Vous êtes sur la page 1sur 9

La phonologie autosegmentale

On a remis en cause la conception purement linéaire des représentations phonologiques sous-


jacentes pour proposer des théories non-linéaires. Goldsmith (1990) propose la phonologie
autosegmentale, en tant que théorie de la représentation des formes sous-jacentes. Elle a
développé un récit formel des travaux antérieurs (Bloch, 1948 ; Hockett,1955 ; Firth, 1948).

La phonologie autosegmentale consiste non seulement en plus d’une séquence linéaire de


segments, mais aussi chaque séquence linéaire constitue un niveau distinct. Le co-
enregistrement des éléments (ou autosegments) sur un niveau avec ceux sur un autre niveau est
représenté par des lignes d’association. Chaque trait est associé à un niveau. L’approche
autosegmentale ne représente pas les segments en tant que matrices de traits mais elle montre
les segments en tant que groupes reliés par des caractéristiques individuelles. Les segments sont
représentés par des listes verticales, connectées par des lignes.

k a n a

x x x x

C V C V

La suite de positions x est le squelette du mot. Ce sont des positions qui sont dépourvues de
tout contenu intrinsèque. Elles désignent ainsi le squelette de positions pures. Le matériel
occupant les positions est constitué de mélodies. La suite mélodique /kana/ représente le
contenu segmental du mot. La séquence CVCV est l’ensemble de positions occupées par les
mélodies qui constituent le gabarit du mot. Les relations entre les séquences d’objet se limitent
à deux types : association et désassociation.

L’association d’une mélodie est traduite par le simple fait qu’elle est phonétiquement réalisée,
et sa désassociation se traduit par le simple qu’elle n’est pas réalisée. On passe d’une théorie
unilinéaire fondée sur une seule séquence à une théorie plurilinéaire qui distingue au moins une
ligne mélodique et une ligne squelettale.

Pour cette raison, une représentation phonologique est représentée par plusieurs niveaux
distincts : le niveau squelettique, le niveau de segment, le niveau de synchronisation.
Chacun de ces niveaux présente une fonction linguistique différente (Goldsmith, 1976). Le
niveau autosegmental mais aussi le "niveau squelettique" contient les caractéristiques qui
définissent les segments articulés dans la représentation phonologique. Le niveau segmental
contient des entités qui sont affectées à des segments. Le niveau de synchronisation contient
des unités de temps définissant les longueurs de segments dans la représentation phonologique.
Ces unités de synchronisation sont généralement représentées par des X et sont affectées à des
segments.

Figure 3.9 : Représentation autosegmentale

A N A N → niveau squelettique

x x x x → Niveau de synchronisation

C V C V → niveau segmental

Conditions de bonne formation au niveau de l’approche autosegmentale

La phonologie autosegmentale inclut une condition de bien former sur les lignes d'association :
1-chaque élément d'un niveau qui peut être associé à un élément d'un autre niveau doit être
associé à un tel élément

2-Les lignes d'association ne se croisent pas, en cas de violation de la condition de la bonne


formation : ajouter ou supprimer le nombre minimum de lignes d'association afin de le satisfaire
au maximum. C’est le principe du non croisement des lignes d’association (NCL). La
directionalité de la propagation est une aussi une condition de bonne formation.

La phonologie autosegmentale et la syllabe

La syllabe est considérée un objet théorique utile pour les descriptions phonologiques. Le point
de vue commun est qu’une syllabe est un pic de proéminence qui est liée à une impulsion
thoracique, ou une impulsion de pression d’air. Dans une syllabe, la position correspond à
une voyelle s’appelle ″noyau″ (N) celle qui précède le noyau est dénommée l’attaque (A) et
celle qui suit le noyau est la coda (C) de la syllabe.
Figure 1: Représentation de la syllabe

A N C

L’opération qui consiste à décomposer en syllabes différentes les séquences phoniques de la


chaine parlée est la syllabation. Elle est une structure fondamentale qui est à la base de tout
regroupement de phonèmes dans la chaine parlée qui se fonde sur le contraste de phonèmes
appelés voyelles et consonnes.

Structure syllabique

La structure syllabique désigne l’organisation de la chaîne de phonèmes en une unité d’ordre


supérieur. Elle est considérée comme une taille maximale de syllabe pour une langue donnée.
Les syllabes de cette taille sont en principe admises dans cette langue. Comme, par exemple,
CVCC, CVC, CV en CH. La structure syllabique n’est qu’un cas particulier de l’approche
autosegmentale qui introduit les représentations non-linéaires Scheer (2015). Dans cette
perspective d’explication de la structure syllabique, la première structure multilinéaire de la
syllabe est représentée sous-forme d'arbre d’associations entre un nœud syllabique et les
segments.

Figure 2 : Structure multilinéaire de la syllabe


σ σ σ σ

CV CV C CVCV
Exemple d’analyse

σ σ σ σ

CV CV C CVCV

b ɑ̃ kɔ k bal e

Mais Clements & Keyser (1983) défendent une représentation qui rend compte de la structure
interne de la syllabe. Car la frontière syllabique découle de la structure linéaire de la syllabe
organisée par la concaténation de trois parties séquentielles : attaque, noyau, coda. L’autre
point de vue est que la syllabe est régie par des relations de dépendance entre le noyau et les
autres éléments segmentaux. On a argumenté en faveur d’une structure syllabique interne
organisée en sous-constituants : attaque et rime. La rime elle-même est composée de sous-
constituants : noyau et coda. La syllabe est donc représentée comme une structure à trois
couches autosegmentales, et un modèle commun est adopté : la représentation syllabique d’un
mot adoptera la forme représentée dans la figure qui suit :

Figure 3.13 : Différentes parties de la structure syllabique

1. Niveau syllabique σ

2. Niveau sub-syllabique 1 A R

3. Niveau sub-syllabique 2 NC

Le niveau syllabique qui est le niveau même de la syllabe. Le niveau sub-syllabique1 qui
comporte l’attaque et la rime. Le niveau sub-syllabique 2 qui se compose du noyau et de la
coda. Les constituants syllabiques plus répandue sont : l’attaque et la rime. L’attaque est une
consonne ou un groupe de consonnes initial ; elle peut être simple ou branchante. La plupart
des langues autorisent également les attaques vides de syllabes mais on parle dans ce cas d'un
trait structurel marqué. Autrement dit, même vide, l'attaque d’une syllabe tend à être comblée
par un son consonantique lié au contexte.

La rime est l'ensemble comprenant le noyau vocalique de la syllabe, qui peut être seul, dans le
cas d'une syllabe ouverte ou bien associé à une coda formée de consonne. La coda, quant à elle,
est un élément facultatif de la syllabe. Elle est constituée d'une ou de plusieurs consonnes. Sa
sonorité, à l'inverse de l'attaque, est descendante. Une syllabe qui possède une coda est une
syllabe fermée : VC, CVC, CVCC sont des syllabes fermées.

L’approche autosegmentale décompose la structure syllabique en rime légère et rime lourde.

Figure 3 : Décomposition de la syllabe en rime

Rime légère Rime lourde


R R

N N C

x x x

V V C

Structure autosegmentale du noyau syllabique et de l’attaque

Le noyau syllabique est une voyelle. Elle se constitue du segment possédant le plus haut degré
de sonorité de la syllabe. La syllabe la plus fréquente et universelle est de forme CV. La syllabe
minimale est de forme V. Ainsi, la segmentation en syllabes d'un énoncé ne peut être correcte
que si l'on connaît les contraintes de formation syllabique de la langue à analyser. Dans ce cas,
deux types de contraintes sont présentés :
1-La contrainte de qualité : les phonèmes se répartissent selon la place qu'ils occupent : en
mandarin, la coda ne peut être réalisée que comme une nasale [n] ou [ŋ]. Le même segment /ŋ/
ne peut cependant pas occuper la place de l’attaque. En CH, [ŋ] ne se réalise pas en attaque.
2-La contrainte de quantité consiste à établir la liste des contraintes syllabiques d'une langue.
Elle revient à indiquer le nombre et l'identité des segments par rapport aux éléments de la
syllabe. L’attaque peut être nulle et la coda absente : par exemple, la syllabe [a] vaut :
Attaque : vide Noyau : [a] Coda : inexistante

Figure 4 : Structure du noyau

Noyau Noyau branchant Noyau précédé d’une attaque

N N AN

x x x x x

V VV CV

La représentation d’une voyelle simple se passe d’un seul branchement : de la voyelle vers le
squelette et de ces positions squelettales vers le nœud noyau. Il suffit de brancher la voyelle
vers sa position pour rendre compte à la fois de sa place dans la syllabe.

Figure 5 : Structure de l’attaque

Attaque simple Attaque branchante

A A

x x x

C CC
Figure 3.19: Structures des attaques branchantes

1. [mwɛ]̃ "moi" 2.[trɛ]̃ "train" 3.[dlo] "eau" 4. [krɑ̃p] "crampe" 5.[atrap] "attraper"

1. σ 2. σ 3. σ 4. σ 5. σ σ

R R R R R

A N A N A N A N C N A N C

x x x x x x x x x x x x x x x x x x

m w ɛ̃ t r ɛ̃ d l o k r ɑ̃ p a t r a p

Figure 3.20 : Structure de la coda

Coda simple Coda branchante

C C

x x x

C CC

Les codas branchantes sont rares en CH. Sauf dans quelques cas d’exception en CH où l’on
peut trouver des codas branchantes :
Figure 3.21 : Structure des codas branchantes en CH

1. [bɔks] ″boxe″ 2.[taks] ″taxes″ 3. [klɑ̃ms] ″agrafeuse″ 4. [eklips] ″éclipse″

1. σ 2. σ 3. σ 4. σ σ

R R R R

A N C A NC A N C N A N C

x x x x x x x x x x x x x x x x x x x

b ɔ k s t a k s k l ɑ̃ m s e k l i p s

Structures de la syllabe fermée : VC, CVC

1. [bɑ̃n] "bande" 2. [bak] "arrière" 3. [sak] "sac" 4. [fiks] "fixe" 5. [plak] "plaque"

1. σ 2. σ 3. σ 4. σ 5. σ

R R R R R

ANC ANC ANC ANC A NC

xx x x x x x x x x xx x x x x x

b ɑ̃ n m ɑ̃ m v ɑ̃ n f i k s p l a k
Figure 6 : structure de la syllabe ouverte : CV, CCV

1. [vɑ̃] ″vent″ 2. [ble] ″blé ″ 3. [ate] ″athée″ 4. [ɑ̃grɑ̃] ″arrogant″

1. σ 2. σ 3. σ σ 4. σ σ

R R R R

A N AN NA N N A N

x x xx x x x x x x x x

v ɑ̃ b l e a t e ɑ̃ g r ɑ̃

Figure 7 : Longueur des segments dans la structure syllabique

a. Voyelle brève b. Voyelle longue c. Consonne simple d. consonne géminée

x x x x x x

a a d m
[a] →[ak] [aa] → [saa] [d]→[dat] [mm] → [lãmmɛd]

Vous aimerez peut-être aussi