvoir les ramener
dans le monde des humains (Objet de la quête).
Chihiro est assistée par Haku, un jeune garçon qui se transforme en
dragon, Kamaji le chauffagiste, Lin, une employée des thermes, l'esprit Sans-
Visage, la gentille sorcière Zeniba, la sœur jumelle de Yubaba, et même Bô,
le bébé géant de Yubaba, et le Yu-bird vers la fin du film (Adjuvants).
Venant finalement à bout de Yubaba et ses assistants, le Yu-bird,
Aniyaku et Chichiyaku (Opposants), Chihiro retrouve ses parents dans le
monde des humains. Chihiro, Akio et Yuko Ogino (Destinataires) reprennent
leur route vers leur nouvelle maison. Seule Chihiro se souvient de ce qu'il
s'est passé.

Application du schéma actantiel à deux archétypes


Le conte traditionnel
Le roi (Destinateur) charge un chevalier (Sujet) de délivrer sa fille
(Objet de la quête), prisonnière d'un donjon (Opposant). En chemin, il libère
une fée (Adjuvant) qui lui donne une épée magique (Adjuvant) pour le
remercier.
Il tue le dragon (Opposant) qui garde le donjon, délivre la princesse et
la remet à son père. Le roi et la reine offrent la main de leur fille au chevalier
(les quatre personnages sont les Destinataires).
Le roman policier
L'institution policière (Destinateur) charge le commissaire (Sujet)
d'enquêter sur un crime pour le résoudre (Objet de la quête).

Grâce à ses collaborateurs, aux témoins et aux indices (Adjuvants), et


au prix d'une lutte acharnée contre le meurtrier et ses complices (Opposants),
le commissaire parviendra à remettre le ou les coupables à la justice
(Destinataire).

Remarques sur le schéma actantiel


Le schéma actantiel est moins intuitif et plus mouvant que le schéma
narratif.
Tout comme le schéma narratif, le schéma actantiel peut s'appliquer à
l'ensemble ou seulement à une partie de l'histoire. Certains estiment qu'il ne
peut pas vraiment s'appliquer à un récit complet, puisqu'à chaque action
correspond son modèle actantiel. Il est cependant possible de choisir une
action qui résume l'histoire pour avoir un schéma actantiel représentatif de
l'ensemble du texte.
Les « actants » représentent des positions au sein de la structure du
récit, des « rôles actantiels ». Ils sont donc différents des « acteurs » de
l'histoire, qui eux peuvent se déplacer au sein de cette structure.
Un acteur (personnage ou chose) peut donc cumuler plusieurs rôles,
c'est-à-dire représenter plusieurs actants, que ce soit simultanément (le Sujet
est souvent un Destinataire) ou successivement au cours de l'histoire (un
Adjuvant peut devenir Opposant, la figure classique du traître, et vice-versa,
celle du repenti). On parle alors de syncrétisme actantiel.
Exemple : Pensez à l'aller-retour d'Anakin Skywalker sur l'axe du
pouvoir du schéma actantiel dans la saga de Star Wars. Jeune Jedi sous la
tutelle d'Obi-Wan Kenobi (Adjuvant), il bascule du Côté Obscur de la Force
sous l'influence du perfide Palpatine. Devenu le redoutable Dark Vador
(Opposant), il incarne la puissance maléfique de l'Empire luttant contre
l'Alliance rebelle. Il se rachète finalement en se sacrifiant pour sauver son
fils, Luke Skywalker, des griffes de Palpatine, permettant du même coup la
destruction de l'Étoile de la Mort (à nouveau Adjuvant).
Certains rôles ou actants, peuvent être absents ou partagés entre
plusieurs acteurs. Typiquement, il y a plusieurs Adjuvants et plusieurs
Opposants. Par contre, il n'y a généralement qu'un seul actant Sujet ou actant
Objet, même s'il peut être collectif.
De nombreuses combinaisons sont donc possibles dans le cadre du
schéma actantiel. Celui-ci contribue à mettre en évidence les interactions
entre personnages et les motivations qui les animent.

De la même façon que pour le schéma narratif, il peut s'avérer difficile


d'appliquer le schéma actantiel à certaines œuvres littéraires modernes.

L'intérêt du schéma actantiel pour les auteurs


Il n'y a pas d'intrigue sans personnages. Par conséquent, l'une des clés
pour captiver les lecteurs est la création de personnages mémorables au
service de l'intrigue. Il est donc crucial qu'ils aient un rôle précis dans
l'histoire (une fonction dans l'intrigue), et il est préférable de le définir avant
de commencer la rédaction. Le schéma actantiel peut alors s'avérer utile, car
il établit, sur la base des travaux de Propp et des grammairiens du récit, que le
nombre de rôles types pour vos personnages est limité à cinq : le sujet de
l'action (Sujet), celui qui la commande (Destinateur), celui pour qui elle est
accomplie (Destinataire), celui qui la facilite (Adjuvant) et celui qui s'y
oppose (Opposant).

Le schéma actantiel invite donc les auteurs à définir le rôle de leurs


personnages, à établir les relations qui les lient et à structurer les rapports de
force en présence. Ce sont ces interactions qui vont permettre aux
personnages d'évoluer et de s'accomplir au cours de l'histoire.
Attention cependant, les personnages ne se limitent cependant pas à
leur rôle. Prenez donc soin de leur donner chair, de l'épaisseur et une certaine
complexité, afin que l'on puisse croire en eux.
La notion de quête, au cœur du schéma actantiel, renvoie à l'une des
caractéristiques les plus importantes du personnage principal : son besoin
central, sa motivation profonde, ce qui l'anime dans l'histoire, ce qu'il veut.
Pour entretenir le suspense, il est fondamental que la volonté des personnages
soit contrariée. C'est la fameuse notion de conflit dont tous les guides
d'écriture parlent. Cette opposition peut être externe (venant d'autres
personnages, de forces naturelles, etc.) ou interne (le doute, un conflit
intérieur).
Le schéma actantiel est a priori moins rigide et contraignant que le
schéma narratif. Comme nous l'avons vu, on peut créer des surprises en
déplaçant des personnages sur les axes du schéma actantiel et notamment sur
l'axe du pouvoir (Adjuvants - Opposants). Souvenez-vous que les
personnages évoluent au cours de l'histoire.
À noter que Greimas a par la suite proposé un autre outil, appelé
« schéma narratif canonique », pour le substituer au schéma actantiel.
Chapitre 3 : Exemples d'application du
schéma narratif et du schéma actantiel
Nous allons dans cette partie passer au double filtre du schéma
narratif et du schéma actantiel quatre textes très différents : un conte
traditionnel, un conte philosophique, un roman engagé et un roman
d'aventures. Nous mettrons ainsi en évidence le contraste entre ces deux
outils d'analyse et leur complémentarité : les étapes et la chronologie du
schéma narratif ; le jeu des forces en présence du schéma actantiel.

Cendrillon
Cendrillon est ce qu'il est convenu d'appeler un conte-type suivant la
classification Aarne-Thomson, c'est-à-dire qu'il correspond à un archétype de
conte (un(e) enfant qui passe des cendres du foyer au trône), dont on trouve
des variations dans différentes cultures et à différentes époques. La version de
Charles Perrault fut publiée pour la première fois en 1697, sous le titre
Cendrillon ou la Petite Pantoufle de verre.

Schéma narratif
1. La situation initiale :
Suite à la mort de sa mère et au remariage de son père, Cendrillon est
exploitée par sa belle-mère et ses deux méchantes filles. Accablée par les
tâches du foyer, elle est maintenue à l'état de souillon.

2. L'élément déclencheur :
Le fils du roi organise un bal et toutes les filles du royaume y sont
conviées.
3. Les péripéties :
Les belles-sœurs se préparent pour le bal avec l'aide de Cendrillon,
qui est triste de ne pouvoir s'y rendre. Sa marraine utilise ses pouvoirs de fée
pour faire apparaître un carrosse et un équipage. Elle transforme les haillons
de Cendrillon en vêtements de princesse et lui donne pour instruction de
rentrer du bal avant minuit. Ébloui, le prince tombe sous le charme de cette
jeune fille inconnue. Au premier coup de minuit, Cendrillon s'éclipse du
château et perd une chaussure de verre[17] dans sa fuite.
4. Le dénouement :
Le prince fait essayer la chaussure abandonnée à toutes les filles du
royaume et retrouve la belle inconnue.
5. La situation finale :
Cendrillon épouse le prince. Magnanime, elle invite ses belles-sœurs à
vivre au palais.

Schéma actantiel
Cendrillon (Sujet) veut aller au grand bal (Objet de la quête) organisé
par le fils du roi (Destinateur).
La condition misérable dans laquelle la maintiennent sa belle-mère et
ses deux filles (Opposants) l'en empêche.
Sa marraine (Adjuvant) utilise ses pouvoirs de fée pour lui permettre
d'y assister.
Le fils du roi tombe amoureux d'elle et finit par la retrouver.
Cendrillon et le prince (Destinataires) se marient.

Candide ou l'optimisme, Voltaire


Candide ou l'optimisme est un roman philosophique de Voltaire
publié en 1759. Grand succès littéraire dès sa parution, l'ouvrage critique
l'optimisme leibnizien selon lequel on vit dans le meilleur des mondes
possibles.

Schéma narratif
1. La situation initiale :
Candide, un jeune garçon bon et naïf, vit en Westphalie au château du
baron de Thunder-ten-tronckh, auprès de son maître, le Dr. Pangloss, un
philosophe optimiste.
2. L'élément déclencheur :
Candide est chassé du château après avoir été surpris par le baron en
train d'embrasser sa fille, Cunégonde.
3. Les péripéties :
Enrôlé de force dans l'armée bulgare, Candide découvre l'horreur de la
guerre et s'enfuit. Recueilli par Jacques l'anabaptiste en Hollande, il retrouve
le vieux Pangloss qui lui apprend le viol et la mort de Cunégonde.

Candide et ses compagnons font naufrage en arrivant à Lisbonne le


jour d'un grand tremblement de terre. Jacques meurt noyé et Pangloss est
pendu peu après par l'Inquisition. Candide retrouve Cunégonde, qui a
survécu, retenue à Lisbonne par un banquier juif, Don Issachar, et
l'inquisiteur. Candide tue les deux hommes et s'enfuit avec Cunégonde et sa
vieille servante vers Cadix.
Candide est engagé comme officier et ils embarquent vers le
Paraguay. Poursuivi par l'Inquisition, Candide doit laisser Cunégonde à
Buenos Aires auprès du gouverneur, avant de s'enfuir au Paraguay avec son
valet Cacambo. Il retrouve le frère de Cunégonde, devenu père jésuite. Ce
dernier s'oppose à sa volonté d'épouser Cunégonde et Candide le laisse pour
mort après un coup d'épée. Il s'enfuit avec Cacambo vers le mythique pays
d'Eldorado d'où ils emportent une fortune. Depuis le Surinam, Candide
envoie Cacambo racheter Cunégonde et lui donne rendez-vous à Venise.

Candide se fait dérober l'essentiel de sa fortune par un marin


hollandais et rentre en Europe avec Martin, un vieux savant pessimiste. Ils
débarquent à Bordeaux, puis se dirigent vers Paris, où Candide se fait voler
par un abbé périgourdin. Ils assistent à une exécution dans un port anglais et
Candide décide de se rendre sur-le-champ à Venise avec Martin. Là, ils
tombent sur Paquette, une ancienne domestique du château, et son amant, le
moine Giroflée. Chez le seigneur Pococurante, Candide retrouve Cacambo,
devenu esclave d'un sultan. Il révèle à Candide que Cunégonde est à
Constantinople et ils entreprennent de s'y rendre.
4. Le dénouement :
Sur la galère qui les emmène à Constantinople, Candide retrouve
Cacambo, mais aussi Pangloss et le frère de Cunégonde, qu'il fait libérer.
Candide rachète Cunégonde, devenue laide et acariâtre, au roi déchu
Ragotski.
5. La situation finale :
Après s'être débarrassé du frère, opposé au mariage, Candide épouse
finalement Cunégonde. N'ayant plus d'argent, ils vivent de leur travail dans
une petite métairie avec Pangloss, Martin, Cacambo et la vieille servante,
puis sont rejoints par Paquette et Giroflée.

Schéma actantiel
Chassé de son château par le baron de Thunder-ten-tronckh
(Destinateur et Opposant) et animé d'un sentiment amoureux (également
Destinateur), Candide (Sujet) veut retrouver Cunégonde pour l'épouser (Objet
de la quête).
De nombreux obstacles se dressent sur la route de Candide : l'armée
bulgare, Don Issachar, l'Inquisition, le marin hollandais, l'abbé périgourdin et
le frère de Cunégonde (Opposants).
Il les surmonte grâce à l'aide de ses amis : Jacques, la vieille servante,
Cacambo, Martin et Pangloss (Adjuvants).
Après de multiples péripéties, Candide et Cunégonde (Destinataires)
finissent par se marier.

Le dernier jour d'un condamné, Victor Hugo


Le dernier jour d'un condamné est un roman de Victor Hugo publié
pour la première fois en 1829 de façon anonyme. Dialogue intérieur d'un
condamné qui attend l'échafaud, cet ouvrage est considéré comme un
réquisitoire contre la peine de mort. Ce récit à la première personne, écrit
durant l'ultime journée du condamné, revient sur les cinq dernières semaines
de son existence, du procès à l'exécution. C'est un exemple de récit qui
commence « in media res », puisque la situation initiale et l'élément
déclencheur (le crime qu'il a commis) sont seulement évoqués par analepse.
Schéma narratif
1. La situation initiale :

Le personnage principal, qui est aussi le narrateur, menait une vie


apparemment sans histoire auprès de sa famille (sa mère, sa femme et sa
fillette Marie).
2. L'élément déclencheur :
L'homme a commis un crime de sang dont on ne sait presque rien.

3. Les péripéties :
Le personnage raconte son procès, la condamnation à mort, son
emprisonnement à Bicêtre, le ferrage des forçats qui partent pour le bagne de
Toulon, son séjour à l'infirmerie, ses rêves d'évasion, son espoir d'une grâce
royale, les visites du directeur de la prison, du prêtre, puis de l'huissier qui lui
annonce qu'il sera exécuté le jour même. Vient ensuite son transfert à la
Conciergerie, sa rencontre avec un autre condamné, la visite de sa fille qui ne
le reconnaît pas.
4. Le dénouement :
Le dénouement est suspendu. Le roman s'achève sur la scène où l'on
vient chercher le condamné dans sa cellule pour l'emmener à l'échafaud. On
laisse le lecteur imaginer la suite.
5. La situation finale :
La situation finale fait l'objet d'une ellipse et n'est donc pas évoquée.

Schéma actantiel
Animé par l'instinct de survie et la responsabilité envers sa fille
(Destinateurs), le condamné (Sujet) espère avoir la vie sauve (Objet de la
quête) en s'évadant ou en bénéficiant d'une grâce royale.
Il voudrait retrouver sa vie d'avant avec sa fillette, sa femme et sa
mère (Destinataires).
L'aide de son avocat (Adjuvant) ne fait pas le poids face à la société
représentée par les magistrats, le directeur de la prison, l'huissier, les
gendarmes, le prêtre, la foule, etc. (Opposants).

L'île au trésor, Robert Louis Stevenson


L'île au trésor est un roman d'aventures publié par l'écrivain écossais
Robert Louis Stevenson en 1883. Ce classique de la littérature jeunesse a
connu de nombreuses adaptations au cinéma, à la télévision, au théâtre, en
bande dessinée et même en jeux vidéo.

Schéma narratif
1. La situation initiale :
Le jeune Jim Hawkins, orphelin de père depuis peu, vit à l'auberge
« L'Amiral Benbow » tenue par sa mère dans le sud-ouest de l'Angleterre.
2. L'élément déclencheur :
Jim découvre une carte dans le coffre d'un mystérieux pensionnaire de
l'auberge, le vieux loup de mer Billy Bones, qui vient de mourir subitement.
Il la montre au gentilhomme Trelawney et au docteur Livesey. Pensant que la
carte représente l'île où a été enterré le trésor du capitaine Flint, un célèbre
pirate, Trelawney propose d'organiser une expédition maritime avec Livesey
et Jim.
3. Les péripéties :

À Bristol, Trelawney achète un navire, l'Hispaniola, et engage le


capitaine Smollett et un cuisinier unijambiste nommé Long John Silver. Peu
avant l'arrivée à destination, Jim découvre que Silver et plusieurs membres
d'équipage, anciens pirates du capitaine Flint, préparent une mutinerie. Il en
informe Trelawnay, Livesey et Smollett.
Sur l'île, deux groupes se forment : les mutins emmenés par Silver et
les hommes restés fidèles à Trelawney qui se réfugient dans un fortin en bois
abandonné. Les matelots Alan et Tom, ainsi que Redruth, un domestique de
Trelawney, sont tués par les mutins. Jim rencontre un ancien pirate à moitié
fou, Ben Gunn, qui a été abandonné sur l'île. L'homme prétend connaître
l'emplacement du trésor et d'une embarcation cachée. Il est prêt à partager le
trésor avec ceux qui l'emmèneront avec eux.

Le fortin est attaqué par la bande à Silver qui veut récupérer la carte.
Les domestiques Hunter et Joyce sont tués, le capitaine Smollett est blessé.
Jim s'empare de la barque de Gunn et rejoint l'Hispaniola qu'il parvient à
ancrer près d'une plage. De retour au fortin, Jim est capturé par Silver et les
mutins qui ont investi les lieux. Silver dissuade ses hommes de tuer Jim. Le
groupe part à la recherche du trésor avec la carte en emmenant Jim comme
otage. Ils découvrent l'endroit où était caché le butin, mais il est vide.
4. Le dénouement :

Les pirates soupçonnent Silver de jouer double-jeu et une dispute


éclate. Jim et Silver sont sauvés par l'intervention de Livesey, Gunn et Gray,
le charpentier en second. Silver change de camp et les autres pirates
s'enfuient. Jim et ses amis récupèrent le trésor, que Gunn avait caché dans
une grotte, puis l'embarquent sur l'Hispaniola pour rentrer en Angleterre.
Silver les accompagne alors que les trois derniers mutins sont laissés sur l'île.
Au cours d'une escale aux Antilles, Silver s'enfuit avec un sac d'argent.
5. La situation finale :
De retour à Bristol, les membres de l'expédition se partagent le butin.
Jim déclare qu'il ne retournera pas sur l'île, même s'il sait qu'une partie du
trésor y est restée.

Schéma actantiel
Après avoir trouvé la carte d'une île dans le coffre d'un vieux pirate, le
jeune Jim Hawkins (Sujet) part à la recherche du trésor du capitaine Flint
(Objet de la quête) sur un navire affrété par le gentilhomme Trelawney
(Destinateur).
Sur l'île, Jim et ses amis (Trelawnay, Livesey, Smollett, Alan, Tom,
Gray, Redruth, Hunter et Joyce, ainsi que l'ancien pirate Gunn - Adjuvants)
parviennent à prendre le dessus sur Silver et sa bande de mutins (Opposants).
Jim doit la vie sauve à Silver (également Adjuvant), qui l'a protégé des autres
pirates.
De retour en Angleterre, les rescapés de l'expédition (Jim, Trelawnay,
Livesey, Smollett, Gray et Gunn - Destinataires) se partagent le trésor, alors
que Silver (également Destinataire) s'est enfui avec un sac d'argent lors d'une
escale.
Pour finir...
J'espère que cet ouvrage aura apporté les réponses que vous cherchiez
sur le schéma narratif et le schéma actantiel, et peut-être même davantage.
N'hésitez pas à laissez un commentaire concernant le livre sur la page
d'Amazon.fr, je vous en serai très reconnaissant.
Si vous détectez une coquille ou une erreur, merci d'avance de la
signaler par courrier électronique à fredbuffa@yahoo.fr.

Vous pouvez également me retrouver sur mon site personnel


(www.fredericbuffa.com) et sur mon blog consacré aux débouchés de
l'écriture (www.vivredecriture.com).

[1] « Succession de faits et d'actions qui forment la trame d'une pièce de théâtre, d'un roman, d'un
film. », Dictionnaire de français Larousse (http://www.larousse.fr).
[2] Jean-Philippe Arrou-Vignod, Vous écrivez ? Le roman de l'écriture, Gallimard, 2017
[3] « Autobiographie empruntant les formes narratives de la fiction », Dictionnaire de français Larousse
(http://www.larousse.fr).
[4] « La linguistique structurale est une approche de la linguistique issue des travaux du linguiste
suisse Ferdinand de Saussure et fait partie de l'approche générale du structuralisme », Wikipédia.
[5] Paul Larivaille, « L'analyse (morpho)logique du récit », Poétique, n° 19, 1974, pp. 368-388.
[6] À noter que les personnages de fiction sont souvent définis à partir de quatre catégories : identité
(nom, âge, sexe, profession, statut familial, etc.), physique (taille, morphologie, etc.), personnalité
(caractère, psychologie) et rôle (agent ou patient, suivant s'ils provoquent ou subissent les actions).
[7] Dans la tragédie classique, le mot « péripétie » renvoyait plus particulièrement à un retournement
de situation, ce que l'on qualifie désormais de « coup de théâtre ». La péripétie était souvent associée à
une scène de « reconnaissance », appelée également « anagnorisis » ou « anagnorismos », c'est-à-dire la
découverte tardive d'une identité jusque là non perçue. Œdipe en est l'exemple le plus célèbre lorsqu'il
se rend compte qu'il a tué son père et épousé sa mère.

[8] « Art de la composition des pièces de théâtre. », Dictionnaire de français Larousse


(http://www.larousse.fr).
[9] Yves Lavandier, La dramaturgie, Le Clown et L'Enfant, 2004.
[10] Il serait plus correct de parler de « Happy ending », qui est le terme généralement utilisé en
anglais.
[11] Locution latine signifiant littéralement « au milieu des choses ».
[12] « Procédé de style par lequel on revient sur un événement antérieur au récit en cours. »,
Dictionnaire de français Larousse (http://www.larousse.fr).
[13] Enchaînement d'événements comportant trois étapes : début, milieu et fin.
[14] Elizabeth George, Mes secrets d'écrivain, Presses de la Cité, 2006
[15] La sémiotique est définie comme : « Science générale des modes de production, de
fonctionnement et de réception des différents systèmes de signes qui assurent et permettent une
communication entre individus et/ou collectivités d'individus. », Dictionnaire de français Larousse
(http://www.larousse.fr).

[16] « Dans l'analyse structurale du récit, terme qui définit un personnage en fonction de la place qu'il
tient dans la combinatoire de la narration. », Dictionnaire de français Larousse (http://www.larousse.fr).
[17] À noter que dans certaines versions du conte, il s'agissait d'une chaussure de vair (de la peau
d'écureuil gris). Bien que moins réaliste, c'est la chaussure de verre qui s'est finalement imposée,
notamment grâce à Disney.

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