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School of Theology at Claremont

TL 10011450480

A
a
DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE
DE LA LANGUE FRANÇAISE
DICTIONNAIRE
ÉTYMOLOGIQUE
DE LA LANGUE FRANÇAISE PAR

Oscar BLOCH :
Directeur d’études à l’École des Hautes Études

ET

W. von WARTBURG
Professeur à l’Université de Bâle
Membre étranger de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres

PRÉFACE D’A. MEILLET

QUATRIÈME ÉDITION REVUE ET AUGMENTÉE PAR


W. von WARTBURG

PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE


108, BOULEVARD SAINT-GERMAI N, PARIS

1964
DÉPOT LÉGAL
1e édition a 2€ trimestre 1932
4e — revueetaugm. 3 — 1964
TOUS DROITS
de traduction, de reproduction et d'adaptation
réservés pour tous pays
© 1932, Presses Universitaires de France
PRÉFACE

L'objet d’un dictionnaire étymologique est d'expliquer le


vocabulaire d’une langue. Mais il faut définir ce qu'on entend par
«expliquer ».
En principe, il n’y a pas de lien entre la forme du mot et la
notion qu’évoque le mot. Soit une phrase comme celle-ci : Le voisin
les
vanne son blé. Rien, dans les formes de voisin ou de blé, n’a avec
rapport. Le signe linguist ique est
notions qu’évoquent ces mots un
e, mais
arbitraire ; la valeur qu'il a est due, non au signe lui-mêm
tel est
à une tradition. Si l’on a recours à un mot donné, c’est que
l'usage.
:
Il y a un rapport de dérivation entre le nom de l'instrument
l'opéra tion. Mais ce nom de
le van, et le verbe vanner, qui indique
voisin ou
l'instrument, le van, est aussi arbitraire que le nom du
celui du blé.
, du
Ce caractère arbitraire, et par suite purement traditionnel
la langue ;
mot ne satisfait pas l'esprit des hommes qui emploient
que le signe lingui stique ne
ils réagissent souvent contre le fait
comme le
s'explique pas directement. Ainsi, dans le cas indiqué,
e, les gens
vent, en enlevant les balles, joue un rôle dans le vannag
ession n’a
. du peuple tendent à dire : le voisin venie son blé. L'expr
échapper au
pas grand sens ; mais On y aperçoit un effort pour
ce que l’on appelle une
caractère immotivé du signe. C’est
« étymologie populaire ».
souvent
Quand il veut serrer le sens d’un mot, Platon le met
que le mot
en rapport avec d’autres mots. Ce n’est pas à dire
: Platon consta te seulement
interprété procède du mot rapproché
peuven t être envi-
un rapport. Du reste plusieurs rapprochements
ents du Cralyle
sagés, dont l’un n’exclut pas l’autre ; les rapprochem
à l’époque
sont de cette sorte. Le mot elymologia qui apparaît
ochements de ce
hellénistique, indique l’art de trouver par des rappr
genre le « vrai » sens du mot. Il n'implique pas une histoire de mot.
L'étymologie du linguiste est autre chose. Const atant que le
d'une tradition,
mot est arbitraire et n’a sa valeur qu’en vertu
en chaque cas
le linguiste se propose de déterminer quelle a été
qui fait une étymologie ne
cette tradition. Le linguiste moderne
VIII DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

cherche pas le sens réel du mot ni même le sens qu’il a eu dans


le passé, mais s’efforce de suivre l’enchaînement des faits de diverses
sortes par lesquelles le mot a pris sa forme et sa valeur. En pareille
matière, le linguiste est historien et n’est qu’historien.
Toute histoire s'entend naturellement entre deux dates
l'usage des dictionnaires étymologiques français est de partir
du latin de l’époque impériale pour aboutir au français moderne.
L’étymologie du latin relève de la grammaire comparée des
langues indo-européennes, celle du français de la grammaire
comparée des langues romanes, donc de deux disciplines distinctes.
Ce n’est qu’une convention commode. Car on ne réussit à faire
l’étymologie du latin que par la comparaison avec des langues
diverses, souvent lointaines ou mal connues. On connaît bien
l’histoire du latin credere, d’où le français croire. Mais pour la
faire, il faut rapprocher des formes de vieil irlandais et de sanskrit.
La tâche des romanistes est assez lourde pour qu’on ne leur demande
pas de manier les anciens textes celtiques et les anciens textes
indo-iraniens. D'ailleurs les rapprochements de ce genre seraient
inaccessibles à la plupart des lecteurs. Pour faire comprendre
des rapprochements sûrs comme celui de granum du latin (fran-
çais grain) avec korn de l’allemand et corn de l'anglais, et avec
zerno du russe, ziarno du polonais, il faudrait trop d'explications.
On renverra donc aux dictionnaires étymologiques du latin le
lecteur curieux de l’histoire ancienne des mots latins : un diction-
naire étymologique du latin d’A. Ernout et d’A. Meillet est main-
tenant paru.
Assurément il est dommage que des considérations pratiques
ne permettent pas de tracer jusqu’au passé le plus lointain qu’on
puisse atteindre — dans les meilleurs cas le troisième millénaire
avant l’ère chrétienne — l’histoire des mots français. Il aurait été
intéressant de montrer comment le latin pater que continue le
français père est un mot du plus ancien vocabulaire indo-européen
et comment ce mot désignait moins l’homme qui a engendré des
enfants que le chef de famille. A propos de hors (de-hors) qui
représente foris du latin, il n’aurait pas été inutile de montrer
que le latin fores ne désignait pas la porte matérielle, mais l’entrée
de l’ensemble que constituait la maison indo-européenne avec
son enclos : être hors, c’est être de l’autre côté de l'entrée de
l’enclos ; on voit que c’est le sens du mot indo-européen représenté
par fores du latin qui rend compte de la façon dont s’est constituée
une expression adverbiale du français. Bien des lecteurs auraient
appris avec curiosité que le mot vin, qui continue vinum du latin,
n’est pas du vieux fonds du vocabulaire indo-européen et que, avec
PRÉFACE 15€

la culture de la vigne, les Romains ont reçu ce mot des vieilles


civilisations méditerranéennes que révèlent les fouilles récentes.
Ces civilisations ont enrichi de nombreux mots le vocabulaire.
Il suffit de l'indiquer ici une fois pour toutes.
Nombre de mots latins ont été pris au grec qui a fourni à
Rome une large part des usages de la vie civilisée et, par emprunt
pur et simple ou par traduction, le principal du vocabulaire de la
culture intellectuelle. Des mots comme peine ou comme machine
sont en français d’origine latine ; en latin, ils étaient d’origine
grecque. La valeur philosophique du latin causa se retrouve dans
le français cause ; en latin, elle était due à ce que causa avait absorbé
les sens d’un mot grec, de même que le mot parlement du français
est de formation française, mais doit le sens politique qu'il a
d'ordinaire aujourd’hui à l'emploi du mot anglais correspondant.
De même que l’histoire du vocabulaire français, l’histoire du
vocabulaire latin est compliquée. Le présent dictionnaire fait, en
général, abstraction du passé des mots latins qu’il prend comme
points de départ. Mais c’est seulement pour des raisons de commo-
dité, des lecteurs comme des auteurs, que l’on a ainsi, suivant une
habitude établie, limité l'exposé.

Les faits historiques sont par nature singuliers ; ils résultent


de concours de circonstances qui ne se reproduisent pas deux fois
d’une manière identique et dont, par suite, on ne peut faire état
que si des témoignages les font connaître. On ne devine donc pas
une étymologie ; on la détermine par des témoignages exprès sur
le passé des mots ou grâce à la méthode comparative qui permet
de suppléer, en partie, à l’absence de témoignages.
Sans les procédés comparatifs, l’histoire des mots serait dans
la plupart des cas impossible.
Soit le mot français jeu. On sait que le français est une forme
considérablement altérée, du latin, et que le provençal, l'italien,
le roumain, l’espagnol, le portugais sont des formes, plus ou moins
altérées, et autrement altérées, de la même langue. Les mots de
même sens sont en provençal joc, en italien giuoco, en roumain
joc, en espagnol juego, en portugais jogo ; tous ces mots font appa-
raître une consonne médiane de type guttural et plusieurs
d’entre eux une voyelle finale articulée du côté arrière du palais ;
la concordance avec le latin iocum en devient évidente. Le
traitement de —-ocum est le même que dans le cas de focum
français feu, provençal foc, italien fuoco, roumain foc, vieil espagnol
huego, portugais fogo. Quant au fait que l’i consonne initial
est représenté en français par j-, il est général dans notre
X DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

langue : iumentum est représenté par jument, iuncum par jonc, et


ainsi toujours. Comme le sens du latin jocus subsiste dans le français
jeu et que le mot jeu se lit dès les plus anciens textes français, 1l
n’y a pas à douter que jeu ne continue simplement le latin Jocum.
Si l’histoire de tous les mots se développait dans les mêmes
conditions, le problème serait relativement simple. Mais, en réalité,
chaque mot a son histoire qui lui est propre.
Soit le latin folium; ce mot est représenté par feuille en
français, folha en provençal, hoja en espagnol, folha en portugais ;
pour rendre compte de la forme et du sens de ces mots, il faut
considérer que la forme du nominatif-accusatif pluriel neutre latin,
folia, concordait avec celle des féminins en —a ; folia « feuilles »
a servi en français à désigner la feuille.
Soit maintenant le mot latin oleum, qui aboutissait en roman
à olium; le français a huile, le provençal oli, l'italien olio,
le portugais oleo (l'espagnol a olio et oleo, mais le mot populaire
est aceile, d'origine arabe). C’est qu'il s’agit d’un objet de
commerce dont le nom s’est transmis autrement que le terme folium
de la langue courante. On est ici en présence de deux mots dont
les histoires ne sont pas comparables entre elles.
Le latin oleum désignait l'huile extraite de l’olive. Or, en
français, dès le début, huile a désigné tout produit gras liquide,
quel que soit le corps d’où il est issu : peu de Français du Nord
ont connu autrefois l'huile d’olive. Aujourd’hui huile désigne de
plus des produits gras, extraits du pétrole, et qui servent à
graisser des machines. Huile a donc en français un sens beaucoup
plus étendu que le latin oleum. En latin, oleum et oliva sont des mots
d’origine grecque ; et, en grec, elai{w)on et elai[w)a désignent,
l’un, un produit, l’autre, le fruit dont le produit est extrait. Qui
ne connaîtrait pas les faits grecs et latins ne saurait expliquer les
origines lointaines du nom de l’ « huile ».
Dans des cas tels que ceux-ci, on aperçoit une continuité de
forme et de sens. Mais, souvent, il s’est produit des accidents que
rien n’autorise à supposer si quelque témoignage historique n’avertit
de ce qui est arrivé.
Aïnsi le nom du « foie » ne continue pas le nom latin iecur, qui,
du reste, n’a survécu dans aucune des langues romanes. Or, si l’on
cherche le mot foie dans le Dictionnaire élymologique des langues
romanes de M. Meyer-Lübke, on constate qu'il figure sous le
mot grec sykôton, bien qu'aucune forme d’aucune langue romane
ne repose directement sur sykôton et bien que ce mot grec signifie
« fourré de figues », ce qui, à première vue, n’a rien de commun
avec le nom du « foie ». Il faut savoir que, à l’époque impériale,
PRÉFACE NT

on engraissait les oies avec des figues, ce qui rendait le foie


de ces animaux particulièrement délicat. C’est un terme de cuisine
qui a été généralisé pour désigner le « foie ». Mais le mot a été
latinisé de manière à faire apparaître le nom ficus de la « figue » ;
cette latinisation, qui ne date pas de l’époque du latin classique,
a eu lieu de façons diverses dans les diverses parties du domaine
latin : l’? de ficus n'apparaît que dans une partie de l'Italie, au
sud de la Toscane, si bien que l'italien classique a fégato, et, de
même, le français a foie, qui exclut un ancien tr, au contraire, les
parlers italiens du Nord ont le représentant de t, ainsi en piémon-
tais fidik, et l’on a de même dans les parlers sardes, calabrais,
siciliens fikalu, et, dans la péninsule hispanique, en espagnol
higado, en portugais figado; l’accent est sur la seconde syllabe
de la forme ancienne du mot dans le vénitien figéo et le roumain
ficät. Si l’on jette les yeux sur la carte « foie » de l’Aëlas linguis-
tique de l'Italie et de la Suisse méridionale de MM. Jaberg et Jud,
on comprend comment le nom du « foie » peut être fourni par le
nom d’un plat cuisiné : le foie est souvent nommé dans l’Italie du
Nord-Ouest frikasa (dont on trouve le correspondant de ce côté-ci
des Alpes, d’après l’Atlas linguistique de la France de Gilliéron)
et frilüra dont le sens originel est évident et qui, du reste, ne
désignent encore parfois que le foie des animaux.
En se transmettant d’une langue à l’autre ou de la langue
commune à des langues techniques ou inversement, les mots
prennent des sens nouveaux. Un mot grec comme parabolë à
servi à indiquer le fait de mettre un objet à côté d’un autre. La
langue de la rhétorique y a recouru pour désigner les comparai-
sons. Or, dans l'Évangile, ce mot a été employé pour désigner
les allégories par lesquelles, en nombre de cas, le Christ donne son
enseignement. Les chrétiens de langue latine en ont fait parabola,
mais il est apparu ainsi que parabola est la « parole » du Christ. La
langue commune a donc employé le mot avec le sens de « parole »
du Christ, et, comme c’est la « parole » par excellence, avec le sens
général de « parole ». L'accent tombant sur ra, lo de bo a cessé de
se prononcer, et parabola a passé à la prononciation parabla, où, en
latin de basse époque, le b était spirant ; ainsi s'expliquent paraula
du provençal, parola de l'italien et parole du français. De là est
sorti le verbe dérivé parler. Dans beaucoup de parlers, ! et r ont
interverti leurs places, et l’on a ainsi palabra en espagnol et
palavra en portugais. Le mot espagnol a été pris par les coloniaux
pour désigner les conversations tenues avec les indigènes des
pays colonisés, d’où palabre en français. L'histoire de ces mots
s'explique ainsi par l’action de la rhétorique grecque ; et elle
XII DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

manifeste la grandeur du rôle qu’a joué le christianisme dans le


développement des langues romanes.
Il y a des cas plus singuliers, surprenants. L'un des plus imprévus,
connu depuis Ménage, est celui du mot lésine. C’est la francisation
du mot italien lesina « alêne de cordonnier ». Mais, en italien,
lesina ne s'emploie pas exactement au sens d’avarice sordide qui
est celui du mot français, et, en français, lésine n’a jamais le
sens technique du mot italien. Ce qui rend compte du sens,
c’est qu’un écrivain italien a publié au cours du xvi® siècle une
sorte de satire sur l’avarice ; il y feint qu’un groupe d’avares
aurait fondé une société et aurait fait en commun l’achat d’une
alêne pour ravauder les chaussures des membres de la compa-
gnie, d’où le nom de Compagnia della lesina. Le livre a été traduit
en français, et de là vient lésine; le satiriste Régnier a
encore la forme italienne lesina. Quand des aventures de cette
sorte arrivent à des mots, sans qu’on en soit averti par des
témoignages, on ne saurait évidemment les deviner.
Sans doute il y a quelques onomatopées évidentes comme cou-
cou. Maïs il est exceptionnel qu’elles aboutissent à fournir des
mots à la langue générale. Sans doute le type cocorico, dont les
langues diverses ont l’équivalent, paraît avoir donné coq qui, dans
une partie de la Gaule romane, et de là en français littéraire, a rem-
placé le représentant du latin gallus ; mais on n’aperçoit que peu de
cas pareils. Sans doute aussi, l’usage populaire joue avec les mots,
et il résulte de là des variations qui ont lieu suivant des modèles
plus ou moins vagues comme bouffer, bâfrer, brifer ; mais ces forma-
tions sont pour la plupart instables et en général n'arrivent pas
à se fixer; il faut des circonstances spéciales pour qu’elles soient
admises dans la langue générale.
Ce ne sont là que des exemples sur lesquels, par une heureuse
fortune, on est renseigné. Mais il y a beaucoup de cas sur lesquels
manque toute donnée.
Tout mot résulte d’une tradition, connue ou inconnue. Il est
rare que des mots soient jamais créés arbitrairement. On a
souvent cité comme exemple d’un mot fabriqué de toutes pièces
gaz qui est en effet dû au Flamand Van Helmont ; mais Van
Helmont ne l’a pas inventé, il a employé le mot chaos pour donner
un nom à une notion particulière, celle de « substance subtile unie
aux corps » et en effet, dans la prononciation flamande de 9,
gaz est près de chaos, avec un ch prononcé spirant. Depuis que
l’on a trouvé le témoignage de Van Helmont lui-même, il n’y a sur
l’origine de gaz aucun doute; mais, avant la découverte du
témoignage, personne ne s’était avisé de cette hypothèse.
PRÉFACE DCUDT

Il y a donc, derrière chaque mot, un passé complexe ; mais ce


passé est souvent inconnu. À lire certains dictionnaires étymolo-
giques, on croirait que les auteurs ont été condamnés à donner pour
chaque mot une étymologie. Rien de moins scientifique. Il faut
louer l’auteur du présent ouvrage d’avoir souvent professé qu'il
ne connaissait pas l’histoire de tel ou tel mot.
Tout vocabulaire exprime une civilisation. Si l’on a, dans une
large mesure, une idée précise du vocabulaire français, c’est qu'on
est informé sur l’histoire de la civilisation en France.
Dans l’ensemble, le vocabulaire général du français continue
simplement le vocabulaire du latin, parce que, à la suite de la
conquête romaine et de la christianisation qui s’en est suivie, la
civilisation romaine a été adoptée en Gaule. C’est pour cela que
paler et maler, que bibere et dormire, que canis et bos (accusatif
bovem) se sont maintenus sous les formes père et mère, boire et
dormir, chien et bœuf, et ainsi de la plupart des principaux termes
de la langue commune. Il n’y a presque aucun mot de ce genre
dont l’histoire ne soit pas connue.
Par suite de la ruine de la civilisation antique, il est arrivé que
des termes du vocabulaire familier ou même vulgaire aient
prévalu sur les mots de la langue littéraire.
Comme on a, sur ce vocabulaire, nombre de données, on
s'explique une forme telle que oreille : la langue de niveau élevé
avait auris, mais des textes de caractère populaire montrent que
leur parler avait auricula, oricla : c’est cette forme « vulgaire » que
continue le français oreille comme l'italien orecchia. Le verbe du
latin classique esse (ou vulgairement edere) n’est pas représenté en
français ; mais le terme vulgaire, presque argotique, manducare,
a subsisté sous la forme manger, et il est devenu le terme normal.
Gardant ce qu’elle pouvait de la civilisation romaine, mais
dominée pendant plusieurs siècles par des envahisseurs germani-
ques, la France a passé par une période de bilinguisme chez
beaucoup de sujets, et les plus influents. Le latin s’est maintenu,
avec des changements profonds. Mais il a pénétré des mots germa-
niques ; jusqu’à des verbes comme choisir, haïr ont été pris au ger-
manique. Et même des mots latins ont subi l’influence germa-
nique : si l’initiale de allus n’est pas traitée comme celle de aller,
et si l’on dit : le haut pays, un haut personnage, tandis que l’on
dit : l’autre pays, un autre personnage, c’est que, à l’époque franque,
allus a subi l'influence du synonyme germanique commençant par
h : hoch de l’allemand, high de l'anglais.
| Même après que le français s’est écrit pour des usagers profanes
et mondains, le latin ancien est demeuré la langue de l'Église, du
XIV DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

droit, de la culture intellectuelle. Aussi les mots qui se rapportent


aux choses de la pensée ont-ils des formes prises au latin écrit,
d’abord fortement adaptées comme dans siècle ou empire, puis de
plus en plus proches de la forme écrite. Le latin causa a survécu
dans la langue courante sous la forme chose ; mais, en tant qu'il
est terme de philosophie ou de droit, il est de la forme cause,
légère francisation de la forme de langue écrite causa. Ainsi la
plus grande part du vocabulaire pour les notions d'ordre intellec-
tuel se compose de mots latins légèrement francisés, comme nation
ou nalure ; et même un grand nombre de verbes, maintenant usuels,
ont été pris au latin écrit : agir ou dominer par exemple. A côté
des verbes qui ont été conservés sous les formes qu'ils avaient prises
dans la langue parlée, les noms d’action et d’agent ontordinairement
des formes provenant de la langue écrite : en face de lire, on a ainsi
lecture et lecteur ; en face de recevoir, réception, récepteur, réceptacle ;
en face de joindre, jonclion ; en face de vaincre, victoire ; en face de
devoir, débiteur, etc. Le français est allé jusqu’à faire du substantif
personne, venu de la langue écrite, l’un de ses mots négatifs, à
côté de rien et de Jamais.
Intime au moyen âge et encore aux xvi-xviie siècles, le contact
du français commun avec le latin écrit ne s’est relâché qu’à l’époque
moderne ; il n’a pas été perdu jusqu’à présent, et, pour désigner une
invention récente, on recourt encore à un dérivé en —-ation, de type
latin littéraire, du nom latin de l’oiseau avis, d’où aviation. On ne
saurait rien tirer de oiseau.
L'action du latin écrit est allée si loin que, en plus d’un cas, le
mot traditionnel tend à sortir de l’usage et ne survit que dans
la langue des gens cultivés ou dans la littérature, tandis que
le mot venu de la langue écrite est courant : le représentant fréle
de fragilis est aujourd’hui un mot littéraire ; la forme à peine
francisée de fragilis, fragile, est un mot que tout le monde emploie.
Un verbe pris au latin écrit, pensare, d’où penser, est devenu
en français si usuel qu'il a pris une importance supérieure à celle
de peser, resté toujours un peu technique. Jdée, qui vient du grec,
est, dans bien des cas, un mot vulgaire : faire à son idée.
Les mots traditionnels ont perdu de leur vitalité parce que les
déviations de formes voisines ont tendu à les isoler : on pense si peu
à un rapport entre poids et peser — qui formaient anciennement un
groupe — que les clercs ont pu, d’après un rapport imaginaire avec
pondus du latin, orner le mot pois de son d purement orthographique.
Comme les noms d’action ou de qualité sont en général pris à la
langue écrite, un adjectif comme fréle n’est accompagné d’aucun nom
de qualité. Mais, à côté de fragile, on a pris au latin écrit fragilité.
PRÉFACE SV

Il résulte de-là que les mots français ne se groupent guère


en familles. Le substantif cause et le verbe causer sont aujourd’hui
indépendants l’un de l’autre. Il faut être latiniste pour apercevoir
qu’il y a un rapport entre l’original latin du mot cause et les ori-
ginaux de accuser, excuser, récuser. Il ÿ a chance pour que le pro-
verbe qui s'excuse s’accuse ait été forgé par des gens qui savaient
le latin. L’isolement est l’état normal du mot français. En règle
générale, il faut se reporter au latin pour comprendre les rapports
que soutiennent entre eux les mots français. Le français d’aujour-
d’hui ne saurait dire quel rapport il y a entre devoir et detle, delle
et débiteur, débit (d’un compte). Aussi les mots qui remontent à
un même groupe du latin écrit perdent-ils souvent le contact
les uns avec les autres : la langue du droit a maintenu le contact
entre transiger et transaction, mais exaclion est loin de exiger.
Le français n’en éprouve guère de gêne. Car même les mots
traditionnels, où le latin écrit n’est pas intervenu, se sont dissociés
les uns des autres par suite des changements profonds de la pro-
nonciation. On ne pense guère que graine et grain sont, étymologi-
quement, presque le même mot ; et l’on ne pense pas du tout que
grenier et grange sont des dérivés du mot qui est devenu grain
et graine. Si les mots lecteur et lecture, pris au latin écrit, sont
loin de Lire, le mot de vieille forme traditionnelle leçon n’en est pas
plus près pour la forme, et il en est loin pour le sens. Il ÿ a en fran-
çais aussi peu de « familles de mots » qu'il est possible. Tel est l’ensei-
gnement le plus clair qui ressort d’un dictionnaire étymologique.
Les mêmes mots du latin écrit ont souvent été pris plusieurs
fois, et avec des sens différents : impressio a fourni une impression
qu’on ressent et l'impression d’un imprimeur. Ce sont en français
deux mots indépendants, et dont ni l’un ni l’autre n’a rien de
commun avec empreinte. Exprimer est pris à l’exprimere du
latin ; mais il y a deux verbes distincts dans exprimer un senti-
ment et exprimer le jus d’un citron. Chaque technique a recouru
au latin pour son compte sans se soucier de ce que faisaient
les autres. Dans chaque technique, un même mot initial prend
une valeur particulière qui va jusqu’à en faire proprement un mot
nouveau. Un même mot latin nola fournit au français une série
de termes techniques qui n’ont de commun les uns avec les autres
que la forme nole : ainsi, dans prendre une note, une nole de bas
de page, prendre note, remettre une nole diplomatique, la nole du plom-
bier, une note musicale (d’où une nole personnelle). Ces valeurs
techniques sont toutes entrées dans la langue commune, sans se
‘rapprocher les unes des autres.
En somme, le vocabulaire français est un vocabulaire intel-
XVI DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

lectuel dont le latin écrit a fourni la plus grande part. Depuis la


Renaissance 1l s’y est joint des formations grecques : en face d’œul,
les formations sont les unes tirées du latin écrit, ainsi oculaire,
oculiste, les autres du grec, ainsi ophialmie, ophtalmique. Il faut des-
cendre bas dans la langue populaire pour trouver un dérivé tiré
du mot français œil, yeux, à savoir zyeuler. Dans le français de niveau
littéraire, les dérivés nouveaux s’obtiennent en recourant à des for-
mations latines ou grecques. Il faut penser au latin pour comprendre
le lien entre cœur et cordial, au grec pour le rapport entre cœur
et cardiaque. On voit par là combien le français est par essence
une langue de civilisation.
Mais le fonds traditionnel du français appartient à des hommes
qui vivaient à la campagne et de la campagne. Plusieurs verbes qui
avaient en latin un sens général : ponere, cubare, trahere, exclaudere
(remplaçant excludere) n’ont plus en français qu’un sens particulier
propre à la vie rurale : pondre, couver, traire, éclore. Le seul sens
tout à fait usuel du représentant saillir de salire est un sens rural :
le représentant cheplel (où le p, écrit mais qui ne doit pas se pro-
noncer, est dû à un pédantisme de juristes) de capitale s'applique à
une notion rurale. Sans la masse des emprunts au latin écrit, le
vocabulaire français serait mal fait pour les choses de l'esprit.
Mais, grâce au fait que le latin lui a apporté tout prêt un vocabulaire
philosophique et juridique, le français s’est trouvé propre à rendre
à peu près toutes les idées.
Des emprunts aux langues voisines ont complété ses ressources.
L’arabe avait fourni à l'espagnol des termes savants que le français
a adoptés, ainsi un mot comme algèbre. L'italien a fourni des mots
comme infanierie, fantassin où ambassade. Plus tard, l’anglais a
enrichi la langue de la politique : un mot tel que budget — que
l'anglais avait pris au français avec le sens de « bourse » — est dû
à l'anglais. À côté du vocabulaire savant d’origine latine, le français
à ainsi acquis beaucoup de termes à demi techniques qui sont entrés
dans la langue courante. Des langues lointaines n’ont fourni que
peu de noms d’objets, et en grande partie à travers des influences
étrangères, espagnoles, portugaises ou anglaises, notamment.
On sait comment tous ces mots ont pénétré dans la langue.
Beaucoup des influences de civilisation dont ils procèdent sont
connues dans le détail. Le vocabulaire courant se nourrit de
termes pris aux diverses techniques, souvent aux techniques
intellectuelles : théologie, droit, médecine, rhétorique, sciences.
Grâce à cette circonstance, la plupart des mots essentiels
d’une langue comme le français ont une histoire plus ou moins
complète. Mais les termes des métiers et les mots provenant de
PRÉFACE NXVII

la langue populaire sont souvent sans histoire : si l’on ne savait


que les alchimistes se servaient du bain-marie et que Marie La
Juive à passé pour pratiquer l’alchimie à l’époque alexandrine,
personne ne pourrait expliquer le terme bain-marie. Dans son
dictionnaire, qu'on admire d'autant plus qu’on le connaît davan-
tage, Littré s’est posé la question sans la résoudre. On trouvera
ici l'explication du terme. Faute de renseignements sur l’alchimie,
tout essai d'explication serait vain.

Un dictionnaire étymologique du français est, on le voit,


prématuré. M. von Wartburg a dépouillé tout ce qu'il a pu trouver
sur le vocabulaire des parlers locaux français et un nombre consi-
dérable de dictionnaires français ; on trouve dans son grand
Etymologisches Würterbuch, en cours de publication, mais dont la fin
se fera longtemps attendre, les résultats de ce travail immense. Mais
le reste est à faire.
Il faudrait d’abord un dépouillement des textes français
médiévaux et modernes équivalant, au moins, à ce qui a été fait
pour le dictionnaire anglais de Murray. Depuis l'œuvre grandiose,
mais toute individuelle, de Littré, il n’a été fait aucun dépouillement
d'ensemble. Il est scandaleux qu'il n’ait pas été mis à la dis-
position des historiens français les ressources nécessaires pour faire
un dictionnaire. Le précieux dictionnaire du xvr® siècle de M. Huguet
n’est publié qu’en partie.
Il faudrait, de plus, un dépouillement complet des textes latins
du Moyen âge, de la Renaissance et même du xvire siècle : personne
ne peut prévoir quand simplement le dictionnaire de Du Cange
aura été refait.
Il faudrait, enfin, un relevé de tous les termes de la civilisation
européenne, avec les formes particulières prises dans chaque
langue, car cette civilisation est une, et au fond elle a un voca-
bulaire un : le travail n’est pas commencé. L'extension du moulin
à eau que n’a pas connu l’antiquité a donné au groupe de molinus
une importance qu'on n’aperçoit que si, en même temps qu'à
‘français moulin et meunier, on pense à Müdhle et Müller de l’alle-
mand, à mill de l’anglais.
L'auteur de ce dictionnaire s’est efforcé d'indiquer l’état actuel
des connaissances et, par là, de répondre à un besoin pressant du
public français. Personne ne sait mieux combien ces connaissances
sont actuellement insuffisantes et quel travail reste à faire. Il faut
espérer que la présente publication, en mettant en évidence les
lacunes de la science actuelle, imprimera un élan à la recherche.
A. MEILLET.
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INTRODUCTION

Le Dictionnaire élymologique que nous publions aujourd’hui


a été rédigé à l'intention du public non spécialiste.
On ne trouvera ici que le vocabulaire usuel du français contem-
porain au sens large du mot : ce vocabulaire comprend de
nombreux mots techniques, auxquels l’usage et la langue écrite
donnent une diffusion. On a écarté les mots archaïques, conservés
dans les dictionnaires comme témoignages de la langue des grands
siècles de notre littérature, mais sortis de l’usage ; toutefois nous
avons maintenu ceux de ces mots qui sont encore de quelque emploi
dans la langue littéraire ou ceux qui expriment des notions histo-
riques connues, tels que alleu, fief, leude, etc. On a en outre écarté
les mots appartenant à des techniques périmées ou employés par
les seuls techniciens. Ces mots dont les dictionnaires fourmillent
offrent peu d'intérêt pour le lecteur non spécialiste, qui souvent ne
les connaît pas ; de plus, l’histoire en est fréquemment mal connue
et l’étymologie en conséquence obscure. Les spécialistes qui ont
quelque raison de les étudier les trouveront dans des recueils plus
complets que le nôtre. Par contre, nous avons accueilli beaucoup
de termes du français populaire, usuels dans la langue parlée, bien
qu'ayant à peine trouvé place dans les dictionnaires ; mais nous
laissons de côté l’argot proprement dit, souvent passager, et qui
pose des problèmes délicats ou insolubles dans l’état de nos connais-
sances. Notre choix soulèvera des critiques : on regrettera l’absence
de tel mot, on jugera inutile la présence de tel autre. Il fallait
choisir, et, en cette matière, tout choix comporte de l'arbitraire.
La définition des mots n’est pas donnée : un dictionnaire éty-
mologique n’est pas un dictionnaire de l’usage. Nous supposons
que celui qui consultera notre ouvrage aura sous la main un diction-
naire courant où il trouvera les sens dont nos articles exigent la
connaissance. Nous n’avons fait exception à cette règle que pour
quelques cas particuliers ou pour distinguer les homonymes. En
ce cas même, notre définition ne donne que les indications
DICT. ÉTYM. . ba
XX DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

nécessaires pour distinguer ces homonymes. Le mot est envisagé


dans ses sens fondamentaux : les acceptions techniques ne le sont
que quand elles demandent des explications. ,
Notre méthode est historique : l’étymolog ie ne consiste que
dans l’histoire des mots et des notions qu’ils expriment . Cette
méthode a fait ses preuves. Loin d’avoir la prétention de la renou-
veler, nous avons essayé de l'appliquer avec le plus de rigueur
possible. Trop de gens croient que faire l’étymologie d’un mot,
c’est l’interpréter, le rapprocher d’un mot d’une autre langue avec
une ingéniosité plus ou moins subtile ; c’est à leurs yeux à peu
près un jeu de devinettes. Or, plus une étymologie est une devi-
nette, moins elle a d'intérêt, faute de preuve. Bien entendu, on
ne confondra pas avec cette méthode ou plutôt cette absence
de méthode l'hypothèse fondée sur l’examen des faits donnés;
la valeur d’une hypothèse est relative, mais on ne peut s’en
passer.
Établir l’étymologie d’un mot, c’est, dans la mesure du possible,
faire l’histoire de ce mot, c’est mettre en évidence les conditions
particulières de sa présence dans la langue et les faits de civilisa-
tion auxquels cette présence répond. Une histoire est nécessairement
comprise entre deux dates. Ici, l’on n’envisage l’histoire des mots
qu'entre le latin et l’époque actuelle, sans envisager l’histoire des
mots latins avant l’époque romane ; pour rendre compte de chien
on prend pour point de départ le latin canis, sans se demander
comment ce mot est parvenu en latin.
En dehors des mots qui ont toujours été usités depuis que le
latin s’est implanté en Gaule, nous avons daté tous les mots.
La date de l’apparition d’un mot est un des points principaux
de son histoire. C’est une des heureuses innovations du Dic-
lionnaire général de la langue française, de Darmesteter-Hatz-
feld-Thomas, que d’avoir donné des dates précises. Nous n’avons
donc fait que suivre cette voie; mais nous avons apporté deux
améliorations. Le Dictionnaire général se contente souvent, depuis
le xvie siècle, de donner le nom du premier auteur, qui s’est servi
du mot et, pour le xix®, du mot néologisme : nous avons essayé
de donner des dates pour toute époque. D'autre part, il donne
souvent la date du premier exemple sans indiquer si le mot a
été usuel dès lors; nous avons signalé, dans la mesure du
possible, la date où le mot est vraiment entré en usage : c’est un
point important pour les mots repris au latin, qui l’ont souvent
été à plusieurs reprises et avec des sens et des succès différents.
Nous avons en outre tiré de nombreuses indications nouvelles des
travaux lexicographiques parus depuis la publication du Dic-
INTRODUCTION XXI

- lionnaire général. En dehors de relevés et d’études de détail, que


nous ne pouvons énumérer ici, nos principales sources ont été :
L'Histoire de la langue française de M. F. Brunot, dont les
tomes IIT, IV et VI contiennent un nombre considérable de dates
nouvelles ;
L’Altfranzôsisches Wôrterbuch de Tobler-Lommatzsch qui n’en
est malheureusement qu’à la fin de la lettre E et dont la publication
est très lente ;
Le Dictionnaire du XVIe siècle de M. Huguet, qui en est à la
lettre G ;
Les Transformations de la langue française pendant la deuxième
moïlié du XVIIIe siècle, de M. Gohin ;
L'important compte rendu du Dictionnaire général, de
D. Behrens dans la Zeïlschrift für franzôsische Sprache und Lilteratur,
en 1901, où sont utilisés plusieurs dictionnaires français-allemands :
Les dépouillements que M. Vaganay a publiés en 1913 dans
les Romanische Forschungen ;
Le Lexique du « Journal des Goncourt », de M. M. Fuchs :
Les importants ouvrages de M. L. Sainéan, surtout ceux qu’il
a consacrés au français populaire du xix® siècle et à l’argot ;
Les notes lexicologiques que Delboulle a publiées dans la Romania
et dans la Revue d'histoire littéraire de la France ; celles-ci s’arrêtent
à la fin de la lettre F; la suite, qui est inédite, est déposée à la
bibliothèque de la Sorbonne ; nous l’avons utilisée pour notre dic-
tionnaire et nous avons en outre relevé pour les lettres A-F les
dates nouvelles que fournissent des notes, également inédites,
recueillies par Delboulle après la publication de ses premières
notes.
Ces dates, cependant, sont la plupart provisoires : elles seront
modifiées par de nouveaux dépouillements. Mais telles quelles, elles
sont le premier jalon de la recherche étymologique. On ne s’étonnera
pas que certaines dates paraissent en contradiction avec la suc-
cession réelle des mots, qu’un dérivé ou un composé ait une date
un peu antérieure à celle du simple : c’est le résultat de l’insuff-
sance de nos connaissances. Nous espérons que nos lecteurs pren-
dront plaisir à rectifier ces données et voudront bien nous commu-
niquer le résultat de leurs découvertes. A la suite de la date, nous
avons ajouté le nom de l’auteur, quand c’est un grand écrivain
ou un écrivain dont le rôle a été considérable dans l'introduction
de mots techniques dans la langue : il eût été utile d'ajouter en
outre le titre de l’œuvre elle-même et l'indication du passage
d’où l’exemple est extrait ; mais nous avons dû y renoncer, faute
de place. Nous avons cependant cité des textes qui viennent à
XXII DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

l'appui d’une étymologie. Certaines dates reviennent souvent;


ce sont celles de dictionnaires, dont voici les principaux :
Robert Estienne, Dictionarium latinogallicum, Paris, 1538 ;
Dictionnaire français-latin, 1539 ; 2e éd., 1549;
Jehan Thierry, Dictionnaire français-latin, Paris, 1564 ;
Nicot, Thresor de la langue françayse, Paris, 1606 ; |
Cotgrave, À Dictionary of the French and English tongues,
Londres, 1611 ;
Monet, Inventaire des langues française et latine, Lyon, 1635
et 36; s
A. Oudin, Recherches italiennes et françaises, Paris, 1640;
seconde partie, 1642;
Richelet, Dictionnaire, Genève, 1680;
Furetière, Dictionnaire universel, La Haye, 1690 ; 2e éd., 1701 ;
Th. Corneille, Dictionnaire des Arts et Sciences, Paris, 1694;
Dictionnaire de l’Académie, 1694; 2e éd., 1718 ; 3e éd., 1740;
4e éd., 1762 ; 5e éd., 1798 ; 6e éd., 1835 ; 7e éd., 1878 ; 8e éd., 1932-35.
En outre éd. de l’an X (1802). Supplément.., 1836;
Savary, Dictionnaire du Commerce, 1723;
Encyclopédie (publiée sous la direction de Diderot), 1751-1771 ;
Encyclopédie méthodique (publiée par Panckouke), 1781-1832 ;
Dictionnaire de Trévoux, 1704 ; [721 ; 1732 ; 1743 ; 1752 : 1771 ;
Féraud, Dictionnaire critique de la langue française, Mar-
seille, 1737-88 ;
Gattel, Dictionnaire portatif de la langue française, Lyon, 1797 ;
Boiste, Dictionnaire universel de la langue française, Paris,
1800 ; 1803 ; 1808 ; 1823 ; 1834; 1841 ;
De Wailly, Nouveau vocabulaire français, 1801 ; 1806 ; 1808;
1818 ; 1826 ;
Landais, Dictionnaire général et grammatical..., Paris, 1834:
1836. Complément..., 1853;
Bescherelle, Dictionnaire national..…., 1845-46 (un fascicule allant
jusqu’à adulte a paru en 1843);
Legoarant, Nouveau dictionnaire critique, 1858 ;
Lillré..., 1863 et suiv. Supplément, 1877 ;
Larousse..., 1re éd. 1866 et suiv. ; en outre les autres éditions.

Parmi les autres dates qui reviennent fréquemment, on


signalera les suivantes :
1314 : Chirurgie de Mondeville, un des plus importants ouvrages
de médecine écrits en français au moyen âge.
Vers 1327, Jean de Vignay, auteur du Miroir historial, traduction
d’une partie du fameux Speculum majus de Vincent de Beauvais :
INTRODUCTION XXTIII

toutefois l’édition du xvie siècle dont s’est servi Delboulle contient


des interpolations ;
1372, Corbichon, la Propriélé des choses, qui est également une
traduction ; même observation que pour le précédent ouvrage ;
19503, Guidon en francoys, ou chirurgie de Guy de Chauliac,
le maître de Paré ;
1488, la Mer des histoires, sorte d’histoire générale du monde.
Nous considérons en principe le mot dans son usage actuel :
c’est d’après sa forme et son sens d’aujourd’hui que nous le datons :
nous ajoutons à la suite les modifications que cette forme et ce sens
ont subies, pour remonter au moment où le mot est entré dans la
langue. Mais nous n’avons pas été systématiques : ce mode d’exposé
n’a été appliqué que là où il nous a paru le meilleur.
Chaque mot a son caractère individuel. Nous avons essayé,
quand nous l’avons pu, de faire apparaître ce qui fait l'intérêt
propre de chaque étymologie.
Pour les mots d’origine latine, nous indiquons quelle valeur
chacun d’eux a eue en latin, de quel milieu il provient, quel mot de
la langue classique un mot populaire a remplacé et pourquoi.
D'autre part, pour ces mots qui continuent un usage latin sans
interruption, il est intéressant de savoir quel en est l’emploi dans
l’ensemble des langues romanes, s’ils ont été conservés partout ou
seulement dans une partie du domaine roman ; mais nous n’avons
cité en principe que les formes de l'italien, de l'espagnol et de l’ancien
provençal. Le catalan, le roumain, le portugais et les parlers rhé-
tiques (ou rhéto-romans) ne viennent à l’appui que de cas parti-
culiers. Il est non moins intéressant de connaître l’usage de ces
mots dans l’ensemble des parlers gallo-romans ; l'Atlas linguistique
de la France a été d’un secours inappréciable ; non seulement il
nous a permis d’être à la fois bref et précis; sans lui, cette
confrontation aurait été à peine possible.
Tout emprunt a sa raison d’être : nous avons tenté de la trouver.
Pour beaucoup de mots, la notion qu’ils expriment suffit à l’indi-
quer, et, pour d’autres, tels que les emprunts à l'italien au
xvie siècle, ils se rattachent à une cause générale qu’on ne pouvait
répéter à propos de chacun d’eux. Mais nous avons relevé les causes
particulières que les textes nous ont permis de retrouver ; car, si
l’histoire du vocabulaire est le reflet de la civilisation, l'emprunt
d’un mot ou d’un sens peut être dû à un accident imprévisible.
Il est légitime aussi et souvent indispensable d'expliquer étymolo-
giquement le mot emprunté dans la langue d’où il provient, car
cette étymologie contient plus d’une fois les raisons de l'emprunt.
L’étymologie n’intéresse pas seulement l'introduction d’un
XXIV DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

mot : dans le cours du développement, des accidents surgissent, des


innovations de sens dont il est non moins important de donner la
cause. Ceci est particulièrement nécessaire pour les mots repris au
latin, qui l'ont souvent été à deux ou trois reprises avec des accep-
tions différentes. La part de ces mots apparaîtra considérable : c’est
qu’en effet, le contact avec le latin n’a jamais été rompu. Le fran-
çais est la langue d’une société cultivée, et c’est sa principale qualité.
Les mots ont été groupés en familles ; sous le simple nous avons
placé les dérivés (on regrettera peut-être que nous ayons en général
négligé, pour économiser la place, les adverbes en -ment, qui avaient.
autant de titres à être relevés que les composés en re-) et les
composés : de ce fait l’article consacré au simple est parfois beau-
coup plus court que la liste des dérivés et des composés. C’est la
meilleure façon de rendre compte de la vitalité d’un mot en français.
Mais les dérivés ou composés qui ont été formés en latin, même s'ils
nous donnent l'impression de l’avoir été en français, restent à leur
place alphabétique. Un jeu de références permet de faire les rap-
prochements utiles. Ces références sont aussi complètes que pos-
sible; elles ne manquent que quand des additions ou des correc-
tions faites au dernier moment ont imposé des suppressions.
On sera frappé du grand nombre des étymologies qualifiées
d’incertaines ou obscures : nous n’avons pas voulu donner pour
acquis ce qui ne l’est pas, et nous avons indiqué pour quelles
raisons l'incertitude régnait encore sur telle ou telle étymologie.
Dans bien des cas nous aurions pu laisser de côté une explication
insuffisamment justifiée. Mais il nous a paru bon de montrer le
défaut d’une étymologie volontiers admise et le point d'arrêt de
nos connaissances, ce qui peut mettre en garde contre l'erreur.
Toutefois, il faut le dire, le progrès, en matière d’étymologie, dépend
essentiellement de la connaissance de l’histoire du lexique, et celle-ci
est liée à la constitution d'un dictionnaire général de la langue
française. Quand on constate combien d’étymologies sont éclair-
cies par un texte, par l’indication d’un observateur qui précise
les conditions particulières dans lesquelles un mot ou un sens s’est
introduit dans la langue, on conçoit quelles sources encore insoup-
çonnées sont cachées dans les auteurs non dépouillés. Certes il restera
toujours des étymologies inconnues ; il faudra toujours recourir à des
reconstructions de formes non attestées. Le gaulois, le prélatin, le
latin lui-même ne nous livreront jamais tous leurs secrets : des
mots même de date plus récente demeureront mystérieux. Mais un
grand dictionnaire apportera tant de faits nouveaux que notre
ouvrage sera en grande partie frappé de caducité. Nous espérons
que, du moins momentanément, nous aurons fait œuvre utile,
INTRODUCTION XXV

en mettant à la disposition du public cultivé le résultat du travail


qui a été fait depuis une cinquantaine d'années et même anté-
rieurement sur l’étymologie du français. En effet, les linguistes
ont été préoccupés de mettre en lumière le fait de civilisation qui a
provoqué tel emprunt ; ils se sont souciés de suivre les voies de
pénétration par lesquelles il a passé ; ils ont recherché les causes
psychologiques des innovations lexicales sémantiques, noté les
milieux sociaux qui ont été le point de départ d’un mot ou d’un sens:
tous ces points de vue nous ont été présents, et nous avons essayé
d’en profiter. Sous la forme du mot, nous avons poursuivi le
réel.
Dans un dictionnaire du genre de celui-ci, la bibliographie
n’avait pas de place : on la trouvera dans des ouvrages spéciaux,
mais nous avons l'intention, si notre tentative reçoit un bon accueil
et par conséquent répond aux besoins auxquels nous le destinons,
de publier un fascicule supplémentaire de bibliographie. Un
deuxième fascicule contiendra les mots français classés d’après les
langues d’où ils proviennent.
Un dictionnaire doit beaucoup à ses devanciers. Nous n’avons
pas indiqué à qui nous devons telle ou telle étymologie. Nous n'avons
pas non plus indiqué ce qui nous appartient en propre : les spécia-
listes reconnaîtront la part de chacun. Mais nous ne voudrions
pas passer sous silence ce que la science étymologique doit à
Ménage. On connaît ses défauts plus que ses mérites. Son erreur,
c’est celle qui se commet encore aujourd’hui et qui consiste à rap-
procher des formes ou à reconstituer des étapes disparues sans
s'appuyer sur l’histoire ; car on ne peut pas lui reprocher d’avoir
ignoré ce qui a été découvert au xix® siècle, à savoir la rigueur
des transformations des sons. Encore faut-il ajouter que les règles
qu’on a établies ne s'appliquent pas mécaniquement et qu’on est
exposé, en les utilisant sans prudence, à commettre de graves
erreurs. Mais Ménage avait des lettres, et savait se servir de ses
lectures : il a donné sur l’histoire particulière de nombreux mots
des renseignements précieux qui ont même parfois été oubliés,
pour le dommage de nos connaissances. C’est pourquoi nous avons
tenu à signaler à plusieurs reprises dans le cours de notre ouvrage
la part qui lui revient.
Le rôle des deux collaborateurs a été le suivant : M. O. Bloch a
rédigé tout le dictionnaire, M. von Wartburg l’a révisé, en se
fondant sur l’immense matériel de fiches qu’il a établies pour la
rédaction de son grand dictionnaire étymologique, en cours de
publication. Cette collaboration s’est révélée aussi facile que fruc-
tueuse. La rédaction par un seul auteur a permis de donner à
XXVI DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

l'ouvrage l'unité. La révision a amélioré la conception de nombreux


articles, rectifié des dates, fourni des faits, apporté des précisions
à l’histoire des mots.
A cette collaboration se sont ajoutés des concours précieux.
M. Meillet a lu tous les placards et souvent révisé la mise en pages :
il a questionné, corrigé. De nombreux articles ont été refaits à
la suite de ses observations. Seul le rédacteur du dictionnaire saura
tout le profit que l’ouvrage a reçu d’une critique qui voit tou-
jours le point faible et qui sait poser les problèmes. M. Vendryès
a bien voulu, lui aussi, relire l’ouvrage ; il a revu avec sa compé-
tence particulière les étymologies celtiques, signalé des oublis,
amélioré la rédaction. M. Marçais a revu les étymologies sémitiques ;
M. Mossé les étymologies germaniques, M. Jules Bloch les étymo-
logies orientales et l’ensemble de la rédaction. M. Gougenheim
a eu, en outre, l’obligeance de dépouiller divers répertoires pour
préciser les dates. Et nous ne pouvons pas nommer tous ceux qui,
d’un conseil, d’une indication, ont fait profiter notre ouvrage. A
tous, maîtres et amis, nous exprimons ici notre vive reconnaissance.
OZES
AVANT -PROPOS
DE LA 2° ÉDITION

Au moment où nous terminons la révision de ce « Dictionnaire


Eltymologique », il y a vingt ans que le premier plan en a été conçu
lors d’un entretien auquel prirent part, avec Antoine Meillet et
nous-mêmes, les directeurs des Presses Universitaires de France.
A la suite de la parution du premier volume de notre Franzôsisches
Etymologisches Wôürierbuch, les P. U. F. nous avaient invité à leur
donner une édition raccourcie et anticipée de ce livre, à l’usage
du public cultivé. Antoine Meillet, avec sa largeur de vues, et la
générosité qu'il savait mettre dans ses encouragements, souligna
l’importance, voire l'urgence d’un livre semblable. Nous primes
donc une décision dans ce sens. Mais, à quelque temps de là, survint
notre nomination dans une de ces grandes Universités qui absorbent
tout le temps de leurs professeurs. Par ailleurs, la nécessité de ne
pas laisser en souffrance le grand recueil étymologique du gallo-
roman ralentit à ce point l’avancement du dictionnaire français
que nous fûmes heureux quand Antoine Meillet nous proposa une
collaboration avec Oscar Bloch. Nous partageâmes d’abord la
tâche ; mais, quand nous vîimes notre compagnon avancer bien
plus vite que nous, nous le priâmes de rédiger l’ouvrage en entier.
Notre rôle se réduisit ainsi à une révision, comme Oscar Bloch l’a
dit dans son introduction. Le livre s’en trouva bien et put paraître
dans un délai très court, grâce à l’admirable énergie avec laquelle
notre confrère se voua à cette belle entreprise. Oscar Bloch avait
retenu l’exemple d'Antoine Meillet et de Jules Gilliéron, deux
grands savants dont la vie fut une source d’inspiration pour tous
ceux qui les approchaient. Au travers de toutes les difficultés,
Oscar Bloch garda jusqu’à la fin quelque chose de son ardeur
juvénile et tout son dévouement aux études. Aussi fut-ce un grand
regret pour tous ses amis et confrères quand, peu d’années après
la parution du livre, Oscar Bloch nous quitta.
| Peu de temps après sa mort, la direction des P. U. F. nous
avertit que l’ouvrage était presque épuisé ; il fallait préparer une
XXVIITI DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

2e édition. C'était en 1939. Les événements ont fait remettre ce


projet d'année en année. En automne 1946 seulement, on en put
envisager l'exécution définitive. Nous avons hésité un moment à
aborder ce travail considérable. Si nous avons fini par l’accepter, ce
fut surtout parce que nous pouvions nous appuyer sur la partie
du grand dictionnaire étymologique déjà rédigée, mais non encore
imprimée. Ces articles-là devant rester longtemps encore inédits,
la réimpression du présent livre est un moyen d’en rendre acces-
sibles les résultats au public et en même temps de les soumettre
à la discussion des spécialistes.
Une réédition faite par un autre auteur, même si celui-ci a
déjà collaboré à la forme première du livre, pose de nombreux
problèmes. La responsabilité de la 1re édition incombait surtout à
l’auteur principal ; elle est partagée entre lui et le rééditeur dès
que celui-ci se charge de reprendre le tout. Et il est inévitable
que les avis diffèrent dans nombre de cas. La place dont nous dis-
posons ne nous a pas permis de discuter à fond les questions souvent
délicates où, par suite de nos recherches, nous nous séparons de
Bloch. Voici comment nous avons résolu ce problème : dans les
cas où de nouveaux faits imposent une autre solution, nous ne
donnons que celle-ci ; là où il y a encore des chances que les vues
de Bloch correspondent à la réalité, nous les avons laissé subsister
dans le texte, en y opposant, toutefois, le résultat auquel nous
sommes arrivés nous-mêmes.
Dans l’océan des faits, ce livre doit faire un choix très restreint.
Avec un merveilleux instinct, Bloch avait su choisir ce qui peut
intéresser un public cultivé, aussi avons-nous suivi son exemple,
sauf dans les quelques cas où des raisons péremptoires nous invi-
taient à retrancher tel ou tel détail.
Gagner de la place a été le grand problème de cette édition;
les énormes frais de l’impression imposant une réduction sensible
de l'ouvrage, et certains articles intéressants ayant demandé à
être développés davantage. Nous avons procédé à des compressions
assez importantes, tout en respectant le caractère du livre et le
texte de Bloch, chaque fois que l’état actuel des recherches le
permettait. À cette fin, les principaux moyens ont été l'usage
d’abréviations, la suppression de remarques dont le contenu res-
sortait déjà du contexte, l'abandon de beaucoup de formes des
autres langues romanes, quand celles-ci n’étaient pas nécessaires
pour éclaircir les formes françaises. Ces suppressions nous ont
gagné tant de place que nous avons pu compléter notre exposé
à d’autres endroits, surtout en ce qui concerne l’évolution de
certains mots à l’intérieur de la langue française.
AVANT-PROPOS DE LA 2€ ÉDITION XXIX

Nous tenons à avertir le lecteur de deux légères modifications


terminologiques. L'une concerne la limite entre « dérivés » et
« composés ». Le propre de ceux-ci est de résulter de l’union de
deux mots indépendants (ex. plate-forme). Par contre, nous appel-
lerons dérivés non seulement les mots formés avec des suffixes,
mais aussi des mots comme méplal, un mé isolé étant un élément
privé de sens. L'autre précision que nous introduisons se rapporte
au mot emprunté. Ce terme est à sa place quand le mot en question
passe d’un peuple à un autre, d’un pays à un autre. Mais, quand
ce mot s’incorpore à une autre langue par suite de la fusion de
deux peuples, il ne s’agit plus du tout d’un emprunt. Ainsi les
nombreux mots anglais qui émaillent aujourd’hui le français sont
des emprunts ; en revanche, les mots gaulois qui sont restés si
nombreux en français, aussi bien que les mots franciques que les
Francs ont incorporés au gallo-roman pendant leur romanisation,
ne sont pas des mots étrangers : ces Gaulois et ces Francs s'étaient
eux-mêmes fondus avec l’élément romain en un seul et même
peuple.
Pour la datation des mots, il est entendu que les textes figurent
au premier plan comme témoins de la langue et que les diction-
naires publiés depuis l’époque lointaine des Estienne ne nous
donnent que des lumières indirectes. Toutefois, les dépouillements
faits jusqu’à ce jour sont encore si insuffisants qu’ils ne peuvent,
en aucune façon, remplacer les lexicographes des siècles passés.
On est du reste toujours exposé aux plus grandes méprises à moins
d’un contrôle et d’une interprétation nouvelle des citations. Ainsi
Bloch avait, tout comme nous dans notre grand dictionnaire,
indiqué, sur la foi de Littré, le xir1e siècle comme date de la pre-
mière apparition de pelil-fils ; pelite-fille n'étant attesté qu’au
xvirie siècle. Ces deux dates ne correspondent pas du tout; j'ai
contrôlé dans le texte même (Le Roman de Renart) la citation de
Littré. Il en résulte que Renart a deux fils, dont l’un est petit
et l’autre grand, petit-fils n’a donc nullement ici le sens de « fils
du fils », qui n'apparaîtra que chez Fénelon; pelile fille n’est
attesté que chez Voltaire. Mais les dictionnaires permettent de
remonter de plus d’un siècle {pelit-fils) (Hulsius, 1596 ; — peltite-
fille, Monet, 1636) et de les rapprocher encore davantage l’un de
l’autre. Les ouvrages des derniers siècles du Moyen âge sont une
autre source de méprises, car ils nous sont conservés dans des
éditions imprimées aussi bien que dans des manuscrits. Un des
textes qui a fourni le plus de dates à Oscar Bloch est la traduction
de Vincent de Beauvais que Jean de Vignay avait faite vers 1327,
sous le titre de Miroir historial. Delboulle s'était servi, pour ses
XXX DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

dépouillements, de l'édition de 1531, qui est à peu près identique


à celle de 1495/96. Or, des recherches effectuées pour nous par
M. Alain Bonnerot sur les manuscrits et dans les éditions de cet
ouvrage, ont montré que l'édition de 1495/96 a renouvelé consi-
dérablement le vocabulaire d’un texte dont la tradition manuscrite
était restée à peu près constante jusque vers 1480. Voilà pourquoi
il a fallu faire redescendre la datation d’un assez grand nombre
de mots pour lesquels la 1re édition avait indiqué 1327. S'il a été
possible, en revanche, de faire remonter la première date de bien
des mots, nous le devons au généreux effort de beaucoup de col-
lègues et d’amis de la langue française qui publient, dans diffé-
rentes revues, éditions de textes, etc., le fruit de leurs lectures.
Il est impossible de les citer tous ici. Nous en rappellerons un qui
nous a quittés 1l y a peu de temps. Dans ses Miscellanea Lexico-
graphica (27 fascicules, dans les Proceedings of the Leeds Philoso-
phical Sociely), Paul BARBIER a publié, de 1923 à 1947, une somme
de renseignements tirés directement des sources les plus variées
qui constituent dans leur ensemble un des apports les plus impor-
tants à la connaissance du lexique français. Il faut souhaiter qu'il
se trouve quelqu'un pour faire valoir aussi le grand nombre de
notes manuscrites qu’il a laissé. Nous tenons beaucoup à remer-
cier ici deux jeunes romanistes, MM. Alain Bonnerot et Maurice
Bossard, qui nous ont aidé dans le travail de cette révision avec le
même enthousiasme et le même amour de leur langue qu’ils mani-
festent en travaillant avec nous à la préparation de notre grand
dictionnaire. MM. Raymond BLocx et G. GOoUGENHEIM ont eu
l’amabilité de lire les épreuves et ont amélioré le texte en plusieurs
endroits.
W. v. W.
AVANT-PROPOS
DE LA 3° ÉDITION

Pour la troisième édition de ce dictionnaire étymologique, il


nous a fallu procéder à une refonte d’une partie considérable du
texte. Ceci a été possible et nécessaire surtout grâce à l'avancement
de la rédaction de notre grand dictionnaire : le Franzôsisches
Etymologisches Wôrierbuch (FEW). Elle nous a souvent amené
à des modifications considérables du texte ou à des vues très
différentes de celles qui ont été présentées dans la 1re édition
et qui avaient été reproduites encore telles quelles dans la 22 édi-
tion. Quelquefois des mots qui par eux-mêmes ne semblent pas
présenter de problème, prennent un aspect tout à fait inattendu
et nouveau à la lumière de l’ensemble des matériaux réunis pour
le FEW. Qu'on lise à ce propos p. ex. ce que la présente édition
dit de plante ou de pleurnicher. Ce remaniement du texte a pris
de grandes proportions surtout dans les lettres M-Z ; il est moins
sensible dans la première moitié du livre. Il faut dire la même
chose des dates de la première attestation apposées à chaque mot.
Sans vouloir exagérer l'importance des dates, il faut reconnaître
qu’elles permettent assez souvent de fixer mieux la genèse des
mots et la généalogie des sens. Pour ne donner qu’un exemple,
elles permettent de constater que ruser au sens moderne vient de
ruse et non pas l’inverse, comme le dit encore la 2e édition. Plusieurs
_ de nos collègues et de nombreux amis de la langue française ont
contribué par leurs études à améliorer dans ce sens la connaissance
de l’histoire du vocabulaire français. Nous leur devons la plupart
des nouvelles dates dans la 17e moitié du dictionnaire et nous leur
en sommes très reconnaissant. En revanche les dates qu’on trouve
à partir de la lettre M proviennent surtout des recherches que
nous avons faites pour le FEW.
Nous avons maintenu au début du livre l’Introduction qu’a
“écrite autrefois Oscar Bloch. Les pensées qu'il y a exprimées gardent
de leur valeur encore aujourd’hui. Mais si les indications biblio-
graphiques qu’il a données aux pages xviI1 à xx1 étaient une base
XXXII DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

suffisante pour ceux qui voulaient se faire une idée des sources
auxquelles avait puisé O. Bloch, elles ne représentent plus qu’une
très petite partie des ouvrages français auxquels nous avons puisé
pour la présente édition. Des lectures étendues faites en vue de la
rédaction et dont nous sommes redevable en partie à certains de
nos collaborateurs ont souvent permis de préciser l’acte de nais-
sance d’un mot. Qu'on compare à ce sujet, pour ne donner qu’un
exemple, l’article pendule dans la 1re et la 2e édition avec celui de
l'édition présente. Les ouvrages que nous consultons pour la
rédaction du FEW sont aussi à la base de la refonte du présent
livre. Il est impossible d'en donner ici la liste, parce que celle-ci,
même aussi réduite que possible, exigerait au moins une trentaine
de pages. Nous renvoyons le lecteur, curieux de se renseigner sur
ces sources, aux annexes bibliographiques du FEW (Beïheît,
2e éd., Tübingen 1950 ; Supplement zum Bibl. Beiïheft, Basel 1957).
Aux pages 124-125 de l'édition de 1950 il trouvera une liste
chronologique de ces sources (les abréviations renvoient aux
pages 67-122, où l’on trouvera les titres complets des livres en ques-
tion). Les pages 124-125 donnent la liste des dictionnaires et autres
ouvrages spéciaux (agriculture, commerce, chasse, marine, pêche,
arts et métiers, cuisine, etc.) dont l’utilisation a contribué à préciser
mieux l’histoire de beaucoup de mots traités dans notre texte.
Les deux listes seraient aujourd’hui à compléter à l’aide du Sup-
plément de 1957, p. 19-41.
Nous tenons beaucoup à remercier ici M. Albert Audubert,
agrégé de grammaire, actuellement professeur à l'Université de
Porto Alegre (Brésil), qui nous a été d’un précieux secours dans le
travail de cette refonte du dictionnaire.
W. v. W.
AVANT-PROPOS
DE LA 4° ÉDITION

Ce qui est dit dans l’avant-propos de la troisième édition vaut


aussi pour la quatrième. L’histoire de nombreux mots présente
aujourd’hui un autre aspect qu’en 1950. Comme celles de la troisième
édition ces modifications sont en très grande partie dues aux progrès
de la rédaction du FEW. En outre, nous avons dû tenir compte
dans une assez large mesure du renouvellement du lexique de la
langue française, puisque nous nous proposons d’admettre seule-
ment des mots usuels aujourd’hui. D’un côté, nous avons donc
procédé à la suppression d’un certain nombre de mots qui étaient
en usage vers 1930, mais qui en sont sortis depuis. D'autre part,
nous avons introduit dans le texte un nombre assez considérable
de mots qui étaient encore inconnus il y a trente ans, mais qui sont
employés aujourd’hui par tout le monde.
Nous remercions beaucoup M. W. Lacher, qui nous a aidé dans
ce travail de modifications.
W. v. W.
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ABRÉVIATIONS

abrév. abréviation impératif


A7 Cal ancien catalan imparfait
ACC. accusalif irlandais
a. champ. ancien champenois italien
ad]. adjectif languedoc
adv. adverbe latin
a. esp. ancien espagnol It. de basse ép. latin de basse ép.
EE ancien français
APTE ancien italien
masc. masculin
aile allemand math. mathématiques
anc. ancien m. fr. moyen français
dEnOr ancien norois mil. militaire
a. pork. ancien portugais mod. moderne
Apr. ancien provençal néerl. néerlandais
ar. arabe nom. nominalif
ar£. article norm. normand
bas-all. bas-allemand orthogr. orthographie
bas-It. bas latin part. participe
cat. catalan partic. particulièrement
celt. celtique -culier
champ. champenois pé]. péjoratif
chanc. chancellerie philos. philosophie, -phi-
class. classique que
comp. composé pic. picard
dér. dérivé pop. populaire
dict. dictionnaires port. portugais
dim. diminutif préc: précédant
eccl. ecclésiastique prés. présent
empr. emprunté, -untés, probabl. probablement
-unt pr. pronom
ép. épique propr. proprement
esp. espagnol prov. provençal
re étymologie Rab. Rabelais
fam. familier rhét. rhétoroman
fém. féminin rom. roman
fig. figuré roum. roumain
fr. français sav. savant
fut. futur scand. scandinave
galic. galicien scol. scolastique
gall. gallois suiv. suivant
gaul. gaulois te terme
géom. géométrie techn. technique
germ. germanique typogr. typographie
gramim. grammaire V voir
h-all. haut-allemand | var. variante
XXXVI DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE

Note sur la prononciation des formes étrangères

Les formes des langues étrangères sont citées avec l’orthographe propre à chacune
de ces langues. Toutefois on a transcrit en caractères latins le grec et les formes des
langues qui usent d’un alphabet spécial ; de même les formes dialectales ont été trans-
crites avec les signes du français.
La lecture de ces formes exige la connaissance des faits suivants :
Germanique. — 4 p sont des consonnes interdentales, la 1'e sonore, la 2e sourde, qui se
prononcent comme les consonnes de l’anglais dans ‘he, thing.
Celtique. — y et w correspondent à à et ou du français.
ch se prononce comme ch dans l'allemand machen.
Arabe et Hébreu. — ’, ‘, À représentent des aspirées.
Les consonnes qui ont un point souscrit sont prononcées énergiquement.
Langues romanes. — u se prononce comme ou du français, sauf en provençal où
u se prononce comme en français
au se prononce aou.
â, &, i, 6, 4 du portugais représentent des voyelles nasales.
î du roumain est une voyelle semblable à e féminin du français, mais articulée dans
l’arrière-bouche.
ä du roumain correspond à e féminin du français.
c, g devant e, i de l'italien et du roumain se prononcent ich, dj.
c devant e, i de l’espagnol est une interdentale, comme {h de l'anglais dans fhing.
J (g devant e, i) de l’espagnol se prononce comme ch dans l’allemand machen.
(c)ch- de l'italien et du roumain se prononce k.
l du roumain se prononce Îs.
s du roumain se prononce ch.
ch de l’espagnol se prononce (ch.
sci- de l'italien se prononce ch.
æ du portugais se prononce ch.
gli- de l’italien, {1 de l'espagnol et du catalan, /h du portugais et du provençal repré-
sentent | mouillée.
ñ de l’espagnol, nh du portugais et du provençal représentent n mouillée.
s de l’espagnol et du roumain se prononce comme s initiale du français.

Note pour la lecture des types étymologiques

L’astérisque devant une forme indique que cette forme est supposée.
A
À prép. Lat. ad « vers » qui s’opposait étymologie celtique qui se heurte à des dif-
à in « dans ». L'emploi de ad comme substi- ficultés et notamment à la date récente des
tut du datif, amorcé à l’époque class. et formes gallo-romanes.
développé à l’époque impériale, a entraîné
celui de ad pour marquer la possession, le ABATTRE. Lat. pop. “*abbaït(u)ère,
possesseur étant une personne, cf. hic re- comp. de batluere, avec le préf. ad expri-
quiescunt membra ad duus fratres «ici repo- mant ici l’action parvenue à son terme ; a
sent les membres de(s), deux frères », VII®Ss. ; remplacé le class. affligère, qui n’a survécu
d’autre part, celui de ad pour introdni-e le que dans l’a. fr. aflire « abattre » (au sens de
complément instrumental est égacment « vaincre »). It. abbaïtere, esp. abatir. —
très ancien, cf. ad aquam calidam coquere Dér. et comp. : abat, xv®°; abattage, 1265;
« cuire à l’eau chaude », Apicius (mais texte abatée, formation irrégulière, 1687 ; abattis,
corrompu de basse ép.), et ad unum gladii x11°; abattement, xir1°; abatteur, x1ve;
ictum caput desecare « couper la tête d’un abattoir, 1806 ; rabattre, x11e ; rabat, 1262 ;:
coup d’épée », Orose, ve s. À cache des rabattement, 1284 ; rabatteur, 1585 (N. du
survivances de la préposition a(b) dans Fail) ; rabat-joie, xive (E. Deschamps) ;
quelques tours, soit à droite d’après a plusieurs mots avec abat comme premier
dexira, laisser faire, faire faire quelque chose élément : abat-jour, 1676; abat-son(s),
à quelqu'un, etc., ét apud, sinon phonéti- 1833, etc.
quement, du moins sémantiquement.
ABBÉ. Lat. eccl. abbätem, acc. de abbas
A préf. 1° : identique à la préposition (d’où l’anc. cas sujet abes), issu de abba
précédente. 20 : a-, an-, négatif, dans des « père », en s'adressant à Dieu, dans le
comp. sav. tels que anhydre, 1863, propr. Nouveau Testament (cf. dans Saint Paul,
«sans eau » (du grec hydôr « eau »), formés Épiître aux Romains, VIII, 15; Épitre aux
avec des éléments grecs, dont le préf. a Galates, IV, 6, abba paier), qui vient du
(an- devant une voyelle), appelé privatif, grec eccl. abba, empr. lui-même de l’ara-
qui correspond au lat. in, négatif ; amoral, méen abba « père » ; de là le sens de « chef
créé artificiellement au xix® s., pour expri- d’une communauté religieuse ». Par suite
mer une notion différente d’immoral, est de l’usage de donner le bénéfice de certaines
un cas rare. abbayes à un ecclésiastique séculier, abbé
a servi, à partir du xvrre s8., à désigner tout
ABACA, 1664. Empr., par l’intermé- homme qui porte un habit ecclésiastique
diaire de l’esp. abacdä, de la langue indigène et, au xixe, un ecclésiastique qui n’est ni
des Philippines (tagal abaka). titulaire d’une cure, ni chanoine. Le latin
ABAJOUE, v. joue. eccl. a en outre créé les dér. abbatissa et
abbatia, d'où abbesse et abbaye. It. abbaie,
ABANDON, xr11e. Issu de l’ancienne locu- (ab)badessa, -dia, esp. abad, abadesa, -dia.
tion (mettre, laisser, etc.) a bandon « au
pouvoir de », formée avec l’ancien mot ABCÈS, 1537. Empr. du lat. médical
bandon « pouvoir, autorité, permission » abscessus, qui ne signifie en lat. class.
(en Normandie banon), dér. de ban, du qu’ «éloignement ». Le sens médical est dû
francique ban. — Dér. : abandonner, vers à une traduction du grec apostéma, propr.
1080 (Roland), d’où abandonnement, x1r11° « éloignement », qui a pris dans la langue
(J. de Meung). médicale le sens de « désagrégation, corrup-
tion, abcès », d'après le verbe d’où ce mot
ABAQUE, x. Empr. du lat. abacus dérive. On a dit aussi abcéder, 1539, empr.
(du grec abax « sorte de table à calcul »), de même du lat. abscedere, dont le sens
d’où les sens modernes, y compris celui de médical s'explique comme celui du subst.
l’architecture.
ABDIQUER, 1402; abdication, 1403.
ABASOURDIR, 1634, au sens de « tuer »; Empr. du lat. abdicare, abdicatio.
sens moderne, 1721. Comp. d’un anc. mot
basourdir, 1628, « tuer », altération argo- ABDOMEN, 1537. Empr. du lat. abdo-
tique (peut-être d’après abalourdir) de ba- men. — Dér. : abdominal, 1611.
sir, 1455 (argot des Coquillards), de même ABÉCÉ, vers 1120, plus rarement abé-
sens, attesté aujourd’hui dans de nombreux cédé. Formé avec les premières lettres de
parlers, surtout méridionaux, cf. prov. basi l'alphabet.
« défaillir, mourir », en parlant des ani-
maux, et aussi italien basire « s’évanouir, ABÉCÉDAIRE, 1529. Empr. du lat. de
mourir ». On a proposé pour basir(e) une basse ép. abecedarium. Parfois adj., d’après
DICT. ÉTYM. 1
ABÉCÉDAIRE 2

le lat. de basse ép. -arius. Équivalent (de abjicere « rejeter »), celui-ci non au sens
vieilli d’alphabet, au sens de « livre où l’on class. d’ « abattement », mais avec celui du
apprend l'alphabet ». lat. eccl. de «mépris, renoncement, rebut » ;
de là l'emploi prépondérant d’abjection
ABECQUER, v. bec. dans la langue religieuse, jusqu’au xvVir1° S.
ABEILLE, xive (abueilles, forme du Valeur de l’adj. parallèle à celle du subst.
Centre de la France, Établissements de ABJURER, 1495 ; abjuration, 1492. Em-
Saint-Louis). Empr. alors du prov. abelha, pr. du lat. abjurare, propr. « nier par ser-
encore usuel aujourd’hui dans les parlers ment », qui a pris en lat. eccl. son acception
méridionaux, lat. apicüla, dér. de apis. Cet religieuse, et du dér. de basse ép. abjuratio,
emprunt a été fait pour parer aux accidents dont le sens s’est développé parallèlement
qui ont atteint les représentants de apis, au verbe.
a. fr. ef, puis é (comme clé), au pluriel es,
formes d’abord connues dans toute la ABLATIF, xive, empr. du lat. ablations.
France septentrionale, et dont il ne survit ABLATION, xiv°, une première fois, au
des traces qu'aux quatre extrémités : Flan- xr11e s., au sens du lat. Empr. du lat. de
dre franc., Guernesey, Bordelais et Suisse basse ép. et très rare ablatio « action d’en-
romande. Après avoir essayé divers substi- lever » (de ablatus, part. passé de auferre
tuts pour donner plus de corps à ce mot « enlever ») en vue de son emploi médical.
trop mince, le français a adopté mouche à
miel, aujourd’hui prépondérant dans les ABLETTE, 1317. Dér. d’able, masculin,
parlers septentrionaux, puis abeille, encore de même sens, encore dans les diction-
peu répandu dans ces parlers. La région naires, latin albülus « blanchâtre », pris
angevine a, pour la même raison, formé le substantivement en latin populaire, au
dér. avelte, dont la Pléiade fit usage au masc. et au fém., pour désigner l’ablette,
xvi® s., et le lorrain, le franc-comtois et la à cause de la couleur de ses écailles. Ré-
Suisse romande, moucheïte. Le franco-pro- pandu sous des formes variées dans les
vençal a des formes régulières du type parlers gallo-romans.
aveille. It. ape et pecchia, esp. abeja. Voir
apiculture. ABLUTION, xrr1°. Empr. du lat. ecclés.
ablutio « action de laver pour purifier », en
ABERRATION, 1733, Voltaire : « Nous lat. class. « action de laver » (de abluere
mettons tous les ans plus d'industrie... dans « laver ») ; en dehors d’un emploi médical,
nos tabatières.. que les Anglais n’en ont ne se prend au sens général que depuis une
mis à calculer l’aberration de la lumière date récente, et surtout par plaisanterie.
(expliquée par Bradley en 1727). » Empr.
de l’angl. aberration, attesté dès le xvire s. ABNÉGATION, 1377. Empr. du lat.
au sens d’ « action de s’égarer » (dér. sav. eccl. abnegatio « renoncement », en lat.
du lat. aberrare « s'écarter », comme le fr. class. « action de nier (abnegare) ».
aberration en 1624 ; le lat. anc. aberratio ne ABOLIR, 1417 ; abolition, 1413 ; d’abord
signifie que « distraction » ; aberratio a été terme juridique, au sens de «remise, grâce »,
usuel dans le lat. scientifique du xvirre) ;
cf. lettre d’abolition ; rapidement sens plus
il semble avoir été fait sur le modèle de
étendu. Empr. du verbe lat. abolere et du
l’angl. scientifique aberration ; sens figuré, dér. abolitio ; le changement de conjugai-
en parlant du jugement, 1775 (Grimm);
son est dû à l'influence du subst. ; de même
devenu usuel au x1x® s., et avec un sens
it. abolire, -izione, esp. abolir, -icion.
plus étendu.
ABHORRER, 14388 ; une première fois ABOLITIONNISME, 1836 ; abolitionnis-
au xive s. Empr. du lat. abhorrere « avoir te, 1835. Empr. des mots anglo-américains
de l'éloignement, de l’aversion pour »; la abolitionism, -ist, dér. de abolition, pris au
seule forme vraiment usuelle au xvI® s. est lat. ou au fr.
abhorrir (1492 ; maïs antérieure d’après le ABOMINER, x11° s.; abomination, id.;
dér. -issement), autre adaptation du latin, abominable, id. Empr. du lat. eccl. abomi-
avec un changement de conjugaison qu'on nari, abominabilis, abominatio ; l’expres-
retrouve dans l’a. pr. aborrir, l’it. aborrire, sion abomination de la désolation vient de
et l'esp. aburrir, et dont l'extension fait la Bible, cf. Mathieu, XXIV, 15. Seul le
supposer qu’il y a eu empr. d’une langue à verbe était class. et signifiait « repousser
l’autre, sans qu’on sache où est le point de comme un mauvais présage (omen) ».
départ des différentes formes. Une forme
plus francisée, avourrir, avorir, xIt1° siècle, ABONDER, xri° s.; abondant, id.;
vit encore dans le Lyonnais. abondance, id. Empr. du lat. abundare (de
unda « flot »), propr. « affluer », abundans,
ABÎME, xure. D'abord surtout dans des abundantia. — Comp. sur le modèle du lat.
textes bibliques. Empr. du lat. eccl. abyssus de basse ép. superabundare, -dantia : sura-
(du grec eccl. abyssos ; en grec class., adj. bonder, x11°; surabondance, x111° ; sura-
signifiant « sans fond »), altéré en *abismus, bondant, vers 1200.
sur le modèle des mots sav. terminés par
le suff. lat. -ismus (du grec -ismos). Aussi ABONNER, v. borne.
a. pr. abisme, esp. abismo, mais l’it. dit ABORNER, v. borne.
abisso. — Dér. : abîmer, xiv° ; au sens de
« mettre en mauvais état », 1567 (Amyot). ABORIGÈNE, 1488. Empr. du lat. abo-
rigines (de origo, -inis, « origine ») « pre-
ABJECT, 1470 ; abjection, 1372. Empr. miers habitants d’un pays » avec une ter-
de l’adj. lat. abjectus et du subst. abjectio minaison en -gène, d'après indigène.
ABSENTÉISME
ABORTIF, xive (« aVorté », encore seul est aussi seulement intransitif), qui a dû
sens du xvi° s.). Ne paraît pas usité au prendre le sens de «se mettre au soleil pour
XVI s. Empr. du lat. abortivus « avorté » éviter le froid, les effets du vent », d’où
et « qui fait avorter ». « abriter (en général) ». Ce développement
ABOULER, v. boule. sémantique est démontré par l'esp. abrigar
« échauffer », archaïque en ce sens, et
ABOULIE, 1883 (Th. Ribot). Empr. du l’usage de nombreux parlers gallo-romans
grec aboulia « irréflexion, imprudence » (de qui n’emploient à l'abri qu’à propos du
a privatif et boulé « décision réfléchie ») vent et se servent de plusieurs autres ter-
pour son sens spécial (d’après boulesthai mes en parlant de la pluie. Des formes régu-
« vouloir »). lières avec -vr- existant en lorrain, dans la
ABOYER. Abayer jusqu’au début du région franc-comtoise et en Suisse romande,
XVIIe s. Onomatopée, bai-, attestée aussi abrier est probabl. d’origine méridionale,
par l’it. abbaiare. Des formes avec les radi- comme beaucoup de termes de marine. —
caux bau, comparables au lat. baubari et Dér. : abriter, 1489.
au grec bauzein, et hau existent dans les ABRICOT, 1547. Du cat. abercoc, albercoc
parlers du Nord-Est (lorrain abaouer) et de (cette dernière forme a donné en fr. auber-
l'Est ; abayer, plus rarement aboyer, se dit cot, attesté de 1512 à 1525). Le mot cat.,
seulement dans les parlers septentrionaux ; comme aussi l’esp. albaricoque, le port.
pour les parlers méridionaux, v. japer: albricoque, est empr. de l’arabe d'Espagne
en outre, lairar dans l'extrême Sud-Ouest, al-barqoûq, les Arabes ayant réintroduit
lat. laträre, cf. it. latrare, esp. ladrar. — dans l'Occident (Andalousie, Sicile) la cul-
Dér. : aboï, xr1° (abay), « aboiement » ; au- ture de ce fruit, tandis que le génois bric-
jourd’hui seulement dans les locutions étre cocalu vient de la Sicile. Le toscan albi-
aux abois, etc., issues du langage de la cocca atteste l’influence espagnole dans la
vénerie; aboiement, xir1° fabaement) : culture de l’abricot jusqu’en Italie. Le mot
aboyeur, 1387 (abayeur). arabe vient du lat. praecoquum (dans Pli-
ABRACADABRANT, 1834. Dér. d’abra- ne), propr. « précoce (d’un fruit) », par l’in-
cadabra, xvi® (Paré, où on lit : Ce beau mot termédiaire du grec, qui avait apporté ce
abracadabra pour guérir la fièvre; en effet, terme en Syrie. Le fruit est originaire de la
le mot passait au moyen âge pour être une Chine et avait fait une première apparition
sorte de talisman contre diverses maladies ; dans les pays méditerranéens, peu avant
il résulterait aussi de ce fait que l’adjectif le commencement de notre ère. Les Grecs
a dû être créé par plaisanterie dans les l'avaient appelé alors armeniaka « fruit
milieux médicaux), mot cabalistique, empr. d’Arménie », mot qui vit encore dans les
du grec a6pacadx@pæ, où le signe c, qui re- parlers lombards (mungnaga, ramognega).
présente un s, a été lu k; ce mot vient lui- Du mot fr. viennent l’angl. apricot, l’all.
même d’une façon obscure du grec abraxas Aprikose. — Dér. abricotier, 1526; abri-
(d’où abraxas dans les dictionnaires) ou cotine, 1843 ; une première fois en 1654,
abrasax, autre mot cabalistique qu’on au sens de « abricot précoce ».
trouve fréquemment sur des pierres ayant ABROGER, 1398 (sous la forme -guer
servi d’amulettes à des adeptes du gnos- jusqu’au xvr*s.) ; abrogation, 1362. Empr.
tique Basilide, du rie s., et qui est diverse- du lat. abrogare, abrogatio. — Dér. : abro-
ment interprété. geable, 1843.
ABRÉGER. Lat. de basse ép. abbrèviare,
dér. de brèvis « bref ». En a. fr. et au xvies., ABRUPT, xive, d’après l’adv. abrupie-
souvent abrevier, simple francisation du ment, longtemps plus usuel que l’adj. Empr.
mot latin. It. abbreviare, esp. abreviar, du lat. abrupius « escarpé », « heurté (en
a. pr. abreujar. V. abréviateur. parlant du style) ». En outre, depuis la fin
du xvire 8., la locution lat. ex abrupto.
ABREUVER. D'abord abevrer, d’où abre-
ver, XIIIe, en outre abuvrer, d'où abru-, ABSCISSE, 1693. Empr. du lat. des
encore au xvi® s. Lat. pop. *abbibéräre, mathématiciens abscissa (linea) « (ligne)
dér. de biber « boisson », forme syncopée coupée » (de abscindere).
de bibere « boire », prise substantiv., fré-
quemment attestée dans le lat. fam. It. ABSCONS, 1823. Repris par plaisanterie
abbeverare, esp. abrevar. — Dér. : abreu- à la langue du xvr°s., où il était très usuel.
vage, 1262 (abeuvrage); abreuvement, Empr. du lat. absconsus « secret, caché »
xir1e ; abreuvoir, id., cf. it. abbeveratoio, (de abscondere « cacher »).
esp. abrevadero. ABSENT, vers 1185; absence, xixr°;
ABRÉVIATEUR, 1375; abréviation, (s ) absenter, 1322 (souvent trans. jus-
1375. Empr. du lat. de basse ép. abbrevia- qu’au début du xvrre s., au sens de «tenir
or, -atio, v. abréger. — Dér. : abréviatif, éloigné »). Empr. du lat. absens, absentia,
XV°. absentare, trans. et intrans.
ABRI, x11°. Tiré d’un ancien verbe abrier, ABSENTÉISME, 1828 (absentisme en
attesté seulement depuis le x111° s., encore 1829). Empr. de l’angl. absenteeism (dér.
terme de marine et dans les patois; ce du subst. absenlee, lui-même du verbe to
verbe correspond à abrigar « abriter » de absent, empr. du fr. absenier) pour désigner
l’a. pr. et de l’esp., lat. de basse ép. apricäre la pratique des grands propriétaires d’An-
« se chauffer au soleil » (dér. de apricus gleterre et surtout d’Irlande de vivre hors
« exposé au soleil »; le lat. class. apricari de leurs terres. — Dér. absentéiste, 1866.
ABSIDE

ABSIDE, xvi®. Empr. du lat. de basse ABSTRAIRE, xive (Oresme) ; abstrac-


ép. absida, lat. class. absis, -idis (du grec teur, 1532 (Rab.) ; abstraction, x1v° (Ores-
hapsis, propr. « voûte »). Les dictionnaires me) ; abstrait, 1372 (sous la forme abstract,
donnent aussi apside, terme d'astronomie, encore usitée au xviie s.). Empr. du lat.
1738 (Voltaire ; en outre abside, 1566), sens abstrahere (avec adaptation d’après exirai-
développé d’après l'emploi du mot en lat. re), abstracior (médiéval), absiractio (de
et en grec : « voûte du ciel, orbite d’une basse ép.), abstractus. Le sens principal de
planète », etc. — Dér. absidiole, 1866. ces mots en fr., déjà ancien dans abstraclio,
-lus, s’est développé surtout dans le lat.
ABSINTHE, 1546. Antér. absince, encore scolastique. Le sens d’ « isoler, isolé par la
au xvire s. Empr. du lat. absinthium (du pensée », qu'ont aussi absiraire, -ait est
grec apsinthion). Le sens d’ « amertume » repris au lat. class. absirahere « détourner,
est issu du lat. eccl. Rarement sous une détacher », propr. « arracher ».
forme pop. : a. pr. aisens, au--, et quelques
formes du franc-comtois et de la région ABSTRUS, xive. Empr. du lat. absiru-
gasconne. L’a. fr. avait un autre mot sus « renfermé, difficile à comprendre »,
aluisne, encore usité dans quelques dialec- part. passé du verbe abstrudere « cacher
tes (norm. aliène), cf. aussi l’esp. alosna, profondément ».
lat. de basse ép. aloxinum, empr. du grec ABSURDE, xive (on a aussi absorde
aléë oxines, apporté probabl. dans la Gaule vers 1200) ; absurdité, xiv°. Empr. du late
septentrionale par le médecin grec Anthi- absurdus, propr. « dissonant », absurditas
mus, qui vécut à la cour mérovingienne. (de basse ép.).
ABSOLU, vers 1080 (Roland : asolue). ABUS, xive (Oresme) ; abusif, id. Empr.
Empr. du lat. absolutus « parfait, achevé ». du lat. abusus (de abuii « faire usage », et
— Dér. : absolutisme, 1796, d’après le lat. spécial. « faire mauvais usage »), abusivus
absolutus ; absolutiste, 1823. (de basse ép.). — Dér. d’abus : abuser,
1312, abuseur, 1392; désabuser, xvie.
ABSOLUTION, xr1°. Empr. du lat. abso-
lutio avec ses acceptions jurid. et eccl. ABUTER, v. but.
ABSORBER, xu1e (en a. fr. assorbir) ; ABYSSAL, 1597. Dér. sav. du grec abys-
absorption, 1586. Empr. du lat. absorbere 08.
« avaler, engloutir », absorpiio (lat. eccl.). ACABIT, xve (« accident »), en outre
Sens fig. du verbe, xive s., déjà lat. acabie, fém., xvir°. — Paraît provenir de
ABSOUDRE, x® (Saint-Léger : absols, l’a. pr., où acabit n’est pas attesté, mais se
3e pers. sing. du parfait). En a. fr., jus- restitue aisément d’après le verbe cabir
qu’au xves., surtout formes avec ass-. Lat. (autre forme de caber «employer, etc. », lat.
absoluëre ; le sens, à la fois jurid. et reli- capere), prov. mod. cabi « serrer un objet ».
gieux, de ce verbe explique que la syllabe ACACIA, 1534 (d’abord acacie, xiIv°,
initiale ait été refaite sur le lat. It. assol- acace, xv®, etc.). Empr. du lat. acacia (du
vere. — Dér. : absoute,xive (E. Deschamps), grec akakia).
fém. pris substantiv. de l’anc. part. passé
absout. | ACADÉMICIEN, 1555. Dér. sav. du lat.
academicus « qui appartient à l’école aca-
ABSTÈME, 1596. Empr. du lat. abste- démique »; sens moderne en 1680.
mius « qui s’abstient de boire du vin (feme-
tum « vin pur ») ». ACADÉMIE, 1508. Vers 1540, Marot
appelle le Collège de France noble académie.
ABSTENIR (s’), vers 1050. En a. fr. sou- Empr. de l’it. ac{c)ademia (l'Italie possé-
vent s’ast-. Empr. du lat. abstinere, avec dait alors l’ Academia Fiorentina, lat. Aca-
adaptation d’après éenir. demia (du grec Akadëémia, propr. jardin
d’Akadémos, à Athènes, où Platon ensei-
ABSTENTION, xvirie, au sens jurid.; gnait, d’où école de philosophie platoni-
d’où le sens politique au xix® s. Empr. du cienne) ; par suite de l'éclat des académies
lat. abstentio « action de retenir », en vue fondées en France au xvii® s., est devenu
de ce sens jurid. ; a été une première fois européen et, en outre, a été appliqué à des
empr. au x11e8. (astensions) au sens d’«abs- établissements de toute sorte. — Dér. :
tinence », que le mot lat. avait dans la académiste, 1613, « académicien » ; acadé-
langue eccl. — Dér. : abstentionniste, 1861. misme, 1876.
ABSTERGER, xive; abstergent, xvVI® ACADÉMIQUE, 1508. Empr. du lat.
(Paré). Empr. du lat. absiergere « essuyer, academicus. À suivi le développement sé-
nettoyer », abstergens, part. prés. mantique d'académie.
ABSTERSIF, xr1ve ; abstersion, id. Dér. . ACAGNARDER, v. cagne.
sav. de absiersus, part. passé de abstergere,
pour servir d’adj. et de subst. à absierger. ACAJOU, 1575, au sens d’ « anacarde »
(acaiou, 1558). Empr. du port. acaju, caju,
ABSTINENT, x11° ; abstinence, id., par- propr. fruit du cajueiro « anacarde », arbre
fois astenance. Le subst., jusqu’au xvI1° 8., importé du Brésil (caju ou acaju en tupi)
signifie aussi « abstention, trêve »; l’adj., aux Indes par les Portugais. On a voulu
plus rarement, « qui s’abstient (en géné- expliquer le nom de l’arbre aca;ou, 1658
ral) ». Empr. du lat. abstinens (part. prés. (acaiou en 1640), par un emploi qu’on
de abstinere, v. abstenir), abstinentia € ac- aurait fait du fruit de l’anacarde pour
tion de s'abstenir, abstinence », faire un vernis noirâtre. Mais on n’a pas
5 ACCOMMODER

pu citer de document.à l’appui de cette ACCEPTION « sens d’un mot », 1694.


hypothèse. Or, le tupi appelait cet arbre Empr. du lat. acceptio (de accipere « rece-
agapü, et il n’est pas impossible que acajou voir ») qui a eu ce sens à basse ép.
ait été employé comme nom du bois par
une simple confusion des deux mots si sem- ACCÈS, xrr1e ; accessible, x1ve (Bersui-
blables phonétiquement. re). Empr. du lat. accessus, à la fois « arri-
vée » et « accès de maladie », accessibilis.
ACANTHE, xve. Empr. du lat. acanthus
(du grec akanthos, de akantha « épine »). ACCESSION, attesté une première fois
au x11° s. au sens d’ « accès de maladie »,
ACARIAÂTRE, xve. Signifie alors « pos- est devenu usuel au xvi® en ce même sens
sédé, privé de raison ». Dér. du lat. Acha- et aussi avec ceux d’ « adjonction, accrois-
rius ou du fr. (Saint) Acaire, nom d’un sement », qui n’ont survécu ensuite que
évêque de Noyon au vrie s., qui passait au dans des emplois techn. et jurid. ; en tous
moyen âge pour guérir de la folie, qu'on ces sens empr. du lat. accessio (de accedere)
appelait aussi le mal Saint-Acaire. Cette « action d’approcher », d’où « adjonction,
dérivation est due à une étymologie popu- accroissement » et aussi « accès de mala-
laire, qui a vu dans le nom de l’évêque le die ». Accession au trône, 1797, accession à
lat. acer « aigre »; les saints guérisseurs un iraité, XVI11°, accession (d’un pays à un
doivent souvent leur vertu à un jeu de autre), début xix®, sont des anglicismes.
mots analogue, cf. Saint Clou(d) qu'on in- ACCESSIT, 1680. Mot lat., issu de la
voquait pour les clous. formule accessit proxime « il s’est approché
ACCABLER, 1329 (texte normand, «abat- de très près », les distributions des prix se
tre », d’où « écraser », encore au XVII® S.). proclamant autrefois en latin.
Forme empr. du normand en face d’achabler ACCESSOIRE, 1296. Empr. du lat. ju-
(1423), comp. de chabler, v. chablis. Les rid. médiéval accessorius (de accedere, au
nombreux textes normands qui offrent sens d’ « ajouter ». Accessoire, pris subs-
des mots de cette famille : cablé « (bois) tantivement, a été d’abord un terme juri-
abattu », caable, de même sens, appuient dique depuis le xve s., mais il a été rapi-
cette explication exigée par la forme. — dement pris dans un sens plus étendu.
Dér. : accablement, 1556 (d’abord au sens
matériel d’ « écrasement »). ACCIDENT, xr1° s. (Chrétien) ; acciden-
tel, x1r1e, parfois accidental au xvi® s. Em-
ACCALMIE, v. calme. pr. du lat. accidens (de accidere, au sens de
ACCAPARER, 1562 « acheter en don- « survenir », impersonnel), accidentalis (de
nant des arrhes », encore en 1628. Empr. basse ép.) ; le sens théologique et philoso-
de l’it. arch. accaparrare, aujourd’hui inca- phique d’accident est déjà du lat. anc., mais
parrare « donner des arrhes », lui-même a été usité surtout en lat. scolastique. En
formé de caparra, v. arrhes, dont le premier outre développements spontanés en fr. —
élément cap- semble être capo, c’est-à-dire Dér. : accidenté, 1824, une première fois
« arrhe principale » (cf. capolavoro « chef- en 1622.
d'œuvre »), bien que caparra ne paraisse ACCISE, 1748 (Montesquieu), en parlant
plus présenter de nuance à côté de arra; d'impôts anglais. Empr. du hollandais
créé peut-être à cause des sens figurés de accijs (accise déjà dans le Coutumier de
arra. Sens moderne, XviI11® $. — Dér. : Bruxelles, xvit), lat. médiéval accisia,
accaparement, 1751 ; accapareur, fin xviie. formé sur le verbe accidere « couper, dé-
tacher » et équivalent au fr. faille. Sans
ACCÉDER, x111e, « avoir accès »; 1731 rapport étymologique avec le moyen néerl.
(Voltaire), « acquiescer ». Empr. du lat. assise, qui est empr. du fr. assise. À servi
accedere, V. accès. à désigner l’impôt de consommation appelé
ACCÉLÉRER, xv®; accélération, 1349. en angl. excise (qui vient du holl. excijs,
Empr. du lat. accelerare (de celer «rapide »), autre forme de accijs) et enregistré en fr.
acceleratio. — Dér. : accélérateur, 1611, sous cette forme excise depuis 1650.
sens techn. 1752. ACCLAMER, xvi° ; acclamation, 1504.
ACCENT, xu1e. Empr. du lat. accenius Empr. du lat. acclamare, acclamatio. —
«intonation », traduction du grec prosôidia. Dér. : acclamateur, xvie.
Développements sémantiques propres au ACCOINTANCE, xre. Dér. de l'anc.
fr. depuis le xviies. verbe accointer, xx1°, encore dans les patois
ACCENTUER, 1511. Empr. du lat. mé- (normand, etc.), « faire connaissance de »,
diéval accentuare, dér. de accentus. — Dér. : et, au réfléchi, « avoir des relations fami-
accentuation, 1521. lières avec quelqu'un » ; ce verbe dérive de
l’anc. adj. accoinie « familier, ami », lat.
ACCEPTER, 1317. Empr. du lat. accep- accôgnitus, part. passé du verbe accognôs-
lare « recevoir, accepter ». — Dér. : accep- cere, cf. de même it. acconio « ami ».
table, vers 1165; inacceptable, 1791;
acceptation, 1262 ; accepteur, 1380. ACCOLADE, v. cou.
ACCEPTION, dans acception de personne, ACCOMMODER, 1539 (déjà en 1336,
x. Empr. du lat. eccl. acceptio personae accommoder un différend). Accommodation,
(traduction du grec prosôpolépsia, fait xive. Empr. du lat. accommodare (de com-
d’après une expression hébraïque signi- modus « convenable »), accommodatio. —
fiant « accueillir favorablement (la face Dér. : accommodement, 1585 ; raccommo-
de), quelqu'un, faire acception de person- der, xvi®; raccommodement, fin xvi°
ne », cf. Lévilique, XIX, 15. (D'Aubigné) ; raccommodeur, 1612.
ACCOMPAGNER a

ACCOMPAGNER, v. compagnon. ACCOURCIR, v. court.


ACCOMPLIR, vers 980. Comp. de l’anc. ACCOURIR, vers 1050 ; d’abord acorre
verbe complir, lat. complère, propr. « rem- jusqu’au xvres. Lat. accürrère. It. accorrere,
plir », avec changement de conjugaison eSp. acorrer.
(v. complies) comme fenir, cf. it. compiere
et accompiere « accomplir », a. pr. complir ACCOURSE, ACCOURSIE, v. coursive.
et accomplir, de même sens. — Dér. ACCOUTRER, x1r1°. Au moyen âge ac-
accomplissement, xr11e. costrer. Signifiait d’abord « arranger, dis-
ACCORDÉON, 1833. Empr. de J’all. poser », ensuite spécial. « habiller, parer »,
Akkordion, nom d’un instrument inventé du xv® au xvIIe S., au sens péjor. depuis
à Vienne par Damian, 1829, et nommé 1680. Lat. pop. *acco(n)s(ü)lüräre (dér.
ainsi d’après Orchestrion, xvIr1° ; devenu de cofn)s(ü)lüra « couture »), qui a dû
accordéon en fr. d’après orphéon « sorte de signifier « coudre ensemble, rapprocher en
grosse vielle », 1812. cousant »; la forme accentuée “*accosture
est attestée par l’a. fr. racosturer et le wal-
ACCORDER. Lat. pop. *accôrdäre, issu, lon acouturer. — Dér. accoutrement,
par substitution de préf., du class. concôr- xve (Commynes).
däre « être d'accord », qui a pris à basse
ép. le sens de « mettre d’accord ». Le sens ACCROIRE. Aujourd'hui seulement
musical n’est attesté que depuis.le x1v®s. ; dans faire accroire, seul emploi de ce verbe
il est probabl. né sous l’influence du subst. au sens de « croire », qui s’est fondu avec
corde (d’un instrument de musique). It. faire à croire, de sens voisin (faire à, suivi
accordare, aux deux sens, espagnol, a. pr. d’un infinitif, est fréquent en a. fr.); ac-
acordar, seulement au sens moral. — Dér. : croire signifiait aussi en a. fr. « prêter » et
accord, x11° ; désaccord, id. ; accordailles, «emprunter », sens conservés dans de nom-
1539 (d’après le sens « fiancer » que le verbe breux parlers septentrionaux. Lat. accre-
a pris au xv® s. et qui vit encore dans les dère « croire » (de crédère). Anc. esp. acreer
parlers de l'Ouest) ; accordeur, 1325, au « prêter ».
sens d’ «accordeur de pianos », 1768 ; désac- ACCROÎTRE. Lat. accréscère (de cres-
corder, xv° ; raccorder, x11° ; raccord, 1835 cère « croître »). It. accrescere, esp. acrecer.
(au sens moral, xrr°) ; raccordement, xrr°. — Dér. : accroissement, xrre,.
ACCORE. « Escarpement d’un écueil », ACCROUPIR, v. croupe.
1671 (antér. escore, 1382; écore, 1683).
Empr. du néerl. schore, de même sens. Adj. ACCUEILLIR. Lat. pop. “*accolligère
dans côte accore, 1773. A- s’est substitué « recueillir, accueillir » (de côlligère, v.
à é- par analogie avec le terme nautique cueillir), avec changement de conjugaison
écore « étai placé sous un navire » (du moyen très ancien. Sens variés en a. fr., notam-
néerl. score « étai »), qui était devenu accore ment « saisir, attaquer (encore au xvrre 5.),
dès 1690 sous l'influence de verbes comme chasser »; encore usité aujourd’hui dans
appuyer, accoter. Développement parallèle les patois de l'Est, au sens de « pousser,
à celui du mot néerl., qui devient aussi chasser le bétail, jeter (des pierres), etc. ».
adj. : schor « escarpé ». It. accogliere « réunir, accueillir », esp.
acoger « accueillir ». — Dér. : accueil, xrr°.
ACCORT, 1444. Empr. de l’it. accorto
« avisé », part. passé du verbe accorgersi ACCULER, v. cul.
«s’apercevoir», lat. pop. *accorrigère, propr. ACCUMULER, 1327. Empr. du lat. ac-
« redresser », comp. du lat. class. corrigére, cumulare (de cumulare, v. cumuler). —
de même sens. A pris le sens moderne de Dér. : accumulateur, 1564 ; au sens techn.
« qui à une vivacité gracieuse » au XVII S. 1860, abrégé familièrement en accu, vers
1930 ; accumulation, 1336.
ACCOSTER, xri° (« être près de » ; sur-
tout s’accoster de « s'approcher de, se lier ACCUSATIF, t. de gramm., vers 1170.
avec »). Dér. de l’a. fr. coste « côte ». Au Empr. du lat. accusativus.
xvI°5s., le verbe a repris -st- sous l'influence
ACCUSER, vers 980 ; accusateur, 1351
de l’a. pr. acostar, verbe réfl. « s'approcher,
s’accointer », que des auteurs comme Mon- (adj.) ; accusation, xin1° (J. de Meung).
taigne, Brantôme, D'’Aubigné, ont intro- Accuser a toujours été influencé par le lat.
duit dans la langue fr. ; de même au sens accusare. Accuser, au sens de « signaler,
maritime, qui est attesté dès 1402. — rendre manifeste », date du xrr1e s., d’où
Dér. : accostage, 1872. accuser (la) réception, 1627. — Dér.
accusable, 1545.
ACCOTER, xr1e. D'un lat. de basse ép.
accubitare, comp. de cubitus « coude ». A -ACÉ, -ACÉE. Suff. empr. du lat.
absorbé aussi en partie l’a. fr. acosier, qui, -aceus, utilisés surtout par les naturalistes
après la perte de ls, n’a gardé partielle- pour des familles d'animaux ou de plantes.
ment son indépendance que grâce à l’in- ACERBE, 1195 (au xvie s. a aussi les
fluence phonétique et sémantique du prov., sens, aujourd’hui disparus de « triste, pé-
v. accosier. Le subst. cote, non attesté en nible »); acerbité, 1495. Empr. du lat.
a. fr., mais fréquent dans les parlers franco- acerbus « aigre, hostile, pénible », acerbitas.
provençaux et méridionaux, cf. le franc-
comtois coute, le savoyard cota et le méri- ACÉRER, v. acier.
dional coto, au sens d’ « étai, cale », est ACÉT(O)-. Premier élément de mots
dér. du verbe. — Dér. : accotement, 1611 ; sav., tels que acétate, 1787, acétique, id.,
accotoir, xvIe. tiré du lat. acetum « vinaigre ».
ACTE

ACÉTYLÈNE, 1877. Empr. de l'angl. sant les bas offices ». Empr. du lat. médié-
acetylene (formé du lat. acelum « vinaigre » val acolytus, lat. eccl. acoluthus, -ythus,
et du grec hyÿle « bois »). Découvert par le -ilus (du grec akolouthos « compagnon, ser-
chimiste anglais Davy en 1836 et étudié viteur »).
surtout par le chimiste français Berthelot.
V. encore éther. ACONIT, vers 1160. Empr. du lat. aco-
nitum (du grec akoniton).
ACHALANDER, v. chaland.
ACOUSTIQUE, 1700 (aux deux em-
ACHARNER, v. chair. plois). Empr. du grec akouslikos « qui con-
cerne l’ouie » (de akouein « entendre »)
ACHE. Lat. äpium. It. appio, esp. apio. par Sauveur, mathématicien et physicien
Désigne dans les parlers méridionaux le (1653-1716).
céleri.
ACQUÉRIR, xive. Réfection, par chan-
ACHÉE, v. êche. gement de conjugaison de l’a. fr. acquerre,
lat. pop. *acquaerère, lat. class. acquirère,
ACHETER. D'abord achater. Le lat. refait sur le simple quaerère, v. quérir. —
class. emere « acheter » a été remplacé de- Dér. : acquéreur, 1385 ; acquis, xvre.
puis le 11° s. par comparare (« procurer »
en lat. class.), d’où it. comprare, esp. a. pr. ACQUÊT, xrie. Anciennement « acqui-
comprar et aussi a. fr. comperer, au sens sition, projet, etc. »: aujourd’hui seule-
secondaire de « payer cher (p. ex. un ment dans des locutions jurid. Lat. pop.
bonheur) ». L’a. fr. achater répond à lit. *acquaesitum, neutre du part. passé de
méridional accattari, gênois accatid, piém. *acquaerere (v. le préc.), pris substantiv.,
catè. Toutes ces formes remontent à un lat. cf. a. pr. aquesi ; cette forme est forcément
de basse ép. *accapiare, qui est aussi à la ancienne, du moins en français où le seul
base de l’it. accaïttare « emprunter, men- part. passé attesté est a(c)quis.
dier », et que les uns expliquent comme
réfection de lat. class. accepiare, d’après ACQUIESCER, xive. Empr. du lat. ac-
captare « saisir », tandis que d’autres l’expli- quiescere, Propr. « se reposer ».
quent comme un comp. de captare, avec le ACQUISITION, 1283 (Beaumanoir). Em-
sens de « saisir, procurer ». Peut-être l’Ita- pr. du lat. jurid. acquisitio, nom d’action
lie doit-elle ce nouveau terme à la Gaule de acquirere.
septentrionale, mais il n’est pas exclu que
l'emprunt ne se soit fait en sens inverse. — ACQUITTER, v. quitter.
Dér. : achat, 1178 (acai), en outre achet, ACRE, 1059 (texte de Rouen). Au Moyen
xvi®; acheteur, id. (achaieor) ; racheter, âge, Normandie et régions voisines; aujour-
xiI1e, d’où rachat, xriI°; rachetable, 1347. d’hui se dit surtout en parlant de l’acre
ACHEVER, v. chef. anglaise, et comme terme dialectal, en
normand. Empr. à la suite de la conquête
ACHILLÉE, 1572. Vulgairement mille- de l’Angleterre, de l’angl. acre, qui corres-
feuille ; servait autrefois pour soigner les pond à l’all. Acker « champ ».
blessures. Empr. du lat. achillea (du grec ÂCRE, xive. Empr. du lat. acer, pour
akhilleios, c'est-à-dire « plante d’Achille », désigner une sensation plus forte que l’ai-
ainsi nommée parce que le centaure Chiron greur. — Dér. : âcreté, xvi®s.
avait appris les propriétés des simples à
Achille. ACRIMONIE, 1539. Empr. du lat. acri-
monia, dér. de acer; jusqu’au xvinie 5.,
ACHOPPER, v. chopper. sens physique, aujourd’hui réservé à dcrelé.
ACIDE, 1545 ; acidité, id. Empr. du lat. — Dér. : acrimonieux, 1605.
acidus, aciditas. ACRO-. Premier élément de mots sav.,
empr. du grec, où akro- vient de akros « qui
ACIDULER, 1721. Dér. d’acidule, 1747, est à l'extrémité »; v. les suiv.
aujourd’hui désuet, empr. du lat. acidulus
(de acidus, v. acide). ACROBATE, 1752, « espèce de danseur
de corde chez les anciens » ; 1834 « danseur
ACIER. Lat. de basse ép. aciarium, dér. de corde », Landais. (acrebade, d’un texte
de acies « pointe d'arme (garnie spéciale- du xive s., est obscur). Empr. du grec
ment d’acier) ». It. acciaio, esp. acero. — akrobatos, dér. du verbe akrobatein « mar-
Dér. : acéré, xr1°, « garni d’acier »; sens cher sur la pointe des pieds ». — Dér. :
fig. moderne, fin xviie (Saint-Simon), acé- acrobatie, 1876 ; acrobatique, 1842 (dans
rer, 1348; aciérer, 1470, rare avant le un sens techn. en 1803).
xIx° s. ; aciérage, 1753 ; aciération, 1793 ;
aciérie, 1751. ACROSTICHE, 1582. Empr. du grec
akrostikhos, de même sens (comp. de akros,
ACNÉ, 1816. Empr., par l'intermédiaire v. les préc., et de stikhos « vers », c'est-à-dire
de l’angl. médical, du grec akné, faute de « vers dont l'extrémité (le début) a un rôle
copiste, dans Aétius, vi*, pour akmé particulier »).
« pointe », d’où « efflorescence », appliqué
à la maladie de la peau, dite aussi couperose. ACTE, terme jurid., 1338. Empr. du lat.
jurid. actum, ordinairement au plur. acia.
ACOLYTE, xr1°, ordinairement acolile Acies (du parlement anglais), 1619, est
au moyen âge ; acolyte a été définitivement empr. de l’angl. act(s) of Parliament et ne
adopté au xvire s. Propr. « clerc remplis- se dit encore qu’à propos de l’Angleterre.
ACTE 8

ACTE, opposé à parole, 1504. Empr. du ACUITÉ, xive. Dér. hybride du lat.
lat. actum « fait, action », ordinairement au acutus, d’après le fr. agu, aigu, pour éviter
plur., comme actum jurid., qui n’en est une forme désagréable “*acutité; l’a. fr.
qu’une spécialisation. avait aguelé, dér. d’agu, v. aigu; on trouve
aussi aguité, mais postérieurement.
ACTE, « acte de théâtre », xvi°. Empr.
du lat. acius, propr. « action scénique », ADAGE, 1529. Empr. du lat. adagium.
d’où « représentation théâtrale », puis « di-
vision, acte d’une pièce » — Comp. ADAGIO, 1726. Empr. de l'it. adagio,
Entr’acte, 1622. comp. de ad agio « à l'aise ». -

ACTEUR. Sens moderne, xviie. Antér. ADAMANTIN, 1509. Très usuel au


« auteur d’un livre », du xrr1° au xvi®; XVI® Ss.; paraît avoir été abandonné au
« auteur » en général du xv® au xvire s. xviIe et repris en 1782, peut-être sous
Empr. du lat. acitor « exécuteur, acteur », l'influence de l'anglais. Empr. du lat.
mais non « auteur d’un livre », sens qui adamantinus (du grec adamantinos) « dur
vient d'une confusion avec auleur (écrit comme l’acier », mais toujours employé en
souvent auclor dans les textes lat. du fr., au sens de « de la nature du diamant »,
moyen âge). d’après un des sens de adamas, d’où l'adij.
dérive, v. aimant et diamant.
ACTIF. 1° : x11°, par opposition à con-
lemplatif ou passif, sens dominant jus- ADAPTER, xive. Empr. du lat. adap-
qu’au xvi® s. Empr. du lat. philosophique tare (de aptus « apte »). — Dér. : adaptable,
et scolastique activus, d'où développement 1775 ; adaptation, 1539 ; inadapté, fin x1xe.
spontané en fr., d’après acte. — 2° : Terme ADDENDA, 1736. Mot lat. signifiant
de finance : deïles actives (par opposition à « choses à ajouter ».
deïles passives), xvi®, par extension du
préc. ; d’où Actif, subst., 1762. — Dér. : ADDITION, x1r1° (J. de Meung, au sens
activer, xv°, rare avant le x1x® s. ; inactif, général). Empr. du lat. additio (de addere
1717 ; réactif, xvir1e, d’après réaction. « ajouter »); terme d’arithmétique, xve.
— Dér. : additionnel, xvirre (Buffon), une
ACTIN-. Premier élément de mots sav., première fois en 1500 ; additionner, avant
tels qu'actinie, 1792, tiré du grec actis, 1549 ; comme terme d’arithmétique, 1680,
-in0s « rayon ». a remplacé ajouter.
ACTION, sens jurid., 1283 (Beaumanoir). ADÉN-. Premier élément de mots sav.,
Empr. du lat. jurid. actio, qui est une spé- tels qu’adénite, 1836, tiré du grec adén
cialisation de actio au sens général de «fait « glande ».
d'agir ». Le sens de « plaidoyer » qu'avait
aussi actio a été usuel au xvie et au xvires. ADENTER, v. dent.
— Dér. : actionner, au sens jurid., 1312. ADEPTE. Sens moderne, 1771, dû à
l'emploi de ce mot dans les sociétés secrètes
ACTION, « fait d’agir », 1250. Empr. du de cette ép., notamment dans la franc-
lat. aclio; a pris en fr. des sens plus maçonnerie ; antér., 1630, terme d'’alchi-
concrets. Action, dans la langue du théâtre,
mie, « celui qui passait pour être sur la
est déjà lat. ; action de grâces, xx1°, est un
voie de la découverte du grand œuvre ».
calque du lat. class. actio gratiarum. — Empr. du lat. des alchimistes adepius,
Dér. : actionner, sens techn., xvi® ; inac-
propr. « qui a atteint ».
tion, 1647 ; réaction, xvie, comme terme
techn. ; a suivi le sens d’action ; au sens ADÉQUAT, 1736 ; attesté une première
politique, 1795, d’où réactionnaire, 1796 fois au xIv° s. Empr. du lat. adaequalus,
(a éliminé réacleur de la même ép.). part. passé du verbe adaequare « rendre
égal (aequus) ».
ACTION, terme de finance, 1669. Le
holl. actie, qui passe souvent pour la source ADHÉRER, xiv® (au sens physique);
du fr. a un autre sens (« mouvement, ma- sens fig., 1377 ; adhérence, x1v® ; a signifié
nifestation ») et est plutôt d’origine fran- aussi « adhésion », du xv® au xvIre s. ;
çaise (par l'intermédiaire de l’all. Aktie). adhérent, 1331 ; adhésion, 1372 (Oresme).
Action paraît avoir reçu ce sens nouveau Empr. du lat. adhaerere, adhacrentia (de
d’après actif, terme de finance, soit propr. basse ép.), adhaerens, adhaesio. Le sens
« part de l’actif ». — Dér. : actionnaire, d’adhérer « être du parti, du sentiment de »
1675. est un développement du fr. L’a. fr. pos-
sédait un verbe a(h)erdre, vivace encore
ACTIVITÉ, 1425. Empr. du lat. médiéval au XVI*S., « saisir », trans., «s'attacher à » ;
activitas. — Comp. : inactivité, 1737. intrans., sens qu’adhérer ne recouvre qu’en
ACTUAIRE, 1749. Empr. de l’angl. ac- partie. On ne peut donc pas dire qu'il a
luary, fait sur le lat. acluarius « scribe, remplacé afh)erdre (d'un lat. *aderigere
officier comptable ». — Dér. : actuariat, «se dresser contre q. ch. », comp. it. adergersi
fin xixe, d’après notariat. « s'élever ») qui a disparu à cause de la
complexité de ses formes.
ACTUEL, xr11e, Jusqu'au xvir1es., terme
philosophique et scolastique ; sens moder- ADIANTE, 1549. Empr. du lat. adian-
ne, 1750. Empr. du lat. scolastique actualis lum (du grec adianton, littéral. « qui ne se
(déjà à basse ép. au sens d’ « agissant »). — mouille pas », de diainein « mouiller »:
Dér. : actualité, 1823, attesté au xrves. au ainsi nommé, parce que sa feuille ne garde
sens scolastique de l’adj. ; actualiser, 1641 pas l’humidité).
(au sens chim.), « rendre actuel », 1836. ADIEU, v. dieu.
ADOPTER

ADIPEUX, 1503. Dér. sav. du lat. ADMINISTRER, xr11° ; administrateur,


adeps, -ipis, « graisse ». vers 1180 ; administration,xive. Formes
plus adaptées am(m)inisirer, -acion, -eor,
ADIRER, v. dire. fréquentes en a. fr. Empr. du lat. adminis-
ADJACENT, 1314. Empr. du lat. adja- trare, propr. « servir » (de minisirer, voir
cens, part. prés. du verbe adjacere « être ministre), d’où « aider, fournir », etc., et
situé auprès ». des dérivés adminisiraior, administratio. —
Dér. : administratif, 1789.
ADJECTIF, 1372. Empr. du lat. de basse
ép. adjectivum (nomen), traduction du ADMIRER, xvi° ; admirable, xr11e ; ad-
grec epitheton, propr. « ajouté à ». mirateur, 1542 ; admiratif, xive (Oresme) ;
admiration, xive. Formes avec initiale
ADJOINDRE. Réfection d'’ajoindre, en- am(m )- fréquentes en a. fr. Empr. du lat.
core usuel au xvi®s., lat. adjüngère, d’après admirari, propr. « s'étonner », sens domi-
la forme du lat. écrit. Sens peu différent nant jusqu’au début du xvir1e 8. (de même
de joindre, jusqu’au xvires. It. aggiungere. admiration, admirable, signifient « étonne-
Dans les parlers gallo-romans, signifie sou- ment, étonnant », jusqu'au début du
vent « atteindre », comme le roumain xvires.) et des dér. admirabilis, -ator, -ativus
ajunge. (de basse ép.), -atio. L’a. fr. disait surtout
se merveiller, qu’admirer a supplanté.
ADJONCTION, xive (souvent ajonction,
jusqu’au xvi® s., d’après ajoindre, v. le ADMISSIBLE, 1453. Dér. sav. du lat.
préc.). Empr. du lat. adjunctio, pour servir admissus, part. passé de admittere ; v. ad-
de nom abstrait au préc.; l’a. fr. avait mettre. — Dér. et Comp. : admissibilité,
formé le dér. ajoignement. 1789 ; inadmissible, 1475 ; inadmissibilité,
1789.
ADJUDANT, 1671, ayudani, en 1701
(« on ne s’en sert que dans les païs étran- ADMISSION, 1539. Empr. du lat. ad-
gers », Furetière). Désignait d’abord des missio.
officiers subordonnés de haut grade ; sens
moderne de « sous-officier, adjudant » de- ADMONESTER. En outre admonéler,
puis 1776, qui n’a pas fait immédiatement encore dans les patois (berrichon, etc.),
disparaître le premier sens, encore usité au avec chute régulière de l’s, rétablie d’après
début du x1ix® s. Empr. de l'esp. ayudante la forme écrite de ce mot peu pop. Au
« officier subordonné », dér. de ayudar « ai- moyen âge ordinairement am- -; adm--
der »; devenu adjudant d’après le verbe est déjà du xr° s., mais n’a triomphé
lat. adjuvare « aider ». qu’au xvie s., d’après le lat. admünèére
« avertir ». Signifiait au moyen âge surtout
ADJUDICATION, 1330. Jusqu'au milieu « avertir » (sans nuance de blâme) et même
du xvirie s., en outre ajudication, d’après « exhorter, encourager », encore au xvI° S.
ajuger (v. le suiv.), auquel il a dû aussi le Le sens de « faire une remontrance », jurid.
sens de « jugement », xive. Empr. du lat. au xvii® s., apparaît au moyen âge dans
jurid. adjudicatio. — Dér. : adjudicataire, des dér. et dans le simple monester, qui
1430 ; adjudicateur, 1823; adjudicatif, signifie parfois aussi « admonester »; cf.
1534. esp. amonestar « avertir », a. pr. amonestar,
« exhorter », sans nuance de blâme. Ces
ADJUGER. En a. fr. ajugier, ajuger, diverses formes supposeraient un lat. pop.
jusqu’au xvine s.; l’orthographe adjuger *admonestäre. À cause de la singularité de
apparaît dès le xr11° s. Jusqu'au xvi® 8., cette forme, on a pensé à un croisement de
signifiait surtout « juger, condamner »; a admonitus « averti » avec molesius « péni-
repris le sens d’ « attribuer par jugement », ble », au sens de « donner à quelqu’un un
xve, au lat. adjudicare. En raison du pre- avertissement pénible » ; mais la succession
mier sens, qui n’est pas attesté en lat., des sens du verbe n’est pas favorable à cette
pourrait être considéré comme un comp. explication. Ce qui est probable, c’est que
de juger ; mais l’it. aggiudicare ayant aussi ce mot a été fabriqué dans les milieux d’étu-
signifié « condamner », il est possible que diants, que c’est donc une sorte de mot
le lat. adjädicaäre ait pris ce sens à basse ép. argotique. — Dér. : admonestation, 1856,
une première fois au XIIIe 8. :
ADJURATION, 1488. Empr. du lat. ad-
juralio « action de jurer », pour servir de ADOLESCENT, x1v°® ; adolescence, x111°.
nom abstrait au suiv. Empr. du lat. adolescens (part. prés. du
verbe adolescere « grandir »), adolescentia.
ADJURER. En a. fr. ajurer, refait sur
le lat. au xvie. Empr. du lat. eccl. adjurare ADONIS, 1715 (Lesage, comme nom com-
« sommer au nom de Dieu », d’où parfois, mun). Tiré du nom propre lat. Adonis (du
et jusqu’au xvie 8., « faire jurer ». Le lat. grec Adônis, adolescent d’une beauté si
class. signifiait, outre « jurer », «invoquer », extraordinaire qu'Aphrodite quitta l’Olym-
qui se trouve encore chez Chénier. pe pour le suivre) ; adoniser, xvi® s. (Ron-
sard), est dérivé du latin ou du grec.
ADMETTRE, xv°, une première fois au
xIt1e s. Empr. du lat. admiltere. La. fr. a ADOPTER, xive; adoptif, xri°; adop-
possédé un verbe ameire, d’origine pop., tion, xi1e. Empr. du lat. jurid. adopiare,
«mettre à charge, accuser », usuel jusqu’au sens propre et usuel« choisir » (de opiare,
xve s., et encore aujourd’hui en wallon; de même sens) et des dér. adoplivus, adop-
le développement de ce sens non attesté tio. Sens fig. du verbe, xvri* ; du subst.,
en lat. n’est pas clair. fin xvirie.
ADORER 10

ADORER, vers 1180; adorable, 1611 ADULTE, 1394. Empr. du lat. adultus,
(une 1'e fois au xives.) ; adorateur, vers part. passé de adolescere.
1420 ; adoration, xrve. Empr. du lat.
adorare, propr. « prier » (de orare, de
ADULTÉRER, x1v°, a signifié aussi aux
xve et xvie s. « commettre un adultère »;
même sens) et des dér. adorabilis, -ator
adultérateur, 1552 (Rab.); adultération,
(lat. eccl.), -alio. Adorer, -ateur ont sup-
planté, sous l’influence du lat. de l’Église, 1551 ; adultère, adj. et subst., xr1° (rare
des formes pop. aorer (qui a persisté dans au moyen âge) ; adultérin, xive. Empr. du
la locution le vendredy aoré, « le Vendredi lat. adulterare, adulterator (de basse ép.),
saint », XVIe et XVIIe S., aoreor. -atio, adulter, -terium, -{erinus. Adulierare,
dont tous les autres mots dérivent, signifie
ADORNER, xive. Usuel au xvi® s.; propr. « rendre autre, falsifier », d’où « cor-
repris au xIx® s. par archaïsme. Réfection, rompre une femme mariée » (de alterare,
d’après le lat., de l’a. fr. aorner « orner », v. altérer). Adultère « qui viole la foi jurée »,
encore usuel au xvie s., lat. adornare; xvii®, doit ce sens au lat. eccl., voir p. ex.
a. PT. azornar. Jérémie, III, et Mathieu, XII, 39, etc.
L’a. fr. a possédé des formes pop., avoutre,
ADOS, v. dos. adj. (encore avoi(s)ire, au XvVI° S.), avou-
ADOUBER, vers 1080 (Roland). Ne tire, avoutrer (cf. a. pr. avoutre, -trar), dont
s'emploie aujourd’hui qu'en parlant des la première est encore usitée dans de nom-
institutions médiévales et dans quelques breux patois.
emplois tech. Propr. « armer chevalier », ADVENIR, 1209. Réfection graphique,
d’où « équiper », puis « apprêter (en géné- puis phonétique, d’après le lat. écrit, de
ral) », très usuel encore au xvi® s., rare au l’a. fr. avenir, lat. adventre, usuel jusqu’au
Xvi1® s. Comp. d’un simple non attesté, XVI s. au sens d’ « arriver, convenir, at-
du francique *dubban, propr. « frapper », teindre » (encore au xvri® avec sujet de
cf. frison oriental dubba, de même sens, et chose) ; il subsiste aujourd’hui dans la lo-
dit spécialement en parlant de l’armement cution jurid. considérer une chose comme...
du chevalier qu’on frappait du plat de non avenue et dans les dér. avenant, vers
l'épée. Ce sens a repassé, avec la chevalerie, 1080 (Roland, comme adj. ; l'emploi jurid.
dans les langues germ.; cf., d’après la du subst. « ce qui revient à » date déjà du
locution fr. adouber a chevalier, anc. angl. XIIe Ss., CÎ. aussi la locution d'origine
dubban to ridere (angl. moderne to dub) et, jurid. à l’avenani, qui remonte à 1377;
de même, all. zum Ritter schlagen. — avenant, terme d'assurances, en 1783), avè-
Comp. : radouber, xir1° (É. Boileau), d’où nement, xiI° s. (signifie jusqu'au xvi®
. radoub, 1532.
«arrivée en général, événement ») ; avenue,
AD PATRES, xvie. Locution lat., signi- 1549 (Rab., au sens moderne, usuel en
fiant « vers nos pères », employée par plai- a. fr. au sens d’ « arrivée », etc., cf., pour
santerie. l'extension de sens, allée); cf. de même
a. pr. avenir, sens divers, esp. archaïque
ADRAGANT, xvie (Paré). Altération avenir « survenir » (avec sujet de chose).
d'adraganie, également dans les diction- Le verbe dialectal et archaïque aveindre
naires, lui-même altération de fragacanthe, « atteindre » (déjà au x1r1° s. avaindre),
XVI®, empr. du lat. fragacantha (du grec très répandu dans les parlers septentrio-
tragakantha, comp. de tragos « bouc » et de naux, est une variante d'avenir, refaite sur
acaniha, V. acanthe). le futur, ce qui est justifié par des reforma-
ADRÉNALINE, 1901. Créé en 1901 par tions analogues de venir d’après son futur.
l'inventeur de la substance, le D' Taka- ADVENTICE, 1767. Empr. du lat. ad-
mine, avec le lat. ad au sens de « auprès venticius « supplémentaire », dér. de adve-
de » et ren « rein », ce remède étant extrait nire. Au sens propre, « qui vient du dehors »,
des glandes surrénales du bœuf et du che- le lat. est représenté par l’a. fr. aventiz (par-
val.
fois adu-) « étranger », disparu de bonne
ADRESSE, -ER, v. dresser. heure sous cette forme, mais refait en
adventif, de même sens, Nicot, 1606, sous
ADRESSE, 1798. Au sens de « écrit le mot aubain. Adventif est conservé par
ayant pour objet une demande, des féli- la langue de la jurisprudence : biens adven-
citations, etc. », ce mot est empr. de l’angl. tifs, 1510, « qui arrivent par une circons-
address, attesté au sens de « pétition pré- tance accidentelle » (une fois adventis,
sentée au roi » depuis 1611. L’angl. address fin xvie).
est empr. du fr. adresse « indication du
lieu où l’on demeure ». ADVERBE, xve (antér. averbe, xr1e).
Empr. du lat. adverbium. — Dér. : adver-
ADRET, « versant exposé au midi », bial, 1550.
début xxe., Empr. des patois du Sud-Est
(Dauphiné, Provence), où le mot corres- ADVERSAIRE, avant 1155 (en outre
pond au fr. à droit et s'oppose à envers av-, dès 1170, encore au xvie s.). Empr. du
(comp. le fr. endroit d’une étoffe) ; le sens lat. adversarius. L’a. fr. a possédé une
premier est donc « du bon côté », v. ubac. forme pop. aversier, surtout « diable »,
d’origine eccl., cf. adversarius déjà chez
ADROIT, v. droit. Tertullien.
ADULER, xive (Christine de Pisan): ADVERSE. Usage moderne vers 1480.
adulateur, x1ve (Oresme) ; adulation, xrre. L’a. fr. a dit d’abord avers, empr. du lat.
Empr. du lat. adulari, adulaior, adulatio. adversus, cf. aussi averse partie du xre
Ib! AFFILIER

au xvi® s., mais on a réfait de bonne heure n’est attesté qu’une fois au x1° s.; il y a
le mot en adv- d’après la forme du mot lat. donc là une difficulté de chronologie. Tou-
Aujourd'hui adverse s'emploie surtout au tefois affectation est déjà attesté en 1413
fém. fortune adverse, d'après fortuna au sens « d’attribution (de bénéfice) »;
adversa ; avocat adverse, abréviation d’avocat comme le lat. affecialio n’a que le sens
de la partie adverse. « fait d’affecter (un sentiment) », le sens
« fait de destiner à un usage » est forcément
ADVERSITÉ, vers 1145 (du xr° jus- médiéval, ce qui vient à l’appui de l’expli-
qu'au xvi*s., aussi au-). Empr. du lat. eccl. cation précédente. — Dér. : désaffecter,
adversitas. Parfois et jusqu’au xvrre 8., 1876, d’où désaffectation, id.
« opposition, hostilité », d’après le préc. ou
d’après le lat. class. qui a, mais très rare- AFFECTER « émouvoir, toucher », xve.
ment, ce sens. Sens nouveau donné à affecter, d’après
affection, et le lat. afficere « affecter physi-
AËDE, 1853 (Leconte de Lisle). Empr. quement et moralement ».
du grec aoidos « chanteur », d’où « poète, AFFECTIF, xv° ; affection, x11° ; affec-
récitant (dans les poèmes homériques) ». tueux, 1347. Empr. du lat. affectivus (de
basse ép.), affectio « disposition physique
AÉRER, 1398 (en outre en a. fr. airier, et morale » (de afficere, v. le préc.), affec-
airer) ; aérien, x11° (ordinairement aerin, tuosus (de basse ép. ; de a/ffectus, à peu près
en a. fr., encore au xvi® s.). Dér. sav. du synonyme de affectio). — Dér. : affection-
lat. aer « air ». — Dér. : aérage, 1758; ner, xiv® ; désaffection, 1787 ; d’où désaf-
aération, 1836. fectionner, 1743 (-é).
AÉRO-. Premier élément de mots sav., AFFÉRENT, terme de jurisprudence.
tiré du grec aër « air »; aéroplane, 1855, Modification orthographique du xvr® s.,
comp. avec le radical de planer; aéro- d’après le lat. afferens, de l’a. fr. aferani,
naute, 1784, comp. avec naulés « mate- part. prés. du verbe aferir « convenir », par-
lot »; aérostat, 1783, en outre aérostaie, tic. usuel à l’impersonnel (il) afiert jus-
1783, comp. avec sialos « qui se tient », qu’au xvie s., lat. pop. *affertre, lat. class.
d’où aérostier, 1794, pour aérostatier, encore afferre, propr. « apporter », d'où « contri-
en 1798, afin d'éviter le groupe -{at- ; aéros- buer ». Afférent, 1845, terme d’anatomie,
tation, 1784; aérostatique, 1783, adi., est repris au lat. afferens, part. prés. de
1634, subst.; aérodrome, 1907 (en 1896 afferre.
« machine volante ») ; aéroport, 1928.
AFFABLE, xive (Oresme) ; affabilité,
AFFÉTERIE, vers 1500. Dér. d’affété,
xuie, Empr. du lat. affabilis, propr. « d’un aujourd’hui archaïque, « qui a une grâce
abord facile » (de affari « parler à »), affa- maniérée », sens qui s’est développé au
xvI® s., mais déjà « apprêté, recherché »,
bilitas. xve, part. passé de l’anc. verbe afailtier
AFFABULATION. Fin xvirie (La Har- « préparer, disposer », très usuel au moyen
pe). Empr. du lat. de basse ép. affabulatio âge. Ce verbe représente le lat. pop. *affac-
« moralité d’une fable ». iäre « mettre en état » (de la famille de
AFFAIRE, v. faire. facere « faire »), cf. a. pr. afachar, de même
sens ; conservé dans les dictionnaires sous
AFFAISSER, v. faix. la forme affaiter, au sens de « tanner »
AFFAITER, v. afféterie. (également prov.) et de « dresser un fau-
con ».
AFFALER, 1610. Propr. terme de ma-
rine, très récent au sens fig. Empr. du AFFICHER, v. fiche.
néerl. afhalen « tirer en bas (un cordage) ». AFFIDAVIT, 1773. Terme jurid., empr.
AFFAMER, v. faim. de l’angl. affidavit « il a fait foi, il a attes-
té », parfait d’un verbe affidare, v. le suiv.,
AFFECTATION : fait d’affecter (un sen- usuel en lat. du moyen âge.
timent), etc. », 1541 (Calvin) (« recherche,
poursuite »). Émpr. du lat. affectatio, qui AFFIDÉ, 1567. Tiré du lat. médiéval
a les mêmes sens. des juristes affidare « promettre, donner en
gage », qui paraît avoir vécu surtout dans
AFFECTATION « fait de destiner à un le Midi. Le verbe correspondant fr. affier a
usage », v. affecter « attribuer ». vécu du xr1° au xvi® s. et se trouve encore
AFFECTER « feindre, faire ostentation dans certains parlers (normand, etc.) ; cf.
de », xive. Empr. du lat. affeciare. aussi l’a. pr. afizar « assurer »; tous ces
verbes sont comp. avec le lat. */idare,
AFFECTER « avoir disposition », en v. fier, verbe. A pris un sens défavorable
parlant de choses, xvirie. Issu, par exten- en fr. au début du xix® 5.
sion de sens, d’affecter « chercher à attein-
dre, poursuivre », usuel du xv° au XVIII°8., AFFILÉE (d’), v. file.
également empr. du lat. affectare dont AFFILER. Lat. pop. *a/filäre, dér. de
c’est le sens propre. filum, au sens de « fil, tranchant d’un
outil », attesté déjà chez Ennius.
AFFECTER «attribuer, imputer », 1551.
Développement incertain. Le lat. médiéval AFFILIER, xive; affiliation, xvi°. An-
affeciatus, part. passé, dit à propos d’un ciennement termes jurid. ; sens plus étendu,
bien attribué, convient au sens (on peut 1732. Empr. du lat. médiéval affiliare (de
alors expliquer ce sens d’après l’a. fr. afai- filius « fils »), affiliatio. — Comp. : désaf-
tier « disposer, etc. », v. afféterie), mais il filier, 1872.
AFFINITÉ 12

AFFINITÉ, xiii®, au sens moderne. AFFÜT, AFFÜÛTER, v. fût.


Empr. du lat. affinitas, propr. « voisinage »
AFIN, v. fin.
(en ce sens, au xr1° s.), d’où « parenté par
alliance » (en ce sens 1283, Beaumanoiïr ; AGA, 1535. Empr. du turc aghé « chef ».
encore en 1802, chez Chateaubriand), puis
« rapport de conformité ». AGACE, v. pie.

AFFIQUET, xir1e. Devenu usuel à partir AGACER, 1530. Altération de l’a. fr.
du xvie s. Forme dialectale, normande et aacier « agacer les dents sous l'effet d’une
picarde, dér. d’afique, correspondant au substance acide », par croisement avec
Îr. affiche, usuel au moyen âge au sens agacer « crier comme une pie », sens attesté
d’ « agrafe, boucle, etc. », v. ficher. du xive au xvi® s., d’où les sens fig. mo-
dernes à partir de ce croisement ; aacier,
AFFIRMER, vers 1230 (en outre afermer verbe propre au fr., encore usité dans les
jusqu'au xvi® s.) ; affirmatif, xir1° ; affir- patois du Nord et de l'Est, est d’origine
mation, 1313 ; d’abord affer-, x11°. Empr. incertaine, probabl. lat. pop. “*adaciare,
du lat. affirmare, affirmalivus (de basse dér. de acies, au sens de « tranchant des
ép.), affirmatio. Les mots fr. ont été rap- dents ». — Dér. : agacement, 1539 ; aga-
prochés du latin. cerie, xvi1° (Mme de Sévigné).
AFFLEURER, v. fleur. AGAMI, 1664. Empr. de la langue des
Caraïbes de la Guyane.
AFFLICTIF, 1667, au sens moderne;
déjà créé au moyen âge, 1374, mais très AGAPE, 1574. Empr. du lat. eccl. agape
rare, au sens de « qui afflige »). Dér. sav. (du grec agapé, propr. « amour », qui, en
de afflictus, part. passé de affligere, pour ce sens même, est également de la langue
servir d’adj. à affliger, affliction. eccl., et qui a pris, surtout au plur., le sens
de « repas fraternel »). Récent dans un
AFFLIGER, x11Ie (en outre « frapper », sens plus étendu.
xvie); affliction, x1° (Saint Alexis; en
outre, parfois, sens physique au moyen AGARIC, 1256. Empr. du lat. agaricum
âge). Empr. du lat. affligere « abattre (au (du grec agarikon).
physique et au moral) », afflictio. AGATE, x111° (agathe, encore au xvi®s. ;
AFFLOUER, v. flot. antér. acate). Empr. du lat. achates (du
grec akhatés, propr. nom propre désignant
AFFLUER, x1v® ; affluent, subst., 1690 ; un cours d’eau de Sicile, près duquel cette
adj., signifiant « abondant », av. 1524 pierre fut d’abord trouvée, d'après Pline
(J. Lemaire) ; affluence, 1495 ; afflux, 1611. l'Ancien).
Les trois premiers sont empr. du lat. AGAVÉ, 1778. Aujourd’hui plutôt agave.
affluere, affluentia, affluens (en vue du sens Formé par les naturalistes avec le grec
spécial que lui donne le fr. ; au xvrre 8., agaué, fém. de l’adj. agauos « admirable ».
a signifié aussi « confluent ») ; afflux a été Une espèce appelée pite, 1599, est empr.
fait sur le supin affluxzum.
de l'esp. pita, qui vient d’une langue non
AFFOLER, v. fou. déterminée du Nord de l'Amérique du Sud.
AFFOUAGE, 1256. Dér. du verbe af- AGE, v. HAIE.
fouer « chauffer », dér. lui-même de feu, AGE. D'abord eage, aage. Dér. de l’a. fr.
peut-être déjà lat. pop. *affocäre, cf. a. pr. eé, aé, lat. aelätem, acc. de aetäs, d’où aussi
afogar « embraser », it. affocare « id. ». Le it. elà, esp. edad. Eé, aé, a été éliminé de
verbe survit encore au sens d’ « allumer » bonne heure, à cause de sa forme réduite,
en vosgien, d’ « affouager » dans la Suisse par dge, qui n’a été créé que dans la France
romande, d’ « incendier » en provençal septentrionale. — Dér. : âgé, xive (Oresme) ,
moderne. parfois « majeur », 1283 (Beaumanoir),
AFFRE, xve. Jusqu'au xvirie s. « ef- d’après le sens de « majorité » qu’a souvent
froi », probabl. empr. de l’a. pr. afre « hor- âge au moyen âge.
reur », qui représente, avec l’it. afro « aigre, AGENCE, v. agent.
âpre », un gotique *aifrs « horrible », qu'on
peut restituer d’après l’anc. haut all. eivar AGENCER, v. gent.
id. — Dér. : affreux, vers 1500.
AGENDA, 1535. Plur. neutre du lat.
AFFRÉTER, v. fret. agendus, propr. « ce qui doit être fait »,
AFFRIOLER, 1530. Comp. de l’adj. frio- extrait de la locution eccl. agenda diei
« offices du jour » pour désigner un registre
lel « gourmand », xive-xvi®, dér. de frire,
v. friand.
qui, aujourd’hui, n’a plus rien de religieux.
AGENT, « principe d'action », 1337.
AFFRONT, v. front. Empr. du lat. scolastique agens, part. prés.
AFFUBLER. Aujourd'hui péj. ; au de agere « agir ». :
moyen âge et jusqu'au xvi®s. «se revêtir ». AGENT, « celui qui est chargé d’une
Issu d’a/ibler, très rare (avec u dû aux deux mission ». Empr. de l'it. agente, 1578
consonnes labiales , b), lat. pop. *affibü- (H. Estienne : « il y a aussi un autre mot
läre, propr. «agrafer » (de fibula « agrafe ») ; nouvellement venu d’Italie, agent »), empTr.
cf. de même it. affibbiare « agrafer ». — SRE agens, V. le préc. — Dér. : agence,
Dér. affublement, xrrre.
13 AGRÈS

AGGLOMÉRER, 1795. Empr. du lat. AGNUS DE, 1360 (d’où agnus). Tiré de
agglomerare (de glomus, -eris « pelote »). — la formule liturgique citée sous agneau ; a
Dér. : agglomérat, 1824, avec le suff. -al servi à désigner des médailles portant
des noms d’action ; agglomération, 1762. l'agneau mystique, puis des images de
piété.
AGGLUTINER, xiv®; agglutination,
1537. Empr. du lat. agalutinare (de gluten, AGONIE, 1580 (Montaigne), au sens mo-
-inis « colle », v. glu, gluten) et du dér. de derne, dans la locution agonie de la mort ;
basse ép. agglutinatio. — Dér. du verbe : antér. « angoisse de l'âme », xiv® (Oresme ;
agglutinatif, xvi® (Paré). parfois sous la forme a{n)goine), d’où le
sens moderne est issu. Empr. du lat. eccl.
AGGRAVER. La forme agraver, déjà agonia « angoisse » (du grec agônia, propr.
dans Saint Alexis, fait place à agrever (du « lutte », d’où « agitation, angoisse »).
lat. aggravare devenu “*aggrevare en lat.
pop., d’après *grevis, v. grief), mais re- AGONIR, v. le suiv.
prend le dessus dès le xIv® 8. — Dér. : AGONISER, 1587 fagonisani), au sens
aggravation, xIve. moderne dû à agonie ; antér. « combattre,
AGILE, 1495 ; agilité, id. Empr. du lat. endurer le martyre », xiv® (Oresme). Empr.
agilis (du verbe agere, au sens de « mener »), du lat. eccl. agonizari, -are « combattre,
et du dér. agilitas. souffrir » (du grec agônizesthai, simplement
« combattre »). À pris dans le bas langage
AGIO, 1679, parfois agiot. Empr. de le sens (attesté en 1743) d’ « accabler d’in-
lit. aggio, même mot que agio « aise », jures », de même qu’agonir, 1756 ; celui-ci
anciennement aussi asio, probabl. empr. est dû à une altération, d’après agonie, de
de l’a. pr. aize ou de l’a. fr. aise. — Dér. : l’anc. verbe ahonir « faire honte », encore
A CÉ 1716; agiotage, 1715 ; agioteur, 1636, chez Monet, et aujourd’hui normand,
mais l’extension de ce sens à agoniser est
AGIR, 1459 (comme terme jurid.). Les bizarre ; peut-être est-elle due à une confu-
sens modernes ne datent que du xvIIes. ; sion dans la conjugaison des deux verbes.
au xvi® s., sens divers disparus. Empr. du AGOUTI, 1578. D'abord agoutin, 1558;
lat. agere. L'expression impersonnelle il acouti, 1654. Empr. de acouti du guarani
s’agit de est un calque du lat. agitur de. — (langue du Brésil).
Dér. et Comp. : agissement, 1845 ; réagir,
xvirie (Voltaire). AGRAFER, 1546. D'abord « accrocher ».
Comp. de l’anc. verbe grafer, 1364, « fixer
AGITER, xrre; agitation, xiv° (Ber- avec un crampon », dérivé de grafe, 1313,
suire). Empr. du lat. agitare (de agere, au « crochet ». Empr. de l’anc. haut all.
sens de « mener, pousser »), agitatio. — krâpfo, v. grappe. — Dér. et Comp. :
Dér. : agitateur, 1651, d’après l’angl. agi- agrafe, 1421, d’abord « crochet » ; dégrafer,
tator, attesté dès 1647 (le lat. agitaior ne 1546 ; ragrafer, 1680.
signifie que « cocher, charretier »).
AGRAIRE, xive (Bersuire : loi agraire).
AGNEAU, AGNELLE. Lat. agnellus, Empr. du lat. agrarius (dér. de ager
déjà class. à côté d’agnus (qui survit dans « champ »), principalement à propos des
l’it. agno et le port. anho) et lat. pop. lois agraires des Gracques, puis de lois
*agnella. Le lat. agna, fém. de agnus, n'a analogues. — Dér. : agrarien, 1790, « qui
survécu que dans l’a. fr. aigne. Les dic- concerne la loi agraire »; xx° s., « (parti)
tionnaires conservent encore la forme agnel qui défend les intérêts des paysans ».
et le dér. agnelet, pour d’anciennes mon- AGRÉABLE, AGRÉER, « trouver à son
naies d’or (xr1e-xv® s.), dont l'effigie était
un agneau, avec la formule liturgique : gré », V. gré.
agnus Dei, qui tollis peccata mundi, mise- AGRÉER, « équiper », v. agrès.
rere nobis. Le type agneau existe dans tous
les parlers gallo-romans, le type agnelle AGRÉGER, 1495 ; agrégation, xive. Em-
seulement dans l'Ouest et les parlers méri- pr. du lat. aggregare « rassembler » (de grex,
dionaux (a. pr. anhel, anhela). — Dér. : gregis, « troupe ») et du dér. de basse ép.
aggregalio. Agrégation, agrégé, titre uni-
agneler, xr1° ; agnelet, id.; agnelin, xI11°.
versitaire, 1766. — Dér. : agrégat, 1745,
AGNOSTIQUE, 1884. Empr. de l’angl. une première fois en 1556, avec le suff. -ai
agnostic, dér. par le naturaliste anglais des noms d'action ; désagréger, 1798, d’où
Huxley (1825-1895), du grec agnôsios désagrégation, 1798.
« ignorant ». — Dér. : agnosticisme, 1884.
AGRÈS, 1491 (aggrais, en parlant de
AGNUS-CASTUS, 1486. Empr. du lat. navires). Antérieurement agrei et agroi,
des naturalistes agnus-casius, formé du xi1e, « armement, équipement (en géné-
lat. agnus (grec agnos), nom de cet arbris- ral) ». Tiré du verbe agreier, XI1° 8., encore
seau, compris comme étant le même mot jusqu’au début du xix° s., sous la forme
que agnus « agneau », et de castus « chaste ». agréer, de l’ancien scandinave greida « équi-
La deuxième partie du mot est probabl. la per, arranger »; le préf. a- s'explique par
traduction du grec hagnos « chaste », con- l'influence de verbes fr., comme abiller,
fondu avec agnos, de sorte que le nom grec v. habiller. Le verbe gréer, 1666, a été subs-
’est contenu deux fois dans le mot lat. Les titué à agréer, peut-être pour éviter l’homo-
propriétés antiaphrodisiaques, attribuées nymie avec agréer, « trouver à son gré »;
longtemps à cette plante, sont l'effet de d’où gré(e)ment, 1670 ; dégréer, 1762 (à
cette interprétation du nom. côté de désagréer, 1688) ; dégrément, 1783.
AGRESSEUR 14

AGRESSEUR, 1404; agression, xve. dans les termes de parenté. Depuis le


Empr. du lat. aggressor (de basse ép.), xvie s., mot littéraire, v. grand-père. —
aggressio (du verbe aggredi « attaquer »). — Dér. : bisaïeul, 1428 (antér. besaiol, xrr1°);
Dér. : agressif, av. 1793 (d’après le latin ag- tris-, 1552, formé avec le préf. lat. fri-
gressus) ; agresser, av. 1892 (dans la langue « trois fois » et l’s de bisaïeul ; quadrisaïeul,
des journalistes ; déjà au moyen âge, jus- 1751 (Voltaire), formé avec le lat. qguadri-,
qu’au xvI° s.). premier élément de mots comp., « quatre »
et l’s de bisaïeul, trisaïeul.
AGRESTE, xr1e. Empr. du lat. agreslis,
v. agraire. AIGLE, xr1° (egle et aigle). Empr. de
l’a. pr. aigla, ou refait sur le lat. aquila,
AGRICOLE, xive (Oresme), « agricul- l’aigle étant un oiseau rare ; on trouve par-
teur », jusqu’au xvr11° s. ; adj. au sens de fois en a. fr. la forme régulière aille, qui
« qui s’adonne à l’agriculture », 1765; existe encore dans la région alpine du
agriculteur, 1495 ; devenu usuel seulement franco-provençal. It. aquila, esp. dguila. —
au xvi® s.; agriculture, 1343. Empr. du Dér. aiglon, 1546.
lat. agricola, -cultor, -cultura.
AIGRE. Lat. pop. acrus, attesté à basse
AGRIPPER, v. gripper. ép., lat. class. äcer, propr. « pointu, péné-
AGRO-. Premier élément de mots sav., trant », qui a pris de bonne heure le sens
empr. du grec où agro- vient de agros d’ «aigre », et s’est ainsi substitué à acidus,
«champ », tels qu’agronome, xiv® (Oresme, dont il n’y a que de faibles traces dans les
(v. anarchie), etc. langues romanes. Aigre, à côté d’aire,
quelquefois attesté en a. fr., paraît dû à
AGRUME, 1922, terme de géogr. Empr. un développement particulier, cf. de même
de l’it. agrume « désignation collective des maigre, v. aussi aigu. It., esp. agro (esp.
oranges, mandarines et citrons » (dér. de moderne agrio). — Dér. : aigrelet, XVIe;
l’adj. agro « acide »). Au sens de « pruneaux aigret, xIII1° (en outre, jusqu’au xvI® $.,
d'Agen », le mot vient peut-être plutôt subst. au sens de « verjus ») ; aigreur, xrv®
d’un parler méridional. (à cause de sa date récente, ne représente
AGUETS, v. guetter.
pas le lat. acror, qui subsiste ailleurs);
aigrir, x11€. — Comp. : aïigre-doux, xvI®
AGUICHER, 1866 (au sens de « agacer », (L. de Baïf ; cf. « Il (L. de Baïf) a donné à
plus tard «attirer par un manège d’agace- notre langue ce beau composé « aigre-
ries »; avant 1860 aguichant, adj. : elle doux » Du Bellay Défense) ; besaïigre, 1743.
avait eu... l’air très aguichant. Dér. de V. vinaigre.
guiche « petite bande d’étoffe », a. fr. AIGREFIN, « officier de fortune, cheva-
guige « courroie », probablement du fran- lier d'industrie », 1672. Probablement
cique *withthja « lien d’osier » ; le dévelop- emploi figuré du mot suivant; il est possible
pement sémantique du verbe a ses analogies aussi que le mot semblant composé des
dans all. mit jemandem anbinden (employé deux adj. : aigre et fin, s’est prêté de lui-
dans un sens hostile) et anbändeln (avec même à une plaisanterie de ce genre.
sens érotique).
AH. Onomatopée (a, vers 1050) ; on l'écrit AIGREFIN, sorte de poisson, 1393. Alté-
ha pour marquer des nuances.
ration d’aiglefin ou égle-, encore dans les
dictionnaires, antér. esclefin(s) et escleuis,
AHAN, x° (Saint Léger : aanz) ; ahan- XIVe, empr. du néerl. schelvisch, cf. all.
ner, x11°. En a. fr., outre les sens de « peine, Schellfisch.
tourment, peiner », etc., s'appliquent par- AIGREMOINE, 1314 ; antér. aegremone.
ticulièrement au travail de la terre: ce Altération, d’après aigre, d’agrimoine, du
sens est encore usuel dans les patois de XIV® au XVI S., empr. du lat. agrimonia.
l'Est. Les formes fr. et l’a. pr. afan, afanar Celui-ci est une altération, d’après ager
s’accordent pour faire supposer un verbe « Champ », de argimonia, argemonia, autre
lat. de basse ép. *afannare, qui est pro- forme plus latine de argenone (du grec
babl. formé sur le subst. lat. de basse ép. argemôné, sorte de pavot, dér. de argemon
afannae « bagatelles, situation embrouil- « ulcère de la cornée » (de argos « blanc ») ;
lée », qui est lui-même empr. du grec le nom de l’argemôné vient de ce qu’on
aphaännai « chose obscure ». Les formes it. l’employait pour soigner cette affection de
affanno, -are ont été rangées parmi les mots la cornée.
comp. avec la prép. a.
AIGRETTE, 1375 (egresie « héron »:
AHURIR, v. hure. sens moderne, 1553, Belon). Empr. du
AIDER. Lat. adjüiäre. It. aiulare, esp. prov. aigrela, dér., par substitution de
ayudar. Dér. : aide, 842 (Sermenits de suff., de aigron « héron ».
Sirasbourg : aiudha), développement pa- AIGU. Lat. dcütus. D'abord agu, encore
rallèle au verbe ; le masc. n'apparaît pas au xvI® s. (alors peut-être par latinisme) ;
clairement avant le xvi® s.; sous-aide, probabl. refait sur le lat., le développement
1586. — Comp. : entr’aider (s’), XLR régulier de acäius l’ayant réduit à une
entr’aide, fin xrxe. forme trop mince eu, cf., le nom de lieu Le
AÏE, 1473. Onomatopée. Montheu (Meurthe, mons acuius en 875) ;
agu a réagi ensuite sur la forme des mots
AÏEUL, -E. Lat. pop. *avidlus, -a, lat. aiguille, aiguillon, aiguiser ; aigu, qui ap-
class. avus, avia; développement phoné- paraît au xir1e s., mais ne triomphe qu’au
tique irrégulier, comme il arrive souvent Xvi®, fait également difficulté; il est pro-
15 AIMER

babl. dû à un croisement avec aigre; en AILLEURS. Étymologie douteuse. Le


effet, agu et aigu ont souvent le sens lat. aliorsum « vers un autre lieu », ne
d’ « aigre », du xr11e au XvIe 8., Cf. « d’au- convient ni à la forme française (à cause
tant aussi en est le vin plus fort et aigu » de sa voyelle eu), ni à plusieurs formes ro-
(Paré). It. acuto, esp. agudo. — Comp. : manes, par exemple portugais alhures. Ail-
suraigu, 1727 ; v. besaiguë. leurs paraît formé d'ailleur avec s adver-
bial; aillour n’a été relevé qu'une fois en
AIGUADE, 1552 (Rab.). Empr. du prov. a. fr., au xive s., mais alhor est fréquent
aigada (de aiga « eau »); le sens du fr. en a. pr. à côté de alhors. On a supposé
n’est attesté par accident que par le prov. *aliôre, issu de locutions telles que *in
moderne eigado ; aigada a d’autres sens : aliôre loco « dans un autre lieu » faites sur
« inondation, etc. ». (in) superiore, interiore, eæleriore (loco).
AIGUAIL, xvi*, en outre égail (Ron- Aujourd’hui dominant dans les parlers
sard). Empr. d’un parler de la région poi- gallo-romans ; en outre, autre part où autre
tevine où aiguail est encore usuel au sens lieu sont disséminés.
de « rosée »; ce mot dérive non de aigue
« eau » (la forme poitevine est ève), mais du AILLOLI, 1837 (écrit alors aüllolis).
verbe aigailler « faire de la rosée », exten- Empr. du prov. moderne aioli, comp. de
sion de « (se) répandre, (s’)éparpiller », ai «ail » et de oli « huile ».
empr. sous la forme s’égailler, v. ce mot.
AIGUE-MARINE, 1578. Empr. du prov. AIMABLE. Lat. amaäbilis. D'abord ama-
non attesté *aiga marina, littéral. « eau de ble, encore au xvi® s. (alors probabl. par
mer », v. eau; dit de cette variété d’éme- latinisme) ; aimable, xiv°, d'après aimer.
raude, à cause de sa couleur. — Ne peut pas Esp. cat. amable. V. amabilité, amiable.
être un comp. fr. d’aigue « eau », que la
langue écrite a beaucoup employé du xr1° AIMANT. D'abord ayement et aïmani ;
au xve s., mais qui était disparu au xvi®s. aimant vers le xvie s. Signifiait au moyen
âge à la fois « aimant » et « diamant », au
AIGUIÈRE, 1322. Empr. du prov. ai- xvi® s., en outre « acier, métal très dur »
guiera, lat. pop. *aquäria, cf. vas aquarium (d’après le lat., v. la suite). Lat. ädämaäs,
« pot à l’eau », Varron. -antis, à la fois « fer très dur, acier et dia-
AIGUILLE. Lat. de basse ép. acücüla mant » (du grec adamas, qui a les mêmes
« aiguille de sapin », dér. du class. acus sens). Aimant, comme l’a. pr. aziman « ai-
(d’où l’it. ago). D'abord aguille, encore au mant, diamant » (d'où l'esp. imän « ai-
xvIe s. ; aiguille, xv®, triomphe au xvies. mant ») exige une forme “*adimas, -aniis
Développement phonétique parallèle à ce- (dont l’i est dû à un développement normal,
lui d’aigu. La prononciation moderne, qui cf. machina, du grec mékhand, et olifani,
a succédé vers le xvi® s. à aigu-lle, est mal issu de elephas) et l’a. fr. ayemani, une
expliquée. It. agucchia, esp. aguja.—- Dér. : forme *adiamas, -antis, qui semble due à
aiguillée, x1r1° (J. de Meung); aiguiller, un croisement de adamas avec diamas.
xIXe (au x1r1° S., au sens de « coudre »), Cette dernière forme remonte au 1v®8., si
dér. d’aiguille, terme de chemin de fer, d’où diamas, relevé dans des tablettes d’exécra-
aiguilleur, 1859 ; aiguillette, x111°, d’où ai- tion de cette époque, comme nom de che-
guilleter, 1549 ; aiguillier, xr11° (G.. de Lor- val, est le même mot, et elle passe pour
ris). une altération de *adimas, par croisement
avec des mots grecs commençant par dia,
AIGUILLON. Lat. pop. acüleoônem, acc. tels que diaphanés « transparent », v. dia-
de acüleô (aculionis, Gloses de Reichenau), mant. L'emploi de adamas au sens de
dér. du class. acülèus, qui a laissé peu de « pierre d’aimant » est propre au gallo-
traces. D'abord aguillon, encore au xvI°s., roman ; il vient des lapidaires où les deux
aiguillon, xi1°; développement phonéti- pierres, la pierre d’aimant et le diamant,
que parallèle à celui d’aiguille. Esp. agu- étaient signalées pour leur dureté. L’it. a
jén. — Dér. : aiguillonner, xr1°. repris le mot lat. magnes, d’où magnele,
comme l’all. Magnet ; v. magnésie, magné-
AIGUISER. Lat. pop. *acüliare (cf. acu-
tique. — Dér. : aimanter, 1386 (aguilles
tiator dans des gloses), lat. de basse ép. aymenirees), d'où aimantation, XVI11° (But-
acütare (de acütus « aigu »). D'abord agui- fon).
ser, encore au XVI°S. ; aiguiser, XIII° ; déve-
loppement phonétique parallèle aux pré-
cédents. It. aguzzare, a. Pr. aquzar. — AIMER. Lat. ämäre. D'abord amer, re-
Dér. : aiguiseur, xiv°; aiguisoir, xv°. fait sur les formes accentuées aime, etc. ;
aimer a triomphé au xvi®s. ; n’ont survécu
AIL. Lat. allium. It. aglio, esp. ajo. Sur que le part. prés. amant (pris substantiv.
le lat. allium a été fait le mot récent al- au xr1e s., sens moderne, au xvire s.) et le
liacé, 1802. part. passé amé dans des formules suran-
AILE. Lat. ala. D'abord ele, écrit aile, nées : « Nos amés et féaux sujeis », etc.
xve, d’après le mot latin. It., esp. ala. — On a, en outre, des locutions des types
Dér. : ailé, xr1° (sous la forme alez) ; aileron, avoir cher, en picard; avoir en gré, en
xive (aleron) ; aîlette, x11° (Chrétien : écrit prov., comparables à l’it. aver caro, voler
alors el-) ; haleter, xr1°, propr. « battre des bene, aimer appartenant à une langue plus
ailes », puis « palpiter », avec h d’origine relevée. It., esp. amar. — Comp. : entr’ai-
expressive, cf. encore aujourd'hui angevin, mer (s’), xr1°; bien-aimé, 1417 (bien-
poitevin daleter, « battre des ailes ». amé).
AINE 16

AINE. Lat. pop. *inguinem, acc., au lieu notamment de l’aigle ; de « nid » on passe
du lat. class. inguen, inguinis, neutre. facilement à «nichée, couvée », d’où «race»,
It. inguine, masc., esp. ingle, fém. ; a. pr. puis aux sens cités plus haut.
engue, masc.
AIRELLE, 1596. Empr. d’un parler de
AINE. Marc de raisin, en a. fr. aisne ; la région orientale du Massif Central, où
aujourd’hui usuel dans la région rémoise. cette forme est très usitée; dér. d’un
Lat. acinus « grain de raisin (et de tout simple attesté par le prov. moderne aire,
autre fruit) ». Mot assez peu répandu : it. masc., du lat. äler « sombre, noir », pris
acino. substantiv. pour désigner l’airelle.
AÎNÉ, v. naître. AIS. Très rare aujourd’hui sur tout le
AINSI. D'abord einsi, auquel ainsi a suc- domaine gallo-roman (a. pr. ais), v. plan-
cédé au x1V*Ss. ; einsi a été expliqué comme che. Lat. pop. axis, altération, d’origine
issu du croisement de deux adv. de même obscure, du lat. class. assis, un croisement
sens ensi, comp. de en et de si, usité sur- avec axis « essieu » étant peu vraisembla-
tout dans les parlers de l'Est, et de eissi, ble ; cette forme axis a pu contribuer à la
propre aux parlers occidentaux et nor- disparition partielle de axis « essieu » en
mands, qui est considéré comme empr. de gallo-roman. L’it. asse peut représenter
l'a. pr. aissi (lat. pop. *“accu({m)sic, dont assis OU ais.
*accum est une variante de eccum (pour
ecce), due probabl. à l'influence de aïque, AISANCE ; AISE, subst. Aise représente
v. celui), lequel aurait pénétré dans les le lat. pop. adjäce(n})s, part. prés., pris
parlers français par le Sud-Ouest. L'’in- substantiv., du verbe adjäcere « être situé
fluence d'issi, autre adv. de l’a. fr., est auprès », qui a pris le sens d’ « environs »,
moins probable, en raison de sa moindre cf. adjacentia, plur. neutre, en ce sens chez
vitalité. L'it. dit cosi, l'esp. asi. Tacite ; adjacens sous des formes variées
est fréquent dans des textes en lat. médié-
AÏOLI, v. ailloli. val de la région du Massif Central pour
désigner une dépendance territoriale ; de
AIR, fluide. Lat. aer (du grec aér). A là, en fr., « commodité », etc. Malgré sa
souvent le sens de « vent » dans les parlers rareté relative en a. fr., aisance doit être
gallo-romans. It. aria (d’après une forme considéré comme représentant de lat. adja-
aera, acc. d’origine grecque, devenu subst. centia et non comme un dér. d’aise. A. pr.
fém.), esp. aire.
aize « proximité », etc.; usuel, avec des
AIR. Le sens « apparence extérieure » sens divers, dans les parlers modernes.
n'apparaît qu’au xvi® s. (Montaigne). — Il L'it. agio « aise » vient du fr. ou du prov.,
est né du sens premier à travers des étapes comp. agio. — Dér. : aise, adj., x11°, pro-
comme l’air d’une cour (où air est pris au babl. par l'intermédiaire de l’anc. locution
sens de « atmosphère, ambiance »), dire adverbiale a aise « à son aise » ; aisé, xrr1°,
d’un certain air « d’une certaine manière ». part. passé du verbe aisier; a absorbé
L’it. aria a développé le même sens. aaisié, part. passé du verbe aaisier « mettre
AIR, « air chanté ». 1608. Empr. séman- à l'aise », etc.; d'où malaisé, 1530. —
tique fait à l’it. aria, où le sens de «chant » Comp. : malaise, xrre.
est sorti de celui de « manière » par un déve- AISSELLE. Lat. pop. *axëlla, lat. class.
loppement comparable à celui de l’all. axilla. It. ascella.
Weise « manière, mélodie », cf. aussi l'arabe
tab « nature, manière, ton musical ». AÎTRE, vers 1080 (Roland). Emprunt
Empr. également par l’esp. aire. V. ariette. ancien (époque carolingienne) du lat.
atrium, par la langue eccl.
AIRAIN. Aujourd’hui surtout littéraire,
à côté de bronze et de cuivre. Lat. pop. AJONC, xrrie. Empr. d’un patois de
*arämen, issu par assimilation vocalique l'Ouest. Se retrouve, avec d’autres suf-
du lat. de basse ép. aerämen, lat. class. aes, fixes, dans le berrichon ajou (déjà a. fr.)
aeris, « bronze ». D'abord arain, encore au et le gascon gabarro. Ces formes remontent
XVI° s., remplacé alors par airain, d'après à un radical *gabo-, d’origine sans doute
le lat. It. rame « cuivre », esp. alambre, a. pr. prélatine, et dont la signification doit
aram. avoir été « épine ».
AIRE. Lat. äréa, qui a aussi le sens AJOUR, v. jour.
d’ « aire d’un oiseau ». It. aia « aire de
grange », esp. era. En raison de l'existence AJOUTER, v. jouter.
de l’a. pr. aire, agre « nid » et « famille, AJUSTER, v. juste.
extraction », qui représente le lat. ager
« Champ », on peut supposer que le genre ALACRITÉ, 1495. Empr. du lat. ala-
masc. de l’a. fr. aire vient de la rencontre critas, V. allègre.
phonétique de area et ager au nord de la
France. — Dér. : airée, xv®; airer, contrac- ALAISE, v. alèze.
tion de l’a. fr. aairier, xir1e. — Comp. ALAMBIC, xrr1e (J. de Meung). Empr.,
débonnaire, vers 1080 (Roland : de bon avec l’art de la distillation, probabl. par
aire, qui s'opposait à de put aire, de mal l'intermédiaire de l’esp. alambique, de l’ara-
aire, aire étant souvent masc. en anc. ir) be al-anb q (lui-même emprunté du grec
le lat. area était déjà attesté chez Plaute ambix « vase à distiller ») ; cf. de même it.
au sens d’ « aire d'oiseau », spécialisé en lambicco. — Dér. : alambiquer, 1552; le
fr. au sens d’ «aire des oiseaux de proie », plus souvent au sens fig.
17 ALÉSER

ALANGUIR, v. languir. sucs » ; on préfère aujourd'hui khémia (ces


ALARME, v. arme.
deux mots sont de basse ép.), qui signifie-
rait « magie noire » et serait formé avec
ALBAÂTRE, xr1e (sous la forme albastre). l'égyptien kém « noir », cf. kémeia, nom de
En outre alabastre, -ausire (d’origine obs- l'Égypte chez les Égyptiens, d’après Héro-
cure, de même latin médiéval alabaustrum), dote. — Dér. : alchimique, 1547 (écrit
alebastre, encore au xvi® s., etc. Empr. du alors -ki) ; alchimiste, 1532 (Rab. ; arche-
lat. alabaster et -irum (du grec alabastros misle au Xv°s.).
et -on).
ALCOOL, xvie (alcohol; en outre alk-
ALBATROS, 1666, d’abord alcatras, jusqu’au xix® s.). Empr. du lat. des alchi-
1588. Empr. du port. et esp. alcatraz, d'ori- mistes alkol, alkohol, cf. « Alkol est purior
gine incertaine (peut-être d’une langue substancia rei, segregata impuritate sua.
américaine ; mais on n'a rien trouvé de Sic alkol vini est aqua ardens rectificata et
satisfaisant dans cette direction). Désigne mundissima », Leticon Alchimiae, 1612 ;
d’abord le pélican d'Amérique, mais les ce mot est à son tour empr. de l’arabe al-
voyageurs portugais ont, par la suite, ap- kohl « antimoine pulvérisé », v. kohl, d’où,
pliqué ce nom à l’albatros de l’océan Indien. dans l’ancienne pharmacie, « toute subs-
En angl. aussi le nom a été modifié d’abord tance pulvérisée et raffinée », d’où «liquide
en algatrass, ensuite en albatross. Le portu- distillé », par une innovation de sens qu’on
gais albatroz est un emprunt récent à l’an- attribue à Paracelse (début xvi®). — Dér. :
glais. alcoolat, 1826 ; alcoolique, 1789 ; alcooliser,
1620 ; alcoolisme, 1861.
ALBERGE, 1546, en outre auberge,
Xvi® s. Empr., probabl. par l'intermédiaire ALCÔVE, 1646. Empr. de l’esp. alcoba,
d’un parler méridional, de l’esp. albérchiga empr. lui-même de l’arabe al-goubba « pe-
(empr. lui-même du mozarabe albérchiga, tite chambre ». A passé du fr. dans les lan-
qui vient du lat. persica, v. pêche). — gues voisines, cf. all. Alkoven, angl. alcove.
Dér. : albergier, id.
ALCYON, 1553 (une 1re fois vers 1265).
ALBINOS, 1665. Empr. du mot hispano- Empr. du lat. alcyon (du grec alkyôn).
portugais albinos, plur. de albino, dans
l'expression negros albinos (traduite nègres- ALE, 1512; du xrr1° au xvie s. aussi
blancs par Buffon en parlant d’albinos de godale, goudale. Empr. du moyen néerl.
l'Amérique centrale), dite d’abord par les ale « sorte de bière doucçâtre », et de goedale,
Portugais à propos des nègres blancs de propr. « bonne bière ». V. pour ce dernier
la côte de l'Afrique occidentale. — Dér. : godailler.
albinisme, 1822. ALÉA, 1867 ; aléatoire, 1596. Empr. du
ALBUM, vers 1700 (Saint-Evremond) :
lat. alea « coup de dé, chance », aleatorius
« Ils (les gens de lettres allemands) se mu-
« relatif au jeu », d’où le sens fr.
nissent d’un livre blanc bien relié, qu’on ALÊNE. Du germ. *alisna, de même radi-
nomme « album amicorum », et ne man- cal que l’all. Ahle (cf. anc. haut all. alunsa,
quent pas d'aller visiter tous les savants alansa avec métathèse de sn). Empr. par
des lieux où ils passent et de le leur pré- le lat. probabl. avant l'invasion franque. It.
senter, afin qu’ils y mettent leur nom »; lesina, esp. alesna a. pr. alezena. V. lésine.
encore en ce sens dans l’Émile de J.-J.
Rousseau ; d’où le sens moderne au xix®s. ALÉNOIS. Seulement dans cresson alé-
Empr. de l’all. Album, lui-même d’un mot nois, 1546 (Rabelais). Altération de cresson
lat. (neutre de l’adj. albus « blanc ») qui orlenois, xir1® c’est-à-dire d’Orléans.
désignait un tableau (album praetoris) ou ALENTOUR, v. tour.
une liste (album judicum).
ALÉRION, x11°, au sens d’ « oiseau de
ALBUMINE, 1792. Empr. du lat. de proie », surtout « aigle », jusqu’au xvi®s.;
basse ép. albumen, -inis, « blanc d’œuf ». aleri-on, en quatre syllabes, au moyen âge.
— Dér. : albumineux, 1666 ; albuminoïde, Semble représenter, avec une altération
1857 ; albuminurie, 1838, créé par le méde- mal éclaircie, le francique *adalaro, corres-
cin Martin Solon, avec le radical du verbe pondant à l’all. Adler « aigle » (moyen haut
grec ourein « uriner ». all. adel-ar, littéral. « aigle noble »).
ALCADE, 1576 (arcade en 1323). Empr. ALERTE, xvie (Rab. qui écrit a l’herte ;
de l’esp. alcalde, empr. lui-même de l’arabe très usuel au xvi® s. sous les formes a l’erie,
al-qâdi, v. cadi. encore chez La Fontaine, ou a l’airte).
ALCALI, 1509 (écrit alors alkalli). Empr. Empr. de lit. all’erta, propr. « sur la hau-
de l’arabe al-qaly « soude ». — Dér. : alcalin, teur » (fém. pris substantiv. de erlo « es-
1691 ; alcaloïde, 1827. carpé », du verbe ergere « dresser », lat.
érigére), cri d'appel de soldats de garde, etc.
ALCARAZAS, 1798. Empr. de l'esp. En outre, au xvi® s., joue le rôle d’adv.
alcarraza, empr. lui-même de l'arabe signifiant «prêt, vigilant », parfois «dehors ».
al-kourréz, de même sens. Devenu adj., écrit en un seul mot, xvi®;
subst. fém., xvire (Buffon). — Dér. :
ALCHIMIE, xive. Formes variées jus- alerter, fin xIxe.
qu’au xvI° s$. alquemie, XIII°, arque-
mie, etc. Empr. du lat. médiéval alchemia ALÉSER, 1671. Continue a. fr. alaisier
(de l'arabe alkimiyé, d'origine grecque). « élargir », lat. pop. “*alläliäre (de lalus
On a pensé au grec khymeia « mélange de « large »), qui survit dans le sens d’ « agran-

DICTe ÉTYMe 2
ALÉSER 18

dir des trous ou des parois de tuyaux ». du lat. helleborum, avec accentuation fran-
Au part. passé, à côté de alésé, ausssi alisé, çaise), cette plante servant au moyen âge
comme t. de blason, variante due à l’in- de remède aux maladies les plus variées.
fluence du verbe lisser, v. lisse. — Dér. : ALIDADE, xvie. Empr. du lat. médiéval
alésage, 1813 ; alésoir, 1671. alidada, empr. lui-même de l'arabe al-
ALEVIN. Lat. pop. *allevämen, dér. du ‘idhäda, de même sens.
verbe alleväre « lever, soulager », qui a pris ALIÉNÉ, « privé de sa raison », XIvV®;
en lat. pop. le sens d’ « élever (des enfants, rare à d’autres formes verbales ; aliéna-
des animaux) », cf. a fr. alever, en ce sens. tion, xive (Oresme : aliénation d’esprit).
On a dit d’abord alevain, changé de bonne Empr. du lat. alienatus, part. passé de
heure en -in d’après nourrin, V. nourrain. alienare « égarer l’esprit » (usuel en ce sens
— Dér. : aleviner, 1308; alevinage, 1690. surtout au part.; de alienus « étranger »
ALEXANDRIN. Terme de versification, v. les suiv.) et du dér. usité surtout dans
vers 1430. Ce vers a été ainsi nommé, parce alienatio mentis, de là aliénation d’esprit,
qu’il fut employé dans un poème du xin1®5. encore usité au xixe s., et aliénation men-
sur Alexandre le Grand, dont le succès tale. — Dér. : aliéniste, 1846.
retentissant est encore attesté par les écri- ALIÉNER, terme juridique, x1r1° ; alié-
vains du xvie s. (au début du xv® s. rime nation, id. Empr. du lat. jurid. alienare,
alexandrine). alienatio, v. le préc. — Dér. : aliénable,
ALEZAN, 1534 (Rab). Empr. de l’esp. 1523 ; inaliénable, 1593.
alazän, probablement de l'arabe ’az‘ar ALIÉNER, «rendre hostile », xive. Empr.
« rougeâtre ». du lat. alienare, qui a également pris ce sens.
ALÈZE, v. laize, ALIMENT, x11° ; alimentaire, xvi<. Em-
pr. du lat. alimentum (de alere « nourrir »)
ALFA, 1848. Empr. de l’arabe halfd. A et du dér. alimentarius. — Dér. : alimenter,
pénétré une première fois, au XVII® S., SOUS xive ; alimentation, 1412 ; sur-, fin xixe.
la forme aufe, encore dans les dict. par
l'intermédiaire du prov. aufo. ALINÉA, xvrie (Balzac). Empr. du lat.
médiéval a linea, formule employée jus-
ALGARADE, xvi® (B. des Périers). Si- qu’au début du xix® s., en dictant, pour
gnifie d'abord « attaque brusque »; sens indiquer qu’il fallait aller à la ligne.
moderne au cours du xviie s. Empr. de
l'esp. algarada « cris poussés par des com- ALISE, 1118. En outre alis, masc., xrr°,
battants », cf. aussi le verbe algarear et alie, fréquent au moyen âge, forme très
« pousser des cris », dérivé de algara «troupe répandue dans les patois contemporains.
d’assaillants » et « attaque », empr. lui- On a longtemps pensé à un emprunt du
même de l’arabe alghéra « attaque à main germ. *aliza, Cf. all. Elsbeere « alise »;
armée ». mais l’alisier étant un arbuste très répandu
dans les régions montagneuses du Midi, il
ALGÈBRE, xiv°. Empr. du lat. médiéval est plus probable que le mot est une survi-
algebra, arabe al-djabr, propr. « réduction, vance d'un gaulois “*alisia, formé avec
réparation » (se dit aussi de l’art de remet- un suffixe fréquent dans cette langue.
tre les membres démis, sens conservé par Répandu sur tout le territoire gallo-roman.
l'esp. archaïque, algebra, d'où algebrista — Dér. : alisier, xrrre.
« rebouteur »), d’où « réduction de l’arith-
métique à une forme plus parfaite » — ALITER, v. lit.
Dér. : algébrique, 1585 ; algébriste, xvre. ALIZÉS, 1643. Du même radical que
ALGIDE, 1812. Empr. du lat. algidus lisse ; -z- au lieu de -ss- s'explique par l’in-
« froid, glacé ». fluence du même mot et allisus qui a donné
la voyelle -i- à cet adj. Cf. de même l’esp.
-ALGIE, -ALGIQUE. Suff. de mots sav., vientos alisios.
tirés du grec algos « douleur ».
ALKERMÉES, v. kermès.
ALGUAZIL, 1581. Empr. de l'esp. algua-
cil, empr. lui-même de l'arabe al-wdzir, ALLAITER. Signifie aussi « téter » au
propr. « conseiller », v. argousin et vizir. moyen âge et encore aujourd’hui en Bour-
gogne (d’où aussi chez Mme Colette). Lat.
ALGUE, 1551. Empr. du lat. alga. de basse ép. allactäre (M. Empiricus, ve)
ALIAS, xve. Adv. lat. signifiant « autre-
« allaiter »; a dû signifier aussi « téter »,
ment, ailleurs », empr. par la langue jurid. comme le simple lactare. It. allattare « allai-
ter, téter », a. pr. alachar « allaiter ». —
ALIBI, 1394. Empr. du lat. alibi « ail- Dér. : allaitement, xrve.
leurs », auquel le latin jurid. du moyen âge
a donné son sens particulier. Au xvie $., ALLÉCHER. Lat. pop. *allecitcare, dér.
signifie souvent « ruse ». du lat. class. allectäre, fréquentatif de alli-
cére « attirer », etc. ; *allicicare, d’où vient
ALIBORON. Presque toujours avec mai- le sarde allicare, est moins vraisemblable
tre. Sens moderne d’après La Fontaine, pour allécher, dont le prototype “*allecti-
Fables, I, 13; au xvi® s., désigne un care est assuré par l'esp. alechigar «adoucir,
homme qui se prétend très habile, le plus apprivoiser » et par alleciäre, conservé par
souvent avec un sens péjoratif. Au xves., lit. allettare. L’étymologie populaire rap-
surnom des apothicaires et des médecins proche aujourd’hui lécher. — Dér. : allè-
tiré de l’a. fr. aliboron « hellébore » (empr. chement, 1295.
19 ALLOCUTION

ALLÉE, v. aller. ploi des formes de vadere correspondant à


celui du français, ambulare y étant, pour
ALLÉGEANCE, terme jurid., 1669 (alli- les autres formes, le verbe usuel. Dans le
geance en 1651). Empr. de l’angl. allegiance, domaine gallo-roman aller est la forme des
altération de l’a. fr. lijance, liejance « état parlers septentrionaux et du franco-pro-
d’un homme ou d’une terre lige ». L’initiale vençal, anar celle des parlers méridionaux
du mot angl. est due à une confusion avec (déjà a. pr.) au sud de la ligne allant de
allegeance, empr. du fr. allégeance « soula- l'embouchure de la Gironde, en passant au
gement », v. le suiv., et qui avait également nord du Massif Central, jusqu’au nord des
une acception jurid. Hautes-Alpes (traces au nord de cette
ALLÉGEANCE, « soulagement », v. le ligne) ; les formes de ire et de vadere cor-
suiv. respondent à peu près à celles du fr. It.
ALLÉGER. Lat. de basse ép. (écrivains andare, esp. andar, probabl. lat. pop. *am-
bitäre, fréquentatif de ambre « aller au-
ecclésiastiques) allèviäre (de lèvis « léger »). tour ». En outre, it. gire, esp. a. pr. ir et
It. alleviare, esp. aliviar, a pr. aleujar. — des formes de vadere à peu près comme en
Dér. : allège, 1162 (attesté à cette date par
fr. V. ambler. — Dér. : allée, xr1°, de bonne
le lat. médiéval alegium) ; allégeance, xr1°, heure au sens de « voie », contre-, 1700;
« soulagement »; aujourd’hui littéraire ; allure, x11° ; préalable, xive, avec le préf.
allègement, xr1°.
lat. prae et l’anc. adj. alable « où on peut
ALLÉGORIE, 1118; allégorique, 1470 aller », sur le modèle du lat. de basse ép.
(souvent au xvi® s. -ic). Empr. du lat. præambulus « qui précède » — Comp.
allegoria, -icus (du grec allégoria, dér. du va-et-vient, 1765 ; va-tout, XvIIe.
verbe allégorein « parler par allégorie », ALLEU. Terme de droit féodal. D'abord
de allos « autre » et de agoreuein « parler », alue, xrie, parfois aluef, comme fief. Du
c’est-à-dire « employer des termes autres francique *al-ôd « propriété complète »,
(que les termes propres) », allégorikos). formé de *al « tout », cf. all. all, et de *ôd
ALLÈGRE. Au moyen âge surtout ha- «bien », cf. vieux saxon 6d. Transcrit alodis
liègre ; aux xve et xvi®s. allegre et allaigre. dans la Loi Salique et allodium dans la Loi
Lat. äläcer « vif, prompt », etc., dont le des Longobards et le lat. médiéval, d’où it.
développement présente des difficultés; allodio et esp. alodio. Du lat. médiéval allo-
on suppose qu'il est devenu en lat. pop. dialis vient allodial, 1463.
*alicèr, alecris (génitif), d’où alècrus. L’h ALLIACÉ, v. ail.
de l’a fr. paraît être d’origine expressive;
on l’a attribué à un croisement avec une ALLIER. En outre, en a. fr. aleier, aloier,
forme germ. correspondante à l'all. heil v. lier. Au sens de « combiner des métaux »,
« sain »; quant au changement d’-iegre en déjà fin xrre. Lat. alltgäre (de ligäre « lier
-egre, il peut s’être produit d’abord dans (au physique et au moral) »). It. allegare
les dér. It. allegro (d’où les termes de mu- « faire un alliage, etc. », esp. allegar « réu-
sique allégro, 1726, et -etto, 1751), a. pr. nir ». — Dér. : 1° d’après le sens de «unir
alegre (d’où l’esp. alegre). — Dér. : allé- (par un traité) » : alliance, vers 1150;
gresse, xr11e (écrit alors alegrece). mésallier, 1510, d’où mésalliance, xvri°;
rallier, vers 1080 (Roland), d’où ralliement,
ALLÉGRO, v. le préc. x11e ; 20 d’après le sens de « combiner des
ALLÉGUER, 1283 (Beaumanoir) ; allé- métaux » : alliage, 1515 ; aloi, vers 1260,
gation, xz1e. D'abord termes de droit. tiré de la forme anc. aloier ; propr. « allia-
Empr. du lat. allegare « citer en exemple », ge », sens vieilli depuis le xvires.
et aussi « alléguer pour sa défense » en latin
jurid., et du dér. allegatio. 7
ALLIGATOR, 1663. Empr. de l’angl.
alligaior, altération, d’après le lat. alligare,
ALLÉLUIA, xnue. Empr. du lat. eccl. par interprétation savante, de l'esp. el
(h)alleluia, transcription de l’hébreu hal- lagarto « le lézard » (cf., parmi de nom-
lelou-yah « louez l'Eternel », qui commence breuses formes altérées, aligarto, 1591),
et termine plusieurs psaumes, 105, etc. appliqué au crocodile d'Amérique ; de mê-
me le port. lagarto désigne le crocodile
ALLER. Lat. ambüläre, propr. « se pro- d'Afrique et d’Asie.
mener »; est entré en concurrence, dans la
langue familière (déjà dans les lettres de ALLO. Empr. de l’anglo-américain
Cicéron), avec ire, qui survit dans le futur halloo. Le fr. allons, essayé vers 1880,
et le conditionnel ir-ai, ir-ais, et vadère, qui a été probabl. suggéré par l’anglo-améri-
survit dans les formes d’indic. prés. vais, cain halloo, d’origine onomatopéique.
vas, va, vont, et l’impér. va. La réduction
anormale de ambulare a dû se produire ALLO-. Premier élément de mots comp.
dans les commandements militaires, ainsi sav., tels que allotropie, 1855, tirés du grec
* allate, altération de ambulate (on a relevé allos « autre ».
en ce sens l’impér. sing. ambula, et, chez ALLOCATION, 1478. Formé d’après loca-
Végèce, 1v° s., ambulare au sens de « mar- tion, pour servir de nom d’action à allouer.
cher au pas »). L'emploi de ambulare au
sens général d’ « aller » a été signalé chez ALLOCUTION, 1835, au sens moderne
des écrivains de la Gaule, saint Avit et (une première fois au x11° s.). Aux XVII°
Grégoire de Tours, vie s., Gloses de Reiche- et xvirre s., seulement en parlant de la ha-
nau, 1x° (4 fois alare). On a en outre cons- rangue d’un général romain à ses troupes.
taté dans une traduction des Leïtres du Empr. du lat. alloculio, dérivé de alloqui
Pape Clément Ie° aux Corinthiens, un em- « haranguer ».
ALLODIAL 20

ALLODIAL, v. alleu. ALOPÉCIE, 1538, antér. alopicie, 1377,


alopice, xive. Empr. du lat. alopecia (du grec
ALLOPATHIE, créé vers 1800 par le alôpekia, dér. de alôpêz « renard », la chute
médecin allemand Hahnemann, en même des cheveux ayant été comparée à la
temps que son opposé homéopathie. chute annuelle des poils chez le renard).
ALLOTIR, v. lot. ALORS, v. lors.
ALLOUER. Au moyen âge signifie aussi ALOSE. Lat. de la Gaule alausa (Au-
« placer, prendre en location, dépen- sone), du gaulois (qui a également pénétré
ser », etc., sens disparus avant le xvire s. dans le germ., d’où l’all. Alse). Esp. alosa,
Lat. de basse ép. allôcäre, propr. « placer », prov. moderne alauso.
qui a dùû signifier aussi « louer », comme ALOUETTE, xr1°. Dimin. d’aloe, encore
lücäre, v. louer. It. allogare « placer, donner au xve s., lat. alauda, d’origine gauloise.
en location ». It. allodola, esp. alondra. V. aloyau.
ALLUMER. Lat. pop. *allüminare, comp. ALOYAU, 1393 (allouyaux de beuf, dans
du lat. class. /äminäre « éclairer » (de lämen, le Ménagier). Probabl. emploi fig. d’aloel
« lumière »), sens attesté en a. fr. et encore « alouette », dér. d’aloe, v. alouette; aurait
usuel dans les patois de l'Est. A pris de désigné d’abord de petits morceaux de
très bonne heure le sens de « mettre le feu bœuf garnis de lard et cuits à la broche
à », éliminant peu à peu esprendre, v. aussi comme des alouettes, puis le morceau de
affouage. Dominant dans les parlers gallo- viande de bœuf qu'on préférait pour ce
romans ; survivances d’affouer et d’espren- mets.
dre, Lorraine et région de la Suisse romande ;
plusieurs concurrents dans les parlers méri- ALPAGA, 1716 (alpaque; 1739, alpaca
dionaux, notamment aluca dans le Sud- ou alpague). Empr. de l'esp. d'Amérique
Ouest, activa et aviva, dans le Sud-Est. It. alpaca, empr. lui-même de allpaca du quet-
alluminare, esp. alumbrar, a. pr. alumenar, chua, langue indigène du Pérou.
tous au sens d’ « éclairer ». — Dér. et ALPESTRE, xvi® (dans des traductions
Comp. : allumette, 1213 ; allumage, 1845; de l’it.). Empr. de l’it. alpestre, dér. de
allumeur, 1540 ; allumoir, 1876 ; une pre- Alpe « Alpes ». V. alpin.
mière fois au xiv®e s., au sens d’ « éclair » ;
rallumer, xi° {Saint Alexis) ; allume-feu, ALPHA. xre. Empr. du lat. alpha, v.
fin xIxe. le suiv.
ALLUSION. Sens moderne, 1690. Antér. ALPHABET, xve. Empr. du lat. de
« badinage, jeu de mots », 1574. Empr. du ‘basse ép. alphabelum, comp. de alpha et
lat. de basse ép. allusio, qui a les deux sens, de béta, les deux premières lettres de l’al-
dér. de alludere « badiner, faire allusion ». phabet grec. Le terme pop. est, depuis le
— Dér. : allusif, 1770. Xv*s. et encore dans beaucoup de régions,
croix (de) par Dieu, beaucoup d’abécé-
ALLUVION, 1690 (Fontenelle), au sens daires portant sur la reliure une croix (de
moderne ; antér. « débordement », 1527. là l'habitude, en Savoie, de lire l’alphabet
Empr. du lat. alluvio, qui a les deux sens, croix par Dieu, a, b, c, etc.). — Dér. : alpha-
dér. de alluere « baigner ». — Dér. : alluvial, bétique, xve; analphabétisme, xxe (par
1830. l’intermédiaire de l’it.), d’où analphabète,
id. (déjà créés une première fois au xvr° s.).
ALMANACH, 1391 (en 1328 anemallat).
Empr. du lat. médiéval almanachus, d’ori- ALPIN, xvie, rare avant 1796 (de Saus-
gine incertaine ; la source du mot paraît sure). Empr. du lat. alpinus, dér. de Alpes,
être le syriaque l-manhaï « en l’année pro- v. alpesire. Dér. alpinisme, fin xix°;
Chaïne », qui a probabl. servi aussi à dési- alpiniste, id.
gner des tables du temps publiées au
commencement d’une année lunaire, En ALPISTE, 1617. Empr. de l'esp. alpista
passant à l'arabe la prép. syriaque 1- a dû « blé des Canaries », d’origine inconnue.
être confondue avec l’article arabe al, ALTERCATION, 1289, d'abord
d’où le mot arabe al-mänakh, terme
attesté en jurid. signifiant « désaccord, débat » ; em-
Espagne, qui a été l'intermédiaire. Alma- ploi moderne au xvie s. ; avant le xvrre s.
nach est devenu européen : it. almanacco,
concurrencé par altercas, tiré d’alterquer,
all. Almanach, ete. empr. du lat. altercari. Empr. du lat. alter-
ALMÉE, 1785. Passe pour être empr. catio, dér. de altercari.
de l’arabe oriental ‘âlmé, part. fém. du ALTER EGO, 1845. Locution lat. signi-
verbe ‘alima (en arabe class.) « savoir », fiant « un second moi-même » {chez Cicé-
propr. « savante », les almées ayant été
instruites dans l’art de la danse, du chant ron).
et de la poésie. ALTÉRER, « changer (ordinairement de
bien en mal) », xive (Oresme) ; altération
ALOËS, vers 1175. En outre aloe, XIIIe, « changement (en général) », xrr1e, sens
encore au xvI® s. Empr. du lat. aloes maintenu jusqu'au xXvi° s. ; a suivi ensuite
(propr. génitif du mot rec aloé), qui ap- le sens du verbe. Empr. du lat. de basse
paraît comme nominatif au vie s. à côté ép. alierare « changer, empirer » (de alter
de aloe. « autre ») et du lat. médiéval alteratio. —
Dér. altérable, xrve; inaltérable, id.
ALOI, v. allier, (Oresme).
21 AMBASSADE

ALTÉRER, « exciter lu soif », xvie. Issu fié, qui paraît représenter une altération
d’altérer au sens d’ « exciter, irriter », fré- du grec malagma « action de pétrir ». —
quent autrefois, issu lui-même, par déve- Dér. : amalgamer, xrve.
loppement propre au fr., du préc. — Dér. :
désaltérer, 1549. AMAN, 1838. Mot arabe de l'Afrique du
Nord amän « sécurité, protection »; ne se
ALTERNE, xve ; alterner, x111°. Empr. dit qu’en parlant des Arabes. Se trouve
du lat. aliernus « alternatif », alternare, déjà chez Voltaire (Charles XII, liv. VI :
trans. et intrans. (de aller « autre »). — « l’autre (un janissaire) lui demanda par-
Dér. : alternance, 1830 ; alternatif, xive, don en criant amman »).
alternative, 1401, comme terme de droit
eccl. ; sens moderne au xvire 8. AMANDE. En outre au moyen âge ale-
mand(l)e et amandre (encore au xvre s. ;
ALTESSE, 1500. Signifie souvent alors forme restée provinciale). Lat. pop. attesté
« élévation ». Empr. de l’it. altezza ou de à basse ép. amandüla (lat. class. amygdäla,
l’esp. alteza, dér. de alto « haut ». grec amygdalé), qui paraît être venu, par
ALTIER, xvie. Peu usuel avant le le Dauphiné et le Lyonnais, de l’Italie où
XVIIe s. Empr. de l’it. alliero « fier » et existe la forme correspondante mandorla.
aussi « orgueilleux », autre dér. de allo, v. Viennent d’autres formes plus ou moins
le préc. altérées, l’esp. almendra et l’a. pr. amela,
ALTITUDE, 1485. Empr. du lat. alli- prov. amelo. — Dér. : amandier, 1372,
ludo « hauteur », dér. de altus « haut ». antér. alemandier, xtre.
ALTO, 1771. Empr. de l’it. alto « haut »; AMANT, v. aimer.
J’it. dit viola alta; on a pris la forme alto, AMARANTE, 1544. Empr. du lat. ama-
sans doute à cause du genre de violon. rantus (du grec amaranios).
ALTRUISME, v. autrui. AMARRER, x. Empr. du néerl.
ALUMINE, 1782 (G. de Morveau). Dér. aanmar(r)en, de même sens. Usité, au
sav. du lat. alumen, -inis, « alun ». sens général d’ « attacher », dans les parlers
normands et de l'Ouest, et surtout près des
ALUMINIUM, 1819 (aluminon en 1813). côtes. Du fr. viennent l’it. amarrare et
Formé parl'Anglais Davy vers 1812, d'après l'esp. amarar. — Dér. : amarrage, 1573;
le lat. alumen, ce métal provenant de la amarre, x111° ;, démarrer, 1491 ; démarrage,
terre alumineuse. 1751
ALUN. Lat. alümen. It. allume, esp. AMAS, AMASSER, v. masse.
alumbre.
ALVÉOLE, 1519. Empr. du lat. alveolus, AMATEUR, 1488. Empr. du lat. amator
qui a des acceptions techn. diverses, propr. « celui qui aime, partisan ». À remplacé
« auge », dimin. de alveus « cavité, ruche ». l’a. fr. ameor, usuel jusqu’au xve s., non
— Dér. : alvéolaire, 1751. seulement au sens d’ « amoureux », mais
avec celui de « qui aime (la paix, le bien) ».
AMABILITÉ, 1671. Empr. du lat. ama- Le sens de « celui qui aime les arts sans les
bilitas, pour servir de nom abstrait à ai- pratiquer » date du xvire s. (1680). Le mot
mable. En a. fr., amableté et amiableté ont a passé en anglais au XviIII° s. au sens de
été peu usuels. « celui qui exerce un sport par dilettan-
AMADOU, 1723, mais déjà amadoue, tisme ». Dans cet emploi il est ensuiterevenu
sorte de drogue, 1628 (Jargon de l’Argot en France, où il est attesté depuis 1898. —
Reformé) et amadouoit « frottait avec Dér. amateurisme, 1898, notamment
l'amadou », 1546 (Rab). Empr. du prov. d’après le sens d’amaleur, opposé à pro-
amadou « id. », propr. « amoureux », dit fessionnel, dans la langue des sports.
de l’agaric amadouvier à cause de sa faci- AMATIR, v. mat.
lité à s’enflammer. — Dér. : amadouer,
1538 ; les textes précédents appuient l’opi- AMAUROSE, xviI®; au xXvVI® S. ama-
nion d’après laquelle amadouer a d’abord phrose, d’après la prononciation du grec:
été un terme de l’argot des gueux, qui se moderne. Empr. du grec amaurôsis « id. »,
frottaient avec de l’amadoue, nom donné propr. « obscurcissement » (de amauros:
à diverses préparations pour se jaunir le « obscur »).
teint et exciter ainsi la pitié. L’explication AMAZONE, xu1° (comme nom propre,
ordinairement admise qui voit dans ce rare avant le xvie s.). Employé au sens
verbe un dér. du prov. amadou au sens fig., 1728 (Voltaire) ; « femme qui monte
propre d’ « amant, ami », et qui aurait à cheval », vers 1610 (E. Pasquier). Empr.
signifié « rendre ami », se heurte au fait du lat. Amazon (du grec Amazôn), ordinai-
que ce verbe n'existe pas dans les parlers rement plur., pour désigner des femmes
prov. (sauf sous une forme récemment em- guerrières qui, d’après la légende, vivaient
pruntée). Quant à amidouler du picard où sans hommes, dans le Pont, la Scythie ou
on a voulu voir le prototype d’amadouer, la Lybie.
et qu’on a interprété comme un dérivé
d’ami doux, c’est une altération d’un verbe AMBAGES, xiv° (Bersuire). Empr. du
dér. d’amiable, qui a été provoquée par lat. ambages « subterfuges ».
amadouer. AMBASSADE, 1387 ; ambassadeur, vers
AMALGAME, xve. Empr. du lat. des 1366, embassalor, xir1°. Jusqu'au xvi® s.,
alchimistes amalgama, probabl. empr. d’un en outre, « député, envoyé ». Empr. de l’it.
mot arabe encore insuffisamment identi- ambasciala, -alore. Ambassee (d’où l’angl.
AMBASSADE 22

embassy), -eor, de l’a. fr., xIr1° et XIVe S., bulatoire, 1637 ; attesté dès 1752 au sens
en sont des adaptations plus francisées de « fonction de receveur ambulant »;
(on les relève, en effet, dans des textes d’où ambulancier, 1870.
d'origine italienne, Brunetto Latini et la ÂME. D'abord anima, x°s. (Saint Léger,
traduction de Marco Polo). Les mots it. Eulalie), aneme, xi° (Saint Alexis), d’où
viennent (comme l'esp. ambajada, -ador) anme, âme, et, en outre, en a. fr., alme et
des formes prov. ambaissada, -ador (et arme. Lat. änima. De par son sens religieux
emb-), dér. d’un simple non attesté *ambais- ou philosophique, a toujours été influencé
sa, correspondant au lat. médiéval ambactia par le lat. écrit. It. anima, esp. alma.
(ambascia, Loi des Burgondes, « service
qu'on tire d’une bête » ; in ambascia regis, AMÉ, v. aimer.
Loi Salique, « au service du roi »), d’origine
germ., cf. le gotique andbahti « service, AMÉLIORER, 1437. Réfection, d’après
fonction » (anc. haut all. ambahli, ambahi, le lat. melior «meilleur », de l’a. fr. ameillorer,
d'où all. Ami « fonction »), dér. de andbahis x11e, dér. de meillor, forme anc. de meilleur ;
« serviteur, fonctionnaire », qui est lui- au xvi° s. ameilleurer et -ir (d’où améliorir,
même empr. du celtique, cf. gaulois *am- 1558-1686). — Dér. : amélioration, xvir1e,
bactos « client, serviteur », transcrit ambac- une première fois en 1421, a de même éli-
tus par Ennius et César. — Dér. : ambas- miné des dér. en -ement : amellorissement,
sadrice, 1631 (fin xvi® s., embasciatrice). 1386 (amélior- encore dans les diction-
naires), ameliorement fin xv®°.
AMBESAS, v. as.
AMEN, 1138. Empr., par l'intermédiaire
AMBIANT,, 1538. Empr. du lat. ambiens, du lat. eccl. amen (en grec amén), de l’hé-
part. prés. du verbe ambire « entourer ». — breu amen « ainsi soit-il », qui termine sou-
Dér. : ambiance, 1889. vent les prières, cf. notamment le psau-
me 41, etc.); v. alléluia.
AMBIDEXTRE, 1547 (Budé). Empr. du
lat. de basse ép. ambidextier, comp. du préf. AMENDEMENT, 17839 (au sens politi-
ambi « double » et de dexter « droit ». que). Le subst. a passé du franc. en angl.
au sens de « amélioration ». En anglais, le
AMBIGU, 1495 ; ambiguïté, x111°, rare parlementarisme lui a fait prendre le sens
avant le xvrie s. Empr. du lat. ambiguus de « altération d’une loi devant le parle-
(du verbe ambigere « être indécis, incer- ment », sens dont s’est emparée tout de
tain »), ambiguïtas. suite l’Assemblée Nationale au moment de
AMBITION, xrr1° ; ambitieux, id. Jus- la Révolution.
qu’au xvue s., surtout « intrigue, intri- AMENDER. Lat. émendäre « corriger,
gant ». Empr. du lat. ambilio, qui a, entre châtier » dans le lat. jurid., et aussi « amen-
autres, le sens du fr. (du verbe ambire der une terre » (dér. de menda, mendum
« entourer », d’où « rechercher, briguer »), « faute »), avec un changement de pré.
ambitiosus. — Dér. : ambitionner, fin xvi® très anc.; cf. de même it. ammendare,
(d’Aubigné : « je lui appris... à dire... am- a. pr. amendar et, avec un autre préf., esp.
bitionner »). enmendar. — Dér. : amende, xr1° (emmende
AMBLE, vers 1200. Dér. de l’anc. verbe « réparation », cf. amendes honorables,
amibler (encore dans les dictionnaires), sans 1390 ; « sanction pécuniaire », xiIv®);
doute empr. de l’a. pr. amblar (de même amendement, x11°, au sens général d’ «amé-
sens, cf. de même it. ambiare), lat. ambü- lioration » jusqu’au xviie s.
läre, propr. « se promener » (on trouve déjà AMÈNE, xr11°; aménité, xve. Empr. du
chez Végèce le dér. ambulatura « amble ») ; lat. amoenus, amoenitas.
il est, en effet, difficile de rattacher ambler
directement à ambulare qui a donné en AMENUISER, v. menuisier.
fr. aller.
AMER. Le masc. semble devoir au fém.
AMBRE, vers 1200. Empr., probabl. le maintien de sa consonne finale dans la
par l'intermédiaire du lat. médiéval ambar, prononciation. Lat. amaärus. It. amaro. —
de l'arabe ‘anbar, propr. « ambre gris ». Comp. : douce-amère, 1752.
It. ambra, all. Ambra, angl. amber, etc. —
Dér. : ambrer, 1651 ; ambrette, xrrre.
AMERRIR, v. mer.

AMBROISIE, xv°, en outre xvI®, am- AMERS, 1683. Du normand merc, masc.,
brosie et ambroise : cette dernière forme « borne de séparation », empr. du néerl.
encore chez La Fontaine. Empr. du lat. merk «limite ».
ambrosia (du grec ambrosia « nourriture AMERTUME. Lat. amaritüdinem, acc.
des dieux », cf. ambrotos « immortel »). Dé- de amaäritüdo, avec une substitution de
signait aussi en grec et en lat. diverses suff. qui se retrouve dans tous les mots
plantes, d'où le fr. ambroisie, au moyen terminés en -iüdinem, cf. coutume ; le radi-
âge ambroise, xiv®, « sorte de plante aro- cal est refait d’après amer. Seulement fr.
matique ». L’a. fr. a en outre amerté, lat. de basse ép.
AMBULANT, 1558 (Rabelais) ; ambula- amäritäs, et une autre forme amertor; les
toire, 1497. Empr. du lat. ambulans, part. autres langues ont des formations variées.
prés. de ambulare « se promener », v. aller, AMÉTHYSTE, xr1° (écrit amnetisie) ; aux
ambulatorius « mobile, etc. ». — Dér. : xvie et xviI® s., en outre amat(hj)iste,
ambulance, sens moderne, 1795, d’après d’après lit. ou l'esp. amatisia. Empr. du
hôpital ambulant, 1762, antér. hôpital am- lat. ameïhystus (du grec amethystos, de
23 AMOURETTE

methuein «s'enivrer » et du préf. négatif a-, AMNÉSIE, 1803. Empr. du grec. amnésia
parce que cette pierre passait pour préser- (de a privatif et d’un élément se rattachant
ver de l'ivresse). au verbe memnésthai « se souvenir ») « ou-
AMEUTER, v. meute. bli » en vue d’un sens spécial.
AMI, AMIE, Lat. amicus, -a. De l’a. fr. AMNISTIE, 1546, en outre au xvi® s.,
mamie, encore chez Molière, est issu ma amnestie. Empr. du grec amnéstia « pardon,
mie, d'où mie, déjà médiéval, souvent usité amnistie » (du verbe mnésthai « se souve-
aux xvII° et XVIIIe s., Comme terme enfan- nir »), avec à dû à la prononciation du grec
tin pour désigner une gouvernante ; au- DAREE et médiéval. — Dér. : amnistier,
jourd’hui vieilli. It. amico, -a, esp. amigo, -a. 795.
AMIABLE. Aujourd'hui seulement ju- AMODIER, 1283 (Beaumanoir). Empr.
rid. (sens attesté dès 1402; jusqu’au du lat. médiéval admodiare « donner à
XVIe s., très rarement après, « aimable »). ferme moyennant une redevance en na-
Lat. de basse ép. amicäbilis, dér. de amicus ture » (de modius « boisseau »). Devenu
« ami ». assez fréquent dans les parlers pop. au sens
de « louer ». — Dér. : amodiation, 1419.
AMIANTE, 1551. Empr. du grec amian-
los, de même sens, propr. adj. signifiant AMOME, 1213. Empr. du lat. amomum.
« pur, incorruptible » (du verbe miainein (du grec amômon) ; v. cardamome.
« COITOMPpre »).
AMORCE, xr11° (amorse) ; V. morceau.
AMICAL, 1735 (Marivaux). Empr. du Fém., pris substantiv., du part. passé de
lat. de basse ép. amicalis. Adapté une pre- l’anc. verbe amordre « mordre, faire mor-
mière fois en amial, au xII° 8. dre », d'où « attirer », encore usité au
xvie s., lat. pop. *admürdère, lat. class.
AMICT, xre (sous la forme emit, au admôrdére, conservé seulement en fr. —
moyen âge ordinairement amit). Empr. du Dér. : amorcer, xiv°; amorçage, 1838;
lat. eccl. amictus, en lat. class. « manteau, désamorcer, 1864.
voile, etc. ».
AMORTIR. Au moyen âge à la fois
AMIDON, 1302. Empr. du lat. médiéval « tuer » et « mourir »; en outre « rendre
amidum, d’après la prononciation du lat. comme mort » (encore au xvi®s., d’où «mor-
au moyen âge (v. dicton), altération du lat. tifier en faisant macérer », vers le xvi® s.
class. amylum (du grec amylon, littéral. et le sens techn. de la langue moderne, à
« qui n’est pas moulu », de mylé « meule ») ; partir du xvrie s.), et, spécial. avant la
même altération dans les autres langues : Révolution, « concéder à titre de main-
it. amido, esp. almidén (probabl. empr. du morte ». Lat. pop. *admütire, qui a dû
fr.). — Dér. : amidonner, 1581. signifier « rendre comme mort » (de morius
AMIRAL. Ne paraît pas, sous cette « mort »). It. ammortire, de sens analogues.
forme, être antérieur au xvi® s. Au moyen — Dér. : amortissable, 1465 (rente..), très
âge, formes variées : amiré, -raut, -rant rare avant le xixe s. ; amortissement, 1263,
(encore au xvi® s.), -ail (id.); cf. de même sens parallèle au verbe.
it. ammiraglio, esp. almirante. Empr. de
l'arabe amiîr « chef », avec une terminaison AMOUR. Empr. de l’a. pr. amor, grâce
mal éclaircie. Signifie d’abord « chef des à l'influence des troubadours et de leur
Sarrazins ». À pris le sens de « chef d’une conception des rapports entre homme et
flotte » à la cour des Normands de Sicile. femme. Le représentant fr. du lat. amor
La forme admiral, usuelle au xvi® s., est vit encore dans le picard ameur, au sens
attestée dans un texte français écrit en
déprécié de « rut ». Le genre de amour est
Angleterre (1306); il s’y rattache aussi probabl. dû à l'influence du lat., surtout
l’angl. admiral et l’all. Admiral. — Dér. : grâce au nom de Dieu Amor. It. amore,
esp. amor. — Dér. et Comp. : amourette,
amirauté, xXIv°.
x11°; enamourer (s’) xv® (mais déjà au
AMITIÉ. Lat. pop. *amicilälem, acc. de XII® S., comme trans.); amour-propre,
*amicitas, au lieu du lat. class. amicilia. 1613 ; mamour, 1608 (Régnier) ; d’abord
L'it. amistà et l’esp. amistade viennent du m'amour, c’est-à-dire avec ma élidé, amour
prov. ayant été surtout fém. jusqu’au xvrie $.,
v. mamie, Sous ami.
AMMONIAQUE, 1787 (G. de Morveau,
qui a dit d’abord -ac, 1782). Fém., pris AMOURACHER (s’), 1559 ; mais on a
substantiv., de l’anc. adj. ammoniac, XvI° antér. les dér. amouracherie, 1414 (dans
(en outre arm..., 1256, et jusqu’au xvr1°8.), une traduction de Boccace), -achemeni,
qui désignait un sel ou une gomme, mot 1545, fréquent dans des traductions ita-
empr. du lat. ammoniacum (du grec ammé- liennes. Empr. de l’it. amoracciare, dér. de
niakon qui désignait déjà ces produits, amoraccio « amour ridicule », dér. péj. de
qu’on recueillait près du temple de Jupiter amore.
Ammon, en Lybie). — Dér. : ammoniacal, AMOURETTE, 1531, antér. marouie,
1748 (au sens moderne). amerote, déformations, sous l'influence de
AMMONITE, 1752. Dér. sav. du lat. amer et de amour, du lat. amalusta, attesté
‘Ammon (du grec Ammôn), à cause de la au r1° s. comme nom de la camomille en
ressemblance de la volute de l’ammonite Dacie. Étant pris ainsi pour un dér. de
avec les cornes de Jupiter Ammon, repré- amour, amourelte est devenu, par la suite,
senté sous la forme d’un bélier. dans les dialectes, le nom de plusieurs
AMOURETTE 24

autres plantes, dont les qualités justifient AMPLITUDE, 1495. Empr. du lat. am-
pour le peuple une dénomination basée sur plitudo, v. ample.
le mot amour telle p. ex. la bardane (parce AMPOULE. Lat. ampülla « petit flacon
que ses capitules s’attachent aux habits à ventre renflé », dimin. de amp(h)ora «am-
des passants). phore ». Le sens de « vésicule qui se forme
AMOUREUX. Lat. de basse ép. amoro- sous la peau », attesté dès le x1r1° s., a dû
sus. se développer dès le lat. pop., cf. les autres
langues. Bien que pülla, fém. de puüllus
AMOVIBLE, 1681 (Patru). Dér. sav. du « petit d’un animal », ait eu aussi ce sens,
lat. amovere « éloigner ». — Dér. : amovi- cf. pullaria « abcès à la gencive », le déve-
bilité, 1748 (Montesquieu); inamovible, loppement sémantique de ampulla n’est
1750 ; inamovibilité, 1774. pas nécessairement dû à un croisement de
AMPÈRE, mesure d'électricité, 1890. ampulla et de pulla. Dans les parlers gallo-
Tiré d’ Ampère, nom du physicien français romans, ampoule est souvent altéré par
(1775-1836). croisement avec boule et aussi avec poule.
— Dér. : ampoulé, xvr°, par l'intermédiaire
AMPHI-. Premier élément de mots sav., d’un verbe ampouler « gonfler » ; a souvent
tiré du préf. grec amphi, qui a deux va- alors le sens de « gonflé, atteint d’ampou-
leurs : « des deux côtés ; autour de ». les » ; appliqué au style, doit ce sens aux
AMPHIBIE, 1553. Empr. du grec am- emplois du lat. ampulla « boursouflure du
phibios, littéral. « qui vit (bios « vie ») des style », ampullari « s'exprimer avec em-
deux côtés ». phase ».
AMPHIBOLOGIE, 1546 (Rab.). Empr. AMPUTER, xve; amputation, 1503.
du lat. de basse ép. amphibologia, altéra- Empr. du lat. ampuliare « couper », ampu-
tion, d’après des mots en -logia, du lat. tatio.
class. amphibolia (du grec amphibolia, de AMULETTE, 1558. Empr. du lat. amu-
amphibolos « équivoque », de amphiballein letum.
« envelopper »). — Dér. : amphibologique, AMUSER, v. muser.
xvie (peut-être déjà formé au xIve s. par
Oresme, d’après le subst. lat.). AMYGDALE, 1503. Ampr. du lat. amyg-
dala «amande ». — Décr. : amydgalite, 1775.
AMPHIGOURI, 1738. Étymologie in-
connue. — Dér. : amphigourique, 1748. AN. Lat. annus. It. anno, esp. año;
moins usuel dans les parlers gallo-romans
AMPHITHÉÂTRE, 1536 (Rab., une pre- que année. — Dér. : année, vers 1175, peut-
mière fois en 1213, dans un livre traitant être déjà lat. pop. *annaäia, cf. it. annata,
de l’histoire romaine). Empr. du lat. am- a. pr. anada. — Comp. : nouvel an; ne
phitheatrum, empr. à son tour du grec am- paraît pas être anc. en fr.; rare dans les
phitheaïtron, propr. « théâtre qui va tout parlers gallo-romans : on y dit, outre nou-
autour »; au sens moderne de « salle où velle année (assez rare), bon an, bonne
les professeurs donnent leurs cours », 1751. année et surtout jour de l'an ou premier de
AMPHITRYON, 1752. Issu au sens mo- l'an ; suranné, xr11°, au sens de « qui a plus
derne des vers de l'Amphitryon de Molière d’un an », employé spécial. dans le langage
(1668) : « Le véritable Amphitryon est jurid., au xvi® s.; d’où le sens moderne,
l’Amphitryon où l’on dîne », que prononce 1661 (Molière).
Sosie après l’invitation adressée par Jupi- ANA, xviie s. (Huet). Tiré de la termi-
ter aux officiers d'Amphitryon ; ceux-ci, en naison de mots de lat. moderne, faits sur
effet, sont déconcertés et ne savent que le nom de l’auteur auquel est consacré un
répondre en présence de Jupiter caché sous ouvrage fait d’anecdotes, etc., cf. Mena-
les traits d'Amphitryon et d'Amphitryon giana. Ces mots, au plur. neutre, ont été
lui-même. formés sur le modèle d’adj. lat., tels que
AMPHORE, 1518. Empr. du lat. am- Ciceronianus « qui concerne Cicéron ». De
phora (d’origine grecque). nombreux recueils de ce genre ont été
publiés aux xvire et xvinie s. ; le plus an-
AMPLE. Lat. amplus. It. ampio, esp. cien est probabl. le Scaligeriana, de 1666.
ancho « large ». — Dér. : ampleur, 1718.
ANABAPTISTE, 1525. Dér. d’anabap-
AMPLIATION, 1339, au sens d’ « agran- tisme, 1564, empr. du grec eccl. anabaptis-
dissement », rare depuis le xvire s.; le mos « second baptême », v. baptême.
sens de « duplicata d'acte », qui ne paraît
ANACHORÈTE, 1598. Antér. anaco-
pas être antérieur au xvinie s., vient de ri(t)le, avec une terminaison qui a persisté
l’emploi de ce mot en ancien droit au sens
jusqu’au xvi® s., d’après les nombreux
d’ « action de compléter ». Empr. du lat. mots en -ite, lat. -ita, désignant des reli-
de basse ép. ampliatio « agrandissement » gieux, p. ex. ermile. Empr. du lat. eccl.
(dér. de ampliare « agrandir, etc. »).
anchorela (du grec eccl. anakhérétés, du
AMPLIFIER, xve, jusqu’au xvile s., verbe anakhôrein « s'éloigner, se retirer »),
surtout au sens d° «accroître » ; aujourd’hui ANACHRONISME, 1625. Formé avec le
seulement en parlant d’écrits ou de dis- préf. grec ana « en arrière » et chronos
cours ; amplificateur, 1532 ; amplification, « temps » ; on opposait d'abord à l’anachro-
XIVe. Empr. du lat. amplificare (qui a les nisme, erreur consistant à placer un fait
deux sens du mot fr.) et les dér. amplifi- avant sa date, le parachronisme, erreur
cator, amplificatio. inverse, 1762.
25 ANDRINOPLE

ANAGRAMME, 1571 (Belleau). Empr. lier du lat. pop. *aniiänus, dér. de anie
du grec de basse ép. anagramma, littéral. « avant », v. prochain. Pourtant cette
« renversement de lettres » (on disait aussi forme du lat. pop. a existé, mais le mot a
au xvI° s. anagrammatisme, du grec ana- été entravé dans son développement par
grammatismos, de même sens). le sentiment que les clercs avaient de sa
ANALOGIE, xve, en 1213, comme titre formation. L'it. anziano, refait sur anzi
de l’ouvrage de César ; analogique, 1547 ; « avant », l'esp. anciano, également irrégu-
analogue, 1503. Empr. du lat. analogia, liers, peuvent venir du fr. — Dér. : ancien-
-icus, -0s (rare) (du grec analogia, -ikos, neté, xII°.
analogos « proportionnel, qui est en rap- ANCILLAIRE, terme de médecine, 1810.
port avec »). Dér. sav. du lat. ancilla « servante », ces
ANALYSE, fin xvi® (D’Aubigné) ; ana- opérations étant faites par les servants.
lytique, xvi°. Empr. du grec philosophique Plaisamment amours ancillaires, fin xixe.
analysis et du lat. de basse ép. analyticus ANCOLIE, 1325. En outre, au moyen
(du grec analytikos, de analyein « résou- âge, anquelie, angorie. Empr. du lat. mé-
dre »). — Dér. : analyser, 1698 ; analyste, diéval aquilea (lat. des botanistes aquileia,
xviI® (Malebranche). aquilegia), dér. du lat. aquilequs « qui re-
ANANAS, 1578 (Ce fruit nommé par les cueille l’eau », à cause des petites cavités
sauvages ananas, J. de Léry); en outre de la fleur ; après coup, le nom a été rap-
amanas, 1544; nana, 1554. Empr., par proché du lat. aquila. La voyelle nasale
l’intermédiaire de l'esp. ananas, anana, de initiale est probabl. due à l'influence de
nana de guarani. mélancolie, justifiée par la position des
fleurs ; l’ancolie est, depuis le xve s., le
ANARCHIE, xive (Oresme). Empr. du symbole de la tristesse.
grec anarkhia, propr. « absence de com-
mandement (arché) », par l'intermédiaire ANCRE. Lat. ancôra (du grec ankyra).
des traductions lat. d’Aristote. — Dér. : It. esp. ancora. — Dér. : ancrer, xr1° ; dé-
anarchique, 1594 {Satire Ménippée) ; anar- sancrer, id.
chiste, 1791. ANDAIN. On trouve, dès 844 (Cartulaire
ANATHÈME, x11°; anathématiser, xIve. de Chartres), andainus, andena, formés en
Empr. du lat. eccl. anathema, anathema- lat. médiéval d’après le fr. Probabl. lat.
tizare (du grec eccl. anathema, qui, en grec pop. *ambitänus, adj. formé pour qualifier
class., signifiait « offrande votive » et a pris passus « pas », dér. de ambilus qui, du sens
le sens défavorable de « malédiction » et de « pourtour, bord », a pris spécial. celui
d’ « objet maudit » dans le grec de la Sep- d’ «espace de deux pieds et demi de largeur
tante, d’où anathematizein « prononcer un autour d’un bâtiment » (Paulus Festus) ;
anathème »). par suite *ambitänus [passus] a pu être
appliqué à une enjambée d’une largeur
ANATOMIE, xive; anatomique, 1503. comparable, d’où à celle d’un faucheur,
Empr. du lat anaïomia, -icus (du grec ana- d’où au foin coupé à chaque pas que fait
tomia, -ikos, du verbe anatemnein « dissé- le faucheur.
quer »). — Dér. : anatomiste, 1503.
ANDANTE, 1750. Empr. de l’it. andante,
ANCÊTRE. Lat. aniecessor « prédéces- part. prés. de andare « aller ».
seur », qui a pris aussi le sens d’ « ancêtre » ;
ancêtre, anciennement ancestre, était primi- ANDOUILLE. Lat. pop. “*indüctilis ou
tivement le cas sujet dont le cas oblique, *indüctilè, neutre pris substantiv. (de indü-
ancessor, lat. antecessôrem, a été usité jus- cère « introduire »), qui a dû désigner
qu’au xve s. A. pr. ancesire, ancessor. d’abord le mélange de chair, etc., qu'on
« introduit » dans un intestin, pour faire
ANCHE, xvie (Ronsard). Sens moderne les andouilles. On a relevé inductilia au
XVII® ; au XVI. « tuyau » ou «embouchure sens d’ « andouille » en lat. médiéval.
de hautbois ou de cornemuse ». Empr. Quant à l’adj. inductilis, du lat. jurid. qui
d’un parler du Centre ou de l’Ouest où a un autre emploi, c’est pour ainsi dire un
anche signifie encore « robinet, conduit par autre mot. — Dér. : andouillette, 1451.
lequel le vin coule du pressoir dans le ba-
ANDOUILLER, 1375 ; cf. en outre en-
quet ». Ce mot, répandu surtout dans les doillée, fém., xiv®; endoiller, xvi® (Du
parlers septentrionaux, vient du germ. Fouilloux). Altération d’antoillier, xiIv®
(francique) *ankja, cf. anc. haut all. ancha (encore dans Trévoux) due à l'influence
« jambe, tuyau ». d’andouille. Lat. pop. “*anieocüläre, adj.
ANCHOIS, 1546 ; aussi anchoies, 1564. neutre, pris substantiv., formé pour spéci-
Empr., probabl. par l'intermédiaire du fier cornu « Cor », donc propr. « qui pousse
prov., de l’esp. anchoa, qui vient du grec devant les yeux », étymologie appuyée à
aphyé, de même sens, par une forme du la fois par le sens, le premier andouiller
lat. pop. *apiü(v)a, appuyée par la glose poussant en effet horizontalement au-des-
apyia. Le mot, partout irrégulier, cf. aussi sus des yeux, et l'expression analogue de
it. acciuga, port. enchova, a dû circuler sur l'allemand Augensprosse, propr. « rejeton
les côtes de la Méditerranée. Sont égale- des yeux ».
ment empr. l’angl. anchouy et l’all. Ans- ANDRINOPLE. 1825. Nom d’une ville
chove, Anschovis. de Turquie, employé pour désigner d’abord
ANCIEN. D'abord anci-en, trissyllabi- une couleur rouge, appelée aussi rouge
que. En raison de cette forme, ne peut pas lurc, puis un tissu de coton teint de cette
être considéré comme le représentant régu- couleur.
ANDR(O)- 26

ANDR(O) -. Premier élément de mots sager de Dieu » (en grec class. « messager »),
sav., tels qu’androïde, xvirre, tiré du grec traduction de l’hébreu mal'ak, Exode, 23,
anér, génitif andros, « homme », ou de mots 20, etc. Mot de la langue religieuse dont
empr., tels qu'androgyne, x1v°. le développement a été entravé par l’in-
fluence du lat. écrit.
ÂNE. Lat. äsinus. It. asino, esp. asno.
— Dér. : ânerie, xrv°, il n’est pas nécessaire ANGÉLIQUE. 1° adj., xir1e ; 2° nom de
de dériver le mot d’énier, adj., « stupide », plante, xvi. Empr. du lat. eccl. angelicus
attesté du reste seulement au xVI® &.; (du grec eccl. angelikos). Le nom a été
ânesse, xr1°, créé à cause de l'identité for- donné à la plante à cause de ses vertus
melle à laquelle aboutissaient en fr. asinus contre les poisons.
et asina. Les patois méridionaux modernes ANGÉLUS, 1690. Prière catholique, qui
désignent l’ânesse par le type sagma, cf. date du x1v® s., commençant par le mot
somme, I, la femelle étant préférée au mâle lat. angelus.
pour le travail, v. jument; ânon, xtI°;
ânonner, 1606 ; ânonnement, xvrre (Mme de ANGINE, 1538. Empr. du lat. angina,
Sévigné). V. asine. dér. de angere « serrer à la gorge », pour
distinguer l’angine de l’esquinancie.
ANECDOTE, 1751 (Voltaire). Tiré du
nom propre Anecdotes, titre de l'ouvrage ANGLAIS, xrie s. (sous la forme An-
de Procope, vire (en grec Anekdoia, plur. gleis). Dérivé d’Angle, nom d’un peuple
neutre pris substantiv., propr. « choses germanique qui est venu s'installer en An-
inédites »), ouvrage plein de détails sur gleterre, au vie s. L'expression filer à l'an-
l’histoire et les personnages de son temps, glaise et l’emploi d’anglaise pour dési-
cf. à l’imitation de ce titre Anecdotes de gner des boucles de cheveux allongées sont
Florence, de l'historien Varillas, 1685 ; on du xix® s. (1829), anglaise désignant une
trouve parfois anecdote adjectif, d’après le sorte d'écriture est attesté dès 1788.
grec anekdotos, ainsi chez Fontenelle. —
Dér. : anecdotier, 1736 (Voltaire) ; anecdo- ANGLE. Lat. angülus. N'est sûrement
tique, 1781. pop. que dans le roumain unghiu; lit.
angolo et le fr. sont peut-être repris au lat.
ANÉMIE, 1722. Empr. du lat. moderne
anaemia, empr. lui-même du grec anaimia ANGLICAN, 1554. Empr. de l’angl. an-
(dans Aristote) formé de an-, préf. négatif, glican, empr. lui-même du lat. médiéval
et de haima « sang ». — Dér. : anémier, anglicanus, fait sur gallicanus, v. gallican.
1877 ; anémique, 1842. ANGLICISME, 1652. Dér. sav. du lat.
ANÉMO-. Premier élément de mots sav. médiéval anglicus « anglais ». — Dér. :
comp., tels qu'anémomètre, av. 1720, tiré angliciste, fin xix°.
du grec anemos « vent ». ANGLOMANE, -MANIE, v. manie.
ANÉMONE, 1544, une re fois xive ANGOISSE. Lat. angüstia (en lat. class.
(anemoine). Empr. du lat. anemone (du de préférence au plur.), dér. de angusius
grec anemôné); ainsi nommée parce « étroit », propr. « resserrement », d’où
qu'elle s'ouvre sous l'effet du vent, v. le « défilé, passage étroit », sens conservé en
préc. fr. jusqu’au xvi® s., « gêne de la respira-
ANESTHÉSIE, 1753. Empr. du grec tion ». Les sens moraux du lat. class. « em-
anaisthésia « insensibilité » (peut-être par barras, difficulté » sont plus faibles que
l'intermédiaire de l’angl. anaesthesia, at- ceux des langues romanes et du fr. ; d’au-
testé dès 1721), formé du préf. négatif an- tre part, le sens était plus étendu en a. fr. :
et de aisthésia « sensation » ; mais répandu « violence, colère, etc. », que depuis le
surtout au cours du xix® s. — Dér. : anes- xvie s. It. angoscia « angoisse, affliction »,
thésier, 1853 ; anesthésique, 1847. esp. congoja, de même sens.

ANETH, sorte de fenouil, x1r1e (écrit ANGOISSER. Usité seulement au part.


anet, encore en 1762). Empr. du lat. ane- passé depuis le xvire s. Signifiait « mettre,
thum (du grec anéthon) ; au moyen âge on être dans l’angoisse, presser, etc. ». Lat.
trouve les formes pop. anoi et anoie, cf. it. angüstiäre, attesté à basse ép. au sens de
aneto, esp. (forme faite sur un dér.) aneldo. « troubler ». Développement sémantique
parallèle à celui du subst. It. angosciare,
ANÉVRISME, 1538 (Canappe). Empr. esp. congojar.
du grec aneurysma « dilatation de l'artère »,
avec la prononciation de eu du grec byzan- ANGORA, 1761 (aussi angola, depuis
tin et médiéval. 1768). D’après le nom d'une ville de Tur-
quie.
ANFRACTUEUX, 1503. Empr. du lat.
de basse ép. anfractuosus « tortueux » ANGUILLE. Lat. anguïlla, dér. de anguis
(attesté seulement au sens fig.), dér. de « serpent ». La prononciation moderne, due
anfractus « sinuosité ». — Dér. : anfrac- à l’orthographe, n’a triomphé que depuis
tuosité, 1503. le xvI1° 5. ; au moyen âge, les rimes assu-
rent souvent une prononciation -ile.
ANGE. D'abord angele, x1° (Saint
Alexis) ; en outre, angle et angre jusqu’au ANGULAIRE, 1377; anguleux, 1539.
XI S.; ange ne triomphe que plus tard. Empr. du lat. angularis, angulosus (de
Lat. eccl. angèlus, grec. eccl. angëlos « mes- angulus, v. angle).
27 ANNOTER

ANICROCHE, 1584. En outre hennicro- « courage », qui a pris à basse ép. les sens
che, 1608 ; hanicroche (de Rab. à 1771); d’ « irascibilité, violence, animosité » (de
désigne une sorte d'arme chez Rabelais ; animosus « hardi, courageux », de animus
en outre, au XVI s. (h)anicrochement « cro- « courage »).
chet » et « ce qui accroche » au sens fig. ;
l’h doit être purement graphique; cf. en ANIS, x. Empr. du lat. anisum (du
outre le part. passé ennicrochez « courbés » grec anison). — Dér. : aniser, 1611 ; ani-
chez Rab. Mot comp., dont la deuxième sette, 1771.
partie représente sans doute croche, tandis
que la première partie, dont le h- est peut- ANKYLOSE, 1709 (ancyle en 1576,
être purement graphique, est probabl. Paré). Empr. du grec médical ankylôsis
l’a. fr. ane « canard » ; le bec recourbé de (de ankylos « courbe »), l’ankylose causant
l'oiseau serait alors la base de cette déno- une sorte de courbure, cf. courbalure que,
mination, comp. aussi fr. bédane. par étymologie populaire, on rattache à
courbe. — Dér. : ankylosé, 1749.
ÂNIER. Lat. asinärius. ANNAL, xve; annales, 1447. Empr. de
ANILINE, 1855. Dér. d’anil « plante qui l’adj. lat. annalis « qui dure un an », ou
produit l’indigo », 1582 (de l’azur que les « annuel » (sens du mot au xvie s.), dér.
Portugais nomment anil) ; l’aniline a été de annus « an », et de annales, plur. de cet
ainsi nommée parce qu’elle a été trouvée adj., propr. « récit d'événements par an-
en traitant l’indigo par la potasse (en 1826). née », d’où « ouvrage par ordre chronolo-
Anil est empr. du port. anil « indigo », gique »; sens plus étendu en fr. à partir
lui-même empr. (comme l'esp. añil) de du xvr1e s. — Dér. : annaliste, 1560.
l'arabe an-nil (qui vient du persan nil
« indigo »). ANNEAU. Lat. an(n)ellus ; le lat. class.
dit plutôt anulus. It. anello, esp. anillo. —
Anille, v. béquille. Dér. : anneler, 1584; annelet, xr1° ; anne-
lure, 1674.
ANIMADV ERSION, xrie (« attention »).
Rare avant le xvi®s. A signifié «remarque » ANNEXE, xr11° (J. de Meung). Depuis le
aux xvi® et xviIes. et « censure judiciaire » xvi£s., annexe et le dér. -er, 1274, sont spé-
au xvi*. Empr. du lat. animadversio « at- cialisés dans des emplois techn. Au moyen
tention », d’où « réprimande, châtiment », âge, sens plus étendus de « joindre, unir ».
dér. de animadvertere « tourner son esprit Empr. du lat. annexus, part. passé de an-
vers ». Le sens moderne d’ « improbation », nectere « attacher, joindre ». — Dér. : an-
xvirie, semble dû à une interprétation nexer, 1269; annexion, 1723 ; annexio-
récente d’animadversion où l’on aura vu le niste, id.
lat. adversus « contre ». ANNIHILER, xive; annihilation, x1ive
ANIMAL, subst., xri°. Rare avant le (Oresme). Transcrits -chil- jusqu’au xvres.
xvi®s. Empr. du lat. animal. Comme terme (parfois encore au xvire s.). Empr. du lat.
d’injure, ne semble pas antérieur au médiéval annichilare (de nichil, transcrip-
xviie s. Du plur. neutre animälia vient le tion médiévale du lat. class. nihil « rien »),
fr. arch. aumaille « gros bétail, bêtes à annichilalio, puis orthographiés et pronon-
cornes », encore usuel dans de nombreux cés d’après la forme anc. nthil.
parlers (d’où le gruyérien armailli « bou- ANNIVERSAIRE, xrie. Adj. et subst.
vier »). — Dér. : animalcule, 1564 ; anima- dès cette époque. Empr. de l’adij. lat. anni-
lier, xvirie (J.-J. Rousseau) ; animaliser, versarius « annuel », comp. de annus et de
1742 ; animalisation, 1763 ; animalité, 1755 versus, part. passé de vertere « tourner »,
(J.-J. Rousseau); une première fois au c'est-à-dire « où l’année tourne ».
xi1e s. (alors peut-être d’après le lat. de
basse ép. animalitas, mais non au XVIIe S., ANNONCER. Lat. annüntiäre (de nün-
le texte lat. qui contient ce mot étant alors lius « message » et « messager »). On ne
inconnu). peut reconnaître à la forme si le mot est
tout à fait pop., ou s’il a été influencé par
ANIMAL, adj., xir1e. Empr. du lat. ani- le lat. écrit. — Dér. : annonciateur, 1800 ;
malis « vital, vivant », dér. de anima usuel au xvie s., alors plutôt empr. du lat.
« souffle vital », p. ex. dans instinct animal. eccl. annuntiaior ; annonce, xvi° ; annon-
Développement sémantique d’après ani- cier, fin xix° ; annonceur, vers 1190.
mal subst., p. ex. dans règne animal.
ANNONCIATION, xr1e. En outre « action
ANIMER, xive (Oresme) ; animation, d'annoncer », encore 1748 (Montesquieu).
xive. Empr. du lat. animare (de anima Le moyen âge préfère anuncion, dér. du
« souffle vital ») « donner la vie », d’où verbe. Empr. du lat. eccl. annuntiatio qui
« exciter, rendre vif, etc. », animatio. L’em- a les deux sens, dér. de annuntiare.
ploi de ces mots dans animation de la rue,
rue animée, etc., est dû à un développement ANNOTER, 1418 («inventorier ») ; anno-
sémantique récent. — Dér. : animateur, tation, xive. Au xvi® s. signifient surtout
1801 ; inanimé, 1478 ; ranimer, 1549. « remarquer, remarque », OU, au sens jurid.,
« inventorier, inventaire de biens saisis ».
ANIMISME, 1781 ; animiste, 1820. Dér. Le sens moderne d’annoter, d’après anno-
sav. du lat. anima « âme ».
lalion (qui a le sens moderne au moins dès
ANIMOSITÉ, 1495. Jusqu'au xvie s. le xvi® s.), ne paraît pas être antérieur
« courage, hardiesse »; sens moderne à au xix°. Empr. du lat. annoiare « noter,
partir du xvie s. Empr. du lat. animositas annoter », annotatio. Le sens jurid. est du
ANNOTER 28

lat. médiéval. — Dér. : annotateur, 1798; tan ? » Testament, 336 ; usuel au xvi° s.,
une première fois en 1552 ; le lat. annotator et encore survivant dans quelques patois.
a d’autres sens. Lat. pop. *anteannum « l'année précéden-
te » ; de même a. pr. antan, esp. anianño.
ANNUAIRE, 1791. Dér. sav. du lat. an-
nuus « annuel ». ANTARCTIQUE, 1338; arctique, id.
Empr. du lat. antarcticus, arcticus (du grec
ANNUEL, xrr1e. L’a. fr. a, en outre, jus- aniarktikos, arktikos, de arktos « grande et
qu’au xr1° s., une forme plus pop., anvel, petite Ourse »), v. ours.
x11e, assurée par le vers. Empr. du lat. de
basse ép. annualis. — Dér. : bisannuel, ANTÉCÉDENT, xive (Oresme). Empr.
1694. du lat. scolastique antecedens, déjà philo-
sophique en latin class., part. prés. de anle-
ANNUITÉ, 1395. Dér. sav. du lat. annuus cedere « précéder ». La locution les antécé-
« annuel »; v. consolider. dents d'une personne date du xix®s.
ANNULAIRE, 1539. Empr. du lat. an- ANTÉCHRIST, xne (antecrist). Empr.
(n)ularius, dér. de an(n)ulus « anneau ». du lat. médiéval antechristus, altération,
d’après l’adv. anie « devant », du lat. eccl.
ANNULER, 1289 ; annulation, 1320, rare anlichristus, v. p. ex. Première Épitre de
au moyen âge ; le mot usuel est, jusqu’à la Jean, II, 18 (du grec antikhristos); le
fin du xvuie s., annulement. Empr. du lat. xvi® s. a rétabli un moment antichristi.
médiéval (rare à basse ép.) annullare (de
nullus « nul »), annulatio. ANTENNE. Aniaines, graphie plusieurs
fois relevée au xur1e s. Lat. antenna, cf. de
ANODE, terme de physique, 1838. Comp. même it. antenna. Appliqué aux insectes,
sav. du grec ana « en haut » et hodos «che- 1712 ; mais on a déjà relevé le lat. antenna
min ». en ce sens dans un ouvrage de l’helléniste
ANODIN, 1503. D'abord terme médical ; Gaza, xve.
au sens fig. dès le xvrre s., chez Descartes. ANTÉRIEUR, 1488. Empr. du lat. anie-
Empr. du lat. médical anodynon « remède rior. — Dér. : antériorité, 1533.
calmant » (du grec médical anôdynon, neu-
tre pris substantiv. de l’adj. anôdynos « qui ANTH(O)-. Premier élément de mots
calme la douleur, etc. », de odyné « dou- sav. comp., tiré du grec anthos « fleur »,
leur »). ou de mots empr., tels qu’anthologie, 1574.
ANOMAL, 1542 (Rab.), une première fois ANTHRAC(O)-. Premier élément de
au x11° s.; anomalie, 1570. Empr. du lat. mots sav. comp., tels qu'anthracite, 1752,
des grammairiens et médiéval anomalus, tiré du grec anthrax « charbon ».
-lia (du grec anômalos, -lia).
ANTHRAX, 1503. Antér. andrac, anirac,
ANONYME, 1557. Empr. du lat. de basse xive. Empr. du lat. médical anthrax (v. le
ép. anonymus (du grec anônymos, de onoma préc. ; ainsi nommé, parce que la surface
« nom »). — Dér. : anonymat, 1864; ano- de la tumeur est noirâtre).
nymie, 1863. ANTHROPO-. Premier élément de mots
ANORAK, 1948. Empr. de la langue sav. comp., tels qu’anthropologie, 1516,
eskimau, où ce mot est un dér. de anoré tiré du grec anthrôpos « homme », anthro-
« vent ». posophie, vers 1910, conception du monde
et de l’existence humaine élaborée par Ro-
ANORMAL, env. 1220. Empr. du lat. dolphe Steiner, ou de mots empr., tels
scolastique anormalis, formé d’après nor- qu’anthropophage, xIve.
malis.
ANTI-. Préf. empr. du préf. grec anti,
ANSE, xr11°. Empr. du lat. ansa, comme issu de la prép. anti « contre ».
lit. ansa ; au contraire l’esp. asa (avec la
chute normale de n devant s) est une forme ANTICHAMBRE, 1529. Adaptation de
pop. Dominant dans la partie septentrio- lit. anticamera, propr. « chambre de de-
nale du domaine gallo-roman et le Sud- vant » (ou anii représente le lat. ante « de-
Ouest ; ailleurs termes divers : manche, en vant »). On a essayé aussi d’une francisa-
picard et en wallon ; manette, manille, lat. tion plus complète, en faisant avant-cham-
manicüla, ou d’autres dér. de main, dans a début xvri, mais cette forme n’a pas
les parlers méridionaux. — Dér. : ansé, uré.
1606. ANTICIPER, xive (Bersuire) ; anticipa-
tion, 1437. Empr. du lat. anticipare « pren-
ANSPECT, 1687. Empr. du néerl. hand-
dre d'avance, prévenir » (de ante « avant »
specke, d’où aussi angl. handspeck, all. et de capere « prendre »), anticipatio.
Handspake.
ANTIDOTE, xrie. Empr. du lat. médical
ANTAGONISME, 1593 ; antagoniste, fin antidolum (du grec médical antidoton, neu-
xvi° (Malherbe, au sens moderne) ; antér., tre pris substantiv., d’après pharmacon
depuis le xvie s., Paré, terme d'anatomie. «remède », de l’adj. antidotos, propr. « don-
Empr. du grec antagônisma, antagônistés né contre »).
« adversaire », propr. « qui lutte contre ».
ANTIENNE. D'abord eniievene, xxtre.
ANTAN. Ne survit que dans les locutions Empr. du lat. eccl. antefana, vie (saint
formées avec d'antan, en souvenir du vers Benoît et Grégoire de Tours), altération,
de Villon : « Mais où sont les neiges d'an- d’après ane « avant », du lat. eccl. anti-
29
APHORISME
Phona, fém. « chant -älternatif de deux AORTE, 1546. Empr. du grec aorté.
chœurs » (du grec eccl. antiphôna, plur.
neutre de l’adj. antiphônos « qui répond AOÛT. Lat. pop. aguslus, lat. class. au-
à », notamment dans la langue de la mu- gustus [mensis « mois »|, qui a été substitué,
sique). L’a. fr. a, entre autres, une forme en l’honneur d’Auguste, à l’ancien nom
antoine, qui correspond à antiphôüna. Au sextilis [mensis]. It. esp. agosto. En raison
sens fig., ne paraît pas antérieur de l’excessive réduction du mot, est sou-
au vent refait en a-out ou renforcé par mois
XVIIIE S.
ANTILOPE, dans les parlers septentrionaux. Le sens de
1751. Empr. de l’angl. « moisson », fréquent en a. fr. et dans les
anielope, attesté en ce sens en 1607, empr.
lui-même patois, encore chez La Fontaine, Fables,
du lat. médiéval ant(h)alopus,
grec médiéval antholops; cf. antelu et I, 1, n’a plus, en fr., qu’une valeur litté-
anlelop chez Brunetto Latini, xrre S., au raire. — Dér, : aoûtat, sorte d’insecte, fin
xIX°, dial. ; aoûter, xr1°, « moissonner, mû-
sens d”’ « animal fabuleux ». rir », peu usité ; aoûteron, xvres. (Baïf), id.
ANTIMOINE, x1ve. Empr. du lat. mé- APACHE, 1902. En 1902, le reporter
diéval antimonium, xr° s., d’origine incer- Victor Moris eut l’idée d’appeler apaches
taine, probabl. adaptation de l'arabe ‘ith- les membres de la basse pègre opérant sur
mid, dont le rapport avec le grec siimmi, les boulevards extérieurs. Le nom de la
stibi (formes empr. par le lat. qui a en peuplade sauvage et féroce des Apaches,
outre slibium) n’est pas clair; on signale qui habitaient les régions du Texas et de
aussi l’égyptien smdt. l’Arizona, avait été connu en France grâce
ANTIPATHIE, 1542. Empr. du lat. anii- aux romans de Gabriel Ferry (Coureur des
pathia (du grec antipatheia, de pathos « pas- bois, 1853) et de Gustave Aimard (Les
sion »). — Dér. : antipathique, 1586. Peaux-Rouges de Paris, 1888).
ANTIPHONAIRE, 1302 (-ar). Au moyen APANAGE, 1297 (sous la forme apenai-
âge, en outre, antefinier xr1es., etc. Empr. ge). Né dans les provinces centrales (Bour-
du lat. médiéval antiphonarius v. an- bonnais, Berry, etc.) il a passé dans la
tienne. terminologie juridique de la couronne au
Xv® 8. Au sens fig., dans Rabelais, ensuite
ANTIPODE, 1372. Empr. du lat. anti- depuis la fin du xvire s. Dér. de l’a. fr.
podes, empr. lui-même du grec &vrirodec apaner, 1314, « pourvoir un fils cadet, une
(de ävri « contre » et toc « pied », gén. fille d’une dotation », littéral. « donner
xo06c). du pain (lat. panis) à » (cf. le sens de « don-
ANTIQUAILLE, 1507 ; antér. 1490, nom ner à chacun la part de nourriture qui lui
de villa à Lyon. Empr. de l’it. anticaglia revient » dans le Bourbonnais), d’où le sens
« antiquités, vieux monuments » (dér. de particulier de ces mots ; cf. l'a. pr. apanar
antico), en ce sens encore en 1668 ; sens « NOUTTIT ».
péjor. depuis le xvrre s. (Corneille), que APARTÉ, 1640. Empr. de la locution it.
lit. anticaglia à pris ensuite au fr. a parie « à part », employé au théâtre.
ANTIQUAIRE, 1568 (« archéologue »: APATHIE, 1546 (Rab.), une re fois
le sens fréquent aujourd’hui de « marchand au xXIvV°Ss., jusqu’au xvir1e s. surtout terme
d’antiquités » est récent). Empr. du lat. de philosophie. Empr. du grec apatheia
antiquarius « qui aime l'antiquité ». En « insensibilité », v. patho-. — Dér. : apa-
outre au xr11° 8., « scribe », sens également thique, 1743.
pris au lat. Le xvie s, aussi a employé, par APATRIDE, vers 1920. Formé avec le
développement spontané, antiquaire com- radical de patrie et le préf. privatif grec a-
me adj. au sens d’ « antique ». pour désigner les personnes arrachées à
ANTIQUE, xiri°; antiquité, vers 1080 leur pays et qui ne peuvent pas être
(Roland). Empr. du lat. antiquus, antiqui- rapatriées.
las. L’a. fr. a eu, jusqu’au x1ve s., une APERCEVOIR, v. percevoir.
forme pop. anti, masc., -ive, fém., d’où, par
analogie, -if, masc., -ie, fém., lat. anticus, APÉRITIF, xiv°; jusqu'au xviri® 8.
antica, autre forme de antiquus, -a; cf. terme de médecine, « qui ouvre les po-
it. antico, esp. -guo. res, etc. ». Sens moderne développé dès
1750. Empr. du lat. médical aperitivus
ANTRE, xve. Empr. du lat. antrum (du (de aperire « ouvrir »).
grec aniron).
APHASIE, 1829. Empr. du grec aphasia
ANUS, 1314. Empr. du lat. anus, propr. «mutisme », du préf. privatif a- et de phasis
« anneau ». « parole », spécialisé pour les troubles vo-
ANXIEUX, 1793, indiqué comme terme caux d’origine cérébrale. — Dér. : apha-
médical ; Landais, qui dit également de sique, 1873.
l'adjectif : « S’emploie surtout en médecine » APHONIE, 1617. Empr. du grec aphonia
en 1853, donne en 1834 l’adverbe en le (de a- privatif et phônëé « voix »), appliqué
déclarant peu usité ; une première fois au aux troubles des organes moteurs.
XIV s., mais rare jusqu’au xix® s.);
anxiété, 1564 (une première fois au x11° 5. ; APHORISME, 1314 (sous la forme
sens médical en 1585). Empr. du lat. afforime). Empr. du lat. de basse ép. apho-
ancius, anzielas, termes seulement moraux ; rismus, usité seulement en parlant des
le sens médical paraît avoir existé dans le aphorismes d’Hippocrate (du grec apho-
lat. moderne, depuis le xvre s. rismos, propr. « définition »); répandu
APHORISME 30

d’abord au sens lat. ; sens étendu à la poli- APOSTASIE, vers 1250 ; apostat, x111°
tique (d’abord en esp. et en it.) vers 1600 (J. de Meung : apostale; pl. apostas, 1265).
et élargi davantage par la suite. Empr. du lat. eccl. apostasia, -tata (du grec
eccl. apostasia, -latés, propr. « abandon »,
APHTE, 1545. Empr. du lat. médical « celui qui abandonne », de aphistasthai
aphiae, plur. (du grec aphthai, id., de « s'éloigner »). — Dér. : apostasier, xve.
aptein « brûler »). D’abord plur., comme
dans les langues anc. — Dér. : aphteux APOSTÈME, v. apostume.
(surtout fém.), 1768.
APOSTER, 1420 ({rahison appostée « pré-
API, 1653. (pomme d’api). Antér. pomme méditée ») ; locutions analogues au xvi®s.
apie, 1571 ; la Melle ou Pomme-Apie, 1600 Empr. de l’it. appostare « guetter, épier »;
(0. de Serres), d’où pomme Appie ou d’Ap- aposter, qu’on trouve au x11° s., dérive de
pie, 1611; apie, (d’)Ap(pJie sont des l’a. fr. poste « position »*
francisations du lat. Appius, d’après l’éty-
mologie admise alors ; «ainsi ditte de Clau- A POSTERIORI, 1626. Empr. du lat.
dius Appius qui du Peloponnese l’apporta scolastique a posteriori, littéral. « (en
à Rome » (O. de Serres). Api a été ensuite partant) de ce qui est après », d’où « en
empr., probabl. par l'intermédiaire d’un partant des données de l'expérience »,
parler méridional, de lit. mela appia; v. a priori.
celui-ci est une adaptation du lat. appiana
[mala], plur. (chez Pline), dér. du nom d’un APOSTILLER, xve (« mettre une note
certain Appius qui aurait le premier cultivé marginale », encore en 1787 ; sens moderne,
ce genre de pommes, ou représente même 1762, Voltaire). Prononciation de -/l- d’a-
un adjectif du lat. pop. *appia. près l'écriture. Dér. de l’a. fr. postille,
xII1e, encore usuel au xvI®s., « annotation,
APICOLE, 1845; apiculteur, 1845 ; api- glose sur les Écritures Saintes », empr. du
culture, 1845. Formés avec le lat. apis lat. médiéval postilla, formé, en ce sens,
« abeille », sur le modèle d’agricole, etc. de post « après » et de illa « ces choses »;
apostille, 1468 (masc. ; parfois -{il), « an-
APITOYER, v. pitié. notation » jusqu'au xVIII® Ss., au sens
APLANIR, v. plain. moderne, 1802, a été tiré du verbe. De
l’a. fr. ou du lat. médiéval viennent l’it.
APO-. Premier élément de mots sav., postilla « note » et l'esp. postila.
tiré du préf. grec apo, marquant l’éloigne-
ment, le changement, etc., tiré de la prép. APOSTOLAT, xv°e; apostolique, xirre.
apo. Empr. du lat. eccl. apostolatus, -icus (du
grec eccl. apostolikos, v. apôtre). Sens fig.
APOCALYPSE, x11° ; apocalyptique,1552 récents, de l’adj., xvirie ; du subst., xixe°.
(Rab.). Empr. du lat. eccl. apocalypsis (du
grec eccl. apokalypsis, propr. « révélation APOSTROPHE, terme de rhétorique,
divine ») et du grec ecel. apokalyptikos « qui 1516. Empr. du lat. apostropha (du grec
révèle ». Développements sémantiques pro- aposirophé, propr. « action de (se) détour-
pres au fr., pour l’adj. déjà au xvie s., ner » (du verbe aposirophein « détourner »),
pour le subst., début xixe. d’où, en figure de rhétorique, « procédé par
APOCRYPHE, xir1e (écrit alors -ife). lequel l’orateur se détourne de son déve-
Empr. du lat. eccl. apocryphus (le plur. loppement pour interpeller une person-
neutre en -a servait à désigner les ouvrages ne »); par plaisanterie « soufflet », 1704
eux-mêmes; du grec eccl. apokryphos, (Regnard). — Dér. : apostropher, 1672
propr. « tenu secret », en parlant d'ouvrages (Molière), « donner un soufflet », 1743.
non reconnus par l'Église) ; sens plus éten- APOSTROPHE, signe orthographique,
du dès le moyen âge. 1514. Empr. du lat. des grammairiens
APOGÉE, xvi°. Empr. du grec apogeios aposirophus, masc. (du grec apostrophos,
« éloigné de la terre » pour servir de terme fém., « signe d’élision d’une voyelle fi-
d’astronomie. Sens fig. au xvir® s. (Balzac). nale »). — Dér. : apostropher, 1548.

APOLOGIE, 1488 ; apologétique, xve. APOSTUME, 1256. Rare aujourd'hui.


Embpr. du lat. eccl. apologia, apologeticum, Empr. du lat. médical apostema (du grec
subst. (du grec apologia « défense », dér. de médical apostéma, v. abcès), avec altération
apologos (voir le suivant), apologétikos, de la terminaison d’après les termes mé-
adj., « propre à la défense »). — Dér. : dicaux rheuma, v. rhume, et “*fleuma,
apologiste, 1623. v. flegme. Depuis le xrrre s., en outre
aposième. Assez usuel dans les patois (qui
APOLOGUE, xve Empr. du lat. apolo- ont en outre un verbe en -er, attesté depuis
gus (du grec apologos, propr. « récit, nar- le x1ve s.), sous des formes correspondant
ration »). aux deux types aposlume et aposième;
APOPHTEGME, 1529. Empr. du grec celles du Midi se rattachent plutôt à l’a.
apophthegma, dér. du verbe apophthegges- pr. postema.
thai « énoncer une sentence ». APOTHÉOSE, xvie. Empr. du lat. apo-
APOPLEXIE, xrr1° ; apoplectique, 1256 theosis (du grec id. de theos « dieu » ) ; sens
(sous la forme appoplelique). Empr. du fig. xvii® (Sévigné).
lat. médical apoplexia, apoplecticus (du APOTHICAIRE, xrr1e (écrit alors -tic- ;
grec apopléksia (du verbe apoplétiein « ren- en outre -lec, -thec- jusqu’au xvie s.). Empr.
verser »), apopléktikos). du lat. médiéval apothecarius, propr. « bou-
31 APPLIQUER

tiquier », dér. de apotheca, v. boutique ; APPARTENIR. Lat. de basse ép. apper-


spécialisé au sens moderne, dès le xIr1eS. ; tinère, comp. de perlinere « tendre à, etc. »,
i d’après boutique. en outre « appartenir » ; développé d’après
tenir. On peut admettre que le lat. pop. a
APÔTRE, vers 1080 (Roland : aposiles, dit appartinère, refait sur pars, partis,
-tre dès le xr1e s.). Empr. du lat. eccl. apos- « part », attesté aussi par l’it. appartenere,
tolus (du grec eccl. apostolos « envoyé de cf. d’autre part a. pr. apertener. — Dér. :
Dieu », Luc, VI, 13, etc., en grec class. appartenance, xII°.
« envoyé », dér. du verbe apostellein). Au
sens fig., 1690 (La Bruyère) ; bon apôtre, APPAT, vers 1520 ; très rare au sens
1668 (La Fontaine et Racine). d’ « aliment », en général. Dér. du verbe
appâter, vers 1530, comp. de l’a. fr. pasi,
APPARAÎTRE. Lat. pop. *apparescère, très usuel au sens de « nourriture, repas »,
inchoatif du lat. class. apparere, qui survit attesté au sens d’ « appât », au xve s., lat.
dans l’a. fr. aparoir, de sens très proche, pästus « pâture, nourriture (en général) »;
usuel encore au xvie s., et aujourd’hui cf. it. esp. pasilo ; a. pr. past. La forme
dans la formule jurid. il appert. — Dér. : appas, dans le plur. les appas, dont on a
réapparaître, 1867. voulu faire comme un autre mot, est la
graphie ordinaire avant le x1x° s. du plur.
APPARAT, x. Empr. du lat. appa- d’appät.
ratus « préparatifs » (en ce sens au moyen
âge), spécial. avec l’idée de « pompe », APPEAU, v. appeler.
dér. de apparare « préparer ». APPELER. Lat. appelläre. — Dér.
APPAREIL. Signifie en outre « prépara- appel, XII° ; appeau, au moyen âge apeau,
tifs en général » jusqu’au xvri® s. (l’anc. est issu d’apeaus, à la fois cas sujet du
plur. apparaux est maintenu dans des em- sing. et cas régime du plur.; attesté au
plois techniques) ; appareiïller, aujourd’hui sens général d’ « appel » encore au xvi®s.,
de « sonnerie de cloches », au xvi® s. au
terme de marine, intrans., 1725, en a. fr. plur., en 1654 au sg. (Racan) ; appeleur,
et jusqu’au xvi® s. « préparer, disposer (en 1863 ; usuel au moyen âge comme terme
général )», d’où « mettre des navires en jurid. : « appelant, plaignant »; rappeler,
état » (attesté dès le xrr1° s., encore en 1763
vers 1080 (Roland), d’où rappel, 1260.
chez Voltaire). Lat. pop. *apparicülum,
élargissement du class. apparätus, *appa- APPELLATION, xr1e. Empr. du lat. ap-
ricülare (le class. apparäre a, en outre, sub- pellatio.
sisté à côté dans tout le domaine roman).
It. apparecchio et -are « préparer », esp. APPENDICE, 1281. Empr. du lat. ap-
aparejo et -ar, sens correspondants au fr., pendix, -icis, fém., propr. « ce qui est sus-
a. pr. aparelh et -ar « id. ». Les subst. pour- pendu à », dér. du verbe appendere « sus-
raient aussi avoir été tirés du verbe après pendre ». — Dér. : appendicite, 1886, créé
la période latine. — Dér. : appareillage, par R. H. Fitzen.
1777, déjà formé au moyen âge, xIv°, au APPENDRE. Peu usuel aujourd’hui. En
sens de « préparatifs ». a. fr. usuel comme intrans. au sens de
« dépendre, convenir à, appartenir à ». Lat.
APPAREILLER « unir deux objets pa- appendère, « suspendre ». Ît. appendere. —
reils », v. pareil. Dér. : appentis, x11°, propr. « dépendance »,
APPARENCE, xive s. (au x11° et au avec le suff. -is, cf. abatis, etc., et le ? qui
XIII S., On a aparance, dérivé d’aparoir se trouve dans pente, etc.
ou adapté d’après ce verbe ; v. apparaître) ; APPÉTENCE, 1555. Empr. du lat. appe-
apparent, 1377. Empr. du lat. appa- tentia. Le comp. inappétence a été formé
rentia (de basse époque ; également « appa- antér. sur le lat. appetentia (déjà en 1549).
rition », sens repris au XvI® s.), apparens,
participe présent du verbe apparere. APPÉTIT, vers 1180. Jusqu'au xvrie 5.,
surtout « désir » (en général, même au mo-
APPARITEUR, 1332. Empr. du lat. ral). Empr. du lat. appetitus « désir, convoi-
apparitor « serviteur public attaché à la tise », dér. de appetere « chercher à attein-
personne d’un magistrat », dér. de apparere dre ». — Dér. : appétissant, 1393 (le verbe
« être attaché au service de », propr. « se apeticier qu’on a supposé comme origine de
montrer aux côtés de ». cet adj. n'existe pas en a. fr.).
APPARITION, xrre, en parlant de l’Épi- APPLAUDIR, xive. Empr. du lat. ap-
phanie ; sens fig. de bonne heure, mais rare plaudere. — Dér. : applaudissement, vers
avant le xvie s. Empr. du lat. eccl. appa- 1500 ; applaudisseur, 1539.
rilio, traduction du grec epiphaneia, au APPLIQUER, x1r1e (sous la forme apli-
sens d’« Épiphanie », propr. « apparition ». quier) ; application, xive (Oresme). Empr.
Les autres sens se sont développés en fr. du lat. applicare « appliquer un objet
d’après apparaître ; le lat. class. apparilio contre », d’où « appliquer son esprit à »,
ne signifiait que « fonction d’apparitor ». applicatio, attesté seulement en parlant de
— Dér. : réapparition, 1771. l'esprit. Développement sémantique propre
APPAROIR, v. apparaître. au fr., le subst. ayant suivi le verbe. —
Dér. : applicable, 1285 (-quable) ; inappli-
“APPARTEMENT, 1559 (Du Bellay) ; peu cable, 1762 ; applique, xv* ; inapplication,
xvie (La Rochefoucauld); inappliqué,
usuel avant le xviie s. Empr. de l’it. appar-
tamento, dér. de appartare « séparer ». 1677.
APPOGIATURE 32

APPOGIATURE, 1829 (sous la forme -a, refait aussi en a. fr. en apriver, -voyer,
en 1813). Empr. de l’it. appoggiatura, dér. d’après privé « apprivoisé » (d’où aussi
de appoggiare « appuyer ». priver, xv°-xvViri® s.). Seulement gallo-
roman. — Dér. apprivoisement, xvI®
APPOINTER, « tailler en pointe », v. (Amyot) ; apprivoiseur, 1565.
pointe.
APPROBATEUR, 1534 ; approbatif,
APPORTER. Lat. apporiäre. — Dér. : 1561 ; approbation, 1396. Empr. des mots
apport, xr1°, sens plus étendu dans l’an- lat. approbator, -ativus, -alio « approba-
cienne langue ; rapporter, 1180 ; rapport, tion » et « preuve » (sens fréquent au
vers 1260; rapporteur, vers 1300. xvie s.), dér. de approbare, v. approuver.
APPOSITION, 1213. Empr. du lat. appo- — Dér. : désapprobateur, 1748 (Montes-
sitio « action de poser, placer », dér. de quieu) ; désapprobation, 1783.
apponere « poser, etc. », pour servir de nom APPROCHER. Lat. de basse ép. (au-
abstrait à apposer. teurs eccl.) apprôpiare, dér. de prüpe « près
APPRÉCIER, 1391. Empr. du lat. de de ». Aussi a. pr. s’apropriar, roumain apro-
basse ép. appretiare (de pretium « prix »).
pia, sarde logoudorien approbiare. — Dér. :
approchable, xve; approche, id.; rappro-
— Dér. : appréciable, 1486 ; in..., xv° ; ap-
cher, xvi® ; rapprochement, xv®.
préciateur, 1509 ; appréciatif, 1615 ; appré-
ciation, 1398 (appretiatio existe à basse APPROPRIER, 1226; appropriation,
ép., mais si rarement qu'il est vraisem- xive. Empr. du lat. médiéval appropriare,
blable que le fr. a été formé indépendam- appropriatio (tirés du lat. proprius « pro-
ment de ce mot). pre ») — Dér. désapproprier, 1653,
APPRÉHENDER, xir° ; appréhension, désappropriation, xvii® (Fénelon) ; expro- .
xi1e (appréhension de l’intellect). Empr. du prier, 1789 (une première fois exproprié
lat. apprehendere « saisir matériellement », en 1611), par changement de préfixe, d’où
d’où, à basse ép. (v. le suiv.) « concevoir », expropriation, 1789.
apprehensio « action de saisir » aux deux APPROUVER. Signifie aussi, jusqu’au
sens. Des sens de « comprendre, fait de XVI S., « prouver » et « éprouver »; de
comprendre », usuels au XVI s., sont issus plus, au xvi® s., « faire approuver » par
alors ceux de « craindre, crainte ». latinisme. Lat. apprübäre « approuver, faire
APPRENDRE. Lat. pop. apprendère, approuver, prouver ». V. approbateur,
lat. class. apprehendère « saisir », comp. de approbation. — Dér. : désapprouver, 1535.
prehendere (v. prendre), pris à basse ép. par APPROXIMATION, 1314. Dér. sav. du
des auteurs eccl. au sens de « saisir par lat. de basse ép. approximare « s'approcher
l’esprit », d’où « apprendre pour soi », puis de » (de proximus « très proche »). — Dér. :
« apprendre aux autres », sens attestés tous approximatif, 1789.
deux de très bonne heure en fr., cf. com-
prendre, pour ce développement du sens. APPUYER. Lat. pop. *appôdiare, dér.
Le sens matériel de « saisir » apparaît encore de pôüdium, terme d'architecture, « soubas-
en a. fr., d’où, en outre, « allumer ». It. sement, support, etc. » (du grec podion,
apprendere, « prendre » et « prendre feu » ; attesté seulement au sens de « petit pied »).
d’autre part esp. aprender et a. pr. aprendre, It. appoggiare, esp. apoyar. — Dér. :
aux deux sens intellectuels du fr. — Dér. appui, x11°. — Comp. : appui-main, 1680.
et Comp. : apprenti, 1483 ; n’a triomphé APRE. Lat. asper. It. aspro, esp. dspero.
qu'au xvures. ; d’abord aprentiz, vers 1175 La forme ispre, répandue dans les patois
(encore apprentis, xvi®), puis -tif, 1539 méridionaux, est d’origine obscure. —
(encore en 1690). Le fém. a été en -isse jus- Dér. : âpreté, xr1°, d’après le lat. asperitas ;
qu’à la fin du xvire s.; -ie n’est que du v. aussi aspérité.
XVIIIe 8. Formé avec le suff. -is qui se
trouve dans quelques adj., cf. l’a. fr. faitis APRÈS. Lat. de basse ép. ad pressum
« bien fait », et un { qui se retrouve dans la (Mulomedicina) « auprès », adv. formé avec
dérivation d’autres verbes en -endre, v. pressum, neutre, pris adverbialement, du
appentis, cf. a. pr. aprentitz ; d’où appren- part. passé pressus « serré, pressé », v. près,
tissage, 1395 ; désapprendre, 1290 ; rap- qui a supplanté en gallo-roman l’adv. class.
prendre, 1549 ; une première fois au x111e 8 ; post « après » (conservé ailleurs : it. poi,
malappris, vers 1230, en a. fr. apris « ins- esp. pues, a. pr. pos, rare). Tout en conser-
truit » et bien apris étaient usuels. vant le sens local, a pris de bonne heure le
APPRÊTER. Lat. pop. *appresiäre, dér. sens temporel, devenu prépondérant. Exis-
te dans tous les parlers gallo-romans (a. pr.
de l’adj. du lat. pop. *prestus, issu de l’adv. apres « auprès, après »). It. appresso « au-
class. praesto « à la portée de », donc « met-
près, après »,
tre sous la main, préparer », v. prêt. —
Dér. : apprêt, xv°; apprêtage, 1750 ; ap- . À PRIORI, 1626. Empr. du lat. scolas-
prêteur, 1552. tique a priori « (en partant) de ce qui est
APPRIVOISER. Lat. pop. “*appriva- avant », v. a postériori.
liäre, issu de *apprivatäre, supposé par APTE, 1377. Empr. du lat. aptus « appro-
l'a. pr. aprivadar, de privälus « privé, do- prié, fait pour, etc. ». Considéré comme
mestique », donc « rendre privé, accoutu- Vieux au XVII* s., signalé comme terme de
mer à la vie domestique » ; la terminaison droit au xvirre, Sens plus étendu au x1x®5.,
-ätiäre a été remplacée de bonne heure dans sous l'influence du suivant. L'a. fr. ae,
la France du Nord par -Ytiäre, plus usuel ; XIII, « convenable », rare et disparu de
33 ARBITRAIRE

bonne heure, est une première adaptation ARAIGNÉE, x11 (iraignee). Jusqu'au
de apitus, plutôt qu’une forme pop. refaite XVIIe s. « toile d’araignée » (cf. La Fon-
sur le fém. — Dér. : inapte, fin xvirie, taine, Fables, IV, 21), dér., avec le suff.
une première fois au xve s. (inapt). -ée (qui a ici une valeur exceptionnelle),
de l’a. fr. araigne, aragne, qui désignait
APTITUDE, xive (Oresme), au sens ju- l’insecte lui-même jusqu’au xvrre s. (cf. La
rid. Empr. du lat. de basse ép. aptitudo. Fontaine, id., X, 6), et encore en 1745
Sens élargi au xvi® s. — Dér. : inaptitude, (Voltaire), lat. aränea, propr. « toile d’arai-
XV°. gnée », l’insecte se disant aräneus ; il s’est
AQUAFORTISTE, 1853 (Goncourt). Dér. donc produit en lat. la même substitution
de l’it. acqua forte « eau forte ». que plus tard en fr., due au fait que les
toiles d’araignée frappent plus l'attention
AQUARELLE, 1791. Empr. de l'it. ac- que l’insecte. Cette substitution, du reste,
quarella, propr. « couleurs détrempées », n’a pas été générale car, si l’esp. dit
dér. de acqua « eau ». — Dér. : aquarel- araña « araignée », l’it. dit encore ragna
liste, 1829. « toile d’araignée », ragno « araignée ».
A la suite du glissement de sens d’araignée,
AQUARIUM, 1860. Empr. du lat. aqua- le fr. a créé l'expression toile d’'araignée,
rium « réservoir », dér. de aqua « eau ». aujourd’hui dominante dans les patois;
les dialectes de l'Ouest et de l’Est ont créé
AQUA-TINTA, 1819. Empr. de l’it. acqua un comp. analogue, attesté au xvi® s. par
tinia « eau teinte ». hyranielle de Brantôme et qui, pris au sens
AQUATIQUE, xu1°. Empr. du lat. aqua- fig. par la langue de la vénerie, figure dans
ticus ; l’a. fr. a possédé un adj. pop. evage, les dictionnaires sous la forme de l'Ouest
de sens analogue. arantèle (arantelle, xvi1° s., chez Du Fouil-
loux, qui était potevin). Ce comp. formé
AQUEDUC, 1553; en outre agueduci, d’aragne et de toile, réduit ensuite à aran-
xvie et xviie s. Empr. du lat. aquae duc- loile, ne doit pas remonter au lat. aranae
tus ; formes pop. dans la région lyonnaise, tela, en raison de la date où il est attesté
d’après acquiductus, attesté à basse ép., pour la première fois; l’it. a aussi ragna-
cf. aussi it. acquidotto. tela. Le type inverse foile aragne existe
AQUEUX, 1503. Empr. du lat. aquosus; dans les patois méridionaux, de même esp.
a supplanté une forme pop. eveux, encore telaraña. Araignée est aujourd’hui la forme
usuelle au xvi® s. et dans de nombreux dominante dans la partie septentrionale du
patois, cf. it. acquoso, esp. arch. aguoso, domaine gallo-roman; aragne celle du
a. pr. aigos. Nord-Est, de l’Est et du Midi (a. pr.
aranha) ; il y a, en outre, plusieurs substi-
AQUILIN, xve. Empr. du lat. aquilinus, tuts, notamment arantoile, lorrain et région
dér. de aquila « aigle ». du Périgord, et filière, lorrain, par imita-
tion de l’all. Spinne, propr. « fileuse », tiré
AQUILON, xr1°. Mot littéraire. Empr. de spinnen « filer ». V. érigne.
du lat. aquilo.
ARAIRE, v. charrue.
ARA, 1614 (en 1558 arat). Empr. de
arara du tupi (langue du Brésil). ARANTÈLE, v. araignée.
ARABE, 1564; arabique, xrie. Empr. ARASER, xr1°. Dér. de l’anc. adj. res,
du lat. arabus (autre forme de arabs), -icus avec l’alternance régulière des voyelles :
(du grec araps, arabikos). L,'a fr. préfère e accentué, a inaccentué, v. ras. — Dér. :
ar (r)abi(t), qui représente peut-être l’ara- arasement, 1367.
be ‘arabi, adj. ARATOIRE, 1514. Empr. du lat. de
ARABESQUE, 1546 (Rab.), au sens mo- basse ép. aratorius, dér. de arare «labourer ».
derne ; aux xvie et xvII® s. aussi « arabe ». ARAUCARIA, 1806 (sous la forme arau-
Empr. de l’it. arabesco, aux deux sens, dér. caire). Empr. du lat. des botanistes arau-
de arabo. caria, dér. de Arauco, nom de la région du
ARABLE, vers 1150. Empr. du lat. Chili, d’où vient cet arbre.
arabilis, dér. de arare « labourer ». ARBALÈTE. Lat. arcuballista (Végèce),
comp. de arcus « arc » et de ballisia « ma-
ARACHIDE, 1799. Empr. du lat. ara- chine de jet », v. baliste. Cf. aussi a. pr.
chidna (du grec arakhidna, autre forme de arbalesta, it. arch. arcobalestro; les langues
arakhos, arakos « gesse »). du sud emploient plutôt bal(l)ist(r)a : it.
ARACHNIDE, 1801. Dér. sav. du grec balestra, esp. ballesta, a. pr. balest(r)a,
encore attesté dans quelques patois. —
arakhné « araignée ». Dér. d’une autre forme -estre, encore usuelle
ARAK, 1519 (écrit alors arach). On dit au xvie s. : arbalétrier, xr1° (-estrier), en
aussi rack. Empr. de l’ar. ‘araq, propr. outre arbalestier, du x11° au xvI°Ss.
« liqueur extraite du palmier », dit ensuite ARBITRAIRE, 1397 (d'après l’adv.
d’autres liqueurs ; cf. de même angl. ar- -ment ; sens jurid., seul attesté jusqu’au
rack, all. Arrack. Les Portugais ont em- xvie s.). Empr. du lat. arbitrarius « qui
prunté au xvie s., dans le sud de l’Inde, relève d’un arbitre » dans la langue jurid.
les formes orraca, urraca. V. raki. Sens moderne à partir du xvi® s., à la fois
ARAGNE, v. le suiv. d’après le lat. arbitrarius et le fr. arbitre.

DICT. ÉTYM.
3
ARBITRE 34

ARBITRE, sorte de juge, 1213 ; arbitre, « préparation secrète », 1631. A été égale-
subst. abstrait, xr11° ; au moyen âge ordi- ment employé comme adj. d’après le lat.
nairement franc arbitre ; aujourd’hui seu- arcanus, du xv® au XVII® s. (encore
lement dans libre arbitre, 1541 (Calvin); en 1664, chez Molière).
arbitrer, 1274; arbitral, 1270. Empr. du
lat. arbitrer, arbitrium, arbitrari, arbitralis. ARCANNE, v. henné.
— Dér. du verbe : arbitrage, 1283 (Beau- ARCHAÏSME, 1659 (Chapelain). Empr.
manoir). du grec arkhaismos, dér. de arkhaios « an-
ARBOR-. Premier élément de mots sav. cien ». — Dér. : archaïque, 1776.
comp., tels qu'arboriculture, 1836, tiré du ARCHAL. Seulement dans fil d’archal,
lat. arbor « arbre ».
attesté au xive s., seul emploi depuis le
ARBORER, fin xve (G. de Villeneuve, xvies. Lat. aurichalcum, altération, d’après
compagnon de Charles VIII, mais déjà aurum « Or », de orichalcum (du grec orei-
vers 1320 dans les Gestes des Chiprois, khalkos « laiton »). Le développement de ce
texte italianisant, au sens de « munir de mot sav. n'est pas régulier, l’origine de
mâts »). Empr. de l’it. anc. arborare, propr. l’initiale ar- est obscure. Très usuel dans
terme de marine, « dresser un mât » (au- les parlers gallo-romans, surtout avec fil.
jourd'’hui refait en alberare, d’après albero It. oricalco, esp. auricalco.
« arbre »), d’où les sens dér., attestés aussi
pour l'it. déjà au xves. ARCHANGE, xrr1e, en outre -gele, x11°,
gle, id., v. ange. Empr. du lat. eccl. ar-
ARBORESCENT, 1553. Empr. du lat. changelus (du grec eccl. arkhangelos, comp.
arborescens, part. prés. de arborescere « de- de arkh-, v. archi, et de angelos).
venir arbre ». — Dér. : arborescence, 1838.
ARCHE de Noë, etc. En dehors des lo-
ARBORISER, -ISTE, v. herboriser, her- cutions d’origine biblique : arche de Noë,
boriste. arche sainte, arche d'alliance, seulement
quelques emplois techn. Dans ces locutions
ARBOUSE, 1557. Altération d’arbouce, représente le lat. eccl. arca ; en lat. class.
1566, empr. du prov. arbousso, tiré du ce mot signifie « coffre ». Rare dans le fr.
masc. arbous « arbousier », lat. arbütèus, littéraire, en dehors des locutions bibliques,
adj. de arbütus « arbousier ». — Dér. : mais encore usité dans de nombreux par-
arbousier, 1539 (-osier). lers gallo-romans au sens de coffre », p. ex.
ARBRE. Lat. arbôr, arbüris. It. albero, dans le Berry au sens de « pétrin » et de
esp. drbol, a pr. arbre. Le lat. arbor signifie « coffre de cuisine ». It., esp., a. pr. arca,
déjà aussi « mât » comme dans la plupart tous trois au sens de « coffre » et aussi de
des langues romanes et désigne, en outre, « cercueil » (déjà lat.), outre le sens bi-
une pièce du pressoir à huile, exactement blique.
deux piliers de bois inclinés.
ARCHE d'un pont; en outre « arc »,
ARBRISSEAU. D'abord arbriscellus, au sens architectural, du xr11° au xvre s.
ixe s. ({Gloses de Reichenau); en outre Lat. pop. *arca, plur. neutre, devenu fém.,
arbroisel, xui°. Lat. pop. *arboriscellus, al- lat. class. arcus « arc ».
tération, d’après arbor, de *arbüscellus,
lat. class. arbüscula, qui a changé de genre ARCHÉO-. Premier élément de mots
comme arbor. It. arboscello. sav. comp. empr. du grec, tels qu’archéo-
logie, 1599, où arkhaio- vient de l’adj.
ARBUSTE, 1495. Empr. du lat. ar- arkhaïos « ancien ».
bustum.
ARCHEVÊQUE, v. évêque.
ARC. Prononciation du c due à l’in-
fluence de la langue écrite ; la prononcia- ARCH(I)-. Premier élément de mots
tion ar était encore usuelle au xvie s. (cf. sav. comp., tiré du préf. grec arkhi, mar-
rue Saint-André-des-Ar(t)s, à Paris). Lat. quant le premier rang (du verbe arkhein
arcus, It., esp. arco. — Dér. : arcature, « commander »).
1353 ; arceau, xr1e, probabl. déjà lat. pop.
*arcellus; archer, id.; archet, id.; arquer, -ARCHIE, -ARQUE. Second élément de
1377 ; peut-être d’après le lat. arcuare. — mots sav. comp., tiré des terminaisons
Comp. arc-boutant, 1387, c’est-à-dire grecques -arkhia, -arkhos (du verbe arkhein
« arc qui pousse contre le mur qu'il sou- « commander »).
tient », d’où arc-bouter, 1604; arc-en-
ciel, xir1° (J. de Meung\, en outre -del-, ARCHIMANDRITE, xvie. Empr. du lat.
XII, -Ou-, XI11°, Cf. de même le lat. caelestis eccl. archimandrita (du grec eccl. arkhiman-
arcus ; it. arcobaleno, esp. arco iris, a. pr. driles, de mandra, propr. « enclos », d’où
arc San Marti. « cloître » en grec eccl.).

ARCADE, xvi® (R. Belleau). Empr. de ARCHINE, 1699 (écrit alors arschin).
l’it. arcata, dér. de arco. Transcription du russe archin; ne sert
qu'en parlant de la mesure russe.
ARCANE, xixe (Balzac), seulement dans
quelques locutions : les arcanes de la scien- ARCHIPEL, 1512. Réduction d'archi-
ce, etc. Semble avoir été repris à la langue pelago ou -gue (encore signalé en 1802;
du xvi®s. (xve : archanes), qui l’a empr. du alors en outre -ge), tous deux très usuels
lat. arcanum « secret ». Arcane s’employait au xvies. (cf. déjà Archepelague au xive s.
aussi comme terme d’alchimie, au sens de dans la Chronique de Morée), empr. de
39 ARGILE

l’it. arcipelago, attesté dès 1268, probabl. ARDU, xive. Empr. du lat. arduus
transformation du grec Aigaion pélagos « élevé, difficile à gravir, malaisé ». Dès le
d'après les mots commençant par arci- premier texte, a le sens de « malaisé », sens
(donc « mer principale »), à la fois nom principal depuis le xvrie s.; au xvie, fré-
propre, désignant la mer de ce nom et les quent au sens d’ « élevé ».
îles qui s’y trouvent, et nom commun. ARE, 1795 (décret de la Convention).
Nom commun en fr. dès le xvi®s. Mot fabriqué à l’aide du lat. area « sur-
ARCHITECTE, 1510 ; en outre, archi- face », pour désigner une mesure agraire du
lecteur, très usuel au xvi® s.; architecto- système métrique et fait masculin comme
tous les autres noms de ce système. —
nique, 1370 ; architecture, 1504. Empr. du
Comp. : centiare, 1798 ; hectare, 1798.
lat. architectus, -onicus, -ura (du grec
arkhitekiôn (architecton existe aussi en lat., AREC, 1521, d'abord areque, ensuite
d’où cette forme en fr., au x1v® s., chez areca jusqu’à la fin du xvrie s., arec depuis
Oresme), comp. de {ektôn « ouvrier travail- 1701. Empr. du port. areca, empr. lui-
lant le bois », arkhitektonikos). Les formes même d’une langue indigène du Sud de
viennent du lat., mais l’empr. d'architecte, l'Inde, cf. adakka du Malabar. — Dér. :
-tecture a été suggéré par l’it. archiletlo (dont aréquier, 1687.
l'influence explique archietteur, xiv®, Chris- ARÈNE. Empr., au xvies., comme terme
tine de Pisan), architellura. littéraire et, au xvi1® s., comme terme
ARCHITRAVE, 1528 (sous la forme ar- archéologique, du lat. arëna. Était popu-
quitrave). Empr. de l’it. architrave (comp. laire au moyen âge sous les formes araine,
de archi, v. archi, et de irave « poutre »), areine, au sens de « sable » (et de « grès »),
propr. « maîtresse poutre ». qui ont disparu devant sable ; ne subsiste
que dans quelques patois, notamment en
ARCHIVES, 1416. Au xvi® s., archifs prov., où il désigne du sable fin, conformé-
masc. plur., archive, masc. sing., une fois ment au sens de arèna, sabulum désignant
chez Amyot. Empr. du lat. de basse ép. du gros sable. It. rena, esp., a. pr. arena.
archivum (du grec arkheion ou arkheia, ARÉOLE, 1611. Empr. du lat. areola
plur. neutre, « lieu où l’on conserve les « petite surface », dim. de area « aire »,
archives » et « les archives elles-mêmes », pour des sens techn.
propr. « résidence des principaux magis-
trats (arkhé) »). — Dér. : archiviste, 1701. ARÉOPAGE, 1495, au sens fig. Empr.
du lat. areopagus (du grec Areios pagos).
ARCHIVOLTE, 1694. Empr. de lit. ar- ARER, v. labourer.
chivolto, même mot que le lat. médiéval ARÊTE. Lat. dialectal *arësia, lat. class.
archivoltum et l’a. fr. arvoli « sorte d’arc », arista (qui vit encore en franco-provencal)
comp. de arc et de l’anc. adj. volt « courbé », « barbe d’épi » et « arête de poisson » (Au-
v. voûte, cf. a pr. arc volt; mais les rap- sone, 1v® s.). Le sens de « barbe d’épi»ra
ports de ces différentes formes sont incer- survécu en gallo-roman, mais n’est guère
tains; le plus vraisemblable, c’est que le répandu. It. resta, aux deux sens. — Dér.
lat. médiéval a été formé sur le fr. et a été du sens technique de la construction :
empr. par l’it., d’où le mot est revenu en- arêtier, xiv°, d’où arêtière, 1691, au sens
suite en France. moderne.
ARÇON. Lat. pop. “*arciônem, acc. de ARGENT. Lat. argentum, métal et, dans
arcio, dér. de arcus. En a. fr. signifie aussi des textes populaires, « monnaie, richesse »,
« petit arc » et « archet » ; autres sens dér. sens qui ne paraît conservé qu’en France.
dans les langues techn. et les patois. It. It. argenio. — Dér. et Comp. : argenter,
arcione, esp. arzôn. — Dér. : désarçonner, xue; argenteur, xrr1° (É. Boileau); ar-
XIIe, genture, 1642 ; désargenter, 1611 ; réargen-
ter, 1838; argenterie, 1286; argentin,
ARCTIQUE, v. antarctique. x11e ; argentifère, 1596; vif-argent, xr11°,
sur le modèle du lat. des alchimistes (déjà
ARDENT, xre. Empr. du lat. ardens, attesté en lat. class.) argentum vivum, cf.
part. prés. de ardere « brûler ». Continue it. argento vivo et les traductions Quecksil-
l’a. fr. ardant, part. prés. du verbe ardoir, ber de l’all. et quichksilver de l’angl.
ardre, encore dans quelques patois. It.
ardere, esp. arder, à. pr. ardre; il en est ARGENTIER. Aujourd'hui seulement
de même dans la locution mal des ardenis, par plaisanterie, en parlant du ministre
xI1e (ardanz), qui se disait de malades des Finances : le grand argenlier. Ancien-
atteints d’érysipèle gangréneux. nement « banquier », 1272, « sorte d’inten-
dant ou de trésorier », xvI*®, rarement « ou-
ARDEUR. Lat. ardôrem, acc. de ardor, vrier travaillant l'argent », xve. En raison
masc. It. ardore, esp. a. pr. ardor. de la chronologie, c’est un mot empr. du
lat. argeniarius « banquier » et « ouvrier »,
ARDILLON, v. hart. lutôt qu’un mot pop., comme paraissent
ARDOISE, xue. Étymologie peu sûre. Fêtre l’it. argentaio et l’a. pr. argentier, qui
signifient surtout « ouvrier travaillant l’ar-
On restitue un mot *ardesia, qui semble gent, orfèvre ».
rappeler le celtique ard- « haut » ; mot pro-
pre à la France septentrionale. — Dér. : ARGILE. En a. fr. (outre argille) ardille,
ardoiser, xvi® ; ardoisier, 1506 ; ardoisière, arsille, etc. Lat. argilla et -ila (du grec
1564. argil(l)os). V. glaise. It. argilla, esp. ar-
ARGILE 36

cilla. — Dér. : argileux, xr1°, continue arre, encore usuelle au xvi® 8., cf. a. pr.
peut-être le lat. argillüsus; argilière, xr11° arre, et qui survit dans quelques patois
(arz-). (poit. are).
ARGOT, 1628. D’abord « métier, corpo- ARIETTE, vers 1710. Empr. de lit.
ration de voleurs », d’où argotier, 1628, arielta, dim. de aria, v. air.
« voleur », -ler, id. « mendier »; n'apparaît
avec le sens moderne qu’en 1690. On a pro- ARISTARQUE, 1549 (Du Bellay). Tiré
posé d’y voir un emploi métaphorique soit du nom propre lat. Aristarchus (grec Aris-
d’argot, forme usuelle d’ergot jusqu’au tarkhos, critique alexandrin du 11° s. avant
XVI® s., au sens de « vol », en s'appuyant Jésus-Christ) ; sens fig. déjà en lat.
sur des mots signifiant « voler, voleur »,
tirés de griffe et du moyen fr. harpe « grit- ARISTOCRATIE, xive (Oresme); aris-
fe », v. harpon, soit de l’a. pr. argaul « vieux tocratique, id. Empr. du grec aristokrateia
vêtement » (cf. a. fr. hargaut, herigaut « gouvernement des meilleurs », -ikos, par
« sorte de vêtement »), qui aurait été em- l'intermédiaire des traductions lat. d’Aris-
ployé pour désigner d’abord la corporation tote. — Dér. : aristocrate, 1778 (créé une
des gueux avant d’être appliqué aux vo- première fois en 1550) ; aristocratiser, 1791
leurs. Plus probablement dér. du verbe (créé une première fois, au xIv® s., par
argoter « se quereller » attesté vers 1600 Oresme).
et qui continue peut-être l’anc. fr. argoter ARISTOLOCHE, xvi® (Paré) ; en outre
« chicaner » attesté chez Gautier de Coinci -gie, 1248. Empr. du lat. aristolochia (du
et qui est dér. du lat. ergo, comp. ergot. — grec aristolokhia) ; plante réputée pour fa-
Dér. : argotique, 1837. ciliter les accouchements (en grec lokhos).
ARGOT, v. ergot.
ARITHMÉTIQUE, subst., 1529. Au
ARGOUSIN, 1538. Remonte à l'esp. al- moyen âge, formes variées, notamment
guazil, par des intermédiaires mal éclaircis. arismétique, XIII®, encore au xvI° s. et en
Si l’on tient compte des formes de Bran- normand. Empr. du lat. arithmetica (du
tôme argousil, etc., à la fois « agent de grec arithmétiké « science des nombres
police » (dans des passages traitant des (arithmos) »). L’s remonte à la prononcia-
choses d'Espagne) et « bas officier de ga- tion spirante de basse ép. du 6 (th) grec,
lère », argousin paraît être une altération qui a dû pénétrer dans les milieux sav.;
de ces formes empr. directement de l’esp., cf. a. pr., esp. arch. arismetica. L’adj., déjà
et l’it. aguzzino (algozzino, proposé comme usité au xive s., est fait sur l’adj. lat. cor-
le prototype du fr., n’est attesté qu’au respondant arithmeticus. — Dér. : arithmé-
xviie s., chez Oudin), une adaptation du ticien, 1539 ; arismetien, xiv® (Christine de
fr. Rabelais emploie en outre une forme Pisan).
algousan. Mais il est difficile de s’appuyer
sur les formes de ce mot argotique, modi- ARLEQUIN, 1585, de 1584 au xvrrre s.
fiées à dessein et de manières diverses. aussi harlequin. En a. fr. maisnie Hellequin
ou maisnie Hierlekin désignait un cortège
ARGUER. Très usuel jusqu’au xvi® s., de fantômes malfaisants qui volait en l’air,
avec des sens variés : « presser » physique- la nuit. Le nom de leur chef fut employé
ment et moralement, « se presser » (au dans une œuvre dramatique pour la pre-
réfl.), « blâmer », etc. Aujourd’hui limité à mière fois par Adam de Le Hale dans son
quelques emplois : arguer de faux, etc. Jeu de la Feuillée. Plus tard, vers la fin
Lat. argütäre (à côté de .argüläri) « bavar- du xvie s., le bouffon d’une troupe ita-
der, ressasser », et, par un développement lienne, qui jouait à Paris, s’empara de cette
de sens hardi, « piétiner » en parlant du figure, qui avait continué à vivre dans la
foulon. C’est de ce dernier sens que vient tradition populaire, pour donner un nou-
celui de « presser »; quant à ceux d’ « ac- veau relief à son rôle de zani, en l'appelant
cuser, blâmer » et aux acceptions modernes, harlequin. Le mot a ensuite aussi passé à
ils sont dus au lat. arguere « prouver, con- l’it., dont la forme arlecchino a influencé le
vaincre, accuser ». Cf. anc. esp. argudarse mot fr. en ce sens que celui-ci a perdu
« se presser ». ; son h-. Hellequin a son origine dans le
milieu anglo-normand, où ce nom corres-
ARGUMENT, x1ii°; argumentateur, pond à un moyen anglais *Herle king
1539 ; argumentation, 1327 ; argumenter, (= roi Harilo). Très probabl. il y a à sa
xiie. Empr. du lat. argumentum, argumen- base un des noms du dieu Wodan, qui fait
tator (de basse ép.) -atio, -ari (de arguere). figure ici de chef de cette horde de démons.
ARGUTIE, vers 1520. Surtout au plur. Le nom de diable Alichino, qu’on trouve
Empr. du lat. argutia (ordinairement au chez Dante, n’a rien à faire avec Harle-
plur.) « subtilité », dér. de argutus « sub- quin ; c’est un comp. de ala « aile » et de
til » (de -arguere). Au xvI® s. aussi arguce. a « incliner ». — Dér. : arlequinade,
726.
ARIA, 1752. Altération de haria, 1530,
cf. aussi un grand haria caria « tumulte », ARMAILLI, v. animal.
xv°, tiré de l’anc. verbe harier « harceler », ARMATEUR, 1584. Empr. du lat. de
usuel aux xve et xvIe s., v. harasser. basse ép. armator « celui qui équipe (un
ARIDE, xive (G. de Machaut) ; aridité, bateau) ».
x11e (rare avant le xvire s.). Empr. du lat. ARMATURE, 1694 (au sens moderne;
aridus, ariditas (de arëre « être desséché »). antér., fin xv® « armure », usuel au xvi® s.).
L'adj. s’est substitué à une forme pop. are, Empr. du lat. armaiura, dér. de armare.
37 ARRÉRAGES

ARME. Lat. de basse ép. arma, fém., ARONDE, v. hirondelle.


lat. class. arma, neutre plur. collectif. It., ARPÈGE, 1751 (harpègement, en 1690).
esp. arma. — Comp. : alarme, xIv°, empr. Empr. de l’it. arpeggio, propr. « jeu de la
de lit. al’arme « aux armes », malgré la harpe », tiré de arpeggiare, v. harpe.
date très ancienne ; d’où alarmer, fin xvi®
(D’Aubigné), d’abord « donner l’alarme », ARPENT. Du gaulois arepennis attesté
sens moderne, xvii® ; alarmiste, 1792. par Columelle, cf. irlandais airchenn « me-
sure agraire de superficie », formé avec le
ARMELINE, v. hermine. mot cenn « tête, bout ». La finale -nt du
ARMER. Lat. armäre « équiper un vais- mot fr. doit remonter à une forme secon-
seau, armer, etc. ». It. armare, esp. armar. daire arependis (cf. aussi esp. arapende),
— Dér. : armée, x1ve ; a fortement concur- issue peut-être de arepennis (d’où a. pr.
rencé dès lors l’a. fr. ost, qui ne survit plus, arpen) par une évolution dialectale tardive
dès le xvie s., que comme terme littéraire, du gaulois et attestée au virr° s. dans une
lat. hostis « ennemi », qui a pris au vi®s. glose (arpendia). — Dér. arpenter, 1384 ;
le sens de « armée ennemie » et, par la arpentage, 1293 ; arpenteur, 1453.
suite, de «armée (en général) » et qui survit ARPETTE, pop., vers 1880. Attesté à
encore en Picardie et dans le Maïne sous
la forme de o au sens de « troupeau »; Genève avec sens péjor., dès 1858, à Reims
armement, x111° ; désarmer, vers 1080 (Ro- en 1845, au sens de « mince et frêle (d’un
land) ; désarmement, 1594 ; réarmer, 1771 ; homme ou d’un cheval) ». Dér. péjor. de
réarmement, id.
harpe « fer coudé ; griffe », né d’une compa-
raison d’un individu amaigri avec un croc
ARMET, xive s. Empr., avec influence et étendu ensuite à toute sorte de défauts ;
d'arme, de l’esp. almeie, lui-même empr. v. harpon. Comp. bourguignon harpiau
de l’a. fr. heaumet, helmet, dér. de heaume. «polisson », fr. arpin « voleur » (Huysmans).
ARMISTICE, 1680. Empr. du lat. diplo- ARPION, 1821. Mot d’argot, empr. du
matique de cette ép. armisiitium. propr. prov. arpioun « griffe », dér. de arpo, de
« cessation des armes », créé sur le modèle même sens, a. pr. arpa, de la famille de
du lat. jurid. justitium « suspension des harpon.
tribunaux »; d’où aussi angl. armisiice,
it. armistizio ; l’all. W’affenstillstand en est ARQUEBUSE, 1475. La première arme
une traduction qui a été imitée par les à feu portative était si pesante que son
langues voisines. maniement demandait un chevalet, sur
lequel elle fut fixée à l’aide d’un crochet,
ARMOIRE, xr1e (sous la forme armaries, d’où l’all. Hakenbüchse, le néerl. hakebusse,
ensuite almarie, almaire, etc. ; armoire Vers propr. « mousquet à crochet ». Ce dernier
le xvie s.). Empr. du lat. armarium « ar- mot pénètre en Flandres et dans les autres
moire pour serrer les ustensiles de ménage, pays bourguignons dès 1475, sous la forme
l'argent, les habits, casier de bibliothè- hacquebusse. Par la suite, celle-ci a été
que, etc. », dér. de arma au sens d’ « us- modifiée de différentes façons, en -buse
tensiles ». Cf. it., esp. armario, a. pr. armari (sous l'influence du nom d'oiseau buse,
tous empr. comp. faucon, etc., qui ont été employés
ARMOIRIES, x1ve (écrit alors armoie- aussi comme noms d'armes à feu), en
rie ; encore parfois sing., au xvi® s.). Dér. arque- (sous l'influence de arc), en -buie
de l’anc. verbe armoyer « orner d'armes (sous l'influence de buier « viser »), en ar-
héraldiques », xive, dér. d'arme, attesté en quebouse (sous l'influence de lit. archibu-
ce sens, dès le xr1° s. — Dér. : armorial, gio, lui-même empr. de l’all. avec adapta-
1611, fait sur le modèle de l’anc. adj. his- tion de la deuxième partie du mot à l’it.
torial « relatif à l’histoire » ; armorier, 1680, bugio « trou »). La forme arquebuse l’em-
fait sur le modèle d’hislorier ; a remplacé porte sur ses concurrents au XVII 8. —
armoyer, encore très usuel au XvI* S. au Dér. : arquebusade, 1475 (sous la forme
part. passé. -aide) ; arquebusier, 1564 ; d’abord haque-
buziers, 1543.
ARMOISE. Lat. arlèmisa (mot grec,
dér. de Artemis). ARQUER, v. arc.

ARMURE. Lat. armaäiüra. — Dér. : ARRACHER. Issu, par changement de


armurier, 1292 ; armurerie, xiv® (Bersuire). préf., de l’a. fr. esrachier, du lat. pop.
*exradicare, lat. class. eradicare, Comp.
ARNICA, 1697. Empr. du lat. des bota- port. arreigar, même sens, à côté de esp.
nistes arnica, qui paraît être une altération port. arraigar « s’enraciner », et, avec un
du nom d’une autre plante piarmica « ptar- autre préf., a. fr. desrachier « arracher »,
mique », plante sternutatoire (du grec anc. lorrain fors ragier, id. Le préf. à
ptarmiké, de piarein « éternuer »). exprime le mouvement de la personne qui
AROMATE, xine (en outre -a, jus- tire l’objet en question à soi. — Dér. :
qu’au xvuie 8.) ; aromatique, XI11° ; arOma- arrachage, 1835 ; arrachement, xX11° ; arra-
tiser, xrie. Empr. du lat. médiéval aroma- cheur, xur1e ; arrachis, 1518 (en Champagne
tum (dér. de aroma) et du lat. de basse ép. -aÿis, xu1e). — Comp. : arrache-pied (d°),
-ticus, -lizare (du grec arômatikos, -lizein). vers 1515, dont le sens premier n’est pas
_— Dér. : aromatisation, 1581. clair.
ARÔME, 1787 (G. de Morveau); une ARRANGER, v. rang.
première fois au moyen âge. Empr. du lat. ARRÉRAGES, v. arrière.
aroma (du grec arôma).
ARRÊTER 38

ARRÊTER. Jusqu'au xvire s. souvent ARROGANT, 1393; arrogance, xrre.


intrans. Lat. pop. *arrestäre « (s') arrêter », Empr. du lat. arrogans, arrogantia (du
comp. du lat. class. resiäre « rester ». It. verbe arrogare, au sens de « revendiquer »).
arrestare, esp. arrestar. — Dér. : arresta-
ARROGER (s’), 1538 ; au xvi® s. aussi
tion, 1370, réfection de l’anc. dér. areslai-
s’arroguer. Empr. du lat. arrogare (sibi) «ré-
son, d’après le lat. restare et les nombreux
mots en -alion; arrêt, xr1° ; arrêté, 1414. clamer pour soi » (de rogare « demander »).
On trouve aussi du x1v® au XvI®Ss. arroguer
— Comp. : arrête-bœuf, 1542, v. bugrane.
et arroger aux sens de « interpeller, attri-
ARRHES. Réfection orthographique, buer » qu'a le lat. arrogare.
faite d’après le latin au début du xvre 5.,
ARROI, v. désarroi.
mais qui n’a triomphé qu’au xvirre s.,
d’erres, xII°, empr. (avec un développe- ARROSER. Lat. pop. *arrüsäre, altéra-
ment de la voyelle rare à cette ép.) du lat. tion, d’après ros, rôris « rosée », d’un verbe
jurid. arr(h)a « gage », réduction de ar- attesté, chez des auteurs originaires de la
r(h)abo, grec arrhabôn, d'origine sémiti- Gaule, à basse ép. arrôräre « couvrir de
que, cf. l’hébreu ‘erabôn « gage », Genèse, rosée » ; a supplanté le lat. class. (ir )rigäre,
xXxXVII, 17, 18, 20. On a attribué l’origine qui subsiste dans le valaisan ergié. Cf. a.
du plur. d’arrhes à celui du lat. jurid. pr. arozar. — Dér. : arrosage, 1611 ; arro-
arrae « sorte de dot de fiançailles », mais sement, xII°; arroseur, 1838 (ouvriers
ce sens n’est pas attesté en fr., où le plur. arroseurs, déjà XvI®) ; arrosoir, xIve.
peut donc être spontané. À eu aussi autre-
fois, surtout au xvi® et au xvrie s., des ARROW-ROOT, 1808. Empr. de l’angl.
sens fig., ordinairement au sing., d’après arrow-root, littéral. « racine à flèches »;
le lat. eccl., sous les deux formes arre(s) ainsi nommé parce qu’il passe pour être
et erre(s). It. arra, au propre et au fig. un remède contre les blessures de flèches.
(moins usuel que caparra, V. accaparer), ARROYO, fin xixe. Empr. de l'esp.
esp. arch. arras. arroyo, lat. pop. *arrügium, lat. class. arru-
ARRIÈRE. Lat. pop. *ad rètro, comp. gia «galerie de mine », d’où, à basse ép., « ca-
du lat. class. rétro « en arrière » (d’où l’a. fr. nal, ruisseau » (ce dernier sens est douteux).
riere, V. derrière). It. addietro (modifié ARSENAL, 1395 (sous la forme arche-
d’après dietro, v. derrière), esp. arch. arre- nal ; arsenac, 1459, jusqu’au xvire s. ; arce-
dro. — Dér. : arrérages, 1267 (arrierages, nal et arsenal, Xv® s.). Désigne d’abord
forme dominante jusqu'au xvi® s., encore l'arsenal de Venise, encore Rab., sens plus
usitée au xviie); arriérer, x111° ; arriéré, étendu dès le xvre s. Empr. de l’anc. véni-
terme de finances, 1751 (comme adj.); tien arzand (d’où aussi la prononciation
terme médical, 1846. — Comp. : Nombreux fr. arsena, attestée au xvie et au xvrre 5.)
mots avec arrière comme premier élément ; empr. lui-même, probabl. par l’intermé-
v: ces mots au 2° terme. diaire du bas-grec arsénalés, 1x° s., de
ARRIMER, 1398, au sens de « ranger la l'arabe dér-sind'a « arsenal maritime »,
cargaison dans la cale d’un navire », mais littéral. « maison où l’on construit »; on
aux xve et xvI® s. aussi « arranger, dis- propose aussi le simple assind‘a. Tarsenal,
poser (en général) ». Empr. du moyen angl. attesté au xrr1° s., vient de l’it. farcenale,
rimen « arranger, débarrasser ». Ce verbe empr. de l’arabe par l'italien méridional ;
appartient à la famille du germ. räm « es- V. aussi darse (qui est le mot génois).
pace » (anc. angl. rum, all. Raum, anc. ARSENIC, xrr1e. Empr. du lat. arseni-
scandinave rüm); ce dernier a aussi été cum (du grec arsenikon, dér. de arsêén
empr. par le fr., où il a donné run « fond « mâle », ainsi nommé à cause de ses pro-
de cale », 1386, ensuite « place, rang d’une priétés puissantes). — Dér. : arseniate,
personne ». De ce subst. dérive un verbe 1782 ; arsenical, 1578.
arumer « ranger la cargaison dans la cale »
(1386-1798), arruner « arranger, disposer » ARSOUILLE, 1792. Terme d’argot, cf.
(fin xive au xvrre s.), qui a été empr. par arsouiller « mener une vie crapuleuse »,
d’autres langues rom. : a. pr. arumar, Cat. 1797, s’ars- 1821. On a proposé d'y voir
esp. port. arrumar. — Dér. : arrimage, une prononciation vulgaire de resouiller
1398 ; arrimeur, 1398. « (se) souiller complètement », peu satis-
faisant pour le sens.
ARRISER, v. ris.
ART. Lat. ars, artis, fém. Genre hésitant
ARRIVER. Lat. *arripäre « toucher à jusqu'au xvie s. It. arie, fém., esp. arte,
la rive », sens propre qui n’est plus senti fém. et masc.
depuis le xvie s., que dans les acceptions
de la marine. It. arrivare (empr. du fr.) ARTÈRE, 1213. Empr. du lat. arteria
esp. arribar, sens propre et fig. — Dér. : (du grec ariéria « artère » et « trachée-
arrivage, xII1°; arrivée, XVI® ; arriviste, artère »). Dér, : artériel, 1503 (en 1314 -al).
1893 (attribué à M. Alcanter de Brahm ARTÉSIEN, 1803. Nom propre, dérivé
par R. de Gourmont). d’Ariois ; c’est en Artois que le premier
ARROCHE, xve. Empr. d’un dialecte puits de ce genre a été creusé.
non déterminé, lat. pop. *atrapica ou *atri- ARTHRITE, 1646; Mme de Sévigné,
pica, lat. class. atriplez (altération du grec 1680, dit arthritis, déjà vers 1560 : Paré
airaphaxzys, déjà lui-même diversement al- (arthrites) ; arthritique, xvre (Paré ; antér.
téré). Formes variées en a. fr. : arace, arietique, xr1°). Empr. du lat: médical
arrache, arrepe, etc., et dans les patois. It. arthrilis, -licus (du grec arthritis, -tikos, de
atrepice. arthron « articulation »).
49 ASINE

ARTICHAUT, 1530- Empr. de lit. dia- xvi. Rapports probables avec l’a. pr:
lectal du Nord arlicioc(co) (d'où aussi arda, arta « teigne », aujourd'hui « mite »;
l'all. Artischocke, l’angl. artichoke), altéra- mais les rapprochements tentés avec le lat.
tion de l’it. carciofo, empr. lui-même de larmes, -ilis, de même sens, ou herpes, -elis
l'arabe al-karchoûf, probabl. par l’intermé- « dartre », qui désigne en outre un animal
diaire de l’esp. alcarchofa (forme à laquelle inconnu (et qui se serait croisé avec le
se rattachent les formes méridionales du gaulois derbita « dartre » ; pour le dévelop-
domaine gallo-roman). pement du sens, v. charançon), se heurtent
à de graves difficultés de forme.
ARTICLE, terme jurid., xirie. Empr.
du lat. jurid. articulus, propr. « articula- ARTISTE, xive (Ch. de Pisan). Empr.
tion » (sens qui a été également empr., au du lat. médiéval artista, dér. de ars, v. art,
xvi® s., Paré); d’où diverses acceptions au sens de «lettré, maistre ès arts », em-
nouvelles : article de loi, xXvi®, et récem- ployé aussi dans la langue des alchimistes.
ment article de journal, article en langage Sens moderne, 1656; cf. toutefois l’adv.
commercial. Article, dans article de la mort, artistement, dès le xvi® s.; v. artisan. —
xvi1e s., est empr. du lat. articulus, au sens Dér. : artistique, 1808.
de « division (du temps) »; d’où « mo- ARUM, 1545. Empr. du lat. arum (du
ment », etc. grec arôn).
ARTICLE, lerme de grammaire, vers AS. Lat. as « unité de monnaie, de me-
1350. Empr. du lat. grammatical articulus sure »; a dû être employé de bonne heure
(signifiant aussi « particule », etc.), exten- pour le jeu de dés, d’où postérieurement
sion du sens propre « articulation »). pour le jeu de cartes. As « homme de va-
ARTICULER, xiue; articulaire, 1538; leur », partic. dans les sports, d’après la
articulation, 1478. Empr. du lat. articulare, valeur de l’as dans les jeux de cartes, est
articularis, articulatio (de articulus, voir du xx°s.
les précédents). — Dér. désarticuler, ASCARIDE, 1372. Empr. du lat. médical
1778 (donné alors comme adaptation de l’it. ascarida (du grec askaris).
disarticolare) ; désarticulation, 1813 (en
1618, dearticulation) ; inarticulé, 1579. ASCENDANT, adj., « qui va en mon-
tant » dans les langues techn., 1503 (en
ARTIFICE, xur1° ; artificiel, xrve (Ores- 1372 pris substantiv.). Empr. du lat. ascen-
me) ; artificieux, xir1° (Roman de la Rose). dens, part. prés. de ascendere « monter ».
Empr. du lat. artificium «art, métier, habi-
leté, ruse », artificialis « conforme à l’art », ASCENDANT, subst. et adj. ; terme d’as-
artificiosus « fait avec art, habile ». Jus- trologie, xive. Empr. du lat. médiéval as-
qu’au xvue s., employés surtout au sens cendens, d’où le sens fig. d’ « influence do-
d’ «art, métier », « fait avec art », (artifi- minante », XVII®,
cieux est encore en ce sens chez Voltaire, ASCENDANT, subsit. et adj.; terme de
1754), sans l’idée péjor. qui apparaît du parenté, xvie. Empr. du lat. jurid. ascen-
reste de bonne heure. Feu d’artifice, qui dens, v. les préc. — Dér. : ascendance,
date du xvi® s. (à côté d’arlifice de feu), 1798 (d’abord « supériorité », Boiste, 1803,
semble être formé sur le modèle de lit. qui cite Jean-Jacques Rousseau; en ce
fuoco artifiziale, cf. feu artificiel au xviI°s. sens dér. d’ascendant, terme d’astrol.).
— Dér. : artificier (seulement pour le feu
d'artifice), 1690. ASCENSEUR, 1867. Dér., d’après le
ARTILLERIE, fin xiue, « ensemble
supin ascensum, du verbe ascendere « mon-
d'engins de guerre » encore au XVI* S.; ter ».
artilleur, 1334. L'’a. fr. atilier « parer », ASCENSION, 1620, « action de monter ».
attesté depuis 1170, très fréquent chez Empr. du lat. ascensio. — Dér. : ascension-
Crestien, représente un verbe *apiiculare nel, 1698 ; d’abord -nal, xvI° S.; ascen-
(dér. de apiare « adapter », comp. fendiller, sionniste, 1872.
du lat. aptus, v. apte) ; il a été modifié par
ASCENSION, terme théologique, x11°.
la suite en arlillier (sorti de l’usage au
xvie s.), sous l'influence de art. De ce verbe Empr.
du lat. ecel. ascensio.
sont dér. les subst. artillerie, -eur. ASCÈTE, 1580 (écrit alors aschele) ; as-
ARTIMON, 1246; au xvie s. souvent cétique, 1665. Empr. du grec eccl. askélés,
artemon. La forme artimon est empr. du en grec class. « qui exerce une profession »
. génois artimone, qui représente le lat. arle- (de askein « exercer »), -Hikos (ascelicus
mon, tandis que le fr. arlemon est un lati- existe aussi en lat. médiéval). — Dér. :
nisme. ascétisme, 1831 ; aujourd’hui aussi ascèse
(du grec askésis).
ARTISAN, 1546 (Rab.). Empr. de lit.
artigiano (dér. de arle, v. art) « qui exerce ASILE, xive (Bersuire). Ordinairement
un métier ». Signifie souvent, au xvi® et écrit asyle, du xvi® au xvirie s. Empr. du
au xvue s., « artiste, écrivain », probabl. lat. asylum (du grec asylon « lieu sacré,
parce que le mot it. a été empr. en parti- inviolable »).
culier en parlant d’ « artisans » des arts ASINE, 1620 (beste asine) ; emploi mo-
plastiques. La distinction d’artisan et ar- derne récent. Altération, par superposition
liste n’a été établie nettement qu’au
syllabique, d’asinine, 1512 (besie…. asi-
xvIr1e s. — Dér. : artisanat, fin xIxe. nine), fém. d’asinin, rare, empr. de l’adj.
ARTISON, xu1e (d’après le dér. arlison- lat. asininus, représenté en a. fr. par un
née); en outre artuison, XIV®; arluson, adj. de forme pop. asnin.
ASPECT 40

ASPECT, xve. Empr. du lat. aspectus, ASSA (FŒTIDA), xive (au xvi°s. asse).
nom d’action de aspicere « regarder ». Empr. du lat. médiéval asa.
Fréquent au xvie s. au sens de « regard »
qu’a aussi le mot lat. ASSAILLIR. Lat. pop. *assalire, réfec-
tion du lat. class. assilire, d’après le simple
ASPERGE, 1539. Antér. sparge, xtr1°, salire « sauter » ; développement de la con-
esperge et esparge, 1387 ; au xvi® s., en jugaison parallèle à saillir. It. assalire,
outre, asparge. Empr. du lat. asparagus esp. asalir, a. pr. assalhir. — Dér. : assail-
(du grec asparagos). lant, x1I1e.
ASPERGER, xr1° ; aspersion, id. Ordi- ASSAISONNER, v. saison.
nairement termes de la langue eccl., en
parlant de l’eau bénite ; sens plus étendus ASSASSIN, 1560 (Belleau) ; assassinat,
à partir du xvie s. Empr. du lat. aspergere, 1563; assassiner, 1546. Empr. de lit.
aspersio. assassino, -ato, -are ; assassino est empr. de
l’adj. arabe hachchâcht, dér. de hachich,
ASPÉRITÉ, xuie. Empr. du lat. aspe- propr. « buveur de hachisch », sectaire du
rilas, dér. de asper. Vieux de la Montagne, x1e, qui fanatisait
ses sectaires en leur faisant boire du
ASPERSOIR, 1345 (écrit alors asper- hachisch. Fréquent au moyen âge sous
ceur). Empr. du lat. eccl. aspersorium, des formes diverses comme nom propre et
dér. de aspergere, v. asperger. aussi déjà au sens fig. (assasis, xi1r°) ; pris
ASPHALTE, 1488 (une première fois au alors directement à l'arabe à l’époque des
xXn1°). Empr. du lat. de basse ép. asphaltus Croisades.
(du grec asphaltos). ASSAUT. Lat. pop. *assaltus, réfection
ASPHODÈLE, 1534 (Rab.). Empr. du du lat. class. assulius, d’après salius « saut ».
lat. asphodelus (du grec asphodelos). En It. assallo, esp. asalto.
outre, du xv® au xvirIe s., aphrodile, afro- ASSÉCHER. Lat. assiccäre, de siccäre.
dil(le), formes altérées, d’où l’all. Affodill It. asseccare. — Dér. : asséchement, 1549.
et l’angl. daffodil.
ASSEMBLER. Lat. pop. “*assimüläre
ASPHYXIE, 1741. Empr. du grec médi- « mettre ensemble », de simül « ensemble ».
cal asphyxia, propr. « arrêt du pouls »; À. pr. assemblar. It. assembrare, -biare
rare au XVIIIe S., qui disait plutôt suffoca- empr. du fr. — Dér. : assemblage, 1493;
tion. — Dér. : asphyxier, 1791. assemblée, x11°, aujourd’hui désigne une
ASPIC, xve (Villon). Altération de l’a. fr. fête locale depuis la Normandie jusqu’à
la Gascogne; assembleur, 1281 ; désassem-
aspe, fém., une première fois en 1213, bler, xr11° ; rassembler, 1213, d’où rassem-
lat. aspis, -idis (du grec aspis), probabl.
par croisement avec basilic, cf. dans le blement, 1426.
Psaume 90 : « Vous marcherez sur l'aspic ASSÉNER, vers 1135. Sens moderne
et sur le basilic. » Parfois aussi aspide, dès aussi dès 1130 ; au moyen âge et jusqu’au
le xir1° s. Au sens de « gelée », terme de Xvi*s., en outre « viser, atteindre, frapper »,
cuisine, 1771, emploi fig., par comparaison d’autre part « assigner, attribuer ». Dér. de
des couleurs variées de cette gelée (d’où, l’a. fr. sen qui signifie « sens, intelligence »,
à cette époque, sauce, ragoût à l'aspic mais aussi « direction dans laquelle
« sauce, ragoût de couleurs variées ») avec on
marche ». Le mot existe aussi en a. pr. sen
celles du serpent de ce nom. Dans le Centre «sens, raison », it. senno «sens, intelligence »,
et l'Ouest, aspic est fréquent au sens de frioul. sèn « envie, besoin », engad. sen
« vipère ». It. arch. aspe. «intelligence », cat. seny (l'esp. seny est
ASPIRER, xr1°, « inspirer », en parlant empr. de l’anc. prov.). Cette extension
de Dieu; aspiration, xn1°, « inspiration du mot montre qu’il n’a pas été incorporé
divine ». Empr. du lat. aspirare « souffler, au gallo-roman par les Francs au sens de
inspirer », aspiratio, « souffle, inspiration » «intelligence », mais que déjà le latin du
(ce dernier sens seulement dans le lat. Bas-Empire l’a emprunté de l’anc. germ.
eccl.), sens conservés en fr. jusqu'au xvres. *sinno-. Aussi est-il déjà attesté dans une
Le sens grammatical est également lat. inscription au Piémont (sinnum). D'autre
Les autres sens sont des développements part le sens « direction dans laquelle on
spontanés du fr. : « respirer, respiration », marche » n’existe qu’en franc. et en franco-
XIII*, encore au XVI S., « aspirer l’eau, provençal. Dans ce sens-ci il a donc été
l'air, etc. », xive s., « aspirer à », id. (sou- introduit par les Francs, peut-être aussi :
vent trans., jusqu'au xvi® s.). — Dér. : par les Burgondes.
aspirant, 1496 ; aspirateur, 1800. ASSENTIMENT, milieu xvirre; déjà
ASPIRINE. Fin xixe. Empr. de l’all. usuel au x1ve et au xves. Réfection, d’après
Aspirin, lancé en 1899. L’acide acétylsali- sentiment, de l’anc. assentement, vers 1180,
cylique se trouve dans les fleurs de la spi- encore usité au xviri® s., dér. du verbe
raea ulmaria. Pour distinguer de cet acide assentir « donner son assentiment » rare
naturel celui qui est préparé chimique- depuis la fin du xvi® s., lat. asseniire, de
ment, on a formé le mot Aspirin au moyen même sens, cf. de même it. assentire, esp.
du préf. grec a, du radical de spiraea et asenlir.
du suffixe sav. -in(e) des mots analogues ASSEOIR. Lat. pop. *assédère, réfection,
(tels que Anilin), c’est-à-dire « qui est fait d’après sédère, du lat. class. assidère « être
sans le secours de la spiraea ulmaria ». assis auprès », d’où « soigner » et d'autre
41 ASTÉRISQUE

part « assiéger », sens-fréquent au moyen ASSISTER, 1372. Empr. du lat. assis-


âge de (sèdere « être assis »); cf. a. pr. lere « se tenir auprès ». — Dér. : assistance
assezer transitif, « placer, assiéger ». Le 1412 ; assistant, 1372.
réfl. s’asseoir a éliminé se seoir, encore
usité au début du xvire s., cf. it. sedersi. ASSOCIER, 1263. Empr. du lat. de
Asseoir s'emploie sous des formes variées basse ép. associare (de socius « compa-
dans la partie septentrionale du domaine gnon »). — Dér. : association, 1408 ; asso-
gallo-roman et la région languedocienne; cié, vers 1180, d’où co-, 1596.
au sud de la ligne allant de l'estuaire ASSOLER, v. sole.
de la Gironde au nord de la Lorraine, on a
des représentants du lat. pop. “*assëèdi- ASSOMMER. Ne se rattache pas à l’a. fr.
täre, dér. de *assèdère, par un part. passé assommer « additionner », dér. du lat. sum-
*assèdilus ; cf. de même a. fr. asseier « pla- ma « somme », mais continue un autre
cer », a. pr. assetar, it. asseltare « arranger », verbe a. fr. assommer « endormir », dér. de
-arsi « s'asseoir ». — Dér. : assise, x11° ; au somme « sommeil », comme le montre le
sens de « séance de tribunal » dès le moyen neuchâtelois assond « étourdir par un coup
âge, cf. siéger pour le développement du sur la tête ; tuer d’un coup » (avec -n- de
sens ; rasseoir, XII®; pain rassis, XVI°; -mn-), donc du lat. somnum. Comp. endor-
ainsi nommé parce que le gonflement pro- mir « tuer » dans le langage pop. de Paris.
duit par la cuisson a diminué. — Dér. : assommeur, vers 1460 ; assom-
moir, 1700.
ASSERTION, 1355. Empr. du lat. asser-
tio, à basse ép. au sens du fr. (dér. de asse- ASSOMPTION, xr1e. Empr. du lat. eccl.
rere « affirmer, prétendre » à basse ép., assumptio, dér. de assumere « s’adjoindre »,
« revendiquer » en lat. class.).
ASSONANCE, 1690. Empr. de l'esp.
ASSERVIR, v. seri.
asonancia « assonance dans les romances »,
ASSESSEUR, xr11°. Empr. du lat. asses- dér. sav. du lat. assonare « faire écho ». —
sor, dér. de assidere, V. asseoir. Dér. : assonant, 1721 ; assoner, fin xix®°.
ASSETTE, 1690. Empr. d’un parler sep-
ASSORTIR, v. sorte.
tentrional, variante d’aissetle, 1389, dér. de
l’a. fr. aisse, attesté une fois, au xIIIe5., ASSOUPIR, xve. Réfection d'assouvir,
lat. ascia «outil de charpentier et de maçon, au sens de « calmer », d’après le lat. sopire,
formé d’un marteau et d’une sorte de au même sens. Signifie d'abord « calmer,
pioche » ; cf. it. ascia. Un autre dér. ais- éteindre », xve et xvies. ; a pris plus tard,
seau, xvi*, est dans les dictionnaires. au xvires., le sens de « porter à un sommeil
ASSEZ. Lat. pop. *ad sätis « en suffi- léger », d’après le sens propre « endormir »
sance », en outre « beaucoup » d’après l’em- du lat. sôpire. — Dér. : assoupissement,
ploi de satis dès le lat. arch. et très fréquent 1531.
à basse ép., sens usuel jusqu’au xXvI® Ss. ; ASSOUVIR. Lat. pop. *assôpire, propr.
cf. de même it. assai « beaucoup », a. pr. «endormir », d'où « calmer » (sens pris par
assalz « assez » et « beaucoup ». Sätis n’a assoupir), d’où « satisfaire complètement ».
survécu que dans l’a. fr. sez, subst., « ce L'’a. fr. a, jusqu’au xvi*s., un verbe assou-
qui est suffisant, satisfaction, etc. ». vir « achever », issu du croisement d’assou-
ASSIDU, xr11° (plus souvent -duel au vir « calmer, satisfaire » avec un verbe asse-
moyen âge); assiduité, id. Empr. du lat. vir « achever », lat. pop. “*assèquire, lat.
assiduus, assiduitas (de assidere, v. asseoir). class. assequi « poursuivre, atteindre ». —
ASSIETTE. Lat. pop. *assèdita, fém. pris Dér. assouvissement, xvi® (Paré), au
substantiv., d’un part. passé “*assèditus, XIVE s. « achèvement »; inassouvi, 1794.
qui a remplacé assisus, du verbe *assèdere, ASSUMER, xve. Empr. du lat. assumere,
v. asseoir, propr. « manière d’être assis, propr. « prendre pour soi », d’où « prendre
posé ». Seulement fr. assielle, au sens de sur soi, s’attribuer » (de sumere « prendre »).
«pièce de vaisselle », est attesté depuis 1507
et dérive du sens anc. « action de placer les ASSURER. Lat. pop. *assécüräre « ren-
convives à table », xiv°, d’où « services dre sûr », de sécürus « sûr ». A passé une
d'un repas », 1378. — Dér. : assiettée, 1690. partie de ses sens à rassurer depuis le
ASSIGNER, xr1° (souvent assiner, no- XVII® s. It. assicurare, esp. asegurar. —
tamment aux xvie et xvI1€s.) ; assignation, Dér. : assurance, xr1° ; les assurances (ou
1265. Empr. du lat. assignare, assignatio contrats garantissant contre un risque)
(de signum « signe, marque »). — Dér. : datent du xvire s. ; alors il s’agit surtout
assignable, xvr1° (Bossuet) ; assignat, 1465, de risques sur mer ; assureur, 1550 ; rassu-
au sens de « constitution de rente », d’où le rer, xi1® (Chrétien); réassurer, 1661,
sens donné à ce mot par la Constituante, -rance, id.
1789 ; réassigner, 1537; réassignation,
1669 (une première fois en 1481). ASTER, 1549. Empr. du lat. asier (du
grec.astér, de même sens, propr. « étoile »;
ASSIMILER, 1495 ; assimilation, id. (as- ainsi nommé à cause de la forme de la
simulation en 1374). Empr. du lat. assimi- fleur). — Dér. : astérie, 1742 « pierre pré-
lare «rendre semblable » (de simul « ensem- cieuse »; en 1729, « étoile de mer ».
ble »; refait sur similis « semblable »),
assimilatio, en vue de sens techn.; sens ASTÉRISQUE, 1570. Empr. du lat. aste-
général, fin xvir1e. — Dér. : assimilable, riscus (du grec asleriskos, de même sens.
1803 ; d’où inassimilable, 1845. propr. « petite étoile », de astér, v. le préc.),
ASTHÉNIE A2

ASTHÉNIE, 1790. Empr. du grec asthe- ASTROLABE, x11e (sous la forme asire-
nia (de sthenos « force »). — Dér. et Comp. : labe). Empr. du lat. médiéval astrolabus
asthénique, 1810 ; neurasthénie, fin xiIx°, (du grec astrolabos « instrument servant à
-ique, id. prendre (lambanein) la position des as-
ASTHME, 1611; réfection orthographi- tres »).
que d’asme, XV°, conservé par la pronon- ASTUCE, xim°. Empr. du lat. astulia
ciation moderne, comme dans asthmali- « ruse, habileté » (en ce dernier sens au
que ; asme a en outre le sens fig. d’ « an- XVIe s.). — Dér. : astucieux, 1495.
goisse, souci », XIIIe et XIV® s.; asthma-
tique, 1538 (antér. asmatique, Xiv°). Empr. ASYMPTOTE, 1638. Empr. du grec
du lat. asthma, asthmaticus (du grec asthma, asymptôtos « qui ne coïncide pas ».
asthmatikos, de même sens); cf. aussi les ATARAXIE, 1580 (Montaigne). Empr.
formes demi-pop. de l’it. asima, ansima. du grec ataraxia « absence de trouble » (de
ASTIC, v. astiquer. taraltein « troubler »).
ASTICOT, 1828. Étymologie inconnue. ATAVISME, 1838 ; atavique, 1808. D’a-
ASTICOTER, avant 1747. Altération de bord termes techn. de la botanique et de
dasticoter « parler allemand », 1642, d’où la physiologie. Dér. sav. du lat. atavus
« parler un langage inconnu, parler vite, « aïeul », propr. « quadrisaïeul ».
contredire, chagriner », sens signalés en ATAXIE, 1741. Empr. du grec alaxia
1718 pour une autre forme fastigoler. « désordre ». — Dér. : ataxique, 1798.
Tasticoler, répandu avec des sens analogues
dans les patois, dérive le daslicot, empr. de ATELIER, 1332 (asteliers). D'abord
l’all. dass dich Got, « que Dieu te », pre- « tas de bois », puis « chantier où travail-
miers mots de jurons all. introduits par les lent des charpentiers, des maçons », puis
lansquenets, cf. « les lansquenets..… en « chantier (en général) », fin xive. Dér. de
criant d’asticot schelme, Moncontour » l’a. fr. astelle « éclat de bois », lat. de basse
(D'Aubigné, Histoire Universelle, 1616), ép. asiella, ve, lat. class. astula, altération
qu’il faut comprendre : « que Dieu te pu- de assula, de même sens (dim. de assis
nisse, infâme ! [souvenez-vous de] Mon- « planche », v. ais), peut-être par croise-
contour | ». ment avec hastula « petite tige » (dim. de
hasta « tige, bâton ») ; v. attelle.
ASTIQUER, 1833 (Boiste, 1834, ajoute :
« populaire parisien »). Dér. d’astic, 1721, ATERMOYER, xri°. Comp. de l’a. fr.
terme techn. des cordonniers, « morceau lermoyer, X111°, « tarder, vendre à terme »
d’os de cheval ou de mulet servant à polir (de terme). — Dér. : atermoiement, 1605.
le cuir »; aslic est dér. d’un autre verbe
*astiquer, qui est encore attesté sous les ATHÉE, 1532. Empr. du grec atheos
formes liégeoise astilchi et picarde ailiquer. (de fheos « dieu »). — Dér. : athéisme, 1555.
Ce verbe résulte de la transformation par ATHLÈTE, 1495; athlétique, 1534 (Rab.).
substitution de préfixe de l’a. fr. estichier
Empr. du lat. athleta, -ticus (du grec athlétés
(a. pic. estikier) « enfoncer, frapper avec -likos, de athlon « lutte »). — Dér. : athlé-
force », lequel vient d’un anc. francique tisme, fin xIxe.
*stik(k)jan, de la même famille de mots
que l’all. sticken, le néerl. stikken. ATLAS, 1663. Nom donné par le géo-
graphe Mercator, en 1595, à un recueil de
ASTRACAN, 1775 (écrit alors -kan).
Tiré d’Astrakhan, nom d’une ville de Rus-
cartes, dont le frontispice était orné de la
figure du héros mythologique Atlas portant
sie, sur la Caspienne, d’où l’astracan pro- le ciel sur ses épaules, comme le représen-
venait à l’origine. taient les anciens.
ASTRAGALE, xvi° (Paré), au sens mé-
dical. Empr. en ce sens du grec asiragalos ; ATMOSPHÈRE, 1665. Formé avec les
comme terme d'architecture, 1600, empr. mots grecs almos « vapeur » et sphaira
du lat. astragalus, qui vient également du « Sphère ». — Dér. : atmosphérique, 1781.
grec. ATOLL, 1843. Empr. de l'angl. atoll
ASTRE, 1372; astral, 1533. Empr. du (1832 ; répandu par Darwin en 1842), empr.
lat. astrum (du grec asiron), astralis. — lui-même de atolu, de la langue des îles
Dér. astronaute, 1960, formé avec le lat. Maldives, sud-ouest de Ceylan, où ce mot
naula «navigateur » (le subst. astronaulique désigne précisément ces sortes d'îles. Déjà,
est en usage depuis 1949). 1611-1845, sous la forme aïtollon, empr.
ASTREINDRE. D'abord asiraindre, xtr°, alors du port. atollon, de même origine.
d’après les verbes en -aindre. Empr. du lat. ATOME, xive. Empr. du lat. atomus (du
asiringere « serrer », d'où « obliger ». La grec alomos « corpuscule indivisible », de
prononciation de l’s est due à l'influence temnein « Couper »). — Dér. : atomique,
du lat. écrit. 1585, D. ; atomisme et atomiste, xvrrre (Di-
ASTRINGENT, 1537. Empr. du lat. derot).
astringens, part. prés. de asiringere, qui
signifie aussi « constiper ». ATONE, 1813, au sens médical (Gattel :
« mot nouveau que le bon usage ne paraît
ASTRO-. Premier élément de mots sav. pas avoir adopté »); atonie, 1752 (une
comp., tels qu’astrologie, vers 1370 (Ores- première fois, au xIv® s., chez Oresme).
me) ; astronomie, vers 1155, empr. du grec, Empr. du grec aïonos, atonia « relâché,
où aslro- vient de astron « astre ». relâchement » (de feinein «tendre »). Oresme
43 ATTERRER

l’a pris au lat. des traductions d'Aristote, allacher (V’anc. it. possède encore un subst.
v. anarchie. L’adj. atonique a été formé slacca « anneau pour fixer le drapeau à la
dès 1585 (D.) sur le grec. façade d’une maison »), dér. du gothique
*stakka « poteau » ; v. attacher. — Dér. :
ATOUR, xri°. Fréquent au sing. jus- attaquable, xvie s., d'où inattaquable,
qu'au xvi® s., signifiait dans l’anc. langue 1726 ; attaque, 1596.
« manière, préparatifs, etc. ». Subst. verbal
de l’anc. atourner « tourner, disposer, pa- ATTEINDRE. D'abord alaindre (aitt….),
rer », encore usuel au xvies. (chez La Fon- encore dominant, au xvie s. Lat. pop.
taine, par archaïsme), comp. de tourner. *atlangère, réfection, d’après {angère, du
ATRABILAIRE, 1546; parfois atrabi- lat. class. attingère « toucher à, atteindre ».
liaire, d’après bilieux. Dér. de l’anc. terme A. pr. alanher « appartenir, convenir »,
médical atrabile, Xvi® (Paré; on trouve lat. *altangère ; it. attingere, a. pr. alenher
aussi atre..), encore dans les dictionnaires, « atteindre », lat. aitingère. — Dér. : at-
fait sur le lat. bilis atra « bile noire, hu- teinte, x1r1° s. (J. de Meung).
meur âcre », imaginée par les médecins ATTELER,. Lat. pop. *allèläre, issu, par
anciens, à laquelle ils attribuaient la colère, substitution de préf., de protèläre, attesté
l'hypocondrie, etc. au sens de « conduire, éloigner », mais qui
ATRE, vers 1200 (sous la forme aïsire, a dù signifier à basse ép. « atteler », d’après
fréquente au moyen âge). Lat. pop. astra- prôtèlum « attelage de bœufs », propr.
cus, -icus, attesté dans des textes du haut « corde d’attelage ». — Dér. : attelage,
moyen âge, « pavé, carrelage », altération 1545 ; dételer, xr1°, fait sur le radical du
de ositracum (Isidore de Séville; du grec verbe, au lieu de désaiteler, qu’on trouve
osirakon « coquillage ; carreau de brique »). quelquefois au xv® et au xvI®s.
La forme aisitre est due à un croisement ATTELLE. D'abord astelle « éclat de
avec l’a. fr. aitre « porche, parvis d’égli- bois » (v. atelier), d’où « planchette ». Très
se, etc. » (inversement transcrit parfois répandu dans les parlers gallo-romans avec
aire ou asire), encore usité au xvI® s., des acceptions variées : « copeau, plan-.
empr. du lat. atrium « cour intérieure des chette, bûche, etc. » Esp. astilla « esquille,
maisons romaines », qui a pris dans le lat. écharde ».
eccl. le sens particulier de « portique
d'église ». It. lastrico « pavé ». Du même ATTENANT, xive. Part. prés. de l’anc.
mot lat. astricus vient l’anc. haut all. asirih, verbe aïlenir « tenir, etc. » et, intrans.,
d’où l’all. Esirich « pavé, carrelage ». «appartenir, dépendre », probabl. déjà lat.
pop. *attènire, class. aïtinere, «tenir, concer-
ATROCE, 1394 (écrit alors -oxe) ; atro- ner (intransitif), etc. ».
cité, xiv® (Bersuire). Empr. du lat. airox,
airocitas. ATTENDRE. Lat. ailendère « tendre à,
porter son attention vers », v. tendre; le
ATROPHIE, 1538. Empr. du lat. médi- sens moderne d’ « attendre », trans. et in-
cal atrophia (du grec atrophia « manque de trans., date des plus anciens textes. A
nourriture », de trephein « nourrir »). — conservé le sens de « porter son attention
Dér. : atrophier, xvi® (Paré). vers », surtout au réfl., jusqu’au xvi®s.;
ATROPINE, 1836. Dér. sav. du lat.-des
en outre s’allendre à quelqu'un « compter
botanistes atropa « belladone », fait sur sur », jusqu’au xv11®s. It. attendere « porter
son attention vers », esp. a. pr. atender, de
Atropos (mot grec), nom d’une des trois
Parques ; plante ainsi nommée à cause de même sens ; le sens de « demeurer jusqu’à
l’arrivée de quelqu'un, de quelque chose »
ses propriétés vénéneuses.
est propre au fr. V. attention. — Dér. :
ATTACHER, vers 1080 (Roland). Issu, attente, xi° (Alexis), représente le fém.,
par substitution de préf., de l’a. fr. esta- pris substantiv., d’un part. passé * allen-
chier « attacher, ficher, etc. »; dér. lui- dilus, disparu avant les premiers textes;
même de l’a. fr. estache « poteau ». Le sens d'où attentif, xive (le lat. médiéval dit
intermédiaire du verbe doit avoir été «fixer aussi allentivus), d’où inattentif, 1761 ;
à l’aide d’un pieu, attacher à un pieu ». Le attentisme, 1948, inattendu, 1613.
subst. estache vient d’un francique *s{akka
« pieu », peut-être introduit en roman com- ATTENTER, 1290; souvent écrit attemp-
me terme de l’architecture primitive des ter. Empr. du lat. allentare (souvent écrit
Francs. *Stakka, qui est de la famille de allemptare) « chercher à prendre, attaquer »
l’anc. haut all. stecko « bâton », a été pro- (de tentare, v. tenter). — Dér. : attentat,
babl. aussi gotique, d’où prov. esp. esiaca. 1326, sur le modèle des noms d'action en
La transformation de eslachier en attacher -alus, dér. des verbes en -are ; attentatoire,
provient de ce que le préf. a- convenait 1690.
beaucoup mieux à l’activité en question. ATTENTION, 1536. Empr. du lat. ailen-
— Dér. : attache, vers 1160 ; attachement, lio, — Dér. : attentionné, 1819 ; inatten-
x111e; rattacher, x11°; rattachement, 1876; tion, 1671.
-age, 1858.
ATTÉNUER, x11e. Empr. du lat. atte-
ATTAQUER (allaquer l'escarmouche nuare « affaiblir, amoindrir » (de {enuis
1549, Rabelais). Empr. de l’it. atlaccare, « mince »). Sens moderne, notamment
propr. « attacher, joindre », d’où altaccare dans la langue jurid., fin xvire. — Dér. :
(scaramuccia), vers 1530, « attaquer », atténuation, 1345.
qui semble issu d’un it. prélittéraire *eslac-
care par changement de préf., comme le fr. ATTERRER, ATTERRIR, v. terre.
ATTESTER 44

ATTESTER, xu11° ; attestation, id. Em- AUBAINE, 1668 (La Fontaine, Fables,
pr. du lat. atlestari (de testis « témoin »), VI, 11), au sens moderne. Issu d’aubaine,
attestatio. dans droit d’aubaine « succession, qui reve-
nait au roi, des biens d’un étranger mort
ATTIFER, vers 1250. Comp. de l’anc. dans ses États », 1237 (écrit alors aubene),
verbe tifer, de même sens, vers 1170, encore fém. de l’adj. aubain « étranger », encore
usité au xvie s. et aujourd’hui dans les pa- chez Voltaire, 1766, ordinairement consi-
tois du Nord-Est et en normand (d’où le déré comme issu du lat. pop. *alibänus,
fr. pop. récent tiffes « cheveux »); appar- dér. de alibi « ailleurs », attesté en bas-lat.
tient à la famille de l’a. nor. *lippa « at- dès le x°, sous la forme albani.
tifer » (cf. norvégien tip « bout d’une pièce
de vêtement », moyen bas-all. tip « bout AUBE « aurore ». Lat. pop. alba, fém.
pointu », néerl. all. fippen « toucher légère- pris substantiv. de l’adj. albus « blanc »
ment ») ; dans l’ancien alaman et dans la (a. pr. alba). It. esp. alba.
partie méridionale du francique p s’est AUBE « tunique blanche des prêtres ».
changé en pf plus tôt que { n’est devenu ts. Lat. eccl. alba; esp. alba.
À la racine germ. tipp- correspondait dans
ces dialectes, pendant quelque temps, AUBE « palette de roue hydraulique »,
*tipf- (plus tard all. zipfel). On a donc eu anc. « planchettes, bandes reliant les deux
un verbe *ipfon, qui est devenu en fr. arçons d’une selle ». D'abord auve, altéré
lifer. L’angl. to tiff « habiller » (moyen de bonne heure en aube, probablement lat.
angl. tyffen) vient du français. äläpa, attesté seulement au sens de « souf-
flet », mais qui a dû signifier « main plate »,
ATTIRAIL, xve. Dér. d’un anc. verbe d’où, d’une part, « soufflet » et, de l’autre,
atir(i)er « disposer, etc. », lequel est dér. «palette », cf. à l'appui alapa en lat. médié-
de l’a. fr. tire « rangée, file », qui représente val « fermoir en métal pour livres », le fr.
l’anc. francique *tért « bon arrangement aleve, 1336, au sens de « planchette », l'esp.
d’une chose ». älabe « aïleron, etc. ».
ATTIRER, v. tirer. AUBÉPINE. Lat. pop. *albispina, déve-
loppement régulier de alb(a) spina (spina
ATTISER. Lat. pop. * aïlitiare, formé alba chez Pline), v. épine ; en outre, en
avec le radical de #tio «tison ». It. atlizzare, a. fr. et jusqu’au xvi® s., aubépin, masc.,
esp. atizar. — Dér. : attiseur, 1615. lat. pop. *alb-ispinus, cf. a. pr. albespin;
la coexistence des deux formes est due au
ATTITRER, v. titre. fait que spinus désigne proprement l’ar-
ATTITUDE, 1637. D'abord terme des brisseau et spina l’épine. Aujourd’hui for-
arts plastiques ; d’où le sens moderne de- mes très variées ; aubépin, notamment dans
puis 1796. Empr. de l’it. attitudine (qui a l'Ouest (ce qui explique la préférence de la
aujourd’hui les mêmes sens que le fr.), Pléiade pour cette forme) ; en outre divers
empr. lui-même du lat. de basse ép. apii- concurrents, notamment épine blanche ou
tudo, -inis « aptitude ». blanche épine (en lorrain).
ATTRACTION, xir1e « contraction »; AUBÈRE, 1579. Empr. de l’esp. hobero
attractif, xi11°. Empr. du lat. de basse ép. (cf. aubere ou hobere, 1606, dans Nicot),
attractio, seulement « contraction » et terme aujourd’hui overo, où l’on a proposé de voir
grammatical (du verbe aitrahere « tirer à l’arabe oubârâ « outarde »; cette dénomi-
soi »), pour des sens techn. divers, et du nation serait due à une comparaison du
dér. atiractivus ; attraction a pris un sens pelage du cheval aubère avec le plumage
plus étendu au xviri1® s. Au sens de « spec- de l’outarde ; mais ni l’arabe ne signifie
tacle », attraction est empr. de l’angl. attrac- « aubère », ni l'espagnol « outarde ».
tion, 1835 (Balzac). AUBERGE, v. héberger.
ATTRAIT, xr1° (Chrétien). Part. passé, AUBERGINE, 1750. Empr. du cat. alber-
pris substantiv., de l’anc. verbe atiraire ginia, altération de l'arabe al-bädindjän
« attirer », disparu depuis la fin du xvies., (du persan bédindjän), cf. aussi l’esp. (al)-
sauf par archaïsme (mais le part. pérs. berenjena. Du lat. scientifique melongena,
pris adjectiv. attrayant, xrrre, est resté relevé en 1678 (cf. aussi le lat. médiéval
usuel), lat. pop. “*attragere, lat. class. melangolus), qui passe pour être une autre
aiträhère, d’où également it. aïtrarre, esp. forme altérée du même mot arabe, vient
airaer ; V. traire. le fr. mélongène, 1762.
ATTRAPER, v. trappe. AUBIER, xive (sous la forme auber).
Altération, par substitution de suff., de
ATTRIBUER, 1313 ; attribut, xive ; at-
l’a. fr. aubour, encore dans les patois de
tribution, id. (Oresme). Empr. du lat. atitri- l'Ouest et dans la langue de la marine;
buere, attributum (qui a pris des sens nou- lat. alburnum, d'où aussi a. pr. alborn.
veaux en latin scolastique), attributio. —
Dér. : attributif, 1516 ; attribuable, 1512. AUBIN, v. blanc.
AUBADE, xve, Empr. du prov. aubada, AUBOUR, v. aubier.
attesté seulement à date récente, dér. de AUCUN. Lat. pop. “*alicünus « quel-
auba « aube »; auba, alba, à côté de son qu’un », comp. du radical de aliquis, de
sens propre, désignait dans la poésie des même sens, et de änus. A signifié d’abord,
troubadours une sorte de poème qui chan- conformément à l’étymologie, « quelque,
tait l’aube ; v. aube « aurore », et sérénade. quelqu'un », jusqu'au xvri® s. A pris peu
45 AUSSITÔT

à peu le sens négatif dans les phrases néga- AUNE, arbre. Le latin alnus est attesté
tives ; d’aucuns « quelques-uns » est ar- dans de nombreux parlers romans par des
chaïque ; aucunement, xXI1°, a suivi le sens formes du simple ou de dérivés, cf. par
d'aucun ; il signifie encore « en quelque exemple roumain anin, italien ontano.
façon » au xviie s. It. alcuno, esp. alguno, Mais, la plus grande partie de la France,
qui signifient surtout « quelqu'un », tout au sud de la ligne allant des Vosges méri-
en tendant vers le sens négatif dans les dionales à l'embouchure de la Loire, ne
phrâses négatives. connaissant que verne OU vergne, qui re-
monte au gaulois verna, aune ne peut guère
AUDACE, 1387. Empr. du lat. audacia, venir du lat. alnus (on remarque de plus
dér. de audere « oser ». — Dér. : audacieux, qu'aucun nom de lieu du type aune n'existe
1495 ; peut-être dér. directement du latin. dans l’aire du nom commun verne, tandis
AUDIENCE, xri°; jusqu'au xvII® 8. que le fait contraire s’observe, ce qui
signifie aussi « action d'entendre, d'écouter prouve qu’aune est plus récent que verne).
quelqu'un » ; a éliminé l’a. fr. oiance, dér. Aune représente le francique *alira, cî.
d’oir ; auditeur, 1230, a éliminé l’a. fr. anc. haut all. alira, d’où arila, all. Erle;
oieor, dérivé d'’oir ; audition, 1318 ; audi- *alira doit avoir été transformé en *alinus
toire, xr11°. Empr. du lat. audientia «action d’après fraxinus « frêne ». — Dér. : aunaie,
d'écouter » (« auditoire » à basse ép.), -itor, XIVe (-oie), en outre, en a. fr., aunoi.
-itio, -itorium (de audire, v. ouïr). — Dér.
d'audition : auditif, xive (Oresme), d’après AUNE, anc. mesure, vers 1080 (Roland).
auditus, part. passé de audire. Empr. du francique *alina, anc. haut all.
elina, d’où all. Elle, de même sens, propr.
AUGE. Lat. alveus, entre autres sens « avant-bras » (le lat. uina « avant-bras »
« auge » (dér. de alvus « bas-ventre »), et « aune » est le même mot) ; aussi a. pr.
devenu probabl. en lat. pop. “*alvea (le alna. — Dér. : auner, xr1° (Chrétien).
masc. est exceptionnel en fr.) ; les formes
des autres langues romanes qui possèdent AUNÉE, plante, 1545 (elnée au x1r°).
ce mot, roumain albie (issu de *albea), des Dér. de l’a. fr. eaune (cf. ialne, alne, etc.,
formes dialectales it. (issues de *albeus) xive), lat. pop. *élèna, altération de (h )ele-
postulent un b, qui a peut-être existé aussi nium (du grec elenion « aunée »), d’après le
dans la forme lat. d’où vient le fr. auge, lat. inüla, de même sens (d’où vient l’it.
sans qu’il soit possible de le reconnaître. (l)ella, de même sens).
Aujourd’hui seulement dans la partie sep- AUPARAVANT, v. avant.
tentrionale du gallo-roman. — Dér. :
auget, XII°. AURA, terme médical, 1793. Empr. du
lat. aura « souffle ».
AUGMENTER, xive (G. de Machaut).
Empr. du lat. de basse ép. augmeniare, AURÉOLE, x1ne (Rutebeuf : auriole).
dér. de augere, de même sens. — Dér. : Empr. du lat. eccl. aureola « couronne
augmentation, 1290. d’or » (on trouve parfois corona aureola),
AUGURER, xive (Bersuire, au sens fém. de l’adj. aureolus. Sens fig. (outre des
acceptions religieuses), xix°. — Dér. :
propre du lat. ; de même, au xvi® s.; de- auréolé, avant 1867 (Baudelaire).
puis le xvire s., seulement au sens fig.);
augural, 1548; augure (personne), xIv® AURICULAIRE, 1532 (Rab.) : doigt au-
(Bersuire) (une 1re fois en 1213 : augurreres) ; riculaire : 1541 (Calvin) : confession auri-
augure « présage », x11°, au sens figuré dès culaire. Empr. du lat. auricularius, dér. de
le moyen âge. Empr. du lat. augurare, auricula « oreille ».
augur, augurium, auguralis, dont les trois
premiers ont déjà le sens figuré. AUR(I)-. Premier élément de mots sav.
comp., tels qu'aurifère, 1532, tiré du lat.
AUGUSTE, x111°. Rare avant le xvires. aurum « Or ».
Empr. du lat. augusius.
AUROCHS, xvire (Buffon); aurox en
AUJOURD’HUI, v. jour. 1611. Empr. de l’all. Auerochs ; une pre-
AULIQUE, 1546 (Rab). Empr. du lat. mière fois, sous la forme ouroflz (plur.),
aulicus, dér. de aula « cour ». 1414, du moyen haut all. ürochse.
AULOFFÉE, v. lof. AURONE, 1486, antér. formes variées,
AUMAILLE, v. animal. notamment averoine, Xiv® ; abrogne, 1213.
Empr. d’un parler de la région limousine,
AUMÔNE. Lat. pop. *alemüsina, altéra- lat. abrôtônum (du grec abrotonon).
tion du lat. eccl. eleemüsyna (du grec eccl.
eleémosyné, en grec class. « compassion », AURORE, xuie. Empr. du lat. aurora,
de l’adj. eleémôn «compatissant »). — Dér. : v. aube. Aurore boréale, xvir°.
aumônier, xi°, d'où aumônerie, xII° ; au- AUSCULTER, 1819 ; auscultation, 1812.
mônière, id. Empr. par Laënnec, pour leur sens médical,
AUMUSSE, xrne (-uce, orthographe du du lat. auscultare « écouter », auscultatio.
moyen âge). Au moyen âge, signifie tou-
AUSPICE, xive (Bersuire). Empr. du
jours « coiffure ». Empr. du lat. médiéval
almutia, d’origine incertaine, cf. a pr. lat. auspicium, qui se prenait également
almussa. Les rapprochements proposés au sens fig.
avec l’arabe ne satisfont pas. L’all. Mütze AUSSI, v. si.
« casquette », moyen haut all. almuz, vient
du lat. médiéval ou du fr. AUSSITÔT, v. tôt.
AUSTÈRE 46

AUSTÈRE, xr11° ; austérité, id. Empr. minée que l'été ou l'hiver. Dans les parlers
du lat. ausierus, propr. « âpre au goût » gallo-romans, divers concurrents : après-
(sens empr. au xvi® s.), d’où « sévère, août, arrière-saison, dernier lemps, re-
grave, etc. », austeritas. gain, etc.
AUSTRAL, 1372. Empr. du lat. ausira- AUTOMOBILE, v. mobile.
lis, dér. de auster, « vent du Midi », d’où
AUTOPSIE, 1573, rare avant le xix° 5.
aussi le fr. auster, vers 1380, auj. poét., en
outre, au moyen âge, ausire (rarement Empr. du grec aulopsia « action de voir
par soi-même », en vue de son sens médi-
ostre, oestre), encore usité au XvI°s.
cal ; empr. aussi au sens d’ « action d’exa-
AUTAN, xvi® (Paré). Empr. du prov. miner », au Xvi° s., en outre par la langue
autan, lat. alläanus « vent du sud-ouest », de la mystique, 1751.
propr. « vent de la haute mer (mare al-
tum) ». AUTORISER, x11° ; autorité, 1121 (Ph.
de Taün). Souvent écrits auct.…., jusqu’au
AUTARCHIE, 1896. Empr. du grec xvie, et auth…, xve et surtout xvie. Empr.
autarchia, au sens de «gouvernement assuré du lat. médiéval auctlorizare et du lat.
par les citoyens mêmes » (empr. dans ce class. auctorilas, écrits aussi aut.…., auth….,
sens sous la forme auiarcie par Oresme, dér. de auctor, v. auteur. — Dér. : autori-
1372). Son sens économique vient des sation (dér. du verbe), 1419 ; autoritaire
écrits de l’économiste suédois Kjellén (dér. du subst.), 1865, d’où autoritarisme,
(1911); il correspond plutôt au grec 1872.
autàrkeia, qui avait déjà été empr. sous la
forme autarcie (1845). AUTOSTRADE, 1925 ; empr. de l’it. au-
lostrada (de auto « automobile » et strada
AUTEL. D'abord alier, rapidement éli- «route »). La première autostrade fut cons-
miné par allel, autel, altération mal éclair- truite de 1922 à 1924, de Milan au Lac
cie. Lat. eccl. aliare, lat. class. aliaria, plur. Majeur. Est remplacé de plus en plus, en
franç., par la forme francisée autoroute.
AUTEUR, xre (souvent écrit auctor ;
au xvi® s. auitheur). Empr. du lat. auctor, AUTOUR, adv., v. tour.
écrit aussi autor, author (propr. « celui qui
AUTOUR, oiseau. Aujourd’hui surtout
accroît », dér. de augere « augmenter »),
littéraire. En a. fr. osiour, osioir. Lat. de
d’où « créateur, auteur d’un livre, d’une
action, etc. » (avait en outre des emplois
basse ép. aucepior (Loi Ripuaire), altéra-
juridiques). V. acteur. tion de accepitor, fréquemment attesté (qui
est, lui-même, une altération de accipiter
AUTHENTIQUE, xrr° (écrit alors auten- « épervier ») par croisement avec aucepior
like). Empr. du lat. authenticus (du grec « oiseleur » (Gloses ; en classique auceps,
authentikos, de authentés « qui agit de sa de même sens); aucepior « oiseleur » et
propre autorité »). — Dér. : authenticité, accepior « autour » sont refaits d’après des
1688 ; une première fois autentiquité, 1557 ; dér. de capere « prendre », surtout d’après
authentiquer, 1442. accipere, supin acceptum ; et acceptor a été
ensuite attiré par aucepior, propr. « preneur
AUTO-. Premier élément de mots sav. d'oiseaux », et toujours compris ainsi (avis
comp., tels qu'autoclave, 1820 (-clave est était encore usuel ; cf. autruche, outarde),
empr. du lat. clavis « clef »), tiré du grec sens qui convenait bien pour un oiseau de
auios, adj. pronominal signifiant à la fois proie. Aulour n’est pas une forme régulière,
« le même, lui-même, de lui-même », ou on attendrait une terminaison -eur ; autour
de mots empr., tels qu'’autographe, xvi®; a été maintenu soit par l'influence de vau-
autonomie, 1596. tour, soit simplement d’après la langue
AUTOBUS, v. omnibus. écrite, le mot paraissant peu usuel depuis
le xve s. It. astore (d’après acceptor), a. pr.
AUTOCHTONE, 1560. Empr. du grec austor.
autokhthôn, comp. de auto- et de khthôn
« terre ». AUTRE. Lat. aller, en lat. class. « au-
tre », en parlant de deux; le lat. du Bas-
AUTODAFÉ, 1714 (Lesage). Empr. du Empire a renoncé à la distinction que fai-
port. aulo da fe « acte de foi ». sait le lat. class. entre alius « un autre »
AUTOMATE, 1532 (Rab.). Empr. du et alter « l’autre, en parlant de deux », en
grec aulomaltos « qui se meut de soi-même ». éliminant le premier. Il n’en est resté que
— Dér. : automatique, fin xvir1° ; automa- quelques traces, v. aussi. It. aliro, esp.
tisme, avant 1757 (Réaumur). otro. — Dér. : autrui, vers 1080 (Roland),
formé sur lui, etc., cf. aussi it. altrui, a. pr.
AUTOMÉDON, 1776. Tiré du lat. Aulo- auirui ; altruisme, créé par A. Comte ou
médon (mot pris au grec), nom du conduc- par Andrieux, 1830, a été dér. d’après le
teur du char d’Achille ; déjà employé par lat. aller.
plaisanterie en latin. AUTREFOIS, v. fois.
AUTOMNE, x1r1° (au moyen âge on a AUTRUCHE, xvie. Antér. osirusce x11°,
aussi auitomn, -ton, etc.) ; automnal, xrre. encore ostruce, 1606, dont auiruche est une
Empr. du lat. autumnus, autumnalis : au- altération, par substitution de suff.; en
tumnus a été empr. de même dans presque outre d’autres formes. Lat. pop. avis strü-
tous les autres parlers romans ; seul le rou- thi6, comp. de avis « oiseau » et de siräthio
main oamnä, fém., est une forme pop.; « autruche », lat. de basse ép. (qui vient
l’automne n’est pas une saison aussi déter- du grec sirouthos) ; développement du reste
47 AVENIR

irrégulier, le mot, en raison de son sens, à supprimer ne rend plus identique à ne.
n'étant ni populaire ni usuel. It. siruzzo, plus, à l'exception des cas où un que intro-
esp. avesiruz, partout masc. duisant le deuxième membre de la compa-
AUVENT, x11°, une fois, au xIrIe 8. raison éclairait suffisamment le sens de
anvant. Identique à l’a. pr. amban « sorte plus ; désavantage, 1290; désavantager,
de parapet ou de galerie de fortification », 1507 ; désavantageux, xve (Commynes). —
languedocien embans «auvent de boutique», Comp. : auparavant, xiv® ; devant, d’abord
dans lesquels on a reconnu un gaulois davant, locution adverbiale formée de
*andebanno-, comp. du préf. augmentatif d(e) et de avant, devenu devant, par substi-
ande et de banno- « corne » (lequel est tution de préf.; a eu également le sens
encore conservé dans le languedocien bano temporel jusqu’au xvri® s. (aujourd’hui
« corne »), les cornes de taureau ayant été par archaïsme), cf. aussi la locution ci-
employées par les Gaulois comme totem devant, usuelle pendant la Révolution ; de
pour protéger la maison. La transformation même a. pr. davan(t), -z, prép. de lieu et
du mot doit être due à la substitution de de temps, et adv., it. davanle, -i, adv. aux
au- à ce qu’on prenait alors pour le préf. en-. deux sens. Dérivent de devant : devancer,
formé d’après avancer, x11°, d’où devancier,
AUXILIAIRE, 1512. Empr. du lat. auxi- xi11e (Beaumanoir) ; devanture, 1642. Do-
liaris, dér. de auxilium « secours ». rénavant, formé de d’or en avant, au x11°5. ;
cf. à côté dès or en avant, x11°; dès lors en
AVACHIR, v. vache.
avant, 1580 (Montaigne).
AVAL, terme de commerce, 1675. Empr.
de l’it. avallo, de même sens, qui vient de AVARE, 1527. Réfection, d’après le lat.
avärus « avide, avare », de l’a. fr. aver, qui
l'arabe hawäla « délégation, mandat ». —
en était le représentant régulier, usuel jus-
Dér. : avaliser, 1875.
qu’au xv®s. Avare signifie en outre « avi-
AVALANCHE, 1611 (-ange, 1835, la- de », au xvie s., d’après le sens primitif du
vange, Buffon). Empr. du mot de la Savoie lat.
avalantse, altération, par croisement
avec avaler « descendre », d’une forme AVARICE, vers 1155. Empr. du lat.
antérieure lavanise, usitée en Savoie, déjà avarilia, propr. « avidité ». — Dér. avari-
relevée par Cotgrave, 1611, cf. en outre cieux, 1283 (Beaumanoir).
l’a. pr. lavanca et l’it. valanga, pris à un AVARIE, av. 1200. Empr. de l’it. avaria
parler de l'Italie septentrionale ; lavan- (d’où probabl. aussi l’esp. averia), empr.
che, etc., représentent un type *lavanca, lui-même de l'arabe ‘awdr « dommage »
prélatin (le suff. -anca d’origine ligure a (cf. le plur. ‘awäriya, « biens avariés ») ;
servi à former de nombreux noms de lieu, cf. aussi l’all. Havarie, probabl. entré par
notamment dans les parlers alpins). Le le fr. — Dér. : avarier, 1752.
latin de basse ép. labina « éboulement, AVATAR, 1800 (au sens propre : «incar-
avalanche » (dér. de labi « glisser ») qui vit nations successives des divinités chez les
également dans les parlers alpins, doit pro- Hindous »; sens fig. à la fin du xix® 8.).
babl. son deuxième sens au précédent et Empr. du sanscrit avaiära, propr. « des-
a donné, par l'intermédiaire de la Suisse, cente (du ciel sur la terre) ».
l’all. Lawine.
AVAU, v. val.
AVALER, v. val.
AVEC. D'abord avuec, avoec, en outre
AVANCER. Lat. pop. *abanliäre, dér. avecque(s). Dès l’origine à la fois prép. et
de abante, v. avant. It. avanzare, esp. adv. Lat. pop. “*abhôüc, adv. signifiant
avanzar. — Dér. avance, vers 1400; propr. « de là », d’où « immédiatement
avancement, x11°. Ont signifié aussi « avan- après, en même temps, conjointement,
tage » jusqu’äu xvi®s. avec ». À supplanté l’a. fr. o(d), encore
employé par les poètes de la Pléiade (au-
AVANIE, 1605. En outre vanie, 1584.
jourd’hui cette prép. survit encore dans
Empr. de l’it. avania « présents que les
bachas turcs faisaient payer injustement
l'Ouest), lat. üpüd « chez » qui a pris le
sens d’ « avec », surtout en Gaule, cf. a. pr.
aux marchands chrétiens », d’où les sens
ab, am, amb(e), etc., et cat. ab, tandis que
fig., dér. de l’adj. turc hawän « traître », qui les autres langues romanes ont conservé le
est emprunté à son tour de l’arabe haw- classique cum : it. esp. con.
wän. L’a. fr. avenie du xXIII° 8, « génu-
flexion », est probablement un autre mot ; AVEINDRE, v. advenir.
on trouve en outre aveinie, 1287, forme
également obscure.
AVELINE, 1393. Altération, par substi-
tution de suff., de l’a. fr. avelaine, encore
AVANT. Lat. abanie (re s.), à la fois au xvire s., lat. [nux] abelläna, propr. « noi-
adv. et prép., en concurrence avec le lat. sette d’Abella (Campanie) », noisette culti-
class. ante « devant, avant ». Concurrencé vée, dont le nom s’est répandu sur toute la
dès les premiers textes par davant, x° Romania, cf. it. avellana, esp. avellana,
(Saint Léger), devant, xi° (Saint Alexis) a. pr. avelana. Peu attesté dans la France
au sens local. A pr. avan(t), avaniz, adv., septentrionale ; v. noisette et coudrier. Ave-
it. avanti. — Dér. avantage, xr1°, d’où laine, attesté aussi sous la forme -ane,
avantager, xi11°; avantageux, 1418 ; da- x1re, est empr. du prov. — Dér. : avelinier,
vantage, xive (Froissart), issu de d’avan- 1751 (antér. avellanier, xi11° 8.).
lage, fréquent encore au xvi® s., est intro- AVENANT, AVENIR, v. advenir.
duit dans la langue pour remplacer plus
à une époque où le parler pop. commençant AVENIR, subsi., v. venir.
AVENT 48

AVENT, x11e (sous la forme adveni; en AVIATEUR, 1863, créé par Nadar et La
outre, depuis le xix1° s., avens, plur., qui Landelle, vulgarisé vers 1900, d’abord nom
désigne les quatre semaines ou quatre di- de la machine, encore en 1908. Aviation,
manches de l’Avent, fréquent au moyen 1863 ; avion, créé par Ader en 1875. Dér.
âge, encore usité aujourd'hui dans plu- sav. du lat. avis « oiseau ». — Comp. :
sieurs patois ; on trouve l’initiale adu- jus- hydravion, vers 1912.
qu’au xvi® s. Empr. du lat. adventus « arri- AVIDE, 1470 ; avidité, 1491. Empr. du
vée », employé dans le lat. eccl. pour dési- lat. avidus, aviditas.
gner la venue de Jésus-Christ.
AVIRON, xr1e. Tiré de l’a. fr. avironner,
AVENTURE. Lat. pop. *adveniüra, pro- x11°, encore usité au xvi® s., propr. « tour-
pr. «ce qui doit arriver », plur. neutre pris ner », trans. et intrans., dér. de l’a. fr.
substantiv. de adventürus, part. futur du viron, à la fois subst. « cercle », et adv.
verbe advenire, v. advenir. L’all. Abenieuer « autour », dér. lui-même du verbe virer.
vient du fr. — Dér. : aventurer, x11° ; aven-
tureux, id. ; aventurier, xv°; aventurine, AVIS, vers 1170. Issu de l’anc. locution
1686 ; ainsi nommée, parce que la limaille, ce m'est a vis, d’où ce m'est avis, d’où
qui sert à faire cette pierre artificielle, est aujourd’hui m'est avis, issue elle-même
jetée à l'aventure sur du verre en fusion. d’une autre locution ce m'est vis, Cf. ço
m'est vis dans Saint Alexis ; vis n’existant
AVENUE, v. advenir. en a. fr. que dans cette locution (vis « vi-
sage » est un autre mot), on la considère
AVÉRER, 1125. Ne s'emploie guère comme représentant le lat. pop. [mihi] est
qu’au part. passé, depuis le xvur1e s. Dér. visum, correspondant au lat. class. [mihi]
de l’anc. adj. voir « vrai », disparu avant le videtur. — Dér. : aviser « donner un avis »,
xvie s., lat. vérus, cf. it. esp. archaïque xin1e (au sens d’ « apercevoir », c’est un
vero ; V. Voire et vrai. comp. de viser); d’où malavisé, xIV°;
se raviser, vers 1350 ; préavis, 1789.
AVERS, 1867. Empr. du lat. adversus AVISO, 1776. Empr. de l'esp. barca de
« qui est en face » pour ce sens spécial.
aviso, propr. « barque chargée de porter
N'a rien à faire avec l’a. fr. avers «ennemi»,
des avis », qui a été francisé en barque
représentant régulier du lat. adversus, de
d’advis au xvr° s.
même sens.
AVIVES, 1530. D’abord vives, 1393 (d’où
AVERSE, v. verse. l’angl. vives), empr. du lat. médiéval vivae
(en outre vivolae, it. vivole), empr. lui-même
AVERSION, début xvii®, au sens mo- de l’arabe adh-dhiba, d'où aussi l’esp. adi-
derne. Empr. du lat. aversio, qui n’a pris bas, de même sens (au plur., comme le lat.
le sens d’« aversion » qu’à basse ép. (dér. médiéval ; le point de départ de ce plur.
de avertere « détourner »). Empr. au xvies. n’est pas clair); avives est une réfection
et antér. pour d’autres sens. de vives, soit d’après aviver, soit d’après
l’esp. ou l'arabe.
AVERTIR. Lat. pop. *advertire, issu du
lat. class. adverière par changement de AVOCAT, xn°. Souvent adv…., d’après
conjugaison. It. avvertire, esp. advertir (re- le lat., jusqu’au xvie s. Empr. du lat. advo-
fait sur le latin). — Dér. : avertissement, catus, propr. « appelé auprès de », v. avoué.
xIIe ; avertisseur, 1281. — Dér. : avocasser, x1v® (E. Deschamps),
d’où avocasserie, 1405 ; péjoratif depuis
AVETTE, v. abeille. le xvire s., sous l'influence du suff.

AVEUGLE, xi° (Alexis). D'une locution AVOCAT « fruit de l’avocatier », 1771


*ab ücülis, propr. « privé d’yeux », qui a dû (écrit alors avocat et avoca, en parlant de
être créée dans le latin médical et pénétrer l’arbre et du fruit). Empr. de l’esp. avo-
dans la langue commune, avec un déve- cado, -gado, etc., empr. lui-même du ca-
loppement qui révèle l'influence de la raïbe avoka (cf. de même angl. avogaio,
langue savante ; cf. de même l’a. pr. avogol. 1697 ; all. Avocatobaum, 1771. L'’esp. dit
On note que la prép. ab est fréquente dans en outre aguacate, empr. de l’aztèque aua-
les locutions exprimant l'absence d’un ob- call. — Dér. : avocatier, 1771.
jet ; cf. campus purus ab arboribus « plaine AVOCETTE, 1760. Empr. de lit. avo-
sans arbres » (Ovide), et on rapproche le cetta, d’origine inconnue.
bas-grec ap’ ommatôn « sans yeux ». Le mot
n'existe pas en dehors du territoire gallo- AVOINE. En a. fr. aveine (avaine), en-
roman, sauf par emprunt. À éliminé les core très usuel au xvie s. Lat. avéna. La
deux adj. de l’a. fr. cieu, lat. caecus, et raison pour laquelle le français a adopté
orb., lat. orbus « privé de », qui a pris, vers la forme avoine des patois orientaux n’est
le 11e s., le sens d’ « aveugle » ; cieu et orb pas sûrement établie. Aujourd’hui aveine
ont été usités jusqu’au xvI® 5. ; cf. it. cieco est la forme de l'Ouest, avoine celle de
et orbo, esp. ciego. — Dér. : aveuglement, l'Est et du Nord-Est; les parlers méridio-
xiIrIe, déjà au sens fig.; sens physique naux, au sud de la ligne allant de l’embou-
encore au xvirI® s. (Buffon), v. cécité ; chure de la Gironde aux Hautes-Alpes,
aveugler, vers 1050; aveuglette (à l), emploient un dér. de cibäre « nourrir le
xviI1e ; antér. aveuglectes, adv. au xv®s., cf. bétail » (d’où l'esp. cebar, de même sens),
faire une chose aveugleites, 1690, souvent lat. pop. *cibäta, a. pr. et cat. civada (en
écrit a veuglelie(s), au xvI° s. esp. cebada « orge »). It. esp. avena.
49 AZYME

AVOIR. Lat. habëre. Le futur aurai, qui AVRIL. Lat. aprilis. Des dér. anc. tels
a remplacé au cours du xvie s. arai, forme que l’adj. avrillier, xn°, encore dans les
du moyen âge (à côté d’avrai, averai), est dictionnaires, ont une / mouillée due à une
mal éclairci (on trouve déjà orai au xt 8. forme du latin populaire *aprilius, faite
dans un texte picard, Li biaus descouneüs, sur Martius, Junius, Julius « mars, juin,
v. 1565) ; il est encore fortement concur- juillet », et qui se retrouve en engadin. It.
rencé par arai dans les parlers septentrio- aprile, esp. abril. Des formes avec / mouil-
naux. — Dér. : avoir, subst., xi® (Alexis). lée, d’où y, existent dans les parlers de
l'Ouest.
AVORTER. Lat. aboriäre, dér. de abo-
riri, de même sens, formé de ab, négatif, AXE, 1372. Empr. du lat. axis, propr.
et de oriri « naître », c’est-à-dire « mourir « essieu », d’où « axe du monde », etc. —
en naissant ». V. abortif. Dér. : avorte- Dér. : désaxé, fin xixe.
ment, x11° ; avorton, 1372. AXIOME, 1547. Empr. du lat. axioma
AVOUÉ. Sens moderne, depuis la Révo- (du grec axiôma, propr. « ce qui paraît con-
lution, 1790. Sous l’ancien régime, sens venable », de axios « qui vaut, qui mérite »).
juridiques particuliers. Lat. advocätus «avo- AXONGE, xive. Empr. du lat. axungia,
cat », qui a désigné dès le ve s. un défenseur propr. « graisse à essieu », d’où « graisse
de communautés religieuses ou d’abbayes, de porc », comp. de axis « essieu » et de
d’où, plus tard, de villes, etc., personnage ungere « oindre ». Formes pop. assez répan-
souvent de très haut rang (d’où aussi l’all. dues, cf. a. fr. soignée « chandelle », it.
Vogt « tuteur ; baïlli », etc.). It. avvocato sogna « saindoux ».
« avocat », esp. abogado.
AZALÉE, 1781, azalea, 1801 (Chateau-
AVOUER, xri°. Propr. « reconnaître briand). Empr. du lat. des botanistes
quelqu'un comme son seigneur », d’où azalea, fait avec le fém. de l’adj. grec
« reconnaître comme valable une ac- azaleos « desséché ».
tion », etc.; mais le sens moderne d’ «avouer
une faute » ne paraît pas être usuel avant AZEROLE, 1651 (en outre azarole, xvi®).
le xvr1e s. Ordinairement considéré comme Empr. de l’esp. acerola, empr. lui-même de
comp. de vouer, ce qui ne s’explique bien l’arabe az-zou‘roûr. — Dér. : azerolier,
qu’au réfléchi s’avouer « se reconnaître 1690.
comme appartenant à ». (Le sens « mettre AZIMUT, v. zénith.
à la discrétion du seigneur », parfois posé
comme le premier sens d’avouer, n’est pas AZOTE, 1787 (G. de Morveau : « Nous
autorisé par les textes). Le lat. advuücare, l'avons nommé azote, de l’a privatif du
propr. « appeler auprès, invoquer, implo- grec et de zoé « vie »). — Dér. : azotate,
rer », Convient mieux au sens d’avouer et 1836 ; azoteux, 1838 ; azotique, 1787 (G. de
est appuyé par celui d’avoué (tous deux M.).
propres au fr. septentrional) et par l'emploi AZUR, vers 1080 (Roland). Empr. du
de advocare en lat. médiéval. Le traitement lat. médiéval azzarum, altération de l’arabe
de la voyelle tonique à, qui aurait dû don- läzaward, lui-même empr. du persan léd-
ner ue en à. fr. (par conséquent on devrait jeward « lapis lazuli » et « couleur de cette
avoir avuee et non avoe, avoue), est dû à pierre » ; de même it. azzurro, esp. azul et,
une réfection très ancienne des formes probabl. par l'intermédiaire du fr. all.
accentuées, d’après les formes inaccentuées Azur et angl. azure. D'une autre forme du
avoer, avouer, etc., appuyées par le subst. lat. médiéval Zapis (mot lat. signifiant
avoué. — Dér. et Comp. : aveu, 1283 (Beau- « pierre ») lazuli vient le fr. lapis lazuli,
manoir, d’après les formes aveue, etc., x111e, d’où lazulite, 1795. — Dér. : azuré,
xII1e, qui ont disparu rapidement devant XIIIe.
les formes en -ou- : avouer, etc.) ; avouable,
1849 (une première fois en 1302), et in.…., AZYME, xuie. Empr. du lat. eccl. azy-
1815; désavouer, 1265; désaveu, 1283 mus (du grec eccl. azymos, de zymé « le-
(Beaumanoir). vain »).

DICT. ÉTYM.
B
BABA, sorte de gâteau, 1767 (D.). Empr. BABOUIN, xiv®, « singe »; d’où « ga-
du polonais baba; passe pour avoir été min », 1668 (La Fontaine, Fables, I, 19);
introduit par l'entourage polonais de Sta- signifie aussi « sot », xr112-xIve, sens fré-
nislas Leczynski. quent encore au xvie s. Mot de la famille
de babine, « lèvre », le babouin ayant des
BABA « ébahi » (fam.), 1808. Onomato- lèvres proéminentes. Le sens de « sot »,
pée du langage enfantin, fréquent dans des mots de cette famille,
cf. it. babbèo, etc., et de nombreuses formes
BABEURRE, v. beurre.
de patois, provient à la fois de ce que les
BABILLER, xire. Appartient à une fa- lèvres proéminentes donnent au visage une
mille de mots expressifs qui se retrouve dans expression niaise et de ce que les mots de
de nombreuses langues, cf. all. babbeln, cette même famille servent souvent à ca-
pappeln, angl. io babble, etc., v. bave. ractériser l’enfantillage, v. babiole. La for-
Les autres langues romanes ne semblent me babouin, v. aussi babouine sous babine,
pas avoir de mots contenant ce radical en est due à un croisement avec l’a. fr. baboue
ce sens, mais il est très répandu dans les « moue », xiv®, de cette même famille,
parlers gallo-romans, avec des suff. diffé- refait probabl. d’après moue. — Dér. :
rents. — Dér. : babil, xv° ; babillage, 1835, embabouïner, x111° (J. de Meung).
une première fois en 1583 ; babillard, 1496 ; BABY, v. bébé.
babillement, 1829, une première fois en
1583. BAC, xri°. Probabl. lat. pop. *baccus
qu’on peut restituer d’après le lat. de basse
BABINE, vers 1460. Appartient à la ép. bac(c)ar (Festus) ou ba(c)carium (Isi-
famille du préc.; très répandu dans les dore de Séville, vrie s.) « vase à vin ou à
patois sous cette forme ou la forme ba- eau », mot propre à la Gaule, de la famille
bouine, v. babouïin. de bassin ; aujourd'hui abondamment at-
testé dans les parlers gallo-romans à la fois
BABIOLE, xvie (en outre babole), Empr. comme masc. et fém., au sens d’ « auge »,
de l’it. babbola, de même sens, aujourd’hui d’où celui de « bateau », v. bachot. Le mot
peu usité, de la famille des préc. En raison doit être d’origine gauloise, mais le celtique
de la date et de la forme babole, l'empr. à n'offre rien de très convaincant. — Dér. :
l’it. est plus vraisemblable qu’une forma- baquet, 1299, dérivé de bac, au sens de
tion spontanée, mais l’origine de la forme « cuve ».
babiole n’est pas claire.
BACCALAURÉAT, 1690 (antér. -or-.
BABIROUSSA, 1764. Empr. du malais 1680). Empr. du lat. médiéval baccalau-
babirusa, comp. de babi « porc » et de rusa reatus, dér. de baccalaureus, altération plai-
« cerf », par l’intermédiaire du lat. des sante, d’après bacca lauri « baïe de laurier »,
naturalistes, qui doivent ce mot à des voya- du lat. médiéval baccalarius « bachelier ».
geurs (déjà en 1658 dans une relation latine
et en 1689 en anglais). BACCARA, 1855. Ce jeu de cartes passe
pour avoir été introduit d'Italie en France,
BÂBORD, 1484. Transcrit d'abord bas- à l’époque de Charles VIII, mais cette
bord (d’où l’accent circonflexe), par étymo- indication ne s'accorde pas avec la date
logie populaire, parce que, partic. sur les récente où le mot a été relevé, et l’origine
navires de guerre, l'équipage se tient à de ce mot est inconnue.
bâbord, le tribord étant réservé aux offi- BACCHANALES, 1488. Empr. du lat.
ciers. Empr. du néerl. bakboord, comp. de Bacchanalia « fêtes de Bacchus » (en grec
bak « dos » et de boord « bord », donc « bord Bakkhos) », d’où, au sing., 1762, « orgie
du dos », ainsi nommé parce que, lors de la bruyante ». On a employé aussi bacchanal,
formation du mot en néerl., le pilote, gou- adj., 1507 (encore chez Vigny), d’après
vernant avec une godille fixée au côté l’adj. lat. bacchanalis, et bacchanal, subst.,
droit du bateau, tournait le dos au côté XVI, d’après le lat. bacchanal (déjà empr.
gauche. A passé du fr. dans les langues au moyen âge, cf. baquenas, xr1e (Wace),
méridionales : it. babordo, etc. « tempête », encore dans les dictionnaires
au sens de « tapage ».
BABOUCHE, 1671 (Bernier) ( en 1546
papouch). Empr. de l'arabe béboûch, bà- BACCHANTE, vers 1590 (sensfig., 1762) ;
boûdj, empr. lui-même du persan pépoûch ; bachique, xve. Empr. du lat. bacchans
de même it. babbuccia, esp. babucha. (ordinairement au plur.), part. prés. de
51 BAFOUER

bacchari « célébrer les fêtes de Bacchus » BACLER, xvi® s. (une première fois
(« bacchante » se dit en grec bakkhé) et du en 1292; débacler est de 1416). Probabl.
lat. bacchicus (du grec bakkhikos). empr. du prov. baclar, 1535, de même sens,
propr. « bâcler une porte », lat. pop. *bac-
BACHA, v. pacha. culäre, dér. de *bacculum, autre forme de
BACHE, xvi° (R. Belleau) «filet » ; 1741 baculum « bâton », c’est-à-dire « barrer avec
« couverture de grosse toile, etc., servant un bâton »; la rareté de ce mot en a. fr.
à protéger les chargements ». Autres sens est due à son sens particulier et n’est pas
techn. aux xvrrie et xixe s. Tiré, par sup- une objection sérieuse contre l’étymologie
pression de la finale, de l’a. fr. baschoe, latine. Sens fig. dès le xvrre s. — Dér. et
-oue « Vaisseau de bois ou d’osier, sorte de Comp. : bâclage, 1751 ; débâcler, 1416 ; dé-
hotte » (encore en 1611) et, par modifica- bâcle, 1690 ; débâclage, 1415 ; débâclement,
tion de la terminaison, baschole, 1384, lat. 1694 ; débâcleur, 1416 ; embâcle, 1836, for-
bascauda, indiqué comme celtique, « vase mé sur débâcle (une première fois au
à laver » ; seulement gallo-roman et surtout XvI1e s., embacle « embarras », qui dérive
parlers septentrionaux. La diversité du d’un verbe embacler).
sens n'empêche pas d’y reconnaître le BACTÉRIE, 1849; mais répandu lors
même mot. Le sens de « filet en forme de des découvertes de Pasteur, entre 1853
poche » sort aisément de celui de « hotte ». et 1860. Empr. du lat. moderne bacterium,
Celui de « couverture » est en rapport avec créé en 1838 par Ehrenberg (d’où aussi
ceux de « sac » et de « paillasse », attestés bactérien, 1841), sur le grec bakieria « bà-
dans divers patois ; on signale au xvirIes. ton », v. bacille.
qu'entre la bâche et la marchandise on
place un lit de paille ou de foin pour pro- BACUL, v. cul.
técer celle-ci. — Dér. : bâcher, 1752, dé- BADAUD,1532(Rab.). Au xvies.signifie
bâcher, 1741. «sot » et s'emploie aussi comme adj. Empr.
du prov. badau, de même sens, dér. de
BACHELETTE, xve (Villon). Aujour- badar « regarder bouche bée », v. bayer. —
d’hui seulement littéraire. Altération, par Dér. : badauder, 1690 ; badauderie, 1548
croisement avec bachelier, de l’a. fr. bais- (N. du Fail).
selete, xir1° (Rose), dér. de baissele, xix1°,
dér. lui-même de baiasse, xrr1° (Rose; en BADERNE, 1773. Propr. terme de ma-
outre baesse, etc.) ; tous ces mots signifient rine, d’où le sens péjoratif, au xix° s., dû
« jeune fille » ou « servante », et sont encore au fait que la baderne est faite de vieux
très répandus dans les patois, cf. de même cordages. Également it., esp., port. baderna.
prov. anc. et moderne bagassa « prosti- Le breton badern, qu’on a considéré comme
tuée » (d’où le fr. bagasse, xvI° (Brantôme), le prototype du fr., en est au contraire
et aussi l’it. bagascia, l'esp. bagasa). emprunté. Baderne vient d’un parler méri-
dional où il est dérivé du verbe badar, v.
BACHELIER, fin xive. Issu, par subs- le préc.; la terminaison est celle de ca-
titution de suff., de l’a. fr. bacheler, 1080 verna ; la baderne garnit les mâts pour
(Roland), propr. « jeune gentilhomme aspi- empêcher un frottement, donc écarte, crée
rant à devenir chevalier », d’où « jeune une ouverture entre les mâts. Badrouille,
homme », encore au xvi1® s. (La Fontaine, enregistré par les dictionnaires, à la fin du
par archaïsme) ; appliqué dès le moyen xvirIe 8., « débris de vieux cordages gou-
âge au premier grade universitaire. Lat. dronnés », paraît être une variante pop. de
médiéval *baccaläris, forme usuelle bac- baderne, avec le suff. souvent péjoratif
calärius, d’origine inconnue (les rappro- -ouille.
chements avec le celtique se heurtent à de BADIGEON, 1676 (Félibien). Étymologie
graves difficultés) ; on trouve, dès le 1x°8., inconnue. — Dér. : badigeonner, 1701;
dans des textes du Nord de l'Espagne et badigeonnage, 1820 ; badigeonneur, 1820.
du Limousin baccalarius, possesseur d’une
baccalaria « domaine de plusieurs mansus, BADIN, xve. Signifie « sot » jusqu’au
propriétés rurales ». Seulement gallo-ro- xvire s., encore chez Molière Dépit amou-
man, cf. a. pr. bacalar « jeune homme », reux, 1656 ; a changé de sens par suite de
avec une nuance péjorative. Empr. par les l'emploi de badin pour désigner un person-
langues voisines : esp. bachiller, de même nage de farce ou de comédie, xvi®, qui fait
sens, angl. bachelor, de même sens, en le sot, par conséquent qui provoque un
outre « célibataire ». L’argot des écoles en rire facile. Empr. du prov. badin « sot,
a tiré bachot, 1856 (D.), d’où bachoter, niais », dér. de badar, v. badaud. — Dér. :
bachotage, fin x1x°. badinage, 1541 (Calvin), « sottise »; ainsi
tout le xvie s. ; badiner, 1549 « agir sotte-
BACHIQUE, v. bacchante. ment »; badinerie, 1546; badine, 1781
(en 1743, plur. « pincettes »).
BACHOT, 1539. Probabl. dér. de bache,
fin xvirre au sens de « bac » ; bache, forme BADROUILLE, v. baderne.
fém. de buc, est signalé alors, de même que BAFOUER, 1532 (Rabelais). Formé,
bachot, dans la région lyonnaise. — Dér. : avec une terminaison d’origine obscure,
bachoteur, 1751. peut-être simplement expressive, de l’ono-
matopée baf, exprimant le bruit fait avec
BACHOT, v. bachelier.
les lèvres, v. bâfrer, d’où l’idée de moque-
‘BACILLE, 1872 (Cohn). Terme techn., rie, cf. de même a. pr. bafar « se moquer »
empr. du lat. bacillum « bâtonnet »; v. et, avec la variante bef, l’a. fr. befe « mo-
bactérie. querie », l’it. beffare « se moquer », etc.
BAFOUILLER 52

BAFOUILLER, 1867. Dér. de fouiller BAGUETTE, xvie. Empr. de lit. bac-


(qui a formé de nombreux verbes populai- chelta, de même sens, dimin. de bacchio
res) avec l’onomatopée baf, v. le préc., au « bâton », lat. bäcülum; apparaît à cette
sens de « parler la bouche pleine ». époque dans les locutions militaires : «com-
mander, mener à la baguette » (les officiers
BÂFRER, 1740. Formé avec l’onoma- étaient munis d’une baguette dans l’exer-
topée baf (v. bafouer et la variante bauf- cice de leurs fonctions).
frer, 153%, Rab.), mot répandu sous les deux
formes dans les patois, v. aussi bouffer, BAGUIER, v. bague.
brifer. — Dér. : bâfreur, 1740. BAH. Onomatopée.
BAGAGE, xrr1e. Dér. de bague, de même BAHUT, vers 1200 (en outre baiul,
sens, usité surtout au plur., XIv°, encore bahur). Étymologie inconnue. Aussi it.
très usuel au xvie s., conservé dans quel- baule, esp. baul, qui n’éclaircissent pas le
ques patois, d’origine inconnue ; attesté problème de son origine. — Dér. : bahuter,
aussi par l’a. pr. baga, de même sens, et, 1633, « faire du tapage », mot pop.; au-
avec des sens apparentés, dans des parlers jourd’hui plutôt « secouer (comme un
de l'Italie et de l'Espagne. Le rapport de bahut) »; bahutier, 1530 (antér. -urier,
cette famille de mots avec l’angl. bag, de 129% ; bahuier, 1313).
même sens, et l’anc. scandinave baggi « pa-
BAI. Lat. bädius, également en parlant
quet » n’est pas éclairci.
du cheval. It. baio (probabl. empr.), esp.
BAGARRE, 1628 (Sorel) Empr. du bayo.
prov. bagarro, adaptation du béarnais bal- BAIE, fruit. Lat. bäca, autre forme de
sarre (ou bacharro) « rixe, Vacarme », lui- bacca. Esp. baga « enveloppe de la graine
même empr. du basque baizarre, propr. de lin », port. baga « baie ».
« rassemblement ».
BAIE « petit golfe ». Empr. de l'esp.
BAGASSE, v. bachelette. bahia, lat. de basse ép. baia (Is. de Séville,
vire), de même sens, peut-être ibérique.
BAGATELLE, 1548 (d’où -teller, -tel- Du fr. vient l’angl. bay, d’où l’all. Bai.
lerie, également au xvie s.). Empr. de lit.
bagalella, de même sens, qu’on fait dériver BAIE « ouverture », v. bayer.
du lat. bäca « baïe », cf. aussi bagatlino BAIGNER. Lat. pop. *baneare, altéra-
« sorte de petite monnaie », v. baie. tion du lat. de basse ép. balneäre (Gloses),
V. bain. — Dér. : baignoire, 1336 ; baignade,
BAGNE, 1667. Empr. de l'it. bagno, 1859.
propr. « bain », dit, dès 1540, des caves de
la forteresse de Livourne, qui se trouvaient BAIGNEUR. Jusqu'au xvirie s. signifie
au-dessous du niveau de la mer et dans les- aussi « celui qui tient un établissement de
quelles on tenait enfermés les esclaves turcs. baïns » (d’où, au xvrie s., « celui qui tient
Dér. : bagnard, fin xixe. un établissement de plaisir »). Lat. balnea-
tôrem, acc. de balneätor, v. le préc., « maître
BAGNOLE, 1840. Mot d’origine dialec- de bains, esclave employé dans un établis-
tale, très usité dans les patois septentrio- sement de bains ».
naux au sens de « carriole », etc., dér. de
banne, v. ce mot, sur le modèle de carriole. BAIL, v. le suiv.
BAILE, v. bailli.
BAGOU, fin xvirie (bagos au xvI® s.).
Tiré du verbe bagouler, 1447, « parler in- BAILLER. Aujourd’hui restreint à des
considérément », d’où aussi débagouler, locutions ; au moyen âge « porter, saisir,
1547 ; -eur, 1636 ; bagouler est tiré de goule avoir à sa charge, donner » (sens qui appa-
« gueule », forme des patois de l'Ouest, raît dès les premiers textes, issu de celui
avec le préf. péjoratif ba-. d’ « apporter »); plus usuel au sens de
« donner » jusqu’au xvr1® s. que donner,
BAGUE, sorte d’anneau, xiv®, en outre dont le triomphe sur bailler est dû à la
wage, XIV® (Froissart) et vaghe, 1432 (texte supériorité numérique et sémantique de
de Douai). Empr. probabl. du moyen néerl. ses dér. Lat. bajuläre « porter sur son dos
bagge « anneau », contenant, comme l’anc. ou dans ses bras ». Peu répandu en dehors
islandais baugr, de même sens, une racine du gallo-roman, qui présente seul le sens
signifiant « courber, plier » (cf. all. biegen). de « donner », cf. a. pr. balhar «livrer, don-
L'’it. baga vient du fr. — Dér. : baguier, ner ». Encore très usuel dans les patois,
1690. au sens de « donner ». — Dér. : baïl, 1250
BAGUENAUDE, 1389, au sens de « futi- (« tutelle », sens très fréquent dans l’ancien
lité » ; l’autre sens est du xv®s. Étymologie droit ; signifie aussi au moyen âge « pou-
douteuse. Le sens de « fruit » est probabl. voir » et simplement « action de donner »,
le sens propre, d’où celui de « futilité » est encore au XVI° S. ; sens moderne au XVI®).
sorti aisément, la baguenaude ne servant Bailleur, vers 1270.
qu’à l’amusement des enfants ; on le consi- BAILLER. D'abord baaillier. Lat. pop.
dère comme empr. d’un parler méridional bataculäre (attesté dans une glose au sens
où il serait dér. de baga « baie », ce qui du fr.), dér. de baïäre « tenir la bouche
convient au sens, mais la fin du mot n’est ouverte », v. bayer. A. pr. badalhar, it. badi-
pas expliquée. — Dér. baguenauder, gliare et sb-. — Dér. : bâillement, xve®;
Xv° ; baguenauderie, 1556 ; baguenaudier, bâilleur, 1690 ; bâillon, 1462, c’est-à-dire
1539, nom d’arbre ; au xvi® s., « celui qui « qui empêche de fermer la bouche » ; bâil-
aime à baguenauder ». lonner, 1530. — Comp. : entre-bâiller, xve.
63. E BALANCE

BAILLI. D'abord -if, x11°, encore au BAL, x11e. À signifié « danse » jusqu’au
xvIIe s. Dér. de l’anc. verbe baillir « gou- xvi£s. Tiré de l’anc. verbe baller « danser »,
verner, administrer », dér. de l’anc. nom sorti d'usage depuis le xvire s., sauf dans
bail « gouverneur », lat. bajülus « portefaix, le part. prés. ballant, lat. de basse ép.
porteur » (v. baïller); ce subst. a pris (saint Augustin, 1v°) balläre (d’où aussi
d’abord en lat. eccl. le sens de « celui qui it. ballare, a. pr. balar, v. bayadère), fait
est chargé du soin d’un enfant, etc. », sur le grec ballein, propr. « jeter »; cf. le
cf. de même a. pr. baile « baïlli, gouver- dér. ballizein (dér. de ballein « jeter »),
neur » ; le vénitien bailo « ambassadeur de attesté en Sicile et en Grande-Grèce au
Venise à Constantinople », également dans sens de « danser » ; balläre a éliminé le lat.
les dictionnaires, depuis 1642, sous la class. saltäre, de même sens, dont il ne
forme baile, vient aussi du prov. — Dér. : reste en ce sens que des traces ; cf. sauter.
baillage, 1312. Baller a également disparu des parlers
gallo-romans au profit de danser.
BÂILLON, v. bâiller.
BALADIN, 1545 (Marot). Empr. du
BAIN. Lat. pop. *baneum, altération prov. baladin, propr. « danseur de ballets »,
du lat. class. balneum, balineum (du grec encore en 1670 (Molière, Bourgeois Gen-
balaneion). V. bagne, baigner. — Comp. : lilhomme) ; n’a pris un sens défavorable
bain-marie, xIve, propr. terme d’alchimie qu’au cours du XVIIe s.
(au xvi® s. on trouve bain-de-marie (O. de
Serres) ; cf. aussi in balneo maria ou marie BALAFON (ou -fo). Fin xix° (une pre-
chez Paré) ; Marie paraît représenter Marie mière fois balafo, 1728, Labat). Empr. du
(ou Miriam), sœur de Moïse (Exode, xv, mandé (Soudan); mot composé de bala
20), à qui on attribuait des œuvres d’alchi- « sorte de piano » et de fo « jouer en frap-
mie (un traité remontant à l’époque pant ».
alexandrine est attribué à Marie la Juive) ; BALAFRE, 1505. A dû signifier propr.
mais une confusion s’est faite avec la Vierge « lèvre, grosse lèvre », d’où « lèvre d’une
Marie, car les alchimistes appelaient l’œu- plaie », cf. le sens du mot dans les parlers de
vre de la pierre philosophale Opus Virginis l'Ouest : « bouton aux lèvres ». Probabl.
Mariae (Ménage). altération, par croisement avec balèvre, de
l’a. fr. leffre, x1v®e, « lèvre, grosse lèvre »,
BAÏONNETTE, 1575 (cf. aussi couteau empr. de l’anc. haut all. leffur, de même
bayonnois, D’Aubigné). Dér. de Bayonne, sens, Cf. aussi lafru « lippu », fin xvre.
nom de la ville des Basses-Pyrénées, où — Dér. balafrer, 1546 (Rab.).
cette arme fut d’abord fabriquée.
BALAI, xr1e. Du gaulois *banatlo (cf. le
BAISER. Lat. bäsiäre, qui d’abord se gallois banadl « genêt » et le breton benal,
disait de baisers donnés à des personnes bonal), devenu par métathèse “*balaino,
respectées, par exemple au père ; s’est de dont la terminaison anormale a été adap-
bonne heure substitué à saviari, terme tée, cf. toutefois l’a. fr. balain(s), xr1°, et
d'amour, et à osculari. Sauf dans des lo- des formes analogues balan, balain, de la
cutions ou avec des noms compléments, région lyonnaise ; s'emploie encore au sens
remplacé au sens propre par embrasser, de « genêt » dans de nombreux parlers sep-
en raison du sens obscène que baiser a tentrionaux, et notamment autour de
pris. Quoique encore assez répandu dans Lyon. Au sens de « balai », qui vient de
les patois, baiser est en fort recul devant l'emploi du genêt à cet usage, balai a sup-
embrasser, sauf dans le Centre et l'Ouest, planté de bonne heure le représentant du
où on dit biser, biger, d’où le fr. pop. bise, lat. scôpa, dont il existe de faibles traces
subst. fém. « baiser ». It. baciare, esp. en a. fr., v. écouvillon (mais it. scopa, esp.
besar. — Dér. : baisement, xr1°; baiser, escoba). — Dér. : balayer, x1r1° (jusqu’au
subst., x11°, divers concurrents dans les xvie s. surtout baloiier ou balier, encore
patois, baiser donnant l'impression d’être dans les parlers gallo-romans, formes dues
un mot prétentieux ; baisoter, 1556 ; bai- à une confusion avec baloiier, balier, usuels
sure, xvi®. — Comp. : baise-main, vers en a. fr., « voltiger, flotter », dér. de baller,
1300 ; entre-baiser (s’), x11° (Voyage de v. bal), d’où balayage, 1783; balayette,
Charlemagne). xu1e (alors baliele) ; balayeur, x111° ; ba-
layure, 1387 (alors balieures), formes de
BAISSER. Lat. pop. *bassiäre, dér. de tous ces dér. parallèles au verbe.
bassus « bas ». A. pr. baissar, esp. bajar.
— Dér. et Comp. : baisse, 1723 ; baissier, BALAIS, seulement dans rubis balais,
1823 ; abaisser, xr1° ; abaisse, xv° ; abais- vers 1200. Empr. du lat. médiéval balascus,
sement, x11° ; rabaisser, xr1° ; rabais, 1307 ; -ascius, altération de l’arabe balakhich, qui
rabaissement, xve, distinction sémantique vient de Balakhchän, nom de la région de
de ces deux dér. au cours du XVIIe 8.; l'Asie Centrale, près de Samarcande, où
rebaisser, 1775 ; surbaissé, 1611. l’on trouve ce rubis, en persan Badakh-
chân. Mot européen : it. balascio, angl.
BAJOUE, v. joue. balas, all. Ballas, etc.
BAKCHICH, 1846. Empr. du turc, BALALAÏKA, 1768. Mot russe.
d’origine persane, bakchîch « pourboire »
(tiré du verbe bakchiden « donner »). BALANCE. Lat. pop. “*bilancia issu du
lat. de basse ép. bilanx (1ve) « balance à
BAKÉLITE, vers 1905. Dér. de Baeke- deux plateaux » (comp. de bis « deux fois »
land, nom d’un chimiste américain d’ori- et de lanx « plat ») ; a éliminé le lat. class.
gine belge. libra, v. niveau. A. pr. balansa, it. bilancia,
BALANCE 54

esp. balanza. L’initiale bal- peut venir d’un fluence de la consonne labiale précédente.
croisement très ancien avec ballare « dan- Par la suite -ai- a été allongé en -ailli-, et
ser », V. bal ; v. aussi bilan. — Dér. : ba- dans ce groupe l’! mouillé a été remplacé
lancer, x11° ; balancement, 1487; balan- par Z. — Dér. : balivage, 1669.
cier, xvI° ; balançoire, 1530 ; contre-balan-
cer, 1549 (Du Bellay) ; balancier « fabricant
BALIVERNE, 1470 (Pathelin). Le rap-
prochement avec le prov. moderne baiu-
de balances », xrrre.
verno « étincelle », quoique appuyé au
BALANCELLE, 1829. Terme méditerra- point de vue du sens par bluetlte, n’est pas
néen, dont l’histoire n’est pas éclaircie ; le sûr, parce que la forme prov. est récente
napolitain paranzella, cité par Jal, corres- et que l’étymologie en est obscure. —
pond à l’it. paranzella, à côté duquel existe Dér. : baliverner, 1540 (Du Fail).
un simple paranza, de sens analogue, d’ori-
gine incertaine. Le mot fr. vient de la BALLADE, xrr1e. Empr. de l’a. pr. ba-
forme génoise baransella, avec influence de lada, propr. « danse », d’où « poème à
balancer. danser », dér. de balar, v. bal. Le sens de
« poème ayant pour sujet une légende
BALBUTIER, xive. Empr. du lat. bal- populaire », xix°, est dû à l’all. Ballade
butire (de balbus « bègue ») et adapté ou à l’angl. ballad. — Dér. : ballader, 1837,
d’après les formes : balbulio, 1'e pers. sing. issu de l’argot des gueux « aller demander
indic. prés. ; balbultiens, part. prés., etc. — l’aumône (en chantant) », 1628 ; ballade
Dér. : balbutiement, 1750. « promenade », 1856 ; balladeuse, fin xixe.
BALBUZARD, 1670. Empr. du latin des BALLANT, v. bal.
naturalistes balbuzardus, fait sur l’angl.
baldbuzzard (comp. de bald « chauve » et BALLAST, 1399. D'abord, terme de ma-
de buzzard, empr. du fr. busard). rine, « sorte de lest », empr. du néerl. bal-
last, qui l’a eu, par l'intermédiaire de la
BALCON, xvi® (Ph. Delorme). Empr. de Hanse, du suéd. barlast. Comme terme de
l'it. balcone, lui-même du longobard *balko chemins de fer, 1842, empr. de l’angl.
« poutre », cf. all. Balken, de même sens;
v. bau. BALLE «gros paquet de marchandises »,
1260 (É. Boileau). Du francique *balla,
BALDAQUIN, 1352 (au xvie et au cf. anc. haut all. balla, all. moderne Ball
XVIIe $., souvent orthographié baldachin « balle », Ballen « ballot », de la même
d'après l’it.). Empr. de l’it. baldacchino, famille. De même a. pr. bala « ballot ». —
dér. de Baldacco, forme anc. de Bagdad Dér. : ballot, 1406 ; baluchon, 1821, terme
(cf. de même a. fr. Baudas) ; baldacchino d’argot devenu pop.; déballer, 1549;
signifiait d’abord « étoffe de soie de Bag- déballage, 1671; emballer, xiv® (Frois-
dad », cf. l’a. fr. baldekin, xu1°, baudequin, sart), antér. part. passé, « embarrassé »,
en ce sens. 1316, s’emballer « s’emporter », par équi-
BALEINE, vers 1080 (Roland). Repris
valence plaisante, date du xix® s.; d’où
emballage, xvi®; emballement, 1880 (de
au lat. ballaena (autres formes balaena,
s’emballer ; en 1629 au sens d’ « em-
balena, etc.). — Dér. : baleiné, 1811 ; ba-
ballage ») ; emballeur, 1520 ; désemballer,
leineau, 1732 ; baleïnier, 1406 ; -ière, 1836.
1615 ; remballer, 1549.
BALÈVRE, v. lèvre. BALLE « balle à jouer », 1534 (Rab.).
BALISE, 1475 (baillize en 1528). Pro- Empr., avec adaptation d’après le préc.,
babl. de l’a. fr. baif « qui regarde attenti- de l’it. palla, de même sens, lui-même du
vement », la balise étant posée pour diriger longobard *ballo, même mot que le préc. ;
le regard du navigateur. Le suff. -if est au moyen âge, la balle, surtout, celle du
souvent remplacé par -iz, et la consonne jeu de paume, se disait pelote ou e(s )teuf,
finale de celui-ci peut s'être sonorisée sous vieillis depuis le xvre s. La locution enfant
l'influence de dér., qui l’avaient sonorisée de la balle, 1690, s’est dite d’abord des fils
par fausse analogie. Pour la forme du radi- des maîtres de jeux de paume et de tri-
cal, v. baliveau. — Dér. : baliser, 1475; pots ; aujourd’hui se dit spécial. en parlant
balisage, 1467 (baillisiage) ; baliseur, 1516. des comédiens.

BALISTE, 1546 (Rab.). Empr. du lat. BALLE, projectile, xvie. Empr. de l’it.
ballista, dont le modèle grec, dér. du verbe palla, qui a pris ce sens par extension, v. le
ballein « lancer », n’est pas attesté, v. cha- préc.; fréquent au xvi® s. au sens de
blis. — Dér. : balistique, 1644. « boulet de canon », cf. lit. palla da canone,
encore usuel. V. ballotter.
BALIVEAU, 1549 (antér. boiviaus, 1274 ; BALLE (de céréales), 1549 (bale). Tiré
baiviaus, xive; en outre bailliveau, 1611, de l’anc. verbe baller, v. bal, attesté au
encore dans Furetière). Dér. de l’a. fr. sens de « vanner »; l’a. pr. dit de même
baif « qui regarde attentivement » (de bala.
baer, V. bayer), le baliveau servant aux
bûcherons de point de repère dans son BALLER, v. bal.
travail ; cf. en prov. moderne une désigna-
tion analogue agacho, fém., de agachà « re- BALLERINE, 1858. Empr. de l’it. bal-
garder, guetter ». La transformation de lerina, fém. de ballerino « maître de danse »,
-ai en -oi- dans la première forme s’expli- dér. de ballare, v. bal.
que, comme celle de framboise pour fram- BALLET, 1578. Empr. de l’it. balletto,
baise, Amboise pour Armbaise par l’in- dim. de ballo « bal », v. les préc.
55 BANCROCHE

BALLON, 1549 (Rab.). Empr.,avec adap- BAMBOCHE, 1810, au sens d’ « amuse-


tation d’après balle (à jouer), de l’it. pal- ment vulgaire ». Formé, ainsi que le verbe
lone, dér. de palla, v. balle {le mot n’a pas bambocher, 1807, sur bambochade, 1747,
pu être formé en français, le suffixe -0on empr. de l’it. bambocciala, qui désignait
n'ayant le sens augmentatif qu'en it. et en des peintures représentant des scènes rus-
esp.). Au sens d’ « aérostat », en 1783, tiques d’auberge, etc., mises à la mode à
comme terme de géographie, traduction de Rome par le peintre hollandais Pierre de
l’all. Belchen, faussement interprété Bäll- Laer, xviie, surnommé il Bamboccio, à
chen « petite balle ». — Dér. : ballonner, cause de sa petite taille ; bamboche, 1680,
1584 ; ballonnement, 1835 ; ballonnet, 1874. « marionnette », d’où « personne contre-
faite », empr. de l’it. bamboccio « poupée,
BALLOT, v. balle « paquet ». pantin », de la famille de bambin, a pu
contribuer à la formation de bamboche au
BALLOTTER, au sens moderne, vers le sens moderne. — Dér. : bambocher, 1807 ;
xvi® s. Emploi fig. de balloïter, xvi®, terme bambocheur, 13821.
de jeu de paume, « peloter, se renvoyer la
balle », dér. de ballotte, xiv® (Christine de BAMBOU, 1604 (bambouc, 1690). Empr.
Pisan), « petite balle », dér. de balle, ou par l'intermédiaire du port., de bambu,
peut-être fait sur le modèle de l’it. pallotia, mot malais. Mot devenu européen.
de même sens ; au xvi® s., ballotte est en
outre usuel au sens de « boule pour voter », BAMBOULA, 1728. Empr. d'une langue
d’où le sens de ballotier « voter avec des bantoue.
ballottes », vers la même époque ; étre bal-
lotté, en parlant d’un candidat, 1849, est BAN, x11°. Terme de féodalité ; « pro-
dû à ballottage. — Dér. : ballottage, 1519, clamation du suzerain dans sa juridiction,
au sens de « vote »; dér. du verbe au sens ‘circonscription, défense, condamnation à
de « voter avec des ballottes », avec déve- l'exil », d’où se sont développés les sens
loppement sémantique d’après le sens gé- modernes. Du francique *ban, cf. anc.
néral du verbe, d’où le sens moderne en haut all. ban « ordre sous menace, juridic-
1762 ; ballottement, 1586. tion », all. moderne Bann « proclama-
tion », etc., angl. ban. — Dér. : banal, 1286,
BALNÉAIRE, 1873. Empr. d’un des terme de féodalité, sens moderne, 1778
adj. lat. balnearis, balnearius, dér. de bal- (Gilbert) ; banalité, 1555, sens moderne,
neum « bain ». xixe. — Comp. : arrière-ban, xrre, alté-
BALOURD, vers 1550. En outre balorde, ration, par étymologie populaire, de l’a. fr.
1611, puis balourde, masc. et fém., encore arban, herban qui représente le francique
à la fin du xvrre s. Empr. de l’it. balordo, *hariban, cf. all. moderne Heerbann, propr.
et refait sur lourd. Le fr. beslourd, fin xve, « appel pour le service de l’armée ». A la
est une formation indépendante, ou une rigueur arrière-ban pourrait être un simple
première adaptation de l’it — Dér. comp. du fr.; banlieue, 1211 (en lat. mé-
balourdise, 1718 ; abalourdir, 1580. diéval banleuca, x°), propr. « espace d’en-
viron une lieue autour d’une ville, où
BALSAMIER, 1783 (déjà aux xri° et s’exerçait la juridiction d’une autorité »,
xu1® s.); balsamine, 1545; balsamique, d’où le sens moderne ; cf. de même all.
1516 ; balsamite, xive. Dér. sav. du lat. Bannmeile (Meile = lieue); mais on ne
balsamum « baume ». peut dire si c’est l’all. qui a servi de modèle
au fr., ou inversement ; d'où banlieusard,
BALUCHON, v. balle. fin xIxe.
BALUSTRE, 1529 (en outre baruste, BANANE, 1600. Empr. du port. banana,
1531); balustrade, 1563. Empr. de lit. emprunté lui-même d’un parler de la Gui-
balausire (et -lo), balaustrata ; balaustre est née (se lit en 1585 dans un récit de voyages
tiré de balaustro (et -ta) « fleur de grena- en latin) et apporté par eux, avec l’arbre,
dier » (balustre est attesté en ce sens en au Brésil. Le fruit, apporté d'Afrique par les
fr. au xvie s.), empr. du lat. balaustium Portugais, était déjà connu au xnIe 8,
(du grec balaustion) ; le balustre doit son alors sous le nom de pomme de paradis. —
nom à son renflement qui ressemble à Dér. : bananier, 1667.
celui de la fleur. — Dér. : balustrer, 1548
(au participe -é), probabl. d’après l’it. BANC, vers 1080 (Roland). Empr. du
germ. *banki-, cf. anc. haut all. banch,
BALZAN, 1584. Empr. de l’it. balzano, masc. Le mot germanique a été empr., au
empr. lui-même de l’a. fr. baucent, d’abord masc. et au fém., par les langues méridio-
-enc, « tacheté, noir et blanc », surtout en nales : it. banco, -a, esp. banco. Le banc
parlant du cheval, cf. de même a. pr. bal- des Germains courait autour de la cham-
san ; ceux-ci représentent le lat. pop *bal- bre, contre les parois. — Dér. : bancal,
leänus, propr. « garni d’une ceinture », 1747 (c'est-à-dire « qui a les jambes de
d’où « rayé », dér. de balleus « ceinture », travers, comme les pieds d’un banc »);
cf. de même roumain balfat « tacheté » et bancroche, 1731, formation argotique, issue
« balzan » ; l’a. fr. baucenc à pris très an- du préc., par croisement avec l’anc. adj.
ciennement le suff. d’origine germ. -enc. croche.
BAMBIN, 1575; rare avant le xvirre s. BANCO, 1723. Empr. de l’it. banco « ban-
Empr. de lit. bambino, môt onomato- que » et terme de jeu, v. banque.
péique dont le radical se retrouve dans les
parlers gallo-romans et en esp., v. le suiv. BANCROCHE, v. banc.
BANDE 56

BANDE lien », x11° (bende, forme ordi- patois, et usuel comme terme techn. dans
naire au moyen âge). Du germanique occi- les mines de charbon. — Dér. : bannette,
dental *binda, cf. le verbe all. binden et xu11e ; banneton, id. ; v. bagnole.
l’angl. io bind « lier ». De même a. pr.
benda, esp. venda. — Dér. et Comp. : ban- BANNERET, v. le suiv.
deau, xr1° ; bandelette, 1377, par un anc. BANNIÈRE, xr1e. Dér., avec altération
dér. bandelle ; bander, xr1° ; bandage, 1508 ; d’après ban, d’un mot germanique corres-
bandagiste, 1701 ; débander, xx1°; plate- pondant à celui d’où vient banda de l'it.
bande, 1508 ; rebander, xrre. et de l’a. pr., v. bande. L’a. fr. ba(n)ne est
si mal assuré pour la forme et le sens qu’il
BANDE « troupe », xive (Froissart). ne permet pas de restituer le francique
Empr. de l’a. pr. banda, du got. bandwa *banna, correspondant au gotique bandwa,
« signe », d'où « étendard, qui servait à et d’où dériverait bannière. Le sens même
distinguer un corps de troupe » ou d’une du suffixe est obscur ; on suppose que ban-
forme correspondante du germanique occi- nière a d’abord désigné le lieu où la ban-
dental *banda (cf. bandum, traduit par nière était placée au centre de l’armée, puis
vetillum, Festus, v. abandon ; banda signi- la bannière elle-même. Le fr. a empr. au
fie encore « écharpe » en italien). Comme xIVe s. et surtout au xvie s. bandière de
terme de marine, 1616 (D’Aubigné), au l’it. bandiera, lui-même empr., comme
sens de « côté de navire », cf. donner de la l’esp. bandera, de l’a. pr. bandiera ; celui-ci
bande, est également empr. de l’a. pr. est dér. de banda, probabl. sur le modèle
banda ; le sens de « troupe, parti » a donné de bannière. — Dér. : banneret, 1297.
celui de « côté », attesté en prov. et en it.
— Comp. : débander (se), xvi® (Amyot) ; BANNIR, xui°. En a. fr. et jusqu’au
débandade, 1585 (N. du Fail); débande- XvI® s. signifie en outre « proclamer ».
ment, 1580 ; surbande, 1634. Empr. du francique *bannjan, forme cor-
respondante au gotique bandwjan « donner
BANDERILLE, fin xixe. Empr. de l’esp. un signal », d’où it. bandire « proclamer,
banderilla, dimin. de bandera « bannière ». bannir », a. pr. bandir, de même sens ;
l'esp. bandir « bannir » est peut-être empr.
BANDEROLE, vers 1500 (antér. ban- Ces sens des verbes romans sont dus à une
(n)erole, xv°, d’après bannière). Empr. de confusion, probabl. déjà germanique, avec
l’it. banderuola, dimin. de bandiera « ban- la famille de ban; cf. l’anc. haut all. ban-
nière ». nan, dér. de bann, qui signifie « recomman-
der sous menace ». Mais l’it. (et l’esp.),
BANDIÈRE, v. bannière. n'ayant pas de représentants anc. de ban,
BANDIT, 1690 (en outre bandy, 1640; doivent leur sens au gallo-roman, ce qu’ex-
-i, encore en 1759). Empr. de l’it. bandito plique le prestige de la féodalité française.
« banni », d’où « hors la loi », dér. de bandire On a proposé inutilement de considérer
« bannir » ; le rôle des bandits en Corse et bannir, au sens ancien de « proclamer »,
le succès d'œuvres littéraires où il en est comme un dér. de ban; mais c’est, dans
parlé a contribué au développement de tous ses sens, le même mot, qui a suivi les
l'usage du mot au xix® s. — Dér. : bandi- développements sémantiques de ban, et
tisme, 1859. que le fr. n’a conservé qu’au sens d’ « exi-
ler ». — Dér. : bannissable, 1661 (Molière) ;
BANDOULIÈRE, 1536. Empr. de l'esp. bannissement, 1283 (Beaumanoir). V. for-
bandolera, de même sens, dér. de banda ban.
« écharpe », lui-même empr. de l’it. banda,
v. bande « troupe ». BANQUE, 1458; banquier, xrve (Ores-
me). Banque a signifié aussi « table » au
BANJO, 1859. Empr. de l’anglo-améri- XVIe s. (cf. aujourd’hui même à Lyon, le
Cain banjo, d’abord -ou, altération, dans le sens de « comptoir »), d’où « tréteau de
parler des esclaves nègres, de bandore, charlatan ». Empr. de l’it. banca, propr.
empr. lui-même soit de l'esp. bandurria, « banc », v. banc, d’où « table de changeur »,
soit du port. bandurra, v. mandoline. puis « banque » (sens répandu par les Gé-
nois), banchiere. Banque comme terme de
BANK-NOTE, 1789. Empr. de l’angl., jeu, au xvirre s., est également empr. de
formé de deux mots d’origine fr. ; le mot l'it., v. banco. — Dér. : banquiste, 1824,
angl. a été francisé en noie de banque à la d’après le sens de « tréteau de charlatan » :
fin du xvine s. débanquer, 1736, comme terme de jeu.
BANLIEUE, v. ban. BANQUEROUTE, xve. Empr. de lit.
banca rotta, propr. « banc rompu », dit
BANNE. Lat. benna, donné comme cel- ainsi parce qu’on rompait le banc des ban-
tique par Festus, qui dit : genus vehiculi. queroutiers. Le mot it. a été parfois adapté
Devait être une sorte de moyen de trans- en banque rompue, xvie. — Dér. : banque-
port, une sorte de panier d’osier, d’où le routier, 1536. s
sens de « corbeille » ou d’objets de forme
ou de fabrication analogues, que présen- BANQUET, xive. Empr. de lit. ban-
tent, à côté du sens de « véhicule », banne chetto, propr. « petit banc » (dér. de banco,
et ses dér. dans les parlers gallo-romans et v. banc), qui désignait des bancs disposés
les langues voisines, cf. it. benna ; a passé autour des tables, dans des banquets. —
aussi dans les parlers germaniques, cf. Dér. : banqueter, fin xrve.
suisse all. Benne « banne » (panier et voi- BANQUETTE,
ture). Aussi benne, très répandu dans les 1417. Empr. du langue-
docien banqueta, cf. le texte de 1417 : « une
57 BARBE

selle que l’on appelle au pays (de Langue- mots pouvait suffire pour former un sobri-
doc) banquette ». Les autres sens en déri- quet, dont l'équivalent Painvin existe du
vent ; toutefois, banquette, terme de voirie, reste comme nom de famille dans la Loire
1762, dérive du simple, attesté en normand, Atlantique. — Dér. : baragouinage, 1546
banque «levée de terre, etc. », fém. de banc. (Rab.); baragouiner, 1583 (Montaigne) ;
baragouiner, 1669 (Molière).
BANQUISE, 1797. On a dit d’abord banc
de glace, cf. l’angl. field of ice, de la même BARAQUE, xv°. Empr. de l'esp. bar-
époque. Empr. du scandinave pakis, id., raca, qui est probabl. dér. de *barra, v.
comp. de pakke « paquet » et is « glace » ; barre, ou de *barrum « argile », v. bardane,
la forme du mot fr. s'explique par l’in- selon que les premières cabanes qui por-
fluence du mot banc, banc de glace étant taient ce nom étaient en bois ou en pisé.
attesté dès 1751. — Dér. : baraquer, xvr1° s., d’où baraque-
ment, 1836.
BAOBAB, 1751 ; déjà en 1592 dans une
histoire naturelle de l'Égypte écrite en BARATTE, 1549 ; baratter, 1546 (Rabe-
latin, sous la forme bahobab, désignant le lais : « agiter »); 1914 (laict. baraié). Le
fruit. Empr. de l’arabe bu hibab « fruit aux subst. est tiré du verbe qui dérive lui-même
nombreuses graines ». de l’a. fr. barale « confusion, agitation »
BAPTÊME. Rarement balesme en a. fr. depuis 1155, même mot que l’it. baratla
Lat. eccl. baptisma (mot grec, de baptizein « dispute » (déjà chez Dante, Enfer, 21, 63)
« immerger », le baptême, dans la primitive et que l’anc. esp. barala, de même sens
église, ayant comporté une immersion). Le (Poème du Cid, 1228). Dér. de l’anc. prov.
pe maintenu orthographiquement d’après baratar « agir, se conduire », anc. fr. bareter
e lat. « s’agiter », barater « tromper, frauder ».
Du sens « agir » l’anc. prov. tire « faire des
BAPTISER, x1e (Alexis). Empr. du lat. affaires », partic. « troquer », d’où aussi
eccl. baptizare (du grec bapliizein, v. le « tromper »; le fr. a développé le sens
préc.). À éliminé vers le x1v® s. une forme « agiter la crème pour faire le beurre »
régulière ba(p )toier, cf. aussi a. pr. batejar, (XVIe s.). Ce verbe vient du grec prätlein
d’où les formes des patois lorrains et du « agir » (pour l’anticipation de la voyelle
Sud-Est. Baptiser le vin, 1588 (Montaigne). tonique en vue d’une séparation des deux
— Dér. : débaptiser, 1564 (Rab.) ; rebap- consonnes comp. béarn. garampe «crampe »,
tiser, xr11° (d’après le lat. eccl. rebaptizare). pour la consonne b- au lieu de p- voir ici
boîte). — Dér. du verbe : baraterie, 1310
BAPTISMAL, xri°; baptistaire, 1603 ;
au sens de « tromperie », 1643 au sens du
baptistère, vers 1080 (Roland). Le premier
droit maritime.
est dér. du lat. baptisma, le deuxième
formé sur le lat. baptizare d’après baptiis- BARBACANE, xrIe. De même lat. mé-
tère et par suite écrit parfois -sière aux XVI® diéval barbacana, it. -e, esp., a. pr. -a. Au
et xvire s., le troisième empr. du lat. eccl. moyen âge, désigne surtout un ouvrage
baptisterium (du grec baptisterion). extérieur percé de meurtrières. Étymologie
BAQUET, v. bac. douteuse. Le mot arabo-persan barbakh-
khâneh, qu’on propose au sens inexact de
BAR, poisson, xri°. Empr. du moyen « galerie servant de rempart devant une
néerl. baers, cf. all. Barsch, masc., « per- porte », et qui ne peut signifier que « mai-
che », angl. barse, de même sens. son (khäneh) à ouverture, à écoulement »
(barbakh signifiant « évier, tuyau d’aque-
BAR, sorte de café, 1861. Empr. de duc ») a en outre le défaut d’être recons-
l’angl. bar, propr. « barre » (empr. du fr.) ; truit, de même que béb-khâneh « maison
ainsi nommé parce que, entre le comptoir pour la défense de la porte ». On a aussi
et les consommateurs, il y a souvent une proposé le persan bélakhanah, qui convien-
sorte de balustrade. drait mieux pour le sens, mais qui satisfait
BARAGOUIN, 1532 (Rab.), au sens mo- moins au point de vue phonétique.
derne ; signifie aussi au xvi® s. « celui qui
parle une langue étrangère »; attesté en BARBACOLE, xvrie. Tiré de Barbacola,
1391 comme terme d'’injure adressé à un nom d’un maître d’école dans le Carnaval,
journalier, originaire de Guyenne, par des mascarade de Lulli (1675). À dû une cer-
gens d’Ingré (Loiret). On a proposé le lat. taine popularité à La Fontaine (Fables,
Berecyntia, un des noms de Cybèle, à cause XII, 8); aujourd’hui archaïque.
du caractère violent des fêtes célébrées en BARBAQUE. Vers 1880. Mot d'argot
son honneur, mais on ne voit pas par quel militaire, d’étymologie obscure.
intermédiaire ce mot aurait pu pénétrer en
français. En outre lit. baraonda, qu'on a BARBARESQUE, v. barbe « cheval ».
voulu identifier avec le mot français, avec
sa déformation dialectale baracundia, est BARBARE, xive (Oresme); barbarie,
un mot du xixe s. et est empr. de l'esp. xIVe ; barbarisme, vers 1260 (au xxrre s.
barahunda « désordre », qui est lui-même aussi -ime). Empr. du lat. barbarus, -ia,
d'origine inconnue. Il faut probabl. revenir -ismus (du grec barbaros, -ia, ismos).
à l’ancienne étymologie, selon laquelle c’est
un emprunt du bret. bara gwin « pain (et) BARBE. Lat. barba. — Dér. : barbé,
vin », mots avec lesquels les pèlerins bre- 1836 (ne continue pas l’adj. médiéval barbé
tons demandaient l'hospitalité dans les au- « barbu », lat. barbätus) ; barbeau « bluet »,
berges. La simple juxtaposition de ces deux 1642, d’où le nom de couleur bleu barbeau ;
BARBE D8

barbelé, vers 1120, par l’a. fr. barbel baiart « civière », probabl. empr. du fr.)
« pointe, dent »; barbet, 1508 ; barbichon, très répandue aujourd’hui dans les patois.
1587 ; bichon, 1642 ; bichonner, vers 1700 ; On a proposé d’y voir un mot de la famille
barbette, xiv°; barbiche, 1694; barbier, de bailler « porter », mais l’absence de
1241 ; barbille, 1751; barbillon, xive (à forme avec -ill- dès les premiers textes
cause de la date, ne peut pas dériver du rend cette explication impossible, bien que
préc.) ; barbifier, xvrre ; ébarber, vers 1200 ; satisfaisante pour le sens. Une dérivation
ébarbeuse, 1876. du verbe baer, v. bayer, « être ouvert »,
conviendrait mieux, si cette civière était
BARBE, « cheval de Barbarie », 1534 primitivement, comme elle l’est souvent
(Rab.). Empr. de l’it. barbero, lat. barba- encore, à claire-voie ; on l’aurait ainsi nom-
rus ; barbero, outre le sens de « barbare », mée pour la distinguer de la civière en bois
a été dit spéc. du Nord de l’Afrique, comme plein. — Dér. : barder, « charger avec un
barbaresco, d’où barbaresque, 1752 (au bard », 1751 ; bardée, 1642 ; bardeur, 1680 ;
xvi® s., « barbare (en général) »). débarder, 1541 (on a proposé aussi de voir
BARBEAU, poisson. Lat. pop. *barbel- dans ce mot un dér. d’un a. fr. *bart
lus, lat. de basse ép. (Gloses) barbulus, cf. « planche », dont bardeau serait le dimin.) ;
de même a. pr. barbel; le simple barbus débardeur, 1528.
survit dans l’it. et l’esp. barbo et l’a. pr. BARDA, 1863. Argot des troupes d’Afri-
barb. — Dér. : barbillon, poisson, x1ve. que, empr. de l’arabe barda‘a, propr. « bât
BARBON, xvie. Empr. de l’it. barbone, d'âne, de mulet », mot d’abord employé
propr. « grande barbe ». par les indigènes engagés au service de la
France (qui prennent le bât, comme des
BARBOTER, xrrie (en a. fr. barbeler; bêtes de somme), v. barde, fém.
signifiait en outre « marmotter », encore BARDANE, xve. Vient de la région lyon-
au xvi1e s.). Variante de bourbeter, encore naise, où il est issu d’un emploi fig. de bar-
attesté au xvi® s. aux deux sens ; les deux dane « punaise », parce que les capitules de
types sont répandus aux deux sens (mais la bardane s’attachent aux vêtements. Bar-
surtout avec le suff. -oter) dans les parlers dane « punaise » est dér. (par l'intermédiaire
gallo-romans ; cf. de même it. barboltare d’un dér. *barritum) du lat. pop. *barrum
et borbotlare « marmotter ». Pour l’étymo- « argile, boue », qu’on restitue d’après l’it.
logie, v. le suiv. — Dér. : barbotage, 1562 ; barro « argile », l’esp. barro « boue », l’a. pr.
barbote, xr11°, dont on trouve les variantes bart, de même sens, v. embardée ; cette
bourbele, xir1° (Joinville), bourbotte, 1700; dénomination vient du fait que la punaise
barboteur, xvi° ; barboteuse, 1856 ; barbo- ressemble à des taches de boue (d’assez
tine, 1532 (Rab.). nombreux dér. du même type signifient
BARBOUILLER, xiv<. Signifie en outre « tacheté »).
au xvie s. « agiter ». La variante avec le BARDE, masc., 1512. Empr. du lat.
radical borb- est attestée dans les patois, bardus, donné comme gaulois, cf. irlandais
mais plus rarement que dans le préc. Ap- bard, gallois bardd « poète ».
partient, comme celui-ci, à une famille de
mots qui expriment le bouillonnement de BARDE, fém., xir1°. Empr., probabl.
l’eau, cf. it. borbogliare « gargouiller » et par l'intermédiaire de l’it. barda, de l’arabe
barbugliare « bredouiller », esp. borbollar barda‘a « bât rembourré », cf. de même
« bouillonner », etc., et aussi le grec borboros esp. albarda et barda, a. pr. aubarda et
« boue ». Le lat. bullare « bouillir, bouillon- barda. Comme terme culinaire, 1709, soit
ner » peut avoir contribué à la formation développement spontané, soit empr. d’un
de certains de ces mots, mais il est peu parler du Midi, où ce sens est également
probable qu'il soit le point de départ de attesté. — Dér. : bardeau, 1358, v. bâtar-
tous. Un rapprochement avec bourbe, d’ori- deau ; barder, 1427 ; bardée, terme culi-
gine gauloise, amènerait à supposer que naire, 1836. V. barda, bardot.
lit. et l'esp. viennent du français. — Dér.
et Comp. : barbouillage, 1588 (Montaigne) ; BARDER, « être, devenir pénible », etc.,
barbouilleur, vers 1480 ; débarbouiller, 1549 ; fin xixe. Argot militaire ; paraît être le
embarbouïiller, 1530. même mot que barder « glisser (sur la glace
ou dans la boue) », en parlant d’une voi-
BARBOUQUET, v. bouquet. ture, d’où «aller vite », attesté surtout dans
les patois de l’Est, verbe qu’on dérive de
BARBU. Lat. pop. *barbütus, réfection *barrum « boue », v. bardane.
du lat. class. barbätus, au moyen du suff.
-ülus, particul. usuel dans les adj. concer- BARDIT, xviie. Empr. du lat. barditus
nant les parties du corps. It. barbulo, esp. (Tacite, Germanie, 3, 2), d’origine dou-
-udo. — Dér. : barbue, xrr1e. teuse ; souvent considéré comme une alté-
ration du lat. barritus « cri de l’éléphant »
BARCAROLE, 1768. Empr. de l’it. bar- et aussi «cri de guerre des soldats romains »,
caruola, tiré de barcaruolo « gondolier », d’après bardus, v. barde, mais à tort, le
dE Au xvi®s. on a dit aussi barque- bardit étant attribué aux Germains et le
rolle. barde, nettement connu comme gaulois.
BARCELONNETTE, v. berceau. BARDOT, xvi® (Brantôme), une pre-
mière fois en 1367. Empr. d’un parler mé-
BARD, xvie. Contraction de beart, ridional, où il a été formé sur barda « sorte
1232 ; d'une autre forme baiart, xrrre, vient de bât », v. barde, c’est-à-dire « bête qui
la forme moderne bayart (cf. aussi a. pr. porte le bât ».
59 BARRIÈRE

BARÈME, 1811. Tiré de (François) Le sens figuré « bizarre » apparaît pour la


Barrême, nom d’un mathématicien, qui 1re fois en 1701 chez Saint-Simon. Il est
publia un ouvrage intitulé Les Comptes- très fréquent au xvire s. et s'applique à
faits du grand commerce, 1670. toutes sortes de choses (esprit, expression),
BARGE, v. barque. depuis le milieu du siècle à des meubles, à
des pièces de musique (Rousseau), à des
BARGUIGNER, xr11° (en outre -gaignier, œuvres d’art. Du fr. l’adj. passe dans ces
du xur° au xvies.). D'abord « marchander », sens à l’all. et à l’it. C’est en allemand
encore au XVIIe S., d'où « hésiter », xXvI® (barock) que Burckhardt (dès 1855) et
(mais le déverbal bargaigne « marché », Wôlfflin s’en sont servis les premiers pour
d’où angl. bargain « marché », a le sens désigner la période de l’art qui suit la Re-
d’ «hésitation », dès le xrr1° s.). Probabl. du naissance. De l’all. ce sens s'étend ensuite
francique *borganjan, qu’on restitue d’a- aussi au fr. et à l’it. Cf. l’évolution séman-
près l’anc. haut all. borgén, all. borgen, de tique de gothique.
même sens, mais dont la terminaison -anjan
est mal expliquée ; cf. a. pr. barganhar, BAROUFE, BAROUFLE, 1861. Empr.,
aux deux sens, d’où l’it. archaïque barga- par les ports méditerranéens (signalé en
gnare « trafiquer » peut provenir. — Dér. : 1830, sous la forme baroufa, comme terme
barguignage, 1580 (Montaigne); bargui- sabir), de l’it. baruffa «altercation, bagarre»,
gneur, xXIvV*. qui se rattache à l’anc. haut-all. biroufan
« faire une bagarre », comp. aussi roufan,
BARIL, xr1e. Étymologie douteuse. Déjà d’où l’it. ruffa « bagarre », arruffare « bou-
barriclos (Capilulaires de Charlemagne). leverser, etc. »
Les rapprochements qu’on propose, soit
avec barre, soit avec le francique *bera, BARQUE, vers 1320 (dans un texte
v. bière, ne conviennent pas au sens; cfÎ. italianisant). Empr. de l’it. barca (aussi
it. barile, esp., a. pr. barril, dont les rap- esp.) ; barca vient du lat. barca (dans une
ports avec le fr. ne sont pas déterminés. inscription du Portugal, vers 200), d’origine
— Dér. : barillet, xr11°. incertaine ; ordinairement expliqué comme
issu de *barica, dér. de baris (mot grec :
BARIOLER (employé surtout au part. « barque égyptienne »). L’a. fr. dit surtout
passé), 1617; mais le dér. -age date du barge, vers 1080 (Roland), encore de quel-
xive s. Issu du croisement de barrer, au que usage (en outre berge depuis le xve s.),
sens de « rayer » (fréquent dans les dialec- transcrit barga en lat. du 1x s. L’all.
tes), et de l’a. fr. rioler (employé surtout Barke et l’angl. barge viennent du fr. —
au part. passé, comme barioler) « rayer », Dér. : barquette, 1283 ; débarquer, 1564;
dér. de riole, autre forme de rieule « règle ». débarquement, 1583; débarcadère, 1733
BARLONG, v. long. (fait sur le modèle d’embarcadère) ; em-
BARNACHE, v. bernicle. barquer, 1511; embarquement, 1533;
désembarquer, 1539; désembarquement,
BARNUM, 1855. Tiré du nom d’un im- 1564; rembarquer, vers 1500; rembar-
presario américain (1810-1891). quement, id. V. embarcation.
BARO-. Premier élément de mots sav. BARQUEROLLE, v. barcarole.
comp., tels que baromètre, 1666, tiré du
grec baros « pesanteur ». BARRE. Lat. pop. “*barra, d'origine
obscure, d’où aussi it. esp. a. pr. barra. On
BARON, x° (Saint-Léger). L’a. fr. pos- rapproche le gaulois *barro- (attesté seu-
sède un cas sujet ber, cf. de même l’a. pr. lement dans des noms propres, cf. aussi le
bar. Comme titre féodal, du francique nom de lieu Bar) qui a dû signifier « extré-
*baro, Cf. sacibarone, Loi Salique « fonc- mité », cf. irlandais barr « sommet », gallois
tionnaire royal au-dessous du comte, chargé barr « sommet, cime », d’où « branche »,
de percevoir les amendes »; le fr. a été sens du breton barri; mais ces sens ne
emprunté par les langues voisines : it. conviennent pas bien à ceux des mots ro-
barone, esp. barén, etc. Avant l'invasion mans. — Dér. et Comp. : barreau, 1285;
des Francs, *baro avait déjà été introduit barreau des avocats, xvi°, pour le dévelop-
dans le monde romain avec son sens propre pement du sens, cf. parquel, et le lat. de
d’ « homme libre, guerrier » (qu’on rappro- basse ép. caulae, de même sens, propr.
che de l’anc. scandinave beriask « combat- « parc à moutons »; barrer, x11° ; barrage,
tre ») par les contingents germains des x11° ; barreur, fin xix°, au sens moderne ;
armées romaines, de là les sens de « merce- barrette, dim., 1791 ; barrière, xive; dé-
naire » (Is. de Séville, vire) et d’ « homme, barrer, x11° ; rembarrer, xv°, par l’inter-
mari » en a. fr. et en a. pr., sens encore médiaire d’embarrer, x11°, encore dans les
aujourd’hui usités dans les patois du Sud- patois. V. embarrasser, embargo.
Est et en picard, cf. aussi esp. varôn « mâle,
homme fort, etc. » — Dér. : baronne, BARRETTE, «bonnet plat », 1366 (signi-
xu1e ; baronnie, xr1e ; baronnet, 1476. fie aussi jusqu’au xvI® s. « Cape ou pèlerine
BAROQUE, 1531, en parlant de la perle
à capuchon »). Empr. de lit. bar(r)ella,
baroque (ou irrégulière). Empr. du port. autre forme, aujourd’hui inusitée, de ber-
relta, dér. très anc. du lat. de basse ép.
barroco, nom masc., de même sens, d’ori-
gine inconnue, auquel correspond l'esp. birrum (saint Augustin) « capote à capu-
chon », v. béret.
‘barrueco, de même sens. Le lieu d’origine
de baroque est démontré par la présence, BARRICADE, v. barrique.
dans un des premiers textes, d’ajorffe,
autre sorte de perle, port. et esp. aljofar. BARRIÈRE, v. barre.
BARRIQUE 60

BARRIQUE, 1455; R. Estienne, en manuscrits latins connus au xvi® s., était


1549, l’enregistre comme gascon. Empr. écrit fautivement basalten (accus.). Cette
du méridional barrica, formé avec le radical forme erronée était déjà devenue courante
de barril, V. baril ; aujourd’hui très usuel dans les langues européennes, quand on
dans les parlers gallo-romans. — Dér. : reconnut l’erreur. — Dér. : basaltique, 1787.
barricade, 1570 ; dit ainsi parce que les
barricades sont souvent faites avec des BASANE, 1260 (vers 1150 bazenne).
tonneaux ou barriques ; formé par l’inter- Empr. de l’a. pr. bazana, empr. lui-même,
médiaire d’un verbe barriquer «barricader » par l'intermédiaire de l’esp. badana, de
usuel au xvie s.; d’où barricader, 1588 l'arabe bitäna « doublure de vêtement ». —
(E. Pasquier). L'’it. barricata est empr. Dér. : basané, 1510 ; basaner, id.
du mot français. BASCULE, v. cul.
BARRIR, 1546 (Rab.). Empr. du lat. BASE, x11°, mais rare avant le xvi® s. ;
barrire. — Dér. : barrissement, fin xixe. souvent masc. alors. Empr. du lat. basis
BARTAVELLE, « grosse perdrix rouge », (mot grec, propr. « action de marcher »,
1740. Empr. du prov. bartavelo, de même puis « endroit sur lequel on marche, point
sens, d’abord « bavard », par application d'appui »). — Dér. : baser, 1787, une pre-
de l’occitan bartavelo « claquet de moulin » mière fois en 1613 ; basique, xvre.
aux personnes bavardes, en a. pr. bartavela
BASE-BALL, 1889. Empr. de l’angl.
«loquet, anneau de verrou », qui représente,
d'Amérique (propr. « balle à la base »).
avec altération de la syllabe initiale, le lat.
pop. *verlabella, transformation de verli- BASILIC, reptile fabuleux, xtr° (en outre
bulum « articulation », v. verveux. L'oiseau -isc et baselique). Empr. du lat. basiliscus
a été nommé ainsi à cause de son cri, (du grec -iskos, propr. « petit roi », v. le
v. crécelle. Du même type lat. vient le fr. suiv.; ainsi nommé à cause des vertus
vertevelle, xir1*, mot. techn. désignant qu’on lui attribuait). Au xvi® s. désignait
« une charnière de gouvernail » ou « un en outre une sorte de gros canon, v. couleu-
anneau maintenant un verrou » (autres vrine.
formes altérées : -nelle, -relle) ; la forme
vervelle, qui représente un *vertibella, vit BASILIC, plante, 1425. Empr. du lat.
du x1re au xvirie et est encore attestée dans de basse ép. basilicum (1ve s.) (du grec
les parlers. -ikon, neutre pris substantiv. de l’adj.
basilikos « royal »).
BARYTE, 1787 (G. de Morveau). Dér.
sav. du grec barys « pesant ». BASILIQUE, 1° Terme d’antiquité ro-
maine, 1549 ; 2° Terme de christianisme,
BARYTON, voix d'homme, 1768. Empr. 1495. Empr. du lat. basilica aux deux
du grec baryionos « dont la voix aunton sens (du grec basiliké, sous-entendu sioa
grave »; terme de grammaire, 1655. « portique de l’archonte-roi »), qui a servi
BARYUM, 1829. Formé comme baryte à Rome à désigner un vaste édifice, sur le
par le chimiste anglais Davy, en 1808. forum, à la fois tribunal et centre d’affai-
res ; mais on ne sait pas bien pour quelle
BAS. Lat. de basse ép. bassus (Gloses), raison basilica a été employé pour désigner
d’origine obscure, attesté au sens du fr. les églises chrétiennes ; serait-ce que la basi-
au vin s. (Gloses de Saint-Gall), antér. lica de la maison des patriciens romains a,
« épais, gras » ; en lat. class. seulement sur- de bonne heure, servi au culte ou s'agit-il
nom. It. basso, a. pr. bas. — Dér. : bas, d’une comparaison des grandes basiliques
subsi., « vêtement couvrant le pied et la païennes avec les églises chrétiennes ? En
jambe », vers 1500, issu de bas-de-chausses, tout cas, la fondation de la Basilica Cons-
V. chausse; aujourd'hui assez répandu tantini à Jérusalem sur le tombeau du
dans les parlers gallo-romans, cf. la forme Christ a joué un grand rôle dans la diffu-
deba(s), Languedoc et régions voisines sion du mot, cf. aussi basoche.
(comp. l’adv. languedocien debas «en bas ») ;
toutefois chausse est encore usuel dans une BASIN, 1642 (en 1396 basine). D'abord
grande partie des parlers gallo-romans. au xIV* s. et encore dans Oudin, bombasin,
Bas-bleu, 1801, est traduit de l'anglais dont basin est une réduction, la première
blue-siocking, 1757, nom donné au salon sSyllabe ayant été prise pour l’adj. bon.
littéraire de Lady Montague, à cause d’un Bombasin est empr. de l’it. bambagino,
de ses familiers, Stillingfleet, brillant cau- dér. de bambagia « coton » (une forme it.
seur, qui se singularisait par son costume, bombage permet de rétablir des formes
notamment par ses bas bleus, puis à des avec bom-, qui expliquent mieux la forme
clubs de même genre, puis à des femmes fr.) ; bambagia est issu, par modification
dont on veut raïller les prétentions litté- de la terminaison, du lat. de basse ép. bam-
raires ; basse, terme d’hydrographie, 1552 bax (mot grec : « coton », de la famille de
(Rab.); bassesse, x11°, jusqu’au xvie s. bombyx « ver à soie » et « soie », v. bombyx,
surtout basseur ; basset, adj., x11°, subsi., d’où vient la syllabe initiale de bombage).
sorte de chien, au xvi® s. — Comp. : Nom- L’it. basino est repris au fr.
breux mots avec bass(e), comme premier BASKET-BALL, 1898. Empr. de l'angl.
élément ; contre-bas (en), x1ve:; soubasse- d'Amérique (propr. « balle au panier »).
ment, 1362. V. basse, basson.
BASOCHE, xve, Probabl. identique à
BASALTE, 1581. Empr. du lat. basanites l’a. fr. basoche « basilique de Saint-Martin,
(du grec bdsanos « pierre de touche »), à Tours » (ce mot est très répandu comme
qui se trouve dans Pline, mais qui, dans les nom de lieu dans la France septentrionale,
61 BATAILLON

et surtout dans l'Ouest, ce qui montre tide, un ouvrage de fortification tempe-


qu’il a désigné les églises commémoratives raire, d’où « château fort », xive (la Bastillo
en général, par imitation de celle de Tours), de Paris fut commencée sous le règne de
du lat. eccl. basilica, v. basilique. Peut-être Charles V).
basoche a-t-il aussi désigné l’ensemble des
ecclésiastiques attachés à une église, dési- BASTILLE, v. le préc.
gnation qui aurait pu être appliquée aussi BASTINGAGE, 1747. Dér. de bastinguer,
par la suite à l’ensemble des clercs d’une 1634, dér. lui-même de bastingue, id. « toile
cour de justice; mais aucun document matelassée qui servait pour le bastingage » ;
n’est venu jusqu'ici corroborer cette ma- celui-ci est empr. du prov. bastengo, de
nière de voir. — Dér. : basochien, 1480. même sens, qui dérive, avec le suff. d’ori-
BASQUE, 1532. En outre baste, 1396, gine germ. -inga, de basto « bât », c’est-à-
encore en 1642 (Oudin). Désignait d’abord dire « qui garnit comme un bât », plutôt
une partie d’étoffe, qui pendait au bas du que de bastiire, peu usuel en it., v. bâtir.
corps du pourpoint. Altération, par croise- BASTION, vers 1500. Autre forme de
ment avec le suiv., de basie, d’origine incer- bastillon, dér. de basiille, plus usuel au
taine, empr. du prov. basta, qui signifie à xvie s. que bastion; l’it. bastione vient du
la fois « couture à longs points » et « trous- fr., et l’it. bastia est issu de baslione. —
sis, plis faits à une robe pour la relever », Dér. : bastionner, 1611.
d’où le sens du fr. peut être issu, plutôt
que de l’it. ou de l'esp. basta, qui n’ont BASTONNADE, 1482. La forme ne per-
que le premier sens; ces trois formes met pas de décider si le mot est empr. de
représentent très probablement un mot l’it. basionata, de l’esp. basionada ou de
déjà lat. pop. tiré de *bastjan « bâtir des l’a. pr. bastonada; l’origine it. de nom-
pièces d’étoffe taillées », v. bâtir ; l’a. fr. breux termes militaires, empr. au xve et
possède aussi basle « faufilure, bâti », x1° au xvi® s., donne à penser qu'il en est de
(Raschi), mais basle, basque avec s pro- même de bastonnade.
noncé ne peuvent pas le continuer direc- BASTRINGUE, 1802. Peut-être emploi
tement. fig., par plaisanterie, de basiringue « ma-
BASQUINE, 1563, en outre vasquine, chine à imprimer les toiles au cylindre »,
1534 (Rab.), fréquent au xvi® s., encore inventée en 1799 par Widmer (né en Suis-
attesté au xvrre s. Empr. de l’esp. basquina, se), neveu d’Oberkampf (né en Franconie),
dér. de basco « du pays basque ». le fameux fabricant de toiles peintes de
Jouy-en-Josas (près de Versailles). L’ori-
BASSE, terme de musique, xvii® ;mais gine des deux fabricants et la forme du
déjà basse-contre, opposé à haute-contre, mot invitent à chercher une étymologie
xvi® (Marot) ; basson, 1613. Empr. de lit. germanique, mais, jusqu’à présent, on n’a
basso, bassone, v. bas; cf. aussi contre- rien trouvé.
basse, 1512, empr. de l’it. contrabbasso.
BÂT. Lat. pop. *bastum, subst. verbal
BASSE, terme d’'hydrographie, v. bas. de *basiäre « porter », v. baste, propr. « ce
qui porte », dès lors concurrent de sagma,
BASSESSE, BASSET, v. bas. v. somme, longtemps plus usuel, et qui
BASSETTE, 1674. Empr. de lit. bas- pouvait signifier plus précisément la char-
selta, dér. de basso. ge ; le lat. class. clitellae a disparu de par-
tout. Ces termes nouveaux, v. aussi barde,
BASSIN. Lat. pop. *baccinum, qu’on res- viennent du grec ou de l’arabe, c’est-à-dire
titue d’après bacchinon, vie (Grégoire de de régions où on se sert davantage de bêtes
Tours) « base de bois », mot de la famille de bât. It. esp. basto, a. pr. bast. — Dér. :
de bac, cf. a. pr. bassin. — Dér. : bassine, bâter, xvi® (Marot); bâtier, vers 1300;
1500 ; bassiner, xiv°, bassinoire, 1454; bâtine, 1549 ; débâter, 1474 ; embâter, xv°.
bassinet, x11°.
BATACLAN, 1783. Mot de formation
BASSON, v. basse. onomatopéique, exprimant le bruit d’ob-
jets qui tombent, qu'on déplace, etc., cf. le
BASTE, 1546 (Rab.). Empr. de l’it. basta, picard paitaclan « bruit d’un corps qui
3e pers. sing. indic. prés. du verbe basiare tombe ».
« suffire », d’où bastler, usuel au xvi® s.
(bastant, d’après basianie, a duré jusqu’au BATAILLE. Signifie aussi « ordre d’une
XVIIe s.), cf. aussi esp. bastar, de même armée rangée pour combattre », d’où « corps
sens ; probabl. lat. pop. *basiäre, propr. de troupe », d’où l'expression bataille ran-
« porter », d’où « supporter, durer » (sens gée, vers 1350. Lat. de basse ép. ballälia,
attestés en anc. it.), « fournir en suffi- issu de batluälia, plur. neutre, attesté seu-
sance » ; *basiare se rattache au grec bas- lement au sens de « sorte d'escrime », dér.
lazein « porter un fardeau » (cf. le grec de baïtuere, v. battre. It. baïtaglia, a. pr.
moderne bastô). L’a. pr. basiar, assez rare, batalha (d’où l'esp. batalla). L’angl. balile
est probabl. aussi empr. V. bât. vient du fr. — Dér. : batailler, x11° ; batail-
leur, 1213.
BASTIDE, xive (Bersuire). Empr. de
l’a. pr. bastida dér. de bastir, v. bâtir. De BATAILLON, 1542. Empr. de lit. bai-
ce même mot est issu, par substitution de taglione « grand escadron de soldats », aug-
suff. (en raison de la rareté de la terminai- ment. de battaglia « troupe », v. le préc.
son -ide en fr.), bastille, 1370 (écrit basse- A passé du fr. dans les langues voisines :
lille) ; a signifié au moyen âge, comme bas- all. Bataillon, angl. baiitalion, etc.
BÂTARD 62

BÂTARD, x1e. En a. fr. aussi fils, fille tendrait un verbe signifiant « s’agiter com-
de bast (souvent altéré en bas), terme de me un moulin ». — Dér. : batifolage, 1532 ;
féodalité, désignant l’enfant reconnu d’un batifoleur, 1835.
noble qui l’a eu d’une épouse illégitime,
où bast représente probabl. le germ. *bansti BATIK, xxe (une 1r'e fois en 1845 dans
« grange », cf. gotique bansis, de même le récit d’un voyage en Chine), esp. de soie
sens. On peut donc considérer bastard peinte. Empr. avec le procédé, du javanais
comme un dér. de ce bast, qui aurait en- batik, au moment de l'Exposition de 1900,
suite éliminé fils, fille de bast; la princi- où des danseuses javanaises eurent un
pale difficulté vient de la disparition de l’n grand succès.
de *bansli, qu’on peut toutefois attribuer BÂTINE, v. bât.
à l’accumulation insolite des consonnes. —
Dér. : bâtardise, xvre (Du Bellay), a rem- BÂTIR. Ancien aux deux sens de « cons-
placé l’a. fr. bastardie; abâtardir, xtr°; truire », xi1° {Voyage de Charlemagne), et
abâtardissement, xrve. d’ « assembler les pièces d’un vêtement qui
a été taillé », xrr°. Représente le francique
BÂTARDEAU, « sorte de digue, souvent *bastjan, cf. anc. haut all. bestén « lacer »,
provisoire », vers 1450. Dér. de l’a. fr. bas- de la famille de l’all. Basti « liber, écorce »,
lard, 1399, probabl. le même que le préc., cf. de même it. imbastire « faufiler », esp.
dit par figure d’une construction bâtarde, port. bastidor « métier à broder ». Le verbe
par opposition à la rive naturelle, cf. les germ. a été introduit avec le sens de « tra-
expressions épée, porle bâtarde, etc. On Vailler avec de l'écorce, tresser », d’où,
l’explique moins bien comme un dér. de d’une part, celui de « rassembler des piè-
bâte, 1309, « sorte de support » dans di- ces »; d’autre part, les Germains faisant
verses techniques, post-verbal de bdtiir. souvent les parois de leurs maisons avec
Bardeau, qu’on trouve au sens de « bâtar- de l’écorce ou d’autres matériaux tressés,
deau », 1439, et bardis, xvi®, de même celui de « bâtir », sens propre au gallo-
sens, encore usité dans la langue de la ma- roman, Cf. a. pr. bastir ; de ces différents
rine, dérivent de barde « planche servant sens est issu celui de « disposer, prépa-
à barrer ou à séparer ». rer », etc., fréquent en a. fr. et en a. pr.,
et qui existe encore dans l’esp. bastir. —
BÂTE, v. le préc. Dér. et comp. : bâti, subst., vers 1698;
BATEAU, vers 1138. Dér. de l’anc. angl. bâtiment, xr1°, « action de bâtir ». sens
bât (d’où angl. boat), avec un suffixe destiné moderne au xvir® s.; bâtisse, 1701 ;
à donner plus de corps au mot ; l’it. battello, bâtisseur, 1539 ; débâtir, 1598, « démolir »,
l’esp. batel viennent du fr. — Dér. : bate- comme terme de la technologie de la cou-
lage, 1443; batelée, xrr1°; batelet, id. ; ture, xuire ; rebâtir, xvi®, au sens moderne,
batelier, id. ; batellerie, 1863, déjà en 1390. « remettre en état », xr1e ; malbâti, 1546.
BATELEUR, xu1re. Dér., comme le verbe BATISTE, 1401 fsoye batiche ; en 1536
basieler, attesté seulement au xvie s. au encore, oile de baptiste). Tiré de Baptiste,
sens de « faire des tours d'adresse », de nom du premier fabricant de ce tissu, qui
l’a. fr. baastel, xrr1e, « instrument d’esca- vécut au xr11e s., à Cambrai.
. moteur », peut-être « marionnette », cf. a.
BÂTON, vers 1080 (Roland). Dér. du
pr. babasiel, bag.…., bav.., de même sens; lat. de basse ép. basium, 1v° s., qui est
probabl. du même radical que l’anc. fr. peut-être, comme bdt, le subst. verbal de
baiasse « servante » ; mais les langues indo- *bastäre « porter », v. baste, au sens de « ce
européennes ne connaissent pas le radical
qui porte, soutient ». La formation du dér.
bak- qu’il faut supposer pour ce groupe dès le latin est due probabl. au désir d’évi-
de mots. ter l’'homonymie de bastum « bâton » et
BATH, « agréable, chic », 1804. Origine de *bastum « bât ». It. basione, esp. bastén.
inconnue, — Dér. : bâtonner, xurre ; bâtonnet, id.;
bâtonnier, 1332, dér. de béton au sens de
BATHYSCAPHE, 1954. Comp. du grec
bathÿs « profond » et skäphè « bateau », « hampe », propr. « porte-bannière d’une
confrérie » ; le bâtonnier des avocats por-
créé par l’inventeur de cet appareil de tait le « bâton » ou bannière de Saint-
plongée, A. Piccard. Nicolas, au moyen âge patron de la confré-
BÂTIER, v. bât. rie des avocats, confirmée par Philippe VI,
en avril 1342.
BATIFOLER, 1576 (Baïf) ; mais le dér.
batifolage est déjà de 1532 (Rab.), d’après BATRACIEN, 1800. Dér. sav. du grec
le titre plaisant : R. Lullius, De batisfola- batrakhos « grenouille ».
giis principium (ou principum). Souvent BATTRE. Lat. fam. baliuere, devenu
considéré comme dér. de lit. baïtifolle batlere « battre, écraser dans un mortier,
«rempart, bastion » (comp. de l’impér. de s’escrimer (en parlant de gladiateurs) ».
baitere « battre », et de folle « fou », c'est-à- Les nombreux sens techn. du fr. : « battre
dire « amuse-toi, fou ») (sur le rempart), le blé, le chanvre, fouler le drap, battre la
sans qu’on voie clairement la raison de faux », existent également plus ou moins
cette dénomination, mais il est étonnant dans les autres langues romanes, si bien
que le verbe n'existe pas en it. ; même diffi- qu'on peut en conclure qu'ils apparte-
culté pour rattacher le verbe fr. à l’a. pr. naient déjà partiellement au lat. — Dér.
batifol « moulin à battre les draps », etc. et Comp. : battage, 1329, au sens de « ré-
(dont les rapports avec le mot it. préc. ne clame tapageuse », xix°, issu de battre la
sont pas éclaircis) et à côté duquel on at- grosse caisse (dans une parade, etc.) ; bat-
63 BAYER

tant, xir1e ; batte, 1393 ; battement, x11°; d’après l’irlandais balc, de même sens, d’où
- batterie, vers 1200 (comme terme d’artil- « croûte que forme la terre séchée », sens
lerie, empr. par l’all. balierie et l’angl. bat- attesté en irlandais et que le fr. bauche
lery) ; contre-batterie, 1580 (Montaigne); permet d'attribuer déjà au gaulois. —
batteur, vers 1200 ; battoir, 1307 ; battue, Dér. : bauger (se), xvre.
vers 1500; imbattable, 1907; contre- BAUME, « substance odorante ». En
battre, vers 1200 ; courbatu, xv°, comp.
a. fr. et jusqu’au xvie s., fréquemment
de court, pris adverbialement, propr. basme d’après le lat. Lat. balsamum (du
« battu à bras raccourcis », courbature, grec balsamon). It. balsamo, esp. bälsamo,
xvi®, courbaturer, 1842; débattre, x1° a. pr. balme, basme. — Dér. : baumier,
(Alexis), d'abord « battre fortement », x111e (sous la forme basmier) ; embaumer,
d’où «se débattre », vers 1175, «contester », x (-asm-);, embaumement, xvI®; em-
xrr1e, d’où débat, x111°; ébattre (s’), x11°,
baumeur, 1956.
d’abord «battre, agiter, divertir », d’où ébat,
xi11°, ébattement, id.; entrebattre (s’), BAUME, « grotte ». En fr. n’est usité
x11e ; rebattre, xive. V. combattre. qu’en parlant de la Sainte-Baume (près de
Toulon), rare en a. fr., mais fréquent au
BAU. D'abord balc, xiri°, puis bauch xvie s. Empr. du gaulois balma, attesté au
« poutre ». Du francique *balk, de la même vie s. au sens de « grotte habitée par des
famille que l’anc. haut all. balko, all. mo- ermites »; cf. a. pr. balma, de même sens ;
derne Balken, v. balcon. — Dér. : débau- répandu comme nom de lieu sur le terri-
cher, vers 1300 (se débaucher « faire défec- toire qui a été habité par les Celtes : Gaule,
tion »; sens moderne, xv°); débauche, Catalogne, Nord de l'Italie et régions ger-
1499 ; débaucheur, fin xvi® (Brantôme) ; maniques de l'Ouest.
ébaucher, xr1° (d’après le dér. esbaucheis),
ébauchage, xvi*, ébauche, 1643 (Rotrou), BAUXITE, 1847. Dér. de Les Baux,
ébauchoir, 1680 ; embaucher, 1564, em- nom d’un village des Bouches-du-Rhône,
bauchage, 1752, embauche, fin xix°, em- où se trouvent des carrières de ce minerai.
baucheur, 1680. Le sens propre de débau- BAVARD, etc., v. bave.
cher, ébaucher, était « dégrossir du bois
pour en faire des poutres », d’où, d’une BAVAROISE, 1762. Fém. de bavarois;
part, pour débaucher « fendre, séparer », l’infusion de thé aromatisé avec du lait et
d’où « détourner de son travail », puis « dé- sucré avec du sirop de capillaire (c'était
tourner de son devoir » ; d’autre part, pour alors le sens de ce mot) a été mise à la
ébaucher « dégrossir un ouvrage ». Le sens mode au café Procope par des princes de
propre de celui-ci est attesté par le dér. Bavière.
esbaucheis du xr1e s. et desbaucher du bois
est donné par Robert Estienne, 1539; la BAVE. En outre en a. fr., mais rarement,
date récente de ce texte, postér. au sens beve, rapidement supplanté par bave, refait
fig., et la rareté des exemples sont dues sur le verbe baver. Signifie souvent « babil,
au caractère techn. de ce sens ; embaucher bavardage », en a. fr. et jusqu’au xvi® s.
est formé sur débaucher. L’a. fr. esboschier (encore signalé au xvrie s. par Furetière).
« émonder, tailler », dér. de bois, s’est pro- Lat. pop. *baba, mot onomatopéique, v.
babl. fondu avec ébaucher. babiller, exprimant le babil accompagné
de bave des petits enfants. It. bava, esp.
BAUCHE, v. bauge. baba. — Dér. : baver, xive, fréquent au
sens de « bavarder » jusqu’au xvie $.,
BAUDET, 1534 (Rab., comme nom pro- bavard, xv°, bavarder, 1539, bavardage,
pre). Dér. de l’a. fr. bald, baud « fier, plein 1647 ; bavette, x111° ; baveux, x11° ; bavo-
d’ardeur », empr. du germ. occidental cher, 1684 ; bavure, xIve.
*bald « hardi », cf. anc. haut all. bald « id ».
et angl. bold « id. », d’où aussi a. pr. baut, BAVOLET, v. volet.
it. baldo « hardi ». L'emploi au x111° s. du BAYADÈRE, 1782 (en outre balliaderes,
nom propre Baudouin, encore usité au 1770). Empr. du port. bailadera « dan-
XVIe s., pour désigner l’âne, a pu favoriser seuse », appliqué aux danseuses profes-
la formation de baudet; maïs il semble
sionnelles de l’inde; dér. de bailar « dan-
bien que baudet soit un dér. plaisant de ser », également esp., qui se rattache à bal-
bald, baud, au sens de « lascif ». lare, v. bal. è
BAUDRIER, 1387. Altération, par subs- BAYART, v. bard.
titution de suff., de l’a. fr. baldre(i), cf. de
même a. pr. baldrei, baldrat, d’origine in- BAYER. En a. fr. baer, beer, encore au
connue. Le moyen haut all. balderich (cf. xvie s., usuel au sens d’ « être ouvert »,
aussi angl. baldric) vient probabl. du fr. surtout en parlant de la bouche, d’où « as-
pirer à »; aujourd’hui ne s'emploie guère
BAUDRUCHE, 1762 (antér. bodruche,
que dans la locution bayer aux corneilles.
1690). Étymologie inconnue. Souvent confondu, depuis le xvI1° 8., gra-
BAUGE, 1539. Variante de bauche, xIv®°, phiquement et dans la prononciation, avec
et bauke, xr1e (forme du Nord-Est), « sorte bäiller. Lat. pop. batare, attesté dans une
de mortier fait de terre et de paille ha- glose du vire s., au sens de « bâiller »,
ühée », propr. « mélange boueux » (on verbe onomatopéique, exprimant le bruit
trouve aussi bauge, au même sens, 1690), qu’on fait en ouvrant la bouche. (On a
dit par extension du gîte fangeux du san- l’onomatopée bai à basse époque.) Répandu
glier, mot d’origine gauloise pour lequel on dans les parlers gallo-romans, surtout dans
restitue un adj. gaulois *balcos « fort », des dér. It. badare « lanterner, faire atten-
BAYER 64

tion », 4. pr. badar «rester bouche bée, etc. ». ainsi éliminé des mots d’origine latine
— Dér. : baie, « ouverture », x11° (baee), de radicaux variés : serorge « beau-frère »,
part. fém. pris substantiv., a signifié aussi encore au Xv°s., lat. de basse ép. sororius
jusqu’au xvirie s. « action de rester bouche « mari de la sœur » (Inscriptions), fillâtre
bée, d’attendre vainement », d’où égale- « beau-fils, belle-fille », encore au xve s.,
ment « tromperie » ; le part. fém. subsiste lat. de basse ép. filiaster, -tra (Inscriptions ;
en outre dans la locution bouche bée; encore très répandu ailleurs, cf. it. fi-
béant, xr11°. — Comp. bégueule, 1690 (cf. gliasiro, -a, esp. hijastro, -a), suire « beau-
bee gueule, 1470), bégueulerie, 1783 ; v. ba- père, belle-mère, père ou mère par al-
daud, badin, balise, baliveau, bard, ébahir. liance », lat. sûücer (ou sôcrus, à basse
ép., Inscriplions), sûcera ou sôcra, tous
BAZAR, xvie (en outre -ard, 1611 ; -are, deux de basse ép. (id., cf. it. suocero,
1554 ; baasas, 1528 ; bathzar, 1432). Empr., -&, eSp. suegro, -a), V. aussi bru, gendre,
probabl. par l’intermédiaire du port. qui marâtre, parâtre. Embellir, x11°; em-
a trouvé le mot dans les Indes, du persan bellissement, 1270 ; embellie, 1753.
bäzär « marché public, rue de boutiques ».
La réputation du bazar de Constantinople BEAUCUIT, v. sarrasin.
a contribué à la diffusion du mot. A pris
au xix° 5., le sens de « grand magasin ven- BEAUPRÉ, 1382. Empr. du néerl. boegs-
dant des articles de tout genre », qui est priet (plutôt que du moyen angl. bousprei,
devenu européen. — Dér. : bazarder, fr. angl. moderne bowsprit) ; a passé dans les
pop., 1846. langues voisines : it. bompresso, esp. bau-
pres, etc.
BÉANT,, v. bayer.
BÉBÉ, 1842, mais antér. Bébé, nom d’un
BÉAT, 1532 (une première fois beate nain célèbre (1739-64) de la cour de Sta-
au xrr1° 8.); béatifier, xrve (Oresme); béa- nislas Leczynski. Mot onomatopéique, v.
tifique, 1529 ; béatitude, x111°. Empr. du babiller, comparable à l’angl. baby, empr.
lat. eccl. bealus, beatificare, -ficus, -tudo. lui-même en 1841 ; mais bébé ne doit pas
Beatus, beatiludo, en lat. class., se disent être considéré comme une adaptation de
du bonheur parfait. celui-ci, malgré la date récente à laquelle
il a été enregistré ; tout au plus baby a-t-il
BEAU. Lat. bellus, en lat. class. « joli, contribué à la diffusion de bébé.
gracieux », en parlant des femmes et des
enfants, ironique en parlant des hommes ; BEC. Lat. beccus, indiqué comme gau-
pulcher, qui était le plus proche de « beau » lois par Suétone ; a supplanté au sens de
et decorus, qui qualifiait la beauté de ce « bec » le lat. class. rostrum. It. becco. —
qui est convenable, décent, ont disparu au Dér. et Comp. : abecquer, xr1° (en outre
profit de bellus, de sens moins élevé, d’où abecher, encore dans Furetière) ; bécasse,
aussi it. bello ; formüsus « beau physique- XIIe, dans presque tous les parlers gallo-
ment » a survécu dans le roumain frumos romans, d’où bécasseau, 1537, bécassine,
et l'esp. hermoso. Concurrencé, dans le 1553; bécot, 1864, « baiser », dér. de
Midi, par divers adj. : brave, gent, gentil, bec, au même sens, d’où bécoter, id. ; bec-
poulit (= fr. poli), pour les mêmes raisons quée, 1543, becquer, vers 1330, qui ont
qui ont fait triompher bellus et formosus. remplacé bechée, -er, encore dans Fure-
— Dér. : beauté, vers 1080 (Roland, beltet), tière ; béquet, x1r1° ; béqueter, 1451 ; bé-
cf. aussi a. pr. beltaï, peut-être déjà lat. quille, 1611, probabl. d’après l’a. fr. anille,
pop. *bellilätem, acc. de *bellitas : belette, encore dans quelques patois et dans divers
XIIIe : « une mutoille que aucuns autre- emplois techn., lat. pop. *anaticüla, lat.
ment nomment bellette »; ainsi nommée class. -Îc-, propr. « petit canard », d’où
par un euphémisme d'origine supersti- béquillard, 1656, béquiller, id. ; embecquer,
tieuse, pour détourner les méfaits de cet 1611; rebéquer, 1330 ; bec-de-cane, xvr®
animal, cf. de même danois den kjoenne « la (Paré); bec-de-corbin, 1453, comp. de
belle », anc. angl. fairy « jolie », esp. coma- corbin « corbeau », autre dér. de corp, v.
dreja « petite commère », etc. (le rouergat corbeau ; bec-de-lièvre, xvie (Paré); bé-
poulido « jolie » est moins probant, parce dâne, 1281, comp. d’ane « canard » ; altéré
qu’il peut être fait sur le fr.), Lucques bel- par les lexicographes en bec d'asne, 1611,
lola, de *bellula, qui remonte à l’époque d’où l’accent circonflexe, le deuxième élé-
latine. L’a. fr. mostoile, lat. mustéla (cf. ment du mot n'étant plus compris ; bé-
aussi à. pr. mostela) est encore vivace dans jaune, xrr1e (Rose : bec jaune).
les patois de l’Est, du Nord-Est et de nom-
breux patois méridionaux ; bellâtre, 1546 BÉCANE, 1890, « bicyclette ». Antér.
(Rab.) ; bellot, 1552. — Comp. : Nombreux
« machine à vapeur », surtout en mauvais
comp. avec beau, belle, comme premier état, 1870. On a proposé d'y voir le fém.
élément ; beaucoup, v. coup. Dans les noms pop. de l’argot bécant (cf. géane « géante »)
de parenté : beau-fils, vers 1470 ; beau- « oiseau de basse-cour », propr. « qui bec-
frère, 1386; beau-père, 1466: beaux-
que », par Comparaison plaisante de l’oiseau
parents, 1377 ; belle-fille, vers 1470 ; belle- qui crie et de la machine qui grince.
mère, 1429 ; belle-sœur, 1423, le dévelop- BÉCARRE, 1432;
pement de beau est dû à son emploi usuel
bémol, 1466, d’a-
bord bemoulz, xive. En outre b quarre,
au moyen âge comme terme d'affection et b mol, 1546 (Rab.), encore dans Furetière,
de respect, cf. par exemple beaus dous Bécarre est adapté, d’après carré (b carré,
amis, etc. Le succès de ces comp. tient rare au xvi® s.), de l’it. b quadro, aujour-
probabl. à ce qu'ils avaient l'avantage d’hui plutôt biquadro « b carré », ainsi
d’être formés de la même manière ; ils ont nommé parce que le signe b, qui désignait
65 BÉJAUNE

le bécarre (d’abord de la note si), et qui BEFFROI, xrrie (antér. berfroi, xire).
était une modification du b désignant cette Empr. du moyen haut all. bércvrit, propr.
note, avait une panse carrée, Bémol, en « ce qui garde (cf. all. bergen) la paix, la
lat. médiéval b rolundum « b à panse sécurité (cf. all. Friede) ». L’empr. ne peut
ronde », est empr. de l'it. b molle, aujour- pas remonter à l’époque de l'invasion des
d’hui bimmolle, ainsi nommé par opposi- Francs, car alors la guerre de siège se pra-
tion au bécarre, appelé aussi b durum ou tiquait à peine. Du fr. vient l’it. battifredo,
b dur ; d’où bémoliser, 1768. Le lat. médié- altéré d’après bailere « battre ».
val convient moins à l'explication des for-
mes françaises, car, à côté de b molle, on BÉGAYER, v. bègue.
ne trouve que b quadraium.
BÉGONIA, 1798. Nom créé par le bota-
BÉCASSE, v. bec. niste Plumier (1646-1706) en l'honneur de
BECFIGUE, 1539, en outre bequefigue, Bégon, intendant général de Saint-Do-
fréquent au xvi® s., et becafique, de même mingue (Haïti) au xvure s.
sens, encore dans Kuretière (qui écrit bec-
ca-). Empr. de l’it. beccafico, attesté au BÈGUE, 1313 (Ameline la begue). Tiré
début du xvi® s., comp. de becca, impér. de de l’a. fr. beguer, Xr11°, encore répandu dans
beccare « becquer », et de fico « figue ». les patois septentrionaux, peut-être d’un
néerl. *beggen « bavarder », qu'on restitue
BÉCHAMEL, 1742. Tiré de (Louis de) d’après le flamand beggelen, de même sens.
Béchamel, marquis de Nointel, nom d’un Devenu usuel en gallo-roman ; a supplanté
gourmet renommé de la fin du xviie s. les représentants du lat. class. balbus,
d’où a. fr. baube, a. pr. baup, it. balbo.
BÊCHER, xui° (bekent, 3° pers. du plur. V. béguine, ébaubir. — Dér. : bégayer,
de l’indic. prés.) ; bêche, xr1°. Seulement 1416, usuel dans les parlers gallo-romans,
gallo-roman, cf. a. pr. bessa et le fr. du d’où bégaiement, 1539.
XV® s. besse, auquel correspondent de nom-
breuses formes dialectales. Représente très BÉGUEULE, v. bayer.
probabl. un verbe lat. *bissicare, formé à
basse ép. sur un subst *bissa, dont le sens BÉGUINE, 1227. On met en doute l’exis-
aura été « (houe) à double pointe » ; comp. tence d’un prêtre de Liège, Lambert le
prov. moderne bes « fourchu ». Bègue ou L. Begh, qui aurait fondé à la
fin du xr1e s. le premier couvent de bé-
BÉCHEVET, v. tête-bêche. guines qui lui devraient leur nom. Peut-
être fém. de béguin, xir1°, « sorte de reli-
BÉCOT, v. bec. gieux », autre forme de begard; celui-ci
BEDAINE, 1400. Autre forme de l’a. fr. viendrait du néerl. beggaert « moine men-
boudine « nombril, ventre » (le simple boude diant » (d’où aussi probabl. begard, héré-
est très rare en a. fr., mais très usuel au- tique du xrr1° s.) ou se rattacherait au
jourd’hui en Champagne), qui appartient verbe *beggen, v. bègue, au sens de « mar-
à une famille de mots expressifs se rappor- motter des prières ». — Dér. : béguin, 1387,
tant à la grosseur ; d’où aussi bedon, x1ve. d’où embéguiner, 1558 (Bon. des Periers);
Très répandu dans les patois gallo-romans du sens de « se coiffer de quelqu'un », pris
sous des formes diverses pour désigner le par s’embéguiner au xvri® s. est issu, au
ventre, le nombril de l’homme et aussi des XIX°, béguin « amour passager » ; béguinage,
animaux (tels que le veau, etc.), v. bouder, 1261.
boudin. Également attesté dans les parlers
italiens. Au xvi* s., on trouve aussi bedon- BEIGE, x1r1° (écrit alors beges). Malgré
daine, 1532 (Rab.), encore usité en Nor- le sens propre de l’adj. « qui a la couleur
mandie, dû à un croisement de bedon et de de la laine naturelle » (cf. Littré : « usité
bedaine; le sens de « machine à lancer des dans la locution : laine beige ») et son
projectiles » vient de dondaine, de même emploi pour désigner des étoffes de laine
sens, vers 1500, v. dondon. (cf. Académie, 1762 : « sorte de serge faite
avec de la laine »), il est difficile de consi-
BÉDÂNE, v. bec. dérer beige comme empr. de l’it. (bam)ba-
gia « coton », où la disparition de la syllabe
BEDEAU. Sens moderne, 1680 ; antér. initiale devrait être expliquée.
« sergent de justice subalterne », x11°, d’où
« huissier d'université », encore au xv1° 5. BEIGNET, xvie. Antér. bignel, 1314,
Empr., avec changement de la terminaison encore au xviie s., et buignet 1325. Dér.
en -el, du francique *bidal, de la famille de de buigne, xiv®e, d’où bigne, xive (Chr. de
l’all. Büllel « sergent, archer », anc. angl. Pisan), encore dans le Berry, en outre
bydel « messager » (d’où angl. beadle), cf. beigne, xvie « bosse à la tête venant d’un
aussi a. pr. bedel « sorte d’appariteur ». coup », d’origine inconnue ; le mets a été
Empr. au sens d’ « huissier d'université » : ainsi nommé à cause de sa forme ronde et
it. bidello, esp. bedel, all. Pedell. gonflée. Le simple et le dér. sont très ré-
pandus dans les parlers gallo-romans ; le
BEDON, BEDONDAINE, v. bedaine. simple existe aussi au sens de « bosse »
‘BÉDOUIN, 1546. Empr. de l’arabe be- dans les dialectes de l'Italie septentrionale ;
doui « habitant du désert ». cf. en outre esp. buñuelo « beignet ».

BÉE, v. bayer. BÉJAUNE, v. bec.


DICT, ÉTYM.
BÉLEMNITE 66

BÉLEMNITE, 1566. Empr. du grec be- BELOTE, début xx°, répandu depuis la
lemnités« pierre en forme de flèche (be- Grande Guerre. Le jeu paraît être d’origine
lemnon) ». hollandaise, mais il aurait été perfectionné
par F. Belot.
BÊLER. Parfois beeler, en a. fr. et au
xvi® s., par imitation onomatopéique ; la BELVÉDÈRE, 1512. Empr. de l’it. bel-
voyelle du fr. moderne s'explique de même. vedere, équivalent du fr. belle vue, formé
Lat. beläre, ou bäläre, tous deux onomato- de l’adj. bel(lo) « beau » et de vedere
péiques. It. belare, a. pr. belar, esp. balar. « VOir »,
Dans les parlers gallo-romans souvent au BÉMOL, v. bécarre.
sens de « pleurer ». — Dér. : bêlement, 1539.
BÉNÉDICITÉ, vers 1200. Empr. du lat.
BELETTE, v. beau. benedicite « bénissez », premier mot de la
BÉLIER, 1412. Autre forme, avec chan- prière qui porte ce nom.
gement de suff., de belin, x111°, qui passe BÉNÉDICTIN, x1r11e, rare avant le xvre.
pour emprunté, avec adaptation de la ter- Empr. du lat. eccl. benedictinus, dér. de
minaison, du néerl. belhamel « mouton Benedictus, saint Benoit, qui fonda cet
conducteur de troupeau », littéral. « mou- ordre au Mont-Cassin (région de Naples)
ton à la sonnette » (comp. de belle «eloche » vers 929. Le sens fig. dans les locutions :
et hamel « mouton »), ef. aussi angl. bellwe- travail de bénédictin, etce., est dû aux tra-
ther. Bélier, aujourd’hui dominant dans les vaux d’érudition des bénédictins de la
parlers septentrionaux, a refoulé belin vers congrégation de Saint-Maur, au xvrre et
l'Est et l'Ouest ; des représentants du lat. XVIIIe 8. — Dér. : bénédictine, sorte de
aries, cf. aussi a. fr. aroy, a. pr. arel, rare liqueur fabriquée à Fécamp dans un anc.
ailleurs, subsistent dans les patois méridio- couvent de Bénédictins, fin xixe.
naux : il y a en outre d’autres types qui
paraissent prélatins, comme en Italie et BÉNÉDICTION, x1r1°, mais rare avant
dans la péninsule Ibérique, v. mouton. le xvi® s. Empr. du lat. eccl. benedictio
(rare en lat. class. où il signifie « louange »;
BÉLIÈRE, xve. D'abord berliere, 1402, dér. du verbe benedicere, V. bénir) ; a rem-
«anneau portant le battant d’une cloche » ; placé une forme plus pop. de l’a. fr. benei-
très répandu dans les patois avec des sens çon, d’où benisson, fréquent au xvre s.,
divers. En raison de l’ancienneté et de la encore en 1613, cf. de même port. bençao.
diffusion des formes avec r, il est douteux
que ce mot soit dérivé du néerl. belle BÉNÉFICE, 1192 (« bienfait »). Empr.
« cloche », v. bélier. du lat. beneficium « bienfait », sens fréquent
jusqu’au xvrre s. Le sens d’ « avantage »,
BELINOGRAMME, 1948. Comp. de dans différentes locutions juridiques, d’où
Belin, le nom de l'inventeur de cet appareil, celui de « gain », qui paraît dater de la fin
et l'élément gramme, contenu dans télé- du xvrie s., vient de certaines acceptions
gramme, etc. de beneficium dans le droit romain. L’em-
ploi de bénéfice dans le droit féodal et eccl.
BÉLÎTRE, 1460 (belistre ;en outre blis- existe parallèlement dans le lat. médiéval
tre, xvi®, blitres, 1506 ; belleudres, 1408). beneficium, d’où il a passé en fr. — Dér. :
Très usuel au xvies. au sens de «mendiant, bénéficier, verbe, xXvirre, d’après le sens
gueux »; sens fig. dès le xvi® s. Probabl. d’ « avantage, gain »; au moyen âge et
empr. de l’all. Beïtler « mendiant » ou d’une jusqu'au xvie s., trans., au sens de « gra-
forme dialectale germ. ; l’altération peut üfier d’un bienfait, pourvoir d’un bénéfice
s'expliquer par une perception inexacte au ecclésiastique ».
moment de l'emprunt.
BÉNÉFICIAIRE, 1609 ; bénéficial, 1369 ;
BELLADONE, 1733 (aussi belladona ou bénéficier, subst., 1308. Empr. du lat. mé-
belle dame, 1762). Empr. du lat. des bota- diéval beneficiarius (le lat. class. a d’autres
nistes belladonna (Tournefort), empr. lui- sens), -ialis, dér. de beneficium, d’après ses
même de lit. belladonna, littéral. « belle sens juridiques au moyen âge, v. le préc.
dame » ; ainsi nommée parce qu’ «en Italie Le premier a pris récemment un sens nou-
on en compose une espèce de fard », 1762, veau, d’après l’expression représentalion à
Académie. bénéfice.
BELLÂTRE, v. beau. BENÊT, xvie (Marot : benest). Autre
BELLICISME, BELLICISTE, 1915 (une forme de benoil (benoist au xvi® s., au
première fois vers 1871, appliqué à Bis- moyen âge beneoit) « bénit », arch. depuis
marck, D.). Dér. sav. du lat. bellicus « belli- le xvrie s., lat. benedictus, part. passé de
queux », par opposition à pacifisme, paci- benediïcere, v. bénir; cf. de même it. bene-
fiste, un peu antér., fin xixe. dello, a. pr. benezech. Le sens de « sot,
niais », est dù à une allusion plaisante au
BELLIGÉRANT, 1744. Empr. du lat. passage de l'Évangile : « Heureux les pau-
belligerans, part. prés. de belligerare « faire vres en esprit », Mathieu, V, 3, v. pauvre ;
la guerre ». cf. de même esp. bendilo, cat. beneyl.
BELLIQUEUX, xve. Empr. du lat. bel- BÉNÉVOLE, 1285. Empr. du lat. bene-
licosus. volus.
BELLOT, v. beau. BENGALI, 1771. Empr. de bengali, adj.,
« qui est du Bengale (Nord-Est de l'Inde) »,
BELOCE, v. prune. d’une langue de l'Inde.
67 BERGER

BENIN, xv°; bénignité, xr1°. Bénin a cf. polonais barszez et, pour la forme, à
été tiré de benigne, x11°, masc. et fém., l’all. dialectal Berz, sorte de myrica, qui,
empr. du lat. benignus « bienveillant, bien- malgré la différence d’acception, peut être
faisant », sens de l’adj. fr. jusqu’au xvr1e8. ; le même mot, les deux espèces poussant
a pris alors un sens ironique. Bénignilé est dans des terrains marécageux.
empr. du lat. benignitas.
BERCER, xrre. Continue un verbe *ber-
BÉNIR, d’abord beneir. Lat. eccl. bene- liare du lat. de Gaule et d’Espagne (comp.
dicere, en lat. class. « dire du bien de quel- a. pr. bresar, cat. bressar, Salamanque
qu'un, louer », pris pour traduire le grec brezar), qui dérive d’un radical gaulois
eccl. eulogein, traduction de l’hébreu barak. *bertä- « secouer » (comp. irlandais bertaim
— Dér. : bénit, issu du part. passé du verbe « je secoue, je brandis »). — Dér. : berceau,
bénir ; quelquefois attesté au moyen âge, 1472 (« treillage en arc », 1538), auparavant
mais moins usuel, jusqu’au xvi® s., que berçuel, xi1e et déjà berciolum au vurre s.
beneoïit (benoist, xv1°e s., à la fois part. passé (aussi cat. bressol, anc. esp. breçuelo; vit
et adj., v. benêt) ; la distinction de béni, encore dans le Poitou : bressiou), dimin.
part. passé, et de bénit, adj., ne date que d’un subst. simple représenté encore par
du xix® s. Avec bénit ont été formées les l’a. fr. bers (qui vit encore en Normandie
expressions eau bénile, pain bénit (au xvres. et ailleurs), a. pr. cat. bres, anc. esp. brizo,
surtout eau benoiste, pain benoist) ; aujour- port. berço ; barcelonnette, xvir1e (en outre
d’hui on dit eau bénile dans les parlers sep- berc-, 1863), dér. analogues dans les pa-
tentrionaux comme en fr.; les parlers méri- tois ; ce mot ayant désigné aussi une cou-
dionaux ont des formes adaptées d’après verture d’enfant, on a proposé d'y voir un
le part. passé de bénir; on dit en outre dér. de Barcelone (Barcelone était réputée
aiga signada « eau signée », région langue- au xvirie s. pour ses couvertures de laine),
docienne et auvergnate. Sur eau bénile a mais, en ce cas, le sens « petit berceau »
été formé en a. fr. un dér. en -ier, eaube- ne s'explique pas; berceuse (de bercer),
noitier, 1281 (encore eaubénitier, XVIIe $.), 1835.
d’où, par suppression d’eau, benoitier, 1288
(benoistier, benestier, xvi®, d’où bénélier, BERCELLE, 1609. Par altération bru-
encore au xvii® s.), refait en bénilier, au celle, 1751 ; précelle, 1877. Peut-être du lat.
XVII $s., d’après eau bénite. — Dér. de basse ép. bersella (pour le lat. volsella) ;
bénisseur, vers 1870 (Flaubert) ; rebénir, il est toutefois surprenant de voir le mot
SIL Ne fr. attesté si tard seulement.
BENJAMIN, vers 1700 (Saint-Simon). BÉRET, 1835; écrit aussi berrel. Empr.
Tiré de Benjamin, nom du plus jeune fils du béarnais berret, ane. gascon berrel « bon-
de Jacob et son préféré. net », dér., comme l’it. berrella, v. barrette,
BENJOIN, 1519 (en outre benjoy, 1537). du lat. de basse ép. birrum (saint Augustin,
Altération du lat. des botanistes benzoe, Ive s.) « capote à capuchon », peut-être
empr. de l’arabe lubân djäwi « encens de d’origine celtique, en rapport avec l’anc.
Java »; mot européen, souvent altéré, cf. irlandais berr « court ».
par exemple angl. benjamin. V. benzine,
BERGAMASQUE, 1605, rare jusqu’au
benzoate. xixe s. Empr. de l’it. bergamasco « de Ber-
BENNE, v. banne. game », nom de la ville, d’où la danse est
originaire.
BENOÎT,, v. benêt.
BERGAMOTE, 1536, « variété de poire »,
BENOÎTE, nom de plante, 1545. Fém. d’où « citron doux », 1699. Empr. de l'it.
de l’anc. part. benoit, v. benêt, bénir.
bergamolta, altération du turc beg-armûdi
BENZINE, nom donné en 1833 par Mit- « poire (armûdi) du seigneur (beg, aujour-
scherlich au produit dénommé bicarbure d’hui bey, v. bey) » ; aujourd’hui encore les
d'hydrogène par Faraday en 1825 ; benzoa- Turcs ont une espèce de poire appelée Mus-
te, 1787 (G. de Morveau). Dér. sav. du lat. lafa bey armüûdé. On a proposé aussi d'y
médiéval benzoe, v. benjoin. voir un dér. de Bergama, forme arabo-
turque de Pergame (Asie-Mineure). Mot
BÉOTIEN, 1715 (Lesage). Les Béotiens européen.
passaient aux yeux des autres Grecs pour
avoir l'esprit lourd ; le grec Boiôlios « béo- BERGE (d’une rivière), 1398 (bergue).
tien » est attesté au même sens que le mot En outre esp. barga. Peut-être lat. pop.
fr. — Dér. : béotisme, 1834. *barica, d’origine celtique, qu'on restitue
BÉQUÉE, BÉQUET, BÉQUETER, BÉ- d’après le gallois bargod « bord ». On pro-
QUILLE, v. bec.
pose aussi un gaulois *berga, apparenté à
l’all. Berg et dont une variante vocalique
BERCAIL, xive. Forme normande ou *barga pourrait rendre compte de la forme
picarde, qui représente, avec changement esp.
de suff., cf. de même bergeail, bergail,
xvre, le lat. pop. *berbicale, dér. de berbex BERGE, v. barque.
« brebis » ; l’a. fr. dit aussi bercil, -gil, lat. BERGER. Lat. pop. berbicäarius (Gloses
pop. *berbecile ou -ic-; v. berger. de Reichenau, 1x°), dér. de berbex, v. brebis.
BERCE, 1698. Étymologie douteuse. A. pr. bergier, roumain berbecar. — Dér. :
Correspond, pour le sens, à l’all. Barisch, bergère, x11°, « sorte de fauteuil », 1746 ;
qui se retrouve dans des parlers orientaux, bergerie, xrr11° ; bergeronnette, 1549.
BÉRIBÉRI 68

BÉRIBÉRI, 1746 (écrit alors beriberrii). BERNIQUE, 1798 (en outre -icles, 1743).
Mot empr. d’une langue indigène de l’Inde Dialectal, normand ou picard, dér., par
par le médecin hollandais Bontius, en euphémisme, de bren, autre forme de bran,
1642 » De paralyseos quadam specie cf. emberniquer « salir », normand de la
quam indigenae beriberi vocant » (déjà vallée d’Yères, débarniquer « débarrasser »,
en 1617 berber chez le voyageur Mocquet). Saint-Pol (Pas-de-Calais). Berniquet, usité
au xvie s. dans les locutions envoyer, être
BERLE. Lat. de basse ép. berula (M. Em- au berniquel « ruiner, être ruiné, dans l’em-
piricus, v®, qui ajoute « graece cardaminem barras » (cf. s’en aller au bruniquel, xv°)
(sorte de cresson) », d’origine celtique, cf. est dér. de bernique, malgré la différence
gallois berwr « cresson de fontaine » ; cf. de des dates, un tel mot ayant pu être long-
même a. pr. berla, esp. berro « cresson »). temps oublié ou écarté par les lexico-
Encore usité dans d’assez nombreux patois graphes.
pour désigner diverses plantes mangées en
salade ou croissant dans des terrains hu- BERQUINADE, 1867. Dér. de Berquin,
mides ; mais, au sens propre, a cédé à nom d’un auteur d'ouvrages moralisateurs
cresson. pour la jeunesse (1749-1791).
BERLINE, 1721, breline, Saint-Simon. BERTHE, 1840. Tiré de Berthe (aux
Dér. du nom de la ville de Berlin ; mise à la grands pieds), nom de la mère de Charle-
mode vers 1670 par un architecte de l’élec- magne, célébrée pour sa sagesse et sa mo-
teur de Brandebourg. — Dér. : berlingot, destie, et dont le nom a été choisi par
1740, dér. de berlingue, xvir1e, formé sur suite pour désigner une pèlerine qui sert
des mots pop., tels que le manceau ber- à couvrir un corsage décolleté. V. oie.
lingue « sonnette ».
BÉRYL, v. bésicle.
BERLINGOT « bonbon », 1618 (alors ber-
linguaux). Peut-être empr. de l’it. berlin- BESACE. Lat. de basse ép. bisaccia
gozzo « sorte de gâteau », dér., comme ber- (Gloses), plur. neutre désignant les deux
lingaccio « Jeudi-Gras », de berlengo «table » poches de la besace, devenu fém., lat. class.
en argot (cf. aussi berlingare « bavarder le bisaccium, de saccus. It. bisaccia, esp.
ventre bien rempli »), v. brelan. bezazas (plur.), à. pr. beassa. Dans les par-
lers gallo-romans parfois au plur. Le lat.
BERLOQUE, v. breloque. a été repris sous la forme bissac, adapté
d’après sac, xv® (Charles d'Orléans).
BERLUE, xr11° (sous la forme bellues,
barlue, Xv° et XVIe s.; berlue, 1536). Re- BESAIGRE, v. aigre.
présente un latin du Bas-Empire *bisluca,
pour l’origine duquel v. bluette. — Dér. : BESAIGUË. Au moyen âge « sorte de
éberluer, 1530, aujourd’hui usité seulement hache d’armes », aujourd’hui terme techn.
au part. passé. Lat. pop. *bisacüta, fém. pris substantiv.
de l’adj. de basse ép. bisacütus (dit d’une
BERME, terme de fortification, 1611. hache), comp. de acülus, v. aigu ; dévelop-
Empr. du néerl. berm, propr. « talus, bord pement parallèle à celui de cet adj.
d’une digue ».
BESANT, v. peser.
BERNARD-L’HERMITE, xvie (Paré,
qui le signale comme languedocien, aujour- BÉSICLES, 1379 (« ung bezicle en une
d’hui bernat l’hermilo). Nom donné par queue d’or »). Issu de bericle, xi°, encore
plaisanterie à ce crustacé, parce qu’il loge attesté au xvie s. (pour le changement de
son abdomen dans des coquilles vides. r en s, v. chaise), altération, d'après la ter-
minaison d’escarboucle, de beril, xr1°, au-
BERNE, v. berner. jourd’hui béryl, empr. du lat. beryllus,
grec beryllos. La pierre précieuse appelée
BERNE, terme de marine, 1672. En béryl a servi à faire des loupes (encore au
outre pavillon en berne au début du xvrres. Xvi® s.), et le mot, par suite, a été employé
Peut-être empr. du néerl. berm « repli, pour désigner le cristal ou le verre de
bord », le pavillon en berne étant roulé sur lunettes, puis les lunettes elles-mêmes ; de
lui-même. là aussi l’anc. esp. beril(es) « lunette(s) »
BERNER, 1508. Probabl. identique à et l’all. Brille(n), de même sens.
berner « vanner le blé », 1611, lequel est BÉSIGUE, 1863 (en outre bésy). Étymo-
dér. de bren « son », cf. breneux. Berne logie inconnue.
« couverture sur laquelle on berne qqn. »
est dér. du verbe, non inversement. — BESOGNE, x11° (sous la forme -oigne).
Dér. : berneur, 1664, À souvent, au moyen âge, le sens de « né-
cessité, pauvreté » (comme besoin), d’où
BERNICLE, 1742. Mot dialectal de « chose nécessaire », d’où, d’une part, terme
l'Ouest, empr. du breton bernic; autres général désignant des objets de toute sorte
formes dont les rapports sont obscurs : (xvie), et d’autre part, « ce qu’on a à
-acle, -ache, barnache, etc., cf. aussi le faire ». Du francique *bisunnia, qui
moyen angl. bernak. Au Xvie s. besnesque, signifié « soin » (de *sunnia « soin », v.
dans un texte normand de 1557, barnacle soigner ; le préf. bi- a eu d’abord le sens de
(1932), désigne l'oie sauvage, aujourd’hui « près de, autour de », il a fini par ne plus
barnache, 1600, ou cravant ; cette désigna- être qu'un moyen pour renforcer le sens
tion est issue de la croyance populaire que du mot). Cf. le gotique bisuniané « à l’en-
cette oie naît du coquillage. tour », propr. « en veillant sur ». Le verbe
69 BIBINE

besogner, x11° (-oigner), d’abord « être BÉTON, 1635. Issu de belun, xue (et
dans le besoin, avoir besoin », et fréquem- -um, 1556), empr. du lat. bilumen, v. bi-
ment impersonnellement « être nécessaire », tume ; sens moderne dès le moyen âge, cf.
a probablement existé déjà en francique de même a. pr. balum; signifie aussi au
sous la forme *bisunnjôn (parallèle à l’all. moyen âge « boue, gravois ». — Dér. :
besorgen, à côté du subst. bisorge « soin »). bétonner, 1838 ; bétonnage, 1835.
— Dér. : besogneux, xi° (St-Alexis) et
besoin, id. Cf. de même it. bisogna « beso- BETTE, xue. Empr. du lat. beta. Sou-
one », bisognare « être nécessaire », bisogno vent bletle dans les parlers d'aujourd'hui,
« besoin » (cf. bisonium, xu1°, lat. médiéval attesté dès le xrve s., d’après le lat. blitum,
de l'Italie), bisognoso « besogneux ». A. qui désigne des plantes analogues, cf. a. pr.
pr. bezonh « besoin », bezonha « besoin et blet « betterave », bleda « bette, poirée ». —
besogne », bezonhar, -os, comme en fr., Comp. : betterave, 1600 (O0. de Serres).
sont empr. du fr. — Dér. : embesogné,
vers 1175. BEUGLER, 1611. Altération de bugler,
xI1e « corner », dér. de l’a. fr. bugle « buffle,
BESOIN, v. le préc. bœuf », empr. du lat. buculus « jeune tau-
BESSON, v. jumeau. reau », v. bugle. — Dér. : beuglant, 1860;
beuglement, 1539 (sous la forme bu-).
BESTIAIRE « gladiateur romain »,
1495 (sous la forme bestiare). Empr. du BEURRE. Forme dialectale, probabl.
lat. bestiarius, v. le suiv. de l’Est, de burre, encore relevé au xvIIe5.,
BESTIAIRE, « recueil de récits et de lat. bütyrum (grec bouiyron) ; le beurre a
légendes sur les animaux », au moyen âge, été d’abord employé comme une sorte
xr1e. Empr. du lat. médiéval bestiarium, d’onguent liquide ; c’est des Scythes de la
dér. de bestia, v. bête. : mer Noire que les Anciens ont appris à
l'utiliser comme aliment. — Dér. : beurrée,
BESTIAL, xue. Empr. du lat. beslialis, 1585 (N. du Fail); beurrer, x111° (bu-);
v. bête. — Dér. : bestialité, xive (Oresme; ébeurrer, x11° {ébu-) ; beurrier, 1270 (bu-).
parfois bestiauté au moyen âge).
BESTIAUX, v. bête. BÉVUE, v. vue.
BESTIOLE, xr1°. Empr. du lat. bestiola, BEY, 1532 (1422 bay). Empr. du turc
v. les préc. bey, antér. beg « seigneur ».
BEST-SELLER, 1960. — Empr. du BÉZEF, v. macache.
même mot anglais, comp. de best « le meil-
leur » et seller « vendeur ». BÉZOARD, 1605, antér. bezahar(d),
1562 (Paré), bezar, xive. Empr. de l’arabe
BÊTA, v. bête. bâzahr, empr. lui-même du persan pâdzehr,
BÊTE. Empr. et adapté du lat. class. littéral. « chasse-poison », par un intermé-
bestia plutôt que représentant pop. du diaire indéterminé (cf. pedra besoar en
lat. de basse ép. besta, attesté indirecte- port., 1563).
ment par bestula, vi® s. (Fortunat); en
effet, bestia étant représenté par des formes BI-. Préf. empr. du préf. lat. bi, issu de
pop., v. biche, Ja coexistence d’une forme bis « deux fois ».
besta aussi peu différente n’est pas vrai-
semblable. — Dér. : bétail, 1213, masc., ‘ BIAIS, xue (en, de biais). Probabl.
mot issu du fém. collectif bestaille, xir1°, empr. de l’a. pr. biais, du grec epikarsios
en outre l’a. fr. a fait sur le lat. bestia un « oblique », qui aurait pénétré par les colo-
subst. bestial « bétail », encore usité au nies grecques de la côte prov., par une
xvr1e s. et aujourd’hui dans les parlers du forme *(e)bigassius. — Dér. : biaiser, 1402;
Centre et de l'Ouest, d’où le plur. bestiaux, biaisement, 1574 (Amyot). /
1418, à côté duquel on a conservé bélail
pour éviter l’homonymie de bestial « bétail » BIBELOT, 1432. Appartient à une fa-
avec l’adj. bestial ; bêta, 1584, formé avec
mille de mots onomatopéiques, servant
le suff. de mots enfantins -a (issu d’-ard, notamment à désigner des objets menus,
cf. poupa « bébé »), plutôt qu’avec le suff. insignifiants ; d’où aussi, avec une variante
-as, qui ne sert qu’à former des mots tels vocalique, bimbelot, 1549, encore dans les
que plâtras, etc.; bêtifier, 1777 (Beau- dictionnaires, d’où bimbelotier, 1484 ; bim-
marchais) ; bêtise, xve ; abêtir, xiv° ; abé- beloterie, 1751 (on trouve également bibe-
tissement, 1842 (une 1re fois en 1552);
lotier, 1467 ; biblolerie, xv° (et, au moyen
rabêtir, 1625 ; embêter, 1799 ; embêtement,
âge, beubelet, beubelot, avec altération de
1859. la voyelle i).
BÉTEL, 1690. En outre belle, antér. BIBERON, 1301 (« goulot », d’où le sens
betre, 1519. Empr., probabl. par l’intermé- moderne). Dér. du verbe lat. bibere «boire»;
diaire du port. belel (ordinairement belele, par métaphore, « ivrogne », xXv°.
xvie et xvire s., en outre belle et beire),
de veltila de la langue du Malabar. Mot BIBI, substitut plaisant de moi, 1832;
européen. tiré du langage des enfants.
: BÉTOINE, xue (en outre ve...). Adapta- BIBINE, pop. 1862, d’abord « cabaret ».
tion du lat. betonica, autre forme de veito- Peut-être dér. burlesque du lat. bibere,
nica, dér. de Vettones « peuple de Lusita- formé dans le milieu des écoles, avec le
nie », d’après Pline. suff. qu’on a dans cantine, cuisine.
BIBLE 70

BIBLE, xr1°. Empr. du lat. eccl. *biblia, BIELLE, 1684. Probabl. empr. de l'esp.
grec eccl. biblia « livres saints », plur. du bielda « fourche servant à venter le blé »
grec class. biblion « livre ». — Dér. : bi- (biela dans la province de Guadalajara),
blique, 1623. dér. de beldar « venter », du lat. ventilare.
Le mot aura désigné d’abord la bielle du
BIBLIO-. Premier élément de mots sav. tarare.
comp., tels que bibliophile, 1740; biblio-
graphie, 1633, d’où bibliographe, 1665, BIEN, adv. Lat. bene. — Dér. : bien,
bibliographique, 1783; tirés du grec bi- subst., xi° (Alexis). — Comp. : Nombreux
blion, v. le préc. mots avec bien comme premier élément.
Combien, x11°, comp. de l’anc. adv. com,
BIBLIOTHÉCAIRE, 1518 ; bibliothèque, v. comme ; a supplanté vers le xvi® s.
1493. Empr. du lat. bibliothecarius (de l’anc. adj. quant, encore dans quelques lo-
basse ép.), -theca (du grec bibliothékëé); cutions telles que foules et quantes fois, etc.,
bibliothèque a éliminé librairie en ce sens. lat. quantus, propr. « combien grand », qui
a pris à basse ép. le sens de « combien »,
BICEPS, 1562 (Paré). Empr. du lat. au lieu du lat. class. quot ou quam multi,
biceps « à deux têtes » par les anatomistes ; cf. it. quanio, esp. cuanio, a. pr. can ; quant
ainsi nommé parce que ce muscle à deux subsiste comme adj. ou comme adv. dans
attaches à sa partie supérieure. les parlers méridionaux, depuis les Landes
jusqu’à la Savoie.
BICHE, xr1e° (écrit bische). Forme dia-
lectale, normande ou picarde, de bisse, BIENFAISANCE, etc., v. faire.
fréquent en a. fr., probabl. lat. pop. *bistia,
issu du lat. class. bestia sous l'influence de BIENNAL, 1550. Empr. du lat. de basse
l’i du groupe -ia, attesté aussi par lit. ép. biennalis (de annus « an »).
biscia « couleuvre » (d’où le fr. bisse, 1611, BIENSÉANCE, v. seoir.
terme de blason), et le port. bicho « ver,
insecte » (d’où l’esp. bicho « bestiole ») ; BIENTÔT, v. tôt.
tandis que ces derniers sens sont probabl. BIENVEILLANCE, v. vouloir.
dus à des euphémismes, celui du fr. vient
du langage de la chasse. — Dér. : bichette, BIÈRE « cercueil », vers 1080 (Roland).
xIVe (Froissart), d’abord bisseille, xxre. Francique *bera « civière » (cf. all. Bahre),
qui servait à porter les morts et qui
BICHET, v. pichet. était souvent laissée sous le corps ; quand
BICHON, v. barbe. l'usage du cercueil, d’abord réservé aux
grands, se répandit, bière prit le sens
BICOQUE, 1522. Signifie d’abord « pe- de « cercueil »; très rare aujourd’hui au
tite forteresse de faible importance » encore sens de « civière ». L’it. bara « id. » vient
au xvirie s. Empr. de l’it. bicocca « châte- du longobard bara, qui correspond au
let », qui signifie aussi « petite maison » francique.
au xvie s., mot qui est probabl. de la fa- BIÈRE « boisson », 1429. Empr. du
mille de coque. néerl. bier, avec le produit lui-même ; a
BICORNE, 1302. Empr. du lat. bicornis éliminé l’anc. mot cervoise.
« à deux cornes ». BIÈVRE, v. castor.
BICYCLE, v. cycle. BIFFER, 1576. Dér. de l’a. fr. biffe
« sorte d’étoffe rayée », vers 1210, sens
BIDET, xvi (sens moderne). Au XvIes. disparu vers le xvie s., au profit du sens
signifie aussi « pistolet de poche ». Paraît péjor. « objet sans valeur, diamant faux,
de la même famille de mots que bider fausse apparence », sens pour lequel on n’a
« trotter », xve, et rabider « accourir en aucune attestation sûre avant la fin du
hâte », xive. L'’it. bideïto, seulement « petit xvIes. Biffer semble appartenir à la famille
cheval», vient du fr. : au sens de « meuble de rebiffer, Xitr°, « rabrouer, repousser »,
de toilette », par métaphore, 1751, s’est attesté au xrI° s. au sens de « froncer le
répandu dans les langues voisines. nez » (revige du nes), d'où le moderne se
BIDOCHE, 1837. Argot militaire, peut- rebiffer, xix°; mot probabl. onomatopéi-
être issu du préc. que, exprimant la moquerie, v. bafouer:
le développement sémantique de l’anc.
BIDON, xve. Ce mot désignant d’abord biffe n’est pas clair. A ces mots se rattache
un ustensile à l'usage des marins et les l’argot du x1x° s., biffin « chiffonnier »,
premiers textes étant normands, un em- 1836, d’où « fantassin » (ainsi nommé à
prunt au scandinave bida « vase » est assez cause de son sac).
vraisemblable, malgré la date récente de
ces textes. BIFIDE, 1772 (J.-J. Rousseau). Empr.
du lat. bifidus (de findere « fendre »).
BIEF, 1631. Au moyen âge bies, biez,
bied. Répandu sur tout le territoire gallo- BIFTECK, 1806 (en 1786 beef-stake).
roman et le Nord de l'Italie; le sens fon- Empr. de l’angl. beefsieak « tranche de
damental est « canal creusé pour arroser bœuf ».
les prairies ou amener l’eau à un moulin » ; BIFURQUER, xvi® (Paré). Jusqu'au
du gaulois *bedu- « canal, fosse », cf. gallois xIx® s. terme scientifique. Dér. sav. du
bedd et breton bez «tombe » ; pour l’f finale, lat. bifurcus « fourchu ». — Dér. bifurca-
v. fief et emblaver. tion, id.
71 BILLEVESÉE

BIGAME, 1270 (Ad. de Le Hale). Empr. empr. lui-même du lat. billa, au sens mé-
du lat. eccl. bigamus, fait sur le grec diga- diéval de « boule dé plomb attachée à des
mos, avec bi substitué à di, v. -game. — actes », d'où « diplôme ».
Dér. : bigamie, xve.
BILLARD, v. le suiv.
BIGARRER, 1530, mais -é, xve. Mot
de la famille de l’a. fr. garre « bigarré », BILLE « partie d’un arbre, d’un tronc
1360, surtout en parlant d'animaux, mot ou de grosses branches, préparée pour être
appartenant surtout à la Haute-Bretagne travaillée », 1372, au sens de « quille »
et d’origine inconnue. — Dér. : bigarreau, (au xr1e s. billa, -us, en lat. médiéval).
1530 ; bigarrure, 1530. Gaul. *bïilia « tronc d’arbre », cf. irlandais
bile, de même sens. Vit aussi au Piémont
BIGLE, 1471. Altération de bicle, xvi°, et en Emilie. — Dér. billard, 1399,
encore chez Ménage, d’abord biscle, début d’abord « bâton recourbé pour pousser des
xvi®, par croisement avec aveugle ; cf. de boules » d’où le sens moderne (depuis la
même de verbe biscler au xvi® s., d’où seconde moitié du xv® s.) qui l’a rapproché
bigler, 1642. L’adj. sort du verbe, d’un lat. de bille et « boule » ; billette, 1304 ; billon,
pop. *bisocüläre « loucher », appuyé par 1277, d’abord « lingot », d'où spécial.
l’esp. bisojo « louche » et le verbe bizquear « alliage d’un métal précieux avec d’autres
«loucher ». L’adj. et le verbe sont tous deux métaux tels que le cuivre », d’où « monnaie
répandus dans les parlers septentrionaux de mauvais aloi », d’où le sens moderne ;
et franco-provençaux. en outre sens techn., notamment agricoles,
1758, d’où billonner, 1755, billonnage,
BIGNE, v. beignet. 1716, « labourer, labour en billon, etc. »;
BIGORNE, 1389 (-orgne). Empr. d’une billot, xive; habiller, vers 1300 (sous la
langue méridionale, cf. prov. moderne bi- forme abillier), « préparer, apprêter » (d’où
gorna, it. bicornia, esp. bigornia, empr. du les nombreux sens techn. modernes), et
lat. bicornis ; v. bicorne. — Dér. : bigor- spécial. « équiper (surtout pour la guerre) »,
neau, 1423 (mais en 1611 pour le coquillage dès le xrr1e s., mais usuel seulement depuis
de ce nom). le xve ; dér. de bille, au sens de « préparer
une bille de bois », attesté par des emplois
BIGOT, xv°e. Apparaît au x11° s. chez modernes ou dialectaux du langage agri-
Wace (Rou) comme terme d’injure adressé cole ; l'orthographe avec h résulte du rap-
par les Français aux Normands ; mais, dans prochement qui a été fait de bonne heure
l'intervalle, jusqu'au xve s., les textes avec habile et habit ou leurs correspondants
manquent, de sorte que la liaison des sens latins ; a pris vers 1400 le sens dominant
et l’'étymologie sont obscures. On a proposé aujourd’hui de « vêtir » en partie d’après
d'y voir un juron germ., empr. de l’anc. habit ; d’où, dans diverses techn., habillage,
angl. bi god. — Dér. : bigoterie, Xv° ; bigo- 1462 (a-) ; habillement, 1374 (1536 au sens
tisme, vers 1700 (Saint-Simon). moderne), usuel jusqu'alors au sens d’ «ar-
BIGOUDI, 1864. Étymologie inconnue. mes, machine de guerre », habilleur, 1552
(habilleur de cuirs) ; déshabiller, vers 1400
BIGRE, v. bougre. (désa-, au sens moderne), aujourd’hui très
BIJOU, 1460 (terme de Bretagne). Empr. répandu dans les parlers gallo-romans ; en
outre desbillier, xv°, attesté aussi dans de
du breton bizou « anneau pour le doigt nombreux parlers septentrionaux (cf. pour
(biz) ». A supplanté en partie joyau. — cette forme démarrer, etc.), rhabiller, 1464
Dér. : bijoutier, 1706 (sens moderne ; antér. (ra-) ; rhabillage, 1506 (ra- d’une biche),
« qui aime les bijoux », 1675) ; bijouterie, rhabillement, 1538 (ra-), rhabilleur, 1549
xvire (Vaugelas). (ra-).
BILAN, 1584. Empr., comme de nom-
breux termes de banque, de l’it. bilancio, BILLE « petite boule », xr1e. Francique
*bikkil, cf. moyen haut all. bickel « dé ».
subst. verbal de bilanciare « balancer, pe-
ser », v. balance. L'it. biglia et l'esp. billa viennent du fr. —
Comp. : billebaude (à la) « en désordre »,
BILBOQUET, 1534 (Rab. : bille bouc- xviie (Mme de Sévigné); peut-être comp.
quei). Peut-être comp. de bille, impér. du de bille et de baude, fém. de l’anc. adj.
verbe biller, anciennement « jouer à la baud « fier », encore usuel au xXvi* $.,
bille (au sens de bâtonnet, v. bille) », et v. baudet, qui aurait signifié « à la bille
de bouquet « petit bouc », s'adressant par hardie », et aurait été une expression de
plaisanterie à la boule. jeu, employée ensuite par plaisanterie.

BILE, 1539; bilieux, 1537. Empr. du BILLET, 1457. Tiré de l'a. fr. billelte,
lat. bilis, biliosus; bilis a été supplanté 1389, encore dans les dictionnaires, alté-
dans le lat. pop. par fel, propr. « vésicule ration, par croisement avec bille « boule »
contenant le fiel ». — Dér. : biler (se), fr. de bullelte, fréquent en a. fr., dér. de bulle.
pop. du xix® 5. ; biliaire, 1687. Billet de banque, 1716.
BILINGUE, 1826. Une première fois au 1534. Probabl. empr.
BILLEVESÉE,
x111€ s. au sens de « médisant », puis en d'un parler de l'Ouest, où vèze est encore
1618, au sens moderne. Empr. du lat. vivace au sens de « cornemuse » et dont
bilinguis, qui a les deux sens. vesée est dér. -vesée dérive d'un radical
BILL, 1669 (écrit aussi bil jusqu’au mi- onomatopéique ves- exprimant un léger
lieu du xvine s.). Empr. de l’angl. büll, bourdonnement, répandu surtout dans les
BILLEVESÉE 72
parlers de l'Ouest (nant. vezon « bourdon », BIRIBI, 1861 (comme nom
etc.); on d'un jeu de
a interprété bille comme une hasard dès 1760), empr. de l’it. biribisso.
altération de beille « boyau », lat. bolülus ;
mais il est étonnant que beille, encore très BIS, adj., vers 1080 (Roland). À. pr. bis,
usité dans les parlers de l'Ouest, ait été it. bigio. Étymologie incertaine. — Dér. :
changé si tôt en bille. biset, 1555.
BILLION, v. mille. BIS, adv., 1690. Empr. du lat. bis « deux
fois ». — Dér. : bisser, 1820.
BILLON (de tronc), v. bille.
BISBILLE, 1677. Empr. de lit. bisbiglio
BIMANE, xvirie (Buffon). Formé avec « murmure, chuchotement », tiré de bisbi-
le préf. bi et le lat. manus « main » sur le gliare, verbe onomatopéique ; bisbille a
modèle de bipède. d’abord signifié « murmure »: sens mo-
BIMBELOT, etc., v. bibelot. Uerne 17/02.

BINAIRE, 1554. Empr. du lat. de basse BISCAÏEN, 1689 (au sens de « mousquet
ép. binarius (1v° s.), dér. de bini « deux à longue portée »; puis « balle de ce mous-
par deux », d’où « deux ».
quet », 1829). Dér. de Biscaye, nom d’une
province au nord de l'Espagne, où cette
BINER, 1507 (mais rebiner au xve 8.). arme fut d’abord employée.
En raison de la date, empr. du prov. binar, BISCOTTE, 1807. Empr. de l’it. biscotto
lat. pop. *binäre, dér. de bini, v. le préc.,
« faire une chose une deuxième fois » (cf. de « biscuit », comp. du préf. repris au lat. bis
et de colo, part. passé de cuocere « cuire ».
même esp. binar « biner la vigne »), plutôt
que forme transmise du lat. au fr. — Dér. : BISCUIT, v. cuire.
binette « outil pour biner », 1722.
BISE, xr1e. Du francique *bisa, cf. anc.
BINETTE, 1813 (« perruque à la haut all. bisa; de même a. pr. biza; ré-
Louis XIV »; sens moderne, 1848). Dér. pandu en outre dans les parlers de l'Italie
au sens propre de Binet, nom d'un coiffeur septentrionale et rhéto-romans et sur tout
de Louis XIV, d’où le sens fig., quand ce le territoire gallo-roman. La forme de
genre de coiffure a passé de mode. On beaucoup de parlers suppose un type *bisia,
s'étonne toutefois de la date récente où le mal éclairci.
mot est attesté.
BISEAU, xir1e. Semble être un dérivé de
BINIOU, 1799. Empr. du breton biniou. bis, adv. — Dér. : biseauter, 1743 ; biseau-
tage, 1863.
BINOCLE, 1671. Tiré par le P. Chéru-
bin, physicien, du lat. scientifique bino- BISET, v. bis, adj.
culus, créé par le P. de Rheita en 1645,
du lat. bini, v. binaire, et de oculus « œil », BISMUTH, 1597, alors bissemul. Empr.
pour désigner une sorte de télescope dou-
de l’alll Wismuth (1550), d’étymologie
ble, sur le modèle incertaine.
de monocle ; Sens mo-
derne depuis 1835. — Dér. : binoculaire, BISON, fin xve. Empr. du lat. bison
1677, d’après le lat. oculus. (Pline, etc.), d’où le grec bisôn (Oppien,
Pausanias). Le lat. est peut-être lui-même
BINÔME, 1554. Formé avec le préf. bi empr. du germ., cf. anc. haut all. wisunt,
et le grec nomos, au sens de « part, por-
tion »; ont été formés sur ce modèle mo- wisant.
nôme (pour mononome), 1691, polynôme, BISQUE, vers 1600. Étymologie in-
1691, quadrinôme, 1554, et irinôme, 1613, connue.
avec les adj. grecs monos « seul », polys BISQUER, 1749
« nombreux » et les préf. d’origine lat. (Vadé). Né dans le
milieu des escrocs ; probabl. dér. du radical
quadri, tri. de Biscaye, cette province espagnole pas-
BIO-. Premier sant pour le pays des filous, au point que
élément de mots sav., Biscaye était devenu le nom de la confrérie
tels que biographie, 1721 ; biologie, 1802,
tiré du grec bios « vie ». des gueux et même celui d’une prison.

BIPÈDE, 1598. Empr. BISSAC, v. sac.


du lat. bipes,
-dis. BISSE, v. biche.
BIQUE, 1509. Seulement parlers gallo- BISSECTRICE, v. secteur.
romans. Peut-être altération, par croise-
ment avec bouc, de biche (bique et biche BISSEXTIL, 1555. Empr. du lat. de
sont dans quelques patois pris l’un pour basse ép. bifs)sextilis (Isidore de Séville,
l’autre), ou simplement fém. de bouc avec i, vie s.), dér. de bifs)sexius (id.), propr.
voyelle expressive. — Dér. : biquet, XVI® ; « deux fois sixième », jour intercalé tous
biquette, xvre (R. Belleau). les quatre ans dans le calendrier julien
;
ainsi nommé parce que, placé après le
BIRBE, 1837 (Vidocq, « vieillard »; a 24 février, le sixième jour avant les calen-
dû signifier propr. « vieux mendiant »). des de mars, il doublait ce jour ; bissextus
Mot d’argot, empr. du prov. birbe, -0 « pain est représenté par bissexte, xI1, et bis-
mendié, canaille », tiré de birba « mendier », sêtre, 1611 (en a. fr. besisire) « événement
cf. aussi it. birba « coquinerie », de la fa- malencontreux », parce que ce jour était
mille de bribe.
regardé comme néfaste.
73 BLANC

BISTOURI, 1462 (bisiorit « poignard » ; BLACK-OUT, 1942. Empr. de l’angl.


aux xv° et xvI£s., -orie, fém.). Empr. d’une black-out, comp. de black « noir » et out
forme de l'Italie Supérieure, où -i repré- « éteint », formé pendant la deuxième
sente le suff. it. -ino; cela nous mène à grande guerre.
l’adj. pistorino « de Pistoja ». A Pistoja
on fabriquait en effet des couteaux très BLAFARD, xive. Signifie parfois « bé-
tranchants. Paré, qui emploie ce couteau nin, complaisant », au xive s. Empr. du
comme instrument chirurgical, hésite entre moyen haut all. bleichvar « de couleur
les deux formes pistolet et bistorie, la pre- pâle », avec substitution du suff. -ard, cf.
mière empr. de l’it. pislolese, la deuxième aussi blafastre, fréquent au xvr°s., cf. sale,
d’une forme de l'Italie Supér. *bistorino. empr. à peu près à la même ép., et terne.
Les deux mots sont certainement identi-
ques, mais la cause du remplacement de BLAGUE, « petit sac pour le tabac
p- par b-, qui doit être cherchée dans (d’abord faite avec la poche du pélican) »,
l’influence d’un autre mot, reste obscure. 1721. Du néerl. balg « peau qu’on a retirée
d’un animal ». A pris le sens figuré de
BISTRE, xvie. Étymologie inconnue. « menterie pour amuser les gens » au début
— Dér. : bistrer, 1834 (bistré en 1809). du xix° s., attesté en 1809 dans le langage
militaire, d’où blaguer, 1808 ; blagueur, id.
BISTRO, pop., 1884. Peut-être en
rapport avec le poitevin bistraud « petit BLAIR, pop., 1880. Abréviation de
blaireau, allusion au museau allongé de
gardeur de vaches ». Il faudrait alors sup- l'animal de ce nom.
poser que le mot aurait désigné d’abord
l’aide du marchand de vin avant de s’ap- BLAIREAU, xive (blarel, 1312). Dér.
pliquer au patron même. de l’anc. adj. bler, dit d’une couleur mal
déterminée du cheval, cf. a. pr. blar, dit
BITTE, 1382 (Texte de Rouen). De l’anc. également d’une couleur (en tout cas, le
scandinave biti « sorte de poutre transver- simple et les dér. servent à désigner des
sale sur le navire »; passé du fr. dans les animaux ayant une tache blanche sur la
langues méridionales, cf. it. bitta, etc. — tête de même que le blaireau) ; bler vient
Dér. : bitter, verbe, 1690 ; bitture, 1683; du gaulois *bläros, qu'on peut restituer
de la locution prendre une bonne bitture d’après le gallois blawr « gris » et le gaé-
« prendre une longueur de câble suffisante » lique blar « qui a une tache blanche sur le
est issue la locution de l’argot des marins, front »; ce mot a pu se fondre en outre
devenue pop., prendre une bit(t)ure « s'en avec le francique “*bläri, cf. néerl. blaar
donner tout son soûl », au xix°s. V. débiter. « vache qui a une tache blanche sur le
front ». Blaireau a supplanté dans les par-
BITTER, subsi., 1838 (en outre pitre, lers septentrionaux l'a. fr. {aisson, 1247;
au xvirie s.). Empr. du holl. ou de l’all. lat. de basse ép. {axo (ve s.) d’origine germ.,
bilter, propr. « amer »; ce produit nous cf. all. Dachs, et qui survit encore dans
vient en effet de la Hollande. les parlers méridionaux, de l'Est et du
Nord-Est, d’où aussi it. {asso, esp. lején,
BITUME, 1549 (au xvie s. aussi bitumen a. pr. fais et taisson ; v. tanière.
et bitum; au xrri1° belume) ; bitumineux,
1543. Empr. du lat. bilumen, biluminosus. BLÂMER. Lat. pop. blasiemäre (blas-
— Dér. : bitumer, 1803. tema dans une inscription de la Gaule),
altération du lat. eccl. blasphèmare « blas-
BIVOUAC, 1650 (en outre bivac et bi- phémer, outrager » (du grec blasphémein),
wacht, Ménage). D'abord « garde de nuit », par dissimilation de la deuxième labiale
d’où le sens moderne. Empr. d’une forme ou par croisement avec aestimare « esti-
germ. correspondante à l’all. Beiwache, mer »; blasphemare a pris de bonne heure
probabl. le suisse biwacht « patrouille sup- (au moins en gallo-roman) le sens affaibli de
plémentaire de nuit », comp. de bi « auprès « faire des reproches » attesté abondam-
de » et de wacht « garde, veillée », qui aura ment en lat. médiéval. It. biasimare (empr.
été introduite par des mercenaires suisses. du fr.), esp. lastimar « blesser, outra-
A passé du fr. dans les langues voisines : ger, etc. ». — Dér. blâme, vers 1080 (Ro-
it. bivacco, angl. bivouac, all. Biwak. — land) ; blâmable, xrrre.
Dér. : bivouaquer, 1792.
BLANC, vers 1080 (Roland). Du germ.
BIZARRE, xvi* (en outre bigearre, jus- occidental *blank, cf. all. blank « clair,
qu’au début du xvrr1e s., et d’autres for- poli », d’où également it. bianco, a. pr.
mes, en partie dues à un croisement avec blanc. Le mot germ. a supplanté le lat.
bigarré). Empr. de l’it. bizarro « emporté, albus, qui survit notamment dans le rou-
capricieux », d'origine incertaine ; on le main alb et le port. alvo, maïs en gallo-
considère ordinairement comme empr. du roman seulement dans des comp., v. aubé-
basque bizar « barbe », qui aurait été pris pine. — Dér. : blanchaille, 1701 ; blan-
au sens de « homme énergique », d’où chard, x111° ; blanchâtre, 1372 ; blanchet,
l'adjectif. — Dér. : bizarrerie, 1555. 1351 (blanquet, sorte d’étoffe, en 1339, à
Arras); blancheur, xr1°; blanchir, xrre,
BLACKBOULER, 1842 (1838, blackbol- blanchiment, 1600, blanchissage, 1539,
ler). Empr. par croisement avec boule, de blanchisseur, 1611 (blanquisseur en 1339),
l’angl. io blackball « rejeter en mettant blanchisserie, 1701, déblanchir, 1789, re-
dans l’urne une boule noire (black) ». — blanchir, 1321 (sous la forme -quir). —
Dér. : blackboulage, 1866. Comp. : Nombreux mots avec blanc, blan-
BLANC 74

che, comme premier élément ; blanc-d’œuf, déblaiement, 1775 ; emblaver, 1242 ; em-
xv°, a supplanté dans les parlers septen- blavure, xir1°; remblayer, 1241, dér.
trionaux aubin, encore dans les Ardennes, d’emblayer, xr1° (déjà au sens fig. d’ « em-
altération d’aubun, lat. albämen, d’où it. barrasser », par opposition à déblayer)
albume, cf. de même it. bianco d’uovo, esp. remblai, 1694.
clara de huevo, v. glaire.
BLED. Fin xix°, Argot militaire, empr.
BLANDICE, xive-xvi® s.; repris par de l’arabe bled « terrain, pays, ville », forme
Chateaubriand. Empr. du lat. blandilia, maghrébine de l’arabe class. biläd.
dér. de blandus « caressant, etc. ».
BLEIME, 1665 (Colbert). Empr. du
BLANQUE, v. numéro. wallon blème, lui-même altération de blène
BLANQUETTE, 1611. Dér. dialectal de « contusion », empr. du néerl. blein « vessie,
blanc, mais de différentes époques suivant ampoule ».
les sens, et de dialectes qu’il est difficile de BLÊME, v. le suiv.
déterminer ; au sens de « raisin » ou « de
vin du Midi », 1600, représente le prov. BLÉMIR, vers 1080 (Roland, blesmir;
blanqueto. en outre blesmer, xr1°). En a. fr. à la fois
intrans. « se flétrir » et trans. « flétrir »,
BLASER. Fin xvie (Régnier, au sens d’où « blesser, endommager », cf. aussi
d’ « user sous l'effet des liqueurs fortes », a. pr. blesmar, blasmar « faire évanouir ».
encore dans Saint-Simon), d’où le sens Probabl. de l’anc. scandinave blémi « cou-
moderne, 1743. Empr. du néerl. blasen leur bleuâtre » (dér. du radical de l’all.
« gonfler », le sens propre ayant pu être blau « bleu »), par l'intermédiaire d’un
« gonflé, bouffi sous l'effet de la boisson », verbe non attesté *bléma, et dont l’s est
sens attesté dans les patois du Nord-Est. dû à un croisement mal éclairci, peut-être
BLASON, xr1° (« bouclier », usuel au avec blesser. On restitue aussi un francique
moyen âge, d’où les sens modernes). On a *blesmjan « faire pâlir », qui dériverait du
voulu y voir un dér. de la famille du mot radical qui se trouve dans l’all. blass
germ. cité sous le mot préc., au sens de « pâle », Blässe « pâleur ». — Dér. : blême,
« marque gravée sur le bouclier, éclat, vers 1460.
gloire », mais le sens propre « bouclier » ne BLENDE, sorte de minerai, 1751. Empr.
s’accorde pas avec cette hypothèse ; d’autre de l’all. Blende.
part, le type *blaso « bouclier », qu’on res-
titue, est sans explication, cf. de même BLENNORRAGIE, 1798; BLENNOR-
a. pr. blezo, blizo « bouclier ». A pénétré RHÉE, id. Formés avec le grec blenna
du fr. dans les langues voisines : it. blasone, « mucus », et rhagé « éruption » (dans le
esp. blasôn, au sens moderne. — Dér. : premier), rhein « couler » (dans le second).
blasonner, 1389, d’où particulièrement « cé- BLÉPHARITE, 1833. Dér. sav. du grec
lébrer » (passé en esp.) ; en outre « couvrir blepharon « paupière ».
de son bouclier » et ironiquement « criti-
quer », d’où des sens anc. de blason « éloge, BLÉSER, xu° (J. de Meung). Spéciali-
critique », fréquents au xvre s. sation de sens récent. Dér. de l’adj. blois
« bègue », rarement attesté, lat. blaesus,
BLASPHÈME, xr1° ; blasphémer, 1360. de même sens, cf. aussi a. pr. bles « id. ».
Empr. du lat. eccl. blasphemia, -mare (du Seulement gallo-roman. — Dér. : blésité,
grec blasphémia, -mein), v. blâmer. 1803.
Dér. blasphémateur, xve; blasphéma-
toire, id. BLESSER, x1° (Raschi : blecier, ortho-
BLATÉRER, 1836. Empr. du lat. blaie- graphe usuelle au moyen âge). Du fran-
rare, qui se disait déjà aussi des chameaux. cique *bletljan « meurtrir », sens encore
attesté dans les patois, d’où « blesser »,
BLATIER, v. blé. dér. d’un adj. *blei, cf. anc. angl. blét
BLATTE, 1534 (Rab.). Empr. du lat.
« blême », et anc. haut all. bleizza « tache
blatla. bleue produite par une meurtrissure » ; de
même a. pr. blessar « blesser ». Seulement
BLAUDE, v. bliaud. gallo-roman. — Dér. : blessure, xrr° ; blet,
BLAVET, v. bleu. masc., xIV® (E. Deschamps), rare avant le
XIX® S.; issu du fém. blelte, déjà attesté
BLÉ, vers 1080 (Roland). Souvent blef fin xue, réfection d’un fém. blesse (cf.
en a. fr. ; cf. le v d’emblaver et bief. Signifie blece, de même date), issu du verbe et
aussi « champ de blé », comme la forme répandu dans les patois septentrionaux;
fém. blée. Mot gallo-roman (cf. a. pr. blat d’où blettir, xve.
et blada), aujourd’hui dominant ; en outre,
it. biada et biava (dialectal). Du francique BLETTE, v. bette.
*bléd « produit d’un champ », restitué BLEU, xni° (en a. fr. blo, blau, blef,
d’après anc. angl. blæd « id. » et néerl. bloe, bleve). Francique “*blao, cf. all.
bla « id. »; le lat. médiéval a blada « pro- blau, angl. blue; de même a. pr. blau.
duit d’un vignoble, moisson ». — Dér. : Seulement gallo-roman. V. bas, cordon,
blatier, 1260 (É. Boileau : blaelier, par un conte. — Dér. : bleuâtre, 1493 ; bleuet,
dér. en -et, non attesté); déblayer, xrrre 1404, et bluet, 1549, en outre blavet,
(desblaer, puis débloyer, 1388), propr. « ré- XVI*, empr. d’un dial. non déterminé;
colter du blé, moissonner », d'où «enlever bleuir, 1690, bleuissage, 1863, bleuisse-
des matériaux », xive, d’où déblai, 1642, ment, 1838.
75 BOBINE

BLIAUD, vers 1080 (Roland). De même encore usuel surtout dans les parlers de
a. pr. blidal, blizaut, etc. Etymologie in- l'Ouest, d’où le sens moderne, vers le
connue. À pénétré dans les langues voi- XVIIIe s. Dimin. de * belue, non attesté,
sines : moyen haut all. blialt « étoffe de mais assuré par l’a. pr. beluga « étincelle »,
soie de prix », etc. — Dér. : blaude, 1564, encore usuel dans les parlers méridionaux,
encore usuel dans les patois, mais en recul et par des formes des parlers de l'Italie
devant blouse, dont le rapport avec blaude septentrionale ; celui-ci s'explique par une
n’est pas déterminé. déformation de famfaluca attesté dans des
gloses du 1X° s. au sens de « bagatelle » ;
BLINDER, 1697. Dér. du terme de for-
famfaluca, qui a vécu en fr. jusqu’au
tification blinde, 1628, empr. de l’all. XVe s. sous la forme fanfelue, est issu du
Blende « id. », tiré de blenden « aveugler » grec pompholyx «bulle d’eau ». La première
(cf. blind « aveugle »), d’où « blinder ». — partie de famfaluca a été échangée dès le
Dér. : blindage, 1792. latin du Bas-Empire contre le préfixe
BLIZZARD, 1888. Empr. de l’angl. d’A- bis, sous ses deux formes, bis- et bi-.
mérique. D'une forme “*biluca, née de cette façon,
est sorti l’anc. fr. *belue, de “*bisluca le
BLOC, xuni°. Empr. du néerl. bloc « tronc fr. berlue.
abattu », ou du moyen haut all. block
«tronc, bloc ». Seulement fr. septentrional ; BLUE-JEAN, 1960. Empr. de l'anglais
ailleurs empr. du fr. — Dér. : blocaille, blue « bleu » et jean « esp. de coton ; vête-
1549 (d’où, par altération, brocaille, 1863) ; ment fait de ce coton », lequel vient du
bloquer, xv® (le sens d’ «investir par un nom de la ville de Gênes (Jeyne en moyen
blocus », fin xvi*, D’Aubigné, est dû à angl.).
blocus, d’où débloquer, xvi*)}, d’où blo- BLUES, 1928. Empr. de l’angl. blues,
cage, 1547, bloquette, fin xix°, débloquer, plur. de l’adj. blue « bleu », qui est employé
terme d'imprimerie, 1754. aussi au sens de « anxieux ». Ce terme
BLOCKHAUS, fin xviie s. Empr. de provient du fait que cette variété de fox-
l’all. Blockhaus, comp. de block, v. le préc., trott se danse langoureusement.
et de haus « maison », soit « maison char- BLUFF, 1895. Empr. de l’argot anglo-
pentée ». américain bluff. — Dér. : bluffer, 1884;
BLOCUS, 1547 ; d’abord blaucus, 1507, bluffeur, 1895.
blocquehuys, xv°, « fort servant à assié-
ger », dès 1376 blochus dans un texte lié- BLUTEAU, v. le suiv.
geois ; sens moderne depuis le xvrie s. ; au BLUTER, xu° (buleler, fréquent au
xIve s., dans des textes du Nord-Est, moyen âge, d’où beluter, xit1°; blulier,
« maison charpentée ». Empr. du moyen xive). Empr. du moyen néerl. biulelen
néerl. blochuus, v. le préc. « bluter », adapté aux verbes en -eler, cf.
BLOND. A. pr. blon, it. biondo. On consi- aussi le moyen haut all. biuteln et l’all.
dère que blond, qui désigne une couleur de Beulel « sac, bluteau ». L’a. pr. balular et
cheveux propre aux gens du Nord, doit l’it. burallare viennent probabl. du fr. —
être d’origine germ., comme les adj. de Dér. : blutage, 1546 (Rab.) ; bluteau, xv°
couleur blanc, bleu, etc., mais “*blund, (buletel au xr1°) ; bluterie, 1611 (d’abord
qu’on restitue, est sans appui dans les buleterie, 1325); blutoir, 1606 (belutoir
langues germaniques. L’all. blond est lui- en 1315).
même empr. de l’a. fr. (par la poésie cour-
toise). — Dér. : blondasse, vers 1700 (Saint-
BOA, 1372. Empr. du lat. boa « serpent
Simon) ; blonde, 1743, « sorte de dentelle », d’eau ».
ainsi nommée à cause de la couleur de la BOBARD, fin xixe. Fr. pop., d'une fa-
soie grège qu’on emploie ; blondelet, xv°; mille de mots onomatopéiques, exprimant
blondin, 1650, blondinet, fin xIx° S.; le mouvement des lèvres, d’où ce qui est
blondeur, vers 1270 ; blondir, xr1° 5. gonflé, la moue, la sottise ; cette famille
BLOQUER, v. bloc. de mots est attestée par de nombreux mots
du gallo-roman et des langues voisines, cf.
BLOTTIR (se), 1552. Probabl. empr. du entre autres a. fr. bobert « sot », etc., v. bo-
bas all. blotten « écraser » ; comp., pour le bine, bombance, embobiner.
développement sémantique, s’écraser. Le
changement de conjugaison peut s’expli- BOBÈCHE, partie de flambeau, 1335.
quer par l'influence de s’accroupir. Peut-être de même formation que bobine,
mais avec un suff. obscur.
BLOUSE « vêtement », 1788. Étymologie
obscure, v. bliaud. BOBÈCHE « pitre », xixe. Tiré du sur-
nom d’un pitre célèbre sous le Premier Em-
BLOUSE (de billard), v. le suiv. pire et la Restauration.
BLOUSER, 1680 (belouser et blouser,
BOBELIN, v. embobiner.
terme de jeu de billard, d’où le sens mo-
derne). Dér. de blouse, xvi® (et belouse), BOBINE, 1544. Mot onomatopéique, v.
d’abord terme du jeu de paume, « creux bobard ; ainsi nommé à cause de sa forme
pour recevoir les balles », d’origine incon- cylindrique. A supplanté sur tout le terri-
nue. toire gallo-roman des représentants du mot
BLUETTE, vers 1530 (Marot, en outre germ. *spola, cf. all. Spule « bobine », d’où
belluette). Propr. « étincelle », aujourd’hui les mots techn. époule, xr11° ; époulin, 1723.
BOBO 76

BOBO, xve (Charles d'Orléans). Mot ce pays ; sens moderne, 1694 ; les tsiganes
onomatopéique, du langage enfantin, v. les apparaissent en France dès 1419. — Dér. :
préc. bohémien, xiIve.
BOBSLEIGH, 1899. Empr. de l’angl. BOIRE, lat. bibère. — Dér. et Comp. :
bobsleigh, comp. de sleigh « traîneau », beuverie, x11° (écrit bev-), disparu après le
l’initiale bob étant obscure. XVI® S., repris au xiIX® s. par archaisme
sous les formes beuverie et buv-; breuvage,
BOCAGE, xr1° (boscage ; en outre, bos- xI1° (bovr-; souvent bevrage au moyen
chage au moyen âge). Dér. dialectal, norm. âge), dér. de beivre, boivre, anc. inf. pris
ou picard, de *bosc, forme qui a dû précéder substantiv., cf. aussi a. pr. beuralge ; bu-
bos, fréquent en a. fr., v. bois. — Dér. : vable, x111° (sous la forme beu-) ; buvard,
bocager, xvi® (Ronsard). 1830 ; buvette, 1539 ; buvetier, 1586 (N. du
BOCAL, 1532 (Rab.). Empr. de l’it. boc- Fail) ; buvoter, 1539 {beuu-) ; déboire, xv®,
cale, masc., lat. de basse ép. baucalis, fém. propr. « arrière-goût désagréable que laisse
(du grec de l’époque impériale baukalis une boisson », encore au xvirie s., d'où le
« vase réfrigérant »). sens fig., xvi®; fourbu, xvi*, en parlant
du cheval, part. passé de l’anc. verbe
BOCHE, 1889 (au sens moderne ; devenu fourboire « boire à l’excès, à contre-temps »
populaire en 1914). Apocope d’alboche, (comp. avec l’adv. fors), sens fig., une
forme argotique d'allemand, cf. -italboche, fois chez Rab., 1546, mais usuel seulement
rigolboche, ou réduction de lêle de boche, au xix€ s.; imbuvable, 1600 ; pourboire,
à peu près de même date, pour léle de 1740. V. biberon, embu.
caboche (équivalent de léle carrée « Alle-
mand, Alsacien », dès 1866), au sens de BOIS. Au sens propre « réunion d’ar-
« tête dure », ou contamination des deux; bres », distinct de la forêt qui, au moyen
on a, dès 1866, boche « mauvais sujet » dans âge, était réservée à la chasse seigneu-
la langue de la galanterie. riale, etc. Du germ. occidental *bosk « buis-
son, bois », cf. all. Busch « buisson », angl.
BOCK, 1855 (de Goncourt). Empr. de bush. De même a. pr. bosc, it. bosco ; existe
l’all. Bockbier « espèce de bière très forte », aujourd’hui dans tous les parlers gallo-
abrégé en bock. romans qui n’ont plus de trace de l’a. fr.
BOESSE, sorte de brosse, 1728. Issu du selve, lat silva, combattu en outre par
comp. gralle-boësse, vers 1600 (graïle-bosse forêt. La forme bois vient, non de *boscum,
pour gralle-boisser), empr. du prov. grata- mais du plur. *bosci. A pris de bonne heure
boyssa, 1498 (texte de Draguignan), formé le sens de « matière ligneuse de l’arbre »
de l’impér. des deux verbes grata(r) « grat- et éliminé en ce sens des représentants du
ter », et bouissa(r) « balayer, frotter » lat. ligna, plur. neutre de lignum, a. fr.
(V. buis). — Dér. : boësser, id. leigne, a. pr. lenha, peu vivace aujourd’hui,
même dans les parlers méridionaux, qui
BŒUF. Lat. bôvem, acc. de büs. — Dér. : ont empr. le fr. bois, tout en gardant la
bouverie, x11° ; bouvet, 1305, au sens de forme locale bosc pour le sens propre. —
« rabot », 1600, par comparaison du rabot Dér. et Comp. : boiser, 1676, d’après le
qui creuse la rainure avec le bœuf qui 2° sens (mais au sens forestier, 1829, d’où
creuse le sillon ; bouvillon, xtrre ; bouvreuil, déboiser, 1826, reboiser, reboisement, 1863);
1762 (d’abord bouvreur, 1700), propr. « pe- boiserie, vers 1700 (Saint-Simon) ; bûche-
tit bœuf », dit ainsi par plaisanterie ; ron, 1611, altération, d'après bâche, de
autres formes, bœuf dans la Sologne, boscheron, xu11°, formes variées dans les par-
bouvrel, bouvron, bouvet, bouvard, dans lers gallo-romans, cf. notamment la forme
d’autres dialectes. normande ou picarde boquillon, 1668 (La
BOGHEI, sorte de cabriolet (orthographe Fontaine), antér. bochillon et boskellon,
bizarre, quoique usuelle depuis 1835 x11e ; buisson, xr1°, altération mal éclaircie
(Acad.) ; boguey, 1809, Lamartine ; bockei, de boisson, vers 1080 (Roland), fréquent
1797). Empr. de l'angl. buggy (ortho- au moyen âge, d’où buissonnet, xir®
graphe parfois conservée en fr.), d’origine (boiss-) ; buissonneux, id.; buissonnier,
inconnue. XVIe; pour école buissonnière, v. école ;
mort-bois, 1797 ; sous-bois, 1869. V. bo-
BOGHEAD, 1857. Du nom du village queteau, bosquet, boucher, verbe, bouquet,
écossais où on trouve cette houille. haut-bois, sous haut.
BOGGIE, 1843. Empr. de l’angl. bogie,
d’origine inconnue. BOISSEAU, 1198 ; en outre boistel au
moyen âge. De même a. pr. boissel. Boïislel
BOGUE, «enveloppe de châtaigne », 1555 est refait sur boiste, v. boîte, qui ne peut
(Belon, dans un sens moins restreint). Mot pas expliquer les formes avec -ss-. Probabl.
de l’Ouest, qui paraît issu du breton bolc’h dér. d’un simple boisse « sixième du bois-
« capsule du lin », propr. « sac, enveloppe », seau », attesté du xrri° au xve s., et qui
de *bolgh (lat. de la Gaule bulga, v. bouge) a d’assez nombreux correspondants dans
étymologie appuyée par l'indication de les patois, avec des sens divers; boisse
Cotgrave, 1611, « enveloppe contenant la représente le lat. (de la Gaule) “*bostia
graine de certaines plantes ». « ce qu’on peut tenir dans la main », dér.
d’un gaulois *bosla « id. », restitué d’après
BOHÈME, 1372. Empr. du lat. médiéval l’irlandais boss, bass « creux de la main ».
bohemus « habitant de la Bohême », dit — Dér. : boisselée, xrire ; boisselier, 1611 :
ensuite des tsiganes qui avaient passé par boissellerie, 1751.
1 S] BONDIR

BOISSON. Lat. de basse ép. (vire s.) BOMBASIN, v. basin.


bibitiônem, acc. de bibitio, dér. de bibere
BOMBE ripaille », v. bombance.
« boire ». Seulement fr.
BOMBE, projectile, 1640. Empr. de l’it.
BOÎTE. D'abord boiste. Issu par subs- bomba, formé comme bombarde. — Dér. :
titution de suff., du lat. pop. büxida, attesté bomber, 1701 (d’après la forme de la
dès le ve s., acc. de buxis, en lat. class. PA d’abord -é, 1690), bombement,
pyxis « boîte, coffret », objet de luxe, d’ori-
gine grecque (dér. de pyksos « buis »). A. pr.
boisseza, boissa, etc., it. bossolo. — Dér. : BOMBONNE, 1867. Empr. du prov.
boîter, 1538 (mais boistoier au x1v® 5.) ; boi- boumbouno « sorte de bouteille », de la
teux, 1226, dér. de boîte, au sens de « ca- même famille que le préc.
vité d’un os », propr. « tourner dans la ca- BOMBYX, 1564 (sous la forme bombyce).
vité » en parlant de la jambe, boîterie, 1803 ; Empr. du lat. bombyx (mot grec).
boîtier, 1260 ; boïitiller, 1867 ; boitillement,
1867; boîtillon, 1765; déboîter, 1545, BON, lat. bünus. L’a. fr. avait une forme
déboîtement, 1530 ; emboîter, 1320, em- buen, qu’a éliminée bon, développé en
boîtage, 1787, emboîtement, 1606, em- position inaccentuée, par suite de l'emploi
boîture, xvie (Paré), remboîter, vers 1300, ordinaire de l’adj. devant le subst. —
remboîtement, 1636. Dér. : bon, subst., « terme de finances »,
vers 1700 (Saint-Simon) ; bonne « servan-
BOÎTER, v. le préc. te », 1708 ; bonifier « rendre bon », vers
1445 (peut-être d’après le lat. médiéval
BOL, « pilule », vers 1300 (écrit bole); bonificare, ou empr. de l’it. bonificare), au
d’abord bolus, xive. Empr. du lat. médical sens financier, 1712, d’où bonification, 1584,
bolus « grosse pilule » (du grec bélos «motte, sens parallèle au verbe ; boniment, 1837,
boule »). par l'intermédiaire d’un verbe argotique
BOL, récipient, 1800, antér. bowl, 1786. bonir « parler », propr. « dire des bonnes »,
Empr. de l’angl. boul. — Dér. : bolée, 1892. 1828; abonnir, x11°, rabonnir, XIII. —
Comp. : Nombreux mots avec bon comme
BOLCHÉVISTE,
vers 1917. Issu par subs- premier élément ; bonbon, 1604 (du bonbon,
titution de suff., de bolchévik, mot russe, Journal de J. Héroard, médecin du dau-
qui signifie « qui veut le maximum », opposé phin), d’où bonbonnière, 1780.
à menchévik « qui veut le minimum »; de
BONACE, vers 1220. Lat. pop. *bonacia,
là les traductions maximaliste, minimaliste,
altération du lat. class. malacia « calme de
en 1905-6. — Dér. : -isme, id.
la mer (du grec malakia « id. »), interprété
BOLÉRO, 1804. Empr. de l'esp. bolero, comme un dér. de malus « mauvais », et
propr. « celui qui danse le boléro », qui conséquemment refait en bonacia d’après
semble dér. de bola « boule, bille ». Pris bonus, en raison du sens du mot ; de même
pour désigner un vêtement d’origine esp., it. bonaccia, a. pr. bonassa. Bonasse, ad).,
1897. usuel au xvi® s., déjà relevé en 1288 (sous
la forme bonace), en parlant de la mer ou
BOLET, xive (écrit boulei). Empr. du du temps, au sens de « calme », est le même
lat. boletus « cèpe » (du grec bôlétés, dér. de mot pris adjectiv., cf. calme, doit son sens
bôlos, v. bol). On a comme formes pop. péjor., attesté dès la fin du xvi° s., au
l’a. pr. bolet et l’a. fr. de l'Est bolei, au- suff., v. hommasse, d’où bonasserie, 1840
jourd’hui disséminé dans les patois de (Balzac).
l'Est et méridionaux, mais peu vivace.
BONDE, 1373 (la bonde du ionnel) ; en
BOLIDE, 1803, une première fois en 1411 « bonde d’étang ». Du gaulois *bunda,
1570. Empr. du lat. bolis, -idis, fém. (mot supposé d’après irlandais bonn « base,
grec, qui signifie « trait, jaillissement de plante du pied »; cf. a. pr. bonda. Les
l'éclair », de la famille de ballein « lancer »). formes germ., cf. all. Spund, sont emprun-
tées du roman. — Dér. : bonder, 1483;
BOLIVAR, 1819. Tiré de Bolivar, nom bondon, vers 1300 (mais le dér. bondenel
du héros de l'indépendance de l’Amérique est attesté dès le xr1° s.), d’où débondonner,
du Sud (1783-1830), dont le nom a été 1564 ; débonder, xv°.
donné à un chapeau à larges bords et à
haute forme, à la mode chez les libéraux, BONDIR. Au moyen âge signifie surtout
vers 1820, au moment de la grande popu- « retentir », encore usuel au xvi® 8., d’où
larité de Bolivar. « s’ébranler, sauter », rare au moyen âge ;
cf. a. pr. bondir « retentir ». Lat. pop.
BOMBANCE, 1530. Altération, d’après *bombilire, formé peut-être d’après le pro-
bombe, de l’a. fr. bobance, très usuel à côté totype de l’a. fr. feniir, v. retentir, cf. le
de bobant, masc. « présomption, faste », lat. class. bombire et le lat. de basse ép.
cf. de même a. pr. boban, bobansa, mots bombiläre, verbe onomatopéique (1v® s.);
onomatopéiques, v. bobard. — Dér. :
v. bombarde, bombe. — Dér. : bond, xIv°
bombe, fin xix°, en fr. pop. (Christine de Pisan), faux-bond est un terme
BOMBARDE, xive (« trompette, ma- du jeu de balle, xvi® (alors déjà au sens
chine à lancer des pierres »). Dér. du lat. fig.) ; bondissement, 1547 (antér. «retentis-
bombus « bruit sourd » (du grec bombos, sement », xive); rebondir, x11° (« reten-
mot onomatopéique). — Dér. : bombarder, tir » ; a suivi le développement sémantique
1515, bombardement, 1701, bombardier, du simple) ; rebondissement, vers 1400 (sens
1431. moderne).
BONHEUR 78

BONHEUR, v. heur. BORDEL, 1609. Empr. du prov. bordel


ou de l’it. bordello (lui-même empr. de
BONI, 1612 : (« l'emploi qu'ils font du l’a. fr. bordel ou du prov.) ; l’a. fr. bordel,
boni et remanet » dans un texte juridique). xI1€ s., d’où bordeau, usuel au xvie s.,
Empr. du lat. boni, génitif de bonum, propr. « petite maison, cabane », dér. de
neutre, dans la locution aliquid boni borde « cabane », encore dans de nombreux
« quelque chose de bon », qui a dû être
parlers de l’Ouest et du Midi au sens de
employée dans le langage juridique du « métairie, ferme, grange, etc. » (cf. a. pr.
moyen âge, comme remanel « il reste »,
d’où « reste ».
borda, d’où bordel) ; du francique *borda
« cabane de planches », plur. neutre de
BONIFICATION, v. bon. sens collectif, devenu fém., de *bord « plan-
che », cf. gotique baurd, etc. (ce mot s’est
BONNET, 1401 (mais dès le xr1° s. bonela parfois confondu en germanique avec le
dans le lat. médiéval ; le sens d’ « étoffe prototype de bord, cf. par exemple anc.
servant à faire des coiffures », bien qu’at- angl. bord, d’où angl. board, à la fois
testé à la même époque, est secondaire). « bord » et « planche »).
On a relevé dès le vrie s. (Loi Salique)
abonnis « bonnet », d’origine peut-être BORDJ, 1856. Mot arabe signifiant «for-
germ., auquel bonnet semble se rattacher. tin »; ne se dit qu'à propos de l'Afrique
— Dér. : bonneteur, 1708, propr. « celui du Nord.
qui prodigue des coups de bonnet », d’où
« filou », 1752, par l'intermédiaire d’un BORE, v. borax.
verbe bonneter, 1550, « donner des coups
de bonnet », d’où bonneteau, 1874 ; bon- BORÉE, xv°; boréal, xive. Empr. du
netier, 1449 ; bonneterie, xve s. ; bonnette, lat. boreas (mot grec), borealis (de basse
1382. ép.).
BONTÉ. Lat. bonitätem, acc. de bonilas. BORGNE, xrie s. Signifie parfois « lou-
It. bontà, esp. bondad. che » en a. fr. et « aveugle » dans les
BONZE, 1570 (bonzis en 1581). Empr., patois. Se rattache probabl. à un type
par l’intermédiaire du port. bonzo, du japo- borne, très répandu dans les patois aux
nais bozu. sens de « fontaine; caverne; ruche;
tuyau, etc. », peut-être d’origine germ.
BOOM, 1885. Mot onomatopéique, empr. (cf. all. brunnen). On propose aussi une
de l’anglo-américain. étymologie par un gaulois *borna qui aurait
BOOMERANG, 1863. Empr. de la langue eu deux sens et deux origines différentes.
des indigènes australiens. L’un serait du radical de l’all. bohren, lat.
forare ; il aurait fourni un adj. *bornio « à
BOQUETEAU, xixe. Dér. dialectal, nor- qui on a crevé les yeux », d’où borgne.
mand ou picard, de bois ; v. bouquet. L'autre serait un dér. du radical indo-
BOQUILLON, v. bois. européen *bher- « jaillir (de l’eau) »; il
aurait donné le type borne « fontaine ».
BORA, v. bourrasque. — Dér. : éborgner, x11° s., d’où éborgnage,
1825, éborgnement, xvIe 5.
BORAX, début xvie (dans un glossaire
édité alors, mais rédigé à la fin du xrr1° 8.). BORNE, 1178 (sous la forme bourne).
Embpr., par l'intermédiaire du lat. médiéval Altération de l'a. fr. bodne, xr1°, d’où
borax, de l’arabe boüraq, empr. lui-même bonne, bosne (si ce n’est pas une simple
du persan boürah (cf. baurach chez Rab., graphie, cette forme peut avoir donné
1532). — Dér. : borate, 1787 (G. de Mor- naissance à borne, par un changement d’s
veau) ; bore, 1818, borique, 1335. en r devant consonne, dont il y a d’autres
BORBORYGME, xvie (Paré). Empr. du exemples, mais en ce cas il faut expliquer
grec borborygmos. l’origine de l’s). Empr. d’un gaulois *bo-
dina, lat. médiéval bodina, x1° s., « borne
BORD. Du francique *bord « bord d’un de frontière », plutôt que “*botina, mal-
vaisseau », autre mot que le prototype de gré botinas de la Loi Ripuaire, l'a.
borde, v. bordel ; cf. de même a. pr. bort. prov. bozola supposant une forme antér.
L'’it. bordo vient du gallo-roman. — Dér. avec d'; mais le mot est sans appui dans
et Comp. : bordage, xve (« bord » ; comme les langues celt. — Dér. : 1° d’après borne :
terme de marine, 1638); bordée, 1546; borner, 1310 (en outre bonner), d’où
border, x11°, d’où bordage « action de bor- bornage, 1385 (bournage), antér. bonnage,
der », xviIt; bordure, x1r1° ; bordereau, XII S. ; aborner, xvies., d'où abornement,
1539 (d’abord bourdrel, 1493), probabl. 1611; 2° d’après bonne : abonner, 1306,
parce que le relevé se place sur le bord, propr. « borner », ensuite «soumettre à une
plutôt qu’au sens de « bord, bande de redevance limitée », etc., d’où les sens
papier »; aborder, vers 1310, abord, vers modernes (d’où all. abonnieren, etc.) ; on a
1470, abordable, 1542 (d’où inabordable, aussi du xv° au xvI°s. en Ce sens aborner,
1611), abordage, 1555, abordeur, 1798: depuis réservé au sens concret, d’où
déborder, x1v°e, débord, 1558 (J. du Bellay), abonnement, 1275, désabonner, 1840, réa-
débordement, xve ; plat-bord, 1606 ; rebord, bonner, 1867.
1642; reborder, 1476 ; transborder, 1812,
d'ou transbordement, 1812, transbordeur, BOSQUET, 1549. Empr. de lit. bos-
INR IXe, chello, dér. de bosco, v. bois. Bosket dans
un texte du x1re s. est une forme normano-
BORDE, v. le suiv. picarde.
79 BOUCHER

BOSS, 1869 ; empr. de l’anglo-américain BOUC. Du gaulois *bucco-, cf. anc. ir-
boss, id., lequel vient lui-même du néerl. landais boc. On note à l’appui de l’étymo-
baas. logie celtique l’extension du mot : a. pr.
BOSSE, x11° (boce). Le prototype *bot- boc et régions voisines, cat. et Italie du
tia, supposé aussi par l’a. pr. bossa et l’it. Nord, l’origine celtique des noms des
bozza et boccia « boule » est inexpliqué; le mâles d'animaux domestiques tels que
roumain bot « boule » paraît exclure une mouton (le colon seul ayant à s'occuper de
étymologie germanique. — Dér. : bossage, ces animaux beaucoup plus rares que leurs
1627 ; bosseler, xiri°, bosselage, 1718,
femelles) et la disparition complète en
bosselure, xvi° (Paré), débosseler, 1838; gallo-roman du lat. caper. — Dér. boucaut,
bosser, 1690 (de bosse au sens de « cor- tonneau, 1624; boucher, subst., xri°,
dage »); débosser, 1683 ; bossette, 1314;
propr. « celui qui abat les boucs » (cf. de
même it. beccaio, de becco « bouc »;
bossoir, 1678 ; bossu, x11°, bossuer, 1564;
embosser, 1752 (de bosse « cordage »), em- ces mots désignaient peut-être d’abord
le serf chargé dans les grands domai-
bossage, 1792.
nes d’abattre les jeunes boucs destinés
BOSTON, sorte de danse, 1882. Tiré de à la consommation sur place, un seul
Boston, ville des États-Unis. — Dér. : bos- bouc adulte suffisant pour un grand trou-
tonner, 1887. peau de chèvres), formation qui a éliminé
à peu près complètement les représentants
BOT, 1566 (pied bot). Se trouve vers la du lat. macellärius, a. fr. maiselier (d’où
même époque comme adj. au sens d’ « é- aussi a. pr. mazelier, it. macellaio), usuel
moussé, contrefait ». Même mot que boi jusqu’au xv° s., outre maceclier, V. mas-
« crapaud », fréquent au moyen âge et dans sacre, d’où boucherie, x11° ; bouquet, xr11°,
les parlers de l'Est et que bof « sabot », « petit bouc », sens moderne, 1867 ; bou-
xvi®, aujourd'hui surtout dans ceux de quin, 1549, d’où bouquiner « couvrir la fe-
l'Ouest, voir aussi botte « chaussure »; melle », 1611.
représenté également dans les autres lan-
gues romanes : it. bolla « crapaud », esp. BOUCAN, « désordre, tumulte », 1624
boto « émoussé » ; famille de mots qui ap- (« mauvais lieu », d’où le sens moderne,
partient à un type germ. *bultia « émoussé », depuis 1797). Probabl. dér. de bouc, soit
auquel se rattachent de nombreuses formes directement, soit par l'intermédiaire du
germ. avec des sens variés ; se trouve aussi verbe boucaner, 1573, « fréquenter les mau-
dans les langues slaves et en magyar. vais lieux », propr. « faire le bouc ».
BOUCAN, « viande fumée » et « gril »
BOTANIQUE, 1611. Empr. du fém. de
(dans le récit de voyages de De Léry, 1578).
l’adj. grec botanikos « qui concerne les
Empr. du mot du tupi mocaëm (dans un
herbes, les plantes », dér. de botanon «herbe,
récit port. de 1587), mukem (p, m, b alter-
plante ». — Dér. : botaniste, 1676. nent souvent à l’initiale en tupi et en gua-
BOTTE (de paille, etc.), 1316. Empr. du rani). — Dér. : boucaner, 1578, d’où bou-
moyen néerl. bote « touffe de lin », d’une canage, 1855 ; boucanier, 1667-1671.
famille de mots germ. signifiant « frapper », BOUCAUT, 1583, probabl. empr. d’un
c’est-à-dire « quantité de blé, etc., qu’on parler prov., où boucaut peut être un dér.
bat en une seule fois »; rattaché aussi, de bouco « bouche ».
mais d’une façon moins vraisemblable à la
famille de bot. — Dér. : botteler, 1328, par BOUCHE. Lat. bücca, propr. « joue
l'intermédiaire d’un dim. botel, xIv® s$., gonflée » ordinairement au plur., d’où le
encore usité au xvire, d’où bottelage, 1351, roumain bucä « joue » a pris le sens de
« bouche » dans le langage familier, déjà
botteleur, 1391 ; botteleuse (machine), 1907.
chez Cicéron ; a éliminé le class. os, oris;
BOTTE (chaussure), x11°. Probabl. formé remplacement d’un mot normal par un
avec le radical de bot, au sens de « chaus- synonyme expressif. It. bocca, esp., a. pr.
sure grossière » ; désignait en effet surtout boca. Les parlers gallo-romans de l’Ouest
au moyen âge des chaussures grossières disent aujourd'hui surtout gueule. — Dér.
couvrant une partie de la jambe, dont se et Comp. : bouchée, x11°, probabl. déjà lat.
servaient les moines ; la botte proprement pop. *buccäla, attesté dans toutes les lan-
dite se disait huese, v. houseau. De même gues romanes ; aboucher, xvi® (sens mo-
“a. pr. bota. — Dér. : botter, 1539 ; bottier, derne), antér. « faire tomber en avant »,
xv® ; bottine, 1367, d’abord « sorte de jam- xIve; arrière-bouche, 1820; déboucher,
bière » ; débotter, vers 1200 ; rebotter, 1549. « sortir d’un lieu resserré », 1640, d’où dé-
bouché, 1723 ; emboucher, 1273, d’où em-
-BOTTE, terme d'escrime, xvi® (Bran- bouche, xve (tiré du verbe au sens d’ «en-
tome). Empr. de lit. bolta « coup », tiré graisser ») ; embouchure, 1328.
du verbe archaïque bollare « frapper »,
autre forme de bullare « lancer », v. bouter ;
BOUCHER, verbe, xir1e. Dér. d’un anc.
bout signifie de même souvent « coup » en bouche (d’où bouchon, v. ce mot), attesté
rarement et seulement au xv° s. au sens
a. fr. de « botte, gerbe », et qui a dû signifier
BOTTELER, v. botte (de paille). « touffe », lat. de la Gaule *boska, dér. de
*bosk, v. boisseau et bois, d’où est sorti le
BOTULISME, 1922. — Dér. du lat. sens du verbe, propr. « boucher une ouver-
bolulus « boyau ». ture au moyen d’une poignée de paille, etc.».
BOUBOU, « grande chemise flottante des — Dér. et Comp. : bouchoir, 1553 ; bouche-
nègres du Sénégal ». Fin xix°. Empr. d’une trou, 1765 (Diderot); déboucher, 1539,
langue indigène de l'Afrique occidentale. débouchoir, 1734 ; reboucher, 1523.
BOUCHER 80

BOUCHER, subsi., v. bouc. et plus tôt par bouffard. Mot onomatopéi-


que d’une famille de mots, exprimant le
BOUCHON, 1388 bouchons à barils). bruit de la bouche qui est ouverte brus-
Dér. de l’a. fr. bouche, v. boucher, verbe quement après avoir été gonflée, puis le
pris au sens de « poignée de paille, etc., gonflement des joues, etc., cf. it. buffare
servant à boucher », d’où aussi les autres « souffler en gonflant les joues, etc. », esp.
sens, notamment « faisceau de feuillage, bufar «souffler, être de mauvaise humeur » ;
indiquant un cabaret », xvi°, comme terme cf. aussi pouf, pouffer. — Dér. : bouffarde,
de tendresse, d’après le sens de « chiffon » 1821 ; bouffée, xr1° ; bouffette, 1409.
(attesté en 1690), 1662 (Molière), d’où
bouchonner, xvi° (Bon. des Périers). BOUFFIR, xrr1° (J. de Meung). Variante
du préc. — Dér. : bouffi, 1549 ; bouffissure,
BOUCLE. Lat. büccüla, dim. de bücca, 1582.
v. bouche, propr. « petite joue, petite
bouche », d’où « bosse de bouclier », à basse BOUFFON, xvie (Marot). Empr. de lit.
ép., sens usuel en a. fr., conservé seulement buffone, dér. de buffa « plaisanterie », cf.
en gallo-roman, cf. de même a. pr. bocla, aussi buffare « plaisanter », v. bouffer. —
bloca, et empr. par les langues voisines; Dér. : bouffonner, 1549 (Du Bellay) ; bouf-
de ce sens dérive le sens fig. d’ « anneau fonnerie, 1539.
servant à boucler », dès le x11€ s., aujour-
d’hui usité partout dans les parlers gallo- BOUGAINVILLÉE, 1836. Dér. du nom
romans (mais le sens de « boucle de che- du navigateur Bougainville.
veux », empr. par de nombreuses langues,
BOUGE, fém., v. le suiv. et budget.
a été relevé seulement en 1676). — Dér. :
boucler, 1539 (auparavant bougler, 1440, BOUGE, masc., vers 1200 (« local de
d’après une autre forme bougle) ; reboucler, décharge », d’où « logement misérable » au
1669 ; bouclette, x11° ; bouclier, x111°, issu, xvitie s., Voltaire). Paraît être un emploi
par substitution de suff., de boucler, xr1°, fig. de bouge « partie concave ou bombée
d’abord adj. dans escu boucler « bouclier d’un objet », xr1°, d’où de nombreuses
garni d’une boucle », vers 1080 (Roland) ; acceptions techn., notamment « ventre
déboucler, x1r°. d’une futaille », 1704, « cuveau » ; ce mot
BOUDER, xive. Mot pop. expressif, v. paraît lui-même être un emploi fig. de
bedaïine ; dit ainsi à cause de la moue bouge, fém., « sac de cuir, valise », xri°,
qu'on fait en boudant. — Dér. : bouderie, d’où « poche » (d’où l’it. bolgia « besace,
1690 ; boudeur, 1680 ; boudoir, avant 1730, fosse »), lat. bülga, signalé comme gaulois
propr. « chambre où on se retire pour bou- par Festus, cf. irlandais bolg « sac » (v.
der » ; dit ainsi par plaisanterie. bogue) ; le masc. de bouge « cabinet de dé-
charge » est surprenant, mais le mot a été
BOUDIN, 1260 (E. Boileau). Probabl. fém. au xiv® s. et jusque dans Furetière,
expressif, comme le préc. ; a reçu de nom- 1690, et le lat. médiéval dit à la fois bugia
breuses acceptions techn. On trouve en et bugius.
outre boudine, xiri°, « nombril », pris égale-
ment ensuite dans un sens techn. — Dér. : BOUGER. Lat. pop. *bullicäre « bouil-
boudiner, 1838 (boudiné en 1758), boudi- lonner », d’où « s’agiter », dér. de bullire,
nage, 1838. v. bouillir. It. bulicare « bouillonner »,
a. pr. bolegar « bouger ». — Dér. : bou-
BOUE, xr1°. Mot de la France septen- geotte, 1859.
trionale, probabl. d'un type *bawa, d’ori-
BOUGIE, 1300 (chandeles de bougie).
gine celtique, d’après le gallois baw « fange,
Propr. « cire fine dont on faisait des chan-
crotte ». — Dér. : boueur, 1563 ; boueux,
vers 1200 ; embouer, xrr°.
delles », puis « chandelle ». Tiré de Bougie,
nom d’une ville d'Algérie, où on achetait
BOUÉE, 1483 (on a aussi en 1394 boue, de la cire et des bougies. — Dér. : bougeoir,
encore attesté en 1674). Probabl. empr. du 1514 (sous la forme boujoué).
germ. occidental *baukn, qui aurait donné
BOUGON, 1796 ; bougonner, 1796 (dès
*boie ; cette forme aurait été fixée au
Xv° s., sous la graphie bouée. Cf. anc. haut 1611 bougonner « faire quelque chose de
all. bouhhan «signal », néerl. baken « bouée » mauvaise grâce », donné par Cotgrave
(d’où l’all. Bake), etc. Le néerl. boei, d’où
comme orléanais.) Paraissent être ono-
matopéiques.
it. boia, esp. boya, vient à son tour du fr.
BOUETTE, v. boëtte. BOUGNA, fin xix°. Apocope de char-
bougna, appellation pop. des charbonniers
BOUFFE, 1824. Tiré d'opéra bouffe, de de Paris, formation plaisante à l’imitation
lit. opera buffa, genre d’opéra-comique (par des patois méridionaux, parce que la plu-
opposition au grand opéra), qui fut partic. part de ces charbonniers sont d’origine
en vogue en Italie au xviri® s., puis en auvergnate.
France (en 1791, scène-buffe) ; pour l’éty-
mologie de buffa, fém. de buffo « plaisant », BOUGRAN, xri° (boquerant, etc. ; bou-
v. bouffer et bouffon. gran, au xvi® s.). Altérations diverses de
Boukhara, nom d’une ville du Turkestan,
BOUFFER, xu°, « souffler en gonflant d’où était importée en Europe une étoffe
ses joues », d’où « gonfler » en général et plus fine que le bougran de nos jours. It.
« être fâché », xve, encore au xvri° ; le sens bucherame, esp. bucarän, angl. buckram, etc.
de « manger gloutonnement », est attesté Les voies de pénétration et les relations de
indirectement dès le xvi® s. par bouffeur ces formes sont encore mal déterminées.
81 BOULINE

BOUGRE, 1172. Jusqu'à la fin du xvres. BOULE. Lat. bülla « bulle », d’où « boule»
signifie surtout « hérétique » ou « sodo- en gallo-roman (a. pr. bola « boule »), —
mite »; d’où le sens moderne, déjà au Dér. et Comp. : bouler, x1ve ; boulet, 1347 ;
XVI® s., d’après les dér., v. ci-dessous. boulette, xvie (Paré) ; boulier (ou boulier-
Empr. du lat. médiéval Bulgarus (déjà compteur), 1863 ; bouliste, 1948 ; boulon,
attesté à basse ép., vie), nom de peuple; X111e, « sorte de boule » (le sens moderne est
les Bulgares, comme membres de l’Église plus récent), d’où boulonner, 1425 (au sens
grecque, étaient considérés comme héré- moderne, 1690), déboulonner, 1877 ; boulot,
tiques, et ils furent des adversaires redou- « petit et gros », 1845; boulotter, x1x°
tables des croisés, partic. lors de la qua- (Balzac) au sens de « se laisser vivre »
trième Croisade. Au moyen âge leur nom (d’où le sens de « manger », 1840, peut-être
est souvent associé à celui des Albigeoïis; influencé par pain boulot); le dévelop-
bigre, 1743, forme atténuée de bougre em- pement d’où est issu boulot « travail »,
ployée comme juron. — Dér. : rabougrir, terme pop. du xix® s., n’est pas clair;
au xXvVI° s., par l'intermédiaire d'abougrir, abouler, 1790 (« apporter », s’abouler
1564, dér. de bougre, au sens de « faible, « venir », rabouler (se), xix°), très ré-
chétif », d’où rabougrissement, 1856. pandu dans les patois avec des sens di-
BOUI-BOUI, 1847 (au sens de « marion- vers ; bouleverser, 1557 (« renverser »,
nette », d’où « théâtre de bas étage »). sens usuel au xvi® s.); bouleversement,
Paraît être une onomatopée de formation 1579 ; boulevue (à la), xvr°, signifie alors
enfantine. « à coup sûr », cf. en outre à bonne vue ; le
sens contraire « sans réflexion », indiqué
BOUILLABAISSE, vers 1840 (écrit par les dictionnaires depuis le xvire s., a
bouille-abaisse). Empr. du prov. bouiabaisso, dû s’appliquer proprement aux juges « qui,
comp. des impér. des verbes prov. corres- dans les contestations entre les joueurs,
pondants à bouillir et à abaisser, c’est-à- jugent à boule-veue, c’est-à-dire par la seule
dire « bous et abaïsse-toi », adressé soit à veue » (sans mesurer exactement) Ménage;
la marmite qu’on retire rapidement du débouler, 1793. V. chambouler, sabouler.
feu, soit à la cuisson qui doit être vive
et rapide. BOULE, masc. Tiré de Boule, nom d’un
sculpteur-ébéniste (1642-1732).
BOUILLER, 1669. Transformation de
bouler, même sens, très répandu dans les BOULEAU, 1516. Dér. de l’a. fr. boul
patois, qui représente de lat. bullare « bouil- (d’où aussi boulaie, 1294), lat. pop. *belül-
lonner », sous l’influence de verbes comme lus, lat. class. belülla, donné par Pline
fouiller, souiller, brouiller. — Dér. : bouille, comme gaulois. Les formes romanes vien-
1669. nent de ces deux types ou de types appa-
BOUILLIR. Lat. bullire, dér. de bulla, rentés *beilius, d’où a. fr. biez, a. pr. bez
v. boule, propr. « faire des bulles ». L’! et *bellia, d'où notamment le nom de lieu
mouillée, régulièrement développée, par Besse; cf. it. bidollo. Aujourd’hui bouleau
exemple à l’imparf. ou au subj. près., a est dominant dans les parlers septentrio-
gagné l’inf.; on trouve en a. fr. boulir, naux à côté de boul et boule, usités surtout
bouli, boulu, etc. It. bollire, esp. bullir, dans l'Est, et de types apparentés dans le
Midi.
a. pr. bolir. — Dér. et Comp. : bouillant,
vers 1200, ébouillanter, 1836 (les diction- BOULEDOGUE, 1741. Empr. de l’angl.
naires donnent aussi éboullir, x11°, qui a bulldog, littéral. « chien-taureau ».
pu contribuer à la formation d’ébouillan-
ler); bouilleur, 1783; bouillerie, 1836; BOULET, v. boule,
bouilli, 1317 ; bouillie, xr1°, au moyen âge BOULEVARD, 1435 (boloari ; au xvies.,
surtout boulie, x11°, forme dominante dans formes diverses, entre autres belouart, ba-
les parlers de l'Est, et attest'e aussi dans louart, boulevert). Propr. ouvrage de forti-
les parlers méridionaux ; bouilloire, 1740; fication « rempart fait de terre et de ma-
bouillon, vers 1200, court-bouillon, 1651; driers », d’où, au début du xix°s., « pro-
bouïllonner, xive; bouïillonnement, xvi® menade plantée d'arbres », sur l’emplace-
(Paré) ; bouillotte, 1788, comme terme de ment d’anc. fortifications, devenues inu-
jeu, 1810, dér. directement du verbe, ainsi tiles par suite du changement des méthodes
nommé à cause de la rapidité du jeu; de défense, d’où le sens moderne. Empr. du
rebouillir, xive (E. Deschamps). moyen néerl. bolwerc, le mot paraissant
BOUILLON-BLANC, 1539. Comp. de être entré par le Nord-Est. A pénétré du
bouillon, parce que cette plante est souvent fr. dans les langues voisines : it. baluarde,
employée en médecine comme tisane, etc. esp. baluarie, etc. — Dér. boulevardier,
xixe (Veuillot).
BOULANGER, 1198 (écrit -engier dans
un texte d’Abbeville, cf. en lat. médiéval BOULEVARI, v. hourvari.
bulingarius, 1120). Élargissement, avec le
suff. -ier des noms de métier, de boulenc, BOULEVERSER, BOULE-VUE, BOU-
attesté dans des textes picards au sens de LIER, v. boule,
« boulanger », formé avec le suff. d’origine BOULIMIE, 1482. Empr. du grec bou-
germ. -enc et un radical issu du moyen limia, littéral. « faim (limos) de bœuf
néerl. bolle « pain rond »; cf. de même it. (bous) », d’où « faim dévorante ».
panatliere, esp. panadero, dér. de pane, pan
« pain ». Boulanger a éliminé l’a. fr. pesiour, BOULINE, sorte de corde, terme de ma-
lat. pistor, et d’autres concurrents. — Dér. : rine, vers 1155 (boesline, dans un texte
boulangerie, .1314 ; boulanger, verbe, xv°. anglo-normand). Empr. de l’angl. bowline,
DICT. ÉTYM.. 6
BOULINE 82

littéral. « corde (line) de proue (bow) ». bourgène, relevé dans les dictionnaires), -rg-
Le néerl. boelijn est moins vraisemblable, évoluant souvent en -rd- dans les parlers
le mot apparaissant d’abord en anglo-nor- de l'Ouest (comp. poit. ardile « argile »).
mand. — Dér. : bouliner, 1688. Borzaine représente un *burgëna, d’origine
pré-indo-européenne, formé avec le mot
BOULINGRIN, 1664 (en 1663, Poulin- contenu aussi dans le basque burgi.
grin). Empr. de l’angl. bowlinggreen, lit-
téral. « pelouse (green) pour le jeu de BOURDE « baliverne, mensonge », vers
boules (bowling) ». 1200. Étymologie inconnue. A. pr, borda.
BOULON, BOULOT, BOULOTTER, v. — Dér. : bourdon, « faute typographique »,
boule. 1688.
BOUQUE, terme de marine ; vers 1400. BOURDON, « bâton de pèlerin ». Lat. de
Empr. du prov. bouca « bouche », déjà basse ép. bürdonem, acc. de bürdô (autre
en 1338, dans-un texte picard. — Dér. : forme de bürdus) « mulet », qui a pris le
débouquer, 1678, débouquement, 1694; sens de « bâton » suivant un développe-
embouquer, id., embouquement, 1792. ment sémantique fréquent, cf. pouire, etc.
De même a. pr. bordon, esp. bordén, it.
BOUQUET « bouquet de fleurs », xve. bordone ; le sens de « bâton de pèlerin » ne
Signifie d’abord « bosquet », cf. aujourd’hui peut remonter qu’au moyen âge, sans
bouquet d'arbres, d’où le sens moderne, au qu’on puisse dire quelle langue l’a donné
xvi® s. Forme normande ou picarde, dér. aux autres.
de bois. — Dér. : bouquetier, xvi®; bou-
quetière, 1566. BOURDON « insecte » et « instrument
BOUQUET « dartre qui attaque le mu- de musique, tuyau de cornemuse », dès le
seau des moutons », 1497. Forme normande moyen âge, avec développements séman-
ou picarde, correspondant à l’a. fr. bou- tiques postérieurs, notamment « bourdon-
chei, de même sens, xiv°, dér. de bouche, nement », xvi®. Aux deux sens, formation
cf. les désignations analogues bouquin, onomatopéique ; mais on ne peut actuelle-
xvie (Paré : « bouquin, maladie »), noir ment reconnaître si l’un des deux sens est
ou faux museau, etc.; on trouve aussi un emploi fig. de l’autre. Au sens d’ « in-
barbouquet (sous la forme -uquet, en 1701), secte », seulement gallo-roman ; comme
formé avec le préf. péjor. bar (v. barlong), terme de musique, it. bordone, esp. bordôn.
attesté au xrive et au xv®e s., au sens de — Dér. : bourdonner, xrr1° ; bourdonne-
« coup sous le menton », sous des formes ment, 1545 ; faux-bourdon, vers 1450.
diverses. BOURDON, « faute », v. bourde.
BOUQUET, sorte de crevette, v. bouc. BOURG. Lat. de basse ép. burgus « lieu
BOUQUETIN, xriie (bukesteins; boc- fortifié (surtout le long des frontières) »,
estain et bouquestain, xvi®). Paraît avoir ‘d’après Isidore de Séville, et attesté d’une
pénétré par le franco-provençal boc estaign, façon conforme dans des inscriptions rhé-
xir1e (texte de la Savoie), altération du nanes, mot empr. du germ. *burgs, fém.,
moyen haut all. sieinbock, littéral. « bouc cf. all. Burg, qui s’est fondu avec burgus
des rochers » ; cf. dans un texte du xvies. « château fort », attesté chez Végèce, 1ves.,
« Les Suisses le nomment bouc d’estain, empr. du grec pyrgos « tour »; le burgus
c'est-à-dire des rochers. » d’origine germ. lui doit son genre masc.,
BOUQUETTE, v. sarrasin.
substitué au fém. du germ. It. borgo, esp.
burgo, a. pr. borc. — Dér. : bourgeois, vers
BOUQUIN, 1532 (cornet à bouquin). Pro- 1080 (Roland), opposé au moyen âge d’une
babl. empr. de l’it. bocchino « petite bou- part au noble et de l’autre au manant, au
che »; pour le sens médical, v. bouquet, vilain, d’où, au cours des siècles, dévelop-
« dartre ». pements sémantiques divers ; d'où bour-
geoisie, 1240 (sous la forme bourgesie) ;
BOUQUIN « vieux bouc », -er, v. bouc. embourgeoiser, 1831. — Comp. : faubourg,
BOUQUIN « vieux livre », xvi*. Empr. xve; en lat. médiéval falsus burgus, dès
du moyen néerl. boeckin « petit livre »; 1380; altération de forsbourc, xrr°, formé
l'imprimerie florissait en effet alors dans avec l’anc. préf. fors, lat. foris « en dehors »,
la région flamande, particul. à Anvers. — propr. « ce qui est en dehors du bourg »,
Dér. : bouquiner, 1611 ; bouquineur, xvtrre ; par croisement avec faux, le faubourg
bouquinerie, 1721; bouquiniste, 1723. ayant été conçu comme s’opposant au
vrai Lourg ; d’où faubourien, 1801.
BOURBE, xr1°. Issu du gaulois *borvo-
(ou, plus exactement, d’un plur. collectif BOURGADE, 1418. Empr. de l’anc.
*borva), d'où dérive le nom de la divinité prov. borgada ou de l’it. borgata, v. le préc.
des eaux thermales Borvo, Bormo, d’où le BOURGEOIS, v. bourg.
nom du lieu Bourbon, cf. aussi l’irlandais
berbaim « je bous ». Seulement fr. du Nord BOURGEON. Lat. pop. bürrionem, acc.
et franco-provençal. V. barbotter. — Dér. : de *bürriô, dér. de bürra « bourre »; ainsi
bourbeux, 1552 ; bourbier, x111° ; bourbil- nommé parce que les « bourgeons des
lon, 1690 ; débourber, 1564 ; embourber, arbres ont quelque chose de velu et qui
xI11°, désembourber, 1740. approche de la bourre » (Ménage), étymo-
logie appuyée par l'emploi du fr. bourre
BOURDAINE, vers 1410 (en outre bor- « duvet qui recouvre certains bourgeons à
zaine, 1200). Altération de borzaine, attesté leur naissance », et des sens analogues du
encore dans les parlers de l'Ouest (cf. aussi simple et du dér. dans les patois. Seulement
83 BOURSE

gallo-roman. — Dér. : bourgeonner, xr1°, BOURREAU, 1302. Dér. de bourrer, au


bourgeonnement, 1600 ; ébourgeonner, sens de « maltraiter » ; formations analo-
xIve, ébourgeonnement, 1549. gues aideau (de aider), chemineau (de che-
miner) ; d'autres mots, en -eau, tels que
BOURGERON, 1842 (en outre berg...). traîneau, sont des noms d’objets.
Paraît empr. d’un patois septentrional, cf.
le rouchi bougéron « sarrau ou surtout de BOURRÉE, BOURRELET, BOURRE-
toile fort court, à l’usage des bûcherons », LIER, BOURRER, v. bourre.
1834 (Hécart) ; ce mot dér. de l’a. fr. borge
« sorte de tissu », xive, lat. pop. *bürrica, BOURRICHE, 1526. Paraît être une
dér. lui-même de bürra, v. bourre, d’où variante, empr. d’un parler non déterminé,
aussi bourgeteur, 1544, mot dialectal de la peut-être picard, de bourrache « natte
région lilloise. d’osier », 1765, attesté depuis le xrr1e 5.,
avec des suff. variés et obscurs, de carac-
BOURGMESTRE, 1309 fbourguemais- tère pop. : bouresce, bourrouche, -oche, etc. ;
ire, bourmaistre). Empr. du moyen haut mot d’origine incertaine, probabl. dér. de
all. burgmeister, aujourd’hui Bürgermeister, bourre, parce que ces objets sont faits gros-
propr. « maître d’un bourg (ou d’un burg) ». sièrement et ont un extérieur inégal et rude
BOURGUIGNOTE, xvi°; mot sorti de comme la bourre. — Dér. : bourrichon,
l'usage, et repris depuis la guerre de 1914- « tête » dans le fr. pop., 1864.
1918. Autre forme du fém. de bourguignon. BOURRIQUE, 1603. (D'abord « ânesse »,
BOURLINGUER, 1838. Argot des ma- puis « âne », sans distinction de sexe.) Em-
rins, qui a pénétré dans le vulgaire pari- pr. de l’esp. borrico, -a, lat. pop. *burricus,
sien, propr. « avancer lentement », en par- altération, par croisement avec burrus
lant d’un bateau. Considéré comme dér. « roux » ou burra « bourre », d’un mot at-
de boulingue, 1512 (en outre bouringue), testé au 11° s., buricus « petit cheval »,
d’origine inconnue, « petite voile au som- d’où aussi it. bricco ; l’'empr. à l’esp. est dû
met du mât »; aurait signifié proprement à l'importation de la race élevée en Espa-
en ce cas « être secoué comme une bou- gne, d’où est issue la race poitevine. —
lingue ». Dér. : bourricot, 1872 (Daudet, qui écrit
-quoi) ; n’est peut-être pas un dim. propr.
BOURRACHE, plante, xrr1e (borra- fr., mais un empr. au parler d'Algérie, où
ce(s) ; en outre burage, etc.; au xvi®s. il serait un nouvel empr. à l’esp. borrico
-oche). Empr. du lat. médiéval borrago (plus le suff. -ot) ; bourriquet, 1534 (Rab.).
(d’où aussi a. pr. borratge, it. borragine,
all. Borretsch, etc.), probabl. d’origine orien- BOURRU, v. bourre.
tale, mais mal éclaircie. BOURSE, petit sac de cuir, etc. Lat. de
BOURRACHE, v. bourriche. basse ép. bürsa « bourse » (du grec byrsa
BOURRADE, BOURRAGE, v. bourre. « cuir apprêté, outre, etc. »). — Dér. :
boursette, 1328 ; boursicaut, 1296 (écrit
BOURRASQUE, 1555 (P. Belon); en -seco), formation mal expliquée, d’où bour-
outre au xvi® s. formes francisées en -ache, sicoter, xvi® « faire des économies », sens
-asse. Empr. de l’it. burrasca, au xvi® s. moderne, d’après bourse, au sens commer-
burasca, dér. du lat. boreas « vent du cial, 1841 (Balzac), boursicotier, 1858
Nord », v. borée; boreas est représenté (Proudhon) ; boursier, 1430 (« qui a obtenu
également dans de nombreux parlers ro- uné bourse dans un établissement d’éduca-
mans, cf. notamment bora « vent du tion »; « qui fait des bourses », xxI°);
Nord » de la région triestine, déjà chez débourser, xr11°, débours, 1599, débourse-
Stendhal, adopté par les géographes. ment, 1508 ; rembourser, 1444, par l’inter-
médiaire d'embourser, xr1°, d'où rembour-
BOURRE. Lat. de basse ép. bürra sable, 1432, remboursement, id.
(1ve s.) « étoffe grossière à longs poils ».
It., esp., a. pr. borra. — Dér. : bourrelet, BOURSE. « Lieu public où l’on s’assem-
1386, par l'intermédiaire d’un dér. bour- ble pour des opérations commerciales »,
(r)el, bourreau, xir1°, de même sens ; du 1677 ; n’a triomphé qu’au xvirie s., après
sens de « collier » dérive bourrelier, 1260 avoir été en concurrence avec change (à
(É. Boileau), dominant dans les parlers Lyon), place (à Paris, etc.), mais déjà à
gallo-romans, d’où bourrellerie, id.; bour- Envers la bourse, 1575, G. Durand (dans
rer, xvie (mais déjà en 1332, « maltraiter »), une note d’une traduction de Perse), bourse
d’où bourrade, xvie, bourrage, 1465, bour- dans un édit de Henri II, pris en 1549 en
rée, 1326, propr. « faisceau de branches faveur des marchands de Toulouse et it.
bourrées » ; au sens de « danse rustique », borsa dans la Description des Pays-Bas de
en 1642, pourrait être un dér. du verbe, Louis Guichardin, 1567, qni indique que
d’après les mouvements rudes et bruyants la bourse d'Anvers a été fondée sur le mo-
de cette danse ; bourru, 1555, propr. « gros- dèle de celle de Bruges ; on prétend que
sier comme la bourre »; débourrer, 1611, celle-ci devait son nom à une place où se
une première fois en 1346 ; rembourrer, trouvait la demeure, ornée de trois bourses,
vers 1200, par l'intermédiaire d’embourrer, d’une famille noble appelée Van Der Burse
(xue-xvire s.); ébouriffé, xvire (Mme de (en it. della Borsa) ; cette demeure servit
Sévigné), c’est-à-dire « dont les cheveux de logis aux marchands vénitiens dès le
sont retroussés comme de la bourre », xive s., et, par suite, la place fut un centre
peut-être empr. du prov. esbourifai, avec de réunions de commerçants, dès 1400
une terminaison non expliquée, d’où ébou- environ. Mais il y a d’autre part la locution
riffant, 1838, ébouriffer, xix° (Balzac). monela in bursa currens « monnaie qui a
BOURSE 84

cours au moment du payement », où bursa gallo-roman, de sorte que le ? intervoca-


a le sens de « sac contenant de l’argent ». lique est conservé. De même a. pr. botar.
Cette locution est attestée dans des textes L'it. bultare « lancer » et l’esp. botar « id. »
brabançons dès 1290, et dès 1339, apparaît viennent du fr. — Dér. : bout, xr1e (en
son équivalent franç. monoie courant en a. fr. souvent « coup »), d’où abouter,
bourse. Il n’est pas impossible que cette 1247, about, 1213, aboutir, 1319, abou-
expression ait eu sa part dans la genèse tissement, 1488 ; debout, xr1° (en a. fr.
du mot bourse au sens qui nous occupe ici. « bout à bout »; sens moderne, 1530);
— Dér. : boursier, 1430. embouter, 1567, d’où embout, 1838, em-
boutir, xive ; boutade, 1538 (Montaigne),
BOURSOUFLER, v. souffler. a éliminé boulée, plus usuel en ce sens au
BOUSCULER, v. cul. xv1° s., encore signalé en 1642 ; bouterolle,
1202 ; boutoir, 1361 ; bouton, xr1°, d’abord
BOUSE. De même a. pr. boza. Probabl. « bourgeon », de très bonne heure « bouton
préroman. — Dér. : bousier, 1764; bou- d’habit », d’où boutonner, xr1°, bouton-
siller, 1554 (« construire en torchis », d'où neux, 1863 (d’après le sens « bouton sur
« faire un travail avec négligence », 1728), la peau »), boutonnière, 1383, débouton-
bousillage, 1521, bousilleur, 1480 (sens ner, 1420, reboutonner, 1549; bouture,
fig. en 1732). 1446, bouturer, 1836 ; débouter, xr1° ; re-
bouteur, xv®, par l’intermédiaire de rebou-
BOUSIN, 1794. Empr. de l’argot des ter, x11° (au sens de « mettre »), encore
marins, empr. lui-même de l’angl. pop. très répandu dans les patois. — Comp. :
bowsing « action de s’enivrer » (de {o bouse Nombreux comp. avec boule comme pre-
« boire ») ; on a relevé en 1567 bousingken, mier élément : boute-en-train, 1694, dans
propr. « maison où l’on boit », dans l’argot un sens fig. ; boutefeu, 1324 ; boute-selle,
des voleurs. — Dér. : bousingot, 1336, 1549 (écrit bouizelle) ; bouterone, 1631.
propr. « chapeau de matelot », 1358, d’où,
après la Révolution de 1830, nom donné BOUTIQUE, 1350 (botique; bouticle,
aux jeunes républicains, sans doute à cause 1242, encore au xvi® s.). Empr., probabl.
de leur coiffure. par l'intermédiaire de l’a. pr. bolica, -ga,
du grec apothéké « lieu de dépôt, magasin »
BOUSSOLE, 1527. Empr. de l’it. bussola, (d’où le lat. apotheca), avec i dû à la pro-
propr. « petite boîte », forme dialectale de
bossolo, V. boîte.
nonciation du bas-grec ; cf. aussi esp. botica
«boutique d’apothicaire », de même origine.
BOUT, BOUTADE, v. bouter. L'it. bollega « boutique » et l'esp. bodega
« cellier » ont pénétré par une autre voie.
BOUTARGUE, œufs de poisson salés, — Dér. : boutiquier, 1596 (antér. bouticlier,
séchés ou fumés, 1534 (Rab.). Empr. du vers 1500, encore au xvir1e s.). — Comp. :
prov. boulargo, empr. lui-même, peut-être arrière-boutique, 1508.
par l'intermédiaire de l’esp. arch. botagra,
de l’arabe bitérikha, de même sens, cf. BOUTOIR, -ON, -URE, v. bouter.
aussi l’it. boïtarica et bultagra. BOUVERIE, BOUVET, v. bœuf.
BOUTEILLE. Lat. pop., attesté seule- BOUVIER. En a. fr. d’abord boier, refait
ment à l’époque carolingienne, bütitcüla, en bouvier sur les dér. de bœuf. Lat. bo(v)a-
dér. de bütlis (vi s.) « tonneau », v. botte. rius.
Seulement gallo-roman. Le sens de « réci-
pient de verre » a dû gagner du Nord au BOUVILLON, BOUVREUIL, v. bœuf.
Sud, qui préférait les cruches, les outres BOVIDÉS, 1836; bovine, 1352. Le 1er
ou d’autres genres de récipients ; non seu- est dér. du lat. bos, bovis, « bœuf » ; le 2e est
lement l’a. pr. bolelha signifie à la fois empr. du fém. de l’adj. bovinus « relatif
« cruche » et « bouteille », mais l’esp. botija au bœuf ».
(formé avec un autre suff.) ne signifie
encore que « jarre ». L’it. bottiglia et l'esp. BOX, 1777 (« stalle, loge de théâtre »;
botella « bouteille » viennent du fr. — Dér. et 1839 « stalle d’écurie »). Empr. de l’angl.
Comp. : bouteiller, xr1° : embouteiller, 1864 box, d’origine incertaine.
(tout r cent au sens fig.), embouteillage,
id.; vide-bouteille, 1752 (en 1560, au sens BOX-CALF, 1899, nom d’un cuir améri-
d’ « ivrogne »). cain, dont la marque représentait un veau
(calf) dans une boîte (box).
BOUTEILLON, « marmite de campagne,
individuelle », 1910. Altération, par étymo- BOXE, 1698. Empr. de l’angl. box, propr.
logie pop., du nom de l'inventeur, l’inten- « Coup ». — Dér. : boxer, d’après l’angl. fo
dant militaire Bouthéon. es 1772, boxeur, d’après l’angl. boxer,

BOUTER. Aujourd'hui seulement dans


quelques emplois arch. À eu des sens va- BOY, 1672 (devenu usuel fin x1ix® en
riés : d’abord « frapper, pousser », vers 1080 parlant de jeunes domestiques en Extrême-
(Roland), d’où « germer », au xvi® s., ou Orient). Empr. de l’angl. boy. Boy-seout,
simplement « mettre », au xr1°, encore usité 1910, propr. « jeune garçon éclaireur » ; le
au xviie. Aujourd’hui bouler survit au sens corps des boy-scouts a été formé en Angle-
de « mettre » dans les parlers de l’Est, du terre par le général Baden-Powell ; sim-
Sud-Est et du Sud-Ouest. Du francique plifié en scout, 1933.
*bôlan, cf. anc. scandinave bauta « frap- . BOYARD, 1575. Mot russe, boiar « sei-
per ». À passé assez tard dans le parler gneur ».
85 BRAISE

BOYAU. Lat. botellus « petite saucisse », BRAHMANE, 1532 (Rab. : brachmane,


a dû prendre de très bonne heure le sens encore en 1835 ; en outre bramine, du xvr®
de « boyau », cf. a. pr. budel, it. budello, au xvir1e s.). Empr. du sanscrit brähmana,
avec un u d'origine obscure. — Dér. : probabl. par l'intermédiaire du port. brah-
boyaudier, 1751 (antér. boiotier, 1680), d’où mane. — Dér. : brahmanique, 1835 ; brah-
boyauderie, 1835 ; ébouler, en a. fr. esboeler maniste, id.
« éventrer », qui contient une forme anc.
bo (u )el, d’où, dès le xr11° s., « faire tomber BRAI, sorte de goudron, 1309 ; au sens
par affaissement » (esboouler), puis les de « boue », xrie. Représente un gaulois
emplois modernes ; aujourd’hui le verbe est *bracu-, appuyé par des formes galloises,
senti comme un dér. de boule : d’où ébou- cf. aussi anc. prov. brac « boue, pus », it.
lement, 1547 ; éboulis, 1680 ; tournebouler, braco et -go « bourbe ».
terme pop., mot du xvi®s., cf. « c’est une
espèce de manie qui luy tourneboule ainsi BRAI, « malt », v. brasser.
l’entendement », Montaigne, I, 49, récem- BRAIE. Terme archéologique (ordinai-
ment repris, dér. de l’a. fr. {ourneboele, rement au plur.); en outre quelques em-
x11° (Chrestien), « culbute », comp. de plois techn. Lat. braca, plus ordinairement
l’impér. du verbe fourner et de boele, fém., au plur., empr. du gaulois braca « sorte de
fréquent en a. fr. ; usuel aussi aujourd’hui pantalon ample », qui, d’abord ridiculisé,
dans des parlers centraux. fut adopté partout ; de là l'extension du
mot dans toutes les langues romanes : it.
BOYCOTTER, 1880. Empr. de l’angl. braca, esp. braga, a. pr. braga. Les braies
to boycott, tiré de Boycott, nom d’un riche ont été plus tard remplacées par les chaus-
propriétaire irlandais, qui fut, vers 1880, ses, v. chausse. Ne survit que dans les
l’objet de cette sorte de quarantaine. — parlers normands, bretons et méridionaux,
Dér. : boycottage, 1881. au sens de « culotte, pantalon ». — Dér. :
BRACELET, v. bras. embrayer, 1858, d’où désembrayer, 1859,
qui a disparu devant débrayer, 1877 ; ordi-
BRACHIAL, xvie (Paré). Empr. du lat. nairement considérés comme formés de
brachialis, v. bras. braie, au sens de « courroie », mais ce sens
n’est pas attesté; par contre on trouve,
BRACHET, v. braconner. fin xvine, dans l'Encyclopédie Méthodique,
rembrayer « serrer la braie, traverse de bois
BRACHY-. Premier élément de mots qu’on met sur le palier d’un moulin à vent
sav. comp., tels que brachycéphale, 1836, (braie, en ce sens, est chez Th. Corneille,
tiré du grec brakhys « court ». 1694) » et débrayer « la desserrer », d’où
BRACONNER, 1228 (propr. « chasser peuvent être issus les sens techn. modernes.
avec des braques », d’où le sens moderne ; BRAILLE, 1948. Cette écriture fut
braconnier, x11° (« valet de vénerie, au inventée par Louis Braille (f 1852), lui-
xv® s. « officier chargé de dresser les bra- même aveugle depuis l’âge de trois ans.
ques »), sens moderne 1669. Dér. de *bra-
con, non attesté, mais assuré par l’a. pr. BRAILLER, xr11°. Formé avec le radical
bracon « sorte de chien de chasse », empr. qui est dans braire ; l’a. pr. brailar, brau-
du germ. occidental *brakko, cf. all. Bracke, lhar est formé d’une façon analogue ; mais
empr. de très bonne heure par les soldats un lat. pop. *braguläre ne convient qu’au
romains stationnés en Germanie, d’où aussi fr. — Dér. : braillard, 1528; brailleur,
it. bracco, esp. braco ; au même mot se 1586 ; braillement, 1836.
‘ rattache brachet, xr1°. — Dér. : bracon-
nage, 1228, sens parallèle à celui du verbe. BRAIN-TRUST, 1960. Empr. de l’an-
glais d'Amérique, où il était d’abord un
BRACTÉE, 1766 ; bractéate, 1751 ; brac- terme ironique pour désigner les intel-
téole, 1762, une première fois, en 1566. lectuels dont s’entoura Fr. Roosevelt en
Le ler est empr., le 2° est dér. du lat. vue de l’organisation du New Deal, 1933.
bractea « feuille de métal », le 3° est empr. Comp. de brain « cerveau » ef trust « or-
de bracieola, dim. de bractea. ganisation ».
BRADERIE, vers 1925, « sorte de vente BRAIRE, vers 1080 (Roland). Jus-
de soldes ». Mot parti dela Flandre et du qu’au xvi® s., « crier, pleurer » ; sens mo-
Haïnaut où il signifie « vente à vil prix, derne, 1640. Lat. pop. “*bragére, cf. de
gaspillage » (à Lille, dès 1867, sorte de foire, même a. pr. braire « crier, chanter, etc. »
au 1er septembre, où l’on se défait à bas et quelques formes it. ; peut-être d’un radi-
prix des objets sales et troués qu’on a dans cal celtique brag- représenté par les verbes
la maison) ; après s'être répandu dans l'Est gaélique braigh- « crépiter, craquer », anc.
et jusque dans la région de Lyon (en 1927 irlandais braigim; toutefois la différence
à Grenoble), est parvenu dans la région de sens est assez grande. Dans les parlers
parisienne (à Puteaux en 1931). — Dér. gallo-romans du Nord « pleurer ». — Dér. :
d’un verbe brader « gaspiller », empr. du braiment, x11°.
néerl. braden « rôtir », et aussi « gaspiller ».
BRAISE, xrie (alors breze). Probabl.
BRAGUETTE, 1534 (Rab.). Dér. de du germ. occid. *brasa. cf. suédois brasa
brague, usuel au xvi* s. au sens de « culot- « rôtir », anc. nor. brass « cuisinier ». It.
te », empr. du prov. braga, v. braie. Au bragia, brace, esp. a. pr. brasa. — Dér. :
même sens on a dit brayelle, xiv®, dér. de braiser, 1783 ; braisette, 1836 ; braser, 1578,
braie. sens moderne ; au moyen âge et jusqu’au
BRAISE 86

xvIies. «embraser » ; brasier, x11° ; brasiller, occidental *brand « tison », v. les suiv.;
xu1e, d’où brasillement, 1835 ; brésil, xr1°, ce nom vient de ce qu’on brûle volontiers
« bois de teinture colorant en rouge » par la bruyère pour défricher une terre ou
une comparaison de la couleur rouge de alimenter un foyer.
cette teinture avec celle de la braise arden- BRANDIR, vers 1080 (Roland). Dér. de
te, d’où brésiller, 1346 ; brasil de l’esp. et du l’a. fr. brand (même texte), propr. « tison »,
port. vient du fr., et lit. brasile de l'esp. ; v. le préc., d’où « lame d'épée », à cause
le Brésil a été ainsi nommé au xviI® 8., de son éclat ; attesté aux deux sens dans
parce qu’il produit en abondance cette les langues germ. A. pr. brandir, it. bran-
espèce de bois ; embraser, xr1° ; embrase- dire. — Dér. : brandiller, vers 1300, bran-
ment, id.: embrasure, 1611, dér. d’un dillement, 1564.
verbe embraser, id., remplacé ensuite par
ébraser, 1694, dont le préf. convenait mieux BRANDON, xrie. Autre dér. du germ.
au sens d’ « élargir », et qui déchargeait occidental *brand « tison », v. les préc. De
embraser d’un double sens gênant ; mais même a. pr. brandon.
le développement sémantique est obscur. BRANLER, vers 1080 (Roland). Alté-
Le premier sens d’embrasure étant «ouver- ration de brandeler, fréquent au moyen
ture dans un parapet pour pointer les âge, « agiter » et « s’agiter », dér. de
canons », embraser a peut-être signifié brandir. — Dér. et Comp. : branle, xr1°s. ;
propr. « produire un embrasement par branlement, xive s. (Bersuire) ; branle-bas,
l'ouverture où le canon est pointé », d’où 1687 ; branlequeue, xvies. ; ébranler, 1480,
le sens d’embrasure. d’où ébranlement, xve-xvi® s., inébran-
BRAMER, 1528, d'abord « mugir ». lable, xvie s., par l'intermédiaire d’ébran-
Empr. du prov. bramar « braire, chan- lable, xvI° s.
ter, etc. »; l’a. fr. présente une fois le subst. BRAQUE, xve s. Empr. de l’it. bracco
brame « cri », mais le verbe n’est vivace en ou du prov. brac; sens figuré en 1829.
gallo-roman que dans les parlers méridio- V. braconner.
naux ; le prov. est empr. du germ. *bram-
môn, cf. de même it. bramare « désirer ar- BRAQUEMART, 1495 (bragamas en
demment », esp. bramar « mugir ». — Dér. : 1392). Probabl. empr. du moyen néerl.
bramement, 1787 (Bernardin de Saint- breecmes « coutelas ».
Pierre).
BRAQUER, 1546 (Rab.), « tourner »;
BRAN, v. breneux. en outre braier, 1611, « diriger une voi-
BRANCARD, 1534 (Rab. ; d’abord «gros- ture », assez répandu dans les parlers sep-
se branche, vergue »). Mot normand, dér. tentrionaux ; sens modernes fin xvie. Les
de branque, forme locale de branche. — formes dialectales de brater permettent de
Dér. : brancardier, xvI1° s. reconstituer un verbe *brachitare, dér. de
brachium sur le modèle de *movuitare, v.
BRANCHE. Lat. de basse ép. branca meute. L’incertitude dans laquelle on s’est
« patte », d’origine incertaine, peut-être trouvé quant à la prononciation des con-
celtique. Seul le gallo-roman a développé sonnes finales à l’époque de la chute de
le sens de « branche » : a. pr. branca et tous celles-ci, explique le changement de -{er
les parlers gallo-romans. Ailleurs sens plus en -quer.
proches du sens propre; it. branca « grif-
fe, etc. ». — Dér. : branchage, 1453 ; bran- BRAS. Lat. brachium. — Dér. et Comp. :
cher, 1510 « se percher sur une branche », bracelet, 1387 (au x11° s. « petit bras »);
sens technique moderne, d’où branche- brassard, 1562, probabl. modification de
ment, xvie («fait de pousser des branches », brassal, fréquent au xvi® s., empr. du
sens moderne en relation avec le verbe); prov. brassal ; brassée, x11° (dér. à la fois
branchu, xri°; ébrancher, vers 1200, de bras et de brasse) ; brassière, 1278, sens
ébranchement, 1552, ébranchage, 1700, moderne depuis fin xvi® ; embrasser, vers
embranchement, 1494, embrancher, 1772. 1080 (Roland), « prendre dans les bras »,
sens moderne de « donner un baiser »,
BRANCHES, 1680. Empr. du lat. bran- xviie, V. baiser, d’où embrassade, 1500 (a
chiae (du grec brankhion). suivi le développement sémantique du
BRAND, v. brandir. verbe), embrasse, 1838 (au sens d’ « em-
brassement », xiv°), embrassement, x11°,
BRANDADE, 1788. Empr. du prov. développement sémantique semblable à
brandado, propr. « secousse, chose remuée »; celui d’embrassade ; avant-bras, 1291.
ce mot, dit ainsi parce que ce mets est
composé de substances battues ensemble, BRASER, v. braise.
dérive de brandä «remuer, etc. », v. brandir. BRASERO, 1784. Empr. de l’esp. bra-
BRANDEBOURG, vers 1656, « sorte de sero « brasier ».
casaque à longues manches et ornée de BRASIER, BRASILLER, v. braise.
galons », introduite en France par les sol-
dats de l’électeur de Brandebourg ; d’où BRASSARD, v. bras.
le sens moderne, 1708.
BRASSE. Lat. pop. brachia, plur. neutre
BRANDE. Attesté indirectement en 1378 de brachium, pris comme fém. collectif,
par le dér. brandey « champ de bruyères » ; d’où, en a. fr. «les deux bras », puis « sorte
dès 1205, en lat. médiéval branda « bruyè- de mesure » ; comme terme de nage, 1835.
re »; cf. de même a. pr. branda. Tiré de A. pr. brassa, sens du fr., esp. brasa, sorte
l’a. fr. brander « s'embraser », dér. du germ. de mesure.
87 BRENEUX

BRASSER. Lat. pop. *braciäre, dér. de brèche est ici probabl. un adj. verbal, tiré
braces, signalé par Pline comme gaulois, de l’anc. verbe brecher « ébrécher » ou de
«sorte d’épeautre » (sens peut-être inexact, ébrécher) ; ébrécher, 1260 (E. Boileau).
les formes celtiques correspondantes, gal-
lois brag, etc., signifiant « malt »), d’où BRÉCHET, xvie (antér. brichel et bru-
l’a. fr. brais, XIIe, « orge préparée pour la chet, xive). Probabl. de l’angl. briskel « ham-
fabrication de la bière », encore en wallon. pe d’un animal », qui est de la famille de
Le mot gaulois ne paraît pas avoir pénétré l’anc. scandinave brjosk « cartilage ». Le
dans les parlers du Midi, où le vin a tou- mot paraît avoir été apporté en France
jours été préféré à la bière. Dans ses nom- pendant la guerre de Cent Ans.
breux développements sémantiques, bras-
ser a fini par être senti comme un dér. de BREDOUILLER, 1564. Variante de l’a.
bras. — Dér. : brassage, 1331 ; brasserie, fr. bredeler, xiri°, Verbe d'un type abon-
1268 ; brasseur, 1250 (sens parallèles au damment représenté dans les parlers gallo-
romans ; probablement variante des anc.
verbe).
verbes bret(t)er « marmotter », brelonner
BRASSIÈRE, v. bras. « bégayer », etc., propr. « parler comme un
Breton », qui remontent à brillus « Bre-
BRAVACHE, xvie. Empr. de l’it. bra- ton ». Les mots avec -d- sont dus peut-être
vaccio, dim. péjor. de bravo, v. brave. à un nouvel emprunt du représentant de
brillus, à un moment où -{-, qui est devenu
BRAVADE, 1547. Empr. de l’it. bravala, -z- en breton moderne, était arrivé à l'étape
dér. de bravare « faire le brave, se vanter », intermédiaire -d-. — Dér. : bredouillage,
au xvi® s. a souvent un sens favorable : vers 1700 (Saint-Simon) ; bredouille, 1534
« bravoure, parure, etc. », d’après l’adij. (Rab.), c’est-à-dire « qui est embarrassé »;
brave. bredouilleur, 1642.
BRAVE, x1v°, cf. aussi bravement, 1465. BREF. D'abord brief; bref n’a triomphé
Sens variés alors : « Orgueilleux, coura- qu'au xviie s. Lat. brèvis « court »; bref
geux, noble, bien vêtu, beau », ce dernier s’est restreint de bonne heure au sens de
sens conservé dans de nombreux parlers. « de courte durée » ; le sens spatial, v. court,
Empr. à la fois de l’it. et de l’esp. bravo, ne subsiste que dans les premiers textes.
qui ont, ou ont eu, à peu près les mêmes It. breve, a. pr. breu. Le neutre lat. breve
sens. L’esp. bravo, d’où a été empr. aussi a pris dès le vre s. le sens de « sommaire »,
le mot it., vient du lat. barbarus, devenu d’où bref, pris substantivement. — Dér. :
par métathèse *brabus. En esp. et en port. 1° de brief, adj. : brièvement, 1539, d’abord
l’adj. est employé surtout en parlant d’ani- briefment, xn°; brièveté, xve, d’abord
maux, de plantes sauvages ou bien de la briélé, 1213 ; 2° de bref, subsi. : brevet,
terre inculte (tierra brava), à quoi il faut x111e (sous la forme brievet) ;breveter, 1751.
comparer les lat. vespa barbara, murra bar-
bara, rure barbaro. L’it. bravo a été repris BREHAIGNE, x. D'abord baraine,
comme exclamation, 1738 (c’est propr. un -aigne, xu°, en parlant d’une terre stérile.
adj. adressé à la personne applaudie), et Mot préroman, attesté par des mots de
plus tard, 1832, au sens d’ « assassin à sens et de forme analogues, répandus jus-
gages » (de 1675 à 1772 une forme francisée qu’en albanais. On reconstitue une base,
brave). — Dér. : braver, vers 1515, d’après purement hypothétique, baran.
l’it. bravare. V. taureau.
BRELAN, x11e (brelens, plur. de brelenc,
BRAVO, v. le préc. d’où brelan(d), v. les dér.). Signifie d’abord
« table de jeu », puis « sorte de jeu de
BRAVOURE, xvi1e (Scarron). Empr. de cartes », et « maison de jeu ». Empr. de
l’it. bravura, v. les préc. l’anc. haut all. breiling, propr. « petite
planche », d’où « table », sens attesté éga-
BRAYETTE, v. braguette.
lement dans l’argot all.; cf. aussi it. ber-
BREAK, 1859. Empr. de l’angl. break. lengo, v. berlingot. — Dér. : brelander,
1481 ; brelandier, 1386 (sous la forme bell-).
BREBIS. Lat. pop. *berbicem, acc. de
*berbix, lat. de basse ép. berbex, lat. class. BRELOQUE, xvuie. D'abord oberlique,
vervez « bélier » (sens conservé par le rou- xve, brelique, xvi®, -uque, xviie. Refait
main berbec). Celui de « brebis », attesté sur le verbe embrelicoquer, v. emberlifico-
à basse ép. dans des auteurs d’origine gau- ter ; la terminaison du subst. provient d’un
croisement avec loque, qui désigne aussi
loise, s’est développé particulièrement dans
la partie septentrionale de la France, où un objet qui flotte au vent.
le celtique *multo s’est maintenu avec le BRÊME, xr1e (sous la forme braisme).
sens de « mouton »; aujourd’hui brebis
n’est vivace que dans les parlers septen- Empr. du francique *brahsima, forme at-
testée en anc. haut all.
trionaux, ouaille est dominant dans le
Centre, l'Ouest et le Sud-Ouest et un type BRENEUX, xive. Dér. de bren, forme
latin féta « femelle qui a enfanté » dans les plus anc. de bran, encore dans les patois,
parlers méridionaux (a. pr. feda).
propr. « son », qui représente un type
_ BRÈCHE, x1re. De l’anc. haut all. brecha *brenno-, dont l’origine celtique, souvent
« fracture », cf. all. brechen « briser » ; seu- admise, se heurte à de graves difficultés;
lement gallo-roman. — Dér. et Comp. : a pris au xv® s. le sens d’excréments, sens
brèche-dent, x111° {Brichedent, nom propre; assez répandu dans les parlers septentrio-
BRENEUX 88

naux. Avec ce même mot, bren au sens dér., loppements sémantiques variés d'une
ont été formés les verbes ébrener, XIIIe, et part, du sens de « courroies de la machine »
embrener, 1532 (Rab.). est issu celui de « courroie, corde, etc. »,
BRÉSIL, v. braise. 1680; de l’autre, de l’usage de la machine
vient le sens de « ricochet d’une balle au
BRETÈCHE, Terme d'archéologie. Lat. jeu de paume ou d’une bille au billard »,
médiéval brillisca (glose de 876), peut-être xvi® et xvii®, d'où « zig-zag, procédés
dér. de brillus (v. bretteur), au sens de obliques », xvi® ; le sens dominant aujour-
« fortification bretonne ; ce type de forti- d’hui de « bagatelles » vient probabl. d'un
fication aurait été importé de la Grande- sens de bricoler : « aller çà et là », xvre.
Bretagne sur le continent ; toutefois on est Empr. de l’it. briccola, seulement « machine
mal informé sur la cause réelle de cette de guerre », d’un longobard *brihhil, qu’on
dénomination. rétablit d’après le moyen haut all. brechel,
propr. «qui brise», cf. all. brechen ; le suffixe
BRETELLE, xi1e (« bande de cuir, germ. -il a été rendu par le suff. inaccentué
d’étoffe, etc., passée sur les épaules pour
-ola. — Dér. : bricoler, vers 1480 (dévelop-
porter une hotte, etc. »). Empr. de l’anc.
pement sémantique parallèle à bricole) ;
haut all. brittil « rêne », v. bride ; ne s’est
bricoleur, xvirre; bricolier, 1751, comme
répandu qu’au xvinie s. au sens de « bre- terme de vénerie.
telles de culotte », bien qu’attesté dès 1470 ;
aujourd’hui usité dans tous les parlers BRIDE, xu1e (J. de Meung). Empr. du
gallo-romans et ailleurs. moyen haut all. bridel « rêne », forme appa-
BRETTEUR, 1653 (au sens fig. de «fan- rentée à briltil, v. bretelle. De même a. pr.
faron »). Dér. de bretle « sorte de longue brida, qui est venu du Nord ; aujourd’hui
épée », xvi®, fém. de l’anc. adj. bret « bre- existe dans tous les parlers gallo-romans.
ton » (de Bretagne ou de Grande-Bretagne), Brida de l’it. et de l'esp. vient du fr. —
lat. pop. *brilius, tiré du class. Brito ou Dér. : brider, xir1° (dans un sens fig.):
Briti. Ici il s’agit de la Bretagne française, oison bridé, déjà chez Rab., 1534, signifie
mais la raison de cette dénomination n’est propr. « à qui on a passé une plume dans
pas connue ; on trouve déjà chez Villon le bec pour l'empêcher de passer les haïes »,
six breltes larges. L’indication de Ménage d’où « personne sans intelligence » et les
que ces épées ont été d’abord fabriquées noms propres Bridoye, 1546 (Rab.) et
en Bretagne est sans preuve ; v. bretèche, Brid'oison, xvirie (Beaumarchais):; bri-
bredouiller. don, 1611 ; débrider, 1466; rebrider, 1549.

BRETZEL, 1889 (bréchetelle en 1867). BRIDGE, 1893. Empr. de l’anglo-amé-


Empr. de l’all. d'Alsace bretzel, qui se rat- ricain bridge (d'origine levantine), de mé-
tache à son tour au lat. brachium « bras », me que le jeu qui apparaît en Angleterre
le breizel représentant deux bras entrelacés. vers 1875, puis à Nice, puis aux États-
Unis, d’où il nous est revenu vers 1890.
BREUIL. Terme archaïque, qui figure — Dér. : bridger, 1906; bridgeur, 1893.
aujourd’hui surtout dans des noms propres.
Lat. de basse ép. brogilus (Capitulaires BRIDGE « appareil dentaire », 1907.
de Charlemagne), du gaulois *brogilos, Empr. de l’angl. bridge « pont ».
dér. de broga « champ », donné comme gau-
lois par le scholiaste de Juvénal, cf. aussi BRIE, 1767, nommé d'après la région
breton et gallois bro « pays, contrée ». De où l’on fabrique ce fromage (au sens de
même a. pr. brolh, it. brolo « verger ». « vin de Brie » dans La Bruyère).
BREUVAGE, v. boire. BRIÈVEMENT, v. bref.
BREVET, v. bref. BRIFER, 1530, mais le dér. brifaud
« glouton » est déjà attesté au xrrre s. Mot
BRÉVIAIRE, 1230. Empr. du lat. mé- onomatopéique, exprimant le bruit fait
diéval breviarium, en lat. anc. « abrégé », avec la bouche quand on mange glouton-
dér. de brevis ; v. bref et brimborion. nement ; rare en dehors du gallo-roman,
BRIBE, xive (et brimbe). Appartient, cf. toutefois sarde briffar, de même sens.
comme le verbe briber, brimber « mendier »,
V. esbroufe.
‘XIV, à une famille de mots onomatopéi- BRIGADE, x1v° (G. de Machaut). Empr.
ques, désignant des choses menues, de peu de lit. brigata « troupe », dér. de briga
de valeur, cf. esp. bribar « mendier », briba « lutte », probabl. par l'intermédiaire du
« gueuserie », v. aussi birbe ; famille de verbe brigare, qui a dû signifier « aller en
mots répandus par l’argot. troupe », v. les suiv. D'abord « troupe de
BRIC. Dans de bric et de broc et bric-à- personnes » jusqu’au xvi® s. ; appliqué à
brac, 1834. Mots expressifs ; cf. de même des troupes armées, 1549, probabl. par un
en bloc et en blic, xve-xvi® s., à bric et à nouvel emprunt à l’it. : sens moderne en
brac « à tort et à travers », 1632. 1789. — Dér. : brigadier, 1642 ; embrigader,
1794 ; embrigadement, 1793.
BRICK, 1782. Altération de l’angl. brig,
1720, abréviation de brigantin. BRIGAND, xive. D'abord « soldat à
pied », 1350, jusqu’à la fin du xve s., mais
BRICOLE, 1372 (G. de Machaut ; en sens moderne dès le x1ve s., en raison des
outre brigole, 1360) « sorte de machine de dommages causés par les soldats ou les
guerre, lançant des pierres à l'aide de bandes armées. Empr. de lit. brigante,
cordes et d’une poutre à bascule ». Déve- propr. « qui va en troupe », qui a aujour-
89 BRISTOL

d’hui des sens analogues au français ; v. BRINDILLE, v. brin.


le préc. — Dér. : brigandage, xve (Charles
Ro R brigander, 1507 ; briganderie, BRINGUE, 1751 (« cheval mal bâti »;
as en parlant d’une femme, 1808). Le sens
propre « menus morceaux », notamment
BRIGANTINE, 1835. Tiré de brigantin, dans la locution en bringues, 1750, «en
attesté indirectement au xi1ves. (Froissart) pièces », est usuel dans les patois. Se rat-
par brigandin (altéré d’après brigand), qui tache probabl. à la même famille que brin,
désignait un petit navire analogue à la mais la formation n’est pas bien claire;
brigantine, et qui est empr. de l’it. brigan- peut-être originaire de la Normandie.
tino, dér. de briganie, v. le préc.
BRIO, 1812. Empr. de l’it. brio, propr.
BRIGUE, 1314. Empr. de lit. briga « vivacité », même mot que l’a. pr. briu
« lutte, querelle, etc. » (sens quelquefois « impétuosité, force » (mot peu représenté
attesté au xvi®s.), d’origine obscure ; déve- dans les parlers de la France septentrio-
loppements sémantiques propres au fr. à nale), issu d’un gaulois *brivo-, ou *brigo-,
partir du xvie s., v. les préc. — Dér. : cf. ancien irlandais brig « force, puissance ».
briguer, 1518 (en outre « se quereller », BRIOCHE, 1404 (indiqué comme nor-
1478 et au xvi° s.). mand par Cotgrave, 1611, qui donne en
BRILLER, xvi*; signifie alors aussi outre le sens de « broie à chanvre »). Dér.,
« s’agiter, être agité d’'impatience ». Empr. avec un suff. pop. d'aspect argotique, de
de l’it. brillare, non seulement « briller », brier, forme normande de broyer « pétrir la
mais « battre des ailes vivement » (d’où le pâte avec la brie (sorte de rouleau) » ; brie
sens du xvi® s.), probabl. dér. de beryllus est admis dans les dictionnaires depuis
« béryl », donc « briller comme le béryl ». 1700.
Les autres sens du verbe it., comme « dé- BRIQUE, vers 1200 (en outre briche).
barrasser le riz, le millet de leur gousse Signifie aussi jusqu’au XVI® S. « Morceau ».
avec une machine », s'expliquent par le Empr. du moyen néerl. bricke, de même
fait que cette opération rend brillant le sens, mot de la famille de l’all. brechen
riz. — Dér. : brillant, subst., xvire ; brillan- « briser ». — Dér. : briquet à feu, 1762,
tine, 1823, « composition pour lustrer les s’est substitué à fusil, quand celui-ci a pris
cheveux, la barbe ». . le sens d’ « arme » ; « sabre court à l'usage
de l’infanterie », 1806, employé par dérision
BRIMBALER, 1532 (Rab.), en outre par les cavaliers, d’après le sens de « sorte
bringueballer, 1634. Mot expressif, dû peut- de couteau », 1734 ; briquetage, 1394 ; bri-
être à un croisement de tribaler, forme queter, 1418 ; briqueterie, 1407 ; briquetier,
antér. de rimbaler, avec des mots de la
1503; briquette, 1615 (texte de Tournay).
famille de bribe.
BRIS, BRISANT, v. briser.
BRIMBORION, xv® (breb.…, brib..…, jus-
qu’au xvi® s.; signifie d’abord « prière BRISE, xvie (Rab.). Répandu à la fois
marmottée », d'où « bibelot sans valeur », dans les langues romanes : it. brezza, esp.
1644). Empr. du lat. eccl. breviarium, v. brisa, et dans les langues germ. : angl.
bréviaire ; pour la prononciation de la fin, breeze, néerl. brise ; le point de départ est
v. dicton; l’initiale vient des mots de la peut-être à chercher dans le frison brise,
famille de brimber, v. bribe. qui pourrait avoir pénétré comme terme
maritime en fr. et, de là, dans les autres
BRIMER, 1853. Argot militaire, d’ori- langues romanes.
gine dialectale ; en manceau a le sens de
« battre, tourmenter », qui paraît être un BRISER, vers 1080 (Roland). Lat. pop.
emploi fig. de brimer « geler, brouir », des brisäre (attesté vers 700), d’origine gau-
parlers de l'Ouest, dér. de brime (attesté loise, cf. irlandais brissim « je brise »; l's
au début du xvirr° s.), altération de brume, sonore paraît venir d’un croisement avec
par croisement avec frime « frimas ». — le type étymologique de l’a. fr. bruisier de
Dér. : brimade, 1862. sens analogue, également d’origine celtique,
cf. irlandais bruim (qui a perdu un s s0-
BRIN, xive (écrit alors brain). On a nore) « je brise ». — Dér. et Comp. : bris,
proposé comme étymologie un gaulois 1413 ; brisant, 1529 ; brisées, xiv°, terme
brinos, mais cette hypothèse n’est pas de vénerie, d’où aller sur les brisées de quel-
suffisamment justifiée par les autres lan- qu’un, propr. « profiter des brisées placées
gues celtiques. — Dér. : brindille (au xvi® par un autre chasseur » ; brisement, x1I°;
et au xviie s., -delle; le d est d’origine briseur, x11° (sous la forme brisiere) ; bri-
incertaine). soir, 1680 ; brisure, 1207 ; débris, 1549, par
l'intermédiaire d’un verbe débriser, encore
BRINDEZINGUES, dans la locution étre
attesté en 1669. — Comp. : nombreux mots
dans les brindezingues, 1756 (Vadé). Défor- avec brise comme premier élément : brise-
mation argotique de la locution étre dans bise, fin xix°; brise-glace, 1751; brise-
les brindes ; brinde, xvi®, « action de boire lames, 1818 ; brise-tout, 1371.
à la santé », encore dans les dictionnaires,
est une altération de l’all. bring dir sie « (je) BRISQUE, 1752. Étymologie inconnue,
te la porte », c'est-à-dire « je te porte une — Dér. : briscard, 1861.
santé » (de là aussi la forme bringue, 1611),
mot introduit par les mercenaires suisses BRISTOL, 1867. Empr. du nom de la
ou all., cf. de même it. brindisi, esp. brin- ville anglaise Bristol, où il y a de nom-
dis, etc. breuses papeteries.
BRIZE 90

BRIZE, 1778. Empr. du grec briza «sorte au cuir, est peut-être le même mot; on
de blé ou de seigle ». trouve aussi brodequin en ce sens au
XVIS S.
BROC, sorte de vase, 1380. Empr. de
l’a. pr. broc, de même sens, du grec brokhis BRODER, xri° (sous la forme brosdé).
« pot »; it. brocca. De même a. pr. broidar. Probabl. du fran-
cique *bruzdôn, de même sens, comme l'esp.
BROCAILLE, v. bloc. bordar représente probabl. un goth. *bruz-
BROCANTER, 1696 (Regnard). Paraît dôn et l’it. brustare, le longobard *brusian,
se rattacher à l’anc. haut all. brocko « mor- forme correspondant au francique. — Dér. :
ceau », la brocante étant un commerce broderie, 1334 ; brodeur, 1260 (E. Boileau) ;
d'objets de rencontre, et dépareillés, cf. le brodure, xiv°; rebroder, xvir® (Mme de
suisse brockenhaus « magasin où de vieux Sévigné).
vêtements sont réparés et vendus à bas BROME, plante, 1559. Empr. du lat.
prix ». — Dér. : brocante, 1782 ; brocan- bromos « sorte d’avoine » (du grec bromos
teur, 1694, dit d’abord de marchands de « folle avoine »).
tableaux.
BROME, 1826. Empr. du grec brômos
BROCARD, 1466. D'abord terme juri- « puanteur » par le chimiste Balard, qui
dique désignant des maximes ; « trait pi- découvrit ce corps. — Dér. : bromure, 1828.
quant » dès le xve s., cf. aussi le verbe dér. BRONCHE, 1633 (d’abord bronchies,
Empr. du lat. médiéval brocardus « apho- XVI $s., Paré). Empr. du lat. médical
risme de droit », issu du nom propre Bro- bronchia, plur. neutre (du grec bronkhia).
cardus, altération de Burchardus, Burckard, — Dér. : bronchique, xvie (Paré) ; bron-
évêque de Worms, qui fit au début du chite, 1825 (peut-être d’après l’angl. bron-
x1°s. un recueil célèbre de droit canonique. chitis, 1812) ; bronchial, 1666.
Le sens de «trait piquant » a pu se dévelop-
per sous l’influence du verbe broquer « dire BRONCHER, xrI° (Chrétien). Signifie
des paroles piquantes », forme dialectale de en outre « pencher, s’incliner » jusqu’au
brocher, V. broche. — Dér. : brocarder, xvI° s. Peut-être lat. pop. *bruncare « tré-
xXv£e; brocardeur, 1507. bucher », dér. de “*bruncus, supposé par
lit. bronco « souche », l'esp. bronco, adij.,
BROCARD, « cerf, chevreuil d’un an », « grossier, rude ». De même a. pr. broncar.
xve. Mot dialectal, normand ou picard, La forme bruncher, fréquente jusqu’au
dér. de broque « broche », qui désigne le xv1° s., s'explique mal.
bois de l’animal, alors en simple pointe,
v. dague. BRONTOSAURE, 1890. Comp. des mots
grecs empruntés bronté « tonnerre » et
BROCART, 1519 (en outre -at, 1549, saura « lézard ».
jusqu’à la fin du xvire s.). Empr., avec
changement de suff., de l’it. broccato « tissu BRONZE, 1511 (souvent fém. jusqu’au
broché ». xviie s.). Empr. de l’it. bronzo, d’origine
BROCATELLE, 1519 (en outre -atel, obscure ; dans le latin médiéval, on trouve
-adel, -adelle). Empr. de l'it. broccatello aes brundisium « airain de Brindisi » ; mais
« tissu léger et broché », dér. de broccato. cette étymologie se heurte à des difficultés
de forme. En dernière analyse ces mots re-
BROCHE. Lat. pop. brocca, fém. pris montent peut-être au persan birindj, id. ;
substantiv. de l’adj. brocchus «proéminent, ou plutôt à une forme arabe *burunz qu’on
saillant », en parlant des dents, d’où brocca peut supposer d’après la forme attestée fu-
« chose pointue ». It. brocco « fétu piquant », luzz, qui doit remonter à une forme persane
a. pr. broc « épine », broca « broche ». — *ourung. C’est par l'Italie septentrionale
Dér. : brocher vers 1080 (Roland), déve- (Venise ou Gênes) que le mot a passé dans
loppements sémantiques variés ; de brocher les langues de l'Occident ; cet alliage est
un livre, 1732, dérivent brocheur, 1771, en effet venu de l'Orient en Europe au
brochure, 1718, débrocher, 1856, rebro- XIVe. — Dér. : bronzer (au part. -é).
cher, 1835 (comme terme de tissage au
XVIIIe S., au moyen âge autres sens) ; bro- BROSSE, x11° (écrit broce ; en a. fr. aussi
chet, 1260 (É. Boileau), à cause de la forme broisse). Signifie d’abord « broussaille »,
pointue de son museau ; brochette, x11°; encore au XVI® s.; au sens de « brosse »,
débrocher «retirer de la broche », vers 1400 ; 1306 (broisse). Du lat. pop. *bruscia « en-
embrocher, x1I1e. semble d’excroissances, de rejetons », dér.
de bruscum « excroissance ligneuse de
BROCOLI, 1560. Empr. de l’it. broccoli, l’érable », étymologie appuyée par le cat.
plur. de broccolo, propr. « pousse de chou, brossa et l'esp. broza « débris d’écorce,
de navet, etc. », dér. de brocco. broutilles ». A. pr. brossa « broussaille ». —
Dér. : brosser, xXIv°, au sens moderne, au-
BRODEQUIN, xve. Altération, d’après jourd’hui dominant dans les parlers gallo-
broder (ces chaussures ayant été souvent romans, sauf brosseler, wallon, signifie en
ornées de broderies), de brosequin, encore outre «aller à travers les broussailles »,
dans quelques patois normands, emprunté xve; d’où brossage, 1837, brossée, 1836,
de l'esp. borcegué, d’origine inconnue. Le brosserie, 1835, brosseur, 1468 ; brossier,
néerlandais broseken « petit soulier », est 1597 ; broussaille, 1559 (souvent écrit
empr. du fr. Broissequin, xIv® s., sorte bross-, au xvi® et au xvire s.), d’où em-
d’étoffe parfois teinte avec de l'écorce broussaïllé, fin xixe, désembroussailler,
de noyer, donc, d’une couleur semblable id., débroussailler, id. ; brousse, fin XIX®,
91 BRUINE

terme colonial, est tiré-de broussaille, ou babl. dér. de bro(u), qui a pris le sens de
empr. du prov. brousso « broussaille », par « boue, écume », attesté dans de nombreux
l'intermédiaire des soldats méridionaux, parlers septentrionaux, v. brouet, avec la
nombreux dans les armées coloniales. terminaison de verbes tels que fouiller,
mouiller, souiller, etc. — Dér. et Comp. :
BROU, v. brouter. brouillard « brouillon », d’après le sens de
BROUAILLES, v. écrabouiller. « griffonner », 1550 ; brouille, 1617 ; brouil-
lerie, 1418 ; brouillon, xvi® (Calvin), « tra-
BROUET, xu1e (J. de Meung). Dér. d’un vail destiné à être recopié », 1642, d’après
simple peu usité breu « sorte de bouillon », le sens de « griffonner » ; brouillage, 1948 ;
cf. de même a. pr. bro(u) « id. », it. brodo, débrouiller, 1549 ; débrouillard, 1872; dé-
empr. de l’anc. haut all. *brod, cf. angl. brouillement, 1611; débrouilleur, xvi°;
broth; cet empr. est dù au fait que les embrouiller, xiv°; embrouillement, 1551.
Germains faisaient à la soupe une place
importante dans leur nourriture, tandis BROUIR, 1431, terme d’agriculture. Al-
que les Romains ne la connaissaient pas. tération, par croisement avec brouil-
lard, etc., de l’a. fr. bruir « brûler », empr.
BROUETTE, x1ne (sous la forme bou- du francique *brôjan, cf. moyen haut all.
roaile(s) ; la forme moderne apparaît dès brüejen « id. », all. brühen « échauder ».
1202). Dim. d’un simple non attesté en
fr. *berou(e), lat. de basse ép. birota (Code BROUSSAILLE, BROUSSE, v. brosse.
de Théodose), adj. pris substantiv., propr.
« véhicule à deux roues », à côté duquel BROUTER, vers 1170 (écrit alors bros-
un type *birotium a donné de nombreuses ter). Dér. de l’a. fr. brost, xi1°, « pousses de
formes romanes, a. pr. bros « char à deux jeunes taillis au printemps », encore dans
roues », it. baroccio « charrette, cabriolet ». les patois sous la forme brout, remonte à un
Le dim. a été sans doute formé quand la verbe germ. *brusljan, cf. anc. saxon id.
brouette à deux roues a été inventée. A « bourgeonner ». Broster « brouter », de
désigné aussi une chaise à porteurs, montée même a. pr. brostar, est probabl. dér. du
sur deux roues, au xvire s. (l'invention en subst. brost « pousses de taillis », parce que
est attribuée soit à Pascal, soit à Dupin, le menu bétail va brouter ces pousses au
1669). Depuis le xvrr® s. au moins, désigne printemps. — Dér. : brout « action de
une brouette à une seule roue. Aujourd’hui brouter, ce que broute le bétail », xvi°,
dans les parlers gallo-romans, sauf au brou (de noix), 1564 (en outre brout, 1694),
Sud-Ouest. — Dér. : brouettée, 1304 (au est une extension de brout au sens de
« pousse »; broutille, 1354.
x111e s. (brotée) ; brouetter, id.
BROWNING, 1906. Empr. de l’angl.
BROUHAHA, 1552. Dans une farce du
browning, du nom de l'inventeur.
xv®s., un curé habillé en diable crie : Brou,
brou, brou, ha, ha, Brou, ha, ha. Soit ono- BROYER, x1°. Du germ. occidental
matopée, soit imitation de la formule hé- *brekan, all. brechen, de même a. pr. bre-
braïque baruk habba « béni soit celui qui gar; le sens de « broyer le chanvre, le lin »,
vient » (au nom du Seigneur), Psaume 113, aujourd’hui prépondérant dans les parlers
souvent répétée à la synagogue; cette gallo-romans, est probabl. dû à un déve-
étymologie est appuyée par l’it. d’Arezzo loppement postérieur à l’'empr. du verbe
barruccaba « confusion, désordre »; des germ. — Dér. : broie, xive ; broyeur, 1422.
empr. de ce genre aux prières hébraïques
ne manquent pas, cf. lit. badanai et bada- BRU, xnu° (jusqu’au xvie s. surtout
nanai « rumeur de gens qui bavardent », brus, -z, -l). Lat. brulis « bru » dans des
empr. de l’hébreu anna adonai « Ah! Sei- inscriptions de la région de la Dalmatie et
gneur », formule fréquente dans les priè- du Frioul, où les Gots étaient établis (en
res, etc. outre dans des gloses et des inscriptions
de la Moselle), qui paraît représenter le
BROUILLAMINI, 1566 (Henri Estienne, gotique préhistorique “*brudis, gotique
au sens moderne). Emploi fig. de brouilla- brups ; attesté au même sens dans les par-
mini, 1537, altération, d’après brouiller, de lers rhéto-romans. Ailleurs le lat. nurus
boli armenii, plur., « bol d'Arménie » s’est maintenu, d’où l’a. pr. nora, lat. pop.
(dès 1378 bouliaminy), sorte de petites *nora, encore usité dans le Sud-Ouest. Au-
mottes de terre argileuse, qui servaient en jourd’hui bru recule devant belle-fille, v.
médecine ancienne. — Dér. : embrouilla- beau.
mini, vers 1747 (D.), d’après embrouiller.
BRUANT, v. bruire.
BROUILLARD, xv° (Charles d'Orléans).
BRUCELLE, v. bercelle.
Modification, par changement de suff., de
brouillas, xui° (d’où brouillasser, 1624, BRUGNON, 1680 (antér. brignon). Empr.
brouillasse, 1863), qui dérive (comme du prov. brugnoun, brignoun, altération de
brouée, 1314, « brouillard », encore dans prugnoun, qui remonte au lat. pop. *prünea
les patois), de bro(u), voir brouet, qui, du it. prugna « prune ». Le b de brugnoun est
sens de « bouillon », a pris celui de « brouil- dû à un croisement avec brun « brun », à
lard », cf. la forme brouas, x1v°, « gelée du caüse de la couleur de cette espèce de
matin ». L'! mouillée vient de brouiller. pêche.
BROUILLARD, brouillon, v. brouiller. BRUINE, vers 1150 (broine ; la forme
BROUILLER, xim® (sous la forme moderne apparaît dès 1200). En anc. fr.
broueillier), « mélanger », d’où sens variés : et jusqu'au xvie le sens du mot est
« barbouiller, salir, griffonner », etc. Pro- « gelée blanche », à côté de « brume ».
BRUINE 92

C’est ce qui montre que bruine représente d’abord intrans. « agir en brutal » ; bruta-
le lat. prüina «gelée blanche » (pruine dans lité, 1539 ; abrutir, 1541 (Calvin), abrutis-
ce sens encore dans un psautier de 1120). sement, 1586.
Ce mot s’est transformé phonétiquement
sous l’influence du lat. bräma, v. brume. — BRUYÈRE. Dér. très anc. de brücus
Dér. : bruiner, 1551. « bruyère », attesté dans une glose d’origine
gauloise, gaulois *brüko, qui correspond à
BRUIRE. Lat. pop. *brügère, altération l’irlandais froech et au gallois grug; d’où
du class. rägire, par croisement avec *bra- aussi l’a. pr. bruc et des formes des parlers
gère, v. braire. — Dér. : bruant, xIv®; méridionaux modernes (et en outre de
bréant, xvri®, est probabl. une altéra- l'Italie septentrionale). Bruyère a signifié
tion dialectale; bruissement, 1495 (au au sens propre « champ de bruyères », sens
moyen âge surtout bruife)ment) ; bruit, encore usité dans quelques parlers ; v. fou-
XI1°; bruitage, 1951; ébruiter, 1583; gère. Le simple survit encore dans les par-
bruyant, xr1e. lers méridionaux.
BRULER, 1120. Altération de l’anc. BRYONE, xvi*. Empr. du lat. bryonia
franc. usler, du lat. ustulare, d'où aussi a. (du grec bryônia).
pr. usclar, it. ustolare « désirer ardemment », BUANDERIE, v. buée.
sous l'influence de l’anc. franc. bruir, v.
brouir ; l’a. pr. bruslar, rarement attesté, BUBON, 1372 (en outre bubone, xiv°).
vient du fr. Aujourd’hui usité dans presque Empr. du grec boubôn « id. ».
tous les parlers gallo-romans, sauf des
représentants du lat. cremaäre dans les par- BUCAILLE, v. sarrasin.
lers méridionaux. L'’it. brustolare « griller » BUCCAL, 1735. Dér. sav. de bucca
doit son br- à bruciare, qui représente « bouche ».
peut-être un préroman *brusiare. — Dér. :
brûlerie, 1417, au sens de « distillerie », BÛCHE. Du germ. *büsk « baguette »,
en 1787; brûleur, xrr1e; brûlot, 1627; cf. moyen haut all. bâsch « gourdin »; le
brûlure, x111. — Comp. nombreux fém., au lieu du masc. germ., est primiti-
composés avec brûle- comme premier élé- vement un neutre plur. pris collectivement
ment : brûle-gueule, 1735 ; brûle-pourpoint, *buska, fait sur le modèle du lat. pop.
1648 (Scarron). fruclus : frucla, etc. De même a. pr. busca,
v. aussi buse. — Dér. : bûcher, subst., xX1r°e ;
BRUME, xive. En raison de sa rareté bûcher, verbe, xirie (en a. fr. « frapper ») ;
en a. fr. et dans les parlers septentrionaux, bûcheur, 1866 ; bûchette, xr1°; débûcher,
doit être considéré comme empr. de l’a. 11°; terme de vénerie, d’après le sens
pr. bruma, qui représente au contraire « bois, forêt », que bâche a dû posséder;
régulièrement le lat. bräma, propr. «le jour refait en débusquer, au xvie s. (déjà
du solstice d’hiver », d’où « hiver », comme attesté au xIv®; mais dans un texte du
it. bruma « hiver », esp., port. bruma Nord-Est), d'après embusquer, v. la suite:
« brume ». — Dér. : brumaire, 1793 (Fabre embüûche, x111° (embusque, dialectal), par
d'Églantine), v. frimaire ; brumasser, 1863 ; l'intermédiaire d’un verbe embücher, x11e,
brumeux, 1787 ; embrumer, vers 1500, v. qui avait le sens de « se mettre en embus-
embrun. cade », et qui est encore dans les diction-
naires comme terme de vénerie (d’où
BRUN (brunus déjà dans une glose d'Isi- rembüûcher, 1549) ; a été refait en embusquer
dore de Séville). Du germ. occidental *brän, au xv°s. (attesté auparavant, mais dans les
all. braun, d’où également it. bruno, a. pr. textes du Nord-Est), d’après l'it. imboscare
brun. — Dér. : brûnâtre, 1557 ; brunet, «mettre en embuscade » (de bosco « bois »),
x11- ; brunir, vers 1080 (Roland), « rendre qui a entraîné embuscade, xve (A. Char-
brillant un métal »; de même anc. haut tier), francisation de l’it. imboscata; +.
all. brûnen, dér. de brûn, au sens de « bril- cavalcade.
lant » (sens qui a peut-être été introduit
par les Germains avec la manière de polir BÛCHERON, v. bois.
les armes), d'où brunissage, 1680, brunis- BUCOLIQUE,
seur, 1313, brunissoir, 1401, brunissure, vers 1270. Empr. du lat.
bucolicus, surtout à cause des Bucoliques
1506 ; rembrunir, 1690, par l'intermédiaire
d’embrunir, vers 1300. de Virgile.
BUDGET, 1764 (en parlant des finances
BRUSQUE, 1546 (« âpre, rude, vif, anglaises ; adopté officiellement par la
étrange » (en 1313, vin brusque dans une France en 1806 ; mais déjà d’usage courant
traduction de l'italien) ; sens moderne au en 1779.) Empr. de l’angl. budget, lui-même
XVIIe 8.). Empr. de lit. brusco « aigre, âpre, de l’a. fr. bougelle « petit sac », dér. de
pas mûr », propr. « fragon épineux », pris bouge « sac, valise », v. bouge; primitive-
adjectiv., lat. ruscum « fragon épineux », ment l’angl. budget a désigné le sac du
croisé avec bräcus, v. bruyère (c'est. un trésorier ; par suite, plus tard le rapport
autre mot que bruscum « excroissance annuel de la situation financière a été ap-
ligneuse de l’érable », v. brosse). — Dér. : pelé opening of the budget « ouverture du
brusquer, 1589 ; brusquerie, 1668 (Molière). Sac ». — Dér. : budgétaire, 1825 ; budgéti-
BRUT, xuri° (assez souvent, jusqu’au vore, 1858.
XVIII s., brule, également masc.) ; brutal, BUÉE, 1219 (au sens, vieilli depuis le
XIVe. Empr. du lat. brulus, brutalis (de XVIIIe S., de « lessive », au sens moderne
basse ép.). — Dér. brutaliser, 1572, de « vapeur d’eau », vers 1360). Tiré de l’anc.
chat BURNOUS

verbe buer, xr1°, « faire la lessive », encore BULBE, xve. Il y a eu hésitation sur le
dans les patois. Francique *bükôn, all. genre. Empr. du lat. bulbus « oignon »;
bauchen, cf. de même a. pr. bugada, it. sens anatomique au xixe s. — Dér. : bul-
bucato. Comme le verbe n’existe que dans beux, 1545, d’après le lat. bulbosus.
les parlers gallo-romans, et surtout au Nord
on considère aussi que le subst. a été fait BULLDOZER, 1948. Empr. de l’an-
sur un modèle germ. et qu’il a été emprunté glais d'Amérique, où le mot désignait
du fr. par les autres langues romanes. Buée d’abord un homme qui cherchait à inti-
« lessive » est encore très vivace dans les mider (nom de la machine dep. 1930).
parlers gallo-romans. Du verbe dérive BULLE, «sceau, acte revêtu d’un sceau »,
buanderie, 1471, par l'intermédiaire d’un xue. Empr. du lat. médiéval bulla, pour
nom d’agent buandier, XVI, encore dans le sens class., v. boule.
les patois de l'Ouest (bugandier, forme poi-
tevine, 1408). — Dér. : embué « couvert BULLE « bulle d’air », xvi*. Empr. du
de buée », fin xiIxe. lat. bulla, v. le préc.
BULLETIN, 1520. Dér. de l’a. fr. bul-
BUFFET, xuie (« sorte de table »). En lelte, dér. de bulle, encore usité au xvie 8. ;
a. fr. buffet signifie en outre « soufflet de a pris le sens de « certificat, bulletin »,
foyer » (de même a. pr. bufet, encore au- probabl. d’après l’it. bollelino, attesté à la
jourd’hui dans les parlers méridionaux et même époque.
le poitevin), d’où, par figure « gifle », v.
souffler ; en ce sens c’est un mot onomato- BUNGALOW, 1829. Mot angl., tiré de
péique, v. bouffer ; peut-être le mot est-il l'hindou bangla « bengalien ».
devenu la désignation d’un meuble, 1260 BURE, xvi® (mais le dér. bureau est
(E. Boileau), parce que celui-ci était d’abord du xr1e s.). Représente peut-être un lat.
muni d’une planche qu’on pouvait abaisser. pop. *büra, autre forme de burra, v. bourre,
BUFFLE, 1213. Empr. de l’it. bufalo, cf. de même les deux formes cuppa, cupa,
lat. dialectal büfälus, lat. class. bübälus. v. coupe, cuve; attesté aussi par l'esp.
L’a. fr. disait bugle, v. beugler et le suiv.
archaïque et le port. bura. La date récente
— Dér. : buffleterie, 1642 ; rare avant la
de bure est étonnante ; on ne peut pour-
tant pas y voir un mot tiré de bureau, qui
fin du xvirie s.
remonterait finalement au même type lat.
BUGLE « clairon à clefs », 1836. Empr. — Dér. : bureau, x11°, propr. « sorte de
de l’angl. bugle, empr. lui-même de l’a. fr. bure », d’où « couverture de meuble faite
bugle, v. beugler, qui désignait d’abord un de cette étoffe », xrr1°, « table à écrire »,
instrument en corne de buffle (relevé dans 1495, « pièce où l’on a son bureau », 1592,
un texte du xrr1e s., rédigé en Angleterre). et enfin les autres sens modernes ; d’où
buraliste, fin xvii*, bureaucrate, 1792,
BUGLE, plante, xir1°. Empr. du lat. de bureaucratie, créé par l’économiste Gour-
basse ép. bugula. nay (1712-1759), bureaucratique, 1796.
BURETTE, 1360 (buyreile en 1305). Dér.
BUGLOSSE, 1372. Empr. du lat. bu- de buire, xr1°, encore dans les dictionnaires,
glossa (du grec bougléssa, littéral. « langue autre forme de buie, avec un r d’origine
de bœuf »). obscure. Représente le francique *bäk (de
la famille de l’all. Bauch « ventre » et
BUGRANE, 1544. Antér. bouverande,
bougrande, issus, avec un traitement anor- de diverses formes germ. désignant des
récipients), devenu *büka, fém., d’après
mal (comme c’est fréquent dans les noms *krüka, V. cruche.
de plantes), du lat. pop. *boverëtina (comp.
de bos « bœuf », et retina, tiré du verbe BURGAU, xvi® (Palissy). Étymologie
retinere), attesté dans des gloses sous la inconnue.
forme bouereina, etc., c'est-à-dire « arrête-
bœuf » ; arrête-bœuf est également le nom BURGRAVE, vers 1480 (d’abord bour-
pop. de cette plante, 1553, parce que ses grave, 1413). Empr. de l’all. Burggraf
racines arrêtent la charrue. « comte d’un bourg (ou d’un burg) »; v.
bourgmestre. — Dér. : burgraviat, 1550.
BUIE, v. burette. BURIN, 1420. Probabl. empr. de lit.
burino, aujourd'hui bulino, empr. lui-même
BUILDING, 1770, mot anglo-américain, d’une forme germ. mal déterminée de la
dér. de {0 build « construire », généralement famille de l’all. bohren « percer ». — Dér. :
connu depuis la fin du xIx°s. à cause des buriner, xvi® (Du Bellay).
buildings américains.
BURLESQUE, 1611 (d'abord bourreles-
BUIS. En a. fr. surtout bo(u)is, encore que, xvi*). Empr. de lit. burlesco, dér. de
en 1718, éliminé par buis, refait probabl. burla « plaisanterie » (d’où burle, xvie, et
sur buisson. Lat. buxus, du grec pyksos. bourle, id.), probabl. de *burrula et *bürula
Usuel dans les parlers gallo-romans (a. pr. (v. bure), dim. de burra.
bois) ; dans divers parlers, on a des noms
se référant à l'emploi du buis le jour des BURNOUS, 1863 (bournous 1838, ber-
Rameaux, notamment un dér. de Pâques nous 1695-1829, bernus 1649, barnusse
‘en wallon, hosanna en poitevin. It. bosso, 1558). Empr., depuis l'occupation de l’AI-
port. buxo. gérie, de l'arabe bournous « tout vêtement
à capuchon » (lui-même du grec birros);
BUISSON, v. bois. une première fois empr. sous la forme albor-
BURNOUS 94.

nos, 1706, « manteau à capuce des cheva- s'explique que si but désignait aussi l’en-
liers de Malte »; en outre alburnos « man- droit d’où l’on joue, v. plus haut de but
teau des Arabes », Chateaubriand, dans en blanc, d’où début, 1642, débutant,
Les Aventures du Dernier Abencérage. 1767 ; rebuter, Xv®, propr. « repousser du
but », rebut, 1549, rebutant, 1674 (Boi-
BUSARD, v. buse. leau).
BUSC, xvi® (écrit busque, encore au BUTANE, 1890. Formé du radical du
xviies.). Empr. de l’it. busco, propr. «brin, lat. bulyrum, avec le suff. qu’on a p. ex.
büûchette », de même origine que bâche. — dans mélhane.
Dér. : busquer, xvi° ; busqué, 1771.
BUTIN, xive. Empr. du moyen bas all.
BUSE, xve. Tiré de l’a. fr. buison, d’où bûle « partage », d’où « butin », all. Beute
buson « sorte de buse », lat. büleo « sorte « butin » (le moyen néerl. buyi n’est pas
de faucon »; de là aussi, avec un autre probable, parce que ni Chastellain, ni
suff., busard, x11°. A. pr. buzart, -ac, -at, Commynes n’emploient butin); le sens
it. bozzag(r)o, abuzzago. propre apparaît encore dans les premiers
textes. Peut-être d’abord terme de ma-
BUSINESS, 1884. Empr. de l’angl. busi- rine (indiqué en ce sens dans plusieurs
ness, prononcé en fr. pop., d’après la pro- textes, jusqu’en 1732), qui a pu être in-
nonciation angl., bizness. — Businessman, troduit grâce aux relations des ports fran-
empr. de l’angl., 1904. çais avec les villes hanséatiques. L'it.
BUSQUE, v. busc. bottino et l’esp. botin viennent du fr. —
Dér. : butiner, xiv®, au sens de « piller ».
BUSTE, 1546. En outre au xvie s. bus-
que, par confusion avec busque « buse ». BUTOR, xr1°. Rapport obscur avec le
Empr. de l’it. busto, peut-être lat. büstum, lat. büteo, bülio, de même sens ; on propose
propr. « bûcher », d’où « monument funé- d'y voir un lat. pop. *bulti-laurus, comp.
raire », qui a pu prendre le sens de « buste », du radical de butio et de taurus « taureau » :
les monuments funéraires étant souvent Pline, 10, 42, signale qu'on appelait le
ornés du buste du mort. butor taurus à Arles, à cause de son cri
rappelant le mugissement des bœufs. Sens
BUT, 1245. Probabl. d’un francique figuré, 1671 (Molière).
*bût « souche, billot », supposé d’après
l’anc. scandinave buir « petit morceau BUTTE, v. but.
de souche », qui a pu prendre le sens de BUTYREUX, xvi® (Paré); butyrique,
« but » à différents jeux d’arc, d’arba- 1823. Dér. sav. du lat. buiyrum, v. beurre.
lète, etc. De but (souvent écrit aussi butte)
en blanc, terme d’artillerie, xvrie, le but BUVABLE, BUVARD, BUVETTE, BU-
désignant le point d’où l’on tire et le blanc VOTER, v. boire.
le centre de la cible, d’où « à toute portée » BYSSUS, vers 1400 (écrit bissus). Empr.
et « inconsidérément », dès le xvrr® s. — du lat. byssus (du grec byssos, d’origine
Dér. : butte, xive (on trouve au xvie s. sémitique, cf. hébreu bouts).
le sens de « cible », par confusion avec but),
d’où butter « disposer en butte », 1701; BYZANTIN, 1838. Empr. du lat. byzan-
buter, xive, « heurter, viser », Xvi®, puis tinus. Discussion byzantine, par allusion
les sens modernes, d’où butoir, 1863, au aux discussions théologiques qui divisaient
sens moderne ; abuter, xir1° ; débuter, 1549 les Grecs au moment où les Turcs assié-
« jouer un premier coup »; le mot ne geaient Byzance.
C
ÇÀ, adv. En a. fr. aussi çai (comp. avec contient beaucoup », plutôt qu’au verbe
l’adv. i « y »). Aujourd’hui usité seulement capere « contenir » (le suff. -acius ne s’ajou-
dans çà et là, et la locution or çà, xv®, et tant pas aux verbes) ; mais c’est peu satis-
dans les parlers méridionaux (a. pr. sai). faisant pour le sens.
Lat. ecce häc, renforcement, au moyen de
ecce « voici » (dont la voyelle est tombée à CABESTAN, 1382 (sous la forme cabes-
l’époque prélittéraire), de l’adv. class. hac tant). Empr. du prov. cabestan, issu de
« par ici ». It. qua, esp. acd, comp. avec cabestran, part. prés. pris substantiv., au
eccu(m). V. ce, ici. — Comp. : céans, xr1° sens d’ « instrument servant à enrouler les
(caenz : Voyage de Charlemagne), aujour- câbles », d’un verbe “*cabestrar, aujour-
d’hui rare, comp. de çai et d’enz, anc. adv., d’hui cabesträ, dér. de cabestre « corde de
disparu au xvi®s., qui signifiait « dedans », poulie », propr. « chevêtre ». L’esp. cabes-
lat. intus ; s’opposait à laienz, d’où léans, t(r)ante et l’angl. capstan, par altération
comp. de lai et d’enz, v. là, encore chez capstern, sont également empr., le premier
La Fontaine par archaïsme. Decà, x11°, du prov., le deuxième du fr.
aujourd’hui surtout dans en deçà de. CABIAÏI, v. cobaye.
ÇA, pronom. V. cela. CABILLAUD, 1278 (-aui, autres formes
-au, cabéliau, cabliau). Empr. du néerl.
CAB, 1850. Empr. de l’angl. cab, abré- kabeljau. Les Basques, qui ont appris des
viation du fr. cabriolet. Néerlandais la pêche du cabillaud, ont
transformé le mot néerl. en bakallao, mot
CABALE, 1532 (Rab.). Au sens fig. dès qui, à son tour, a été empr. par le fr. sous
le xvi® s. Empr. de l’hébreu rabbinique
gabbalah, propr. « tradition », par opposi- la forme bacala.
tion à la loi écrite, et appliqué au moyen CABINE, 1364. Désigne d’abord, dans
âge à la tradition ésotérique. — Dér. : une ordonnance de Lille, une maison de
cabaler, 1617 ; cabaleur, xvri° ; cabaliste, jeu, où les filous exploitent la passion de
1534 (Rab.); eabalistique, 1546 (id.). jeu du public. Il est hors de doute que le
mot est né dans le milieu des malfaiteurs
CABAN, 1448. Dès 1347, dans un texte des riches villes de Flandres. Le suff. -ine
latin; en outre gaban, 1552 (Rab.). Empr. est partic. fréquent à cette époque-là en
de lit. (de Sicile) gabbano, de l'arabe néerl., mais l’origine du radical reste obs-
gabd’ «sorte de tunique à longues manches ». cure. — Dér. : cabinet, 1525, au sens de
« petite chambre intime », ensuite « meu-
CABANE, 1387. Empr. du prov. cabana, ble », 1528, « endroit couvert de verdure,
lat. de basse ép. capanna, vu (Isidore de dans un jardin », 1540, « lieu où les mi-
Séville), d’origine incertaine, probabl. de nistres tiennent conseil », 1631, de là
l'illyrien, ou d’une langue antérieure, cf. « corps des ministres », 1708. L’angl. cabin,
aussi it. capanna, esp. cabaña. — Dér. : cabinet, lit. gabineïlo viennent du fr.
cabanon, 1798.
CABARET, 1275. Empr. du moyen CÂBLE, x1ve (Froissart). S’est substitué
néerl. cabret, forme dénasalisée de cambrel, à l’a. fr. cheable, chaable (d’où chable, en-
cameret, qui est à son tour empr. de l’anc. core dans les dictionnaires), auquel il doit
sa voyelle longue. Empr. du normand
picard camberele, dimin. de cambre «cham- cable, lat. de basse ép., vire 8. (Isidore de
bre ». — Dér. : cabaretier, xIv°.
Séville), capülum « espèce de corde », d’où
CABARET, nom de plante, 1538. Alté- aussi l’it. cappio « sorte de nœud ». L’a. fr.
ration de baccaret, dér. du lat. bacc(h)ar chaable, au lieu de chable, doit sa forme à
(du grec bakkaris). un croisement avec chaable « engin de
guerre » (v. accabler), croisement dû au
CABAS, vers 1327, antér. lat. médiéval fait que les câbles sont une partie impor-
cabatium, 1243. Depuis le xvi® s., jusqu’à tante de ces engins. — Dér. : câbler, 1680 ;
une date récente, servait surtout à l’expé- le sens d’ «envoyer une dépêche par câble »,
dition de raisins ou de figues, cf. au xvi®s. 1877, vient de l’anglo-américain, cf. aussi
raisin, figue de cabas. Empr. de l’a. pr. le comp. câblegramme, 1896 (ou céblo-,
cabas « corbeille de jonc », lat. pop. *capä- 1903, aujourd’hui plus usuel), empr. de
cius (cf. notamment esp. capazo « panier l’anglo-américain cablegram, fait sur tele-
de sparte », avec un p hétéroclite), d’origine gram, et par abréviation câble, 1897 ; encà-
incertaine. On pense à l’adj. capaz « qui blure, 1758.
CÂBLEGRAMME 96

CÂBLEGRAMME, v. le préc. et chevreau, à une recherche de mots nou-


veaux, partant plus expressifs que les mots
CABOCHE, xve. Au sens de « clou », anciens.
1680. Forme picarde de l’a. fr. caboce, xr1°,
d’origine douteuse. La date de l’a. fr. CABRIOLE, 1562 (écrit alors cabriolle) ;
exclut un emprunt au prov. où le mot est cabrioler, 1585. Au xvie d’abord et, jusqu’à
plus récent qu’en fr. Dér. de bosse, la fin du xvue® s., surtout capriole, -er.
avec le préfixe ca-; attesté au sens de Empr. de l’it. capriolare (dér. de capriolo
« bosse » dans de nombreux parlers septen- « chevreuil »), capriola ; le b du fr. cabrio-
trionaux. — Dér. : cabochon, 1380 « sorte le(r) est dû à un croisement avec cabri.
de pierre précieuse » ; au sens de « clou », — Dér. : cabriolet, 1755, à cause des sauts
1706 de ces voitures légères ; cabrioleur, 1718.
CABUS, xrr1° (texte du médecin it. Ale-
CABOSSER, 1546 (cf. cabocier, xtr°,
brant de Sienne). De l’a. pr. cabus, xir1°,
« former des bosses », en parlant de souliers
qui vient lui-même des dialectes de l'Italie
trop larges). Dér. de cabosse, qui a dû avoir Supér. (lombard gabus). Ce mot représente
le sens de « bosse », comme le montre le
un dér. très anc. de capui avec le suff.
verbe du xrie s., attesté en outre dans
divers patois, v. le préc. -uceus. L’it. cappuccio a subi l’influence de
cappa.
CABOT, « chien », 1837 (Vidocq). Terme CACA, 1534 (Bon. des Périers). Mot
d’argot, peut-être empr. du dialectal cabot enfantin, remontant à l’époque lat., cf.
« têtard », attesté en normand et dans les lat. cacäre, sous chier.
patois méridionaux. De là, dans l’argot
militaire, « caporal », abréviation de capo- CACADE, 1611. Dér. du même radical
ral, avec altération d’après cabot « chien ». que le préc. Au xvi® s., on trouve cagade,
V. aussi cabotin. d’après le prov. cagada.
CACAHUÉTE, -HUATE, 1802. Empr.
CABOTER, 1678. Dér. du fr. cabo « pro- de l’esp. cacahuate, masc., empr. lui-même
montoire », attesté au commencement du de l’aztèque du Mexique tlacacahuall.
xviI® s. et qui est empr. de l’esp. cabo.
Reste à trouver si le mot a été formé dans CACAO, 1568. Empr. de l'esp. cacao,
les ports de l'Océan ou dans ceux de la empr. lui-même de l’aztèque cacauall. —
Méditerranée. Le prov. caboutà parle peut- Dér. : cacaoyer, 1694, ou cacaotier, 1721 ;
être en faveur de la deuxième hypothèse. cacaoyère, cacaotière, 1730.
— Dér. : cabotage, 1707 ; caboteur, 1542 ; CACATOIS, 1663 (var. kakatoës). Kaka-
cabotier, 1671. ioès est empr., par l’intermédiaire du hol-
CABOTIN, 1808. Passe pour être le nom landais kakatoe, et avec s du pluriel, du
malais kakatüwa, mot onomatopéique ; ca-
propre d’un célèbre comédien ambulant calois est refait sur le port. cacatua, 1630,
du xvrie8., à la fois impresario et charlatan. de même origine, avec s de la forme préc.
— Dér. : cabot, 1865 ; cabotinage, 1829;
cabotiner, 1798. L'emploi du mot comme terme de marine,
d’après perroquet, est propre au fr.
CABOULOT, 1852. Terme d’argot, empr. CACHALOT, 1730. Empr. du port. ca-
du franc-comtois caboulot « réduit », issu choloite, propr. « poisson à grosse tête »,
de boulot, avec initiale ca- due à un croise- dér. de cachola, fém., « caboche », d’origine
ment avec cabane ; boulot dérive lui-même douteuse ; est peut-être entré par l’inter-
de boye, répandu dans les parlers franco- médiaire de l'esp. cachalot, si celui-ci ne
provençaux, suriout au sens d’ « écurie, vient pas, au contraire, du fr. ; cf. en outre
étable, elc. », mot d’origine celtique, repré- angl. cachalot.
sentant un type *buia « hutte », cf. irlan-
dais both « hutte, cabane, maisonnette ». CACHE, v. cacher.

CABRER (se), xive (G. de Machaut, CACHEMIRE, 1803. Nom propre de


pays, province au Nord-Ouest de l'Hin-
une 1'e fois en 1180). Le prov. cabrar n’est doustan où l’on fabriquait le tissu ainsi
attesté que depuis le xvirre s. C’est pour- nommé.
quoi un empr. du prov. est peu probable.
Mais des dér. prov. de capra ont passé au CACHER. Le lat. class. coactare « com-
fr. dès le moyen âge, comme cabrit, cabret, primer » vit encore en prov. Il a en outre
cabrote et il est possible que cabrer a été formé en gallo-roman deux dér. : *coacti-
dér. en fr. même du radical de ces mots. lare dans le Midi et *coacticare dans le
Nord. Du sens « comprimer, serrer » est
CABRI, xv°; cabril au x1ve s. et jus-, sorti celui de « cacher », x111°. Au sens de
qu’au xviIIe 8., avec un / qui paraît venir « cacher », a supplanté l’a. fr. esconser,
de chevril qu’on trouve dans des textes de vivace jusqu’à la fin du xve s., encore usité
la Franche-Comté et de la Suisse Romande en lorrain en parlant du coucher du soleil,
du x1ve et du xvi® s., mais dont l’origine dér. d’escons, part. passé d’escondre, dis-
n’est pas claire. Empr. du prov. cabrit paru de bonne heure, lat. abscondere, qui
(encore usité dans les parlers méridionaux), existe dans toutes les langues romanes
lat. de basse ép. (Loi Salique) capritus, avec ou sans substitution de préf. : it.
dér. de capra « chèvre » ; a supplanté l’a. (n)ascondere, esp. esconder, a. pr. escondre,
fr. chevri, xt, encore usité aujourd'hui Aujourd’hui escondre se dit dans la majo-
en lorrain, en franc-comtois, dans la Suisse rité des parlers méridionaux ; en outre
Romande et la région rhodanienne. L’em- autres concurrents, notamment musser
prunt de cabri est dû, v. de même chèvre d’origine incertaine, surtout au Nord-Est
97 CADMIE

et en normand. V. celers— Dér. et Comp. : liver de traits », xve), « paroles superflues


1° au sens de « comprimer » : cachet, 1464, (d’un auteur, d’un avocat), servant uni-
d’où cacheter, 1464, décacheter, 1544, quement à l’ornement », xvire (Furetière),
recacheter, 1549 ; écacher, xr1°, « écraser », « divertissement, principalement offert à
aujourd’hui aussi sens techn. ; 2° au sens une dame », xvire, et enfin le sens moderne
de « cacher » : cache, 1561 ; cachette, 1313 ; 1787. Empr. du prov. capdel, surtout
cachot, 1550 ; cachotter, xvire (Mme de « chef » qui a dû signifier « lettre capitale»
Sévigné), cachotterie, xvr1® (Bossuet), ca- (c'est-à-dire « qui est en tête »), lat. pop.
chottier, 1792 ; cache-cache, 1778 ; cache- *capilellus, dér. de caput « tête », cf. de
corset, fin xix®; cache-nez, 1549 ; cache-pot, même en a. fr. chadel « chef ».
1856 ; cache-poussière, 1876 ; cache-sexe,
cache-col, 1842 ; cache-tampon, CADENAS, 1540 (en outre -aiz, 1551;
-al, encore fin xvie et cathenat, 1529,
d’après le lat. catena). Empr. du prov.
CACHET, etc. v. le préc. cadenat (dér. de cadena « chaîne »), propr.
CACHEXIE, 1537. Cachectique, xvi® « (serrure) en manière de chaîne », avec
(Paré). Empr. du lat. médical cachexia, substitution de suff., probabl. déjà prov. ;
cachecticus (du grec kakhexia, de kakos on a des formes prov. anciennes en -az à
« mauvais » et hexis « constitution physi- côté des modernes en -as ; l'esp. candado
que » (de ekhein « tenir »), kakhektikos). 4 LL de même. — Dér. : cadenasser,
CACHOT, etc., v. cacher.
CADENCE, fin xv°, au sens moderne ;
CACHOU, 1680. Empr. du port. cacho, en outre usuel au xvi® s., au sens de
1516 (aujourd’hui écrit cachu), empr. lui- « chute ». Empr. de l’it. cadenza, qui a les
même du tamoul käsu. D’une autre forme deux sens, dér. de cadere « tomber ». —
caiechu viennent l’angl. catechu et lit. Dér. : cadencer, 1701 (-é, en 1597).
catecu.
CADÈNE, « chaîne de forçats », 1559.
CACIQUE, 1515. Empr. de l’esp. cacique, Empr. du prov. cadena « chaîne » ; on sait
empr. lui-même de la langue des Aruaks que les galères étaient stationnées dans les
d'Haïti. ports de la Méditerranée ; vers 1300 et au
CACO-. Premier élément de mots savants xvI® s., on trouve parfois aussi cat(h)ene,
comp. tels que cacographie, 1579, tiré du qui est l’it. calena (cf. bagne, chiourme,
grec kakos « mauvais », ou de mots empr. forçat).
tels que cacophonie, xvie.
CADENETTE, 1658 (Brébeuf). « Petite
CACOCHYME, 1503 (écrit -ime). Empr. moustache de cheveux qu’on laissait pen-
du grec médical cacokhymos (de khymos dre du côté droit, ainsi appelée (sous
« suc, humeur »). Louis XIII) d'Honoré d’Albert, Seigneur
CACOLET, 1829. Empr. du parler des de Cadenet (Vaucluse), Maréchal de Fran-
Pyrénées cacoulet, d’origine incertaine. ce, qui, le premier, porta de ces sortes de
moustaches. Cet Honoré d’Albert était
CACTUS, 1781. Empr. du lat. cactus (du frère de M. d'Albert de Luines, connestable
grec kaklos « artichaut épineux »), pour de France » (Ménage).
désigner des plantes exotiques. A sup-
planté le dér. caclier, 1778. CADET, xve. Empr. du gascon capdet,
qui correspond au prov. capdel « chef »,
CADASTRE, 1527. Empr. du prov. mo- v. cadeau (-ei en gascon est le traitement
derne cadasire, empr. lui-même de lit. du suff. prov. -el); les chefs gascons qui
catast(r )o, attesté par le vénitien catastico vinrent servir dans les armées des rois de
dès 1185; ces formes italiennes viennent France au xv® s., étant généralement des
du bas grec kalastikhon « liste, registre », fils puînés de familles nobles, a pris le sens
propr. « ligne par ligne » (cf. le grec class. actuel de « cadet », d'où « gentilhomme
stikhos « rang, ligne »); de là aussi l’esp. (ordinairement cadet), qui servait comme
catastro et l’all. Xataster. En fr. cadastre volontaire », au xvi® s. À supplanté puiné
n'est employé jusque vers 1760 que par au XVIIe 8., Cf. : « Dans la conversation,
rapport au Midi; son usage semble être on se sert plus ordinairement du mot
devenu général grâce à Turgot. — Dér. : cadet », Académie, 1740. — Dér. : cadichon,
cadastral, 1790 ; cadastrer, 1781 (Turgot). xvire (Mme de Sévigné).
CADAVRE, fin xvi® (cadaver, 1559- CADI, xvirre. Empr. de l'arabe gâdi
1637) ; cadavéreux, 1546 (Rab.). Empr. du « juge ». Une première fois empr. au xiv®
lat. cadaver, cadaverosus. — Dér. : cada- (G. de Machaut). V. alcade.
vérique, 1787.
CADE, variété de genévrier, 1518. Empr. CADMIE, 1538 (camie en 1400). Empr.
du prov. cade, encore très usité en ce sens, du lat. cadmia (du grec kadmeia « calamine,
lat. de basse ép. cädlanum (dans une glose minerai de zinc »; ainsi nommé parce
d’Espagne, fin vire s.), peut-être d’origine qu’on le trouvait près de Thèbes, la cité
préceltique. de Kadmos). D’une forme altérée du lat.
médiéval calamina vient calamine, 1484,
CADEAU, 1416. D'abord « lettre capi- auparavant, x111°, calemine, chalemin, xrve.
tale », encore au xvi® s., puis « traits de — Dér. : cadmium, xixe s., découvert en
calligraphie », id. (cf. le dér. cadeler « enjo- 1817, par Strohmeyer.
DICT. ÉTYM.
CADOGAN 98

CADOGAN, 1775, aujourd’hui plutôt ca- CAFOUILLER, fin xix°. Mot picard et
logan, 1782. Coiffure qui paraît avoir été normand, où il résulte du croisement de
nommée d’après le nom du général anglais cacher « serrer, presser » et fouiller, v. ba-
W. de Cadogan (1675-1726), qui l'avait fouiller.
mise à la mode.
CAGE. Lat. cavea, entre autres sens
CADRAN, xi1e (quadran). Empr. du « cage », dér. de l’adj. cavus « creux »;
lat. quadrans, propr. « quart », certains développement anormal de la consonne
cadrans solaires marquant les heures sur initiale à côté de Chage, abbaye fondée à
un quart de cercle. Meaux en 1135, et de Sainit-Crépin-en-
CADRE, 1549 (Rab.), sens militaire de- Chaye (près de Soissons ; cavea signifie ici
puis la Révolution (1796). Empr. de lit. « théâtre »). Signifie quelquefois « prison »
quadro, tiré de l’adj. quadro « carré », lat. en a. fr., comme l’a. pr. gabia, cf. aussi
quadrus. — Dér. : encadrer, 1752 ; encadre- geôle. Existe partout dans les parlers gallo-
ment, 1756; encadreur, 1870; cadrer à romans, sauf geôle, surtout Nord-Est et
qch., 1539 (encore Bossuet), avec qch., région poitevine. — Dér. : cagée, 1599;
1666 (Molière), plutôt dér. de cadre que encager, vers 1310.
empr. du lat. quadrare, d’où vient le part.
quadré de mesure (seulement 1529). CAGNA, 1915. Empr. du prov. cagnä
« lieu abrité contre le vent », languedocien
CADUC, xive (E. Deschamps). Empr. du cagnar, dér. du prov. câgna « chienne »,
lat. caducus (de cadere « tomber »). — Dér. : v. le suiv.
caducité, 1479 (déjà lat. -ifas).
CADUCÉE, 1512, d’abord caduce, fém., CAGNE, xv®e (caigne; antér. canie, lire
au xves. Empr. du lat. caduceus, altération cagne), « chienne, mauvais chien », et
du grec kérykeion « insigne de héraut « prostituée ». Empr. de l’a. pr. canha
(kéryx) ». « chienne », lat. pop. *cania, v. chienne.
— Dér. : cagnard, 1520 (écrit cai-), propr.
CAECUM, 1541. Empr. du lat. de basse « fainéant comme un chien couché », d’où
ép. (inteslinum) caecum, propr. « aveugle », cagnarder, xvi® (Calvin), cagnardise, xvi®
traduction du grec {yphlon, de même sens ; (Calvin), acagnarder (s’), xvie (Calvin);
le cæcum a été ainsi nommé parce qu'il est cagneux, 1614, dit ainsi parce que les
comme sans issue, étant fermé à la base chiens ont les pattes de devant plus ou
en cul-de-sac. moins cagneuses.
CAFARD, 1512 (caphars, graphie fré-
.quente au xvi® s.). Empr. de l'arabe käfir CAGNOTTE, 1836. Empr. du méridional
« qui n’a pas la foi », part. du verbe kafara cagnotio, dim. de cagna « chienne », v.
« ne pas avoir la foi, renier », avec, dans cagne, qui désigne par figure divers réci-
le passage au fr., remplacement de la ter- pients ou objets, petit cuvier, cornette
minaison insolite par le suff. péjor. -ard. d’étoffe, etc.
Désigne par métaphore un insecte mal
CAGOT, 1537 (sens moderne ; au sens
défini à la fin du xvi® s., ensuite la blatte
dans beaucoup de régions (Normandie, de « malheureux », Rab., 1552). Empr. du
Berry, Franche-Comté), d’où le sens a béarnais cagot « lépreux blanc », appliqué
pénétré aussi en fr., 1863. De là aussi, à par dérision aux bigots ; cf. en outre cagou,
cause de la couleur noire de l’insecte, la 1436 (texte parisien), caqueux, 1456 (texte
locution argotique avoir un cafard (dans breton) ; cacot, xvi® (Paré, en parlant des
la tête) « être toqué » (comp. avoir une lépreux blancs de Basse-Bretagne) ; caquol,
araignée dans le plafond), d’où avoir le 19598 (Bouchet, en parlant de ceux du Poi-
cafard « avoir des idées noires », 1912 tou), etc. Dér. de cacäre « chier » ; cf., dans
(d’abord chez les troupes stationnées en un texte du moyen âge, impostor : cachous,
Algérie). — Dér. : cafarder, 1470 (écrit formé sur un adj. du lat. médiéval *cacôsus,
caph-), cafardage, 1765 (J.-J. Rousseau), qui aura été appliqué ensuite aux lépreux.
cafarderie, xv° (caph-); cafardise, 1551 — Dér. : cagoterie, 1594 ; cagotisme, 1667
(D.) ; cafardeux, 1948. (Molière).
CAFÉ, xvire s. (d’abord cahoa, 1611; CAGOULE, 1552 (Rab.). Empr. d’un par-
caüé, 1633). Empr. de l’it. caffé, empr. lui- ler de la région poitevine ou du Sud-Ouest
même, par les Vénitiens, du turc kahué, (avec a dû à un croisement avec cagouille
qui vient de l’arabe qahwa. L'usage du « escargot », mot de ces parlers), cogole,
café s’est établi et développé à Paris entre xuie ; lat. eccl. cuculla (à côté du class.
1660-1670), et les lieux publics où on le cucullus « capuchon »), d’où aussi l’a. fr.
consommait, peu après. On relate que le coule, rare aujourd'hui, « froc ou capuchon
premier café fut ouvert en 1654, à Mar- de moine », et l’it. cocolla, | esp. cogulla,
seille. Le fr. pop. caoua, 1888, vient de de même sens ; cf. en outre la forme empr.
l’argot militaire, qui a pris la forme arabe cuculle, 1488, encore dans les diction-
dans les armées d’Afrique. — Dér. : ca- naires.
féier, 1743 (sous la forme caffier) ; caféine,
1818 ; cafetier, 1696, « on dit plus commu- CAHIER, anc. quaer, caer, caier. Lat.
nément limonadier », Académie, 1762; ca- quaterni « groupe de quatre », pris au sens
fetière, 1690. de « groupe de quatre feuilles », cf. le lat.
de basse ép. qualerni5, en ce sens. It. qua-
CAFTAN, ou CAFETAN, 1537. Empr. du derno, esp. cuaderno ; V. caserne. — Dér. :
turc gaftän, même mot que le mot arabo- carnet (quernet, 1416, formé avant la chute
persan khaftân «sorte de vêtement militaire». de l’n final).
99 CALAMINE

_. CAHIN-CAHA, 1552 (Rab.). Antér., au CAILLOT, xvie s. (Paré). Dér. du m.


XV® Ss., cahu-, cahy-; onomatopée, peut- fr. cailhe « lait caillé », apr. calh, qui
être d’après le suiv. représentent le lat. coagulum, même sens.
CAHOTER, 1564 (mais attesté déjà pour CAILLOU. Forme dialectale, probabl.
le xrr1° s. par le comp. racahotee). Du fran- normande, qui a remplacé de bonne heure,
cique hoïtôn « faire balancer, branler », xive, la forme centrale chaillo, xr1°. Au
et renforcé en gallo-roman à l’aide du préf. moyen âge aussi chail (conservé en poite-
péjoratif ca-. — Dér. : cahot, vers 1460; vin) et chaille, fém. (Suisse, conservé en
cahotage, 1694; cahotement, 1769. Suisse et dans la Franche-Comté). Ces
CAHUTE, xr11° (chaule est une graphie deux formes représentent un gaulois *cal-
inverse, le texte en question étant picard). jo- « pierre », qu’on peut reconstituer
Contamination de hutte avec des mots d’après epo-calium (dans des gloses) « sabot
comme cabane, caverne, etc. du cheval » (« pierre », ensuite « corne,
sabot ») et d’après le gallois caill « testi-
CAÏD, 1568. Empr. de l’arabe géid « chef cules »). Dans caillou on peut voir un dér.
de tribu ». déjà gaulois *caljdvo, dont la terminaison
n’est pas encore expliquée définitivement.
CAÏEU, 1651. Terme de jardinage, d'ori- La forme normande caillou a remplacé
gine picarde (cf. les hortillons ou terrains chaillou, qui survit presque dans tout
de culture maraïîchère sur la Somme), cor- l'Ouest, comme terme maritime. — Dér. :
respondant à l’a. fr. chael, lat. catellus (v. cailloutage, fin xvi® (Sully); caillouter,
chiot) « petit chien », appliqué à un rejeton, 1768 ; caillouteux, xvi®; cailloutis, 1700.
suivant une figure fréquente.
CAILLE, xr1e. Continue une dénomina-
CAÏMAN, 1587 (sous la forme cayma-
tion onomatopéique de cet oiseau, qui est nes). Empr. de l’esp. caimän empr. lui-
attestée dans des gloses lat. du virre et du même d’une langue caraïbe. On n'est pas
IX€ s. sous deux formes, quaccula et quac-
sûr si dans les Antilles c’est un mot indi-
quara. Les deux vivent en fr., la première
gène ou s’il y a été apporté de l'Afrique.
ayant donné caille, la deuxième courcaillet CAÏQUE, 1579 (écrit caïq). Flottement
« appeau imitant le cri de la caille ». Le de l'orthographe et du genre au xvrie s.
néerl. kwakkel et l’it. caglia sont empr. du Empr. de l’it. caicco, empr. lui-même du
gallo-roman. — Dér. : cailleteau, 1372. turc qaiq.
CAILLER, lat. coaguläre. It. quagliare, CAISSE, xvie (écrit quesse, Amyot), une
esp. cua ar. — Dér. : caillement, 1490. — première fois en 1365 (écrit quecce). Empr.,
Comp. : caillebotter, x111°, empr. d’un par- par suite des rapports commerciaux, du
ler de l'Ouest, comp. de cailler et d’un prov. caissa, lat. pop. *capsèa, de capsa
verbe botter «mettre en bottes » (usuel dans « coffre, cassette », cf. également esp. caja;
l'Ouest), dér. de botte, donc « se mettre en le lat. class. capsa ne suffit pas à expliquer
masse caillée », d’où caillebotte, 1546 (Rab.), les formes caissa, caja, V. casse, chasse. —
« sorte de fromage blanc » et, par figure, Dér. : caissier, xvi° ; décaisser, 1701 ; en-
caïillebot, 1845, ou caillebotte, 1771, «espèce caisser, 1510, encaisse, 1849, encaisse-
de viorne » dite aussi boule-de-neige, à ment, 1701, encaisseur, 1876, rencaisser,
cause de la couleur et de la forme de ses 1704.
fleurs, tous termes de la même région. De
caillebotte, au sens propre, sont issus caille- CAISSON, 1636, antér. casson, XVI°;
botis, 1678, terme de marine, « sorte de caixon, 1418. Dér. normand ou méridional
treillis (comparé aux formes en damier où de casse, chasse, adapté par la suite à la
se font les caillebottes) » et caillebote, 1634, nouvelle forme du simple caisse.
terme de marine, « morceau de bois servant CAJOLER, xvi<. D'abord « babiller com-
(comme le caillebotis) à boucher un vide »; me un geai en cage »; transformation de
Caïlle-lait, 1701, d’où gaillet, 1786, par gaioler, même sens, xvi® (dér. du pic.
croisement avec le lat. scientifique galium gaiole « cage », du lat. caveola, v. geôle),
(du grec galion). sous l'influence de cage. Sens moderne
CAILLETTE, « quatrième estomac des dès 1596. — Dér. : cajolerie, fin xvi°;
ruminants », xIv®, en moyen fr. aussi cail- cajoleur, id.
let, masc. Dimin. de cail « présure », encore CAKE, 1821. Empr. de l'angl. cake.
dans les patois, qui représente le lat. coagu-
lum, id. Ce dernier mot avait encore le sens CAKE-WALK, 1895. Empr. de l’angl.
« lait caillé », conservé dans l’a. pr. cailh d'Amérique (propr. « marche au gâteau »).
et dans le normand cail, ainsi que dans le CAL, xive. Empr. du lat. callum; cf.
fém. plur. cailles (Haute-Bretagne, Maine), aussi la forme pop. chauz (pluriel), xive.
et dont dérive fr. caillot, xvi°.
CAILLETTE, « personne frivole », xvi® CALAMBOUR, variété d’'aloès, 1540
(Marot). Tiré de Caillelte, nom d’un bouf- (1644 carembourg). Empr. du malais kalam-
fon de Louis XII et François Ier. Long- baq, probabl., par l’intermédiaire du port.
temps masc., encore en 1611, devenu fém. calambuco, 1540, qui représente aussi des
sous l’influence de la terminaison et parce formes variées comme le fr.
qu’il a été compris comme un dimin. de CALAME, xvie. Empr. du lat. calamus
caille ; aujourd’hui se dit surtout des fem- « roseau (à écrire) ».
mes. — Dér. : cailleter, fin xviri° ; Caille-
tage, vers 1770 (J.-J. Rousseau). CALAMINE, v. cadmie.
CALAMISTRER 100

CALAMISTRER, xive. Fait d’après le CALÈCHE, 1656, d’abord calège en


lat. calamistratus « frisé au fer » (de cala- 1646 ; en outre galèche, 1661 (Molière).
mistrum « fer à friser »). Empr. de l’all. Xalesche, empr. lui-même
d’une langue slave, probabl. le tchèque
CALAMITÉ, x1v® ; calamiteux, xv°. Em-
pr. du lat. calamilas, calamitosus.
kolesa « sorte de voiture ».

CALANDRE, sorte de cylindre, 1483 CALEÇON, 1563 (H. Estienne : cales-


(mais calandrer, 1400, et calandreur, 1313). sons, plus fréquent que le sing. au xvi® 5.).
Issu par assimilation vocalique d’un ancien Empr. de l’it. calzoni, plur., dér. de calza
*colandre, d’un lat. de basse ép. *colendra, « bas »; v. chausse.
adaptation du grec kylindros, devenu fém. CALÉFACTION, xive. Empr. du lat. de
sous l'influence de columna (dont certains basse ép. calefactio (de calefacere « chauf-
représentants, comme le suisse colonde « pi- fer »).
lier », portent à leur tour les traces de cette
rencontre). CALEMBOUR, 1768. Rapport probable,
CALANDRE, sorte d’alouette, xrie. En mais insuffisamment élucidé, avec le suiv.
a. fr. très rarement chalendre. Empr. du CALEMBREDAINE, 1798. Formé avec
prov. calandra, lat. pop. *calandra (du le préfixe péjoratif ca(l)- et le radical
grec kalandra). It. calandra, esp. calandria. contenu dans bredouiller. Comp. aussi
CALANDRE « charançon », v. charançon. bredin « étourdi », très répandu dans les
CALANQUE, 1678 (en 1690, calangue). parlers, lorrain berdaine « bavardage », etc.
Empr. du prov. calanco, dér. de cala « cri- CALENDES, xri°. Empr. du lat. calen-
que », mot d'origine prélatine (cf. it., esp. dae ; pour la forme pop. de ce mot, v. noël.
cala, de même sens) avec le suff. prélatin
-anca, v. avalanche ; les parlers alpins ont CALENDRIER, 1339, auparavant calen-
le même mot au sens de « ravin, etc. ». dier, xu°. Du lat. calendarium « registre
CALCAIRE, 1751. Empr. du lat. calca-
des dettes » (dér. de calendae, v. le préc.
rius (de calx « chaux »).
parce qu’on payait les intérêts le premier
du mois), qui a pris le sens moderne déjà
CALCÉDOINE, xr°. En outre, et jus- dans le lat. médiéval de l’Église (attesté
qu'au xviie s., caci-, etc. Empr. du lat. dès le xe° s.).
chalcedonius, adj., « de Chalcédoine (ville
de Bithynie, en face de Byzance, en grec CALEPIN, 1534 (Bon. des Périers). Tiré
Khalkédôn) », qui se disait aussi de la pierre du nom de l'Italien A. Calepino (1435-
elle-même, qu'on trouvait près de cette 1511), auteur d’un dictionnaire polyglotte
ville. du latin et de plusieurs langues de l’Eu-
CALCÉOLAIRE, 1783. Dér. sav. de cal- rope, qui eut un très grand succès (pre-
ceolus, dim. de calceus « chaussure » ; cette mière éd. en 1502). Signifiait jusqu’au
plante a été ainsi nommée à cause de la XVII® s. un recueil de notes.
forme de sa fleur. CALER, terme de marine, xii°. Empr.
CALCIFICATION, 1863. Dér. savant du du prov. calar (cf. aussi it. calare et l'esp.
lat. calx, v. chaux. calar). Du grec chalän « abaisser (la voile) »
(le lat. calare, empr. du grec, n’a jamais
CALCINER, xive; calcium, 1808. Dér.
sav. du lat. calx, calcis, « chaux ». — Dér.
ce sens techn. que possédait déjà le grec ;
il s’agit donc d’un élément de la terminolo-
du verbe : calcinable, 1729 ; calcination,
gie maritime grecque conservée dans la
xr1e (J. de Meung). Méditerranée occidentale). Le lat. calare
CALCUL, terme médical, xvi® (Paré). est conservé dans l’a. pr. calar « abaisser »,
Empr. du lat. calculus, propr. « caillou », d’où le dér. cale « partie du navire », 1671
employé également dans le lat. médical. (empr. du prov. calo, id.). Ce verbe a été
CALCULER, 1372; calculateur, 1546. empr. par les parlers du Nord dans différen-
Empr. du lat. de basse ép. calculare (de tes acceptions spéciales, ainsi « immerger »
calculus, déjà class. au sens de « compte »), (d’où champenois recaler qqn. « répliquer
calculator. — Dér. et Comp. : caleul, xve ; vertement à qqn. », xvrrie, d’où fr. recaler
calculable, 1705, incalculable, 1779 ; recal- « refuser à l'examen », 1907), « descendre
culer, xv°. en glissant » (d’où fr. cale « partie inclinée
d'un quai », 1694).
CALE « coin pour caler », 1611. Empr.
de l’all. keil, id. (prononcé kail). — Dér. : CALFAT, 1371 (écrit calefas) ; calfater,
calot « petite cale », 1732 : caler, 1676 ; dé- xve. Du grec byzantin kalaphäles, -ein, qui
caler, 1345 ; décalage, id. (au sens de «dépla- sont peut-être empr. de l'arabe qafr « as-
cement dans le temps ou dans l’espace », phalte ». Les mots grecs ont pénétré aussi
ces deux mots sont attestés depuis 1922). dans les autres langues européennes : it.
calafatare, a. pr., esp. calafaiar, all. kalfa-
CALE, fond d’un navire, v. caler. tern. Les mots fr. viennent sans doute des
CALE, coiffure, v. calotte. ports de la Provence. Au moyen âge s’est
CALE, « ce qui sert à caler », v. caler. développée une forme altérée calfetrer (ca-
lefesirer, 1382), d'où, d’après feutre, cal-
CALEBASSE, 1555 (1542 calabasse). Em- feuirer, 1555 (Ronsard), qui a gardé son
pr. de l’esp. calabaza, probabl. de l'arabe sens propre jusqu’au XIXe s. — Dér. :
gar‘a, id., mais la terminaison reste obs- calfatage, 1527 ; calfateur, 1373 (calpha-
cure. deur), cf. aussi callefateries, 1295.
101 CALVAIRE

CALIBRE, 1478; calibrer, 1552 (Rab.). présente le grec kauma (qui a été empr
Empr. de l’arabe qélib « moule où l’on après l’époque où au était devenu 0, d'où
verse les métaux, forme de chaussure, etc. ». le développement particulier al de au)
It. calibro, esp. calibre, all. kaliber vien- « chaleur brûlante », d’où plus tard « tran-
nent du fr. — Dér. : calibrage, 1839. quillité des éléments, principalement de la
mer, par un temps très chaud », cf. a. pr.
CALICE, sorte de vase, x11e. Empr. du cauma « Chaleur », prov. moderne caumo
lat. calir, -icis, de même origine que calyx.
« chaleur étouffante », v. chômer. — Dér. :
Les locutions « boire, vider le calice » sont neue 1783, fait sur le modèle d’em-
d'origine biblique, cf. Mathieu, XX, ellie.
22, etc:
CALICE, « partie de la fleur », 1549. CALOMEL, 1752 (parfois calomelas).
Orthographié d'après le préc. Empr. Formé artificiellement des mots grecs kalos
du lat. calyx, -ycis (du grec kalyx). « beau » et melas « noir », le calomel étant
une poudre blanche, maïs noire au début
CALICOT, 1613 (écrit callicoos). Usuel de sa préparation.
seulement au xix° s. Formé sur Calicut,
nom d’une ville de l’Inde, sur la côte du CALOMNIE, 1330; calomnier, 1377;
Malabar ; l’angl. calico vient du fr. Au sens calomniateur, xrr1°; calomnieux, 1312.
de « commis », 1823, tiré du nom d’un per- Empr. du lat. calumnia, calumniari, ca-
sonnage de vaudeville. lumnialor, calumniosus. L’a. fr. avait des
formes pop. chalonge (ou -enge), -gier,
CALIFE, xri°. Empr., au moment des -geor, au sens fondamental de « réclamer
Croisades, de l’arabe khalifa, propr. « vi- en justice », conformément au sens lat. de
caire (de Mahomet) ». En outre en a. fr. « chicaner » : l’angl. challenge « défi », repris
algalife et -ie. — Dér. : califat, 1560. comme terme de sport, d’où challenge,
1885, vient de l’a. fr. chalenge.
CALIFOURCHON (à), 1611. En outre
cafourchons et cal-, xvi®; a caleforchies, CALORI-. Premier élément de mots sa-
xir1e. Mot de l’Ouest né d’une composition vants comp., tels que calorifère, 1823,
du bret. Æall « testicules » et du fr. fourche. tiré du lat. calor « chaleur ».
CÂLIN, xvi°; câliner. Sont encore au CALORIE, 1835. Dér. sav. du lat. calor
XVIIIe s. des termes pop., au sens de « pa- « chaleur ». — Dér. : calorique, 1783.
resseux, lâche », « prendre ses aises (sous
la forme se céliner) ». L’adj. dérive du CALOTTE, 1394. Dér. de cale, 1474,
verbe, lequel est empr. du normand caliner encore dans les patois, cf. aussi caleite,
« se reposer à l'ombre pendant les grandes “calot, caline, calipelle, etc., de même sens.
chaleurs »; celui-ci dérive du normand Les coiffures en question sont presque
caline, a. fr. chaline « chaleur étouffante », toujours collantes et se continuent vers le
d’un lat. de basse ép. *calina, du radical bas par des rubans, qui pendent. Cela rap-
de calere « faire chaud » (aussi esp. calina pelle le brou de la noix qui se détache de
« air chaud qui monte »). — Dér. : câline- la coquille dure vers le bas à l’époque de
rie, 1835. la maturité, tout en restant encore collé
étroitement vers le haut. En effet cale est
CALISSON, fin xix® (calisson d'Aix). le même mot que le fr. écale. — Dér. :
Empr. du prov. calissoun, autre forme de calot, 1750; calotin, 1717; calotter, 1808;
canissoun, propr. « clayon (de pâtissier) », décalotter, 1791.
dér. de canis, de même sens, lat. pop. *can-
nicium, neutre d’un adj. pris substantiv., CALOYER, xive (E. Deschamps); en
propr. « fait de roseau {canna) », V. canne. outre calogere, fin xive. Empr. du grec mo-
L'’it. calicione « sorte de gâteau » (calison derne kalogeros (où g se prononce y), éty-
est dans un texte franco-italien du moyen mologiquement « beau vieillard » (du grec
fr.), dér. de caniccio « clayon », est formé ancien kalos et gerôn).
comme calissoun, mais le rapport des deux
mots n’est pas élucidé. CALQUER, 1642; calque, 1751. Empr.
de l’it. calcare, propr. « presser », colco (tiré
CALLEUX, 1503; callosité, id. (antér. de ce verbe) ; cf. l’a. fr. chauchier « fouler »,
caill-, xive). Empr. du lat. callosus (de qui représente le même mot lat. calcäre.
callum, v. cal), callositas. — Comp. : décalquer, 1694, décalque,
CALLI-. Premier élément de mots sa- 1837, décalcomanie, 1840.
vants comp., tels que callitypie, fin xix®, CALUMET, vers 1655 (Muse Norman-
tiré du grec kallos « beauté », ou de mots de) ; en outre calumo. Forme normande de
empr., tels que callipyge, 1786. chalumeau avec substitution de suff., em-
CALMAR, 1532. À servi à désigner le ployée par les colons français pour désigner
calmar, parce que celui-ci répand un liquide la pipe des Indiens de l'Amérique du Nord,
noirâtre comme la seiche ; désignait jus- Signifie encore « pipe » en franco-canadien.
qu’au xvir° s. une sorte d’écritoire porta-
tive (cf. calemart, 1471) ; empr. en ce sens CALVAIRE, xu1° s. Empr. du lat. eccl.
de l’adj. lat. calamarius « servant à conte- Calvaria (en lat. class. « crâne »), traduc-
nir le roseau pour écrire ». tion de l’hébreu Golgotha, colline où Jésus
fut crucifié, cf. « ce qui signifie lieu du
CALME, subst., 1418 ; adj., xv® ; calmer, crâne » (la version latine dit calvariae locus),
id. Empr. de l’it. calma, calmo, calmare (les Mathieu, xxvr1, 33; « crâne » se dit en
deux derniers dér. du premier) ; calma re- effet en hébreu biblique goulgoleth.
CALVILLE 102

CALVILLE, espèce de pomme, 1650 (dé- cf. aussi l’angl. caboose et l’all. Kabuse
jà calvil en 1544). Écrit aussi caleville, (attesté dès 1422), dont les relations ne
calle-, au xvrre s. Tiré de Calleville, nom sont pas élucidées.
d’un village du Calvados. CAME, 1751. Empr. de l’alll Kamm
CALVITIE, xive. Empr. du lat. calvilies « peigne, carde, etc. ».
(de calvus « chauve »). On a essayé chauvece CAMÉE, v. camaïeu.
au xII1*, chauvelé au XVI Ss.
CAMÉLÉON, xr1e. Empr. du lat. camae-
CAMAÏEU, xime (écrit camaheus). Au leon (du grec khamaileôn, littéral. « lion à
moyen âge signifie « camée ». De même terre (nain) », de zhamai « à terre »).
origine que l’it. cammeo (d’où le fr. camée,
1752), l'esp. camafeo. Peut-être de l’arabe CAMÉLIA, 1829. Empr. du lat. des bo-
gama'tl, plur. de qum'‘ül « bouton (de tanistes camellia, créé par Linné en l’hon-
fleur) », mais en arabe ces formes ne sont neur du Père Jésuite Camelli, missionnaire
attestées que dans les dictionnaires. Le de la fin du xvrie s., qui apporta cette
changement de sens serait le même que fleur de l’Asie Orientale en Europe.
pour le lat. gemma. CAMELINE, 1549. Altération de cama-
mine, 1542, nom de plante, altération du
CAMAIL, xr11e. Empr. de l’a. pr. cap- lat. de basse ép. chamaemelina (sous-enten-
malh « coiffure de fer pour la tête », sens du herba), littéral. « herbe ressemblant à
de camail au moyen âge, d’où aussi lit. la camomille ».
camaglio ; capmail est le subst. verbal
d’un verbe non attesté *capmalhar « revê- CAMELOT, étoffe, 1213. Empr. de l’ara-
tir la tête d’une armure analogue à la cotte be hamlat « peluche de laine », qui a été
de mailles », cf. en a. fr. maillier « se revêtir introduit dans l'Occident avec l'étoffe
d’une cotte de mailles » et en a. pr. malhar, même, laquelle a été fabriquée d’abord en
de sens analogue ; v. maille. Orient. En passant en fr. le mot a été mis
en rapport avec chameau, d’où l’a. fr.
CAMARADE, xvie s. (fém.; devenu chamelot, vers 1300. Le suff. -at, plutôt
masc. au xviie s., d'après le sens). Empr. rare en fr., a été échangé contre -ot. —
de l'esp. camarada, terme militaire, propr. Dér. : cameloter, 1530, « façonner grossiè-
« chambrée » (sens également empr. au rement comme le camelot », d’où camelote,
XVIe s.), dér. de camara « chambre ». L’it. 1751 ; ont subi dans leur développement
camerata, ayant pris le même sens de sémantique l'influence du suivant, cf. came-
« compagnon d'armes », soit indépendam- loter, donné comme terme d’argot, au sens
ment, soit d’après l’esp., nous a donné la de « gueuser », par Oudin au xvire 5.
forme camerade, au xvi® s. — Dér. : cama-
raderie, xviie (Mme de Sévigné). CAMELOT, « colporteur », 1836. Altéra-
tion, d’après les préc., de l’anc. coesmelot
CAMARD, v. camus. « petit mercier », dér. de coesme « gros mer-
cier », mot d’argot de la fin du xvi® s.,
CAMARILLA, 1830. Empr. de l'esp. d’origine douteuse. Le prov. camalo « por-
camarilla « cabinet particulier du roi » (de tefaix » vient du turc hamäl.
cimara).
CAMEMBERT, 1867, d'après Camem-
CAMBISTE, 1675. Empr. de l’it. cam- bert, petite ville de Normandie, aux envi-
bista (de cambio « change »). rons de laquelle on fabrique ce fromage.
CAMBOUIS,
xiv° (Ménagier : cambois). CAMÉRA, 1900. Empr. du lat. camera,
Étymologie inconnue. en vue d’un sens technique spécial.
CAMBRER, 1447. Dér. de cambre, forme CAMÉRIER, 1671; une première fois
picarde ou normande, attestée au moyen en 1350. Empr. de l’it. cameriere, dér. de
âge, et encore usitée au xvie s., de l’anc. camera « chambre ».
adj. chambre, lat. camür «courbé en dedans, CAMÉRISTE, 1752. Empr. de l’esp. ca-
arqué ». — Dér. : cambrure, 1537. marisla, dér. de câmara « chambre ». On
CAMBRIOLEUR, 1828. Mot de l’argot trouve aussi camarisle. Camérisie est refait
des voleurs, dér. de cambriole, 1790, «cham- d’après l’it. camerisia de même sens, empr.
bre », dér. lui-même du prov. cambro de l'esp.
« chambre ». — Dér. : cambrioler, 1847. CAMERLINGUE, 1666 (Retz ; camerlin,
CAMBROUSSE, 1837 (alors cambrouse, 1418). Empr. de l’it. camerlingo, même
-ousse depuis 1928). Empr. du pr. cam- mot que le fr. chambellan.
brousso « mauvaise chambre », dér. de CAMION, 1352 (sous la forme ch-). Éty-
cambro, du lat. camera, V. chambre. La mologie inconnue. — Dér. : camionner,
. signification actuelle est probablement née 1829, camionnage, id., camionneur, 1554;
dans une expression courir la cambrouse camionnette, fin xix° (d’après voülurette).
« courir les foires », d’où « aller d’un lieu
à un autre, courir la campagne » ; le mot CAMISADE, 1552 (Rab.). Empr. d’un
campagne a sûrement contribué à cette prov. *camisada (v. chez Monluc en cami-
transformation sémantique. sade « en portant une chemise par-dessus
l’armure »), de même sens, dér. de camisia,
CAMBUSE, 1783. Propr. terme de ma- v. chemise, les assaillants, dans ces atta-
rine, devenu pop. Empr. du néerl. kombuis, ques nocturnes, passant leurs chemises par-
plus ancienn. kabuis, de même sens; dessus leurs armes pour se reconnaître.
103 ” CANCAN

CAMISOLE, 1547. Empr. de l'a. pr. CAMPHRE, vers 1307 (en 1372 camphore,
camisola « casaque », 1524, dim. de camisa. au x111e 8. cafour). Empr. du lat. médiéval
camphora, altération de l'arabe kdfoûr,
CAMOMILLE, 1322. Empr. du lat. de d’origine hindoue. Mot européen. — Dér. :
basse ép. (vit s.) camomilla, altération du camphrer, 1564; camphrier, 1751.
lat. chamaemelon (du grec khamaimélon,
littéral. « pomme à terre » (v. caméléon) ; CAMPING, 1905. Empr. de l’angl., subst.
cette plante a été ainsi nommée parce que verbal de {o camp « camper ». — Dér. :
l'odeur de ses fleurs rappelle celle des campeur, 1948.
pommes. CAMPOS, 1488. Tiré de locutions d’éco-
CAMOUFLER, 1837. Mot de l’argot des liers, telles que dare campos « donner congé
voleurs, dans lequel on a vu un empr. de aux écoliers », 1530.
lit. camufjare « déguiser, tromper ». Mais
CAMUS, xrr1°. Paraît contenir le radical
il est plus probable qu'il est dér. de camou- de museau, avec le préfixe ca-, sans
flet, l'idée de « fumée » pouvant très bien
qu'on voie clairement comment ce mot
servir de base à un mot au sens de « dégui- a été formé. — Dér. camuset, id.;
ser » — Dér. camouflement, 1837 ; camard, par substitution de suff., 1534
camouflage, vers 1916 ; camoufleur, 1923.
(Rab.).
CAMOUFLET, 1611. Altération de CANAILLE, vers 1470. Empr. dé lit.
Chault mouflet, xv® (cf. aussi chaumou/let, canaglia, dér. de cane « chien ». A sup-
Oudin, xvrre) ; le sens propre, aujourd'hui planté l’a. fr. chiennaille, de même forma-
disparu, était « fumée qu’on souffle au tion et de même sens. — Dér. : canaillerie,
nez de quelqu'un au moyen d’un cornet de 1846 ; encanailler (s’), 1661.
papier allumé ». Le radical du mot est
moufle, attesté du xvi® au XvIII° S. au sens CANAL, xr1°. Empr. du lat. canalis (de
de « gros visage rebondi », qui est empr. de canna, v. canne), surtout pour des emplois
l’all. muffel « museau ». L'élément ca- qui techn., v. chenal. — Dér. : canaliser, 1829,
a été substitué à chaud est le préfixe péjo- canalisable, 1838, canalisation, 1823.
ratif. — Dér. : camoufle, 1837, terme d’ar- CANAPÉ, 1650. Empr. du lat. médiéval
got, « bougie ». canapeum, altération, avec innovation du
CAMP, 1490. Empr. du picard ou du sens, du lat. anc. conopeum « rideau, pavil-
prov., du lat. campus, v. champ, avec le lon de lit », cf. conopée, 1546 (Rabelais),
sens militaire que le mot a pris au xves. conopé, x11°, au même sens ; le mot lat.
— Dér. : camper, 1539 (antér. mot picard vient du grec kônôpeion « moustiquaire »
signifiant « aller par les champs »), d’où (de kônôps « moustique »). L’it. canape
campement, 1584 ; décamper, 1562, a éli- vient du fr.
miné escamper, 1516 (Rab.), empr. de lit. CANARD, 1487 (quanart au xt 5.
scampare, d’où (poudre d’) escampette, Canart, surnom, en 1199). Dér. de l’a. fr.
1688. caner « caqueter » (xrr1e) ; le suff. provient
CAMPAGNE, 1535 (Marot; au xr1° et de l’a. fr. maslart « canard », dér. de masle
au xrrie s., attesté comme mot normanno- « mâle », comp. aussi criard, pleurard, qui
picard). Empr. du prov. ou du picard, lat. sont toutefois de formation plus récente,
de basse ép. campänia « plaine, terrain dé- Le sens de « nouvelle fausse » est attesté dès
couvert », plur. neutre pris substantiv. de 1750 ; il provient de la locution vendre des
l’adj. campäneus, dér. de campus ou exten- canards à moitié, attestée au xvi® s., d’où
sion de Campania, nom de la plaine fertile donner des canards à qn « tromper l'attente
autour de Naples ; le sens militaire n’appa- de qn » (de la fin du xvire jusqu’au milieu
raît qu’au xvires.; dans celui d’ « étendue du x1x® s.). — Dér. : cane, 1487 (quenne en
plate ». a fait disparaître l’a. fr. champagne, 1338), d’où canette, xve ; caneton, 1530;
encore terme de blason ; champagne existe caner « jacasser », 1549 ; « reculer », 1821
en outre dans les patois et de nombreux (cf. du xvie au xvinie s. la locution faire
noms de lieu ou de région, d’où le nom la cane « se sauver précipitamment »);
d’une ancienne province. — Dér. : campa- caniche, 1743 (d’abord fém., nommé ainsi
gnard, 1611 ; campagnol, xvir1e (Buffon). parce qu'il va volontiers à l’eau) ; canarder,
fin xvi® (d’Aubigné), propr. « tirer d’un
CAMPANE, xive (au sens de « cloche », abri, comme à la chasse au canard sau-
fréquent jusqu’au xvi* s.). Emplois techn. vage »; canardière, 1665. — Comp.
divers. Empr. du lat. de basse ép. campäna canepetière, 1534 (Rab.).
« cloche », v. le suiv. et cloche. CANARI, 1583, en outre canarie, 1642,
CAMPANILE, 1586 (écrit -il; parfois forme du xvire s., et canarin (1576-x1x°).
-ille, par substitution de suff.). Empr. de Empr. de l'esp. canario, adj. « (serin) des
l’it. campanile, dér. de campana « cloche ». Canaries » et orthographié au xviie s.,
d'après ranarie. Le commerce des canaris
CAMPANULE, 1694. Empr. du lat. mé- fut longtemps le monopole des Espagnols
diéval campanula « clochette ». Les patois et les canaris des oiseaux à la mode.
septentrionaux disent cloche ou clochelte,
les patois méridionaux ont des dér. de CANCAN, 1554 (un quanquan de colleige).
campana « cloche » de l’a. pr. Empr. de la conjonction lat. quanquam
« quoique », avec la prononciation du lat.
CAMPÊCHE, 1603. Tiré de Campêéche, à cette ép. ; désignait une harangue latine
nom d’une ville du Mexique. faite par un jeune écolier, ces sortes de
CAMPER, v. camp. harangues commençant souvent par cette
CANCAN 104

conjonction. Au sens de danse vulgaire et CANICULE, 1500 ; caniculaire, 1555 (au


bruyante, 1836, vient probabl. d’un nom xve « pariétaire »). Empr. du lat. canicula,
enfantin du canard, sens attesté en 1808; propr. « petite chienne » (traduction, avec
cancan signifierait donc propr. « danse changement de genre, du grec kyôn «chien
évoquant le dandinement du canard ». — (d’Orion), Sirius »), canicularis.
Dér. : cancaner, 1823 ; cancanier, 1834
CANIF, 1441 (sous la forme quenif, mais
CANCER, 1503, une première fois, 1372 cnivet au x11° s.; d’où canivel, encore en
au sens de signe du zodiaque. Empr. du Normandie). Empr. de l’anc. francique
lat. cancer, propr. « écrevisse » (traduction *knif, cf. angl. knife, moyen néerl. cnijf.
du grec karkinos « écrevisse » et « cancer ») ; CANIN, xive, Empr. du lat. caninus (de
v. le suiv. et chancre. Le sens astronomique canis « chien »). À supplanté la forme d’ori-
est également anc. — Dér. cancéreux, gine pop. ch(ijenin, encore usitée dans
1743. l'Allier.
CANCRE, xrr1e (au sens de « crabe »). CANITIE, xr11e (écrit canecie). Empr. du
Empr. du lat. cancer, v. le préc. Employé lat. canilies (de l’adj. canus « blanc »), v.
au fig., à cause de la lenteur du crabe, au chenu.
sens d’ « être qui végète » (La Fontaine,
Fables, I, 5), d'où « mauvais écolier », 1808. CANIVEAU, 1694. Étymologie inconnue.
CANCRELAT, 1775 (on a dit aussi cac- CANNE, xir1e. Empr. de l’a. pr. cana,
kerlac, 1701). Empr., avec altération du lat. canna « roseau, tuyau » (du grec
d’après le préc., du néerl. kakerlak, qui kanna, mot d’origine orientale). — Dér. :
semble avoir été introduit de l'Amérique cannaie, 1600 (déjà en 1196 canoie) ; can-
du Sud, avec l'animal. nelle « petit tube », etc., xvI° ; canner (un
siège), 1856, cannage, 1856 ; cf. canon.
CANDÉLABRE, xuie (antér. ch--). Em-
pr. du lat. candelabrum, dér. de candela CANNELLE, substance aromatique, xr1°.
« chandelle ». Ce mot dérive du préc. et est dû à la forme
en petits tuyaux que prend l'écorce dessé-
CANDEUR, vers 1330. Empr. du lat. chée du cannelier. Mais le lieu de formation
candor, propr. « blancheur éclatante », v. du mot n’est pas déterminé, cf. it. a. pr.
candide, candidat. canella, esp., port., canela ; il a été probabl.
CANDI, xir1e. Empr. de l’it. (zucchero) répandu par le lat. médiéval cannella. —
candi(lo) « sucre candi », empr, lui-même Dér. : cannelier, 1743 (arbre canellier en
de l’arabe gandi, adj. de qgand « sucre de 1575).
canne », d’origine hindoue. — Dér. : can- CANNELLONI, 1922. Empr. de l’it. can-
dir, 1600, d’après l’it. candire. nelloni, désignant une pâte alimentaire rou-
CANDIDAT, xrr1e. Empr. du lat, candi- lée en cylindre, dér. de canna « tuyau »
dalus (de candidus, v. le suiv.), les candi- CANNELURE, 1564 (canelature, en 1545).
dats aux fonctions publiques, à Rome, Empr. de l’it. cannellatura, remplacé plus
s’habillant de blanc pour briguer les suf- tard par scannellatura. — Dér. : canneler,
frages. Jusqu'au xviie s. le mot ne s'em- 1545.
ploie qu’en parlant de l’histoire romaine.
Il est devenu un terme de la vie universi- CANNETILLE, 1534 (Rab.). Empr. de
taire en Allemagne vers 1580, et il est pro- l'esp. cañulillo, dim. de cañuto (de caña
(ou -0) « roseau, tuyau », lat. canna, v.
bable que c’est des universités allemandes canne).
qu’il a passé en France, où il est attesté
depuis 1671. — Dér. : candidature, 1829. CANNETTE, 1407. Empr. du dialecte de
Gênes, d’où l’on faisait venir le fil d’or et
CANDIDE, xvie. Empr. du lat. candidus, d'argent destiné à l’ornement des habits,
- propr. « d’un blanc éclatant ». aux xIve-xve s. L’homonyme cannette
CANÉPHORE, 1570. Empr. du grec « vase à bière », 1723, est empr. du picard,
kanéphoros, propr. « porteuse de corbeille » où il est dér. de cane au sens spécial de
(de kanoun « corbeille » et pherein « por- « cruche », sens qu’a aussi développé
ter »). l’all. Kanne, de canna (au sens de « réci-
pient » dès le vre s.).
CANEVAS, 1281 (canevach dans un texte
de Saint-Omer). Croisement de cette forme CANNIBALE, 1515. Empr. de l'esp.
picarde canevach et de l’a. fr. chenevas, canibal, altération de caribal, qui vient
propr. « fait de chanvre », dér. de chaneve, lui-même de caribe, mot de la langue des
forme anc. de chanvre. Du sens partic. de Caraïbes (ou Caribes) des Antilles, qui
« réseau aux mailles larges pour la tapisse- passe pour signifier propr. « hardi » et qui
rie à l’aiguille » sont sortis les sens fig., te les désigner. — Dér. : cannibalisme,
à partir du xvres. 796.
CANEZOU, 1829. Étymologie inconnue. CANOË, v. canot.
CANON « tube à projectiles », 1339.
CANGE, 1838. Empr. de l'arabe d'Égyp- Empr. de l’it. cannone, augment. de canna
te quand;a, d'origine turque. au sens de « tube », v. canne. A pris le sens
CANGUE, 1686. Empr. du port. canga, de « mesure pour liquides », 1832. — Dér. :
empr. lui-même de l’annamite gong (relevé canonnade, 1552 (Rab.), d’après l’it. can-
en 1651 sous la forme goû). nonala ; canonner, vers 1500 (J. Marot) ;
it eme 1383 ; canonnière, sens variés,
CANICHE, v. cane.
105 CAPE

CANON, terme de théologie, x111° ; cano- CANTON, xiv°, au sens de « coin d’une
‘nique, id.; canoniser, id. Empr. du lat. rue ». Empr. de l’a. pr. canton, dér. de
canon, canonicus, canonizare (ce dernier cant « bord », v. chant. Le sens de « sous-
créé en lat. eccl.) avec les sens développés division d’un arrondissement », 1789, est
dans le lat. eccl. (du grec kanôn « règle », également empr. du prov.; comme nom
kanonikos « conforme à la règle », kano- des petits Etats de la Suisse, 1467, par
nizein « régler »). — Dér. : canonisation, contre, canion est empr. du lomb. cantone
id. ; canoniste, xIve. « région, surtout dans les montagnes » ; il
a été apporté de l’Italie par les représen-
CANON, terme de géographie. Fin xixe. tants de la ville de Fribourg. — Dér. :
Empr. de l’esp. du Mexique cañén (aug- cantonal, 1829 ; cantonner, xive, canton-
ment. de caño « tube », v. cannetille) ; dit nement, fin xvir® (Saint-Simon) ; canton-
d’abord du cañon du Colorado. nier, xvir1e ; cantonnière, xvI°.
CANONICAT, 1611. Empr. du lat. mé- CANTONADE, 1694. Empr. du prov.
diéval canonicatus (de canonicus « cha- cantonada « angle d’une construction ». Le
noine »). À supplanté le fr. archaïque cha- mot a probabl. été introduit en fr. par
noinie, XII°. une des nombreuses troupes qui ont joué
CANOT, 1614 (antér. canoa en 1568, temporairement dans le Midi.
canoe en 1584, fém., encore en 1690 chez
Furetière). Empr. de l’esp. canoa, empr. CANULE, vers 1400. Empr. du lat. can-
lui-même du caraïbe des Antilles canaoa. nula (de canna, v. canne). — Dér. : d’après
Récemment repris, en 1887, de l’anglo- le sens vulgaire de « personne ennuyeuse »,
américain canoë (qui vient lui-même du par allusion à l’emploi de la canule dans
fr.), pour désigner une espèce de canot de les lavements, cf. l'expression faire l'effet
sport très léger. — Dér. : canotier, fin d’un lavement, au sens d’ « ennuyer »,
XVI. canuler, 1830 ; canulard, début xxe.
CANT, 1822. Empr. de l’angl. cani, CANUT, 1839. Empr. du parler lyon-
propr. « jargon d’une classe qui affectait nais, mais de formation incertaine ; peut-
un grand formalisme », d'où « affectation, être dér. de canne ; mais la formation et
hypocrisie »: ce mot, qui a signifié autre- le développement du sens sont obscurs.
fois « complainte de mendiants », vient
CAOUTCHOUC, 1736. Empr. d’une lan-
probabl. du lat. cantus « chant », auquel
aura été donné ce sens spécial en parlant gue du Pérou, peut-être par l'intermédiaire
de l'esp. caucho. — Dér. : caoutchouter,
des moines mendiants. 1859 (écrit -oucter, en 1849 ; on a dit aussi
CANTABILE, 1757 (Diderot). Empr. de caoutchouquer, 1874).
l’it. cantabile, empr. lui-même du lat. de
basse ép. cantabilis, propr. « digne d’être CAP, « avant de navire et promontoire »,
célébré », pris au sens de « destiné à être 1387. Empr. du prov. cap, propr. « tête »,
chanté, semblable à un chant ». d’où nombreux sens fig. : «extrémité, etc. »,
v. chef.
CANTALOUP, 1791 (sous la forme -pe).
Peut-être tiré de Cantalupo, nom d’une CAP, dans de pied en cap, xiv® (Frois-
villa des papes aux environs de Rome, où sart), locution empr. du prov. de cap a pe
ce melon était cultivé ; toutefois le subst. (d'où de cap à pied, 1580, Montaigne).
est inconnu en it., et il y a dans l'Hérault CAPABLE, xiv°. Empr. du lat. de basse
un lieu Cantaloup, qui peut très bien avoir ép. capabilis « susceptible de » (de capere,
donné son nom au fruit. au sens de « comporter »); par suite a
CANTATE, 1709. Empr. de l’it. caniala signifié « qui peut contenir, susceptible
(de cantare « chanter »). de », au xvi° et au xviI® s. ; sens moderne,
xvi®. — Dér. Comp. : incapable, 1464.
CANTATRICE, 1762. Empr. de l’it. can-
latrice, empr. lui-même du lat. cantairiz. CAPACITÉ, 1372. Empr. du lat. capa-
cilas, dér. de capax « qui peut contenir,
CANTER, 1862. Empr. de l’angl. canlier, capable » (de capere, v. le préc.). — Comp. :
probabl. abréviation de Canterbury; dit incapacité, vers 1525.
. ainsi par comparaison plaisante avec l’al-
lure lente des chevaux menant ou portant CAPARAÇON, 1498. Empr. de l’esp. ca-
les pèlerins de Saint-Thomas de Canter- parazén, probabl. dér. de capa « manteau »;
bury. comp. le prov. qui possède le simple capa-
CANTHARIDE, xive. Empr. du lat. rasso «sorte de manteau » (d’où le fr. cape-
cantharis, -idis (du grec kanlharis). rasse, 1863, « petit manteau de canotier »).
— Dér. : caparaçonner, 1546.
CANTILÈNE, 1512. Empr. de l’it. can-
tilena, empr. lui-même du lat. cantilena CAPE, xv®, « manteau à capuchon ».
« chanson » (de canlilare « chantonner »). Empr. de l'a. pr. capa, même sens; au
xvi® s., désigne la cape espagnole, d’après
CANTINE, 1680. Empr. de l’it. canlina l'esp. capa, v. chape. La locution sous cape
« cave, cellier », probabl. dér. de canlo est une réfection de sous chape, encore
« coin », pris au sens de « réserve », V. Can- chez Molière, Tartufe, 1, 1 (attestée au
ton. Dér. : cantinier, 1762. moyen âge sous la forme sous cape, mais
CANTIQUE, vers 1120. Empr. du lat. dans des textes picards). — Dér. : capot,
canticum (de cantus « chant »), avec le sens 1576 (au sens de « sorte de cape », aujour-
pris par ce mot dans le lat. eccl. d'hui disparu), cf. it. cappoiito. Du sens de
CAPE 106

ce mot en langage de marine : « sorte de CAPITAN, 1637. Sorte de matamore de


tambour d'escalier » est issu capot (des la comédie it., empr. de l’it. capitano,
automobiles) ; capote « sorte de manteau », propr. « capitaine », déjà empr. depuis la
1688, dér. de capot au premier sens; fin du xv® s. avec ce dernier sens.
décapotable (d’une auto), 1929 ; capeline,
1367 («armure de tête », encore au xv® 5.); CAPITATION, 1587. Empr. du lat. de
décaper, terme scientifique, 1742, par basse ép. capitatio « impôt par tête » (de
comparaison des dépôts qu’on enlève caput « tête »).
d’une surface métallique avec une cape.
CAPITEUX, xive. D'abord « obstiné »,
CAPE, 1529, terme de marine, propr. d’où le sens moderne, attesté depuis 1740,
« grande voile du grand mât », d’où les sort par une évolution ininterrompue dans
locutions mettre à la cape, etc. Empr. du le fr. même. Empr. de l’it. capitoso.
normand cape, propr. « manteau », v. le
préc. De là le verbe capéer, 1573, ou ca- CAPITONNER, 1863 (une première fois
peyer, 1690, « tenir la cape ». en 1546, chez Rab.). Dér. de capiton,
1564, empr. de l’it. capitone « sorte de soie
CAPÉER, v. le préc. grossière », propr. « grosse tête ».
CAPENDU, 1423 (texte normand). Éty- CAPITOUL, 1389. Empr. du prov. capi-
mologie douteuse. Le nom de lieu Capendu, toul, empr. du lat. capilulum, d’après le
chef-lieu de canton de l'Aude, ne va pas sens pris en lat. eccl. de « chapitre, assem-
avec l’origine du premier texte. Les formes blée de religieux ». — Dér. : capitoulat,
pommes de carpendu ou de couripendu du 1567.
XVIe s., à côté de pommes de capendu, pa-
raissent être des étymologies pop. CAPITULAIRE, xi1e. Empr. du lat.
médiéval capilularis (de capitulum « cha-
CAPHARNAÜM, xvire. Tiré du nom de pitre d’un ouvrage »).
lieu Capharnañüm (ou Capernaüm), en Ga- CAPITULE, terme de liturgie, 1721.
lilée, auprès du lac de Génézareth, où Jésus Empr. du lat. médiéval capitulum « court
résidait souvent et où son retour attira passage de l’Écriture ».
un jour tant de personnes devant sa mai-
son que « l’espace devant la porte ne pou- CAPITULE, terme de botanique, 1732.
vait plus les contenir », Marc, II, 2. Le Empr. du lat. capitulum « petite tête ».
point de départ de cet emploi fig. est dans
la famille du berrichon caforniau « cabinet CAPITULER, xive (Oresme). Jusqu'au
de débarras » très répandue dans les patois début du xvrre s., surtout « faire une con-
et qui est le résultat d’une contamination vention »; sens moderne au XVIe s., propr.
de fourneau avec caveau, caverne. La res- « se rendre suivant convention ». Empr. du
semblance phonétique avec le nom de la lat. médiéval capitulare « faire une conven-
ville a aidé à substituer celui-ci à la forme tion » (de capitulum « chapitre », d’où
primitive. « clause »). — Dér. : capitulation, xvie,
d’abord « convention », conformément au
CAPILLAIRE, adj., 1314 ; non de plan- sens du verbe; s’est maintenu au plur.
te, xvie (Paré). Empr. du lat. capillaris, dans le langage politique pour certaines
aux deux sens (de capillus « cheveu »). — conventions jusqu’à ces dernières années;
Dér. : capillarité, 1820. capitulard, 1871 (Goncourt).
CAPILOTADE, 1555. Altération de ca- CAPON, 1808. Mot d’argot, d’abord
pirotade, 1588 (Montaigne), propr. « sorte « lâche », 1628, ensuite « écolier fripon »,
de ragoût », cf. « soupe mêlée de fromage 1690, empr. d’une forme occitanienne de
et autres friandises », Caseneuve ; sens chapon. — Dér. : caponner, 1701.
fig. dès le xvirie s. Empr. de l’esp. capiro- CAPONNIÈRE, 1671. Empr. de l’it. cap-
tada « ragoût fait avec des œufs, du lait poniera, qui vient lui-même de l’esp. capo-
et d’autres ingrédients », dér. de capirole nera, propr. « cage où l’on engraisse les
« mante ». La forme cabirotade, 1534 (Ra-
Chapons », appliqué par plaisanterie à
belais), est une autre altération de capi- l’abri appelé caponnière.
rotade.
CAPORAL, 1552 (Rab.). En outre cor-
CAPITAINE, xirie. Empr. du lat. de poral, forme altérée sous l'influence de
basse ép. capilaneus, adj. attesté seule- corps, au XVI® s. Empr. de l’it. caporale,
ment au sens de « capital » (de caput dér. de capo « tête », sur le modèle de petto :
« tête ») et qui a pu facilement être pris pettorale. — Dér. : caporalisme, 1870.
au sens de « chef ». A supplanté diverses
formes pop. chalain, -aigne, chevetain, CAPOT, terme de marine, v. cape.
-aigne. — Dér. : capitainerie, 1330, CAPOT, dans faire capot, v. capoter.
CAPITAL, xr1e Empr., comme adj., du CAPOT, terme de jeu, 1690, antér. dans
lat. capilalis (de caput « tête »). Le subst., être capot, faire qqn capot, 1642. Celui qui
terme de finance, date du xvre S.; capi- n’a pas fait de levée au jeu est dans un
tale « première ville d’un pays », 1509, extrême embarras, comme si on lui avait
d’abord ville capitale, 1420. — Dér. du jeté un capot (« manteau avec capuchon »)
substantif : capitaliser, 1820, capitalisa- sur la tête. L’all. kapult a été empr. du fr.
tion, 1829 ; capitaliste, 1759 (Rousseau), à l’époque de la guerre de Trente ans. —
plutôt empr. du néerl. kapilalist, dér. de Dér. : capote, terme de jeu, 1740.
kapital « capital » ; capitalisme, 1867. CAPOTE, sorte de manteau, v. cape.
107 CARACAL

CAPOTER, 1843. Probabl. dér. de capoi, ainsi appelée à cause de la forme de la


dans faire capot, 1752, terme de marine, fleur. Sens techn., xix°, par comparaison
altération, d’après capot (jeu) du prov. des objets désignés avec la fleur.
faire cabot, propr. « saluer » (cabot est un
dér. de cap « tête »), qui aura été employé CAQUER, fîin xive. Empr. du moyen
par plaisanterie par les marins. Devenu néerl. caken ; cette façon de conserver le
usuel dans le langage de l’automobile et de hareng paraît avoir été inventée par les
l’aviation (1903). — Dér. : capotage, 1922. Hollandais. Le verbe néerl. est dér. du
moyen néerl. cake « ouies du poisson »,
CÂPRE, xve. Empr. de lit. cappero, aujourd’hui kaak, et signifiait « couper les
lat. capparis (du grec kapparis). — Dér. : ouies d’un poisson ». — Dér. : caque, fin
câprier, 1553 ; câpron, 1642 (à cause de la xive (qui a donné par la suite au verbe la
saveur aigre de ce fruit). signification de « mettre en caque ») ; ca-
quage, 1730. — Comp. encaquer, vers 1600.
CAPRICANT, 1832. Dér. du lat. capra
par une comparaison avec les sauts de CAQUETER, 1466. Onomatopée, —
la chèvre. De 1589 jusqu’à la fin du Dér. : caquet, xve; caquetage, 1556 ; ca-
xviie on disait caprisant. La transforma- queterie, 1418 ; caqueteur, 1507.
tion de -isant en -icant est peut-être due
à une faute de lecture. CAQUEUX, v. cagot.

CAPRICE, 1565; capricieux, 1584. Em- CAR, conjonction. En outre quar, quer,
pr. de l’it. capriccio, capriccioso. Capriccio en a. fr. Lat. quärë « pourquoi » et « c’est
« frisson », au sens propre, encore usuel, pourquoi ». Le premier de ces sens est très
est un dér. de capo d’après le plur. capora. vivant dans l’a. pr. car, le deuxième vit
en fr. jusqu’au xvie s. Le sens nettement
CAPRICORNE, xr° (sens astronomi- causal, qui est le plus vivant en fr., appa-
que). Empr. du lat. capricornus, de même raît aussi en lat., dans les textes très pop.,
sens ; « coléoptère », 1753. dès le rer s. Au xvrre s. certains auteurs,
parmi lesquels Malherbe, avaient pris le
CAPRIN, vers 1240. Empr. du lat. capri- mot en grippe, mais l'intervention de Voi-
nus, dér. de capra « chèvre ». On a dit aussi ture le sauva. En a. fr. car est fréquemment
chevrin jusqu’au xvI®s. employé pour introduire un impér. ou un
CAPSULE, 1532 (Rab.). Empr. du lat. subj. de souhait.
capsula « petite boîte », dim. de capsa, CAR « véhicule », 1873. Empr. de l’angl.
v. caisse. car, empr. lui-même de l’anc. normand
CAPTER, xv® ; captateur, fin XVI° ; Cap- car, V. Char. — Comp. : auto-car, 1907.
tation, 1520. Empr. du lat. capiare «essayer Cf. aussi side-car, 1912, empr. de l’angl.
de prendre », ordinairement dans un sens (comp. de side « côté » et de car).
défavorable, capiator, capiatio ; employés CARABE, coléoptère, 1790. Empr. du
aussi dans le lat. juridique. Capier une lat. carabus (du grec karabos, esp. de
source, 1863, est une innovation du fr. crabe).
pour une acception techn.
CARABIN, 1808. « Étudiant en méde-
CAPTIEUX, 1382. Empr. du lat. captio- cine » en langue fam., extension de carabin
sus, dér. de captio « piège » (de capere de Saint-Côme, xvurre, « garçon de l’École
« prendre »). de Chirurgie (appelée Saint-Côme, du nom
du patron des chirurgiens) »; semble être
CAPTIF, 1488 ; captiver, vers 1410 ; cap- une altération d’escarrabin, 1521 (texte de
tivité, x. Empr. du lat. captivus (de Montélimar), « ensevelisseur des pestifé-
capere « prendre »), caplivare (de basse ép., rés », autre forme de escarabilh, etc., « sca-
et au sens fig. dans le lat. eccl.), captivilas. rabée », dit par dérision à cause du vête-
Captif a supplanté le mot de forme pop. ment noir de ces ensevelisseurs.
chétif, auquel les sens dér. de « miséra-
ble », etc., attestés de très bonne heure, CARABINE, xvre. Dér. de carabin, 1575,
ont fait perdre le sens de « captif », ce qui autrefois soldat de cavalerie légère, peut-
a entraîné le succès de capliver, caplivilé être le même mot que le préc. — Dér. :
- au détriment de chetiver, -ivelé. Capliver a carabinier, 1634.
perdu le sens propre de « retenir captif ».
CARABINÉ, 1864. Signifie « très vio-
CAPTURE, 1406. Empr. du lat. captura lent » dans la langue fam., par extension
(de capere « prendre », v. les préc.). — du sens de carabiner, 1771, « souffler par
Dér. : capturer, xvIe. bouffées », en parlant du vent, puis
« souffler violemment », 1783, propr. « se
CAPUCHON, 1542. Dér. de cape, d’après battre en carabin », 1611, c'est-à-dire « faire
l’it. cappuccio (de cappa, v. cape). — Dér. : feu, puis se retirer »; emploi étendu en
capuche, 1863; capuchonner, fin xvi® outre au xvire et au xvrr1e s. à des jeux de
(D’Aubigné), encapuchonner, 1582. cartes.
CAPUCIN, 1546 (Rab. : capussin; par- CARACAL, xvirre (Buffon). Semble
fois aussi capuchin, au xvie s.). Empr. de empr. de l'esp. caracal, d’origine orientale,
l’it. cappuccino (de cappuccio, v. le préc.) ; cf. le turc gara qüläq « oreille noire » (le
dit ainsi à cause du capuchon que portent caracal a en effet les oreilles noires) ; mais
ces religieux. — Dér. : capucinade, 1724 la voie de pénétration du mot n’est pas
(Le Sage) ; capucine, 1694, nom de plante, exactement déterminée.
CARACO 108

CARACO, 1774. Étymologie inconnue. raca. Caraque ne représente pas toujours


CARACOLER, 1642. Dér. de caracole, le même bâtiment et a pu, à diverses
1642, d’abord caragol, 1600 ; caracol, 1611, époques, être repris à l’une de ces langues.
empr. de l’esp. caracol, propr. « limaçon », CARAT, 1355. Empr. du lat. des alchi-
v. escargot ; le mot esp. a été introduit mistes carralus (v. aussi it. caralo), empr.
notamment au sens spécial qu’il a reçu lui-même de l’arabe girât « petit poids »,
dans le langage de l’équitation, par com- notamment « 24° d’un denier »; ce mot
paraison des mouvements du cheval avec arabe vient du grec keration « 1/3 d’une
les spirales de la coquille de l’escargot. Un obole », propr. « gousse », et le grec paraît
autre emploi techn., escalier en caracol, devoir son sens au lat. siliqua « gousse;
1740, d’abord caracol, 1675, est également 24° d’un sou, 1/6 du scrupule ». L’esp.
empr. de l’esp., où il a déjà ce sens; le quilate vient aussi de l’arabe.
mot a pénétré en fr. par l'intermédiaire
des Flandres. CARAVANE, xrr1e (carvane et carevane ;
parfois appliqué à une escadre). Empr., à
CARACTÈRE, xine; caractéristique, l’époque des croisades, en Asie Mineure,
1550. Empr. du lat. character (du grec
kharaklér « signe gravé », de kharaltein
du persan karwân. Mot devenu européen,
sous la forme fr.
« graver ») et de l’adj. grec kharakitéristikos.
Le sens de « trait distinctif » a été empr. CARAVANSÉRAIL, 1673. Altération,
directement du grec au xvi® s., d’où les d’après sérail, de caravanserai, 1686, cara-
sens modernes. Caractéristique, subst., XVIIIe vansera, 1512, encore chez Montesquieu,
(Diderot), vient peut-être de l’angl. — empr. du persan karwän-serai « maison
Dér. de caracière : caractériser, 1512 (ou de caravane », v. le préc.
bien du grec kharaktérizein).
CARAVELLE, 1433. Empr. du port.
CARAFE, 1558. Empr. de l’it. caraffa, caravela ; celui-ci dérive de cdravo (esp.
empr. par l'intermédiaire de l’esp. garrafa, cärabo), lat. de basse ép. (vrre, Isidore de
de l’arabe gharräf « pot à boire », courant Séville) carabus « canot », V. gabarre. Phi-
aujourd'hui dans l'Afrique du Nord. — lippe le Bon de Bourgogne fit construire
Dér. : carafon, 1677 ; on trouve en 1680 la première caravelle française à Sluis par
carafon « grande carafe », qui est empr. de des constructeurs portugais.
l’it. caraffone.
CARBONARO, 1820. Empr. de lit. car-
CARAMBOLER, 1811. Dér. de caram- bonaro, propr. « charbonnier », nom pris
bole, 1793, peu usité aujourd’hui, « sorte par les carbonari, en souvenir, dit-on, de
de jeu de billard, bille rouge à ce jeu », conspirateurs qui se réunissaient dans des
emploi métaph. de carambole « fruit du
cabanes de charbonniers. — Dér. : carbo-
carambolier », fruit qui a la forme d'une narisme, 1829.
boule orangée; carambole est empr. de
l’esp. carambola, empr. lui-même du malais CARBONE, 1787 (G. du Morveau) ; car-
karambil. — Dér. : carambolage, 1829. boniser, 1803 (-é, 1799); carbonisation,
1789 (Lavoisier). Formés sur le lat. carbo,
CARAMBOUILLE, xxe. Terme d'’argot, carbonis « charbon ». De carbone on a tiré
désignant l’escroquerie qui consiste à se ensuite carbure, 1795.
faire livrer des marchandises et à les vendre
sans les payer. Semble une altération de CARBONNADE, 1539. Empr. de l'it.
carambole « vol à l’étalage », empr. de l’esp. carbonata, dér. de carbone « charbon ». On
carambola « tromperie », même mot que a dit d’abord charbonnée, xx1°, encore dans
celui de l’article préc. — Dér. : caram- les patois.
bouilleur, xxe.
CARBURE, 1787. Dér. sav. du radical
CARAMEL, 1680. Empr. de l'esp. ar- du lat. carbo « charbon ». — Dér. : carbu-
chaïque caramel, xvni°, aujourd’hui cara- rant, 1907 ; -ation, 1867; -ateur, id.
melo, altération du lat. médiéval canna-
mella « canne à sucre » (représenté déjà CARCAJOU, 1751. Empr., par l’inter-
par cañamiel, de même sens), par croise- médiaire du fr. du Canada, d’une langue
ment avec caramillo « roseau », v. chalu- indigène non déterminée.
meau. — Dér. : caraméliser, 1832. CARCAN « sorte de collier », xur°. En
CARAPACE, 1688. Empr. de l'esp. ca- outre charchan(t) au moyen âge. Même
rapacho ; on propose un radical préroman mot que le lat. médiéval carcannum, a. pr.
kar- « écale », karr-, qui, combiné avec carcan, d’étymologie obscure.
différents suffixes, vit dans les langues CARCAN « mauvais cheval », vers 1860.
ibéro-romanes et en occitan. Très vivant dans les parlers provinciaux,
CARAPATER probabl. emploi fig. du préc.
(se), 1876. Mot argoti-
que, dér. de païle, dont la 1r'e partie est CARCASSE, 1550 (Ronsard). D'abord,
l'arg. se carrer « se cacher » (celui-ci dér. au x111€ et au XIV® S., charcois, encore usité
du m. fr. carre « coin », dér. de carrer). dans l'Ouest, et carcois. Forme empr. d’un
dial. non déterminé et d’étymologie dou-
CARAQUE, xure (Ph. de Novarre : teuse. L’it. carcassa vient probabl. du fr.
«un petit vaisseau que les Sarazins apelent Un emploi fig. de carquois (charcois pou-
en lor lengage karaque »). Probabl. empr. vant être altéré d’après char « chair »)
de l'arabe karrâka « brûlot, bâtiment lé- n’est pas impossible. — Dér. : se décarcas-
ger », d’où aussi l’it. caracca et l’esp. car- ser, 1821.
109 CARILLON

CARCINOME, sorte de cancer, 1545, CARÈNE, 1552 (une première fois en


Empr. du grec karkinôma « sorte de can- 1246, en outre, du x1v®e au xvi® s., carine
cer » (de karkinos,) v. cancer. d’après le lat.) Empr. du parler de la
région génoise, carena, latin carina, « id. »,
CARDAMINE, 1545. Vulgairement «cres- propr. «coquille de noix ». — Dér. : caréner,
son des prés ». Empr. du lat. cardamina (du 1643 ; carénage, 1678.
grec kardaminé, de kardamon « cresson »).
CARESSER, xv°; caresse, 1545, Empr.
CARDAMOME, nom de plante, x1re. de lit. carezzare, propr. « chérir » (dér. de
Empr. du lat. cardamomum (du grec kar- caro « cher »), carezza.
damômon), v. amome.
CARET, « sorte de dévidoir », 1382.
CARDE, xur1°, « outil à carder ». Empr. Empr. du picard, propr. « petit char »,
des patois du Nord, où l'industrie textile dér. de car « char ».
florissait dès le haut moyen âge. La forme
et le genre du mot doit s’expliquer comme CARET, « sorte de tortue», 1667. Empr.
plur. collectif *carda, l’outil étant toujours de l’esp. carey, qui désigne à la fois cette
comp. de plusieurs têtes de chardon, mais tortue et surtout son écaille, très probabl.
il n’est pas impossible qu’il soit dér. du empr. d’une langue caraïbe.
verbe carder. Au sens de « cardon » carde
(depuis Rab.) est empr. du prov. cardo. Cf. CAREX, 1794. Empr. du lat. carex.
de même esp. carda « cardère, carde », it. CARGAISON, 1554 (sous la forme -qu-).
cardo « cardère, carde, cardon » ; tous ces Empr. du prov. cargazon, dér. de cargar
sens sont en effet connexes. V. chardon. — « charger ».
Dér. : carder, x1r1°, Cardeur, id., recarder,
1549; l’a. fr. dit plutôt peigner, peigneur, CARGUER, 1611. Empr. du prov. car-
et aussi charpir. gar, avec le sens spécial qu'il a pris
dans le langage de la marine. — Dér. :
CARDÈRE, 1778. Dér. sav. du lat. car- cargue, 1634 (ou empr. du prov. carga).
duus, formé probabl. par Lamarck dans
sa Flore Française ; v. le préc. CARGO, 1907. Abréviation de cargo-
boat, 1887, mot angl. comp. de cargo
CARDIAQUE, 1372. Empr. du grec kar- « charge » (empr. de l'esp.) et de boat
diakos, de kardia « cœur » (le lat. cardiacus « bateau ».
a un autre sens). .
CARI, 1602. Empr. du tamoul (langue
CARDINAL, adj., 1279. Empr. du lat. hindoue) kari. L’angl. l’a emprunté sous la
class. cardinalis, dér. de cardo, -inis «gond, forme curry, laquelle se rencontre aussi
pivot », d’où « point principal »; cardinal quelquefois en franc.
vient du lat. eccl. dans vertus cardinales.
CARIATIDE, 1657. Empr. de l’it. ca-
CARDINAL, subst., 1490 (une première riatidi, du lat. caryatides, plur. (du grec
fois vers 1270, en outre au moyen âge char- karyatides, id., propr. « femmes de Carye,
denal, -onal, etc.). Empr. du lat. eccl. du Péloponèse) », cf. Vitruve, De Archilec-
moyen âge cardinalis, employé pour diffé- iura, I, 1, 5, qui dit que ces femmes furent
rentes dignités de l'Église, puis spécialisé. emmenées captives après la destruction
— Dér. : cardinalat, 1508, d’après le latin de leur ville qui avait soutenu le roi des
médiéval cardinalatus. Perses, et que les architectes les représen-
CARDINALICE, 1829. Empr. de lit. tèrent, à la place de colonnes. Une pre-
cardinalizio, dér. de cardinale, v. le préc. mière fois colonnes: caryaltides, 1547, dans
une traduction de Vitruve, empr. directe-
CARDIOGRAMME, 1922. Comp. savant ment du lat.
du grec kardia « cœur » et de gramma
CARIBOU, 1607. Empr. de l’algonquin
« écriture ».
(Canada), cf. kalibu de la tribu des Mic-
CARDITE, « maladie », 1818. Dér. sav. macs.
du grec kardia « cœur ». CARICATURE, 1740. Empr., comme
CARDON, 1507. Empr. du prov. cardon, terme de peinture, de l’it. caricaiura, dér.
propr. « chardon », v. ce mot et carde. Le de carricare « charger ». — Dér. caricaturer,
sens de « cardon » qu’a pris le prov. explique 1801 ; caricaturiste, 1831.
que chardon, dans de nombreux parlers CARIE, 1537. Empr. du lat. caries. —
méridionaux, ait été remplacé par caussida, Dér. : carier, xvi® (Marot).
propr. « chardon aux ânes ».
CARILLON, 1345 (sous la forme quarel-
CARÊME. Lat. pop. *quarësima, forme lon). Forme altérée de carignon (quarre-
altérée du lat. class. quadrägèsima (sous- gnon, x), lat. pop. *quadrini6, réfection,
entendu dies) « le quarantième jour (avant d’après les nombreux mots cormencés par
Pâques) », sens développé dans le lat. eccl., quadri-, cf. carrefour, du lat. de basse ép.
d’après le grec. eccl. lessarakosté (hémera).
quaternio, attesté au sens de « cahier »,
— Comp. — Carême-prenant, x11°; mi- propr. « groupe de quatre choses », d’où,
carême, 1251, fém., comme les noms de ici, « groupe de quatre cloches » ; cf. l’a. pr.
date composés avec mi. trinho(n) « carillon », lat. pop. “*frinio
CARENCE, 1452. Empr. du lat. médié- « groupe de trois choses ». Caregnon a
val carentia, dér. du verbe class. carere également en a. fr. le sens de « feuille de
« manquer ». papier pliée en quatre », d’où « lettre »,
CARILLON 110

et, d'autre part, désigne une mesure de CARNÉ, 1669 (La Fontaine). Dér. sav'
capacité. — Dér. : carillonner, xve ; caril- du lat. caro, carnis « chair ».
lonneur, 1601.
CARNET, v. cahier.
CARISEL, v. casimir. CARNIER, 1762. Empr. du prov. car-
CARLIN, « espèce de chien, au nez écrasé nier(r), dér. de car(n) « chair », V. carnas-
et au museau noir », 1803. Passe pour sière.
venir du surnom de l’acteur italien Carlo CARNIVORE, 1556. Empr. du lat. car-
Bestinazzi (1713-1783), qui eut une très nivorus (comp. de caro, carnis, « chair » et
grande vogue à Paris, en remplissant le de vorare « dévorer »).
rôle d’Arlequin, sous le nom de Carlin;
l’acception nouvelle est due à une compa- CAROGNE, xive (E. Deschamps). Forme
raison plaisante du museau du carlin avec normande ou picarde de charogne.
le masque noir d’Arlequin.
CARONADE, 1783. Empr. de l’angl. car-
CARLINGUE, 1600 (d’abord calingue en ronade, dér. de Carron, nom d'une localité
1382, callingue en 1576). Terme de marine d'Écosse, à l'Ouest et non loin d’Edim-
employé aujourd'hui dans l’aviation. De bourg, où les premières caronades furent
l’anc. scandinave kerling. fondues vers 1774.
CARMAGNOLE, 1791. Le nom du chant CARONCULE, xvi® (Paré). Empr. du
vient de celui du vêtement que portaient lat. caruncula, dér. de caro « chair ».
les révolutionnaires. Le mot est emprunté
du Dauphiné et de la Savoie, où carmagnole CAROTIDE, 1541. Empr. du grec karô-
désignait une jaquette de cérémonie des tides, plur., dér. du verbe karoun « assou-
paysans dès le xvrre s. Ce nom vient sans pir », parce qu’on croyait que la cause du
doute de Carmagnola, nom d’une ville située sommeil résidait dans les carotides.
dans une des régions les plus riches du CAROTTE, 1393 (Ménagier : garroite).
Piémont. Empr. du lat. carota (du grec karélon), v.
CARME, xr11e. Du nom du Mont Carmel panais. Dér. : carotter, 1° terme de jeu
(Liban), où se fonda l’ordre. — Dér. : en 1740, d’après jouer la carotte « jouer
carmélite, vers 1640. avec une prudence excessive », probabl.
d’après vivre de carottes ; 2° « subtiliser de
CARMIN, xrre. Croisement de l'arabe l’argent », en 1826, d’après tirer une ca-
girmiz (v. kermès) avec les représentants rotte ;d’où carottier, 1740 ; carotteur, 1798,
de minium (aussi lat. médiéval carminium). développements de sens parallèles à celui
du verbe.
CARMINATIF, xve. Empr. du lat. mé-
diéval carminativum, dér. de carminare, en CAROUBE, 1512; carouge, x11° (car-
lat. class. « carder », d’où en lat. médical roige): Empr. du lat. médiéval carrubia,
« nettoyer ». -ium, empr. lui-même de l’arabe kharroüba.
CARNAGE, 1546 (Rab.). Empr. du pi- — Dér. : caroubier, 1555.
card ou du normand, cf. a. fr. charnage, CARPE, poisson, 1260 (É. Boileau). Du
dér. de char, v. chair. latin de basse ép. carpa (vie s.). Le poisson
CARNASSIER, 1515. Empr. du prov. a probabl. immigré, avec le nom, d’un
carnassie(r), dér. de carnasso « viande en pays de l’Europe orientale, mais qu’on n’a
abondance » (de carn « chair »). pas encore pu identifier. Comp. all. Karp-
fen, russe karpü. — Dér. : carpeau, 1260 ;
CARNASSIÈRE, 1743. Empr. du prov. carpillon, 1579.
carnassiero, V. le préc.
CARPE, terme d'anatomie, xvie (Paré).
CARNATION, xve. Adaptation de l’it. Empr. du grec karpos, propr. « fruit, pro-
carnagione « chair », d'où « couleur de la duit » (développement sémantique obscur,
chair », notamment en peinture, dér. de si c'est un seul mot).
carne « Chair » (carnalio n’est attesté que
dans le lat. médical, au sens d’« obésité »). CARPETTE, 1582 (dans un tarif d’en-
CARNAVAL, xvi® (carneval, une pre- trée à Calais). Empr. de l’angl. carpet,
mière fois quarnivalle, 1268). Empr. de empr. lui-même de l’a. fr. carpile « sorte
lit. carnevale, propr. « mardi-gras », issu, de tapis », qui est empr. à son tour de l’it.
en Toscane, par métathèse, de carnelevare carpita, subst. tiré du part. passé de car-
« ôter la viande » (comp. esp. carnestolen- pire « saisir, effilocher », du lat. carpère,
das), anc. vicent. carlassare — carne las- id., v. charpie. À signifié alors, et jusqu’au
ciare, etc.). L’empr. du mot par le fr. est XIX° S., un gros drap rayé, dit aussi tapis à
emballer.
sans doute dû aux somptueuses fêtes de
l’époque de la Renaissance (la citation CARQUOIS, xive. D'abord iarchois, xrre,
isolée du xir1e s. provient probabl. de larquais, xin1° ; carquais, 1213. Empr. du
l'influence locale de commerçants toscans). lat. médiéval {arcasius (en grec byzantin
CARNAVALESQUE, 1867. Empr. de tarkasion), empr. lui-même de l'arabe fir-
l’it. carnevalesco, v. le préc. kâch (qui vient du persan ferkech). On
trouve en outre iurqueis, x11° (d’après
CARNE, 1837 (Vidocq). Mot d’argot, turc), encore usité au xve s., d’où l’it. {ur-
empr. du normand carne « charogne », casso (carcasso, qui a le même sens, vient
refait sur carnage. aussi du fr.).
IT] CARVI

CARRARE, 1771. Tiré de Carrare, nom CARROSSE, 1574. Empr. de l’it. car-
d’une petite ville toscane, célèbre par son (r)ozza, dér. de carro; parfois fém. d’après
marbre. lit. On trouve aussi carroche, fém., 1574,
d’après une autre forme it. car(r)occia. —
CARRÉ, adj. et subst. Lat. quadrälus, Dér. : carrossable, 1832 ; carrossier, 1589
part. passé de quadräre, propr. « rendre (écrit carrozzier) ; carrosserie, 1844.
carré ». — Dér. : carrée, xrr1°.
CARROUSEL, 1642 (-elle au xvie s.).
CARREAU. Lat. pop. *quadrellus, dér. Mot d'origine napolitaine. Dès le xvies. est
de quadrus « carré », v. cadre. Au moyen attesté à Naples un jeu dans lequel des
âge signifie aussi « sorte de flèche à quatre cavaliers lançaient des pointes de roseau
pans », d’où, au xvri° s., en langage poé- ou des balles de craie, jeu introduit d’'Es-
tique, « les traits de la foudre ». A reçu pagne, où il était d’origine mauresque. Ces
en médecine le sens spécial de «tuberculose balles de craie avaient la forme de tirelires,
des ganglions mésentériques », 1694, le lesquelles s’appelaient en napolitain caru-
ventre devenant aussi dur qu’un carreau siello (dér. de caruso « tête rasée », parce
(servant à paver). V. quadrille. — Dér. : qu’on donnait aux tirelires cette forme). Le
carreler, fin xr1°, carrelage, 1611, carre- jeu était appelé à Naples giucare a caru-
leur, 1463, décarreler, 1642 ; carrelet, 1360 sielli. Le mot passa en franç., où le rap-
(désigne alors une sorte de poisson), en DEPCREPEN avec carrosse fit redoubler
outre nombreuses acceptions techn. e -r-.
CARREFOUR. Lat. de basse ép. qua- CARRURE, v. carrer.
drifurcum, adj. qui a été pris substantiv. au CARTABLE, 1814, au sens moderne,
sens d’ « endroit où quatre chemins se anciennement « registre », 1636. Probabl.
croisent ». A. pr. caireforc. Le lat. class. empr. d’un lat. d'école *cartabulum « réci-
quadrüvium a laissé plus de traces : a. fr. pient à papier », dér. de charia.
carrouge (aujourd’hui dans les patois et
dans les noms de lieu), a. pr. cairoi. CARTE, 1393, au sens de « carte à
jouer »; du.sens propre « feuille de papier
CARRER. Lat. quadräre, au sens de épaisse » est issue l'expression (donner)
« donner une forme carrée », v. cadre. Le carie blanche dès le xvi® s. Empr. du lat.
développement sémantique particulier de charta, v. charte.— Dér. et Comp. : écarter,
se carrer, 1606, est dû au dér. carrure, propr. terme de jeu de cartes, 1611, probabl. sur
« forme carrée », attesté dès le xIII° s. au le modèle de l’it. scariare, de même sens,
sens moderne. It. quadrare, esp. cuadrar. d’où écart, id., écarté, 1829; encarter,
— Dér. : carrure, xr11e. — Comp. : contre- 1642 ; carto-, premier élément de mots
carrer, 1541. Pour le développement sé- sav. comp., tels que cartographie, 1832.
mantique, il faut partir de conire-carre
« résistance par voie de faits ou de paroles, CARTEL, 1527 (cartel de défi). Empr.
antithèse », vers 1470, ce qui est carré de l’it. cartello « affiche, placard », d’où
étant beaucoup plus difficile à ranger avec « lettre de défi », dér. de caria « papier,
d’autres objets que ce qui est rond; se écrit, etc. ». Repris sous la forme it. en
contrecarrer, terme de jeu de bouillotte est parlant d’artistes de cartello, de ou di primo
né d’un autre emploi fig. de carrer. cartello, 1868 (Th. Gautier; c’est-à-dire
« dignes de l’affiche », de est français pour
CARRICK, 1805 (Stendhal carick). l'italien di) ; t. politique, 1924.
Passe pour être empr. de l’angl., mais n’y CARTER, 1891. Empr. de l’angl. carier,
est pas attesté au sens du fr. Peut-être tiré du nom propre de l'inventeur, le méca-
issu de l’angl. carrick « espèce de voiture nicien J. H. Carter.
légère », empr. vers cette époque et qui
aura reçu le sens de « manteau de cocher ». CARTILAGE, 1429 ; cartilagineux, 1314.
Empr. du lat. cartilago, -aginosus.
CARRIÈRE « espace à parcourir dans
une course, etc. », 1534 (Rab.). Empr. de CARTON, 1578. Empr. de l’it. cartone,
l’a. pr. carriera, proprement «rue » (comme augm. de carla « papier ». — Dér. : carton-
l’a. fr. chariere « chemin pour voitures »), ner, 1751, cartonnage, 1785 ; cartonnerie,
du lat. de basse ép. via carraria, dér. de 1734 ; cartonnier, 1680.
-carrus, vV. char. L'it. carriera est aussi CARTOUCHE, « rouleau de carton con-
empr. de l’a. pr. C’est comme terme d’équi- tenant une charge à mitraille », fém., 1581
tation que carrière a été emprunté, les (alors -uche). Empr. de l’it. carluccia, dér.
autres sens se sont développés en fr. dès de carta, v. le préc. — Dér. : cartoucherie,
la fin du xvies. 1870 ; cartouchière, 1859. V. gargousse.
CARRIÈRE, d'où l’on tire la pierre, CARTOUCHE, « encadrement orné d’en-
x11e. Dér. très ancien du lat. quadrus « car- roulements », masculin, 1547 (alors -oche).
ré », au sens de « pierre carrée, moellon », Empr. de lit. cartoccio, propr. « cornet de
sens qui n’est plus attesté en fr., mais bien papier », v. les préc.
pour l’a. pr. cayre. — Dér. du même mot
lat. carrier, 1285. CARTULAIRE, 1340. Empr. du lat.
médiéval chariularium, v. chartrier.
CARRIOLE, xvie. Empr. de l’a. pr.
carriola, dim. de l’a. pr. carri, qui repré- CARVI, xive. Empr. de l'arabe kariwija
sente un lat. de basse ép. *carrium, dér. (qui vient du grec karon). Une première
de carrus. L'it. carriola vient probabl. aussi fois introduit en fr. sous la forme chervi(s),
de l’a-"pr: 1539, antér. escheruys, 1409, déjà dans le
CARVI 112

Capitulare de Villis (fin vire s.) sous la CASIMIR, sorte de drap, 1791 ; altéra-
forme carvita ; l’esp. chirivia doit venir du tion, d’après le nom propre Casimir, de
fr. Cassimere, nom angl. de la province de
CARYOPHYLLÉE, 1694. Empr. du lat. Kashmir, d’où cette étoffe a été d’abord
des botanistes caryophyllata, dér. du lat. tirée.
caryophyllon (du grec kar-, qui signifie CASINO, 1740 (De Brosses). Empr. de
« giroflier ») ; dit de l’œillet et des fleurs l’it. casino, dim. de casa « maison », au sens
dont le pétale est terminé par un onglet de « maison de plaisance, de jeux ». Au
en forme de clou de girofle. XVIIIe s., francisé aussi en casin.
CAS, vers 1250. Empr. du lat. casus, au CASOAR, 1733, antér. gasuel, 1694;
sens d’ « événement, circonstance », propr. casuel, 1677. Empr. du malais kasuvari,
« chute ». par l'intermédiaire du lat. des naturalistes
CAS, terme de grammaire, xrr1° (d’abord hollandais casoaris, 1631 (d’où le hollan-
case). Empr. du lat. grammatical casus qui dais kazuaris) ; casuaris, 1690, a été con-
traduit le grec piôsis « chute », d’où « ter- servé par Linné.
minaison ». CASQUE, 1591. Empr. de l'esp. casco,
CASANIER, 1552. Empr. de l’esp. anc. propr. « éclat, tesson », d’où « casque »
casañero, attesté dès le xvie s. L'a. fr. (pour la cause de l’empr., v. morion), tiré
casenier, 1315, dit de marchands italiens du verbe cascar « briser », lat. pop. *quas-
résidant en France, est empr. de l’it. casa- sicäre, V. casser. — Dér. : casqué, 1747
niere « prêteur d'argent », de casana (Luc- casquette, 1823.
ques) « boutique d’un prêteur d’argent ». CASQUER, 1836. Terme pop. d’origine
CASAQUE, 1413 ; casaquin, 1546. Empr. argotique ; empr. à l’it. cascare « tomber »
du persan kazagand « esp. de jaquette ». (v. cascade), qui a pris en argot le sens de
L'élément -and a été pris pour un suff. et « tomber dans un piège », puis de « payer ».
on en a tiré un simple casaque. L’it. casacca, CASSE, v. casserole.
esp. casaca viennent probabl. du fr.
CASSE, 1675, terme d'imprimerie. Em-
CASBAH, 1845 (en outre casauba). pr. de l’it. cassa, propr. « caisse », v. châsse.
Empr. de l'arabe qacaba « forteresse »,
prononcé au Maghreb gacba; cf. l’esp. CASSE, « fruit du cassier », xive. Empr.
archaïque alcazaba, de même sens. du lat. cassia (du grec kassia). — Dér. :
cassier, 1512.
CASCADE, 1640 ; cascatelle, 1740 (De
Brosses). Empr. de l’it. cascaia (dér. de CASSER. Lat. quassäre « secouer forte-
cascare « tomber », lat. pop. *casicare), cas- ment », d’où « endommager, briser ». Plus
catella, Empr. probabl. au sens de « chutes employé au Nord qu’au Sud du territoire
d’eau artificielles ». — Dér. : cascader, gallo-roman (a. pr. cassar). It. squassare :
1864 (une première fois en 1771), terme « secouer », esp. cansar « fatiguer ». —
du langage pop., cascadeur, 1860. Dér. et Comp. : cassation, 1413 ; casse,
CASE, xrr1° (Rose). Empr. du lat. casa
1642, jusqu’au xrx® s. ne s’est employé que
« chaumière », v. maison. Au sens de « com-
dans le langage militaire au sens d’ «action
de casser un officier »; cassement, x111°;
partiment d’un échiquier, etc. », 1650,
casseur, 1552; cassis, « rigole », 1488; cas-
empr. de l’esp. casa (d’où aussi l’it. casa), son, 1359, cassonade, 1578 (BI), au xvrre,
propr. « maison », qui aura servi à traduire ordinairement casionade ; cassure,
l'arabe beil. — Dér. (de ce dernier sens ou 1375 ;
incassable, 1801; recasser, vers 1400 ;
de ses développements) : caser, 1669; ca- casse-noisettes, 1680 ; casse-noix,
sier, 1765. 1564 ;
casse-tête, 1690 ; casse-cou, 1718; casse-
CASÉEUX, 1786, en outre caseux, 1559 ; croûte, 1907 ; casse-pieds, 1960.
caséine, 1832. Dér. sav. du lat. caseus
« fromage ». CASSEROLE, 1583. Dér. de casse, 1393,
répandu dans les parlers septentrionaux,
CASEMATE, 1539 (Rab., 1546, écrit empr. de l’a. pr. cassa, rare aujourd’hui,
chasmale, d’après le grec khasma «gouffre »). d’un type caïlia, attesté dans une glose,
Empr. de l’it. casamatta, d’abord terme de au sens de « truelle, poêle », du grec kyd-
fortification, du grec chasmata « gouffre ». thion, dim. de kÿathos « écuelle » ; à l'étape
Le mot a passé aussi dans les autres langues *ciallia, la dissimilation a fait disparaître
européennes : all. Kasemaite, etc. — Dér. : le premier i.
casemater, 1578.
CASSETTE, 1348. Dim. de l’a. fr. casse,
CASERNE, vers 1540. D'abord « petite probabl. de provenance normande, du lat.
loge bâtie sur les remparts ou dans les capsa « petit coffre », v. châsse.
fortifications à l'usage de soldats qui mon-
tent la garde » (« ordinairement six », CASSIS, sorte de groseille, 1552. Pro-
Furetière), en outre « petite chambre pour babl. empr. du lat. cassia, le cassis ayant
loger les soldats qui sont en garnison », été employé au moyen âge comme substitut
1644 ; appliqué sous Louis XIV aux grands de la casse.
bâtiments, qu’on commençait alors à cons- CASSIS, « rigole », v. casser.
truire pour loger la garnison. Empr. du
Prov. cazerna, propr. « groupe de quatre CASSOLETTE, 1420. Empr. de l’a. pr.
personnes », lat. pop. *quaderna, altération casoleta « petite casserole », dim. de casola;
de qualerna. — Dér. : caserner, 1718, v. Casserole.
casernement, 1800, CASSON, CASSONADE, v. casser,
113 CATIMINI

CASSOULET, fin xix°. Empr. du lan- CATALYSE, 1838. Empr. de l’angl. ca-
guedocien cassoulet, propr. « plat de grès » talysis (du grec katalysis, propr. « action
où on prépare ce ragoût, dim. de cassolo de dissoudre ») ; le mot a été en effet créé
« terrine » qui est un premier dim. de casso en 1836 par le chimiste anglais Berzelius.
(a. pr. cassa), v. casserole. CATAPLASME, 1390. Empr. du lat.
CASTAGNETTE, 1606 (1582, cascagnet- cataplasma (du grec kataplasma « emplà-
te). Empr. de l'esp. castañeta, dim. de cas- tre, metc).
taña « châtaigne », les castagnettes ayant CATAPULTE, xiv°. Empr. du lat. cata-
une forme de coque de châtaigne. pulta (du grec calapallés).
CASTE, 1676. Empr. du port. casia, CATARACTE « chute d’eau », 1539.
fém. pris substantiv. de l’adj. casio « chaste, Empr. du lat. cataracta (du grec kata-
pur »; les voyageurs créèrent ce mot au raktés).
xvi®s. pour désigner les castes de la société
hindoue. CATARACTE, terme médical, xve. Em-
ploi fig. du lat. caiaracia d’après le sens
CASTEL, fin xvrie (Saint-Simon). Empr. de « barrage, herse ou treillis gardant une
par plaisanterie du prov. castel « château ». porte », v. le préc.
CASTOR, 1135. Empr. du lat. castor (du CATARRHE, xve. Aux xvi® et XVIIe s.
grec kastôr). À supplanté l’a. fr. bièvre, surtout caterre. Empr. du lat. médical
encore dans les parlers, du gaulois *bebros, catarrhus (du grec kaïarrhos, propr. « écou-
cf. le nom de lieu Bibracte, etc., et dont lement »). — Dér. catarrhal, 1503 ; catar-
les représentants romans : anc. it. bevero, rheux, 1507.
anc. esp. befre, etc., soulèvent diverses CATASTROPHE, 1546 (Rab.). Empr. du
difficultés, parce que le mot a circulé avec lat. catastropha (du grec katastrophé, propr.
la peau de castor et la sécrétion appelée « renversement », d’où « bouleversement » ;
castoreum (xr11°, empr. du lat. médiéval) partic. « dénouement d’une pièce de
qui était employée en médecine. — Comp. :
théâtre »).
demi-castor, xvi1° (Racine), chapeau dont
le tissu contient environ moitié de peau de CATCH, 1948. Empr. de l’angl. catch
castor ; a pris le sens de « demi-mondaine » « saisir ».
dès 1859. CATÉCHISER, xiv®; catéchisme, id.;
CASTRAT, vers 1760. Empr. de lit. catéchiste, xvie. Empr. du lat. eccl. caie-
casirato, v. les suiv., le mot ayant été chizare, -ismus, -isia (du grec eccl. kalé-
empr. au xvir1® s. en parlant de chanteurs khizein, -khismos, -khistés, dér. de katékhein,
italiens. v. le suiv.).
CASTRER, fin xixe; castration, xXIv®. CATÉCHUMÈNE, xive. Empr. du lat.
Empr. du lat. castrare « châtrer », castratio. eccl. catechumenus (du grec katékhoumenos,
part. passif de kaïtéchein, propr. « faire
CASUEL, 1371. Empr. du lat. de basse retentir », d’où, en grec eccl., « instruire
ép. casualis, dér. de casus. de vive voix »).
CASUISTE, 1611. Empr. de l'esp. ca- CATÉGORIE, 1564 (Rab.) ; catégorique,
suisia, dér. du lat. scolastique casus « Cas 1532 (id.). Sens fig. développé en fr. Empr.
de conscience ». — Dér. : casuistique, 1845. du lat. philosophique categoria, categoricus
CATACLYSME, 1564 (Rab.). Empr. du (du grec katégoria « qualité attribuée à un
lat. cataclysmos (du grec kataklysmos, propr. objet », de katégorein au sens d’ « énoncer »,
katégorikos). — Dér. : catégoriser, 1338.
« inondation »).
CATGUT, 1871. Empr. de l’angl. caigul,
CATACOMBE, xur1°. Empr. du lat. caia- littéral. « boyau (gui) de chat (cat) ».
cumba (dans les inscriptions chrétiennes)
ou de l’it. catacomba, mot d’origine incer- CATHÉDRALE, 1680. Adj. pris subs-
taine ; paraît être une forme altérée de tantiv. ; antér. église cathédrale, vers 1180.
*catatumba, propr. « tombe souterraine », Cathédral est empr. du lat. médiéval cathe-
mot qui a pu être formé dans les milieux dralis, dér. de cathedra, propr. « siège »,
chrétiens avec le préf. grec kata et iumba v. chaire, d’où « chaire et fonctions épis-
« tombe », cf. aussi châlit, échafaud. copales » en lat. eccl. (v® s.).
CATAFALQUE, 1690. Empr. de lit. CATHODE, 18338. Comp. avec les mots
catafalco, v. échafaud. grecs kala « en bas » et hodos « chemin »
sur le modèle d'’électrode. — Dér. : catho-
CATALEPSIE, 1507 (sous la forme dique, 1900.
-epse) ; cataleptique, avant 1742 (Réau-
mur). Empr. du lat. médical catalepsis, CATHOLIQUE, x. Empr. du lat.
-plicus (du grec kaialépsis, propr. « action eccl. catholicus (du grec katholikos « uni-
versel »). — Dér. : catholicisme, xvi®;
de saisir », d’où « attaque » dans la langue
catholicité, fin xvi® (D’Aubigné).
médicale, -iikos).
CATIMINI, x1ve (elles font le catimini) ;
CATALOGUE, 1262. Empr. du lat. de d’où en catimini, xvi°. Mot dialectal, pro-
basse ép. catalogus (du grec katalogos «liste, babl. picard, signifiant propr. « chat », de
rôle »). — Dér. : cataloguer, 1801. cate et mini, autre forme de mine. Ce mot
CATALPA, 1783. Empr. de l’angl. ca- s’est fondu avec calamini (xvi®) « mens-
lalpa, xvine, lui-même empr. de la langue trues », pour calaménies, empr. du grec
des Indiens de la Caroline. kataménia, plur. neutre (de mên « mois »).
DICT. ÉTYM. 8
CATIN 114

CATIN, xvie (Marot). Hypocoristique de CAVALCADE, 1349 (au xv°® cavalcalie).


Catherine. Fréquent au sens de « poupée » Empr. de l’it. calvalcata, dér. de calvacare ;
dans le Centre et l'Ouest. v. chevaucher. La forme de suff. indique
CATIR, au moyen âge parfois « presser », que beaucoup des mots qui le présentent
surtout « (se) cacher », sens conservé au sont entrés en fr. par l’it. du Nord ; il y a
pronominal dans quelques parlers septen- eu aussi influence du prov. — Dér. : caval-
trionaux ; ne subsiste en fr. que comme cader, 1843.
terme techn. Lat. pop. *coaciire, dér. de CAVALE, vers 1560. Mot poétique. Empr.
coacius, part. passé de côgere « presser », de l’it. cavalla; v. jument.
propr. « rassembler ». Seulement fr. —
Dér. et Comp. : cati, 1694 (La Bruyère) ; CAVALIER, vers 1470, au sens moder-
décatir, 1754. ne ; 1546 (Rab., comme terme de fortifica-
tion) ; cavalerie, 1546. Empr. de l’it. cava-
CAUCHEMAR, 1564. Antér. cauchemare, liere dans presque tous ses emplois, y
fém., encore au xvi1® 5. ; en outre quauque- compris le sens de « gentilhomme », aujour-
maire, au xv° s. Comp. de l’impér. du verbe d’hui désuet, cavalleria ; chevalerie et che-
caucher « fouler, presser » (forme hybride, valier répondaient alors à d’autres notions,
née de la fusion de l’a. fr. chaucher et du ce qui explique l'emprunt.
picard cauquer, lat. calcäre « fouler », v.
côcher) et de mare, attesté dans un glos- CAVATINE, 1768. Empr. de l’it. cava-
saire latin-français où il traduit /amia tina, dér. de cavata « action de tirer avec
« sorte de vampire », empr. du moyen art un son d’un instrument » (de cavare,
néerl. mare « fantôme nocturne », cf. l’all. propr. « creuser », vV. Caver).
moderne Mahr « cauchemar », et l’angl. CAVE, adj., xitie. Empr. de l’adij. lat.
nighimare, de même sens. Cavus « Creux ».
CAUDAL, 1792. Dér. sav. du lat. cauda
« queue ». CAVE, subsi., xt. Empr. du lat. de
basse ép. cava, attesté au sens de « fossé »,
CAUDATAIRE, 1542. Dér. de cauda, fém. pris substantiv. de cavus, v. le préc.
fait d’après légataire, mandataire, etc. — Dér. caveau, xirI; caviste, 1832,
CAUSAL, vers 1680 (Bossuet). Empr. CAVEÇON, vers 1580. Empr. de l’it. dia-
du lat. causalis, id. lectal cavezzone, augment. de cavezza, de
CAUSALITÉ, 1488. Dér. sav. de l’adj. même sens, lat. pop. *capilia « ce qu’on
lat. causalis, attesté seulement comme ter- met autour de la tête », cf. lat. capitium
me grammatical, dér. de causa, v. le suiv. « ouverture supérieure d’une tunique par
où l’on passe la tête », v. chevet.
CAUSE, xrre. Empr. du lat. causa « cause
et procès ». — Dér. : causer, xr1°. CAVER, « creuser », xr11e. Empr. du lat.
cavare « creuser », v. cave. L'’a, fr. a dit
CAUSER, « s’entretenir familièrement », chaver, chever qui a disparu au profit de
Xi. Empr. du lat. causari, propr. « faire creuser, mais qui vit encore dans le Berry.
un procès, plaider », d’où le fr. a développé
le sens de « bavarder ». Causari, au sens de CAVER, terme de jeu, v. décaver.
« reprocher », est représenté par l’a. fr.
choser « gronder, blâmer », encore usuel CAVERNE, x1r° ; caverneux, xtr1e. Em-
dans quelques parlers septentrionaux. — pr. du lat. caverna (de cavus, v. les préc.),
Dér. causerie, 1555; causette, 1790; cavernosus.
causeur, 1534 (Rab.) ; causeuse, 1832. CAVIAR, 1553 (1432, cavyaire). D'abord
CAUSER, « être cause de », v. cause. caviai, 1552 (Rab.), forme usitée jusqu’à la
fin du xvirres. ; on trouve en outre cavial.
CAUSSE, 1791. Empr. du prov. du Sud- Empr. de l’it. caviale, empr. lui-même du
Ouest des Cévennes causse, propr. « terrain turc khävidr.
calcaire », lat. pop. *calcinus, dér. de calx,
calcis « chaux ». CAVITÉ, x (sous la forme caveté).
Empr. du lat. de basse ép. cavitas, dér. de
CAUSTIQUE, 1490. Empr. du lat. caus- cavus, V. Cave.
ticus (du grec kauslikos « brûlant », de
kaiein « brûler », v. cautère). — Dér. : CE, pronom invariable. Lat. pop. *ecce
causticité, 1752. hoc, v. ça et ici, a. fr. iço, ice et ço, Ce,
qui a éliminé ice au xve s. Devenu inac-
CAUTELEUX, xine. Dér. de caultèle,
centué, a été remplacé comme pronom
X11°, mot archaïque, empr. du lat. cautela accentué par cela, sauf dans quelques locu-
« prudence excessive » (de cautus « pru-
dent »). tions archaïques. Les parlers méridionaux
ont ako, pronom accentué (a. pr. aizo,
CAUTÈRE, xi1v*; cautériser, id. Empr. aisso et zo, so, en outre aquo, lat. pop.
du lat. de basse ép. cauterium, -izare (du *accu (m)hoc, v. celui). It. ciô. — Comp. :
grec kautérion, kautérizein, de kaiein « brû- ceci, xIV°, d’où ci, dans comme ci comme
sa v. caustique). — Dér. : cautérisation, ça, fin xix°; cela, x1ve, d’où ça, xvire.
CE, CET, CETTE, CES. En outre, formes
CAUTION, 1283 (Beaumanoir). Empr. avec i initial, disparues vers lé xrve s., v.
du lat. cautio, propr. « précaution », égale- le préc. Latin populaire *ecce istum, -a(m),
ment terme juridique, dér. du verbe cavere -08, -as. En a. fr. cest, cesie marquent géné-
« prendre garde ». — Dér. : cautionner, ralement la proximité en opposition à
1360 ; cautionnement, 1616. celui, etc. Le lat. class. avait possédé trois
115 CELUI

pronoms démonstr. : hic (qui se rapportait CEINTRER, v. cintrer.


à la 1'e personne), isie (pour la 2e personne),
ille (pour une personne ou un sujet sans CEINTURE. Lat. cinclüra. It. esp. cin-
rapport ni à la 1re, ni à la 2° personne). lura, centura. — Dér. : ceinturon, 1579;
Hic ayant été détourné de cet usage pour ceinturer, 1883 (déjà au xvie s.).
être employé comme pronom déterminatif CELA, v. ce.
(hic qui, au lieu de is qui), on fit appel à
iste pour combler la lacune, et, à la place CÉLADON, 1617 (D’Aubigné). Nom pro-
de celui-ci, on mit ipse, le pronom d'’iden- pre tiré de l’ Asirée de d’Urfé (1610), qui l’a
tité, quitte à lui substituer des formes de tiré lui-même des Métamorphoses d’Ovide.
renforcement comme meiipse et metipsi-
mus, v. même. C’est là l’état de la langue CÉLÈBRE, 1546 (Rab.); célébration,
à l’époque de Grégoire de Tours, qui em- xIIe ; célébrer, id. ; célébrité, 1295, au
ploie comme pronoms démonstr. isie, ipse, xir1e, « fête solennelle »). Empr. du lat.
ille, avec les nuances que nous avons indi- celeber, celebrare, celebratio, celebritas. Ce-
quées ; c’est encore celui de l'esp. (este, leber signifiait au sens propre « fréquenté »,
ese, aquel) et de l'Italie méridionale (esto, celebrare « visiter en foule » et celebrilas
esso, quello). Le fr., par contre, a renoncé « affluence ».
par la suite à cette distinction si subtile CELER. Aujourd'hui surtout de langue
au profit d’un système plus simple, qui ne écrite, propr. « tenir secret ce qu'on tient
comporte plus que rapprochement et éloi- à dissimuler », ce qui le distingue de cacher.
gnement (a. fr. cest, cel; fr. mod. celui-ci, Lat. céläre. Peu usuel dans les parlers gallo-
celui-là). La cause de cette transformation romans ; à celé, à l’encelé se dit dans le
est probabl. à chercher dans le fait que le Centre, au sens d’ « à l’abri (de la pluie) ».
francique, lui aussi, ne possédait que deux It. celare, esp. celar, surtout « surveiller ».
pronoms démonstr. Dans les Sermenis de — Dér. : déceler, xrrr° ; recéler, x11°, recel,
Strasbourg le pronom est encore ist; le c- id., recèlement, id., receleur, 1324.
a été ajouté plus tard par analogie avec
cil, où il était nécessaire, parce que le CÉLERI, 1656 (au xive s. scelereau, au
simple il servait de pronom personnel. xve scellerin). Empr. du lombard seleri,
Ce, xur° s., représente à la fois la réduction plur., forme correspondante à l’it. écrit
de cel (v. celui) et de cest devant consonne. sedano, lat. selinon (d’un mot grec qui dé-
L’a. fr. a possédé en outre un nom. (i)cist signe une sorte d’ache). Les parlers méri-
et un cas oblique (i)cestui, formé comme dionaux disent (l)api(t), lat. apium, v.
(i)celui, disparu au xvi® s., sauf comme ache, employé également par quelques par-
archaïsme et dans le parisien vulgaire stila, lers septentrionaux.
pronom. En a. fr. déjà, ces formes sont CÉLÉRITÉ, 1358. Empr. du lat. cele-
surtout adj., mais cependant assez souvent
ritas, dér. de celer « rapide ».
pronominales ; v. celui. La plupart des
parlers méridionaux disent akest(e) (a. pr. CÉLESTE, xi° (Alexis). Empr. du lat.
aicest et aquest). It. questo, lat. pop. ecce caelestis, dér. de caelum « ciel ».
islum.
CÉLIBAT, 1549. Empr. du lat. caeliba-
CÉANS, v. çà. lus, dér. de caelebs, -ibis « célibataire ». —
Dér. : célibataire, 1711.
CÉCITÉ, x1rre. Empr. du lat. caecitas,
dér. de caecus « aveugle ». A supplanté en - CELLIER. Lat. cellärium, dér. de cella,
ce sens aveuglement, encore usité au de même sens. It. cellaio, esp. arch. cillero.
XVIIIe S.
CELLULAR, 1904. Empr. de l’angl. cel-
CÉDER, 1377. Empr. du lat. cedere, lular, adj. pris substantiv., propr. « cellu-
propr. « (s’en) aller ». — Comp. : recéder, laire ».
1596.
CELLULE, 1429. Empr. du lat. cellula,
CÉDILLE, 1529 ; en outre, de 1611 à dim. de cella, au sens de « chambre »;
1642, cerille. Empr. de l’esp. cedilla, propr. terme scientifique depuis le XVIIIe 8. —
« petit c », pour désigner le signe orthogra- Dér. : cellulaire, 1743 ; celluleux, 1719;
phique empr. dès la fin du xv®s. cellulose, 1854.
CÉDRAT, 1680. En outre cedrac, 1701 CELLULOÏD, 1878. Empr. de l'anglo-
iac, 1600. Émpr. de l'it. cedralo, arbre el américain celluloïd; le celluloïd a été dé-
fruit, dér. de cedro, lat. citrus « citronnier ». couvert en 1869, aux États-Unis, par les
— Dér. : cédratier, 1823. frères Hyatt, et breveté en Angleterre
CÈDRE, x. Empr. du lat. cedrus (du en 1871; tiré de cellulose au moyen du
grec kedros). suff. -(o)id, v. -ide.
CÉDULE, vers 1180. Au moyen âge CELUI, CELLE, CEUX, CELLES. En
désigne une sorte d’écrit et est un terme outre, en a. fr., formes avec i initial dis-
juridique; aujourd’hui surtout terme ad- parues au xviie 8., v. ce. Lat. pop. *ecce
ministratif désignant les catégories servant illui (v. lui), ecce illa(m), -os, -as. Sur le
à classer la matière imposable, fin du sens en a. fr., v. ce. Celui a supplanté
xixe s. Empr. du lat. de basse ép. schedula l’anc. nom. cil, lat. pop. *ecce üllt et l’anc.
« feuillet », dér. de scheda « bande de pa- oblique cel, lat. *ecce illum, disparus au
pyrus ». — Dér. : cédulaire, fin x1x®°. xvi® s. Jusqu'à cette époque, à la fois
CEINDRE. Aujourd’hui surtout litté- pronom et adj. Les parlers du Midi disent
raire. Lat. cingère. surtout (a)kel (a. pr. aicel et aquel, formé
CELUI 116

avec la particule accu{m), de eccum + al- CENTAURÉE, x (en outre cenloire,


que). It. quello, esp. aquel. — Comp. encore au xviie s.). Empr. du lat centaurea,
celui-ci, 1372; celui-là, xv°; créés pour à côté de -eum (du grec kentaurié (forme
suppléer à la disparition de l'opposition ionienne d'Hippocrate), -rion, propr. « plan-
entre les formes ceft), etc., et celui, etc., te de Centaure », par allusion au centaure
v. ce. Chiron qui passait pour avoir connu les
propriétés des simples et notamment de
CÉMENT, 1611. Empr. du lat. caemen- la centaurée).
um « pierre non taillée, moellon », avec un
sens développé probabl. d’après ciment. — CENTENAIRE, 1390. Empr. du lat.
Dér. : cémenter, 1675 ; cémentation, 1578. centenarius.
CÉNACLE, vers 1240. Désigne d’abord CENTÉSIMAL, 1804. Dér. sav. du lat.
surtout la salle où eut lieu la Cène ; nom cenlesimus, V. centième.
d’un groupe littéraire, 1829. Empr. du lat.
cenaculum « salle à manger », dér. de cena, CENTIÈME. Lat. centèésimus. It. esp.
v. cène. centesimo.
CENDRE. Lat. cinèrem, acc. de cinis, CENTIGRADE, 1799. Formé avec les
cineris. It. cenere. — Dér. : cendré, xiv®; mots lat. centum « cent » et gradus « degré ».
cendreux, vers 1200 ; cendrier, x111°, « drap
contenant les cendres quand on coule la CENTON, 1580. Empr. du lat. cenio,
lessive », le sens moderne ne paraît pas propr. « habit fait de pièces rapportées ».
ancien ; Cendrillon, d’abord nom propre,
personnage d’un conte de fées de Per- CENTRAL, 1377. Empr. du lat. centralis,
rault (1697) v. le suiv. — Dér. : centraliser, 1794, cen-
tralisation, 1798, décentraliser, 1834, décen-
CÈNE, x11e. Empr. du lat. eccl. cena, en tralisation, 1829.
lat. class. « repas du soir ».
CENTRE, vers 1360. Empr. du lat. cen-
CENELLE, xr1e. Attesté sous les formes irum (du grec kentron, propr. « aiguille,
cenelle et cinelle dans les parlers septentrio- pointe »). — Dér. et Comp. : centrer, 1699 ;
naux. Etymologie incertaine, peut-être concentrer, 1611, concentration, 1753;
dér. du lat. acinus « baie d’une grappe ». concentrique, xiv® (Oresme); décentrer,
1841 ; égocentrisme, -iste, 1922, d’abord
CÉNOBITE, xive. Empr. du lat. eccl. termes de médecine mentale.
caenobita, dér. de coenobium « monastère »
(du grec koinobion « vie en commun »). — CENTRIFUGE, 1703; centripète, id. For-
Dér. : cénobitique, 1586. més avec les mots lat. cenitrum et fugere
CÉNOTAPHE, 1501. Empr. du lat. de « fuir », pelere « gagner ».
basse ép. cenotaphium (du grec kenolaphion, CENTUPLE, 1495. Empr. du lat. cen-
comp. de kenos « vide » et de taphos « tom- tuplus. — Dér. : centupler, 1542.
beau »).
CENTURIE, xri° ; centurion, xr1°. Em-
CENS, 1283 (Beaumanoir). Empr. du
lat. census « recensement, cens ». Des sens pr. du lat. centuria, propr. « groupe de cent
juridique et administratif ont été déve- citoyens », centurio, propr. « chef de cent
loppés en fr. au moyen âge et au xix®s. soldats ».
— Dér. : censitaire, 1740. CEP. Lat. cippus, propr. « pieu », d’où
CENSÉ, xvie. Part passé, fait sur le lat. «tronc d’arbre » ; a pris en fr. le sens domi-
censere « estimer, juger bon ». Signifie par- nant de « pied de vigne », mais les autres
fois « compté » au xvr1e s. — Dér. : censé- sens : « sorte d’entrave », au moyen âge
ment, 1863 (très répandu dans les parlers et jusqu'au xvi® s., « pièce de bois portant
populaires). le soc de la charrue », xve s., montrent que
ce sens n'avait pas fait disparaître celui
CENSEUR, x1v° (Bersuire, -or, en 1213). de « tronc, souche, pièce de bois ». Se pro-
Empr. du lat. censor, qui a déjà le sens nonce encore sè dans le Centre ; la pronon-
figuré de « celui qui blâme ». Sens admi- ciation sep est due à la graphie. — Dér. :
nistratif développé en fr. à partir du cépage, 1573 (Baïf) ; cépée, xr1°, d’après le
XVIIe $. — Dér. : censorial, 1762, d’après sens de « tronc ».
le latin censor.
CÈPE, 1798. Empr. du gascon cep,
CENSURE, 1387. Empr. du lat. cen- propr. « tronc », appliqué aux champi-
sura ; pour le sens fig. et le sens adminis- gnons en général, et au cèpe en partic.,
tratif, v. le préc. — Dér. : censurer, 1518, v. le préc.
censurable, 1656 (Pascal).
CEPENDANT, v. pendant.
CENT. Lat. centum. It. cenio, esp. ciento.
— Dér. centaine, xII° {cenieine), ou CÉPHAL(O)-. Premier élément de mots
plutôt lat. centèna, fém. pris substantiv. du sav. comp., tels que céphalopode, 1795,
distributif centenus, avec substitution de tiré du grec kephalé « tête », ou de mots
suff. en fr. ; centime, 1793, d’après décime. empr., tels que céphalalgie vers 1487 (sous
la forme -argie).
CENTAURE, x (en outre cenior,
1213 ; centaurus, xv® s.). Empr. du lat. CÉRAMIQUE, 1806. Empr. du grec
centaurus (du grec kentauros, être mytho- keramikos, dér. de keramon « argile », d’où
logique). Sens fig. au x1x° 5. « vase d'argile ». — Dér. : céramiste, 1836.
7 CÉSARIENNE

CERBÈRE, 1576. Nom propre, lat. Cer- CERNER. Peu usité avant le xvi® s.
berus (du grec Kerberos « chien à trois têtes Lat. circinäre « former un cercle » (d’où
qui gardait l’entrée des Enfers »). Dès le l'esp. cercenar « rogner, retrancher »). —
début, sens fig. Dér., d’après le sens de « cerner une noix » :
cerneau, XIII®.
CERCE, v. cercle.
CERTAIN. Lat. pop. *certänus, dér. de
CERCEAU. Lat. de basse ép. circellus certus « sûr », d’où aussi it. et esp. arch.
« petit cercle », dér. de circus, v. le suiv. cerlano, a. pr. certan. L’a. fr. a connu le
Esp. cercillo et zar- « boucle d'oreilles ». simple cert, qui n’a pas atteint le xvi®s.,
CERCLE. Lat. circülus, dér. de circus, cf. it. certo, esp. cierto, a. pr. cert. — Comp. :
propr. « cercle ». A. pr. cercle, celcle ; dans incertain, 1329.
le Centre et la région de la Suisse romande, CERTES. Lat. pop. ceriäs, fait comme
traces de cerce (attesté depuis 1823), cerche primaäs, a. fr. primes « premièrement », etc.,
(attesté depuis le xrr1° s., encore dans les au lieu du lat. class. certo.
dictionnaires comme terme techn.), de for-
mation mal éclaircie. — Dér. et Comp. : CERTIFICAT, 1380. Empr. du lat. mé-
cercler, xvi* (Marot), recercler, 1832 ; en- diéval certificatum, v. le suiv.
cercler, xr1° ; demi-cercle, 1377.
CERTIFIER, x. Empr. du lat. mé-
CERCUEIL. D'abord sarcou, sarcueu, diéval certificare (de cerlus, V. certain).
puis sarcueil, Xv° ; cercueil, 1564. Du grec
sarkophagos, nom d’une pierre dont on CERTITUDE, xive. Empr. du lat, de
fabriquait des cercueils parce qu’elle avait basse ép. certitudo, dér. de certus. — Dér. :
la propriété de consumer rapidement la incertitude, 1495.
chair. Le fr. a le mot en commun avec CÉRULÉEN, 1842. Dér. de cérulé, xvi°s.,
l’all. (Sarg) et le néerl. (zerk), tandis empr. du lat. caeruleus « bleu de ciel ».
qu’il manque aux autres langues romanes.
Ce mot est arrivé très anciennement, avec CÉRUMEN, 1726. Empr. du lat. médié-
d’autres mots eccl., comme samedi, all. val cerumen, dér. de cera « cire ».
Samstag, le long du Danube. D’autres
mots lat., comme locellus « coffret », qui CÉRUSE, xu1e. Empr. du lat. cerussa.
est conservé en Picardie, et vascellum, en
Lorraine et en Wallonie, auront désigné CERVEAU. Lat. cerebellum « cervelle »
des réceptacles moins somptueux que le (fréquent comme terme de cuisine, notam-
sarcophagos. Autres concurrents de cer- ment au plur.), dér. de cerebrum « cerveau ».
cueil en gallo-roman sont bière dans le D'une forme fém. cerebella, issue de ce
Centre, chässe dans l'Ouest, les types caisse plur., vient le fr. cervelle. Les deux mots
et caisse de mort dans le Midi et des repré- sont assez mal distingués en a. fr. La dis-
sentants de l’arabe tâboût dans le Sud- tinction n’existe actuellement que dans le
Ouest. langage scientifique et dans des locutions.
Cerveau est plus sav., cervelle plus pop.;
CÉRÉALE, 1790 (sens moderne, d’abord de là, la préférence de nombreux patois
adj., au xvie s.). Empr. de l’adj. lat. cerea- pour cervelle. It. cervello, a. pr. cervel et
lis, dér. de Ceres « déesse des moissons »; cervela. — Dér. : cervelet, 1611 ; décerveler,
déjà fig. en lat. au sens de « relatif au 1839 ; écervelé, xr1° ; l’a. fr. dit fréquem-
blé, aux moissons, etc. ». ment escerveler « faire jaillir la cervelle
hors du crâne ».
CÉRÉBRAL, xvie (Paré). Dér. sav. de
cerebrum « cerveau ». CERVELAS, 1653, antér. cervelat, 1552
(Rab.). Empr. de l'it. cervellato (dér. de
CÉRÉMONIE, x11°; cérémonial, x1v°. cervello), d'origine milanaise, cf. la défini-
Empr. du lat. caeremonia « caractère sa- tion de certains dictionnaires italiens :
cré », d’où au plur. « cérémonies », caere- « sorte de saucisse à la milanaise, faite de
monialis (créé à basse ép.). Sens fig. du viande et de cervelle de porc ».
subst. au xvie s., de l’adj. au xvrr*. ---
Dér. : cérémonieux, Xv=°. CERVICAL, xvie (Paré). Dér. sav. du
lat. cervit, -icis, « nuque ».
CERF. Lat. cervus. — Comp. : cerf-
volant, 1381. V. chat, loup. CERVOISE. Du gaulois cervesia. Esp.
caerefolium (du grec cerveza « bière ».
CERFEUIL. Lat.
khairephyllon). It. cerfoglio. CÉSAR, 1488. Tiré de (Jules) César,
nom que prirent ensuite le descendant de
CERISE. Lat. pop. *cerésia, plur. neutre
pris substantiv., issu de *ceresium, lat. J. César, le premier empereur, Auguste, et
les successeurs de celui-ci. — Dér. : césa-
impérial cerasium, lat. class. cerasum (du rien, fin xix°, au sens de « partisan du
grec kerasion « cerisier » et « cerise »). césarisme »; césarisme, 1850 (créé par
— Dér. : cerisaie, 1397 ; cerisier, x11°.
Romieu, administrateur sous Napoléon III,
CERNE. Sens restreint aujourd’hui ; au communication de M. W. Kaegi).
moyen âge et jusqu'au xvii® s. « cercle ».
Lat. ctreinus « compas, cercle ». It. cercine, CÉSARIENNE, opération chirurgicale,
avec changement de la terminaison, « bour- xvie (Paré : enfantement césarien). Dér.
relet qu’on met sur la tête pour porter des sav. du lat. caesar «enfant tiré par incision
charges ». du sein de la mère » (de caedere « couper »).
CESSER 118

CESSER. Lat. cessare, fréquentatif de CHAGRIN, sorte de cuir, xvi® (en outre
cedere, V. céder, « tarder, traîner en lon- sagrin). Empr. du turc çâgri (qui se trouve
gueur », d’où « cesser de » (avec l’infinitif). chez Buffon), altéré par croisement avec
Transitif de bonne heure en fr. It. cessare, grain ; souvent écrit chagrain au xvire s.
esp. cesar. — Dér. et Comp. : cessation, L'it. zigrino vient du fr. — Dér. : chagriner
1377 (Oresme); cesse, xrI°; incessant, « travailler le chagrin », 1700.
1552.
CHAHUTER, 1821. Mot de formation
CESSION, xrr11°. Empr. du lat. juridique onomatopéique ; on trouve déjà cahu et la
cessio, dér. du verbe cedere. variante cafu dans un texte liégeois de
1757, d’où chahut, 1821 ; chahuteur, 1867.
CESTE, xve. Empr. du lat. caestus,
dér. de caedere au sens de « frapper ». CHAI, 1611 (Cotgrave : chaiz, pluriel,
indiqué comme terme de Bayonne). Mot
CÉSURE, 1537 (Marot). Empr. du lat. poitevin-saintongeais (qui a gagné le Sud-
caesura, dér. de caedere au sens de « cou- Ouest), du gaulois caio (d’où aussi quai).
per ».
CHAIL, CHAILLE, v. caillou.
CÉTACÉ, 1553. Dér. sav. du lat. cetus
(du grec kélos, qui désignait toute sorte de CHAÎNE. Lat. caiëna. It. caiena, esp.
gros poissons de mer), avec le suff. sav. cadena. — Dér. : chaînette, xr1° ; chaînon,
-acé, v. crustacé. 1260; déchaïîner, xri°, déchaînement,
1671; enchaîner, vers 1080 (Roland),
CÉTOINE, 1790. Empr. du lat. des natu- enchaînement, xiv® (E. Deschamps).
ralistes celonia, d’origine inconnue.
CHAIR. D'abord charn, char, puis cher ;
CHABLIS, 1600 (bois chablis). Tiré, écrit chair par orthographe savante au
comme l’a. fr. chable ou chaable, de même xv® s. Lat. caro (acc. carnem). Supplanté
sens, du verbe chabler, x1v®, « abattre »; par viande, au sens de « chair des animaux »
ce verbe est lui-même dér. de chaable considérée comme aliment (sauf dans des
« machine de guerre, servant à lancer des locutions), à partir du xvire s., en raison
pierres », lat. pop. *catabôla (du grec kata- de la gêne causée par l'identité formelle
bolé, propr. « action de jeter », non attesté avec chère, dont les sens se rencontraient
au sens de machine, cf. baliste). avec ceux de chair, ce qui était particuliè-
CHABOT, 1564 (au sens moderne ; au rement incommode quand on parlait de
xI11e s. cabot, peut-être « têtard »). Empr. l'interdiction de la chair au moment du
de l’a. pr. caboïz, francisé en chabot, lat. carême. Survit encore dans le Nord-Est,
pop. *capocius « qui a une grosse tête », l'Est, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du
cf. le classique capitô « sorte de poisson »; domaine gallo-roman, au sens de viande. —
v. Cabot. Dér. et Comp. : acharner au sens figuré,
XIV S.; proprement terme de chasse,
CHACAL, 1676. Empr. du turc ichagäl « donner aux chiens ou aux oiseaux de
(qui vient du persan chagäl, en sanscrit chasse le goût de la chair », x11°, d’où
crgâla). acharnement, 1611 ; charcutier, chaircut-
CHACONNE, 1655. Empr. de l'esp. cha- tiers, 1464, encore chercuitiers, 1533 (Rab..) ;
cona, dér. probabl. de la syllabe ichac chaircuitières, fém., vers 1780 (R. de La
employée comme onomatopée. Bretonne), de char cuite, d’où charcuter,
XVI*, charcuterie (sous la forme charcuict-),
CHACUN. Issu de l’a. fr. chaün « cha- 1549 ; décharner, xrre.
cun » par croisement avec les représentants
du lat. quisque, qui a disparu avant l’épo- CHAIRE. D'abord chaiere. Lat. cathèdra
que littéraire, mais qui est encore conservé « chaise à dossier », distinct de sella « sorte
dans l’a. pr. quec et l’anc. it. cescheduno. de tabouret » (du grec kathedra « siège »).
L’a. fr. chaün vient de l'expression du lat. Chaise s'étant développé vers le début du
de basse ép. unum cata unum « un à un » XV® s. (chaeze en 1420), dans la région cen-
(comp. a. pr. us cada us, id. et berrichon trale, le fr. a utilisé les deux formes pour
à cha un, id.). La prép. cata est empr. du des sens différents. Chaire est encore usité
grec kalä, prép. ayant la même fonction, dans le Nord-Est, l'Est, l'Ouest et dans
comp. kaih'en « un à un ». It. ciascuno et les parlers méridionaux (a. pr. cadiera),
ciascheduno, esp. cadauno et cada. — Dér. : mais il est fortement attaqué par chaise
chacunière, xvi® (Bon. des Périers) ; cha- dans les parlers septentrionaux ; en outre
que, x11°, usuel seulement à partir du selle, lorrain, région de la Suisse romande
XVIC S. et rhodanien, v. selle.

CHAFAUD, v. échafaud. CHAISE, v. le préc., d’où chaisier, 1820 ;


chaisière, 1838.
CHAFOUIN, 1650. Emploi fig. de cha-
fouin, 1611, « putois », mot dialectal du CHAKO, v. schako.
Centre et de l'Ouest, comp. de chat et de CHALAND, « bateau plat », vers 1080
fouin, masc., tiré de fouine, très répandu us ). Empr. du grec byzantin khelan-
dans la même région. ion.
CHAGRINER, 1424 (au xvre aussi chagri- CHALAND, « client », x11e (écrit -ant).
gner). Probabl. comp. de chat et de grigner Au moyen âge, « ami, connaissance, pro-
(v. grignon), comp. l’all. kaïtzenjammer tecteur », etc., part. prés., avec substitu-
« profond malaise » (propr. « lamentation tion de suff., de l’anc. verbe chaloir « être
des chats »). — Dér. : chagrin, subst., 1530. d'intérêt pour », lat. class. calére « être
119 CHAMEAU

chaud, avoir chaud »,-d'où « s’échauffer CHAMADE, vers 1570. Empr. d’une
pour quelque chose », qui a pris en lat. forme de l'Italie septentrionale avec ini-
pop. le sens d’ « importer, intéresser » ; de tiale ich-, correspondant à l’it. littéraire
là aussi it. calere « importer », esp. caler chiamala, de même sens, dér. de chiamare
« id. », à. pr. caler, ordinairement imper- « appeler », lat. clamäre.
sonnel (d’où aujourd’hui, dans les patois CHAMAILLER, vers 1300. Ancienne-
méridionaux le sens de « falloir »). — Dér. ment « frapper », d’où « batailler, se bat-
et Comp. : achalander, 1383, achalandage, tre », encore au xvirie s. Probabl. dû à un
1820, désachalander, 1690 ; nonchalant, croisement de chap(e)ler « frapper », v.
xirie (J. de Meung), nonchalance, 1150. chapelure, et de l’a. fr. maillier, de même
L’a. fr. disait aussi nonchaloir, xrre. sens, dér. de mail, v. mail. — Dér. : cha-
CHALCOGRAPHIE, 1617. Dér. de chal- maillis, 1540; chamaillerie, vers 1680.
cographe « graveur sur cuivre », 1620, fait CHAMARRER, 1530. Dér. de chamarre,
avec le grec khalkos « cuivre » et la termi- 1490, altération de samarre, 1447, « sorte
naison -graphe. de robe », empr. de l'esp. zamarra, propr.
CHÂLE, 1772 (Raynal : chaale). En « vêtement de peau de mouton que portent
outre schall, 1811 (Chateaubriand). Empr., les bergers en hiver », d’origine obscure.
comme l’angl. shaul (d'où chaule en îr., De l'esp. ou d’un mot de même origine
1770), de l’hindou shal, d’origine persane ; vient l’it. zimarra, anc. « sorte de longue
désignait d’abord des châles fabriqués au robe », d’où vient le fr. simarre, 1628 (chi-
Cachemire avec de la laine du Thibet. en 1619; ci-, orthographe fréquente au
Empr. une première fois par des voyageurs xvire s.). Tout le groupe remonte peut-être
français au xvire s. (écrit chal, en 1666). à l’arabe sammür « belette sibérienne ». —
Dér. : chamarrure, 1595 (Charron).
CHALET, 1723; mais établi dans la CHAMBARDER, 1359. Terme d’argot.
langue par J.-J. Rousseau, Nouvelle Hé- Le béarn. chambardä, peu attesté, en est
loïse, 1761. Empr. du parler de la Suisse emprunté et n’en est pas la source. Peut-
romande chalet, dim. de *cala «lieu abrité », être comp. de chambe « jambe » et barder
d’où l’a. pr. cala « petit abri pour les « glisser », tous deux en usage en Franche-
navires ». Mot d’une des langues prélatines Comté et en Bourgogne ; ce dernier se rat-
de la Méditerranée. tache au lat. pop. (d’origine prélatine)
*barrum « argile », d'où aussi bardane.
CHALEUR. Lat. calôrem, acc. de calor, — Dér. : chambardeur, 1886 ; chambarde-
masc. It. calore, esp. calor. — Dér. : cha- ment, 1881; chambard, 1889.
leureux, 1360 (d’après l’adv. -eusement).
CHAMBELLAN, x1° (Alexis chamber-
CHÂLIT. En a. fr. souvent « lit de pa- lenc; en outre chambellans, chamubellens,
rade (pour un mort) », puis « bois de lit »; d’où par substitution de suff., -an, xvi°).
désigne aujourd’hui seulement la monture Empr. du francique *kamerling, restitué
de certains lits. Lat. pop. *calalectus, très d’après l’anc. haut all. kamarling, d’où
probabl. né d’un croisement de lectus «lit » l’all. moderne Kämmerling, dont le pre-
avec calasla « estrade sur laquelle on mier élément représente le lat. camera
martyrisait les chrétiens et les malfai- « chambre », cf. camerlingue.
teurs », cf. it. cataletto « litière, bière »,
esp. cadalecho « sorte de litière ». . CHAMBOULER, 1807. Mot de l'Est;
comp. de chant (du lat. canthus) et de
CHALLENGE, v. calomnie. bouler.
CHALOIR, v. chaland « client ». CHAMBRANLE, 1518 (écrit -ansle).
Issu, par croisement avec le verbe branler,
CHALOUPE, 1522 (chaloppe, texte de de chambrande, 1313. Celui-ci représente
Bretagne). Emploi figuré du dialectal cha- le gérondif substantifié du lat. camerare
lope, chaloupe « coquille de noix », 1578, « voûter » (comp. buvande, de bibenda),
réduction de l’a. fr. eschalope, même sens, dont est conservé aussi le part. passé,
lequel est dér. de eschale, v. écale, avec le comp. a. pr. camarat « lambris, plafond »,
suffixe de enveloppe. L’anc. gascon ga- lorrain chambrée « cavité pratiquée dans
lup(a) (une fois aussi calup) n’a certaine- les ardoisières ».
ment rien à faire avec chaloupe. L’angl.
sloop (d’où le fr. sloop, 1752) est empr. du CHAMBRE. Lat. caméra « plafond voû-
néerl. sloep, à son tour empr. du fr.; de té » (du grec kamara, de même sens) qui
même l’all. Schaluppe, lit. cialuppa et a pris au 1v° 8. le sens de « chambre » (qui
l'esp. chalupa viennent du fr. — Dér. : s’est également développé en grec). It.
chalouper, vulg., 1867. camera, esp. cdmara. — Dér. : chambrée,
1539 ; chambrer, 1678 ; chambrette, x11°;
CHALUMEAU, xvie (Marot). A. fr. cha- chambrière, xr1°, fém. de l’anc. chambrier
lemel, rarement -elle, lat. de basse ép. cala- « valet de chambre » ; a pris des sens techn.
mellus, dér. de calamus « roseau ». It. cara- variés.
mella, esp. caramillo. CHAMEAU. D'abord chameil, -oil, d’où,
CHALUT, 1753. Mot des côtes norman- rapidement, par substitution de suff., cha-
des et de l'Ouest, qui paraît de même mel. Lat. camèlus (du grec kamélos, d’ori-
famille que chalon, 1611 ; tous deux d’ori- gine sémitique, cf. hébreu gamal).— Dér. :
gine insuffisamment éclaircie. — Dér. : chamelier, xve (A. Chartier); chamelle,
chalutier, fin xIx®°. xr1e (sous la forme camoille).
CHAMOIS 120
CHAMOIS. Lat. de basse ép., attesté en heure le sens de « marcher en Zig-Zag » par
Gaule, camox. It. camoscio, esp. gamuza, comparaison avec le treillis d’un grillage,
a. pr. camos. — Dér. : chamoiser, 1393 d’où « chanceler », cf. pour ce développe-
(mais du xr1° au Xve s. chamoissier « meur- ment sémantique griller « glisser », XVIe 8.
trir »), chamoiserie, 1723, chamoiseur, id. et encore normand ; signifie aussi en a. fr.
CHAMP. Lat. campus « plaine », qui a pris « se croiser les bras », et en outre « biffer,
à basse ép. le sens de « champ », supplan- annuler », déjà attesté dans le lat. juri-
tant à peu près partout ager. À conservé, dique ; ce dernier sens est dû à cancellarius
en outre, le sens de « champ de bataille » « scribe », v. le suiv. Cf. it. cancellare « bif-
d'où, au moyen âge, en fr. champ clos, fer, se croiser les bras, chanceler ». —
sens qui a passé dans les langues voisines Dér. : chancellement, xrrre.
avec les mœurs féodales. Mais champ de
Mars est un calque de campus martius. CHANCELIER. Lat. de basse ép. can-
— Dér. et Comp. : champis, 1390, figure cellärius « huissier qui se tenait près des
comme mot récent dans le roman berrichon grilles (cancelli) qui séparaient le public
de George Sand, François le champi, 1850 Ê de l’endroit où siégeaient l'Empereur ou
champlever, terme techn., 1753, composé les juges », d'où « scribe, greffier ». Des
de champ, au sens de « fond d’une gra- sens nouveaux se sont développés au
vure, etc. »; échampir, 1701, réchampir, moyen âge et postérieurement. — Dér. :
1676, pour le sens, cf. champlever. chancellière, xve s., pour le développe-
ment du sens, cf. chambrière ; chancel-
CHAMPAGNE, vin, vers 1705. Du nom lerie, X11° ; archi-, 1507: vice-, 1583 (du
de la province. — Dér. : champagniser, XIII AU XVI s. vi-chancelier).
1839 ; -isation, 1929.
CHAMPÊTRE. Lat. CHANCIR, 1508. Altération, sous l’in-
campesiris « de fluence de rancir, de l’a. fr. chanir « blan-
plaine, plat »; a changé de sens parallèle-
ment à campus dont il dérive. It. esp. chir », encore usité au xvre s., lat. pop.
campestire. *canire, lat. class. cänère, de même sens,
dér. de cänus « blanc » (surtout en parlant
CHAMPIGNON, 1393. Issu, par substi- des cheveux).
tution de suff., de l’a. fr. champegnuel (cam-
pegneus, au x11°8.), lat. pop. *campanibolus, CHANCRE. Lat. cancer, au sens d° « ul-
propr. « qui pousse dans les champs » (par cère », v. cancer. It. canchero, a. pr. cancer.
opposition aux champignons cultivés). A — Dér. : chancreux, xvre ; échancrer, 1549
complètement supplanté en gallo-roman le (propr. «entamer comme fait un chancre »),
lat. class. fungus, d’où it. fungo, esp. hongo. échancrure, 1555.
Cf. prov. moderne campanhou, mais nom-
breux concurrents : bolet Est et Sud-Est, CHANDAIL, fin xix°. Abréviation pop.
potiron Ouest, mousseron Est et Sud du de marchand d'ail, usuel alors aux Halles
Massif Central. — Dér. : champignonnière, de Paris pour désigner des ouvriers s’oc-
1694. cupant du marché des légumes ; dit aux
CHAMPION. Du germ. occidental *kamp- Halles de cette sorte de tricot, parce qu'il
j0, id., dér. de *kamp « champ de bataille », avait eu un succès particulier parmi ces
qui avait été empr. du lat. campus par les ouvriers ; fut, par suite, adopté par le
mercenaires germaniques. Le mot a passé fabricant de ce tricot, Gamard, d'Amiens,
par la suite dans la terminologie juridique qui, suivant ses propres indications, l'avait
des peuples germ. pour désigner celui qui d’abord appelé gam(e)sou avec l’initiale
combattait pour un autre dans un champ de son nom et celle de l’angl. sweaier, qui
clos. L’it. campione et l'esp. campeôn vien- désigne un vêtement analogue.
nent probabl. du fr. — Dér. : championnat, CHANDELEUR. Latin populaire *can-
1877. dél‘rum, génitif pluriel dans l'expression
CHAMPIS, CHAMPLEVER, v. champ. fesla *candèl‘rum, au lieu de -ärum « fête
CHAMPOREAU, fin x1xe, d’abord ter- des chandelles », altération due à l'influence
me d’argot des troupes d'Afrique du Nord. de festa cereorum (V. cierge). Aussi it. can-
Paraît être empr. de l’esp., qui a un verbe delara (de -arum, devenu fém. d’après
cha(m )purrar « mêler une liqueur avec une fesia), candelora, anc. cat. candelor. En
autre ». Bourgogne et ailleurs substitution de suff.,
d’où est sortie la forme chandelouse.
CHANCE. Antér. cheance. Propr. terme
du jeu de dés, « chute des dés, jeu de dés », CHANDELIER, x11e, issu, par substitu-
sens très usuels au moyen âge et jusqu’au tion de suff., du lat. candelabrum ; la forme
XVIIe s., d’où, dès le moyen âge « hasard », *candelarium doit être née très tôt, puis-
puis « heureux hasard ». Lat. pop. *caden- qu’elle est aussi à la base de l’it. candelaio
lia, dér. de cadere « tomber » (v. choir), et de l'esp. candelero.
qui s’employait en lat. class. en parlant
du jeu de dés. — Dér. : chanceux, 1606 ; CHANDELLE. Jusqu'au xirie s. chan-
chançard, 1864. Comp. mal(e)chance, deile, -oile, puis -elle par substitution de
XIIe (malecheance). suff. Lat. candela. It. esp. candela. — Dér. :
CHANCELER. Lat. cancelläre « disposer chandelier, nom de métier, xrrre.
un treillis, une grille », dér. de cancelli CHANFREIN,
« treillis, grille » (d’où l’a. fr. chancel « clô- xrre. Dér. de l’a. fr. cha-
frener « dompter », comp. de caput et fre-
ture », notamment « espace entre le maître- nare. Dans enchifrené, qui est formé avec
autel et la grille, etc. »); a pris de bonne les mêmes mots, le premier élément a été
121 CHAPELET

développé comme en position accentuée. de coupe » (du grec kantharos, de même


La nasalisation de la première voyelle de sens) ; ce champignon est ainsi nommé à
chanfrein est probabl. due à l'influence du cause de sa forme.
suiv.
CHANTIER. D'abord « pièce de bois
CHANFREIN, « demi-biseau », xve. Dér. sur laquelle on place des tonneaux dans
de chanfraindre « tailler en demi-biseau », une cave », d’où différentes sortes d’étais ;
1321, de chant « côté » et fraindre « briser ». le sens moderne de « lieu où l’on dépose
des matériaux » est attesté dès le x1ve s.
CHANGER. Latin de basse ép. cam- Lat. canthérius, propr. « mauvais cheval »,
biäre, attesté à côté de cambire « échanger, d’où « support, chevron » (probabl. empr.
troquer », mot d’origine gauloise, cf. moyen du grec kanthélios « âne bâté »), cf. pour
irlandais cimb « tribut ». N'a éliminé muer le développement sémantique chevalet,
que peu à peu. — Dér. et Comp. : change, poutre, etc.
x11°, a signifié « changement » jusqu’au
XVII® s.; Comme terme de finance, xri°, CHANTOURNER, v. tourner.
probabl. d’après l’it. cambio ; changement,
XIIe ; changeur, x11°, probabl. d’après l’it. CHANTRE, CHANTEUR. Lat. canior,
cambiatore, V. cambiste ; inchangé, 1838; nom., caniôrem, acc. La forme régulière
interchangeable, 1870; rechanger, xrr°; chantur, x11°, a été remplacée de bonne
rechange, x1Iv°. heure par chanteor ; de même l’anc. chan-
terre est une forme analogique plutôt
CHANLATTE, v. latte. qu’issue du lat. cantator, cf. aussi l’a. pr.
canire, cantor. Chanire s’est peu à peu spé-
CHANOINE, vers 1080 (Roland : canu- cialisé, outre son emploi dans la langue
nies). Lat. eccl. canônicus (du grec eccl. poétique, dans son sens actuel, attesté au
kanonikos, de kanôn « règle », v. canon) xve s. Le fém. chanteuse a supplanté chan-
« versé dans la connaissance des règles de teresse, encore usité au XVIe s.
l'Église », d'où « clerc ». Changement sé-
mantique au moyen âge. It. archaïque CHANVRE. Représente une forme lat.
calonaco, a. pr. canonge. V. aussi canonicat. difficile à déterminer exactement, soit
— Dér. : chanoinesse, 1264. ca(n )nabis, soit plutôt ca(n )napus, appuyé
par le prov. canebe et -a (du grec kannabis
CHANSON. Lat. cantionem, acc. de can- et -bos, mot de civilisation, issu d’une
ti0. It. canzone, esp. canciôn (refait). — langue non indo-européenne). Longtemps
Dér. : chansonner, 1584; chansonnette, fém., encore au xvri° s., mais masc. attesté
x11e ; chansonnier « recueil », x1v®, « faiseur au xi11e s. It. canapa, esp. cañamo. —
de chansons », vers 1680. Dér. : chènevotte, xve (Villon), mais chè-
CHANT. Lat. cantus. It. esp. canto, a. pr. nevot, xi11°, formé d’après chénevière, ché-
cant; vV. plain-chant. nevis ; V. ces mots et aussi canevas.

CHANT, écrit souvent par erreur champ. CHAOS, 1377. Empr. du lat. chaos (du
Lat. canthus, attesté seulement au sens de grec khaos). — Dér. : chaotique, 1838.
« bande de fer bordant une roue » (chez CHAPARDER, 1867. Terme d’argot mi-
Quintilien, qui considère le mot comme litaire, propr. « marauder », d’étymologie
africain ou espagnol), mais qui a dû signi- douteuse.
fier aussi « bord » (cf. le grec kanthos « coin
(de l’œil) »). It. canto « coin, côté, bord », a. CHAPE. Signifie « manteau » jusqu'au
pr. can(t); v. cantine, canton. — Dér. : XVIII® Ss.; aujourd'hui seulement sens
chanteau, 1451, au sens de « morceau de techn. Lat. de basse ép. (vi° s., Grégoire
pain », antér., x11€ « quartier d’un bouclier, de Tours) cappa « sorte de capuchon », qui
pièce du fond d’un tonneau »; v. aussi a pris le sens de « manteau ». It. cappa,
latte, tourner. esp. capa; v. cape. — Dér. : chaperon,
x11° ; chaperonner, id., anciennement « cou-
CHANTEPLEURE, v. le suiv. vrir d’un chaperon » ; aujourd’hui, depuis
CHANTER. Lat. caniäre; a complète- le xvi1es. «servir de chaperon à une dame »,
ment supplanté le lat. class. canère. — c'est-à-dire de protecteur, qu’on a comparé
Dér. et Comp. : chantage, 1837 (Vidocq), par plaisanterie à un chaperon ; déchape-
issu de l’expression faire chanter quelqu'un, ronner, 1564 ; enchaperonner, x11° ; encha-
1808 ; chanterelle « la corde qui a le son per, XIIe.
le plus aigu », 1540 ; chantonner, 1538; CHAPEAU. Signifie en outre, au moyen
chantepleure, x11°, formé de l’impér. des âge et jusqu’au début du xvi® s., « cou-
deux verbes chantier et pleurer, à cause du ronne (de fleurs) ». Lat. pop. *cappellus,
bruit produit par le liquide quand il coule ; dér. de cappa, v. le préc., au sens de
déchanter, 1226 (« chanter sur un autre « coiffure ». Ît. cappello. — Dér. : chapelet,
ton », au sens fig.), depuis le xvi® s. senti x11e, « petit chapeau », surtout « couronne
comme négatif de chanter, a signifié au de fleurs », d’où le sens principal moderne,
moyen âge et encore au début du xvi®s. le chapelet ayant été nommé d’après la
« chanter le déchant (sorte d’ornements couronne de roses ou rosaire, dont on
ajoutés au plain-chant) », dont le sens mo- ornait la tête de la Vierge, voir aussi l’it.
derne n’est sans doute qu’une extension corona, de même sens ; chapelier, x1r1°;
péjorative ; rechanter, 1214. chapellerie, xir1e (É. Boileau).
CHANTERELLE, « sorte de champi- CHAPE-CHUTE, v. choir.
gnon », 1752. Adaptation du lat. des bota-
nistes cantharella, dér. de cantharus « sorte CHAPELET, v. chapeau.
CHAPELLE 122

CHAPELLE. Lat. pop. “*cappella, dér. langue arabe », empr. de l'arabe al-‘arabiya,
de cappa, v. chape. À servi d’abord à dési- de même sens, d’où « galimatias » en esp.
gner l'endroit où on gardait la chape de même.
Saint-Martin de Tours, vénérée par les
premiers rois de France, ensuite celle CHARADE, 1770. (Signalé comme d'’ori-
d’Aix-la-Chapelle, etc. Empr. par les lan- gine languedocienne.) Empr. du méridional
gues voisines : it. cappella, esp. capilla, charrado, propr. « causerie (notamment
all. Kapelle. — Dér. : chapelain, xrr°; dans les veillées) », dérivé de charra « ba-
archi-, 1530. varder », verbe onomatopéique, cf. it. ciar-
lare, esp. charlar, de même sens.
CHAPELURE, 1393 (Ménagier). Dér.
de chapeler, encore dans les parlers au sens CHARANÇON, 1370. Probabl. gaul. *ka-
d’ « enlever la croûte du pain », attesté à rantionos, dér. du mot gaulois qui désignait
la même ép., propr. « tailler, frapper », le cerf, comp. bret. karo, donc « petit cerf ».
lat. de basse ép. *cappulare « couper », de
la famille de ca(p)po « chapon ». A. pr. CHARBON. Lat. carbônem, acc. de carb6.
chaplar, capolar, verbe encore vivace, soit It. carbone, esp. carbôn. — Dér. : charbon-
comme simple, soit avec le préf. es-, au nage, 1794, une première fois au xIv® s.
sens de « couper », en franco-provençal et dans un texte liégeois ; charbonner, x11°;
dans le Sud-Est. Un dér. en -uliare (d’après charbonneux, 1611.
minuliare) a donné chapuiser « charpenter » CHARBONNIER. Lat. de basse ép. car-
(jusqu’au xvrie s.), d’où chapuis « char- bônärius. It. carbonaio, esp. carbonero.
pentier » dans le Berry et en franc-comtois.
CHARCUTER, CHARCUTIER,v. chair.
CHAPERON, v. chape.
CHARDON. Lat. de basse ép. cardonem,
CHAPITEAU, xr1°. Francisation du lat. acc. de cardô, lat. class. carduus (d’où it.
de basse ép. capitellum, de même sens, et esp. cardo). Esp. cardén, esp. de char-
dér. de caput « tête, sommet ». don. — Dér. : chardonneret, vers 1500,
CHAPITRE. D'abord chapiile, xne. ainsi nommé parce qu’il recherche la graine
Francisation du lat. capitulum, v. le préc., de chardon, cf. aussi le lat. class. carduelis;
au sens de « section d’un ouvrage », d’abord dér. variés en a. fr. et dans les patois.
« titre d’une section ». À pris en outre en CHARGER. Lat. pop. *carricäre, dér.
lat. eccl. le sens d’ « assemblée de religieux, de carrus « char ». — Dér. et Comp. :
de chanoines », sens dér. de « passage de charge, x11° ; chargement, 1250 ; chargeur,
l'Écriture ou autre lecture, telle qu’un 1332 ; décharger, x1°, déjà lat. pop. dis-
chapitre de la Règle, qui se faisait dans carricäre, cf. it. scaricare, esp. a. pr. des-
l'office propre à ces personnes ». — Dér. : cargar, d’où décharge, vers 1330, déchar-
chapitrer, 1442, d’abord « faire une répri- gement, 1272, déchargeur, 1241 ; rechar-
mande à quelqu'un en plein chapitre ». ger, 1125, d’où rechargement, xve; sur-
CHAPON. Lat. pop. *cappônem, acc. de charger, vers 1200, d’où surcharge, vers
*cappo, lat. class. cap. V. capon. — Dér. : 1500.
chaponneau, 1554 ; chaponner, 1285 ; cha-
ponnière, xv® s.
CHARITÉ, x° (Saini-Léger). Francisa-
tion du lat. eccl. caritas « amour du pro-
CHAPSKA, v. schapska. chain », en lat. class. « affection (en géné-
ral) », dér. de carus « cher ». — Dér. : cha-
CHAQUE, v. chacun. ritable, xrre.
CHAR. Peu employé aujourd'hui en CHARIVARI, vers 1320 (chalivali). Du
dehors de la langue poétique, cf. voiture. lat. de basse ép. caribaria, empr. du grec
Lat. carrus (César, De Bello Gallico, 1, karëèbaria « lourdeur de tête, mal de tête ».
3, etc.), empr. du gaulois pour désigner Le sens fr. s'explique par l’effet que fait
une voiture de charge à quatre roues. Les sur la tête de l’homme un assourdissant
Romains, peuple sédentaire de proprié- charivari. Si le premier à n’est pas tombé,
taires, n’avaient pas les grands chars, qui c’est probabl. parce que le sentiment de la
servaient aux conquérants gaulois ; v. char- valeur expressive de la réduplication de
penter. — Dér. : charrette, vers 1080 (Ro- cette voyelle l’a préservé de la syncope.
land), charretier, xr1° (Chrétien) : charre-
tée, x1°; charrier, vers 1080 (Roland), CHARLATAN, 1543. Empr. de lit. ciar-
existe dans tous les parlers gallo-romans, laiano, probabl. altération de cerretano, de
d’où charriage, 1240, chariot, xr1re ; d’une même sens, propr. « habitant de Cerreto
forme parallèle charroyer est issu charroi, (village près de Spolète, dont les habitants
1160 ; charrière, xri° ; charron, xir® allaient souvent vendre des drogues, etc.,
(E. Boileau), charronnage, 1690 ; antichar, sur les places publiques, v. aussi orviétan) ;
vers 1942. — Comp. char-à-banes, 1803, la transformation en ciarl- est due à l'in-
d’abord en usage en Suisse et en Franche- fluence du verbe it. ciarlare « bavarder » ».
Comté. — Dér. : charlatanerie, 1575 ; charlata-
nisme, 1750.
CHARABIA, 1802. Appliqué plus par-
tic. au fr. des Auvergnats, à cause de leur CHARLEMAGNE, 1826. Dans la locu-
prononciation de ch pour s. Semble être tion faire charlemagne, terme d'’argot des
emprunté du provençal charabiat, altéra- joueurs de cartes, d’après le nom d’un des
tion, d’après le verbe charra « bavarder », quatre rois ; mais la signification première
v. le suiv., de l’esp. algarabia, propr. « la en est obscure.
123 CHARYBDE

CHARLESTON, vers 1923. Du nom de le franc-comtois charre, id. et le limousin


la ville Charleston, en Caroline du Sud, chadro, qui représente le lat. de basse ép.
pays originaire de cette danse. cathara « eau employée pour nettoyer ».
CHARLOTTE, 1804 (dans les Souvenirs Celui-ci est le fém. substantifié de l’adij.
sur Paris de l'Allemand Kotzebue). Tiré grec kdtharos « pur », dont l'introduction
du nom propre Charlotte, pour une raison en gallo-latin est certainement due aux
inconnue. colonies grecques du littoral méditerranéen.
. CHARME, arbre. Lat. carpinus. It. car- CHARRUE. Lat. d'origine gauloise car,
pino, esp. carpe. — Dér. : charmille, 1690. rüca « voiture de luxe à quatre roues (v.
char) », Virgile appelle currus, propr. « char-
CHARME. Lat. carmen, au sens de voiture », la charrue avec avant-train mu-
« formule magique », usuel jusqu’au xvries. ni de roues, la charrue romaine arätrum
Seulement fr. étant sans roue ; cf. encore a. pr. carruga
CHARMER. Lat. de basse ép. carminare, « charrette », rouergat moderne corrugo
dér. de carmen, v. le préc., avec un déve- « tombereau à bœufs », sarde carruga « esp.
loppement sémantique parallèle. Seulement de voiture ». La charrue à roues est une in-
vention germ. devenue nécessaire parce que
îr. — Dér. : charmant, 1550 (Rons.) ; char-
meur, xIII*.
dans les pays habités par les Germains le
sol était beaucoup plus lourd qu’en Italie.
CHARMILLE, v. charme. Elle a été introduite dans les pays romans
à plusieurs reprises, d’abord en Italie à
CHARNEL, x1° (Alexis). Francisation l’époque de Virgile et, plus tard, du temps
du lat. eccl. carnalis, v. chair. des Longobards (qui l’appelaient plouum),
CHARNIER. Aujourd'hui emploi sur- ensuite par les Francs dans la Gaule sep-
tout littéraire. Lat. carnäarium (dér. de tentrionale. Cet outil d’origine germ. a reçu
carû « chair ») « lieu où l’on conserve la son nom roman d’après l’innovation techn.
viande, boucherie » ; a pris de bonne heure qu’il représentait. Charrue a supplanté le
le sens de « cimetière, dépôt d’ossements » ; représentant du lat. arätrum, a. fr. arere
cf. l’it. carnaio, même sens. (rare ; cf. aussi it. arch. aralio, esp. arado),
qui ne survit que dans le Nord-Est et les
CHARNIÈRE, xre. Dér. de l’a. fr° parlers méridionaux pour désigner l’an-
*charne (attesté sous la forme carne), lat- cienne charrue et même les formes nou-
cardinem, acc. de cardô « gond » (cf. it- velles : de là, dans les dictionnaires, araire,
cardine), ou déjà lat. pop. *cardinaria; 1539, empr. du Midi. Il existe en outre une
cf. a. pr. carniera. Seulement gallo-roman- forme avec un autre suff. areau, surtout
CHARNU. Lat. pop. *carnütus dér. de dans le Centre (usuelle au xvi® s. et em-
caro, V. Chair. It. carnulo, esp. carnudo, ployée par George Sand dans La Mare au
a. pr. carnul. Diable) et l'Ouest, pour désigner l’ancienne
charrue.
CHAROGNE. Lat. pop. *carônia, dér. de CHARTE, x1° (Alexis). Francisation plu-
carô, V. Chair. A. pr. caronha, it. carogna,
tôt que forme traditionnelle du lat. charta.
esp. carrona (r double d’origine expressive). Très rare au moyen âge et avant le xvies.,
CHARPENTE, xvi® (Brantôme). Tiré en face de chartre, aujourd’hui archaïque
de l’a. fr. charpent, masc., attesté seulement (d’où chartrier, 1370), lat. chartula « petit
au sens de « corps humain », qui est un ‘ écrit, acte » (en lat. juridique), dér. de
sens fig., lat. carpentum, seulement « cha- charta « papier, écrit » (du grec khartés,
riot à deux roues », d’origine gauloise, v. masc., « feuille de papyrus ou de papier ») ;
char, mais qui a dû posséder un autre sens charta est représenté régulièrement par it.
d’ « assemblage de pièces de bois ». Seule- carta « papier, lettre », esp. carta « lettre ».
ment fr. et parlers rhétiques. V. le suiv. Pour charte-partie, v. partir.— Dér. : char-
— Dér. de charpent : charpenter, x11°, sens tiste, 1907.
fig. au xive. CHARTRE, « prison ». Ne s'emploie plus
CHARPENTIER. Lat. carpeniärius aujourd’hui que dans la locution en chartre
« charron », attesté au sens moderne seule- privée ; a été supplanté par prison depuis
ment vers le vire s.; cf. a. pr. carpentier, le xv® s.; au xvrie s. ne s'emploie qu’au
de même sens. En outre chapuis, Franche- sens fig. ; v. aussi geôle. Lat. carcer, masc.
Comté, v. chapelure, et Auvergne fustier. CHARTREUSE, xr11°. Nom propre, cou-
CHARPIE, 1300. Part. passé fém., pris vent de la Grande Chartreuse, près de Gre-
substantiv., du verbe charpir, encore dans noble, nommé d'après le nom de lieu où il
le Maine, « étirer » et ancienn. « carder de fut établi par saint Bruno, en 1084 ; d’où
la laine », d’où aussi « tailler, mettre en l’it. certosa et le lat. médiéval carlusia ; au
pièces », lat. pop. *carpire, lat. class. car- sens de «liqueur fabriquée dans la Grande-
père, propr. « Cueillir » (d’où aussi it. carpire Chartreuse », 1863. — Dér. : chartreux, xv°.
« saisir, etc. », esp. carpir « égratigner », CHARTRIER, v. charte.
d’où « faire tort »; v. écharper). Dans les CHARYBDE, ne s'emploie que dans la
parlers gallo-romans le masc. charpi est locution de Charybde en Scylla. 1552 (Ra-
plus répandu que le fém. belais : de Scylle en Carybde). Charybde,
CHARRÉE, x11e (sous la forme carrée). en lat. Charybdis (du grec Kharybdis) et
Cf. le mot de même famille charrier, 1450, Scylla, en lat. Scylla (du grec Skylla) sont
« drap destiné à contenir la charrée ». deux gouffres fameux dans le détroit de
Dér. d’un mot simple attesté encore dans Messine.
CHAS 124

CHAS, vers 1220. Lat. capsus « boîte » péique, cf. « si l’une est chate, l’autre est
(fém. de capsa, v. châsse), qui a aussi, à mite », x11® s., v. marmite et mistigri;
basse ép., le sens de « bulle ». chat-tigre, xvir1e (Buffon). V. chafouin et
chat-huant.
CHÂSSE. Lat. capsa « boîte, caisse » (et
« cercueil », sens déjà attesté en lat. eccl.). CHÂTAIGNE. Lat. casianea (du grec
It. cassa, v. caisse, casse. — Dér. : châssis, kastanon). Conservé partout (du moins là
xr1e ; enchâsser, 1226, enchâssure, xve. où l'arbre et le fruit existent) : it. castagna,
esp. casiaña, a. pr. castanha. — Dér. :
CHASSELAS, 1680 (écrit chacelas). Nom châtaignier, xr1°, d’où châtaigneraie, 1533 ;
d'un village de Saône-et-Loire, près de châtain, x1r1°, tiré de châtaigne, employé
Mâcon. en fonction d’adj., au moyen âge, cf. violet.
CHASSEPOT, 1866 (fusil chassepol). CHÂTEAU. A changé de sens avec les
Nom de l’armurier (1833-1905) qui invents mœurs ; faire des châteaux en Espagne,
ce fusil, en usage de 1866 à 1874. x111€ (G. de Lorris), locution créée au temps
CHASSER. Dès l'a. fr. aux sens de des Chansons de geste, dans lesquelles
« poursuivre une bête pour la prendre » et les chevaliers reçoivent souvent en fief des
de « chasser une personne ». Lat. pop. châteaux en Espagne qu'ils doivent com-
*captiäre, lat. class. capiäre « chercher à mencer par prendre de force. Dans l’expres-
prendre »; a peu à peu supplanté le lat. sion donner un château en Espagne, donner
class. vénärt, V. Veneur. Aussi a. pr. cas- a été remplacé par faire; la signification
sar, it. cacciare, esp. cazar. — Dér. et actuelle est établie définitivement depuis
Comp. : chasse, x11°, cf. it. caccia, esp. caza, le xive s. Lat. castellum « place forte, for-
et l’adj. captiosus « qui aime la chasse » teresse, etc. », dér. de castrum, de même
(texte d'Auxerre, vie s.); chasseur, xrr° ; sens. — Dér. : châtelet, xrre.
déchasser, terme de danse, 1803 ; pourchas-
CHATEAUBRIAND, 1856. On présume
ser, vers 1080 (Roland) ; rechasser, 1213.
Nombreux comp. avec chasse- comme pre- que cette espèce de bifteck aurait été
inventée par le cuisinier du comte de
mier élément : chasse-marée, 1350 ; chasse-
mouches, 1555; chasse-neige, 1869 (au
Chateaubriand, à l’époque où celui-ci était
sens de « vent violent »); chasse-pierres, ambassadeur à Londres. Mais on n’a pas
1845 ; chassé-croisé, 1839. V. entrechat.
d’attestation plus précise de cette origine
du mot.
CHASSIE, x1e (écrit chacide). D'un lat.
pop. *caccita, dér. du radical du lat. cacare CHÂTELAIN. Lat. castellänus « habi-
(v. chier), avec réduplication expressive de tant d’un casiellum » (pour le sens, v. le
la consonne c. Le suff. a été pris du lat. préc.). — Dér. : châtellenie, xrre.
pituita, V. pépie. Cf. a. pr. cassida, piém. CHAT-HUANT, xrr1e (J. de Meung :
scassia. — Dér. : chassieux, vers 1125. chahuan). Altération, d'après chat et le
verbe huer, de chavan, attesté au moyen
CHASTE, xrie; chasteté, xr1°, a rem-
âge sous la forme javan, xi°, et usuel au-
placé chasieé, x11°, dér. de chaste. Empr. jourd’hui dans le Centre, lat. pop. cavan-
du lat. casius, propr. « pur, intègre », nus (ve s., Eucherius de Lyon), d’origine
castitas.
gauloise. Des formes issues de cavannus
CHASUBLE, xri°. Lat. de basse ép. désignent le hibou dans la plupart des
(vie, Grégoire de Tours) casubla, altération parlers septentrionaux, notamment chouan,
non éclaircie de casula « manteau à capu- refait probabl. d’après chouelle, dans
chon », probabl. emploi fig. de casula « pe- l'Ouest.
tite cabane » dér. de casa, v. case; l’esp. CHÂTIER. Lat. casligäre, dér. de caslus,
casulla est refait sur cogulla, v. cagoule. propr. « essayer de rendre pur », v. chaste.
CHAT, CHATTE. Lat. caltus, -a, attesté It. castigare, esp. castigar. — Dér. : châti-
à basse ép., probabl. empr. d’une langue ment, XIIe.
africaine, cf. nubien kadis, berbère kad- CHATON, v. chat.
diska. L’angl. cat et l’all. Kaïze viennent
du roman. Le lat. felis, également « chat CHATON, « tête de la bague où est
sauvage » (le chat domestique est récent enchâssée une pierre précieuse », x11® (chas-
à Rome) n’a pas laissé de traces dans les tun). Du francique *kasto « coffre, caisse »,
parlers populaires. It. gatlo, esp. gato. — restitué d’après l’anc. haut all. chasto, d’où
Dér. : chatière, x111° (J. de Meung) ; cha- l’all. moderne Kasten « id. » ; de là le sens
ton, xir1e (id.), d’où, par comparaison, du fr. L’it. casione « chaton de bague » est
terme de botanique, cf. l’angl. cattail, lit- probabl. empr. du fr.
tér. « queue de chat », et catkin, littér. CHATOUILLER, vers 1200. En outre,
« petit chat », de même sens ; chatoyer, formes avec différents suffixes -eillier,
1753, d’après les reflets changeants de -illier ; chatouiller a triomphé grâce aux
l’œil du chat, chatoiement, 1783 ; chattée, nombreux verbes formés avec le suff.
1680 ; chatterie, 1540. -— Comp. : chat- -ouiller. Plusieurs langues européennes ex-
cervier, xvir1® (Buffon), d’après loup-cer- priment le chatouillement par la suite de
vier ; Chatpard, 1690, comp. de chat et de consonnes k-f-l, comp. angl. kittle, anc.
pard, empr. du lat. pardus « léopard, pan- scandinave kitla, all. kitzeln. De même le
thère » (du grec pardos, mêmes sens), cf. gallo-roman, qui diffère des langues préc.
guépard, léopard ; chattemite, 1295 (Join- uniquement par la voyelle a au lieu de l’i.
ville en un sens fig.), comp. de challe et de La palatalisation du c- initial montre que
mite, nom pop. du chat, probabl. onomato- le mot est très ancien; en outre caliller,
125 CHÉBEC

Nord-Est, gatiller, Est, gatilhä, parlers CHAUSSER. Lat. calceäre, dér. de cal-
méridionaux, croisé fréquemment avec ceus « soulier, brodequin ». It. calzare, esp.
grata. — Dér. : chatouillement, xr11e (ca---); calzar. — Dér. et Comp. : chaussure, x11° ;
chatouïilleux, xive ; chatouille, 1787. enchausser, XvVI°; rechausser, x1I1°.
CHATOYER, v. chat. CHAUSSE-TRAPE, xr11e (au sens de
« piège »). Altération, d’après chausser et
CHÂTRER. Lat. casträre. It. castrare, trappe, de chauchelrepe, vers 1200, cf. cau-
esp. castrar. V. castrat. — Dér. : châtreur, kelrepes « chardon », xirie ; mot fréquem-
1416. ment altéré (cf. notamment caude ire-
pe, etc.), comp. de l’impér. de l’anc. verbe
CHATTEMITE, v. chat. chauchier « fouler », lat. calcäre, et de l’anc.
CHAUD. Lat. cal(i)dus, dér. de calere verbe ireper, v. cauchemar et trépigner,
« être chaud », v. chaland. It. caldo (l'esp. donc littéral. « foule, marche dessus », dit
caldo signifie « bouillie, sauce »), a. pr. d’abord du piège à animaux et de l'engin
caut. — Dér. : chaudeau, xr1°. — Comp. : de guerre formé d’une pièce de fer à quatre
chaud-froid, 1863. pointes en forme de chardon, souvent dis-
simulée (la priorité est possible pour l’une
CHAUDIÈRE. Lat. de basse ép. caldäria ou l’autre des deux acceptions), puis, de
« étuve, chaudron ». Les parlers méridio- très bonne heure, « chardon étoilé » (lat.
naux disent surtout pairolo, fém. de pairol, des gloses calcatrippa), dont le développe-
de même sens, lat. pop. *pariolum, lui- ment sémantique est dû probabl. à l’in-
même dim. de *parium, d’origine gauloise, fluence du lat. tribulus qui désigne le
a. pr. par (cf. le gallois pair « chaudron »). même engin et la châtaigne d’eau (du grec
It. caldaia, esp. caldera. — Dér. : chaudron, tribolos « id. »).
x (d’abord chauderon), d’où chaudron-
CHAUSSETTE, xrie; chausson, xrie.
née, 1474, chaudronnier, 1277, chaudron-
Dér. de chausse, lat. pop. *calcia, lat. class.
nerie, 1611.
calceus, v. chausser, qui a pris de bonne
CHAUFFER. Lat. pop. *calefäre, lat. heure le sens de « guêtre couvrant à la fois
class. calefacere. A. pr. calfar ; se dit dans le pied et la jambe », cf. it. calza « bas »,
tous les parlers gallo-romans, sauf dans le esp. calza « id. ». Chausse a servi au xv°s.
franco-provençal partiellement, et l’extré- à désigner, sous la forme du plur. chausses,
me Sud-Est qui ont le type échauder. — un pantalon collant qui a remplacé alors
Dér. : chauffage, 1265 ; chauffe, 1701 (au l’anc. pantalon ample, dit braie, v. culotte ;
moyen âge « bois de chauffage ») ; chauf- d’où, pour distinguer du bas propr. dit la
ferette, 1379, issu, par substitution de partie qui descendait jusqu'aux genoux,
suff., de chaufete, 1360 ; cf. aussi chaufoire, haut-de-chausses (ou chausses) et bas-de-
1344, tous deux de même sens ; chaufferie, chausses, xvi°, d’où bas, id. Le type chausse
1723 (au moyen âge, au sens de « chauf- s'emploie encore au sens de « bas » dans
fage ») ; chauffeur, 1680 ; chauffard, 1928. une très grande partie des parlers gallo-
— Comp. : quelques comp. avec chauffe- romans, v. bas, et au sens de « culotte »
comme premier élément : chauffe-assiettes, (toujours au plur.) en vosgien (d’où, dans
1845 ; chauffe-plats, 1907; chauffe-bain, ce parler, chausseite au sens de « bas »),
fin xix° ; chauffe-lit, 1471 ; chauffe-pieds, dans la Suisse romande et dans la région
1381 ; surchauffer, 1676. gasconne et languedocienne.

CHAUFOUR, v. four.
CHAUVE. Fém. qui a commencé à sup-
planter, dès la fin du xr1° s., le masc.
CHAULER, v. chaux. chauf, disparu au xiv® s. Lat. caluus. Sou-
vent remplacé aujourd’hui par des termes
CHAUME. Lat. calämus « tige du roseau expressifs tels que pelé, plumé, têle pelée, etc.
et aussi des céréales » (du grec kalamos). It. esp. calvo. V. calvitie.
—— Dér. : chaumage, 1393 ; chaumer, 1338 ;
chaumière, 1666, a remplacé chaumine, CHAUVIN, vers 1830. Tiré du nom pro-
1606, attesté antér. comme adj. fém., cf. pre Chauvin, type du soldat des armées du
maison chaumine, au xv® s.; aujourd’hui premier Empire, célèbre pour son enthou-
tous deux sont des mots littéraires ; dé- siasme naïf, fréquemment représenté dans
chaumer, 1732.
les lithographies de Charlet et mis en
scène dans La Cocarde Tricolore (des frères
CHAUSSE, v. chaussette. Cogniard), 1831. — Dér. : chauvinisme,
1834 ; chauviniste, 1867.
CHAUSSÉE. Lat. de basse ép. *calciäta
(sous-entendu via), *calciata n’est probabl. CHAUX. Lat. cal, -cis, propr. « pierre »,
pas, comme on l’a cru, un dér. de calx même mot que le grec khalix, auquel il doit
« chaux », la chaux n’ayont pas été em- le sens de « chaux ». It. calce, a. pr. caus.
ployée au moyen âge dans la construction — Dér. : chauler, 1372, chaulage, 1764,
de routes. Un document catalan du xe®s. échauler, 1700 ; on a hésité sur la forme, cf.
définit expressément via calciata par «route aussi chauder, chauter au xvir1° 8., V. clouer.
formée de morceaux de pierres soigneuse- CHAVIRER, 1701. Francisation du prov.
ment pilonnés et consolidés ». Calciaia capvira « tourner la tête en bas »; v. cap
doit être le part. passé d’un verbe *calciare et virer.
« fouler aux pieds », dér. de calcia attesté
au ve s. comme synonyme et dér. de calx CHÉBEC, 1771. Empr. de l’it. sciabecco,
« talon ». — Comp. : rez-de-chaussée, 1504, empr. lui-même, probabl. par l'intermé-
V. rez. diaire de l’esp. jabeque, de l'arabe chabbäk.
CHÉCHIA 126

CHÉCHIA, 1872. Empr. de l'arabe rivé à chemin (de fer) ; chemin de fer, 1787
maghrebin châchiya, adj. dér. du nom de (dans la région de Saint-Étienne, Le Creu-
la ville de Châch (Transoxiane) où se fabri- sot, Lyon, il y avait déjà, au xvirre, un
quait une sorte de bonnet (fait attesté dès petit réseau de voies ferrées exploité avec
le 1xe 5.). des chevaux ; la machine à vapeur s’y
CHEDDITE, 1922. Dér. du nom du substitua vers 1832).
hameau Cheddes (Haute-Savoie), où l’on CHEMINÉE. Lat. de basse ép. caminäta
fit les premières expériences en vue de (relevé en 584), dér. de caminus « four,
l'invention de cet explosif. foyer », etc. (du grec kdminos) ; a sup-
CHEF. Depuis le xvie s., seulement lit- planté le simple (cf. toutefois it. ca({m )mino
téraire au sens de « tête »; outre celui-ci « cheminée », a. pr. camin « fourneau »),
le lat. caput avait déjà celui de « bout supé- après avoir signifié, jusqu’au x1°5., «(cham-
rieur de qch.; bout (en gén.) » (comp. bre) pourvue d’une cheminée », à cause de
funis caput « bout d’une corde »), et celui homonymie de camminus « chemin », qui
de « le premier, le plus important, le paraît avoir contribué, par étymologie pop.,
maître » (capui rei publicae). Lat. pop. à maintenir l’i de cheminée. L'esp. chime-
*capum, lat. class. caput. Ne survit dans nea vient du fr. It. ca{m)minata « grande
les parlers gallo-romans au sens de « tête » salle ».
que dans cap du gascon et de la région CHEMISE. Lat. de basse ép. camisia
languedocienne (a. pr. cap). Dér. et Comp. : (1ve s.). It. camicia, esp. camisa, a. pr.
1° au sens de « tête » couvre-chef, x1r°; camiza. — Dér. : chemisette, xrr1° ; che-
2° au sens de « bout, fin » derechef, xrr°; misier, 1806 ; chemiserie, 1845.
achever, vers 1080 (Roland), propr. « arri-
ver, mener à la fin », cf. l’a. pr. et l’esp. CHENAL, xr1e. Réfection, d’après canal,
acabar, de même sens, d’où achèvement, de l’a. fr. chanel, chenel, parfois fém., lat.
xX111, inachevé, xvirie s. (Delille), para- canälis « canal, etc. », des deux genres,
chever, 1213, parachèvement, x1v® ; 3° au dér. de canna, v. canne. It. canale, masc.,
sens de « maître, le premier » chef-d’œuvre, esp. canal, fém. — Comp. : échenal, 1287
xl (E. Boileau, au sens ancien qu'il (sous la forme eschannal) ; on trouve aussi
avait dans la langue des métiers ; « œuvre des formes dialectales en -eau et -0, 1762.
accomplie », xvi°) ; chef-lieu, 1257 (chef a
eu ici à l’origine la fonction d’un adj., au CHENAPAN, 1694 (mais déjà snaphans
sens de « principal », comp. chieve rente à en 1568, snapane en 1657, formes qui vien-
côté de chief rente ; sous l’Ancien Régime, nent du néerl. snaphaan). Empr. par les
on désignait ainsi l'endroit où l’on prêétait soldats des armées d'Allemagne, au moment
serment de fidélité au seigneur, où l’on de la guerre de Trente ans, de l’all. Schnapp-
payait les impôts, tantôt le château, tantôt hahn « maraudeur » (attesté dès 1494);
une ferme, ou même seulement un pré désignait alors des paysans réfugiés dans
qu’on destinait à cette cérémonie ; avec la les bois, qui attaquaient les passants et se
Révolution le sens du mot s’élargit) ; sous- mettaient parfois au service des armées;
chef, 1791. le mot all. voulait dire ou « attrape le
Coq » ou « attrape, coq » (où coq aurait eu
CHEFTAINE, vers 1911. Empr. de à peu près le sens de « gaillard »).
l’angl. chieftain, lequel représente l’a. fr.
chevetain, V. capitaine. CHÊNE. En a. fr. souvent chasne, devenu
chaisne, chêne, d’après fraisne, frêne. Gau-
CHEIK, 1798 (cheque en 1598). Empr. de lois *cassänus ; le lat. quercus (qui ne sub-
l’arabe cheikh, propr. « vieillard ». Empr. siste qu’en sarde logoudorien kerku, it.
une première fois au moyen âge (sous la quercia, de *quercea), n’a pas pénétré en
forme seic, chez Joinville). Gaule, parce que le chêne, comme arbre
CHELEM, 1773. Altération de l’angl. saint du druidisme, a gardé le nom indi-
slam, propr. « écrasement ». gène. Seulement gallo-roman; a. pr. cas-
se(r). Aujourd’hui seul mot des parlers
CHÉLIDOINE, xirie, Empr. du lat. che- septentrionaux, mais divers concurrents
lidonia (herba) (du grec khelidonia, de dans ceux du Midi, notamment garric,
khelidôn « hirondelle »); cette plante est sud du Massif Central et région languedo-
ainsi nommée parce qu’on croyait que cienne, v. garrigue, rouvre, yeuse. — Dér. :
l’hirondelle s’en servait pour rendre la chênaie, 1211 ; chêneau, 1323.
vue à ses petits. Au sens de « variété d’aga-
te », 1575 ; cette pierre passait autrefois CHÉNEAU, 1459 (écrit chesneau, encore
pour se trouver dans l'estomac des hiron- au xviie s.). Empr. d’un parler central ou
delles. oriental où chenau correspond au fr. chenal
(cf. le sens du comp. échenal « chéneau »),
CHÉLONIENS, 1800. Dér. sav. du grec puis altéré en chéneau, par croisement avec
khelôné « tortue ».
chêne, le bois de chêne servant souvent à
CHEMIN. Lat. pop. *camminus (camino, faire des chéneaux, avec graphie arbitraire
texte esp. du vri® s.), mot d’origine cel- -eau de la terminaison.
tique, cf. gallois cam « chemin », breton CHENET, v. chien.
kamm « pas ». It. cammino, esp. ca-
mino. — Dér. : cheminer, 1138, chemine- CHÉNEVIÈRE. D'abord chen-, puis
ment, x111°, acheminer, vers 1080 (Ro- chén- ; chanevière, 1226, est dû à l'influence
land), acheminement, 1555 ; chemineau, de chanvre. Lat. pop. *canapäria. It. cana-
1889 ; cheminot, 1910, pour servir de dé- paia, a. pr. canabiera.
127 CHEVAL

CHÉNEVIS. V. le préc. pour la voyelle ; qu’en wallon et lorrain et ne persiste qu’à


chanevuis, xixre, réduit de bonne heure à l’infinitif dans une partie des parlers sep-
-vis (l'a s'explique comme celui de chane- tentrionaux ; peu vivace également dans
vière). Lat. pop. *canapütium, comparable les parlers méridionaux où triomphe cerca
à *linütium, d’où l’a. fr. linuis « graine de (a. pr. cercar « chercher »). It. cercare « par-
lin ». Mot de la France septentrionale, à courir, chercher », esp. cercar « entourer ».
côté duquel existent d’autres dér., plus ou L’angl. {o search vient de l’a. fr. cercher. —
moins anciens. Dér. : chercheur, 1538 ; rechercher, vers
1080 (Roland), recherche, 1508.
CHÉNEVOTTE, v. chanvre.
CHÈRE. Le sens propre de « visage »,
CHENIL, v. chien.
usuel au moyen âge, a disparu au XviI® $. ;
CHENILLE. Lat. pop. canicüla, propr. chère ne subsiste que dans quelques locu-
« petite chienne », dit ainsi à cause de la tions, v. lie, développées dès le moyen
forme de la tête de la chenille ; a sup- âge. Lat. de basse ép. cara « visage » (du
planté le lat. class. erüca, d’où esp. oruga, grec kara, neutre, « tête, visage », terme
a. pr. eruca. Seulement gallo-roman; l’a. surtout poétique). Dans le domaine gallo-
pr. canilha n'est attesté, par accident, roman, ne subsiste guère au sens de « vi-
qu’au sens de « ver »; aujourd’hui domi- sage » que dans quelques parlers prov.
nant dans les parlers gallo-romans, mais (a. pr. cara). Esp. cat. cara « visage ».
avec divers concurrents, notamment des CHÉRIF, 1551 (1528 sérif). Empr. de
survivants de erüca en gascon et en lan- l'arabe charif, propr. « noble, éminent »,
guedocien. — Dér. : chenillette, 1783; peut-être par l'intermédiaire de l’it. sceriffo.
écheniller, xive ; échenillage, 1783.
CHERRY-BRANDY, 1855. Empr. de
CHENU. Lat. de basse ép. canütus, dér. l’angl. cherry-brandy, comp. de cherry
de cänus « blanc » (en parlant des cheveux). « cerise » et brandy « eau-de-vie », réduit à
It. canuio, esp. canudo, a. pr. canut. cherry, 1907.
CHEPTEL. Réfection étymologique, qui CHÉRUBIN, vers 1080 (Roland). Empr.
date du xvrres. (on trouve d’abord chaptel, du lat. eccl. cherubin, empr. lui-même de
au xvII° s.), de chetel, altération anc. de l’hébreu biblique keroûbim, plur. de keroûb
chatel, probabl. d’après ch(i)ef, qui est très « sorte d’ange », Genèse, III, 24, etc. Sens
usuel au moyen âge comme adj. signifiant fig. : rouge comme chérubin, 1611.
« principal », dans des expressions juri-
diques telles que chief cens, etc. Au moyen CHESTER, 1853. Empr. de l’angl. ches-
âge, a le sens général de « biens, rentes »; ter, du nom de la région de Chester, en
spécialisé suivant les régions. Lat. capitäle, Angleterre, où se fabrique ce fromage.
adj. pris substantiv. à basse ép., comme CHÉTIF. D'abord chaitif. Le sens pre-
terme juridique, au sens de « ce qui cons- mier de « captif » a disparu vers le xves.,
titue le principal d’un bien ». A. pr. capdal, v. captif. Lat. caplivus, qui a pris aussi le
de sens analogues, esp. caudal « biens, ri- sens de « malheureux » de très bonne
chesses ». heure (1ve s.), altéré en *cactivus en gallo-
CHÈQUE, 1788 (écrit check). Empr. de roman, Cf. a. pr. cailiu, probabl. par croi-
l’angl. cheque (écrit ainsi d’après Exchequer sement avec le gaulois *cactos « pris, cap-
bill « billet du Trésor »); d’abord check, tif », qu’on rétablit d’après l’anc. irlandais
tiré de {o check « contrôler » (propr. « faire cacht et le breton keaz de même sens, cf.
échec »; remonte au fr. échec). — Dér. : pour un croisement semblable orteil. Chez
chéquard, 1893 ; chéquier, début xxe. Sénèque et chez les auteurs eccl. du 1ve 8.
(saint Jérôme), captivus est employé pour
CHER. Lat. cärus, aux deux sens d’ « ai- désigner une personne qui est dominée par
mé » et de « coûteux ». It. esp. caro « id, ». ses passions (ainsi libidinis captivus), d'où
— Dér. : au 1er sens, chérir, x1° (Alexis) ; le sens de l’it. cattivo « mauvais ». Saint
chérissable, vers 1560. Au 2e sens, cherté, Augustin s’en sert pour désigner celui à
xI1°, au sens moderne. À signifié aussi qui manque la grâce, ce qui explique le
« affection », peut représenter le lat. carilas, sens de « misérable, à plaindre », qu’a
mais a été refait sur cher; enchérir, xr1°, l’adj. fr. De là chti « méchant, malin » et
enchère, 1259, enchérissement, 1213, ren- aussi « faible », dans les parlers du Centre
chérir, 1175, renchérissement, 1283, su- et de l'Ouest, entre la Loire et le Massif
renchérir, xvi®, surenchère, 1569. Central. L'esp. caultivo ne signifie que
« captif ».
CHERCHER. D'abord cercher, d’où, par
assimilation, chercher, xvi°, qui ne l’a em- CHEVAL. Lat. caballus, propr. « rosse »,
porté qu’au xvr® s. Signifie au moyen âge terme vulgaire qui a supplanté le lat.
surtout « parcourir ». Lat. de basse ép. class. equus. — Dér. : chevaler, xve
circäre « parcourir », dér. de circä, circum (A. Chartier), chevalement, 1694; che-
« autour »; a pris de bonne heure le sens valet, x11°, au moyen âge surtout « petit
de « chercher » que possède aussi le roumain cheval », pour le sens fig., 1429, v. chevron ;
cerca. À supplanté le verbe quérir (ou quer- chevalier, vers 1080 (Roland), déjà cabal-
re), désuet depuis le xvri° s. S’est égale- larius au ve s. «garçon d’écurie », sous les
‘ ment répandu dans les parlers septentrio- derniers Carolingiens « soldat à cheval,
naux sous la forme française (faibles traces mais sans armure », ce qui explique que le
de cercher dans le Nivernais), au détriment chevalier représente le degré le plus bas
de quérir, querre, qui n’a plus de vitalité de la noblesse ; chevalerie, id., v. cava-
CHEVAL 128

lier, cavalerie ; chevalin, 1376. — Comp. : germ. existe au Nord-Est ; en outre, péné-
chevau-léger, 1534, d’après le pluriel che- tration des formes méridionales (a. pr.
vaux-légers, 1568 ; cheval léger, 1579, refait cabra) dans les parlers septentrionaux (mais
sur le sing. cheval; cheval-vapeur, 1838. kab(r) du Nord-Est est une forme refaite
sur cabri). It. capra, esp. cabra. — Dér. :
CHEVALERESQUE, 1642; une pre-
mière fois au xv® s. Francisation de lit.
chevreau, 1170, peu usuel aujourd’hui,
sauf en parlant de la peau utilisée pour
cavalleresco, d’après chevalier.
faire des gants ; peu représenté dans les
CHEVAUCHER. Ne s'emploie plus au parlers gallo-romans qui ont, outre cabri
sens propre que dans la langue littéraire et des dér. de chèvre, de nombreux dér. de
depuis le xvrie s. Latin de basse ép. (vres.) bique ; chevrette, xir1°, v. crevette ; che-
caballicäre, dér. de caballus. It. cavalcare, vron, x11€ s. ; pour le sens, v. chevalet; les
esp. cabalgar. V. cavalcade. — Dér. : che- formes du Sud-Ouest représentent le latin
vauchée, x11° ; chevauchement, x1v® (Frois- populaire *capriônem, cf. capriuns, Gloses
sart). de Cassel, a. pr. cabrion ; cf. aussi esp. ca-
CHEVÊCHE, xu1° (chevoiche). La com- brio, lat. pop. *capreus. Le sens de «galon »,
paraison avec le prov. cavec(o) invite à y 1771, est dû à l'emploi de chevron au sens
voir un mot de la famille de cavannus, de « bandes plates disposées en angle aigu »
chat-huant ; mais la formation du mot dans le blason, cf. le dér. chevronné, dès
est obscure. le x111° s. ; chevroter, 1708, en parlant de
la voix, d’où chevrotement, 1767 (Rous-
CHEVESNE. On trouve aussi chevanne, seau) ; au sens ancien de « mettre bas »,
altération non expliquée, si ce n’est pas 1566, dérive de chevrot « chevreau », 1528,
une coquille pour chevaine. Lat. pop. *capi- d’où chevrotin, vers 1300 (chivrotin dans
linem, au lieu de capitoônem, acc. de capito, un texte lyonnais); chevrotine, 1701,
-0nis « chabot » ou « chevesne », vie s. (Au- « plomb à tirer le chevreuil ».
sone), propr. « grosse tête » (en ce sens chez
Cicéron) ; conservé de même dans le prov. CHÈVREFEUILLE. A remplacé au
moderne cabede « chabot » et dans divers Xvi1® s. l’ancienne orthographe -feuil, en-
parlers it. core chez Boileau et Mme de Sévigné. Lat.
de basse ép. capriflium.
CHEVET. Antér. chevez, d'où chevet, par
substitution de suff. Lat. capitium (dér. CHEVREUIL. À remplacé au xvire 5.
de caput) « ouverture supérieure de la tu- l’anc. forme chevreul (déjà attestée chez
nique » (1v® s. en ce sens), non attesté au Rab.). Lat. capreëlus, dér. de capra. A. pr.
sens pris par le fr., mais cf. a. pr. cabetz, cabrol, cabirol, it. capriuolo. — Dér. : che-
aux deux sens. Ailleurs représenté par le vrillard, 1740, avec altération du radical.
simple ou des dér. avec des sens différents :
« sommet, licou, etc. », v. caveçon. Signifie CHEVRIER. Lat. caprarius. It. capraio,
« Coussin » Ou « oreiller » dans quelques esp. cabrero, a. pr. cabrier.
parlers gallo-romans, notamment en picard CHEVRON, CHEVROTER, CHEVRO-
et au Nord de la Franche-Comté. TIN, v. chèvre.
CHEVÊTRE, v. enchevêtrer. CHEWING-GUM, 1922. Empr. de l’an-
CHEVEU. Lat. capillus, propr. « cheve- glais d'Amérique chewing-gum, comp. de
lure » ; a supplanté crinis, v. crin. Les par- chewing « mâchant » et gum « gomme ».
lers gallo-romans, au sud de la ligne allant En Amérique, le mot est attesté dès 1850.
de la Vendée à la Suisse romande, sauf CHEZ. Issu de locutions telles qu’en
au Sud-Est, disent poil, comme le roumain chies, fréquent en a. fr. (cf. encore le fr.
pär. It. capello, esp. cabello, a. pr. cabel. mod. de chez), lat. pop. in casa, etc.
— Dér. : chevelu, xr1° ; chevelure, vers 1080 « dans la maison », avec traitement anormal
(Roland), déjà lat. capillatura ; échevelé, de la finale, en raison de l’emploi préposi-
xI® (Alexis). tionnel du mot, cf. de même anc. esp. en
CHEVILLE. Lat. clavicüla « petite clef », cas de, languedocien a co de; développe-
d’où « vrille de la vigne » qui a dû prendre ment analogue dans les parlers de l'Italie
à basse ép. le sens moderne ; dér. de clävis septentrionale. Le picard et le wallon em-
« clef », dissimulé en cävicula, attesté à basse ploient des locutions avec maison : à notre
ép. L’acception « cheville de pied », attestée maison, etc., d’où ils ont tiré une prép.
dès le xr1° s., appartient également à l’a. mon. — Comp. chez-soi, 1694.
pr. cavilha (d’où l’it. caviglia). — Dér. :
chevillard « boucher qui vend én gros et CHIALER, pop., fin xix°. Probabl. dér.
en demi-gros » (d’après vendre à la cheville, de chiau « petit chien » (xvi®, et encore
expression du langage de la boucherie), dans les patois), avec interférence de chier
1863 ; cheviller, xr1° ; chevillette, xrrre. (cf. chier des yeux « pleurer », vulg., xvrrre).

CHEVIOTTE, 1856. Dér. de cheviot, CHIANTI, 1907. Empr. de l’it. chianti,


nom donné au vin récolté dans le Chianti
1856 « mouton d'Écosse » et « Jaine de ce (Toscane).
mouton », empr. de l’angl. cheviot « mou-
ton, laine de Cheviot hills (chaîne de mon- CHIBOUQUE, 1831. Empr. du turc {chi-
tagnes entre l'Angleterre et l'Écosse, où ce boug, autre forme de ichouboug, propr.
mouton est élevé) ». « tuyau », d’où « pipe ».
CHÈVRE. Lat. capra. Aujourd’hui con- CHIC, 1832. Terme d’argot des ateliers
currencé par bique dans de nombreux par- de peinture devenu rapidement terme de
lers septentrionaux; un mot d’origine mode. Empr. de l’all. schick « adresse;
129” CHINCHILLA

talent », qui vit surtout dans les parlers angl. chip « petit morceau » (cf. fo chip
allemands de l'Alsace; de la Suisse, de la « dr ee »). La modification en chiffe, qui
Rhénanie, dér. du verbe schicken souvent semble s'être produite en Normandie, est
employé au sens de « arranger, préparer ». due à l'influence du moyen fr. chiffre
Introduit à Paris probabl. par des Alsa- «objet sans valeur, personne insignifiante »,
ciens. — Dér. : chiqué, adj., 1839, terme sens fig. de chiffre « zéro ». — Dér. : 1° de
d'atelier, « fait avec chic », d’où chiqué, chipe : chiper, 1759 (pour le sens il faut
subst., « artifice », 1907. partir du sens « chiffonner » vivant en
Picardie, d’où « empocher en cachette ») ;
CHICANER, vers 1460 (Villon). Se rat- chipoter, vers 1560 (au xv® s. chipoirer
tache à un radical de valeur expressive « tourmenter »), le sens « petit morceau »
répandu dans presque toutes les langues est toujours sensible dans le verbe (« faire
romanes (esp. chico « petit », occitan chic, des difficultés pour des riens ; marchander
etc.). Le suffixe est probablement pris du mesquinement »); 2° de chijffe : chiffon,
verbe ricaner, dont le sens se rapproche de 1608; chiffonner, 1657 ; chiffonnier, 1640.
celui de chicaner. — Dér. : chicane, 1582;
chicanerie, fin xve; chicaneur, 1462; CHIFFRE, 1485. Empr. de l'it. cifra
chicanier, 1690, « signe numérique » et aussi « convention
secrète », par des développements de sens
CHICHE, adj., « parcimonieux », vers propres à l’it.; le mot it. est empr. lui-
1170. Mot expressif qui évoque l’idée de même du lat. médiéval cifra « zéro », qui
quelque chose de petit, de mesquin, de vient de l’arabe sifr, de même sens, propr.
peu de valeur. Existe aussi en Italie, avec « vide ». A fait disparaître l’a. fr. cifre,
de nombreux dérivés, en partie comme XIIIe s., masc. et fém., encore usuel au
terme enfantin. XvI® s., au sens de « zéro », de même ori-
CHICHE, « pois chiche », xrr1e (J. de gine. — Dér. : chiftrer, 1515; chiffreur,
Meung). Altéré, d'après le préc., de cice, 1529 ; déchiffrer, d’après le sens d’ « écri-
xir1e, empr. du lat. cicer. Celui-ci avait ture secrète », xve, d’où déchiffrable, 1609,
donné une forme régulière cerre, encore indéchiffrable, 1609, déchiffrement, 1553.
attestée au xvire s. ; Cf. de même it. cece,
a. pr. ceze(r), encore usuel dans les parlers CHIGNOLE, « dévidoir », 1753, « mau-
méridionaux. vaise voiture (qui grince) », 1922. Forme
normande de l’a. fr. ceoignole « manivelle »,
CHICHI, 1898. Mot familier de forma- du lat. vulg. “*ciconiola, dim. de ciconia
tion expressive, qui se rattache à la famille « cigogne », par comparaison de la mani-
de chiche. velle avec le long bec de l'oiseau.
CHICON, 1700, nom vulgaire de la laitue CHIGNON. Signifie « nuque » jusqu’au
romaine. Probabl. formé, par fausse régres- xvirre s. Lat. pop. *calénionem, acc. de
sion de chicorée. *calénio, dér. de catèna, propr. « chaînon »
CHICORÉE, x11° ; aussi cichorée, XV° ; (très usuel en outre au moyen âge au sens
empr. du lat. cichoreum (du grec kikhorion) de « sorte de lacet pour pendre à une po-
influencé par lit. cicoria. tence ») ; d’abord chaaignon, puis chaignon,
encore au xvi® s., devenu chignon (cf. es-
CHICOT, xvi° (Baïf). Mot expressif ser- chignon, Amyot) par croisement avec ti-
vant à exprimer l’idée de la petitesse. gnon. v. tignasse, auquel il doit son sens
_— Dér. : chicoter, 1582. — V. encore moderne, attesté seulement en 1745 (eschi-
chique, qui est d’origine différente. gnon est, de son côté, croisé avec échine).
Seulement fr. du Nord ; encore usité au
CHICOTIN, 1564 ; antér. alloeu cycoterne
sens de « nuque », sous les formes châgnon,
(1359), (aloès) cicotin, XV°; Cf. aussi cico- -eau, dans les parlers de l'Ouest (angevin,
trin, xvi*. Altération de socotrin, dér. de
Socotora, nom d’une île au sud-est de la
poitevin, etc.).
mer Rouge, d’où venait cet aloës. CHIMÈRE, x1r1e (au sens d’ « insen-
CHIEN. Lat. canis. — Dér. : chenet, sé »); emploi moderne, 1550 (Ronsard).
Empr. du lat. chimaera (du grec khimaira,
1287, à cause des têtes de chien dont les monstre mythologique). — Dér. : chimé-
chenets étaient souvent ornés, encore
usuel dans de nombreux patois, v. lan- rique, 19580.
dier ; chenil, 1387 ; chienne, x11°; chien- CHIMIE, 1554. Empr. du lat. médiéval
née, 1611 ; dans d’autres sens dès le x111° ; chimia, tiré de alchimia, v. alchimie. Écrit
chienner, xv® ; chiennerie, 1863. — Comp. : souvent chymie, du XxXvI® au XVIIe S$.
chiendent, 1340, en outre le type dent de d’après les étymologies proposées alors. —
chien en picard et en normand; autres Dér. : chimique, 1556 ; chimiste, 1557.
termes, surtout dans les parlers méridio-
naux ; chien-loup, 1775, calque de langl CHIMPANZÉ, 1738 (sous la forme quim-
wolf-dog, propr. « chien pour loup ». pezé). Empr. d'une langue de l'Afrique
CHIER. Lat. cacäre. It. cacare, esp. occidentale.
a. pr. cagar. -_Dér. chiasse, 1578; CHINCHILLA, 1611 (sous la forme chin-
chieur, 1520 ; chiure, 1640 ; chiotte, fin chille). Empr. de l'esp. chinchilla, dim. de
xixe. — Comp. : chie-en-lit, 1534 (Rab.). chinche (propr. « punaise », lat. cimet).
CHIFFE, 1611 (mais chijfetier, 1564). Chinche a été dit aussi d’une moufette
D'abord chipe, 1310, encore dans le Maine puante du Brésil, d’où chinche, xwir1°
et dans le Vendômois, empr. du moven (Buffon).
9
DICT. ÉTYM.
CHINER 130

CHINER, terme de tissage, 1753. Dér. CHIRURGICAL, vers 1370 (alors ci-).
du nom propre Chine, l’art de chiner les Empr. du lat. médiéval chirurgicalis, dér.
étoffes venant de Chine, cf. l’it. far i drappi de chirurgia, v. le suiv.
alla cinese.
CHIRURGIE, xr1r° (écrit cirurgie). Em-
CHINER, « se moquer », en fr. pop., pr. du lat. chirurgia (du grec kheirourgia,
1847. Probabl. le même mot que chiner propr. « travail manuel », d’où « opération
« travailler » de l’argot, attesté en ce sens chirurgicale », de kheirourgos « qui fait un
dans les patois de l'Ouest, où il signifie travail manuel », d’où « chirurgien »). —
aussi « quémander, voler »; altération de Dér. : chirurgien, xr1° (écrit cir-).
échiner « accabler de coups », v. échine.
CHLAMYDE, vers 1500 (écrit clamide).
CHINOIS, 1798 (certainement antérieur). Empr. du lat. chlamys, -ydis (du grec
Nom propre pour désigner des objets ou khlamys, -mydos).
des usages, soit venant de la Chine, soit
imités. — Dér. : chinoiserie, 1838, au sens CHLOR(O)-. Premier élément de mots
d’ « objet venant de Chine, etc. », et au sav. comp. tels que chlorophylle, 1817,
sens de « formalités compliquées », ce tiré du grec khlôros « vert ».
deuxième sens d’après les mœurs des fonc- CHLORE, 1815. Tiré du grec khlôros
tionnaires chinois. « vert » par Ampère pour désigner ce corps
CHIOT. Fin xix°. Empr. d’un patois du découvert par Steele en 1774. — Dér. :
Centre ou de l'Ouest, lat. catellus « petit chloral, 1831 (-al est la première syllabe
chien », a. fr. chael, très usuel, cf. it. catello, d'alcool).
esp. cadiello, a. pr. cadel.
CHLOROFORME. Ainsi nommé en 1834
CHIOURME, xve (sous la forme cheur- par Dumas, « à cause de sa propriété de
me). Terme de l’argot des galériens, cf. former du chlorure de potassium et de
cadène, empr. de l’it. ciurma, forme dialec- l’acide formique sous l’influence d’une s0-
tale génoise, lat. celeusma « chant par lution alcoolique de potasse caustique »,
lequel le chef des rameurs dirigeait les Würtz, Dict. de Chimie.
mouvements » (du grec keleusma, de même
sens, propr. « ordre »). CHOC, v. choquer.
CHIPER, v. chiffe. CHOCOLAT, 1671, antér. -ate, 1643;
CHIPIE, 1821 (écrit chipi). Est attesté chocholate, 1591. Empr. de l'esp. chocolate,
presque en même temps dans les parlers empr. lui-même de l’aztèque chocolatl. —
normands, d’où il semble avoir été apporté Dér. : chocolatier, 1706 ; chocolatière, 1680.
à Paris. Probablement comp. de chipe et CHŒUR, vers 1120. Francisation du
de pie, cet oiseau passant pour avoir toutes lat. chorus (du grec khoros), v. chorus.
sortes de défauts.
CHIPOLATA, 1774 (Voltaire, masc.). CHOIR. Ne s'emploie plus que par ar-
Empr. de lit. cipollata, dér. de cipolla chaïsme ; a cédé la place à {omber. Survit
« oignon », v. ciboule. dans les parlers septentrionaux de la péri-
phérie. — Dér. : chute, xrve (Froissart),
CHIPOTER, v. chiffe. réfection, d’après le part. passé chu, de
CHIPS, plur., 1948. Empr. de l’angl. l’a. fr. cheoite, fém. pris substantiv. du
chip « morceau mince ». part. passé, lat. pop. “*cadectus, formé
d’après collectus; d’où chuter, 1835. —
CHIQUE, 1798 («tabac mâché »). Radical Comp. chape-chute, x1Ir° (kapekeue),
onomatopéique qui imite le bruit que fait comp. de chape et d’une anc. forme du
celui qui mâche. Au sens de « bille », part. passé, littéral. « chape (manteau)
1642, mot dialectal des parlers de l'Est, que qn. a laissé tomber », d’où « bonne au-
qui vient du rhénan « jeu de billes », de la baine » ; méchant, xr1e (sous la forme mes-
famille de l’all. schicken « envoyer ». — cheant), part. prés., devenu adj., de l’anc.
Dér. : chiquer, 1794, en picard et en nor- verbe méchoir, xri° (du préf. mes et de
mand signifie « manger ». Voir aussi chicot. choir), signifiant propr. « qui a mauvaise
CHIQUÉ, v. chic. chance », d’où « misérable, sans valeur »
CHIQUENAUDE, 1530 (écrit -ode). (quand l’adj. est devant le subst.), enfin
Probabl. dér. du radical onomatopéique « porté à mal faire », xive; a supplanté
chic, dont on s’est servi pour imiter des l’adj. mal, v. mal, et s’est répandu dans
bruits subits (comp. argot chic « fouet » les parlers gallo-romans ; d’où méchanceté,
dès le xvr° s., faire chic « rater (d’un fusil) » 1380, dér., d’après les subst. en -f, de
l'a. fr. mescheance « malchance », qui a sur-
répandu dans les parlers depuis la Lorraine vécu jusqu’au xvis., avec développement
jusque dans le Rouergue). La deuxième sémantique d’après l’adj. ; parachute, 1784
partie du mot vient probabl. de baguenaude (inventé par Blanchard, célèbre aéronaute,
(les gousses du baguenaudier font partir 1753-1809) ; parachutiste,
leurs graines dans toutes les directions, 1932 ; rechute,
en éclatant).
1475, par l'intermédiaire d'un anc. verbe
rechoir, x11°, encore en Lorraine. V. déchoir,
CHIQUETER, v. déchiqueter. échoir.
CHIR(O)-. Premier élément de mots CHOISIR, xue. Signifie surtout « aper-
sav. comp., tels que ch(e)iroptère, 1797, cevoir » jusqu’à la fin du xvies. Du gothique
tiré du grec kheir « main », ou de mots kausjan « éprouver, goûter », introduit très
empr., tels que chiromancie, 1419 (à Mâ- tôt, probabl. comme terme de la langue
con) (écrit sir-, en 1495 cyr-). militaire, cf. all. kiesen « choisir », angl. do
151 CHRESTOMATHIE

choose. A. pr. causir, aux deux sens, anc. babl. d’origine gauloise) en wallon et lor-
génois scoxæir « distinguer ». Aujourd’hui, rain et un dim. du type cholet en picard et
le sens de « regarder » ne survit qu’en surtout dans les parlers méridionaux (prov.,
Suisse romande. — Dér. : choix, xr1°. languedocien et gascon). — Comp. : chou-
fleur, 1611 (et chou-fleuri), d’après lit.
CHOLÉRA, 1549. Empr. du lat. cholera cavolo fiore, seule forme connue d’O. de
(du grec kholera, de même sens). — Dér. : Serres, ce qui indique que le chou-fleur est
cholérine, 1831 ; cholérique, 1826, d’après d’origine italienne ; chou-rave, xvre.
le lat. cholericus (du grec kholerikos) ; pour
kolorike, xir1°, V. colère. CHOUAN, 1795. Nom donné aux insur-
CHÔMER. Lat. de basse ép. caumäre, gés de l'Ouest contre la Révolution en
dér. de cauma, v. calme, qui a pris le sens 1791, d’après le nom d’un de leurs princi-
de « se reposer pendant la chaleur », d’où paux cheîfs,-Jean Cottereau, dit Jean
« ne pas travailler ». Seulement fr. en ce Chouan, qui avait été faux-saunier comme
sens. — Dér. : chômable, xve ; chômage,
ses trois frères, et auxquels on avait donné
le surnom de Chouan, parce qu'ils imi-
xII1e ; chômeur, 1876.
taient le cri du chouan (v. chat-huant) pour
CHOPE, 1845. Empr. de l’alsacien s'appeler et s’avertir. — Dér. : chouan-
schoppe(n) « grand verre de bière » intro- nerie, 1794.
duit par les brasseries alsaciennes installées
à Paris. CHOUCAS, 1530. Semble être un mot
onomatopéique, ce qui expliquerait la
CHOPINE, xir1°. Empr. du moyen bas- forme insolite de la terminaison, cf. aussi
all. schôpen « puisoir du brasseur ». L’all. l’a. pr. caucala « corneille », le prov. mo-
schoppen, qui n’est attesté que depuis le derne chouca, verbe désignant le cri du
xviie, est empr. d’une forme chopaine hibou, et l’angl. chough « choucas ».
« chopine » très répandue dans les parlers
de l'Est. — Dér. : chopinette, xv°; cho- CHOUCROUTE, 1768, d’abord sorcrolte,
piner, 1482. 1739. Empr. du dialecte all. de l’Alsace
sûrkrût, correspondant à l’all. Sauerkraut,
CHOPPER. D'abord çoper, x11°, devenu littéral. « herbe » (krût) aigre (sûr) », v.
chopper, par croisement avec choquer, v. sûr, avec adaptation pop. d'après chou et
le suiv., ou forme dialectale; peut-être croûle.
onomatopée, imitant le bruit produit par
un heurt. — Comp. : achopper, vers 1180, CHOUETTE, oiseau, xr1°. Altération de
d’où achoppement, xIve. l’a. fr. çuele, mot d’origine onomatopéique
d’après le cri de l’oiseau (cf. de même lit.
CHOQUER, xrr1e. Du radical onomato- civetta), par croisement avec l’a. fr. choe,
péique {chok-, qui se retrouve dans le néerl. oiseau du même genre, de l’anc. francique
schokken et l’angl. to shock. — Dér. : choc, *kLawa « corneille », cf. le néerl. kauw, id. ;
1523. — Comp. : entrechoquer (s’), 1550. la nature onomatopéique de ces mots ap-
paraît dans l’angl. {o caw « coasser ».
CHORAL, 1336 ; choriste, 1359. Le pre- Chouetle est aujourd’hui le terme dominant
mier est dér. du lat. chorus, le deuxième des parlers gallo-romans ; choue survit
empr. du lat. médiéval chorisia, v. chœur. dans quelques parlers septentrionaux; les
parlers méridionaux ont des formes variées
CHORÉGRAPHIE, 1701 (R. A. Feuil- dont quelques-unes semblent formées com-
let), comp. du grec choreia « danse », dér. me l’a. fr. çuele.
de chéros, et de graphie; a supplanté en
partie orchésographie, plus ancien. — Dér. : CHOUETTE, adj., 1830. Paraît être un
chorégraphe, 1829. emploi figuré du précédent, la chouette
passant dans le peuple pour un oiseau
CHORUS, xve; s'emploie seulement coquet, cf. a. fr. choeler « faire le coquet »,
dans la locution faire chorus. Empr. du et chez Rab., III, 14 : « Ma femme sera
lat. chorus, v. chœur. jolye comme une belle petite chouette »,
cf. aussi l’it. civetla « chouette (oiseau) »
CHOSE. Lat. causa, qui a pris à basse
époque le sens de « chose », en remplace- et « femme coquette ».
ment du lat. class. rés, v. rien. A. pr. CHOUQUET, v. souche.
cauza, it. esp. cosa. — Dér. : chosette,
x1r1e ; chosier, vers 1500. — Comp. : quel- CHOYER. Forme qui ne paraît pas an-
que chose, xvi° ; a remplacé l’a. fr. auques, térieure au xvire s.; d’abord chouer, xvI®
lat. aliquid, avec modification postérieure et, au moyen âge, chuer, xiri°. Mot propre
de la terminaison, cf. a. pr. alque(s), esp. au fr. ; lit. soiare « cajôler » est empr. du
algo; ne survit plus aujourd'hui qu’en fr. Peut-être formation onomatopéique du
wallon, lorrain, franc-comtois et dans la langage enfantin.
Suisse romande; divers composés dans
les patois méridionaux. Le franco-proven- CHRÊME, xu-xuie s. (sous la forme
çal et le Midi disent surtout quauque ren cresme). Du lat. eccl. chrisma (du grec
khrisma « onction, huile »); cf. de même
CHOTT, 1873. Empr. de l’arabe choit, it. cresima.
propr. « bord d’un fleuve ». CHRESTOMATHIE, 1813; une pre-
CHOU. Lat. caulis. Concurrencé dans mière fois en 1623. Empr. du grec khrésto-
les parlers gallo-romans par cabus en wal- matheia, de même sens, littéral. « recueil
lon, joie, xiie (dans l'Ouest « bette », pro- de textes utiles (khréstos) ».
CHRÉTIEN 132

CHRÉTIEN, 842 (Serments de Stras- CHYLE, xve. Empr. du lat. médical


bourg). Francisation du lat. eccl. chrislia- chylus (du grec khylos « suc »).
nus (du grec khristianos). — Dér. : chré-
tienté (vers 1050, Alexis), sur le modèle du CHYME, 1753. Empr. du grec chymés
lat. eccl. christianitas. — Comp. : bon- «€ suc ». -
chrétien, xve {poyres de bon-chrestien) ;
CI, v. ici.
l’origine de cette dénomination n’est pas
établie.
CIBLE, 1693 (longtemps dit cibe, forme
CHRIST, x° (Eulalie); christianisme, encore relevée par Boiste, 1829). Empr. du
x111e. Empr. du lat. christus, christianismus dialecte alémanique de la Suisse schibe
(du grec khrislos (v. messie), khristianis- (all. Scheibe, de même sens, en outre « dis-
mos). que, carreau de vitre ») par la Suisse fran-
CHRISTIANIA, 1906. De Christiania, an- çaise où le mot est attesté aux deux sens,
cien nom d’Oslo, capitale de la Norvège. dès la fin du xve s.; de là, par suite de
l’éclat des fêtes de tir en Suisse, a passé
CHROMATIQUE, 1552. Empr. comme dans la région lyonnaise, d’où il s’est ré-
terme de musique du lat. chromaliens, pandu à l’époque napoléonienne.
grec chromatik6s.
CHROME, 1797. Fait par Vauquelin sur CIBOIRE, xr1° (sous la forme civoire).
le grec khrôma « couleur ». Empr. du lat. eccl. ciborium; a existé
aussi en lat. class. avec le sens du grec
CHROM(O)-. Premier élément de mots kibôreon, propr. « gousse du nénuphar
sav. comp., tels que chromolithographie, d'Égypte (qui servait de coupe dans ce
1838, tiré du grec khrôma, v. le préc. pays) », d'où « vase ».
CHRONIQUE, subst., 1138. Empr. du
lat. chronica, du grec chronikà biblia « livre CIBOULE, xve. Empr. de l’a. pr. cebula,
qui se rapporte au temps » (de chronos lat. caepulla, dim. de caepa « oignon ».
« temps »). — Dér. : chroniqueur, 1476.
CICATRICE, x1v° ; cicatriser, 1314 (-icer,
CHRONIQUE, adj., xive. Empr. du lat. au xvi® s.). Empr. du lat. class. cicatrix
chronicus « qui se rapporte au temps » ; le et du lat. médiéval cicatrizare (en lat.
sens médical est déjà attesté en lat. de class. -icare). — Dér. du verbe : cicatrisa-
basse ép. tion, 1314.
CHRON(O)-. Premier élément de mots CICÉRO, 1657. Tiré de Cicero, forme
sav. comp., tels que chronomètre, 1704, lat. de Cicéron ; dit ainsi d’après les carac-
tiré du grec khronos « temps ». tères que l’imprimeur U. Gallus employa
pour la première édition d'œuvres de Cicé-
CHRYS(O)-. Premier élément de mots ron, à Rome, en 1458.
sav. comp., tels que chrysocale, 1825 (pour
-chalque, 1823 ; crisocane, en 1372), tiré CICERONE, 1753. Empr. de l’it. cice-
du. grec khrysos « or », x11° ou de mots rone, emploi fig. de Cicerone, donné par
empr., tels que chrysolithe, id.; chryso- plaisanterie, à cause de leur verbosité, aux
prase (de prasos « poireau »), id., sous la guides qui font visiter les curiosités des
forme crisopras (tous deux par l’intermé- villes.
diaire du lat.).
CICÉRONIEN, vers 1327. Empr. du lat.
CHRYSALIDE, 1692. Empr. du lat. ciceronianus.
chrysallis, -idis (du grec khrysallis, -idos,
de khrysos, v. le préc.). CICINDÈLE, 1754. Empr. du lat. cicin-
dela « ver luisant » (en ce sens, 1564, Rab..).
CHRYSANTHÈME, 1775. Empr. du lat.
chrysanthemon (mot pris au grec, de anthe- CIDRE. D'abord cisdre. Lat. eccl. sicera,
mon « fleur ») ; sous la forme anc. en 1543. altéré en *cisera « boisson enivrante » (du
grec de la Septante sikera, de même sens,
CHUCHOTER, 1611. Antér. chucheter empr. de l’hébreu chekar, Lévitique, X,
(vers 1400 et jusqu’au xvrrre s.), en 1606 9, etc.) ; a pris de bonne heure le sens mo-
aussi chucher, dans les parlers chuchuler. derne, par une spécialisation qui a dû
Onomatopée. Le groupe de consonnes {ch naître dans la région normande, mais s’ap-
répété et avec les voyelles ü, i au milieu plique encore au jus de la poire, comme à
exprimant très bien le bruit du chuchote- celui de la pomme, au xvi® s., dans la
ment. — Dér. : chuchotage, 1782 : chucho- région de Paris ; au moyen âge on dit aussi
tement, vers 1580 (Montaigne) : chucho- pommé, encore dans les parlers, cf. a. pr.
terie, 1718. pomada. Existe dans tous les parlers gallo-
romans (dans de nombreux parlers sous la
CHUINTER. Onomatopée (se rattache forme citre), sauf pomada dans l'extrême
à chuchoter) : « Ce mot, inconnu jusqu’à Sud-Ouest. L’it. sidro et l'esp. sidra vien-
nous, peint si parfaitement la prononciation nent du fr.
de ch, que nous n’avons pu nous refuser à en
enrichir notre langue », Court de Gibelin, CIEL. Lat. caelum ; le plur. caeli, d’ori-
1776. — Dér. : chuintement, 1873. gine biblique et chrétienne (rare aupara-
CHUT, xvie (écrit cheul). Onomatopée. vant et seulement chez les poètes) est fait
— Dér. : chuter, 1834. sur l’hébreu chamayim, plur. (il en est de
même du plur. du grec ouranos). It. esp.
CHUTE, v. choir. cielo. V. arc-en-ciel.
133 CIPPE

CIERGE. Lat. cêreus, adj. pris substan- tion du bas grec. A. pr. cimenleri, la forme
tiv., dér. de céra « cire » ; autres formes du ancienne cimentiere survit en picard et
moyen âge cirge et cerge. Développement dans l'Ouest ; aitre (on a aussi des dér.),
non spontané ; le mot est resté en contact en wallon et en lorrain, est empr. du lat.
avec le lat. écrit, le cierge étant employé atrium, qui, du sens de « cour », a pris au
surtout dans les églises. Il en est de même moyen âge celui de « parvis », puis de
de l’esp. cirio et de l’a. pr. ciri. AT près de l’Église, servant de cime-
ière ».
CIGALE, xv°. Empr. du prov. cigala,
lat. cicäda, d’où aussiit. cicala, esp. cigarra. CIMIER, v. cime.
CIGARE, 1776; d’abord cigarro, 1723. CINABRE, xrr1e (sous la forme cenobre).
Empr. de l'esp. cigarro, d’origine incer- Empr. du lat. cinnabari (du grec kinnabari,
taine. À été parfois fém., p. ex. chez Cha- d’origine orientale).
teaubriand (1811); l’est encore dans le
Sud-Est. — Dér. : cigarette, 1831, d’où CINÉ(MAT)-. Premier élément de mots
porte-cigarettes, fin x1x° ; cigarière, 1863. sav. comp., tels que cinématographe, début
— Comp. : porte-cigares, 1845. xx° 8. (mot créé par les inventeurs, les
frères Lumière), tiré du grec kinéma « mou-
CIGOGNE, 1113. Empr. du prov. ce- vement » ; d’où les formes abrégées cinéma,
gonha, influencé par le lat. ciconia ; a rem- ciné. — Dér. : cinéaste, vers 1930.
placé l'a. fr. soigne, issu de *ceoigne, cf. it.
cicogna, eSp. cigüenña. CINÉRAIRE, 1753. Empr. du lat. cine-
rarius, dér. de cinis, cineris « cendre ».
CIGUË, x11° (en outre cegüe, au xl).
Adapté du lat. cicüla; a remplacé l'a. fr. CINGLER, « faire voile ». D'abord sigler,
ceuë, cf. encore le normand chue. vers 1080 (Roland). De l’anc. scandinave
sigla, cf. all. segeln, angl. to sail, de même
CIL. Lat. cilium. Aujourd'hui concur- sens, devenu singler, fin xIv*, par croise-
rencé dans les parlers gallo-romans par les ment avec le suiv., le navire singlant sous
types sourcil, paupière, poil. It. ciglio « cil, l'effet du vent qui cingle (cf. « singler, navi-
sourcil », esp. ceja « sourcil », a. pr. cilh guer en plein vent », Nicot, 1606). L’ortho-
« sourcil ». — Dér. : ciller, xr1°, d'où, graphe cingler, xv1°, est due de même à un
d’après le sens de « coudre les paupières rapprochement avec le suiv., les deux mots
du faucon qu’on dresse », xrr1° s., déciller ayant été rattachés au lat. cingulum « cein-
(ou dessiller) « découdre les paupières du ture, courroie » (single « voile », antér. sigle,
faucon », xirie ; sens fig. au xvi® s., seul n’était plus usité, mais on le lisait notam-
usuel aujourd’hui. ment chez Froissart). — Dér. : cinglage,
1543.
CILICE, xuie s. (écrit celice). Empr. du
lat. eccl. cilicium, qui signifie en lat. class. CINGLER, « frapper avec une baguette
« étoffe grossière, faite en poil de chèvre flexible », etc., x1r1° s. (singler, encore au
de Cilicie », et qui a servi à traduire l’hé- XVIIe s., mais cingler déjà au XIV°8., chin-
breu saq « cilice, haïre », v. sac. gler, forme picarde, au xrr1° s.). Altération
de sa-n-gler, au sens de « frapper », en
CIMAISE, xu°. Du lat. cymatium (du si-n-gler, par modification expressive de la
grec kymalion, propr. « petite vague », de voyelle, v. sangler et tinter.
kyma « vague »; dit ainsi à cause de la
forme ondulée de la moulure). CINNAME, 1636; cinnamome, XIII°
(écrit chi-). Empr. du lat. cinnamun, cin-
CIME. Lat. cyma « tendron de chou ou namomun (du grec kinnamon, kinnamô-
d’autres plantes » (du grec kyma, même mot mon).
que celui qui signifie « vague », étvmologi-
quement « ce qui est gonflé ») ; a servi de CINQ. Lat. pop. cinque (Inscriptions),
bonne heure en lat. pop. à désigner l'extré- lat. class. quinque (pour ce traitement, v.
mité d’autres objets que celle des plantes. cuire). It. cinque, esp. cinco. — Dér. :
_— Dér. : cimier, xr11° ; écimer, 1564. cinquième, xr1° (Chrétien : -isme).
CIMENT. Lat. caementum « pierre non CINQUANTE. Lat. pop. cinquantia (Ins-
taillée », v. cément ; a pris de bonne heure criptions), lat. class. quinquaginia. It. cin-
le sens de « ciment », parce que les maçons quanta, esp. cincuenta. — Dér. : cinquan-
romains avaient l'habitude de mêler au taine, x1r1° ; cinquantième, id.; cinquan-
mortier les éclats de marbre qui se déta- tenaire, 1872, d’après centenaire.
chaient en le travaillant ; développement
de l'initiale, peut-être déjà lat. CINTRER. Lat. pop. *cinciüräre, dér.
anormal de cinclüra « ceinture », au sens de « dis-
It. cimento, en outre au sens fig. «épreuve »,
esp. cimiento, seulement « fondement ». — poser en forme de ceinture ». Écrit ceintrer
Dér. : cimenter, xIv®.
(d’où ceintrage, 1694), comme terme techn.
de la marine. — Dér. : cintre, 1300.
CIMETERRE, xve. Empr. de l’it. sci-
mitarra, empr. lui-même du turco-persan CIPAYE, 1768 (Voltaire) ; antér. cipay,
1770; sepay, 1750. Empr. du port. sipay,
chimchir. cipay, empr. lui-même d’une langue de
CIMETIÈRE, xu° (cimitere; souvent l'Inde, qui l’a pris au persan sipahi, propr.
cimentiere au moyen âge). Empr. du lat. « cavalier » (de là aussi l’angl. sepoy),
eccl. coemeterium (du grec eccl. koimétérion, v. spahi.
propr. « lieu de repos, où l’on dort ») ; la
vovelle i est peut-être due à la prononcia- CIPPE, 1718. Empr. du lat. cippus.
CIRCON- 134

CIRCON- {circom-). Préf. de mots sav. CIRRE, 1545. Empr. du lat. cirrus,
comp., tels que circompolaire, 1784, tiré propr. « boucle de cheveux ».
du préf. lat. circum « autour ».
CIRRUS, 1847. Empr. du lat. cirrus, qui
CIRCONCIRE, xr°; circoncision, id. a aussi le sens de « filaments ».
Empr. du lat. eccl. circumcidere, en lat. CIS-. Premier élément de mots sav.
class. « couper autour », circumcisio. tiré du préf. lat. cis « en deçà de », ou de
CIRCONFÉRENCE, xur1e (J. de Meung). mots empr.
Empr. du lat. circumferentia (de circum- CISAILLES. Lat. pop. *cisäculum, réfec-
ferre « faire le tour », cf. circumferens linea tion de *caesaculum (comp. ciseau), formé
« ligne circulaire »). avec le suff. -aculum, fréquent dans les
CIRCONFLEXE, 1550 (Meigret); en noms d’outil (cf. tenaculum). A. pr. cizalha,
1529, circumflect. Empr. du lat. circum- catalan cisalla. — Dér. : cisaïller, 1450,
flezus (accentus), traduction du grec peris- d’où cisaille, 1324, « rognure de métal ».
pômené (prosôdia), propr. « accent tiré CISEAU. Lat. pop. *cisellus, formé com-
autour », en parlant de l’accent musical, me martellus, qui a dû se substituer à
qui monte (aigu), puis qui descend (grave). *caesellus « instrument servant à couper »
CIRCONLOCUTION, xrr1e. Empr. du lat. (de caedere « couper »), d’après des dér. de
circumlocutio (traduction du grec periphra- ce verbe tels que abscisus « coupé », exciso-
sis « périphrase »). rius « qui sert à couper », cf. cisorium «ins-
trument tranchant », 1v° (Végèce) ; ciseaux
CIRCONSCRIRE, xive (Oresme); cir- (de couturière) date du xn1° s. A. pr. cizels
conscription, Oresme ; sens administratif, « ciseaux », catalan cisell « ciseau ». —
1835. Empr. du lat. circumscribere, -scrip- Dér. : ciseler, x111° ; ciseleur, xvr° ; ciselure,
to. 1307 ; ciselet, 1491.
CIRCONSPECT, xive (Christine de Pi- CISTE, 1554 (écrit cisthe). Empr. du
san) ; circonspection, xir1e. Empr. du lat. grec kisthos (et kistos).
circumspeclus, circumspectio (de circum-
spicere « regarder autour, examiner »). CISTRE, vers 1550. Empr. du lat.
cithara, mais peut-être avec influence de
CIRCONSTANCE, 1283 (Beaumanoir). sistrum « crécelle ».
Empr. du lat. circumstantia, dér. du verbe CITADELLE, xve. Empr. de l’it. citta-
circumslare « se tenir autour ». — Dér. : della, dim. de l’anc. it. citiade, aujourd’hui
circonstanciel, 1747 ; circonstancier, xve. citlà, V. cité.
CIRCONVALLATION, 1640. Dér. sav. CITADIN, xve (plusieurs fois au x1r1° s.
du lat. circumvallare « faire une circonval- dans un texte italianisant). Empr. de lit.
lation » (de vallus « pieu, palissade »). ciltadino, dér. de l’anc. it. citlade, v. le
CIRCONVENIR, xive (Bersuire). Empr. préc.
du lat. circumvenire, propr. « venir au- CITÉ. Lat. civilätem, acc. de civitas,
tour », d’où « assiéger, accabler », d’où propr. « ensemble des citoyens » ; n’a con-
« tromper » à basse ép., sens qui est le plus servé en lat. pop. que le sens de « ville »
proche du sens fr. (avec, en plus, la notion de « groupement
organisé »). Le sens nettement politique a
CIRCONVOISIN, 1387. Empr. du lat. été repris au lat. au xvi® s. Certains em-
tardif circumvicinus « situé tout autour », plois : cités ouvrières, cités-jardins sont ré-
attesté dès 873 ; la 2e partie du mot a été cents. — Dér. : citoyen, x11e (alors citeien,
adaptée au français. XIIe, d’abord au sens de « citadin » ; d’où
CIRCONVOLUTION, xrr1°. Dér. sav. du concitoyen, 1290, d’après le lat. de basse
lat. circumvolutus « roulé autour ». ép. concivis).
CIRCUIT, 1257. Empr. du lat. circuitus, CITER, 1257; citation, xive (Bersuire).
dér. du verbe circuire, autre forme de cir- Empr. du lat. citare, propr. « mettre en
cumire « faire le tour ». — Comp. : court- mouvement », d’où en latin juridique « con-
cireuit, 1907. voquer, citer en justice », etc., citatio. —
Comp. du verbe : précité, 1799.
CIRCULER, xive (Oresme) ; circulaire,
id. ; circulation, vers 1360. Empr. du lat. CITÉRIEUR, xve. Empr. du lat. citerior.
circulari, circularis (créé à basse ép.), cir- CITERNE. Lat. cisterna (dér. de cista
culatio. — Dér. du verbe : circulatoire, « coffre »).
Xvi® (Paré), le lat. circulatorius a un autre
sens. CITHARE, xive (la forme kilaire, du
x111° s., est empr. de l'esp. quitarra, lui-
CIRE. Lat. céra. Dér. : cirage, 1554 ; même de l'arabe gitdra). Empr. du lat.
cirer, xui°; cireux, 1542 (rare avant le cithara (du grec kithara).
xXIx®); cirier, vers 1220.
CITOYEN, v. cité.
CIRON, xrrre, En a. fr. aussi sueron, CITRATE, 1782; citrique, id. Dér. sav.
suiron ; du francique *seuro (cf. anc. haut
all. siuro ; de même a. pr. soiron, de même du lat. citrus « citron ».
sens, du gothique *siurjo). CITRON, 1393 (chitron). Dér. sav. du
lat. citrus. — Dér. : citronnier, 1530 ; -elle,
CIRQUE, xive (Bersuire). Empr. du lat. 1611; -ade, 1907 (déjà 1845 au sens de
circus. « mélisse »).
135 CLAQUER

CITROUILLE, 1536. Issu, par substitu- piém. cea, port. chevas « ridelles d’une char-
tion de suff., de citrole, xxr1°, encore poite- rette ». — Dér. : clayère, 1863, en outre
vin, empr. de l’it. citruolo, dér. du lat. ci- cloyère, 1771, forme dialectale ; clayette,
trium (de citrus « citron ») ; la citrouille a 1863; clayon, 1642; clayonnage, 1694.
été ainsi nommée à cause de sa couleur
CLAIR. Au moyen âge surtout cler;
jaune citron, v. courge. clair à partir du xive s., d’après le mot
CIVE, v. le suiv. lat. Lat. clärus. It. chiaro, esp. claro (repris
CIVET, 1636, antér. civé, xit1°. Propr., au latin). — Dér. : clairet, adj., x11° S., en
« ragoût préparé avec des cives », dér. de parlant du vin, d’abord claré, formé comme
l’a. fr. cive, encore en Normandie au sens civé, v. civet, devenu claret, par substitu-
de « ciboulette », lat. cepa « oignon », d’où tion de suff., puis clairet, d'après clair,
aussi civette « ciboulette », 1549. xive; claret, empr. par l’angl. au xv°s.,
a été repris par le fr. vers 1830 ; clairière,
CIVETTE « sorte de martre », 1467. 1660 (La Fontaine); clairon, xinu°; Clai-
Empr. de lit. zibelto (on trouve parfois ronnant, fin xix°; clarine, xvie, fém. pris
gatto zibelto), empr. lui-même de l'arabe substantiv. de l’anc. adj. clarin, d’où clari-
zabäd «sorte de muse (que produit l’animal nette, 1753. — Comp. claire-voie, 1412,
appelé qatt (« chat ») az-zabd) ». fait sur le modèle d’orbe voie, propr. « voie
CIVIÈRE. Probabl. lat. pop. cibaria, aveugle, sorte de fausse ouverture », cf.
fém. pris substantiv. de l'adjectif cibarius, pour le sens voie d’eau ; on propose d’inter-
dér. de cibus « nourriture », c’est-à-dire préter voie comme le subst. postverbal de
« véhicule servant au transport des provi- voir, mais cette formation fém. est difficile
à justifier ; elair-obseur, 1668 (d’après l’it.
sions (fourrage, etc.) »; au moyen âge
signifie surtout « civière à fumier », cf. la. chiaroscuro ; on a, dès 1596, clair ei obs-
cur); clairsemé, xre (Chrétien); clair-
pr. civiera « civière » (le mot est attesté en
outre dans des dialectes italiens avec des voyant, xirre (J. de Meung), d’où clair-
sens divers) ; ci- au lieu de ce- (comp. ber- voyance, 1580 (Montaigne).
richon cevière) n’est pas expliqué de façon CLAMEUR. Lat. clamôrem, acc. de cla-
satisfaisante. mor « cri ». Signifie aussi en a. fr. « plainte»,
CIVIL, 1290; civilité, xrv® (Oresme). comme l’a. pr. clamor, d’après le verbe
Empr. du lat. civilis, en tous ses sens, et clamer, lat. clamäre, disparu au xvrI* S.
du dér. civilitas « affabilité » (de civis « ci- CLAMPSER, fin xixe. Mot argotique,
toyen »). — Dér. : civiliser, 1568 ; civili- qui semble d’origine onomatopéique, cf. les
sable, fin xviie (Cuvier); civilisateur, variantes clapser, crapser, crampser, Cram-
1836 ; civilisation, 1756 (créé par Mirabeau ser.
dans L'Ami de l'Homme) ; jusqu'alors la
notion était exprimée par police (et l’adij. CLAN, 1759. Empr. de l’irl. clann, propr.
policé) ; l'excès de sens de police et l’enri- « descendant ».
chissement des idées se rapportant au pro- CLANDESTIN, xive (Bersuire). Empr.
grès de l’homme en société ont fait recher- du lat. clandestinus (de clam « en secret »).
cher un mot nouveau. Après 1800, par —— Dér. : clandestinité, 1671.
suite des événements historiques et des
voyages de découvertes, civilisation a pris CLAPET, 1517. Dér. de l’a. fr. claper
le sens nouveau d’ « ensemble des carac- « frapper », de formation onomatopéique.
tères que présente la vie collective d’une CLAPIER, 1365 (sous la forme glapier).
société donnée (sauvage, etc.) ». Civiliser, Empr. de l’a. pr. clapier, de même sens, et
civilisation ont été en outre juridiques : en outre « tas de pierres », dér. de clap « tas
« rendre, action de rendre civil un procès
de pierres » ; le prov. moderne clap signifie
criminel ». surtout « éclat (de pierre) », et le fém.
CIVIQUE, 1504, en parlant de la cou- clapo « caillou » ; tous ces mots appartien-
ronne civique des Romains ; sens moderne nent à une famille de mots d’origine pré-
vers la Révolution (chez Turgot). Empr. romane *klappa « pierre plate ».
du lat. civicus, à cause de la pléthore des CLAPIR, 1701 ; elapoter, 1832 (clappet-
sens du préc. — Dér. : civisme, 1770.
ler, 1611), d’où clapotage, 1728, clapotis,
CLABAUD, vers 1485. Probabl. tiré 1831 ; clapper, xvi®, clappement, 1838.
d’un verbe non attesté *claber, variante dia- Tous ces mots contiennent un radical ono-
lectale de clapper, cf. clabet « crécelle », 1420 matopéique clap, qui se retrouve dans l’all.
(texte de Lille) ; le néerl. klabbaerd « cré- klappen « claquer » et l’angl. {o clap « id. »;
celle », peut être formé d’après le fr. et ne v. aussi les préc. et esclaîffer (s’), éclater.
prouve rien en faveur de l'origine néerl. de
clabaud. — Dér. : clabauder, 1564, d’où CLAQUER, vers 1508. Onomatopée. —
clabaudage, 1567, clabauderie, 1611, cla- Dér. : claque, fém., 1306; le masc. est
baudeur, 1554. de 1823 ; de claque, terme de cordonnerie,
du dérive claquer « garnir de claque des chaus-
CLAFOUTI, 1869. Mot dialectal sures », 1863 ; claquement, 1552 ; claquet,
Poitou, du Berry, du Limousin, né sous xve; claquette, 1549 ; claqueur, 1781. —
l'influence de foutre de l’afr. claufir Comp. : claquedent, xv° (nom propre) ;
« attacher avec des clous », dialectal clafir claquemurer, 1644 (Scarron), dér. de la
« remplir ». locution contemporaine à claquemur, c’est-
CLAIE, Gaulois *cléta, cf. anc. irl. cliath, à-dire « dans un endroit si étroit que le
mur claque ».
gallois clwyd, de même sens. À. pr. cleda,
CLARIFIER 136

CLARIFIER, x11° Empr. du lat. eccl. CLEF. Lat. clävis. It. chiave, esp. lave,
clarificare « glorifier »; n’a que ce sens a. pr. clau. La locution clef des champs a
avant le xvi® s. Développement séman- déjà été relevée vers 1317. — Dér. :
tique d’après clair. — Dér. : clarification, claveau (de porte), 1380 ; clavette, xr1e, au
vers 1400, d’après le lat. clarificare ; clari- sens propre de « petite clef » ; clavier, xrre,
ficatio, qui existe en lat. eccl. au sens de signifiait aussi alors « porte-clefs
« glorification », a été emprunté en ce sens ». —
Comp. : porte-clefs, vers 1600.
vers 1495.
CLÉMATITE, 1559 (avec le suff. -ide).
CLARINE, v. clair.
Empr. du lat. clematitis (du grec klématitis,
CLARTÉ, Lat. clarilas, dér. de clärus, de kléma « sarment »).
V. clair. A. pr. clartat, clardat.
CLÉMENT, 1213 ; clémence, xrrre. Empr.
CLASSE, xive (Bersuire). Empr. du lat. du lat. clemens, clementia.
classis « classe de citoyens ». Les autres
sens se sont développés en fr. — Dér. : CLENCHE, xrr1e. Anc. francique *klin-
classer, 1756, classement, 1784, déclasser, ka, correspondant à l’all. Klinke, moyen
1813 (« retirer de l'inscription maritime »), néerl. klenke. Seulement fr. du Nord. —
déclassement, 1836 ; classification, 1752. Dér. : déclencher, 1732, déclenchement,
1863. — Comp. : enclancher, 1870.
CLASSIQUE, 1548. Empr. du lat. clas-
sicus, propr. « de première classe », pour CLEPHTE, 1824 (Fauriel, Chanis popu-
servir d’adj. à classe « appartenant à la laires de la Grèce moderne). Empr. du grec
première des cinq classes en lesquelles moderne klephihés, grec anc. kleptés « vo-
étaient divisés d’après leur fortune les leur » ; avec ce dernier mot ont été formés
citoyens romains ». Au n° s. Aulus Gel- cleptomane, fin xixe, cleptomanie, 1872.
lius recommanda de s'adresser aux classi-
ci, non aux prolelarii, pour se renseigner CLEPSYDRE, xive (écrit clepsidre).
sur le bon usage en fait de langue. Dans Empr. du lat. clepsydra (du grec klepsydra,
son Ari poétique Sebillet emprunta le le récipient inférieur dérobant (kleptein )
mot en l’appliquant aux auteurs qu'il l’eau (hydôr) du récipient supérieur).
recommandait comme modèles. Désigne, CLERC. Lat. eccl. cléricus (du grec klé-
depuis Voltaire, spécialement la littéra- rikos), dér. de clérus « clergé » (du grec
ture française du xvire s. kléros propr. « lot reçu par le sort ou par
CLAUDICATION, x. héritage », qui traduit dans la Bible l’hé-
Empr. du lat. breu na‘ala, mot par lequel Dieu se déclare
claudicatio, âér. du verbe claudicare (de
claudus « boîteux »). l’héritage des Lévites, Deutéronome, xvin,
2, etc., d'où, dans le grec eccl., « les chré-
CLAUSE, xive. Empr. du lat. médiéval tiens » et partic. « le clergé considéré
clausa, tiré de clausus, part. passé de clau- comme ayant Dieu pour héritage »). Opposé
dere « clore », cf. le lat. class. clausula, de au laïc, a signifié au mc -en âge le.lettré ;
même formation, dont il a pris le sens. au sens de « secrétaire, qui travaille dans
un office », xv°. — Dér. : clergeon, x111°;
CLAUSTRAL, 1471. Empr. du lat. mé-
diéval claustralis, dér. de claustrum, au clergie, x11*, avec -g- d'après le suiv.
sens médiéval de « cloître ». CLERGÉ. Lat. eccl. cléricätus, dér. de
CLAVEAU, terme d'architecture, v. clef. cléricus, v. le préc.
CLAVEAU « maladie des bêtes à laine ». CLÉRICAL, x1ve ; cléricature, 1429, Em-
Lat. de basse ép. clavellus (ve s., Marcellus pr. du lat. eccl. clericalis, clericatura (mé-
Empiricus), dim. de clavus « clou »; cette diéval). — Dér. de clérical : cléricalisme,
maladie a été ainsi nommée parce que, 1867 ; anticlérical, 1866.
desséchées, les pustules qu’elle fait naître,
ressemblent à des têtes de clou enfoncées. CLICHER. Fin xvrrre. Onomatopée,
— Dér. : clavelée, xve. évoquant le bruit que produisait alors la
matrice s’abattant sur le métal en fusion.
CLAVECIN, 1611 (clavessin, orthographe — Dér. : clichage, 1809; cliché, id. ; cli-
encore usitée au xvine s.); antér. clavy- cheur, 1835.
cimbale, 1447. Empr., avec apocope de la
terminaison, du lat. médiéval clavicymba- CLIENT, 1437; clientèle, 1352. Empr.
lum, propr. « cymbale à clavier », comp. de des mots lat. cliens, clientela, termes de la
clavis, « clef » et de cymbalum. langue politique ; d’abord employés en par-
lant des clients des hommes de loi; le
CLAVELÉE, v. claveau. sens commercial date de 1829.
CLAVICULE, 1541. Empr. du lat. clavi-
cula « petite clef » auquel les médecins ont CLIGNER, xr1e. Surtout cluignier au
donné son sens particulier, à cause de la moyen âge, devenu cligner d'après guigner.
forme des clavicules. Peut-être *clüdiniäre, issu de *clädinare
« fermer à demi les yeux », dérivé de clädere
CLAVIER, v. clef. (autre forme de claudere « fermer ») avec
CLAYÈRE, CLAYETTE, CLAYON, un suff. rare, mais qui n’est pas sans
v. exemples, cf. farcinare « farcir » ; v. aussi
claie.
traîner. — Dér. : clignement, xrrre (sous la
CLEARING, 1948. Empr. de l’angl. forme cloi-) ; elignoter, xve (antér. cligne-
clearing « action de régler une créance, une ler), d’où clignotement, 1546 ; clin (d'œil),
dette ». XV. — Comp. : cligne-musette, 1662, alté-
137 CLORE

ration de cligne-musselte, xve (cf. aussi CLOAQUE, xive (Bersuire). Empr. du


climuselle, xvr1° et xvirre s.), dér. d’un mot lat. cloaca « égout ». Depuis l’origine, seu-
non attesté *cligne musse, formé des impér. lement au sens fig., sauf quand on parle
de cligner et de musser « se cacher ». de la grande Cloaque ou des égouts de
CLIMAT, x11e Empr. du lat. clima, cli- Rome, et en ce cas fém.
matis (du grec klima, propr. « inclinaison », CLOCHE. Lat. de basse ép. clocca, vire s.
d’où « obliquité d’un point de la terre par (Vie de saint Colomban) ; d’origine cel-
rapport au soleil », puis « région », sens tique, cf. l’anc. irl. cloc, de même sens, qui
empr. au xi1e 8.). À pris aussi le sens a été apporté sur le continent par les moi-
d’ « atmosphère morale, milieu », depuis nes irlandais ; se trouve en outre dans les
Lamartine. — Dér. : climatérique, 1812, dialectes it. du Nord et le port. choca
par confusion avec l’anc. adj. climatérique, « sonnaille »; mais l’it., l'esp. et l’a. pr.
1554, empr. du lat. climactericus, avec alté- disent campana, lat. campäna. Cloche est
ration par croisement avec climat (du grec aujourd’hui le terme des parlers septentrio-
klimaktérikos, propr. « qui va par échelons naux et du Sud-Ouest, campana celui du
(klimakiér) »), qui se disait d'années cri- prov., du languedocien et du Sud du Massif
tiques, se succédant de 7 en 7, et parti- Central. — Dér. : clocher, subst., xr1° ; se
culièrement de l’année 63e (7 X 9); cli- dit partout dans les parlers gallo-romans,
matique, fin x1x° ; acclimater, 1776, passe sauf des dér. de campana dans l’extrême
pour avoir été créé par Raynal, d’où accli- Sud-Est, la région catalane et quelques
matation, 1832, acclimatement, 1801. parlers pyrénéens ; d’où, par dérivation
CLIN, v. cligner. anormale, clocheton, vers 1700 ; clochette,
xI1® (clokette).
CLINIQUE, 1626, subst. fém. (B.) ; 1696,
adj. Empr. du lat. clinicus (du grec kli- CLOCHER, verbe. Lat. pop. *cloppicäre,
nikos, dit « du médecin qui visite les ma- dér. de l’adj. pop. cloppus « Loiteux », v.
clopin-clopant, cf. de même a. pr. clopchar.
lades », de kliné « lit »), par opposition à
l’empirique qui avait alors un sens défavo- — Dér. : clochard, 1928. — Comp. : cloche-
rable. pied (à), xiv® (Christine de Pisan).

CLINQUANT, xvi°, antér. clicquanl, xv®. CLOISON. Lat. pop. “*clausionem, acc.
Part. prés. de l’anc. verbe clinquer, rare- de *clausiô, dér. de clausus « clos ». A. pr.
ment attesté, « faire du bruit », d'où « atti- clauzon. Jusqu'au xvi® s. a le sens plus
rer l'attention », d’où « briller », variante
large d’ « enclos, enceinte ». — Dér. : cloi-
sonnage, 1676 ; cloisonné, 1742.
de cliquer, peut-être d’après le néerl. klin-
ken « résonner », v. le suiv. et quincaille. CLOÎTRE. Spécialisé dès l’origine ; rare
CLIP, 1951. Empr. de l’angl. clip
au sens général d’ « enceinte », et probabl.
pas d’après son sens étymologique, mais
« agrafe ».
par figure. Lat. clausitrum « enclos, en-
CLIPPER, 1853. Empr. de l’angl. clip- ceinte », devenu régulièrement closire, rare-
per, id., propr. « qui coupe (les flots) ». Par ment attesté et de bonne heure remplacé
analogie « avion de transport transocéa- par cloistre, par croisement avec cloison
nique », 1938. dont le sens était moins restreint qu'au-
jourd’hui. — Dér. : cloîtrer, 1623.
CLIQUE, x1v°, cliquet, x1r1° ; cliqueter,
xi111°; cliquetis, xix1°, cliquette, 1230 (B.); CLOPIN-CLOPANT,, 1668 (La Fontaine).
dér. de l’anc. verbe cliquer « faire du Comp. de l’anc. adj. clopin et de clopani,
bruit », onomatopée, v. le préc. — Dér. : part. prés. du verbe cloper, 1611, encore
déclic, 1510, subst. verbal d’un anc. verbe berrichon et normand, tous deux dér. de
décliquer, vers 1310. l’anc. adj. clop « boîteux » ; clop représente
le lat. de basse ép. cloppus, qui, avec sa
CLISSE … osier tressé servant à faire des consonne double, paraît une onomatopée
clayons à fromages, des enveloppes à bou- évoquant le bruit fait par la marche lourde
teilles, etc. », x11° 8. (écrit clice). Probabl. des boîteux. — Dér. : clopiner, xvi® (Paré).
altération de claie, par croisement avec
éclisse, cf. aussi clie « claie », au xvu° 8. ; CLOPORTE, x11°. Comp. de l’anc. im-
clisse et éclisse sont encore aujourd’hui pér. de clore, clo, et de porte; dit ainsi
souvent pris l’un pour l’autre ; éclisse se parce que ce crustacé se replie sur lui-même
dit, depuis le xvi® s., au sens de « clayon au moindre contact, par comparaison avec
à fromage », et inversement, Littré signale un homme qui, en présence d’un danger,
clisse pour éclisse, terme de chirurgie. Ces ferme sa porte; cf. la même expression
confusions viennent de ce que les éclisses, dans le parler des Abruzzes ndzerraporte
proprement « éclats, baguettes », sont uti- (qui équivaut à un it. inserra poria, de
lisées pour faire des treillis. Clisse est usuel inserrare « fermer »).
en poitevin au sens de « claie, clôture ». CLOQUE, 1765. Mot picard qui corres-
— Dér. : clisser, 1546 (Rab.). pond au fr. cloche ; non attesté au sens du
CLITORIS, 1611. Empr. du grec klei- fr. mais en des sens analogues, par exem-
loris. ple « espèces d’ampoules qui se forment sur
l’eau, quand il pleut ».
CLIVER, 1723. Empr. du néerl. klieven,
‘qui correspond à l’all. klieben et à l’angl. CLORE. Ne s'emploie plus qu’à cer-
to cleave, propr. « fendre »; on connaît taines formes et dans des locutions ; a cédé
l'importance de l’industrie diamantaire à la place à fermer, en raison de l’anomalie
Amsterdam. — Dér. : clivage, 1755. de ses formes et de l’homonymie de plu-
CLORE 138

sieurs formes de clore et de clouer, cf. encore COASSER, 1564 ; d’abord coaxer, xvre.
au xvi®s. clouant les yeux (Amyot), clouant Mot onomatopéique, empr. du lat. coaxare,
le nez ei la bouche (Paré). Lat. claudère. Ne lui-même fait sur le grec koax (Aristo-
survit aujourd'hui que dans les parlers phane). — Dér. : coassement, 1671 (coaxe-
méridionaux (a. pr. claure) et dans quelques ment, XVI®, par confusion avec croassement
parlers du Nord-Est, de l’Est et de la « cri du corbeau »).
Suisse romande. It. chiudere, d’après clu-
dère. — Dér. et Comp. : clos, xrre, d'où COBALT, 1723 (en outre cobold, 1671).
closerie, 1449 ; déclore, xr1° ; forclore, xr1e, Empr. de l’all. Xobalt, variante d’origine
d’où forclusion, 1446, d’après exclusion. non déterminée de Xobold « sorte de lutin »,
V. éclore, enclore. dit de ce métal pour une cause analogue
à celle qu’on propose pour nickel.
CLÔTURE. Sens fig. depuis le xve s.
Lat. clausüra (d’où l’a. fr, closure et l’it. COBAYE, 1820. Empr. du lat. des natu-
chiusura), refait d’après les nombreux mots ralistes cobaya, xvrr1e (Linné), empr., com-
en -lure. — Dér. : clôturer, 1795. me cabiai, xvir1e (Buffon), du tupi sabüja,
à l’s- duquel les imprimeurs portugais
CLOU. Lat clävus, qui signifie égale- ont substitué d’abord un ç-, ensuite un c-.
ment « furoncle »; de même a. pr. clau.
It. chiodo. — Dér. : clouer, xr1°, concur- COBRA, 1587 (cobra capel). Empr. du
rencé en gallo-roman par clouter, Nord- port. cobra capelo ou cobra de capelo, dit
Ouest, clouler, Est, cloutrer, région rhoda- ainsi à cause de la peau en forme de capu-
nienne (le fr. connaît aussi clouter, xvI® chon que ce serpent a sur la tête ; cobra
(aujourd’hui surtout au part. clouté), fait représente le lat. pop. *colôbra, v. cou-
d’après cloulier) ; d’où déclouer, xr1°, dé- leuvre.
clouure, id. ; enclouer, id., enclouure, id., COCA, 1568 (écrit cocca). Empr. de l'esp.
désenclouer, 1580 ; reclouer, xr1° ; cloutier, coca, ancienn. cuca, empr. lui-même de
XI11 (en a. fr. autres formes : clouelier, etc., cuca, coca de l’aimara (Est de l’Argentine)
d’après clouet, xine, etc.), d’où clouterie, ou du quechua. — Dér. : cocaïne, 1863,
1486 (clauelterie, 1202). abrégé familièrement en coco (fin xix°).
CLOVISSE, 1867 (d’abord clovis, 1858, COCAGNE, vers 1200 (écrit quoquaigne).
indiqué comme venant de Marseille). Empr. Fréquent au moyen âge comme nom pro-
du prov. clauvisso, fém., altération de clau- pre : « pays de Cocagne ». On rapproche
sisso, dér. de claus « clos », propr. « qui se lit. cuccagna, de même sens, et, d’autre
ferme » (Cotgrave, en 1611, signale déjà part, le moyen néerl. kokenje, propr. « petit
clouisse comme marseillais). gâteau de sucre et de sirop, donné aux en-
fants à l’occasion des foires annuelles » ;
CLOWN, 1823. Empr. de l’angl. clown, mais l’histoire du mot reste obscure.
propr. « rustre ». — Dér. : clownerie, 1873.
COCARDE, 1530. Dér. de l’a. fr. co-
CLOYÈRE, v. claie. quart, coquard « sot, vaniteux », propr.
« coq », encore dans les patois. — Dér. :
CLUB, 1702, mais devenu usuel seule- cocardier, 1858.
ment un peu avant la Révolution. Empr.
de l’angl. club (au même sens au xvrre s.). COCASSE, 1752 (en 1650, nom propre).
— Dér. : clubiste, 1784. De même empr. Variante de coguard, v. le préc. — Dér. :
de l’angl. clubman « membre d’un club » -erie, 1837.
clubman, 1888.
COCCINELLE, 1754. Empr. du lat. des
CLUSE, 1834 (attesté une première fois naturalistes coccinella, formé sur l’adij.
au xvi® s. chez Du Pinet, qui est de la lat. coccinus « écarlate », dér. de coccum
Franche-Comté). Empr. du parler du Jura, « cochenille », d’où « écarlate » (du grec
où il représente le lat. clüsa, autre forme kokkos) ; dit ainsi à cause de la couleur des
de clausa, propr. « endroit fermé ». élytres de la coccinelle.
CLYSTÈRE, xui°. Empr. du lat. clyster COCCYX, 1541. Empr. du grec kokkyx,
(du grec klystér, de klyzein « laver »). propr. « coucou »; ce sens est dû à une
comparaison avec le bec du coucou.
CO-. Préf. empr. du lat. co, autre forme
de cum, « avec ». COCHE, « entaille », xr1e. D’après l’it.
cocca, de même sens, et l’a. pr. encocar
COADJUTEUR, xie (J. de Meunpg). « encocher », on rétablit le lat. pop. *cocca,
Empr. du lat. de basse ép. coadjutor, comp. dont l’origine est obscure. Lit. cocca « petit
de adjutor « aide ». bouton qui garnit les deux extrémités du
COAGULER, xir1°, Empr. du lat. coagu- fuseau », d’où « sommet, lisière », est de la
lare, v. cailler. — Dér. : coagulable, 1698 ; même origine. Tous ces mots sont tirés du
coagulation, vers 1360. lat. coccum « grain de kermès ; excrois-
sance d’une plante ». Les bords d’une en-
COALITION, 1718. Empr. de l’angl. coa- taille ressemblent à une excroissance. —
lition (du lat. coalescere « s'unir »). Une Dér. : cocher, 1304 ; décocher, xr1° ; enco-
première fois formé en fr., 1544. — Dér. : cher, xr1°, encoche, 1542.
coaliser, 1791, d’après les verbes en -iser.
COCHE, « grande voiture », 1545. Sou-
COALTAR, 1850. Empr. de l’angl. coal- vent fém. au xvies. Empr. de l’all. Kuische,
tar, comp. de coal « charbon » et de tar fém., ordinairement considéré comme em-
« goudron ». prunté du hongrois kocsi, du nom de lieu
139 CŒUR

Kocs, près de Raab;- Nord-Est de la Hon- COCO, « fruit du cocotier », 1529; au sens
grie, où se trouvait un poste de relais. Un de « boisson faite avec du bois de réglis-
auteur espagnol, d’Avila, indique en 1548 se, etc. », dit ainsi d’après le lait de coco,
que l’esp. coche est d’origine hongroise. On 1808. Empr. du port. coco, antér. « croque-
a proposé récemment le tchèque coichi qui mitaine » (également esp.), appliqué par
serait attesté dès 1440 à Kosice (Kassau). plaisanterie au fruit du cocotier, à cause
S’est répandu dans toutes les langues voi- de sa forme et de son aspect hirsute. Coco
sines it. cocchio, forme altérée, angl. est un représentant du lat. coccus, v. coche.
coach, etc. — Dér. : cocher, subst., 1560; — Dér. : cocotier, 1701.
(Porte) cochère, 1611.
COCO, terme enfantin au sens d’ « œuf »,
COCHE, « bateau pour voyageurs », XI11€ etc., 1821. Réduplication onomatopéique
(Beaumanoir). Fém. jusqu’au xvie s.; de coque. Le sens de « vilain personnage »,
coche d’eau, à partir du xvue s., pour le attesté dès 1790, est une extension plai-
distinguer du préc. Les formes cogue, co- sante de coco, qui sert familièrement à
que, etc., usuelles au moyen âge dans des désigner les enfants, etc.
textes du Nord-Est et normands, sont in-
fluencées par le moyen néerl. cogghe, qui est COCON, 1600. Empr. du prov. coucoun,
lui-même probabl. empr. du gallo-roman. également « coque d’œuf », dér. de coco
Tout le groupe remonte très probabl. au « coque », v. coque.
lat. de basse ép. caudica « sorte de canot ». COCOTTE, terme enfantin, 1843. Terme
COCHE, v. cochon. de formation onomatopéique, d’après le
cri de la poule, comp. cog. Au sens de
COCHENILLE, 1578. Empr. de l'esp. « femme de mœurs légères », 1789, comp.
cochinilla, propr. « cloporte », sens encore le sens analogue de poule.
usité aujourd’hui {de cochino « cochon »,
de même origine que le fr. cochon) dit au COCOTTE, « sorte de casserole », 1807.
xvie s. de la cochenille, qui vit sur le nopal Variante de coquasse, 1542, issu de coque-
au Mexique, et qui fut pour les Espagnols mar par changement de suff.; ce dernier
une grande source de richesse. est dér. du lat. de basse ép. cucuma « cas-
serole » (aussi cuccuma), Comp. it. cüccu-
COCHER, verbe, v. coche « entaille ». ma, etc.
CÔCHER (ou cocher d’après coq) « cou- COCU, xive. Variante onomatopéique de
vrir (la femelle) », 1680. Altération de coucou ; désigne d’abord l'oiseau, encore
l’a. fr. chaucher, encore usité au xviIe 8., au xvi® s.; l’a. fr. disait cous (altéré en
d’après le picard cauquer, propr. « presser, coup, fém. coupe, d’où coupaud, coupereau,
fouler », v. cauchemar, lat. calcäre, cf. de coupir, d’après coupe « faute », v. coulpe),
même it. calcare, a. pr. calcar ; attesté au de même origine ; l'emploi fig. est dû au
sens moderne dès le x111° s., mais signifie fait que la femelle du coucou aime à chan-
encore « presser, fouler » au xvi® $., et ger de compagnon. — Dér. : cocuage, 1513 ;
aujourd’hui dans beaucoup de patois. cocufier, 1660 (Molière).
COCHEVIS, 1327. Souvent désigné par
des mots onomatopéiques, par exemple CODA, 1838. Empr. de l’it. coda, propr.
wallon koklivi, solognot cochelirieu ; mais « queue ».
ceux-ci peuvent être des altérations du mot CODE, xinue. Empr. du lat. juridique
fr. dont la formation reste obscure. codeæ, propr. « planche », d’où « planchette,
COCHON, xr1°. Signifie surtout « jeune recueil, livre », etc. Repris sous la forme
porc » jusqu'au xvii® s. Probabl. formé lat. codex, 1826, comme terme de pharma-
d’après les cris qui servent à appeler les cie. — Dér. : codifier, 1836 ; codification,
porcs. Cuiiones « cloportes » de Marcellus 1819 (Saint-Simon).
Empiricus, ve s., ne convient pas pour la CODÉINE, 1832. Mot formé avec le grec
forme ; peut du reste avoir une origine kôdeia « tête de pavot » par le chimiste
analogue, le cloporte étant souvent désigné Robiquet qui découvrit ce corps.
par le nom du porc. Surtout dans les parlers
septentrionaux. Esp. cochino. — Dér. : CODICILLE, 1270. Empr. du lat. juri-
coche, x111° ; cochonner, 1808, au sens mo- dique codicillus, propr. « tablette », d’où
derne ; au sens de « mettre bas », 1403; « mémoire, etc. » (de codex, v. code). —
cochonnerie, 1688 ; cochonnet, xrr1°. Dér. : codicillaire, 1562 (n’est pas empr.
du lat. codicillaris, qui a un autre sens).
COCKER, 1863. Empr. de l’angl. cocker.
COEFFICIENT, v. efficient.
COCKTAIL, 1860. Empr. de l’anglo-
américain cocklail, littéral. « queue de coq », COERCIBLE, 1766; coercitit, 1559;
terme d’argot, réduction de l’angl. coktailed coercition, 1586. Le 1er est dér. du lat.
horse, « cheval auquel on a coupé la queue coercere « contraindre », le 2e du part. passé
de sorte qu’elle se redresse en haut »; coercitus, le 3° empr. du nom d'action
cette opération ne se faisant pas aux Che- coercitio (de coercere). — Dér. de coerci-
vaux de race, mais seulement aux bâtards, ble ; incoercible, 1762.
le mot signifie ensuite « cheval de moindre
‘; valeur » et finalement « homme de mœurs CŒUR. Lat. cor, décliné *coris, etc.,
abâtardies ». Le passage au sens de en lat. pop., au lieu du lat. class. cordis.
« boisson faite du mélange de l’alcool à La médecine grecque appelait l’entrée de
autre chose » est attesté en angl. dès 1806. l'estomac kardia, propr. « cœur », dénomi-
CŒUR 140

nation qui fut traduite en lat. par cor, ce Est, un type éfre coi « se faire, se tenir
qui explique des expressions telles que avoir tranquille », franco-prov. et parlers méri-
mal au cœur et le dér. écœurer, 1642, d’où dionaux. It. chelo, esp. quedo, a. pr. quel.
écœurement, 1870. L’anatomie grecque
plaçait dans le cœur aussi le siège des puis- COIFFE. Lat. de basse ép. cofia (vie s.),
sances affectives et de la sensibilité et d’un germ. occidental kufia, cf. it. (s)cuf-
même celui du courage et de l'intelligence. fia, esp. (es )cofia. — Dér. : coiffer, x1r1°;
C'est ce qui explique l’expression par cœur, décoiffer, id. ; recoiffer, 1550 (Ronsard) ;
vers 1200. It. cuore, esp. corazén (dér.). — coiffeur, 1669 ; coiffeuse, 1647, dans un
Dér. et Comp. : courage, vers 1080 (Ro- titre ; coiffure, vers 1500.
land), distinction de sens plus nettement COIN. Au sens d’ « angle », x11° ; terme
établie à partir du xvri® s., d’où courageux, de monnaie, id. lat. cüneus « coin à fen-
xIIe, décourager, xiri*, découragement, dre », déjà emplois fig. d’après la forme
XII; encourager, id., encouragement, XII1°; triangulaire du coin. It. arch. cogno, esp.
contre-cœur (à), xiv°; sans-cœur, 1808. cuña, nom d’instrument, cuño, terme de
monnaie, a. pr. conh, aux deux sens. Les
COFFIN, v. le suiv. parlers gallo-romans l'ont remplacé au
sens propre par un type coignel, Nord-Est,
COFFRE. Lat. de basse ép. côphinus (du Est et Sud-Est ; au sens de « coin (de la
grec kophinos « sorte de corbeille »). It. maison) » il est concurrencé notamment
cofano « panier », esp. cuébano « manne- par quarre, masc. et fém., lat. quadrus
quin, panier de vendange ». A été repris « carré », Est, canton, parlers méridionaux.
de bonne heure sous la forme coffin, x111°, — Dér. et Comp. : coincer, 1783 ; écoinçon,
au sens lat. ; coffin est aujourd’hui employé 1334 ; enco(i)gnure, 1504 ; recoin, 1549;
dans la région au nord de Paris au sens cogner, x11° ; Cogne « gendarme », argot et
d’ « étui destiné à contenir la pierre à pop., 1800 ; rencogner (se), 1638 (Chape-
aiguiser du faucheur » ; les parlers méridio- lain) par l'intermédiaire d’un anc. verbe
naux l’emploient au sens de « panier, cor- enco(i)gner « mettre dans un coin », encore
beiïlle », v. couffe. Dér. et Comp. : cof- attesté au xvIes.
frage, 1838; coffrer, 1544; coffret, x1r1°;
coffrage (t. de construction), 1907; dé- COÏNCIDER, xive (Oresme). Empr. du
coffrer, 1948; encoffrer, 1382; coffre- lat. scolastique coincidere, propr. « tomber
fort, 1589. ensemble » (de incidere « tomber »). — Dér. :
coïncidence, 1464; coïncident, 1503.
COGNÉE. Lat. pop. cuneäta (cuniada, COING. Orthographe du xvrr1e s. (1718),
Capitulaires de Charlemagne), fém., pris mais déjà dans Rabelais, d’après cognasse
substantiv., de l’adj. cuneätus « en forme et pour le distinguer orthographiquement
de coin » (de cuneus) ; a d’abord dû s’em- de coin. Le lat. hésite entre les deux formes
ployer comme adj. de ascia, securis, autres cydoneum (du grec kydônia mala) et coto-
noms de la hache, également fém., v. aussi neum. Les rapports entre les deux formes
hache. ne sont pas éclaircis définitivement.
COHABITER, vers 1375 ; cohabitation, Ou bien cydoneum représente le nom
xu1e. Empr. du lat. de basse ép. cohabitare, de la ville Cydonëa en Crète, et alors la
cohabitatio. substitution de -f à -d- provient du
fait que le nom aurait été transmis aux
COHÉRENT, 1539; cohérence, 1524. Romains par les Etrusques ; ou bien le nom
Empr. du lat. cohaerens (part. prés. du vient de la ville XKyionion en Asie Mineure
verbe cohaerere « être attaché ensemble »), et a été modifié en cydoneum sous l'in-
cohaerentia. — Dér. : incohérence, 1729; fluence du nom de la ville crétoise. A. pr.
incohérent, 1751. codonh, it. cologno, arbre ; cotogna, fruit.
— Dér. : cognasse, 1534 (écrit coi-), d’où
COHÉSION, 1675. Dér. sav. du lat. co- cognassier, 1611, qui a supplanté coignier,
haesus, part. passé de cohaerere, v. le préc. 1255, encore usité en Normandie et dans
les parlers centraux.
COHOBER, 1615. Empr. du lat. des
alchimistes cohobare, dér. de l'arabe qgohba COÏON, v. couille.
« couleur brunâtre », propr. « donner une
couleur plus forte à un liquide distillé ». COÏT, xive. Empr. du lat. coitus (de
— Dér. : cohobation, 1615. coire, proprement « aller ensemble »).
COKE, 1827 (coak, 1773, par orthogra-
COHORTE, 1213, au sens propre du phe hyperanglicisante). Empr. de l’angl.
lat.; sens fig. de bonne heure. Empr. du coke. — Dér. : cokerie, 1882.
lat. cohors, cohortis ; sens fig. déjà lat.
COL, v. cou.
COHUE, 1235. Au moyen âge « halle »
et en outre « audience de juges seigneu- COLBACK, 1823. Plus rarement kal-
riaux »; sens moderne, xviie. Du moyen pack. Introduit, pour désigner une coiffure
breton cochuy. Le mot et ses dér. vivent des chasseurs à cheval de la garde consu-
surtout dans les régions limitrophes de la laire, après l’expédition d'Egypte (1798),
Bretagne. s à l’imitation de la coiffure des mamelucks,
dite kÆalpak, mot qui vient lui-même du
COI, COITE (fém. relevé en 1798 ; antér. turc qgalpäq « bonnet de fourrure, répandu
coie). Lat. pop. *quelus, lat. class. quiètus. chez les peuples de Turquie et des régions
Les parlers gallo-romans n’en ont plus que Ter (d’où antér. kalepak, 1657 ; calpa,
des traces : au coi « à l'abri », Est et Nord-
<.4 Ed COLLERETTE

COLCHIQUE, 1628. Empr. du lat. mé- «les Suisses eux-mêmes », comp. de Colin,
diéval colchicum, lat. class. colchicum (du v. le préc., et de tampon, par plaisanterie
grec kolkhikon, propr. « plante de Col- d’après lambour.
chide »; cette plante a été ainsi nommée COLIQUE, xrr1e. Empr. du lat. colica,
parce qu’elle est vénéneuse et que la Col- fém. pris substantiv. de l’adj. colicus, « qui
chide est la patrie de l’empoisonneuse souffre de la colique » (du grec kélikos, de
Médée). kôlon « gros intestin »; de celui-ci est em-
COLD-CREAM, 1827. Empr. de l’angl. prunté le lat. colon, d’où le fr. côlon, x1v®).
cold-cream, littéral. « crème froide ». COLIS, 1723. En outre coli, encore chez
-COLE. Deuxième élément de mots sa- Littré. D'abord usité surtout à Marseille
vants composés, tels que vinicole, 1842; et à Lyon. Empr. de lit. colli, pluriel de
viticole, 1823, etc., formés d’après le mot collo « cou », d’où « charge sur le cou »,
fr. agricole ou le lat. agricola, etc. par un développement sémantique hardi.
COLÉOPTÈRE, 1754. Empr. du latin COLLABORER, 1842; collaborateur,
des naturalistes coleoplerum fait sur le grec 1775; collaboration, 1771. Le premier est
koleopteros, composé de Æoleos « étui », et empr. du lat. de basse ép. collaborare (de
de pieron « aile »; dit ainsi parce que les laborare « travailler »), les deux autres sont
élytres supérieures de cet insecte servent des dér. sav. de ce verbe.
comme d'’étuis aux deux autres. COLLATÉRAL, x1r1°. Empr. du lat. mé-
COLÈRE, 1416. Empr. du lat. cholera, diéval collateralis (de latus, -leris, « côté »).
propr. « choléra », qui a pris le sens de COLLATION, terme juridique, 1276.
« maladie bilieuse », d’où « bile », par confu- Empr. du lat. médiéval collatio qui a reçu
sion avec le grec kholé « bile » ; fréquent en ce sens d’après conferre, V. conférer. Le
ce sens au moyen âge et au xvi® ; celui de sens de « repas léger », xrr1°, vient de
« colère » est déjà attesté chez saint Jérôme, l'usage des moines de faire un repas léger
ive. A supplanté au xvie, l’a. fr. ire, lat. après une conférence du soir, dite collation.
tra, encore usité au xviie et plus tard par —- Dér. : collationner « faire un léger repas »,
tradition littéraire ou régionale. — Dér. : 1549.
coléreux, xvi°; colérique, xiv® ; antérieu-
rement « bilieux », xir1° ; décolérer, 1835. COLLATION, 1370 (Oresme), au sens
de « comparaison »; d'où « comparaison
COLIBRI, 1640. Attesté en fr. longtemps d'une copie avec un original, etc. ». Empr.
avant les autres langues. Peut-être empr. du lat. collatio, v. le précédent, « compa
d’un diminutif de l’occitan colobro « cou- raison », propr. « réunion » (sens parfois
leuvre » porté aux Antilles par les colons repris en a. fr.) (de collatus, part. passé de
français. Les colibris sont connus pour la conferre, v. conférer). — Dér. : collation-
vivacité de leurs accès de colère et de leurs ner, 1345.
mouvements offensifs, ainsi que pour le
chatoiement de leurs plumes rappelant COLLE, xzrie. Lat. pop. *colla (du grec
le vernis des reptiles. kolla). — Dér. : collage, 1544 ; coller, 1392,
d’où colle, 1858, argot des écoles; sans
COLIFICHET, 1666 (Molière). En raison rapport direct, semble-t-il, avec colle
de son sens propre « morceau de papier « tromperie », ancien argot, 1455, qui conti-
découpé, puis collé sur du bois », etc., on nue à vivre dans les patois avec le sens de
a voulu y voir un comp. de coller et ficher, « mensonge » ; collant, 1868 ; colleur, 1544 ;
mais coeffichier, subst., relevé au xv°, qui recoller, 1380 ; décoller, 1382, d'où décol-
paraît se rapporter à la coiffure, est un lement, 1653 ; encoller, 1324, d’où encol-
dér. de coiffe, et colifichet peut en être une lage, 1771, encolleuse, 1877.
altération d’après coller, avec finale d’après
affiquet. COLLECTE, xv®, au sens moderne, issu
de l’ancien sens « levée des impôts », XIV° ;
COLIMAÇON, 1529. V. limace. collecteur, 1330 ; collectif, 1495 (comme
COLIN, poisson, 1380. S'appelle en néerl. t. de grammaire déjà au x1r1e) ; collection,
kole (— charbon) ou kolefisch (poisson- 1680, au sens moderne, issu de l’ancien sens
charbon). Le fr. a emprunté les deux for- « réunion, etc. », xive. Empr. du lat.
mes : cole (Eust. Deschamps) et colfisch collecla, collector (créé à basse époque),
(Belon) ; il a fini par remplacer la deuxième collectivus, collectio (de colligere, «recueillir,
partie de colfisch par le suffixe indigène -in. réunir »). — Dér. : 1° de collectif : collec-
Le lat. médiéval carbonarius est une trans- tivisme, 1869 ; collectiviste, 1876 ; collec-
position du nom néerl. tivité, 1852 ; 2° de collection : collectionner,
1840 ; collectionneur, 1829 (Sainte-Beuve
COLIN-MAILLARD, 1532 (Rab.). Comp. s'excuse encore en 1857 de l’employer).
des deux noms propres Colin (fréquent à
cette époque dans diverses acceptions fa- COLLÈGE, 1321. Empr. du lat. colle-
milières, cf. des noms de jeux indéterminés gium, qui désignait divers groupements,
Colin bridé, 1534, Rab., ostes moi de Colinel, voir le suivant. Le sens d’ « établissement
xve) et Maillard, pour une raison non scolaire » ne paraît qu'au xvie. — Dér. :
élucidée. collégial, 1350; collégien, 1743.
_ COLIN-TAMPON, 1573. Aujourd’hui uni- COLLÈGUE, env. 1500. Empr. du lat.
quement dans les locutions : s'en moquer, collega.
s’en soucier comme de colin-lampon. Propr.
COLLERETTE, v. collier.
« batterie de tambour des Suisses », d’où
COLLET 142

COLLET, COLLETER, v. cou. d’après le latin; cf. colombine « fiente de


pigeon, servant d'engrais », 1743, et le lat.
COLLIER. Le lat. collare est flanqué dès columbinum stercus, de même sens.
le ve d’une forme collarium, née par substi-
tution de suffixe. En a. fr. les deux formes COLON, 1556; antér. au sens ancien,
du mot vivent côte à côte (coler, colier). xive (Bersuire), ou avec un sens jurid.
Depuis le xve, collier l'emporte aux sens particulier ; colonie, xiv° (Bersuire). Empr.
de « collier de cheval » et « ornement de du lat. colonus, colonia. — Dér. : colonial,
cou », mais beaucoup de patois gardent 1776 ; coloniser, 1790, colonisateur, 1835,
coler au sens de « collier de vache ou de colonisation, 1769, colonisable, 1838 ; dé-
chien ». — Dér. : collerette, 1309. coloniser, 1960.
COLLIGER, xvi<. Empr. du lat. colligere
CÔLON, v. colique.
« réunir »,

COLLIMATEUR, 1873. Tiré de collima- COLONEL, 1534. De 1542 jusqu’à la fin


tion, 1776, dér. du lat. des astronomes colli- du xvie, surtout coronel (l'esp. a encore
mare (p. ex. de Kepler, en 1604) « viser », cette forme). Empr. de l’it. colonello, dér.
qui est une forme fautive prise dans quel- de colonna au sens de « troupe en colonne ».
ques anciennes éditions de Cicéron et d’Au-
lu-Gelle pour collineare (de linea « ligne »). COLONNE. Lat. columna. L'’a. fr. pré-
sente une forme colombe (x1°-xv®), encore
COLLINE, 1555. Les géomètres du Bas- dans les dictionnaires, qui résulte d’un
Empire avaient formé à l’aide de ladj. effort pour maintenir artificiellement la
collinus (de collis « colline ») l'expression prononciation latine -mn-; d’où colom-
loca collina « colline qui s’étend assez loin », bage, 1340. — Dér. : colonnade, 1740
dont ils ont tiré un subst. collina tout (d’abord colonnate, 1675, d’après l’it. colon-
court. De là le mot fr., qui n’est probable- nato, masc.) ; colonnette, xvi® (R. Belleau).
ment pas un emprunt, mais un mot régional — Comp. : entre-colonnement, 1567 ; on
de l'Ouest. trouve aussi entre-colonne, au xvi°, sur le
modèle du lat. intercolumnium.
COLLISION, xve. Empr. du lat. collisio
« choc, heurt ». COLOPHANE, xvie (antér. colofonie,
COLLODION, 1848. Dér. du grec kollôdés xt11e ;colophone, encore aux xvI1° et XVIII°).
« collant », dér. de kolla « colle ». Altération du lat. colophonia (du grec kolo-
phônia, sous-entendu pissa ou rétiné « ré-
COLLOÏDE, 1845 ; colloïdal, 1855. Empr. sine »), propr. « résine de Colophon (en
des mots angl. colloid, colloidal, formés par Asie-Mineure) » peut-être par croisement
le chimiste Graham (1805-1869) avec le avec diaphane, cette substance ayant une
grec kolla « colle », et le suff. scientifique certaine transparence.
-id, correspondant au fr. -ide.
COLOQUINTE, 1372; en outre colo-
COLLOQUE, xvie (Marot). Empr. du cynihe, 1546 (Rab.); coloquintide, xiv°-
lat. colloquium « entretien », d’après le titre Xve. Empr. du lat. colocynthis (du grec
Colloquia, écrit célèbre d'Érasme. kolokynthis).
COLLOQUER, xri°. Empr. du lat. collo- COLORER, x1°. Du lat. colorare, d’après
care « placer ». lequel il a été refait. — Dér. : coloration,
COLLUSION, 1290. Empr. du lat. jurid. XVe,
collusio, dér. de colludere, « s'entendre avec COLORIS, 1615. Empr., avec modifica-
un autre au préjudice d’un tiers ». tion de la terminaison (-is, au lieu d’-i), de
COLLYRE, xr1°. Empr. du lat. collyrium l’it. colorito, dér. du verbe colorire « colo-
(du grec kollyrion, proprement « emplâtre, rier ». La. fr. a eu aussi un verbe colorir,
onguent »). disparu au xrr1°. —— Dér. : colorier, 1660,
COLMATER, 1345 ; colmatage, id. Dér. d’où coloriage, 1845 ; coloriste, 1660.
de colmate, 1835, emprunté de l’it. colmata
« comblement » et « terrain comblé », dér. COLOSSE, xve. Empr. du lat. colossus
de colmare « combler » ; le colmatage a pris (du grec kolossos). — Dér. : colossal, xvre.
naissance en 1781, en Toscane, où un
COLPORTER, 1539 ; colporteur, 1533,
arrêté du grand-duc, plus tard l’empereur déjà 1288, mais de sens douteux. Altéra-
Léopold II, le rendit obligatoire.
tion de comporier « porter, transporter,
COLOMBAGE, COLOMBE, v. colonne. supt orter », lat. comporiäre « transporter »
et «u dér. comporieur, xt1°, en colporier,
COLOMBE, x1°. Du lat. columba, sur- colporteur, sous l’influence de l'expression
tout pour des emplois littéraires. Pour p'irler a col ; au XvI°, colporter signifie aussi
l’a. fr. coulon, v. pigeon. « porter (sur les épaules) un mort à la
COLOMBIER. Lat. columbaärium. sépulture » ; en outre, contreporter, -eur, du
XVI® au XVIIIe $. — Dér. : colportage, 1723.
COLOMBIER, « sorte de papier », 1752.
Nom propre du fabricant. . COLT, 1960. Empr. de l'anglais d’Amé-
rique colt, nommé d’après son inventeur
.COLOMBIN, xrr1e (adj.). Du lat. colum- S. Colt (f 1862).
binus « couleur de pigeon » ; en ce sens, du
Xv® au xviri®; autres sens, en partie COLTINER, v. cou.
143 COMME

COLUMBARIUM; 1752, comme terme COMESTIBLE, x1v®. Dér. sav. de comes-


d’antiquité ; récent au sens moderne. Em- lus, part. passé du verbe comedere « man-
pr. du lat. columbarium, proprement « co- ger ».
lombier ».
COMETE, vers 1138. Empr. du lat. co-
COLZA, 1671. En outre colsa, 1700; mela, masc. et fém. (du grec kométés, masc.,
colsat, 1723. Empr. du néerl. koolzaad, propr. « (astre) chevelu », de komé « che-
littéral. « semence (zaad) de chou (kool) ». velure ») ; parfois masc. du xvI® au xvriIe.
A pénétré en fr. grâce à l'importation de
grandes quantités de graines de colza au COMICE. Empr. du lai. comitium, qui
xvi1e ; la culture du colza s’est étendue en désignait aussi bien l’assemblée du peuple
France au xvirre. romain que la place où elle se tenait. Dans
ce dernier sens, il a été emprunté par le
COMA, 1721. Empr. du grec médical traducteur Bersuire (x1v®, comice), dans le
kôma (génitif -{os), propr. « sommeil pro- premier il est attesté depuis 1694, au plur.,
fond ». — Dér. : comateux, 1616. par rapport à la vie politique de l’ancienne
Rome. Il est devenu vraiment fr. seule-
COMBATTRE. Lat. pop. “*combaliere ment depuis que, vers 1760, le Marquis de
lat. de basse époque combaliuere, v. battre’ Turbilly appela ainsi en Anjou des réu-
— Dér. : combattant, 1472 ; combat, 1530. nions agricoles qu’il organisait pour favo-
combativité, 1838; combatif, fin xix® s’ riser le développement de l’agriculture.
COMBE. Gaul. *cumba, cf. gallois cwm COMIQUE, xiv<. Empr. du lat. comicus
« vallée ». Vit dans les parlers de l'Italie (du grec kômikos).
septentrionale, et les parlers gallo-romans
au sud d’une ligne qui va de l’embouchure COMITÉ, 1650 (écrit committée). Empr.
de la Loire aux Vosges Mérid. de l’angl. commitlee, dér. de io commil
COMBIEN, v. bien. « confier » (du lat. commitiere).

COMBINER, xiie. Empr. du lat. de COMMANDER. Lat. pop. *commandare,


basse époque combinare, proprement «unir refait de commendare sur mandäre. Le sens
deux choses ensemble ». — Dér. : combi- class. de commendare était « confier, re-
naison, vers 1660 (une fois dans Oresme, commander », et ce sens vit en fr. jus-
antér. combination, xive s., d’après le latin qu'au xve. Il passe alors définitivement
de basse époque combinatio), d’où combine, au dér. recommander, attesté d’abord au
fr. pop., fin xixe; au sens de « vêtement sens de «livrer » dans Saint-Léger, au sens
de dessous », 1895, fait sur le modèle de actuel depuis le xrr1°. Depuis César, le lat.
l’anglo-américain combination. commendare a aussi le sens de « donner un
ordre », courant en fr. depuis les premiers
COMBLE, subst. Lat. cümülus « mon- textes. Le sens commercial de commander
ceau », d’où « comble » au sens figuré dès n’est attesté que depuis 1690. — Dér. et
le lat. comp. : 1° au sens de « recommander » :
COMBLE, adj., v. le suivant. commande (« protection, garde », de 1213
à la Révolution, « câble, corde qui sert à
COMBLER, Lat. cumuläre « amonce- retenir qch. » dep. 1494); recommanda-
ler ». Seulement gallo-roman : anc. prov. tion, 1150 ; recommandable, env. 1450;
comolar, comblar. — Dér. : comble, adj., 2° au sens de « donner un ordre » : com-
vers 1210. - mandeur, xr1° ; commanderie, 1387 ; com-
COMBUGER, 1694. Mot angoumois et mandement, 1050, Alexis; commandant,
bourbonnais, qui contient la forme régio- 1671 (le sens strictement militaire de com-
nale correspondante à buer, v. buée. mander étant attesté dep. 1573 ; Napoléon
avait aussi appelé un grade de la Légion
COMBURANT, 1789 (Lavoisier); dit d'honneur commandant, titre que la Res-
d’abord de l’oxygène. Empr. du lat. com- tauration remplaça aussitôt par comman-
burens, part. prés. de comburere « brûler ». deur pour rapprocher la Légion des anciens
COMBUSTION, 1150. Empr. du lat. de ordres de chevalerie, où ce titre avait été
basse ép. combustio, v. le précédent. — en vigueur depuis le x1r1°) ; Larmes, joie de
Dér. : combustible, x1ve.
commande, 1658, La Fontaine ; 3° au sens
commercial commande, 1540 ; décomman-
COMÉDIE, xive (Oresme). Empr. du der, 1807.
lat. comoedia « comédie » et « pièce de
théâtre » (du grec kômôidia « comédie »). COMMANDITE, 1673. Empr. de lit.
Oresme et Evrart de Conty emploient le accomändita « dépôt, garde », formé comme
mot uniquement dans les passages où ils läscilo, etc. — Dér. : commanditaire, 1727 ;
exposent les pensées d’Aristote sur le théä- commanditer, 1809.
tre grec ; la comédie grecque est pour eux COMMANDO, 1907. Empr. du port.
l'équivalent des Miracles. Le mot comédie commando, qui désignait d’abord un corps
n'appartient à l’usage français que depuis de troupes chez les Boers. Le mot fut repris
que Jodelle a appelé ainsi sa pièce Eugène ensuite pendant la deuxième guerre mon-
(1552). Au xvire désigne souvent toute diale pour désigner un détachement de
pièce de théâtre, comme parfois en latin, prisonniers de guerre, etc.
d’où « théâtre », cf. Comédie-Française. —
Dér. : comédien, env. 1500 (en outre, au COMME, x1e (Alexis). Du x1° jusqu’au
xvi®, comedian(t), d'après l’it. comme- commencement du xvi® aussi com, du lat.
diante); sens d’après celui de comédie quomodo, qui, dès le ve, était devenu quomo,
« pièce de théâtre ». conservé aussi en a. it. esp. a. port. como.
COMME 144

Comme est sorti de com par adjonction de COMMÈRE. Lat. eccl. commäter « mar-
la conj. el (e); des expressions comme raine », attesté depuis Grégoire de Tours,
quomodo et lu sont attestées en lat. depuis comme un peu plus tard compater. Ces
le rie, et it. a. port. come ont la même deux termes exprimaient le fait que les
origine. Les plus anciens textes fr. font, personnes en question partageaient avec
du reste, encore une différence sensible le père et la mère la responsabilité pour
entre com et come, employant le premier l'enfant. On appelait donc commère et
pour introduire une phrase comparative compère la marraine et le parrain d’un
(paien s’en fuient com Damnesdeus le volt), enfant dans leurs rapports avec les parents
le deuxième devant un subst. ou un adj. de l'enfant et dans les rapports qu'ils
donc dans la comparaison raccourcie (Ro- avaient entre eux, tandis que marraine et
land : or i fiert come ber). L’a. fr. come est parrain exprimaient leurs rapports avec
ainsi une formation analogue à a. prov. l'enfant. Cette double terminologie a été
acat. port. coma, néap. comma, qui vien- trop subtile pour se conserver, et commère
nent de quomodo ac. Dans la question le et compère ont dévié dans des significa-
fr. recourt depuis le xre s., à comment, de tions secondaires, cédant la place à
com et -meni, le suff. adverbial étant passé marraine et parrain ; notre sens familier
des adverbes employés dans la réponse à existe déjà au moyen âge. It. comare, esp.
l’adv. interrogatif. Au x1IvVe, comment pé- comadre ; à. pr. comaire. — Dér. : commé-
nètre du reste du domaine de la compa- rage, 1776 (au sens moderne ; 1546 (Rab.)
raison dans celui de la question, et jusqu’à au sens de « baptême ») ; au sens de « rela-
la fin du xvii® comme et comment s’em- tions entre commères et compères », 1549-
ploient assez souvent indifféremment. 1660.
Pour combien, v. bien.
COMMETTRE. Lat. commilière « mettre
COMMÉMORATION, xxrre. Empr. du ensemble, joindre, commettre, confier ».
lat. commemoratio. — Dér. : commémo- — Dér. : commettant, 1563 ; commis, dér.
ratif, xvie. du verbe au sens de « préposer », 1320,
COMMÉMORER, 1508-1675, de nouveau au sens commercial dep. 1675.
dep. 1823. Empr. du lat. commemorare. COMMINATOIRE, 1517. Empr. du lat.
COMMENCER. Des trois verbes lat. médiéval des juristes comminalorius (de
pour «commencer », coepisse a disparu tout comminari « menacer »).
à fait, incipere est conservé dans le roum. COMMISÉRATION, xu°. Empr. du lat.
incep et le rhétoroman anischeiver, inchoare commiseratio (de miserari « plaindre, avoir
dans l’occit. encar. Depuis le 1ve, le lat. a pitié de »).
fait passer le verbe initiare du sens « ini-
tier » à celui plus profane de «commencer », COMMISSAIRE, 1314. Empr. du lat.
et il l'a bientôt renforcé en “*cominiliare, médiéval commissarius (de commiltere
d'où fr. commencer, pr. comensar, it. comin- « préposer »). — Dér. : commissariat, 1752.
ciare, cat. comensar, esp. comenzar. — Dér. :
commencement, x11° ; recommencer, 1080 COMMISSION, xrr1°. Empr. du lat. com-
(Roland), recommencement, 1546. missio « concours, etc. », pour servir de
substantif abstrait à commettre au sens de
COMMENDE, 1461; commendataire, « préposer ». — Dér. : commissionnaire,
xv°. Termes eccl., empr. du lat. médiéval 1583 ; commissionner, 1462. — Comp. :
commenda, commendatarius (de commendare sous-commission, 1871.
« confier », V. commander).
COMMISSURE, 1314. Empr. du lat.
COMMENSAL, 1418. Empr. du lat. mé- commissura (de commitliere au sens de
diéval commensalis (de mensa « table »). « joindre »).
COMMENSURABLE, xive (Oresme). COMMODE, 1475; commodité, env.
Empr. du lat. de basse ép. commensurabilis 1400. Empr. du lat. commodus, commoditas.
(de mensura « mesure »). — Dér. : commen- — Dér. de commode : commode, sorte d’ar-
surabilité, 1672. moire, 1705 ; commodément, 1531.
COMMENTER, 1314; commentaire,
xve s. Empr. du lat. commentari (de mens, COMMODORE, 1760. Empr. de l’angl.
mentis « esprit »), propr. « réfléchir », d'où commodore, probabl. altération du néerl.
« étudier, imaginer » et « commenter », kommandeur, de même sens, qui est lui-
seul sens emprunté, commentarius (repris même d’origine française.
au sens de « mémoire » dans le titre Com- COMMOTION, x11°. Empr. du lat. com-
mentaires de César). — De même empr. du motio « mouvement » et « émotion » (de
lat. commentalor commentateur, XIV® commovere « (é}mouvoir »).
(Oresme).
COMMERCE (1370, G. de Machault,
COMMUER, 1361 (Oresme). Empr. du
lat. commutare « (é)changer », francisé
commerque, commerce dep. 1468). Empr. du
lat. commercium (de merx, mercis « mar- d’après muer (v. commutation) ; d’abord
au sens gén. de « transformer » ; sens jurid.
chandise »); le sens de « relations pour dep. 1680.
l'échange des marchandises » est dominant
depuis le début ; mais le sens de « relations COMMUN. Fém. en -e dès les premiers
sociales » est usuel dep. 1540. — Dér. textes. Lat. commuünis. — Dér. : communal,
d’après le premier sens commerçant, xl1e ; sert aussi à commune, v. le suivant,
1695 ; commercer, 1405 ; commercial, 1749, dep. la Révolution, d’où communauté
d’où commercialiser, 1872. (1284, probabl. refait de l’a. fr. communilé,
145 COMPÉTER

empr. du lat. conmunitas, d'après l’adj. le xr1°; d’où accompagnateur, xvII® s.


communal) ; communément (dep. Frois- (Sévigné, au sens musical ; peu usité autre-
sart) ; communisme, 1841; communiste, ment) ; accompagnement, XIII® 8., au sens
1834 (Lamennais), déjà en 1769 au sens de musical, 1690 ; 2° de compagnon : compa-
« copropriétaire ». gnonnage, 1719.
COMMUNE, comugne du x11° au xiv°, COMPARAÎTRE, 1437. Réfection, d’a-
surtout dans les textes du Nord, devenu près paraître, de l’a. fr. comparoir, xrr1°,
comune, d’après le fém. de l’adj. précédent. encore dans les dict., empr. du lat. jurid.
— Lat. pop. conmaünia, plur. n. de com- du moyen âge comparere (en lat. class. ne
munis, pris comme subst. f. au sens de signifie qu’ « apparaître »). — Dér. : com-
« réunion de gens ayant une vie com- parution, 1453, d’après le part. passé com-
mune ». — Dér. de Commune, nom du mou- paru.
vement révolutionnaire qui eut lieu à
Paris en 1871 : communard, 1871. COMPARER, env. 1200 ; comparable,
id. ; comparaison, xr1° ; comparatif, 1290.
COMMUNIER, x° (Saint-Léger). Empr. Empr. du lat. comparare, comparabilis,
du lat. eccl. altari communicare « approcher comparatio, comparativus.
de l’autel pour recevoir la sainte hostie »
(saint Augustin), v. communiquer. — Dér. : COMPARSE, 1669. Empr. de l’it. com-
communiant, 1531. parsa, fém., « personnage muet dans une
pièce de théâtre », proprement « appari-
COMMUNION, env. 1120. Empr. du lat. tion », part. passé du verbe comparire
eccl. communio (qui a, dès le rves., les deux « apparaître, se faire voir »; a désigné
sens de « union de ceux qui professent la d’abord et jusqu’en 1835 l’action de figurer
même croyance » et de « participation au Ps un carrousel; sens moderne dep.
sacrement de l’Eucharistie »), en lat. class. 798.
« communauté », dér. de communis, V. Com-
mun. COMPARTIMENT, 1549 (Rab.). Empr.
de l’it. compariimento, dér. du verbe com-
COMMUNIQUER, xive (Oresme) ; com- partire « partager ». — Dér. : compartimen-
municatif, id. ; communication, id. Empr. ter, fin xiIx®.
du lat. communicare, propr. « mettre en
commun », en outre, en lat. de basse ép., COMPASSER. Ne s'emploie plus que
« être en relations avec », communicalivus dans des sens techn. et au part. passé pris
(de basse ép. et rare), communicatio. — adjectiv. Jusqu'au xvrre signifie « mesurer,
Dér. : communicable, 1380, d’où incommu- régler, etc. ». Lat. pop. *compassäre (de
nicable, 1541 (Calvin) ; communiqué, subst.,
passus « pas »), proprement « mesurer ».
It. compassare « mesurer », esp. compasar.
1863. — Dér. : compas, xri° ( Voyage de Charle-
COMMUTATEUR, 1869. Dér. sav. du magne), d’abord « mesure, règle », etc.,
lat. commutiare « (é)changer », v. commuer. surtout dans des locutions à compas, par
compas « d’une manière régulière, etc. »,
COMMUTATION, xrie. Empr. du lat. celle-ci encore usitée au xvi®; sens mo-
commulatio « changement », v. commuer. derne, xII°.
Le sens de « transformation d’une peine »
n'apparaît qu’en 1680. COMPATIBLE, 1447. Dér. sav. du lat.
compali, v. le préc. — Dér. et Comp. :
COMPACT, 1377 (Oresme). D'abord compatibilité, 1564; incompatible, 1370,
compac, ensuite compacte pour les deux d’où incompatibilité, 1466.
genres ; le masc. compaci dep. 1705. Empr.
du lat. compactus « resserré », part. passé COMPATIR, 1541; compassion, x1I°.
du verbe compingere « assembler ». Empr. du lat. de basse ép. compali, com-
passio.
COMPAGNIE, vers 1080 (Roland). Nom-
breux sens techn., militaires et autres, à COMPATRIOTE, xve. Empr. du lat. de
partir du xve s. Dér. de l’a. fr. compagne, basse ép. compairiota, v. patriote.
lat. pop. *compänia « compagnie », usicé COMPENSER, 1277; compensation,
jusqu’au xve s. (en outre compagnée, d’a- 1290. Empr. du lat. compensare (de pensare
près le verbe compagner, jusqu’au xvri1° s.). « peser »), propr. « peser ensemble pour
COMPAGNON. Lat. pop. compänionem, comparer », d'où « compenser », compensa-
acc. de companio (Loi Salique), formé de lio. — Dér. : compensateur, 1798.
la préposition cum « avec » et de pâänis COMPÈRE. Lat. eccl. compaler « par-
« pain » sur le modèle d’un mot germa- rain », formé comme commäler, et avec un
nique, cf. le got. gahlaiba (composé de ga sens correspondant, v. commère. Sens
« avec » et de hlaiba « pain », c’est-à-dire fam. dès le moyen âge; au sens péj. 1768
« qui mange son pain avec »), mot apporté (Voltaire). — Dér. : compérage, xXIII°. —
par les Germains des armées du Bas- Comp. : compère-loriot, v. loriot.
Empire ; le nom compänio est représenté
par l’anc. nom. compain, encore usité au COMPÉTER, 1371 (Oresme); compé-
xvie, et conservé dans le fr. pop. copain. tent, xrr1e ; compétence, 1470. Empr. du
— Dér. : 1° de compain : compagne, xII°; lat. compelere au sens de « revenir à » dans
accompagner, x11°, au moyen âge surtout la langue jurid., d'où « compéter », compe-
s’accompagner à « être de compagnie avec », lens, terme jurid., competentia, propr. « juste
ou accompagner « associer », jusqu’au XVI° ; rapport » (pris pour servir de substantif à
sens musical au xv® s.; sens moderne dès compélent) ; v. le suiv.

DICT. ÉTYMe 10
COMPÉTITEUR 146

COMPÉTITEUR, 1402. Empr. du lat. COMPONCTION, xrie. Empr. du lat.


competilor (de competere, parfois trans. au eccl. compunclio, propr. « piqûre » (de
sens de « rechercher, briguer » (proprement compungere « piquer », d’où « affecter »,
intrans. « se rencontrer (en parlant de che- et, au passif, « être repentant »).
mins), etc. », v. le préc.).
COMPORTER. Lat. comporläre « trans-
COMPÉTITION, 1759. Empr. de l’angl. porter », qui a dû prendre à basse ép. le
compelilion, lui-même empr. du lat. de sens de « supporter »; en a. fr., outre les
basse ép. compelitio, v. le préc. sens modernes, « porter, transporter (v.
COMPILER, x111° ; compilateur, 1425; colporter), supporter ». — Dér. : compor-
compilation, x111°. Empr. du lat. compilare, tement, 1475.
propr. « piller », compilalor, compilalio.
COMPOSER, xr1°; composite, 1545;
COMPLAINTE. Ne s'emploie plus qu’au compositeur, 1274 « auteur », 1406-1675;
sens de « chanson populaire sur quelque sens musical dep. 1549 ; sens typogr. dep.
événement tragique », 1800 ; antér. « plain- 1606 ; composition, x1r1° (J. de Meung,.
te (en justice) », xrr°. Dér. de l’anc. verbe Empr. du lat. componere (avec francisation
complaindre (se), lat. pop. *complangere, d’après poser, francisation suggérée par le
comp. de plangere, v. plaindre ; cf. it. com- radical pos- qui se trouve dans des formes
piangere « plaindre ». de componere), composilus, compositor, com-
COMPLAIRE, 1373 (une 1l'e fois vers posilio. — Dér. de composer : décompo-
1120). Empr. du lat. complacere « plaire ser, 1541 (Calvin), décomposable, 1790,
beaucoup », francisé d’après plaire. — indécomposable, 1738 ;décomposition, 1694,
Dér. : complaisant, 1556 ; complaisance, d’après composilion ; recomposer, 1549 ;
1370 (Oresme). surcomposé, 1749. V. déposer, etc.
COMPLÉMENT, 1690. Empr. du lat. COMPOST, v. compote.
complementum (de complere « remplir, com-
bler »). Dans les quelques passages où l’on COMPOSTEUR, 1675, au sens moderne.
trouve complement au xiv° et au xvire, il Empr. de l’it. composiore, de composto,
signifie « accomplissement » et est probabl. part. passé de comporre « composer ». —
dér. du verbe a. fr. a. pr. complir « accom- Dér. : compostage, vers 1930.
plir » — Dér. : complémentaire, 1791.
COMPLET, 1300. Empr. du lat. com- COMPOTE. Lat. pop. *compüsila, fém.
pletus, part. passé du verbe complere « em- pris substantiv. de compüsitus, part. passé
plir, achever ». — Dér. : compléter, 1752, de compôünere « composer » ; a pris le sens
d’où complètement, subsi., 1750 ; décom- de « mélange », cf. l’a. fr. compost, à la fois
pléter, 1779. adj. au sens de « composé », et subst. au
sens de « mélange », et partic. « engrais »
COMPLEXE, terme de logique, 1667. (d’où l’angl. compost repris par le fr. techn.
Empr. du lat. complexzus, part. passé de compost, 1771). — Dér. : compotier, 1746.
complecti « enlacer, contenir ». — Dér. :
complexité, 1755. COMPRÉHENSION, vers 1470 ; compré-
COMPLEXION, xr1°. Empr. du lat. com- hensible, xve (au x1v°-able) ; compréhensif,
plexio (v. le préc.), propr. « assemblage », 1834 ; parfois au xvie. Empr. du lat. com-
d’où, à basse ép., « tempérament ». prehensio, comprehensibilis, comprehensivus
(créé à basse ép.) (de comprehendere), v.
COMPLICE, 1320. Empr. du lat. de le suiv.
basse ép. complex, -icis, propr. « uni étroi-
tement », d’où « complice ». Le sens jurid. COMPRENDRE. Lat. pop. comprendre,
est postérieur, en fr., au sens moral ; le lat. class. comprehendère, proprement « sai-
mot a donc été introduit par l’Église. — sir »; le sens intellectuel du verbe « em-
Dér. : complicité, 1420. brasser par la pensée, le sens, la nature,
COMPLIES, xr1e. En a. fr. surtout sing. la raison de quelque chose, les paroles de
Du lat. médiéval eccl. complela (hora), quelqu’un » apparaît pour la première fois
completae horae, sous l'influence de l’anc. dans les écrits de Cicéron et vit aussi dans
verbe complir « accomplir, achever », lat. toutes les langues rom.; toutefois il est
pop. *complire, lat. class. complère. rare en franc. avant le xv®s., où comprendre
commence à supplanter entendre dans cette
COMPLIMENT, 1608. Empr. de l'esp. acception. It. comprendere, esp. comprender.
cumplimiento, dér. de cumplir « accom- — Dér. : incompris, xv°; comprenette,
plir », dans la locution cumplir con alguien fam., 1886.
« être poli envers quelqu'un ». — Dér. :
complimenter, 1634 ; complimenteur, 1622. COMPRESSE, 1539 (sens moderne).
COMPLIQUER, env. 1400 ; complica- Antérieur. « action de presser, accabler »,
tion, 1377. Empr. du lat. complicare, propr. xur1e (Roman de la Rose), sens disparu au
« lier ensemble », d’où « embarrasser », Xv°. Dér. de l’anc. verbe compresser « pres-
complicatio (créé à basse ép.). Jusqu’au ser, accabler », encore usité au xvi°, empr.
commencement du xix®, il n’existe du du lat. compressäre.
verbe quele part. passé, employé comme adj.
COMPRESSIBLE, 1648. Dér. sav. de
COMPLOT, x11°. D'abord « foule serrée »; compressus, part. passé du verbe compri-
sens moderne dès la même ép. En outre mere « comprimer ». — Dér. : compressi-
en a. fr. comploie, fém. Et. inconnue. — bilité, 1680 ; incompressible, id., d’où in-
Dér. : comploter, xve. compressibilité, id. $
147 CONCERNER

COMPRESSION, vers 1360. Empr. le sens partic., aujourd’hui disparu, d’ «exi-


du lat. compressio (de comprimere). — ger, en vertu d’un acte officiel, communi-
Dér. : compressif, env. 1400 ; aussi en lat. cation d’une pièce », d’où le sens moderne,
médiéval compressivus. 1803. — Dér. : compulsif, 1762 (J.-J. Rous-
seau), une première fois en 1584 ; compul-
COMPRIMER, xive (Bersuire). Empr. soire, 1446.
du lat. comprimere « serrer, presser » (de
premere, de même sens); a remplacé la
COMPUT, 1584. Empr. du lat. de basse
forme héritée compriendre (xr1e-xive) et
ép. computus « compte ». D'abord compot,
compresser, V. compresse. — Dér. : com- X11°, et compost, encore au XVIIIe, par con-
primé, subsi., 1878.
fusion avec l’adj. compost « composé », v.
COMPROMETTRE, 1283. Empr. (avec compote.
francisation d’après promettre) du lat. jurid.
compromiliere « prendre l'engagement de, COMTE. Lat. comilem, acc. de cômes
s’en remettre à la décision d’un arbitre, «compagnon » nom., d’où l’a. fr. cuens, qui
faire un compromis », sens principal jus- était d’abord le cas sujet, comie, cas obli-
qu'au xvirie, encore dans le Code civil; que ; comes a pris dès le règne de Constan-
sens moderne, 1690 ; en m. fr. en outre tin le sens de « haut personnage faisant
« promettre », sens du lat. class. partie de la suite de l'Empereur, délégué
que l'Empereur envoyait avec pleins pou-
COMPROMIS, 1243. Empr. du lat. jurid. voirs dans les provinces ». Les Mérovin-
compromissum, V. le préc. — Dér. : com- giens et les rois visigoths conservèrent ce
promission, 1787 (formé une première fois titre pour désigner leurs envoyés, d’où esp.
au moyen âge, 1262, au sens de « compro- port. conde aussi, tandis que l’it. conte est
mis ») ; a suivi le sens du verbe précédent. empr. du fr. Sous les Carolingiens le déve-
loppement de la féodalité finit par faire
COMPTER, var. orthogr. de conter, par de comile un titre de noblesse. — Dér. :
réaction étym., qui apparaît dès le xrrre, comté, x11° ; flottement du genre en a. fr.,
mais ne fut choisie définitivement qu’à d’après les mots abstraits en -{é, cf. duché,
partir du xv® pour le sens propre de «comp- parenté, d’où le fém. de La Franche-
ter », l’anc. orthogr. conier ayant été réser- Comié ; it. contado, esp. condado, a. pr.
vée pour le sens figuré de « raconter »; comiat (Comiat-Venaissin) ; comtesse, 1080.
pour ce développement sémantique, cf.
l’all. zählen « compter », erzählen « conter » CON. Lat. cünnus.
(c'est-à-dire « énumérer les détails d’un
événement »). Lat. compütäre « compter » CONCASSER. Lat. conquassäre, propr.
(de puiäre, de même sens), qui a dû prendre « secouer fortement », d’où « briser », v.
le sens de « conter » dans le parler pop. casser. Seulement gallo-roman. — Dér. :
Dér. et Comp. : 1° de compter : comptable, concasseur, 1863.
1340 (au sens moderne ; en outre a signifié
CONCAVE, 1314 ; concavité, 1314. Empr.
au xr1I1® « qui peut, doit être compté »),
d’où comptabilité, 1579 ; comptant, 1265 du lat. concavus (de cavus « creux »), con-
(au xve et au xvit, a été rapproché de cavitas (créé à basse ép.).
content, cf. veult paier ses debtes contentes, CONCÉDER, xiri°; concession, 1264.
Charles d'Orléans, Ballade, 103) ; compte, Empr. du lat. concedere, propr. « quitter
xI11° (conte au xr1e) ; remonte au lat. de une place », d’où « céder, concéder » (de
basse ép. compülus « compte »; le comp. cedere, V. céder), concessio. — Dér. : con-
compile courant, 1675, est un calque de l’it. cessionnaire, 1664.
conto corrente ; compteur (1752 comme ter-
me d’horlogerie ; 1834 « mécanisme servant CONCEPT, xve-xvi® au sens de « des-
à compter »; du x111° au xv® comieur, au sein, projet », sens philos. dep. 1644. Empr.
sens de « celui qui compte »); comptoir, du lat. conceptus « le fait de contenir, réu-
1354 ; acompte ou à-compte, 1740, ne con- nion, procréation » (de concipere « conce-
tinue pas l’a. fr. aconte, de même sens, voir »), qui a pris dans la langue eccl. de
disparu avant le xvie, subst. verbal d’acon- sens de « conception de l'esprit ».
ter, mais est un comp. du subst. compte ;
décompter, xr1°, d’où décompte, 1276 ; mé- CONCEPTION, au sens intellectuel, 1315.
compte, x11°, dér. de mécompier, x11°, en- Empr. du lat. conceptio (de concipere), v.
core dans les dict.; recompter, 1409. — le préc. ; sens philos. développé dans la
Dér. et Comp. : 2° de conter : conte, x11° langue eccl.
(v. compte) ; contes-bleus, 1664 (Molière),
probabl. d’après les contes de fées ou récits CONCEPTION, au sens physiologique,
d’aventures publiés dans la Bibliothèque xu1e. Empr. du lat. conceptio, v. les préc.
Bleue, ainsi nommée à cause de sa couver-
ture bleue ; conteur, x11°; raconter, x1I1° CONCEPTUEL, 1863. Empr. du lat.
(dér. itératif de l’a. fr. aconter « raconter », scolast. conceptualis (de conceplus, v. con-
x11e-xive; le sens itératif est encore vivant cept, fait sur le modèle de spiritualis, v.
dans les premiers passages que nous avons spirituel). — Dér. : conceptualisme, 1832.
de raconter), racontable, x11°-X111° s., inra-
contable, 1876 ; racontar (pour -ard), 1867. CONCERNER, 1385. Empr. du lat. sco-
last. concernere, qui a développé ce sens
COMPULSER, xv® (au sens de « con- sur celui de « réunir en passant au crible,
traindre »). Empr. du lat. compulsare « con- mélanger », que le verbe avait en lat. de
traindre » qui, dans la langue jurid., a pris basse ép.
CONCERT 148

CONCERT, 1560. Empr. de l’it. concerlo CONCORDAT, 1520. Empr. du lat. mé-
« accord », subst. verbal de conceriare « se diéval concordatum, v. le suiv. — Dér. :
concerter », lat. conceriäre « rivaliser », concordataire, 1838.
d’où «se mettre d'accord ». Comme terme
musical, 1611 ; l’it. concerlo a été repris CONCORDER, 1777-1783 (Linguet) ; dé-
sous cette forme, 1739 (De Brosses), et jà usité au moyen âge, du x11° s. jusqu’au
pour un autre sens que concert. — Dér. : xvIe s., puis disparu ; concorde, vers 1155.
concerter, xvi®, ou empr. de l’it. conceriare, Empr. du lat. concordare, concordia. —
d’où déconcerter, XvI°. Dér. du verbe : concordance, xI1°.
CONCETTI, 1753. Empr. de l’it. concelli, CONCOURIR. Empr. du lat. concurrere,
pluriel de concetlo (empr. aussi en 1739), d’abord, xive, sous la forme concurre, au
ropr. « conception, pensée », d'où «saillie » xvie concurrer, dep. 1557 concourir, d’après
eo renen pour la forme au fr. concept) ; courir ; sens commercial depuis 1690. Dér.
ne s'emploie au sing. que depuis peu. de concurrer, concurreni, sens moderne
1552 : concurrence « rencontre » (1377-
CONCEVOIR. Lat. concipère « prendre, 1675), sens moderne 1559, jusqu’à la con-
saisir », d’où, d’une part « recevoir la se- currence de 1559. L'évolution sémantique
mence, devenir enceinte », et, d'autre part, s’est faite en partie en lat. médiéval, sous
« former une conception ». Au moyen âge, l'influence du lat. jurid., où concurrere
surtout « devenir enceinte » ; le sens intel- avait déjà eu le sens de « prétendre à la
lectuel, qui n’est attesté que dep. le xiv®, même chose ». Concours, empr. du lat.
est probabl. dû au lat. écrit. — Dér. : concursus (francisé d’après cours), d'abord
concevable, 1584 ; inconcevable, 1584 ; pré- «moyen de se tirer d’affaire », vers 1330, en-
conçu, vers 1640. suite « réunion », dep. 1572, « compétition »
CONCHYLI(O)-. Premier élément de dep. 1660.
mots sav. comp., tels que conchyliologie,
1742, tiré du grec konkhylion « coquillage ». CONCRET, 1508, phys., « opposé d’abs-
trait », 1704 ; concrétion, 1537. Empr. du
CONCIERGE, 1195 (écrit cumcerges). Au lat. concretus (part. passé de concrescere
moyen âge a le sens plus étendu de « gar- (se solidifier »), concretio. — Dér. de l’adij. :
dien ». Probabl. lat. pop. *conservius, issu concréter, 1789 ; concrétiser, fin xIx°, d’a-
du lat. class. conservus « compagnon d’es- près le nouveau sens de concret.
clavage », sous l'influence du lat. serviens,
seulement en fr. — Dér. : conciergerie, 1318. CONCUBINE, 1213. Empr. du lat. con-
cubina (de concumbere « coucher avec »).
CONCILE, vers 1138. Empr. du lat. eccl. — Dér. : concubinage, 1372 (Oresme).
concilium, en lat. class. « assemblée », v.
les suiv. CONCUPISCENCE, xrr1e. Empr. du lat.
CONCILIER, xn°, rare avant le xvi®; eccl. concupiscentia (du lat. class. concu-
conciliabule, 1549 ; conciliation, xive. Em- piscere « désirer ardemment »).
pr. du lat. conciliare « assembler », d’où CONCURRENT, 1120 (en parlant de cer-
« concilier », conciliabulum « assemblée », tains jours de l’année ajoutés pour faire
pris d’abord pour désigner un concile irré- concorder l’année civile et l’année solaire).
gulier, d’où le sens moderne, xvrie. — Dér. Empr. du lat. concurrens, part. prés. de
de concilier : conciliateur, x1v®; conciliable, concurrere (V. concourir), sens développé
1787 ; conciliatoire, 1775 (une première fois dans la terminologie scientifique du lat.
1583) ; inconciliable, 1752. médiéval. — Dér. : concurrence, 1559 au
CONCIS, 1553. Empr. du lat. concisus, sens actuel (depuis la fin du xrve s. et
propr. « tranché », part. passé de concidere. jusqu’au milieu du xvrie s. « fait de se
— Dér. : concision, 1709 (déjà aux xve et rencontrer »).
xvi®, mais avec un autre sens, empr. du
CONCUSSION, 1474, au sens de « forte
lat. concisio).
secousse », sens jurid., déjà lat., dep. 1559.
CONCLAVE, xive. Empr. du lat. médié- Empr. du lat. concussio (de conculere « se-
val conclave, en lat. class. « chambre (fer- couer »). — Dér. : concussionnaire, xvI®
mée à clef) ». — Dér. : conclaviste, 1546 (Amyot).
(Rabelais).
CONDAMNER, xt ; condamnation,
CONCLURE, x1r1°, au sens de « convain- xir1e. Empr. du lat. condemnare, condem-
cre d’une faute » x11€ s. ; conclusion, x1r1e. nalio, avec modification d’après damner
Empr. du lat. concludere (de claudere « fer- (on trouve des formes en -emn- jusqu’au
mer », v. clore), conclusio. xvrie). La signification « rendre inutilisa-
CONCOMBRE, vers 1390. Altération de ble » (p. ex. une porte) est déjà dans
co(u)combre (xrr1°, encore en 1688), qui Saint-Léger, peut-être même déjà dans des
est empr. de l’a. pr. cocombre, lat. de basse amplifications de la Loi Salique. — Dér. :
ép. cücümer (lat. class. cucumis), génitif condamnable, xiv® (avec -emn-); recon-
-mêris. damner, 1611.

CONCOMITANT, 1503; concomitance, CONDENSER, 1314 ; condensation, x1v®


xive. Le premier est empr. de concomitans, (Oresme). Empr. du lat. condensare «rendre
part. prés. de concomitari « accompagner », épais » (de densus « épais »), condensatio
le deuxième du subst. concomitanlia, formé (créé à basse ép.). — Dér. de condenser :
dans la terminologie scolastique. condensateur, 1753.
149 CONFINS

CONDENSEUR,-1834. Empr. de l’angl. CONFÉDÉRER, xive (Bersuire) ; confé-


condenser, tiré du verbe io condense (v. le dération, 1326 (une fois au xIrI*, confe-
préc.) par Watt, en 1769, quand il inventa deraison). Empr. du lat. confoederare (de
l'appareil en question. foedus, -deris « traité »), confoederatio.
CONDESCENDRE, xr1e. Empr. du lat. CONFÉRENCE, 1464. Empr. du lat.
de basse ép. condescendere, de même sens médiéval conferentia (du verbe conferre, au
(de descendere). — Dér. : condescendance, sens de « discuter »). — Dér. : conférencier,
1609 ; condescendant, xIv®. 1752 (sens théol., au sens actuel 1869).
.CONDIMENT, xu1°. Empr. du lat. con- CONFÉRER, xive (Oresme, au sens
dimentum, qui a les deux sens, dér. de d’ « attribuer ») ; en outre « raisonner avec
condire « confire, assaisonner ». quelqu'un », xv°-xvi<. Empr. du lat. con-
ferre, propr. « rassembler », d’où les sens
CONDISCIPLE, 1532. Empr. du lat. con- précédents (du sens de « réunir, rapprocher
discipulus. des idées, des projets » on passe à celui
de « discuter »).
CONDITION, xr1e; conditionnel, 1295.
Empr. du lat. condicio, condicionalis (ju- CONFERVE, 1775. Empr. du lat. con-
rid.) ; le { vient de la graphie condilio de ferva, de confervere « se consolider » (propr.
basse ép. — Dér. : conditionner, xIII° « bouillir ») ; dit ainsi à cause de la pro-
(Rose), « soumettre à des conditions »; priété qui était attribuée à la conferve de
restreint aujourd'hui à certaines accep- souder les corps. L’a. fr. avait une forme
tions, d’où conditionné, 1304; incondi- pop. confirie, confierge, de *confervia, forme
tionné, 1838 ; conditionnement, 1845; in- refaite de conferva.
conditionnel, 1777. CONFESSER. Lat. médiév. eccl. *confes-
CONDOLÉANCE, vers 1460. Dér. de säre (de confessus, part. passé de confileri
l’anc. verbe condouloir, 1279,encore dans les « avouer ») avec les sens pris par confileri
dict. (lat. condolëre, de dolère « avoir de la dans le lat. eccl. — Dér. : confesse, x11°.
douleur »), avec réfection d’après doléance. CONFESSEUR, xu°; confession, id.
Empr. des mots du lat. eccl. confessor,
CONDOMINIUM, 1869. Empr. de l’angl. confessio (déjà usuel en lat. class. au sens
condominium, mot du lat. des diplomates 4 ES »), dér. de confiteri, v. le précé-
(formé avec le préf. con- et le lat. dominium
ent.
« souveraineté »).
CONDOR, 1596. Empr. de l'esp. condor, CONFESSIONNAL, 1636 ; d’abord chaire
empr. lui-même de cuniur du quechua confessionale (1613), siège confessional.
(langue du Pérou). CONFETTI, 1852. Empr. de l’it. confelli,
plur. de confetio « dragée », lat. confèclus,
CONDOTTIÈRE, 1776. Empr. de lit. qui a pris le sens de « préparé, assaisonné »,
condoïtiere, dér. de condotta « engagement, puis de « confit », v. confire ; dit d’abord
groupe de soldats loués » (fém. pris subst. par rapport au Carnaval de Rome, où l’on
de condotto, part. passé de condurre, lat. lançait des boulettes de plâtre, puis de
condücere au sens de « louer »). petites rondelles de papier servant à des
CONDUCTIBILITÉ, 1801. Dér. sav. de usages analogues.
conductus, part. passé de conducere. CONFIDENCE, xive (Oresme). Signifie
« confiance » jusqu’au XVIIe ; sens moderne,
CONDUIRE. Lat. condücére, qui n’a xvire s. (Malherbe), d’après confident. Em-
gardé généralement du lat. class. que le pr. du lat. confidentia, v. le préc. — Dér. :
sens de « conduire », v. cependant condot- confidentiel, 1779.
tière. It. condurre, esp. conducir. — Dér.
et Comp. : conducteur, vers 1225 (réfec- CONFIDENT, xvie. Empr. de l’it. confi-
tion, d’après le part. passé du verbe lat., dente, empr. lui-même du lat. confidens
de l’a. fr. conduilour, du lat. conductor, qui, «confiant », avec un développement séman-
outre les sens attestés « locataire, entre- tique propre; signifie aussi « confiant,
preneur », aura aussi eu celui de « celui fidèle » au xvi°.
qui conduit », d’après le lat. ductor) ; con- CONFIER, xive; confiance, xv® (une
duit, xr1e : en a. fr. aussi «conduite, escorte, fois confience, xin°). Empr. du lat. confi-
protection », etc., jusqu’au xv°, d’où sauf- dere, confidentia, avec francisation d’après
conduit, xrie ; lat. conduclum, neutre pris lier, fiance. Confier est trop récent pour
substantiv., cf. it. condotlo « conduit »; qu'on puisse y voir, comme le sont l’it.
conduite, xr11°, d’où inconduite, 1693 ; re- confidare et l'esp. confiar, un représentant
conduire, x1v°, d'où reconduite, 1582. du lat. pop. *confidäre. — Dér. : confiant,
CÔNE, 1552 (Rab.) ; conique, 1626. Em-
XIV*.
configuration,
pr. du lat. conus (du grec kônos) et du grec CONFIGURER, xu°;
configu-
kônikos. xue. Empr. du lat. configurare,
ratio.
CONFECTION, xr1° ; au moyen âge et CONFINS, fin xve. Antérieurement con-
jusqu’au xvi*, aussi « préparation pharma- fines, xive. Empr. du lat. confines, pl. de
ceutique », d’après le lat. médical. Empr. l’adj. confinis « limitrophe », qui a déjà en
du lat. confectio « achèvement » (de confi- lat. de basse ép. le sens de « limite », sens
cere « achever »). — Dér. : confectionner qu'il a gardé en lat. médiéval (comp. de
des vêtements, 1795, au xvi® « fabriquer finis « limite »). — Dér. : confiner, 1225.
des drogues », d’où confectionneur, 1830.
CONFIRE 150

CONFIRE. Au moyen âge « préparer, lable « secourable » (v. les préc.), d’où s’est
assaisonner », avec des acceptions plus développé le sens particulier de l’angl. —
étendues qu'aujourd'hui. Lat. conficère Dér. : inconfort, 1896 ; inconfortable, 1850.
propr. « achever » et partic. « préparer di-
verses matières » ; l’i est dû au part. passé CONFRÈRE, xur1e. Les associations de
confit, de conféctus, v. confetti. — Dér. : laïques, ayant un patronage religieux, le
confiseur, 1636, au xvi® confisseur, d’où plus souvent avec un but de piété, de cha-
confiserie, 1753 ; confiture, xr11e, d’après le rité, sont attestées dès le 1x° s., sous
part. pris de bonne heure substant. confit, le nom confrairia, d'où le fr. confrarie,
XIIe, dans les dictionnaires pour un sens XI11<-XVI® (aussi frarie, tous deux encore
technique et un emploi régional du Sud- dans les patois). Continuation probable
Ouest « viande conservée dans la graisse », de la phratria grecque. Devenu confrérie,
d’où confiturier, 1584 ; confiturerie, 1823 Ê sous l'influence de frère, dep. x1n1° s.;
déconfire, propr. « défaire », vers 1080 confrère est dér. de confrarie, d'après frère,
(Roland) ; avait en a. fr. le sens de « dé- de même confraternité, 1283, d’après fra-
truire, briser, défaire (un ennemi) » ; désuet ternité ; confraternel, 1786, d’après frater-
depuis le xvri*, sauf au part. passé, au nel.
sens de « qui a éprouvé une grande décon- CONFRONTER, 1344; confrontation,
venue » ; d’où déconfiture, xX11°, qui a suivi 1346. Empr. du lat. médiéval jurid. con-
le sort du verbe. frontare (de frons « front »), confrontatio.
CONFIRMER, 1213, en outre, du x1° au CONFUS, xrie; confusion, vers 1080
XVIe confermer ; confirmatif, 1473 ; con- (Roland). Empr. du lat. confusus (part.
firmation, x111° (au x11° cunfermeisun). passé de confundere, v. confondre), confusio.
Empr. du lat. confirmare (de firmus « fer- Développement sémantique en relation
me »), confirmativus (créé à basse ép., no- avec confondre.
tamment comme terme de grammaire, au
sens d’ « affirmatif »), confirmalio.
CONGÉ. Lat. commeätus, propr. « action
de se rendre à un endroit (commeare) »
CONFISQUER, 1331 ; confiscation, 1359. qui a pris spécialement dans le langage
Empr. du lat. confiscare (de fiscus « fisc »), militaire le sens de « titre de permission ».
con/fiscatio. CONGÉDIER, env. 1400. Empr. de l’it.
CONFLAGRATION, 1488. Empr. du lat. congedare, dérivé de congedo, empr. lui-
conflagralio (de flagrare « être en feu »). même du fr. ; la terminaison -ier vient de
l’ancien verbe congier que congédier a sup-
CONFLIT, x. Empr. du lat. de basse planté (congier est issu de congeer, dérivé
ép. confliclus (de confligere « heurter »). de congé, d’où vient congeable, 1570, au-
jourd’hui congéable).
CONFLUER, au sens de « affluer (de
personnes) », du x1v® au xvi®, empr. du CONGELER, xir1e; congélation, 1320.
lat. conjluere ; empr. une deuxième fois Empr. du lat. congelare, congelatio. Conge-
en parlant de cours d’eau, 1834. Dans ce ler a été en outre influencé par geler. —
dernier sens, le verbe a été précédé du Dér. : congelable, 1800, une première fois
subst. confluent, vers 1510, J. Lemaire, au xVI°.
empr. du lat. confluens. CONGÉNÈRE, 1562 (Paré). Empr. du
CONFONDRE. Lat. confündère, propr. lat. congener (de genus « genre »).
« mêler », d’où « ne pas faire de distinction CONGÉNITAL, 1784. Dér. sav. du lat.
entre des personnes ou des choses, troubler, congenitus « né avec ».
rendre confus, détruire »; paraît n'avoir
gardé que ce dernier sens dans le lat. pop. CONGÈRE, « amas de neige entassée
de la Gaule, sens dominant au moyen âge. par le vent », 1869, empr. des parlers de
Le sens « couvrir de confusion », très fré- la région de Lyon. Lat. congeries « tas
quent dans le lat. eccl., a été repris par les de choses qu’on a ramassées »: ne s’est
traducteurs de la Bible; le sens « mêler » maintenu que dans les régions où il neige
seulement au xvre. beaucoup.
CONGESTION, vers 1400. Empr. du lat.
CONFORMER, xri° ; conformation, x1ve
(Paré) ; conforme, 1372 ; conformité, xrve congestio « accumulation, amas » (de conge-
(Oresme). Empr. du lat. conformare, con- rere « amoasser »), au sens Spécial que conges-
formalio, conformis (créé à basse ép.), con- tio avait pris dans le langage médical, —
Dér. : congestionner, 1853 ; décongestion-
formitas (id.). — Dér. : conformateur,
ner, 1874.
1845 (une première fois 1611).
CONGLOMÉRER, 1721; conglomérat,
CONFORMISTE, 1666. Empr. de l’angl. 1818. Le premier est emprunté du lat.
conformisi, dér. de conform « conforme ». conglomerare (de glomus, -meris, « pelote ») ;
— Dér. : conformisme, 1907. — Comp. : le second est un dér. sav. de ce verbe sur
non-conformiste, 1672. le modèle des noms en -ai (en lat. -aius).
CONFORT, « ce qui donne de la force », CONGLUTINER, 1314; conglutination,
conforter, v. réconfort. 1314. Empr. du lat. conglutinare, conglu-
CONFORT, « bien-être matériel », 1816 tinatio, cf. glu, gluten.
(écrit com-) ; confortable, 1786. Empr. des CONGRATULER, x1v® (Bersuire) ; con-
mots angl. comfort, comfortable, eux-mêmes gratulation, 1512. Empr. du lat. congralu-
tirés du fr. confort « secours, aïde », confor- lari (de gratulari « féliciter »), congratulatio.
151 CONQUÉRIR

CONGRE, xu11e. Peut représenter le lat. CONJUGUÉ, 1690. Empr. du lat. conju-
de basse ép. congrus, antérieurement conger galus, au sens d’ « uni ».
(du grec gongros), ou être emprunté du pr. CONJURATION, xri°; souvent « ac-
congre, CÎ. aussi it. grongo, port. congro, tion d’exorciser, de prier instamment »,
esp. congrio. d’après conjurer ; conjuré, 1213. Empr. du
.CONGRÉGANISTE, 1704. Créé pour ser- lat. conjuratio, conjuratus, v. le suiv.
vir de dér. à congrégation, mais avec une
formation obscure, peut-être d’après orga- CONJURER. Lat. conjüräre « jurer en-
semble », d’où « former une conjuration » ;
nisie.
a pris en lat. de basse ép. le sens de « prier
CONGRÉGATION, xvie au sens moderne. instamment » (attesté chez Grégoire de
Empr. du lat. eccl. congregatio (de grex, Tours), puis d’ « exorciser, détourner par
gregis « troupeau »), qui, en lat. class. des prières ou des pratiques magiques ».
désignait toute espèce de réunions ; empr. Le sens de « conspirer », une première fois
au xII° en ce sens, encore usité au xvie. en 1213, ensuite dep. xiv® (Bersuire), est
CONGRÈS, xvi®, au sens de « union repris au lat. class., de même que le subst.
sexuelle, etc. », disparu vers 1700, au sens conjuré (Bersuire). Toutefois le dér. conju-
de «réunion de ministres », 1611, «réunion raison « conspiration » est attesté du x11°
de savants, etc. », 1845. Empr. du lat. au xv°.
congressus (de congredi «aller trouver, etc. ». CONNAÎTRE. Lat. cognôscère, dont le
— Dér. congressiste, 1869. groupe gn a été remplacé par -7-, sous
CONGRÈS, au sens de « corps législatif l'influence du verbe simple noscere, dans
des Etats-Unis », 1774. Empr. de l’anglo- une partie de la Romania. It. conoscere,
américain congress, également empr. du esp. conocer ; avec n mouillée : portugais
lat. congressus. conhocer, patois franco-provençaux, rhéto-
roman. — Dér. : connaissable, x111°, d’où
CONGRU, vers 1300. Empr. du lat. inconnaissable, 1470 ; connaissance, vers
congruus « convenable » (de congruere « se 1080 (Roland) ; en, avec, sans connaissance
rencontrer », d’où « s’accorder »). Portion de cause, 1409, sont propr. des termes de
congrue, d’abord terme de droit eccl., 1680. procédure ; connaissement, x11° ; Connais-
CONIFÈRE, 1523. Empr. du lat. conifer seur, id.; inconnu, x1v® (E. Deschamps),
(comp. de conus « cône » et de ferre « por- d'après le lat. incognilus; méconnaître,
ter »). x11€, méconnaissable, x111°. V. reconnaître.
CONJECTURER, xu°; conjecture, CONNECTER, vers 1780. Au sens techni-
1246. Empr. du lat. conjecturare (créé à que depuis 1929.
basse ép.) de conjicere, de même sens), CONNÉTABLE, x11° (cunestables). Du
conjectura. — Dér. conjectural, 1520. lat. de basse ép. comes siabuli « grand
CONJOINT, xr1°. Part. passé de l’ancien écuyer » (dans le Code Théodosien), propr.
verbe con‘oindre {jusqu’au xvni®), lat. con- « comte de l’étable », par dissimilation de
jüngère. l’'m avec le b, conestable. L’it. connestabile,
d’où contestabile, et l'esp. condestable sont
CONJONCTIF, xvie s., terme d’anato- empr. du fr., avec modification d’après les
mie ; une première fois en 1372. Empr. du formes it. et esp. de comie.
lat. conjunclivus dans ce sens spécial. —
Dér. : conjonctive, 1495, d’où conjoncti- CONNEXE, 1290 ; connexion, xive (Ores-
vite, 1832. me). Empr. du lat. connexus, conneæio (de
connectere « lier ensemble »). — Dér. de
CONJONCTION, x, t. de gramm.;
‘ l'adj. connexité, xv°.
conjonctif, id., xiv°. Empr. du lat. con-
junclio (de conjungere), conjunctivus (créé à CONNIVENCE, 1561. Empr. du lat. de
basse ép. comme terme de grammaire). basse ép. coniventia (de conivere « cligner,
fermer les yeux », d’où « être de conni-
terme d’astron., xIr1*.
CONJONCTION, vence »); conniver a été usité du xvi* s.
Empr. du lat. conjunctio « union, etc. », à Renan.
dans ce sens spécial. En a. fr. a en outre
des sens variés se rattachant à l’idée d’ « u- CONQUE, 1505. Empr. du lat. concha
nion », notamment « union charnelle », (du grec konkhé), qui vit sous la forme
comme en latin, jusqu’au xvr1°. conche en a. fr. et dans beaucoup de patois
comme désignation de plusieurs variétés
CONJONCTURE, x1ve. Réfection d’après de récipients.
le lat. conjuncius, de conjoiniure, XIII°,
dér. de conjoint, v. ce mot ; l’it. congiun- CONQUÉRIR. D'abord conquerre, encore
iura, de formation analogue, a peut-être chez Hardy, refait comme quérir, acg-,
eu une influence sur le sens, vers le xv°. eng-, reg-. Lat. pop. *conquaerère « acqué-
rir, conquérir », nouveau composé de quae-
CONJUGUER, 1572; conjugaison, 1551 rère, lat. class. conquirère « rechercher »,
(d’abord conjugation, 1529, et, une première qui a continué à vivre dans l’a. it. conqui-
fois, vers 1230). Empr. du lat. des grammai- dere. — Dér. : conquérant, xr1° ; conquête,
riens conjugare, propr. « unir, marier » (de xn1e, fém. pris substantiv. de conquest (con-
jugum « joug »), conjugatio (avec modifi- servé comme subst. dans conquêt, x11°-
cation de la terminaison). xvirre, terme d'anc. droit), lat. pop. *con-
CONJUGAL, vers 1300. Empr. du lat. quaesitus, disparu comme part. avant les
conjugalis, v. le préc. premiers textes ; reconquérir, x11°.
CONSACRER 152

CONSACRER, vers 1155. Empr. du lat. CONSIGNER, 1403 (une première fois
consecrare, avec francisation d’après sacrer, 1345 « délimiter par une borne »). Empr.
v. consécration, francisé de la même façon du lat. consignare « mettre un sceau (si-
en consacration, XIV®-XVI®. gnum) », d’où « signer, rédiger, consigner
CONSANGUIN, xir1°; consanguinité,
par écrit »et, en outre, « déposer une somme
1277. Empr. du lat. consanguineus, consan- d’argent » (langue juridique). « Donner un
guinitas (de sanguis « sang »). ordre à une sentinelle, etc. », XvIr1. —
Dér. : consignataire, 1690 ; consignation,
CONSCIENCE, xrie. Empr. du lat. cons- 1396 ; consigne, 1740 (formé une première
cientia, propr. « Connaissance », d’où « con- fois, fin du xv®s., au sens de « fait consigné
naissance intérieure ». — Dér. : conscien- par écrit ») ; a suivi le sens du verbe.
cieux, 1500; inconscience, 1838 ; subcons- CONSISTER, 1495, au sens moderne (une
cience, 1907. première fois au xiv® « rendre consistant »).
CONSCIENT, 1754. Empr. du lat. cons- Empr. du lat. consisiere, propr. « se tenir
ciens, part. prés. de conscire « avoir cons- ensemble ». — Dér. : consistance, 1377,
cience (d’une faute), la connaissance de cf. le lat. médiéval consistentia ; consistant,
quelque chose ». — Dér. : inconscient, 1847 ; XVI® (Paré), d’où inconsistance, 1755, in-
subconscient, 1907. consistant, 1775 (Beaumarchais ; une pre-
mière fois en 1544).
CONSCRIT, 1789; conscription, 1789.
Empr. du lat. conscriptus « enrôlé » (de CONSISTOIRE, xr1°. Empr. du lat. de
conscribere « enrôler des soldats »), cons- basse ép. consistorium «lieu où l’on setient,
criptio « enrôlement » (de basse époque en assemblée », d’où les sens du fr. au moyen
ce sens). L'expression pères conscrits, x1v®, âge et plus tard. — Dér. : consistorial, 1472.
est une francisation de paires conscripti CONSOLER, xirI°; consolable, xve;
« ensemble des sénateurs, comprenant à la consolateur, xiri® (Rose); consolation,
fois les paires et les conscripti ». x11<. Empr. du lat. consolari, consolabilis,
CONSÉCRATION, xn1°. Empr. du lat. consolator, consolatio. — Dér. : inconsolé,
consecratio, V. consacrer. fin xvin; une première fois vers 1500.
CONSÉCUTIF, 1474. Dér. sav. du lat. CONSOLE, 1565. D'abord consolateur
consecuius « qui suit », part. passé de conse- « figures d'hommes portant des corniches »,
qui « suivre ». 1567, dont console est une forme réduite.
CONSEIL. Lat. consilium « délibération, Ces saillies servaient d’abord d’accoudoirs
assemblée délibérante, sagesse, projet, con- dans les stalles de chœur, comp. le lat.
seil ». — Dér. : conseiller, subst., x° (Sainie- médiéval misericordia avec le même sens.
Eulalie), du lat. consiliarius. CONSOLIDER, 1314. Empr. du lat. con-
solidare, propr. « rendre solide (solidus) »,
CONSEILLER, verbe. Lat. pop. consi- également usité en lat. jurid. Consolider La
liâre, lat. class. -Gri. — Dér. : conseilleur dette publique, 1789, a été tiré d’annuités
« celui qui donne un conseil », xrre-xvre, consolidées, 1768, calque de l’angl. conso-
créé une deuxième fois au sens péjoratif lidated annuities (fonds d'Etat créés en
au xiX° (1821) ; déconseiller, xrr°. 1751), d’où aussi consolidés, 1856. — Dér. :
CONSENTIR. Lat. consentire « être d’ac- consolidation, x1ve.
cord », d'où « consentir ». — Dér. : consen- CONSOMMER, xr1e. Empr. du lat. con-
tement, xrre. summare, propr. « faire la somme (sum-
CONSÉQUENT, x1v® (Oresme), ne se dit ma) », d’où « achever ». Dans l’anc. langue,
de personnes que dep. le xvire. L’expres- et surtout au xvi® et au xvir®, souvent
sion par conséquent (dep. Oresme) est, employé au sens moderne de consumer, par
sans doute, formée d’après le lat. per conse- suite d’une confusion due au double sens
quentiam (par conséquence, aussi au xvI®) ; de consumer. — Dér. consommateur,
‘Conséquence, xr11°. Empr. du lat. conse- 1745, au sens moderne ; au sens théol.,
quens (part. prés. de consequi « suivre »), 1525, représente le lat. eccl. consummaior ;
consequentia. consommation, x1I°, d’après le lat. eccl.
consummatio, notamment dans la locution
CONSERVATEUR, xive (Oresme) ; con- la consommation des siècles, calque de con-
servation, vers 1290. Empr. du lat. conser- summatio saeculorum (saint Jérôme) ; con-
vaior, conservalio. sommé, adj., xive (Oresme), subsi., xvi®
CONSERVER. Lat. conserväre. — Dér. : (Paré).
conservatoire, comme adj., xIVe-XVIIIe CONSOMPTION, 1314. Empr. du lat.
(terme jurid.) ; comme subst. « école de consumptio (de consumere, au sens de
musique », 1778, empr. de l’it. conserva- « détruire »).
lorio, dér. de l’it. conservare; conserve,
CONSONANT, xr1°; consonance, xxre
1393 ; comme terme de marine, xvie, pro- (écrit consonantie). Empr. du lat. consonans,
babl. de l’a. pr. conserva.
consonantia (de consonare « résonner, en-
CONSIDÉRER, 1150; considération, semble »).
XIIe. Empr. du lat. considerare, conside- CONSONNE, 1529. Empr. du lat. des
ratio ; le verbe a supplanté l’a. fr. consirer grammairiens consona (de consonare, v. le
qui, au réfl., avait pris le sens de « s’abs- préc.), propr. « dont le son se joint à celui
tenir ». — Dér. : considérable, 1564; dé- de la voyelle ». Au xve et au xvie, plus
considération, 1797 ; déconsidérer, 1790, V. souvent consonant(e), d'après le latin des
inconsidéré. grammairiens consonans, -antis fém.
153 CONTENIR

CONSORT, xiv°. Empr. du lat. consors, CONSTRICTEUR, 1698. Dér. sav. du


propr. « qui partage le sort », d’où « com- lat. consirictus, part. passé de constringere
pagnon, etc. »; sens péjoratif récent, d'a- « SeITrer ».
près le sens jurid. (Prince) consort, 1669
est empr. de l’angl. consort, de même ori- CONSTRICTION, 1306; constringent,
gine. 1743. Empr. du lat. consiriclio, constringens,
v.. le préc.
CONSORTIUM, 1900. Empr. de l’angl. CONSTRUIRE, 1466 (consiruer en 1290) ;
consortium, empr. lui-même du lat. consor- constructeur, xIV® ; construction, xr1°. Em-
tium « association »; v. le préc. pr. du lat. consiruere (francisé d’après dé-
CONSOUDE. Lat. de basse ép. consôlida truire), constructor (créé à basse ép.), cons-
(de consolidare, v. consolider) ; ainsi nom- tructio. — Dér. : reconstruction, 1728 ;
mée à cause de ses propriétés astringentes. reconstruire, 1549 ; constructif, 1863 (une
Se présente souvent sous une forme refaite 1re fois en 1487).
sur le latin ou des formes altérées, par CONSUBSTANTIEL, x1v°; consubstan-
exemple console, fréquent dans le Centre. tialité, xr1°. Empr. du lat. eccl. consubstan-
Esp. consuelda. tialis (de substanlia), consubstantialitas, v.
CONSPIRER, 1213 ; conspiration, xri°. : substance.
Empr. du lat. conspirare, proprement CONSUL, xrr1° ; consulaire, vers 1295;
« souffler ensemble », conspiratio. En outre consulat, id. Empr. du lat. consul, con-
trans. au xvie et au xviie. — Dér. : cons- sularis, consulatus. Dans le Midi l’adminis-
pirateur, 1302. tration romaine des villes s'étant conservée
CONSPUER, 1743 (une première fois jusqu’au moyen âge et au delà, le lat.
en 1530). Empr. du lat. conspuere, propr. consul est resté comme titre des adminis-
« cracher (sur) ». trateurs des villes (cosol). — Dér. : vice-
consul, 1718.
CONSTABLE, 1776. Empr. de l’angl.
constable, de l’a. fr. conestable, v. conné- CONSULTER, xv°: consultation, x1v®
table. (Bersuire). Signifient aussi « délibération,
délibérer », du xvie au xvinie. Empr. des
CONSTANT, x1ve ; constance, 1202. Em- mots lat. consultare, consultatio, qui ont les
pr. du lat. constans (de consiare « s'arrêter, deux sens. — Dér. : consultant, 1584;
se tenir ferme »), constantia. consultatif, 1608 ; consulteur, xv°. Sens
d’abord jurid., ensuite médicaux.
CONSTATER, 1726. Dér. du lat. constat
« il est certain », 3° pers. du sing. de cons- CONSUMER, x11°. Empr. du lat. consu-
tare. — Dér. : constatation, 1845 ; a été
mere, au sens de « détruire peu à peu »;
formé une première fois en 1586 ; constat, signifie aussi du XIV® au XVII® « CONSOM-
fin xixe, est la forme verbale latine constat, mer », sens également latin, v. consommer.
empruntée comme formule initiale d’un CONTACT, 1611. Empr. du lat. contacius
procès-verbal. (de contingere « toucher »). — Dér. : contac-
teur, 1929 ; contacter, vers 1940.
CONSTELLATION, xrr1° (Rose). Terme
d’astrologie : « situation respective des CONTAGION, vers 1327; contagieux,
astres (agissant sur la destinée) »; sens vers 1300. Empr. du lat. contagio, propr.
moderne en 1666. Empr. du lat. de basse « contact », contagiosus, de la famille du
ép. constellatio (de stella « étoile ») qui n’a préc. — Dér. : contagionner, 1873.
qu’un sens astrologique. — Dér. : constellé,
au sens astrologique : « fait sous l'influence CONTAMINER, 1213; contamination,
d’une constellation », 1519 ; consteller, au xive, D'abord « souiller, souillure », sens
sens moderne, 1838 (Lamartine). disparus au profit du sens médical récent.
Empr. du lat. contaminare, propr. « tou-
CONSTERNER, xive (Bersuire) ; cons- cher », d’où « souiller », contaminatio, de la
ternation, 1512. Empr. du lat. consternare famille des préc.
(de la famille de conslernere « abattre »,
CONTEMPLER, xu1°; contemplateur,
auquel consierner doit ce sens, xvii® et
xvirie), consternatio. 1360 (Bersuire) ; contemplatif, x11° ; con-
templation, id. Empr. du lat. contemplari,
CONSTIPER, xiv®°; constipation, x1Iv°. -alor, -ativus, -atio.
Empr. du lat. consiipare « serrer, resserrer ». CONTEMPORAIN, xve. Empr. du lat.
constipatio, au sens particulier qu'ils ont contemporaneus (de tempus « temps »). —
dans la langue médicale. Dér. : contemporanéité, 1798.
CONSTITUER, xur1° ; constitution, x11°. CONTEMPTEUR, 1449. Empr. du lat,
Empr. du lat. constituere « établir », consii- contempior (de contemnere « mépriser »,
tutio « nature, institution »; d’où les sens lui-même empr. sous la forme conlemner,
français. — Dér. : 1° de consliluer : consti- xive-La Fontaine).
tuant, 1390 ; constitutif, 1488 ; reconsti-
tuer, 1790, une première fois en 1534, d’où CONTENIR. Lat. pop. continére ; a suivi
reconstituant, 1369 ; 2° du subsi., au sens le développement de tenir, — Dér. : conte-
politique : constitutionnel, 1775, d’où anti- nance, vers 1080 (Roland), d’où déconte-
constitutionnel, 1769; inconstitutionnel, nancer, 1549 (au part. passé, romme verbe
1775 ; au sens général : reconstitution, 1734. dep. G. de Balzac).
CONTENT 154

CONTENT. Lat. contentus « qui sait se ble »), continuus, continualio. — Dér. :
contenter », d'où « satisfait », part. passé 19 de continu : continuité, vers 1360 ; 2° de
de continere « maintenir, retenir ». — Dér. : continuer : continuateur, 1579 (continueur
contenter, 1314, d’où contentement, xv®; au xve)
mécontenter, xiv°, mécontentement, 1528,
mécontent, 1501, antér. malcontent, xir1°, CONTINUEL, xri°. Dér, sav. de l’adj.
encore G. Sand. continuus, Voir le préc.
CONTENTIEUX, 1257. Au moyen âge CONTONDANT, 1503. Part. prés. de
et jusqu’au xvrre, surtout « querelleur », l’anc. verbe coniondre, xv°-xix®, empr. du
comme subst. au sens actuel, 1797. Empr. lat. contundere « frapper fortement », v.
du lat. contentiosus « querelleur » et « liti- contusion.
gieux » dans la langue jurid. (de contentio
« lutte »), v. le suivant. CONTORSION, xive. Empr. du lat. con-
lorsio, forme de basse ép. pour contortio
CONTENTION, 1208. Antér. contençon « action de tordre », attesté seulement dans
« lutte », x11°, jusqu’au xvire. Signifie sur- des sens fig. (de coniorquere « tordre »),
tout « débat, dispute »; le sens de « ten- dans un sens particulier. — Dér. : se contor-
sion de l'âme » ne paraît pas être antérieur sionner, 1367.
au xvi®., Empr. du lat. contentio « tension, :
lutte », voir le préc. (de contendere «tendre »). CONTOURNER, 1311, mais doit être
CONTER, v. compter. plus ancien, v. le dér. ; représente un lat.
pop. *contornare. Le sens a été d’abord
CONTESTER, 1338 ; contestation, 1387. « être situé près de ; (se) tourner vers »,
À. pr. contestar et contestacion sont attestés lequel vit jusqu’au xvi1° s. Au xvI® s. se
beaucoup plus tôt ; le verbe continue pro- développe le sens de « entourer, faire le
babl. le verbe lat., le droit romain ayant tour de qch. ». Le sens de « tracer le
continué à vivre dans le Midi. L’introduc- contour de », comme terme des beaux-
tion du verbe en fr. est peut-être due à l’in- arts, est attesté depuis 1651; il a été
fluence croissante des études de droit de donné au verbe probablement sous l’in-
Montpellier. Le sens que le verbe y avait pris fluence de l’it. contornare. — Dér. : contour,
n’est pas du lat. class., mais vient de celui 1170; d’abord au sens de « environs;
du lat. jurid. « ouvrir un débat judiciaire lisière d’un champ » (encore dans les
en produisant des témoins », contestatio. patois) ; le sens moderne est attesté
— Dér. : contestable, 1611, d’où incontes- depuis 1549.
table, id. ; conteste, xvre, aujourd’hui seu-
lement dans la locution sans conteste (dep. CONTRACTER, « faire un contrat »,
Molière) ; incontesté, 1650. xIve (Oresme). Dér. du lat. contracius
« convention » (du latin jurid. contrahere
CONTEXTE, 1539. Empr. du lat. con- « faire un contrat », propr. « resserrer »).
texlus « ensemble, enchaînement » (de con- A partir du xvie, sens fig. d’après ceux du
iexere, proprement « tisser ensemble ») en latin conirahere « contracter une ami-
vue d’un sens partic. tié, etc. », v. contrat.
CONTEXTURE, 1552. Dér. sav. du lat. CONTRACTER, « resserrer, réduire le
conlexlus, part. passé de contexere, sur le volume, etc. », 1703. Dér. sav. du lat.
modèle du lat. fextura « tissu, contexture ». coniracius, part. passé de conirahere, au
CONTIGU, vers 1360. Empr. du lat. sens de « resserrer », v. le préc. ; contrac-
contigquus (de contingere « toucher »). — ture, 1790 ; comme terme d'architecture,
Dér. : contiguïté, xve. 1611, empr. du lat. coniractura ; on a aussi
contireture, -ait-, au moyen âge en parlant
CONTINENT, adj., xr1° ; continence, x11°. de contracture du corps, d’après a. fr.
Empr. du lat. continens, part. prés. de contrait « paralysé » (de contractus).— Dér. :
conlinere, au sens de « maîtriser », conii- décontracter, 1951.
nentia.
CONTINENT, subst., 1532. Empr. du lat, CONTRACTILE, 1755. Dér. sav. du
continens (sous-entendu terra), aussi terre lat. contracius, voir le préc. — Dér. :
contractilité, 1793.
continenie, 1532-1609, propr. « continu » (de
continere, au sens de « tenir ensemble ») CONTRACTION, xrrie. Empr. du lat.
voir le précédent. — Dér. : continental, contractio, v. les préc. — Dér. : décontrac-
1773 (ou empr. de l’angl.). tion, 1922.
CONTINGENT, adj., 1370 (Oresme); CONTRACTUEL, 1596. Dér. sav. du lat.
subsi., 1509, d'abord part contingenie, coniracius « contrat », v. contrat.
1668; contingence, 1300. Empr. du lat.
contingens, part. prés. de contingere, au CONTRADICTEUR, vers 1200; contra-
sens d’ « échoir, arriver par hasard », diction, x11° ; contradictoire, x1ve (Oresme).
conlingentia (créé à basse ép.) « hasard ». Empr. du lat. coniradictor, contradictio,
— Dér. de contingent au deuxième sens : Rod lte(créé à basse ép.), v. contre-
contingenter, 1922, -tement, id. e.
CONTINUER, x11° ; continu, x111° (Join- CONTRAINDRE. Anciennement cons-
ville); continuation, 1283 (Beaumanoir). treindre, devenu rapidement consiraindre.
Empr. du lat. continuare (de la famille du Lat. consiringère, propr. « serrer », d’où
verbe continere, au sens de « tenir ensem- « contraindre ». — Dér. : contrainte, xrie.
\
155 CONVAINCRE

CONTRAIRE, vers 1080 (Roland); CONTREDIRE. Lat. conitradicére. V.


contrarier, id. ; contrariété, x11°. Empr. du contradicteur, etc. — Dér, : contredit, xrre.
lat. conirarius, contrariare (créé à basse
ép.), contrarielas. CONTRÉE, v. contre.
CONTREFAIRE. Lat. de basse ép. con-
CONTRALTO, 1791. Empr. de l’it. con- trâfacère, qui a pris de bonne heure le sens
irallo, formé comme le fr. haute-contire, de « reproduire par imitation », d’où le sens
c'est-à-dire « voix d’alto, qui est contre, « dessiner, peindre » (xr112-xv1®). — Dér. :
qui est proche de l’alto ». contrefait, x111° ; contrefaçon, d’après fa-
CONTRAPONTISTE, 1831. Empr. de çon, xI11° ; Contrefacteur, 1754, d’après fac-
lit. conirappuntista, dér. de contrappunto teur ou le lat. factor, a remplacé l’ancien
« contrepoint »; on trouve parfois contre- contrefaiseur, quand le développement in-
pointiste d’après le mot fr. contrepoint. dustriel du pays a rendu nécessaire une
poursuite plus systématique de la contre-
CONTRASTE, 1580 (Montaigne). D'a- facon ; de là contrefaction, 1752.
bord « lutte, contestation », encore au
XVIIe, Empr. de l'it. contrasto, tiré de CONTREPÉTERIE, xvi® (au sens de
contrastare « s'opposer à », lat. pop *con- « modification volontaire des mots »). Dér.
träsiäre, comp. de contra « contre », et de de l’anc. verbe contrepéter (comp. de péler)
siäre « se tenir »; celui-ci a donné égale- « changer intentionnellement les sens des
ment l’a. fr. contrester « disputer », usuel mots pour produire un effet plaisant »,
jusqu’au xvi*, refait alors en contraster, d’où « imiter par dérision ».
d’après contraste, dont il a suivi le sens. CONTREVALLATION, 1680. Comp. hy-
Comme terme de peinture, semble égale- bride du fr. contre et du lat. vallatin (créé
ment d’origine italienne, 1669 (Molière). à basse ép.) « retranchement » (de val-
CONTRAT, xive (Oresme). Empr. du lum « id. »).
lat. contracius, v. contracter. CONTREVENIR, 1331. Empr. du lat.
CONTRAVENTION, xi°. Dér. sav. du médiéval contravenire au sens jurid. (déjà
lat, de basse ép. coniravenire « s'opposer latin de basse ép. au sens de « s'opposer à,
à »; développement sémantique parallèle engager une polémique contre »), v. contra-
à celui de contirevenir. vention.
CONTRIBUER, 1309; contribution,
CONTRE. Lat. conirä. Le sens lat. class.
« en face de » vit en fr. jusqu’au xvire et 1317. Empr. du lat. coniribuere « fournir
a donné le dér. contrée (d’un lat. pop. pour sa part », contributio (jurid., créé à
*regio contrata « pays situé en face de celui basse ép.). Le verbe a été souvent trans.
au xvi® et au xviie d’après le latin. —
qui regarde », aussi it. contrada; l’all.
Dér. : contribuable, 1401.
Gegend est dér. de la prép. gegen sur le
modèle du mot fr.). De là le sens de « tout CONTRISTER, xrie. Empr. du lat. con-
près de » (serrer contre sa poitrine, etc.), tristare.
ensuite « en direction opposée à », « en
CONTRIT, x11° ; contrition, x11°. Empr.
opposition à » (remplace déjà en lat. du
Bas-Empire adversus et praeïter). Depuis la du lat. eccl. coniritus, contritio (du verbe
conlerere, propr. « broyer, écraser »).
Vulgate contra est concurrencé par la prép.
composée incontra, d'où fr. encontre, qui CONTRÔLE, v. rôle.
pourtant disparaît au commencement du CONTROUVER. Propr. « imaginer »,
xviie, au profit de contre. Elle est restée d’où le sens moderne. Même mot que
dans l’expression à l’encontre de (x111° 8., contropare, vi® (Loi des Wisigoths), « com-
vieillie au xvire, mais de nouveau en usage parer », d’origine incertaine, d’où contro-
dep. le xix®, p. ex. G. Sand) et a formé palio, vi®, « comparaison », cf. aussi it.
le dér. encontrer « trouver quelqu'un sur controvare « imaginer », V. trouver.
son chemin » (x° — vers 1620), qui
est resté en fr. sous la forme renforcée CONTROVERSE, 1311, en 1245 coniro-
rencontrer, xIV°, d’où rencontre, XIII°. — versie. Empr. du lat. coniroversia. — Dér. :
Comp. malencontreux, vers 1400, formé controversable, 1836 ; controversé, 1610;
sur malencontre « malheur » (de l’adj. mal controverser, 1640 ; -iste, 1656 (Pascal).
et du subst. verbal encontre, de enconirer, CONTUMACE, adj., 1392 (antérieure-
qui s’opposait à bonne encontre « bonne ment -al, par substitution de suff., xr11°) ;
aventure », vers 1300). contumace, subsi., fém., xir1e. Empr. du
CONTREBANDE, 1566 : « marchandise lat. jurid. contumazx, contumacia (de iumere
de contrebande », Henri Estienne, qui attri- « se gonfler »), propr. « obstiné, obstination
bue cette expression aux Vénitiens ; déjà orgueilleuse », sens également empr. en
en 1512. Empr. de l'it. contrabbando, a. fr. et que le subst. a encore au xvrie.
d’abord locution adverbiale signifiant «con- CONTUS, 1503 ; contusion, 1314. Empr.
tre le ban », devenue subst. — Dér. : du lat. contusus, contusio, également terme
contrebandier,
1723. médical (de contundere), v. contondant. —
CONTRECARRER, v. carrer. Dér. : contusionner, 1823.
_ CONTREDANSE, 1626. Empr. de l’angl. CONVAINCRE, xr1e. Empr. du lat. con-
counitry-dance, propr. « danse de campa- vincere, francisé d’après vaincre. Signifie
gne » (de country, du fr. conirée, et de souvent aussi « démontrer, prouver », jus-
dance), devenu coniredanse, par croisement qu’au xvrie, d’après le verbe lat., v. convic-
avec conire. tion.
CONVALES CENT 156

CONVALESCENT, vers 1400 ; convales- CONVICT, 1796. Empr. de l’angl. convict


cence, vers 1355. Empr. du lat. convales- « condamné soumis à une peine », empr.
cens, part. prés. de convalescere « reprendre lui-xnême du lat. convicius « convaincu
des forces », convalescentia (créé à basse d’un crime ».
ép.).
CONVICTION, 1579. Empr. du lat. de
CONVENIR. Souvent covenir en a. fr. basse ép. convictio (de convincere), V. con-
Lat. convenire, propr. « venir ensemble », vaincre.
d’où « aller trouver », d’où « être d'accord », CONVIER. Lat. pop. “*convitäre, réfec-
avec sujet de chose. Paraît avoir subsisté tion de invuitäre « inviter à un repas »,
dans le lat. pop. en ce dernier sens, d’où d’après convivium « banquet », cf. it. convi-
« être convenable », puis « falloir », prépon- are, esp. convidar.
dérant en a. fr. Usage analogue dans les
autres langues romanes it. convenire, CONVIVE, xve. Empr. du lat. conviva.
esp. convenir. La construction personnelle,
au sens de « tomber d’accord », x1r1°, très CONVOITER. D'abord coveitier, devenu
rare en lat., peut s'être développée spon- rapidement convoilier, d’après les nombreux
tanément ; mais d’autres sens du lat., no- mots à initiale con-. Lat. de basse ép. *cupi-
tamment « venir ensemble », ont été parfois dietäre, dér. de *cupidietäs, altération du
repris. — Dér. : convenable, xr1° ; conve- lat. class. cupiditäs « désir », d’après anæie-
nance, id., d’où inconvenance, 1573 ; in- täs, medietäs, pietäs, etc., d’où a. fr. coveilié.
convenant, 1790, d’après l’anc. adj. conve- Seulement gallo-roman; cf. a. pr. cobeitar,
nant, XI11° (au XIIe s., covenant, pris subs- cobeitat. — Dér. : convoitable, x11° ; convoi-
tantiv., d’où l’angl. covenant « conven- teux, id.; probabl. déjà lat. de basse ép.
tion ») ; déconvenue, x11°, propr. « Ce qui *cupidietosus, Cf. a. pr. cobeitos ; convoitise,
arrive d’une manière qui ne convient pas », id., a supplanté l’a. fr. coveitié. Tous ces dér.
d’où « mésaventure, etc. »; le verbe des- apparaissent d’abord avec le radical coveit-.
convenir ne paraît pas avoir été usité en CONVOLER, 1481. Empr. du lat. jurid.
ANEr. convolare, propr. « voler, se hâter vers ».
CONVENT, 1874. Empr. de l’angl. con- CONVOLVULUS, 1545. Empr. du lat.
vent (empr. lui-même du lat. convenius, convoluulus (de convolvere « enrouler »),
v. couvent) par les loges maçonniques du francisé parfois en convolvule, 1553.
rite écossais.
CONVOQUER, xive (Bersuire) ; convo-
CONVENTICULE, 1384. Empr. du lat. cation, 1302. Empr. du lat. convocare, -atio.
conventiculum (dér. de convenius), v. le CONVOYER. Lat. de basse ép. *conviare
préc. (de via « chemin »), propr. « se mettre en
CONVENTION, 1268. Empr. du lat. con- route avec ». — Dér. : convoi, x11° ; con-
ventio, qui a les deux sens du fr., d’abord voyeur, id.
covence, du nom. lat., 1212. — Dér. : con- CONVULSER, xvi® (au part. passé, le
ventionnel, 1453 ;reconvention, 1283 (Beau- verbe dep. 1829); convulsion, 1549. Le
manoir) ; reconventionnel, 1421. verbe est dér. du lat. médical convulsus, le
CONVENTUEL, 1249 (conveniual, -el dep. subst. est empr. du lat. médical convulsio
1461). Empr. du lat. médiéval conveniualis, (de convellere « arracher »); sens fig. de
v. convent. convulsion au xvr1°. — Dér. : convulsif,
1546 ; convulsionnaire, 1735.
CONVERGER, 1720; convergent, 1626.
Empr. du lat. de basse. ép. convergere (de COOLIE, 1857. Empr. de l’angl. coolie;
vergere « incliner vers »), convergens pour a remplacé orthographiquement couli, en-
des emplois scientifiques, v. diverger. — core dans les dict., 1666 (écrit colys) ; tous
Dér. : convergence, 1675. deux sont empruntés de koli, nom d’une
peuplade du Goudjerat, à l'Est de l’Hin-
CONVERS, xri°. Empr. du lat. eccl. doustan, au Nord de Bombay.
conversus « converti », V. convertir. COOPÉRER, vers 1390; coopérateur,
CONVERSER, xi° (Alexis). D'abord 1516; coopération, vers 1390. Empr. du
« fréquenter », sens moderne seulement à lat. cooperari (créé à basse ép.), cooperator
partir du xvir® ; conversation, xr1° ; même (id.), cooperatio. — Dér. : coopératif, 1838 ;
développement de sens. Empr. du lat. une première fois en 1550.
conversari « fréquenter », conversalio « fré- COOPTATION, xvri®. Empr. du lat.
quentation ». cooptalio (de cooptare « choisir, associer »,
CONVERTIR, x° ; conversion, XII° ; con- v. opter ; coopter, vers 1710, est peu usité).
vertible, x111° (Rose). Empr. du lat. conver- COORDINATION, 1762 (Rousseau), une
ere, propr. « tourner », d’où les différents 1re fois en 1370, Oresme. Empr. du lat. de
sens, notamment le sens chrétien, empr. à basse ép. coordinatio (de ordinatio « mise en
différentes époques, conversio, convertibilis. ordre »), v. ordonner. — Comp. : incoordi-
— Dér. : convertissement, xr11° ; conver- nation, 1865.
tisseur, 1530; inconvertible, 1866, au sens
financier, en 1546, au sens religieux. Dér. COPAHU, 1730. Empr. de co“paheu des
de conversion, reconversion, 1877. Caraïbes. Le comp. copa-iba « arbre qui
produit le copahu » (iba « arbre » en tupi)
CONVEXE, xive (Oresme) ; convexité, a été emprunté sous la forme de copaïba,
xv°. Empr. du lat. convezus « voûté, ar- 1610, et transformé en copayer, 1786, sous
rondi », convexitas. l'influence du suff. -ier.
157 CORAIL

COPAIN, v. compagnon. donc. « grue mâle », et qui se serait ensuite


croisé avec cigogne, d'où la syllabe -si-.
COPAL, 1588. Empr. de l'esp. copal, Mais cette explication ne tient pas compte
empr. lui-même de l’aztèque copalli. de la forme coquesague chez Eust. Des-
COPEAU, a. fr. cospel, coispel. Dér. en champs. L'origine du mot reste donc
-ellus du lat. cuspis « fer d’une lance, d’un incertaine.
aiguillon de bouvier » et de *cuspia, qui en COQUELICOT, 1544, d’abord coquelicog.
était probabl. un dér. collectif (les deux Onomatopée imitant le cri du coq; a
formes vivent encore dans des parlers méri- d'abord désigné le coq lui-même, x1ve 8.,
dionaux). L’a. fr. cospel est représenté puis a été appliqué à la fleur, par compa-
aujourd’hui par fr. copeau, coispel par raison de sa couleur avec celle de la crête
norm. coipiau, etc. du coq.
COPIE, xive (au sens moderne), x1i°, COQUELOURDE, nom de plante, 1539.
au sens lat. « grande quantité ». Le sens Dér. de cog, à cause de la fleur rouge;
moderne est peut-être dû à l’influence du désigne des plantes différentes selon les
verbe lat. médiéval copiare « reproduire en régions.
grande quantité », par rapport auquel copie
pouvait être pris comme un subst. verbal. COQUELUCHE, xv°, « sorte de capu-
— Dér. : copier, 1339, d’où recopier, 1362 ; chon » et « toux épidémique » ; sens figuré
copiste, xve. de « béguin, passion », xviie. On a dit que
le 2e sens dérive du 1er, d’après l'usage
COPIEUX, 1365. Empr. du lat. copiosus qu’auraient eu les malades de se couvrir la
de copia, v. le préc.). tête d’une coqueluche ; en tout cas une
COPRAH, 1877 ; d’abord copre, 1859, en étymologie populaire est intervenue, cette
outre copra dans des traductions de voya- sorte de toux s’appelant chant de coq, à
ges (1602-1758). Empr. par l'intermédiaire cause de son caractère à une certaine pé-
du port. copra, de koppera, du parler de riode de la maladie ; l’étymologie même du
Malabar. mot est obscure.

COPULATION, xr11°. Empr. du lat. copu- COQUEMAR, v. cocotte.


latio « union », v. le suivant. COQUERET, 1545; antér. coquelet,
COPULE, 1752, sens moderne. Empr. de 1512; cokelet, 1270 ; en outre coquerelle,
copula, de même sens, proprement « ce qui xvic. Dér. de coq ou variante de coquelicot,
sert à attacher » (à basse ép. a signifié à cause de la couleur rouge des baies de
« lien conjugal », d’où le sens de « copula- cette plante.
tion », xv®-XVIIIE S.).
COQUET, v. coq.
COPYRIGHT, 1878. Mot angl. signifiant
COQUETIER, v. coque.
« droit (right) de copie » et devenu inter-
national à la suite du Congrès de la pro- COQUILLE. Lat. pop. *conchilia, neutre
priété artistique. plur. pris comme fém., du lat. class. con-
COQ, xue. Tiré de coco, imitation du chylium (du grec konchylion) ; l’initiale cog-
cri du coq dès Pétrone ; coccus déjà Loi est due à un croisement avec coque. —
Dér. : coquillage, 1573 ; recoquiller, x1v°.
Salique. A supplanté l’a. fr. jal, lat. gallus,
d’où it. esp. gallo, a. pr. gal; des repré- COQUIN, xr1°. Jusqu'au xvi® surtout
sentants de gallus survivent encore en « gueux, mendiant ». Probabl. dér. de coq,
lorrain et dans la plupart des parlers gallo- comme d’autres mots à sens défavorable
romans au sud de la Loire. V. pâte. — ‘(coquart « prétentieux », xv®; « benêt »,
Dér. : coquet, xv°, d'où coqueter, 1611;
xv° ; cocquelineux « fantasque », XvI°). —
coquetterie, 1651 (Scarron), v. cocarde. — Dér. : coquinerie, x111° ; acoquiner, 1530.
Comp. : cog-à-Pâne, 1532 (Marot) ; litté-
ralement « discours où l’on passe du coq COR. Lat. cornu. L'emploi du mot pour
à l'âne »; cf. saillir du coq en l’asne, XIV°, désigner une sorte d’instrument de mu-
sauter du coq à l’asne, xve-xvi*, et la locu- sique, prépondérant aujourd’hui, remonte
tion anglaise a cock-and-bull-siory « une au latin. Du sens de « corne », attesté en
histoire de coq et de taureau ». ancien français, est issu cors (de cerf),
xive (d’où dix cors, xviie s.). De cornu
COQ, « maître-coq », 1690. Empr. du comme nom de la substance vient cor (au
néerl. kok « cuisinier ». pied), xvie (tous deux certainement anté-
COQUE. Du lat. coccum « excroissance rieurs), cor (au pied) est aujourd’hui pré-
d’une plante », qui, dans les langues ro- pondérant dans les patois; concurrencé
manes, a pris plusieurs sens, comme « baie, par œil d’agace (v. pie), Lorraine et région
noix, coquille », qui représentent tous des de la Suisse romande, nid d'agace, picard,
objets aux formes arrondies. De là coque agace, wallon, et un dérivé d’agace, Sud-
«enveloppe d'œuf, de noix », etc. — Dér. : Est: cf. pour cette dénomination œil de
coquetier, ustensile, 1524 ; tandis que co- pérdrix, sorte de cor, et l’all. Hühnerauge
« cor », littéralement « œil de poule ». V.
quelier, «marchand d'œufs et de volailles »,
1475, se rattache plutôt à coq. corne.
CORAIL, 1416 ; antérieurement courail,
COQUECIGRUE, 1534 (Rab.). On l’a 1328 ; coral, xrre. Du lat. de basse ép. coral-
expliqué par un coquegrue (vers 1550),
dont le sens serait « coq de la grue », lum (it. corallo), lat. class. corallium. La
CORAIL 158

transformation de la terminaison -a/ en -ail planté l’a. fr. sueur, usité jusqu'au xve,
en fr. est due à une réfection du sing. lat. sütor « cordonnier », et une autre forme
d’après le plur. coraux. — Dér. : corailleur, corveisier, dérivée de l’a. fr. corvois (cf.
1679. a. pr. corives « cuir de Cordoue ») ; cette
CORALLIN, 1500. Empr. du lat. de forme indique que ce cuir a été désigné en
basse ép. corallinus, v. le préc. gallo-roman sous la forme lat. cordubë(n )-
sis, Cf. esp. cordobes « habitant de Cor-
CORAN, 1657 : « Alcoran ou mieux doue »; corveisier encore, sous des formes
coran »; antér. alcoran, xive. Empr. de altérées, en wallon. — Dér. : cordonnerie,
l’ar. (al)-gorân, propr. « la lecture » ; cf. de 1532, d’abord -ouanerie, 1236.
même Bible, Écriture. On a proposé d'ex-
pliquer l’an quaranie dans la locution se CORIACE, 1549 (d’abord corias, masc.,
moquer d'une chose comme de l'an quarante xve). Dér. de l’a. fr. coroie « courroie »
comme une altération de l’alcoran, expli- (comp. a. fr. corion, etc.). Signifie d’abord
cation qu’on peut appuyer sur la locution « filandreux », et cette signification vit
qui a été assez usuelle : 7e pas s’y entendre encore dans certains patois. À été rappro-
plus qu’à l’alcoran. ché, par la suite, du lat. coriaceus, de co-
rium « Cuir », Ce qui en a aussi modifié
CORBEAU, xr1°. Dér. de l’a. fr. corp, légèrement l’acception.
disparu de très bonne heure, lat. corvus,
conservé dans toutes les autres langues CORIANDRE, xrrie. Empr. du lat. co-
romanes : it. corvo, esp. cuervo. Aujourd’hui riandrum (du grec koriandron).
concurrencé par corneille, graille ou grole, CORINDON, 1795 ; antérieurement cu-
v. graillement, etc. ; le simple ne survit que rind, xvire, indiqué comme terme du te-
dans quelques patois méridionaux. V. en lengui (ou telougou), langue dravidienne.
outre bec-de-corbin, cormoran. — Dér. : Soit dérivé de curind, cf. aussi allemand
corbillat, xvIe s., d’après cornillat, v. cor- Korund, soit repris d’une autre forme
neille ; encorbellement, 1394, d’après l’em- kurundan ; l'anglais corindon paraît venir
ploi de corbeau, comme terme d'architec- du français.
ture.
CORBEILLE. Lat. de basse ép. corbicula, CORME, xirie. D'un gaul. *corma, qui
dim. de corbis, de même sens, d'où it. se rattache à curmi, ve s. (M. Empiricus),
corba, a. pr. corba, corp. Seulement fr. — « boisson fermentée » faite avec des cormes,
Dér. : corbillon, xr1e. cf. irlandais cuirm « bière », et aussi cormé
« sorte de cidre », xvI® s., encore dans les
CORBILLARD, 1798, au sens moder- parlers de l'Ouest. Corme s'emploie aujour-
ne. Antérieurement « grand carrosse », d’hui surtout dans les parlers de l'Ouest,
1690, corbillat « coche d’eau, faisant le par confusion avec corne « cornouille », au
service de Paris à Corbeil », xvie, Dér. de sens de « cornouille ». — Dér. : cormier,
Corbeil. XIIe S.
CORBLEU, v. dieu. CORMORAN, 1393 ; antérieurement cor-
mare(n)g, xni°, altéré en cormaran, xirr°,
CORDE. Lat. chorda, propr. « corde à puis cormoran. Comp. de l’a. fr. corp « cor-
boyau d’instrument de musique », d’où beau » et de l’adj. marenc (attesté dans ce
« corde (en général) » dans le lat. fam., comp. et dans pie marange « pie de mer »,
déjà chez Plaute, à côté du class. fünis (du mot de l'Ouest), dérivé de mer avec le
grec khordé, propr. « boyau »). Le class. suffixe d’origine germ. -enc; correspond
fünis a largement survécu, cf. it. fune et au lat. de basse ép: corvus marinus (Gloses
a. fr. fun, disparu de très bonne heure. — de Reichenau), d’où pr. corpmari(n), port.
Dér. : cordage, xive; cordeau, xr1° ; cor- corvo marinho.
delle, xr1°, d'où cordelette, 1213 ; cordelier,
xini*, cordelière, 1476 ; corder, xr1°, d’où CORNAC, 1685. Empr. par l’intermé-
décorder, 1550 ; cordier, 1240, d’où corde- diaire du port. cornaca d’un parler de
rie, 1239 ; cordon, xrre ; cordon bleu, propr. l'Inde, peut-être le singhalais *kärawa-
« cordon porté par les chevaliers de l’ordre nayaka, restitué d’après cournakeas d'un
du Saint-Esprit », a été dit, au xvire, d’un voyageur hollandais du xvire s., propr.
homme qui se distingue, et au x1ix°, par « chef d’un troupeau, dompteur d’élé-
plaisanterie, d’une cuisinière habile ; d’où phants ».
cordonner, xr1° ; cordonnet, 1515. CORNE. Lat. pop. “*corna, lat. class.
CORDIAL, adj., au sens médical, 1314 cornua, plur. neutre de cornu, pris comme
(ensuite subst. fin xvire), en parlant de fém. sing. Seulement gallo-roman et rhéto-
personnes, fin xve. Empr. du lat. médiéval roman. Une partie du Midi a conservé le
cordialis (de cor, cordis « cœur »). — Dér. : gaul. *banno (cf. gallois ban, irlandais
cordialité, xve. benn), a. pr. ban m., bana f., pr. langd.
bano. — Dér. : cornaline, xrre (-eline).
CORDONNIER, 1340. Altération, par Dér. 1° du sens « corne d’un animal » :
croisement avec cordon, de cordoanier, cornichon « petite corne » (Marot-xrxe® s.),
xIr1e, dér. de cordoan « cuir de Cordoue » : « petit concombre », 1654 ; écorner, xur°;
celui-ci est empr. de l’a. pr. cordoan, lui- cornette « chaperon de femme », 1352-
même empr. de l'esp. cordoban, qui vient 1694, « étendard de cavalerie », J. Lemaire,
de l’arabe cortobant (l’industrie du cuir de XVir1e, «officier de cavalerie qui porte l’en-
Cordoue a été en effet créée par les Arabes), seigne », fin xve-fin x1xe ; 2° du sens « cor,
d'où aussi lit. cordovano. D'abord em- instrument de musique » : corner, vers 1080
ployé avec son sens étymologique, a sup- (Roland); corneur, XIIe; cornard, d’un
159 CORPUS

animal dont les voies respiratoires sont CORNU. Lat. cornülus. Au sens de
malades, 1834 ; cornet, xr11° ; cornemuse, « cocu », 1608 (xIr12-XvI1e « sot »). — Dér. :
xIH1e (subst. verbal de cornemuser « jouer cornue, 1405. — Comp. : biscornu, xvi°;
de la cornemuse », xrr1°-xviI°, comp. tau- bicornu, 1390.
tologique de corner et de muser « jouer de
la musette », v. muselle, comparez pour la COROLLAIRE (1370, Oresme, sous la
formation du verbe fournevirer, de tourner forme correlaire). Empr. du lat. corollarium,
et de virer); 3° du sens « corne (subs- dér. de corolla, v. le suiv., propr. « petite
tance) » : racornir, xIv® ; racornissement, couronne offerte en présent », d’où « sup-
1743 ; 40 du sens « coin, angle » (attesté plément », « conséquence qui doit suivre
pour cor, du x11° au xIvV® s.) : cornier, adj., de la conclusion d’une démonstration »,
1676 (cornière, s. f. « angle, coin », x11°- terme de philosophie attesté d’abord chez
Xvi® s.); écorner « émousser les angles », Boèce et qui a passé dans la terminologie
xvi®; écornifler (comp. de écorner et d'a. mathém.
fr. nifler « renifler »), d’abord « voler en COROLLE, 1749. Empr. du lat. corolla,
furetant », xve, « aller manger à la table dim. de corona « couronne ».
d'autrui », xvi® ; écornifleur, 1537 ; 5° d’a-
près la corne prise comme symbole : faire CORON, 1835 (Zola). Empr. du parler
les cornes, 1656 ; cornes, symbole des maris des mineurs de la région picarde et wal-
trompés, dep. xv® (on avait autrefois l’ha- lonne ; développement sémantique récent
bitude de couper les ergots aux coqs chà- de coron « bout, extrémité » (signifie aussi
trés et de les leur implanter dans la crête, spécial. « extrémité de la rue »), fréquent
où, devenus grands, ils ressemblaient à en anc. picard, dér. de cor, usité au moyen
deux cornes ; ces coqs ayant été privés de âge au sens de « coin, angle », v. cor.
leurs fonctions sexuelles furent comparés
aux maris trompés), de là cornard « cocu », CORONAIRE, xvie s. (Paré). Empr. du
1608 (« niais », xI11°-XIV®) ; encorner un lat. coronarius « qui forme une couronne »,
mari, fin xvi® (Cholières), envoyer en Cor- CORONER, 1688. Empr. de l’angl. coro-
nouaille, id. (XVi®-XvIt1°). ner, qui continue l’anglo-normand coroneor
(de couronne).
CORNE, v. cornouille.

CORNÉ, 1752 ; cornée, 1503. Empr. du


CORONILLE, 1700. Empr. de l'esp.
coronilla, dim. de corona « couronne ».
lat. corneus (dér. de cornu) et du lat. mé-
diéval cornea, fém. pris substantivement CORPORAL, 1264. Empr. du lat. eccl.
de l’adj. préc. (formé d’après funica, cf. le corporale, dér. de corpus, l’hostie ou corps
lat. class. oculorum tunica). de Jésus-Christ étant posé sur le linge
ainsi nommé, v. corporel.
CORNED-BEEF, 1922. Empr. de l’angl.
corned beef « viande de bœuf salée ». CORPORATION, 1672. Empr. de l’angl.
corporation « réunion, corps constitué » (le
CORNEILLE. Lat. de basse ép. *corni- sens de « municipalité », propre à l’angl.,
cüla, lat. class. cornicüla, dér. de cornix, date du xvrrre), dér. du lat. médiéval cor-
qui vit encore sous la forme cornille dans porari « se former en corps ». — Dér.
les parlers de l'Ouest, du Centre et de la corporatif, 1842.
Bourgogne. A pris le sens de « corbeau » CORPOREL, xr1e, Empr. du lat. corpo-
dans un très grand nombre de parlers ralis.
septentrionaux du domaine gallo-roman
(en wallon, pic. norm. avec le suffixe -aille, CORPS. Lat. corpus, également class.
comme it. cornacchia). — Dér. : cornillat, au sens de «réunion de personnes, soumises
1340. aux mêmes règles, etc. », d’où dérivent de
nombreuses acceptions modernes. Le lat.
CORNICHE, 1561 ; antérieurement cor- corpus était aussi employé au sens de « per-
nice, cornisse, xvi®. Empr. de l’it. cornice, sonne, individu », d’où a. fr. mes cors « moi »,
probabl. du grec korônis, même sens, peut- fr. drôle de corps « plaisant personnage »,
être influencé dans la terminaison par 1694, gardes du corps, 1688 (xvi°, garde-
cornice « corneille », développement séman- corps). — Dér. : corsage « buste », x11°-
tique analogue à celui qui a fait du fr. xvire, sens actuel dep. J.-J. Rousseau;
corbeau un terme d’architecture. corsé, 1819 (d’après corps « consistance que
prend un liquide qu'on épaissit », dep.
CORNICHON, CORNIER, v. corne. Paré) ; corser, 1860; corset, 1829, au sens
actuel {« surcot », etc., XI11°-XIX®) ; Corse-
CORNOUILLE, d’abord cornolle, 1250, tier, 1845; corselet, 1752, au sens actuel
dér. à l’aide du suff. lat. -ülla (à côté de (« petit corps », etc., xr1°). — Comp. :
-ille, -eille, -aille, -elle, -etle, tous en a. fr. arrière-corps, 1690 ; avant-corps, 1658.
et dans les patois). Dans le nom de l’arbre,
le -I1- par le contact du suff. -ier, de là CORPULENT, xv°; corpulence, 1382.
cornouiller, 1320, et de celui-ci la mouillure Empr. du lat. corpulentus, corpulentia (de
est passée aussi au nom du fruit, de là corpus).
cornouille, 1539. On a de plus corne, xr11°,
encore dans certains patois, lat. pop. *corna, CORPUS, 1863 (corpus iuris, 1845).
plur. neutre pris comme fém. sing. attesté Tiré du lat. corpus juris ou corpus « recueil
aussi en a. pr. par le dér. cornier ; pour de droit » ; sert aujourd’hui à désigner des
corme dans l'Ouest, v. corme. recueils divers.
CORPUSCULE 160

CORPUSCULE, 1495. Empr. du lat. per » et aussi « corroyer ». — Dér. : corroi,


corpusculum, dim. de corpus. — Dér. : xI1e (sous la forme conroi) ; au moyen âge
corpusculaire, 1721. « ordre, soin », etc. ; a suivi partiellement
le développement sémantique du verbe.
CORRECT, 1512 ; correcteur (1275, sens corroijerie, 1741; corroyeur, 1260 (con-
théol. ; 1678, sens typogr.) ; correctif, x1v® reeur).
(Oresme) ; correction, xtr1°. Empr. du lat.
correctus, corrector, correctivus (lat. médié- CORSAIRE, 1443 (corsar, 1200). Empr.,
val), correctio (de corrigere « redresser » au par l'intermédiaire de l’a. pr. corsari, xII1°,
propre et au fig., v. corriger). — Dér. : de l’it. corsaro, dér. du lat. cursus « course ».
correctionnel (de correction), xv®, d’un tri-
CORSO, 1869, dans les deux sens « pro-
bunal, 1791, d’où correctionnaliser, 1823;
incorrect, 1421 ; incorrection, 1512.
menade publique en Italie » et « cortège
de chars ». — Comp. : corso fleuri, 1963.
CORRÉGIDOR, 1655. Mot esp. corregi- CORTÈGE, 1622. Empr. de l’it. corteggio
dor, dér. de corregir « corriger ».
« suite de personnes qui accompagnent
CORRÉLATION, 1606; corrélatif, 1355. pour faire honneur », subst. verbal de cor-
Empr. du lat. scolastique correlalio (de leggiare « faire la cour », dér. de corte
relatio « relation »), correlativus. « cour »; extension de sens propre au fr.,
dès le xvire.
CORRESPONDRE, xiv® (Bersuire) ; cor-
respondant, xive (Oresme, -eni). Empr. du CORTÈS, 1659. Mot esp. cortes, plur. de
lat. scolastique correspondere « être en rap- corte « Cour » ; ne s’emploie qu’à propos de
port de conformité », correspondens « qui l'Espagne ou du Portugal.
correspond »; correspondant, au sens de
« qui correspond par lettre », xvire, est le CORTICAL, 1665. Dér. sav. du lat. cor-
part. prés. du verbe fr., qui paraît avoir lex, corticis « écorce ».
pris ce sens à cette époque. — Dér. : cor- CORVÉE. Lat. de basse ép. corrogäta
respondance, xiv®; sens parallèles aux (sous-entendu opera) « ouvrage auquel on
préc. est prié de participer », dér. de corrogaäre
CORRIDA, 1907. Empr. de l'esp. corrida « convoquer plusieurs personnes » ; a dési-
« course de taureaux », dér. de correr «cou- gné d’abord une aide que de petits exploi-
rir ». tants se prétaient librement, puis, au cours
du moyen âge, a servi à désigner un travail
CORRIDOR, 1611 (pop. colidor, dep. imposé par de grands propriétaires à des
1808). Fin xvi® en outre courridour, com- subordonnés (lat. médiéval corvada). Seu-
promis entre l’it. corridore et l’a. pr. cour- lement gallo-roman : a. pr. corroada. Les
radour ; n’est alors qu’un terme de forti- corvées obligatoires furent supprimées la
fication, désignant « un chemin couvert » ; nuit du 4 août 1789; sens militaire, 1835.
au sens actuel, 1636. Empr. de l’it. corri-
dore (à côté de corridoio), de même sens, CORVETTE, 1476 (texte de la Seine-
dér. de correre « courir ». Maritime). Paraît dér. de corve, attesté
seulement en 1700, également en parlant
CORRIGER, xr11e. Empr. du lat. corri- de bateaux des mers septentrionales, cf.
gere, v. correction. — Dér. : corrigible, aussi le dér. corvot, 1476, mais représenté
vers 1300; recorriger, 1538. anciennement par corbe, 1520, donné com-
CORROBORER, 1326; corroboration, me une sorte de bateau de Hollande et de
1296. Empr. du lat. corroborare (de robur, Flandre (d’où corbette, dit sur la côte nor-
-oris « force »), corroboraiio (créé à basse mande de « petits écumeurs ostendois »,
ép.). — Dér. : corroboratif, xvie (Paré). Ménage), dont on rapproche le moyen bas
all. korf « sorte de bateau » et le moyen
CORRODER, 1314 ; corrosif, x111° ; cor- néerl. korver « bateau chasseur ». Le lat.
rosion, 1314. Empr. du lat. corrodere « ron- corbita « vaisseau de transport » convient
ger », COTTOSiUUS, COTTOSio. moins. L’it. corvelta et l’esp. corbeta vien-
nent du fr.
CORROMPRE, xrI° ; corrupteur, XIVe ;
corruptible, x111° (Rose); corruptibilité, CORYMBE, 1545. Empr. du lat. corym-
XV®; corruption, xr1°. Empr. du lat. cor- bus (du grec korymbos).
rumpere (avec francisation d’après rompre),
corrupior, corruptibilitas (lat. eccl.), corrup- CORYPHÉE, 1556. Empr. du lat. cory-
bilis (id.), corruptio. phaeus (du grec koryphaios, de koryphé
« sommet »).
CORROYER (d’abord conreer, d’où cor-
reer, puis corroyer, d’après les formes ac- CORYZA, 1757 (antér. coryze, xIV° ; cor-
centuées). A signifié au moyen âge « pré- rize, 1605-1762). Empr. du lat. coryza (du
parer, apprêter, équiper », etc. ; le sens grec koryza « écoulement nasal »).
moderne apparaît dès le xrr1° s. Lat. pop. COSAQUE, 1606. Empr. du russe kozak.
*conredäre, adaptation du goth. garedan
« pourvoir à qch. » (de ga « avec » et de COSMÉTIQUE, adj., 1555 ; s. m., 1676;
*réps « provisions », cf. ahall. rat, id., all. S. f., 1754. Empr. du grec kosmétikos « qui
Rat « conseil »), introduit par les merce- concerne la parure (kosmos) ».
naires germaniques qui servaient dans COSMO-. Premier élément de mots sav.,
l’armée romaine, cf. compagnon, désarroi, remontant au grec, tels que cosmogonie,
Aussi it. corredare « équiper », esp. correar 1735 ; cosmographie, 1512; cosmopolite,
« biner la terre », a. pr. conre(z)ar « équi- 1560, comp. du grec kosmos « monde ».
161 COTRET

COSSARD, « paresseux », fin xixe; CÔTE. Lat. cosia, « côte (du corps),
cosse, « paresse ». Mots argotiques, probabl. flanc, côté ». Cf. it. a. pr. costa, esp. cuesta
extension métaphorique de cosse de lé- (aujourd’hui plutôt costilla au sens propre).
gume. Les sens de « pente d’une colline », dép.
COSSE (de légume), xre. Lat. pop. *coc- 1150, et de « rivage de la mer », existent
cia, altération, par croisement avec le mot également en roum.,enit., en rhéto-roman,
enfantin continué par coque, de cochlea en cat. esp. port.; ils appartiennent donc
« limaçon, coquille », cf. de même, entre certainement déjà au latin, bien qu'ils n’y
autres, it. coccia « coquille, écorce, etc. ». — soient pas attestés. — Dér. : coteau, xv®
Dér. : cossu, xive, déjà au sens fig.; le (antér. coslel, xr1°, dér. en -ale); côtelé,
sens propre « bien fourni de cosses », en x11°; côtelette, 1393 ; côtier, adj., 1539,
parlant d’une tige de pois, d’un champ, mais côliere, s. f. « côte de la mer », xr1€-
est encore dans les dict.; écosser, xrr°, ee ; Côtoyer, x11°. — Comp. : entrecôte,
écosse, 1381, écosseur, 1560.
COSSER, 1560 (Ronsard). Empr. de CÔTÉ. Lat. pop. *cosiätum, dér. de costa,
l’it. cozzare, de même sens, dér. en -iare v. le préc. ; a supplanté lez au xve. It. cos-
d’un verbe répandu en Italie, en gallo- lato, esp. costado. V. accoter.
roman et en ibéro-roman, cf. a. fr. a. pr.
cotir « heurter », xrrie-xvire, fr. « meurtrir COTERIE, 1660. Toutefois aussi « com-
un fruit par un coup », 1690 ; piém. coti pagnie » dans le langage pop., sans nuance
« amolli », cat. cotar « heurter », esp. culir. péjor. Antér. « bien roturier soumis à un
Tous ces verbes viennent du grec koptein cens » et « association de paysans tenant
« frapper », dont les nombreux sens se- en commun les terres d’un seigneur », xIv®-
condaires sont presque tous encore vivants xvie s. Dér. d’un adj. cotier, 1390, qui est
dans les parlers gallo-romans. un terme de féodalité : « relatif à un bien
chargé d’une redevance roturière » ; consi-
COSSON, « charançon du blé », xr°. At- déré comme dérivé d’un a. fr. *cole « ca-
testé à la fois dans les parlers septentrio- bane » qu’on restitue d’après l’a. fr. cotin,
naux et méridionaux ; dérivé fort ancien, de même sens, xr1® (Rou, texte nor-
peut-être déjà lat. de basse ép. *cossô, du mand), et qui est empr. de l’a. nor. cot
latin cossus « sorte de ver de bois » qui « cabane » (cf. angl. cof, de même sens,
survit dans quelques parlers de la région v .cottage).
franc-comtoise au sens de « mite, larve du
hanneton » et dans l'italien cosso « Verrue ». COTHURNE, 1527. Empr. du lat. co-
thurnus (du grec kothornos).
COSTAUD, 1884 ; d’abord « souteneur ».
Mot d’argot, d’origine méridionale, dér. COTIGNAC, 1550. Altération, d’après le
du pr. costo « côte », propr. « qui a des lat. cotoneum « coïing », de coudignac (1534,
côtes, gaillard ». Rab.), antér. coudoignac, 1393, empr. de
l'a. pr. codonaï, dérivé de codon, -nh
COSTUME, 1777 (au sens moderne); « coing ». La modification de la terminaison
antérieurement terme d’art : « vérité des (-ac pour pr. -at) est probabl. due au désir
usages, vêtements, etc., reproduite dans de bien marquer l’origine méridionale du
les œuvres d’art », 1676 (Félibien). Empr. produit en introduisant dans le nom le -ac
de l’it. costume (prononcé d’abord costumé, .Si caractéristique de l’onomastique du
à l'italienne, encore en 1740) au premier Midi.
sens, d’où s’est développé le sens propre
au français, probabl. dans la langue des COTILLON, v. cotte.
théâtres, voir le sens des dérivés ; lit. cos-
tume est le même mot que le fr. coutume. COTIR, v. cosser.
— Dér. : costumé, 1787, d’où costumer,
xixe; costumier, 1826. COTON, xrie. La culture du cotonnier
et l’ouvraison du coton ont été introduites
COSY, 1922. Empr. de l’angl. cosy. — dans l'Occident par les Arabes, qui impor-
Comp. avec l’angl. corner « Coin » : cosy- tèrent de grandes quantités de coton de
corner, 1929. Syrie dès le xr1° s., et qui firent des plan-
COTE, 1390 (quote, graphie usuelle avant tations en Andalousie et en Sicile. De la
le xvie s.). Empr. du lat. médiéval quota Sicile et de l'Orient est venu l’arabe quiun,
(sous-entendu pars), issu du lat. class. d’où it. coione et fr. coton; l'Espagne a
quotus, -a « en quel nombre » et de pars, transmis ce mot pourvu de l’article arabe
et qui a été pris au xive au sens de « quote- al : esp. algodén, d'où a. fr. auqueion
part imposée à chaque contribuable », d’où « étoffe de coton ; tunique rembourrée »,
cotiser, 1325 ; cotisation, 1515. Des sens x (par l'intermédiaire de l’a. pr. alco-
secondaires de cote « marque servant à clas- ion), devenu hoqueton au xIv® s., sous
ser un document », xvie, et «indication du l'influence de heuque « esp. de cape ». —
prix d’une valeur de bourse », 1784, vient Dér. : cotonnade, 1615 ; cotonnier, subst.,
le verbe coter (xv® s., et 1834). Sur quota xvie, adj. 1837 ; cotonneux, 1552; coton-
pars a été calqué aussi l'expression quote ner, 1244; fulmicoton, 1865.
et portion « part que chacun doit payer ou
recevoir dans la répartition d’une somme » COTRET, 1298 (sous la forme cosierez).
(1390-1521), modifié en quote partie (fin Xv®- Probabl. dér. de costa, au sens de « qui se
1660) et en quote-part, 1490. D’après le trouve sur les côtés » (avec le suff. -aricius) ;
modèle de quantité, de a. fr. quant « com- aurait qualifié d’abord les rondins qui gar-
bien », on a formé quotité, 1436. nissent les côtés d’une charrette.
DICT. ÉTYM. 11
COTTAGE 162

COTTAGE, 1754. Empr. de l’angl. coi- l’it. coricare, dans le sarde si cusca. — Dér.
lage, dér. de cot, v. coterie, proprement et Comp. : couchage, 1723 ; couche, xri°;
« maison de paysan », d’où « maison de plur. au sens d’ «enfantement », 1552, d’où
campagne », fin XVIII S. fausse-couche, 1652; au sens de « linge
d'enfant », 1505 ; coucherie, 1760 ; cou-
COTTE, xr1° s. Au moyen âge « sorte chette, xive; coucheur, xvie; accoucher,
de tunique » et partic. « habillement de x11° (au sens moderne), propr. « (se) cou-
chevalier ou de guerrier ». Du francique cher », xr1e, sens qui a subsisté jusqu’au
*kotta, cf. anc. haut all. chozza « manteau xvie, notamment dans la locution accou-
de laine grossière » ; l’esp. cola, l’a. pr. cota cher malade; accoucher s'est substitué à
et, lit. coita sont empr. du fr. Aujourd'hui agesir, en même temps que se coucher se
usité au sens de « jupe, jupon, robe » dans substituait à gésir; dans accoucher de la
les parlers de l'Est. — Dér. : cotillon, 1461 ; prép. a un sens causal, comp. chez Villehar-
au sens de « sorte de danse analogue à la douin soi acouchier de maladie, d'où ac-
contre-danse », 1708, c’est-à-dire « danse couchée, 1321, qui a éliminé gisante, encore
avec le cotillon », puis par extension, 1824, usité dans d'assez nombreux patois ; ac-
« danse avec figures ». Au sens de « jupon », couchement, xr1° ; accoucheur, 1677 ; dé-
a été emprunté par les parlers méridio- coucher, x1I° ; recoucher, id.
naux ; un autre dér. colteron, xvi®, a le
même sens dans les parlers du Nord-Est. COUCI-COUCI, 1648 (coussi coussi; for-
me ordinaire du xvri®). Aujourd’hui on dit
COTTRE, 1780 (écrit alors cotre) ; anté- plutôt couci-couça d'après comme ci comme
rieurement cutter, 1777, orthographe en- ça. Empr. de l’it. cosi cosi « ainsi ainsi »;
core admise. Empr. de l’angl. cutter, propr. cosi représente le lat. pop. eccum ste, lit-
« celui qui coupe », dér. du verbe io cui. téral. « voici ainsi ».
COTYLÉDON, 1314. Empr. du grec koty- COUCOU. Le lat. cücülus survit dans le
lédôn, propr. « cavité (d’une coupe) ». — prov. cougüou et dans le tosc. cuculo.
Comp. : dicotylédone, 1763 ; monocotylé- Ailleurs le cri si caractéristique de l'oiseau,
done, 1763. qui est toujours doublé et dont le deuxiè-
me son est jeté sur une note plus basse
COU, jusqu’au xvire aussi col, forme que le premier, a causé la réfection des
conservée pour désigner la partie du vête- formes romanes, altérées par l’évolution
ment qui entoure le cou ; ce sens est de phonétique. En premier lieu on a rétabli
création romane, parce que le costume le deuxième c, ensuite il y a eu assimi-
romain laissait le cou absolument libre. Du lation des deux voyelles, de là fr. cocu,
lat. collum (it. collo, esp. cuello). — Dér. et XI1-XVIIe s., puis coucou, 1538 (koko, vers
Comp. 1° de « cou » : accoler, vers 1050; 1100). V. aussi cocu.
d’où accolade, 1532, reformation, d’après
les mots en -ade, de l’a. fr. accolée, racoler COUDE. Lat. cubitus. — Dér. coudée,
(1762-1869 « engager de gré ou par ruse xt1e (sous la forme coliee) ; couder, 1493;
des hommes pour le service militaire », coudoyer, 1588 (Montaigne); accouder,
XIII-XIVe « embrasser ») ; racoleur (1803- x11°, d’où accoudoir, xIv®e.
69), au fém. d’une prostituée, fin x1x°;
encolure, xvi® (où er- a le sens de « pourvu COUDRE, verbe. Lat. pop. *côsere, refait
de », tandis que dans l’acception maritime du lat. class. consuere « coudre ensemble »
le mot est dérivé d’encoler et en- veut dire (de suere « coudre ») d’après *coso pour
« entouré de ») ; 2° de « col » : collet, 1280, consuo. It. cucire, esp. coser. — Dér. et
d’où colleter, 1580 (propr. saisir par le col- Comp. : couseuse, 1834 (au xxrre s. et dans
let); décolleter, 1700; coltiner, commenc. l'Ouest aussi le masc. couseur) ; cousette,
xix® (de collelin, « grand chapeau de cuir fin xix° (norm. dès 1850) ; découdre, xxr°,
pour portefaix », XIXe; « pourpoint » au décousure, 1611 ; recoudre, x1r° s.
XVI), coltineur, 1827; faux-col, 1827; COUDRIER, 1503. Dér. de coudre, au-
3° sens fig. : col entre deux montagnes, jourd’hui archaïque et sans vie dans les
1635 (surtout Alpes et Pyrénées) ; cou-de- patois, latin de la Gaule *côlürus, transfor-
pied, xrre. mation du lat. class. corylus (graphie hellé-
COUAC, xvi® (Marot). Onomatopée. nisante pour colurus), sous l'influence du
gaul. *collo, de “*coslo, forme correspon-
COUARD, COUARDISE, v. queue. dante à celle du lat. ; n’a subsisté que dans
les parlers septentrionaux de la France,
COUCHER. Lat. collocare « placer », de où il est, en outre, concurrencé par noise-
locare, de même sens, mais dont la compo- lier ou d’autres dérivés, et dans quelques
sition n’a plus été sentie en lat. de basse parlers du Nord de l'Italie et rhéto-ro-
ép. Dès le lat. class. collocare s’employait mans ; ailleurs dérivés de abelläna « noi-
partic. au sens de « placer dans une posi- sette cultivée », dont le succès, dû au déve-
tion horizontale, étendre dans sa longueur », loppement de cette culture, a affaibli la
d’où aussi le sens de « rédiger », x1r1®- vitalité de corulus, v. noisette, noisetier.
XVIIe, «insérer dans un procès-verbal, etc. », Autres dér. de coudre : coudraie, xt1°;
xv®, et l'emploi réfléchi du verbe par rap- coudrette, id., tous deux peu usités.
port aux astres, xi°. À ce sens se rattache
le dér. couche « étendue horizontale de COUENNE. Lat. pop. *cütinna, altéra-
qch. », 1268. Depuis la Vulgate on trouve tion de “*cütina, dér. du lat. class. cütis
enfin collocare super lectulum, se lecto col- « peau ». La transformation de la termi-
locare, etc., dans un sens qui, vivant en naison -ina en -inna est probabl. due à
fr., se retrouve dans le roum. culca, dans l'influence du gaul., qui possédait un suff.
163 COUPEROSE

-inna. *cülina a donné néap. cétena, piém. COULEUVRE. Lat. pop. *cülübra, alté-
cuna, cat. coina; “*cütinna vit en gallo- ration du lat. class. colübra. Concurrencé
roman et dans le tosc. cotenna. — Dér. : dans les parlers gallo-romans par serpeni,
couenneux, 1655. fém., région poitevine, Centre et Suisse
romande, et ser(p), fém., parlers méridio-
COUETTE (ou COITE). Rare aujour- naux., — Dér. : couleuvrine, vers 1400
d’hui, en dehors de quelques emplois tech- (Froissart).
niques et locutions. Lat. cülciia « oreiller »,
d’où, en fr., coille, coite. It. coltrice, esp. COULON, v. pigeon.
colcedra. — Dér. et Comp. : Une ancienne
forme coule, xr1°, peut-être altération de COULPE. Ne s'emploie que par archaïs-
coilte d’après couche(r), a donné le dér. me dans quelques locutions. Réfection,
coutil, xr11°, et le comp. courte-pointe, d’après le lat., de l’a. fr. coupe, lat. culpa;
X11°, issu, par croisement avec l’adj. courte, bien que l'orthographe coulpe soit très
de coiïte-poinie, id., c’est-à-dire « couverture ancienne, on peut admettre que cette ré-
piquée » (pointe, part. passé de poindre) ; fection n’a triomphé que quand coupe est
on a dit aussi contre-pointe, xvi®, d’où sorti de l'usage au sens général de « faute »,
contre-pointer, xvi*. L’altération en courte- vers le début du xvi® s. (encore employé
et contre- s'explique par le fait que les par Chapelain en 1665), cf. coupable, qui
points de couture sont très courts et unis- n’a pas changé, en raison de sa vitalité.
sent deux points opposés de la couverture.
COUP. Lat. pop. colpus (Loi Salique),
COUFFE, 1723 (écrit alors coufle). Empr. lat. pop. colaphus « soufflet, coup de poing »
du pr. coufo, attesté dès le xveet empr. de (du grec kélaphos « soufflet »), qui rem-
l’arabe qüffa (d’où aussi l’esp. alcofa), empr. place le lat. class. ictus. Existe dans tous
lui-même du lat. cophinus. les parlers gallo-romans (ancien provençal
colp, colbe). — Dér. et Comp. : couper,
COUGUAR, 1761 (Buffon). Modification XIIe Ss.; le développement sémantique,
faite (probablement d’après jaguar) par qu’on explique par « diviser d’un coup »,
Buffon « par contraction du brésilien cugua- doit partiellement son succès au besoin
cuara » (suivant ses propres termes); ce d’avoir un verbe signifiant « couper », le
mot est dû à une faute de lecture ; le mot verbe lat. secäre s'étant spécialisé dès l’épo-
tupi susuarana a été écrit cuçuarana par que latine, v. scier ; les autres langues ro-
les Portugais, d’où les cédilles ont été éli- manes ont eu recours à d’autres suppléants.
minées par négligence ; on donne aussi, De couper dérivent : coupage, 1302 ; coupe,
comme forme en tupi cuguacuarana, 1741. x11° ; coupé, 1660 (d’abord carrosse coupé
COUILLE. Lat. pop. *colea, d’abord « carrosse à un seul fond », de couper son
plur. neutre, devenu subst. fém., issu du carrosse « en faire retrancher un des deux
lat. class. côleus; cf. aussi l’a. pr. colh et fonds », attesté 1690-1771) ; coupée, 1783 ;
colha ; v. le suivant. — Dér. : couillard, couperet, 1328 ; coupeur, xr1°; coupon,
XIVE. X11° ; coupure, x1v® ; de là aussi découper,
xIIe, découpage, 1497, découpeur, x11°,
COUILLON, déjà lat. pop. “*coleünem, découpoir, 1754, découpure, 1421; entre-
acc. de *coleô; aussi it. coglione, esp. cojén. couper, XII° ; recouper, XII®, recCoupe, XIII°,
Dans le sens figuré de « lâche, sans éner- recoupement, x11° ; surcouper, 1802 ; coupe-
gie » aussi couille, xvi®. Au xvie s. lit. ‘ bourse, xr1°; coupe-choux, xrv® (comme
coglione est emprunté dans le même sens, nom propre); coupe-file, 1890; coupe-
d’où coïon. Cette forme est concurrencée gorge, x111°; coupe-jarret, 1584; coupe-
par couillon, aussi dans les dér. : coyonnade, papier, 1869 ; coupe-racines, 1832 ; coupe-
1592, couillonnade, 1863 ; coïonnerie, 1569, tête, 1690 (une première fois « bourreau »,
couillonnerie, 1864. dans Froissart); à-coup, 1835 (une pre-
mière fois 1260) ; beaucoup, x1ve, peut-être
COUINER, pop. et régional, xix°, Ono- fin x111e, aussi a. pr. belcop, au x111° aussi
matopée. grand coup de, comp. de beau (grand) avec
COULE, v. cagoule. coup au sens non attesté de « partie coupée
d'un tout », cf. grand coup de la terre le conte
COULER. Lat. côläre « filtrer », dér. de (Joinville) ; a remplacé l’ancien adj. moult,
côlum « filtre »; a pris dès l’époque latine du lat. mulium ; contre-coup, xvi® (Paré);
le sens de « couler », intrans., en parlant tout-à-coup, XVIe.
d’un liquide, et de « glisser ». — Dér. :
coule, dans étre à La coule, xui° (Renart) ; COUPABLE, xrie. Du lat. culpäbilis,
coulage, 1614 ; coulée, 1500 ; coulis, xr1°, dér. de culpa, v. coulpe.
d’où Le fém. pris substantiv.; coulisse, x111°,
par suite de l'emploi fréquent d’expres- COUPE, sorte de vase. Lat. cüppa, autre
sions telles que porte, fenêtre coulisse, d’où, forme de cüpa « barrique » (v. cuve);
d’après l’acception du langage de la Bourse, cüppa a pris sous cette forme, à basse ép.,
coulissier, 1823; couloir, xi°; coulure, le sens de « coupe », cf. it. coppa, esp.
1315 ; découler, vers 1180 ; écouler, xr1°; copa. — Dér. et Comp. : coupelle, 1431 ;
soucoupe, 1640, probabl. calque de lit.
écoulement, 1538.
soltocoppa, cf. soutecouppe, 1615.
COULEUR. Lat. côlôrem, acc. de color.
Le sens de « prétexte » paraît repris au COUPEROSE, terme médical, xvi® (Pa-
lat., notamment dans la locution sous cou- ré). Probabl. emploi fig. de couperose, nom
leur de, lat. sub colore. ancien de plusieurs sulfates, x111°, cf. pour
COUPEROSE 164

cet emploi l'anglais coppernose « nez Coupe- curvo ; le suff. -elle est employé ici pour
rosé » et l’allemand Xupfernase, « id. », exprimer l’action, cf. {ournelte, sonnelle, etc.
littéralement « nez de cuivre », qui parais- recourber, XII°.
sent des altérations de couperose d’après COURÇON, v. court.
le mot anglais ou allemand qui signifie
« nez ». Couperose, au sens propre, xIII°, COURGE, xive (cohourges et courges).
probabl. adaptation du lat. médiéval cupri- Forme dialectale, surtout de l’Ouest. Le
rosa « rose de cuivre »; l’it. copparosa, lat. cücürbita a donné coorde, xir1°, forme
l’esp. caparrosa, l’angl. copperas (ancien- conservée dans beaucoup de patois; il a,
nement coperose) semblent empr. au fran- en outre, échangé son suffixe contre d’au-
çais. — Dér. : couperosé, xve. tres suff. dimin., comme -üla (d’où a. pr.
cogorla, fr. courle, Rab., lorr. cohole, Lyon
COUPLE. Proprement « lien » ; sens au- courla) et -ica (d’où courge). Quant à gourde,
jourd’hui peu usité. Lat. copüla «lien pour X111°, qui a perdu son sens propre, encore
conduire des animaux » ; le sens de « paire » attesté au xvrie (La Fontaine, Fables, IX,
s’est développé dès l'époque latine. It. 4; cf. aussi gohourde chez Ménage), c’est
coppia, seulement « paire » — Dér. : une altération de courde, également d’ori-
couplet, xiv° (une fois copel au xxr1°). gine dialectale, peut-être de la région lyon-
naise, sous l'influence de l’a. pr. cogorda,
COUPLER. Lat. copüläre. — Dér. et aujourd'hui usité dans le Sud-Est. Le terme
Comp. : accoupler, xri°, d’où accouple- dominant aujourd’hui dans les parlers sep-
ment, xrr1, désaccoupler, id.; découpler, tentrionaux est citrouille ; outre gourde et
XIIe s. ; découplé « qui a les membres bien courge (d’où courgette, en Bourgogne), dis-
dégagés », 1690, est une extension de séminés, on trouve courde surtout au Sud-
« débarrassé de ses liens » en parlant d’un Est de Paris et en franco-provençal et
chien de chasse. beaucoup de formes altérées. Aïlleurs cu-
COUPOLE, 1666. Empr. de l’it. cupola, curbita n’est attesté que par le roumain
cucurbelä et le galic. cogorda « agaric ».
lat. cüpüla « petite cuve », dér. de cüpa,
v. cuve ; a perdu son sens propre en it. COURIR, xu11°. À succédé à courre, qui
au profit du sens figuré dû à la forme de subsiste dans quelques locutions, lat. cür-
la coupole, qui ressemble à un vase ren- rére. Conservé partout : italien correre,
versé. espagnol correr, ancien provençal corre,
COUR. Anciennement court, encore au correr. — Dér. et Comp. : courant, subst.,
xvie s. (d’où l'anglais court, voir court, IL) ; x11e, d’où contre-courant, 1783 ; coureur,
l'orthographe cour apparaît vers le xve®; xI1e, d’où avant-coureur, xIv°, sens figuré
elle est probabl. due à la traduction médié- au xvi® s. (surtout au fém.); courrier,
vale curia. Lat. de basse ép. curtis, attesté 1464, auparavant dans la Geste des Chy-
dans le lat. médiéval, lat. class. cohors, prois (vers 1300), qui a des traces d’une
propr. « cour de ferme », d’où, à basse influence italienne. L’it. corriere étant at-
époque, le sens plus étendu de « ferme, testé dès le xr1° s. (dans des documents
domaine rural ». En lat. class. cohors avait en latin médiéval), il est hors de doute que
déjà la signification de «suite d’un prince », le mot fr. est emprunté de l'Italie. On
de là « entourage royal », xr1°, ensuite appelait corriere particulièrement un mes-
« cour de justice », x11°, le roi entouré des sager, qui assurait au XIIIe et au xIve Ss.
grands ayant formé longtemps le tribunal la poste entre Florence et Sienne d’un côté
supérieur. Ce développement sémantique a et les foires de la Champagne de l’autre;
été suivi par les langues voisines, cf. all. peut-être cette institution est-elle pour
Hof. It. esp. corite, aujourd’hui seulement quelque chose dans l'emprunt du mot;
« cour royale ». — Dér. : courtois, vers 1080 encourir, x11°, formé dans la langue jurid.
(Roland), d’où courtoisie, x11°. — Comp. : et eccl. sur le modèle du lat. incurrere;
arrière-cour, 1586; avant-cour, 1564; v. accourir, parcourir, recourir, secourir.
basse-cour, xrr1°, d’abord une cour exté- COURLIS, xvi® s.; antér. courlieu,
rieure d’un château, située plus bas ; haute- x1r1e, encore dans les dictionnaires. Ono-
cour, 1791. matopée, comme le montrent les formes
dialectales variées, notamment corlu, cor-
COURAGE, v. cœur.
leru, picard, courreli, prov., etc.
COURBACHE, v. cravache. COURONNE, COURONNER. Lat. corona
COURBATU, COURBATURE, v. battre. (du grec korôné, propr. « corneille », d’où,
par figure, «toute sorte d'objets recourbés »,
COURBE. Primitivement fém. qui a sup- le sens de « couronne » n'étant attesté que
planté, dès le xr1°, le masc. corp (encore dans le dér. korônis, v. corniche), coronare.
dans des textes du xr1e), lat. pop. *curbus, It. esp. corona; it. coronare, esp. coronar.
lat. class. curvus. Esp. corvo, a. pr. corp. — Dér. du verbe : couronnement, xrr°;
découronner, xiI°.
COURBER. Lat. pop. “*curbaäre, lat.
class. curväre. Esp. (en )corvar, a. pr. corbar. COURRE, COURRIER, v. courir.
— Dér. et Comp. : courbure, 1547 ; cour- COURROIE. Lat. corrigia. It. coreggia,
bette, 1578 (Ronsard, au sens moderne; esp. correa.
dans d’autres sens dér. de l’adj. courbe);
ne vient pas de l’it. corvelta, qui est plutôt COURROUCER. Lat. pop. *corrupliaäre,
empr. lui-même du fr., le lat. curvus n'étant dér. de corrumpere (par le part. corrupius) ;
conservé en it. que sous la forme sav. en a. fr. aussi « endommager, maltraiter
165 COUTIL

(au physique) », d’où-le sens fig. « aigrir ». COURTINE. Au moyen âge « rideau de
Comp. a. fr. corrot « chagrin » (x°, Saini- lit. tenture », ne s'emploie plus ainsi que
Léger), a. pr. corroi « courroux, chagrin », par archaïsme ; terme de fortification au
it. corrotto « douleur, regret funèbre », anc. xvi® s. (sens attesté antér. pour l’a. pr.
esp. corroto « mortification » de corrupium, corlina). Lat. de basse ép. corlina (rve)
dans l’expression animus corruptus. Seule- « tenture », traduction du grec aulaia, de
ment gallo-roman, cf. a. pr. corrossar même sens (dér. de aulé « cour »).
« courroucer et chagriner ». Quant à cour- COURTISAN, 1472. Empr. de l’it. corti-
roux, x11° 8., parfois « chagrin » en a. fr., giano (dér. de corie « cour ») ; l'introduction
c’est un postverbal. L’it. corrucciare, d’où du mot est probabl. due à la cour d’Avi-
corruccio « courroux, chagrin », vient du fr. gnon, où cortezan est attesté dès 1350.
COURS. Lat. cursus. La plupart des Déjà empr. au xrv® s. sous une forme plus
sens du fr. sont déjà lat.; cours, terme adaptée courlisien. — Dér. : courtisanerie,
d'enseignement, est attesté dès 1330 (esiu- * xvi® : courtisanesque, 1578 (H. Estienne).
dier a ordinaire et a cours « sans interrup- COURTISANE, 1558 (antér. courlisienne,
tion ») ; cours, en parlant de la monnaie, 1500, v. le préc.). Empr. de l’it. cortigiana,
est attesté depuis Oresme. It. esp. corso. fém. du préc., qui a pris un sens péjor.,
— Dér. : coursier, x11° ; Coursière, au sens conservé en fr. littéraire, devenu archaïque
de coursive, 1627. enxit.
COURSE, une fois corse au xrt1° s. Cette COURTISER, 1554. Réfection de l’a. fr.
dernière forme a été formée en fr.; mais courioyer « fréquenter une Cour », V. cour,
course, n'étant attesté que depuis la fin du d’après courtisan.
xive s., est peut-être suggéré de l’it. corsa.
COURTOIS, v. cour.
COURSIVE, 1687 (écrit alors courcive).
Réfection, d’après l’it. corsiva, de l’arch. COUSCOUS, 1728 (Labat). Empr. de
coursie, fin xv® (d’où aussi accoursie, XVI° l’arabe kouskous (probabl. d’origine ber-
(R. Belleau) et, par altération, accourse, bère). En outre couscoussou, 1725, d’après
1751), empr. de lit. dialectal corsia, fém. une autre forme arabe kouskousoû. Une
pris substantiv. de l’adj. corsio, it. litté- première fois empr. au xvies., 1534 (Rab.),
raire corsivo « courant ». sous la forme coscosson, d’après une autre
forme arabe kouskousoûn. Ce mot, importé
COURT, adj. Lat. curius « écourté, aux Antilles par les nègres, y désigne la
court ». It. esp. corlo. — Dér. : courçon graine mondée du maïs ou de la plante
(ou courson), 1316 (sous la forme cour- dite houlque, d’où le fr. couscou, 1826
chon), dér. de l’anc. verbe corcier « Trac- (outre cousse-couche, couche-couche, au
courcir », attesté surtout dans les comp. xvirie S., cuzcuz, J.-J. Rousseau, 1762).
acorcier, XII° ; encorcier, XII° ; secorcier «Te-
trousser » (de sub +), lat. pop. *curtiäre; COUSETTE, COUSEUR, v. coudre.
courtaud, 1438 ; écourter, x11° ; raccourcir, COUSIN. Lat. co(n)sobrinus « cousin
1237, par l'intermédiaire d’accourcir, 1162 germain », en parlant d'enfants de deux
(Chrétien), encore dans les patois, d’où sœurs ; développement particulier dû au
raccourcissement, 1529.
langage enfantin, de même a. pr. cozin ;
COURT, terme du jeu de tennis, masc. l'it. cugino vient du fr.; l’esp. dit primo,
1900. Empr. de l’angl. court, empr. Jui- propr. « premier ». — Dér. : cousinage,
même de l’a. fr. court, V. cour. xr1 ; cousiner, 1605:
COURTAGE, v. courtier. COUSIN, « moustique », 1551. Altération
COURTE-POINTE, v. couette. de cusin, xvi® s., dér. de *couç, id., de
culex, id. ; l’u de certaines formes est due
COURTIER, 1538, antér. colelier et core- aux représentants de pülex.
tier, xiu°, cour(r)alier, id., encore au
xviie s. (Corneille). Aussi a. pr. courralier. COUSSIN, xne (écrit alors cussin). En
Les formes avec -L- sont moins anciennes outre coissin, x11°, encore usité au XVI°S.
que celles avec -r- et en sont issues par Seulement gallo-roman. *Cüxinus, dér. de
dissimilation. Le suff. -atier est assez Îré- côra « cuisse », le coussin étant destiné
quent, surtout au Midi. Le mot est dér. du c’abord aux chaises et aux bancs (le suff.
verbe courre « courir », parce que le courtier -inus peut-être d’après pulvinus). L'it. cus-
est tout le temps en course entre l’acheteur cino et l'esp. cojin sont empr. du fr. —
— Dér. : courtage, 1358 Dér. : coussinet, xXIII*.
et le vendeur.
(antér. courralage, 1248, texte du Nord- COÛT, v. coûter.
Est).
1547. Emploi fig. de COUTEAU. Lat. cultellus, dim. de culler,
COURTILIÈRE, » v. coutre. It. coltello, esp. cuchillo. — Dér. :
l’a. fr. courtilière, propr. « jardinière », coutelas, 1564, comp. l'it. coltellaccio ; cou-
(cf. : « En Anjou onl appelle la jardinière telier, xrr< ;coutellerie, 1260 (É. Boileau).
Ménage), dér. de courlil, X11° (cf. it. coriile,
du lat. de basse ép. *cohortile, dér. de COÛTER. Lat. co(n)siäre, propr. « être
cohors, v. cour, dans lequel -ile ne sert certain, fixé »; le sens de « coûter » s'est
qu’à ranger le mot parmi les mots dési- développé avec des compléments de prix.
gnant des emplacements, comme bovile).» It. costare, esp. cosiar. — Dér. : coût, x11°;
jardin
Ï1 est encore très usité au sens de « la
coûteux, vers 1190.
dans l'Ouest, en franc-comtois et dans COUTIL, v. couette.
Suisse romande).
COUTRE 166

COUTRE. Lat. culier « couteau », déjà CRABE, 1113 ; fém. jusqu’au xvure s.
attesté au sens de « coutre de charrue » Empr. de l’anc. nor. krabbi, m., le mot
pour lequel le mot a été réservé, tandis franç. doit peut-être son genre au contact
que le dim. cultellus s’est généralisé au sens avec le moyen néerl. crabbe, fém.
de « couteau ». It. coltro.
CRAC, 1492. Onomatopée, certainement
COUTUME. Lat. co(n)suelüdine(m), antér. à cette date.
acc. de cô(n)suelüdo. It. coslume, v. cos-
tume, esp. costumbre. V. habitude. — Dér. : CRACHER, xri°. Onomatopée qui re-
coutumier, adj., 1157 ; subst., 1396 ; accou- monte à un lat. *craccaäre, cf. l’it. sc(a )rac-
tumer, x11°, accoutumance, id. ; désaccou- chiare et l’a. pr. escracar. Le même radical
tumer, x11°, désaccoutumance, xr11e ; inac- se retrouve dans les parlers germ., cf. anc.
coutumé, xiv®; raccoutumer, 1538. scandinave kréki, anc. angl. krdca « cra-
chat », mais ce sont des formes indépen-
COUTURE. Lat. pop. *co{n)sülüra (de - dantes. Cracher domine aujourd’hui dans
cô(n )suere « coudre »). It. esp. cosiura. — les parlers gallo-romans ; picard raquer,
Dér. : couturé, 1787; le verbe couturer,
wallon rachier sont des variantes de cra-
au sens de « coudre », a existé au xve 5. ; cher, comme le montrent des formes ana-
couturière, x11°, d'où couturier, 1856:
logues de dialectes it., p. ex. le napolitain
celui-ci avait déjà existé au sens de « tail- rakare; on trouve, en outre esco(u)pir,
leur », dès 1213 et jusqu'au xvrre 8. (rem- parlers méridionaux, traces dans l'Est, cf.
placé par iailleur, dès le xvi® s.); encore a. Îr. escopir, esp. escupir, de formation
usité dans quelques parlers septentrionaux onomatopéique. Tout craché, xv®; il s’ex-
de l'Ouest, et de la région de la Suisse plique par le fait que chez beaucoup de
romande. V. coudre.
peuples l’action de cracher symbolise l’acte
COUVAIN, v. couver. de la génération. — Dér. : crachat, 1260,
COUVENT. Lat. eccl. (attesté en ce sens probabl. avec substitution du suff. -at à
au moyen âge) cô(n)ventus, en lat. class. -as; crachement, xir1°; cracheur, 1538;
« assemblée, réunion », A. pr. coven, it. crachoir, 1548 ; crachin, 1929 ; crachoter,
esp. convenio. L’orthographe fréquente con- 1660 ; recracher, xve.
vent, encore usitée au xv1e s., n’est peut- CRACK, 1854. Empr. de l’angl. crack,
être qu’une graphie étymologique ; v. con- d’abord adj. signifiant « fameux », tiré du
vent. verbeio crack « (se) vanter », propr. « cra-
COUVER. Lat. cübäre « être couché »; quer ».
s’est spécialisé au sens de « couver » dès CRAIE. Lat. créta « craie, argile »; n’a
l’époque lat. ; cf. les cas semblables d’éclore, conservé en gallo-roman que le premier
frayer, pondre, saillir, sevrer. Sens fig. dès sens. A. pr. greda, it. crela « craie » et
le moyen âge, notamment en parlant du « argile » (archaïque au 2e sens), esp. greda
feu, attesté également en it.: mais ce « id. »..— Dér. : crayeux, XIII ; Crayon,
développement sémantique est peut-être 1528 (souvent sous la forme creon), au
indépendant. A. pr. coar, it. covare. — sens moderne, antér. croion, 1308 « sorte
Dér. : couvain, xive (sous la forme cou- de terre »; d’où crayonner, 1604 : erayon-
vin) ; couvaison, 1542 ; couvée, xr1e ; cou- neur, 1743 ; porte-crayon, 1676.
veuse, 1542; couvi, xve (antér. coveis,
X11€) ; cf. l’a. pr. covadis, de même sens, CRAINDRE. D'abord criembre, refait en
craindre de très bonne heure (déjà cren-
COUVERCLE. Lat. cooperculum, dér. de drez, futur, dans la Chanson de Roland)
coopertre « couvrir ». It. coperchio, a. pr. sur les verbes en -aindre ; tout le verbe a
cobercle. été ainsi refait au cours du moyen âge.
COUVRIR. Lat. coopertre « couvrir com- Lat. iremere « trembler, craindre », altéré,
plètement, de tous les côtés », comp. de dans le lat. de la Gaule, en *cremere, par
operire « couvrir ». Les langues romanes croisement avec un mot gaulois contenant
ont toutes laissé tomber le verbe simple au le radical *crit-, qu’on restitue d’après
profit du comp., au sens plus énergique : l’irlandais crith « tremblement »; Cf. aussi
it. coprire, esp. cubrir, a. pr. cobrir. — Dér. l'a. pr. cremer. Dans d’autres langues ro-
et Comp. : couvert, xrie; couverte, XIIe ; manes, iremere a conservé le sens de
couverture, x11° (aussi au sens de « toit », « trembler » : it. iremare. L'idée de
encore assez répandu; comp. aussi it. « craindre » est partout, sauf en fr., expri-
coperlura, esp. cobertura) ; couvreur, XITO$ mée par des représentants du lat. fimèére :
recouvrir, x11°, recouvrement, 1464. Nom- it. lemere, esp. a. pr. femer. Dans les parlers
breux mots avec couvre comme premier gallo-romans craindre est peu pop. ; on y
élément : couvre-chef, XII®; couvre-feu, dit plutôt avoir peur; en outre douter en
1260 ; couvre-lit, 1863 (une première fois lorrain, {eme dans les parlers méridionaux.
au xII° s.); couvre-pied, 1697. — Dér. : crainte, xr11° (d’abord criente,
COW-BOY,
crieme, subst. verbal de criembre) ; craintif,
. 1922. Empr. de l’angl. XIVe,
d'Amérique cow-boy « gardien des bœufs ».
CRAMAIL, v. crémaillère.
COX(O)-. Premier élément de mots sav.
comp., tels que coxalgie, 1826, tiré du lat. CRAMOISI, 1298. Empr. de l’arabe qir-
coxa « hanche ». mizi « rouge de kermès », d’origine perso-
indienne, par l'intermédiaire de l'esp. car-
COYOTE, 1867. Empr. de l'esp. du mesi où de l’it. chermisi, cremisi ; les voies
Mexique, empr. lui-même de l’aztèque qu’a suivies le mot arabe dans sa diffusion
coyotl. ne sont pas sûrement déterminées.
167 CRÈCHE

CRAMPE, xi°, en outre adj, xtrI°, CRASSE, vers 1327, subst.; xI11° $.,
notamment dans la locution goutte crampe, adj. fém. Ne s'emploie guère aujourd’hui,
encore dans les dictionnaires ; crampon, comme adj., que dans la locution ignorance
xurie, Francique *kramp « courbé » (cf. crasse, déjà attestée au xive s. et formée
anc. haut all. kramph, id.). Les deux subst., d’après le lat. crassa rusticitas. Empr. du
qui se rattachent certainement au même fém. de l’adj. lat. crassus « épais, grossier »,
radical, ont très probabl. déjà existé en v. gras. — Dér. : crasser, 1836 ; crasseux,
francique. Le moyen néerl. cramp « cram- xrr1e ; crassier, 1753 ; décrasser, 1476 ; en-
pe », all. krampf, angl. cramp permettent crasser : en raison de sa date, xive s., peut
de restituer un francique *krampa, id., et avoir été formé directement sur le lat.
de même l’angl.-saxon krampo « crochet » crassus.
et l'angl. cramp rendent probable l’exis- CRATÈRE, xve, terme d’antiquité;
tence d’un francique *krampo, masc. — 1570, « cratère de volcan ». Empr. aux deux
. Dér. : cramponner, xv°. sens du lat. crater (du grec kratér, propr.
CRAN, xr1° (Chrétien), aussi cren, Xv°, « grand vase où l’on mélangeait le vin et
tiré du verbe crener «entailler », xI1° (créner l’eau »).
et -ure sont encore dans les dictionnaires) ;
ce verbe crener représente le gaulois *cri- CRAVACHE, 1790. Empr. de l’all. Kur-
näre, comp. anc. irlandais ar-a-chrinnim baische, empr. lui-même du slave (polonais
« disparaître, se décomposer ». — Dér. : ou russe) karbatch, qui vient à son tour du
turc qyrbâtch « fouet de cuir ». Le turc a
créneau, xr1° (aussi a. pr. crenel) ; créneler, été tout récemment empr. directement
xre; crénelage, 1723 ; crénelure, xIv<.
sous la forme courbache, pour désigner
CRÂNE, xive. Empr. du lat. cranium une sorte de cravache servant à donner la
(du grec kranion). Par figure, subst. ou bastonnade en Orient.
adj., désignant « un homme décidé », 1833,
d’abord « téméraire », 1787. — Dér. : 1° au CRAVATE, 1651 (Loret, masc.; fém.,
sens propre : crânien, 1812; 2° au sens 1652). Propr. « bande de linge, que les
fig. : crâner, 1907 ; crânerie, 1798. cavaliers croates portaient autour du
cou » ; d’après Ménage, usage introduit en
CRANIO-. Premier élément de mots sav. 1636, lors des guerres d'Allemagne. À dé-
comp., tels que craniotomie, 1855, tiré du signé d’abord les Croates eux-mêmes, puis
grec kranion. les mercenaires, employés par Louis XIII
CRAPAUD, xue (crapout, souvent cra- et Louis XIV, qui en fit le régiment de
pot et crapaut jusqu’au xvi° s.). Seulement Royal-Cravate. Autre forme (déjà chez Voi-
gallo-roman : a. pr. grapaui, grapal. On a ture) de Croate, empr. de l’all. Kroale,
proposé d'y voir un dér. de l’a. fr. crape Cravate étant soit une adaptation de la
« crasse, squamosité », en raison de l'aspect forme slave hrvat, soit empr. d’une forme
répugnant de la peau ; mais ce mot n'est all. dialectale Xrawait. À passé dans les
attesté que trois siècles après crapaud. langues voisines : it. cravatla, esp. corbala,
Celui-ci est plutôt un dér. de l’a. fr. crape, angl. cravat. — Dér. : cravater, 1823.
attesté au x11° s. au sens de « grappe », qui to
doit avoir eu primitivement le sens de CRAWL, 1923. Empr. de l’angl.
crochet » et qui représente le crawl, même sens, à l’origine « ramper, se
« crampon,
germ. *krappa, V. grappe. L'animal doit traîner ».
cette dénomination à ses pattes crochues. | CRAYON, v. craie.
— Dér, : crapaudière, 1394; crapaudine,
x (au sens de « pierre de crapaud », CRÉANCE, CRÉANCIER, v. croire.
pierre qui, croyait-on, provenait de la tête
du crapaud) ; crapoussin, 1752 ; crapouil- CRÉCELLE, xu° s. (cresselle « sorte
lot, 1915. d’instrument pour attirer les oiseaux »).
xiv°; crapuleux, 1495. En outre cresserelle, xiv°. Probabl. lat.
CRAPULE,
pop. *crepicella, lat. class. crepilaculum et
Empr. du lat. crapula « ivresse » (du grec crepilacillum « sorte de hochet », dér. de
kraipalé, de même sens), crapulosus. Au- crepitäre « craquer ». Seulement fr. S’est
jourd’hui servent surtout de termes d’in- dit figurément de l'oiseau, parce que son
jure. — Dér. : crapulerie, 1863 (Goncourt).
cri rappelle le bruit d’une crécelle.
CRAQUE, CRAQUELER, v. craquer.
CRÉCERELLE, xue. En outre cres-
CRAQUELIN, sorte de pâtisserie, 1297 selle, xive, encore chez Furetière (crec-) et
(texte de Tournai). Emprunté du moyen surtout cercelle, du x11° au XV° S., Cerce-
néerlandais crakelinc, de même sens. relle (Belon). Élargissement de crécelle, v.
CRAQUER, 1546. Onomatopée, comme bartavelle, traquet et vanneau. La forme
crac. Même onomatopée dans les langues cercelle est probabl. due à une altération
germ. : all. krachen, angl. {o crack. Au sens de crecelle d'après cercelle « sarcelle », et
fig. de « dire des hâbleries », 1694 ; l’angl. non une extension sémantique de ce dernier
signifie de même « se vanter », cf. crack; mot. En outre, les formes du xvi° s. qui
v. aussi krack. — Dér. : 1° au sens propre : désignent la crécelle montrent une action
eraqueler, 1863 (craquelé, 1761), d’où cra- réciproque du nom de l'oiseau et de celui
quelure, 1863 ; craquement, 1553 ; craque- de l'instrument.
ter, 1538, craquètement, 1568 ; 2° au sens CRÈCHE, xinue. Francique *kripja, cf.
1694 ;
fig. : craque, 1826 ; antér. craquerie, du all. Krippe. Aussi it. greppia, a. pr. crep-
craqueur, 1640 (craqueux en normand cha, etc. À supplanté le lat. praesepe, d’où
XVII® S.).
CRÈCHE 168

l’esp. pesebre. Dominant aujourd'hui dans CRÈME. Ancienn. craime, cresme. Lat.
les parlers gallo-romans ; concurrencé dans pop. crama (vie s., Fortunat), d’origine
les parlers septentrionaux par auge et gauloise, comp. gallois crammen « escarre
mangeoire. sur une plaie », croisé de bonne heure avec
CRÉCY, 1845. Tiré de Crécy, nom d’un chrisma, v. chrême. Vit aussi dans les
village de la Somme, près d’Abbeville, parlers rhéto-romans et dans ceux de l’Ita-
d’où vient la carotte de ce nom. lie septentrionale (cf. p. ex. crama, région
de Côme), et même dans le catalan gra-
CRÉDENCE, 1536. Empr. de l’it. cre- mada « résidu du petit lait ». — Dér. :
denza, dér. de credere, v. croire, propr. crémer, xvi®; crémeux, 1578; crémier,
« croyance, confiance » (en ce sens, vers 1762 (déjà adj. fém. en 1583), d’où créme-
1400, chez Froissart) ; a pris le sens par- rie, 1849 ; écrémer, xive (sous la forme
tic. de « buffet » d’après la locution faire la escramer) ; écrémage, 1791.
credenza « faire l'essai des mets et des bois-
sons, avant de les servir, chez les grands » CRÉMONE. Terme de serrurerie, 1790.
(d’où faire la crédence, xvi°), d'où « le buf- Passe pour être tiré du nom de Ia ville
fet sur lequel se fait cet essai », puis « tout d’Italie, mais sans justification.
buffet où se posent les plats, etc. ». CRÉNEAU, v. cran.
CRÉDIBILITÉ, 1651. Empr. du lat. CRÉNER, CRÉNURE, v. cran.
scolastique credibilitas.
CRÉOLE, 1693. Antér. criole, 1676.
CRÉDIT, « confiance », 1491. Empr. du Empr. de l'esp. criollo, qui est empr. du
lat. creditum (de credere « croire »). — Dér. : port. crioulo, de sens variés, « métis, nègre
accréditer, 1553 ; décréditer, 1572. né au Brésil, serviteur qui est dans une
CRÉDIT, terme de banque, xves. Empr. maison depuis son enfance (en parlant de
de l’it. credito « crédit », terme de banque, l’Inde), etc. » ; attesté en anc. port. au sens
empr. du lat. creditum au sens de « dette » de « né dans la maison (en parlant de
(v. le préc.). V. banque. — Dér. d’après le poules, par opposition à des poules ache-
sens propre : créditer, 1671; créditeur, tées) »; dér. de criar « nourrir, élever »,
1723 (antér. « créancier », du xine au lat. creûre, avec un suff. peu clair.
XVII° s., d’après l’it. creditore); discrédit, CRÉOSOTE, 1832. À été découverte par
en 1719, comme terme de banque, ou l’Allemand Reichenbach en 1832 et nom-
d’après l’it. discredito, sens plus étendu de mée ainsi au moyen des mots grecs kreas
bonne heure ; d’où discréditer, 1572 (Mon- « chair » et sôzein « conserver ».
tesquieu, au sens fig. d’après crédit).
CRÉPE. lo fém., pâtisserie, x1rr°;
CREDO, xrri°. Empr. du lat. credo « je 2° masc., sorte d’étoffe, 1357. Dér. de
crois », premier mot du Symbole des Apô- l'anc. adj. crespe « crépu », usité jusqu’au
tres. Sens fig. depuis 1771. XVIe s., d’abord fém., qui a éliminé de très
CRÉDULE, 1393; crédulité, xrrre. Empr. bonne heure le masc. cresp, lat. crispus
du lat. credulus, credulitas. « crépu », d’où également it. esp. crespo,
a. pr. cresp, de même sens. — Dér. du
CRÉER, xu°; créateur, id.: création, deuxième sens : crépon, 1660, étoffe. Au
vers 1200; créature, xr° (Alexis). Empr. sens de « boucle de cheveux », xvie, puis
du lat. creare, creator, creatio, creatura. de « cheveux postiches », dér. plutôt de
Créature paraît devoir le sens de « personne l’adj. même.
qui doit sa situation à la faveur d’une
CRÉPER, 1523 (mais indirectement d’a-
autre », 1558, à l’it. creatura. — Dér. : près crespeüre, xive). Déjà lat. crispare
incréé, 1474, sur le modèle du lat. de basse
ép. increalus ; recréer, 1350. « friser, etc. » ; cresper, au xvI® S., au sens
de « brandir », est un latinisme. It. crespare
CRÉMAILLÈRE, 1549, antér. carmeil- « plisser », esp. arch. a. pr. crespar « friser ».
liere, xir1° s., au xviie s. plutôt crémaillée. — Dér. : crépure, xrve.
Dér. de cramail, encore tout l'Est, lat.
Pop. cramaculus (Capitulaires de Charle- CRÉPINE, 1248, au sens de « passemen-
magne), autre forme terie » ; terme de boucherie au xrve s. Dér.
de cremaculus (Glo-
ses), altération de *cremasculus (d’où le de l’anc. adj. crespe, v. crêpe. — Dér. :
prov. cremascle), fait sur le grec kremasiér, crépinette, terme de charcuterie, 1740.
propr. « qui suspend » (attesté seulement CRÉPIR, 1150 (en parlant
en parlant des muscles des testicules et de
de cuir:
« crépir un mur », xive, d’après le dér.
claie à fromage). L’it. méridional camastre crépissure). Dér. de l’anc. adj. crespe, à
vient directement du grec. Aujourd’hui, cause de l’aspect grenu du cuir ou de celui
dans les parlers gallo-romans, crémaillère, d’un mur après le crépissage. — Dér. et
souvent avec substitution de suff., existe Comp. : crépi, 1528 ; crépissage, 1810 ; dé-
dans la majorité des parlers septentrio- crépir, 1857 ; recrépir, 1549.
naux, cramail se dit à l'Est, cremascle en
franco-provençal et en prov. CRÉPITER, 1753; parfois au xve s. et
au xvi; crépitation, xvie (Paré). Empr. du
CRÉMATION, 1823 (une première fois lat. crepitare, crepitatio (créé à basse ép.).
empr. au xi1° s.); crématoire, 1879, — Dér. : crépitement, 1869.
seulement dans four crémaioire. Le premier
est empr. du lat. de basse ép. crematio, CRÉPON, v. crêpe.
dér. de cremare « brûler » : le deuxième est CRÉPU, xne (Chrétien). Dér. de l'anc.
un dér. sav. de ce verbe. adj. cre(s)pe, v. crêpe.
169 CRIN

CRÉPUSCULE, x. Empr. du lat. esp. quebrar « briser », a. pr. crebar. —


crepusculum. — Dér. : crépusculaire, 1705. Dér. : crevaison, 1856 (une première fois
CRESCENDO, 1775. Empr. de lit. cres- vers 1280); crevasse, x11°, cf. a. pr. cre-
cendo « en croissant », gérondif de crescere, bassa, d’où crevasser, vers 1372; crevé,
v. croître. XVIIe. — Comp. : crève-cœur, xrI°.
CRESSON. Du francique “*kresso, cf. CREVETTE, 1530. Forme dialectale,
anc. haut all. chresso, all. Kresse. L’a. pr. normande ou picarde, de chevrette, usuel en
creisson (d'où l’it. crescione) et d’autres ce sens dans l’Ouest ; ainsi nommée à cause
formes romanes attestent un croisement des sauts qu’elle fait, cf. de même bouquet.
avec le verbe croître, à cause de la poussée CRIBLE, CRIBLER. Formes du lat.
rapide de cette plante. Le lat. nasturtium pop. criblum, criblare (ve s., M. Empiricus),
survit dans l'esp. mastuerzo. — Dér. issues par dissimilation, à basse ép., du
cressonnière, 1286. lat. class. cribrum, cribrare. Esp. cribo,
CRÉSUS, xvie (Marot). Empr. du lat. criba, cribar; d’après le dér. cribellum,
Croesus (du grec Xroisos, roi de Lydie, it. crivello, crivellare, a. pr. crivel, crivelar.
vies. avant Jésus-Christ, vaincu par Cyrus — Dér. : criblage, 1573 ; cribleur, 1556;
criblure, XIv=.
et célèbre par ses richesses). Pris comme
nom commun déjà en lat. et en grec. CRIC, 1447. Empr. du moyen haut all.
CRÉTACÉ, 1753. Empr. du lat. creta- kriec (moyen bas all. krich), qui désigne
ceus, dér. de crela « craie ». un engin destiné à pointer et tourner les
grosses machines de guerre. À pénétré en
CRÊTE. Lat. crisia. It. esp. a. pr. cresta. France comme terme de guerre et n’est
Dans de nombreux parlers du Centre, altéré attesté que comme tel pendant le xve s.
en krep d’après crêpe, à cause des dente- Le bruit que produit le crochet du cric en
lures de la crête du coq. — Dér. : cerêté, tombant dans les crans de la crémaillère
x1I1°; crêter (se), x11° (Chrétien) ; écrêter, a donné au mot une forte valeur onomato-
1611. — Comp. : crête-de-coq, plante, 1611 péique.
(creste à geline, 1538). CRIC-CRAC, 1520. Onomatopée.
CRÉTIN, 1754 : cf. « Les crétins du CRICKET, 1726. Mot angl., peut-être
Valais et des vallées voisines », 1769-1770, d’origine fr.; on trouve au xv® s. criquel
Bonnet, de Genève. Empr. du valaisan au sens de « bâton servant de but au jeu
cretin, employé également dans les parlers de boule ».
voisins, cf. de même l’anc. pyrénéen, par-
tic. béarnais, crestian « cagot », formes cor- CRICRI, xvi° s. Onomatopée.
respondantes au fr. chrétien ; a été employé CRIER. Lat. pop. *critäre, réduction du
d’abord par commisération, puis est devenu lat. class. quiritare, qui est de formation
péjor. — Dér. : crétinisme, 1786. onomatopéique (comp. les formes gutritare
CRETON, terme de cuisine, vers 1200. et quirriiare, qui se disent du cri du san-
Cf. le wallon crèton « petit morceau de lard glier ; l’étymologie proposée par Varron,
frit », dér. du moyen néerl. kerte « entaille », d’après laquelle ce verbe serait dér. de
dit ainsi à cause de l’aspect ridé, recroque- Quirites, le titre des citoyens romains, et
villé du creton. aurait d’abord signifié « convoquer les
citoyens » est simplement due à la simili-
CRETONNE, 1723. Dér. de Creton, nom tude des deux mots et ne correspond pas
d’un petit village de l'Eure, renommé pour à la réalité). La même onomatopée est à
ses toiles dès le début du xvie s. la base du néerl. krijten et du moyen haut
CREUSET, 1549. Altération, par substi- all. krîsien. À. pr. cridar, it. gridare, esp.
tution de suff. de l’a. fr. croisuel, propr. gritar (avec -i- conservé pour sa valeur
« sorte de lampe », probabl. d’un gallo- onomatopéique). — Dér. et Comp. : cri,
roman *croseolus, dér. de crûsus, proba- vers 1080 (Roland), cf. criz, x° s. (Passion
blement d’origine celtique (v. creux). Le de Clermont), it. grido, esp. grito, a. pr.
lat. médiéval crucibulum n'est qu’une crit ; criailler, 1564; criaillerie, vers 1580;
mauvaise latinisation des formes romanes, criailleur, 1564; criard, 1532; criée, xr1°;
d’après {uribulum. A pris de bonne heure crierie, x11°; décrier, xir1°; écrier (s’),
le sens moderne de « creuset », 1202 (sous xir1e ; vers 1080 (Roland, alors v. n.);
la forme croiseus). Croisuel est encore récrier (se), x11°.
vivace dans les parlers du Sud-Est pour CRIME, xu°. Empr. du lat. crimen,
désigner une lampe rustique. Empr. par propr. « accusation », déjà « crime » en
lit. crociuolo, crogiuolo « creuset » et lat. class.
l'esp. crisol « creuset », crisuelo « sorte de
CRIMINEL, vers 1080 (Roland) ; crimi-
lampe ». naliser, 1584 ; criminaliste, 1715 ; crimina-
CREUX, x11° (sous la forme crues). L’ex- lité, 1546. Le premier est empr. du lat.
tension du mot en gallo-roman, a. pr. cros, juridique criminalis (de crimen, v. le préc.),
et dans les parlers rhétoromans et de l’Ita- les autres en sont des dér. sav.
lie septentrionale, rend probable une ori- CRIN. Lat. crinis « cheveu », qui a pris
gine celtique, soit un hypothétique *crüsus. en outre en lat. pop. le sens de « crin ».
— Dér. : creuser, x11° (écrit croser) ; creu- A. pr. crin, it. crine, crino, Catalan crin,
‘sage, 1716; creusement, x1r1°.
fém. Le sens de « cheveu » a survécu en
CREVER. « Mourir », même en parlant fr. jusqu’au xvi® s., au moins dans la
de l’homme, xr1es. Lat. crepäre. It. crepare, langue littéraire ; l’it. et l’a. pr. l'ont aussi,
CRIN 170

et il est conservé en Normandie. — Dér. : CRITÉRIUM, 1750 (Jean-Jacques Rous-


crinière, 1556 ; existe dans tous les parlers seau), au sens sportif, 1872. Empr. du lat.
gallo-romans, sauf dans quelques parlers philosophique récent crilerium (du grec
de la Suisse romande, qui conservent le kritérion, de la famille de krinein « discer-
classique coma « chevelure, crinière », cf. it. ner »). Francisé en critère, 1781.
chioma, aux deux sens, a. pr. et esp. arch. CRITIQUE, adj., xiv°, au sens médical ;
coma ; quant à /üba, il ne survit que dans d’où « difficile, dangereux, décisif », 1690.
le sarde logoudorien yua. Empr. du lat. de basse ép. criticus (du grec
CRINCRIN, 1661 (Molière). Onomatopée. kritikos, de krinein « juger comme décisif »
dans la langue médicale, v. crise).
CRINOLINE, 1856 ; dès 1829, sorte de
tissu. Empr. de l’it. crinolino, comp. de CRITIQUE, « qui exerce la critique »,
crino « crin », et de Lino « lin », propr. subst., 1580 (Scaliger), adj., 1667 (Boileau).
«tissu dont la trame est de crin et la chaîne Empr. du lat. criticus, attesté, sans doute
de lin », et adapté en mot fém. d’après les par hasard, seulement comme subst. en
noms de tissus en -ine, mousseline, pope- ce sens (du grec krilikos au sens de « qui
line, etc., d’où, en fr., « jupon fait avec ce juge des ouvrages de l'esprit », voir le pré-
tissu ». A la suite de la mode des crinolines, a cédent). Critique, fém., « art du critique »,
repassé du fr. en it. sous la forme crinolina. 1580 (Scaliger ; cf. toutefois les dér.) est
empr. du grec kriliké « art de juger ». —
CRIQUE, 1336 (texte normand). Anc. Dér. : eritiquer, 1552, critiquable, 1727,
scandinave kriki. L’'angl. creek (prononcé critiqueur, 1590 ; hypercritique, 1638 (Mé-
autrefois avec e) est une autre variante
vocalique de ce mot germ. nage).
CRIQUET, insecte, xr1e (Marie de Fran- CROASSER, 1564 (écrit alors crou-;
ce, il remplace la cigale dans la fable de La antér. croescer, Xv°). Onomatopée réservée
Cigale et la Fourmi). Onomatopée, comme en général au cri du corbeau, dit le croas-
cricri. Désigne le grillon en normand. sement ; parfois employée aussi en parlant
de la grenouille, cf. La Fontaine, Fables,
CRIQUET, « sorte de petit cheval », II, 4, et ailleurs ; v. coasser. — Dér. :
1650, « petit homme », 1834. Onomatopée, -ement, 1549 (Du Bellay).
évoquant la faiblesse, ce qui craque, comme
l’all. Xricke « haridelle », mais formation CROC, inierjection, xvi1°. Onomatopée,
probabl. indépendante de criquer, 1539, comme crac et cric.
«craquer », très rare. Au sens de « piquette »
CROC, subst., xrie. D'un francique
1834, extension du sens de « faible », attesté *krok « crochet », qui correspond à l’anc.
dans le fr. régional de la Savoie et le franc-
scandinave krékr. *Krôk a passé deux fois
comtois criquet « gamin » (ou empr. du du francique en roman pendant la longue
néerl. krik « eau-de-vie » ?). période de bilinguisme du temps mérovin-
CRISE, 1429. Empr. du lat. médical gien. Une première romanisation s’est pro-
crisis (du grec krisis « phase décisive d’une duite assez tôt pour faire supprimer le -k
maladie » dans la langue médicale, propre- comme celui de focus; il en est resté le
ment « décision »). Sens fig. 1621. dér. encroué, qui se dit d’un arbre qui, en
tombant, s’est embarrassé dans les bran-
CRISPER, 1774. Empr. du lat. crispare ches d’un autre arbre (déjà incrocare « pen-
« rider », v. créper, d’où les sens récents, — dre un délinquant » dans la Loi Salique,
Dér. : crispation, 1743. sens attesté encore en a. fr., ce qui rend
CRISPIN, 1825 (mais dès 1780, d’après probable que cette romanisation s’est pro-
le dér. crispinade « bouffonnerie »). Emploi duite par l'effet des habitudes judiciaires).
figuré de Crispin, nom d’un valet de comé- Au sens plutôt technologique de « croc »,
die, 1654 (Scarron), empr. de l’it. Crispino la romanisation s’est produite plus tard,
« id. »; d’où gants à Crispin, puis crispin, de là la conservation du -c. — Dér. : cro-
d’après les gants du personnage. cher, x11°, peu usité aujourd’hui ; croche,
adj., 1540 (d’après un anc. subst. fém.
CRISS, 1529 (parfois crid, xvir1e). Empr. croche, XI11€-XV° s.), rare aujourd'hui, v.
du malais kris. bancroche ; croche, terme de musique,
CRISSER, 1549, du xIv® au xvie s. 1680 ; crochet, x11°; crocheter, 1457, cro-
grisser. Représente très probablement un cheteur, vers 1440, au sens de « celui
anc. francique “*kriskjan attesté par le qui porte des fardeaux sur les crochets »,
moyen néerl. criscen « pousser un cri stri- 1455 ; crochu, xr1° ; accrocher,
x11° ; accroc,
dent », criscelen « grincer les dents »; 1530, accroche-cœurs, 1837; raccrocher,
*kriskjan est un élargissement du francique vers 1310, d’où raccroc, 1374, raccrocheuse,
*krisan, moyen néerl. criselen « id. », qui 1772; décrocher, vers 1220. — Comp. :
a donné, avec un suffixe roman, l’anc. fr. croc-en-jambe, xvie ; croc imgambe, Mont-
crisner « grincer ». L’anc. fr. croissir, très luc, est une forme hybride mi française,
répandu encore dans les patois, représente mi méridionale.
un francique *krussjan, avec une autre
CROCODILE, 1532. Antér. cocodrille,
voyelle thématique.
x11°, encore au début du xvrie s. Empr. du
CRISTAL, vers 1080 (Roland) ; cristal- lat. crocodilus (du grec krokodeilos). Verser
lin, xit°, Empr. du lat. crystallus (du grec des larmes de crocodile vient de la fable
krystallos, propr. « glace »), crystallinus. (attestée depuis le 1xe s.), d’après laquelle
— Dér. : cristallerie, 1745; cristalliser, 1666, le crocodile verse des larmes après avoir
cristallisable, 1764, cristallisation, 1676. dévoré un être humain.
171 CROULER

CROCUS, 1372. Empr. du lat. crocus CROQUER, xinie, a eu aussi le sens de


(du grec krokos). « craquer ». Comme terme de peinture,
CROIRE. Lat. crédere. La construction 1650 (au xvr®s. étape intermédiaire « avoir
une connaissance superficielle de qch. »),
croire en remonte au lat. eccl. credere in cf. de même pocher. Onomatopée, comme
deum, etc. — Dér. : créance, xr1° (Alexis);
croc. Un verbe croquer, xve et xvi® s.,
lettre de créance, xive (Froissart); sens
« voler », vient de croc. V. marmot. —
financier attesté dès le x11° s. par le dér. Dér. : croquant, xvie (Montluc), nom donné
créancier ; croyance, xiv® (Oresme), mais aux paysans révoltés du Sud-Ouest, 1594,
créance est prépondérant jusqu’au xvri® s. pour une raison incertaine : d’après De
dans tous les sens ; croyable, xvre (antér. Thou (1553-1617), parce qu’ils faisaient de
creable, x1°), d’où incroyable, xvi® (antér. nombreuses destructions ; d’après Mézeray,
increable, xiv®) ; mécréant, xr1°, part. prés. 1667, parce qu'ils appelaient ainsi les sei-
de l’anc. verbe mécroire, id., « refuser de gneurs, qui leur auraient retourné ce nom
croire »; recru, vers 1080 (Roland), part. par dérision; d’après d’Aubigné (1616-
passé de l’anc. verbe recroire (se) « se- 1620), parce que les premières bandes se
rendre à merci ». V. accroire.
formèrent à Crocq (Creuse); croquette,
CROISADE, xve. Réfection de l'a. fr, 1834 ; croqueur, 1668 (La Fontaine). D’a-
croisee, au même sens (dér. de croit), à
près l'emploi du verbe comme terme de
l’aide du suff. -ade, très usuel depuis le peinture, croquis, 1752, et croquade, 1827.
Xv® s., et d’après lit. crociaia et l'esp. — Comp. : Nombreux comp. avec croque
cruzada, réfection à laquelle invitait l’excès comme premier élément, notamment cro-
de sens de croisée, v. croix. L’a. fr. disait que-mitaine, 1822, dont le deuxième terme
en outre croisement et croiserie. est d’origine obscure ; croque-mort, 1788;
croque-note, 1767 (J.-J. Rousseau).
CROISÉE, CROISILLON, v. croix. CROQUET « sorte de jeu de boules »,
1877. Empr. de l’angl. croquet (qui paraît
CROÎTRE. Lat. créscere. It. crescere, se rattacher à croc), récent aussi en ce
esp. crecer, a. pr. creisser, sauf dans les par- sens, d’où le verbe croquer, comme terme
lers septentrionaux du domaine gallo- de ce jeu.
roman où il est concurrencé, surtout par
pousser. — Dér. et Comp. : croissance, xrre, CROQUIGNOLE, xv®, « chiquenaude »,
peut-être déjà lat. crescentia, très rare; d’où, par plaisanterie et d’après croquer,
croissant, id., d’abord « temps pendant « pâtisserie croquante », 1545. Étymologie
lequel la lune croît », d’où « la forme de la douteuse. Dér. du verbe croquer « frapper »,
lune appelée croissant », sens attesté au mais la formation du mot est obscure;
XIHI® s. ; croissant « sorte de gâteau », xIx®, torgnole est trop récent pour qu’on puisse
est une traduction de l’all. Hürnchen ; les lui attribuer quelque action.
premiers croissants furent fabriqués à Vien- CROSNE, 1822. Tiré de Crosnes, nom
ne pour célébrer la victoire de 1689 sur les d’un village près de Corbeil, où cette plante
Turcs dont l'emblème national, comme on fut cultivée pour la première fois.
sait, est un croissant ; croît, xir1°; crû, CROSSE, vers 1080 (Roland). Du germ.
1414 ; crue, x111° ; décroître, xr1°, souvent occidental *krukja « béquille », cf. all.
en à. fr. decroisire, au lieu de des-, d’après Krücke « id. », angl. cruich, et croisé avec
le lat. decrescere ; refait en *discrescere ou . CrOC, Cf. aussi it. gruccia; l'esp. croza et
non, le verbe lat. a pu survivre dans le l’a. pr. crossa sont peut-être empr. au fr.
latin pop., cf. esp. descrecer, a. pr. def(s)- Fréquent dans les parlers gallo-romans au
creisser ; d’où décroissance, x111°, décrois- sens de « béquille ». — Dér. : crossé, 1461,
sement, xiri® (Villehardouin), décroît, en parlant d’un prélat; crosser, xrr1e;
x11°, décrue, 1542; recroître, x11°, recrue, crossette, 1564.
1550, recruter, 1691 (Racine qui le blâme),
recrutement, 1790 ; surcroître, x1r1°, rare CROTALE, 1596, « sorte de castagnette
aujourd’hui, d’où surcroît, x111°. V. ac- chez les anciens ». Empr. du lat. crotalum
croître, excroissance. (du grec krotalon). Appliqué au serpent à
sonnettes, 1800.
CROIX. Lat. crucem, acc. de crux. It. CROTTE. Du francique *krotla, qu’on
croce, esp. cruz (refait sur le lat.), a. pr. peut supposer d’après le rhénan krotz. La
crolz. — Dér. et Comp. : croiser, vers 1080 signification première était « fiente de
(Roland), d’où croisée, 1379 (antér. « croi- chèvre, de lapin » ; le sens « boue des che-
sade »), croisement, 1539, croiseur, 1690, mins » est secondaire. Le flamand role,
sens moderne, d’après le sens du verbe qui a aussi ce dernier sens, le doit probabl.
« parcourir la mer en différents sens », au fr, — Dér. : crotter, xr11°; crottin,
croisière, 1680, id.; croisillon, 1375, par 1344 ; décrotter, xrr1°, décrottage, 1845,
l'intermédiaire de croisille, xr1° ; décroiser, décrotteur, 1534 (Rabelais), décrottoir,
1548; entre-croiser, 1320; recroiser, 1445. xve, décrottoire, 1483, indécrottable, 1611.
CROMLECH, 1785 (dans une traduction CROULER, vers 1080 (Roland : crollee,
de l’angl. où on parle de l'Écosse). Empr. part. fém., en outre crodler). D'abord «se-
du gallois cromlech, comp. de crum (fém. couer, agiter », encore en 1654 (La Fou-
crom) « courbe » et de lech « pierre »; at- {aine) et dans des patois; déjà intrans. au
testé comme terme d'archéologie en An- sens de « s’écrouler », xi1°. On a pensé à
gleterre, à propos du pays de Galles, en un lat. pop. *crotaläre « secouer », dér. de
1603. Est employé par les archéologues crotalum « sorte de castagnette », v. cro-
anglais et gallois au sens de « dolmen ». tale, cf. de même anc. prov. croilar, aux
CROULER 172

deux sens, et it. crocchiare « battre »; lit. CRUCIAL « décisif », 1911. Empr. de
crollare « secouer » pourrait être empr. On l’angl. crucial ; celui-ci a été créé au xIx°5.
a proposé aussi le lat. pop. “*corrotuläre, (1830) sur le modèle de crucial « disposé
propr. « faire rouler », dér. de roia « roue », en croix », 1706, lui-même empr. du fr.,
par l'intermédiaire de *corrotäre, largement v. le préc., d’abord dans les expressions
attesté au sens de « s’écrouler » dans les crucial insiance, crucial experiment, qui re-
parlers rhéto-romans et de l'Italie septen- montent au latin de Newton et de Bacon ;
trionale, mais qui convient moins au pre- Newton avait en effet créé experimenium
mier sens. — Comp. : écrouler (s”), xIr1°, crucis en 1672 sur le modèle de l’expression
écroulement, 1561. instantia crucis de Bacon, 1620, qui l’expli-
que ainsi : « Instantias crucis... translato
CROUP, 1777-1778. Empr. de l’angl. vocabulo a crucibus quae erectae in biviis
croup, mot dialectal du parler d’Edim- indicant et signant viarum separationes.
bourg (1765). — Dér. : croupal, 1826. Has enim instantias decisorias et judiciales
CROUPE. Francique *kruppa, qu'on appellare consuevimus. »
peut supposer d’après all. Kropf « goître »,
néerl. krop, anc. scandinave kroppr « buste, CRUCIFIER, xu° ; crucifix, 1138 ; cru-
bosse ». L’it. groppa est empr. du fr. L’it. cifixion, vers 1500. Empr. du lat. eccl. cru-
gruppo « groupe » remonte au même mot cifigere, crucifixus (part. passé pris substan-
germ., mais par l'intermédiaire du longo- tiv. en lat. médiéval), crucifitio ; crucifigere
bard, qui doit avoir eu une forme avec à ; est connu par des auteurs païens, mais
la voyelle labiale varie en effet dans les c’est son emploi dans le lat. eccl., et en
langues germ. devant consonne labiale parlant de Jésus-Christ, qui l’a répandu.
entre 6, 6, à et u. — Dér. : croupier, 1797, Le verbe a été adapté d’après les nombreux
au sens moderne, dont le développement verbes en -fier. — Dér. : crucifiement, x11°.
n’est pas sûr ; d’abord « celui qui est en CRUDITÉ, xive. Empr. du lat. cruditas
croupe derrière un autre cavalier », 1651 «indigestion », pour servir de nom 2bstrait
(Scarron), puis « personne associée à un
autre joueur ou qui assiste un banquier au à cru. |
jeu de la bassette », 1690 ; en outre « associé CRUE, v. croître.
secret de fermier général », 1694; crou-
pière, x11° ; croupion, xve® (Villon) ; eroupir, CRUEL. Lat. crüdeélis (dér. de crädus) ;
xI1e, signifie « s’accroupir, rester accroupi cruel est refait sur le lat. ou représente une
ou à la même place », jusqu'au xviI° $.; forme pop. *crüdalis, appuyée par l’a. pr.
accroupir (s’), xirI1, a été pris au sens crual (à côté de cru(z)el). L’a. fr. a en
figuré de « croupir » au xvI®s. outre crueus, -se, fait sur l'anc..nom.
crueus, issu de cruels. It. crudele (avecune
CROUSTADE, 1716. Empr. de l’it. cros- ouvert, dû à l’empr. de la forme du lat.
tata ou du prov. crostado, v. croûte. écrit), esp. cruel.
CROUSTILLER, xvi. Empr. du prov. CRURAL, xvie (Paré). Empr. du lat.
croustilld, v. croûte. — Dér. : croustillant, cruralis {de cr::s, cruris » jambe »).
1751, au sens de « plaisant » ; croustilleux,
1680 (au même sens que le préc.) ; crous- PAESTACEMUT?21-Dér. sav. du lat.
tille, 1680. crusia « croûte ».
CROÛTE. Lat. crusia. A. pr. crosta, it. CRYPTE, xive (écrit alors cripie). Empr.
crosta, esp. costra. — Dér. : eroûton, xvi°; du lat. crypia, v. grotte.
écroûter, x11e ; encroûter, 1538, encroûte-
ment, 1546. CRYPTO-. Premier élément de mots sav.
comp., tels que cryptographie, 1625, tiré du
CRU, adj. Lat. crädus. Conservé par- grec kryplos « caché », ou cryptogame, 1783,
tout : it. esp. crudo, a. pr. cru(t). — Dér. : empr. du lat. des botanistes cryplogamus,
écru, 1260 (É. Boileau), avec un préfixe créé par Linné avec le même mot grec et
qui sert simplement à renforcer. gämos « mariage ».
CRÜ, subst., v. croître. CUBE, xrri° ; cubique, xi1v° (Oresme).
CRUAUTÉ. Lat. crüdélitätem, acc. de Empr. du lat. cubus, cubicus (du grec kybos
crädélitas, dér. de crüdelis ;développement « dé à jouer », kybikos). — Dér. : cuber,
anormal d’après féaulé, loyaulé, ou refait 1554 ; cubage, 1783 ; cubisme, vers 1908,
de bonne heure en “*crüdalitäs, v. cruel. école des arts plastiques ; cubiste, id.
It. crudeltà, esp. crueldad. CUBÈBE, 1256. Empr. du lat. médiéval
CRUCHE. Du francique *krüka, attesté cubeba, empr. lui-même de l'arabe kubaba,
par le moyen haut all. £râche et une forme forme altérée de l'arabe class. kabdba.
dialectale moderne KXrauche; l’all. Krug
appartient à la même famille. D'une roma- CUBITUS, xvie (Paré). Empr. du lat.
nisation antérieure proviennent l’a. fr. cubitus « coude », pour son sens spécial. —
cruie et l’a. pr. cruga, d’où crugo du Sud- Dér. : cubital, 1611 (le lat. cubitalis ne
Ouest. — Dér. : cruchon, x1r1°. signifie que « haut d’une coudée »).
CRUC(I)-. Premier élément de mots sav. CUCULLE, v. cagoule.
comp., tels que crucifère, 1701, tiré du lat. CUCURBITE, xive siècle. Empr. du
CTUT, CTUCiS « Croix ». lat. cucurbita « citrouille », dans la signi-
CRUCIAL, terme de chirurgie, xvi® fication que lui avaient donnée les alchi-
(Paré). Dér. sav. du lat. crux, crucis «Croix ». mistes du moyen âge. V. encore courge.
173 CUL

CUEILLETTE. D'abord cueilloite, xxrre, homonyme de fimus, -oris « fumier »;


devenu rapidement cueillette, par substitu- a été remplacé dans son ancienne signifi-
tion de suff., v. de même emplette. A cation par hanche, d’origine germ. It. cos-
signifié aussi « collecte », xive. Lat. collecta, cia, a. pr. coissa. — Dér. : cuissard, 1642;
part. passé fém. pris substantiv. de colli- cuissette, 1347 ; cuissière, 1250 ; cuissot,
gere, v. le suiv., attesté seulement au sens ee par variante orthographique, -eau,
de « cotisation, quête, réunion », mais qui
a dû prendre de très bonne heure le sens CUISSON. Lat. coctionem, acc. de coctio;
de « cueillette ». It. colletla, esp. cosecha la voyelle de la syllabe initiale est due à
(avec un s anormal). l'influence de cuire. A. pr. Coisson.
CUEILLIR, a signifié fréquemment « ac- CUISTRE, 1622 (Sorel), terme d’argot
cueillir, recueillir », jusqu’au xvr® s. Lat. des écoliers. Paraît être l’anc. nom., attesté
colligere, vieux dér. de legere « cueillir », sous la forme quistre, de l’acc. coisiron
dont les éléments n’ont plus été compris, « marmiton », lat. de basse ép. *coquisiro
propr. « cueillir », d’où « réunir, rassem- « officier royal chargé de goûter les mets »
bler », d’où de nombreux sens non conservés (cocistro dans des gloses), par un dévelop-
dans les langues romanes. L'’inf. cueillir pement anormal qui paraît être dû à un
doit son radical aux formes accentuées croisement avec cuire, cuisine, Cf. « un
telles que cueille et sa terminaison -ir à quistrun de sa quisyne » d’un texte médié-
une réfection analogique très ancienne. val ; l’s a été maintenu dans cuisire, parce
A. pr. coelher, colhir ; cueudre, attesté en que le croisement continuait à être senti
a. fr., refait sur un anc. futur coldrai, est et que, de plus, le mot était ainsi plus
conservé en wallon, en franc-comtois et expressif. L'absence du mot dans les textes
dans la Suisse romande ; en outre concur- du xvi® s. peut n'être qu’un accident.
rencé par le type ramasser surtout dans le
Centre, l'Ouest et les parlers méridionaux. CUIVRE. Lat. pop. *coprium, lat. class.
V. accueillir, recueillir. cyprium (aes), propr. « bronze de Chypre » ;
l’o, qui fait difficulté, vient sans doute
CUIDER, v. outrecuidance. d’une adaptation différente du mot grec
qui est à la base du mot lat. Seulement fr.
CUILLER et CUILLÈRE. D'abord
D'autres formes cuprum ou *coprum sont
masc. ; devenu fém. de bonne heure. Lat.
cochleärium (dér. de cochlea « escargot »);; à la base de l’a. fr. cuevre (encore wallon
keuve), de l’a. pr. coure et coire (encore
dit ainsi parce que l’ustensile servait à
manger des escargots avec la pointe dont usité dans le Sud-Ouest) et de l’esp. cobre,
v. airain. — Dér. : cuivreux, 1580 ; cuivré,
il était muni à l’une de ses extrémités. —
Dér. : cuillerée, xiv°; cuilleron, 1352. 1587.
CUL. Lat. cülus. — Dér. : culasse, 1581
CUIR. En dehors de son sens propre, (écrit -ace) ; culée, 1355; culier, culière,
est souvent pris au sens de « peau de x; culeron, 1611; culot, 1319, pop.
l’homme », jusqu’au xvir1® 5. ; encore usité « toupet », fin xixe (ce sens vient de l’ac-
en ce sens dans quelques locutions. Faire ception « partie la plus basse d’une lampe »,
un cuir, 1783, est d’origine douteuse ; a parce que celle-ci donne de la stabilité à
peut-être été suggéré par l’expression écor- la lampe, tout comme celui qui a du culot,
cher un mot. Lat. corium, parfois « peau de ne perd pas facilement son équilibre), d’où
l'homme » dans la langue fam. A. pr. cuer, culotter (une pipe), 1838; culotte, 1515
cuor, it. cuoio, esp. cuero. — Dér. : curée, (Chronique bordelaise : « En cette année on
xve, d’abord cuiriée, cf. « Et puis doit-on commence à porter les hault de chausses,
laisser aller les chiens à la cuirée sur le qu’on appelloit à la culotte, et aultrement
cuir », XIV, Ce qu’on donne à manger aux rondes avec les bas y attachés »), aujour-
chiens étant étendu sur le cuir de la bête d’hui dominant dans les parlers gallo-
tuée ; sens fig. au xvie s.; cuirasse, 1266 romans (au sens de « pantalon », comme de
(a supplanté l’a. fr. broigne, du francique « culotte »), toutefois concurrencé, notam-
brunnja ; n’est pas empr. de lit. corazza, ment par les types chausses, Lorraine, Suisse
qui est peut-être plutôt une adaptation du romande, région languedocienne, braies,
mot fr., ainsi que l'esp. coraza) ; cuirasser, normand, breton et prov.; d’où culotter
1636 (cuirassé en 1611) (vaisseau) cuirassé, « mettre une culotte », 1792 (part. passé),
1862; cuirassier, 1577, subsi., et spécial., culottier, 1790, déculotter, 1739 (de Bros-
à partir de 1664, « sorte de soldat de cava- ses), sans-culotte, 1791, nom dû au fait
lerie ». que les hommes du peuple portaient le pan-
CUIRE. Lat. pop. *cocere, lat. class. talon, tandis que la culotte courte carac-
coquere (pour ce traitement, v. cinq). It. térisait les gens de l’ancien régime ; acculer,
cuocere, esp. cocer, a. pr. coire. — Dér. : xir1e, accul, vers 1550; éculer, 1564; re-
cuite, x1r1° : recuire, x11° ; biscuit, 1538, culer, xr1°, recul, xir1°, reculade, 1611,
réfection de l’a. fr. bescuit, xr1°. reculement, 1340, reculons (à), vers 1225.
— Comp. : bascule, 1549 (cf. basse cule,
CUISINE. Lat. cocina, autre forme de en 1600), altération, d’après l’adj. fém.
coquina. À. pr. cozina, it. cucina, eSp. CO- basse (parce que la bascule s’abaisse), de
cina. — Dér. : cuisiner, x111° ; Cuisinier, bacule, 1466, encore au XVII* S., subst.
vers 1200, v. queux. L’argot militaire a verbal de baculer, propr. « frapper le der-
créé, fin x1x°, cuistance « cuisine » et cuistot rière de qqn. contre terre, pour le punir »,
« cuisinier ». v. plus loin, désignation plaisante de la
CUISSE. Lat. coxa « hanche » ; a rem- bascule qui heurte en s’abaissant ; ce verbe
placé le lat. class. femur, qui était devenu est né d’une comp. de l'adv. bas et de
CUL 174

cul (il n’a rien à faire avec le subst. bacul CUNÉIFORME, xvi° (Paré), comme ter-
« croupière », 1466, encore en normand, me médical. Comp. du lat. cuneus « coin »,
comp. de l’impér. de baitre et de cul); d’après des adj. tels qu’informe, multi-
basculer, 1611, altération de baculer, 1377 forme. Reformé au xixe® s. (dès 1829) pour
(encore au xvir® s.), d’après bascule ; bous- désigner l'écriture assyrienne.
culer, 1798, d’abord boutieculer, xir1e, dér.
de boutecul, id., propr. « celui qui pousse CUPIDE, xv®,; cupidité, xive. Empr. du
du cul », comp. de l’impér. de bouler et de lat. cupidus (de cupere « désirer »), cupidi-
cul (l’altération de bouteculer en bousculer tas ; signifient parfois « passionné, pas-
a dû se produire dans l'Est, où bouteculer sion », xvi* et xvires., d’après le sens domi-
vit encore aujourd’hui, et où existe, à côté nant en lat. class.
de bouter une forme bousser, empr. du CUPIDON, xrr1e (nom propre ; nom com-
moyen haut all. bôzen, v. bouier), d’où mun, 1836). Empr. du lat. Cupido, nom du
bousculade, 1867 ; culbuter, 1480 (Marot), fils de Vénus, personnification de cupido
écrit d’abord culebuter, comp. du verbe « désir », v. le préc., d’après le grec erôs
moyen fr. culer « frapper au cul; v. r. « amour » et « Erôs ».
s’accroupir » et buier, comme fournevirer
(de tourner et virer), d’où culbute, 1538; CUPULE, 1611. Empr. du lat. cupula
culbuteur, 1599 ; torche-cul, 1505, au sens « petite barrique », par les botanistes ; pris
de « valet d’écurie ». Nombreux noms au sens de « petite coupe » en fr. d’après
comp. avec cul comme premier élément : coupe (lat. cuppa).
cul-de-jatte, xvr1e (Scarron) ; cul-de-lampe, CURABLE, x1r1°. Empr. du lat. de basse
xve; cul-de-sac, 1229. ép. curabilis.
CULINAIRE, 1546 (Rab.). Empr. du CURAÇAO, 1801. Tiré du nom d’une
lat. culinarius, dér. de culina « cuisine ». île des Antilles qui produit les oranges dont
CULMINANT, 1823, au sens de la langue l’écorce sert à faire la liqueur dite curaçao.
commune ; point culminant, terme d’astro- CURAGE, « poivre d’eau », xiv® (écrit
nomie, en 1708. Part. prés. de culminer, culrage). Altération de scurage (lat. médié-
1751 (Voltaire), terme d’astronomie, « at- val scurago, d’origine incertaine), par éty-
teindre, en passant au méridien, sa plus mologie pop. : « Ainsi nommée parce que
grande hauteur au-dessus de l’horizon », ses feuilles appliquées au cul pour le déter-
empr. du lat. culminare « mettre au com- ger y font rage », Liébault, 1597.
ble » (de culmen « comble »).
CURARE, 1758. Empr. de curare de la
CULPABILITÉ, 1791. Dér. sav. du lat. langue des Caraïbes des Antilles, attesté
culpabilis, pour servir de nom abstrait à sous d’autres formes chez d’autres peu-
coupable. plades de l’Amérique du Sud (curari,
CULTE, 1532. Empr. du lat. culius, urari, etc.).
dér. de colere, qui a entre autres sens celui CURATELLE, xive. Empr. du lat. mé-
d’ « adorer ». — Dér. : cultuel, 1872. diéval juridique curatela (en lat. class.
CULTIVER, vers 1200. Empr. du lat. curatio), fait sur {utela, d’après le rapport
médiéval cultivare (de *cultivus, formé dans des deux mots curaior, tutor.
le lat. de basse ép. d’après vacivus « in- CURATEUR, 1287. Empr. du lat. juri-
culte », sur culius, part. passé du lat. class. dique curator, dér. de curare,.
colere qui a entre autres sens celui de « cul-
tiver »). L'a. fr. a aussi le verbe coutiver, CURATIF, 1314 ; curation, xrtre. Le pre-
dont le lat. médiéval cultivare n’est qu’une mier est un dér. sav. du lat. curare « soi-
transcription, comparez aussi le langue- gner » au sens médical, le deuxième empr.
docien coutiu « culture, champ cultivé ». du lat. médical curatio.
— Dér. : cultivable, 1308; cultivateur, CURCUMA, 1559. Empr. de l’esp. cur-
XIV® (Oresme), en a. fr. souvent coutiveor, cuma, empr. lui-même de l’arabe kour-
cult-, jusqu’au xive s. koum « safran » (d'origine perso-indienne) :
CULTURE, vers 1350; 1509, sens dit aussi safran d’Inde, parce que la racine
propre. Empr. du lat. culiüra, qui a les de curcuma produit une matière colorante
deux sens ; une forme régulière couture de jaune.
l’a. fr., au sens de « champ cultivé », est CURE. Au sens général de « soin », ne
encore usitée dans quelques parlers septen- s’emploie aujourd’hui que dans la locution
trionaux ; cf. it. a. pr. coliura « culture, n'en avoir cure. Lat. cüra « soin ». Au
terre en culture ». Sert en outre de deuxième moyen âge, a reçu diverses acceptions dans
- élément de mots sav. tels qu’arboriculture, la langue eccl., notamment « soin des af-
1345, etc., d’après agricullure. — Dér. : faires de l’Eglise », et spécial. « fonction
culturel, 1929, d’après l’all. kulturell. du curé » ; ce dernier sens et celui de « pres-
CUMIN, 1393. Antér. coumin. Empr. du bytère », 1496, sont dus à curé. It. esp.
lat. cuminum (du grec kyminon, d'origine a. pr. cura. — Dér. : curial, xvire (Patru),
orientale, cf. hébreu kammôn). dér. de cure, fonction eccl., d’après le lat.
curialis, dér. de curia « curie » ; curé, xrr1°,
CUMULER, 1354 (Bersuire). Aujour- signifie propr. « chargé d’une cure, d’une
d’hui surtout juridique et administratif, paroisse » (le mot ne peut pas venir du
mais jusqu’au xvi® s., « entasser (en géné- lat. curatus, qui veut dire « bien soigné »,
ral) », aujourd'hui accumuler. Empr. du et qui est dér. du verbe curare ; l’it. curato
lat. cumulare « entasser », v. combler. — et le catalan curat sont plus récents que
Dér. : cumul, 1692 ; cumulard, 1821. le mot fr.); curiste, 1899.
175 CZAR

CURÉE, v. cuir. CYCL(O)-. Premier élément de mots


sav. comp., tels que cyclostome, 1807 (La-
CURER. Lat. curäre « soigner ». Le sens marck), cf. aussi cycloïde, vers 1640 (Mer-
du verbe s’est restreint, en fr. moderne, à senne), tiré du grec kyklos « cercle ».
celui de « nettoyer ». It. curare « soigner »,
esp. curar « guérir », a. pr. curar « Soigner, CYCLONE, 1863 (d’abord fém.). Empr. de
guérir ». — Dér. : curage, 1328 ; curette, l’angl. cyclone, formé par un savant du nom
1451, d’où, d’après l'instrument de chirur- de Piddington en 1848 sur le grec kyklos.
gie de ce nom, curetage, fin xix°.— Comp. :
Nombreux noms comp. avec cure comme CYCLOPE, vers 1542 (Rabelais, aupa-
premier élément : cure-dent, 1416 ; cure- ravant cyclopien chez Oresme et Jean
oreille, id. Lemaire). Empr. du lat. cyclops « géant
mythologique ». — Dér. cyclopéen, 1809.
CURIAL, v. cure.
CURIE, 1538 (comme terme d’antiqui- CYGNE, x1r1e. Altération de la forme
té). Empr. du lat. curia. Comme terme antérieure cisne (d'où cine, encore au
d'administration papale, 1845, empr. de xvie s.). Lat. pop. cicinus (Loi Salique et
lit. curia, lui-même empr. du lat. eccl. Gloses), lat. class. cycnus (du grec kyknos).
It. arch. cecino et cecero, aujourd’hui cigno,
CURIEUX, vers 1125 ; curiosité, x11°. a. pr. cinhe; l'esp. cisne vient du fr.
Empr. du lat. curiosus, propr. « qui a soin
de » et aussi « curieux », curiosilas « SOin ». CYLINDRE, xive. Empr. du lat. cylin-
Le sens propre du latin a dominé jusqu’au drus (du grec kylindros). — Dér. : cylin-
xvie s. et est encore fréquent au xvir®. drique, 1596.
CURSEUR, 1562. Empr. du lat. cursor CYMAISE, v. cimaise.
« coureur » en vue d’un sens spécial ; empr.
au sens du lat. au x1v®s. CYMBALE, xue. Empr. du lat. cymba-
CURSIF, 1792; une première fois en lum (du grec kymbalon). — Dér. : cymba-
1532 (Rab.). Empr. du lat. médiéval cursi- lier, 1671.
vus (de cursum, supin de currere « courir »). CYNÉGÉTIQUE, 1752. Empr. du grec
CURVILIGNE, 1613. Comp. des mots kynegetikos, de kynegetein «chasser » (propr.
lat. curvus « courbé » et Linea « ligne ». « mener les chiens »).
CUSCUTE. Empr. du lat. médiéval cus- CYNIQUE, x1ve (au sens propre). Empr.
cuta, empr. lui-même de l'arabe kouchôuih, du lat. cynicus (du grec kynikos « qui ap-
variante de kachoûth(ä) (d’origine grec- partient à l’école cynique ») ; cette école a
que). été appelée ainsi d’après le mot grec signi-
CUSTODE, 1379. Empr. du lat. custodia fiant « chien », parce que ses adeptes dé-
« garde ». À signifié « rideau de lit », au xv® fiaient les convenances ; on signale aussi
et au XVI s. qu’ils se réunissaient dans le gymnase ap-
pelé {o kynosarges « le Cynosarge », ce qui
CUTANÉ, 1546. Dér. sav. du lat. cutis a pu contribuer au choix du nom. Sens fig.
« peau ». — Comp. : sous-cutané, 1753. en 1674 (Boileau), développé spontanément
CUTI-RÉACTION, 1907. Comp. créée en fr.
dans la langue des médecins, du lat. cutis. CYNISME, vers 1740. Empr. du lat. de
« peau » et de réaction, voir ce mot. basse ép. cynismus (du grec kynismos) pour
CUTTER, v. cottre. servir de nom abstrait au préc.
CUVE. Lat. cüpa, v. coupe. Esp. a. pr. CYN(O)-. Premier élément de mots empr.
cuba. — Dér. : cuveau, x11° ; cuvée, XIII°; remontant au grec, tels que cynocéphale,
cuveler, 1762, cuvelage, 1762; cuver, xve ; cynoglosse, xve, comp. du grec Ayôn,
1373 ; cuvette, xu° ; cuvier, id.; décuver, génitif kynos, « chien ».
1611 ; encuver, vers 1400.
CYAN(O)-. Premier élément de mots CYPRÈS, x11e. Empr. de la forme lat.
sav. comp., tels que cyanogène, 1815, tiré hellénisée cypressus, remplaçant cupressus
du grec kyanos « bleu sombre ». (du grec kyparissos).
CYCLAMEN, xiv<. Empr. du lat. cycla- CYPRIN, 1783. Empr. du lat. cyprinus
men (du grec kyklaminos). . (du grec kyprinos « carpe »).
CYCLE, 1534 (Rab.); cyclique, 1578; CYST(O)-. Premier élément de mots
ceyclotron, 1948. Empr. du lat. cyclus, sav. tels que cystotomie, 1793, cf. aussi
cyclicus (du grec kyklos, propr. « cercle », cystite, 1810, tiré du grec kyslis « vessie ».
kyklikos). Au sens de « vélocipède », cycle,
1889, vient de l’anglais qui a reçu ce sens CYTISE, 1563 (d’abord cythison, 1516).
vers 1870 ; viennent également de l'anglais Empr. du lat. cytisus (du grec kytisos).
bicycle (1877), tricycle (1834), cycliste,
d’où le français bicyclette, 1890. CZAR, v. tsar.
D
DA, dans oui-da, v. oui, sous il. DAIS. D'abord deis, dois. Signifiait au
DA CAPO, vers 1710. Empr. de lit. moyen âge « table, estrade », d’où « tenture
da capo «(en reprenant) depuis le commen- dressée au-dessus, etc. » ; ces derniers sens
cement », v. chef. sont assez récents, du xvie s. environ. Lat-
discus « disque » (comme celui du Disco-
DACTYL(O)-. Premier élément de mots bole), d’où « plat » (du grec diskos « id. ») ;
sav. comp., tiré du grec daktylos « doigt ». du sens de « plateau où l’on disposait les
Dactylographe a été formé une première mets » le mot a abouti au sens de « table »
fois vers 1836 au sens de «machine inventée dans les langues romanes ; cf. aussi l’all.
pour servir de moyen de communication Tisch « table », à côté de l’angl. dish « plat »,
aux sourds-muets et aux aveugles » ; sens tous deux pris au lat. It. desco « table,
disparu au profit du sens moderne, d’où établi », a. pr. desc « plat (sens rare), table ».
dactylo, -graphie, 1833, -graphier, fin xixe.
DALLE, 1319, au sens moderne de « pier-
DADA, xvi®. Onomatopée enfantine. re plate pour paver », d’après le dér. daller.
Sens fig. 1778. À été pris par défi en 1916 Les sens d’ « auget » ou de « gouttière »
comme symbole d’une école artistique qui des langues techn. dérivent de celui d’ «é-
prétendait être « une révolte permanente vier, égout », attesté dès le x1ve s. dans des
de l'individu contre l’art, la morale, la textes normands et qui survit aujourd’hui
société », d’où dadaïsme. surtout dans les parlers de l'Ouest. Le sens
DADAIS, 1642. Mot onomatopéique; il premier a dû être « pierre plate ou légère-
y a de nombreux mots de sens analogue ment creusée, servant d'égout ». Mot
dans les patois, cf. aussi dadée « enfantil- techn. qui a circulé surtout comme terme
lage, babiole », xvie. de marine, cf. angl. dale, esp. (a)dala
« tuyau d’écoulement pour la pompe d’un
DAGUE, 1229. Empr. de l’a. pr. ou de bateau », etc., et le dér. fr. dalot, 1382. Le
lit. daga, d’origine obscure ; attesté éga- mot, apparaissant d’abord dans des textes
lement dans la péninsule ibérique ; l’all. normands, représente l’anc. scandinave
Degen « épée » et l’angl. dagger « dague » dæla « gouttière », attesté comme terme
viennent du fr. Un lat. pop. *daca, fém. de marine. — Dér. : daller, 1319, dallage,
de däcus « Dace », au sens d’ « épée dace », 1831, dédaller, 1836.
est incertain, en raison du silence des
textes lat. — Dér. : daguer, 1572 ; daguet, DALMATIQUE, xr1e. À éliminé une for-
1655 (au xvi® s. dagard), le premier bois me plus francisée dalmai(r)e. Empr. du
du jeune cerf s’appelant dague. lat. eccl. dalmaiica, qui désignait sous
l’Empire une longue blouse, à longues
DAGUERRÉOTYPE, 1839. Mot comp. manches, faite de laine blanche de Dal-
de Daguerre, nom de celui qui fit cette matie.
invention, en 1839 et du grec fypos « em-
preinte ». — Dér. : -ie, 1854. DALTONISME, 1841. Dér. de Dalton,
nom d’un physicien angl. (1766-1844), qui
DAHLIA, 1804. Empr. du lat. des bota-
était atteint de ce vice de la vue et qui
nistes dahlia, nom donné à cette plante en l’a décrit le premier.
l’honneur du botaniste suédois Dahl qui
la rapporta du Mexique en 1789, DAM, 842 (Sermenis de Strasbourg :
DAIGNER. D'abord degnier, deignier. damno). Ne s'emploie plus que dans des
Lat. pop. *dignäre, lat. class. dignäri « ju- locutions depuis le xvr® s. ; peu usité même
ger digne ». En fr. ne paraît être employé au moyen âge ; a été remplacé par le dér.
depuis les premiers textes qu’avec un infi- dommage, qui avait l’avantage d’avoir plus
nitif complément, construction qui appar- de corps. Lat. damnum « dommage, pré-
tient au lat. eccl. du 1ve s. It. degnare, judice ». Le sens théologique vient du lat.
esp. deñar, a. pr. denhar « approuver », etc. eccl., v. damner. — Dér. : dommage, xrie
— Dér. : dédaigner, xr1°, de même esp. (d’après le dér. endommager), altération,
desdeñar, a. pr. desdenhar, d’où dédaigneux, d’après dongier « danger », de damage,
xI1e, dédain, id. vers 1080 (Roland), d’où l’angl. damage,
cf. aussi a. pr. damnaïge; d’où domma-
DAIM. Lat. de basse ép. *dämus, lat. geable, 1314 ; dédommager, x1r1° ;dédom-
class. damma, däma, peut-être d'origine magement, 1367 ; endommager, x11° ; en-
africaine. It. damma, a. pr. dam. — Dér. : dommagement, x1rr1e.
daine, 1387.
DAMAS, xive (au sens d’étoffe). Tiré
DAINTIER, v. dignité. de Damas, nom de la grande ville de Syrie,
177 DARD

une des plus commerçantes du moyen âge. d’une cloche avec les hésitations d’un
Mot européen. — Dér. : damasser, 1386; homme faible, etc.; d’où les noms propres
damassure, 1611. Perrin Dandin, créé par Rab. (Paniagruel,
DAMASQUINER, 1553. Dér. de l’anc. III, 39) et employé ensuite par Racine
adj. damasquin, 1546 (Rab.), « de Damas, (Les Plaideurs) et La Fontaine (Fables,
à la manière de Damas », empr. de l’it. IX, 9), et George Dandin (Molière) ; dan-
damaschino (de Damasco « Damas », v. le dinement, 1725.
préc.). — Dér. : damasquinage, 1611 ; da- DANDY, 1817. Empr. de l’angl. dandy,
masquinerie, 1688 ; damasquineur, 1558; d’origine obscure, mot en vogue à Londres
damasquinure, 1611. vers 1813-19, à propos d’ « élégants » dont
DAME. Au moyen âge était le titre le type fut G.-B. Brummel (1778-1844). —
Dér. : dandisme, 1830.
donné à la femme d’un noble, par oppo-
sition à celle d'un bourgeois, appelée de- DANGER. Lat. pop. *domniärium « pou-
moiselle encore au xvr1®s. ; emploi moderne voir », dér. de dominus « seigneur ». La
depuis le xvi®s. environ. Lat. domina, avec forme première dongier a disparu de bonne
un développement particulier de la voyelle heure devant dangier, altéré d’après dam
o quand le mot était en position inaccen- « dommage ». A signifié d’abord « pouvoir,
tuée devant un autre. Le sens du moyen domination », d’où, d’une part, « refus,
âge est un développement d’origine féodale, difficulté » et, de l’autre, « péril » dans des
parallèle à celui de dominus, qui, sur le locutions telles que estre en dangier « être
territoire gallo-roman, a pris, à l’époque au pouvoir (de quelqu'un) » dès le xrrre s.,
des Mérovingiens et des Carolingiens, le sens qui a éliminé en fr., vers le xvi® s.,
sens de « seigneur, maître d’un fief », d’où les autres sens, dont il reste quelques traces
l’a. fr. dan(s), dam, et l’a. pr. don, v. dom, dans les patois. Seulement fr. ; d’où l’angl.
seigneur, sieur. It. donna, esp. dueña, a. pr. danger. — Dér. : dangereux, x1r1°, d’abord
domna, etc. — Dér. : Du sens de « pion au « difficile » ; a suivi le développement sé-
jeu de dames », 1562 ; damer, 1562, d’où mantique du subst. ; d’où l’angl. dangerous.
damer le pion, au sens figuré, 1688 ; damier,
1548 ; dédamer, xvrre ; dameret, 1564, « qui DANS. Lat. de basse ép. deinius « de-
a les goûts d’une dame », et non dér. de dans », adv. comp. de de et de inius, de
dame, autre forme de dom, qui n'existe même sens, d’où vient l’a. fr. enz, disparu
qu’en comp., v. vidame et le suiv. — Comp. : vers le xvie s. Dans est peu usité en a. fr.
madame, xr1°, d’abord titre de noblesse; le comp. dedans, xi° (Alexis), à la fois
sens plus général depuis le xvire s. adv. et prép., est préféré jusqu’au xvies.,
à partir duquel il se restreint à la valeur
DAME, inierjection, 1665 (Molière). Abré- adverbiale, fixée au xvri® s., tandis que
viation du juron fredame, attesté en 1690, dans se développe comme prép. au détri-
issu de par nositre dame ou de damedieu, ment de en dont l'emploi devant l’article
fréquent au moyen âge comme invocation avait abouti à des formes complexes qui
signifiant « Seigneur, Dieu », devenu en- se sont éliminées. Rare en dehors du gallo
suite juron, lat. eccl. domine deus (cf. it. roman, Cf. a. pr. catalan dins ; aujourd’hui
domeneddio), mais qui paraît ne pas avoir partout dans les patois, sauf dans les par-
attemt le <vie.s. lers de l’extrême Sud.
DAME-JEANNE, 1694. Mot qui a circulé . DANSER, xrie. Ce verbe, originaire de
comme terme de marine, d’où l’it. dami- la France du Nord, s’est répandu dans les
giana, l’angl. demijohn, etc.; l’arabe da- langues voisines : it. danzare, esp. danzar,
mâdjana est récent et également empr., et all. {anzen, angl. io dance, pour désigner
non la source des mots européens. Le une danse élégante, de la belle société,
mot est probabl. comp. de dame et Jeanne, tandis que les représentants de balläre,
donné par plaisanterie à un récipient, sui- v. bal, désignaient des formes de danses
vant un procédé répandu, cf. christine plus populaires ; de là le caractère litté-
« grande bouteille en grès » en normand, raire de danser dans les langues méridio-
jacqueline « cruche de grès à long ventre, nales. En raison de ces particularités, une
en usage dans le Nord », etc. origine germ. est probable ; on propose le
francique *dintjan « se mouvoir de ci, de
DAMER, DAMERET, DAMIER, v. là », qu’on restitue, entre autres, d’après
dame. le néerlandais deinzen « id. », bien que la
DAMNER, x1°; damnation, id. Empr. voyelle a du fr. soit une difficulté. Les
du lat. eccl. damnare, damnatio, en lat. termes concernant la danse sont souvent
class. « condamner, blâmer, etc. ». It. dan- empr., parce que la danse est fortement
nare, esp. dañar. — Dér. : damnable, vers soumise à la mode, cf. aussi le récent dan-
1200. cing, vers 1919 (pour dancing-house). —
Dér. : danse, xri° ; danseur, xv® (Charles
DAMOISEAU, -ELLE, v. demoiselle. d'Orléans).
DANDINER, 1500, aujourd'hui surtout DAPHNÉ, 1782. Empr. du grec daphné
réfl. Dér. de dandin « clochette », 1390, « laurier ».
mot expressif d’une famille de mots expri-
mant le balancement d’une cloche, et qui DARD, vers 1080 (Roland). Du fran-
se retrouve dans d’autres langues, cf. angl. cique *darod. cf. anc. haut all. fart « id. »,
to dandle « dorloter » ; v. dinguer. — Dér. : de même a. pr. dari; a passé dans les
dandin, 1526, « niais », aujourd'hui peu langues méridionales : it. esp. dardo. Dard
usité, par comparaison du balancement « carpe vandoise » est un autre mot ; c’est
DICT. ÉTYM. 12
DARD 178

une altération, d’après dard, de dars, xx1°, d’attelage dont l'usage a été introduit par
lat. de basse ép. darsus, d'origine gauloise. un duc d’Aumont, sous la Restauration.
La locution fam. dare-dare, 1642, peut être DAUBER, DAUBIÈRE, v. daube.
formée avec dard, cf. l'expression pop.
courir comme un dard. — Dér. : darder, DAUPHIN, poisson. D'abord daufin,
XVe. xire. Empr. de l’a. pr. dalfin (plutôt que
forme pop. du fr.), lat. pop. dalfinus, alté-
DARNE, tranche de gros poisson, 1528. ration attestée en 710 du lat. class. del-
Empr. du breton darn « morceau ». phinus (du grec delphis).
DARSE, xve (à propos du port de Gênes, DAUPHIN, titre du fils aîné des rois de
tandis qu’arsenal vient de Venise). Empr. France (pendant quelque temps, du deuxiè-
du gênois darsena, empr. lui-même de me fils), adopté en 1349 à la suite de la
l'arabe dûr-sind‘a, v. arsenal ; on trouve cession du Dauphiné à la maison de France.
aussi darsine au XvII° S. Était d’abord le titre des seigneurs du
Dauphiné, issu du nom propre lat. Delphi-
DARTRE, 1314 (dertre, d’où darire, nus, Delfi(n), etc. (francisé ensuite en Dau-
xvie). Lat. de la Gaule derbita, attesté dans fin, etc.), devenu ensuite patronymique,
des gloses, mot d’origine celtique, cf. bre- puis titre seigneurial, cf. lo comte dalfi «le
ton dervoed. — Dér. : dartreux, xv°® (der-
comte dauphin (d'Auvergne) » dans un
treux). texte de 1200 environ ; pour la forme, v. le
DATE, xine. Empr. du lat. médiéval préc.
data (sous-entendu litiera), «lettre donnée », DAURADE, 1556, et dorade, 1539. Em-
premier mot de la formule qui indiquait pr. de l’a. pr. daurada, reformation, d’après
la date où un acte avait été rédigé. — daurar « dorer », de aurada, attesté par la
Dér. : dater, 1367, antidater, 1462, anti- prov. moderne aurado, lat. auräta « dorade »
date, 1435, où le préf. lat. anite « avant» a propr. « dorée », d’où aussi it. oraia.
été traité d’après des mots tels que anii-
ciper, etc., postdater, 1549, postdate, id. DAVANTAGE, v. avant.
(d’abord posti-, d’après les préc., 1536); DAVIER, 1546. Issu, par substitution de
datation, fin xIxe.
suff., de daviet, 1532 (Rab.), dim. de David,
DATIF, xue. Empr. du lat. (casus) nom propre, attesté comme nom d’un
dativus. outil de menuisier dès le x1v® s., suivant
un procédé fréquent dans le langage pop.,
DATTE, xuue (en outre dade, x11°). v. robinet.
Empr. de l'a. pr. datil, masc. (d’où datil,
xvi® ; même forme en esp.) ou de l’it. dat- DE. Lat. de. It. di, esp. a. pr. de. S’est
tero, lat. dactylus (du grec dakiylos, propr. développé dans la basse latinité comme
« doigt »; sens fig. dû à la forme allongée substitut du génitif, cf. nebula de pulvere
de la datte). — Dér. : dattier, xrr1e. « nuage de poussière », ve s. (Sid. Apolli-
naire) ; on trouve déjà dimidium de praeda
DATURA, 1597. Empr., peut-être par «la moitié du butin » chez Plaute, Pseudo-
l'intermédiaire du port. (attesté en 1563), lus, 1164. Le préf. lat. de, qui marquait
de dhatüra, mot d’une langue de l’Inde, l'éloignement, a été ordinairement rempla-
cf. le sanscrit dhattüra. cé en gallo-roman par dis, v. dé, préf.
DAUBE, 1640. Probabl. empr. d’un esp. DÉ, « dé à jouer ». On suppose un lat. *da-
*doba, qu’on peut supposer d’après le verbe lum, au sens de «pion de jeu », part. passé
dobar « cuire à l’étouffée »; v. adouber. neutre pris substantiv. de dare « donner »,
L'orthographe daube est due au suivant. attesté aussi au sens de « jouer », cf. calcu-
— Dér. : daubière, 1829 ; dauber, id.; en- lum dare «jouer un pion», mais toute preuve
dauber, 1836. de cette étymologie manque. It. dado, esp.
DAUBER, 1552 (Rab., au sens moder- dado, a. pr. dat.
ne). En a. fr., xIII°, se rencontre au sens DÉ, « dé à coudre ». D’abord deel, d’où
de « garnir » ; a dû signifier propr. « crépir », dé, avec influence probable du préc. ; une
comme l’atteste le dér. daubeor dans un forme deau, attestée au xiv® s.. (écrite
texte anglo-normand parmi des noms d’ar- deaul), a des correspondants dans les par-
tisans : charpentiers, maçons, plâtriers, lers de l’Ouest et de l'Est, et, quoique plus
tuiliers ; cf. aussi l’angl. empr. {o daub. Du rarement, dans le Centre. Lat. pop. digi-
sens de « crépir » on passe facilement à tale, attesté dans les gloses, neutre pris
celui de « frapper », puis de « maltraiter en substantiv. de l’adj. digitälis, dér. de digi-
paroles ». On a proposé le lat. dealbare tus « doigt ». It. ditale, esp. a. pr. dedal.
« blanchir, crépir » ; mais il est difficile de
penser que le de- soit resté si longtemps DE-, préf. Lat. dis, qui marquait l’éloi-
senti comme élément distingué du verbe gnement et la séparation, v. de. Toutefois
même qu'il n’a pas suivi l’évolution phoné- dans des emprunts tels que déclarer, etc.,
tique normale en di- et j-. Il est plus pro- ou des mots lat. conservés tels que défendre,
bable qu’il s’agit d’une forme régionale dé- n’a aucun sens.
d’adouber, dans laquelle la voyelle de l’a.
fr. -o- se serait conservée. — Dér. : dau- DÉAMBULER, 1492, rare avant le
beur, fin xvire s. (au sens moderne ; voir xixe s. Empr. du lat. deambulare. Dér.
ce qui précède). déambulaioire, xvi° (archéol.) ; déambula-
tion, 1480, tous deux rares avant 1840. Tout
DAUMONT, 1867. Dans la locution à la le RE a quelque chose d'’ironique, sauf
daumont, d’abord à la d’Aumonit, sorte -atoire.
179 DÉCENT

DÉBÂCLE, -ER, v. bâcler. DÉBUCHER, DÉBUSQUER, v. bûche.


DÉBAGOULER, v. bagou. DÉBUT, DÉBUTER, v. but.
DÉBARDER, v. bard.
DÉCA-. Premier élément de mots sav.
DÉBAT, DÉBATTRE, v. battre. comp., tiré du grec deka « dix », notamment
DÉBAUCHE, -ER, v. bau. dans les termes du système métrique.

DÉBET, 1441. Empr. du lat. debet « il


DÉCACHETER, v. cacher.
doit », 3° pers. sing. indic. prés. de debere DÉCADE, xive siècle. Empr. du lat.
« devoir », employé dans des formules decas, -adis, lui-même empr. du grec dekas,
juridiques et sur des registres commer- -ados. Surtout connu depuis l'introduction
ciaux, cf. boni. du calendrier républicain de 1793, où il
DÉBILE, xir1° ; débilité, xrr1e : débiliter, désignait une période de dix jours.
vers 1370, Oresme. Empr. du lat. debilis, DÉCADENCE, 1413. Empr. du lat. mé-
debilitas, debilitare.
diéval decadentia, formé sur le lat. cadere
DÉBINER, 1790, « médire, calomnier » ; « tomber ». — Dér. : décadent, 1864 (déjà
1808, « tomber dans la misère ». Mot argo- formé au xvi® s.) ; école décadenie a été pris
tique, peut-être formé avec biner « sar- comme titre d’une école littéraire, vers
cler ». Débiner (se) « s’enfuir, s’en aller 1885, d’après le vers de Verlaine : « Je suis
vivement », xix® s., est probablement un l'empire à la fin de la décadence. »
autre mot, également obscur. — Dér. :
débine, 1808. DÉCANAT, 1650 (G. Patin). Empr. du
lat. médiéval decanatus, dér. de decanus
DÉBIT, par opposition à crédit, 1723. « doyen »,
Empr. du lat. debitum « dette » (de debere
« devoir »). — Dér. : débiter, 1723. DÉCANILLER, 1821. Paraît empr. du
lyonnais et formé avec canilles « jambes »;
DÉBITER, 1387, « découper du bois ». on y dit aussi s’escanir « se sauver ».
Dér. de bitle « sorte de billot sur lequel on
enroule les câbles », donc propr. « faire des DÉCAMPER, v. camp.
bittes », d’où « débiter du bois de construc-
tion ou d’autres matières », d’où « vendre DÉCANTER, 1701 ; décantation, 1690.
au détail », 1464, d’où « détailler en réci- Empr. du latin des alchimistes decanthare
tant », xvi1e 8. — Dér. : débit, « vente au (de canthus, qui signifiait dans ce latin
détail », 1565 (vendre à débit), d'où « bou- « bec de cruche », v. chant), decanthalio.
tique où l’on débite », 1829 ; « action de DÉCAPER, v. cape.
détailler en récitant », xvirre s. ; débitant,
1731, d’abord « marchand de tabac »; DÉCAPITER, 1320. Empr. du lat. mé-
débiteur, « qui débite des discours », 1611. diéval decapitare (de caput, -ilis « tête »).
— Dér. : décapitation, xive (E. Deschamps).
DÉBITER, « créditer », v. débit.
DECAUVILLE. Fin xixe. « Chemin de
DÉBITEUR, 1239. Empr. du lat. debi- fer à voie étroite, d’une construction qui
ior ; a éliminé au xvii® s. detteur, encore n’exige pas de gros travaux de ballast,
chez La Fontaine, Fables, XII, 7, repré- . pour faciliter des transports au cours de
sentant pop. du lat., d’où aussi esp. deudor, travaux » ; inventé, vers 1890, par l’ingé-
a. pr. deudor, deutor. — Comp. : co-, 1611. nieur Decauville (né en 1846).
DÉBITEUR, « qui débite des discours », DÉCAVER. Usuel surtout au part. passé,
v. débiter « découper ». 1825. Dér. de cave, 1690, terme de jeu,
« somme qu'un joueur met devant lui
DÉBLAI, DÉBLAYER, v. blé. quand il commence à jouer », tiré de caver,
DÉBLATÉRER, 1798. Empr. du lat. 1642, terme de jeu, « mettre une certaine
deblaterare « criailler, bavarder ». somme devant soi », empr. de l’it. cavare
« tirer de sa poche », propr. « creuser »,
DÉBOÎTER, v. boîte. V. caver.
DÉBONNAIRE, v. aire. DÉCÉDER, xv° (Villon); décès, x1°
DÉBOUCHÉ, -ER, « sortir d’un endroit (Alexis). Empr. du lat. decedere [vita]
resserré », v. bouche.
« sortir (de la vie) », decessus. — Comp. :
prédécès, 1576.
DÉBOUCHER, « ôter ce qui bouche »,
v. boucher, verbe. DÉCEMBRE, vers 1150. Empr. du lat.
decembris [mensis] « le dixième mois » dans
DEBOUT, DÉBOUTER, v. bouter. l’anc. calendrier des Romains. Formes éga-
DÉBRAILLER. Usuel surtout au part. lement empr. dans tous les patois. It. di-
passé, 1549 (sous la forme desbraillé). Dér. cembre, esp. diciembre.
de l’a. fr. braiel « ceinture », d’où brail, DÉCENNAL, xvie. Empr. du lat. decen-
chez Froissart, dér. lui-même de braie; nalis (de decem « dix » et annus « an »).
débraillé signifie propr. « dont la ceinture
‘qui retient les braies est dénouée ». DÉCENT, xv° ; décence, xrr1°. Empr. du
lat. decens, decentia (du verbe impersonnel
DÉBRAYER, v. braie. decere « convenir, être conforme à la bien-
DÉBRIS, v. briser. séance »).
DÉCEPTION 180

DÉCEPTION, xr1° ; signifie « tromperie » DÉCHOIR. Lat. pop. décadere (des ca-
jusqu’au xvie s. Empr. du lat. de basse dere) ; a perdu de bonne heure le sens
ép. deceptio « tromperie », dér. de decipere, propre de « tomber ». — Dér. : déchéance,
pour servir de nom abstrait à décevoir dont xr1e ; déchet, d’abord déchié, x1I11°, d’où
il a suivi le développement sémantique. déchiet, xv®, par confusion avec la 3° pers. :
il dechiet.
DÉCERNER, 1318, « décréter », encore
chez Voltaire, 1756 ; sens moderne, xvI°s., DÉCI-. Premier élément de mots sav.
encore contesté au xvii s. Empr. du lat. comp., tiré arbitrairement du lat. decimus
decernere « décider, décréter ». « dixième » pour l’opposer à déca, dans des
noms de mesure, lors de l’établissement du
DÉCÈS, v. décéder. système métrique.
DÉCEVOIR. En a. fr. et jusqu’au DÉCIDER, 1403. Empr. du lat. dectdere,
xvIIe s., « tromper »; la nuance moderne propr. « trancher » ; v. décisif, décision.
« tromper quelqu'un dans ses espérances »
apparaît vers le xve s., cf. : « Les Anglais... DÉCILLER, v. cil.
virent bien qu'ils estoient déçus en leurs
cuiders », Froissart, peut-être par lati-
DÉCIMAL, 1583. Dér. sav. du lat. deci-
mus « dixième », en vue de son sens spécial.
nisme. Lat. pop. *décipére, lat. class. deci-
pere « tromper, séduire, tromper qqn dans DÉCIME, terme du système métrique,
ses espérances » (ce dernier sens, poétique 1795. Empr. du lot. decimus.
ou de basse époque), dont le préf. a été DÉCIMER, xve. Empr. du lat. decimare,
senti comme tel, à cause de concevoir, dér. de decem « dix », qui signifiait « punir
recevoir ; v. déception. Seulement gallo- de mort une personne sur dix, désignée par
roman, Cf. a. pr. decebre (d’après le lat. le sort », châtiment infligé surtout aux sol-
class.) et anc. esp. decebir. dats, qui avaient manqué à leur devoir;
DÉCHANTER, v. chanter. le sens fig. ne s’est développé en fr. qu’au
xixe s. (relevé en 1820, chez Lamartine).
DÉCHARNER, v. chair.
DÉCISIF, 1413 ; décision, 1314. Empr.,
DÉCHAUSSER. Lat. de basse ép. dis- comme termes juridiques, du lat. médiéval
calceäre, de calceäre « chausser ». It. scalzare decisivus et du lat. class. decisio « arrange-
(avec changement de préf.), esp. descalzar, ment, décision juridique »; ont suivi le
a. pr. descaussar. Le fr. a connu aussi jus- développement sémantique de décider.
qu’au xviie s. l’adj. déchaux (cf. carmes-
déchaux), encore usuel dans les patois, lat. DÉCLAMER, 1542; déclamateur, 1519 ;
pop. “*discalceus, reformation de discal- déclamation, xv° (au x1v® s., traduction
ceälus, de même it. scalzo, esp. descalzo, du titre de l’ouvrage de Sénèque) ; décla-
a. pr. descaus. matoire, 1549. Empr. du lat. declamare,
declamator, -atio, -atorius. Le sens défavo-
DÈCHE, 1835. Mot d'argot, d'origine rable des trois derniers mots s’est déve-
provinciale, soit du prov. deco, decho «tare», loppé en fr. au xvrie s.
a. pr. deca, subst. verbal de decazer, decaire DÉCLARER, 1250 ; déclaration, 1200.
« déchoir », soit de l’angevin dèche « tare Empr. du lat. declarare, declaratio. Déclarer
congénitale », qui vient lui-même du pro- a signifié jusqu’au xvi® s. « expliquer »,
vençal. Même si l’expression battre la dèche d’après l’a. fr. desclairier, lat. pop. *dis-
est venue de Paris, l’origine provinciale clariäre, dér. de clärus « clair » et qui signi-
de dèche reste probable. fiait donc « rendre clair »; desclairier dis-
DÉCHIQUETER, xve (Charles d'Or- paraît vers le xv° s. devant éclairer, après
léans). Issu de l’anc. mot eschiquelé, avoir donné naissance à une forme hybride
attesté dès 1285 pour désigner une sorte déclairer, fréquente au xvie s. et encore
d’étoffe à carreaux, conservé comme adj. vivante dans les patois, même au sens
dans la langue du blason : écu échiquelé ancien.
« découpé en cases comme un échiquier ». DÉCLIC, v. cliquet.
Cet adj. est issu, avec modification de la DÉCLINER, vers 1080 (Roland). Empr.
terminaison, de l’anc. adj. eschequeré, de
du lat. declinare « s'écarter de sa voie »,
même sens, dér. d’échiquier ; le développe- d’où « pencher vers son déclin » ; également
ment du sens s'explique aisément, et l’anc.
forme eschaquetey (part. passé), relevée en terme de grammaire. Le sens juridique
1348, dont l’a rappelle celui d’eschaquier, est attesté en fr. dès 1310. — Dér. :
déclin, vers 1080; déclinable, xrve, d’où in-,
v. échiquier, appuie l’'étymologie. De déchi-
XVe ; déclinaison, xr11° ; déclinatoire, 1316.
queiter a été tiré l’anc. verbe chiqueler. —
Dér. : déchiqueture, 1534. DÉCLIVE, xvi® (Paré): déclivité, vers
1700 (Fontenelle). Empr. du lat. declivis,
DÉCHIRER, 1120. En a. fr. escirer, declivitas.
conservé dans beaucoup de patois sous la
forme essirer, échirer, avec échange de l'é- DÉCOCTION, xt. Empr. du lat. de
contre le préfixe dé- fr. déchirer (dans basse ép. decoctio, dér. de decoquere « faire
beaucoup de parlers dessirer). D'un fran- cuire ».
cique *skerian « partager » qu’on peut DÉCOLLATION, 1227. Empr. du lat.
supposer d’après l’anc. haut-all. skerian juridique decollatio, dér. de decollare « déca-
« priver, séparer ». — Dér. : déchirement, piter », d'où a été aussi empr. le verbe
vers 1200 ; déchirure, vers 1250. — Comp. : décoller, x° s. (Saint-Léger), encore relevé
entre-déchirer (s’), 1544. dans les dictionnaires.
181 DÉFECTIF

DÉCOLLETER, v. cou. DÉCRIRE, x11e. Empr. du lat. describere


et francisé d’après écrire.
DÉCOLORATION, 1503. Empr. du lat.
decoloratio. DE CUJUS, xix°. Abréviation (qui se
dit aussi par plaisanterie) de la formule
DÉCOLORER, 1537. Réfection, sur le juridique moderne de cujus successione agi-
lat. decolorare, de l’anc. descoulourer, at- ER « de la succession duquel il est ques-
testé dès 1080 (Roland) et encore en 1642, 1On ».
dans Oudin, dér. de couleur avec le préf. des.
DÉCUPLE, 1350. Empr. du lat. decu-
DÉCOMBRER, x11° (Chrétien). Avait en plus. — Dér. : décupler, 1584.
a. fr. le sens plus général de « débarrasser ».
Dér. de l’anc. combre « barrage pratiqué DÉDALE, fin xvie (en outre, au xvI®s.,
dans une rivière », qui apparaît seulement sous la forme latine). Tiré de Dédale, lat.
au xve s. dans des textes de la région de Daedalus (du grec Daidalos), nom du cons-
la Loire, mais dès le vrie s. sous la forme tructeur légendaire du labyrinthe de Crète ;
combrus « abatis d'arbres », dans des le sens fig. s’est développé en fr.
textes écrits en lat., du gaulois *com- DÉDICACE, 1350, au sens religieux
boro(s), qu'on restitue d’après le moyen (déjà dicaze au xre s.); d’où le sens
irlandais commor « rencontre de cours d’ « hommage qu’on fait d’un livre à quel-
d’eau, de chemins » ; v. encombrer. Seule- qu’un », 1613 (Pasquier), v. dédier. Au
ment fr. — Dér. : décombres, 1404 (au moyen âge apparaît surtout dans des textes
sing., au sens d’ « action de décombrer ») ; dialectaux du Nord-Est au sens de « fête
au plur. dès le xvi® s. patronale d’une église », déjà sous les for-
DÉCONFIRE, -ITURE, v. confire. mes dicasse, ducasse, d'où viennent les
formes usitées aujourd’hui en wallon et en
DÉCONTENANCER, v. contenir. picard. Empr. du lat. eccl. dedicatio « con-
DÉCONVENUE, v. convenir. sécration », de sens analogue en lat. class.
DÉCORER, xiv® (Oresme) ; décoration, DÉDICATOIRE, 1542. Dér. sav. du lat.
1393. Empr. du lat. decorare (de decus, dedicare, pour servir d’adj. à dédicace dont
-oris « ornement, beauté, honneur ») et du il a suivi le développement sémantique.
dér. de basse ép. decoratio. — Dér. du DÉDIER, x11°. Empr. du lat. eccl. dedi-
verbe : décor, 1790 (écrit décore) ; décore, care, de sens analogue en lat. class., avec
1536 (Marot), au sens moral, est une fran- chute du c, comme dans les verbes en -fier,
cisation du subst. latin ; décorateur, xvI°; v. édifier, et probabl. sur ce modèle; a
décorati”, xve. suivi le développement sémantique de dédi-
DÉCORTIQUER, 1851; décortication, cace.
1747. Empr. du lat. decorticare (de cortex, DÉDUCTION, xive (Oresme), au sens
-icis « écorce »), decorticatio. logique. Empr. du lat. deduclio ; le déve-
DÉCORUM, 1594 (Saiire Ménippée). loppement sémantique de déduction et de
Empr. du lat. decorum « bienséance, conve- déduire a été paralièle.
nance », v. décorer. DÉDUIRE, x1° (Alexis). Empr. du lat.
deducere « faire descendre, amener, etc. »,
DÉCOUPLER, v. couple. et francisé d’après conduire, etc. Au moyen
DÉCOURS, xr1e. Empr. du lat. decursus âge signifiait « mener, conduire » (cf. se dé-
« course rapide sur une pente », d’où en duire «s'éloigner »), etc., et surtout « diver-
a. fr. « écoulement, déclin »; aujourd’hui tir » ; au xive s. a repris au lat. le sens de
d’un emploi restreint; francisé d’après « retrancher une somme d’une autre »,
cours. comme déduction ; au xvi® s. a pris le sens
d' «énumérer » ; le sens logique s’est déve-
DÉCOUVRIR. Lat. de basse ép. discoo- loppé au xvie s. d’après déduction, v. in-
pertre (Vulgale), comp. de coopertre. It. duire. — Dér. : déduit, xr1°, au sens de
scoprire (avec changement de préf.), esp. « divertissement », d’où « divertissement
descubrir, a. pr. descobrir. — Dér. : décou- amoureux », vieilli depuis le xvrre s.
verte, xIII°; découvreur, xII1°.
DÉESSE, x11°. Au moyen âge en outre
DÉCRÉPIT, xive. Au xviie s. decrépite dieuesse d’après dieu. Dér. du lat. dea avec
aux deux genres. Empr. du lat. decrepilus, le suff. fém. -esse.
de formation discutée. Aujourd’hui rap- DÉFALQUER, 1384. Empr. de l’it. de-
proché, par étymologie pop. du verbe dé- falcare, diffalcare, « retrancher », propr.
crépir. — Dér. : décrépitude, x1Iv*. « trancher avec la faux » ; empr. probabl.
DECRESCENDO, 1838. Empr. de lit. comme terme de finances ; aussi esp. des-
decrescendo « en décroissant », gérondif de falcar. Au xvue s. Vaugelas le jugeait bar-
decrescere « décroître ». bare. — Dér. : défalcation, 1307.
DÉCRET, xue. D'abord « décision de DÉFAUSSER, v. faux.
toute autorité » et au moyen âge, spécia- DÉFAUT, v. faillir.
lement « droit canon »; depuis la Révolu-
tion « décision du gouvernement ». Empr. DÉFECTIF, 1629, au sens moderne;
défection, 1772 (Raynal), id.; défectueux,
du lat. decretum, part. passé neutre pris
substantiv. de decernere, V. décerner. — 1336 ; défectuosité, xv°. Empr. du lat.
defectio, defectivus (lat. des grammairiens)
Dér. : décréter, 1382 ; a suivi le développe- et du lat. médiéval defecluosus, defectuo-
ment sémantique de décret.
DÉFECTIF 182

silas (du verbe deficere « faire défaut »). nire, definitivus, definitio ; les formes avec
Défection apparaît au xir1° s. au sens diffj- viennent d’une autre forme du lat.
d’ «éclipse », et au xv® au sens de « défail- difjinire, etc. L’a. fr. avait un verbe comp.
lance, défaite », sens également vivant en de finir : definir, defenir, qui signifiait
lat. (qui a donc été repris trois fois avec « finir ». — Dér. : définissable, vers 1700.
des sens différents) ; defectif a, en 1341, le (Saint-Simon), indéfinissable, 1731 (Vol-
sens de « défectueux », d’après le verbe lat. taire).
DÉFENDRE. Lat. défendere « écarter, DÉFLAGRATION, 1719. Empr. du lat.
protéger » ; le sens d’ «interdire » est propre deflagratio (de deflagrare « être brûlé »).
au gallo-roman, auquel l’it. passe pour
DÉFLATION, v. inflation.
l’avoir emprunté. It. difendere, esp. defen-
der. — Dér. : défendable, xrr1°, d’où indé- DÉFLORER, 1437; défloration, xive.
fendable, 1663 (Molière) ; défendeur, 1283 Empr. du lat. deflorare « ôter la fleur »
(Beaumanoir), au sens moderne ; a signifié et du dér. defloratio.
en outre « défenseur » du xr12 au XvIes.
DÉFONCER, v. fond.
DÉFENSE, x11°; défenseur, 1213, rare
avant le xvi® s. à cause de la présence de DÉFORMER, xr11° (Roman de la Rose) ;
défendeur ; défensif, xive. Empr. du lat. déformation, 1835, une première fois au
defensa (créé à basse ép., au lieu de XIV® s. Empr. du lat. deformare (de forma
defensio), defensor et du lat. médieval defen- « forme, beauté »), deformatio.
sivus, v. offensif. Défense a suivi le déve- DÉFUNT, x. Empr. du lat. defunctus,
loppement sémantique de défendre ; défense issu de defuncius [vitä] « qui a achevé sa
(de sanglier) apparaît au xvie s., le mot vie », part. passé de defungi « accomplir ».
servait depuis le xve s. de terme de forti-
fication pour désigner des pieux, etc. DÉGÉNÉRER, xive (Oresme) ; dégéné-
ration, 1731, une première fois vers 1500.
DÉFÉQUER, 1583; défécation, 1754. Empr. du lat. degenerare (de genus, -eris
Empr. du lat. defaecare « débarrasser de «race »), et du dér. de basse ép. degeneralio.
ses impuretés » (de faex, faecis « résidu, — Dér. : dégénérescence, xvrrre (Condor-
lie ») et du dér. de basse ép. defaecatio, cet), d’après des mots sav. tels que efflo-
pour divers sens techn. rescence, d’où dégénérescent, 1839.
DÉFÉRER, xiv° (Bersuire), intrans., au DÉGINGANDÉ, vers 1590. Altération de
sens de « se conformer à la volonté de déhingander, 1552 (Rab.); dér., dans la
quelqu'un », encore usuel au xvir® s.; région bilingue du nord, du moyen néerl.
déférent, xvi° (Paré), comme terme techn. ; henge « gond de porte », sous l'influence du
le sens moderne de « qui a des égards » verbe ginguer « sauter », très répandu dans
est récent et dû à déférence. Empr. du lat. les patois du nord et qui est une forme
deferre « porter (notamment devant une secondaire de giguer, V. guinguette.
juridiction) », « faire honneur » (à basse DÉGLUTITION,
ép.) et du part. prés. deferens. — Dér. : xvie (Paré). Dér. sav.
déférence, xive (E. Deschamps). du lat. de basse ép. deglutire « avaler ».
DÉGOBILLER, v. gober.
DÉFERLER, vers 1600 (D'Aubigné),
sous la forme défrelée, fém. du part. passé. DÉGOISER, v. gosier.
Au sens propre « déployer les voiles qui
étaient ferlées » ; sens fig., 1787 (Bernardin DÉGOR, DÉGORGER, V. gorge.
de Saint-Pierre). Comp. de ferler « plier DÉGOTER, xviie (Ménage, d’après un
une voile le long des vergues », 1553, pro- auteur normand du xvire s.), comme terme
babl. dér. d’un a. fr. *ferle non attesté, de jeu d’enfants, au sens de « pousser une
« bâton, verge », du lat. ferula, v. férule, et balle d’un lieu appelé gal, pierre plantée
a. pr. ferla. L’angl. to furl est empr. du fr. ou posée à une certaine distance d’un
DÉFI, autre gal » ; Ménage ajoute : « Dans notre
DÉFIANCE, DÉFIER, v. fier. province d'Anjou, quand celui qui la pousse
DÉFICIENT, 1587. Empr. du lat. defi- est sur le point de la pousser, il crie aux
ciens, part. prés. de deficere, v. le suiv. — autres joueurs : Dégot s'en va. » Un jeu
Dér. : déficience, 1907. d'enfants, appelé le jeu de la g6, qui con-
siste à pousser une balle ou une pierre vers
DÉFICIT, 1589. Empr. du lat. deficit un trou, se pratique encore dans le Perche.
«il manque », 3° pers. sing. indic. prés. de Du langage des enfants a passé dans le fr.
deficere, terme qui se plaçait autrefois dans fam. (mais avec une nuance argotique) au
les inventaires pour indiquer que quelque sens de « déplacer », attesté en 1740, puis
pièce ou article manquait. Sens moderne, à celui de « chasser d’un poste » chez d’Ar-
1771 ; déjà au sens fig. dans les Confessions genson (mort en 1747). On a regardé dégoter
de J.-J, Rousseau. comme un dér. de gau, autre forme de gal
« caillou », v. galet, mais la formation du
DÉFILÉ, -ER, « aller à la file », v. filer. mot n’est pas claire et le mot n’est pas
DÉFILER, « désenfiler », V. fil. partic. normand.
DÉFINIR, 1541 (Calvin), antér. diffinir, DÉGOULINER, 1787. Mot dialectal dér.
xv® (Villon), encore usité au xvire s. ; défi- de dégouler « s’épancher » (de goule, forme
nitif, x11€ (diff-) ; définition, xrre, Empr. régionale de gueule).
du lat. à la fois class. et scolastique defi- DÉGOURDIR, v. gourd.
183 DÉJEUNER

DÉGRADER, « faire descendre du gra- DÉIFIER, xu1e (J. de Meung) ; déifica-


de », xrie; dégradation, 1486. Empr. du tion, 1488. Empr. du lat. eccl. deificare,
lat. de basse ép. degradare (de gradus deificatio.
« degré »), degradatio, d'abord en parlant
d’ecclésiastiques. DÉISME, xvui° (Pascal); déiste, 1563.
Dér. sav. du lat. deus « Dieu ».
DÉGRADER, 1651, terme de peinture. DÉITÉ, xre. Empr. du lat. eccl. deitas.
Empr. de lit. digradare, de même sens,
dér. de grado « degré ». — Dér. : dégrada- DÉJÀ. Comp. de des ja, xirie s. (Rose),
tion, terme de peinture, vers 1660 (Mo- dans laquelle Ja n’a pas le sens de « déjà »,
lière). mais celui de « tout de suite », sens
DÉGRAISSER, DÉGRAS, v. graisse; qu'avait déjà eu le lat. jam, quand il
dégraisser, x1r1°, d’où dégras, 1723, refait était suivi d’un verbe au présent ou au
sur gras ; dégraissage, 1754 ; dégraissement, futur. Déjà a éliminé ja au xvI° S., re-
1752 ; dégraisseur, 1552 (Rab.). pris plus tard par archaïsme, mais encore
usuel dans les parlers de l'Est ; ja repré-
DEGRÉ. Se rattache à l’a. fr. gré, id. sente le lat. jam, d’où it. gic, esp. ya, a. pr.
Il s’agit probabl. d’un comp. assez tardif de ja. V. jadis, jamais.
la prép. de et de gradus; la prép. peut DÉJARRER, v. jard.
venir du verbe degradare, qui, bien qu’at-
testé seulement au sens de « destituer », DÉJECTION, 1538. Empr. du lat. médi-
peut très bien avoir existé au sens de « des- cal dejectio, dér. de dejicere « jeter hors »
cendre ». Au sens propre, degré a cédé à d’où « évacuer ». À été une première fois
marche, qui apparaît au xvi®s. V. escalier. emprunté au moyen âge, et était encore
DÉGRÉER, v. agrès. usité au xvI° s., au sens d’ « abaissement ».

1660, d’abord desgrin- DÉJEUNER. Lat. pop. *disjéjanäre, de-


DÉGRINGOLER, venu ensuite *disjünäre, propr. « rompre
gueler, 1596; gringoler, attesté en 1583, le jeûne », cf. l’angl. {o breakfast, d’où
est refait sur dégringoler. Se rattache au « prendre le premier repas de la journée ».
moyen néerl. crinc « courbure » ; le suffixe Au moyen âge le verbe présentait en outre
est celui du moyen néerl. crinkelen « crépir », aux formes non accentuées le radical disn-
cringhelen «entourer ». Le sens du verbe fr. (avec un i mal éclairci), d’où est issu un
vient de ce que celui qui dégringole tourne deuxième verbe disner, x11° s., qui avait
plusieurs fois autour de lui-même. Le le même sens que déjeuner. Quand, par
préfixe dé- marque le point de départ. suite de changements dans les habitudes,
— Dér. : dégringolade, 1829. le premier des deux principaux repas quo-
x11°, au sens d’ « aban- tidiens a été reculé, à une époque qu'il est
DÉGUERPIR,
donner », ordinaire au moyen âge; a en difficile de déterminer exactement (on
outre le sens spécial. juridique de « quitter trouve disnar traduit par le lat. prandium
une propriété, abandonner un héritage », « repas au milieu du jour » dans le Donat
sens qui paraît remonter au droit germa- provençal; d'autre part on sait que ce
repas avait lieu ordinairement vers 10 heu-
nique, d’où, au sens général d’ «abandonner res au xvie s. et vers 11 et 12 au xvire), la
un lieu », dès le xive s. Comp. de l’anc.
verbe guerpir « abandonner », également langue a réservé déjeuner pour un petit
repas au lever et diner pour le repas du
terme juridique (cf. de même l’a. pr. guer-
pir), empr. du francique *werp;an, auquel milieu du jour. Depuis le milieu du xix®5.,
correspondent l’all. werfen « jeter » et déjeuner et dîner ont subi un nouveau
l’angl. {o warp « détourner ». changement de sens à Paris; déjeuner a
été attribué au repas du milieu du jour
DÉGUIGNONNER, v. guigner. (le petit repas du début de la journée se
disant pelit déjeuner), dîner au repas du
DÉGUSTER, 1802; dégustation, 1599. soir, par suite du recul progressif du déjeu-
Empr. du lat. degustare (de gustare « goû- ner au cours du xixe s.; depuis le milieu
ter »), degustatio. — Dér. : dégustateur, de ce siècle, ce repas a tendu à être ramené
1793 (le lat. de basse ép. degustator est vers midi, v. aussi souper. Le mot est seu-
rare et n’a pas dû servir de modèle). lement gallo-roman, cf. a. pr. disnar « faire
le repas du matin »; l’it. desinare « faire
DEHAIT, -TÉ, v. souhaiter. le repas de midi » vient du fr. Aujourd'hui,
DÉHALER, v. haler. dans les patois gallo-romans, déjeuner dé-
signe encore presque partout le premier
DÉHISCENT, 1798 (d’après indéhis- repas du matin, diner le repas de midi,
cent) ; déhiscence, id. Dér. sav. du lat. sauf le lorrain qui dit encore déjeuner pour
dehiscere « s’entr'ouvrir ». ce repas. Les deux infinitifs des verbes sont
en outre employés substantiv. — Dér. : de
DEHORS, v. hors. dîner : dînatoire, 1811, aujourd’hui seule-
ment dans déjeuner dinatoire, déjà attesté
DÉICIDE, « meurtrier de Dieu », XVII au xvie s. (le mysière dinaloire) ; dinette,
(Bourdaloue). Empr. du lat. eccl. deicida, au xvie s., d’où midinette, fin xIx!°, mot
fait sur le modèle du lat. class. homicida de fantaisie, fait sur : qui fait dinelle à
« homicide ». midi; dineur, 1642. — Comp. : après-
DÉICIDE, « meurtre de Dieu », 1585 (D.). dîner, vers 1362 (Froissart) ; en outre -ée,
Fait sur le modèle d’homicide « meurtre ». 1483.
DÉLABRER 184

DÉLABRER, 1561 (au part. deslabré). par sa finesse » ; le maintien de cette forme
Dér. de l’afr. label « ruban effrangé », qui est dû au fait que la langue l’a comprise
remonte à un francique *labba « chiffon » comme étant le part. passé du verbe délier,
(cf. a. nor. labba « être suspendu », all. cf. l'orthographe deslié de Montaigne. —
lappen « chiffon »). Dér. et Comp. : délicatesse, 1539, peut-être
DÉLAI, 1172. Subst. verbal de l’anc. d’après l’it. delicatezza, développement du
verbe deslaier « différer », xr1° (dont une sens parallèle à délicat; indélicat, 1786,
forme altérée dilayer, du xv® s., par croi- d’où -esse, 1808.
sement avec dilation, dilatoire, est encore DÉLICE, subst. sing. masc., xr1e (blâmé
en usage dans le Berry), comp. de l’anc. au xviIIe s.); délices, plur. fém., id.; déli-
verbe laier « laisser », encore vivace dans cieux, x11e. Empr. du lat. delicium, -cide,
les patois. Dans les premiers textes fr., -ciosus (créé à basse ép.). C’est l’existence
laier n’est attesté que dans les formes du des deux formes du lat. qui explique celle
présent qui sont accentuées sur le radical des deux formes du français, d’où variation
et au futur ; il est issu de l’a. fr. laissier du genre au plur., au XvIrre.
sur le modèle de la conjugaison de faire.
DÉLATEUR, 1539, au xve s. au sens DÉLICTUEUX, 1863. Dér. sav. du lat.
de « qui rapporte, raconte » ; délation, 1532. delictum, d’après les adj. en -ueux, tels que
Empr. des mots lat. delator, delatio, dér. difficuliueux, pour servir d’adj. à délit.
de delatus, part. passé du verbe deferre, DÉLIÉ, v. délicat.
« rapporter, dénoncer », v. déférer.
DÉLIMITER, 1773; délimitation, id.
DÉLAYER, xire. Paraît être le même Empr. du lat. de basse ép. delimitare, deli-
mot que l’it. dileguare et l’a. pr. deslegar mitatio par D. Berthod, suivant une lettre
« id. », qu’on rattache au lat. déliquare de D. Clément : « Délimiter et délimitation
« clarifier, transvaser » qui serait devenu sont deux termes énergiques, mais ils sont
en lat. pop. de la Gaule *délicäre, forme de votre création, et vous n’avez pas encore
nécessaire pour expliquer celles du fr. et acquis assez de crédit pour les faire passer. »
de l’a. pr.; le développement anormal
delayer au lieu de deleyer, deloyer s’est peut- DÉLINÉAMENT, 1860 (Sainte-Beuve,
être produit parce que la langue a cherché une 1re fois chez Paré). Dér. savant du
à éviter la rencontre de ces formes avec les lat. delineare « esquisser ».
formes anc. de délier : de(s )leier, de(s )loier,
mais a causé, par suite, un rapprochement
DÉLINQUANT, 1369. Part. prés. de dé-
avec délayer « retarder », v. délai. — Dér. : linquer, 1379, verbe usité autrefois comme
délaiement, 1549 ; délayage, 1836. terme de droit, empr. du lat. delinquere
« commettre une faute, un délit ».
DÉLÉBILE, v. indélébile.
DÉLIQUESCENT, 1753; déliquescence,
DÉLECTER, 1340; délectable, XIVE ; 1757, terme de chimie ; s'emploie, depuis
délectation, xri°, Empr. du lat. delectare, la fin du xixe s., au sens fig. de « désorga-
delectabilis, delectatio. L'’a. fr. a possédé un nisation des forces, du style », cf. Les Déli-
verbe delilier « charmer, réjouir » et un quescences d'A. Floupelte (1885), pastiche
adj. delilable, qui ont disparu vers le xves. : de l’école décadente. Le premier est empr.
ce verbe était d’origine pop., comme l’a. pr. du lat. deliquescens, part. présent de deli-
delechar et l’it. dilettare, v. dilettante. quescere « se liquéfier », le deuxième en est
DÉLÉGUER, 1330; délégation, un dér. sav.
xrrre.
Empr. du lat. delegare, delegatio « pro- DÉLIRER, 1525 ; délire, 1538 ; delirium
curation ». Délégation, au sens d’ « en- tremens, 1819. Les deux premiers sont
semble de personnes déléguées », date du empr. du lat. delirare, delirium : delirium
XIXe s. — Comp. : subdélégation, 1560: iremens, propr. « délire tremblant », a été
subdéléguer, x1ve. créé par le médecin angl. Sutton en 1813.
DÉLÉTÈRE, xvie. Empr. du grec dêlé- DELIT, vers 1320. Empr. du lat. delic-
lérios « nuisible ». lum, dér. de delinquere, v. delinquant. A été
DÉLIBÉRER, xir1e ; délibératif, 1372; souvent écrit delict d’après le subst. lat.
délibération, x1r1e. Empr. du lat. delibe- V. délictueux.
rare, deliberativus, deliberatio. Le sens de DÉLITER, v. lit.
« se déterminer à », ordinairement dans se
délibérer de, usuel du xrrre au xvrre s., DÉLIVRER. Lat. de basse ép. dëliberäre
est également pris au lat. « mettre en liberté », simple élargissement
du lat. class. liberäre. Le sens de «remettre
DÉLICAT, xve. Empr. du lat. délicatus quelque chose à quelqu'un », attesté dès le
«délicat, choisi, etc. » ; a pris de nombreuses XIIIe S., s’est développé parallèlement à
acceptions nouvelles en fr. À éliminé une
forme pop. delgié, deugié, dougié « délicat, livrer. Au sens d’ « accoucher », dès le
fin, mince, svelte, etc. », qui a vécu jusqu’au xX11° S., d’après les dér. A. pr. defs)liurar.
XvI® s. et subsiste encore dans les patois — Dér. : délivrance, xrr°, au sens d’ « ac-
de l’Ouest, cf. de même a. pr. delgat et couchement » ; délivre, 1611.
esp. delgado « fin, mince, ingénieux ». Le DELTA, 1553, en parlant du delta du
laf delicatus a été en outre francisé en Nil ; déjà attesté au xrrres. Empr. du grec
délié au xrr1° s. au sens de « mince », qui delia propr. la 4° lettre de l'alphabet, dit
s’est maintenu dans des sens plus matériels des bouches du Nil à cause de leur forme
que délicat et au sens particulier d’ « habile comparée à la forme À de cette lettre.
185 DEMOISELLE

DELTOÏDE, xvie (Paré). Empr. du grec pour séparer les Indes orientales, revendi-
deltoeidès « en forme de delta ». quées par le Portugal, des Indes occiden-
DÉLUGE, xnr° (Chrétien). Empr. du lat. tales, que revendiquait l'Espagne. Empr.
diluvium « inondation, déluge ». Formes de l'esp. demarcacién, dér. de demarcar
variées au moyen âge diluvie, delouve, etc. ; « marquer les limites ».
la forme qui a prévalu, déluge, est la plus DÉMARRER, v. amarrer,
francisée, parce que le mot était pop. à
cause de l'emploi qu’en faisait l'Eglise à DÉMENT, 1836, comme terme de méde-
propos du déluge raconté par la Bible. cine, déjà parfois empr. au xve s. et au
Passons au déluge, expression devenue pro- XVI° ; démence, 1381. Empr. du lat. demens,
verbiale, adressée par P. Dandin à l’Intimé dementia.
dans Les Plaideurs (III, 2). Après moi le
déluge, autre expression également devenue DEMEURER. En a. fr. demourer jus-
proverbiale, attribuée à Louis XV, ou, qu’au xvi® s. Lat. pop. *démoräre, lat.
selon d’autres, prononcée par Mme de class. dëmorart « tarder, rester » ; le sens
Pompadour après la défaite de Rosbach. de « tarder » a persisté jusqu’au xvie s.
V. diluvien. Celui d’ « habiter » a dû se développer à
basse ép., les trois sens étant attestés par
DÉLURÉ, vers 1790. Forme dialectale l’it. dimorare et l’a. pr. demorar (l'esp. de-
de déleurré, part. passé de déleurrer « dé- morar n’a que rarement le 3e sens). Les
tromper », 1787, qui se dit dans beaucoup parlers gallo-romans ont le sens de « res-
de régions délurer ; c’est un dér. du verbe ter » surtout dans l'Est; moins usité au
leurrer (en picard, etc. lurer), v. leurre, et sens d’ « habiter ». — Dér. : demeure, vers
l’anc. dér. alleurer, d’où l’angl. to allure 1200, au sens de « retard » et de « séjour »
«attirer ». (cf. la locution encore usitée, mais souvent
DÉMAGOGIE, 1791. Empr. du grec dé- mal comprise : il n'y a pas de péril en la
magôgia. — Dér. démagogique, 1791. demeure) ; au sens d’ « habitation », ne
paraît pas antérieur au xvi*. Meltre en
DÉMAGOGUE, 1688 (Bossuet). Empr. demeure est une locution juridique signi-
du grec démagôgos, propr. « qui conduit le fiant primitivement « rendre responsable
peuple », mot qui a servi à désigner à du retard à remplir une obligation », d’après
Athènes, pendant la guerre du Pélopon- être en demeure « être en retard ».
nèse, les chefs du parti démocratique, no-
tamment Cléon, et a pris, par suite des DEMI. Lat. pop. dimedius, attesté dans
attaques de leurs adversaires, un sens défa- des gloses, fait sur medius, et remplaçant
vorable. Une première fois empr. par Ores- le lat. class. dimidius « demi ». Seulement
me dans sa traduction d’Aristote, faite non gallo-roman, cf. a. pr. demeg ; a éliminé mi
sur le grec qu’il ignorait, mais d’après des comme adj. et comme subst. dans la plus
traductions lat. du moyen âge. grande partie des patois, v. mi. — Comp. :
Nombreux mots avec demi comme premier
DEMAIN. Lat. de basse ép. de mane, élément.
propr. « à partir de matin », d’où « le ma-
tin » (sens conservé par quelques parlers DÉMISSION, 1338. Empr. du lat. demis-
it.), et d’autre part « à partir du matin sio « action d’abaisser » pour servir de nom
du jour suivant », d’où « demain » (l'usage abstrait à démettre. — Dér. : démission-
de désigner « demain » par « le matin » est naire, xvir1° ; démissionner, id.
fréquent ; cf. all. morgen, etc.). Le lat. DÉMIURGE, 1823. Empr. du lat. phi-
class. cräs « demain » n’a laissé que quelques losophique demiurgus (du grec démiourgos,
traces, cf. l’a. esp. cras ; dé mäne est attesté au sens de « créateur de l'univers »; le
dans tous les parlers gallo-romans, cf. a. premier sens était « qui travaille pour le
pr. deman, et en outre par l’it. domani. — public »; une première fois demiourgon,
Comp. : lendemain, vers 1300, d’abord 1546 (Rab.).
l'endemain, x11°, issu d’endemain, qui a été
usité du x11° au xv°s., d’où surlendemain, DÉMOBILISER, v. mobile.
xvirre (Lesage) ; après-demain, 1690.
DÉMOCRATIE, 1370 (Oresme); démo-
DEMANDER. Lat. démandäre signifiant cratique, id. Empr. du grec démokralia,
« confier », mais le sens de « demander » -alikos, par l'intermédiaire des traductions
est attesté dans presque toutes les langues lat. d’Aristote v. démagogue. — Dér. :
romanes : it. domandare, esp. a pr. deman- démocrate, une première fois en 1550, mais
dar. À éliminé, au sens de « demander pour devenu usuel seulement au moment de la
savoir », le lat. class. inierrogäre (sauf le Révolution ; formé au xvi®s. sur le modèle
roumain inireba et quelques traces en de mots grecs en -kratés ; reformé à l’épo-
gallo-roman, a. fr. enterver), et au sens de que de la Révolution sur le modèle d’aris-
«demander pour avoir » le lat. class. pelere. tocrale.
— Dér. et Comp. : demande, x11° ; deman-
deur, 1283 (Beaumanoir); redemander, DEMOISELLE. Jusqu'à la fin du xvirres.
x11e (Chrétien) : codemandeur, 1771. désigne une fille noble ou une femme ma-
riée de la petite noblesse (cf. une femme
DÉMANTELER, v. manteau. demoiselle, Molière), G. Dandin et la Grande
Mademoiselle) et aussi de la bourgeoisie ;
DÉMANTIBULER, v. mandibule.
désigne depuis la fin du xvirres. une femme
DÉMARCATION, 1700, à propos de la non mariée. Lat. pop. *dom(i)nicella, dim.
ligne de démarcation que le pape Alexan- de domina, v. dame. Seulement gallo-
dre VI fit tracer d’un pôle à l’autre en 1493, roman, Cf. a. pr. donsela d’où l’it. donzella
DEMOISELLE 186

et l'esp. doncella. Les dictionnaires conser- DENIER. Lat. dénärius, d’abord « mon-
vent une forme arch. damoïiselle et le masc. naie d’argent qui valait dix as (environ un
correspondant damoiseau, déjà vieilli et franc) » ; à l’époque du Bas-Empire « mon-
péj. au xvriI® s., au moyen âge, « jeune naie de cuivre, unité monétaire, valant un
gentilhomme qui n’était pas encore reçu demi-centime ». En France monnaies de
chevalier », lat. pop. *dom(i )nicellus, dim. valeurs diverses sous l’ancien régime, même
de dominus; seulement gallo-roman, cf. en argent et en or, d’où l’emploi de denier
a. pr. donsel ; également emprunté ailleurs. au sens de « somme d’argent indétermi-
Les sens de ces diminutifs se sont déve- née ». Denier à Dieu, XV® s., d’abord
loppés à l’époque de la féodalité, parallè- « légère contribution qui se payait sur tous
lement à ceux de dominus, domina, v. dame. les marchés et servait à des œuvres pies »;
Donzelle, attesté dès le moyen âge et qui, sens moderne depuis 1680. Le denier de la
depuis le xvie s., ne s'emploie qu’avec une veuve, locution issue de Luc, xxt, 1 et 2.
nuance de mépris, est empr. de l’a. pr. It. danaio, esp. dinero. — Dér. : denrée,
donsela. — Comp. : mademoiselle, xvie; xiIr1e, contraction de dénerée, XII°, propr.
au moyen âge ma demoiselle ne paraît pas « la valeur d’un denier », de même a. pr.
encore être senti comme un mot unique; denairada, d’où souvent au moyen âge
la forme réduite mameselle est attestée en « petite quantité » ; le sens moderne appa-
1680 ; aujourd’hui ordinairement écrite raît de bonne heure.
mam'selle.
DÉNIER. Lat. dénegäre ; développement
DÉMOLIR, 1383 ; démolition, xive. Em- parallèle à celui de nier, la composition de
pr. du lat. demoliri, demolitio. DÉTE ce verbe ayant toujours été sentie. Mot
démolisseur, 1764 (d’Alembert), au sens dont ni la forme ni le sens ne permettent
fig. ; une première fois en 1547. de reconnaître s’il est resté pop. ou s’il a
été repris au lat., v. dénoncer. — Dér. :
DÉMON, xvie, au xu1e s., sous la forme déni, xrr1° ; indéniable, 1789.
demoygne, d’après le lat. daemonium. Empr.
du lat. eccl. daemon (du grec eccl. daimôn ; DÉNIGRER, 1358. Empr. du lat. deni-
en grec class. signifie « génie protecteur, grare, propr. « noircir », d’où « dénigrer »
dieu », sens repris au xvi® s.); sens fig., à basse ép. — Dér. : dénigrement, 1527;
1680. dénigreur, 1781.
DÉMONÉTISER, 1794. Mot sav., formé DÉNOMBRER, 1530. Empr. du lat.
avec le lat. moneta « monnaie ». — Dér. : denumerare ; francisé d’après nombre.
-isation, 1796. — Dér. : dénombrement, 1329, qui a donc
été formé avant le verbe.
DÉMONIAQUE, xr11°. Ordinairement dé-
moniacle au moyen âge ; encore chez d’Au- DÉNOMMER, x11° ; dénominateur, 1484 ;
bigné. Empr. du lat. eccl. daemoniacus; dénomination, 1377 ; une première fois au
v. démon. xur1e $. Empr. du lat. denominare (adapté
DÉMONSTRATEUR, 1713, une première d’après nommer), denominaior « celui qui
fois au xive s.; démonstratif, 1550, une dénomme » (créé à basse ép. ; le sens mathé-
première fois vers 1350 ; démonstration, matique est probabl. déjà lat. médiéval),
vers 1360, au moyen âge demosiraison denominatio.
au même sens. Empr. des mots lat. demons- DÉNONCIATEUR, 1328 ; dénonciation,
trator, demonsirativus, demonstratio, dér. de 1283 (Beaumanoir). Empr. du lat. denun-
demonsirare. Le sens de « manifestation tiator (créé à basse ép., avec un sens parti-
extérieure » est déjà lat. culier), denuntiatio « action d’annoncer » ;
DÉMONTRER. Au moyen âge souvent développements du sens parallèles au verbe
demostrer et demonstrer et au sens de «mon- suiv. L’a. fr. disait, jusqu’à la fin du xves.,
trer ». Au sens moderne, xv® s., v. le préc. denonceor, -ceur plutôt que -ciateur.
Lat. déemonsiräre « montrer, démontrer » ; DÉNONCER. Lat. dénuntiare « faire
a suivi dans sa forme le développement de savoir ». Développement parallèle à l’anc.
montrer. — Dér. : démontrable, xrr1° (J. de verbe noncier « annoncer », lat. nuntiare.
Meung). Mot qui, comme dénier, ne révèle ni par
DENDR(O)-. Premier élément de mots sa forme ni par son sens s’il est resté pop.
sav. comp., tels que dendrophage, 1823, ou s’il a été repris au latin ; toutefois ail-
tiré du grec dendron, arbre. leurs a l’aspect d’un mot repris au lat. :
it. dinunziare, esp. denunciar. Le sens était
DÉNÉGATION, xive; terme surtout ju- plus étendu autrefois qu'aujourd'hui.
ridique. Empr. du lat. de basse ép. dene-
gatio, dér. de denegare, V. dénier. DÉNOTER, 1350; dénotation, xve s.
Empr. du lat. denotare, denotatio.
DENGUE, 1855. Sorte de grippe rhuma-
tismale des pays tropicaux. Empr. de l’esp. DENRÉE, v. denier.
d'Amérique dengue, propr. « manières af- DENSE, 1627 ; densité, 1627. Empr. du
fectées » appliqué par plaisanterie à cette lat. densus « épais », densilas « épaisseur »,
maladie, à cause de la démarche de ceux en vue de sens techn.; déjà empr. au
qui en sont atteints. XIIIe S., puis au xvIe (Paré) au sens propre.
DÉNICHER « enlever du nid », v. nicher.
DENT. Masc. jusqu’au xrve s. Lat. dens,
DÉNICHER « enlever une statue de sa masc., peut-être fém. chez Grégoire de
niche », v. niche. Tours. Partout masc. : it. dente, esp. dientie,
187 DÉPORTER

sauf en a. pr. où den est des deux genres, DÉPENSE. Lat. dispensa, part. passé
et dans les parlers gallo-romans où le fém. fém. de dispendere, v. le préc.; ln a été
a triomphé, sauf dans l'Est (champenois maintenu comme dans dépens et pour des
oriental, lorrain, picard, wallon). Le chan- causes semblables. Le sens de «lieu où l’on
gement de genre est mal expliqué. — Dér. conserve les provisions » est attesté dès le
et Comp. : dental, 1503 ; denté, xve ; den- x11€ 8. — Dér. : dépenser, 1367-70, qui a
telé, 1545, par l'intermédiaire d’un anc. éliminé dépendre, v. plus haut, gêné par
dér. denlele « petite dent », xrve, d’où den- ses deux homonymes ; dépensier, « qui
teler, 1690, dentelure, 1547 ; dentelle, 1549, aime à dépenser », déjà au xve s.; « celui
extension de sens du deniele préc., d’où qui tient l'office appelé dépense », xrre.
dentellière, 1647 : dentier, 1728, au sens V. dispendieux.
moderne, une première fois en 1624 ; aupa-
ravant « partie du heaume qui couvre les DÉPERDITION, 1314. Dér. sav. du lat.
dents », 1611: dentiste, 1728; denture, deperdere, d’après perdition.
xIve; adenter, xIv°; édenter, xr11°, peut DÉPÉRIR, 1235. Empr. du lat. deperire.
remonter à un lat. pop. *exdentare, lat. — Dér. : dépérissement, 1521.
class. édentäre, cf. it. sdentare, a. pr. esden-
lat ; endenter, x11° ; redan, 1677 (Colbert), DÉPIAUTER, 1864. Empr. d’un parler
d’abord redent, 1611 ; surdent, xrre. de la France septentrionale ; attesté en
rouchi en 1834 ; contient la forme dialec-
DENTAIRE, 1706 ; dentifrice, xvi° (Pa- tale piau « peau ».
ré) ; dentition, xvirie. Empr. du lat. den- DÉPIÉTER, v. pied.
tarius, dentifricium (comp. de fricare « frot-
ter »), deniilio. DÉPILER, xvies. (Paré). Empr. du lat.
depilare, de pilus « poil ». — Dér. : dépilatif,
DÉNUDER, 1790 (une 1e fois vers 1120); 1732 ; dépilation, xvi®e s. (Paré ; une pre-
dénudation, xvi° (comme t. de chir., Paré), mière fois au xir1° s.); dépilatoire, 1390.
une 1re fois, dans un sens religieux, en 1374. DÉPIT. Signifie « mépris » jusqu’au
Empr. du lat. denudare, denudatio (créé à xvI® s., sens qui survit dans la locution
basse ép.) pour des emplois techn. en dépit de, du xvi® s. environ; le sens
moderne ne paraît pas être antérieur au
DÉNUER. Jusqu'au xvi® s. signifie sur- xviie s. Lat. despecius « mépris », propr.
tout « mettre à nu » ; sens fig. dès le xr1° 5. « action de regarder de haut en bas ». It.
Lat. denüudaäre, de nüdus « nu ». — Dér. : dispetto, esp. despecho.
dénuement, xIv®e.
DÉPITER. Lat. despeciäre « mépriser » ;
DÉPART, -TAGER, -TEMENT, v. par- développements de la forme et du sens
tir. parallèles au préc. Esp. despechar.

DÉPÉCHER, v. empêcher.
DÉPLAIRE. Dér. de plaire, analogue au
lat. class. displicëre, dér. de placère ; déve-
DÉPEINDRE, xr11e, au sens de « pein- loppement parallèle à plaire. — Dér. :
dre »; sens moderne, à partir du xvies. déplaisir, x1r1°, d’abord autre forme de
Empr. du lat. depingere « peindre » et l’inf., comme plaisir.
« dépeindre »; adapté d’après peindre. DÉPLORER, xu1e. Empr. du lat. deplo-
rare « pleurer » et « déplorer ». Jusqu'au
DÉPENAILLÉ, v. pan. xviies., signifie surtout « pleurer sur quel-
qu'un »; au xvi® et au xviie s., le part.
DÉPENDRE « dépendre de », xtre. Empr. passé a souvent le sens de « sans remède,
du lat. dependere, propr. « pendre de », désespéré » d’après le lat. deploralus. —
d’où, au sens fig., « se rattacher à, être lié Dér. : déplorable, fin xve.
à ». Le sens d’ « être sous la puissance de
quelqu'un » ne paraît pas être antérieur au DÉPOPULATION, 1721 (Montesquieu)
xvie s. — Dér. et Comp. : dépendance, au sens moderne. Formé pour servir de
1361, développement du sens parallèle nom abstrait à dépeupler d’après popula-
au verbe ; indépendant, 1584, d’où -ance, tion (il s’est maintenu à côté de dépeuple-
1610. ment, parce qu’il s'oppose mieux à popu-
lation) ; le lat. depopulatio ne signifie que
DÉPENS. Ne s'emploie plus depuis le « dévastation, destruction », d’où dépopu-
XVIIe s. que comme terme juridique et lalion en ce sens du x1Iv® au xvI®s.
dans la locution aux dépens de, avec ses DÉPORT, terme de bourse, milieu xix®.
variantes. Lat. dispensum, part. passé neu- Fait sur report par substitution du préf. dé-
tre, pris substantiv., de dispendere (rare, (d’après des mots tels que débourser, etc.).
mais dont le sens de « dépenser » est attesté
par le dér. dispendium « dépense »; le lat. DÉPORTER, dès 1495 dans certaines
class. dit de préférence expendere), d’où Coutumes, généralement usuel depuis la
l'anc. verbe dépendre « dépenser », disparu Révolution seulement, quand cette peine
depuis le début du xvu® s. au profit de a été établie pour toute la France ; de même
dépenser. De même a. pr. despens, et, pour déportation. Empr. du lat. deportare, depor-
le verbe, it. spendere, esp. despender, a. pr. tatio. L’a. fr. a possédé en outre un verbe
despendre. Le maintien irrégulier de l’n aux sens variés déporter «amuser, distraire »
‘devant s est dû au caractère juridique du (et aussi « ménager, supporter »), d’où se
mot (cf. le lat. médiéval dispensum) et à déporter «se divertir », encore chez Rabelais,
son rapport toujours senti avec l’anc. dé- «se conduire », chez Amyot, et d'autre part
pendre « dépenser ». « se détourner, renoncer à », encore au
DÉPORTER 188

xvI° s., représentant traditionnel du lat. sens moderne est dû à député, 1328,
déporiäre, qui a dû prendre à basse ép. les lui-même empr. du lat. deputalus, attesté
sens de « supporter » et d’ « amuser », à basse ép. au sens de « représentant de
celui-ci attesté par l’it. diportarsi, l'esp. l’autorité » (le verbe est attesté au sens
deportarse, l’a. pr. deportar. Du verbe au correspondant dès 1303) ; dépulé a été dit
sens de « s'amuser, se conduire » dérive d’abord de tout envoyé ; le sens moderne
déportement, XIII° ; v. Sport. date de la Révolution. — Dér. : députation,
DÉPOSER « poser quelque part, desti- 1433, d’après le lat. de basse ép. deputalio
tuer », xiie. Empr., avec francisation d’a- « délégation » ; sens parallèle à dépuler, -lé.
près poser, du lat. deponere, v. composer. DÉRAPER, 1739, comme terme de ma-
DÉPOSER « ôter ce qui est posé », v. rine, en parlant de l’ancre qui quitte prise
poser. sur le fond, d’où le sens moderne, de date
récente (une première fois desrapper au
DÉPOSITAIRE, x1v°; déposition, x1re. Xvii® s. chez le provençal Peiresc dans un
Empr. du lat. juridique depositarius, depo- sens fig.). Empr. du prov. moderne derapa,
sitio. comp. de l’a. pr. rapar « saisir », du
DÉPÔT, 1348. Empr. du lat. juridique germ. rapôn (cf. l’angl. {o rap « saisir,
depositum. tirer fortement », l’all. raffen), d'où aussi
l’it. arrappare « arracher ».
DÉPOUILLER. Lat. déspoliäre, De mê-
me esp. despojar, a. pr. despolhar (lit. spo- DÉRATÉ, v. rate.
gliare représente le simple spoliare). Le DERBY, 1829. Empr. de l’angl. derby,
sens, arch. aujourd’hui, de « déshabiller » tiré de Lord Derby, nom de celui qui ins-
doit remonter au lat. de basse ép., car non titua cette course de chevaux en 1780.
seulement il est attesté dans le simple D'abord employé en parlant de la course
spoliäre, mais dans presque toutes les lan- anglaise ; depuis 1860 environ, dit de la
gues romanes. — Dér. : dépouille, 1120; course du Jockey-Club, à Chantilly.
dépouillement, x1r°.
DERECHEF, v. chef.
DÉPRAVER, 1212 ; dépravateur, 1551 ;
dépravation, xvie. Empr. du lat. depravare DÉRISION, xrr1° ; dérisoire, xive. Empr.
(de pravus « pervers »), depravalor (créé à du lat. de basse ép. derisio, derisorius (de
basse ép.), depravalio. deridere « se moquer de »).
DÉPRÉCATION, xr1° ; déprécatoire, xve. DÉRIVER « détourner une eau de son
Empr. du lat. deprecatio « prière pour dé- cours, etc. », xr1° ; dérivatif, xv°, comme
tourner un malheur », deprecatorius (créé terme grammatical (aujourd’hui vieilli au
à basse ép.). profit de dérivé) ; dérivation, 1377, comme
terme médical. Empr. du lat. derivare (de
DÉPRÉCIER, 1762. Empr. du lat. depre- rivus « ruisseau »), derivalivus (déjà fig. à
liare (de pretium « prix »). — Dér. : dépré- basse ép.), derivalio.
ciateur, 1789 ; dépréciation, 1779.
DÉRIVER « être entraîné par le cou-
DÉPRÉDATEUR, vers 1285, rare avant rant », fin xvi®s. (d’Aubigné). Altération,
le xvirie s.; déprédation, 1372 (Oresme). d’après le préc., de driver, également chez
Empr. du lat. de basse ép. depraedator, d’Aubigné, encore usité en 1700, empr. de
depraedalio (de praeda « butin »). l’angl. {o drive, de même sens, propr. « pous-
DÉPRESSION, 1314. Empr. du lat. ser » et « être poussé » ou du néerl. drijven
depressio, dér. de depressus, part. passé «id. », — Dér. : dérive, 1678 (drive en 1671) ,
de deprimere, v. le suiv. Le sens d’ « affai- dérivation, 1690.
blissement » est récent. DÉRIVER « écarter de la rive », v. rive.
DÉPRIMER, 1355 (Bersuire). Empr. du DÉRIVER « défaire ce qui est rivé »,
lat. deprimere « abaisser », aux sens propre v. river.
et fig., celui-ci fréquent du xvie au xvrries.
Pour le sens d’ « affaiblir », v. le préc. — DERMAT(O)-. Premier élément de mots
Dér. : dépressif, 1864 (une 1re fois au xves. sav. comp., tels que dermatologie, 1836,
au sens de « qui anéantit »), formé sur le tiré du grec derma, -atos, « peau ».
part. passé latin depressus. DERME, 1611. Empr. du grec. derma,
DE PROFUNDIS, xive. Premiers mots v. le préc. ; de même épiderme, xvie (Paré),
du psaume 130 : De profundis clamavwi « du est empr. du lat. epidermis (mot pris au
fond de l’abîme je t'invoque, Ô Seigneur », grec).
employé dans l'office des morts. DERNIER, xve. Contraction de derre-
DÉPURATIF, 1792; dépuration, xrrre nier, XItI*, dér., d'après premier, de der-
(J. de Meung); dépuratoire, 1731. Dér. rain, qui subsiste jusqu’au début du xvres.
sav. de l’anc. verbe dépurer, xit1°, encore Derrain, d’abord dererain, représente le lat.
dans les dictionnaires, empr. du lat. mé- pop. *“derelränus, dér. de déretro « derrière »,
diéval depurare (de purus « pur »). On cf. de même a. pr. darreiran, derairan, et
trouve dans le lat. de basse ép. depurare it. derelano. Aujourd’hui dernier domine
« faire sortir le pus (lat. pus, puris) », qui dans les parlers gallo-romans ; derrain ne
est un autre mot. survit que dans le Nord-Est et l'extrême
Ouest, mais un autre type derrier (pour
DÉPUTER, vers le xvI® s., au sens mo- *dererier), attesté en a. fr. et en a. pr., est
derne ; signifie d’abord « estimer, assi- encore très répandu au sud d’une ligne
gner », 1328. Empr. du lat. deputare, propr. allant de la Loire au sud de la Wallonie.
« tailler », d’où « estimer , assigner ». Le — Comp. : avant-dernier, xvrrre.
189 DÉSIRER

DÉROBER ; desrober en a. fr., xr1°. Jus- de pente, rente, vente, en face de pendre,
qu’au xvini1e s. signifie aussi « dépouiller, rendre, vendre; l’a. fr. préfère d’autres
voler quelqu'un » ; le sens moderne appa- dér. : descendement, descendue, descense;
raît au x1Ve s. ; se dérober, en parlant d’un redescendre, xXI1°.
cheval, est déjà chez Rabelais. Comp. de
l’anc. verbe rober, de même sens, empr. du DESCRIPTIF, 1770 ; une première fois
germanique occidental *raubôn, cf. l’all. en 1469. Dér. du lat. descriptus, part. passé
rauben « id. », d’où aussi it. rubare, esp. du verbe describere « décrire », pour servir
robar, à. pr. raubar ; v. robe. d’adj. à décrire et au suiv.

DÉROGER, xive (Oresme), d’abord et DESCRIPTION, xr1°. Empr. du lat. des-


jusqu’au xvi® s., déroguer ; dérogation, criplio.
1408. Empr. du lat. derogare, terme juri- DÉSERT, adj. Jusqu'au xvie s. signifie
dique, d’où, au sens fig., « porter atteinte aussi « abandonné » en parlant d’une per-
à », et du dér. derogatio. sonne, « ruiné ». Lat. désertus « abandonné,
DERRICK, 1890. Empr. de l’angl. désert ». It. diserlo, esp. desierio, a. pr.
derrick. dezert. — Dér. : déserter, x11°, jusqu'au
xviie s. signifie surtout « abandonner une
DERRIÈRE. D'abord deriere, devenu personne, rendre un lieu désert »; peut
derrière d’après derrain « dernier ». Lat. de représenter le lat. de basse ép. déseriäre,
basse ép. dè retrô, comp. du lat. class. retrô comme l’it. disertare, l'esp. desertar et
« en arrière » (d'où l’a. fr. rière, usuel jus- l’a. pr. dezeriar ; déserteur, xI11°, probabl.
qu'au xve s.) ; a supplanté le lat. class. d’après le lat. desertor ; développement du
post, qui n’a survécu que comme adv. de sens parallèle au verbe.
temps. De même it. dietro, a. pr. dereire.
Aujourd’hui, outre le type derrière, de DÉSERT, subsi. Lat. de basse ép. dêser-
nombreux parlers gallo-romans ont des tum, en lat. class. deserta, plur. neutre. It.
formes dont la syllabe finale est tombée, esp. et a. pr. mêmes formes que celles de
cf. déjà en a. fr. derrier (qui n’est pas le l’adj. préc. La forme ne permet pas de
derrier cité sous dernier). Derrière, pris reconnaître si ce mot est traditionnel ou
comme subst., date du xv®s. repris au lat. — Dér. : désertique, 1929.
DERVICHE, 1653 (en outre dervitz en DÉSERTION, vers 1361 (Oresme). Empr.
1546, derviss en 1559, d’où dervis, fréquent du lat. juridique desertio pour servir de
au xviie et au xvuie s.). Empr. du persan nom abstrait à désert et à ses dér.
dervich, propr. « pauvre ». DÉSHABILLER, v. bille.
DÈS. Lat. de basse ép. de ex, comp. des DÉSHÉRENCE, v. hoir.
deux prép. dé et ex « hors de »; de même
a. pr. des et esp. desde. L'existence de de DESIDERATUM, 1783. Mot lat., neutre
ex écarte dé ipso, qui, de plus, explique du part. passé desideralus, de desiderare
moins bien les formes romanes. « regretter l'absence de qqn., de qch. ».
DÉSAGRÉABLE, -GRÉMENT, v. gré. DÉSIGNER, x1ve (sous la forme desin-
ner), ne paraît pas usuel avant le xvi®s. ;
DÉSARROI, xu1°. Tiré de l’anc. désar-
désignatif, 1611 ; désignation, xiv°, mais
royer, autre forme de désareer « mettre en
rare avant le xvire. Empr. du lat. desi-
désordre », dér. d’areer « disposer, etc. » : gnare, designativus (médiéval), designatio
(d’où arroi), lat. pop. *arrédare, formé avec (id.) (de signum « signe »), v. dessiner.
le gothique *réps « moyen, provision » (cf.
all. Raï «conseil, avis, moyen, etc. »), intro- DÉSINENCE, xive. Empr. du lat. mé-
duit de bonne heure par les mercenaires diéval desinentia, dér. du verbe desinere
germains, v. Corroyer, d'où aussi it. arre- « finir, se terminer ».
dare « préparer », esp. arrear, a. Pr. arezar.
Désarroi a éliminé desroi, qui avait le même DÉSINVOLTE, fin xvie (Saint-Simon).
sens, tiré de desreer, autre comp. d’areer. Empr. de l’esp. desenvuelto « dégagé dans
ses manières », dér. du verbe desenvolver,
DÉSASTRE, 1546 (Rab. ; en outre dans propr. « développer »; cf. la réflexion de
des traductions de l’it.) ; désastreux, XVIe. Mme de Sévigné : «les Espagnols appellent
Empr. de l'it. disasiro, disasiroso, avec cela desembuelto ; ce mot me plaît » ; tou-
adaptation du préf. dis- en dés-. Disastro tefois la forme indique aussi une action de
est tiré de disasiralo, terme d’astrologie, l’it. disinvollto.
« né sous une mauvaise étoile »; l’a. pr.
dit de même dezastrat, dezastre ; mais l’ori- DÉSINVOLTURE, 1830 (Stendhal) : « La
gine it. des mots fr. est appuyée par la désinvoliure de tous ses mouvements »,
date de l'apparition de ces mots et la Le Rouge et le Noir, 43; déjà dans la
nature des premiers textes. Nouvelle Héloïse, II, 21, sous la forme it.
Empr. de l’it. disinvoltura.
DESCENDRE. Lat. déscendere. Concur-
rencé aujourd'hui par le type dévaler, sur-
DÉSIRER. Lat. désideräre, propr. « re-
tout dans le Sud-Ouest. Le sens de « tirer gretter l'absence de quelqu'un, de quelque
chose », d’où « désirer ». It. arch. disiderare,
son origine de », attesté au xix1° 8., est a. pr. dezirar. — Dér. : désir, x11°; dési-
repris du lat. juridique. — Dér. : descen- rable, x11°; désireux, xi° (Alexis), peut
dance, 1283 (Beaumanoir) ; descendant est
également du xtr1°; descente, 1304, au représenter le lat. de basse ép. desiderosus ;
sens de « succession », formé sur le modèle
cf. a pr. deziros.
DÉSISTER 190

DÉSISTER (se), 1350. Aujourd’hui seu- l’it. disegno, qui a les deux sens. Dessein,
lement juridique et politique; jusqu’au xv® s., tiré de desseigner, a été jusqu’à la
XVIIe s. signifiait « renoncer à, cesser de ». fin du xvirie s. plus usuel aux deux sens
Empr. du lat. desistere « id. ». — Dér. : que dessin, tiré de dessigner (cf. en 1549
désistement, 1564. un desing ou pourject), que Richelet blâme
DÉSOLER, x1v° ; désolateur, 1516 : dé- encore en 1680, même comme terme de
solation, x11°. Empr. du lat. desolare «rava- peinture, et que l’Académie n’a admis
ger », desolaïor (créé à basse ép.), desolatio qu’en 1798; dessinateur, 1667, d'après l’it.
(id.); le sens moral, qui apparaît au xives. disegnaiore (on a dit aussi dessigneur et
vient du lat. de basse ép. qui semble avoir desseignaieur) ; redessiner, 1762 (J.-J.
Rousseau).
vu dans desolare le contraire de consolari
« consoler ». DESTINER, xr1°, jusqu’au XvIr°s. signi-
DÉSOPILER, 1546 (Rab.). Terme de la fie aussi « décider, projeter, etc. »; desti-
langue médicale, qui s’est fixé dans l’ex- nation, xx1°. Empr. du lat. destinare « fixer
pression se désopiler la rate, propr. « dégor- (au propre et au fig.) », destinatio. — Dér. :
ger la rate » dont l’engorgement passait destin, xrr°, parfois « destination » en a. fr. ;
pour causer les vapeurs, les humeurs noi- destinataire, 1829 ; destinée, xrr°.
res, d’où le sens fig. au xix® s. Comp. de
l’anc. verbe opiler, xiv® s., terme médical, DESTITUER, 1322, au sens d’ « écar-
empr. du lat. oppilare « boucher ». — ter », jusqu’au xvri® s. signifie surtout
Dér. : désopilant, 1814. « priver (d’un soutien, d’une ressource) » ;
sens moderne au xv®s. ; destitution, 1316,
DESPOTE, xive (Oresme) ; despotique, sens moderne, 1418. Empr. du lat. desti-
id. Empr. du grec despotés « maître », d’où tuere « mettre de côté, priver », destitutio
« despote », despotikos, par l'intermédiaire « abandon ». Le sens moderne est une inno-
des traductions lat. d’Aristote, v. déma- vation du fr.
gogue. — Dér. : despotisme, 1698.
DESTRIER, vers 1080 (Roland). Terme
DESSERT, DESSERTE « mets qui ont féodal qui, après avoir disparu avec l'usage
été desservis », v. servir. exprimé par ce mot, a été repris au xvies.
dans des textes historiques; prononcé
DESSERVIR t« servir avec exactitude ». d’après la forme écrite. Dér. de l’a. fr.
Lat. dëservire « servir avec zèle ». En a. fr. desire « maïn droite », lat. dexiera ;: ainsi
signifie surtout « mériter », encore en 1599 nommé parce que l’écuyer, tout en tenant
dans une lettre de Henri IV, sens qui a de la main gauche son cheval ou une bête
pu disparaître à cause de la concurrence de somme, menait le destrier de la main
de desservir « rendre un mauvais service », droite, quand le chevalier ne le montait
d'autant plus facilement que mériter pou- pas pour le combat.
vait le suppléer. Le sens de « faire un ser-
vice religieux », dès le xrr1e s., a été déve- DESTROYER, 1893. Empr. de l’angl.
loppé d’après le sens propre du lat. ; d’où destroyer, dér. de to destroy « détruire ».
«faire un service de communication », 1864. DESTRUCTEUR, 1420 (a éliminé l’a. fr.
Seulement gallo-roman, cf. a. pr. deservir destruiseur, encore attesté au xvrre s., lui-
« mériter ». — Dér. : desserte, x11°, a signifié
même précédé par destruieor); destruc-
« mérite, utilité », jusqu’au xvi® s., ensuite tible, 1764; destructif, 1372, mais rare
«action de faire un service religieux, etc. », avant la fin du xvri® s. ; destruction, xrre.
rare aujourd’hui ; desservant, 1752, déjà en Empr. du lat. destrucior, destructibilis (lat.
1322 (le d. de la ditte capellenie). scientifique moderne), destructivus (créé à
DESSERVIR « enlever ce qui a été basse ép.), destructio, cf. détruire. — Dér. :
servi »; « rendre un mauvais service », v. indestructible, fin xvrre (Leibniz).
servir. DÉSUET, fin x1x°e ; désuétude, 1762 (une
première fois en 1596). Empr. du lat. desue-
DESSICCATIF, xiv°; dessiccation, id:
lus, desuetudo.
Empr. du lat. de basse ép. desiccativus»
desiccatio (de desiccare « dessécher »). DÉTACHER, xuie. Dér. de fache, au
sens anc. d’ « agrafe », v. attacher. Cf. de
DESSILLER, v. cil. même it. saccare, a. pr. destacar. Sens mili-
taire à la fin du xvi® s. (d'Aubigné), —
DESSINER, 1667. Autre forme de dessi- Dér. : détachement, 1613.
gner, par changement de prononciation de
gn en n, cf. signet; dessigner, usuel au DÉTALER, v. étal.
XVI® s., encore attesté en 1771, est une
altération, d’après le lat. designare (on DÉTECTEUR, 1870. Empr. de l’angl.
trouve aussi désigner au même sens), de détector, lequel a été formé sur le part.
desseigner, empr. de l'it. disegnare, à la fois passé du lat. detegere, deteclum (detector
« dessiner » et «former un plan » (ce dernier dans Tertullien n’a qu'un sens religieux).
sens est fréquent en fr. au xvi® s.), lat.
désignäre « tracer, dessiner ». La francisa- DÉTECTIVE, 1871 (J. Verne). Empr.
tion de l’it. en desseigner paraît avoir été de l’angl. detective, dér. de io detect « décou-
faite sur le modèle d'enseigner, it. insegnare. vrir », tiré du lat. detecius, part. passé de
— Dér. : dessein et dessin, spécialisés dans detegere « id. ».
leur acception moderne seulement depuis DÉTEINDRE. Lat. pop. *distingere. It.
la fin du xvurre s., faits sur le modèle de slingere, esp. desteñir.
LOL DEUX

DÉTENIR, xu1°. Empr. du lat. delinere « serrer », formé comme anguslia « défilé »),
(comme le montre la prononciation du dér. de angustus « étroit ». En a. fr. signifie
préf. : dé et non de) et francisé d’après aussi « passage étroit » et, au sens moral
tenir. — Dér. : codétenu, 1859. « sévérité, contrainte judiciaire, etc. ». Le
développement des sens s’est fait paralle-
DÉTENTEUR, 1320; détention, 1287, lement à celui de l’anc. adj. détroil. Seule-
rare avant le xvi® s. Empr. des mots du ment gallo-roman, a. pr. desireissa, sauf
lat. juridique detenior, delentio, dér. de quelques traces dans l’Italie septentrionale.
detinere, v. détenir. — Dér. : codétenteur,
XVIe. DÉTRIMENT, 1236. Empr. du lat. deiri-
mentum de deterere, v. détritus).
DÉTERGER, 1538; détergent, 1611.
Empr. du lat. detergere « nettoyer », DÉTRITUS, 1753. Empr. du lat. detritus
delergens, part. prés. « action d’user en frottant », subst. verbal
de deterere « user en frottant ».
DÉTÉRIORER, 1411; détérioration,
xve,
rare avant le xvire s. Empr. du lat. de DÉTROIT. Jusqu'au xviries. signifie au
basse ép. deteriorare (dér. de delerior «moins sens concret « défilé »; le sens moderne
bon, inférieur »), delerioratio. apparaît dès 1556; en outre jusqu’au
xvie s. sens analogues à détresse. Tiré d’un
DÉTERMINER, xr°; détermination,
anc. adj. détroit, lat. districtus « resserré »,
xive (Oresme). Empr. du lat. determinare v. détresse, usuel en a. fr. aux sens de
« marquer les limites », determinalio ; le « resserré », d’où « chagriné, angoissé, sé-
sens de « décision, décider » s’est développé vère, etc. ». Seulement gallo-roman, cf.
en fr. vers le xvie s. — Dér. : déterminable,
a. pr. destrech, adj. et subst.
1801 (existe en a. fr. au sens de « fixé »),
d'où indéterminable, 1749 (une première DÉTRUIRE. Lat. pop. *desirügere, ré-
fois en 1537); indétermination, 1600; fection du lat. class. destruere sur le parfait
indéterminé, 1370 (Oresme),; prédéter- desiruxi et le part. passé destruclum, v.
miner, en 1530, d’où -ation, 1636 ; déter- traire. — Comp. : entre-détruire (s’), 1633
minisme, 1836, par l'intermédiaire de (Corneille).
l’all. Determinismus qui paraît avoir été
tiré de Praedeterminismus : -iste, 1836. DETTE. Lat. pop. débita, fém. issu du
plur. neutre du lat. class. débilum « dette »
DÉTERSIF, 1539 ; détersion, xvi® (Pa- (d'où l’a. fr. dei, masc., qui a donné naïs-
ré). Le 1er est dér. du lat. detersus, part. sance au genre masc. de delle attesté jus-
passé de detergere, le 2° empr. du lat. médi- qu'à la fin du xvie s.), comme aussi l’a. pr.
cal detersio, V. déterger. deude, deule, masc., encore très vivace
dans les parlers méridionaux. Esp. deuda,
DÉTESTER, xve (Villon); détestable,
vers 1361 (Oresme) ; détestation, xIv<. Jus-
a. pr. deuta. — Dér. : endetter, vers 1200,
d'où endettement, 1611.
qu'au xviie s. expriment surtout l’idée de
malédiction. Empr. du lat. detestari « mau- DEUIL. Réfection, vers le xv® s., de
dire », propr. « prendre les dieux à témoin l’a. fr. duel, au plur. dueus, sur le modèle
(testis) en maudissant », d’où « avoir en d'œil : yeux. À signifié d’abord « douleur,
horreur », sens devenu dominant depuis le chagrin », puis spécial. « affliction causée
xvire s., et des dér. delestabilis, detesiatio. par la perte d’une personne aimée », vers
DÉTONER, 1680. Empr. du lat. delonare .le xve s., d'où « marques extérieures de
« tonner fortement ». — Dér. : détonation,
cette affliction » (l'usage des vêtements de
1676; détonateur, fin xixe. deuil noirs est attesté dès le ves., mais il
ne paraît pas s'être répandu avant le
DÉTONNER, v. ton. xive). Lat. du rie s. dolus, subst. verbal
DÉTRACTEUR, xive. Empr. du lat. de dolere « avoir de la douleur ». Conservé
dans toutes les langues romanes au sens
detractor, de detrahere « tirer en bas », d’où
« diminuer ». On a dit aussi detracier, 1372, de « douleur », le sens de « deuil » est connu
de l'esp. : it. duolo, esp. duelo, a. pr. dol.
formé sur détracteur, et detraction, xn1°,
Aujourd’hui, le type deuil domine dans la
empr. du lat. detractio « dénigrement » partie septentrionale du domaine gallo-
(sens de basse ép.). roman, le type anc. ne survivant que dans
DÉTRAQUER, 1464, au sens propre les parlers excentriques et dans le Midi. —
« (se) détourner de la voie », encore attesté Dér. : endeuiller, fin xix°. — Comp. :
au xvuie s., d’où le sens de « déranger », demi-deuil, 1829, au sens moderne, mais
dès le xvi®s., peut-être par l’intermédiaire dès 1762, au sens métaph.
de l’emploi de ce verbe dans le langage de DEUTÉR(O)-. Premier élément de mots
l'équitation, détraquer un cheval, « lui faire sav. comp., tiré du grec deuleros « deuxiè-
perdre son frac, son allure ». Dér. de l’anc. me », ou de mots empr., tels que deutéro-
rac « trace », 1441, encore dans les dic- nome, XIIIe.
tionnaires, V. traquer.
DÉTREMPER. Lat. disiemperäre « dé- DEUX. Lat. duos, acc. de duo; l’a. fr.
layer », v. tremper. — Dér. : détrempe, possède en outre un cas sujet dui, doi, lat.
terme de peinture, 1553. pop. *duï, et un fém. does, lat. duäs, attesté
dans les textes de l'Est. It. due (d’après
DÉTREMPER, « … l'acier », v. tremper. le lat. duae), esp. dos. — Dér. : deuxième,
DÉTRESSE. Lat. pop. *districtia « chose xive (deusimes), v. centième et second. —
étroite, étroitesse » (dér. de disirictus, part. Comp. : entre-deux, x11*, d’abord comme
passé du verbe disiringere, au sens de
terme d'escrime:
DÉVALER 192

DÉVALER, v. val. DÉVOLU, 1354, adj., 1549, subst. Termes


de droit, notamment de droit canonique;
DEVANCER, DEVANT, v. avant. de la locution jeter un dévolu sur un bénéfice
DÉVASTER, 1339 (manque au xvrre s.) ; « élever une prétention juridique, fondée
dévastateur, 1781 ; déjà en 1502 ; dévasta- sur l’incapacité du possesseur » (un dévolu
tion, 1751 (Montesquieu ; une première fois était une lettre de provision accordée par
1502). Empr. du lat. devasiare, devastator, le pape pour un bénéfice vacant ; on disait
devasiatio (les deux derniers de basse ép.). aussi obtenir un dévolu) est issue la locution
jeter son dévolu sur au xvrre s. ; dévolution,
DÉVELOPPER, v. envelopper. 1385. Empr. du lat. médiéval devolutus,
devolutio (de devolvere « dérouler, faire pas-
DEVENIR. Lat. dèvenire « venir de », ser à »).
qui a pris le sens de « devenir » à basse
ép. Le sens de « venir de », qu’on relève DÉVORER. Péfection, difficile à dater,
parfois au xv® et au xvi® s., aujourd’hui de l’a. fr. devourer, d’après le lat. devorare ;
assez répandu dans les patois, vient de cf. it. divorare, esp. devorar, dont ni la
venir. L’a. pr. devenir a les deux sens. — forme ni le sens ne permettent non plus
Dér. : redevenir, vers 1200. de reconnaître si le mot est pop. ou repris
à la langue écrite. — Comp. : entre-dévo-
DÉVERGONDÉ, v. vergogne. rer (s°), vers 1470.
DÉVERNIR, v. vernis. DÉVOT « pieux », x11e ; dévotion, id. Le
sens péjoratif de ces mots (qui se prennent
DÉVIER, 1787 (une 1'e fois en 1370, encore en bonne part) paraît dater du
Oresme) ; déviation, vers 1300. Empr. du XVII s., Vers l’époque du Tartuffe et de la
lat. de basse ép. deviare « sortir de la voie Cabale des Dévots. Empr. du lat. eccl. devo-
(via) » et du lat. médiéval deviatio. lus, devolio, en lat. class. « voué, action de
DEVIN. Lat. pop. *dèvinus, lat. class. vouer (devovere) », d’où « dévoué, dévoue-
divinus, propr. « divin » ; déjà classique au ment ». Dévotion, au sens de « dévoue-
sens de « devin ». A. pr. devin. ment », notamment dans l'expression éire
à la dévotion de quelqu'un, dès le xvire s.,
DEVINER. Lat. pop. “*dévinäre, lat. vient probabl. non du lat., mais de l’it.
class. divinäre, déjà « conjecturer ». A. pr. devozione, cf. aver devozione in alcuno, de
devinar. L’a. fr. a en outre les comp. ade- même sens ; H. Estienne signale ce sens
viner et endeviner, cf. aussi a. pr. endevinar, nouveau dans ses Deux Dialogues du nou-
aujourd’hui encore usités dans d’assez nom- veau langage Francois italianizé.
breux patois ; de même it. indovinare, d’où DÉVOYER, v. voie. .
indovino « devin », esp. adivinar. — Dér. :
devineur, x11°, au sens de « devin » ; déve- DEXTÉRITÉ, 1504. Empr. du lat. dexte-
loppement du sens parallèle au verbe; ritas (de dexter), v. le suiv.
d’où devineresse, id. (devineuse est rare) 3
devinette, 1870. DEXTRE, xive (Oresme : la main dextre).
Ne s'emploie plus que par archaïsme au
DEVISER. D'abord « partager, attri- sens de « main droite »; déjà arch. au
buer », d’où « mettre en ordre, exposer », Xvil® s. Repris au lat. dexiera, fém. de
« raconter », « discourir » ; ce dernier sens, dexier « qui est à droite », qui avait donné
le seul conservé, s’est développé vers le l’a. fr. desire, encore usité au xvi® s., v.
XVe s. Lat. pop. *dévisäre, d’abord “*divt- destrier et droit.
sare (de dividere « diviser »). V. diviser. —
Dér. : devis, x11°, sens parallèles au verbe ; DEY, 1628, d’abord day. Empr. du
le sens moderne se rattache à ceux de turc di, propr. « oncle maternel », donné
« description, disposition testamentaire », comme titre honorifique aux anciens sou-
attesté dès le x1r1° s.; devise, xr1°; au verains d'Alger.
moyen âge nombreux sens, comme devis ; DI-. Premier élément de mots sav., tels
le sens moderne, développé depuis le que dimorphe, 1864, tiré du préfixe grec
XVIIe s. paraît venir du langage du blason, di signifiant « deux fois ».
où devise a désigné une bande de l’écu,
puis une formule placée à côté des armoi- DIA, xvie (N. du Fail : a diai). Mot pro-
ries ; on trouve déjà le sens de « signe babl. onomatopéique, v. hue.
distinctif, livrée » au xve s. ; le sens finan- DIABÈTE, 1611. Empr. du lat. médical
cier n’est attesté que depuis 1842 (vient du moyen âge diabetes (du grec diabétés,
peut-être de l’all., où il est attesté de- Propr. « qui traverse », parce que, dans
puis 1833). cette affection, l'urine est surabondante).
DEVOIR. Lat. débère. Conservé partout, — Dér. : diabétique, 1793 (une première fois
sauf en roumain : it. dovere, esp. deber, au XIVe 5.).
a. pr. dever. Du sens fondamental de l’obli- DIABLE, x° (Sainie Eulalie : diaule).
gation sont issus des emplois modaux qui Empr. du lat. eccl. diabolus (du grec eccl.
relèvent de la grammaire. V. dette, débet, diabolos, en grec class. « calomniateur »).
débit, etc. — Dér. et Comp. : devoir, subst., Empr. partout : it. diavolo, esp. diablo.
vers 1200; doit, terme de comptabilité, L’a. fr. a employé des noms de création
Xvuie ; dû, xive, d’où dûment, 1310 ; indû, POP. : aversier, maufé en partie pour éviter
1341; indûment, 1309; redevoir, xrre, le mot diable. — Dér. : diantre, 1524 (renier
redevable, vers 1200, redevance, 1239, le dianire), déformation voulue, par euphé-
redevancier, 1573. misme ; depuis le xvrie s., ne s'emploie
193 DICTER

que comme juron ; diablement, xvi® ; dia- DIAMÈTRE, xrr1e ; diamétral, vers 1300.
blerie, xir1° (Rose) ; diablesse, x1ve ; dia- Empr. du lat. diametrus (du grec diame-
blotin, xvie (des Périers) ; diabolo, sorte de iros, de meiron « mesure »), diametralis
jeu d’enfant, 1907, fait avec diable (un (créé à basse ép.). — Dér. : diamétrale-
jeu de ce genre appelé diable a été à la ment, x1v®, sens figuré, 1588 (Montaigne).
mode vers 1825) d’après diabolique et avec
la terminaison -0, fréquente dans des noms DIANE, « batterie de tambour », puis
sav., tels que chromo, mec(c )ano, vélo, etc. ; « sonnerie (au lever du jour, pour éveiller
endiablé, xve; -er, 1611. les soldats) », 1555 (Ronsard). Empr. de
l'esp. diana, de dia « jour ».
DIABOLIQUE, xrrre. Empr. du lat.
eccl. diabolicus (du grec eccl. diabolikos). DIANTRE, v. diable.
DIACHYLON, xive {sous la forme dia- DIAPASON, xri°, peu usuel avant le
culon). En outre diachylum, 1835, d’après XVIIe s. Empr. du lat. diapason (du grec
des noms à terminaison lat. tels que dia pasôn (sous-entendu khordôn), littéral.
arum, etc. Empr. du lat. médical diachylon « par toutes (les cordes) », qui désignait
(du grec diakhylon, littéral. « au moyen de l’octave), d’où «instrument servant à don-
sucs »). ner une note déterminée », 1626 ; sens fig.,
DIACODE, 1762, au xvi® s. diacodion. 1691 (Regnard).
Empr. du lat. médical diacodion (du grec DIAPHANE, xive (Oresme). Empr. du
diakôdeiôn, littéral « au moyen de têtes grec diaphanés « transparent », par l’inter-
de pavots »). médiaire des traductions lat. d’Aristote,
DIACRE, xrie (sous la forme diacne); v. démagogue. — Dér. : diaphanéité, xive.
diaconal, xive; diaconat, 1495; diaco-
nesse, id. Empr. du lat. eccl. diaconus DIAPHRAGME, 1314. Empr. du lat.
(du grec eccl. diakonos, en grec class. « ser-
médical diaphragma (d’un mot grec, signi-
viteur »), diaconalis, diaconatus, diaconissa.
fiant propr. « séparation, cloison »).
Ailleurs également empr. : it. diacono, DIAPRER, xrie. Dér. de l’a. fr. diaspre
a. pr. diague. — Comp. : sous-diacre, x11° « sorte de drap à fleurs », empr. du lat.
(subdiacne) ; archidiaconat, 1558. médiéval diasprum, altération de jaspis
« jaspe » (l’i initial était souvent écrit di
DIADÈME, vers 1180. Empr. du lat. dans les textes latins du haut moyen âge),
diadema (du grec diadéma). cf. it. diaspro, esp. diäspero « jaspe » ; pour
DIAGNOSTIQUE, adj., 1584 ; écrit aussi le sens qu’a pris ce mot, v. jasper. — Dér. :
-ic. Empr. du grec diagnostikos « apte à diaprure, 1360.
reconnaître ». — Dér. : diagnostic, 1759, DIARRHÉE, 1372 (sous la forme diar-
d’après la forme -ic de l’adij. ; -tiquer, 1836. rie ; diarrhée, xvi®, Paré). Empr. du lat.
DIAGONAL, xrrie. Empr. du lat. de médical diarrhoea (du grec diarrhoia, propr.
basse ép. diagonalis, de diagonus (du grec « écoulement »).
diagônos «ligne tracée d’un angle à l’autre) DIASTOLE, 1541, au sens anatomique.
(gônia « angle ») ». Empr. du grec diastolé « dilatation ». Du
DIAGRAMME, 1767 (J.-J. Rousseau; XIV® au xvI® s., comme terme de gramm. ;
une 1re fois en 1584). Empr. pour désigner empr. en ce sens du lat. diasiole (qui re-
l'échelle des sons, du grec diagramma présente le même mot grec diastolé, au
(propr. « dessin »), qui s’employait au sens grammatical d’ « allongement d’une
même sens, d’où sens nouveaux en fr. brève »).
DIALECTE, 1550 (Ronsard). Empr. du DIATHÈSE, xvi® (Paré). Empr. du grec
lat. dialectus (du grec dialektos, fém., d’où médical diathesis.
l'emploi de dialecte comme fém., assez
fréquent au xviie et au xvir1e s.). — Dér. : DIATRIBE, 1558 (D.), au sens de « dis-
dialectal, fin x1x$* ; dialectologie, 1881. cussion d’école ». Empr. du lat. diatriba
(du grec diatribé « entretien philosophique,
DIALECTIQUE, xr°, comme subst.; école »); sens moderne, 1734 (Voltaire).
l’adj. est récent. Empr. du lat. dialectica
(du grec dialektiké, du verbe dialegesthai DICTAME, 1666 ; au moyen âge diciam,
« discuter »). — Dér. : dialecticien, d’après encore usité au xvi® s., et dilan au xrre.
le lat. dialecticus, 1488 (déjà au xri°- Empr. du lat. diclamnum (du grec dikiam-
xI11e 8. ; en outre dialetien au moyen âge). non). Depuis le xvire s., sens fig., surtout
dans la langue poétique.
DIALOGUE, xri°, rare avant le XVI® S.
Empr. du lat. dialogus « entretien philoso- DICTATEUR, 1213; dictature, xive,
phique à la manière des dialogues de Pla- Empr. du lat. diciator, dictatura. — Dér. :
ton » (du grec dialogos, v. le préc.). A pris dictatorial, 1777, d’après sénateur : séna-
en français le sens d’ «entretien entre deux torial, etc.
personnes ». — Dér. : dialoguer, 1717; a DICTER, xve; d’abord diter dès le
remplacé dialogiser, formé au xvi® s., en- x11e s. Empr. du lat. dictare. L’a. fr. a eu
core au xviri® s. comme terme d'école. une forme pop. ditier « rédiger, composer
DIAMANT, v. aimant. — Dér. : diaman- (une œuvre poétique) »; de même a. pr.
taire, 1680 ; diamanté, 1782 ; diamantifère, dechar, refait parfois en diciar d’après le
1864. lat. — Dér. : dictée, 1680.

DICT. ÉTYM: 13
DICTION 194

DICTION, xn°, au sens d’ « expression, xire ; différencier, vers 1400 (Christine de


mot », encore chez La Bruyère. Le sens Pisan) ; différent, vers 1350. Empr. du lat.
moderne ne paraît pas être antér. au differre- (qui a les deux sens), differentia,
xvire s. Empr. du lat. dictio qui a les deux differentiare (lat. scolastique), differens.
sens. Différend, subst., est une variante ortho-
graphique de l’adj., qui apparaît déjà chez
DICTIONNAIRE, 1539 (dictionnaire fran- Froissart. — Dér. de différencier : diffé-
cois latin de R. Estienne). Empr. du lat. rentiel, xvie, pour diverses techniques.
médiéval dictionarium, cf. le préc.
DIFFICILE, 1330; difficulté, xr11°. Empr.
DICTON, 1477. Empr. du lat. dicium des mots lat. difficilis, difficulias, qui
« mot, sentence » et orthographié d’après s’opposaient à facilis, facilitas. — Dér.
la prononciation du lat. à cette ép. On de difficulté : difficultueux, 1584, d’après
trouve en outre au xvie et au xvri® s. la majestueux : majesté, etc.
forme dicium.
DIFFORME, xui°; difformité, xive.
DIDACTIQUE, 1554. Empr. du grec Empr. des mots du lat. médiéval difformis,
didaktikos (de didaskein « enseigner »). difformitas, issus, par changement de préf.
DIÈDRE, v. -èdre. du lat. classe. deformis, deformitas (de forma
DIÈSE, 1556 (au fém.). Empr. du lat. « forme, beauté »). Du xIv® au xVII® s. on
diesis (d’un mot grec qui signifie propr. trouve assez souvent déformilé d’après le
« intervalle », d’où « quart de ton, demi- lat. class.
ton »). Le masc. est dû à la fois à la forme DIFFUS, xv° ; diffusion, 1587. Empr. du
diesis, qui a été parfois employée et aux lat. diffusus, diffusio (de diffundere, « ré-
termes musicaux de sens opposé bécarre, pandre »). Le sens de diffus, opposé à
bémol. — Dér. : diéser, 1732 (diésé en 1704). concis, date du xvri® s. — Dér. : diffuser,
DIESEL, 1929. Réduction de moieur XVI, rare jusqu'au xIX° 8.
Diesel, du nom de son inventeur, l'ingé- JIGÉRER, xvi®, au sens moderne; di-
nieur allemand Diesel, mort en 1913. gestion, xir1e (Rose). Empr. du lat. dige-
DIÈTE, terme médical, xrr1e. A signifié rere, propr. « porter çà et là, distribuer »,
aussi « régime de nourriture », sens aujour- digestio. Digérer a été empr. dès le xives.
d’hui disparu. Le sens moderne date au au sens de « calmer (la colère) », puis de
moins du xvi® s. Empr. du lat. diaela (du «mettre en ordre », encore usuel au XVIIe 8.,
grec diaita « genre de vie », d’où « régime d’où peuvent être issus certains emplois de
prescrit par un médecin »). — Dér. : digérer, tels que digérer une pensée, avoir
diététique, 1752 (une 1re fois diétitique, mal digéré, qui paraissent aujourd’hui se
en 1611). rattacher au sens dominant de « faire la
digestion ».
DIÈTE, terme politique, 1512. Empr. du
lat. médiéval dieia « jour assigné » (de dies DIGESTIBLE, 1783, une première fois
« jour »), employé pour traduire l’all. Tag en 1314 ; digestif, xrr1e. Dér. sav. de diges-
« jour » dans le sens de « jour d’assem- tus, part. passé de digerere, pour servir
blée », cf. Landiag, Reichsiag ; s’est dit d’adj. à digérer, digestion.
d’abord surtout d’assemblées politiques DIGITAL, adj., 1776 ; digitale, 1545, nom
d'Allemagne. de plante. Empr. du lat. digitalis (de digi-
DIEU. Lat. deus. — Comp. : adieu, xr1° ; tus « doigt ») ; la digitale a été ainsi nommée
bondieusard, 1865; bondieuserie, 1881, à cause de la forme de ses fleurs en doigt
dér. de bon dieu ; demi-Dieu, 1488 (et déjà de gant ; d’où digitaline, 1831.
au xr11e s.), pour traduire le lat. semideus DIGITI-. Premier élément de mots sav.
(en grec hémitheos). Nombreux comp. comp., tels que digitigrade, 1804, tiré du
ayant servi de serments, puis devenus lat. digitus « doigt ».
jurons, et intentionnellement altérés pour DIGNE, vers 1050 (Alexis) ; dignité,
éviter le blasphème : corbleu, 1612, issu de
corps Dieu ; morbleu, 1612, de mort Dieu ;
vers 1090. Empr. du lat. dignus, dignitas.Ce
dernier mot a donné en a. fr. une forme
parbleu, vers 1650 (Cyrano), de par Dieu ;
palsambleu, 1695 (Regnard), de par le sang pop. daintié « bien », d’où « joie, mets déli-
Dieu ; sacrebleu, 1808, de sacre Dieu (at-
cat », et, spécial. dans la langue de la
chasse, « testicules de cerf », conservé dans
testé au x1ve s.); sacre désignait souvent
au moyen âge la Fête-Dieu ; têtebleu, 1666 les dictionnaires sous la forme daintiers
(Molière) ; tudieu, 1537 (des Périers), abré- (déjà attestée vers 1100), due à une substi-
viation de vertu Dieu ; déjà iudey, 1611, tution de suff. — Dér. : dignitaire, 1752.
donné comme lorrain, ventrebleu, 1552, etc. DIGRESSION, xr1°. Empr. du lat. di-
DIFFAMER, x1rre ; diffamation, id. Em- gressio (de digredi « s'éloigner »).
pr. du lat. diffamare (de fama « renom- DIGUE, vers 1400 (Froissart) ; antér.
mée »), diffamatio (créé à basse ép.). Le dike, 1373. Empr. du moyen néerl. dijc;
verbe a eu au xvi® et au xviie s. les sens lit. diga et l’esp. dique, masc., viennent du
concrets de « souiller, battre, etc. », encore fr. — Comp. : endiguer, 1829, endigue-
conservés dans de nombreux patois. — ment, 1829 ; contre-digue, 1839 (une pre-
Dér. : diffamateur, vers 1460; diffama- mière fois en 1585).
toire, xXIv°. DILAPIDER, x1r1e; dilapidation, 1465.
DIFFÉRER, au xive s. aux deux sens Empr. du lat. dilapidare, dilapidatio, v.
d’ «être différent » et d’ «éloigner l’accom- lapider. — Dér. : dilapidateur, fin xvint®,
plissement de quelque chose » ; différence, une première fois en 1433, puis en 1560.
195 DIPLÔME
DILATER, xive-(Oresme) ; dilatation, d’une ville de Belgique, célèbre au moyen
1314. Empr. du lat. dilatare « élargir, âge pour la fabrication d’ustensiles de
étendre » (de laitus, « large »), dilatatio. cuivre.
DILATOIRE, xrr1° (Beaumanoir). Empr. DINDE, 1600 (O. de Serres). À été aussi
du lat. juridique dilatorius (de dilatus, masc., au sens de « dindon » ; encore usité
part. passé du verbe differre, v. différer). ainsi dans de nombreux patois septentrio-
On a aussi employé dilation, 1290, lat. naux. Issu de coq d’Inde, 1548 (Rab.) et
dilatio, encore dans les dictionnaires. de poule d’Inde, encore usités dans les
patois, et qui, au moyen âge, servaient à
DILAYER, v. délai. désigner la pintade : poules d'Inde, 1380;
DILECTION, x11°. Empr. du lat. dilectio coq d'Inde, 1465 (antér. en lat. médiéval
(de diligere « chérir »). — Dér. : prédi- gallina de India chez Frédéric II ; l’Inde
lection, xve®. désigne ici l’Abyssinie où la pintade vit à
l’état sauvage, cf. le nom donné par Linné
DILEMME, 1570. Empr. du lat. de basse numidia meleagris. Coq, poule d’Inde ont
ép. dilemma (du grec dilémma, v. lemme). été appliqués au dindon, quand celui-ci,
DILETTANTE, 1740 (de Brosses); d’a- trouvé au Mexique par les Espagnols lors
bord spécial. « amateur passionné de mu- de la conquête de ce pays (1519-21) et im-
sique italienne ». Empr. de l’it. dileliante porté peu après en Europe, l’a été en
« celui qui s’adonne à un art par plaisir », France, vers 1532. Cf. it. gallo et gallina
part. prés. de dilettare, v. délecter. — Dér. : d’ India, all. indianischer Hahn, indianische
dilettantisme, 1836. Henne, angl. cock et hen of India. — Dér. :
dindon, 1600, id., d’abord au sens de « din-
DILIGENT, vers 1180; diligence, id. donneau », le dindon étant appelé dindart ;
Empr. du lat. diligens, diligentia ; le sens d’où dindonneau, 1680, dindonner, 1842,
de « soin empressé » qui est celui du lat., dindonnière, vers 1650 (Scarron).
est fréquent au xvrie s. Celui de « hâte »,
DÎNER, v. déjeuner.
dominant aujourd’hui, apparaît de bonne
heure. Diligence « voiture publique », 1680, DINGUER, 1863 (Goncourt). Terme du
est issu de carrosse de diligence. fr. pop., également usité dans les patois,
DILUER, 1824, une première fois au dont le radical expressif est une variante
de dind-, très répandu dans des mots patois
xve s. Empr. du lat. diluere « laver, dé- pour exprimer le balancement d’une clo-
tremper ». che, etc., et qui est lui-même une variante
DILUVIEN, 1764. Dér. sav. du lat. dilu- de dand-, v. dandiner ; dingo (t), fin xix°,
vium, V. déluge. —- Comp. : antédiluvien, se rattache à dinguer.
1750. DIOCÈSE, vers 1180, fém. jusqu’au
DIMANCHE, d’abord diemanche. Lat. xvie s. Empr. du lat. eccl. dioecesis (déjà
eccl. dies dominicus « jour du Seigneur », usité en lat. class. ; du grec dioikésis « ad-
attesté à la fin du n°s., devenu *didomi- ministration, gouvernement »). — Dér. :
- nicu, ensuite, par dissimilation consonan- diocésain, 1265 (en outre -siien en 1332).
tique *diominicu ; le plus souvent masc., DIONYSIAQUE, 1762. Empr. du grec
comme l'esp. domingo, mais aussi dans dionysiakos, dér. de Dionysos, autre nom
quelques régions fém., comme lit. dome- . de Bacchus.
nica, le genre de dies ayant aussi varié.
Dies dominicus s’est substitué à dies solis, DIOPTRIE, fin xixe. Tiré de diopitrique,
que la Gaule, avant de le perdre, a com- 1626, empr. du grec dioptriké « art de me-
muniqué aux langues voisines : breton surer les distances » (de dioptra « appareil
disul, angl. sunday, all. Sonntag. — Dér. : pour viser »).
endimancher, XvI® s.
DIORAMA, v. panorama.
DÎME. Lat. decima, fém. de decimus DIPHTÉRIE, 1855. Nom donné par
« dixième »; désignait dès l’époque répu-
blicaine un impôt du dixième du produit, Trousseau à la maladie que Bretonneau
prélevé sur les propriétaires des provinces avait nommée diphiérile, dans une com-
conquises. It. decima, a. pr. desma ; l’esp. munication faite en 1821 et publiée en
diezmo est masc., comme l’a. pr. desme ; 1826; mots faits sur le grec diphthera
« membrane ». — Dér. : diphtérique, fin
disme l’est aussi, mais rarement, en a. fr.
— Dér. : dîmer, xr1°.
XIXe,
DIMENSION, 1425. Empr. du lat. de DIPHTONGUE, xrne (écrit alors dit-).
basse ép. dimensio (de dimensus, part. Empr. du lat. des grammairiens diphihon-
passé de dimeliri « mesurer »). gus, fém. (du grec diphthongos) propr.
« son (phihongos) double »).
DIMINUENDO, 1838. Empr. de lit.
diminuendo, gérondif de diminuire « dimi- DIPLÔME, 1732, d’abord « charte »,
nuer ». « diplôme émanant d’un corps enseignant »,
1829 ; diplomatique, subst. « science qui a
DIMINUER, 1308; diminutif, xiv®; pour objet les diplômes, les chartes »,
diminution, xr1e. Empr. du lat. diminuere, 1708 ; adj., « relatif à cette science », 1732 ;
. diminutivus (terme de gramm.), diminulio. dès 1726, « relatif aux diplômes qui règlent
DINANDERIE, 1387. Dér. de dinandier, les rapports internationaux ». Empr. du
x111°, dér., avec le suff. des noms de métier lat. diploma (du grec diplôma, propr.
tels que faillandier, etc., de Dinant, nom « feuille de papier, etc., pliée en double »),
DIPLÔME 196

et du lat. scientifique moderne diploma- DISCIPLINE, vers 1080 (Roland). Em-


ticus (cf. le De Re Diplomatica de Mabillon pr. du lat. disciplina, « enseignement,
en 1681). — Dér. : 1° de diplomatique : science, discipline militaire, etc. ». Jus-
diplomate, 1792, d'où diplomatie en 1791, qu’au x1v®s. signifie surtout « châtiment »,
sur le modèle d’aristocrate, -lie ; diploma- sens issu du lat. eccl. du moyen âge, puis
tique « de diplomate », adj., 1777 ; 2° de « massacre », et d’autre part, « instrument
diplôme : diplômé, 1867. de flagellation ». — Dér. : disciplinaire,
1835 (une première fois en 1611) ; discipli-
DIPTYQUE, 1838, au sens moderne, en ner, x11°, au sens de « châtier », développe-
parlant de peintures, de bas-reliefs. D’a- ment du sens parallèle au verbe, discipli-
bord, depuis la fin du xvrie s., terme d’an- nable, 1389 ; indisciplinable, 1568 ; indis-
tiquité romaine et eccl. : «sorte de tablettes cipline, 1501 ; indiscipliné, x1ve.
doubles où l’on inscrivait des noms de
magistrats, d’évêques, de bienfaiteurs de DISCONTINU, 1508, une première fois
l'Eglise, etc. ». Empr. du lat. dipiycha, au xiv® s.; discontinuer, vers 1360; dis-
plur. neutre (du grec diptykha « tablettes continuation, xiv® (Oresme). Empr. du lat.
pliées en deux », v. polyptyque, triptyque). scolastique discontinuus, discontinuare, dis-
continuatio. — Dér. de discontinu : discon-
DIRE. Lat. dicère. — Dér. et Comp. : tinuité, 1775, d’après continuité.
dire, subst., xit1e; diseur, 1233; adirer
« égarer », XII*, usuel jusqu’au xvIIe &., DISCONVENIR, 1529, mais v. le dér.
encore aujourd’hui dans la langue du Empr. du lat. disconvenire. — Dér. : dis-
droit et dans les patois, issu, par l’inter- convenance, 1488.
médiaire du part. adiré (cf. affaire
affairé), longtemps plus usité que les autres DISCORD, adj., 1304. Empr. du lat.
formes verbales, de la locution {étre) à discors, -ordis.
dire « manquer », xli*, Cf. avoir à dire DISCORDANT, xr1°; discordance, id. ;
« manquer de », xvi®, érouver à dire « ne réfection, d’après le lat., de l’a. fr. descor-
pas avoir son compte », xvire ; dédire, xI1°, dani, descordance, plus usuels jusqu’au
dédit, x11° ; médire, x1I1°, médisance, xVI® XVIe s., dér. de l’anc. verbe descorder (refait
(Amyot), par l'intermédiaire du part. prés. également en discorder), lat. discordare
médisant ; redire, xrI°, redite, xve (Ch. « être en désaccord », d’où aussi it. discor-
d'Orléans). V. contredire, maudire, prédire. dare, esp. arch. et a. pr. descordar. Le sens
Bien-dire, subst., xvri® (Bossuet) ; qu’en musical s’est développé en opposition à
dira-t-on, fin xviie (Saint-Simon); soi- accorder.
disant, vers 1435; susdit, 1495; surdit
au x11e s. ; on-dit, fin xVIIIe. DISCORDE, xr°, parfois descorde au
moyen âge d’après les préc. Empr. du lat.
DIRECT, xire, peu usuel avant le discordia.
xvi® s.; directeur, xve; direction, 1372
(Oresme). Empr. du lat. directus, director, DISCOURIR, 1539, d'abord discurre,
directio (de dirigere, v. diriger) ; v. droit. — vers 1200; paraît rare au moyen âge;
Dér. : 1° de direct : indirect, 1416 ; 2° de discours, 1503. Empr. des mots du lat. de
directeur : directorial « qui concerne un basse ép. discurrere, discursus, en lat. class.
directeur », fin xIx°; une première fois « courir Çà et là, action de courir çà et
au XVII S. là », et francisés d’après courir, cours. Le
DIRECTIVE, fin xixe, tiré de l’adi. sens propre du verbe a été parfois repris
directif, rare, attesté dès 1300; directoire, au xXvI° s. — Dér. : discoureur, xvre.
xve, diverses acceptions périmées ou his- DISCOURTOIS, 1584 (descourtlois en
toriques. Dér. sav. du lat. directus, part. 1416), discourtoisie, 1580 (Montaigne) (des-
passé de dirigere, v. le préc. — Dér. de courtoisie au début du xv® s., dans une
directoire au sens politique : directorial, traduction de Boccace). Dér. de courtois,
1796. dans lesquels le préf. des- a été remplacé
DIRIGER, 1496. Empr. du lat. dirigere, par dis- sous l'influence de l’it. discortese.
v. les préc. — Dér. : dirigeable, 1789 ; diri-
gisme, 1948. DISCRET, xr1° ; discrétion, id. Empr. du
lat. médiéval discretus, au sens de « capable
DIRIMANT,, 1701. Dér. sav. du lat. diri- de discerner », sens développé d’après le
mere au sens juridique d’ « annuler », d’où verbe discernere, v. discerner (en lat. class.
aussi dirimer, 1616. ne signifie que « séparé », sens rarement
DISCERNER, xir1e, au sens de « sépa- repris), et du lat. anc. discretio « distinc-
rer »; sens moderne dès lors. Empr. du tion, discernement », sens dominants jus-
lat. discernere, propr. « séparer », d’où « dis- qu’au xviies., d’où sont issues les locutions
tinguer par les sens », puis « par l'esprit ». à discrétion, à la discrétion de, dès le xvres.
Le premier sens a été usité jusqu’au et le sens d’ “enjeu indéterminé » au xvies.,
XVII $s. — Dér. et Comp. : discernable, le sens de « réserve, etc. » s’est développé
1729 ; discernement, 1532; a signifié aussi au xviie s. d’après l’adj. — Dér. : discré-
au xvIIe s. « action de séparer » d’après le tionnaire, 1794 ; indiscret, 1488, indiscré-
verbe ; indiscernable, 1582. V. discrétion. tion, vers 1200, «manque de discernement »
jusqu’au xvi® s., développement de sens
DISCIPLE, xr1°. Empr. du lat. eccl. dis- parallèle au simple.
cipulus « disciple de Jésus-Christ », en par-
lant des apôtres, en lat. class. « élève ». DISCRIMINATION, 1877; discriminer,
C'est du sens eccl. quele sens moderne 1948. Empr. du lat. discriminatio et discri-
s’est développé, vers le xvie 8. minare, mêmes sens.
197 DISQUALIFIER

DISCULPER, 1615: Réfection de l’anc. le premier établissement de ce genre fut


descolper, descoulper, encore en 164%, comp. établi en Angleterre en 1699. Au sens de
de colpe, « faute », v. coulpe, d’après le lat. « recueil de formules pharmaceutiques ou
médiéval disculpare. Bouhours attribue de laboratoire », en 1611, c'est un dér. de
l'introduction de disculper à Mazarin, ce dispenser au sens de « doser ».
qui fait penser à une influence de lit.
discolpare. DISPENSER, 1283, au sens d’ « accorder
une dispense » ; dispensateur, x11° ; dispen-
DISCURSIF, xvi®. Empr. du lat. sco- sation, id. Empr. du lat. dispensare, qui ne
lastique discursivus (de discursus « dis- signifie à l’époque class. que « distribuer »,
cours »). sens repris au XvI® s., dispensaior, dispen-
satio. Celui d’ « accorder une dispense »
DISCUTER, x111° ; discussion, xr1°. Em- est empr. du lat. eccl. du moyen âge. —
pr. du lat. discutere, discussio, propr. « se- Dér. : dispense, 1437 ; indispensable, 1654,
couer, secousse », d’où « séparer, examiner », a signifié aussi « dont on ne peut être dis-
et, à basse ép., « discuter, discussion ». — pensé par l'Eglise » au xvires.
Dér. : discutable, 1791 ; indiscutable, 1836 ;
discuteur, xv°, rare jusqu’au xix°. DISPERSER, xv: ; dispersion, xrr1°. Le
premier est un dér. du lat. dispersus, part.
DISERT, 1321. Empr. du lat. disertus. passé du verbe dispergere, ou une réfection
DISETTE, xrie s. (sous la forme di- de disperger, attesté en 1482, d’après l’ad)j.
sietes). Peut-être dér. du verbe dire au sens dispers, assez usuel au xvi® s., empr. du
qu’il a dans des locutions comme trouver à lat. dispersus ; le deuxième est empr. du
dire « regretter l'absence de », avec le suff. lat. dispersio.
verbal -eite, ou bien empr. du moyen grec
disechtos « année bissextile, année de DISPONIBLE, xive. Empr. du lat. mé-
malheur ». La deuxième hypothèse trouve diéval disponibilis (de disponere). — Dér. :
un appui dans le fait que l'Italie connaît disponibilité, 1790, une première fois en
le mot dès le moyen âge (anc. génois nn ; indisponible, 1752, indisponibilité,
dexeta). 1829.
DISGRAÂACE, 1539 ; disgrâcier, 1552 ; dér. DISPOS, 1465. Le fém. inusité aujour-
de disgrâcié, usuel au xvi® s. Empr. des d’hui a été parfois employé au xvI® s.;
motsitaliens disgrazia, disgraziato «malheu- sa disparition est due à l’hésitation entre
reux, mauvais, méchant » (ces deux der- disposie et dispose, qui s’est manifestée
niers sens sont parfois employés au xvi®s.). au xvie et au xvires. Empr. de l’it. disposto
(dont la forme explique le fém. disposie,
DISJOINDRE, x1v® (Oresme). Réfection, v. ci-dessus, et le masc. disposi, fréquent
d’après le lat., de dé(s)joindre, encore dans au xvi® s.), francisé en dispos d’après dis-
les dictionnaires, lat. disjungère; cf. de poser.
même a. pr. desjonher. DISPOSER, 1181. Empr., avec franci-
DISJONCTIF, 1534 ; disjonction, xI11°S. sation d’après poser, v. composer, du lat.
Empr. du lat. disjunctivus, disjunctio. disponere « distribuer, régler, établir, etc. ».
DISLOQUER, 1545; dislocation, 1314, — Dér. : indisposer, vers 1400, au part.
au sens médical, d’où se sont développés passé, qui a été suggéré par le lat. eccl
les autres sens. Empr. du lat. médical du indispositus « non préparé », cf. le texte de
moyen âge dislocare, dislocatio (on a en lat. Gerson : « Ame indisposée par péché mor-
médical anc. delocatio, de locus « endroit »). tel »; au sens de « légèrement malade »,
Disloquer a éliminé une forme pop. des- 1460 ; le verbe n’est devenu usuel qu’à la
louer, usuel jusqu’au xvi® s., au même fin du xvie s. ; prédisposer, 1798, une pre-
mière fois au xv°e s.
sens, lat. pop. *dislocäre ; de là aussi l’a.
pr. deslogar. DISPOSITIF, 1314, comme terme de mé-
DISPARATE, adj., xvire. Empr. du lat.
decine, sens techn. divers d’après le verbe
préc. ; disposition, xr1°. Le premier est un
disparaius « inégal » et, à basse ép., « dispa- dér. de dispositus, part. passé du verbe
rate », part. passé du verbe disparare
disponere, le deuxième empr. du lat. dis-
« séparer, diversifier ». Disparal semble ne posilio. — Dér. : indisposition, 1459 ;
jamais avoir existé et le choix de la forme
fém. être dû à la présence de disparale, prédisposition, 1798.
subst. fém., « acte extravagant », XVIIe DISPUTER, xu°. Empr. du lat. dispu-
(Chapelain) (que le dér. suiv. a fait dispa- iare, au sens de « discuter ». Les sens de
raître), empr. de l'esp. disparaie (de dispa- « rivaliser, quereller », et la construction
ratar « faire des actes extravagants »). — transitive se sont développés au xvrIe S.
Dér. : disparate, subst., début xIx°, « dis- _— Dér. : disputailler, xvi° ; dispute, 1474,
semblance choquante », ordinairement fém. au sens de « discussion », aujourd’hui
d'après le mot empr. de l'esp. vieilli, au profit de celui de « querelle »;
DISPENDIEUX, 1737. Empr. du lat. de disputeur, 1681, une première fois au XII1°8.
basse ép. dispendiosus (de dispendium) DISQUALIFIER, 1784 ; répandu surtout
pour servir d’adj. à dépense. dans le langage des courses de chevaux,
; DISPENSAIRE, 1775 (comme établisse- aujourd’hui entré dans la langue courante ;
ment d'Angleterre, en 1835 à propos de la disqualification, 1784. Empr. des mots angl.
France). Empr. de l’angl. dispensary (du io disqualify (de to qualify, empr. du fr.
qualifier), disqualification, termes de sport.
verbe {0 dispense « distribuer »), v. les suiv.;
DISQUE 198

DISQUE, 1556, paraît peu usuel avant DISTENDRE, 1721, une première fois,
le xvire s. Empr. du lat. discus « palet », xvie (Paré); distension, xIve. Empr. du
déjà dit de différents objets de forme plate lat. distendere, distensio.
et circulaire, v. dais. — Dér. : discothèque,
vers 1933, formé d’après bibliothèque. DISTILLER, xuie; distillation, 1372.
Empr. du lat. distillare « tomber goutte à
DISSÉMINER, 1787, une première fois goutte fsiilla) », distillatio ; le verbe dis-
en 1503 ; dissémination, 1764. Empr. du tiller a été aussi intransitif au xvi® et au
lat. disseminare (de semen « semence »), xviie s., en cet emploi d’après le lat. Le
disseminatio. sens techn. des deux mots vient du lat.
DISSENSION, xr1°. Empr. du lat. dis- des alchimistes. — Dér. : distillateur, xvi®
sensio (de dissentire « être en désaccord »). (Palissy) ; distillatoire, xvie (Paré) ; distil-
lerie, 1784.
DISSENTIMENT, 1787, une première
fois en 1611, dissentement chez Montaigne. DISTINGUER, 1360 ; distinct, 1314 ; dis-
Dér. du verbe dissentir, Xv®°, vieilli depuis tinction, xr1e ; distinguo, 1578 (H. Estien-
le xvir1e s., empr. du lat. dissentire. ne). Empr. du lat. distinguere, distinctus,
distinctio, distinguo (terme du lat. des
DISSÉQUER, 1611; dissection, 1538. écoles). Le sens de « donner une marque
Empr. du lat. dissecare, dissectio. — Dér. : honorifique qui distingue » a été pris par
dissecteur, 1958. distinguer au xvirie s. et le sens correspon-
DISSERTER, 1723 ; dissertateur, 1726 ; dant de distinction est du xviie. — Dér.
dissertation, 1645 (G. Patin). Empr. du de l’adj. : distinctif, 1314.
lat. dissertare, dissertator, dissertatio. DISTIQUE, 1546; d’abord distichon,
DISSIDENT, 1767 (Diderot, une pre- 1550. Empr. du lat. distichon (du grec dis-
mière fois au xvi® s.); dissidence, 1787, tikhon, comp. de dis « deux fois » et de
une première fois au xv® s. Empr. du lat. stikhos « vers »).
dissidens (part. prés. du verbe dissidere DISTORSION, 1538. Empr. du lat.
« s’écarter, être en désaccord », de sedere distorsio, id.
« s’asseoir »), dissideniia.
DISTRAIRE, 1377 (Oresme); dis-
DISSIMULER, x1ve (Oresme) ; dissimu-
traction, 1335. Empr. du lat. distrahere
lateur, xve ; dissimulation, x1re. Empr. du
lat. dissimulare, dissimulator, dissimulatio, (francisé d’après fraire, etc.), propr. « tirer
v. simuler. en divers sens », distractio. Distraction
semble avoir pris le sens d’ « amusement »
DISSIPER, xru11° ; dissipateur, vers 1400 au xviie s.; mais le verbe n’a pas claire-
. (E. Deschamps) ; dissipation, 1419. Empr. ment celui de « (s’)amuser » avant le xvirre.
du lat. dissipare « disperser, répandre, dé-
truire », dissipaior, dissipatio. Le sens DISTRIBUER, 1248 {(destribuer); dis-
de « se distraire, perdre son temps en tributeur, vers 1370 ; distributif, x1ve (Ores-
amusements » s’est développé au xvire s. me) ; distribution, xrv°. Empr. du lat. dis-
tribuere, distributor, distributivus (médié-
DISSOCIER, 1579, une première fois val ; en lat. ancien, terme de grammaire),
1495. Empr. du lat. dissociare, v. asso- disitributio. — Dér. : redistribuer, xviri®
cier. — Dér. : dissociation, xve. (Turgot).
DISSOLU, vers 1190. Empr. du lat. DISTRICT, 1421. Utilisé en 1789 pour
dissolulus, part. passé du verbe dissoluere, désigner une subdivision des départe-
v. dissoudre. ments. Empr. du lat. de basse ép. distric-
DISSOLUTION, xrI°, au sens moral;
tus ; a éliminé une forme pop. destroit
sens matériel en 1314. Empr. du lat. dis- « étendue d’une juridiction », d’où « dis-
solutio qui a les deux sens. trict », usuel jusqu’au xvire s., encore chez
La Fontaine, Fables, X, 14.
DISSONER, xiv® (Bersuire, rare avant DITHYRAMBE, xvie (Rabelais); di-
le xvir1 5.) ; dissonance, 1628, une première thyrambique, 1568. Empr. du lat. dithy-
fois au xive s. Empr. du lat. dissonare, rambus, dithyrambicus (du grec dithyram-
dissonantia. bos, -bikos).
DISSOUDRE, vers 1190. Empr. du lat.
dissolvere et francisé d’après les verbes DITO, 1723. Terme commercial, empr.
formés avec le même radical, cf. absoudre de l’it. ditlo, au sens de « ce qui vient
et l’a. fr. soudre « payer », v. soulte, d’être dit » (forme usuelle en Toscane, à
côté de l’it. littéraire deito, part. passé du
DISSUADER, x1v° (Bersuire). Empr. du verbe dire).
lat. dissuadere (de suadere « persuader »).
DIURÉTIQUE, xive. Empr. du lat. mé-
DISTANT, xiv® (Oresme); distance, dical diureticus (du grec diourétikos).
xi11e (J. de Meung). Empr. du lat. disians DIURNE, 1425, mais peu usuel avant le
(part. prés. du verbe distare), distantia. Le XVIe s. Empr. du lat. diurnus.
sens moral de distant : « qui observe ou
qui fait observer les distances », 1829 DIVA, 1833. Empr. de l’it. diva, propr.
(Stendhal, en parlant des Anglais), vient « déesse », terme poétique appliqué à la
de l’angl. distant. — Dér. : distancer, 1838, femme aimée et aux grandes cantatrices
en langage de courses de chevaux, d’après (empr. du lat. diva « divine » ; v. dive). —
l’angl. to distance. Dér. : divette, 1890.
199 DOCTRINE

DIVAGUER, 1534. Empr. du lat. de DIVISER, xr1e. Réfection de deviser d'a-


basse ép. divagari « errer çà et là »; le près le lat. dividere, voir les suivants ; jus-
sens concret est aujourd'hui disparu, en qu’au xvi® s. diviser est rare et son sens
dehors de la langue de la jurisprudence. n’a été fixé qu’alors.
Le sens fig. est propre au fr. — Dér. : DIVISEUR, 1213 ; divisible, xrv° (Ores-
divagateur, 1838 ; divagation, 1577, déjà
me) ; division, xu°. Empr. du lat. divisor,
au sens fig., développement du sens paral- divisibilis (créé à basse ép.), divisio, éga-
lèle au verbe. lement terme de mathématique (de divi-
DIVAN, 1653, au sens d’ « estrade à dere, v. le préc.). Division, au sens mili-
coussins », à propos des Turcs. Antér. taire, date de la fin du xvirie s. — Dér. de
défini « court ou conseil », 1558, à propos divisible : divisibilité, xv°. — Dér. de divi-
de la Turquie; au xvirie s. « conseil des sion : indivision, xvi° ; divisionnaire, 1793,
ministres, etc. », et aussi « chez les no- au sens militaire.
tables turcs salle de réception, dont le tour DIVORCE, xiv<. À signifié aussi « sépa-
est garni de coussins ». Empr. du turc ration (en général) » jusqu'au xvuie &.
diouan, qui a ces derniers sens, lui-même Empr. du lat. divorlium qui a les deux
d’origine persane. V. douane. Toutefois le sens. — Dér. : divorcer, XIvV°®.
sens de « meuble, sorte de sofa », relevé
pour la première fois dans une Descriplion DIVULGUER, xive; divulgation, 1510.
d'Égypte de 1812, vient vraisemblablement Empr. du lat. divulgare, divulgatio (créé à
de l’arabe d'Égypte, seul parler oriental basse ép.).
où ce sens ait été signalé.
DIX. Lat. decem. It. dieci, esp. diez. —
DIVE, 1564 (Rabelais, dans l'expression Dér. : dixième, x11° (sous la forme diseme),
v. centième ; dizain, xv®, au moyen âge
la dive bouteille, qu’on dit encore par plai-
santerie). Empr. du lat. diva « divine », signifie aussi « dixième »; le suffixe -ain a
fém. de divus. remplacé -ein, lat. -Enus des multiplicatifs,
cf. a. pr. dezen ; dizaine, 1515, v. centaine,
DIVERGER, 1720; divergent, 1626 ; di- d’où dizenier, xve. — Comp. : dix-sept,
vergence, id. Empr. du lat. divergere « pen- xre (dis e set) ; dix-huit, id. (dis e uit);
cher, incliner », divergens, divergentia pour dix-neuf, id. (dis e neuf).
des emplois scientifiques, v. converger ; (V. Hugo, déjà en 1674
le sens fig. s’est développé en fr. à la fin DJINN, 1828
du xvIIIe 8. dgin dans un récit de voyage). Empr. de
l'arabe djinn « démon bon ou mauvais ».
DIVERS. Lat. diversus « qui est en sens DO, 1767 (J.-J. Rousseau). Empr. de
opposé », d’où « opposé, différent de », d’où, l’it., v. gamme.
à basse ép. « varié » et au plur. « quelques » ;
a dû prendre en outre le sens de « méchant », DOCILE, 1495; docilité, 1493. Empr.
attesté en a. fr., où il a été usuel jusqu’au du lat. docilis, docilitas (de docere « en-
xvi® s., par l’a. pr. divers et l’it. diverso. seigner »).
Les sens du lat. class. ont été en outre DOCK, 1671, en parlant de choses de
parfois repris.
l'Angleterre ; docker, 1899. Empr. de l’angl.
DIVERSIFIER, x1r1e. Empr. du lat. mé- dock (qui vient du néerl. docke), docker.
diéval diversificare. DOCTE, 1532 (Rabelais). Empr. du lat.
DIVERSION, 1314. Empr. du lat.r de
»).
doctus ; a éliminé l’a. fr. duit, encore usuel
au xvie s., « expérimenté, habile », part.
basse ép. diuersio (de divertere « détourne
passé de l’anc. verbe duire « instruire »,
DIVERSITÉ, xn°. Empr. du lat. diver- lat. pop. *docére, lat. class. docére.
silas (de diversus), v. divers. DOCTEUR, x11° ; doctorat, 1575. Empr.
DIVERTIR, vers 1400. A signifié propr. du lat. doctor, doctoratus (lat. médiéval).
« détourner » jusqu’à la fin du xvi®s., d'où Docteur, grade universitaire, créé vers le
« détourner de ses occupations », au XVII*S., x11e 8. (au xvie s., spécial. « docteur en
d’où « distraire ». Empr. du lat. diverlere théologie »), est devenu partic. usuel au
« (se) détourner »; pour la conjugaison, xIxe s. au sens de « médecin » (mais déjà
cf. convertir. — Dér. : divertissement, xv°, signalé au xvi1° 8.) parce que les médecins,
développement du sens parallèle au verbe. ourvus du titre de docteur, mettaient
FE titre en valeur, quand le grade d’offi-
DIVETTE, v. diva. cier de santé existait encore. — Dér. :
doctoral, xive; doctoresse, XvV° (jusqu’au
DIVIDENDE, xvie, comme terme d’a- xixe s. s'employait par plaisanterie) ; a
rithmétique. Empr. du lat. dividendus « qui été de nouveau essayé de nos jours (attesté
doit être divisé » (de dividere) ; sens finan- en 1871), mais sans s'établir solidement.
cier au XVIII S.
DOCTRINE, xue; doctrinal, id. Empr.
DIVIN, xive; en outre devin en ce sens du lat. doctrina « enseignement, science,
au xue s.; divinité, xr1e. Empr. du lat. doctrine », doctrinalis ; le sens de « doc-
divinus, divinitas. — Dér. : diviniser, 1581. trine » a triomphé au xvrre s. et a éliminé
les deux autres, le premier dominant au
DIVINATEUR, xv°; divination, x111° (en moyen âge, le deuxième encore usuel au
).
outre devinalion au xr11° 8. d’après deviner xvire s. — Dér. : doctrinaire, 1787, comme
Empr. du lat. divinator, divinatio, v. devi- terme politique, antér., depuis le xrv®s.,
ner. — Dér. : divinatoire, xXIv*.
DOCTRINE 200
avait d’autres sens aujourd’hui disparus; dueille, doille, lat. doleam, etc. L’é de do-
endoctriner, xri*, développement du sens léance est d’origine incertaine ; do (u )liance
parallèle au verbe. a peut-être été d’abord refait en *dou-
DOCUMENT, xrie. Empr. du lat. docu- loyance d’après le verbe douloyer, attesté
menlum (de docere) « enseignement, ce qui au xvI® s., puis en doléance sur le modèle
sert à instruire », seul sens du mot fr. jus- des deux formes croyance : créance. Quant à
qu’au xvrre s. ; le sens moderne, qui paraît l’o, à côté de douleur, douloir, il résulte
être issu de l'emploi de document comme d’une hésitation de la prononciation qui se
terme de palais dans iütres et documents retrouve aussi dans soleil, etc.
depuis la fin du xvnie s., date du début du
DOLENT,, x1° {Alexis) sous la forme du
XIX°. — Dér. : documentaire, 1876 ; docu-
fém. dolente. En raison de l'ancienneté de
mentation, 1870 ; documenter, 1769. cette forme, cf. aussi dolentas, fém. plur.,
DODÉCA-. Premier élément de mots dans le Mysière de l'Époux, au milieu du
Sav. comp. tels que dodécagone, 1690, XIe 8., il faut admettre que le lat. dolens
tiré du grec dôdeka « douze ». a été refait dans le lat. pop. de la Gaule
septentrionale en *dolentus, -a.
DODELINER, 1532 (Rab.); dodiner,
XIVe. Mots expressifs, se disant du balan- DOLER. Lat. doläre. V. doloire.
cement du corps. Le radical de ces mots
se retrouve également dans le mot enfantin DOLICHO-. Premier élément de mots
dodo, xve (Charles d'Orléans), dont la créa- savants comp., tels que dolichocéphale,
tion a été en même temps suggérée par le 1855, tiré du grec dolikhos « long ».
verbe dormir. Dodu, vers 1470, paraît
appartenir à la même famille; aurait DOLLAR, .1750. Empr. de l’anglo-amé-
ricain dollar (qui vient lui-même du bas-
signifié propr. « bien soigné, dorloté », cf.
le sens de « bercer » que possède dodiner ; v. allemand daler, all. Taler).
dondon. — Dér. : dodinement, 1552. DOLMAN, 1763 (J.-J. Rousseau, dé-
DOG-CART, 1858. Empr. de l’angl. dog- crivant un costume arménien); le dol-
cart, propr. « charrette à chiens », cette man passe pour avoir été introduit sous
voiture de chasse ayant une caisse disposée Louis XV. Empr., par l'intermédiaire de
pour loger des chiens. l'all. Dolman, du hongrois dolmany, qui
vient lui-même du turc dolämän. Le mot
DOGE, 1642; dogaresse, 1835. Empr. turc a été introduit directement sous la
des mots it. doge, dogaressa, tous deux forme doliman, en 1568, pour désigner un
empr. du vénitien, où doge représente le vêtement turc : « sorte de robe de dessus,
lat. ducem, acc. de dux; l’it. litt. dit duca à manches étroites », doloman, 1537.
et duce.
DOLMEN, 1805. Fabriqué avec deux
DOGME, 1570 ; dogmatique, 1537 ; dog- mots bretons iaol (tol) « table » et men
matiser, xr11°; dogmatiste, 1558. Empr. « pierre » par des archéologues celtomanes
du lat. dogma, dogmaticus, dogmatizare ignorant les règles de la langue bretonne
(lat. eccl.), dogmatistes (id.) (du grec dogma (qui dirait, si le mot existait, taol-ven).
« opinion, doctrine », -likos, -tizein, -tistés,
ce dernier du grec eccl.), employés au DOLOIRE. Lat. pop. *dolätoria, dér. de
moyen âge surtout dans le langage de la doläre, v. doler ; préféré au neutre dolät-
théologie, comme ils l’étaient dans le lat. rium, attesté à basse ép., « sorte de hache
et le grec de l’Église. A partir du xvie 8., pour tailler des pierres », d’après doläbra
sens plus étendus, et, en outre, les sens du « outil (analogue à la doloire), servant à
lat. et du grec du paganisme. — Dér. de tailler, creuser, etc. »; de même a. pr.
dogmatiser : dogmatiseur, 1586 ; dogma- doladoira.
tisme, 1580 (Montaigne).
DOLOMITE (plus usité que dolomie).
DOGUE, 1406. Empr. de l’angl. dog Tiré en 1792 par de Saussure de Dolomieu,
« chien »; cette variété de chien d’origine nom du célèbre naturaliste (1750-1801),
anglaise a pénétré également dans les qui a découvert et étudié cette substance.
autres pays européens, d’où l’it. dogo, l’all.
Dogge, etc. ; v. bouledogue. DOLOSIF, 1864; une fois dolosivement,
1626. Dér. de l’adj. lat. dolosus pour servir
DOIGT. Lat. digitus, devenu *ditus en d’adjectif à dol.
lat. pop. It. dito, esp. dedo. Un plur. neutre
*dita, de sens collectif, a donné l’a. fr. doie DOM, xvie, comme titre de religieux ;
« largeur d’un doigt », conservé au sens depuis réservé aux Chartreux et aux Béné-
simple de « doigt » en lorrain. Digitus avait dictins. Empr. de l’it. don, avec une graphie
aussi le sens de « doigt de pied » ; v. orteil. qui rapproche le mot de la forme latine.
— Dér. : doigté, 1798, par l'intermédiaire DOMAINE, xr1e, sous la forme demaine,
d’un verbe doigter, terme de musique, dominante en a. fr. Soit empr. du lat. domi-
1726; doigtier, xrve. nium, comme l’a. pr. domini, soit tiré de
DOL, aujourd’hui seulement terme juri- l’anc. adj. demaine « seigneurial, etc. »,
dique, 1248. Empr. du lat. dolus « ruse ». empr. du lat. dominicus. Le développe-
ment du mot s’est fait, en tout cas, en
DOLÉANCE, 1421. Réfection de do(u)- contact avec le lat. médiéval domanium,
liance (où { est probabl. mouillée), xrrre, fait lui-même sur l’a. fr. demaine. — Dér. :
dér. de l'anc. verbe douloir, lat. dolëre ; domanial, xvie, d’après le lat. médiéval
l’? mouillée est due aux formes du subj. domanialis.
201 DOPER

DÔME, en parlant d’une église cathé- DON « action de donner ». Lat. donum.
drale d'Italie, xve. Empr. de l'it. duomo It. dono, esp. don.
qui vient du lat. eccl. domus, soit dans
domus Dei « maison de Dieu », soit dans DON, titre espagnol, 1606. Empr. de
domus ecclesiae « maison de la chrétienté », l'esp. don, lat. dominus, v. dame ; a été
d’où « maison des clercs, du chapitre, de parfois transcrit dom au xvre et au xvrres.,
l’évêque », d'où « église épiscopale ». Le d’après dom.
lat. domus a également passé en Allemagne, DONATAIRE, xive; donateur, 1320;
d’où l’all. anc. Thum, aujourd’hui Dom donation, 1235, a éliminé une forme pop.
(refait sur le fr.), et l'emploi du fr. dôme donaison, très usuel au moyen âge, encore
en parlant de cathédrales d'Allemagne, signalée en 1642. Empr. du lat. donatarius,
DÔME, sorte de coupole, xvie (O0. de donaïor, donatio (de donare), v. donner.
Serres : dosme (d’où l'accent circonflexe), DONC. En outre dongues, usuel jus-
en parlant d’un pigeonnier). Empr. du qu’au xvII® S.; a signifié aussi en a. fr.
prov. doma, attesté une seule fois, grec «alors, puis ». Lat. dunc, attesté à l’époque
dôma, propr. « maison » et spécial. « toiture impériale, de formation discutée, mais dont
plate », introduit par les colonies grecques le sens consécutif est assuré par l'accord
du Sud de la Gaule (et non par le lat. de des langues romanes ; issu de dumque,
basse ép. doma) ; a pris ensuite le sens de élargissement de dum, particule qui est
« toiture de forme ronde », d’où « coupole ». souvent employée, en lat. de basse ép., au
DOMESTIQUE, adj., xive ; domesticité, sens de « donc » et qui se joignait à des
1628. Empr. du lat. domesticus (de domus imper., cf. agedum « allons », dic dum
« maison »), domesticitas (créé à basse ép.). « parle donc » ou altération de dum d’après
L’a. fr. a possédé une forme pop. domesche tum, tunc. La syllabe finale -que(s), qui
« domestique » (en parlant des bêtes), persiste dans la prononciation moderne,
« franc » (opposé à « sauvage », en parlant vient de unquam. L'ancien comp. adonc,
des plantes), disparu vers le xve s., mais est encore vivace dans les patois. It. dun-
encore usuel dans de nombreux patois au que, esp. arch. doncas.
sens d’ « apprivoisé, etc. », cf. aussi l’a. pr. DONDON, 1579. Mot expressif à rappro-
domesge, etc., « de la maison, greffé, etc. ». cher de dandiner et dodeliner ; le sens de
— Dér. : domestique, subst., 1432 ; domes- « balancement » se trouve dans l’anc. mot
tiquer, xve; domestication, 1836. dondaine « ancienne machine de guerre
DOMICILE, xive. Empr. du lat. domi- pour lancer des traits ou des pierres » ; en
cilium (de domus « maison »). — Dér. : outre abondamment représenté dans les
domiciliaire, 1539 ; domicilier, 1539. patois par des mots exprimant les actions
de « bercer, sommeiller, etc. ». Des mots
DOMINER, x° (Saint-Léger) ; domina- expressifs de sens analogue existent aussi
teur, x1r1e; domination, xrie. Empr. du en it., cf. dondolare « dandiner ».
lat. dominari (de dominus « maître »), domi-
naior, dominalio. — Comp. : prédominer, DONJON. Lat. pop. *dominionem, acc.
1580 (Montaigne); prédominance, xvi®, de *dominio, dér. de dominus, propr. « tour
rare jusqu’au xIxe. maîtresse du château » ou « tour du sei-
gneur » (en tout cas non « habitation du
DOMINICAL, 1417. Empr. du lat. de seigneur »). Seulement gallo-roman.
basse ép. dominicalis (de dominicus), DONNER. Lat. dôünäre « faire un don »,
v. dimanche. qui est entré en concurrence à basse ép.
DOMINO, 1505, au sens, aujourd'hui avec le lat. class. dare « donner (en géné-
vieilli, de « camail noir avec capuchon ral) », dont il n’est resté que des traces en
porté par les prêtres en hiver », « d’où robe gallo-roman ; cf. au contraire it. dare et
avec capuchon pour bal masqué », 1739, donare, esp. dar et donar (surtout juri-
puis le jeu de ce nom, 1771, ainsi nommé dique). Par contre, donner a été concur-
à cause de l’envers noir des dés plutôt que rencé en gallo-roman par bailler. — Dér.
parce que celui qui gagne fait domino (dont et Comp. : donne, 1732, terme de jeu;
le sens, en ce cas, n’est pas expliqué). Au donneur, x11°; adonner, x1I°, au sens de
premier sens, domino paraît représenter le « donner, livrer », jusqu’au xvi®s. ; aujour-
lat. domino, extrait de quelque formule de d’hui seulement réfl., attesté dès le x1ves.
prière, telle que benedicamus domino « bé- (Froissart), 1re fois x1re s. (Eracle) ; cf. de
nissons le Seigneur »; mais cette explica- même esp. adonarse « se conformer »;
tion n’est pas suffisamment justifiée. probabl. déjà lat. pop. *addônäre ; entre-
donner (s’), vers 1080 (Roland); mal-
DOMMAGE, v. dam. donne, 1842, par l'intermédiaire de mal
DOMPTER. D'abord donter, encore dom- donner ; redonner, xrre.
ter dans le Dict. de l’ Académie, 1718 ;domp- DONT. Lat. pop. dë unde, comp. de de
ter, qui remonte au moyen âge, doit son p et de unde « d’où » (qui a survécu dans de
à des graphies fort anciennes, telles que nombreux parlers, notamment dans les
dampnum, iempiare à côté de damnum, patois méridionaux, cf. aussi a. fr. ont).
‘ tentare. Lat. domiläre qui ne s’est établi It. donde « d’où », esp. « où ».
qu’en gallo-roman, cf. a. pr. domdar, dom- DONZELLE, v. demoiselle.
‘tar, tandis que le simple domäre s’est con-
servé dans l’it. domare et l’esp. domar. — DOPER, début xxe°; doping, 1903. Em-
Dér. : dompteur, 1213 ; indomptable, 1420 ; pr. de l’angl. io dope, doping, qu’on rat-
indompté, xve. tache au néerl. doop « sauce, ingrédient ».
DORADE 202

DORADE, v. daurade. DOSE, xve. Empr. du lat. médical du


moyen âge dosis (du grec dosis, également
DORER. Lat. déauräre (Tertullien) (de médical, propr. « action de donner »). —
auräre, verbe de peu de vitalité et qui n’a Dér. : dosable, 1853 ; dosage, 1812; doser,
pas laissé de traces) ; v. le préc. It. dorare, xvi® (des Périers).
esp. dorar. — Dér. et Comp. : doreur, fin
xiI1e ; dorure, xr1°; dédorer, vers 1300; DOT, xu1°, rare jusqu’au xvi. Empr.
mordoré, 1669 {more doré) ; ‘comp. de more du lat. dos, dotis; paraît s'être implanté
nom des habitants de la Mauritanie qui dans certains parlers régionaux plus tôt
ont un teint basané, et de doré; redorer, que dans la langue littéraire ; comp. le
1322 ; surdorer, 1361, au part. passé, long- passage de Bon. des Périers (Nouvelle 43,
temps seul usité. qui se passe à Lyon) : « Elle estoit jeune
et n’avoit point encore oui dire ce mot de
DORIS, sorte d’embarcation plate, fin dot, lequel ils disent en certains endroits
xIxe, donné comme masc. par Larousse ; du royaume et principalement en Lyonnois,
le fém. de dori, 1874 (Littré), ne paraît pas pour douaire ; et pensoit qu’on eust dit que
justifié. Paraît être d’origine américaine, cet homme avoit mangé le dos ou l’eschine
d’après le texte cité par Littré : « Embar- de sa femme... » La plaisanterie de ce texte
cations qu’on voit à bord de leurs goëlettes montre aussi qu’on ne prononçait pas alors
(des Américains) et qui sont connues sous le ? final, qui a dû être introduit depuis,
le nom de doris. » d’après doter et d’après l'orthographe. Dot
a été masc., comme en prov., au xvi® et
DORLOTER, xve (doreloiez, au part. au XvII° s., probabl. d’après douaire, bien
passé). Signifiait propr. « friser les che- que le lat. dos soit fém.
veux, la barbe », encore au xvi® s., d’où
le sens d’ « entourer de soins tendres », DOTER, xin1e; paraît peu usité avant
attesté dès le xrrre s. Dér. de l’a. fr. dorelot, le xviie s., le verbe douer ayant eu ce sens
dorenlot « grosse boucle de cheveux (que jusqu'alors ; dotal, 1459 ; dotation, 1235.
les hommes portaient relevée sur le front) », Empr. du lat. dotare, dotalis, dotatio.
d’où aussi « ruban, frange », cf. le dér. dore- DOUAIRE, xr1e. Empr. du lat. médiéval
lotier « fabricant de dorelots », 1292; a dotarium (de dos, dotis, v. dot), et francisé
pris aussi le sens de « mignon, favori », d’après douer. — Dér. : douairière, 1368,
encore usité au xvie s, Ce mot paraît être tiré de l’anc. adj. douairier, terme de droit
un emploi plaisant de l’anc. refrain dorelo. ancien.
Aujourd’hui le verbe est rapproché, par
étymologie populaire, de dormir, d’où le DOUANE, 1372. Empr., probabl. par
dér. dorlotine « sorte de dormeuse », 1858. l'intermédiaire de l’anc. it. doana, aujour-
d’hui dogana, de l’arabe diouân « bureau
DORMIR. Lat. dormire. It. dormire, esp. de douane ». Cf. en outre esp. aduana. Le
dormir. — Dér. : dormeur, xrv® ; dormitif, mot arabe, qui signifie propr. « registre,
1545 ; redormir, 1811. salle de réunion, etc. », vient du même mot
persan que le mot turc qui nous a donné
DORSAL, 1314. Empr. du lat. médiéval divan. — Dér. : douanier, subst., 1545,
dorsalis, en lat. anc. dorsualis, v. dos. adj., 1864 ; douaner, 1741 ; dédouaner, fin
XIX°.
DORTOIR. Lat. dormitôrium « chambre
à coucher ». A désigné d’abord partic. les DOUAR, 1836, une première fois en
chambres communes de monastères, ce qui 1637, dans un texte traitant de la Barbarie.
explique les nombreuses formes refaites sur Empr. de l'arabe de l'Afrique du Nord
le lat., p. ex. esp. dormitorio. doûär.
DORYPHORA, ou -E, 1836. Empr. DOUBLE. Lat. duplus. It. doppio, esp.
du lat. des naturalistes, fait sur le grec doble.
doryphoros « soldat armé de la lance ». DOUBLER. Lat. de basse ép. dupläre.
It. doppiare, esp. doblar. — Dér. : doublage,
DOS. Lat. pop. dossum, lat. class. dor- : 1411; doublé, 1755; doublement, 1298;
sum, qui désignait surtout la croupe des doublet, xrI° (sorte d'étoffe); doublure,
animaux ; a complètement éliminé le mot 1376; dédoubler, 1429, rare jusqu’au
normal fergus. Dos n’est dominant que XVIIIe s., dédoublement, fin xvri® (Saint-
dans la partie septentrionale des patois Simon) ; redoubler, 1510, redoublement,
gallo-romans ; ceux du Midi (jusqu’au 1539 (une première fois au x1ve s.).
Berry) emploient le type reins et surtout,
jusqu’au Poitou, le type échine, comme DOUBLON, monnaie espagnole, frappée
dans presque toute l’Italie. — Dér. : dosse, à partir de 1497, 1534. Empr. de l'esp.
xIve; dossier, xi11, dossier « liasse de doblén (dér. de doble « double »).
pièces », 1680, ainsi nommé parce que la
liasse porte une étiquette sur le dos ; dos- DOUÇATRE, v. doux.
sière, 1260 ; adosser, x11°, au sens de « ren- DOUCHE, xvie (Montaigne, sous la
verser sur le dos », sens divers au moyen forme italienne), souvent altéré en douge
âge ; le sens moderne est ancien; ados, aux xvI1e et xvirie s. Empr. de l’it. doccia,
XII, au sens de « soutien », sens moderne propr. « conduite d’eau », probabl. tiré de
au xvIIe s.; adossement, 1432 ; endosser, doccione « tuyau », lat. ductiônem, acc. de
vers 1150 ; endos, 1599 ; endossement, xive. ductiô « id. »; le verbe it. docciare est lui-
— Comp. : extrados, 1680 ; -dossé, 1680; même dér. de doccia. — Dér. : doucher,
intrados, 1704 ; surdos, 1680. 1642 ;doucheur, 1836 (une 1re fois en 1687).
203 DRAGON

DOUCINE, v. doux. douceur, xr1e, continue le lat. de basse ép.


dulcor, avec réfection d’après doux, d'où
DOUELLE, v. douve.
doucereux, x11°, en a. fr. souvent « doux »,
DOUER. A signifié « donner une dot » encore au xvi® s., d’où le sens péjoratif;
jusqu’au xvries., encore en 1662 (Molière), doucine, 1547, propr. « moulure en pente
sens qu’il a perdu au profit de doter. Em- douce » (le masc. doucin existe aussi pour
ployé en outre au sens de « faire don de », divers sens techn. depuis 1611 ; on a, en
dès le moyen âge; le sens moderne ne outre, au moyen âge, douçaine, doucine
paraît pas être antérieur au xvrre s. Lat. «sorte de flûte »); adoucir, x11°, d’où -cisse-
dôtäre. Seulement fr. (l’it. dotare peut être ment, xv°, radoucir, x11°, -cissement, 1657.
repris au lat.). DOUZE. Lat. duodecim. — Dér. :
DOUILLE, 1227. Francique “*dulja, douzaine, x11° ; douzième, xr1° (dudzime);
restitué d’après le moyen haut all. fülle, de in-douze, 1666 (Furetière).
sens analogue. DOUZIL. D'abord doisil, altéré en dousil,
1611, probabl. d’après douille. Lat. de
DOUILLET, xive (Oresme). Dér. de basse ép. duciculus (vie s.), dér. de dux, au
l’anc. adj. doille « mou (au sens physique) », sens de « conduit » (cf. pour ce sens le
d’où « tendre », lat. ductilis « malléable », catalan deu « source »). Douzil est moins
v. ductile et le préc. Le sens de douillet a usuel en fr. propr. dit que faussel ; mais il
été rapproché de doux par étymologie pop. est très répandu dans les patois et les par-
ne : douillette, « sorte de robe ouatée », lers pop. ; rare en dehors du gallo-roman.
1803.
DOYEN. Lat. eccl. decänus, propr. « chef
DOULEUR. Lat. dolôrem, acc. de dolor. de dix hommes, dizenier » ; se trouve aussi
It. dolore, esp. dolor. Peu usuel dans les en ce sens comme terme militaire. A. pr.
patois, le mot pop. étant mal. — Dér. : degan. — Dér. : doyenné, 1260.
endolorir, 1763 (J.-J. Rousseau), réfection,
d’après le lat. dolor, d’endoulourir, 1503. DRACHME, xr11e (dragme, forme encore
usitée au xvrie s.). Empr. du lat. drachma
DOULOIR, v. doléance. (en lat. médiéval dragma, d’où la forme
anc. du fr. ; du grec drakhmé).
DOULOUREUX. Lat. de basse ép. dolô-
rôsus. Développement influencé par dou- DRACONIEN, 1838. Dér. de Dracon,
leur ; de même dans les autres langues ro- nom d’un législateur athénien de la fin du
manes : it. esp. doloroso. vire s., à qui l’on attribuait une constitu-
tion dont les sanctions furent jugées trop
DOUTER. Signifie souvent « craindre » rigoureuses.
en a. fr., encore en 1613 ; se douter de, à
partir du xine s. Lat. dubitäre « douter », DRAGÉE, xive. Altération mal expli-
en outre « craindre » à basse ép. De même quée du lat. tragemata (du grec tragémaia
esp. dudar « douter », a. pr. dopiar « douter » « dessert, friandises »), cf. aussi it. {reggea,
et « craindre ». Dans les parlers gallo- esp. gragea et a. pr. iragea, dragea, dont
romans le sens de « craindre » est encore les relations avec le fr. dragée sont obs-
vivace, notamment en lorrain. — Dér. : cures ; v. drogue. Dragée, au sens de « four-
doute, x1° {Alexis), sens parallèle au verbe, rage » (dragie dès le xrr1° s.), mot dialectal,
ordinairement fém. jusqu’au début du est un autre mot : il représente un lat. de
XVIIe s. ; douteux, XII£, au moyen Âge sou- . la Gaule *dravocäla, dér. de dravoca « ivraie »,
vent « redoutable, craintif » ; redouter, x1° attesté dans des gloses, d’origine gauloise ;
(Alexis), redoutable, vers 1200. de là aussi dravée (1611), dravière (1369),
formes du Nord-Est, et droue « ivraie »
DOUVE, « fossé, planche servant à for- (xr1e), forme très répandue dans les patois
mer le corps d’un tonneau ». Lat. de basse septentrionaux (issue de *drauca). — Dér. :
ép. doga « vase », peut-être empr. du grec drageoir, x1v® (écrit drajouer).
dokhé « récipient ». It. doga « douve de DRAGEON, 1553. Francique *draibj6,
tonneau », dogaia « égout », a. pr. doga, aux
deux sens du fr. — Dér. au deuxième sens : cf. l’all. Trieb « pousse ». — Dér. dra-
douelle, 1296 ; largement répandu dans les geonner, XVIII®.
patois, au détriment du simple. DRAGON, vers 1080 (Roland). Empr.
du lat. draco. Le sens de « serpent infernal
DOUVE, « ver qui se trouve dans le foie (figure de démon) », xr1°, vient de l’Apo-
du mouton », xi®, d’où « sorte de renon- calypse. Le sens de « soldat de cavalerie »,
cule marécageuse (qui passe pour engen- fin du xvi® s. (dragon a passé en ce sens
drer ce ver) »; attesté seulement en 1564. dans les langues voisines), est dû au sens
Lat. dolva, probabl. d'origine gauloise, d’ « étendard » que dragon a eu depuis le
relevé au v® 8. chez Eucherius, évêque de x11e s., d’où « soldat combattant sous cet
Lyon. étendard » ; le lat. draco, qui a désigné sous
DOUX. Le fém. douce, qui apparaît de l'Empire une enseigne de cohorte, a pu
bonne heure, a été créé en fr. Lat. dulcis, servir de modèle ; mais l'explication d’après
qui se disait propr. de la saveur, d’où laquelle les dragons ont été ainsi nommés
« doux (en général) ». Les autres adj., qui au xvi® s. parce qu’ils avaient un dragon
exprimaient la douceur, ont eu des sorts sur leur étendard est une simple hypothèse
‘ divers ; lénis « doux (en parlant de tou- de Voltaire. — Dér. : dragonnade, 1708 (on
cher) » survit dans le roumain lin « tran- trouve conversion à la dragonne en 1688) ;
quille, calme »; pour sudvis, V. SUave. — dragonne, 1673 (Molière), au sens de « bat-
Dér. : douçâtre, 1539 ; doucet, vers 1200; terie de tambour », sens moderne, 1800.
DRAGUE 204

DRAGUE, 1556 (drègue en 1388) ; d'’a- XvI® s.; a signifié en outre « (se) diriger
bord au sens de « filet » ; au sens de « ma- vers un lieu » jusqu’au xvri® s., d’où
chine à curer », 1676. Empr. de l’angl. drag adresse, x111° et jusqu’au XVI® s. « direc-
« crochet, filet » (du verbe io drag « tirer »). tion » et « chemin » ; le sens « d’habileté »
— Dér. : draguer, 1634, dragage, 1765, qui date du xvi® s. l’a mis en relation
dragueur, XVIIIe. étroite avec adroit, mais a pu se développer
indépendamment ; au sens d’ « action
DRAIN, 1849, au sens médical, 1859 d’adresser la parole à quelqu'un », encore
Empr. de l’angl. drain (du verbe {o drain attesté au début du xviI® s., a passé dans
« dessécher ») avec la technique agricole de l’angl. address, qui est revenu en fr. comme
ce nom. — Dér. : drainer, 1850, drainage,
terme de la langue politique en 1656, sur-
1849. tout à propos de l’Angleterre ; redresser,
DRAME, 1707 (sens fig. en 1787) ; dra- vers 1150, redressement, x11°, redresseur,
matique, 1666 (parfois au xrve s.; sens fig., 1566.
1858) ; dramaturge, 1773 (dès 1668, Cha- DRIBBLER, terme de football, 1895.
pelain, au sens de « catalogue d'ouvrages
Empr. du verbe angl. {o dribble.
dramatiques »). Empr. du lat. de basse ép.
drama, dramaticus (du grec drama, drama- DRILLE, 1628, comme terme d’argot,
tikos) et du grec dramatourgos. — Dér. « soldat vagabond », équivalent de nar-
de drame : dramatiser, 1801. quois ; dès le xvire s. dans le langage fami-
lier, cf. La Fontaine, Fables, XI, 3. Emploi
DRAP. Lat. du ve s. drappus, probabl. fig. de l’anc. fr. drille « chiffon », 1370,
d’origine gauloise (comp. les noms propres
encore dans les patois, auparavant *druille
gaulois Drappo, Drappus). It. drappo, esp.
(comp. le bret. frulenn, qui en est empr.),
trapo « chiffon ». Pour le sens de « drap de
dér. d’un verbe *druillier, de l’anc. haut
lit » attesté au xrrre s., v. linceul. — Dér. :
all. durchilon « déchirer, mettre en lam-
drapeau, x11°, au sens de «vêtement », encore
au XVIe s.; en outre au moyen âge « chif- beaux ».
fon », d’où «lange », 1501 ; le sens moderne, DRISSE, 1639. Empr. de lit. drizza,
qui date du xvies., est peut-être dû à l’it. tiré du verbe drizzare, autre forme de di-
drappello, plus ancien en ce sens, d’où rizzare « dresser », V. dresser.
porte-drapeau, 1578 ; draper, 1225, au sens
DRIVE, 1896. Empr. de l’angl. drive,
de « fabriquer le drap », sens moderne de-
t. de tennis.
puis 1636; drapier, 1260, draperie, xxrre,
« fabrication, commerce de drap » et DROGMAN, 1553 (écrit droguement),
aussi « étoffe de drap », xr1®, d’où « étoffe une 1re fois en 1213 ; cf. en 1564 (J. Thier-
flottante, formant des plis »; en ces deux ry) : « Drogueman aux Italiens est ce que
derniers sens peut-être directement de drap. communément nous disons trucheman. »
DRASTIQUE, 1741. Empr. du grec dras- Empr. de l’it. dragomanno, empr. lui-même
tikos « qui opère ». du grec byzantin dragoumanos, mot d’ori-
gine sémitique, cf. le syriaque iargmänä
DRAVÉE, DRAVIÈRE, v. dragée. « interprète ». Le même mot a pénétré au
moyen âge par l’arabe tourdjoumän, d'où
DRÈCHE, résidu du malt, etc., 1688. drugement, X11°, trucheman, xiv®, écrit sou-
Ne peut pas être séparé de l’a. fr. drasche, vent truchement (qui s'emploie encore au
même sens, et de drache « grappe de raisin sens fig.), cf. aussi it. {urcimanno, esp. tru-
dépouillée de ses grains », XVI® ; cf. en chimän, irujamän.
outre le lat. médiéval drasca « drèche »,
drascus « orge » (au xrx1e s.) et « drèche », DROGUE, xiIve. Parmi les nombreuses
et les formes dialectales draque, 1410, et hypothèses qu’on a formées pour expliquer
drague, 1478. Toutes ces formes représen- l’origine de ce mot, deux méritent d’être
tent un prototype *drasca, peut-être d’ori- retenues : le néerl. droog « sec » (qui aurait
gine celtique, cf. les mots de sens appa- donc été dit d’abord d'ingrédients séchés),
renté brai et cervoise qui sont de même et l’arabe duräawa « balle de blé » (qui serait
origine. devenu *drawa, *drowa, d’où les formes ro-
manes). Le fait que l’it. et l’esp. droga sont
DRELIN, 1673 (Molière). Mot onomato- postérieurs au mot fr., est favorable à
péique, représenté par des variantes et des l’étymologie néerl. — Dér. : droguer, 1554 :
dér. dans les patois. droguerie, 1462 ; droguet, 1554, dit ainsi
DRESSER. Le sens de « dresser un ani- parce que le droguet était une étoffe de
mal » apparaît au xvi® s. Parmi les nom- laine de bas prix; drogueur, 1462; dro-
breux sens du verbe on notera celui de guiste, 1549.
« diriger » du xve au xvire s., peut-être DROIT, adj. Lat. dirécius. Au sens « qui
d’après adresser, et celui d’ « habiller », est à droite », opposé à « gauche », s'est
conservé dans le mot angl. to dress. Lat. établi au xvi* s. (quelques traces antér.),
pop. *direcliäre, dér. de directus, v. droit. et a éliminé l’a. fr. desire (v. dextre), qui ne
It. d(i)rizzare, esp. arch. derezar « ache- survit que dans l'extrême Ouest. Ce sens,
miner ». — Dér. et Comp. : dressage, 1791 ; qui existe aussi dans l'esp. derecho, s'est
dressoir, 1285, ainsi nommé d’après l’usage développé en parlant de la main droite
de placer sur cette sorte de meuble les considérée comme agissant avec précision ;
assiettes, etc., debout contre la paroi, la v. direct. — Dér. et Comp. : droitier, xvi° ;
tablette étant réservée à l'exposition des droiture, x11°, désigne surtout le droit jus-
belles pièces d’orfèvrerie, etc. ; adresser, qu'au xvi® s.; sens moderne depuis le
XIIe, au sens de « dresser », usuel jusqu’au XVIIe S. ; adroit, x11e, développement com-
205 DUNE

parable à celui de droit « qui est à droite », gieuses des Druides, rapproche du grec
d’où maladroit, 1538, maladresse, 1740, drys « chêne ». — Dér. : druidesse, 1727;
d’après adresse; endroit, xr1°, d’abord druidique, 1773 (Voltaire) ; druidisme, 1727.
prép. au sens de « vers, etc. », usitée jus-
qu'au xvI° 8. DRYADE, xrre (Rose). Empr. du lat.
dryas, dryadis (d'un mot grec, dér. de
DROIT, subsi. Lat. de basse ép. dirécium, drys).
attesté au virre s., issu de l’adj., cf. verbum DUALISME, 1755. Dér. sav. de l’adij.
directum « le bon droit », chez Grégoire de lat. dualis « qui se rapporte à deux ».
Tours. De même dans les autres langues
romanes. DUALITÉ, 1835 (auparavant en 1377
et en 1585). Dér. sav. du lat. dualis ; duali-
DROLE, 1584, au sens de « plaisant las est déjà du lat. médiéval.
coquin », d’où le sens d’ « enfant », attesté
dès 1771 pour le languedocien, sens très DUBITATIF, xie. Empr. du lat. de
répandu dans les parlers du Centre, de basse ép. dubilativus, v. douter.
l'Ouest et du Sud-Ouest. Empr. du moyen DUC, vers 1080 (Roland). Lat. dux
néerl. drol « petit bonhomme, lutin », d’où, « chef », qui a servi sous le Bas-Empire à dé-
par suite, en fr. le sens de « plaisant co- signer un chef militaire de haut rang, dux
quin », le premier attesté, qui a engendré limitum « chef des frontières », d’où est
celui de « petit garçon », rejoignant ainsi sorti son sens nouveau à l’époque de la
le néerl. — Dér. : drolatique, 1565 (Rabe- féodalité. Le sens d’ « oiseau de nuit », fin
lais), remis en vogue par Balzac en 1832 par xue, est peut-être dû au fait que cet
ses Contes drolatiques ; drôlerie, 1573; oiseau rapace apparaît souvent entouré de
drôlesse, xvi®; drôlet, 1870; drôlichon, volées d’autres oiseaux. « Sorte de voitu-
1860 (Goncourt), déjà dans Les Plaideurs, re », 1877. — Dér. : ducal, vers 1180;
1, 7, comme nom propre. duché, xr°, ordinairement fém. et sous
DROMADAIRE, xu1°. Empr. du lat. de la forme ducheé au moyen âge, v. comté;
basse ép. dromedarius, dér. de dromas, mot duchesse, xr1° ; archiduc, 1486, d’où -cal,
pris au grec, propr. « COureur ». vers 1500 ; -ché, 1512 ; -chesse, 1504.
DROME-. Premier ou second élément DUCAT, 1395. Empr. de l’it. ducaio
de mots sav. comp., tels que dromomètre,
« monnaie à l'effigie d’un duc (it. duca) »,
fin x1xe, tiré du grec dromos « course », ou notamment « monnaie des ducs ou doges
de mots grecs empr., tels que hippodrome, de Venise ».
xir1e, sur lequel on a fait vélodrome, aéro- DUCTILE, fin xvie (D’Aubigné), une
drome. première fois vers 1300. Empr. du lat. duc-
tilis « malléable », v. douillet. — Dér. :
DROSÉRA, 1804. Empr. du lat. des ductilité, 1676.
botanistes drosera, mot pris au grec, fém.
de l’adj. droseros « humide de rosée ». DUËÈGNE, 1655 (Scarron); en outre
douègne, encore au xvire s. Empr. de
DROSSER, 1771. Dérivé du terme l'esp. dueña, v. dame.
tech. drosse « cordage qui transmet le
mouvement de la roue à la barre du DUEL, 1539. Empr. du lat. duellum,
gouvernail », par comparaison de ce mou- forme arch. de bellum, « guerre », et qui a
vement avec celui que la mer imprime au . été faussement interprété comme un dér.
navire drossé. Drosse est empr. de l’it. de duo « deux ». Duel, terme de grammaire,
trozza « id. », avec altération de l’initiale 1570, est empr. du lat. dualis, v. dualisme.
d’après drisse (il y a aussi la forme frisse, — Dér. : duelliste, fin xvi* (Brantôme), pro-
qui a reçu sa voyelle du même mot). Le babl. d’après l’it. duellista.
holl. drosen vient probabl. du fr. Lit. DULCIFIER, 1620. Empr. du lat. de
trozza représente le lat. {radux « sarment de basse ép. dulcificare (de dulcis « doux »). —
vigne », par comparaison de la corde avec Dér. : dulcification, 1755.
un sarment qui grimpe le long du pieu en
l’embrassant. DULCINÉE, 1765. Tiré de Dulcinée de
Toboso, nom de la dame des pensées de
DROUE, v. dragée. Don Quichotte, voir le roman de Cervan-
DRU, vers 1080 (Roland). Signifie en tès, I, 1.
outre en a. fr. et jusqu’au xvI° 8., « gras, DUMPING, 1904. Mot de l’argot com-
gai, vif, ami, amant », sens encore plus ou mercial anglo-américain, du verbe {o dump
moins vivaces dans les patois. Du gaulois « décharger, jeter en tas »; s’est dit aussi
*druio- « fort, vigoureux », cf. gallois drud à propos d’immigrants qu’on rejette vers
« hardi ». Le sens propre de dru n’est donc d’autres pays.
pas « qui a des pousses nombreuses et ser-
rées », en parlant de l’herbe, mais « vigou- DUNDEE, 1904. Paraît être une altéra-
reux », de là les sens donnés plus haut. De tion, d’après le nom du grand port écos-
même a. pr. drut « amant, ami »; attesté sais, de dandy, forme usitée en angl. (éga-
en outre dans les parlers de l'Italie septen- lement attestée en fr. en 1877), d’origine
trionale. douteuse.
DRUIDE, 1213. Empr. du lat. druida, DUNE, xr1°. Empr. du moyen néerl.
d’origine gauloise, cf. irlandais drui « drui- dunen, aujourd’hui duin, qu’on rapproche
de, sorcier », et que Pline, en rapportant du lat. de la Gaule düänum, d’origine gau-
le rôle du chêne dans les pratiques reli- loise, « hauteur », cf. les noms de ville
DUNE 206

Augusiodunum, Lugdunum, etc. — Dér. : DUVET, 1310. Altération inexpliquée de


dunette, 1634, déjà en 1550 en un sens dumel, attesté seulement au xv® s. (mais
incertain, probabl. « levée de terre forti- duma a été relevé en lat. médiéval au
fiée ». X111° s.), encore usité au xvie s. et aujour-
d’hui dans les patois de l'Ouest. Dumet
DUO, 1548 (N. du Fail). Empr. de lit. dérive de l’a. fr. dum, altération, d’après
duo, propr. « deux », forme arch. de due, plume (cf. le lat. médiéval duma, visible-
v. deux. ment refait sur pluma), d’une forme dun,
DUODÉCIMAL, 1801. Dér. sav. du lat. attestée vers 1220, de l’anc. scandinave
duodecimus « douzième », d’après décimal. dünn, auquel se rattachent l’all. Daune et
l’angl. down : cet emprunt, cf. aussi édredon,
DUODÉNUM, 1514. Empr. du lat. mé- est dû au commerce du duvet. — Dér. :
dical duodenum, abréviation de l’expres-
duveté, 1611 (Rabelais, 1534, a dumeté) ;
sion duodenum digitorum « de douze doigts » duveteux, XVIe.
ainsi nommé parce qu’il a une longueur de
douze travers de doigt, cf. les formes tra- DYNAMIQUE, 1692 (adj, Leibnitz),
duites dozenaire, XIV® ; douzedoigtier, XVIe. comme subst. depuis 1752. Empr. du grec
DUPE, 1426, texte relatif à Rouen, dynamikés « vigoureux ».
comme terme d’argot : « Il avoit trouvé DYNAMITE, 1866. Mot créé par le Sué-
son homme, ou sa duppe, qui est leur ma-
dois Nobel d’après le grec dynamis « force » ;
niere de parler et qu’ilz nomment jargon,
quand ilz trouvent aucun fol ou innocent
s’est répandu dans les langues européennes
et- ailleurs. — Dér. dynamiter, 1890,
qu’ilz veullent decevoir par jeu. » Emploi -eur, fin xIxe.
plaisant de dupe « huppe », usuel jusqu’au
XVIIIe s. et encore en berrichon, parce que DYNAM(O-). Premier élément de mots
la huppe est un oiseau d'apparence stu- sav. comp., tels que dynamomètre, 1802,
pide. V. huppe. — Dér. : duper, 1622 (se
tiré du grec dynamis « force ». Dynamo,
duper de), on trouve le part. passé déjà chez
fém., fin xix°, est abrégé de (machine)
Villon, d’où duperie, 1690; dupeur, 1669. dynamo-élecirique.
DUPLICATA, 1574. Empr. du lat. mé-
diéval duplicata (s. ent. lillera), propr. DYNASTE, vers 1500; dynastie, 1767
« (lettre) redoublée », mot qui s'inscrit au (Voltaire), une première fois 1568. Empr.
bas des actes faits en double. du grec dynastés « souverain » (empr.
DUPLICITÉ, xuie (J. de Meung). A aussi par le latin), dynasteia « puissance »,
signifié également jusqu’au xvI1® 8. « carac- celui-ci en vue du sens particulier donné
tère de ce qui est double ». Empr. du lat. au mot fr. (dinascie, vers 1495, est entré
par une autre voie). — Dér. : dynastique,
de basse ép. duplicitas, qui a les deux sens 1834.
(de duplexæ « double »).
DUR. Lat. dürus. — Dér. : durcir, xrr°, DYS-. Préfixe de mots sav., tiré du préf.
durcissement, 1753, endurcir, x11°, rare au péjor. grec dys- ; v. les suiv.
sens concret, endurcissement, 1495, ren-
durcir, vers 1530; duret, xri°; dureté, DYSENTERIE, 1372 (dissenierie; dis-
XIII, au moyen âge ordinairement durté siniere, xrt1e) ; dysentérique, xive. Long-
jusqu'au xvres. ; durillon, 1393 (dureillon). temps écrits dyss-. Empr. du lat. médical
dysenieria, dysentericus (du grec dysenteria,
DURE-MÈRE, 1314. Traduction du lat. -ikos, de entera « entrailles »).
médiéval dura mater, v. pie mère.
DURER. Lat. düräre, qui est peut-être DYSPEPSIE, 1550 (sous la forme dip-).
étymologiquement un autre mot que da- Empr. du lat. médical dyspepsia (d’un mot
räre (de dürus « dur ») « durcir, endurcir » ; grec, issu de peplein « cuire, digérer »). —
en tout cas les deux verbes n'étaient plus Dér. : dyspepsique, 1864.
sentis comme différents en lat.; dans les DYSPNÉE, xvie (Paré : dyspnoee). Empr.
langues romanes le sens de « durcir, en- du lat. médical dyspnoea (du grec dyspnoia,
durcir » est rare. V. endurer. — Dér. : de pnein « respirer »).
durable, vers 1050 (Alexis) ; peut-être con-
tinuation du lat. durabilis ; durant, prép., DYTIQUE, 1764. Empr. du grec dytikos,
Xvi, issue d'emplois tels que le mariage propr. « plongeur », dit aussi du dytique
durant, xu1° ; durée, xr1e. (de dyein « plonger »).
E
E(S)-. Préf., marquant propr. l’éloi- supposent deux types *“exblaudire, *exblau-
gnement, d’où l’action d’enlever, etc., lat. däre, formés avec le francique “*blaudi
ex, &, prép. et préf. Conservé partout. « faible », auquel se rattache l’all. blüde
« faible (notamment en parlant des yeux) ».
EAU. Lat. aqua. D'abord ewe, vers 1150, Seulement gallo-roman, cf. a. pr. emblauzit
d’où eaue, encore au XVI s., par un déve- (avec changement de préfixe) « ébahi, hors
loppement particulier dû à la forme du de soi-même » ; aujourd’hui assez répandu
mot lat. et à la phonétique du fr. On trouve dans les patois, sous des formes variées. —
en outre en a. fr. aive, eve, conservé aujour- Dér. : éblouissement, xIve.
d’hui dans la région poitevine, et aigue,
emprunté au Midi. — Comp. : eau-de-vie, ÉBONITE, 1868. Empr. de l’angl. ebonite
xive, traduction du lat. des alchimistes (de ebony « ébène »).
aqua vitae, d’où l’it. acquavite (les alchi-
mistes à la recherche de l’élixir de longue
ÉBOULER, v. boyau.
vie avaient trouvé l’alcool, en distillant le ÉBOURIFFÉ, v. bourre.
vin, et s'étaient crus en présence de l’objet
final de leurs recherches) ; un autre terme, ÉBRASER, v. braise,
eau ardenie, usuel au XvVI® s., correspond ÉBRENER, v. breneux.
au mot usité aujourd’hui dans la péninsule
ibérique, cf. esp. aguardienie, et dans les ÉBRIÉTÉ, 1330, mais rare avant le
parlers méridionaux, de la Provence au xixe s. Empr. du lat. ebrielas (de ebrius
Languedoc ; un troisième terme, brande- « ivre »).
vin, 1640, empr. du néerl. brandewijn, cor- ÉBROUER (s’), 1542. Probabl. dér. de
respondant à l’all. Branniwein, a pénétré l’a. fr. bro(u), propr. « bouillon », v. brouet
en France, par le langage des soldats, lors et brouillard, d’où le sens d’ « écume »,
des guerres, qui ont eu lieu dans les Flan- fréquent dans les parlers septentrionaux,
dres dans la deuxième partie du xvrI® 5. cf. notamment en normand « écume qui
et existe aussi dans les parlers du Nord et vient à la bouche des chevaux », l’ébroue-
de l'Est ; v. bénitier ; eau-forte, xvi® (Paré) ment pouvant provoquer un jet d’écume.
au sens d’ « acide azotique »; « gravure » — Dér. : ébrouement, 1611.
(d’abord gravure à l'eau forte), 1802 ; morte-
eau, XVIII. ÉBULLITION, xue. Empr. du lat. de
ÉBAHIR, x11e. Dér. de baer, anc. forme ‘ basse ép. ebullitio (dé ebullire « bouillir »).
de bayer, et entraîné dans la conjugaison ÉBURNÉEN, 1870. Empr. du lat. ebur-
en -ir par l’anc. adj. baïf « ébahi », de la neus. |
même époque, v. baliveau. A été empr. par
les langues voisines : a. pr. esbair, it. sbaire ÉCACHER, v. cacher.
et baire, etc. — Dér. : ébahissement, xr1°. ÉCAILLE, xire. S’est dit aussi de la
ÉBAUBI, x1r1e. Issu, par changement coquille d’œuf. Forme dialectale, d’une
de préf., d’abaubi, plus fréquent au moyen région maritime du normand ou du picard
âge, part. passé du verbe abaubir « éton- (le mot désigne encore dans ces dialectes
ner », propr. « rendre bègue », formé avec toute sorte de coquilles), d’un mot du ger-
l'anc. adj. baube « bègue », lat. balbus, d’où manique occidental *skalja, correspondant
aussi lit. balbo, l’a. pr. balp. Un infinitif au gothique skalja « tuile » et à l’all. Schale,
ébaubir a été formé vers 1920. entre autres sens, « écaille »; cf. de même
it. scaglia et a. pr. escalh, masc., qui prou-
ÉBAUCHER, v. bau. vent l'ancienneté de l'emprunt. Une forme
ÉBAUDIR (s), vers 1080 (Roland). avec -ch-, soit échaille, qu'on attend dans
Mot archaïque, encore d’un certain usage les parlers septentrionaux, est très répan-
dans la langue littéraire. Dér. de l’anc. due dans tout l'Est, depuis la Wallonie
adj. bald, baud « joyeux, etc. », usuel jus- jusqu’au Dauphiné et au Velay, surtout
qu’au xv° s., v. baudet. — Dér. : ébaudis- au sens de « brou de noix, glume, etc. ».
sement, XIIIe, — Dér. : écailler, vers 1200, écaillement,
1611 ; écailleux, 1542.
ÉBÈNE, xue (écrit ebaine). Empr. du
lat. ebenus (du grec ebenos, lui-même d’ori- ÉCALE, x. Forme dialectale du nor-
gine égyptienne). — Dér. : ébénier, 1680; mand ou du picard (le mot est encore usité
ébéniste, id. ; ébénisterie, 1732. dans ces dialectes au sens de « coquille,
ÉBLOUIR, xr1e (sous la forme esbleuir). etc. ») d'un mot francique skala, même
En outre en a. fr. esbloer. Ces deux formes mot que les mots germaniques cités sous
ÉCALE 208

le préc.; s’est répandue jusque dans le vers 300; aussi dans les parlers de l'Italie
Midi ; des formes avec -ch-, du type échale, septentrionale, mais dans les parlers gallo-
existent en outre dans quelques patois. — romans le mot le plus répandu vient du
Dér. : écaler, 1549. lat. pop. *paæellus, lat. class. paæillus, cf. le
ÉCARLATE, xrie (Chrétien). Mot euro- fr. dialectal paisseau et l’a. pr. paissel. —
péen, voyageur, cf. it. scarlatto, all. Schar- Dér. : échalasser, 1396; échalassement,
lach, angl. scarlet, etc., et aussi lat. médié- 1552.
val scarlalum. Empr. du persan sägirlât ÉCHALIER, v. escalier.
(lui-même empr. de l’arabe siqillat « tissu.
décoré de sceaux »), auquel se rattache ÉCHALOTTE, 1514 ; échalette, xve. Issu,
aussi l’a. fr. siglaton, ciclaion, etc., « sorte par substitution de suff., de l’a. fr. escha-
d’étoffe de soie ou d’autre tissu précieux » ; logne, lat. pop. “*scalonia, altération de
l’étoffe persane était bleue, on ne sait pas ascalônia (caepa) « oignon d’Ascalon (ville
exactement quand la couleur rouge est de Palestine) » ; paraît avoir été interprété
devenue prédominante ; l’arabe remonte au comme un dér. d’échale, v. écale ; la forme
lat. sigillatus « décoré de sceaux », par anc. subsiste dans la Drôme et dans l’Ar-
l'intermédiaire du grec, v. scarlatine. dèche. De même it. scalogno, esp. escaloña,
a. pr. calonha.
ÉCARQUILLER, v. quart.
ÉCHAMPIR, v. champ.
ÉCARTELER, v. quartier.
ÉCHANCRER, v. chancre.
ÉCARTER, « séparer, éloigner ». Lat.
pop. “*exquariäre, de quarius « quart », ÉCHANGER. Lat. pop. “*ercambiare,
propr. « partager en quatre, écarteler » dont l’existence est assurée par le roumain
(sens conservé par l’it. squariare), d’où schimba ; cf. aussi it. scambiare, a. pr. es-
«séparer », seul sens attesté en fr. — Dér. : cambiar. — Dér. : échange, vers 1080 (Ro-
écart, x11° ; écartement, 1557, semble avoir land) ; échangeable, 1798.
été peu usuel avant le milieu du xvrre 8. ÉCHANSON. Du francique *skankjo, cf.
ÉCARTER, terme de jeu de cartes, v. scantio(ne) de la Loi Salique et des Gloses
carte. de Reichenau, qui désignait un serviteur
chargé de verser à boire dans les festins,
ECCE-HOMO, 1690. Mots lat. signifiant cf. all. Schenk « id. » (d’où le verbe schenken
« voici l’homme », paroles prononcées par « verser à boire », puis « faire un don (en
Ponce Pilate, en présentant au peuple juif général) »).
Jésus-Christ couronné d’épines, v. Jean,
xX1X, 5. Dit par suite de tableaux où Jésus ÉCHANTILLON, 1260. A signifié d’abord
est représenté couronné d’épines. « étalon de poids et mesures »; sens d’où
proviennent de nombreux sens techn. d’au-
ECCHYMOSE, xvie (Paré). Empr. du jourd’hui. Le sens de « morceau d'étoffe
grec ekkhymosis « tache produite par le qu’on coupe pour donner une idée de cette
sang extravasé » (du verbe ekkhein « s’écou- étoffe », qui date du xvi® s. environ, est
ler »). issu de celui d’ « épreuve, essai », attesté
ECCLÉSIASTIQUE, xrrre, l’a. fr. dit au xvV® s., qui vient du premier sens. Alté-
plus ordinairement ecclesiast(r)e et eccle- ration d’eschandillon, xrire (dont le simple
sial. Empr. du lat. ecclesiasticus (du grec est attesté dans l’a. pr. escandil « mesure
ekklésiastikos), v. église. de capacité », l’anc. lyonnais eschandilx
(plur.), et le verbe dér. eschandiller « véri-
ÉCHAFAUD, x11°. Propr. « assemblage fier les mesures des marchands », attesté
de pièces de bois destinées à soutenir un surtout dans des textes lyonnais), par croi-
plancher élevé », d’où diverses acceptions, sement avec des mots tels que chantelage,
dont la seule usuelle aujourd’hui est celle droit que devaient payer à Paris ceux qui
de « construction où l’on exécute les con- achetaient du vin pour le revendre et qui,
damnés à mort », attestée dès le xve s. en le payant, avaient le droit d’ « oster le
Élargissement, d’après échasse, de l’a. fr. chantel de leur tonniau et la lie vuidier ».
chafaud (qui a le premier sens d’échafaud), Le simple méridional, d’où est issu eschan-
encore dans les parlers, lat. pop. *caiafali- dillon, dérive du verbe scandere « monter »,
cum, comp. de fala « échafaudage, tour de au sens d’ « échelle pour mesurer », cf. à
bois servant dans les sièges ou qu’on élevait l’appui le lat. médiéval scandilia « éche-
dans les cirques » et du préf. d'origine lons », scandalium « mesure de capacité,
grecque cata, sur le modèle de catasta « es- sorte de balance » ; cf. de même les formes
trade pour l'exposition et la vente des es- apparentées de l’a. pr. escandalh, it. scan-
claves », mot d’origine grecque, mais in- daglio, scandiglio « sonde, mesure ». On
complètement élucidée. It. catafalco, a. pr. peut supposer des formes du lat. pop.
(es)cadafalc, v. catafalque et châlit. — *scandilia, *scandälia, refaites ensuite en
Ta : échafauder, vers 1240 ; échafaudage, formes de sing. — Dér. : échantillonner,
1517. 1452, développement du sens parallèle au
ÉCHALAS, subst., d’où échantillonnage,
xrre. Altération, probabl. id.
d’après des mots de la famille d'échelle, ÉCHAPPER. Lat. pop. *excappäre, de
d’un simple *charas, attesté indirectement Cappa, propr. « jeter le froc aux orties ».
par le dér. charasson du berrichon. *Charas Apparaît au sens fig. dès les premiers
représente le lat. pop. *caracium, cf. carra- textes. It. scappare, esp. escapar. — Dér.
lium de la Loi des Longobards, formé sur et comp. : échappatoire, Xv£; échappée,
le grec kharaz « échalas », d’où aussi charax, Xv°, rare avant le XvIrre 5. ; échappement,
209 ÉCHEVEAU

xI1e, rare avant le Xvir1e s.; réchapper, d'hommes chargés de faire le guet », d’où
x11° (sous la forme rescaper). La forme « action de faire le guet » et « petite tour
picarde rescapé a été popularisée à la suite d'observation », tous ces sens attestés de
de la catastrophe qui s’est produite dans bonne heure. Du francique “*skarwahia
as de Courrières (Pas-de-Calais), en « guet (wahta) fait une avec troupe (skéra,
cf. l’all. Schar) ».
ÉCHARBOT, v. escarbot. ÉCHE, écrit aussi aiche. Restreint au-
ÉCHARDE, xu1°, d’abord escherde, plus jourd’hui au langage de la pêche; au
usité au moyen âge, et surtout au sens moyen âge désigne aussi « ce qui sert à
d’ « écaille de poisson », encore usuel dans allumer ou à alimenter le feu ». Lat. esca
les parlers de l'Ouest. Du francique *skarda « appât, ce qui sert à alimenter le feu »,
« FRS », auquel se rattache l’all. Scharie propr. « nourriture », sens disparu dès le
€ 14. ». lat. pop. Encore usuel dans les parlers de
l'Est et surtout méridionaux au sens d’ «ap-
ÉCHARPE, xr1° s.; ordinairement es- pât ». Conservé dans toutes les langues ro-
cherpe au moyen âge, en outre escrepe. Si- manes dans les deux sens du fr. : it. esca,
gnifie d’abord « sacoche pendue au cou », esp. yesca. — Dér. : achée, 1514, subst.
notamment « bourse de pèlerin »; le sens verbal de l’a. fr. aeschier « amorcer ».
de « bande d’étoffe passée autour du corps
en forme de baudrier ou de ceinture » ÉCHÉANCE, v. échoir.
apparaît vers 1300. Il s'explique par le fait
qu’on portait cette sacoche en bandou- ÉCHEC, xu°, d’abord interjection par
lière : c’est dans l’expression porier en laquelle, au jeu d'échecs, un des joueurs
écharpe « porter comme une bourse de avertit son partenaire que le roi de celui-ci
pèlerin » que le sens d’écharpe a glissé peu est menacé, d’où le nom du jeu, vers 1080
à peu vers la façon de porter et qu’écharpe (Roland) ; eschec et mat au sens fig. est
a pu finir par désigner la bande d’étoffe à déjà du xrre s. Altération de la forme
laquelle on suspendait la bourse. Repré- eschac, attestée par le plur. eschas, empr.,
sente un francique *skirpja, qui, étant lui- probabl. par l'intermédiaire de l'Espagne,
même empr. du lat. scirpus « jonc », doit du mot arabo-persan shdh « roi », dans
avoir désigné d’abord une sacoche tressée l'expression shdh mât « le roi est mort »,
avec du jonc. Un bas-lat. scrippum v. mat, d’où aussi it. scacco, esp. jaque.
« bourse de pèlerin » est attesté dès 757. L’altération d’eschac en eschec est peut-être
*Skirpja a participé au commencement de due à un croisement avec l’a. fr. eschiec
la palatalisation; il est devenu *skjirpja et « butin », empr. du francique *skäk, quoi-
de là, par dissimilation, *skjirpa. qu’il y ait peu de rapport pour le sens. —
Dér. : échiquier, xrr1e, altération d’esche-
ÉCHARPER, 1690. Autre forme d’échar- quier, antér. eschaquier, xr1°. Échiquier,
pir, attesté au xvi® s. au sens de «tailler, terme d'administration angl., xvire, est
mettre en pièces » (de charpir, v. charpie). un calque de l’angl. exchequer « trésor pu-
ÉCHARS, v. escarcelle. blic, etc. » (cf. chancelier de l’échiquier,
ministre des finances anglais), qui vient
ÉCHASSE, xr1° ; au moyen âge eschace ; lui-même de l’a. fr. eschequier, attesté au
signifie alors aussi « jambe de bois, bâton ». x11e s. au sens de « trésor royal » dans un
Du francique *skakkja, dér. d’un verbe texte anglo-normand; l’échiquier de Nor-
*skakan « courir vite », auquel se rattache mandie, en latin médiéval scaccarium,
aussi l’angl. {o shake; de même a. pr. passe pour avoir existé avant la conquête
escassa « béquille »; existe aussi dans les de l’Angleterre. L'emploi de ce nom vien-
parlers it. — Dér. : échassier, 1799, au drait de ce que la cour féodale des ducs de
sens moderne ; au moyen âge fréquent au Normandie se réunissait autour d’une table
sens de « qui a une jambe de bois, estropié ». recouverte d’un tapis orné de carreaux
ÉCHAUBOULURE, « petite cloque sur servant à faire les comptes ; a survécu en
la peau », 1690. Altération d’eschaubouil- outre longtemps comme terme d’adminis-
lure, 1549, qui paraît dér. d’un verbe du tration en Normandie. V. aussi déchi-
type chaubouiller, attesté en berrichon au queter.
sens d’ « échauder », comp. de chaud, pris ÉCHELLE. Lat. scala. It. scala, esp. a.
adverbialement, et de bouillir. pr. escala. L’a. fr. eschiele, vers 1080 (Ro-
ÉCHAUDER. Lat. de basse ép. excaldäre land) « groupe d'hommes armés » est une
« baigner dans l’eau chaude ». It. scaldare, altération d’eschiere, du francique *skéra,
esp. escaldar. — Dér. : échaudé, xrn°; v. l’all. Schar. Échelle, comme terme de
échaudoir, 1380. marine, signifie propr. « le lieu où l’on pose
ÉCHAUFFER. Lat. pop. “escalëfäre, une échelle pour débarquer », d’où Échelle
lat. class. excaléfacere, v. chauffer. Esp. es- du Levant, 1681, v. escale. — Dér. : éche-
calfar. — Dér. et Comp. : échauffaison,
lette, xrr1°; échelon, xrI°; échelonner,
x111e ; échauffement, x11° ; réchauffer, xII° ; 1823, une première fois au xv® s.; éche-
réchaud, 1549, altération de *réchauf, post- lonnement, fin xIxe.
verbal, d’après chaud, d'où aussi l’ortho- ÉCHENAL, v. chenal.
graphe du mot ; réchauffement, 1611.
ÉCHEVEAU. Lat. scabellum « petit
ÉCHAUFFOURÉE, v. four. banc », qui a dû prendre par comparaison
ÉCHAUGUETTE, vers 1080 (Roland : le sens de « dévidoir », d’où « écheveau »;
escalguaite). D'abord *eschargailte, d'où es- cf. à l’appui l’a. pr. escavel, qui a les deux
chalgaite, etc. A signifié d’abord « troupe sens « dévidoir, écheveau » qu’on retrouve

DICT. ÉTYM. 14
ÉCHEVEAU 210

également dans les parlers de l'Ouest du ÉCHOUER, xvie (Amyot). Étymologie


Massif Central, l'emploi d’escabel au sens inconnue. — Dér. : échouage, 1687; échoue-
de « dévidoir » dans ces mêmes parlers et, ment, 1671.
d'autre part, le picard écagne « escabeau »
et « écheveau », l’a. pr. escanha « dévidoir, ÉCLABOUSSER, xvi*, d’après le dér.
écheveau », escanh « escabeau » qui repré- éclaboussure. Altération de l’a. fr. escla-
sentent des formes du lat. pop. *scamnium, bouter (encore vivant en Picardie et en Nor-
-ia, « escabeau ». Le passage sémantique mandie). Probabl. comp. du radical onoma-
de « dévidoir » à « écheveau » est dû pro- topéique klabb- (v. clabauder) et de boulier.
bablement à l’emploi du mot désignant le — Dér. : éclaboussement, 1835.
dévidoir comme mesure de fil, comme l’all. ÉCLAIRCIR. D'abord esclarcir, devenu
haspel « dévidoir » sert dans quelques esclaircir au xtti® s. d’après clair. Lat.
régions de nom d’une mesure égale à la pop. “*exclaricire, réfection de *excläricäre
portion de fil qui trouve place sur un dévi- (cf. cläricäre « scintiller » chez Apulée), fait
doir. sur le modèle de *exclariäre, v. le suiv.;
ÉCHEVELÉ, v. cheveu. dans les dér. le préf. ex a une valeur forte
et indique l’action de « (faire) sortir de
ÉCHEVIN, 1197. Du francique *skapin l'obscurité pour entrer dans la lumière ».
(cf. anc. haut-all. scaffin et all. moderne — Dér. : éclaircie, xv®, rare avant la fin
Schüffe) qui a dû signifier « juge », attesté du xviri® s.; éclaircissement, xIrIe.
par le lat. scabinos (acc. plur.) de la Loi
des Longobards. À pénétré du fr. dans les ÉCLAIRER. Lat. pop. “exclariare, lat.
langues méridionales, d’où a. pr. escavin, class. excläräre. A. pr. esclairar. — Dér. :
esclavin, it. schiavino, ete. — Dér. : éche- éclair, xri°, a éliminé l’ancien épari, en se
vinage, 1211. propageant depuis la côte normande, au-
jourd’hui dominant dans les patois septen-
ÉCHIDNÉ, 1800. Dér. sav. du grec ekhid- trionaux, et surtout fém. ; ailleurs types
na « vipère », par comparaison des crochets divers, v. foudre; éclairage, 1798; éclaire,
de la vipère avec les piquants des échidnés. plante, xri° ; éclaireur, 1793, au sens mo-
ÉCHIF, v. esquiver. derne, a déjà été formé au xvi® s. au sens
ÉCHINE. Du francique *skina, cf. anc. de « celui qui est capable d'éclairer les
haut-all. scina, à la fois « os de la jambe » autres ».
(d’où l’all. Schienbein) et « aiguille », cf. ÉCLAMPSIE, 1783. Empr. du lat. mé-
pour ce sens le fr. épine dorsale (épine du dical moderne eclampsis (d’un mot grec
dos chez Montaigne) et le lat. spina « id. ». qui signifie propr. « lumière éclatante »,
De même a. pr. esquina « échine » et « dos », d’où « accès subit »).
it. schiena « id. », esp. esquina. — Dér. :
échinée, xri°; échiner, 1515, « rompre ÉCLANCHE, 1548 (Rab. esclanges).
l’échine », d’où s’échiner « se donner beau- Francique *slink (cf. moyen néerl. slinke
coup de peine », 1808. On employait aussi « main gauche »), d’où anc. picard esclenc
au xvii® s. les formes altérées échignée, « gauche », xrI°. Cet adj. a été substantifié
échigner, encore de quelque usage dans le (esclence « bras ou épaule gauche », 1180), et
langage pop. quand gauche s’est substitué à esclenc
ÉCHIN(O)-. Premier élément de mots comme adj., éclanche est devenu la déno-
sav. comp., tels qu’échinoderme, 1792 (créé mination de l'épaule (du mouton) sans
par le naturaliste Bruguières), tiré du grec restriction au côté gauche.
ekhinos « hérisson ». ÉCLATER, xr1°, rare avant le xvIe s. ;
ÉCHIQUETÉ, v. déchiqueter. est employé aussi transitivement. Probabl.
du francique “*slaitan, cf. anc. haut all.
ÉCHIQUIER, v. échec. sleizen « déchirer », tandis que l'it. schiai-
ÉCHO, xiie. Empr. du lat. echo (du tare remontera à la forme correspondante
grec ekhô). — Dér. : échotier, 1866, « celui du longobard. La conservation du -f- est
qui rédige des échos dans un journal ». due au fait que dans la longue période de
ÉCHOIR. Lat. pop. *excadère, réfection bilinguisme de l’époque mérovingienne la
du lat. class. excidère, d’après le simple forme germ. et la forme romanisée du mot
cadere ; a perdu partout son sens propre de ont vécu côte à côte. — Dér. : éclat, xr1°;
«tomber » ; conservé dans toutes les langues éclatement, 1553.
romanes avec des sens proches du fr. : ÉCLECTIQUE, 1651 (d'abord seulement
it. scadere « échoir » et « déchoir », a. pr. par rapport à la philosophie ancienne;
escazer « id. », esp. arch. escaecer « déchoir ». appliqué à la philos. moderne par Cousin,
V. choir. — Dér. : échéance, xxrr1e. en 1817). Empr. du grec eklektikos, propr.
ÉCHOPPE, « burin employé par les gra- « qui choisit » (de eklegein « choisir »). —
veurs, etc. ». Depuis 1762 sous cette forme, Dér. : éclectisme, 1755.
altération d’eschople, xvri1°, au moyen âge
eschalpre, lat. scalprum « burin, ciseau, etc. » ÉCLIPSE, x11°; écliptique, xrr1°. Empr.
v. scalpel, -er; de même a. pr. escalpre du lat. eclipsis, eclipticus, cf. aussi Linea
« ciseau », esp. escoplo « id. ». — Dér. : ecliplica (du grec ekleipsis, ekleiptikos « qui
échopper, 1621, encore eschopler en 1636. concerne les éclipses », et substantiv. « or-
bite du soleil ») (d’après l’ancienne astro-
ÉCHOPPE, «petite boutique », 1230 (sous nomie c’est à l’intérieur de ce cercle que
la forme escopes). Empr. de l’anc. néerl. se produisent les éclipses). — Dér. : éclipser,
schoppe, cf. angl. shop « magasin ». xrtie (J. de Meung), déjà au sens fig.
211 ÉCOUTILLE

; ÉCLISSER, vers 1080 (Roland). Le fran- ÉCONDUIRE. Altération de l’a. fr. es-
cique *slitan « fendre » est représenté en condire (quelque chose à quelqu'un), escon-
a. fr. par esclier, encore vivant dans beau- dire (quelqu'un) « refuser, repousser »,
coup de patois. La région méridionale du s’escondire « s'excuser », usuel jusqu’au
francique a changé le verbe en slizzan XVI s., lat. médiéval (1x° s.) excondicere,
(ainsi en a. haut all.). Cf. l’all. schleissen, comp. du lat. class. condicere « convenir
l’angl. to slit. — Dér. : éclisse, vers 1080. de »; de même a. pr. (s')escondire. Au
XVe s. écondire a été refait en éconduire,
ÉCLOPER, xrre, surtout au part. passé. d’après conduire, la forme ayant provoqué
Dér. de l’anc. cloper, v. clopin-clopant. un rapprochement du sens, et, dès lors, il
ÉCLORE. Lat. pop. *exclaudere, réfec- a été senti comme un comp. de conduire.
tion, d’après le simple claudere, du lat. ÉCONOME, 1337 ; économie, 1370 (Ores-
class. exclüdere « faire sortir, exclure », et me); économique, 1265. Empr. du lat.
déjà « faire éclore des œufs », d’où le sens oeconomus (lat. juridique), -mia, -micus (du
dominant en fr., v. couver. S’est employé grec oikonomos, -mia, =mtkos). Le sens fig.
aussi transitivement jusqu’au xvi® s. A apparaît au xvi1°s., d’abord pour économie,
perdu rapidement en fr. le sens général de ‘ ensuite, par contagion, aussi pour économe,
« faire sortir », relevé au x11° s., seul sens -ique. — Dér. : économat, 1553; écono-
de l’a. pr. esclaure, cf. aussi l’it. schiudere miser, 1718 ; économiste, 1767.
« ouvrir, exclure », schiudersi « s'ouvrir (en
parlant des fleurs) ». Dans les parlers gallo- ÉCOPE, xuic. Du francique *skôpa,
romans, peu usité en dehors de la partie lequel peut être supposé d’après le moyen
septentrionale. — Dér. : éclosion, 1747. néerl. schope. — Dér. : écoper, 1870, déjà
ÉCLUSE. Lat. de basse ép. (vie s., chez en 1867 comme terme d’argot, au sens de
des auteurs de la Gaule) exclüsa, part. fém. « boire » et au sens de « recevoir un re-
de exclüdere, propr. « (eau) séparée du cou- proche, un coup ».
rant », d'où la construction elle-même ; ÉCORCE. Lat. scoriea, dér. de scorlum
mot lié à l’invention du moulin à eau; v. « peau », attesté au sens de « vêtement de
aussi bief. Seulement gallo-roman : a. pr. peau », qui a pu prendre le sens d’ «écorce ».
escluza. Aïlleurs empr. du gallo-roman : De même it. scorza, roumain scoarfa et a. pr.
esp. esclusa, all. Schleuse, angl. sluice, etc. escorsa. Du lat. class. cortex vient écorcher.
— Dér. : éclusier, xIvV°. — Dér. : écorcer, xrre.
ÉCOBUER, « défricher », 1721. Altéra- ÉCORCHER. Lat. de basse ép. excorii-
tion d’égobuer, 1539, sous l'influence d’écot cäre « écorcer », qui a pris le sens d’ «enlever
« rejeton », fréquent dans les parlers de la peau ». It. scorticare, aux deux sens. —
l'Ouest. Égobuer se rattache au poitevin Dér. : écorchement, xr11° ; -eur, id.; -ure,
gobuis « terre pelée », dér. sous l’influence id.; -oir, vers 1935.
de menuis (v. menuiser) de gobe « motte de
terre », du radical de gober, v. ce mot. — ÉCORNIFLER, v. corne.
Dér. : écobuage, 1797. ÉCOT. Du francique *skot « contribu-
ÉCOINÇON, v. coin. tion », cf. all. Schoss « id. », angl. scoi
« écot » (mots de la famille de l’all. schiessen
ÉCOLÂTRE, v. scolastique. « tirer »); existe aussi dans les langues
ÉCOLE, xi° (Alexis). Lat. schola (du méridionales : it. scoilo, esp. escole.
grec skholé), qui a refoulé le mot propr.
lat. ludus, propr. « jeu », qui signifiait ÉCOURGÉE, ESC-, v. fouet.
« école élémentaire » et qui a disparu de ÉCOURGEON, v. escourgeon.
toutes les langues romanes. La forme école
montre que le mot est resté en contact ÉCOUTE, « sorte de câble », 1155. Du
avec le lat. écrit. Existe partout dans des francique *skôta, dont l’existence est assu-
conditions analogues : it. scuola, esp. es- rée par le moyen néerl. schote ; v. écoutille.
cuela; empr. également par les langues
voisines : all. Schule, angl. school. École ÉCOUTER. D'abord escolier, x°s. (Sain-
« sottise », dans faire une école, assez récent, le Eulalie : eskoltet, 3° pers. sing. indic.
est issu du langage du jeu de trictrac, où prés.), issu, par substitution de préf., d'as-
ce sens vient des expressions envoyer, meilre colier, lat. pop. attesté à basse ép. asculiäre,
à l’école « marquer pour soi les points que lat. class. ausculiäre. It. ascoliare, et, avec
l'adversaire a oublié de marquer ou a mar- la même modification qu’en fr., esp. escu-
qués en trop ». École buissonnière, xvI° char. Le type ancien acouler survit dans
(Marot), paraît s'être d’abord dit d’écoles un certain nombre de parlers septentrio-
tenues dans la campagne par des maîtres naux, notamment au Nord-Est. — Dér. :
qui voulaient se soustraire à la redevance écoute, x11° ; écouteur, x11°, rare avant le
exigée par les chapitres des églises, puis XVIIE $.
d'écoles clandestines tenues par les pro- ÉCOUTILLE, 1538.. Empr. de l'esp.
testants (interdites par. arrêté du Parle- escolilla, dér. de escote « échancrure dans
ment en 1554). une étoffe », d’où est issu le sens de trappe,
ÉCOLIER. D'abord escoler, x11e, puis cf. escotadura « trappe de théâtre », dér.
escolier par changement de suffixe. Jus- de escotar « tailler ». Éscote est probabl. pris
qu'au xvin® s. a eu un sens plus large du gothique skauis « extrémité, bord d’un
qu'aujourd'hui. Lat. de basse ép. schola- vêtement » (auquel se rattache l’all. Schoss
ris; pour le développement de la forme, « giron », de la famille des mots germa-
v. le préc. It. scolare et -ro, esp. escolar. niques cités sous écoi).
ÉCOUVILLON 212

ÉCOUVILLON, xrie. Dér. de l’a. fr. es- sens d’ « écrou » par une comparaison vul-
couve, lat. scôpa « balai » ; escouve n’est plus gaire, cf. l’it. du sud scrofula « écrou » et
attesté que par des dér., cf. écouvette, re- l'esp. puerca « truie » et « écrou », v. vérin.
levé au xIv® s. V. balai. — Dér. : écouvil- Rare en dehors du fr.
lonner, 1611.
ÉCROU (de prison), xr1°. D'abord es-
ÉCRABOUILLER, 1478. On a dit aussi croue, fém., encore usité au xvii® s. A
écarbouiller, encore dialectal. Altération, signifié d’abord « morceau d’étoffe, de cuir,
par croisement avec écraser, de l’a. fr. etc. », d’où « morceau de parchemin », puis
esbo(u)illier « éventrer », encore très ré- le sens moderne au xvri® s. Du francique
pandu dans les patois, dér. de l’anc. boille *skrôda, cf. moyen néerl. schroode « mor-
« entrailles », lat. pop. *botula, lat. class. ceau coupé », auquel se rattache l’all. Schrot
boiulus, v. boyau. De boille aussi brouailles, « tronc, etc. ». — Dér. : écrouer, 1643.
xive, « entrailles de poisson, etc. », issue
d’une anc. forme breuille, xr1°, avec une r ÉCROUELLES. Lat. pop. *scrôfellae,
non expliquée. autre forme de scrofulae (Végèce) (d’où
lit. scrofole et l'a. pr. escroula), dér. de
ÉCRAN, 1290. Empr. du moyen néerl. scrôfa, propr. « truie », qui a été pris en
scherm, id. lat. médical, au sing. et au plur., au sens
ÉCRASER, xvi®; en outre accraser. d’ « écrouelles », cf. de même en grec khoiros
Moyen angl. crasen « écraser » (angl. mo- « porcelet », khoiras « écrouelles », qui a
derne {o craze), probabl. empr. pendant la peut-être servi de modèle ; l'emploi du nom
Guerre de Cent Ans. Le fr. a donné tout du porc en ce sens vient de ce que cette
de suite à ce verbe le préf. é- si fréquent maladie est malpropre ou de ce que les
dans les verbes d'un sens semblable. — porcs y sont partic. sujets, cf. aussi le ber-
Dér. : écrasement, 1611 ; écraseur, id. richon porcinat « gros bouton qui vient sur
la peau, furoncle ». Rare en dehors du
ÉCREVISSE, 1248. Altération de cre- français. V. scrofule.
vice, 1213. Francique *krebitja, auparavant
*krabitja, cf. anc. haut all. krebiz, all. ÉCROUER, v. écrou (de prison).
Krebs.
ÉCROUIR, 1685. Doit avoir passé des
ÉCRIN. Lat. scrinium. De même it. scri- régions wallonnes (cf. Namur crufier «métal
gno, esp. arch. escriño « sorte de panier de fondu ») dans la terminologie métallur-
paille », a. pr. escrinh. gique fr. Dér. du liégeois crou « cru », du
lat. crüdus. — Dér. écrouissage, 1802;
ÉCRIRE. D'abord escrivre, puis escrire, écrouissement, 1680.
au x1I11° s., d’après Lire, dire. Lat. scribere.
It. scrivere, esp. escribir. — Dér. et Comp. : ÉCRU, v. cru.
écrit, x11°, Ou lat. scriplum; écriteau,
vers 1350 ; écrivailler, 1611 ; écrivailleur, ÉCU. D'abord « bouclier »; a été dit, à
1580 (Montaigne) ; écrivassier, 1774 ; écri- l’époque de saint Louis, de monnaies d’or,
vasser, fin XVIIIe ; récrire, XIIIe. ornées de l’écu de France, puis d’autres
monnaies, d'où en général « monnaie d’ar-
ÉCRITOIRE, xr1°, au sens de « cabinet gent ». Lat. scütum. — Dér. : écusson,
d’étude » ; a signifié aussi un petit meuble 1280 ; écussonner, 1600 ; écussonnoir, 1721.
portatif, contenant tout ce qu'il faut pour
écrire ; le sens moderne date du xvire s. ÉCUBIER, 1678. D'abord formes diver-
D'abord masc., encore au xvie s. Empr. du ses : esquembieu, XIV®; equibien, 1573;
lat. médiéval scriptorium qui a le premier escubier, 1643 ; d'autre part escouve, 1557,
sens ; en lat. ancien « stylet pour écrire ». dans un texte d’origine portugaise, cf. de
même esp. escoben(es). Étymologie in-
ÉCRITURE., Lat. scriplüra. Mot resté connue.
en contact avec le lat. écrit ; de même it.
scrittura. Écriture (sainte) est fait sur le ÉCUEIL, 1538. Empr. de l’occitan
lat. eccl. scripiura, probabl. d’après le grec escueill ; celui-ci représente comme l’anc.
biblos, v. bible, bien qu’en lat. class. scrip- génois scoio et le cat. escull un lat. de basse
tura signifie aussi « ouvrage », seul sens de époque *scoc’lus, né du lat. class. scôpülus
l'esp. escritura. (empr. du grec skopelos) par assimilation à
distance de la consonne -p- au -c- précé-
ÉCRIVAIN. Signifie d’abord « celui qui dent. L’it. scoglio est empr. du génois et a
écrit pour d’autres » ; le sens de « personne passé à son tour à l’esp. fescollo).
qui compose des livres » apparaît une
première fois vers 1300, puis au xvie s. ÉCUELLE. Lat. pop. scütella, altéra-
Lat. pop. *scribänem, acc. de scriba tion du lat. class. scütella, par croisement
« scribe, greffier, etc. », dont la déclinaison avec scülum, V. écu, en raison de la forme
class, scriba, -ae, a été changée en scriba, des deux objets. Existe dans tous les par-
-änis, sur le modèle des noms en -6, -ünis, lers gallo-romans ; la forme du lat, class.
tels que Cicerô, -Gnis, v. sacristain, innova- est conservée dans l’it. scodella. — Dér. :
tion dont on trouve des traces jusqu’en écuellée, xrr1e.
roumain; V. aussi nonnain, putain. It. ÉCULER, v. cul.
scrivano, esp. escriban.
ÉCUME, xni°. Empr. du germanique
ÉCROU, « pièce de bois ou de métal, occidental *skum, cf. all. Schaum, devenu
dans lequel on introduit une vis ». D’abord en lat. pop. *scüma, par croisement avec
escroue, fém., aux x111e et x1v®e, encore usité späma ; paraît avoir été emprunté comme
au xvi11e8. Lat. scrôfa « truie », qui a pris le article de toilette au sens de « savon liqui-
213 EFFÉMINER

de », v. savon. De même it. schiuma, a. pr. sens parallèle au verbe ; les deux sens du
escuma, à côté desquels spüma a subsisté : verbe et du subst. apparaissent de bonne
it. spuma, esp. espuma. — Dér. : écumer, heure en fr.; le sens d’ « instruire pleine-
xIIe ; écumeur, 1351, déjà au sens de « vo- ment », est de date récente. — Comp. :
leur », dans écumeur de mer; écumeux, réédifier, x111° (d’après le lat. de basse ép.
Fo ; écumoire, 1552, d’abord escumoir, reaedificare) ; réédification, 1296.

ÉDILE, 1213 ; édilité, xive. D'abord ter-


ÉCURER. Lat. pop. *excüräre « net- mes d’antiquité ; appliqués à des institu-
toyer », de cüräre, v. curer. Esp. a. pr. es- tions modernes, au xix°® s. Empr. du lat.
ur — Dér. : récurer, xirI° ; récurage, aedilis, aedilitas. — Dér. : édilitaire, 1875.
1509.
ÉCUREUIL. Issu assez récemment, par ÉDIT, x. Empr. du lat. edicium, v.
substitution de suffixe, d’un mot de l’a. fr. édicter.
aux formes variées, cf. notamment escu-
riuel, XII; escurieu, XVI, d'où écurieu, ÉDITER, 1784 ; éditeur, 1732 ; édition,
encore dans les dictionnaires. Lat. pop. xir1e, Éditer a été dér. du lat. editus, part.
*scüriolus, dér. du lat. class. sciürus (du passé du verbe edere « publier », et éditeur
grec skiouros). Usuel en gallo-roman avec a été emprunté du lat. editor (qui n’a que
divers suffixes (a. pr. escuriol, esquirol, escu- le sens d’ « auteur, fondateur ») pour servir
rol). It. scoialtolo. de verbe et de nom d'agent à édition,
empr. dès le moyen âge du lat. editio, class.
ÉCURIE, v. écuyer. au sens de « publication d’un ouvrage ». —
Dér. : rééditer, 1845 ; réédition, 1725.
ÉCUSSON, v. écu.
ÉCUYER. Lat. scütärius, qui a pris à ÉDITORIAL, 1895. Empr. de l’angl. edi-
basse ép. le sens de « celui qui porte l’écu », torial, de la famille des préc.
v. écu; terme d'institution politique, dont
la valeur a évolué ; les sens de « maître -ÈDRE. Deuxième élément de mots sav.,
d'équitation », puis de « celui qui monte tels que dièdre, 1783 ; trièdre, 1793, etc.,
bien à cheval » (en partie dus à l’influence tiré du grec hedra « siège », d’où « base ».
du mot lat. equus « cheval » qu’on a cru
reconnaître dans écuyer) datent du xvIIes. ÉDREDON, 1700 (en outre ederdon,
— Dér. : écurie, d’abord escuerie, XIII°; xvu11e). D'abord « duvet fourni par l’eider »,
escuyrie, au Xv° et au XVI° s.; a désigné d’où « couvre-pied fait avec ce duvet ».
d’abord le service des chevaux d’un prince, Empr. de l’islandais aedar-dun « duvet de
cf. escuyer d’escuirie encore chez Mon- l'oiseau aedar », par l'intermédiaire de
taigne. Le sens moderne date du xvi°s., l’all. Eiderdaun ou du danois edder-duun,
et s'explique par le caractère de la charge v. duvet et eider.
des écuyers qui, depuis le x111° s. environ,
veillaient spécialement sur les écuries du ÉDULCORER, 1625. Empr. du lat. mé-
roi ou de grands seigneurs, cf. de même diéval edulcorare (du latin de basse ép.
lit. scuderia, encore aujourd’hui « écurie dulcorare, dér. de dulcor, id.).
de maison seigneuriale ». ÉDUQUER, 1746 ; longtemps mal reçu ;
ECZÉMA, 1828. Empr. du lat. médical aujourd’hui encore d’un emploi restreint;
eczema, relevé en 1747, empr. lui-même du une première fois au xiv® s.; éducateur,
grec médical ekzema « éruption cutanée » 1527; éducation, 1495. Empr. du lat.
(du verbe ek-zein « bouillonner »). — Dér. : educare, educator, educalio. Jusqu'au xvir°s.
eczémateux, 1864. on disait surtout nourrir, nourriture. —
Dér. : éducable, 1845 ; rééduquer, fin xIX° ;
EDELWEISS, 1885. Mot all. importé rééducation, id.
de la Suisse par l'effet du tourisme (all.
edel « noble », weiss « blanc »). EFENDI, 1762. Empr. du turc efendi,
altération du grec moderne afthendis (th
ÉDEN, 1762. Empr., par l'intermédiaire prononcé comme fh anglais), issu du grec
de la Bible, de l’hébreu eden, nom du lieu, anc. authentés « qui agit de sa propre auto-
où se trouvait le paradis terrestre, propr. rité, maître », cf. authentique.
« volupté », cf. Genèse, II, 8, etc. — Dér. :
édénien, 1838 et -nique, 1877. EFFACER, v. face.
ÉDICTER, 1864, une première fois au EFFARER, xive. D'abord efferé, 1202.
xvies. Dér. sav. du lat. edictum, pour servir Dér. du lat. ferus (v. fier) dans l’anc. sens
de verbe à édit, dont le dér. éditer, attesté de « indompté ». L’e du radical est devenu
en 1399, se serait confondu avec éditer a sous l'influence de l’r suivant et aussi de
« publier ». l’adj. farouche. — Dér. : effarement, 1803.
ÉDICULE, 1863. Empr. du lat. aedicula EFFECTIF, xive. Empr. du lat. didac-
(de aedes « maison ») pour désigner de tique effectivus « qui produit un effet ».
petites constructions, kiosques, etc., sur Comme subst., de date récente.
les boulevards, les places, etc.
EFFECTUER, xv°. Empr. du lat. mé-
ÉDIFICE, xr1° Empr. du lat. aedificium. diéval effectuare (de effectus).
ÉDIFIER, xu:° ; édification, xr1°. Empr.
du lat. aedificare « construire » et, dans le EFFÉMINER, x11e. Empr. du lat. effe-
lat. eccl. « porter à la pitié », aedificalio, de minare. 1
EFFERVESCENT 214

EFFERVESCENT, 1778 ; effervescence, d’où le sens de « rendre le sol stérile par


1641 ; cf. aussi chez Mme de Sévigné : « Des le retour des mêmes cultures ». — Dér,. :
effervescences d'humeur, voilà un mot dont effritement, 1859,
je n’avais jamais entendu parler ; mais il EFFROI, v. effrayer.
est de votre père Descartes. » Le premier
est emprunté du lat. effervescens, part. EFFROYABLE, v. effrayer.
prés. de effervescere « bouillonner », le EFFUSION, xr1°. D'abord sens physi-
deuxième est dér. de ce part.; la date que ; sens moral au xvire s. dans le langage
d’effervescence montre qu’il a été formé sur
religieux. Empr. du lat. effusio qui a les
le lat. et non tiré d’effervescent, v. efflores- deux sens (de effundere « répandre »).
cent, -ce. Sens fig. du subst., fin xvirIe.
EFFET, xt. Empr. du lat. effectus
ÉGAILLER (s’), 1877. Mot dialectal,
usité dans les parlers de l’Ouest, où il signi-
« résultat d’une action. influence », d’où
fie « se disperser » (est employé comme tel
est issu de bonne heure en fr. le sens de
« réalisation », puis, vers le xvrre s., celui par Balzac dans Les Chouans), cf. l’a. fr.
d’ « impression morale ». Comme terme de esgailler « répandre », qui n’apparaît qu’à
finance, déjà x1rve s. (effet de change) ; au
la fin du xve s., et dans des textes de
sens de « vêtements, linge », xvr1e. En effet, l'Ouest, probabl. lat. pop. *aequäliäre (de
d’abord au sens de « en réalité », date du l’adj. aequälis « égal »), « rendre égal » d’où
xvI1e 8. environ, d’où le sens affaibli d'adv. « répandre de façon égale », v. aiguail.
de confirmation, à la même date. ÉGAL, xu°. Réfection, d’après le lat.
aequalis, d’une autre forme igal, première
EFFICACE, vers 1225; efficacité, 1675 réfection de formes pop. evel, ivel, et., qui
(Bouhours, qui le blâme), une première ont résisté jusqu’au xv® s.; l’it. uguale,
fois 1495. Empr. du lat. efficax, effica- l'esp. igual, etc., sont aussi des formes pop.
citas. Efficacité a supplanté, à la fin du — Dér. : égaler, x1r1°, rare avant le xvI®s. ;
xvIIe s., efficace, fém., x11°, empr. du lat. égaliser, 1539 (d’abord equaliser au xv®s.) ;
efficacia. — Dér. : inefficace, x1ve ; ineffi- égalisation, xvie.
cacité, 1694.
ÉGALITÉ, x, mais rare avant le
EFFICIENT, 1290 (la cause efficiens). début du xvires. Réfection, d’après le préc.
Empr. du lat. philosophique efficiens (cf.: d’équalilé, encore usuel au xvi® s., empr.
chez Cicéron causa efficiens), part. prés. de du lat. aequalitas ; au moyen âge de nom-
efficere « accomplir ». — Comp. : coefficient, breuses autres formes, d’après les formes
1629. de l’adj. — Dér. : égalitaire, 1859.
EFFIGIE, xve. Empr. du lat. effigies ÉGARD, v. garder.
« figure, portrait ».
ÉGARER, v. garer.
EFFLEURER, v. fleur.
ÉGÉRIE, 1853 (A. de Musset); 1829,
EFFLORESCENT, 1777 ; efflorescence, genre de crustacé. Tiré du nom de la
xvie (Paré). Le premier est empr. du lat. nymphe qui inspirait le deuxième roi
efflorescens, part. prés. de efflorescere « fleu- légendaire de Rome, Numa Pompilius.
rir », le deuxième est dér. de ce part.
ÉGIDE, 1512. Empr. du lat. aegis, aegi-
EFFLUVE, 1755. Empr. du lat. efflu- dis (du grec aigis, aigidos, de aix, aigos
vium « écoulement » (de e/ffluere « écouler »). « chèvre », propr. « peau de chèvre »), qui
EFFONDRER, v. fond. désignait le bouclier (plus exactement un
manteau ou une cuirasse) de Zeus, recou-
EFFORCER (s’), EFFORT, v. forcer. vert de la peau de la chèvre Amalthée, sur
EFFRACTION, xvie (Amyot) ; une pre- lequel était la tête de Méduse (Zeus a par-
mière fois au xIvV® s. dans un sens moral. fois confié ce bouclier à Apollon ou à
Empr. du lat. effractura « effraction » (de Athéna) ; en fr. désigne spécial., comme en
effringere « rompre ») avec changement de lat., le bouclier de Pallas; le sens fig., qui
suffixe. apparaît en 1774 chez Voltaire, est une
innovation du français.
EFFRAIE, v. orfraie.
ÉGLANTIER, vers 1080 (Roland : eglen-
EFFRAYER. D'abord esfreer, d’où *es- lier). Dér., avec le suff. -ier des noms
freier, effrayer. Lat. de la Gaule *exfridäre, d’arbres et d’arbustes, cf. coudrier, de l’a.
dér. du francique *fridu, cf. ane. haut all. fr. aiglent, lat. pop. *aquilentum, dér. anor-
fridu (d’où l’all. Friede « paix ») donc « faire mal de aculeus « aiguillon » (l’initiale aqui-
sortir de l’état de tranquillité »; de même est à rapprocher de aquifolium « houx »,
a. pr. esfredar. — Dér. : effroi, d’abord comp. de acus « aiguille » et de folium
esfrei, XII*, d'où esfroy, par un déve- « feuille ») ; *aquilenium est le neutre d’un
loppement phonétique qui l’a séparé du adj. non attesté, qui a dû signifier « riche
verbe, v. émoi; d’où effroyable, xrve. en épines », cf. piscilentus « poissonneux »,
spinulenius « épineux ». Seulement gallo-
EFFRÉNÉ, vers 1200. Empr. du lat. roman ; Cf. a. pr. aguilen et -lensier, etc.
effrenatus (de frenum « frein »).
ÉGLANTINE, 1600 (O. de Serres). Fém.
EFFRITER, 1801, au sens moderne. pris substantiv. de l’anc. adj. aiglantin,
Emploi abusif, probabl. d’après l’adj. fria- 1572 (R. Belleau), dér. d’aigleni, v. le préc. ;
ble, d’effriter, 1611 (peut-être déjà xrrre s.), cet adj. survit encore dans le Vendômois,
altération d’effruiter, 1213, qui signifiait région proche de Nogent-le-Rotrou, où Bel-
au moyen âge « dépouiller de ses fruits », leau est né.
215 ÉLECTRIQUE

ÉGLEFIN, v. aïigrefin, poisson. ÉJACULER, fin xvi® ; éjaculation, 1552


(Rabelais), en parlant de phénomènes at-
ÉGLISE. Lat. pop. eclèsia, forme fré- mosphériques ; s’est dit aussi d’une prière
quemment attestée, lat. eccl. ecclesia (du fervente ; aujourd’hui employé surtout en
grec ekklésia, en grec class. « assemblée », physiologie, comme le verbe. Le premier
d’où, dans le grec des chrétiens, « assemblée est empr. du lat. ejaculari « lancer », le
des fidèles ») ; ecclesia, au sens de « maison deuxième est un dér. sav. de ce verbe lat.
du culte », apparaît au n° s. Sauf en Rou-
manie et dans la région rhétique, christia- ÉJARRER, v. jard.
nisées les dernières et qui ont adopté basi-
lica (cf. roumain bisericä), qui eut alors ÉJECTER, 1907 (une 1re fois en 1492) ;
une grande vogue pour désigner des églises éjection, xrrre s. Empr. des mots lat.
consacrées à des saints ou à des martyrs, ejectare « jeter dehors » et ejectio « action
cf. basilique, ecclesia existe partout : it. de jeter dehors ».
chiesa, d’après la forme ecclesia, esp. igiesia,
a. pr. glieisa, tous deux d’après la forme ÉLABORER, 1534 (au part. passé ; du
eclesia, mais partout avec un traitement XVIe au xvze s. le plus souvent élabouré) ;
élaboration, 1503. Empr. du lat. elaborare
qui révèle l'influence de la langue écrite et
des écoles (où tout e latin se prononçait € « perfectionner », elaboratio.
ouvert). Existe partout dans les parlers ÉLAGUER, 1576 (Baïf). D'abord alaguer
gallo-romans sauf, par une innovation se- (norm. xive), eslavé, 1425. A. nor. laga
condaire, moulier dans un certain nombre « arranger, mettre en ordre »; les formes
de parlers de l'Est, cf. monastère. avec -v- reflètent une forme dialectale nor-
ÉGLOGUE, 1495 (Au IV églogue de végienne *laba. — Dér. : élagage, 1760;
celluy Virgile; ensuite fém.). Resté plus élagueur, 1756.
didactique qu'idylle. Empr. du lat. ecloga
ÉLAN, ÉLANCER, v. lancer.
(du grec eklogé « choix », d’où « pièce choi-
sie »); s'emploie surtout en parlant des ÉLAN, « sorte de cerf du Nord », 1414
œuvres pastorales de Théocrite et de Vir- (hellent) ; ellend, xvre s. ; élan, xvne. Em-
gile. pr. du haut all. elend. Elentier, empr. lui-
ÉGOCENTRIQUE, 1922. Terme de la même du baltique elnis.
psychologie moderne. (Comp. des mots ÉLASTIQUE, 1675; élasticité, 1719.
lat. ego « moi » et cenitrum « centre », avec Empr. du lat. scientifique moderne elas-
le suff. -ique. ticus (du grec elasios, autre forme de elaios
ÉGOÏNE, 1676 (écrit égohine). Antér. « ductile », chez Aristote), elasticitas. Mots
escohine, 1344, au sens de « râpe », lat. devenus européens.
#scofina, forme dialectale du lat. class. ELBEUF, 1743. Tiré du nom d’une ville
scobina « lime », d'où aussi it. scuffina de la Seine-Maritime, réputée pour ses
« râpe », esp. escofina « lime ».
draps.
ÉGOÏSME, 1755 ; égoïste, id. Dér. sav. ELDORADO, 1640 (Dorado en 1579).
du lat. ego « moi ». Empr. de l'esp. el dorado, propr. «le doré »,
ÉGOSILLER (s’), v. gosier. c’est-à-dire « le pays de l'or », pays d’une
richesse fabuleuse, qu’on plaçait au xvies.
ÉGOTISME, dès 1726, mais senti comme dans la région du Venezuela, et dont Orel-
néologisme encore vers 1880. Empr. de lana, le lieutenant de Pizzare, contribua à
l’angl. egotism (du lat. ego), fait pour expri- créer la légende, popularisée en France par
mer une nuance de sens différente de Voltaire dans Candide.
egoism (du fr. égoisme). ÉLECTEUR, x1v® (Oresme) ; électif, id. ;
ÉGRATIGNER, v. gratter. élection, vers 1130. Empr. du lat. elector
« qui choisit », electivus (créé à basse ép.),
ÉGRENER, v. graine. electio (de eligere « choisir, élire »). Election
a été beaucoup employé dans le langage
ÉGRILLARD, 1640, au sens moderne; religieux au sens de « choix fait par Dieu
au xvie s. esgrillard « malfaiteur qui guette lui-même », cf. notamment l'expression
les passants » (qui apparaît et disparaît de vase d'élection, d’après le lat. eccl. vas elec-
façon inattendue). Dér. du normand égril- lionis : au sens de « choix (en général) »,
ler « glisser » (cf. le simple griller « id. »), usuel jusqu’au xviie s. — Dér. d'électeur
altération d’écriller, anc. scandinave *skri- d’après le lat. elector : électoral, 1666 ; élec-
dla « glisser », exactement « marcher avec torat, 1611; d'élection : réélection, 1784.
des raquettes (à neige) » (qu'on restitue
d’après le suédois dialectal skrilla). ÉLECTRIQUE, 1660 ; électricité, 1720.
Empr. des mots du lat. scientifique mo-
ÉGROTANT, 1838 (auparavant isolément derne electricus, electricilas, dér. du lat.
au xrrre et au xvie s.). Empr. du part.
« être ma- anc. electrum (du grec « élektron » « ambre
prés. du verbe lat. aegroiare jaune »), à cause de la propriété de cet
lade ». ambre, connue des anciens, d'attirer les
de l’islandais corps légers, quand on l’a frotté. — Dér. :
EIDER, 1764 Empr.
électricien, 1764 ; électrifier, d’où -fication,
aedar, v. édredon; une première fois au
x111e s. edres ;empr. alors de l’anc. scandi- 1877 ; électriser, 1733. — Comp. : électro-,
nave ; en outre traces du mot au xvI°Ss.
premier élément de nombreux mots techn.
ÉLECTROCUTER 216

ÉLECTROCUTER, 1899 ; électrocution, Dér. : éligibilité, 1732; inéligible, 1752;


1890. Empr. des mots anglo-américains lo inéligibilité, 1791 (une première fois
electrocuie, -cution, formés vers 1890, avec en 1519); rééligible, 1791.
electro-, v. le préc., et la fin du verbe execule
et du subst. execution. ÉLIMER, v. limer.
ÉLECTRODE, 1838. Empr. de l'angl. ÉLIMINER, 1495. Empr. du lat. elimi-
electrode, créé en 1834 par Faraday, avec nare « faire sortir », d’où « rejeter » (de
electr-, v. les préc., et le grec hodos « che- limen « seuil »). — Dér. : éliminateur, 1859 ;
min ». -ation, 1765 ; -atoire, 1875.
ÉLECTRON, 1892. Empr. de l’angl. elec- ÉLINGUE, « cordage à nœud coulant »,
tron, créé arbitrairement en 1891 par Sto- 1322, aussi eslinge « fronde », au xrne 5.
ney avec le grec électron. Mot normand et picard, surtout au sens
de «fronde ». Du francique *slinga «fronde »,
ÉLECTUAIRE, 1387; antér. formes al- qui correspond à l’anc. haut all. slinga,
térées, notamment lelluaires, xr1°. Mot angl. sling. Le sens moderne s’explique
d’ancienne pharmacie, encore usité dans par la ressemblance techn.
les patois de l'Est. Empr. du lat. de basse
ép. electuarium (vie s., Is. de Séville), alté- ÉLIRE. Lat. pop. *exlégère, réfection du
ration, d’après electus « choisi, excellent », lat. class. éligère d’après légère, cf. com-
du grec médical ekleikion « électuaire » (du mander, éclore, etc. Jusqu'au xvr1es. signi-
verbe ekleikhein « lécher »). fie aussi « choisir », cf. aussi le sens de
ÉLÉGANT, 1150, rare avant le xve s. ; « trier » dans les patois. Surtout gallo-
élégance, xv°e. Empr. du lat. elegans, roman, cf. ancien provençal eslir(e). —
elegantia. Élégant a été un mot à la mode, Dér. : élite, xr1°, d’après un anc. part. eslit,
désignant une personne d’une mise dis- signifie aussi « action de choisir » jusqu’au
tinguée, à la fin du xvire s. — Dér. : XVI£ s.; réélire, 1789, une première fois
inélégance, 1525 ; inélégant, vers 1500. en 1237 (écrit reslire), puis en 1570.

ÉLÉGIE, 1500 ; élégiaque, 1480 (v. épi- ÉLIXIR, x1ve ; eslissir, xit1e. Empr. de
gramme). Empr. du lat. elegia, elegiacus l’arabe al-iksir, nom de la pierre philoso-
(créé à basse ép.) (du grec elegeia, propr. phale et aussi sorte de médicament, lui-
« chant de deuil », d’où « chant triste », même empr. du grec kséron « médicament
seul sens conservé en fr., elegiakos). Sens de poudres sèches ». A reçu dans le langage
fig. de l’adj. développé au xixe® 5. de la pharmacie un sens autre que celui
des alchimistes, cf. alcool.
ÉLÉMENT, x° (Eulalie) : élémentaire,
xive. Empr. des mots lat. elementum, ele- ELLE, ELLES. Lat. {lla, illas. Ont suivi,
mentarius, qui ont les principaux sens du fr. comme pronoms sujets, le développement
du masc. il, ils. Comme pron. complément,
ÉLÉPHANT, xr1° ; mais peu usuel avant le sing elle s’est substitué à un anc. pron.
le xvie s. Empr. du lat. elephantus (du grec li, lat. pop. *illaei, disparu d’assez bonne
elephas). Au moyen âge se dit surtout oli- heure en fr., mais encore usité dans les
phant, olifant, forme plus pop., qui a aussi patois de l’Est, du Sud-Est et normands;
les sens d’ « ivoire » (comme en lat. et en cf. de même a. pr. lieifs) et it. lei.
grec) et de « cor d'ivoire », en ce dernier
sens souvenir du cor de Roland. ELLÉBORE, vers 1250. Empr. du lat.
(h)elleborus (du grec helleboros). Est resté
ÉLÉPHANTIASIS, 1538 (vers 1200, connu comme remède contre la folie, grâce
mal d’elefantie). Empr. du lat. elephantiasis aux vers : « Ma commère, il faut vous
(mot pris au grec); ainsi nommé parce purger Avec quatre grains d’ellébore », de
que, dans cette maladie, la peau devient la fable de La Fontaine Le Lièvre et la
rugueuse et que, dans les pays chauds Tortue, VI, 10.
les jambes deviennent d’une grosseur dé-
mesurée. ELLIPSE, terme de grammaire, 1573
ÉLÉVATEUR, ÉLÉVATION, v. lever. (elipse) ; elliptique, id., 1692. Empr. du
lat. ellipsis (du grec elleipsis, propr. «man-
ELFE, 1822, une première fois en 1586, que ») et du grec elleiptikos.
en parlant des fées d'Écosse : « Elfes ou
fairs » (aussi elve en 1595 et dès 1561). ELLIPSE, terme de géométrie, 1625;
Empr. directement de l’angl. elf, plutôt elliptique, 1634. Empr. des mots du lat.
que par l'intermédiaire de l’all. Elf, lui- scientifique moderne (de Képler, etc.) el-
même empr. de l’angl., tandis que elve lipsis, ellipticus, faits sur les mots grecs
est empr. de l’ouvrage latin du Suédois cités sous les mots préc. au sens de « man-
Olaus Magnus sur les elfes publié à Rome que, qui manque », parce que l’ellipse est
en 1555, où ces fées sont appelées elvae, comme un cercle imparfait. — Dér. : ellip-
latinisation de l’anc. scandinave äifr. ticité, 1758 ; ellipsoïde, 1705.
ÉLIDER, 1548 ; élision, id. Empr. du ELME (feu saint-), xvre. Empr. de l'it.
lat. grammatical elidere, propr. « écraser », Sant Elmo ; Saint-Elme, sancitus Erasmus,
d’où « supprimer », elisio. IVe s., est invoqué comme saint protecteur
ÉLIGIBLE, vers 1300 (on trouve aussi par les marins de la Méditerranée.
eslisible d’après le radical eslis- du verbe ÉLOCUTION, 1520. Empr. du lat. elo-
élire). Empr. du lat. eligibilis, v. élire. — cutio(du verbe eloqui).
217 EMBLÉE

ÉLOGE, xviie, d’abord euloge, fin xvie. dique emancipare (de mancipare « vendre »,
Propr. « discours à la louange d'un per- propr. « prendre avec la main » ; l’émanci-
sonnage ». Éloge est empr. du lat. elogium pation résultait primitivement de trois
« inscription tumulaire » (du grec elegeion, ventes fictives ou mancipations), emanci-
avec adaptation d’après le grec eulogia patio.
« louange »), et euloge est empr. de son
côté d’une forme de basse ép. eulogium ÉMARGER, v. marge.
(qui montre plus clairement l'influence de ÉMASCULER, xvirIe, une première fois
eulogia) ; et c’est à eulogia que le fr. doit au xIV® s. Empr. du lat. emasculare (de
également le sens d’ « éloge ». Eulogia a masculus « mâle »). — Dér. : émasculation,
en outre pris en grec eccl. le sens de « béné- 17747
diction », d’où le lat. eulogia et le fr. eulogie
« pain bénit », 1584 (sous la forme euloge EMBÂCLE, v. bâcler.
dans Cotgrave). — Dér. : élogieux, 1836. EMBALLER, v. balle.
ÉLOIGNER, v. loin. EMBARCADÈRE, 1723. Empr. de l'esp.
ÉLOQUENT, 1213 ; éloquence, xrre. Em- embarcadero, v. barque.
pr. du lat. eloquens, eloquentia (du verbe EMBARCATION, 1762. Empr. de l'esp.
eloqui « parler »). embarcacién, v. le préc. ; Voiture l’emploie
ÉLUCIDER, 1480. Empr. du lat. de dans une lettre écrite d'Espagne, en le
basse ép. elucidare, propr. « rendre clair soulignant comme espagnol : « Difficile-
(lucidus) ». — Dér. : élucidation, 1530, ment je trouverois embarquation devant le
développement du sens parallèle au verbe. mois de septembre. »

ÉLUCUBRATION, 1593. Empr. du lat. EMBARDÉE, 1694, comme terme de


de basse ép. elucubratio (de elucubrare marine ; aujourd’hui usuel en parlant d’au-
« travailler avec soin », propr. « … pendant tomobiles, de bicyclettes, etc. Dér. du
les veilles », de lucubrum « veille »). verbe embarder, terme de marine, 1694,
empr. du prov. embardä « id. », propr. «em-
ÉLUDER, xvi®, a eu en outre le sens bourber », dit par extension d’un navire
de « tromper », 1611, usuel au xvire s. qui tourne sur lui-même sous l’effet d’un
Empr. du lat. eludere « se jouer de, dé- courant ou d’un vent violent; c’est un
jouer » (de ludere « jouer »). dér. de bard « boue », a. pr. bar!t, v. bardane.
ÉLYSÉES (champs), terme d’antiquité, EMBARGO, 1626. Empr. de l’esp. em-
xXIV®. On trouve aussi champ Elysée, ou bargo, tiré de embargar « mettre l’embar-
Elysée, seul, au xvi® s., champs elisies, go », propr. « empêcher, embarrasser », lat.
1312, etc. Empr. du lat. elysei campi, pop. *imbarricäre (de barra « barre »), d’où
forme incorrecte de basse ép. pour le lat. aussi a. pr. embargar « empêcher, embar-
class. elysii campi, traduction du grec rasser ».
élysia pedia ; le sing. vient d’une forme EMBARRASSER, 1574. Empr. de l’esp.
correspondante du lat. elyseum pour ely- embarazar par l'intermédiaire de la Flandre
sium, grec élysion pedion. espagnole ; le part. fém. signifie dans un
ÉLYTRE, 1762. Empr. du grec elytron très grand nombre de patois « (femme)
« id. », propr. « étui, fourreau ». enceinte », (sens très rare dans la langue
littéraire), comme l'esp. embarazada. Lit.
ELZÉVIR, fin xvue. Tiré d’Elzevier, imbarrazzare est également empr. de l'esp.
nom d’une famille célèbre d’imprimeurs (de barra « barre »). — Dér. : embarras,
hollandais au xvie et au xvire 8. — Dér. : 1611 ; débarrasser, 1584, au lieu de désembar-
-rien, 1838. rasser, par simplification, v. dépêcher, d’où
débarras, 1798.
ÉMACIÉ, 1564 (Rabelais), rare avant le
xIX® s. Empr. du lat. emaciatus (de macies EMBAUCHER, v. bau.
« maigreur »). EMBERLIFICOTER, 1755. Transfor-
ÉMAIL, xuie. D'abord esmal, x11°, issu mation d’un verbe issu d’une composition
d’une forme disparue “*esmali, qui a été fantaisiste du radical expressif bir- (va-
remplacé par esmail, issu, par substitution riante de pir-, v. pirouette) qui représente
de suff., du plur. esmauz, la terminaison l’idée d’un mouvement circulaire, d’un en-
-auz étant commune aux noms en al et en veloppement, avec le subst. coque au sens
-ail. Empr. du francique *smali, cf. anc. de « chose sans valeur ». On y a introduit
haut all. smelzi, all. Schmelz « email » (de le suff. savant -ifique et le suff. verbal
la famille de schmelzen « fondre »); de pop. -oler. Comparez embirelicoquer, em-
même a. pr. esmaut, it. smalio. — Dér. : brelicoquer (dès le xrve s.).
émailler, x1r1° ;émailleur, vers 1290 ; émail-
lure, 1328. EMBLAVER, EMBLAYER, v. blé.

ÉMANER, 1456 ; émanation, 1579. Em- EMBLÉE (d’), vers 1490, d’abord a
pr. du lat. emanare « couler de », d’où emblee, xr1° ; à l’emblée, vers 1460. Locu-
« provenir », emanatio (créé à basse ép.) tion adverbiale tirée du verbe embler, dis-
en vue d'emplois surtout techn. paru depuis la fin du xvri® s., encore chez
Saint-Simon, « prendre, ravir », lat. involäre
ÉMANCIPER, vers 1320, au sens juri- « voler sur », d’où « prendre » (sens déve-
dique ; émancipation, 1317, id. Sens fig. loppé dans le langage de la chasse, v.
du verbe dès le xvi® s. Empr. du lat. juri- voler) ; de même it. involare, a. pr. envolar.
218
EMBLÈME

EMBLÈME, 1560 (« Ceste embleme, de- terme juridique, 1471. Comme terme d’op-
vise et tiltre luy avoyent este decernes ») ; tique, 1720, c’est un calque de l’angl. de
emblématique, 1564 (Rabelais). Empr. du Newton emergent [light]. On a d’autre part
lat. emblema « ornement rapporté, mo- créé émersion, 1666, sur emersus, part. passé
saique » (du grec embléma) et du lat. de du verbe lat., en vue d’emplois scienti-
fiques. V. immerger, immersion.
basse ép. emblematicus « surajouté ». Le
lat. emblema avait aussi le sens fig. d” « or- ÉMERI, xune s. (écrit esmeril ; on trouve
nement du style », mais le sens de « figure aussi l'orthographe emeril à partir du
symbolique », 1704, est propre au fr. xvire s.). Empr. du moyen grec smeri, grec
EMBOBINER, 1836. Altération, d’après anc. smyris; cf. aussi esp. esmeril, it.
bobine, d'embobeliner, de même sens, 1611, smeriglio.
attesté dans de nombreux patois au sens ÉMERILLON, xu° (Chrétien). Dér. de
d’ « envelopper de vêtements », de la fa- l'a. fr. esmeril qui a disparu de très bonne
mille des anc. mots, usités du x1v® au heure, probabl. d’un francique *smiril, cf.
xvie s., bobelin « chaussure grossière », anc. haut all. smirl, d’où all. Schmerl, cf. de
bobeliné « rapiécé (en parlant de chaus-
sures) », mots expressifs de la famille de même a. pr. esmnirle, it. smeriglio, esp. esme-
rejon. — Dér. : émerillonné, xv=®.
bobard, bobine, etc., v. ces mots ; le déve-
loppement du sens est obscur, en raison ÉMÉRITE, 1762, une première fois au
du caractère pop. de ces mots ; embobeliner xive s. (Bersuire). Empr. du lat. emeritus
a pu signifier d’abord « rapiécer », puis « qui a accompli son service militaire »,
« arranger »; mais ce sens n'existe plus. d’où les innovations de sens en fr., dont
le plus récent, le seul usuel aujourd’hui,
EMBOIRE, v. embu. « qui est particulièrement versé dans la
EMBOLIE, 1857. Dér. sav. du grec em- pratique d’un art ou d’une science » est
bolé, propr. « action de jeter dans ou sur », dû à mérite.
d’où « attaque, choc » (du verbe emballein ÉMERSION, v. émerger.
« jeter sur »).
EMBOLISMIQUE, xv<. Dér. d’embolis- ÉMÉTIQUE, xvi® (Paré). Empr. du lat.
me, xu1e, empr. du lat. de basse ép. embo- emeticus (du grec emetikos, du verbe emein
lismus « intercalation du mois dit embolis- « vomir »).
mique » (du grec embolismos « id. », plus ÉMETTRE, 1476, comme terme juri-
rare que embolimos, du verbe emballein). dique ; autres sens seulement à la fin du
EMBONPOINT, v. point. xvinie s. Empr., avec francisation d’après
meitre, du lat. emilitere « lancer hors de,
EMBOUCHE, -CHER, -CHURE, v. émettre (en général) », v. émission.
bouche.
ÉMEUTE, v. émouvoir.
EMBOUT, EMBOUTER, v. bout.
ÉMIER, v. mie.
EMBRASER, v. braise.
ÉMIGRER, vers 1780, moins fréquent
EMBROCATION, xive. Empr. du lat. qu’émigré et émigrant, très usuels au mo-
médiéval embrocatio, dér. du lat. médical ment de la Révolution : cf. « Les émigrés
embrocha (du grec embroché, propr. « action qui rentrent dans leurs foyers », décret du
d'’arroser (embrokhein) :). 9 juillet 1791; émigrant est attesté dès
EMBRUN, 1836, une première fois en 1776, cf. « Le grand-papa ayant prononcé
1521 (écrit anbrun). Empr. du prov. em- le mot émigrani, vous en füûtes effrayée »,
brun, tiré du verbe embrumd « bruiner », abbé Barthélémy à Mme du Deffant ; émi-
formé comme le fr. embrumer. gration, 1752. La chronologie montre qu'é-
EMBRYON, xive (Oresme : embrion). migration, emprunté le premier du lat.
Empr., par l'intermédiaire des traductions emigratio (de emigrare « changer de de-
lat. d’Aristote, v. anarchie, du grec em- meure », v. migrateur) a amené ensuite
bryon (du verbe bryein « croître ». — l’'empr. d’émigrer.
Comp. : embryo-, premier élément de mots ÉMINENT, xr11e ; éminence, 1314. Empr.
sav., tels qu’embryogénie, 1836 ; embryo- du lat. eminens, part. prés. du verbe emi-
logie, 1753. nere « s'élever hors de, au-dessus », emi-
EMBU, ne s'emploie plus que dans le nentia. Éminence, titre des cardinaux, date
langage de la peinture, d’où aussi embu, du décret pris le 8 janvier 1630 par le pape
pris substantiv. Part. passé d’un anc. em- Urbain VIII ; eminentia était déjà un titre
boire « absorber, s’imprégner de », lat. im- d’honneur sous le Bas-Empire.
bibere. ÉMIR, 1549, une première fois au xI11° 8.
ÉMERAUDE, xr1e (sous les formes esme- chez G. de Tyr. Empr. de l'arabe amir,
ragde et esmeralde). Empr. du lat. smarag- v. amiral.
dus (du grec smaragdos, d’origine orien- ÉMISSAIRE, 1519, rare avant la fin du
tale), de même it. smeraldo, esp. esmeralda ; xviue s. Empr. du lat. emissarius (de emit-
mot européen, souvent sous la forme anc., lere, v. émettre). Bouc émissaire, 1690, est
cf. all. Smaragd, angl. smaragd, etc. fait sur le lat. eccl. caper emissarius, qui
ÉMERGER, 1826 (Chateaubriand), une désigne le bouc chargé des iniquités d’Is-
première fois 1496. Empr. du lat. emergere raël et chassé dans le désert par le grand
« sortir de l’eau », d’où nombreux sens fig. prêtre, le jour du Grand Pardon, cf. Lévi-
On trouve beaucoup plus tôt émergent, tique, xvi* ; sens fig., à la fin du xvues.
empr. du part. prés. du verbe lat., comme (Saint-Simon).
219 - EMPÊCHER

ÉMISSION, 1811, comme terme de fi- ÉMOUSSER «rendre moins tranchant »,


nance ; antér. depuis le-xrv® s., sens techn. v. mousse, adj.
divers (dès 1720 comme terme de physique
d’après l’angl. de Newton emission). Empr. ÉMOUSTILLER, 1743. Probabl. dér. de
du lat. emissio « action d'émettre » pour mousse « écume ». Moustille, 1868, qualité
servir de nom d’action à émeliire. d’un vin pétillant », est tiré du verbe.
EMMÉNAGOGUE, 1738. Comp. des mots ÉMOUVOIR. Jusqu'au xvri® s. signifie
grecs enména « menstrues » et agôgos « qui aussi « mettre en mouvement ». Lat. pop.
conduit, amène ». *exmôuère, lat. class. émôvére, qui signifie
EMMITOUFLER ts’), v. mitaine. surtout « mettre en mouvement », d’où le
sens d’ « émouvoir » a dû se développer à
ÉMOI, x11e (esmais ; esmoi apparaît au basse ép., cf. it. smuovere « mouvoir, émou-
xi1es., mais ne triomphe qu’au xvie ). Tiré voir », à. pr. esmover « id. ». — Dér. :
de l’anc. verbe esmayer « troubler, ef- émeute, xr1°, sur le modèle de meuie qui
frayer » et « se troubler ». d’où esmoyer, avait un sens analogue; signifie d’abord
verbe encore usité dans les patois, lat. pop. « mouvement, émotion » (encore chez La
*exmagäre « faire perdre son pouvoir, sa Fontaine, Fables, X, 3); le sens moderne
force », dér. de bonne heure du verbe ger- ne paraît pas antérieur au XVIII 8. ; émo-
manique occidental *magan « pouvoir », tion, 1538, d’abord « mouvement », d’où
cf. anc. haut all. et gotique magan « id. », « agitation populaire » au xvir® s., dér. sur
auquel se rattachent l’all. môgen et l’angl. le modèle de motion, alors de sens analogue,
lo may. Aussi it. smagare « se décourager », d’après le rapport de celui-ci avec mouvoir,
port. esmagar « écraser », a. pr. esmagar, d’où émotionner, 1829 ; émotif, fin xixe,
esmaiar « troubler, se troubler ». Le senti- d’après emoltus, part. passé de emovere.
ment linguistique rapproche aujourd’hui
émoi du verbe émouvoir, d’où l’expression EMPALEMENT « vanne d'’écluse », v.
doux émoi. pale.
ÉMOLLIENT, xvi® (Paré). Empr. du lat. EMPALER, -ement, v. pal.
emolliens, part. prés. de emollire « amollir »,
également employé dans la langue médi- EMPAN, ancienne mesure, 1532 (Rabe-
cale. lais). Altération d’espan, xu1°, autre forme
ÉMOLUMENT, xrrte (J. de Meung). d’espan(n)e, du francique *spanna, cf. all.
Empr. du lat. emolumenium « bénéfice, Spanne « id. », de la famille du verbe span-
avantage ». nen « étendre, tirer », v. épanouir. Lit.
spanna vient probabl. du fr.
ÉMONCTOIRE, 1314. Dér. sav. du lat.
emuncius, part. passé du verbe emungere EMPARER ts’), xvie (Amyot). Antér.
« moucher », pour son sens techn. ; emunc- emparer, trans., « fortifier », 1371, encore
lorium existe en lat., mais au sens de usité au xvi® s., d’où l’emploi moderne au
« mouchettes ». sens de « se rendre maître ». Empr. de l’a.
ÉMONDER. Lat. pop. *“ermundäre, lat. pr. antparar, amparar « id. », lat. pop. *ante-
class. emundäre « nettoyer », d’où son sens
paräre, propr. « faire des préparatifs pour
spécial dans la langue de l’arboriculture. se défendre », cf. parer ; emparar, très fré-
L’a. fr. a donné aussi, du xr1° au xvies., quent, résulte d’une substitution de préf. ;
cf. aussi esp. amparar « protéger, défen-
à esmonder le sens de « purifier » d’après dre ». — Dér. : désemparer, 1361, signifiait
mundare, qui avait pris ce sens en lat. d’abord « enlever les fortifications, déman-
eccl., ef. a. pr. esmondar, au même sens.
teler ». encore au xvi®s., et « cesser d’atta-
— Dér. : émondage, xvi®, rare avant le quer », xv°, sens conservé dans la locution
XIX® s.; émondeur, id.
sans désemparer ; comme terme de marine,
ÉMOTION, v. émouvoir. 1694 ; remparer, xv®, d’où rempart, 1370.
ÉMOUCHET, 1560. Altération, d’après EMPÉCHER. D'abord empeechier, xrr°.
épervier, émerillon, de l’a. fr. mouchet, x11° A signifié d’abord « entraver », puis « em-
(dér. de mouche), encore répandu dans les barrasser » jusqu’au xviie s., outre le sens
patois, masc. comme les noms d'oiseaux moderne. Empr. du lat. de basse ép. impé-
de même sorte, cf. a. pr. mosquel, it. mos- dicäre « prendre au piège », francisé comme
cardo. Cette désignation de « petite mou- prêcher. — Dér. empêchement, x1I°;
che » vient de ce que l’émouchet est plus empêcheur, usuel au moyen âge, sorti de
petit que le faucon et que l’épervier; le l'usage au xvue s., puis réintroduit dans
mot désigne parfois le mâle de l’épervier l'expression empécheur de danser en rond,
qui est plus petit que la femelle, par exem-
née du pamphlet célèbre de P.-L. Courrier,
ple chez Belon, de même en it. écrivain archaïsant, Pélition pour les villa-
ÉMOULU. En dehors de son emploi geois qu’on empêche de danser, 1822 ; dépê-
techn., ne s'emploie aujourd’hui que dans cher, d’abord despeechier, 1225, au lieu
la locution frais émoulu, 1673 (Molière), de “*désempécher, par simplification (cf.
extension du sens, usuel au moyen âge, débarrasser, dépétrer, etc.), a signifié aussi
d’ « affilé », cf. l'expression combalire à fer « débarrasser » jusqu’au xvii® s.; d’où
émoulu, encore relevé dans les diction- dépêche, 1464, d’abord « action de dépé-
naires. Part. passé du verbe émoudre « affi- cher »; sens moderne au XVII® 8. ; a passé
‘ler », lat. pop. *exmülére, lat. class. émilère également dans les langues voisines : it. dis-
« moudre entièrement ». Seulement gallo- pacciare, esp. a. pr. despachar, d’où it. dis-
roman : a. pr. esmoler « affiler ». paccio, esp. despacho, d’après le fr. dépêche.
EMPEIGNE 220

EMPEIGNE, xirie (empeine, empiegne EMPIRIQUE, 1314, terme de médecine.


dans Villon et encore en Picardie). Comp. Empr. du lat. empiricus « id. » (du grec
de l’a. fr. peigne « métacarpe », celui-ci empeirikos, « id. »). Comme terme de méde-
étant nommé ainsi à cause des phalanges cine, a pris un sens défavorable au xvires.
dont l’ensemble ressemble à un peigne. Le Comme terme philosophique, attesté indi-
sens du mot est donc « ce qui recouvre le rectement par l’adv. empiriquement au
métacarpe (du pied) ». XVI® s. ( Pénétrer empiriquement, par des
expériences). — Dér. : empirisme, 1736,
EMPEREUR, vers 1080 (Roland : em- jusqu’au xix® s. désigne surtout la méde-
pereor, cas régime, dont le cas sujet était cine empirique.
emperedre, x1°, Alexis). Empr. du lat. im-
perator(em), à l’époque de Charlemagne; EMPLÂTRE. Souvent fém. jusqu’au
imperalor n’est représenté sous une forme xviIIe s. et encore dans les parlers pop.
traditionnelle que par le roumain fmpârat, Lat. emplasirum (du grec emplastron, du
v. impératrice. verbe emplattein « modeler, façonner »).
— Dér. : plâtre, xir1°, par comparaison
EMPESER
, vers 1100. Dér. de l’a. fr. em- d’un emplâtre avec du plâtre gâché, aussi
poise « empois », lat. impê(n)sa, en lat. class. a. pr. plastre ; battre comme plâtre, depuis
« dépense », mais qui signifie aussi « maté- le xv° s.; terme aujourd'hui dominant
riel » (« ce qu’on se procure moyennant dans les parlers gallo-romans, v. gypse,
dépense ») et partic., à basse ép., « mortier, d’où plâtras, 1371 ; plâtrer, 1538 ; plâtrage,
ciment ». Seulement gallo-roman, cf. a. pr. 1718 ; plâtreux, xvi* ; plâtrier, 1260; plà-
empezar. — Dér. : empois, 1454 (écrit trière, vers 1460 ; déplâtrer, 1601 ; replä-
empoit), d’après les formes accentuées du trer, 1549; replâtrage, 1762.
verbe : empoise, etc., cf. peser, poids ; em-
pesage, 1650 ; désempeser, 1690. EMPLETTE. D'abord emploile, d’où em-
plette, xir1°, par substitution de suff. Au
EMPÊTRER. D'abord empaistrier ; en sens propre « le fait d'employer son argent
outre, au moyen âge, empasturer d’après en achais », encore dans faire emplette
pasture. Propr. « mettre une entrave »; (d’un objet), d'où le sens moderne restreint
sens fig. de très bonne heure. Lat. pop. à l’achat de menus objets. Lat. pop. *im-
*impasioriäre, dér. de pastoria (attesté plicita, part. passé fém. pris substantiv.
dans la Loi des Longobards, où on lit aussi du verbe implicare, v employer. Seulement
pasiorium) « entrave pour retenir dans la gallo-roman, cf. a. pr. emplecha « marchan-
pâture » (dér. de pastus « pâturage »), d’où dise », et sarde logoudorien impitla « occu-
it. pasloia « entrave » ; de même it. impas- pation ».
toiare « entraver », a. pr. empastrar « bar- EMPLIR. Lat. pop. *implire, lat. class.
rer », V. pâturon. — Dér. : dépêtrer, vers implère. Moins usuel que remplir. Conservé
1300, au lieu de *désempétrer, par simplifi- dans toutes les langues romanes, d’après
cation, cf. débarrasser, etc. ; au sens propre les deux types : it. empiere et empire, esp.
de « dégager d’une entrave » ; sens fig. de henchir (avec un k dû à un croisement),
très bonne heure. a. pr. emplir et umplir. Dans les parlers
EMPHASE, 1546; emphatique, 1579 gallo-romans emplir a été presque partout
(H. Estienne). Empr. du lat. emphasis, éliminé par remplir, en outre on trouve
terme de rhétorique, « figure consistant à souvent un dér. de plein, croisé avec rem-
employer un terme dans un sens très fort » plir. — Dér. : désemplir, xr1°; remplir,
(mot pris au grec) et du grec emphatikos ; XIIe (au part. rampli), au moyen âge ordi-
d’où le sens propre au fr. dès le xIve s. nairement raemplir, comp. d’un antér. aem-
plir, et que remplir a fini par absorber:
EMPHYSÈME, 1707. Empr. du grec d’où remplissage, 1508.
médical emphysêma, propr. « gonflement ». EMPLOYER. Lat. implicäre, en lat.
— Dér. : emphysémateux, 1766. class. « mettre l’un dans l’autre », d’où
EMPHYTÉOSE, 1271; emphytéote, «envelopper, engager », d’où le sens d’ «em-
1494 ; emphytéotique, xiv<. Empr. du lat. ployer » a dû sortir à basse ép. It. impiegare
médiéval emphyteosis, -leola, -licus, alté- « id. », a. pr. emplegar « id. ». — Dér. :
ration du lat. juridique emphyteusis, -leula, emploi, 1539 : employeur, 1794 ; remployer,
-licus (en grec de basse ép. emphyleusis, XIVe (Froissart), remploi, 1577.
-leutés, -tikos, dér. du verbe emphyteuein EMPOIGNER, v. poing.
« planter », d’où « donner à bail », cette EMPOIS, v. empeser.
sorte de baïl à longue durée permettant
de planter et de jouir de ses plantations). EMPOTÉ, v. potelé.
EMPIFFRER (s’), xvie. Dér. de pifre EMPREINDRE. Altération, d'aprés les
« gros individu », comp. anc. prov. pifart verbes en -eindre (ou -aindre), v. craindre,
« ventru ». Ce groupe de mots est sans rap- d’un verbe *empriembre (cf. emprient au
port avec pifre « fifre » ; il est de création xI11€ S.), lat. pop. *impremere, lat. class.
indigène, la syllabe piff- se prêtant bien à imprimere, refait sur le simple premere, v.
exprimer ironiquement la grosseur d’une imprimer. Peu usuel aujourd’hui, sauf à
personne ventrue. Le français vulgaire pif l’inf. et au part. passé. A été partiellement
« nez », 1833, se rattache aussi à ces mots. confondu avec imprégner. — Dér. : em-
preinte, x111° (J. de Meung : emprainie), a
EMPIRE. D'abord empirie, vers 1080 été emprunté par les langues voisines : it.
(Roland). Empr. du lat. imperium, qui imprenta, d'où impronla, esp. et a. pr: em-
avait déjà des sens étendus. prenta.
221 ENCLAVER

EMPRISE, x11°, au sens d’ «entreprise », d’abord incasiré, xvi® (Paré). Empr. de


surtout de « prouesse de chevalier », disparu l’it. incastrare, lat. de basse ép. incasiräre
au xvi®s. ; n’a survécu que dans la langue « emboîter, enchâsser » (littéral. « tailler
jurid. au sens d’ « action d’empiéter (faite pour introduire », de casiräre, v. châtrer) ;
par l’administration) sur une propriété », de même a. pr. encastrar. L’a. fr. a possédé
d’où l’expression récente avoir de l'emprise également un verbe enchätrer, d’où enchâ-
sur quelqu'un. Part. passé de l’anc. verbe tre, 1397, « pièce de bois dans laquelle
emprendre « entreprendre », usuel jusqu’au quelque chose est encastré ». — Dér. : en-
xvI® s., lat. pop. *imprendère, comp. de castrement, 1694.
prendere « prendre », d’où aussi it. impren-
dere (v. impresario) « entreprendre », esp. ENCAUSTIQUE, vers 1752; une pre-
emprender. Ë
mière fois, au xvi®s. Empr. du grec enkaus-
tiké « art de peindre à l’encaustique (sorte
EMPRUNTER. Signifie aussi parfois au de cire fondue) » (de enkaiein « brûler »).
moyen âge « prêter ». Lat. pop. *imprümu- Emploi étendu au xix® s. à d’autres techn.
täre, altération, par assimilation des deux — Dér. : encaustiquer, 1864.
voyelles o, u, de *impromuüiäre, formé sur ENCEINDRE. Lat. incingère, v. ceindre.
le lat. juridique promuütuärt « emprunter ». It. incingere, a. pr. encenher. — Dér. : en-
dér. de promütuum « argent avancé », cf. ceinte, subsi., XIII°.
aussi le lat. class. müluäri « emprunter »,
Dans les parlers gallo-romans emprunier ENCEINTE, adj. fém. Lat. de basse ép.
est souvent refait en emprêter d’après pré- incincta (vries., Isidore de Séville). Probabl.
ter. — Dér. : emprunt, 1196 ; emprunteur, part. passé de incingere « ceindre », la
1254 ; remprunter, 1549. femme enceinte ayant la sensation d’être
gênée comme par des liens. It. incinta, a. pr.
EMPUANTIR, v. puer. encencha, esp. encinla.
EMPYRÉE, xu1e (Les cieux empirées; ENCENS, xr1e°. Empr. du lat. eccl. incen-
en outre le ciel empire au xvi* ; aujourd’hui sum (du verbe incendere « brûler »). — Dér. :
surtout subst.). Empr. de l’adj. du lat. encenser, vers 1080 (Roland); d’abord
eccl. empyrius, en parlant du ciel, séjour « brûler de l’encens », jusqu’au xvI® $.;
des bienheureux (du grec empyrios « en feu sens fig. depuis le xvire s. ; d’où encense-
(pyr) »); a servi au x1x° s. à désigner la ment, vers 1180; encenseur, xviI®, une
quatrième et la plus haute sphère selon le première fois au xIv® s., d’après le sens
système de Ptolémée ; sens fig. à la fin du propre du verbe ; encensoir, xr11°.
xvie s. (D’Aubigné).
ENCÉPHALE, 1755. Empr. du grec en-
ÉMULE, xime; Richelet en 1680, dit kephalos « cervelle, cerveau ». — Dér. :
que « (c’) est un terme de collège » ; émula- encéphalite, 1766. — Comp. : Nombreux
tion, xz11° ; sens scolaire, 1534 (Rabelais). mots sav. avec encéphal(o)- comme pre-
Empr. du lat. aemulus « rival », aemulatio. mier élément, tels qu'encéphalogie, 1836.
ÉMULSION, xvi® (Paré). Dér. sav. du ENCHANTER. Au sens fig. depuis le
lat. emulsus (part. passé du verbe emulgere, Xxvie s. Lat. incantare « prononcer des for-
propr. « traire »), pris au sens d’ «extrait ». mules magiques ». It. incantare, esp. encan-
tar. — Dér. : enchantement, xr1e, déve-
EN, prép. Lat. in « dans, sur ». A perdu loppement du sens parallèle au verbe;
beaucoup de ses emplois au profit de dans. enchanteur, vers 1080 (Roland), id.; dé-
It. in, esp. en ; pour les anc. articles ou, ès, senchanter, vers 1260 ; désenchantement,
v. le. En outre préf., comme en latin;
prend la forme em- devant b, m, p.
1554.
EN, adv. pronominal. D'abord ent. Lat.
ENCHÂTRE, v. encastrer.
inde, adv. de lieu, « de là », qui a pris à ENCHEVÊTRER. Propr. « mettre un
basse ép. une valeur analogue au fr. en, licou à un cheval », d’où le sens fig. depuis
adv. pronominal, cf. {e paenitet inde « tu le xve s. Lat. incapisiräre, dér. de capis-
t’en repens », Commodien, 11° s., inde reddo irum, d’où chevêtre, usuel jusqu’au xvi®s.,
rationem « j'en rends compte », Anthimus, encore dans les patois. Le subst. et le verbe
vie s. It. ne (règles d'emploi particulières), ont été conservés dans toutes les langues
a. pr. en, ne, anc. esp. ende. Sert aussi romanes : it. capesiro, incapesirare, esp.
comme préf., avec des verbes de mouve- cabestro, encabestrar. — Dér. : enchevêtre-
ment, p. ex. s'enfuir, emmener, empor- ment, xvi®, d’abord au sens propre : « en-
ter, cf. aussi s’en aller; seulement gallo- chevestremens… de ses bestes ».
roman ; rare en a. pr., Cf. s’ensegre « s’en-
ENCHIFRENÉ, 1611, une première fois
suivre ». au sens de «asservi d'amour », xrr1® (Rose).
ÉNASER, v nez. Comp. de chief et de l’a. fr. frener « brider »
ENCAN, vers 1400; écrit alors aussi in- (v. frein). Le rhume est souvent précédé
quant, encant (encore en 1642), enfin encan, d’une courte période pendant laquelle on
xvire. Empr. du lat. médiéval inquantum, a la sensation d’avoir les régions buccale
de in quantum « pour combien »; a passé et nasale bridées.
dans les langues voisines : it. incanio, esp. ENCLAVER. Lat. pop. “*inclaväre (de
encanie. clavis « clef ») « fermer avec une clef »;
ENCASTRER, 1694 (en 1464, dans un le sens, dominant aujourd’hui, d’ « enclore
texte de Lille, c’est probabl. une forme une terre dans une autre, etc. », apparaît
picarde correspondant à l’a. fr. enchâtrer) ; dès le xrr1° (au part. passé). Roumain în-
ENCLAVER 222

cheia « enclore », a. pr. enclavar « enfermer, a. fr. airement, arrement, errement, jusqu’au
enclaver, fixer avec un boulon ». — Dér. : XVI€ 8., a. pr. airemen. Un troisième mot,
enclave, 1312; enclavement, xive. tincta, part. passé fém. du verbe fingere
« teindre », est représenté par l'esp. finia,
ENCLIN, vers 1080 (Roland), au sens de cf. aussi all. Tinie (qui vient du lat. mé-
« baissé », sens encore attesté au xvI® s.; diéval). — Dér. : encrer, 1530 : encrier,
sens moderne dès le xrr1° s. Tiré de l’anc. 1380.
verbe encliner « baisser et incliner vers »,
lat. inclinäre ; d’où aussi it. inchinare, a. pr. ENCYCLIQUE, 1798. Dér. sav. de l’adj.
enclinar ; encliner a été supplanté au début grec enkyklos « circulaire » (de. kyklos
du xvuie s., d’après le lat. inclinare, par « cercle »).
incliner, tandis qu'enclin a résisté parce ENCYCLOPÉDIE, 1532 (Rabelais). Empr.
qu'il n’avait plus que le sens intellectuel du lat. de la Renaissance encyclopaedia
qui l’éloignait du verbe. Seulement gallo- fait par Budé (1508) d’après un grec enkyklo-
roman ; Cf. prov. enclin. paideia, fausse lecture d’un manuscrit pour
ENCLORE. Lat. pop. *inclaudère, réfec- enkyklios paideia « éducation comprenant
tion, d’après le simple claudere, du lat. l’étude de toutes les sciences » ; v. le préc.
class. inclüdere, cf. éclore. — Dér. : enclos, — Dér. : encyclopédique, 1762 ; encyclopé-
1283 (Beaumanoir). diste, 1757.

ENCLUME. Lat. pop. incüdinem, acc. ENDÉMIQUE, 1608. Dér. sav. d’endémie,
de incüdo, au lieu du lat. class. incüs, -üdis; XvI® (Paré), fait sur le grec endémos noséma
une substitution de suff. s’est produite dans « maladie fixée dans un pays » (de démos
la forme fr. comme dans coutume, et L vient « peuple »).
du verbe inclüdere « enfermer », les objets ENDÊVER, xr1e (sous la forme anderve).
à travailler sur l’enclume étant souvent Comp. de l’a. fr. derver, desver « être fou,
pincés dans celle-ci. A. pr. encluge. — devenir fou », très usuel jusqu’au xvi® s.
Dér. : enclumeau, x1ve. V. rêver.
ENCOGNURE, v. coin. ENDIVE, xrr1e. Empr. du lat. médiéval
ENCOLLER, v. colle. endivia, empr. lui-même du grec byzantin
endivi, qui remonte au lat. iniybum. De
ENCOLURE, v. cou. même it. endivia, esp. endibia.
ENCOMBRER, xi° (Alexis). Dér. de ENDO-. Premier élément de mots sav.
l’a. fr. combre, comme décombrer. — Dér. : comp. tiré du grec endo-, premier terme de
encombre, x11°; encombrement, id.; dé- comp. (de endon « dedans ») ; cf. notam-
sencombrer, xII°. ment endosmose, créé par le physicien
Dutrochet, en 1826, avec le grec 6smos
ENCONTRE, prép. qui subsiste dans à «poussée », et le suff.-ose, de même qu'exos-
l'encontre de. Lat. de basse ép. inconträ, v. mose qui en est le contraire, v. exo-.
contre. — Dér. : rencontrer, xiv®, par l’in-
termédiaire d’un anc. enconirer ; rencontre, ENDOLORIR, v. douleur.
XIIIe,
ENDORMIR. Lat. indormire « s’endor-
ENCORBELLEMENT, v. corbeau. mir ». — Dér. : endormeur, 1299 ; rendor-
mir, XIIIe.
ENCORE ; aussi encor, encores. Lat. hinc
hä horä ou hinc ad horam « de là à cette ENDOSMOSE, v. endo-.
heure »; a. fr. oncore d’après onque « une
fois, parfois », lat. unquam. It. ancora est ENDUIRE. Lat. indücère « appliquer »
empr. du fr. d’où « enduire », cf. inducere pice « enduire
de poix » (Plaute), et d'autre part « inci-
ENCOURIR. D'abord enco(u)rre, puis ter ». Au sens d’ « enduire », seulement
encourir, Comme courir. Lat. incürrère gallo-roman, cf. a. pr. enduch « enduit »;
« courir sur », sens attesté en a. fr., d’où, au sens d’ « induire, introduire », a. pr.
déjà en lat. class., « s’exposer à », cf. in enduire, it. indurre. A signifié au moyen
odia hominum incurrere, Cicéron ; devenu âge « inciter quelqu'un », sens qui a été
trans. en fr. It. incorrere, esp. encorrer (au- repris par induire, et, d'autre part, « absor-
jourd’hui plutôt incurrir). ber, digérer », encore usité au xvie 8. et
relevé comme terme de fauconnerie. —
ENCRE. D'abord enque. Lat. de basse Dér. : enduit, 1508, une 1re fois vers 1170.
ép. encaulum « encre rouge dont se ser-
vaient les empereurs », autre forme de en- ENDURER. Lat. eccl. indüräre « s'en-
caustum (du grec enkausion propr. « prépa- durcir le cœur contre quelque chose », d’où
ration pour la peinture à l’encaustique », le sens fr. de « supporter »; en lat. class.
d’où « encre rouge ») ; plus tard a servi à « rendre dur, devenir dur ». — Dér. :
désigner l’encre noire inférieure. La forme endurance, xIve.
du fr., d’où l’angl. ink, est due au fait que ÉNERGIE, vers 1500, rare avant le
encauium a gardé dans le lat. de la Gaule Xvri s. Empr. du lat. de basse ép. energia
septentrionale l’accent grec sur la voyelle (d’un mot grec qui signifie « force en ac-
initiale ; mais l’a. pr. encausi, l’it. inchiostro tion », par opposition à dynamis « force en
représentent encaustum avec accent sur la puissance »), — Dér. : énergique, 1584;
deuxième syllabe. Le lat. class. désignait énergétique, fin x1x°, d’après le grec ener-
l’encre noire par le mot aträmentum, d’où gélikos, pour une théorie scientifique.
223 ENGRENER

ÉNERGUMÈNE, 1579 (Bodin). Empr. ENFOUIR. Lat. pop. *infodire, lat. class.
du lat. eccl. energumenos « possédé du dé- infodere, v. fouir. Seulement fr. — Dér. :
mon » (transcription du grec eccl. energou- enfeu, terme d'archéologie, 1482, anc.
menos, part. prés. passif du verbe energein subst. verbal; enfouissement, 1539 ; en-
« agir », d’où, en parlant du démon, « exer- fouisseur, 1627.
cer une influence néfaste »). Pris rapide-
ment en fr. au sens fig. Le sens propre est ENFREINDRE. D'abord enfraindre, écrit
conservé dans la langue de la théologie. enfreindre depuis le xvi® s., pour le rappro-
cher du lat. Lat. infringere « briser », d’où
ÉNERVER, vers 1226. Propr. « priver « violer une loi », refait en *infrangere,
de nerf, d'énergie », le sens d’ « irriter d’après le simple frangere. It. infrangere,
les nerfs », dominant aujourd’hui, est du a. pr. enfranher.
xixe. Empr. du lat. enervare, propr. « cou-
per les nerfs », d’où « affaiblir ». — Dér. : ENGEANCE, 1538. D'abord « race d’ani-
énervement, xvirre (Vauvenargues), une maux ou d'hommes » (encore chez La Fon-
première fois en 1413. taine, Fables, IV, I, etc.) ; aujourd’hui, et
depuis le xvri® s., seulement en mauvaise
ENFANCE. Lat. infantia. Seulement gal- part. Dér. de l’anc. verbe enger « pourvoir
lo-roman : a. pr. enfansa. d'animaux, de plantes », etc., encore usité
fin xvrre, antér. aengier, qui survit encore
ENFANT. Lat. infaniem, acc. de infans, dans le normand enger « pourvoir, munir ».
conservé aussi par l’a. fr. enfes, cas sujet. Probabl. du lat. indicare « indiquer », dans
Infans, qui désignait en lat. class. l’enfant un sens modifié sous l'influence de index,
en bas âge, littéral. « qui ne parle pas », qui a pris, en lat. de basse ép., le sens de
a pris en outre à basse ép. les sens de puer, « œuf qu’on laisse au nid pour encourager
puella « garçon, fille de six à quinze ans les poules à y pondre ».
environ » et de liberi « enfants par rapport
aux parents ». Existe dans la plupart des ENGENDRER. Lat. ingeneräre, de ge-
parlers gallo-romans, sauf dans l'Ouest et nus, generis « race ». Seulement gallo-
le Sud-Ouest, où il est éliminé ou du moins roman, Cf. a. pr. engenrar, et cat. engendrar.
fortement concurrencé par canaille, drôle, ENGIN. Aujourd’hui, et depuis le xvrres.,
ménage, etc. It. infanie et fanie (qui ne seulement en parlant de machines de guer-
signifie aujourd’hui que « valet, servante »); re, de chasse, de pêche ; auparavant « ma-
ces deux formes ont pris aussi le sens de chines et instruments de toute sorte » et,
« fantassin » (v. infanterie et fantassin). au sens propre, « adresse, moyen, ruse »;
Enfant perdu, qui se disait depuis le xves. usité en ces trois derniers sens jusqu’au
d’un soldat hardi, tentant une entreprise xvie s. Lat. ingenium « intelligence, habi-
périlleuse, en avant des troupes, est un leté », d’où déjà en lat. class. « invention
terme militaire, fait sur le modèle de l’it. ingénieuse » et, à basse ép., « ruse ». It.
fante perduto. — Dér. : enfanter, xri°; ingegno, sens variés comme en fr., a. pr.
enfantement, id.; enfantillage, vers 1210, engenh « id. ». L’angl. engine « machine »
par l'intermédiaire d’un anc. adj. enfantil, vient du fr.
usuel jusqu’au xvi® s., lat. infantilis; on
a dit aussi au même sens enfance du xri® ENGLOUTIR. Sens fig. de très bonne
au xvitie s.; enfantin, x1I1°, moins usuel heure. Lat. de basse ép. inglutitre « avaler »,
au moyen âge qu'enfantil; fanfan, 1525 en lat. class. glutiire, v. glouton. It. inghiot-
(écrit fantfant), formation du langage en- tire, a. pr. englotir. — Dér. : engloutisse-
fantin. ment, xv°, rare avant le xixes. ; rengloutir,
XIII.
ENFER. Lat. eccl. infernus, adj. pris
substantiv., propr. « lieu d’en bas ». La ENGONCER, v. gond.
langue du paganisme disait inferna « lieux
d’en bas », plur. neutre, et inferni, plur. ENGOUER (s’), xive (Froissart), trans.,
masc., ou surtout inferi (dei), propr. « les au sens propre d’ « avaler gloutonnement »,
dieux d’en bas », de là l'emploi du plur. d’où « (s’)obstruer le gosier » encore au
les enfers, en parlant des croyances paien- XVIIIe 8. ; sens fig. depuis 1680. Empr. d’un
nes. Sens fig. dès le xrr1e 8. It. inferno, dialecte non identifié (probabl. de l'Ouest)
et formé avec le radical- que nous avons
esp. infierno. aussi dans joue. Dér. : engouement,
ENFEU, v. enfouir. 1694, développement du sens parallèle au
verbe.
ENFLAMMER. Parfois enflamber, d’a- ENGOULEVENT, v. gueule.
près flambe, v. flambeau. Lat. inflammäre.
It. infiammare. — Dér. : renflammer, 1549. ENGOURDIR, v. gourd.
ENFLER. Lat. infläre, propr. « souffler ENGRAISSER. Lat. pop. “*incrassiäre,
dans ». It. enfiare, esp. hinchar. — Dér. : devenu “*ingrassiäre, V. gras, issu du lat.
enflure, xr1° ; désenfler, id.; renfler, id.; de basse ép. incrassäre. Roumain ingräsa,
renflement, 1547. port. engraxar « graisser ». — Dér. : engrais,
1510 ; rengraisser, xri° ; dégraisser, xr11°,
ENFONCER, v. fond. d’où dégras, 1723, refait sur gras ; dégrais-
sage, 1754 ; dégraissement, 1752; dégrais-
ENFORCIR, xr°. Variante de l’anc. seur, 1552 (Rab.).
verbe enforcier, très usuel jusqu’au xvi®s.,
dér. de force. ENGRENER, v. graine.
ENGUEULER 224

ENGUEULER, v. gueule. ÉNORME, xive (Bersuire); énormité,


xI11e. Empr. des mots lat. enormis, enormi-
ENHARNACHER, v. harnais. tas (de norma « règle »; signifient donc
ÉNIGME, vers 1500, enigmat, au XIv°s. ; propr. « qui est, le fait d’être hors de la
masc. au xvi*s. et parfois au xvi1®, d’après règle »). — Dér. de l’adjectif : énormément,
le genre neutre du mot ancien ; énigma- 1549, d’abord enormement, xiv®, refait
tique, x111° s., rare avant le xvie s. Empr. d’après les adv. en -ément.
du lat. aenigma, aenigmaticus (du grec ENQUÉRIR. D'abord enquerre, jusqu’au
ainigma, ainigmatikos). xIr1*s., refait en enquérir, comme quérir.
ENJOINDRE, vers 1200. Empr. du lat. Ne s'emploie plus que comme réfl.; jus-
qu’au xvrie s. est également trans. au sens
injungere, avec francisation d’après join-
de « rechercher, interroger », cf. encore
dre, v. injonction.
dans la langue juridique un témoin enquis.
ENJOLER, v. geôle. Lat. inquirére « rechercher, interroger »,
spécial. comme terme juridique, « faire une
ENJOUÉ, v. jeu. enquête », refait en inquaerère, d’après le
simple quaerere, dans les milieux savants
ENLISER (s’), 1838, une première fois plutôt que dans la langue pop., v. enfrein-
au xv® s. Empr. du patois normand s’en- dre. It. :nchiedere, a. pr. enquerre. — Dér. :
lizer, dér. de lize « sable mouvant », lise, enquête, x11°, fém. pris substantiv. d’un
xr1e, Ce mot, qui s'emploie en outre aujour- anc. part. passé, disparu avant les pre-
d’hui dans un sens fig., a été introduit dans miers textes, lat. *inquaesiius, de même
la-langue générale par le fameux chapitre it. inchiesta (mais le part. inchiesto existe
des Misérables, V, 3, où V. Hugo, l’a em- encore), a. pr. enquesta (le part. quest du
ployé. Peut-être comp. de liser « glisser », simple existe également) ; d’où enquêter,
assez répandu dans les patois, lequel est récent comme trans., antér. s’enquêter,
une forme altérée de lisser. — Dér. xII1e; enquêteur, 1283 (Beaumanoir).
enlisement, 1862 (ibid.).
ENLUMINER, vers 1080 (Roland). ENRAYER , en parlant d’une roue, v. rai.
Usuel jusqu’au xvr® s. au sens d’ «éclairer, ENROUER, xrie. Parfois enrouir. Dér.
rendre brillant » ; sens moderne dès le xrrre. de l’anc. adj. rou, attesté au fém. roue, lat.
Empr. du lat. illuminare, avec modifica- raucus, V. rauque ; de même a. pr. enrau-
tion du préf.; le lat. ayant été également car. — Dér. : enrouement, xv°; désen-
repris sous la forme illuminer, le fr. a uti- rouer, 1580.
lisé les deux formes pour des sens diffé-
rents. — Dér. : enluminure, xrrre. ENSEIGNE. À eu de nombreuses accep-
tions aujourd’hui disparues, par exemple
ENNÉA-. Premier élément de mots sav. « signe qui fait reconnaître, etc. ». En
comp., tels qu’ennéagone, 1561, tiré du outre a été pris pour désigner les étendards
grec ennea « neuf ». romains, en lat. signa, d’après le sens qu’a
eu enseigne, dès les premiers textes ; de là
ENNEMI, x° (Eulalie, inimi; au xres. le sens de « porte-drapeau », vers le xvies.,
enemi). Lat. inimicus, en lat. class. «ennemi puis spécial. dans la marine le nom de
particulier », par opposition à amicus dont grade enseigne de vaisseau, 1643. Lat. in-
il est comp. ; partic. usité en lat. eccl. en signia, plur. neutre, pris comme nom fém.,
parlant du démon ; traitement non pop., de insigne « insigne ». It. insegna, anc. esp.
dû au fait que le mot appartient à la langue enseña, a. pr. ensenha, partout avec des
religieuse ; a aussi servi à désigner l’ennemi sens analogues à ceux du fr.
public, le lat. class. hostis ayant pris un
autre sens, v. armée. De même, sous des ENSEIGNER. Propr. « indiquer », d’où
formes plus ou moins pop., it. nemico, « instruire ». Lat. pop. *insignäre, au lieu
esp. enemigo, V. inimitié. du lat. class. insignire « signaler, faire re-
connaître ». It. insegnare, esp. enseñar. —
ENNUYER. En a. fr. surtout imperson- Dér. enseignement, xrre, signifie en outre
nel ; a souvent le sens plus fort de « cha- en a. fr. « signe, avis »; renseigner, 1762,
griner ». Lat. de basse ép. inodiäre, formé au sens moderne, d’après le dér. renseigne-
sur la locution in odio esse « être un objet ment; auparavant relevé seulement au
de haïne », usuelle en lat. class. It. annoiare, sens d’ « indiquer de nouveau » ; au moyen
a. pr. enojar (d’où l’esp. enojar). — Dér. : âge attesté comme terme juridique au
ennui, xt1e, sens plus fort qu'aujourd'hui sens d’ « assigner, mentionner ».
jusqu’au xvrie s.; désennuyer, vers 1400 ENSEMBLE. Pris substantiv. depuis le
(G. de Machaut).
XVIII* s., d’abord à propos des arts plas-
ENNUYEUX,. Lat. de basse ép. inodio- tiques. Lat. insimul, plus rare que simul
sus, dont la forme et le sens se sont déve- dont il est comp. L’it. insieme et l’anc. esp.
loppés en contact avec les préc. It. noioso ensiemo supposent une forme *insèémul,
(d’après noia « ennui »), a. pr. enojos. composé de l’anc. lat. semol, qui est attesté
à une époque très ancienne et qui a survécu
ÉNONCER, 1611 (une première fois en dans le lat. parlé, le class. simul ayant été
1377 ; énonciatif, 1542, une première fois refait sur similis. Les formes du fr. et du
en 1386; énonciation, xive (Oresme). prov. peuvent représenter l’un ou l’autre
Empr. du lat. enuntiare, enuntiativus, type. — Dér. : ensemblier, « artiste qui
enunliatio, avec francisation d’après annon- run les ensembles décoratifs », vers
cer. — Dér. : énoncé, xvrre (Bossuet).
225 ENTRAILLES
ENSEVELIR, xrie, Soit lat. insepelire, ENTÉR(O)-. Premier élément de mots
quelquefois attesté, soit comp. de l’a. fr. sav. comp., tels que entérozoaire, 1855,
sevelir (qui a été éliminé par ensevelir), lat. tiré du grec enteron « intestin ».
sepeltre, d’où aussi a. pr. sebelir, esp. za(m)-
bullir « plonger ». — Dér. : ensevelissement, ENTHOUSIASME, 1546. Empr. par les
XIIe, poètes de la Pléiade du grec enthousiasmos
« transport divin » (de l’adj. entheos « ins-
ENSILER, v. silo. piré par un dieu »); employé d’abord au
ENSORCELER, v. sorcier. sens de « extase du poète inspiré », le mot
a été ravalé peu à peu par un usage abusif
ENSOUPLE, 1557. Forme altérée d’après à un niveau accessible au commun. —
souple ; on trouve au xI11° 8. essouble ; le Dér. : enthousiasmer, 1629 ; enthousiaste,
XVIIe s. disait en outre ensuble. Lat. de 1544 (du grec enthousiastés, a participé de
basse ép. insubulum « cylindre du métier l’évolution sémantique d’enithousiasme).
à tisser » (vire s., Isidore de Séville). Con-
servé dans toutes les langues rom., sous ENTICHER, 1664 (Molière), au sens mo-
des formes plus ou moins altérées : it. derne ; dès le xr1° s. au sens de « souiller,
subbio, esp. enjullo. entacher », conservé en parlant de fruits
qui commencent à se gâter. Altération de
ENTAMER. Lat. de basse ép. intaminare l’anc. verbe entechier, dér. de teche, autre
« souiller » (V. contaminer), qui, par son forme de tache, « marquer d’une bonne ou
sens étymologique même (*{äminäre, dont d’une mauvaise marque », usité surtout au
il est comp., est formé avec le radical de part. passé, et attesté au sens fig. du mo-
ta(n)gere « toucher »), a dû signifier « tou- derne enticher ; la forme enticher est due à
cher », d’où « prendre une partie d’une un croisement avec un autre verbe enticier
chose », cf. atlaminare, à la fois « toucher « inciter », mot expressif qui vit encore
à », d’où « voler », et « déshonorer ». Le dans l’Anjou (comp. aussi lorr. kissi
sens de « commencer un travail, etc. » «exciter un chien », norm. akisser).
— Dér. :
apparaît au x111° s. A. pr. entamenar et entichement, xix° (Sainte-Beuve).
dialectes it. (avec des sens très variés). —
Dér. et Comp. : entame, xive (Froissart), ENTIER. Lat. iniegrum, acc. de inieger,
rare avant le xix® s. ; rentamer, vers 1320. propr. «intact », d’où, d’une part, «entier »,
et, de l’autre, « intègre, vertueux », sens
ENTENDRE. Propr. « tendre son atten- vivace en fr. jusqu’au xvi® s. Entier, au
tion vers », d’où « comprendre », sens domi- lieu d’*entir qu'on devrait avoir, est dû à
nant jusqu’au xviI® s.; rarement syno- la substitution du suff. -ier, d’après des
nyme d’ouir au moyen âge, bien que déjà adj. tels que premier, etc. It. iniero, esp.
attesté au x1°s. {Alexis). À servi, à partir entero. — Dér. : entériner, 1260, terme juri-
du xvries., de substitut à ouir et, par suite, dique, « rendre un acte valable en le rati-
est archaïque au sens de « comprendre », fiant », par l’intermédiaire d’un anc. adj.
cf. encore bien entendu, s'entendre avec, etc. ; enterin « entier, parfait »; entérinement,
suppléé en ce sens par comprendre. Lat. 1316.
intendere, propr. « tendre », d’où « s'appli-
quer à », en lat. de basse ép. «comprendre ». ENTITÉ, vers 1500. Empr. du lat. sco-
— Dér. : entendeur, xr11e, aujourd’hui seu- lastique entilas, dér. de ens, enlis « être »,
lement dans bon entendeur qui est déjà part. prés., attesté dans le lat. anc., no-
dans le premier texte ; entendement, xr1° ; tamment pour traduire le grec philoso-
entente, x11°, formé d’après un part. *in- phique {o on « ce qui est », v. aussi néant.
tenditus, disparu avant les premiers textes ;
jusqu’au xvi® s. signifie « intention, soin, ENTOMO-. Premier élément de mots
pensée ». — Comp. : malentendu, 1558; sav. comp., tels que entomologie, 1745
sous-entendu, xXvII®, au sens moderne. (Bonnet, qui lui préfère insectologie), tiré
du grec enlomon « insecte », v. insecte.
ENTER. Lat. pop. *impülare, dér. de
impotus « greffe » (Loi Salique), lequel ENTORSE, 1540. Part. passé fém., pris
représente le grec émphytos « planté dans ». substantiv., de l’anc. verbe entordre, partic.
Le mot, étant restreint au fr. et le -ph- du usité au part. passé, lat. pop. *inlorquere,
mot grec étant rendu par -p- au lieu de -f-, lat. class. iniorquêre (v. tordre) ; d’où aussi
a dû passer de la langue des colonies grec- roumain inloarce.
ques de la Provence avec la pratique de la ENTORTILLER, xire, d'abord aussi
greffe dans le parler (peut-être déjà dans entorteillier. Lat. pop. *iniôrliliare, dér. de
le gaulois) de la Gaule. Dans le Midi il a l’adj. tôrtilis « tordu ». De même esp. enior-
été évincé plus tard par le lat. inserere, son lijar et, avec un autre préf., it. attortigliare,
dér. *inserlare (a. pr. inserlar), etc. Mais lequel ne peut pas remonter à un suffixe
avec le perfectionnement du greffage en -icülare. Il n’est pas impossible, quoique
France le mot entier est revenu au Midi et moins probable, que tous ces verbes aient
dans le Piémont (antè). En fr. il est con- été formés indépendamment dans chacune
currencé depuis le xvie s. par greffer. L'ir- des langues romanes, sur l’anc. part. passé
radiation de *impuiare à une époque très de {ordre ou d’entordre. — Dér. : entortil-
ancienne explique aussi l’all. impfen et lage, 1744.
l’angl. {o imp. — Dér. : ente, x1re.
ENTÉRINER, v. entier. ENTRAILLES. Lat. de basse ép. inira-
lia, attesté dans les gloses de Reichenau (fin
ENTÉRITE, 1801. Dér. sav. du grec vire s.), issu, par substitution de suff., du
enteron « intestin ». lat. class. inleränea, propr. « ce qui est à
DICT. ÉTYM- 15
ENTRAILLES 226

l’intérieur », plur. neutre, d’où l’a. fr. en- ENTRETOISE, terme de charpenterie,
traigne qui a disparu de bonne heure ; de vers 1200. L’a. fr. entoise, par lequel on a
même, d’une part, a. pr. iniralhas; de voulu expliquer ce mot, n’a pas existé;
l’autre, esp. entrañas. entretoise se rattache à l’a. fr. {eser « ten-
dre » (d’un lat. *{ensare, de tensus, part.
ENTRAIT, terme de charpenterie, 1416 passé de tendere), peut-être par l’inter-
(sous la forme antrais, plur.). Part. passé, médiaire d’un comp. *entreloiser ; v. intense
pris substantiv., de l'anc. verbe eniraire et toise. Seulement fr.
« attirer », lat. intrahere, v. traire, cette
poutre servant à maintenir l'écartement ÉNUCLÉATION, 1836, comme terme de
des deux poutres latérales appelées arba- chirurgie ; au xv® s., au sens d’ « éclair-
létriers, cf. pour le sens de ce mot l’emploi cissement ». Dér. sav. du lat. enucleare
de tirant dans le langage de la construction « ôter le noyau (nucleus) », d’où « résoudre
au sens de « poutre maintenant les deux une difficulté, expliquer ».
jambes de force d’un comble », et, pour ÉNUMÉRER, 1748 (Montesquieu), une
l’acception du part. au sens actif, couvert. première fois en 1520 ; énumération, 1488.
ENTRAVER, xve, sens fig. dès le xvies. Empr. du lat. enumerare, enumeratio (de
Dér. de l’a. fr. ref « poutre, solive », lat. numerus « nombre »). — Dér. : énuméra-
trabs, trabis, v. poutre, donc « retenir les teur, 1688 (La Bruyère, qui met le mot en
jambes d’un cheval au moyen d’une pièce italique, pour indiquer sans doute que ce
de bois ». — Dér. : entrave, 1530. mot est de sa création).

ENTRE. Lat. inier « entre, parmi ». ENVAHIR. Lat. pop. *invadire, lat.
Conservé partout avec les sens fondamen- class. invadere « pénétrer dans ». A. pr. en-
taux du latin, sauf l’it. qui dit {ra ou fra, vazir ; ailleurs formes plus proches du lat.
lat. intra, infra : esp. a. pr. entre. Sert de — Dér. : envahissement, vers 1080 (Ro-
préf. devant des noms ou des verbes ; a land) ; envahisseur, xve (A. Chartier). Pa-
pris en fr. le sens partic. d’ « à demi, un raissent avoir été délaissés au xvrie s.; le
peu », cf. enir'ouvrir, entrevoir. premier reparaît chez Buffon, le deuxième
à la fin du xvurre 8.
ENTRECHAT, 1630. D'abord entrechas, ENVELOPPER, vers 1080 (Roland, déjà
1628 ; entrechasse, 1611. Ces formes sont envolopet, 3° pers. sing. parf., au x°s., dans
des francisations de l’it. intrecciala (Ménage la Passion de Clermont-Ferrand). Mot de
cite l'expression capriola intrecciata « saut la famille de voloper « envelopper », xrt°,
entrelacé » d’après le verbe chasser, cf. le rapidement disparu, et de développer, xr1°,
moderne chassé-croisé : le genre masc. d’en- d’où développement, xve; cf. de même
trechat est dû à la terminaison et le 4 a été a. pr. volopar, envolopar, desvolopar, et it.
introduit ensuite d’après l’it. ou pour telle viluppo « touffe, fagot, embarras », invilup-
autre raison ; l’it. intrecciare, dér. de {reccia pare, sviluppare. Se rattache très probabl.,
« tresse », s'applique encore aujourd’hui à comme friper, à faluppa « balle de blé, brin
une sorte de danse). On propose aussi d’y de paille », attesté dans une glose du x®s. ;
voir un mot tiré d’un verbe “*enirechasser, vo- au lieu de fe- est probabl. dû à l’in-
mais l’absence de ce verbe est défavorable fluence de la famille de volvere. — Dér. :
à cette explication. enveloppe, 1292 ; enveloppement, vers 1090.
ENTREFAITE, v. faire. rare avant le XVIIIe &.
ENVERGURE, v. vergue.
ENTREFILET, v. fil.
ENVERS, subst. Issu de l’anc. adj. envers
ENTREGENT, v. gent. « renversé », usité jusqu’au xvi® s., lat.
inversus, part. passé de inverlere « renver-
ENTREPÔT, v. poser. ser » ; de même a. pr. envers, adj. et subst.
ENTRER. Lat. initräre. Dans les patois ENVERS, prép. Comp. des prép. en et
fortement concurrencé par rentrer. — Dér. : vers.
entrée, xr1° ; rentrer, xII°; rentrée, vers
1510. ENVI (à 1’), vers 1550. On trouve aussi
au xvi® s. à l’envi de. De l’anc. subst. envi
ENTRESOL, 1673, dès 1607 et jusqu’au « défi au jeu, gageure, surenchère », tiré
commencement du xvir1e s. aussi entresole, lui-même de l’anc. verbe envier, propr.
fém. Le mot est emprunté de l’esp. entre- « inviter », d’où « provoquer au jeu » (cf.
suelo, attesté dès 1490, comp. de enire invite), d’où renvier, x11e ; renvi, vers 1450 ;
« entre » et suelo « sol ; plancher, étage ». la locution à l’envi (de), issue de jouer à
Le genre fém. qu'a eu d’abord le mot l’envi (de) « sur le défi d’un adversaire »,
franc. s'explique probablement par l’in- a pris facilement les sens de « en rivalité
fluence de sole. avec », puis de « à qui mieux mieux ».
Envier représente le lat. invïläre, d’où aussi
ENTRETEMPS, xve. Altération, par it. invitare, esp. envidar, également termes
étymologie pop., de l’a. fr. entretant, comp. devjeu.
de tant, d’où aussi la locution conjonctive
entrelant que, cf. de même eniretantdis et ENVIE, x° (Saini-Léger : enveia). Fran-
entretanidis que. Entretant à la fin du cisation du lat. invidia « jalousie, haine »;
xvie s., chez le Périgourdin Brantôme, est a pris de bonne heure en fr. le sens de
un provincialisme ; entrelant de l’a. pr. « désir »; appliqué aux besoins corporels
survit encore aujourd'hui dans les patois au xve s. (envye de boire, Commynes).
du Midi. L'’a. pr. enveja « jalousie, désir » a un aspect
ÉPAVE
plus pop. — Dér. : envier, 1165, d’après le EPANOUIR, 1539. Altération de l’a, fr.
sens de « désir », d’où enviable, vers 1400, espanir, encore usité au xvie s. et aujour-
rare jusqu’au xIX®° s.; envieux, x111°, d’a- d’hui dans les parlers septentrionaux et
près le lat. invidiosus, cf. invidius au xrie s. franco-provençaux, du francique *spann-
ENVIRON, v. virer. jan « étendre », de la famille de l’all. span-
nen, V. empan. Épanouir paraît dû à l’in-
ENVOÜÛTER, xrr1e. Dér. de l’anc. subst. fluence phonétique d’évanouir. L'’a. fr. a
vout, volt, lat. vullus « visage », qui, en eu un autre verbe espanir « sevrer », qui
a. fr., signifiait aussi « image (même sain- représente le même verbe germanique au
te) », cf. de même a. pr. volt, et désignait sens d’ « écarter ». Pour le développement
spécialement des figures de cire représen- du sens d’épanouir, cf. espelir de l’a. fr. et
tant les personnes qui, par un effet ma- de l’a. pr., à la fois « chasser » et « faire
gique, devaient être atteintes du mal qu'on éclore » qui est encore usuel dans les par-
infligeait à ces figures ; le sens propre du lers méridionaux au sens d’ « épanouir »,
verbe est donc « soumettre à une action lat. expellere « chasser ». — Dér. : épanouis-
magique ». — Dér. : envoûtement, xrve. sement, xve, d’abord -nissement, id.
ENVOYER. Lat. de basse ép. inviäre ÉPARCET, v. esparcette.
« faire route » qui a dû prendre de bonne
heure le sens d’ « envoyer », v. voie. It. ÉPARGNER, vers 1080 (Roland). Germ.
inviare, esp. enviar. — Dér. : envoi, xrI° ; *sparanjan, issu de *sparon (cf. all. spa-
envoyeur, xv®, rare jusqu’au XIX°S. ; ren- ren), probabl. sous l'influence de *xaidan-
voyer, x1I°; renvoi, 1396. jan, V. gagner. À. pr. esparnhar, it. rispar-
miare (m par l'influence du p précédent).
ÉOCÈNE, 1843. Empr. de l'angl. eocene ; — Dér. : épargne, xrre.
de même miocène, pliocène, viennent de
l’angl. miocene, pliocene; ces trois mots ont ÉPARPILLER. D'abord esparpeillier,
été créés par le géologue Lyell, en 1833, desparpeillier, comp. a. pr. esparpalhar, it.
avec les mots grecs é6s « aurore », meiôn sparpagliare, esp. desparpajar. L’un de ces
« plus petit », pleion « plus grand » et kainos deux types est sorti de l’autre par change-
« nouveau, récent ». ment de préfixe. La combinaison dispare
palare « répartir inégalement » se trouvant
ÉOLIENNE, 1798 (une 1re fois en 1615), dans Pétrone, il est fort probable que c'est
dans harpe éolienne dont l'invention est de là que sont nés les verbes romans, la
attribuée au père Kircher (xvrr® s.). Dér. mouillure de ! peut facilement avoir été
sav. du lat. Aeolus (du grec Aiolos), dieu causée par l'influence du lat. palea, v.
des vents. paille. — Dér. : éparpillement, 1290.
ÉPACTE, xn1°. Empr. du lat. de basse ÉPARRE, v. palonnier.
ép. epactale « jours intercalaires » (du grec ÉPARS, vers 1200. Part. passé de l’anc.
epakiai hémerai « id. »). verbe espardre, usité jusqu’au xvie s., lat.
ÉPAGNEUL, 1375, au sens moderne, spargere « répandre », conservé dans toutes
sous la forme espaignol, avec la forme espa- les langues rom. : it. spargere, esp. esparcir.
gnole du suff., qui n’a élé francisé que plus ÉPART, v. éparre.
tard, 1465. Empr. de l'esp. español.
ÉPARVIN, x1r1°. Probabl. dér. du fran-
ÉPAIS. D'abord espes, encore usité au Cique *sparwun, acc. de *sparo « passe-
xviie s. Lat. spissus. L’orthographe épais reau », soit par une comparaison de cette
est due à la coexistence au moyen âge excroissance du cheval avec la forme ar-
d’une autre forme espeis, espois, d’où épais rondie du corps d’un moineau (cf. esp.
par un développement semblable à celui de pajarilla « rate », propr. « passereau »),
roide, raide; cette forme était elle-même soit parce que l'allure un peu lourde de
issue d’un croisement d’espes avec l’anc. cet oiseau a une certaine ressemblance
subst. espeisse, espoisse « épaisseur » et avec celle du cheval atteint de cette
lJ’anc. verbe espeissier, espoissier « épais- maladie.
sir », lat. pop. “*spissia, *spissiare. It.
Spesso, esp. espeso. — Dér. : épaisseur, ÉPAULE. A dû être d’abord *espadle,
1377, a remplacé espoisse ; épaissir, 1165 d’où espalle, espaule; en outre en a. fr.
(spessir au x1v* $s.), l’a emporté sur espois- espalde. at. spat(h)üla (dér. de spatha
sier ; d’où épaississement, 1538. Les trois
« épée », v. épée), propr. « sorte de cuiller,
formes sont transcrites espess- dans les spatule », d’où « omoplate » chez le gastro-
premiers textes. : nome Apicius ; spat(h)ula a été pris en ce
sens assez tard par la langue parlée, d’où
ÉPANCHER. Ne s'emploie plus au sens le développement partic. du groupe -{ül-,
propre que dans le style élevé. Lat. pop. v. vieux. It. spalla, esp. espalda, v. dos. —
*expandicäre, élargissement de expandere, Dér. : épaulée, x1v° ; épauler, x111° ; épau-
v. le suiv. Seulement gallo-roman, a. pr. lement, 1564 ; épaulette, xvie (Paré, comme
espanchar ; traces dans les patois. — Dér. : terme d’anatomie) ; « pièce de l’armure
épanchement, 1606. du cheval », 1549 ; sens moderne, 1694;
insigne militaire depuis le milieu du xvr1es.
ÉPANDRE. Lat. expandere, qui a éliminé
le simple pandere. It. spandere, esp. espan- ÉPAVE, xvie, au sens moderne ; « chose
dir. Traces dans les patois. — Dér. : égarée et non réclamée par le proprié-
épandage, 1765 ; répandre, x11°, qui a sup- taire », xive. Issu de l’anc. adj. espave
planté, depuis le xvrr®s., le simple épandre, « égaré, dont on ne connaît pas le proprié-
aujourd’hui d’un emploi restreint. taire », x111°, encore usité en ce sens dans
ÉPAVE 228

la langue du droit. Lat. expavidus « épou- ÉPI-. Préf. de mots sav., tiré du préf.
vanté »; bêle épave a dùû signifier d’abord grec epi « SUT ».
« bête qui s’enfuit sous le coup de la peur ». ÉPICE, vers 1150. Empr. du lat. species,
ÉPEAUTRE. Forme sans r encore 1771. propr. « espèce », qui a servi à désigner des
Lat. de basse ép. spelta (empr. du germ. denrées de toute sorte, et, à basse ép.,
occidental *spella), signalé dans la région spécialement des aromates, des drogues.
de la Pannonie par saint Jérôme (1v® s.), À désigné aussi des dragées ou des confi-
cf. all. Spelze « balle de céréales ». It. spelta, tures, d’où, dès le moyen âge, épices des
esp. espella. juges, qui étaient d’abord des cadeaux et
ÉPÉE. Lat. spatha « large et longue qui furent ensuite transformées en taxes.
épée, à deux tranchants » (du grec spathé — Dér. : épicer, xrr1°, au sens de « faire
« épée »). Spatha avait, comme le mot grec, commerce d'épices », le sens moderne date
de nombreuses acceptions techn., notam- du xvie s.; épicier, id., jusqu’au xix° 8.,
ment « palette de tisserand, spatule de bois se disait seulement du commerce des
large et plate pour délayer les médica- épices et des denrées exotiques; d’où
ments », qui n’ont pas survécu et qui se épicerie, 1248, sens parallèle au préc.
ramènent toutes à l’idée d'objet en forme de ÉPICÉA, 1765, aussi epicia, 1796. Al-
morceau de bois large et plat, d’où, par tération de picea, cf. arbre de picea, 1553,
comparaison, « épée »; il a d’autre part empr. du lat. picea « sapin », dér. de pix,
donné naissance au dér. spathula, v. épaule. picis « poix »; c'est de picea que vient
ÉPELER, xve. D'abord espelt, 3e pers. pesse, empr. d’un parler franco-provençal
sing. ind. prés. (qui suppose un inf. *espel- de la région alpine, mot employé par Pele-
dre), xi° (Alexis), et espelir; signifie au tier du Mans au xvit s. sous la forme pece
moyen âge «expliquer, signifier » ; sens mo- dans un poème sur la Savoie.
derne au xv® s., ce qui a entraîné la forme
espeler d’après appeler. Francique *spellôn, ÉPICURIEN, 1512, au sens fig., 1295,
cf. anc. haut all. spellôn « raconter »; au sens propre ; épicurisme, xvi®, parfois
l’angl. {o spell doit probabl. le sens « épeler » -réisme. Dér. sav. du lat. epicurius « dis-
au français. — Dér. : épellation, 1732. : ciple d’Épicure », pris également déjà au
sens fig.
ÉPERLAN, 1564; d’abord espellens,
plur., xt). Empr. du moyen néerl. ÉPIDÉMIE, xr1° (espydymie ; encore au
spierlinc, cf. all. Spierling. XvI1e s. epidimie). Empr. du lat. médiéval
epidemia (du grec médical epidémia, dér.
ÉPERON, vers 1080 (Roland). Du germ. de l’adj. epidémos « qui séjourne dans un
*sporo, introduit de bonne heure par les pays », d’où « qui se propage »; v. endé-
soldats mercenaires, cf. all. Sporn et angl. mique, et, pour l’i dans espydymie, epidi-
spur, d’où aussi it. sprone, a. pr. esperon ; mie, éphémère. — Dér. : épidémique, 1549.
l'esp. espuela vient de la forme gothique
correspondante *spora. — Dér. : éperon- ÉPIDERME, v. derme.
ner, vers 1080.
ÉPIER, « observer secrètement », vers
ÉPERVIER, vers 1080 (Roland : espre- 1080 (Roland). Du francique *spehôn, cf.
viers). Du francique *sparwäri, cf. anc. all. spähen « épier ». It. spiare. Ce verbe
haut all. sparwäri, all. moderne Sperber.
L’it. spar(a)viere vient du gallo-roman. est aujourd’hui usuel au sens de « regarder »
en lorrain et dans le Sud-Ouest. V. espion.
ÉPHÈBE, vers 1500. Empr. du lat. ephe-
bus (du grec ephébos, comp. de hébé « jeu- ÉPIER, « monter en épi ». Lat. spicare.
nesse », propr. « qui est dans la jeunesse »). It. spicare et spigare, esp. espigar.
ÉPHÉMÈRE, xvi® (Paré). Empr. du ÉPIEU, xve. D'abord espiet, vers 1080
grec médical ephémeros « qui dure un jour (Roland), altéré en espiel, espieu, d’après
(hémera) », en parlant de la fièvre ; déjà pieu. Du francique *speot, cf. anc. haut
[ièvre effimère en 1314 avec un i qui vient all. spioz, d’où all. moderne Spiess « épieu »;
de la prononciation de é en grec de basse de même a. pr. espeut. L’it. spiede ou spiedo
ép., mais la voie de pénétration de cette vient du fr.
forme, à cette époque, n’est pas exacte-
ment déterminée, v. épidémie. Les autres ÉPIGRAMME, xiv°, mais établi seule-
sens de l’adj. fr. ont été pris au grec au ment au xvi® s., cf. « Lazare
de Baïf a
XVII S. donné à nostre langue le nom d’Epigram-
mes et d’Elégies », Du Bellay ; genre hési-
ÉPHÉMÉRIDES, 1537. Empr. du lat. tant au xvrie s.; épigrammatique, xv®,
ephemeris « récit d'événements quotidiens » rare jusqu'au xvirie s. Empr. du lat. epi-
(du grec ephémeris « id. », v. le préc.). gramma, epigrammalticus (du grec epigram-
ÉPHOD, xvii®, une première fois ma, propr. « inscription » (de graphein
1495. Empr. de l’hébreu efod (cf. Exode, « écrire »), d’où « petite pièce de vers »,
XXVII, 4, etc.) par les traductions lat. de epigrammatikos) ; epigramma a servi déjà
la Bible. à Rome à désigner un poème de caractère
satirique, cf. les Epigrammes de Martial,
ÉPI. Lat. spicum, moins usuel que spica. et c’est ce sens qui a éliminé les autres en
Les parlers gallo-romans ont des formes fr. à partir du xvrie s.
fém. dans l'Est et le Midi (a. pr. espiga et
espic) ; a été supplanté par d’autres mots ÉPIGRAPHE, 1694. Empr. du grec epi-
au Nord-Est et au Sud-Ouest. It. spiga, graphe « inscription ». — Dér. : épigraphie,
esp. espiga. 1838 ; -ique, 1845.
229 ÉPLORÉ

ÉPILEPSIE, 1503; épileptique, 1512. ÉPIQUE, fin xvie (D’Aubigné). Empr.


Empr. du lat. médical epilepsia, epilepticus du lat. epicus (du grec epikos « qui con-
(du grec médical, epilépsia, propr. « atta- cerne l'épopée ») ; sens fig., 1835 (V. Hugo :
que », epiléptikos) ; en outre en a. fr. epi- « Les grenadiers épiques » ; v. épopée).
lence et epilencie d’après des formes alté-
rées du lat. médiéval epilempsia, epilencia. ÉPISCOPAL, vers 1200, rare avant le
XVIIIe s., épiscopat, 1610. Empr. du lat.
ÉPILER, 1762. Dér. sav. du lat. pilus eccl. episcopalis, episcopaius (de episcopus
« poil » — Dér. : épilatoire, 1798. « évêque ») ; cf. aussi archiépiscopal, 1389,
et le lat. médiéval archiepiscopalis.
ÉPILOGUE, x11°. Empr. du lat. epilogus
(du grec epilogos) « péroraison d’un dis- ÉPISODE, 1660 (Corneille), antér. epi-
cours ». — Dér. : épiloguer, xve, d’abord sodie, xv® et xvi® s. Genre hésitant au
trans., au sens de « récapituler », sens mo- xvi1€ s. Empr. du grec episodion « acces-
derne au xvri® s.; d’où épiloguer, 1690. soire », d’où, comme terme de rhétorique,
« épisode » (neutre de l’adj. episodios « in-
ÉPINARD, 1331. En outre espinach, troduit en sus », comp. de eisodos « entrée »,
-noche, XIvV*, d’où, par substitution desuff., formé lui-même de eis « dans » et de hodos
espinarde, -nard. Espinache a été empr. du « chemin »). La voie de pénétration de la
latin médiéval spinachium, spinargium, forme du xv® s. est incertaine. — Dér. :
tiré probabl. par les médecins de l’arabe épisodique, id.
d’Andalousie isbinäkh (arabo-persan ispd-
nakh) ; l’épinard a en effet été employé ÉPISSER, terme de marine, « assembler
d’abord en médecine avant d’être employé deux bouts de corde en entrelaçant les
pour l’alimentation. It. spinaci, a. pr. espi- torons », 1631. Empr. du néerl. splissen
narc. La forme avec -r- semble être née (cf. all. id. au même sens), de la famille
dans le Midi; elle a fini par être placé- de l’all. spleissen « fendre ». La disparition
parmi les dér. en -ard. Mot devenu euro- de l’Z est due à une cause obscure. — Dér. :
péen, cf. all. Spinat, angl. spinage. L’épi- épissoir, 1678 ; épissure, 1677.
nard, qui croît naturellement en Orient, a ÉPISTOLAIRE, 1542 ; épistolier, 1539.
été introduit par les Arabes en Espagne, Le premier est empr. du lat. epistolaris (de
où un auteur arabe du xi° s. le signale epistola « lettre », v. épître), le deuxième
dans la région de Séville. est un dér. sav. de epistola.
ÉPINCER, v. pince. ÉPITAPHE, xu°. Genre hésitant jus-
qu’au xvue s. Empr. du lat. de basse ép.
ÉPINE. Lat. spina, propr. « piquant », epitaphium (du grec epitaphios, adj., « con-
spinus désignant l’arbrisseau. En fr. épine cernant le tombeau, funèbre » en parlant
a pris les deux sens, cf. toutefois aubépine. de jeux, de discours, comp. de éaphos
Dans les parlers gallo-romans la forme « tombeau ») ; pour le mot usuel en grec,
masc. subsiste encore pour désigner l’ar- v. épigramme.
brisseau dans le Sud-Ouest (a. pr. espina
et espin). Ailleurs les deux mots ont sub- ÉPITHALAME, 1536. Empr. du lat.
sisté : it. spina et spino, esp. espina et espi- epithalamium (du grec ephitalamion « chant
no. V. échine. — Dér. : épinette, xXIV®, au nuptial », de {halamos « chambre à coucher
sens d’ « arbrisseau » ; comme nom de l’an- de la maîtresse de maison »).
cien instrument de musique, 1514, est ÉPITHÈTE, 1517. Masc. jusqu’au
une francisation de l’it. spinelta, dér. de xvue s. Empr. du lat. des grammairiens
spina, ainsi nommé parce qu'on pinçait epitheton (d’un mot grec signifiant « qui
les cordes avec des pointes de plumes; est ajouté » d’où « adj. ») ; sens plus étendu
épinière, dans moelle épinière, 1660 ; épi- dès le xvi® 5.
noche, xrrIe.
ÉPITOGE, 1484. D'abord masc. ; devenu
ÉPINEUX. Lat. spinôsus. It. spinoso, fém. d’après toge. Empr. du lat. epitogium,
esp. espinoso. comp. hybride du préf. grec epi et du lat.
ÉPINE-VINETTE, v. vin. loga « toge ».
ÉPITOMÉ, 1522. D'abord epitome; de-
ÉPINGLE. Lat. spinula « petite épine », puis 1829 -mé. Empr. du lat. epitome (du
d’où « épine servant à attacher », sens at- grec epitomé « abrégé », du verbe femnein
testé pour le simple spina chez Tacite à « Couper »).
propos des Germains. Le groupe -ngl- fait
postuler une forme lat. *spingula due pro- ÉPÎTRE, xue. Empr. du lat. epistula,
bablement à un croisement avec spicula -lola (du grec epistolé). Emploi littéraire
« piquant », lequel est conservé dans le depuis le xvrre s., d’après le sens du mot
haut-breton épille « épingle ». A. pr. espinla, chez les anciens ; emploi liturgique d’après
espila, it. spilla et spillo. — Dér. : épingler, le sens du mot dans le Nouveau Testa-
1596 ; épinglette, vers 1380. ment ; sens général de « lettre » dès les
premiers textes, aujourd’hui ironique.
ÉPIPHANIE, xu°. Empr. du lat. eccl.
epiphania, du grec eccl. epiphaneia « appa- ÉPIZOOTIE, 1775. Fait avec le grec
rition ». zôotés « nature animale » (plus com-
mode pour faire un mot fr. à suff. que zéon
ÉPIPLOON, 1541. Empr. du grec médical « animal ») sur le modèle d’épidémie. —
epiploon, propr. « flottant », neutre pris Dér. : épizootique, 1772.
substantiv. de l’adj. epiploos « qui navi-
gue ». ÉPLORÉ, v. pleurer.
ÉPLUCHER 230

ÉPLUCHER, xu1° (sous la forme espe- ÉPUISER, v. puits.


lucha, 3° pers. sing. passé simple). Comp. de
l’anc. verbe peluchier, de même it. piluccare, ÉPURGE, v. expurger.
cat. pellucar (avec influence de pell «peau »). ÉQUARRIR, xir1e s. « rendre carré »
Sur pilare (v. peler) le lat. a formé un dans différentes techn. ; « dépecer un ani-
verbe *pilücare (d’où a. pr. pelugar « éplu- mal », 1845. Autre forme d’équarrer, éga-
Cher ») ; sur *piläcare le lat. de basse époque lement usuel au moyen âge et jusqu’au
a fait, à l’aide du suff. -{care, un *piläcicare, Xviie s., lat. pop. *exquadräre, comp. de
réduit par la suite à “*pilüccare. L’all. quadräre, de même sens ; de même it. squa-
piläcken « cueillir » et l’angl. do pluck « id. » drare, esp. escuadrar ; v. équerre. — Dér. :
sont d’origine romane. Le simple survit à équarrissage, 1364 ; équarrissement, 1328;
côté du dér. dans les patois. — Dér. : équarisseur, 1803, une première fois en
éplucheur, 1555 ; épluchure, 1611. 1552. Sens de tous ces dér. parallèle au
verbe.
ÉPONGE. Lat. pop. *sponga, lat. class:
spongia (mot pris au grec spongid, dér. ÉQUATEUR, xiv°. Empr. du lat. mé-
de spéngos). It. spugna d’après la forme diéval aequator (du verbe aequare « rendre
class., mais la plus grande partie de égal » ; le lat. ancien ne signifie que « con-
l'Italie dit sponga ; la forme *sponga est trôleur »), en parlant du cercle de la sphère
due à un nouveau contact avec le grec céleste (appelé en lat. circulus aequinoctia-
spôngos ; elle a comme point de départ lis, fait sur le modèle du grec isémerinos
Marseille, qui importait en Gaule les kyklos), d’où, plus tard, l’équateur de la
éponges venant surtout des îles grecques. sphère terrestre. — Dér. : équatorial, 1784.
V. spongieux. — Dér. : éponger, 1755,
déjà vers 1220 et en 1582 (alors spongier). ÉQUATION, 1613, une première fois au
xI11e s. au sens du lat. anc. Empr. du lat.
ÉPOPÉE, 1690. Empr. du grec epopoia scientifique aequalio, emploi partic. du lat.
(de epopoios « qui fait des récits en vers ») ; anc. aequatio « égalité » (de aequare, v. le
sens fig., 1835 (V. Hugo : « Cette épopée préc.).
Que vous aviez naguère écrite avec l'épée »). ÉQUERRE. Lat. pop. *exquädra, tiré
ÉPOQUE, 1634 fepoche ou aere). Empr. du verbe *exquadrare, v. équarrir, l’équerre
du grec epokhé, propr. « point d’arrêt », servant à tracer les angles des objets car-
pris ensuite comme terme d’astronomie, rés, en lat. class. norma. It. squadra, esp.
puis au sens de « temps marqué » ; a d’abord escuadra.
le sens fort de « moment où se passe un ÉQUESTRE, xiv® (Bersuire). Empr. du
fait remarquable », cf. « Le grand Corneille lat. equesiris (de equus « cheval »).
faisant pleurer le grand Condé d’admira-
tion est une époque bien célèbre dans l’his- ÉQUI-. Premier élément de mots sav.
toire du genre humain ». Voltaire (Siècle comp., tels que équimultiple, 1667, tiré du
de Louis XIV) et encore aujourd’hui faire lat. aequi-, préf. tiré de l'adj. aequus « égal »,
époque. sur le modèle de mots empr., tels que équi-
latéral, 1520.
ÉPOUSAILLES. Lat. spo(n)salia « fian-
çailles », dér. de spô(n )sus, v. époux. A. pr. ÉQUILIBRE, xvie. Empr. du lat. aequi-
espozalha(s) ; rare ailleurs. librium, comp. de aequus, v. équi-, et de
libra « balance, livre ». — Dér. : équilibrer,
ÉPOUSER. Signifie aussi « marier » en 1744, une première fois en 1525; le lat.
a. fr. ; sens plus étendu, p. ex. dans épouser
une querelle, depuis le xvre s. Lat. de basse aequilibrare est si rare qu’il n’a pas dû
servir de modèle pour le verbe fr.: d’où
ép. spô(n)säre « fiancer » ; a pris dans les
équilibriste, vers 1780 ; déséquilibrer, 1877 E
langues romanes le sens de « prendre pour déséquilibre, 1907.
époux, épouse ». — Dér. : épouseur, 1665
(Molière), une première fois au xIve s. ÉQUINOXE, 1210 (écrit -oce): équi-
ÉPOUSSETER, v. poussière. noxial, id. Empr. du lat. aequinoctium,
comp. de aequus, et de nox, nociis « nuit »,
ÉPOUVANTER. D'abord espoenier (-pau- aequinoctialis.
>-pau- >-po-), espovenier, espouventer au
moyen âge, épouvanter au xvi®s. Lat. pop. ÉQUIPER, 1160. Signifie d’abord «s'em-
*ezpaveniäre, formé avec le part. prés. barquer »; le sens moderne n'apparaît
pavens, -entis, au lieu du lat. class. expauëre qu’au xve s. En anc. franc. il y a eu un
(qui survit en quelques points). It. spa- autre verbe esquiper « mettre à voile, navi-
ventare, esp. espantar. — Dér, avec une guer », qui est emprunté de l’anglo-sax.
succession de formes semblables à celles scipian, de même sens. Mais le fr. équiper
du verbe : épouvantable, x11° ; épouvantail, est emprunté de l’anc. nor. skipa, qui a le
XIII°; épouvante, xvi*; épouvantement, même sens que le verbe franc. La forme
BAUER eschiper, qui se rencontre à côté d’esquiper,
d’accord avec l’anc. franc. eschipre « ma-
ÉPOUX, ÉPOUSE. Développement de rin », esquipre, qui vient de l’anc. nor.
la forme d’aprés épouser. Lat. spo(n )sus, skipari, montre que le franc. a hésité pen-
spo(n)sa « fiancé, -ée », part. passif du dant un certain temps entre -eski- et
verbe spondère « prendre un engagement ». eschi- comme résultat du nor. ski-. L'a.
L'emploi d’époux, en langage mystique, gasc. esquipar « équiper » vient du fr. —
vient de la parabole des dix vierges, Ma- Dér. : équipage, xve; équipe, 1456, rare-
thieu, XXV, 1-13. It. sposo, -a, esp. es-
ment attesté ; équipée, vers 1500, d’abord
Poso, -a. « expédition », d’où le sens moderne dès
ÉPREINDRE, v. exprimer. 1611 ; équipement, 1671.
231 ERREUR

ÉQUITATION, 1503. Empr. du lat. equi- ERGOT, x11e (argos, plur., forme usuelle
tatio (de equitare « aller à cheval »). jusqu’au xvie s.). Étymologie inconnue.
Dit par extension d’une excroissance para-
ÉQUITÉ, xrr1e (J. de Meung). Empr. du sitaire du blé ou du seigle, 1676. — Dér. :
lat. aequitas « id. », propr. « égalité » (de ergoté, 1594 (Satire Ménippée) au sens
aequus « égal », d’où « équitable »). — Dér. : propre, dit du blé ou du seigle dès 1755;
équitable, 1517. ergotine, 1836, « base extraite de l’ergot
ÉQUIVALENT, 1370 (Oresme); équi- de seigle ».
valence, vers 1350. Empr. du bas-latin ÉRIGER, 1466. Empr. du lat. erigere
equivalens, equivalentia attestés au xIIe Ss. « dresser ».
(comp. du lat. aequus et du verbe valere).
Formé sur ces deux mots : équivaloir, 1660. ÉRIGNE, 1536 (ireigne) ; parfois érine ;
instrument de chirurgie. Autre forme d’a-
ÉQUIVOQUE, adj., xirie. Empr. du lat. raigne « araignée », refaite d’après le dér.
de basse ép. aequivocus « à double sens » arignée, cf. airignée chez M. Régnier ; cette
(de vox, vocis « voix, parole »). Sens fig. au désignation est due à une comparaison de
xviIe s. Devenu subst. au xvies. ; d’abord l'instrument avec les pattes de l’araignée.
masc. ; genre hésitant au xvi1e s. — Dér. : Paré emploie encore araigne au même sens.
-quer, 1520. ERMITE, xr°, souvent écrit avec h
ÉRABLE. Lat. de basse ép., attesté initiale. Empr. du lat. eccl. eremita (du
dans des gloses, acerabulus, au lieu du lat. grec erémités (qui vit dans la solitude »,
class. acer, aceris, d’où l’it. acero, l'esp. de l’adj. erémos « solitaire, désert »). —
arce. Acerabulus est un comp. du lat. acer Dér. : ermitage, id.
et d’un mot gaulois *abolos, qu’on restitue ÉRODER, xvi® (Paré), rare jusqu’au
d’après la deuxième partie du gallois cri- xixes. ; érosion, 1541. Empr. du lat. erodere
afol « sorbier des oiseaux ». « ronger », erosio, Cf. roder, corroder.
ÉRAFLER, v. rafler. ÉROTIQUE, 1566. Empr. du grec er6-
tikos (de erôs « amour »).
ÉRAILLER. D'abord esroeilier, d'où es-
raaillier, puis esraillier. Au moyen âge ne ERRANT, xr1e. Aujourd’hui usité seule-
s’est dit que des yeux qu’on roule ; d’où, ment dans les expressions : chevalier errani,
au xvi® s., en parlant des yeux « dont la le juif errant. Part. prés. de l’anc. verbe
paupière inférieure... se renverse et ne errer « marcher, aller » qui a disparu avant
laisse voir que le blanc » (Paré), d’où le le xvi® s., sans doute en raison de la con-
sens moderne. Dér. de l’anc. verbe roeil- currence du verbe homonyme errer, de sens
lier, d’où rooillier, puis rouiller encore dans peu différent, v. errer ; l’anc. errer repré-
un certain nombre de patois septentrio- sente le lat. iieràäre « voyager », dér. de iter
naux, au sens de « rouler les yeux », lat. « voyage ». Une forme régulière oir(r)e,
pop. *roticüläre, élargissement de roiäre 3e pers. sing. prés. ind., a été refaite de
« rouler », qu’on disait aussi des yeux. — bonne heure sur les formes à radical inac-
Dér. : éraillement, xvie (Paré, en parlant centué err-. De ce verbe dérive errements,
des yeux); éraillure, 1690. xI1e s., qui ne se dit plus qu’au pluriel,
mais s’employait aux deux nombres au
ÈRE, 1537 (la here de Cesar, v. époque). moyen âge, au sens de « manière de se
Empr. du lat. de basse ép. aera, d’abord conduire », etc., v. erre.
« article d’un compte, nombre », d’où
« époque, point de départ (en chronolo- ERRATA, 1590. L'Académie, depuis
gie) », « ère », dérivé de aes, aeris « Cuivre », 1798, donne erratum pour le sing., mais
d’où « monnaie ». Littré trouve cette forme pédantesque.
Empr. du lat., errata, plur. neutre de erra-
ÉRECTION, 1485. Empr. du lat. erecitio lum « erreur ».
« action de dresser » (du verbe erigere, v. ERRATIQUE, xine (esloiles erratiques,
ériger). Au sens physiologique, xvi° (Paré),
d’après le lat. erraticae stellae), rare jus-
d’où érectile, 1813 (d’après le part. erecius). qu'au xix° s. Empr. du lat. erraticus « er-
ÉREINTER, v. rein. rant, vagabond » (de errare « errer »), en
vue de sens techn.
ÉRÉTHISME, 1743. Empr. du grec ere-
thismos « irritation » (du verbe erethizein ERRE. Ne s'emploie plus que dans des
«irriter »). locutions et en parlant de la vitesse d’un
navire. En a, fr. et jusqu'au xvi®s., usuel
ERGASTULE, 1823, une première fois au sens de « voyage, chemin, route », etc.
1495. Empr. du lat. ergastulum (mot Soit tiré du verbe errer, v. errant, soit lat.
hybride fait sur le grec ergazesthai « tra- iter. Une forme oir(r)e, qui peut dériver
vailler », d’après ergastérion « atelier »). du radical accentué du verbe, a disparu en
ERGO, xvrre, d’abord argo, xire s. Mot même temps que celui-ci.
lat. signifiant « donc », répandu par la sco- ERREMENTS, v. errant.
lastique et les discussions dialectiques. ERRER. Lat. erräre. It. errare, esp.
Ergo-gluc (ou -glu), dont le deuxième élé-
ment est obscur, reste connu, parce que errar.
Rabelais l’a employé dans la harangue de ERREUR. Lat. errorem, acc. de error.
Janotus de Bragmardo, I, 19. — Dér. : Au xvie s. masc. d’après le lat. Depuis le
ergoter, x111e (sous la forme argo-) ; ergo- xive s. et seulement dans le style élevé,
tage, fin xvie (D’Aubigné); ergoterie, pris au sens d’ « action d’aller çà et là »;
1567 ; ergoteur, xvIe. d'après le sens propre du lat.
ERRONÉ 232

ERRONÉ, xve. Empr. du lat. erroneus, esp. ; l'orthographe escouade paraît spécia-
qui ne signifie que « errant, vagabond », lement due à celle de l’esp. Comme terme
pour servir d’adj. à erreur. de marine, escadre date du xvri® s., et doit
ERS, genre de lentille, 1538. Empr. d’un ce sens à l’esp. qui disait alors escuadra de
parler méridional, cf. a. pr. ers, aujourd'hui galeras ; escouade apparaît déjà avec ce
erse, esse, erre, lat. de basse ép. ervus, ervo- sens au xvi® s. Le dér. escadrille, attesté
ris, au lieu du lat. class. ervum, cf. aussi au xvie s. au sens de « troupe », vient de
l’esp. yero d’après une forme erum, égale- l'esp. escuadrilla ; développement du sens
ment attestée. parallèle au simple. L'’it. squadriglia vient
du fr. ou de l'esp.
ERSATZ, 1915. AIL. ersaiz « objet qui en
remplace un autre ». ESCADRON, fin xve (Molinet : « Depuis
que les Italiens se sont boutés en la maison
ÉRUCTATION, xr1re. Empr..du lat. eruc- de Bourgogne, ils sont nombrés par escua-
tatio « Vomissement », dér. du verbe eruc- dres et escuadrons »). Au xvi® s. surtout
lare « roter, vomir », auquel éructation doit squadron ou scadron. Empr. de l’it. squa-
son sens de « rot ». drone, dér. augment. de squadra.
ÉRUDIT, 1496; érudition, 1618 au
sens moderne ; du xXIv® au xvi® s., au sens ESCALADE, 1427. On y a vu un empr.
d’ « enseignement » d’après le sens propre de l’ital. scalata « assaut d’une ville ou
du lat. Empr. du lat. eruditus, eruditio (de d’une muraille », dér. du verbe scalare
erudire « instruire »). «monter avec une échelle », v. échelle. Mais
en occitan le verbe correspondant escalar
ÉRUPTION, xive (Bersuire); éruptif, est attesté depuis le xure s., et le subst.
1759. Éruption est empr. du lat. erupiio ; correspondant escalado, attesté depuis le
érupiif a été dér. du lat. erupius, part. passé XVII* S., Comme du reste l’it. escalata, peut
du verbe erumpere « (faire) sortir impé- fort bien avoir été formé beaucoup plus
tueusement », pour servir d’adj. à éruplion. tôt. C’est pourquoi un empr. à l’occitan,
ÉRYSIPÈLE, 1314 (sous la forme heri- pendant la guerre de Cent Ans, est beau-
sipille). Empr. du lat. médical erysipelas coup plus probable. On disait au moyen
(d’origine grecque). On dit aussi érésipèle. âge eschelement et le verbe escheler, qui a
survécu jusqu'au XvIIe s. — Dér. : escala-
ÉRYTHÈME, 1811. Empr. du grec mé- der, 1603.
dical erythéma (de la famille de l’adj. ery-
thros « rouge »). ESCALE, 1507, déjà au xzr1e s. dans
le fr. d'Orient (faizeent escale). Empr. de
ÈS, v. le. lit. scala dans la locution far scala ; pour
ESBIGNER (s’). Avant 1827 (Désau- le développement du sens, v. échelle.
giers). Empr. de l’it. sbignare « courir », ESCALIER, 1545 (dans un traité d’ar-
transformation de svignare (les deux formes chitecture). Empr. à la fois du lat. scalaria,
sont attestées dès 1619), aujourd’hui plur., « sorte d'escalier d’amphithéâtre »
svignarscla « s'enfuir, se sauver », dér. de
vigna « vigne », propr. « s’enfuir de la chez Vitruve, par les architectes et du
prov. escalier, dér. de escala « échelle » ;
vigne, comme un maraudeur »; la forme dominant aujourd’hui dans les parlers gallo-
sbignare est surtout répandue dans l'Italie romans ; l’a. fr. eschalier n'a pas signifié
du Nord. « escalier » ; il ne survit que dans quelques
ESBROUFE, 1827. Empr. du méridio- parlers de l'Ouest pour désigner une petite
nal esbroufe, tiré du verbe esbroufa, propr. échelle ou une barrière entre des champs,
« s’ébrouer ». Onomatopée qui vit aussi etc. ; il a rarement le sens d°’ « escalier »
dans lit. sbruffare « asperger par la bouche et c’est alors probabl. un transfert du sens
ou par le nez ». — Dér. : esbroufer, 1859, du fr. escalier. Escalier, terme de haute
ou empr. avec esbroufe ; esbroufeur, id. architecture, a éliminé degré qui a perdu
ESCABEAU,
le sens d”’ « escalier » au xvire 8. et survit à
1419. Empr. du lat. scabel-
lum ; vers la même ép. on a fait également peine dans la région franco-provençale où
le fém. escabelle, 1328 (d’abord et jusqu’au il a été soutenu par la présence du simple
commencement du xvi® s. scabelle). Ces gré; moniée, essayé du xive au xvrre S.,
deux mots ont remplacé l’anc. eschame, lat. ne s’est maintenu que dans les patois, no-
scamnum, et eschamel, lat. de basse ép. tamment au Nord-Est d’où il provenait.
scamnellum, qui survivent tous deux dans ESCALOPE, 1767, au sens moderne.
les patois. Paraît venir du Nord-Est. L’anc. fr. esca-
ESCADRE, xve (Le Jouvencel : « Ba- lope signifiait « coquille », il vit encore dans
tailles ou eschielles ou escadres, comme on certains patois avec le sens « bonnet à
dit en Ytalie »). En outre escoadre, escoidre, grandes pattes ». Dér. de l’anc. fr. escale
fin xv° ; scouadre, xvie. Empr., au sens du « écale » avec le suffixe de enveloppe, -Opper,
« bataillon, escouade, etc. » successivement v. écale,
de l’it. squadra « id. » et de l'esp. escuadra ESCAMOTER, 1560. Empr. de l’occitan
€ id. », propr. « équerre », v. équerre; le escamotar, dér. de escamar « effilocher »,
nouveau sens est dû à la formation en dér. de l’a. pr. escama « écaille », qui repré-
carré des troupes ainsi nommées ; mais on sente le 1t. squama, devenu d’abord *scama,
n’a pas établi si ce développement de sens sous l’influence de skalja, v. écaille, L’esp.
s’est produit d’abord en it. ou en esp. escamolar est empr. récemment du fr. —
Escouade, fin xvi®, d’abord esquade, 1553, Lo escamotage,
est une autre francisation des mots it, et 1789; escamoteur,
233 ESCLANDRE

ESCAMPER, ESCAMPETTE, v. camp. reurs et les patrouilles se tenant cachés


ESCAPADE, vers 1570. S’est dit aussi aussi longtemps que possible. La transfor-
d'un cheval, comme terme de manège. mation de -muche en -mouche a lieu dans la
1611. Empr. de l’it. scappata ou de l’esp. deuxième moitié du xve 5. ; elle est due à
escapada, qui ont ce même sens; pour l’influence de mouche au sens de « personne
l’'étymologie, v. échapper. qui espionne ». It. scaramuccia, esp. es-
caramuza, a. pr. escaramussa, all. Schar-
ESCARBILLE, 1780. Empr. d’un parler müûtzel, angl. skirmish sont empr. du fr. —
de la région minière du Nord ; cf. le lillois Dér. : escarmoucher, 1350 (d’abord -mu-
escarbille, rouchi escabille (dès 1667). C’est cher) ; escarmoucheur, vers 1380 (d’abord
le subst. verbal de escrabiller attesté encore -mucheur).
en Belgique et qui est empr. du néerl.
schrabben « gratter, racler » ou de son dimi- ESCAROLE, xrr1e (sous la forme sca-
nutif schrabbelen. riole). Empr. de l’it. scariola, qui représente
le lat. de basse ép. escariola, attesté dans
ESCARBOT, xve (Villon). Réfection, par des gloses comme traduction du grec érôæi-
croisement avec escargot, de l’a. fr. eschar- ma « endive ». Escariola est dér. de esca
bot, encore écharbot en berrichon au sens «nourriture », sur le modèle du grec {rôxima,
d’ « escargot », lat. scarabaeus, avec chan- plur. neutre de l’adj. rôximos « qui peut
gement de la terminaison ; de même, avec se manger (cru) » (du verbe {rôgein « man-
diverses altérations, it. scarafaggio, esp. ger »).
escarabajo, a. pr. escaravach, etc. Le croi-
sement d’écharbot et escargot est dû au fait ESCARPE, 1800. Mot d’argot des vo-
que les parlers désignent souvent l'escarbot, leurs, qui paraît empr. d’un parler méri-
par le nom de l’escargot et inversement, dional, où il a été tiré du verbe escarpi
cf. l’'étymologie d’escargot et en outre l’em- « écharper ».
ploi d’escarbot au sens d’ « escargot » dans ESCARPÉ, 1582. Dér. de l'anc. verbe
l'Yonne et la Seine-Maritime et l'emploi escarper, 1558, « couper en pente raide »,
inverse d’escargot au sens d’ « escarbot » d’où escarpement, 1701 ; ce verbe dérive
dans l’Anjou. lui-même de l’anc. terme de fortification
ESCARBOUCLE, 1125 (escha-). Altéra- escarpe, 1553, « muraille qui règne au-
tion, par croisement avec boucle, d’escar- dessus du fossé du côté de la place », d’où
buncle, vers 1080 (Roland), issu de car- contrescarpe, 1550 (Rab.), et escarpe est
buncle « id. »; celui-ci est empr. du lat. empr. de l’it. scarpa « talus d’un rempart ».
carbunculus, dim. de carbo « charbon », Celui-ci représente probabl. un gothique
propr. « petit charbon », dit du rubis à *skarpô « objet qui se termine en pointe »,
cause de son éclat. de la famille de l’all. scharf « bien affilé »,
Scharfe « poutre coupée en biseau ».
ESCARCELLE, xire, rare avant le
Xvi® s. Empr. (de même que l’a. pr. escar- ESCARPIN, 1534, en outre escalpin,
sela) de l’it. scarsella, dér. de l’adj. scarso 1512. Empr. de l’it. scarpino, dim. de
« avare », littéral. « petite avare »; cette scarpa «chaussure » (d’où escarpe au XvVI®s.).
dénomination, de formation hardie, est L'’it. scarpa est le même mot que scarpa
propr. une plaisanterie, parce que l’escar- « talus de rempart » ; la base du rempart
celle peut servir à contenir les épargnes. faisant saillie peut paraître comme le
Scarso représente le lat. pop. *excarpsus, soulier du rempart. V. le préc.
réfection du lat. class. excerpsus, propr.
« cueilli, extrait », d’où « resserré », d'où ESCARPOLETTE, 1605 (écrit alors es-
aussi l’a. fr. eschars « avare », fr. moderne carpaulelle). En outre escarpoulelle « escarpe
échars « qui souffle faiblement (vent) ». de rempart », fin xvi® s. Ce mot, qui n’est
attesté que dans le Midi, pourrait bien être
ESCARGOT, 1393 (Ménagier : limas- un dim. d’escarpe formé en prov. Escarpo-
sons que l’en dit escargols). Empr. avec lette en est probabl. un emploi métapho-
substitution de suff., du prov. escaragol, rique dû au fait qu’en se balançant l’escar-
forme usitée aujourd’hui dans le Sud- polette décrit une ligne inclinée.
Ouest, qui est issu du prov. caragôu sous
l'influence des représentants du lat. scara- ESCARRE, 1495, antér. eschar
(r )e, 1314.
baeus, v. escarbot. Le mot prov. et l’esp. Empr. du lat. médical eschara (du grec
caracol sont nés par métathèse du type du eskhara).
prov. cacalaou, lequel est probabl. le ESCIENT,, vers 1080 (Roland : mien es-
résultat d’un croisement, survenu sur les cient) ; ne s'emploie plus que dans
quelques
côtes de la Méditerranée occidentale, entre locutions. Empr. du lat. sciente dans des
le grec kächlaz et le lat. conchylium. L’empr. locutions telles que me, le sciente « à mon
d’escargot de la part du fr. est dû au fait su, à ton su », etc., d’où en lat. médiéval
que l’emploi culinaire de ce mollusque meo, tuo scienie ; de là sont nées les locu-
vient du Midi. Pour la même raison l'esp. tions mon, mien escient, etc., d’abord sans
caracol a passé dans les Pays-Bas espagnols prép., puis à mon escient, etc. L’a. fr. a dit
(wallon caracol, flamand karakol). aussi escientre, d’après l’adv. lat. scienter.
ESCARMOUCHE, xive (d’abord escar- ESCLAFFER (s), au xvie s. et depuis
muche). Croisement de l’a. fr. escremie 1893. Empr. du prov. esclafä « éclater »,
.« combat », dér. de escremir « combattre », attesté depuis le xve s.; cf. fr. éclater de
qui représente le francique *skirmjan « pro- rire, V. Clapper.
téger » (comp. all. schirmen), avec le radical
du verbe a. fr. muchier « cacher », les éclai- ESCLANDRE, v. scandale,
ESCLAVE 234

ESCLAVE, xr11°. Empr. du lat. médiéval fleur », sens que le fr. a également d’abord :
sclavus, autre forme de slavus, propr. le sens moderne s’est développé rapidement
« slave »; le sens d’ « esclave », qui s’est en fr. — Dér. : escroquerie, 1694 ; escro-
développé dès le haut moyen âge est dû queur, xvi° (J. du Bellay).
au fait que les Germains réduisirent en ESCULAPE, 1771, au sens fig. Dieu de
esclavage de nombreux Slaves ; on attribue la médecine chez les Grecs, lat. Aesculapius
aussi la diffusion de ce sens aux razzias
(du grec Asklépios).
que les Vénitiens firent en Esclavonie, au
moment des Croisades. Mot devenu euro- ESGOURDE, « oreille », 1896 (pop.,
péen : cf. it. schiavo, esp. esclavo, all. d’abord argot). De gourde « courge », en
Sklave, angl. slave. — Dér. : esclavage, raison d’une comparaison des oreilles avec
xvi°; esclavagiste, 1864 ; anti-, fin xixe. les larges feuilles de la courge ; le préf.
vient de l’argot escoute, dér. du prov. es-
ESCOFIER, 1797. Mot de l’argot des coutd « écouter ».
voleurs, empr. du provençal escoufia « sup-
primer, tuer », issu, par changement de ÉSOTÉRIQUE, 1755. Empr. du grec
conjugaison, du provençal escoufi « id. », esôlerikos « réservé aux seuls adeptes »,
du lat. du Bas-Empire “*exconficere, com- propr. « intérieur » (de esô « dedans »), cf.
posé de conficere (comp. pour le sens le exotérique.
franc. déconfire). Avant escofier l’argot a ESPACE, vers 1190. Souvent fém. jus-
connu coffier « tuer » (1725), qui est pro- qu’au xvi® s.; genre conservé dans l’im-
bablement déformé de coffir « meurtrir », primerie. Empr. du lat. spatium. — Dér. :
répandu dans les patois de l'Ouest et qui espacer, 1416 ; espacement, 1680.
représente le lat. conficere.
ESPADON, 1694, comme nom de pois
ESCOGRIFFE, 1611 (Cotgrave, qui le son ; dit aussi épée de mer. Emploi fig.
donne comme orléanais). A signifié aussi d’espadon, 1546, « grande épée », empr. de
« voleur »; mot de formation obscure. La l’it. spadone, augment. de spada « épée ».
deuxième partie du mot pourrait se rat-
tacher au verbe griffer. ESPADRILLE, 1793. Altération d’espar-
dille, 1723, empr. du mot. des parlers de la
ESCOMPTER, 1675; escompte, 1597. région pyrénéenne espardillo, dér. altéré de
Empr. de l’it. scontare, propr. « décompter » espart « sparte », cf. l’esp. esparteña, dér.
(de contare, v. compter), sconto. — Dér. : de esparto « id. ».
escomptable, 1867 ; escompteur, 1838, une
première fois en 1548 (Rab.), d’après l’it. ESPAGNOLETTE, 1731, au sens de «fer-
rure servant à fermer et à ouvrir une fe-
ESCOPETTE, 1517 (écrit eschopelle). nêtre ». Dim. d'espagnol ; le mot est en
Empr. de lit. schioppetto, dér. de schioppo usage surtout dans le Midi, et l’objet
« arme à feu », lat. siloppus « bruit qu’on vient probabl. d’Espagne.
fait en frappant avec les joues gonflées ».
ESPALIER, 1553 comme terme d’ar-
ESCORTE, vers 1500. Ordinairement chitecture, d’où le sens moderne dès 1600
terme militaire au xvi® s. Empr. de l’it. chez O. de Serres. Empr. de l’it. spalliera,
scorla, dér. du verbe scorgere « montrer, dér. de spalla « épaule » au sens d’ « appui » ;
guider », lat. pop. *excorrigere (de corrigere francisé en -ier, probabl. d’après échalier.
« redresser »). — Dér. : escorter, 1530.
ESPARCETTE, xvie (sous la forme es-
ESCOUADE, v. escadre. parcet). Empr. du prov. esparceto, forme
ESCOURGEON (on dit moins souvent usuelle dans les patois méridionaux en
écourgeon), 1269 (secourjon dans un texte concurrence avec esparcet. Dér. de l’a. pr.
picard). Mot du Nord-Est. Dér. du lt. espars « répandu » (part. passé de espardre,
corrigia (V. courroie), chacune des six lat. spargère), parce qu’on répand de facon
suites de grains de cette plante ressem- sommaire dans les champs la poussière
blant à une courroie ronde. de foin qui contient la graine de l’esparcette,
tandis qu’on sème soigneusement le blé.
ESCRIME, 1409. Empr. de l’anc. it.
scrima, empr. lui-même de l’a. pr. escrima ; ESPÈCE, xuie (J. de Meung). Empr. du
a éliminé, quand l’art de l'escrime ita- lat. species, propr. « vue, aspect, appa-
lienne s’est répandu en Europe, l’a. fr. rence », d’où nombreuses acceptions, en
escremie, encore usuel au début du xvi®s,, partie reprises par le fr., notamment « es-
dér. de l’anc. verbe escremir « lutter à pèce, subdivision du genre » (sens d’origine
l’épée », du francique *skirmjan, cf. all. grecque, d’après eidos, comme genre, d’a-
schirmen « protéger » ; c’est du français que près le grec genos) ; comme terme de fi-
sont empr. l’it. schermire « faire de l’es- nances, attesté à basse ép., au vie s. (Gré-
crime », l’esp. esgrimir et l’a. pr. escremir, goire de Tours) ; en outre développements
escrimir « combattre, se défendre, etc. », partic. dans la langue de la scolastique et
d’où escrima, tiré d’une variante escrimar. de la théologie chrétienne. Cf. en outre
— Dér. : escrimer, 1537, déjà au sens fig., épice.
seul usité aujourd'hui; réfl. depuis le ESPÉRANTO, a été d’abord le pseudo-
XVII® S.; escrimeur, xve. nyme (= celui que espère) de l'inventeur
ESCROQUER, 1597 ; escroc, 1642. Em- de cette langue artificielle, le docteur polo-
pr. de l’it. scroccare (soit de crocco « croc » ; nais Zamenhof, qui la proposait dès 1887.
littéral. « décrocher », soit de la famille ESPÉRER. Lat. spéräre. Le maintien de
onomatopéique krokk-, dont relève le l’s et le traitement de la voyelle sont dus
franc. croquer), scrocco « écornifler, écorni- au maintien du contact avec le lat. écrit.
235 ESSAYISTE

A pris le sens d’ «attendre », attesté au ESQUINANCIE. Mot aux formes va-


XVIe s. et aujourd’hui usuel dans de nom- riées : quinancie, XII® ; esquinancy, XIII;
breux parlers, notamment dans l'Ouest et squinancie, XVI° (Paré), etc. Empr. du lat.
le Midi. It. sperare (avec e ouvert dans médical cynanche (du grec kynankhé, litté-
spero, etc., d’après la prononciation sco- ral. « collier de chien (kyôn) », ainsi dit à
laire du lat.), esp. et a. pr. esperar ; tous cause de la sensation d’étranglement que
trois ont aussi le sens d’ « attendre ». — cause cette affection).
Dér. et Comp. : espérance, vers 1080 ; dé-
sespérance, vers 1170, sorti de l'usage
ESQUINTER, 1800. Mot de l’argot des
au xvI® s., repris au début du xix® 5. ;
voleurs, empr. du prov. esquinid, propr.
espoir, 1155 d’après les formes régulières
« déchirer », d’où « échiner », a. pr. esquintar
de l’ind. prés. espoir, espoires, espoire,
« déchirer », lat. pop. *exquiniäre « mettre
en cinq »; cf., d’après une autre forme
lat. spero, spèras, spéral ; d’où désespoir,
vers 1170 ; espoir « peut-être », fréquent au
*exquinliare, à. pr. esquinsar « déchirer,.
arracher », esp. esquinzar « découper du
moyen âge jusqu’au xve s., est étymolo- chiffon (pour faire du papier) ».
giquement la première personne de l’ind.
prés. ; désespérer, 1155, on a dit souvent ESQUISSE, esquisser, 1567 (sous les for-
aussi au moyen âge desperer, d'après le mes esquiche, esquicher). Empr. de lit.
lat. desperare ; inespéré, xve. schizzo, schizzare ; schizzare signifie d’abord
« jaillir », d’où schizzo « tache que produit
ESPIEGLE, xvi® (alors ulespiègle). Alté- un liquide en jaillissant », ensuite (chez
ration du nom propre Ulespiegle, francisa- Vasari) « dessin provisoire ». Mot expressif
tion du néerl. Till Uilenspiegel, personnage qui, avec des sens assez rapprochés,
célèbre « par ses petites tromperies ingé- comme « déchirer, presser, écraser » vit
nieuses » d’un roman all, répandu au aussi en a. pr. et dans les parlers occitans.
xvi®s. surtout dans la région néerlandaise
et qui fut traduit en fr. en 1559. — Dér. : ESQUIVER, 1605. Empr. de l’it. schi-
espièglerie, 1694. vare, dér. de l’adj. schivo « dédaigneux,
dégoüûté », du germ. occidental *skioh, cf.
ESPINGOLE, 1671 (au sens de « ma- all. scheu « farouche », angl. shy « id. »,
chine à lancer des pierres » en 1373, au comme l’a. fr. eschif « de mauvaise volonté,
même sens a. prov. espingola, 1290). Alté- rétif, etc. », d’où échif, encore dans les dic-
ration de l'a. fr. espringale, 1258, qui tionnaires, l’a. pr. esquiu « farouche » et
désignait une sorte de baliste au moyen l’esp. esquivo « dédaigneux ». Esquiver a
âge, puis une pièce d'artillerie au xv®e s$.; éliminé l’anc. verbe eschiver, encore usité
ce mot dérivé lui-même du verbe espringuer au xvi® s. sous la forme eschever, cf. de
« danser », du francique *springan, cf. même a. pr. esquivar, du francique *skiu-
l’all. springen « sauter », probabl. par hjan, cf. all. scheuen « avoir peur ».
l'intermédiaire du verbe espringaller « dan-
ser » (bien qu’attesté postér.) qui paraît dû ESSAI. Lat. exagium « pesée » (dér. de
à un croisement d’espringuer et de baller. exigere, au sens de « peser », v. essaim,
examen), qui est attesté dès le 1ve s. au
ESPION, xrrie. Dér. de l’a. fr. espier sens de « essai ». It. saggio, avec chute du
« épier ». La consonne s, disparue de la préf., assaggiare, avec un autre préf., esp.
prononciation dès le xr11° s., a été rétablie, ensayo, id., toutes transformations qui se
probablement vers 1500, sous l'influence trouvent aussi en gallo-roman, cf. anc.
de l’it. spione (dér. de spia), même mot lorrain sai, anc. picard assai, a. pr. ensai.
que l’a. fr. espie, x11°, d’où épie, encore — Dér. : essayer, xrI°; essayeur, XIII°;
dans les dictionnaires, et que l’a. pr. espia, essayage, 1828.
tous fém., du germ. “*speha, v. épier. —
Dér. : espionner, 1482, espionnage, 1587. ESSAIM. Lat. examen, propr. « groupe
de jeunes abeilles emmenées hors de la
ESPLANADE, xve. Empr. de l’it. spia- ruche », mot de la famille du verbe exigere
nala, dér. du verbe spianare « aplanir », lat. « emmener hors de ». Dominant dans les
ezplänäre (de plänus « plat, uni »). parlers gallo-romans (a. pr. eissam), sauf
dans l’Est où il est concurrencé par jeton.
ESPRIT, vers 1120 (sous la forme espirilt; It. sciame, esp. enjambre. V. examen. —
d’où esperit, puis esprit, xiv®). Empr. du Dér. : essaimer, x111° (essamer).
lat. spirilus, propr. « souffle », d’où « souffle
vital, âme » ; l’acception chrétienne du mot ESSART. Lat. de basse ép. exsarlum,
vient de la Bible ; esprits vitaux, animaux, attesté dans la loi des Burgondes, dér. du
d’anciennes théories médiévales sur la vie ; verbe *exsarire, comp. lui-même du lat.
esprit, comme terme de chimie, du lat. de class. sarire « sarcler ». Seulement gallo-
l’alchimie, v. essence et spiritueux. roman : à. pr. eissart « terre défrichée ».
— Dér. : essarter, xri° ; essartage, 1783;
ESQUIF, 1497. Empr. de l’it. schifo, du essartement, 1611.
longobard *skif, v. équiper.
ESSAYISTE, 1845 (Th. Gautier). Empr.
ESQUILLE, 1534. Empr., avec modifi- de l’angl. essayist, dér. de essay ; celui-ci a
cation de la terminaison, du lat. schidia été empr. du fr. essai, au sens de « traité,
« copeau » (du grec de basse époque, skhi- ouvrage non approfondi », qui remonte aux
dion, cf. le verbe skhizein « fendre »). Essais de Montaigne (mais le sens du mot
ESQUIMAU « bonbon glacé », 1922; est notablement différent chez Montaigne,
«vêtement d’enfant », vers 1930. Tous deux cf. « Toute cette fricassée... n'est qu'un
noms de réclame, d’après le nom des Esqui- registre des essais de ma vie », IIT, 13). La
maur. : nuance de l’angl.essay a passé aussi danslefr.
ESSE 236

ESSE, 1304 (écrit alors aisse). Nom de cf. all. Siecken « bâton », angl. stick ; avait
la lettre s, pour désigner des objets en aussi les sens de « champ clos », «combat en
forme d’s. Au sens de « cheville fixée à champ clos », également empr. par le fr.
l’extrémité de l’essieu pour empêcher la au XVI®S.
roue de sortir », c'est une altération de
l’a. fr. heuce, euce, attesté jusqu’au début ESTAFETTE, 1596. Empr. de l'it.
du xvrie s. et encore usité dans divers staffetta (dim. de séaffa « étrier »), qui
patois, sous des formes variées, mot d’ori- a pris le sens de « courrier » dans la locution
gine incertaine. andare «a staffeita, cf. le fr. à franc étrier.
Staffa représente le longobard “*staffa,
ESSENCE, xri° ; essentiel, id., d’après propr. « trace du pied, pas » d’où « étrier
l’adv. -ellement. Empr. du lat. philoso- où on met le pied » de la famille de l’all.
phique et eccl. essentia (dér. du verbe esse Siapfe « trace du pied », v. les suiv.
« être »), essentialis (créé à basse ép.). Com-
me terme de chimie, essence vient du lat. ESTAFIER, vers 1500. Peu usité au-
de l’alchimie. jourd’hui, sauf en mauvaise part. Parfois
staphier, staffier. Empr. de l’it. staffiere
ESSEULER, v. seul. « écuyer, valet de pied, laquais », dér. de
ESSIEU. Forme d'origine dialectale, pro- staffa, v. le préc.
babl. picarde (cf. la forme fieux de fils), ESTAFILADE, xvi°. Empr. de l’it. siaf-
enregistrée dès le xvie s., de l’a. fr. aissil, filata « coup de fouet ou d’étrivière », encore
lat. pop. *axilis, dér. du lat. class. ais; en ce sens au xvi®s., d’où le sens propre au
de même a. pr. eisiu et dialectes de l’Italie îfr. Siaffilata est dér. de staffile « étrivière »,
septentrionale et rhéto-romans ; aujour- propr. « courroie qui tient l’étrier », dér.
d’hui dominant dans les parlers gallo- de siaffa, v. les préc.
romans. Le lat. class. axis, gêné par l’homo-
nyme *axis, forme altérée de assis « ais », ESTAMINET, xvrie. Empr., par l’inter-
a été supplanté par des dér.; un autre médiaire du picard, du wallon staminé, dér.
type *axaälis a donné l’it. sala ; pourtant de siamon « poteau qui se dresse à côté de
axis survit à la fois dans l’a. pr. ais (encore l’auge de l’étable », empr. d’une forme
aujourd’hui attesté dans de nombreux par- germ. correspondant à l’all. Siamm « tronc,
lers du Sud-Ouest) et dans la péninsule tige » ; l’estaminet, d’abord « salle réservée
ibérique, cf. esp. eje; on a remarqué que aux habitués ou aux sociétés », aurait été
les parlers qui ont conservé axis n’ont pas d’abord « une salle à un ou plusieurs sfa-
de représentants de assis. mons ».
ESSORER. Ne s'emploie que comme ESTAMPE, 1564, au sens d’«impression »,
terme techn. au sens d’ « exposer à l’air qui ne parvient pas à s’imposer ; au sens
pour faire sécher ». Lat. pop. *exauräre actuel dp. 1647, introduit probablement
«exposer à l’air » (de aura « air ») ; de même par Poussin. Empr. de l'it. siampa, de
a. pr. eissaurar « id. »; en dehors du gallo- Siampare, v. le suiv. Comme terme de di-
roman, existe dans des dialectes it., rhéto- verses techn., a été tiré du verbe estamper,
romans et catalans. Essorer a pris dans la v. le suiv.
langue de la fauconnerie le sens de «s’élever
ESTAMPER, xrrie. Prononciation de l’s
dans l’air », aujourd’hui inusité (lit. sorare, due à l'influence de l’it. stampare, d’où
qui n’a que ce sens, est empr. du fr.). — aussi la prononciation d’estampe, terme
Dér. : au premier sens : essorage, 1859, au
x11° s. au sens de « action de lâcher un techn., v. le préc.; les formes normales
oiseau » ; essoreuse, 1870. Au 2° sens (terme étamper et élampe se sont maintenues dans
de fauconnerie) : essor, xrie (Chrétien de
les parlers. Du francique *siampôn « pi-
ler, broyer », cf. all. siampfen « id. »;
Troyes), qui a signifié aussi « le fait d’être
exposé à l’air » (d’après le 1er sens). viennent de même du germ. l’it. sfampare
« imprimer » et l'esp. estampar « graver,
ESSORILLER, v. oreille. etc. »; a prix au xixes. dans la langue vul-
gaire le sens de « faire payer trop cher ».
ESSUYER. Sens fig. fin xvie. Lat. exsü- — Dér. : estampage, 1628.
câre « exprimer le suc » (ve s.), d’où sont
sortis les sens de « sécher (des plantes } » ESTAMPILLE, lre moitié xvrire (Saint-
et d’«essuyer ». Dominant dans les parlers Simon qui emploie aussi la forme esp., à
gallo-romans (a. pr. eissugar) ; concurrencé propos de la cour d’Espagne), ensuite 1762.
surtout par paner, anc. dér. de pan, dans Empr. de l’esp. estampilla, dér. de estampa
les parlers du Centre et de l'Est, depuis les « empreinte », v. le préc. — Dér. : estam-
Vosges jusqu’à la mer. — Dér. et Comp. : piller, id.; estampillage, 1783.
essui, XVIe ; ressuyer, xX11°, « faire sécher », ESTER. Terme de droit, usité seulement
d'où ressui, terme de vénerie, 1561. Divers à l’inf., x. Empr. du lat. juridique du
mots avec essuie comme premier élément moyen âge siare, issu, par spécialisation de
essuie-main, 1610. sens, du lat. siare « se tenir debout,
être, etc. ».
EST, x11° (le hest). Empr. de l’anc. angl.
east. ESTHÉTIQUE, 1753. Empr. du lat.
moderne aesthetica, créé en 1735 par le phi-
ESTACADE, 1566 (sous la forme ensia- losophe all. Baumgarten d’après le grec
calte). Parfois stecade. Empr. de l’it. steccata aisthétikés « qui a la faculté de sentir »
(on a dit aussi esiocade par altération d’a- (dér. du verbe aisthanesthai « sentir »). Le
près esiocade « coup d’estoc » ; steccata dé- mot a rencontré beaucoup de résistance
rive de sfecca « pieu », du longobard *stikka, en France, comme trop théorique, et
237 ESTURGEON

n’a été accepté définitivement que vers au xvIIe s., et encore aujourd'hui dans
le milieu du xix° s. — Dér. : esthète, beaucoup de parlers, par suite de la défa-
1882 (Goncourt), péjor. ; esthéticien, x1x° veur dont était frappé à cette ép. le mot
(Th. Gautier). poitrine. — Dér. : estomaquer (s’), 1480,
peut-être d’après le lat. stomachari « s’ir-
ESTIMER, vers 1300 ; estimateur, 1389 ; riter, etc. »
estimation, 1279. Empr. du lat. aestimare,
aestimaior, aestimatio. Estimer a éliminé ESTOMPE, 1666. Empr. du néerl. stomp
l’anc. verbe de formation pop. esmer, cf. de « chicot, bout (de chandelle »). Probabl. ce
même it. siimare, a. pr. esmar, forme qui a mot a été employé occasionnellement par
disparu avant le xvie s. et dont il ne reste des peintres néerlandais qui peignaient en
que des traces dans les patois. La dispari- France et est entré ainsi dans la langue fr.
tion d’esmer dans les parlers gallo-romans — Dér. : estomper, 1676 (d’abord et au
paraît due au fait que, par suite de la XVIII $s. aussi siomper).
chute de l’s, il était homonyme du verbe
aimer ; le déverbal esme, qui n’est pas gêné ESTRADE « route » ; ne se dit plus que
par un déverbal d'aimer, est encore assez dans les locutions : baitre l’estrade, batteur
répandu dans les patois. — Dér. et Comp. : d’estrade ; xv° (« Des gens. qui alloient à
estimable, xiv°e; inestimable, id., n’a pas l’estrade »). Empr. de l’it. strada « route »,
suivi le développement sémantique d'’esti- qui s’employait dans des locutions ana-
mable, ne s’oppose en effet qu’au sens logues, cf. andare alla strada « assassiner,
ancien d'’estimable « dont on peut faire voler des voyageurs sur la route » ; d’autres
l'estimation »; estimatif, 1314; estime, locutions se sont développées en fr. Sirada,
xve; mésestimer, 1556, mésestime, 1753 forme dialectale, représente le lat. de basse
(d’Argenson) ; surestimer, vers 1600. ép. sträia (via), propr. « route pavée » (du
verbe siernere « étendre »), d’où l’a. fr.
ESTIVAL, x11°; rare avant le xvi® s. estrée, l’a. pr. et l’esp. esirada, cf. aussi
Empr. du lat. de basse ép. aestivalis, dér. l’all. Sirasse et l’angl. street.
de l’adj. class. aestivus « de l'été ».
ESTRADE « plancher élevé pour y pla-
ESTIVANT, 1930. Empr. du part. prés. cer un lit, etc. », 1640. Empr. de l’esp. es-
du verbe prov. estivà « passer l'été », lat. trado, lat. sirätum, propr. « ce qui est éten-
aestivare. du », d’où « plate-forme » chez Vitruve ; de
même it. siralo « plancher, lit, etc. ».
ESTOC. Ne s'emploie, en dehors d’ac-
ceptions techn., que dans l’expression d’es- ESTRAGON, 1564. Altération de fargon
toc et de taille qui remonte au xv® s., cf. (1539), empr., par l'intermédiaire du lat.
« ferir de pointe, que les Franczeis ap- des botanistes {archon, tarcon, de l'arabe
pellent ferir d’estoc », 1285 (J. de Meung). tarkhoun (qui vient du grec dracontion
Dans ce sens c’est le subst. verbal de « serpentaire ») ; de même it. fargone, etc.
l’a. fr. estochier, estoquer « frapper de la
pointe » (du xr1° au xvi1e8.), qui représente ESTRAMAÇON, 1548. Empr. de lit.
le moyen néerl. stoken « piquer ». Probabl. siramazzone, dér. du verbe siramazzare
l'expression /ferir d’esioc a passé en prov. « renverser violemment » (formé du préf.
où, il est vrai, elle n’est pas attestée. augment. sira, lat. extra, et de mazza, v.
Mais elle se reflète dans l'expression colp masse).
d’estoc « coup d’épée » (vers 1300), d’où
pouvait sortir facilement l’a. pr. esioc ESTRAPADE, 1482, en outre sirapade.
« épée droite » (vers 1300). Celui-ci a passé Semble empr. de lit. sirappala, dér. du
en fr., d’où estoc (xv°-xviie s.), « pointe de verbe sirappare « tirer violemment » ; mais
l'épée » (depuis 1550), ainsi qu’en it. l’it. strappata n'est jamais attesté avec le
(siocco) et en esp. (estoque). — Un autre sens du mot fr., et l’origine de l’it. strappare
mot est estoc, vers 1170, qui signifiait au est inconnue.
moyen âge « bâton, pieu, souche (sens ESTRIQUER, v. étriquer.
encore usité dans la langue de la silvi-
culture : couper à blanc esioc (ou étoc) « au ESTROPIER, xv°. Empr. de lit. strop-
ras du pied »), d’où « origine d’une famille », piare (en outre storpiare), d’origine obs-
sens encore conservé au xvii® s. Il repré- cure, peut-être lat. pop. *exiürpiare, dér.
sente le francique “*siok, cf. all. Siork de iürpis « laid », propr. « enlaidir ».
« bâton, etc. ». Étau, 1611, se dit à cette ESTUAIRE, xve. Empr. du lat. aeslua-
époque, et jusqu’au xviri® s. et encore rium, dér. de aeslus « mouvement des
aujourd’hui dans beaucoup de parlers
flots », v. étiage.
estoc, éloc ; comme l’all. schraubstock (sing.)
on l’a nommé ainsi parce qu’il est ou était ESTUDIANTIN, vers 1935. Dér. de for-
généralement monté sur un poteau de fer, mation sav. d'étudiant, pour donner à
v. les planches de l'Encyclopédie, vol. IX, celui-ci un adj., peut-être sous l'influence
Serrurerie, planche 53. La confusion avec de l’adj. esp. esiudiantino « d'étudiant ».
étau(x) est postérieure et purement gra-
phique. ESTURGEON (écrit -jon ; en outre au
xir1e s. sturgun). L’s a été rétablie dans la
ESTOCADE, 1546 (écrit alors estoquade). prononciation d’après l'écriture ; on a dit
Empr. de l’it. sioccata, dér. de slocco. au xviie s. éturgeon et aussi estourgeon. Du
ESTOMAC, vers 1100. Souvent écrit esto- francique *sturjo, cf. all. Siür ; viennent
mach. Empr. du lat. stomachus (du grec probabl. du fr. l’a. pr. esturjon, lit. siorione
stomakhos). Signifie souvent « poitrine » et l'esp. esturiôn.
ET 238

ET. Lat. ef. Et cetera « et les autres âge des acceptions nombreuses : « position »,
choses » est empr. du lat. médiéval qui notamment dans des locutions militaires ;
l’employait comme formule usuelle dans attesté vers 1080 (Roland) en ce sens.
certains actes juridiques. Du francique “*stal « position, demeure »
ÉTABLE, Lat. pop. *siabula, probabl. (outre le sens d’ « écurie », cf. all. Séall
pluriel collectif du lat. class. slabulum, « écurie, étable »); de même it. stallo
propr. « lieu où l’on habite », d’où « lo- «stalle, séjour » qui a reçu ce mot du longo-
cal où se tiennent les animaux, écurie, bard. — Dér. : étaler, xrI°, au sens de
étable, etc. », seul sens conservé dans les «s'arrêter », sens moderne dès le x1IrIe s. à
langues rom. ; se disait également pour les en juger par le dér. élalage ; d’où (mer)
chevaux dans l’anc. langue, v. écurie. étale, 1687, issu de l’emploi du verbe dans
Usité dans presque tous les parlers gallo- la langue de la marine, cf. étaler le vent
romans, dans le Midi surtout sous une forme «résister au vent », étaler la marée «mouiller
masC. (a. pr. estable et -a). It. stabbio « pare malgré la marée », etc.; étalage, 1225,
à moutons, fumier », esp. establo. étalagiste, 1801; étalier, 1260, dévelop-
pement du sens parallèle à éfal; détaler,
ÉTABLIR. Lat. siabilire, dér. de stabilis, 1285, sens fig. déjà vers 1570, détalage,
v. Stable. A. pr. esiablir, esp. establecer. — 1752:
Dér. : établi, subst., 1390, du xirr° au
XVIe s. aussi establie; établissement, 1155 : ÉTALON « cheval reproducteur », xrtre.
préétablir, 1609 (d’où l'harmonie préétablie Au xvires. on disait aussi éflon, v. le suiv.
en 1710, chez Leibniz) ; rétablir, vers 1120 ; Empr. du francique *siallo, dér. de stall
rétablissement, vers 1260. « écurie » que le fr. n’a pas gardé, v. le
préc. ; dit ainsi parce que l’étalon repro-
ÉTAGE, vers 1155, au sens moderne : ducteur est tenu à l'écurie, cf. dans la loi
signifie d’abord « demeure, séjour, état », des Visigoths qui. quadrupedem, qui ad
v. stage, d’où le sens de « rang », qui se dit stallum.….. servalur, castraverit.
encore, Cf. personne de bas étage, et, d’autre
part, par spécialisation, le sens moderne. ÉTALON « type légal de mesures ou de
Lat. pop. *siaticum, au lieu du lat. class. poids », 1322. Le mot est attesté en Picardie
statio. Dér. du verbe stare « se tenir, être » dès le x111° s. par le bas-latin séalo, stalon-
formé à une époque difficile à fixer; il nus. Le moyen néerl. siael « id. » permet de
n’est toutefois pas nécessaire de postuler supposer un francique “*stalo « étalon de
déjà un lat. pop. *siaticum, le suff. -aticum mesure », dont les rapports avec “*sialo
ayant toujours été très fécond »; de « tige » (d’où a. fr. estal « pieu », estalon) ne
même a. pr. eslalge, mêmes sens qu’en a. sont pas éclaircis. On a postulé l'identité
fr. Rare en dehors du gallo-roman. — Dér. : des deux mots, ce qui ferait supposer qu’on
étager, xvie, formé déjà au moyen âge au employait des bâtons garnis de marques
sens d’ « établir »; étagère, 1800, est un pour jauger. Mais la forme siallone (ablatif
mot du Midi, où il est attesté dès 1502. d’un sfallo) attestée dans un document de
ÉTAI, 1197, rare avant le xvine s. l’an 1000 environ pour désigner une sorte
aussi estaie, 1304. Francique *s{aka, comp. de seau à puiser la saumure n’est pas
all. siake. Le moyen néerl. siaeye est favorable à cette explication. — A côté
empr. de l’anc. fr. esiaie. Comme terme de de *sialo « tige » le francique avait encore
marine, au sens de « cordage servant une forme “*sielo (comp. moyen néerl.
à maintenir les mâts », x11°, semble être stèle), d’où l’a. fr. estel « poteau », estelon.
empr. de l’anc. angl. sfaeg (angl. stay — Dér. : étalonner, 1390, d’où étalonnage,
«id. »). — Dér. : étayer, 1213, étayage, lies étalonnement, 1540; étalonneur,
1864, étaiement, 1459. 1636.

ÉTAIM, v. étamine. ÉTAMAGE, ÉTAMER, v. étain.


ÉTAIN. Lat. siagnum, propr. « plomb ÉTAMBOT, 1643. Altération d’esiam-
argentifère », puis « étain », forme plus cor- bord, 1573 (écrit estambor), empr. de l’anc.
recte que siannum ; d’après Pline, l’éta- scandinave *siafnbord « planche de l’étra-
mage est une invention gauloise, ce qui fait ve », v. étrave.
supposer que slagnum est peut-être d’ori- ÉTAMINE, sorte d’étoffe, xrie.
gine gauloise. Existe dans tous les parlers Altéra-
tion, par substitution de suff., d’une forme
gallo-romans (a. pr. esianh). Tain, vers non attestée, issue du lat. pop. *siäminea,
1200, est une altération d’éfain, d'après fém. pris substantiv. de l’adj. siamineus
teint. It. siagno, esp. estaño. — Dér. : éta- « fait de fil », forme appuyée par l’it. sta-
mer, 1260, par confusion de la terminaison migna, l'esp. estameña, l’a. pr. estamenha;
d’estain avec des mots en -aim et croise- cet adj. dérive de siämen « fil de la chaîne
ment avec entamer, fait attesté par des tendue sur le métier », puis «fil» en général,
formes dialectales de l'Est et des formes d’où le fr. étaim, conservé dans les diction-
anc., aujourd’hui mot de tout le domaine naires comme terme techn. « sorte de
gallo-roman ; d’où étameur, 1723 (entameur longue laine peignée ou cardée », cf. de
au xIV° s.), étamage, 1743, rétamer, 1870 même it. stame, esp. estambre, a. pr. estam.
(attesté dans les parlers dès 1845), réta-
mage, 1870, rétameur, id. ÉTAMINE, terme de botanique, 1685.
ÉTAL. Aujourd’hui restreint au sens de Empr. du lat. siamina, plur. de stamen, en
« table sur laquelle les bouchers débitent ce sens chez Pline, en parlant du lys, et
la viande » ; antér., et dès 1190, s’appliquait francisé d’après le préc.
à tout commerce ; avait en outre au moyen ÉTANCE, v. étancon.
239 ÉTEULE

ÉTANCHER. Sens-très variés en a. fr. : ÉTÉ. Lat. aesiälem, acc. de aestas. Le


« arrêter, épuiser, dessécher, fatiguer »; genre masc. du fr., qui est attesté ailleurs,
élancher la soif date déjà du xine s. It. est dû à celui des autres noms de saisons.
siancare « lasser », esp. eslancar « arrêter Été domine dans la partie septentrionale
le cours de l’eau, etc. », a. pr. estancar du domaine gallo-roman, surtout au fém. ;
« arrêter, fermer, etc. », et les adj. it. stanco les patois méridionaux, au sud de la ligne
« las », a. fr. estanc « desséché, las », a. pr. allant de l'embouchure de la Gironde aux
estanc « épuisé, faible » ; le roumain sing Hautes-Alpes, ont esfiou, à. pr. estiu, lat.
« gauche », cf. it. mano slanca « main gau- pop. “*aeslivum (tempus), issu de l’adj.
che », prouve que cette série de mots est class. aestivus « de l'été », cf. de même esp.
d’origine lat. Représente sans doute un lat. port. estio. It. siale, fém., a. pr. estat, id.,
*stanticare, dér. de sians, part. prés. de et parlers rhéto-romans.
stare. On a émis des doutes à cause de la
syncope de l’i en it. et en occitan. Mais ÉTEINDRE. Lat. pop. “*extingere, lat.
cette syncope, sans être aussi générale class. exslinguere. Sauf l’a. pr. estenher,
qu’en fr., est assez fréquente dans ces deux l’ombrien slegnere, et le roumain séinge,
langues aussi, comp. it. {osco « poison » ce verbe a été presque partout supplanté
(< doxicum); a. pr. fotjar « bêcher » par d’autres mots ; en gallo-roman même,
(< fodicare). — Dér. étanche, 1156, éteindre ne survit que dans les parlers sep-
comme fém., a éliminé le masc. estanch, tentrionaux, et là même il est concurrencé
attesté encore au xvIIIe s., d’où estanche par déteindre et tuer. Cette disparition, qui
au masc., déjà en 1394; étanchement, remonte à l’ép. lat., est due au fait que
vers 1290; étang, 1140 (écrit estanc), exlingere, non soutenu par un simple,
littéral. « étendue d’eau, entourée de bords pouvait être compris comme un comp. de
qui en arrêtent l'écoulement »; on consi- lingere « teindre » ; le dér. *distingere, qui
dère, à tort, que l’étymologie d’éfang est le n’a survécu en gallo-roman (cf. l’a. fr. des-
lat. stagnum, représenté par l’it. stagno, leindre et l’a. pr. destenher) que dans des
l’esp. estaño, l’a. pr. estanh; pour une conditions partic., se heurtait de même à
dérivation analogue à celle du fr., cf. l’a. *distingere « déteindre ». — Dér. : étei-
pr. estanc et l’esp. estanque. gnoir, 1552.
ÉTANÇON, vers 1196. Semble être dér. ÉTENDARD, vers 1080 (Roland). Comp.
d’un simple estance, attesté seulement en de stand, impér. du verbe germ. standan
13140, mais qui a dû exister auparavant, « être debout » (anc. sax. anglo-sax. goth.,
dér. de l’anc. verbe ester, lat. siare « se etc.\ avec l’adv. *hardo « ferme », ou, plus
tenir debout », v. être ; estance, XVe s., d’où probablement, d’un adj. francique *stand-
étance, encore dans les dictionnaires, hard « inébranlable », comp. du subst. stand
comme terme techn. de la marine, « sorte « action de se tenir debout » et de l’adij.
d’étai », semble être, en raison de sa date hard « dur, ferme », correspondant à l’all.
récente, non pas la continuation du simple hart. Au moyen âge l’étendard d’une ar-
d’où est issu élançon, mais un mot tiré de mée était souvent planté en un endroit
celui-ci ; pour le développement du sens, fixe où il pouvait être vu de toute l’ar-
cf. l’all. Ständer « support », et étai. — mée pendant la bataille. Il était le signe
Dér. : étançonner, vers 1180. de la fermeté des combattants ; souvent
même il était placé sur un char, au haut
ÉTANG, v. étancher. d’un long mât. Quand il s’abattait, l’armée
était en danger de se disperser.
ÉTAPE, 1766 (Rousseau), au sens mo-
derne, issu de celui de « magasin où l’on ÉTENDRE. Lat. exiendere. — Dér. :
met les vivres destinées aux troupes qui étendage, 1760 ; étendoir, 1688 ; étendue,
passent », xvi® (une 1re fois en 1285) ; au xve, a supplanté esiente, x11°, encore attesté
moyen âge, « endroit où les marchands au xvie s., formé sur le fém. d’un part. dis-
devaient s'installer pour vendre leurs paru avant les premiers textes *exlendilta.
marchandises » (1280), d’où « comptoir,
entrepôt de commerce » vers 1490 (Com- ÉTERNEL, x11° ; éternité, id. ; éterniser,
mynes). Altération de eslaple, 1280, encore 1544. Les deux premiers sont empr. du lat.
chez Froissart, empr. du moyen néerl. aelernalis, aelernitas, le troisième est un
slapel « entrepôt », doù aussi l’all. Slapel- dér. sav. de l’adj. lat. aelernus.
(plaiz) et l’angl. staple.
ÉTAT, 1196. Empr. du lat. status, propr. ÉTERNUER. Lat. de l’époque impé-
« le fait d’être debout », d’où « position, riale siernüläre, fréquentatif du lat. class.
situation », employé dp. 1490 (Commynes) sternuere. — Dér. : éternûment, vers 1238.
comme terme politique (d’après l’it. salo, ÉTÉSIENS, 1542 ; d’abord elfesies, 1539.
mais déjà slalus romanus à basse ép.) et Empr. du lat. elesiae, masc. plur. (du grec
avec des acceptions juridiques, cf. slalus elésiai (sous-entendu anemoi « vents »),
personarum « état des personnes ». — Dér. propr. « périodiques, qui reviennent chaque
et Comp. : étatisme, vers 1880 ; état-maijor, amnée (elos) »).
1676 ; étatiser, vers 1942; -ation, id.
ÉTEULE, vers 1200. Forme dialectale
ÉTAU, v. estoc. (probabl. du picard où la forme est encore
ÉTAYER, v. étai. vivace aujourd'hui), de l’a. fr. estuble,
vers 1120, lat. de basse ép. slupula, lat.
ET CETERA, v. et. class. stipula ; ce mot est encore aujour-
240
ÉTEULE

d'hui dominant dans les patois gallo- sens moderne dès le xv® s. Empr. du lat
romans (a. pr. estobla) ; cf. aussi it. stoppia, médical hecticus (du grec hektikos, propr.
all. Stoppel. « habituel », dér. du verbe ekhein « avoir »),
repris sous la forme hectique, vers 1500.
ÉTHER, x1r° (écrit ethere) ; éthéré, xv°. hectisie, 1570, d’après phiisie, refait en
Empr. du lat. aether, aethereus, forme moins étisie, 1784 (en outre ethisie, 1755), d’après
class. ue aetherius (du grec aithér, aithe- étique.
rios). Éther, comme terme de chimie, a été
pris par le chimiste allemand Frobenius ÉTIQUETTE, 1387, au sens de « marque
en 1730 ; comme terme de physique, date fixée à un pieu »; a pris ensuite le sens
de 1703. — Comp. : la chimie moderne crée d’ « écriteau mis sur un sac de procès »,
des mots nouveaux avec éther- ou éth- encore relevé en 1802, et d’autres sens juri-
comme premier élément, cf. éthyl, d’où diques analogues, p. ex. « mémoire conte-
éthylène, où (h)yl- représente le grec hylé nant la liste des témoins » (on disait aussi
« matière » et -êne est extrait de -gène. étiquet en ce sens), d’où le sens moderne de
« petit écriteau qu’on place sur les objets
ÉTHIQUE, xrr1°, comme subst. ; 1553, pour les reconnaître »; au sens de « céré-
comme adj. Empr. du lat. efhicus, ethica monial de cour », le mot vient de la cour de
(du grec éthikos, ethiké, de éthos « mœurs »), Bourgogne : Philippe le Bon, pour rempla-
‘cer le titre de roi, qu’il avait ambitionné
ETHNIQUE. Récent au sens moderne ; en vain, donna à sa cour une solennité
au xviire s., « qui sert à désigner une popu- qu'on ne connaissait nulle part ailleurs ; on
lation », en parlant de noms propres, tels notait même sur un formulaire tout ce qui
que Français, dans la langue des grammai- devait avoir lieu dans une journée; la
riens. En ces sens, empr. du grec ethnikos chose et le mot passèrent ensuite, grâce au
(de ethnos « peuple ») ; au xvi°s. (Marot) mariage de Marie de Bourgogne avec Maxi-
et au xvrrre s., a signifié aussi « païen, milien d'Autriche, des Flandres à Vienne,
gentil » : en ce sens, empr. du lat. eccl. plus tard de Vienne à Madrid ; la première
ethnicus (du grec eccl. ethnikos, par exten- attestation du mot, de 1607, se rapporte à
sion du sens propre, v. gentil). la cour de Vienne, la deuxième, de 1700
environ, à celle de Madrid ; il ne devient
ETHN(O)-. Premier élément de mots d'une application générale que vers le
sav. comp., tels que ethnographie, 1823, milieu du xvirie s. Dér. de l’anc. verbe
tiré du grec ethnos « peuple ». estiquier, estiquer « attacher », empr. du
ÉTHYL, ÉTHYLÈNE, v. éther. néerl. stikken « id. » (cf. all. sticken « bro-
der »). V. ticket. — Dér. : étiqueter, 1564.
ÉTIAGE, 1783. Mot formé sur élier,
1687, terme techn. et dialectal, originaire ÉTOFFER, vers 1190. À d’abord le sens
des parlers de la côte atlantique où le mot de « rembourrer » et aussi « munir de ».
est usité de la Loire à la Gironde (en outre Représente le francique *siopfôn « rem-
au Sud, vers les Pyrénées), au sens de bourrer », forme qui était issue vers le
« chenal allant de la mer à un marais », vire s., chez les Francs de Neustrie, d'un
d’où « chenal de moulin »; a été en outre ancien *sioppôn (comp. le néerl. sioppen,
relevé au moyen âge dans des textes de l’all. mod. siopfen), ces verbes étant d’ori-
l'Ouest dès 1313 ; lat. aesluärium, au sens gine germ. et sans rapport avec le lat.
de « bassin au bord de la mer, mare ou sluppa « étoupe ». — Dér. étoffe, 1241;
flaque d’eau de mer », v. estuaire ; de même lit. stoffa, l'a. pr. et l'esp. estofa sont
anc. gascon esler, esp. estero « lagune ». beaucoup plus récents et sont empr. du
mot fr., de même que l'angl. siuff (aussi
ÉTIER, v. le préc. verbe) et l’all. sioff.
ÉTINCELLE, 1226. Altération d’esten- ÉTOILE. Lat. pop. *stéla, au lieu du lat.
celle (dès 1100), lat. pop. *stincilla, au lieu class. stella, suivant un traitement de [}
du lat. class. scintilla. Étincelle est la forme après voyelle longue qui n’a eu lieu qu’en
normale en Picardie et a peut-être passé gallo-roman (a. pr. estela) et en rhéto-
de là dans le parler de Paris. De même roman ; ailleurs, d’après siella : it. siella,
esp. centella, sarde logoudorien istinkidda. esp. estrella. — Dér. : étoilé, 1369, d’abord
Les parlers gallo-romans ont des mots estelé, xrre; étoiler, 1611.
variés, cf. notamment dans les parlers
méridionaux et franco-provençaux des ÉTOLE, xre. Empr. du lat. ecel. stola,
formes du type de l’a. pr. beluga, v. bluette en lat. class. « longue robe, surtout des
. et flammèche. — Dér. : étinceler, x1r1°, dames du grand monde » (du grec stolé).
auparavant estancelent, 3° pers. plur. ind.
prés., x11° (Chrétien de Troyes); étincel- ÉTONNER. Au moyen âge signifie
lement, x11° (écrit esten….). « ébranler physiquement, étourdir », encore
attesté au xvi*s., et dans quelques emplois
ÉTIOLER, 1690. Dér. d’une variante techn. modernes, d’où « causer un ébranle-
dialectale de éleule (cf. Yonne éfieuble, ment moral », sens usuel jusqu’au xvri°s. ;
champenois équiole); la forme grêle de le sens moins fort de la langue moderne
ces plantes les fait ressembler à des éteules. date du xvrie s. Lat. pop. *exionäre, au
— Dér. : étiolement, 1756. lieu du lat. class. attonäre « frapper de la
ÉTIQUE, xue (écrit etike), terme médi- foudre, de stupeur ». Rare en dehors du
cal, qui se disait d’une fièvre continue fr. — Dér. : étonnement, xir1°, développe-
amenant une consomption lente, d’où le ment du sens parallèle au verbe.
241 ÉTRILLLE
ÉTOUFFÉE, termé de cuisine, 1864 (une être adapté en *estaune, d’où *estavre, puis
première fois en 1393). Cette première at- estrave, étrave ; d’autres formes éfable, étau-
testation étant si ancienne, éfouffée est ve sont issues d’ *esiaune par *estaule ; v.
simplement un dér. du verbe étouffer. étambot.
Esiouffade ou estoufade, 1669, est empr.
de l’it. siufata, p. ex. dans carne stufata ÊTRE. Lat. pop. *essere, lat. class. esse.
« viande cuite en vase clos », dér. de stufa L'étude des formes de ce verbe relève de
« étuve ». la grammaire. On notera seulement ici que
l’a. fr. ester (v. ester), lat. siare,. qui survit
ÉTOUFFER, 1230. Dû à une altération partout (cf. it. siare, a. pr. et esp. estar), a
de *sluppäre « garnir d’étoupe » (d’où fourni au verbe étre le part. passé été, le
étouper) par croisement avec a. fr. estofer part. présent étant et les formes de l’imp.
(v. étoffer), dont le sens « rembourrer » de l’ind. j’étais, etc. (qui a éliminé de bonne
était très voisin de celui de esioper « bourrer heure en fr. propr. dit les représentants du
de, remplir ». Le nouveau verbe a pris la lat. class. eram, etc., lesquels survivent au
voyelle de l’un et la consonne de l’autre; contraire, dans quelques parlers vosgiens et
son sens, qui était d’abord « remplir », les parlers méridionaux, au Sud de la ligne
a évolué vers celui du fr. mod. au xve s. allant de l’embouchure de la Gironde à la
— Dér. étouffement, xve; étouffoir, Suisse Romande) et que l'esp. et le port.
1671 ; touffeur, vers 1620, forme fam. pour utilisent esiar comme verbe expressif, ser
*étouffeur, surtout répandu dans le fr. pop. ne servant que de copule et d’auxiliaire.
de l'Est, où on dit aussi il fait touffe. — Dér. : être, subsi., x11e. — Comp. :
ÉTOUPE. Lat. siuppa. It. stoppa, esp. bien-être, 1580 (Montaigne); non-être, x1ve.
a. pr. esiopa. — Dér. : étoupille, 1632; ÉTRÉCIR, v. rétrécir.
étoupillon, 1373.
ÉTOUPER. Lat. pop. *siuppare. It. stop- ÉTREINDRE. Lat. siringere. — Dér.
étreinte, vers 1210.
pare, a. pr. esiopar.
ÉTOURDIR, x1°, d’après le nom propre
ÉTRENNE. Orthographe nouvelle qui a
éliminé, au xvri® s., la forme esireine (sou-
Ricard Estordit. Lat. pop. *exiurdire, dér. vent transcrit estraine au moyen âge). Lat.
de {urdus « grive », propr. « avoir le cer- siréna. It. sirenna, esp. estrena. — Dér. :
veau étourdi, comme une grive ivre de étrenner, XIIe.
raisin », Cf. « Nostre ivrogne, plus saoul
qu’une grive partant d’une vigne », xve ÊTRES. Très usuel au moyen âge au
(Cent Nouvelles nouvelles), d’où «étourdir », sens d” « emplacement », d’où « lieu, cham-
trans. ; cf. aussi it. fordo « grive » et « sot », bre, jardin, etc. »; souvent masc. sing,
esp. {ener cabeza de tordo « avoir une tête encore au xvi® s. Lat. exiera « ce qui est à
de grive » et grec kôphoteros kikhlés « plus l’extérieur », plur. neutre de l’adj. exterus
sot qu’une grive ». It. siordire « abasourdir, « extérieur », traité en lat. pop. comme un
étourdir », esp. atordir (d’abord estordir). fém. sing., devenu rapidement avant les
— Dér. (de l’adj. éfourdi) : étourderie, premiers textes, masc. Seulement fr.
1674 ; étourdissement, 1213.
ÉTRÉSILLON, xve, au sens de « bâillon »
ÉTOURNEAU. Lat. pop. “*siurnellus, (dès 1333 estesillon). Terme de charpenterie
dér. du lat. class. siurnus (d’où l’it. storno). (xvire, d’après le verbe dér.) et de marine
Le sens fig. du mot paraît avoir été favo- (1762), altération d'’estesillon, 1333, autre
risé par un rapprochement avec élourdi. forme, d’après le verbe esieser « tendre »,
A. pr. estornel, it. stornello. de tesillon, xIv®, qui a le sens analogue de
« bâton servant à maintenir la gueule
ÉTRAIN, v. paille. ouverte », d’où tésillon, relevé dans les
ÉTRANGE. Jusqu'au xvii® s., signifie dictionnaires aux mêmes sens que éfré-
« étranger », sens conservé dans les parlers sillon. Tesillon dérive de l’anc. verbe
pop. (berrichon, lorrain, etc.) ; le sens mo- teseillier « ouvrir la bouche », dér. de
derne apparaît au xrn1° s. Lat. exiräneus, l’anc. verbe feser (d’où aussi esteser), lat.
par un développement phonétique compa- pop. *le(n)säre « tendre », dér. de tensus,
rable à celui de ange, linge. — Dér. : part. passé de fendere, v. toise. — Dér. :
étranger, xiv® (G. de Machaut) (d’où it. étrésillonner, 1676.
straniero, esp. extranjero) ; étrangeté, x1ves. ÉTRIER. D'abord esireu, estrieu, encore
(contesté au xvii® s., repris à la fin du au xvries., et, en outre, esirief, d’où estrier.
xvirie s. Comme un mot de Montaigne). D'origine germ., les Romains ayant appris
ÉTRANGLER. Lat. stranguläre. It. stran- des Germains l'usage des étriers. D’après
golare. — Dér. : étranglement, 1240 ; étran- l’a. pr. estreup, on restitue une forme fran-
gleur, XIIIe. cique *sireup, au sens de « courroie », ce
qui était la première forme de l’étrier chez
ÉTRANGUILLON, vers 1100 (au sens de les Germains, et à laquelle se rattache
« esquinancie des chevaux »). Empr. du aussi, d’après une variante germ. *siriup,
bas lat. siranguillo « morbus equi » (lit. l'esp. esiribo. — Dér. : étrivière, xr1° (Chré-
siranguglione est attesté trois siècles plus tien), d’après l’anc. forme estrieu.
tard que le mot fr.). ÉTRILLE, ÉTRILLER. Lat. pop. *siri-
ÉTRAPER, v. extirper. gila (réfection du lat. class. strigilis d’après
le verbe suiv.), *strigiläre. La voyelle i dans
ÉTRAVE, 1573. Malgré la date récente étrille, etc., vient des formes inaccentuées
représente l’anè. scandinave stafn, qui a dû du verbe.
DICT. ÉTYM. 16
ÉTRIQUER 242

ÉTRIQUER, 1760 (Voltaire). Propr. ter- du comp. elymologia est l’adj. elymos
me de marine : « amincir une pièce de bois « vrai », propr. « science qui fait connaître
pour qu’elle se superpose exactement sur le vrai sens des mots »). — Dér. : étymo-
une autre ». Mot normand et picard s’éfri- logiste, 1578.
quer « se raidir, s’arc-bouter sur ses jarrets
(du cheval, etc.) », empr. du moyen-néerl. EU-. Premier élément de mots sav. tels
striken (néerl. sirijken, all. sireichen « frot- que euphorie, 1810, etc., tiré du grec eu
ter »), qui avait entre autres le sens de « bien ».
« s'étendre ». Le sens actuel d’éfriquer EUCALYPTUS, 1796. Empr. du lat. des
s'explique par le fait qu’un animal ou un botanistes eucalypius, 1788, comp. des
objet devient plus mince dans la mesure où mots grecs eu « bien » et kalypios « cou-
il s'étend. Le verbe néerl. a été empr. vert » : dit ainsi parce que le limbe du calice
à plusieurs reprises par diverses techn., reste clos jusqu’après la floraison.
ainsi estriquer, 1759, « boucher dans
les formes à sucre les fentes causées par la EUCHARISTIE, vers 1165 ; eucharisti-
sécheresse ». Dans une acception plus que, 1577. Empr. du lat. eccl. eucharistia,
générale le gallo-roman s'était déjà appro- eucharisticus (du grec eccl. eukharistia,
prié le verbe correspondant anc. francique ikos ; eukharistia, qui signifie propr. « ac-
*sirtkan, d’où p. ex. le fr. éfricher « dégrais- tion de grâces », dér. de l’adj. eukharistos
ser les cordes à boyau des métiers ». V. « reconnaissant »).
trique. EUGÉNISME, 1930. Dér. du grec eugenës
ÉTRIVIÈRE, v. étrier. « de bonne race ».
ÉTROIT. Lat. siricius. — Dér. : étroi- EUH, 1668 (Racine). Onomatopée évi-
tesse, XIIIe. demment plus anc.
ÉTRON, xurre. Francique *siruni, cf. bas- EULOGIE, v. éloge.
all. strunt, néerl. siront ; de même a. pr. EUNUQUE, xire (sous la forme euni-
estron, l'it. stronzo pouvant, d’après le lat. que), rare avant le xvire s. Empr. du
des gloses sirundius, représenter une forme lat. eunuchus (du grec eunoukhos, litté-
longobarde. ral. « qui garde (de ekhein « avoir, tenir »)
ÉTUDE, xr1e. D'abord estudie, empr. du le lit feuné) », c’est-à-dire « qui garde la
lat. sludium, devenu, par métathèse, chambre à coucher des femmes) ».
estuide, puis estude ; parfois masc. jusqu’au EUPHÉMISME, 1756. Empr. du grec
XVI: euphémismos « emploi d’un mot favorable
ÉTUDIER, xu°. Dér. de l’anc. fr. au lieu d’un mot de mauvais augure ».
estudie, v. étude. — Dér. : étudiant, 1370 EUPHONIE, xvie. Empr du grec eu-
(Oresme). phonia (de eu « bien » et phone « son »).
ÉTUI, xr1e (au sens de « prison »). Tiré — Dér. : euphonique, 1756.
de l’a. fr. esluier, estoier «enfermer, garder, EUPHORBE, x111° (écrit euforbe). Empr.
ménager, etc. », encore usité au XvI® s.,
du lat. euphorbia (herba), dér. de Euphor-
d’origine obscure ; ce verbe, auquel corres-
bus, Euphorbe, médecin de Juba, roi de
pond l’a. pr. eslojar, estujar, de mêmes sens,
représente peut-être le lat. pop. *s/udiäre Numidie, au 1°" s. avant J.-C.; celui-ci
« donner son soin à quelque chose », attesté s’occupait de sciences naturelles et, d’après
par de nombreuses formes de dialectes ita- Pline, donna à cette plante, qu’il appliqua
liens, au sens de « garder, nettoyer, etc. », à l'usage médical, le nom de son médecin.
dér. de siudium, v. étude. EUPHUISME, 1820. Empr. de l’angl.
ÉTUVE, xie. Lat. pop. de la Gaule euphuism, dér. de Euphues (fait sur le grec
*exiüpa « salle de bain, surtout pour bain euphyés « qui a naturellement d’heureuses
de vapeur », dér. d’un verbe “*extupare dispositions »), titre d’un ouvrage de J. Ly-
« remplir de vapeurs chaudes », qui est ly (1579), écrit dans le style précieux, alors
formé du préf. ex- et du verbe grec typhein à la mode en Angleterre.
« fumer ». Celui-ci a passé aux parlers EUSTACHE, 1782. Tiré d'Eustache Du-
de la Gaule méridionale depuis le grec de bois, nom d’un coutelier de Saint-Étienne.
Marseille ; le prov. connaît encore un verbe
tubà « fumer ». L’all. Siube est probable- EUX. D'abord seulement pron. complé-
ment empr. de cet “*exiupa. L'it. stufa ment prépositionnel ; depuis le xvre s. sert
« poêle » représente, avec ses congénères, de pronom sujet, v. il. Lat. illos. En gallo-
le même mot grec passé au lat. pop. d'Italie roman, eux est aujourd'hui la forme domi-
sous une forme plus récente, dans laquelle nante des parlers septentrionaux, els (a. pr.
-ph- était déjà devenu -f-. — Dér. : étuver, els, forme correspondante à eux), avec des
xI11° (qui ne vient pas directement de modifications analogiques, celle des parlers
*eælupare) ; étuvée, xv® (une première fois méridionaux, sauf leur dans la région fran-
vers 1180) ; étuveur, vers 1260. co-provençale jusqu'aux Vosges. Esp. ellos.
ÉTYMOLOGIE, vers 1160 (en parlant ÉVACUER, xire; évacuation, 1314.
de l’œuvre intitulée Étymologies d’Isidore Tous deux ont été d’abord des termes mé-
de Séville); le sens actuel est attesté dicaux, et le sont restés, de préférence,
depuis 1550 environ ; étymologique, 1551. jusqu’au xvi® s. Empr. du lat. evacuare
Empr. du lat. elymologia, elymologicus (propr. « vider », d’abord au sens médical,
(mots d’origine grecque ; le premier terme encore usité, puis au sens général de « vi-
243 ÉVINCER
der »), evacualio ; le-verbe avait pris en ler »; cette confusion a donné naissance à
outre en lat. eccl. le sens d’ « affaiblir », un inf. *experire, d’où esperir en a. fr. et
qui a été empr. au xvie et au xvrre 8. en a. pr., dont il reste des traces dans les
. ÉVADER (s’), xive. D'abord évader, parlers méridionaux. Aujourd’hui domi-
intrans., jusqu'au xvI1e 8. ; rarement trans. nant (avec réveiller) dans les parlers gallo-
Empr. du lat. evadere, propr. « sortir de », romans (a. pr. esvelhar), sauf quelques
d'où « s’échapper de », intrans. et trans., traces des anciens types dans le Midi et,
vV. évasion. en wallon, un verbe dispierter, dér. d’un
anc. adj. despert, usuel en a. fr. It. sue-
ÉVALUER, v. valoir. gliare ; en outre en a. pr. despertar, formé
comme l'esp. despertar, et reissidar, lat.
ÉVANESCENT, 1810. D'abord terme de pop. “*excitäre (d’après exclus « éveillé »).
botanique ; puis employé dans la langue — Dér. et Comp. : éveil, xrr° (Chrétien) ;
littéraire. Empr. du lat. evanescens, part. réveiller, xr11°, tend à se substituer à éveil-
prés. de evanescere « s’évanouir ». ler dans le fr. pop., réveil, id., réveille-
ÉVANGILE, xr1°; évangéliaire, 1721; pins xve, réveillon, 1526, réveillonner,
évangélique, x1ve ; évangéliser, xr11° ; évan-
75.
géliste, x11°. Évangile a été longtemps fém., ÉVÉNEMENT, 1507. Tiré du radical du
il l’est encore au xvrie s. Empr. du lat. verbe lat. evenire, sur le modèle d’avène-
eccl. evangelium, evangeliarium (médiéval), ment (v. ce mot pour son sens au xvi® 5.)
evangelicus, evangelista, evangelizare (tous, qui correspondait au lat. adventus « arri-
sauf le 2€, pris au grec : euangelion qui, en vée ». On a essayé aussi event à la fin du
grec class., signifie « bonne nouvelle » et moyen âge et au xvi®s.
a servi, dans le Nouveau Testament, à
désigner la prédication de Jésus, voir Ma- ÉVENT « épreuve sportive », 1901. Empr.
thieu, IV, 23, etc., euangelikos, euangelis- de l’angl. event, empr. lui-même du fr.
tés, euangelizein). event, V. le préc. On a d’abord employé le
mot comme un terme angl., cf. the great
ÉVANOUIR. xrie. Altération de l’a. fr. event, 1866, en parlant du derby d’'Epsom.
esvanir, qui vit encore dans le normand
évanir, refait en esvanoir d’après le passage. ÉVENTER. Lat. *exveniäre, dér. de ven-
de Luc, XXI, 31, Et ipse evanuit ex oculis tus « vent ». It. sventare, a. pr. esventar,
eorum « Mais il disparut de devant eux », intrans. — Dér. : évent « ouverture »,
qui concerne Jésus quand il apparut après 1564 ; éventail, xvi® (Amyot), fait sur le
sa mort à deux de ses disciples, à Em- modèle de l’anc. ventail, v. vantail; d’où
maüs ; de même a. pr. esvanoir, en- : -ailliste, 1690 ; éventaire, 1690 ; aupara-
exemple remarquable de l'influence du lat. vant évenioire, XIvV°.
de l’Église sur la langue parlée. On a expli- ÉVENTUEL, 1718. Dér. sav. du lat.
qué d’une même façon un ancien parf. evenius « événement ». — Dér. : éventualité,
engenui, -oi « engendra », par genuit, répété 1791.
une quarantaine de fois dans la généalogie
de Jésus, au chap. Ier de Mathieu. Esvanir ÉVÊQUE, x° (Saint Léger). Lat. eccl.
représente le lat. pop. *exvänire, lat. class. episcopus (du grec eccl. episkopos, en grec
êvanescere ; de même it. svanire, a. pr. class. « surveillant, gardien »), avec un
esvanezir (avec une autre terminaison). développement partic., dû à la fois à la
S’évani survit aussi dans la région lyon- forme et à la valeur du mot; cf. aussi
naise, s’avani en prov. (qui paraît venir du archevêque, x11°, lat. eccl. archiepiscopus.
Nord, l’ancien provençal n'ayant pas de It. vescovo, esp. obispo, a. pr. bisbe, qui
forme correspondante) ; ailleurs formes d’a- continuent la forme pleine episcopu, tandis
près le fr. — Dér. : évanouissement, x11° que le fr. représente une forme raccourcie
(Chrétien). *episcu. — Dér. : évêché, xr1° fevesqué),
d’après le lat. eccl. episcopatus ; cf. aussi
ÉVAPORER, 1314. Sens fig. depuis le archevêché, 1138, lat. eccl. archi-.
XVIIe s. ; évaporation, xive. Empr. du lat.
evaporare, evaporatio. ÉVERTUER (s’), v. vertu.
ÉVASER, vers 1380, le subst. évasement ÉVICTION, 1283. Empr. du lat. juridique
est déjà attesté au xr1e 5. Dér. ancien du lat. evictio (du verbe evincere, v. évincer).
vas « vase » et qui a conservé le -a- du ÉVIDENT, xu1e (J. de Meung); évi-
radical dans les formes accentuées sur dence, xir1°. Empr. du lat. evidens, eviden-
la terminaison. Le lat. vas n’est attesté tia (de videre « voir »).
qu’une fois en anc. fr., sous la forme ves.
ÉVIER. Lat. pop. *aquärium, issu de
ÉVASION, xr1e. Empr. du lat. de basse l’adj. aquärius « pour l’eau », fréquemment
ép. evasio (du verbe evadere, v. évader). — employé en lat. class. avec des noms de
Dér. : évasif, 1787 (d’après l’adv.-ivement). vases et dans des gloses en parlant d’ « é-
gout ». Développement phonétique en con-
ÉVEILLER. Lat. pop. “*exvigilare, lat. tact avec aqua. Aujourd’hui dominant dans
class. évigiläre, propr. « veiller sur », d’où les parlers gallo-romans, souvent d’après
« s’éveiller », puis « éveiller », sens dont le la forme fém. dans le Midi (a. pr. aiguier
succès est dû à la gêne causée par la ren- et aiguiera). It. acquaio.
contre de expertus, part. du verbe experiri
« faire l’expérience de » et d’un part. créé ÉVINCER, 1412. Sens fig., 1835. Empr.
en lat. pop. *expertus, au lieu du lat. class. du lat. juridique evincere, en lat. class.
experrectus, du verbe expergisci « s’éveil- « vaincre » et « convaincre », v. éviction.
ÉVITABLE 244

ÉVITABLE, xrie. Empr. du lat. evita- Empr. du lat. exaliare « élever » au sens
bilis. fig. du lat. eccl. (de altus « haut », v. exau-
cer), exaltatio (lat. eccl.).
ÉVITER, 1350. Empr. du lat. evitare.
On a dit d’abord et jusqu’au xvi®s. éviter à EXAMEN, 1372. Empr. du lat. examen,
(probabl. d’après échapper à), encore usité au même sens, issu de celui d’ « aiguille de
dans la langue du droit et de la marine. balance » qu'avait également examen, cf.
— Dér. : évitement, 1538. le verbe exigere, de même famille, au sens
de « peser ».
ÉVOCATION, 1348, comme terme juri-
dique ; évocatoire, xive. Empr. du lat. EXAMINER, x1r1e ; examinateur, 1307.
juridique evocatio, evocatorius. Évocalion a Empr. du lat. examinare, examinator (créé
pris d’autres sens, en parlant d'opérations à basse ép.).
magiques, au xviries., et, en parlant d’une EXANTHÈME, 1565 (d'abord exanthe-
chose oubliée, au xix°, d’après évoquer. mate, 1541). Empr. du lat. médical exan-
ÉVOLUTION, 1536. D’abord terme mili- thema (du grec exanthéma, propr. « efflo-
taire, d’où les autres sens se sont dévelop- rescence », de anthos « fleur »). — Dér. :
s, au xviri® s. Empr. du lat. evolutio exanthémateux, 1756.
« action de dérouler » (dér. du verbe evol- EXASPÉRER, 1495 ; exaspération, 1588
vere « dérouler ») en vue de son sens spécial. (Montaigne). Empr. du lat. exasperare (de
— Dér. : évoluer, 1773; évolutionniste, asper « âpre, etc. »), exasperalio.
1876 ; évolutionnisme, fin x1Ix°.
EXAUCER, v. hausser.
ÉVOQUER, xive (Deschamps). Empr.
du lat. evocare. — Dér. : évocable, 1708; EX CATHEDRA, xvrie (Mme de Sévi-
évocateur, fin xiIxe. gné). Empr. du lat. moderne eccl. ex cathe-
dra « du haut de la chaire ».
EX-. xviie s. (Mézeray : ex-laquais).
Sorte de préf., tiré de la prép. lat. ex « hors EXCAVER, x111°, rare jusqu'au XVIIIe S.
de », qui a servi à basse ép. à faire des Excavation, xvi*. Empr. du lat. excavare
comp. semblables, cf. exconsul, expalricius. « creuser » (de cavus « creux », v. cave),
excavatio « cavité ». — Dér. : excavateur,
EX-ABRUPTO, v. abrupt. 1843, fait d’après l’angl. excavaior.
EXACERBATION, 1503, rare avant le EXCÉDER, vers 1300 ; excédent, x1v®
xviie s. Empr. du lat. de basse ép. exacer- (Deschamps). Empr. du lat. excedere, propr.
batio (de exacerbare « irriter »). — Dér. : « s’en aller », d’où « dépasser », excedens,
exacerbé, 1874 (Daudet), d’après le lat. part. prés., v. excès.
exacerbare.
EXCELLENTISSIME, 1550. Empr. de
EXACT, 1541 (d’après l’adv. exacte- l’it. eccellentissimo, v. le préc.; une pre-
ment) ; exacie est souvent employé au masc. mière fois au x111° s. dans un ouvrage écrit
au xviie s. Empr. du lat. exacius, part. par un Italien.
passé pris adjectiv. du verbe exigere, au
EXCELLER, 1544; excellent, xr1° ; ex-
sens d’ « achever ». — Dér. : exactitude,
1634 (Vaugelas : « C’est un mot que j'ai cellence, id. Empr. du lat. excellere, excel-
vu naître comme un monstre et auquel on lens, excellentia.
s’est accoutumé ») ; d’abord exacielé, 1643 EXCENTRIQUE, x1ve (Oresme) ; excen-
(G. de Balzac; Arnauld) et exaclesse tricité, 1634. Empr. du lat. scientifique et
(1632, Peiresc), d’où inexactitude, 1689; médiéval excentricus (de centrum « centre »),
inexact, id. excentricitas. Le sens fig. a été relevé pour
EXACTEUR, 1304 ; exaction, xrr1°. Em- le subst. en 1736.
pr. du lat. exacior « celui qui exige une EXCEPTER, xr1°. Empr. du lat. excep-
créance », exactio « action de faire rentrer tare, qui n’a que le sens de « recevoir »
une dette, des impôts » (de exigere, au sens (sens empr. par le fr. au moyen âge) pour
de « faire payer »); souvent au sens du
servir de verbe à exception. — Dér. :
lat. jusqu’au xvrie s., mais le sens moderne
excepté, prép., vers 1360; d’abord ac-
est usité dès le moyen âge.
cordé avec le subst. jusqu’au xvre s.
EX-AEQUO, x1x° ; certainement antér. EXCEPTION, x1r1°, comme terme juri-
Empr. du lat. ex aequo « également », v. dique, sens dominant jusqu’au xvie s.
accessit.
Empr. du lat. exceplio, à la fois « excep-
EXAGÉRER, 1535; exagérateur, xvir®e tion », en général et terme de la langue
(Balzac) ; exagération, 1549. Empr. du lat. juridique (du verbe excipere « retirer, ex-
exaggerare (de agger « matière entassée ») cepter », v. exciper, et « recevoir »). —
« entasser, augmenter, amplifier, faire va- Dér. : exceptionnel, 1739.
loir », d’où « excessif » au part. passé, exag-
gerator « qui exagère », exaggeratio « entas- EXCÈS, 1287. Empr. du lat. excessus,
sement, élévation de l’âme ». Le verbe si- au sens d’ « excès » qui n'apparaît qu’à
gnifie parfois au xvi® et au xvII® s. sim- basse ép., pour servir de subst. à excéder;
plement « faire valoir »; le sens moderne excès n’a donc qu’un rapport de forme avec
a triomphé au xvries. le lat. class. excessus (nom d’action d’exce-
dere, v. excéder), qui signifie surtout
EXALTER, xe (Saint Léger) ; exalta- « mort », propr. « sortie de la vie ». —
tion, xr11° (en parlant de la Sainte Croix). Dér. : excessif, XIIIe.
245 EXEQUATUR

EXCIPER, 1279 ; rare avant le xvirre. EXCUSER, xrie (alors escuser). Empr.
Empr. du lat juridique excipere, v. excep- du lat. excusare, propr. « mettre hors de
tion. cause (causa) ». — Dér. : excusable, vers
1300, d’après le lat. excusabilis, d’où inex-
EXCISE, v. accise. cusable, 1450, d’après le lat. inexcusabilis;
excuse, XIV®.
EXCISION, 1340. Empr. du lat. excisio
« entaille » (de basse ép. en ce sens), dér. EXEAT, 1622 (à propos d’un collège).
de excisus, part. passé du verbe excidere Empr. du lat. exeat « qu'il sorte », sub).
« couper ». — Dér. : exciser, xvI°. du verbe exire « sortir », pris comme terme
de droit eccl. au sens d’ « autorisation
EXCITER, xr1e ; excitateur, XIVe ; exCi- qu’un évêque donnait à un prêtre de son
tation, vers 1300. Empr. du lat. excitare, diocèse d'aller exercer dans un autre»,
propr. « faire lever, éveiller », d’où «élever, d’où son emploi en parlant d’un collège.
soulever, exciter » (fréquentatif de excire
« faire venir, exciter »), excitator (créé à EXÉCRER, 1495; exécrable, xive (Ber-
basse ép.), -fatio (id.). — Dér. et Comp. : suire) ; exécration, xire. Empr. du lat.
excitable, 1812, une première fois au execrari (écrit aussi exs.) « charger d’im-
xu11e s. (J. de Meung), d’après le lat. exci- précations, maudire », d’où le sens affaibli
tabilis ; excitabilité, 1808 ; surexciter, 1842 ; du îr., execrabilis, execratio; l’adj. et le
surexcitation, 1830. subst. ont parfois au xvi® et au XvII® 8.
des sens rapprochés du lat.
EXCLAMER (s’), 1495 : exclamer ; au
réfl., 1516 ; exclamation, 1311 ; exclamatif, EXÉCUTEUR, vers 1200; exécution,
1747. Empr. du lat. exclamare (de clamare. xII1 (J. de Meung); exécutoire, 1337.
« crier »), exclamatio. Empr. des mots lat. execulior, executio,
EXCLAVE, xxe° s., t. de douane empr. executorius (créé à basse ép.), écrits aussi
de l'anglais, où il a été formé sur enclave. ezs., du verbe exsequi « poursuivre, accom-
plir ». — Dér. : exécuter, x1v® ; exécutable,
EXCLURE, xive (Bersuire); exclusif, 1481 ; inexécutable, 1695, une première
1453 ; exclusive, subst. fém., 1838; ex- fois en 1579; inexécuté, xive; exécutif,
clusion, x111°, rare avant le xvrie s. Empr. 1764 (J.-J. Rousseau), une première fois
du lat. excludere, exclusivus (médiéval), au xiv® (Oresme) ; inexécution, fin xvi®
exclusio ; v. éclore. — Dér. : exclusivité, (d’Aubigné).
1818.
EXÉGÈSE, xvire ; exégète, 1732 ; exé-
EXCOMMUNIER, xrI°; excommunica- gétique, 1694. Empr. du grec exégésis (le
tion, xr1e° (en outre escomination). Empr. mathématicien Viète l’a employé aussi au
du lat. eccl. excommunicare, propr. « mettre xviie s. en lat.), exégélés, exégétiké (on
hors de la communauté » (de communis trouve aussi, mais rarement le lat. exege-
« commun »), excommunicatio. L’a. fr. a lice), du verbe exégeisthai « expliquer ».
possédé un verbe de formation pop. esco-
mengier, d’où escomengement, Où -en- repré- EXEMPLE, vers 1080, essample, fém.
sente un développement de -un- en syllabe (Roland), est peut-être une forme pop.
inaccentuée. d’après le plur. neutre exempla; le fém.,
. plus rare que le masc. au moyen âge, a
EXCORIER, 1541. Empr. du lat. de persisté jusqu’au x1x® s., dans une exemple
basse ép. excoriare « écorcher » (de corium d'écriture ; exemplaire, adj., 1150 ; exem-
« cuir »). — Dér. : excoriation, x1v°. plaire, subst., 1138, jusqu'au xvirie s.
signifie aussi « modèle (à suivre) »; sens
EXCRÉMENT, 1537. Empr. du lat. mé- moderne de « copie d’un ouvrage », 1580
dical excrementum « sécrétion », dér. de (Montaigne), d’où sens plus général,
excrelus, part. passé du verbe excernere xixe. Empr. du lat. exemplum, exemplaris,
« cribler », en lat. médical « évacuer ». — exemplarium. La locution exclamative par
Dér. : excrémenteux, 1555 ; excrémentiel, exemple, issue par ironie de par exemple « à
XVIS. titre d'exemple », date du xvrrre s.
EXCRÉTION, 1541. Empr. du lat. de
basse ép. excretio « criblure ». — Dér. : EXEMPT, adj., xir1e ; exemption, 1407.
excréter, 1336; excréteur, xvi® (Paré); Empr. du lat. exemptus, part. passé, exemp-
excrétoire, 1538. tio (terme de la langue juridique, du verbe
eximere « tirer hors de, affranchir »). —
EXCROISSANCE, 1314 (excressance). Dér. : de l’adj. exempt, subst., fin xvi®
Empr. du lat. de basse ép. excrescenlia, (d’Aubigné) « sous-officier de cavalerie qui
dér. de excrescere « croître » et francisé commandait en l’absence des officiers (et
d’après croissance; une forme excrescence qui était exempt du service ordinaire) »
calquée sur le lat. a été aussi usitée au d'où, au xviie s., « sous-officier de police »
xviie et au XVII S. (disparu depuis la Révolution) ; exempter,
1320 fessenter).
EXCURSION, 1530, rare avant le
xvirie s., où le mot devient usuel avec le EXEQUATUR, 1752. Empr. du lat. exe-
‘sens dominant aujourd’hui. Empr. du lat. quatur « qu’il exerce », subj. du verbe
excursio « voyage, incursion, digression » exequi, v. exécuter, qui était employé dans
(de excurrere « courir hors de »). — Dér. : les textes juridiques; comme terme de
excursionniste, 1852. diplomatie, date du xiIx° 8.
EXERCER 246

EXERCER, xr1°; exercice, xr11° (J. de Dér. : inexistant, 1823 ; inexistence, 1609 ;
Meung). Empr. du lat. exercere, propr. coexister, 1745 ; coexistence, 1560 ; non-
« tenir en mouvement », exercilium. — existant, xviri® ; -ence, id.; existenciel,
Comp. : inexercé, 1798. terme de philos., vers 1940, existentia-
lisme, id., existentialiste, id.
EXERGUE, 1636. Terme techn. de mon-
naie, empr. du lat. moderne exergum, fa- EX-LIBRIS, 1870. Formé avec les mots
briqué avec les mots grecs ex « hors de », lat. ex libris, propr. « (qui fait partie) des
et ergon « œuvre », c’est-à-dire « espace livres ».
hors d'œuvre ».
EXO-. Premier élément de mots sav.,
EXFOLIER, xvie (Paré). Empr. du lat. tels que exogène, 1813, tiré du grec ex
de basse ép. exfoliare (de folium « feuille »). « dehors ».
— Dér. : exfoliation, 1503.
EXODE, x1r1°, rare jusqu’au XVIIIe s.
EXHALER, x1ve ; exhalation, vers 1360. Propr. terme biblique empr. du lat. eccl.
Empr. du lat. exhalare, exhalatio. — exodus (du grec eccl. exodos, en grec class.
Dér. : exhalaison, xrve. «sortie, départ », de hodos « chemin »). S’est
dit au x1x° s., par extension, d’abord de
EXHAUSTIF, fin xixe. Empr. de l’angl. la grande émigration des Irlandais après
exhaustive (du verbe {o exhaust « épuiser », la famine due à une maladie des pommes
fait sur le part. passé exhaustus du verbe de terre, puis de toute autre émigration,
lat. exhaurire). 1864.
EXHÉRÉDER, xive; exhérédation, EXONÉRER, 1680 ; exonération, 1865,
1437. Empr. du lat. exheredare (de heres, une première fois en 1552 dans un sens
heredis « héritier »), exheredatio. physiologique. Empr. du lat. juridique
exonerare, propr. « décharger » (de onus,
EXHIBER, xrr1e; exhibition, xi1e. Em- oneris « charge »), exoneratio.
pr. du lat. exhibere (de habere « avoir,
tenir »), exhibitio. — Dér. : exhibitionnisme, EXORBITANT, 1455. Empr. du lat. exor-
terme médical, 1866 ; -iste, 1880. bilans, part. prés. du verbe de basse ép.
exorbilare « dévier », propr. « sortir de la
EXHORTER, 1150, rare avant le xvi®s.; voie tracée » (de orbila « ornière »).
exhortation, vers 1180. Empr. du lat. exhor- EXORCISER, xive, rare avant le
lari, exhortatio. Ont éliminé les mots de XVIIe s.; exorcisme, 1495. Empr. du
l’a. fr. usuels jusqu’au xvi® s., enorter lat. eccl. exorcizare, exorcismus (du grec
(lat. postclass. inhortari, cf. de même a. exorkizein « faire prêter serment », exorkis-
pr. enoriar), enortement. mos, de horkos « serment »).
EXHUMER, 1643. Empr. du lat. mé- EXORDE, 1488. Empr. du lat. exordium,
diéval exhumare, fait sur le modèle du lat. dér. de exordiri « commencer ».
class. inhumare, v. inhumer. — Dér.
exhumation, 1690. EXOSMOSE, v. endosmose.
EXIGER, 1357; exigence, xrve (Ores- EXOTÉRIQUE, 1568, usuel à partir du
me). Empr. du lat. exigere, exigentia (créé XVIe s. Empr. du lat. exotericus (du grec
à basse ép.), v. exact, exaction. — Dér. : exôterikos « extérieur, public », de exé, v.
exigible, 1603, d’où exigibilité, 1783 ; inexi- exo- et ésotérique).
gible, 1789.
EXOTIQUE, 1548 (Rab.), usuel à partir
EXIGU, 1495 ; exiguité, 1798, une pre- du xvirie s. Empr. du lat. exoticus (du grec
mière fois au xiv® s. Empr. du lat. exôtikos). — Dér. : exotisme, 1845.
exiquus, exiguilas ; exiguus, propr. « mo-
dique », dérive de exigere, au sens de EXPANSION, 1695 ; parfois au xvie s.
« peser » (d’une manière stricte). D'abord terme de physique et de physio-
logie ; sens fig. au xix° s. Empr., en vue
EXIL. La prononciation moderne ne de ses sens spéciaux, du lat. de basse ép.
paraît pas être antér. au xrrre s. Réfection, expansio « action d'étendre » (du verbe
d’après le lat., de l’a. fr. eissil, essil (avec L exzpandere « étendre, déployer »). — Dér. :
mouillée), quelquefois exil (avec x déjà expansible, 1756 ; expansibilité, id. ; expan-
d’après le lat.), lat. exilium (écrit aussi sif, 1732, au sens moral (J.-J. Rousseau,
exs.) ; signifie souvent au moyen âge « des- Confessions).
truction, ruine »; de même a. pr. eissilh.
— Dér. : exiler, a suivi le développement EXPECTANT, xve; expectative, 1552,
phonétique du préc. ; au moyen âge eissil- d’abord comme terme scolastique (cf. grâce
lier, ess. (rarement ex.), signifie non seule- expeciative en 1511) et juridique; sens
ment « exiler », mais « ravager, ruiner », général, fin xvirie. Empr. du lat. expectans,
sens encore relevé en 1664, et fréquent part. prés. de expectare (écrit aussi exsp.)
aujourd’hui encore dans les patois, par « attendre » et du lat. médiéval expeciativa,
exemple en lorrain. fém. de l’adj. expectativus.
EXISTER, 1425, rare avant le xvire 8. ; EXPECTORER, vers 1670. Empr. du
existence, xIv°, jusqu’au xixe s., terme lat. expectorare, attesté seulement au sens
philosophique. Empr. du lat. existere (écrit fig. de « chasser de son cœur », pour son
aussi exs.), existentia (créé à basse ép.). — sens médical ; ce verbe avait pris dans le
247 EXPOSER

lat. de la cour pontificale le sens de «rendre (écrit aussi exsp.) « exhaler, expirer », expi-
publique une nomination de cardinal faite ratio « exhalaison ». Le sens de « cesser »
in petlo », d’où expectorer, en ce sens chez apparaît dès le xive, d’où le sens d’expi-
Saint-Simon (qui emploie aussi le subst. ration « cessation », au xvirie 8. — Dér. :
dér.). — Dér. : expectoration, vers 1700; expirateur, 1771.
en 1732 au sens médical.
EXPLIQUER, xive, au sens de « dé-
EXPÉDIENT, adj., xive (Oresme). Em- ployer »; sens moderne au xvI® s. ; expli-
pr. du lat. expediens, part. prés. de expedire cable, 1554 ; inexplicable, 1486 ; explica-
« dégager » ; ne s’est guère employé qu'avec teur, 1642, rare avant le x1Ix® s.; expli-
le verbe étre, comme traduction du lat. cation, 1322 ; explicite, terme de scolas-
ezpedit « il importe ». — Dér. : expédient, tique, 1488. Empr. du lat. explicare, propr.
subst., xvi®; expédier, 1360, au sens de « déplier », sens encore usité au xVII® s.
« terminer rapidement une affaire »; le (de plicare « plier »), explicabilis, explicator,
sens de « faire partir pour une destination » explicitus (part. passé). — Dér. : explicatif,
date de 1676 (en parlant d’un messager ; 1587 ; inexpliqué, 1792 ; expliciter, 1870.
le prov. a expedir en ce sens en 1445), et
en 1723 (en parlant de marchandises), EXPLOIT, xive; exploiter, xXII1I° (sous
d’où réexpédier, xvrr1® (Mirabeau), réexpé- la forme exploitier). Réfection, d’après le
dition, id. ; expéditeur, 1730 (déjà créé au lat. explicare au sens d’ « accomplir », de
xve et au xvie s.; formé d’après expédi- l’a. fr. espleit, esploit « action menée à
tion) ; expéditif, 1546 (id.). bien », espleitier, esploitier « accomplir,
jouir de », etc., lat. pop. *explicitum, neutre
EXPÉDITION, xrr1e, Empr. du lat. expe- pris substantiv. de l’adj. explicitus, au sens
ditio, surtout « expédition militaire », de « d’une exécution facile », *explicitare;
d’abord « préparatifs », dér. de expedire, de même a. pr. esplech « avantage, etc. »,
au sens de « préparer »; autres sens du esplechar « accomplir, jouir de, etc. ». Seu-
mot fr. d’après expédier. — Dér. : expédi- lement gallo-roman. Le subst. et surtout
tionnaire, 1553. le verbe sont encore vivaces sous les formes
anciennes dans les patois. Exploit, au sens
EXPÉRIENCE, xine (J. de Meung). judiciaire, date au moins du xvi® s.; se
Empr. du lat. experientia, dér. du verbe rattache au sens de « saisir » qu'avait le
experiri « faire l’essai de ». — Dér. : inexpé- verbe au moyen âge. Exploiter, au sens
rience, 1762, déjà en 1452 et en 1460. défavorable, date de 1840 (Proudhon). —
Dér. : exploitable, xr11° (esp-); exploitation,
EXPÉRIMENTER, 1372 (d’où -é, 1453). 1752; usuel au moyen âge au sens de
Dér. de l’a. fr. esperiment, experiment « ex- « saisie judiciaire »; d’où inexploitation,
périence », du lat. experimenium, du verbe 1873 ; exploiteur, xvre ; signifie « huissier »
experiri, v. le préc. L'’a. fr. a possédé un au moyen âge ; a suivi le sens du verbe;
verbe de formation pop. espermentier, seu- inexploité, fin xixe.
lement fr. — Dér. : expérimental, 1503,
d’après le lat. experimentalis ; expérimen- EXPLORER, 1804, mais déjà en 1532
tateur, 1824, une première fois, XIV® ; expé- et en 1546; explorateur, 1718, au sens
rimentation, 1824; inexpérimenté, 1679, moderne ; au xv®s. au sens d’ « éclaireur »,
une première fois 1495. qui est un des sens du mot latin ; explora-
tion, vers 1500, rare avant le xvir1°s. Empr.
EXPERT, x11°. D'abord adj. ; l'emploi du lat. explorare (qui n’a sans doute rien
comme subst., déjà attesté au xvi° s. a à faire avec plorare « pleurer »), explorator,
pris le dessus. Réfection, d’après le lat., exploratio. — Dér. : inexploré, 1832.
de l’adj. espert « habile », lat. expertus, part.
passé du verbe experiri, v. les préc.; de EXPLOSION, 1701. Empr. du lat. explo-
même a. pr. espert. — Dér. : expertise, 1580 sio « action de huer » (de explodere « rejeter
(Montaigne : -ice) au sens général, aupara- en frappant des mains, en huant »), pris
vant esperitise; comme terme juridique, au sens de « action d’éclater bruyam-
1792, d’où expertiser, 1807. ment ». — Dér. : exploseur, 1867 ; exploser,
1801 ; explosible, 1849 (mais inexplosible,
EXPIER, xive (Bersuire); expiation, 1838) ; explosif, 1815.
xr1e ; expiatoire, 1562 (Rab.) ; expiatrice,
xvirie, le masc. expialeur, xvi®, est rare. EXPORTER, 1750 ; exportation, 1734.
Empr. du lat. expiare, propr. « purifier par Empr. du lat. exporiare, exæportatio, peut-
des expiations », sens parfois également être d’après l’angl. {o export, exportation,
empr. (de piare « rendre propice, expier », v. importer, -ation. — Dér. : exportateur,
propr. « faire une action pie », dér. de pius 1756; réexportation, 1755 ; réexporter, 1734.
« pieux »), expiatio, expialorius (créé à basse
ép.), expiator (id.), expiatrit (id.). EXPOSER, x11° ; exposition, x11°. Empr.
du lat. exponere (avec francisation d’après
EXPIRER, xue. D'abord espirer, x11°, poser, v. composer), expositio. Un verbe de
forme qui a rapidement disparu par suite formation pop. espondre, usuel au moyen
de la confusion qui se produisait avec espi- âge, a été éliminé au profit d'exposer, sou-
rer « souffler, inspirer, respirer », lat. spiräre tenu par les autres verbes formés avec
« souffler, respirer » (même confusion en poser. — Dér. : exposant, terme de mathé-
a. pr. où espirar signifiait à la fois « respi- matiques, 1658 (Pascal); au sens juri-
rer » et « expirer ») ; expiration, xXIV°, rare dique, 1389; nouveau sens au xiX° S.;
avant le xvirre s. Émpr. du lat. expirare exposé, 1690.
EXPRÈS 248

EXPRÈS, adj., xir1° (J. de Meung). « étendre »). — Dér. : extenseur, 1680;
Empr. du lat. expressus « nettement expri- extensible, 1676, une première fois au
mé », part. passé de exprimere. — Dér. : XIVe s., d’où extensibilité, 1732 ; inexten-
exprès, adv., xIv*, d’abord par expres ; sible, xvrr1° (Buffon) ; extensif, 1680, une
expressément, xvI1®, d’abord expressement, première fois au XIV®S. :
du x11° au xvI® s., mais on trouve déjà
espressement, en 1270. EXTÉNUER, 1495, aujourd’hui moins
usité, au sens intellectuel, qu’atténuer;
EXPRESS, 1849. Empr. de l’angl. ex- exténuation, xive. Empr. du lat. extenuare
press, qui vient du fr. exprès. (de éenuis « ténu »), extenuatio.
EXPRIMER, xr°; expression, xIv® EXTÉRIEUR, xve. Empr. du lat. exle-
(Froissart). Empr. du lat. exprimere « faire rior. — Dér. : extérioriser, 1869, d’après le
sortir en pressant », d’où « exprimer, expo- lat. exterior.
ser », expressio. Un verbe de formation
POP. espreindre, usuel au moyen âge, est EXTERMINER, x; exterminateur,
encore dans les dictionnaires sous la forme XIIIe; extermination, xr1°, rare avant le
épreindre, au sens concret (cf. aussi it. xvI® s. Empr. du lat. exierminare, propr.
spremere). — Dér. d'expression : expressif, « chasser » (sens souvent attesté en fr. jus-
fin xvrre s. (Saint-Simon), une première qu’au xvIi® s.; de {erminus « frontière »),
fois en 1488, d’où in-, 1781 ; expressio- d’où, en lat. eccl., « détruire, faire périr »,
nisme, 1930, -iste, 1948; d'exprimer : exterminator (lat. eccl.), exterminatio (id.).
exprimable, 1599 ; inexprimable, xve.
EXTERNE, xve. Empr. du lat. exiternus.
EX PROFESSO, 1612. Locution lat. si- — Dér. : externat, 1829.
gnifiant « ouvertement », propr. « d’après
ce qui est publié », formée de professus, EXTINCTION, 1488. Empr. du lat. ex-
part. passé du verbe profiteri « déclarer tinctio (écrit aussi exsi.) de exstinguere
publiquement »; le sens qu’on lui donne « éteindre »). — Dér. : extincteur, 1872,
en fr. paraît dû à un rapprochement avec une première fois, vers 1700, au sens fig.
professeur. de « celui qui anéantit », empr. du lat.
exstincior « id. ».
EXPROPRIATION, v. propre.
EXTIRPER, xive (Oresme); extirpa-
EXPULSER, vers 1460 ; expulsion, 1309. teur, XIV® ; extirpation, xves. Empr. du lat.
Empr. du lat. expulsare, expulsio (du verbe
expellere « chasser »). extirpare (écrit aussi plutôt exst.), extir-
pator, extirpatio (de stirps, stirpis «souche »).
EXPURGER, 1437. Empr. du lat. expur- L’a. fr. a possédé un verbe de formation
gare « purger, nettoyer ». L’a. fr. avait un pop. esterper, plus souvent esitreper « arra-
verbe de formation pop. espurgier « net- cher », d’où, par altération, estraper, xu1°,
toyer » et surtout « purifier », disparu de conservé dans les patois sous la forme étra-
bonne heure, cf. it. spurgare, a. pr. espur- per, comme terme d'agriculture, cf. de
gar ; de cet anc. verbe a été tiré épurge même it. sierpare « arracher ».
« euphorbe », xrrre.
EXTORQUER, 1330 ; extorsion, 1290.
EXQUIS, 1393. D'abord « recherché », Empr. du lat. extorquere, extorsio. L’a. fr.
encore chez Montesquieu ; au sens moderne a possédé un verbe de formation pop.
de « d’une délicatesse recherchée », xvie. esiordre, aux sens plus étendus, non seu-
Réfection, d’après le lat. exquisitus « re- lement « extorquer », mais « tordre, etc. »,
cherché, exquis », de esquis, part. passé de dont toutes les autres langues ont le cor-
l’anc. verbe esquerre « rechercher », lat. respondant : it. siorcere « détourner », esp.
pop. *exquaerere, réfection, d’après le sim- estorcer « tirer d’embarras ».
ple quaerere, du lat. class. exquirere.
EXTRA-. Premier élément de mots sav.,
EXSANGUE, xve. Empr. du lat. exsan- tiré du lat. extra « en dehors ».
guis.
EXSUDER, xvi® (Paré); exsudation, EXTRACTION, xive, antér. esiration,
1762. Empr. du lat. exsudare (de sudare X11<. Dér. sav. de exiractus, part. passé du
« suer »), exsudatio (médical). verbe extrahere, v. extraire. L’a. fr. a pos-
sédé au sens de « race » une forme esirace,
EXTASE, vers 1470, en outre extasie, qui paraît tirée de estration. — Dér. :
XIV® (Oresme) ; sens fig., 1669 (La Fon- extractif, 1555, rare avant le xvrirre S.,
taine) ; extatique, 1546 (Rab.). Empr. du formé d’après le part. passé exiractus.
lat. eccl. exstasis ou ectasis (du grec eccl.
exlasis, propr. « égarement de l'esprit », EXTRADITION, 1763 (Voltaire). Mot
du verbe existasthai, propr. « se mettre formé avec les mots lat. ex « hors » et fra-
hors de », d’où « être hors de soi ») et du ditio « action de livrer ». — Dér. : extrader,
grec exlalikos. — Dér. : d’extase d’après la 1777, d’après le lat. iradere « livrer ».
forme exlasie : extasier (s’), 1674 (Boileau),
d’après le sens fig. d’extase ; XvIe-xviIe s., EXTRAIRE, xve, Réfection, d’après le
DAS trans., au sens de « ravir en ex- lat. (sous l'influence d'extraction), de l’a. fr.
ase ». estraire, lat. pop. “*exiragere, lat. class.
extrahere, v. traire ; d’où aussi a. pr. es-
EXTENSION, xive (Oresme). Empr. du traire; verbe seulement gallo-roman. —
lat. de basse ép. exiensio (de exlendere Dér. : extrait, 1447, d’abord estrait, 1312.
249 EX-VOTO

EXTRAORDINAIRE, xir°, Empr. du EXTRINSÈQUE, vers 1300. Empr. de


lat. extraordinarius. On a tiré par abrège- l’adv. lat. extrinsecus « en dehors ».
ment un adj. extra, 1836, qui se prend éga-
lement comme subst. et comme particule EXUBÉRANT, xve; exubérance, xvi®
augmentative, cf. exira-fin ; comme subst. (Paré). Empr. du lat. exuberans, part. prés.
masc., a déjà été créé au xvirre s. dans la de exuberare « regorger » (de l’adj. uber
langue de l’ancien droit pour désigner une « fertile »), exuberantia.
audience extraordinaire,
EXULCÉRER, 1534 (Rab.); exulcéra-
EXTRAVAGANT, 1380. Empr. du latin tion, xvie. Empr. du lat. médical exulcerare
eccl. médiéval exiravagans « promulgué en (de ulcus, ulceris « plaie »), exulceratio.
dehors du droit canonique » (comp. avec le
préf. lat. extra et vagans, part. prés. du verbe EXULTER, xve. Empr. du lat. exuliare
vagari « errer ») ; le sens moderne apparaît (écrit aussi exs.), propr. « sauter » (de saliare
au XVI® s. — Dér. : extravagance, xve, « sauter »).
développement du sens parallèle aux préc. ;
exitravaguer, 1538. EXUTOIRE, 1784. D'abord terme de
médecine ; sens plus étendu, 1845. Dér.
EXTRAVASER (s’), 1673. Terme scien- sav. du lat. exulus, part. passé. de exuere,
tifique, fait avec le lat. vas « vase », sur le au sens de « enlever ».
modèle de iransvaser.
EX-VOTO, 1643 (Saint-Amant). Tiré de
EXTRÊME, xiue (esireme) : extrémité, la formule lat., usuelle dans les inscrip-
xin1e (J. de Meung). Empr. du lat. extremus, tions, ex voilo suscepio, ordinairement abré-
extremitas. gée e. v. s. « suivant le vœu fait ».
F
FA, xIII°, V. gamme. FACE. Lat. de basse ép. facia, lat. class.
facies. Dans les parlers gallo-romans, a été
FABLE. Lat. fäbula « propos, récit », presque partout éliminé au sens propre,
d'où « fable mythologique, récit allégori- comme en fr., par figure. It. faccia, esp.
que »; mot resté en contact avec le lat. haz (de facies), a. pr. fassa. — Dér. : fa-
écrit. De même it. favola (en outre fola cette, x11° ; effacer, id. ; effacement, xIII° ;
« plaisanterie », fiaba « sornette », qui pa- ineffaçable, 1523. — Comp. : face-à-main,
raissent empr.), a. pr. fabla-et faula. — 1872 ; surface, 1611, d’après le lat. super-
Dér. : fabliau, introduit au xvi® s. par ficies ; d’abord superface, 1521.
Fauchet qui a pris cette forme dans des
manuscrits écrits en dialecte picard, fabliau FACÉTIE, xve. Empr. du lat. facelia,
est la forme picarde de l’a. fr. fablel, fa- dér. de facetus « bien fait, plaisant ». —
bleau, tombé en désuétude avant le xvi®s. ; Dér. : facétieux, id.
fablier, début x1x°, au sens de « recueil de FÂCHER, 1442. La date récente du mot
fables »; a été dit par plaisanterie de La donne à penser qu’il est provincial; en
Fontaine, au xviir® et au xvIIIe S.; cf. effet, les premiers exemples viennent de la
« Comme l'arbre qui porte les pommes est Savoie. Paraît représenter une forme du
appelé pommier, M° de Bouillon disait de lat. pop. “*fasticäre, forme issue de fasti-
M. de La Fontaine : C’est un fablier, pour diare par une substitution de suff. (-icare),
dire que les fables naïissaient d’elles-mêmes cf. aussi esp. arch. hastiar ; fastidiäre est
dans son cerveau » (d’Olivet). une transformation du lat. class. fastidire
« éprouver du dégoût » ; le sens propre est
FABRIQUER, x11°, rare avant le xvIes. ; rare en fr., mais fâcher a encore au XvII°Ss.
fabricateur, xve ; fabrication, 1488 ; fabri- le sens de « causer de la douleur ». L’a. pr.
que, x1v°, au sens de « fabrication », encore fastic « dégoût », fastigos « dédaigneux »
usité dans des locutions telles que prix de (en lat. fastidiosus) et le dér. enfastigat
fabrique, d’où le sens de « construction », « dégoûté » supposent la même forme alté-
surtout en parlant d’une « église », puis rée “*fasticäre. — Dér. : fâcherie, xv°;
« revenus destinés à l'entretien d’une fâcheux, xve, au sens d’ « importun », à
église », 1374 (fabrice) ; le sens d’ « éta- prop? d’une personne, 1538 ; défâcher (se),
blissement où l’on fabrique », date du 1539.
XVIIe s. (1679). Empr. du lat. fabricare
(dér. de aber « artisan »), fabricator, fabri- FACIAL, 1753, une première fois en
calio, fabrica (v. la forme pop. forge). — 1551 ; facies, 1795. Le premier est dér. du
Dér. de fabriquer : fabricant, 1740, au sens lat. facies ; le deuxième est le mot. lat. lui-
moderne, une première fois en 1604 ; au même.
sens de « fabricateur », xves. ; fait d’après FACILE, 1441 ; facilité, 1495. Empr. du
le lat. fabricans, part. prés. ; préfabriqué, lat. facilis, facilitas (de facere « faire »).
1949 ; fabricien, 1569, « membre d'un
conseil de fabrique »; en outre fabricier, FACILITER, xve. Empr. de l’it. facili-
1605, dér. de fabrice, autre francisation de tare, dér. de facilità « facilité ».
fabrica ; a été préféré à fabriqueur, usuel FAÇON. Lat. facliônem, acc. de factio,
au moyen âge, jusqu’au xyIe s. dér. de facere « faire ». It. arch. fazzone,
FABULEUX, xive. Empr. du lat. fabu- a. pr. faisson. — Dér. : façonner, xr1®
losus, v. fable, « qui appartient à la fable, (Chrétien), façonnement, 1611, façonnage,
riche en fables », d’où le sens propre au 1838 ; façonnier, 1564. — Comp. : malfa-
fr. « qui dépasse toute croyance », dès le çon, 1260 (É. Boileau : male..….); sans-
XVIIS S. façon, masc., 1865; contrefaçon, xirre.
FACONDE, xrie. Empr. du lat. facundia
FABULISTE, 1588. Dér. sav. du lat. « éloquence », également pris au sens défa-
fabula, v. fable. Se trouve la première fois vorable du fr. (de facundus « disert »).
dans une traduction de l’esp., en 1588,
d’après l'esp. fabulista, mais avec le sens FAC-SIMILE, 1821. Mots lat. signifiant
défavorable de « conteur de fables », ensuite « fais une chose semblable ».
chez La Fontaine.
FACTAGE, v. le suiv.
FAÇADE, xvi® (Ph. Delorme). Empr. de FACTEUR, xive (Oresme), au sens
l’it. facciata, v. le suiv.; encore sous la d’ « agent ». Empr. du lat. factor « celui
forme facciate dans Cotgrave (1611); pour qui fait », en vue d’acceptions variées :
le suff., v. cavalcade. « agent commercial », 1393, d’où « facteur
251 FAILLE

de lettres », 1704 (devenu usuel, lors de fiait aussi en a. fr. « languissant, écœuré »,
l'établissement de la « petite poste », 1758), sens conservé dans avoir le cœur fade et le
puis « facteur de messageries », 1851 ; -dér. affadir. Seulement fr. — Dér. : fa-
« facteur d’orgues », 1628. En lat. eccl. dasse, 1761 (Voltaire) ; fadeur, xrr1e (au
factor a été dit spécialement de Dieu, créa- XvI® s. fadesse) ; affadir, x111e 8.
teur du monde, cf. notamment le début du
Symbole de Nicée : Credo in unum Deum.… FADING, 1930. Empr. de l’angl. fading,
factorem cæli, d'où la forme de l’a. fr. subst. verbal de {o fade « faiblir », qui est
faitre, faileur. — Dér. : de facteur au lui-même empr. du franc. fade.
3e sens : factage, 1845; de facteur au FAFIOT, xix°. Terme d’argot pour dési-
1er sens : factorerie, 1568, d’abord faciorie, gner les billets de banque (Balzac), déjà
1428, encore en 1771, d’après le lat. factor; attesté au xvnie s. au sens de «jeton, mar-
facture, terme de commerce, 1583 ; factu- que », d’un radical onomatopéique faf-, qui
rer, 1836. désigne surtout un objet de peu de valeur
(comp. morvandiau fafions « menus objets
FACTICE, 1675. Empr. du lat. facticius de toilette »).
« fait artificiellement, non naturel ». La. fr.
a possédé une forme pop. failis, encore FAGNE, v. fange.
usuelle dans le Bas-Maine, « bien fait,
joli », v. aussi fétiche. FAGOT, vers 1200. Cf. it. fagotto, a. pr.
fagot, tous deux pas avant le xive. Origine
FACTION, 1330; factieux, 1488. Empr. incertaine. On a proposé le grec phäkelos,
du lat. factio « faction » propr. « groupe qui aurait été refait en *phakos. Le mot
de gens qui agissent ensemble », factiosus, viendrait donc du Midi, ce qui est difficile
v. les préc. Le sens militaire, cf. esire en à admettre, parce qu’en a. pr. fagot n’est
faction, xvi®, vient de celui d’ «action mili- attesté que depuis 1380. Aujourd’hui
taire », également du xvi® s., peut-être dominant dans les parlers gallo-romans, en
d’après l’it. fazione, attesté en ce sens à concurrence avec bourrée dans l'Ouest
cette époque. Faction a été en outre pris et le Centre, le type faix dans le Sud-Ouest
dans les langues de l’alchimie et du droit et le type fascine, disséminé dans tout le
au sens d’ « action de faire ». — Dér. : territoire. — Dér. : fagoter, xirI°, sens
factionnaire, 1671, a signifié « factieux » fig., 1636 ; fagotage, 1580 (Montaigne, au
au XVI®S. sens fig.) ; fagoteur, 1215.
FACTOTUM, 1642, d’abord factoton, FAIBLE. D'abord foible, puis faible ; on
xvie s., encore en 1762, d’après la pronon- trouve feble dès le xrr1° s. ; en outre formes
ciation du lat. à cette époque, v. dicton. variées au moyen âge ; Ménage signale que
Locution lat. créée par la Renaissance. « dans la Picardie on prononce encore
floible et que le petit peuple de Paris pro-
FACTUM, 1532 (Rab.); la prononcia- nonce aussi ce mot de la sorte », mais peut-
tion facton, attestée par une rime de Vol- être cette forme était-elle une altération
taire, n’a pas passé dans la graphie du mot. récente. Lat. flébilis (dont le premier / est
Signifie d’abord « mémoire exposant les tombé par dissimilation en gallo-roman)
faits d’un procès », encore chez Voltaire; « digne d’être pleuré » (dér. de flère « pleu-
sens moderne, fin xvii® (Saint-Simon). rer », d’où « déplorable »), puis « faible »,
Empr. du lat. factum « fait » pris sub- seul sens attesté dans les langues romanes.
stantiv. . De même it. fievole, a. pr. feble (empr. par
l’esp.). — Dér. : faiblard, fin x1x®; fai-
FACTURE « manière dont une chose est blesse, x11° ; faiblir, x11° (mais rare avant
faite », seulement en parlant d’une œuvre 1680); affaiblir, xr1°; affaiblissement, 1290.
d’art, 1548, au sens moderne ; antér. « fa-
brication », xI11°, « œuvre, créature » (Ma- FAÏENCE, fin xvie s. (L’Estoile : vais-
rot, Calvin). Empr. du lat. factura « fabri- selle de faenze); 1589 (fayence); 1642
cation », d’où, en lat. eccl., « œuvre ». (faiance ou vaisselle de faiance). Tiré de
L’a. fr. a possédé une forme pop. failure Faenza, nom d’une ville d'Italie, près de
« action de faire », d’où « production, créa- Ravenne (appelée Fayance par J. Marot,
ture, forme, etc. » (d’où l’angl. feature). d’où Faiance au xvir® s.), d’où l’usage de
cette poterie s’est répandu en France;
FACTURE, terme de commerce, v. fac- mais l’it. ne connaît pas ce terme, et dit
teur. maiolica, v. majolique. — Dér. : faïencier,
FACULTÉ, vers 1200. Empr. du lat. 1676 ; faïencerie, 1743.
faculias « capacité, aptitude, etc. » ; le sens FAILLE, sorte d’étoffe, 1829. Issu de
de « corps des professeurs de l’enseigne- laffetas à failles ; la faille était une sorte
ment d'université », 1261, vient du lat. de voile dont les femmes se couvraient la
médiéval. — Dér. : facultatif, 1694. tête, surtout dans la région flamande ;
FADAISE, 1541 (Calvin) Empr. du faille est attesté en ce sens au moyen âge
prov. fadeza « sottise », dér. de fat « sot ». dès le xrr1e s., surtout dans des textes du
Nord-Est et encore, au début du xix®8.,
FADAS, « niais », vers 1940. Empr. du däns les patois de cette région. Étymologie
prov. mod. fadas (déjà fadasse chez d’Au- obscure ; le néerl. falie, faelge « grand vête-
. bigné et Voltaire), dér. du prov. fai, v. fat. ment de femme » passe pour venir du fr.
FADE. Lat. pop. *falidus né d’un croi- FAILLE, terme de géologie, 1771; cf.
sement de faluus « fade, insipide » et de « Ces espèces de roches sauvages sont con-
sapidus « qui a de la saveur »; fade signi- nues dans le pays de Liége sous le nom de
FAILLE 252

failles », 1779. Mot du dialecte wallon, du FAÎNE. D'abord faïne. Lat. pop. *fägina
langage des mineurs; attesté dans des (sous-entendu glans « gland »), fém. pris
textes liégeois de la même région se rap- substantiv. de l’adj. fäginus, pour faginus,
portant aux mines. Même mot que l’a. fr. dér. de fägus « hêtre », v. fouet, fouine.
faille «manque », tiré de faillir. Une forma- Seulement fr.
tion analogue se retrouve ailleurs, cf. port.
falha «fissure », anc. it. faglia. FAINÉANT,, v. néant.

FAILLI, 1606; faillite, 1566. Empr. de FAIR-PLAY, 1930. Empr. de l’angl.


l’it. fallito, fallita, de fallire « faillir, man- fair « agréable » et play « jeu ».
quer (de l’argent nécessaire au paiement FAIRE. Lat. facere. — Dér. et Comp. :
d’une dette) faire faillite » et prononcés faisable, vers 1350; infaisable, 1613; fai-
d’après faillir, v. les suiv. seur, xIv®, on trouve d’abord une forme
FAILLIR. Lat. pop. “*/fallire. lat. class. de cas sujet facerres, X11°; affaire, xrie,
fallere « tromper », d’où « échapper à » avec d’abord masc. jusqu’au xvi® s., des deux
un sujet de chose, de là se sont développés genres du xvVI® au xviII® s., fém. depuis;
plus tard les sens de « faire défaut, man- d’où affairé, 1584, souvent alors au sens
quer, commettre une faute » (au passif fal- de « qui a besoin d'argent »; affairisme,
lere signifie déjà en lat. class. « se trom- 1928 ; -iste, 1928 ; affairement, 1865 (une
per »), puis l’emploi du verbe comme im- première fois au xir1° 5.) ; défaire, vers 1080
personnel, cf. petit s’en faillit, xtrre s.; (Roland), défaite, 1475, au sens moderne ;
petit s’en faut, id.; le sens d’ « être sur le le sens de « moyen de se tirer d'affaire »
point de » s’est développé au xvi® s., d’a- est issu de se défaire, défaitisme, 1915
bord avec les prép. à et de. Le radical faill-, (créé par l'écrivain russe Alexinsky pour
régulier à l’ind. prés. faillent, issu de *fal- traduire le mot synonyme russe porajent-
liunt, à l’imparfait faillais, *falliebam, etc., chesivo formé aussi par lui), défaitiste,
s’est étendu à l’inf. et au part. passé ; mais 1915 ; redéfaire, xr1° ; refaire, id.; bien-
la réfection du verbe n’a pas été complète, faisant, x11°; bienfaisance, xvirie (abbé
et la 3° personne faut, lat. fallit, et le futur de Saint-Pierre : « J'ai cherché un terme
faudrai n’ont pas été modifiés. Sur ces qui nous rappelât précisément l’idée de
formes et d’après le modèle de valoir, la faire du bien aux autres, et je n’en ai pas
langue a refait une série de formes pour trouvé de plus propre pour me faire
le sens impersonnel (faut dès le xIr1e &. ; entendre que le terme de bienfaisance ») ;
remplace au x1ve l’a. fr. estuet « il est une première fois au xiIv® s.; bienfait,
besoin », du lat. est opus). L'emploi imper- vers 1125, d’après le lat. benefactum,
sonnel, propre au gallo-roman, est domi- d’où bienfaiteur, 1181, au xvire s.
nant dans les parlers contemporains, sauf concurrencé par bienfacteur et bienfaicteur;
dans quelques parlers du Sud-Est et tout forfaire, vers 1080 (Roland), comp. de
le Sud-Ouest jusqu’au Rhône qui emploient l’anc. prép. fors « dehors », propr. « agir en
caler, V. chaloir ; des formes avec -ill-, par dehors du devoir », forfait « crime détes-
exemple à l’imparfait, subsistent dans la table », x°, forfaiture, xrrre ; forfait, terme
région franco-provençale et au nord du de droit, 1647, comp. de for, altération
Massif central. It. fallire « faillir » et de fur, d’après le préc., v. fur ; malfaire,
« tromper », a. pr. falhir, sens analogues xI1°, d’où -faisant, id., -ance, 1739 ; méfait,
au fr. faillir, esp., avec une autre forma- XIIe, par l'intermédiaire de l’anc. verbe
tion, fallecer « défaillir, mourir, manquer méfaire, id. ; parfaire, xr1° ; v. aussi parfait,
‘de ». — Dér. et Comp. : faillible, 1762 ; une imparfait, d’après le lat. perficere (on
première fois xrr1e (Rose), d’après le lat. trouve aussi parfit(e) dans Saini-Alexis,
médiéval fallibilis, d'où faillibilité, 1697, forme plus francisée) ; surfaire, x11° ; fai-
une première fois au xr11° s., d’après le lat. tout, xix°e (dès 1790 en picard) ; entrefaite,
médiéval fallibilitas ; défaillir, vers 1080 1213 ; s'emploie surtout dans la locution
(Roland), d’abord « faire défaut », sens sur ces entrefailes.
dominant jusqu’au xvri® s., sens moderne FAISAN, 1170. Empr. de l’a. pr. faisan,
usuel à partir du xvi® s., d'où défaillance, qui représente le lat. phasianus (du grec
x11e, développement du sens parallèle au phasianos [ornis], propr. « oiseau du
verbe ; défaut, x1ve, au sens de « manque » ; Phase, en Colchide »). Cf. it. fagiano. —
« imperfection » depuis 1636; défaut est Dér. : faisandeau, 1393, au xve et au
moins usuel au moyen âge que défaute XVIIe s. on dit faisanneau ; faisander, 1393 ;
« manque, faute », fait probabl. d’après faisanderie, 1669.
faute ; à défaute on a préféré défaut qui se
distinguait mieux de faule; infaillible, FAISCEAU. Lat. pop. *fascellus, dér. de
xive, d’après le lat. médiéval infallibilis; fascis, v. faix. Seulement fr. Comme terme
infaillibilité, 1558. d’antiquité romaine, sert de traduction au
lat. fascis.
FAILLITE, v. failli.
FAISSE, v. fasce.
FAIM. Lat. fames. Concurrencé dans les
parlers languedociens par le type talent, FAIT. Lat. factum (de facere « faire »).
cf. a. pr. falen « désir ». — Dér. : famine, It. fatto, esp. hecho, a. pr. fach.
x11e; affamer, xr1°, peut-être déjà lat.
pop. *affamaäre, cf. it. affamare, a. pr. FAÎTE. Au moyen âge fesi, masc., et
afamar. feste, fém., d’où, au xvi® s., faite, avec le
genre de jest. Faîle est dû à une fausse
FAIM-VALLE, v. fringale. étymologie qui y a vu le lat. fastigium, de
253 FANFARON

même sens, L’a. fr. fest est conservé sous FALSIFIER, 1330. Empr. du lat. mé-
la graphie faix, comme terme de marine. diéval falsificare, v. faux. — Dér. : falsifi-
Du francique “first, cf. all. First, qui a cateur, 1510 ; falsification, 1369.
donné la forme masc. fest ; la forme fém.
feste est due au fait que le mot francique FALUN, terme de géologie, 1755. Ce
était fém. — Dér. : faîtage, xvie, au moyen mot se dit surtout de la Touraine où se
âge était un terme de droit féodal: fai- trouve ce genre de dépôts fossiles. Origine
tière, 1335 ; enfaîter, 1400, ren-, 1549. inconnue.
FAIX. Lat. fascis « faisceau, paquet » FALZAR « pantalon », 1878, pop. Ori-
(sens attesté en a. fr. jusqu’au xrves.), d’où gine inconnue.
« charge ». Ailleurs conservé au sens de
« faisceau » : it. fascio, esp. haz, a. pr. fais ; FAMÉ, seulement dans bien famé, xv°,
de même en wallon et en Suisse romande. et mal famé, xvirre. Dér. de l’a. fr. fame,
— Comp. : affaisser, xir1°, affaissement, XIIe, encore dans les dictionnaires sous la
1538 ; arrière-faix, 1539 ; portefaix, 1334. forme fâme, empr. du lat. fama « réputa-
tion ».
FAKIR, v. faquir. FAMÉLIQUE, xve. Empr. du lat. fame-
FALAISE, xri°, faleise; en outre, en licus, dér. de fames « faim ».
a. fr. faloise, falise. Mot dialectal, des côtes
normandes et picardes, du francique *falisa FAMEUX, xve. Empr. du lat. famosus,
correspondant à l’anc. haut all. felisa, d’où dér. de fama, v. famé.
l’all. Fels « roche ». Le gallo-roman n’ayant FAMILLE, xive; familier, xr1°; fami-
pas de proparoxytons en -esa le mot fut liarité, x11°. Empr. du lat. familia, fami-
rangé parmi les subst. en -ésa ; l’accent liaris, familiaritas. — Dér. de famille :
changea donc de place. La forme falise familial, 1865, d’après le lat. familia; de
appartient au picard et au wallon. familier, d’après le lat. familiaris : fami-
FALBALA, 1692. Signifie d’abord « une liariser, 1551 (on trouve jusqu’au xvirre s.
sorte d’étoffe plissée que les femmes por- familiariser avec).
tent au bas de leurs jupes ». Ménage rap- FAMINE, v. faim.
porte une historiette sur l’authenticité de
laquelle il est difficile de se prononcer : FANAL, 1552 (Rab., qui écrit phanal,
« M. de Langlée étant avec une couturière fanar en 1372). Empr. de l’it. fanale, qui
qui lui montrait une juppe, au bas de se rattache certainement au grec phanos
laquelle il y avait une de ces bandes plis- « lanterne », v. falot, mais sans que les
sées, il lui dit en raillant que ce falbalà intermédiaires soient sûrement établis, soit
était admirable ; et il lui fit accroire qu’on par le sicilien fano, soit par l'arabe fandär
appelait ainsi à la Cour ces sortes de ban- (du reste lui-même d'origine grecque, cf.
des... » Probabl. empr. du franco-prov. le grec byzantin phanarion et le lat. médié-
farbélla « frange, dentelle » (dès le xvrre s. ; val phanarium, d’où le fr. phanars, 1369).
aussi auvergnat ferbelà « mettre les habits
en loques »), qui remonte en dernier lieu, FANATIQUE, 1532 (Rab.), adj. au sens
avec l’a. fr. frepe (v. fripier), à un groupe de « propre à quelqu'un qui croit avoir une
de mots contenant la suite de consonnes f- inspiration divine », sens encore attesté
lp et désignant quelque chose de futile; chez Voltaire ; d’où le sens moderne qui
il apparaît pour la première fois dans une - paraît dater du xvi® s. Empr. du lat. fana-
glose du x° s., sous la forme de faluppa. licus, propr. « qui concerne le temple »,
dér. de fanum « temple » ; a pris en lat. le
FALLACIEUX, vers 1460. Empr. du lat. sens de « inspiré, en délire », en parlant
fallaciosus, dér. de fallacia « ruse, trompe- des prêtres de Cybèle, de Bellone ou d'Isis,
rie » (de fallax « trompeur », adj. de fallere parce que ces prêtres, qui se livraient à
« tromper »), d’où fallace, xrr1°, encore des manifestations violentes, logeaient dans
vivant en Normandie. les temples de ces déesses. — Dér. : fana-
tiser, 1752 ; fanatisme, 1688 (Bossuet).
FALLOIR, v. faillir.
FANCHON, 1828. Dim. familier de Fran-
FALOT « sorte de grande lanterne », çoise, dit par plaisanterie d’une coiffure de
1371. Empr. de l’it. falo, empr. d’une forme femme, analogue à une coiffure d'enfant
du bas grec *pharés, en grec class. phäros, ou de paysanne.
v. phare (le déplacement de l’accent est
dû à un croisement avec phandés «lanterne », FANDANGO, 1783 (Beaumarchais). Em-
v. fanal) ; cf. a. pr. farot, forme plus proche pr. de l’esp. fandango, d’origine inconnue,
du grec. FANE, FANER, v. foin.
FALOT « plaisant, drôle, grotesque »,
FANFAN, v. enfant.
1466. Jusqu'au xvrie s., ne s'emploie que
comme subst., cf. plaisant falot, encore en FANFARE, 1546. Mot onomatopéique;
1694; adj. dès 1655 (Molière). Probabl. d'où fanfarer, 1532 (Rab.).
empr. de l’angl. fellow « compagnon »;
comp. le passage de Rabelais, III, 47, FANFARON. Fin xvie (M. Régnier).
« Prends Millort Debitis à Calais, car Empr. de l'esp. fanfarrén, formation ono-
il est goud fallot », où Rabelais s’est amusé matopéique comme l'arabe farfär « bavard,
à franciser l’angl. good fellow pour faire un léger, inconstant », dont il est peut-être
jeu de mots. adapté, cf. aussi sicilien farfaru « fripon »
FANFARON

et it. littéraire fanfano « hâbleur » — FANTASQUE, v. fantastique.


Dér. : fanfaronnade, 1598; fanfaronner,
1642 ; fanfaronnerie, 1598. FANTASSIN, 1578 (H. Estienne, fanta-
chin; fantassin en 1584). Empr. de lit.
FANFRELUCHE, 1534 (Rab.). Altéra- fantaccino, dér. de fante, v. enfant.
tion de l’a. fr. fanfelue, cf. fanfeluce déjà
chez Christine de Pisan au sens de « baga- FANTASTIQUE, vers 1380. A signifié
telle », lat. de basse ép. famfalüca, altéra- aussi « fantasque, chimérique », jusqu’au
tion du grec pompholyxz « bulle d’air », cf. xvues. Empr. du lat. de basse ép. phantas-
la glose : « Famfaluca graece, bulla aqua- ticus (écrit aussi fan., du grec -ikés « qui
tica latine dicitur. » De même it. fanfaluca concerne l’imagination »), v. fantaisie. —
« bagatelle, flammèche ». Dér. : fantasque, 1575, d’abord (attesté
chez Ronsard), probabl. fantasie par abré-
FANGE, xrie. D'un type germanique viation, puis /fantasque, par altération
*fanga, dont le suff. -ga n’est pas bien d’après fantastique.
expliqué, mais dont le radical se retrouve
dans l’anc. gascon fanha (de *fanja, plur. FANTOCHE, 1865. Empr. de l’it. fan-
gallo-roman d’un gothique fani « boue »), loccio « poupée, marionnette », dér. de
v. encore it. fango, catalan fanc. Un fém. fante « enfant ».
analogue */annja, attesté en néerl. et en FANTÔME. Ionien “*fantagma (repré-
all. (comp. néerl. veen, all. Fenn), a donné
senté aussi dans le grec moderne), d’où
fagne en wallon, forme qui a passé en fr. *fantauma, altération, probabl. d’origine
comme terme de géologie, 1838. Aujour-
d’hui usité surtout dans les parlers méri- massaliote, du grec phaniasma; cf. de
même a. pr. fantauma.
dionaux sous les trois types fanc, fanga et
fanha. — Dér. : fangeux, x11°. FAON. A signifié d’abord le petit de
tout animal ; cf. encore en parlant du lion-
FANION, v. le suiv.
ceau La Fontaine, Fables, X, 12. Lat. pop.
FANON, xr1e, au sens de « manipule de *fétonem, acc. de felo, dér. de fêtus « nou-
prêtre » ; signifiait aussi « fanion » ; aujour- veau-né », v. foetus ; de même a. pr. fedon
d’hui, outre des acceptions techn., désigne « agneau ». Seulement gallo-roman; mais
surtout « les plis de la peau qui pendent fêtus a de nombreux représentants, cf.
au cou des bovins », 1538. Du francique roumain fät « garçon ».
*fano « morceau d'étoffe », cf. all. Fahne
« drapeau » et gonfalon. Seulement fr. — FAQUIN, 1534 (Rab.). Signifie d’abord
Dér. : fanion, 1673. « portefaix », encore au xvii® s. Dér. de
facque, attesté dans compaignons de la
FANTAISIE, xr1°, au sens de « vision », facque, terme d’argot, cité dans une énu-
sous la forme fantasie, usuelle jusqu’au mération de termes analogues, au xv® s.,
xvi® s. À signifié aussi, depuis le xrv® s. par le chroniqueur belge Chastellain (cf. en
(Oresme), «imagination », jusqu’au xvr1es., outre fasque « poche, sac », chez Rab., II,
cf. « fantaisie signifiait autrefois imagina- 16 et 30), empr. du néerl. fak « poche »
tion, et on ne se servait guère de ce mot Lane l’all. Fach). L’it. facchino vient du
que pour exprimer cette faculté de l’âme r.
qui reçoit les objets sensibles », Voltaire, FAQUIR, 1653 (écrit fakir). Empr. de
Dicl. philos., d’où le sens moderne, fin l'arabe fagir, propr. « pauvre ».
xvies. Empr. au premier sens du lat. phan-
lasia (écrit aussi f-), qui, à basse ép., a FARAMINEUX, xvire. Mot dialectal,
pris le sens de « vision », en lat. class. de’ l’Ouest ou du Centre, dér. de béte fara-
« idée, concept » (du grec phantasia « appa- mine, nom d’un animal fantastique, objet
rition », d’où « image qui s'offre à l'esprit, de superstition ou de plaisanteries dans
imagination ») ; ce dernier sens a été pris diverses régions de l'Ouest et du Centre,
par Oresme au lat. des traductions d’Aris- jusque dans le Macônnais. Faramine, at-
tote. — Dér. : fantaisiste, 1845. testé dans le Couiumier de Brelagne, vers
le xvi® s., au sens de « bête nuisible », est
FANTASIA, 1845. Empr. de l'arabe une autre forme du méridional faramio,
fantasia, empr. lui-même du grec phantasia fém., « bête sauvage », dér. de l’a. pr. feram
(v. fantaisie), et qui a pris au Maroc le « id. », lat. pop. ferämen (attesté dans le
sens de « fête brillante, splendeur ». Le mot lat. carolingien), dér. du lat, class. fera, de
a été introduit en fr. surtout en parlant même sens.
du célèbre tableau de Delacroix, Une
fantasia au Maroc, fait après.son voyage FARANDOLE, 1771. Empr. du prov.
en Afrique du Nord en 1832 (lui-même, farandoulo qui est peut-être une modifica-
dans son journal, appelle cette sorte de tion d’origine expressive de barandello « fa-
manifestations course de poudre). randole languedocienne », de la famille de
branda « branler, danser » (v. branler), croisé
FANTASMAGORIE, 1797. A servi d’a- avec des dér. occitans de flandrin, comme
bord à désigner la production dans l’ombre, flandrinä « lambiner », flandinü « cajoler ».
au moyen d’une lanterne magique mobile, L’esp. farändula « troupe de comédiens
de figures lumineuses, qui paraissent, en ambulants », attesté depuis 1603, est peut-
grandissant, marcher vers les spectateurs. être aussi empr. de l’occitan.
Formé arbitrairement avec le grec phan-
tasma, « fantôme », et allégorie, en raison FARAUD, 1743 (Vadé). Mot du langage
de l’emploi de ce mot pour désigner des pop. Empr. de l'esp. faraule (lequel est
représentations plastiques. — Dér. : empr. à son tour du fr. héraut, avec trans-
fantasmagorique, 1798. position de l’h- du mot fr. en f-) ; faraute
255 FASCINER

désignait l’acteur qui-récitait le prologue, mot fr.; farineux, 1539, rare avant le
fonction qui lui donnait une importance Xvirié s., d’après le lat. farinosus ; enfari-
fastidieuse auprès du public moyen dési- ner, XIVe,
reux de voir commencer la pièce; il a
pris ainsi le sens de « personne qui veut se FARNIENTE, 1676 (Mme de Sévigné :
mêler de tout, factotum ». « Personne n’est plus touchée que moi du
farniente des Italiens »). Empr. de l’it. far-
FARCE. Lat. pop. “*farsa, fém. pris niente « ne rien faire », v. néant.
substantiv. de *farsus, part. passé de far-
cire, V. farcir. A pris aussi le sens de « petite FAROUCHE, xxr1e (écrit faroche). Alté-
pièce bouffonne » au xv®s., probabl. parce ration, par métathèse des deux voyelles, de
que cette petite pièce était d’abord intro- forasche, xir1°, encore conservé par le ber-
duite dans la représentation d’un mystère, richon fourâche (dit d’un animal mal appri-
comme la farce qu’on introduit dans une voisé), lat. de basse ép. forasticus « étran-
volaille, etc., d’où le sens moderne de ger », d’où s’est développé plus tard le sens
« chose plaisante qu’on fait ou qu’on dit » de « sauvage, farouche », adj. dér. de foras
(le verbe farser « raïller » est déjà attesté « dehors », par opposition à domesticus. De
au x1r1®s.). Seulement fr. — Dér. : farceur, même anc. it. forastico « intraitable »,
vers 1450; signifiait aussi « auteur ou a. pr. ferotge (forme altérée, comme plu-
joueur de farces ». sieurs autres formes du fr. et des parlers
it., sous l’influencé de l’adj. ferus « sau-
FARCIN. Lat. farcimen, propr. « farce, vage », v. fier). — Dér. : effaroucher,
andouille », qui a pris le sens de « farcin », 1495.
cette affection du cheval étant caractérisée
par une éruption de boutons purulents FARRAGO, vers 1791 (Un farrago de
dont il est comme « farci », suivant l’expli- préjugés). Empr. du lat. farrago « mélange
cation que Végèce donne de l’adj. farcimi- de diverses espèces de grains pour le bé-
nosus (dér. de farciminum, « farcin » chez tail ». Vit sous forme pop. dans l’a. pr.
Végèce, dér. lui-même de farcimen). Seule- ferratja, d’où farrage en fr. au début du
ment gallo-roman. — Dér. : farcineux, XVII S.
XIII. FASCE. Terme de blason; xIve (Frois-
FARCIR. Lat. farcire « remplir, bourrer, sart). Empr. du lat. fascia « bandelette »,
farcir ». Seulement gallo-roman : a. pr. représenté par une forme pop. faisse, fré-
farsir. quente en a. fr., encore dans les patois
comme terme de vannerie. Aussi it. fascia
FARD, 1213 ; farder, xr1e (Chrétien). Le « bande, maillot », esp. haza « champ »,
verbe représente probabl. un francique propr. « bande de terre », a. pr. faissa « ban-
*farwidon « teindre » (comp. le verbe anc. delette ».
haut all. farawen, part. passé gifarwit) ; le
subst. est dér. du verbe en fr. FASCICULE, 1690, comme terme de
pharmacie : « Une certaine quantité de
FARDEAU, xrie. D'abord « paquet, bal- plantes (environ douze poignées) » ; 1793,
lot »; sens moderne, xve. Dér. roman de comme terme de librairie; une première
l’arabe fard « charge d’un chameau », formé fois, au xv® s., au sens de « petit paquet ».
probabl. dans le Levant (comp. le bas-lat. Empr. du lat. fasciculus « petit paquet (de
fardellus) ou empr. de l’it. fardello. L’esp. lettres), bouquet », dér. de fascis, v. faix.
fardel est un empr. du fr. L’a. fr. farde
« paquet » est sans doute dér. de fardeau. FASCICULÉ, 1778. Dér. sav. du lat.
— Dér. : fardier, 1771, formé avec le radical fasciculus, au sens étymologique de « petit
de fardeau. faisceau », v. le préc.
FARFADET, 1546 (Rab.). Empr. du FASCIÉ, 1737, comme terme d’histoire
prov. farfadet, altération de fadet « feu naturelle. Dér. de fascie, 1742, « bande
follet », en a. pr. « fou », dér. de fado « fée ». marquée sur certains coquillages », empr.
L'it. farfarello, de même sens, dont Dante du lat. fascia, v. fasce ; fascié, en 1737,
a fait un démon dans l'Enfer, XXI, 183, dans un gros drap d’or fascié, paraît fait
appartient à une famille de mots it. d’un directement sur le mot lat., car fascié est
autre type, mais d’où provient peut-être rarement attesté avant le x1xe 8.
la première syllabe de farfadet. FASCINATION, xive. Empr. du lat. /as-
FARFOUILLER, v. fouiller. cinatio, dér. de fascinare, v. fasciner.
FARIBOLE, 1532 (Rab.). Mot probabl. FASCINE, xvie. En a. fr. aussi faissin,
dialectal, d’une famille de mots aux formes masc. Réfection, probabl. d’après l’it. fas-
variées, cf. faribourde, xvi* s., et a. pr. fala- cina (dans son acception militaire), d’un
bourdo, etc., dont les relations entre eux a. fr. faissine « fardeau », qui représente le
et avec l’a. fr. falourde « tromperie, bourde » lat. fascina, même sens. Cf. aussi it. fascina
sont difficiles à déterminer, en raison du « fagot », esp. hacina « monceau de gerbes,
caractère instable de ces mots, et dont le de foin », également usité dans de nom-
point de départ, pour la même raison, breux parlers gallo-romans, v. fagot.
reste obscur.
FASCINER, xive. Empr. du lat. fasci-
FARINE. Lat. farina. It. a. pr. farina, nâre, dér. de fascinum « enchantement,
esp. harina. — Dér. : farinacé, 1798, le lat. maléfice ». A éliminé une forme pop. fais-
de basse ép. farinaceus est si rare qu'il a nier qui subsiste au sens de « porter mal-
dû être ignoré des savants qui ont créé le chance » sous la forme fainer dans le Maine,
FASCINER 256

cf. aussi it. affascinare « ensorceler ». — où il a été relevé en 1834 au même


Dér. : fascinateur, 1845 ; déjà créé au xvi® sens ; dér. de faucard « sorte de faux »,
(Ronsard, d’Aubigné). dér. picard de fauquer « faucher ».
Comp. le tourangeau fauchard « espèce de
FASCISME, vers 1924 ; fasciste, id. Em- serpe ».
pr. de lit. fascismo, fascisia (de fascio
« faisceau », v. faix). FAUCHER. Lat. pop. *falcäre, dér. de
falx, falcis « faux », au lieu du lat. class.
FASÉOLE, v. flageolet. metere et de secäre, « couper », en lat. aussi
« faucher », d’où l’it. segare et l’a. pr. segar.
FASHIONABLE, 1804, en parlant des Seulement fr. en ce sens. Aujourd'hui
Anglais; en parlant des Français, 1829 faucher est le terme des parlers septen-
(Balzac) ; aujourd’hui désuet ; les mots trionaux, scier celui des parlers de l'Est
de ce genre sont sujets à passer de mode. qui rejoignent segd du Sud-Est ; le Sud-
Embpr. de l’angl. fashionable, dér. de fashion Ouest dit dalhä, dér. de dalh(a) « faux »,
(du fr. façon), qui a été également empr. lat. pop. *dacülus, -la, v. dague. — Dér. :
pour désigner la mode élégante, 1830 fauchage, 1374 ; fauchaison, xr1° ; fauche,
(Balzac), mais qui a été moins usité que 1507; fauchet, 1213; faucheur, xxrie,
fashionable. quand il désigne une sorte d’araignée,
FASTE « magnificence qui s'étale », se dit faucheux, d’après la prononcia-
1540 (en outre au xvie s., fast, encore chez tion dialectale du suff. -eur ; refaucher,
Corneille). Empr. du lat. fasius, propr. 1538.
« orgueil, dédain ». FAUCILLE. Lat. de basse ép. falcicula,
dér. de falx, falcis « faux ». Rare en dehors
FASTE, adj., v. néfaste. du fr.; les parlers méridionaux, outre le
FASTES, 1488 (en parlant de l'ouvrage type faux dans le Sud-Ouest, ont un type
d'Ovide). Empr. du lat. fasti(dies)« sorte volant, d’origine gauloise, jusqu’à la Suisse
de calendrier des jours fastes », puis « liste romande, cf. a. pr. volam, qui en est
des consuls et des magistrats »; le sens le point de départ. — Dér. faucil-
fig., déjà lat., apparaît en fr., à la fin lon, xrrie.
du xvIIe $.
FAUCON. A désigné aussi à la fin du
FASTIDIEUX, xive. Empr. du lat. fasti- moyen âge un petit canon, v. coulevrine.
diosus, dér. de fastidium « dégoût », v. Lat. de basse ép. (du 1v® s.) falconem, acc.
fâcher. de falcô, d’où l’a. fr. falc. Le lat. falco est
sans doute dér. de falx « faux » au sens de
FASTIGIÉ, 1781. Empr. du lat. fasti- « oiseau qui a des griffes recourbées », les
giatus, part. passé du verbe de basse ép. mots germaniques, Cf. anc. haut all. falcho,
fastigiare (de fastigium « faîte »). d’où l’all. Falke, étant empruntés. Quel-
FASTUEUX, 1537. Empr. du lat. fas- ques-uns s'appuient sur l’a. fr. gerfaut
tuosus, en lat. class. fastosus, dér. de fastus, (d’un francique geirifalko) pour y voir un
v. faste. emprunt au germanique, mais ce mot a
très bien pu passer du francique au gallo-
FAT, 1534 (Rab. : « Fat est un vocable roman après que le germanique eût pris
de Languegoth »). Signifie d’abord « sot », falco au lat. It. falcone, esp. halcén, a. pr.
encore au XxvVII® s.; sens moderne, 1622; falc et falcon. — Dér. : fauconneau, 1498,
fatuité, xiv° (Bersuire), d’abord « sottise », au moyen âge fauconcel, en 1534 (Rab.)
développement du sens parallèle à fat. « petit canon »; fauconnerie, xive; fau-
Fat est empr. du prov. fat « sot » (aujour- connier, XII°.
d’hui « fou »), lat. jatuus, au sens de « sot », FAUFILER, v. fil.
v. fade ; fatuité est empr. du lat. fatuilas
« sottise ». FAUNE, masc., 1372. Empr. du lat.
Faunus, nom d’un dieu champêtre. —
FATAL, xive (Bersuire) ; fatalité, xve, Dér. faune, fém., 1783 (Faune Vaudoise,
Empr. du lat. fatalis (de fatum « destin »), titre ; paraît pour la première fois comme
fatalitas (créé à basse ép.). — Dér. de titre d’un ouvrage latin de Linné, Fauna
l’adj. : fatalisme, 1724; fataliste, 1584, Sueciae regni; formé d’après Flora, fr.
rare avant le XvIrIeSs. {lore) ; faunesse, 1872.
FATIDIQUE, xve. Empr. du lat. faii- FAUSSAIRE, xrie. Empr. du lat. falsa-
dicus « qui prédit le destin », v. le préc. rius.
FATIGUER, xive. Empr. du lat. fati- FAUSSER. Signifiait aussi au moyen
gare. — Dér. : fatigue, id. âge « falsifier » et « accuser de fausseté ».
Lat. de basse ép. falsäre. — Dér. : fausset
FATRAS, 1320 (écrit fastras) ; mais le « cheville enfoncée dans un trou fait dans
dér. fatrasie « sorte de pièce de vers », date un tonneau au moyen d’un foret », 1322,
du xir1e s. Représente un dér. du lat. far- dér. de fausser au sens d’ « endommager,
sura « remplissage », avec le suff. -aceus. enfoncer »; le mot a été formé au sens
Seulement fr. L’a. fr. fastrouiller (au xvires. actif de « qui enfonce » avec le suff. -et,
fatrouiller) « bafouiller ». — Dér. : fatras- cf. foret, littéral. « qui fore » ; l’anc. gascon
sier, 1611.
falset est probabl. empr. du fr.
FAUBOURG, v. bourg. FAUSSET « voix », v. faux, I.
FAUCARDER, 1840. Empr. du picard FAUSSET, v. fausser ; faux, adj.
257 FÉLIBRE

FAUTE. Lat. pop. “*fallila « manque, lat. febrifugia, nom de la centaurée (comp.
action de faillir », fém. pris substantiv. de de febris « fièvre » et de fugare « mettre en
*fallitus, au lieu du lat. class. falsus, part. fuite »).
de fallere, v. faillir. De même anc. it., a. pr.
falta. — Dér. : fauter, 1877, en parlant FÉBRILE, 1503. Empr. du lat. de basse
d’une femme ; déjà attesté en 1568, au ép. febrilis.
sens général de « commettre une faute »; FÉCAL, 1503. Dér. sav. du lat. faex,
fautif, xv°. faecis, « lie, résidu, excréments ».
FAUTEUIL. D'abord faldestoel (-stoed de FÈCES, xvi® (Paré). Empr. du lat. fae-
la Chanson de Roland est peut-être une ces, plur. de faex.
faute de copiste), puis faldesiueil, xrtre,
faudeteuil, encore en 1611, contracté en FÉCOND, xr11e ; féconder, xrr1° ; fécon-
fauteuil, 1642. Au moyen âge désigne un dité, xie (Alexis). Empr. du lat. fecundus,
siège pliant qui servait pour les grands per- fecundare, fecunditas. — Dér. : féconda-
sonnages, rois, évêques, seigneurs. Du teur, xvi11° s. ; fécondation, 1729, une pre-
francique *faldistél, cf. anc. haut all. fali- mière fois en 1488.
stuol, propr. « siège pliant » (cf. all. falien FÉCULE, 1690 ; féculent, xvi® (Paré),
« plier » et Siuhl « siège »). Empr. au fr. au sens de « qui laisse un dépôt » ; a suivi
par les langues voisines : it. faldistorio le sens de fécule. Empr. du lat. faecula
« siège épiscopal », esp. facisiol « lutrin », « sorte de condiment, marc de raisin brûlé
a. pr. faldesiol « fauteuil, trône, lutrin ». (pour servir de remède) » (de faex « lie »),
Aujourd’hui répandu sur tout le territoire en vue de son sens spécial, et du dér. faecu-
ge sous la forme et avec le sens lentus. — Dér. de fécule : féculerie, 1836.
u fr.
FÉDÉRAL, 1783. — Dér. fédéralisme,
FAUTEUR, 1323 (sous la forme faule- 1789 (Robespierre). Dér. sav. du lat. foe-
res). Ordinairement avec un sens défavo- dus, foederis « alliance ». — Dér. : fédéra-
rable. Empr. du lat. fautor « qui favorise, liste, 1792.
partisan » (du verbe favere « favoriser »).
FÉDÉRATIF, 1748 (Montesquieu), de-
FAUVE, vers 1080 (Roland). Comme venu usuel sous.la Révolution; fédéré,
terme de chasse, 1573. Du germ. occidental 1790, une première fois en 1521 ; fédéra-
*falwa-, cf. all. falb; de même it. falbo. tion, id., déjà empr. au xIve et au xv®s.
a. pr. falp. — Dér. : fauvette, xrr1°. Les deux premiers sont dér. du lat. foede-
FAUX, adj. Lat. falsus, part. passé de ratus « allié », le troisième est empr. du
fallere, au sens de « tromper », v. faillir. lat. foederatio.
It. falso. — Dér. : fausset, en parlant de la FÉE. Lat. pop. faia, issu Ge faium « des-
voix, xrr1e ; fausseté, xr1°, d’après le lat. tin », cf. le lat. des Inscriptions Faia
de basse ép. falsitas ; défausser (se), 1792, « déesse de la destinée » ; les fées passaient
formé sur le fém. fausse, « se débarrasser en effet pour avoir un pouvoir surnaturel
d’une fausse carte ». sur la destinée humaine. It. fala, esp. hada,
FAUX, subsi. Lat. falx. It. falce, esp. a. pr. fada. — Dér. : féerie, x11°, d’abord
hoz « faucille », a. pr. fals. Faux n'existe faerie, encore au xv® s., terme de théâtre,
que dans les parlers septentrionaux ; au 1823; féerique, 1834.
sud d’une ligne allant de la Loire au Jura, FEINDRE. Au moyen âge, se feindre,
la faux est désignée par des représentants surtout dans des phrases négatives, signifie
du lat. pop. *daculus, *dacula, v. faucher; « hésiter ». Lat. fingere, propr. « façonner »,
toutefois le type faux subsiste au sens de d’où «inventer, imaginer », d’où « feindre ».
« faucille » dans le Sud-Ouest. It. fingere, a. pr. fenher, même développe-
ment du sens au réfléchi qu’en fr. — Dér. :
FAVEUR, vers 1150. Le sens de «ruban »
feinte, xiIrI°.
vient de celui de « ruban, écharpe, etc.,
donnés par une dame à son chevalier », FELDSPATH, 1773. Empr. de l’all.
1564. — Dér. : favoriser, 1330, d’après Feldspath « spath des champs ».
le lat. favor ; défavoriser, xv°; défaveur,
XVe. FÊLE, v. fistule.
FAVORABLE, vers 1150. Empr. du lat. FÊLER, 1422. Forme contractée, issue
favorabilis. — Dér. : défavorable, xve. de faieler, attesté indirectement par le dér.
faieleure, xiu° s., aujourd’hui fêlure. Re-
FAVORI, 1535 ; favorite, 1564. Empr. de présente le lat. flagellare « fouetter »; les
l’it. favorito, part. passé de favorire « favo- félures d’un vase ont été comparées aux
riser ». — Dér. : favoritisme, 1819, fait sur traces que le fouet laisse sur la peau. Le
le modèle de népotisme. premier {, qui est tombé en fr. par dissi-
FAYOT, v. flageolet. milation, est conservé dans le normand
fléler. Seulement fr.
FÉAL, v. foi.
FÉLIBRE. Vers 1870. Empr. du prov.
FÉBRICITANT, 1330. Empr. du lat. fe- felibre, pris dans un récit pop. où il est
bricitans, part. prés. de febricitare « être parlé des « sept félibres de la Loi » et choisi
atteint de fièvre ». en 1854, lors de la fondation du Félibrige
FÉBRIFUGE, xvue (La Fontaine, en par Mistral et six poètes de ses amis. Pro-
parlant de la centaurée : « La centaurée... babl. empr. du lat. de basse ép. fellibris,
fébrifuge certain »). Fait sur le modèle du forme secondaire de fellebris « nourrisson »,

DICT. ÉTYM. 17
FÉLIBRE 258

dér. de fellare « sucer », les savants étant FENÊTRE. Lat. fenestra. — Dér. et
ainsi désignés comme ceux qui boivent Comp. : fenêtrage, 1230 ; fenêtré, xve, on
directement au sein de la science (expli- dit aussi fenestré, comme terme techn.
cation de Mistral). — Dér. : félibrige, 1876. d’après le lat. fenestra; contre-fenêtre,
FÉLICITÉ, xin°; féliciter, xve. Empr. TSI
du lat. felicitas, felicitare. — Dér. : félici- FENIL. Lat. fenile, dér. de fénum « foin ».
tation, 1623 (d’Aubigné qui l'indique com- It. fienile, esp. henil, a. pr. fenil.
me un mot de Genève) ; en 1690, Th. Cor-
neille dit encore : « Je hazarderois... « Je FENOUIL. Lat. pop. *fenuc{u)lum, lat.
lui ay écrit un compliment de félicita- class. feniculum, propr. « petit foin ». It.
tion », s’il est permis de parler ainsi. » finocchio, esp. hinojo, a. pr. fenolh. —
Dér. : fenouillet, 1628 ; fenouilette, xvire,
FÉLIN, 1792. Empr. du lat. felinus, dér.
de feles « chat ». FENUGREC, xr11e, d’abord fenegrec. Em-
pr. du lat. fenugraecum, littéral. « foin
FELLAH, 1829 ; on trouve félaque en grec >.
1735, fela en 1665 (Thévenot). Empr. de
l’arabe falldh « cultivateur ». FÉODAL, 1328. Empr. du lat. médiéval
feodalis, dér. de feodum, une des formes
FÉLON, vers 980 (Passion; en a. fr. lat. de fief. — Dér. : féodalité, 1515.
la forme du cas sujet est fel). A: pr. fel, FER. Lat. ferrum, It. ferro, esp. hierro.
felon. Lat. carolingien fello, cf. fellones, — Dér. : ferraille, 1390 ; ferrailler, 1665
plur., dans les Capitulaires de Charles le (Quinault), ferrailleur, 1630 ; ferret, x1v® ;
Chauve. Très probabl. d’un francique ferronnerie, 1297, par l'intermédiaire de
*/illo, réduction de *filljo « celui qui fouet- ferronnier, lui-même dér. de ferron, xr1°,
te, qui maltraite (les esclaves) », nom « marchand de fer ». — Comp. : fer-blanc,
d’agent dér. du verbe francique correspon- 1384, ferblantier, 1723, ferblanterie, 1845.
dant à l’anc. haut all. fillen « fouetter ».
L’it. fello, fellone vient du gallo-roman. — -FÈRE. Suff. de mots sav., tiré du lat.
Dér. : félonie, vers 1050 (Alexis). -fer « qui porte », issu du verbe ferre « por-
ter ».
FELOUQUE, 1608; d’abord pelouque,
1595, falouque, 1606. Empr. de l'esp. faluca, FÉRIÉ, xive, rare avant le xvire 5.
probabl. de l’arabe faläwa « poulain ; petit Empr. du lat. feriatus, dér. de feriae « jours
bateau de transport », qui a passé d’abord consacrés au repos ».
en cat. sous la forme falua (x1ve s.), d’où FÉRIR. Ne s'emploie plus que dans la
l'esp. falüa, ensuite faluca. locution sans coup férir et au part. adj.
FEMELLE. Lat. fémella, dim. de fémina; féru. À été usuel jusqu’au xvi®s. ; quelques
restreint dans le parler pop. au sens de traces au xvrie s. La prononciation de l’é
« femelle ». À. pr. femela, catalan femella. est peut-être due à un croisement avec fer.
Lat. feritre. It. fiedere (vieilli), esp. herir.
FÉMININ, x11e. Empr. du lat. femininus. FERME, adj. Ferme, qui servait d’abord
FÉMINISTE, 1872 (A. Dumas fils). Dér. seulement pour le fém., a éliminé le masc.
sav. du lat. femina; d’où féminisme, fer(m) avant le xrve s. Lat. firmus. It.
fin xixe. fermo, à. pr. ferm. — Dér. : affermir, 1372,
affermissement, 1551, raffermir, 1394,
FEMME. Lat. fémina « femelle », d’où raffermissement, 1669.
« femme » en gallo-roman, qui a développé
FERME, subsi., v. fermer.
aussi celui d’ « épouse », cf. a. pr. femna
et tous les parlers contemporains. Au con- FERMENT, xive ; fermenter, vers 1270 :
traire lit. femmina, l'esp. hembra et le port. fermentation, 1539. Empr. du lat. fermen-
femea ne signifient que « femelle ». Le lat. tum (mot de la famille de fervere « bouil-
class. uxor « épouse » n’a laissé que quelques lir »), fermeniare, fermentatio.
traces, cf. a. fr. oissour et a. pr. oissor ;
mais mulier « femme » existe encore par- FERMER. Signifiait propr. « rendre
tout : it. moglie, esp. mujer, sauf dans le ferme », d’où « fortifier (usuel jusqu’au
gallo-roman qui l’a du reste possédé au Xvi® s.), fixer, décider, etc. »; le sens de
moyen âge, cf. a. pr. molher et a. fr. moil- « fixer » survit encore dans quelques accep-
lier, encore chez Villon. — Dér. : femme- tions techn., celui de « clore » apparaît au
lette, xive (G. de Machaut : fameleite). X11° 8., V. le comp. enfermer. À peu à peu
supplanté le verbe clore, qui, maintenant,
FÉMUR, 1586 ; fémoral, 1790. Empr. du est vieilli. Lat. firmäre, dér. de firmus, v.
lat. class. femur et de son dér. femoralis. ferme, adj. L’it. fermare a développé des
sens différents : « arrêter, conclure » ;
FENAISON, v. foin. l’a. pr. fermar a des sens plus proches de
ceux du fr. : « fixer, assurer, confirmer ».
FENDRE. Lat. findere. It. fendere, esp. — Dér. au sens juridique : ferme, subst.,
hender. — Dér. et Comp. : fendeur, 1403: XI11°, désigne une convention, souvent une
fendiller, xvie (B. Palissy) ; fendoir, 1700 ; convention relative à un domaine rural,
fente, qui remonte à un part. *finditus, d’où spécial. « domaine rural » (le lat. mé-
disparu de très bonne heure; pourfendre, diéval à aussi firma qui peut être fait sur
xl1°, pourfendeur, 1798; refendre, 1320, ferme), en outre autres sens techn. ; d’où
refend, 1423, affermer, vers 1170 ; fermage, 1367 ; fer-
259 FÉTICHE

mier, 1207, dont le sens rural subsiste seul dictionnaires comme terme de boucherie
aujourd’hui (pour un immeuble urbaïin on et de corroierie, lat. pop. *natica, lat.
dit locataire). — Dér. et Comp. au sens class. natis, d’où aussi it. nalica, esp. nalga,
concret : fermeture, xIv°, au sens moderne, a. pr. naggas (lire natjas) et quelques
se trouve au xxtIe s. au sens de « forte- traces dans les parlers gallo-romans con-
resse », doit sa forme avec { à fermeté; temporains. — Dér. : fessier, subsi., xvi®
fermoir, x111° ; enfermer, xr1°; refermer, (Marot), adj., xvi® (Paré) ; fessu, xrxre.
xlie, développement du sens parallèle à
fermer. FESSER, 1489. Les formes comme nor-
mand fessier montrent que le radical de
FERMETÉ, xu1°, au sens moderne ; au ce verbe s’est terminé sur une consonne
moyen âge et dès le xr1° s., signifie aussi palatale. C’est donc un dér. de l’a. fr. fece
« fortification, forteresse ». Empr. du lat. (pour *faisce) « hart », du lat. fascia «lien ».
firmitas « fermeté, force d'âme » dér. de Ce subst. ayant disparu de la langue, le
firmus, v. ferme. Firmitas avait pris dans verbe fut rattaché au subst. fesse « moitié
le lat. pop. de la Gaule le sens de « forte- du derrière de l’homme », et la nuance
resse », d’où l’a. fr. ferlé, conservé aujour- sémantique en fut légèrement modifiée en
d’hui dans des noms de ville (La Ferté) ; « battre en donnant des coups sur les fesses »
par suite, firmilas a reçu le sens de « forte- (de *« battre avec des verges »). — Dér.
resse » en lat. médiéval, d’où l’a. fr. fermeté fessée, 1526. — Comp. : fesse-mathieu,
et l’a. pr. fermetat. XvVI® (N. du Fail : « À Rennes on l’eust
FÉROCE, xv°, au sens « farouche, or- appellé fesse-mathieu, comme qui dirait
gueilleux », encore chez La Bruyère ; féro- batteur de saint Mathieu, qu’on croit avoir
cité, xIII1°, mais rare au moyen âge; a esté changeur »), cette explication (où il
parfois le sens de « fierté ». Empr. de l’adij. faut comprendre « qui bat saint Mathieu
lat. ferox « fier, orgueilleux », et de son pour lui tirer de l’argent ») est appuyée
dér. ferocilas « fierté, orgueil », qui ont par les comp. fesse-maille « avare », fesse-
pris le sens de « féroce, férocité » à basse ép. pinte « ivrogne », fesse-cahier « copiste
gagnant sa vie à faire des copies ».
FERRADE, 1836. Empr. du prov. fer-
rado, dér. du verbe ferra « ferrer », parce FESTIN, 1526, une première fois en 1382.
qu’on marque au fer l'animal terrassé. Empr. de l’it. festino, dér. de festa « fête ».
— Dér. : festiner, 1350.
FERRER. Lat. pop. *ferrare. It. ferrare,
esp. herrar, a. pr. ferrar. — Dér. et Comp. : FESTIVAL, 1838. Empr. de l’angl. fes-
ferrure, 1260 (Ë. Boileau) ; déferrer, x1I°; tival, propr. « fête », lui-même empr. de
enferrer, id.; referrer, xr1°; maréchal- l’a. fr. festival, adj., dér. du lat. médiéval
ferrant, v. maréchal. festivus « de fête ».
FERRONNIÈRE, chaîne entourant la FESTON, 1533. Empr. de l'it. fesione,
tête et portant au milieu un bijou qui orne dér. de fesla « fête », propr. « ornement
le front, 1832. Ainsi nommé d’après le de fête ». — Dér. : festonner, xvV®-XVI® s.
portrait de la Belle Ferronnière (par L. de FÊTE. Lat. fesia (sous-entendu dies),
Vinci) qui porte cet ornement. fém. pris substantiv. de l’adj. festus « de
FERROVIAIRE, vers 1900. Empr. de fête ». Au sens de « fête patronale », concur-
lit. ferroviario (de ferrovia « chemin de rencé dans les parlers gallo-romans contem-
fer ») pour servir d’adj. à chemin de fer. porains par des termes variés, v. notam-
ment assemblée, dédicace, frairie, vogue
FERRUGINEUX, 1610. Dér. sav. du (sous voguer). — Dér. fêtard, 1859,
lat. ferrugo, -ginis « rouille du fer », en vue d’après l'expression faire la fête; fêter,
d’un sens spécial de « qui contient du fer ». xrIe; festoyer, xr1° (fesieer) ; la pronon-
ciation actuelle de l’s est due à ce que,
FERRY-BOAT, 1890. Empr. de l’angl. après être sorti de l’usage courant, le mot
ferry-boat. — Comp. de ferry « bac » et boat a été réintroduit d’après l’ancienne gra-
« bateau ». phie ; fesioyer est un verbe du langage
-marotique ; la prononciation fétoyer est
FERTILE, xive ; fertilité, xive (Oresme). encore recommandée par l’Académie et
Empr. du lat. fertilis, fertilitas. — Dér. de Voltaire écrit féloyer. — Comp. : fête-
l’adj. : fertiliser, 1564 (Ronsard), fertilisa- Dieu, 1521, fête instituée en 1264 par Ur-
tion, 1764 (Voltaire), fertilisable, 1865. bain IV, sous le nom de corpus domini,
FÉRULE, 1372, comme nom de plante ; qui se dit en it., ou de corpus Christi, qui
1385, au sens de palette servant à frapper se dit en esp., d’où aussi corpus, aujour-
les écoliers dans la main. Empr. du lat. d’hui en languedocien et en catalan, et le
ferula qui a les deux sens. type corps de Dieu dans le Sud-Ouest;
dite aussi féle du saint sacrement, encore
FERVENT, xn° ; ferveur, id. Empr. des usité notamment en picard et en normand.
mots lat. fervens et fervor, part. et nom
d’action de fervere « bouillir ». FÉTICHE, 1669 (et fetiso en 1609). Em-
pr. du port. feilico, propr. adj. signifiant
FESSE. Lat. pop. *fissa, plur. neutre « artificiel », puis subst. au sens de « sorti-
! pris comme fém. de fissum « fente », dér. lège, objet enchanté », cf. de même esp.
de findere « fendre ». Seulement fr. en ce hechizo, aux mêmes sens, lat. faciicius, v.
sens. A éliminé l’a. fr. nache (ou nage), factice. — Dér. fétichisme, 1760 (de
usuel jusqu’au xvi® s., encore dans les Brosses : « Le culte... de certains objets
FÉTICHE 260

terrestres et matériels appelés fétiches… et FEUTRE, xrre. Francique. *filtir, cf. all.
que par cette raison j’appellerai féti- Filz, angl. felt; de même it. feltro, a. pr.
chisme »). felire; l'esp. fiellro doit remonter à une
base “*fellir, peut-être d’origine suébique.
FÉTIDE, xve. Empr. du lat. foelidus, — Dér. : feutrer, xrie.
dér. de foetere « puer ». — Dér. : fétidité,
1754. FÈVE. Lat. faba. It. a. pr. fava, esp.
haba. — Dér. : féverolle, début xIv® (fave-
FÉTU. Lat. de basse ép. fesiücum, lat. rolle).
class. fesiüca. D’après les deux formes, it.
festuca et -tuco, a. pr. festuga et -tuc. FÉVRIER. Lat. de basse ép. febrärius,
lat. class. februärius, cf. les formes de jan-
FEU, subsi. Lat. focus, propr. « foyer », vier. It. febbraio, esp. arch. hebrero, a. pr.
qui a pris dès l’époque impériale le sens feurer, etc.
de « feu » et éliminé le lat. class. ignis. It.
fuoco, esp. fuego, a. pr. foc. — Dér. : fouée, FEZ, 1677 (écrit fes) ; fez en 1787 (Peys-
xI1e, — Comp. : feu-follet, v. fou ; contre- sonnel, consul à Smyrne). Tiré de Fez, nom
feu, 1531 ; feu-Saint-Elme, v. elme. de la capitale du Maroc, où cette coiffure
était fabriquée et d’où elle était exportée
FEU, adj. D'abord faü, feü; puis feu. dans les principaux pays islamiques.
Lat. pop. *fatütus, dér. de fatum « destin »,
propr. « qui a une bonne ou une mauvaise FI. Onomatopée.
destinée », cf. mal faüt (Alexis), d’où « qui FIACRE, 1650 (Ménage). Nom propre;
a accompli sa destinée » ; ce sens a éliminé
cf. ce que dit Ménage : « On appelle ainsi
le premier dès le xrr1° s. Seulement fr. à Paris, depuis quelques années, un car-
L’a. pr. a une forme analogue mal fadat
rosse de louage ; à cause de l’image de
« qui a une mauvaise destinée », mais dont
saint Fiacre, qui pendoit à un logis de la
le sens ne s’est pas développé comme en
fr. L’it. fu vient du fr. ; v. fée. rue Saint-Antoine, où on trouvoit ces
sortes de voitures. C’est dont je suis témoin
FEUDATAIRE, xve. Empr. du lat. mé- oculaire ».
diéval feudaiarius, dér. d’une des formes FIANCER, v. fier.
lat., feudum, de fief, v. féodal, fief,
FIASCO, dans faire fiasco, 1820. Empr.
FEUILLE. Lat. pop. folia, plur. neutre, de l’it. far fiasco, dit d’abord d’une œuvre
pris comme fém., du lat. class. folium, dramatique ou musicale mal accueillie par
représenté en a. fr. par une forme fueil; le public ; far fiasco (attesté depuis 1808)
l’emploi de folia, propr. collectif, s'explique est très probabl. pour appiccar il fiasco
par le sens de « feuillage d’un arbre ». Con- ad alcuno « diffamer qn » (dès le xve s.),
servé partout, d’après les deux formes du de l’habitude qu'on avait de suspendre
lat. : it. foglio et foglia, esp. hoja, a. pr. un fiasco sur le devant d’une maison où
folh et folha ; les parlers gallo-romans au- on avait ouvert un débit de vin.
jourd’hui n’ont plus guère que des formes
fém. pour désigner une feuille d’arbre, FIASQUE, 1852. Empr. de l'it. fiasco
tandis qu’au sens de « feuille de papier » « bouteille à large panse », lui-même
le masc. est encore assez vivace en prov. empr. du germ. flaska.
L’it. foglio et l’a. pr. folh désignent notam- FIBRE, 1372. Empr. du lat. fibra. —
ment une feuille de papier. — Dér. : feuil- Dér. : fibreux, 1545 ; fibrille, 1701 ; fibrine,
lage, 1324 ; feuillaison, 1763 ; feuillée, xrre ; 1799 ; fibrome, 1856 ; fibrane, 1941, créé
feuiller, id. « garnir de feuilles »; feuillet, par les techniciens pour distinguer les tissus
x11e; feuilleter, xrr1e; feuilletage, xvre; de fibres coupées. — Comp. : Nombreux
feuilletis, 1755 ; feuilleton, 1790, comme mots sav. avec fibro- comme premier élé-
terme de reliure, au sens moderne, 1811 ; ment.
feuilletonniste, 1839 (Balzac) ; refeuilleter,
xXvi® (Ronsard); feuillu, xr1°; feuillure, FIC, v. figue et verrue.
1334, « entaille faite pour recevoir une
partie saillante »; dér. de feuiller au sens FICELLE, 1564, auparavant fincelle,
de « faire une feuillure », 1357, qui dérive 1350. Représente probabl. un lat. de basse
lui-même de feuille, par comparaison de ép. *funicella, dim. de funis « corde »,
l’entaille dite « feuillure » avec une feuille, dont la voyelle a été modifiée sous l’in-
cf. en all. Verblattung « feuillure », dér. de fluence de fin (au sens de « petit bout d’un
Blaït « feuille » ; défeuiller, xrr1e ; effeuiller, objet »), et transformé par la suite en fi-
XIV. sous l'influence de fil, prononcé souvent
fi. Seulement fr. Ficelle au sens de « ruse »,
FEUILLETTE, fût de contenance variée, puis de « rusé, trompeur », 1808, vient
aujourd’hui d'environ 114 à 140 litres, d’expressions du théâtre des marionnettes.
suivant les pays, xv°. Souvent altéré en — Dér. : ficeler, 1694 ; déficeler, 1755.
lillette, 1387. À peut-être signifié d’abord
« tonneau de jauge » ; en ce sens, pourrait FICHE, v. le suiv.
dériver de feuiller « faire une feuillure (pour FICHER. Lat. pop. *figicäre, devenu de
jauger) »; toutefois feuillure n’est pas at- bonne heure *ficcäre dér. de figere « atta-
testé au sens d’ «entaille dans un tonneau ». cher, fixer ». It. ficcare, esp. hincar, a. pr.
FEULER, fin xixe; se dit surtout du ficar. Ficher est usuel depuis le xvrre s.,
tigre. Onomatopée. — Dér. : feulement, id. comme euphémisme de fouire (parfois fiche,
d’après l’inf. foutre, d’où aussi l’interjection
FEURRE, v. fourrage. fichtre); de là le part. passé fichu, 1611,
261 FIGER

d’après foutu, d'où .fichu, 1701, subst., FIENTE. Lat. pop. */emila, dér. de *fe-
probabl. au sens de « mis à la hâte »; fi- mus, altération du lat. class. fimus, d’après
chaise, 1756 (Vadé). — Dér. : fiche, 1413 siercus, v. fumier. Esp. arch. hienda, a. pr.
(déjà « pointe » au xr1° s.), d’abord pour fenda, fenta, etc. — Dér. : fienter, xIve.
désigner des pieux, des clous, des attaches,
etc., puis, par comparaison, « marque de FIER, verbe. Depuis le xvri® s. ne s’em-
jeu », dès le xvire s., d’où diverses sortes ploie plus que comme réfl. ; la construction
de cartes (de bibliothèque), etc. ; fiche de active a toujours été moins usuelle, même
consolation est propr. un terme de jeu, qui au moyen âge. Lat. pop. *fidäre « confier »
désignait des fiches d’un nombre détermi- dér. de fidus « fidèle ». It. fidare, esp. fiar,
né qu’on ajoutait à celles qu’un joueur a. pr. fizar. — Dér. et Comp. : fiancer,
avait gagnées, pour lui assurer un certain XII*, propr. « prendre un engagement »,
bénéfice, d’où le sens fig. au xvirie s. ; d’où jusqu’au xve s., d’où le sens moderne dès
fichet, 1680 ; afficher, vers 1080 (Roland), 1283 (Beaumanoir), par l'intermédiaire
signifie au moyen âge « ficher, fixer » et au d’un anc. fiance « engagement »; d’où
fig. « déclarer, affirmer » ; le sens moderne fiançailles, xr1e, développement du sens
vient de celui de son dér. affiche, à partir parallèle au verbe; défier, vers 1080 (Ro-
du xvres. ; ce dér. date d’av. 1204 et signi- land), d’abord terme de féodalité « renon-
fie au moyen âge surtout « boucle, agrafe », cer à la foi jurée », d’où, d’une part, «enle-
v. affiquet, le sens moderne date du xv®s. ; ver la confiance » et d’autres part, « provo-
d’où affichage, 1792. quer » ; se défier de, seulement à partir du
xvi® s., a été fait d’après le lat. diffidere
FICHTRE, FICHU, v. ficher. (on trouve difier au xr1° s.), d’où défiance,
xI1e, au sens de « défi », sens moderne au
FICTION, xirre. Empr. du lat. ficiio, XvI® s., défi, fin xve; méfier, fin xv®°,
dér. de fictus, part. passé de fingere « in- méfiance, xv° s.
venter », v. feindre. — Dér. : fictif, 1609;
une première fois au xv® s. ; formé d’après FIER, adj. D'abord « farouche », « dur,
terrible », usuel jusqu’au xvire s. ; le sens
le lat. fictus. moderne apparaît au xr1° s. La prononcia-
FIDÉICOMMIS, xr11°, dans une traduc- tion de l’r final est due à la fois au fém.
tion du Digeste; rare au moyen âge; et à fierté. Lat. ferus « sauvage, farouche » ;
fidéicommissaire, x111e, id. Empr. du lat.
apparaît déjà à basse ép. avec le sens
juridique fideicommissum, propr. « confié d’ « audacieux ». It. fiero « sauvage, fier »,
a. pr. fer « sauvage ». Dans les parlers de
à la bonne foi de quelqu'un », et de son l'Est signifie « âcre », depuis le xvie s.,
dér. fideicommissarius. notamment en parlant d’un fruit qui n’est
FIDÈLE, x°s. ; fidélité, vers 1300. Empr. pas mûr. — Dér. : fiérot, 1808, une fois
au xvie s.; fierté, vers 1080 (Roland),
du lat. fidelis (de fides « foi »), fidelitas.
L'a. fr. a possédé des formes pop. feeil, d’après le lat. feritas; cf. aussi a. pr.
feoil, feelté, feeulé qui paraissent avoir été fertat; développement de sens parallèle à
moins usitées que feal, feallé, feauté, avec fier.
lesquels elles ont fini par se confondre, FIER-A-BRAS, xive. Tiré du nom pro-
v. foi. pre d’un géant sarrazin des chansons de
geste, dont la forme n'est pas claire; fera
FIDUCIAIRE, 1593. Empr. du lat. juri- bracchia « bras redoutables », qui se trouve
dique fiduciarius, dér. de fiducia « con- dans une traduction latine du moyen âge,
fiance », de la famille des préc. peut être une interprétation de savant.
FIEF. D'abord fieus, cas sujet, fieu, cas FIEUX, v. fils.
complément, d’où fief, xit1, avec un f
final qui s'explique probabl. par les dér. FIÈVRE. Lat. febris. It. febbre, esp.
comme le verbe a. fr. fiever, cf. la forme arch. hiebre, a. pr. febre. — Dér. : fiévreux,
du lat. médiéval fevum. Francique */éhu- x11e; fiévrotte, 1673 (Molière) ; enfiévrer,
« bétail », cf. all. Vieh « bétail » et alleu; 1588 (Montaigne, au sens propre ; d’abord,
transcrit en latin carolingien fevum, feu- enfibrer, vers 1500), sens fig., 1775 (Beau-
dum, feodum, 1x° (premier texte en 881, marchais).
charte de Cluny) et xe s., d’après allodium, FIFRE, 1507. Empr. du suisse all. pifer,
y. féodal, feudataire ; du sens propre a pris,
comme le lat. pecunia « richesse » qui propr. « celui qui joue du fifre (pfife) »
(ef. all. Pfeifer « id. »), introduit par les
dérive de pecus « bétail », les sens de «bien»,
puis a servi, lors de l’établissement de la mercenaires suisses.
féodalité, à désigner un bénéfice hérédi- FIFRELIN (ou fiferlin), 1867. Mot pop.,
taire, feudum ayant succédé à beneficium. empr. de l'all. Pfifferling « sorte de cham-
L’it. fio vient du gallo-roman. — Dér. : pignon », propr. « peu de chose ».
fieffer, x11e, sens fig., au part passé, 1655
(Molière : « Filous fieffés »). FIGARO, 1840. Substantification du
nom du héros de la pièce de Beaumar-
FIEL. Lat. fel, propr. « vésicule qui con- chais (1775).
tient la bile », d’où « bile »; sens fig. dès
le lat. class. It. fiele, esp. hiel (fém.), a. pr. FIGER. D'abord fegié, xti°, d’où feger,
fel (quelques parlers gallo-romans de l'Est encore usuel dans les parlers de l'Ouest,
disent amer). — Dér. : fielleux, xvi° (Ron- puis figer, xinie, peut-être d’après la forme
sard) ; enfieller, xrr1°, rare avant le xvi®s.
fie « foie » du picard. Lat. pop. */ëlicäre,
FIGER 262

dér. de */élicum « foie », propr. « prendre mis » (dont le développement sémantique


l’aspect du foie », cf. pour le sens Soignies n’est pas clair), défilement, 1803 ; mortil,
sang foilé « sang caillé », dér. de foite 1611, comp. de mort, part.
« foie ». Seulement fr.
FILAMENT, 1538. Empr. du lat. médié-
FIGNOLER, v. fin, adj. val filamentum, attesté en lat. de basse
ép. au sens d’ « étoffe de fil ». — Dér. :
FIGUE, xr1° (figes ; rarement fie). Em- filamenteux, 1588.
pr. de l’a. pr. figa, lat. pop. “*frca, issu,
sur le modèle des nombreux noms de fruits FILANDRE, v. filer.
en -a, du lat. class. ficus, fém., à la fois FILANZANE, fin xixe. Empr. d’un par-
« figuier » et « figue », d’où it. fico, aux ler des indigènes de Madagascar.
deux sens, esp. higo « figue ». Ficus avait
aussi le sens de « verrue », d’où le fr. fic, FILASSE. Lat. pop. “*/iläcea, dér. de
jusqu’au xvi® s. fi, encore usité dans de ftlum « fil ». It. filaccia (fém. plur.), esp.
nombreux patois. La locution moilié figue, hilaza, a. pr. filassa.
moitié raisin, qui apparaît dès 1487, passe
pour rappeler une fraude dont les commer- FILER. Lat. de basse ép. filare. It.
çants vénitiens, qui achetaient du raisin filare, esp. hilar, a. pr. filar. Filer, au sens
de Corinthe, autrefois rare et cher, au- fam. de « s’en aller », peut se rattacher à
raient été victimes ; cette locution vien- la fois au sens de « se dérouler comme un
drait donc de l’Italie, mais elle n’y a pas fil », terme de marine, en parlant d’un
été signalée. Faire la figue à quelqu'un, câble, xvie, et de la vitesse d’un navire,
attesté dès le x1r11° s., est empr. de lit. far ou à celui de « s’en aller » en parlant d’une
la fica, le fiche, relevé à la même date, qui troupe, xvi*; filer doux, fin xve, paraît se
désigne propr. un geste de dérision, d’in- rattacher à ces locutions. — Dér. et Comp. :
tention obscène, fica ayant pris en it. le filage, x111°; filandre, xiv°, au lieu de
sens de « vulve de la femme ». — Dér. : *filande, d'où filandreux, 1603; filature,
figuier, x111° (figiers ; rarement fier, d’a- 1724, d'où filateur, 1823; file, xve, d’où
près fie). (d”) affilée, vers 1850 ; défiler « aller à la
file », 1648, défilé, 1643 (Rotrou) ; faufiler,
FIGURE, x° (Sainie Eulalie); figurer, 1684, altération de forfiler, 1349 (fourfi-
x1e ; figuratif, xu11° ; figuration, x111€, Em- ler), comp. de l’anc. préf. fors « dehors » ;
pr. du lat. figura « forme, figure » (mot de filerie, 1376 ; fileur, 1260 ; filure, fin x1ve.
la famille de fingere, v. feindre) et des dér. FILIAL, 1330 ; filiation, x. Empr. du
figurare, figuralio, figurativus (créé à basse lat. de basse ép. filialis, filiatio (de filius
ép.). Au sens de « visage », qui apparaît « fils »).
au xvire s., s’est répandu dans tout le ter-
ritoire gallo-roman. — Dér. : défigurer, FILIÈRE, v. fil.
xn1e ; figurant, 1740 (à propos de ballet). FILIGRANE, 1673. Souvent altéré en
FIGURINE, 1589, « petite figure, image », filigramme; déjà filagramme en 1664,
d’où le sens de « statuette », 1829. Empr. usuel fin xvr1e ; à ce moment-là une étymo-
de l’it. figurina. logie pop. d’après gramme est impossible,
gramme datant de la fin du xvirre s. Empr.
FIL. Lat. filum, également au sens de de l’it. filigrana, fém., comp. de fili « fils »
« tranchant d’une arme », v. affiler. La et de grana « grain », les filets des filigranes
locution de fil en aiguille, déjà au sens fig. ayant été d’abord garnis de petits grains.
dans Le Roman de la Rose, paraît être — Dér. : filigraner, 1845.
propr. une expression se rapportant au FILIN, v. fil
travail de la couturière qui, après avoir
mis un fil, coud avec l’aiguille, et, après FILLE. Lat. filia. It. figlia, esp. hija.
avoir cousu avec l'aiguille, reprend du fil, — Dér. : fifille, terme enfantin ; fillette,
et ainsi de suite. Dans les parlers gallo- XIIC,
romans du Nord-Est, de l'Est et du Poitou, FILLEUL. Lat. filiolus, dim. affectueux
il est concurrencé par filet. — Dér. et de filius « fils », qui a pris en lat. de la
Comp. : filet « petit fil », xrre, d’où entre- Gaule, rarement ailleurs, le sens de « fil-
filet, 1843 (Balzac), propr. « paragraphe leul » (filleul, filleule répondant à parrain,
entre deux filets (petites lames métalliques) marraine), cf. à. pr. filhol. L’it. figliuolo
pour le mettre en valeur » ; fileter, xirre; et l’esp. hijuelo sont encore des dim. de
filet, terme de boucherie, xive, cf. angl. figlio, hijo.
fillet « bandelette » et « morceau de viande
roulé, lié, rouelle de veau » ; filet « engin FILM, 1889. Empr. de l’angl. film,
de pêche », xvi®, altération de filé, xrrre, d’abord « pellicule spécial. préparée pour
encore dans Monet 1636 sous la forme filé, la photographie instantanée », d’où, plus
a. pr. filat, c’est-à-dire « fait de fils »; tard, son application au cinéma. — Dér. :
filière, 1244; filin, 1611 ; contrefil, xvre filmer, 1919.
(Rab.) ; effiler, 1526; effilocher, 1761, par FILOCHE, v. fil.
l’intermédiaire d’un anc. filoche, x1ve ; en-
filer, xir1e, enfilade, 1611, désenfiler, FILON, 1566. Probabl. empr. de l’it.
1694 ; défiler « ôter du fil qui les réunit filone, augment. de filo « fil ».
des objets enfilés », xr11°; se défiler, du FILOSELLE, « bourre de soie, rebut des
langage fam., paraît être issu de l'emploi cocons dévidés », 1369 (filloisel ; puis fillo-
‘militaire de défiler un ouvrage « le disposer selle, 1544). Empr. de lit. dialectal filosello
de manière à le soustraire aux feux enne- (d’où aussi l’it. filugello « ver à soie »),
263 FISTULE

propr. « cocon de ver à soie », d’où « filo- FINANCE, 1283 (Beaumanoir). Signifie
selle », altération, par croisement avec filo d'abord « payement, rançon », ensuite
« fil », de *folisello, lat. pop. “*follicellus, « ressources pécuniaires », encore familier
lat. class. follicülus (dér. de follis « sac »), en ce sens ; a été dès 1314 employé en par-
propr. « petit sac », d’où « enveloppe du lant des ressources de l'État ; au sens de
grain de blé, de la larve d’un insecte, etc. ». « maniement des affaires d’argent », date
du xvire. s. Dér. de l’anc. verbe finer, forme
FILOU, 1564 (Chronique bordelaise). altérée de finir sous l'influence du subst.
Mot d’argot ; probabl. forme dialectale de fin, proprement « mener à fin, venir à
fileur, dér. de filer dans un sens qui cor- bout », d’où spécial. « payer » jusqu’au
respond à peu près à celui de iramer. — xvi® s. ; même développement sémantique
JR : filouter, 1656 (Pascal) ; filouterie, de l’a. pr. finar « payer » et finansa «accord,
paiement ». — Dér. : financer, 1544 ; finan-
FILS. Lat. filius, concurrencé dans les cier, xve ; développement du sens parallèle
patois par des termes variés, gosse, drôle, à finance.
etc. Fils est l’anc. cas sujet, qui a été con- FINIR. D'abord fenir, refait de bonne
servé avec son s final en raison de son heure en finir d’après fin, etc. Lat. finire.
emploi fréquent comme vocatif ; fi, forme — Dér. : finissage, 1786; finisseur, 1756.
archaïque, représente l’anc. cas régime
avec disparition d’! mouillée; fieux est FIOLE, 1180. Empr. de l’a. pr. fiola ou
une forme picarde, voir La Fontaine, Fa- du lat. médiéval phiola, altération du lat.
bles, IV, 16; on emploie en outre fifi, class. phiala (du grec phialé), par substi-
terme du langage enfantin, et fiston, terme tution du suff.; l’it. dit fiala.
fam., dér. de fils.
FION, 1783, dans donner le fion, le coup
FILTRE, xvi® (Paré). Empr. du lat. de fion. Locution pop. ; probabl. altération
médiéval (des alchimistes) filirum, qui est du verbe fignoler réduit par besoin d’ex-
le même mot que feutre. — Dér. : filtrer, pressivité à un monosyllabe.
id. ; filtrage, 1845; filtration, 1611 ; infil-
trer (s’), 1503, infiltration, id. FIORD, 1830. Empr. du norvégien fjord.

FIN, subst. Lat. finis. It. fine, a. pr. fin; FIORITURE, 1830 (Stendhal). Empr.,
v. finance et seul. — Comp. : afin (que, comme terme de musique, de l’it. fioritura,
de), 1320 ; enfin, vers 1190. dér. de fiorire « fleurir ».
-FIQUE. Deuxième élément de mots
FIN, adj. Depuis Cicéron le lat. em-
ployait le subst. finis pour désigner la sav., tiré de mots lat. en -ficus (de facere
partie la plus parfaite de qch., p. ex. finis « faire »).
honorum « la plus haute des honneurs », FIRMAMENT, xr1e. Empr. du lat. eccl.
finis boni « le plus haut bien ». De cet firmamentum qui, en lat. class., signifie
usage est issu l'emploi de fin comme adj. ; « appui, soutien » (dér. de firmare, v. fer-
l’étape de transition est conservée jusqu’à mer), et que le lat. eccl. a employé pour
nos jours dans des expressions comme le désigner « l'étendue », qui, dans la Genèse,
fin fond, le fin mot de l'affaire, et dans I, 6, « sépare les eaux des eaux »; d’où
l'emploi adverbial du mot tel qu'il existe « voûte céleste, ciel », dès le xrr1e s.
dans fine seule, etc., en a. fr. et dans les
parlers pop. It. fino et fine « fin, délicat », FIRMAN, 1666. Empr. du turc fermän,
a. pr. fin « pur, accompli »; l’all. fein et lui-même d'origine persane.
l’angl. fine viennent du fr. — Dér. et FIRME, 1877. Mot devenu européen,
Comp. : finaud, 1762 ; finesse, 1330, finas- empr., d’abord par la Belgique, de l’angl.
ser, altération de finesser (cf. « Quelques- firm ou de l’all. Firma, empr. eux-mêmes
uns disent finasser pour finesser, mais ils de lit. firma « convention » qui correspond
parlent mal », 1680), finasserie, 1718, fi- au fr. ferme.
nasseur, 1740 (d’abord finassier, 1718) ;
finet, xve, finette, 1519, cf. « satin fignet FISC, 1449 (/isque, une première fois au
cramoisi » dans le premier texte où se xive 8.); fiscal, quelquefois depuis le
trouve finel; fignoler, 1743 (et finioler en xI11e s., usuel à partir du XvII*Ss. Empr.
1752), formation pop., peut-être d'origine du lat. fiscus, propr. « panier », d’où spécial.
méridionale ; affiner, xri°, affinage, 1390, « panier pour recevoir de l'argent, dont se
affinerie, 1552, affineur, xXIV°; raffiner, servaient les collecteurs d'impôts », puis
1519 ; raffinement, 1600, raffinerie, 1670 « caisse de l'Etat », et, sous l'Empire, « Cas-
(Colbert), raffineur, 1611 ; superfin, 1688; sette de l'Empereur », et du dér. fiscalis.
d’où, par abréviation, super, fin x1IX°; — Dér. : fiscalité, 1749.
surfin, 1828.
FISSI-. Premier élément de mots sav.,
FINAL, xue. Empr. du lat. de basse ép. tels que fissipède, 1743, tiré du lat. fissus
finalis, dér. de finis « fin »; comme terme « fendu ».
de philosophie, doit cet emploi au latin 1300, rare avant le
médiéval. — Dér., au sens philosophique : » FISSURE, vers
finaliste, 1829 ; plus rarement cause-fina- xvine s. Empr. du lat. fissura (de fissus,
liste, id., ou -nalier, XVIII (Voltaire) ; fina- part. passé de findere « fendre »). — Dér. :
lité, 1865. fissurer, 1861.
FISTULE, 1314 ; fistuleux, 1490. Empr.
FINALE, terme de musique, 1779. Empr. fistula, propr. « tuyau,
du lat. médical
de l’it. finale, dér. de fine « fin ».
FISTULE 264

tube », fistulosus. Fistula a donné une en outre faséole, 1509 (fasole en 1371),
forme pop. fêle, encore usité dans la langue empr. du lat. phaseolus (faisol du xves.
technique de la verrerie. est empr. du prov.) ; fayot, 1721 (fayols),
FIVE O’CLOCK, 1890. Empr. de l’an-
terme d’argot militaire et scolaire, est
glais. Se rapporte à l'habitude anglaise empr. du prov. faiou.
de prendre un petit repas l'après-midi. FLAGORNER, 1470 (Païthelin). Signifie
FIXE, x111° (écrit fix) ; rare avant le d’abord « bavarder, dire à l'oreille ». Éty-
xXvi® s. Empr. du lat. jixus, part. passé de mologie obscure. — Dér. : flagornerie,
figere « fixer ». — Dér. : fixer, 1330, fixage, 1583 ; flagorneur, xve.
1854, fixateur, 1824, fixatif, 1829, fixa- FLAGRANT, 1413. Empr. du lat. fla-
tion, xve, rare, avant le xvire s.; fixité, grans « brûlant » en vue du sens juridique
1603. qu’il a en fr.
FLA, 1840. Onomatopée. — Réduplica- FLAIRER. Signifie d’abord « exhaler
tion : flafla, 1847. une odeur », usuel jusqu’au xve s. Lat.
FLAC, v. flic. frägräre « exhaler une bonne odeur »,
devenu *flägräre par dissimilation ; le sens
FLACCIDITÉ, 1756. Dér. sav. du lat. de « flairer » remonte à l’époque lat., car
flaccidus « flasque ». le sicilien {chaurari et le port. cheirar ont
FLACHE, v. flaque. ce sens ; l’a. pr. flairar signifie « exhaler
une odeur ». — Dér. : flair, xr1° (Chr. de
FLACON, 1314. Altération de */flascon, Troyes) ; flaireur, 1539.
lat. de basse ép. flasconem, acc. de flascô
(Grégoire de Tours, vie s.), dér. de flasca FLAMANT, 1534 (Rab.). Empr. du
(Isidore de Séville, vire s., qui indique que prov. flamenc (d’où aussi l’esp. flamenco),
c'était d’abord un récipient servant à por- dér. de flama « flamme » avec le suff. d’ori-
ter et à enfermer des « phialae », v. fiole) ; gine germ. -enc; ainsi nommé à cause de
flasca représente le germanique occidental la couleur de ses plumes ; pour cette raison
*flaska, propr. « bouteille clissée » (sens on l’a aussi appelé flambant au xvue et
conservé en it.), cf. all. Flasche, d’où a. fr. au XVIIIe s.; cf. en outre le nom grec
flasche « sorte de bouteille », it. fiasca et phoinikopleros, propr. «aux ailes pourpres ».
fiasco, cf. aussi a. pr. flascon.
FLAMBER, 1546 (une 1re fois vers 1170);
FLAGELLATION, xive, rare avant le a remplacé l’a. fr. flammer, usuel jusqu’au
XVIIe s. ; flageller, xive. Empr. du lat. fla- XVIe s., lat. flammaäre, d’où it. fiammare,
gellare (de flagellum « fouet », v. fléau), a. pr. flamar. Dér. de l’a. fr. flambe, encore
{lagellatio (lat. eccl.). L’a. fr. a possédé un dans les dictionnaires pour quelques em-
verbe de formation pop. flaieler qui ne plois techn., issu de /flamble, usuel au
paraît pas avoir atteint le xvie s. moyen âge, lat. flammula « petite flam-
me »; rare en dehors du fr. ; encore usité
FLAGEOLER, 1771. Paraît avoir été dans les parlers de l'Ouest et de la région
formé sur /lageolel, au sens de « jambe languedocienne (où il est empr. du fr.). De
grêle »; l’a. fr. a possédé un verbe /lageoler flambe dérivent flambeau, x1ve ; flamboyer,
« jouer du flageolet », qui, en raison de son vers 1080 (Roland). — Dér. : flambée,
sens et de l’époque où il a été usité (il ne 1320.
paraît pas avoir dépassé le xvie s.), doit
être considéré comme un autre mot. FLAMBERGE, xvie (Bouchet : « Flam-
berge, c'est une espée »). Emploi plaisant
FLAGEOLET, « sorte de flûte », xr11°5. de Flamberge, nom de l'épée de Renaud
— Dér. de l’a. fr. flajol, lat. pop. “*fla- de Montauban, altération, d'après flamme,
beolum, dér. de fläre « souffler », cf. tibia de Floberge, Froberge, mot d’origine germ.,
flaltur « on joue de la flûte » (Ovide); qu’on trouve aussi au moyen âge au sens
l’a. pr. dit de même /flaujolar « jouer d’ « épée » en général.
de la flûte »; existe en outre ailleurs. Le
lat. pop. de la France septentrionale FLAMME. Lat. flamma. V. flamber. —
a hésité entre */läbeolum et *flaäbellum, Dér. : flammé, 1731; ne continue pas
d’où a. fr. flavel. Le lat. class. disait aussi l’a. fr. flammer, v. flamber. — Comp. :
fläbellum au sens d’ « éventail », d’où a. fr. oriflamme, vers 1080 (Roland ; orie flambe ;:
flavel en ce sens ; *fläbellum « flageolet » puis oriflamme, x1ve), comp. de l’anc. adj.
est un autre mot, mais dérive comme celui- orie « doré » (empr. du lat. aureus) et de
là de flare « souffler ». flambe, flamme, au sens de « bannière »,
d’après le lat. médiéval aurea flamma, qui
FLAGEOLET « sorte de haricot », 1835, désignait la bannière rouge des abbés de
lageolle en 1726 (à Tours). Empr. de l’it.
fagiuolo, du lat. class. phaseolus (mot Saint-Denis, puis des rois de France.
d’origine grecque), d'où aussi esp. frisuelo, FLAMME « lancette de vétérinaire ».
a. pr. faizol. La forme flageolle résulte d’un D'abord flieme, altéré en flamme d’après
croisement avec flageole « sorte de flûte », le préc., lat. médical phlebolomus (du grec
attesté en Poitou au xvr1e s., probable- phleboiomos « instrument servant à couper
ment dû à la forme étroite et allongée de les veines »), qui, par altération, a été réduit
cette variété de haricots. La transforma- à “*flelomus, cf. l’anc. haut all. {lioluma,
tion de /flageolle en flageolet est due à la d’où l’all. moderne Fliele; l’a. pr. flecme
perte de /lageole « flûte » évincé par la est dû à une autre altération; l'angl.
forme française. Les dictionnaires donnent, fleam vient du fr.
265 FLEGME
FLAMMÈCHE, xine, Francique* fala- FLAQUE, 1718. Forme normande
wiska, restitué d’après l’anc. haut all. ou
picarde, correspondant au fr. flache, en-
falawiska « cendre » ; le mot fr. a été de core dans les dictionnaires, fém. pris subs-
très bonne heure altéré par croisement tantiv. de l’anc. adj. flache « mou », forme
avec flamme, d’où formes très variées au primitivement fém., qui a éliminé le masc.
moyen âge, cf. notamment falemesche (en- flac, lat. flaccus. Le sens de « petite mare
core usité sous des formes voisines dans d’eau » paraît être issu de celui de « creux »
les parlers de l'Ouest) ; au xvie s. formes que présente l’adj. lache, cf. le sens de
dialectales plus proches du type étymolo- « creux dans une route », usité dans les
gique fallevuche, falivoche ; cf. de même it. parlers du Centre et l’emploi habituel de
falavesca (arch.), d’où favolesca. [laque sous la forme flaque d'eau.
FLAN, xive, d'abord flaon, xri°. Propr. FLASH, 1918. Empr. de l’angl. flash
« sorte de gâteau » ; dès le xrr1e s. employé « illumination rapide ».
aussi comme terme de monnayage : « Flaons
de monnoye. » Du francique */lado, cf. all. FLASQUE, adj., 1421 (« L’eau est flasque
Fladen, de même sens; cf. aussi a. pr. et malsaine »). Altération de flaque, forme
flauzon. dialectale de l’anc. adj. flache, v. flaque.
L’s d’abord graphique a été plus tard pro-
FLANC. Francique *hlanka « hanche », noncée, parce qu’elle rendait le mot plus
cf. anc. haut all. flancha « hanche, rein », expressif ; le picard dit encore flaque.
all. Gelenk « articulation ». Cette forme en
-a a été prise pour un plur. collectif du FLATIR, xre. Dér. du francique *flat
type de brasse, et on lui a donné un nou- « plat », qu’on peut supposer d’après l’anc.
veau sing. masc. flanc. It. fianco, all. scandinave /lair, l’angl. flat et l’anc. haut
Flanke viennent du fr. — Dér. : flanchet, all. flaz, peut-être d'un verbe francique
1376 ; flanquer « garnir sur les flancs », */latjan.
1555 (Ronsard), flanquement, 1795; flan- FLATTER, xr1e. Signifie propr. « cares-
quer « lancer rudement », 1596 (fam. et ser avec la main », sens attesté seulement
iron., avec, au début, le sens de « attaquer au XVI°S.; répandu dans les patois. Dér.
de côté », ensuite « appliquer des baisers du francique “flat, v. flatir, au sens de
sur les joues ») ; efflanquer, 1611 (au xives. « passer le plat de la main », cf. aussi l’a.
rage efflanchée). — Comp. : bat-flanc, fin pr. aflatar « appliquer contre »; le sens
xix® (bat du verbe baitre). moral s’est développé de bonne heure. —
FLANCHER, 1862 (argot « blaguer », Dér. : flatterie, xrr1° (J. de Meung) ; flat-
1846). Issu par changement de conjugaison teur, xir1° (Rutebeuf).
de l’a. fr. flenchir « détourner », qui repré- FLATUEUX, 1538. Dér. sav. du lat.
sente le francique *hlankjan « ployer, tour- flatus « vent », d’où dérivent aussi flatu-
ner », passé si tard dans le gallo-roman lent, xvie (Paré) ; flatulence, 1747. — Dér. :
qu’il a encore pu devenir, par métaphonie, flatuosité, 1611.
*hlenkjan. Cf. all. lenken.
FLÉAU. Lat. flagellum, propr. « fouet »,
FLANDRIN, xve. D'abord nom propre, qui a pris à basse ép. le sens d’ «instrument
signifiant propr. «originaire des Flandres »: à battre le blé »; s'emploie déjà en lat.
employé par dérision, parce que les Fla- class. au sens fig. de « calamité » ; usité en
mands, qui sont fréquemment de haute outre dans le lat. eccl. au sens de châtiment
taille, seraient de nature molle. ‘envoyé par Dieu, notamment dans la locu-
FLANELLE, 1650 (Ménage). Empr. de tion flagellum domini, cf. Job, 19, 16;
l’angl. flannel, lui-même empr. du gallois Isaïe, 28, 15 (en parlant de Nabuchodo-
gwlanen, nom d’une étoffe de laine (gallois nosor). A. pr. flagel et dialectes it. et
gwlän « laine »; cf. aussi l’angl. dialectal rhéto-romans.
Îlannen). FLÈCHE « arme », x11e. Paraît signifier
FLÂNER, 1808. Mot d'origine dialectale, d’abord la tige, l’ensemble de l'arme se
attesté en Normandie sous la forme flanner disant saiele, lat. sagitla. D'après le moyen
en 1645, mais entré récemment dans l’usage néerl. vliecke et l’anc. bas all. fliuca, on
général ; cf. aussi le dér. flanier, aujour- restitue le francique *fliugilra, qui explique
d’hui normand, employé au xvit® s. par parfaitement la forme fr. L'it. freccia, l'esp.
Voiture. Représente, en raison de son ca- [lecha et l’a. pr. fleca, flecha viennent du fr.
ractère spécialement normand, l’anc. scan- FLÈCHE « pièce de lard », 1549. Modi-
dinave flana « courir étourdiment çà et là ». fication, d’après l’anc. picard flec (du
— Dér. : flânerie, xvie ; flâneur, xvie (dans moyen néerl. vlecke, id.), de l’a. fr. fliche
un texte normand); flânocher, 1864. (1195, et jusqu’au xvrre s.), qui représente
FLANQUER, v. flanc. l’anc. scandinave flikki, cf. encore normand
[lique, id.
FLAPI, fin xixe. Mot de la région lyon-
naise (/lapir « abattre » déjà au xv® s.), FLÉCHIR, xre. Modification de l’a, fr.
dér. d’un adj. attesté dans les parlers de flechier, xri°, qui représente un lat. de
la Suisse romande (se trouve aussi en Italie basse ép. “*/flectlicare, dér. de flectere. —
et dans la région rhétique), flap, fiap Dér. : fléchissement, vers 1300 ; fléchis-
« mou ». Cet adj. se rattache très probabl. seur, 1586.
‘au lat. faluppa, v. envelopper, par une FLEGME, 1538 (antér. fleume, encore
forme */alappa, due à une assimilation usité au xve s. et aujourd’hui dans les
vocalique (cf. piém. flapa « cocon incom- patois) ; flegmatique, 1534 (Rab. ; antér.
plet »). {leumatique, fin xrre). D'abord termes médi-
FLEGME 266

caux, le phlegme étant l’ancien nom de la odeur »; l’a. fr. a une autre forme /lairor,
lymphe ou pituite ; sens fig. à partir du plus usuelle, qui s'explique aisément com-
xvue s. Empr. du lat. phlegma, phlegmati- me une réfection de f/aor d’après flairer.
cus (du grec phlegma « humeur, pituite »,
propr. « inflammation », phlegmalikos). Le FLEURET, v. fleur.
fr. pop. flemme, 1821 (adj. des 1795), est
le même mot, empr. de l’it. flemma, fém. FLEURIR. Lat. pop. */lôrire, lat. class.
(même mot que flegme) qui a pris populai- flôrère. It. fiorire, esp. florecer, a. pr. florir.
rement le sens de « lenteur, mollesse » ; de L'imparf. florissais et le part. florissani,
flemme dérivent flemmer, 1888, flemmard, refaits sur le latin, servent à des sens fig.
— Dér. : défleurir, xiv* ; refleurir, xr1°.
1886, flemmarder, 1922.
FLEUVE, xrie (flueve) ; d’abord fluive.
FLÉTRIR « faire perdre à une plante sa Empr. du lat. écrit flüvius qui était déjà
couleur », xr1. Dér. de l’anc. adj. flaisire, moins courant que /lämen, conservé sous
flestre « flétri, flasque », lat. flaccidus, d’où des formes pop. : a. fr. flum, usité jus-
aussi esp. lacio. qu'au xves., a. pr. /lum, it. fiume.
FLÉTRIR « marquer d'ignominie », XvI®, FLEXIBLE, vers 1300; flexion, xve.
antér. fleutrir (de 1549 à 1636); flairir, Empr. des mots lat. flexæibilis, flexio, dér.
xure, Altération progressive, due peut-être de flezus, part. du verbe fleciere « courber ».
au mot préc., de flatir, v. ce mot. — Dér. : — Dér. : flexibilité, 1381.
flétrissure, 1611.
FLIBUSTIER, 1667 f{fribustiers; en
FLEUR. Lat. florem, acc. de flôs. La 1690, Furetière donne encore fribustier et
cause du changement de genre n'est pas [libustier ; Ménage donne aussi la forme
claire ; les noms abstraits en -or, -üris sont flibustier). Empr. du hollandais vrijbuiter
devenus fém. en gallo-roman, v. dou- « pirate », propr. « qui fait du butin libre-
leur, etc.; mais le cas de flôs n'est pas ment ». L'insertion d’un -s- s’explique
exactement le même. La locution à fleur comme simple graphie d’abord (on écri-
de « à la surface de » a déjà été relevée au vait encore p. ex. fesie « fête »), qui, par
xIve s. (: « À fleur de la terre ») ; on dit de la suite, a fini par être aussi prononcé,
même en it. a fior d'acqua, di terra. Fleurs, comme dans un certain nombre d’autres
au sens de « mentrues », Xrr1e, aujourd'hui mots. L’angl. fleebooter est attesté une
employé surtout dans fleurs blanches, repré- seule fois, vers la fin du xvi® s.; il ne
sente le lat. de basse ép. (1v° s.) (mens- réapparaît qu’à la fin du xvirre s., sous la
trui) fluores, emploi spécial de fluor « cou- forme flibustier, évidemment empr. du
rant d’eau; diarrhée »; par l’évolution fr. — Dér. : flibuster, 1701 (: « On dit
phonétique normale, ce subst. est devenu flibuster en prononçant l’s », Furetière),
dès le lat. de basse ép. flores, et l'identité d’où flibuste, 1647.
phonétique avec flores « fleurs d’une plan-
te » a fait voir dans celui-là un emploi FLIC « agent de police », pop., vers 1880
métaphorique de celui-ci, conception qui (déjà en 1837 argot ligue). A été en usage
est restée vivante en fr. L’it. dit aussi d’abord parmi les fripons d'origine juive,
fiori. — Dér. : fleuraison, vers 1600 (Mal- dont l’argot contient beaucoup d'éléments
hetbe), et floraison, 1731, refait d'après le allemands. Dans l’argot des malfaiteurs all.
lat. ; en outre fleurison, xXve s., d’après [lick est attesté dès 1510 au sens de « jeune
[leurir ; mot très rare au moyen âge ; fleu- homme, garçon ». Selon toute probabilité
ret, « sorte d'épée terminée par un bou- flic a passé de cet idiome dans l’argot fr.
ton », 1580, Montaigne {le floret au poing);
adaptation de l’it. fioretlo, propr. « petite FLIC-FLAC, xvrre (Scarron). Onomato-
fleur », qui a dù désigner le bouton du pée du type clic-clac, tric-trac, etc.
fleuret, puis le fleuret lui-même par l’inter- FLINGOT, 1887. Terme d’argot militaire,
médiaire d’une locution non attestée « épée dér. de flingue « fusil », qui a été relevé
à fleuret »; fleurette, X11° ; au XVII S., a dans l’argot des marins, empr. de l’all.
pris le sens de « propos galants », d’où dialectal Flinke, Flingge, variante de
conter (des) fleurettes; fleuriste, 1680; Flinte « fusil ».
fleuron, 1302 (floron), peut-être adapta-
tion de l’it. fiorone, d'où fleuronné, 1692, FLIRT, 1879; flirter, 1855. Empr. de
-er, XV° ; affleurer, 1397, dér. de fleur dans l’angl. to flirt, propr. « lancer rapidement »,
à fleur de, d’où affleurage, 1762, affleure- d’où « folâtrer » dont l’acception partic.,
ment, 1593; effleurer, xr11° feflorée) ; si- la seule passée en fr., date du milieu du
gnifie d’abord « ôter les fleurs »; au sens xXvuIe s.; celui-ci vient de l’a. fr. fleureter
de « ne toucher que la superficie », 1595 « conter fleurettes ». — Dér. : flirtage, 1855
(Montaigne). (on a dit aussi /lirtation, 1833, forme prise
à l’angl.) ; flirteur, 1890.
FLEURDELISER, v. lis.
FLOC, v. flocon.
FLEURER, xve. Signifie souvent « flai-
rer », jusqu'au xvrie s. Très probabl. dér. FLOCHE, 1829. Usité aujourd'hui seule-
de l’a. fr. /laor « odeur bonne ou mauvaise », ment dans soie floche. Très probabl. empr.
lat. pop. *flälôrem, acc. de */flator, dér. de du gascon floche, attesté dès le xvie s. et
flalare « souffler », peut-être sous l’in- qui représente le lat. fluzus « flasque,
fluence de foelor « mauvaise odeur » et de faible ». Le mot a pénétré au nord avec
[lätus « souffle », cf. it. fialore « mauvaise l’industrie de la soie.
267
FLUVIAL
FLOCON, xu1e. Dér, de l’anc. subst. FLOTTE, xr1e, N'est pas identique avec
floc, encore dans les dict., au sens de a. fr. flotte « multitude, foule », lequel est
« petite houppe de laine ou de soie » (sou- robabl. empr. très tôt de l'Italie : l’anc.
vent flot), lat. floccus « flocon de laine », it. fiollo « foule », fiolta, id., continuent le
également attesté dans les autres langues lat. flucitus « flux ». Le fr. flotte au sens
romanes : it. fiocco « flocon, houppe », esp. maritime, par contre, vient de l’anc. scan-
flueco « frange ». — Dér. : floconneux, 1792, dinave floti « flotte, radeau », et il vit en
FLONFLON, xviie, Onomatopée. gallo-roman dans ces deux sens. Si le sens
de « flotte » n’est pas attesté au x1ve et au
FLOPÉE, 1877 (d'abord argot. « volée Xv° s., cela tient probabl. au peu d'intérêt
de coups », 1849). Dér. de floper « battre » qu'avait la France à cette époque-là pour
(argot), 1846, qui se rattache à faluppa les choses de la mer.
(v. envelopper) par l'intermédiaire d’une
forme *feluppa, avec la voyelle de la FLOTTILLE, 1723. Empr. de l'esp. flo-
1re syllabe affaiblie. tilla, dér. de floia, v. flotte.

FLORAL, FLOU, xr1e. Lat. flavus « jaune », qui


1749, comme terme de
botanique. Empr. du lat. floralis, dér. de doit avoir pris déjà en lat. le sens de « fané,
flos « fleur ». Jeux floraux, 1550 (du Bellay : flétri » (cf. le verbe flavescere « flétrir »),
« Aux jeux floraux de Toulouse »), concours d’où « faible, languissant ». L’a. fr. connaît
littéraire institué par l’Académie de Tou- encore les trois sens. Terme techn. de la
louse ou Consistori del Gai Saber (fondé peinture depuis 1676. L’all. flau et le
en 1323) ; ces jeux ont été ainsi nommés néerl. flauw viennent du fr. — Dér. : fluet,
parce qu’on récompensait les lauréats avec 1694, altération de flouet, xve, encore
usuel au xvi1e 5,
des fleurs d’or ou d'argent.
FLORE,
FLOUER, 1827 (une première fois au
1771 (Lamarck : Flore Fran-
çaise, titre). Empr. du lat. Flora, nom de XVIe 8.). Terme d’argot, variante de frouer,
déjà chez Villon, dans une de ses ballades
la déesse des fleurs. en jargon, au sens de « tricher au jeu »,
FLORÉAL, 1793 (Fabre d’Eglantine). emploi fig. de l’a. fr. froer « rompre », qui
Dér. sav. du lat. floreus « fleuri ». se dit surtout des armes qui se rompent
au combat et trompent ainsi l'attente que
FLORÈS. Ne s'emploie que dans la locu- le combattant a mise en elles, Lat. fraudare
tion faire florès, 1638 (Richelieu). Signifiait « tromper ».
d’abord « faire une dépense d'éclat, une
manifestation éclatante de joie ». Peut-être FLUCTUATION, xrre. Empr. du lat. fluc-
adaptation du prov. faire flôri « être dans lualio, dér. du verbe fluctuare « flotter »,
un état de prospérité », empr. du lat. flori- d’où « être balloté, être indécis ».
dus « fleuri »; cette adaptation a pu se FLUET, v. flou.
produire dans l’argot des écoliers.
FLUEURS, v. fleur.
FLORILÈGE, 1704. Empr. du lat. mo-
derne florilegium, fait sur le modèle du lat. FLUIDE, xive. Empr. du lat. fluidus,
ancien spicilegium, propr. «action de glaner dér. du verbe fluere « couler ». — Dér, :
des épis »; ce dernier mot a été employé fluidité, 1565.
au xv11° et au xvir1e s. pour désigner des
recueils d’actes, de documents, etc., cf. le FLUOR, 1687, comme terme d’ancienne
Spicilegium de dom Luc d’Achery, d’où chimie, dit des acides qui restent toujours
spicilège, 1752. fluides ; dit ensuite de minéraux incombus-
tibles et fusibles, spath fluor, etc., puis du
FLORIN, 1307. Empr. de l’it. fiorino, corps simple de ce nom. Empr. du lat.
dér. de fiore « fleur » (avec francisation fluor « écoulement ». — Dér. : fluorescence,
de l’initiale); le florin a été d’abord une 1865 ; -escent, id,
monnaie d’or, frappée à Florence, dès le
xI11° 8., et ornée de fleurs de lis; celles-ci FLÛTE « instrument de musique », xr1e
figuraient sur les armes de la ville. ([lehules ; en outre flaüte). De même a. pr.
[laüt. Probabl. onomatopée, La suite voca-
FLOT, x11e. Flotter, Du radical francique lique a-u est souvent employée pour rendre
qui vit dans le moyen néerl. vlot « flots », le bruit du vent qui passe par un tuyau
vloten « être emporté par le courant, couler, vide ; les consonnes initiales sont probabl.
nager », all. Flosse « nageoire ». Probabl. dues aux mots qui s'étaient groupés autour
le francique a passé au fr. le verbe avec du lat. flare « souffler », cf. flageolel. Lit.
le subst. Le germ. connaît plusieurs radi- [laulo et l'esp. flauta viennent du prov.
caux commençant par fl- et désignant s'emploie dès 1864 par euphémisme comme
quelque chose de fluide. Aïnsi francique interjection, marquant l’impatience, cf.
fluod (cf. got. flodus), d’où a. fr. fluet zut. — Dér. : flûteau, vers 1200 (flaülel) ;
« fleuve ». — Dér. : flottable, 1572 ; flottage, flûter, x11e ; flûteur, x1r1e (G. de Lorris) ;
1446; flottaison, id.; flottement, xv°; flûtiste, 1832.
flotteur, 1415. — Le normand et l’anglo-
norm. possèdent un autre subst. flot « ma-
FLÛTE, sorte de navire, xvre (Amyot).
Empr. du néerl. fluit.
rée », qui représente l’a. nor. flôd « id. »,
‘ d’où le norm. flouée « id. »; le fr. en a tiré FLUVIAL, 1823, une première fois au
les termes maritimes renflouer, 1529, mot x111° 8. sous la forme fluviel; fluviatile,
probabl. normand, renflouage, 1870, ren- 1559. Empr. du lat. fluvialis, fluviatilis (de
flouement, id. ; afflouer, 1863. {luvius « fleuve »).
FLUX 268

FLUX, fin xrr1e (Joinville : flux de ven- comp. avec l’adj. sain; on a écrit aussi par
ire). Au moyen âge et jusqu’au xvi® 8., fausse étymologie sainct-foin, 1549, d’où le
signifie surtout « écoulement »; sens mo- calque all. Heilig-heu.
derne, 1532. Empr. du lat. fluxzus « écou- FOIN, inierjection, xvi®. Né probable-
lement », dér. du verbe fluere « couler ». ment de l'expression fig. bailler foin en
— Comp. : reflux, 1532. corne « duper », d’après l'habitude déjà
FLUXION, vers 1300. Empr. du lat. de romaine d’avertir les gens de la méchan-
basse ép. fluxio « écoulement », la fluxion ceté d'un taureau par une botte de foin
étant considérée comme un afflux de sang liée à ses cornes (cf. les vers de Horace
ou d’autres liquides dans l’endroit malade. longe fugi, habet fenum in cornu). On a
proposé aussi d’y voir une déformation
FOARRE, v. fourrage. atténuante de l’anc. fr. fiens « fumier »
(encore dans les patois), qui aurait été
FOC, 1722, en 1602 focquemasi. Empr. employé comme exclamation péjorative,
du néerl. fok. à peu près comme bran et merde ; mais le
FOCAL, 1815. Dér. sav. du lat. focus fait que fiens n’est pas attesté comme inter-
« foyer ». jection est peu favorable à cette explication.
FOEHN, 1810. Empr. du suisse all. FOIRE « marché ». Lat. pop. féria « mar-
ché, foire », en lat. class. fériae « jours de
FOËÈNE, v. fouine « fourche ». fête », spécial. fériae nundinae « jours de
FOETUS, xvie (Paré). Empr. sav. du marché », d’après l’usage ancien de faire
lat. foetus, variante graphique de feius, des foires en même temps que des fêtes
propr. « enfantement », d’où « nouveau- religieuses. A. pr. feira, fiera ; it. fiera. —
né », v. faon. Dér. : foirail, 1874, mot berrichon.
FOIRE « diarrhée ». Lat. foria. De même
FOI. Lat. fidés « confiance, croyance, a. pr. foira et dialectes de l'Italie septen-
loyauté, etc. », qui a pris en lat. eccl. son
trionale et rhéto-romans. — Dér. : foirer,
sens religieux. — Dér. : féal, vers 1200,
1576; foireux, vers 1200.
v. fidèle.
FOIS. Lat. vices « succession d’événe-
FOIE. Les Grecs avaient l'habitude ments, vicissitudes », cf. in vicem « tour à
d’engraisser les oies avec des figues, ce qui tour », vice versa, « id. » (v. vice-versa),
faisait grossir surtout le foie. Ils appelaient d’où l'emploi du mot dans les langues
un pareil foie hepar sykôlén, de sykon rom. pour indiquer chacun des cas où un
« figue ». Les Romains traduisaient ce mot fait a lieu. L’f de fois n’est pas expliquée
en lat., d’où ficalum, de ficus « figue ». de façon satisfaisante. It. vece, esp. vez,
De là p. ex. le vénitien figà. D'autre part a. pr. veiz. Le Midi et le wallon disent coup;
le commerce avec la Grèce maintenait dans en franco-provençal existe un type *vicäta,
les pays de langue lat. la connaissance du dér. de vices, largement attesté ailleurs :
mot grec, qui devint, par les transforma- a. fr. foiée (avec f due à fois), a. pr. et esp.
tions phonétiques du grec et par l’adapta- vegada, V. Voyage. Comp. : autrefois,
tion au lat. quelque chose comme “*séco- vers 1170 ; parfois, 1370 ; toutefois, 1456
tum. Cette forme a agi dans différentes (toutes-fois) ; a succédé à l’a. fr. toutefs)-
mesures sur les formes romanes, d’abord voies, Cf. aussi it. {ullavia, esp. fodavia;
en en déplaçant l'accent (type “*ficatum), v. quelquefois.
d’où l’esp. higado, le picard fie, ensuite en
substituant l’e de son radical à l’i du mot FOISON. Lat. füsio (v. fusion), propr.
lat. (type “*fécatum), d’où l’it. fégato et le « écoulement, diffusion », d’où le sens du
fr. foie. En outre il s’est produit dans plu- fr.; la locution à foison date déjà du
sieurs régions une métathèse des deux XIIIe s. Aussi a. pr. foizon, aux mêmes sens.
consonnes c et # (type félicum), d’où le cat. rs : foisonner, xni° ; foisonnement,
fétge et le wallon féle. De ce type vient
aussi le verbe a. fr. fegier « coaguler (du
sang) », qui est devenu plus tard, sous FOLIACÉ, 1766; foliaire, 1778; folia-
l'influence du picard fie, figer. Tous ces tion, 1766. Le premier est empr. du lat.
mots ont désigné d’abord le foie des ani- foliaceus, les deux autres sont des dér.
maux, qui est destiné à la consommation ; sav. de folium « feuille ».
ce n’est que par la suite qu’ils ont été ap- FOLIÉ, 1746; foliole, 1749. Empr. du
pliqués aussi au foie du corps humain. lat. foliatus « feuillu » (comme terme de
FOIN. En a. fr. fein, fain jusqu'au xves. ; botanique ; comme terme de chimie « en
la diphtongue -oi- de foin est due à l’in- forme de feuille », c’est une extension de
fluence de la consonne labiale préc. Lat. celui-ci ou un dér. du lat. folium), foliolum
fenum. It. fieno (dont le -ie- est probabl. « petite feuille ».
dû à une influence dialectale italique), esp. FOLIO, 1675. Empr. de l'ablatif folio
heno, a. pr. fe, sauf le wallon qui a les du mot lat. folium, v. feuille, appartient
types feurre ou fourrage et quelques par- d’abord à la langue du commerce. — Dér. :
lers de la région gasconne et catalane les folioter, 1832.
types herbe ou fourrage. — Dér. : faner,
xIve (Froissart), d’abord fener, xri®, le FOLK-LORE, 1880. Empr. de l’angl.
sens fig. apparaît dès le xrr1° s., d’où fane, folk-lore, littéral. « science du peuple » (pour
1385 ; faneur, xri°; fenaison, 1240 (ou désigner l'étude des usages et traditions
fan-, 1762). — Comp. : sainfoin, 1572, populaires). — Dér. : folk-loriste, 1885.
269 FONTANGE

FOLLICULAIRE. Mot dér. par Voltaire avec le lat. écrit ; le sens d’ « anus », déjà
(Candide, 1759), de folliculus qu’il a pris attesté au xr1e s., vient du lat. médical.
pour un dim. de folium « feuille » et qui, It. fondamento, a. pr. fondamen.
en réalité, signifie « petite enveloppe, petit
sac », dim. de follis, v. fou; de là aussi le FONDER. Lat. fundare ; resté en contact
sens erroné de « petite feuille de papier » avec le lat. écrit. It. fondare, a. pr. fondar.
que Voltaire a donné en 1770 à follicule FONDRE. Lat. fundere, propr. « répan-
(attesté comme terme scientifique dès dre, faire couler » (sens quelquefois attesté
1523). au moyen âge), d’où « couler », sens prin-
FOMENTER, x1u°e, d'abord comme ter- cipal des langues rom., puis, plus tard, en
fr., « s’affaisser, s'effondrer », jusqu’au
me de médecine, sens fig. depuis le xvr®s. ;
xIXe s., et transitivement « faire écrouler »
fomentation, xir1°. Empr. du lat. médical
au moyen âge ; le sens de « s’abattre sur »,
fomentare (de fomentum « cataplasme, cal-
qui ne paraît pas antérieur au xvie s., est
mant », mot de la famille de fovere « chauf- né dans le langage de la fauconnerie, où il
fer »), fomentalio. apparaît dès 1375. A. pr. fondre « fondre,
FONCÉ, FONCER, FONCIER, v. fond. détruire », it. fondere « fondre, gaspiller »,
esp. hundir « détruire, enfoncer ». Il semble
FONCTION, 1537. Empr. du lat. functio, que le sens de « détruire, faire écrouler »
propr. « accomplissement », d’où en lat. ne soit pas dû à un développement spon-
juridique « service public, fonction », nom tané, mais à un croisement avec fond. —
d'action du verbe fungi « s'acquitter de ». Dér. et Comp. : fonderie, 1373 ; fondeur,
— Dér. : fonctionnaire, 1770 ; fonctionna- 1260 ; fondoir, 1680, d’abord au xxrre et
risme, 1870 ; fonctionnel, 1830 ; fonction- au xive 8. au sens de « creuset » ; fondue,
ner, 1787, une première fois, 1637 ; fonc- 1768 ; au moyen âge « fonte » ; fonte, xve,
tionnement, 1838. mais antér. d’après le dér. fontaille « fonte »,
1227 ; représente probabl. une forme du
FOND. Variante graphique, vers le lat. pop. *fundita, fém. pris substantiv.
Xve s., de fonds; la prononciation de la d’un part. passé *fundilus, disparu avant
locution de fond en comble montre que cette les premiers textes ; morfondre (se), vers
variante est devenue un autre mot. Depuis 1320, en parlant du cheval atteint de ca-
le xvr1e s. on a réservé aux deux formes tarrhe, d’où « prendre froid » et le sens
des valeurs particulières. Fonds, réfection moderne depuis le xvi® s., vivant surtout
graphique de l’a. fr. fonz, fons, était, dans dans le Midi, comp. avec le prov. mourre
le haut moyen âge, un mot invariable, « museau »; refondre, x11°, d’où refonte,
comme corps, temps, parce qu’il représente 1594.
une forme neutre du lat. pop. fundus,
*fundoris, qui s’est substitué au lat. class. FONGUS, xvie (Paré, alors fungus);
fundus, fundi « fond, fonds », cf. de même fongueux, id. Empr. du lat. médical
a. pr. fons et rhéto-roman fuonz; ailleurs fungus, propr. « champignon », et de son
la forme ne permet pas de distinguer : it. dér. fungosus. — Dér. : fongosité, id.
fondo, esp. hondo. — Dér. du type fonds : FONTAINE. Lat. pop. foniäna, fém. pris
foncer, 1389 ; foncé, 1690, comme terme
substantiv. de l’adj. class. foniänus « de
de couleur, une couleur sombre paraissant source » (fontana aqua « eau de source »),
enfoncée par rapport à ce qui est clair, cf. . dér. de fons « source ». Existe ou a existé
enfoncé, au même sens, XVII®; foncer sur, dans toutes les langues rom. au sens de
formé au xviie s. sur fondre sur ; foncier, « fontaine » ou de « source » : it. a. pr. fon-
1370. — Dér. ou Comp. des deux types : tana, esp. arch. hontana (aujourd’hui sup-
arrière-fond, 1904; bas-fond, 1704; dé- planté par fuenlie). Usité seulement dans
foncer, xive, défoncement, 1653 ; enfoncer, la partie septentrionale du territoire gallo-
1278, enfoncement, xv°, enfonceur, xvIe, roman ; au sud (et en quelques points un
enfonçure, xvi®; plafond, 1559 (parfois peu au nord) de la ligne allant de l’embou-
platfonds), plafonner, 1690, plafonnage, chure de la Gironde aux Hautes-Alpes, on
1835, plafonneur, 1800, plafonnier, fin dit fon. — Dér. : fontainier, ou fonlenier,
xixe, plafonnement, 1874 ; tréfonds, xr11°, 1292.
comme terme de droit coutumier au sens
de « fonds qui est sous le sol » ; aujourd’hui FONTANELLE, 1565, réfection de fonte-
peu usité — Dér. du type *fundora nelle (Paré), d’après le lat. médical fonta-
(plur.) : fondrière, 1488, mais déjà une nella, qui est lui-même une latinisation du
première fois au xri° s.; s’effondrer, mot fr. Dim. de fontaine, qui est attesté
xI1e, aussi a. pr. esfondrar, effondrement, au même sens du xrr1° s. jusqu’en 1835.
1560. Ce sens est né d’une comparaison entre
le petit enfoncement sur la tête des nou-
FONDAMENTAL, xve. Empr. du lat. veau-nés et un bassin de fontaine. La
fundamentalis, de fundamentum. même comparaison a fait employer fon-
laine et fontenelle aussi aux sens de « plaie
FONDATEUR, 1330; fondation, x111°. suppurante ; cautère », etc.
Empr. des mots lat. fundaior, fundalio,
dér. de fundare, v. fonder. Fondateur a éli- FONTANGE, vers 1680 (Sévigné). Terme
. miné une forme fondeor dont l’homonymie désignant une mode qui est sortie d'usage
avec fondeor « fondeur » pouvait gêner. depuis le xvrrie s. Tiré du nom de Mlle de
Fontanges, qui fut maîtresse de Louis XIV.
FONDEMENT. Lat. fundamenium, dér. D’après Bussy-Rabutin, l’origine de ce nom
de fundäre, v. fonder ; resté en contact est la suivante : « Le soir, comme on se
FONTANGE 270

retirait (il s’agit d’une partie de chasse), FORCEPS, 1747. Empr. du lat. médical
il s’éleva un petit vent qui obligea Mlle de forceps, propr. « tenailles, pinces ».
Fontange de quitter sa capeline ; elle fit
attacher sa coiffure par un ruban dont les FORCER. Lat. pop. “*/forliare, dér. de
nœuds tombaient sur le front, et cet ajus- fortia, v. force. — Dér. forçage, x11° s.;
tement de tête plut si fort au roi qu’il la forcerie, 1865, déjà créé au moyen âge au
pria de ne se coiffer point autrement de sens de « violence »; efforcer (s’), xi°
tout le soir ; le lendemain toutes les dames (Alexis), effort, vers 1080 (Roland : esforz).
de la cour parurent coiffées de la même FORCES. Au moyen âge, parfois sing’
manière ; voilà l’origine de ces grandes Lat. forficem, acc. de forfex « ciseaux », qui
coiffures qu'on porte encore, et qui, de la a dû être employé de préférence au plur.
cour de France, ont passé dans presque à cause des deux branches de l’instrument.
toutes les cours d'Europe ».
FORCLORE, v. clore.
FONTE, poche de selle, 1752. Empr.,
avec altération de la fin du mot, de l’it. FORER. Lat. foräre « percer ». It. forare,
fonda, d'abord « bourse », lat. funda « fron- esp. horadar (dér. de horado « trou », cf.
de », attesté à basse ép. au sens de « petite aussi a. pr. forat « trou »). — Dér. : foret,
bourse », cf. a. pr. fonda « petite bourse 1394.
de cuir où l’on mettait le projectile d’une
sorte de baliste ». FORÉT. Lat. de basse ép. forestis (silva),
attesté dans la Loi des Longobards et les
FONTS, vers 1080 (Roland). Toujours Capitulaires de Charlemagne, qui désignait
masc. plur. Empr. du lat. eccl. médiéval la forêt royale. Probabl. d’abord *silua fo-
fonies, plur. du lat. class. fons, masc., restis « forêt relevant de la cour de jus-
« source, fontaine ». Fons, là où il a survécu tice du roi » (de forum « tribunal »). On a
comme terme pop., est devenu fém. : esp. proposé un francique “*forhist « futaie de
fuente, a. pr. fon, sauf en it. où fonie est sapins », dér. de forha, all. Führe; mais
des deux genres, v. fontaine, source. cette étymologie ne tient pas compte du
FOOT-BALL, fin xixe, déjà en 1698 et côté juridique de la signification du mot,
souvent au cours du xixe s., dans des ou- qui domine dès les premiers textes. It.
vrages traitant de l'Angleterre. Empr. de foresta et all. Forst sont empr. du fr. A
l’angl. football, littéral. « balle au pied ». éliminé des parlers contemporains, en con-
currence avec bois, les représentants du
FOOTING, 1895. Empr. de l’angl. foo- lat. class. silva, d’où a. fr. selve, it. esp.
ling, id. selva. — Dér. : forestier, x11° (forestarius
en bas lat. dès le 1x°), prononciation
FOR, v. fur. de l’s, d’après la langue juridique, qui s’en
FORAIN, 1757, au sens moderne dans est tenue à la forme écrite.
marchand forain ; d’où théâtre forain, fête
foraine, 1802. Extension de sens, par éty- FORFAIRE, v. faire.
mologie, pop. d’après foire, de l’a. fr. forain FORFAIT, terme de droit, v. faire.
«étranger », encore dans des sens juridiques
et autres, lat. de basse ép. foranus, dér. FORFAIT, terme de courses, 1829. Em-
de foris « dehors », cf. de même a. pr. foran pr. de l’angl. forfeit, empr. lui-même du
« étranger » ; seulement gallo-roman. L’éty- Îr. forfait, au sens médiéval de « transgres-
mologie pop. s’est produite dans marchand sion d’un engagement ».
forain, propr. « marchand étranger par-
courant les villes, les campagnes, notam- FORFANTERIE, vers 1540. D'abord
ment dans les foires », d’où, par suite, forain « coquinerie »; de même l'anc. subst. for-
a été pris pour un dér. de foire ; de là aussi fanie, usuel au xvi® s. (/orfant au xve®),
la forme foirain de quelques patois et signifiait d’abord « coquin »; le sens de
marchans foirains, au xv° s., dans un texte « vanterie-vantard », déjà du xvre s., est
d’Abbeville. peut-être dû à l'influence de l’esp. far-
fante, farfantén « fanfaron », de la famille
FORBAN, vers 1300. Tiré d’un anc. verbe de fanfarén. Dér. de forfant, qui est pro-
forbannir, usité jusqu’à la fin du xvi®s., babl. empr. de l’a. pr. forfan, mais avec,
v. bannir et fors. au xvi® s., influence de l'it. furfante, qui
FORÇAT, 1531. Empr. de l’it. forzato, est, lui aussi, empr. de l’a. pr. L’a. pr.
dér. du verbe forzare « forcer », cf. le fr. forfan est le part. prés. de forfaire « faire
travaux forcés. du mal ».
FORCE. Lat. de basse ép. (dès le rve 5.) FORGE, Lat. fabrica « atelier », surtout
fortia, plur. neutre pris comme subst. fém. « atelier de forgeron », dér. de faber « arti-
de l’adj. class. fortis. san », surtout « forgeron ». Esp. fragua,
a. pr. farga. V. fabrique.
FORCENÉ, xi° (Alexis forsenede).
Écrit forcené vers le xvI® s., parce qu’on a FORGER. Lat. fabricäre « fabriquer »
cru y voir un dér. de force. Part. passé de et spécial. « forger ». — Dér. : forgeable,
l’anc. verbe forsener, x11° s., « être hors de 1627 ; forgeage, 1775 ; forgerie, 1865, au
sens, furieux », écrit aussi plus tard force- sens de « falsification de document », c’est
ner, encore usité au XVII® s., Comp. de la un anglicisme d’après forgery (lui-même
prép. fors et de l’anc. subst. sen « sens, dér. de forge, d’origine fr.) ; forgeron (formé
raison », du germanique *sino-, v. asséner. sans doute d’après forgeur), 1534 ; a éliminé
De même ït. forsennare a., pr. forsenar. l’a. fr. fèvre (qui subsiste largement dans
271 FOU
les noms propres, cf. Fèvre, Lefèvre, etc.), faire fort aux deux genres. It. forte, esp.
qui signifie surtout « forgeron », lat. faber, fuerie. Fort, subst., terme de fortification,
d’où aussi it. fabbro « forgeron », a. pr. paraît au x1r1e, de même que le sens « for-
fabre, faure « id. ». Aujourd'hui, dans les tifié » de l’adj. — Dér. : forteresse, x11°,
parlers gallo-romans, le mot le plus usité formé avec le suff. -eresse, ou peut-être
est maréchal, maïs les parlers du Sud- déjà lat. pop. *fortaricia, cf. a. pr. fortareza
Ouest ont encore des représentants de à côté de fortaleza. — Comp. : contrefort,
faber; forgeur, xr11°, depuis le xvre s. sur- XII1*, propr. « appui fort mis contre un mur
tout sens fig.; reforger, 1317. pour le soutenir ».
FORMALISER (se), 1539, a d’abord sur- FORTE, v. piano.
tout le sens de « prendre intérêt pour »;
formalisme, 1838 ; formaliste, 1585 ; forma- FORTIFIER, xive; fortification, 1360.
lité, 1425. Dér. sav. de langue jurid. du Empr. du lat. de basse ép. forlificare, forti-
lat. formalis « qui est suivant la forme, la ficatio. — Dér. : refortifier, xrve.
formule » ; toutefois le sens du verbe, même FORTIN, 1642. Empr. de l'it. forlino,
si on l’explique comme signifiant propre- dim. de forle, pris substantiv., v. fort.
ment «s'attacher aux formes », offre quel-
que difficulté. FORTIORI (a), vers 1660. Locution
empr. du lat. scolastique, propr. « en par-
FORMAT, 1723. Soit empr. de l’it. for- tant de ce qui est plus fort ».
maio « forme, figure », dér. du verbe for-
mare, soit dér. de forme avec le suff. sav. -at. FORTUIT, xive s. Empr. du lat. fortui-
lus, dérivé de fors « hasard », v. le suiv.
FORME, vers 1090, parfois fourme au FORTUNE, xr1e. Au sens de « richesse »,
moyen âge ; formateur, 1414, au moyen âge à partir du xve s. Empr. du lat. foriuna
souvent formere, formeor ; former, x1°, par- « sort », au plur. « richesse ». Forlune, au
fois fourmer au moyen âge; formation, XIV® S., apparaît au sens de « tempête »,
xi11e; formel, xr11e. Empr. du lat. forma et pris à l’a. pr. fortuna ; ce sens s’est déve-
des dér. formare, formaior, formatio, for- loppé dès le lat. pop., cf. de même roumain
malis. Le sens philosophique de forme, for- furlunä qui se dit spécialement du malheur
mel vient du lat. scolastique ; le sens jurid. sur mer. — Dér. : fortuné, xrve (Froissart),
de forme (en lat. anc. forma ne signifie dans d’après le lat. fortunaius; a parfois, du
la langue jurid. que « teneur d’un édit ») XIV® au XVI® s., le sens de « malheureux »
ne paraît pas être antérieur au xvrie s. d’après le double sens de fortune.
V. conformer, déformer, fromage. —
Comp. : plate-forme, xve ; reformer, xtre. FOSSE. Lat. fossa (de fodere « fouir »).
FORMIDABLE, 1475. Empr. du lat. for- It. à. pr. fossa, esp. fuesa « tombe ». —
midabilis, dér. du verbe formidare « avoir Dér. et Comp. : fossette, xrie ; fossoyeur,
peur ».
1328, par l'intermédiaire d’un ancien verbe
fossoyer, xir1°, « creuser une fosse » ; basse-
FORMIQUE, 1787. Dér. sav. du radical fosse, xve.
du lat. formica « fourmi ».
FOSSÉ. Lat. de basse ép. fossätum. A.
FORMULAIRE, xive. Dér. sav. du lat. pr. fossai, anc. esp. fossado.
formula.
FOSSILE, 1556. Empr. du lat. fossilis
FORMULE, 1496. Empr. du lat. formula, .« qu’on tire de la terre », v. les précédents.
dér. de forma, surtout en tant que jurid.
— Dér. : formuler, 1752, terme de pharma- FOSSOIR. Lat. de basse ép. fossorium.
cie, une première fois créé au x1v® 8. A. pr. fossor et quelques parlers romans.
FORNIQUER, 1564; fornicateur, xr1°;
FOU « hêtre », v. fouet.
fornication, id. Empr. du lat. eccl. forni- FOU, adj. Lat. follis « soufflet, sac, bal-
care (dér. de fornix « prostituée », propr. lon »; du sens de « ballon » a passé par
« voûte », d’où « chambre voüûtée »; les plaisanterie au sens de « fou », par compa-
prostituées de bas étage habitaient sou- raison d’une personne sotte, folle avec un
vent, comme les esclaves et le bas peuple, ballon gonflé d’air. Ce changement de sens
dans des réduits voûtés, établis dans la est accompli dès le vie s. L'ancien sens
muraille des maisons), fornicator, fornicalio. « soufflet » vit en fr. jusqu’au xvre s. It.
FORS, v. hors. Comme préf., d’abord folle, a. pr. fol. Dominant dans les parlers
sous la forme fors, d’où for, a servi à former
gallo-romans, en concurrence avec fat dans
de nombreux mots comp., surtout des la région languedocienne, soi (et surtout
soite au fém.) dans les parlers de l’Est et
verbes ; existe de même en prov. et en it.
Ce préf. s’est parfois fondu avec le préf. du Nord-Est. Comme terme de jeu d’é-
checs, fin xvie (Régnier), a remplacé l’anc.
germ. correspondant à l’all. ver, cf. notam- subst. alfin, aufin, empr., par l’intermé-
ment l’anc. verbe forbannir, xu1e, du fran- diaire de l’esp., de l'arabe al-fil « l’élé
cique *firbannjan, en all. verbannen « ban- phant », cette pièce ayant été d’abord
nir » ; On rapproche aussi de forfaire le type représentée par un éléphant ; mais il est
gotique frawaurkjan « pécher » ; mais il est difficile de voir dans fou une altération
difficile de reconnaître la part du germ. d’aufin, v. roquer. — Dér. : folâtre, 1394,
dans le développement du préf. roman. d’où -er, xv® ; folichon, 1637, d’où -onner,
FORT. Lat. forlis. L'’a. fr., conformé- 1786 ; folie, vers 1080 (Roland); follet,
ment au lat., où fortis est masc. et fém., xr1e, d’où feu-follet, 1611; affoler, xrre,
cf. aussi grand, a dit fort aux deux genres d’où affolement, x111°, raffoler, xvi®, au
jusque vers le x1ve s., d’où la locution se sens d’ « être fou », xIve.
FOUAGE 272

FOUACE. Lat. pop. focäcia, fém. de l’anc. verbe fouger, encore dans les patois.
focäcius, cf. focäcius pänis « pain cuit sous Seulement gallo-roman : a. pr. fozilhar. —
la cendre du foyer » (de focus, v. feu), chez Dér. et Comp. : fouille, 1578 ; fouilleur,
Isidore de Séville. It. focaccia, esp. hogaza. fin xve; fouillis, fin xVIII*, au sens mo-
— Dér. : fouacier, 1307. derne, vers 1500 (Deschamps), « action de
fouiller »; affouiller, 1835, affouillement,
FOUCADE, v. fougue. 1836; farfouiller, 1552 (Rab.), avec un
préf. de renforcement provenant peut-être
FOUDRE. Lat. fulgur. Le lat. class. du verbe farcir ; refouiller, xvi® ; trifouiller,
disait en outre fulmen, qui désignait propr. 1808, terme fam., avec une initiale expres-
la foudre, tandis que fulgur désignait l’é- sive, due probabl. au verbe iripoter. V. ba-
clair. Fulmen a disparu dès le lat. de basse fouiller, cafouiller.
ép. ; fulgur a pris sa place ; à son tour il a
été remplacé par des créations nouvelles, FOUINE « sorte de fourche ». D'abord
v. éclair. Le genre fém. de foudre peut venir foisne, d’où les formes foène, fouane qui
de fulgura, plur. neutre pris comme fém. datent du moyen âge ; tandis que fouine
sing. L’a. fr. fuildre représente le lat. de date du xvie s. Lat. fuscina « trident, har-
basse ép. fulgerem comme l’a. pr. folzer; pon, fourche ». V. rouanne.
l’it. folgore représente une forme */fulgurem.
— Dér. : foudroyer, vers 1170, d’où fou- FOUINE, animal. Lat. pop. *fagina
droiement, vers 1300. (sous-entendu musiela), dér. de fägus « hé-
tre », propr. « martre des hêtres », cf. l’all.
FOUDRE « sorte de tonneau », 1690 : Buchmarder et le fr. martre des hêtres (Lit-
« Foudre est un grand vaisseau dont on tré). La forme fouine, cf. foine, xn°, est
se sert en Allemagne », Furetière ; antér. une altération de faine, également attestée
« Six voudres de vin du Rhin », xv°. Empr. au moyen âge et encore répandue dans les
de l’all. Fuder. patois, d’après fou « hêtre », v. faîne, fouet.
FOUÉE, v. feu. It. faina, à. pr. faina ; v. aussi chafouin.
— Dér. : fouiner, 1755.
FOUET, xrne. Dér. de l’anc. subst. fou
« hêtre », lat. fägus, qui a été remplacé en FOUIR. Lat. pop. fodire, lat. class. fo-
fr. par hétre; fouet a dû signifier propr. dere. A. pr. foire. — Dér. : fouisseur, vers
« petit hêtre », puis « baguette de hêtre », 1300.
sens non attestés, d’où « fouet ». Devenu
le terme dominant des parlers gallo-ro- FOULARD, 1761. On a proposé de voir
mans ; a éliminé du fr. le mot écourgée, dans foulard une altération du prov. foulat
esc-, qui se rattache au lat. corrigia « cour- « foulé » en rapprochant le fr. foulé « sorte
roie, fouet » et qui survit sous des formes de drap léger d’été »; mais cette explica-
diverses dans les parlers du Nord-Est et tion, bien que vraisemblable, manque de
de l'Est; il existe en outre divers termes, preuves.
notamment un dér. de chasser, chassoire, FOULER. Lat. pop. “*fullare, propr.
en picard et en lorrain. — Dér. : fouailler, « fouler une étoffe », de la famille de fullo
tiré du radical fou-, xiv® ; fouetter, 1514, « foulon ». It. follare, esp. hollar, a. pr.
d’où fouetteur, xvi® s. (Rab.). folar. — Dér. et Comp. : foulage, 1284;
FOUGASSE, 1368. Altération, par subs- foule, xr1°, cf. pour le sens presse ; de même
titution de suff., de fougade, fin xvie (Bran- it. folla, a. pr. fola ; foulée, xrr1e ; foulure,
tôme), encore attesté en 1690, empr. de xr1e ; refouler, xr1°, au sens de « fouler de
l’anc. it. fugaia; celui-ci est probabl. un nouveau », sens moderne xvi*, d'où refou-
dér. de fogare « fuir d’une façon précipitée, lement, 1538 ; défoulement, 1960.
voler avec une extrême vitesse » (dér. de FOULON. Lat. fullônem, acc. de fullo.
foga, v. fougue). It. follone.
FOUGER, v. fouiller. FOULQUE, oiseau des marais, xive
FOUGÈRE. Lat. pop. “*/ilicaria, propr. (Ménagier : fourques). Empr. de l’a. pr.
« fougeraie », dér. de filix, filicis « fou- folca, lat. fulica.
gère »; de même a. pr. falguiera « fouge- FOUR. D'abord forn. Lat. furnus. Four,
raie » et « fougère » ; le développement du en parlant de l'échec d’une pièce de théâ-
sens est dû au fait que la fougère pousse tre, d’un livre, etc., est issu de l’ancienne
ordinairement en groupes. Le simple est locution faire un four, relevée au xvirre 8.,
représenté par l’it. felce et l’a. pr. feuze; terme de théâtre qui signifiait « renvoyer
il survit dans le Sud-Ouest, la région lan- les spectateurs, quand la salle n’est pas
guedocienne et provençale et le franco- assez garnie », probabl. « rendre la salle
provençal. — Dér. : fougeraie, 1611. noire comme un four, en supprimant la
FOUGUE, 1580 (Montaigne). Empr. de lumière ». — Dér. et Comp. : fourneau,
lit. foga, lat. füga « fuite », d’où, en it., xi1e ; fournée, vers 1165 ; fournier, 1153
« impétuosité », par l'intermédiaire du sens (déjà lat. furnarius « boulanger », au
de « fuite précipitée ». — Dér. : foucade, 1er s.) ; fournil, vers 1165 ; défourner, vers
1533 ; fougueux, 1589. 1300 ; enfourner, xrr1e; chaufour, vers
1330, chaufournier, 1276 (causfornier) ;
FOUILLER. Lat. pop. *füdicüläre, élar- échauffourrée, xir1°, vient de l’occupation
gissement de füdicäre « percer », qui devait du chaufournier, qui pendant un temps
avoir le sens non attesté de « creuser » très prolongé et dans une température très
(dér. lui-même de fodere, v. fouir), d’où élevée, ne fait que pousser la bourrée dans
273 FOURRIÈRE

l’âtre du chaufour, où il l’éparpille avec ment de suff., p. ex. Valenciennes four-


son fourgon; de là aussi l'influence du miche) ; le reste a pour base une forme avec
verbe fourrer, qui a modifié la fin du mot. changement de genre, *formicus. En effet
l’a. fr. formi était masc., et le fr. n’est
FOURBE, v. le suiv. revenu au fém. qu'au xvire s. Ailleurs
FOURBIR, vers 1080 (Roland). Du ger- représentants du lat. formica : it. formica,
manique occidental “*furbjan, cî. moyen esp. hormiga. Dans les parlers du Nord-
haut all. fürben « nettoyer » ; de même it. Est et du Massif Central autres termes. —
forbire, a. pr. forbir. — Dér. : fourbe, nom Dér. : fourmilier, 1754, d’après le suivant ;
fém. « fourberie », 1455, aujourd’hui vieilli; fourmilière, 1530 (écrit for-), mauvaise gra-
fourbe, nom masc., 1455 (argot des Coquil- phie pour fourmilliere, 1564, réfection de
lards) au sens de « voleur », d’où l’anc. l’a. fr. formière, xu1°, d’après le verbe four-
verbe fourber, 1643, fourberie, 1640. Le miller ; fourmiller, 1552, réfection de l’a. fr.
développement du sens « fourbir, net- fourmier, lat. formicäre, cf. it. formicare,
toyer », d’où « voler » en argot se retrouve d’où fourmillement, 1636, d’abord fourmie-
dans polir, v. polisson, cf. aussi en fr. pop. ment, 1545. — Comp. : fourmi-lion, 1745
l'emploi de neiloyer au sens de « voler ». (Bonnet ; une première fois en 1372, sous la
L’it. furbo vient probabl. du fr. ; cf. dès le forme fourmilleon), fait sur le modèle du lat.
xtr1e s. le verbe forbeter « tromper » ; four- des naturalistes formica leo (Isidore de Sé-
bissage, 1444; fourbisseur, xri°, l’a. fr. ville a déjà formicoleon).
disait surtout forbeor ; fourbissure, 1552 ; FOURNAISE, xrre. Réfection fém. de
refourbir, 1279. l’a. fr. fornais, masc., mais dont le genre a
FOURBU, v. boire. dû être hésitant comme ailleurs, lat. for-
näcem, acc. de fornax, masc., « sorte de
FOURCHE. Lat. furca. It. forca, esp. four ». It. fornace, fém., esp. hornaza, a. pr.
horca. — Dér. et Comp. : fourcher, x1I°; fornaiz, des deux genres.
fourchette, 1313 ; fourchon, 1213, « dent
de fourche »; fourchu, xr1°; enfourcher, FOURNIR. Du germanique occidental
1553, au sens de « percer d’une fourche » ; *frumjan, Cf. anc. saxon frummian « exé-
enfourchure, xr1° ; fourche-fière, x11® (/or- cuter », all. frommen. L’a. pr. formir et l’anc.
ches fires) ; fière paraît être une altération, toscan frummiare représentent directement
par croisement avec fier, de fire qui repré- le mot germ. ; le fr. fournir et l’it. fornire
sente régulièrement le lat. ferrea « de fer »; ont substitué un n à la consonne m, sous
cf. à l’appui le limousin fourcho-ferrio; l'influence de garnir, it. guarnire. — Dér. :
a. fr. ferges, firges « entraves, chaînes (d’un fourniment, xv°, d'abord comme terme
prisonnier) », lat. pop. ferreae, n’a pas le militaire ; fournisseur, 1415; fourniture,
même traitement, mais c’est un mot moins 1393, d’abord fornelure, xr11°.
pop.
FOURRAGE, x. Dér. de l’a. fr. feur-
FOURGON : tige de fer servant à attiser re, x11° (fuerre), vit encore dans les pa-
le feu », vers 1100. Dér. d’un verbe lat. tois sous les formes feurre, foerre, foarre,
de basse ép. *furicare (dér. de fürare « déro- fouarre (cf. la rue du Fouarre, à Paris), au
ber », für « voleur », cf. it. frugare « fouil- sens de « paille ». F'eurre représente le fran-
ler », Lucques furicare, esp. hurgar, et sur- cique *fodar, cf. all. Futter et angl. fodder.
tout a. fr. furgier « fouiller », forgier), peut- — Dér. : fourrager, verbe, xiv® ; fourragère,
être déjà lat. de basse ép. *furico (acc. adj., 1835, pris depuis 1836 comme subst.
-onem) « instrument servant à fouiller ». pour désigner une voiture militaire et un
La voyelle o (au lieu de u) dans le radical ornement de l’uniforme en forme de cor-
peut provenir de la position protonique de don, 1872, sens qu'on explique comme
cette syllabe dans les formes accentuées issu du sens, pourtant non attesté, de
sur la terminaison (cf. froment), tandis que « corde à fourrage ».
la voyelle u peut s'expliquer comme déve-
loppement en syllabe accentuée. —— Dér. : FOURREAU, xre. Dér. de l’a. fr. fuerre
fourgonner, xXIII°. « fourreau », du germ. *f6dr qu’on suppose
d’après le gotique fôdr (cf. aussi all. Fulier
FOURGON, vers 1640 « sorte de voiture » et Futieral « fourreau, étui ») ; cf. it. fodero.
(Voiture). Très probabl. même mot que le
préc. Le fourgon, étant d’abord une voiture FOURRER, xre. Dér de l’anc. fuerre
à ridelles, a été dénommé d’après cet élé- « fourreau », v. le préc. — Dér. : fourré,
ment de construction. Le sens de ridelle 1761 (J.-J. Rousseau) ; d’abord bois fourré,
est encore conservé dans le prov. mod. 1690 ; fourreur, 1260 ; fourrure, x11° ; dé-
fourgoun. Fourgon aura donc désigné d’a- fourrer, x1I°.
bord chacune des perches dont se compose
une ridelle, ensuite la ridelle même, et FOURRIER, xn°. À signifié au moyen
finalement la voiture (par l'intermédiaire âge « fourrageur, soldat qui va au four-
d’une *charrette à fourgon). Cf. guimbarde. rage », puis « officier chargé de marquer le
logement des gens de guerre », d’où, depuis
FOURMI. Le gallo-roman est divisé en le xves., « sous-officier chargé de s'occuper
trois parties pour les. successeurs du lat. des vivres et de pourvoir au logement des
formica. Le franco-provençal, la Provence soldats ». Dér. de l’a. fr. fuerre « fourrage»,
et le Languedoc continuent directement v. fourrage.
cette forme (a. pr. formiga) ; les formes du
wallon, du picard, du Dauphiné et du FOURRIÈRE, xu1°. A signifié d’abord
Rouergue ont comme point de départ un « local où l’on met le fourrage »; le sens
lat. de basse ép. *formice (avec change- moderne, 1771, est issu de la locution
18
DICT. ÉTYM.
FOURRIÈRE 274

melire en fourrière, XV1®, où fourrière dé- viennent du germ. ancien. — Dér. : frai-
signe un local où l’on retenait un cheval, cheur, 1213, rare avant le xvi® s. ; fraîchir,
une vache, une voiture, etc., saisis jus- x11° ; défraîchir, 1863 ; rafraîchir, xr1°, sou-
qu’au paiement de dommages, de dettes, vent aussi refreschir au moyen âge ; d’où
d’amendes. Dér. de l’a. fr. fuerre « four- rafraîchissement, x1IIe.
rage », v. les préc.
FRAIS, subsi., 1283 (Beaumanoir : fres,
FOURVOYER, v. voie. pluriel). Le sing. frai n’est pas attesté,
FOUTEAU, v. hêtre. mais il ressort du dér. frayer « faire les
frais », 1260. En a. fr. souvent sing. Repré-
FOUTRE. Lat. fuiuere. V. ficher. — sente le lat. fractum, part. passé du verbe
Dér. et Comp. : foutaise, 1790; Jean- frangere « rompre ». En effet le sens pre-
foutre, xvir1e ; je-m’en-foutiste, 1834, d’où mier, attesté en 1266, est « dommage qu’on
-isme, vers la même ép. cause en rompant quelque chose » —
Dér. : défrayer, 1373, par l'intermédiaire
FOX, fin xix°. Ellipse de fox-hound, du simple frayer.
1828, mot angl. comp. de fox « renard » et
hound « chien ». FRAISE, fruit. Lat. pop. fräga, plur. du
neutre frägum pris comme fém. sing. La
FOX-TROT, vers 1912. Comp. angl. id. forme régulière fraie, rarement attestée en
signifiant « trot du renard ».
a. fr., a disparu devant fraise, forme née
FOYER. Lat. pop. *focärium, subst. issu sous l'influence de framboise. Roumain
de l’adj. de basse ép. focärius « qui concerne fragä et dialectes italiens ; en it. littéraire
le foyer », dér. de focus « foyer », v. feu. fragola, lat. pop. *fragula. Des formes du
A. pr. foguier et, d’après une autre forme type “*fräga existent encore en wallon,
*focäre, esp. hogar. dans la région de la Suisse romande et en
gascon ; en outre un type mag-, d’origine
FRAC, 1767. Empr. de l’angl. frock (lui- préromane, avec différents suffixes (lan-
même empr. du fr. froc), qui apparaît au guedocien majoufo, etc.) dans les parlers
XVIIe s. au sens de frac et dont l’o angl. méridionaux, répandu aussi dans l'Italie
très ouvert fut pris par les Français pour septentrionale et en basque. — Dér.
un ag. fraisier, vers 1300.
FRACAS, 1475 ; fracasser, id. Empr. de
l’it. fracasso, fracassare, probablement croi-
FRAISE « mésentère du veau, de l’a-
gneau », xive (sous les formes fraise et
sement de lat. frangere et quassare (v.
casser). frase). Tiré, au sens d’ « enveloppe », de
l’anc. verbe fraiser « dépouiller de son enve-
FRACTION, 1520 (au sens arithméti- loppe » spécialement en parlant de fèves,
que) ; au moyen âge et jusqu’à nos jours cf. fèves. frasées, xrie. De même a. pr.
«action de rompre le pain eucharistique », freza « fève écossée », frezar « écosser des
1187, en outre « action de briser, de rom- fèves » et freza « fressure », tiré de ce verbe.
pre ». Empr. du lat. de basse ép. fractio Freza, au premier sens, représente le lat.
(du verbe frangere « briser »). — Dér. : (faba) frésa « fève moulue », part. passé du
fractionnaire, 1705 ; fractionner, 1789, d’où verbe frendere « broyer avec les dents »;
fractionnement, 1838. de frésa a été dér. un verbe “*frésäre, qui
FRACTURE, xr11e. Empr. du lat. frac- aura pris le sens de « dépouiller de son
enveloppe ».
tura. L’a. fr. dit plutôt fraiture, — Dér. :
fracturer, 1793; d’abord fracturé, xvi® FRAISE « collerette empesée », à la mode
(Paré). au xvi®s. Emploi fig. du préc. Sans rapport
FRAGILE, xive (Oresme); fragilité, avec à. fr. fresé, frasé « bordé, galonné »
x11e ; a éliminé fraileté, dér. de fréle. Empr. dér. de l’a. fr. freis « id. », qui repré-
du lat. fragilis, fragilitas, de la famille du sente le grec phryx, v. orfroi. L’a. pr.
verbe frangere, v. les préc. et frêle. dit de même frezar « border, galonner »
et fres « bordure, galon ».
FRAGMENT, vers 1500. Empr. du lat.
fragmenitum. — Dér. : fragmentaire, 1801 ; FRAISE « outil », 1676. Emploi méta-
fragmenter, 1811. phorique du préc., dû aux découpures des
deux objets. — Dér. : fraiser, 1676 ; frai-
FRAGON, nom d’arbuste, x11° (sous la seuse, 1877.
forme fregon). Gaulois frisgo.
FRAGRANCE, xrr1° s., mais rare avant FRAISIL, 1676. Altération de faisil,
Chateaubriand (1830), qui avait une pré- xinie, lat. pop. *facilis, dér. de fax, facis
dilection pour les mots en -ance. Dér. du « torche, tison », au sens de « qui provient
lat. fragrare « répandre une bonne odeur ». du tison », p. ex. dans scoria *facilis. L’r
de frasil provient probabl. du verbe frai-
FRAIRIE, v. frère. ser.
FRAIS, FRAÎCHE. D'abord frois, fres- FRAMBOISE, xrre. Du francique *bram-
che, x11°, puis fres, fresche, écrits ensuite basi « mûre de ronce ». L’initiale fr- vient
frais, fraische, fraîche. Du germ. “*frisk, de l'influence de fraise et la diphtongue oi
propr. « frais » en parlant de la tempéra- de la labiale précédente. — Dér. : fram-
ture, d’où « non flétri, récent », cf. all. boiser, 1680 ; framboisier, 1306.
frisch, angl. fresh ; de même it. esp. fresco, FRAMÉE, 1559. Empr. du lat. framea,
a. pr. fresc. L'existence des sens fig. dans donné par Tacite (Germanie, VI), comme
toutes les formes citées prouve qu'ils pro- mot germ.
275 FRAYER

FRANC, adj., vers-1080 (Roland). Tiré FRANGIPANE, 1646. D'abord surtout


du nom propre Franc, du francique *frank, gants de frangipane ; on trouve aussi fran-
latinisé de bonne heure en Francus. Le sens chipane. Empr. de l'it. Frangipani, nom
de « libre » domine au moyen âge ; le sens d’un marquis de Rome qui inventa un par-
dér. « qui dit ouvertement ce qu’il pense » fum dont on se servit surtout pour parfu-
apparaît dès le xrr° s. À passé dans les mer les gants. Balzac dit encore vers 1640
langues voisines : it. esp. franco, a. pr. ganis de Frangipani. Dit plus tard d’une
franc, avec des sens analogues. Comme crème pour la pâtisserie, 1746.
nom de peuple, franc fait au fém. franque;
langue franque, pour désigner le sabir des FRANQUETTE, v. franc.
ports du Levant, vient de l'it. lingua FRAPPER, xue. Signifie souvent au
franca. — Dér. : franchir, xr1°, au sens moyen âge « s’élancer » au réfl. Très pro-
d’ « affranchir », usuel jusqu’au xve s. ; le babl. d’origine onomatopéique, cf. engadi-
sens moderne, qui apparaît vers le xIve 5., nois fraper « bavarder ». — Dér. : frappe,
vient de celui de « se libérer de, se dégager 1584 ; frappeur, xve; refrapper, xII° S.
de », d’où « se dégager d’un obstacle, le
franchir », cf. le lat. liberare limen « franchir FRASQUE, xv°. Empr. de l’it. frasche
le seuil » ; d’où infranchissable, 1792 ; fran- « balivernes », plur. de frasca « branche
chise, xr1°, développement du sens paral- qu’on a coupée à un arbre », en partic.
lèle à celui de l’adj. ; franquette, dans la « gluaux ». Frasca est dér. d’un anc. verbe
locution à la bonne franquette, xvrie (d’a- représentant le lat. de basse ép. *fraxicare
bord à la franquelte) ; affranchir, xrrr°; « rompre », qui a été formé avec “*fraxus,
affranchissement, 1322. pour fracius, part. passé de /rangere
FRANC, monnaie, 1360. D’abord mon- « rompre ».
naie d’or frappée pour la première fois sous
FRATERNEL, xre. Dér. sav. du lat.
le roi Jean et qui portait la devise Franco-
rum rez, d’où le subst. franc. fraternus « fraternel » (de fraler « frère »).
— Dér. : fraterniser, 1548 ; -sation, 1792.
FRANÇAIS, vers 1080 (Roland). Dér.
de France (latin de basse ép. Francia « pays FRATERNITÉ, xue. Empr. du lat. fra-
des Francs », dér. de Francus). — Dér. : ternitas.
franciser, xvie (Bon. des Périers) ; franci-
sation, 1796. FRATRICIDE, meurtrier, xv°, a été
contesté au xvii® s.; fratricide, meurtre,
FRANCHIR, v. franc. xI1e, rare jusqu'au xvirie s. Empr. des mots
FRANCISQUE, 1599. Empr. du lat. de lat. fratricida, fratricidium, comp. du verbe
basse ép. francisca (Isidore de Séville), caedere « tuer ».
dér. du nom du peuple des Francs. FRAUDE, 1255; frauder, xive (Ber-
FRANC-MAÇON, 1735 (en outre frima- suire). Empr. du lat. fraus, fraudis « ruse,
con, 1740, d’Argenson). Calque de l’angl. mauvaise foi, tromperie », fraudare. —
free mason, relevé, avec son sens actuel, en Dér. : fraudeur, xive.
1646 ; cette désignation vient de ce que la
franc-maçonnerie est issue de groupements FRAUDULEUX, xiv®e (Oresme). Empr.
d’idéologues anglais qui pratiquaient l’al- du lat. de basse ép. fraudulosus pour faire
chimie et s’abritaient sous la protection suite à fraude.
des franchises des corporations et parti-
culièrement de celle des maçons (free ma- FRAYER. Au moyen âge en outre froier.
son, littéral. « maçon libre » désignait pro- Signifie d’abord « frotter », sens conservé
babl. des maçons habiles, autorisés à se dans quelques acceptions techn. (d’où
déplacer). — Dér. : franc-maçonnerie, « user une monnaie »); d’où « rendre un
1747, d'abord franche..…., 1742 ; maçonni- chemin praticable », xrve, et, d'autre part,
« frayer » en parlant de la femelle du pois-
que, 1788.
son qui, souvent, frotte son ventre sur le
FRANCO, 1754. Abréviation de porto sable, etc., pour faciliter l'émission des
franco « port franc », empr. de l’it. qui dit œufs, 1307 (acception que le mot fr. a en
aujourd’hui franco di porto « franc de port », commun avec le piémontais friè, l’engadi-
v. franc. nois frier; cf. esp. frezar « se frotter au
FRANCOLIN, vers 1300 (Marco-Polo). moment du frai », lat. pop. “*frictiare,
Empr. de l’it. francolino, d’origine incon- propr. « frotter ») et, par extension, en
nue. parlant du mâle qui féconde les œufs ; on
dit en ce cas frayer avec, xvi® s., d’où l’ex-
FRANGE. Lat. fimbria, devenu de bonne pression frayer avec quelqu'un, fin xvue
heure *frimbia, par métathèse de l’7. Rou- (Saint-Simon). Lat. fricäre « frotter ». It.
main fringhie « corde », dialectes de l'Italie fregare « frotter », esp. a. pr. fregar « id. »..
Supérieure franbe « franges ». Le fr. a été — Dér. : frai, 1340 (sous la forme /ri), on
empr. par les langues voisines : it. frangia, trouve aussi au x1v® s. une forme /rois,
all. Franse, etc. — Dér. : franger, 1213; qui n’est sans doute qu’une variante pra-
effranger, 1870. phique de frai ; cf. l’a. pr. fregazon « saison
FRANGIN, 1837 (Vidocq). Mot d’argot du frai », dér. de fregar; fraie « époque du
empr. d’un argot it. ; on a relevé dans l’ar- frai », XVIIIe (du XIVE AU XVIIIE S. au sens
got piémontais franzin au sens de « frère », de « frai ») ; frayon, d’origine dialectale au
qui paraît être une altération du piém. sens d’ «irritation de la peau produite par
fradel « frère » d’après cüzin « cousin » de ce le frottement de la selle », date du xrr° 5.
dialecte. — Dér. : frangine « sœur », 1837. (sous la forme froion) au sens de « coup ».
FRAYEUR 276

FRAYEUR. D'abord /reor, d'où frayeur, d'après perruque. Freluche est sorti de fan-
xv*. Signifiait propr. « bruit, tapage »; a freluche, par apocope de la première syl-
pris le sens de « peur » dès le xn° s., parce labe.
qu’il a été rapproché du verbe esfreer « ef-
frayer », ce qui a amené aussi la création FRÉMIR. D'abord fremir, refait en fré-
d’esfreor « effroi ». Lat. fragôrem, acc. de mir. Lat. pop. */remire, lat. class. fremere
fragor « bruit, fracas ». It. fragore « bruit ». « bruire, rugir, ete. ». It. fremere et fremire,
a. pr. fremir. — Dér. : frémissement, xr1°.
FREDAINE, 1420. Forme fém. de l'adj.
fredain « mauvais », xve, empr. de l’a. pr. FRÊNE. D'abord /raisne, puis fresne,
*fraidin, qui a très probabl. existé à côté frêne. Lat. fraxinus. It. frassino, esp. fresno,
de radin « scélérat » (cf., avec un autre a. pr. fraisse. — Dér. : frênaie, 1280 (sous
suff., les deux formes /radel et fraidel, id., la forme fragnée), ou déjà lat. pop. *fraæi-
de l’a. pr.). Ce groupe de mots prov. repré- nèla, lat. de basse 6p. fraxinèlum, cf. it.
sente très probabl. un gotique */fra-aipeis frassinelo, esp. fresneda.
« qui a renié le serment prêté », qui corres-
pond à l’anc. haut all. freidi « téméraire » FRÉNÉSIE, vers 1220 ; frénétique, vers
(qui équivaudrait à un all. *Xver-eidig, de 1200. Jusqu'au xvure s., termes de méde-
Eid « serment »). cine ; sens fig. au xviit s. Empr. du lat.
médical phrenesis (au moyen âge phre-
FREDON, 1546. D'abord « sorte de rou- nesia, -nisia), phrenelicus, -niticus (en grec
lade ». Vit surtout dans les dialectes du phrenèsis, plus souvent phrenilis, phreni-
Midi, d’où il doit avoir passé en fr. Repré- tikos, dér. de phrén « âme, pensée », propr.
sente probabl. le lat. frilinnire « gazouil- « diaphragme »; cet organe, d'après cer-
ler », avec changement de suff, On a aussi taines théories, était considéré comme le
proposé un germ. *verdonen qui serait comp. siège de la pensée).
du préf. ver- et du verbe moyen haut all.
donen « tendre », mais ce verbe n'étant FRÉQUENT, vers 1400 (Deschamps) ;
attesté dans aucun texte, cette étymologie fréquence, xr1°, d'abord au sens de « fré-
a moins de probabilité. — Dér, : fre- quentation, assemblée », développement
donner, xvi° (J. du Bellay), développement du sens d’après celui de l’adj. ; fréquenter,
du sens parallèle à celui du verbe : fre- XII°, au sens de « raviver le souvenir »,
donnement, xvi®. sens moderne au xIv® s.; fréquentation,
XIV®, au sens de « fréquence », développe-
FRÉGATE, 1536 (fraguale en 1525 dans ment du sens d’après celui du verbe. Empr.
un texte de Marseille). Empr. de l’it. fre-
gata, napol. fragate, dans lequel on a pro- du lat. frequens « nombreux, assidu, fré-
posé de voir un dér. du grec dphrakton «non quenté, fréquent » et de ses dér. frequentia
couvert (d’un bateau) », ce qui offre de « réunion, assistance », frequentare « ras-
grandes difficultés phonétiques et mor- sembler, peupler, fréquenter, répéter », fre-
phologiques. La frégate étant à l’origine quentatio « fréquence ». Le sens dominant
un petit bateau destiné à alléger une galère de ces mots s'est établi peu à peu; celui
ou à en recueillir l'équipage en cas de de fréquence s'est réglé sur celui de fré-
naufrage on a aussi proposé le part. passé quent, celui de fréquentation sur celui de
de naufragare, naufragala, qui aurait perdu fréquenter, mais ils ont d’abord été pris au
la première syllabe identique au subst. nau latin sans lien entre eux.
« bateau ». Maïs ce part. aurait le sens de FRÈRE. Lat. fraäter. De même a. pr.
« qui a fait naufrage » et ne serait point fraire. A été remplacé au sens de « frère »
indiqué pour désigner un bateau qui devrait dans une partie des parlers romans : l'it.
servir en cas de naufrage. En outre cette fraie signifie « moine », de même que l’esp.
réduction du mot est une pure hypothèse fraile, empr. du prov. « Frère » se dit en
qui ne s'appuie sur rien. Le mot s’est it. fratello; pour l'esp., v. germain. —
répandu de l'Italie méridionale dans tous
Dér. : frairie, xr1° (frarie, puis frairie, fré-
les ports de la Méditerranée. rie), mot aujourd’hui désuet ; dér. formé
FREIN. Lat. frénum. It. esp. freno. — sur le modèle de confrérie ; signifie en effet
Dér. : freiner, fin xix°, d'où freinage, id. au moyen âge « confrérie »; aujourd'hui
usuel dans la région poitevine au sens de
FRELATER, 1515 (aux xvie et xvrie s- « fête patronale »; la conservation de l’a
aussi /ralaler). Signifie d’abord « trans- dans frarie prouve qu'il s'agit d'un très
vaser », d’où « altérer par mélange »; au anc. dér. en -1a ; on peut même se demander
sens moral, xvrire, Empr. du moyen néerl. si la forme jrairia attestée en bas lat. dès
verlaten « transvaser (du vin) ». — Dér. : le Xe s. ne permet pas de faire remonter
frelatage, 1655; frelaterie, 1609; fre- le mot au grec phralria, la désignation des
lateur, 1611. douze groupes dans lesquels étaient orga-
FRÊLE. Aujourd'hui seulement litté- nisés les citoyens d'Athènes et qui ne se
raire. D'abord /raile, puis fresle, frêle, d’a- réunissaient plus que pour le culte et pour
près grêle. Lat. fragilis, v. fragile. des agapes ; frérot, xvi° (B. des Périers).
FRELON. Francique *hurslo, cf. fors- FRESAIE, xue, Altération, peut-être
leone dans les Gloses de Reichenau, et d'après orfraie, de presaie, signalé en poite-
néerl. horzel, all. Horniss. vin par Ménage, cf. aussi le gascon bresaga
signalé par Scaliger, lat. pop. praesäga,
FRELUQUET, 1611, dér. de freluque tiré de praesäga avis « oiseau de mauvais
« mèche de cheveux » (xve s.), altéré de augure », cf. pour le sens l'all. Totenvogel.
freluche « ornement vain », probablement Seulement gallo-roman.
277 FRINGALE

FRESQUE, vers 1660, Empr. de l’it. FRICHE, 1251, Du xie au xviit 8.


fresco, propr. « frais », tiré de la locution et encore dans beaucoup de parlers fresche,
dipingere à fresco « peindre sur un enduit frèche, Empr, du moyen néerl versch
frais », d’où, souvent aussi, peindre, pein- « frais », qui était souvent employé avec
{ure à fresque, encore au xvi1® 8. ; le fém. le mot lant « terre » gr) désigner la
de fresque vient de celui de peinture. Au terre qu’on avait gagné eur la mer en
début du xvue $. le fr. avait essayé un l’endiguant, La forme friche est sortie de
calque, peindre au frais. frèche probabl. sous l'influence des parlers
rhénans où frisch s’employait au sens de
FRESSURE, x111* (sous la forme froi- « nouvellement défriché », Cf, aussi Je lat.
sure ; froissure au x1v* 8.). Lat, pop. frisü- noväle « jachére », dér, de novus « nouveau ».
ra, propr. « friture », dér. du verbe de basse — Dér, : défricher, 1256 ; défrichement,
ép. frizäre « frire »; cette dénornination 1486 ; défricheur, 1541.
vient de ce qu'on fait des fricassées avec
la fressure ; C1. l'emploi de fricassée en ce FRICHTI, 1864, Empr, de l’all. Früh-
sens en Saintonge au xvu1° $., d'aprés Mé- slück, avec la prononciation alsacienne
nage et au sens de « foie » aujourd’hui dans fristich, introduit probabl. par des soldats
les ers alpins. La voyelle de la première alsaciens.
syl de fressure vient probabl. de l’in- FRICOT, 1773; fricoter, 1808. Termes
uence du lat, fresa, vw. fraise « mésentére ». pop. formés avec le radical de fricasser,
FRET, xt, Empr. du néerl. vrechi, Cf. fricandeau. — Dér. : fricoteur, 1831.
crachf « prix du transport » (d’où aussi FRICTION, 1532. Empr. du lat. médical
l'ail Fracht et l’angl. ms ra freight). friclio (du verbe fricare « frotter »), — Dér. :
L’a. pr. freit vient du fr, — Dér. : fréter, frictionner, 1742,
xa11€, d’où fréteur, fin xvi° ; affréter, 1322 ;
affrétement, 1: , > XVIIE, FRIGIDAIRE, 1922. Empr. du lat. fri-
gidarium « chambre froide » (comme terme
FRÉTILLER, vers 1160. Dér, de l’a. fr. hist, déjà au xvi® 8),
freter « frotter » (du lat. frictare) ; le sens
rs ae à par les mouvements rapides FRIGIDITÉ, 1230. Empr. du lat. de
qu’on fait en frottant. — Dér, : frétille- basse ép. frigidilas, dér. de l’adj. frigidus
ment, 1270 (Oresme); frétillon « petite « froid ».
fille qui frétille », xv°. FRIGORIFIQUE, 1676, Empr. du lat.
FRETIN, xu1°, Fréquent au moyen âge frigorificus, propr. « qui fait le froid »,
au sens de « menus débris », d’où spécial. cornp. du subst. frigus, frigoris « froid » et
menu frelin « choix de morue de dernière de la terminaison fréquente -ficus (de facere
«< faire »). — Dér. : frigorifier, fin x1x°;
qualité », 1606 (les autres s’appelaient
alors, par ordre de ité, meilleur frelin, frigo, réduction du part, passé.
grand fretin, fretin de rebut), Dér. de l’a. fr. FRILEUX, D'abord friuleux, frieuleus.
frait, fret, part. de l’anc. verbe frain- Dit parfois du temps. Lat. de basse ép.
dre, v. fracture, donc propr. « fragment ». frigorôsus, dér. de frigus, v. le préc. Rare
en dehors du fr.; cf. roumain friguros
FRETTE, vers 1180. Probabl. d’un fran- < froid, frileux ».
cique *felur, qu’on peut supposer d'aprés
anc. L feler, anc. haut all. fezzara. On a FRIMAIRE, v. le suiv.
astres 4 aussi d’y voir un dér. du verbe FRIMAS, xv= (Villon). Dér. de frime,
anc, fr. freter « garnir d’une frette », qui attesté dans les parlers pop. (en a. fr.
+ serge un verbe lat, non attesté frume, 1289), qui représente le francique
#firmitare « consolider ». #hrim, C1, anc, angl. hrim, moyen haut all.
FREUX, xun° (alors fros, fru). Francique rim. À été remplacé, à une époque mo-
#hr6k qu’on restitue d’après l’anc. haut derne, par givre, venu du Sud. — Dér. :
all. hkruoh. frimaire, 1792, créé par Fabre d’Eglantine:
v. brumaire, vendémiaire.
FRIABLE, 1529. Ernpr. du lat. friabilis,
dér. du verbe friare « réduire en menus FRIME, xv°, On disait d’abord faire
morceaux ». — Dér. : friabilité, 1641 frime de, faire la frime de « faire semblant »;
aujourd’hui surtout pour la frime, c'es une
FRIAND, v. frire. frime. Altération de l’a. fr. frume « mau-
FRICANDEAU, 1552 (Rab.) Dér. du vaise mine », du lat. frümen « gorge,
radical fric-, qu’on a obtenu en interpré- gueule ». — Dér. : » 1845, alté-
tant, contrairement à l’étymologie, le ration de frimouse, 1611 (alors phrymouse,
verbe fricasser comme un dér. en -asser. -euse), emmpr. d’une région où le suff. fr.
-euse est représenté par -ouse.
FRICASSER, xv°. Comp. de frire et de
casser. — Dér. : fricassée ; 1490; en outre FRIMOUSSE, v. frime.
fricassure chez Villon; fricasseur, vers FRINGALE, 1808. Altération, peut-être
1500. d’après le suiv., de faim-valle, x11°, déjà
FRIC-FRAC, 1752 (au sens de « carn- alors au sens fig, propr. « boulimie des
briolage » depuis 1867}. Création onoma- chevaux », encore usité sous cette forme
| topéique pour exprimer un bruit ou une en normand et sous des formes altérées
action rapide (comp. ce qui vient de fric, dans les parlers voisins, cf. faimcalle en
s’en va de frac «le bien mal acquis se dissipe angevin, etc. La i partie du mot
vite » (1640)). est le fr. faim; la deuxième représente
FRINGALE 278

probabl. le breton gwall « méchant ». Cette tème de défense passe pour avoir été in-
hypothèse peut s'appuyer sur le fait que venté dans la province de la Frise, cf. la
faimvalle vit surtout en Normandie et désignation all. spanischer Reiler, littéral.
dans la Haute-Bretagne. « cavalier espagnol ».
FRINGANT, xve. Part. prés. de l’anc. FRISER, 1448. Très probabl. issu du
verbe fringuer, XV®, « gambader ». Ce verbe radical fris- qu’ont du xIv® au XvI° s. cer-
est lui-même dér. de la locution faire frin- taines formes de frire. Les mets qu'on frit
gues, id., XIIIe s., d’un radical onomato- dans l'huile se tordent et se recroquevillent
péique fring- qui désignait le sautille- jusqu’à ressembler à des mèches frisées. Ce
ment d’une personne qui est dans la joie. développement a pu être favorisé par le
I1 en est sorti aussi le subst. fringues conflit de frire et frir « férir » (forme plu-
« habits » (d’abord seulement pop.) sieurs fois attestée) dont ces deux verbes
1888. sont sortis réduits à quelques formes. Le
FRIOLER, v. affrioler. sens de « frôler » apparaît dès le xvI® s. ;
il a probabl. comme point de départ le
FRIPER « chiffonner », 1546 (Rab.). sens musical « faire vibrer la corde en
Altération, d’après fripon, de l’a. fr. freper, l’effleurant », très vivant au xvrie s. —
dér. de l’anc. subst. frepe, ferpe, felpe Dér. et Comp. : frisette, 1865 ; frison, 1474 ;
« frange, vieux habits », issu par différentes frisotter, 1552 (Ronsard) ; frisure, 1515 ;
modifications du lat. de basse ép. faluppa défriser, 1680.
« fibre, chose sans valeur ». — Dér. : fripe-
rie, xvi®, d’abord freperie, xttre ; fripier, FRISQUET, 1827. Dér. du wallon fris-
xv°, d’abord frepier, xurr°; défriper, 1771. que « froid », empr. du flamand frisch (pro-
FRIPE-SAUCE, v. fripon. noncé avec une gutturale finale) « légè-
rement froid », cf. moyen néerl. frise
FRIPON, vers 1570, plus ancien d’après « frais », v. aussi friche.
le dér. friponner. À signifié aussi « gour-
mand ». Dér. de l’anc. verbe friper « déro- FRISSON. D'abord fém., jusqu’au xvi®s.
ber ; avaler goulûment », xvi® (d’où fripe- Lat. de basse ép. frictionem, acc. de frictiô,
sauce, 1532, Rab.), au moyen âge au sens considéré comme dér. de frigere « avoir
de « s’agiter » (attesté surtout dans le comp. froid ». — Dér. : frissonner, xve (Villon),
défriper), de la même origine que friper d’où frissonnement, 1540.
« chiffonner ». — Dér. : friponner, x1v®, au FRISURE, v. frire.
sens actuel, d’où friponnerie, 1530.
FRITURE. Lat. de basse ép. frictüra,
FRIPOUILLE, 1837 (Vidocq). Se ratta- dér. de frigere « frire ».
che probabl. à la famille de friper; pour
le suff., cf. aussi frapouille « haïllon », 1807. FRIVOLE, xri°. Empr. du lat. frivolus.
FRIQUET, « esp. de moineau », 1555 — Dér. : frivolité, 1721.
(Belon). Au xvri® s. signifie aussi « vif, FROC, xri° (Chrétien). Francique *hrok,
éveillé », sens qui remonte au moyen âge ; cf. anc. haut all. hrok, all. Rock « habit,
dér. de l’anc. adj. frique, frisque, friche, etc., robe ». Une autre forme, prov. floc et
« vif, alerte », cf. a. pr. fric « jeune hom- lat. médiéval floccus, est due à l’in-
me ». Celui-ci représente le gotique *friks fluence du lat. floccus. — Dér. : frocaille,
«avide, téméraire » (attesté dans le comp. vers 1750 (Piron); frocard, vers 1700;
faihu-friks « avide d'argent »), auquel au- défroquer, xv® ; défroque, 1611 ; enfroquer,
rait correspondu en francique *frek (cf. all. XVI® -(Rab.).
frech). Mais le francique doit avoir aussi
connu une forme avec alternance vocalique FROID. Lat. pop. *frigidus, lat. class.
*frik-, représenté par le rhénan frick « ava- frigidus (l’origine de cette substitution de
re », qui rend parfaitement compte du voyelle est discutée : soit dissimilation de
mot fr. l’r à l'étape frijdu, soit influence de r'gidus).
FRIRE. Lat. frigere. V. friser. — Dér. : — Dér. : froid, subst., vers 1080 (Roland),
friand, x111°, d’abord friant, jusqu’au xves., existe dans tous les parlers gallo-romans
friandise, xive, « gourmandise »; affrian- où il est souvent fém. d’après chaleur ;
der, xive. V. affrioler. froidure, xt11e ; froideur, xr1°, déjà lat. fri-
gidor, sens moral depuis le xvre s. ; froidir,
FRISE, terme de construction, 1528. x11° ; refroidir, x11° ; refroidissement, 1314.
Paraît être empr. du lat. médiéval frisium,
autre forme de frigium, phrygium « brode- FROISSER. A signifié d’abord « briser
rie, frange », formé sur le modèle de phry- en menus morceaux », sens dominant au
giae vesies ou simplement phrygiae « étoffes moyen âge, d’où « meurtrir par un choc,
brochées d’or » (on a aussi en fr. frise pour heurter brusquement », puis « chiffonner »,
désigner une sorte d’étoffe ou de broderie, XVe; sens moral fin xviie. Lat. pop. *frus-
1394, cf. orfroi), et avoir été appliqué à la tiäre, dér. de frustum « morceau, fragment ».
frise par comparaison de ses ornements Outre le fr. it. frusciare « importuner » et
avec une broderie. L’it. dit de même fregio sursilvain furschar « nettoyer ». — Dér. :
et l’esp. friso, mais les rapports de ces froissement, x1r11°, développement du sens
formes avec le fr. et avec le lat. médiéval parallèle à celui du verbe; froissis, xr1°:
frisium, etc., sont également incertains. froissure, id.:; défroisser, 1948.
FRISE, dans « cheval de frise », 1572. FRÔLER, xve (au sens de « rosser ») ;
Traduction du néerl. friese ruiter « cavalier sens moderne 1694. La suite de consonnes
de Frise », ainsi nommé parce que ce sys- fr, avec voyelle différente intermédiaire,
279 FRUSQUIN

peint dans plusieurs langues le bourdonne- FRONTON, 1653. Empr. de l’it. frontone,
ment d’un objet qui passe (it. frullare). — dér. augment. de fronte, v. front.
Dér. : frôlement, 1700 ; frôleur, 1876 (-euse).
FROTTER, xr1e, Étymologie incertaine.
FROMAGE. D'abord formage. Lat. pop. Cf. a. pr. fretar, a. fr. freter de même sens.
formäticus, dér. de forma au sens de It. frettare «nettoyer avec un balai la partie
« forme à fromage »; a signifié propr. submergée d’une barque », lat. pop. *fric-
« fromage (caseus) fait dans une forme », täre « frotter »; mais le rapport entre les
cf. fourme « fromage du Cantal » dans le formes avec e et celles avec o n’est pas
fr. régional du Massif central. De même éclairci. — Dér. : frottée, 1823, au sens de
a. pr. formaitge. À éliminé le lat. class. « coups », dès 1611 au sens de « tartine
caseus, qui survit partout ailleurs : it. frottée d’ail » ; frottement, x1v® ; frotteur,
cacio, esp. queso. — Dér. : fromager, x11I°; 1372, au sens général, XVIII° S. au sens
fromagerie, xIve. moderne ; frottis, 1611 ; frottoir, 1423 ; re-
FROMENT. Lat. frümentum. — Dér. : frotter, 1329.
fromentacée, 1732 ; fromental (autre nom FROUER, v. flouer.
du ray-grass), 1760, adj., 1836 ; déjà créé
au moyen âge sous la forme fromeniel; FROU-FROU, 1738. Onomatopée.
fromenté, adj., 1865 ; fromentée, sorte de FROUSSE, 1864. Probabl. allongement
bouillie, x11r°. consonantique du préc.; a désigné peut-
FRONCE, x1e (aux deux sens de « ride être d’abord une frayeur causée par un
de la peau » et de « petit pli fait à une bruit subit. — Dér. : froussard, fin xixe.
étoffe »). Francique *hrunkja « ride », cf.
anc. scandinave hrukka. — Dér. : froncer, FRUCTIDOR, 1793. Mot créé par Fabre
xIe ; froncis, 1563 ; défroncer, xtrIe. d’Eglantine avec le lat. frucius « fruit » et
le grec dôron « présent », v. thermidor,
FRONCLE, v. furoncle. messidor.
FRONDAISON, 1823. Dér. sav. du lat. FRUCTIFIER, xr1° ; fructification, xIv°.
frons, frondis « feuillage ». Empr. du lat. de basse ép. fructificare,
FRONDE, xrr1e (alors fondre). Probabl. fructificatio. V. fruit. Fruclifier a éliminé
d’un lat. *fundula, dim. de funda, lequel un verbe de formation pop. frogier.
vit sous la forme fonde en fr., du xII° au
xvire s. It. fionda (aussi de *fundula), esp: FRUCTUEUX, xrie. Empr. du lat. fruc-
honda, a. pr. fonda et fronda. Comme nom tuosus, v. fruit.
propre désignant la rébellion de 1649, a FRUGAL, 1534 (Rab.) ; frugalité, x1v®
été tiré du verbe fronder, voir la suite. — (Bersuire). Empr. du lat. frugalis (dér. de
Dér. : fronder, 1611; au sens figuré de frugi « de rapport », en parlant d’un es-
« faire le mécontent », xviie s., dérivé de clave, d’où « économe, rangé, honnête »),
l'emploi qui fut fait de ce verbe par le frugalitas.
conseiller du Parlement Bachaumont. Cf.
l'explication de Retz : « Bachaumont s’avisa FRUGIVORE, 1762. Comp. avec les
de dire un jour en badinant que le Parle- mots lat. frux, frugis « fruit » et vorare
ment faisait comme les écoliers qui fron- « dévorer ».
dent dans les fossés de Paris, qui se sépa-
rent dès qu'ils voient le lieutenant civil »; FRUIT. Lat. fräctus « rapport, produc-
d’où frondeur, 1213 (fondaour), dévelop- tion, profit », dit aussi des fruits des arbres.
pement de la forme et du sens d’après le Le sens intellectuel est dû en partie au
contact maintenu avec le lat. écrit, no-
verbe. tamment avec le lat. eccl., cf. p. ex. l’ex-
FRONT. Lat. frons, frontis, ordinaire- pression le fruit des entrailles d’après le
ment fém., mais déjà aussi masc. Masc. fruit de ion sein, Luc, I, 42. It. frutto et
seulement en gallo-roman. — Dér. : fron- frutia, esp. arch. frucho (aujourd’hui fruio),
tal, adj., xvi® ; fronteau, 1393, issu par a. pr. fruch et frucha, d’où, dans de nom-
substitution du suff. de frontel, xt1° ; fron- breux parlers méridionaux, des formes
talier, 1730, d’abord uniquement par rap- fém. À pris le sens du lat. class. pomum
port à la frontière esp., empr. du prov. « fruit d’un arbre », v. pomme, sauf en
mod. frountalié; frontière, 1213, au sens roumain où frupi signifie propr. « laitage »,
de « front d’une armée », signifiait aussi au c'est-à-dire « toute la nourriture que don-
moyen âge « place fortifiée »; le sens mo- nent les troupeaux »; sens analogue de
derne, xiv®, paraît être issu de l’anc. adj. fruit en Suisse. — Dér. : fruiterie, 1611, au
frontier « qui fait face à, voisin » ; affronter, sens moderne, usité au moyen âge au sens
x11e, au sens de « frapper (sur le front) », collectif de « fruits »; fruitier, xve, usité
fréquent au moyen âge; signifiait alors au moyen âge au sens d’ «officier de bouche
aussi « faire rougir de honte », d’où « trom- qui prenait soin des fruits », etc.
per, insulter », sens usités au XVII° $.
(une re fois en 1525), d'où affront, FRUSQUES, v. le suiv.
vers 1560, considéré aussi, à tort, comme FRUSQUIN, 1628 (Jargon ou Langage
empr. du lit. affronto; effronté, xrr1° de l'Argot Réformé : « habillement »). Au-
(J. de Meung), littéral. « sans front (pour jourd'hui surtout saint-frusquin, suivant
rougir) », cf. it. sfacciato «effronté », littéral. un procédé pop., cf. notamment saini-
« sans face », d’où effronterie, fin xvre. crépin qui désigne « les outils du cordon-
FRONTISCIPE, 1529. Empr. du lat. de nier », etc. Mot d’argot, d’origine obscure.
basse ép. frontispicium. — Dér. : frusques, 1790.
FRUSTE 280

FRUSTE, xvie (Ronsard) ; une première FULMINER, x1ve, au sens de « lancer la


fois au xv°e s. (/rustre). Empr., comme foudre », 1368, au sens religieux ; fulmina-
terme d'art, de l’it. frusio « usé », tiré du tion, 1406, au sens religieux. Empr. du lat.
verbe frusiare « user », propr. « mettre en fulminare « lancer la foudre » et « fou-
morceaux », qui dérive lui-même de frusio droyer » au sens fig., fulminatio « action
« morceau », lat. frustum, v. froisser. S’em- de lancer la foudre ». Fulminare a pris en
ploie depuis 1845, par oubli du sens propre lat. eccl. le sens de « lancer une condam-
au sens de « rude, non poli ». nation » que le fr. a également emprunté
et qui a donné naissance à certaines accep-
FRUSTRER, 1330. Empr. du lat. frus-
tions de fulminer et de fulmination. La
trari.
chimie a, d’autre part, pris ces mots dès le
FUCHSIA, 1693. Empr. du lat. des natu- XVIIe S., en parlant de corps détonants,
ralistes fuchsia, mot créé par le botaniste d’où la création de fulminate, 1823, et de
Plumier (1645-1706), en l'honneur de fulmicoton, 1865.
Fuchs, botaniste allemand du xvres. FUMER « dégager de la fumée ». Lat.
FUCHSINE. Produit inventé en 1859 fämäre. — Dér. et Comp. : fumage, 1752;
par le chimiste Verquin au service d’un fumée, x11°, a éliminé l’a. fr. fum, qui a
industriel de Lyon, du nom de Renard, et disparu de bonne heure, lat. fämus, d’où
dénommé fuchsine d’après Fuchs, nom all. aussi it. fumo, esp. humo, a. pr. fum qui
du renard, qui s'emploie aussi comme nom survit dans un certain nombre de parlers
propre. méridionaux; fumées, terme de vénerie,
FUCUS, xvie. Empr. du lat. fucus (du « fiente du cerf, etc. », xive; fumeron,
grec phykos) « sorte d’algue ». 1640 ; fumet, xvre ; fumeur, 1690 ; fumiste,
1762, fumisterie, 1845, ont pris récemment
FUEL, 1960 (d’abord fuel-oil, 1948). un sens fig. (relevé en 1852, Goncourt ; ce
Empr. de l’angl. fuel « combustibles » sens est dû à un vaudeville de 1840, La
(+ oil « huile »). Famille du Fumiste, dans lequel un fumiste
FUGACE, 1726. Empr. du lat. fugax, enrichi se sert souvent de l'expression
fugacis, dér. de fugere « fuir ». farce de fumisie en parlant de tours joués
par lui) ; fumoir, 1838 ; enfumer, xrr°. V.
FUGITIF, vers 1300. Empr. du lat. fugi- parfumer.
livus ; a éliminé une forme plus francisée
d’après fuite, fuilif, qui a survécu jusqu’au FUMER « amender une terre avec du
XvIIe s., Cf. de même l’a. pr. fugdiu à côté fumier ». D'abord femer, devenu fumer,
de fugiditz. xive, sous l'influence des deux consonnes
labiales. Lat. pop. *femaäre, dér. de *femus
FUGUE, 1598, terme de musique. Empr. « fumier ». Seulement gallo-roman (a. pr.
de l’it. fuga, propr. « fuite », qui a servi à femar) et catalan femar. — Dér. : fumage,
désigner des motifs se suivant les uns les Re (déjà du xrr1e au xvie s.); fumure,
autres (du lat. pop. fuga). A été pris de 1357.
nouveau à l’it. au xvit1e s.(1775, Voltaire) FUMEROLE, 1818. Francisation de l’it.
au sens propre de « fuite ».
fumaruolo, propr. «orifice d’une cheminée »,
FUIE, v. le suiv. appliqué aux fumeroles du Vésuve, à pro-
FUIR. Lat. pop. *fügire, lat. class. fü- Re re le mot a d’abord été employé
gere. À pris le sens de « courir » dans les
en fr.
parlers de la région franc-comtoise et lyon- FUMETERRE, 1372. Empr. du lat. mé-
naise, v. courir. — Dér. : fuite, xr1°, d’après diéval fumus terrae, propr. « fumée de la
un part. disparu de bonne heure représen- terre »; dit ainsi « parce que son jus fait
tant *fügitus (l’a. fr. a eu aussi un mot pleurer les yeux comme la fumée », O. de
fuie, encore vivant au sens de « volière Serres.
pour pigeons », attesté dès 1278, transformé FUMEUX. Lat. fümôsus. It. fumoso,
en fuite sur le modèle de suite) ; fuyard, esp. humoso.
1538. — Comp. : enfuir (s’), vers 1080
(Roland) ; faux-fuyant, vers 1550 (alors FUMIER. D'abord femier, devenu fu-
aussi faut-fuyante, fém., au sens de « che- mier dès le xr1° s., v. fumer. Lat. pop.
min détourné par lequel s'échappe le gi- *femärium, propr. « tas de fumier », dér.
bier »), sens fig. 1664 (Molière), altération de *femus, altération du lat. class. fimus,
par étymologie populaire, d’un mot non fimi, masc., d’après sercus, v. fiente. Seu-
attesté en ce sens forsfuyani, comp. avec lement fr. A éliminé l’a. fr. fiens « fumier »,
l’anc. préf. fors, c'est-à-dire « qui fuit usité jusqu'au xvie s. et qui survit dans
dehors »; forsfuyant est attesté au xve s. beaucoup de parlers septentrionaux, tout
comme adj. de forsfuiance, terme de droit comme les parlers méridionaux ont pour
féodal, droit payé par un serf pour obtenir la plupart des formes correspondant à
de son seigneur la permission de passer fens de l’a. pr. Les autres langues rom. ont
dans un autre domaine. d’autres termes : it. letame, du lat. laetämen
« engrais »; esp. esliercol, dér. du verbe
FULGURANT, 1488; fulguration, 1532. estercolar, lat. slercoräre « amender une
Empr. du lat. fulgurans, part. prés. de ful- terre ».
gurare « faire des éclairs » (de fulgur, v.
foudre), fulguratio « lueur de l'éclair ». FUMIGER, x1v®, rare jusqu’au XVII® $. ;
fumigation, 1314. Empr. du lat. fumigare
FULIGINEUX, 1549. Empr. du lat. de « faire de la fumée » et de son dér. de basse
basse ép. fuliginosus, dér. de fuligo, -ginis ép. fumigatio. — Dér. : fumigatoire, 1503,
« suie ». d’après le verbe lat.
281
FUSTIGER
FUMISTE, v. fumer. FURONCLE, xvi® (Paré). Empr. du lat.
FUMIVORE, 1799. Comp. avec les mots furunculus, sens issu de celui de « bosse de
lat. fumus « fumée » et vorare « dévorer ». la vigne à l’endroit du bouton », donc au
sens d’ « excroissance » (propr. « voleur »,
FUNAMBULE, vers 1500. Empr. du lat. dér. de fur « id. »). Le fr. a eu une forme
funambulus (comp. de funis « corde » et pop. froncle, 1539, encore usitée au xvire s.
ambulare « marcher »). — Dér. : funambu- et très répandue dans les patois (rarement
lesque, 1857. relevée au moyen âge ; ferongle, 1376, est
FUNÈBRE, xive. Empr. du lat. funebris une forme altérée) ; cf. aussi le port. frun-
cho ; ailleurs dans des dialectes.
(de funus, -eris « funérailles »).
FUNÉRAILLES, xive, Empr. du lat. FURTIF, 1370. Empr. du lat. furiivus
funeralia, plur. neutre de l’adj. funeralis (de furlum « vol », dér. de fur « voleur »).
« qui a rapport aux funérailles ». FUSAIN. Lat. pop. *füsäginem, acc. de
FUNÉRAIRE, 1565. Empr. du lat. de *{üsägo, dér. de füsus « fuseau »; ainsi
basseép. funerarius. nommé parce que son bois dur sert à faire
des fuseaux ; appelé aussi dans de nom-
FUNESTE, xive (Bersuire). Empr. du breux parlers bonnet de prêtre, de curé ou
lat. funesius, dér. de funus, voir les préc.,
bonnet carré à cause de la forme de ses
propr. « funèbre », d’où « plein de deuil, fruits. It. fusaggine.
funeste ».
FUSEAU, xrie. Dér. d'un anc. *fus, qui
FUNICULAIRE, 1725. Dér. sav. du lat. a disparu avant la période littéraire, du
funiculus, dim. de funis « corde ». lat. füsus « fuseau ». Ailleurs représentants
FUR. Ne s'emploie plus que dans la de füsus : a. pr. fus (encore très répandu
locution au fur et à mesure, au XvII° s. au dans les parlers méridionaux), it. fuso,
fur et mesure, locution pléonastique issue esp. huso. — Dér. : fuselé, xive, d'où fuse-
d’au fur « à proportion », xvi®, dont le sens lage, xx° s,
n’était plus suffisamment compris. Fur est
dû à un développement partic. d’une forme FUSÉE. Dér. d’un anc. */us, v. fuseau;
plus ancienne feur, dans la locution au feur, désigne à l’origine la quantité de fil enrou-
quand le mot feur est sorti de la langue lée autour du fuseau. Vieilli au sens pro-
comme mot indépendant. Feur, d’abord pre; a pris de nombreuses acceptions
fuer, est un ancien terme de droit, très techn. où il équivaut à fuseau; comme
usuel au moyen âge au sens de « taux » terme de pyrotechnie, 1400, ainsi nommé
(au fur « au taux de » est encore attesté par comparaison de la forme d’une fusée
au XVIIe s.), lat. forum « marché, place avec celle d’un fuseau.
publique » qui a servi en lat. pop. à dési- FUSELÉ, v. fuseau.
gner les opérations qui se font au marché,
d’où « convention, loi, etc. », cf. a. pr. for FUSER, xvi*; fusible, vers 1500. Dér.
« juridiction, loi, prix, etc. », esp. fuero sav. du lat. fusus, part. passé du verbe
« loi, statut ». Forum, d’après le sens class. fundere « fondre ». — Dér. de l’adj. : fusi-
de « tribunal », issu de celui de « place pu- bilité, 1641.
blique », a pris en lat. eccl. moderne celui
de « juridiction temporelle de l'Église », FUSIL. D'abord foisil, puis fuisil, xtre,
puis celui de « jugement de la conscience », par développement irrégulier, d’où fusil,
d’où le fr. for intérieur, 1635 (s'oppose x111°. Signifie propr. « pièce d’acier avec
alors à for extérieur « juridiction temporelle laquelle on bat la pierre à feu pour en
de l’Église »). Au sens de « coutumes lo- faire jaillir des étincelles », d’où « la pièce
cales », for, xvie, concerne les régions mé- d’acier qui recouvrait le bassinet des an-
ridionales et est empr. du prov. for. ciennes armes à feu et contre laquelle
venait frapper la pierre de la batterie »,
FURET. Lat. pop. *fürittus, propr. « pe- puis « arme à feu portative », 1671 ; a pris
tit voleur », dér. de für « voleur ». It. fureito. aussi dès le xrve s, le sens de « baguette
L’a. fr. disait aussi fuiron, lat. pop. *fürio- d’acier pour aiguiser », d’où « fusil de bou-
nem, acc. de fürio, élargissement de für6, cher ». Lat. pop. “*focilis (sous-entendu
attesté à basse ép. au sens de « furet », peira « pierre »), dér. de focus « feu », propr.
d’où a. pr. furon, esp. hurén. Le nom lat. « qui produit le feu ». It. fucile, a. pr. fozil.
class. viverra du furet survit dans des par- — Dér. : fusilier, 1589, souvent fuselier
lers it. et franco-provençaux, mais au sens au xviie s.; fusiller, 1732, d’où fusillade,
‘le « belette » ou d’ « écureuil ». L’all. Frett- 1790.
chen et l’angl. ferret sont empr. du fr.,
sans doute par le langage de la chasse. — FUSION, 1547. Empr. du lat. fusio (du
Dér. : fureter, xive, en a. fr. souvent fui- verbe fundere « fondre », v. foison). — Dér.
ronner ; d’où furetage, 1811; fureteur, d’après le sens récent de « réunion d’inté-
1514. rêts, de partis » : fusionner, 1865, fusion-
nement, id.
FUREUR, x° 5. Empr. du lat. furor.
FUSTANELLE, v. futaine.
FURIBOND, xr11e. Empr. du lat. furi-
bundus (dér. du verbe furere « être furieux »). FUSTIGER, xiv° ; fustigation, 1411. Le
verbe est empr. du lat. de basse ép. fus-
FURIE, xive (Bersuire, en parlant des tigare « frapper à coups de bâton » (de fustis
divinités infernales) ; furieux, 1290. Empr. « bâton »), le subst. est un dér. sav. du
du lat. furia, furiosus. verbe lat,
An
FUT 282

FÜT. Propr. « fût d’un arbre », d'où de grec de la Septante æylina lina « tissu de
nombreuses acceptions fig.; au sens de coton », littéral. « venant d’un arbre »
« tonneau », dès le xrr1e s. (d’après le dér. (æylinos est un adj. dér. de æylon « bois »,
fulaille), propr. « vaisseau de bois ». Lat. d’où « arbre »), cf. le lat. médiéval zylinum
fustis « bâton, pieu ». It. fusio « tige, tronc », et la définition /ana de ligno « laine venant
a. pr. fust « bâton, tonneau, bateau ». — du bois », cf. aussi all. Baumuwolle. Mot de
Dér. : 1° du sens propre : futaie, x1v®; civlisation : it. fruslagno, fuslagno, a. pr.
20 du sens de « tonneau » : futaille, x111°; fustani; l'arabe fouchtân vient du roman ;
affûter, ne signifie plus aujourd'hui qu’ «ai- fustanelle, 1872, se rattache à ce mot.
guiser des outils », sens issu de celui de FUTÉ, 1690. Part. passé de l’anc. verbe
« mettre en état », d’après les sens techn. se futer, qui se dit d’un poisson, d’un oiseau
de fût; signifie « disposer » dès le xrre s. ; qui, ayant été manqué par un pêcheur, un
en outre « (se) poster derrière un arbre, chasseur, fuit et appréhende l’abord des
un buisson », terme de chasse, dès le filets, xvie ; ce verbe vit surtout dans les
XIVe s.; d’où affût, « endroit où l’on se parlers de l'Ouest, où ui est devenu u; il
poste pour guetter », xvire, « sorte de sup- est donc un dér. de fuite.
port », 1468, affûtage, id.; développe-
ments du sens de ces deux dér. d’après le FUTILE, xive; futilité, 1671 (Molière) ;
verbe ; affûtiau, 1696, forme dialectale au xvi® s. futileté d’après l’adj. Empr. du
pour *affuteau. lat. futilis, futilitas.
FUTAIE, FUTAILLE, v. fût. FUTUR, xu1e. Empr. du lat. fuiurus.
FUTAINE, xirie (écrit fustaigne). Pro- FUTURISME, 1909 ; futuriste, 1909. —
babl. francisation du lat. médiéval fusta- Empr. de l’it. fulurismo, -ista, mots créés
neum qui semble être une traduction du par Marinetti en 1909.
G
GABARDINE, fin xixe. Empr. de l'esp. GABER, vers 1080 (Roland). Vieux mot
gabardina « esp. de justaucorps » attesté auquel a été donné depuis 1860 un regain
dès 1423, probabl. né d’un croisement de vie littéraire. Gaber et l’anc. subst. gab
entre gabän « paletot » (de l'arabe qabd') et « raillerie » représentent l’anc. scandinave
anc. esp. tavardina, d’où aussi moyen fr. gabba « raïller » (à l’origine « ouvrir toute
gaverdine, sorte de manteau, 1482; gal- grande la bouche »), gabb « raillerie ». Ont
vardine, 1510 (d’où aussi angl. gaberdine). pénétré dans les langues voisines, cf. no-
tamment lit. gabbare, gabbo et le port.
GABARRE, 1338 (texte de la région de gabar « vanter ».
la Garonne) ; usité surtout dans le Midi et
jusqu’à la Loire. Empr. de l’a. pr. gabarra GABIER, 1678. Dér. de l’anc. subst.
(textes de la région de la Garonne), cf. gabie « hune », empr. vers 1480 du prov.
aussi gabarra en cat., en esp. et en port. gabia, propr. « cage », d’où « hune ».
Ce mot vient d’un mot du grec byzantin
correspondant au grec anc. karabos, propr. GABION, 1525. Empr. de l’it. gabbione
« écrevisse », d’où plus tard « bateau de augment. de gabbia « cage ».
charge », cf. aussi carabus « sorte de canot »,
vie s. Le changement du radical carab- en
GÂCHE de serrure, 1294. Représente
un francique *gaspia « boucle » qu’on
gabar- est probabl. d'origine grecque. V.
peut reconstituer d’après le moyen néerl.
caravelle.
gespe. — Dér. : gâchette, 1478.
GABARI(T), 1643. Empr., par la langue GÂCHER. Francique *waskan « laver »,
de la marine, du prov. gabarrit, altération cf. all. waschen. D'abord « passer à l’eau,
de garbi « gabarit » par croisement avec laver sommairement », d’où gâcher du
gabarra. Garbi, masc., propr. « grâce, gen- morlier, début xive; « faire un travail sans
tillesse », d’où, dans la langue de la marine, soin », etc., début xixe. — Dér. : gâche
le sens partic. de « gabarit », par l’intermé- de maçon, 1636 (« aviron », 1376) ; gâcheur,
diaire de « belle forme », puis de « modèle », 1292 ; gâchis, 1636 (1611 autre sens), sens
est empr. d’un gothique *garwi « prépara- fig., 1779.
tion », dér. de *garwon « arranger » (cf.
anc. haut. all. garawi, de même sens; GADE, 1788. Empr. du grec gados, id.
l’all. gerben « préparer (notamment le
cuir) », appartient à cette famille de GADOUE, xvie. Étymologie obscure.
mots). V. galbe. GAFFE, 1393; GAFFER, 1687. Empr.
de l’a. pr. gaf, masc., gafar ; le prov. mo-
GABEGIE, 1790 (Père Duchêne). Pro- derne gafo, fém., est probabl. refait sur le
babl. dér. du radical de gaber, mais la for-
fr. L’esp. et le port. ont également gafar.
mation est plutôt obscure (influence de En dernière analyse ces mots remontent
labagie ?). Le sens de «gaspillage, désordre » très probablement à un gothique *gaffôn
est aujourd’hui prépondérant au détriment « saisir », de la même famille que l’anc.
de celui de « fraude ». scand. gabba (v. gaber). Du sens vulg. de
gaffer « commettre une indélicatesse »,
GABELLE, 1330. De bonne heure spé- 1872, qui a dû se développer dans le langage
cial. « impôt sur le sel »; a continué un des mariniers, est issu celui de gaffe « mala-
certain temps à désigner aussi des impôts dresse », 1872; gaffeur, 1888.
sur d’autres denrées telles que drap, vin.
Empr. de l’it. gabella, qui se disait d'impôts GAG, 1948. Empr. de l’angl. gag « ce
sur toute sorte de denrées, empr. lui-même qu'un acteur ajoute à son rôle ».
de l’arabe al-qabäla « impôt », propr. « re-
cette », au xrr1° s., peut-être par l’intermé- GAGA, 1879. Onomatopée faite à l’imi-
diaire de l’arabe d’Andalousie où -dla était tation du bredouillement des personnes
devenu -ala. — Dér. : gabelou (gabeloux tombées en enfance ; on retrouve dans
de Croisil) (Le Croisic, à l'embouchure de d’autres langues cette syllabe gag- avec
la Loire), 1585 (N. du Fail, écrivain bre- la même valeur.
ton) ; la forme parisienne ne vient pas de
la région où ce texte a été écrit, mais pro- GAGE. Francique “*wadi, cf. gothique
babl. de la Bourgogne qui était un pays wadi « gage », all. Welle « gageure » : terme
de grande gabelle ; a triomphé, sans doute de droit germ. Du fr. viennent it. gaggio,
à cause de son suff., d’autres formes gabel- esp. port. gage. Au sens propr. jurid., gage
lant, gabellier, gabeleux. n’a plus que quelques emplois, p. ex. prêter
GAGE 284

sur gage; cède le pas à caution, garanlie. GAINE. Lat. vägina, modifié en *wägina
— Dér. et Comp. : gager, vers 1200 ; ga- d’après la prononciation du w germ. (v.
geure, xr11° ; gagiste, 1680 ; dégager, xr1°, gascon), cf. également a. pr. it. guaina. —
dégagement, 1419; engager, xr1°, enga- Dér. : gainier, x111°, nom de métier ; gainier
gement, xr1e, rengager, vers 1450, renga- « arbre de Judée (dont la gousse ressemble
gement, 1718 ; désengager, 1462; mort- à une gaine) » et, au fém., gainière « variété
gage, 1283 (Beaumanoir morgage) ; d'abeille », dite aussi faiseuse d’étuis, sont
gage-mor est plus récent et plus rare. récents ; dégainer, xrr1e, dégaine, 1611 (en
1633 : « Tu t’y prends d’une belle dégaine »,
GAGNER. Francique “*waidanjan « se d’où le sens moderne) ; engainer, vers 1340,
procurer de la nourriture, faire du bu- rengainer, 1526.
tin, etc. », de la famille de l’all. Weide
« pâturage », weiden « paître » ; l’anc. haut GALA, 1666. Se trouve pour la première
all. weida signifie encore « recherche de fois dans un rapport sur les fêtes de
nourriture, à la chasse ou à la pêche », Madrid. Le mot est empr. de l'esp. gala,
aussi bien que « pâturage ». De là les sens lequel, à son tour, est empr. du franc.
du mot fr. : d’une part, « faire du profit, gale « réhouissance, plaisir » (XI11-XvIe 5.).
du butin », d’où les nombreuses acceptions
GALACT(O). Premier élément de mots
modernes, et, d'autre part, « paître » dans
sav. comp., tels que galactomètre, 1796,
le langage de la vénerie, « cultiver, labou-
rer, semer »; ces derniers sens, qui ont tiré du grec gala, galactos « lait ».
disparu du fr., survivent dans les parlers GALANDAGE, v. guirlande.
du Sud-Est et franco-provençaux. Le verbe
germ. a été également introduit par d’au- GALANT, vers 1360. Part. prés. d’un
tres envahisseurs dans les langues du Sud : anc. verbe galer, XI11°, « s'amuser, mener
it. guadagnare « gagner », esp. guadañar joyeuse vie » (d’où le subst. gale, xrrre, v.
« faucher ». — Dér. et Comp. : gagnage, gala). Le sens de « vivacité, de hardiesse
xI1e, vieux mot ; gain, xr1e, tiré du verbe entreprenante » a cédé au xviie s. à celle
quand il se prononçait gaaingnier, V. re- de « bonnes manières, spécial. dans les rela-
gain; regagner, xXII°; gagne-pain, xXI1I°, tions avec les dames ». C’est en ce sens que
au sens de « gantelet » qui servait dans les lit. galanie a été pris au fr. L'’a. fr. galer
tournois, cf. l'explication d’un auteur du représente un gallo-roman “*walare « se la
XIVe 5, : « Car par li est gagnies li pains »; couler douce », dér. du francique waäla
sens moderne, 1566 ; gagne-petit, 1597, où « bien », cf. angl. well. — Dér. : galanterie,
petit a le sens adverbial de « un peu ». 1559 (Amyot); souvent alors au sens
d’ «acte de bravoure » ; galantin, 1555. —
GAÏI, vers 1170. Empr. de l’anc. prov. Les parlers gallo-romans ont formé de
gai, qui est plus ancien et qui appartient nombreux dér. et comp. de galer, comme
au vocabulaire des troubadours. Celui-ci Galafre, nom de capitaines sarrazins (+lafre
doit représenter un goth. *géheis, corres- « vorace »), resté comme adj. dans les
pondant à l’anc. haut all. gähi « impé- parlers, suisse galavar, galapiat (aussi fr.,
tueux », all. mod. jäh. Est empr. du fr. vers 1850), galipelte (aussi fr. fam., 1889),
lit. gaio. — Dér. : gaieté, vers 1170; galimafrée (xiv*, qui contient dans la
égayer, x111° ; égaiement, vers 1175. deuxième partie le picard mafrer « manger
beaucoup », empr. du moyen néerl. maffelen,
GAÏAC, 1532 (Rab.). Empr. de l'esp. id.), etc. V. encore galvauder, galéjade,
guayaco, empr. lui-même de l’arouak (de galibot.
Saint-Domingue) guayacan. — Dér. : gaïa- GALANTINE. Attesté dès le xrr1° s. sous
col, fin xixe. cette forme, altération de galatine, xire,
GAILLARD, vers 1080 (Roland). L'it. probabl. empr. du parler de Raguse en
gagliardo, l'esp. gallardo et le port. galhardo Dalmatie, où ge- pouvait devenir ga-, d’où
sont empr. du gallo-roman. Très probabl. l’on exportait au moyen âge des poissons
dér. d’un gallo-roman *galia « force », d'un en sauce, et où galatina est effectivement
radical celtique “*gal (cf. irl. gal « bra- attesté dans des textes en lat. médiéval.
voure ») et du suff. -ia, qui pourrait être Les formes d’autres langues, comme l’all.
de provenance celtique également ou d’ori- Gallerte, dont la deuxième partie ne se
gine lat. Si g- n’est pas devenu j- c’est dû laisse pas ramener à galatine, viennent
à une dissimilation des deux consonnes en peut-être de la Provence, où le lat. gelare
train de se palataliser à l’étape *gyalya était devenu *galare, par une transforma-
(d’où *galya), cf. cage. — Dér. : gaillardise, tion due au gaulois des derniers siècles.
vers 1510; regaillardir, 1549 ; ragaillardir, GALAXIE, 1557. Empr. du grec ga-
XV. laxias, dér. de gala « lait », v. galactite.
GAILLET, v. caille-lait. GALBE, 1578, d’abord garbe, 1550 (Ron-
sard). Empr. de l’it. garbo « grâce, belle
GAILLETIN, 1853. Dér. de gaillelte, de forme, galbe », dér. de garbare « plaire »,
même sens, 1770, aujourd’hui peu usité, du gothique *garwon « arranger », v.
empr. du wallon ; c’est un dimin. de gaille, gabarit, « préparation ».
nom local de la noix, ainsi nommé parce
que ce charbon est en petits morceaux de GALE, 1205. Variante orthographique
la grosseur d’une noix ; gaille représente de galle « excroissance qui se produit sur
un lat. pop. (nux « noisette », v. noix) gal- les feuilles ou la tige des végétaux » qui,
lica « gauloise », le noyer ayant été très tôt en raison de son sens propre, a été employé
cultivé partic. en Gaule. pour désigner la gale des végétaux, puis
285
GALLUP
celle des animaux. Le vieux verbe galer un travail minutieux, pour lequel il bouge
« gratter, frotter », encore au xvirre 84, peu, de sorte qu'il semble passer son temps
1360, en est dér. — Dér. : galeux, xve, sans rien faire.
GALÉACE, GALÉE, v. galère, GALHAUBAN, v. hauban.
GALÉJADE, 1881. Empr. du prov. gale- GALIBOT, « jeune manœuvre dans les
jada « plaisanterie », dér. du verbe galejà travaux des mines », 1871. Empr. du pi-
« plaisanter », dér. lui-même du verbe se card, de la région minière, où il est issu,
galä « se réjouir », qui correspond à l’a. fr. avec changement de suff., de galibier « po-
galer, v. galant. lisson », lequel est une déformation du
picard galobier (déjà au xrve s.). Celui-ci
GALÈNE, 1556. Empr. du lat. galéna, id.
est très probabl. dér. d’un verbe *galober,
GALÈRE, 1402. Empr. du catalan ga- comp. de galer (v. galant) et de l’a. fr.
lera, issu par substitution de suff. de galea, lober « flatter » (empr. du moyen haut all.
empr. lui-même du grec byzantin galéa. À loben « louer »). Cf. aussi a. fr. galoberie
remplacé galée et une autre forme galie, « débauche », xrrre.
toutes deux dans la Chanson de Roland,
de même origine. Autres formes anc. : GALIMAFRÉE, v. galant.
galéace (ou galéasse, galiace), xv®, empr. de
lit. galeazza « grande galère » ; galion, vers GALIMATIAS, 1580 (Montaigne : « Jar-
1300 (Joinville), dér. de galie, qui a servi gon de galimathias »). Étymologie dou-
au xviIe s. à désigner les vaisseaux espa- teuse. D’après une récente explication, ce
gnols appelés en esp. galeén (dér. de galea) ; serait un terme du jargon des étudiants,
galiote, 1358, « petite galère », dér. de galie. forgé avec le lat. gallus « coq » qui aurait
La diversité de ces mots est en rapport, désigné les étudiants prenant part aux
comme on le voit par le sens de quelques- discussions réglementaires, et la terminai-
uns, avec des particularités de construc- son grecque -mathia « science », cf. amathia
tion. Dans la technologie, galion s'emploie «ignorance », d’où *gallimathia. Une autre
encore au sens de « traverse de bois main- explication part du lat. de basse ép. balle-
tenant la fermeture des écoutilles » — malia, qui signifiait « chansons malhon-
nêtes ».
Dér. : galérien, 1611.
GALION, GALIOTE, v. galère.
GALERIE, 1316; guerrerie en 1328.
Empr. de l’it. galleria, empr. lui-même du GALIPETTE, 1883. Mot populaire, d'ori-
lat. médiéval galeria, attesté au 1xe Ce gine incertaine.
c’est probabl. une altération, par substi-
tution de suff., de galilea, tiré du nom GALLE, xi° s. Empr. du lat. galla, v.
propre Galilea « Galilée » qui a servi à gale.
désigner le porche d’une église dans l’ordre GALLICAN, 1355. Empr. du lat. médié-
de Cluny (on trouve aussi quelquefois galilée
val gallicanus, employé spécial. à propos
en ce sens en à. fr.). Sous ce porche se de l’Église de France, en lat. class. « gau-
pressaient les laïques, tout comme la Galilée lois » (vers 1360 (Oresme) au sens de
était dans la Bible un pays peuplé de gens « français »). — Dér. : gallicanisme, 1810.
peu adonnés à la religion du peuple élu.
GALERNE, vers 1150. Certainement GALLICISME, 1578 (H. Estienne). Dér.
d’origine prélatine, mais difficile à déter- sav. du lat. gallicus « gaulois » auquel on
miner. Usuel dans les parlers de l'Ouest a donné le sens de « français ».
pour désigner les vents de l’ouest et du
nord-ouest. Le breton gwalarn est empr.
GALLINACÉ, 1770 (Buffon). Empr. du
du français. lat. gallinaceus « qui a rapport à la poule
(gallina) ».
GALET, x11°. Paraît provenir des régions
côtières de la Picardie ou de la Normandie. GALLO-. Premier élément de mots sav.
Dér. de l’a. fr. gal « caillou », aussi dialectal, comp., tels que gallophobie, 1859, tiré du
qui représente un gaulois *gallos, supposé lat. gallus, gallicus « gaulois » pour expri-
d’après l’irl. gall « pierre, rocher ». Le dér. mer des notions relatives aux Français.
jalet, 1478, qui a la forme attendue en fr.
vit encore dans le Maine ; ce mot s’em- GALLON, 1687. Empr. de l’angl. gallon,
ployait au xvie s. à propos d’arbalètes ou empr. lui-même de l’a. fr. galon « sorte de
d’arcs, appelés arbalètes, arcs à jaleis, qui mesure », forme probabl. normande (au-
lançaient des cailloux. — Dér. : galette, jourd’hui encore galon désigne en norm.
X1I11°, ainsi nommée à cause de sa forme une cruche de grès). A cette forme corres-
ronde et plate ; anc. normand aussi gale. pond une forme de l’a. fr. jalon et les dict.
donnent encore jale « esp. de jatte », xr1°,
GALETAS, 1378 (galaitas). Vient du et le dér. jalot, 1582, aujourd’hui « baquet
nom de la tour de Galaïa, à Constantinople. employé pour couler le suif fondu ». Pro-
A d’abord désigné un logement placé au babl. du même radical que l’a. fr. jaloie
haut d’un édifice, même d’un palais (encore « mesure de capacité », lat. de basse ép.
chez La Bruyère) ; le sens actuel date du galleta, d’origine inconnue, d’où aussi l’all.
XVII® 8. Gelle « seau ».
GALFÂTRE, 1808. Empr. de galfai « cal- GALLUP, 1948. Empr. de Gallup, nom
fat » des parlers de l'Ouest. Le sens péjor. du journaliste américain qui a créé en 1935
du mot provient de ce que le calfat fait un institut pour sonder l'opinion publique,
GALOCHE 286

GALOCHE, 1351 (le dér. galochier, dès GAMME, xrue. On a dit longtemps aussi
1292). Désigne à l’origine un soulier avec gamm(a)ut, encore dans Trévoux. Empr.
une semelle partic. épaisse, ce qui invitait du nom de la lettre grecque gamma, em-
à une comparaison avec une pierre plate. ployée par Gui d’Arezzo (vers 995-1050)
Dér. probabl. du même radical que galei, pour désigner la première note de la gam-
gaulois *gallos; provient du normand ou me, puis la gamme elle-même. Jusqu’alors
du picard, d’où il a pénétré en fr. avec on employait les lettres de l'alphabet, a
cette esp. de chaussure. correspondant au la au-dessous de la grosse
corde du violon ou la grave du violon, celle
GALON, 1584. Tiré du verbe galonner, qu’on appela gamma; puis Gui d’Arezzo
attesté dès le xr1° s., « orner la tête de désigna les six notes de ui à la d’après
rubans » ; se rattache peut-être à la même six syllabes de la première strophe de
famille que galant. l'hymne à saint Jean-Baptiste de Jean
GALOPER, vers 1135. Francique *wala Diacre : « Ut queant laxis resonare fibris
hlaupan «bien sauter », cf. l’all. wohl « bien » mira gestorum famuli tuorum, solve pulluti
et laufen « courir », ainsi que le sens « sau- labii reatum, Sancte Johannes »; ui était
ter » qu’a le mnld. lopen. — Dér. : galop, également désigné par gamma, d’où le
vers 1080 (Roland); galopade, 1611; terme gamm(a)ut. Si fut inventé plus
galopin, xive (Deschamps) comme nom tard, au début du xvire s., d’après les ini-
commun, antér., dès le x11° s., nom propre, tiales de Sancle Johannes; quand à do,
désignant des messagers, etc., dans des c’est une syllabe substituée arbitrairement
textes littéraires et autres (v. aussi trottin). à ut, comme plus sonore.
GALOUBET, 1768. Empr. du prov. ga- GANACHE, 1642. Empr. de l’it. ganas-
loubet, dér. probabl. d’un verbe *galaubar cia « mâchoire de n'importe quel animal ».
« jouer magnifiquement » refait sur l’a. pr. Dit d’abord du cheval chargé de ganache,
galaubiar « agir bien », lequel est dér. c’est-à-dire « qui a une mâchoire épaisse ».
de l’a. pr. galaubia « étalage, pompe », L'’it. ganascia est empr. des parlers de
empr. du gothique *galaubei, qu’on res- l'Italie Méridionale, lesquels l’ont tiré du
titue d’après l’adj. galaufs « qui a de la grec gnaïhos, en intercalant une voyelle
valeur ». entre les deux premières consonnes.
GALUCHAT, 1762. Nom de l'inventeur
de ce procédé de préparation. GANDIN, 1858 (Les Gandins, titre d’un
roman de Ponson du Terrail). Passe pour
GALURIN, 1867. Dér. de l’argot galure être dér. du nom du boulevard de Gand,
(1888), m. fr. galere (1532), qui sont empr. aujourd’hui boulevard des Italiens, consi-
du lat. galerus « sorte de bonnet tel que déré comme le rendez-vous des élégants,
le portait Mercure ». cf. l'expression fashionable du boulevard de
GALVANISME, 1797. Dér. de Galvani, Gand, 1830. Le personnage de la pièce de
nom du physicien italien qui a découvert Barrière, Les Parisiens (1855), R. Gandin,
l'électricité animale en 1780. — Dér. : gal- a tout au plus contribué à mettre le mot
vanique, 1798 ; galvaniser, 1799 ; galvani- à la mode. Mais le mot se trouve en dau-
sation, 1802, etc. phinois dès 1809, au fém. même dès le
XvIIe s.; il est donc fort probable qu'il
GALVAUDER, 1690. Probabl. comp. de
est emprunté des patois du Sud-Est et que
galer, v. galant, et de ravauder, contamina- le rapport avec le nom du boulevard de
tion ironisante. — Dér. : galvaudeux, 1865 ;
Gand est dû à une étymologie populaire.
formé avec un suffixe dialectal du Centre. Le dauph. gandin est un des nombreux
GAMBADE, 1480. Empr. du prov. cam- dér. de l’anc. pr. gandir « fuir, faire des
bado, id., gambado, dér. du prov. cambo détours, se soustraire », lequel représente
« jambe ». — Dér. : gambader, 1425. le goth. wandjan « tourner ». V. aussi
gourgandine.
GAMBILLER, 1611. Comme terme du
langage fam., probabl. normand ou picard, GANDOURA, fin xive. Empr. de l’arabe
dér. de gambe « jambe ». Comme terme de maghrébin gandoura (d’origine étrangère,
marine, peut avoir la même origine. peut-être lat.).
-GAME, -GAMIE. Deuxième élément de
mots sav. comp., tiré du grec gamos « ma- GANG, 1948; gangster, 1948. Empr.
riage », tels que cryptogame, 1783, ou de de l'anglais gang, gangsler, mêmes sens.
mots empr. tels que polygamie, 1578. Ga-
mo- sert aussi de premier élément pour GANGLION, xvie (Paré). Empr. du lat.
former des mots sav., surtout en botanique. de basse ép. ganglion (d'un mot grec signi-
fiant « glande »). ‘
GAMELLE, 1584. Empr. de l'esp.
gamella, du lat. camella « sorte de vase ».
GANGRÈNE, 1495 (d’abord cancrene).
GAMIN, 1765 (Encyclopédie), au sens de Empr. du lat. gangraena (du grec gan-
« jeune aide de verrier ». Vit surtout dans graina). — Dér. : gangréner, 1503 ; gan-
les parlers de l’Est, qui l’ont peut-être gréneux, 1539. ;
emprunté de l’all. gammel « joie bruyante ;
jeune homme dégingandé, vaurien », qui GANGUE, 1552. Empr. de l’all. Gang
vit dans les parlers limitrophes du français « chemin », qui a le sens de « filon » dans
et qui aurait été francisé à l’aide du suff. des comp. tels que Ærzgang (comp. de
-in. — Dér. : gaminerie, 1838. Erz « airain, minerai »).
287 GARGARISER
GANSE, 1594. Probabl. empr. du prov. sion .coiffée à la garcelte, « avec les cheveux
ganso « ganse », qui présente en outre diver- rabattus sur le front » (d’Aubigné), d’où
ses acceptions « boucle, nœud, crampon, garcelle « coiffure de femme dans laquelle
anse, bord, etc. ». Celui-ci représente l’adj. les cheveux sont rabattus sur le front ».
grec gampsés « courbé ». L’it. gancio et
l'esp. gancho sont empr. du turc kandja, GARDÉNIA, 1777. Formé dans le lat.
id., lequel est à son tour empr. du même des naturalistes en l'honneur du botaniste
adj. grec. écossais du xvirIe s. Garden.

GANT. Francique want, qui a probabl. GARDER, vers 1050 (Alexis). Germ.
passé en gallo-roman comme terme jurid., *wardôn, cf. all. warien « attendre, soi-
les Francs ayant eu l'habitude d'offrir le gner », angl. {o ward « protéger » ; de même
gant en symbole de la remise d’une terre. it. guardare, esp. guardar. — Dér. : garde
L’it. guanto et l'esp. guanie viennent du « action de garder », vers 1050 (Alexis) ;
fr. — Dér. : gantelet, 1260 ; ganter, 1488 ; arrière-garde, x11° ; avant-garde, id. ; garde
gantier, 1241; ganterie, 1337; gantelée, « celui, celle qui garde », xr1° ; garderie,
XIV®; ganteline, 1820 (ces deux derniers 1579 ; gardeur, x11° ; gardien, 1255, d'abord
dér., qui désignent des esp. de campanules, gardenc, xri°, formé avec le suff. d’origine
viennent de quelque parler de la France germ. -enc, d’où -nage, 1823 ; égard, xrre,
centrale ; gandlée désigne la digitale en par l'intermédiaire d’un verbe esgarder
Normandie (Orne), et des dér. ou des « veiller sur », id. ; regarder, vitre, rewar-
comp. de gant diverses esp. de campanules dant (dans une glose) ; le sens de « diriger
dans les parlers septentrionaux) ; dégan- sa vue sur » apparaît dès les premiers
ter, vers 1350. textes. — Comp. : cent-gardes, gardes de
l’empereur Napoléon III, d’où un cent-
GARANCE, xre. Francique *wratja qu’on garde ; garde-barrière, 1865 ; -chasse, 1669 ;
restitue d’après l’anc. haut all. rezza, avec -chiourme, 1829 ; -côte, 1599 ; -feu, 1619 ;
modification de la terminaison, cf. warantia -fou, 1400; -magasin, 1634; -malade,
(gloses lat. du moyen âge) et warentia (Ca- 1754; -manger, 1304; -meuble, 1680;
pitulaires de Charlemagne). -pêche, 1669 ; -robe, xir1e; -vue, 1749:
sauvegarde, v. sauf.
GARANT, vers 1080 (Roland). Part.
prés. du francique *wärjan « garantir la GARDEN-PARTY, v. jardin.
vérité de qch » (comp. l’all. wahr « vrai »).
La forme correspondante gothique wérjan GARDON, vers 1210. Probabl. dér. de
a donné l’a. pr. guiren. V. Warrant. Dér. : garder. Ce poisson à l'habitude de retourner
garantir (Roland) ; garantie, x11e. aux endroits où il a été effarouché et d’y
prendre ses ébats comme s'il avait à
GARBURE, 1782. Empr. du gascon garder qch.
garburo, probabl. de même famille que
l'esp. garbias, masc. plur., « sorte de ra- GARE, v. garer.
goût », mais d’étymologie obscure.
GARENNE, xirie. Lat. médiéval wa-
GARCETTE, v. le suiv. renna; le sens du mot au moyen âge :
« lieu réservé par le seigneur pour la chasse
GARÇON, vers 1080 (Roland). Probabl. ou la pêche » fait penser au verbe garir
francique *wrakjo ; on trouve le nom de (vV. guérir) ; mais la forme en est obscure.
personne Wracchio au 1x€ s. et on rap- Aussi varenne, surtout dans des noms de
proche l’anc. saxon wrekkjo, l’anc. haut lieu.
all. rekko « banni, guerrier à la solde de
l'étranger » (d’où aujourd'hui Recke « hé- GARER, 1180, sous la forme varer dans
ros ») et l’anc. angl. wrecca « coquin », sens un texte de Bretagne, n’est attesté que de-
auxquels se rattachent les sens dominants puis le xve s. à Paris, où il a été amené par
du moyen âge d’ « homme de basse condi- le trafic maritime avec la Normandie.
tion, valet ». Garçon est l’anc. cas oblique Empr. de l’anc. norois vara « avertir (d’un
dont le cas sujet gars est resté pop. et pro- danger) », congénère de l’all. (be)wahren.
vincial sous la prononciation gd. Du sens Le verbe égarer par contre existe en fr.
de « valet » dérive celui d’ « employé subal- dp. le x1° s.; il représente probabl. une
terne », usuel à partir du xvrie s. Celui formation hybride née d’une comp. de la
d’ « enfant du sexe masculin » n’apparaît prép. eæ et du verbe francique *waron
qu’au xvie s. Des dér. comme garçonnet, « conserver ». — Dér. : gare, interjection,
vers 1185, garçonnière, xr1e, se rapportent 1460 (sans crier gare) ; gare, subst. fém.,
d’abord à la signification « valet ». Le sens 1690, au sens de « gare d’eau »; garage,
de « célibataire » date de 1636. — Dér. : 1802, sens actuel 1899, d’où garagiste,
outre les précédents ; garçonne, 1922, début xxe.
créé par V. Margueritte, auparavant chez GARGAMELLE 1468. Empr. du prov.
Huysmans, en 1880 ; garçonnière « loge- gargamela, dû à un croisement de calamela
ment de célibataire », 1835. — Dér. de «chalumeau » (dit par métaphore du tuyau
gars : garce, vers 1175, qui a pris un sens de la gorge) avec le radical garg- « gosier,
péjor. vers le xvie s., d’où garcette, xXI11°, gorge », v. les mots suiv.
inusité au sens propre depuis le xvi® s.,
sauf dans quelques patois, mais au sens GARGARISER, x1ve ; gargarisme, xI11°.
de « petite corde faite de vieux cordages Empr. du lat. gargarizare, gargarisma (pris
détressés » (attesté en 1634 au sens de à basse ép.) (du grec médical gargarizein,
« petite corde »); ce sens vient de l’expres- gargarisma).
‘GARGOTE 288

GARGOTE, 1680. Terme argotique, dér. de l'épaule, entre l’encolure et le dos »,


du verbe gargoter, au sens de « boire, man- 1444. Empr. du prov. garrot, dér. de garra
ger malproprement », 1675, antér. « faire « jarret » (et aussi « jambe, fesse »).
du bruit avec la gorge, bouillonner avec
bruit », 1622. Gargoler (gargueter, XIV®) GARROT « bâton », 1302 (alors « trait
dérive de l’a. fr. gargate « gorge, gosier », d’arbalète »). Même mot que a. fr. guaroc
encore usité dans diverses régions de la « trait d’arbalète ». La forme en -of est
France. Dans ce mot et dans d’autres mots née quand le plur. des mots en -c et en -{
dialectaux ou appartenant à des langues est devenu identique (-os pour -ocs et pour
voisines, cf. esp. et port. garganta, le radi- -0z) ; c'est alors que le sing. en -of, plus
cal garg- est une onomatopée rappelant le fréquent que celui en -oc, a supplanté
bruit de l’eau qui bout ou celui que fait la celui-ci dans ce mot. A. fr. guaroc est
gorge quand on avale gloutonnement. — un dér. du verbe garokier « garrotter », XII,
Dér. : gargoter, 1642, « fréquenter les gar- lequel représente un francique *wrokkan
gotes »; gargotier, id. « tordre, tourner avec force », qu’on peut
restituer d’après le moyen néerl. wroken
GARGOUILLE, 1500 (d’abord gargoule, « se quereller », flamand wrooken « tordre ».
1295). Mot contenant le radical garg- des — Dér. : garrotter, 1535. L’esp. garrote,
mots préc. La première forme gargoule empr. du fr., a pris le sens d’ « instru-
paraît comp. avec goule « gueule ». Gar- ment de supplice », que le fr. a reçu à son
goule a été modifié par la suite sous l’in- tour au xix® s. (une première fois chez
fluence du verbe gargouiller, v. le suiv. — Vaugelas, qui dit garrolie).
Dér. : gargoulette, 1337.
GARS, v. garçon.
GARGOUILLER, 1337. Dér. du radical
garg- avec le suff. péjor. qu’on a dans bar- GASCON. Souvent « hâbleur » depuis le
bouiller, etc. — Dér. gargouillement, xviie s. Lat. vasco devenu wasco, par subs-
1532; gargouillis, 1581. titution de w à v, due à l'influence de la
prononciation germ. qui n’avait pas de v;
GARGOUSSE, 1505. Probabl. empr. du v. gaine. — Dér. : gasconisme, 1584; gas-
prov. cargousso, même sens, dér. de cargd connade, fin xvie.
« charger »; gargouche, 1643, est dû à un
croisement avec cariouche. GASPILLER, 1549, en outre gap- au
xvi® s. Probablement issu de gapailler,
GARLANDAGE, v. guirlande. mot dialectal de l'Ouest, croisé avec le
prov. gaspilha « grapiller, gaspiller »; de
GARNIR. Germ. *warnjan « pourvoir, là aussi la première forme gapiller. Gapail-
munir ». It. guarnire, esp. guarnecer. — ler, propr. « rejeter les balles de blé », cf.
Dér. et Comp. : garnement, vers 1150, au gaspaille « balles de blé rejetées par le van »,
moyen âge désigne ce qui protège ; appli- attesté anciennement dans la même région,
qué à l’homme considéré comme protec- est à rapprocher du méridional gaspa « pe-
teur, a pris vers 1380 un sens péjor. qui a tit lait » ; on le rattache à un gaulois *was-
éliminé les autres sens ; garnison, xI° s., pa, qu’on suppose d’après des mots irlan-
jusqu’au xvire s. signifie aussi « moyen de dais et gallois, et qui aurait signifié «nourri-
défense, approvisionnement, soutien »; ture », puis se serait restreint au sens de
vers 1213, spécialisé au sens d’ « ensemble « nourriture du bétail, déchet », quand le
de troupes qui défendent une place, qui gaulois est tombé au rang de langue rurale.
sont casernées dans une ville », d’où celui — Dér. : gaspillage, 1740 ; gaspilleur, 1538.
de « la ville même », d’où garnisaire, 1771
(qui a remplacé garnisonnaire, XVI1°) ; gar- GASTÉRO-, GASTR(O)-. Premier élé-
niture, 1327, en outre au moyen âge garne- ment de mots sav. comp., tels que gastéro-
ture ; dégarnir, vers 1080 (Roland) ; regar- pode, 1795 ; gastro-entérite, 1823, tiré du
nir, XIII®. grec gastér « ventre », ou de mots empr.
tels que gastronomie (en 1623 dans le titre
GAROU, v. loup. d’un ouvrage grec).
GARRIGUE, 1546 (Rab.). Ne s'applique GÂTEAU, xrr°. Probabl. empr. du fran-
qu’à des terres du Midi. Empr. du prov. cique *wastil qu’on suppose d’après l’anc.
garriga équivalent de l’a. fr. jarrie. Ce mot, saxon wist « nourriture » (mais le moyen
de même famille que l’a. fr. jarris, sorte haut all. wasiel est empr. du fr.).
d’arbre, a. pr. et cat. garric « sorte de
chêne », esp. carrasca, se rattache sans GÂTER. Lat. vastäre, dont l'initiale a
doute à la famille de gascon carroc « ro- été modifiée en w, d’où gu-, g-, sous l’in-
cher », suisse all. XKarren « rochers calcaires fluence du radical germ. “*wosi- qui se
crevassés à fleur du sol » (cette esp. de trouve dans l’all. wüst « désert », verwüsten
chêne poussant surtout sur un sol pier- « ravager ». Jusqu'au xvII® s. a conservé
reux). Ce groupe de mots peut être ramené le sens de « ravager, dévaster ». Même alté-«
à un type *carra « pierre », qui est sans ration dans l’it. guastare « dévaster »,
doute resté d’une langue prélatine, à juger « gâter », esp. gastar « consommer, détrui-
d’après son extension géographique même re », l’a. pr. gasiar, qui ont les mêmes sens”
préceltique, mais que le gaulois et le latin que le verbe fr. — Dér. et Comp. : gâterie,
ont incorporé à leur vocabulaire et trans- 1815, dér. de gâler, au sens fam. d’ « encou-
mis au roman. rager les défauts de quelqu'un par une
complaisance excessive », déjà créé dans le
GARROT « partie du corps qui, chez les sens « d’altération d’un texte » en 1609;
grands quadrupèdes, se trouve au-dessus gâteux, 1836 (Balzac), formé avec le suff.
289 GAZETTE

dialectal -eux par dérision,


-en conformité GAULOIS, xve, sens fig. xvrie. Dér. de
avec le sens péjoratif; cf. gaga, d'où Gaule, qui représente le francique *walha
gâtisme, 1871 ; dégât, 1321, par l’intermé- « les Romans », dér. de *walh- « roman »,
diaire d’un anc. verbe dégastier « dévaster », cf. all. welsch. — Dér. : gauloiserie, 1865.
usuel jusqu’au xvi® s., qui paraît formé
d’après le lat. dêvastäre ; gâte-papier, xr11° ; GAUPE, 1401. Empr. de l’all. dialectal
gâte-sauce, 1808. Walpe « sotte femme », attesté en bava-
rois ; paraît être entré en fr. par les parlers
GAUCHIR, vers 1210. Probabl. issu de de la région franco-provençale.
l’anc. verbe guenchir « faire des détours »,
empr. du francique *wenkjan, cf. all. wan- _ GAUSSER (se), vers 1560 (Ronsard).
ken « vaciller », par croisement avec l’anc. Egalement en normand au sens de « s’amu-
verbe gauch(i)er « fouler », empr. du fran- ser ». Etymologie inconnue. — Dér.
cique *walkan, cf. all. walken « fouler du gausserie, 1539 ; gausseur, id.
drap » (l’angl. {o walk « se promener » est GAVE, 1671. Empr. du pyrénéen gave,
le même mot). Au sens de « fouler », le d’origine prélatine ; on a gabarus en lat.
croisement ne se comprend guère ; mais de basse ép.
le verbe gauchier, rare dans l’ancienne
langue, a dù signifier « marcher d’une GAVER, 1642. Empr. du picard, de
manière embarrassée », cf. le berrichon même famille que l’a. fr. dialectal gave,
gaucher « patauger dans la boue ». — Dér. encore usité en picard et en normand au
et Comp. : gauchissement, 1547 ; gauche, sens de « gosier, gésier », cf. aussi le prov.
1471, s’est substitué à l’anc. adj. senesire, gava « jabot ». Représente un prélatin
encore de quelque usage au xvi® s., depuis *gaba « gorge, gosier, goître », peut-être
usité seulement sous la forme écrite senes- d’origine gauloise, qui vit aussi dans les
ire, spécialement dans la langue du blason. dialectes de l'Italie du Nord. V. gavotte;
Ce mot signifiait propr. « qui est de tra- joue.
vers », d’où « maladroit », il a pris la place
de senesire, quand droit a pris celle de GAVION, xuie. Mot dialectal, dér. de
destre ; d’où gaucher, vers 1540 ; gaucherie, l’anc. forme gave, v. le préc.
vers 1750 ; dégauchir, 1582, dégauchisse- GAVOTTE, 1588. Empr. du prov. gavolo,
ment, 1513. propr. « danse des gavots »; gavot sert à
GAUCHO, 1846. Empr. de l'esp. de désigner les habitants des Alpes. Le prov.
l'Amérique du Sud, spécial. de la Répu- dit aussi gavach « rustre, montagnard »
blique Argentine, empr. lui-même de l’a- (d’abord « étranger »), d’où gavache, 1546
raucan cachu « camarade ». (Rab.), et l'esp. gavacho, qui désigne par
dérision les Pyrénéens et par extension les
GAUDE « esp. de réséda », xr11°. Germ. Français. Gavot et gavach dérivent de gava,
*walda, cf. l'angl. weld, d’où aussi l’esp. V. gaver.
et l’it. gualda. — Dér. : gauder, 1244.
GAVROCHE. Nom propre, créé par Vic-
GAUDE « bouillie de farine de maïs », tor Hugo dans Les Misérables, III, I, 13,
1732. Empr. du bourguignon et du franc- avec le suff. argotique -oche; devenu rapi-
comtois. Même mot que le préc.; cette dement nom commun.
bouillie a été appelée ainsi à cause de sa
GAZ, 1670 (gas, dans une traduction de
couleur jaune. van Helmont). Mot créé par le médecin
GAUDIR, voir le suivant. flamand van Helmont (1577-1644) pour
désigner une substance subtile qu’il consi-
GAUDRIOLE, 1741. Paraît êtie un dér. dérait comme unie aux corps, d’après le
fantaisiste, sur le modèle de mots tels que lat. chaos (grec khaôs), suivant ses propres
cabriole, de l’anc. verbe se gaudir « s’é- paroles : Halitum illud gas vocavi, non longe
gayer », XI11°, aujourd'hui arch., empr. du a chao veterum. En flamand ch a une pro-
lat. gaudere « se réjouir ». nonciation spirante sourde proche de celle
GAUFRE, x11°, au sens de « sorte de de g, spirante sonore. Sens moderne, fin
pâtisserie ». Représenté probabl., en raison xvire, depuis les travaux de Priestley et
de l’ancienneté du mot, le francique *wafel, de Lavoisier. — Dér. et Comp. : gazéifier,
plutôt que empr. du moyen néerl. wafel. 1802 ; gazeux, 1775 ; gazier, 1802 ; gazéi-
Les deux sens « gâteau » et « rayon de forme, 1811. Comp. techn. avec gazo-
miel » doivent déjà être germ., cf. l’all. comme premier élément, tels que gazo-
Wabe « rayon de miel ». Le -/ de la forme mètre, 1789 (Lavoisier).
germ. doit avoir été anticipé dans la pre- GAZE, 1554 (Ronsard). Peut-être d'a-
mière syllabe, avec, par la suite, dissimila- près le nom de la ville de Gaza (Palestine).
tion des deux L. d’où la première forme On a proposé aussi l’arabe gazz « bourre
walfre. — Dér. : gaufrer, xvi° (R. Belleau : de soie ».
« Ruchettes gaufrées », au sens techn.,
déjà en 1439), gaufrure, xv°, gaufrage, GAZELLE, fin x. Empr. de l’arabe
1806, gaufreur, 1677; gaufrette, 1536; ghazäla.
gaufrier, 1365. GAZETTE, 1600. Empr. de l’it. gazzella,
GAULE, 1278. Francique *walu, forme empr. lui-même du vénitien gazela, propr.
qu’on peut restituer d’après le moyen néerl. « petite monnaie de la valeur de trois
wal « bâton », l’anc. haut all. valus, le liards environ »; on vendait au XVI s. à
gothique walus. — Dér. : gauler, 1360; Venise des feuilles périodiques, donnant
gaulée, 1611 : gaulis, 1392. des nouvelles sur les entreprises vénitiennes
DICT. ÉTYM. 19
GAZETTE 290

dans le Levant et sur les événements de GÉMEAUX, xvie. Aujourd’hui ne s’em-


l'époque et appelées gazela dele novità, ploie plus qu’au plur., en parlant d’un des
parce qu’on les vendait au prix d’une signes du Zodiaque. Au xvi® et au XvIIe8.,
gazela. Aujourd'hui gazelle ne s'emploie a la même valeur que jumeau dont il n’est
guère que comme titre de quelques publi- qu’une réfection partielle sur le lat. gemel-
cations ; a cédé la place à journal, sauf dans lus.
les parlers du Nord-Est et du Sud-Est,
surtout en Wallonnie et en Suisse romande. GÉMINÉ, 1529. Empr. du lat. geminatus
— Dér. : gazetier, 1633. « doublé ».

GAZON. Francique *waso, cf. all. Wasen. GÉMIR, v. geindre.


Le mot a passé en fr. grâce à l’usage jurid. GEMME. Empr. du lat. gemma « bour-
de symboliser la cession d’une terre par geon, pierre précieuse »; employé dès le
la remise d’une motte de gazon. — Dér. : XVIe s., Comme adj., en parlant du sel fos-
gazonner, 1295, gazonnement, 1762. sile. À remplacé jame, écrit souvent gemme,
GAZOUILLER, 1316. Verbe à radical d’après l'orthographe du lat., de sorte
onomatopéique, v. jaser. — Dér. : gazouil- qu’on ne peut reconnaître quand gemme,
lement, xiv® (Oresme) ; gazouillis, XvI°. prononcé comme aujourd’hui, a succédé à
Jame. Gemme s'emploie sous des formes
GEAI. Lat. de basse ép. gaius, tiré du locales au sens de « résine, poix » dans les
nom propre Gaius, suivant un procédé fré- parlers de l'Ouest et du Sud-Ouest, d’où
quent pour la désignation des animaux il a pénétré sous la forme francisée gemme
familiers. Esp. gayo, a. pr. gai. dans la langue de la sylviculture ; ce sens,
attesté dès le moyen âge, est dû au fait
GÉANT. D'abord jaiant (d'où l’a. pr. que la résine sort en gouttes brillantes
jaian). Lat. pop. *gagantem, acc. de *gagaäs, comme des perles.
altération de gigäs, personnage mytholo-
gique (mot d’origine grecque), pris à basse GÉMONIES, 1611. Empr. du lat. gemo-
ép. comme nom commun (rare en ce sens niae (sous-entendu scalae « escalier »), esca-
en grec). Rare en dehors du gallo-roman lier où l’on exposait, à Rome, les corps des
sous une forme pop., cf. gaiani, encore condamnés après leur strangulation et
usuel en picard. V. gigantesque. avant de les jeter dans le Tibre. Devenu
usuel au xix° s. dans l’expression {raîner
GÉHENNE, xirie. Empr. du lat. eccl. aux gémonies, 1820 (Lamartine), « accabler
gehenna, venu, par l'intermédiaire du grec d’outrages ».
geenna, de l’hébreu post-biblique ge-hinnom
« vallée de Hinnom », près de Jérusalem, GENCIVE. Lat. gingiva; le c de gencive
où les Juifs sacrifièrent à Moloch, et qui, est dû à une dissimilation du deuxième g
par suite, devint un lieu maudit, puis dési- de gingiva.
gna l’enfer, cf. « Le feu de la géhenne », GENDARME, v. gent.
Mathieu, V, 22. V. gêne.
GENDRE. Lat. generum, acc. de gener.
GEINDRE. Lat. gemere, devenu régu- It. genero, esp. yerno, à. pr. genre ; concur-
lièrement giembre qui a été refait sur les rencé dans les parlers gallo-romans par
verbes en -eindre. Ne s’est maintenu que beau-fils.
dans un sens ordinairement péjoratif, at-
testé dès le xive s., tandis que pour le sens GÊNE, 1538. Issu de gehine, 1213, qui
propre le fr. gémir, vers 1150, est repris dérive de l’anc. verbe jehir, gehir «avouer ».
au lat. gemere, avec changement de conju- Celui-ci représente un francique */ehhjan
gaison ; d’où gémissement, xr1°. It. gemere, (par métaphonie pour un plus ancien
a. pr. gemer, gemir. — Dér. : geignard, 1872. *jahhjan, ïid.), cf. anc. haut all. jehan
GEISHA, 1922. Mot d’origine japonaise. « avouer » (-jan a ici une valeur d’inten-
sité). Le part. passé est déjà iectus dans
GEL. Lat. gelu. Peu usité aujourd’hui. la Loi Salique. Aussi a. pr. gequir, giquir.
It. gelo, esp. hielo (v. glace), a. pr. gel. — L’anc. it. gecchire « humilier » est empr. du
Dér. : antigel, 1948. gallo-roman. Gêne et gêner ont conservé
GÉLATINE, 1611. Empr. de l'it. gela- jusqu’à la fin du xvrre s. les sens très forts
tina, v. galantine. — Dér. : gélatineux, de « tourment, tourmenter (physiquement
1743. et moralement) », ce qui explique qu’on
ait vu du xv® au xvre s. dans gêne le
GELER,. Lat. geläre. Existe aujourd’hui même mot que gehenne « enfer »; de là
dans tous les parlers gallo-romans. It. l'orthographe gehenne au sens de « gêne »
gelare, esp. helar, à. pr. gelar. — Dér. et fréquente au xXvi® s., cf. aussi gehenner
Comp. : gelée, vers 1080 (Roland), gelata « gêner » chez Commynes et, d'autre part,
est dans les Gloses de Reichenau; gélif, gêne au sens d’ « enfer » chez Bossuet et
1622, en outre le fém. gélisse, id., encore Furetière. — Dér. : gêner, 1381 ; gêneur,
chez Buffon, d’où gélivure, 1737; gélis- 1868. — Comp. : sans-gêne, 1778 (nom
sure, 1771 ; dégeler, xir1e (J. de Meung) ; d’une association d'ouvriers).
dégel, id.; engelure, x1r1°, dér. d’un anc.
verbe engeler, x11°, encore dans les patois ; -GÈNE. Suff. scientifique, tiré du radical
regeler, 1447. gen- de mots grecs qui contiennent l’idée
d’ « engendrer », tel que le verbe gennän,
GELINOTTE, xvie (Marot). Dér. de ge- etc., v. hydrogène ; de ce suff. a été tiré
line, anc. nom de la poule, lat. gallina, v. un nouveau suff. chimique -ène, cf. acé-
poule. tylène.
291 GENT

GÉNÉALOGIE, xn°, Empr. du lat. de GENETTE, terme de manège, xve. Em-


basse ép. genealogia (d'origine grecque). ployé d’abord dans la locution à la genetle,
Fe : généalogique, 1480 ; généalogiste, calquée sur la locution esp. a la jineia
« avec les étriers courts », dér. de Jjinele,
v. genet ; désigne, par extension, une esp.
GÉNÉRAL, xr1e, Empr. du lat. generalis, de mors.
propr. « qui appartient à une espèce fge-
nus) », d’où « général ». Devenu rapide- GENETTE, « sorte de petit carnassier »
ment usuel ; la locution en général date du xuie, Empr. de l’arabe djarnait (le port.
xIVe s. Pris comme subst., au sens de «chef gineta est attesté depuis le x11r° 5.).
d'un ensemble d'unités militaires », xv® GÉNIE, 1532. Empr. du lat. genius
(capitaine général est déjà du x1v® 5.) ; au « génie tutélaire », qui apparaît avec le
sens de « chef d’une communauté reli- sens de « talent, don naturel » à basse ép. ;
gieuse », xvi®. — Dér. : 1° de l’adj. : géné- a servi aussi en fr. pour traduire le lat.
raliser, fin xvi® (d’Aubigné); généralisa- ingenium, au sens de « don inné, dépassant
tion, 1778 ; généralisateur, 1792 ; généra- la mesure ». Comme terme de guerre, au
lité, x1r1° ; on a dit aussi généraulé, xIII°, sens « d’art de fortifier les places, etc. »,
qui s’est maintenu au sens de « généralat » fin xvrie, a été suggéré par ingénieur, au-
jusqu’au xvri® s. À désigné en outre sous trefois « constructeur d’engins ». — Dér. :
l’anc. régime une division administrative génial, 1838 (une première fois en 1547),
en vue de la perception des impôts, créée dér. de génie dans son sens d’ « aptitude
sous le règne de Charles VII ; 2° du subst. : supérieure ».
généralat, 1554, d’abord généraulé, xvVI°.
GENIÈVRE, 1584 (Ronsard), aupara-
GÉNÉRALISSIME, fin xvi® (d’Aubi- vant, geneivre, genoivre, genèvre. La voyelle
gné). Empr. de l’it. generalissimo, dér. de iè a probabl. remplacé ot par analogie avec
generale. des couples comme levrier : lièvre, en par-
GÉNÉRATEUR, 1519 ; génération, xr1e. tant du dér. genévrier. Lat. juniperus, de-
Empr. du lat. generator, generatio « action venu à basse ép. “*jeniperus (giniperus,
d’engendrer » (de generare « engendrer ») ; vers 800). — Dér. : genévrier, 1372.
le sens de « génération d'hommes » vient GÉNISSE. Lat. pop. *jenicia (cf. sicilien
du lat. eccl. yinitisa), issu par affaiblissement de l’u
GÉNÉREUX, x1v® ; générosité, fin xve. inaccentué de */ünicia, transformation du
Empr. du lat. generosus, generositas au sens lat. class. jünix, jünicis.
de « de bonne race, qui a de nobles senti- GÉNITAL, xive. Empr. du lat. genitalis
ments ; noblesse » (de genus au sens de « qui engendre » (de genitus, part. passé de
« race »); ces sens n’ont cédé la place à gignere « engendrer »).
« libéral, libéralité » que depuis le xvire s.
GÉNITIF, vers 1373. Empr. du lat.
GÉNÉRIQUE, 1582. Dér. sav. du lat. genitivus (plus fréquemment genelivus).
genus, generis, au sens de « genre ».
GÉNITOIRES, vers 1300 (Joinville : ge-
, GENÈSE, 1660, d’abord génésie, 1611. neloires, issu de genitaires, X11°, par substi-
Restreint aujourd’hui à la locution récente tution de suff.). Genilaires est une franci-
genèse d’un ouvrage (dont le sens est sans sation, par une première substitution de
rapport, malgré l'apparence, avec Genèse, suff., du lat. genitalia, plur. neutre, pris
premier livre de la Bible); était d’abord substantiv., de l’adj. genitalis. Ne s’em-
employé dans les langues techn., biolo- ploie plus guère aujourd’hui que par plai-
gie, etc. Empr. au lat. eccl. genesis « naïs- santerie.
sance, génération ». — Dér. : génésique,
1836, comme terme biologique ; d’abord GENOU. D'abord genouil, éliminé par
en concurrence avec génétique, id., empr. genou qui est issu du plur. genouilz, puis
du grec gen(n)étikos « propre à la généra- genous (transcrit genoux). Lat pop. ge-
tion ». nuc(u)lum, réfection du lat. class. geni-
culum, sous l'influence de genu. — Dér. :
GENÉT, vers 1200. Réfection de l’a. fr. d’après l’ancienne forme genouil, genouil-
geneste, fém., probabl. parce que la forme lère, x11° ; agenouiller (s’), xi°; -ement,
fém. a été sentie comme un nom collectif ; XIV.
cette forme masc. n’a pas éliminé l’anc.
fém. qui est encore vivace, surtout à l'Est GENRE, vers 1200. Empr. du lat. genus,
de Paris et dans le Midi, Genesie représente generis dans l'expression genre humain,
le lat. genesia (le lat. class. genisla est lat. genus humanum, et dans ou pour des
probabl. d’origine dialectale, d’où égale- acceptions techn. de grammaire, scolasti-
ment it. ginesira, esp. hiniesla, anc. prov. que, histoire naturelle ; a pris le sens géné-
genesta). ral de « manière, sorte » dans la langue
commune, vers 1400, tout en restant
GENET, xive. Empr. de l'esp. jinele techn.
« cavalier armé à la légère » d’où « bon
cavalier » et « cheval bon pour être monté GENS, v. le suiv.
à la genette », emprunté de l'arabe zenäia, GENT, subsi. Lat. gentem, acc. de gens
nom d’une tribu berbère connue pour la «nation, peuple ». Ce sing. n’a plus qu’une
valeur de sa cavalerie. existence littéraire, maintenue par l'usage
GÉNÉTIQUE, 1865. Empr. du grec que La Fontaine en a fait. Le plur. gens a
gennétikés « qui a trait à la génération ». pris de bonne heure le sens général d’ «hom-
GENT 292

mes » ; de là le genre masc., dès le x111° $., GÉODÉSIE, 1647. Empr. du grec geo-
bien que le genre étymologique n'ait pas daisia (de daiein « partager »).
disparu. L'expression droit des gens, 1694,
est une traduction du lat. jus gentium. — GÉOGRAPHE, 1542; géographie, vers
Comp. : gendarme, xv® s., issu du pluriel 1500 ; géographique, 1546. Empr. du lat.
gensdarmes, 1330 ; encore parfois accom- geographus, geographia, -icus (du grec geô-
pagné de l’adj. fém. au xv°s.; désignait graphos, -ia, -ikos ; v. -graphe, graphie).
d’abord des hommes de guerre à cheval, GEÔLE. D'abord jaiole. A signifié « ca-
ensuite un corps d'élite sous l’ancien régi- ge » jusqu’au xvi® s., et ce sens subsiste
me ; sens moderne depuis 1790 ; a parfois encore au Nord-Est, en Suisse romande et
le sens général de « soldats » dans la langue à l’extrême Sud-Ouest. Le sens de « pri-
littéraire ; d’où gendarmerie, 1473 ; gen- son », aujourd'hui arch., apparaît dès le
darmer (se), 1566 ; gendelettre(s), masc., XII® S., en concurrence avec charire et
1843 (Balzac), ne s'emploie que par déri- prison. Lat. de basse ép. caveola, dim. de
sion, issu de gens de lettres, 1556 ; entregent, cavea « cage ». — Dér. : geôlier, 1294, en
1427. concurrence avec charirier au moyen âge ;
enjôler, x111° (sous la forme enjaole), au
GENT, adj. Depuis le xvrre s., restreint sens d’ « emprisonner », vers 1550, au sens
au style marotique. Lat. genitus « né », qui fig., d’où enjôleur, xvre.
a pris le sens de « bien né » dans les milieux
féodaux, d’où « noble », puis « gracieux, GÉOMÈTRE, vers 1300, ordinairement
joli ». Seulement gallo-roman en ces sens; geometrien en a. fr. ; géométrie, vers 1165 ;
survit encore avec ce dernier sens en ber- géométrique, 1371 (Oresme). Empr. du lat.
richon, limousin et en auvergnat. — Dér. : geomeires, geometria, geometricus (du grec
agencer, XIII®, propr. « embellir, parer » geômeirés, géemelria, -ikos).
(encore au xvi® s.), d’où « ajuster, ordon-
ner », dès les premiers textes, de même GÉRANIUM, 1545. Empr. du lat. des
a. pr. agensar « embellir », d’où agence- botanistes geranium, réfection du lat. anc.
ment, xII°. geranion (d’un mot grec, dér. de geranos
« grue »; ainsi nommé parce que le fruit
GENTIANE, x11e. Empr. du lat. gen- de cette plante ressemble au bec d’une
tiana. grue).
GENTIL, adj. Lat. gentilis « de la fa- GERBE. D'abord jarbe. Francique *gar-
mille, de la race »; a pris le sens de « de ba, cf. all. Garbe ; aussi a. pr. garba. —
bonne race, généreux » de la même manière Dér. : gerbée, 1432 ; gerber, x111°, au sens
que gent, d’où, vers le xvirI® s., ceux de de « mettre en tas des fûts », 1567 ; enger-
« gracieux, joli, aimable »; les sens anc. ber, xvi® (R. Belleau), même développe-
ne subsistent que dans les locutions arch. ment de sens que gerber.
et le comp. gentilhomme. L’l mouillée est
d’origine analogique. — Dér. : gentillet, GERBOISE (Buffon), xvirre. Tiré d’une
1845 ; gentillesse, xr1° (Chrétien); « no- forme antér. gerbo, 1700, empr. du lat. des
blesse de race, de sentiments » jusqu’au naturalistes gerboa, qui est empr. lui-même
Xviie s. ; gentillâtre, vers 1310. — Comp. : de l'arabe yerboû’ (en arabe maghrébin
gentilhomme, vers 1080 (Roland): gen- dj-), d’où aussi esp. Jerbo.
tilhommière, xvi*. Empr. par les langues GERCER. D'abord jarser, signifie sou-
méridionales : it. gentiluomo, esp. gentilhom- vent « scarifier » au moyen âge. Probabl.
bre. Cf. aussi gentleman. lat. pop. charaxäre, fait sur le grec kha-
rassein, propr. « faire une entaille », d’où
GENTIL, subst., 1488. Surtout au plur. « scarifier », sens attesté dans le composé
Empr. du lat. eccl. gentiles « païens (par enkharassein ; l’empr. se serait produit
opposition aux chrétiens) », Mathieu, X, dans les milieux médicaux. Le sens de
5, traduction du grec {a ethné qui traduit « scarifier » d’où celui de « ventouser »
lui-même l’hébreu g6im, propr. « peuples », qu'a encore le wallon garsi, a disparu du
d’où « les non-juifs ». fr. avant le xvie s. au profit de scarifier,
plus techn. La disparition du deuxième -a-
GENTLEMAN, 1769 (Voltaire; antér. s'explique probabl. par dissimilation des
gentillemans, 1558) ; jusqu’à une daté ré- deux voyelles, Anc. napolitain (s )carassare
cente, employé en parlant d'Anglais ; n’a « scarifier ». — Dér. : gerce, xvi*, au sens
encore que le plur. angl. gentlemen. L’angl. de « teigne », 1777, au sens de «fente dans le
gentleman est lui-même un calque de gen-
lilhomme, fait avec genile, empr. du fr.
bois ». Celui de « teigne » s'appuie sur le sens
gentil, et man « homme ». d’ « endommager » qu'a gercer au moyen
âge et sur des dér. dialectaux de l’époque
GÉNUFLEXION, xive. Empr. du lat. moderne qui ont à leur base le sens de
médiéval genuflexio, dér. du lat. eccl. genu- « piquer »; gerçure, 1379.
fleciere « fléchir le genou », d’après flexio GÉRER, 1445. Empr. du lat. jurid.
« flexion ». gerere « administrer une tutelle, etc. » (sens
GÉO-. Premier élément de mots sav., très variés en lat. class., propr. « porter »).
— Dér. : gérant, 1787; gérance, 1843.
tels que géologie, 1751 (Diderot ; on a déjà
geologia en 1690, et giologia dans un texte GERFAUT, vers 1180. D'abord girfale,
italien de 1603), faits sur le modèle de gerfalc. Comp. de l'a. fr. gir « vautour »
mots tels que géographie, qui contiennent (empr. de l’a. haut all. gir « id. ») et de
le grec gé « terre ». fauc « faucon ». Cette composition est due
293 GIBELET

au fait que gir était identique avec le telles que vesce, pois des champs, ivraie,
radical du verbe girer et demandait un a. pr. geissa. Peut-être de aegyplius « égyp-
deuxième élément pour rendre clair le ien ».
sens du mot.
GESTATION, 1537, sens moderne depuis
GERMAIN. Jusqu'au xix® s. s’est em- 1748 ; 1872 en parlant d’une création de
ployé comme subst. et comme adj. en par- l'esprit. Empr. du lat. gestatio « action de
lant des frères et des sœurs ; ne s'emploie porter » (de gestare « porter »).
plus que dans les expressions : cousin ger-
main, cousin issu de germain. Lat. germä- GESTE, masc., fin xve (une première
nus « qui est du même sang ». Esp. her- fois, gesi, 1213). Empr. du lat. gestus.
Le -a « frère, sœur », port. irmäo, -à GESTE, fém. Ne s'emploie plus que dans
€ Id. ». chanson de geste et dans la locution faits
et gestes. Chanson de geste, qui remonte au
GERMANDRÉE, x11° (gemandree). Al- moyen âge et qui a été repris au xiIx° s.
tération obscure du lat. chamaedrys (du par l’histoire littéraire, signifie propr. « poè-
grec khamaïidrys, propr. « chêne nain », de me de récits historiques » : gesie en ce sens
drys « chêne » et de khamai « à terre »). a été empr. du lat. gesta (plur. neutre du
Le lat. médiéval calamendria, lui-même part. passé de gerere « faire »), qui a servi
inexpliqué, n’explique pas la forme fr. à basse ép. de titre à dés ouvrages histo-
GERME. Lat. germen. It. germe, a. pr. riques tels que les Gesta Francorum : par
germ(e). suite geste, francisé en nom fém., a désigné
les poèmes eux-mêmes, puis a pris le sens
GERMER. Lat. germinäre. À donné la d’ «actions mémorables », encore usité au
forme jerner dans les parlers du Nord, de XVIIe s., d’où la locution faits el gestes,
l'Ouest et dzerna dans la région franco- 1615 ; a désigné en outre au moyen âge
provençale. A. pr. germenar, it. germogliare un groupe de traditions épiques et même
(avec changement de suff.). & Ar qui fournissait la matière de ces
récits.
GERMINAL, 1793 (Fabre d’Églantine).
Dér. sav. du lat. germen, germinis ; v. ger- GESTICULER, 1578; gesticulateur,
me et floréal, prairial. 1578 ; gesticulation, xive. Empr. du lat.
GERMINATION, vers 1510. Empr. du gesticulari, -ator, -atio, v. geste, m.
lat. germinatio pour servir de nom d’action GESTION, 1482. Empr. du lat. gestio (de
à germer. gerere « faire »); sert de nom d’action à
GERMON, esp. de thon, 1836. Pris aux gérer.
parlers de la région maritime du Poitou; GEYSER, 1783. Empr., par l’intermé-
étymologie inconnue. diaire de l’angl. geyser, de l’islandais mo-
GÉRONDIF, 1520. Empr. du lat. gerun- derne geysir, nom propre d’une célèbre
divum. source d’eau chaude au sud de l'Islande;
étendu par la suite à toute source d’eau
GÉRONTE, 1829. Personnage du théâtre chaude jaillissante.
de la foire du xvrie s., dont le nom a été
fait sur le grec gerôn, gerontos « vieillard ». GHETTO, 1842, une première fois en
On ne peut dire si le nom du personnage 1690. Empr. de l’it. ghetto, attesté en 1516
de la comédie italienne Gerontio vient du dans un texte vénitien, mot d’origine in-
fr. ou en est l’origine. certaine ; d’après une des explications pro-
GÉRONTOCRATIE, 1828. Comp. avec posées, désignerait propr. un quartier de
le grec gerôn, v. le préc., sur le modèle de Venise où se trouvaient des fonderies dites
mots tels qu'aristocralie, etc. ghetlo et où les Juifs se seraient établis.
GERZEAU, 1798, une première fois GIBBEUX, xv° ; gibbosité, 1314. Le pre-
jarzeu dans un texte poitevin du xr1e s. mier est empr. du lat. gibbosus (de gibbus
Empr. d’un parler du Centre ou de l'Ouest, « bosse »), le deuxième est un dér. sav. de
où, sous des formes variées, il désigne sur- gibbosus.
tout la gesse tubéreuse. Paraît contenir le GIBBON, xvirie (Buffon). Introduit par
radical qui se trouve dans l’a. fr. jargerie Dupleix qui l’a emprunté d’un parler non
« ivraie », variante de jarderie. Cette der- déterminé.
nière forme est peut-être dér. de jard «long
poil rude qu’on enlève des peaux et des GIBECIÈRE, xuie. On trouve aussi au
toisons », qui a pu servir pour désigner des moyen âge le masc. gibecier, gibacier. Dér.
mauvaises herbes. de l’a. fr. gibiez, v. gibier.
GÉSIER. D'abord giser. Lat. pop. gige- GIBELET, sorte de foret, 1549. Aussi
rium, usité en lat. class. surtout au plur. gimbelel, 1534 ; guibelel, fin xve; guimbe-
et au sens d’ «entrailles de volailles offertes let, 1410. Adaptation de wimbelquin, l’anc.
‘ en sacrifice ». Le développement irrégulier forme de vilebrequin, v. ce mot, par substi-
de la consonne intérieure paraît dû à une tution de l’initiale gu- au w- et du suff.
dissimilation. dim. -et au suff. dim. néerl. -kin, dont
la valeur diminutive était bien sentie
GÉSINE, GÉSIR, v. gisant. dans les villes bilingues de l’extrême Nord.
GESSE, vers 1100 (écrit jaisse). Empr. Une deuxième substitution (gu- remplacé
d’unparler du Midi où le mot est usuel pour par g-) s’est peut-être produite quand le mot
désigner, outre la gesse, diverses plantes a passé des parlers du Nord à l’Ile-de-
GIBELET 294

France. La perte de la nasalité de la voyelle GIGOT, xve. Dér. de l’a. fr. gigue « esp.
du radical est probabl. l'effet de la dualité d’instrument à cordes », cet instrument
des formes regimber et regiber. ayant eu au moyen âge une forme assez
GIBELOTTE, 1617. Issu par changement semblable à celle d’un gigot. L’a. fr. gigue
de suff. de l’a. fr. gibelet « plat d'oiseaux », est empr. de l’anc. haut all. giga, id.— Dér. :
lequel est un dim. de gibier (*giberet) dont gigue, 1655, refait sur gigot sur le modèle
la valeur diminutive a été soulignée par de cuisse : cuissol.
la substitution d’un -/- à l’r, ce qui a trans- GIGOTER, 1694. Dér. fréquentatif de
formé la fin du mot en une suite de deux giguer « gambader » (XIv®-XIX® s., encore
suff. dim. dans les patois), v. guinguette, et comp.
GIBERNE, 1752, une 1lre fois en 1585. les formes patoises gigougner, gigouiller,
L'it. giberna est empr. du franç. On rap- gigauder, etc.
proche celui-ci du lat. de basse ép. zaber- GIGUE, « air de danse, danse très vive »,
na «esp. de bissac », 1ve s. (Édit de Dioclé- 1658. Empr. de l’angl. jig, probabl. du
lien), d’origine inconnue. radical du verbe a. fr. giguer « gambader »,
GIBET, 1155. Désigne aussi au moyen xve (en outre ginguer).
âge une esp. de bâton à poignée recourbée.
Peut-être dim. d’un francique *gibb- « bâ- GIGUE, « jambe », v. gigot.
ton fourchu », qui semble pouvoir se jus- GILDE, v. guilde.
tifier par l’angl. gib « bâton recourbé »,
bavarois gippel « branche fourchue ». GILET, 1736. Empr. de l'esp. jileco (au-
GIBIER, au moyen âge surtout dans la
jourd’hui plutôt jaleco), gileco dans Don
locution aller en gibier « aller à la chasse ». Quichotte, I, 41, empr. de l’arabe d'Algérie
Issu par substitution de suff. de l’a. fr. Jalaco, jaleco (Kvi°) « casaque des captifs
gibiez. Francique *gabaiti « chasse au fau- chrétiens chez les Mores », mot qui vient
con », cf. moyen haut all. gebeize, id. Le du turc yelek.
mot ne désigne que depuis le xvi® s. les GILLE, « niais », xvirie. Vient de Gille
animaux pris à la chasse. le Niais, nom d’un bouffon du théâtre de
GIBOULÉE, 1548. Étymologie inconnue. la foire au xvrie s. Dans l’expression au-
jourd’hui hors d'usage, faire gille « s’en-
GIBOYEUX, 1700. Dér. du verbe giboyer fuir », du xvi® s., gille est d’origine dou-
XIIIe, encore au XVIIIe s., d’où aussi gi- teuse ; peut-être est-ce une expression fa-
boyeur, 1583, formé avec le radical de cétieuse tirée de l’anc. verbe giler « se
gibier. hâter ».
GIBUS, 1834. Nom de l'inventeur.
GIMBLETTE, gâteau, 1680. Empr. du
GICLER, 1810; une première fois en prov. gimblelo, d’origine obscure.
1542. Représentant d’une famille de mots
répandue dans presque tout le domaine GIN, 1794. Empr. de l’angl. gin (lui-
gallo-roman, avec les sens de « crier, faire même empr. du néerl. jenever « genièvre »).
jaillir, fouetter », et avec une variante à GINDRE, « ouvrier boulanger », 1260
initiale sourde (cf. déjà a. pr. gisclar à côté (joindre). Lat. pop. jünior, avec un u bref,
de cisclar). Origine inconnue. au lieu du lat. class. jänior, d’après jüvenis
GIFLE, x111e (sous la forme giffe). Usuel « jeune » ; joindre, d'où gindre, est un anc.
au sens de « joue » jusqu’au xXvIIe s., sens nom. qui, du sens de « plus jeune », puis
moderne depuis 1807. Empr. d’un parler simplement de « jeune », s’est restreint au
du Nord-Est où il signifie encore « joue » sens moderne. Survit dans la région franco-
sous la forme gif, du francique kifel « mâ- provençale, au sens de « second berger ».
choire », cf. l’all. Kiefer. — Dér. : gifler,
1846. GINGEMBRE, vers 1100. Lat. zingiberi
(du grec zingiberis, lui-même d’origine
GIGANTESQUE, 1598. Empr. de l'it. extrême-orientale), avec développement
gigantesco, dér. de giganie, v. géant, ou partic., dû à la fois à la forme et à la valeur
dér. du mot lat. avec le suff. -esque de- de ce mot ; c’est en effet une épice, trans-
venu fr. mise par le commerce, et dont le nom a
GIGOGNE, 1659 (d’Assoucy) en parlant pénétré avec le produit bien en dehors du
de la Mère Gigogne, personnage de théâtre, roman.
créé en 1602 par les Enfants Sans-Souci, GINGIVAL, 1866 ; gingivite, 1830. Dér.
femme géante, des jupes de laquelle sortait sav. du lat. gingiva « gencive ».
une foule d’enfants. Récent comme nom
commun dans les expressions mère Gigogne GINGUET, 1549. « En l'an 1554 nous
« femme ayant beaucoup d'enfants » et eusmes des vins infiniment verds que l’on
table gigogne. Paraît être une altération de appela ginguets », Pasquier. Probabl. dér.
cigogne, oiseau connu pour son amour du verbe ginguer « sauter », ainsi dit parce
maternel. que l’aigreur de ce vin fait sursauter;
de là les dér. rares ginglet et ginglard. Le
GIGOLO, vers 1865; d’abord « jeune verbe ginguer, 1490 (au part. prés.), qui est
homme qui fréquente les bals de barrière ». encore très usité en province, a été fait
Le fém. gigolelle est moins en usage. sur giguer sur le modèle de regimber à côté
Dér. de gigue « jambe » (1655, très répandu de regiber.
dans les patois), lequel est refait sur gigot
d’après le modèle de cuisse : cuissot. GIPSY, v. tsigane.
295 GLAIRE

GIRAFE, 1298. Empr. de l’it. giraffa, GISANT. Part. prés. de l’anc. verbe
qui vient lui-même de l'arabe zaräfa. On gésir, aujourd’hui restreint à quelques for-
trouve antér. giras, xur1°, orafle chez Join- mes de langue écrite gît, gisai(en)t, lat.
ville (cf. esp. azorafa), formes prises direc- jacère « être étendu », très rare dans les
tement à l’arabe. parlers gallo-romans ; it. giacere, esp. ya-
cer ; V. coucher. De ce verbe gésir dérivent
GIRANDE, 1694. Empr. de l’it. giranda gésine, xr1e (probabl. déjà lat. *jacina),
« gerbe de feu » (dér. du verbe girar, lat. aujourd’hui peu usité, gisement, 1632,
de basse ép. gyräre « faire tourner en comme terme de marine, « situation d’une
cercle »): comme d’autres termes concer- côte », 1771, au sens de « position des
nant les feux d’artifice. Le sens de « gerbe couches de minerai » (a été une première
d’eau » est une innovation du fr. fois créé au moyen âge, XIII°, au sens
d’ « action de se coucher »); gîte, x11°
GIRANDOLE, 1642. Empr. de l’it. gi- (Chrétien) ; gîter, xrr1e.
randola (dér. de giranda) au sens de « gerbe
de feu ». GIVRE, 1611 ; Jjoivre, xve (surtout
franco-provençal). Mot prélatin, d’origine
GIRASOL, xvie. Empr. de l’it. girasole, inconnue, qui doit avoir existé avec deux
comp. de gira « tourne » et de sole « soleil » ; variantes, *givro et *gevro. Le fr. frimas
cf. tournesol. est en recul devant givre depuis le moyen
âge. — Dér. : givré, 1845; givrure, 1755;
GIRATOIRE, xvire (Condorcet). Dér.
dégivrer, 1948.
sav. du lat. gyrare.
GLABRE, 1545. Empr. du lat. glaber.
GIRIE, 1790. Mot pop., d'origine dia-
lectale, répandu dans les parlers de la GLACE. Lat.-pop. glacia, lat. class.
France septentrionale, aux sens que ce glaciés. Se dit aujourd’hui dans tous les
mot a en français et aussi de « tromperie ». parlers gallo-romans (a. pr. glassa), sauf
do dér. du verbe girer (pour *gire- dans le Centre et l'Ouest où s'emploie une
rle). forme glas, des deux genres, usitée en fr.
du xive au xvie (dès le x11° s. d’après
GIRL, « danseuse de music-hall », 1948. verglas), qui paraît être une réfection de
Empr. de l’angl. girl « jeune fille ». glace plutôt qu’un représentant de glacies.
Anc. it. ghiaccia ; la péninsule ibérique se
GIROFLE. D'abord aussi girofre, XII°. sert des représentants du lat. gelu, v. gel.
Lat. caryophyllon (qui vient lui-même du — Dér. : glaçon, xrr° ; glacier « marchand
grec) avec développement partic., comme qui vend des rafraîchissements à la glace »,
gingembre, et pour les mêmes raisons, cf. 1802 ; « fabricant de glaces de verre »,
de même it. garofano. — Dér. : giroflée, 1765 ; « amas de glace permanente », 1752,
xve (« Pour ce qu’elle a oudeur semblable d’après les parlers alpins (une première
a clous de girofle, l’appelle l’en giroflee », fois en 1572; on a aussi dit glacière au
Grant Herbier), fém. d’un adj., qui date xvir1e s.); glacière, 1640; glaciaire, 1866.
du xurie s., aujourd’hui hors d’usage ; gi-
roflier, 1372. GLACER. Lat. glaciäre. Fréquent au
moyen âge au sens de « glisser ». It. ghiac-
GIROLLE, 1513. Probabl. dér. de l’anc. ciare. — Dér. : glacis, 1345, le sens de
verbe girer « tourner », lat. gyräre, V. gi- « terrain en pente » se rattache à celui de
rande ; dit ainsi à cause de la forme du « glisser ».
chapeau de ce champignon.
GLACIAL, xive. Empr. du lat. glacialis.
GIRON. Signifie d’abord « pan de vête-
ment taillé en pointe », d’où « pan de vête- GLAÇURE, 1771 (« Vernis dont on cou-
ment » et spécial. « pan du vêtement allant .vre la porcelaine, en allemand glasur, et
de la ceinture au genou », de là le sens mo- que l’on nomme en français converti
derne, dès le xr1° s. Francique *géro « pan « glaçure », comte de Milly). L’all Glasur
coupé en pointe », anc. haut all. géro, id. est dér. de Glas « verre » avec le suff. -ur.
(dér. de gér « lance »), moyen néerl. ghére ; GLADIATEUR, xie. Empr. du lat.
cf. de même it. gherone « partie de vête- gladiator.
ment taillée en pointe ». Un dér. gironnée
signifiant « contenu d’un tablier » est usuel GLAÏEUL. Lat. gladiolus, dimin. de
dans les parlers du Centre. gladius « glaive »; dit ainsi à cause de la
forme des feuilles de cette plante. On
GIRONDE, 1828. Terme d’argot, devenu trouve aussi en a. fr. et jusqu’au xvrie s.
pop. ; se dit d’une belle femme. Malgré la une forme glai, lat. gladius, non attesté
date, il est probable que ce mot remonte à comme nom de fleur, d’où aussi a. pr. glai
Girondelle, nom de femme, qui se trouve (encore usité dans les parlers modernes du
dans le refrain d’un motet du xrr1e s. : Je Midi ; les parlers septentrionaux ont sur-
l’arai L'amour de la belle Girondele. S'a- tout le type glaïeul).
mour je l’arai.
: GLAIRE. Propr. « blanc d'œuf », sens
GIROUETTE, 1509 ; en outre gyrouel. qui ne survit que dans la langue de la
Altération de l’anc. normand wirewile (de reliure ; sens moderne, xir1®. Lat. pop.
l’anc. scandinave vedrvili, de même sens) *cläria, dér. de l’adj. clärus « clair », avec
par croisement avec girer, v. girolle, et des g anormal, cf. de même a. pr. glaira « blanc
mots tels que rouelle, pirouelte (le masc. d'œuf » et aussi glara, clara. Existe encore
s'explique de même par rouel, pirouel). au sens de « blanc d'œuf » en picard et
GLAIRE 296

dans les parlers méridionaux (sous des GLAUCOME, 1649. Empr. du lat. glau-
formes refaites sur le type clair ou diver- coma (du grec glaukôma).
sement modifiées) ; cf. de même it. chiara
« blanc d'œuf »; v. blanc. — Dér. : glai- GLAUQUE, 1503. Empr. du lat. glaucus
reux, xI11€ (« visqueux ») ; glairer, 1680. (du grec glaukos).
GLÈBE, xve. Empr. du lat. gleba, propr.
GLAISE. D'abord gleise, gloise, et en « motte de terre ». Au sens actuel empr.
outre glise, encore normand ; aujourd’hui par des ecclésiastiques vers 1600.
surtout {erre glaise. Mot d’origine gauloise,
dont le radical est attesté par glisomarga GLISSER, vers 1190. Issu du croisement
(Pline l'Ancien) « espèce de glaise ou de de l’a. fr. glier, empr. du francique “*glidan,
marne ». La première partie du mot, qui cf. all. gleiten « glisser », et de glacer qui
existe donc en deux variantes (gliso et a signifié « glisser ». — Dér. : glissade,
gliso) est probabl. un dér. du celtique 1564 ; glissement, vers 1400; glisseur, 1636;
attesté dans l’irl. gel « blanc », ajouté glissière, 1866 ; glissoire, 1308 (au sens de
comme distinctif à Mmarga, v. marne ; mais, « conduit d'écoulement »).
quand l’adj. comme tel disparut, la pre-
GLOBE, x1ve, devenu usuel au xvIe s.
mière partie du comp. gliso-marga parut
suffisant comme nom de la terre glaise. — Empr. du lat. globus, qui a déjà les accep-
Dér. : glaiser, 1690; glaiseux, xr11° ; glai- tions principales du fr. Dér. : global,
sière, 1762. 1864 ; englober, 1611.
GLOBULE, xvir® (Pascal). Empr. du
GLAIVE, xr1°, d’abord gladie, x° (Saint lat. globulus « petite boule », en vue d’ac-
Léger). Lat. gladius ; la fin du mot (la ceptions scientifiques. — Dér. : globulaire,
forme normalement développée est glai, 1694; globuleux, 1611.
v. glaïeul) est peut-être due à la nécessité
de distinguer le nom de l'épée de l’a. fr. GLOIRE, x1° (Alexis : glorie). Empr. du
glai « joie, etc. » (à l’étape *glaide -d- lat. gloria. Depuis le xv® s. a parfois le
serait devenu -u-). sens d’ « ostentation », conservé dans beau-
coup de patois, sens qu’a aussi le lat. gloria,
GLAND. Lat. glandem, acc. de glans, v. glorieux. Présente en outre plusieurs
fém. It. ghianda, esp. lande (hors d'usage), acceptions d’origine chrétienne, notam-
a. pr. glan. Le fém. est encore attesté en ment, en peinture, celle d’ « auréole lumi-
a. fr. et en à. pr.; aujourd'hui subsiste neuse entourant la tête de personnages
dans beaucoup de patois, mais des formes divins », d’après le sens théologique de
nombreuses qui ont un a initial prouvent gloria, d’où « représentation du ciel ouvert
que le fém. a reculé à une date récente. avec ces personnages », de même it. esp.
— Dér. : glandée, vers 1500. gloria. — Dér. : gloriette, 1538, au sens
GLANDE. D'abord glandre, encore nor- moderne ; attesté dès le moyen âge ; dési-
mand. Lat. médical glandula, dér. de glans. gne d’abord le palais de Guillaume d’Oran-
It. ghiandola, esp. landre (refait sur lande, ge, ainsi qu’une petite chambre sur un
v. le préc.). bateau, probabl. pour marquer un certain
luxe qui régnait dans des pièces ; plus tard
GLANDULE, 1495; glanduleux, 1314. le suff. dim. prima le radical pour la signi-
Empr. du lat. glandula, glandulosus. — fication du mot, c’est pourquoi il finit par
Dér. : de glandule : glandulaire, 1611. désigner des bâtiments de petite extension.
Esp. cat. gloriela « berceau de verdure »
GLANER. D'abord glener, disparu vers vient du français.
le xvre s. Lat. de basse ép. glenäre (vie s.,
Loi Salique), mot d'origine gauloise, cf. GLORIA, café mélangé d’eau-de-vie,
anc. irlandais doglinn « il ramasse », qui 1317. Paraît être un emploi burlesque du
contient une racine *glenn-. Seulement lat. gloria, premier mot du verset qui ter-
gallo-roman (a. pr. glenar) ; aujourd’hui mine tous les psaumes. Dans une farce
usité surtout dans les parlers septentrio- du xvi® on trouve déjà gloria filia (pour
naux où glener est aussi fréquent que filio, d’après gloria patri) par rapport à
glaner. — Dér. : glanage, 1596; glane, une excellente boisson.
xXir1° ; glaneur, id. ; glanure, xvie (Calvin). GLORIEUX, vers 1080 (Roland). Empr.
GLAPIR, vers 1200. Altération, d’après du lat. gloriosus. À eu aussi au xvrie et
japper, de l’anc. verbe glatir, lat. glaitire, au xvitie s., d’après le lat., un sens péjor.
verbe onomatopéique, qui se disait spécial. conservé dans beaucoup de parlers.
du cri des jeunes chiens, d’où it. ghiattire, GLORIFIER, xre; glorification, x1ve.
esp. latir, a. pr. glatir. On trouve aussi la Empr. du lat. eccl. glorificare, glorificatio ;
variante clatir, 1690, hors d'usage aujour- employés de bonne heure dans un sens
d’hui. — Dér. : glapissement, 1538. général, mais encore aujourd’hui surtout
GLAS. S’est spécialisé au sens moderne dans la langue religieuse.
depuis le xvres. ; a désigné d’abord diverses GLORIOLE, 1757 (abbé de Saint-
sortes de sonneries. Lat. de basse ép. *clas- Pierre : « Nous avons besoin de citoyens.
sum, lat. class. classicum « sonnerie de qui méprisent les distinctions de vanité ou
trompette » ; la forme glas (en a. fr. aussi les glorioles » ; cf. « L'abbé de Saint-Pierre
clas) s'explique par l'assimilation du c- est l’auteur d’une expression qui com-
initial à la consonne sonore suivante, mence à prendre faveur ; c’est le mot de
v. glaire. Cf. a. pr. clas, it. chiasso « tu- gloriole ») (d'Alembert). Empr. du dim.
multe ». lat. gloriola.
297 GODAILLER

GLOSE, xr1°. Empr. du lat. de basse ép. GNAF (écrit aussi gniaf), 1808. Autre
glosa « mot rare, qui a besoin d’être expli- forme du lyonnais gnafre « cordonnier en
qué, interprétation de ce mot », autre vieux », d’origine obscure, peut-être expres-
forme de glossa (du grec glôssa, propr. sive.
« langue, langage », d’où « idiotisme » et GNANGNAN (écrit aussi gniangnian),
le sens du lat. glosa). — Dér. : gloser, x11° ; 1859, au sens moderne ; en 1825, dans une
gloseur, 1636, aussi du xI1I° au XIVe Ss. lettre de Talma, en parlant de mauvais
GLOSSAIRE, 1678, d’abord glosaire, rôles. Onomatopée, exprimant la moquerie
xvie. Empr. du lat. glossarium ; on trouve à l'égard d’une personne qui se plaint, etc.,
à côté glosarium, d’où la forme du xvies. cf. dans Le Mariage de Figaro, II, 4, la
syllabe gnian répétée sept fois.
GLOSSATEUR, 1426, sous la forme glo-
sateur. Dér. sav. du lat. glossa, v. glose. GNEISS, 1779 (De Saussure). Empr. de
l’all. Gneiss.
GLOSS(O)-. Premier élément de mots
sav., tels que glossotomie, 1753, tiré du GNOGNOTTE, 1346. Mot expressif du
grec glôssa « langue ». langage enfantin, exprimant le dédain.
GLOTTE, 1618. Empr. du grec attique GNÔLE, v. hièble.
glôtta « langue » pour un sens spécial,. GNOME, 1583. Empr. du lat. moderne
d’après épiglotte, 1314, empr. du lat. epi- gnomus, mot créé par Paracelse, alchimiste
glottis (du grec epiglôttis, littéral. « qui est fameux du xvi® s., peut-être sur le grec
sur la langue »). gnômé « intelligence », les gnomes, en tant
que génies présidant à la terre, ayant pu
GLOUGLOU, 1619. Onomatopée, cf. le être considérés comme des puissances intel-
lat. de basse ép. glutglut. ligentes, peut-être représente un grec *geno-
GLOUSSER. Le lat. glocire, de forma- mos « qui habite la terre », qui aurait été
tion onomatopéique (cf. all. klucke « poule créé par Paracelse d’après {halassénomos
couveuse ») est devenu, à basse ép., clo- « qui habite la mer ».
ciare, d’où le verbe fr., auquel l’évolution GNOCCHI, 1907. Empr. de l’it. gnocchi
phonétique a fait perdre la valeur onoma- « esp. de pâte en forme de petite boule »,
topéique. Celle-ci a été rétablie dans la autrefois « pain granulé », d’étymologie
plupart des parlers pop., par la création incertaine.
de formes comme cloquer, croquer, etc. —
Dér. : gloussement, xve. GNOMON, 1547. Empr. du lat. gnomon
(du grec gnômôn).
GLOUTERON, v. grateron.
GNON, v. oignon.
GLOUTON. Lat. de basse ép. glutiônem,
acc. de gluilo, dér. de gluitus « gosier », GNOSE, xviie (Bossuet) ; gnostique, fin
également de basse ép., de la famille du xvie. Empr. du grec eccl. gnôsis (propr.
verbe glutlire « avaler », v. engloutir. La. « connaissance » en grec class.), gnôstikos.
fr. a eu en outre une forme de cas sujet — Dér. du deuxième : gnosticisme, 1838.
glouz, conservée sous la forme glout, comme GNOU, xvrrie, Buffon, qui donne l’éty-
archaïsme marotique, jusqu’au xvrre s. It. mologie : « Un quadrupède que les Hot-
ghiotto et ghiotione, a. pr. gloton. — Dér. : tentots appellent gnou. »
gloutonnerie, xii1° (glouionnie est plus
usité jusqu’au xvriIe 8.). GO, v. gober.
GOBELET, xrr1e. Dér. de l’a. pr. gobel,
GLU. Lat. glülem, acc. de glüs, variante
1310. Tiès probabl. dér. du gallo-roman
de basse ép. du lat. class. gluten. Port. *gob « bec, bouche », qui représente le gau-
grude « colle », esp. engrudar « coller ». — lois *gobbo-, id. (à supposer d’après l’irl.
Dér. : gluant, xr11°, part. prés. d’un anc. gob, id.), cf. gober ; cf. a. fr. bec d’asne
verbe gluer, xu°; gluau, 1375; dégluer, « pot à eau ». — Dér. : gobeloter, 1680,
1213 ; engluer, xr1°.
dér. d’un subst. gobelot (pour gobelet), at-
GLUCOSE, 1853, a éliminé une forme testé dans les patois.
glycose, formé vers la même époque. Dér.
GOBELIN, v. kobold.
sav. du grec glykys « doux ».
GOBER, 1549, déjà soi gober «se vanter »,
GLUME, 1802, une première fois en au x s. Dér. d’un gallo-roman *gob, v.
1584. Empr. du lat. gluma « balle des gobelet, tout comme le subst. vieilli gobet
graines ». « bouchée », xrr1°, encore dans les parlers
GLUTEN, xvi® (Paré). Empr. du lat. pop. — Dér. et Comp. : go (tout de), 1579
gluten « colle, glu » pour des acceptions (alors tout de gob) ; gobeur, 1554 ; dégobil-
techn. ler, 1611, cf. de même dégober en angevin,
gobe-mouches, 1548.
GLYCÉRINE, 1836. Dér. sav. du grec
glykeros « doux ». GOBERGER (se), 1526 (écrit gauberger).
Dér. de gobert « facétieux », probabl. pour
GLYCINE, 1786. Dér. sav. du grec glykys *4obard, dér. de se gober « se vanter », v.
« doux »; dit ainsi à cause de l’élément ce mot. Le verbe a été formé comme a. fr.
visqueux que cette plante contient. hauberger de haubert.
GLYPTIQUE, 1796. Empr. du grec glyp- GODAILLER, 1752. Dér. de goudaille
tikos « relatif à la gravure ». « mauvaise bière », qu’on a tiré de godale,
GNACARE, v. nacre. id., en substituant à la terminaison -ale le
GODAILLER 298

suff. péjor. -aille. Le subst. godale, xrrr°$., facile à exploiter dans la comédie Robert
encore dans certains patois, est empr. du Macaire (par Saint-Amand, Antier et Fréd.
moyen néerl. goedale « bonne bière ». Plus Lemaître).
tard on aura certainement vu dans godail-
ler un dér. de godet. — Dér. : godailleur, GOGUE, xrr1e. Issu d’un radical onoma-
1831. Cf. ale. topéique gog-, qui correspond, pour la
partie consonantique, à gag-, V. gaga;
GODAN(T), fin xvrie (Saint-Simon). V. pour la partie vocalique, à kok-, v. coq. —
le suiv. Dér. : goguelu, 1480 ; goguenard, 1607,
GODELUREAU, vers 1500. Appartient formé d’après le moyen fr. mentenart
à une famille très répandue dans les parlers «menteur » ; goguenarder, XVI° ; goguenar-
pop. pour désigner différents animaux do- derie, 1660, aujourd’hui plutôt goguenar-
mestiques, et à la base de laquelle il y a, dise, 1883 ; goguette, xv°, alors « joyeu-
sans doute, le cri d'appel (à l'adresse de ces seté », depuis le xvrr1€ s. seulement dans
animaux) god. Ce radical a été employé par l'expression étre en goguelle.
la suite pour désigner péjorativement des GOGUENOT, 1881. Terme d’argot mili-
personnes (p. ex. Mons godeau « personne taire au sens de « latrines », argot gogue-
niaise »). La deuxième partie de godelureau neau, 1849. Formation irrégulière et bur-
provient de galureau, comp. de galer, v. lesque qui se rattache probabl. au même
galant, et de lureau, v. luron. radical que goguenard.
GODER, 1762. Formé avec le radical de
godron. : GOINFRE, fin xvi® (d’Aubigné), dans
un passage gasconisant, en un sens in-
GODET, xir1°. Empr. du moyen néerl. connu : « Les grands seigneurs, par ému-
codde « morceau de bois de forme cylin- lation, en faisaient plus que les pauvres
drique », cf. pour le changement de signi- goinfres. » Mot dialectal, peut-être gascon,
fication l’all. Humpen « morceau de bois », d’origine obscure. — Dér. : goinfrer, vers
ensuite « hanap ». 1628.
GODICHE, 1752. Modification pop. de GOITRE, 1530. Empr. d’un parler de la
Godon, forme hypocoristique de Claude, région rhodanienne, cf. aujourd’hui la for-
que Ménage signale comme étant en usage me gouiire, tirée de goitron, attesté en
aussi bien pour les petites filles que pour a. pr. ; celui-ci est le même mot que l’a. fr.
les garçons. goitron « gorge, gosier », lat. pop. *guitu-
GODILLE, 1792 (sous la forme goudille). riônem, acc. de *gutlurio, dér. de guttur
Mot dialectal de la France septentrionale, « gorge » ; au xvI°s. a pris en fr. le sens de
d’origine inconnue. — Dér. : godiller, id. « goitre » d’après le franco-provençal, cf.
le gouetron en Savoye, Paré (Furetière a
GODILLOT, 1881. D'abord terme d’argot encore gouelron).
militaire tiré du nom d’un fournisseur de
l’armée en 1870. D’où, avec une terminai- GOITREUX, 1411, dans un texte du
son argotique, godasse, fin xIx° s. Forez. Empr. de la même région que le
préc. ; formé d’après le subst. gouitre.
GODIVEAU, 1546 (Rab.). D'abord gau-
debillaux (Rab., encore aujourd’hui en poi- GOLF, 1792 (goff, dans un récit de
tevin godebeillas), tranformé ensuite sous voyage en Écosse); devenu usuel vers
l'influence de veau. Comp. du radical god- 1839. Mot angl.
qu’on a dans godelureau et du poitevin GOLFE, xr11° (Golf de Trace, chez B. La-
beille « ventre », qui représente le lat. botu- tini).. Empr. de l'it. golfo, issu du grec
lus « boyau », cf. écrabouiller. kolpos. Ne devient usuel qu’à partir du
XVI S., v. gouffre.
GODRON, 1379 (écrit goderon). Au xrves.
on orne les bords de la vaisselle d’argent GOMÉNOL, fin xix®. « Comme c'est
de renflements, qu’on désigne, à cause de dans un domaine de Nouvelle-Calédonie
leur forme, avec un dim. en -eron de godet; appelé Gomen que j'ai commencé à distil-
au xvi®s. ce nom est étendu aux plis ronds ler cette essence. (et que) d’autre part
qu'on fait aux chemises, ete. — Dér. : dans les pays de langue anglaise on désigne
godronner, 1379. sous le nom de gum tout ce qui est résine
GOÉLAND, vers 1500 (sous la forme ou essence, l’idée m'est venue de chercher
gaellans). Empr. du bas breton gwelan, une appellation qui francise ce nom gum
cf. le gallois gwylan. et qui rappelle aussi la localité où le Gomé-
nol a été tout d’abord produit », d’après
GOÉLETTE, 1752 (sous la forme goua- une lettre du créateur de ce produit,
lette). Semble avoir été formé sur le préc., M. Prevet.
avec substitution de suffixe.
GOMME, xri°. Empr. du lat. de basse
GOÉMON, xive (sous la forme goumon). ép. gumma, autre forme de gummi(s) (du
Empr. du bas breton gwemon, cf. le gallois grec kommi, d’origine orientale), v. gutta-
gwymon et l’irl. femmuin « varech ». percha. — Dér. : gommer, xiv® ; gommeux,
GOGO (à), xv® (Charles d'Orléans). Ré- 1314, a été employé au milieu du xix®s.
duplication plaisante de gogue. au sens de « jeune homme à la mode »,
par un développement de sens incertain.
GOGO, « personnage crédule à l’excès », On en a tiré un subst. Gomme « manière
1834. Réduplication, de formation ana- du gommeux », 1875 ; dégommer, 1653; a
logue au préc. ; apparaît pour la première aussi le sens trivial de « ôter sa place à
fois comme nom d’un capitaliste crédule et quelqu'un », 1833 ; engommer, 1581.
299 GOTHIQUE

GOND. Lat. gomphus « cheville » (du GORET, 1297. Dér. de l’a. fr. gore
grec gomphos). Seulement gallo-roman, cf. « truie », mot d’origine onomatopéique,
a. pr. gofon « gond ». — Dér. : engoncer, imitant le grognement du porc, et qui
1611 (engoncé), d'après l’anc. plur. gons, existe aussi dans d’autres langues. Cf, all.
par une comparaison plaisante d’une per- gorren « grogner ».
sonne à qui son vêtement donne l’apparence
de quelqu'un qui a le cou enfoncé dans les GORGE. Lat. pop. *qurga, lat. class.
épaules avec une porte dont les pivots sont gurges « gouffre ». Usuel au sens de « bou-
enfoncés dans les gonds. che » dans la région de la Franche-Comté
GONDOLE, 1549 (Rab.), en 1382, gondre, et de la Suisse romande, avec la voyelle 0,
dans un texte de Rouen (si c’est le même cf. aussi l’a. pr. gorc « gouffre ». — Dér. :
mot). Empr. de l’it. de Venise gondola gorgée, x11° s. (Chrétien de Troyes) ; gor-
« petit bateau (employé à Venise) », qui ger, x111° s.; gorgerette, x111° s. (E. Boi-
est probabl. empr. du grec kondy « vase », leau ; désigne alors une sorte d’armure) ;
les bateaux empruntant souvent leur dési- dégorger, 1299, d’où dégor, 1789 ; dégorge-
gnation à celle de vases, cf. fr. vaisseau, et ment, 1548 ; égorger, 1539, d’où égorge-
le suff. -ola exprimant la petitesse du ment, 1538 ; égorgeur, 1793, une première
bateau en question. — Dér. : gondoler (ou fois au xvi°s. ; engorger, x11°-XI11€ s., d’où
se g.), 1845, du sens de « se bomber (en engorgement, xv°® s.; entr’égorger (s’),
parlant du bois) », déjà 1687, gondolé fin xviie s. (Saint-Simon) ; regorger, vers
« relevé tant de l’avant que de l'arrière 1360 ; rengorger (se), 1482.
(d’un bâtiment) », a pris au réfl., 1894,
celui de « rire à se tordre ». GORILLE, 1847. Empr. du lat. des natu-
ralistes gorilla, qui vient du grec gorillai,
GONDOLIER, 1532. Empr. de l’it. de êtres humains velus dont parle le Périple
Venise gondoliere. d'Hannon, voyageur carthaginoiïis, du ves.
-GONE. Deuxième élément de mots sav. avant J.-C.
comp. tels que dodécagone, 1690 ; hexa-
gone, 1534 (Rab.), etc., dont l'original grec GOSIER, x111° (alors josier). Dér., avec
est formé avec gônia « angle », v. gonio-. le suff. de gésier, du gaulois geusiae « bords
du gosier », attesté chez le médecin Mar-
GONFALON, vers 1080. Au moyen âge cellus Empiricus (ve s.). Le g- (au lieu de
on dit ordinairement gonfanon; d’où j-) provient d’une romanisation du mot
gonfalon, par dissimilation. Terme médié- gaulois par *gousiae, soit par l'influence de
val qui ne s'emploie que dans des textes gorge ou du lat. guttur. — Dér. : dégoiser,
historiques. Francique *gundfano « éten- xir1e, formé avec le radical de gosier;
dard de combat », cf. all. Fahne « drapeau ». égosiller (s’), 1671 (Molière) ; au xve et
— Dér. gonfalonier, id., vers 1080 XVI s., égosiller ; trans. au sens d’ « égor-
(Roland) ; même emploi que le simple. ger »; on trouve antér. gosiller, de même
GONFLER, 1559. Empr. des parlers du formation, au sens de « jacasser » et de
Sud-Ouest où le verbe est hérité du lat. « vomir ».
conflare « souffler, gonfler », et où beaucoup
GOSSE, 1798. Mot d’argot, d’origine
de formes ont même conservé le c- du lat.
obscure. — Dér. : gosseline, 1843.
Devenu un synonyme très usuel d’en/ler
dans les parlers populaires. — Dér. et GOTHIQUE, « qui appartient au moyen
Comp. : gonflement, 1542; dégonfler, 1558, : âge », 1482. Empr. du lat. de basse ép.
rare avant le xix® s. ; dégonflement, 1790 gothicus « relatif aux Goths », employé
(aujourd’hui se dégonfler, fam. au sens de d’abord par Lorenzo Valla, vers 1440, pour
« reculer, etc. », paraît venir de la langue désigner l'écriture en usage au moyen âge ;
des sports : « se dégonfler comme un bal- s'emploie au sens de « suranné » dès 1556.
lon, un pneu »); regonfler, 1530 (écrit Au xvie s., Vasari attribua aux Goths
rec.) ; regonflement, 1542. toute l'architecture médiévale qu’il mépri-
GONG, 1691. Empr. du malais ; jusqu’au sait au point de ne pas la juger digne de la
début du xix®s., dit par rapport aux pays désignation « style ». Mais l'adj. par lequel
d’Extrême-Orient. il la désigne est edesco ; golicus dans ce
sens se trouve pour la première fois en 1610
GONIO-. Premier élément de mots sav. dans l’œuvre latine d’un jésuite ; en franç.
comp., tels que goniomètre, 1783 (« Le la première attestation de gothique au sens
goniomètre ou mesure -angle »), tiré du architectural est de 1619. Jusque vers
grec gônia « angle ». 1820 le style gothique resta exclu par les
GONOCOQUE, 1896 (d’abord gonococcus, historiens de l’art de ce qu’on regardait
1885). Formé avec les mots grecs gonos au comme la véritable architecture, dans
sens physiologique de « semence génitale » laquelle on distinguait cinq ordres. La
êt kokkos « grain » pour désigner un microbe réaction contre cette proscription vint
qui se trouve dans les organes de la géné- d'Angleterre, dès la 1'e moitié du xvirie 8.
ration de l’homme. Elle passa en France grâce aux études des
savants normands inspirés par les auteurs
GONORRHÉE, x1ve. Empr. du lat. mé- anglais. Le premier en France à rompre
dical gonorrhoea (du grec gonorrhoia « écou- avec le dédain qu’on avait pour l’église
lement séminal »). gothique, fut Chateaubriand (1802). La
GONZESSE, 1836. Mot d’argot, devenu restriction chronologique à l’époque qui
pop., fém. de gonze, 1684, qu’on rattache commence vers 1150 a été proposée pour
à l’argot it. gonzo « lourdaud, balourd ». la 1re fois en 1824.
GOTON 300

GOTON, 1838. Hypocoristique de Mar- GOUJON, nom de poisson. Lat. gobio-


guerite, d’où on a tiré Margot, Margoton, nem, acc. de gobio.
puis Goton.
GOULASCH, 1930 (goulache dès 1907).
GOUACHE 1752. Terme techn., empr. Empr. du hongrois gulyas, le mets venant
de l’it. guazzo, propr. « endroit où il y a de la Hongrie.
de l’eau », d’où partic. dipingere a guazzo
« peindre à la détrempe », d’où, par suite,
GOULE, 1821 (Ch. Nodier). Empr. de
guazzo pour désigner la préparation elle-
l'arabe ghoûl « démon qui dévore les hom-
mes », souvent fém.
même ; considéré comme représentant dia-
lectal du lat. aquätio « action d’arroser », GOULÉE, GOULOT, v. gueule.
d’où a pu sortir le sens du mot it.
GOUM, 1853. Empr. de l’arabe algérien
GOUAILLER, 1749 (Vadé). Mot d’argot, goum, arabe class. qaum « troupe ». —
qui s’est répandu au xix° s. Mot de la Dér. : goumier, id.
famille d’engouer. — Dér. : gouaille, 1808 ; GOUPILLE, 1439. Fém. de l’a. fr. goupil
gouaillerie, 1823 ; gouailleur, 1808. « renard », cf. les nombreuses acceptions
GOUAPE, 1867 (le dér. gouapeur est at- techn. de renard. Goupil représente le lat.
testé dès 1835). Mot d’argot, empr. de l'esp. de basse ép. vulpiculus, issu par change-
guapo «brave » et pop. «galant, amoureux », ment de suff. du lat. class. vulpécula, dim.
lequel a été lui-même emprunté, à l’époque de vulpes « renard ». à
des guerres des Flandres, du pic. wape GOUPILLON, 1611, guipellon au xr1es.,
« insipide ; affaibli (d’une personne) »; wispeilon au xire. Élargissement, sous
celui-ci représente le lat. vappa « vin gâté ; l'influence d'’écouvillon, de l’a. fr. guipon,
vaurien ». id. Le breton guispon « pinceau », qui est
GOUDRON, xvi® (v. les dér.), d’abord empr. du fr., montre que l’s que contien-
catram, xIt1° ; gotran, 1381. Cairam, dont nent certaines formes, est étymologique et
les autres formes sont des altérations, est a été prononcée. Empr. du moyen néerl.
empr. de l'arabe d'Égypte qatran (arabe wisp « bouchon de paille ».
class. qätirän), probabl. par l’intermédiaire GOURBI, 1841. Empr. de l'arabe algé-
de l’it. catrame ; d’une autre forme arabe rien gourbi, probabl. d’origine berbère.
alqiträn (cf. l'arabe de Syrie gitran) vient
alquitran de l’esp. et de l’a. pr., d’où le GOURD. Lat. de basse ép. gurdus «lour-
prov. moderne quitran; goudron est la daud, grossier » qui a pris en gallo-roman
forme des ports de l'Atlantique, mais l’ori- le sens d’ «engourdi par le froid », de même
gine de l’ou (au lieu de l’a) n’est pas claire. a. pr. gort; a pris d'autre part le sens de
— Dér. : gouäronner, 1457 (sous la forme « gros, bien nourri », qui est attesté en
goutrenner) ; goudronnage, 1792 ; goudron- a. pr. et qui est celui de l’esp. et du port.
neur, 1532 (Rab. guoildronneurs). gordo. Gourd apparaît au xv® et au xvres.
au sens d’ « homme galant, de manières
GOUET, v. gouge. distinguées », par un développement dont
les conditions sont obscures. — Dér. : dé-
GOUFFRE, vers 1170. Grec kolpos « gol- gourdir, x11°, d'où dégourdissement, 1642 ;
fe ; vallée encaissée » a passé en lat. (col-
engourdir, xIII1°; engourdissement, 1539.
pus) uniquement avec le premier de ces
sens. Mais le gallo-roman possède aussi la GOURDE, v. courge.
deuxième acception, transmise probabl.
directement des Grecs de la côte méditer- GOURDIN, xvre. Signifiait d’abord «cor-
ranéenne. Par hypercorrection l’on a rendu de servant notamment à châtier »; sens
le -p- du mot grec par -ph-, c’est-à-dire -f-. moderne, 1622. Empr. de l’it. cordino « pe-
Jusqu'au xvii® s. parfois « golfe »; au tite corde » (de corda), devenu gourdin
XVIe s. l’empr. de l’it. golfo fournit au fr. d’après gourd.
le moyen de distinguer les deux notions. GOURER, vers 1500, dans un texte
— Dér. : engouffrer, vers 1500, on a d’abord argotique (le part. passé gorré déjà au
la forme verbale engoufler au x1r° 5. XI11° $s.). Probabl. dér. du même radical
GOUGE. sorte d'outil. Lat. de basse que goret.
ép. gubia « sorte de burin ». A. pr. goja, GOURGANDINE, 1640. Mot d'origine
esp. gubia. Un mot dialectal, surtout du dialectale, encore vivace dans le Centre et
Centre, admis dans les dictionnaires sous le Midi; probablement comp. du radical
la forme gouet « serpe », a. fr. goi « id. » de gourer et de celui de l’anc. fr. et anc.
représente un masc. *qubius. — Dér. : pr. gandir, V. gandin, comp. dauph. gan-
goujon, xr1°-xr11° s., « petite gouge ». dina « guenipe » dès le xvrre s.
GOUGE, « femme de mauv. vie », v. GOURGOURAN, v. grog.
goujat.
GOURMADE, v. gourme.
GOUGELHOF, 1907. Empr. de l’alé-
manique (d'Alsace et de Suisse) gugelhupf. GOURMAND, 1354. En raison de la
forme et du sens anciens de gourmet,
GOUJAT, xve. Empr. du prov. goujat, il est difficile de considérer gourmand com-
propr. « garçon » (encore languedocien), me étant de la même famille. Même diffi-
dér. de goujo « servante, fille » (d’où le fr. culté de sens pour un rapprochement avec
arch. gouge, xve, de l’hébreu goja « chré- gourme(r). — Dér. : gourmandise, vers
tienne ; servante chrétienne »). — Dér. : 1400, en outre gourmandie, -erie, du xtve
goujaterie, 1880 (Goncourt), déjà en 1611. au XVI°S.
301 GRADUER

GOURMANDER,-xive, au sens de « se sonne à qui est confiée l’éducation d’un en-


livrer à la gourmandise », disparu depuis fant », date de 1534 (Rab.); gouverne, 1292;
le xvrres. ; a pris par suite le sens de «con- gouvernement, x11°; gouvernemental, 1801 ;
sommer ses biens » au XVI® S. ; en ces sens gouverneur, vers 1050, au sens de « gou-
paraît dér. de gourmand. Depuis la fin verneur de province, de ville », 1290, a
du x1ve s. apparaît le sens « dominer, éliminé gouvernant, tout en gardant pour
mener qu’à sa guise », depuis le commen- fém. gouvernante ; ingouvernable, 1760.
cement du xvri®s. celui de « réprimander ».
C’est un emploi figuré du sens « manger GOYAVE, 1601. Empr. de l’esp. guyaba,
goulûment », comme l’all. einen fast qui vient lui-même du parler des Arouaks.
auffressen prend le sens de « réprimander GRABAT, xrie, rare jusqu’au xvi® s.
avec dureté ». Empr. du lat. grabatus (du grec krabaïtos).
GOURME. Francique *worm, cf. anc. — Dér. : grabataire, 1721.
angl. worms « pus ». À. pr. vorm. — Dér. :
gourmer, vers 1320, au sens de « mettre GRABUGE, 1532, en outre gaburge,
la gourmette à un cheval », par comparai- 1526, et garbuge, xvI°. Issu par change-
son de la gêne causée par la gourmette ment de suff., peut-être d’après l’a. fr.
avec celle que cause la gourme, d’où gour- deluge « massacre », de grabouil, garbouil,
made, 1599, d’après le sens de « frapper à xvi®, dér. de garbouiller « faire du tu-
coups de poing » qu’à aussi gourmer ; gour- multe », xvi®, probabl. empr. du moyen
mette, 1442, d’abord gourme, vers 1320. néerl. crabbelen « égratigner, griffonner »;
l’it. garbuglio, attesté à la même ép.
GOURMET, 1352 (grommes, d'où gour- peut venir du fr.
met, Xv°). Signifiait d’abord « valet (sur-
tout de marchand de vin) », jusqu’au GRACE, xi°. Jusqu'au xvrie s. signifie
XVI s., Cf. a. gasc. gormei « aide-matelot ». « faveur, pardon, remerciement »; le der-
Empr. de l’anc. angl. grom « garçon, valet » nier de ces sens est aujourd’hui vieilli.
(attesté dès 1225). A subi dans le dévelop- Empr. du lat. gratia ; les sens fondamen-
pement de son sens l'influence de gourmand. taux du fr. sont déjà lat., y compris le
sens théologique. Le sens d’ « agrément
GOUSSE, vers 1200. L’it. guscio ne peut résidant dans les personnes ou les choses »,
guère être empr. au fr. Origine inconnue. — a été repris au lat. plus tard que les autres.
Dér. : gousset, 1278 ; propr. « pièce d’ar- — Dér. : gracier, 1336, au sens moderne,
mure, en forme de croissant, placée sous du x1® au xvie s. « remercier », d’où gra-
l’aisselle », attesté depuis 1302, d’où ciable, 1311.
« creux de l’aisselle », sens du premier
texte, encore usuel au xvitie s., d’où, à GRACIEUX, xr1e. Empr. du lat. gralio-
partir du xvii® s. au moins, « petite sus qui a eu le sens d’ « aimable » à basse
bourse qu’on plaçait sous l’aisselle, puis ép. ; en lat. class. signifie « qui est en cré-
au dedans de la ceinture de la culotte », dit ». Développement du sens d’après
d’où le sens moderne de « poche de gilet ». grâce. — Dér. et Comp. : gracieuseté, 1462 ;
malgracieux, 1382.
GOÛT. Lat. gustus. — Dér. et Comp. :
arrière-goût, 1764 ; avant-goût, 1610 ; dé- GRACILE, 1874; gracilité, 1488. Empr.
goûter, 1538 ; dégoût, xvi° (Paré, concur- du lat. gracilis, gracilitas ; v. grêle.
rencé jusqu’au xvI1° s. par dégoütement) ;
dégoûtant, 1642; dégoûtation, 1861 ; ra- GRADATION, xve. Empr. du lat. de
goûter, xive (Froissart) ; ragoût, 1642 ; ra- la rhétorique gradalio (de gradus).
goûtant, 1676 (Sévigné). GRADE, 1721, au sens moderne. Antér.
GOÛTER. Lat. gusiäre. It. gustare, esp. « degré de dignité », 1578. Empr. du lat.
gustar. Au sens de « collationner », déjà gradus. — Dér. : gradé, 1796, s'emploie
latin classique ; cependant peu répandu surtout en parlant des grades inférieurs de
dans les patois. l’armée, cf. toutefois haut gradé pour un
officier supérieur.
GOUTTE. Lat. guila. Le sens de « mala-
die des articulations » (en lat. class. podagra GRADIN, 1648. Empr. de l’it. gradino,
« goutte des pieds ») vient de ce qu’on dim. de grado, au sens de « degré d’es-
attribuait cette affection à des gouttes calier ».
d’une humeur viciée. — Dér. : gouttelette, GRADUEL, adj., xive. Empr. du lat.
xirIe; gouttière, XII; goutteux, xII°; médiéval gradualis, v. le suiv. Graduel,
goutter, xive (ne représente pas le lat. terme de liturgie catholique, vient du
guitare) ; dégoutter, x11°; égoutter, xIII°; même mot du lat. médiéval gradualis, dit
égout, id.; égoutier, 1842 ; égouttement, d’abord de la portion de l'office entre
1330 ; égouttoir, 1564. l'épître et la prose, qui se disait sur les
GOUVERNAIL. Lat. gubernäculum qui degrés du jubé ou de l’ambon, d’où le sens
ne désignait qu’un fort aviron à large de « livre contenant ce qui se chante au
pelle; le type du gouvernail moderne n’a lutrin »; en ce sens a donné en a. fr. une
été inventé qu’au moyen âge. Aussi catalan forme plus francisée grael.
governall. GRADUER, 1404. Empr. du lat. scolas-
GOUVERNER. Lat. gubernäre, égale- tique graduare, dér. de gradus. Gradué
ment usité au sens fig. (du grec kybernân). désigne spécial., et depuis 1404, «celui qui
It. governare, esp. gobernar. — Dér. : gou- a obtenu un grade universitaire ». — Dér. :
vernant, 1437 ; le fém., au sens de « per- graduation, xive, rare avant le xvirIe s.
GRAFITTE 302

GRAFITTE, 1878, d’abord graffito, 1866. grammalica en gra(mi)maire est demi-


Empr. de l'it. graffilo, dér. de graffio savant. V. grimoire. — Dér. du premier :
« stylet », lat. graphium, id., v. greffe. grammairien, XIII°.
GRAILLEMENT, 1671, du xive au GRAMME. Loi du 3 avril 1793, au sens
XVII® S. « croassement ». Dér. de l’anc. moderne ; en 1790, comme terme d’anti-
verbe grailler, propr. « crier comme une quité. Empr., comme mètre, du grec gram-
corneille », xrr1*, d’où « faire entendre un ma d’après son sens de « scrupule, vingt-
cri rauque », dér. lui-même de graille « cor- quatrième partie de l’once » (ce sens est
neille » ; ce mot dialectal, usité aujourd’hui dû à une traduction maladroite du lat.
surtout dans les parlers méridionaux (a. scripulum, autre forme de scrupulum, con-
pr. gralha), continue le lat. gräcula (ef. it. sidérée fautivement comme dér. de scribere
gracchia, esp. graja). Grailler, terme de « écrire », et, par suite, comme correspon-
vénerie « sonner du cor pour rappeler les dante au grec gramma, propr. « lettre »). —
chiens », déjà chez Nicot, 1606, est un Comp. : centigramme, 1795, et les autres
autre mot; il est dér. de l’a. fr. graile noms du système métrique.
« esp. de trompette », qui représente le lat.
gracilis « mince », par suite du genre de GRAMO-,-GRAMME. Premier et deuxiè-
son qu’émet cette trompette, a été con- me éléments de mots sav. comp., tels que
fondu avec le grailler préc. gramophone, xx°e s.; télégramme, 1859,
liré du grec gramma, au sens de « lettre ».
GRAILLON, « odeur de graisse ou de
chair brûlée », 1762, auparavant (1642) GRAND. Lat. grandis, qui a éliminé dans
« restes d’un repas ». Les variantes phoné- la plus grande partie du roman le lat.
tiques de ce mot (berr. grillons, etc.) mon- class. magnus, de sens plus moral, « puis-
trent qu’il s’agit d’un dér. du verbe griller sant, important, grand (en parlant de
(norm. grailler), dér. de l’a. fr. grille « gril », l’âme), etc. ». — Dér. et Comp. : grandelet,
v. gril. Le sens de « mucosité » qu’a grail- 1393; grandeur, xr1°; grandir, XIIIe ;
lon, 1823, est dû à la ressemblance des mu- agrandir, xr11° (J. de Meung) ; agrandisse-
cosités avec les restes d’un repas jetés ment, 1502; ragrandir, 1549. À servi à
pêle-mêle. — Dér. : graillonner « éxpecto- faire des comp. désignant des degrés de
rer », 1823, « prendre une odeur de grail- parenté : grand-père, grand’mère, grands-
lon », 1866. parents, depuis le xri° s. et qui ont rem-
placé peu à peu aïeul, aïeule, aïeux, ensuite
GRAIN. Lat. gränum. Au sens de « bour- grand-oncle, grand(e)-tante, xvi°: dans
rasque », 1552 (Rab.), il n’est pas sûr que ces comp. grand est employé dans l’accep-
ce soit un emploi fig. de grain qui aurait tion de « âgé », qu’il avait déjà en lat.
été dit ainsi à cause des grains de grêle, (grandis natu). En outre nombreux comp.
fréquents dans ces sortes d’orages, cf. ce- avec grand comme premier élément.
pendant grenasse, 1803, « petit orage ».
GRANDESSE, 1665. Empr. de l'esp.
GRAINE. Lat. gräna, plur. neutre pris grandeza.
comme fém. de granum. It. esp. a. pr.
grana, qui paraissent moins spécialisés que GRANDILOQUENT, 1891 (en 1540 gran-
le fr. au sens de « semences ». Par contre, diloque). Empr. du lat. grandiloquus,
le sens de « cochenille », d’où « écarlate », avec transformation d’après éloquent.
fréquent en fr. jusqu'au xvirr° s., est encore
usuel en it. et en esp. — Dér. de grain ou GRANDIOSE, 1798. Empr. de l’it. gran-
de graine : grener, xn1° ; grenaille, 1354 ; dioso. On trouve grandiosité dès 1787 d’a-
grènetier, « marchand de grains », 1572, près l’it. grandiosita.
d’où grèneterie, 1660 ; formé sur le modèle
de l’a. fr. grenelier, xur°, «officier, juge au GRANDISSIME, vers 1300. Empr. de
grenier à sel », qui paraît formé directe- lit. grandissimo.
ment sur grenier; grenu, xIr1°; égrener, GRANGE. Lat. pop. *graänica, dér. de
XI1° S. ; engrener, 1195, depuis 1660 s’em- gränum. Seulement gallo-roman. — Dér. :
ploie en un sens techn., en parlant d’une engranger, 1307.
roue dentée qui, en entrant dans une
autre, la fait mouvoir ; d’où engrènement, GRANI-. Premier élément de mots sav.
1730 ; engrenage, 1709. comp., tels que granivore, 1751, tiré du
GRAISSE. Lat. pop. lat. granum « grain ».
“*crassia, subst.
abstrait de crassus, v. gras. It. grascia, GRANIT, 1665. Empr. de l’it. granito,
esp. grasa (refait Sur l’adj.), a. pr. graissa. propr. adj. signifiant « grenu ». — Dér. :
— Dér. : graisser, vers 1500 (dér. de graisse granitique, xvir1e (Buffon).
sur le modèle d’engraisser) ; graissage,
1460 ; graisseux, 1532 (Rab.). V. engraisser. GRANULE, 1845 ; granuler, 1611 ; gra-
nuleux, xvie (Paré). Le premier est empr.
GRAMEN, 1372; graminée, 1732. Le du lat. granulum « petit grain », les deux
premier est empr. du lat. gramen, le deuxiè- autres en sont des dér. sav. — Dér. du
me est un dér. sav. du lat. gramineus. verbe : granulation, 1676.
GRAMMAIRE, x11° ; grammatical, xve. GRAPE-FRUIT, 1930. Empr. de l’an-
Empr. du lat. grammatica (du grec gram- glais d'Amérique grape-fruit, comp. de
maltké, propr. « art de lire et d’écrire les grape « grappe » et fruit « fruit » Rem-
lettres », d’où « grammaire »), grammaticalis place de plus en plus l’ancien pample-
(créé à basse ép.). Le développement de mousse.
303 GREDIN

-GRAPHE, -GRAPHIE. Deuxièmes élé- GRATTER. Germanique *krallôn, cf.


ments de mots sav. comp., formés sur le all. kralzen ; de là aussi it. grallare, a. pr.
modèle de mots grecs terminés par -gra- gratar. — Dér. et Comp. : gratte, 1859, au
phos, -graphia (de graphein « écrire »). sens pop., antér. créé, 1786, comme terme
GRAPHIE, 1762 ; graphite, 1799 ; gra- techn., « rossée », 1733 ; « gale », 1549;
phique, 1762. Les deux premiers sont dér. grattelle, xrrie; grattoir, 1611; gratin,
du verbe grec graphein, le troisième est 1564, gratiner, 1829; égratigner, xxrre,
empr. du grec graphikos « qui concerne d’abord esgraliner, xir1e (Chrétien), par
l’art d'écrire ou de dessiner ». l'intermédiaire de l’a. fr. graliner, xtre,
«gratter, égratigner » (gratigner au xvies.),
GRAPHO-. Premier élément de mots d’où égratignure, xr11°; regratter, XIII°;
sav. comp., tels que graphologie (créé en regrat, 1219; regrattier, 1180 ; gratte-ciel,
1868 par l'abbé Michon), tiré du verbe fin xixe, traduction de l’anglo-américain
grec graphein. sky-scraper ; gratte-cul, 1530, très usuel
GRAPPE. Germ. *krdppa « crochet », dans les parlers gallo-romans ; gratté-
cf. all. Xrapfen. Appliqué dès les premiers papier, 1578. à:
textes à la grappe de raisin à cause de la GRATUIT, 1496 ; gratuité, 1477. Empr.
forme de celle-ci. Le sens propre de « cro- du lat. class. gratuitus (de gratis) et du dér.
chet » a eu peu de vitalité en fr., cf. toute- gratuitas.
fois l’a. fr. agraper « accrocher », xxtI°,
encore usité au xvi® s. et le mot suiv.; GRAVATS, v. grève.
cf. aussi esp. a. pr. grapa, it. grappa « Cro- GRAVE, xve. Empr. du lat. gravis, a
chet ». — Dér. : grappiller, 1549 ; grappil- éliminé l’adj. grief, qui s’est maintenu jus-
lage, 1537, rare avant le xviries. ; grappil- qu'au xvr1°s., v. grièvement. A été employé
leur, 1611; grappillon, 1584; égrapper, au sens de « pesant » dans la langue de la
1732. physique au xviIrIe $8., v. gravité.
GRAPPIN, 1376. Dér. de grappe, dans GRAVER, xr1e, au sens de « tracer une
l’anc. sens de « crochet ». : raie dans les cheveux » (d’où grève « raie

GRAS. Lat. crassus, propr. « épais ». dans les cheveux », qui a été remplacé par
doit peut-être son g initial à grossus «gros » raie à la fin du xvri1e s.) ; le sens moderne
It. grasso, esp. graso ; seuls le picard et le n’est attesté pour la première fois que dans
wallon ont conservé le X initial du mot le dér. graveur, au xive s. Francique *gra-
lat. — Dér. : grasset, x11° ; grasseyer, 1530 ; ban, all. graben « creuser, graver » —
grassouillet, 1680. — Comp. : gras-double, Dér. : gravure, 1538, au sens moderne, au
1611, où double, pris substantiv., signifie xXI1° s. au sens de « rainure d’arbalète ».
« panse » ; gras-fondu, 1664, terme de vété- GRAVIER, v. grève.
rinaire, d’où gras-fondure, id., cf. aussi se
graisse-fondre, 1611. GRAVIR, 1213. Du francique *krawjan
« s’aider de ses griffes », dér. du subst.
GRATERON, 1314. Aujourd'hui usité *krawa « griffe », qui vit en anc. fr. sous
surtout dans les parlers de l’Ouest. Altéra- la forme groe.
tion, d’après gratter, de gleteron, dér. de
l’a. fr. glelon, encore usité dans la ré- GRAVITER, 1734 (Voltaire); gravita-
gion rhodanienne, antér. cleton ; francique tion, 1722. Empr. des mots lat. gravitare,
*kletto, cf. all. Klette « bardane », cf. de gravilalio, créés par Newton (1642-1727),
même berrichon gralon; aussi glouteron, : d’après le lat. class. gravitas « pesanteur »
xve, altération d'après glouton (on trouve (angl. gravilation, to gravilate).
même glouton dans la région parisienne). GRAVITÉ, vers 1200, au sens moral.
GRATIFIER, 1366; gratification, 1362° Empr. du lat. gravilas ; a éliminé griélé,
Empr. du lat. gratificari « avoir de la com- grievelé. Au sens physique de « pesanteur »,
plaisance pour », sens que paraît avoir le 1626, v. grave.
verbe fr. au xvie s., et du dér. gratificatio GRAVOIS, v. grève.
« bienveillance, faveur » ; dès les premiers GRÉ. Dès le moyen âge, s’est restreint
textes, le fr. a donné à gralification le sens à des locutions fixées. Lat. grälum, neutre
qu’il a aujourd’hui, et c’est de ce sens que pris substantiv. de l’adj. grälus au sens
vient le sens moderne du verbe. de « ce qui est agréable ». It. gralo, esp.
GRATIOLE, 1572. Empr. du lat. de grado. — Dér. et Comp. : agréer, 1138;
basse ép. gratiola, dim. de gratia « grâce » ; agréable, xr1°; désagréable, xi11° ; agré-
cette plante a été ainsi nommée pour la ment, 1465 ; agrémenter, 1801 ; désagré-
même raison qui l’a fait nommer au moyen ment, 1642; malgré, xve, réfection de
âge gratia dei, en a. fr. grâce dieu, en fr. maugré, xI1°, encore usité au xvie s., d'où
mod. herbe à pauvre homme, parce qu’elle maugréer, 1279, réfection qui a servi à
était utilisée par les pauvres gens pour ses mieux marquer l'opposition avec bon gré.
propriétés légèrement purgatives. GRÈBE, 1557, P. Belon qui dit : « En
GRATIS, 1496 ; à eu le sens de « grati- Savoye elle est nommée grebe ou griaibe » ;
fication », fin xve. Empr. de l’adv. lat. ce mot est d’origine inconnue.
gratis (contraction de graliis, ablatif plur. GREDIN, 1642, au sens de « gueux ».
de gratia, propr. « par complaisance »). Empr. du moyen néerl. gredich « avide »,
GRATITUDE, 1445. Refait sur ingrali- avec transformation de la fin de mot en
tude (le lat. de basse ép. gratitudo n’est at- un suff. fr. Le fr. gredin signifie d’abord
testé que dans un texte inconnu au xv® 8.). « mendiant ». — Dér. : gredinerie, 1690.
GRÉER 304

GRÉER, v. agrès. lotter, fin xvie (d’Aubigné), d’après la


GREFFE « pousse d'arbre », masc. jus- locution trembler le grelot « trembler de
qu’au xvi® s. Emploi métaphorique de froid, de peur », 1585 (aussi grilloter «faire
l’a. fr. grefe (souvent grafe d’après le lat. un bruit de grelots », xvi°). La locution
ou l’anc. verbe grafigner) « poinçon », sur- altacher le grelot vient de la fable de La
tout « poinçon à écrire », d’où aussi « petit Fontaine, Conseil lenu par les rats, II, 2.
poignard », lat. graphium « poinçon à GRELUCHON, 1725. Dér. du fr. grelu
écrire » (du grec grapheion, v. graffite). — « misérable, gueux » (XVIr1-xXIX® s.), avec
Dér. : greffer, 1530 (sous la forme graffez), l'allongement du suff. qu’on trouve dans
v. enter, d’où greffe « action de greffer », saint Grelichon « saint imaginaire auquel
1690; greffoir, 1700 ; greffon, 1866 (déjà les femmes s’adressaient pour se guérir de
graphon au xvI® s.). la stérilité », xvi°; grelu est dér. de l’adij.
GREFFIER, 1378. Empr. du lat. mé- grêle.
‘diéval graphiarius, dér. de graphium, v. GRÉMIL, v. mil.
greffe. — Dér. : greffe « lieu où l’on dépose
les minutes des actes d’un tribunal, etc. », GRENADE, x1I° (pume grenaie, d’où
1320. pume grenade, … grenelte, au moyen âge;
grenade, sans pomme, xV°). Par métaphore,
GRÉGAIRE, 1829. Empr. du lat. gre- au sens de « projectile », 1520. Empr. des
garius « Ce qui concerne un troupeau ». dialectes de l’Italie supér. (milanais pom
Paraît avoir été appliqué à des êtres granat), du lat. granatum (de granum
humains pour la 1re fois par R. Poincaré « grain »), « id. », propr. « fruit à grains ».
(1909). — Dér. : grenadier, 1° arbre, 1425, d’abord
GRÈGE, 1679. Empr. de l'it. (sea) grenat où pommier grenat ; 2° « soldat lan-
greggia, propr. « brut », d’origine inconnue. çant la grenade », 1667 ; « soldat d'élite »,
GRÉGEOIS. Dans l'expression feu gré- 1803 ; grenadine, 1° « soie torse, grenue »,
geois. Altération, qui date du xriI° s., de 1829, antér. grenade, 1723 ; 2° « jus de
grezois « grec », cf. de même a. pr. grezesc, grenade, servant à faire du sirop », 1866.
qui représente un adj. *graeciscus, dér. de GRENAT, xri° (alors adj., jagonce gre-
graecus, avec le suff -isk. Employé dès le nat ; subst., xiv°). Au moyen âge dit sur-
XIIe s. pour désigner le feu grégeois. C'était tout de pierres précieuses, d’où nom de
un mélange de soufre, de poix, etc., dont couleur en général, vers le xvi® s., qui se
les Byzantins se servaient, surtout dans prend aujourd’hui adjectiv. Tiré de l’a. fr.
les combats navals, et que les Occidentaux grenate qui était adj. dans pume grenate,
rencontrèrent pour la première fois lors de v. grenade.
la troisième croisade.
GRENIER. Lat. gränärium, dér. de gra-
GRÈGUE, xvic. Empr. du prov. mod. num « grain ». It. granaio, esp. granero.
grègou, -a « grec », cette culotte ample GRENOUILLE, 1215. Altération d’un
étant appelée à tort ou à raison, d’après
les Grecs. La mode des grègues disparut
plus anc. re{i)no(u)ille, lat. pop. *ranu-
cula, d’où aussi it. ranocchia, avec un g
au xvi1® s. Cf. l’esp. gregüescos « sorte de
culotte large », à la mode au xvi® et au dû probabl. à l'influence de quelques mots
XVIIe s., dér. de griego « grec » ; on a d’au- imitant le cri de certains animaux, comme
tres formes empr. de l'esp. au xvi® s. gracula « choucas » (d’où le fr. graille);
(chausses à la) gregesque, gargesque, gar- cette forme doit son succès à sa valeur plus
guesque.
expressive, cf. de même a. pr. grano-
lha, antérieur d'environ cinquante ans
GRÊLE, adj. Lat. gracilis. à grenouille, et des formes analogues dans
GRÉLER, xr1e. Seulement fr. ; a éliminé les dialectes it. Renouille ne survit auj. que
les mots du lat. class. grandô « grêle », gran- dans des parlers de l'Est. Le simple rana,
dinäre « grêler ». Anc. francique *grisilôn,qui d’où it. esp. a pr. rana, a. fr. raine, sorti de
est attesté en moyen néerl. sous la forme la langue depuis le xvre s., est aujourd’hui
grîselen. — Dér. grêle, 1119 ; grêlon, xvie. confiné dans quelques parlers du wallon, du
picard, du Sud des Vosges, de la Suisse
GRELOT. Le germanique occidental a romande et de la région rhodanienne; cf.
un groupe de mots avec alternance voca- rainette. — Dér. : grenouillère, 1534 (Rab.).
lique faisant paraître les sons qu’on veut
rendre dans leur variété : moyen haut all. GRÈS. Francique *greot, cf. all. Gries
grillen « crier de colère », grellen, id., grell « gravier »; a pris rapidement le sens de
« aigu (d’un son) », moyen néerl. grollen « grès », ainsi nommé à cause de sa consti-
« grogner », moyen haut all. grüllen. Le tution en grains. Dér. grésillon, « verre
mot a passé en gallo-roman avec toutes ces pilé », 1771, «charbon en menus morceaux »,
variantes : namurois gruler « grogner », 1875 (une l1re fois meltre en gresillons
moyen fr. grouler « gronder », xvi® s. Des « écraser », 1530).
deux premières variantes sont dér. les GRÉSILLER «faire du grésil », vers 1120.
désignations du grelot dans les parlers Empr. du moyen néerl. grîselen, v. grêler.
gallo-romans anc. bourguignon grilot Le suff. -elen a été rendu en fr. par -iller,
(encore très répandu dans l'Est), fr. grelot, et l’i du radical a été ensuite dissimilé en e.
1680, dont le radical apparaît dès le xrr1es. V. grès. — Dér. : grésil, vers 1080 (Roland),
dans le dér. grelee « cri (de la poule) ». souvent grésille, fém., au moyen âge,
Il y a aussi eu interférence avec les noms d’après grêle, comme inversement, gréle
du grillon, cet insecte rendant un son assez est aujourd’hui masc. dans de nombreux
semblable à celui du grelot. — Dér. : gre- patois d’après grésil.
305 GRILLON

GRÉSILLER « faire crépiter », xive. *grevis, réfection du lat. class. gravis, d'a-
Altération, d’après le préc., de grediller, près levis « léger », d’où aussi it. greve, a.
xXIV® (encore chez Paré et usité aujourd’hui pr. greu.
dans le Vendômois au sens de « faire du
grésil ») « flamber, friser au fer », qui se GRIFFER, 1386. Le subst. grif, masc.
rattache à l’anc. normand grediller « gril- « griffe » est attesté vers 1220, Il est donc
ler », dér. de l’anc. norm. gredil « gril », probable que le verbe est dér. de ce subst.,
qui représente le lat. craticula (au masc.), qui représente un francique *grif (à sup-
mais dont le -d- est difficile à expliquer. poser d’après l’anc. haut all. grif), forme
du vire et du 1x° s., après la mutation des
GRÈVE. Prélatin *grava « sable, gra- consonnes. Le lombard grif vient de la
vier », d’où « grève » (l'extension du mot forme correspondante du longobard. V.
jusque dans l'Italie méridionale interdit gripper. — Dér. : griffe, vers 1500; grif-
d'y voir un mot celtique); grève signifie fade, 1564 ; griffonner, 1555, griffonnage,
encore « gravier » à l’est de Paris, en cham- 1621, griffonneur, 1584.
penois et en lorrain, dans l'Ouest (sous la GRIFFON, « animal fabuleux », vers 1080
forme groue) et dans de nombreux parlers (Roland) ; appliqué à des oiseaux de proie,
méridionaux. Par suite de l'usage qu'’a- 1672; dit d’une espèce de chien anglais,
vaient les ouvriers parisiens sans travail 1685. Dér. de grif, lat. eccl. (rve s.) gry-
de se réunir sur la place de Grève, au bord phus, d’où aussi it. esp. grifo. Gryphus a
de la Seine (depuis 1806, place de l'Hôtel remplacé le lat. class. grypus (empr. du
de Ville), il s’est créé la locution faire grève, grec gryps, gén. grypé6s), qui survit encore
d’où grève « cessation concertée du tra- dans l’a. fr. grip, xui° ; mais la cause de la
vail », 1805 ; gréviste, 1872. — Dér. : gra- substitution de -ph- à -p- en lat. de basse
vats, 1771 (gravas, 1680), issu par substi- ép. est obscure.
tution du suff. -as (cf. plâtras), de gravois,
1549, gravoi au x1r° s., formé avec le suff. GRIGNER, v. le suiv.
-oi, lat. -éfum ; d'où gravatier, 1762 ; gra- GRIGNON, 1564. Aussi grignelle, XVe,
velle, x11°, au sens de « gravier », jusqu’au grigne, 1694 (tous deux encore bien vivants
xvI® s., rare dans les parlers modernes ; dans les patois). Très probabl. dér. de
comme terme médical, xrr1°, d’où grave- l’anc. verbe grigner les denis, etc., « grincer
leux, x111°, au sens de « qui contient du des dents », puisqu’une personne qui gri-
gravier », comme terme médical, xvI® s. ; gnote son pain au lieu de le manger fran-
au sens de «licencieux », c’est-à-dire pénible chement ne fait que tordre la bouche.
pour la conscience comme l’est la gravelle Pour la même raison il faut voir aussi dans
pour le corps, fin xvrie, d’après le dér. le verbe grignoter un dér. de grigner du
gravelure, Lesage ; gravier, xr1°, d’où -ière, francique grinan « faire la moue » (comp.
fin xix°; engraver (s’), 1636. all. greinen « pleurer »). Le verbe grigner
GREVER. D'abord « causer du dom- est encore très vivant dans les parlers
mage, du chagrin », vieilli depuis le xvries. ; au sens de « pleurnicher ». L’n mouillée de
au sens de « frapper de contributions ou grigner est due à grogner.
d’autres charges », 1636. Lat. graväre « char- GRIGNOTER, 1537. V. grignon.
ger », développé d’après grief, v. griève-
ment, comme le montrent les anc. formes GRIGOU, 1658 (Molière). Empr. du lan-
du verbe et aussi le subst. verbal grief, guedocien grigou « gredin », gascon gregoun
cf. de même a. pr. grevar « Vexer, causer : (1610), dér. de grec, qui a pris au Midi le
du dommage ». Ailleurs d’après le lat. sens de « filou ». Il est bien possible que
class. : it. gravare « charger », esp. gravar Molière ait recueilli le mot pendant ses
« id. ». — Dér. et Comp. : grief, subst. longues pérégrinations dans le Midi.
verbal, xrr1e s.; dégrever, 1792 ; dégrève- GRIL, xrr° ; grille, xie. La spécialisation
ment, 1790. de ces deux formes, en relation avec le
développement du sens moderne de grille,
GRIBOUILLER, 1548, d’après Gribouil- ne commence qu'au xve s. Jusqu'à la fin
le, nom propre, qui en a été tiré par plai- du xvie s., grille est plus usuel que gril, et
santerie. Attesté en 1611 au sens de « gar- il en est de même dans les patois, où grille,
gouiller »; s’expliquerait mal comme une au sens du fr., est peu connu. Grille repré-
variante de grabouiller, fréquent dans les sente le lat. cralicula, cf. aussi a. pr. gra-
parlers septentrionaux avec des sens variés : zilha ; gril paraît être une forme refaite
« barbouiller, griffonner », picard, « remuer plutôt que représenter le lat. cräticulum.
de l’eau », angevin, etc., et qui remonte — Dér. : 1° de grille, au sens de « gril »
au moyen néerl. crabbelen « gratter », v. griller « faire cuire sur le gril », xr1°, d’où
grabuge. Gribouiller est plutôt empr. du grillade, 1628 ; 2° de grille, au sens de
néerl. kriebelen « fourmiller ; griffonner »; «clôture », griller, 1463, d’où grillage, 1739,
le suff. diminutif du néerl. -elen ayant été une première fois en 1342.
remplacé par -ouiller. — Dér. : gribouillage,
1752; gribouilleur, 1866 ; gribouillis, 1611, GRILLON, 1372. Autre forme de grüillel,
au sens de « borborygme » ; sens moderne, xue, plus usité en a. fr., v. grelot, qui dérive
1826. d’un simple non attesté issu du lat. grillus ;
1’! mouillée provient probabl. de grésillon,
GRIÈVEMENT, 1435. Ne s'emploie plus v. grès. Rare en gallo-roman. Aïlleurs for-
qu’au sens physique dans des locutions mes également difficiles : it. grillo, esp.
telles que grièvement blessé; antér. grief- grillo. L’i peut être d’origine expressive,
ment. Adv. de l’anc. adj. grief, lat. pop. pour rappeler le cri de l’insecte.
DICT. ÉTYM. 20
GRIMACE 306

GRIMACE, fin xive (Deschamps). Issu dans ce mot le port. criado « domestique »,
de grimuche (attesté vers 1202, chez J. Bo- ces musiciens étant aux gages des rois
del comme désignation péjor. d'une idole nègres ; le mot aurait été transformé en
païenne) par substitution, à la terminaison passant dans la langue des nègres de ces
insolite -uche, du suff. péjor. -asse. Déjà au régions ; mais cette ét. reste incertaine.
xIe s. Grimulio en lat. médiéval comme GRIOTTE, 1539 (mais au xve s. et
surnom. Dér. sans doute d’un francique encore chez O. de Serres agriole). Empr. du
*grima « masque », qu'on peut supposer prov. agriota, dér. de agre « aigre »; au-
d'après anc. saxon grima, id., moyen jourd’hui très répandu dans les patois du
néerl. grime. — Dér. : grimacer, 1428; Midi et de l'Est avec ou sans la voyelle
grimacier, 1580. initiale. — Dér. : griottier, xvi® (alors
GRIMAUD, 1480. Le francique a tiré du gruolier).
subst. *grima, « masque », v. le préc., un GRIPPER, 1405, mais le dér. grippe
certain nombre de noms de personnes, date du xrrre s. et déjà au sens fig. de
p. ex. *Grimward, d’où le nom prov. Gri- « rapine ». Proprement « saisir, accrocher »,
moart (et le subst. a. fr. grimouart « moue encore au XVI1*5. ; aujourd'hui d’un emploi
dédaigneuse »), Grimwold, d’où le nom de restreint ; comme terme techn., en parlant
Grimaud. Au sens que grimaud a en fr., d’une machine dont les pièces s'arrêtent
il est peut-être issu de ce dernier nom sous par excès de frottement, 1757. La famille
l'influence de grimoire. de gripper est rarement attestée dans les
GRIME, 1778. De grimace le fr. a tiré, premiers siècles, mais elle s’épanouit rapi-
en détachant le suff., l'expression faire la dement à partir du xve. Il est possible que,
grime « faire la moue », 1694. De là, il a comme pour griffer, le point de départ soit
tiré, dans la langue du théâtre, le verbe à chercher dans le subst. et que le verbe
grimer « marquer un auteur de rides », en soit dér. en fr. Le francique a sûrement
d’où enfin grime, masc. « personnage de possédé le verbe *gripan aussi bien que le
vieillard ». subst. *grip, les deux existant aussi dans
les autres langues germ. — Dér. et Comp. :
GRIMOIRE, xu1°. Altération de gram- grippe, 1689, au sens disparu de « fantaisie
maire qui, d’après le sens de « grammaire soudaine »; a signifié aussi au moyen âge
en latin (inintelligible pour le vulgaire) », « querelle », vers 1300, « mésaventure », en
a pris rapidement, dès le xr11° s., celui de somme ce qui saisit (outre le sens de
livre secret de sorcellerie. L’i au lieu de l’a « griffe »); ne s'emploie plus que dans la
dans la première syllabe s'explique peut- locution prendre en grippe, vers 1770, issue
être par l’influence de subst. comme gri- probabl. par antiphrase de grippe au sens
muche et grimouart (v. grimace, grimaud). de « caprice ». Au sens de « sorte de mala-
GRIMPER, 1495. On a proposé un germ. die », 1743, serait ainsi nommée parce
*krimpan, mais la date tardive de l’appa- qu’elle saisit brusquement ; d’où grippé,
rition de grimper exclut cette hypothèse. 1782. Empr. par l’all. Grippe, vers 1782,
Probabl. forme nasalisée de griper, d’après et l’angl. grippe, 1776. Cf. « Ces mauvais
ramper. — Dér. grimpereau, 1555; rhumes épidémiques, auxquels les Fran-
grimpeur, 1596 ; grimpette, 1922 ; regrim- çais, qui nomment tout, ont donné le
per, 1549. nom de grippe, qui est en effet très signi-
GRINCER, 1311. Issu très probabl. de
ficatif », Bonnet, de Genève, vers 1780;
grisser, même sens, xIvV® s. et encore v. aussi influenza. Grippage, 1869 ; agrip-
dans les patois, par nasalisation irrégulière per, xv° (une première fois vers 1200);
grippe-sou, 1680.
de la première voyelle (cf. grimper) ;
v. crisser. — Dér. : grincement, 1530, GRILL-ROOM, 1907. Empr. de l’angl.
d’abord gricement, xve. grill-room « local où l’on grille les viandes ».
GRINCHEUX, 1866. Mot dialectal, v. le GRIS, x1r°. Au sens de «légèrement ivre »,
préc. cÎf. grincher « grincer », en picard et fin xvrie, Le Duchat. Francique *gris, cf.
en normand, et l’adj. grinceur « qui grince anx. saxOn gris, néerl. grijs. — Dér. : gri-
facilement des dents », 1611. saille, 1632; grisâtre, vers 1500; griser,
1538, au sens moderne, 1718, d’où grise-
GRINGALET, 1611. Paraît être un em- rie, 1874; dégriser, 1771; grisette, xr1°,
ploi figuré de gringalel, xrre (Chrétien, sous comme adj. ; d’où « espèce d’étoffe com-
la forme gringalel d’où est issue rapide- mune », 1651 (Scarron), et « jeune fille
ment la forme moderne), « sorte de che- de mœurs faciles, de modeste condition »,
val », mot qui remonte au gallois Keinka- vers 1660, propr. « vêtue de grisette »;
led, nom propre du cheval de Gauvain dans grisonner, vers 1470, par l'intermédiaire
un texte de la légende arthurienne ; aura d’un anc. adj. grison, 1449, aujourd’hui
été dit, par antiphrase, d’un cheval chétif, subst., en parlant d’un âne, d’un vieillard.
puis appliqué à l’homme. Mais il n’est pas
impossible qu’au sens moderne gringalet GRIS-GRIS. Amulette des indigènes de
vienne du suisse all. gränggel « homme l'Afrique, 1728 (P. Labat, Relation de
chétif » (aussi le dim. gränggeli) et qu'il ait l’Afrique occidentale : « Ces billets à qui
été introduit par les mercenaires suisses. les Européens ont donné le nom de gris-
Sa rencontre avec l’a. fr. gringalet serait gris, sont des sentences de l’Alcoran avec
alors purement fortuite. quelques figures arbitraires. ») ; cf. aussi
dans un texte de 1569 : « Un diable nommé
GRIOT. Musicien ou chanteur de l'Afri- grigri se voit en Canada et en la Guinée. »
que occidentale. D'abord guiriot, à partir On ne sait rien de plus sur ce mot; la
de la fin du xvue s. On a proposé de voir forme n’est pas expliquée.
307 GROTESQUE

GRISOU, 1796, antér. feu brisou, 1751, Midi au sens de « savate, chaussure usée »,
altération due à briser. Forme wallonne, cf, a. pr. grola « savate, vieux soulier »,
usitée dans le Borinage, qui correspond au mot d’origine obscure.
fr. grégeois, en a. fr. gresois et grisois, cf.
ignem graecum vocant hullarii Leodienses, GROMMELER, 1375. Auparavant et en-
1676. Le houilleur liégeois a dit aussi Li feû core dans les dialectes grommer, xri°. La
griyeû (a. fr. griois), cf. feu grieux, dans un correspondance exacte avec le moyen
texte manuscrit de la fin du xvre s.; au- néerl. grommen, flamand grommelen et le
jourd’hui il dit encore « avoir Li feû griyeû fait que ces verbes s’encadrent en germ.
dans le corps » au sens d’ « avoir grand dans tout un groupe de verbes de sens
soif », mais pour grisou il dit gdz. (Commu- analogue, rend probable un empr. au néerl.
nication de M. Haust.) — Dér. grisouteux, plutôt qu’une onomatopée. Les formes gre-
1876. meler, grumeler, grimoler, grimoner, etc.,
qu’on trouve depuis le xve s. et dans les
GRIVE, vers 1280. Fém. de l’a. fr. griu patois, représentent une autre variante
« grec », probabl. combiné d’abord avec le germ., moyen néerl. grimmen, moyen néerl.
représentant du lat. merula. Allusion aux grimmelen.
migrations de l'oiseau, la grive étant la
seule espèce de merle qui quitte le pays GRONDER, 1210. On trouve aussi gron-
pour l’hiver (pour la même raison, les Vé- dir et grondre. Lat. grundire, variante de
nitiens appellent l’hirondelle ciprioto). — grunnire, V. grogner ; a. pr. grondir. —
Dér. : grivelé, xrr1°; grivèlerie, xvi®, dér. Dér. : grondement, xrr1° ; gronderie, XvI° ;
du verbe griveler « faire des profits illi- grondeur, 1586 ; grondin, 1769, ainsi nom-
cites », 1620, hors d’usage. Restreint au- mé à cause du grondement qu’il fait en-
jourd’hui au sens d’ «action de consommer tendre, quand il est pris.
dans un café ou dans un restaurant, sans
GROOM, 1669, dans un ouvrage sur
avoir de quoi payer » ; dit ainsi par compa-
l'Angleterre ; sens plus étendu au xix® s.
raison avec les menus pillages que font les
grives dans les vignes. Empr. de l’angl. groom, v. gourmet.

GRIVOIS, 1690, au sens de « soldat GROS. Lat. de basse ép. grossus, mot
alerte », sens moderne 1704. Dér. de grive, vulgaire. À remplacé crassus, lequel avait
qui, dans l’argot, avait pris le sens de pris la place de pinguis. It. grosso, esp.
« guerre », la grive étant très querelleuse. grueso. — Dér. et Comp. : grossesse, 1283,
Vers la fin du xvrre s. aussi grivoise « taba- au sens moderne, a signifié aussi en a. fr.
tière munie d’une longue râpe » nommée « grosseur » ; grosset, XIII° ; grosseur, XII° ;
ainsi parce qu'elle avait été introduite par grossier, x111°, dès le moyen âge aussi «mar-
des soldats revenant d'Alsace. — Dér. : chand en gros »; d’où grossièreté, 1642;
grivoiserie, 1872. grossir, x11°, grossissement, 1560, dégros-
sir, 1611 ; grossoyer, 1335 ; dér. de grosse,
GRIZZLI, GRIZZLY, 1866. Empr. de subst. fém., « expédition d’un acte en
l’anglo-américain grizzly (sous-entendu bear grosse écriture » ; grossiste, fin xix° (peut-
« ours »), « grisâtre », dér. de grizzle, « gris », être d’après l’all. Grossist); engrosser,
empr. lui-même de l’a. fr. grisel, v. gris. 1283 ; en outre en a. fr. engroissier, d’après
groisse « grosseur, grossesse », lat. pop.
GROG, 1776. Empr. de l’angl. grog *grossia, d'où aussi a. pr. groissa « gros-
(1770), tiré du sobriquet Old Grog, donné seur », les deux verbes ont aussi le sens de
à l’amiral Vernon par les matelots, à cause « rendre gros » ; gros-bec, 1555.
du vêtement de grogram qu’il portait habi-
tuellement ; cet amiral ayant prescrit, en GROSEILLE, xr1e. D'abord et encore
août 1740, aux marins de son escadre dans les patois grosele. Empr. du moyen
d’étendre d’eau le rhum de leur ration, néerl. croesel, dér. de kroes « crépu » (aussi
ceux-ci donnèrent à cette boisson le nom cruus), comp. all. dialectal Xräuselbeere. La
de grog. Grograyn, 1562, en outre grogran terminaison -ele a été modifiée en -eille
et grogoran, est empr. du fr. gros grain, sous l'influence du nom du buisson (grose-
autrefois « espèce d’étoffe à gros grain », lier, ensuite groseillier, xrr°).
aujourd’hui « sorte d’étoffe à côtes pour
faire des ceintures »; le mot angl. a été GROSSO-MODO, xvie (« Le vulgaire dé
repris par le fr. sous la forme gourgouran, Paris dit aussi grosso modo »). Locution du
1723. lat. scolastique, signifiant « d’une manière
grosse », signalée déjà dans le lat. médiéval ;
GROGNER. Lat. grunnire autre forme probabl. terme d'étudiants ou de baso-
de grundire, v. gronder ; d’abord gronir, chiens.
devenu grogner, 1250, d’après groin. It.
grugnire, esp. gruñir, a. pr. gronir, gronhir. GROTESQUE, 1532. Jusqu'au cours du
— Dér. : grognard, x111°, appliqué sous XVIIE s., souvent crolesque, d’après croule .
Napoléon Ier aux vieux soldats et notam- v. grotte. Empr. de l’it. (pillura) groltesca,
ment à ceux de la vieille garde ; grogne- dér. de grotla « grotte » ; introduit comme
ment, xve; grognon, 1752; grognonner, subst. au sens de « dessins capricieux » à
1634. l'imitation de ceux qui furent trouvés dans
dés édifices anciens, alors remis récemment
GROIN. Lat. pop. grunium, tiré du au jour, ou de grottes décorées, comme on
verbe grunnire. en fit alors en Italie ; a pris ensuite celui
GROLE. « Chaussure », en argot pari- de « figure ridicule », puis est devenu adj.
sien, fin xixe. Très répandu dans les patois au sens moderne au xviie s. (repris alors
de l'Ouest, de la région rhodanienne, et du par l’it.) ; le sens défavorable du subst. est
GROTESQUE 308

amorcé aussi en it., où on trouve à la fin la forêt ». P. Pithou, fin xvie s., dit que
du xvi® s. grottesca au sens de « peinture « le gru, en France, mesme à l’entour de
grossière et mal soignée ». Paris, s’appelle tout le fruit de la forêt »;
GROTTE, 1553 (Ronsard) ; une première mais ce mot est trop récent pour être le
fois au x1r1e s. dans un texte italianisant. prototype de gruage. Au xXIII° S., On à au
Empr. de lit. grotta, lat. crypta (prononcé deuxième sens verdier, formé sur vert, com-
crupia), qui vient du grec krypté « souter- me gruyer l’a été sur un mot signifiant
rain », mot de la Grande-Grèce ; a éliminé « vert ». — Dér. : gruerie, 1479.
l’a. fr. croule, usité jusqu’au xvi® s., repré- GRUYÈRE, 1674, on disait aussi Grière
sentant régulier de crupla, d’où aussi esp. au xvinie s. Tiré du nom du pays d’origine,
gruta. la Gruyère (canton de Fribourg, Suisse).
GROUILLER, vers 1460. Nombreuses
formes du même type dans les patois issu de GUANO, 1598 (au xvir1° s. aussi guana,
l’anc. fr. grouler « s’agiter » sous l'influence 1785). Empr. de l'esp. guano, empr. lui-
de verbes comme fouiller. Grouler est même de huano du quetchua.
une forme secondaire de crouler, comme GUÉ. Lat. vadum qui a pris en gallo-
l'italien a grollare à côté de crollare. En roman et en it. le w initial du mot appa-
fr. pop. se grouiller, 1797, et plus tard, se renté *wad du germ., cf. it. guado, a. pr.
dégrouiller ont pris le sens de « se hâter ». ga, mais esp. vado.
GROUPE, 1671. Empr. de lit. groppo
(d’abord « nœud », d’où « assemblage », cf. GUËDE, xi°. Germ. *waizda (le mot ne
a. pr. et cat. grop « nœud »), qui vient peut pas avoir été apporté par les Francs,
probabl. par Le gothique du germ. *kruppa, parce que dans leur parler -z- avait disparu
qui devait avoir le sens large de « masse ou était devenu -r-), cf. all. Waid. Lit.
arrondie », de là les sens très variés des guado vient du longobard *waid. — Dér. :
guéder, 1546 « saturer une étoffe avec la
mots de cette famille même dans les
langues germ., cf. aussi cruppa « gros guède », peu usuel aujourd’hui ; part. passé
câble », dans une glose de basse ép. et au sens fig. de « rassasié », fin xvi®, encore
croupe. — Dér. : grouper, 1680 ; groupe- usité dans les parlers du Centre et de
ment, 1801; regrouper, fin xIxe s.; l'Ouest, où il signifie aussi « mouiller ».
-ement, id.
GUÉER. Lat. de basse ép. vadare ; pour
GRUAU, xri° (alors gruet). Dér. de gru‘ le gu initial, v. gué. — Dér. guéable, xrr°.
encore dans les patois. Francique *grüt,
qu’on peut supposer d’après anc. haut all. GUELTE, 1870. Empr. de l’all. ou du
gruzzi, all. Grütze « gruau », néerl. grut. Le flamand geld « argent ».
lorrain gru « son » est un autre mot; il
remonte à l’anc. champenois gruis (ui de- GUENILLE, 1605. Mot emprunté des
vient souvent w dans ces parlers), lequel parlers de l'Ouest. Altération de guenipe,
est empr. du moyen néerl. gruis, id. sous l’influence de fondrilles, broutilles, etc.,
désignant des résidus divers; guenipe
GRUE. Lat. pop. *grüa, lat. class. grüs. a le même sens, encore usuel en poitevin,
Au sens de « machine à soulever des far- attesté dès 1496, et qui a pris le sens de
deaux », 1467 (probabl. calqué sur le moyen « femme de mauvaise vie »; guenipe, dont
néerl. crane) ; « fille publique », dès 1415. le suffixe provient probablement de l’anc.
It. gru, esp. grua. chipe «chiffon », v. chipoter, se rattache à un
GRUERIE, v. gruyer. groupe de mots représenté surtout dans
l'Ouest et le Centre par des mots comme
GRUGER, 1482. Empr., grâce à quelque gâne « mare », guène, guener « mouiller,
acception techn., du néerl. gruizen « écra- crotter » et qui remonte très probabl. à
ser », dér. de gruis « grain », v. gruau. — un gaulois *wädana- «eau » (pour *wodana-),
Dér. : égruger, 1556, égrugeoir, 1611. qui correspond au goth. walo « eau ».
GRUME, 1690. Lat. gräma « gousse, La guenille tire donc son nom du fait que
cosse ». les pauvres, en marchant, la traînent dans
la boue liquide. Cf. aussi nippe. — Dér. :
GRUMEAU. Lat. pop. *grümellus, lat. déguenillé, fin xvire (Saint-Simon).
class. grämulus, dim. de gramus « tertre »,
d’où le sens spécial du fr., cf. a. pr. grumel GUENON, 1505, parfois masc. au xvie s.
« peloton de fil ». Répandu dans les parlers Désignant d’abord un singe à longue queue
de la France septentrionale au sens de traînante, ce mot se rattache au même
« grumeau » et de « noyau », en partie avec radical que guenille ; -on a ici une valeur
d’autres suffixes. — Dér. : grumeler, x111° ; individualisante. — Dér. : guenuche, fin
grumeleux, XIII s.; engrumeler, 1549. XvI® (Régnier) ; cf. en outre gueniche, 1615 :
guenichon, xvi® (Baïf); guenuche a en
GRUYER. Sous l'ancien régime dési- champenois le sens de « femme de mauvaise
gnait soit un seigneur qui avait droit
vie », et gueniche signifie en lorrain à la
d'usage dans les bois d’un vassal, soit un fois « femme de mauvaise vie», « poupée »
officier d'administration des eaux et fo- (comme guenon en Suisse romande) et
rêts ; xri1e. Représente très probabl. un « guenille » (dans la région de Metz).
gallo-roman “*grodiarius « maître fores-
tier », dér. du francique *grôdi « ce qui est GUÉPARD, 1706 (sous la forme gapard ;
vert », qui correspond à l’anc. haut all. Buffon guépard). L'animal était connu au
gruoti, id. (de la famille de l’all. grün moyen âge, mais désigné par les noms
« vert »). Cf. aussi a. fr. gruage « droit sur d'autres animaux tels que léopard, once,
309 GUEUSE

lynx, etc. La peau de l'animal était connue GUET-APENS, 1472, dans la locution
des fourreurs de Paris, auxquels est due la de quel apens « par préméditation », d’où
prononciation guépard. Francisation de le subst., vers la fin du xvie s. Cette locu-
lit. gatlo-pardo, formé avec gatio « chat » tion a succédé à de guet apensé, antér. en
et pardo « léopard », comme chal-pard. aguel apensé, d’aguet apensé, en guel.…., a
guet, locutions formées d’aguet (d’où
GUÉPE. Lat. vespa. La consonne initiale guei) et d’apensé, part. passé de l’anc.
est due à un croisement avec le mot germ. verbe apenser « former un projet »; puis
de même sens, cf. anc. haut all. wefsa ; de guet apensé a été altéré en de guei apens,
l’all. Wespe, déjà moyen haut all., est lui- d’après apens « pensée, intention » qui
même refait sur vespa; il y a donc eu s’employait dans des locutions de sens
influence réciproque du germ. et du lat. de analogue, cf. en apens, de fait et apens «in-
la Gaule l’un sur l’autre. It. vespa, esp. tentionnellement », xvi® s.; on trouve
avispa ; des formes avec v initial survivent encore dans Monet, en 1636, fait, crime de
dans le Midi. — Dér. : guëpier « nid de guet appensé.
guêpes », 1762; d'abord guespière, xvre.
GUÊTRE, xv° (écrit guietre). Très pro-
GUÈRE. Guères avec s adverbiale est babl. francique *wrist « cou de pied », cf.
vieilli; en a. fr. guaires. Francique *wai- all. Rist, anc. angl. wrist, malgré la date
garo « beaucoup ». It. guari est empr. du récente du mot. Le mot aurait passé à
fr. — Comp. : naguère, formé de n’a guère, désigner ce qui couvre la partie du corps
cÎ. n’a encor guères, XIIIe. en question. — Dér. : guêtrer, 1549.
GUÉRET. Lat. vervactum « jachère ». GUETTER. Francique *wahtôn, cf. all.
Le début du mot a été modifié d’après un wachen « veiller », de même famille ; de là
croisement mal défini, probabl. avec un aussi a. pr. guailar. Très répandu au sens
mot germ. non identifié ; de même a. pr. de « garder » dans le Sud-Ouest et, sous la
garach. Aujourd’hui usité aussi dans les forme simple ou avec le préf. re-, au sens
parlers du Centre, de l'Ouest, le prov. et de « regarder » dans le Nord, l’Est et le
le gascon. Esp. barbecho. Midi. — Dér. : guet, 1160 ; guetteur, 1190 ;
l’a. fr. dit surtout gaite, guelte « veilleur »,
GUÉRIDON, 1650. Nom propre d’un ordinairement fém., qui est tiré de gueiter
personnage d’une facétie de 1614, qui fut ou peut représenter une forme francique
introduit vers la même date dans un ballet ; *wahla ; v. échauguette ; aguet, xr1° (écrit
le nom a pris ensuite rapidement le sens agait) : jusqu’au xvire s., subst. signifiant
de « chanson, vaudeville », 1626 (« Vers «garde, embuscade » ; aujourd’hui ne s’em-
pour les guéridons et les chansons nou- ploie plus que dans la locution aux aguets ;
velles »); appliqué par fantaisie au petit tiré de l’anc. verbe agaitier.
meuble qui porte encore ce nom, peut-être
parce que, dans les ballets, Guéridon tenait GUEULE. Lat. gula « gosier, gorge,
un flambeau, pendant que les autres dan- cou », sens encore attesté en a. fr.; de
seurs s’embrassaient. Ces petits meubles même it. esp. gola. À pris en fr. le sens de
avaient en effet souvent la forme d’une « bouche », dès le x1° s. (encore dans les
personne, en particulier d’un Maure. Le patois), celui de « visage », au xvir1e. Gueu-
nom même est très probabl. né d’un refrain les, terme de blason, xrrr°, est le même mot
de chanson, comp. des refrains (6)gué et employé dans un sens fig. et non, comme
laridon. - on l’a cru longtemps, un mot empr. du
persan gul « rose ». Au moyen âge les
GUÉRILLA. 1820. Empr. de l'esp. gueules désignaient de petits morceaux de
guerrilla « petite guerre ». fourrure découpés dans la peau du gosier
GUÉRIR (Alexis : guarir, puis garir, d’un animal, particulièrement de la mar-
qu'on rencontre jusqu’au milieu du tre, qui servaient à orner des manteaux,
xvii® s.). À signifié d'abord « défendre, surtout en forme de collet; le sens de
protéger », d’où le sens moderne dès le «rouge» vient soit de la couleur naturelle
xie s. Germ. *warjan, cf. all. wehren « ré- de la fourrure, soit d’un rouge dû à la tein-
primer » ; d’où aussi a. pr. garir « préserver, ture — Dér. et Comp. : gueulard, 1395,
guérir », it. guarire « guérir ». — Dér. : subst. (terme de métallurgie) ; 1567, ahj.;
guérison, vers 1080 (Roland : guarisun), gueulée, x11° ; gueuler, 1648 ; gueulardise
développement du sens parallèle à celui « gourmandise », 1881 (au XVII s. goular-
du verbe ; guérissable, xr11°, inguérissable, dise) ; gueuleton, 1755 (Vadé), -onner,
vers 1460 ; guérisseur, x1v® (gariseor) ; 1864 ; goulée, xr1e ; goulet, 1358 ; goulot,
comme terme péjor. au sens de « médecin 1611 ; goulu, xv°; bégueule, 1690, issu de
qui n’a que la routine », xvirie (Gil Blas). bee queule, 1470, c’est-à-dire « gueule béan-
te », v. bée ; dégueuler, xv° ; -lasse, vers
GUÉRITE, x; d’abord dans la lo- 1881 ; égueuler, xirre ; engoulevent, 1791
cution a la garite « sauve qui peut », dér. (déjà 1656 « homme qui boit beaucoup »),
irrégulier de garir sur le modèle de fuite, mot dialectal de l’Ouest, formé avec le
dér. de fuir, comp. l’a. pr. garida, même verbe engouler « prendre dans la gueule »,
sens. attesté en a. fr., d’où aussi le nom propre
Engoulevent, en 1292 ; engueuler, 1783, cf.
GUERRE. Germ. *werra; a éliminé le mal engueulé « mal embouché », 1642. V.
‘ lat. bellum qui a disparu avec l’organisa- aussi dégouliner.
tion militaire de l’empire romain. It. esp.
guerra. — Dér. : guerrier, vers 1080 (Ro- GUEUSE, 1543. On trouve aussi guise
land); guerroyer, id.; aguerrir, 1535. xvie, encore dans Littré et dans Larousse.
GUEUSE 310

Les gros morceaux informes de fer fondu GUIGNE « malchance », v. guigner.


s'appellent en all. gans (= oie), dont le GUIGNER. Au sens propre «faire signe »;
plur. est en bas all. gése. Ce mot a été
apporté en France par les mineurs du a pris le sens de « loucher » dans de nom-
Harz qu'on appela au xvi® s. pour l’orga- breux parlers de l'Est, du Sud-Est et méri-
nisation de l’industrie minière. L’1 de cer- dionaux et celui de « remuer » p. ex. en
taines formes est probabl. dû à l’influence prov. D'un francique “*wingjan « faire
du verbe all. giessen « fondre ».
signe », qu'il est permis de supposer d’après
l’anglo-saxon wincian « guigner », une alter-
GUEUX, 1452. Très probabl. empr. du nance consonantique entre “*wink- et
moyen néerl. guit, «coquin, fripon, fourbe », wing- étant rendue probable par des
qui aurait pu donner une forme “*gueu formes parallèles telles qu’all. schwingen
(comp. la graphie geulz en 1566) dont le à côté de schwenken. *Wingjan ayant été
fém. gueue est attesté au xvi® s., d’où romanisé en *gwingyare a perdu le deuxiè-
gueux, queuse, d’après les nombreux adj. me g par dissimilation, d’où un type
en -eux, -euse. — Dér. : gueusaille, 1630; *gwinyare. — Dér. : guignon, 1609 (Ré-
gueuser, 1501 ; gueuserie, 1567. gnier) ; l’idée de malchance dérive de celle
qu’on attache au mauvais œil, d’où guigne,
GUI, plante. Lat. viscum. D'abord vwisi, 1866 ; déguignonner, 1731 ; enguignonné,
puis guix, sous l'influence de l’anc. fran- 1821.
cique *withsila, v. guigne, les fruits des
deux plantes ayant une certaine ressem- GUIGNOL, 1865. Empr. du lyonnais Gui-
blance ; viscum et *wfhsila appartiennent gnol, nom d’un personnage de marion-
du reste déjà à la même racine indo- nettes, ce genre de théâtre étant en vogue
européenne. V. guimauve. à Lyon dès le xvrtie s. Guignol est un dér.
du verbe guigner ; ce personnage jette
GUI, terme de marine, 1694. Empr. du des regards furtifs et entendus de droite
néerl. giek (ou gijk). et de gauche.
GUIBOLE, 1842. Mot vulg., altération
GUILDE, terme d'institution du moyen
de guibonne, issu de guibon qui est attesté
âge : « association, confrérie », en usage
en norm. au xvII® s., à côté d’une forme surtout au Nord-Est. On écrit aussi gilde
gibon qui fait penser au verbe giber « se- et ghilde. Attesté en fr. mod. depuis 1788.
couer », v. regimber. Mais l’origine de giber Empr. du lat. médiéval gilda, ghilda,
étant inconnue, on ne peut rien dire sur
latinisation du moyen néerl. gilde, d’où
le rapport des deux formes guibon, gibon. aussi l’anc. picard gueude, cf. aussi angl.
GUICHET, xu°. Très probabl. dim. de guild ; l’a. fr. a un autre mot gelde, jaude
l’anc. scandinave vik « cachette, recoin », « bande de soldats », qui représente le
sens que le mot avait au x11° s. aussi en francique “*gilda (de même famille que
fr. L’s de la forme a. fr. guischeï s'explique le néerl. gilde), d’où aussi a. pr. gelda
peut-être par l'influence de huisset « petite « troupes, gens de pied », it. arch. geldra
porte ». — Dér. : guichetier, 1611. « foule ».
GUIDER, 1368. Réfection de l’a. fr. GUILLAUME, 1600 (en prov. déjà 1506).
guier d’après guide, 1370, empr. de l’it. ou Nom propre, dit par figure d’une sorte de
de l’a. pr. guida « celui qui guide » et « ac- rabot.
tion de guider », mot qui a remplacé l’a. fr.
guis, Cas sujet, guion, cas complément (qui, GUILLEDOU. Ne s'emploie que dans
du reste, ne signifiait que « celui qui gui- la locution courir le guilledou. Fin xvre
de »). Guide a été fém. également comme (d’Aubigné). Sans doute comp. de l'anc.
nom d'agent jusqu’au xvii® s. Guier vient verbe guiller « tromper, attraper » et de
du francique *wftan « montrer une direc- l’adj. doux dans son acception morale. L’a.
tion ». L’a. pr. guidar, l’it. guidare et l'esp. fr. guiller est dér. de l’a. fr. guille « ruse »
guiar viennent du gothique “*widan. — (les formes avec / non mouillé, guile et gui-
Comp. : guide-âne, 1732. ler sont probabl. nées sous l'influence de
l’adj. vil), qui représente un francique
GUIDE-ROPE, 1856. Empr. de l’angl. *wigila « ruse ».
guide-rope, comp. de guide (empr. du fr.),
et de rope « corde ». GUILLEMET, 1677. D'après Ménage,
tiré du nom de l'inventeur de ce signe, qui
GUIDON, xv°, déjà une fois au xIve s. se serait appelé Guillaume (d’après Th. Cor-
Empr. de l’it. guidone « étendard », comme neille). — Dér. : guillemeter, 1800.
terme militaire ; v. guider. Les autres sens
se sont développés en fr. GUILLEMOT, 1555. Dim. de Guillaume,
dit par figure du guillemot, v. geai.
GUIGNE « esp. de cerise », 1393 (d’abord
guine). On a proposé comme type étymo- GUILLERET, 1460. Probabl. de même
logique l’anc. haut all. wfhsila, d’où all. famille que guilleri « chant du moïneau »,
Weichsel « griotte »; mais les formes ro- 1560. Sans doute dér. de l’a. fr. guiller
manes et dialectales soulèvent de grosses « tromper ». Dans le premier passage qu’on
difficultés, ef. moyen fr. (textes de l'Ouest connaît, l’adj., au fém., a le sens de « sédui-
et de la région rhodanienne) et angevin sante, pimpante ». V. guilledou.
guindole, prov. guindol(o), esp. guinda
GUILLERI, v. le préc.
« griotte », etc. — Dér. : guignolet, 1829,
peut-être d’origine angevine, le gugnolet GUILLOCHER, 1558 (d’après le dérivé
d'Angers ayant eu une réputation parti- guillochis). Probabl. empr. de l’it. ghioc-
culière. ciare « dégoutter », variante dialectale de
311 GUITARE

gocciare née sous linfluence de ghiotto GUINGOIS, 1442 (au xve et xvIes. aussi
« glouton ». L'it. goccia, comme le fr. goutte, gingois). V. guinguette.
désigne aussi un ornement architectural,
et c’est avec ce sens que la forme de l'Italie GUINGUETTE. 1697, aussi maison guin-
sept. ghioccia paraît avoir passé au fr. gueïle, 1750. D'abord fém. de l’adj. guin-
avec le verbe. Guilloche, fém., « outil à guet « étroit », issu de ginguet « trop court
guillocher », 1866, est tiré du verbe. (d’un habit) », 1694, par assimilation con-
sonantique. Ce dernier phénomène est très
GUILLOTINE, 1790. Dérivé de Guillotin, fréquent dans cette famille de mots, comp.
nom du médecin qui préconisa l’usage de m. fr. a gingois « de travers » à de gquingois
cette machine. — Dér. : guillotiner, 1790. (tous deux au xv* s.), ginguet « vin aigre-
let » (xvi®-xIx°5s.), à guingue, id. (XVIIe 8.),
GUIMAUVE, xri° (sous la forme wid- ginguer « sauter » à guinguer (poit.) et
malve). Comp. d’un premier élément qui ginger (champen.) ; ce dernier montre du
est issu du lat. hibiscus « mauve » (du grec reste que l’assimilation peut agir aussi en
hibiskos), altéré par croisement avec gui, sens inverse. Le verbe ginguer, attesté
et de mauve qui a été ajouté pour éviter depuis le xv® s., est une déformation de
une confusion de sens, cf. de même it. mal- giguer, XIV°, par analogie avec le couple
vavischio à côté de vischio « gui, glu ». regiber-regimber, v. celui-ci. Le verbe a. fr.
giguer « sauter » est dér. de gigue « instru-
GUIMBARDE, 1622, où il désigne une ment de musique », soit par comparaison
sorte de danse ; a désigné aussi un instru- du mouvement des personnes avec celui de
ment de musique, d’où, semble-t-il, par l’archet, soit parce qu’on danse aux sons
suite, différents objets et notamment une de la gigue. L’idée du sautillement a cer-
sorte de voiture (sens qui apparaît dès 1723, tainement aussi été le point de départ de
dans la région lyonnaise) ; dès 1620, désigne guingois.
l'héroïne d’un récit romanesque. Comme
le prov. guimbardo apparaît au xvrie s. GUIPURE, 1393. Dér. de l’anc. verbe
au sens de « danse », il est fort probable guiper, 1350, « recouvrir de soie, de lai-
qu'il dérive du verbe guimba « sauter, ne, etc. », encore dans les dict. Représente
gambader », attesté dès le xvrre s. à Tou- le francique wipan «envelopper de soie, etc.,
louse ; celui-ci correspond à l’a prov. en filant », cf. moyen haut all. wifen, « en-
guimar « bondir », lequel représente le rouler, tortiller ».
gothique *wimman « se mouvoir vive- GUIRLANDE, 1540. Empr. de lit.
ment », correspondant au moyen haut all. ghirlanda, lequel est empr. de l’anc. pr.
wimmen (d'où l’all. wimmeln). Le verbe guirlanda « couronne faite de fils d’or ». Le
occitan a modifié -m- en -mb- sous l’in- mot apparaît en gallo-roman sous deux
fluence de cambo « jambe ». Cf. aussi gui- formes, anc. pr. guirlanda et anc. fr.
bole. garlande. Ces mots sont formés sur l’anc.
francique *wiara « ornement fait de fils
GUIMPE, xu° (alors guimple). Fran- d'or », devenu “*weara vers 800; cette
cique *wimpil, cf. all. Wimpel « bande- forme a fourni la variante avec gar-.
rolle ». En francique ea est devenu ia, ie au IX°S. ;
GUINDER. xre (sous la forme windé). d'une forme “*wiera, qui doit être du
Propr. terme techn. de la marine signifiant ixe s., est née la forme guirlanda. De
« soulever un fardeau au moyen d’une ma- ga(r)lande dérivent galandage, 1785, mot
chine », d’où le sens fig. moderne, dès le techn. de la construction, attesté en
xviie s. Anc. scandinave vinda « hausser ». normand et, avec le suff. -ure, en bour-
Appartient à la même famille guindeau, guignon et en franc-comtois depuis 1689,
« esp. de cabestan », 1768, issu par substi- et garlandage, 1866, mot techn. de la
tution de suff. de l’a. fr. guindas, xr1°, qui marine. — Dér. : enguirlander, 1555.
représente l’anc. scandinave vindaäss, comp.
de vinda « tourner » et ä4ss « barre ». GUISE, vers 1050 (Alexis). Germ. *wisa,
cf. all. Weise « manière »; d’où aussi it.
GUINÉE, 1669. Empr. de l’angl. guinea, esp. guisa. — Dér. : déguiser, xr1°, propr.
propr. nom d’une monnaie d’or, frappée « changer sa manière d’être », d’où « se
en 1663 avec de l’or venant de la Guinée rendre différent (en partic. au moyen d’un
par la Monnaie Royale d'Angleterre pour vêtement )»; de là déguisement, vers 1200.
le compte de la Compagnie de Guinée. Le
sens de « toile bleue de coton », 1701, vient GUITARE, 1360. Empr. de l’esp. gui-
du fait qu’on se servait de cette toile com- larra, qui est empr. de l’arabe gftära (du
me de moyens d'échange avec les nègres de grec kithara). Auparavant et jusqu’au
Guinée. xviies. plus fréquent guiterne, xir1° (Rose),
encore terme de marine, forme dont la ter-
GUINGAN, 1723. D’après Raynal, c'était minaison est probabl. prise dans les nom-
une toile de coton blanche qui venait de breux noms bibliques et sarrazins (dans les
l'Inde; il n’y a donc pas de rapport avec Chansons de Geste), comme Holoferne, Lo-
Guingamp, ville de Bretagne, bien que quiferne. On a voulu expliquer une autre
celle-ci ait été renommée pour ses tissus forme, quinterne, par l'influence de quinte,
au xvire s. Le mot a été certainement une cinquième corde ayant été ajoutée à
apporté en Europe par les Portugais, la guitare ; seulement cette transformation
la forme portugaise guingäo étant attestée n’est survenue qu'au xv® s., tandis que
depuis 1552. Mais la forme employée quinierne remonte jusqu’au xrr1e. — Dér. :
par les langues des Indes reste inconnue. guitariste, 1829.
GUIVRE 312

GUIVRE. Jusqu'au xve s. désigne un GYMNASTE, 1543 (Rab.), comme terme


serpent dont il n’est pas facile de déter- d’antiquité ; sens moderne, 1866, d’après
miner l’espèce ; depuis, ne survit que com- gymnastique. Empr. du grec gymnastés
me terme de blason ; au moyen âge a des « maître de gymnastique ».
formes variées wire, vivre, etc.; mais la
forme givre est une erreur des dict. Lat. GYMN(O)-. Premier élément de mots
vipera, altéré en *wipera avec une pronon- sav. comp., tels que Gymnocéphale, 1836,
ciation germ., cf. anc. haut all. wipera, tiré du grec gymnos « nu ».
lui-même empr. du lat. V. vipère. GYNÉCO-, GYN(O). Premiers éléments
GUTTA-PERCHA, 1845. Empr. de de mots sav. comp., tels que gynécologie,
l’angl. guita-percha, adaptation des mots 1666 ; gynophore, id., etc., tirés du grec
malais getah « gomme » et percha, nom de gyné, gynaikos, « femme ».
l’arbre qui donne cette gomme, Gutla a été GYNÉCÉE, 1701. Empr. du lat. gynae-
francisé en gulle qui existe dans le comp. ceum, ou directement du grec gynaïkeion,
gomme-gutte, 1704, et le dér. guttier, 1798, v. le préc.
arbre de Ceylan qui donne cette gomme.
GYPAËTE, 1800. Fait avec les mots
GUTTURAL, 1578. Dér. sav. du lat. grecs QUypSs, gypos « vautour » et aelos
gullur « gosier ». « aigle ».
GUZLA, 1791. Mot croate. GYPSE, 1464 (écrit gips). Empr. du lat.
GYMNASE, xive s. (sous la forme gy- gypsum (du grec gypsos) qui a donné les
naise), comme terme d’antiquité ; sens mo- formes pop. du nom du plâtre gesso de
derne, 1792 ; gymnastique, xive (Oresme) ; l’it., yeso de l’esp., geis del’a. pr. (qui survit
gymnique, 1542. Empr. du lat. gymnasium, dans la région du Languedoc), cf. aussi en
gymnasticus, gymnicus (du grec gymna- a. fr. les formes gip et gif, d’où gy, encore
sion, gymnastikos, gymnikos, dér. de gym- en 1642, et des formes de ce type en franco-
nos « nu », les exercices athlétiques se fai- provençal et en provençal.
sant chez les Grecs le corps nu). GYROSCOPE, v. télescope.
H
HABILE, xive (Oresme), au sens de HABLER, 1542. Empr. de l'esp. hablar
« propre à », sens aujourd’hui vieilli; d’où « parler » (lat. fabulari), qui a pris en fr.
le sens moderne, xv°. Empr. du lat. habilis le sens de « parler avec emphase »; d’une
« maniable, apte » (de habere, au sens de façon analogue, l’esp. a empr. le fr. parlar
« tenir »). L’acception jurid. est née dans et lui a donné le sens de « bavarder, man-
le lat. jurid. du Bas-Empire. Habile a éli- quer de discrétion ». — Dér. : hâblerie, 1628
miné l’a. fr. able « apte, etc. », représentant (Sorel) ; hâbleur, 1555.
pop. du lat. habilis (d’où angl. able). —
Dér. : habileté, 1539 ; du xx au xvies., HACHE. Francique *häppja, cf. anc.
on a dit beaucoup habilité, d’après le lat. haut all. happa « couteau en forme de
habilitas « aptitude », et la langue jurid. faucille » ; les formes du wallon fh)èpe et
l’a conservé, en rapport avec habile. — de l’a. pr. apcha confirment cette étymo-
Comp. : malhabile, fin xve. V. inhabile. logie. — Dér. : hacher, vers 1300 (du xrr®
au xviie s. dehachier), hachis, 1538, ha-
HABILITER, vers 1300; habilitation, choir, 1471, hachure, vers 1440 ; hachette,
1373. Empr. du lat. jurid. du moyen âge XIIIe ; hachereau, xve.
habilitare (attesté à basse ép. au sens de HACHISCH, 1556. Empr. de l'arabe
« rendre apte »), habilitatio. — Comp. : hachîch, propr. « herbe », dit du chanvre
réhabiliter, 1234 ; réhabilitation, 1401. indien par raccourcissement d’une expres-
HABILLER, v. bille. sion qui signifiait « herbe des fakirs », v.
assassin.
HABIT, x11°. Empr. du lat. habilus, au
sens d’ « habillement », propr. « manière HADDOC, aiglefin, ordinairement fumé,
1708 (alors hadock). Empr. de l’angl.
d’être » (du verbe habere au sens de « se
tenir »), sens parfois repris au moyen âge ;
haddock ; usuel depuis par suite de la con-
désignait surtout alors l’habit des reli- sommation du haddock fumé ; apparaît dès
le x111° s. sous la forme hadoï que Littré a
gieux. Habit signifie souvent aussi « de-
conservée, cf. aussi hadou et adot, au xvies.;
meure »; mais, en ce sens, c’est probable-
ment un mot tiré d’habiter. on a pensé pour l’étymologie du mot angl.
à l’a. fr. adoub (du verbe adouber) au sens
HABITACLE, x s. Empr. du lat. de de « préparation », v. adouber, mais il y
basse ép., surtout ecclésiastique, habita- a des difficultés de forme ; et on ne voit
culum, v. le suiv. pas qu’adouber se soit dit de la préparation
des poissons.
HABITER, x11° ; habitation, id. Empr.
HAGARD, 1393. Au sens propre dési-
du lat. habitare, -atio (de habere, au sens
de « se tenir »). — Dér. : habitable, xrr°, gnait dans la langue de la fauconnerie
in-, 1360 ; habitant, xr1° ; habitat, 1808;
l'oiseau de chasse resté sauvage et farou-
inhabité, 1396. che ; sens fig. à partir du xvi® s. À été
compris comme un dér. d’une forme nor-
HABITUDE, xive (Oresme), au sens de mande ou picarde de haie, à en juger par
« complexion du corps », sens qui se ren- le texte du Ménagier : Esprevier hagart est
contre jusqu’au xvI® s.; sens moderne au celluy qui est de mue de hayes, c’est-à-dire
xvi€ s. Empr. du lat. habitudo « manière « qui demeure pendant la mue dans les
d’être, complexion » (de habere au sens de haies ». C’est sans doute une étymologie
« se trouver dans tel ou tel état »), d’où pop. ; le mot paraît être empr. d’une langue
s’est développé le sens propre au fr., en germ., cf. moyen angl. hagger « sauvage,
rapport avec les suiv., et probabl. par l’in- décharné, faucon hagard » et all. Hagerfalk
termédiaire du lat. scolastique. Avoir l’ha- « faucon hagard ».
bitude de, Xvri°, a remplacé l’anc. verbe HAGIO-. Premier élément de mots sav.
souloir, dont La Bruyère, XIV, 73, cons- comp., tels que hagiologique, 1732, tiré du
tate la disparition : (« L'usage a préféré... grec hagios « saint », ou de mots empr. tels
être accoutumé à souloir »), lat. solère, con- que hagiographe, vers 1500.
servé par l’it. solere.
HAIE. Francique *hagja, cf. anc. haut
HABITUER, vers 1320 (d’abord « mu- all. hegga (la forme “*haga, cf. all. Hag,
nir », sens moderne depuis Oresme) ; habi- qu’on a supposée autrefois, est exclue par
tuel, xiv°, d’après l’adv. habituellement. le poitevin et le berrichon age). Haie comme
‘Empr. du lat. médiéval habituare, habi- nom d’une pièce de la charrue est attesté
tualis (de habitus au sens de « manière depuis le xtr1e s.; depuis 1835, la forme
d’être », v. habit); inhabituel, 1829. — berrichonne est souvent employée par les
Dér. : réhabituer, 1549. auteurs d'ouvrages agricoles.
HAILLON 314

HAILLON, 1404. Empr., avec allonge- HALLEBARDE, 1448. Empr. du moyen


ment au moyen du suff. -on, du moyen haut all. helmbarte, littéral. « hache (barte)
haut all. hadel, mot de la famille de l’all. à poignée (helme, halm) ». — Dér. : halle-
Hader. Le simple hailles est encore très bardier, 1483.
répandu dans les parlers du Nord.
HALLIER, « réunion de buissons épais »,
HAÏR. Francique *hatjan, de même fa- xve, Mot d’origine germ., cf. le néerl.
mille que l’all. hassen, l’angl. io hate. — haazelara et l’all. dialectal (de Westphalie)
Dér. : haine, xue (haine), d'où haineux, Hessler qui ont la même formation ; c’est
id. (haïnos) ; haïssable, 1569. un dér. du simple qui est à la base de hasla
« rameau » de la Loi ripuaire, francique
HAIRE. Francique *hdrja, cf. anc. haut *hasal, cf. all. Hasel « coudrier »; cf. l’a.
all. hârre « vêtement grossier, fait de poil », fr. halot « buisson, bûche » ; on trouve en-
dér. du radical qui se trouve dans l’all. core une trace de l’s dans arlé « jeune bali-
Haar et l’angl. hair « cheveu ». veau qu'on laisse après une coupe, pour
refaire une futaie », Saint-Pol (Pas-de-
HALBRAN, x1v® (halebran). Empr. d’un
moyen haut all. *halbereni, littéral. « demi Calais).
canard », ainsi nommé à cause de sa peti- HALLUCINÉ, 1611; hallucination, xvrr°.
tesse, mot qu’on restitue en s'appuyant Empr. du lat. hallucinatus (part. passé du
sur l’all. moderne Halb-ente « plongeon »; verbe hallucinari « avoir des hallucina-
le prov. alabran est une adaptation du fr. tions »), hallucinalio.
HALEINE. Vers le xve s. ; d’abord alei- HALO, vers 1360. Empr. du lat. halos
ne (Roland); h est due à une réfection (du grec halôs de même sens, propr.
orthographique d’après le lat. halare « souf- « aire »).
fler ». Tiré de l’anc. verbe alener, d’où hale-
ner, encore dans les dict., lat. anhelare, HALTE, 1585. Empr. de l’all Hali,
devenu “*alënare par métathèse (et non masc., « arrêt », subst. verbal de halten
d’après halare, qui avait disparu de la « s'arrêter » ; la forme alle, usuelle au xvi®
langue parlée), d’où aussi it. alenare, a. pr. et au xvrre s., notamment dans la locution
alenar ; on trouve à la fois anela dans un faire alte, 1578, est due à l’it. allo, qui
texte carolingien et alena dans une glose s'emploie à la fois comme interjection ou
du x°5s. dans fare alto, empr. de l’all. comme halte.

HALER, terme de marine, vers 1150. HALTÈRE, 1808, une première fois Rab.
Empr. de l’anc. bas all. *halon, cf. l’anc. I, 23 : alieres. Empr. du plur. lat. halieres
néerl. halen; les langues scandinaves, (du grec haltéres « balanciers pour la danse
cf. suédois hala, ont également empr. ce et le saut »).
mot qui n'existe pas en anc. scandinave; HAMAC, 1746; antér. amacca, 1533.
l’angl. {o hale vient du fr. En norm. le dans un récit de voyages ; hamacque, 1587,
verbe a le sens général de « tirer ». — Dér. : dans une histoire des Indes. Empr. de
halage, 1488 ; haleur, 1680 ; déhaler, terme l'esp. hamaca, empr. lui-même du caraïbe
de marine, 1529. de Haïti. L'’all. Hängemaïle et le néerl.
HALER, terme de vénerie, v. harasser. hangmat sont des altérations du mot esp.
par étymologie pop.
HÂLER, xue (halé; en outre au moyen
âge harler et haller) ; au moyen âge signifie HAMEAU, xrrre. Dér. de l’a. fr. ham,
aussi « dessécher au moyen du feu ». Le attesté surtout dans des noms de lieu de
postverbal hasle, xrr°, d’où le fr. moderne ‘ la France septentrionale. Francique *haim,
hâle montre, comme les formes harler, hal- cf. all. Heim « domicile, foyer », angl. home.
ler, que le verbe contenait une s étymolo- HAMEÇON, vers 1100 fameçon). Dér.
gique. Très probabl. du lat. *assulare, dér. de l’a. fr. ain (encore usité dans beaucoup
du lat. class. assare « rôtir ». L’h- provient de parlers), lat. hämus, avec un suff. fait
probabl. d’un croisement avec le néerl. sur le modèle de mots tels que poinçon,
hael « desséché » ; le mot vit en effet surtout écusson ; a pris de bonne heure, comme le
dans le Nord. — Dér. hâle ; déhâler « enle- simple ain, une À orthographique d’après
ver le hâle », 1690. le lat. It. amo.
HALETER, v. aile. HAMMAM, 1859. Empr. du mot arabo-
HALL, 1672, en parlant de choses an- turc hammdäm « bain chaud ».
glaises ; valeur générale seulement dans la HAMPE « manche de lance, etc. », xvi®
deuxième partie du xix° s. Empr. de (Amyot). Altération de l’a. fr. hante « lance,
l’angl. hall, de même origine que le mot bois de lance, manche, tige, etc. », encore
d’où vient halle. usité au xviie s., peut-être par croisement
HALLALI, 1751. Comp. de hale, forme avec empe, forme lorraine d’ente « greffe »,
secondaire de hare « cri pour exciter les d’après leur sens voisin. Hante (du xr° au
chiens à la poursuite » (comp. haler « exci- XIV® s. aussi hansie) représente le lat. hasta
ter les chiens » attesté depuis le xve s.); « lance, tige » altéré par un croisement
la deuxième partie du mot représente le avec le francique hant « main » (l’it., l'esp.
fr. à lui, sous sa forme réduite à li. et l’a. pr. ont la forme non altérée asia) ;
une forme altérée hanse désigne le corps de
HALLE. Francique “*halla. — Dér. l’'épingle avant que la tête y soit mise, et
hallier, vers 1260. une autre forme hâte (hasie au xrre s.), une
315 HARCELER

broche de bois pour faire rôtir la viande, d'Anne Radcliffe (1764-1823) et autres ;
d’où la viande elle-même. (H)ante et toutefois le fr. a aussi créé des dér. qui
(h)ampe ont encore le sens de « manche » donnent dans ce sens-là, cf. p. ex. le norm.
dans les parlers de la France septentrionale. hant « revenant ». — Dér. hantise, XITT OS
Il est visible que ces formes ont exercé les le sens récent d’ « obsession » vient du sens
unes sur les autres des actions réciproques, nouveau du verbe.
RE sont difficiles à élucider dans le
ail. HAPPER, xue. Existe aussi dans les
langues germ. voisines, cf. néerl. happen
HAMPE, terme de vénerie et de bou- « saisir »; mais le verbe fr. étant attesté
cherie, 1270. Origine incertaine. Peut-être plus tôt que les mots germ., il doit être
issu d’un croisement de l’anc. haut all. wam- issu en fr. d’une onomatopée happ-. De-
pa (d’où all. Wambe, autre forme de Wam- puis que les mots d’origine germ. avaient
me « fanon, peau du ventre, etc. », cf. le donné au fr. la consonne h, une onomato-
vosgien wambe « fanon ») avec le francique pée commençant par h- était possible. —
*hamma, cf. anc. haut all. hamme « jam- Comp. : happe-chair, xvrre (La Fontaine) ;
bon ». Ce croisement aurait dû se produire happelourde, 1532 (Rab.), aussi « pierre
dans le francique parlé dans la France sept. fausse » ; formé comme aïttrape-nigaud, de
avant 800. l’impér. happe et de lourde, appellation, au
HAMSTER, xvine s. (Buffon). Empr. sens de « sotte », adressée aux femmes qui
de l’all. hamster. se laissent prendre à l'apparence.
HAN. Onomatopée, relevée seulement HAQUENÉE, 1367. Empr. du moyen
en 1835, mais évidemment plus ancienne. angl. haquenei, cf. le lat. d'Angleterre ha-
queneia, tiré de Hackney, nom d'un village
HANAP. Francique *hnap, cf. all. Napf d'autrefois aux environs de Londres dont
« écuelle » et hanappus dans une glose du les chevaux étaient renommés.
IX£ 8. ; d’où aussi a. pr. enap.
HAQUET, vers 1480. Peut-être emploi
HANCHE. Germ. *hanka, qu’on restitue métaphorique de haquet « sorte de cheval »,
d’après le moyen néerl. hanke « hanche ». et haque, xv° s. et tous deux probabl. tirés
S’est substitué au lat. coxa (v. cuisse), qui du préc.
avait remplacé le lat. femur, lequel était
devenu homonyme de “*femus (pour fi- HARAKIRI, 1907. Mot japonais dési-
mus, V. fumier). Aussi it. esp. a. pr. anca. gnant une manière spéciale de se suicider.
— Dér. : déhancher, 1564, déhanchement, HARANGUE, vers 1500. Empr. de l’it.
77e aringare « haranguer », aringa, qui sont dér.
HAND-BALL, 1930. Empr. de l’angl. d’aringo « place publique pour les courses
hand-ball « balle dont on joue avec les de chevaux et pour les assemblées popu-
mains » (contraire de foot-ball). laires » (déjà chez Dante). Les autres
langues rom. ont empr. ces mots de l’it.,
HANDICAP, 1827. Empr. de l’angl. han- qui les a tirés du gothique *hriggs (pro-
dicap, altération de hand in cap « main noncé *hrings), forme correspondant au
dans le chapeau », primitivement jeu de francique hring, v. rang. L'a est né,
hasard, appliqué ensuite aux courses de déjà en gothique, entre les deux consonnes,
chevaux en 1754. — Dér. : handicaper, comme dans hanap. Le h- de harangue
1854, au sens propre ; sens fig., 1889 ; tous -s’explique peut-être par le fait que l’anc.
deux d’après l’angl. prov. connaissait aussi le mot sous la
HANGAR, 1337 (à Corbie). Attesté en forme arengua (1300) et que l’analogie de
Picardie par le nom de lieu Hangart dès beaucoup de mots, qui ont un k- en
1135. Y est sans doute d’origine francique français, mais pas en prov., a fait naître
et s’est répandu plus tard en franc. Repré- cette initiale en franç. — Dér. : haranguer,
sente un comp. *haim-gard « clôture au- 1414, harangueur, 1527.
tour de la maison » (de haim, v. hameau, et HARAS, xr1° (écrit haraz). L'explication
gard, v. jardin). par l’arabe faras « cheval » n’est pas vrai-
HANNETON, xie. Dim. du francique semblable ; l'arabe a aussi haras, collectif
*hano « coq », cf. néerl. leliehaantje « sca- de haris « gardien », parfois « valet d’é-
rabée qui vit sur les lis », all. de la Rhénanie curie » ; mais le sens de « haras » manque.
Hahn « punaise des baies ». Le hanneton Probabl. formé avec le radical qui se
ne vit que dans les régions septentrionales trouve dans haridelle. Signifie « troupeau »
et n’a pas eu de nom lat. dans l’extrême Ouest.
HANSE, vers 1240 (à Saint-Omer). HARASSER, 1527. Dér. de l’anc. verbe
Empr. du moyen bas all. hansa. L’adij. harer, terme de vénerie, « exciter les
hanséatique correspond à l’all. hansealtisch. chiens », lui-même dér. de hare « cri pour
exciter les chiens », interjection qui était
HANTER, xr1°. Anc. scandinave heimia sûrement déjà francique (hara) ; la forme
«retrouver » et aussi « ramener les moutons haler (pour harer, depuis le xve s.) est
du pâturage d'été à l’étable » (verbe qui peut-être due à une dissimilation des
contient le radical qui est dans hameau) ; deux r, cf. aussi hallali.
l’angl. to haunt vient du fr. Le sens de
‘« fréquenté par les esprits » qu’a le part. HARCELER, 1493. Dér. de herser qui,
dans maison hantée, d’où sont issus des sens en a. fr., a fréquemment le sens de « tour-
nouveaux du verbe, est peut-être un angli- menter ». Pour la voyelle cf. berrichon har-
cisme, introduit par les romans fantastiques ser « herser ».
HARDE 316

HARDE, x (sous la forme herde). HARIDELLE, xvie (écrit aridelle). Con-


Francique *hérda, cf. all. Herde « troupeau » tient le radical har- qui se trouve dans de
sens encore usuel dans les parlers du Nord- nombreux mots dialectaux désignant le
Est. cheval, cf. aussi haras. L’a. fr. harace, tra-
duit dans une glose equus spadix « cheval
HARDES, 1539. Empr. du gascon, où ce bai », appuie l’étymologie par l’anc. scan-
mot est connu au moyen âge sous la gra- dinave hdrr « qui a les cheveux gris » ; mais
phie fardes, mais prononcé en gascon propr. la terminaison des différents mots n’est pas
dit avec h-. Le gasc. l’a probabl. empr. de claire.
l’arag. farda « habit ». C’est la même fa-
mille de mots que fardeau, v. ce mot. HARMONICA, 1765. Empr. de l’angl.
harmonika, fait par B. Franklin sur le lat.
HARDI. Part. passé d’un ancien verbe harmonica, fém. de l’adj. harmonicus « har-
*hardir « rendre dur », de là « rendre cou- monieux », pour désigner l'instrument à
rageux », qui représente un. francique lames de verre inventé en Allemagne et
*hardjan « rendre dur », de l’adj. harit. — perfectionné par lui.
Dér. hardiesse, xr1°; enhardir (s’), xxre.
HARMONIE, xr1°. Empr. du lat. har-
HAREM, 1663 (sous la forme haram). monia (mot d’origine grecque). — Dér. :
Empr. de l'arabe haram, propr. « ce qui est harmonieux, vers 1400 (Froissart) ; har-
défendu » et de là « femmes qu’un homme moniser, xv°, peu usuel au XVII® S., COnCur-
étranger à la famille n’a pas le droit de rencé au xvirie et au début du xIxe par
Voir ». harmonier (archaïque depuis) ; harmo-
nium, 1840, créé par Debain, facteur d’or-
HARENG. Francique *haring, cf. néerl. gues (1809-1877).
Haring ; aringus est déjà attesté en lat. de
basse ép.; de là aussi it. aringa, a. pr. HARMONIQUE, xive (Oresme). Empr.
arenc. La côte de la Manche dit héreng, du lat. harmonicus (du grec harmonikos). —
forme qui représente une autre forme Comp. : philharmonique, 1739, à propos
germ., avec e au lieu de l’a, cf. all. Hering. d’une académie de Vérone ; 1823, au sens
— Dér. : harengère, 1226. moderne.

HARGNEUX, x11° s. (alors hergnos), HARNAIS, au x1° et au x11°s. écrit plus


hargneux depuis 1393. Au xve et au xvre le souvent herneis. Représente un anc. scan-
fr. possède encore un verbe hergner et un dinave *hernest « provisions pour l’armée »
. Subst. hargne « dispute » (encore dialectal (cf. anc. scand. vegnest « provisions pour la
dans ce sens et dans celui d’ « averse »). La route », veg « route »). La 2e syllabe a été
famille représente probabl. un francique modifiée d’après le suff. -eis. Au moyen âge
*harmjan qu’on peut supposer d’après surtout «équipement d’un homme d'armes»,
l’anc. haut all. harmjan « insulter, tour- ensuite aussi de son cheval, et finalement,
menter », qui a subi l'influence d’un autre dès 1260, “équipage d’un cheval d’attelage».
mot, peut-être de l’a. fr. hergne « hernie, It. arnese, esp. arnés, all. Harnisch, angl.
bosse » (du lat. hernia), ce qui expliquerait harness ont été empr. au temps de l'éclat de
le -gn- et la voyelle e (au lieu de a) de beau- la chevalerie française. — Dér. : harna-
coup d’anciennes formes. Le verbe et le cher, vers 1200 (harneschier), d’où l’anc.
subst. semblent s'être perdus par la suite, forme du subst., harnas ; pour la dérivation
et la famille s’est formée à nouveau plus cf. maraîcher, d'où harnachement, 1561,
tard autour de l’adj., seul resté vivant du déharnacher, xr1°, déharnachement, 1636,
XII© au XvV° $s. — Dér. : hargnerie, vers enharnacher, xrrre.
1770 (Rousseau).
HARO, xu1° (harou; souvent hareu au
HARICOT, sorte de ragoût, xive (heri- moyen âge). Dér. de hare, v. harasser. —
coq de mouton). On rapproche l’a. fr. hari- Devenu, dans l’anc. Normandie, un terme
goier, haligoter « couper en morceaux », judiciaire, sorte de cri d'appel.
harigot(e), hal- «ornement tailladé ». Pour HARPE, xri°. Germ. “*harpa, cf. all.
l'étymologie v. le suivant. Harfe, angl. harp ; le mot germ. a été intro-
duit par les légionnaires d’origine germ.,
HARICOT, « sorte de fève » (introduite Cf. harpa chez Fortunat, vie siècle, d'où
en Europe de l’Amérique), 1651 (dès 1642 aussi it., esp. arpa. — Dér. : harpiste, 1677.
febves de haricot). Cette première forme
est due très probabl. au fait que les hari- HARPIE, xive (sous la forme arpe).
cots entrent souvent dans la composition Empr. du lat. harpya (mot pris au grec).
du ragoût de mouton appelé haricot (aussi Comme nom commun, xvuie; déjà lat.
hericot, dès 1393) ; haricot dans ce dernier
sens est dérivé du verbe a. fr. harigoter HARPILLER, HARPIGNER, v. le suiv.
« mettre en lambeaux », lequel est un dér. HARPON, xni°, alors en anglo-normand,
du francique *hariôn « gâcher », prononcé rare jusqu'au xv°s., encore vivant, surtout
*harijôn (d’où l’all. verheeren) ; le haricot dans les parlers de l'Ouest, comme aussi le
de mouton doit son nom au fait que la verbe harper (du x11° au xvrrre s.) « em-
viande y est coupée en des morceaux poigner ». De celui-ci sont dér., aux xvrre
irréguliers. La forme fève de calicot, 1654, et xvirIe s. des verbes comme se harpigner,
est due à une de ces fréquentes confu- se harpiller, se harpailler « se quereller ».
sions géographiques qui a fait croire que ce En raison de la géographie de cette famille,
légume venait des Indes orientales, ce qui de son éclosion tardive et de la prononcia-
a fait introduire le nom de la ville Calcutta. tion par h-, ces mots sont dér. très probabl.
317 HAVRESAC

d’un représentant de l’anc. scandinave are ; depuis le x° s. au sens d’ « écouter


harpa « crampe, action de tordre » (dans favorablement et accomplir une prière »,
munn-harpa «action de tordre la bouche »). sens qui paraît venir des traductions de la
Le Midi possède encore un mot arpa « grif- Bible où exaucer répond souvent à exaudire,
fe » (répandu dans différents sens aussi en écrit exaucer depuis le xvir® s. ; rehausser,
Espagne et en Italie), lequel représente le XIIIe ; rehaussement, 1552; rehaut, id.,
lat. harpe « faucille, faucon », empr. du terme de peinture, 1621 ; surhausser, xrr° ;
grec harpe. Le mot lat. et le mot d’origine surhaussement, 1578.
germ. se sont rencontrés et superposés
l’un à l’autre de sorte qu'il n’est plus pos- HAUSSE-COL, xve (houscot ; d'où haus-
sible de les séparer nettement. — Dér. : colz, 1447 ; hochecol, 1415). En raison des
harponner, 1613 ; harponneur, 1613. formes anc. et du premier sens « pièce de
fer qui garnit le cou », probabl. empr. d’un
HART, xre. Francique *hard « filasse », moyen néerl. *halskote, propr. « habille-
cf. moyen néerl. herde, de même sens, ment du cou » ; mais il est surprenant que
formé avec le radical qui est dans l’all. ce mot ne soit pas attesté. En tout cas le
Haar « filasse » (peut-être le même mot mot a été rapidement compris comme un
que Haar « cheveu », v. haire). — Dér. : comp. de hause (d’où hoche) et de col.
ardillon, xv®, antér. hardillon, xtrre, glosé
lingula « languette », propr. « petit lien »,
HAUSSIÈRE, 1382; on trouve aussi
aussière et, par altération, hansière chez
cf. it. ardiglione (probabl. empr.), a. pr. Bernardin de Saint-Pierre, cf. aussi le mi-
ardalhon « ardillon ».
lanais antsana. Probabl. lat. pop. *helciaria,
HASARD, x11° (écrit hasarl). Empr. de dér. de helcium « corde de halage » (qu'on
l'arabe az-zahr « le dé, le jeu de dés » par rapproche du grec helkein « tirer »), altéré
l'intermédiaire de l’esp. azar, relevé no- de bonne heure d’après hausser, cf. it.
tamment dans le libro del ajedrez (jeu alzaia « espèce de câble ». Le prov. aussiero
d'échecs) d’Alphonse le Sage (1283), la vient du fr.
plus anc. traduction européenne d’un livre HAUT. Lat. altus. L’h du fr. est dû à
de jeux oriental ; mais l’h n’est pas expli- ce que allus a recu à l’époque mérovin-
quée. Le sens propre « jeu de dés », d’où gienne l’h de l’adj. germ. de même sens,
« coup heureux à ce jeu », dominant en francique, *hôh, cf. all. hoch, angl. high. It.
a. fr. a cédé la place au sens général de esp. alto. — Dér. : hautain, xr1°, signifie
« risque, chance », déjà courant au moyen « haut » au sens physique jusqu’à la fin
âge, et qui a passé dans les langues voi- du xvit s.; hautesse, xrI° (au sens de
sines : it. azzardo, all. Hasard, angl. hazard. « hauteur »), au sens moral et comme titre
— Dér. : hasarder, 1407 ; hasardeux, 1544, honorifique, dès le xrr1° s., aujourd’hui
au moyen âge hasardeur. hors d’usage ; hauteur, xr1°. — Comp. :
HASE, 1556 (en 1547 en wallon). haut-bois, vers 1500 (écrit auxboys) ; hau-
Empr. de l’all. Hase « lièvre ». boïste, 1836 ; d’après l’all. Hautboist, 1775 ;
haut-de-chausses, 1546 (Rab.); haut-le-
HASTE, 1704. — Empr. du lat. hasta cœur, 1877 ; haut-le-corps, 1601 ; haut-de-
« lance ». — Dér. hasté, 1778. forme, ou haute-forme, abréviation de cha-
peau haut-de-forme ou à haute-forme, XIX° ;
HÂTE. Francique *haist « violence », haut-le-pied, xvrrie, locution adverbiale,
cf. gotique haïfsts «lutte ». L’all. Hast vient puis adj. ; au sens propre se disait de che-
du fr. — Dér. : hâter, vers 1080 (Roland) ; vaux ni attelés, ni montés, a passé dans
hâtif, id. la langue de la navigation, puis dans celle
HAUBAN, xr1° (écrit hobent). Anc. scan- des chemins de fer : locomotive haul-le-
dinave hôfudbendur, plur. de hüfudbenda pied ; contre-haut (en), 1701 ; haute-contre,
« câble principal d’un navire », dont les 1511 (haut-).
deux éléments de composition correspon- HÂVE ; aussi havre, jusqu'au xvire s.
dent à l’all. Haupl « tête » et Band «lien ». Francique “*haswi, supposé d’après le
— Comp. : galhauban, 1634 (aussi cale- moyen haut all. heswe « blême » et l’anc.
hauban ; le début du mot est l’impér. du angl. hasva.
verbe caler).
HAVENEAU, 1713. Autre forme de ha-
HAUBERT (halberc au xr1e s.). Fran- venel, « sorte de filet », mot d’origine scan-
cique *halsberg, littéral. « ce qui protège dinave, dont la première partie est hafr
(cf. all. bergen « mettre en sûreté ») le cou « engin de pêche », la deuxième le germ.
(all. Hals) », à supposer d’après moyen nel « filet ».
néerl. halsberch. Dès les plus anciens textes
on trouve des formes sans h et aussi osberc, HÂVRE, xre (sous la forme havene),
empr. de l’a. pr. ausberc, par suite du com- d’où havre de bonne heure. Empr. du
merce d'armes que faisait le Nord avec le moyen néerl. et du moyen angl. havene,
Midi. cf. all. Hafen.
HAUSSER. Lat. pop. *alliäre, dér. de HAVRESAC, 1672, d'après Ménage aussi
altus « haut » avec l’h de haut. It. alzare. häbresac, forme presque seule vivante dans
— Dér. et Comp. : hausse, x1r1° ; hausse- les patois. Empr. de l’all. Habersack, propr.
ment, 1465; exhausser, x11° (eshalciez, « sac. à avoine », introduit par les soldats
. dont le préf. a été refait vers le xv® s. revenant d'Allemagne pendant et après
d’après le lat. exaliare) ; outre le sens con- la Guerre de Trente Ans. La forme havresac
cret, a souvent le sens d’ « élever en di- doit venir du bas all., qui dit hawer pour
gnité » au moyen âge, d’après le lat. exal- le haut all. haber « avoine ».
HE 318

HÉ. Onomatopée. — Comp. : hé bien, HÉLIANTHE, 1615. Empr. du lat. des


écrit aussi eh bien; non signalé avant le botanistes helianthus, fait avec les mots
xvIIe s.; hélas, xr1°, comp. de las, qui grecs hélios « soleil » et anthos « fleur ».
signifie souvent « malheureux », au moyen
âge ; ohé, 1843; certainement antérieur. HÉLIANTHÈME, 1732. Empr. du lat.
des botanistes helianthemum, fait avec les
HEAUME (déjà helmus dans les Gloses mots grecs hélios et anthemon « fleur ».
de Reichenau, virie s.). Francique *helm,
cf. all. Helm, d’où aussi it. et esp. elmo, HÉLICE, xvi® (R. Belleau). Empr. du
a. pr. elm. L’a. fr. a empr. de bonne heure lat. helix (mot pris au grec signifiant « spi-
elme de l’a. pr., v. haubert. rale »).
HEBDOMADAIRE, 1596. Empr. du lat. HÉLICOÏDE, 1704. Empr. du grec heli-
de basse ép. hebdomadarius (de hebdomas, koeidés. — Dér. : hélicoïdal, 1854.
mot d’origine grecque, « semaine »).
HÉLICOPTÈRE, 1907. Comp. des mots
HÉBERGER (Alexis : herbergier, héber- grecs helix « hélice » et pterén « aile ».
gier depuis le xrve s.). Signifie propr. « lo-
ger, camper », en parlant d’une armée; HÉLIO-. Premier élément de mots sav.
sens général dès les premiers textes ; l’a. comp. tels qu'héliographie, 1856, tiré du
fr. a en outre un subst. herberge « campe- grec hélios « soleil ».
ment, logement », aussi anc., cf. à côté le
masc. herberc, de même sens ; on a heri-
HÉLIOTROPE, 1372 (sous la forme
eliotropie). Empr. du lat. heliotropium (du
bergo : crastro dans les Gloses de Reichenau.
grec héliotropion), littéral. « qui se tourne
L'it. dit de même albergare, albergo et (de frepein « tourner ») vers le soleil » ; v.
l’a. pr. albergar, alberga. Les formes avec a- tournesol.
ont été introduites dans le lat. de basse ép.
par les mercenaires d’origine germ., tandis HELMINTHE, 1807. Empr. du grec hel-
que celles avec her- sont dues aux Francs. mins, -minihos « Ver », spécial. « lombric ».
Le point de départ est très probabl. pour HEM, xvrie. Onomatopée, évidemment
les deux variantes le verbe, non pas le antér. ; déjà relevée en lat. V. hom.
subst. (germ. *haribergôn, francique heri-).
Le fr. a repris auberge, 1477, dans un sens HÉMATITE, xr1e (écrit ematite). Empr.
particulier à un parler méridional, mot qui du lat. haemaïites (du grec haimalités).
s’est depuis répandu dans presque tous les
parlers gallo-romans ; d’où aubergiste, HÉMAT(O)-. Premier élément de mots
1667. sav. comp., tels qu'hématocèle, 1732, tiré
du grec haima « sang ».
HÉBÉTER, xive (Bersuire). Empr. du
lat. hebelare, dér. de hebes « émoussé » ; le HÉMÉROCALLE, vers 1600 (Malherbe).
sens et la forme ont rapproché ce mot de Empr. du lat. hemerocalles (du grec héme-
bête. rokalles, neutre), littéral. « (fleur) belle de
jour », cf. belle-de-jour, appellation fré-
HÉCATOMBE, vers 1500, au sens anc. : quente dans les parlers pop. de la France.
sens fig., xXvIIe. Empr. du lat. hecatombe
ou -a (du grec hekatombé « sacrifice de cent HÉMI-. Premier élément de mots sav.
bœufs »). comp., tels qu'hémièdre, 1847, tiré du
préf. grec hémi « à demi ».
HECTIQUE, v. étique.
HÉMICYCLE, 1547. Empr. du lat. hemi-
HECT(O)=. Premier élément de mots du cyclium (du grec hémicyclion).
système métrique, hectogramme, 1795, etc.,
tiré artificiellement du grec hekaton «cent ». HÉMIONE, 1838. Empr. du lat. des
naturalistes hemionus (du grec hémionos
HÉDONISME, 1890. Dér. du grec « mulet »).
hédonë « plaisir ».
HÉMISPHÈRE, xrr1° (sous la forme
HÉGÉMONIE, 1840. Empr. du grec hêge- emispere). Empr. du lat. hemisphaerium
monia (de hégemôn « chef »). (du grec hémisphairion, v. sphère).

HÉGIRE, 1586. Empr. de l'arabe hedjra, HÉMISTICHE, xvi® (Du Bellay). Empr.
propr. « fuite (de Mahomet de La Mecque du lat. hemistichium, qui est empr. du grec
à Médine) », probabl. par l'intermédiaire hemistikhion, id.
de l’esp. hegira ; en 1584 on a une autre HÉMO-. Premier élément de mots sav.
forme algiere, d’après l’arabe al-hedjra « la comp., tels qu’hémoglobine, 1877, tiré du
fuite ». grec haima « sang », sur le modèle de mots
HEIDUQUE, 1605. Empr., au moment empr.
des guerres d'Allemagne, de l’all. Heiduck, HÉMOPTYSIE, 1694. Empr. du lat. hae-
qui est lui-même empr. du hongrois hajdû mopiysis (d’un mot grec non attesté, mais
« fantassin » (pluriel hajdük). Cf. haimopiyikos « qui crache le sang »),
HEIN, 1765. Onomatopée, évidemment HÉMORRAGIE, 1549. Empr. du lat.
antér. à la date où elle a été enregistrée. haemorrhagia (du grec haimorrhagia, d’un
verbe rhégnynai « briser »).
HÉLAS, v. hé.
HÉMORROÏDE, xrrre (écrit emoroyde).
HÉLER, 1527. D'abord terme de ma- Empr. du lat. haemorrhois, -idis (du grec
rine. Empr. de l’angl. {o hail, de même sens. haimorrhois, du verbe rhein « couler »).
319 HÉRISSON

HÉMORROÏSSE, 1598. Terme des tra- attesté au second sens ; herbu, x11° ;désher-
ductions de l'Évangile, empr. du lat. ber, 1874, herbicide, vers 1930 (formé avec
eccl. haemorrhoissa (tiré du grec haimor- le suffixe -cide de homicide, etc.
rhois).
HERBIVORE, 1748. Fait sur le modèle
HÉMOSTASE, 1748. Empr. du grec hai- de carnivore avec le lat. herba.
mostasis (cf. stasis « arrêt »).
HERBORISTE, 1545; d’abord herbo-
HENDÉCA-. Premier élément de mots liste, 1530, qui se disait encore à Paris au
sav. comp., tels qu’hendécagone, 1652, temps de Ménage (de même que le verbe
tiré du grec hendeka « onze », ou de mots herboliser). Herboliste, d'où herboriste, par
empr., tels qu'hendécasyllabe, 1549 (Du assimilation de l'Z à l’r précédente, est empr.
Bellay). d’un parler méridional non identifié; il
est dér. d’un représentant du lat. herbula
HENNÉ, 1553. Empr. de l’arabe hinna. « herbette », v. le prov. erboularié « traité
Ce mot arabe a été une première fois empr. de botanique » et l’it. erbolaio « herbo-
par le lat. médiéval alchanna, sorte de riste ». D'autre part herboliste est devenu
plante tinctoriale, d’où le fr. arcanne, 1611 arboliste, 1499, puis arboriste (pour l’r voir
(alchanne au xxr1° s.), encore en Savoie, etc., plus haut), 1572 (Ronsard), qui a été dès
au sens de « craie rouge » et orcanette,
lors conçu à tort comme dér. du lat. arbor
1559, déjà arquenet, 1393, sorte de plante « arbre ». — Dér. : herboriser, 1611, cf. à
tinctoriale. côté arboriser, 1534 (Rab.), herborisation,
HENNIN, 1428. Probabl. empr. du néerl. 1719 ; herboristerie, 1838.
henninck « coq », grâce à une comparaison HERCHER, 1769 (hiercher, forme wal-
avec la crête du coq. lonne, « traîner »). Terme de mineur popu-
larisé, de même que le dér. hercheur, id.,
HENNIR. Lat. hinnire. L'h aspirée est par Germinal de Zola, 1885. Tous deux sont
d’origine expressive, cf. huer, etc. Seule-
empr. du wallon ; hercher représente un lat.
ment fr. et a. pr. enhir et endir. — Dér. :
de basse ép. *hirpicare, cf. it. erpicare, dér.
hennissement, vers 1220.
de hirpex, v. herse.
HÉPATIQUE, xive (écrit epatique). Em- HÈRE, xvie s. (Bon. des Périers) ; déjà
pr. du lat. hepaticus (du grec hépatikos, de au x1ve s. (cest her contrefait le truant) et
hépar, hépaios « foie »). en 1324 (her(r)e au sens de « maître »
HÉPATITE, pierre précieuse, vers 1550. dans des poèmes de Metz). Ordinairement
Empr. du lat. hepatites (du grec hépatités considéré comme empr. de l’all. Herr « sei-
« (pierre) qui a la couleur du foie »). gneur » qui aurait été employé par déri-
sion ; mais il n’est pas impossible qu'il se
HÉPATITE, maladie, 1743. Empr. du rattache plutôt à haire (métonymie pour
lat. médical hepatitis, tiré du grec hépar; le pèlerin qui porte la haïre) ; hère « jeune
le mot grec manque peut-être par hasard. cerf », xvirie (Buffon), est un autre mot ;
HÉPAT(O)-. Premier élément de mots c’est un empr. au néerl. hert « cerf ».
sav. comp., tels que hépatologie, 1793, tiré HÉRÉDITAIRE, 1459. Empr. du lat.
du grec hépar, hépatos « foie ». hereditarius.
HEPT(A)-. Premier élément de mots HÉRÉDITÉ, vers 1050 (Alexis : eredi-
sav. comp., tels que heptaèdre, 1772, tiré lez). Empr. du lat. hereditas. L’a. fr. a pos-
du grec hepia « sept ». sédé des formes (h)erité et (h)erelé, adap-
tées d’après le verbe hériler. A signifié
HÉRALDIQUE, 1680 (comme subst. « héritage » au moyen âge, sens encore
depuis 1845). Dérivé savant du lat. médié- admis au xvirie s. (1748, Montesquieu).
val heraldus, fait sur héraut.
HÉRÉSIE, 1118 (écrit eresie) ; hérésiar-
HÉRAUT, x11e (alors hirauz). Francique que, 1528. Empr. du lat. eccl. haeresis,
*heriwald, plus anc. “*hariwald, propr. haeresiarches (du grec hairesis, propr.
« chef d’armée », cf. Charioualda, chef ba- « choix », d’où « préférence, opinion parti-
tave, Tacite, Annales, II, anc. saxon culière », hairesiarkhés).
Heriold, nom propre. Le mot a passé en
gallo-roman assez tard, sous la forme HÉRÉTIQUE, xive. Empr. du lat. eccl.
*heriwald. Lit. araldo, l'esp. heraldo, l’all. haerelicus (du grec hairetikos). À supplanté
Herold, l’angl. herald viennent du fr.; l’a. fr. (h)erege, devenu herile par modifi-
v. faraud. cation de la terminaison d’après les mots
en -ile, partic. sodomite, avec lequel il est
HERBACÉ, 1566. Empr. du lat. herba- souvent associé.
ceus.
HÉRISSER. D'abord hericier. Lat. pop.
HERBE. Lat. herba. It. erba, esp. yerba. *criciare, dér. de éricius « hérisson », « se
— Dér. : herbage, x; herbager, verbe, dresser (en parlant du poil ou des plumes)
1409, subst. et adj., 1732 ; herbette, x1ve à la manière des piquants du hérisson »;
(Deschamps) ; herbier, x11°, au moyen âge l’hvaspirée du fr. est d’origine expressive.
signifie surtout « terrain couvert d'herbes », It. arricciare, esp. erizar.
se dit encore en picard et en norm. au sens
.d’ « herbes », et spécial. de « mauvaises HÉRISSON. Dér. du lat. ericius, qui a
herbes ». Au sens de « collection de plan- disparu de très bonne heure au nord de la
tes », 1596 et d’ « ouvrage de botanique », Gaule ; pour h v. hérisser. It. riccio, esp.
1704, peut-être d'après le lat. herbarium, erizo continuent le mot lat. simple.
HÉRITER 320

HÉRITER. Lat. hérédiläre (de héres, HÉROÏ-COMIQUE, xvrr°. Forme rédui-


héredis, v. hoir); À du lat. rétablie de te de *héroïco-comique, par superposition
bonne heure dans l'écriture. En a. fr. sou- syllabique.
vent « rendre héritier ». (H )eriter, au lieu
de *hereler, non attesté, mais cf. herelaige, HÉRON (écrit d’abord hairon). Fran-
a été refait sur herité « héritage » (v. héré- cique *haigro, devenu plus tard *heigro,
dité) qui, de son côté, doit son à à hérédité. restitué d’après l’anc. haut all. heigir. Une
Esp. heredar. — Dér. : héritage, xrr°; forme d’origine dialectale aigron, attestée
déshériter, vers 1138. en a. fr., est encore usuelle dans le Centre
et l'Ouest, cf. aussi à. pr. aigro ; V. aigrette,
HÉRITIER. Lat. hérédilarius, avec les HÉROS, xiv° (Oresme). A pris le sens
mêmes transformations que hériter, c’est-à- fig. au xvrie s. Seul des mots de cette
dire *herelier, puis heritier. On ne voit pas
clairement, s’il avait un sens différent
famille, héros ne se lie pas avec le mot préc.,
pour éviter une homonymie prêtant à rire
d’hoir ; en tout cas a éliminé celui-ci grâce
avec zéro; héroïne, xvi°; héroïque, x1ve
à l’appui d’hériter, héritage et parce qu'il a
plus de corps. Esp. heredero. — Comp. : (Oresme). Empr. du lat. heros, heroine, he-
cohéritier, 1411. roicus (du grec hérôs, hérôiné, hérôikos). —
Dér. du premier : héroïsme, 1658.
HERMAPHRODITE, xive (hermofro- HERPÈS, xve. Empr. du lat. herpes (du
dite), au xir1° s. hermefrodis. Empr. du lat. grec herpés, herpêtos « dartre »). — Dér. :
Hermaphroditus (du grec Hermaphroditos, herpétique, 1793 ; herpétisme, 1853.
fils d'Hermès et d’Aphrodite, représenté
comme bissexué) ; déjà adj. en lat. et en HERSE. Lat. hirpex, probabl. dér. de
grec. l’osque hirpus « loup », est venu des dia-
lectes italiques ; comme formation latine,
HERMÉTIQUE, 1615, d'après l'adv. il aurait eu la voyelle e. Une partie des
dans vase clos hermétiquement. Vient de la formes romanes remontent à l’acc. hirpi-
langue des alchimistes, qui qualifiaient par cem (p. ex. it. érpice), d’autres à *herpicem
cet adj. un mode particulier de fermeture (p. ex. namurois yèsse), tandis que d’autres
des vases; cf. hermetic vase, 1554; dér. encore, comme le fr., peuvent représenter
irrégulier de Hermès (irismégiste) (du grec l’une ou l’autre des deux formes. L’h initial
Hermés trismegistos « Hermès trois fois très de herse est très probabl. sorti de l’impres-
grand »), dieu d'Égypte, nommé ainsi par sion du grand effort que font les chevaux et
les Grecs de l’époque hellénistique et à qui des mouvements saccadés de l’instrument ;
les alchimistes attribuaient la fondation de il y a en Wallonie des patois où le verbe
leur art. De là aussi hermétique (alchimie, est muni d’un h- qui manque au subst.
sciences, etc.), 1762; -isme, fin xix°. (îpe, mais hîrper). — Dér. : herser, x1r°;
hersage, vers 1300 ; hersé, 1690 ; herseur,
HERMINE. En outre ermine en a. fr. XII. V. hercher, harceler.
Fém. de l’anc. adj. (h)ermin, empr. du lat.
Armenius, tiré de Armenius mus « rat HÉSITER, 1406: hésitation, vers 1220.
d'Arménie » ; l’hermine a été ainsi nommée Empr. du lat. haesitare, haesitatio.
parce qu’elle était fort abondante en Asie- HÉTAÏRE, 1799 (héfaire, seule pronon-
Mineure, cf. aussi mus ponticus « rat du ciation que Littré accepte). Empr. du grec
Pont ». L’a. fr. emploie aussi ermin au sens helaira, au sens propre de « courtisane
de « fourrure ». La syllabe initiale avec h grecque »; au sens de « courtisane (en
et e semble être due à hermite, graphie fré- général) » depuis la fin du xtxe s., mais en
quente d’ermite (on trouve en effet par langage livresque.
confusion hermine au sens d’ « ermite », à
côté du sens d’ « Arménien » qu'a aussi HÉTÉRO-. Premier élément de mots
(h)ermin(e) au moyen âge); en tout cas sav. comp., tels qu'hétéromorphe, 1822,
elle n’est pas due à l’all. Hermelin, mal tiré du grec heteros « l’autre ».
expliqué et récent. It. armellino (dér. d’où HÉTÉROCLITE, xve; dès les premiers
vient le fr. armeline, 1680), esp. armiño. textes, dans un sens général. Empr. du
— Dér. : (h)erminette, xvie, par compa- lat. heleroclitus, terme de grammaire (du
raison du tranchant recourbé avec le mu- grec heteroklitos « id. »).
seau de l’animal ; attesté au sens d’ « her-
mine » dans quelques textes picards du HÉTÉRODOXE, 1667 (D.) ; hétérodoxie,
moyen âge; désigne encore l’hermine ou xXviie (Bossuet). Empr. du grec eccl. hete-
la belette, outre l'outil, dans les parlers de rodoxos, heterodoxia (de doxa « opinion »,
l'Est. v. orthodoxe). Sens fig. de l’adj., xixe.

HERNIE, 1490. Empr. du lat. hernia. HÉTÉROGÈNE, 1616, d’abord hétérogé-


A éliminé hergne, d’où hargne, encore usités née, fin xvi® (d'Aubigné); hétérogénéité,
au xvuie s.; l’h vient de la forme lat., 1641. Empr. du lat. scolastique heteroge-
comme dans la forme récente hernie ; mais neus, helerogeneitas (du grec heterogenés,
par rapprochement de la famille de har- de genos « genre »). Sens fig. de l’adj., xixe.
gneux, l’h de toutes ces formes est une h HÊTRE. Francique *haisir, dér. du radi-
dite aspirée. — Dér. : herniaire, 1697, re- cal de *haisi « buisson, fourré » (qui, roma-
levé aussi depuis 1611 pour désigner la nisé en *hasia, a donné l’a. fr. haise « clô-
plante dite en outre herniole, xvi® s.; ces ture de branches entrelacées », encore ré-
désignations viennent de ce que cette pandu dans les patois) à l’aide du suff.
plante servait autrefois à faire des cata- francique -{r servant à former des noms
plasmes contre les hernies. d'arbres. *Haiïsir est devenu roman plus
321 HIÉROGLYPHIQUE

tard que *haisi, de sorte que ai y était HIBOU, 1535, huiboust, 1530. Paraît être
déjà devenu e. I1 a vécu longtemps à côté un mot de formation onomatopéique, com-
de fou (lat. fagus), celui-ci désignant les me houhou du normand, hourhou du gascon
grands arbres qu’on laisse pour la repro- et d’autres termes analogues. Peu usité.
duction (dans quelques régions fayard,
1371, foyard), tandis que hêtre était le nom HIC, 1690. Tiré de la langue du Palais,
des jeunes troncs qu'on coupait à inter- où le mot lat. hic « ici » était employé
valles réguliers et qui repoussent sur les pour marquer à la marge d’un acte l’en-
souches en assez grand nombre. Cette dis- droit notable, afin d’épargner la peine de
tinction s’est perdue plus tard en fr., peut- lire toute la pièce.
être à la suite d’un changement survenu
dans la méthode d'exploitation de la forêt, HIDALGO, fin xvi*, indalgo, 1534 (Ra-
et hêtre, remplaçant fou, a fini par désigner belais). Mot esp. hidalgo « gentilhomme »,
aussi l’arbre adulte. forme réduite de hijo de algo « fils de quel-
que chose »; parfois francisé en hidalgue,
HEUR. D'abord aür et eür, dissyllabi- 1752; mais usité seulement en parlant
ques. Lat. pop. *agürium, altération de d’Espagnols.
agurium, forme attestée à l’époque impé-
riale, au lieu du lat. class. augurium « pré- HIDEUR, xue (écrit hisdor); hideux,
sage ». Avec le recul des croyances païennes id. (écrit hisdos). Dér. de l’a. fr. hisde, hide
a pris le sens de « chance bonne ou mau- « horreur, effroi », qui représente très pro-
vaise ». Le mot fr., hors d’usage depuis le bablement un anc. haut all. “*egisida
XVII s., a été remplacé par bonheur, xr1°, «horreur », dér. du verbe egisôn « effrayer ».
et malheur, id.; le succès de bonheur est Le h- initial a été ajouté en gallo-roman
en partie attribuable à la rencontre homo- pour renforcer la valeur expressive du mot.
nymique de heur avec heure (auquel heur — Comp. : haleier, dér. de aile.
doit son À depuis le moyen fr.). Ne survit
que dans quelques parlers du Nord-Est. HIE, 1220 (haye, 1457). Empr. du
Esp. agüero « présage », a. pr. aür « pré- moyen néerl. heie, id., qui a été incorporé
sage, augure, destin ». — Dér. : heureux, au fr. par les Néerlandais occupés à des
1213. — Comp. : bonheur, malheur ; bien- travaux hydrauliques en France, de même
heureux, xr1°; malheureux, vers 1050. que le verbe hier, xtr1°. L’a. fr. hie « coup »,
HEURE. D'abord ore, eure; h du lat. xl1e, est dér. du verbe.
rétablie de bonne heure dans l'écriture. HIÈBLE. Lat. ebulum. L'h a été ajoutée
Lat. hôra. It. ora, esp. hora. À côté de la au moyen âge pour qu’on ne lise pas jèble.
locution à la bonne heure qui est toujours It. ebbio, a. pr. evol. On a proposé d’expli-
usuelle, à la male heure a disparu, probabl. quer gnôle « eau-de-vie de mauvaise qua-
à cause de la disparition de l’adj. mal, ce lité », d’où « eau-de-vie » en argot parisien
qui donnait à cette locution, surtout en et militaire, fin x1x°, par gnole, forme bour-
présence du masc. malheur, un aspect guignonne de hièble, qui désigne dans la
grammaticalement choquant. V. lurette, région de la Bourgogne une espèce de
HEURISTIQUE, 1859. Empr. du grec sureau noir produisant une eau-de-vie de
heuristiké (tekhné) « art de faire des décou- mauvaise qualité.
vertes » (du verbe heuriskein « trouver »).
HIÉMAL, vers 1500 (alors hyemal, d’a-
HEURTER, xrie s. (sous la forme hur- près une autre graphie du mot. lat.). Empr.
ler) ; heurter, attesté depuis le xrxr1e 8., a du lat. hiemalis (de hiems « hiver »).
triomphé au xvi®, époque où s’est produit
un flottement de la prononciation entre HIER, adv. Lat. heri; l’h a été rétabli
eu et u. Probabl. dér. francique d’un *huri, au moyen âge pour qu’on ne lise pas jer,
supposé d’après l’anc. scandinave hrütr v. hièble. It. ieri, esp. ayer. Souvent comp.
« bélier »; ce verbe aurait donc signifié avec main, lat. mäne « le matin », ou avec
« heurter à la manière d’un bélier ». It. soir, dans les parlers de l'Est. — Comp. :
uriare est empr. du fr. — Dér. et Comp. : avant-hier, x11°, le premier terme du comp.
heurt, x11° s. ; heurtement, x111° ; heurtoir, est devant dans le Nord-Est, l'Est et le
1302 ; tous trois d’abord avec la voyelle u ; Sud-Est, de là ou passé, préposés ou post-
aheurter, x11°, id. posés, ou part, préposé (au sens de « au
delà de ») dans le Sud-Ouest.
HÉVÉE, 1751 (La Condamine : hhévé;
puis hévé, 1769, Turgot ; hévée, 1808). Em- HIÉRARCHIE, 1332; hiérarchique,
pr. du quetchua (Pérou); les botanistes xive (écrit ierarcicque), tous deux au sens
ont latinisé le mot en hevea, d’où la forme chrétien. Empr. du lat. eccl. hierarchia (du
hévée aujourd’hui, aussi hévéa. grec eccl. hierarkhia, de hieros « sacré » et
arkhia « commandement »), hierarchicus.
HEX(A)-. Premier élément de mots sav. Le sens fig. date du x1x® 5. (relevé en 1808).
comp., tels qu'hexapode, 1764, tiré du grec
heks « six » ou de mots empr., tels qu’hexa- HIÉRATIQUE, 1566. Empr. du lat. hie-
gone, 1377 (Oresme). raticus (du grec hieratikos « qui concerne les
HIATUS, 1521. Empr. du lat. hialus choses sacrées »). — Dér. : -isme, 1877.
« ouverture ». HIÉROGLYPHIQUE, 1529. Empr. du
. HIBERNAL, 1815, une première fois en lat. hieroglyphicus (du grec hieroglyphikos,
1567 ; hiberner, 1792. Empr. du lat. hiber- de glyphein « graver »). On en a tiré hiéro-
nalis, hibernare. — Dér. du verbe : hiber- glyphe, 1576 (L’asne est l'hieroglyphe d’igno-
nant, 1824. rance).

DICT. ÉTYM. 21
HILARANT 322

HILARANT, 1805, comme terme de chi- HISTORIQUE, 1447. Empr. du lat. his-
mie. Empr. du lat. hilarans, part. prés. de toricus (du grec historikos). — Dér. : pré-
hilarare « rendre gai ». S’emploie aussi au- historique, 1869.
jourd’hui au sens général.
HISTRION, 1544. Empr. du lat. histrio
HILARE, 1865 (V. Hugo), usité déjà au « acteur de bouffonneries ».
moyen âge sous la forme hilaire ; hilarité,
xiie. Empr. du lat. hilaris, hilaritas. HIVER. D'abord ivern, h rétabli dans
l'écriture d’après le lat. Lat. de basse ép.
HILE, 600, terme de botanique ; au hibernum (sous-entendu fempus), propr.
xixe s., t rme d'anatomie. Empr. du lat. « temps d'hiver »; a remplacé partout le
hilum au sens de « point noir au haut de lat. class. hiems. It. inverno, esp. invierno.
la fève » (donné par Varron). — Dér. : hivernal, xr1° ; hivernage, xr1e;
s'emploie au sens de « semailles d’au-
HIPPIQUE, 1840. Empr. du grec hip-
pikos. tomne » et de « fourrage d'hiver » dans la
France septentrionale ; au moyen âge sou-
HIPPO-. Premier élément de mots sav. vent adj.
comp., tels qu'hippoglosse, 1836, tiré du
HIVERNER. Lat. hibernaäre. V. hiberner.
grec hippos « cheval ».
HOBEREAU, 1370, au sens de « petit
HIPPOCAMPE, 1562. Empr. du grec faucon », une première fois en 1196; le
hippôkampos (comp. de hippos et de sens moderne déjà 1566. Dér. de l’a. fr.
kampés « esp. de poisson »). hobel, hobé, hobier, sorte de petit oiseau de
HIPPODROME, vers 1190 (écrit ypo- proie, qui se rattache sans doute au verbe
dromes). D'abord en parlant des jeux a. fr. hobeler « escarmoucher, harceler l’en-
anciens ; sens général depuis le xix® s. nemi, piller », 1195, empr. du moyen néerl.
Empr. du lat. hippodromus (du grec hippo- hobbelen, « se démener, vaciller » (l’a. fr.
dromos, de dromos « course »). hober, id., 1310, est dér. de hobeler par
réduction). Sur hobeler on a fait hobel (cf.
HIPPOGRIFFE, vers 1560 (Ronsard). bourreau fait d’après bourreler), pour dési-
Empr. de lit. ippogrifo, mot créé par gner le faucon qui fait sa proie surtout de
l’Arioste avec le grec hippos (d'où l’or- tous les petits animaux comme l’escarmou-
thographe du fr.) et l’it. grifo « griffon ». cheur fait la petite guerre ; les autres for-
HIPPOPOTAME, vers 1260 (écrit ypo- mes sont issues de hobel par substitution
potame). Empr. du lat. hippopotamus (du de suff.
grec hippopotamos, de poltamos « fleuve »). HOCHE, entaille, xr1°, d’après le verbe
HIRONDELLE, 1555. Antér. arondelle oscher, aujourd’hui hocher « entailler »;
(encore chez Ronsard), dér. d’aronde, lat. l’h, rare en a. fr., s’est établie tardivement.
pop. de la Gaule *harunda (cf. aussi a. pr. A. pr. osca, oscar ; en outre osca dans des
aronda), adaptation du lat. de basse ép. dialectes esp. et dans ceux de l'Italie sep-
harundo (d’où it. rondine, pour l’arondine), tentrionale. Sans doute d’origine gauloise,
lat. class. hirundo. Le fr. hirondelle semble comp. gallois osg « entaille », bret. ask.
venir du Midi, où la forme avec i- initial, HOCHER « secouer », xrI® (hocier).
représentant la forme du lat. class., a tou- Du francique *hottisôn « secouer », attesté
jours été très répandue. Aronde ne survit par le néerl. huisen, dér. de *hoïtôn à l’aide
au sens d’ « hirondelle » que dans les parlers du suff. -isôn; voir cahoter. — Dér. :
du Nord-Est, de l'Est, en normand et dans hochement, 1550 ; hochet, 1331. — Comp. :
le Sud-Ouest ; en fr. il est encore dans les hochepot, 1292 ;hochequeue, 1549, souvent
langues techn., cf. aussi le comp. queue altéré en hausse-queue, 1555.
d’aronde, 1458.
HOCKEY, 1889. Empr. de l’angl. hockey,
HIRSUTE, 1802. Empr. du lat. hirsutus. nom de ce jeu.
HISSER, 1552 (Rab. : inse ! inse ! inse !). HOIR. Vieux mot qui ne s'emploie plus
Empr. du bas all. hissen. — Dér. : rehisser, que par archaïsme ; cf. héritier. Lat. pop.
1670. *hérem, au lieu du lat. class. hérèdem,
HISTOIRE, xri® (esloire, forme ordi- acc. de heërés. A. pr. er. — Dér. : hoirie,
naïire au moyen âge). Empr. du lat. historia 1318 ; deshérence, 1285.
(mot grec). — Dér. : historiette, 1657 (Tal- HOLD-UP, 1955. Empr. de l'anglais
lemant, dans le titre de son ouvrage), d'Amérique holdup « action d'arrêter qn
d’après le lat. hisioria ; historien, 1213, de pour le voler » (attesté depuis 1878).
même formation ; préhistoire, 1872.
HOLO-. Premier élément de mots sav.
HISTOLOGIE, 1836. Fait avec le grec comp., tels que holomètre, 1555, tiré du
histos « tissu », d’après les mots en -logie. grec holos « entier ».
HISTORIER, xiv® (Froissart), au sens HOLOCAUSTE, xrie. Empr. du lat.
de « raconter »; a pris au xve s. le sens eccl. holocaustum (du grec eccl. holocauston,
moderne d’après le sens de «représentation de kaiein « brûler », qui a été fait pour tra-
figurée » qu'a hisioire au moyen âge, entre duire un mot hébreu) ; sens fig. depuis le
autres valeurs. Empr. du lat. médiéval XVI® S.
hisioriare « raconter ».
. HOM, xvrre. Transcription approxima-
HISTORIOGRAPHE, 1213. Empr. du tive d’une onomatopée évidemment antér.
lat. hisioriographus (du grec historiogra- et es l’h n’a aucune valeur phonique,
phos). v. hem.
323 HONTE

. HOMARD, 1532. Empr. de l’anc. scan- HOMOLOGUER, 1461; émologuer est


dinave humarr, d’où aussi bas all. aummer. fréquent du xv® jusqu’au xvrre s. Empr.
HOMBRE, 1657. Empr. de l’esp. hombre du lat. scolastique homologare qui paraît
« homme », avec le jeu qui a été ainsi remonter au grec homologein, « être d’ac-
nommé, parce que celui qui mène la partie cord, reconnaître ». — Dér. : homologa-
“s’appelle el hombre, d'où aussi en fr. tion, 1537 (alors emol-).
l’hombre au même sens. HOMONYME, 1534 ; homonymie, 1606.
HOMÉLIE, xu°. Empr. du lat. eccl. Empr. du lat. homonymus, homonymia (du
homelia (du grec eccl. homilia, propr. « réu- grec homônymos, homônymia, de onoma
nion », d’où «entretien familier », qui a dû « nom »).
recevoir son acception nouvelle dans les HONGRE, xve, au sens moderne. Spé-
milieux chrétiens). cialisation de l’a. fr. hongre, ongre, d’où
nous avons tiré hongrois, l’usage de châtrer
HOMÉO-. Premier élément de mots sav. les chevaux étant venu de Hongrie. Le
comp., tels qu'homéopathie, 1827, tiré du mot remonte au lat. d'Allemagne ungarus,
grec homoios « semblable ».
hungarus, qui est formé sur le turc ogur
HOMÉRIQUE, 1548, au sens propre. « flèches » (plur.), mot avec lequel les Tures
L'expression rire homérique, 1851, est une a les Hongrois. — Dér. : hongrer,
allusion à la scène du premier chant de 1613.
l’Illiade, où les dieux réunis sur l’Olympe
HONNÊTE, xrre. Empr. du lat. honestus
rient en voyant le boiteux Héphaistos fai- « honorable, honoré ». Au xvi® s. honnête
sant l'office d’échanson.
homme a reçu le sens particulier de « qui
HOMICIDE « celui qui commet un homi- sait se conformer à toutes les règles de la
cide », x11°; homicide, l’acte lui-même, bienséance ». Usuel dans les patois au sens
id. Empr. du lat. homicida, homicidium. de « poli ». — Dér. et Comp. : honnêteté,
1372 (Oresme); au moyen âge honesié,
HOMMAGE, v. le suiv. empr. du lat. honestas ; déshonnête, xx11°;
HOMME. Lat. hominem, acc. de homo. malhonnèête, 1406, signifie « impoli » dans
It. uomo, esp. hombre. L’anc. nom. huem les parlers pop., d’où malhonnêteté, 1676.
a disparu devant homme. Le pron. indéfini HONNEUR, vers 1080 (Roland). Empr.
on représente le nom. lat. homo, développé du lat. honos, honoris. Au moyen âge fém.
en position atone. Puisque tous les autres d’après le genre des noms en -eur ; a com-
parlers romans, y compris l’it. et l’esp., mencé à reprendre le genre du lat. au
connaissent aussi des représentants de xIVe s. D’autre part a souvent dans l’anc.
homo comme pronom indéfini, il est peu langue une valeur jurid., notamment celle
probable que, comme on l’a soutenu, le de « fief, domaine, etc. », comme l’a. pr.
fr. on soit dû à une imitation de l’all. man, onor qui a des formes plus ou moins adap-
qui aurait été importé en Gaule par les tées enor, anor, etc. — Dér. : déshonneur
Francs. Tout au plus, c’est peut-être grâce (Roland).
à ceux-ci que l’usage de on est devenu plus
général et fréquent en fr. que celui des HONNIR, xri°. Empr. du francique
formes correspondantes dans les autres *haunjan, cf. all. hôhnen. V. honte.
langues. Les parlers méridionaux font p. HONORABLE, xre. Empr. du lat. hono-
ex. une très fine distinction inconnue du rabilis. L'emploi d’honorable dans le lan-
fr. : ils disent on, quand la personne qui gage parlementaire a été calqué au cours
parle est comprise dans le nombre des du xix® s. sur l’angl. honourable, d’abord
personnes auxquelles on pense (p. ex. dans à propos des parlementaires anglais. —
la phrase quand on a soif), sinon ils se Dér. : honorabilité, 1845, d’après le lat.;
servent de la troisième pers. plur. (p. ex. une première fois en 1464 (écrit onno-) ;
ils disent que au lieu de on dit que). Homme l’a. fr. disait honorableté.
a toujours eu aussi le sens de « mari » dans
le langage fam. — Dér. : hommage, xrr°, HONORAIRE, 1496. Empr. du lat. ju-
terme de féodalité, le sens fig. paraît dater rid. honorarius « qui est à titre honori-
du xviie s.; hommasse, xiv°. — Comp. : fique », en lat. class. « honorable ». — Dér. :
bonhomme, x11° ; bonhomie, 1736 ; surhom- honorariat, 1836, formé comme nofa-
me, 1898 (dès 1893 superhomme), calque de riat, etc.
l’all. Ubermensch, au sens que Nietzsche HONORAIRES, 1771. Antér. au sing.,
a donné à ce mot, qui se trouve, par ail- 1597. Empr. du lat. jurid. honorarium,
leurs, déjà au xvi® s. et chez Gœthe. neutre de l’adj. cité ci-dessus, propr.
HOMO-. Premier élément de mots sav. « donné à titre d'honneur ».
comp. tels qu'homopétale, 1838 ; homo- HONORER, x1° (Alexis). Souvent eno-
sexuel, 1907, tirés du grec homos « sem- rer au moyen âge, v. honneur. Empr. du
blable ». lat. honorare. — Dér. : déshonorer, xrre.
HOMOGÈNE, 1503 (sous la forme homo- HONORIFIQUE, 1478. Empr. du lat.
génée) ; homogénéité, id. Empr. du lat. honorificus.
scolastique homogeneus, homogeneitas (du
grec homogenés, v. hétérogène). Sens fig. HONTE, xi°. Francique “*haunipa, cf.
de l’adj., xix°. honnir, de même a. pr. anta. — Dér. :
honteux, xr1°, a pris le sens de « timide »
HOMOLOGUE, 1585. Empr. du grec dans le fr. pop. et les patois ; éhonté, xrve
homologos « semblable ». (Oresme).
HOP 324

HOP, 1828. Onomatopée, évidemment Le subst. horripilation a été empr. du lat.


antér.; cf. hep, interjection d'appel. On horripilatio au sens médical dès le x1ve s.
dit aussi houp. HORS, x1° (Alexis). Tiré de dehors qui
HÔPITAL, xue. Désignait d’abord tout représente le lat. de basse ép. déforis;
établissement destiné à recevoir des per- entre voyelles le f disparaît normalement ;
sonnes dans le besoin, pèlerins, etc.; n’a cette forme deors a pris un h dans l’excla-
été distingué d’hospice qu’au cours du mation emphatique, d'où il s’est par la
xixe s. Empr. du lat. hospitalis (domus) suite généralisé. Fors, hors d’usage depuis
« maison où l’on reçoit les hôtes, etc. », le xvrie s., représente le lat. forts, d’où it.
par l'intermédiaire des couvents. fuori, esp. fuera (de -as). L'Est et le franco-
provençal disent defors, le Midi defors,
HOQUET, xve. Signifie aussi en a. fr. deforas ; fors ne survit que dans l'Est. —
« heurt », cf. hoqueler « secouer », xr1°. For- Comp. : hormis, x111° ; hors-d’œuvre, XvII°.
mation onomatopéique ; hoquelus est déjà
attesté en 1322 dans une bulle papale HORTENSIA, 1804. Mot du lat. des
comme expression désignant les interrup- botanistes, créé par Commerson (1727-
tions des mélodies. A souvent dans la 1773), en l'honneur d’Hortense Lepaute,
France septentrionale la forme loquet qui femme de Lepaute, horloger célèbre du
paraît venir du langage des enfants. XVIIIE S.
HOQUETON, ancienne casaque de co- HORTICOLE, 1836 ; horticulteur, 1829 ;
ton, xr1° (écrit auqueion; au xxt1° s., hoc- horticulture, id. Faïts avec le lat. hortus
queton, avec h de huque, heuque « espèce « jardin » sur le modèle d’agricole, etc.
de cape »). Empr. de l'arabe algoton, par HOSANNA, 1276. Empr. du lat. eccl.
l'intermédiaire de l’a. pr. alcoton, de même hosanna, cf. aussi le grec eccl. 6sanna, trans-
sens ; V. Coton. cription de l’hébreu héschi ‘a-nd « sauve
HORAIRE, 1532, comme adj. Empr. du (-nous) de grâce », Psaume 118, 25.
lat. horarius (de hora « heure »). Pris subs- HOSPICE, x1r1° s., au sens d’ « hospi-
tantiv., 1868. talité », rare au moyen âge, mais encore
HORDE, 1559 (Une horde des dits Tar- usité au xvuie s.; sens moderne, 1785.
lares, dans une relation de voyage en Empr. du lat. hospitium « hospitalité ».
Orient de G. Postel) ; a été pris dans un
sens défavorable dès le xvirre s. Empr. du HOSPITALIER, xri°, comme nom de
religieux. Empr. du lat. médiéval hospitala-
tartare (h)orda, mot de la famille du turc
ordu « camp » ; le mot a cireulé, l’all. Horde rius. Le sens de « qui exerce l’hospitalité »
a été relevé dès 1534, cf. aussi l’angl. horde. s’est développé d’après hospitalité, 1488
(Jupiter ospitalier) ; inhospitalier, 1649.
HORION, xirre. Peut-être a. fr. oreillon HOSPITALISER, 1801. Dér. sav. du
« coup sur l'oreille », avec À expressif ; lat. hospitalis, pour servir de verbe à h6pi-
toutefois la réduction de ! mouillée à y, tal. — Dér. : hospitalisation, 1866.
à une date si anc., fait difficulté.
HORIZON, vers 1360 (écrit orizon; au HOSPITALITÉ, x11°. Empr. du lat. hos-
xir1e s. orizonte). Empr. du lat. horizon (du pitalitas.
grec horizôn, part. prés. du verbe horizein HOSTIE, xiv® (Bersuire), au sens anc. de
« borner »). — Dér. : horizontal, 1545, fém. « victime offerte à un dieu », sens conservé
pris substantiv., au sens de «fille publique », dans la langue class.; ne s'emploie plus
1886. qu’au sens chrétien. Empr. du lat. hostia.
HORLOGE, xu1°. Empr. du lat. horolo- L'’a. fr. a, au sens chrétien, une forme oisie.
gium (du grec hôrologion, littéral. « qui dit HOSTILE, vers 1500; hostilité, 1353,
l'heure »), les instruments anciens étaient Empr. du lat. hostilis, hostilitas (de hostis,
soit des cadrans solaires, soit des sabliers ; propr. « étranger », d'où « ennemi public »).
le mot est resté, mais a servi à désigner
des instruments tout autres ; a été long- HÔTE. Lat. hospitem, acc. de hospës. —
temps masc. ; l’est encore dans de nom- Dér. : hôtesse, xr11°. V. otage.
breux parlers. — Dér. : horloger, xIve HÔTEL. Au moyen âge a le sens général
{Froissart) ; le fr., jusqu’au xvries., préfère de « demeure, logis » ; le sens d’ « hôtelle-
horlogeur ; horlogerie, 1660. rie » semble s'être formé dans les riches
HORMONE, 1922. Dér. savant du gr. villes du Nord (déjà au xut1° s.), il ne de-
hormadô « exciter ». vient général que vers la fin du xve s. Le
sens de « demeure somptueuse » est issu
HOROSCOPE, 1529. Empr. du lat. ho- de l’expression jurid. juger en l’ostel le roi
roscopus (du grec hôroskopos, littéral. « qui « à la résidence (momentanée) du roi »; ce
considère le moment de la naissance »). n’est qu’au début du xv® s. que l’on com-
mence à se servir de ce mot pour désigner
HORREUR, xr1e. Empr. du lat. horror.
n'importe quelle demeure somptueuse, de
HORRIBLE, xu°. Empr. du lat. horri- là aussi le maitre d'hôtel, qui désigne d’a-
bilis. bord l'officier qui s'occupe, chez le roi et
HORRIFIQUE, 1500. Empr. du lat. hor- chez les grands seigneurs, de tout ce qui
rificus. regarde la table et dont le nom n’a rien à
faire avec hôtel « hôtellerie ». Lat. de basse
HORRIPILER, 1843 (Th. Gautier, au ép. hospiläle « chambre, local pour recevoir
part. -ant). Empr. du lat. horripilare « faire des hôtes », neutre de l’adj. hospitalis.
hérisser le poil », de horrere et pilus « poil ». Survit dans les parlers de l’Est au sens de
325 HOUX

« demeure » et parfois de « cuisine » ; « mai- HOUPPELANDE, 1281. Peut-être empr.


son » dans les parlers méridionaux. — Dér. de l’anglo-saxon hop-pâda « pardessus »,
et Comp. : hôtelier, xr1° ; hôtellerie, id. ; dont le deuxième élément aurait subi
Hôtel-Dieu, vers 1250. une francisation approximative.
HOTTE, xin°. Francique “*hoëta, cf. HOURDER, xr1e. Au moyen âge « forti-
l’all. dialectal hutte. — Dér. : hottée, 1496 ; fier avec des retranchements, garnir »,
hottereau, 1359. encore terme d'architecture. Dér. de hourd,
HOUBLON, 1443. Dér. du moyen néerl. au moyen âge « palissade faite de claies »,
hoppe, id., dont la consonne finale se sono- empr. du francique *hAurd, cf. all. Hürde
risa quand on forma un dér., tout comme « claie ». Les deux mots sont encore usités
le fr. corbeau est dér. d’un a. fr. corp. Le dans les parlers de la France septentrio-
nale, surtout du Nord-Est, au sens d’ « é-
suff. -lon vient de l’a. fr. homlon auquel se
substitua le nouveau mot. L’a. fr. homlon,
chafauder, échafaudage, etc. ». — Dér. :
hourdis, xr1°.
attesté en lat. médiéval dès le vire s. sous
la forme humlone, représentait un fran- HOURET, 1661. Probabl. dér. de hure
cique *humilo (cf. flamand hommel) ; il a formé dans une région qui conserve la
été introduit en gallo-roman, parce que les voyelle à avec la prononciation ou, comme
Gaulois n'avaient pas connu l'usage que le wallon. — Dér. : hourailler, 1690 (d’après
l’on peut faire du houblon dans la bras- le dérivé houraillis).
serie. — Dér. : houblonnière, 1607 (houbel-).
HOURI, 1654. Empr. du persan hoûri,
HOUE. Francique *hauwa, cf. all. Haue. lui-même empr. de l'arabe hoûr, plur. de
— Dér. : houer, xr1° ; hoyau, 1335 (sous haoura, propr. « qui a le blanc etle noir
la forme hewel), v. houlette. des yeux très tranchés (qualification des
HOUILLE, 1615; oille de charbon en femmes du Paradis) ».
1511 ; en outre ouille au xvi® s. Empr. du HOURRA, 1722 (hurra). Empr. de
wallon hoye, qui doit ce mot spécialement l’angl. hourrah (ou de l’all. où il est attesté
au patois de Liège ; la houille a été décou- dès le moyen âge); mot onomatopéique.
verte en Hesbaye en 1195, cf. dans des Au sens de « cris poussés par les troupes
textes liégeois hulhes, 1278 ; hulhes ou cher- russes, notamment par les Cosaques » et
bons, 1295. Le mot représente un francique d’ « attaque imprévue faite par ces trou-
*hukila « bosse, éminence », dim. de *hukk- pes », 1829 (houra), a été empr. sous le
(cf. moyen néerl. hocke, all. Hocke « tas ») ; Premier Empire du russe ura, qui est le
le dim. aussi est attesté dans des dialectes même mot que les préc.
néerl. sous la forme de heukel « veillote ».
L'aspect phonétique du mot permet de HOURVARI, xvie. Propr. terme de vé-
penser que le mot francique a passé en nerie. Probabl. comp. de l’interjection hou,
wallon à une époque très ancienne. — employé dans la langue cynégétique, et
Dér. : houiller, 1793; houillère, xvi°; de l’exclamation revari, laquelle est comp.
houilleur, 1780 (une 1re fois vers 1400). de (le cerf) reva « retourne » et de hari
« cri du chasseur servant à lancer le chien à
HOULE, 1484 (écrit aussi oule jusqu’à la poursuite » (v. aussi hallali). On trouve
la fin du xvure s.). Doit être le même mot aussi boulevari « tapage », 1808, qui est
que le norm. houle « cavité où se retirent les une altération de hourvari d’après boule-
poissons au bord de la rivière » (d’où hou- verser.
lelte « trou de lapin ») et anc. picard haule
« port », qui, en raison de leur géographie, HOUSEAU, xr1°. Dér. de l’a. fr. huese
représentent sans doute l’anc. scandinave « botte », qui représente le germ. *hosa
hol « caverne » (cf. aussi l’adj. holr). Le « vêtement pour les jambes, guêtre, botte »,
sens du mot fr. est né de l'aspect du creux cf. all. Hose « culotte, pantalon ». Aussi
des vagues. — Dér. : houleux, 1716. it. uosa « guêtre », a. pr. oza « botte, chaus-
HOULETTE, 1278. Dér. de l’a. fr. houler
sure ».
« jeter » (picard et champenois), parce que HOUSPILLER, v. houx.
le bout recourbé de la houlette est destiné
HOUSSE, xr1° (houce). Signifie aussi au
à houler la terre légère sur les brebis (Jehan
de Brie, Le bon berger). Ce verbe repré- moyen âge « sorte de mantelet à manches
sente probabl. le verbe francique qui est pendantes » ; le sens premier n’est pas sûr.
devenu en moyen néerl. hollen « courir im-
Représente un francique *hulflia qu’on
peut reconstituer d’après le moyen néerl.
pétueusement » et qui peut très bien avoir hulfte « fourreau pour arc et flèches »,
eu un sens plus général qu’en moyen néerl.
anc. haut all. hulsi « couverture », et qui
HOUPPE, xive. Les plus anciennes cita- est attesté en lat. médiéval dès le x1° s.
tions de ce mot viennent toutes de l’extré- sous la forme Aullia. — Dér. : housser,
me Nord, où il a les deux sens de « houppe » « couvrir d’une housse », 1260.
et de « cime d’arbre ». Il est très probabl.
HOUX, xne. Francique *hulis, cf. all.
empr. du moyen néerl. hoop, qui n'est
diglectal Hulst, — Dér. : houssaie, xII°;
attesté qu’au sens de « tas », à partir duquel
on passe toutefois facilement aux deux houssine, xve, propr. « verge de houx ». —
sens fr. En passant plus au Sud houppe Comp. houspiller, vers 1450, au xr1° $.
s’est, par la suite, rencontré avec le Îr. houcepignier, d'où houspiller est issu soit
huppe, qui lui a passé sa voyelle, d’où sous l'influence des verbes péjor. en -iller,
aussi fr. huppe « houppe », 1549. — Dér. : soit par interférence du verbe piller. Hous-
houppé, xvi® (Marot) ; houppette, 1399. pigner est né du croisement des deux
HOUX 326

verbes housser « épousseter avec un balai HUIT, pour h, v. huile. Depuis le


de verges », xr11° s. (qui est un dér. de XVIIe s. on dit le huit sans élision d’après
houx, cî. encore houssoir « balai de verges ») les autres noms de nombre. Lat. octo. —
et a. fr. pigner « peigner », formé comme Dér. : huïtain, vers 1500, au moyen âge
tournevirer. Cf. le passage suivant du roman « huitième » ; huitaine, 1437 (d’abord huyc-
de Renart : As denz la pigne et housse et line, 1385) ; huitième, 1213 fhuitiesme).
hape, où les deux verbes apparaissent unis
pour renforcer l'expression. HUÎTRE. En outre oistre, d’où l’angl.
oysier ; pour l’h, v. huile. Lat. ostrea (du
HUBLOT, 1773, en 1382 huvelot (Rouen). grec ostreon).
Dér. de l’a. fr. huve « sorte de coiffure; HULAN, v. uhlan.
couverture d’un objet », qui représente le
francique *häba « coiffe ». On a aussi rap- HULOTTE, 1530. Dér. du fr. huler
proché le moyen haut all. hüle « cavité » «hurler » (du x111° au xvIes.), de même que
(de la famille de hohl « creux »), mais on sur le verbe huer on a formé huetlte, huot, etc.
ne rend compte ni de l’absence du simple Le verbe huler représente le lat. ululare,
ni de l’altération en hublot. v. hurler.

HUCHE, x11° (aussi huge, encore dans HUMAIN, xr1e. Empr. du lat. humanus.
les patois). Attesté dès avant 800 sous la — Dér. : humaniser, 1584. — Comp. :
forme hutica dans le Capitulaire-de Villis, surhumain, 1578 (Ronsard).
ce mot est d’abord propre à la France sep- HUMANISTE, 1539. Empr. du lat. du
tentrionale. Ce fait et l’h initial dénoncent XV°s. humanista, attesté depuis 1490. Voir
l’origine germ., mais jusqu'ici on n’a rien humain, humanité.
trouvé de satisfaisant.
HUMANITÉ, x. Empr. du lat. Auma-
HUCHER. Aussi a. pr. ucar, cat. ahucar, nitas, par l’Église, il s'oppose d’abord à
Modène ucaler. Du francique *hükôn « s’ac- déité et exprime l’idée de la corruptibilité
croupir » auquel correspondent moyen de la nature humaine; en outre, mais
bas all. hûken, néerl. huiken, moyen haut rarement « bonté envers d’autres per-
all. hûchen, tous de même sens. sonnes ». Le sens d’ « étude des lettres
classiques » date du xvi® s. d’après le sens
HUE, 1680. Aussi hu, interjection pour de humanitas en lat. class., cf. siudia huma-
avertir d’un danger, etc., du xr1° au nilatis « études littéraires » chez Cicéron.
XVI® $. — Dér. : huer, xr1° ; huée, xrr°; —“Dér. humanisme, 1765 (avec in-
v. chat-huant. fluence de l’alll Humanismus); a été
essayé en 1765, au sens d’ « amour géné-
HUGUENOT, 1552, au sens de « pro- ral de l’humanité »; humanitaire, 1836
testant ». Mot qui vient de Genève, où il (Musset), d’où -tariste, 1837 (Balzac) ;
a été employé sous la forme eyguenot -isme, 1838.
dès 1520, pour désigner les partisans du
parti politique qui luttait contre les ten- HUMBLE, vers 1080 (Roland), d’abord
tatives d’annexion du duc de Savoie; humele. Empr. du lat. humilis, propr. « bas
(physiquement) » (de humus « sol »), d’où
il est empr. de l’all. de la Suisse aléma-
nique Eidgenosse (n) « confédéré (s) »: « abaïssé » en lat. class., puis « humble »
cette désignation vient de ce que Genève en lat. eccl., seul sens pris par le fr. V.
s'était alliée pour lutter contre le duc de humilier.
Savoie, en 1519, avec Fribourg, et, en 1526 HUMECTER, 1503. Empr. du lat. hu-
avec Berne, villes de la Suisse alémanique ; mectare « rendre humide ».
par suite, les partisans du duc donnèrent
ce nom, par moquerie, aux Genevois, par- HUMER, x1e. Seulement fr. Est sûre-
tisans de la Confédération. Quant à la ment une onomatopée qui dépeint l’aspi-
forme huguenot, elle est née en France, ration du liquide qu’on absorbe de cette
parce que, comme nous disent les historiens façon.
contemporains, les réformés de la ville de HUMÉRUS, xvi° (Paré). Empr. du lat.
Tours se rassemblaient la nuit près de la humerus « épaule ».
porte du Roi-Hugon pour faire leur culte.
HUMEUR, xnu°. Empr. du lat. humor
HUILE. D'abord olie, oile; h introduit qui désigne toute espèce de liquide, repris
pour assurer la lecture u et non v. Lat. parfois avec cette valeur ; désigne surtout
oleum « huile d’olive ». En fr. ne désigne depuis le moyen âge les liquides qui se
que l'huile en général ; a été étendu à des trouvent dans les corps organisés, d’après
produits analogues, v. p. vi. A été partout la langue de l’ancienne médecine ; a pris
influencé par la forme lat. — Dér. : huiler, des sens moraux, dès le début de la tradi-
1488 ; huïleux, 1474 ; huilier « fabricant », tion, et par suite ceux de « tempérament,
1260 ; huilerie, 1547 ; huilier « récipient », caractère », d’après la théorie de l’ancienne
1693. mt ee sur les quatre humeurs cardi-
nales.
HUIS. Hors d'usage, sauf dans la locu-
tion à huis clos ; pour h, v. huile. Lat. üs- HUMIDE, xve; humidité, xrve, Empr.
lium, attesté au vie s., modification méta- du lat. humidus, humiditas.
phonique du lat. class. ôstium « porte de HUMILIER, xr1° ; humiliation, fin x1ve ;
maison ». — Dér. : huissier, x11°, au sens humilité, x° s. (Saini-Léger). Empr. du
de « portier »; « officier de justice », lat. eccl. humiliare, humiliatio, humilitas
dès 1320. (de humilis « humble ») ; en lat. class. humi-
327 HYMEN

litas signifie « état de ce qui est bas physi- HYACINTHE, v. jacinthe.


quement », d’où « modestie de la condi-
tion » ; le sens moral s’est développé dans HYALIN, xve. Empr. du lat. de basse
la langue des chrétiens, v. humble. ép. hyalinus (du grec hyalinos, de hyalos
« toute pierre transparente », d’où « objet
HUMOUR, 1725 ; humoriste, 1770, « qui de verre »).
a de l'humour » ; humoristique, 1844. Empr.
de l’angl. humour, lui-même empr. du fr. HYBRIDE, 1596. Empr. du lat. hybrida,
humeur à la fin du xvr® s. au sens de d’abord ibrida « de sang mélangé », altéré
« penchant à la plaisanterie », humorisi, en hybrida, parce qu’on l’a rapproché du
humoristic. Humoriste a été en outre empr. grec hybris « excès, ce qui dépasse la me-
de l’it. humorisia au sens de « capricieux », sure ».
1578, mot qui vient lui-même du lat. de
Van Helmont (v. gaz) humorisila, qui dési- HYDRATE, 1802. Dér. du grec hÿdor
gnait le médecin partisan de la doctrine «eau ».
dite humorisme, doctrine qui attribuait les
HYDRAULIQUE, fin xve. Empr. du
maladies à l’altération des humeurs.
lat. hydraulicus (du grec hydraulikos), qui
HUMUS, 1755. Empr. du lat. humus se disait notamment d’une orgue hydrau-
« sol ». lique, c’est-à-dire qui marche grâce à de
HUNE, xr1°. Anc. scandinave hünn. — l’eau (hyÿdôor) passant dans des tuyaux
Dér. : hunier, 1634. (aulos « flûte, tuyau »).
HUPPE. Lat. upupa. La voyelle accen- HYDRE, xrue (écrit alors idre); rare
tuée n’est pas devenue 0, parce que l’u avant le xviie s. Empr. du lat. hydra,
exprimait mieux la valeur onomatopéique hydrus (du grec hydra, hydros, de hydôr
du nom ; la tendance au renforcement de « eau »); hydre est parfois masc. comme
cette valeur a en outre fait naître un À dans les langues anc.
devant la voyelle. L’odeur infecte que HYDRO-. Premier élément de mots sav.
répand cet oiseau a fait rapprocher le nom comp., tels qu'hydrographie, 1551, tiré du
dans les patois du verbe puer et de l’adij. grec hydôr « eau ».
pute « puante » (du lat. putida), de là des
formes comme pupu et pupute, avec rédu- HYDROCÉPHALE, « hydropisie de la
plication. V. aussi houppe. tête », xvi® (Paré) ; adj., « atteint d’hydro-
HURE, xue. Propr. « tête hérissée ». Le pisie », 1782. Empr. du grec hydrokephalon,
fait que le mot vit uniquement dans la subst., hydrokephalos, adj.
France du Nord et son caractère phonique
font supposer une origine germ., mais on HYDROGÈNE, 1787. Mot créé par G. de
n’a encore rien trouvé dans cette direction. Morveau au sens de « engendrant l’eau »
— Dér. : huron, 1360, au sens propre de avec le grec hydôr « eau » et le suff. -gène.
« qui a la tête hérissée », d’où « rustre », HYDROMEL, xve. Empr. du lat. hydro-
encore normand ; depuis le xvire s. sert à meli (d’un mot grec, comp. de meli «miel »).
désigner une peuplade sauvage du Canada,
ce qui a donné une nouvelle vie au mot; HYDROPHOBE, 1640; hydrophobie,
ahurir, 1270, d’où ahurissement, 1863. 1314. Empr. du lat. hydrophobus, hydro-
HURLER. Lat. pop. ärulare, lat. class. | phobia (du grec hydrophobos, de phobos
ululäre ; l'h de hurler est d’origine expres- « crainte »).
sive ou vient peut-être de huer. — Dér. : HYDROPISIE, xri°; hydropique, id.
hurlement, x11° ; hurleur, xvirie (Buffon). Empr. du lat. hydropisis, hydropicus (du
HURLUBERLU, 1564 (Rab.) ; en outre grec hydrôpisis, hydrôpikos, de hydrôps
hurluburlu et, par altération, husiuberlu. « hydropisie »).
Mot grotesque et fantaisiste formé au
xvi®s., conformément au goût de l’époque, HYÈNE, xu°e. Empr. du lat. hyaena (du
de *hurelu « ébouriffé » (qui peut avoir grec hyaina).
existé d’après l’anc. fr. hurel « homme aux HYGIÈNE, 1550. Empr. du grec hygiei-
cheveux hérissés » et qui est conservé dans non (neutre de l’adj. hygieinos « qui con-
le pic. hurlu « harle ») et berlu « qui a la cerne la santé ») qu'Aristote a employé au
berlue ». Hurel est un dér. de hure ; pour sens de « santé ». — Dér. : hygiénique,
berlu v. berlue. L’angl. hurlyburly, bien 1791 ; anti-hygiénique, 1867; hygiéniste,
qu’attesté un peu avant le mot franc., doit 1830.
en être emprunté.
HYGRO-. Premier élément de mots sav.
HURON, v. hure. comp., tels qu'hygromètre, 1666, tiré du
HUSSARD, 1605. Souvent aussi hous- grec Aygros « humide ».
sard et housard. Empr. de l’all. Husar, empr. HYMEN, « dieu du mariage », d’où « ma-
lui-même du hongrois huszar, qui remonte, riage », xvuie. Empr. du lat. Hymen, nom
par l'intermédiaire du slave du sud gu(r )sar du dieu, d’où « chant de mariage » (du grec
« pirate, brigand » (qui doit ce mot au bas
Hymén).
grec où, toutefois, il n’est pas attesté), à
un lat. pop. *cursarius, V. corsaire. HYMEN, membrane, 1541. Empr. du
HUTTE, 1358 (au xue s., à Metz, dans lat. de basse ép. hymen (du grec hymén,
un autre sens). Empr. du moyen haut all. qui est peut-être un autre mot que le nom
hütte ou de l’anc. haut all. hutia. du dieu du mariage Hymên).
HYMÉNÉE 328

HYMÉNÉE, 1550. Empr. du lat. Hyme- HYPOCRITE, xr1° (Chrétien) ; hypocri-


naeus (du grec Hymenaios, de même sens sie, x11°. Empr. du lat. hypocrita, hypo-
que Hymên). crisia (du grec hypokrités « acteur », hypo-
krisis « jeu ou débit de théâtre ») ; ont déjà
HYMNE, x11°. Empr. du lat. Aymnus (du le sens fig. en grec et en lat. de basse ép.
grec hymnos).
HYPOGÉE, 1552 (Rab.). Empr. du lat.
HYPER-. Préf. empr. du grec hyper hypogeum (du grec hypogeion, de hypo
« au-dessus ».
« sous » et de gé « terre »).
HYPERBOLE, xrr1°, comme terme de HYPOSTASE, 1541 (Calvin), au sens
rhétorique ; rare avant le xvrre s., où appa- théologique. Empr. du lat. eccl. hypostasis
raît aussi le sens mathématique (1646); (d’un mot grec qui signifie littéral. « ce qui
hyperbolique, 1546 (Rab.). Empr. du lat. est placé dessous », traduit en lat. par
hyperbole, hyperbolicus (du grec hyperbolé, subsiantia, V. substance).
de ballein « lancer », propr. « action de
lancer par-dessus », d’où « excès, etc. »). HYPOTÉNUSE, 1520. Empr. du lat. hy-
Le sens mathématique est déjà grec. potenusa (du grec hypoteinousa, part. prés.
fém. du verbe hypoteinein « se tendre »,
HYPERBORÉEN, xvine (Diderot). Dér. littéral. « (le côté) (pleura, fém.) se tendant
de hyperborée, 1372, encore dans les dict., (sous les angles) » (Platon).
empr. du lat. hkyperboreus (du grec hyper-
boreos, de boreas « vent du nord »). HYPOTHÈQUE, xiv°, HYPOTHÉCAI-
RE, 1305. Empr. du lat. hypotheca, hypo-
HYPNOTIQUE, 1549. Empr. du lat. Ayp- thecarius (celui-ci de basse ép.) (du grec
noticus (du grec hypnotikos, de hypnos hypothéké; le verbe hypotithemi signifie
« sommeil »). — Dér. : hypnotiser, 1855; déjà « mettre en gage »). — Dér. : hypo-
-iseur, fin xix° ; hypnotisme, 1845, d’après théquer, 1369.
l’angl. hypnotism, créé en 1843 par Braid,
de Manchester ; hypnose, 1877. HYPOTHÈSE, 1582 ;hypothétique, 1290.
Empr. du lat. hypothesis, hypotheticus (du
HYPO-. Préf. empr. du grec hypo « au- grec hypothesis, hypothetikos, de thesis).
dessous ».
HYPSO-. Premier élément de mots sav.
HYPOCONDRE, « atteint d’hypocon- comp., tels qu'hypsomètre, 1866, tiré du
drie », fin xvi® (Régnier). Tiré d’hypocon- grec hypsos « hauteur ».
driaque, xVi° (Paré), empr. du grec hypo-
khondriakos ; celui-ci est un dér. de hypo- HYSOPE, 1120. Empr. du lat. hysopus,
khondrion « chacune des parties latérales de hyssopus (du grec hyssôpos, empr. lui-même
l’abdomen sous les fausses côtes », d’où le d’un parler sémitique, cf. l’hébreu éz6b);
lat. hypochondria et le terme de l’anc. le mot grec est antérieur à l'époque chré-
anatomie hypocondre, xrve, ou -ie, 1490; tienne, mais c’est par la Bible que le mot
le sens des adj. vient de ce que l’hypocon- a été répandu : en effet le nom de la plante
drie était attribuée autrefois à un trouble a été connu au moyen âge et figure dans
des hypocondres. — Dér. : hypocondrie, des locutions où elle symbolise ce qui est
1806. petit, par opposition au cèdre, etc., parce
que l’hysope est plusieurs fois citée dans
HYPOCRAS, vers 1415. Altération, par l'Ancien Testament, notamment dans des
modification de l’initiale (d’après les mots locutions semblables à celles du fr.
en hypo-) d'Hippocras, au moyen âge nom
d’Hippocrate, auquel on attribuait l’inven- HYSTÉRIQUE, 1568. Empr. du lat.
tion de l’hypocras, souvent appelé alors hystericus (du grec hysierikos, de hystera
vinum hippocraticum. « matrice »). — Dér. : hystérie, 1731.
||
ÏAMBE, 1532 (Rab. : iambus) ; Yambique, IDÉAL, 1578 (Desportes). Empr. du lat.
1466. Jambe, propr. terme de métrique de basse ép. idealis pour servir d’adj. à
anc., a été pris par A. Chénier pour dési- certains sens d’idée. Comme subst., 1832
gner une sorte de poème satirique, sans (Balzac), empr. de l’all. des philosophes.
doute en souvenir des poèmes ïiambiques — Dér. : idéaliser, 1794 ; idéalisme, 1752? ;
d’Archiloque. Empr. du lat. iambus, iam- idéaliste, 1729.
bicus (du grec iambos, iambikos). IDÉE, 1119; peu usité avant le xvires.
Empr. du lat. idea (mot pris au grec), au
IBIDEM, 1693. Empr. du lat. ibidem sens philosophique de « représentation que
« là même ». l'esprit se fait des choses ». A pris des sens
IBIS, 1537. Empr. du lat. ibis (mot d’ori- plus étendus, même pop.
gine grecque). IDEM, 1501. Empr. du lat. idem « le
même, la même chose ».
ICEBERG, 1857. Empr. de l’angl. ice-
berg, calque du néerl. ijsberg, avec substi- IDENTIFIER, 1610. Empr. du lat. sco-
tution au premier élément de la forme lastique identificare (de idem). — Dér. :
angl. correspondante ice. identification, 1610.
IDENTIQUE, 1610. Empr. du lat. sco-
ICE-CREAM, 1922. Empr. de l’angl. lastique identicus.
ice-cream, Comp. de ice « glace » et cream
IDENTITÉ, 1611 (auparavant aux sens
« Crème ».
de « égalité sociale » en 1327 et « fait
ICHTYO-. Premier élément de mots sav. d’être uni avec qn » dans Oresme). Empr.
comp., tels qu'ichtyologie, 1649, tiré du du lat. de basse ép. identilas.
grec ikhthys « poisson ». IDÉO-. Premier élément de mots sav.
comp., tels qu'idéologie, 1796 (créé par
ICI. Comp. de ci, lequel est comp. à son Destutt de Tracy), etc., tiré du grec idea,
tour, en vue d’un renforcement de l’idée avec o d’après les mots d’origine grecque,
locale, des mots lat. ecce « voici » et hic dont le premier élément est terminé par 0,
« ici ». La voyelle initiale d’ici provient cf. philosophe, etc.
probabl. de iluec (une autre explication
par une nouvelle comp. avec i, de hic, IDIOME, 1544 ; d’abord ydiomat, 1527.
reste possible) ; iluec représente l’adv. lat. Empr. du lat. idioma (du grec idiôma),
illüc « là », devenu “*zlloc, avec modification ropr. « particularité propre à une langue,
de la première voyelle sous l'influence du idiotisme », sens usité jusqu’au xvrie s. (et
lat. Zlico « sur-le-champ » et de la seconde conservé en angl.) ; le sens moderne s’est
par loco, l’ablatif de locus. Cet i a aussi développé dès le xvi® s. — Dér. : idioma-
passé aux pron. démonstr. (icil, etc.), qui tique, 1845.
l’ont perdu plus tard, tandis qu'ici l’a con- IDIOSYNCRASIE, 1626. Empr. du grec
servé, ci étant trop affaibli comme adv. idiosynkrasis € tempérament particulier »
atone. Ailleurs autres renforcements, cham- (de idios « particulier » et synkrasis « mé-
penois foulci, wallon droilci. lange ») ; d’abord terme médical; pris au
xiIxe s. dans un sens plus étendu.
ICÔNE, 1838. Mot russe ikona, lui-même
empr. du grec byzantin eikona, prononcé IDIOT, xive (Oresme : ydiot), d’abord
ikona, « image, statue sainte », v. les suiv. ; idiote, vers 1180. Empr. du lat. idiotes
ne s’emploie qu'en parlant de l'Église « ignorant, sot » (du grec idiôtés, propr.
d'Orient. « particulier », d'où « étranger à tel ou tel
métier, ignorant ») ; idiot a d’abord eu le
ICONO-. Premier élément de mots sav. sens ancien; le sens moderne date du
comp., tels qu’iconographie, 1701, tiré du XVIIe 8. — Dér. : idiotie, choisi en 1836
grec eikôn « image ». par Esquirol pour remplacer en ce sens
idiotisme, usuel au xviie et au XVIIIe 8., qui
ICONOCLASTE, 1557. Empr. du grec a été ensuite éliminé à cause de l’homo-
eikonoklastés « briseur d'images ». nymie avec le suivant.
ICTÈRE, 1578. Empr. du lat. médical IDIOTISME, xvie (Bon. des Périers).
icterus (du grec médical ikteros « jaunisse »). Empr. du lat. idiotismus (du grec idiôtis-
mos « langage particulier »); idiotisme a
-IDE. Suff. sav., signifiant « en forme d’abord eu le sens anc. ; a été ensuite spé-
de », tiré du grec eidos « forme ». cialisé dans l'usage des grammairiens.
IDOLÂTRE 330

IDOLÂTRE, x1rie (J. de Meung) ; ido- gner par dérision les Frères des écoles chré-
lâtrie, xr1°. Pour “*idololatre, *idololairie, tiennes; ignorantissime, 1593 (Satire Mé-
par superposition syllabique. Empr. du nippée), sur le modèle de l’it. ignorantis-
lat. eccl. idololatres, idololatria (du grec simo.
eidololairés, -treia). Idolätrie a été pris au IGUANE, 1658 (1533 iuana). Empr., par
sens fig. au xvire S., d’après idolätrer. — l'intermédiaire de l’esp. iguano, de la lan-
Dér. du 1er : idolâtrer, xiv®, au sens d’ « a- gue des Caraïbes.
dorer les idoles » encore usité au XVII 8. ;
sens fig. depuis le xvre s. IL, ILS. Le sing. il représente le lat.
pop. *illi, fait probabl. sur qui, au lieu du
IDOLE, xirre (J. de Meung : ydole; lat. class. ille, cf. it. egli ; le plur. ils date
d’abord idele, idle, cf. ydele, vers 1080, du xrves. Il, ils ont été de véritables pro-
Roland). Empr. du lat. eccl. idolum (du noms jusqu’au xvi® s.; ont été depuis
grec eidôlon « image », d’où en grec eccl. remplacés par lui, eux, en devenant de
« image d'un dieu »). À eu au xvi° et au simples préf. de conjugaison. I s’est déve-
xviie s. le sens d’ « image, fantôme » loppé devant les verbes impersonnels au
d’après le grec; le sens de « personne cours du moyen âge. Cf. it. egli, aux deux
aimée » date du xvire s. nombres, esp. el (de ille), ellos, a. pr. el,
IDYLLE, 1605 f(idillies; au xvre s. il, etc., aux deux nombres ; les patois du
idile, idylle). Empr. de l’it. idillio, empr. Midi, au sud de la ligne qui va de l’embou-
lui-même du lat. idyllium (du grec eidyllion chure de la Gironde aux Hautes-Alpes, ne
« petit poème lyrique », qui a servi à date les emploient pas comme accessoires du
très basse et pour des causes mal connues verbe ; il en est de même du pronom devant
à désigner les poèmes de Théocrite) ; le les verbes impersonnels. — Comp. : oui,
mot usuel dans l’antiquité églogue est resté xvi®, d’abord oil, vers 1080, comp. de
didactique, tandis qu’idylle a pris au xIx°s. l’a. fr. o « cela », lat. hoc, et d’il, conden-
un sens plus étendu. — Dér. : idyllique, sation d’une phrase, qui aurait été en lat.
1845. hoc ille fecit, le verbe faire remplaçant
ordinairement le verbe de la question dans
IF. Du gaulois ivos, attesté par une ins- la réponse, et pouvant être supprimé en-
cription, cf. aussi irl. eo; les langues germ. tièrement. L’a. fr. disait aussi o-je. La
possèdent le même mot, cf. all. Eibe, mais particule négative qui s’opposait à oil était
if n’en vient pas. — Dér. : iveteau, 1690 ;
nen-il, aujourd’hui nenni (devenu rural);
ive, xve ; ivette, 1762, dite aussi germandrée l’a. fr. disait aussi ne-je. O-je et ne-je
petit if. étant sortis d'usage et il ayant perdu
IGLOO, 1931. Empr. de iglo de la langue toute autonomie, oui et nenni sont de-
des Esquimaux. venus inanalysables en fr. dès le xvie s.
au moins. Oui est aujourd’hui répandu
IGNAME, sorte de plante tropicale, 1515. dans tout le domaine gallo-roman; o (a.
Empr. de l'esp. iñame, aujourd'hui ñame, pr. oc) est devenu rare dans le Midi ; d’où
qui passe pour être lui-même empr. d’une ouiche, 1696, déformation d’'oui; oui-da,
langue africaine. xvIIe, d’abord oui-dea, xvi®, formé avec
IGNARE, x1v° (Oresme). Empr. du lat. la particule da qui se combinait aussi
ignarus. avec non, nenni, et, en outre, était em-
ployée isolément ; da, xvi®, qui a succédé
IGNÉ, xve. Empr. du lat. igneus (de à dea (parfois dia), usuel au xve et au
ignis « feu »). xvi® s. (et encore signalé fin xvr1®) est une
IGNI-. Premier élément de mots sav. altération, due à son emploi interjectif, de
comp., tels qu'ignifuge, fin xix®, tiré du diva, xi1°, formé des deux impér. di et va.
lat. ignis « feu ».
IL-, préf., v. in.
IGNOBLE, x1ve (E. Deschamps), au sens
de « non noble », sens encore attesté au ÎLE. Lat. i(n)sula. It. isola, esp. isla,
XVIIe s. ; sens moderne depuis lors. Empr. a. pr. iscla, etc. — Dér. : flot, 1529, a éliminé
du lat. ignobilis « inconnu, de naissance islet et islelle, qui se rencontrent encore au
obscure, vil ». et au xvirie s. — Comp. : presqu'île,
IGNOMINIE, xv°; ignominieux, vers
1400. Empr. du lat. ignominia (de in, ILIAQUE, xvi° (Paré). Dér. sav. du lat.
négatif, et nomen, -inis « nom, réputa- ilia « flancs ».
tion »), ignominiosus. ILLÉGAL, xive (Oresme). Empr. du lat.
IGNORER, vers 1330 ; ignorance, vers médiéval illegalis. — Dér. : illégalité, id.
1120; ignorant, 1253. Empr. du lat. igno- ILLÉGITIME, xive. Empr. du lat. de
rare, ignorantia, ignorans. — Dér. d’igno- basse ép. illegitimus. — Dér. : illégitimité,
rant : ignorantin, 1752, adaptation de lit. 1752.
Ignorantelli, dont le suffixe à valeur de
dérision a été rendu par un suff. franc. de ILLICITE, xive. Empr. du lat. illicitus.
même valeur, pour désigner les Frères de ILLICO, 1842. Mot lat. (dont l’ortho-
Saint-Jean de Dieu, ordre fondé en 1494 graphe correcte est ilico), employé au sens
par le Portugais saint Jean de Dieu qui de « sur-le-champ » dans le jargon des
lui donna le nom d’ignorant, par modestie ; pharmaciens, et passé ensuite dans le parler
on trouve des frati ignoranii à Paris dès familier général. Employé déjà au xvi®s.
1604 (frères ignoranis est déjà dans la dans le langage de la chancellerie, sous
Satire Ménippée) ; a servi plus tard à dési- l’anc. régime.
331 IMMUNITÉ

ILLIMITÉ, 1611. Empr. du lat. de basse IMMARCESCIBLE, vers 1520. Empr. du


ép. illimitatus. lat. eccl. immarcescibilis (de marcescere «se
flétrir, languir »).
ILLUMINER, xr°; illumination, xive
(Oresme). Empr. du lat. illuminare, illu- IMMATÉRIEL, vers 1335 ; immatérialité,
minalio ; V. enluminer. — Dér. du verbe : 1647 (Pascal). Empr. du lat. scolastique
illuminisme, 1819. immalerialis- -itas.

ILLUSION, xr1°; illusoire, xiv°. Empr. IMMATRICULER, 1485. Empr. du lat.


du lat. illusio (de basse ép.), illusorius (de médiéval immatriculare. — Dér. : imma-
illudere «se jouer de »). — Dér. d’illusion : triculation, 1636.
illusionner, 1801 ; désillusion, 1834 ; désil- IMMÉDIAT, 1382. Empr. du lat. de
lusionner, 1838. basse ép. immediatus.
ILLUSTRE, xv°; illustrer, vers 1350; IMMÉMORIAL, 1507. Empr. du lat.
illustration, xir1e. Empr. du lat. illusiris, médiéval immemorialis.
illustrare, illustratio. — Dér. d’illusire :
illustrissime, 1481, d’après l’it. illustrissimo. IMMENSE, 1360 ; immensité, xive. Em-
pr. du lat. immensus, immensilas.
ILOTE, 1568. Empr. du lat. ilota (du
grec heilôs, -ôtos). — Dér. : ilotisme, 1823, IMMERGER, 1632, une première fois
en 1501 ; immersion, xive. Empr. du lat.
IMAGE, vers 1050 {Alexis : imagene; immergere, immersio.
d'où image). Empr. du lat. imaginem, IMMEUBLE, vers 1190. Empr. du lat.
acc. de imago. — Dér. : imager, 1796,
immobilis, auquel le lat. juridique du moyen
s'emploie surtout au part. passé ; une pre- âge a donné son acception spéciale; fran-
mière fois formé au xirrI1® s.; imagerie, cisé en immeuble d’après meuble.
1829, au sens de « commerce, fabrication
d'images » ; au moyen âge désigne l’art des IMMIGRER, 1838, mais immigré, 1769 ;
imagiers ou sculpteurs. immigration, 1768. Le premier est empr.
du lat. immigrare, le deuxième dér. de ce
IMAGINER, 1290 ; imaginable, 1295 ; verbe lat., pour exprimer des notions oppo-
imaginaire, 1496 ; imagination, xr1°. Empr. sées à émigrer, émigration.
du lat. imaginari, imaginabilis (créé à basse
ép.), imaginarius {id.), imaginatio. — Dér. IMMINENT,, xive; imminence, 1787 (Nec-
d'imaginer : imaginatif (xive, Froissart); ker). Empr. du lat. imminens (de imminere
d’imaginable : inimaginable, 1580 (Mon- « menacer »), imminentia (créé à basse ép.).
taigne). IMMISCER, 1482, s'emploie surtout au
IMAN, 1559. Empr. du mot arabo-turc réfl. ; immixtion, 1701, une première fois
imäm. au xvi® s. Empr. du lat. immiscere, im-
mixlio.
IMBÉCILE, 1496 ; imbécillité, xrve (Ber-
suire). Empr. du lat. imbecillus, imbecilli- IMMOBILE, xirie (J. de Meung) ; im-
tas « faible, faiblesse », sens du fr. jusqu’au mobilité, 1314. Empr. du lat. immobilis,
XVII s., Où a triomphé le sens moderne. immobilitas (créé à basse ép.).

IMBERBE, xv®e. Empr. du lat. imberbis. IMMODÉRÉ, xve. Empr. du lat. immo-
deratus.
IMBIBER, 1503. D'abord s’imbiber ; im-
biber, trans., apparaît dès le xvie s. Empr.
IMMODESTE, 1543 ; immodestie, 1546.
Empr. du lat. immodestus « sans retenue »,
du lat. imbibere « s’imbiber de ». immodestia « excès » ; ont suivi le dévelop-
IMBRIQUÉ, 1584. Empr. du lat. imbri- pement sémantique de modesie, modestie.
catus (de imbrex « tuile »). IMMOLER, vers 1460; immolation,
IMBROGLIO, fin xvrie (Bossuet). Empr. x. Empr. du lat. immolare, immolatio.
de l’it. imbroglio, subst. verbal de imbro- — Dér. : immolateur, 1534.
gliare, qui correspond à embrouiller. IMMONDE, xrr1°. Empr. du lat. immun-
IMBU, vers 1460. Réfection, d’après le dus (de mundus « net, propre »).
lat. imbulus, part. passé de imbuere. « imbi- IMMONDICES, 1223. Empr. du lat.
ber, imprégner », d’embu, encore usité dans immunditiae ; on trouve aussi le sing. au
le langage de la peinture, part. de l’anc. xi1e s. et encore chez Chateaubriand,
verbe emboire, v. embu. Sur imbu a été d’après le lat. immunditia.
refait imboire, très rare, aujourd’hui inusité.
IMMORTEL, xire; immortalité, xxi°.
IMITER, xive; imitateur, vers 1420; Empr. du lat. immortalis, immorialitas. —
imitatif, 1466 (rarement avant 1764, Vol- Dér. d’immoriel, d’après le lat. inmortalis :
taire) ; imitation, vers 1235. Empr. du lat. immortaliser, 1544.
imitari, imitaior, imitativus (créé à basse IMMUTABILITÉ, xive. Empr. du lat.
ép.), imilatio. immulabilitas pour servir de nom abstrait
IMMACULÉ, vers 1400. Empr. du lat. à immuable, v. muer.
eccl. immaculatus (de macula « tache »). IMMUNITÉ, 1276. Empr. du lat. immu-
IMMANENT, 1570. Empr. du lat. sco- nitas « exemption de charges » fmunus) ;
lastique immanens, part. prés. de immanere pris au sens médical, 1866, en parlant de
« demeurer ». — Dér. : immanence, 1873. la vaccine.
IMPACT 332

IMPACT, 1829. Empr. du lat. impactus, IMPÉRIEUX, vers 1420. Empr. du lat.
part. passé de impingere « se heurter ». imperiosus.
IMPAIR, 1500, d’abord impar, 1484; IMPÉRITIE, x1v° (en outre imperice au
imparité, 1838 (auparavant, vers 1300 et xves.). Empr. du lat. imperilia (de peritus
vers 1600, au sens de « inégalité »). Empr. « expérimenté »).
du lat. impar, francisé d’après pair, impa-
rilas (créé à basse ép.). IMPERMÉABLE, v. perméable.
IMPALPABLE, vers 1440. Empr. du IMPERSONNEL, 1174 (impersonal, com-
lat. de basse ép. impalpabilis. me terme de grammaire). Empr. du lat.
des grammairiens impersonalis ; le sens
IMPARFAIT, 1372. Du lat. imperfectus ; philosophique est un développement propre
comme t. de gramm. d’abord prélérit impar- au fr. du xix® s. — Dér. : impersonnalité,
fait, XVe s., temps imparfait, 1596, impar- 1765, au sens grammatical.
fait, subst., 1606.
IMPERTINENT, 1327. Empr. du lat.
IMPARTIR, 1410. Terme juridique, de basse ép. impertinens « qui ne se rap-
empr. du lat. imparliri, impartire (de basse porte pas à, qui ne convient pas », d’abord
ép.) « donner une part, accorder », réfection t. de procédure, emploi qui a duré jusqu’au
du lat. class. impertiri. XVIIIe s. ; sens moderne dès lors. — Dér. :
IMPASSE, v. passer. impertinence, xve, développement séman-
tique parallèle à celui de l’adij.
IMPASSIBLE, vers 1300 ; impassibilité,
xIt1e. Empr. du lat. de basse ép. impassi- IMPERTURBABLE, 1406, rare avant
bilis, impassibilitas. le xvirie s. Empr. du lat. de basse ép. im-
perlturbabilis (de perturbare « troubler »).
IMPATIENT,, xr1° ; impatience, xr1°. Em- — Dér. : imperturbabilité, xvr1° (Bossuet).
pr. du lat. impatiens, impatientia. — Dér. :
d'impatient : impatienter, 1584. IMPÉTIGO, 1784. Empr. du lat. médical
IMPAVIDE, 1801. Empr. du lat. impa- impetigo (de impetere « attaquer » ; cf. pour
vidus. le sens éruption).
IMPECCABLE, xve. Empr. du lat. eccl. IMPÉTRANT,, 1347. Part. prés. de l’anc.
impeccabilis (de peccare « pécher »). verbe juridique impétrer, xiv® (d’abord
empeirer, xi11°, Beaumanoir), empr. du lat.
IMPÉNÉTRABLE, vers 1390. Empr. du impeirare « obtenir ».
lat. impenetrabilis. — Dér. : impénétrabi-
lité, xvrr° (Pascal). IMPÉTUEUX, x; impétuosité, id.
Empr. du lat. de basse ép. impetuosus,
IMPÉNITENT, vers 1380 ; impénitence, impetuositas (de impetus « choc, élan, at-
1488. Empr. du lat. eccl. impoenitens, im- taque »).
poenitentia.
IMPIE, xve; impiété, vers 1120, rare
IMPÉRATIF, x1r1e, comme terme de
grammaire, xvi®, au sens de « qui impose
avant le xvii® s. Empr. du lat. impius,
impietas.
un ordre ». Empr. du lat. de basse ép.
imperalivus, à la fois terme de grammaire IMPLACABLE, 1455. Empr. du lat. im-
et au sens d’ « imposé » ; le deuxième sens placabilis (de placare « apaiser »).
du fr. est une innovation qui lui est propre.
IMPLANTER, 1539, rare avant le
IMPÉRATRICE, 1482. Empr. du lat. xvinies. Empr. de l’it. impiantare « placer »,
imperairiz, a remplacé l’a. fr. empereriz, qui s'emploie surtout au réfl. comme le fr.,
forme plus francisée ; à côté on trouve lat. de basse ép. implantäre « planter dans ».
aussi emperiere, etc. ; v. empereur. Après On considère aussi le verbe fr. comme
avoir ainsi hésité, le fr. a opté pour la empr. du lat., mais implantare est très rare
forme la plus proche du latin. et ne paraît pas avoir pu servir de modèle.
IMPERCEPTIBLE, 1377. Empr. du lat. — Dér. : implantation, 1541.
eccl. imperceptibilis.
IMPLIQUER, x1v® (au réfl.) ; implica-
IMPERFECTION, vers 1120. Empr. du tion, xive; implicite, 1496. Empr. des
lat. de basse ép. imperfectio. mots lat. implicare « envelopper, embar-
rasser », implicatio « enveloppement, em-
IMPÉRIAL, xr1°, en outre emperial. barras », implicitus « enveloppé », qui ont
Empr. du lat. de basse ép. imperialis (de été affectés à des emplois juridiques ou
imperium « empire »). — Dér. : impériale, logiques ; impliquer se rencontre quelque-
« dessus d’une voiture adapté de façon à fois avec le sens propre du lat. et implica-
recevoir des voyageurs », 1648 ; puis (en tion a d’abord été pris au sens de implicatio
1842) « touffe de poils qu’on laisse pousser avant de se régler sur le verbe fr. A côté
sous la lèvre inférieure »; impérialiste, 1525, de la locution impliquer contradiction, 1377,
au sens de « partisan de l’empire d’Alle- on trouve souvent impliquer (encore chez
magne » ; au xix° s., a désigné les partisans Beaumarchais) ; cf. déjà au xive s. : « Ce.
de la dynastie napoléonienne ; puis, d’après que j'ai dit ne répugne ne implique »; le
l’angl. imperialist, a pris le sens de « qui sens s’est sans doute développé dans le
concerne la doctrine de l’impérialisme ou latin médiéval.
expansion de la puissance britannique »,
1893, cf. aussi impérialisme, 1836, d’après IMPLORER, vers 1280. Empr. du lat.
l’angl. imperialism, puis sens plus étendus. implorare (de plorare « pleurer »).
333 IMPUBÈRE

IMPORTER, terme de commerce, 1669 fondaient avec celles d’empregnier ; de là


(le verbe apparaît déjà quelquefois au empreinte « fécondée », fréquent en a. fr.
XIVe s., où il est empr. du Îlat.) ; importa- Imprégnation, xiv®, rare aujourd’hui, a été
tion, 1734. Empr. de l’angl. {o import (du fait sur le verbe lat. avant imprégner.
lat. importare « porter dans »), importation,
par opposition à exporier, exportation. — IMPRESARIO, 1833 (Th. Gautier, au
Dér. : importateur, 1756 ; réimporter, 1792 ; sens de « directeur »). Empr. de l’it. impre-
réimportation, 1835. sario, dér. de impresa « entreprise » (de
imprendere, v. emprise).
IMPORTER, 1536; importance, vers
1470 ; important, 1476, très probablement IMPRESSION ; action de mettre une
empr. des mots it. importare, -anza, -ante, empreinte, 1259. Empr. du lat. impressio
qui ont passé du sens de « causer », propre « action de presser, empreinte », de émpri-
au lat. imporiare, à celui de « être d’impor- mere « presser sur ». À servi de subst. à
tance ». imprimer (un livre) à partir de 1475. —
Dér. : réimpression, 1690.
IMPORTUN, 1327; importunité, vers
1190. Empr. du lat. imporiunus, propr. IMPRESSION, « influence exercée par
« difficile à aborder » (en parlant d’un port, des objets extérieurs », 1468. Empr. du lat.
d’un lieu) d’où « désagréable », importunitas. philosophique impressio « impression sur
Le sens de « désagréable en arrivant mal à les sens ». V. expression. — Dér. : impres-
propos » s’est développé en fr., et impor- sionner, 1741 ; impressionnable, 1780 ; im-
tunité a suivi le sens d’importun. — Dér. pressionniste, 1874, d’où, plus trad, im-
d'importun : importuner, 1508. pressionnisme ; créé dans un sens défavo-
rable par le critique du Charivari, Leroy,
IMPOSER, 1302. Empr. avec francisa- à propos d’un tableau de Claude Monet,
tion d’après poser, du lat. imponere « faire intitulé Zmpression.
porter une charge », d’où « imposer un
tribut » et aussi « en imposer, tromper »; IMPRIMER, vers 1270. Empr. du lat.
mais (en) imposer au sens d’ « imposer le imprimere ; au sens d’ «imprimer un livre »,
respect » est propre au fr., XvI1®, d’où im- 1530. — Dér. : imprimerie, vers 1500
posant, 1732 (Voltaire). — Dér. et Comp. : (« L'art d'imprimerie ») ; imprimeur, 1441 ;
imposable, 1454 ; réimposer, 1549; -ition, réimprimer, 1538 (Marot).
1683 ; surimposer, 1674 ; -ition, 1611. IMPROBATION, v. improuver.
IMPOSITION, 1288. Empr. du lat. impo- IMPROBE, 1866, une première fois au
sitio « action de mettre sur »; développe- Xv® s.; improbité, 1350, rare avant le
ment sémantique parallèle à imposer ; im- xixe s. Empr. du lat. improbus, improbitas.
position des mains est un calque du lat.
eccl. impositio manuum ; le sens d’ « im- IMPROMPTU, 1651. Empr. du lat. in
pôt » apparaît dès le x1v®s. promptu (du subst. lat. prompius « le fait
d’être à la disposition de »), locution adver-
IMPOSSIBLE, 1227. Empr. du lat. im- biale signifiant «sous la main, en vue », d’où
possibilis. — Dér. : impossibilité, 1325. en fr. « sur-le-champ, sans préparation »,
IMPOSTE, 1545. Empr. de l’it. imposta, puis « morceau improvisé, petite pièce de
fém. pris substantiv. de imposio, part. de théâtre, etc. ».
imporre, lat. impônere « placer Sur ». IMPROPRE, 1372; impropriété, 1488.
IMPOSTEUR, 1534 (Rab.) ; imposture, Empr. du lat. des grammairiens impro-
1546, au moyen âge emposture. Empr. du prius, improprietas.
lat. de basse ép. impostor, impostura (de IMPROUVER, 1370 (Oresme) ; impro-
imponere au sens de « tromper », v. im- bateur, xvire (Balzac) ; improbation, vers
poser). 1450. Empr. du lat. improbare « désap-
prouver » (de probare « approuver »), impro-
IMPÔT, 1399. Empr. du lat. impositum, bator (créé à basse ép.), improbaltio. Im-
neutre de imposilus « posé sur », part. passé prouver a été francisé d’après approuver.
de imponere, v. imposer, en vue de son sens
spécial, et francisé comme dépôt. IMPROVISER, 1660. Empr. de lit. im-
provvisare, dér. de improuviso « imprévu »,
IMPOTENT, 1308 ; impotence, x111° (J. empr. du lat. improvisus. — Dér. : impro-
de Meung). Empr. du lat. impotens, impo- visateur, 1787 ; improvisation, 1807 (Mme
tentia « impuissant, impuissance » ; spécia- de Staël).
lisés au sens physique ; rares au sens lat.
IMPROVISTE, seulement dans la locu-
IMPRÉCATION, xrve (Bersuire). Empr. tion à l'improviste, 1528. Empr. de l'it.
du lat. imprecatio (de imprecari « souhaiter improuvisto, synonyme de improuviso; on
du mal à quelqu'un »). trouve rarement improvisle pris comme
adj. au xvi® s. À supplanté à l’impourvu,
IMPRÉGNER, 1620. Réfection de l’anc. encore usité au XVII°S.
verbe empregnier « féconder », usité encore
au début du xvire s., lat. de basse ép. im- IMPRUDENT, vers 1450 ; imprudence,
praegnäre (de praegnans « fécondée », en- 1370 (Oresme), rare avant le xvrie s. Empr.
ceinte »). Le sens de « féconder » est aujour- du lat. imprudens, imprudentia.
d’hui restreint à la langue de l’histoire
naturelle. Le sens moderne vient d’em- IMPUBÈRE, 1488, rare avant le xvIrIes.
preindre dont beaucoup de formes se con- Empr. du lat. impubes, -eris.
IMPUDENT 334

IMPUDENT, vers 1520 ; impudence, INCARNAT, 1532 (Rab.). Empr. de l’it.


1511. Empr. du lat. impudens, impudentia. incarnalo « de la couleur de la chair (car-
IMPUDIQUE, xive. Empr. du lat. im-
ne) ». On a dit aussi depuis la fin du
pudicus. — Dér. : impudicité, xive (E. Des-
XVIe s. incarnadin, empr. de l’it. dialectal
champs). incarnadino.

IMPULSION, 1315 ; impulsif, x1ve, rare INCARNER, 1496, terme de théologie,


avant le xvirie s. Empr. du lat. impulsio a éliminé une forme plus francisée enchar-
de impellere « pousser vers »), impulsivus ner, qui se trouve encore chez d’Aubigné;
lat. médiéval). incarnation, 1113. Empr. du lat. eccl. in-
carnare (de caro, carnis «Chair »), incarnalio,
IMPUNI, 1320, impunité, xive (Ber-
suire). Empr. du lat. impunitus, impuni- INCARNER, terme de médecine, 1372 -
tas. — Dér. d’impuni : impunément, 1554 ; a éliminé une forme plus francisée enchar;
d’abord impuniment, bien que relevé en ner, 1314, qui a été refaite en incarner par
1564 seulement, refait sur les adv. en interprétation étymologique. Incarnare
-ément. n’est pas attesté au sens médical, mais a
pu exister dans le lat. médiéval. — Dér. :
IMPUR, xur1° ; impureté, xive (E. Des- désincarné, 1891 (Huysmans).
champs), en outre impurité, xv°. Empr. du
lat. impurus, impurilas. INCARTADE, 1612. Empr. de l’it. in-
quartata « coup d’épée qu'on fait tout en se
IMPUTER, 1362, on trouve aussi du retirant vivement de côté, quand l’adver-
XIIIe au XV s. empuier, d’où empuleur, saire porte un coup droit en avant », parce
encore au xVI° s. ; imputation, xve. Empr. qu’on fait alors un quart de tour.
du lat. imputare « porter au compte » (de
pulare « compter »), imputatio. — Dér. : INCENDIE, 1602; incendiaire, xrtre.
imputable, xive (Oresme). Empr. du lat. incendium, incendiarius.
Jusqu'au début du xvrre s. on a dit embra-
IN-. Préf. négatif, empr. du lat. in-; sement ou brülement. — Dér. : incendier,
prend les formes im devant b, p, m, il 1596.
devant l, ir devant r. Les mots non relevés
à l’ordre alphabétique doivent être recher- INCESTE, xrri°; incestueux, 1352.
chés sous le simple. Empr. du lat. incestus, incesiuosus (créé à
basse ép.). On a dit aussi inceste, adij.,
INACCESSIBLE, 1496. Empr. du lat. de d’après le lat. incesius, propr. « impur »
basse ép. inaccessibilis. (de castus « chaste »).
INCIDENCE, 1626 ; incident, adj., 1720 ;
INADVERTANCE, 1344. Empr. du lat. t. de physique, empr. des mots anglais
médiéval inadvertentia (de adveriere « tour- incidence (formé par Bacon sur le lat. inci-
ner son attention vers »). dere), incident.
INANITÉ, 1496. Empr. du lat. inanitas INCIDENT, subsi., xtr1° (J. de Meung).
(de inanis « vide, vain »). Empr. du lat. scolastique incidens (de inci-
dere « survenir »).
INANITION, vers 1240. Empr. du lat. de
basse ép. inanitio « action de vider » (de INCINÉRER, 1794, parfois au xvie s.
inanire) en vue de son sens spécial ; le lat. et déjà en 1488 ; incinération, 1762, rare
inanis signifie aussi « à jeun, affamé ». auparavant, relevé au xiv®s. et chez Paré.
Empr. du lat. incinerare (de cinis, cineris
INAUGURER, x1v° (Bersuire) ; inaugu- « cendre »), incineratio (lat. médiéval).
ration, id. ; tous deux alors au sens du lat. ;
rares avant le xvir1e s. Empr. des mots lat. INCIRCONCIS, 1496 ; -ion, 1530. Empr.
inaugurare « prendre les augures, consa- du lat. eccl. incircumcisus, -io, v. circoncire.
crer », inauguratio, tous deux termes de la
langue religieuse, d’où le sens du fr., qui INCISER, 1418. Réfection, d’après inci-
n’a gardé que l’idée de solennité ou de sion, de l’a. fr. enciser « couper » ; le sens
nouveauté. — Dér. du verbe : inaugural, du verbe a été en même temps restreint à
xvi1® (Chapelain : Vosire oraison inaugu- des emplois techn. en rapport avec inci-
rale). sion ; enciser représente le lat. pop. *inct-
sûre (de incisus, part. passé du lat. incidere
INCANDESCENT, 1781. Empr. du lat. « couper »).
incandescens, part. prés. de incandescere
« être en feu ». — Dér. : incandescence, INCISION, 1314, au sens médical. Empr.
1764. du lat. incisio. Formé avec le radical
d’incision, incisif, 1314, n’a pris le sens de
INCANTATION, xrr1<. Empr. du lat. de « tranchant » qu’au xvie s. .
basse ép. incantalio (de incaniare « faire
des chants magiques »); v. enchanter. INCITER, xive (Froissart) ; antér. enci-
ler, xu1° ; incitation, xive. Empr. du lat.
INCARCÉRER, 1451 ; rare avant la fin incilare, incitatio.
du xvirie s. ; au moyen âge on trouve aussi
encarcerer. Empr. du lat. médiéval incar- INCIVIL, x1v® (Oresme) ; incivilité, 1426.
cerare (de carcere « prison », v. chartre). — Empr. du lat. incivilis, incivilitas.
Dér. : incarcération, xve, a signifié « étran- INCLÉMENT, 1528, rare avant le x1xes. ;
glement d’une hernie » dans la langue de inclémence, 1520. Empr. du lat. inclemens,
la chirurgie, dès 1314. inclementia.
339 INCUNABLE

INCLINER, 1213. Réfection, d’après le INCONSTANT, 1372 ; inconstance, x111°.


lat., d’encliner qui a résisté jusqu’au début Empr. du lat. inconsians, inconsiantia.
du xvrre s. (probabl. à cause de l’existence
INCONTINENT, adv., x. Empr. du
de l’adj. enclin) et qui représente le lat. lat. in continenti (sous-entendu {empore),
inclinäre ; inclination, vers 1295, depuis le
locution adverbiale signifiant « dans un
xvI1e s., usité surtout au sens moral. Empr.
du lat. inclinatio « action d’incliner » au temps continu, tout de suite ».
physique et au moral. — Dér. d’incliner : INCONTINENT, adj., vers 1350 ; incon-
inclinaison, 1639 ; créé pour distinguer le tinence, x11° (alors au sens moral). Empr.
sens physique du sens moral, réservé de des mots lat. incontinens, incontinentia, qui
préférence à inclination. ont également le sens médical.
INCLUS, 1394, on trouve aussi un fém. INCONVÉNIENT, xime. Empr. de l’adj.
inclue au xve s. Empr. du lat. inclusus, lat. inconveniens (de convenire « conve-
part. passé de includere « enfermer ». On nir »). À été aussi employé comme adj.
a créé au début du xix® s. le verbe inclure jusqu’au xvII° s.
d’après exclure, mais pour quelques formes
seulement : inf. et ind. prés. INCORPOREL, xx. Empr. du lat. in-
corporalis.
INCLUSIVEMENT,, xive. Fait, par oppo-
sition à exclusivement, d’après le lat. mé- INCORPORER, 1425, au moyen âge en-
diéval inclusivus. corporer ; incorporation, 1408. Empr. du
lat. de basse ép. incorporare (de corpus,
INCOGNITO, 1581. Empr. de l’it. inco- corporis « corps »), incorporatio. Ont élargi
gnito, empr. lui-même du lat. incognitus leur sens d’après corps. — Dér. : réincor-
« inconnu ». porer, 1599.
INCOLORE, 1797. Empr. du lat. de
basse ép. incolor. INCORRIGIBLE, 1334. Empr. du lat. de
basse ép. incorrigibilis.
INCOMBER, 1789, déjà au xve s. et en
1567 ; on trouve aussi chez Buffon incom- INCORRUPTIBLE, xirie ; incorrupti-
bant, comme terme techn., au sens de bilité, 1496. Empr. du lat. de basse ép.
« qui pèse sur ». Empr. du lat. incumbere incorruptibilis, incorruptibilitas.
« peser sur ». INCRÉDIBILITÉ, 1520. Empr. du lat.
INCOMBUSTIBLE, x1ve (Oresme) ; rare incredibilitas.
avant le xvii® s. Empr. du lat. médiéval INCRÉDULE, xive (Froissart); incré-
incombustilis. dulité, x° (Fragment de Valenciennes :
INCOMMENSURABLE, 1370 (Oresme) ; encredulitet). Empr. du lat. incredulus,
rare avant le xvrie. Empr. du lat. de basse incredulitas. -
ép. incommensurabilis. INCRIMINER, 1791, mais déjà au xvies.
INCOMMODE, 1534 ; incommoder, xv® ; Empr. du lat. incriminare (de crimen, cri-
incommodité, 1389. Empr. du lat. incom- minis « accusation, crime »).
modus, -are, -itas. INCRUSTER, xvi°; incrustation, 1553.
INCOMPARABLE, xu1°, d’après l’adv. Empr. du lat. incrusiare (de crusla « croù-
-ement. Empr. du lat. incomparabilis. te »), incrustalio.
INCOMPÉTENT, 1505. Empr. du lat. de INCUBATION, 1694, propr. « action de
basse ép. incompelens. — Dér. : incompé- couver des œufs », d’où le sens médical.
tence, 1537. Empr. du lat. incubalio (de incubare « cou-
INCOMPLET, 1762, une première fois ver »).
en 1372. Empr. du lat. de basse ép. incom- INCUBE, 1372. Empr. du lat. incubus
pletus. « cauchemar » (de incubare « coucher sur »)
INCOMPRÉHENSIBLE, vers 1300. Em- qui a servi, par suite, à désigner dans le
pr. du lat. incomprehensibilis. — Dér. : lat. eccl. cette sorte de démon appelé
incompréhensibilité, 1553. incube, V. succube.
INCONGRU, 1496; incongruité, 1514. INCULPER, 1526; inculpation, 1743,
Empr. du lat. de basse ép. incongruus « in- une première fois au xvi® s. Empr. du lat.
conséquent, déraisonnable », incongruilas de basse ép. inculpare (de culpa « faute »),
(seulement terme de grammaire). Incon- inculpatio. Le fr. a eu jusqu’au xvi* s.
gruité a suivi le sens de l’adj. une forme plus francisée encou(l)per ; v.
coulpe.
INCONSÉQUENT, 1734 (Voltaire), une INCULQUER, 1512. Empr. du lat. in-
première fois en 1552; inconséquence, culcare, propr. « fouler, presser » (de cal,
1538. Empr. du lat. inconsequens, inconse- calcis « talon »).
quentia.
INCULTE, 1475. Empr. du lat. inculius.
INCONSIDÉRÉ, xv°; inconsidération,
1488. Empr. du lat. inconsideratus « irré- INCUNABLE, 1823. Empr. du lat. incu-
fléchi », inconsideratio « irréflexion » ; ont nabula, plur. neutre, « berceau », qui a été
suivi le sens de considéré, considération. employé en lat. moderne pour désigner les
INCONSOLABLE, 1504 ; l’adv. -ement
premières productions de l'imprimerie, cf.
est déjà attesté en 1488. Empr. du lat. Incunabula Typographiae, Beughem, Ams-
inconsolabilis. terdam, 1688.
INCURABLE 336

INCURABLE, 1314. Empr. du lat. de innovation du lat. moderne; on trouve


basse ép. incurabilis. aussi quelquefois en ce troisième sens indice
d’après lit. indice. — Dér. : indexer, 1948.
INCURIE, 1560. Empr. du lat. incuria
(de cura « soin »). INDICE, 1306. Empr. du lat. indicium
(de index) ; a signifié aussi « dénonciation »
INCURIOSITÉ, 1496. Empr. du lat. de au xvie et au xvire s. d’après le lat. dont
basse ép. incuriosilas « négligence » pour c’est le sens propre.
servir de contraire à curiosilé.
INDICIBLE, 1452; indisible, xiv°. Em-
INCURSJON, x1ve (Bersuire). Empr. du pr. du lat. de basse ép. indicibilis (de
lat. incursio « attaque, invasion » (de incur- dicere « dire »).
rere « Courir sur »), sens plus étendu au
XIX® 8. INDICTION, terme de chronologie, x1r°.
Empr. du lat. de basse ép. indictio (de
INCURVER, 1840. Empr. du lat. in- indicere « publier »).
curvare.
INDÉCENT,, x1v® ; indécence, 1568. Em- INDIENNE, 1632. Dér. d’Inde, nom du
pr. du lat. indecens « qui n’est pas conve- pays où l’indienne se fahriquait d’abord.
nable », indecentia ; concernent surtout la INDIFFÉRENT, 1314, d’après l’adv.
pudeur depuis le xvrre s. -emment ; indifférence, 1487 (une 1re fois
INDÉCIS, 1458. Empr. du lat. de basse 1377). Empr. du lat. indifferens ; indiffe-
ép. indecisus « non tranché » ou formé sur rentia.
le lat. class. decisus (de decidere « tran- INDIGÈNE, 1756 (Voltaire), une pre-
cher ») pour servir de contraire à décidé. — mière fois, par plaisanterie, dans le jargon
Dér. : indécision, 1611. latinisant de l’écolier limousin, 1532
INDÉCLINABLE, xive, au sens de « qui (Rab.) ; récent comme subst. Empr. du
ne dévie pas (moralement) »; sens gram- lat. indigena. — Dér. : indigénat, 1699.
matical, 1579 (une 1re fois 1380). Empr. INDIGENT, xrr1e (J. de Meung); indi-
du lat. indeclinabilis, qui a les mêmes sens. gence, id. Empr. du lat. indigens, -entia.
INDÉFECTIBLE, 1501. Comp. de l’adij. INDIGESTE, vers 1360, sens fig. dès le
défectible, rare (mais attesté par l’adv. xvi® s.; indigestion, xi1I1°, sens fig. au
-ement au xvi® s.), dér. sav. du lat. defec- xviie s. Empr. du lat. indigesius, propr.
lus, part. passé de deficere « faire défaut ». « confus » (de digerere « mettre en ordre »),
INDÉFINI, xive, rare avant le xvie. d’où « mal digéré », à basse ép., indigestio.
Empr. du lat. indefinilus. INDIGNE, xri°, rare avant le xvi*;
INDÉLÉBILE, 1528. Empr. du lat. inde- indigner, xive (Bersuire, mais dès 1330
lebilis (de delere « détruire »); d’où a été au part. passé), au x11° s. s’endeignier;
tiré délébile, 1823. indignation, xri°; indignité, vers 1420.
Empr. du lat. indignus, indignari « trouver
INDEMNE, 1384, comme terme jurid.; indigne, s’indigner », indignatio, indignitas.
sens plus étendu au xix® s.; indemnité,
1367. Empr. du lat. jurid. indemnis (de INDIGO, 1603. Empr. de l'esp. indigo,
damnum « dommage »), indemnitas. — par l'intermédiaire du néerl. indigo, les
Dér. : indemniser, 1465. Pays-Bas ayant à cette époque-là mono-
polisé l'importation de l’indigo en Europe.
INDÉMONTRABLE, 1726, une première L’esp. indigo est empr. du lat. indicum
fois en 1582. Empr. du lat. de basse ép. qui désignait l’indigo venant de l’Inde,
indemonstrabilis. d’où aussi a. fr. inde (rare) ; indigo a servi
en esp., après la découverte de l'Amérique,
INDESCRIPTIBLE, 1789. Formé sur à désigner l’indigo qui y avait été trans-
descriptus, le part. passé du lat. describere. planté, surtout dans la région du Mexique,
INDÉSIRABLE, 1905. Empr. et adapté et y prospérait ; le nom convenait bien à
de l’angl. undesirable (de desirable, empr. cause de son rapport avec Indias « Indes
du fr.). Rendu populaire en 1911, à la suite occidentales » qui désignait l'Amérique;
de la fugue retentissante d’un chef de il n’a pourtant pas éliminé en esp. le mot
famille avec la gouvernante de ses enfants, anc. añil, d’origine arabe, v. aniline. —
les autorités canadiennes ayant déclaré Dér. : indigoterie, 1658 ; indigotier, 1718.
undesirable, suivant un terme usuel dans INDIQUER, 1510 ; indicatif, xive (Ores-
les services de l’immigration en Amérique, me), au sens de « qui indique » ; terme de
l'accès de ces deux personnes sur le terri- grammaire, vers 1500 ; indication, 1333.
toire du Canada. Empr. du lat. indicare, indicativus, indi-
INDEX, 1503, en parlant du doigt qui catio. — Dér. d'indiquer : indicateur, 1498.
est près du pouce, en outre doigt indice, Comp. d'indication : contre-indication, 1741.
1534 (Rab.); au sens de « table des ma- INDISCRET, vers 1380; indiscrétion,
tières d’un livre », xvrie ; « catalogue des
xite. Empr. du lat. indiscretus « qu'on ne
livres suspects établi par une Congrégation peut distinguer », indiscretio ; ont suivi le
spéciale de Rome », xviie ; de là l’expres- sens de discret, discrétion.
sion meltre à l’index, début xix°. Empr.,
aux deux premiers sens, du lat. index, pro- INDISSOLUBLE, 1496. Empr. du lat.
pr. «indicateur » ; le troisième sens est une indissolubilis. — Dér. : -ubilité, 1609.
337 INFÂME
INDISTINCT, 1496, d’après l’adv. -ement industrieux ; le sens moderne triomphe au
Empr. du lat. indistincius. début du xixe s., d’où industrialisme, 1823
(Saint-Simon), -iser, 1836.
INDIVIDU, 1242. Empr. du lat. scolas-
tique individuum « ce qui est indivisible » INÉDIT, 1796. Empr. du lat. ineditus.
(signifie « atome » chez Cicéron; indivi- INEFFABLE, vers 1470. Empr. du lat.
duus est usuel en lat. anc. au sens d’ «indi- ineffabilis (de effari « parler, dire »).
visible »), d’où « ce qui est particulier »
par opposition aux espèces et aux genres, INÉGAL, 1503, d’après l’adv. -ement;
puis « tout être particulier », et, de là, en inégalité, xvi*. Réfection, d’après égal,
fr. fam., « personne indéterminée », dès le égalité, d'inéqual, xive; inéqualité, 1290,
XVIIe s. — Dér. : individuel, 1490; indivi- empr. du lat. inaequalis, inaequalilas.
dualiser, 1767 ; individualité, 1760 ; indivi- INÉLÉGANT,, vers 1500. Empr. du lat.
dualisme, 1833 ; individualiste, 1836. inelegans.— Dér. : inélégance, 1525, d’après
INDIVIS, terme de droit, 1347. Empr. élégance.
du lat. jurid. indivisus. — Dér. : indivision, INÉLUCTABLE, vers 1790, une pre-
1765, d'après division; rare antér.; une mière fois, 1509. Empr. du lat. ineluctabilis
fois au xve s. dans un sens philosophique. (de eluclari « surmonter en luttant »).
INDIVISIBLE, 1314. Empr. du lat. de INÉNARRABLE, xve. Empr. du lat.
basse ép. indivisibilis. — Dér. : indivisi- inenarrabilis (de enarrare « raconter en
bilité, 1516. détail »).
INDOCILE, xv® ; indocilité, xvi°. Empr. INEPTE, 1380 ; ineptie, 1546. Empr. du
du lat. indocilis, indocilitas. lat. ineptus « qui n’est pas apte » (de aplus
INDOLENT, fin xvie (Sully) ; indolence, « apte »), d'où « sot, niais », ineplia « inap-
xvie, une première fois au xi1v°s. Empr. du titude, sottise »; le deuxième sens a éli-
lat. indolens, indolentia. miné le premier, exprimé aujourd’hui par
inapte, inaplitude, v. apte, aptitude.
INDOLORE, 1845. Empr. du lat. indo-
lorius « sans douleur ». INERTE, 1745, une première fois, en
1509 ; inertie, 1648, comme terme de
INDUBITABLE, 1488, d’après l’adv. mécanique ; une première fois, xiv° (Ores-
-ement. Empr. du lat. indubitabilis (de me); force d'inertie, 1732; rapidement
dubitare « douter »). sens plus étendus. Empr. du lat. iners
INDUIRE, x111° s., au sens d’ « amener « incapable », inertia « incapacité », d’où
quelqu'un à faire »; sens logique, x1v® «inactif, inactivité » (de ars «art, habileté »).
(Oresme) ; induction, 1290 ; appliqué à la INÉVITABLE, 1374. Empr. du lat. ine-
physique, au xix® s.; inductif, fin x1v®, vitabilis.
souvent au sens de « qui amène à », d’après
le verbe. Induire est une réfection, d’après INEXORABLE, xve. Empr. du lat.
le lat. inducere, de l’a. fr. enduire « amener inexorabilis (de exorare « Vaincre par ses
l'esprit à », v. enduire : le sens logique est prières », de orare « prier »).
dû à induction, empr. du lat. philosophique INEXPIABLE, vers 1500. Empr. du lat.
inductio ; inductif est empr. du lat. scolas- inexpiabilis.
tique inductivus. — Dér. d’induction, terme
de physique : inducteur, 1866. - INEXPUGNABLE, xive (Bersuire). Em-
pr. du lat. inexpugnabilis (de expugnare
INDULGENT, 1573; indulgence, vers « prendre d'assaut », de pugna « combat »).
1190. Empr. du lat. indulgens, -entia (de
indulgere « avoir de l’indulgence »). IN EXTENSO, 1838. Locution faite avec
le lat. exlensus « étendu », c’est-à-dire « dans
INDURER, 1855, une première fois in- toute son étendue ».
duré, dans un sens fig., 1466 ; induration,
1495, au sens médical ; se trouve au xIv°s. INEXTINGUIBLE, 1406. Empr. du lat.
aussi en un sens fig. Empr. du lat. indu- de basse ép. inexstinguibilis (de exstinguere
rare, induralio; v. endurer. « éteindre »).
INDUSTRIE, 1356, au sens d’ «activité », IN EXTREMIS, 1734. Locution de ca-
d’où, aussi, « habileté »; prend au xv°s. ractère jurid., faite avec le lat. exiremus
le sens de « profession mécanique, ingénio- « extrême », c’est-à-dire « à l'extrémité ».
sité qu’on manifeste dans un métier, dans
l’agriculture », de là le sens d’ « ensemble INEXTRICABLE, vers 1361 (Oresme).
des arts, des métiers, qui mettent en œuvre Empr. du lat. inexiricabilis (de exiricare
les matières premières », 1765, qui est de- « débarrasser, dégager »).
venu le sens dominant ; industrieux, 1455. INFAMANT, 1557. Part. prés. d’un anc.
Empr. du lat. industria « activité », indus- verbe infamer, xri1e, empr. du lat. infamare
triosus. Chevalier d'industrie, 1690, d’abord « déshonorer ».
-de l-, en 1633, dans la traduction du
Buscén (de 1622) de Quevedo, qui feint INFÂME, 1348 ; infamie, xiie. Empr.
qu’une association de vauriens prend du lat. infamis, infamia (de fama « renom-
comme patronne l’industrie dont ils se mée »); l’a. fr. avait aussi adapté le
nomment les chevaliers ; on trouve encore masc. infamium du lat. de basse époque en
chevalier de l’- en 1721. — Dér. : d’indus- infame qui a été éliminé par l’adj., et créé
trie : industriel, 1770 (Galiani : Nations infameité auquel infamie a été préféré à
industrielles) ; un moment concurrencé par cause de sa forme plus proche du lat.

DICT. ÉTYM. 22
INFANT 338

INFANT, 1407 (Je prins congié de l’in- INFIRME, 1247, rare avant le xvie s. ;
fant de Castille). Empr. de l’esp. infanie, infirmité, vers 1380. Réfection, d’après le
empr. lui-même du lat. infans, v. enfant. lat. infirmus, infirmitas « faible, faiblesse »,
Infante a été parfois employé par extension de l’a. fr. enfer, enferme « faible, malade »,
au sens de « princesse » dans la langue poé- enferié, enfermeté « faiblesse, maladie », cf.
tique ou, au contraire, par dérision. le texte de Pasquier : « Par succession de
temps nous avons repris l’é latin ; car nous
INFANTERIE, vers 1500. Empr. de l’it. disons aujourd’hui infirme, infirmité »;
infanteria, de infante propr. « enfant », infirme, infirmité ne continuent pas exac-
d’où « fantassin », v. fantassin. tement les deux mots de l’a. fr., ils ont
INFANTICIDE, 1611. Empr. du lat. de reçu dans le langage médical un sens spé-
basse ép. infanticidium. cial que ne connaît pas non plus le lat.
Infirme a de plus quelquefois au xvire s.
INFANTILE, 1870, comme terme de le sens du lat., et infirmité l’a encore, cf.
médecine. Empr. du lat. de basse ép. in- l’infirmité de la nalure humaine.
fantilis « d'enfant », dont l’a. fr. avait fait
enfantil, usuel jusqu’au xvi® s. (parfois INFIRMER, vers 1360; infirmation,
refait en infantile, d'après la forme du lat.). 1499. Empr. du lat. jurid. infirmare (de
— Dér. infantilisme, 1907.
infirmus « faible »), propr. « affaiblir »,
infirmatio. — Dér. d’infirmer : infirmatif,
INFARCTUS, 1866. Empr. de infarclus, 1569.
part. passé du lat. infarcire « fourrer dans ». INFIRMIER, 1398. Réfection, d’après
INFATIGABLE, 1496. Empr. du lat. in- infirme, de l’a. fr. enfermier « celui qui
fatigabilis. soigne les malades dans une infirmerie, un
hôpital », 1288, dér. de enferme, v. infirme ;
INFATUER, vers 1380. Empr. du lat. mais, tout en étant refait sur infirme, in-
infatuare (de fatuus, v. fat). — Dér. : infa- firmier a gardé le sens anc., par la force
tuation, 1622. des choses. — Dér. : infirmerie, 1606 ; au
INFÉCOND, xv° ; infécondité, xrve. Em- moyen âge enfermerie.
pr. du lat. infecundus, -itas. INFLAMMABLE, 1503. Dér. sav. du lat.
INFECT, xive (Oresme) ; infection, xI11°. inflammare.
Empr. du lat. infectus (de inficere, propr. INFLAMMATION, xive (Bersuire), au
« mélanger », d’où « teindre », puis « souil- sens d’ « excitation de l’esprit », sens rare.
ler »), infectio. — Dér. : infecter, 1416; Empr. du lat. inflammatio, également em-
désinfecter, 1556 ; infectieux, 1838 ; désin- ployé comme terme médical (de flamma
fection, 1797. « flamme »). — Dér. : inflammatoire, 1549.
INFÉODER, 1411. Empr. du lat. mé- INFLATION, vers 1920. Empr. en vue
diéval infeodare, v. fief ; sens plus étendu d’un sens spécial du lat. inflatio « enflure »
au xix® s. — Dér. : inféodation, 1393. (de inflare « enfler ») qui s'employait sur-
INFÉRER, vers 1380. Empr. du lat. tout comme terme médical et a été empr.
inferre, propr. « porter dans », d’où « allé- avec cette valeur depuis le xvi® (Paré);
guer », puis « inférer » (déjà dans Cicéron) d’où, par opposition déflation, 1922.
et francisé en -er, comme conférer, etc. INFLEXIBLE, 1314. Empr. du lat. in-
INFÉRIEUR, xve. Empr. du lat. infe- {lexibilis. — Dér. : inflexibilité, 1611.
rior. — Dér. : infériorité, d’après le lat. INFLEXION, x1ve, rare avant le xvrre s.
inferior, 1974. Empr. du lat. infleæio. — Dér. : infléchir,
INFERNAL, xr1°. Empr. du lat. de basse 1738, d’après le rapport de flexion et de
ép. infernalis. fléchir.
INFERTILE, 1434; infertilité, 1456. INFLIGER, 1488. Empr. du lat. infli-
Empr. du lat. infertilis, -ilitas. gere, propr. « heurter, frapper ».
INFESTER, 1390. Empr. du lat. infes- INFLORESCENCE, 1789 (Lamarck).
lare « attaquer, harceler » (de infestus «at- Formé sur le lat. de basse ép. inflorescere,
taqué »). d’après efflorescence.
INFIDÈLE, xur° ; infidélité, xr1°. Empr. INFLUENZA, 1782. Empr. par l'inter-
du lat. infidelis, infidelitas. médiaire de l’angl., de l'it. influenza,
propr. « influence », d’où « écoulement
INFIME, 1406. Empr. du lat. infimus d’une chose fluide », puis spécial. « épidé-
« qui est au degré le plus bas ». mie »; le mot s’est répandu à la suite de
INFINI, xx (alors infinit); infinité, l'épidémie de 1743 qui prit naissance en
1214. Empr. du lat. infinilus, infinitas. Italie, v. grippe ; a été très à la mode vers
1889 ; désigne aujourd’hui une forme bé-
INFINITÉSIMAL, 1716. Empr. de l’angl. nigne de cette maladie.
infinitesimal, attesté dès 1655, et dér. du
lat. infinitus au moyen du suff. lat. des INFLUER, xive (Deschamps), en cons-
ordinaux -esimus et du suff. -alis. Le fr. truction transitive, usitée jusqu'au xvri®s.,
infinitésime, 1752, a été tiré d’infinitésimal au sens de « faire pénétrer (une action, une
en fr. force) »; la construction intransitive au
sens de « couler dans » date du xvie s. ; le
INFINITIF, x1re. Empr. du lat. des sens moral, qui date du xvirie s., vient du
grammairiens infinitivus (modus). sens de ce verbe dans la langue de l’astro-
339 INHIBITION

logie; influence, vers 1240, au sens astro- INGÉNIEUR, xvie (Amyot : « La me-
logique ; d’où le sens moral, dès le xve s. chanique ou art des ingenieurs ») ; l'emploi
Empr. du lat. influere « couler dans », moderne s’est développé à partir du
spécial. médiéval au sens astrologique et xXvinies., avec le développement de l’indus-
du lat. médiéval influentia « action attri- trie ; antér. désigne surtout celui qui fait
- buée aux astres sur la destinée ». — Dér. : des machines ou des travaux de guerre.
influencer, 1787 ; influent, 1791, une pre- Réfection, d’après ingénier, de l’a. fr. engei-
mière fois en 15083. gneur, dér. d’engin au sens de « machine de
guerre »; cette réfection a été faite pour
INFLUX, 1547. Empr. du lat. influxus séparer le mot du verbe engeignier, en
« influence ». raison du sens péjor. de celui-ci.
IN-FOLIO, 1567. Mots latins signifiant INGÉNIEUX, xive. Réfection, d’après le
«en feuille », cf. in plano, 1835, « en plan », lat. ingeniosus, de l’a. fr. engeignus ; cette
qui se dit d’une feuille non pliée. réfection s'explique comme celle d’ingé-
INFORME, vers 1500. Empr. du lat. nieur. — Dér. : ingéniosité, 1307, d’après
informis « affreux, sans beauté » ; a suivi la forme de l’adj. lat.; rare avant la fin
le sens de forme (qui n’a pas gardé le sens du xvIue Ss.
de « beauté » qu'avait aussi forma). INGÉNU, 1680, au sens jurid. de « né
INFORMER, 1286. Réfection, d’après le libre » une première fois au xIII® $.;
lat. informare, propr. « donner une forme », ingénuité, 1372 (Oresme), 1541 (Calvin),
d’où « instruire », de l’a. fr. enformer « for- dans un sens correspondant, encore chez
mer, instruire »; le fr. a développé la Montesquieu. Empr. du lat. ingenuus,
nuance spéciale de « mettre au courant » ingenuitas ; le sens moral des deux mots fr.
qu'a déjà enformer. Le fr. philosophique a s’est développé au xvi® s. (cf. l’adv.
repris au xviie s. au lat. le sens, aujour- ingénument, dès 1554), d’après le sens
d’hui hors d'usage, de « façonner ». — Dér. : moral des mots lat. « qui a l'honnêteté d’un
informateur, 1375; information, xrriIe. homme libre, loyauté », mais en fr. il y a
en plus une nuance propre de « naïveté ».
INFORTUNE, vers 1350; infortuné, id.
Empr. du lat. inforiunium, infortunalus. INGÉRER (s’), xiv® (Oresme). Empr.
du lat. se ingerere « s'introduire dans »,
INFRACTION, 1250 ; infracteur, 1419. emploi partic. de ingerere « porter dans ».
Empr. du lat. de basse ép. infractio, infrac- — Dér. : ingérence, 1866.
or « action de briser, celui qui brise » (de INGRAT, xive (Oresme); ingratitude,
infringere « briser »), en vue d'emplois x111e (J. de Meung). Empr. du lat. ingratus,
jurid. ingratitudo.
INFRUCTUEUX, vers 1400. Empr. du INGRÉDIENT, 1508, terme d’apothi-
lat. infruciuosus. caire. Empr. du lat. ingrediens « qui entre
INFUS, 1541 (Calvin) ; rare au sens con- dans » (de ingredi « entrer »), qui a dû être
employé avec ce sens spécial dans le lat.
cret de « répandu dans », déjà employé
une fois au xrr1° s. Empr. du lat. infusus médiéval, v. récipient.
(de infundere « répandre dans », d’où « faire INGUINAL, xvi® (Paré). Dér. sav. du
pénétrer » et au passif « se glisser »). Ne lat. inguen, inguinis, « aine »; inguinalis
s'emploie guère aujourd’hui que dans la “existe en lat., mais comme nom de plante.
locution science infuse, qui, à l’origine
était propr. théologique et désignait la INGURGITER, 1836, très rare aupara-
science qu'Adam tenait de Dieu. vant, relevé en 1488; ingurgitation, 1818,
une première fois en 1488. Termes d’abord
INFUSION, x1r1°, au sens pharmaceu- médicaux, aujourd’hui d’un emploi plus
tique ; sens théologique de même. Empr. étendu, empr. du lat. ingurgitare, propr.
du lat. infusio « action de répandre ». On « engouffrer » (de gurges « gouffre »), ingur-
a tiré du radical de ce mot le verbe infuser, gilalio, en vue de sens spéciaux.
vers 1500. INHABILE, xive (Oresme). Empr. du
INFUSOIRE, 1792. Empr. du lat. scien- lat. inhabilis ; a suivi le sens d’habile. —
tifique infusorius (Wrisberg, De animalcu- Dér. : inhabileté, x1ve, rare avant le xIx®8.;
lis infusoriis, Goettingen, 1765 ; animalcula le droit a conservé inhabililé, xive (Ores-
infusoria en 1760 chez Ledermüller) ; le me), formé d’après habilité, v. habile.
nom vient du fait qu’on trouve ces animal- INHALER, 1845 ; inhalation, 1760. Em-
cules dans des infusions aqueuses. pr. du lat. inhalare « souffler sur, dégager
INGAMBE, 1585. Empr. de l’it. in gam- une odeur », inhalatio, en vue de sens spé-
ba, locution signifiant littéral. « en jambe », ciaux, opposés à exhaler, exhalation.
d'où « alerte »; on trouve d’abord au INHÉRENT,, 1503. Empr. du lat. scolas-
xvi® s. en gambe. tique inhaerens (de inhaerere « être attaché
à »). — Dér. : inhérence, 1633, auparavant
INGÉNIER (s’), xive (Christine de Pi- en 1377 et vers 1400.
san). Formé sur le lat. ingenium « es-
prit, etc. ». L’a. fr. engeignier « faire avec INHIBITION, vers 1300, comme terme
. habileté », d’où « tromper » (cf. le proverbe jurid. ; sens médical, xix° s. Empr. du lat.
cité par La Fontaine, Fables, IV, Il) est inhibitio (de inhibere « retenir, arrêter »),
un dér. d’engin au sens de « ruse »; ingé- qui a dû prendre son sens jurid. dans le
nier (s’) ne lui doit rien. lat. médiéval, comme inhibere lui-même,
INHIBITION 340

d’où inhiber, 1391 (en outre inhibir, 1390), INNOCENT,, vers 1080 (Roland) ; inno-
terme jurid. ; inhibitio n’a qu’un sens nau- cence, vers 1120. Empr. du lat. innocens,
tique en lat. class. innocentia. — Dér. d’innocent : innocenter,
1GINe
INHOSPITALITÉ, 1530 ; une première
fois au xive s. Empr. du lat. inhospitalitas. INNOCUITÉ, 1783. Dér. sav. du lat.
innocuus « qui n’est pas nuisible », avec
INHUMAIN, 1373; inhumanité, 1312. un sens techn. différent d’innocence.
Empr. du lat. inhumanus, inhumanitas.
INNOVER, 1315, rare avant le xvies.;
INHUMER, 1413. Empr. du lat. inhu- innovation, 1297. Empr. du lat. innovare,
mare «mettre en terre » (de humus « terre »). innovalio (de novus « nouveau »). — Dér.
— Dér. : inhumation, vers 1500. du verbe : innovateur, 1500.
INIMITABLE, vers 1500. Empr. du lat. IN-OCTAVO, 1567. Mots lat. signifiant
inimitabilis. « en huitième », v. in-folio.
INIMITIÉ, vers 1300. Réfection, d’après INOCULER, 1722; inoculation, 1722.
le lat. inimicilia, de l’a. fr. ennemistié, ane- Empr. de l’angl. to inoculate, 1722, inocu-
mistié, x11°, dér. d’ennemi sur le modèle lation, 1714 ; c'était d’abord une sorte de
d’amistié. vaccine introduite vers cette date de Cons-
ININTELLIGIBLE, 1694. Empr. du lat. tantinople en Angleterre ; les mots angl.
de basse ép. inintelligibilis. sont eux-mêmes empr. du lat. inoculare,
propr. « greffer en écusson », inoculatio (de
INIQUE, xrv° (Bersuire) ; iniquité, xr1°. oculus « œil », d’où « bourgeon » que porte
Empr. du lat. iniquus (de aequus « égal, un bout d’écorce, employé dans cette sorte
juste »), iniquilas. de greffe ; cf. le fr. œil au sens de « bour-
geon ») ; se prennent depuis le xix° s. dans
INITIAL, x111°, rare avant le xvirre s.
un sens plus étendu. — Dér. d’inoculer :
Empr. du lat. de basse ép. initialis (de inoculateur, 1752.
inilium « commencement »).
INODORE, 1676. Empr. du lat. inodorus.
INITIER, xive (Bersuire); initiation,
1496, rare avant le xvirie s.; initiateur, INONDER, xrr1°, d’abord enonder ; inon-
1839, une première fois en 1586. Empr. du dation, xr11°. Empr. du lat. inundare, -atio
lat. initiare, propr. « commencer », d’où (de unda).
« initier aux mystères religieux », initialio,
iniliator ; le sens a été élargi en fr. — INOPINÉ, xive. Empr. du lat. inopinalus
Dér. du verbe : initiative, 1567, rare avant (de opinalus « imaginé », de opinari).
la fin du xvrr1e s. ; comme terme politique, INOPPORTUN, vers 1380. Empr. du lat.
1787, « pouvoir (du roi) de mettre la puis- inopporlunus.
sance législative en mouvement »; cf.
l’adj. inilialif « qui a de l'initiative » chez IN-PACE, 1762. Abrégé de la locution
J.-J. Rousseau. Formé avec le suff. savant lat. vade in pace (qui s'emploie parfois en
contenu dans expectative, etc. entier) « va en paix », qui se prononçail
après la fermeture du cachot où on enfer-
INJECTION, xrr1e. Terme médical, empr. mait certains condamnés dans les couvents.
du lat. injectio « action de lancer dans »
(de injicere), déjà usité au sens de « clys- IN PARTIBUS, 1703; cf. en 1742 (chez
tère ». On a fait par suite un verbe injecter, Voltaire dans un sens fig. « : Je compte
1719, d’après le verbe lat. injectare pour être évêque in partibus infidelium »).
servir de verbe à injection ; d’où injecteur, Abrégé de la locution lat. in partibus
1842. infidelium « dans les régions des infidèles »,
terme de droit canonique, créé dans le lat.
INJONCTION, 1295. Empr. du lat. de
moderne de l’Église, pour désigner un
basse ép. injuctio pour servir de nom
d'action à enjoindre.
évêque qui a son diocèse dans un pays
occupé par les infidèles. S’emploie aujour-
INJURE, 1174 ; injurier, 1266 ; injurieux, d’hui dans un sens plus étendu, par plai-
1334. Empr. du lat. injuria « injustice, santerie, au sens de « sans fonction ».
tort », injuriare « faire tort », injuriosus
IN PETTO, 1666. Locution it. signifiant
« injuste, nuisible ». Le sens dominant
« dans sa poitrine », qui se dit propr. du
aujourd’hui est un développement du fr.
pape, quand il nomme un cardinal sans
Le sens pris au lat., encore vivace au
XVIe s. dans injure, injurieux, est arch.;
le proclamer ni l’instituer (Voltaire
« Le pape devient mon protecteur in
il a disparu dans le verbe depuis le xvres. peitto »).
INJUSTE, vers 1350; injustice, xrre.
Empr. du lat. injustus, -itia. IN-QUARTO, 1567. Mots lat. signifiant
« en quart », v. in-octavo.
INNAVIGABLE, xvie (Marot). Empr. du
lat. innavigabilis. — Dér. : innavigabilité, INQUIET, 1588 (Montaigne) ; inquiéter,
1787. xI1e ; inquiétude, 1406 ; en a. fr. enquetume,
plus loin du lat. Empr. du lat. inquietus,
INNÉ, 1611. Empr. du lat. philosophique
innatus. — Dér. : innéité, 1810.
inquielare, inquieludo. Jusqu'au xvrre s.
les mots fr. ont été pris surtout au sens
INNERVATION, 1830 ; innervé, fin xixe. lat. d’ « agitation physique ou morale »;
Termes scientifiques, formés avec le lat. depuis, ils se sont restreints au sens d’ « agi-
nervus « nerf ». tation morale causée par la crainte ».
341 INSTAR

INQUISITEUR, vers 1260 ; inquisition, INSISTER, 1336. Empr. du lat. insis-


xu°. Empr. du lat. jurid. inquisitor, inqui- lere, propr. « se tenir, s’appuyer sur », d’où
sitio (de inquirere « rechercher »); ont pris « s'appliquer à, insister ». — Dér. : insis-
un sens partic. dans le lat. de l’Église, au tance, 1801, déjà de 1556 à 1626.
xue s. — Dér., d’après le lat. médiéval
inquisilorius : inquisitorial, 1516. .INSOCIABLE, 1548. Empr. du lat. inso-
ciabilis. — Dér. : -bilité, 1723 (Montes-
INSALUBRE, 1528. Empr. du lat. insa- quieu).
lubris. — Dér. : insalubrité, 1532.
INSOLATION, 1554. Dér. sav. du lat.
INSANE, 1784; insanité, id. Empr. insolare « exposer au soleil ».
de l’angl. insane, insanily, qui sont attestés
dp. le xvie s., et dont le premier est INSOLENT, 1496; insolence, 1425.
empr. du lat. insanus « qui a perdu la Empr. du lat. insolens, insolentia, propr.
raison », le deuxième dér. de l’adj. anglais. « qui n’a pas l'habitude, inexpérience » (de
solere « avoir l’habitude ») ; ont parfois le
INSATIABLE, xrr1° ; insatiabilité, 1546 sens propre du lat. au xvies.
(Rab.). Empr. du lat. insaliabilis, insatia-
bilitas (créé à basse ép.; de satiare « ras- INSOLITE, 1496. Empr. du lat. insolitus.
sasier »).
INSOLUBLE, xrr1°. Empr. du lat. inso-
INSCRIRE, 1272 (sous la forme ens- lubilis ; parfois « indissoluble » comme le
crire), rare avant le xvi® s.; inscription, lat. — Dér. : insolubilité, 1765.
1444. Empr. du lat. inscribere (francisé
d’après écrire), inscriplio. — Dér. : inscrip- INSOMNIE, 1555. Empr. du lat. insomnia
teur, 1377. (de somnus « sommeil »).
INSECTE, 1553 (1536 besle insecte). INSPECTEUR, 1619 ; une première fois
Empr. du lat. insecia, plur. neutre du part. 1488, autres emplois au xiIx° s.; inspec-
passé insectus « coupé », traduction du grec tion, 1432 au sens d’ « examen (en géné-
entoma (plur. neutre de l’adj. eniomos « cou- ral) »; a suivi le sens du préc. Empr. du
pé ») ; dit ainsi à cause des étranglements lat. inspecior qui a reçu en lat. jurid. le
du corps des insectes (Aristote), v. ento- sens de « contrôleur, inspecteur », ins-
mo-. — Comp. : insecticide, 1853 ; insecti- pectio « action d'examiner ». — Dér. d’ins-
vore, 1764. pecteur : inspecter, 1781, d’après le lat.
inspeciare.
INSENSÉ, 1470. Empr. du lat. de basse
ép., insensatus. INSPIRER, vers 1190 ; inspirateur, 1798,
une première fois au x1v® s.; inspiration,
INSENSIBLE, x1r1° ; insensibilité, 1314. xuie, Empr. du lat. inspirare, inspiralor,
Empr. du lat. de basse ép. insensibilis, inspiratio. Le sens physiologique de ces
insensibilitas. mots date du xvi® s. d’après le sens propre
INSÉPARABLE, vers 1285. — Empr. « insuffler dans, etc. » du lat.
du lat. inseparabilis. INSTABLE, 1236, rare jusqu’au xXvVII1e8. ;
INSÉRER, 1319 ; insertion, 1535. Empr. instabilité, 1236. Empr. du lat. instabilis,
du lat. inserere « introduire », insertio. -ilitas.

INSIDIEUX, 1420, rare avant le xvires. INSTALLER, 1349. Empr. du lat., mé-
Empr. du lat. insidiosus (de insidiae « em- diéval insiallare « établir dans une stalle
bûche »). du chœur une personne de l’Église pour
la mettre en possession d’une dignité,
INSIGNE, adj., xive; insigne, subsl., d’un bénéfice (qui donnaient droit à cette
1823, une première fois en 1484. Empr. du stalle) » v. étal; sens plus étendu dès le
lat. insignis (de signum « signe »), insigne XVI NE — NDér. installation, 1349;
(neutre pris substantiv. de insignis); le réinstaller, 1581 ; réinstallation, 1775.
subst. a été empr. pour exprimer un signe
différent de ceux que désigne enseigne. INSTANCE, 1288, au sens d’ « applica-
tion, soin », sens du mot jusqu’au XVIIe 8.,
INSINUER, xvi, au sens moderne ; in- d’où celui de « sollicitation pressante »,
sinuation, xvire, id. Empr. du lat. insi- encore usuel; au moyen âge, signifie en
nuare, partic. usuel au réfl. se insinuare outre « effort, intention »; le mot a été
« se glisser » (de sinus « repli, sinuosité »), pris dans des sens jurid. à partir du xir1° 8.
insinualio (de sens assez différent du fr. : Empr. du lat. instantia « application,
« exorde insinuant ») pour servir de nom insistance » (de insiare « se tenir dans »,
d’action à insinuer. Ont été d’abord empr. d’où « s'appliquer »).
au x1ve s. comme termes jurid. au sens de
« notilier, notification, enregistrement » INSTANT, adj., xive (Froissart), comme
qu'avait le latin jurid.; d’où, jusqu’au subst. depuis 1377 (Oresme). Empr. du
lat. instans. — Dér. : instantané, 1604;
xvirie s., des acceptions analogues « faire
enregistrer un contrat, etc., pour lui donner instantanéité, 1735.
l'authenticité ; l'enregistrement de ce con- INSTAR à (l), 1572. Locution faite sur
trat ». le modèle du lat. ad insiar « à la ressem-
INSIPIDE, 1503. Empr. du lat. insipidus, blance » (de insiar « poids, mesure, ressem-
v. sapide. — Dér. : insipidité, 1572, rare blance, etc. »); instar, pris comme subst.,
avant la fin du xvr1es. est très rare en fr.
INSTAURER 342

INSTAURER, 1823, déjà en 1532 (Rab.), INSULTER, xive (Bersuire). Empr. du


en 1541 (Calvin); instaurateur, 1838, au- lat. insullare, propr. «attaquer, sauter sur »
paravant au xive®s. et en 1659; instauration, (de saltare), sens usuel jusqu’au xvire $. ;
xive. Empr. du lat. insiaurare, -ator, -atio, au xvirie s. est également de préférence
intrans. d’après le lat. — Dér. : insulte,
INSTIGATEUR, 1363 ; instigation, 1332. xvir®, a remplacé insult, 1416, usité jus-
Empr. du lat. insligator, instigatio (de qu’au début du xvire s. (empr. du lat.
insiigare « pousser, exciter »), d'où insti- insulius), en en gardant quelque temps le
guer, xiv°, Bersuire, qui ne se dit plus. genre masc. ; a signifié « attaque » d’après
INSTILLER, 1546 (Rab.); instillation, le verbe, jusqu’au début du xvirie s. ; in-
1496, au sens physique ; 1542, au sens sulteur, 1796.
moral. Mots techn. empr. du lat. instillare INSURGER (s’), 1792 (déjà de 1474
« verser goutte à goutte (stilla) », instil- à 1611); insurgé, 1794. Ont été faits
latio. d’après insurgeni, attesté depuis 1762, mais
INSTINCT, 1496, au sens d’ «impulsion », vulgarisé à propos des insurgents d'Amé-
usité jusqu’au xvire s. ; le sens d’ « impul- rique ; insurgent du fr. et insurgent de
sion naturelle des êtres vivants » date du l’angl. sont empr. du lat. insurgens, part.
xviie s. Empr. du lat. instinctus (de instin- prés. de insurgere « se lever contre » (d’où
guere « exciter, pousser »). — Dér. : ins- insurger (s’) en 1556); v. le suiv. On a
tinctif, 1803 (Maine de Biran). dit aussi insurgence, 1777, en parlant de
l'insurrection américaine, d'après l’angl.
INSTITUER, 1219, signifie parfois « ins- insurgency.
truire » au xvie et au Xxvrre s. ; institution,
x1I1°, au sens de « chose établie », d’où le INSURRECTION, xive (Oresme), rare
sens politique dès le moyen âge ; au sens avant la fin du xvine s. Empr. du lat. de
d’ « instruction », 1532, d’où le sens de basse ép. insurrectio (de insurgere). —
« maison d'instruction », xvirie. Empr. du Dér. : insurrectionnel, 1793.
lat. instiluere « établir », d’où « instruire », INTACT, fin xviie (Saint-Simon). Empr.
institutio « fait d'établir, instruction ». du lat. intactus (de tangere « toucher »).
INSTITUT, 1622, au sens de « règle d’un INTAILLE, 1808. Empr. de l’it. intaglio
ordre religieux » (rarement au sens de «ce (de intagliare « sculpter, graver » ; cf. en-
qui est institué », depuis 1480), d’où, en tailler).
1749, l'emploi du mot comme nom propre INTÉGRAL, au sens général, 1370 (Ores-
pour désigner les institutions savantes, de me), rare avant le xvirie s. Dér. sav. du
là en 1795 Institut National, Institut de lat. inieger « entier » ; integralis, de basse
France. Empr. du lat. insiitutum, propr. ép., est si rare qu'il n’a pas dû servir de
« ce qui est établi ». modèle. — Dér. : intégralité, 1761, une
INSTITUTEUR, 1485, au sens de « celui première fois en 1611.
qui établit », sens du mot jusqu’au xvirres. ; INTÉGRAL, terme de mathématiques,
dès 1441 « celui qui instruit », d’où l’adop- 1696. Empr. du lat. du mathématicien
tion de ce mot en 1792 pour désigner les Bernoulli integralis (de integer), d’où inté-
maîtres d’école. Empr. du lat. instituior grer, 1705 ; intégration, 1700 ; désintégrer,
« celui qui établit, celui qui instruit ». 1907; désintégration, 1870. Intégrer et
INSTRUIRE, xiv® (Deschamps), d’abord inlégration ont été une première fois empr.
ensiruire, X11° ; instructeur, xIV® ; instruc- au x111° s. au sens du lat. integrare «rétablir
tion, 1319. Empr. du lat. insiruere, propr. dans son intégrité », integratio « fait de
« disposer, bâtir », d’où « instruire » (pour rétablir... ».
la francisation différente d'’insiituer, cf. INTÉGRANT,, 1503. Empr. du lat. inie-
construire, détruire), instructor (seulement grans.
« celui qui bâtit ») pour servir de nom
d’agent au verbe, instructio. Le sens jurid., INTÈGRE, 1692 (La Bruyère), une pre-
qui date du xvri® s., résulte d’un dévelop- mière fois en 1567 dans un texte qui affecte
pement propre au fr. — Dér. d’insiruire, de latiniser (Ép. du Limousin à Panta-
d’après le lat. instructus : instructif, x1ve. gruel) ; intégrité, vers 1420. Empr. du
lat. integer « entier, pur », iniegritas « état
INSTRUMENT, vers 1200, en outre es- de ce qui est entier, pureté » ; mais iniègre
trument, xi11° (J. de Meung). Empr. du lat. n’a été pris qu’au sens moral, tandis qu’in-
insirumentum (de insiruere au sens d’ «équi- tégrité l’a été aux deux sens.
per »), y compris le sens jurid. — Dér. :
instrumental, xiv® (Oresme, dans un sens INTELLECT,, xirre ; intellectuel, id. Em-
scolastique) ; instrumentation, 1824 ; ins- pr. du lat. philosophique iniellectus, intel-
trumenter, 1431 au sens jurid.; instru- lectualis. Intellectuel a pris au x1x® s. le
mentiste, 1823. sens plus étendu de « qui s’adonne aux
choses de l'intelligence ».
INSUFFLER, 1835, une première fois
au xive s.; insufflation, 1793, id. Empr. INTELLIGENT,, 1488 ; intelligence, x1r°e :
du lat. de basse ép. insufflare, insufflatio intelligible, xrire. Empr. du lat. intelligens
en vue de sens techn. Le verbe se rencontre (de inielligere « comprendre »), intelligentia,
parfois du xIv®e au xvi® s. au sens moral intelligibilis. — Dér. 1° d’intelligent : inin-
qu'ont eu aussi ces mots en lat. eccl. telligent, 1784 ; inintelligence, 1791 ; mésin-
telligence, fin xvie (d’Aubigné) ; 20 d’in-
INSULAIRE, 1516. Empr. du lat. de telligible : intelligibilité, xvrre (Fénelon) .
basse ép. insularis. inintelligible, 1640.
2
343 INTERNE

INTEMPÉRANT, 1541; intempérance, INTERFOLIER, 1798. Formé au moyen


1370 (Oresme). Empr. du lat. intemperans, des mots lat. inier et folium « feuille », v.
-antia. in-folio.
INTEMPÉRIE, 1534 (Rab.). Empr. du INTÉRIEUR, 1406. Empr. du lat. inle-
lat. intemperies (de lempus « temps »). rior.
S’est employé dans l’anc. médecine, au
xvire s., en parlant d’une mauvaise cons- INTÉRIM, 1412. Empr. du lat. inierim
titution des humeurs du corps. adv. signifiant « pendant ce temps, provi-
soirement ». — Dér. : intérimaire, 1796.
INTEMPESTIF, 1474. Empr. du lat. in-
tempestivus (de iempus). INTERJECTION, vers 1300. Empr. du
lat. des grammairiens inlerjeclio, propr.
INTENDANT, v. surintendant. « parenthèse, intercalation » d’où, par
INTENSE, xuie (J. de Meung). Empr. extension, « interjection » (de inierjicere
du lat. de basse ép. inlensus, part. passé « jeter entre »).
de intendere « tendre ». — Dér. : intensif,
INTERLOCUTEUR, vers 1530 (Marot).
xive, rare avant la fin du xvrie s. ; inten- Empr. de interloculor « partenaire dans un
sité, 1740. dialogue », mot lat. formé par des traduc-
INTENTER, xive. Empr. du lat. jurid. teurs de Lucien au xve s. ; celui-ci a peut-
inteniare, propr. « diriger ». être été tiré par eux du verbe inierloqui,
lequel est employé une fois par Chalcidius
INTENTION, xr1°, en outre entencion à (ve s.), le traducteur de Platon pour rendre
la même époque. Empr. du lat. intenlio, le grec dialégein « converser, dialoguer ».
propr. « action de diriger », qui avait aussi
le sens de « tension, intensité », quelquefois INTERLOCUTOIRE, v. interloquer.
repris au xvi® et au xvri® s. — Dér. :
intentionné, xvi®, d’où malintentionné, INTERLOPE, 1687; inlierlopre, 1723.
1649 ; intentionnel, 1487. Empr. de l’angl. interlopper (du verbe fo
INTER-. Préf., empr. du lat. inier « en- interlope, d’origine douteuse). S’est dit de
tre », v. entre. navires de commerce trafiquant en fraude,
puis du commerce de contrebande (cf.
INTERCALER, 1520 ; intercalaire, x1v° commerce interloppe, 1755), et surtout en
(Bersuire) ; intercalation, xv°. Empr. du parlant de l'Amérique latine; pris dans
lat. iniercalare, intercalaris (ou -rius), in- un sens plus étendu 1772 (Voltaire, comme
tercalatio. subst.) ; adj. au xix° s. :
INTERCÉDER, 1345 ; intercesseur, xXI11°,
d'abord entrecessor, xiri®; intercession, INTERLOQUER, 1787, au passif élire
vers 1230. Empr. du lat. iniercedere, interloqué « être embarrassé », terme fam.,
intercessor, intercessio. issu du sens propre du droit « interrompre
la procédure par une sentence interlocu-
INTERCEPTION, xve. Empr. du lat. toire », xve. Empr., au sens propre, du lat.
interceptio (de intercipere « prendre au pas- jurid. interloqui. La langue juridique a
sage »). — Dér. : intercepter, 1528, sur le aussi le subst. interlocution, 1546, empr.
modèle du rapport exception : excepier, etc. du lat. jurid. interlocutio sur lequel a été
INTERCOSTAL, 1536. Formé au moyen fait aussi interlocutoire, 1283 (Beauma-
des mots lat. inler, v. inter-, et cosia . noir).
« côte ».
INTERLUDE, 1829. Empr. de lit.
INTERDIRE, vers 1250 ; antér. enire- interludio, dér. savant du lat. tardif inier-
dire, xn°; interdiction, 1410; interdit, ludere « jouer entre deux autres repré-
subst., 1213. Empr. du lat. inierdicere, sentations ».
interdictio, interdictum.
INTÉRÉT. Terme jurid. empr. du lat. INTERMÈDE, xvi® (iniermedie), inter-
interest « il importe » (de inleresse), pris mède dp. 1597. Empr. de l’it. inlermedio,
substantiv. au sens de « ce qui importe », empr. lui-même du lat. intermedius « qui
d’où « dommage, préjudice », 1251, sens est au milieu ». Au xvi® s. on trouve en
conservé jusqu'au xvii® s.; du sens de outre inlermeis el inlermeze d’après une
« dédommagement », qui apparaît assez autre forme it. inlermezzo.
tôt (comp. le lat. médiéval damna el 1678. Dér. sav. du
interesse), est sorti celui de « profit qu’on INTERMÉDIAIRE,
lat. intermedius.
retire de l'argent prêté », xvi®, d’où les
autres sens modernes à partir de ce siècle.— INTERMINABLE, xive (Oresme). Empr.
Dér. : intéresser, 1423, d’après le lat. inie- du lat. de basse ép. inierminabilis.
resse, a signifié « faire tort, compromet-
tre », aujourd’hui ce sens est rare en dehors INTERMISSION, 1377; intermittent,
de la langue de la chirurgie ; cf. celle bles- 1567. Empr. du lat. intermissio, inlermit-
sure intéresse le poumon, d’où désintéresser, tens (de intermiltere « discontinuer ».) —
1552; désintéressement, 1657 (Pascal) ; Dér. : intermittence, 1660.
cointéressé, 1670.
INTERFÉRER, 1833 ; interférent, 1838 ; INTERNE, xiv<. Empr. du lat. iniernus.
:_ 1829 ; interner, 1838;
interférence, 1793. Termes scientifiques _—— Dér. : internat,
empr. des mots anglais lo interfere, interfe- au xvirre s. s’inlerner avec « se lier d'amitié
ring, inlerference. avec quelqu'un ».
INTERPELLER 344

INTERPELLER, x1v®e (Bersuire) ; inter- INTESTAT, x1ne. Empr. du lat. juri-


pellateur, 1611 ; interpellation, xiv° (Ber- dique intestatus ; la locution ab intestat,
suire), au sens de « interruption », encore 1427, est calquée sur le lat. jurid. ab intes-
usité au xvie s., d’après le lat. Empr. du tato.
lat. interpellare « interrompre », d’où « som-
mer », interpellator, interpellatio ; le sens INTESTIN, adj., 1356 (Bersuire) ; subst.,
jurid. vient également du lat.; sens poli- xive. Empr. du lat. intestinus « intérieur »,
tique depuis la Révolution. intesiinum, subst. neutre dér. de l’adij.,
traduction du grec enteron, v. entérite. —
INTERPOLER, 1721, le part. passé Dér. du subst. : intestinal, 1495.
dès 1352, en 1390 comme terme médical;
interpolateur, 1721 : en 1578 au sens de INTIME, vers 1390. Empr. du lat. inti-
« ennemi de la vérité » ; interpolation, 1352. mus. — Dér. : intimiste, « peintre d’inté-
Empr. du lat. interpolare, propr. « remettre rieurs », 1883 ; intimité, 1735.
à neuf », d’où « falsifier », interpolator
« falsificateur », inlerpolalio. INTIMER, 1325, au sens juridique d’ « as-
signer », d’où intimé « défendeur », XxvVII®,
INTERPOSER, xiv®e (Bersuire) ; inter- au sens moderne, dès le xv® s. ; intimation,
position, x11°, rare avant le xvie s. Empi. vers 1320. Empr. du lat. jurid. intimare
du lat. interponere (francisé d’après poser), « enjoindre », propr. « introduire » (de inii-
interpositio. mus « intérieur »), d'où « faire savoir »,
intimatio.
INTERPRÈTE, 1321 ; interpréter, 1155
(en outre entre-) ; interprétation, xr1° (en INTITULER, xx, d'abord entituler,
outre enire-). Empr. du lat. interpres, x111€ (J. de Meung). Empr. du lat. de basse
-elis, interpretari, -atio. — Dér. du verbe : ép. inlitulare, v. titre.
interprétatif, 1939 (une première fois
vers 1380). INTOLÉRABLE, 1295 (J. de Meung).
Empr. du lat. intolerabilis.
INTERRÈGNE, x1ve (Bersuire ; parfois
enirerègne). Empr. du lat. interregnum. INTONATION, 1372. Dér. sav. du lat.
médiéval inionare « entonner » qui est une
INTERROGER, 1399, antér. inlerro- latinisation du fr. entonner, v. ton.
guer, depuis 1356; interrogateur, 1530;
interrogatif, 1507; interrogation, x1r1°; INTOXIQUER, 1484, inconnu aux xviI®
interrogatoire, 1327. Empr. du lat. interro- et xvirie s., réintroduit 1823. Empr. du
gare, -alor, -ativus, -alorius, -atio. Inter- lat. médiéval inioticare, v. toxique ; une
rog(u)er, appuyé par les autres mots de forme pop. entoschier ne paraît pas avoir
la même famille, a éliminé la forme pop. dépassé le x1v® s. — Dér. : intoxication,
enierver. 1845, une première fois en 1408; désin-
INTERROMPRE, 1501, d’abord entre- toxiquer, 1922.
rompre, encore usité au début du xvires. ; INTRA-. Préf. sav., empr. du lat. intra
interrupteur, 1572; interruption, xrve. « à l’intérieur de ».
Empr. du lat. inlerrumpere, -ruptor, -rup-
tio. — Dér. : ininterrompu, 1776. INTRANSIGEANT, 1875. Fait sur l'esp.
INTERSECTION, 1640 (au sens géom. ; intransigente (fait lui-même sur le lat. fran-
une première fois, vers 1390, dans un sigere, V. transiger), qui désignait les répu-
autre sens). Empr. du lat. inlersectio (de blicains fédéralistes hostiles à la république
Secare « Couper »). unitaire. — Dér. : intransigeance, 1875.

INTERSTICE, 1495. Empr. du lat. de INTRÉPIDE, 1496. Empr. du lat. inire-


basse ép. interslitium (de iniersiare « se pidus « qui ne tremble pas » (de trepi-
trouver entre »). — Dér. : interstitiel, 1851. dus « agité, tremblant »). — Dér. : intrépi-
dité, 1665 (La Rochefoucauld).
INTERVALLE, xrr1e, en outre enireval.
Empr. du lat. inlervallum, propr. terme de INTRIGUER, fin xvie (d'Aubigné);
fortification, « ce qui est entre deux palis- d’abord s'intriguer au sens de « s’embar-
sades (vallum) ». rasser », qui persiste au xvir® s., d’où «s’in-
troduire adroitement dans une affaire »,
INTERVENIR, 1363, en outre entrevenir, puis intriquer « embarrasser », xviie, d’où
jusqu’à la fin du xvres. ; l’a. fr. disait aussi « exciter la curiosité », xvitIe ; « faire une
entrevenir au sens de « aller à la rencontre intrigue », fin xvire, d’après intrigue, iniri-
l’un de l’autre », qui est peut-être un comp. gant; intrigue, 1578, au sens d’ « em-
de venir ; intervention, 1322. Empr. du lat. barras, complication », d’où « combinaison,
iniervenire, inlerventio, attesté seulement série de pratiques secrètes pour faire réus-
comme terme jurid. au sens de « média- sir quelque chose », xvire; intrigue, terme
tion », pris pour servir de nom d’action au de théâtre », id.; intrigant, 1583, en 1669,
verbe. — Comp. : non-intervention, 1838. Molière ne connaît encore qu'homme, fem-
INTERVERTIR, 1507 ; interversion, id. me d’initrigue, dans M. de Pourceaugnac.
Empr. du lat. intervertere, interversio « em- Empr. de lit. intrigare, intrigo, inirigante,
pêchement, détournement », pris pour ser- lat. iniricäre « embarrasser, embrouiller » ;
vir de nom d'action au verbe. le sens de « machiner, machination » pour-
rait s'être développé en fr. et avoir ensuite
INTERVIEW, 1883. Empr. de l’angl. passé en it. ; intrigo n’est donné en it. à la
interview, empr. lui-même du fr. entrevue : fin du xvres. qu’au sens de « complication,
cî. reporier. — Dér. : interviewer, 1883. embarras »; le fr. avait d’abord empr. au
345 INVÉTÉRER

lat. entriquer, X1V®, puis intriquer, encore INVENTAIRE, 1313. Empr. du lat. ju-
usité au début du xvire s., d’où la forme rid. inventarium (de invenire « trouver »)
intrique, 1611, qui s’est maintenue au « opération qui consiste à dénombrer, à
XVII $s. et au masc., comme parfois aussi (re)trouver », v. répertoire. — Dér. : inven-
intrigue, évidemment d’après l’it. torier, 1367, d’après le lat. médiéval inven-
torium, refait sur repertorium ; on trouve
INTRINSÈQUE, 1314. Empr. du lat. aussi au xIv® et xv® s. inventoire.
scolastique inirinsecus, adj. tiré de l’adv.
du lat. class. inirinsecus « au dedans », v. INVENTEUR, 1454; invention, 1431.
extrinsèque. Empr. du lat. inventor, inventio (de inve-
nire « trouver »), propr. « action de trou-
INTRODUIRE, 1292; dès le xr1° en- ver », sens conservé dans l’expression de la
troduire ; a eu aussi le sens d’ « instruire » liturgie invention de la Sainte Croix, 1270.
jusqu’au xvi® s., sens conservé dans la — Dér. : inventer, vers 1485; réinventer,
langue de la fauconnerie ; introducteur, 1867 ; inventif, 1442.
1538, d’abord iniroduitor, xrr1° ; introduc-
tion, xir1. Empr. du lat. iniroducere « in- INVERTIR, avant 1831 (Chateaubriand,
troduire » («instruire » à basse ép. ; francisé au part. passé : images inverlies dans les
d’après conduire, etc.), introductor (créé à eaux), déjà usité au xvies. ; inverse, 1611 ;
basse ép.), iniroductio. inversion, 1529. Empr. du lat. invertere
« retourner, modifier », inuersus, inversio.
INTROÏT, vers 1376 (écrit iniroite). Invertir a pris récemment un sens péjor.,
Empr. du lat. introitus « entrée » (de iniroire tiré d’inversion (propr. « renversement de
« entrer »), que le lat. liturgique a pris l’ordre normal des mots ») pour qualifier
dans un sens spécial. : une perversion des sens, acception qui
INTRONISER, xre. Empr. du lat.
s’est ensuite communiquée à inversion.
eccl. inthronizare (du grec eccl. enthronizein, INVESTIGATEUR, xv°; investigation,
de thronos au sens de « trône épiscopal »). XIV® (Chr. de Pisan). Rares avant le
— Dér. : intronisation, xIve. XVIIIe s. (J.-J. Rousseau se donne comme
INTROSPECTION, 1838. Empr. de ayant lancé investigation). Empr. du lat.
l’angl. introspection, formé d’après inspec- investigaior, investigaiio (de investigare
« rechercher avec soin »).
tion sur le radical du verbe lat. inirospicere.
INTRUS, vers 1380; intrusion, 1304. INVESTIR « revêtir d'une dignité en
D'abord termes de droit « celui qui est donnant une pièce de vêtement », vers
introduit, le fait d’être introduit dans une 1410, en outre le sens plus étendu de
charge sans droit, sans titre », et surtout « mettre en possession d’un pouvoir »,
du droit eccl. ; sens plus étendu au xvires. 1274 (sous la forme picarde enviestir);
(une fois déjà chez E. Deschamps). /ntrus investir des capitaux est tout récent. Empr.
est empr. du lat. médiéval inirusus (de du lat. médiéval investire, en lat. anc. « re-
inirudere, mal attesté en lat. anc. à côté de vêtir » — Dér. : investiture, 1460, au
introtrudere « introduire de force ») ; iniru- moyen âge parfois envesture, bien que le
sion est un dér. sav. de inirusus. verbe envesiir n’ait pas été relevé au sens
de « donner l'investiture » ; en raison des
INTUITION, 1542, une première fois au deux sens d'investir, v. le suiv., invesliture
xive s. Empr. du lat. scolastique intuilio, a eu aussi le sens d’ « investissement » au
déjà attesté à basse ép. au sens de «regard » xvI® et au xXvIIeSs.
(de intueri « regarder, considérer » ; intui-
INVESTIR, terme militaire, vers 1410,
tif, 1480, en raison de la date, paraît avoir au sens d’ « attaquer », usité jusqu’au
été dér. directement du lat. xvie s.; le sens moderne l’emporte au
INTUMESCENCE, 1611. Dér. sav. du xvI£Ss. ; on trouve aussi envestir du XIVe au
lat. intumescere « gonfler ». xvi® s. Semble être empr. de l’it. investire
« investir, attaquer », lat. investire, attesté
INUSITÉ, 1488. Empr. du lat. inusilatus. seulement au sens général d’ « entourer,
INUTILE, xive (Bersuire ; d’abord inu- garnir », d’où aussi esp. embestir « atta-
lele, xri°) ; inutilité, 1386. Empr. du lat. quer » ; les termes militaires empr. de l’it.
datent ordinairement du xv® ou du XvI®8. ;
inutilis, inutilitas.
mais investir ne peut pas être un emprunt
INVALIDE, 1515. Empr. du lat. invali- au lat. qui n’a pas le même sens. Il est
dus « faible, sans force ». Le sens jurid. curieux que le sens d’ « attaquer » qui ne
s’est développé en fr. au xvi® s. — Dér. : peut être que secondaire apparaisse en fr.
invalider, 1452 (au sens jurid.) ; invalida- avant celui d’ « investir » et domine dans
tion, 1636 ; invalidité, 1521. Invalider, inva- les langues voisines. Si ce n’est pas dû à
lidation ont reçu au x1x° s. un sens poli- une insuffisance de notre information, cela
tique, issu du sens jurid. peut tenir à ce que l’art des sièges était
peu développé avant le xvi®s., si bien que
INVASION, xrie. Empr. du lat. de basse le sens propre du verbe était peu net. —
ép. invasio (de invadere « envahir ») pour Dér. : investissement, 1704.
servir de nom d’action à envahir.
INVÉTÉRER, 1468, usité surtout au
INVECTIVE, 1404. Empr. du lat. de part. passé et au réfl. Empr. du lat. inve-
basse ép. invectivae (sous-entendu oratio- leratus, inveterari « s’invétérer » (de inve-
nes) « discours violents » (de invehi « s’em- lerare « conserver », propr. « faire vieillir »,
porter contre »). — Dér. : invectiver, 1542. de veus « vieux »).
INVINCIBLE 346

INVINCIBLE, xive (Oresme). Empr. du IROQUOIS, vers 1700 (déjà sens fig.).
lat. de basse ép. invincibilis (de vincere Nom d’une peuplade de l'Amérique du
« vaincre »). Nord, que Chateaubriand a fait particuliè-
rement connaître.
INVIOLABLE, 1328, d'après l’adv.
-ement. Empr. du lat. inviolabilis. — IRRADIER, xv® s., manque aux XVII
Dér. inviolabilité, 1611. et xvire s.; irradiation, 1390. Termes
techn. empr. du lat. irradiare « rayonner »
INVISIBLE, xrre; invisibilité, 1560. (de radius « rayon ») et du bas lat., irra-
Empr. du lat. invisibilis, invisibilitas. diatio.
INVITER, 1356; invitation, xiv°, rare IRRATIONNEL, 1370 (Oresme). Empr,
avant le xvirie s. Empr. du lat. invitare, du lat. irrationalis.
invilatio ; l’a. fr. a eu une forme pop.
envier « provoquer », v. envi. — Dér. IRRÉCONCILIABLE, 1534. Empr. du
d'inviter : invite, 1767 (Diderot). lat. irreconciliabilis.
INVOLONTAIRE, 1370 (Oresme), rare IRRÉCUSABLE, 1778, une première fois
avant le xvrre s. Empr. du lat. de basse en 1558. Empr. du lat. irrecusabilis.
ép. involuntarius.
IRRÉFRAGABLE, 1468. Empr. du lat.
INVOQUER, 1397; invocation, xir°. de basse ép. irrefragabilis (de refragari
Empr. du lat. invocare, invocatio ; au xr1°s. « voter contre, s'opposer à »).
on trouve une forme plusfrancisée envochier.
IRRÉFUTABLE, vers 1747 (Vauve-
INVULNÉRABLE, vers 1500. Empr. du nargues). Empr. du lat. irrefutabilis.
lat. invulnerabilis. — Dér. (par dérivation IRRÉGULIER, 1283 ; irrégularité, x1v®
régressive) vulnérable, 1671 (le lat. vuine- (Oresme). Empr. du lat. irregularis, irre-
rabilis n’a qu’un sens actif), vulnérabilité, gularitas.
1876.
IRRÉLIGION, 1527; irréligieux, 1406;
IODE, 1812 : « La substance découverte irréligiosité, 1859, d’abord irréligieuselé,
par M. Courtois et à laquelle j'ai proposé 1642. Empr. du lat. irreligio, irreligiosus,
de donner ce nom d’iode à cause de la irreligiositas.
belle couleur violette de sa vapeur », Gay-
Lussac. Zode est formé avec le grec iodés IRRÉMÉDIABLE, 1474. Empr. du lat.
« de la couleur de la violette (ion) ». — irremediabilis.
Dér. : iodé, 1836 ; iodure, 1812 ; ioduré, id. IRRÉMISSIBLE, 1234, rare avant le
IODLER, 1883. Empr. du suisse alle- xvi® s. Empr. du lat. irremissibilis (de
mand jodeln. remillere « remettre »).

ION, 1840. Empr. de l’angl. ion, créé par


IRRÉPARABLE, 1234, rare avant le
xve s. Empr. du lat. irreparabilis.
Faraday, en 1834, d’après le grec 1on,
part. prés. neutre de ienai « aller » — IRRÉPRÉHENSIBLE, vers 1400. Empr.
Dér. : ioniser, 1910 ; ionisation, 1902. du lat. irreprehensibilis (de reprehendere,
v. reprendre).
IOTA, 1552 (Rab.). Empr. du grec i6la,
nom de la neuvième lettre de l’alphabet IRRÉSISTIBLE, 1687. Empr. du lat
grec. médiéval irresistibilis.
IPÉCACUANA, 1694, d’où ipéca, 1802. IRRÉVÉRENT,, xv® ; irrévérence, xI1I°.
Empr., par l'intermédiaire du port., du Empr. du lat. irreverens, irreverentia. —
tupi. Dér. d’irrévérence : irrévérencieux, 1794.
IRASCIBLE, xu°. Empr. du lat. iras- IRRÉVOCABLE, 1315. Empr. du lat.
cibilis (de irasci « se mettre en colère »). irrevocabilis. — Dér. : irrévocabilité, 1688,
— Dér. : irascibilité, 1370 (Oresme). une première fois en 1534.
IRE, v. colère. IRRIGUER, 1835 ; irrigation, xv®, com-
me terme médical, 1764, comme terme
IRIS, xrrre, fleur; xvie (Paré), terme d'agriculture. Termes techn. empr. du lat.
d'anatomie ; 1556, arc-en-ciel. Empr., aux irrigare (de rigare « arroser »), irrigatio. —
sens 1 et 3, du lat. iris (du grec iris, propr. Dér. d’'irriguer : irrigateur, 1827.
« arc-en-ciel »), au sens 2 du grec directe-
ment. — Dér. au sens 3, par extension : IRRITER, xive (Bersuire); irritable,
iriser, xvirie (Buffon), irisation, 1853. 1520; irritation, xiv<. Empr. du lat. irri-
IRONIE, 1370 (Oresme), rare avant le tare, irritabilis, irritatio. — Dér. d’irrila-
xvIi® s.; ironique, xve, d’après l’adv. ble : irritabilité, 1754.
-ement. Empr. du lat. ironia, tronicus (du . IRRUPTION, 1496. Empr. du lat. irrup-
grec eirôneia, eirônikos; eirôneia signifie tio (de irrumpere « se précipiter vers »).
propr. « interrogation » et a dû son sens
particulier à la méthode, dite eirôneia, de ISABELLE, 1595 couleur isabelle). Issu
Socrate qui feignait l'ignorance pour faire du nom propre de femme, empr. de l'esp.
ressortir l'ignorance réelle de ses interlo- Isabel (forme pop. de Elisabelh), transfor-
cuteurs). — Dér. : ironiser, 1647 ; ironiste, mé en /sabelle d’après le lat. médiéval Zsa-
1801. bella. On rapporte une historiette suivant
347 IVROGNE

laquelle Isabelle la Catholique aurait fait « passage étroit, isthme »). Empr. auss
vœu, lors du siège de Grenade, en 1491, comme terme médical, 1552 (Rab.), direc-
de ne pas changer de chemise avant la tement du grec.
prise de la ville.
ITALIQUE, terme de typographie, vers
ISARD, x1v® (G. Phébus : Le bouc izart). 1500. Empr. du lat. italicus, les caractères
Cf. basque izar « étoile ; tache blanche sur italiques ayant été inventés par l'Italien
le front des animaux ». Ces mots sont dér. Alde Manuce l’Ancien (vers 1449-1515).
du mot ibérique pour « étoile », qui est ITEM, 1279. Adv. lat., signifiant « de
représenté en berbère par ichri. Ce mot même ».
ibérique s’est superposé à un antérieur
camozx, conservé dans les Alpes (chamois) ITÉRATIF, 1403. Empr. du lat. ifera-
et au Portugal (camuza). tivus, attesté comme terme de grammaire
(de iterare « recommencer »).
ISBA, 1815 (X. de Maistre). Mot russe.
ITINÉRAIRE, 1616 (une 1re fois au
ISOCHRONE, 1675, empr. du grec xIve s.). Empr. du lat. itinerarium.
iséchronos. — Formés en franc. avec le
même élément grec isos « égal » d’autres IVE, IVETEAU, v. if.
mots savants, tels que isomorphe, 1821. IVOIRE, xri°. Empr. du lat. eboreus
« d'ivoire », adj. de ebur, eboris « ivoire ».
ISOCÈLE, 1542. Empr. du lat. isosceles
(du grec isoskelés, littéral. « qui a les jambes IVRAIE, 1236. Lat. pop. ébriäca, fém.
égales », de isos « égal » et skelos « jambe »). pris substantiv. de l’adj. &briäcus « ivre »;
l’ivraie a reçu ce nom parce qu’elle cause
ISOLÉ, 1575 ; d’abord terme d’architec- une sorte d'ivresse. La voyelle initiale, qui
ture, pris rapidement au sens moderne. est due à ivre, montre que le contact avec
Empr. de l’it. isolalo « séparé de toute ce mot a été maintenu. L'expression l’ivraie
chose comme une île l’est de la terre et le bon grain, pour désigner les mauvais
ferme ». Le verbe isolare paraît être posté- et les bons, vient de la parabole de l'’Évan-
rieur, comme le verbe fr. — Dér. : isoler, gile, Mathieu, XIV, 27 sq.
1653 (Saint-Amand) ; isolateur, 1836 ; iso-
lement, 1701 ; isoloir, 1789, comme terme IVRE. Lat. ébrius; l’i est dû à l’in-
de physique, moins usité aujourd’hui que fluence de l’i de la terminaison. Aujour-
isolaieur; refait récemment pour désigner d’hui les parlers gallo-romans préfèrent,
une cabine destinée à permettre à l’élec- comme le fr. pop., des mots plus expressifs
teur de préparer son bulletin de vote. plein, soûl. — Dér. : ivresse, x11° ; enivrer,
id. ; enivrement, id.
ISSU. Part. passé de l’anc. verbe issir, IVROGNE, xx. Issu de l’anc. subst.
lat. exire, éliminé au xvi® s. au profit de ivro(i)gne « ivrognerie », lat. pop. *ebrio-
sortir. It. uscire (v. réussir), a. pr. eissir. nia; cf. pour cette extension d'emploi le
— Dér. : issue, x11e, lat. crapula « ivresse » et « ivrogne ». —
ISTHME, 1538, comme terme de géogra- Dér. : ivrogner, 1536 ; ivrognerie, 1498;
phie. Empr. du lat. isthmus (du grec isthmos ivrognesse, 1583.
J
JA, v. déjà. JACQUET, 1867, « jeu analogue au tric-
JABLE, 1564, en 1397, dans des comptes
trac ». Peut-être le même mot que jaquei,
de Nevers, « chanlatte », vers 1200, en Nor- xvi®, « flatteur », diminutif de Jacques;
mandie, gable « pignon ». Ce que tous ces
mais on ne connaît pas la raison de cette
objets ont en commun, c’est la partie sail- dénomination.
lante. Cet élément aussi bien que les formes JACTANCE, x11°. Empr. du lat. jactantia
des mots font penser au gaulois gabulum (de jactare « jeter; vanter »).
« gibet » (il faut partir du gibet à un seul
poteau, dont la poutre transversale fait JADE, 1612 (jadde), issu d’ejade, 1633,
saillie), qui est attesté dans des gloses du l’initiale e ayant été prise pour la fin de
vire s. et qui correspond à l’irl. gabul l’article les, des. Ejade est empr. de l'esp.
« branche fourchue ». — Dér. : jabler, 1573. ijada, dans piedra de la ijada, littéralement
« pierre du flanc » (ijada est dér. d’un
JABOT, 1546 (Rab., en parlant de l’esto- simple non attesté, issu du lat. ïlia «flancs »,
mac de l’homme). Se rattache à la même conservé ailleurs, cf. a. pr. ilha) ; ce nom
famille que gaver ; doit être empr. du pa- vient de ce que le jade passait pour guérir
tois auvergnat ou limousin, où il vit encore les coliques néphrétiques, cf. l’all. ANie-
aujourd’hui. — Dér. : jaboter, 1691, « ba- rensiein, littéralement « pierre des reins ».
varder ».
JADIS, xr1°. Contraction de l’expression
JACASSER, 1808. Soit réfection, d’après ja a dis « il y a déjà des jours », di, lat.
des mots tels que coasser, de jaqueler, 156%, diem (acc. de dies), encore usitée au début
usité aujourd'hui dans le fr. pop., dér. de de notre tradition littéraire.
jaqueile (dim. de Jacques, v. geai) « pie »,
mot de la région lyonnaise, soit dér. de JAGUAR, 1761 (Buffon). Empr., par
jacasse « pie », 1867, dér. de jaque « geai », l'intermédiaire du portug. et de l’angl. (où
mot très répandu en France, d’après agace. jaguar est attesté depuis 1604, jaguarelé
— Dér. : jacasserie, 1838. en portug. depuis 1587), du tupi (Brésil).
Jaguareté, qu'on trouve quelquefois au
JACÉE, nom de plante, 1611. Empr. du XVIIIe s. est une variété noire du jaguar;
lat. médiéval jacea, d’origine inconnue. les formes janware (1556) et ianouare, qui
JACENT, 1509; sens jurid. — Comp. : apparaît au xvi® et au xvire s., doivent
sous-jacent, terme de géol., 1872. PP une variante dialectale du mot
upi.
JACHÈRE, xn1e. Seulement France sep-
tentrionale. Transcrit gascaria dans le lat. JAILLIR, xr1°. En a. fr., jusqu’au xves.
médiéval. Représente un gaulois *ganska- trans. au sens de « lancer vivement ». La
ria « charrue », dér. de *gansko « branche », forme galir, conservée dans le normand de
cf. irl. gésca, id. ; *ganskaria a un parallèle la Manche, au sens de « jeter », exclut tout
p. ex: dans le romagnol pardghir « char- rapprochement avec le lat. jaculäri « lan-
rue », dér. du lat. pertica « perche ». cer ». On suppose un “*galire formé du
JACINTHE, xr1e, « sorte de pierre pré- radical du verbe gaulois *gali- « bouillir ».
— Dér. : jaillissement, 1611; rejaillir,
cieuse », sous les formes jacini, jacinie,
avec j initial d’après jagonce, forme plus 1539 ; rejaillissement, 1557.
usitée en a. fr.; le sens de « fleur » ne JAIS. D'abord jaiet, xrr°, et jusqu'au
paraît pas être antérieur au xvi® s. Empr. XVIIIe s., contracté au xrr1® s. en jai, écrit
du lat. hyacinthus, aux deux sens (du grec arbitrairement jais. Lat. gagälem, acc. de
hyacinthos, propr. personnage mythologi- gagäles (mot pris au grec, signifiant lit-
que qu’Apollon tua par mégarde et qui fut téral. « pierre de Gages (ville et cours d’eau
changé en fleur) ; le sens de pierre précieuse de Lycie) » : la forme correcte du fr. serait
est donc issu de celui de fleur. En outre, *jaié, qui a été altérée en jaiet, par substi-
depuis le xvie s., et aux deux sens, hya- tution de suffixe. Seulement fr.
cinthe, repris aux langues anc.
JALE, v. gallon.
JACQUERIE, vers 1370. Désigne propr.
le soulèvement de 1357 ; sens plus étendu, JALON, 1613. Terme de métier, du même
1821 (P.-L. Courier) ; cf. empêcheur. Dér. radical que jaillir. On a aussi rapproché
de Jacques, surnom donné par dérision aux l’a. fr. gielle « sorte de bâton servant à
paysans au moment de ce soulèvement. tendre des rets »; mais l’étymologie de
Jacques Bonhomme apparaît aussi au gielle est inconnue. — Dér. : jalonner,
XIVE 8. 1690 ; jalonnement, 1838 ; jalonneur, 1835.
349 JARGON

JALOUX, vers 1180. Empr. de l’a. pr. gallois cam « id. » et breton camhet « jante ».
gelos, gilos (depuis 1140), qui représente Le traitement de la consonne initiale se
un lat. pop. *zelosus, dér. du lat. de basse retrouve dans d’autres représentants de ce
ép. zêlus (du grec zélos), propr. « zèle », mot. — Dér. : déjanter, 1948.
d’où « émulation, jalousie », le z initial a
été traité comme di de diurnus « jour ». JANVIER. Lat. pop. jenuarius, attesté
Le grand usage que les troubadours ont dans des inscriptions, pour lat. class. janua-
fait du mot l’a fait passer dans la poésie rius, ja- protonique étant régulièrement
d'amour de l’a. fr. — Dér. : jalouser, vers devenu je- en lat. à basse ép. Cf. anc. picard
1300, peu usuel avant la fin du xvi° s.; genvier comme it. gennaio, esp. enero.
jalousie, vers 1220 (a. pr. gelosia vers 1190). JAPPER, xrr1e. Onomatopée. Rare en
Dit depuis 1549 d’un treillis de bois ou de dehors du gallo-roman; aujourd’hui au
fer qui permet de voir sans être vu ; pro- sens moins spécial d’ « aboyer » en norm.
babl. empr. en ce sens de l’it. gelosia, et dans les parlers méridionaux au Sud de
attesté dès 1493. la Loire. — Dér. : jappement, xv°; jap-
peur, 1546.
JAMAIS. Comp. de l’adv. ja (qui repré-
sente le lat. jam « déjà ») et de mais « plus » JAQUEMART, 1534 (Rab.). Empr. de
(lat. magis), et combiné avec ne pour servir l’a. pr. où jacomart est attesté dans ce sens
de négation par rapport au temps. En dès 1472. Le mot vit encore aujourd’hui
a. fr. ne … ja et ne … jamais ne s’emploient surtout dans le Midi. Dér. plaisant de Ja-
que par rapport à l'avenir, tandis que pour queme, forme de l’a. pr. pour Jacques.
le passé on se sert de ne … onques (du lat.
unquam). Ce n’est qu’à partir du xives. JAQUETTE, 1375. Dér. de l’a. fr. jaque,
que ce dernier cède son terrain à ne … ja- 1364, masc., « sorte de vêtement court et
mais. Du x1° au xt s. le fr. distinguait serré », emploi fig. de jacques « sobriquet
entre ne … ja et ne … jamais en ce sens donné au paysan au xIV° s. », parce que
que le deuxième avait le sens de «ne … plus cet habillement court et serré était surtout
jamais », conformément à l'étymologie porté par les paysans. Ce sobriquet s’expli-
(cf. Jean de Meung, Dieux mourut une fois, que par la fréquence de ce nom de per-
mes ja mes ne morra). Depuis, ne … ja a sonne parmi les paysans. Les autres langues
disparu au profit de ne... jamais, auquel européennes ont empr. le nom de cette
il a fallu ajouter alors plus pour rendre pièce d’habillement du fr.
l’idée dont il avait été l'expression jusque- JARD, 1260 (gart) ; souvent écrit jar,
là. C’est ce qui explique la tautologie de jarre, jars. À Lyon et en Franche-Comté
mais et plus dans ne … plus jamais. « aiguillon de guêpe ». Francique *gard,
« piquant » qu’on peut supposer d’après
JAMBE. Lat. de basse ép. gamba « pa- anc. haut all. gart, id., all. dialectal « aiguil-
turon du cheval et plus généralement des lon pour faire marcher les bêtes » .— Dér. :
quadrupèdes » (du grec kampé, propr. jarreux, 1782, au moyen âge jardeux, 1260 ;
« courbure », d’où « articulation », empr. éjarrer, 1753.
comme terme de vétérinaire), qui a éliminé
dans la langue vulg. le mot de la langue JARDE « tumeur au jarret du cheval »,
courante crüs, v. pour des substitutions 1678. Empr. de l’it. giarda, empr. lui-même
semblables bouche, tête. De la forme camba de l'arabe djarad. On a aussi, depuis 1678,
l’a. pr. camba et, aujourd’hui, les formes * jardon, empr. de lit. giardone.
de tous les parlers méridionaux, au Sud
d'une ligne allant de l'embouchure de la JARDIN, xn1°. Au moyen âge aussi gart,
Gironde au Nord de la Suisse romande. jart. Celui-ci représente le francique *gart ou
It. gamba ; l'esp. dit pierna, lat. perna, qui, *gardo, id. (cf. anc. haut all. garto, all. Gar-
à l’époque classique, signifiait « cuisse ten). Jardin, qui en est dér. et qui est attesté
d'animal, jambon ». — Dér. : jambage, en lat. médiéval dès le xe s. (gardinium),
1369 ; jambé (dans bien, mal jambé), 1582 ; a probabl. été formé en gallo-roman, peut-
jambette, 1383, au sens de « croc-en-jam- être d’abord comme adj. joint à horus (on
be », encore dans les patois, au sens de a supposé un *horius gardinus « jardin en-
« petit couteau de poche », 1622 (Sorel); touré d’une clôture », d’après le sens du
jambier, nom d’un muscle, xvi® (Paré); gotique garda « clôture »). L’it. giardino et
jambière, 1203 ; jambon, x1r1°, d’où jam- l'esp. jardin sont empr. du fr., comme le
bonneau, 1607 ; enjambé, vers 1200, « pour- norm. gardin vit dans l’angl. garden; nous
vu de jambes » ; enjambée, xr11°; enjamber, avons repris ce dernier dans garden-party,
xve, d’où enjambement, 1566, «action d’en- 1885. — Dér. : jardinage, 1281 ; jardiner,
jamber », comme terme de prosodie, xvire. xive (Deschamps) ; jardinet, xrr1e ; jardi-
nier, x11° ; le fém. date du xtre.
JAMBOREE, 1931. Mot angl., empr. de
JARGON, 1426, au sens moderne; at-
l’hindou par Kipling.
testé dès le x11° s. au sens de « gazouille-
JANISSAIRE, xv°. Empr. du turc yenit- ment ». De la famille de gargole, mots qui
cheri «nouvelle milice », par l'intermédiaire signifient « faire du bruit avec la gorge ».
de l’it. gian(n)izzero, qui vient probabl. L’it. gergo et l'esp. jerigonza sont empr.
lui-même du grec byzantin. du fr. Jargonner, x11°, dont le sens s’est
développé parallèlement au subst. et qui a
JANTE. Lat. pop. *cambita, dér. d’un donc souvent les sens de « gazouiller, ba-
gaulois *cambo-, signifiant « courbé », sup- varder », cf. aussi jargouiller jusqu’au
posé d’après l’irlandais camm « courbe », xvie s. et encore dans les patois.
JARRE 350

JARRE, 1449. Empr. du prov. jarra, JAVEL (eau de) (aussi Javelle), 1824
empr. lui-même de l'arabe djarra « grand Javel est le nom d’un ancien village de la
vase de terre », d’où viennent également banlieue de Paris, aujourd’hui quartier du
lit. giarra et l'esp. jarra. 15e arr., où on fabriquait cette eau. —
Dér. : javelliser, 1931.
JARRET, xr1°. Dér. d’un simple attesté
en a. pr. (garra) et dans les patois du JAVELLE, xr1°, au sens de « monceau » ;
Centre (jarre « cuisse »). Gaulois *garra, le sens rural apparaît dès le x111° s.; en
qu’on peut supposer d’après gallois garr, outre « botte de sarments, fagot », encore
bret. gâr « jambe », et d’où viennent aussi usité dans les patois. Mot d’origine gau-
esp. port. garra « griffe ». — Dér. : jarre- loise, qui désignait ce qu’on rassemble par
tière, 1360, en outre, en a. fr., jarrelier, tas, par poignée ; cf. irl. gabal « saisir »;
masc., 1360, encore usuel aujourd’hui dans de là aussi l’a. pr. gavela « javelle de blé »
les parlers septentrionaux; jarreter, 1576, et l’esp. gavilla « id. ». L’a. fr. a aussi le
pour *jarrelerer. masc. javel « monceau » (cf. de même l’a.
pr. gavel « botte de sarments »); d’où le
JARS, xirie. Probabl. même mot que fr. techn. javeau « île formée de sable et
jard (v. le dér. berrichon jardir « couvrir de limon à la suite d’un débordement »,
l’oie », avec la consonne -d-), par une com- déjà relevé au xive s. — Dér. : javeler,
paraison de la verge du jars avec l’aiguil- x ; javeleur, 1611 ; enjaveler, 1352.
lon, cf. en dialecte alsacien Siecher, « cou-
reur de jupes », propr. « celui qui pique ». JAVELOT, xr1°. Mot d’origine gauloise ;
cf. anc. irl. gabul « enfourchure », gallois
JASER, 1538 (gaser au xv®; la forme gafl « id. » et, pour le sens d’ « arme »,
jaser qu'on a cru trouver une fois au gallois gaflach « lance empennée ». — Dér. :
xI12 s. est due à une faute de lecture). javeline, 1451.
Onomatopée ; v. gazouiller. — Dér.
jaserie, 1538 ; jaseur, 1538. JAZZ, 1918. Empr. de l’anglo-américain
jazz, d’origine obscure.
JASMIN, vers 1500 (écrit jassemin).
Empr. du mot arabo-persan yésimin, pro- JE. Lat. pop. *eo, lat. class. ego, par
babl. par l’intermédiaire de l’it. gelsomino. développement particulier, dû au rôle ac-
JASPE, 1118. Empr. du lat. iaspis (mot cessoire pris par ce pronom, entraînant
pris au grec). — Dér. : jasper, 1552 (-6), une prononciation rapide et faible. Pour
jaspure, 1617. l’affaiblissement du pron., v. il.

JASPINER, 1723 ; on trouve aussi jas- JEEP, 1944. Mot anglo-américain tiré
piller au xvirie s. Mot argotique, dû à un des initiales G. P., qui désignait un type
croisement voulu de jaser et de japper; d’auto fabriquée pour l’armée chez Ford et
cf. jasper à la lune chez d’Assoucy. dont le sens était general purpose « (d’un)
usage général ».
JATTE. Lat. gabala « plat, assiette
creuse », devenu *gabila. À. pr. gauda, JÉJUNUM, 1541. Empr. du lat. médical
gaveda, et dialectes italiens; cf. la forme jejunum (iniestinum), littéralement « (in-
Jade de l'Ouest « jatte pour faire le beurre, testin) à jeun »; cf. : « Le second intestin
corbeille pour la pâte ». gresle est nommé jejunum, non parce qu’il
ne contient rien, mais parce qu'il contient
JAUGE, 1260. Francique *galga, qu’on bien peu au regard des autres » (Paré).
peut supposer d’après l’anc. haut all. galgo
« treuil de puits, potence » et dont le genre JÉRÉMIADE, vers 1720. Dérivé de Jé-
fém. est assuré par le néerl. galge. La signi- rémie; par allusion aux lamentations de
fication première du mot germ. était « per- ce prophète.
che ». — Dér. : jauger, 1260; jaugeur,
1258 ; jaugeage, 1248. JERSEY, 1881 ; déjà en 1667 au sens
de « laine ». Tiré de Jersey, nom de l’île
JAUNE. Lat. galbinus « vert pâle ». En de la Manche où l’on préparait depuis la
dehors de la France septentrionale, con- fin du xvi® s. la laine qui sert à faire le
servé seulement par le roumain galbän. Le tissu appelé jersey.
mot fr. a été empr. par les langues voisines :
it. giallo, esp. jalde (tous deux d’après la JETER. Lat. pop. *jeciare, lat. class.
forme anc. du fr. jalne), prov. jaune. — jaciäre, v. janvier. — Dér. et Comp. : jet,
Dér. : jaunâtre, 1530 ; jaunet, 1125 ; jaunir, XIIe; jeté, terme de danse, 1704; jetée,
1213 ; jaunisse, xrre. x1I11*, « action de jeter »; terme de cons-
truction, 1362; jeton, 1317, d’après jeter
JAVA, 1931. Du nom de l’île de Java. au sens de « calculer » ; en outre usuel en
a. fr. au sens de « rejeton » et d’ « essaim »,
JAVART, 1393. Se rattache à la famille ce dernier sens conservé dans les parlers
de gaver. Cette tumeur peut avoir été com- de l’Est, ainsi que jeter au sens d’ « essai-
parée à un goitre, surtout parce qu'elle mer »; déjeter, xr1° ; interjeter, terme ju-
vient au paturon, donc à un endroit resserré rid., xv°, sur le modèle du lat. interjicere ;
de la jambe du cheval. Le mot est surtout projeter, réfection, qui date du xvr° s., de
méridional et le fr. doit l'avoir reçu d’un pourjeter, xi1°, fait lui-même sur le modèle
parler de la région septentrionale de l’occi- du lat. projicere ; d’où projet, 1518 (pour-
tan, en substituant en même temps au get) ; surjeter « jeter par-dessus », xr11e,
suff. méridional -arri (prov. gavarri, aussi d’où surjet, 1393, d'où, à nouveau, surjeter,
esp. gabarro), le suff. -ard. t. de couture, 1660.
391 JOUER

JEU. Lat. jocus « plaisanterie » ; a pris JOLI, xr1e. D'abord jolif, -ive, « gai,
en lat. vulg. tous les emplois de ludus aimable, agréable », jusqu’au xviie &.;
« amusement, divertissement ». — Comp. : cf. a. pr. joliu; l’angl. jolly vient du fr.
enjoué, xrr1°, d'où enjouement, xvI1e (SCar- Au xrr1e s. « élégant, paré », d'où, vers
ron) ; enjeu, 1611. 1400, le sens moderne. Très probabl. dér.
de l’anc. scandinave jôl, nom d’une grande
JEUDI, d’abord juesdi. Lat. pop. jovis fête paienne du milieu de l'hiver, sur le
dies « jour de Jupiter », v. dimanche. modèle d’un adj. comme aisif « agréable »,
JEUN. Ne s'emploie plus que dans la de aise, — Dér. : joliesse, 1885 (Goncourt) ;
locution à jeun; a été adj. jusqu’au xvies.; joliet, vers 1200 ; enjoliver, vers 1315;
cette disparition de la valeur adjective est enjolivement, 1611 ; enjoliveur, 1612 ; en-
due au fait que la forme du fém. était peu jolivure, 1611.
différente de jeune « qui est dans la jeu- JONC. Lat. juncus. — Dér. : jonchée,
nesse » ; aussi est-elle très rarement attes- xur1e ; joncher, vers 1080 (Roland), déjà
tée, et sa disparition a entraîné celle du au sens fig., propr. « couvrir de jonc (le
masc. Lat. jejünus « à jeun ». sol des rues ou des salles dans certaines
JEUNE ; a. fr. juene. Lat. juvenis. Les solennités) » ; jonchet, 1474.
formes du fr. et de l’it. supposent une JONCTION, xive. Empr. du lat. junctio
forme avec 0. due probabl. à l'influence pour servir de nom d'action à joindre.
dissimilatrice du v. — Dér. : jeunesse,
x11° ; jeunet, id.; rajeunir, id., d’après ra-
JONGLEUR. Au moyen âge jogleor. Lat.
jeunissement.
joculätor « rieur, qui dit ou fait des plai-
santeries »; au moyen âge désigne une
JEÜÛNER. Lat. eccl. jéjüänäre. V. déjeu- sorte de ménestrel ; a le sens moderne de
ner et dîner. — Dér. : jeûne, xr1° ; jeûneur, « bateleur, faiseur de tours d'adresse », dès
1595. le xr1e s. La forme jongleur, due à un croi-
JIU-JITSU, 1907. Mot japonais importé sement avec jangler « médire, bavarder »,
en France avec cette méthode d’entraîne-
date du xvi® s. Jangler est sans doute
d’origine germ., cf. moyen néerl. janken
ment.
« gémir », moyen bas all. « piauler », moyen
JOBARD, 1836 (une re fois joubard néerl. jangelen « murmurer, gronder ».
en 1571). Dér. de jobe, 1547 (N. du Fail); L'a. fr. jougler représente le lat. joculäris
on trouve en outre au xv® et au xvI° S. « plaisant, badin ». — Dér. : jongler, vers
jobet, jobelet, jobelin ;enjobarder «tromper » 1400 ; jonglerie, 1119.
(vers 1280). Très probabl. du nom du per-
sonnage biblique Job, qui a occupé l’ima- JONQUE, 1540 (un juncque, dans un
gination du peuple surtout par les railleries récit de voyages; en 1519, joinct, id.).
qu’il a eu à subir de la-part de ses amis Empr. du malais de Java (a)jong (même
et les reproches que lui adressait sa femme.
mot que le chinois ichouan).
JONQUILLE, 1614. Empr. de l'esp. jun-
J.0CKEY, 1776. Empr. de l’angl. jockey quilla, dér. de junco, v. jonc.
dim de jock, forme écossaise de Jack;
l’acception moderne remonte, en angl., à JOSEPH, 1723, sorte de papier transpa-
1670. Parfois francisé en ja(c)quet, mais rent. Du prénom de l'inventeur Joseph
sans influence de l’anc. ja(c)quet, usuel au Montgolfier, directeur de papeteries à An-
xvIe s. au sens de « valet » et surtout de nonay, père de l'inventeur de l’aérostat.
« bouffon ».
JOUBARBE. Lat. jouis barba « barbe de
JOCRISSE, 1587. Type de benêt, popu- Jupiter » (Pline dit barba jovis).
larisé par les farces de Dorvigny, à la fin
du xvrre s. Mot vulg., qui paraît être une JOUE. Très probabl. dér. du prélatin
déformation fantaisiste de joquesus, 1493, *qaba, d'où gaver. L’it. gola, le prov.
de même sens, littéral. « juche-toi dessus », gaulo, le franco-prov. dzouta font supposer,
dit d’un sot incapable de rien faire ; joquer avec le fr. joue, un très anc. dér., aussi pré-
est fréquent en a. fr. au sens de « jucher, latin, *gäboia ou gäbuia. Un autre dér.
être à ne rien faire ». prélatin du même radical, peut-être un
*gabonia, est représenté par l’a. pr. gau-
JOIE. Lat. gaudia, fréquent dans le lat. nhas « ouïes du poisson », aujourd’hui aussi
fam. (d’où son emploi dans le lat. pop.), « joue ». — Dér. : jouée, x11°. — Comp. :
plur. neutre, pris comme fém. sing., du bajoue, xrv° ; abajoue, 1766 (Buffon) ; dû
lat. class. gaudium. L’it. gioia vient du fr., à un croisement avec balèvre, v. lèvre.
comme l’angl. joy. — Dér. : joyeux, vers
1500 ; joyeuseté, vers 1295. JOUER. Lat. jocäre « badiner, plaisan-
ter », a éliminé ludere, comme jocus a éli-
JOINDRE. Lat. jungere. — Dèér. : joi- miné ludus. — Dér. : jouable, 1741 (Vol-
gnant, prépr., xr11e ; joint, x111°, au sens de taire) ; injouable, 1767 (id.); jouet, 1523 ;
« joug », d’où ajointer, 1838 ; jointé, dans joujou, 1715, réduplication née dans le
court-jointé, 1660, et long-jointé, 1660, tous langage enfantin, sorti de la locution faire
deux termes concernant le cheval, par joujou, 1715, déjà faire jojo au xv° $.;
l'intermédiaire de jointe, x11°, « articula- joueur, x11° ; déjouer, x111° S., au sens de
tion » et spécialement « paturon du che- « déconcerter », au sens moderne 1797, mis
val »; jointée, xrr1e ; jointoyer, 1226; re- à la mode par la Révolution (depuis 1694
jointoyer, 1392 ; déjoindre, xn1° ; rejoindre, aussi « tourner au gré du vent, d’un pavil-
XIII, lon », ce qui se rattache à jouer « se mou-
JOINTURE. Lat. junciüra. voir avec légèreté »); rejouer, vers 1170,
JOUER 392

mais déjà au x1r1° s. au sens de « déconcer- (Roland : luz jurz), a éliminé sempre(s)
ter » ; ce sens vient probabl. du jeu d’échecs (lat. semper), qui a pris de bonne heure le
ou de dames, où il se dit encore au sens sens de « tout de suite » ; {oujours est de-
de « retirer une pièce qu'on vient de venu le terme de presque tout le domaine
jouer » ; depuis 1694 dans la langue de la gallo-roman ; un comp. fousdis, attesté
marine en parlant du pavillon qui tourne en a. fr., survit en picard et en wallon.
au gré du vent ; rejouer, xr1e.
JOUTER. D'abord josier. Lat. pop. *juæ-
JOUFFLU, 1530. Altération de giflu, v. täre « être attenant, toucher à », dér. de la
gifle, par croisement avec joue; type ré- prép. juxiä « près de »; ce sens primitif
pandu d’adj. pop. ; cf. faf(e)lu « dodu », d’ « être attenant » survit encore dans les
du xv® au xviies., encore dialectal, v. aussi parlers septentrionaux, notamment dans le
mafflu, à côté de mafflé. Centre en parlant des propriétés ; jouter a
pris de bonne heure le sens de « (se) ras-
JOUG. Le g, qui apparaît dès le xrx1° 5., sembler » et spécialement celui de « com-
mais qui ne se prononce que dans un lan- battre de près à cheval avec des lances » ;
gage livresque, est dû à l’orthographe éty- les mœurs de la chevalerie ont porté le mot
mologique. Lat. jugum, dont le g est tombé dans les langues voisines d’où it. giostrare,
de bonne heure. esp. jusiar. V. jouxte. — Dér. et Comp. :
joute, x11° ; jouteur, id.; ajouter, x1°, au
JOUIR. Lat. pop. *gaudire, lat. class. moyen âge surtout « réunir » et, au réfl.,
gaudère « se réjouir ». À pr. jauzir, mais «se rassembler, en venir aux mains » ; d’où
it. godere. À pris le sens de « venir à bout rajouter, xr1°; surajouter, 1314.
de » dans de nombreux parlers gallo-ro-
mans : Suisse romande, lorrain, normand, JOUVENCE. Altération, qui date du
angevin, celui d’ « user » dans ceux du XIII1€ s., d’après jouvenceau, de l’a. fr. jou-
Sud-Est. — Dér. et Comp. : jouissance, venie, lat. juvenia ; ce mot, conservé seu-
1466, a remplacé l’anc. joiance, d’où co- lement en fr., était en concurrence avec
jouissance, 1835, non-jouissance, 1660; une forme masc. jouvent, qui représente le
réjouir, xr1°, par l'intermédiaire d'’esjouir, lat. juventüs, fém. (d’où aussi lit. gioventü)
XII, disparu au xvii® s., d’où réjouis- pris en lat. pop. de la Gaule pour un nom
sance, vers 1460 ; comme terme de bouche- masc ; jouvente et jouvent ont été éliminés
rie, 1783, par ironie ; jouisseur, 1849, au par jeunesse. La légende de la fontaine
sens moderne, déjà au xv®s. au sens de «qui de jouvence est d’origine orientale; elle a
jouit de ». été répandue dans l'Occident par les
romans d'Alexandre.
JOUR. D'abord jorn. Lat. pop. diurnus,
en lat. class. adj. signifiant « de jour ». De JOUVENCEAU, -ELLE. Vieillis depuis
même a. pr. jorn, it. giorno. Le lat. class. le xvrie s.; ne s’emploient plus qu’ironi-
diés a laissé peu de traces en fr. où di a quement. Lat. pop. *juvencellus, -a ; le lat.
disparu de bonne heure. Dans les parlers eccl. avait juvenculus, juvencula. Seule-
gallo-romans on n’a dia que dans l’extrême ment fr.
Sud-Ouest. V. midi et les noms des jours
de la semaine. — Dér. : journal, d’abord JOUXTE, xiri°. Prép., qui ne s'emploie
adj., encore usité dans papier journal; a que dans la langue jurid. ou dans un style
éliminé une forme journel qui a donné archaïsant. Réfection, d’après le lat. juxia,
l’adv. : journellement, vers 1450 ; d’où de l’anc. prép. jo(u ste, v. jouter.
journalier, 1535. Comme subst., au sens de JOVIAL, 1532 (Rab.). Empr., par l’in-
«relation d'événements quotidiens », jour- termédiaire de l’it. gioviale, du lat. jovialis
nal date du x1ve®s. ; le sens de « périodique » « qui concerne Jupiter », auquel les astro-
ou de « quotidien » est dû peut-être à l’it. logues ont donné le sens de « né sous
giornale ; désigne d’abord des périodiques l'influence de la planète Jupiter » ; d’après
scientifiques : cf. Journal des Savanis, 1665, eux, cette planète annonçait pour ceux
puis, au milieu du xvine s., des publica- qui naïssaient sous ce signe une destinée
tions périodiques ou quotidiennes, ana- heureuse. Le sens spécial du fr. est déjà
logues aux nôtres, cf. Journal de Paris, it. — Dér. : jovialité, 1624.
1777 : a peu à peu éliminé gazelte, d’où
journaliste, 1703 ; journalisme, 1778 ; jour- JOYAU. D'abord joel. Joyau vient du
née, x11°, Cf. it. giornala, a. pr. jornada ; plur. L’y vient du suff., qui, après une
ajourner, vers 1080 ; ajournement, 1213; voyelle, avait pris la forme -iaus. Dér. de
réajourner, x1v°, d'où -ment, 1503; en jeu, plutôt que d’un dér. déjà lat., *jocalis.
outre formes avec ra-; ajouré, 1644. — It. giojello, all. Juwel, angl. jewel sont
Comp : aujourd’hui, vers 1180 ; a peu à empr. du fr. — Dér. : joaillier, 1438 ; joait-
peu supplanté l’a. fr. hui, lat. hodie. Au- lerie, 1434.
jourd’hui n’a pénétré que dans les parlers
septentrionaux et surtout au Nord-Est et JUBÉ, 1386. Premier mot de la prière :
à l’Est ; hui subsiste en Wallonie, dansle Jube, Domine, benedicere « Ordonne, Sei-
franco-provençal et dans le Midi, renforcé gneur, de bénir », qu’on prononçait au
en ahui au Sud-Ouest, en ancui au Sud- jubé avant la lecture de l’évangile.
Est, cf. ancui de l’a. fr. et de l’a. pr., comp.., JUBILÉ, 1364. Empr. du lat. eccl. Jubi-
comme encore, avec l’adv. hinc; de nom- aeus, empr. lui-même de l’hébreu yôbel
breux parlers de l'Est, de l’Ouest et de la « jubilé ». Le lat. jubilare, qui n'a aucun
région centrale disent anuit, attesté en a. rapport étymologique avec jubilaeus, a
fr., propr. « jusqu’à la nuit »; bonjour, xzr1°; certainement agi sur la forme de celui-ci.
contre-jour, 1690; toujours, vers 1080 Jubilé s’est répandu à la suite de l’établis-
353 JUNTE

sement du jubilé chrétien par Bonifa- Juillet est une réfection de juignet d’après
ce VIII en 1300 ; mais, dans les emplois le lat. julius, employé toujours dans les
modernes, la date de cinquante ans vient chartes et une forme pop. juil qui s’était
ee de la fête juive. — Dér. : jubilaire, os dans les parlers de l'extrême
0. ord.
JUBILER, 1752, au sens moderne ; a JUIN. Lat. jünius.
été usité au moyen âge au sens du lat.;
jubilation, x11°. Empr. du lat. jubilare JUJUBE, 1256. Altération du lat.
« pousser des cris de joie », jubilatio. zizyphum (du grec zizyphon « jujubier »).
Le jujubier ne poussant que dans la région
JUCHER, xue (joschier). Dér. de juc méditerranéenne, le nom franç. du fruit
(on trouve aussi joc), attesté au xIve s. doit être emprunté de l’occitan. Dans le
Francique jok « joug », cf. all. Joch. Le lat. du Bas-Empire zizyphon a été trans-
sens « perchoir » est secondaire. La voyelle u formé en zizupus, qui, par métathèse, est
vient sûrement du verbe hucher « jucher », devenu züzipus, d’où l’occit. jousibo.
très répandu dans les patois et qui, bien Une autre forme métathétique, zizüpus, a
qu’attesté à une époque tardive seulement, pu donner *gijube, d’où, avec assimilation
doit être très ancien et représenter le fran- vocalique, jujube. — Dér. : jujubier, 1553.
cique *hükon (cf. moyen haut all. hüchen
« s’accroupir », néerl. huiken). De même JULEP, vers 1300. Empr., par l’inter-
norm. gerquer, par croisement avec perquer médiaire de l’a. pr. julep ou de l’esp. julepe,
« percher ». — Dér. : juchoir, 1538; déju- de l’arabe djuléb, empr. lui-même du per-
cher, xrr1° (alors desjoche). san gul-4b « eau de rose »; on employait
JUDAS, 1497, « traître », nom de l’apôtre cette eau pour diverses préparations médi-
qui trahit Jésus ; « ouverture dissimulée », cinales.
1798. JULES « vase de nuit », 1878; pop.
JUDICIAIRE, vers 1400 (Deschamps). d’abord argot de soldats. Du prénom Jules,
Empr. du lat. judiciarius. — Comp. : extra- par ironie.
judiciaire, 1539.
JULIENNE, 1680, comme nom de plan-
JUDICIEUX, 1580 (Montaigne). Dér. te (1665, juliane) ; 1722, esp. de potage.
sav. du lat. judicium au sens de « discer- Passe pour être dérivé, aux deux sens,
nement ». d’un des noms propres Jules, Julien, mais
JUDO, JUDOKA, vers 1936. Mots japo-
sans qu’on connaisse les raisons de cette
nais importés en France avec cette méthode dénomination.
d'entraînement. JUMEAU, JUMELLE. Ont remplacé de
JUGE. Lat. jüdicem, acc. de jüdex; le
bonne heure des formes avec syllabe ini-
développement phonétique de juge a suivi
tiale ge-, encore usitées dans les parlers de
l'Est. Lat. gemellus, -a. Vivent dans les
celui du verbe juger ; juge de paix, 1687,
terme adopté officiellement en 1790, d’où parlers septentrionaux ; le Midi et le Centre
ont besson, fréquent-en a. fr., jusqu’au
justice de paix. xvI® s., aujourd'hui provincial et pris com-
JUGER. Lat. jüdicäre. — Dér. : juge- me tel par G. Sand dans La Petite Fadette,
ment, vers 1080 (Roland) ; jugeotte, 1871 1848, dér. de l’adv. lat. bis « deux fois ».
(Flaubert, fam.) ; déjuger (se), 1845, fait Le fém. jumelle sert pour des emplois
sur le modèle de se dédire ; formé déjà au techn. — Dér. : jumeler, 1765 ; jumelage,
moyen âge au sens de « juger, condamner » ; 1873 (au sens actuel vers 1950).
préjuger, 1570, sur le modèle du lat. jurid.
praejudicare ; méjuger, 1829 (déjà au JUMENT. Lat. jämenium « bête de som-
xir1e s.) ; préjugé, 1584. me ». À pris de bonne heure le sens de
« femelle du cheval », à cause de l'usage
JUGULAIRE, 1532 (Rab.), comme adij., dans les campagnes d'employer pour le
terme de physiologie. Dér. sav. du lat. travail les femelles servant à la reproduc-
jugulum « gorge »; « mentonnière d’une tion ; a éliminé dès le x1v® s. l’a. fr. ivc
coiffure militaire », 1803. (lat. equa), qui avait moins de corps.
JUGULER, 1213, rare avant le xix® ss. JUMPING, 1907. Empr. de l’angl. jum-
Empr. du lat. jugulare « égorger ». ping «action de sauter ». Le subst. jumper
« cheval qui saute », empr. de l’angl.
JUIF. D'abord, en a. fr., juiu, au fém. jumper, est attesté dès 1907.
Juive, sur lequel juif a été refait. Lat. ju-
daeus (du grec ioudaios, propr. « de Juda », JUNGLE, 1796. Empr., par l’intermé-
le nom de la tribu de Juda ayant été diaire de l’angl. jungle, de l’hindoustani
étendu au royaume de Juda, puis à tout jangal « région non cultivée, couverte de
le peuple hébreu). — Dér. : juiverie, xrre. hautes herbes » (du sanscrit jangala).
JUILLET, 1213. A éliminé vers le xvi°s. JUNIOR, vers 1890. Empr. de l’angl.
l’a. fr. juignet, dér. de juin; ce dér. est junior « plus jeune » (t. de sport).
peut-être dû au fait qu'on regardait le
juillet comme une répétition de juin, un JUNTE, 1581. Empr. de l'esp. junia,
juin cadet, tout comme on les distinguait fém. de junio « joint », qui est empr. du
en anc. angl. en faisant précéder le même lat. juncius. Ne se dit qu'à propos de
nom de l’épithète le premier et le second. l'Espagne et de l'Amérique latine.

DICT. ÉTYM. 23
JUPE 394

JUPE, xr1°. Empr., par l'intermédiaire JUSQUE. En a. fr. souvent josque. Pro-
de la Sicile, de l’arabe djoubba « vêtement babl. tiré de enjusque, lat. pop. *inde
long en laine »; de même a. pr. jupa, it. üsque, dont le premier élément a été senti
giubba, esp. aljuba. — Dér. : jupon, 1319; comme identique à la prép. en, ce qui
enjuponner, 1534 (Rab.). l’a fait paraître inutile et a entraîné sa
chute. La forme avec o permet peut-être
JURER. Lat. jürare. — Dér. : juré, de supposer un lat. üsque, à côté de üsque.
vers 1200 ; au sens de « membre du jury », La prononciation de l’s, qui date du xvies.
d’abord à propos de l’Angleterre, 1704; (juque est encore attesté en 1530), a été
adopté pour la France depuis 1790, v. entraînée, comme celle de presque, par
jury ; jurande, xvie ; jurement, xrr1° ; ju- lorsque, puisque, voir ces mots ; il est pos-
reur, x11° ; juron, 1599. sible que le lat. usque où les savants du
JURIDICTION, 1209. Empr. du lat. ju- xvie s. ont vu l’étymologie du mot fr.,
risdictio « action, droit de rendre la jus- ait agi dans le même sens.
tice » ; le mot fr. a été refait, dès le moment JUSQUIAME, xrr1e. Empr. du lat. jus-
où il a été empr., d’après juridicus. — gquiamus (du grec hyoskyamos, littérale-
Dér. : -onnel, 1537. ment « fève de porc »).
JURIDIQUE, 1410, d’après l’adv. -ment. JUSTE, xri°. Empr. du lat. justus. Le
Empr. du lat. juridicus. sens de « qui a de la justesse » est égale-
JURISCONSULTE, 1393. Empr. du lat. ment lat. ; cf. justa altitudo « hauteur vou-
jurisconsulias « versé dans le droit ». lue » chez César. — Dér. : justesse, 1611 ;
ajuster, 1265, ajustage, 1350, ajustement,
JURISPRUDENCE, 1562. Empr. du lat. 1328, ajusteur, xvi*, désajuster, 1611, rajus-
jurisprudentia « science du droit ». ter, 1170. — Comp. : justaucorps, 1617.
JURISTE, xive (Oresme). Empr. du JUSTICE, x1° (Alexis : justise, forme
lat. médiéval jurisia. usitée jusqu’au xxr1e s.). Empr. du lat. jus-
tilia. — Dér. : justiciable, xr1°, par l’inter-
JURY, 1588, en parlant de l'Angleterre. médiaire d’un anc. verbe justicier ; justi-
Devenu usuel depuis l'établissement du cier, subst., xXII°.
jury par la Constituante ; a pris rapide-
ment un sens plus étendu ; on trouve jury JUSTIFIER, xri°; justification, xrie.
d'experts dès 1796. Il y a eu d’abord du Empr. du lat. justificare, -atio. — Dér. :
flottement entre juré et jury, probabl. à justifiable, vers 1300, injustifiable, 1791 ;
cause de la prononciation; cf. : « Ce pre- injustifié, 1838 ; justificateur, 1723, terme
mier juré s'appelle juré d'accusation », de typographie ; autre mot que justifica-
Dict. de la Constitution, 1791. Empr. de teur, 1512, empr. du lat. justificator « celui
l’angl. jury, empr. lui-même de l’a. fr. quijune (au sens propre) »; justificatif,
jurée « serment, enquête juridique » auquel
l’angl. a donné un sens nouveau.
JUTE, 1849. Empr. de l’angl. julie, empr.
JUS. Lat. jüs. — Dér. : juteux, xiv®; lui-même du bengali jhuto.
juter, 1844. — Comp. : verjus, xr1re.
JUVÉNILE, xv° ; juvénilité, 1838. Empr.
JUSANT, 1484. Dér. probablement du lat. juvenilis, juvenilitas.
formé en Normandie, de l’anc. adv. jus
(disparu du fr. depuis le xvie s.) « en bas », JUXTA-. Premier élément de mots
lat. deorsum « id. » ; jus doit sa voyelle u à comp. sav., tels que juxtalinéaire, 1867,
sus « en haut », mot auquel il s’opposait. empr. du lat. juxia « auprès de » ; v. jouxte.
K
KAKÉMONO, fin xixe. Mot japonais, KIDNAPPER, 1948. Empr. de l’angl. Lo
signifiant propr. « chose suspendue ». kidnap « enlever un enfant » (kid «enfant»,
lo nap « enlever »).
KAKI (parfois khaki), 1898. Empr. de
l’angl. khaki, d'abord khakee, empr. de KIF-KIF, 1867. Mot fam. signifiant « pa-
l’hindoustani khäki « couleur de poussière » reil, la même chose », empr. de l’arabe algé-
(du persan khäk « terre, poussière »); les rien kif kif « id. », littéral. «comme comme »
uniformes de cette couleur ont été adoptés par les soldats des armées d’Afrique.
dans les armées anglaises de l’Inde lors des
campagnes de 1857-58. KILO-. Premier élément de noms de
mesure créés lors de l'établissement du
KALÉIDOSCOPE (ou ca.), 1818. Mot système métrique, tiré du grec khilioi
fabriqué avec les mots grecs kalos « beau », « Mille », v. gramme, litre, mètre. Le comp.
eidos « aspect » et skopein « regarder ». kilogramme se dit couramment kilo.
KANGOUROU (ou kanguroo), 1774. Em-
pr., comme l’angl. kangaroo, d’une langue KILT, 1792. Empr. de l’angl. kill.
indigène de l’Australie.
KIMONO, fin xixe. Empr. du japonais
KAOLIN,. 1712. Empr. du chinois kao- kimono, « vêtement, robe ». Après avoir
ling, littéralement « colline (ling) élevée désigné la robe japonaise, a été étendu à
(kao) », nom de lieux où s’extrait le kaolin, des robes de même forme, spécial. pour
argile appréciée pour la fabrication de la l’intérieur.
porcelaine et abondante en Chine.
KINESTHÉSIE, vers 1900. Comp. sa-
KAPOK (ou capoc), 1691 (écrit alors vant des mots grecs kinein « mouvoir »
capok). Empr., comme l’angl. kapok, du et aisthèsis « sensation ».
malais kapogq.
KINKAJOU, 1672. Empr. d’une langue
KAYAK, vers 1900. Empr. de la langue indigène de l'Amérique équatoriale.
des Esquimaux.
KIOSQUE, 1608. Empr. du turc kieuchk
KEEPSAKE, 1829. Empr. de l’angl. (du persan kouchk), proprement « pavillon
keepsake, comp. du verbe to keep « garder » de jardin, belvédère ». À reçu, au cours du
et de sake qui ne s'emploie que dans des XIX° s., un sens plus étendu.
locutions telles que for my sake « pour
l'amour de moi », etc. KIRSCHWASSER, 1775, d'où kirsch,
1782. Empr. de l’all. d'Alsace Kirschwasser
KÉPI, 1809. Empr. du suisse all. Kaeppi, « eau-de-vie de cerises ».
dim. de Xappe « bonnet ».
KLAXON, 1914. Nom de la firme amé-
KERMËS, 1600 (O. de Serres). Autre ricaine qui fabriqua la première cet aver-
forme d’alkermès, 1546 (Rab.), empr., par tisseur d’auto.
l'intermédiaire de l’esp. al/kermez, de l’arabe
al-qirmiz (d’origine persane). V. carmin et KLEPTOMANIE, 1872 ; kleptomane, fin
cramoisi. xix*. Comp. sav. formés avec le mot grec
KERMESSE, 1397, très rare et seule- kleptes « voleur ».
ment régional jusqu’au xix® s. Devenu
usuel vers 1832. Empr. du flamand kerk- KNOCK-OUT, 1904. Terme de boxe
misse, littéral. « messe d'église », qui a d’origine angl. (knock « coup », out « de-
servi à désigner la fête patronale et les hors »). — Dér. knock-outer, 1908.
réjouissances auxquelles elle donne lieu,
KNOUT, 1681. Mot russe.
cf. le picard ducasse, de même sens, issu
de dédicace. Le mot a été introduit en KOBOLD, 1867. Empr. de l’all. Kobold,
fr. au xIX° s. par les peintres, la kermesse d’origine incertaine ; du même mot le nom
constituant un sujet favori de l’art flamand. du métal cobalt, 1723.
KHAN, sorte de caravansérail 1598 (écrit
cam). Empr. du mot arabo-persan khân. KODAK, vers 1889. Combinaison de
lettres arbitraire, créée par l'inventeur
KHÉDIVE, 1877. Empr. du mot turco- américain G. Eastman, qui, comme il l’a
persan khediw, propr. « roi, souverain ». raconté lui-même, chercha pour son appa-
KODAK 306

reil un mot qui fût bref, facile à prononcer KRACH. Popularisé vers 1882, lors du
et à l'abri de confusions avec d’autres krach de l’Union générale. Empr. de l’all.
termes de l’art photographique. Krach, propr. « craquement » (du verbe
krachen « craquer »), qui fut employé pour
KOHL. Écrit aussi kohol, koheul, 1717 la première fois à Vienne, en 1873, à l’oc-
(écrit alors kool), mais usuel seulement de- casion du grand krach du vendredi 9 mai.
puis la conquête de l'Algérie. Empr. de
l'arabe kohl « collyre d’antimoine » qui sert KYRIELLE, xu° (Wace : écrit kériele).
à noircir les sourcils et les paupières ; éty- Fait sur la litanie qui commence par les
mologiquement même mot qu’alcool. mots kÆyrie eleison (du grec kyrie eleéson
« Seigneur, aie pitié (de nous) », suivie de
KOLA (écrit aussi cola, 1836). Empr. noms de saints. On trouve également de
d’une langue indigène du Soudan. bonne heure miserele au sens de «litanie »,
altération de miséréré d’après kyrielle.
KOLKHOSE, 1948. Empr. du russe.
KYSTE, xvi® (Paré). Empr. du grec
KOULAK, vers 1917. Empr. du russe kystis « vessie ». — Dér. : enkysté, dans un
kulak. sens fig., xX°.
L
LA, nom de la sixième note, v. gamme. LAC, xu° (Chrétien). Empr. du lat.
lacus ; la forme pop. lai a eu peu de vita-
LÀ. En a. fr. en outre lai. Lat. illac; lité.
v. à. It. là, esp. alla. — Comp. : delà, xrre.
LACER. Lat. laqueäre « serrer avec un
. LABARUM, 1556. Empr. du lat. impé-
lacet ». It. lacciare, a. pr. lassar. — Dér.
rial (du 1v® s.), d’origine obscure. et Comp. : lacis, xr1° ; délacer, vers 1080
LABEL, 1906. Empr. de l’angl. label (Roland) ; enlacer, xri1°, enlacement, id. ;
« étiquette », empr. lui-même de l’a. fr. entrelacer, id., entrelacs, id., entrelace-
label, v. lambeau. ment, id.
LABEUR, xu°; souvent fém. jusqu’au LACÉRER, xive (Bersuire) ; lacération,
XVe s., d’après le genre normal des subst. id. Empr. du lat. lacerare, laceratio.
en -eur ; laborieux, vers 1200. Empr. du LACERON, 1393. Nom dialectal de la
lat. labor « effort, fatigue », laboriosus région centrale, du laiteron, cf. aussi le
« pénible » et déjà « actif », avec francisa- normanno-picard lacheron. Elargissement
tion des suffixes -or, -osus sur le modèle de lasson, attesté en a. fr. xiv° (E. Des-
des nombreux mots fr. en -eur, -eux. champs) et aujourd'hui en lorrain; pour
LABIAL, 1605 ; labiée, fin xviie (Tour- les suff. comp. liseron ; lasson, représente
nefort). Dér. sav. du lat. labium « lèvre ». un lat. pop. “*lacteonem, acc. de *lacleo,
LABILE, xive. Empr. du lat. de basse dér. de l’adj. lacteus « laïteux », le laiteron
est en effet une plante lactescente.
ép. labilis (de labi « glisser »).
LACET, v. lacs.
LABORANTINE, 1934. Empr. de l’all.
Laborantin, formé d’après Laboratorium LÂCHE, v. lâcher.
« laboratoire ».
LÂCHER, vers 1080 (Roland). Lat. de
LABORATOIRE, 1612. Dér. sav. du basse ép. laxicare « détendre », dér. de
lat. laborare « travailler ». laxare, id., v. laisser; laxicare est devenu
*Jascare par dissimilation des deux k dans
LABOURER, x° (Fragment de Valen- laksikare. — Dér. : lâche, xrr1°, COMP. a.
ciennes ), au sens de «se donner de la peine, pr. lase, lâcheté, xr1° ; lâcheur, 1858 ; là-
travailler », sens maintenu jusqu’au début chage, 1839 ; relâcher, xu11° ; relâche, 1539
du xvire s., souvent sous la forme labeurer, (une première fois vers 1170); relâche-
d’après labeur. Empr. du lat. laborare « se ment, vers 1170.
donner de la peine, travailler ». À été pris
de bonne heure pour le travail de la terre, LACINIÉ, 1676. Empr. du lat. laciniaius
au détriment du verbe arer (lat. arre), « fait de morceaux » (de lacinia « morceau
usuel jusqu’au xvi° s. It. arare, esp. arar; d’étoffe »).
mais l’a. pr. a une forme pop. de labôräre, LACONIQUE, 1529. Empr. du grec lako-
laurar, encore vivante. Arer survit dans nikos « bref, concis », propr. « de Laconie »,
les parlers de la Franche-Comté, de la les Lacédémoniens ou Laconiens ayant élé
Suisse romande, de la Savoie et du Sud- célèbres pour leur manière de parler brève.
Est. — Dér. : labour, vers 1180 ; labou- — Dér. : laconisme, 1556 (le grec lakonis-
rable, 1368; labourage, vers 1200, a eu mos avait un autre sens).
aussi le sens de travail (en général) jus-
qu’au xvi® s., Cf. : « Par excellence ce mot LACRYMAL, xvie (Paré ; déjà vers 1300
. de labourage a esté donné à la culture des comme subst. sous la forme lacrimel) ;
bleds, encores qu’il soit communiqué à lacrymatoire, 1690. Le premier est un dér.
tout autre travail », O. de Serres ; labou- sav. du lat. /acryma, autre orthographe de
reur, xz1°, souvent « travailleur, ouvrier » lacrima «larme », le deuxième de lacrymari,
au moyen âge, l’on trouve jusqu’au xv®s. pour lacrimari « verser des larmes », à
laboureur de mains, de bras. l'imitation des nombreux mots en -aloire.
LABRE, 1754. Empr. du lat. des natu- LACS. Aujourd’hui seulement littéraire.
ralistes /abrus, tiré arbitrairement du lat. Anciennement Zaz, las, orthographié lacs
labrum « lèvre », parce que le labre a des vers le xve s., d’après lacer. Lat. laqueus.
lèvres épaisses. It. laccio, esp. lazo. — Dér. : lacet, 1315.
LABYRINTHE, 1418 (alors lebarinihe), LACTATION, 1747 ; lacté, xiv° ; lactes-
cent, 1792 ; lactique, 1787. Lacialion est
au sens propre ; sens fig. dès le xvi®s.
Empr. du lat. labyrinthus (du grec labyrin- empr. du lat. de basse ép. laciatio (de laciare
thos, mot égéen). « allaiter »), lacté du lat. lacteus, lactescen.
LACTATION 358

du lat. lactescens, part. prés. de lactescere lique montre que ce groupe de mots vient
« se convertir en lait », lactique est un dér. de la langue d’un peuple prégermanique
sav. du lat. lac, lactis « lait », d’où on tire et prélatin, probabl. aussi préceltique. Le
aussi des mots techn. tels que lactose, etc. fr. lèche « tranche mince », très répandu
dans les patois au sens de « tranche de
LACUNE, 1541. Empr. du lat. lacuna de pain », est peut-être le même mot ; il appa-
même sens, propr. « mare », v. lagune. — raît dès le xrr1° s., cf. aussi a. pr. lesca
Dér. : lacunaire, 1822 ; -neux, 1783. « tranche, morceau », cat. [lesca « tranche
LACUSTRE, terme techn. d'archéologie de pain », it. lisca « arête, chénevotte ».
préhistorique, 1846 (attesté en 1803 en LAID, vers 1080 (Roland). Du francique
parlant de plantes) ; rare auparavant, de
quelque usage au xvi® s., dans un sens *laip, qui correspond à l’anc. haut all. /eid
moins spécial. Empr. du lat. lacustris (de « désagréable, odieux ». L'’a. pr. laid, lag
lacus « lac »). est empr. du fr., lit. et l’anc. esp. laido de
l’a. pr. Le sens esthétique de l’adj. est
LAD, 1854. Empr. de l’angl. lad. attesté en fr. dès le x1° s., mais il ne l’em-
porte sur le sens premier de « désagréable,
LADANUM, v. laudanum. odieux, funeste » qu’au xrv® s. Celui-ci vit
encore dans des dér. dialectaux, comme
LADRE. D'abord lasdre. Lat. eccl. Laza- norm. laidure « outrage », Maïne laidanger
rus, nom propre, d’origine hébraïque, du « outrager ». — Dér. : laideron, xvi® (Ma-
pauvre couvert d’ulcères à la porte du rot) ; laideur, xrr1e (J. de Meung), au sens
mauvais riche, dans la parabole de Jésus, moral; au sens physique depuis 1280) ;
cf. Luc, XVI, 19. A pris par suite soit le enlaidir, x11°, enlaidissement, vers 1470.
sens de « lépreux », cf. l’it. lazzaro, soit
celui de « pauvre, mendiant », cf. l’esp. LAIE « femelle du sanglier «, xtre. Déjà
läzaro ; v. lazaret, lazarone. Ladre ne s’em- leha dans les Capitulaires de Charlemagne.
ploie plus à propos d’affections physiques Du francique *léha, cf. moyen haut all.
que dans la médecine vétérinaire ; le sens liehe.
de « qui a une avarice sordide » ne paraît
pas être antérieur au xvrr® s. — Dér. : LAIE « sentier de forêt », 1324. Du
ladrerie, 1530 (écrit Zaderye) ; au moyen francique “*laida, cf. anc. angl. léd, de
âge les léproseries se disaient maladrerie, même sens. — Dér. : layon, signalé seule-
x11*, altération de maladerie, id., dér. de ment en 1865, mais certainement plus an-
malade, par croisement avec ladre. cien; cf. le layon du roi dans la forêt de
Fontainebleau.
LADY, 1669. Empr. de l’angl. lady.
LAIE « tiroir », v. layette.
LAGUNE, 1579 (lacune, en 1574, est un LAINE. Lat. läna. It. esp. lana. —
latinisme). Empr. de l’it. d’origine véni- Dér. lainage, vers 1300, rare avant le
tienne laguna, lat. lacäna de lacus « lac », XVIrIe s. ; lainer, 1334 ; lainerie, 1803, une
v. lacune ; s’est dit d’abord des lagunes
de Venise. première fois en 1295 ; laineux, vers 1500 ;
lainier, subst., vers 1300 ; adj., 1723, sur-
LAI, LAIE, « laïque ». Survit notamment
tout au fém.
dans /rère lai. L’homonymie de l’adj. laid LAÏQUE, xrr1°, rare avant le xvie. Em-
a dû favoriser le succès de laïque, qui per- pr. du lat. eccl. laïcus, v. lai. — Dér. :
mettait d'éviter des plaisanteries, cf. chez laïciser, 1870, laïcisation, id. ; laïcité, 1871.
Bon. Despériers, XLIV : « La bonne femme
ne sachant que vouloit dire un conseiller LAISSE, v. le suiv.
lai, entendit que ce dut estre un conseiller
laid. » Lat. eccl. laïcus (du grec eccl. laïkos, LAISSER. Lat. laräre « détendre, lâ-
propr. « du peuple {laos) », opposé à klé- cher », d’où est sorti le sens de « laïsser
rikos). aller ». It. lasciare, esp. dejar, a. pr. laissar.
Laisser est concurrencé aujourd'hui dans
LAI, poème du moyen âge, d'abord les parlers de la Wallonie, de la Lorraine
« compositions chantées par des jongleurs et de la Franche-Comté par l’anc. verbe
de la Grande-Bretagne », xire. Empr. d'un laier, v. délai, relayer ; ceux du Sud-Ouest
mot d’une langue celtique correspondant ont un d initial, comme l'espagnol. —
à l’irl. laid « chant, poème » (l’angl. Lay Dér. et Comp. : laisse, au sens de « lien
est empr. du fr. et n’est pas, comme on qui sert à mener un animal », x11° ; la laisse :
serait tenté de le croire, l’intermédiaire du a été ainsi nommée parce que c’est un lien
celtique et du fr.). lâche, qu’on laisse aller ; au sens de « tirade
monorime des chansons de geste », ce
LAÎCHE, nom de plante, xi°. Repré- terme du moyen âge, repris au xix£ s., est
sente un type lisca (attesté déjà dans les sans doute le même mot ; la locution tout
Gloses de Reichenau, fin vie), tandis que d’une laisse « tout d’un trait », propr. «en
le champenois /auche demande une base se laissant aller », montre comment le sens
*losca, l’auv. liuisa un “*lisca; lisca vit s’est développé ; l’idée de suite ininterrom-
aussi dans le piém. lesca, “*lisca dans le pue (de vers) sort facilement du sens « d’un
lombard, piém. génois lisca. Les trois trait », et l’on a un terme de comparaison
types se retrouvent aussi dans les dialectes dans tirade, propr. « action de tirer », d’où
all, : Suisse, lische ; moyen néerl. liesch, par l’intermédiaire de la locution fout d'une
luesch. Cette répartition des formes et le tirade, le sens moderne ; legs, altération,
caractère non germ. de l’alternance voca- introduite au xve s., de l’a. fr. lais, 1250,
359 LAMENTER

par suite d’un faux rapprochement étymo- LAMANTIN, 1640 (manali dès 1533). AI-
logique avec le lat. Zegatum « legs » ; cette tération, probabl. d’après le verbe lamen-
altération l’a rapproché de léguer et séparé ler, à cause des cris de ce cétacé, de l’esp.
de laisser ; délaisser, xr1°, au moyen âge manali, empr. lui-même du galibi manati,
souvent « laisser », surtout dans des textes qui désigne exactement les mamelles appa-
jurid. ; de là l’emploi de ce verbe dans la rentes du lamentin, cf. les noms dus à cette
langue jurid. d'aujourd'hui, délaissement, particularité anatomique port. peixe
1274, sens parallèle au verbe; laissez- mulher, angl. american sea-cow, etc.
passer, 1675 ; laisser-aller, 1786.
LAMBEAU, 1285. Au moyen âge «espèce
LAIT. Lat. pop. lactem, acc. de déclinai- de frange », de là le terme de blason lambel
son masc. ou fém., au lieu du lat. class. « brisure formée par un filet horizontal à
läc, neutre, mais dans les parlers gallo- la partie supérieure de l’écu ». On trouve
romans du Nord-Est et de l'Est, laicel, lat. aussi les formes label, labeau, qui paraissent
pop. *lacticellus. Frère de lait, 1538, rap- être les formes primitives (dès 1170), pro-
pelle l’a. fr. mère de lait « nourrice » au babl. dér. du francique “*/abba, cf. anc.
xir1e s. — Dér. : laite, matière fécondante haut all. lappa « morceau d’étoffe pendant »
du poisson mâle, xive, cf. le lat. lactis ou, d’où all. Lappen « lambeau »; pour la
au plur., lacies, qui vient d’une même forme anc. du mot germ., cf. anc. scandi-
comparaison ; laitance, vers 1300; laité, nave /abba « pendre ».
1393 ; laïitage, 1376; laiterie, 1315; lai-
teron, 1545, très répandu dans les parlers LAMBIN, 1584. Issu par changement de
gallo-romans sous cette forme, pour des suffixe du mot précédent. Le sens moral se
formes parallèles, v. laceron ; laiteux, vers présente facilement à partir de « chiffon ».
1400 ; laitier, vers 1200 ; comme terme de — Dér. : lambiner, 1642.
métallurgie, 1676. LAMBOURDE, 1294. Mot techn., pro-
LAITON, xrr1° (aussi lalon au moyen babl. comp. de l’a. fr. laon « planche »,
âge). Mot qui existe dans les langues rom. du francique lado, de même sens, et de
avec différentes variantes vocaliques bourde « poutre », c’est-à-dire « poutre ser-
a. pr. leton, laion, anc. esp. alaïén, anc. vant à soutenir des planches ». Cette déno-
vénitien laiton, norm. laton, sicilien ofturi, mination est justifiée par le fait que la
it. ottone, lombard lotion. Empr. de l’arabe lambourde est une pièce de bois sur la-
lätän « cuivre », qui est lui-même empr. quelle sont fixées les lames du parquet, ou
d’un dialecte turc, où altan signifiait « or ». qui supporte des solives.
Le bronze et le laiton étant seuls admis LAMBREQUIN, xv® (sous la forme lam-
pour les objets de ménage par le Coran, ce bequins). Issu de lambeau par substitution
nom pénétra facilement dans les langues de suffixe, le suff. diminutif néerl. -quin
occidentales. Que l’objet ait été importé ayant été incorporé à la dérivation du
par plusieurs routes explique les variantes picard.
phonétiques.
LAMBRIS. D'abord lambrus et lambruis
LAITUE. Lat. laciäca, dér. de läc «lait », (en outre au moyen âge lambre, tiré de ce
ainsi nommé parce que la laitue est une mot); devenu lambris vers le xIv® s., cf.
plante lactescente. Le mot lat. s’est ré- lambrisser plus loin. On a proposé le lat.
pandu dans toute l’Europe, cf. all. Lat- pop. *lambräscus, tiré de *lambräsca, lat.
tich, etc. class. labrüsca « vigne sauvage »; il est
LAÏUS, mot d’argot scolaire ; viendrait plus probable que le mot fr. a été tiré du
de ce que le premier sujet de composition verbe lambruschier, xn1°, devenu lambrisser
française donné en 1804, à Polytechnique, au xve s., qui continue le lat. pop.
aurait été le discours de Lalus, père d’Œdi- *lambräscäre, dér. de *lambräscus. Le sens
pe. de « lambris, lambrisser » est dû aux
LAIZE. D'abord laise; laize date du ornements dont on couvrait cette sorte
xvies. Lat. pop. *latia, dér. de l’adj. latus de revêtement, cf. vignette. *Lambrüsca,
« largeur », v. lé. Alèze, d’abord aleize, au sens propre de « vigne sauvage », est
représenté en fr. par lambruche, 1555,
1419 ; alaise, xvi® s., « drap souple de toile
d’abord lambrusce, xv°, forme dialectale
plié en plusieurs doubles dont on garnit le des parlers de l'Ouest qui disent aussi
lit des malades », est le même mot avec a
lambrunche, employé par Ronsard.
de l’article La, par suite d’une coupure
erronée. LAME. Lat. lämina.— Dér. : lamé, 1690.
LAMA « prêtre de Bouddha, au Tibet », LAMELLE, 1407 ; rare avant fin xvirie.
1629. Mot tibétain. Empr. du lat. lamella, v. le préc. L’a. fr.
LAMA « ruminant du Pérou », 1598. alemelle, d’où alumelle, 1548, « lame », en-
Empr., par l'intermédiaire de l’esp. llama, core dans les patois, est une forme pop.
de {lama, du quechua (Pérou). qui continue le lat., avec a de l’article la,
par suite d’une coupure erronée. V. ome-
LAMANEUR, pilote, 1584. Dér. de l’a. lette ; semelle.
fr. laman, 1346, issu par assimilation voca-
lique de lomant (1345-1693), aussi locman LAMENTER (se). Trans. ou intrans.
(depuis 1400, le -c- est probabl. dû à une sans pronom réfl. jusqu’au xvire s. Lat. de
fausse aperception du groupe inusité basse ép. lameniäre, lat. class. lameniäri
« se lamenter ». — Dér. : lamentable, x1v°,
-ism-), qui vient du moyen néerl. looisman
« pilote ». Le suff. a été ajouté par analogie d’après le lat. lamentabilis ; lamentation,
avec les nombreux noms de métier en -eur. 1241, d’après le lat. lamentatio.
LAMIER 360

LAMIER, 1791, ortie blanche. Dér. sav. LANDGRAVE, xrr11e (Rutebeuf : lande-
du lat. lamium, de même sens. grave). Empr. du moyen haut all. landgrave,
LAMINER, 1596. Dér. sav. du lat. la- littéral. « comte du pays ». — Dér. : land-
mina, V. lame. — Dér. : laminage, 1731 ; graviat, 1575.
lamineur, 1823 ; laminoir, 1643. LANDIER, xr1e. Issu, par agglutination
LAMPADAIRE, support de lampe, 1752. de l’article, d’andier, usuel au moyen âge
Empr. du lat. médiéval lampadarium. et encore dans de nombreux patois. D’un
gaulois *andero- « jeune taureau », cf. irl.
LAMPANT, -E, 1723. Empr. du prov. ainder « jeune femme », gallois anner « gé-
lampan, part. prés. du verbe lampa « bril- nisse ». Les landiers ont souvent à une de
ler », notamment en parlant de l'éclair, du leurs extrémités une tête d'animal ; et l’on
grec lampein « briller ». L’empr. de /am- a trouvé à Bibracte des landiers à quatre
pant, qui s’est d’abord dit seulement en pieds, ornés de têtes de bélier.
parlant de l'huile, est dû à l'importance
du commerce de l’huile d’olive en Provence. LANGE. Lat. laneus, adj., « de laine ».
D'abord adj. au moyen âge, puis subst.
LAMPAS, 1723. Étoffe d’origine orien- pour désigner tout vêtement de laine. S’est
tale ; étym. inconnue. spécialisé au sens moderne depuis le xvres.
LAMPE. Lat. lampada, accus. de forme LANGOUSTE (1393). Empr. de l’a. pr.
grecque, attesté comme nom fém. à basse langosta, lat. pop. *lacusta, forme altérée,
ép., du lat. class. lampas, -adis (du grec probabl. par dissimilation vocalique, plutôt
lampas, -ados). — Dér. : lampiste, 1835. que par croisement avec lacertus « lézard »,
LAMPER, 1655. Forme nasalisée de du lat. locusta « sauterelle », et, par compa-
laper. — Dér. : lampée, 1678. raison « langouste » ; la forme /angosta ré-
sulte d’une nasalisation secondaire. Lan-
LAMPION, vers 1550. Empr. de l’it. /am- gouste a été emprunté dès le xr1°s., cf. aussi
pione, augment. de lampa « lampe » (forme langoule, xir1° s. (G. de Lorris), au sens de
empr. du fr., la forme propr. it. étant « sauterelle », et se trouve encore chez Cor-
lampada) ; l'emprunt de lampion est dû neille. En ce sens l’a. fr. a eu une forme
au fait que les fêtes de nuit étaient régulière laou(s )te ; le mot est encore usuel
alors organisées par des artistes italiens,
v. girande, -dole.
aux deux sens dans les parlers méridionaux
(le poit. langoute ne désigne que la « lan-
LAMPROIE. Lat. de basse ép. /ampréda gouste »), cf. it. aliusta « langouste », esp.
(fin vire dans des gloses), dont les rapports lagosta, langosta aux deux sens, roumain
avec lampeira « murène » (la lamproiïe et läcustä « sauterelle ». Les naturalistes ont
la murène se ressemblent) et naupreda, repris locuste au latin au x1x® s. (relevé
nauprida, attestés vers le ves., ne sont pas en 1804); déjà repris du xr1° au xvi° s.,
éclaircis. — Dér. : lamprillon, xvi° ; au surtout au sens de « sauterelle », dans des
XIVe s. lampreon. textes bibliques.
LANCE. Lat. lancea, qui désignait d’a- LANGUE. Lat. lingua. It. lingua, esp.
bord d’après Varron une arme de jet d’ori- lengua. — Dér. : langage, xtr° : languette,
gine hispanique, peut-être gauloise. It. 1314 ; langueyer, 1378 (attesté indirecte-
lancia, esp. lanza. — Dér. : lancette, xrr°, ment par le dér. langueyeur), au sens de
« petite lance », terme de chirurgie dès le « visiter la langue d’un pore pour voir s’il
XIII Ss. ; lancier, 1580 (Montaigne), le lat. est ladre », a signifié aussi « remuer la
avait formé aussi le dér. lancearius, mais langue, faire parler », au moyen âge, et
lancier est une formation fr. sur lance ;: encore chez Saint-Simon. — Dér. : sub-
lanceron, 1412 ; lançon, xvi®, ainsi dits à lingual, xvi® (Paré), dér. sav. d’après le
cause de la forme effilée de ces poissons. lat. lingua.
LANCER. Lat. de basse ép. lanceare LANGUEUR. Lat. languôrem, acc. de
«manier la lance ». It. lanciare, esp. lanzar. languor. It. languore, esp. langor. — Dér. :
— Dér. et Comp. : lançage, 1693 ; lanceur, langoureux, xr°.
1865, comme terme de la langue de la LANGUIDE, 1552. Empr.
Bourse, dans lanceur d'affaires : élancer du lat. lan-
guidus.
(s’), xvi® (Amyot) (une première fois au
X11° s.), d’où élan, vers 1410, élancement, LANGUIR. Lat. pop. “*languire, lat.
Xvi°; relancer, 1213, d’où relance, xix®, class. languëre. It. languire. — Comp. :
comme terme du jeu de poker; lance- alanguir, 1539, alanguissement, XVI®, rare
mines, créé pendant la guerre de 1914-18 avant la fin du xvrrres.
sur le modèle de l’all. Minenwerfer. LANIÈRE, xr1e (sous la forme lasnière).
LANCINANT, 1546 (Rab.). Terme médi- Dér. de l’a. fr. lasne, d’où aussi lasneie ;
cal, empr. du lat. lancinans, part. prés. de lasne est probabl. une métathèse de l’a. fr.
lancinare « déchirer ». *nasle « lacet » (qu’on restitue d’après le
wallon nale « ruban », d’où nalière), sous
LANDAU, 1820. Tir. de Landau, nom l'influence de laz « lacet ». *Nasle repré-
d’une ville du Palatinat, où ce genre de sente (comme le wallon nale) le francique
voiture a d’abord été fabriqué. *nastila, cf. all. Nestel « lacet ».
LANDE. Gaulois *landa, cf. breton lann LANIFÈRE, 1747. Formé avec le lat.
« lande ». Dans les parlers de l'Ouest dé- lana « laine », sur le modèle de mots tels
signe l’ajonc, la bruyère et en général les qu’argenltifère, faits eux-mêmes sur des mo-
plantes qui poussent dans les landes ; v. dèles lat. tels que frugifer, littéral. « qui
brande. porte fruit », pomifer, etc.
361 LARD

LANIGÈRE, 1823 ; une première fois au au style concis des inscriptions latines, or-
xves. Empr. du lat. laniger, littéralement dinairement gravées sur la pierre ; lapidaire
‘ qui porte de la laine » (de gerere « por- a été employé antér. en d’autres sens.
er »).
LAPIDER, vers 980; lapidation, x11°, rare
LANSQUENET, vers 1480. Empr. de avant le xvrie s. Empr. du lat. lapidare,
l’all. Landsknecht, littéral. « serviteur du lapidatio (de Lapis).
pays », de là « soldat à pied au service de LAPIN, xve s. S’est substitué à l’a. fr.
l’empereur ». Ménage rapproche Landsmann connin, d’abord connil, lat. cuniculus, d’où
« compatriote », nom que se donnaient les aussi esp. conejo, a. pr. conilh (d’où lit.
Suisses et le sens de pays dans le langage coniglio). Connin, connil, qui ne subsistent
des « gens de basse condition ». Les lans- que dans certains patois, p. ex. à Mal-
quenets étaient des mercenaires d’origine medy, en Suisse romande et dans les Alpes-
allemande, surtout rhénane, cf. Commynes, Maritimes, ont disparu au xvri® s. à cause
VIII, 31, qui indique qu'ils « hayent natu- des jeux de mots obscènes qu’ils provo-
rellement les Suysses, et les Suysses eulx. »
quaient dès le xr1° s. Lapin remonte avec
LANTERNE. Lat. lanterna. It. esp. lan- lapereau (vers 1330), à un radical *lappa
terna, esp. linterna. La locution oublier « pierre plate », avec suffixes différents. Il
d'éclairer sa lanterne vient de la fable de s’agit sans doute d’un mot d’origine pré-
Florian Le Singe qui montre la lanterne romane, dont le sens est devenu « terrier »,
magique. — Dér. : lanterner, 1588, trans. les lapins établissant leur repaire souvent
et intrans., fait probabl. d’après les locu- dans la terre couverte de pierres. Lapin
tions prendre des vessies pour des laniternes et lapereau viennent peut-être de l’ibéro-
(dès le xr11° on trouve dans un fabliau por roman (comp. port. lapim, läparo « jeune
lanterne vendre vesie), conter des laniternes lapin ») ; ils sont attestés d’abord à l’extré-
(d’où lanternes « baliverne », chez Mme de me Nord du gallo-roman, où ils doivent
Sévigné). Lanterner (quelqu'un) s’est em- être venus par voie de mer, grâce au
ployé au xiv® s. comme terme injurieux, commerce qu'on faisait des peaux de
équivalent de dire à quelqu'un d’aller à la lapins. — Dér. : lapiner, xvirie ; lapinière,
lanterne sa mère ; en ce sens, c’est un autre xIxXe (Chateaubriand).
mot, dérivé de lanterne dans la locution LAPIS-LAZULI, v. azur.
envoyer à la lanterne sa mère, 1397, où lan-
terne est un euphémisme pour landie, cf. LAPS, dans la locution laps de temps,
le fournier les avoit envoyez à la landie leur 1266 (laps du dit temps). Empr. du lat.
mère, 1395, landie continue le lat. landica lapsus « chute, cours (des eaux, des as-
« clitoris ». tres) », et fixé dans la locution laps de
temps.
LANTUR(E)LU, 1637. Mot de fantaisie,
refrain d’une chanson en vogue sous le LAPSUS, 1843. Empr. du lat. lapsus au
ministère du cardinal de Richelieu. sens de faute ; on dit aussi lapsus linguae,
lapsus calami « faute en parlant, en écri-
LANUGINEUX, 1553. Empr. du lat. vant » (celui-ci une 1re fois en 1630 ; calami
lanuginosus, dér. de lanugo «sorte de duvet est le génitif de calamus « roseau pour
des feuilles, des fruits ». écrire »).
LAPALISSADE, 1872 (Goncourt). Dér. LAQUAIS, vers 1450. En outre halagues,
de Lapalisse (ou Lapalice) (Jacques de - alacays, 1477. D'abord « sorte de soldat,
Chabannes, seigneur de), nom d’un capi- arbalétrier, valet d’armée », jusqu’au
taine du début du xv® s. sur lequel on fit xvi® s. Origine inconnue.
à une époque mal déterminée une chanson
d’une forme naïve qui finissait ainsi : « Un LAQUE, xv°e. Empr. de l’a. pr. laca
quart d’heure avant sa mort il était encore (xurre s.), empr. lui-même de l’arabe lakk,
en vie », d’où l'expression vérité de La qui vient du persan /ak. L’importation de
Palisse « vérité d’une évidence trop simple ». ce produit oriental par l'intermédiaire de
Venise et de Gênes est attestée dès le
LAPAROTOMIE, 1800. Comp. du grec x112 8. — Dér. : laquer, 1870.
lapara « flanc » et de -tomie, sur le modèle
de mots tels que laryngotomie. LARBIN, 1837. Terme d’argot, d’origine
obscure, qui signifiait d'abord «mendiant»,
LAPER, xr1e. Verbe onomatopéique, v. sens signalé en 1828.
lamper ; on rapproche des mots germ., cf.
anc. angl. lapian, angl. {o lap, de même LARCIN, xu°. En a. fr. aussi larrecin.
sens ; mais ce peuvent être des formations Empr. du lat. latrocinium.
indépendantes.
LARD. Lat. lardum, d’abord laridum.
LAPIDAIRE « ouvrier qui taille les It. esp. lardo. — Dér. et Comp. : larder,
pierres précieuses », xi1°. Émpr. du lat. xr1e (Chrétien), signifie ordin. au moyen
lapidarius (de lapis, lapidis « pierre »). Au âge « frire comme lard »; lardoire, 1328;
moyen âge désigne aussi un traité sur les lardon, xn1e ; délarder, 1676; entrelarder,
propriétés des pierres précieuses, xI1° ; en xi1e (Chrétien) ; papelard, xrr1° s. (« Tel fait
ce sens il est empr. du lat. médiéval lapi- devant le papelard qui par derrière pape
darius. lart », G. de Coincy), contient peut-être
LAPIDAIRE, adj., dans la locution style l’anc. verbe paper « manger goulûment »,
lapidaire, 1704. Empr. du lat. lapidarius ; lat. pappare, dit ainsi parce que le faux
cette locution a été faite ainsi par allusion dévot mange le lard en cachette comme le
LARD 362

montre le texte cité, ou bien est un dér. et qui s’est employé aussi sans hé, aux
d’un anc. verbe *papeler « bavarder », deux genres, comme interjection, jusqu’au
attesté encore dans les patois sous les xviies. (cf. encore las / dans Tartuffe, V, 1).
formes élargies papeloier, papelauder et
appuyé par l’anc. fr. papeter « babiller ». LASCAR, 1834. au sens pop. d’ « homme
Ces verbes sont dér. du même verbe lat. décidé ». Le milieu où s’est développé cet
pappare, les mouvements de la bouche, dus emploi n’est pas exactement déterminé et
à la mastication et ceux faits en vue de son origine peu claire. Le mot se trouve
parler étant souvent confondus sous les déjà en 1610, dans le récit de voyages de
mêmes termes. L’explication avancée dans Pyrard de Laval au sens de « matelot
le passage de G. de Coincy serait alors un indien »; il est tiré du port. lascar, qui
bel exemple d’un jeu de mots. vient, à son tour, du persan laskhar, « sol-
dat », de lachkar « armée ». Cf. arabe ‘askari
LARE, 1488. Empr. du lat. lares. « soldat » (d’où le récent askari), askar
« armée ».
LARGE. Primitivement fém. ; a éliminé
avant les premiers textes le masc. */arc, LASCIF, 1488 ; lasciveté, xv°, cède le
lat. largus « abondant, libéral ». A sup- pas à lascivité, dp. 1755. Empr. des mots
planté l’anc. adj. lé, encore chez Marot, lat. lascivus, lascivilas.
lat. Zätus « large » (par opposition à long). LASSER. Lat. lassäre. — Dér. : dé-
Lé ne survit plus que comme subst. et dans lasser, xIv°, rare avant le xvie, délasse-
des emplois restreints. — Dér. : largesse, ment, 1475.
xIIe, a signifié aussi « largeur » jusqu’au
XvI® s.; largeur, xrrie ; élargir, x11°, sens LASSITUDE, xive. Empr. du lat. lassi-
jurid. dès 1355; élargissement, 1314, tudo pour remplacer l’ancien lassesse com-
sens parallèle au verbe ; rélargir, vers 1300 me nom d'état de las, lasser.
(Joinville). LASSO, 1829. Empr. de l’esp. de l’Ar-
LARGUER, 1609. Empr. du prov. larg, gentine lazo, v. lacs, où il a pris le sens
dér. de l’adj. larc, larga « large ». La langue partic. de « longue lanière garnie de plomb
de la marine emploie aussi l’adj. largue, à son extrémité, servant à enlacer bêtes ou
1560, qui vient également du prov. et le hommes ».
lar que ou la largue au sens de « haute mer ». LASTING, sorte d’étoffe, 1830. Empr.
LARIGOT, dans la locution à tire larigot, de l’angl. lasting, propr. adj. signifiant
1534 (Rab.). Désignait aussi au xXvI® s. « durable » (du verbe to last « durer »).
une sorte de flûte. Larigot a été tiré d’un LATANIER, 1645, d’origine inconnue.
anc. refrain larigot va larigot, Mari, tu
n'aimes mie, 1403 (Christine de Pisan) et LATENT, xive (Oresme). Empr. du lat.
dit arbitrairement d’une sorte de flûte, latens, part. prés. de laiere « être caché ».
d'où est sortie l’expression à tire larigot,
c’est-à-dire en « aspirant le contenu d'un LATÉRAL, 1315, rare avant le xvire s.
verre », Cf. flûler dans le même sens. Empr. du lat. laïeralis (de latus, lateris
« Côté »). — Dér. : bilatéral, 1823; tri-
LARME. D'abord lerme. Lat. lacrima. latéral, 1613, d’après le lat. frilaterus;
It. esp. lagrima. — Dér. : larmier, 1321 ; unilatéral, 1803.
larmière, xv®, terme de vénerie ; larmoyer, LATEX, 1870. Terme de botanique,
x11e, larmoiement, 1358, larmoyant, xvi®
empr. du lat. latex, qui désigne toute espèce
(Marot), larmoyeur, vers 1700. de liquide.
LARRON. Lat. latrônem, acc. de lairo. LATICLAVE, 1595. Empr. du lat. lati-
L’a. fr. possédait en outre une forme de clava (lunica) et fait masc. d’après latus
cas sujet lerre, cf. de même a. pr. laire, clavus, de même sens, littéral. « large
lairon. It. ladro, ladrone, esp. ladrôn. — bande ».
Dér. : larronneau, xv® (A. Chartier) ; lar-
ronner, 1534 (Rab.), rare avant le xixes. LATITUDE, 1314, au sens de « largeur »,
d’où « extension, facilité d'agir », depuis
LARVE, 1495, au sens antique ; 1762 le xvi® s. Empr. du lat. latitudo « largeur ».
(Geoffroy), au sens que lui a donné l’his- — Dér. : latitudinaire, 1800, propr. terme
toire naturelle d’après le sens de « masque » de théologie, désignant des personnes qui
du mot lat., la chenille étant comme le se donnent des libertés dans les croyances
masque de l’insecte ailé. Empr. du lat. et les pratiques.
larva « fantôme, masque ». — Dér. : lar-
vaire, 1859 ; larvé, terme médical, 1812, LATITUDE, terme de géographie, xrv®
propr. « masqué ». (Oresme), d’où, au xvi® s., son emploi dans
la langue de la cosmographie. Empr. du
LARYNGOTOMIE, 1620. Empr. du lat. lat. latitudo « largeur ».
laryngoïomia (d’un mot grec, dont le
deuxième terme est de la famille de femnein LATOMIE, vers 1500. Empr. du lat.
« couper », {omos « coupure »). latomia (mot pris au grec).
LARYNX, 1532 (Rab. : laringue). Empr. LATRIE xive. Terme théologique, em-
du grec larynx, laryngos. — Dér. : laryngé, pr. du lat. eccl. latria (du grec laireia).
1743 ; laryngien, 1753; laryngite, 1806. LATRINES, 1437. Empr. du lat. lairina ;
LAS, LASSE. Lat. lassus, lassa. — le sing. est rare, cf. lieux, cabinets ; il y a
Comp. : hélas, xri°, de hé et de las, qui souvent plusieurs trous, sièges, etc., dans
signifie souvent « malheureux » en a. fr. les lieux d’aisance.
363 LE, LA, LES

LATTE, xr1°. Correspond à l’all. slai LAVE, 1651. Empr. de l’it. lava, empr.
« gaule », gallois Zldth, id., anc. haut all. lui-même du napol. lave, qui représente le
lata, anglo-saxon læppa, et vit dans toutes lat. labes « éboulement ».
les langues romanes, excepté le roumain.
Hérité du gaulois, le mot roman n'aurait LAVER. Lat. lavare. — Dér. et Comp. :
guère pu perdre son s- initiale dans toute lavage, 1432 ; lavandière, xr1°, « blanchis-
la Romania. On est donc amené à supposer seuse », désigne aussi, depuis le xvie s., la
un très ancien emprunt du germanique dû bergeronnette, ainsi nommée à cause des
peut-être à l'importance que les lattes ont mouvements de sa queue, comparés à ceux
eue dans la construction des maisons de des blanchisseuses battant le linge; la-
bois des colons germaniques (v. faîte). — vasse, xv® ; lavement, x11°, au sens d’ « ac-
Dér. et Comp. : latter, 1288 ; lattis, vers tion de laver », le sens de « clystère » paraît
1500 ; chanlatte, x111° (Rutebeuf), comp. dater de Paré; laverie, 1728, au sens mo-
de chant « côté, bord »; relatter, 1329. derne, au xvi®s. «lavage » ; lavette, 1636 ;
laveur, xiri°, d’après le fém. laveresse,
LAUDANUM, 1620. Altération inexpli- peut remonter au lat. de basse ép. lava-
quée (déjà chez Paracelse, au xvi® s.) de or ; lavis, 1676 (Félibien); lavoir, x11°;
ladanum, vers 1300, terme de pharmaco- en a. fr. signifie surtout « bassin », peut
pée, empr. du lat. ladanum « résine du remonter au lat. de basse ép. lavätôrium,
ciste » (du grec ladanon) ; le laudanum, qui cf. it. lavaloio, esp. lavadero ; lavure, x1°
est aujourd’hui un médicament liquide à (Alexis), peut remonter au lat. pop. *lava-
base d’opium, désignait autrefois de l’o- lüra ; délaver, xive (E. Deschamps), d’abord
pium ramolli dans l’eau et passé par expres- seulement au part. passé ; relaver, x11°.
sion.
LAXATIF, xu1e. Empr. du lat. médical
LAUDATIF, 1788. Empr. du lat. lauda- laxativus, dér. de laxare « (re)lâcher ».
tivus (de laudare « louer »).
LAYETTE, 1378, au sens de « tiroir »,
LAUDES, terme de liturgie, vers 1200.
au sens de « contenu d’un tiroir », spécial.
Empr. du lat. eccl. laudes (plur. de aus, en parlant du trousseau d’un enfant nou-
laudis « louange »), dit de la partie de veau-né, n’est pas antérieur au XVII® S.
l'office qui suit matines, parce qu'on y Dér. de laie, 1357, « tiroir, boîte, coffre »,
chante des psaumes qui célèbrent Dieu. attesté d’abord dans des textes picards,
LAURÉ, 1823, une première fois en empr. du moyen néerl. laeye, cf. all. Lade,
1574. Dér. sav. du lat. laurus « laurier ». de même sens. Layetlte encore « tiroir »
LAURÉAT, 1745 (adj. dès 1530). Empr. dans beaucoup de régions. — Dér.
du lat. laureatus « couronné de laurier »; layetier, « qui fabrique ou vend des coffres,
le laurier, plante consacrée à Apollon, ser- etc. », 1582, d’où le composé layetier-
vait à faire des couronnes pour les vain- emballeur, 1867.
queurs des jeux et des concours poétiques, LAZARET, 1567. Empr. de l’it. lazza-
notamment à Delphes, de là l’emploi du retlo, empr. lui-même du vénitien lazareio,
mot en fr. pour désigner des vainqueurs altération, d’après lazaro « ladre », de naza-
dans des concours poétiques, etc. relo ; ce mot avait été tiré du nom de
LAURIER, xr1e. Dér. de l’a. fr. lor, dis- l’église Santa Maria di Nazaret, près de
paru de très bonne heure, lat. laurus. laquelle fut établi au xv® s. un hôpital de
lépreux ; l’altération s'explique d’autant
LAVABO, 1804, au sens de « meuble de mieux que dans le voisinage de cette église
toilette ». Ce sens a été tiré de lavabo il y avait un hôpital di San Lazaro.
« linge avec lequel le prêtre s’essuie les
mains après l’offertoire », 1560, tiré lui- LAZARONE, 1786 (en outre lazzaron en
même de la formule lat. lavabo inier inno- 1781, cf. déjà lazares en 1665, lazarelli en
centes manus meas « je laverai mes mains 1739, de Brosses). Empr. du napolitain
au milieu des innocents », Psaume XXVI, lazarone « mendiant », dér. de lazaro «ladre,
6, que prononce le prêtre quand il lave ses lépreux », v. ladre.
mains après l’offertoire ; lavabo désigne
aussi la partie de la messe qui suit l’offer- LAZULI, v. azur.
toire (depuis 1680). C’est après avoir dési- LAZZI, fin xvrre (dans le Théâire lialien
gné l'endroit (niche, etc.) où le prêtre dépo- de Gherardi). Empr. de l'it. lazzi, né de
sait linge et vase que lavabo a pris le sens l’abréviation l’azzi pour l’azzioni (d'abord
de « meuble de toilette » ; terme de sacristie qui si fanno le azzioni) employée dans les
qui a pénétré dans la langue courante. indications sur la mise en scène des jeux
LAVALLIÈRE, 1877. Désigne une sorte bouffons, d’où s’est développé rapidement
de nœud de cravate (d’abord de fem- en fr. le sens de « saillie bouffonne ».
me) ; tiré arbitrairement de (Mlle de) La LE, LA, LES, IL, articles. Continuent les
Vallière, nom d’une des maîtresses de formes du lat. illum, illam, illos, illas, for-
Louis XIV. Se dit aussi d’un maroquin mes d’acc. de ille, etc., propr. adj. dé-
couleur de feuille morte, 1874, peut-être monstr., avec chute de la voyelle initiale,
en souvenir du duc de La Vallière, célèbre à cause de l'emploi proclitique de l’article.
collectionneur du xvII° Ss. — Comp. : au, aux ; au, issu d’a le, d’où
LAVANDE, 1370. Empr. de l’it. lavanda, al, au, a absorbé une ancienne forme ou,
propr. « qui sert à laver » (de lavare « la- encore employée par Villon, issue d’en le,
ver »); la lavande était employée pour d’où el, eu, ou, p. ex. dans jeier au feu;
parfumer l’eau de toilette ; pour cet em- comme devant voyelle on employait sim-
prunt, v. parfum. plement en, on a aujourd'hui au Portugal,
LE, LA, LES 364

en Angleterre, au printemps, en élé. Aux a fait alors pour ce sens d’après le lat. legen-
éliminé une ancienne forme es des deux dus « qui doit être lu ». — Dér. : légendaire,
genres, issue d’en les, qui ne survit que 1582 (alors « compilateur de légendes »).
dans quelques formules, par exemple dans
docteur ès-leïtres, etc., mais est encore
LÉGER. Lat. pop. *leviarius, dér. du
usuelle dans les parlers de l’Est et du Sud- lat. class. levis. À. pr. leugier. — Dér. :
Est ; des, contraction de de les.
légèreté, vers 1200.

LE, LA, LES, pron. pers. Représentent LEGGINGS, 1860 (écrit aussi leggins).
les mêmes formes du lat. que l’article. Empr. de l’angl. leggings « molletières,
jambières » (dér. de leg « jambe »).
LÉ, v. large.
LÉGIFÉRER, 1796. Dér. sav. du lat.
LEADER, 1856, dans un ouvrage trai- legifer « qui établit des lois », v. législateur.
tant de l’Angleterre. Empr. de l’angl. lea-
der, propr. « celui qui conduit » (de {o lead LÉGION, xn1°. Empr. du lat. legio, terme
« conduire »); désigne encore surtout le militaire ; a été pris dans un sens plus
leader des partis politiques d'Angleterre. étendu dans le lat. eccel. Emplois nouveaux
Désigne aussi un article de fond dans un en fr. — Dér. : légionnaire, 1495, une pre-
journal (déjà relevé en 1862, à propos d’un mière fois vers 1270.
journal français).
LÉGISLATEUR, xive (Oresme) ; légis-
LEBEL. Tiré de Lebel, nom de l'officier lation, id.; rare avant le xvirie s. Empr.
président de la commission d’expériences, du lat. legislator, legistatio ; legislator est
qui fit adopter ce fusil, en 1886. le nom d'agent de la locution legem ferre
« proposer une loi » — Dér. : législatif,
LÉCHER, xr°. Probabl. du francique 1718 ; une première fois xrve s. chez Ores-
*lekkôn, cf. all. lecken, cf. it. leccare, a. pr. me ; législature, 1741, d’après l’angl. legis-
lecar ; cf. aussi lecator « gourmand », dans lature.
les gloses d’Isidore de Séville. Le fr. fam.
a en outre une forme licher, relevée dès le LÉGISTE, xu1° (sous la forme legisire).
x11e s., d’où licheur, cf. lichere « entremet- Empr. du lat. médiéval legista.
teur », id. ; lichette, 1841. Cette variante
est probabl. due à l'influence de lisser. LÉGITIME, xin°. Empr. du lat. legiti-
— Comp. : à lèche-doigt, xvi® (sous la mus.— Dér. : légitimer, vers 1280; légitima-
forme lichedoigt) ; lèche-frite, 1195, alté- tion, xiv® ; légitimiste, vers 1830, pour un
ration de Zechefroie, XIrI° S., Comp. des sens politique partic.; légitimité, 1553.
impér. lèche et froie (de froier « frotter », LEGS, v. laisser.
v. frayer), c’est-à-dire « lèche, frotte »
(ce qui dégoutte de la broche); pour- LÉGUER, 1577. Empr. du lat. legare.
lécher (se), xv° (Diderot). LÉGUME, 1530 (déjà lesgum au xiv®5.).
LEÇON. Lat. lectionem, acc. de lectio Empr. du lat. legumen. A éliminé une
« action de lire, lecture ». forme pop. leüm. Cf. lion en Suisse romande
et en Savoie. — Dér. : légumier, 1765;
LECTEUR, 1307; lectrice, xvri° ; lec- légumineux, 1611, d’après le lat. legumen,
ture, xive. Empr. des mots lat. lector, leguminis.
lecitrix (créé à basse ép.), lectura (médiéval).
LEITMOTIV, 1898. Empr. de l'all.
LÉGAL, xive (Oresme). Empr. du lat. leilmotiv, comp. de leiten « diriger » et
legalis « relatif, conforme à la loi » (de la motiv .« motif », créé pour désigner les mo-
famille de lex, legis « loi ») ; légal a d’abord tifs qui reviennent souvent dans les parti-
eu surtout le sens de « loyal », encore at- tions de Richard Wagner.
testé en 1713 ; la langue a utilisé les deux
formes loyal et légal pour des sens diffé- LEMME, 1613. Empr. du lat. lemma
rents, surtout à partir du xviie s. — Dér. : « majeure d’un syllogisme » (du grec lém-
légalité, 1370 (Oresme), au sens de « loyau- ma) ; d’où le sens spécial de lemme dans la
té » (encore usité au xvie) ; le sens jurid. langue des mathématiques.
est attesté dans le lat. médiéval Legalilas;
légaliser, 1681 ; légalisation, 1690. LÉMURIEN, 1804. Dér. sav. de lémures
(attesté depuis 1488), terme d’antiquité
LÉGAT, xu°; légation, id. Empr. du romaine, empr. du lat. lemures « âmes des
lat. legatus, legatio (de legare « envoyer en morts » ; les lémuriens ont été ainsi nommés
ambassade ») ; ont souvent le sens général parce que ce sont des animaux nocturnes.
d’ « envoyé », « mission »; mais légat dé- LENDIT, foire qui se tenait autrefois,
signe surtout un cardinal délégué par le
en juin, près de Paris, entre Saint-Denis
pape, cf. aussi légat a laïere, depuis le
et La Chapelle, xrr1e. Issu de l’endit, xre,
xvi®s. (a laïere sont des mots lat. signifiant par agglutination de l’article. Endit est
« du côté ») ; légation a reçu en plus un sens
partic. dans la langue de la diplomatie empr. du lat. médiéval indicium « ce qui
est fixé » (de indicere « déclarer, fixer »),
(relevé depuis 1798).
ci. déjà indiciae feriae « fêtes fixées » au
LÉGATAIRE, 1368. Empr. du lat. jurid. vire s. chez Isidore de Séville.
legatarius, dér. de legare « léguer ».
LENDORE « personne nonchalante »,
LÉGENDE, xr1°. Empr. du lat. médiéval 1534 (Rab.). Des mots de sens analogue
legenda, propr. « ce qui doit être lu ». A ayant un radical land- apparaissent aussi
reçu au xvi® s. le sens d’ « inscription en Italie et dès le xvre s. Il y a des formes
explicative », ou c'est un mot nouveau, avec -r- à côté de formes sans -r- {landin-
365 LEST

landrin). L'origine est probabl. à chercher LÉROT, v. loir.


dans un groupe de mots allemands, comme
landel « femme méprisable », qui auront LESBIEN, xrxe s. Dér. de Lesbos par
été répandus dans les autres langues par allusion aux mœurs qu’on a attribuées à
l’argot international des voleurs. Landore la poétesse Sapho, originaire de cette île,
doit probablement l'élément -ore à l’in- v. saphique.
fluence du verbe endormir. LÈSE. Ne s'emploie que devant un
LÉNIFIER, x1ve, rare avant le XvI1°8. ; subst. fém. avec lequel il forme locution,
lénitif, 1314. Empr. du lat. médical de 1362 (crime de lèse majesté; cf. déjà en
basse ép. lenificare et du lat. médiéval 1344, meffait de lèze majesté). Locution
lenitivus (de lenis « doux »). calquée sur le lat. jurid. crimen laesae ma-
jestatis « crime de majesté lésée » (où laesae
LENT. Lat. lentus « souple, lent ». — est le génitif du part. fém. du verbe laedere
Dér. : lenteur, xive (Bersuire); ralentir, « léser ») et a servi de modèle depuis le
1564, par l'intermédiaire d'alentir, xni°, xvi1e s. pour faire des locutions analogues.
ere usité au xvri® s., ralentissement,
4. LÉSER, 1538. Dér. de laesus, part.
passé, de laedere « léser » pour servir de
LENTE. Lat. pop. *lenditem, au lieu du subst. à lésion.
lat. class. lendem, acc. de lens, qui vit
pourtant encore dans le wallon lin et le LÉSINE, 1618, dans le titre La fameuse
lorrain /a. Autre forme de l’acc. dans l’it. compagnie de la lésine, traduction de l’it.
lendine, l'esp. liendre. Della famosissima compagnia della lesina.
Dans cet ouvrage, publié vers la fin du
LENTICULAIRE, 1314 ; lenticulé, xvir1° xvie s. et qui eut un grand succès, l’auteur
(Buffon). Empr. du lat. lenticularis, lenti- représente des avares qui dialoguent en-
culatus. semble et il imagine, pour se moquer des
avares qui raccommodent leurs chaussures
LENTILLE. Lat. pop. “*lenticula, lat. eux-mêmes, qu'ils ont formé une compa-
class. lenticula, dim. de lens, lentis. La gnie sous le nom de compagnia della lesina
forme nentille, parisienne au xvire s., est et qu'ils ont pris comme emblème une
très répandue aujourd’hui dans les parlers alêne, en it. lesina ; v. alêne ; le succès de
pop. It. lente, lenticchia, esp. lenteja. Len- cette satire a été tel que lesina a pris rapi-
tille, terme d'optique, depuis 1686. dement le sens d’ « épargne sordide » et
LENTISQUE, xve. Empr. de l’a. pr. len- que le mot a pénétré en France très rapi-
tiscle, qui représente un dim. lat. *lentis- dement ; Régnier, dans la satire X, emploie
culus, d’où aussi it. lentischio. À remplacé déjà le mot en ce sens, mais sous la forme
lentise, xini°, empr. de l’a. pr. lentisc, du italienne. — Dér. : lésiner, 1618, dans le
lat. lentiscus. texte cité plus haut; lit. ne dit que lesi-
nanle « qui fait partie de la compagnie de
LÉONIN, « propre au lion », xui°. Empr. la lésine », d’où le fr. lésinant, 1604, dans
du lat. leoninus. L'expression société léo- un ouvrage intitulé La Conire-Lésine ; lési-
nine, d’où contrat léonin, etc., est calquée nerie, 1604, dans ce même ouvrage, sur le
sur le lat. jurid. societas leonina, fait lui- modèle de l’it. lesineria.
même par allusion à la fable du lion en
société avec la génisse, la chèvre et la LÉSION, xr1°, au sens de « dommage,
brebis. tort », encore chez Voltaire ; le sens médical
déjà en 1314 (H. de Mondeville). Empr.
LÉONIN, terme de prosodie, xr1° (Chré- du lat. laesio, qui a les deux sens du mot
tien, mais lioine dès 1160, dans l’ Alexandre français (de laedere « blesser, léser »).
poitevin). Passe pour être dér. de Léon (en
lat. médiéval Leonius), nom d’un chanoine LESSIVE. Lat. pop. lixiva, fém. pris
de Saint-Victor de Paris, qui aurait mis à substantiv. de lixivus, dér. de lix, licis ; on
la mode au xr1° s. les vers lat. à rimes léo- attendrait loissive ; la forme lessive est
nines. dialectale, de l'Ouest ; au Sud d’une ligne
allant du Sud de la Lorraine à l’embou-
LÉOPARD, xvie, antér. leupart, vers chure de la Loire, les formes correspondent
1080 (Roland) et liepart, encore chez Ma- au neutre litivum, cf. a. pr. leissiu et lessif.
rot. Empr. du lat. leopardus, comp. de leo It. lisciva, esp. lejia. — Dér. : lessiver,
« lion » et de pardus (du grec pardos « léo- 1585 ; lessivage, 1805 ; lessiveur, 1828 ; les-
pard »). siveuse, « machine à lessiver », fin xIxe.
LÉPAS, 1703. Empr. du lat. lepas « co- LEST, 1282 (sous la forme lees ; en outre
quille » (mot pris au grec).
lez et lets ; la forme moderne apparaît de
LÉPIDOPTÈRE, 1754. Comp. avec les bonne heure). Au moyen âge « charge
mots grecs lepis, lepidos « écaille » et pieron (d’un poids indéterminé) de harengs ou de
« aile ». cuir »; le sens moderne est attesté par
lastage, en 1366, dans un texte se rappor-
LÉPORIDE, 1838. Dér. sav. du lat. tant à la Flandre (qui contient aussi le
lepus, leporis « lièvre ». verbe laster), en 1398, dans un autre se
LÈPRE, xu°; lépreux, xi° (Alexis). rapportant à l'Angleterre ; on a aussi les-
Empr. des mots lat. lepra (mot pris au lage au sens de « taxe de chargement » dès
grec), leprosus (créé à basse ép.). — Dér. le xive s. Le mot est entré de différents
de lépreux d’après le lat. leprosus : lépro- côtés, ce que montrent la forme lastage
serie, 1543. citée plus haut et last au xvirie s. Lasie,
LEST 366

1678 (écrit last en 1835), poids d'environ LEURRE, 1388, d'abord loerre, loirre,
2 000 kilos, en parlant de la marine hol- vers 1200. Propr. terme de fauconnerie,
landaise, est empr. du hollandais last désignant un morceau de cuir rouge, sou-
(cf. all. Last), lest est empr. du frison lest vent en forme d'oiseau, auquel on atta-
(anc. frison hlest). — Dér. : lester, 1507; chait un appât qui servait à faire revenir
lesteur, 1681 ; dèlester, 1593. l'oiseau de proie ; sens fig. au xvre s. Du
francique *lopr « appât », restitué d’après
LESTE, 1578 (H. Estienne), « bien équi- le moyen haut all. luoder ; de même a. pr.
pé », d’où « propre en habits » (Ménage) ; loire. — Dér. : leurrer, 1373, au xrr®
le sens moderne apparaît vers la même loirier, loirer, comparable à l’a. pr. loirar.
époque. Empr. de lit. leslo, propr. « bien
équipé », d’où « agile, dégagé » (en outre LEVAIN. Lat. pop. *levämen, dér. de
« rusé »). L’it. es{o représente un longobard leväre au sens de « lever » en parlant de la
*list « artifice », cf. anc. haut all. List «id. ». pâte ; le lat. class. levämen ne signifie que
« soulagement ». Le levain est désigné par
LÉTHARGIE, xirre ; léthargique, vers des dér. divers : levat, part. passé du verbe
1325. Empr. du lat. médical lethargia, levar, en a. pr. et aujourd’hui dans de nom-
lethargicus (du grec léfhargia, -gikos). breux parlers méridionaux, lievito en it.,
LETTRE. Lat. liftera. Au sens d’ « écrit lat. pop. “*levitum, levadura en esp.
adressé à une personne absente », s’em- LEVER. Lat. leväre « lever, soulever »,
ployait au plur. en lat. class., comme et aussi «lever » en parlant de la pâte (sens
aussi en a. fr. Le sens de « belles-lettres » attesté seulement au vie s.) ; par contre le
a été repris au lat. litierae dès le moyen sens class. de « soulager » a disparu. —
âge, mais est devenu usuel surtout à Dér. et Comp. : levant, d’abord adj., cf.
partir de la Renaissance. Le sens de « sens soleil levant, vers 1080 (Roland), subst.,
littéral », attesté dès le moyen âge vient XIVe; d’où levantin, 1575, dér. de Levant,
de Saint-Paul, cf. 2e Épitre aux Corin- pris comme terme géographique ; levé, 1534
thiens, III, 6 : « Les ministres... non pas (Rab.); levée, vers 1200; lever, 1564
de la lettre, mais de l'esprit, car la lettre (Rab.) ; levier, xr1° ; levis, v. pont ; levure,
tue et l’esprit donne la vie. » Homme, vers 1300 ; élever, xrr°, souvent eslever au
femme de lettres, 1788. V. gent. — Dér. et moyen âge, peut-être lat. pop. “*exleuare,
Comp. : lettré, xr1°, d’après le lat. litiera- lat. class. éleväre ; le sens de « nourrir,
lus ; illettré, 1594, d’après le lat. illitera- instruire » ne paraît pas être antérieur au
tus ; contre-lettre, xrrr°. XVIe s., d’où élève « celui qui est instruit
LETTRINE, 1625. Empr. de lit. leite- par un maître », 1653 (un esleve d’artisan,
rina, dimin. de leltera « caractère ». Le sens Oudin), d’après l'it. allievo ; ne s’est d’a-
était d’abord « petite lettre qu’on met à bord employé qu’en parlant de l'élève
côté d’un mot pour renvoyer le lecteur à d'un peintre, suivant Ménage, ou d’un
une note ». artiste ; élève « action d’élever des animaux
domestiques », 1770 ; élevage, 1836; éle-
LEU, v. loup. veur, id., au sens moderne, une première
LEUCÉMIE, 1890. Empr. de lall fois au xrI° s. dans un autre sens ; éléva-
Leukämie, mot formé par Virchow avec les tion, xrr1° (L'’élévation du corpus domini),
mots grecs leukos « blanc » et haima d’après le lat. eccl. elevalio, a reçu au cours
« sang ». de l’histoire des sens divers d’après élever ;
élévateur, 1801, comme terme techn. ; de-
LEUCO-, Premier élément de mots sav., puis 1871 « grand magasin où le grain est
tels que leucocyte (de kyios « cuirasse, monté et traité mécaniquement », d’après
enveloppe », pris au sens de « cellule »), l’anglo-américain elevator, une première
1867, tiré du grec leukos « blanc ». fois au xvi® s. au sens général de « celui
LEUCORRHÉE, 1784. Empr. du grec qui élève » ; enlever, x11°, avec en, lat. inde,
enlèvement, 1531, enlevage, 1838 ; soule-
leukorrheia « écoulement blanc » (de rhein ver, XI° (Alexis), soulèvement, vers 1200 ;
« couler », v. le préc.).
surélever, vers 1400, -ation, 1847.
LEUDE, 1748 (Montesquieu) ; leudien au
XIVe S. Empr. du lat. mérovingien leudes, LÉVITATION, vers 1900. Empr. de l’angl.
levitation, qui a été formé dès le xvrre s. à
fait sur le francique *leudi, plur., « gens », l'instar de gravitation, d’après l’adj. lat.
au sens de «gens d’un chef », cf. anc. haut levis « léger ».
all. liuti, plur. de liut, d’où all. Leute, sans
sing. LÉVITE, x11e. Empr. du lat. eccl. levites,
LEUR, pronom. Lat. illorum, génitif -la, qui vient lui-même, par l’intermédiaire
plur. masc. du démonstr. ille; dans les du grec, de l’hébreu lévi « membre de la
parlers de l'Est, du Sud des Vosges jus- tribu de Lévi (3e fils de Jacob), destiné au
qu’au Dauphiné et au Massif central, ce service du culte ». Pris au fém. comme
pronom a souvent la valeur des pronoms subst., pour désigner une robe ayant quel-
accentués eux, elles. It. loro, roumain Lo- que ressemblance avec celle des lévites,
r(u), a. pr. lor, d'un emploi varié. Leur comme on les voyait habillés dans des ta-
est adj. poss. dès les premiers textes ; il a bleaux ou sur le théâtre, par exemple dans
commencé vers le xI1v® s. à prendre l’s du Athalie (sens relevé depuis 1781).
plur., qui n'a triomphé définitivement LÈVRE. Lat. pop. läbra, plur. neutre
qu’au xvire s. L'emploi du fr. leur comme pris comme fém. sing. du lat. class. läbrum.
adj. poss. se retrouve dans l’it. Loro, tou- — Comp. : balèvre, 1220, du xrne au
jours invariable, XVI® s. aussi baulevre, comp. avec le fran-
367 LIBIDINEUX

cique *balu « mauvais » (comp. anc. haut rapporté à la couleur de la lie de raisin
all. balo, anc. angl. bealu), avec double rouge, laquelle est rougeâtre. — Dér. :
traitement de -/-l-, comme dans épaule et liarder, 1611 ; liardeur, 1800.
comme dans halle. LIAS, v. liais.
LEXIQUE, xvie (Ronsard), lexicogra- LIBATION, 1488. Terme d'’antiquité,
phe, 1578 (H. Estienne). Empr. du grec pris dans un sens fam. au x1x® s. (relevé
lexikon (de lexis « mot »), lexikographos. — depuis 1823). Empr. du lat. libatio (de
Dér. du 2° : lexicographie, 1765. libare « verser un liquide en offrande »).
LEZ. Anc. prép. signifiant « à côté de ». LIBELLE, 1402, dans libelle diffama-
sortie de l’usage depuis le xviie s., sauf loire ; antér. désigne des écrits juridiques
dans des noms de lieu, cf. Plessis-lez- Tours, depuis 1283 (Beaumanoir). Empr. du lat.
Lat. pop. de basse ép. (d&) latus, issu du libellus (de Liber « livre »), qui a déjà,
subst. latus, lateris, neutre, « flanc, côté », entre autres, les deux sens de « mémoire »
qui a, de son côté, donné lez « côté », disparu et de « pamphlet ». On trouve à la même
depuis le xvie s., v. côté. époque que libelle diffamatoire le lat. libel-
LÉZARD. Lat. lacertus, d'où est sorti lus diffamaiorius. — Dér. : libellé, 1834,
lézard par substitution de suff. En a. fr. d’après le sens jurid. de Zibelle ; libeller,
le fém. laisarde, du lat. lacerta, est plus 1451, id.; libelliste, 1640 (Chapelain),
fréquent. Conservé sous des formes très d’après le sens d’ « écrit diffamatoire ».
variées dues à des altérations d’origines LIBELLULE, 1792. Empr. du lat. des
diverses, surtout influence de lux : it. lu- naturalistes libellula, dér. du lat. class.
ceria, esp. lagarito, a. pr. lazert, lauzert libella « niveau »; ce nom a été créé par
(+ gaulois louxos « lumière »). Le fém. allusion au vol plané de la libellule.
lézarde, encore attesté non loin de Paris
au sens propre, a été pris pour désigner LIBER, 1758. Empr. du lat. liber «écorce
une fente dans un mur (relevé depuis 1676), d'arbre »; v. livre.
par comparaison de la forme d’une lézarde
avec celle d’un lézard ; d’où lézardé, 1772 LIBÉRAL, xr1°, au sens de « généreux » ;
(dans mur lézardé) ; se lézardér depuis 1829 ; libéralité, 1213. Empr. du lat. liberalis,
on dit aussi fam. lézarder « faire le lézard, propr. « qui convient à un homme libre »,
se chauffer au soleil, flâner »; en ce sens liberalitas. L'expression aris libéraux, qui
c’est un dérivé de lézard. apparaît dès le moyen âge en parlant des
sept arts libéraux, xir1°, remonte au lat.
LIAIS, sorte de calcaire, vers 1125 class. artes liberales. Libéral, comme terme
(liois). En a fr. aussi adj. Probabl. dér. de langue politique, apparaît pour la pre-
de lie, cette pierre étant d’une couleur mière fois dans la proclamation de Bona-
grisâtre. L’angl. lias, empr. du fr., a été parte du 19 brumaire : « Français, vous
repris au xix° s. (attesté depuis 1818) par reconnaîtrez sans doute à cette conduite le
les géologues. zèle d’un soldat de la liberté, d’un citoyen
dévoué à la République. Les idées conser-
LIANE, 1694 (lienne en 1640). Empr.
vatrices, tutélaires, libérales sont rentrées
du fr. des Antilles qui doit ce mot probabl. dans leurs droits. » Libéral avait été em-
aux parlers de l'Ouest. On trouve dans ployé déjà par le marquis de Mirabeau
ceux-ci les formes, liene, liane, désignant (1765) pour exprimer la modération et la
diverses espèces de plantes grimpantes : magnanimité du puissant. — Dér. : libé-
clématite, liseron, polygonum convolvulus ;
ralisme, 1821.
ces subst. sont refaits sur le verbe touran-
geau liener « lier les gerbes », dér. de lien; LIBÉRER, 1495 ; libérateur, vers 1500 ;
l'alternance entre lienne et liane s'explique libération, xive. Empr. du lat. liberare,
par celle entre lien et lian dans les parlers liberator, liberatio (de liber « libre »). Libé-
de l'Ouest. raleur a remplacé délivreur, xr1°, qui se
LIARD, xve. D’après Ménage, liard a trouve encore chez Voiture.
été tiré du nom propre Liard; Guigues LIBERTIN, 1525. Signifie propr. « indo-
Liard, de Crémieu-en-Viennois, créa cette cile aux croyances religieuses », sens vieilli
monnaie en 1430, où on lui donna le nom depuis le xvirie s. au profit du sens mo-
de ce personnage, cf. dans Guy Allard, derne, attesté à partir du xvrre s. Ne cor-
Bibliothèque du Dauphiné : « D’ancienneté respond que pour la forme au lat. libertinus
on avoit accoutumé de fabriquer... des « affranchi » (sens fréquemment repris au
liards en Dauphiné. » Ce nom propre de xvies.). Doit son sens partic., à un passage
Liard est sans doute le même mot que des Actes des Apôtres, VI, 9, où il est ques-
l’anc. adj. liard « grisâtre », qui passe pour tion d’une secte juive dite libertinorum,
être empr. du moyen irlandais liath « gris », mot dont la valeur exacte n’est pas con-
qui aurait été introduit avec la « matière nue, et qui a été interprété comme étant
bretonne »; liath se prononçait liah, mais le même mot que le lat. libertinus ; de là
ce mot a pu recevoir la terminaison usuelle la traduction « La synagogue dite des Af-
-ard en remplacement d’une terminaison franchis ». — Dér. : libertinage, 1603, sens
sans exemple en fr. On a proposé cet adj. parallèle à libertin.
comme étymologie de liard, monnaie, mais
_ une monnaie de cuivre n'est pas grisâtre, LIBIDINEUX, 1596, une première fois
et les données historiques de Ménage n’ont au xzrre s. Empr. du lat. libidinosus (de
pas été réfutées. Mais il n’est pas impos- libido, propr. « caprice », d’où « passion »
sible que l’adj. liard se soit quelquefois spécial. en parlant des plaisirs sexuels).
LIBITUM 368

LIBITUM (ad), 1771. Formule du lat. LICOL, v. lier.


moderne, signifiant « à volonté », faite sur
la forme verbale libitum est, de libet «il LICORNE, 1385; en outre lincorne en
plaît ». Cette formule a été d’abord em- 1388. Altération d'’unicorne (du xr° au
ployée surtout en musique. xv°), empr. du lat. eccl. unicornis «animal
fabuleux à une seule corne », littéral. adj.
LIBRAIRE, 1220 (sous la forme livrai- « qui n’a qu’une corne ». Vient peut-être
re ; libraire depuis 1313) ; a d’abord désigné de l’it. alicorno (aujourd’hui on dit plutôt
un copiste, un auteur ; sens moderne de- liocorno), ce qui expliquerait mieux licorne.
puis 1380. Empr. du lat. librarius dans
ses deux sens (de Liber « livre »). — Dér. : LICTEUR, xive (Bersuire). Empr. du
lat. lictor.
librairie, 1380 ; d'abord « bibliothèque »,
d’où angl. library ; sens moderne depuis LIE, 1120 (attesté sous la forme lias
1540. dans les Gloses de Reichenau). Probabl.
LIBRE, 1339; liberté, 1266. Empr. du d’un celtique */ïga, d’une racine indo-eur.
lat. liber, libertas. — Dér. : libertaire, fin legh-, qui est attestée avec à (p. ex. dans
xIX®. — Comp. : libre-échange, 1853, sur l’anc. irl. lige « couche ») et avec & (p. ex.
le modèle de l’angl. free-irade ; libre-échan- dans l’all. lage), un & étant devenu : en
giste, 1846 ; libre-penseur, 1659 (rare avant celtique. L’esp. lia est empr. du fr.
le xvrrie s.), d’après l’angl. free thinker,
LIE, adj., v. liesse.
d’où libre-pensée, qui ne paraît pas être
antérieur au xix® s. (relevé en 1873), le LIED, 1845 (Brizeux Lieds, titre).
XVir1e s. s’en tenait à liberté de penser. NV. Empr. de l’all. Lied « chant » qui a servi
arbitre. à désigner des pièces lyriques mises en
musique ; mot introduit sous l'influence de
LIBRETTO, 1823. Empr. de l’it. libretto la musique allemande, cf. les Lieder de
« petit livre » Aujourd'hui on préfère Schubert, etc.
livret. — Dér. : librettiste, 1853.
LIÈGE. Lat. pop. *levius, élargissement
LICE « barrière », partic. pour les tour- de levis « léger » ; a servi en français à dési-
nois, xtI° ; ne s'emploie plus que dans des gner l’écorce du chêne-liège, à cause de sa
sens techn. et dans la locution enirer en légèreté. Liège ayant été dit de l’arbre lui-
lice. Du francique “*lisiia, dér. de “*lista, même, on a créé le comp. chéne-liège, 1600
v. liste. L’a pr. lissa « palissade », l’it, (O. de Serres), pour distinguer le nom de
lizza et l’esp. liza viennent du français. l’arbre de celui de l’écorce ; dans le Midi
LICE, terme de tissage. Lat. pop. Zicia, où l’arbre pousse, il est désigné par des
plur. neutre pris comme subst. fém. de formes du lat. süber « liège », p. ex. prov.
sieure. — Dér. : liéger, 1527.
licium « fil de trame ». It. liccio, esp. Lizo.
Haute lice, 1392 ; basse lice, 1419. LIEMENT, v. ligament.
LICE « femelle d’un chien de chasse », LIEN. D'abord leien, loien, forme régu-
xI1°. Probabl. du lat. Zycisca « chienne née lière qui survit dans de nombreux patois ;
d’un loup et d’une chienne ou d’un chien refaite en fr. sur lier. Lat. ligämen. It.
et d’une louve », refait en */icia par retran- legame. — Dér. : limier, d’abord liemier,
chement du suff. X11°, d’après l’anc. forme liem, propr.
LICENCE, xu°; licencier, xive (Frois- « chien tenu en laisse ».
sart) ; licencieux, 1550. Empr. des mots LIER. D'abord leier, loier, forme régu-
lat. licentia, propr. « liberté d’agir », d’où lière qui survit dans de nombreux patois ;
« abus dans l’usage de la liberté » (de Licet la voyelle : est analogique ; d’après des
«il est permis »), licentiare (médiéval), licen- alternances telles que neier, nie « nier,
tiosus. Licence, titre universitaire, vient du (il) nie », on a dit loier, lie au lieu de Loier,
lat. médiéval licentia docendi « liberté d’en- loie, puis i s’est répandu dans toute la
seigner ». — Dér. 1° de licence au sens uni- Conjugaison. Lat. ligare. — Dér. et Comp. :
versitaire : licencié, 1349, d’après le lat. liasse, vers 1170; liaison, XIIIe, remonte
médiéval licentiatus ; 2° du verbe : licen- peut-être au lat. ligätio, cf. a. pr. liazon ;
ciement, xvie.
licol, 1333 (liecol), aussi licou ; lieur, xrve;
LICHEN, 1545. Empr. du lat. lichen (du délier, xri°; relier, vers 1200, relieur,
grec leikhén, de leikhein «lécher » ; le lichen xii1e, reliure, 1549.
semble, en effet, lécher les endroits où il
pousse) ; au sens médical, xvi® (Paré, qui LIERRE. D'abord edre, x° s. (Fragment
dit la lichene), le mot est de même origine. de Valenciennes), puis ierre, encore attesté
au xvi® S., devenu lierre (lyarre, en 1444)
LICHER, v. lécher. par agglutination de l’article ; masc. dès
l’origine, quelquefois fém. par latinisme.
LICITE, xirie. Empr. du lat. licitus, Lat. hedera.
part. passé de licere « être permis », v.
licence et illicite. LIESSE. Ne s'emploie plus que par ar-
chaïsme ; d’abord leesse (encore attesté au
LICITER, 1514, surtout dans avoué lici- xvi® s.), refait en liesse (dès le xrrre s.),
tant ; licitation, 1509. Empr. du lat. jurid. d’après l’adj. lié « joyeux ». Lat. laelitia.
licitari « mettre une enchère » (de Licere Conservé seulement en fr. Lié, lat. laetus,
« être mis à prix »), licitatio. ne survit lui-même que dans la locution
369 LIMANDE

chère lie, maintenue à cause de l'emploi LIGNEUX, 1528 ; LIGNITE, 1765. Dér.
qu’en a fait La Fontaine, v. chère; lie est sav. du lat. lignum « boïs ».
une contraction de liée, d’origine picarde.
LIGOTER, vers 1815. Mot d’argot, de-
LIEU. Lat. locus. Lieu (commun), terme venu aujourd’hui courant, dérivé de ligote,
de rhétorique, xvi®, est un calque du lat. également mot d'’argot (1837, Vidocq),
locus (communis). Au lieu de, Xvr1°, a suc- d’origine méridionale, cf. ligot « lien » (de
cédé à en lieu de, xrr°. — Comp. : lieute- la famille de lier) en gascon ; ligote, au
nant, 1287 (sous la forme lueïenant), cî. moyen âge « courroie intérieure du bou-
aussi lat. médiéval locum tenens ; terme clier », semble aussi d’origine méridionale,
d'organisation administrative qui a eu des mais il n’y a pas de forme correspondante
valeurs diverses ; comme nom d’un grade en a. pr. Ligoier, 1600 (chez l’Ardéchois
militaire, 1669 (Colbert) ; d’où lieutenance, O. de Serres), en parlant de la vigne, est
XV®; l’a. pr. locitenen, l’it. luogotenente, de la même famille de mots.
l'esp. lugarteniente sont faits sur le même
modèle, le lat. médiéval locum (ou loca) LIGUE, 1393 ; déjà au xrx1° s. dans un
tenens ; l’all. Leutnant et l’angl. lieutenant texte italianisant ; cf. aussi liga dans le
sont empr. du fr. ; sous-lieutenant, 1497; lat. médiéval du xrv® s. Empr. de l’it. liga,
non-lieu, terme jurid., 1846. forme anc., probabl. refaite sur le lat.
ligare « lier », à côté de lega (d’où lègue au
LIEUE. Lat. leuca (ou leuga), indiqué xv® s.), forme aujourd’hui usuelle, tirée de
comme gaulois par des auteurs anciens. legare, v. lier. — Dér. : liguer, 1564 ; li-
A. pr. it. lega, esp. legua. gueur, 1594 (Saïire Ménippée).
LIÈVRE. Lat. leporem, acc. de lepus. LILAS, 1651 (d’abord lilac, 1600). Empr.
Fém. dans les parlers méridionaux, en du mot arabo-persan liläk.
Suisse romande et dans quelques autres LILIACÉ(E), fin xvue (Tournefort);
parlers isolés. — Dér. : levraut, 1530,
lilial, mot mis à la mode par l’école sym-
d’abord 1306 (levroz, plur.), formé avec le boliste ; une première fois en 1492. Le pre-
suff. d’origine germ. -ald; levrier, xt1°; mier est empr. du lat. de basse ép. liliaceus,
levrette, xv®, pour *levrerelte, par superpo-
le deuxième dér. sav. du lat. lilium, v. lis.
sition syllabique.
LILLIPUTIEN, 1727, dans la traduction
LIFT, 1904. Empr. de l’angl. lift (de de Gulliver ; sens fig. 1801. Empr. de
lo lift « élever »). Dér. liflier, vers 1920 l’angl. lilliputlian, dér. de Lillipui, nom
(plus employé que lift même, supplanté d’un pays imaginaire dont les habitants
par ascenseur). n'ont que six pouces de taille dans le ro-
LIGAMENT, 1503. Terme de médecine, man de J. Swift, publié en 1726.
empr. du lat. ligamentum, également terme
de médecine (de ligare « lier »). L’a. fr. LIMACE. Sur la forme class. limax, le
avait liement au sens de « lien », encore lat. pop. avait formé un masc. *limaceus
dans des emplois techn. et un fém. *limacea, d’où a. fr. limaz,
limace, qui, avec le dim. limaçon, xnr° s.,
LIGATURE, xive (d’abord ligadure). servaient à distinguer la limace rouge,
Empr. du lat. de basse ép. ligaiura (de sans coquille, le limaçon (petit, avec co-
ligare « lier »); a remplacé l’a. fr. liure, quille) et l’escargot (grand, avec coquille).
encore dans des emplois techn. Depuis la fin du xiv°*s., l'usage méridional
de manger ce dernier comme une friandise
LIGE, vers 1080 Roland; en outre a gagné aussi le Nord, ce qui a fait passer
liège). Terme de droit féodal. Letus « sorte le mot prov. escargot en fr. De là perte de
de vassal » des Gloses de Malberg et litus limaz dans la langue littéraire, tandis que
de la Loi Salique font supposer en francique beaucoup de patois l’ont conservé. Un
*lepu, d’une famille de mots à laquelle moyen très simple de distinguer est de
appartient l’all. Zedig « libre » : les formes joindre une opposition au nom, ainsi Maine
fr. lige, liège (cf. aussi a. pr. ligeza « droit lima à coque. De même le picard et le nor-
du seigneur lige ») font supposer un dér. mand ont créé, à l’aide de écaille et de
*Jeticus « qui a la position d’un letus ». Les écale (francique skala), caillemasson et cali-
lètes, c’est-à-dire les colons établis en Gaule machon (encore très répandu), qui, sous
avant l'invasion franque, furent aussitôt l'influence de coque, a modifié la voyelle de
admis dans la communauté franque comme la première syllabe ; de là le fr. colimaçon,
hommes libres, faisaient donc partie de la 1529.
classe privilégiée du nouvel État. LIMANDE, xime. En raison de l’exis-
LIGNE. Lat. linea, propr. « fil de lin tence de Lime en a. fr. et de lima en it. au
(linum) ». Le sens de « ligne de pêcheur » sens de « limande », on est tenté de voir
est déjà lat. — Dér. et Comp. : lignage, dans limande un dér. de lime ; la limande
xie (Alexis) ; lignée, xr1° ; aligner, x11°, aurait été ainsi nommée à cause de la rugo-
alignement, 1428, désaligner, 1836 ; inter- sité de sa peau, donc au sens de « bonne à
ligne, vers 1600, a remplacé enireligne, limér »; mais la formation est mal expli-
xvie; souligner, 1704. quée. D’autre part limande « planche mince
et étroite » (depuis 1319) se rattache pro-
LIGNEUL. Lat. pop. *lineolum, dér. de babl. au même mot que limon « brancard » ;
linea « fil, ficelle ». A. pr. linhol «fil, ficel- le suffixe serait un gaulois -anto, -a, dont
le »; dans les parlers de l’Est aussi « lise- le -nt- serait devenu -nd- en gaulois peu
ron ». de temps avant la disparition de celui-ci.
DICT. ÉTYM. 24
LIMBES 370

LIMBES, xive. Terme théologique, em- empr. lui-même de l’arabe lima, d’où aussi
pr. du lat. eccl. du moyen âge limbi « séjour esp. lima. — Dér. : limonade, 1640, pro-
céleste situé au bord du paradis », tiré du babl. d’après l’it. limonala ou l'esp. limo-
lat. class. limbus « bord ». Limbe a été repris nada, limonadier, 1676, cf. : « De là nous
au sens de « bord » depuis le XvII1e s., pour avons fait limonadier pour signifier ven-
des emplois techn., en partie déjà lat., p. deur de limonade, qui est un mot nouveau
ex. dans la langue de l'astronomie. dans notre langue, les limonadiers n’ayant
été établis à Paris que sous le ministère de
LIME. Lat. lima. Lime sourde déjà au Mazarin », Ménage ; limonier, nom d’arbre,
sens fig. de « personne sournoise », au xv®s. 1351.
(Ch. d'Orléans).
LIMOUSIN, 1718, sorte de maçon. Tiré
LIME, variété de limon, v. limon. du nom propre Limousin « habitant du
LIMER. Lat. limäre. — Dér. : limaille, Limousin », parce que cette région a fourni
xir1e ; élimer, id. ; relimer, xvi° (Ronsard). à Paris beaucoup de maçons. — Dér. :
limousiner, 1801, terme techn. : limosinage,
LIMIER, v. lien. 1694, ou limousinage, 1718.
LIMINAIRE, 1548. Empr. du lat. de LIMOUSINE, 1836, sorte de manteau.
basse ép. liminaris (de limen «seuil »). — Fém. du nom préc., sans doute parce que
Dér. préliminaires, vers 1648, comme
ce manteau est partic. porté dans le Li-
terme de diplomatie, à propos de la paix
mousin. Depuis la fin du xixe® s. sert à
de Westphalie; a pris rapidement des
désigner une sorte d'automobile fermée,
sens plus étendus. probabl. à cause d’une comparaison entre
LIMITE, 1355, rare avant le xvi®s.; de ce manteau flottant, qui met bien à l’abri
préférence masc. jusqu’au xvii1® s., d’après de la pluie, et le manteau de roul'er ef. le
le genre du mot latin ; limiter, 1311 ; limi- sens moderne de capole.
tation, 1322. Empr. des mots lat. limes,
limitis « chemin bordant un domaine, li- LIMPIDE, xve, mal accueilli au xvr1e5.;
mite », limitare, limitatio. — Dér. de limi- limpidité, 1680. Empr. du lat. limpidus,
ter : limitatif, 1510. limpiditas.
LIMITROPHE, 1467. Empr. du lat. ju- LIN. Lat. Zinum. — Dér. et Comp. :
rid. limitrophus, mot hybride formé avec linière, vers 1200 ; linot, attesté au x111° s.
le radical de limes, v. le préc., et la termi- (Rutebeuf) par le fém. linotte ; ainsinommé
naison grecque -{rophos (de la famille de parce qu’elle est friande de la graine delin;
itrephein « nourrir »), pour qualifier des linaigrette, 1789, comp. de lin et d’aigreile,
terres de régions frontières assignées aux ainsi nommée à cause de ses épis aux soies
soldats pour leur entretien ; ne signifie en plumeuses, en formes d’aigrettes ; linon, fin
fr. que « qui est sur les limites d’un ter- xvie (d'Aubigné), altération de linomple,
ritoire », sauf quand il est terme d’anti- xve, comp. de lin et d’omple, adj. d’origine
quité (il garde alors son sens propre). inconnue, signifiant « uni », usité surtout
dans des textes du Nord-Est.
LIMOGER, 1914. Après les premières
batailles de 1914, quelques généraux qui LINCEUL. Tend aujourd'hui à se pro-
n'avaient pas fait preuve d’une grande noncer comme s'il était écrit linceuil, d’a-
capacité furent relevés de leur commande- près cercueil, etc. Lat. linteolus « petit mor-
ment et envoyés à l'arrière, en partic. à ceau de toile de lin, etc. » avec i long comme
Limoges, d’où ce verbe, dont le sens prit dans linum dont il dérive. A signifié « drap
bientôt une extension plus grande. de lit » jusqu’au xvri® s., sens qui est
encore répandu dans les parlers gallo-
LIMON « terre déposée par les eaux cou- romans.
rantes ». Lat. pop. *limünem, acc. de *limo,
dér. du lat. class. /imus. Ce dérivé est peut- LINÉAIRE, xive; linéal, id.; linéa-
être fait d’après le francique *lemo, acc. ment, 1532 (Rab.). Empr. des mots lat.
*lemun, cf. all. Lehm « argile ». Le simple linearis, linealis (créé à basse ép.), linea-
limus survit en a. pr., cf. lim, dans it. esp. mentum (de linea « ligne »).
limo. — Dér. : limoneux, 1332.
LINGE. Lat. lineus, adj. « de lin », avec
LIMON « brancard », vers 1150. Probabl. un développement comparable à celui de
de la même racine celt. que l'esp. leme lange, v. ce mot. Usuel au moyen âge
« gouvernail ». Il semble que l’indo-eur. ei comme adj. ; a même pris le sens de « fin »,
est représenté en celt. tantôt par €, tantôt propr. « fin comme du lin », sens conservé
par t. Cela fait supposer un celt. *leim-, dans quelques patois. Subst. dès le xrrres.,
qui pourrait être étymologiquement iden- a rapidement élargi son sens propre de
tique au lat. limen « perche mise de tra- « toile de lin » encore usité à la fin du
ei », — Dér. : limonier, xr1°; limonière, me s. — Dér. : lingère, 1292; lingerie,

LIMON « variété de citron », 1351. Le LINGOT, 1392 (d’abord langot, 1380),


citrus limonum ne semble pas avoir été empr. de l’anc. prov. lingot, dér. de lingo,
connu en Europe avant les Croisades. Les lengo « langue », ainsi appelé à cause de la
croisés rapportèrent d'Orient aussi le forme allongée qu'on donnait à ces mor-
nom arabo-persan de ce fruit, limün. Cf. ceaux de métal. L’angl. ingot est empr. du
a. pr., esp. limon, it. limone. Une autre franc., avec déglutination de l’article. —
variété lime, 1663, vient du prov. limo, Dér. : lingotière, 1611.
371 LIT

LINGUAL, 1708. Empr. du lat. de basse LIQUIDE « disponible (de biens) », 1509.
ép. lingualis (de lingua « langue »). Empr. de l’it. liquido, comme terme de
finance. — Dér. : liquider, 1520; liquida-
LINGUISTE, 1632. Dér. sav. du lat. tion, 1416 (celui-ci peut-être directement
lingua. — Dér. : linguistique, 1826. de l’it. liquidazione) ; liquidateur, 1791.
LINIMENT, 1546. Empr. du lat. médical
linimentum, propr. « enduit » (de linire LIRE. Lat. legere. — Dér. : liseur, vers
« oindre, frotter »). 1200; lisible, 1464; illisible, 1686; relire,
XIIe.
LINKS, 1897. Empr. de l’angl. links,
forme écossaise de Zinch « bord ». LIRE, monnaie, v. livre.
LINOLÉUM, 1874. Empr. de l’angl. lino- LIS. Forme de plur., qui a éliminé de
leum, mot forgé avec les mots lat. linum bonne heure le sing., qui ne semble pas
« lin » et oleum « huile » par l'Anglais Wal- avoir été relevé. Lat. Zilium. — Dér. : lise-
ton, inventeur de ce tissu imperméable, ron, 1539; liset, 1538.
breveté en 1863, fait d’un mélange où entre
de l’huile de lin. LISIÈRE, xr1°. Probabl. dér. de lis,
LINON, LINOT, v. lin. lat. licium, rarement attesté, à côté de
lice, mais qui survit encore en normand
LINOTYPE, 1889. Empr. de l’anglo- (prononcé lis) et en angevin (prononcé li
américain linotype, tiré de line o’ (abrévia- au sens de « lisière », d’où aussi en norm.
tion de of) type « ligne de caractères typo- liset « petit ruban, liseré »). — Dér. : liséré,
graphiques », inventé pour désigner une 1743, par l'intermédiaire d’un verbe liserer,
machine qui compose et cliche automati- 1525, encore employé dans des techn.
quement par lignes.
LINTEAU, d’abord liniel, issu par subs- LISSER, vers 1100 (sous les formes lis-
titution de suff. de lintier, lui-même issu chier, licier). Lat. lixare « extraire par la
d’une forme non attestée *linier ; le sens lixiviation », qui est attesté, vers 800, au
actuel est récent ; au moyen âge signifie sens de « repasser, polir ». La voyelle : du
« seuil ». *Linter représente un lat. pop. gallo-roman doit s'expliquer par l'influence
*/imilaris, réfection de liminaäris « du seuil » d’un autre mot, probabl. allisus, qui s’em-
(pris substantiv.), par suite d’une confusion ployait en part. en parlant d’étoffes usées,
de limen, liminis « seuil » et de limes, donc devenues lisses et luisantes. Le fait
limitis « bord ». que le verbe n’est pas attesté en fr. aux
xive et xves. ne peut guère infirmer cette
LION. Empr. du lat. leo. Lionne, 1539, explication. — Dér. : lisse, 1552 (liz, une
a remplacé lionnesse, usuel au moyen âge, première fois lisce au xx1° s.); lissoir,
encore chez Pascal. Au sens de « person- 1614; délisser, 1767. Voir aussi enliser.
nage à la mode », 1838 (lionne est déjà
chez Musset, en 1830), empr. de l’angl. LISTE, 1587. Empr. au sens moderne et,
lion, usuel en ce sens depuis le xvirI® $. ; sous cette forme, de l’it. lisia, qui est lui-
on l’explique comme né d’une comparaison même empr., comme l’a. fr. lisie « bord,
plaisante avec les lions de la Tour de bande », du germ. *lisia, cf. all. Leisie
Londres qui étaient un objet de curiosité « bordure, bande » ; c’est du sens de « ban-
pour les étrangers. — Dér. : lionceau, xt1°, .de » qu'est issu celui de liste « série de noms
au moyen âge on trouve en outre lionneau, placés les uns à la suite des autres ». L’a. fr.
lionnet ; lionné, terme de blason, xvi*. liste survit sous la forme régulière litre
(attestée dès le xr1° s.), au sens de « bande
LIPPE, xrue. Empr. du moyen néerl. noire qu'on tend autour des églises, por-
lippe, d’où vient aussi l’all. Lippe. À péné- tant les armoiries ou les initiales du nom
tré, par l'intermédiaire du fr., dans les du défunt », cf. en un sens analogue a. pr.
parlers méridionaux et du Nord de l’Italie. listra, et dans les dér. liteau, 1229 (listiel),
— Dér. : lippée, 1316 ; lippu, 1539. « bordure », aujourd’hui « tringle, raie de
LIQUÉFIER, xiv°. Empr. du lat. lique- couleur dans du linge »; liter, vers 1250,
facere (avec francisation d’après les verbes « border », usités aujourd’hui comme termes
en -fier). — Dér. : liquéfiable, xvi® ; liqué- techn.
faction, 1314 (écrit -/acion).
LISTEL, 1657. Terme d’archit., empr.
LIQUETTE « chemise », pop. Probabl. de l’it. listello. Le plur. lisieaux conserve
altération arbitraire de l’argot limace, id., la trace de l’hésitation entre listel et une
1725, dér. de l'anc. argot lime, xve. forme plus francisée lisieau.
LIQUEUR, xu°. Empr. du lat. liguor LIT. Lat. lectus. It. letlo, esp. lecho. —
« liquide »; a gardé ce sens jusqu’au Dér. et Comp. : liteau, 1655, terme de
xviie s.; le sens moderne s’est développé vénerie ; litée, xr1°; liter, 1723, « disposer
au xvrrie s. — Dér. : liquoreux, 1529, en lit », terme techn. de la pêche ; literie,
d’après le lat. liquor ; signifie d’abord «li- 1834, une première fois en 1614 (Yves
quide », développement de sens parallèle d’Évreux, au sens de « bois de lit »); li-
à liqueur; liquoriste, 1775, réfection de tière, x11°, les deux sens du mot apparais-
liqueuriste, 1753, d’après le lat. liquor. sent dès le moyen âge; aliter, x111e, alite-
LIQUIDE « qui coule », xin° ; liquidité, ment, 1549 ; déliter, xvie (Ph. Delorme),
vers 1500. Empr. du lat. liquidus, liqui- «séparer une pierre dans le sens des couches
ditas. de stratification ».
LITANIE 372

LITANIE, xr1e, sous la forme lefanie, LITTORAL, 1793, comme adj.; devenu
qui n’a été remplacée par litanie qu’au subst. au cours du x1x®s. (relevé en 1824).
xvie s. Empr. du lat. eccl. lilania (du grec Empr. du lat. liltoralis, mieux litoralis (de
litania « prière »). litus, litoris « rivage »).
LITEAU « tringle », LITER « border », LITURGIE, 1579 (Bodin),; liturgique,
v. liste. 1718 (dans le titre d’un ouvrage de De
Moléon). Le premier est empr. du lat. eccl.
LITEAU, terme de vénerie ; LITÉE, id., du moyen âge liturgia (du grec leitourgia,
v. lit.
propr. « service public »), le deuxième du
LITHARGE, 1314 (écrit litarge). Empr. grec leitourgikos pour servir d’adj. à litur-
du lat. lithargyrus (du grec lithargyros, gie.
propr. « pierre d’argent »). LIVÉCHE. Lat. pop. levistica, lat. class.
LITHO-. Premier élément de mots sav., levisticum, altération de ligustlicum, neutre
tels que lithographie, 1729 (au sens de de l’adj. ligusticus « de Ligurie ».
« traité sur les pierres »; sens moderne,
relevé depuis 1819), tiré du grec lithos LIVIDE, 1314. Empr. du lat. lividus. —
« pierre »; -lithe, deuxième élément de Dér. : lividité, xive.
mots sav., tels que monolithe, 1532, est de LIVING-ROOM, 1922. Empr. de l'anglais
même origine que lifho-. pour désigner la pièce de séjour d’un ap-
LITIGE, x1v° ; litigieux, 1331. Empr. du partement.
lat. litigium, litigiosus (de lis, litis « pro-
LIVRE, masc., vers 1080 Roland).
cès »), Empr. du lat. liber, propr. « pellicule qui
LITORNE, grive cendrée, xvi® (Belon). se trouvait sous l’écorce », sur laquelle on
Même mot que le picard lutrone, sorte de écrivait avant la découverte du papyrus,
grive, qu'on rapproche du picard luiron puis «livre », d’abord écrit sur cette pelli-
« lambin », tiré du verbe lutroner, lutourner cule, ensuite sur le papyrus, cf. de même
«s'amuser à des riens », empr. lui-même du le grec biblos « partie de l'écorce du papy-
moyen néerl. loteren, leuteren « hésiter, rus » et « livre ». — Dér. : livret, vers
tarder »; la litorne devrait son nom à sa 1200 ; livresque, 1808, mot repris à Mon-
lenteur. Losiurgne du xvi® s., si c’est le taigne qui l’a formé d’après pédantesque.
même mot, est altéré.
LIVRE, fém. Lat. /ibra, mesure de poids.
LITOTE, 1521 (écrit lipiote). Terme de It. libbra, a. pr. lieura, d’où it. lira, qu’on
rhétorique empr. du lat. de basse ép. litoies francise en lire.
(du grec lilotés, propr. « simplicité, manque
d’apprêts »). LIVRER. Lat. liberäre « délivrer », qui
a pris en lat. pop. le sens de « laisser par-
LITRE, 1793. Tiré, lors de l’établisse- tir », puis de « remettre », « fournir », ce
ment du système métrique, de litron (de- dernier sens usité en a. fr. — Dér. : livrable,
puis la fin du xvi® s.; écrit aussi literon), 1792; livraison, xri° (Chrétien); livrée,
anc. mesure de capacité pour les grains; vers 1290, propr. « vêtements que les sei-
litron était usuel au xvire s. (Voltaire) et gneurs fournissaient aux gens de leur sui-
il se dit encore populairement au sens de te », d’où le sens moderne vers la fin du
« litre »; c’est un dér. du lat. médiéval xve s.; livreur, 1877.
litra, mesure de liquides (qui remonte au
grec litra « poids de douze onces »). En LOBE, 1503. Terme techn., empr. du
outre multiples et sous-multiples du litre grec lobos « lobe de l'oreille, du foie ». —
comp. avec litre. Dér. : lobé, 1778 ; lobule, 1690 ; trilobé,
1783.
LITRE « bande noire », v. liste.
LOBELIA (ou -IE), 1778. Empr. du lat.
LITTÉRAIRE, 1527. Empr. du lat. lit- des botanistes lobelia, créé par Linné en
lerarius « qui concerne les lettres, l’instruc- l'honneur du botaniste flamand Lobel (1528-
tion » pour servir d’adj. à {belles )-lettres, 1616).
liltéralure.
LOCAL, adj., 1314. Empr. du lat. de
LITTÉRAL, xve. Empr. du lat. de basse basse ép. localis « qui a rapport à un lieu ».
ép. lilteralis « relatif aux lettres de l’alpha- L'expression couleur locale date de la fin
bet » pour servir d’adj. à lettre « sens du xvri® s. comme terme de peinture, et
textuel ». fut appliquée à la littérature dès 1772 par
LITTÉRATEUR, 1716 (une première La Harpe, puis surtout à l'époque du
fois vers 1470). Empr. du lat. lilierator romantisme, cf. : « Vers 1827, nous enten-
« maître de grammaire »; adapte au dions par couleur locale ce qu’au xvure s.
XVIIIe s. sa signification à celle de littéra- on appelait les mœurs » (Mérimée). Pris
ture. substantiv. depuis le xvirr® s. — Dér. :
localiser, 1798 ; localisation, 1803 ; loca-
LITTÉRATURE, 1432; déjà vers 1120, lité, 1810, au sens moderne, existe depuis
au sens d’ « écriture ». Empr. du lat. litte- le xvi® s. avec d’autres sens techn.
ratura « écriture ; enseignement des let-
tres ». De là le sens du mot fr. « connais- LOCATAIRE, 1435 ; locatif, terme ju-
sances scientifiques », ensuite « connais- rid., vers 1300. Dér. sav. du lat. locare
sances des choses littéraires ». Sens actuel « louer ». — Comp. du premier : sous-
depuis 1782. locataire, 1690.
373 LONG

LOCATION, 1437. Empr. du lat. locatio XIIe; logeable, vers 1470; ïin-, 1784;
(de locare « louer »). — Dér. et Comp. : logement, xiri°; déloger, xr1°; logette,
relocation, 1765 ; sous-location, 1812. x111e ; logeur, xve; logis, 1308.
LOCATIS, 1680. Écrit longtemps locati ; LOGGIA, 1890. Empr. de l’it. loggia,
d’autre part locatis a été prononcé avec v. loge.
s finale vers la fin du xvurie s. Empr. du LOGIQUE, adj., 1536 ; subst., xir1° (J. de
lat. de basse ép. locaticius « de louage ». Meung). Empr. du lat. logicus, logica (du
LOCH, 1683 (écrit lok). Empr. du néerl. grec logikos, logiké « qui concerne la raison
log « bûche, poutre ». (logos) »). — Dér. : logicien, d’après le lat.
logicus, xur1° ; illogique, début xixe.
LOCHE, poisson, xrr1°. Étym. inconnue.
Loche « limace », dans les parlers de l'Ouest, LOGOGRIPHE, 1623. Comp. avec les
est le même mot. Très probabl. *laukka, mots grecs logos au sens de « parole » et
latinisation d’un gaul. “*leuka, fém. de griphos « filet », d’où « énigme ».
*leukos « blanc », les deux animaux étant LOGOMACHIE, xvi®. Empr. du grec
de couleur gris-clair. logomakheia (de logos, et de makhé « com-
LOCK-OUT, 1865. Empr. de l’angl. bat »). 1
lock-out, tiré du verbe {o lock out « mettre -LOGUE, -LOGIE. Suff. de mots sav.
à la porte »; cet empr. est dû au fait que comp., tirés de mots tels que philologue,
cette grève patronale s’est d'abord pro- -logie, « qui aime les lettres, goût des let-
duite en Angleterre ; la greve, plus popu- tres » ; par suite ces deux suff. ont été pris
laire et plus ancienne, a au contraire des au sens de « qui pratique une science »,
noms particuliers dans les différentes « doctrine, science », cf. biologie (créé par
langues. l’all. Treviranus et adopté par Lamarck).
LOCMAN, v. lamaneur. LOI. Lat. lègem, acc. de lex. Depuis la
LOCOMOBILE, v. mobile. Réforme, loi sert aussi à désigner l’an-
cienne loi ou loi de Moïse d’après la langue
LOCOMOTEUR, LOCOMOTIVE, LOCO- de la Bible.
MOTION, v. moteur.
LOCUSTE, v. langouste.
LOIN. Lat. longe. It. lungi, esp. arch.
lueñe. Dér. : éloigner, xi° (Alexis) ;
LOCUTION, x1v° (E. Deschamps). Empr. éloignement, xI1e.
du lat. locutio (de loqui « parler »).
LOINTAIN. Lat. pop. *longilanus, dér.
LODEN, 1923. Empr. de l’all. loden, de longë, v. le préc., sur le modèle de
probabl. des parlers alémaniques. *subitanus, v. soudain, etc. It. lontano.
LODS, terme de droit féodal ; ne s’em- LOIR. Le mot du lat. class. glis, glirem
ploie plus que dans l'expression lods ei survit dans l’it. ghiro et le dér. berrichon
ventes, qui est elle-même une expression du liron. Le mot fr. et le port. leiräo attestent
droit féodal « droit de mutation dû au sei- l'existence en lat. pop. d’une forme glis,
gneur par celui qui acquiert un bien dans glirem. La chute du g- s’est produite aussi
sa censive ». Lods, qui signifie « approba- dans d’autres mots commençant par gl,
tion donnée par le seigneur », est une va- p. ex. a. fr. luissel « pelote », de “*globus-
riante orthographique de l’anc. mot los cellus, dér. de globus « boule ». Les parlers
« louange, gloire », invariable, hors d'usage méridionaux présentent un type “*gliru-
depuis le xvie s., lat. laus, très rare en lus, également avec : ou i; comp. prov.
dehors du fr. ; l'orthographe lods qui date moderne grioule, gréoule. — Dér. : lérot,
du xv® s., est due au rapprochement du xvi® (écrit leyrot en 1530).
mot avec le lat. LOISIR. Infinitif pris substantiv. dès le
LOF, terme de marine, x11°. Empr. du moyen âge de l’anc. verbe impersonnel
moyen néerl. /6f, id. En anc. scandinave loisir « être permis », lat. licére. — Dér. :
le mot ne doit pas avoir existé, puisqu'il loisible, xrv°, d’après l’adv. -ement.
n’y est pas attesté. — Dér. : lofer, 1771 ; LOLO, 1511 (Gringore : papa! lelel!
louvoyer, 1529; on disait aussi louvier; Du lolo !). Mot du langage enfantin.
auloffée, 1771, fait sur la locution aller au
lof, xvrr°, cf. pour la formation le terme de LOMBE, xvi® (Paré ; une première fois
marine abalée sous abattre. au xi1e s.). Empr. du lat. lumbus « rein,
région des reins ». — Dér. : lombaire, 14388
LOGARITHME, 1626. Empr. du lat. (écrit lumbaire).
scientifique logarithmus, 1614, comp. avec
les mots grecs logos au sens de « rapport » LONDRÈS, 1849. Empr. de l’esp. londrés
et arithmos « nombre ». «de Londres » ; paraît avoir désigné d’abord
des cigares faits à Cuba pour l'Angleterre.
LOGE, xri°. Du francique *laubja, cf.
all. Laube « tonnelle, feuillée », qui est le LONG. L’anc. fém. longe a été de bonne
sens de l’a. fr. L'’it. loggia, empr. du fr., heure remplacé par longue d’après le masc.
a reçu une acception partic. dans la langue Lat. longus. — Dér. et Comp. : longe « la-
de l'architecture, acception que le fr. a nière », anc. fém. de l’adj., pris substantiv.,
empr. au xix® s., Cf. les loges du Vatican ; x11e (Chrétien) ; longer, 1655, dér. de la
on emploie parfois la forme italienne. Loge locution le long de, d’après allonger, etc.,
(maçonnique), 1740, doit ce sens à l’angl. d'où longeron, fin xix®; longuet, 1314;
lodge ; cf. franc-maçon. — Dér. : loger, longueur, xr°; élongation, 1377 (dans
LONG 374

différentes acceptions techniques et médi- beaucoup de femmes de mœurs légères ; le


cales) ; allonger, xr1°, allonge, x1r1°, allon- nom du quartier vient de celui de l’église
gement, 1224, rallonger, 1354, rallonge, qui s’y trouve et ce nom vient lui-même de
1418, rallongement, 1495 ; barlong, 1600, celui du fameux sanctuaire, la Santa Casa
antér. belonge, fém., xri°, beslonc, ber- de la Vierge à Loretto, près d’Ancône.
lonc, bellonc, etc., au xive et au xve s.,
« oblong », comp. avec le préf. bes, lat. LORGNER, 1450. Dér. de l’anc. adj.
bis « deux fois », qui a été souvent pris lorgne « louche », xir1°, qui subsiste encore
avec une nuance péjor. (ici sans doute celle au même sens comme simple ou sous des
de « trop long »); longtemps, vers 1080 formes dérivées, cf. par exemple calorgne,
(Roland) ; longue-vue, xvri®; scieur de dans les parlers septentrionaux ; est appa-
long, 1358 (scieur de bois au long), ainsi renté à l’émilien l6rgna « paresse », etc.,
nommé parce qu'il scie le bois en long no- Lucques l6rnia « personne lente ». Ces mots
tamment pour faire des planches ; expres- représentent un adj. *lürni-, qui a pu être
sion probabl. formée d’après scier de long, dérivé en francique et en longobard du
qui est attesté au xviri® s., auparavant radical */ür « guetter, espionner ». — Dér. :
sier au lonc, 139%, scier en long, xvIr° s. lorgnette, 1694, fait sur le modèle de lunette,
désignait d’abord une petite lunette d’ap-
LONGANIMITÉ, xr1°. Empr. du lat. de proche, appelée aussi monocle ou de petites
basse ép. longanimitas. ouvertures faites dans un éventail pour
permettre aux dames de voir sans être
LONGE, terme de boucherie. Souvent
vues ; lorgneur, xvi° ; lorgnon, 1835.
loigne au moyen âge ; on trouve aussi /ombe
en ce sens. Lat. pop. */umbea, dér. de lum- LORIOT, xive (E. Deschamps). Altéra-
bus ; v. lombe. tion, par substitution de suff., de loriot,
LONGE « sorte de lanière », v. long. issu d’oriol, orieul, par agglutination de
l’article, lat. aureolus « d’or, de couleur
LONGÉVITÉ, 1788. Empr. du lat. de d’or », qui a été pris pour désigner le loriot
basse ép. longævitas « temps de longue dans la langue pop., à cause de son plu-
durée ». mage. — Comp. : compère-loriot, 1838 à
LONGITUDE, 1543, au sens moderne, la fois « loriot » et « orgelet » ; il n’est pas,
v. latitude ; antér. au sens de « longueur », comme on l’a cru, empr. du picard au sens
1377 (Oresme). Empr. du lat. longitudo de « loriot » ; il est plutôt empr. du lyon-
« longueur ». — Dér. : longitudinal, 1543, nais, où il vit sous des formes comme
au sens moderne, une première fois en 1314. piglorieu, pirglorieu, pilouriou, etc., mais
aussi gloriou tout court. Il est fort pro-
LONGRINE, terme techn. de la char- bable que les deux noms d'oiseaux ici
penterie de la marine et des chemins de accouplés viennent du grec de Marseille.
fer, 1752 ; d’abord longueraine, 1716. Dér. Pir- représente le grec pyrrés « couleur de
de long ou empr. de l’it. lungarina, terme feu »; gloriou est une transformation du
de charpenterie, dér. de lungo « long ». grec chlorion, nom du même oiseau, qui lui
LOOPING, 1911, en parlant de l’avia- a été donné à cause de la couleur d’une
tion. Tiré de la locution d’origine angl. partie de son plumage, chloriôn étant un
looping the loop « bouclement de la boucle » dér. de chlorés « vert jaunâtre ». Par la
(d’où aussi le fr. boucler la boucle), lancée suite, pir- a été confondu avec père, d’où
vers le début du siècle à propos d’une exhi- la variante lyonnaise perloryo ; cette forme
bition au théâtre des Folies-Bergère, où un a voyagé vers le nord et en route il a été
acrobate monté sur une bicyclette se lan- allongé en compère-loriot. En se substituant
çait sur une piste formant une boucle ver- à une forme leurieul « loriot », attestée au
ticale. XVe s., il a gardé le sens d’ « orgelet » que
LOPIN, 1314. Dér. de l’a. fr. lope, v. loupe. leurieul devait à une collision ancienne
d’orieul « loriot » et d’orjeul, lat. hordeolum
LOQUACE, 1764 (Voltaire) ; loquacité, « orgelet »; on trouve déjà au 1x° s. une
1466, rare avant fin xvire. Empr. du lat. forme latine auriola « orgelet ».
loquax « bavard », loquacitas « bavardage »
(de loqui « parler »). LORS. En outre lor et lores. Lat. illa
LOQUE, xv°e. Empr. du moyen néerl.
hôr&, ablatif, « à cette heure-là », dont le
locke « mèche de cheveux », d’où aussi développement a été parallèle au type qui
l’a. fr. locu « ébouriffé » et le liég. lotchet a donné naissance à or. — Comp. : alors,
« mèche de cheveux ». Le changement de 1250, rare jusqu’au xv® s., remplace par
sens s'explique par le fait que la mèche la suite lors, qui, depuis le xvrie s., n’est
comme la loque pendent de façon désor- plus employé que dans les expressions lors
donnée. — Dér. : loqueteux, vers 1500, par de, dès lors, et lorsque, celui-ci depuis 1477 ;
l'intermédiaire du dim. loquette, 1461, en- pour la prononciation de l’s, v. jusque.
core bourguignon « petit morceau », cham- LOSANGE, 1294 (écrit losenge). D'abord
penois « petit champ. » terme de blason, fém., devenu masc. au
LOQUET, x1r°. Dér. de l’anglo-normand XVIIIe s. comme terme de géométrie (at-
loc « loquet », empr. de l’anc. angl. loc, id. testé en ce sens dès le xiv® s.), d’après les
autres noms de figures géométriques. Dér.
LORD, 1558. Mot angl., d’origine germ., du gaulois *lausa « pierre plate », d’où
v. milord. a. pr. lausa « dalle », esp. losa « carreau » ;
LORETTE, 1841. Ne s'emploie plus au- losenge, losange a donc signifié propr. « en
jourd’hui. Tiré de Noïtre-Dame-de-Lorette, forme de dalle », et a été dit partic. d'une
nom d’un quartier de Paris, où habitaient pièce de l’écu.
375 LOURD

LOT, xu°. Du francique l6f, id., cf. go- LOULOU, v. le suiv.


tique hlauts, anc. angl. hlot « sort, héri-
tage ». — Dér. : lotir, 1300 ; lotissement, LOUP, LOUVE. Lat. lupus, lupa. Loup
id.; allotir, 1611. est probabl. une forme dialectale. La forme
correcte leu, fréquente en a. fr., survit dans
. LOTERIE, 1538. Empr. du néerl. loie- l'expression à la queue leu leu et dans des
rije, id., qui est dér. du néerl. lof, comp. lot. noms de lieu, cf. par exemple Saini-Leu-
LOTIER, nom de plante, 1558. Dér. du Taverny (près de Pontoise). La locution
lat. lotus en raison du sens de « mélilot » entre chien et loup, xin*, est d’origine orien-
qu'a aussi le mot lat. tale (dès le r1° s. on trouve dans des textes
hébreux l’expression « quand on peut dis-
LOTION, xive. Empr. du lat. de basse tinguer entre un chien et un loup » pour
ép. lotio « action de laver » (de lavare désigner le passage de la nuit au jour ou
« laver »). — Dér. : lotionner, 1853. inversement). — Dér. : louveteau, 1331;
LOTO, 1732. Empr. de l’it. lotto « sort, louvetier, 1516 ; louper, fin xix°, « man-
lot », empr. antér. du fr. loi. quer un coup », mot pop., qui paraît être
issu d’un argot de métier, qui l’aura tiré
LOTTE, 1553. Attesté au x° s. par le de loup au sens de « défaut dans un ou-
lat. lota, peut-être d’un gaulois *loiia. vrage », 1867 ; la forme montre que le dér.
LOTUS, 1553, parfois aussi loios, d’après a été fait sur le mot écrit; loulou, fin
le mot grec. Empr. du lat. lotus (du grec xvItIe (loup-loup) pour désigner une esp. de
lôtos). petit chien, aujourd’hui aussi terme d’af-
fection, forme due à une réduplication
LOUCHE, adj.; sens fig. au xvIIe s.
enfantine ; loupiot, 1885, mot pop., Syno-
D'abord fém., lat. lusca, qui a éliminé de nyme de gosse, dér. de loup d’après la
bonne heure le masc. lois (cf. lâche), lat. forme écrite. — Comp. : loup-cervier, fin
luscus « borgne », qui a dû prendre le sens xive (le fém. louve cerviere est beaucoup
de « louche » dans le lat. pop., cf. les dér. plus ancien, 1113 ; du xr° au xiv®s. on dé-
luscinus, luscitiosus « myope ». — Dér. : signait le mâle par le mot lin) ; loup-garou,
loucher, 1611 ; louchon, 1867. xir1e (cf. leu garoul dans Guillaume de Pa-
LOUCHE « grande cuiller », xiri° (alors lerne, comp. de loup et de garou, xur1°, alors
louce). Forme picarde correspondant à la sous la forme garolf, du francique *werwulf,
forme lousse des parlers de l’Ouest. Du littéral. « homme-loup », cf. all. Werwolf et
francique *ltja « grande cuiller », qui est aussi lycanthrope ; le mot fr. contient donc
à la base du moyen néerl. loele « sorte de deux fois la notion de « loup » qu'on ne
cuiller à long manche pour puiser le pu- saisissait plus dans garou ; la forme conti-
rin ». — Dér. : louchet, sorte de pelle, 1342. nuant directement le francique *werwulf
LOUER « donner à loyer ». Lat. locäre est attestée dans le lat. médiéval gerulphus,
« placer ». Le sens de « prendre loyer » en 1212, ainsi que par le manceau gué-
apparaît dès la Chanson de Roland. Con- rou, etc. ; wer- a été modifié en war- sous
currencé par divers types : affermer dans l'influence de l’anc. norois vargulfr, dont
l'Ouest et le Sud-Ouest, amodier dans le la première partie est vargr « le criminel,
Centre et le franco-provençal, arrenier dans l'assassin »).
le Sud-Est. — Dér. et Comp. : louage,
LOUPE, 1328 (au sens de « pierre pré-
1283 (Beaumanoir) ; loueur, id.; relouer, cieuse d’une transparence imparfaite ») ; le
1546, une première fois au XIV° S.; SOUus- ‘sens médical n'apparaît qu’au xXvI°s., mais
louer, 1609. loupe désigne vers 1450 une masse de fer
LOUER « faire l’éloge de ». Lat. laudaäre. informe, et le fr. connaît du x111° au XV°Ss.
— Dér. : louable, xrr° ; louange, id., louan- une locution faire la lope « faire la moue »
ger, id., rare avant le xv° s., louangeur, (encore en picard), où loupe doit avoir dé-
1570 ; loueur, xr1°. signé d’abord la lèvre grossie par la gri-
LOUFOQUE, 1873. Mot d’argot, trans- mace qu'on fait. L’anc. haut all. possède
un mot luppa « masse informe d’une ma-
formation de fou suivant le procédé qui a tière caillée », mais les premiers sens du
fait louchebem de boucher. On dit aussi mot fr. s’accorderaient mal avec cette si-
louf et louftingue.
gnification. Il est plus probable qu’il s’agit
LOUGRE, 1781. Empr. de l’angl. lugger. d’un type expressif lopp- créé en fr. même,
LOUIS, xvrre. Abréviation de louis d’or, avec le sens de « morceau informe pendant
tiré du nom du roi de France, Louis XIII, lâchement d'un objet ». Terme d'optique,
sous le règne de qui on a commencé à frap- 1676.
per cette sorte de monnaie, en 1640.
LOURD. Lat. pop. “*lürdus, lat. class.
LOUISE-BONNE, 1690 (Quintinie). D’a- lüridus « blême, sombre ». It. lordo « sale »,
près un contemporain de Ménage, Merlet, a. pr. dort « id. ». Malgré les difficultés que
cette poire « vient de la Terre des Essars, soulèvent le sens et la forme, cette étymo-
en Poitou. La Dame de ce lieu se nommoit logie est la plus vraisemblable. Lourd au
Louise, laquelle avoit une amitié particu- sens physique est attesté depuis 1538;
lière pour ce fruit, qui lui a mérité le nom auparavant il signifie « étourdi, lourd
de Louise-bonne ». (moralement) ». Or du sens de « blême » on
. LOUKOUM, 1879 (alors lokoum), aussi peut, d’une part, passer à celui de « sale »
rahat-losoum. Empr. du turc lokum, rahat- de l'it., et, d'autre part, à celui de «qui a le
lokum, empr. lui-même de l'arabe rähat vertige », cf. le prov. moderne lort et le
halkäm « rafraîchissement du palais ». berrichon lourd qui se disent du mouton
LOURD 376

qui a le tournis ; le sens de l’a. fr. a pu cique *lukinna «lucarne », dér. de *lük (cf.
sortir de là. — Dér. et Comp. : lourdaud, néerl. luik, all. luke) avec le suff. germ.
xv® (déjà Zourdeau en 1306); lourdeur, -inna ; *lukinna a été incorporé au voca-
1785 ; alourdir, 1542, une première fois bulaire fr. plus tard que ne s’est produit
en 1219, au moyen âge surtout eslourdir le changement de -k en -is-, de sorte que
et alourder ; alourdissement, vers 1400, -k- est conservé.
antér. eslourdissement et alourdement. V.
balourd. LUCIDE, 1488, rare avant le xvie s.
Empr. du lat. lucidus. — Dér. : lucidité,
LOUSTIC, 1762 (Voltaire qui écrit : lous- 1480 ; le lat. eccl. luciditas, attesté une fois
lig). Empr. de l'all. lustig « gai »; a été au sens d’ « éclat », n’a pas dû servir de
probabl. introduit par les mercenaires des modèle.
régiments suisses ; le loustic était un bouf-
fon « dont les fonctions consistaient à dis- LUCIOLE, 1704 (alors lucciole). Empr.
traire les soldats menacés du mal du pays » de l’it. lucciola, dér. de luce « lumière ».
(comme le rappelle P.-L. Courier). LUCRE, xv®, rare avant le xvrre ; lucra-
LOUTRE, 1125 (au masc.). Empr. du tif, xr11e (J. de Meung). Empr. du lat.
lat. luira. L’a. fr. a des formes pop. lorre, lucrum « profit », lucrativus. Le sens péj.
leurre, dont la deuxième survit dans les de lucre s’est développé à date récente.
parlers du Centre et de l'Ouest. LUDION, 1787. Empr. du lat. ludio
LOUVOYER, v. lof. « histrion ». Un objet analogue a été appelé
diable cartésien.
LOVELACE, 1781. Tiré de Lovelace, nom
d’un personnage de Clarisse Harlowe, ro- LUETTE, vers 1300. Issu d’une forme
man de Richardson, paru en 1749 ; nom non attestée *uelle, avec agglutination de
forgé qui signifie « lacs d’amour ». l’article, lat. pop. *ävitta, dim. de äva,
propr. « grappe de raisin », attesté dès le
LOVER, 1678. Empr. du bas-all. lofen 1 s. au sens de « luette ».
« tourner » qui est de la famille de (of,
v. ce mot. LUEUR. Lat. pop. *lücôrem, acc. de
*lücor, dér. de lücére « luire ».
LOYAL. Lat. légälis « conforme à la loi,
légal », sens qui s’est maintenu jusqu’au LUGE, fin xix°. Mot empr. du fr. régio-
XVII® $., Cf. à. pr. leial « légal ». Le sens nal de la Savoie et de la Suisse romande ;
moderne apparaît de bonne heure. — Dér. : mot d’origine gauloise (s/udia attesté dans
loyauté, x11°, d’où déloyauté, id. ; déloyal, des gloses du 1xe s.), mais de formes très
XII. variées d’après les régions.
LOYALISTE, 1717, dans un ouvrage sur LUGUBRE, vers 1300. Empr. du lat.
l'Angleterre, où il désigne les Américains lugubris (de lugere « être en deuil »).
qui sont restés dévoués au gouvernement
britannique ; loyalisme, 1838. S’emploient LUI. Lat. pop. *illui, datif, refait, au
encore aujourd’hui surtout en parlant des lieu du lat. class. illi, d’après cui, datif du
Anglais. Empr. des mots angl. loyalist, pronom relatif-interrogatif.
loyalism (qui remontent au fr. loyal). LUIRE, xu1°. Forme refaite qui a peu
LOYER. Lat. locarium « prix d’un gîte », à peu éliminé luisir; celui-ci continuait
dér. de locäre, v. louer. régulièrement le lat. pop. *lücire.
LUBIE, 1636. Étym. incertaine. Probabl. LUITES, v. lutte.
dér. burlesque, né dans les écoles, du lat. LUMACHELLE, xvirre (Buffon). Empr.
lubëre, forme arch. du lat. class. libère de lit. lumachella, propr. « petit limaçon »,
«trouver bon » ; une 1re fois lubane dans les dit de cette sorte de marbre, parce qu'il
Dits artésiens, vers 1280. contient des coquilles fossiles.
LUBRIFIER, xvi® (Paré). Dér. sav. de LUMBAGO, 1756. Empr. du lat. de
l’adj. lat. lubricus « glissant » d’après les basse ép. lumbago, -ginis, fém., « mal de
nombreux verbes en -fier, tels que liqué- reins », dér. de lumbus, v. lombe.
fier.
LUMIÈRE. Lat. pop. läminaria (dér. de
LUBRIQUE, 1450 ; lubricité, x1ve (Ores- lümen, lüminis), qui vient du
me). Empr. des mots lat. lubricus « glis- lat. eccl.
luminaria, plur. neutre, « lampe, flambeau,
sant », lubricitas (créé à basse ép.), avec un
sens moral qui s’est développé dans le lat. astre »; le lat. class. a eu aussi lüminare,
mais au sens de « volet, fenêtre ». L’a. fr.
médiéval. Le fr. du xves. a une forme plus
a eu lum.
francisée lubre qui a aussi le sens du lat.,
comme parfois lubrique. LUMIGNON, xvre, antér. limegnon, xurre,
LUCANE, 1789. Empr. du lat. lucanus en outre limignon, lemignon, luminnon,
« cerf-volant ». lumilon (ces deux dernières formes peuvent
se lire avec /, 7 mouillées), qui peuvent se
LUCARNE, xv°. Altération de lucanne, ramener à lumignon, bien que cette forme
(de 1261 à Commynes), d’après l'a. fr. lui- soit tardive. L’it. a lucignolo « lumignon »
serne « flambeau, lumière », lat. lucerna qu’on explique par */äcinium, altération de
« lampe », v. luzerne ; le croisement est basse ép., d’après lux, de licinium, qui
rendu évident par l'emploi qu’a fait E. Des- serait une autre altération, de basse ép.,
champs de lucarne (ou lucanne) au sens de de ellychnium, empr. du grec ellykhnion ;
« lumière ». Lucanne représente un fran- en conséquence on suppose pour lumignon
377 LUTTER

un lat. pop. *lüminionem, acc. de *lüminio, de la locution lorraine il y a belle heurette,


dér. de *luminium, réfection de *lücinium 1875. (A. Theuriet) ; heurelle, dim. d’heure,
d’après lämen, lüx ayant disparu dans la est assez fréquent en ancien français ; COMpP.
France du Nord. berrichon il y a belle heure, id.
LUMINAIRE, xr1° (Chrétien). Empr. du LURON, xve€ s. Mot pop., qui connaît
lat. eccl. luminare, v. lumière ; le lat. eccl. au xvi® s. aussi la variante lureau. Se
employait surtout le plur. luminaria, de rattache à une série de mots pop. et régio-
là la forme luminaries relevée au x1I° s. naux, comme à lure lure « au hasard », pic.
ue surtout dans le style biblique ou lures « sornettes », lurer « amuser par des
élevé. sornettes ». Il y a à la base un refrain de
chanson pop., attesté dès le xve s. (Avant
LUMINEUX, xrr1° (J. de Meung). Empr. lure lurete, Avant lure luron. Le même
du lat. luminosus (de lumen). élément onomatopéique, avec apophonie
LUNAIRE, xrr1e. Empr. du lat. lunaris. consonantique, se trouve dèsle xrr1es. dans
turelure).
LUNATIQUE, 1277. Empr. du lat. de
basse ép. lunaticus « soumis à l'influence LUSTRAL, 1360 (Bersuire) ; lustration,
de la lune », v. lune. 1360 (Bersuire), rare avant le xvirre s.
Empr. du lat. lustralis, lustratio (de lus-
LUNCH, 1820, dans un ouvrage sur Lon- irare « purifier »).
dres. Empr. de l’angl. lunch (abréviation
de luncheon, d’origine obscure), propr. LUSTRE, « période de cinq ans », 1354
« morceau, grosse tranche », qui n’a le sens (Bersuire). S’emploie surtout comme terme
de repas que depuis une date récente; d’antiquité, mais aussi parfois par plaisan-
luncheon, 1840 (Mérimée), n’est pas accli- terie comme terme de chronologie moderne.
maté. — Dér. : luncher, 1867. Empr. du lat. lustrum, propr. « sacrifice
expiatoire qui avait lieu tous les cinq ans »
LUNDI. En a. fr. lunsdi(s) ; diluns, (dans ce sens en a. fr., 1213).
deluns dans des textes du Nord-Est. Lat.
pop. *lünis dies, altération de lünae dies LUSTRE, « éclat, qui fait paraître bril-
« jour de la lune », d’après les autres noms lant », 1489. Empr. de lit. lustro, subst.
des jours de la semaine martis dies, etc., verbal de lustrare:« éclairer », lat. lusträre.
v. dimanche. It. lunedi, esp. lunes. Le sens de « luminaire suspendu, à plu-
sieurs branches » s’est développé en fr. au
LUNE. Lat. lüna. It. esp. luna. — Dér. : XVIIe 8. — Dér. : lustrer, xv°, au xvie s.
lunaison, xu1°, d’après le lat. de basse ép. sens moins spécialisé qu'aujourd'hui, d’où
lunatio ; luné, 1579 (au sens de « en forme délustrer, xXvIr°.
de lune »), bien, mal luné, xix° ; lunette, LUSTRINE, 1730. Empr. de l’it. lus-
vers 1200, outre différents objets de forme trino, dér. de lustro ; la lustrine passe pour
ronde, a désigné le verre d’un miroir rond, avoir été fabriquée d’abord à Gênes.
vers 1280, puis a été employé pour désigner
des lunettes faites de deux verres ronds, in- LUT, vers 1500 ; luter, 1552. Empr. des
ventées vers la fin du xxrr1e s. par le Flo- mots lat. lulum, propr. « limon », d’où
rentin Salvino degli Armati, v. aussi besi- « terre pétrie pour construire ou enduire »,
ele, enfin a été appliqué à la lunette astro- lutare « enduire de terre pétrie ». — Dér. :
nomique, inventée ou réinventée au début déluter, 1676.
du xviie s. et à la lunette d'approche, dite LUTH, xrr1°, d’abord leüt. Empr. de
aussi longue-vue, de la même ép. ; d’où lu- l'arabe al-‘oûd, par l'intermédiaire de l’a.
netier, 1508, lunetterie, 1873 ; lunure, ter- pr. laül, cf. aussi esp. laud et port. alaude.
me forestier, 1842. — Comp. : alunir, 1960 ; — Dér. : luthier, 1649 ; lutherie, 1767.
lune de miel, 1748 (Voltaire, qui l’a calqué
sur l’angl. honeymoon, attesté depuis 1546); LUTIN. Désigne ordinairement au moyen
demi-lune, 1553. âge un génie malfaisant : le sens de génie
malicieux plutôt que méchant apparaît
LUNULE, 1694. Empr. du lat. lunula cependant d’assez bonne heure. Lat. Nep-
(dim. de luna). tänus, Dieu de la mer, qui figure dans une
liste de démons du vrres., v. ogre. D'abord
LUPANAR, 1532 (Rab.) ; en outre lupa- régulièrement nelun, puis nuilon, d’après
naire, 1823. Empr. du lat. lupanar, dér. de nuil, parce que ces sortes de génies pas-
lupa « prostituée », emploi métaphorique saient pour se manifester surtout la nuit,
de lupa « louve ». puis luiton, encore chez La Fontaine, luion,
LUPIN, x. Empr. du lat. lupinus, et enfin lulin, déjà au xves., d'après luiler,
propr. « pois de loup ». forme anc. de lutter. — Dér. : lutiner, 1585
(Du Fail).
LUPULINE, 1789 (luzerne lupuline); LUTRIN. D'abord letrin, usité jusqu’au
on dit aussi luzerne houblon. Dér. du lat. xvi1e 8., devenu lutrin, d’après lu, part.
des botanistes lupulus, littéral. « petit passé de Lire. Lat. pop. *lecirinum, dér. de
loup », qui désigne le houblon. lectrum « pupitre », vire (Is. de Séville), qui
LUPUS, 1826. Empr. du lat. médical est un dér. de legere « lire ».
lupus, attesté dès le x° s. au sens d’ « ul- LUTTER, LUTTE. D'abord loitier, puis
cère », v. loupe. luilier, luiter, de même luile; ces deux
LURETTE. Ne s'emploie que dans la dernières formes ont persisté jusqu’au
locution il y a belle lurette, 1877. Altération xvie s. Lat. lüciäre, moins usue: que lüc-
LUTTER 378

lärt, läcta (de basse ép.), dont la voyelle u, où Aristote tenait son école. Sens moderne,
étymologiquement longue, a eu un timbre 1807, remplacé par collège royal en 1815,
hésitant. It. loitare, lotta, esp. luchar, lucha. rétabli en 1848. — Dér. : lycéen, 1819.
Luiles, terme de vénerie, désignant les LYCHNIDE, 1781, d'abord lychnis, 1562.
testicules du sanglier, 1656, est un post- Empr. du lat. lychnis (mot pris au grec, de
verbal de luitier au sens de « couvrir la lychnos « lampe, flambeau »).
femelle », cf. rut, d’où, par altération,
suites. — Dér. : lutteur, xrre. LYCOPODE, 1778. Empr. du lat. des
LUXE, 1611. Empr. du lat. luxus. — naturalistes lycopodium, fait avec les mots
grecs lykos « loup » et pous, podos « pied »,
Dér. : luxueux, 1771.
parce que c’est une plante velue comme
LUXER, 1541 ; luxation, id. Empr. des la patte du loup.
mots lat. luxare, luxatio.
LYMPHE, 1690. Empr. du lat. lympha
LUXURE, xu°; luxurieux, id. Empr. « eau » en vue d’un sens techn. ; a été em-
des mots lat. luxuria, propr. « surabon- ployé au sens propre du lat. au xve et au
dance », p. ex. en parlant de la végétation, xvie 8. — Dér. : lymphangite, 1834, dont
d’où « amour du faste, débauche », luxu- la terminaison est faite avec le grec angeion
riosus (de sens parallèles). « vaisseau »; lymphatique, 1665 ; le lat.
lymphaticus signifie « frénétique » d’après
LUXURIANT, 1540. Empr. du lat. luxu- un sens de /ympha « divinité champêtre »,
rians, part. prés. de luxuriari, propr. « su- sens dans lequel lymphatique est employé
rabonder ». par Rabelais et par Malherbe ; lympha-
LUZERNE, 1562, en 1581 luyserne par tisme, 1867.
croisement avec luire. Empr. du prov. LYNCH, 1867, dans l'expression loi de
moderne luzerno, emploi métaphorique de
lynch. Traduction de l’anglo-américain
luzerno « ver luisant », dû au fait que les lynch-law (pris tel quel en 1853) tiré de
graines de la luzerne sont brillantes;
C. Lynch (1736-1796) nom d’un fermier de
ce terme est souvent croisé avec le verbe Virginie, qui institua avec quelques voisins
luire, comme la forme de 1581. Luzerno
une sorte de tribunal privé. — Dér. : lyn-
« ver luisant » est issu par métaphore de cher, 1867, d’après l’anglo-américain to
l’a. pr. luzerna « lampe », lat. pop. *lü- lynch, d’où lynchage, 1883, lyncheur, 1892.
cerna, altération du lat. class. lücerna
d’après lücére « luire ». — Dér. : luzernière, LYNX, xr1e (sous la forme lynz). Empr.
1600. du lat. lynx (mot pris au grec, v. once).
LYCANTHROPE, 1560; lycanthropie,
LYRE, xrre (écrit lire); lyrique, 1496.
1564. Empr. du grec lykanthrôpos, -pia (de Empr. du lat. lyra, lyricus (du grec lyra,
lykos « loup » et anthrôpos « homme », cf. lyrikos). À partir du xvir1° s., lyrique qua-
loup-garou sous loup).
lifie des pièces de théâtre accompagnées de
LYCÉE, 1568, au sens anc.; cf. aussi musique et de chant ou un genre de
Lyceon, 1544 (Bon. Despériers, au même poésie en forme de stances ; se dit depuis
sens). Empr. du lat. lyceum (du grec le xrx® s. de la poésie élevée, inspirée. —
Lykeion), gymnase situé près d'Athènes, Dér. de lyrique : lyrisme, 1834.
M
MABOUL, 1860, déjà donné en 1830 Du même argot vient bezef « beaucoup »,
comme mot de la « langue franque » des empr. également de l'arabe algérien bezzäf
États barbaresques. Mot pop., venu de (anc. bidjizäf « en bloc, en tas »); l’it. a
l’argot des troupes coloniales, empr. de emprunté ce mot avant le xviie s. et dit
l'arabe algérien mahboül « fou ». couramment «a bizzeffe « à foison ».
MACABRE, 1842, comme adj. Tiré de MACADAM, 1830, cf. en 1829 pavé à la
l'expression danse macabre, altération ré- Mac- Adam. Tiré de J.-L. Mac Adam, nom
cente, due à une faute de lecture, de danse d'un Anglais, inventeur du procédé (1756-
Macabré (ainsi au xv° s.), cf. déjà de Ma- 1836). — Dér. : macadamiser, 1828, d’où
cabré la danse, 1376, dont l'origine est macadamisage, 1838.
incertaine. On trouve à la fois la forme MACAQUE, 1680 (mecou en 1665). Em-
Judas Macabré « Judas Macchabée » au pr. du port. macaco, mot africain du ban-
xr1e s. et l'expression latine chorea Maccha- tou, peut-être de l’Angola, apporté par les
beorum « danse des Macchabées » au sens Portugais au Brésil.
de « danse macabre » en 1453; mais le
rapport de la figuration dite danse macabre MACARON, 1552 (Rab.). Empr. de l’ital.
avec les deux légendes bibliques des Mac- dialectal maccarone « macaroni », probable-
chabées, d’une part celle des quatre chefs ment dér. du grec makaria « potage d'orge ».
asmonéens et de l’autre celle des sept Le sens du mot it. était d’abord « sorte de
frères martyrisés sous Antiochus Épiphane, quenelles », ensuite « pâte avec du fro-
n’est pas éclairci définitivement. Le point mage » ; le sens du fr. est dû à une innova-
de départ est peut-être à chercher dans le tion qui date de l'apparition du mot, car
fait que le moyen âge voyait en Judas chez Rabelais il paraît être le même qu’au-
Macchabée un des plus grands héros de jourd’hui, et Cotgrave, en 1611, traduit
l’histoire et que l’Église priait pour les « sorte de pâtisserie ». Le plur. macaroni
défunts en s’autorisant d’un passage des a été repris au xvire s. au sens de lit.
Macchabées où Judas dit qu'il faut prier « mets de pâte étendue en lames minces ».
pour les morts afin de les libérer de leurs MACARONIQUE, 1552 (Rab. : « Vers
péchés. On a voulu établir aussi un rapport macaronicques »). Empr. de l’it. macaro-
avec le nom du Macarius Alexandrinus de nico, dér. de macaronea « pièce de vers en
la Légende dorée, lequel était familier du style macaronique », aujourd’hui macche-
monde des morts ; mais ce mot n’explique ronea (d’où macaronée, 1550), dér. plaisant
pas la fin du mot macabre et moins encore de macarone, v. le préc.
de macabré. D'autres enfin ont vu le point
de départ dans le syrien megabrey « fos- MACCHABÉE « cadavre de noyé », 1856.
soyeur » ; les chrétiens auraient imité une Vient d’une allusion aux héros bibliques.
cérémonie pratiquée par les Syriens (et les MACÉDOINE, 1771 (Bachaumont : « Ma-
Juifs) lors de leurs enterrements ; mais cédoine littéraire »). Malgré le sens de ce
aucune preuve de cet emprunt, pour lequel premier texte, macédoine a été d’abord pris
il y a de grandes difficultés chronologiques, comme terme de cuisine : en ce sens c’est
n’a été donnée. Il faudra tenir compte aussi un emploi plaisant de Macédoine, pays où
du fait que dès le xive s. et jusqu’à nos s'affrontent des peuples très différents, et
jours Macabré est attesté comme nom de de provenance diverse.
famille dans le Jura bernois, en Franche-
Comté et jusque vers Bâle et vers Fri- MACÉRER, « mortifier la chair par des
bourg, donc dans la région où peu après on austérités pieuses », xIvV° ; macération « mor-
trouve les premières manifestations de la tification de la chaïr », 1326. Empr. des mots
danse macabre. Par allusion plaisante du lat. eccl. macerare, maceralio, dont le
aux personnages de la danse macabre, sens vient de celui du lat. class. « consumer
macabé, d’où macab, a été pris dans l’argot moralement ».
des étudiants en médecine, d’où il a passé MACÉRER, « faire tremper à froid dans
dans le fr. pop., au sens de « cadavre ». un liquide une substance pour en extraire
la partie soluble », 1546 ; macération, 1611.
MACACHE, 1866. Mot pop., au sens Empr. des mots lat. macerare « faire trem-
de « pas du tout », venu, comme maboul, per, amollir », maceralio.
de l’argot des troupes coloniales ; empr.
‘de l'arabe algérien md-känch « il n’y a MACFARLANE, 1859. Tiré de Mac Far-
pas »; on emploie aussi par plaisanterie lane, nom propre angl. qui fut probabl.
l'expression du sabir algérien macache bono celui du créateur de cette sorte de man-
« pas bon du tout » (où bono vient de l’it.). teau ; mais l’angl. ne connaît pas le mot.
MÂCHE 380

MÂCHE, 1611. Paraît une forme apo- maquer « broyer le chanvre, le lin », d’où
copée de pomache, relevé au xvi°s., encore maque « instrument pour maquer », en
usité dans de nombreux patois, probabl. outre it. ammaccare « meurtrir », prov.
dér. de pomum en -asca. moderne macd « id. », esp. macarse « se
gâter » (de fruits meurtris). Pour le croi-
MÂCHEFER, vers 1210. Peut-être comp. sement qui a transformé machure en md-
du verbe macher « écraser », v. mâchure, chure, v. mâchicoulis, mâchefer. — Dér. :
et de fer ; aurait été ainsi nommé à cause mâchurer, terme techn., « marquer for-
de sa dureté ; mais le rapport avec l’a. pr. tement en pressant », xv°; mâchuron,
merdafer n'est pas éclairci; y voir une xixe, usité dans le français provincial (no-
transformation de mâchemerde (p. ex. chez tamment à Lyon) pour désigner les pous-
Rabelais) n’est pas plus convaincant. sières noires et grasses qui se collent au
MÂCHELIER, -LIÈRE ; le fém. est plus visage.
usité que le masc. Altération, déjà attestée MÂCHURER, « barbouiller, noircir »,
au xr1e s., de l’a. fr. maisseler, lat. maæilla- 1507, mais on a mascurer, mascherer
ris, adj. de maæxilla (v. mâchoire), d’après au xr1e s. Mascherer, dont mâchurer est une
le verbe mâcher et avec une substitution altération mal expliquée (machure est trop
de suffixe très fréquente. récent pour qu’on puisse y voir la cause
MÂCHER. Lat. de basse ép. masticare. de cette altération), est à rapprocher de
It. maslicare, esp. mascar. — Dér. : mâ- l'a. pr. mascarar, de même sens (d’où
cheur, xvi® (Paré); mâchoire, 1377, a aujourd’hui mascara), et du port. mascarrar
supplanté, parce qu'il avait la supériorité «id. », eux-mêmes mal expliqués ; ces mots
d’être le dér. d’un verbe usuel, maissele, sont de la même famille que masque.
lat. maxilla, qui survit dans l’it. mascella, MA CIS, 1256, t. de botanique; l'huile de
l'esp. mejilla «joue » ; mâchonner, vers 1520, macis est d’un certain usage comme condi-
mâchonnement, 1832 ; remâcher, 1538. ment ou aromate. Empr. du lat. macis,
MACHIAVÉLIQUE, 1578, rare avant le forme de basse ép. qui semble être une
xixe s. ; machiavélisme, 1611, id. ; machia- faute de scribe pour le lat. class. macir
véliste, 1581, id. Dér. de Machiavel, nom « écorce aromatique d’un arbre exotique »
du célèbre auteur florentin du Prince (1469- (le grec a aussi maker à une ép. basse).
1527). On a dit aussi au xvi° s. machiavé- MACKINTOSH, 1842. Empr. de l’angl.
liser. mackiniosh, tiré de Mac Iniosh, nom de
MÂCHICOULIS (on dit aussi méchecou- l'inventeur (1766-1843).
lis), 1402 (machecolis ; au xv° s. en outre
MACLE, terme de minér., 1690. Déjà
machecolies). Peut-être altération de *ma-
chis coulis, qui serait un comp. de *machis, au moyen âge pour désigner un meuble de
l’écu, en français d'Angleterre mascle, pro-
dér. du verbe macher « écraser », v. mâ-
chure, et de coulis « action de couler », dér. babl. d’un germ. *maskila, dim. de *maska
de couler. Le verbe machicouler « garnir de (all. masche, moyen néerl. masche et dim.
mâchicoulis », 1358, serait un dér. Les maschel). Le nom du meuble d’écu a été
formes de l’a. pr. machacol (xi1v°), etc., re- appliqué à la pierre à cause des prismes
monteraient au fr. quadrangulaires de celle-ci. — Dér. : ma-
cler (se), -é, 1795.
MACHINE, 1370 (Oresme) ; machiner,
1225; machinateur, xv°; machination, MAÇON. Francique *makjo, latinisé en
xine. Empr. du lat. machina (du grec dia- macio au vire s. par Isidore de Séville,
lectal makhana), machinari, machinator, dér. du verbe *makôn « faire », qui avait
machinatio. Tandis que le sens concret de d’abord le sens de « préparer l'argile em-
machine est devenu prépondérant depuis ployée dans la construction de parois », d’où
le xvir1es., les trois autres mots continuent all. machen, angl. {o make. Le mot a donc
à se dire à propos d'opérations de l'esprit ; probabl. pénétré en français grâce au
machiner a cependant pris quelques va- contact entre la construction en pierre des
leurs techn. d’après le sens concret de ma- Romains et celle en argile des Germains.
chine. — Dér. : machin, terme fam., signalé Le subst. francique a dû être à l’origine
en 1807; machinal, 1731; machinerie, *mako ; il aura été transformé en *makjo
1805 ; machinisme, 1742 ; machiniste, 1643, sous l'influence des noms de métier latins
dans un sens figuré (Les machinistes de vos en -i0. — Dér. : maçonner, vers 1220,
plaisirs), signifie « celui qui conduit ou ee maçonnage, 1240 ; maçonnerie, vers
invente une machine » jusqu’au xix® 5.;
concurrencé au premier sens par mécani- MACREUSE, 1642. Francisation du nor-
cien, éliminé au deuxième par inventeur, mand macroule, attesté au xvrre s., altéra-
ingénieur ; s'emploie aussi au sens de «celui tion de macrolle, vers 1300, relevé sous la
qui fait marcher les machines d’un théâtre ». forme macroule, encore normande, par les
MÂCHOIRE, v. mâcher. dict.; l’a. fr. a une autre forme altérée
mascrue. Macrolle est empr. du frison
MÂCHURE, 1472 (« Point de sang es- markol (attesté au xvri° s.) ou du néerl.
pandu, mais seulement macheure »), dans septentrional meerkol, forme secondaire
mâchure d’une plaie, d’une éloffe. Altéra- du néerl. meerkot (de la même famille que
tion graphique, d’après mâcher, de machure, l’angl. coot, attesté au xive s.). Comme
dér. de l’anc. verbe macher « écraser, meur- d’autres noms d'oiseaux de mer celui-ci est
trir », qui représente un radical makk-, venu du germanique par voie maritime et le
de formation expressive, cf. le picard fait qu’en germ. ces noms sont attestés
381 MAGIE

plus tard qu’en fr., me suffit pas pour in- *malerium, tiré du lat. class. maleria « bois
firmer cette étymologie. Relevé depuis la de construction », probabl. sur le modèle
fin du xrxe s. comme terme de boucherie de folium, folia, v. feuille.
pour désigner de la viande maigre placée MADRIGAL, 1542 (écrit madrigale).
sur l’os à moelle de l’épaule, par comparai- Empr. de l’it. madrigale (au xiv° s. ma-
son avec la macreuse, admise au XVII° $. driale), qui signifiait, au sens propre,
parmi les aliments autorisés les jours un morceau de musique vocale à plusieurs
d’abstinence. voix sans accompagnement. Pour l’origine
MACRO-. Premier élément de mots sav. du mot it. on hésite entre les deux adj. lat.
comp., tels que macrocosme, 1314 (sur le malerialis « matériel » et matricalis « sorti
modèle de microcosme) ; macropode, 1802, nouvellement de la matrice » ; dans les deux
tiré du grec makros « long », ou de mots cas le sens primitif serait « (poésie) très
empr., tels que macrocéphale, 1556. simple, composée tout naturellement ».
MACROULE, v. macreuse. MAESTRO, 1824 ; maestria, 1855. Empr.
des mots it. maesiro, maestria « maître,
MACULER, xue. Empr. du lat. macu- maîtrise »; tous les deux empr. comme
lare (de macula « tache »). — Dér. : macula- termes d’art, maestro spécial. pour dési-
ture, 1567, abrégé en macule, 1922. gner un grand compositeur, un grand exé-
MADAME, v. dame.
cutant de musique.
MAFFIA, 1875. Mot it., d’origine obs-
MADELEINE, 1845, comme nom de gâ- cure, qui a aussi le sens de « misère » dans
teau ; mais pêche-madeleine est déjà signalé lit. vulgaire ; s'emploie surtout à propos
par Le Duchat (xvire). Le nom de la pêche d'associations secrètes de l'Italie méridio-
est tiré de Marie de Magdala, lat. Magda- nale.
lena, « de laquelle il avait chassé sept dé-
mons », cf. Marc, XVI, 9, confondue avec la MAFFLÉ, 1666 ; mafflu, 1668 (La Fon-
pécheresse repentante, cf. Luc, VII, 37 et taine). Mots pop. de la famille de mafler
suivants, parce que ce fruit « fond en eau « manger beaucoup », 1642. Empr. du
comme la Madeleine est dépeinte fondante néerl. maffelen «mâchonner » (d’une famille
en larmes », Le Duchat. Quant au nom du de mots largement représentée dans les
gâteau, il viendrait de Madeleine (Paulnier), langues germ.) et v. mufle.
nom d’une cuisinière de Mme Perrotin de MAGASIN, vers 1400. Empr. de l'arabe
Barmond, qui en aurait trouvé la recette. makhäzin, plur. de makhzin, «lieu de dépôt,
bureau, etc. », par l'intermédiaire du prov. ;
MADEMOISELLE, v. demoiselle.
dès 1229, magazenum apparaît dans un
MADONE, 1643. Empr. de l’it. madonna statut qui permet aux marchands de Mar-
« madame », dit spéc. de la Vierge. seille d'entretenir des entrepôts à Bougie;
à ce moment-là le mot désignait exclusi-
MADRAGUE, 1679. Terme de pêche, vement des magasins dans les villes du
empr. du prov. madraga qui remonte, Maghreb. Le sing. a été repris vers la fin
comme l'esp. almadraba, à l’arabe al- du x1x°® s. sous la forme maghzen pour
mazraba « enceinte » (de zaraba « entourer désigner les fonctionnaires du sultan du
d’une haïe »). Maroc. L’esp. almacén est entré par l’inter-
MADRAS, 1797. Tiré du nom de la ville médiaire des Arabes d’Espagne. — Dér. :
de l'Inde, située sur la côte occidentale, magasinage, 1675 ; magasinier, 1692 ; em-
où ces mouchoirs de tête furent d’abord magasiner, 1762.
fabriqués et portés. MAGAZINE, 1776, au fém. Empr. de
l’angl. magazine, empr. lui-même du fr.
MADRÉ, xive. Le sens propre, aujour- magasin et pris dans un sens nouveau ; au
d’hui hors d’usage, est « veiné, moucheté », xvirie s. (relevé en 1753), on a, par imita-
en parlant du bois ; le sens moderne «rusé », tion de l’angl., donné ce sens à magasin,
qui date du xvie, résulte d'une comparai- d’où le titre d’une publication connue Le
son de l’aspect varié du bois madré avec Magasin piltoresque.
les ressources variées d’un esprit rusé.
Dér. de ma(s)dre, xur1° « bois veiné servant MAGE, xvie (Amyot), une première fois
à faire des vases à boire », du francique au x111e 8. sous la forme mague. Empr. du
*maser « excroissance rugueuse de l’éra- lat. magus « mage, magicien » (du grec
ble », qui correspond à l’anc. haut all. magos, d'origine iranienne) ; signifie aussi
masar, anc. scandinave mûsurr. « magicien » au xvr1® 8. — Dér. magisme,
1697.
MADRÉPORE, 1671. Surtout au plur. MAGIE, 1535; magique, 1265 (J. de
Empr. de l’it. madrepora, mot scientifique, Meung). Empr. du lat. magia, magicus (du
comp. de madre « mère » et de poro « pore », grec mageia, magikos). Magie a été pris
modifié en pora dans ce comp. à cause du
genre de madre ; désignait propr. les ca- aussi au xvi® et au xvri® s. au sens de
naux qui font communiquer les cellules de « religion de mages » avant la création de
cet agrégat de polypes. — Dér. : madré- magisme. Son sens fig. date du xvii° $.;
magique et magicien ont suivi, le premier à
porique, 1812. la fin du xvirre s., le deuxième au xix*.
MADRIER, fin xvie (d'Aubigné) ; an- Lanterne magique, xvir1e, nom donné à un
tér. madrets, 1382. Empr., avec adjonction instrument d'optique inventé au xvri® s.
d’r, de l’a. pr. madier, attesté au xIv° s. par le jésuite allemand Kircher. — Dér.
au sens de « couvercle de pétrin », lat. pop. de magique : magicien, XIv°.
MAGISTER 382

MAGISTER, xv°, ne s'emploie plus que préc. Le sens fig. qu’a pris ce mot au
par plaisanterie ; magistral, xir1e (B. La- xixe s. vient de magnélisme dans magné-
tini). Empr. des mots lat. magisler, magis- lisme animal « pouvoir d’endormir quel-
tralis (créé à basse ép.); v. maître. qu’un d'un sommeil mystérieux », pratique
qui remonte au médecin allemand Mesmer
MAGISTRAT, 1354 (Bersuire, au sens de (voir mesmérisme), dès 1766, et qui fut
« magistrature », usité jusqu’au XvIIe $. ; beaucoup en usage à la fin du xvurre s. —
celui de « magistrat » apparaît au xvIe s.). Dér. : magnétisme, 1666, sens fig. comme
Empr. du lat. magisiralus aux deux sens. l’adj., d'où, d’après le sens de « magnétisme
— Dér. : magistrature, 1472. animal », magnétiser, 1781, magnétisation,
MAGMA, 1694. Empr. du lat. magma id., magnétiseur, 1784 ; magnéto-, premier
« résidu, marc d’onguent » (d’un mot grec élément de mots techn., d'où magnéto,
qui signifie propr. « pâte pétrie », de la 1891, abréviation de (machine) magnéto-
famille de mattein « pétrir »), comme terme électrique.
de pharmacie et de chimie ; depuis 1879 MAGNIFICAT, vers 1330. Empr. du lat.
sens géologique. magnificat « (Mon âme) magnifie (le Sei-
MAGNANERIE, 1838. Empr. du prov. gneur) », premier mot du cantique de la
magnanarié, dér. de magnan « ver à soie », Vierge exaltant le Seigneur, qui est chanté
mot de la famille de l’anc. it. magnaïlo ou aux vêpres et au salut.
peut-être même empr.; on considère ces MAGNIFIER, vers 1120. Empr. du lat.
mots comme appartenant à la famille de magnificare.
lit. mignatta « sangsue » avec modification
de la voyelle radicale, et on les rapproche MAGNIFIQUE, vers 1265, au sens de
tous de noms servant à désigner le chat, «très beau » apparaît déjà chez ©. de Serres,
tels que le fr. minet ; le nom du chat aurait mais usuel seulement au xix° s.; magnifi-
été pris pour désigner le ver à soie ou la cence, xrtie. Empr. du lat. magnificus,
sangsue à cause de la forme de la tête de littéral. « qui fait de grandes choses »,
ces invertébrés, cf. pour une dénomination magnificentia.
comparable chenille. Un autre dér. de ma- MAGNOLIA, 1752. Empr. du lat. des
gnan, magnarello, qui sert de féminin à botanistes magnolia, créé par Plumier en
magnanaire « éleveur de vers à soie », a l'honneur du botaniste français Magnol
été francisé en magnanarelle, popularisé (1638-1715).
par le chœur de Mireille de Gounod.
MAGOT « somme d'argent mise en ré-
MAGNANIME, xrre (Br. Latini : Ma- serve », 1549 (alors -ault). Altération obs-
gnanime, ce est a dire de grant corage), rare cure de mugot, relevé à la même date, qui
avant le xvI® s.; magnanimité, xir1° (Br. est le même mot que l’a. fr. musgot, mus-
Latini). Empr. du lat. magnanimus, ma- gode, musjoe, etc., « lieu où l’on conserve
gnanimitas. les fruits, provision », lui-même d'origine
MAGNAT, 1895. Empr. de l’anglo-amé-
obscure, v. mijoter.
ricain magnale « gros capitaliste, grand MAGOT « espèce de singe de Barbarie »,
industriel », empr. lui-même du fr. magnat, 1476. Tiré de Magot ou Magog, nom pro-
qui s’est dit d’abord des magnats de Po- pre, associé à Git ou Gog dans les légendes
logne, 1732, ou de Hongrie, 1838, mais qui et les représentations figurées du moyen
a pris un sens plus étendu dès le xvIr1e $. ; âge pour désigner des peuples ou des chefs
magnat, en polonais et en hongrois, vient de peuples orientaux, redoutables ennemis
du lat. administratif de la Pologne et de la des chrétiens ; appliqué par dérision au
Hongrie, qui doit lui-même ce mot au lat. singe de Barbarie. Gog et Magog, noms
de la Vulgate magnates « personnages émi- d’origine hébraïque, viennent de l’Apoca-
nents » (on trouve aussi le mot au sing. dans lypse, XX, 8, où ils désignent des nations
le lat. médiéval d'Occident pour désigner séduites par Satan ; ces noms ont été pris
un prince). à Ézéchiel, cf. 38 et 39, d’après lequel
Magôg, peuple de l'Asie Mineure, devait
MAGNÉSIE, 1554, pour désigner la ma- venir sous la conduite de Gôg détruire
gnésie noire ou peroxyde de manganèse ; Jérusalem.
a servi au XVIIIe s. à désigner, sous le nom
de magnésie blanche, l’oxyde de magné- MAHATMA, vers 1900. Empr. du sans-
sium préconisé dès lors comme remède, ecrit mahätman.
Empr. au premier sens du lat. médiéval
magnesia, de même sens, dér. du lat. ma- MAHONNE, 1553 (« De telles navires
gnes (lapis) « pierre d’aimant » (du grec dictes Maonnes l’on en voit touts les matins
magnés (lithos), propr. «pierre de Magnésie grand nombre arriver à Constantinoble »,
(ville d'Asie Mineure), qui se trouve dans Belon). Jusqu'au xix® 5. ne désigne qu'une
une région abondante en aimants natu- sorte de bateau turc. Empr., comme lit.
rels) » ; la magnésie noire a été ainsi nom- (roue, du ture méoûna, peut-être d’origine
mée parce qu'elle ressemble, par sa forme arabe.
et sa couleur, à la pierre d’aimant. — MAI. Lat. majus (sous-entendu mensis).
Dér. : magnésium, 1818 ; magnésien, 1782 Est attesté dès le xr1° s. pour désigner du
(Condorcet). feuillage et des fleurs cueillis en l'honneur
MAGNÉTIQUE, 1617. Empr. du lat. de du premier mai, d’où, plus tard, « arbre de
basse ép. magneticus « de la nature de la mai », cf. planier un mai, xvre.
pierre d’aimant », dér. de magnes, v. le MAIE, v. pétrin.
383 MAIS

MAÏEUTIQUE, 1874, « méthode de dis- MAILLECHORT, 1829 (écrit -orl). Tiré


cussion pratiquée par Socrate pour accou- des noms propres Maillot et Chorier, noms
cher les esprits » ; se dit aussi dans un sens de deux ouvriers lyonnais qui inventèrent
plus étendu. Empr. du grec maieutiké « art et exploitèrent cet alliage. On dit aussi par
de faire accoucher ». altération melchior.
MAIGRE. Lat. pop. *macrus, lat. class. MAIN. Lat. manus. It. esp. mano. —
macer ; pour le développement phonétique, Dér. : manette, xr11° (sous la forme mai-
cf. aigre. — Dér. : maigrelet, 1579 ; mai- neie) ; manier, xr1°, d’abord menoier, ma-
greur, 1372; maigrichon, 1874; maigrir, noier, XI1°, souvent au sens de « caresser »
1530 ; amaiïgrir, xri°, amaigrissement, au moyen âge, d’où maniable, x11°, manie-
vers 1300, ramaigrir, 1540 ; démaigrir, 1680. ment, 1237, manieur, xive (E. Deschamps),
remanier, 1470, remaniement, 1690 ; ma-
MAIL. Propr. « marteau » ; éliminé, sauf nière, xr1°, tiré de l’anc. adj. manier «fait
dans quelques techn., par le dér. maillel ; avec la main, pour la main », d’où «souple,
a pris en outre dans les villes de la vallée habile », maniéré, 1679, maniérisme, 1829 ;
de la Loire, à Orléans notamment, le sens menotte, 1474, emmenotter, xvi° (R. Bel-
de « promenade publique, en forme d’allée, leau) ; l’e de la syllabe initiale s'explique
de boulevard », par allusion aux allées où par l'influence de la monophtongue avec
l’on pratiquait le jeu de mail. Lat. malleus laquelle se prononce main. — Comp. :
« marteau, maillet ». — Dér. : mailler arrière-main, terme d'équitation, 1751;
« donner des coups de maillet », x11° ; mail- avant-main, id., 1671; main-d'œuvre,
let, xire ; mailloche, 1409 ; maillotin, ne 1706 ; main-forte, xve; mainlevée, 1384;
s'emploie que comme nom propre pour main-mise, 1342, terme jurid.,; pris dans
désigner des Parisiens qui se révoltèrent un sens plus étendu, fin xvrre (Saint-Si-
en 1380 et s’armèrent de maillotins. mon); mainmorte, 1213, on disait aussi
morie-main, maïnmortable, 1372, le lat.
MAIL-COACH, 1802. Empr. de l’angl. médiéval dit manus moriua qui a probabl.
mail-coach « diligence qui transporte le servi de modèle, car le sens de main « pos-
courrier » (n’a jamais le sens que le mot a session, autorité » existe déjà dans le latin
en fr.), comp. de mail (du fr. malle) et de jurid. (par conséquent il n’est pas néces-
coach (du fr. coche). saire de considérer manus moriua comme
calqué sur main-morie) ;sous-main, 1872.
MAILLE « boucle de fil, etc., servant à
faire un tissu ». Lat. macula, dont le sens MAINT, xre. A. pr. mant, maint. On
propre est « tache », sens que le fr. n’a propose un gaulois *manti qu'on restitue
conservé que dans quelques emplois techn., d’après le gallois maint, l'irl. meit « gran-
attestés au moyen âge : « taie sur l’œil, deur » ou bien un croisement du lat. ma-
moucheture sur les ailes d’un oiseau », cî. gnus « grand » et de éanius « si grand ».
aussi it. macchia et esp. mancha, spéc. Mais il est bien plus probable que main
« tache sur la peau » et « forêt, buisson représente un germ. manigibé- « grande
touffu », cf. maquis. Le sens de « maille de quantité », devenu adj. par suite de son
tissu », aussi en a. pr. malha ; l’it. maglia emploi fréquent devant un subst.
et l'esp. malla sont empr. du gallo-roman MAINTENIR. Lat. pop. *manütenëre,
au sens partic. de « maille de cotte » ou puis *manülenire au moins dans la France
de « maille de filet ». — Dér. : mailler,
du Nord, v. tenir. L'existence de ce comp.
1611, d’après les deux sens « maille de dans les langues romanes, sauf en roumain
tissu » et « moucheture » (le part. passé (it. mantenere, esp. a. pr. mantener), prouve
maillé, dès 1170), maillure, 1671, au sens
de « moucheture », démailler, « défaire les qu'il date de l’ép. lat. — Dér. : mainte-
neur, 1842 ; maïntien, xi11e; maintenant,
mailles », vers 1080, remmailler, 1829; x11e, signifiait d’abord « aussitôt », a pris
maillon, 1542; maillot, x1r1° (d’après les le sens moderne vers le xvie s. et s’est
dér.), issu, par substitution de suff., de
substitué en ce sens à or.
maillol, d'abord mailloel, vers 1200, ainsi
nommé par comparaison des bandes lacées MAIRE. Le sens administratif moderne
qui formaient autrefois le maillot avec date de la Révolution (fixé par un décret
des mailles plutôt qu’au sens de « tissu de l’Assemblée constituante); désignait
fait de mailles »; au sens de « caleçon sous l’ancien régime diverses sortes d’offi-
collant », d’abord à l'usage des danseuses, ciers de même espèce (dès 1170). Lat. major
vers 1820, passe pour venir de Maillot qui « plus grand », nom. du comparatif de ma-
serait le nom de l'inventeur ; d’où démail- gnus «grand » ; maire a souvent en a. fr. le
loter, vers 1260, emmailloter, vers 1200, sens de « plus grand », en concurrence avec
remmailloter, 1549. maieur, qui représente l’acc. mäjôrem ; la
valeur casuelle de ces deux formes a disparu
MAILLE « ancienne monnaie de cuivre de bonne heure. Maire du palais est une
valant la moitié d’un denier »; ne s’em- traduction du lat.mérovingien major palalit
ploie plus que dans les locutions n'avoir ni «chef du palais ». V. majordome. — Dér. :
sou ni maille, avoir maille à partir avec mairie, xi11°, mairerie, aujourd'hui vulg.,
quelqu'un. En a. fr. meaille, maaille. Lat. est fréquent dès le x1v®s.
pop. *mediälia, plur. neutre pris comme
fém. sing. d’un adj. *medialis, devenu de MAIS. Lat. magis « plus », sens qui, en
bonne heure *medälia par dissimilation, fr., ne subsiste que dans la locution n’en
dér. de medius « demi », donc « demi- pouvoir mais ; la valeur de conjonction
denier », d’où aussi it. medaglia, esp. meaja, adversative s’est développée en lat. parlé
port. a. pr. mealha, tous « maille ». à la place du latin class. sed. It. mai, ma,
MAIS 384

esp. mas. Le roumain mai n’a que le sens Dér. : majestueux, 1616 ; aussi magesieux
du latin classique « plus » ; partout ailleurs (Baïf), fait probablement d’après lit.
on a les deux sens « plus » et « mais », maesloso, dér. de maestà » majesté » ; refait
parfois sous des formes légèrement diffé- en majestueux sur le modèle des adj. en
renciées pour chacun des deux sens. — -ueux, tels que somplueux.
Comp. : désormais, xr1°, forme renforcée MAJEUR. Terme sav. du droit (xrr°),
de l’a. fr. desor (xi°-Xvi® s.); jamais, de la logique (x1v®), etc., empr. du lat.
xie (Alexis), vit à côté de ja, employé major ; il est difficile de dire à quel moment
avec ne comme négation temporelle (en on a prononcé le mot avec un j, car la
a. fr. ne .… Ja se rapporte à l'avenir, lettre 7 n’est devenue usuelle qu’au xvi®s.
tandis que ne … onques, du lat. unquam, et le fr. du moyen âge a une forme maieur
est employé pour le passé ; ne … jamais (encore signalée par Cotgrave en 1611), qui
s'oppose à ne … ja en ce sens qu'il nie, avait du reste des sens pris au lat. « aîné,
pour l’avenir, la réalisation d’un fait qui ancêtre », à côté du sens de « plus grand »,
s’est produit dans le passé, tandis que le probabl. pop., v. maire.
second est employé quand il ne s’agit pas
de marquer une pareille opposition avec MAJOLIQUE, 1556, en 1587 majorique.
le passé) ; avec le temps, ces fines distinc- Empr. de l’it. majolica, d’abord majorica,
tions se perdent ; ne jamais remplace littéral. « de l’île Majorque » (it. Majorica,
les autres expressions. lat. Mäjorica), où cette faïence fut d’abord
fabriquée. On écrit et on a prononcé aussi
MAÏS, 1545. Empr. de l'esp. mais, empr. maïolique d’après une autre orthographe de
lui-même de la langue des Arouaks d'Haïti. l’it. maiolica ; la prononciation du fr. maj-
Le maïs, qui était répandu dans toute est due à l’orthographe.
l’Amérique (Cartier en a vu en 1535 dans
la région du Saint-Laurent), fut introduit MAJOR, xvrie. Empr., avec prononcia-
d’abord en Espagne et se répandit rapide- tion influencée par le lat. major (et peut-
ment en Europe. Les parlers gallo-romans être aussi le fr. majeur), de l’esp. mayor,
ont des désignations variées : blé de Turquie, qui servait à former en composition divers
souvent abrégé en iurki, blé d'Espagne, grades ou fonctions, cf. élat-major, 1678,
d’Italie, etc., et, en outre, dans le Midi, le et esp. estado mayor, major général, xvir®
type mil ou des dér. de ce mot, etc. (Retz) et esp. mayor general, etc. ; a servi
par suite en fr. à former d'autres comp.
MAISON. Lat. ma(n)sionem, acc. de désignant des grades ou des fonctions.
mansio (de manëére « demeurer », v. manoir) Major chez Rab. : « Au temple major »,
« demeure », d’où «auberge, relais »; n’existe V, 44, est un latinisme et est sans rapport
au sens de « maison » qu’en gallo-roman et direct avec major désignant des grades.
surtout dans les parlers septentrionaux,
bien que l’a. pr. ait maizon, etc., au sens MAJORAT, 1671. Empr. de l'esp. mayo-
du fr. Le lat. class. domus a disparu par- razgo (dér. de mayor) avec francisation
tout ; il a été remplacé par casa, propr. d’après major et les mots en -ai ; empr. au
« cabane », qui, dans le lat. pop., a pris le XVII s. sous la forme majorasque, 1679.
sens de « maison », et a subsisté partout MAJORDOME, xvi® (Rab.). Empr. de
sauf en fr. : it. esp. casa, a. pr. caza ; tou- lit. maggiordomo et influencé par l'esp.
tefois de nombreux noms de lieux du type mayordomo, tous deux faits sur le lat.
la Chaise montrent que casa a existé dans médiéval major domus « chef de la maison »
la France du Nord, jusqu’en Normandie (le maire du palais, v. maire, s’appelait
et dans la région parisienne ; v. chez. — aussi major domus regiae) ; employé d’abord
Dér. : maisonnée, 1611 ; maisonnette, vers en parlant de maisons princières d'Italie et
1170. d’Espagne.
MAIT, v. pétrin. MAJORER, 1870. Dér. sav. du lat. ma-
jor. — Dér. : majoration, 1867.
MAÎTRE. Lat. magister, propr. « celui
qui est au-dessus ». It. esp. maesiro. À sup- MAJORITÉ, âge, 1510. Empr. en ce sens
planté partout comme nom commun les du lat. médiéval majoritas (dér. de major) ;
représentants du lat. class. dominus « maî- devenu terme de jurisprudence générale
tre d’une maison, propriétaire », qui a sub- vers la Révolution.
sisté comme titre honorifique ; v. dom, MAJORITÉ, terme de droit politique,
dame, etc. Avant maître d'école (qui semble 1760 (Voltaire). Empr. de l’angl. majorily,
être du xvrre s.), on a dit depuis la fin v. le préc. et minorité. — Dér. : majori-
du xr11°, maistre escole au sens d’ «écolâtre ». taire, fin xixe,
— Dér. : maîtresse, xrr1° ; maîtrise, 1191 ;
maîtriser, vers 1200. — Comp. : contre- MAJUSCULE, 1529 (G. Tory : « Lettre
maître, 1425 ; petit-maître, 1617, comme majuscule »). Empr. du lat. majusculus
terme de mode, 1686. « un peu plus grand » en vue d’un sens
spécial, v. minuscule.
MAÏZENA « farine de maïs », 1853. MAKI « singe à longue queue », 1756.
Empr. de l’angl. maizena, dér. de l’angl. Empr. du malgache mäky.
maize « maïs » (l’angl. d'Amérique appelle
cette céréale corn). MAL, subst. et adv. Le lat. a malum,
subst., et malë, adv., qui, en gallo-roman,
MAJESTÉ, vers 1120. Empr. du lat. aboutissent tous deux à mal: mais les
majestas. D'abord en parlant de Dieu, de- autres langues romanes ont seulement des
puis Froissart aussi du roi de France. — formes de male, avec les deux valeurs
385 MALOTRU

d’adv. et de subst. : sarde logoudorien des mots lat. maleficium « mauvaise ac-
male, it. male, esp. port. mal; il est donc tion » et spécial. « mauvais charme, sorti-
probable que, de même en gallo-roman, lège », maleficus, de sens parallèles.
mal représente l’adv. et non le subst. De
l’adv. mal est issu un préf. qui ne s’est MALENCONTREUX, vers 1400. Dér. de
développé phonétiquement en mau que l’anc. subst. malencontre, xir1° (Joinville),
dans quelques mots tels que maudire, mau- hors d’usage depuis le xvrrre s., mot comp.
gréer, la langue ayant rétabli ou maintenu de l’adj. mal, et d’un anc. subst. enconire
l'identité formelle du préf. et de l’adv. La « rencontre », xii®, encore signalé au
locution de mal en pis est déjà de la fin XvI1e s., tiré de l’anc. verbe enconirer, v.
du xs. ; on trouve aussi au xv® de mal contre.
en pire. MALFAITEUR, xr1°, sous la forme mau-
MAL, adj. Depuis le xvrie s. ne survit faitour; la forme du préf. mau- a été plus
que dans quelques locutions : bon an mal usuelle que mal- jusqu’au xv° s. Empr. du
an, bon gré, mal gré, etc., et dans des comp. : lat. malefactor et francisé d’après la famille
malheur, malchance, etc. : a été remplacé de faire.
par des adj. plus expressifs méchant, mau- MALHEUR, v. heur.
vais. Lat. malus.
MALICE, vers 1120; malicieux, xrIe.
MALABAR, 1928. Probabl. du nom de Empr. des mots lat. malitia, malitiosus
Malabar, région des Indes; le rapport de « méchant, méchanceté », seuls sens de ces
sens est peut-être dû aux nombreux pro- mots jusqu’au xvrIe $.
duits exportés par cette région.
MALIN, 1549, antér. maligne, xr1° ; ma-
MALADE. Lat. male habitus (du verbe ligne est des deux genres au moyen âge;
habëre au sens de « se trouver dans tel refait en malin, xv°, maline, attesté dès
état ») « qui se trouve en mauvais état », le xvie s., d’après les adj. en -in, -ine, v.
d’où « malade » (chez Aulu-Gelle, 11°); a bénin ; malignité, vers 1120. Empr. des
éliminé le lat. class. æger qui avait moins de mots lat. malignus, malignitas « méchant,
corps. It. a. esp. malalo. — Dér. : maladie, méchanceté »; malin a pris familièrement
vers 1180 ; maladif, xrr1° ; maladrerie, v. le sens de « malicieux » depuis le xvII® 5.
ladre.
MALINES, 1752. Tiré de Malines, nom
MALANDRE, terme de vétérinaire, d’une ville de Belgique.
1393. Empr. du lat. des vétérinaires malan-
dria, qui désigne des pustules au cou des MALINGRE, 1598, mais attesté comme
chevaux. Le mot est usité dans la région nom propre dès 1249 et parle dér. malingros
normande et l'Ouest pour désigner diffé- « chétif » dès 1225. Peut-être issu du croi-
rentes sortes de maux, notamment des sement de l’adj. mal avec l’ancien adj.
pustules, et une forme malan(t) qui désigne haingre « faible, décharné », qui a l’aspect
toute sorte d’ulcères, de croûtes, attestée d’un mot d’origine germ., mais pour lequel
dès 1100, occupe un plus grand territoire. on n’a rien proposé de décisif.
MALANDRIN, x1ve (Froissart, dans un MALITORNE, v. maritorne.
passage où il parle de Naples). Empr. de
l’it. malandrino « voleur de grands che- MALLE, x. Du francique *malha,
mins », d’origine incertaine. comp. anc. haut all. mal(a)ha « sacoche ».
:— Dér. : mallette, xrr1°. — Comp. : malle-
MALARIA, 1855. Empr. de l’it. malaria, poste, 1793.
littéral. « mauvais air » (comp. de mala et
aria, v. air) ; s’est dit d'abord des fièvres MALLÉABLE, vers 1500. Dér. sav. du
paludéennes d'Italie, et notamment de la lat. malleus « marteau » ; il n’y a pas de
campagne romaine. verbe malleare « marteler », mais seulement
un adj. malleatus « battu au marteau ». —
MALAXER, terme de pharmacie, vers Dér. : malléabilité, 1676.
1400. Empr. du lat. malaxare « amollir »
(du grec malassein, d’après la forme de MALOTRU, xu1e (malostruz). Altération
l’aoriste malaxai). — Dér. : malaxage, 1873; inexpliquée de “*malasitru (malasiru du
malaxeur, 1870. xIve-xve s. est une forme secondaire et ne
continue pas la forme antér. à malosiru;
MÂLE. Lat. mäsculus, adj., « de mâle », on a aussi malestru), lat. pop. *malé asirü-
qui a supplanté le subst. maäs, maris. — cus « né sous un mauvais astre » (de asitrum
Dér. : malart, x11°, « canard sauvage mâ- « astre »), cf. anc. esp. asirugo, a. pr. asiruc
le » ; désigne encore le canard mâle en nor- et benastruc « heureux, né sous une bonne
mand, dans le Centre et, sous la forme étoile », malastruc. Malotru a signifié « mal-
altérée mayar, en picard. heureux, chétif, etc. »; le sens moderne
MALÉDICTION, 1375. Empr. du lat. apparaît à la fin du xvie s. Les parlers
eccl. maledictio, en lat. class. « médisance »; méridionaux emploient encore astruc et
a supplanté les formes de l’a. fr. maleicon benastruc. Le suffixe -ücus, qui est tout à
et maudicon, celle-ci usuelle jusqu’au fait exceptionnel, de l’adj. *asträcus, et qui
xvirie s. comme terme fam. est forcément anc., puisque astrum n’a pas
survécu dans les parlers pop., est considéré
MALÉFICE, 1213, jusqu’au xvi® s. ne comme avant été tiré de l’adj. cadücus
signifie que « méfait »; maléfique, vers 1480, « fragile, périssable » auquel *asirücus pou-
ordinairement terme d’astrologie. Empr. vait s'opposer.
DICT. ÉTYM. 25
MALT 386

MALT, 1702, dans un texte traitant de désigne des esclaves blancs ; les milices de
l'Angleterre. Empr. de l’angl. mali, mot mamelouks étaient formées d'esclaves, qui,
d’origine germ., cf. all. Malz. — Dér. : au moyen âge, étaient d'origine circas-
maltage, 1834; malter, 1838; malterie, sienne ou turque.
1877 ; malteur, 1838 ; maltose, 1872.
MAMILLAIRE, 1503 ; mammaire, 1654 ;
MALTHUSIEN, 1848. Dér. de Malthus, mammifère, 1791. Le premier est empr. du
nom d’un célèbre économiste anglais (1766- lat. de basse ép. mamillaris (de mamilla,
1834), qui, dans son ouvrage Essai sur le v. mamelle), le deuxième est dér. de mam-
principe de la population, exposa une doc- ma, le troisième est comp. de ce mot latin
trine sur la limitation volontaire des nais- et du suff. -fère.
sances pour remédier à l’insuffisance de la MAMMOUTH, 1727. Empr., par l’inter-
production des substances alimentaires. — médiaire du russe, de namout, de l’ostiaque
Dér. : malthusianisme, 1870. (langue finno-ougrienne de la Sibérie occi-
MALTÔTE, vers 1350; d’abord mau- dentale) ; on a dit aussi mammoni, cÎ. ma-
loste, 1262; malletote, 1326 ; male toute, mant en 1727, d’après une autre forme
1310, d’où maletoulle encore au xvie s. russe mamont.
Comp. de l’anc. adj. mal et de l’anc. subst. MANAGER, sorte d’impresario, 1884.
tolte, toute « imposition, redevance », propr. Empr. de l’anglo-américain manager, dér.
«rapine », part. passé fém. pris substantiv., du verbe io manage « manier, diriger »
qui répond à un lat. pop. *tollita, de l’anc. (empr. lui-même de l’it. maneggiare).
verbe ioldre « enlever », lat. follere, d’où
aussi it. togliere, esp. arch. toller. La mallôte MANANT, xric. Tiré du part. prés. de
était d’abord un impôt extraordinaire, de l’anc. verbe manoir « demeurer », lat. ma-
là son nom, cf. ce que dit Pasquier : « Ces nêère, V. manoir. Signifie au moyen âge
levées, qui estoient quelquefois extraordi- « celui qui a une demeure », d’où « habi-
naires, furent anciennement appelées ma- tant » et « riche »; d’autre part, par suite
letoultes, comme si le peuple eust voulu de son emploi comme terme de droit féodal
dire qu’elles estoient mal prises. » Maltôte pour désigner ceux qui étaient soumis à
n’est pas la forme attendue ; on attendrait une juridiction féodale dans le ressort de
malioute (maletoulier est encore dans Fure- laquelle ils étaient « levants et couchants »,
tière) ; maliôle est probablement issue a pris, à une époque qui ne paraît pas être
d'une forme maliolte (attestée indirecte- antérieure au xvi° s., le sens de « paysan »,
ment par mallaullier, 1611), refaite sur le d’où, au xvri® s., celui de « rustre ».
lat. médiéval mala tolia, et réduite ensuite
à mallôte par dissimilation. — Dér. : mal- MANCENILLIER, 1658. Dér. de mance-
tôtier, 1606, en outre maltaullier, 1611. nille, 1527, empr. de l'esp. manzanilla,
dim. de manzana « pomme », lat. Mattiänum
MALVACÉE, 1747. Empr. du lat. mal- mälum « pomme de Mattius » (il s’agit
vaceus (de malva « mauve »). probabl. de Caius Malius, agronome du
MALVERSATION, 1505. Dér. sav. du 1er s. avant J.-Chr.), ami de César.
verbe malverser, 1510, peu usité aujour- MANCHE, jém. Lat. manica, dér. de
d’hui, fait sur un fictif male versari «se com- manus « main », propr. « sorte de gant »,
porter mal », empr. du lat. versari, forme puis « manche » (d’abord chez les femmes
médiale de versare, qui avait le sens de et les chasseurs) ; l’usage général de la
« être actif dans un certain domaine ». manche a été introduit chez les Romains :
MALVOISIE, 1393 (sous la forme Mal- vers le 111° s., à l’imitation des peuples
vesy). Tiré de Mal(e)vesie (fréquent au de l’Asie et du Nord et a d'abord été
xIve s. dans la Chronique de Morée), nom considéré comme la marque d’une grande
d’un îlot grec au Sud de la côte orientale mollesse. — Dér. : manchette, x111° ; man-
de la Morée, en grec moderne monemvasia ; chon, id. ; emmanchure, 1494.
l'italien dit de même malvasia (ou -gia), MANCHE, masc. Lat. pop. manicus,
d’après la forme Malvasia. dér. de manus « main », propr. « ce qu'on
MAMAN, 1256. Mot du langage enfan- saisit avec la main, poignée ». A. pr. man-
tin ; sous cette forme ou sous des formes gue, margue ; it. manico. — Dér. : manche-
voisines existe dans de nombreuses lan- ron (de charrue), xrr1° (J. de Meung);
gues : grec, lat. it. mamma, esp. mamd, etc. démancher, vers 1200, démanchement,
V. le suiv. 1611 ; emmancher, vers 1160, emmanche-
ment, 1636, remmancher, 1549.
MAMELLE. Lat. mamilla, dér. de mam-
ma « mamelle », même mot que mamma MANCHOT, xv°. Dér. de l’anc. adj.
« maman, grand'mère, nourrice », v. le manc, manche « manchot, estropié », lat.
préc. It. mammella, esp. mamella. — Dér. : mancus « id. », d'où aussi it. esp. manco.
mamelon, xv°; mamelonné, 1753. L’adj. manque, usité au xvre s., surtout au
sens de « défectueux » est probabl. un ita-
MAMELOUK. Début xix°; au xviri® lianisme, v. manquer.
on dit plutôt mameluk ; attesté dès 1192,
dans un récit des Croisades, sous la forme MANDARIN, 1581. Empr. du port. man-
mamelos ; au xv® s. on a mameluz et chez darin, qui est lui-même empr., avec alté-
Montesquieu mamelus (au plur.). Mot empr. ration d’après le verbe mandar « mander,
à plusieurs reprises de l'arabe d'Égypte ordonner », du malais mantari (qui vient
mamloûk (part. passé de malak « possé- du sanscrit mantrin « conseiller d'état ») :
der ») « celui qui est possédé » ; le terme les Portugais ont appliqué le mot aux hauts
387 MANIE

fonctionnaires de Malaisie, de Chine et MANÈGE, 1611. Empr., comme terme


d’Annam. La locution {uer le mandarin est d'équitation, de l’it. maneggio, subst. ver-
attribuée à J.-J. Rousseau qui aurait dit : bal de maneggiare « manier », formé comme
« S'il suffisait, pour devenir le riche héri- le verbe fr. manier (on a aussi empr. ma-
tier d’un homme qu’on n'aurait jamais vu, néger, comme terme d'équitation, au
dont on n'aurait jamais entendu parler, et xvI® s.). Manège a pris rapidement en fr.
qui habiterait le fin fond de la Chine, de des sens plus étendus, peut-être d’après
pousser un bouton pour le faire mourir, l'it., et, au x1xe s., de nouveaux emplois
qui de nous ne pousserait le bouton et ne techn.
tuerait le mandarin ? » — Dér. : mandari-
nat, 1732; mandarinisme, 1838 ; manda- MÂNES, xive. Empr. du lat. manes
rine, 1773, empr. de l’esp. naranja manda- « âmes des morts » (ordinairement considé-
rina « orange des mandarins », ou de l’it. rées comme favorables, par opposition aux
mandarina, probabl. parce que ce fruit a larves et aux lémures, v. lémurien).
été regardé comme une espèce partic. choi- MANETTE, v. main.
sie d'orange.
MANGANÈSE. Tiré, pour désigner le
MANDAT, 1488 ; mandataire, vers 1537. corps découvert par le chimiste suédois
Empr. des mots lat. mandalum, mandata- Scheele en 1774, de manganèse, anc. nom
rius (en latin jurid. de basse ép.). de la magnésie noire, empr. en ce sens au
MANDER. Lat. mandäre. It. mandare, xvi® s. (relevé en 1578), de l’it. manganese,
esp. mandar. Le verbe, qui appartient sur- altération mal expliquée du lat. magnesia ;
tout à la langue écrite, est peut-être repris on trouve aussi magnèse d’après le mot
au latin, mais il est usuel dans les parlers lat. et des formes altérées magalaise, méga-
pop. de la vallée du Rhône et de la Pro- naise. La graphie médiévale mangnesia
vence au sens d’ «envoyer » et de «lancer ». n’explique que la première syllabe.
— Dér. : mandant, 1789; mandement,
xi1e, signifie aussi « lieu de ralliement (de MANGER. Lat. mandücäre (de mandere
« mâcher »), mot de la langue pop. qui
troupes) » au moyen âge. — Comp. : con-
tremander, xII°.
signifiait « jouer des mâchoires » et qui a
pris le sens de « manger » à basse ép. Quand
MANDIBULE, 1314. Empr. du lat. de le verbe class. edere a faibli, en partie
basse ép. mandibula « mâchoire », dér. de parce qu’il était menacé d’homonymies, le
mandere « mâcher ». — Dér. : démantibu- peuple lui a substitué manducare, assez
ler, 1611 (démantibulé), altération de dé- grossier et vulg. (p. ex. dans l’Itala), tandis
mandibulé, 1552 (Rab.), peut-être d’après que les gens cultivés ont préféré se servir
démanteler, si ce n’est pas une dissimilation de comedere, qui avait l’avantage de rap-
du d intérieur entre deux sonores. peler au moins le verbe class. (p. ex. dans
MANDOLINE, 1759. Empr. de l’it. man- la Vulgate). Celui-ci vit dans l’esp. et le
dolino, dim. de mandola, même mot que port. comer, l’autre dans le fr. manger et
le fr. mandore (au xtr1° s. mandoire), ins- dans l’anc. it. manucare, manicare (lit.
trument de musique analogue à la mando- moderne mangiare a été empr. du fr. à
line, altération inexpliquée du lat. pan- l’époque de la plus grande influence de la
dura ; Cuiui-ci désigne un instrument de civilisation fr., de même que le cat. men-
musique, probabl. à trois cordes (du grec jar). — Dér. et Comp. : mangeable, vers
pandoüra), cf. it. pandüra, esp. bandur- 1200, rare avant le xvrrre s., immangeable,
ria, etc. Les relations de ces formes ne sont ‘1611; mangeaille, 1264; mangeoire, vers
1165 ; mangeotter, 1787; mangerie, vers
pas expliquées.
1170; mangeur, vers 1200; mangeure,
MANDRAGORE, xir°, antér. mande- 1690, au sens moderne, comme terme de
gloire, xu°. Empr. du lat. mandragoras vénerie, 1375; démanger, vers 1300,
(pris au grec), masc. ; les racines de cette démangeaison, 1549; mange-tout, 1834
plante passaient au moyen âge pour avoir (comme épithète de la mort chez Ronsard) ;
des vertus magiques; mot diversement blanc-manger, xir1°; entre-manger (s’),
altéré, cf. notamment main de gloire, dû à 1564.
une étymologie pop., encore dans les patois.
MANGOUSTE, espèce de rat d'Égypte
MANDRILL, 1751. Empr. de l’angl. et de l’Inde, 1703 (mangouze en 1697). Le
mandrill, qui est probabl. comp. de man port. manguço, mongus et l’angl. mongoose
« homme » et drill « babouin ». sont empr. de mungus d’une langue de
MANDRIN, 1676. Mot aux nombreuses l'Inde, cf. marathe mangüûs ; mais l’origine
acceptions techn. Empr. de l’occitan man- du -{e, cf. esp. mangosia, port. mangusio,
drin, dér. du prov. moderne mandre « tou- n’est pas déterminée.
rillon, manivelle », en a. pr. « fléau de ba-
lance », issu du lat. mamphur « partie du MANGUE, 1540 (sous la forme manga ;
tour du tourneur » (d’où lit. maänjfano en 1604 mengue). Empr., par l’intermé-
« manche du fléau ») sous l'influence du diaire du port. manga, de manga de la
got. *manduls qu'on peut supposer d’après langue de Malabar. — Dér. : manguier,
l’anc. nor. mondull « manivelle du moulin 1600.
à main ». MANIE, xive, comme terme de méde-
. MANDUCATION, 1793 (déjà de 1531 cine ; sens plus étendu à partir du xvi®s.;
au xvrie s., mais disparu ensuite). Empr. maniaque, vers 1300, sens parallèles à
du lat. manducatio comme terme de méde- manie. Empr. du lat. médical mania « fo-
cine. V. manger. lie » (mot pris au grec) et du dér. médiéval
MANIE 388

maniacus. Manie sert depuis le xvIrI® 5. MANNE, terme biblique, xui°. Empr. du
de deuxième élément de comp. tels qu’an- lat. eccl. manna qui remonte, par l’inter-
glomanie, 1754, etc., d’où on a tiré des médiaire du grec, à l’hébreu man (cf. Exode,
noms d'agent en -mane, tels qu'anglo- XVI, 15). Pris au sens fig. depuis le
mane, 1764. XVIIS S.
MANIER, MANIÈRE, v. main. MANNE, espèce de panier d'’osier, 1467.
MANIFESTE, adj., vers 1190; mani- Empr. du moyen néerl. manne, variante de
fester, vers 1120 ; manifestation, vers 1190, mande (d'où a. fr. mande, qui vit encore,
rare avant le xvi® s. Empr. des mots lat. surtout en wallon et en picard). — Dér. :
manifesius, manifesiare, manifestatio (créé mannette, 1453.
à basse ép.). MANNEQUIN « panier en forme de hot-
MANIFESTE, subst., 1574. Empr. de te », 1467. Empr. d’un moyen néerl. *man-
l’it. manifesto. — Dér. : manifester, mani- nekijn, dim. de manne, v. le préc., qui ne
festant, manifestation au sens politique, peut pas manquer d’avoir existé, cf. aussi
tous vers 1845. moyen néerl. mandekijn, dim. de mande,
MANIGANCE, 1541 (Calvin). Mot pop. qui a aussi été empr. en picard.
d’origine obscure ; on a proposé d’y voir MANNEQUIN t figure de bois ou de cire,
un mot venu du Midi, où il aurait été dér. servant aux peintres, etc. », 1467, au sens
de manega « manche », v. manche, pour de « figurine ». Empr. en ce sens du moyen
désigner des tours de bateleurs faisant néerl. mannekijn, littéral. « petit homme ».
disparaître des objets dans leurs manches ; C'est au xvrrie s. que le mot a pris le sens
mais ce sens est supposé; l’étymologie indiqué dans la définition, d’où le sens péj.
n’est donc que plausible. — Dér. : mani- d’ «individu qu’on fait mouvoir comme on
gancer, 1691. veut », 1776 ; autres sens au xIx° 5.
MANILLE, terme de divers jeux de car-
tes, 1696 (dès 1660 sous les formes menille, MANŒUVRE, fém., manœuvrer. Lat.
malille) ; le jeu pratiqué aujourd’hui sous pop. manuopera, manuoperäre, littéral.
ce nom est récent. Empr. de l'esp. malilla « travail, travailler avec la main » ; manuo-
avec dissimilation de l’l; mallila est dér. pera est dans les Capitulaires de Charle-
de mala, qui a le même sens, et qui est le magne au sens de « corvée ». — Dér. :
fém. de malo « méchante » ; malilla signifie manœuvre, subst. masc., nom d’agent,
donc littéral. « petite méchante, mali- 1449 ; manœuvrier, 1678; manouvrier,
cieuse »; probabl. nommée ainsi parce XIIC.
que, tandis qu'elle est une des moindres MANOIR. Aujourd'hui littéraire; au
cartes de sa couleur, la malilla devient la moyen âge « habitation seigneuriale », x11°.
deuxième quand sa couleur est atout; Inf. pris substantiv. de l’anc. verbe manoir,
à ce titre on pouvait bien l'appeler « la usuel au moyen âge, lat. manëre « demeurer
malicieuse ». — Dér. : manillon, fin x1x®°,
un certain temps », d’où, à basse ép., « ha-
au nouveau jeu de manille. biter », cf. a. pr. maner, de même sens.
MANIOC, 1614 ; d’abord manihot, 1558 ; V. manant.
maniot, 1578. Maniot paraît avoir été pris
directement au tupi (Brésil), qui dit ma- MANOMÈTRE, 1705. Inventé par le ma-
nioch, et avoir été refait en manioque, thématicien Varignon (1654-1722) ; a été
fém., manioc d'après mandioca de l’esp. et fait au moyen du grec manos « rare » pris
du port., qui représente une autre forme au sens de « peu dense », et de meiron
du tupi mandihoca. « mesure », donc au sens de « qui sert à
mesurer ce qui est peu dense » ; v. mètre.
MANIPULE, terme de pharmacie, xvi®
(Bon. Despériers). Empr. du lat. manipulus MANQUER, 1546. Empr. de l'it. man-
« poignée » (de manus « main »). — Dér. : care « être insuffisant, faire défaut, etc. »,
manipuler, 1765 ; manipulateur, 1762 ; ma- dér. de l’adj. manco au sens de « défec-
nipulation, 1716 ; sens développés parallè- tueux », qu'avait déjà le lat. mancus, v.
lement. manchot, et qu'ont conservé l'esp. manco
MANIPULE, terme d’antiquité romaine, et l’a. pr. manc. — Dér. : manque, 1594
xvire. Empr. du lat. manipulus, même mot (Henri IV); manquement, 1566 ; imman-
que le préc. quable, 1652.
MANIPULE, terme de liturgie, 1380. MANSARDE, 1676. Tiré de l'expression
Empr. du lat. manipulus (v. les préc.), qui comble à la mansarde faite sur le nom de
a reçu le sens liturgique au moyen âge. l’architecte Fr. Mansard (1598-1666). —
Dér. : mansardé, 1844.
MANITOU, 1627, au sens propre. Empr.
de la langue des Algonquins (Canada occi- MANSUÉTUDE, xin1e, antér. mansue-
dental). S’'emploie au sens fig. et par plai- tume, vers 1200, avec le suff. d'ameriu-
santerie, depuis 1870 environ. me, etc. ; mansueludine, id. Empr. du lat.
mansueludo (de mansuelus « apprivoisé,
MANIVELLE. D'abord manevelle, vers doux »).
1130, devenu menivelle, 1325, puis mani-
velle, xv1e (Paré), probabl. d’après le verbe MANTE, insecte, 1754. Empr. du lat.
manier. Lat. pop. *manabella, altération de des naturalistes manlis, qui l'ont pris au
manibula, autre forme de manicula (de grec mantis, propr. « devineresse », d’où, par
manus « main »), entre autres sens « man- plaisanterie, « mante », pour une raison
cheron de charrue ». analogue à celle qui a fait appeler cet in-
389 MARABOUT

secte manie religieuse ou prie-Dieu (dans MAQUE, MAQUER, v. machure.


les parlers méridionaux) ; il se tient en effet MAQUEREAU « entremetteur », x111°
souvent debout, posé sur ses pattes de der- (Rutebeuf). Empr. du moyen néerl. make-
rière, les deux pattes de devant jointes lâre « courtier » (cf. makelare en ce sens,
comme les mains de quelqu'un qui prie. dans un texte de Saint-Omer de 1270),
MANTE, sorte de manteau, 1404. Empr. dér. de makeln « trafiquer » (de maken
de l’a. pr. mania, lat. pop. *manlta, fait sur « faire »). — Dér. : maquerellage, xtr1°;
le lat. de basse ép. manium, V. manteau, maquerelle, xr11° (J. de Meung).
ou tiré de mantel et fait fém. d’après capa
« chape », v. mantille. A désigné en outre MAQUEREAU, poisson, 1138. Très pro-
un grand voile de deuil (comme en a. pr.), babl. le même mot que le préc. Selon une
encore chez Saint-Simon (dans Gil Blas et croyance populaire le maquereau, qui,
dans Corinne on n'est pas en France) et comme on sait, accompagne les troupes
jusqu’au xvi® s. une espèce de couverture, de harengs dans leurs migrations, aurait la
sens encore usité dans l’Ouest. fonction de rapprocher les harengs mâles
des femelles.
MANTEAU. Lat. maniellum, dim. de
manium, attesté seulement au vire s. (Isi- MAQUETTE, 1752. Empr. de l’it. mac-
dore de Séville, qui le donne comme hispa- chietta, propr. « petite tache », d’où « ébau-
nique), mais certainement plus ancien, che (de dessin) », dér. de macchia « tache »
maniellum étant déjà chez Plaute au sens du lat. macula.
de « voile ». — Dér. : mantelet, xr1° ; dé- MAQUIGNON, 1279 ; jusqu’au xvi*s. on
manteler, 1563, par l'intermédiaire de man- disait maquignon de chevaux. Très proba-
leler « couvrir d’un manteau », x11°, d’où
« fortifier », relevé seulement au xvII°5., blement autre forme de maquereau au sens
mais certainement antér., cf. aussi emman- propre de « courtier », avec substitution de
suff., sous l'influence de barguigner.
teler « couvrir d’un manteau », xIv®, d’où 1511, maqui-
« fortifier », 1566 ; le développement sé- — Dér. : maquignonner,
gnonnage, 1507.
mantique est d’origine fig.; démantèle-
ment, xvI°. MAQUILLER, 1840, comme terme de
MANTILLE, fin xvie. Empr. de l'esp. l’argot du théâtre, mais déjà maquis « fard »,
mantilla, lat. maniellum, fait fém. d’après 1827. Vient de l’argot, où il est attesté au
capa « cape ». sens de « travailler » de Villon au xvni°s.,
MANUEL, adj., vers 1200. Empr. du au sens de « voler » au xvii° et au xvirI*s.
lat. manualis (de manus « main »). 11 doit s’agir d’un dér. né dans l’argot des
villes picardes, où un verbe simple makier
MANUEL, subst., 1539. Empr. du lat. au sens de « faire » (makier le papelart
de basse ép. manuale, v. le préc. « feindre d'être dévot ») est attesté dès le
MANUFACTURE, 1511. Empr. du lat. x11e s. ; makier est empr. du moyen néerl.
médiéval manufactura « travail à la main », maken « faire ». — Dér. : maquillage, 1860 ;
d’où « fabrication », sens du mot jusqu’au maquilleuse, 1872 ; démaquiller, 1907 (au
milieu du xvur1es., conservé seulement dans sens de « défaire » en 1837).
le titre École Centrale des Aris et Manufac-
tures (créée en 1829) pour distinguer cette MAQUIS, 1775 (var. makis). Empr. de
école du Conservatoire des Aris et Métiers. lit. macchia, propr. « tache », d’où « sorte
Au sens moderne, 1614; a signifié aussi . de fourré », ces groupes de buissons épais
« produits manufacturés ». — Dér. : manu- formant comme des taches sur les pentes
facturer, 1601 ; manufacturier, 1664. des montagnes. Les Français ont eu con-
naissance du mot et de la chose à l’époque
MANUSCRIT, 1594, adj. et subsi. Empr. des expéditions contre les Corses qui ne
du lat. manu scriptus « écrit à la main », voulaient pas reconnaître d'emblée la do-
qui ne s'employait que comme adj. avec mination française. La grande diffusion du
liber ou codez. mot en fr. est due en partie aux œuvres
MANUTENTION, vers 1500, au sens narratives de Mérimée. — Dér. : maqui-
d’ « action de maintenir » ; de ce sens dis- sard « membre de la résistance active, pen-
paru depuis le xvirre s. est issu celui d’«ad- dant l'occupation allemande (1940-44) ».
ministration, gestion » fin xvri® (Saint-
MARABOUT, « musulman qui se consa-
Simon), puis celui de « manipulation de
certains produits », 1820 (à propos du cre à la pratique et à l’enseignement de la
tabac ). Empr. du lat. médiéval manutentio religion », 1651 (dans un récit de voyage à
(de manu tenere « tenir avec la main) ». — Madagascar qui donne un autre sens :
« marabou, qui veut dire barbier ou méde-
Dér. : manutentionnaire, 1788 ; manuten-
tionner, 1820 (à propos du tabac). cin »). Empr. du port. marabulo, empr.
lui-même de l'arabe mordbit « attaché à la
MAOUS « gros, etc. », pop. de l’argot garde d’un poste-frontière », d’où « ermite »,
maous, 1895, comp. ang. mahou « lour- d’où aussi esp. morabito et quelques formes
daud », probabl. du nom de femme a. fr. fr. du xvie s., morabuth, 1575 ; moabile,
Mahaut, forme pop. de Maihilde. 1560. Le même mot arabe se retrouve dans
MAPPEMONDE, xu11°, cf. aussi mapa- le nom de la dynastie des Almoravides
monde, xr1° (Chrétien). Empr. du lat. mé- almoräbitin, d’où vient le nom de la mon-
diéval mappa mundi, littéral. « nappe du naie esp. maravedi, arabe mordbiti, d'abord
trouve aussi au « monnaie d’or (frappée sous cette dynas-
monde », ci. nappe ; on
moyen âge mappe du monde et simplement tie) », et, beaucoup plus tard, « monnaie
mappe. de cuivre », empr. en ce sens sous la forme
MARABOUT 390

maravédis, attesté depuis 1555 (aupara- son collective -a du roman, on prit ce mot
vant malavedis vers 1500, marobedis en pour un plur. collectif et on lui donna un
1517). Marabout, nom d'oiseau, 1820, est nouveau sing. masc.
un emploi fig., par plaisanterie, en raison
du port majestueux de cet oiseau; on MARC, résidu de fruits, v. marcher.
l’appelle aussi pour cette raison philosophe. MARCASSIN, 1496 (sous la forme mar-
MARAÎCHER, v. le suiv. quesin). Probabl. dér. du radical de mar-
quer, les marcassins portant des rayures le
MARAIS, x11° (écrit mareis). Du fran- long du corps, qui disparaissent après le
cique *marisk, dér. du germ. *mari- « mer, 5e mois de leur vie. Le suff. rappelle celui
lac », cf. angl. marsh ; attesté sous la forme de bécassin, agassin, etc.
mariscus dans des documents mérovin-
giens et carolingiens. — Dér. : maraîcher, MARCASSITE, 1490 (écrit marcasite).
1690, en 1497 la forme picarde marequier; Empr. de l’arabe margachité (d’origine per-
marécage, xive (Froissart), antér. depuis sane) par l'intermédiaire du lat. médiéval
1213 adj., dér. norm. ou picard de l’anc. marchasita, de l’it. marcassita ou de l’esp.
forme maresc, cÎ. maresquiere et mares- marcasila, anc. marcaxila.
quois « marécage », à côté des formes MARCHAND. D'abord marcheant, de-
Îr. mareschiere, mareschoi(s) ; d’où maré-
venu marchand par contraction ; marcheant
cageux, 1532, cf. aussi le dér. maraîchin, représente le lat. pop. *mercätaniem, acc.
« qui appartient au Marais poitevin », 1840, du part. prés. d’un verbe *mercätäre, Sup-
d’où maraîchinage qui désigne notamment posé par l’a. pr. mercadar « commercer »
une certaine manière de s’embrasser des (dér. de mercälus « marché »), le lat. class.
jeunes gens du Marais poitevin. disait mercärt « commercer », mercätor
MARASME, xvie (Paré), d’abord ma- « marchand ». It. mercatanie, esp. merca-
rasmos, 1552. Empr. du grec marasmos dante. — Dér. : marchander, vers 1200,
« consomption ». Sens fig. fin xvirre. propr. « faire le marchand, trafiquer »,
encore usité au xvi® s., d’où le sens plus
MARASQUIN, 1739 (de Brosses : ma- étendu « délibérer » vers le xrve s., etc.,
rasquin de Zara). Empr. de l’it. maraschino, d’où marchandage, 1867, marchandeur,
dér. de (a)marasca « espèce de cerise aigre », 1836 ; marchandise, xr1° (marcheandise), a
avec laquelle on fait le marasquin (de signifié aussi « commerce, marché » jus-
amaro « amer ») ; maraschino provient pro- qu’au xvI° s. comme son concurrent -die.
babl. de la côte dalmate (région de Zara)
où se fabrique le marasquin le plus re- MARCHE « pays de frontière », vers 1080
nommé. (Roland). Empr. du germ. *marka, cf.
all. Mark, fém. « frontière », d’où aussi it.
MARATHON, vers 1900. Le nom de cette esp. a. pr. Mmarca « frontière, pays de fron-
course vient du fait qu’un guerrier qui avait tière ». V. marquis.
combattu à Marathon fit une course rapide
pour porter à Athènes la nouvelle de la vic- MARCHE « action de marcher », v. mar-
toire remportée sur les Perses. cher.

MARÂTRE. Lat. pop. *maätrastra « fem- MARCHÉ. Lat. mercäitus. It. mercato,
me du père », qui a supplanté le lat. class. esp. mercado.
noverca, qui ne subsiste que dans le macédo- MARCHER, vers 1160, au sens de « fou-
roumain nuearcà. Sens défavorable dès le ler aux pieds », sens du verbe au moyen âge,
XIIIe S.; aujourd'hui remplacé au sens d’où celui de «broyer, battre au fléau, etc. »,
propre par belle-mère. Esp. madrastra. des parlers de l’Est ; le sens moderne paraît
MARAUD, xve. Peut-être emploi méta- dater du xves. Du francique markôn « mar-
phorique de maraud, nom du matou dans quer, imprimer (le pas) ». A. pr. marcar
« fouler aux pieds, marcher » ; l’it. marciare
les parlers du Centre et de l'Ouest, qui
aura pu être pris au sens de « vagabond ». « marcher » et l’esp. marchar « id. » viennent
Quant à maraud « matou », c’est un mot du fr., de même l’angl. io march, l’all.
qui imite le ronron des chats ou le miau- marschieren ; marcher s’est répandu ainsi
lement des chats en rut, v. marmonner. depuis le xvi° s. comme terme militaire. —
V. marlou. — Dér. : marauder, 1549; Dér. et Comp. : marc de raisin, d’après le
maraude, 1679 ; maraudage, 1788 ; marau- sens propre du verbe, xv° ; marche, 1375,
deur, 1679. « traces d’un animal », terme de vénerie,
développement de sens parallèle au verbe,
MARAVÉDIS, v. marabout. marche (d’escalier), 1538; d’où contre-
marche, 1626, terme militaire, en 1752,
MARBRE. Lat. marmor. It. marmo, esp. contremarche d’escalier ; marcheur, 1669 ;
märmol. — Dér. : marbrer, xi° (Alexis); démarche, vers 1500, par l'intermédiaire
marbrier, 1311; marbrerie, 1771; mar- d’un verbe démarcher, xn®, propr. « fouler
brière, 1566 ; marbrure, 1680. aux pieds », d’où « marcher », vers le xves.,
encore usité au xvirie s. à la forme prono-
MARC « ancien poids », vers 1138. Du minale se d., d’où démarcheur, début xxe,
francique *marka qu’on suppose d’après le «employé d'établissement financier, chargé
moyen haut all. mark, marke « demi-livre de faire des démarches auprès des clients » ;
d’or ou d’argent », d’où all. Mark, cf. le marchepied, 1330, au sens moderne, au
lat. du 1x°5s. marca ; la terminaison du fran- XI11 et XIVe aussi « sorte d’engin de pêche »
cique *marka correspondant à la terminai- ou « tapis », d’après le sens propre du verbe.
391 MARGUERITE

MARCOTTE, 1538 (écrit marquotie ; en comme margarique, 1816, du grec mar-


outre marquos, plur., 1397 ; marquot, 1555, garon « perle », v. marguerite, à cause de
et, à côté, margolie, 1559). La forme dia- la couleur de cet acide.
lectale margotte (d’où l’it. margotta) étant
plus récente que marcotle, celui-ci ne peut MARGE, 1225. Lat. mago, marginis
guère venir du lat. mergus « provin ». Il « bord, marge ». Le mot lat. est des deux
est plutôt dér. de marcus, donné par Colu- genres, de là aussi quelque hésitation en
melle comme nom d’une espèce de cep usité fr. sur le genre de marge. D’une forme
en Gaule. — Dér. : marcotter, 1551, d’où *marne, non attestée, mais qui serait régu-
marcottage, 1835. lièrement issue de marginem, semble être
dér. le verbe marner, 1716, « dépasser le
MARDI. En a. fr. marsdi et, dans des niveau des hautes eaux », en parlant de la
textes dialectaux, dimars. Lat. martis dies mer. — Dér. : marger, xiv® (Froissart),
« jour de Mars », v. lundi. It. mariedi, esp. margeur, 1730, émarger, 1611, émarge-
martes. — Comp. : mardi gras, xvIe°. ment, 1721.

MARE, vers 1170. Jusqu'au xvi° s. MARGELLE. Lat. pop. *margella, dér.
surtout normand et anglo-normand. De de margo, v. le préc. ; en a. fr. on trouve
l’anc. norois marr « mer ; lac » ; il est vrai souvent les formes altérées marzelle et
que celui-ci est masc., mais l’anglo-saxon mardelle, cette dernière forme encore usitée
mere « lac ; marais » peut lui avoir conféré en berrichon.
son genre fém. MARGINAL, xve; marginer, 1738 (Vol-
MARÉCAGE, v. marais. taire). Dér. sav. du lat. margo, marginis
« marge », v. les préc.
MARÉCHAL, xr1° (mareschauz). Du
francique *marhskalk, cf. anc. haut all. ma- MARGOTIN, 1803 (sous la forme mar-
rahskalk, « domestique (skalk) chargé de coltin). Malgré la première forme du mot,
soigner les chevaux (marah) » et le latin dér., non de marcotte, ce qui ne convient
de la Loi Salique mariscalcus. S’est déve- pas au sens, mais de margot, forme fam.
loppé en deux sens : 1° a pris celui de de Marguerite, qui a souvent dans les par-
lers le sens de « poupée », d’où, par plai-
« maréchal-ferrant », attesté dès 1086,
et qui se retrouve dans l’it. maniscalco, santerie, l'emploi du dér. margoiin pour
d’abord mariscalco (qui paraît venir du désigner un petit fagot, etc., cf.les emplois
gallo-roman) et l’a. pr. marescalc, manes- techn. de marionnelte et au xvi® s. mariolet
« fagot », dér. de l’a. fr. mariole « figurine
calc ; maréchal-ferrant, 1611, est propre au
fr., qui avait plus besoin que les parlers sainte (d’abord de Marie), marionnette ».
pop. de distinguer les sens ; autrefois le MARGOUILLIS, 1630. Dér. du verbe
maréchal était aussi le vétérinaire des che- margouiller « salir », XIV®, au XII° S. MAr-
vaux, et l’est encore dans les campagnes; gouillier et mergouillier. Peut-être dér. du
20 dès le xr1° 5. a servi à désigner diverses lat. mergullus « plongeon (oiseau) », ou
sortes d’officiers. Au sens d’ « officier géné- bien issu d’une comp. tautologique de
ral d'armée » qui apparaît dès le x1r1° s. mare et de l’a. fr. goille « mare, etc. » (encore
(Guillaume le Maréchal), a été empr. par les très répandu dans les patois, probabl. du
langues voisines : it. maresciallo, esp. ma- francique *gullja « mare »). Cf aussi norm.
riscal (d’après la forme du lat. médiéval), manceau marouiller, dér. de marr (v. mare).
all. Marschall, angl. marshal. — Dér. : ma- .
réchaussée, vers 1100 (marechaucie), d’a- MARGOULETTE, 1756 (Vadé). Mot
près la première forme mareschalc ; signifie vulg. dér. de gueule. Le premier élément
« écurie » jusqu’au xv® s. ; le sens de «gen- est probabl. emprunté d’un mot comme
darmerie » s’est développé vers 1700 d’après margouiller, qui a pris, entre autres en
l'emploi de maréchal pour désigner des Normandie, le sens de « manger salement ».
soldats à cheval veillant à la sûreté
publique. D’après le premier sens : maré- MARGOULIN, 1840. « Petit marchand
chalerie, 1533. D’après celui d’ « officier forain », mot pop., tiré du verbe margou-
général du plus haut grade » : maréchalat, liner, usité dans le Bas-Maine au sens
1840. d’ « aller vendre de bourg en bourg », sur-
tout en parlant de femmes qui vendent des
MARELLE, xive (merele) ; au xvri® et mouchoirs ; ce verbe est dér. de margouline
au xvairie s. plutôt mérelle, qui est aussi la « bonnet de femme », donc « aller en mar-
forme la plus usitée au moyen âge. Signifie gouline » (plutôt que « vendre des margou-
propr. « jeton », d’où son emploi pour dési- lines ») et margouline est lui-même une
gner des jeux avec des jetons ou des palets. variante de margoulette, v. le préc., d’après
Fém. de marel, merel, xi1°, vieux mot, en- gouline « sorte de bonnet de femme », dér.
core dans les dict. sous la forme méreau, de goule « gueule ».
mais hors d'usage depuis le xvi® s., « jeton,
palet, sorte de médaille ou de monnaie », MARGRAVE, 1575. Empr. de l’all. Mark-
d’origine obscure. Se rattache probabl. à graf « comte de marche ». — Dér. : mar-
un préroman *marr- « pierre », dont les graviat, 1752.
dér. sont répandus en Italie et dans l’ibéro- MARGUERITE, xzr11e (margerite, comme
roman. nom de fleur; en outre margarile, vers
MARGARINE, 1813. Nom donné par 1200, au sens de « perle »). Empr. du lat.
Chevreul (1786-1889) à cette combinaison margarita « perle » (du grec margarités,
d'acide margarique et de glycérine; dér., d’origine sémitique). Le sens de « margue-
MARGUERITE 392

rite », fleur, s’est développé en fr. Le sens fille » chez Villon : Calvin l’emploie au sens
de « perle », fréquent au moyen âge, a de « figurine sainte » par allusion mépri-
disparu sauf dans la locution, du reste sante à la Vierge Marie.
arch., jeler, semer des marguerites devant MARITAL, 1496. Empr. du lat. marilalis
des pourceaux, introduite au xvi®s., d’après (de maritus, v. mari).
la phrase de l'Évangile : « Ne jetez pas
vos perles devant les pourceaux », Mathieu, MARITIME, 1336. Empr. du lat. mari-
VII, 6. — Comp. : reine-marguerite, XVIIIe. limus ; au xv® et au xvi® s., formes plus
francisées maritin, maritain, au fém. mari-
MARGUILLIER, vers 1460, d’abord mar- laine.
reglier, X11°, d’où marglier, xv°, puis mar-
gueillier, xvi<. Empr. du lat. de basse ép. MARITORNE, 1798, d'abord malilorne,
mairicularius « qui tient un registre », v. 1642. Tiré de Maritorne, en esp. Maritornes,
matricule. Signifie en outre au moyen âge nom d’une fille d’auberge remarquable-
« bedeau, sonneur », sens encore usités. — ment laide dans Don Quichotte, chap. XVI.
Dér. : marguillerie, xvi*, antér. formes MARIVAUDAGE, 1760 (Diderot) ; ma-
variées, depuis le x1r1e (marreglerie, etc.). rivauder, id. Dér. de Marivaux (1688-1763),
MARI. Lat. martius, qui a éliminé wir. en raison du raffinement du sentiment et
Aujourd’hui éliminé lui-même dans le fran- de l’expression, propre à cet auteur.
çais pop. par homme ou, dans l'Ouest,
MARJOLAINE, xvie. Altération de ma-
bonhomme. It. marilo, esp. marido.
riolaine, 1393, la lecture marjolaine est
MARIER. Lat. mariläre. It. marilare, alors inexacte, première altération de maio-
esp. maridar. — Dér. : mariable, x11° ; ma- rane, xiri° (également imprimé à tort ma-
riage, xr1° ; marieur, 1223 ; remarier, 1251. jorane), empr. du lat. médiéval maiorana
(j est également injustifié), d’origine obs-
MARIE-SALOPE, v. sale. cure, cf. it. maiorana, maggiorana, esp.
mayorana, mejorana, a. pr. majorana (avec
MARIGOT, début xix°. Terme de géo- un j dont la valeur est également contes-
graphie, d’origine inconnue. table), dont les rapports avec le lat. ama-
MARIN, adj. Lat. marinus (de mare racus (du grec amarakos) ne sont pas éclair-
« mer »). It. esp. marino. — Dér. : marin, cis. En tout cas la forme du fr. a d’abord
subst., désigne d’abord un officier de ma- été mariolaine, encore usitée en wallon, due
rine, 1718, ensuite un matelot, 1756; à un croisement de maiorane avec Marion
marine, xvIi®, au sens moderne ; au moyen (il a dû y avoir une forme *marionaine) et
âge signifie « plage, littoral », sens encore elle n’a pu devenir marjolaine qu’au xvr®s.,
relevé au x1x° s., comme l’it. esp. marina ; quand les imprimeurs ont introduit j dans
au sens de « tableau représentant une scène le lat. majorana, d’où on a fait ensuite
de mer », 1626 ; de marine « eau de mer » marjolaine, d’abord dans la langue écrite.
ou « poisson de mer », sens attestés au xve MARJOLET, v. mariole.
et au xvies., est issu mariner, 1546 (Rab.), MARLOU, 1821. Terme vulgaire signi-
d’abord au part. passé, depuis 1636 comme fiant « souteneur », emploi fig. de marlou
verbe, cf. aussi mariné « gâté par l’eau de «matou », répandu dans les parlers septen-
mer », 1690, d’où marinade, 1651 ; mari- trionaux. V. maraud.
nier, 1137 « marin »; le sens de « qui
conduit un bateau sur une rivière », 1524. MARMAILLE, v. marmot.
— Comp. : sous-marin, adj., 1555, rare MARMELADE, 1642 (écrit marmellade :
avant le xvrrre s. ; 1875, subst. antér. mermelade, 1573). Empr. du port.
marmelada « cotignac », dér. de marmelo
MARINGOUIN, 1614 (1579, maringon). « coing », lat. melimëlum c« sorte de pomme
Empr. du tupi ou du guarani (Brésil), où
douce » (du grec melimélon) ; l'esp. a égale-
ce moustique est appelé maruim ou mba-
rigui. ment empr. mermelada, mais on ne peut
affirmer qu'il ait été l'intermédiaire entre
MARIOL(LE), 1827. Terme d’argot de- le port. et le fr.
venu pop. ; «roublard, rusé, malin ». Paraît MARMENTEAU, 1508 (écrit marmen-
être le même mot que l’a. fr. mariole « figu- lau). On dit surtout bois marmenteau.
rine sainte, marionnette, poupée », v. mar- Terme techn., propr. anc. adj. en -al, dér.
gotin, pris dans un sens péj.; cette étymo- de l’a. fr. merrement, 1308, pour mairre-
logie est appuyée par celle de marjolet « fre- ment, lat. pop. *maïeriämentum « bois de
luquet », aujourd’hui hors d'usage, ancienn. construction », conservé seulement en fr.,
mariolel, cf. mariaulet en 1704, considéré dér. de *maleriämen, v. merrain.
comme dér. de l’anc. mariole et devenu
marjolet dès le xv® s., probabl. par croi- MARMITE, 1313. Substantivation de
sement avec marjolaine, les marjolets (ou l’adj. marmite « hypocrite », vers 1200 (v.
damoïseaux) étant de ceux qui pouvaient le suivant), qui s'explique par le fait que la
« aller la nuit resveiller les pots de marjo- marmite profonde et couverte d’un cou-
laine (c’est-à-dire donner des sérénades) ». vercle cache son contenu aux enfants
Mariol « filou » est un autre mot emprunté curieux. Remplace l’a. fr. oule, eule, du
au xvi® s. de l’it. mariolo. lat. olla. L'adj. marmite est né d’une
composition du radical marmouser « mur-
MARIONNETTE, 1517. Dér. de Marion, murer » (V. marmonner) avec rnite, nom de
dim. de Marie, cf. mariotie, au même sens, caresse de la chatte dans le Roman de
au xve et au xvie s. et au sens de « petite Renart. Le franç. partage avec d’autres
393 MARQUER

langues le radical onomatopéique mi- MARNE, 1266, d’après la forme latinisée


suivi d’une consonne pour désigner le marna. Altération de marle, encore usité
chat par l’imitation de sa voix, comp. all. au xvi® s. et aujourd’hui dans des patois,
mieze, it. micio, esp. mizo. Marmite a du gaulois margila, dont le simple marga
servi à désigner pendant la guerre de est chez Pline, d’où it. esp. marga ; cf. aussi
1914-18 (aussi déjà en 1745 et 1855) les all. Mergel, angl. marl. — Dér. : marner,
obus, d'où marmiter, vers 1915. — Dér. : vers 1207 (marler dans un texte normand),
marmiton, 1523. marnage, 1641 ; marneux, vers 1520 ; mar-
nière, vers 1230 (sous la forme marliere).
MARMITEUX, xu°. En a. fr. « hypo-
crite ». Dér. de l’a. fr. marmite, employé MARNER « dépasser le niveau ordinaire
surtout dans la locution faire le marmite des hautes eaux », v. marge.
« faire l’hypocrite », d’origine incertaine;
MARONAGE, terme techn. des forêts,
marmile est une contamination de l’a. fr.
mile « chat », mot onomatopéique, et du v. merrain.
verbe marmonner « murmurer ». Cf. chatte- MARONNER, 1743. Terme fam., d’ori-
mite. gine dialectale, qui signifie « miauler » en
MARMONNER, 1534 (Rab.). Beaucoup normand et ailleurs ; dér. d’un nom du
de langues indo-européennes possèdent une chat, v. maraud et marmonner.
famille de mots onomatopéiques qui expri- MAROQUIN, 1490. Dér. de Maroc, nom
ment, avec ou sans réduplication, au du pays où cette peau s’apprêtait d’abord.
moyen de la voyelle x ou a, le murmure, — Dér. : maroquiner, 1701 ; maroquinier,
ainsi lat. murmurare, all. murren, norv. vers 1700 ; maroquinerie, id.
marma « bruire », suéd. marra «murmurer ».
Le franc. possède la forme avec ou sans MAROTIQUE, 1585. Dér. du nom du
-m-, et avec plusieurs suffixes. De là poète Clément Marot (1495-1544).
marmoiier, marmuser, marmouser au XV°S., MAROTTE, 1468, au sens de « figure
marmonner au XVI®, sainte » ou de « poupée » : « L’accouchée
MARMORÉEN, 1838. Dér. sav. du lat. est dans son lit, plus parée qu’une espou-
marmoreus « de marbre (marmor) ». sée., tant que vous diriez que c’est la
teste d’une marote ou d’une idole » (J. Cas-
MARMOT, 1493, au sens de « singe » en- tel) ; sens moderne au xv® s.; le sens de
core usité au xvi115.; a pris le sens de «petit « poupée » est encore usuel dans les parlers
enfant » dès 1640. Semble tiré du verbe du Nord. Dim. de Marie, cf. mariole et
marmoller, à cause des mouvements conti- mariotte.
nuels que les singes font avec leurs babines ;
le fém. marmole « singe » est attesté du MAROUFLE « maraud », 1534 (Rab.).
xIIIe au xve s.; a été fait masc. pour le Autre forme de maraud, attestée au sens
distinguer de marmolle. La locution croquer de « gros chat » en 1611 et encore usitée
le marmot (ou le marmouset), 1690, n’est au sens de « matou » dans plusieurs parlers.
pas claire ; peut-être est-ce simplement une
périphrase pour marmonner, Marmouser. — MAROUFLE « colle forte », 1688 (sous
Avec changement de suff. : marmaille, la forme marouf). Probabl. forme fém. du
1560. précédent employée par plaisanterie par
les peintres en bâtiment pour désigner la
MARMOTTE, vers 1200. Peut-être tiré . colle. — Dér. : maroufler, 1746 ; marou-
de marmolier, cf. le préc., bien que ce verbe flage, 1876.
ne soit attesté que depuis le xv® s., mais
un tel mot pouvait vivre dans les parlers MARQUER, vers 1510. Forme dialec-
pop., sans être enregistré dans la langue tale ; l’a. fr. avait merch(i)er « marquer »,
écrite, cf. l'indication de Buffon : « Elles encore usité au xvi® s., dér. de l’anc. scan-
le boivent (le lait) en marmottant »; l’it. dinave merki « marque », cf. anc. haut all.
marmoitta et -o et l’esp. marmota viennent merken, all. merken « marquer, remarquer » ;
du fr. Marmotte n’a pas de rapport direct la voyelle a est due au verbe marcher qui
avec le lat. mus montänus, propr. « rat des signifiait alors « presser », cf. aussi marcher
montagnes », de Polemius Silvius, sur au sens de « marquer » au Xv° 8. ; marquer
lequel sont refaites les formes du xvre s. a pu subir aussi l'influence de l’it. marcare
marmontaine, marmotaine. Le sens de « marquer », de même famille ; celui-ci dé-
« sorte de coiffure de femme », 1829, s’ex- rive de marca « marque », d’un mot germ.
plique par le fait que cette coiffure nouée *marka, correspondant à l’all. Marke « si-
sur la tête a deux coins qui se détachent gne », dont le prototype est à la base du
comme les oreilles des marmottes. verbe germ. *markôn (anc. nor. marka,
angl. mark), cf. de même esp. a. pr. marca.
MARMOTTER, v. marmonner. L'a de ces différentes formes est dû pro-
MARMOUSET, 1310 : Rue des Marmou- babl. à celui de marca « frontière », v.
sets, ainsi nommée à cause des figures gro- marche. — Dér. et Comp. : marque, 1483 ;
tesques qui s’y trouvaient, cf. duo marmo- en a. fr. merc et merche, parfois aussi marc
seti lapidei dans un texte de 1280 se rap- au xve s., d’où contremarque, 1463. Mar-
portant à cette rue ; sens encore usité au que, au sens anc. de « représailles », 1339,
xvir1e 8., d’où celui de « petit garçon » dès parfois aussi marche, xive, d’où lettre de
. le xve s. Variante de marmoi d’après le marque, est empr. de l’a. pr. marca (attesté
verbe marmouser ; il n’est pas nécessaire dès le xr1e s.), qui a pris ce sens spécial de
de supposer que marmouset ait eu le sens de « saisie (qu’on signalait par une marque),
«singe », étant donné l’existence de marmol. représaille »; en lat. médiéval marcare et
MARQUER 394

marca apparaissent en ce même sens de en renferme plusieurs. La locution tirer


« saisir, faire une saisie », propr. « faire une les marrons du feu a été répandue par la
marque de saisie » dès le xr1° s. ; il repré- fable de La Fontaine, Le Singe et le Chat,
sente le gothique *markôn qu'on est en IX, 17. — Dér. : marronnier, 1560.
droit de postuler d’après l’anc. nor. marka
« marquer la propriété de qn »; marqueté, MARRON « esclave nègre fugitif », 1667
1379 (on trouve rarement -er, etc.), mar- (1579, cimaroni). Altération de l’esp. d’Amé-
queterie, 1416 ; marqueur, 1575 ; marquoir,
rique cimarrén, dér. de l’anc. esp. cimarra
1771 ; démarquer, xvi® (Ronsard) ; remar- « fourré », qui se disait peut-être d’abord
quer, xvi®, antér. remercher, remerquier, des animaux domestiques qui se sont en-
x1ve (forme picarde), on a encore remarcher fuis dans les bois, puis des esclaves fugitifs.
au xXvI° s.; d’où remarque, xvi®, en outre Le sens péj. de « personne qui exerce une
remerche, 1505 ; remerque, xXvVI°; remar- profession sans titre » est propre au fr. et
quable, 1547. date du x1x® s. (relevé depuis 1832).
MARRUBE, 1387 (alors marrubre). Em-
MARQUIS, 1227. Réfection de l’a. fr. pr. du lat. marrubium; l’a. fr. a une forme
marchis, xr1°, dér. de marche « frontière », pop. maruge (lire marouge).
d’après l’it. marchese, de même formation ;
d’abord seulement d'’Italiens, depuis le MARS. Lat. martius (mensis). It. esp.
xvIes. aussi de Français. — Dér. : marquise, marzo. La locution (arriver) comme mars
xvIe, au x11° s. marchise ; depuis le xviries. en carême, apparaît dès le xIv® s., on a dit
« tente de toile tendue au-dessus de la tente aussi comme marée en carême, mais, Semble-
d’un officier », ainsi nommée parce qu'elle t-il, postérieurement.
se distingue des autres (marquis a pris un
sens légèrement défavorable que n’ont pas MARSAUX, v. saule.
les autres titres de noblesse), d’où, au MARSOUIN, 1385 (écrit massouyn et
XIXE s., « sorte d’auvent ». — Marquisat, marsouyn, à Dieppe). Empr. du mot dano-
1474. Empr. de l’it. marchesato, adapté
suédois marsvin, littéral. « porc de mer »,
à marquis. cf. de même all. Meerschwein.
MARRAINE. Lat. pop. *matrina, dér.
MARSUPIAL, 1736. Dér. sav. du lat.
de maäier, « mère ». La substitution du suff.
-aine est antérieure aux premiers textes. marsupium « bourse » (du grec marsipion).
It. esp. madrina. V. commère, parrain. MARTAGON, 1562. Empr. de l’esp.marla-
MARRE, « houe de vigneron », 1265, gôn, lequel vient probabl. du turc martagan
dans un texte de l’Orléanais. Mot dialectal, « sorte de turban ». Comp. tulipe.
usité aujourd’hui surtout dans la région de MARTEAU. Lat. pop. *martellus, du
l’Orléanais, du Centre et de l'Ouest, lat. lat. impérial martulus ; martulus est une
marra, d'où aussi it. esp. marra. — Dér. : altération de marculus (dont marcus « mar-
marrer, XIII. teau » est une réfection tardive) par hyper-
urbanisme, sur le modèle du lat. class. vetu-
MARRE, 1896, dans en avoir marre «en lus en face du lat. pop. vetus « vieux ». Fam.
avoir assez », subst. verbal de se marrir au sens de « fou » (qui a reçu un coup de
« s’ennuyer », a. fr. « s’affliger ». V. le marteau sur la tête), depuis 1882. — Dér. :
suivant. — Dér. se marrer, d’abord terme marteler, xr11° (J. de Meung), d’où, d’après
d’argot au sens de «s’ennuyer », 1886, puis, un sens fig. de « soumettre à un effort
par antiphrase, « se tordre de rire », 1920 ; pénible », martel « inquiétude », xvi®, en-
marrant « amusant », 1920.
core usuel au xvir®e, aujourd’hui seulement,
MARRI, 1160. Part. passé de l’anc. verbe dans se meltre martel en tête; martelage,
marrir « affliger », du francique *marrjan, 1530 ; marteleur, xrr1° ; martellerie, vers
cf. gotique marrjan « fâcher », d’où a. pr. 1500, d’abord « choc des armes » ; marte-
marrir, it. smarrire « égarer ». L’adj. survit let, xirie (J. de Meung).
aussi en prov. au sens de « mauvais » et, MARTIAL, 1511. Empr. du lat. martia-
par un développement notable, au sens de lis « qui concerne Mars, dieu de la guerre » ;
« fils, fille » dans les Hautes-Alpes. loi martiale date d’une promulgation de
l’Assemblée Constituante, le 21 octobre
MARRON « grosse châtaigne », 1537. 1789 ; cour martiale a été fait ensuite.
Mot venu de la région lyonnaise, cf. marron
de Lyon, 1544, qui se retrouve dans le MARTINET, espèce d'hirondelle, 1530.
milanais marrone. Dér. probabl. du même Dér. du nom propre Martin, qui représente
radical préroman que marelle, v. celui-ci. peut-être saint Martin, sans qu’on sache
On le rattache aussi au franco-prov. la raison de cette dénomination, cf. oiseau
marron « guide (surtout sur le Grand- Saint-Martin au sens de « martin-pêcheur »
Saint-Bernard) », toscan marrone « homme en a. fr. ; se retrouve dans l'esp. pdjaro de
expert qui en secourt un autre peu expert », San Martin ; si Saint-Martin a été substi-
lesquels pourraient être un reflet de l’étrus- tué postér. à Martin, martinet est formé
que maru désignant une charge dans le comme sansonnel, etc. A signifié aussi
sacerdoce de ce peuple (le nom d'homme « martin-pêcheur » au xvie s. (Ronsard),
romain Maro s’y rattache probablement). d’où, pour mieux distinguer les deux espè-
Le rapport conceptuel consisterait alors ces, martinet pêcheur en 1553 et encore
dans le fait que le marron, très gros, ne Acad., 1762 ; aujourd’hui martin-pêcheur,
contient qu’un fruit dans la même bogue, depuis 1680. Martelet « martinet » de plu-
tandis que celle de la châtaigne commune sieurs dialectes est une autre désignation
395 MASSE

qu’il n’y a pas lieu de considérer comme MAS, 1552 (Rab.). Terme méridional,
ayant précédé mariinel, qui en serait une popularisé par les ouvrages de Mistral. Le
altération par substitution de suff.; le prov. mas représente le lat. ma(n)sum,
contraire serait plus probable. neutre pris substantiv. de mansus, part. de
manère « demeurer », v. manoir.
MARTINET, mot techn. aux acceptions
diverses : 1° « lourd marteau à bascule », MASCARADE, 1554. Empr. de l’it. mas-
1315 ; en outre, au moyen âge, « machine carala, autre forme de mascherata, v. mas-
de guerre pour lancer des pierres ». Pro- que.
babl. dér. de Martin, suivant un procédé
fréquent pour désigner des objets, v. mer- MASCARET, xvie (Palissy). Empr. du
lin ; 2° « fouet à plusieurs lanières » et gascon mascaret, propr. « (bœuf) baï brun »
« cordage de marine »; tous deux début (dér. de mascara « mâchurer »), dit par
xix*, Soit emploi métaphorique de marti- comparaison des flots que le mouvement
net aux sens préc., soit dér. de Martin, pris du mascaret fait soulever avec le mouve-
par plaisanterie au sens de « bâton », cf. ment ondulant des bovins quand ils cou-
Martin-bélon chez La Fontaine, Fables, rent, Cf. prov. biou d’aigo, littéral. « bœuf
IV, 5 (se trouve déjà dans une sotie de d’eau » au sens de « torrent impétueux ».
1536) et Martin, id., VI, 21 (que Jeanne V. mâchurer.
d’Arc employait déjà). On a attribué aussi MASCARON, 1633 (Peiresc). Empr. de
l'invention du fouet à un colonel du l’it. mascherone, v. masque.
xviie s., nommé Martinet ; 3° « chandelier
plat à queue », xvirie. Ainsi nommé par MASCOTTE, 1867. Popularisé par l’opé-
comparaison avec le martinet qui vole les rette d’Audran, représentée en 1880 ; mas-
pattes pliées sous le ventre. coite est empr. du prov. mascoto « sortilège,
porte-bonheur », dér. de masco « sorcière »,
MARTINGALE, vers 1520 (Gringore) : qui paraît continuer masca de même sens,
Chausses à la martingale, chausses dont le de la loi des Longobards, v. masque.
fond s’attachait par derrière, cf. chez
Brantôme, chausses à la martingale autire- MASCULIN, vers 1200. Empr. du lat.
ment à pont levis) ; cf. aussi à la martingale masculinus. — Dér. : masculinité, 1732,
« d’une manière absurde » chez Rabelais une première fois au XIII°S.
et chez Cholières ; les sens modernes se MASOCHISME, fin x1xe. Tiré de Sacher
trouvent dès 1611. Empr. du prov. marte- Masoch, nom d’un romancier autrichien du
galo, fém. de martegal, nom des habitants xixe s., dont les romans traduisent un
de Martigue, petite ville sur l'étang de érotisme d’un caractère pathologique.
Berre, c’est-à-dire « à la manière des habi-
tants de Martigue », parce que les Marti- MASQUE «faux visage dont on se couvre
gaux, qui vivent à l’écart des autres Pro- la figure », 1511 ; au xve s. on disait faux
vençaux, sont souvent tournés en ridicule visage. Empr. de l’it. maschera, d’où aussi
par leurs voisins. Le rapport qu’on a voulu esp. mascara. En lat. de basse époque masca
établir avec l'esp. almdrlaga « sorte de « sorcière, incube » est attesté dans un édit
bride » ne s’appuie sur rien. Comme terme longobard de 643, au sens de « masque » en
de jeu, le développement sémantique Angleterre (680) et en Italie (1192). Le
s'explique par le risque absurde qu’on sens de « sorcière, incube » vit encore
court en jouant ainsi. C’est un terme de aujourd'hui dans une partie de l'Italie
l’argot des joueurs. _ et en Sardaigne. Le sens premier est sans
doute celui de « démon » ou de « masque
MARTIN-PÉCHEUR, v. martinet. qui représente un démon ». Le mot doit
MARTRE, vers 1080 (Roland); en être prélatin. D’un dér. *mdskaro « noirci
outre marie, depuis le xvie s. Du germ. avec de la suie (pour ne pas être reconnu
*marpor, Cf. all. Marder. It. martora, esp. ou pour passer pour un spectre) » vient
maria. l’a. fr. mascherer, voir mâchurer. Masque,
conformément à l'it., est parfois fém.
MARTYR, xi° (Alexis) ; martyre, vers
au xvie s.; cf. aussi l’all. Maske, fém. —
1080 (Roland) ; martyriser, 1138 ; marty-
Dér. : masquer, 1539 ; démasquer, 1564.
rologe, 1325. Empr. des mots du lat. eccl.
martyr (du grec martyr, plus ordinairement MASQUE fille, femme effrontée », 1642.
mariys, propr. « témoin », qui a été pris au Empr. du prov. masco, v. mascotte.
sens de « témoin de Dieu » dans le Nouveau
Testament, d’où, plus tard, « martyr »), MASSACRER (vers 1165, macecler ;
mariyrium (du grec martyrion), et des mots machecler en anc. picard). Représente très
du lat. médiéval mariyrizare, martyrologium probabl. un ancien *malleucculare, dér. de
(fait sur le modèle de mots tels que eulo- *malleuca, Voir massue. — Dér. : massacre,
gium, v. éloge). Au moyen âge on trouve vers 1100, rare avant le xvi® s., massa-
parfois la forme martre « martyr », cf. aussi creur, 1572 ; massacrement, 1574.
Montmartre, du lat. médiéval mons mar- MASSE «réunion de choses ». Lat. massa,
tyrum « mont des Martyrs », ainsi nommé propr. « masse de pâte », d’où nombreux
en souvenir de saint Denis et de ses deux sens fig., y compris celui de « foule » (du
compagnons, et substitué au 1x° s. à grec maza). It. massa, esp. masa « pâte ».
monte Mercori «mont de Mercure ». V. tirer. — Dér. : masser, xrr1° ; massif, adj., 1480 ;
. MARYLAND, 1762. Empr. de l’anglo- mais le moyen âge dit surtout massis, pris
américain maryland, du nom d’un des substantiv. dès le xive s. comme terme
États-Unis, qui produit cette sorte de de construction, de là notre massif ;amas-
tabac. ser, vers 1100, amas, xive (Froissart),
MASSE 396

ramasser, fin xve (Commynes, une 1re fois MASTODONTE. Mot créé par Cuvier,
en 1213), ramas, 1549, ramasseur, vers en 1812, avec les mots grecs masios « ma-
1508, ramassis, xvr1° s. (Mme de Sévigné). melle » et odous ,odontos « dent », à cause
des mâchelières mamelonnées de ce fossile.
MASSE, espèce de gros marteau; d’a-
bord mace. Lat. pop. *maltia, tiré de ma- MASTOÏDITE, 1855. Dér. de mas-
leola, outil agricole mal défini. It. mazza, toïde, terme d'anatomie, xvi° (Paré), empr.
esp. maza. — Dér. : masser, terme du jeu du grec mastoeidés, littéral. « qui a l'appa-
de billard, 1867 ; massette, nom de plante, rence (eidos) d’une mamelle (masios) ».
1778 ; massier, vers 1350 (sous la forme
picarde machier). MASTROQUET, 1849. Mot pop. d'ori-
gine obscure ; un rapport avec mastoc est
MASSEPAIN, 1449. Altération, d’après des plus douteux. On abrège aussi en
masse, de marcepain, encore en 1636, alté- troquet.
ration qui s’est peut-être produite d’abord
en a. pr. où massapan est attesté dès 1337 ; MASTURBER, 1800; masturbation,
empr. de l’it. marzapane. De l'arabe mau- 1580 (Montaigne). Empr. du lat. mastur-
fabän « roi assis », nom d’une monnaie en bare, -atio.
circulation dans l'Orient pendant les croi-
sades, sur laquelle était figuré le Christ MASURE. Lat. pop. *ma(n)süra « de-
assis. Vers 1193, les Vénitiens imitèrent meure », v. maison, mas. Usité en ce sens
cette monnaie sous le nom de malapan. Ils au moyen âge, cf. en normand le sens de
désignèrent par la suite du même nom une « bâtiments avec un verger »; péjor. vers
redevance de 10 % qu'ils levèrent en le xve s.
Chypre et enfin une boîte qui contenait MAT, adj., xri°, au sens d’ « abattu,
un dixième de muid. Par suite des rapports affligé », usuel jusqu’au xvi® s.; d’où
commerciaux entre l'Italie Méridionale et « flétri » en parlant du feuillage (cf. matir
le Midi de la France, le mot passa avec d’après ce sens au xr1° s.), « sans éclat,
cette acception en France ; et aux x1v® et sombre » en parlant du temps, 1424, sens
xve s. en prov. et en fr., il a le sens de proches de « terne », sens dominant aujour-
« boîte de luxe pour confiserie ». Ce n’est d’hui, relevé en 1621. Lat. maittus (dans
qu’à partir de 1544 que le mot désigne le Pétrone pour désigner quelqu'un qui a le
contenu même de la boîte. vin triste), peut-être pour *maditus, part.
MASSER « soumettre le corps au mas- passé de madèêre « être humide »; comp.
sage », 1779, dans un récit de voyages aux dans Isidore de Séville maïtus « humectus,
Indes. Empr. de l’arabe mass « toucher, emollitus, subactus ». Vit aussi dans l’it.
palper » ; la pratique du massage est venue matto « fou » et dans l'esp. port. matar
des pays d'Orient. — Dér. : massage, 1812 ; « tuer ». Il n’a rien à faire avec le terme du
masseur, 1779. jeu d’échecs mat, qui vient, comme toute
la terminologie de ce jeu de l'Orient, en
MASSICOT « oxyde de plomb jaune », l'espèce de l’arabe mat « mort ». Dans
qui sert à faire le minium, 1480. Altération l’ibéro-roman, celui-ci s’est superposé au
de l’it. marzacotto « sorte de vernis dont se mot roman. — Dér. : mater, « abattre »,
servent les potiers », qui vient lui-même de - XII ; mater, « rendre mat (sans éclat) »,
l'esp. mazacoet « sorte de mortier », anc. 1765 ; matir, v. plus haut ; souvent au sens
« soude », mot dans lequel l’on voit une d’ « abattre » en a. fr., d'où amatir, xri°,
altération de l'arabe schabb-qubti « alun sens parallèles ; matité, 1836.
d'Égypte ».
MAT, terme du jeu d'échecs, v. le préc.
MASSICOT « machine à rogner le pa-
pier », 1877. Tiré du nom de l'inventeur, MAT. Du francique *masi, cf. all. Mas.
Massiquot. — Dér. et Comp. : mâter, 1382 ; mâtereau,
1529 (alors masterel) ; mâture, 1680 ; démä-
MASSUE. D'abord maçue. Lat. pop. ter, 1590 ; trois-mâts, 1835.
*mailiüca, dér. de *maltia, v. masse « mar-
teau ». MATADOR, 1823, au sens moderne ;
depuis 1660, terme du jeu de l’hombre et,
MASTIC, xrr1e. Empr. du lat. de basse au sens fig., « personnage considérable ».
ép. masticum, autre forme de mastiche (du Empr. de l'esp. matador, dér. de matar
grec mastlikhé « gomme du lentisque »). — « tuer », v. mat.
Dér. : mastiquer, xvi®; masticage, 1845;
démastiquer, 1699. MATAMORE, 1630 (D'’Aubigné). Empr.
MASTIFF, 1835 (une première fois mas- de l’esp. Matamoros, nom propre, « tuteur
tive, 1614, dans un ouvrage sur l’Angle- de Maures », v. le préc., faux brave de la
terre). Empr. de l’angl. masliff qui remonte Comédie Espagnole, qui se vante à tout
lui-même à l’a. fr. mastin, v. mâtin. propos de ses exploits contre les Maures.

MASTIQUER « mâcher », 1840; une MATCH, 1827 ; devenu usuel seulement


première fois au xvie s. (Paré ; en outre vers la fin du xix® s., lors du développe-
en 1425 dans un sens fig.); mastication, ment des sports en France. Empr. de
xiie. Empr. du lat. médical masticare, l’angl. maich.
masticatio. MATCHICHE, vers 1904. Nom d’une
MASTOC, 1834 (Balzac, écrit mastok). danse indigène, importée du Brésil; écrit
Terme pop., empr. de l’all. Masitochs aussi maxixe d’après l'orthographe portu-
« bœuf à l’engrais ». gaise.
307 MATRICIDE

MATÉ, 1716 (mali en 1633). Empr., qui ont passé dans le fr. et ont été partielle-
par l'intermédiaire de l’esp., du quechua ment conservées jusqu'aujourd'hui, no-
(langue du Pérou) mati, male, propr. « vase, tamment les acceptions jurid. et théolo-
fait d’une espèce de courge, qui sert pour la gique, v. matériel.
préparation du maté », puis «le maté lui-
même ». MATIN. Lat. maiuiinum, adj. neutre
pris substantiv., tiré de mälütinum tempus
MATELAS, xve s.; d’abord matieras « temps du matin ». Le lat. class. mâäne a
(ue à xvire s. et aujourd’hui dans les survécu dans l’a. fr. main et l’a. pr. man,
parlers de l'Ouest et de l'Est, d’où l’all. qui ont été éliminés par malin. V. demain.
Mairaize). Materas est empr. de l’it. male- — Dér. : matinal, xr1°; matinée, id. ;
rasso, empr. lui-même en Sicile de l’arabe matineux, vers 1350 ; matines, vers 1080
maitrah « chose jetée », d’où « matelas » (du (Roland), tiré de matin sur le modèle du
verbe iarah « jeter »), ainsi nommé d’après lat. eccl. maiutinæ (vigiliæ « vigiles,
l’usage des Orientaux de se coucher sur des veilles »).
coussins jetés, étendus sur le sol. — Dér. : MÂTIN. Lat. pop. *ma(n)suëlinus « ap-
matelasser, 1690 ; matelassier, 1615 (sous privoisé », dér. du lat. class. mansuëlus
la forme malerassier). « id. » (a dû désigner une sorte particulière
MATELOT, xive; en outre matenoli.
de chien, probabl. un chien de garde).
Empr. du moyen néerl. mattenoot, littéral. Empr. par les langues voisines : it. mas-
« compagnon de couche » (il y avait autre- tino, esp. mastin. — Dér. : mâtiner, xr1°,
fois un seul hamac pour deux matelots, propr. « couvrir une chienne de race ».
l’un des deux étant toujours de service;
sens et forme conservés dans le patois de
MATOIS, 1578. Empr. de l’argot des
malfaiteurs, équivalent d'enfant de la
Guernesey mainot « compagnon »); a été
male ; male signifiait en argot « rendez-vous
plus tard repris par le néerl. mairoos, d’où
all. Matrose, etc. — Dér. : matelote, 1660. des voleurs », ainsi maihe chez Villon.
Très probabl. empr. à l’all. dialectal Malte
MATÉRIALISER, 1754; matérialité, « prairie », dès le xive aussi « lieu de réu-
1551 (une première fois en 1470, D.) ; ma- nion ».
térialisme, 1702 ; matérialiste, 1729; une MATOU, 1571; une première fois ma-
première fois en 1553 en parlant de loue dans un proverbe du xir1e s. Peut-être
drogueurs. Dér. sav. du lat. de basse d’origine onomatopéique.
ép. et scolastique malerialis, pour servir
de verbe et de subst. à diverses acceptions MATRAQUE, 1863. Empr. du fr. d’AI-
de matière. gérie, qui l’a empr. de l'arabe algérien
matraq « gourdin », en arabe class. mitragq.
MATÉRIEL, vers 1350, où il est opposé
à formel. Empr. du lat. de basse ép. et MATRAS, « sorte de vase à long col
scolastique materialis ; s'oppose encore à étroit », employé en pharmacie et en chi-
formel dans la langue jurid., comme autre- mie, vers 1500 (matheras). On y voit ordi-
fois dans la langue scolastique. Le moyen nairement un emploi métaphorique, par
âge a aussi employé une forme plus comparaison de la forme, de l’a. fr. mairas,
proche du lat., material (dès 1300), d’où xv° (matiras), antér. maleras, xiv® et plus
a été tiré le plur. matériaux, xv°, pour un souvent, par altération, malelas, xu°,
sens concret; de même matériel, Prise « sorte de long dard lancé par l’arbalète »,
substantiv. depuis le xXvIrI° s., rare aupa- qui paraît dér. de matara « sorte de jave-
ravant, a reçu au xixe des acceptions line », d'origine gauloise ; le maintien du à
concrètes. dans mai(e)ras peut s'expliquer par une
forme mattara ; l’a. pr. matraïz serait empr.
MATERNEL, vers 1370 (Oresme). Dér. du fr. Toutefois l'arabe a un mot mafara
sav. du lat. maternus. — Dér. : maternité, (forme vulg. meira) « outre, vase », qui
vers 1470, sur le modèle de paiernilé, conviendrait autant (la terminaison -as
fraternilé. serait due à une altération d’après matras,
MATHÉMATIQUE, adj., xire (B. La- nom d’arme). On sait que l’alchimie doit
tini). Empr. du lat. mathematicus (du grec une grande partie de son vocabulaire à
mathématikos, propr. « qui concerne la l’arabe.
science (mathéma) », puis spécialisé). Pris MATRICAIRE, 1539. Dér. sav. du lat.
substantiv. dp. 1265 ; s’est dit aussi au matrix, matricis « matrice »; cette plante
sing. jusqu’au xvire 8. — Dér. : mathé- a été ainsi nommée parce qu'elle a été
maticien, 1370 (Oresme). employée comme emménagogue.
MATIÈRE, 1119 ; la forme malière indi- MATRICE, 1265 (B. Latini), au sens
que que le mot est usité depuis une époque propre. Empr. du lat. matrix, mairicis, qui
très reculée ; c’est un de ces mots que les a déjà pris à l’ép. impériale le sens de
milieux savants ont toujours employés. « registre »; les autres emplois du fr. se
Empr. du lat. malteries qui signifiait propr. sont développés depuis le xvire s.; ainsi
« bois de construction », cf. merrain, et a au sens de « moule pour fondre des mon-
pris divers sens abstraits, notamment un naies », en 1611. À éliminé l’a. fr. marriz,
sens philosophique, sur le modèle du grec encore au XV° 5.
hylé « bois de construction », puis « ma-
tière » ; outre ces sens, maleries a pris dans MATRICIDE, 1521. Empr. du lat.
la langue scolastique diverses acceptions mairicidium.
MATRICULE 398

MATRICULE, 1460, au sens moderne; moyen breton milhuit est probabl. empr.
en 1566, au sens de « bourgeon ». Empr. du fr.; le mot paraît avoir circulé, cf.
du lat. de basse ép. matricula, cf. le préc. angl. mavis, esp. malvis. — Dér. : mau-
et immatriculer. viette, 1694.
MATRIMONIAL, xive. Empr. du lat. de MAXILLAIRE, 1488. Empr. du lat.
basse ép. matrimonialis, dér. de matrimo- mazxillaris (de maxilla, v. mâchelier). —
nium « mariage » (de maier « mère »). Comp. : sous-maxillaire, 1745.
MATRONE, vers 1240 ; pris parfois au
sens de « sage-femme », depuis le xvies. MAXIME, 1539, une première fois au
Empr. du lat. mairona « mère de famille, xIvVe s. Empr. du lat. médiéval maxima
dame » (de maïer « mère »). (sous-entendu sententia), littéral. « sen-
tence la plus grande », d’où « générale ».
MATURATION, vers 1400. Dér. sav. du
lat. maturare « mûrir ». MAXIMUM, 1718. Empr. du lat. maæi-
mum, adj. neutre pris substantiv. « ce qui
MATURITÉ, 1496. Empr. du lat. maltu- est le plus grand, le plus haut degré » (de
ritas, V. mûr ; a éliminé meürié, usuel jus- maximus, superlatif de magnus « grand »).
qu'au XVI°Ss.
MAYONNAISE, 1807. Passe pour être
MATUTINAL, arch., littéraire, 1798; tiré de Mahon (ou Port-Mahon), capitale
quelquefois attesté depuis le xrr° s. Dér. de Minorque ; aurait été ainsi nommée en
sav. du lat. malutinus. souvenir de la prise de Mahon par le duc
de Richelieu, en 1756 ; toutefois on s’étonne
MAUDIRE, vers 1080 (Roland). Empr.
que le mot n'ait été enregistré qu’à une
du lat. eccl. maledicere « maudire », en lat.
date très postérieure à cet événement.
class. « dire du mal de »; a éliminé une
forme autrement développée maleir, v. MAZAGRAN, café froid auquel on ajoute
bénir. de l’eau-de-vie, 1866. Tiré de Mazagran,
nom d’un village d'Algérie (Oran) ; ainsi
MAUGRÉER, v. gré. nommé en souvenir du siège que soutint
MAUSOLÉE, 1544. Empr. du lat. le capitaine Lelièvre avec 123 Français
mausoleum (du grec mausoleion, célèbre contre 13 000 Arabes en 1840.
tombeau élevé pour Mausole, roi de Carie, MAZETTE, 1622, au sens de « mauvais
par sa veuve Artémise, au 1v° s., à Hali- cheval »; d’où « personne inhabile à un
carnasse); déjà employé à Rome pour jeu », 1640. Pour le développement du
désigner des tombeaux monumentaux, par sens, CÎ. criquei, XVII® « mauvais cheval »,
exemple les mausolées d’Auguste et d’'Ha- d’où « petit homme ». Très probabl. emploi
drien. métaphorique du normand et franc-com-
MAUSSADE, 1370 (Oresme). Comp. de tois mazelle « mésange ». Le mot mésange
l’adv. mal et de l’anc. adj. sade, hors lui-même a été employé pour désigner des
d'usage depuis le xvi® s., « agréable », en animaux domestiques ou des personnes
parlant de choses ou de personnes, lat. (p. ex. picard « méchante femme »).
sapidus « d’une saveur agréable » (de sapere MAZOUT, 1907. Empr. du russe mazout,
« avoir de la saveur », v. savoir) ; cf. a. pr. qui semble venir de l'arabe makhzulat
sabe et sade. Sade survit dans la région « déchets ».
lyonnaise et dans quelques parlers méri-
dionaux. — Dér. maussaderie, 1740; MAZURKA, 1829 (alors -ourka). Empr.
au xXvI® s. maussadelé. du polonais mazurka, nom d’une des danses
nationales de la Pologne ; v. polka.
MAUVAIS. Lat. pop. malifatius, attesté
à basse ép., propr. « qui a un mauvais sort ME, MOI, TE, TOI, SE, SOI. Lat. me,
(fätum) », cf. le nom propre Bonifatius et lé, se; me, te, se se sont développés en
l’adj. de basse ép. bonifatus et, pour le position inaccentuée, moi, ioi soi en posi-
développement du sens, méchant. A. pr. tion accentuée après des prép.
malvatz ; l’it. malvagio « méchant » vient MÉ-, préf., v. moins.
du gallo-roman et l’esp. malvado de malvat,
autre forme de l’a. pr. L’a. fr. mais, forme MEA-CULPA, 1560. Mots lat. signifiant
raccourcie de mauvais, est encore usité « par ma faute », premiers mots du Confi-
dans quelques parlers. L’anc. dér. mau- leor, prière de l’Église catholique, par la-
vaistié, usité jusqu’au début du xvire s., quelle le pénitent confesse ses fautes.
se dit encore dans des parlers septentrio-
naux. MÉANDRE, 1552. Empr. du lat. Mæan-
der (du grec Maiandros, fleuve de l’Asie
MAUVE. Lat. malva. It. esp. malva: Mineure, aujourd’hui Mendereh, célèbre par
dans les parlers de l'Est, la mauve est ses sinuosités) ; déjà pris au sens de «sinuo-
désignée par des dér. de fromage, à cause sité » en grec et en latin.
de la forme du fruit.
MÉAT, xvie (Paré). Empr. du lat. meatus
MAUVE, v. mouette. « passage, canal » (de meare « passer ») ;
MAUVIS, vers 1170. Désigne d’abord, une première fois empr. sous la forme
en anglo-norm., un oiseau aquatique. meale, vers 1500, au sens général de « pas-
Probabl. dér. de mauve, v. mouette. Le sage ».
mauvis ressemble à la mouette par la cou- MEC « souteneur, gaillard », attesté en
leur claire du plumage de sa poitrine. Le 1827 dans l’argot ; origine inconnue.
399 MÉDUSE

MÉCANIQUE, adj., 1265 (B. Latini); MÉDIAN, terme techn., 1425 (Mediaine,
subst. fém., 1559 (Amyot). Empr. du lat. c'est une vaine du bras). Empr. du lat. de
mechanicus, mechanica (du grec mékhani- basse ép. medianus, v. moyen.
kôs, mékhaniké (sous-entendu tekhné « art »),
de mékhané « machine ») ; mécanique (fém.), MÉDIATEUR, xrrie (J. de Meung);
qui a souvent au xvirre s. le sens de « mé- médiation, xir12. Empr. du lat. de basse
canisme », a pris aussi alors, sous l’in- ép., relevé surtout chez des auteurs eccl.,
fluence du développement des techn. in- mediator, mediatio (du verbe de la même
dustrielles, un sens plus concret de « ma- langue mediare « s’interposer », de medius
chine considérée dans son fonctionne- « qui est au milieu »).
ment ». En outre, terme de mathématiques MÉDICAL, 1534 (Rab.); médicament,
depuis le xvrie s. Mécanique a été employé 1314 ; médicamentaire, 1734, une première
comme subst. masc. ou adj. au xv® et au fois en 1559 ; médicinal, vers 1200, a éli-
Xvi® s. au sens d’ « artisan, d’artisan ». — miné l’a. fr. mecinal, mecinel, au xvre et
Dér. : mécanicien, 1696, d’après mathéma- au XVIIe s. on a parfois médecinal d’après
ticien, etc., d’abord dans un sens scienti- médecin ; médication, 1503. Le premier est
fique; le sens s’est ensuite développé d’a- un dér. sav. du lat. medicus, les autres sont
près mécanique ; mécaniser, XvVI°, a pris le empr. de medicamentum, medicamentarius,
sens d’ « ennuyer » au xix° s. (1823); medicinalis, medicatio. — Dér. : médica-
mécanisme, 1701. menter, 1518; -teux, 1549, d’après le lat.
medicamentosus.
MÉCÈNE, 1680 (mécénas dès 1526).
Tiré de Mecenas, nom du célèbre ministre MÉDICASTRE, 1812, (en 1560 le dér.
d’Auguste, protecteur des lettres et des médicastrie). Empr. de l'it. medicastro,
arts ; déjà pris comme nom commun en péj. de medico « médecin ».
lat. — Dér. : mécénat, 1867. MÉDIÉVAL, 1874; médiéviste, 1867.
MÉCHANT, v. choir. Faits sur le lat. medium aevum « époque
qui se trouve au milieu » auquel on a donné
MÈCHE. Lat. pop. *micca, altération le sens de « moyen âge ».
gallo-romane, par croisement avec muccus MÉDIOCRE, 1495; médiocrité, 1314.
« morve, mucus nasal », du lat. class. myxa Empr. des mots lat. mediocris, mediocritas
« mèche de lampe » (du grec myæxa « id. », (de medius « qui est au milieu »), qui
propr. « mucus nasal »). Le rapport des signifiaient « modéré, modération, juste
deux sens est si naturel que les parlers de milieu »; n’ont pris un sens péjor. qu’en
l'Est ont de nouveau croisé mèche avec fr., vers le xvi® s.; mais le sens du lat.
moucher, cf. aussi le fr. fam. chandelle au est encore usuel au xvr1e s. — Comp. :
sens de « morve pendant sous le nez ». médiocratie, 1845 (Balzac) sur le modèle
Découvrir, éventer la mèche, propr. termes d’aristocratie, etc., pour “*médiocrecratie
du génie militaire, xvie, ont été dès cette par superposition syllabique.
ép. pris au sens fig.; vendre la mèche,
expression récente, montre que le sens MÉDITER, 1495; méditatif, xive, rare
propre de ces locutions s’est perdu. A. pr. avant la fin du xvrie s.; méditation, xrr°.
meca. L’it. miccia et l’esp. mecha viennent Empr. des mots lat. medilari, propr.
du fr. — Dér. : mécher, 1752, méchage, « s’exercer », d’où « réfléchir », medilativus
1873 ; éméché, 1859, D., propr. « qui a les (seulement comme terme de grammaire),
cheveux en mèches, sous l’effet de l’ivresse ». meditatio avec des sens nouveaux déve-
loppés dans la langue religieuse. Médiler
MÉCRÉANT, xr1e. Part. prés. de l’anc. est plus pop. que méditatif, méditation qui
verbe mescroire, xi1°, de l’anc. préf. mes et sont restés plus philosophiques et plus
de croire, encore chez La Fontaine et Vol- religieux.
taire, par .archa sme. On trouve aussi mé- MÉDIUM, terme de musique, 1704. An-
croyant, xv°, encore chez Saint-Simon et tér. signifiait « moyen, accommodement »,
le dér. mécréance, xII°. xvie, sens hors d'usage. Empr. du lat.
MÉDAILLE, 1496 (Commynes). Empr. medium « milieu », neutre pris substantiv.
de l’adj. medius.
de l’it. medaglia qui désignait propr. la
même monnaie que le fr. maille, et a pris MÉDIUM, terme de spiritisme, 1854.
le sens de « médaille ». — Dér. : médaillé, Empr. de l’anglo-américain medium (attesté
1853 ; médaillier, 1718 ; médailliste, 1669. depuis 1853), même mot que le préc. (mais
le concept qu’exprime ce mot a été créé
MÉDAILLON, 1554. Empr. de l’it. meda- par le mystique suédois Swedenborg, 1688-
glione « grande médaille ». 1772), v. transe.
MÉDECINE, xue. Empr. du lat. medi- MÉDIUS, terme d'anatomie, xvie (Paré).
cina « art de guérir » et « remède » (de medi- Empr. du lat. medius qui s’employait au
cus « médecin ») ; a éliminé l’a. fr. mecine, même sens, mais seulement comme adj. :
qui signifiait du reste surtout « remède », medius digitus « doigt du milieu ».
d'où meciner « soigner », tous deux usuels MÉDULLAIRE, 1503. Empr. du lat.
jusqu’au xive s. — Dér. : médecin (vers medullaris(de medulla « moelle »).
1330, sous la forme picarde medechin) ; a
éliminé l’a. fr. mire, lat. medicus ; l’anc. MÉDUSE, 1754. Tiré du nom propre
mège avait pris au xvir® s. le sens de Méduse, v. le suiv., par comparaison des
« médicastre » en Suisse et dans le Sud-Est tentacules du zoophyte avec les serpents
et pénétré en ce sens dans le fr. de l’époque. de la chevelure de la Méduse.
MÉDUSER 400

MÉDUSER, 1838, une première fois en MÉLANCOLIE, x1r1e (en outre au moyen
1606. Dér. du nom propre Méduse, empr. âge merencolie) ; mélancolique, x1v®° (Ores-
du lat. Medusa (du grec Medousa), per- me). Empr. des mots lat. melancholia,
sonnage mythologique, une des trois Gor- melancholicus (du grec melankholia, comp.
gones, dont la tête hérissée de serpents de melas « noir » et de kholé « bile », spécial.
changeait en pierres ceux qui la regar- « bile noire », une des quatre humeurs car-
daient ; Persée, l'ayant tuée, lui trancha dinales (bile noire, bile jaune, pituite,
la tête dont il se servait pour méduser ses sang), qui passait pour provenir de la rate
adversaires ; aujourd'hui le mot est en et capable d’engendrer l’hypocondrie, me-
dehors de tout souvenir du sens étymolo- lankholikos). Les sens anc. sont dominants
gique. L'expression téle de méduse, au sens en fr. jusqu'au xvries. ; mais les deux mots
d’ «objet qui méduse », xvir1e (Helvétius), ont servi en outre de bonne heure à dési-
d’abord au sens propre, en 1650 chez Cor- gner ou à qualifier diverses formes de la
neille, ne s’est pas maintenue. tristesse.
MEETING, 1733. Empr. de l’angl. MÉLASSE, 1664, d’abord meslache,
meeting, dér. du verbe io meet « se rencon- 1508. Empr. de l'esp. melaza, dér. de miel
trer, se réunir ». « miel ».
MÉGA-, MÉGALO-. Premiers éléments MELCHIOR, v. maillechort.
de mots sav. comp., tels que mégalithique,
1867 ; mégalomanie, 1873, tirés du grec MÊLER. Lat. pop. misculäre, relevé au
megas, megalos « grand ». iX° s., élargissement du lat. class. miscère.
— Dér. et Comp. : mélange, xve (A. Char-
MÉGARDE, v. garder. tier), mélanger, 1549; mêlée, vers 1080
(Roland) ; démêler, xri°, démêlé, 1650,
MÉGATHÉRIUM, an vi (1797-8) (Cu- démêloir, 1802 ; emmêler, xr1° ; entremèê-
vier). Formé avec les mots grecs megas ler, id. ; mêlé-cassis « mélange d’eau-de-vie
« grand » et fhérion « bête » ; on a dit aussi et de cassis », fin x1x°, et par abréviation
megather ou -ère, 1808, où -ther vient du mélé-cass ; remêler, 1549 ; pêle-mêle, xr1®
grec thér « bête ». (Chrétien), altération (pour éviter la répé-
MÉGÈRE, 1480, au sens propre, sens tition de m) de mesle mesle, qui se trouve
fig., fin xvrre (Saint-Simon). Empr. du lat. dans les manuscrits du même texte, outre
megæra (du grec Megaira, nom d’une des melle pelle et des formes plus altérées brelle
Furies) ; sens fig. déjà en lat. : mesle, melle et brelle; méli-mélo, 1866,
variante du préc. avec variation vocalique.
MÉGISSIER, xrr1° (É. Boileau ; en 1217,
mesgeichiere). Dér. de l’a. fr. megeïs, xx1°, MÉLÈZE, 1552; cf. aussi melze chez
d'où mégis, encore usité comme terme Rab., qui le donne comme mot des « Al-
techn., dér. de l’anc. verbe megier, propr. pinois » ; en effet melze se dit dans les Alpes
« soigner médicalement », lat. medicäre, provençales. Il vient d’un mot préroman
qui a dû être spécialisé au sens de «traiter *melix, -ice (comp. le lat. larix), probabl.
le cuir pour la préparation des peaux ». — gaulois. Les Alpes dauphinoises et la
Dér. : mégir, 1720 ; mégisserie, vers 1300. Savoie connaissent un changement d’ac-
cent dans les mots de ce type, d’où le mot
MÉGOT, 1872. Subst. verbal du touran- français a été emprunté.
geau mégauder « sucer le lait d’une femme
enceinte (en parlant d’un nourrisson) », MÉLILOT, 1322. Empr. du lat. melilo-
par comparaison du fumeur qui s’évertue tum (du grec melilôtos, comp. de meli
à tirer quelques dernières bouffées du bout « miel » et de Lôtos « lotus ») ; on trouve
de cigare jeté, avec le nourrisson qui essaie au xvii® s. une forme altérée mirlirot,
d’arracher encore d’une mamelle en train encore dans quelques patois.
de tarir quelques gouttes d’un lait sans MÉLINITE, 1884. Créé par Turpin, l'in-
force et sans saveur. Le verbe mégauder venteur de cette poudre, qui a tiré ce mot
dérive du tourangeau mégaud « jus qui sort de l’adj. lat. melinus « de coing » (du grec
du moule à fromage », le lait d’une femme mélinos, dér. de mélon « pomme ») en raison
enceinte ne valant guère mieux que ce jus ; de la couleur de la mélinite.
mégaud est un dér., assez répandu dans
l'Ouest, de mègue « petit-lait », a. fr. mes- MÉLISSE, x. Empr. du lat. médiéval
gue, d'un gaulois *mesigu-, cf. irlandais melissa, tiré du lat. melissophyllon (mot
medg, id., anc. breton meid. Dans la plus pris au grec, littéral. « feuille (phyllon) à
grande partie de la France, mêgue a été abeilles {melissa) », ainsi nommé parce que
remplacé par laitée et pelit-lait. les abeilles affectionnent cette plante).
MÉHARI, 1853 (Flaubert : mahari, mé- MELLIFÈRE, 1823 ; une première fois
herry en 1822). Empr. de l’arabe d'Algérie en 1523. Empr. du lat. mellifer (de mel
méhri (en arabe class. mahri « de la tribu .« miel » et de ferre « porter »).
de Mahra (dans le sud de l’Arabie) »). MELLIFLUE ; ne s'emploie qu’au fém.,
MEILLEUR. Lat. meliorem, acc. de me- 1495. Empr. du lat. mellifluus (de mel
« miel » et de fluere « couler »).
lior, comparatif de bonus « bon ». S’emploie
souvent précédé de l’adv. plus comme un MÉLO-. Premier élément de mots sav.
positif. Ît. migliore, esp. mejor. L’a. fr. comp., tels que mélomane, fin xvir1e ; mé-
avait en outre mieldre(s), anc. cas sujet, lodrame, 1771, tiré du grec melos, propr.
a melior, qui est resté assez longtemps « membre », d’où spécialement « membre
usité. de phrase musical », puis « chant cadencé ».
401 MENER

MÉLODIE, x. Empr. du lat. de basse MENACE. Lat. pop. minäcia, déjà at-
ép. melodia (du grec melôidia, de melôidos testé au plur. chez Plaute, dér. du lat.
« qui chante mélodieusement », de melos, class. minæ « menaces », qu’il a supplanté.
v. le préc., et de aidein « chanter »). — It. minaccia, esp. (a)menaza.
Dér. : mélodieux, xrr1° ; mélodique, 1607.
MENACER. Lat. pop. *minäciaäre, dér.
MELON. Lat. mélonem, acc. de melô, de minaäcia ; a éliminé le lat. class. minäri
tiré du grec mélopepôn, de même sens. Il au sens de « menacer », propr. « faire sail-
est difficile de reconnaître si le mot a tou- lie », mais qui a été conservé au sens de
jours été connu ou s’il a été repris au lat., « mener », V. mener. It. minacciare, esp.
cf. de même it. mellone, esp. melôn. — amenazar.
Dér. : melonnière, 1537. MÉNAGE, 1150 (d’abord manage, les
MÉLONGÈNE, v. aubergine. formes maisnage, mesnage, menage n’ap-
paraissent qu’au xrrIe s. et sont dues à
MÉLOPÉE, 1578. Empr. du lat. de basse l'influence de l’a. fr. maisniee « famille »,
ép. melopœia (du grec melopoia « mélodie », de *mansionata, dér. lat. pop. de mansio,
de melopoios «compositeur, poète lyrique », v. maison). Dér. de l’a. fr. manoir « demeu-
de melos). rer », v. manoir. Au moyen âge désigne sou-
vent des logis de toute nature et les meu-
MEMBRANE, 1555. Empr. du lat. mem- bles ou ustensiles qui les garnissent ; au
brana, propr. « peau qui recouvre les diffé- xvie et au xvrre s., signifie aussi « bonne
rentes parties du corps », dér. de membrum administration des biens ». — Dér. : ména-
« membre ». — Dér.-: membraneux, 1538. ger, verbe, 1309, au sens d’ « habiter », a
signifié « administrer ses biens » au xvie et
MEMBRE, lat. membrum. It. membro, au xviie s. parallèlement à l'emploi de
esp. miembro. — Dér. : membré, xIv®; ménage, le sens d’ « épargner » date du
membru, xr1° ; membrure, id. ; démembrer, xvi® s., d’où ménagement, xVI°, aménager,
vers 1080 (Roland) ; démembrement, x111°. 1312, aménagement, 1327 ; ménager, adj.,
1281; ménagère s. f., vers 1470; mé-
° MÊME. En a. fr. surtout meisme. Lat. nagerie, 1546 (Rab.), pour traduire le titre
pop. *melipsimus, dér., avec le suff. du de l'ouvrage de Caton, De Re Ruslica,
superlatif -imus, de *melipse, tiré lui-même signifie d’abord « administration des biens
des locutions du latin class. memet ipsum, domestiques », puis « lieu où l’on soigne
egomet ipse, etc., « moi-même », etc. ; d’où les animaux domestiques », dit aussi mé-
aussi a. pr. medesme, it. medesimo, esp. nage le ; sens moderne s’est développé sous
mismo. Metipse n’a été conservé que dans Louis XIV, vers 1662, lors de la création
le pr. medeis et le cat. mateix. Ce renforce- de la ménagerie royale de Versailles ; démé-
ment de ipse comme pronom d'identité nager, 1611 (une 1re fois desmanagier au
était devenu nécessaire vers la fin de l’'Em- xi11° s.), déménagement, 1611, déména-
pire, parce que ipse était de plus en plus em- geur, 1863; emménager, 1425, emmé-
ployé aussi en qualité de pronom démonstr. nagement, 1611.
et d’article.
MENDICITÉ, xu1° (J. de Meung). Empr.
MÉMENTO. Début xIx° au sens mo- du lat. mendicitas, a éliminé l’a. fr. men-
derne. Emploi fig. de memento, 1375, ter- distiet.
me de liturgie catholique, mot lat. signi-
fiant « souviens-toi » (impér. du verbe me- MENDIER. Lat. mendicäre. It. mendi-
minisse), qui désigne des prières pour les care, esp. mendigar. — Dér. : mendiant,
vivants et pour les morts. Se trouve déjà xne; le nom les quatre mendiants, d’où
au xv®s. au sens de « mémoire, faculté de aujourd’hui, par abréviation, mendiants,
se souvenir », par plaisanterie. propr. « les quatre ordres mendiants », a
été donnée par plaisanterie, vers 1600, à
MÉMÈRE, fin xixe, redoublement en- quatre sortes de fruits secs : figues, noi-
fantin de mére. settes, amandes et raisins secs, formant des
assiettes de dessert. Mendiant a éliminé
MÉMOIRE, x1° (Alexis : memorie) ; l’a. fr. mendi, usuel jusqu'au xvi® s., lat.
mémorable, xve, attesté indirectement par mendicus, d’où aussi it. mendico, esp. men-
l’adv. -ement. Empr. du lat. memoria, me- digo (d’où paraît venir le fr. pop. mendigot,
morabilis. De mémoire a été tiré mémoire, 1876, J. Richepin), a. pr. mendic, qui survit
au sens d’ « écrit pour que mémoire en soit dans les Hautes-Alpes, au sens de « fils »;
gardée », masc. dès 1320. sur ce sens, V. marri.
MÉMORANDUM, 1777. Formé avec MENEAU, v. moyen.
le neutre de l’adj. lat. memorandus « qui
MENER. Lat. pop. minäre « pousser des
doit être rappelé ». animaux devant soi en criant », lat. class.
MÉMORIAL, xr1e. Empr. du lat. de minäri « menacer ». Le sens du lat. pop.
a été conservé par le roumain mina. —
basse ép. memoriale, neutre pris substan- Dér. et Comp. : menée, vers 1080 (Roland),
tiv. de l’adj. memorialis qui se disait spé- au sens de « son de trompe », sens variés
cial. avec Liber au sens de «livre de notes ». au moyen âge, sens moderne depuis le
_— Dér. : mémorialiste, 1726.
xvie s.; meneur, 1308, le sens dominant
MÉMORISER, 1907. Dér. sav. du lat. aujourd'hui de « celui qui mène les autres
memoria « mémoire ». — Dér. : mémorisa- dans une cabale, etc. » est du xvuIe s.;
tion, 1847. amener, vers 1080 (Roland), amené terme,

DICT. ÉTYM.
26
MENER 402

de droit, 1668 (Racine), ramener, xri°; à cette explication. Souvent dér. du verbe
démener (se), x1r1°, au moyen âge en outre mentir : menlerie et mente dans les parlers
trans. au sens de « mener, agiter » depuis septentrionaux, mentida de l’a. pr. — Dér. :
1080 (Roland) jusqu’au xvres. ; emmener, mensonger, XII°.
vers 1080 (Roland), formé avec l’adv.
local en; remmener, x1v®; malmener, MENSTRUES, xvi® (Paré); menstruel,
XIIe; promener, xvI° (au xv° on trouve 1314. Empr. des mots lat. mensirua (plur.
déjà la forme d’indic. prés. proumaine), neutre de l’adj. mensiruus « mensuel »,
réfection de pourmener, vers 1300 (encore probabl. sur le modèle du grec {a kataménia,
attesté au xvri® s.), d’après les nombreux v. catamini), menstrualis. Menstrue, sing.,
verbes en pro-, d'où promenade, 1557, d’après le lat. mensiruum, mais des deux
promeneur, 1584, promenoir, 1559 ; reme- genres, a été employé depuis la fin du
ner, x11° ; surmener, id., surmenage, 1872. xve s. par les alchimistes au sens de « dis-
solvant » par suite de la vertu dissolvante
MÉNÉTRIER, x (Joinville). Altéra- qu’on attribuait autrefois au sang mens-
tion, par substitution de suff. de menestrel, truel. — Dér. : menstruation, 1761.
lat. de basse ép. ministeriälis « chargé d’un
service (ministerium) », d'où « serviteur, MENSUEL, 1795. Empr. du lat. de
artisan », sens usuel jusqu’au x1v® s. ; tout basse ép. mensualis, dér. de mensis « mois »,
en prenant le sens de « poète, musicien », d’après menstrualis. — Dér. : mensualité,
ménestrel, sans doute en raison de son sens 1874.
propre, a pris aussi au moyen âge le sens MENSURER, fin xix°; mensuration,
péjor. de « mauvais sujet ». Avec le chan- 1802 (Chateaubriand), une 1re fois en 1520.
gement des mœurs ménestrel est sorti de Empr., pour des emplois techn., du lat.
la langue avant le xvie s. pour être repris mensurare, mensuratio, V. mesurer.
au xIx° s. comme terme historique et mé-
nétrier, qui désignait surtout un musicien, MENTAL, 1371. Empr. du lat. de basse
est tombé au sens de « musicien de vil- ép. mentalis (de mens, mentis, « esprit »).
lage », au xvrr1e s.
MENTALITÉ, 1842. Empr. de l’angl.
MENHIR, 1834. Empr. du bas-breton mentality, dér. au xvrre s. de l’adj. mental,
menhir, littéral. « pierre (men) longue v. le précédent, pour désigner la façon
(hir) »; on en a trouvé de nombreux en particulière de penser et de sentir d’un
Bretagne où ils portent ce nom; dans peuple, d’un certain groupe de person-
divers points de la France on dit pierre nes, etc.
levée, pierre fitte, etc. MENTHE. Rectification orthographique
MENIN, -E, 1606 (F. de Sales). Empr. de mente, d’après le mot latin. Lat. men-
de l’esp. menino, -a, pour désigner des gen- t(h)a (du grec mintha, minthé). Au Midi
tilshommes ou des demoiselles attachés à aussi menltasire, lat. mentasirum, propr.
des princes ou des princesses espagnols; « menthe sauvage ».
menino paraît appartenir à la famille du MENTION, xr1e. Empr. du lat. mentio
Îr. mignon. (de la famille de mens, mentis, « esprit »).
MÉNINGE, 1532. Empr. du lat. médical — Dér. : mentionner, 1432 ; susmentionné,
de basse ép. meninga (du grec méninga, 1824, déjà plusieurs fois employé du xv®
acc. de méninx). — Dér. : méningite, 1829 au XVIII S.
(d’abord meningilis, 1803 ; -ilé, 1793). En MENTIR. Lat. pop. menitre, lat. class.
outre méningo-, premier élément de mots mentiri. It. mentire, esp. mentir. — Dér. :
sav. comp., d’après le mot grec. menteur, x11°, peut continuer un lat. pop.
*menlitior ; menterie, x111° ; démentir, vers
MÉNISQUE, terme d'optique, 1671. 1080 (Roland) ; démenti, xve.
Empr. du grec méniskos, propr. « petite
lune », d’où « croissant, cercle » (de méné MENTON. Lat. pop. *mentonem, acc. de
« lune »). * menio, dér. de mentum, d’où it. mento. —
DÉe mentonnet, 1604; mentonnière,
MÉNO-. Premier élément de mots sav. 1373.
comp., tels que ménopause, 1823, tiré du
grec mên « mois » qui signifiait aussi MENTOR, début xviri® (Saint-Simon).
« menstrues » au plur. Tiré de Mentor, nom du guide de Télé-
maque dans le Télémaque de Fénelon
MENOTTE, v. main. (1699), ainsi nommé d’après le héros de
MENSONGE, fém. jusqu'au début du l'Odyssée, en grec Mentôr, ami d'Ulysse,
XVII® s., ensuite masc., peut-être sous dont Athéné a pris la figure pour accom-
l'influence de songe. Lat. pop. *mentionica, ne Télémaque à la recherche de son
dér. de mentio (au lieu de *menittio, de père.
mentitus, part. passé de menttri « mentir »), MENU. Lat. minülus, part. passé pris
attesté par des gloses ; cf. aussi a. pr. men- adjectiv. du verbe minuere « amoindrir ».
sonega. Un autre type “*mentionia est It. minuio, esp. menudo. Devenu subst. de
supposé par l’it. menzogna, l’a. fr. mensoigne bonne heure, au sens de « menu de repas »,
et l’a. pr. mensonha. On a émis l’idée que XVIII®, — Dér. : menuet, xrr°, comme adij.,
ces mots ont été formés dans la termino- usité jusqu’au début du xvrre s., quand il
logie eccl. qui s’adressait au peuple. Mais désigne une sorte de danse, mise à la mode
l'absence d’attestations dans toute la sous Louis XIV, passe pour être originaire
littérature chrétienne est peu favorable du Poitou.
403 MÉRIDIEN

MENUAILLES. Lat. minütalia « menus en outre un terme de politesse depuis le


objets », plur. neutre pris substantiv. de XIVe s., d’après des locutions telles que
l’adj. minütälis, dér. de minütus. voire merci « grâce à vous », d’où grand
merci, masc. déjà chez Marot, par erreur
MENUISER. Lat. pop. *minütiare, dér. sur la valeur grammaticale de grand. It,
de minülus, propr. « rendre menu », sens mercè, esp. merced, avec des sens analogues
conservé en fr. jusqu'au xvirie s. It. mi- à ceux du français. — Dér. : remercier,
nuzzare, esp. menuzar. — Dér. et Comp. : XIVe (Froissart), par l'intermédiaire d’un
menuisier, 1227, d’abord «ouvrier employé verbe mercier, usuel jusqu’au xXvII® $.;
à des ouvrages menus, délicats », au sens remerciement, xv®.
moderne vers le xvie s., menuiserie, 1456,
sens parallèle à menuisier ; amenuiser, MERCIER. Dér. de l’a. fr. merz « mar-
xII*, amenuisement, xIII®; mince, xIV®, chandise », du lat. merx, mercis ; cf. it.
tiré de mincier « couper en menus mor- merce. Spécialisé de bonne heure ; toutefois
ceaux », qui est une forme d'infinitif antér. le dér. mercerie, vers 1187, a conservé jus-
à menuiser ; celui-ci a été refait sur les qu’au xvi® s. le sens général de « mar-
formes accentuées menuise, etc. ; minc(i)er chandise ».
est encore usité dans de nombreux parlers MERCREDI. En a. fr. mercresdi et, en
septentrionaux ; d’où minceur, 1782 ; amin-
wallon, dimercre, etc. Lat. pop. *mercoris
cir, avant 1752 (une première fois au dies « jour de Mercure », altération de Mer-
XIIIe s.), amincissement, xvirie (Buffon); curi dites, d’après les noms des autres jours
émincer, 1701.
de la semaine. It. mercoledi, esp. miércoles.
MÉPHISTOPHÉLIQUE, 1832 ; on a dit
aussi -phélétique, 1841. Dér. de Mephis- MERCURE, nom de métal, xv°e. Empr.
tophélès, nom du diable dans la légende de du lat. Mercurius « Mercure, messager de
Faust, rendue célèbre par le drame de Jupiter » par les alchimistes qui ont donné
Gœæthe. ce nom au métal peut-être à cause de la
mobilité du mercure, appelé vulgairement
MÉPHITIQUE, 1564 (Rab.). Empr. du vif-argent. — Dér. : mercuriel, 1626, d’après
lat. de basse ép. mephiticus, dér. de mephi- le lat. mercurialis, aussi mercurial, 1625.
lis ou mefitis, à la fois « exhalaison pesti-
lentielle » et nom propre désignant une MERCURIALE, plante, xir°. Empr. du
déesse (ce qui est probabl. le sens propre lat. mercurialis (herba) « herbe de Mer-
du mot). — Dér. : méphitisme, 1782. cure ».
MÉPLAT, v. plat. MERCURIALE, remontrance, xvVII® s.
Empr. du lat. mercurialis « de Mercure »
MER. Lat. mare. It. mare, esp. mar. Le pour servir d’adj. à mercredi, v. ce mot;
genre fém. qui est aussi cat. et roumain, ainsi nommé parce qu'il désignait d’abord
est attribué à l'influence de terre. — Dér. une assemblée de Parlements, qui se tenait
et Comp. : marée, 1260 (É. Boileau : « Qui- le premier mercredi après les vacances et
conques ameine poissons de mer à Paris où le premier président parlait notamment
de deux marées »), le sens de « poisson de contre les abus commis, etc., 1535 ; par
mer vendu frais » en est sorti rapidement, suite, a désigné ce discours même, puis des
d’où mareyeur, 1610, -age, fin xix®°; discours de rentrée dans les tribunaux et
amerrir, vers 1910, avec double r d’après d’autre part a pris le sens de « remon-
atterrir ; outre-mer, xXII°. _ trance ».
MERCANTI, 1863. Empr. du sabir de MERCURIALE « état détaillé des prix
l’Afrique du Nord, empr. lui-même de l’it. de vente, établi après les marchés », 1800.
mercanti (plur. de mercanie « marchand ») Empr. du lat. mercurialis, parce que Mer-
pour désigner spécial. les boutiquiers des cure était le dieu du commerce.
bazars, d’où le sens péjor. que le mot a
pris en fr. MERDE. Lat. merda. It. merda, esp.
mierda. — Dér. : merdeux, xive (E. Des-
MERCANTILE, 1611. Empr. de l’it. mer- champs) ; démerder (se), fin xix°; em-
cantile « qui se livre au commerce, etc. », merder, XIv°.
dér. de mercanlte ; sens péjor. développé en
fr. au xviries. — Dér. : mercantilisme, 1841. MÈRE, subst. Lat. mater. It. esp. madre.
— Comp. : belle-mère, v. beau.
MERCENAIRE, xie. Empr. du lat.
mercenarius, dér. de merces au sens de MÈRE, adj., 1369. Ne s'emploie guère
« salaire ». que dans quelques locutions, notamment
MERCERISAGE, -ER, fin xix°. Dér. mère goutte. Empr. du lat. merus « pur »;
la place de l’adj. est à limitation du lat.
de Mercer, nom de l'inventeur. qui place régulièrement merus devant le
MERCI. Lat. mercèdem, acc. de mercës, subst., cf. merum vinum « vin pur ». En
propr. « salaire », qui a pris en lat. pop. a. fr. on a une forme plus francisée mier
le sens de « prix », d’où est sorti celui de dans or mier.
« faveur », attesté dans le lat. mérovingien, MÉREAU, MÉRELLE, v. marelle.
puis celui de « grâce qu’on accorde en
épargnant », sens qui ne subsistent plus MÉRIDIEN, comme terme d'astronomie,
que dans des locutions, telles que se rendre 1377 (Oresme) (subst. masc.) ; les autres
à merci, être à la merci, Dieu merci (de emplois à partir du xvzie s. Empr. du lat.
syntaxe très ancienne, locution signifiant meridianus, adj. de meridies « midi ». On
« par la merci de Dieu »; on trouve aussi trouve au moyen âge l’adj. méridien au sens
au moyen âge la merci Dieu). Est devenu de « qui est du Midi ».
MÉRIDIENNE 404

MÉRIDIENNE « sieste vers midi », MERLUCHE, nom de poisson, en outre


xvue. Empr. du lat. meridiana (hora) « poisson séché », notamment « morue sé-
« heure de midi »; a éliminé une forme chée », 1603 ; en outre morlusse, 1589. Mot
pop. meriene, propr. « heure de midi », de la famille du suiv.
usuelle au moyen âge et conservée dans le MERLUS, « poisson séché pour faire la
Centre et l'Ouest ; on trouve déjà, mais merluche », 1393. Issu peut-être d’un croi-
isolément, meridiane au xrr1° s., et Ménage sement du fr. merlan avec l’a. fr. lus « bro-
recommande cette forme à côté de mé- chet » (aussi a. pr. Luiz, cat. Ilus).
riane, qui est une forme hybride.
MERRAIN « sorte de bois servant pour
MÉRIDIONAL, 1314 Empr. du lat.
différents usages », écrit aussi mairain ;
meridionalis, dér. de meridies. jusqu’au xvi® s., on a surtout merrien. Lat.
MERINGUE, 1737. Étymologie incon- pop. maieriämen, dér. de maieria au sens
nue. L’all. Meringel est empr. du fr. — propre de « bois de construction ». — Dér. :
Dér. : meringué, id. maronage, terme de la technologie des
MÉRINOS, xvine (Turgot, mais certai- forêts, d’abord marenage, 1276.
nement antér.). Empr. de l'esp. merinos, MERVEILLE. Lat. miräbilia, plur. neu-
plur. de l’adj. merino, qui désigne une es- tre pris comme subst. fém., fréquent dans
pèce de mouton à laine fine, introduite en la langue de l’Église, qui a été altéré dans
France par Colbert et Daubenton et qu’on le lat. du Nord de la Gaule en *miribilia
croit originaire de l'Afrique du Nord. La par assimilation de l’a aux deux à qui l’en-
grande dynastie du Maroc au bas moyen tourent, et dont le premier a été lui-même
âge, les Beni-Merîn (dont l’ethnique est assimilé aux deux suivants. It. meraviglia.
merîni) était issue d’une importante tribu — Dér. : merveilleux, x1rI°, pris comme
de Berbères zenètes, nomades et éleveurs subst. pour désigner une personne, 1741,
de moutons. Merino est signalé en esp. a désigné sous le Directoire des gens à la
comme ayant eu le sens de « errant, pas- mode ; émerveiller, xrr°; émerveillement,
sager », en parlant des troupeaux transhu- vers 1200.
mants ; mais il n’est pas sûr que ce soit
le même mot que le précédent. MÉSANGE, xn°. Du francique “*mei-
singa (cf. misinga dans un texte lat. du
MERISE, xrre (J. de Meung). Dér. de x° s.), cf. anc. scandinave meisingr, dér.
l'adj. amer, sous l'influence de cerise, cî. d’un simple attesté par l’all. Meise.
it. amarella, id., lorrain amerelle. L’a s’est
perdu parce qu’on le prenait pour une MÉSAVENTURE, xu°. Dér. de l’anc.
partie de l’article. — Dér. : merisier, xrr1°. verbe mesavenir, comp. du préfixe més et
MÉRITE, xrr° (Chrétien), est féminin et d'avenir, v. advenir, sur le modèle d’aven-
signifie « récompense » au moyen âge; ture.
méritoire, xrr1° (J. de Meung). Empr. des MÉSENTÈRE, 1538. Empr. du grec me-
mots lat. meritum (de merere « mériter »), senterion, Comp. de l’adj. mesos « qui est
merilorius qui n’a que le sens de « qui au milieu » et de enteron « intestin », v.
procure un gain », mais qui a été pris entérite. — Dér. : mésentérique, id.
pour servir d’adj. à mérite. — Dér. :
mériter, xive (Chr. de Pisan); immérité, MESMÉRISME, 1783. Dér. de Mesmer.
1823, une première fois vers 1500, d’après nom d’un médecin allemand (1733-1815).
le lat. immeritus ; démérite, xiv° ; démé- MESQUIN, 1611. Empr., avec une nuan-
riter, xvi®, une première fois au XIIIe S. ce de sens nouvelle, de l’it. meschino « pau-
MERLAN, v. merle. vre, chétif », qui vient de l’arabe miskîn
« pauvre »; celui-ci a déjà pénétré une
MERLE. Parfois fém. en a. fr. Lat. de première fois en gallo-roman au moyen
basse ép. merulus, lat. class. merula. Encore âge, cf. a. pr. mesqui, mesquina « pauvre »,
fém. dans les parlers de l’Est et du Nord- et, par l'intermédiaire des sens « chétif,
Est ; la femelle est désignée dans l'Ouest petit », ceux de « jeune homme, jeune
par le dér. merlesse, et dans le Midi par fille », d'où en a. fr. meschin, meschine, dès
merla. — Dér. : merlan, d’abord merlanc, le x11° s., qui n’ont que ces derniers sens ;
xir1° (É. Boileau), dér. de merle avec le aujourd’hui le fém. est encore usité au sens
suff. d’origine germ. -enc ; pour cet emploi de « servante » en picard et en wallon. —
de merle, cf. en lat. merula pris pour dési- Dér. : mesquinerie, 1636.
ogner un poisson de mer qui est peut-être
le merlan, v. merlus. Merlan, « coiffeur, MESS, 1838. Empr. de l’angl. mess,
perruquier », attesté dès 1756, est dit par empr. lui-même du fr. mes, orthographe
comparaison du perruquier couvert de anc. de mes.
poudre blanche avec un merlan enfariné
avant d’être mis dans la poêle; merlette, MESSAGE, x1° (Alexis). Dér. de l’a. fr.
XIVS. mes « envoyé », lat. missus, part. passé,
pris substantiv. à basse ép., du verbe mit-
MERLIN, sorte de hache, 1624. Empr. ere « envoyer ». Message signifiait aussi
des parlers de l'Est (merlin, marlin), « envoyé » en a. Îr., jusqu’au xve s., d’où
où il a été dér. à une époque ancienne de la création anc. de messager, xr1°. Messa-
narculus, V. marteau. ger, au sens moderne de « conducteur de
MERLON, 1642. Empr. comme t. mili- voiture faisant les transports de bagages »,
taire de lit. merlone, probabl. dér. de paraît être de la fin du xvuie s. L’it. mes-
merlo «merle », parce qu’on voit quelquefois saggio et l'esp. mensage viennent du gallo-
ces oiseaux assis en files sur les murs. roman. Message, terme politique, 1704,
405 MÉTHODE

est empr. de l’angl. message. — Dér. : mes- MÉTAMORPHOSE, vers 1530, en 1488
sagerie, xXI11°, au sens de « mission », sens en parlant de l’ouvrage d’Ovide. Empr. du
du mot jusqu’à la fin du xv® s.; autres lat. melamorphosis (du grec melamorphôsis)
sens d’après ceux de messager. « changement de forme fmorphé) ». —
Dér. : métamorphoser, 1571.
MESSE. Lat. eccl. missa « messe »,
part. passé fém. pris substantiv. du verbe MÉTAPHORE, x (J. de Meung).
mittere ; tiré de la formule qui termine la Empr. du lat. melaphora (d'un mot grec
cérémonie de la messe : ile, missa est signifiant « transport », d’où « transposi-
(contio) « allez , la réunion est renvoyée ». tion »). — Dér. métaphorique, xIv®
(Oresme).
MESSER, v, seigneur.
MÉTAPHYSIQUE, subst., xive (Oresme),
MESSIDOR, 1793. Créé par Fabre adj., 1546 ; métaphysicien, xive (Oresme).
d’Églantine avec le lat. messis « moisson » Les deux premiers sont empr. du lat. scolas-
et le grec dôron « présent »; v. fructidor, tique metaphysica, fait sur le grec meta ta
thermidor. physica, littéral. « après les choses physi-
MESSIE, fin xve. Empr. du lat. eccl.
ques (ou de la nature) », placé par Aristote
messias, empr., par l'intermédiaire du grec, en tête de son traité de métaphysique, qui
de l’araméen meschîkhä, en hébreu mds- fait suite au traité de physique {a physica,
chiakh « oïint, sacré par le Seigneur », qui et du dér. metlaphysicus, le 3° est dér. de
a été aussi traduit en grec khrisios (du ceux-ci.
verbe khriein « oindre »), d’où le lat. Chris- MÉTATARSE, 1586. Comp. des mots
tus, fr. Christ. — Dér. : messianisme, 1836 ; grecs meta « avec » et farsos, V. tarse, sur
messianique, 1859. le modèle de métacarpe.
MESSIRE, v. seigneur. MÉTATHÈSE, 1587. Empr. du lat. me-
tathesis « déplacement » (du grec).
MESURE. Lat. mé{n)süra, dér. de men-
sus, part. passé de melirt. It. misura, esp. MÉTAYER, v. moitié.
mesura (au sens fig. ; au sens propre on a
medida). MÉTEIL. Lat. pop. *misiilium, propr.
« mélange », dér. d’un adj. *mislilis, dér.
MESURER. Lat. de basse ép. mé(n)sü- de *mistus, mixius, part. passé de miscére
rare, dér. de mé(n)süra ; a éliminé le lat. « mêler ». Se présente en a. fr., comme dans
class. meélirt, sauf en Sardaigne et dans la les parlers modernes, avec des suff. variés
péninsule ibérique, esp. medir. — Dér. : (cf. meslueil, etc.). L’a. fr. a aussi le dér.
mesurable, xr1° ; mesurage, 1247 ; mesu- mesteillon et mesiure, lat. mixiüra, propr.
reur, xr1° ; démesuré, vers 1080 (Roland), « mélange », encore dans l’Ouest et le Sud-
attesté alors par l’adv. -reement ; remesu- Ouest.
rer, XIV°®.
MÉTEMPSYCHOSE, 1564. Empr. du
MET, v. pétrin. lat. de basse ép. metempsychosis (du grec
melempsykhôsis, comp. de mela, v. méta,
MÉTA-. Premier élément de mots sav., et du verbe empsykhoun « faire vivre », de
faits sur le modèle de mots grecs où mela, psykhé « âme »).
comme préf. tiré de la prép. metä « avec,
après », exprime la participation, la suc- MÉTÉORE, vers 1270. Empr. du lat.
cession, d’où le changement. scolastique meleora (du grec ia mele6ra «les
phénomènes », de l’adj. meleôros «élevé dans
MÉTACARPE, 1546. Empr. du grec les airs »). — Dér. météorique, 1580.
metakarpion, comp. de melti « avec » et de
karpos « carpe ». MÉTÉORISER, 1757. Empr. du grec
melteôrizein « gonfler » en parlant d’une
MÉTAL, xre; métallique, vers 1500. tumeur, propr. « élever ».
Empr. des mots lat. melallum « mine »,
d’où « produit de la mine, métal » (du grec MÉTÉOROLOGIE, 1547. Empr. du grec
metallon « mine »), melallicus. Du xin1° au melebrologia. — Dér. météorologique,
XVIIe s., On a souvent melail, encore chez 1550 ; -ogue, fin xvrtre.
Bossuet. — Dér. : métalliser, xvi° (B. Pa- MÉTÈQUE, xix°, comme terme d’anti-
lissy) ; métallisation, 1753. quité grecque; employé vers 1894 par
Ch. Maurras (après avoir lu l'ouvrage de
MÉTALLO-. Premier élément de mots M. Clerc, Les Métèques athéniens) en par-
sav. comp., tels que métallographie, 1548, lant d'étrangers domiciliés, avec un sens
tiré du grec melallon, pris au sens de défavorable. Empr. du grec meltoikos,
« métal ». propr. « qui change de résidence » (de mea,
MÉTALLURGIE, 1666. Empr. du lat. v. méta, et de oikos « maison »).
scientifique moderne metallurgia, tiré du
grec melallourgein « exploiter une mine ». MÉTHODE, 1537; méthodique, 1488.
— Dér. : métallurgique, 1752; métallur- Empr. du lat. de basse ép. methodus,
methodicus (du grec meïhodos « poursuite,
giste, 1719. recherche », methodikos. Méthodisme, 1760,
MÉTAMORPHISME, 1846. Comp. sav. nom d’une secte protestante, créée par
du grec mela et morphe « forme ». — Dér. : Wesley, au xvirre s., et méthodiste, vien-
métamorphique, 1847. nent de l’angl. methodism, -ist.
MÉTHYLE 406

MÉTHYLE, 1840 (Regnault). Tiré de MÈTRE, terme de versification, xive


méthylène, déjà formé en 1834 avec les (G. de Machaut); métrique, adj., 1496;
mots grecs methy « boisson fermentée, vin » subst., 1768. Empr. du lat. meirum, meiri-
et hylé « bois, substance », d’après éthyle, cus, metrica (du grec metron, meirikos, -é).
v. éther, d’où plus tard méthane, fin — Comp. : métromanie, 1723.
XIXC,NeLC.
MÉTRITE, 1807 (d’abord -{is en 1803).
MÉTICULEUX, 1584 (dans un texte Empr. du lat. médical meiritis (du grec
jurid. à propos de contrats). Empr. du lat. mêtra « matrice »).
melticulosus « timide, craintif » (de meius MÉTRO-. Premier élément de mots sav.
« crainte » ; fait sur le modèle de pericuto- comp., tels que métronome, 1836, tiré du
sus), qui a été pris en fr. avec une nuance grec meiron « mesure ».
inconnue du lat.
MÉTROPOLE, xive; métropolitain,
MÉTIER. Développement particulier du 1431. Empr., comme terme d’administra-
lat. minisierium « service, office » (dér. de tion eccl., du lat. de basse ép. metropolis
minister « serviteur »), d’où en gallo-roman (du grec métropolis, littéral. « ville mère »),
« métier ». La forme fr. mestier suppose un metropolitanus ; sens plus étendu depuis le
lat. pop. *misterium, résultat d’une forte xvirie s. Au sens de « chemin de fer métro-
contraction, ou croisement avec mysierium, politain », 1900 ; abrégé aujourd’hui métro.
dans des locutions où il s'agissait du « ser-
vice de Dieu », cf. le mestier Dieu, fréquent METS. Jusqu'au xv® mes ; orthographié
au moyen âge. L’a. fr. misiere apparaît depuis mets d’après mettre. Lat. pop. mis-
souvent au sens de « cérémonie, office, mi- sum « ce qui est posé sur la table », part.
nistère » jusqu’au xvI® s., ce qui indique passé neutre, pris substantiv., du verbe
que les deux mots lat. ministerium et mitiere. It. messo « service de la table »,
mysterium continuaient à être rapprochés, cf. mess. — Comp. : entremets, xI1°, jus-
et l’a. pr. emploie à la fois mesier, menester qu’à la fin du xvi* s., désigne souvent un
et ministeri au sens du lat. ecel. mystlerium, divertissement, une scène figurée repré-
à propos du Christ ou du règne de Dieu, sentés au cours d’un festin.
dans des traductions de l'Évangile (cf. aussi
l'emploi de menester au sens de « service de METTRE. Lat. millere, propr. « laisser
Dieu », par latinisme, dans Sainte Eulalie). aller » (sens qui explique seul celui de nom-
L'expression faire un tour de son métier breux dér. et comp. latins), d’où « en-
(aujourd’hui plutôt jouer) est déjà attestée voyer » ; a pris en lat. pop. celui de « placer
au xve s. Mestier en a. fr. a aussi les sens à un endroit déterminé ». It. mettere ; con-
de « besoin, nécessité », et, d’autre part, currencé par le type bouter, d’origine fran-
désigne divers ustensiles (ministerium si- cique, dans les parlers de l’Est, de la région
gnifie déjà « vaisselle » en lat. de basse ép.) rhodanienne et du Sud-Ouest. — Dér. et
ou meubles, d’où le sens spécialisé dès le Comp. : mettable, xr1°, immettable, fin
moyen âge de « machine » (notamment à xixe ; metteur, 1704, une première fois en
tisser), cf. Et uns mestiers por gimples faire, 1305 ; mise, 1233 ; miser, 1789 ; mise-bas,
vers 1200 (L’Escoufle). L'it. mestiere, l'esp. 1846, au sens de « vêtement dont on ne
menester viennent du gallo-roman. veut plus », d’après mettre bas ; démettre,
XIIIe ; au sens de « déplacer », au sens de
MÉTIS. Lat. de basse ép. mixlicius, dér. « démettre un membre », xvi®, a pris le
de mixtus, v. méteil. La prononciation de sens de « se retirer d’une charge », xiI°,
l’s final vient du fém. ; le sens spécialisé d’après le lat. demitiere « faire descendre,
de « homme, femme nés de l’union d’un jeter en bas », v. démission ; d’autres sens
blanc avec un homme, une femme d’une de démettre au moyen âge viennent de ce
autre couleur » vient de l’esp., v. mulâtre. même verbe lat. ; entremettre, xr1° ; entre-
Du xvi® au xvirie s. on a dit aussi métif, metteur, 1380, aujourd’hui surtout dans un
mélive, par substitution de suff. Esp. mes- sens défavorable ; entremise, xrre.
tizo (d’où l’it. mestizzo), a. pr. mestilz. —
Dér. : métissage, 1834 ; métissé, 1877. MEUBLE, adj. Lat. pop. *môbilis, réfec-
tion du lat. class. môbilis, d’après le verbe
MÉTONYMIE, 1521. Empr. du lat. de môvêre « mouvoir ». Avait des emplois plus
basse ép. meitonymia (du grec metônymia, étendus en a. fr. qu'aujourd'hui, remplacé
comp. de meta, exprimant le changement, dans ces emplois par mobile. It. mobile,
v. méta-, et de onoma « nom »). esp. mueble. La locution biens meubles a
été répandue par le latin jurid. — Dér. :
MÉTOPE, 1545. Empr. du lat. de basse meuble, subst., au moyen âge apparaît
ép. melopa (du grec metopé, de meta au d’abord vers le xr11° s. comme sing. collec-
sens d’ « après » et de opé « ouverture »). tif au sens de « biens meubles », le sens
moderne, issu lui-même de la langue jurid.,
MÈTRE, « unité de mesure », 1791. est du xvi® s. environ; il a passé dans les
Empr., lors des recherches pour la création langues voisines, cf. all. Môbel, etc. ; meu-
du système métrique, du grec metron « me- bler, xvie, au sens moderne, au moyen âge
sure ». Sert aussi de deuxième élément pour on a déjà meublé au sens de « garni, riche » ;
des mots sav. tels que manomètre, v. ce ameublement, 1598, par l'intermédiaire
mot ; hygromètre, 1666, etc. — Dér. : d’ameubler, xv1°, aujourd’hui hors d’usage ;
métrer, 1834; métreur, 1846; métrique, ameublir, xvi® (Liebault), de meuble, adj.,
dans système métrique, 1795. — Comp. : en parlant de la terre, déjà créé au xrves.
les multiples et les sous-multiples du mètre. comme terme jurid. au sens de « rendre
497 MICHÉ

meubles des biens », d’où ameublissement, bourdon municipal. Muetle « logis pour les
1839, comme terme d'agriculture, depuis chiens de chasse, etc. », n’est qu’une anc.
1603, comme terme jurid., «ameublement », orthographe de meule, qui a été conservée
av. 1573; démeubler, xvrre, au sens aussi dans le château de la Muelle au bois
moderne, au moyen âge signifiait « priver de Boulogne (d’où la prononciation erronée
de ses biens », d’où démeublement, 1680; d’aujourd’hui) ; souvent écrit meule au
remeubler, XIII. XVIIIe 8. — Dér. : mutin, xiv® s., attesté
indirectement par le verbe mutiner (se),
MEUGLER, 1539, attesté indirectement d’où mutinerie, vers 1500 ; ameuter, xvir®
par le dér. meuglement. Altération de beu- (du Fouilloux), propr. terme de vénerie
gler par croisement avec mugir. «réunir une meute de chiens », sens disparu
MEULE « meule à moudre ». Lat. mola. rapidement au profit du sens moderne,
It. mola, esp. muela. — Dér. : molette, d’où ameutement, 1636.
1301 ; meulière, 1566 {pierre rude et meu-
lière), le masc. est rare. MEZZANINE, terme d'architecture,
1676. Empr. de l’it. mezzanino « entresol »,
MEULE « monceau de fourrage, de paille dér. de mezzo « qui est au milieu ».
ou de céréales ». Probabl. emploi métapho-
rique du préc., cf. à l’appui le lat. meta, MI. À été concurrencé dès les premiers
propr. « objet en forme de cône », d'où textes par demi, qui ne lui a laissé que des
« meule », esp. muela. Mulon, attesté dès emplois restreints devant un subst. ou un
le xrr1° s., répandu dans les parlers septen- adj., dans des locutions adverbiales ou pré-
trionaux, d’où mule, xvrie, et refait de positives ; a encore été quelquefois pris
nouveau en meulon, n’est pas un dér. substantiv. en a. fr. au sens de « milieu ».
direct de meule, malgré l’a. pr. molon; Lat. medius « qui est au milieu », d’où
c’est une altération, par croisement avec « demi ». — Comp. : midi, vers 1080 (Ro-
meule au stade muele (d’où muelon, mulon, land) ; après-midi, 1514 ; les parlers méri-
cf. mutin sous meute), de l’a. fr. muillon, dionaux, au sud de la ligne allant de l’em-
mouillon, lat. pop. *mululionem, acc. de bouchure de la Gironde à la Suisse roman-
muiuliô, dér. de muiulus « pierre en saillie, de, sauf l’extrême Sud-Ouest, disent mi-
pierre de limite », d’où « tas de pierres », jour, rare au Nord et dont il y a des traces
cf. aussi it. mucchio « monceau », esp. en a. fr., jusqu’au xvi® s.; milieu, x11°,
mojén « borne, monceau » et, d’autre part, sauf dans le Sud-Ouest qui dit mi, la plu-
les formes du prov. moudel, moudeloun, part des parlers gallo-romans emploient
« meule de foin », lat. pop. *mutellus, etc. ; mitan, écrit mitant en moyen fr. On a pro-
v. aussi modillon, pour un autre sens. posé pour l’étymologie de ce mot mi-lemps
qui ne convient pas, le fr. et les parlers
MEUNIER. Altération, qui date du ayant toujours la voyelle a; la plus anc.
xime s., de mounier d’après meule; en forme étant moitan (dans des textes bour-
outre au moyen âge, munier, issu de Mmeu- guignons et franc-comtois, x11e-x111e S.) il
nier. Lat. pop. *molinärius, dér. de moli- s’agit très probabl. d’un comp. de mi et
num « moulin », v. ce mot. — Dér. : meu- de iant, né dans l’Est et qui s’est répandu
nerie, 1767. par la suite dans les autres parlers ;
minuit, x11e (mie nuit, forme usuelle au
MEURTRE, vers 1090 (d’abord mortre, moyen âge), le féminin s’est maintenu
murtre) ; meurtrir, vers 1130 (d’abord jusqu’au xvI1° s.; parmi, xi° (Alexis),
muririr, moririr), formes refaites en eu au autrefois aussi emmi (Roland). Les noms
xive s. Du francique *murihrjan « assas- comp. avec mi et un nom de mois sont du
siner », comp. gotique maürprjan, anc. haut genre fém., cf. la mi-aoust, 1381, etc., v.
all. mord « assassinat ». Dès le xrie s.ilya carême ; ce genre vient sans doute de jêle,
des formes avec -d- et avec -I- (mordrir, comme dans noël (dans à la noël), toussaint.
mortrir). Le mot a passé du francique en
roman à des époques différentes de sorte MI, v. gamme.
que le -th-, qui est devenu -d- après -r- en
francique, a passé avec deux articulations MIASME, 1765. Empr. du grec miasma
en fr., l’une au vie s., l’autre vers 800. « souillure » (de miainein « souiller »).
Jusqu'au xvire s. meurltrir signifiait encore
« tuer », sens conservé dans les dér.; le MIAULER, xrr1e. Verbe onomatopéique,
sens moderne date du xvies. pour meuririr, comme les verbes de même sens : it. mia-
du xve pour meurdrir. — Dér. : 1° de golare, esp. miullar, all. miauen, etc. —
meurtre : meurtrier, xv® (au xXII® mur- Dér. : miaulement, 1564.
trier), d’où meurtrière, 1573, au sens
moderne, au moyen âge on disait archière, MICA, 1735. Empr. du lat. mica « par-
encore usité au xvire s.; 3° de meuririr : celle », v. mie. — Dér. et Comp. : micacé,
meurtrissure, 1535. 1755 ; micaschiste, 1817, v. schiste.
MEUTE. Lat. de basse ép. movila, fém. MICHE, vers 1170. À en a. fr., de même
pris substantiv. de movitus, lat. class. mû- que l’apr. mica et le cat. mica, le sens de
ius, part. passé, refait sur le radical de «mie, miette ». Représente, avec ceux-ci, un
movére. À signifié jusqu’au début du lat. *micca, forme renforcée de mica, v.
xvie s. « soulèvement, expédition », cf. mie et tricher. Le néerl. micke est empr. du
émeute ; le sens moderne apparaît dés le roman.
xir1e s. À. pr. moula « signal, sonnerie de
cloches », sens également attesté dans le MICHÉ « ami riche qui entretient »,
Nord, cf. à Metz, la Muie qui désigne le 1739, pop. Anc. pron. pop. de Michel.
MICHELINE 408

MICHELINE « automotrice sur pneus, MIÈVRE, vers 1240 (Eles ont les cuers
des chemins de fer », vers 1932. Du nom si mievres qu’elles ne se pueent tenir a
de l'inventeur Michelin. 1 seul) ; 1288, en parlant d’une chèvre;
en outre esmieure au moyen âge. Jusqu'au
MICMAC, 1649. Aussi miquemaque, xviie s. a qualifié la vivacité malicieuse;
xviie, fém., altération de mulemaque, le sens moderne date de la fin du xvrres.,
-che, etc., «rébellion », xv® s., d’où «confu- par oubli du sens propre. La forme de
sion, désordre », au XvVI® S., qui remonte l’a. fr. esmièvre et nièvre, relevé au xXVII®Ss.
au moyen néerl. muitlmaken « faire une en normand, appuient l’étymologie par
rébellion » (où muit vient du fr. meule); l’anc. scandinave snæfr « vif, habile » ; l’m
de par sa forme, a pris le caractère d’un viendrait d’une accommodation de l’n à v.
mot expressif. L’all. Mischmasch, de sens — Dér. : mièvrerie, 1718 ; on a dit d’abord
analogue, est un autre mot qui n’a pénétré mièvrelé, xv®, sorti de la langue au début
que dans nos parlers de l'Est. du xvirIe 5.
MICOCOULIER, 1552 (« Lotos est un
arbre nommé en Provence micacoulier »). MIGNARD, v. le suiv.
Mot d’origine prov., qui remonte au grec MIGNON, vers le milieu du xve® s., dans
moderne mikrokoukouli. des sotties. Antér., depuis le x11°s., mignoi,
MICRO-. Premier élément de mots sav. d’où les anc. dér. mignoter, mignolise, ami-
comp. tels que microphone, 1732, tiré du gnoter. Mots de la famille de minet, « chat » ;
grec mikros « petit », ou de mots empruntés. du sens de « chat » sont sortis aisément
ceux de « doux, caressant, gracieux » et
MICROBE, 1878. Empr. du grec mikro- aussi ceux de « jeune enfant ». On a proposé
bios « dont la vie est courte » par le chirur- aussi pour mignot, mignon une étymologie
gien fr. Sédillot (1804-1882). celtique d’après l’anc. irlandais min (avec
MICROCOSME, 1314 (Fauvel), rare 1 long) « petit, tendre, doux » ; on a aussi
avant 1500. Empr. du lat. de basse ép. voulu voir dans mignot, mignon des mots
microcosmus (du grec mikrokosmos; v. remontant au germ. *minnja « amour »,
cosmo-). On a fait par opposition macro- d’où all. Minne ; mais on sépare ainsi la
cosme, attesté dès 1314 (Fauvel), cf. ma- famille de minet sans raison valable. Le
cro-. breton mignoun, -on, usuel au sens d’ «ami»
est empr. du fr. — Dér. : mignonnette, vers
MICRON, fin xixe. Empr. du grec mik- 1500, par l'intermédiaire d’un adj. mignon-
ron, neutre de mikros « petit ». nel, aujourd’hui hors d’usage ; a reçu di-
MICROSCOPE, v. télescope. verses acceptions techn.; mignard, par
substitution de suff., 1418 (attesté alors
MICTION, 1618. Empr. du lat. mictio, par le verbe mignarder) ; mignardise, 1539.
autre forme de minctio (de mingere « uri-
ner »). MIGRAINE, xr1e (migraigne). Empr.
du lat. médical hemicrania (du grec hémi-
MIDI, v. mi. krania, littéral. « douleur dans la moitié de
MIDINETTE, v. déjeuner. la tête », comp. de hémi « à demi » et de
kranion « crâne »).
MIDSHIP, 1883 (Loti), usuel au sens
d’ « aspirant de marine ». Abréviation de MIGRATION, 1495. Empr. du lat. mi-
midshipman, 1785 (dans la traduction de gratio (de migrare « changer de résidence »).
Cook), empr. de l’angl. midshipman (comp. — Dér. : migrateur, 1867, d’après le lat.
de midship « le milieu du bateau » et de de basse ép. migralor ; migratoire, 1838.
man « homme »). MIJAURÉE, 1640 ; en outre, à la même
MIE. Lat. mica « miette », propr. « par- date, migeorée. Paraît être un mot dialectal
celle ». À gardé son sens étymologique de de l'Ouest, modification d’un subst.
« miette » jusqu'au xvire s. ; remplacé dès *mijolée, dér. d'un verbe manceau mijoler
lors par mietle. À servi jusqu’au xvir° s. de « cajoler », d’après le verbe normand jorer
particule de renforcement de la négation, « parer avec recherche » ; mijoler est un dér.
encore usuelle dans l’Est ; même dévelop- de mijot (v. le suivant) et signifie d’abord
pement en it. et en a. pr. It. mica, esp. « cuire à petit feu ».
miga. — Dér. : miette, x11°, au sens de
« mie », jusqu’au xvi® s., encore usuel dans MIJOTER, 1767. Mot de l'Ouest, où il
de nombreux parlers septentrionaux, d’où est encore très usuel au sens de « faire
émietter, 1572, émiettement, 1611; mio- mûrir des fruits »; dér. de mijot « lieu où
che, 1795, formé avec le suff. argotique l’on conserve les fruits », même mot que
-oche, attesté au sens de « miette » en 1567 ; celui qui est à la base de magot ; attesté
on trouve aussi mion, 1649, au sens de comme normand dès 1583 au sens de « faire
« gamin » et de « miette »; émier, xrr°. mûrir, cacher » (aussi migoter). Le sens de
« cuire à petit feu » est également d'origine
MIE, v. ami. dialectale, cf. migeoler aux mêmes sens
MIEL. Lat. mel, neutre. It. miele, esp. dans le Bas-Maine. Le verbe est sans doute
miel. — Dér. : mielleux, x1r1° (J. de Meung) ; dér. de l’a. fr. migoe « provision de fruits,
emmieller, xr11°. de vivres », mujoe, musgode (celui-ci dans
l’Alexis) ; on ramène ces mots à un germ.
MIEUX. Lat. melius, neutre pris adver- *musgauda, dont la première partie cor-
bial. de melior, v. meilleur. La locution fà) respond au flamand muize « souris »,
qui mieux mieux apparaît vers le xrr1e 5. première partie de muizegole « cachette pour
It. meglio, a. pr. melhs. pommes, etc. »; seulement la deuxième
409 MINARET

partie de ce comp. s'accorde mal avec le vers 1270 (empr. de l’it. milione « un grand
mot gallo-roman, lequel présentant -j- en mille »)}, d’où millionième, 1550, million-
fr. et -g- en normand demande la voyelle naire, 1740 (Lesage), et, par substitution
-au-. de suff., milliard, 1544, milliasse, 1479, en
outre, par modification arbitraire de l’ini-
MIL, 1282. Aujourd'hui moins usité que tiale d’après les particules lat. bi-, tri,
le dér. millet, xive, sauf dans l'Ouest et quadri- « deux, trois, quatre fois », billion,
dans les parlers méridionaux. Lat. milium. trillion, quadrillion, 1484 (aujourd’hui plu-
— Comp. : grémil, xur1° (gromil), comp. tôt quairillion d’après frillion) ; ces trois
de grès et de mil, cf. les noms pop. herbe mots désignaient au xvi® s. des nombres
aux perles, et graine perlée et le nom scien- d’une valeur 1 000 fois plus grande qu’au-
tifique lithospermium officinale (dont l’all. jourd’hui. — Comp. : mille-feuilles, 1539 ;
Steinsamen est un calque) ; dit ainsi à cause au moyen âge milfoil d’après le lat. mille-
de la dureté de ses graines ; altéré aussi en folium ; mille-fleurs, xvri° ; mille-pertuis,
grenil, xvi®e, d’après grain. 1539 ; mille-pieds, xvie, d’après le lat. mi-
MILADY, 1727. Empr. de l’angl. comme lipeda ; aussi mille-paliies.
titre d’une dame anglaise de qualité. MILLÉNAIRE, 1495. Empr. du lat. de
MILAN, 1500. Empr. du prov. milan, basse ép. millenarius.
lat. pop. *milänus, dér. du lat. class. mi- MILLÉSIME, 1515. Empr. du lat. mille-
luus, cf. esp. milano. L’a. fr. disait escoufle simus « millième ».
(écoufle encore dans les patois), empr.
d’une forme de bas-breton *skouvl, suppo- MILLET, v. mil.
sée par le breton moderne skoul.
MILLI-. Premier élément des sous-mul-
MILDIOU, écrit d’abord mildew, 1874. tiples du mètre, etc., tiré du lat. mille
Empr. de l’angl. mildew, propr. « rouille « mille », lors de la création du système
(des plantes), tache d'humidité »; mildiou métrique, en 1795.
est transcrit d’après la prononciation de
MILLIAIRE, terme d’antiquité romaine,
l’angl.
1636. Empr. du lat. miliarius, -a (de milia,
MILICE, fin xvi® (dès 1372 milicie v. mille) ; on emploie aussi plus rarement
chez Oresme). Empr. du lat. mililia milliaire comme subst. pour marquer une
« service militaire », d’où « corps de troupe, distance de mille pas, depuis la fin du
expédition », dans le langage soutenu ou xXv® s., d’après le lat. miliarium, neutre
religieux, cf. les milices célestes jusqu’au pris substantiv. de miliarius.
xvrie s.; depuis la fin du xvri® 8. a servi
à désigner des levées de paysans et de MILLIARD, MILLIÈME, etc., v. mille,
bourgeois pour recruter l’armée, d’où le MILORD, x1v® (millour, forme plus fran-
sens que milice a reçu au x1x° s. — Dér. : cisée, encore usitée au xvrie s.). Empr. de
milicien, 1725. l’angl. mylord (comp. de my « mon » et
MILIEU, v. mi. lord, v. lord).
MILITAIRE, xive (Bersuire). Empr. du MILOUIN, « canard sauvage », 1775.
lat. militaris (de miles « soldat »). — Dér. : Paraît être un dér. sav. du lat. miluus, v.
militarisme, 1845 ; militariste, 1892 ; anti-, milan.
fin xixe; militariser, 1845, militarisation,
1876, démilitariser, 1871, -isation, fin : MIME, 1534; mimique, 1570, comme
xixe ; paramilitaire, vers 1935, formé avec adj. Empr. des mots lat. mimus, mimicus
la prép. grecque para « à côté ». (du grec mimos, mimikos) comme termes
d’antiquité. Mime a servi par suite au
MILITER, 1669, au sens moderne. Empr. xixe 8. à désigner celui qui imite le parler
du lat. militare « faire le service militaire, ou la physionomie des gens, d’où l’emploi
combattre » en vue d’un sens spécial. Déjà de mimique, comme subst. et la création
empr. au moyen âge (du x111° au XV°S. ; du verbe mimer, 1838.
se trouve aussi au xvini® s.) au sens de
« combattre », mais surtout dans la langue MIMÉTISME, 1874. Dér. sav. du grec
théologique, d’où l'adj. militant dans mimeisthai « imiter ».
Église militante, 1420, et, par suite, les MIMI, xixe, Mot enfantin tiré de minei,
acceptions de militant au x1x° s. dans la pour désigner le chat ; sert aussi dans le
langue politique. langage enfantin pour désigner certaines
MILK-BAR, 1960.
Empr. de l’angl., personnes : « grand-mère, etc. ». Désignait
où il désigne un café dans lequel on ne au xvire 8. une coiffure de dame.
consomme pas d'alcool.
MIMOSA, 1619. Empr. du lat. des bota-
MILLE. Continue orthographiquement nistes mimosa, dér. du lat. mimus, v.
l’a. fr. mille, d’abord milie, xii°, empr. du mime, au sens de « qui se contracte comme
lat. milia, plur. de mille « mille »; mais, un mime »; ainsi nommé parce que cer-
pour la prononciation, continue mil, qui taines espèces se contractent au toucher.
est le lat. mille ; de bonne heure les deux On a dit aussi mimeuse, fin xvirre.
formes se sont employées indifféremment ;
aujourd’hui la graphie mil n’a plus qu’un MINARET, 1606. Empr. du turc menäret
emploi restreint. — Dér. : millième, 1377, (empr. lui-même de l’arabe mandära « pha-
d’abord milisme, xirie, V. centième ; mil- re », d’où « tour de mosquée » à cause de
lier, vers 1080 (Roland), le lat. a déjà mil- la forme ; on s’est demandé aussi s’il n’y
liarius, qui a pu servir de modèle ; million, a pas eu en même temps un signal à feu).
MINAUDER 410

MINAUDER, v. mine. comme maximum, et on leur donne des


plur. lat. minima, maxima. — Dér. : mini-
MINCE, v. menuiser. miser (ou minimer), 1842.
MINE, anc. mesure de capacité. Altéra- MINISTRE, xri°; ministère, 1468;
tion d’émine, lat. hemina, mesure d'environ ministériel, xvie. Empr. des mots lat.
28 centilitres (du grec hémina « id. »), fran- minister « serviteur », minislerium « ser-
cisé en hémine depuis 1718 en parlant de vice, office », ministerialis (de basse ép.,
la mesure ancienne. — Dér. : minot, xrr1® « chargé d’un service »). Jusqu'au xvi° s.
(É. Boileau), anc. mesure valant une demi- ministre est surtout employé au sens de
mine ; minotier, 1791 ; minoterie, 1836 ; le « serviteur de Dieu, du culte »; de là son
minotier préparait d’abord des farines de emploi à partir du xvie s. en parlant de
choix (minot, au xvir® s., désigne de la ceux qui exercent les fonctions sacer-
farine fine) destinées au commerce exté- dotales chez les protestants; depuis le
rieur, qu’on appelait farines de minot, en- xvIIe s. ministre et ministère ont pris une
fermées dans des barils pour passer les valeur nouvelle dans la langue politique,
mers. et ministériel a suivi. — Comp. de l’ad)j. :
MINE « terrain au sein de la terre d’où anti-ministériel, 1740, D.
l’on extrait des métaux, du charbon, etc. », MINIUM, xvie (Paré, sous la forme mi-
1314. Peut-être d’origine celtique. A. pr. nion, d’après la prononciation du lat. à
mina. À passé dans les langues voisines : cette ép., v. dicton). Empr. du lat. minium,
it. esp. mina, all. Mine, angl. mine. — francisé au moyen âge en mine.
Dér. : miner, xr1°, d’où minable, 1823,
« misérable », au Xv® s. au sens propre de MINOIS, v. mine « visage ».
« qui peut être miné » ; mineur, vers 1210 ; MINON, v. minet.
minière, xir1® (J. de Meung); minerai, MINORITÉ, terme jurid., 1437. Empr.
1314 (minerois, qui indique que le suff. du lat. médiéval minoritas, v. mineur et
est le même que celui des mots tels que majorité.
bourgeois) ; minier, 1867 ; déminer, 1948. —
Comp. : contre-mine, xrv°, contre-miner, MINORITÉ, terme de droit politique,
xve ; lance-mines, v. lancer. 1727. Empr. de l’angl. minority, v. majo-
rité. — Dér. : minoritaire, fin xiIxe.
MINE « apparence du visage », xve.
Peut-être empr. du breton min « bec, mu- MINUIT, v. mi.
seau »; l’all. Miene, qui a le même sens MINUSCULE, 1634 (en parlant de let-
que le fr., est récent et vient du fr. Le tres). Empr. du lat. minusculus « assez
terme de marine minot « sorte de pièce de petit », pour avoir un mot opposé à majus-
bois en saillie », 1690, dér. du breton min, cule ; depuis le x1x° s. pris dans un sens
mais ne prouve rien pour l’étymologie de plus étendu.
mine. — Dér. : minauder, 1645, dans un
texte normand, minauderie, xvi°, minau-
MINUTE, division du temps, xrr1°. Em-
dier, 1694 ; minoiïs, 1498. pr. du lat. médiéval minuta, tiré de l’adj.
du lat. anc. minutus « menu ». — Dér. :
MINERAI, v. mine « terrain... ». minuterie, 1786.

MINÉRAL, vers 1500. Empr. du lat. MINUTE « original sur lequel on fait une
médiéval mineralis, dér. de minera « mi- copie », 1382, attesté alors par le verbe dér.
nière » (du même latin). — Dér. : minéra- minuter. Empr. du lat. médiéval minuta,
liser, 1751, minéralisation, id., déminéra- même mot que minuta « division du temps »,
liser, fin xix°; minéralogie, 1729, pour pris au sens d’ « écriture menue » (on a dit
*minéralologie, d’où -ique, 1751. aussi en fr. écrire en minute) ; plus francisé
en minue au XV® S., V. grosse, SOUS gros;
MINET, xvie (sous la forme fém. mi- minuler a eu aussi au xvi® et au xvIres.
nelle). Dér. de mine, nom pop. du chat dans le sens fig. de « projeter ».
de nombreux parlers gallo-romans, mot MINUTIE, 1627. Empr. du lat. minutia,
onomatopéique également répandu dans propr. « petite parcelle », dér. de minutus.
l'Italie du Nord ; d’où aussi le dim. minon, — Dér. : minutieux, 1752.
x1Ve (E. Deschamps), qui désigne dans des
parlers pop. un chaton de fleur, comme MIOCÈNE, v. éocène.
minette, désigne la luzerne en Normandie MIOCHE, MION, v. mie.
et ailleurs.
MIRABELLE, xviie. Empr., en l’alté-
MINEUR, adj., xiv® (mineurs d’ans). rant, du latin myrobalanus, -um, propr.
Empr. du lat. minor, comparatif de parvus « myrobolan (sorte de fruit des Indes, em-
« petit ». ployé autrefois en pharmacie) » (du grec
myrobalanos, composé de myron « sorte de
MINIATURE, 1653. Empr. de l’it. mi- parfum » et de balanos «gland »); v. miro-
niatura, dér. du verbe miniare « peindre bolant. Liger, fin xvire, dit encore mirabo-
en miniature », dér. de minio « minium », lanier pour désigner le mirabellier d’après
v. minium. — Dér. : miniaturiste, 1748. le nom du fruit en it. L'it. mirabella est
MINIME, xive (Oresme); minimum, probabl. empr. du fr. — Dér. : mirabellier,
1705. Empr. du lat. minimus « le plus fin xixe.
petit », superlatif de parvus, v. mineur, et MIRACLE, xi° (Alexis) ; parfois fém.
du neutre de ce superlatif pris substantiv. ; au moyen âge. Empr. du lat. miraculum
minimum est une forme purement lat., « prodige » avec la nuance prise par ce mot
411 MISTENFLUTE

dans le lat. eccl. — Dér. : miraculeux, MISANTHROPE, 1552 (Rab.); misan-


1314 ; le lat. n’a que l’adv. miraculose, très thropie, xvi®. Empr. des mots grecs misan-
rarement attesté. thrôpos, -ia (comp. de misein « haïr » et
MIRADOR(E), vers 1830, à propos de de anthrôpos « homme »).
choses d’Espagne. Empr. de l’esp. mirador MISCELLANÉES, 1572, en parlant de
« sorte de belvédère », dér. de mirar, v. le l'ouvrage de Politien. Empr. du lat. mis-
suiv., puis utilisé pour des emplois techn, cellanea, littéral. « choses mêlées », plur.
MIRER. Lat. pop. miräre « regarder neutre de l’adj. miscellaneus (de miscere
avec attention », lat. class. mirärt « s’éton- « mêler »).
ner ». Ne s'emploie au sens de « regarder » MISE, MISER, v. mettre.
que dans des locutions techn. telles que
mirer des œufs ; depuis le moyen âge s’em- MISÈRE, xn°; misérable, 1336. Empr.
ploie surtout au réfl. se mirer, dont le déve- des mots lat. miseria (de miser « malheu-
loppement sémantique a subi l'influence reux »), miserabilis « digne de pitié » (de
du dér. miroir. Comme terme concernant miserari « avoir pitié ») ; le sens défavorable
les armes à feu, date du xvi®s.; doit alors de l’adj. s’est développé au xvi® s. — Dér. :
cet emploi à lit. mirare. It. mirare, esp. miséreux, xive (Christ. de Pisan).
mirar, partout au sens de « regarder ». —
Dér. : mirage, 1753 ; mire, xv° (Lesquels
MISÉRÉRÉ, 1546, au sens de « colique ».
(Livres). me tiennent lieu de mire) ; comme Tiré de miserere, impér. de misereri, qui
terme concernant les armes à feu, date, commence le Psaume 51, miserere mei,
comme le verbe, du xvi® s., et vient égale- Deus « aïe pitié de moi, mon Dieu », pour
ment de l’it., d’où point de mire, 1668 (alors désigner une sorte de colique très doulou-
encore techn.) ; miroir, x11€ (l’a. fr. a un reuse ; Paré emploie même la formule mi-
autre dér. mirail, de même a. pr. miralh, serere mei. Au sens de « litanie, etc. » on a
encore usité dans le Midi), miroïiter, xvi°, aussi la forme miserele au moyen âge.
miroitement, 1622, miroitier, 1564, miroi- MISÉRICORDE, xre. Empr. du lat.
terie, 1701 ; mireur (d'œufs), 1874. misericordia (de misericors « qui a le cœur
MIRIFIQUE, 1496. Empr. du lat. miri- (cor) sensible à la pitié »). — Dér. : misé-
ficus «admirable » (de la famille de mirari). ricordieux, id.
MIRLIFLORE, xvine (Collé qui écrit MISOGYNE, 1838 ; déjà usité au xvi®s.
-or ; on trouve aussi -fleur dans Faublas). (Amyot : Hercules nommé misogyne, comme
Paraît une altération voulue de mille qui diroit ennemy des femmes). Empr. du
fleurs, usuel au xvire s. dans eau de mille grec misogynés (de misein « haïr », et de
fleurs, parfum très apprécié des élégants, gyné « femme », v. misanthrope).
ou plutôt du lat. mille flores (cî. aqua sier-
coris vaccini vulgo aqua mille florum dicia MISS, 1713 (écrit misse) ; devenu usuel
dans le Traité de pharmacie de N. Lémery, au xix° s. pour désigner une demoiselle
fin xvrie s.) ; mille flores ne figure pas dans anglaise servant de professeur d’anglais.
les traités médicaux d’alors, mais il pouvait Empr. de l’angl. miss, abréviation de mis-
se dire à une époque où toutes les prépara- tress « une dame » (qui vient de l’a. fr.
tions faites par les apothicaires avaient un maistresse).
nom latin ; l’altération est due à un croise- MISSEL, 1611 ; antér. et jusqu’à cette
ment avec mirlifique, déformation burles- date, messel, d’après messe. Empr. du lat.
que de mirifique, attestée dès le xv° s. médiéval missalis (liber) «livre de messe ».
MIRLITON, 1752. Paraît être un anc. MISSILE, 1949 (au sens actuel, comme
refrain, v. guéridon. Mirely se rencontre adj. dès 1840). Empr. de l’angl. missile,
au xv® s. au sens de « mélodie ». empr. à son tour du lat. missilis « qu’on
MIROBOLANT, 1838. Tiré par plaisan- peut expédier ».
terie de myrobolan, xim° s., qui désignait MISSION, xvi°, au sens religieux ; d’où
plusieurs espèces de fruits desséchés ser- sens plus étendus à partir du xvuie s.
vant dans des préparations pharmaceuti- Empr. du lat. missio « action d'envoyer »
ques, v. mirabelle ; Hauteroche, dans sa (de miltere « envoyer »). Au moyen âge
comédie Crispin Médecin, 1680, a donné signifie « frais, dépenses », comme l’a. pr.
à un médecin le nom de mirobolan qui mession, sens qu’a également le lat. médié-
paraît avoir joué un rôle dans la formation val missio ; pour ce sens, cf. verbe melire,
de l’adj. mirobolant, cf. Ce docteur mirobo- fréquent au sens de « dépenser » et de même
lard, en 1767, chez Collé. a. pr. mettre, de là aussi mise « dépense »
MIROTON, 1691. Terme de cuisine en a. fr. — Dér. : missionnaire, 1662 (Ra-
d’origine inconnue. cine).
MISAINE, xvic. Altération, d’après l’it. MISSIVE, 1456, d’abord dans leltre mis-
mezzana, de l'a. fr. migenne, 1382 (texte sive « lettre d’affaire politique », d’où mis-
de Rouen), cf. aussi mizenne, fin xve. Mi- sive, 1547. Dér. du lat. missus, part. passé
genne est lui-même empr. du cat. miljana, de mittere « envoyer ».
même sens, fém. de l’adj. mitjan, propr.
« (voile) moyenne », qui sert à désigner MISTENFLUTE, 1642, au sens de « jeune
l’artimon, de même que lit. mezzana. garçon trop délicat ». Mot fam., empr. avec
Le nom s'explique par le fait que le mât une altération burlesque, voulue, du prov.
de misaine se place en avant ou en arrière mistouflet « poupin », déjà signalé par Mé-
du bateau entre le mât principal et la nage (aujourd’hui aussi mistanflet, d'après
proue ou la poupe. le fr.), dér. fantaisiste de misio « mioche »,
MISTENFLUTE 412

même mot que l'a. fr. misle « joli, gen- MITONNER, 1640. Empr. d’un parler
til, etc. », qui est peut-être une variante de l'Ouest, où il a été tiré de mitonnée
de mile, un des noms pop. du chat. « panade », dér. lui-même de milon « mie
de pain »; milon, attesté notamment en
MISTIGRI, 1836. Propr. nom fam. du normand, dér. de mie.
chat, issu, probabl. avec l’adj. gris, de
misle, variante de mile, nom pop. du chat, MITOUFLE, v. mitaine.
probabl. d’origine onomatopéique, v. aussi MITOYEN, v. moitié.
minet. A été employé par plaisanterie pour MITRAILLE, v. mite.
désigner le valet de trèfle dans certain jeu
de cartes (qui est remarquable par les MITRE, vers 1200. Empr. du lat. mitra
noms de fantaisie, cf. lustucru, autre nom (mot pris au grec, signifiant « bandeau »,
du valet de trèfle, faire lenturlu « avoir et qui a servi à désigner diverses coiffures).
cinq cartes de la même couleur »). — Dér. : mitré, id. ; mitral, 1673 ; mitron,
1690, comme nom propre; dit ainsi à
MISTOUFLE, 1867. Terme d’argot, de- cause de la coiffure en papier que portent
venu mot fam. au sens d’ «avanie ». Dér. de les garçons boulangers.
emmisioufler « envelopper de fourrures »
attesté en 1808, lequel est sorti de emmi- MITTE, vapeur dégagée par les fosses
toufler sous l’influence de l’adj. miste « élé- d’aisance, 1782. Étymologie inconnue.
gant » attesté au xvi® et xvr1® s. et encore MIXTE, xive, rare avant le XVIIe $.;
dans certains patois. mixtion, xrr1° (J. de Meung); mixture,
MISTRAL, 1803 (« Maestral, prononcez XVI (Paré), rare avant le xIx° s., une pre-
mistral »). Empr. du prov. mistral, ancien- mière fois au xr1€ s. sous la forme misture.
nement maistral, maestral, dér. de maistre, Empr. des mots lat. mixius « mêlé », part.
maesire « maître », littéral. « vent qui passé de miscere, mixtio, mixtura.
souffle en maître ». MNÉMONIQUE, 1800. Empr. du grec
mnémonikos, dér. de l’adj. mnémôn « qui
MITAINE, vers 1180. Dér. de l’a. fr. mile, se souvient » (de mnémé « mémoire »).
de même sens, sans doute emploi méta-
phorique de l’anc. fr. mile « chatte », dû MNÉMOTECHNIE, 1823. Comp. des
à la fourrure douce de cet animal; de là mots grecs mnémé et iekhné « art » d’après
aussi miton, 1660, de même sens ; de miton le préc. — Dér. : mnémotechnique, 1836.
a été tiré emmilonné, 1580 (Montaigne). MOBILE, 1377 ; attesté en 1301 au sens
Miton milaine dans la locution onguent mi- de « bien meuble »; mobilité, vers 1200,
ton mitaine, 1640, « qui ne fait ni bien ni rare au moyen âge. Empr. du lat. mobilis,
mal », est issu d’un refrain de chanson (ou mobilitas (de la famille de movere « mou-
fait sur un modèle de ce genre, cf. tonton voir »). — Dér. et Comp. : mobiliaire, 1411 ;
iontaine, etc.) comme ribon ribaine « bon mobilier, 1510 (le fém. est souvent écrit
gré mal gré », 1438. Au xvi® s. milaine est mobiliaire) ; immobilier, id (antér., depuis
modifié, sous l'influence de moufle, en le xves., on trouve aussi immobiliaire), tous
miloufle ; celui-ci disparaît en laissant ces mots ont été créés pour servir de dér. à
le dér. s’emmitoufler, 1611. meuble dans biens meubles ou à meuble, op-
posé à immeuble ; mobiliser, 1808, comme
MITE, x. Empr. du moyen néerl. terme de droit, comme terme militaire,
mile, cf. angl. mile, de sens analogue. L'a. 13836, d’où démobiliser, 1842, démobilisa-
fr. mile « monnaie de cuivre » est empr. du tion, id. ; immobiliser, 1801, d’où -ation,
moyen néerl. mile « id. », en néerl. les 1823 (comme terme de banque) ; locomobile,
deux mots sont dér., indépendamment l’un 1808, adj., « qui peut être changé de place »,
de l’autre, de la racine germ. mil- « couper pris plus tard substantiv. pour désigner
en morceaux »; mile, nom de l’insecte, une machine à vapeur, fait sur le modèle de
est pris au sens actif « qui ronge », comme locomotif, v. moteur ; automobile, 1866,
nom de la monnaie au sens passif « qui est adj., pris substantiv. 1896 (quelquefois
coupé en petits morceaux ». — Dér. : anti- masC.), d’où, par abréviation, auto ; auto-
mite, 1960. De mile, monnaie, a aussi été mobilisme, 1896 ; v. auto-. On a fait aussi
dér. mitaille, 1295, d’où mitraille, 1375, assez récemment sur le modèle d’automo-
« petite monnaie », puis « menu métal », bile un adj. hippomobile.
et, par suite de l’usage de charger des
canons de vieille ferraille dite mitraille, MOCASSIN, 1707 (en 1615, mekezen).
mitrailler, 1796, mitrailleuse, 1867, mi- Empr. de l’algonquin makisin, par l’inter-
trailleur, 1795, mitraillade, 1794, mitrail- médiaire de l’angl. mocassin.
lette, vers 1940.
MOCHE, 1880. Mot d’argot formé sur le
MITHRIDATISATION, fin xixe; mi- verbe amocher « défigurer », 1867, dér. de
thridatisé, id. Dér. sav. de Mithridate, nom moche « écheveau de fil vendu en gros
d’un roi du Pont (du rer s. avant J.-C.), paquets (et qui venait surtout de Rennes
qui passe pour s'être immunisé contre les au XVIIIe 8.) », avec le sens intermédiaire
poisons en s’habituant à en prendre des de « arranger grossièrement ». Le subst.
doses progressivement croissantes. moche est très répandu en Normandie et
dans la Haute-Bretagne, avec le sens de
MITIGER, xive (Bersuire). Empr. du « pelote de beurre », « grappe d’oignons ».
lat. miligare « adoucir » (de mitis « doux »). Il représente un anc. francique *mokka
« masse informe », qu’on peut supposer
MITON, v. mitaine. d’après l’all. mocke.
413 MOINE

MODE, xve. Empr. du lat. modus « ma- MOELLON, xvi®, altération orthogra-
nière, » propr. « mesure », qui s’employait phique, par étym. pop. d’après le préc., de
aussi comme terme de musique et de gram- moilon, xiv® ; en outre, à la même ép. moi-
maire. Dans tous les sens fém. jusqu’au ron, d’où moison, en Touraine ; on a aussi
xXvIe s. ; le masc. a été rétabli au xvire s. relevé la forme moulon à la fin du xrres.
pour des sens techn. L’a. fr. a une forme Peut-être tiré d’une expression pierre de
francisée meuf qui a persisté jusqu’au moilon « pierre de milieu », non attestée,
xvirie s. (chez Rollin, sous la forme moeuf), mais dont l’existence peut être supposée,
au sens de « mode du verbe ». Damourette le moellon se plaçant ordinairement dans
et Pichon l’ont repris. — Dér. : 1° de mode, le massif de la maçonnerie. Moilon, qui est
fém. : modiste, 1777 ; démodé, 1827 ; 2° de très fréquent au moyen âge au sens de
mode, masc. : modal, xvi° ;modalité, 1546 « milieu », est une altération de moillon,
(Rab.). qui représente le lat. pop. *modiolünem,
acc. de *modiolo, dér. de modiolus « moyeu ;
MODÈLE, 1549, souvent fém. au xvI°s- jaune d'œuf », v. moyeu, et « milieu », sens
Empr. de lit. modello, lat. pop. *modellus, que moyeu a parfois en a. fr.
lat. class. modulus « mesure »; v. moule.
— Dér. : modeler, 1585 ; modeleur, xvi° ; MŒURS. Lat. mûres, masc., genre par-
modelage, 1830 ; modelliste, 1832, d’après fois repris au xvie s.; la prononciation
IRute moderne de l’s finale est due à l'influence
de l'orthographe. Du reste, mœurs est un
MODÉRER, xive (Oresme); modéra- de ces mots restés toujours en contact avec
teur, 1416; modération, xive (Bersuire). le latin écrit, qui lui-même doit une partie
Empr. du lat. moderari, moderator, mode- de ses sens au grec éfhos.
ratio (de modus « mesure »). — Dér. : mo-
déré, xive (Oresme qui a l’adv. -reement), MOFETTE ou MOUFETTE, 1741. Propr.
pris comme terme de la langue politique, « exhalaison fétide », aujourd'hui hors
fin xvine, déjà usité au xvre s. en parlant d'usage ; l'animal appelé moufette (depuis
d'opinions religieuses. Buffon) doit son nom à son odeur. Le
mot est attesté d’abord dans un traité sur
MODERNE, vers 1361 (Oresme). Empr. ie Vésuve traduit de l’it. ; il est emprunté
du lat. de basse ép. modernus, dér. de de l'it. moffetta « exhalaison fétide »,
l’adv. modo «récemment ». — Dér. : moder- néap. mufeta. Ce mot est dér. de lit.
niser, 1754 ; modernisme, fin x1x° ; moder- muffa « moisissure ; odeur de moisissure »,
niste, 1769 (J.-J. Rousseau), n’est devenu lequel remonte sans doute à un langobard
usuel qu’à la fin du xix° s.; modernité, *muff « id. », dont l’existence peut s’inférer
1855, de l’all. muff « id. », bavarois muffezen
MODESTE, xive (Bersuire qui a l’adv. « exhaler une odeur de pourriture ».
-ement) ; modestie, id. Empr. des mots lat. Ces mots germ. sont probabl. des mots
modesius « modéré », modestia « modéra- expressifs exprimant l’action de flairer.
tion » (de modus, v. modérer), d’abord au L'esp. moho, de même sens, peut très bien
sens lat., vieilli depuis le xvrr® s. être une création indigène indépendante
des mots italiens et allemands.
MODIFIER, xive (Bersuire) ; modifica-
tion, 1385. Empr. du lat. modificare, fran- MOHAIR, v. moire.
cisé d’après les nombreux verbes en -fier, MOIGNON, xr1e (Ménage donne aussi le
et du dér. modificatio (de modus). — Dér. : sens de « muscle »). Mot de la famille de
modifiable, 1611, d’où im-, vers 1830 l’a. fr. esmoignier « mutiler », de l’a. pr.
(A. Comte). monhon « moignon », de l'esp. muñôn « mus-
MODILLON, 1545 (Muliles ou modi- cle du bras », muñeca « poignet », cf. aussi
glions). Empr. de l’it. modiglione, lat. pop. prov. moderne mougno, fém., « souche »,
*mutulionem, acc. de *mutulio, dér. de mu- mougne, adj., « camard », dont l’étymologie
tulus, terme d’architecture de même sens, est inconnue. Se rattache probabl. à un
d’où le fr. mutule, en 1600 (Mutiules ou type *mundiare « couper (pour nettoyer) »,
modions). dér. de l’adj. lat. nundus « pur ».
MODIQUE, xv:°, rare avant le xvri®s. ; MOINDRE. Lat. minor, comparatif de
modicité, 1584. Empr. des mots lat. modi- parvus, anc. cas sujet dont le cas complé-
cus (de modus), modicitas (créé à basse ép.). ment était meneur, lat. minôrem ; mais la
valeur des deux formes a été rapidement
MODULE, 1547. Empr. du lat. modulus, oubliée, et meneur a été éliminé. It. minore,
terme d’architecture, dim. de modus « me- esp. menor. — Dér. amoindrir, xIvV®
sure ». (d’abord amanrir, xr1°) ; amoindrissement,
MODULER, 1633; modulation, 1626. xve (d’abord amanrissement, x11°).
Termes musicaux, empr. des mots it. MOINE. D'abord munies, vers 1080 (Ro-
modulare, modulazione, empr. eux-mêmes land). Lat. eccl. monachus (du grec mo-
du lat. modulari, modulatio (de modulus nakhos, propr. « solitaire », de monos
« mesure » au sens musical, dim. de modus). « seul »); toutefois moine représente une
On trouve déjà parfois moduler depuis forme altérée *monicus. L'it. monaco conti-
1488 et modulation depuis 1495; ils sont nüe monacus, mais l’a. pr. monge est du
empr. alors directement du lat. même type que moine. — Dér. : moi-
xvie; moinerie, xir1°; moinillon,
MOELLE. D'abord meole, d'où, par mé- naille,
tathèse, moele, xirre. Lat. medulla. It. mi- xviie (La Fontaine) ; moineau, x11°, déno-
dolla et -o, esp. meollo, surtout « cerveau ». mination plaisante due à une comparaison
— Dér. : moelleux, 1490. du plumage de l'oiseau avec le vêtement
MOINE 414

des moines. Usité seulement dans une « juteux » (dér. de müstum « moût »), de là
partie des parlers septentrionaux ; le Nord- aussi la voyelle à de *mücire, v. moisir,
Est et le normand ont encore l’a. fr. mois- cf. a. pr. mosie qui représente un lat. pop.
son, lat. pop. *muscionem, acc. de *muscio, *mustidus ; toutefois ces types supposés
propr. « mouche, moucheron », dér. de expliquent mal le prov. moderne mouide
musca « mouche » ; le Centre, l'Ouest et le « jaune, pâle » et l’a. fr. moide, attesté,
Midi ont des formes variées se rattachant il est vrai, par un seul texte. En tout cas
au lat. passer, v. passereau. Comme terme on ne peut voir dans *müscidus un dér.
de fortification, depuis le xve s., c’est le de müscus « mousse » qui n’a pas survécu
nom de l'oiseau employé métaphorique- en gallo-roman. It. mucido « humide » re-
ment comme corbeau, cf. à l'appui l’a. fr. présente mucidus et l'esp. mustio « fané »
moinel « moineau » aux deux sens, ce qui *mustidus. — Dér. : moiteur, xrrie.
écarte l’explication par moienel, dér. de
moyen, au sens de « bastion qui est au MOITIÉ. Lat. medietätem, acc. de me-
milieu ». dieläs (de medius, v. mi) « milieu », d’où
« moitié » à basse ép. ; le mot était du lan-
MOINEAU, v. moine. gage fam. et Cicéron s'excuse de l’em-
MOINS. Lat. minus, neutre pris adver- ployer. — Dér. : métayer, xr11° (sous la
bialement de minor, v. moindre. Le préf. forme meileiers) ; métairie, vers 1200 (sous
més, mé, Prov. mes, souvent considéré la forme moiloierie) ; métayage, 1838 ; mi-
comme issu de minus, vient du germ. et toyen, x1v®e (sous la forme mitoyenne « qui
représente la particule négative ou péjor. est au centre »), altération d’après mi,
de l’all. miss-, en anc. haut all. missa-, en d’un dér. en -ain, cf. en 1257, ble moiteen
gotique miss-. (c’est-à-dire moiteain), sorte de méteil, d’où
mitoyenneté, 1804.
MOIRE, 1650 (Ménage : « Mouaire, es-
pèce de camelot : nous avons eu ce mot MOKA, 1773. Tiré de Moka (en arabe
avec la chose des Anglais ») ; écrit ensuite al-mokhä), nom d’un port de l’Yémen, sur
moire. Le dér. moiré a été signalé au xvies., la mer Rouge, où l’on embarquait le café
vers 1540, dans un texte où on lit : barbe d'Arabie.
noire, barbe moirée ; mais la date du texte
n’est pas sûre. L’angl. mohair « étoffe faite MOLAIRE, 1503. Empr. du lat. (dens)
de poils de chèvre angora » (repris sous molaris (de mola « meule »).
cette forme et avec ce sens, 1868), est MÔLE, masc., 1546 (Rab.). Empr. de
empr. de l’arabe mukhayyar « espèce de lit. molo, empr. lui-même du bas grec
camelot grossier »; le sens moderne de môlos (où l’on voit le lat. moles « masse »,
moire, qui date de la fin du xvnie s., vient « digue »).
aussi de l’angl., comme l’apprêt, cf. « la MÔLE, fém., terme médical, 1372. Empr.
méthode anglaise pour mohérer », 1765
du lat. médical mola. propr. « meule ».
(Savary). Le mot arabe est entré en fr.
une première fois, par l'intermédiaire de MOLÉCULE, 1678. Dér. sav. du lat.
l’it. mocajarro, -ardo, d’où mouquayat, 1580 moles « masse », sur le modèle de corpus-
(dans un texte originaire de la Provence), cule, etc. — Dér. : moléculaire, 1797.
moncayar, 1608 (Malherbe) « espèce d’étoffe MOLÈNE « bouillon blanc », x. Peut-
de laine ». — Dér. : moiré, 1740, v. plus être pour molaine, qui serait un dér. de
haut; moirer, 1765, id.; moirage, 1763. mol « mou » et serait ainsi nommé à cause
MOIS. Lat. me(n)sis. It. mese, esp. mes. de ses feuilles souples au duvet moelleux.
MOISE, v. table.
En ce cas l’anc. angl. molegn serait empr.
du fr., comme l’angl. moderne mullein.
MOÏSE, 1907. Substantivation du nom MOLESKINE, 1857. Empr. de l’angl.
de Moïse, qui a été trouvé dans une cor- mole-skin, déjà pris sous cette forme en
beille.
1838, littéral. « peau (skin) de taupe
MOISIR. Lat. pop. *mücire, lat. class. (mole) ». Maïs le fr. a développé un sens
müctre (l’ü vient peut-être de müscidus, que l’angl. ne connaît pas.
v. moite). A. pr. mozir. — Dér. : moisissure,
vers 1400. MOLESTER, vers 1200. Empr. du lat.
de basse ép. molestare (de molesius «fâcheux,
MOISSON. Lat. pop. *messionem, acc. de pénible »).
*messio, dér. de messis. À. pr. meisson ;
ailleurs messis a été conservé : it. messe, MOLETTE, v. meule.
esp. mies. Aujourd’hui, dans les parlers MOLLASSE, MOLLESSE, MOLLET,
gallo-romans, moisson, tout en étant le MOLLETON, MOLLIR, v. mou.
terme dominant, a été supplanté par mois
d'août ou août en normand, par métive (de MOLLUSQUE, 1771. Empr. du lat. des
messis aestiva), dans l'Ouest et par des naturalistes molluscus, créé par Cuvier
d’après le lat. mollusca (nux) « noix à
dér. de segd « moissonner », v. scier, dans
le Sud-Ouest. — Dér. : moissonner, xrrre
écorce molle ».
(Rutebeuf), le Sud-Ouest du Massif central MOLOSSE, 1555 (Ronsard). Empr. du
a encore des représentants du lat. meïere, lat. molossus (du grec molossos, propr. « du
cf. a. pr. medre, meire, it. mielere ; mois- pays des Molosses (peuple de l’Épire) »).
sonneur, vers 1200.
MOLYBDÈNE, xvie. Empr. du lat. mo-
MOITE. Peut-être *müscidus « moisi », lybdæna « veine d'argent mêlée de plomb »
d’où « humide », altération du lat. class. (c’est le sens du xvie s.) du grec molyb-
mücidus, par croisement avec müsteus daina, de molybdos « plomb ») dont les chi-
415 MONÉTISER

mistes se servirent pour désigner le molyb- MONACAL, 1534 (Rab.). Empr. du lat.
dène découvert en 1782 par le Suédois eccl. monachalis (de monachus). Antér. mo-
Hjelm. nial. dér. de monie, forme anc. de moine.
MONACHISME, 1554, Dér. sav. du lat.
MÔME, 1821. Mot vulg., d’origine in- monachus.
connue.
MONADE, 1547. Empr. du lat. de basse
MOMENT, division du temps, x11°, mais ép. monas, monadis « unité » (du grec
devenu usuel seulement à partir du XVIIe. ; monas, de monos « seul »), au sens mathé-
momentané, 1542 ; au moyen âge forme matique et philosophique; a reçu au
plus francisée momentain. Empr. du lat. xvrie s. un sens nouveau dans la philoso-
momentum, propr. « mouvement », d’où phie de Leibniz, qui a créé aussi le comp.
« pression d’un poids », puis « poids léger, monadologie.
point, parcelle, petite division », et spécial.
« petite division du temps » (momentum MONARQUE, xive (Oresme); monar-
temporis), et du dér. de basse ép. momen- chie, xrr1e (B. Latini). Empr. du lat. de
taneus. Le mot lat. a eu aussi le sens d’ «in- basse ép. monarcha, monarchia (des mots
fluence, importance », repris au moyen grecs monarkhés, -khia, comp. de monos
âge et au xvI°s. « seul » et de arkhein « commander »). —
Dér. : monarchique, 1482 ; monarchisme,
MOMENT, terme de mécanique, 1799. xvir1e, une première fois vers 1550 ; mo-
Empr. du lat. momentum au sens de « pres- narchiste, 1738; d’où antimonarchique,
sion d’un poids ». L'expression moment 1714 ; -isme, 1751.
psychologique est un calque de l’all. psy-
chologisches Moment où Moment a le sens MONASTÈRE, xive ; monastique, 1495.
Empr. du lat. eccl. monasterium, monas-
de moment, terme scientifique ; l’expres- monas-
sion all., qui signifie donc « pesée sur les ticus (du grec eccl. monastérion,
âmes », a été dite par Bismarck pour justi- likos, de monastés « moine »). Une forme
altérée *monisteri um (cf. moine) a donné
fier le bombardement de Paris contre
lequel protestaient nombre d’Allemands, l'a. fr. moustier « couvent », d’où « église »,
notamment l’impératrice ; mais, en pas- conservé en ce sens dans les parlers wallon,
sant en fr., il a été compris comme si lorrain, franc-comtois et de la Suisse ro-
moment avait le sens plus connu de « divi- mande.
sion du temps ». MONCAYAR, v. moire.
MOMERIE, xv® (Charles d'Orléans), au MONCEAU. Lat. de basse ép. monticel-
sens de « mascarade », d’où le sens moderne lus « monticule », dér. de mons monlis ; a
au xviie s. Dér. de l’anc. verbe momer « se perdu rapidement son sens propre. — Dér. :
déguiser », usité jusqu’au xvii® s., d’où amonceler, xr1° ;amoncellement, id.
aussi momon, « mascarade », usité du MONDAIN, vers 1200, au sens religieux.
xvie au début du xix® s. Probabl. mots Empr. du lat. eccl. mundanus « du monde »
d’origine expressive, faits avec un mot en- (opposé à la vie religieuse) ; signifiait « de
fantin momo exprimant l’étonnement, la l’univers » en lat. class. (de mundus); a
peur, cf. esp. et port. momo « grimace », suivi les sens de monde. — Dér. : monda-
all. Mumme « masque », angl. {o mum «se nité, xive (E. Deschamps), même déve-
déguiser »; mais le point de départ du loppement de sens que celui de l'adj. —
développement sémantique n’est pas éta- . Comp. : demi-mondaine, 1889, cf. aussi
bli. En tout cas les formes germ. ne sont demi-monde, v. monde.
pas anciennes ; d’autre part les verbes de
l’all. mummeln « gronder » et de l’angl. to MONDE, xu°e. Empr. du lat. mundus, a
mumble « id. » ne conviennent pas au sens. éliminé l’anc. forme mont, assez usitée au
moyen âge. Le sens de « siècle », opposé
MOMIE, xine. Empr. du lat. médiéval à la vie religieuse, lui vient du lat. eccl.
mumia, empr. lui-même de l’arabe moûmia A pris le sens de « société » vers le xvI1° s.
(de moûm « cire »). Le sens de moûmia était Le sens de « gens » date du moyen âge,
« bitume dont on enduisait les cadavres notamment dans la locution tout le monde,
embaumés en Égypte » et aussi « une masse et il est aujourd’hui répandu dans les par-
bitumineuse qui coulait de ces cadavres ». lers gallo-romans (où il désigne aussi
Celle-ci était employée comme remède, et l'homme, par opposition aux animaux).
c’est dans ce sens que le mot est attesté — Dér. mondial, vers 1900. — Comp. :
en fr. au xr11e 8. ; la signification de « mo- demi-monde, 1804 (1855 au sens actuel,
mie » ne sera connue en fr. qu'au XvI° 8. chez A. Dumas fils, qui a lancé le mot en le
— Dér. : momifier, 1789 ; momification, id. prenant comme titre d’une pièce qui eut du
MON, MA, MES. Lat. meus, meum, mea. succès).
En position accentuée meum a donné mien MONDÉ, xvie (Paré) dans orge mondé.
(d’où mienne qui a remplacé moie, lat. mea, Part. passé du verbe monder « nettoyer,
vers le xive s.), longtemps employé en purifier », encore dans des emplois techn. ;
position accentuée, disparu comme adj. lat. mundare ; it. mondare, esp. mondar.
depuis le xvi® s., sauf dans le tour fam. xvie. Empr. du lat. de
un mien ami. Tien, sien, se sont substitués MONÉTAIRE,
basse ép. monetarius (de monela « mon-
vers la fin du xr® s. à uen, suen, Îoue,
soue, etc., lat. {uum, suum, lua, sua, etc. naie »).

MONACAILLE, 1784. Dér. sav. du lat. MONÉTISER, 1823; monétisation, d.


monachus, V. moine. Dér. sav. du lat. monela « monnaie ».
MONIAL 416

MONIAL, v. monacal. MONOTONE, 1732; monotonie, 1671.


MONITEUR, xve. Empr. du lat. monitor Le premier est empr. du lat. de basse ép.
(de monere « avertir »). monotonus (du grec monotonos, de monos
« seul » et de fonos « ton »), le deuxième est
MONITOR, sorte de croiseur, 1864. Em- dér. de cet adj. lat.
pr. de l’anglo-américain monitor, empr.
lui-même du lat. monitor, par l'Américain MONOTYPE, 1907. Empr. de l’anglo-
Ericsson, l'inventeur de ce genre de navire américain monolype, nom sous lequel
de guerre. l'Américain Lanston fit breveter cette
MONNAIE. Lat. monëla, propr. surnom machine en 1887, et qui fut fait d’après
de Junon, Jünd Moneéta; le développe- linotype.
ment sémantique est dû au fait que la MONSIEUR, v. seigneur.
monnaie se fabriquait dans le temple de
cette déesse. It. moneta, esp. moneda. — MONSTRE, xr1° ; monstrueux, xive. Em-
Dér. : monnayer, xri°, monnayage, 1296, pr. du lat. monsirum, monstruosus. Dér. de
monnayeur, 1539, d’où faux-monnayeur, l’adj. et d’après la forme du mot lat. :
1470. monstruosité, 1488.
MONO-. Premier élément de mots sav. MONT. Lat. montem, acc. de mons. It.
comp., tels que monomanie, 1835, tiré du esp. monte. — Comp. : amont, vers 1080
grec monos « seul », ou de mots empr., tels (Roland).
que monochrome, 1771.
MONOCLE, 1827, au sens moderne, tiré MONTAGNE. Lat. pop. montäanea, fém.
de monocle « lunette pour un œil », 1671 pris substantiv. d’un adj. attesté à basse
(le P. Chérubin, physicien). Empr. du ép. montäneus, lat. class. montanus. It.
lat. de basse ép. monoculus « qui n’a moniagna, esp. monitaña. — Dér. : monta-
qu'un œil « (comp. hybride du grec monos gnard, 1512; montagneux, xrr1e (J. de
« seul » et du lat. oculus « œil ») en vue d’un Meung).
sens spécial ; le mot lat. a déjà été empr. MONT-DE-PIÉTÉ, 1584 (G. Bouchet).
sous des formes diverses depuis le moyen Empr. de l’it. monte di pietà, littéral.
âge jusqu’au début du xvire s. au sens « crédit de piété », monte ayant eu au
propre. xvi® s. le sens de « somme d'argent due »,
MONOCORDE, vers 1360 (une 1re fois d’où spécial. « endroit où l’on prête sur
monacorde en 1155), subst. ; empr. du lat. nantissement » ; de là aussi en it. des locu-
monochordon « instrument à une seule tions comme luoghi di monte « titres de
corde ». — Monocorde, adj., 1907 ; empr. crédit », traduits en fr. lieux de mont au
du lat. monochordos « à une seule corde ». XVIIIe s. pour des faits propres à l'Italie.
MONOGAME, 1808, au sens moderne ; Mont-de-piété ne s’est dit d’abord qu’à
une première fois 1495 ; monogamie, 1526. propos de l'institution it.; dep. 1575
Empr. du lat. de basse ép. monogamus, désigne des établissements analogues de
monogamia (du grec monogamos, -mia, de Flandre ; les monts-de-piété n’ont été éta-
monos « seul » et de gamos « mariage »). blis en France qu’en 1774. Dès le xvire s.
et au cours du xvirre s. on avait fait divers
MONOGRAMME, 1557. Empr. du lat. projets pour les instituer. Aujourd’hui on
de basse ép. monogramma fait sur un mo- dit par euphémisme crédit municipal, de-
dèle grec non attesté, comp. de monos puis 1918.
« seul » et de gramma « lettre ».
MONOGRAPHIE, 1793. Comp. sav. du MONTER. Lat. pop. *moniäre, dér. de
grec monos « seul » et l’élément -graphie, mons ; a triomphé du lat. class. ascendere,
que l’on a dans ifypographie, etc. grâce à sa valeur plus expressive et l'appui
que lui donnait l’abondante dérivation de
MONOLITHE, xvir1e, une première fois cette famille de mots. Toutefois ascendere
en 1532. Empr. du lat. de basse ép. mono- a largement survécu : it. ascendere, esp.
lithus (du grec monolithos, de monos « seul » ascender, à. pr. ascendre, a. fr. ascendre
et de lifhos « pierre »). dans quelques textes religieux ou techn.
MONOLOGUE, xve. Fait sur le modèle It. montare. — Dér. et Comp. : montant,
de dialogue avec le grec monos, v. les préc. subst., x11°, au moyen âge n’a que le sens
— Dér. : monologuer, 1851. de « total d'une somme »; monte, XVIE,
au sens moderne, au moyen âge « montant,
MONOMANIE, 1823. Comp. sav. du valeur, intérêt »; montée, xr1° ; monteur,
grec monos « seul » et de manie. — Dér. : id. ; montoir, id.; monture, 1355 ; mon-
monomane, 1829. tage, 1604; démonter, x11°, démontable,
MONÔME, v. binôme. 1870, démontage, 1838; remonter, x1re,
remontage, 1543, remonte, 1680, remon-
MONOPHASE, début xx°. Comp. sav. du toir, 1729; surmonter, x11°, surmontable,
grec monos « seul » et du fr. phase, dans son XV°, insurmontable, 1561 ; monte-charge,
acception techn. 1868 ; monte-plats, fin xIxe.
MONOPOLE, 1318. Empr. du lat. mono- MONTGOLFIÈRE. Dér. de Monigolfier,
polium (du grec monopôlion « droit de nom des deux frères qui ont inventé cet
vendre (plein) seul certaines denrées »). aérostat, en 1782.
À eu aussi le sens de « conspiration, in-
trigue » jusqu’au xviie s. — Dér. : mono- MONTICULE, 1488. Empr. du lat. de
poliser, 1783. basse ép. monticulus. 7
417 MORGANATIQUE

MONTRER. Réfection, qui apparaît et MORASSE, terme de typographie, 1845.


a triomphé de bonne heure, de l’a. fr. Étymologie inconnue.
mostrer, lat. parlé mosträre, d’après la forme MORATOIRE, 1765. Empr. du lat. ju-
écrite monsirare. It. mosirare, esp. mos- rid. moratorius (de morari « s'arrêter, re-
trar ; les parlers du Nord-Est et du Sud- tarder »). On a fait aussi au début du
Ouest ont encore des formes du type mos- xx® s. un subst. moratorium, sur le neutre
trare. — Dér. et Comp. : montre, xiIve, de l’adj. lat.
d’abord mostre en 1243 ; a perdu beaucoup
d’acceptions, notamment celle de « revue MORBIDE t« relatif à la maladie », xve.
d'hommes de guerre », usuelle du xIv® au Empr. du lat. morbidus (de morbus « ma-
XVIIe s. ; aujourd'hui, en dehors de quel- ladie »).
ques locutions, désigne surtout l’objet de MORBIDE, terme d'art, 1690 ; morbi-
poche qui sert à marquer les heures, depuis desse, 1676. Empr. des mots it. morbido
le xvie s.; antér. désigne le cadran de qui a pris le sens de « délicat, souple »
toute horloge ; montreur, 1328 ; remon- dans le langage des arts plastiques, mor-
trer, xive, remontrance, 1453. V. démon- bidezza ; on trouve d’abord au xvire s.
trer. cette dernière forme.
MONTUEUX, xive, rare avant 1488. MORBLEU, v. dieu.
Empr. du lat. monituosus (de mons « mon- MORCEAU, xr1e (morsel). Dér. de mors,
tagne »). attesté en a. fr. jusqu’au xv® s. au sens
MONUMENT, x11°. Empr. du lat. monu- de « morceau », v. mors ; même dérivation
dans l’it. morsello et l’a. pr. morsel. Il y a
menitum. — Dér. monumental, 1823. quelques traces de mors « morceau » dans
MOQUER, vers 1180. Peut-être mot les parlers de l'Est. — Dér. : morceler,
expressif exprimant le mépris, cf. a. pr. 1611 ; morcellement, 1792.
mocar au même sens, esp. Mueca « grimace MORDICUS, vers 1700 (Regnard). Em-
de moquerie ». L’angl. {o mock vient du pr. du lat. mordicus, adv., « en mordant »,
fr. — Dér. : moquerie, xII1I°; moqueur, d’où « sans démordre ».
vers 1180. MORDORÉ, v. dorer.
MOQUETTE, étoffe pour tapis et meu- MORDRE. Lat. pop. *mordere, lat.
bles, 1650 (Scarron). Antér. moucade, 1611. class. mordèére. It. mordere, esp. morder. —
Étym. inconnue. Dér. et Comp. : mordant, xir1e, jusqu’au
XVI° s. désigne une pièce de la ceinture,
MORAILLE, sorte de tenaille, 1606. autre sens depuis ; mordiller, xvI° ; démor-
Empr. du prov. mor(r)alha, à la fois « mo- dre, xiv°; morgeline, plante, xv°, comp.
raille » et « moraillon (pièce de fer servant de l’impér. de mordre et de geline « poule »,
à fermer) », dér. d’un simple mor(re) « mu- v. poule, ainsi nommé parce que les poules
seau », encore très usuel en ce sens au Sud sont friandes de cette plante. Le lat. des
de la ligne allant des Vosges à l’embou- naturalistes du xvI® S., morsus gelinae,
chure de la Gironde, et qui représente un paraît être une traduction de morgeline et
type *murrum, attesté ailleurs, v. morion, non le modèle de ce mot.
et anc. gên. morro, piém. gênois, sarde
murru « museau ». Le mot peut être d’ori- MOREAU, v. le suiv.
gine expressive, mais sa grande extension MORELLE, plante. Lat. pop. maurella,
dans les pays autour de la Méditerranée fém. de *maurellus, dér. de Maurus « Mau-
montre qu'il doit avoir été créé déjà très re », qui a pris dans le lat. pop. le sens de
anciennement. Moraille avait déjà été « brun foncé »; de là l’emploi du fém.
empr. au moyen âge, pour désigner une pour désigner la morelle dont la variété
visière ou certaine pièce de la visière, typique se dit aussi morelle noire ; cf. aussi
d’où moraillon, 1457, antér. morillon. it. morella, a. pr. maurella. L’a. fr. avait
aussi un adj. morel, d’où moreau, encore
MORAINE, 1779 (de Saussure : « Les dans les patois, « brun foncé », spécial. en
paysans de Chamouni nomment ces mon- parlant du cheval, d’où aussi le dér. mo-
ceaux de débris la moraine du glacier »). rillon, 1283, d’abord « variété de raisin
Empr. du savoyard moréna, propr. « bour- noir », et d’autre part, « espèce de canard
relet de terre à la limite inférieure d’un
champ en pente », dér. du type mor(re) au plumage noir », 1280.
« museau », v. le préc. Le mot simple vit MORESQUE, xive (Froissart, pour dési-
aussi dans le toscan mora « tas de pierres », gner une monnaie d'Espagne); qualifie
Murcia morra « hauteur », etc. aussi une danse; souvent morisque,
dès 1379, devenu moresque d’après les
MORAL, vers 1225 (où on lit l’adv. mo- nombreux mots formés avec le suff. -esque.
ralement) ;: moralité, xi1e. Empr. des mots Empr. de l'esp. morisco, empr. lui-même
lat. moralis « qui concerne les mœurs », du lat. médiéval mauriscus, v. le préc.
moralitas (créé à basse ép.), de mores
« mœurs ». — Dér. : morale, début xvir°; MORFIL, v. fil.
moraliser, xive, moraliseur, 1611, une pre- MORFONDRE, v. fondre.
mière fois au xiv® s., démoraliser, 1798,
démoralisation, 1796, démoralisateur, 1803 ; MORGANATIQUE, 1609. Empr. du lat.
moraliste, 1690 ; immoraliste, récent (A. Gi- médiéval morganaticus, fait d’après un mot
de); amoral, 1885, amoralité, 1885; des Lois Barbares morgangeba qui se trouve
immoral, 1770, immoralité, 1777. aussi chez Grégoire de Tours, littéral. « don

DICT. ÉTYM
27
MORGANATIQUE 418

du matin », d’où l’all. Morgengabe « douaire MORNIFLE, 1530 ; désigne au xvie 8.


que le nouveau marié donnait à sa fem- un groupe de quatre cartes semblables.
me »; mais les circonstances du change- Probabl. dér. d’un verbe *mornifler « gifler
ment de sens de morganalticus sont encore le museau », comp. du type “*murr-, v.
à trouver. moraille, et de l’anc. fr. nifler, v. renifler.
Dans les parlers de la région lyonnaise
MORGELINE, v. mordre. mornifler signifie aussi « renifler ».
MORGUE, vers 1460, au sens d’ «air hau- MOROSE, 1615 ; morosité, 1486. Empr.
tain » ; a reçu plus tard le sens d’ «endroit des mots lat. morosus, propr. «scrupuleux,
d’une prison où les prisonniers étaient sévère » (de mores « mœurs »), morositas.
examinés à leur entrée », 1526 ; puis « en- MORPHINE, 1817. Dér. sav. de Mor-
droit où l’on expose des cadavres de per- phée, dieu du sommeil, en lat. Morpheus
sonnes inconnues », au XVII® S.; aujour- (lui-même pris au grec) ; dit ainsi à cause
d’hui remplacé par l’Institut médico-légal. des propriétés anesthésiantes de la mor-
Dér. du verbe morguer « braver (qn) », en phine.
usage du xv® au xvirie s. Celui-ci est empr.
des parlers occitans, où il est encore en MORPHO-; -MORPHE. Premier et
usage. Il représente un type *mürricare, deuxième élément de mots sav. comp.,
qui doit avoir eu le sens de « faire la moue», tels que morphologie (créé par Gœthe),
dér. de *mürrum, v. moraille. 1822, tiré du grec morphé « forme », ou de
mots empr., tels qu'amorphe, 1793.
MORIBOND, 1492. Empr. du lat. mori-
bundus (de mori « mourir »). MORPION, v. pion.

MORICAUD, 1583 (Egyptien… mori- MORS. Lat. morsus « morsure », subst.


cault) ; déjà en 1494 comme nom de chien verbal de mordere « mordre » ; le sens de
(Briffault, Moricault et Clairauld). Dér. de « morsure » a été usuel jusqu’au xvre s.;
More, empr. de l’esp. Moro, lat. Maurus de là divers emplois dans les langues techn.
(la forme devenue plus usuelle Maure est pour désigner des objets qui mordent,
refaite sur le mot lat.). maintiennent : étau, mors de cheval, et
aussi ce qu’on mord, un morceau, v. mor-
MORIGÉNER, fin xvie (d’Aubigné) ; ceau ; cf. de même it. morso « morsure,
antér., depuis 1314, employé au part. passé mors », a. pr. mors « morsure ». — Dér. :
et surtout sous la forme moriginé; signifie morsure, 1213, aujourd'hui les parlers em-
d’abord « former les mœurs, dont les mœurs ploient aussi divers dér. de mordre ; mais
ont été formées », encore chez Molière (Sca- mors a disparu en ce sens.
pin, II, I) ; le sens moderne de « reprendre,
MORSE, 1540 (écrit mors). Empr. du
blâmer, pour améliorer » est du xvirie s. russe morju, empr. à son tour du lapon
Empr. du lat. médiéval morigenatus, -are,
mor$$a, qui paraît être une imitation du
altération du lat. class. morigeraius, -ari cri de l’animal.
« (être) complaisant pour » ; le mot médié-
val a reçu le sens nouveau de « rendu do- MORSE, appareil télégraphique, 1856.
cile, éduqué », d’après l’adj. morigerus Empr. de l’anglo-américain morse, tiré lui-
« docile, complaisant ». même du nom de l'inventeur Morse, de
New-York (1791-1872).
MORILLE, 1500. D'un lat. *mauricüla,
dér. de maurus « brun foncé » (v. morelle), MORT, subst. fém. Lat. mortem, acc. de
postulé aussi par l’occitan moourilho; mors. It. morte, esp. muerte. — Dér. et
la dénomination est due à la couleur sombre Comp. : mortaillable, 1346, par l’intermé-
de ce champignon. Le néerl. morielje diaire de mortlaille, xirre, terme de droit
est empr. du franc. — Dér. : morillon, féodal, « droit par lequel l'héritage du serf
variété de morille, fin xixe. mort revenait au seigneur »; signifiait
aussi « mort, funérailles », cf. a. pr. mor-
MORILLON, variété de raisin, etc., v. talha « épidémie »; la dérivation en mor-
morelle. taillable a probabl. été faite sur le modèle
MORION, 1542. Empr. de l'esp. mor- de faillable, V. tailler ; male-mort, xrrre:
mort-aux-rats, 1606.
riôn, dér. de morra « crâne », cf. pour l’em-
prunt casque ; l’esp. a en outre un masc. MORT, MORTE. Lat. pop. *morlus, -a,
morro dont morra a été tiré ; ce masc., qui lat. class. morluus, -a, part. passé de mori
désigne des objets de forme ronde et signifie «mourir ». It. morlo, esp. muerto. — Comp. :
aussi « lippe », représente le type *murrum, mort-bois, 1533 ; morte-eau, 1690 ; mort-
v. moraïille. Rapprocher l’onomatopée mor- gage, 1283 (Beaumanoir) ; mort-né, 1551 ;
ro employée pour appeler les chats. morte-paie, 1532 (Rab.) ; désignait autre-
MORNE, adj., vers 1138. Tiré d’un verbe fois un soldat invalide ou vétéran qui rece-
disparu avant les premiers textes (morné vait une solde sans faire un service actif;
est encore attesté du x111° au x1x°s., empr. morte-saison, xv°. V. amortir.
du franc. *mornôn, cf. angl. {o mourn « être MORTADELLE, xve. Empr. de lit. mor-
triste ». tadella (on dit aussi moriudello), dér. du
MORNE, subst., 1717. Mot du créole des lat. murlälum « sorte de farce où il entre
Antilles, altération de l’esp. morro « mon- des baies de myrie (murius, forme plus
ticule », survenue peut-être déjà en Galicie, latinisée de myrius, v. myrte) ».
v. morion. MORTAILLABLE, v. mort.
419 MOTIF

MORTAISE, xrr1°, À. pr. morlaiza, Mmor- mosaïque). L’a. fr. a à la fois musaique au
taira. L’esp. mortaja vient du gallo-roman. sens de « mosaique », déjà fém., vers le
Probabl. empr. de l'arabe murtazz, part. xves. et plus anciennement un adj. music,
passé de razza « introduire une chose dans musique, surtout dans or music, musique,
une autre ». Mais l’a. pr. mortaiza est qui paraît désigner une sorte de dorure,
empr. du fr., et la première forme de celui-ci cf. en lat. médiéval musivum aureum ; or
était mortoise, ce qui s'accorde mal avec musif, 1838 (altéré en or mussif, 1792, chez
le mot arabe. — Dér. : emmortaiser, 1289. Fourcroy) « mélange de soufre et d’étain,
brillant comme de l’or », tout en étant fait
MORTEL, vers 1080 (Roland) ; morta- sur le lat. musivus (cf. aussi argent musif,
lité, x11°, au moyen âge se dit aussi de 1836) paraît être une survivance de l’a. fr.
l’ensemble des morts dans un combat. or music, bien qu’on ne le suive pas dans
Empr. du lat. mortalis, mortalitas. Mortel les textes. — Dér. : mosaiïste, 1823.
a la forme d’un mot pop. ; mais, en raison
de son sens, c’est plutôt un mot de la MOSQUÉE, 1554; d’abord mosquez,
langue savante qui a été francisé. 1506 ; en outre musquee, 1528. Empr. de
MORTIER. Lat. mortarium, à la fois l’it. moschea, altération de moscheta (fran-
« sorte de récipient » et «ciment (le contenu cisé en musquet(t)e au xv® et au XvIeSs.;
du récipient) ». It. morlaio « récipient », on a aussi muscat, masC., au xv°s.), d’abord
esp. morlero, aux dens sens, a. pr. mortier moschita ; lit. est empr. lui-même de l’esp.
« id. ». Mortier a servi depuis le xve s. à mezquita (francisé en mesquile, fin xive et
désigner une machine de guerre et, depuis en 1516), et l’esp. vient à son tour de
le xvire, une toque de magistrat (par com- l’arabe masdjid (peut-être empr. lui-même
paraison de la forme). du nabatéen), propr. « endroit où l’on
adore ».
MORTIFIER, xx, au sens religieux;
mortification, x11°, id. Empr. du lat. eccl. MOT. Lat. de basse ép. muitum, dans
mortificare, propr. « faire mourir », morti- une scholie : dicimus muiltum nullum, emi-
ficaiio, d’où le sens particulier de ces mots. seris id esl verbum, aussi a. pr. mot, l’it.
Ont été pris au sens concret d’après leur motlo et l'esp. mote, d'emploi restreint,
étymologie dans la langue médicale depuis viennent du gallo-roman. A l’origine mot
1539, d’où l’emploi de mortifier dans la a le sens de « son émis »; il est surtout
langue de la cuisine déjà chez Montaigne ; employé dans des phrases négatives avec
morlifier est en outre déjà employé au les verbes dire, sonner, tinter, etc. C’est au
XIVe s. en un sens concret dans la langue contact de ces verbes qu'il prend la signi-
de l’alchimie, opposé à vivifier et encore fication de « parole ». L'expression mof à
usité au XVIIe. mot, 1411, se dit plus souvent à la même
époque de mot à mot, attesté depuis le
MORTUAIRE, vers 1300. Empr. du lat. xive s.; c'est alors surtout un terme de
morluarius (de mors « mort »). À été usuel procédure. Motus, 1662, est une latinisa-
au moyen âge comme subst. des deux tion plaisante de mot, pris au sens de « pas
genres au sens de « mortalité, funérail- un mot » (mot figurait souvent dans des
les, etc. ». expressions négatives dans l’anc. langue),
cf. Point de réponse, mot, La Fontaine,
MORUE, 1260. En outre molue, fréquent
Fables, VIII, 17, Mais mot, dans une farce
en fr. jusqu’au xviie s., moluel dès 1036. . de la fin du xv® s. — Dér. : motet, xII1°
Peut-être comp. du celt. mor « mer » et de
l’a. fr. Luz « brochet » (du lat. lücius, id.). — (Rutebeuf).
Dér. morutier, 1874; moruyer, 1606. MOTEUR, 1377. Empr. du lat. motor
MORVE, 1495 ; mais l’adj. morveux est « qui met en mouvement » (de mo-
déjà atLesté au xrr1e s. Paraît être une alté- vere « mouvoir ») comme terme de philo-
ration dialectale, de la région méridionale, sophie ou de science, à la fois comme
du mot qui a donné le fr. gourme, cf. les subst. et comme adj.; sert depuis 1744 à
mots de l’a. pr. vormailz et morvel, tous désigner une machine. — Dér. : motoriser,
deux au sens de « morve » ; l’altération de 1923 ; motoculture, 1920 ; motard, 1960. —
vorm- en morv- est peut-être elle-même due Comp. locomoteur, 1690, fait sur le
à l'influence des parlers de la péninsule modèle de locomotive, d’abord adj. dans
ibérique où l'esp. a muermo et le port. facullé locomotive, 1583, imité du lat. des
mormo, formes qui peuvent continuer le humanistes loco motivum « puissance de
lat. morbus (à côté du catalan vorm qui changer de place », comp. avec loco,
est du même type que le fr. gourme). ablatif du lat. locus « lieu », au sens de
« qui permet de s'éloigner d’un lieu »,
MOSAÏQUE, 1526. Empr. de lit. mo- d’où a été tiré le subst. pour désigner une
saico, empr. lui-même du lat. médiéval machine, 1826; d’où locomotion, 1772;
musaicum ; celui-ci est dû à une altération vasomoteur, 1872, comp. avec le lat. vas
par changement de suff., du lat. anc. musi- « vaisseau », sur le modèle de locomoteur.
vum, tiré de musivum opus « ouvrage en
mosaique » (de musivus, autre forme de MOTIF, xive (Oresme). Tiré d’un ancien
museus), qui ne se disait que d'ouvrages adj. molif « qui met en mouvement »,
en mosaque (du grec mouseios « qui con- empr. du lat. de basse ép. molivus « mo-
cerne les Muses »; mais mouseion au sens bile » (de movere « mouvoir »), dont le neutre
de « mosaïque » est récent et est fait sur motivum était employé dans le lat. du
le lat. ; ce sont, en effet, les Romains qui moyen âge avec le sens de « motif ». — Dér.:
paraissent avoir inventé les ornements en motiver, 1721 ; immotivé, 1877.
MOTION 420

MOTION, terme de langue politique, MOUDRE. Lat. molere. Esp. moler, a.


1775. Empr. de l’angl. motion (empr. du pr. molre. — Comp. : remoudre, 1549;
lat. motio « mise en mouvement »). Motion vermoulu, vers 1244 (alors vermelu),
a été empr. du lat. motio, depuis le xr11°58., -oulu dès 1283 , comp. de ver, au sens de
au sens de « mouvement », pour des em- « mangé par les vers », d’où vermoulure,
plois scientifiques ou spéciaux, aujourd’hui 1283.
hors d'usage. MOUE, vers 1170 (Chrétien). Au moyen
MOTOCYCLETTE, 1907, d'abord aussi âge surtout «lèvre ». Du francique *mauwa,
motocycle. Fait sur bicyclette dont bi- a été qu’on restitue d’après le néerl. mouwe
remplacé par moto-, tiré de moteur avec 0- maken « faire la moue », le moyen haut all.
sur le modèle d’auto, d’où, par abréviation, mâwen, ete., mot qui semble être d’origine
moto. — Dér. : motocycliste, 1923. onomatopéique ; cf. Moue ! interjection
dans une sottie du xvI®s.
MOTTE, x11e. Signifiait aussi au moyen MOUETTE, x1ve. Cet oiseau vivant pres-
âge « levée de terre » et « château bâti sur que exclusivement sur la mer (ce n’est que
une hauteur » (d’où nombre de noms de depuis un demi-siècle environ qu’il a chan-
lieu) ; a. pr. mola « id. »; attesté en outre gé son genre de vie), son nom n’est d’abord
dans les parlers de la Haute-Italie avec des attesté que dans les parlers des régions
sens analogues. Représente un prélatin maritimes de la France ; ainsi anc. nor-
*mütt (a). — Dér. : motter, xvi° (Ronsard); mand mave, mauve, qui sont empr. de
mottereau, nom d'oiseau, 1778, mot des l’anc. angl. mæw. Mouette en est un dimin.
parlers du Centre ; motteux, nom d’oiseau,
xvirie (Buffon), usité au xvi° s. comme MOUFETTE, v. mofette.
adj. au sens de « où il y a des mottes »;
émotter, 1555. MOUFLARD, v. mufle.
MOUFLE, sorte de gros gant, d’où di-
MOTU PROPRIO, xvi® (Du Bellay). verses acceptions techn. depuis le xvrre s.
Mots lat. signifiant « de son propre mou- Attesté dès 817 par la forme latinisée muj-
vement », empr. du lat. de la chancellerie fula, d’origine incertaine. Seulement franç.,
papale. ce qui parle pour une origine francique.
MOTUS, v. mot. Probabl. comp. du radical du germ. mu/fel
« museau rebondi » (v. camouflet), lequel
MOU. Lat. mollis. — Dér. : mollasse, aura signifié « enveloppe » et de vél « peau
xive { Amyot : mollace), peut-être d’après d'animal ». Les mots germ. de même sens,
l’it. mollaccio ; mollesse, xrr°, mollet, adj., all. Muff et angl. muff viennent du fr. —
xu1e, d’où molleton, 1664; œuf mollet, Dér. : mouflé, terme techn., 1743 ; mou-
xve ; pris substantiv. pour désigner le gras flette, fin xve.
de la jambe, xvie (Paré); dit ainsi par
opposition au devant osseux de la jambe ; MOUFLON, xvirie (Buffon), antér.
l’a. fr. disait aussi mol, encore dominant muffle, 1556, muifle, 1611 ; muifleron, id.;
dans les parlers gallo-romans, d'où molle- mufleron, 1660 (Oudin : especie de carnero en
tière, fin xixe ; mollir, xve ; molard, « cra- Sardeña). Empr. de l’it. muflone, attesté
chat », terme vulg., 1864, molarder, fin xvine, lui-même d’origine dialectale,
fin x1xe ; amollir, xr1°, amollissement, 1539, cf. corse muffolo, sarde logoudorien mu-
ramollir, 1503, ramollissement, 1552. rone, etc., lat. de basse ép., dialectal ou
d’origine étrangère mufro.
MOUCHE. Lat. musca. La locution faire MOUILLER. Lat. pop. *molliäre, propr.
la mouche du coche vient de la fable de La « amollir le pain en le mouillant », dér. de
Fontaine, VII, 9. Mouche au sens d’ « es- mollis « mou »; verbe créé quand l’usage
pion » est attesté depuis le xvi° s. — Dér. de la soupe a été introduit par les Germains,
et Comp. : mouchard, 1579, de mouche v. soupe. Esp. mojar, a. pr. molhar ; con-
« espion », moucharder, fin xvi°, -age, currencé aujourd'hui par les types baigner
fin xvuie ; moucherolle, sorte d'oiseau du dans le Sud-Est, fraîchir en picard, etc.
type gobe-mouches, 1555 ; moucheron, sor- Pris comme terme de marine dans mouiller
te de petite mouche, vers 1300 ; mouche- l’ancre depuis le xvrre s. — Dér. : mouil-
ter, 1433, moucheture, 1539 ; démouche- lage, 1654, aujourd’hui surtout terme de
ter, 1838, en parlant d’un fleuret ; émou- marine ; mouillette, 1690 ; mouillure, x111° ;
cher, vers 1200 ; émouchette, 1549 ; mouche remouiller, 1549.
à miel, 1487, v. abeille.
MOUISE, terme d’argot, 1829. D'abord
MOUCHER. Propr. « enlever les muco- « soupe de pauvre », puis « misère, gêne »;
sités nasales », dit d’une chandelle dès le paraît empr. de l’all. dialectal du Sud mues
xie s. Lat. pop. *muccäre, dér. de muccus « bouillie ».
« morve ». — Dér. : 1° au sens propre; MOUJIK, 1727 (alors mousique; en
mouchoir, xve, antér. écrit moucheur, fin 1787, un voyageur emploie le pluriel mou-
XIIIe ; au xvi1e s. on distingue le mouchoir gikis, avec s du fr.). Mot russe signifiant
de poche et le mouchoir de cou, distinction « paysan ».
encore usuelle chez les ruraux ; 2° au sens
de « moucher une chandelle » ; moucheron, MOULE, masc. D'abord modle, xxre.
vers 1200, parfois mécheron, par croise- Empr. du lat. modulus, propr. « mesure »
ment avec mèche ; mouchette, 1399 (sous (de modus au même sens), qui s’employait
la forme miochote dans un texte bourgui- dans la langue de l’architecture, v. module
gnon). et modèle ; de même it. modano, a. pr.
A1 MOUSTIQUE

mole ; l'esp. molde vient du gallo-roman. que l’a. pr. molsa (xurie s.) et le vellavien
— Dér. : mouler, vers 1080 (Roland) ; moursa montrent que le mot germ. s’est
moulage, 1415 ; mouleur, xzr1° s. (É. Boi- rencontré avec un mot lat., qui doit être
leau) ; moulure, 1423 (écrit mollure) ; dé- mulsa « hydromel » (dér. de mel « miel », cf.
mouler, 1803 ; surmouler, XvIIr1° (supposé mulsum (vinum) « vin mêlé de miel »;
par -age de Falconnet). mulsa aura été dit de l’écume, parce que
l’hydromel est mousseux; son emploi
MOULE, fém. Lat. musculus ; muscle du métaphorique pour désigner la plante
prov. et du catalan remonte à une forme devait se produire facilement ; pour le
avec ü. développement inverse v. le mot suiv.
MOULIN. Lat. de basse ép.m olinum, L'it. et l'esp. musco continuent le lat.
dér. de mola « meule »; mot créé lors de müscus. — Dér. : mousseux « couvert de
la diffusion du moulin à eau. — Dér. : mousse, etc. », 1545 ; moussu, vers 1160;
moulinet, 1389, au sens de « petit moulin »; émousser « ôter la mousse », 1549.
l'expression faire le moulinet, issue de mou- MOUSSE « écume », 1680. En raison de
linet « sorte de bâton », 1418, date du cette apparition tardive il ne peut pas
xvi® s.; mouliné, dans bois mouliné, 1685, venir directement du lat. mulsa; c'est
cf. aussi Le bois se mouline, xvrre (Liger) et plutôt un emploi métaphorique du mot
molinure, 1283 (Beaumanoir), « vermou- précédent. — Dér. : mousseux « écumeux »,
lure », v. moudre. 1718 ; mousser, 1680.
MOULT. Anc. adv. qui ne s'emploie MOUSSE, adj., 1370 (Oresme), attesté
depuis le xvi® s. que dans le style maro- indirectement par le dér. émousser. Vit
tique. Était en outre adj. dans l’anc. dans les parlers au sud de la Loire, d'’oùila
langue ; a été remplacé par beaucoup. Lat. pénétré en franç. Continue un lat. pop.
multus, adj., mulium, adv. ; ne survit plus *mutitius « tronqué », dér. du radical pré-
en gallo-roman que comme adv. et dans roman mütt- (v. motte). — Dér. : émousser,
quelques points du Nord-Est et de l'Est. v. plus haut.
MOUQUÈRE, 1863 ; donné comme mot MOUSSE, nom masc., 1522. Empr. de
de la « langue franque » des États barba- lit. mozzo, de même sens, empr. lui-même
resques en 1836. Mot d’argot, introduit en de l’esp. mozo « garçon » (lat. musteus au
fr. par les troupes de l'Algérie, empr. de sens de « frais, nouveau », propr. « de la
l’esp. mujer « femme », lat. mulier. nature du moût », de mustum « moût »);
mais l’esp. dit au sens de « mousse » gru-
MOURIR. Lat. pop. *morire, lat. class. mele (de l’angl. groom).
mori. It. morire, esp. morir. — Comp. :
meurt-de-faim, 1690, en 1604 mort-de-faim. MOUSSELINE, 1656. Empr. de l’it. mus-
solina, lequel est tiré de l’adj. arabe mausili
MOURON, x11°. Répandu en gallo-roman « de Mossoul ». Cette étoffe se fabriquait
sous des formes variées ; paraît être d’ori- d’abord à Mossoul, ville de la Mésopotamie.
gine germ. ; le holl. a muur (moyen néerl. Le suff. -{ a été rendu en italien par -ino;
muer) et des variantes existent dans d’au- le fém. s'explique par la combinaison avec
tres langues germ. ; mais le détail de l’his- tela « toile ».
toire de ce mot est mal connu.
MOUSSERON, vers 1200 (sous la forme
MOURRE, dans la locution jouer à la meisseron). Lat. de basse ép. (vi s., chez
mourre, 1475. Empr. de l'it. dialectal ‘Anthimus) mussirionem, acc. de mussiriô,
morra, issu très probabl. de l’it. dialectal mot local propre au gallo-roman, d’origine
morra « troupeau », les doigts levés de la prélatine, v. champignon.
main dont il s’agit de deviner le nombre
formant comme un petit troupeau qu’on MOUSSON, 1649; en outre monson,
dénombre rapidement. L'it. morra est de 1690. Empr. du port. monçäo (d’où aussi
la même famille que moraine, le sens de esp. monzén), empr. lui-même de l'arabe
« troupeau » étant sorti de celui de « tas ». mausim, propr. « époque fixée, saison »,
d’où le sens de « vent de saison », déve-
MOUSQUET, 1578 (mosquel, 1581; mous- loppé dans les milieux marins de l'Océan
quelte, chez Ronsard). Empr. de l’it. mos- Indien.
chetto (ou moschetta), auparavant « flèche
lancée par une arbalète », dér. de mosca MOUSTACHE, vers 1500 (« Grec por-
« mouche ». Le sens d’ « arbalète » que tant la barbette moustache »). Empr. de
le développement sémantique semble de- l’it. moslaccio, autre forme de mosiacchio,
mander est attesté dans le lat. de cette ép. empr. lui-même du bas-grec musiaki, en
muschela. Celui d’ « émouchet » attribué à grec anc. mystaæ, propr. «lèvre supérieure »,
lit. par certains dictionnaires a été suggéré d’où « moustache », mot dorien. On a relevé
par le fr. fauconneau, mais paraît y être mostacia dans des gloses du vie s.; mais
inconnu. — Dér. : mousquetade, 1574 ; il ne semble pas que l’it. remonte si haut,
mousquetaire, fin xvi° (Montaigne) ; mous- et cette forme n’explique pas mostlacchio.
queterie, fin xvie (d’Aubigné); mousqueton, Fém. d’après barbe. — Dér. : moustachu,
id., d’après l’it. moschettone. 1853.
MOUSSE, nom de plante. Du francique MOUSTIQUE, 1654, dans un récit de
*mosa, cf. all. Moos; Grégoire de Tours voyages au Brésil (1611 mousquite). Ne
a déjà un dér. mussula. À. pr. mossa (pour s’est dit longtemps qu’en parlant de mous-
la forme molsa, v. le suiv.). Toutefois le tiques des pays tropicaux. Empr. altéré
judéo-français molse (vers 1100), ainsi de l'esp. mosquito, dér. de mosca « mou-
MOUSTIQUE 422ca

che ». Les parlers du Sud-Ouest disent bien au sens, le meneau étant un montant
aussi mousquit «moucheron », formé comme qui divise la baie d’une croisée; moyen
le mot esp.; mais il ressort de l’histoire âge, 1640 (dans le lat. de la Renaissance,
du mot fr. que c’est un mot exotique et on rencontre dès 1518 media acias, en 1604
non pris à ces parlers. — Dér. : mousti- medium aevum, d’où l’it. medio evo; le
quaire, 1768, parfois aussi moustiquière; mot franç., ainsi que l’angl. middle age
fait d’après l’esp. mosquilera. et l’all. Millelaller sont des adaptations
de ces termes latins), moyenâgeux, 1865
MOÛT. Lat. mustum. — Dér. : moutarde, (Goncourt) (moyenâgisie en 1845).
vers 1220, propr. «condiment fait de grains
de sénevé broyés avec du vinaigre ou du MOYEU. Lat. modiolus, propr. « petit
moût de vin », d’où, de très bonne heure, vase » (dér. de modius, v. muid), d’où
le sénevé lui-même; cf. de même it. mos- « moyeu » par comparaison de la forme.
tarda, esp. mostaza; il est difficile de dire Le sens propre survit encore en a. fr., cf.
d’où est parti l’usage et, par suite, quelle aussi a. pr. mojol. Le sens de « moyeu »
langue a servi de modèle ; moutardier, est rare en dehors du fr. ; l’it. l’a développé
1323, « pot à moutarde », 1311, « fabricant dans le simple mozzo. Dans les parlers du
de moutarde ». Midi et de l’Est on a des représentants
divers d’un type *buit- d’origine celtique,
MOUTARD, 1827, dans un glossaire ar- cf. le gallois both. Moyeu au sens de « jaune
gotique. On a rapproché moté « petit gar- d'œuf » « représente très probablement le
çon » de la région lyonnaise, qui pourrait lat. mediolum « jaune d’œuf » (dans les
être de la famille du prov. mout « écorné, anciens parlers souvent mieul) ; il a tiré
tronqué », v. mousse ; mais l’histoire du son o de moyeu d’une roue, celui-ci se
mot n’est pas suffisamment connue. trouvant aussi au centre de l’objet dont il
MOUTARDE, v. moût. fait partie. V. moellon.
MOUTIER, v. monastère. MUCILAGE, xiv®; mucilagineux, id.
MOUTON. D'un gaulois *mulio, supposé Empr. du lat. de basse ép. mucilago, muci-
d’après le gallois mollt, l’irlandais moli, le laginosus (de mucus).
breton maout « mâle châtré destiné à la MUCRE, v. remugle.
boucherie » ; d’où aussi a. pr. mollo ; pour
cette origine, v. bélier. Signifie aussi « bé- MUCUS, 1743 ; muqueux, xvi® (Paré);
lier » en a. fr., comme l’it. montone (altéré muqueuse, s., 1874; mucosité, 1539. Les
d’après moniare), et aujourd’hui dans les deux premiers sont empr. du lat. mucus,
parlers de l’Ouest et du Midi ; mais désigne mucosus, le troisième est un dér. sav. de
surtout l’espèce dans la plupart des parlers mucosus.
gallo-romans, en concurrence avec brebis MUER. Lat. mütäare « changer ». Avait
dans le Nord et ouaille dans le Centre et encore le sens général de « changer » au
l'Ouest ; signifie rarement « brebis ». — moyen. âge; s’est restreint au sens mo-
Dér. : moutonner, 1678, moutonnement, derne depuis le xvrr° s. Conservé au sens
1877; moutonneux, 1838, moutonnier, lat. dans les autres langues romanes : it.
adj., 1548 (Rab., dans le fameux épisode muiare, esp. a. pr. mudar ; le sens « de
des moutons de Panurge), au moyen âge muer » existe également presque partout.
s’employait déjà comme subst. au sens de Est encore de quelque usage dans les par-
« gardeur de moutons ». lers gallo-romans au sens de « changer ».
MOUTURE. Lat. pop. *molilüra, dér. de — Dér. : muance, xr1° (Chrétien), vieux
molere « moudre ». Esp. moledura, a. pr. mot ; remuer, vers 1080 (Roland), a signi-
moldura. fié « (re)changer » jusqu’au xvi® s., comme
l’a. pr. remudar, encore usité aujourd'hui
MOUVOIR. Lat. movére. Rare aujour- en ce sens; a été confondu avec l’anc.
d’hui, sauf à l’inf. ; les parlers du Nord qui remouvoir qui, par suite, a disparu ; d’où
l'ont gardé l'ont refait en mouver, attesté remuement, xI1°, remue-ménage, XVI°, qui
en fr. litt. au xvie s. It. muovere, esp. mo- a d’abord signifié jusqu’au xvir® s. « démé-
ver. — Dér. : mouvance, terme d’ancien nagement »; immuable, 1327, d’après le
droit, 1495; mouvement, xr1°, mouve- lat. immutabilis et l’anc. muable, vers 1080
menté, 1845 ; mouvette, 1762, mot techn., (Roland).
dér. de mouver plutôt que de mouvoir.
MUET, xu° (Chrétien). Dér., d’origine
MOXA, sorte de bourre faite avec l’ar- expressive, de l’a. fr. mu, lat. mütus, dis-
moise, servant de révulsif, 1698. Mot im- paru depuis le début du xvi® s., sauf dans
porté d’Extrême-Orient (où le moxa est la locution rage mue, usitée jusqu’au
usuel en thérapeutique), vers 1680, par XVIIe s. L’extrême Nord-Est dit muel,
Batavia qui semble avoir pris le mot au usuel au moyen âge. Ailleurs mültus est
japonais qui a mogusa (communication de conservé : it. mulo, esp. mudo. — Comp. :
M. Pelliot). sourd-muet, 1791 (une 1re fois en 1564),
MOYEN, Lat. medianus « qui se trouve sourd-et-muei, depuis 1694, enccre usuel
au milieu », dér. de medius, v. mi. It. dans les parlers septentrionaux.
mezzano, esp. mediano. Apparaît de bonne MUETTE, v. meute.
heure comme subst. avec des sens variés. —
Dér. et Comp. : moyenner, x11° ; meneau, MUEZZIN, 1823 (1654 muezim, 1568
terme d’architecture, d’abord mayneau, au maizin). Empr. du turc muezzin, empr.
pluriel mayneaulx, 1398, qui pourraient lui-même de l’arabe mo’adhdhin « celui qui
être issus d’un *meienel, ce qui conviendrait appelle à la prière ».
423 MUNIR

MUFLE, 1542. Altération, par croise- rouge », attesté vers 700 sous la forme mule,
ment avec museau, de moufle, relevé de- passé au néerl. (muil), d’où il est revenu
puis 1536 et attesté indirectement par au xvi® au sens actuel.
mouflart « joufflu », vers 1320. A de nom-
breuses correspondances dans les parlers MULET « produit mâle issu de l’accou-
allemands et néerl. voisins, comme mofflen plement d’un cheval et d’une ânesse ou
« manger avec la bouche pleine », moyen inversement ». Dér. de l’a. fr. mul, lat.
néerl. moffelaer « glouton », all. muffel mülus, d’où aussi it. esp. mulo, a. pr. mul.
«museau », dont il est sans doute emprunté. — Dér. : muletier, subst. 1325.
V. maîfflé, camouflet. Mufle a pris récem- MULET, poisson, x11°. Dér. du lat. mul-
ment le sens de « personnage d’une indéli- lus « sorte de rouget » influencé phonéti-
catesse grossière », 1840 (cf. mufle « lour- quement par mülus, v. le préc. La forme
daud », en 1824); en ce sens masc. — mulle, 1836, est empr. du lat. mullus. Em-
Dér.: muflerie, 1867, de mufle « personnage ployé abusivement pour désigner le muge.
d’une indélicatesse grossière »; muflier, — Comp. : surmulet, x111° (sormulés).
1778, dans les parlers populaires se dit
surtout gueule de lion ou gueule de loup. MULOT, xrre. Dér. d’un mot germ. at-
MUFTI, 1546 (écrit mofty). Empr. du testé dans les Gloses de Reichenau : Talpas :
mot turco-arabe moufti « celui qui rend des muli qui fodiunt terram, dont on rapproche
décisions juridiques (appelées falwé) ». le néerl. mot « taupe », d'un francique
*mull ; l’all. Maulwurf a une autre origine ;
MUGE, 1546. Empr. du prov. muge, lu de mulot est probabl. dû à mul, mulei,
lat. mugil, d’où aussi la forme des parlers v. mulet. — Comp. : surmulot, xvirI®
de l’Ouest meuille, cf. en outre it. muggine. (Buffon).
MUGIR, xve. Réfection, d’après le lat. MULTI-. Premier élément de mots sav.
mugire, de l’a. fr. muir (d’où, par change- comp., tels que multicorne, 1859, tiré du
ment de conjugaison, muire), qui continue lat. multi-, préf. issu de mullus « nom-
la forme lat., comme l’a. pr. mugir, lit. breux », sur le modèle de mots lat., ou de
muggire ; mugissement, xIv°, est une réfec- mots empr. tels que multiflore, 1778, mul-
tion, antér. à celle du verbe, de l'a. fr. tiforme, xve, etc. V. le suiv.
muissement.
MULTICOLORE, 1823 (écrit -or); une
MUGOT, v. magot, mijoter. première fois au xvi® s. Empr. du lat.
MUGUET, xrre. Tiré de (noix) muguelie, multicolor.
altération de (noix) muscade (on trouve MULTIPLE, 1618, une première fois au
les formes muguade, mugale) ; cette déno-
xIvVe s.; multiplier, xri° (en outre, au
mination est due au parfum du muguet. moyen âge, formes plus francisées molle-
Pris souvent au sens de « lilas » dans les pleier, monie-) ; multiplicande, 1552 ; mul-
parlers de l'Est. Au xvi® et au xvii® s. tiplicateur, 1515; multiplication, x1rIe;
a servi à désigner de jeunes élégants (par- multiplicité, xi1°. Empr. des mots lat. mul-
fumés d’essence de muguet), d’où mugue- tiplez, multiplicare, multiplicandus « qui
ter, xvie (au xv°, -é), aujourd’hui hors doit être multiplié » (adj. verbal), multipli-
d'usage. Depuis 1769, désigne aussi une calor (créé à basse ép.), mulliplicalio « id. »,
inflammation de la muqueuse buccale (sur- multiplicitas « id. ». — Dér. : multipliable,
tout chez les petits enfants) par compa- xue; multiplicatif, 1770, d'après le lat.
raison des plaques blanchâtres avec les : multiplicare ; démultiplier, 1929. — Comp.
fleurs du muguet. du premier : sous-multiple, 1552.
MUID (orthographe étymologique ; au
moyen âge mui). Anc. mesure; ne s’em- MULTITUDE, xre. Empr. du lat. mul-
ploie plus que dans des locutions telles tiludo.
que gros comme un muid; encore usité
dans les parlers de l’Est au sens de « ton- MUNICIPE, 1765, terme d’antiquité ro-
neau » et dans le Midi. Lat. modius, qui maine ; municipal, 1474, d’abord avec une
désignait une grande mesure, notamment même valeur, au cours du xviries. appliqué
pour le blé. It. moggio « mesure pour les à des institutions modernes. Empr. du lat.
grains », a. pr. moi, etc., « muid ». municipium (de municeps « citoyen d’un
municipe », littéral. « qui prend part (ca-
MUIRE, v. saumure. pere) aux charges (munia) »), municipalis
« qui appartient à un municipe ». — Dér.
MULATRE, 1614 ; mulat, mulaïe, 1690. du deuxième : municipalité, 1756 (Mira-
Empr., avec modification de la terminai- beau) ; municipaliser, 1845.
son, d’après les adj. en -dire, de l’esp. mu-
laio, dér. de mulo « mulet », le mulâtre MUNIFICENCE, xve. Empr. du lat. mu-
étant un métis comme le mulet. — Dér. : nificentia (de munificus « libéral »), littéral.
mulâtresse, 1759, sur le modèle de négresse. « qui fait (facere) des présents (munus) ».
MULE « femelle de mulet ». Lat. müla. MUNIR, 1350 ; munition, xive. Empr.
It. esp. mula. — Dér. : mulassier, 1471, des mots lat. munire « fortifier, protéger,
par l'intermédiaire de mulasse, xir°, défendre », d’où les sens du fr., munitio
« jeune mulet, jeune mule ». « fortification ». Munition désignait l’en-
MULE « esp. de pantoufle », 1556, déjà semble des moyens de défense d’une place,
au xive s. pour désigner des engelures au d’une armée, d’où l'expression pain de
talon. Lat. mulleus (calceus) « brodequin munition, au xvi® s., parfois munition de
MUNIR 424

pain ; aujourd’hui, depuis le début du MUSCADE, xir1° (noiz muscade). Empr.


xIx®, sens restreint. — Dér. et Comp. : de l’a. pr. (noiz) muscada, dér. de musc.
munitionnaire, 1587 (Lanoue); démunir, — Dér. : muscadier, 1701.
1564 ; remunir, 1587 (Lanoue).
MUSCADIN, terme de mode, 1793; cf.
MUQUEUX, v. mucus. grenadiers musqués en 1792. Tiré de mus-
MUR. Lat. mürus. It. esp. muro. — cadin « pastille parfumée au muse », fin
Dér. et Comp. : muraille, 1346; murer, xvi® (d'Aubigné), cf. muguet, pour un
XII (Chrétien de Troyes); démurer, vers développement analogue ; muscadin a été
1200 ; emmurer, id. ; avant-mur, 1461. empr. au sens propre de l’it. moscardino,
dér. de moscado « musc » ; le fr. a hésité au
MÜÔR. Lat. mätürus. It. maiuro, esp. xviIe s. entre moscardin, muscardin et mus-
maduro. — Dér. : müûrir, vers 1350, a rem- cadin, les deux dernières formes altérées
placé l’anc. meürer, lat. mätüräre, d’où d’après muscade. Muscardin a été conservé
aussi it. maturare, esp. a. pr. madurar et pour désigner une espèce de loir.
de nombreuses formes correspondantes
dans les parlers gallo-romans. MUSCAT, 1371. Empr. du prov., par
hasard non attesté à date anc., muscai,
MURAL, xvrr1e (Buffon), une première dér. de musc. On a dit aussi au xIv®-xv®s.
fois au xive s. (Bersuire) dans l’expression muscade d’après l’it. moscato.
coronne murail, calquée sur le lat. muralis
corona. Empr. du lat. muralis (de murus, MUSCLE, 1314. Empr. du lat. musculus,
v. mur). propr. « petit rat », par un développement
sémantique que présente aussi le grec mys,
MÜRE. Propr. « fruit du mürier », d’où à la fois « rat » et « muscle », cf. aussi en
« mûre de ronce ». Altération, d’après le lat. lacertus, propr. « lézard », d’où « partie
dér. mürier (eu devient facilement uw en supérieure du bras », et « muscle » ; v. sou-
syllabe non accentuée), de moure, meure, ris. — Dér. : musclé, début xvirre, une
qui subsiste jusqu’au xvri® s., lat. pop. première fois en 1553.
môra, plur. pris comme fém. sing. du lat.
class. morum « fruit du mûrier ». It. esp. MUSCULAIRE, 1698; musculature,
a. pr. mora. Le mot est souvent altéré dans 1834 (comme terme de peinture); mus-
les parlers septentrionaux en môle, moule culeux, 1503. Les deux premiers sont des
ou remplacé par le dér. mûron, x1v® (alors dér. sav. du lat. musculus, le troisième est
sous la forme moron, en 1549 meuron), dans empr. de l’adj. musculosus.
le Centre et l'Ouest ; mais même dans le MUSE, xire. Empr. du lat. musa (du
Midi où le mürier est bien plus connu que grec mousa).
dans le Nord, il n’y a qu’un mot pour les
deux variétés. — Dér. : müûrier, xr1° (mais MUSEAU, vers 1200. Dér. d’un simple
on trouve encore mourier au xXvi® s.), cf. mus, non attesté en fr., mais cf. it. muso,
de même a. pr. morier ; müûron. a. pr. mus, et lat. du vire s. musum, mot
d’origine inconnue. Mus subsiste à l’extré-
MURÈNE, 1538, une première fois mo- me Sud-Ouest. — Dér. : museler, xIv®
reine au xXI11° s. Empr. du lat. muræna (du
grec Mmyraina). (G. Phébus) ; démuseler, 1831 ; muselière,
XIII, musoir, terme techn., 1757.
MUREX, 1505. Empr. du lat. murex.
MUSÉE, 1762, au sens moderne ; une
MURMURE, xu° (Chrétien) ; murmu- première fois au xI11° s. dans une traduc-
rer, x11°, Empr. du lat. murmur « gronde- tion. Empr. du lat. museum, du grec mou-
ment, bruit sourd », murmurare, de sens seion, propr. « temple des Muses », qui a
parallèle ; la nuance du sens des mots fr., été pris à Alexandrie, sous Ptolémée I,
qui n’est pas exactement celui du lat., est pour désigner un établissement destiné à
peut-être due à la prononciation différente la culture des arts et des sciences, d’où le
de l’u ; l’it. mormorare, qui est une forme sens moderne. La forme lat. museum, re-
pop., se dit cependant comme le français, prise en 1746 au sens de « musée de pein-
du bruit léger produit par les eaux cou- ture » et aussi en parlant du musée d’A-
re et le vent et de paroles dites à voix lexandrie (on trouve en ce sens aussi mu-
asse. séon) a servi depuis 1793 à désigner spé-
MÜRON, v. mûre. cialement le Muséum d'Histoire Naturelle,
antérieurement le Jardin des Plantes, fondé
MUSARAIGNE. Lat. pop. *müsaränea, en 1635 par Guy de La Brosse.
comp. de müs « rat » et de aränea « arai-
gnée »; on a déjà musaraneus au VII s. MUSER, xrre. Dér. de mus, v. museau,
chez Isidore de Séville. Esp. musaraña. propr. « rester le museau en l’air »; cf. de
Parmi les formes variées des parlers gallo- même a. pr. muzar, esp. arch. musar « at-
romans on notera muselle, attesté dès le tendre », it. arch. musare « baguenauder ».
XVIe s., tiré de muset, xr1° (fait sur musa- Il est probable qu'il y a eu emprunt, mais
raigne plutôt que dér. du lat. müs). sans qu’on puisse déterminer le point de
départ. — Dér. et Comp. : musard, xrr°,
MUSARD, etc., v. muser. musarder, 1834, musardise, id., antér. mu-
MUSC, xrrie. Empr. du lat. de basse sardie, xt; musarderie, 1546 (Rab.);
ép. muscus, cf. aussi grec moskhos, égale- amuser, x11° (Chrétien), amusement, xve,
ment de basse ép., mot d’origine orientale ; amusette, 1653, amuseur, 1545.
on rapproche le persan muchk (et l'arabe MUSETTE, xrr1e. Dér. de l’a. fr. muse,
misk). — Dér. : musqué, 14925; le verbe de même sens, tiré du verbe muser, qui a
musquer est très rare. eu par extension le sens de « jouer de la
425 MYTHOLOGIE

musette ». Jusqu'à la fin du xvirre s. mu- MYRIADE, 1525. Empr. du lat. de


selle ne s’est employé qu'au sens propre. basse ép. myrias (mot pris au grec).
Cornemuse, xr11°, a été tiré d’un anc. verbe
cornemuser, Comp. lui-même de corner et MYROBOLAN, v. mirabelle,
de muser.
MYRRHE, vers 1080 (Roland). Empr.
MUSÉUM, v. musée. du lat. myrrha (mot pris au grec).
MUSIC-HALL, 1862. Empr. de l’angl. MYRTE, xre. Empr. du lat. myrius (du
music-hall.
grec myrios).
MUSIF, v. mosaïque.
MYRTILLE, 1747, une première fois au
MUSIQUE, xr°. Empr. du lat. musica xiIr1e s. Empr. du lat. médiéval myrtillus,
(du grec mousiké (tekhné), propr. « art des dér. de myrius, v. airelle.
Muses »). — Dér. : musical, xiv®, attesté
alors par l’adv. -ment; musicien, x1v® MYSTAGOGUE, 1564 (Rab.), terme
(Oresme) ; musiquette, 1875 (A. Daudet), d’antiquité, qui s'emploie parfois par plai-
MUSQUER, v. musc. santerie. Empr. du lat. mysiagogus (du
grec mysiagôgos).
MUSSIF, v. mosaïque.
MUTABILITÉ, xr1°; mutation, xil°; MYSTÈRE, x11e. Empr. du lat. mysle-
muter, au sens milit., 1923. Empr. du lat. rium (du grec myslérion, dér. de mystés
mutabilitas, mutatio, muiare « changer ». « initié ») ; le sens général de « secret » qui
apparaît de bonne heure est déjà attesté
MUTILER, 1334 ; mutilation, 1245. Em- en lat. Au xves. a pris le sens de « repré-
pr. des mots lat. mutilare, mutilatio (créé sentation dramatique » (parfois de « scène
à basse ép.). figurée au cours d’un banquet »), d’après
le sens de « service, office, cérémonie »
MUTIN, etc., v. meute. qu'avait pris en lat. médiéval mysterium,
MUTISME, 1741 ; mutité, 1803. Le pre- par confusion avec minislerium, V. métier.
mier est un dér. sav. du lat. muius « muet », — Dér. : mystérieux, xve ; mystifier, 1764
le deuxième est empr. du lat. de basse ép. (Grimm), arbitrairement fait sur mysière,
muiilas. à propos d’un auteur, nommé Poinsinet,
homme d’une crédulité telle qu’il devint le
MUTUEL, xive. Dér. sav. du lat. mu-
jouet des salons et à qui on fit croire no-
tuus « réciproque ». — Dér. : mutualité, tamment que le roi de Prusse voulait lui
1784, une première fois en 1599 ; mutua- confier l’éducation du prince royal, d’où
liste, 1834. mystificateur, 1772, mystification, id.
MUTULE, v. modillon.
MYSTIQUE, vers 1390 (écrit misticque).
MYÉLITE, 1836. Dér. sav. du grec mye- Empr. du lat. mysticus « relatif aux mys-
los « moelle ».
tères », conservé dans la langue de l’Église
MYOPE, 1578 ; myopie, 1732. Empr. du (du grec mystikos). — Dér. : mysticisme,
lat. de basse ép. myops (du grec myôps, 1804; mysticité, 1718.
propr. « qui cligne des yeux ») et du grec
myôpia. MYTHE, 1818. Empr. du lat. de basse
MYOSOTIS, 1545. Empr. du lat. myosotis _ép. mythus (du grec mythos « récit, légen-
(du grec myosôtis, littéral. « oreille de sou- de »). — Dér. : mythique, 1831 (Michelet),
ris »; ainsi nommé à cause de la forme déjà créé au xiv® s. et en 1570.
des feuilles). MYTHOLOGIE, xive (écrit mi-); my-
MYRIA-. Premier élément de mots sav. thologique, 1480 (id.). Empr. du lat. de
comp., tels que myriamètre, 1795, tiré du basse ép. mythologia, -logicus (du grec my-
grec myrias « dix mille ». thologia, -logikos).
N
NABAB, 1653, dans un récit de voyage disparition de nouer « nager » est due à
aux Indes, en parlant d’un prince. Empr. l’homonymie de nouer « faire un nœud »;
de l’hindoustani 2abab, empr. lui-même de elle a eu pour conséquence l'emprunt de
l’arabe nawwdb, plur. de ndïb « lieutenant, naviguer. — Dér. : nage, xrI°, développe-
vice-roi ». Le sens de « personnage fas- ment de sens parallèle à celui du verbe;
tueux », 1835, vient de celui de « personne nageoiïre, 1555 ; nageur, x11°, pour le sens,
qui s’est enrichie aux Indes », 1777, sens V. nage; on trouve noueur encore au
propagé par l’angl. nabob, mais popularisé XVIe s. — Comp. : surnager, xIv®, d’abord
en fr. par le roman d’A. Daudet, Le Nabab, sournouer, Sur-, enCOre au XVI®S.
1877.
NAGUËÈRE, v. guère.
NABOT, 1549. Paraît être une altération
de nambot, nain-bot, comp. de nain et NAÏADE, 1491. Empr. du lat. naïas-
de bot, survenue sous l'influence de navet naïadis (mot pris au grec).
employé quelquefois pour désigner un NAÏF. Jusqu'au xvie s. a le sens (ar-
courtaud ; on trouve la graphie nimbot chaïque au xvri® s.) de « natif, naturel ».
de 1549 à 1636. Lat. nälivus « donné par la naissance,
NACAIRE, v. nacre. naturel », dér. de nätus « né ». It. archaïque
nalio, a. pr. nadiu, tous deux seulement
NACARAT, 1640, d’abord nacarade, fin au sens propre. V. natif. — Dér. : naïveté,
xvi® (d’Aubigné). Empr. de l'esp. naca- XIIIe, sens parallèle à celui de l’adj.; v.
rado, propr. « nacré », sens encore usuel, nativité.
dér. de näcar « nacre ».
NAIN. Lat. nanus (du grec nanos). It.
NACELLE. Lat. de basse ép. naävicella, nano, esp. enano. V. nabot.
dér. de navis. It. navicella.
NAÎTRE. Lat. pop. nascere, lat. class.
NACHE, v. fesse. nasci. — Dér. et Comp. : naissance, xr1°,
NACRE, xvie (Paré); d’abord nacle, d’après le lat. nascentia; naissain, nom
1389 ; déjà attesté en 1347, sous la forme techn. des jeunes huîtres, 1868 ; naïsseur,
nacrum dans un texte lat. du Dauphiné. terme techn. de l'élevage des chevaux, fin
Empr. de l’it. naccaro, aujourd’hui nac- xixe; renaître, x11® (Chrétien), d’où re-
chera, à la fois « nacre » et « coquille qui naissance, x1v® ; aîné, d’abord ainsné, xI1°,
produit la nacre » (sens ordinaire de nacre comp. de l’anc. adv. ainz « avant » (d’où
en fr. jusqu'au xvire s.), empr. lui-même « mais »), disparu au début du xvire s.,
de l’arabe naggära (ou nagqayra). Il faut lat. pop. *antius, lat. class. antea, refait
reconnaître le même mot dans l’it. nacchera sur le modèle de “*posiius, v. puis ; d’où
« Limbale », d’où l’a. fr. nacaire « sorte de aînesse, xr11° ; mort-né, 1408 (N. de Baye) ;
timbale », usuel jusqu’au xvr® s. (gnacare, puîné, d’abord puisné, vers 1200, comp.
de même sens, 1666, chez Molière, vient de puis, a été remplacé par cadet; le
d’une autre forme it. gnaccara) ; le sens moyen âge disait aussi en ce sens moinsné.
intermédiaire est « castagnettes faites avec NAJA, nom de serpent, 1804 (naïa de
des coquilles », attesté en it. — Dér. : 1754 à 1838). Empr. du lat. des naturalistes
nacré, 1667. naïa, naja, d’origine obscure ; on a signalé
NADIR, xive (Oresme : nador). Empr. au sud de Constantine na‘ja (propr. « bre-
de l’arabe nadir, propr. « opposé », c'est-à- bis ») au sens de « femelle du naja ».
dire « opposé au zénith », v. zénith. NANAN, 1660. Mot du langage enfantin.
NAGER. Lat. nävigäre « naviguer ». A NANDOU, sorte d’autruche d'Amérique,
conservé son sens propre jusqu’à la fin du 1836 (écrit nandu). Empr. de l'esp. d'Amé-
xve s. et s'emploie encore au sens de « ra- rique, cf. argentin nandu, empr. du gua-
mer » dans la langue de la marine ; cf. au rani.
sens propre it. navigare, eSp. navegar, a. pr.
navejar (où il y a eu substitution de suf- NANKIN, 1759. Tiré de Nankin, nom de
fixe). A éliminé l’a. fr. nouer, encore chez la ville de Chine, où était d’abord fabriquée
Ronsard et aujourd’hui dans quelques par- la toile de ce nom.
lers lorrains, lat. pop. *notäre, issu par dis- NANTIR, 1283 (Beaumanoir). Dér. de
similation vocalique du lat. class. naiare, l’a. fr. nant « gage », fait sur le plur. nans,
de là d’une part it. nuotare, de l’autre esp. qui était plus usuel, sur le modèle des mots
a. pr. nadar, encore usité aujourd'hui dans à plur. en -ans et à sing. en -ani, cf. lat.
la plupart des parlers méridionaux ; la médiéval namum, namium. Le subst. a
427 NATION

toujours vécu surtout en Normandie, d’où mais il a été concurrencé par des dér. de
viennent les premières attestations (Lois types variés, par recherche de mots nou-
de Guillaume le Conquérant) et où il est veaux, expressifs, comme il est fréquent
encore en usage. Il représente l’anc. scan- pour la désignation du nez et des narines,
dinave näm « prise de possession », qui a cf. a. fr. naris, à. pr. narilz, it. narice, esp.
passé en roman comme terme juridique, nariz (qui signifie « nez »), lat. pop. *närt-
et non pas, comme on l’a aussi dit, la forme cem, a. fr. narille, a. pr. narilhas, lat. pop.
francique correspondante *ndma, de la fa- *naricula, etc.
mille de l’all. nehmen. — Dér. : nantisse- NARQUOIS, 1582 (Tabourot, au sens de
ment, 1393 (écrit nampi-) ; dénantir, xv°. « rusé », sens encore usité au XVII $.;
NAPHTE, 1555 (napie en 1213); a été paraît avoir le sens moderne par rappro-
fém. au xvirIe s., d’après le genre anc. chement avec narguer). Mot d’argot qui
Empr. du lat. naphiha (d’un mot grec, désignait d’abord des soldats maraudeurs,
d’origine orientale). — Dér. : naphtaline, cf. dans le Jargon de l’Argot reformé, vers
1832 ; naphtol, 1874. 1628 : « Drilles ou narquois sont des sol-
dats qui truchent la flambe sous le bras »;
NAPOLÉON, 1812. Tiré de Napoléon Ier, a désigné aussi l’argot lui-même, 1640
dont l'effigie était représentée sur les mon- (Oudin). On a proposé d’y voir une va-
naies de ce nom. riante de narquin, xvi®, qui serait lui-
NAPPE. Lat. mappa, indiqué comme même issu d’arquin, id., encore usité au-
étant d'origine punique ; l’n est dû à une jourd’hui en prov. au sens de « pillard »,
dissimilation de l’m sous l’action du p lequel serait un dér. d’arc, propr. « archer »
suivant ; cf. nèfle. Rare en dehors du fr. en rapprochant à l’appui de cette explica-
propr. dit. — Dér. : napperon, 1391. tion l’it. arcadore « archer » et « fripon ».
NARRER, 1388; narré, subst., 1452;
NARCISSE, nom de plante, 1363 (écrit
narrateur, vers 1500 ; narratif, 1376 (Char-
alors narcis). Empr. du lat. narcissus (du les d'Orléans) ; narration, xr1°. Empr. du
grec narkissos). lat. narrare, narrator, narrativus, narratio.
NARCISSE, nom de personne, xvilI®, V. inénarrable.
déjà au sens fig. Tiré de Narcisse, lat. Nar- NARTHEX, 1721. Empr. du grec eccl.
cissus, grec INVarkissos, nom d’un person- narthéx, qui désignait dans la primitive
nage de la Fable qui s’était épris de sa église un portique en avant de la nef, des-
figure, qu’il vit dans une fontaine où il se tiné à recevoir ceux qui assistaient du
précipita ; il fut ensuite métamorphosé en dehors à l'office divin; a servi à désigner
narcisse. — Dér. : narcissisme, 1932. au cours du xiv® s. les porches des églises
NARCOSE, 1836 ; empr. du grec ndrkosis occidentales ; narthéx, propr. « férule », a
« torpeur ». Au sens actuel depuis 1907. pris le sens de « cassette (faite avec des
tiges de férule) » et, par suite, le sens archi-
NARCOTIQUE, 1314. Empr. du lat. tectural.
médiéval narcoticus (du grec narkôtikos,
de narké « engourdissement »). NARVAL, 1627. Empr. du danois narhval.
NASAL, 1611. Dér. sav. du lat. nasus
NARD, xve (narde en 1213). Empr. du « nez ». Au moyen âge nasal « partie du
lat. nardus (du grec nardos, mot d’origine casque qui protège le nez » est un dér. de
orientale, cf. l’hébreu nerd). Déjà empr. au nes, d’après l'alternance régulière e accen-
moyen âge sous la forme narde, au fém. tué (issu de a latin), a inaccentué, cf. navet,
d’après le genre anc. travée, etc. — Dér. : nasaliser, 1868, nasa-
NARGUER, vers 1450. Dans les parlers lisation, id. ; nasalité, 1760.
dauphinois et provençaux les mots de la NASARDE, NASEAU, NASILLER, v.
famille de narguer signifient aussi « parler nez.
du nez » et « morveux ». Les sens du mot
fr. en sont dérivés. Le mot provençal a NASSE. Lat. nassa. It. nassa, esp. nasa.
été très probablement introduit en fr. par NATAL, vers 1500. Empr. du lat. natalis
des mercenaires venant du Midi au temps (de natus « naissance »). — Dér. : natalité,
de la guerre de Cent Ans. Il représente 1868 ; dénatalité, 1939.
un It. *naricare « nasiller », dér. de naris NATATION, 1748, une première fois en
(v. narine), comme *nasicare (v. renâcler) 1550 ; natatoire, 1770 (au moyen âge subst.
de nasus. — Dér. nargue, 1552 (Rab.). au sens de « piscine »), Empr. des mots lat.
NARGUILÉ, 1823 (écrit narguillet). Em- nalatio, natatorius (de nalare « nager »).
pr. du persan narguileh, dér. de narril NATIF, xive (Froissart). Empr. du lat,
« noix de Coco »; ainsi nommé parce que, nalivus, v. naïf.
au lieu du flacon de verre ou de cristal
destiné à contenir l’eau que traverse la NATION, xr1e. Empr. du lat. natio, propr.
« naissance, extraction », sens fréquents en
fumée, on emploie souvent une noix de
coco ou une boule de métal qui en a la a. fr. jusqu'au xvie s., d’où « nation » (de
nalus « né »). — Dér. : national, 1534,
forme. anti-national, 1743, nationaliser, 1792,
NARINE. Lat. pop. *närina, dér. de -isation, 1877, dénationaliser, 1808, inter-
näris, fém., cf. narinosus de basse ép. «aux national, 1802 ; nationalisme, 1798 ; -iste,
narines larges ». Seulement fr. Le simple 1837 (probabl. d’après l’angl. nationalism,
näris survit dans l’it. nare, l'esp. nares, -ist, du xvuie s.) ; d’où internationalisme,
aujourd’hui vulgaire, l’a. pr. nar(r)as; 1876; -iste, fin x1ixe; nationalité, 1808.
NATIVITÉ 428

NATIVITÉ, xne; ne s'emploie plus que probablement naula, -anis (d’où l’a. prov.
comme terme de liturgie ; jusqu’au xvrrres. nautanier) ; à côté de noion, qui est visi-
a aussi le sens général de « naissance ». blement empr. du prov., l’a. fr. connaît
Empr. du lat. de basse ép. nativitas, dér. aussi la forme normale noon.
de nativus, v. natif ; au moyen âge on a
fréquemment une forme plus francisée NAVAL, vers 1300. Empr. du lat. navalis
naïlé. (de navis « navire », v. nef).
NATTE. Lat. de basse ép. naïla (Gré- NAVARIN, terme de cuisine, 1867, dès
goire de Tours), altération de matta, éga- 1859 « navet ». Bon mot qui transforme
lement de basse ép., qui passe pour être en un dér. de navet le nom de la ville de
d’origine phénicienne, par accommodation Navarin devenu célèbre par la bataille
de l’m initiale à la dentale f. It. archaïque de 1827.
maïla, prov. moderne malau « natte »
(dér.). — Dér. : natter, 1344; dénatter, NAVET, xrr1e s. (J. de Meung). Dér. de
1680. nef, lat. näpus, conservé dans les autres
langues romanes : it. 2apo, esp. nabo, a. pr.
NATURALISER, 1471; naturalisme, nap ; navei a remplacé nef, trop court;
1719, terme savant de philosophie; en un autre dér. naveau, usuel au moyen âge
1735, terme médical au sens de « caractère et jusqu’au xvi® s., est encore plus usité
naturel, nature »; a servi à désigner une aujourd’hui dans les parlers gallo-romans
école d’art au xix° s.; naturaliste, 1527, que navel. — Dér. : navette, variété de
à propos d’Aristote ; sens parallèle à natu- navet, 1323.
ralisme. Dér. sav. du lat. naturalis. — Dér.
du verbe : naturalisation, 1566. NAVETTE, instrument de tisserand, v.
nef.
NATURE, xrie, naturel, id. Empr. du
lat. nalura (de natus « né »), naturalis. — NAVIGUER, 1456 (une première fois
Dér. de naiture : naturante, dans nature fin xive, E. Deschamps); la langue a
naiuranie, vers 1520, par opposition à hésité au xvrit et au xvrr1°s. entre naviguer
naiure naiurée, 1507, qui sont empr. des et naviger; cf. nager; navigable, 1448;
termes correspondants du lat. scolastique navigateur, 1529 ; navigation, x1r1° (J. de
naiura naturans et natura naiurata créés Meung), rare avant le xvie s. Empr. du lat.
au xiie s. par les traducteurs d’Averroës ; navigare, navigabilis, navigator, navigatio.
dénaturer, x11°, — Comp. de naturel : sur- — Dér. de navigable : navigabilité, 1823.
naturel, 1552, au xv°® s. supernaturel.
NAVIRE, xive. D'abord navirie, vers
NAUFRAGE, 1414. Empr. du lat. nau- 1080 (Roland), issu de navilie, id., qui est
fragium, littéral. « brisement (cf. le verbe empr. du lat. navigium « navire », avec
frangere « briser ») de navire (navis) ». — altération de la terminaison, d’où un type
Dér. : naufragé, 1681 ; une première fois *navilium, d’après des mots tels que conci-
dér. directement du mot lat. au xIve s.; lium, etc., cf. de même a. pr. navili ; signi-
naufrager est du début du xvi°; naufra- fie souvent « flotte » au moyen âge. L’a. fr.
geur, 1374. a eu aussi les formes navoi, navie aux deux
sens de « flotte » et de « navire ». Navire a
NAULAGE, v. noliser. été d’un genre hésitant du xv® au xvIIe 5.
NAUMACHIE, 1520, dans une traduc- NAVRER, vers 1140, d’abord nafrer,
tion de Suétone. Empr. du lat. naumachia vers 1080 (Roland). A signifié « blesser »
(du grec naumakhia, littéral. « combat jusqu’au xvri® s., encore au xviri® chez
(cf. le subst. makhé « combat ») de navires J.-J. Rousseau. La forme nafrer vit encore
(naus) »). dans les patois de l'Ouest. A. nor. *nafra
NAUSÉE, 1539; nauséabond, 1762 ; « percer », qu'on peut supposer d’après le
nauséeux, 1793, terme médical. Empr. du subst. a. nor. nafarr « tarière ». Comme le
lat. nausea, propr. « mal de mer » (du grec verbe a passé en gallo-roman sans ce subst.
nausia, altération de la forme plus usitée il a élargi sa signification de manière à
nautia) et des dér. nauseabundus, nauseo- désigner toute action de blesser avec effu-
sus. V. noise. sion de sang. En passant de la Normandie
au parler de Paris nafrer a échangé le
NAUTILE, sorte de mollusque, 1562. groupe consonantique -fr- contre celui,
Empr. du lat. naulilus (du grec nautilos, beaucoup plus fréquent, de -vr-.
propr. « matelot »).
NE. Lat. non avec un développement
NAUTIQUE, vers 1500. Empr. du lat. partic. devant consonne dû à la position
naulicus (du grec naultikos, de nautés « ma- proclitique de ce mot accessoire ; v. non.
telot »). L’a. fr. a eu en outre une forme nen devant
voyelle, cf. nennil. It. non, no, esp. no,
NAUTONIER, vers 1120 fnoiuner; la a. pr. non devant voyelle, no devant con-
graphie avec au a été établie au xvre s. sonne. Ne ne s'emploie en combinaison
d’après le lat. nauta). Ne s'emploie plus avec des particules telles que pas, point, etc.,
que dans la langue poétique. Empr. de qu’en gallo-roman ; ne tend aujourd’hui à
l’a. pr. naulonier « matelot », dér. d’un disparaître dans les parlers pop. au profit
simple attesté seulement par l’a. fr. noton, de ces particules plus expressives et qui
lat. pop. *nauiônem, acc. de *nauto, trans- portent l'accent, surtout au profit de pas.
formation de nauta lequel avait été décliné Pour ne au sens de « ni », v. ni.
429 NÉGOCE

NEÉANT. En a. fr. neient, noient et nienl; NÉCROPOLE, 1833. Empr. du grec


néant apparaît de bonne heure et triomphe nekropolis, littéral. « ville des morts », qui
au xvi° s. On a proposé un lat. nec entem, servait spécial. à désigner la nécropole sou-
formé avec ens, part. prés. de esse « être ». terraine d'Alexandrie en Égypte.
Mais il est peu probable qu’un terme créé
dans la langue philosophique soit devenu NÉCROSE, terme de pathologie, 1721.
populaire, surtout à la fin de l’Empire. Empr. du grec nekrôsis « mortification »
I] faut y voir plutôt un ne genitem. L’em- dans la langue des chrétiens, en vue d’un
ploi d’un subst. désignant des êtres vivants sens spécial.
pour la formation d’une négation se rappor- NECTAR, vers 1500. Empr. du lat. nec-
tant à des choses a son parallèle dans l’all. tar (mot pris au grec).
nichts (de ni + wiht « être, démon »). It.
niente, a. pr. nien ; aujourd’hui survit çà NEF. Lat. navis. Propr. « navire », sens
et là dans les parlers normand, lorrain, disparu depuis le xvi® s., sauf par archaïs-
de la Suisse romande et du Sud-Ouest me ; a cédé la place à navire, vaisseau, qui
au sens de « non » ou de « rien ». — Dér. ont plus de corps ; on trouve souvent au
et Comp. : anéantir, xrr°, anéantissement, xvies. la forme nauf, d’après le prov. nau.
1309 ; fainéant, 1321, fainéanter, 1690, Le sens architectural est attesté dès le
fainéantise, 1539. Altération, par étymo- XI1° s. Subsiste dans quelques régions
logie pop., de l’a. fr. faignant, id., vers 1200, périphériques. — Dér. : navette (de tisse-
part. prés. de feindre au sens, fréquent rand), xi11° ; aujourd’hui usité dans tous
en a. fr. et jusqu'au début du xvrre s., les parlers gallo-romans ; c’est probabl.
de «rester inactif, paresser ». La plus grande non pas un dér. direct de nef, mais un
partie de la France, y compris Paris, dit emploi fig. de navette qui désigne un petit
encore feignant. Néanmoins, XIIe. vase d'église, destiné à contenir l’encens,
qui a la forme d’un petit navire, ou d’autres
NÉBULEUX, vers 1360; nébulosité,
vases de ménage.
1488. Empr. des mots lat. nebulosus (de
nebula « brouillard, nuage »), nebulositas NÉFASTE, 1535, d’abord comme terme
(créé à basse ép.) ; nébuleuse se prend subs- d’antiquité romaine ; une première fois
tantiv. comme terme d'astronomie, 1672, nefauste, xiv® (Bersuire) ; sens plus étendu,
on a dit d’abord étoile nébuleuse, 1667. 1840. Empr. du lat. nefasius, propr. « in-
terdit par la religion », qui se disait notam-
NÉCESSAIRE, 1119, pris substantiv. ment de jours où il était interdit de rendre
pour désigner divers objets : boîte, étui, la justice. Le contraire de nefastus était
etc., xvirre ; nécessité, vers 1120 ; nécessi- fastus « (jour) où il était permis de rendre
ter, xive, au sens de « mettre dans la néces-
la justice », d’où le fr. (jour) faste, 1845,
sité de faire q. ch. », seul sens du mot jus- seulement terme d’antiquité romaine ; une
qu’à la fin du xvirre s. Empr. des mots lat. première fois au xiv® s. (Bersuire, sous la
necessarius, necessitas (qui a pris le sens de forme fauste, par confusion avec faustus
« pauvreté » dans le lat. eccl.), necessitare
« favorable »).
(médiéval). — Dér. de nécessité : nécessi-
teux, 1422. NÈFLE, xue (G. de Lorris). En outre
NEC-PLUS-ULTRA, 1767. Antér., de- en a. fr. nesple, mesle. Lat. pop. mespila,
puis le xvire s., non plus ultra. Mots lat. plur. neutre pris comme fém. sing., de mes-
signifiant « (et) pas plus outre »; cette pilum (du grec mespilon) ; l’n initiale est
locution vient probabl. du lat. des écoles. - due à une dissimilation d'm sous l’action
du p intérieur; mais l’origine de l’f de
NÉCRO-. Premier élément de mots sav. nèfle est obscure. Sauf dans les parlers de
comp., tels que nécrophage, 1829, tiré du l'Est qui disent cul-de-chien, le type lat.
grec nekros « cadavre », ou de mots empr. a été conservé dans tout le gallo-roman,
tels que nécrophore, 1804 (de nekrophoros mais sous des formes diverses ; néfle est
« qui transporte les morts (pour la sépul- usité dans le Centre, le provençal et le
ture) »), v. les suiv. languedocien, mêle dans le Nord-Est et
l'Ouest, nèple dans le Centre, le picard et
NÉCROLOGE, 1646. Empr. du lat. mo- le limousin, mespoulo, mesplo, nesplo dans
derne necrologium, comp. avec le grec le Sud-Ouest, etc. — Dér. : néflier, xIr1°;
nekros, v. le préc., d’après eulogium « épi- la forme du nom de l'arbre est parallèle à
taphe ». — Dér. : nécrologie, 1701 ; -logi- celle du nom du fruit.
que, 1784.
NÉGATIF, 1283 (Beaumanoir); néga-
NÉCROMANCIE, x11°, aussi nigromance tion, 1370. Empr. du lat. negalivus (créé à
ou -ie, au moyen âge ; en outre necromance, basse ép.), negatio (de negare « nier »).
du xvie au xvine s. Empr. du lat. de
basse ép. necromantia (du grec nekroman- NÉGLIGER, 1256; négligent, vers 1190;
teia, de manteia « prédiction »). — Dér. : négligence, vers 1120. Empr. du lat. negli-
nécromancien, x1v° (sous la forme nigro-) ; gere, negligens, negligentia. — Dér. du
on a dit aussi au xvii® et au XVIIe S. verbe : négligé, 1640 ; négligeable, 1845.
necromant ou negromant, empr. de lit.
necromanlte, negro- (ou nigro-), empr. du NÉGOCE, vers 1190, au sens d’ «affaire,
lat. de basse ép. necromanlit, plur. Les entremise » usité jusqu’au xviIe s. ; le sens
formes avec negro-, nigro- sont dues à un de « commerce » date du xvii® s; v. les
croisement avec le lat. niger « noir », en suiv. ; parfois fém. jusqu’au xvi®s. Empr.
it. negro, cf. magie noire, magie qui est du lat. negotium « occupation, affaire » et
censée opérer avec l’aide des démons. aussi « affaire commerciale ».
NÉGOCIER 430

NÉGOCIER, xive (Oresme); négocia- NÉPENTHÉS, 1552 (Ronsard : nepen-


teur, 1370 ; négociation, 1323 ; négociant, the). Empr. du grec d'Homère népenihes,
1599. Empr. du lat. negotiari « faire du sorte de drogue qui dissout les maux,
commerce », negoliaior « commerçant », cf. Odyssée, IV, 221 ; aussi empr. par le
negotialio « commerce », negotians « COmM- latin ; mais c’est à Homère que Ronsard
mérçant ». Les trois premiers mots ont et A. Chénier, entre autres, doivent le mot.
d’abord été pris au sens du lat., sens que
négocier a même conservé jusqu'au XVIIIe S. NÉPHRITE, 1721; néphrétique, x1ve.
le sens de « s’entremettre pour conclure Empr. du lat. médical nephritis, nephriti-
une affaire » apparaît au xvi® s. et négo- cus, au moyen âge nephre- (du grec nephri-
cialeur qui a le sens de « celui qui s’entre- tis, -tikos, de nephros « rein »).
met » au moins dès le début du xve s.
aurait été le point de départ de ce sens NÉPOTISME, 1653 (Balzac), pour dési-
nouveau ; par suite la langue a été amenée gner la faveur dont les neveux ou autres
à former négociant pour avoir un nom parents des papes jouissaient à la cour
d'agent correspondant à négoce, peut-être pontificale ; sens plus étendu 1800. Empr.
d’après l’it. negoziante ; négocier a pris en de l’it. nipotismo, dér. de nipole« neveu »,
outre au xvii°s. le sens spécial de « trans- v. neveu.
mettre un billet, un effet de commerce
après l’avoir endossé », d’où le dér. négo- NERF. Lat. nervus « ligament, fibre »
ciable, 1678. (comme le grec neuron), d’où « muscle »;
le sens anatomique de « nerf » s’est déve-
NÈGRE, 1516. Empr. de l’esp. ou du loppé d’abord en grec et a passé de là en
port. negro, V. noir ; negro a été repris au lat. ; il a été repris en fr. par la langue
xXIX® s. sous la forme originale comme médicale, probabl. dès le moyen âge. Les
terme familier. — Dér. : négresse, 1724 sens fig. de « force, vigueur » ne paraissent
(P. Labat) ; négrier, 1730 ; négrillon, 1714. pas être antér. au xvr®s. et sont également
NEGROSPIRITUAL, 1959. Empr. de repris au lat. d’où vient aussi la locution :
l’anglais d'Amérique negro spiritual « chant « l'argent est le nerf de la guerre », cf. chez
religieux des nègres ». Cicéron, Nervi belli pecunia ; la pronon-
ciation ner-f dans avoir du ner-f est expres-
NÉGUS, 1516; rare avant le xvire 5. sive. It. nerbo, nervo ; l'esp. nervio et l’a. pr.
Empr. de l’éthiopien negûs « roi ». nervi, conservé dans les parlers méridio-
naux, représentent le dér. lat. nervium. —
NEIGER. Lat. pop. *nivicäre, lat. class. Dér. : nerver, « garnir de nerfs », XIV®;
ninguere. En dehors du fr., seul lit. ne- nervure, vers 1388 (Froissart). V. énerver,
vicare continue le type *nivicare ; ailleurs innervé, etc.
autres formations esp. 4. pr. nevar ;
mais partout on a des formations nou- NERPRUN. Lat. pop. niger pränus, lit-
velles pour remplacer la forme du lat. téral. « prunier noir ». Seulement gallo-
class. — Dér. : neige, vers 1325, a éliminé roman.
l’a. fr. noif (dont on ne saisissait plus le
rapport avec neiger, cf. la locution fré- NERVEUX, xrr1e. Empr. du lat. nervo-
quente au moyen âge noif negiée), lat. sus « vigoureux » ; développement de sens
nivem, acc. de nix, conservé encore dans parallèle à nerf. — Dér. : nervosisme, 1868,
les parlers du Nord-Est et de l'Est. Cf. it. d’après le lat. nervosus ; nervosité, 1840,
neve, esp. nieve, a. pr. neu, qui survit dans même formation ; nervosilé, 1562, est un
les parlers méridionaux ; neigeux, 1552; empr. au lat. nervositas « force » et « sys-
neigeoter, 1861 (Goncourt). V. névé. tème nerveux » ; déjà en 1553, en parlant
NENNI, v. il. des arbres.
NÉNUFAR, xrr1e (dans un recueil de NERVI. Fin xixe; déjà attesté en 1804
plantes médicinales). Empr. du lat. mé- à Marseille. Empr. de l’argot de Marseille
diéval nenufar, empr. lui-même, pour dési- nervi, propr. « force », v. nerf, qui a été
gner cette plante employée en médecine, pris au sens d’ « homme vigoureux », d’où
de l’arabe ninûüfar, nilûfar ; à une autre « mauvais drôle ».
forme noûfar se rattache neufar, xtrre,
encore chez Ronsard (qui écrit neufart). NESTOR, 1803, une première fois chez
NÉO-. Premier élément de mots sav. Brantôme, au sens fig. Tiré de {Nestor, nom
comp. tels que néologie, 1762, néologisme, d’un héros de l’Iliade, d’une sagesse renom-
mée.
1735 (d’où -ique, 1726), tiré du grec neos
« nouveau », ou de mots empr. tels que NET. Lat. nitidus « brillant, poli, pur »,
néoménie, xVI11°, une première fois en 1495 d’où le sens roman de « propre » (de nitere
(alors par l'intermédiaire du lat. eccl. neo- « briller »). Nel a cédé une partie de ses
menia, en grec neoménia, de mên « mois »). emplois à propre. — Dér. : netteté, xI11° ;
NÉON, 1898. Tiré du grec neon, neutre nettoyer, vers 1170, réfection, d’après nei,
de l’adj. neos « nouveau ». d'un *nedheier prélittéraire, qui repré-
sente un lat. *nilidiare formé sur nilidus
NÉOPHYTE, xviie (Bourdaloue), une comme “*alliare sur allus (v. hausser) et
première fois 1495. Empr. du lat. ecel. qui vit dans l’afr. neier « nettoyer », Vos-
neophyius (du grec eccl. neophylos, propr. gien noyé « racler les légumes »; nettoie-
« nouvellement engendré », de neos, v. le ment, vers 1190, nettoyage, 1344 (sous la
préc., et de phyein « faire naître »). forme nesliage), rare avant le xixe s.
431 NICODÈME

NEUF, nom de nombre. Lat. novem. — dér. de narille, v. narine), nasillard, 1650,
Dér. : neuvième, 1213 (sous la forme no- attesté alors par l’adv. -ement, nasille-
viesme) ; a éliminé l’a. fr. nuefme, lat. pop. ment, fin xvirre (Marmontel), etc. ; énaser,
*novimus, réfection de nônus, d’après deci- XII°.
mus « dixième » ; neume était encore usuel
comme subst. en Bretagne au xvir1e s. pour NI. D'abord n(e), que ni a commencé
désigner une perception du neuvième faite à concurrencer au xv® s. pour l'emporter
par le curé sur les biens de ses paroissiens définitivement au xvrIe. ]Ne représente le
décédés ; neuvaine, vers 1364 (alors nou- lat. nec; ni s’est développé dans des
venne). groupes syntactiques, probabl. quand ne
se trouvait devant les anc. démonstr. ice,
NEUF, adj. Lat. novus « neuf, nouveau ». icelui, etc. ; il a triomphé, parce qu'il avait
NEUME, anc. terme de musique, xIve. une valeur expressive supérieure à n(e);
Empr. du lat. médiéval neuma, altération cf. aussi si, conjonction. It. né, esp. ni,
de preuma (d’un mot grec signifiant « souf- a. pr. n(e) et ni; mais, sauf dans le Sud
fle, émission de voix »). des Vosges où on a encore ne, les parlers
gallo-romans ont ni qui s’explique comme
NEURO-. Premier élément de mots sav. celui du fr.
comp. tels que neurologie, 1840, tiré du
grec neuron « nerf », neurasthénie, 1880 NIAIS. Lat. pop. *nidäcem, acc. de *nt-
(névrosthénie en 1840, névrasthénie en däx, dér. de nidus « nid », propr. « pris au
1859) ; v. névro-. On a formé récemment nid », en parlant du faucon ; sens fig. depuis
neurone sur le mot grec en vue d’un sens Chrestien. It. nidiace, refait sur nidio «nid »,
spécial. qui a les mêmes sens que le mot fr., a. pr.
NEUTRE, 1370 (Oresme); neutralité, nizaic « id. », avec changement de suff. —
fin xive ; neutraliser, 1564. Le premier est Dér. : niaiser, début xv1°, peu usité, d’où
déniaiser, 1539 ; niaiserie, début du xvie.
empr. du lat. neuler, propr. « ni l’un ni
l’autre », par suite pris comme adj. quali- NICHE « renfoncement dans un mur
ficatif au sens grammatical et au sens de pour y placer une statue, etc. », 1395.
« ni bon ni mauvais » ; de là le sens du fr. N'est pas empr. de l’it. nicchia, qui n’est
« qui ne prend point parti », dès Froissart ; attesté qu’au xviie s.; est plutôt un dér.
les deux autres sont des dér. sav. du lat. du verbe nicher. Niche de chien est attesté
de basse ép. neulralis, qui est uniquement depuis 1697. — Dér. : dénicher «enlever une
terme grammatical, pour servir de nom statue de sa niche », mot forgé par plai-
abstrait et de verbe à neuire. — Dér. du santerie au xv11° s. d’après dénicher « enle-
subst. : neutron, 1933 (comp. électron), du ver du nid », v. nicher.
verbe : neutralisation, 1778.
NICHE « petite attrape », fin xvi®
NÉVÉ, 1867. Empr. d’un parler valai- (d’Aubigné). Semble être une francisation
san, où névé a été dér. de la forme locale de nique dans l'expression faire la nique
du lat. nivem. L’anglais avant emprunté d’après le sentiment que ch du fr. corres-
névé longtemps avant le fr., il n’est pas pond à la consonne # du normand et du
impossible que celui-ci l’ait acquis par picard ; niche s'emploie surtout avec le
l'intermédiaire de l’anglais. En Savoie la verbe faire, comme nique.
forme correspondante est névi, masc.
NICHER. Lat. pop. *nidicäre, dér. de
NEVEU. Lat. nepôlem, acc. de nepôs, nidus « nid ». Une autre forme nigier de
propr. « petit-fils »; n’a pris le sens de l’a. fr., qui représente le même type lat.,
« neveu » qu’à basse ép. Ce sens est pré- est continuée par niger du Centre et de
pondérant en fr. dès le haut moyen âge; l'Ouest. Seulement fr. — Dér. et Comp. :
mais celui de « petit-fils », conservé en nichée, xive; nichet, 1752, probabl. alté-
a. fr., est encore dans un texte juridique ration d’une forme pop. nichoué, même
au xvie s. et n’a disparu qu’au xviie. mot que le fr. techn. nichoir « sorte de
L'a. fr. a eu en outre une forme de cas cage ou de panier à claire-voie », 1680 ; les
sujet nies, lat. nepôs. It. nipole aux deux parlers ont un autre mot, niau dans le
sens du mot lat., a. pr. nep(s), nebot « id. ». Centre, l'Ouest, et l'Est. nisau en prov.,
« Neveu » se dit en esp. sobrino, lat. s‘brinus lat. pop. *nidäle, d’où aussi esp. nidal;
« Cousin germain ». — Comp. : arrière- nichon, 1858, dér. fait par plaisanterie pour
neveu, XIV® S. désigner les seins qui sont nichés sous la
NÉVR(O)-. Premier élément de mots chemise ; dénicher, x11°, d’où dénicheur,
sav. comp. tels que névralgie, 1801, ou de 1690.
mots dér. tels que névrite, 1836, névrose, NICKEL, xvire (Buffon). Nom donné
1785, tiré du grec neuron « nerf » avec la ar le minéralogiste suédois Cronstedt qui
prononciation du grec moderne ; v. neuro-. isola ce métal en 1751, d’après l’all. Kup-
NEW LOOK, 1960. Empr. de l’angl., fernickel « sulfure de nickel », minerai ainsi
composé de new « nouveau » et look « as- appelé par les mineurs allemands qui,
pect ». croyant avoir découvert un minerai de
cuivre, furent déçus ; nickel représente lui-
NEZ. Lat. näasus. It. esp. naso (en esp. même l’all. dialectal nickel « génie astu-
terme fam., v. narine), a. pr. nas. — Dér. : cieux »; cf. cobalt.
nasarde, 1532 (Rab.), nasarder, 1537 (Ma-
rot); naseau, vers 1540; nasiller, 1575 NICODÈME, 1662. Tiré de Nicodème,
(Baïf ; nasiller, au moyen âge, « renifler, nom d'un pharisien qui vint de nuit ques-
se moucher », est une autre forme de nariller, tionner Jésus (cf. Évang. de Jean, 3) et qui
NICODÈME 432

fut représenté dans un ancien mystère et NIGUEDOUILLE, v. niquedouille.


devint, par suite, un type de personnage
borné, à cause du caractère de ses ques- NIHILISME, vers 1810, comme terme de
tions. philosophie ; répandu depuis environ 1875
comme nom d’une secte politique russe;
NICOTINE, 1818. Reformation, par nihiliste, 1761, id. Dér. sav. du lat. nihil
changement de suffixe, de nicoliane, 1570, « rien ».
empr. du lat. des naturalistes herba nico-
tiana «herbe à Nicot », c’est-à-dire « tabac », NILGAUT, 1666, dans un récit de voya-
tiré de Nicot, nom de l’ambassadeur de ges. Empr. de l’hindoustani nilgäû, empr.
France à Lisbonne, qui envoya du tabac lui-même du persan nilgäw, littéral. « bœuf
en 1560 à Catherine de Médicis (en l’hon- (gao) bleu (nit) ».
neur de qui le tabac fut aussi appelé pen- NIMBE, 1704. Empr. du lat. nimbus
dant quelque temps herbe à la reine). — «nuage », en vue d’un sens spécial. Nimbus
Dér. : dénicotinisé, fin xIx®. a été repris tel quel récemment, 1868, par
NID. D'abord ni, écrit nid au xvi°s. par la langue de la météorologie pour désigner
graphie étymologique. Lat. nidus. une sorte de nuage. — Dér. : nimber, 1876.

NIDIFIER, 1872. Empr. du lat. nidifi- NINAS, pl. « petits cigares vendus en
care ; s'était déjà dit du x1I° au xvI®° s. paquet », fin xix°. De l'esp. niñas, fém.
plur. de niño « petit enfant ».
NIÈCE. Lat. pop. neptia, attesté dans
des inscriptions, lat. class. nepiis, sens NIPPE, 1605. Semble avoir été tiré de
parallèle à nepôs ; iè de nièce est dû sans guenipe, pour éviter le groupe initial inso-
doute à l’anc. forme nies de neveu. À. pr. lite gn-, v. guenille. — Dér. : nipper, 1718.
nepsa, nessa ; le sens de « petite-fille » n’a
été relevé que dans nessa des Alpes-Mari- NIQUE, xiv°; ne s'emploie que dans
times. On a aussi le type neveuse en wallon l'expression faire la nique. N'a rien à faire
et en lorrain, et neboudo, tiré de nebout, avec l’a. fr. niquer « faire un signe de tête »,
au Sud-Ouest. Une autre forme de basse empr. du néerl. nicken « id. », et qui est
ép. nepta est représentée par nela de l’a. pr. toujours un signe de consentement ou de
et niela de l’esp. (qui n’a que le sens de sommeil approchant ; nique, par contre,
« petite-fille », d’où nielo « petit-fils »); exprime la moquerie ; c’est un mot expres-
l’it. nipote sert aux deux genres. sif marquant aussi l'indifférence. Le moyen
fr. avait tiré aussi de niquer, niquet « signe
NIELLE, nom de plante. D'abord neelle, de tête », cf. faire le niquet « faire la nique »,
refait en nielle d’après le mot lat. Lat. d’où le verbe niqueter, 1564, encore dans
de basse ép. nigella, fém. pris substan- la langue du manège.
tiv. de nigellus « noirâtre ». A. pr. niella.
Le mot lat. a été en outre repris pour NIQUEDOUILLE, 1654. Déformation du
désigner la même plante sous la forme nom biblique Nicodème, par l'influence du
nigelle, 1538. suffixe péjoratif -ouille.
NIELLE, maladie du blé, 1538. Exten- NIRVANA, 1844. Empr. du sanscrit
sion sémantique du préc., parce que les nirväna, t. de la religion bouddhique.
grains de blé attaqués par cette maladie
deviennent noirs comme ceux de agros- NITOUCHE, dans sainie nitouche, v.
temma githago et que le paysan doit sépa- toucher.
rer au crible ces deux espèces de grains du NITRE, xu11° ; nitreux, id. Empr. du lat.
bon grain. Empr. sav. nigelle, 1552. — nitrum (du grec nitron), nitrosus. — Dér. :
Dér. : niellé « atteint de la nielle », nitrate, 1737 (G. de Morveau) ; nitrique,
1538, niellure « action de la nielle sur les id.; nitrifier, 1797, nitrification, 1787. En
blés », 1558. outre nombreux mots comp. formés avec
NIELLER « graver en nielle », 1611 nitro- comme premier élément.
(neeler au x1° s.). Dér. de l'a. fr. neel « émail NIVEAU, 1311 (sous la forme nivel).
noir » (xI°-xI11€ s.), représentant substan- Nivel est une altération (par assimilation
tivé du lat. nigellus « noirâtre ». — Dér. : de l’n initiale à / finale) de livel (d’où
nielle, 1823 (plutôt qu'empr. de l’it. niello) ; l’angl. level), lat. pop. *libellus, lat. class.
nielleur, 1826, niellure, « art de nieller », libella « instrument servant à niveler »,
x11° (alors neelure).
dér. de lïbra « balance »; le type liveau
NIER. Lat. negäre « nier ; refuser », le est encore signalé au xvr®s. et se dit encore
2e sens conservé jusqu'au xviie s. Le aujourd'hui en Wallonie et à Guernesey.
triomphe du radical accentué ni-, au détri- It. livello ; l’esp. nivel vient du gallo-roman.
ment de ney-, forme régulière dans les — Dér. : niveler, 1339, liveler est encore
formes inaccentuées, a évité toute confu- signalé au xvi® s.; d’où niveleur, 1455,
sion avec noyer; nier rappelle d’ailleurs nivellement, 1521, déniveler, 1847, déni-
mieux la négation ne, ni que noyer ; d’une vellation, id., dénivellement, 1853.
façon analogue les parlers ont, notamment
dans l’Est, adopté renier pour éviter cette NIVÔSE, 1793. Tiré du lat. nivosus par
confusion. — Dér. : niable, 1662. V. dénier. Fabre d’Églantine.
NIGAUD, vers 1500. Probabl. dim. fam. NIXE, nymphe des eaux dans la mytho-
de Nicodème. — Dér. : nigauderie, 1548. logie allemande, 1850 (nix en 1850). Empr.
de l’all. Nixe (à côté duquel existe aussi
NIGELLE, v. nielle. un masc. Nix).
433 NOMADE

NOBILIAIRE, 1690. Dér. sav. du lat. v. le suiv. ; moins usité au moyen âge que
nobilis, v. le suiv. noirelé ; employé alors surtout au sens
propre, rare aujourd’hui.
NOBLE, xi° (Alexis). Empr. du lat.
nobilis « connu, célèbre », d’où « bien né », NOIRCIR. Lat. pop. *nigricire, réfec-
qui est le seul sens empr. — Dér. : noblesse, tion du lat. class. nigrescere, cf. éclaircir.
x11°; nobliau, 1840 ; anoblir, 1326, ano- A. pr. negrezir. Dans les parlers gallo-
blissement, 1345; ennoblir, xirI°, long- romans le verbe est souvent refait, et il y
temps synonyme d’anoblir, aujourd’hui ré- a des concurrents, notamment mâchurer.
servé au sens fig., qu'anoblir peut du reste — Dér. : noircissure, 1538.
avoir aussi; ennoblissement, fin xix*.
NOISE. Au moyen âge surtout « bruit,
NOCE. Rarement sing. avant le xvires. tapage »; ne s’emploie plus depuis le
Lat. pop. *noptiæ, altération du lat. class. XVII€ s. que dans la locution chercher noise.
nuptiæ, par croisement avec *novius « nou- Lat. nausea (v. nausée) « mal de mer »,
veau marié » (d’où l’esp. novio « id. »), dér. qui a dû prendre dans la langue pop. des
de novus « nouveau ». It. nozze, plur., a. pr. sens très variés, dus sans doute à des plai-
nossas ; aujourd’hui rarement au plur. dans santeries, dont, par suite, le développement
les parlers gallo-romans. — Dér. : nocer, ne se suit pas bien, notamment celui de
1838, d’après l'expression vulgaire faire la « situation désagréable, pénible », puis de
noce ; noceur, 1838. « tapage » et de « querelle », attesté aussi
NOCHER, 1518 ; une première fois en de bonne heure par le verbe noisier « que-
1246. Mot de la langue littéraire, empr. du reller » ; l’a. pr. nauza, noiza, a également
génois noicher (équivalent de l’it. nocchiero les sens de « bruit, querelle » ; ailleurs on a
et -e), lat. nauclerus « patron de bateau, d’autres sens, cf. catalan noxa « dommage ».
pilote » {du grec naukléros « id. »). NOISETTE, v. le suiv.
NOCIF, 1869, une première fois au
(de nocere NOIX. Lat. nur, qui désignait à la fois
xive s. Empr. du lat. nocivus l'arbre et le fruit et en outre la noisette.
« nuire »). — Dér. : nocivité, 1876.
It. noce (pour l’arbre et le fruit), esp. nuez,
NOCTAMBULE, 1701, au sens de « som- a. pr. noiz, noze. V. noyer. — Dér. : noi-
nambule »; sens plus étendu au xvuiI°s. sette, xrr1°, mot de la France septentrio-
Empr. du lat. médiéval noctambulus, fait nale ; un autre dér. noisille est également
sur le modèle de funambulus, avec n0%, très répandu, noix s'emploie en outre au
noctis « nuit ». — Dér. : noctambulisme, Nord-Est et à l'Est; les parlers méridio-
1765. naux, au Sud de la ligne allant de l’embou-
chure de la Gironde à la Suisse romande
NOCTUELLE, variété de papillon de ont le type abelläna, v. aveline ; d’où noi-
nuit, 1792. Dér. sav. du lat. noctua « chouet- setier, 1530 (écrit noiseltier), en concur-
te » (de nox, noctis « nuit »). rence avec des dér. des noms de la noisette
NOCTURNE, xive (Bersuire). Empr. du et surtout avec coudre, v. coudrier. —
lat. nocturnus (de nox, noctis « nuit »). Comp. terre-noix, 1694 (Tournefort),
peut-être sur le modèle de l’all. Erdnuss.
NOCUITÉ, 1838 (au sens de « culpabi-
lité », 1829). Dér. sav. de l’adj. lat. nocuus NOLI ME TANGERE, 1503, au sens
« nuisible » (de nocere « nuire »). d’ « ulcère »; depuis 1704 pour désigner
NODOSITÉ, 1539, une première fois au diverses sortes de fleurs piquantes dont
xive s. Empr. du lat. de basse ép. nodosilas ‘les capsules s'ouvrent au moindre choc.
(de nodosus, v. noueux). Tiré des mots lat. noli me tangere qui signi-
fient « ne me touche pas » ; au moyen âge
NOËL. Lat. naätälis (sous-entendu dies), on trouve ne me touche pour désigner une
littéral. « jour de naissance », utilisé par
maladie ; mais on ne peut dire si cette
le lat. eccl. pour désigner l’anniversaire de expression est un calque de noli me langere
la naissance de Jésus. L’o de noël, propre ou a servi de modèle, Cf. ne m’oubliez pas.
au fr. est dû à une dissimilation des deux a,
comp. a. fr. noer, du lat. nalare ; nael à NOLISER, 1520, en outre noliger, 1690.
existé, cf. Saint-Brandan, 899. It. natale, Empr. de l'it. noleggiare, dér. de nolo
a. pr. nadal, conservé dans le Sud-Ouest ; « affrétement », lat. naulum « frais de
la Suisse romande, la région rhodanienne transport » (du grec naulon). — Dér. :
et le Sud-Est ont des formes remontant au nolis, 1634 ; nolisement, 1681, plus récem-
lat. calendæ « premier jour du mois » (qui ment nolissement, on a déjà au moyen âge
a été empr. par les langues slaves, notam- nolesemens, 1337, empr. de lit. noleggia-
ment pour désigner la fête de Noël, et par menio. Depuis le xvie s., on a dit aussi
les langues celtiques pour désigner entre naulage, 1549, empr. du béarn. naulage,
autres le premier jour de l'an), comme l'a. dér. de naul, qu’il a remplacé.
pr. calendas.
NOLITION, v. volition.
NOEUD. Anciennement neu, puis nœud
au xvi° s. par graphie étymologique. Lat. NOM. Lat. nômen. It. nome, esp. nombre.
nôdus. It. nodo, esp. nudo, a. pr. not), — Comp. : surnom, x1I°, surnommer, id.
dér. en -el dans le Sud-Ouest, v. noyau.
— Dér. : nouet, 1298. NOMADE, 1540, dans une traduction de
NOIR. Lat. niger. It. nero, esp. negro, Dion. Empr. du lat. nomas, nomadis (d’un
a. pr. negre. — Dér. : noirâtre, 1395 ; noi- mot grec qui signifie propr. « qui fait
paître », de nemein « faire paître »).
raud, 1538; noirceur, xr1°, d’après noircir,
28
DICT. ÉTYM.
NO MAN’S LAND 434

NO MAN’S LAND, 1923. Empr. de l’angl. NONCHALANCE, v. chaland.


au sens de « territoire qui n'appartient à
aucun des deux belligérants ». NONE, terme de liturgie catholique, x11° ;
nones, terme de chronologie romaine, x1r°.
NOMBRE. Lat. numerus. It. novero. — Le premier est empr. du lat. eccl. nona
Dér. et Comp. : nombreux, vers 1350; « neuvième (heure) », le deuxième du lat.
surnombre, 1872. anc. nonæ « neuvièmes (jours) », dit ainsi
parce que les nones tombaient neuf jours
NOMBRER. Lat. numerare. It. noverare. avant les ides.
— Dér. : nombrable, vers 1380 ; innom-
brable, 1341, à l’imitation du lat. innume- NONNE. Lat. eccl. nonna, mot de la
rabilis, dès 1120 nient nombrable. V. dé- langue familière, attesté à basse ép. au
nombrer. sens de « nourrice »; on trouve de même
nonnus à la fois au sens de « père nourri-
NOMBRIL, xr1e. Remonte au lat. pop. cier » et de « moine », conservé en ce sens
*umbiliculus, dér. du lat. class. umbilicus, dans le lat. médiéval. Gallo-roman au sens
v. ombilic, par une série d’altérations obs- de « religieuse » : a. pr. nona; en it. nonno,
cures ; le mot est souvent sujet à des acci- -a signifient « grand-père, grand’mère ». —
dents qui viennent sans doute en partie du Dér. : nonnaïn, vers 1080 (Roland), au-
langage enfantin, cf. it. bellico, esp. om- jourd’hui hors d'usage, anc. cas -régime
bligo, a. pr. umbrilh, etc. ; les parlers de d’un type qui a eu de l'extension en a. fr.,
l'Est et du Nord-Est ont en outre un autre cf. putain, et dont l’origine est germa-
mot boude, surtout dans des dér., v. be- nique ; nonnette, xI11° s., au sens de « petit
daïne, boudin. pain d'épice anisé », signalé en 1802 comme
NOMENCLATURE, 1676, une première fabriqué à Reims ; ainsi nommé parce qu'il
fois en 1541. Empr. du lat. nomenclalura, était fabriqué d’abord par des religieuses.
propr. « action d'appeler quelqu'un par NONOBSTANT, x111e, ordinairement prép.
son nom », d'où déjà « nomenclature » ou élément de locution conjonctive (no-
(de nomenclator « esclave chargé de dire à nobstant que) ; l'emploi en fonction d’adij.
son maître les noms des visiteurs » (de est plus rare (cf. lesdictes deffenses nonobs-
calare « appeler », d’où nomenclateur, xvie, lans, en 1418). Terme de procédure, comp.
chez Pasquier). de non et de l’a. fr. obstant « faisant obs-
NOMINAL, 1503. Empr. du lat. nomi- tacle » ; celui-ci, qui s’employait également
nalis « relatif au nom »; de là son emploi dans la langue de la procédure et surtout
dans diverses langues techn.; nominalis comme prép. et qui est signalé encore à la
avait pris en outre un sens spécial dans la fin du xvri® s. par Régnier-Desmarais
langue de la scolastique, sens qui a passé comme usité dans les provinces, est empr.
dans le mot fr., cf. les nominaux, opposés du lat. obstans, part. prés. de obsiare « faire
aux réaux ou réalistes, 1500, d’où les dér. obstacle ».
nominalisme, 1752 ; -iste, xvre. NON-SENS, 1787. Empr. de l’angl. non-
sense ; l’a. fr. employait déjà non-sens, mais
NOMINATIF, terme de grammaire, xrr1e. dans la signification de « manque de bon
Empr. du lat. grammatical nominativus.
sens ».
NOMINATIF, adj., 1789. Dér. sav. du NOPAL, nom d'arbre, 1587. Empr. de
lat. nominare « nommer », pour servir l'esp. nopal, empr. lui-même de l’aztèque
d’adj. à nom dans diverses langues techn. nopalli.
NOMINATION, 1305. Empr. du lat. no- NORD, 1137 (north). Empr. de l’anc.
minalio. angl. norp, conservé par l’angl. moderne ;
NOMMER. Lat. nôminare. It. nominare, norte de l’it. et de l'esp. vient du fr.
esp. nombrar. — Dér. et Comp. : innom- NORIA, 1805. Empr.
mable, 1838 (une 1re fois en 1584); in- de l'esp. noria,
nommé, xive (Oresme); renommer, vers
empr. lui-même de l’arabe nd‘oûüra « ma-
chine élévatoire servant à l'irrigation » (qui
1080 (Roland), renom, XII®, renommée, vient lui-même peut-être de l’aramée }.
vers 1125 ; nommément, x11° ; prénommer
« nommer auparavant », XVI° ;susnommé, NORMAND, 1640, au sens de « rusé
1449. V. dénommer, nom, etc. comme un Normand ». Tiré du nom propre
Normand, empr. du francique *noriman,
NON. Lat. nôn en position accentuée: en lat. du 1x° s. norimannus
développement propre au fr., cf. ne. Con- « homme du
Nord ».
currencé dans les parlers par néant et
nennil. Sert à former des mots comp., tels NORME, vers 1170, rare avant la fin
que non-lieu, 1868, etc. du xve s.; normal, 1759. Empr. du lat.
norma, propr. « équerre », d’où « règle »,
NONAGÉNAIRE, 1660. Empr. du lat. normalis « fait à l'équerre », d’où «conforme
nonagenarius, qui a pris à basse ép. le sens à la règle ». Normal a été pris pour quali-
du fr. ; à l'époque impériale signifiait « de fier des écoles où l’on forme des profes-
quatre-vingt-dix » (de nonageni), empr. seurs, d’abord dans le nom de l’École Nor-
une fois en Ce sens au xIv® s. male Supérieure, fondée par décret du
NONANTE, v. vingt. 9 Brumaiïre an III, d’où, dans la deuxième
partie du x1xe s., celui de diverses écoles
NONCE, 1521 ; nonciature, 1626. Empr. de même destination, d’où normalien,
de l’it. nunzio « envoyé, ambassadeur » et vers 1850. V. anormal. — Dér. 1° de norme :
spécial. « légat du pape » (empr. du lat. normatif, 1868. 2° de normal : normalisa-
nuntius), nunziatura. tion, fin x1Ixe; normalité, 1834.
435 NOUMÈNE

NOROIS, v. suroit, NOTION, 1570. Empr. du lat. notio «.con-


naissance » pour désigner une nuance spé-
NOSO-. Premier élément de mots sav. ciale de la connaissance.
comp. tels que nosologie, 1747, tiré du
grec nosos « maladie ». NOTOIRE, 1226. Empr. du lat. juridique
notorius « qui fait connaître », usité surtout
NOSTALGIE, 1759. Empr. du lat. médi- dans noloria (epistula) « lettre d’avis »
cal nosialgia, créé en 1678 par le médecin (même usage dans le lat. médiéval). —
suisse Hofer avec les mots grecs nostos Dér. : notoriété, d’après la forme du lat.
« retour » et algos « souffrance » sur le nolorius, 1404.
modèle des mots médicaux en -algie, comme
traduction du mot suisse all. heimweh NOTRE. Lat. nosier. L'emploi de le nôtre,
« mal du pays », ce mal étant particuliè- dont le fr. a tiré un pronom accentué,
rement fréquent chez les Suisses à l’étran- apparaît dès le xrr1° s., de même que le
ger, surtout chez les mercenaires. A été vôtre. Les formes de plur. nos, vos se sont
précédé de l'expression maladie du pays, développées en position protonique, peut-
1718, plus tard concurrencée par mal du être d’abord au masc. ; mais il y a eu ten-
pays, 1827 (Scribe). dance à employer ces formes dans toute
la flexion de l’adj. et même en fonction
NOTA BENE, 1764 (Voltaire). Mots lat. accentuée, surtout en picard et cet usage
signifiant « note bien »; on trouve dès le persiste aujourd’hui dans ce parler.
xve s., notamment dans un inventaire,
nota, devenu de quelque usage au xvi® et NOTULE, 1752, une première fois en
spécial. dans la langue du commerce au 1495, rare ensuite. Empr. du lat. médiéval
XVII®. notula, dim. de nota.
NOTABLE, xrrie (J. de Meung); pris NOUBA, fin xixe. Propr. « musique des
comme subst. pour désigner une personne tirailleurs algériens », d’où, dans l’argot
d’un rang considérable, 1355, il est tiré des militaire d'Afrique, faire la nouba « faire
expressions bourgeois, personne notable, la fête ». Empr. de l'arabe algérien nowba,
usuelles depuis le xive s. Empr. du lat. littéral. « tour de rôle », qui servait à dési-
notabilis (de notare « marquer, désigner »). gner (dès le moyen âge) la musique qui se
— Dér. : notabilité, 1800 (Constitution de faisait périodiquement devant les maisons
l'an VIII : Lisie des notabilités), d’après des officiers de la milice et des dignitaires ;
la forme du lat. nolabilis ; une première de là « orchestre militaire » et aussi « airs
fois au xvie s. et déjà vers 1360 au sens militaires ».
de « caractère de ce qui est notable ». NOUE « terre grasse et humide, servant
de pâturage ». De nauda, attesté à l’époque
NOTAIRE, xr1e (sous la forme notarie, carolingienne, d'origine gauloise. A. pr.
au sens de « scribe ») ; sens divers au cours nauza « terrain marécageux »; usuel dans
de l’histoire ; l'acception moderne date de presque tous les parlers gallo-romans.
la fin du moyen âge ; notariat, 1482 (sous
la forme notoriat, d’après notorius, v. no- NOUE « jonction de deux combles à
toire). Empr. des mots lat. notarius « scri- angle rentrant » et « tuile creuse qu’on y
be » (de nota, v. note), nolarialus (médié- place », etc. Lat. *nauca, issu de *nävica,
val). — Dér. de notaire d’après la forme dér. de navis « bateau », employé métapho-
du lat. nolarius : notarié, xve. riquement. Une forme masc. *naucus à
donné l’a. fr. no « auge, cercueil » et l’a. pr.
NOTE, xu1°, terme de musique; noter, nau « id. »; usuel aujourd'hui au sens
id. ; notation, xive (Oresme). Empr. du lat. d’ « auge » dans l'Ouest, en picard, en sa-
nota « marque », également terme de mu- voyard et dans les parlers du Midi, qui en
sique, noiare, notatio. Note, noiler au sens ont en outre tiré un fém. nauco.
défavorable de « marque, marquer d’infa-
mie, etc. », usuels depuis le moyen âge, NOUER. Lat. nôdäre. A. pr. nozar, it.
doivent ce sens au lat., où il était très annodare, esp. anudar. — Dér. et Comp. :
usité. — Dér. de noler : notamment, xv°, nouure, 1611 ; dénouer, xr1°, dénouement,
par l'intermédiaire du part. notant; on a 1580 (Montaigne, au sens d’ « action de
dit aussi notantement au xvi®s. dénouer la langue »); le sens dominant
aujourd’hui date du xviIe s.; renouer,
NOTICE, 1369, au sens de « connais- x11°, renouée, nom de plante, 1545.
sance », seul usité jusqu’au xvII® 8., no-
tamment dans la langue juridique ; le sens NOUET, v. nœud.
moderne d’ « écrit de peu d’étendue sur NOUEUX. Lat. nodôsus. It. nodoso, esp.
une question d'histoire, etc. », relevé en nudoso.
1802, vient de ceux de « résumé succinct »
NOUGAT, 1750. Empr. du prov. nougal,
et de « résumé du contenu d’un manuscrit
qui se place en tête du manuscrit avec le
a. pr. nogat, attesté seulement au sens de
« tourteau de noix », sens conservé et éga-
nom de l’auteur de l’ouvrage, etc. », relevé lement empr. par le fr., lat. pop. *nucälum,
au XVIIIe $.; ces sens paraissent dus à la
fois à nole et au sens de « liste » qu'a aussi dér. de nuœ « noix ».
notice. Empr. du lat. notitia « connais- NOUILLE, 1655 (écrit nulle). Empr. de
sance », qui a pris à basse ép. le sens de l’all. Nudel.
« liste », cf. la fameuse Notitia Dignitatum NOUMÈNE, 1823. Terme de philosophie,
(qu’on francise parfois en Molice). créé par Kant d’après le grec noumenon
NOTIFIER, 1314. Empr. du lat. notifi- « ce qui est pensé » (du verbe noein « pen-
care. — Dér. : notification, id. ser »), par opposition à phénomène.
NOURRAIN 436

NOURRAIN, terme de pisciculture. An- les novellieri italiens, cf. les Cent Nouvelles
cienn. nourrin au même sens, 1310, et en Nouvelles. — Dér. nouvelliste, 1620. L'’a.
outre au sens d’ « élève de bétail » et de fr. et l’a. pr. disaient dans un sens analogue
« bétail ». Lat. pop. *nuitrimen « action de novelier.
nourrir », à côté du lat. class. nutrimen NOVATEUR, 1578; novation, xiv°, ter-
« aliments », a. pr. noirim « nourriture,
me juridique. Empr. du lat. novaior, novalio
jeune bétail, etc. ». Aujourd’hui usité dans (juridique) (de novare « renouveler »).
de nombreux parlers au sens de « jeune
porc », en Anjou au sens de «pâturage », etc. NOVEMBRE. Lat. novembris.
NOURRICE. Lat. de basse ép. nutricia, NOVICE, xr1° (Chrétien) ; noviciat, 1587.
fém. pris substantiv. de nutricius « nour- Empr. du lat. médiéval novitius « novice
ricier », lat. class. nutrix. — Dér. : nounou, de couvent » (qui continue le lat. novicius
terme du langage enfantin, 1867. « nouveau venu dans un état, p. ex. dans
l'esclavage ») et de novitialus « état de
NOURRICIER. Lat. pop. *nulriciärius, novice »,
dér. de nultricius, v. le préc. A. pr. noiris-
sier. L’anc. picard nourequier, aujourd’hui NOYAU. D'abord noiel. Lat. de basse
nourkier, « éleveur », et l’a. pr. noiriguier ép. nucälis, dér. de nux « noix », «semblable
correspondent à un lat. pop. *nulricärius, à une noix », qui a été par suite pris subs-
fait d’après le verbe nutricäre, d'où a. pr. tantiv. au sens de « noyau » en lat. pop.
noirigar. A. pr. nogalh, avec changement de suff.;
aujourd’hui les parlers gallo-romans ont
NOURRIR ; jusqu'au xvri° s. aussi «éle- une grande diversité de mots, et noyau est
ver », v. les suiv. Lat. nutrire. À. pr. noirir, rare. L’a. fr. possédait un autre mot noel
— Dér. : nourrissage, 1482 ; nourrisseur, « bouton, etc. », lat. pop. *nôdellus, dér. de
xI1e, rare avant le xix®s. nôdus « nœud », d’où aussi it. nodello
« nœud », esp. nudillo « jointure, maille »,
NOURRISSON. D'abord nourreçon, fém., a. pr. nozel « nœud », qui s’est rapidement
refait en nourrisson d’après nourrir, nour- confondu en fr. avec noiel « noyau » ; mais
rice ; signifiait au moyen âge « nourriture, le prov. a encore nouzeu, à la fois « join-
éducation, famille » et aussi « animaux ture » et «noyau ». — Dér. noyauter, 1932 ;
qu’on élève, etc. »; le sens moderne qui dénoyauter, 1922.
paraît dater du xvi® s. environ a entraîné
le changement de genre. Lat. nutritionem, NOYER, nom d'arbre. Lat. pop. *nuca-
acc. de nuirtiio « nourriture », développé rius, dér. de nux « noix ». A. pr. noguier,
en contact avec nourrice, nourricier, de là port. nogueira; l’it. dit noce qu'il fait
le traitement du groupe fi et le maintien masc., v. noix, l’esp. a un autre dér. nogal.
de la voyelle intérieure inaccentuée. A. pr.
noirisson « nourriture ». Le Sud-Ouest dit NOYER, verbe. Lat. necäre « mettre à
noirigal, part. passé de noirigar, V. nour- mort (surtout sans se servir d’une arme) »,
ricier. qui a pris dans le lat. pop. le sens de
« noyer », attesté en lat. mérovingien; la
NOURRITURE, 1180. Jusqu'au xve s. disparition du subst. nex, necis « mort vio-
aussi norreture. Empr. du lat. nutritura et lente » a favorisé la perte du sens propre,
refait d’après nourrir; a signifié aussi qui a été exprimé par d’autres mots, v.
« éducation » jusqu’au XVIIIe S. occire, tuer. La forme du radical aux for-
mes inaccentuées a été étendue à tout le
NOUS. Lat. nôs. Nous, seule forme at- verbe, ce qui a permis de le distinguer de
testée dès les premiers textes, est la forme nier, V. Ce mot. À. pr. negar, it. annegare,
développée en position non accentuée. It. esp. anegar. — Dér. : noyade, 1794.
noi, esp. a. pr. nos. Dans la plupart des
parlers septentrionaux nous a été remplacé NU. Lat. nüdus. It. esp. nudo.
par je. Pour le pronom accentué la plupart NUAGE, NUANCE, v. nue.
des parlers méridionaux préfèrent nous
autres qu’on rencontre aussi en poitevin. NUBILE, 1509 ; se dit partic. des filles.
Nous du langage administratif, dit aussi Empr. du lat. nubilis « en âge de se marier
de majesté, a été repris à un usage des (en parlant des filles) », dér. de nubere « se
empereurs romains (depuis Gordien III, marier (en parlant de la femme) ». —
vers 240). V. vous. Dans la langue pop. Dér. : nubilité, 1750.
et les parlers, on a souvent la valeur de
nous. NUCLÉAIRE, 1838. Dér. sav. du lat.
nucleus.
NOUVEAU. Lat. novellus « nouveau,
jeune, récent », dér. de novus, v. neuf. NUDISME, NUDISTE, 1932. Tirés du
A. pr. novel, it. novello. — Dér. : nouveauté, lat. nudus, v. nu.
xitIe, l’a. fr. a aussi novelelé et novelité, NUDITÉ, 1350. Empr. du lat. de basse
d’après le lat. de basse ép. novellitas ; ma- ép. nuditas (de nudus « nu ») ; a remplacé
gasin de nouveautés, signalé depuis 1823. les mots de l’a. fr. nuece, nuelé, dér. de nu.
NOUVELLE. Lat. pop. novella, plur. NUE. Aujourd’hui littéraire. Lat. pop.
neutre de l’adj. novellus, pris comme subst. *nüba, lat. class. nübes qui survit dans
fém. It. a. pr. novella. Nouvelle « sorte de l’a. pr. niu et le port. nuvem, d’après la
roman très court », est fait sur l’it. novella forme de l’acc. nübem. Le dér. nübilum,
(d’où aussi l'esp. novela) ; c'est au xve s. d’où aussi *nibulum, a laissé plus de traces :
qu’on a commencé à traduire et à imiter it. nuvolo et nuvola, esp. nublo, a. pr. nivol
437 NYMPHÉA

et nivola. — Dér. : nuage, 1564, a remplacé lesquels on jouait le jeu de la blanque


dans l'usage commun nue et nuée ; égale- emprunté à son tour de lit. bianca). Empr.
ment terme dominant dans les parlers de l’it. numero (repris au lat. numerus, v.
septentrionaux, en concurrence avec nuée ; nombre, avec le jeu lui-même). — Dér. :
mais il y a, à côté, des formes complexes numéroter, 1680, numérotage, 1791.
par suite de croisements, notamment avec
le type nebula « brouillard », v. nielle, en NUMISMATIQUE, 1762, au sens mo-
wallon, dans l’Est et le franco-provençal, derne, déjà en 1579 au sens de « numis-
d’où nuageux, 1549, nué, 1200; nuée, mate ». Dér. du lat. numisma, variante de
xue; nuance, 1380, par l'intermédiaire nomisma (d’un mot grec signifiant « mon-
d’un anc. verbe nuer, fin xvi® (d’Aubigné), naie »). — Dér. : numismate, 1823, fait sur
« nuancer », par comparaison des couleurs le modèle de diplomaie.
nuancées avec les reflets des nuages ; d’où NUPTIAL, xrr1e, rare avant le xvie s.
nuancé, fin xvie (d'Aubigné), puis -er; Empr. du lat. nuplialis (de nupiiae, y.
nuaison, 1529, terme de marine, « durée noce). Dér. prénuptial, 1932.
d'un même vent », a dû probabl. signifier
d’abord « durée d’un état nuageux de NUQUE, 1314, jusqu’au xvies. ne signi-
l’atmosphère ». fie que « moelle épinière ». Empr. du lat.
médiéval nucha « moelle épinière », empr.
NUIRE. Lat. pop. *nocere, lat. class. lui-même de l’arabe noukh4 « id. » par le
nocère. Dér. et Comp. : nuisible, xIve médecin Constantin l’Africain (né à Car-
(Oresme), réfection de l’a. fr. nuisable, thage au x1° s.), qui enseigna à la fameuse
d’après le latin de basse ép. nocibilis; école de Salerne ; de même a. pr. n2uCa aux
entre-nuire (s’), XIII°. deux sens du mot fr. Le nouveau sens
NUIT. Lat. nociem, acc. de nox. V. au- « nuque » est attesté depuis 1546 ; il est dû
jourd’hui. — Dér. : nuitée, xr1I°; anui- à l'influence d’un autre mot arabe, nukra,
ter (s’) ; d’abord intrans. au sens de « faire qui a précisément cette signification, ainsi
nuit », xie (Alexis) ; l'emploi moderne est qu’au fait que dans la terminologie anato-
postérieur au xvI° s. mique on avait remplacé nucha par me-
dulla.
NUITAMMENT, 1328. Altération de
l’anc. adv. nuitantre, lat. de basse ép. noc- NURSE, 1872 (Taine, dans un ouvrage
tanter, devenu successivement nuilanie, sur l'Angleterre) « nourrice » ; 1896, «infir-
puis nuilamment, d’après les nombreux mière » et « bonne d’enfant ». Empr. de
adv. en -amment ; écrit aussi nuite (m) ment l’angl. nurse (lui-même du fr. nourrice). Le
d’après les adv. en -emmeni ; il y a d’autres dér. nursery « chambre d'enfant », 1833,
formes altérées, cf. nuitremment au xIHI°S$. est moins usuel en fr.
NUL. Lat. nüllus, adj. de négation, qui NUTRITIF, 1314; NUTRITION, xive
est aussi employé comme qualificatif au (Oresme). Empr. du lat. médiéval nuiriti-
sens de « sans valeur ». Ce dernier sens vus (de nuirire, v. nourrir) et du lat. anc.
semble avoir été repris au lat. vers le nutritio, en vue de sens techn., v. nour-
xvi® s. It. nullo, aux deux sens du mot risson. — Dér. dénutrition, 1870.
lat. (d’où nulla « rien ») ; l’a. pr. nul est
seulement adj. de négation. — Dér. : nul- NYCTALOPE, 1562; nyctalopie, 1732.
lement, vers 1180. Empr. du lat. médical nycialops, -pia (du
NULLITÉ, vers 1400. Empr. du lat. - grec nyktalôps, littéral. « qui voit la nuit »,
-pia).
médiéval nullitas, v. le précédent.
NUMÉRAIRE, 1561, rare avant le NYLON, empr. de l'anglais, mot suggéré
XVIIe s., pris substantiv. 1775; numé- au fabricant Du Pont de Nemours par
son personnel pour désigner cette fibre
ral, 1474 ; numérateur, 1515 ; numération,
xi1ve, rare avant le xvie. Empr., en vue de découverte vers 1939 ; la terminaison rap-
sens spéciaux, des mots lat. numerarius
pelle celle de cotion « coton », le radical
« relatif aux nombres, calculateur », nume- peut être vinyle, le nom d’un radical qui
ralis, numeralor « qui compte », numeralio est à la base de nombreux textiles syn-
thétiques.
(tous de basse ép., sauf le dernier ; de la
famille de numerus « nombre »). NYMPHE, xune (J. de Meung : nimphes).
Empr. du lat. nympha (du grec nymphé,
NUMÉRIQUE, 1616. Dér. sav. du lat.
numerus « nombre », v. les préc. propr. « jeune mariée »).

NUMÉRO, 1589 (attesté d’abord au sens NYMPHÉA, 1546 (Rab.). Empr. du lat.
de «numéro dans un registre », un peu plus nymphæa (du grec nymphaia dér. de nym-
tard aussi pour désigner les numéros avec phé).
O
OARISTYS, terme littéraire, fin xvrrie nettement opposés, mais, dans la langue
(A. Chénier), auparavant oarisie, dès 1721. générale, la distinction n’est pas toujours
Empr. du grec oarisiys. observée.
OASIS, 1799, connu grâce à l'expédition OBJURGATION, xrrie. Empr. du lat.
égyptienne (une première fois en 1766 objurgatio (de objurgare « blâmer »}.
chez un géographe). Empr. du lat. de basse OBLAT, terme eccl., 1549. Empr. du
ép. oasis, employé à propos de l'Égypte lat. eccl. oblatus, propr. « offert », part.
comme le grec oasis, mot d'origine égyp- passé du verbe offerre, l’oblat ayant été
tienne. tout d’abord l'enfant donné par ses pa-
OBÉDIENCE, terme eccl., 1155. Empr. rents à un monastère ou celui qui s’y don-
du lat. oboedientia « obéissance » en vue nait avec ses biens.
d’un sons spécial. OBLATION, terme eccl., vers 1120.
Empr. du lat. eccl. oblatio « offrande », en
OBÉIR, vers 1120. Empr., comme terme lat. class. « action d'offrir ».
eccl. et jurid., du lat. obædire (comp. de
audire « écouter »). — Dér. : obéissance, OBLIGER, 1246, au sens de « lier par
1270 ; désobéir, vers 1280, désobéissance, un engagement » ; le sens de « rendre ser-
1283. vice » apparaît au xvi®s. ; obligation, 1235,
comme terme jurid., sens plus étendu de-
OBÉLISQUE, 1537. Empr. du lat. obe- puis le xvi® s., comme terme de finance,
liscus (du grec obeliskos, propr. « broche à 1868; obligatoire, 1319, terme jurid., sens
rôtir », dit des obélisques d'Égypte par plus étendu depuis le xvirre s. Empr. des
comparaison de la forme). mots lat. obligare «lier par un engagement »
OBÉRER, fin xvire (Saint-Simon). Tiré (de ligare « lier »), obligatio, obligatorius
d’obéré, 1596, empr. du lat. obæralus « en- (juridique). — Dér. du verbe : obligeance,
detté » (de æs « cuivre », d’où « monnaie, 1456 (vbligance dès 1300) ; désobliger,
dette »). 1307, au sens de « défaire d’une obligation »,
jusque vers 1630, désobligeance, 1798. Dér.
OBÈSE, 1825 ; OBÉSITÉ, 1550. Empr. d'obligation, terme de finance : obligataire,
des mots lat. obesus, propr. « gras, bien 1867, sur le modèle de donataire et paral-
nourri » (de edere « manger »), obesitas. lèlement à actionnaire.
OBIT, vers 1150; obituaire, 1671. OBLIQUE, x1r1° ; obliquité, 1370 (Ores-
Empr. du lat. eccl. obitus, tiré du lat. class. me). Empr. du lat. obliquus, obliquitas. —
obitus « mort », et du lat. médiéval obi- Dér. d’oblique : obliquer, terme militaire,
luarius. 1825, une première fois vers 1285, alors
empr. du lat. obliquare « placer oblique-
OBJECTER, 1498, d’abord objeter, ment ».
1288, encore chez Régnier; objection,
vers 1190. Empr. des mots lat. objectare, OBLITÉRER, vers 1500, rare avant le
propr. « placer devant », objectio (créé à XVine s. Empr. du lat. oblit(t)erare « effa-
basse ép.). cer, faire oublier ». — Dér. oblitération,
1777
OBJECTIF, adj., vers 1470 (attesté alors
par l’adv. -ivement), terme de scolastique OBLONG, 1503. Empr. du lat. oblongus
et de philosophie, opposé à subjeciif ; (de longus).
sens plus étendus, à partir de 1666, no- OBNUBILER, vers 1350 (paraît manquer
tamment dans la langue de l'optique. Empr. aux xviie et xvrtIe s.) ; obnubilation, 1486,
du lat. médiéval objectivus. Objectif, 1857, manque aux xvii®e et xviri® s. Empr.
pris substantiv. au sens de « but à attein- des mots lat. obnubilare « couvrir de nuages
dre » vient de la langue de la stratégie qui (nubilum) », d'où « altérer la sérénité ».
disait point objectif. — Dér. : objectivité, obnubilalio en vue de sens spéciaux.
1803, vient de la langue de Kant.
OBOLE, 1245. Empr. du lat. obolus
OBJET, xive (Oresme : object). Empr. du (du grec obolos); désignait jusqu’au
lat. scolastique objectum « chose qui affecte XVIIIS s. une monnaie de cuivre de la
les sens », propr. « ce qui est placé devant » valeur d’un demi-denier, d’où des expres-
(du verbe anc. objicere), v. sujet : sens plus sions figurées ; depuis le xvi® s. repris
étendus à partir du xvi®s. ; en philosophie aussi pour désigner une monnaie ou un
(comme en grammaire) objet et sujet sont poids grecs.
439 OCARINA

OBSCÈNE, 1532; obscénité, 1511 ; rare OBSOLÈTE, 1799 (une première fois
avant le xvrie s. Empr. des mots lat. obs- us en 1596). Empr. du lat. obsoletus
cœænus, propr. « de mauvais augure », « usé ».
obscænilas.
OBSTACLE, 1223. Empr. du lat. obsia-
OBSCUR, xu°; d’abord surtout oscur culum (de obstare « se tenir devant »).
jusqu’au xvi® s. (encore chez Ronsard); OBSTÉTRIQUE, 1803. Tiré du lat. obs-
obscurité, vers 1120, en outre oscurié jus- letriz « sage-femme » (de obstare). — Dér. :
qu’au xv®e s. Empr. du lat. obscurus, obs- obstétrical, 1845.
curilas. — Dér. d’obscur : obscurcir, vers
1170 (alors oscurcir) sur le modèle de noir- OBSTINER (s), 1538 ; obsliné, depuis
cir, éclaircir, mais dès 1120 oscurir ; d’où 1236 ; on a dit aussi obsliner « attacher
obscurcissement, xir1°; obscurantisme, avec ténacité » aux xvi® et XVIIe $.;
1823, par l'intermédiaire d’obscurant, 1781 ; obstination, vers 1190. Empr. du lat.
obscurément, 1213. obstinare, -alus, -atio.
OBSÉCRATION, xin°; rare avant le OBSTRUER, 1540; (obsiruire en 1531) ;
xvie s. Empr. du lat. obsecralio « prière obstruction, 1540. Tous deux d’abord ter-
instante » (de obsecrare « supplier au nom mes de médecine; sens plus étendus depuis
des dieux »). le xvirie s. Empr. des mots lat. obstruere,
littéral. « construire devant », obstruclio
OBSÉDER, fin xvi® (Régnier), au sens en vue de sens spéciaux.
d’ « assiéger quelqu'un » ; le sens moderne
date du xvrre s. (Corneille) ; obsession, vers OBTEMPÉRER, vers 1390 ; a toujours
1460, d’abord au sens de « siège » ; a suivi été surtout un terme de palais. Empr. du
le sens du verbe. Empr. des mots lat. mat. oblemperare, littéral. « se modérer
obsidere, propr. « s'établir devant », d’où devant ».
« assiéger (une place) », puis « être conti- OBTENIR, 1283 ; obtention, 1516 (obsten-
nuellement auprès de quelqu'un », seul cion en 1360 et en 1525). Le premier est
sens empr., obsessio « siège », pris pour empr. du lat. obtinere « tenir fermement,
servir de subst. à obséder. On attendrait maintenir, occuper (sens pris au xive et
obsider ; obséder paraît avoir été entraîné au xve $s.) », d’où « obtenir », francisé
par posséder. d’après lenir, le deuxième est un dér. sav.
OBSÈQUES, vers 1400, d’abord obsèque, de oblentus, part. passé de oblinere, pour
x11e jusqu’au xvi® s. Empr. du lat. de basse servir de subst. à obtenir.
ép. obsequiae, altération du lat. class. exse- OBTURER, 1826; une première fois
quiae (d’où exeques, usuel du xr° au en 1538 ; obturation, 1507; rare avant le
xvie s. et qui paraît même l’avoir été plus xixe s. Empr. des mots lat. oblurare « bou-
qu’obsèque) par croisement avec obsequia, cher », obluratio (créé à basse ép.). — Dér.
« clients, cortège », plur. neutre de obse- du verbe fr. ou du verbe lat. : obturateur,
quium «complaisance, service » (de obsequi xvi® (Paré), comme terme anatomique et
« céder à, obéir », lui-même comp. de sequi chirurgical ; autres sens depuis le x1Ix® 8.
« suivre »).
OBTUS, 1503, au sens d’ « émoussé »;
OBSÉQUIEUX, vers 1500; rare avant 1542, comme terme de géométrie ; xvI® s.
le xvirre s., 1765 (J.-J. Rousseau). Empr. (Paré), en parlant des sens. Empr. du lat.
du lat. obsequiosus (de obsequium). — Dér. -obtusus, même signification, propr. «émous-
d’après la forme du lat. obsequiosus sé » (p. ex. d’un poignard), part. passé du
obséquiosité, 1823; quelquefois déjà au verbe oblundere « frapper à coups redou-
XVICOS. blés ».
OBSERVER, x° (Saint Léger) ; obser- OBUS, 1697 : À la bataille de Nervinde….
vance, x111° ; observateur, 1491, rare avant il se trouva huil mortiers appelés obus ; une
la fin du xvi® s.; observation, vers 1200. première fois en 1515 (sous la forme hoc-
Empr. des mots lat. observare, observantia, bus). À d’abord signifié « obusier » ; le sens
partic. « observation des devoirs religieux » moderne n'apparaît qu’à la fin du xvir1es.
dans le lat. eccl., observator, observaltio. — Empr. de l’all. Haubilze « obusier » (« obus »
Dér. : observable, vers 1500; observatoire, se dit Granale), antér. Haubnilze, empr.
1667 ; inobservation, 1550 ; la langue reli- lui-même, au moment des guerres contre
gieuse emploie aussi inobservance, 1521, les Hussites, du tchèque haufnice, propr.
fait sur le lat. inobservanlia. « machine à lancer des pierres ». L’it. obice
« obusier » et « obus » vient également de
OBSESSION, v. obséder. l’all. ; mais l’esp. obus, surtout « obusier »,
vient du fr, — Dér. : obusier, 1762.
OBSIDIENNE, 1765 (-iane en 1600 et
depuis 1752). Empr. du lat. obsidiana OBVIER, vers 1180 ; avait autrefois des
(lapis), mauvaise leçon pour obsiana, fém. emplois plus étendus, par exemple obvier
d’un adj. dér. de Obsius, nom d’un per- à la mort, 1309. Empr. du lat. de basse ép.
sonnage qui découvrit ce minéral en obviare, propr. « aller à la rencontre » (de
Éthiopie, suivant Pline, 26, 196. via « chemin »).
OBSIDIONAL, xiv°; ne s'emploie que OCARINA, fin xixe. Mot it., probabl.
comme terme d’antiquité, sauf dans fièvre dér. de oca « oie »; le mot signifie donc
obsidionale et monnaie obsidionale, terme propr. « petite gardienne d’oies » ; l’instru-
de numismatique. Empr. du lat. obsidio- ment a été créé vers 1880 par le fabricant
nalis (de obsidio « siège »). it. G. Donati.
OCCASION 440

OCCASION, vers 1170; rare avant le OCÉAN, vers 1125: océanique, 1548.
xv® s. Empr. du lat. occasio, subst. verbal Empr. du lat. oceanus (du grec ôkeanos,
de occidere « tomber ». A éliminé l’a. fr. propr. personnage mythologique), oceani-
ochaison, achaison, encore usité au début cus. On a dit aussi mer océane, du XIIIe au
du xvi® s., cf. aussi a. pr. ocaizo et it. xviri1e s. d’après le lat. mare oceanum. —
(ac)cagione ; ces formes issues régulière- Comp. : océanographie, 1876 (une 1re fois
ment du mot lat. ont souvent le sens en 1584).
d’ « accusation, poursuite », de là l’a initial OCELLÉ, terme d’hist. nat., s'emploie
qui vient de accusare, accusalio, ou des
aussi dans la langue littéraire, 1804, empr.
mots romans correspondants. Prendre l’oc- du lat. ocellatus, même sens ; ocelle, 1825,
casion par les cheveux peut remonter à la également terme d’hist. nat., empr. du lat.
fable V, 8 de Phèdre. Forme réduite
occase, pop. 1849. — Dér. : occasionnel,
ocellus « petit œil ».
1679 (Malebranche) ; l’adv. occasionaument, OCELOT, xvirie (Buffon). Empr. de l’az-
(relevé en 1306, d’où ensuite occasionnelle- tèque ocelotl « tigre, jaguar », peut-être par
ment, 1611, est fait sur le lat. de basse ép. l'intermédiaire de l’esp. ocelote.
occasionaliter ; occasionner, 1305, d’après
occasionari de basse ép.; a éliminé l’anc. OCRE, 1307; rare avant le xvi® s.
verbe ochaisoner, ach-, qui signifiait surtout Empr. du lat. de basse ép. ochra (du grec
« accuser, poursuivre », cf. de même a. pr. 6khra « sorte de terre jaune », de 6khros
ocaizonar, ac- «accuser »etit. fac)cagionare « jaune »). — Dér. : ocreux, 1762.
« causer, imputer, inculper ».
OCTA-. Premier élément de mots sav.
OCCIDENT, vers 1120 ; occidental, 1314 comp., d'origine grecque, tels que octaëdre,
(sous la forme occideniel). Empr. des mots 1572, où ocia- remonte à okt6 « huit ».
lat. occidens, sous-entendu sol « soleil »,
part. prés. de occidere « tomber », occiden- OCTANTE, v. vingt.
lalis.
OCTAVE, xri°, comme terme de litur-
OCCIPUT, 1372; occipital, 1534. Empr. gie ; comme terme de musique, 1534. Empr.
des mots lat. occiput (de caput « tête »), du lat. octava, fém. de octavus « huitième ».
occipitalis (médiéval). L'’a. fr. a eu des formes plus pop. oifieve, etc.,
pour le sens liturgique.
OCCIRE. A. fr. ocire, usuel jusqu’à la
fin du xvie s.; refait en occire d’après le OCTO-. Premier élément de mots sav.
lat. occidere au xvi® s.; aujourd’hui n’est comp., tels que octopétale, 1797, tiré du
plus qu’un archaïsme de la langue fam. grec okiô ou du lat. octo « huit ».
Ocire représente un lat. pop. *auccidere,
altération du lat. class. occidere, probabl. OCTOBRE, 1213. Empr. du lat. october.
par croisement avec auferre « emporter ». A supplanté l’a. fr. oitouvre, qui a eu peu
Il faut signaler aussi que les langues cel- de vitalité ; on a en outre des formes alté-
tiques ont une préposition au, qui a pu rées telles que uitembre, cf. déjà à basse
servir de préverbe en gaulois ; de là aussi ép. octembris (qui a passé en irlandais et
a. pr. aucir, qui survit dans l’extrême Sud- en vieux slave), d’après sepiembris, etc.,
Ouest. L'’it. uccidere continue régulière- Aujourd'hui octobre est la forme de tous
ment occidere, comme le roumain ucide. les parlers gallo-romans, sauf quelques va-
riantes au Sud-Est. It. oflobre, esp. octubre,
OCCLUSION, 1808. Terme médical, a. pr. ochoure, ochoire, octembre, etc.
empr. du lat. de basse ép. occlusio « action
de fermer » (de occludere « fermer ») en OCTOGÉNAIRE, 1578. Empr. du lat.
vue d’un sens spécial ; la linguistique em- octogenarius.
ploie aussi ce mot et a fait en outre occlu- OCTOGONE, 1520. Empr. du lat. de
sive.
basse ép. octogonos, altération, d’après octo
OCCULTE, vers 1120. Empr. du lat. « huit », de octagonos (du grec oktagônos
occultus « caché, secret ». « à huit angles (gônia) »). — Dér. : octo-
gonal, id.
OCCULTATION, 1488. Empr. du lat.
occullatio «action de cacher », en le spécia- OCTROYER, 1280. Terme de langue
lisant comme t. d'astronomie. écrite et surtout du style de la chancellerie,
qui est une réfection d’après le lat. auctor,
OCCUPER, vers 1180 ; sens variés au auciorare, etc., de l’a. fr. ofroier, lat. pop.
moyen âge, notamment « se saisir d’une *auciorizäre, dér. du lat. de basse ép. auc-
personne, accuser » dans la langue juri- iôräre « garantir » (de auctor au sens de
dique ; occupation, vers 1170. Empr. du « garant »). It. arch. ofriare « accorder »,
lat. occupare « s'emparer de », occupalio. a. pr. autreiar « id. » ; otorgar de l’esp. et
Le fr. a développé divers sens nouveaux. — auiorgar de l’a. pr. représentent un lat.
Dér. : désoccuper, 1579 ; inoccupé, 1717 pop. *aucioricare. V. autoriser. Dér.…
(une première fois en 1544) ; inoccupation, octroi, 1208, d’abord ofrei, otroi, x1r1° ; dési-
1771 ; réoccuper, 1808, récoupation, 1836. gnait sous l’ancien régime une taxe qu’une
ville avait été autorisée à prélever (désignée
OCCURRENT, 1475. Empr. du lat. oc- par le terme deniers d’octroi, ainsi chez Cot-
currens, part. prés. de occurrere « courir à grave, 1611 et plus tard) d’où, au xrx® 8.,
la rencontre de ». — Dér. : occurence, toute taxe prélevée à l'entrée d’une ville
vers 1470. sur les denrées.
4AÏ OFFENSIF

OCULAIRE, 1480; OCULISTE, 1534. contraction de auoiller, littéral. « remplir


Le premier est empr. du lat. ocularius, le jusqu’à l'œil ». Sert à faire de nombreux
ia est un dér. sav. du lat. oculus comp. œil-de-bœuf, terme d’architec-
« ŒIL ». ture, 1530, œil-de-chat, sorte de pierre pré-
cieuse, 1416, etc.
ODALISQUE, 1624. Empr. du turc
odaliq (de oda « chambre », cf. camériste, ŒILLETTE, variété de pavot, 1732.
chambrière), avec altération de la termi- Altération d’oliette, xirr°, dér. d’olie «huile »
naison ; on trouve odalik au xvrres. et « olive », v. huile; on a dit aussi olivète,
encore bourguignon.
ODE, 1485, rare avant Ronsard, cf.
Préface des Odes, 1550. Empr. du lat. de ŒNO-. Premier élément de mots sav.,
basse ép. ode, oda (du grec ôidé, propr. tels qu’œnologie, 1636, tiré du grec oinos
« chant »). — Dér. : odelette, 1554 (Ron- « vin ».
sard). ŒSOPHAGE, 1314 (ysofague, avec la
ODEUR, vers 1125 ; odorant, x1v® (sous prononciation y de 0e en bas grec). Empr.
la forme odourant) ; odorat, xvi® (Paré); du grec oisophagos, littéral. « qui porte (de
odoriférant, xv°. Odeur est empr. du lat. oisein) ce qu’on mange (de phagein) ».
odor ; odorant est le part. prés. d’un anc. ŒSTRE, sorte de diptère, 1519. Empr.
verbe odorer, xr1®, « avoir de l’odorat, du lat. æsirus (du grec oistros) ; le sens de
sentir », encore usité à la fin du xvirres8., « fureur prophétique », que le mot a pris
empr. du lat. odorari, -re, « percevoir par en grec, et par suite, en lat., a été égale-
l’odorat » ; odorat est empr. du lat. odoratus ; ment empr. au xvirie s. (J.-J. Rousseau,
odoriférant est empr. du lat. médiéval Confessions, 7).
odoriferens, réfection du lat. anc. odorifer ŒUF. Lat. pop. “*ovum, lat. class.
« qui apporte une odeur ». — Dér. : déso- ôvum ; ôvum est devenu oum, où o s’est
doriser, 1922 (déodoriser dans Huysmans, ouvert par dissimilation ; puis *ovum (avec
1886). o ouvert) a été refait sur le plur. ova. It.
ODIEUX, 1376. Empr. du lat. odiosus uovo, esp. huevo. — Dér. : œuvé, 1393.
(de odium « haïne »). ŒUVRE. Genre hésitant depuis le
ODONT(O-). Premier élément de mots xvie s. Lat. opera. It. opera, esp. huebra,
au sens partic. de « journal de terre » (obra
sav., tels que odontologie, 1754, tiré du
grec odous, odontos « dent », ou de mots
« œuvre » est tiré du verbe obrar « travail-
empr., tels que odontalgie, 1694.
ler »), a. pr. obra. V. ouvrer. Le sing. lat.
opus « ouvrage » a été moins vivace ; l’a. fr.
ODORANT, etc., v. odeur. ues, usité surtout dans la locution a ues
« au profit de », a disparu avant le xvi®s.
ODYSSÉE, 1814 (Lamartine, dans une — Dér. et Comp. : ouvrage, 1226, a rem-
lettre). Emploi fig. d'Odyssée, empr. du lat. placé l’a. fr. ouvraigne, de terminaison
Odyssea (du grec Odysseia, célèbre poème plus rare ; d’où ouvragé, xiv® (Froissart),
d'Homère, consacré aux aventures d’Ulys- les autres formes du verbe sont rares;
se, en grec Odysseus). désœuvré, 1692, désœuvrement, 1748;
ŒCUMÉNIQUE, 1590. Empr. du lat. hors-d’œuvre, 1690, comme terme de
eccl. œæcumenicus (du grec eccl. oikoume- cuisine (d’abord locution adjective em-
nikos, dér. de oikoumené (sous-entendu gé ployée par rapport à une pièce d’architec-
« terre ») « la terre habitée, l'univers », de - ture détachée à l'extérieur du corps d’un
oikein « habiter »). bâtiment, p. ex. un pilier, une balustrade,
1596, ceci d’après le sens de « bâtiment,
ŒDÈME, 1540. Empr. du grec oidéma bâtisse » qu'a œuvre depuis le x1v® s.);
« gonflement, tumeur ». — Dér. : œdéma- sous-œuvre, 1694. Pour chef-d'œuvre, v.
teux, 1549, d’après la forme du grec oi- chef.
déma, -atos.
OFFENSE, 1380, une première fois vers
ŒDIPE, 1721. Emploi fig. d’'Œdipe, 1226; offense, relevé en 1295, « attaque »
empr. du lat. Œdipus (du grec Oidipous doit ce sens à l’anc. verbe offendre. Empr.
« Œdipe », fils de Laius, roi de Thèbes, du lat. offensa, de même sens. — Dér. :
célèbre par ses infortunes) ; le sens fig., offenser, xv°, au sens moderne; a signifié
déjà lat., vient de ce qu'Œdipe résolut aussi « attaquer », depuis le xve s., « faire
l’énigme posée par le sphinx. une blessure » au xvi® et encore au XVII° 5.
(plutôt dér. de offense qu’emprunt du
ŒIL. Lat. oculus. Le plur. yeux repré- verbe lat. offensare, dont le sens est dif-
sente régulièrement oculos, par les stades férent) ; offenser a éliminé l’anc. verbe
uels, ueus, yeus. It. occhio, esp. ojo, a. pr. offendre, usité jusqu’au xvi® 8., « heurter,
uelh. Le fr. pop. a tiré de les yeux, etc.,
le verbe zieuler, 1907. — Dér. : œillade, attaquer, offenser » (lat. offendere « id. »),
sans en garder tous les sens ; offenseur,
vers 1480 ; œillère, xri° ; œillet, 1295, au
vers 1400, rare avant le xvri®s.
sens d’ « ouverture », propr. « petit œil »;
de même œæillet, nom de fleur, 1493, devenu OFFENSIF, 1538. Dér., sur le modèle de
le terme dominant des parlers gallo-ro- défensif et par opposition, de l’anc. verbe
mans; mais le Sud-Est dit giroflée; offendre au sens d’ « attaquer », v. le préc.,
œilleton, 1554, dérive de œil au sens de qui formait souvent locution avec défendre,
« bouton de fleur ou de feuille », par l’in- dans offendre et défendre, encore attesté au
termédiaire du m. fr. œillet « id. » ; ouiller, xvIes., cf. aussi espees et basions offensables
«remplir un tonneau à mesure que le liquide el deffensables au x1ve 8. ; offensive, terme
s’évapore », 1322 (sous la forme aeuilliés), militaire, a été tiré de l’adj., 1636, sur
OFFENSIF 442

le modèle de défensive, déjà employé au OFFRIR. Francisation, antér. aux pre-


XVI°. Offensif se trouve dès 1417 en parlant miers textes, du lat. offere. It. offrire,
d’une opinion (qui offense); en ce sens esp. ofrecer. La locution jurid. au plus
c’est un dér. d’offense. — Dér. : inoffensif, offrant apparaît dès 1365. — Dér. : offre,
1777, probabl. d’après l’angl. -sive. 1155; offreur, terme de commerce, 1764,
au xive et xve avec autre sens; roffrir,
OFFERTOIRE, vers 1350. Terme de li-
XIIIC.
turgie, empr. du lat. médiéval offertorium
(de offerre «offrir »);le mot lat. existe déjà OFFSET, vers 1930. Empr. de l'angl.
à basse ép., mais seulement au sens de (comp. de {o set « placer » et off « hors »).
«lieu où l’on sacrifie ». Au xvi® s. on trouve
aussi offerte, encore dans les dictionnaires, OFFUSQUER, xiv®, propr. « Couvrir
propr. «offre, offrande », en ce sens dès 1317 d’obscurité » ; le sens de « choquer », domi-
et encore usité au xvI®s., fém. pris substan- nant aujourd'hui, est du xvirre ; offusca-
tiv. du part. offert. tion, 1868, terme d'astronomie ; déjà at-
testé au xIve et au xvi® s., également en
OFFICE « service, devoir, fonction pu- parlant de l’obscurcissement de la lumière.
blique », vers 1175. Genre hésitant depuis Empr. des mots du lat. de basse ép. offus-
le xve s. Empr. du lat. officium qui avait care « obscurcir » (de fuscus « sombre,
tous ces sens. De là le nom de certains noirâtre »), offuscatio.
services ou charges; cf. aussi le Saint-
Office, xvire s., d’après l’it. santo ufizio; OGIVE, 1245 ; souvent augive jusqu’au
de là aussi la locution propr. juridique XVII s. On a proposé un empr. de l'esp.
d'office, relevée depuis le xvrie s. Celui de aljibe » citerne », venant d’une forme dia-
« lieu ou les domestiques préparent le ser- lectale arabe *al-djibb, modification de la
vice de la table », fém. en ce sens, s’est forme classique al-djubb, même sens. Les
développé au xvi® s. Celui de « bureau, citernes étaient souvent couvertes d’une
centre administratif », 1863, est peut-être voûte d’arêtes appelée bôveda de aljibe
un anglicisme. depuis le xvire s. Les voûtes des construc-
tions musulmanes étaient souvent pour-
OFFICE «service religieux », 1160. Empr. vues d’arcs en forme de nervures, et ce
du lat. eccl. officium; le mot s’employait genre d’arc fut imité dans l'Espagne chré-
dans le lat. du paganisme pour désigner rienne, en Aquitaine et jusqu’en Norman-
les funérailles. die dès la fin du xi° s. Mais l'anglais
OFFICIEL, 1778, attesté alors par l’adv. possède à côté de ogive une forme ogee
-ellement. Empr. de l’angl. official, qui est (au xve s. ogger) lequel semble représenter
empr. lui-même du lat. de basse ép. offi- un lat. obviala « disposée en croisée »;
cialis « qui a rapport à une fonction » pour ogive pourrait très bien en être un dér.
exprimer un sens différent d'officieux. Du en -iva. — Dér. : ogival, 1823.
même mot lat. officialis, pris dans un sens OGRE, vers 1300, au sens moderne. Très
partic. dans le lat. médiéval de l’Église est
probabl. altération d’une forme antér. *orc,
empr. official, vers 1180, d’où officialité,
1285. lat. Orcus « dieu de la mort » et « enfer »,
qui aurait survécu dans les croyances popu-
OFFICIER, verbe, 1290. Empr. du lat. laires pour aboutir à la légende de l'ogre ;
médiéval oÿficiare, dér. de officium, au cette étymologie est appuyée par l’it. orco
sens eccl. — Dér. : officiant, subst., 1676. « croque-mitaine », l’esp. arch. huerco
«enfer, diable » et par un passage de la vie
OFFICIER, subsi., 1324. Empr. du de saint Eloi, mort en 659, qui fait allusion
lat. médiéval officiarius, dér. de officium à un sermon où celui-ci, blâmant ceux qui
au sens de « fonction publique ». — Comp. : gardaient de vieilles superstitions païennes,
sous-officier, 1771. citait à la fois Orcus, Neptunus (cf. lutin) et
OFFICIEUX, 1534; inofficieux, en Diana (d’où, entre autres, a. fr. gene « sorte
1495. Empr. du lat. officiosus « complai- de fée malfaisante »). La métathèse de l’r
sant », dér. de officium au sens de « service peut être due à l'influence de bougre.
rendu ». OH. Exclamation onomatopéique. Ho, ô
OFFICINE, 1643, au sens de « lieu où sont des variantes orthographiques utili-
l’on fait des machinations »; usité du sées pour des nuances de sens. — Comp. :
XIIe s. au début du xvi® au sens de « bou- holà, xv® (Charles d'Orléans) ; on a dit au
tique, atelier » ; le sens de « local » où se XVIe s. faire le holà au sens de notre meltre
font les préparations pharmaceutiques » le holà, qui date du xvire s. (cf. aussi la
est le plus récent (signalé depuis 1838) et locution punir hola, au début dans un
paraît avoir été suggéré par l’adj. suiv.; texte juridique du début du xve s.).
officinal, 1735, au sens moderne ; une pre- OHÉ, v. hé.
mière fois vers 1530 en un autre sens. Le
premier est empr. du lat. officina « ate- OHM, mesure d'électricité, 1881. Tiré de
lier » qui s’employait aussi dans un sens au nom d’un physicien allemand (1787-
péjor. ; le deuxième est un dér. sav. de ce 1854).
mot lat.
OÏDIUM, 1825. Empr. du lat. scient.
OFFRANDE, vers 1080. Empr. du lat. oïdium, mot formé avec le grec 6on « œuf »
médiéval offerenda, fém. pris substantiv. et une terminaison -idium, qui contient le
de offerendus « qui doit être offert », adj. A -id(e), v. -ide, probabl. d’après
verbal de offerre, v. le suiv. ovoïde.
443 OLYMPIEN

OIE, xrr1°. Antér.-oue, encore attesté au de Cassel; souvent refait aussi dans les
xXvIIe s., cf. la rue aux Ours, à Paris, alté- parlers modernes sur oie (comme oie a été
ration qui date du xvri® s., de la rue aux refait en fr. sur oison).
Oues ; oie passe pour être empr. d’un parler OKAPI, vers 1900. Empr. d’une langue
de l’Est de Paris (il est p. ex. dans le Mé- du Congo.
nestrel de Reims) ; de toute façon, c’est une
réfection d’oue d’après oiseau et oison. OLÉAGINEUX, xive. Dér. sav. de l’adij.
Lat. *avica, dér. de avis « oiseau », qui s’est lat. oleaginus (ou -neus) « de la nature de
substitué au lat. class. anser, disparu par- l’olive ou de l'olivier (olea) » pour servir
tout ; *avica s'explique parce que l’oie a d’adj. à huile.
été considéré comme l'oiseau domestique OLÉO-. Premier élément de mots sav.,
par excellence ; le croisement d’oue et tels qu’oléomètre, 1868, tiré du lat. oleum
oiseau montre que cette conception a long- « huile »; en outre dér. d’oleum, tels
temps persisté. It. oca, a. pr. auca ; ailleurs qu'’oléine, 1827.
autres mots. L'origine de la locution contes
de ma mère l’oie est discutée ; pour les uns OLFACTIF, 1718, une première fois en
ma mère l’oie représente la mère de Charle- 1527. Dér. sav. du lat. olfactus « action de
magne, Berte aus grans piés, héroïne de flairer » (de olfacere « flairer »). Aussi olfac-
nombreuses légendes, et identifiée avec la loire au XVIIIe S.
reine Pédauque (en prov. pe d’auco « pied OLIBRIUS, 1537 (Bon. Despériers). Tiré
d’oie »); pour d’autres c’est le souvenir d’Olibrius, nom du gouverneur d’Antioche,
d’un fabliau où la mère oie instruit ses persécuteur de sainte Marguerite ; la lé-
oisons. — Comp. : patte d’oie, xvi°. gende de cette sainte a tiré elle-même ce
OIGNON. Lat. ünionem, acc. de ünio, nom d’Olibrius, nom d’un empereur d’Oc-
donné par Columelle comme nom d’une soc (472), incapable et plein de jac-
sorte d’oignon qui n’a pas de ca eux (caepa ance.
simplez) ; c’est donc la plante à une seule OLIFANT, v. éléphant.
tige. La voyelle protonique à est traitée
comme dans l’a. fr. jostise (de justitia). OLIGARCHIE, 1370 (Oresme) ; oligar-
L'’a. fr. avait aussi cive, encore dans les chique, id. Empr. des mots grecs oligar-
patois, v. eivet, lat. class. cæpa, d’où aussi khia (de oligos « peu nombreux » et de
a. pr. ceba, continué par des formes des arkhein « commander »), -khikos, par l’in-
parlers méridionaux ; à côté de ce type, termédiaire des traductions latines d’Aris-
des langues romanes ont des formes issues tote, v. anarchie.
d’un dér. de basse ép. cæpulla : it. cipolla, OLIVE, vers 1080 (Roland), au sens
esp. cebolla, v. ciboule et civette. Le fr. d’ « olivier », fréquent jusqu’au xvie s.
pop. a tiré au xIx°s. gnon « COUP » d’oignon Lat. oliva «olive » et «olivier », forme restée
par apocope de l’initiale. en contact avec celle de l’occitan, v. huile.
OILLE, v. olla podrida. — Dér. : olivaison, 1636 (d’après l’a. pr.
olivar « cueillir les olives ») ; olivâtre, 1553 ;
OINDRE. Lat. ungere. olivette, 1611 (une 1re fois vers 1200, au
sens de « petit olivier ») ; olivier, vers 980.
OISEAU. Lat. pop. *aucellus, d’abord V. œillette.
*avicellus, dim. du lat. class. avis (d’où
esp. port. ave). It. uccello, a. pr. auzel. Par OLLA-PODRIDA, 1590. Empr. de l'esp.
suite d'accidents arrivés à oiseau, les par- olla podrida « pot pourri ». On a dit au
lers septentrionaux ont eu recours à divers même sens au xvii® s. oille, évalement
substituts, notamment à moineau dans le empr. de l'esp. olla, lat. olla « pot, mar-
Centre et en picard et à moisson (propr. mite », d’où aussi a. fr. oule, a. pr. olla,
« moineau », lat. pop. *musciônem, acc. de encore usité dans les parlers méridionaux.
*musciô, dér. de musca « mouche ») en OLOGRAPHE, 1603. Empr. du lat. de
wallon. — Dér. : oïiselet, x11° ; oiseleur, basse ép. olographus, autre forme de holo-
x11° ; oiselier, 1558 ; oisellerie, x1v® ; oiselle, graphus (du grec holographos, comp. de
1873 (de Banville), une première fois chez holos « entier » et de graphein « écrire »).
Rab., 1562; oisillon, vers 1200.
OLYMPIADE, terme d’antiquité grec-
OISEUX. Lat. ofiosus ; ailleurs formes que, xute, rare avant la fin du xves.;
empr. du lat. Puisqu’il existait à côté de olympique, vers 1520, sens plus étendu au
l’a. fr. voisous « prudent » (du lat. vitiosus) xixe s. Empr. du lat. Olympias, Olympicus
un subst. voisdie « subtilité, adresse » (des mots grecs Olympias, -pikos, dér. de
(aussi voisdive), dér. d’un représentant du Olympia « Olympie », ville d’'Elide, ainsi
lat. vilialus, on a formé au x11°s. sur oiseus nommée à cause du culte de Zeus Olym-
un subst. oisdive « oisiveté », d’où par la pien) ; toutefois les jeux Olympiques se
suite un adj. oisdif « oisif ». Au xrr1° 8. le disaient en lat. Olympia, plur. neutre,
radical de oisdif a été simplifié sous l’in- d’après le grec ta Olympia.
fluence de oiseux, d’où oisif, 1271. De là
oisiveté, vers 1330. OLYMPIEN, 1552, au sens propre ; le
sens de « majestueux » est de date récente
OISON, x1r1e. Réfection, d’après oiseau, (1840) ; Ronsard a pris aussi le mot au sens
d’une forme rarement attestée osson, en- d’ «olympique ». Dér. sav. du lat. Olympius
core usitée dans les parlers de l'Est, lat. « qui réside sur le mont Olympe » (du grec
pop. auciônem, acc. de auciô, dér. de Olympios, de Olympos « mont Olympe »,
*aquca « oie », cf. auciun dans les Gloses en Thessalie, séjour des dieux).
OMBELLE 444

OMBELLE, terme de botanique, xvi® les parlers gallo-romans, où il revêt des


(J. du Bellay). Empr. du lat. umbella formes diverses, notamment amolelle, qui
« parasol », dim. de umbra, v. ombrelle. paraît dû à un croisement avec mou, mol,
Du même mot lat. a été tiré ombellifère, par opposition aux œufs durs.
1698 (Tournefort), sur le modèle de mots OMETTRE, 1337 ; omission, 1350, rare
lat. tels que frugifer, pomifer, v. aussi -fère. avant le xvi® s. Empr. des mots lat. omil-
OMBILIC, 1503. Empr. du lat. umbili- lere, francisé d’après mettre, omissio (créé
cus, V. nombril. — Dér. : ombilical, 1490. à basse ép.).
OMNIB US, 1825. Tiré de voiture omnibus,
OMBRE. Souvent masc. jusqu’au XvI°s.
Lat. umbra. It. ombra ; pour l’esp., v. om- où omnibus « pour tous » est le datif plur.
breux. Le sens d’ « apparence du corps de l’adj. lat. omnis « tout »; on sait que
après la mort », qui représente une croyance
Pascal avait imaginé d’établir dans Paris
païenne, a été repris au lat. au xvi® s. des transports en commun, et qu’un premier
Ombre chinoise, 1776, spectacle qu’on di- essai en fut fait en 1662 ; mais ces véhicules
furent alors appelés simplement carrosses.
sait inventé en Chine. Lécher la proie pour
l’ombre se dit par allusion à une fable de D'où, par abréviation arbitraire du mot,
La Fontaine, VI, 17. Ombre, nom de pois- faite comme l’angl. bus, les comp. récents
son, remonte également au lat. umbra, autobus (vers 1907), aérobus (1908, créé
sauf dans ombre-chevalier, fin Xvir1e, empr. par M. Provins), électrobus.
d’un parler de la Suisse romande, forme OMNIPOTENT, vers 1080 (Roland), de-
altérée d’omble (écrit aussi umble chez venu rare depuis le xvri® s. ; omnipotence,
Littré, et en 1798 (Dict. de l’ Académie), 1387. Empr. des mots lat. omnipotens,
humble, 1553, chez P. Belon); ce mot, omnipotentia.
encore usité sur les bords du lac Léman,
est lui-même une altération d’amble (forme OMNISCIENCE, 1752. Empr. du lat.
employée sur les bords du lac de Neu- médiéval omniscientia, fait sur le modèle
châtel), lat. de basse ép. amulus (Polémius de omnipotentia, v. le préc. — Dér. : om-
Silvius). — Dér. et Comp. : ombrage, vers niscient, 1737 (Voltaire), sur le modèle des
1180, d’où ombrager, vers 1120, ombrageux précédents.
vers 1270 (J. de Meung), au sens de « qui
donne de l’ombrage », usité jusqu’au OMNIUM, 1776, à propos des finances
xXvIe s. ; sens moderne dès 1300, en parlant anglaises, récent comme terme de bourse.
d’un cheval. Empr. de l’angl. omnium, tiré du lat. om-
nium « de tous », génitif plur. de omnis ;
OMBRELLE, 1588 (Montaigne). Empr. créé pour désigner un emprunt de formule
de l’it. ombrello, lat. de basse ép. umbrella nouvelle en 1760. S’emploie aussi comme
(attesté dans des gloses), altération de terme de courses.
umbella, vV. ombelle, d’après umbra « om-
bre ». Ombrelle a d'abord été masc., encore OMNIVORE, 1749; OMNICOLORE,
au xviie s., d’après le genre de l’it. 1828. Empr. des mots lat. omnivorus,
omnicolor, comp. du lat. omnis « tout ».
OMBRER. A d’abord signifié « mettre V. les précédents.
à l’ombre »; en ce sens continue le lat. OMOPLATE, 1534 (Rab.). Empr. du
umbräre, cf. aussi a. pr. ombrar. Le sens grec ôémoplaté (de ômos « épaule » et platé
moderne, qui est un terme d’art, relevé en « surface plate »).
1555, est dû en partie à l'influence de l’it.
ombrare et a fait disparaître le premier ON, v. homme.
sens, encore usuel au XvIeSs. ONANISME, 1760. Dér. de Onan, nom
OMBREUX. Lat. umbrôsus. It. ombroso, d’un Hébreu, qui ayant reçu de son père
a. pr. ombros ; l’esp. sombroso est refait Juda l’ordre d’épouser la femme de son
sur sombra « ombre », lui-même refait sur frère décédé sans enfant, fit incomplète-
sombrar « faire de l’ombre », lat. pop. ment l’acte de la génération pour ne pas
*subumbräre. créer une postérité qui n'aurait pas été la
sienne et fut puni de mort par Dieu, cf.
OMÉGA, 1535 (dès 1616 dans la locution Genèse, 38, 9. 4
l’alpha et l’oméga). Empr. du grec 6mega
« © grand », nom de l’o long, opposé à ONAGRE, 1778, une première fois au
omikron, « o petit », nom de l’o bref. XII® $s. (onager), onagra au xvire et au
XVIe s. Empr. du lat. onagrus, onager
OMELETTE, 1552 (Rab. : homelaicte). (du grec onagros, littéral. « âne sauvage »).
Altération probabl. d’origine méridionale, ONCE, mesure. Lat. uncia « douzième
sous l'influence des représentants du lat. partie de diverses mesures ». It: oncia,
ovum « œuf », d’amelelle, XV® s., encore esp. onza, a. Pr. onsa.
usité à Paris au xvri®, qui est à son
tour une forme altérée d’*alemette, autre ONCE, nom d’un animal, xrrre. Masc.
forme d’alumeïte, xiv®; cette forme est chez Buffon. Désigne au moyen âge diver-
elle-même issue par substitution de suff. ses bêtes féroces. Forme apocopée de lonce,
d’alumelle, xiv°, qui vient de l'a. fr. lemelle, où l a été pris pour l’article, cf. l’once, chez
v. lamelle ; l'emploi de ce mot pour dési- Rutebeuf, qu’on peut aussi bien lire lonce.
gner l’omelette est dû à une comparaison Lonce remonte à une forme fém. *lyncea,
de l’omelette à une lame, à cause de sa dér. du lat. class. lynx (d’un mot grec signi-
forme aplatie. Le mot s’est répandu dans fiant « loup cervier »).
445 OPHTALMIE

ONCIAL, 1587. Empr. du lat. uncialis ONYX, xr1° fonix), formes variées jus-
(de uncia, v. once), qui s’est dit à basse qu'au xviie s. Empr. du lat. onyx (d’un
ép. de lettres capitales d’après le sens de mot grec, qui signifiait propr. « ongle », dit
« haut d’un pouce » attesté chez Pline. de la pierre de ce nom à cause de sa trans-
parence analogue à celle d’un ongle).
ONCLE. Lat. avunculus, propr. « oncle
maternel »; pairuus « oncle paternel » a ONZE. Lat. undecim. On dit aujourd’hui
disparu partout. Cf. roumain unchiü ; l’it. le onze et le onzième (déjà chez Mme de
zio et l’esp. fio viennent du lat. de basse Sévigné ; au xvi®s. on dit encore l’onzième),
ép. fhius (du grec fheios). En dehors d’ap- comme le un, le huit, sur le modèle de le
pellations enfantines, oncle est le mot de deux, le trois, etc. — Dér. : onzième, 1534 ;
tous les parlers gallo-romans. V. tante. d’abord onzime, depuis le xrr° 5.
ONCTION, xx; onctueux, 1314; onc- OOLITHE, 1762. Comp. avec les mots
tuosité, id. Empr. du lat. anc. unctio (de grecs 6on « œuf » et lithos « pierre », pour
ungere « oindre ») et du lat. médiéval unc- traduire l’all. Rogensiein. — Dér. : ooli-
tuosus, unctuositas. — Comp. d’onclion : thique, 1818.
extrême-onction, 1496.
OPALE, xvie (R. Belleau). Empr. du
ONDE. Lat. unda. It. esp. onda. — Dér. : lat. opalus, mot d’origine étrangère, comme
ondée, xr1° ; ondine, xvi® (Ronsard ; peut- le grec opallios. — Dér. : opalin, 1798;
être du lat. de Paracelse) ; on a dit aussi
opalisé, 1840.
ondin, Xxvi11° ; ondoyer, x11°, ondoiement, id.
ONDULATION, 1680 (« Les ondulations OPAQUE, vers 1500 ; opacité, id. Empr.
de l’eau »). Dér. sav. du lat. de basse ép. des mots lat. opacus « ombre, touffu »,
undula, dim. de unda, v. le préc. A été pris opacitas « ombre, obscurité », en vue de
par les physiciens pour désigner la théorie sens spéciaux.
des ondulations, formulée par Huyghens en OPÉRA, vers 1646, date de l’introduc-
1690 ; pop. aujourd’hui comme terme de tion de l’opéra italien à Paris par Mazarin.
coiffure. — Dér. : ondulatoire, 1765 ; on- Empr. de l’it. opera. propr. « œuvre » ; les
duler, 1746, onduleux, 1735. sens de « chose difficile, chef-d'œuvre »,
ONÉREUX, xive (Oresme). Empr. du usités au xvrie et au xvrrie 8., sont d’autres
lat. onerosus (de onus, -eris « charge »). emprunts à lit. Opéra comique, 1745,
par opposition à opéra, plus tard grand
ONE-STEP, vers 1910. Empr. de l'angl. opéra, au xiIx® s.; v. aussi opéra bouffe
d'Amérique, propr. « Un pas ». sous bouffe.
ONGLE. Le plus souvent fém. jusqu’au OPÉRER, 1495; opérateur, xiv® (Ores-
xvie s. Lat. ungula, propr. « serre, sabot », me); opération, xzrie s. Empr. des mots
dér. de unguis « ongle », qui a disparu; lat. operari, operare « travailler, faire,
cet emploi de ungula est visiblement d’ori- opérer, etc. » (de opus « ouvrage »), operaiio,
gine pop. ou même argotique ; on sait que operator, en vue de sens variés. — Dér. du
plusieurs parties du corps ont reçu dans le verbe : opératoire, 1784; opérable, 1845
lat. pop. des désignations de ce genre, cf. (une 1re fois vers 1450) ; inopérable, 1812 ;
jambe, etc. — Dér. : onglée, 1549 ; onglet, inopérant, 1859.
1538 (une 1re fois en 1304).
OPERCULE, terme techn., 1736. Empr.
ONGUENT, x111° ; au sens de « parfum »,
du lat. operculum « couvercle » en vue de
1512, sens conservé jusqu’au milieu du
xvI1e s. Empr. du lat. unguenium « par- sens spéciaux.
fum »; le sens que nous donnons au mot OPÉRETTE, 1840. Empr. de l’all. Ope-
s’est développé dans la langue des apo- relle, attesté depuis le début du xvirres.,
thicaires. d’après lit. operetta, dim. de opera, v. opéra.
ONGULÉ, 1756. Adaptation du lat. des OPHICLÉIDE, instrument employé pour
naturalistes ungulalus, dér. du lat. ungula, la première fois à l'Opéra en 1822. Comp.
v. ongle. avec les mots grecs ophis « serpent » et
ONIR(O)-. Premier élément de mots kleis, kleidos « clef », quand cet instrument,
sav. comp. ou de mots empr., tels qu’oniro- muni de clefs, a été inventé pour remplacer
mancie, 1834 (antér. -ce et oneiromancie), un instrument à six trous, utilisé surtout
cf. aussi onirique, -isme, mots entrés récem- dans les églises, et qui s'appelait serpenl.
ment en usage chez les aliénistes, où oniro-
OPHIDIEN, 1800. Dér. sav. du grec
vient du grec oneiros « rêve ». ophis « serpent », d’après le dim. ophidion.
ONOMATOPÉE, 1585. Empr. du lat. de
basse ép. onomalopæia (du grec onomalo- OPHIO-. Premier élément de mots sav.
poiia, littéral. « création (poiein « faire ») comp., tels que ophiomancie, 1808, tiré du
de mot fonoma) »). grec ophis « serpent ».
ONTOLOGIE, 1704. Empr. du lat. mo- OPHTALMIE, 1370 (Oresme : obial-
derne ontologia, créé par le philosophe mié) ; ophtalmique, 1495 (écrit obthalmi-
allemand Wolf (1679-1754), littéral. « scien- que). Empr. du lat. de basse ép. ophialmia
ce de l’être », au moyen du grec to on, tou -micus (du grec ophihalmia, -mikes, de
ontos, « l'être » (tiré du part. prés. du verbe ophthalmos « œil »). Exophtalmie, 1752, est
einai « être »), sur le modèle des nombreux fait sur l’adj. grec exophthalmos « qui a les
mots en -logie. — Dér. : ontologique, 1740. yeux en dehors », d'où -ique, 1836.
OPHTALM (O0) - 446

OPHTALM(O)-. Premier élément de oppresser s’employant surtout en parlant


mots sav. comp., tels qu'ophtalmologie, de la gêne de la respiration, tandis qu'op-
1753, tiré du grec ophtalmos « œil ». pression sert de subst. aux deux verbes.
OPIACÉ, v. opium. OPPROBRE, vers 1120. Empr. du lat. op-
probrium (de probrum « action honteuse »).
OPIAT, 1336 ; rare aujourd’hui. Empr.
du lat. médiéval opialum ; on a en outre OPTER, 1411; option, 1411, une pre-
au moyen âge et jusqu'au xvI11° S. opiale, mière fois vers 1190. Empr. du lat. opiare
fém., d’après medicina opiala, v. opium. « choisir », optio « choix » ; mais opiion est
plus spécialisé qu’opier.
OPILER, v. désopiler.
OPTICIEN, v. optique.
OPIMES, 1571 (D.), surtout dans dé-
pouilles opimes ; sing. rare. Terme d’anti- OPTIMISME, 1737; optimiste, 1752.
quité romaine, calqué sur le lat. opima Dér. sav. du lat. optimus «le meilleur », v.
spolia, où opima est le plur. neutre d’un pessimisme.
adj. opimus « fertile, riche ». OPTIMUM, 1771. Empr. du lat. oplimum,
OPINER, xiv°; s'emploie aujourd'hui forme neutre de optimus « le meilleur ».
surtout dans la locution opiner du bonnet, OPTIQUE, subst., 1605. Empr. du grec
xvirIe ; opinion, vers 1190. Empr. du lat. optiké (sous-entendu iekhnê « art ») « art
opinari, opinio.— Dér. : préopiner, 1718; de la vision » (de la famille du verbe op-
préopinant, 1690, fait d'après opinant, 1549.
lesthai « voir »). Le lat. a aussi optice. L’adij.
OPINIÂTRE, 1431. Dér. sav. du lat. optique a suivi le subst. dans la langue de
opinio (peut-être d’après acariäire), v. le la physique ; comme terme d’anatomie,
préc. — Dér. : opiniâtrément, 1680, d’abord attesté dès 1314 dans nerf optique, il est
opinidtrement, 1539 ; opiniâtrer (s’), 1538, fait sur le lat. oplice. — Dér. : opticien,
souvent trans. au xvri® s.; opiniâtreté, 1765, au sens moderne ; d’abord « savant
1528. en matière d'optique », vers 1640 (opticien
ou maistre d'optique).
OPINION, v. opiner.
OPULENT, 1355 (Bersuire) ; opulence,
OPIUM, xuie. Empr. du lat. opium (du
grec opion « suc de pavot », de opos « suc »). 1464. Empr. du lat. opulentus, opulentia
— Dér. : opiacé, 1812 ; opiomane, 1907. (de opes « richesses »).
OPUSCULE, 1488. Parfois fém. Empr.
OPONCE, genre de cactacée, fin xix®. du lat. opusculum, dim. de opus «ouvrage ».
Empr. du lat. des botanistes opuntia, nom
du nopal, tiré du lat. opuntius « d’Oponce » OR, subst. Lat. aurum. It. esp. oro, a. pr.
(en Locride). aur ; aujourd’hui souvent fém. à cause de
l’initiale vocalique.
OPOPONAX, 1664, dans un tarif, déjà
opopanac au xrr1e s. Altération du lat. opo- OR, adv. En a. fr. en outre ore, ores,
panaxz (d’un mot grec formé de 0pos « suc » jusqu'au xvIe s. ; signifiait « maintenant »
et de panax, nom de plante). jusqu’au xvrie s., l’e est tombé parce que
or est un mot accessoire, l’s finale est l’s
OPOSSUM, 1640. Mot anglo-américain,
dite adverbiale, v. jadis, lors, etc. Lat. ha
empr. lui-même de l’algonquin, oposon. horä, altération du lat. class. häc hora « à
OPPORTUN, 1355; opportunité, vers cette heure », d’après illä hor& « à cette-
1220. Empr. des mots lat. opporiunus, heure-là » ; la forme class. hac hor& survit
propr. « qui conduit au port » (de portus dans l’anc. esp. agora. Le sens de « main-
« port »), opporlunitas. — Dér. : opportu- tenant » est encore conservé en franco-
nément, 1422 ; opportunisme, 1876, oppor- provençal et en provençal, où ce type est
tuniste, 1889. concurrencé par era, du lat. e& hora. V.
OPPOSER, x1i° (Chrétien); opposite, désormais, dorénavant, sous mais, avant.
XIIIe, comme adij., usité jusqu’au XvIre $. ; ORACLE, vers 1170. Empr. du lat.
aujourd’hui ne s'emploie guère que dans oraculum.
la locution à l’opposite, relevée depuis la
fin du xi1ves. ; opposition, xr1° (Chrétien) ; ORAGE, xr1°. Jusqu'au xvi® s. signifie
au sens politique, anglicisme, 1745. Empr. surtout « souffle du vent (favorable ou
des mots lat. opponere (francisé d’après défavorable) »; le sens moderne apparaît
poser), oppositus, opposilio. — Dér. du de bonne heure, pour triompher au xvr®s.
verbe : opposant, 1431. Masc. à cause du suff. -age, cf. âge, mais
parfois fém. à cause de l’initiale vocalique.
OPPRESSEUR, 1350; oppression, xrre. Dér. de l’a. fr. ore « vent », disparu de
Empr. des mots lat. oppressor, oppressio, bonne heure, lat. aura « souffle léger,
dér. du verbe opprimere, v. opprimer. — brise » (mot pris au grec), d’où aussi it.
Dér. oppresser, xiIi®, avant Froissart arch. ora, a. pr. aura, qui survit dans la
seulement opressé, a signifié aussi « oppri- région franco-provençale au sens de « vent »
mer » et « accabler sous le poids d’une et d’ « orage »; cf. aussi le dér. auratge
privation, d’une gêne », jusqu’au xvir® 5. ; « vent, orage » en a. pr. — Dér. : orageux,
oppressif, 1697, une première fois au XVIIe, une première fois vers 1200 dans un
XIVe s., puis en 1480. sens fig.
OPPRIMER, 1355 (Bersuire). Empr. du > ORAISON, xr1°. Empr. du lat. eccl. ora-
lat. opprimere « serrer, écraser ». Aujour- tio (en lat. class. oratio signifie « discours »,
d'hui ne s'emploie qu’au sens moral, mais le verbe dont le sens propre est « par-
447 ORDRE

ler » signifie le plus souvent « prier », v. ORCANETTE, v. henné.


oracle.) Le sens de « discours » a été repris
par Bersuire (1355), d’où, au xvires., l’ac- ORCHESTIQUE, 1721 ; orchestre, 1520
ception grammaticale exprimée aujour- (dans une traduction de Suétone), comme
d'hui par discours. terme d’antiquité ; appliqué à nos théâtres
au xvrie s. Empr. du grec orkhéstiké « art
ORAL, 1610 (La manducation orale, pour de la danse », orkhéstra (du verbe orkheis-
user de ce mot). Dér. sav. du lat. os, oris, thai « danser »), celui-ci par l’intermé-
« bouche ». diaire du lat. ; jusqu’au xvir1e s., orchestre
ORANGE, xir1e (d’abord pume orenge, a été fém. d’après le genre anc. — Dér. :
vers 1300 pomme d’orenge) ; d’où orange orchestrer, 1838, orchestration, 1838.
au xvi® s. Pomme (d’)orange paraît être
un calque de l’anc. it. melarancia (au- ORCHESTRION, 1802. Empr. de l’all.
jourd’hui plutôt arancia) qui remonte lui- Orchesirion, dér. de Orchester, v. le préc. et
même à l’arabe narandj (d’origine persane
accordéon.
comme le fruit) ; mais il s’agit d’abord de ORCHIDÉE, 1766. Dér. anormal du lat.
l'orange amère ; l’orange douce a été ap- orchis (du grec orkhis, propr. « testicule »)
portée de Chine par les Portugais (de là it. d’après le grec orkhidion, « petit testicule »
poriogallo, all. Apfelsine, littéral. « pomme et « orchidée »; cette plante a été ainsi
de Chine »). Mais, en général, le nom anc. nommée à cause de la forme de ses bulbes.
a passé au nouveau fruit, d’où esp. naranja,
all. Pomeranze (par l'intermédiaire du lat. ORCHITE, 1562. Dér. sav. du grec
moderne pomarancia), etc. L’o du fr. orkhis, v. le préc.
orange s'explique très probabl. par l’in-
fluence du nom de la ville d'Orange, par ORD, v. ordure.
où les fruits devaient passer pour parvenir ORDALIE, 1721. Terme de droit médié-
au Nord. L'influence du subst. or, à cause val, qu’on emploie aussi pour l'antiquité.
de la couleur du fruit, est exclue du fait Empr. du lat. médiéval ordalium, empr. lui-
que le fruit s'appelle d’abord et pendant même de l’anc. angl. ordél « jugement »,
des siècles pomme d'orange, ce qui fait cf. l’all. Urleil « id. », qui est étymologi-
supposer qu’on voyait dans orange un nom quement le même mot.
de lieu. — Dér. : orangé, 1555 ; orangeade,
1642, peut-être d’après l’it. aranciaia, cî. ORDINAIRE, adj., 1348 ; dès 1140 juge
limonade, sous limon; oranger, 1389, ordinaire, pour désigner le juge naturel,
orangerie, 1603 (Henri IV). dès 1260 ordinaire comme subst. en ce sens ;
ORANG-OUTANG, 1707, déjà sous cette a pris des sens plus étendus depuis le xves.
forme chez le naturaliste hollandais Bon- Empr. du lat. ordinarius « placé en rang
tius, en 1635. Empr. du malais orang (ordo, v. les suiv.) », d’où « régulier ».
oulan « homme des bois », mot par lequel ORDINAL, 1550 (nombres ordinaux).
les Malais désignent des tribus monta- Empr. du lat. des grammairiens ordinalis
gnardes. Appliqué au singe par les Euro- (de ordo « rang », v. les suiv.).
péens, par erreur ou par plaisanterie.
ORDINATION, xrr1e. Empr. du lat. eccl.
ORATEUR, 1180; oratoire, adj., vers ordinatio, propr. « action de mettre en
1500 (art oratoire). Empr. des mots lat.
orator (de orare « parler », v. oraison), rang » (de ordinare), v. le suiv.
oralorius. ORDONNER, D'abord ordener, 1137,
ORATOIRE, subsi., xi1°. Empr. du lat. devenu ordonner au xIv° s., sans doute
eccl. oratorium (de orare au sens de « prier »); d’après donner. Empr. du lat. ordinare
de nombreux noms de lieu fr., tels qu’O- «mettre en rang, en ordre » (de là la forme
rouer, Oradour, etc., viennent de ce mot lat. ordiner, également usitée au moyen âge),
sens encore usuel surtout au part. passé,
ORATORIO, 1739, dans une lettre d’Ita- p. ex. dans personne, maison ordonnée ; le
lie du président de Brosses. Empr. de l’it. sens de « donner l’ordination » vient du
oralorio, qui passe pour avoir été tiré lat. eccl. ; celui de « prescrire, donner un
d’Oratorio, nom de l’église de l’Oratoire, à ordre », qui apparaît dans la langue juri-
Rome, qui aurait été donné à ce genre mu- dique à la fin du xive s., est devenu pré-
sical, parce que le fondateur de la congré- pondérant depuis le xvi® s., sans doute
gation de l’Oratoire (fondée en 1575), d’après ordinare qui avait déjà ce sens dans
saint Philippe de Neri, fit composer et exé- le lat. juridique. — Dér. : ordonnance, xv®°,
cuter dans cette église des intermèdes d’abord ordenance, vers 1200 (d’où ordon-
sacrés. nancer, terme d'administration, 1784, or-
ORBE, 1634, une première fois au donnancement, 1832) ; le verbe ordonnancer
XIIIe s.; orbiculaire, xiv°, rare avant le a été relevé une première fois en 1424 et le
xvie s. Empr. des mots lat. orbis « cercle », subst. en 1380 ; ordonnateur, 1504; or-
orbicularis. donnée (16583, Pascal, d’où coordonnée,
1754) ; désordonné, xrr1° (J. de Meung :
ORBITE, 1314, comme terme d’anato- -denée) ; coordonner, 1771; réordonner,
mie ; au sens astronomique, 1676. Empr. 1568. V. subordonner.
du lat. orbita (de orbis, v. le préc.), propr.
« ligne circulaire, ornière, etc. », également ORDRE, vers 1080, aussi ordene, x1re.
terme d’astronomie ; mais le sens anato- Souvent fém. jusqu’au xvr1° s., à cause de
mique est propre au fr. — Dér. : orbitaire, l’initiale vocalique. Empr. du lat. ordo,
d’orbite, terme d’anatomie, xvi® (Paré). d’après les formes des cas obliques, ordi-
ORDRE 448

nem, etc., «rang, classe de citoyens, etc. », praesaga « qui prédit »), d’où effraie, 1553
d'où les sens nouveaux du fr.; celui de (effraigne dans un texte de 1370), d’après
« prescription » s’est développé parallèle- le verbe effrayer ; dans le Maïne orfraie
ment à celui de « prescrire » qu'a pris ordon- désigne encore inexactement la fresaie.
ner. V. ornière. Ordre du jour, terme poli- ORFROI. D'abord, jusqu’au x111° s. au
tique 1778, est un anglicisme (d’après order moins, orfreis, orfrois. Mot techn. qui repré-
of the day) de même que rappeler à l’ordre, sente probabl. un lat. “*aurum phryx
xix°, en angl. {o call io order. — Comp. : (on a frigium au x° s., graphie imitant le
contre-ordre, 1688 ; désordre, 1377 ; sous- lat. phrygium), littéral. « or de Phrygie »,
ordre, 1690. qui aura été fait sur le modèle du lat. class.
ORDURE. xu°. Dér. de l’anc. adj. ord vestes phrygiae « étoffes brochées d’or »,
« d’une saleté repoussante », hors d’usage cf. en outre phrygio « brodeur d’or »;
depuis le xvie s., lat. horridus « qui fait les Phrygiens étaient renommés pour leur
horreur », d’où aussi it. ordo « sale », a. pr. habileté dans l’art de broder les étoffes
orre « id. », encore usité dans les parlers avec de l’or.
méridionaux. — Dér. ordurier, 1718. ORGANDI, 1723. Étymologie inconnue.
ORÉE, 1308, au sens de « bord »; au- ORGANE, xve, au sens de « partie du
jourd’hui ne s'emploie plus que dans la corps considérée dans sa fonction », parfois
langue littéraire au sens de « lisière d’un orgue, ainsi en 1314 ; organique, 1561, une
bois », mais encore usité en des sens variés première fois en 1314. Empr. des mots lat.
dans les parlers septentrionaux. Dér. de organum, au même sens, organicus (du
l’a. fr. eur « bord, bordure », lat. pop. grec organon, propr. « instrument (en
*Grum, tiré du lat. class. ora, « bord, li- général) », d’où « instrument de musique »
sière », d’où aussi a. pr. or. et « organe du corps », organikos, de même
sens que l’adj. lat.). V. orgue. — Dér. :
OREILLE. Lat. auricula, élargissement organiser, xIv®, organisateur, 1793, orga-
de auris, qui a disparu. It. orecchio (plus nisation, vers 1390; désorganiser, 1764
usuel aujourd’hui que le type normal orec- (le part. passé déjà vers 1570 et en 1611),
chia), esp. oreja, a. pr. aurelha. Très répan- -sateur, 1792 (Robespierre), -sation, 1764,
du au sens de « versoir » à la fois en gallo- inorganisé, 1769 (Diderot), réorganiser,
roman et dans les langues voisines. — Dér. 1791, d’où -sation, 1791 ; organisme, 1729;
et Comp. : oreillard, 1642; oreiller, xr1°, inorganique, 1579.
souvent oriller au moyen âge; oreillette,
1654, comme terme d'anatomie (en 1314 ORGANISTE, 1223. Empr. du lat. mé-
on a oreille en ce sens), usuel au moyen diéval organisia, dér. de organum au sens
âge aux sens de « petite oreille » ou de d’ «orgue ».
« pendant d'oreille »; oreillon, 1640, au
sens médical, existe depuis le xxrx1° s. au ORGANSIN, fil de soie torse, 1627, on a
sens de « coup sur l'oreille » (orillon); déjà orgasin au xiv® s. (le mot désignait
essoriller, 1303, « couper les oreilles »; alors une étoffe). Probablement empr.
perce-oreille, 1964, ainsi nommé par com- de l’it. organzino (attesté pourtant seule-
paraison de la queue, en forme de pince, ment depuis 1750), où l’on propose de voir
de l’insecte avec la pince qui sert aux orfè- un mot dér. de Urgandi, nom d’une ville du
vrès pour percer les oreilles. Puis le sens Turkestan russe.
de cette désignation a été modifié; on a ORGASME, 1611. Empr. du grec orgas-
cru qu’elle était due au fait que l’insecte ma (du verbe orgân «bouillonner d’ardeur »).
perçait les oreilles, de là de nouveaux
termes dans les parlers gallo-romans et ORGE. Genre hésitant depuis le moyen
ailleurs ; antér. on disait oreilliée, xI1°, âge, à cause de l’initiale vocalique. Lat.
oreillère, XViI°, par comparaison des ailes hordeum. Cf. escourgeon, paumelle.
postérieures de l’insecte avec l'oreille hu- ORGEAT, xv°. Empr. du prov. orjat,
maine. dér. de orge.
ORÉMUS, 1560. Mot lat. signifiant ORGELET, 1671. Altération d’orgeolet,
« prions », première pers. du plur. du subj. xvi®, dér. d’orgeol, 1538 (en outre orgeul,
prés. du verbe orare « prier », V. oraison, 1660 et une forme altérée orgueil au
qui précède souvent les prières dans la xvI1e s.) ; l'absence d’orgeol dans les textes
liturgie catholique. du moyen âge doit être l'effet du hasard
et le mot la continuation régulière du
ORFÈVRE, xu°. Le lat. aurifex est lat. hordeolus, propr. « grain d’orge ». V.
conservé dans l’it. orefice, orefo ; comme il
compère-loriot sous loriot.
devait aboutir en fr. à une forme inanaly-
sable, le mot a été refait en orfevre dont ORGIE, vers 1500, au plur., comme
les deux éléments se comprenaient facile- terme d’antiquité, en parlant des fêtes de
ment, v. fèvre sous forgeron. — Dér. : orfè- Bacchus ; sens plus étendu au xvirre s. ;
vrerie, XII°. orgiaque, 1832, sens parallèle à orgie. Empr.
du lat. orgia, plus. neutre (mot pris au
ORFRAIE, 1491. Issu d’osfraie, attesté grec), et du grec orgiakos.
indirectement par l’angl. osprey, lat. ossi-
fräga, littéral. « qui brise (de la famille de ORGUE, xiv°, au sens moderne. Genre
frangere « briser ») les os ». Seulement fr. — hésitant depuis le moyen âge, v. orge.
Sous l'influence d'orfraie est né fresaie Empr. du lat. eccl. organum qui désignait
(pour presaie, encore en poit., du lat. non seulement l’orgue hydraulique (en lat.
449 ORPHELIN

class. hydraulus, du grec hydraulos, v. hy- créée d’après l'usage des juges de village
draulique), mais l’orgue pneumatique ; il de rendre la justice sous l’orme qui se trou-
y a eu des orgues de ce genre de bonne vait devant le manoir seigneurial, cf. l’ex-
heure dans les églises et l’on sait que l’em- pression juge de dessous l’orme (on trouve
pereur de Constantinople envoya un orgue aussi avocat dessouz l’orme dans Pathe-
portatif à Pépin en 757. Orgue, d’abord lin) ; cette locution doit probabl. son suc-
orgene, xX11°, et aussi orgre, ogre au moyen cès à la comédie de Regnard, Attendez-moi
âge, organe une fois au xr1° s. et quelque- sous l’orme, 1694. — Dér. : ormeau, xrr°;
fois au xvi*, a aussi le sens d’ «instrument ormille, 1762, sur le modèle de charmille,
de musique » dans les textes bibliques
d’après le lat. eccl., v. organe. ORNE, nom d'arbre, 1529. Empr. du
lat. ornus. Peu usité.
ORGUEIL. Du germanique occidental
ORNE, sorte de sillon, v. ornière.
*urgôli « fierté », cf. anc. haut all. urguol
« remarquable », d’où aussi it. orgoglio, a. ORNEMENT, x1° (Alexis). Continue le
pr. orgolh. Le sens de « cale qui fait dresser lat. ornamentum, v. le suiv., ou est un
la tête d'un levier » date déjà du xIve s. empr. anc. ; l’a. fr. préfère aornement, v. le
— Dér. : orgueilleux, x11° ; enorgueillir, id. suiv. — Dér. : ornemaniste, 1800 ; orne-
menter, 1868, ornementation, 1838.
ORIENT, vers 1080 (Roland) ; oriental,
xi1e. Empr. des mots lat. oriens (sous- ORNER, 1487. Empr. du lat. ornare.
entendu sol), littéral. « soleil levant » (du L’a. fr. a dit jusqu’au xvi® s. aorner,
verbe oriri « se lever »), orientalis. — Dér. aourner, qui a été absorbé par orner,
d’orieni : orienter, vers 1485 (au part. passé); lat. adornäre, d’où aussi it. adornare, a. pr.
orientation, 1834; désorienter, 1617 (au azornar. V. adorner.
sens fig.) ; d'’oriental : orientaliste, 1799, ORNIÈRE, 1278. Altération de l’a. fr.
-isme, 1838. ordière, lat. pop. *orbitaria, dér. de orbita,
ORIFICE, xives. Empr. du lat. orificium qui a déjà le sens d’ « ornière », v. orbite,
(de os, oris, « bouche »). cf. encore le picard ourdière et le wallon
ourbire ; cette altération est due à un croi-
ORIFLAMME, v. flamme. sement avec l’a. fr. orne (et ourne) « rang,
ordre, rangée de ceps », lat. ordinem, v.
ORIGAN, nom de plante, xx. Empr. ordre, disparu depuis le xvries. du fr., mais
du lat. origanum (du grec origanon) ; les conservé au sens de « sillon, etc. » dans
parlers pop. disent de préférence marjo- quelques parlers du Centre et de l'Est.
laine. Dér. propre à la France du Nord.
ORIGINE, vers 1460 ; originaire, 1365,
rare avant le xvi® s. ; original, 1240; ori-
ORNITHO-. Premier élément de mots
ginel, vers 1380, avec le sens actuel ; le sens
sav. comp., tels qu’ornithologie, 1690, tiré
du grec ornis, ornithos, « oiseau ».
d’ « étrange, bizarre » qu'a reçu aussi ori-
ginal, est du xvii® s. Empr. des mots ORNITHORYNQUE, 1803, aujourd’hui
lat. origo (d’après les formes de cas obliques on dit aussi -ynx. Formé avec les mots
originem, etc.), originarius (créé à basse grecs ornis, v. le préc., et rynkhos « bec ».
ép.), originalis « id. ». L’a. fr. avait une
forme plus francisée d’après l’acc. origi- ORO-. Premier élément de mots sav.
nem, orine, disparue vers le xve s. de la comp., tels qu’orographie, 1823, tiré du
langue littéraire, mais encore usitée dans grec oros « montagne ».
les parlers de l'Ouest. — Dér. d’original : OROBANCHE, sorte de plante parasite,
originalité, 1699. 1546. Empr. du lat. orobanche (du grec
ORIGNAC « élan du Canada », vers 1600. orobankhé, littéral. « qui étouffe (de
On trouve aussi les formes altérées orignal, ankhein) l’orobe »).
original, avec un plur. en -aux. Orignac OROBE, sorte de légumineuse, 1545.
est étymologiquement le basque oregnac Empr. du lat. orobus (du grec orobos).
(plur. de oregna « cerf »), qui a été importé
au Canada, d’où il nous est revenu. ORONGE, sorte de champignon, 1775.
Empr. du prov. ouronjo, propr. « orange »,
ORIPEAU, v. peau. dit de ce champignon à cause de sa couleur
ORLE, v. ourler. rouge doré.
ORPAILLEUR, terme technique, « ou-
ORLÉANS, 1868. Nom d’étoffe, tiré d'Or- vrier qui recueille les paillettes d’or qui
léans, nom de ville; la prononciation de
se trouvent dans le sable des fleuves »,
l’s finale paraît due à l’angl. orleans, dont
les commerçants fr. ne comprenaient pas 1762. Altération, par croisement avec or,
de harpailleur, donné au sens de « foueur
l'origine. V. alénois.
de mines », en 1636 (Monet), déjà chez
ORMLZ.IE, on trouve aussi ormoie. Lat,. Rab., 1532, dér. de l’anc. verbe harpailler
de basse ép. ulmêëtum, v. le suiv. It. olmelo, (bien que relevé postérieurement), qui de-
esp. a. pr. olmeda. vait signifier « saisir, empoigner », v. har-
pon.
ORME. Altération d’olme, oulme, oume,
encore relevé au xvi® s., d’après le dér. ORPHELIN, 1131. Mot né dans les mi-
ormeau, issu d’ormel, d'abord *olmel. Lat. lieux eccl., issu d’une forme antérieure
ulmus. It. esp. olmo, à. pr. olm(e). La locu- orfanin (vers 1090), orfenin par dissimila-
tion ailendre, atiendez-moi sous l’orme a été tion du premier n; orfenin est un dér.
DICT. ÉTYM. 29
ORPHELIN 450

d’orfene (on a aussi une forme réduite orfe), ORVET, 1390 (écrit orveis, plur.). Dér.
lat. eccl. orphanus (du grec orphanos), qui de l’a. fr. orb « aveugle », lat. orbus, ce qui
a éliminé le lat. class. orbus ; de là aussi it. convient bien au sens, l’orvet passant pour
orfano, esp. huérfano. — Dér. : orphelinat, être aveugle et étant appelé fréquemment
1866. borgne, cf. le nom lorrain obrevya, littéral.
« orbe ver ». Pour le v, cf. verve.
ORPHÉON, 1767. Tiré d'Orphée, per-
sonnage de la mythologie grecque, célèbre ORVIÉTAN, 1642. Empr. de l’it. orvie-
comme musicien, sur le modèle d’Odéon (du tano, propr. « habitant, originaire d’Or-
grec ôideion « édifice destiné aux concours vieto »; ainsi nommé parce qu'un charla-
de musique »), d’abord pour désigner un tan d’Orvieto vendait, vers cette époque,
instrument de musique, puis, en 1833 cet électuaire sur les places publiques.
par le musicien Wilhem pour désigner une
école de chant composée des meilleurs OS. Lat. ossum, forme moins class. que
chanteurs des écoles primaires. — Dér. : os. Le wallon emploie aujourd’hui un dér.
orphéonique, 1868 ; -iste, 1853. du type osseau. — Dér. et Comp. : osselet,
xIIe; osseux, vers 1370 ; désosser, xIv® ;
ORPIMENT, sulfure jaune d'’arsenic, suros, 1393 (d’abord soros, vers 1175). V.
xi1e. Empr. du lat. auripigmentum, comp. ossature, etc.
de aurum «or » et de pigmentum « piment ».
De ce mot a été tiré orpin, de même sens, OSCILLER, 1752; oscillation, 1605 ; os-
xr1e, et qui, depuis le xvI° s., sert aussi à cillatoire, 1741. Empr. du lat. de basse ép.
désigner une sorte de plante. oscillare, « balancer » (de oscillum « balan-
çoire »), oscillatio et du lat. moderne oscil-
ORSEILLE, sorte de lichen, 1461; laïorius.
aussi orsolle, Xv°. Empr. du cat. orxella,
orcella ïid., qui vient du mozarabique OSEILLE. Lat. pop. acidula, attesté
orchella, peut-être d’origine arabe. Le dans les gloses, fém. pris substantiv. de
terme savant roccella est dû au fait que l’adj. acidulus « aigrelet », avec un déve-
l’orseille vit de préférence sur les pierres; loppement anormal de la terminaison
comp. l’a. pr. peirela id. (osille de l’a. fr. est une variante également
irrégulière) et un o dû à un croisement avec
ORTEIL, xr1°. Altération d’arteil, encore oxalis « oseille » (d’un mot grec, dér. de
signalé à Paris au xvire s., lat. articulus oæys « aigre »), qui a des représentants en
(dér. de artus « articulation ») « jointure », franco-provençal et dans la région pyré-
d’où membre, « doigt », de là esp. ariejo néenne. Les influences savantes de ce genre
« jointure des phalanges » ; s’est spécialisé sont fréquentes dans les noms de plantes.
au sens de « doigt de pied » en gallo-roman, Le type acidula n’est conservé que dans
cf. aussi a. pr. artelh, probabl. d’après un les parlers de l’Italie du Nord et rhétiques
mot gaulois attesté par ordigas : zaechun et dans les parlers gallo-romans du Centre
des Gloses de Cassel (cf. aussi irl. orddu et de l'Est (surtout dans les dér.) ; ailleurs
« pouce »), auquel on attribue aussi l’origine autres mots.
de l’o d'’orteil. Arieil (en prov. artelh) et un
type artoil sont encore très répandus dans OSER. Le type audère « oser », ausus
les parlers gallo-romans. V. article. sum, était anormal; il a été fait par suite
un lat. pop. *ausäre, dér. de ausus, d’un
ORTHO-. Premier élément de mots sav. type régulier et facile. It. osare, esp.
osar;
comp., tels qu'orthoptère, 1795, tiré du dans le Sud-Ouest forme avec un g initial
grec orthos « droit », v. les suiv. d’origine obscure. — Dér. : osé, xr1e.
ORTHODOXE, 1431. Empr. du lat. OSIER. En outre en a. fr. osière, conservé
de basse ép. orthodoxus (du grec orthodoæxos, dans le Centre, l'Est et le Nord-Est, et
de doxa « opinion »}), v. hétérodoxe. Sens oisil (dans des textes de l'Ouest), conservé
plus étendu depuis le xvirI® s. — Dér. : dans l'Ouest. Attesté au viri® s. par une
orthodoxie, 1580. forme latine auseria, dér. probabl. d’une
ORTHOGRAPHE, 1545. D'abord ortho- base *arwithiarium, dér. du francique awi-
graphie, xx, empr. du lat. orthographia « terrain aqueux » (comp. all. aue), à l’aide
(mot pris du grec, v. graphie). — Dér. : du suffixe collectif -(1)thi- et de -arium ;
orthographier, 1426 ; orthographique, 1752. les noms de l’osier et du saule viennent
souvent de la désignation du terrain où ils
ORTHOPÉDIE, 1741. Formé avec les poussent. Mot particulier à la France du
mots grecs orthos « droit » et pais, paidos, Nord. — Dér. : oseraie, vers 1200.
« enfant », l’orthopédie concernant surtout
les enfants. — Dér. : orthopédique, 1771 ; OSMIUM, 1804. Mot créé par le chimiste
-iste, id. anglais Tennant, qui découvrit ce corps
en 1804, d’après le grec osmé « odeur », à
ORTIE. Lat. urtica. It. ortica, esp. a. pr. cause de l’odeur dégagée par un des oxydes
ortiga ; termes nouveaux dans les parlers de l’osmium.
de l'Est.
OSMONDE, nom d’un genre de fougère,
ORTOLAN, 1552. Empr. du prov. orio- xi1<. Mot particulier à la France du Nord,
lan, propr. « jardinier », lat. de basse ép. d’étymologie inconnue.
hortulanus « id. », dér. de hortulus « jardi-
net », v. jardin, cf. de même it. ortolano, OSMOSE, 1872. Tiré de endosmose et
même sens. exosmose par réduction.
ORVALE, nom de plante, xive. Étymo- OSSATURE, 1801. Dér. sav. du lat.
logie obscure. OS « OS ».
451 OUBLIER

OSSEMENTS, xr1° (au sing.) ; au moyen sortir le sens d’ « enlever ». Aujourd’hui


âge en outre ossemente. Lat. *ossamentum, souvent renforcé en dosta(r) dans la région
mot créé dans les milieux eccl.; v. os. limousine ou en rôler dans l'Est.
OSSIFIER, 1697. Formé avec le lat. os OTITE, 1810. Dér. sav. du grec ous,
« os » sur le modèle des nombreux verbes ôlés, « oreille ».
en -fier, v. édifier. — Dér. : ossification, id.
OTTOMANE, 1730. Fém. d'Oltoman,
OSSUAIRE, 1775. Empr. du lat. de autre nom des Turcs, qui a été tiré d’Ofh-
basse ép. ossuarium « urne funéraire », v. man Ier (en turc ‘Othmän), nom du fonda-
les préc., en vue d’un sens spécial. teur de la dynastie qui régna de 1259 à
1326 ; ce nom a été appliqué à cette sorte
OST, v. armer. de siège, parce qu’on peut s’y reposer à
OSTENSIBLE, 1740. Dér. sav. du lat. la manière des Orientaux. ‘Ofhmän est un
osiensus, part. passé de ostendere « mon- mot arabe ; d’une autre forme turque Ost-
trer » ; a éliminé ostensif, x1v®, encore usité man (ou Osman) dérive un adj. Osmanli,
au xvirie s., empr. du lat. médiéval osien- empr. aussi par le fr.
sivus, de même formation. OÙ. Lat. aut. L'autre adv. disjonctif du
OSTENSION, xrr1°. Terme religieux (qui lat. vel n’a pas subsisté : it. o{d), esp. 0 ;
se dit spécial. dans osfension des reliques) ; aujourd’hui souvent renforcé dans les par-
empr. du lat. eccl. ostensio (de ostendere lers gallo-romans en ou bien ou en ou donc,
« montrer »). cf. de même it. ouvero.
OSTENSOIR, 1797. En outre, dès 1501 OÙ. Lat. ubi. It. ove, esp. arch. 0, do
et jusqu’au xvrri® s., ostensoire, des deux (aujourd’hui donde). L’adv. est aujour-
genres. Dér. sav. du lat. osiensus. d’hui renforcé, à cause de sa brièveté, dans
les parlers gallo-romans de manières va-
OSTENTATEUR, 1535; ostentation, riées (cf. là où, etc.).
1366 (au sens d’ « action de montrer »).
Empr. du lat. ostentator, ostentatio au même OUAILLE. Propr. « brebis »; ne s’em-
sens (de ostentare « faire parade de », propr. ploie plus depuis le xvrr® s. qu’au sens fig.,
« montrer », fréquentatif de ostendere). dans la langue religieuse, sens déjà usité
au moyen âge et qui vient des paraboles
OSTÉO-. Premier élément de mots sav. de Jésus, notamment de celle du mauvais
comp., tels qu'ostéotomie, 1753, tiré du berger, cf. Jean, X. Altération, par substi-
grec osteon « os », ou de mots empr., tels tution de suff., de l’a. fr. oeille, lat. de basse
qu'ostéologie, 1594. ép. ovicula, élargissement de ovis (qui ne
OSTRACISME, 1535, comme terme survit que dans le roumain oaie), d’où aussi
d’antiquité grecque ; sens plus étendu de- esp. oveja, a. pr. ovelha; encore usité dans
puis le xvurie s. Empr. du lat. osiracismus les parlers du Centre, de l'Ouest et du
(du grec ostrakismos, dér. de osirakon « co- Sud-Ouest, v. brebis et mouton.
quille », d’où « morceau de terre cuite »; OUAIS, 1611. Onomatopée.
on sait que les Athéniens inscrivaient sur OUATE, 1661, une première fois en 1493,
un ostrakon le nom de celui qu'ils vou- attesté sous la forme wadda en lat. médiéval
laient bannir). dès 1380 ; on a prononcé aussi ouelle au
OSTRÉI-. Premier élément de mots sav. xvire s. Indiqué au xvii® s. comme
comp., tels qu'ostréiculture, 1868, tiré du désignant une esp. de coton qui croît
lat. ostrea « huître ». autour de quelque fruit d'Orient et
qui vient d'Alexandrie par la voie de Mar-
OSTROGOT, xviie (Th. Corneille), au seille. It. ovatta. Probablement empr. de
sens fig. Tiré de Ostrogot, empr. du lat. de l’arabe bata’in (pl.) « fourrure de vête-
basse ép. Ostrogothus, nom d’une des ments », mais on ne voit pas bien par
tribus des Gots. quelle voie le mot est arrivé en France.
OTAGE, vers 1080 (Roland). Dér. de — Dér. : ouater, 1680.
hôte. Outre le sens actuel l’a. fr. osiage a OUBLIE, xrie. Altération d’oublée, en-
encore celui de « logement, demeure », encore usité au x1v®s., propr. «hostie »,sens
surtout dans des expressions comme rapidement disparu, d’où, dès le x11° 5.,
prendre, laissier en ostage. Les otages habi- sorte de pâtisserie, dont la pâte légère se
tant généralement dans la maison du préparait comme le pain d’autel. Lat. eccl.
souverain auprès duquel ils avaient été obläta, fém. pris substantiv. (d’après hostia
envoyés, le terme pouvait facilement finir « hostie ») de oblälus « offert », part. passé
par être pris comme désignation de la de offerre « offrir ».
personne. Les formes it. oslaggio et slalico
sont empr. du gallo-roman, le deuxième en OUBLIER. Lat. pop. “*obliläre, dér. de
subissant en même temps une adaptation. oblitus, partic. passé de oblivisci. Se dit
dans presque tous les parlers gallo-romans
OTARIE, 1810. Empr. par le naturaliste (a. pr. oblidar), mais souvent avec un préf.
Péron du grec étarion « petite oreille » de renforcement ; r- dans l’Est et le Nord-
(dim. de ous, ôlos, v. otite), à cause de la Est, d- dans le Sud-Ouest, es- dans le Sud-
petitesse des oreilles de cet animal. Est ; le Sud-Ouest a en outre un type des-
* ÔTER. Lat. obstäre « faire obstacle », qui membrar, comp. de membrar, lat. memo-
s'est pris à basse ép. transitivement, cf. râre. — Dér. et Comp. : oubli, vers 1080
aliquem obsiare « empêcher quelqu'un », (Roland) ; oubliettes, 1374 ; oublieux, xr1°;
rem obstare « retenir une chose », d’où a pu inoubliable, 1838 ; ne m’oubliez pas, nom
OUBLIER 452

pop. du myosotis, d'abord ne m'oubliez en *austarda dans le lat. de la Gaule, où


mie, en 1421, ne m'oublie mie en 1408. avis n’était plus compris, v. oiseau, d’où
Traduit en all. Vergissmeinnicht (parfois a. fr. ostarde, a. pr. austlarda. En esp., où
empr., ainsi en 1787, dans Faublas) et en ave survit, on a avetarda. — Dér. : outar-
angl. forget-me-not. deau, 1552 (Rab., ofardeau).
OUEST, xr1° (west). Empr. de l’anc. OUTIL. Au xvie s. souvent ulil, forme
angl. west. encore usitée dans des parlers de l'Est et
du Sud-Ouest, par croisement avec l’adj.
OUF, 1642. Onomatopée. utile. Lat. pop. *usitilium, sing. d’un plur.
OUI, v. il. neutre *usitilia, altération mal expliquée
du lat. class. ätensilia « ustensiles » (*üsäre
OUILLER, v. œil. « faire usage de », v. user, ne rend pas
OUÏR. Lat. audire. Éliminé, au cours compte de la voyelle initiale). Ne se trouve
du xvrie s., au profit d'entendre. Ne survit qu’en fr. et dans des dialectes de l’Italie
que dans quelques formules de langue du Nord. — Dér. : outiller (d’abord au
écrite ; plus vivace dans les patois, qui part. passé, 1377 ; comme verbe vers 1550,
l'ont encore dans la région bretonne et sur- et puis dp. 1798), outillage, 1868.
tout dans les parlers de l'Est depuis la OUTLAW, 1783. Empr. de l’angl. out-
Wallonie jusqu’en Provence, et dans le law « hors la loi ».
Massif central, mais partout fortement
concurrencé par entendre. — Dér. et Comp.: OUTRAGE, v. le suiv.
ouïe, vers 1080 (Roland), en a. fr. « action OUTRE, prép. Lat. ultra. À servi autre-
d’entendre », depuis le xvri° s., emploi res- fois à faire de nombreux comp. mais n’a
treint en raison du recul du verbe ; ouies plus aujourd’hui de pouvoir créateur ; v.
(du poisson), xvi® (Paré); ouï-dire, xv®°, ultra. — Dér. : outrage, vers 1080, jusqu’au
au xvie et au xvrie s. on disait plutôt par xvIe s. signifiait aussi « excès »; d’où ou-
ouir dire (attesté dès le xrr1° s., et devenu trager, 1478, outrageux, vers 1170; outrer,
par oui-dire par suite de l’amuissement de vers 1160, signifiait au moyen âge « dépas-
l’r final) ; inouï, vers 1500. ser » et « surpasser, vaincre »; aujourd'hui
OUISTITI, xvrre (Buffon). Passe pour ne s’emploie plus guère qu’au part. passé ;
être une onomatopée imitant le cri de d’où outrance, vers 1310, outrancier, 1874.
l'animal. OUTRE, subsi., fin xvi. Empr. du lat.
OURAGAN, 1654; d’abord huracan, uler ; en outre, vers la fin du xvi® s., chez
1555, haurachan, 1579, uracan, 1609; écrit l’Ardéchois ©. de Serres, ouilire, ouistre,
houragan encore au xviri® s. Empr. de formes hybrides, qui paraissent dues à un
l'esp. huracän, propr. « tornade des tropi- croisement avec le prov. oire (oire se ren-
ques », empr. lui-même d’une langue indi- contre chez des auteurs du xvI® s.).
gène de la région des Antilles ; de là aussi OUTRECUIDANCE, xir1e, outrecui-
it. uracano, all. Orkan, angl. hurricane. dant, xrr1e. Dér. de l’anc. verbe outrecuider,
OURDIR, terme de tissage ; sens plus x11e, hors d’usage depuis le XVII° s., Comp.
étendu dès le xre s. Lat. pop. ordire, de la prép. outre, et de l’anc. verbe cui-
lat. class. ordiri. — Dér. : ourdissage, 1765 ; d(i)er, « penser », sorti de la langue depuis
ourdisseur, 1410 ; ourdissoir, 1410. le xvi® s. (employé par archaïsme par La
Fontaine, Fables, IV, II), lat. cogitare, d'où
OURLER, vers 1165; aussi it. orlare, aussi esp. cuidar.
esp. orlar. Lat. pop. *orulare, dér. de 6ra,
v. orée. Dér. ourlet, vers 1240 ; orle, terme OUTSIDER, 1859. Empr. de l’angl.
de blason, est une forme écrite de l’a. fr. ouisider « celui qui n’appartient pas à un
o(u)rle « bord » surtout d’un vêtement; certain groupe ».
dans d’autres sens techn., relevés depuis OUVERTURE. Lat. pop. *opertüra, al-
le xvrre s., c'est un empr. à l’it. (notam- tération du lat. class. aperlura, v. ouvrir.
ment au sens de « filet sous l’ove d’un — Comp. : réouverture, 1823.
chapiteau »).
OUVRAGE, v. œuvre.
OURS, OURSE. La prononciation our
(que le fr. emploie parfois encore au plur.) OUVRER. Ne s'emploie plus que dans
survit dans des patois. Lat. ursus, -a. des acceptions techn.; a été remplacé,
Ourse, nom de constellation, xvie, vient depuis le xvr1® s., par iravailler, dont le
du lat. ursa, qui doit lui-même ce sens au succès a été favorisé par la gêne que causait
grec arkios, fém., propr. « ourse », v. arcti- l’'homonymie d’ouvrer et d'ouvrir à diverses
que. — Dér. : oursin, 1552, sorte d’échino- formes ; mais œuvrer est encore de quelque
derme, dit aussi hérisson de mer ; on a pré- usage, grâce à œuvre. Lat. de basse ép.
tendu qu’oursin est une altération d’héris- operäre, lat. class. operärt (de opera, v.
son ; mais c’est une hypothèse inutile, et œuvre). Survit encore dans quelques par-
même le suff. -ir semble prouver qu'on a lers de l’Est et du Nord-Est au sens de
voulu faire un dér. d'ours, nettement dis- « travailler ». It. operare, esp. obrar. —
tinct d’ourson, 1549 (cf. dès le xrr° s. le Dér. : ouvrable, xr1° ; ouvroir, id.
nom de lieu Val-Urson), au moyen âge OUVRIER. Lat. operärius, v. le préc.
oursel, etc.
OUVRIR. Lat. pop. *operire, altération
OUTARDE. Lat. avis larda, littéral. qui se trouve à la fois en gallo-roman, en
« oiseau lent », signalé par Pline comme catalan et dans de nombreux dialectes
terme d’Espagne, contracté de bonne heure italiens, du lat. class. aperire, sous l’in-
453 OZONE

fluence de cooperire « couvrir ». Le lat. OVOÏDE, xvie (Buffon). Formé avec


class. operire « couvrir » ayant été remplacé le lat. ovum « œuf » et le suff. sav. -ide.
par cooperire, aperire pouvait subir l’at-
traction de celui-ci, grâce à la polarité des OVULE, 1798. Dér. sav. du lat. ovum
deux notions. It. aprire, esp. abrir, mais « œuf ».
cat. a. pr. obrir ; aujourd’hui douvrir dans OXALATE, 1787 (G. de Morveau) ; oxa-
des parlers du Nord-Est, de l'Est et du lique, 1783. Dér. sav. du lat. oxalis « oseille »
Midi. — Dér. et Comp. : ouvreur, 1611; (mot pris au grec).
rouvrir, xive (Christine de Pisan) ; entr’-
ouvrir, xiI®, d’où entr’ouverture, xII° OXY-. Premier élément de mots sav.
(Chrétien), d’après ouverture. comp., tels qu’oxyphonie, 1810, tiré du
grec OZys « aigu »; dans les comp. chimi-
OVAIRE, 1672. Empr. du lat. scienti- ques, tels qu'oxybase, 1838, oxyhémoglo-
fique moderne ovarium (de ovum « œuf »), bine, 1873, etc., oxy- est tiré d'oxyde.
— Dér. : ovariotomie, 1868 ; ovarite, 1836.
d’après le mot lat. OXYDE, 1787 : « Nous avons formé le
mot oxide qui d’une part rappelle la subs-
OVALE, 1529 (une 1r'e fois 1370). Dér. tance avec lequel le métal est uni, qui
sav. du lat. ovum « œuf ». d'autre part annonce suffisamment que
OVATION, 1520, comme terme d'’anti-
cette combinaison de l’oxigène ne doit pas
quité romaine (dans une traduction de être confondue avec la combinaison acide »,
Suétone) ; sens plus étendu au xvIrIe s.
G. de Morveau. Dér. sav. de l’adj. grec
oæys « acide ». — Dér. : oxyder, id., oxy-
Empr. du lat. ovatio, dér. de ovare « célè-
dable, 1789, inoxydable, 1845 ; oxydation,
brer le petit triomphe ».
1789, désoxyder, 1797, -ation, 1794.
OVE, 1639. Empr. du lat. ovum « œuf »
en vue d’un sens spécial. OXYGÈNE, 1786 : « M. Lavoisier désigne
l’air vital sous le nom de principe « oxy-
OVIDUCTE, 1771 (oviducius en 1676). gène » ou « propre à engendrer les acides »
Comp. des mots lat. ouum « œuf » et ductus (Fourcroy) ; Lavoisier et les chimistes de
« conduit ». l’époque ont hésité entre oxygène et oxygine
OVINE, 1834. Dér. sav. du lat. OViS
(d’après le lat. gignere), v. les préc. et
hydrogène, -gène. — Dér. : oxygéner, 1787,
« brebis ». Au xvi® s. déjà ovin. id., d’où désoxygéner, 1789, -ation, 1797,
OVIPARE, 1700, une première fois ovi- (eau) oxygénée, 1804.
pere en 1558. Empr. du lat. oviparus (de
OYAT, sorte de graminée qui sert à fixer
parere « engendrer »). les dunes, 1859 (les oyais croissanis en la
OVO (ab), 1792 (une 1re fois vers 1600, dite dune) ; on a déjà oiak dans un compte
chez E. Pasquier). Locution empr. d'Ho- de 1415-16 de Boulogne-sur-Mer. Etymo-
race, Art poétique, 148 : Nec gemino bellum logie inconnue.
trojanum orditur ab ovo « (Homère) ne OZÈNE, 1503. Terme médical, empr. du
commence pas le récit de la guerre de lat. de même sens ozæna (du grec ozaina
Troie par l’histoire des deux œufs (il s’agit « id. », du verbe ozein «exhaler une odeur »).
des deux œufs pondus par Léda ; de l’un
naquirent Castor et Pollux et, de l’autre, OZONE. Dér. sav. du grec ozein, mot
Clytemnestre et Hélène) ». créé en 1840 par le chimiste Schônbein.
P
PACAGE. Lat. pop. *pascuäticum, dér. PAGAIE, 1686 (pagais dans un récit de
du lat. class. pascuum « pâturage » (de pas- voyage au Siam; parfois pagale d’après le
cere « paître ») ; v. aussi pâquis et pâtis; prov. pagalo, qui est une forme altérée).
peu usité aujourd’hui, sauf dans les parlers Empr. du malais des Moluques pengajoeh.
méridionaux. — Dér. : pacager, XVI ; L'expression en pagaie, propr. terme de
usité aujourd’hui dans les parlers de l'Ouest marine signifiant « de travers , précipitam-
et méridionaux. ment » en parlant du mouillage, puis d'ob-
jets qu'on jette dans la cale, a été empr.
PACANT « rustre », 1567 (sous la forme au xixe du prov. en pagaio (on a aussi la
pagan). Usité surtout dans les parlers sep- forme altérée en pagale, 1838) ; du langage
tentrionaux. Empr. de l’all. Packan, mot de la marine, elle a passé dans l’argot des
d’argot signifiant « gendarme, huissier », soldats, puis dans la langue pop., avec une
et aussi « mâtin », impér. du verbe anpak- prononciation qui rappelle celle du prov.
ken « empoigner ». — Dér. : pagayer, 1686.
PACHA, 1771. Empr. du turc pacha. PAGANISME, 1546. Empr. du lat. eccl.
Antér. paschia (1559); bacha (dès 1457, paganismus (de paganus, v. païen). L’a. fr.
baschaïz, 1532, Rab.), bassa (1532 et La païenisme signifie surtout « terre des infi-
Fontaine, Fables, VIII, 18, d’après la dèles », comme païenie.
forme arabe béché du mot turc).
PAGE, 1225, masc. Signifiait au moyen
PACHYDERME, 1795 (Cuvier), comme âge, jusqu’au xv®5s., «jeune garçon, valet »,
terme scient. Empr. du grec pakhydermos sens qui s’est conservé plus longtemps
« qui a la peau épaisse » (de pakhys « épais » dans quelques langues techniques. On a
et de derma « peau ») ; une première fois proposé d’y voir un empr. à lit. paggio.
empr. au xvi® s. (d’Aubigné : pachuderme) mais celui-ci vient plutôt du fr. Eire hors
au sens propre du grec. de page, 1459. Représente très probabl. le
grec paidion « garçon », romanisé en
PACIFIER, 1250, intrans., au sens de *päidion.
« faire la paix », usuel jusqu’au xvi® ; em-
ploi moderne depuis le xv®s. ; pacificateur, PAGE, fém; empr. du lat. pagina.
fin xve; pacification, 1432; pacifique, En anc. picard aussi pagene.
xve. Empr. du lat. pacificare, pacificaior, PAGINER, 1829 (p. passé dès 1811).
pacificatio, pacificus (de pat « paix » Pagination, 1801. Dér. sav. du lat. pagina.
et de facere « faire »). — Dér. : de pacifique : PAGNE, 1650 (sous la forme paigne, au
pacifisme, -iste, fin xiIxe.
fém., que quelques auteurs, Voltaire et
PACK, 1866 (J. Verne). Empr. de l’angl. Chateaubriand ont aussi employée). Empr.
pack, abrév. de pack-ice « paquet de glace », de l'esp. paño, v. pan, I.
v. paquet. PAGNOTER (se), 1859. Terme d’argot
PACOTILLE, 1723. Parfois pacquotille, mil., devenu pop.; paraît remonter, par
d’après paquet, au xvinie. Empr. de l’esp. l'intermédiaire d’un dialecte, cf. notam-
pacotilla de la famille de paquet. ment le provençal pagnoto « poltron », à
l’ancien mot pagnote, encore dans les dict.,
PACTE, 1355 (Bersuire : paci). Empr. du qui a été usuel au xvri® et au xvIrI® au
lat. pactum (du verbe pacisci « faire un sens de « mauvais soldat, lâche », mot qui
pacte »). — Dér. : pactiser, 1481. a une origine historique, cf. ce texte de
PACTOLE, m. Empr. du lat. Paclolus, 1587 : « Ce qui fut appellé pagnotte en
nom d’une rivière en Asie Mineure, dont Piedmont et ailleurs, quand les soldats
le sable contenait de l’or, d’où expres- necessiteux se desbandent et vont à la
sion proverbiale pour la richesse (dans guerre pour avoir du pain, et ce sobriquet
Horace, ete.). fut inventé en l’an 1544, aux guerres du
Piedmont, par les Espagnols, par moque-
PADDOCK, 1828. Empr. de l’angl. pad- rie, qui appelloient nos soldats, soldats de
dock, altération de parrock (v. angl. pearroc, la pagnotte »; et cette expression a été
de la famille du fr. parc). elle-même créée d’après l'usage de pa-
PAF. Onomatopée. Au sens pop. d’ «i- gnotla, proprement « petit pain », en it.,
vre », 1839 (Balzac), d’après des locutions Cf. : « gentiluomini di pagnotta, gentilshom-
telles que faire paf (en tombant), mais déjà mes que les Seigneurs louent pour leur
en 1756 au sens de « eau-de-vie », très escorte aux jours de cérémonie, à cause
répandu au sens de « stupéfait » en Bel- qu'on leur donne des pains ces jours-là »,
gique et dans les Flandres. Ménage.
455 PALAIS

PAGODE, 1553. Empr. du port. pagoda, rencé aujourd'hui dans les parlers gallo-
adapté lui-même d’une langue hindoue romans par le dér. pairée ou couple. V.
pour désigner les temples hindous. Le terme parier.
hindou remonte probabl. en dernier lieu
au sanscr. bhagavat « saint, divin ». Le PAIRESSE, 1698. Empr. de l’angl. pee-
DRE « idole » est disparu du port. comme ress, fém. de peer, lui-même empr. de l’a.
fr. per, v. pair ; orthographié d’après pair.
LHC.
PAISSEAU, v. échalas.
PAGURE, 1552. Empr. du lat. pagurus
(du grec pagouros, sorte de crustacé, lit- PAÎTRE. Emploi aujourd’hui restreint
téral. « qui a la queue en corne »). à quelques formes. Lat. pascere. Peu usité
aujourd'hui dans les parlers gallo-romans
PAÏEN. Lat. eccl. pägäanus, en lat. class. en dehors du Sud-Ouest (a. pr. paisser) ;
« paysan », propr. habitant d’un pägus ailleurs pâturer, pacager, etc. Un dér. de
« village » ; le sens particulier du lat. ecel. pascere, pastio « pâturage », a donné le fr.
est peut-être dû au fait que le paganisme a paisson, qui ne survit que comme terme
résisté plus longtemps dans les campagnes. de vénerie. — Dér. : repaître, vers 1180,
Une autre explication se tire du fait que, « rassassier », partic. usité aujourd’hui
dès le rer s., les soldats romains avaient dans le part. repu, dont on ne sent plus le
l'habitude d’appeler les civils pagani. Les lien avec paitre.
Chrétiens étant regardés comme les milites
Christi, pagani aurait servi à désigner ceux PAIX. Au moyen âge pais, refait sur le
qui ne se sont pas engagés dans l’armée du comp. apaiser ; a éliminé la forme régu-
Christ, les paiens. lière paiz. Lat. pax, päcis. — Dér. : pai-
sible, vers 1120, sur le modèle du lat. pla-
PAILLE. Lat. palea « balle de blé ». A cabilis « qu’on peut apaiser, etc. », cf. de
pris le sens de « paille » déjà en lat. de même a. pr. pazible; signifie aussi au
basse ép., d’où aussi it. paglia, esp. paja. moyen âge «en paix, tranquille » ; apaiser,
L'ancien sens est pourtant conservé dans x1Ie, d’où apaisement, x11°, rapaiser, vers
les parlers wallons et lorrains, qui dési- 1180.
gnent la paille par le mot étrain (du lat.
stramen « litière »). — Dér. : paillard, PAL, fin xive. Empr. du lat. palus
vers 1200, d’abord « gueux » (c’est-à-dire « pieu ». — Comp. : empaler, 1534 (Rab.) ;
« qui couche sur la paille »), sens encore empalement, 1600.
usuel au xv°, d’où paillarder, xve (Villon), PALABRE, 1604 ; tend à devenir masc.
paillardise, vers 1500 ; paillasse, fém., vers d’après discours, entretien. Rare avant le
1250 ; masc. au sens de « bateleur d’un xIx° ; a alors aussi le sens de « présents
théâtre forain », ainsi nommé parce qu’il faits aux roitelets de la côte d’Afrique ».
est souvent vêtu d’une toile à paillasse, Empr. de l’esp. palabra « parole ».
1782, paillasson, 1680, paillet, x111° ; pail-
lette, 1386, d’où pailleter, xiv®; paillon, PALACE, 1905. Empr. de l’angl. palace,
1560; paillotte, 1773 (B. de Saint-Pierre) ; qui vient lui-même du fr. palais, v. palais.
dépailler, 1758 ; empailler, 1543, empaillage PALADIN, 1578 (« Les douze pairs de
1835, empailleur, 1680, rempailler, env. France que nos poètes italiens appellent
1700, rempaillage, 1775, rempailleur, 1723. paladins »). Empr. de l’it. paladino, empr.
PAILLER, « meule de paille, etc. », 1240. lui-même du lat. médiéval palatinus « qui
Lat. paleärium « grenier à paille », dér. de . appartient au palais », en parlant des offi-
palea, v. le préc. Aujourd’hui usité aussi ciers des cours royales, notamment des
dans les parlers de l'Ouest et du Midi (a. pr. comtes (dér. de palatium qui, en lat. class.,
se dit en parlant du mont Palatin ou du
palhier, palhiera).
palais de l’empereur), v. palatin.
PAIN. Lat. pänis. — Dér. : paner, XvI°; PALAFITTE, 1865. Empr. par l’archi-
panetier, xr1e (Chrétien), paneterie, x11° ; tecte français Delsor de l’it. palafitla,
panetière, x11° (Chrétien); v. apanage, « pilotis » pour dénommer ces constructions
panier. préhistoriques qu’on venait de découvrir
dans les lacs suisses.
PAIR, écrit per jusqu’au xv®. Lat. par,
adj., qui a le sens du fr., cf. ludere par PALAIS. Lat. palälium, propr. le mont
impar. De l’emploi de per, sous le régime Palatin, une des sept collines de Rome, sur
féodal, pour désigner de hauts personnages laquelle Auguste fit bâtir sa maison, qui
de rang égal dérive l’emploi qui a été fait resta la demeure des empereurs ; employé
de pair dans le langage politique de diver- par suite, dans les langues romanes, pour
ses époques et dans diverses locutions de désigner les maisons royales. À servi à
la langue générale ; étre jugé par ses pairs, désigner la maison où siège le tribunal,
etc. Comme terme de commerce, et de d’après le Palais de Paris, ancienne rési-
finance, dans la locution au pair, 1662 dence des rois. L'emploi de palais pour
(Colbert). Comme terme politique de l’An- désigner une demeure autre qu'une de-
gleterre, d’après l’angl. peer, v. pairesse. meure royale, cf. le Palais Mazarin, n’ap-
— Dér. : parage «extraction », xI® (Alexis), paraît pas avant le xvire; peut-être in-
d'après le sens féodal de per, c’est-à-dire fluence de l’it. palazzo ou de l'esp. palacio.
« de haute naissance égale »; pairie, 1331.
PALAIS « partie supérieure de la bou-
PAIRE. Lat. pop. paria, fém. issu du che ». Lat. de la Gaule *palätium, altéra-
plur. neutre de par, v. le préc. Concur- tion du lat. class. palälum, par confusion
PALAIS 456

auditive avec palatium étudié sous le mot PALERON, v. pelle.


préc. It. pdlalo, esp. et a. pr. paladar PALESTRE, 1674 ; une première fois au
(dér.), d’après le lat. palätum. x11e. Empr. du lat. palæstra (du grec pa-
PALAN, 1553. Empr. de l’it. palanco, laistra).
forme masc. de palanca « palis, etc. » (d’où PALET, v. pelle.
palanque, 1688, comme terme mil.), même PALETOT, 1370 (paltoke ; encore paleloc
mot que le fr. régional palanche « pièce chez Ronsard; palletot, xv°). Empr. du
de bois dont on se sert pour porter deux moyen angl. pallok « sorte de jaquette »,
seaux », lat. pop. “*palanca, lat. class. d’origine obscure ; paraît avoir signifié
palanga « gros bâton, servant notamment
d’abord « casaque de paysan », sens en
à déplacer de lourds fardeaux », empr. lui- tout cas attesté au xvi*. Le sens moderne
même du grec phalanga, acc. de phatanx, ne paraît pas antérieur au x1x°. — Dér. :
propr. « gros bâton », v. phalange et plan- paltoquet, 1704 (Cotgrave en 1611 donne
che. Cet emprunt au grec a eu lieu à une aussi palloquier « qui porte un palletoc »),
époque où ph n'était pas encore une aspi- d’après l’ancienne forme paletoc et le sens
rée ; le mot venant de l'Italie méridionale
de « casaque de paysan », ce qui explique le
habitée en grande partie par des Osques,
sens péjoratif.
dont le parler répondait par -ng- au groupe
-nc- du latin, la langue pop. de Rome a PALETTE, v. pelle.
substitué -anca à la terminaison -anga PALÉTUVIER, 1722, d'abord parétu-
qu’on entendait de la bouche des Méridio- vier, 1643-71, appariturier, 1614. Empr.
naux. La forme palange représentait le avec une altération mal expliquée de apa-
lat. class. palanga, s'entend encore dans réiba (de apard « courbé » et iba « arbre »)
certains parlers régionaux, p. ex. à Pon- du tupi, langue indigène du Brésil, spécia-
tarlier. lement du parler de l’île Maranhäo.
PALANQUIN, 1589. Empr. du port. pa- PALIER, 1287. D'abord paelier, en
lanquim, empr. de pdlaki d’un parler de outre pouaillier, dans des textes de l'Or-
l'Inde, forme moderne correspondante au léanais (où poualier survit aujourd’hui au
sanscrit paryañka « litière ». sens de « chassis en bois servant à allonger
une voiture »), poislier, 1660. Jusqu'au
PALATIN, 1272 ; en outre -sin, -zin au xviie terme techn. signifiant « pièce de
moyen âge d’après palais. Empr. du lat. métal qui facilite le mouvement horizontal
médiéval palatinus, v. paladin. — Dér. : d’une pièce sur une autre » à propos de
palatinat, 1606. moulins, barrières, cloches, pressoirs, d’où
PALATINE, 1680. Tiré du nom de la les sens techn. modernes ; au sens de
Princesse Palatine, seconde femme du duc « plate-forme où se termine un étage »,
d'Orléans, frère de Louis XIV, qui inventa 1547, par extension. Dér. de l’a. fr. paele
cette mode de fourrure. « poêle (f.) », au sens de « en forme de
poêle », à cause de la forme plate del’objet.
PÂLE, 1080 (Roland). Empr. du lat.
pallidus, dér. de pallere « pâlir ». — Dér. : PALIKARE, 1828 (V. Hugo ; écrit pali-
pâleur, xr1°, d’après le lat. pallor ; pâlir, care). Empr. du grec mod. pallikari « gail-
xn°; pâlot, 1775; au xvie une fois pal- lard, brave », qui se rattache au grec anc.
laux, au plur. palléks, pallékos, « jeune homme ».
PALE-ALE, 1856. Empr. de l’angl. pale PALIMPSESTE, 1823 ; une première fois
ale, de pale (empr. du fr. péle) et de ale, en 1542. Empr. du lat. palimpsesios (mot
v. ce mot. pris au grec, signifiant « gratté de nou-
veau »).
PALEFRENIER, 1350. Empr. de l'a. PALINGÉNESIE, 1556. Empr. du lat. de
pr. palafrenier, dér. de palafren « pale- basse ép. palingenesia (d'un mot grec,
froi », dont la dernière syllabe -fren paraît
comp. de palin « de nouveau » et d’un
être due à un croisement avec fren « frein », deuxième terme de la famille de genesis
v. le suiv. « naissance »).'
PALEFROI. Lat. de basse ép. parave- PALINODIE, 1512, comme terme litt.;
redus « cheval de poste », comp. hybride « rétractation » (1591, D.). Empr. du lat.
du préf. grec para « auprès de » et de de basse ép. palinodia (du grec palinôidia,
veredus « cheval de poste », déjà chez Mar- propr. « chant repris sur un autre ton et
tial, mot d’origine celt., cf. gallois gorwydd où l’on se rétracte », d’où le sens de « ré-
« coursier ». Anc. esp. palafré. Le comp. tractation » ; ce sens remonte à une légende
paraveredus s'explique probabl. comme concernant Stésichore rapportée par Iso-
ayant signifié propr. « cheval de renfort »; crate ; cf. aussi l'expression chanter la pali-
il est probabl. créé d’après le grec pdrippos, nodie, fin xvie (d'Aubigné : chanter des
même sens, comp. de para et hippos « che- palinodies) encore usité au x1x° (Balzac),
val », et se trouve d’abord dans des édits au sens de « se rétracter », calque du lat.
de la fin du 1ve s. réglementant le service de basse ép. palinodiam canere. On a fait
des postes. L’all. Pferd est empr. du lat. aussi au xvi® le masc. palinod, d’après la
PALÉ(O)-. Premier élément de mots forme palinode (signalée en 1521), pour
sav. comp., tels que paléographie, 1708 désigner une prière en l'honneur de la
(Montfaucon, qui a d’abord formé un mot Vierge, qu’on présentait dans des concours
lat. palæographia) (d’où -aphe, 1760), pa- qui avaient lieu dans des villes normandes
léolithique, 1866, paléontologie, 1830, tiré (Rouen, Caen, etc.).
du grec palaios « ancien ». PALIS, PALISSADE, v. pieu.
457 PAMPRE

PALISSANDRE, 1723. D'abord pa- PALONNEAU, 1383 (un palonel de char-


lixandre, encore Dict. de l’Ac. de 1878. rue) ; d’où palonnier, 1694. Probabl. dér.
Probabl. empr. d’un parler indigène de la d’un a. fr. *palon, dim. de palus, v. pieu,
Guyane, peut-être par l'intermédiaire du plutôt que déformation d’a. fr. paronne,
holl. palissander, le palissandre venant sur- qu'on rattache au germ. sparra « poutre ».
tout de la Guyane hollandaise. PALPER, 1488. Palpable, vers 1400
PALLADIUM, terme d’antiquité, 1647 (Christ. Pisan). Empr. du lat. palpare et
(Vaugelas), au sens figuré ; une première de son dér. de basse ép. palpabilis.
fois au xn° au sens ancien. Empr. du PALPITER, 1488; palpitation, 1941.
lat. palladium (du grec palladion, statue Empr. du lat. palpitare, dér. de palpare,
de Pallas, à Troie, dont la possession était v. le préc., et de son dér. palpitatio.
regardée par les Troyens comme le garant
du salut de leur ville). Le sens fig. s’est PALSAMBLEU, v. dieu.
développé en fr. PALTOQUET, v. paletot.
PALLADIUM, nom de métal, 1803. PALUDÉEN, 1853. Paludisme, 1884.
Empr. de l’angl. palladium, mot créé par Dér. sav. du lat. palus, paludis, « marais ».
le chimiste Wollaston, en 1803, d’après le PALUSTRE, 1505 ; rare avant le xixe.
nom de la planète Pallas, qui venait d’être Empr. du lat. paluster « marécageux »,
découverte. Mlempréc.
PALLIER, vers 1300, palliation, 1314. PAMER, x11°, alors aussi espasmer, pau-
Palliatif, 1314. Empr. par la terminologie mer, a. pr. espalmar, esplasmar. Lat. spas-
médicale du lat. de basse ép. palliare märe « avoir un spasme », dér. du lat.
« pallier », propr. « couvrir d’un manteau », médical spasmus (du grec spasmos « con-
dér. de pallium, sorte de manteau, du lat. vulsion, crampe, spasme »). Toutes ces
palliatio « action de pallier », et du dér. formes s'expliquent par un croisement de
médiéval palliativus. spasmus et du grec palmés « pouls précipité,
inégal », qui à tantôt fait disparaître l’s
PALLIUM, sorte de bande de laine blan- initiale, tantôt fait remplacer l’s intérieure
che, portée par les hauts dignitaires de de spasmus par un /, tantôt les deux. La
l'Église, xr1° ; rare avant le xvire; s’em- première étape de ce croisement, pasmus,
ploie parfois dans un sens plus étendu. est attestée chez le médecin bordelais Mar-
Empr. du lat. pallium, v. le préc. cellus Empiricus au ves. La répartition des
différentes formes en gallo-roman est très
PALMARES, 1868. Mot lat. signifiant irrégulière. It. spasimare «avoir des convul-
« ceux qui méritent la palme » pour dési- sions », esp. espasmar et pasmar « faire
gner les élèves récompensés, plur. de l’adij. pâmer, se pâmer ». — Dér. : pâmoison,
palmaris, v. le suiv., d’où « liste des élèves 1080 (Roland). Ë
récompensés » et aujourd’hui « brochure PAMPA, 1831. Empr. de l'esp. d’Amé-
qui la contient »; cf. accessit. rique pampa, d’origine indigène (attesté à
PALME, xive (Oresme). Empr. du lat- la fois en aymara de Bolivie et en quechua
palma, propr. « paume de la main », v- du Pérou).
paume, d’où, par comparaison, « branche PAMPHLET, 1698. Devenu usuel au
de palmier ». Palme a commencé par deve- xvirie. Empr. de l’angl. pamphlet, altéra-
nir paume, même quand il s’agit de son tion de Pamphilet, Panflet, nom pop..d’une
sens chrétien, cf. paumier « pèlerin ». Le comédie en vers lat. du xrre s. intitulée
sens de « symbole de la victoire », qui ne Pamphilus seu de Amore ; le nom de cette
semble pas antér. au xvi°, est repris au comédie, très connue à cause d’un person-
lat. class. La locution palme des mariyrs nage remarquable de vieille entremetteuse,
est due au fait qu’on représentait les mar- servit à désigner, en Angleterre, depuis la
tyrs avec une palme à la main droite. — fin du xvie, un court écrit satirique. —
Dér. : palmette, xvire ; palmier, x11°, d’où Dér. : pamphlétaire, 1791; Voltaire dit
palmeraie, fin xix° (une première fois encore pamphleler d’après l’angl. pam-
en 1607; en raison de la date, palmier phleieer ; on a essayé en outre au xvines.
est peut-être dér. directement du lat. pamphlétier et pamphlétiste.
palma).
PAMPILLE, fin xixe. Terme de mode,
PALMÉ, 1754. Empr. du lat. palmaiu. ornement de robe. D'un radical onoma-
topéique pamp- représenté dans beaucoup
PALMIPÈDE, 1760, une première fois de parlers, qui dépeint quelque chose
en 1555. Empr. du lat. palmipes, -pedis, d'oscillant ; v. les formations parallèles
v. les préc. dandiner (pour les voyelles) et pimpant
PALMISTE, 1640. Empr. du créole des (pour les consonnes).
Antilles, qui paraît être une altération de PAMPLEMOUSSE (1666 pompelmous,
l'esp. palmito « petit palmier, palmiste » 1687 pamplemouse, 1697-1771 pampeli-
(d'où palmito au xvi®s., au sens de « moelle mouse, 1705 pumplenose). Du holl. pom-
de palmier »). pelmous, qui est comp. de l’adj. pompel
« gros » et du subst. malaisien limoes
PALOMBE, xvie (Marot). Empr. de l’a. « citron ».
pr. palomba, lat. pop. *palumba, à côté du
lat. class. palumbus et palumbes (des deux PAMPRE. Lat. pampinus. — Dér.
genres). épamprer, XVI.
PAN 458

PAN. Propr. « morceau d’un vêtement », cratium (du grec pankration, comp. de pan
d’où de très bonne heure, acceptions figu- « tout » et de kratos « force »). Cette sorte de
rées : en parlant d’un mur, vers 1150; lutte a été remise en honneur vers 1920.
« sorte de filet », 1370. Lat. pannus « mor- PANCRÉAS, 1541. Empr. du grec pan-
ceau d’étoffe ». — Dér. : dépenaillé, 1611, kreas (composé de pan « tout » et de
par l'intermédiaire d’un ancien mot kreas, kreatos, « chair »). — Dér. : pancréa-
penaille, Xitre, « hardes, tas de loques » tique, 1671.
(au lieu de *panaille, cf. de même a. fr.
despaner « déchirer », à côté duquel on PANDÉMONIUM, 1714. Empr. de l’angl.
trouve de bonne heure despenner, par pandemonium, mot créé par Milton pour
croisement avec despener « déplumer », désigner l'enfer avec les mots grecs pan
comp. de penne). « tout » et daimôn « démon ».
PAN-. Premier élément de mots sav. PANDORE, 1857. Emp. du lat. Pandora,
comp., tels que pangermanisme, pansla- employé dans une chanson de Nadaud pour
visme, 1845, pansophie (1834), tiré du grec désigner un gendarme qui obéit passive-
pan « tout », ou de mots empr., v. pan- ment à son chef.
créas, etc.
PANDOUR ; parfois écrit pandoure, 1746
PANACÉE, 1550 (Ronsard). Empr. du (Voltaire). Désigne propr. des soldats de
lat. panacea, plante imaginaire à laquelle troupes irrégulières de Hongrie, levées sur-
on attribuait la vertu de guérir toutes les tout en Esclavonie ; a servi en France à
maladies (du grec panakeia). Une première désigner l’infanterie croate, et a pris rapi-
fois au sens antique en 1213. dement des sens figurés. Empr. du hon-
PANACHE, 1522 (écrit pennache, en- grois Pandur, nom d’un village de Hon-
core usité au xvrIt) ; on trouve déjà une grie, au sud de Kalocza, où le premier
fois pannaché en 1389 (un chapperon d’es- contingent de ces troupes fut levé au
carlate pannaché). Empr. de l’it. pennacchio XVIIE S.
dérivé de penna « plume »; v. penne. — PANÉGYRIQUE, 1512 (J. Le Maire).
Dér. : panacher, v. plus haut ; de l'emploi Panégyriste, xvi® s. (Pasquier). Empr. du
de panaché, en parlant d'oiseaux ou de lat. panegyricus (du grec panégyrikos, dér.
fleurs aux couleurs variées, 1660 (d’où de panégyris « fête solennelle ») « éloge »,
panachure, 1758), est issu son emploi ré- sens issu du sens propre du mot grec «éloge
cent dans la langue de la cuisine pour public prononcé dans une fête nationale »
désigner des mets aux couleurs variées et du lat. de basse ép. panegyrista (du grec
ou simplement faits d’un mélange ; pana- panégyristés, attesté seulement au sens de
chage, fin xix°. Empanacher, vers 1500. « qui se rend à une fête solennelle »).
PANADE, 1548. Empr. du prov. panado,
dér. de pan « pain ». PANETON, v. panier.
PANAIS. D'abord pasnaie, fém., d’où PANICAUT, 1532 (Rab.). Empr. du
pasnais, XVI, probabl. d’après le plur., prov. panicau ; en lat. médiéval panis
changement de forme qui a entraîné le cardus, nom dû au fait que les jeunes feuilles
changement de genre ; le fém. est encore sont mangées en salade, tandis que plus
usité dans de nombreux patois. Lat. pas- tard elles se couvrent de piquants ; altéré
linäca « panais, carotte ». À. pr. pastenaga par la suite en panis calidus à cause des
(d’où, avec altération de la terminaison, piqûres brülantes, que causent ceux-ci.
le fr. pastenade, 1372). PANICULE, 1762. Empr. du lat. pani-
PANAMA, sorte de chapeau, 1864. Tiré cula, dér. de panus « épi à panicules »,
de Panama, nom du pays d'où vient le propr. « fil de trame enroulé sur le dévi-
jonc qui sert à faire cette sorte de chapeau. doir ». — Dér. : paniculé, 1778.
PANARD, 1750. Du prov. mod. panard PANIER. Lat. panärium « corbeille à
« boiteux », attesté dp. 1734, dér. de l’oc- pain », dér. de panis « pain ». — Dér. :
citan a pan « de côté », v. pan, les chevaux panerée, xIv°:; paneton, 1812.
panards ayant les sabots tournés de côté. PANIFIER, 1600 ; rare avant le xixe.
Pris récemment dans le parisien vulgaire Formé avec le lat. panis « pain », sur le
au sens de « pied ». modèle des nombreux verbes en -fier, v.
pacifier. — Dér. : panifiable, 1823 ; panifi-
PANARIS, 1503 ; au xve panarice. Empr. cation, 1781.
du lat. panaricium, altération de parony-
chium (du grec parônychia, propr. « abcès PANIQUE, 1534 (Rab. : terreur panice).
qui se forme près de l’ongle, onyæ »). D'abord surtout adj. et avec ferreur ; de-
puis le x1x°, de préférence subst. (relevé
PANCARTE, xve (Charles d'Orléans). en 1834). Empr. du grec panikos « de
Signifie d’abord une charte dans laquelle Pan », qui s’employait surtout avec un
étaient énumérés tous les biens d’une subst. signifiant « terreur », le dieu Pan
église, d’où « placard servant à faire con- passant pour produire les bruits qu’on
naître le tarif de certains droits », xvi°, entend dans la campagne et pour troubler
d’où « tout placard servant à donner un les esprits.
avis au public » (1623). Empr. du lat.
médiéval pancharta, comp. de pan « tout », PANNE ; s'employait au moyen âge avec
extrait de mots d’origine grecque, et de des sens étendus ; ne désigne plus aujour-
charta « charte ». d’hui qu’une sorte d’étoffe et la graisse qui
garnit le ventre de certains animaux, outre
PANCRACE, terme d’antiquité, 1738 un emploi du mot dans la langue familière.
(une 1re fois en 1583). Empr. du lat. pan- D'abord penne, puis panne ; pour le déve-
459 PANTOMIME

loppement de la prononciation, cf. femme. PANSER, v. penser.


Lat. penna « plume », en lat. class. surtout PANT(O)-. Premier élément de mots
« plume des ailes » ; a été dit de la panne, sav. comp., tels que pantographe, 1743,
étoffe pelucheuse, douce comme de la tiré du grec pas, pantos, « tout ».
plume ; au moyen âge désignait aussi des
fourrures ; de même a. pr. pena « fourrure ». PANTALON, 1650, au sens moderne.
Panne « graisse de porc ou d’autres ani- Issu du nom propre Pantalon (cf. en 1550 :
maux, surtout au ventre », XIII° (penne « l’un vestu en Pantalon, l’autre en Zani »),
d’oint) est un emploi fig. de panne « étoffe, empr. de l’it. Pantaleone, Panialone, per-
fourrure »; penne d’oint, où oint signifie sonnage de la comédie italienne habillé
« graisse », donc « fourrure, garniture de d’un vêtement tout d’une pièce et repré-
graisse », montre comment le sens s’est sentant le Vénitien. « Ce nom nous est
développé ; de même a. pr. pena. Panne a venu d'Italie, où les Vénitiens, qui portent
pris en outre au moven âge le sens de « peau de ces sortes de hauts de chausses, sont
qui couvre le bouclier », attesté dès 1080 appellés par injure Pantaloni. Et ils sont
(Roland). ainsi appellés de S. Pantaleon, qu’ils nom-
ment Pantalone. Ce saint étoit autrefois
PANNE, terme de marine ; xvi1® (meitre en grande vénération parmi eux : et plu-
en panne; d'où rester en panne, XVIII°, sieurs, à cause de cela, s’appelloient Pan-
puis les sens figurés modernes). Dès 1611 taleoni dans leurs noms de baptême, d’où
mettre en penne «disposer les voiles de ma- ils furent tous ensuite appellés de la sorte
nière à ne pas prendre le vent, de sorte que par les autres Italiens », Ménage. — Dér.
le bateau s’arrête », locution formée avec du premier sens : pantalonnade, 1597 (les
penne « extrémité de la vergue à antenne », pantalonnades d’un Harlequin).
même mot que penne (cette extrémité res-
PANTELER, v. pantois.
semble un peu à la pointe d’une plume).
Le sens de « misère », 1842, que panne a PANTHÉISTE, 1712. Empr. de l’angl.
pris dans le parler pop., est une extension pantheist, mot créé par le philosophe angl.
du sens « arrêt de l’activité », d’où panné, J. Toland en 1705 avec les mots grecs pan
1828 ; panne, de l’argot des théâtres, est « tout » et fheos « dieu ». — Dér. : pan-
une spécialisation de « misère ». — Dér. : théisme, 1712.
dépanner, 1922, d’où -age, id. ; empanner, PANTHÉON, 1491, comme nom d’un
mar., 1703. temple de Rome; sens plus étendus de-
PANNE « terme de charpenterie », 1220 puis la fin du xvinie. Empr. du lat. Pan-
(panes, texte de Douai; en outre pasne et theum (du grec Pantheion, comp. de pan
parne dans des textes picards); transcrit « tout » et theos « dieu »).
aussi penne au moyen âge. Vit surtout dans PANTHÈRE, 1125. Empr. du lat. pan-
le Nord et l’Est de la France et dans les thera (du grec panthér).
Pyrénées (gasc. padeädu, -ale), en galic.
padea, et dans l’all. pfette. Toutes ces formes PANTIN, 1747 : « Dans le courant de
remontent à un lat. palena, empr. du grec l’année dernière, on a imaginé, à Paris,
pathne « crèche », autre forme de phaine. des joujoux qu'on appelle des pantins »,
Barbier, Journal. Formé sur pantine « éche-
PANNEAU. Propr. « pan d’étoffe », sens veau de soie », attesté comme terme tech-
encore usité au xviri®, d’où « filet de nique des teinturiers depuis 1570, lequel
chasse », xiv°, qui a donné naissance aux est dér. de pan ; pour le rapport sémantique
locutions : étre, donner dans le panneau, voir les significations de poupée.
xvire. Autres sens techn. «pan de mur, etc. »,
développés comme dans pan. Lat. pop.
PANTOIS. Vieux mot qui ne s'emploie
que par archaïsme et en plaisantant, 1534
*pannellus, dér. de pannus. It. pannello
(Rab.). Tiré de l'anc. verbe paniaisier,
« morceau de drap », a. pr. panel « pan
pantoisier, encore attesté au XvI° s., « ha-
d’étoffe, etc. ». leter », lat. pop. *paniasiäre « avoir des
PANONCEAU, v. penne. visions, rêver », d’où, par l'intermédiaire
d’une signification « cauchemar » attestée
PANOPLIE, 1784 ; d’abord au sens an-
p. ex. pour l’a. pr. pantais, « être suffoqué
cien. Empr. du grec panoplia « armure (d'émotion) »; *panlasiare est un emprunt
complète d’un hoplite »; d’où le sens du grec phaniasiein « id. », fait à une
moderne, 1868. époque où le ph grec était encore un p
PANORAMA, 1799. Empr. de l’angl. aspiré. V. aussi fantaisie ; d’où aussi a. pr.
panorama, créé en 1789 par le peintre panteizar « rêver », cat. panleixar « hale-
écossais Barker avec les mots grecs pan ter », vénit. pantezar. On trouve aussi, du
« tout » et orama « vue », au sens de « vue xIvVe au xvire, pantais comme subst. au
de l’ensemble »; le premier panorama sens d’ « oppression ». Le verbe panteler,
qu’on ait vu à Paris et qui représentait 1561 aujourd’hui usité surtout au part.
cette ville fut exécuté cette même année adj. panielant, est de la même famille ;
sous la direction de Fulton. Dér. panora- c’est une réfection de pantoiser par substi-
mique, 1828. Sur le modèle de ce mot a tution du suff. -eler, très usité en fr., à
été forgé diorama, 1822, avec le préf. grec la terminaison -oiser, qui est rare.
dia « à travers ». PANTOMIME, masc., 1501. Empr. du
PANSE. Jusqu'au xve surtout pance. lat. pantomimus « celui qui mime tout »
Lat. panticem, acc. de pantex, plus usité (du grec paniomimos, v. mime). — Dér. :
au plur. en lat. class. « intestins, panse ». pantomime, fém., 1752; comme adij., dé-
— Dér. : pansu, xve (Coquillart). but xvirre.
PANTOUFLE 460

PANTOUFLE, 1465. L'it. a aussi pan- PAPILLE, xvie (Paré); une première
tofola; l’all. Pantoffel et l’angl. pantofle fois en 1372. Empr. du lat. papilla. —
viennent du fr. La première attestation Dér. : papillaire, 1665.
venant du limousin et le suff. -oufle étant PAPILLON, vers 1270 (Rose). Aupara-
fréquent en occitan, il est très probable vant paveillon, pavillon (xri°-xir1e $.),
que le mot a été formé dans les parlers du forme qui se présente encore avec ce sens
Midi d’où il a passé en franc. ; il se rattache dans les parlers du Nord-Est et de l’Est.
peut-être à la famille de pale, avec inser- Dans beaucoup de langues le papillon
tion d’une nasale. — Dér. : pantouflard, porte des noms qui essaient de dépeindre
1839. l’image de l’insecte voltigeant, ainsi le
PAON. Lat. pävônem, acc. de pävo. V. mexicain papalotl, l’it. farfalla et le lat.
ponceau. — Dér. : paonneau, xv®. papilio même. La transformation de pa-
PAPA, 1256. Terme du langage enfantin villon en papillon a rétabli cette image
répandu dans de nombreuses langues, cf. détruite par l’évolution phonétique. Pa-
lat. papa, grec pappas, etc. Il y a d’autres pillon est la forme dominante aujourd'hui
types également répandus, avec labiales dans les parlers septentrionaux ; les parlers
sonores : bab-, ab-, avec dentales : tata, méridionaux, au Sud d’une ligne allant de
at(t)a, etc. V. maman. l'embouchure de la Loire à la Savoie, ont
en majorité des formes avec une syllabe
PAPAVÉRACÉE, 1798. Dér. sav. du initiale par-, de date ancienne, cf. a. pr.
lat. papaver « pavot ». parpalhon, parpalhol. V. parpaillot et pa-
PAPAYE, 1579. Empr. du caraïbe des villon. — Dér. : papillonner, 1608 ; papil-
Antilles papaya. — Dér. : papayer, 1654. lote, 1420, au sens de « paillette (d’or) »,
cf. le texte : plumes de paon, papillolées de
PAPE, xie s. (Alexis). Papal, 1315. papillotes d’or ; papillote a reçu ensuite
Papesse, vers 1450. Empr. du lat. eccl. d’autres sens : « tache de boue », xvi°,
papa (en grec eccl. pap(p)as), titre d’hon- « ornements de diverses sortes », id., et,
neur donné d’abord aux évêques jusqu’au à partir du xvii®, « morceau de papier
vie s., où il a commencé à être dit de pré- dont on enveloppe les cheveux pour les
férence des évêques de Rome, auxquels il friser », par comparaison de sa forme avec
a été réservé à partir du 1x°s., et du lat. celle d’un papillon (il est inutile de faire
médiéval papalis, papissa. — Dér. de pape : intervenir papier pour ce dernier sens),
papauté, xiv°, sur le modèle de royauté, d’où papilloter, 1400 (jusqu’à la fin du
principauté ; papisme, 1553 ; papiste, 1526 ; xvie s. seulement au part. passé), du sens
papable, xvie ; dit ordinairement par plai- d’ « orner de paillettes » est issu celui de
santerie, imité de l’it. papabile ; antipape, « produire l'effet de paillettes », qui n’est
1393 (dans un document de Charles VI) devenu usuel qu’à partir du xvir® ; papil-
sur le modèle du lat. médiéval antipapa, lotage, 1611.
bien antérieur.
PAPEGAI, v. perroquet. PAPOTER, 1767. Se rattache à la grande
famille de mots qui remonte au lat. fam.
PAPELARD, v. lard. pappare « manger », très répandue en
PAPIER, xrr1e. Le lat. papyrus « papy- gallo-roman ; attesté en 1611 au sens de
rus » et « papier fait avec le papyrus » a « manger du bout des lèvres »; l’a. fr. a
servi, après avoir désigné le papyrus, en- un verbe analogue papeter « bavarder ». —
core de quelque usage jusqu'à la fin du Dér. : papotage, 1866.
virie, à désigner le papier de chiffon, intro- PAPOUILLE « chatouillement », fam.,
duit d'Orient en Espagne par les Arabes 1923 ; mot de formation expressive.
vers la fin du x£ et répandu de là dans les
pays de la Méditerranée. Le mot, attesté PAPRIKA, 1923 (papriko en 1845).
dans l'Italie du Nord-Ouest depuis le Empr. du hongrois paprika.
XII® $., y a été incorporé au vocabulaire PAPYRUS, v. papier.
pop. avec un changement de suff. (-ier),
et c’est sous cette forme que le commerce PAQUE(S). Au moyen âge et jusqu'au
italien a fait passer le mot en fr. Papyrus, XVI s. les deux formes Pasques et (la)
repris par le fr. sous cette forme au xvi®, Pasque s’employaient pour désigner la fête
est lui-même d’origine égyptienne, comme chrétienne ; aujourd’hui la forme du sing.
la plante de ce nom, et a pénétré en latin sans s finale s'emploie à peu près exclusi-
par le grec. Le lat. désignaït aussi la feuille vement en parlant de la fête juive. Lat.
de papyrus par charta, d’où it. carla « pa- pop. *pascua (cf. aussi l’adj. de basse ép.
pier », v. carte, charte. — Dér. : paperasse, pascualis, à côté de pascalis), altération du
1588 (Montaigne) ; d’abord en 1553 (écrit lat. eccl. Pascha (le plur. Paschae est plus
alors paperas); d’où paperassier, 1798 ; rare) par croisement avec pascua « nourri-
papetier, 1414 (attesté alors par le lat. ture (proprement pâturage) », parce que
médiéval papelerius, on trouve papelier Pâques met fin au jeûne du Carême. Pascha
au xive s.), papeterie, 1423. — Comp. vient lui-même, par l'intermédiaire du grec
papier-monnaie, créé à propos des spé- Paskha, forme de la Septante, qui remonte
culations de Law, 1727, calqué sur l’angl. à une forme hébraïque plus ancienne que
paper money (aujourd’hui obsolète). l’hébreu massorétique Pesach : ce mot hé-
breu qui signifie propr. « passage », désigne
PAPILIONACÉ, vers 1700 (Tournefort), la fête célébrée en souvenir de la sortie
dér. savant du lat. papilio, v. papillon; d'Égypte ; pour le sens du mot hébreu,
écrit quelquefois papillonacé, d’après pa- cf. : « C’est le sacrifice de Pâques en l'hon-
pillon. neur de l'Éternel, qui a passé par-dessus
AGI PARAÎTRE
les maisons des enfants d'Israël en Égypte, empr. en ce sens de l’esp. parada, dér. du
lorsqu'il frappa l'Égypte », Exode, XII, 27. verbe parar « arrêter un cheval court »
A servi ensuite à désigner la fête chré- (d’où aussi le verbe parer, terme de manège,
tienne célébrée en l’honneur de la résur- fin xvie (Malherbe), encore relevé dans les
rection de Jésus-Christ, en raison de la dict.), propr. « disposer », v. parer, par un
coïncidence des dates. Pâques fleuries, dp. développement partic. Les autres sens sont
le xrr1e. — Dér. : pâquerette, 1553 ; en 1571 propres au fr., en partie d’après le verbe
pasquerelle ou pasqueïle; ainsi nommée parer « arranger d’une manière élégante » :
parce qu'elle fleurit vers Pâques. faire parade, lit de parade, xviI°, parade,
PAQUEBOT, 1634 (écrit paquebouc ; en- au sens de « revue », xvil®, parade de foire,
suite paquet-bot, 1687 et encore 1802; pa- XVIIIe. — Dér. : parader, 1625.
quebôt, 1679). Empr. de l’angl. packet-boat, : PARADE, terme d’escrime, v. parer.
littéral. « bateau (boat, v. bateau) qui
transporte les paquets de lettres (packel, PARADIGME, terme de gramm., 1561.
Empr. du lat. du grammairisme paradigma
empr. du fr. paquet) ».
(du grec paradeigma qui signifie propr.
PAQUET, 1368. Dér. de pacque, attesté « exemple »).
en 1410 et en 1510, fém., de même sens,
empr. du néerl. pak. Cette origine est PARADIS, xi° (Alexis) ; en outre pa-
appuyée par l’existence du verbe paquier, reis, au xII*, qui a été de bonne heure af-
paquer « empaqueter, mettre en baril », à fecté au sens de « parvis ». Empr. du lat.
la même époque dans des textes de la eccl. paradisus (du grec paradeisos, empr.
région picarde et flamande. Le néerl. pak de l’iranien paridaiza, propr. « enclos de
appartient à une famille de mots très ré- seigneur, parc ») au sens de « séjour des
pandus : all. Pack, angl. pack, anc. scand. bienheureux », cf. Épître aux Corinthiens,
pakki, irl. paca et gall. pac, tous avec le IT, 12 ; a servi, au xvi°, à traduire l’hébreu
sens de « paquet » ; mais le point de départ eden, V. éden. Par une comparaison plai-
est encore inconnu. L’it. dit également sante paradis désigne les galeries supé-
pacco. — Dér. : paqueter, 1494, d’où paque- rieures d’une salle de spectacle (relevé de-
tage, 1838 ; paqueteur, 1562 ; dépaqueter, puis 1606). Paradisiaque, 1838, une l'e fois
1487 ; empaqueter, vers 1500, d’où empa- en 1553, est de même empr. du lat. eccl.
quetage, 1813. paradisiacus (fait sur un modèle grec non
attesté). V. parvis.
PÂQUIS, v. pâtis.
PARADOXE, vers 1485, aussi comme
PAR. Lat. per « à travers, pendant, par adj. de Montaigne à la Révolution. Empr.
le moyen de ». La locution archaïque de du grec paradoxos, adj., « contraire à l’opi-
par (le roi, etc.), est une altération, qui nion commune {doxa) ». — Dér. : para-
remonte au xu1°, de de part, propr. « de doxal, 1588.
la part de ». Par, en a. fr., servait à donner
une valeur superlative à un adj., comme PARAFFINE, 1832. Substance décou-
le préf. lat. per, p. ex. dans permagnus verte en 1830 par le chimiste Reichenbach
« très grand », avec cette différence que et nommée paraffine d’après le lat. parum
par était séparable, ce qui se trouve en affinis « qui a peu d'’affinité » en raison de
latin seulement dans des textes d’un ca- son peu d’affinité avec les autres corps.
ractère familier ; il nous en reste la locu- Paraffine avait déjà été formé au xvres.
tion par trop (fort, etc.). Par sert aussi de pour désigner une résine minérale.
préf. verbal pour marquer l’accomplisse- PARAGE « extraction », v. pair.
ment, comme le lat. per. — Comp. : parce PARAGE, terme de marine, 1544. Empr.
que, 1272 ; a éliminé au XVIIe pource que, de l'esp. paraje, propr. « lieu de station »,
qui était la conjonction de cause usuelle d’où « lieu où se trouve un vaisseau », dér.
au moyen âge. du verbe parar au sens de « s'arrêter ».
PARA-. Premier élément de mots sav.,
tiré du préf. grec para « à côté de », ou de PARAGRAPHE, vers 1220. Empr. du
mots empr., v. les suiv. lat. médiéval paragraphus, dont le sens
est issu du seul que connaisse le latin de
PARABELLUM, pistolet automatique ; basse ép. « signe servant à séparer les dif-
mot formé en all. avec le grec para « con- férentes parties d’un chapitre, etc. » (du
tre » et le lat. bellum « guerre », ou plutôt grec paragraphos, littéral. « écrit à côté »),
tiré du dicton si vis pacem para bellum sens repris récemment par la langue de
(Gougenheim). l'imprimerie et de la paléographie. Une
PARABOLE, terme eccl., xi11° (Rose). forme altérée du lat. médiéval pa(r )raffus
Parabolique, I, vers 1500. Empr. du lat. est représentée par le fr. paragraphe, 1390,
eccl. parabole, parabolicus (du grec eccl. d’abord au sens qu'avait paragraphe, puis
parabolé, cf. Mathieu, XIII, 33-35, propr. réservé au sens de « signature abrégée
« comparaison », parabolikos). qu’on met en marge des actes pour ap-
PARABOLE, terme de géom., 1554. Est prouver les ratures, etc. » à partir du xvi°,
le même mot que le préc. ; repris au grec déjà attesté en 1394, d’où parapher, 1467.
qui a déjà ce sens d’après celui qu'a le En outre paiarafe, 1690, par altération
verbe dont il dérive dans la langue des plaisante, peut-être d’après paille.
mathém., d’où parabolique, terme de PARAÎTRE. Lat. de basse ép. parescere,
géom., vers 1505. dér. inchoatif du lat. class. parère, qui a
PARADE, 1539 (dans la locution faire continué à être employé, d’où a. fr. paroir,
parade). C’est propr. un terme de manège cf. de même a. pr. pareisser et parer. La
signifiant « action d'arrêter un cheval »), différence des sens n'étant pas sensible,
PARAÎTRE 462

paroir, qui cependant était plus usité au PARASITE, vers 1500. Empr. du lat.
moyen âge que paraître, a disparu vers Ja parasitus (du grec parasitos, proprement
fin du xvi® s. — Dér. : parution, 1923, « commensal » de para « auprès de » et de
d’après le participe passé paru et sur le silos « nourriture », qui a pris un sens
modèle de comparution. Disparaître, 1606, défavorable à cause des personnages de
remplace un ancien disparoir fait sur le comédie, faisant métier de parasites); a
modèle du lat. de basse ép. disparere, d’où passé ainsi de la comédie grecque dans la
disparition, 1559 (Amyot), sur le modèle comédie latine, où nous l'avons pris. —
d'apparition ; on a dit aussi disparution; Dér. : parasitaire, 1855 ; parasitisme, 1832.
reparaître, 1611.
PARASOL, 1548 : « En cette année
PARALLAXE, 1557. Empr. du grec pa- furent mis en usage les parasols » (Chro-
rallaxis, propr. « changement », employé nique bordelaise) ; rare avant le xvirre.
au même sens par les astronomes grecs : Empr. de l’it. parasole, littéralement « qui
« On entend spécialement par ce mot le écarte le soleil », v. parer. Sur le modèle
changement qui s'opère dans la position de ce mot ont été formés des mots comme
apparente d’un astre quand on l’observe parachute, 1777.
d’un point qui n’est pas le centre de son
mouvement », Delambre. PARÂTRE. Aujourd'hui péj., comme
PARALLÈLE, 1532 (une 1lre fois au marûtre, mais moins usuel ; usité au sens
XIIIe s.) ; parallélépipède, 1570 ; parallélo- propre jusqu’au xvi®, où il a été remplacé
gramme, 1540 ; parallélisme, 1647 (Pascal). par beau-père. Lat. de basse ép. patrasier
Les trois premiers sont empr. des mots lat. «beau-père » au sens de « mari de la mère ».
parallelus, parallelipipedus (attesté à basse PARAVENT, 1599. Empr. de l’it. para-
ép.), parallelogrammum (id.) (du grec pa- vento, littéral. « qui écarte le vent », v.
rallèlos, parallélepipedos (de epipedon « sur- parasol. Remplace le fr. ostevent (de ôter).
face plane »), parallélogrammon) ; le qua-
trième est empr. du grec de basse ép. PARBLEU, v. dieu.
parallélismos. Le sens fig. de parallèle,
xviie, est dû principalement à l'ouvrage PARC. Désigne proprement un enclos.
de Plutarque : Les Vies parallèles. Attesté dès le vire s. dans la Loi Ripua-
PARALYSIE, xrie. Paralytique, xrr1°, rienne sous la forme parricus. Dér. d’un
Empr. du lat. médical paralysis, paralyti- prélatin *parra « perche » conservé dans
cus (du grec paralysis, propr. « relâche- l'esp. parra « espalier ». Avec consonne
ment », paralytikos). — Dér. du premier : initiale sonore dans le fr. barre. Parricus
paralyser, xvi® (Paré). vit aussi dans le gasc. parrik et dans les
patois lombards (parek). L’anc. haut all.
PARANGON, 1513 ; une première fois au pfarrih (all. mod. Pferch), l’anc. angl.
xve; en outre paragon, 1501, assez fré- pearroc. sont empruntés du gallo-latin.
quent au xvi*. À signifié aussi « compa- Autre dér. de *parra dans le langd. parran
raison » ; le sens de « pierre de touche », est « enclos », qui suppose une forme *parra-
rare en fr. ; Ménage déclare que les Fran- gine. Le gall. parc et l'’irl. pairc sont d’ori-
çais ne se servent pas de parangon en ce gine angl. comme le breton park « champ »
sens. Empr. à la fois de l’esp. parangôn vient du fr. Le fr. parc a signifié aussi
« comparaison » et de l’it. paragone « com- « camp retranché » aux xIve et xve s.,
paraison, modèle »; l’esp. vient du reste sens qu’il à cédé vers 1500 à camp, non sans
de l’it. qui signifie proprement « pierre de conserver en partie sa signification mili-
touche »; ce subst. et le verbe paragonare taire (partie du camp où l’on met le train).
« éprouver à la pierre de touche, compa- — Dér. : parquer, 1380, d’où parcage,
rer », remontent au grec parakoné « pierre xIve; parquet, 1339 (à côté duquel on a
à aiguiser », parakonân « aiguiser ». On a parchet), propr. « petit parce, petit enclos »,
dit aussi au XVI° s. parangonner « COMpa- encore chez Buffon et dans les parlers du
rer » et paragonner, d’après l'esp. paran- Centre ; parquet a pris dès le xrve le sens
gonar et l’it. paragonare; parangonner de « partie d’une salle de justice où se tien-
s'emploie encore dans la langue de la nent les juges », à cause de la barre qui
typographie. sépare cette partie du reste de la salle,
PARANOÏA, 1923 (déjà paranoie en d’où les autres acceptions judiciaires, et
1874). Terme de la langue des aliénistes, aussi celle qui est usitée à la Bourse (pour
empr. du grec paranoia « folie » (de para désigner les agents de change par opposi-
qui figure souvent dans des comp. pour tion aux banquiers de la coulisse), cf. pour
exprimer ce qui est contraire, cf. paradoxe, le sens barreau ; de l'emploi de parquet,
et de nous « esprit »). — Dér. : paranoïa- comme terme de menuiserie, propr. « petit
que, id. enclos planchéié » (cf. parquet « plancher
démontable et entouré d’une clôture, ser-
PARAPET, 1546 (Rab.). Mot de forti- vant de salle de bal » dans les parlers du
fication, empr. de l’it. parapeito, littéral. Centre et de l'Ouest) dérive le verbe par-
« qui protège la poitrine (petlo) », v. parer. queter, 1680 (dans une autre acception
PARAPHRASE, 1525. Empr. du lat. dès 1382), d’où parquetage, 1676, parque-
paraphrasis (mot d’origine grecque, pro- teur, 1691, parqueterie, 1835.
prem. « phrase à côté », c’est-à-dire « qui
amplifie »). — Dér. : paraphraser, 1534, PARCELLE. Lat. pop. *pariicella, ré-
paraphraseur, xvie. fection du lat. class. particula, dim. de
pars, partis « part, partie ». — Dér. :par-
PARAPLUIE, v. pluie. cellaire, 1791.
463 PARIÉTAIRE

PARCHEMIN. Les formes des autres outre en roman des sens nouveaux « or-
langues romanes (it. pergamena, esp. per- ner », etc. : it. parare « orner, présenter,
gamino, a. pr. pergamen) remontent au opposer, etc. », esp. parar « arrêter », v.
lat. de basse ép. pergamena (quelquefois parade et parage. — Dér. : parement, x°
-ina), du grec pergamené « peau de Per- (Eulalie) ; pareur, 1262; parure, xrrr°;
game » (la préparation de la peau de mou- déparer, x1° (Alexis) au sens d’ « enlever
ton en parchemin fut inventée à Pergame, ce qui pare », sens du moyen âge; celui
en Asie mineure). En fr. ce mot a subi très d’ « enlaidir par le désaccord de l’ensem-
tôt l'influence de parthica (pellis) « (peau) ble » ne paraît pas être antérieur à la fin
du pays des Parthes » (on a en effet des du xvrres.
textes parthes écrits sur parchemin), qui PARER, terme d'escrime, 1559 : « parer
est devenu parche, parge, en a. fr. et dans un coup ». Empr. de l’it. parare « se garder
les patois. — Dér. : parcheminé, 1838; d’un coup, arrêter le mouvement d’une
parcheminier, x111°, parcheminerie, 1394. chose, empêcher en s’opposant », lat. pa-
PARCIMONIE, 1496; rare avant le rare. — Dér. : parade, 1628.
XVIIIE, CÎ. « parcimonie, s’il m'est permis PARER, terme de manège, v. parade.
d’user de ce mot » Ménage. Empr. du lat.
parcimonia, parsimonia (dér. de parsus, PARESSE, xri°-xive perece, du lat. pi-
part. passé de parcere « épargner »). — grilia, dér. de piger « paresseux », Comp.
Dér. : parcimonieux, 1773 (Beaumarchais). a. pr. esp. pereza. Le changement de per-
en par- est probabl. dû à l’action du r. —
PARCOURIR, xve; parcours, 1286. Dér. : paresseux (d’abord pereceus).
Empr. des mots lat. percurrere, percursus PARFAIRE, PARFAIT, v. faire.
(surtout médiéval ; rare en lat. de basse
ép.) et francisés d’après courir, cours. PARFAIT, terme de gramm., 1596.
Francisation du lat. des grammairiens
PARDESSUS, v. sus. (tempus) perfectum, d’après l’adj. parfait.
PARDONNER, d’abord « concéder, ac- — Comp. : plus-que-parfait, 1550 (Mei-
corder (la vie, une grâce) », sens qu'avait gret), sur le modèle du lat. plus quam per-
le lat. perdonare attesté une seule fois, fectum.
vers 400. — Dér. : pardon, vers 1135 ; par- PARFOIS, v. fois.
donnable, vers 1120 ; impardonnable, xrve
(Froissart), rare avant le xvrre s. PARFUMER, 1532. Ce verbe est très
vivant dans les pays méditerranéens
PAREIL. Lat. pop. *pariculus, élargis- Milan perfümà, Venise perfumar, cat. esp.
sement du lat. class. par « égal », v. pair.
port. perfumar, aussi a. pr. perfumar (le
De même it. parecchio, esp. parejo. — Dér. subst. perfum déjà en 1397). Le verbe fr.
et Comp. : appareiller « unir à quelque chose
a été emprunté d’un de ces idiomes méri-
de pareil », x11° (Chrétien), d’où appareille- dionaux, mais il est difficile de dire duquel.
ment, 1829, rappareiller, 1690 ; dépareiller,
— Dér. : parfum, 1528, parfumeur, 1528,
vers 1220 ; en outre désappareiller, 1606;
parfumerie, 1803.
nonpareil, vers 1350.
PARELLE, nom de la patience dans les PARIA, 1693. Empr., par l’intermé-
parlers de l’Ouest. Lat. médiéval para- diaire du port. paria, du tamoul parayan.
da. Aussi cat. paradella. C’est très probabl. Au fig. dp. 1821.
un dér. du part. passé de parare, au sens PARIER, 1549, au sens moderne. Alors
de « préparer », la patience étant souvent aussi « mettre de pair, comparer » (Bon.
préparée pour engraisser les porcs, ce qui Périers, Amyot), cf. aussi le sens d’ «aller
lui a aussi valu le nom de chou gras en de pair », encore chez Saint-Simon, d’où
Franche-Comté et ailleurs. le sens moderne, propr. « mettre en jeu
PARENCHYME, 1546. Empr. du grec des sommes égales ». Apparaît en outre dès
parenkhyma. le xves. au sens d’ « accoupler ». Réfection,
d’après le lat. de basse ép. pariäre « égaler,
PARENT, PARENTS. Lat. parentem, être égal à », d’un ancien verbe pairier,
acc. de parens « père ou mère », parenles pairer « unir, comparer, égaler », dér. de
« le père et la mère » et en lat. fam., sur- l’adj. afr. per « égal » (v. pair), mais in-
tout de basse ép., « personnes de la même fluencé dans la voyelle du radical par pai-
famille ». Dans les parlers gallo-romans on rier « accoupler », dér. de paire. Le comp.
emploie beaucoup nos gens au sens de apparier, attesté dès le x111° au sens d’ « as-
« père et mère » et aussi de « proches, per- socier » est une réfection d’un comp. anté-
sonnes de la famille ». — Dér. : apparenter, rieur apairier, de même sens, faite sur le
XIIe. lat. médiéval appariare, qui était à son
PARENTÉ. Masc. jusqu'au xvi®, v. tour une latinisation d’apairier. Les formes
comté. Lat. pop. *parentälus, dér. de pa- signifiant « comparer » paraissent être plus
rens :V. le préc: partic. formées avec pair, celles qui signi-
PARENTHÉÈSE, xve. Empr. du lat. pa- fient « accoupler » avec paire; mais il y
renthesis (mot d’origine grecque qui signifie a eu fusion des deux séries, comme le
littéralement « action de mettre auprès montre leur réfection. — Dér. et Comp. :
de »). Le mot, qui désignait d’abord une pari, 1642 ; pariade « accouplement », t. de
phrase accessoire, désigne surtout aujour- chasse, 1690 ; parieur, 1640 ; apparier, v.
d’hui les signes typographiques qui servent ce qui précède, d’où appariement, xvi°,
à limiter cette phrase. rapparier, 1690 ; déparier, 1393.
PARER « préparer, arranger ». Lat. PARIÉTAIRE, xine. Empr. du lat.
paräre « apprêter, disposer », qui a pris en (herba) parietaria « (herbe) des parois ».
PARIÉTAL 464

PARIÉTAL, 1541 (Paré). Dér. sav. du aux magistrats en voyage » (en lat. paro-
lat. paries, parielis « paroi » ; le lat. parie- chus, parfois « hôte ») ; une confusion ana-
talis désigne la pariétaire. logue est intervenue dans l’évolution de
PARITÉ, xive. Empr. du lat. de basse presbyler, v. prêtre. — Dér. : paroissial,
ép. paritas, dér. de par « égal ». — Dér. : x11e, d’après le lat. eccl. parochialis ; pa-
paritaire, vers 1920 ; disparité, vers 1300. roissien, id., d’après le lat. médiéval paro-
chianus.
PARJURER (se), vers 1080 (Roland),
parfois intrans. ou trans. ; parjure, « celui PAROLE. Lat. eccl. parabola, devenu
qui fait un parjure », vers 1155 ; parjure, *parabla, *paraula, proprement « parabole
«faux serment », 1495 (déjà de 1130 à 1240). du Christ », d’où « parole du Christ », puis,
Empr. du lat. perjurare et de ses dér. per- sur les traces du mot verbum, qui avait
jurus, perjurium. pris le sens de « parole de Dieu » dans
l'expression verbum Dei, mais à rebours
PARKING, vers 1945. Empr. de l’angl. « parole en général ». Aussi it. parola, esp.
parking «endroit où l’on parque les autos ». palabra. — Dér. : parolier « celui qui fait
PARLER. Lat. eccl. paraboläre (vire s.), les paroles d’un morceau de musique »,
dér. de parabola, v. parole. Aussi it. par- 1843 (Th. Gautier) ; au sens de « bavard »
lare. Le lat. class. loqui a disparu; un en 1757.
autre verbe fam. fabuläri « bavarder » a PAROLI, 1640. Empr. de l'it. paroli
triomphé dans la péninsule ibérique, d’où (comp. de paro « je fais une mise au jeu »
esp. hablar, port. fallar. — Dér. et Comp. : et le pron. Zi « les » ou l’adv. Zi « là »).
parlage, 1770. Parlement, vers 1089 (Ro-
land) au sens d’ « entretien », encore chez PAROTIDE, 1545. Empr. du lat. paro-
Racine ; d’où parlementer, x1v®, parlemen- lis, -idis (du grec parôtis, de para « auprès
taire, « relatif à l’action de parlementer », de » et ous, ôlos « oreille »).
1776. Parlement a commencé, vers le xrrre, PAROXYSME, 1552 (Rab.); une pre-
à être employé pour désigner des assemblées mière fois en 1314 (sous la forme peroxime).
de caractère judiciaire ; en anglo-normand Empr. du grec médical parozysmos ; au
il désigne dès 1275 l'assemblée législative moyen âge a été pris au latin médical de
constituée en vertu de la Grande Charte; cette époque.
il est devenu parlement, ensuite parliament
en anglais. Parlement est employé dans PARPAILLOT, 1622. Issu par change-
ce sens dans de nombreux textes français ment de suffixe de parpaillon « papillon »,
de tous les siècles; il n’est appliqué aux mot très répandu dans les parlers occitans
assemblées législatives élues en France que (aussi chez Rab.) et jusqu’en Italie, et qui
depuis 1825, quand les Parlements judi- est une forme de papillon altérée par l'in-
ciaires avaient disparu en France; d’où sertion d’un r. Les explications qu’on pro-
parlementaire, 1644, d’abord « relatif aux pose pour le sens « huguenot » sont probabl.
cours de justice de l’ancien régime, mem- des inventions; probabl. on a assimilé
bre de ces cours », puis « relatif aux assem- l’infidélité que l’Église reprochait aux hu-
blées législatives, membre de ces assem- guenots aux papillons voletant de fleur
blées », d’abord en parlant de celles de en fleur.
l’Angleterre, 1708, puis de celles de la PARPAING, terme de maçonnerie, 1284.
France, 1830, parlementarisme, 1852 ; par- On a dit aussi parpaigne, subst. et adj.
leur, 1170, d’où haut-parleur, vers 1925
Ces formes, avec l'esp. perpiaño et l’apu-
(calqué sur l’angl. loud speaker) ; parloir, lien perpitagnu « parapet en pierre d’un
xi1e ; parlote, 1829, formé par dérision;
balcon », postulent un lat. de basse ép.
déparler, xvri® (Scarron), « cesser de par-
*perpetaneus, ainsi que le haut engad.
ler », rare aujourd’hui, au moyen âge
pertaun demande un *perpetanus, tous deux
« dédire »; pourparler, 1465, inf. pris subs-
tantiv. d’un anc. verbe pourparler, 1080 dér. du lat. perpes, -ëtis « ininterrompu ».
(Roland) ; reparler, xxre. PARQUE, xvi, comme nom propre;
PARMI, v. mi. pris au sens de « mort personnifiée » au
XVIIe s. Empr. du lat. Parca.
PARODIE, 1614. Empr. du grec parôi-
dia, littéral. « chant à côté », c’est-à-dire PARRAIN. D'abord par(r)in; parrain,
« qui imite » (le lat. parodia est très rare). refait d’après marraine au xiv®, l'emporte
A signifié aussi « couplets composés sur un au xvi*. Lat. pop. paitrinus (fréquent en
air connu » au xviri®. — Dér. : parodier, lat. médiéval), dérivé de pater. V. compère,
1580 ; parodiste, 1723. — Dér. : parrainage, 1836.
PAROI. Lat. pop. *parëlem, lat. class. PARRICIDE, « meurtrier », vers 1190,
parièlem, acc. de parieés. rare avant le xvi® s. Parricide « meurtre »,
PAROISSE. Lat. eccl. parochia, altéra- 1372 (Oresme). Empr. du lat. par(r)icida,
tion de paræcia du même latin (du grec par(r)icidium (de caedere « tuer »; le
eccl. paroikia, de paroikos « étranger », les premier élément représente un indo-eur.
Chrétiens se désignant comme étrangers *päsés « parent » ; les Latins l’ont rapproché
sur cette terre). La parochia était d’abord de palier, parens).
le diocèse d’un évêque. L'origine de l’alté- PART. Lat. pariem, accus. de pars. Si-
ration de paroikia en parochia semble venir gaifie parfois « parti, faction » au moyen
de ce que les écrivains chrétiens de langue âge et jusqu'au xvie. La locution à parl
latine ont confondu paroikos et parokhos moi, etc., est attestée depuis la fin du xrve,
« fournisseur d'objets de première nécessité part a été substitué à la préposition par;
465 PAS

en effet on trouve fréquemment au moyen remplacé partir au sens propre, partagea-


âge par lui, etc., au sens de « à lui seul », ble, 1505, partageux, 1849 ; pariageur, 1567,
etc., cf. « Et la dame... s’en rit par elle », xve, signifie « préposé au partage des succes-
à par est attesté depuis le xirre. Pour sions » ; départager, 1690 ; parti, vers 1360,
de par, cf. par. — Comp. : plupart (la), propr. « ce qui est partagé », d'où accep-
1436 (au sens de « la plus grande partie ») ; tions diverses : « groupe, résolution, etc. » ;
emploi moderne à partir de la fin du xve. comme terme de la langue politique, xvi®, a
PARTANT, v. tant. servi à traduire le lat. pars ; partie, xr1e,
propr. «portion d’un tout », d’où acceptions
PARTENAIRE, 1767 (aussi pariner, variées (au xve signifie notamment « parti
1767, qu’on emploie encore au xix®). Empr. (politique) »; comme terme de la langue
de l’angl. pariner, altération, par croisement Jurid., xi11e, a servi à traduire le lat. pars ;
avec part « parti », de parcener ; celui-ci au xve de la partie de équivaut à de la
est empr. de l’a. fr. parçonier, parcenier part de ; d’où contre-partie, 1262 ; départir,
« associé » (dér. de parçon « partage, part, vers 1080 (Roland), d’abord « partager »,
butin », lat. pariïtionem, accus. de partitio). encore usité au xviI®, d'où (soi) départir
PARTIAL, xive (Oresme), au sens de de « s’en aller » dès les premiers textes,
« qui s’attache à un parti », encore usité « s’écarter de » dès le xive, d’où départ,
au xviI1°; sens moderne depuis le xvi£; 1213, sens parallèle à celui du verbe,
partialité, vers 1400 (Froissart), au pluriel, département, x11°, propr. « action de par-
au sens de « faction », encore usité au tager », encore usité au xvi®; au sens de
XVIIIe; sens moderne depuis 1611. Em- « division administrative », xv®, d’où l’em-
pr. du lat. médiéval partialis, partialitas ploi fait de ce mot en 1790 pour désigner
(de pars « part »); v. partiel ; l’adj. n’est des parties du territoire français ; mi-parti,
pas attesté au sens du fr. ; mais partialitas x11°, part. passé d’un ancien verbe mipar-
l’ayant, partialis l’a certainement eu éga- lir ; répartir, x11°, avec le préfixe ré- dont
lement. — Dér. : impartial, 1576 ; impar- on ne peut préciser la date, pour le distin-
tialité, 1576. guer de repartir, d'où répartiteur, 1749,
répartition, 1662 ; charte-partie, 1606, ainsi
PARTICIPE, x1rie. Empr. du lat. des nommée parce qu’on partageait l’acte, la
grammairiens participium, v. le suiv. charte, en deux parties, dont les deux con-
PARTICIPER, 1337 ; participation, vers tractants gardaient chacun une.
1170. Empr. du lat. participare (de par- PARTISAN, 1483. Empr. de l’it. parti-
ticeps « qui prend part à ») et du dér. de giano, dér. de parie « parti ». Au xvire
basse ép. participatio. s’est dit des fermiers d'impôts, d’après un
PARTICULE, 1484. Empr. du lat. par- des sens qu'avait alors parti « part attri-
ticula, dim. de pars « part ». buée à des fermiers d'impôts ou de fourni-
tures de l’État ».
PARTICULIER, vers 1265; particula-
rité, vers 1270 (Rose). Empr. du lat. de PARTITIF, terme de gramm., 1380.
basse ép. (rare auparavant) particularis, Empr. du bas lat. partitivus, dér. du lat.
propr. « relatif à une partie » (de particula, partitus, part. passé de partiri « partager ».
v. le préc.) et du dér. partlicularitas. — PARTITION, 1690, au sens moderne.
Dér. de particulier d’après la forme du lat.
Antérieurement et depuis le xr1®, « part,
particularis particulariser, vers 1460; partage, division », ce dernier sens dans
particularisme, 1689, d’abord terme de
diverses techniques, notamment dans la
théologie, au sens politique depuis la guerre langue de la rhétorique et de la logique
de 1866, particulariste, 1701, sens parallèle comme en latin. Probabl. de l’it. partizione,
à parlicularisme. qui, il est vrai, est assez récent au sens
PARTIE, v. partir. musical.
PARTIEL, 1745. Empr. du lat. de basse PARTURITION, 1823 (en 1803, peut-
ép. partialis et francisé en partiel pour le être par erreur, parturation). Empr. du
distinguer de partial, qui a eu du reste le lat. partluritio « accouchement ».
sens de « partiel » du x1v® (Oresme) jus-
qu’au xvie. PARVENIR. Lat. pervenire. — Dér. :
parvenu, s. m., 1721.
PARTIR. A signifié d’abord « partager »,
sens usuel jusqu’au xvi® et conservé dans PARVIS. D'abord parevis; cf. aussi pa-
la locution avoir maille à partir. Le sens reis (Roland) au sens de « paradis ». Lat,
moderne s'est développé au réfléchi soi eccl. paradisus, v. paradis, qui a pris le sens
partir de qqn. « se séparer de », d’où partir de « parvis », parce que, dans le haut
de qgqn., qui apparaît dès le xrr1°, puis moyen âge, la place qui se trouvait devant
partir (d’un endroit), id. De l’ancien tour l'entrée principale des églises, à Rome et
se partir il est resté des traces dans les dans l'Italie méridionale, pet Para-
patois, par exemple en poitevin. Lat. pop. disus. Cette acception vient sans doute
*partire, lat. class. pariirt « partager ». — du sens premier du mot « parc, enclos ».
Dér. et Comp. : 1° d’après le sens moderne : Le -v- est probabl. dû à la prononciation
partance, XVII° s., une première fois vers grecque, où le -d- était devenu une spi-
1400 (Christine de Pisan) ; repartir, seule- rante dentale, consonne qui, n’existant
ment 1580 (Montaigne), au sens de « ré- pas dans le roman d'Italie y a été rem-
pondre », mais le dér. repartie date de placée par vw.
1611 ; 2° d’après le sens de « partager » : PAS. Lat. passus. — Dér. : pas, adv. de
partage, 1244, d’où partager, 1398, qui a négation, xr1® (Voyage de Charlemagne) ;
DICT. ÉTYM. 30
PAS 466

a éliminé depuis le xvi® son principal passer, xII°, au sens de « passer », puis de
concurrent mie, vV. aussi goutte, point; « mourir », XI1°, d'où trépas, XII°, au sens
seulement gallo-roman. de « passage », développement du sens
parallèle à celui du verbe; la locution
PASCAL, 1121. Empr. du lat. eccl. pas-
chalis. aller de vie à trépas apparaît dès le début
du xv® (antérieurement, au x1IV°... irépas-
PASQUINADE, 1566. Empr. de lit: sement) sans la nuance familière qu'elle a
pasquinata, dér. de pasquino (d’où pasquin, aujourd'hui.
1558, « écrit satirique », encore usité au
xviIt), nom donné par plaisanterie à une PASSEREAU, 1532 (Rab. une 1re fois
statue antique de Rome, qui se trouve près au xirie s.). Sorti, par changement de
du palais des Ursins, et sur laquelle on suffixe, de formes plus anciennes telles
affichait des placards satiriques. Castel- que passeron, passerai, qui ont été dér. des
vetro, cité par Ménage, explique que cette représentants du lat. passer, -em à une
statue avait reçu le nom d'un tailleur époque où -r- n'avait pas encore disparu,
nommé Maestro Pasquino, réputé pour ses comme c’est le cas dans l’a. fr. passe.
médisances et près de la boutique duquel PASSIBLE, x11°, au sens de « qui peut
la statue aurait été découverte. On emploie souffrir » (théol.), jusqu’au xvrie. Empr.
aussi quelquefois pasquille, forme altérée du lat. eccl. passibilis, dér. de passus,
de pasquin, par substitution de suff., usitée part. passé de pati « souffrir ». Le sens
dans le Nord-Est, où elle a été relevée au jurid. date du xvirie. V. impassible. —
début du xvire (en outre au xvie chez le Dér. : passibilité, 1390.
Genevois Bonivard), cf. aussi pasquil,
masc., au XVII®. PASSIF, vers 1220. Empr. du lat. pas-
sivus « susceptible de souffrir » et terme
PASSADE. Fin xvii® (Saint-Simon) au de gramm. ; le sens financier développé
sens moderne, issu de celui de « action de par opposition à actif : delles passives,
passer dans un lieu sans y séjourner », xv® 1495, d’où passif, terme de commerce,
(pour la passade) ; s’est en outre employé 1789. — Dér. : passivité, 1760 ; d’abord
du xvi® au xviII° s. comme terme de ma-
nège et d'escrime. Empr. de l’it. passata passivelé, xvri° (Bossuet).
(de passare « passer »), qui a ces divers PASSIFLORE, 1807, empr. du lat. des
sens, sauf le sens moderne du français. naturalistes passiflora, de passio « pas-
PASSER. Lat. pop. *passäre, dér. de sion » et flos «fleur » (ses organes paraissent
passus « pas ». — Dér. et Comp. : passable, rappeler les instruments de la passion du
xi1e (Rose), au moyen âge surtout « par Christ).
où l’on peut passer »; passage, vers 1080 PASSION, x° (Saini-Léger), au sens de
(Roland), passager, vers 1330, au sens de « souffrance », encore chez Montaigne,
« qui prend passage à bord d'un navire », spéc. en parlant du supplice de Jésus-
XVI®; passant, subsi., XVI°® au sens mo- Christ ; au sens de « mouvement de l’âme »,
derne ; au moyen âge désigne notamment 1538, une 1re fois au xrr1°. Empr. du lat.
un anneau attaché à une boucle de cein- de basse ép. et eccl. passio. — Dér. : pas-
ture, cf. coulant, dans des sens analogues, sionnel, 1808 ; une première fois fin xrr1e,
depuis le xvi® ; passation, 1428, d’après le d’après le lat. de basse ép. passionalis.
sens de « fixer, décider », qu'a eu passer Passionné, xr11°, signifie jusqu’au Xv1° « qui
dans la langue jurid. dp. le xrve, d’où a subi une souffrance physique » ; le verbe,
passer un acie, un ordre; passe, 1383, avec des sens parallèles, apparaît au xve.
comme terme de jeu; éfre en passe, xVII°,
est issu des anciens jeux de mail et de bil- PASTEL « crayon fait de couleurs pul-
lard ou passe désignait un arc sous lequel vérisées », 1676. Empr. de l'it. pastello,
la boule devait passer, impasse, mot créé propr. « petit morceau de matières réduites
par Voltaire (pour remplacer cul-de-sac) : en pâte et durcies », d’où le sens de « pas-
« Un honnête homme aurait pu appeler tel », lat. de basse ép. *pastellus, issu par
ces sortes de rues des impasses », Dict. changement de suff. du lat. class. pastillus,
philos., 1761 ; passé, subst., 1539 ; passe- qui se rattache au radical de panis et n’a
mentier, 1552, passementerie, 1582, par rien à voir avec pasia. — Dér. : pastel-
l’intermédiaire d’un verbe passementer, liste, 1836.
1542, lui-même dér. de passement « sorte PASTEL « guède », 1510. Empr. du
de tissu », 1538, au moyen âge « passage »; prov. pastel, dér. du prov. pasta (déjà en
passerelle, 1835 ; passette, 1812; passeur, bas lat. pasiellus), v. le préc. qui a dû
XII°; passoire, xiri*; passavant, 1718, désigner d’abord la matière colorante qu'on
déjà usité au moyen âge avec d’autres extrait de la plante en en réduisant la
sens ; passe-droit, 1546; passe-fleur, va- tige en pâte, puis la plante elle-même.
riété d’anémone, xv°; passe-lacet, 1842;
passe-partout, 1564; passe-passe, vers PASTENADE, v. panais.
1420, impér. répété deux fois avec muscade PASTÈQUE, 1674. Altération d’abord
ou un mot analogue sous-entendu ; passe- orthogr., puis qui a passé dans la pronon-
poil, 1603; passeport, 1420 ; passe-rose,
ciation, de paieque, 1512. Empr., par l’in-
XIII®; passe-temps, xv°; passe-volant,
termédiaire du port. pateca, d’une langue
1522 ; dépasser, xrI°; outrepasser, xII°;
repasser, x11°, d'où repassage, 1800, une
de l’Inde (ce mot lui-même est l’ar. al-
première fois en 1596 au sens d’ « action
bâttikha ; l'esp. albudeca vient également
de l’arabe).
de passer de nouveau », repasseur, 1765,
repasseuse, 1800 ; surpasser, 1340; tré- PASTEUR, v. pâtre.
467 PATÈRE

PASTEURISER, 1872. Dér. du nom PATATRAS, 1651. Onomatopée.


de Pasteur. — Dér. : -ation, id.
PATAUGER, PATAUD, v. patte.
.PASTICHE, 1677. Empr. de l’it. pastic-
cio, propr. « pâté », dit par plaisanterie, PATCHOULI, 1826. Empr. de l'angl.
lat. pop. *pasticium, v. pâtissier. — Dér. : paich-leaf, attesté dès 1698 et empr. à son
pasticher, 1845. tour du tamil (langue dravidienne), peut-
être de pach « vert » et ilai « feuille ». La
. PASTILLE, 1539. Empr. de l'esp. pas- transcription par paichouli, certainement
lilla, dér. de pasta, v. les préc. « composi- d’origine franç., est née probabl. sur la
tion de pâte sèche et odorante ». côte de Coromandel et a passé du franc. à
PASTIS, 1928. Empr. du dialecte de l'anglais, où paichouli n’est attesté que
Marseille, où pastis a pris le sens de « dé- depuis 1845.
sordre, gâchis »; pastis représente le lat. PÂTE. Lat. de basse ép. pasla, chez le
*paslicius (V. pastiche), dér. de pasia (v. médecin M. Empiricus (du ve s.) (du grec
pâte). pasté « sauce mêlée de farine »). La locution
PASTORAL, x1rI° ; rare avant le xvre. être comme un coq en pâte, 1690, paraît
Empr. du lat. pastoralis, dér. de pastor, avoir signifié propr. « comme un coq qu'on
v. pâtre. empâte, qu'on engraisse », cf. chez Bon.
Desperiers « Il estoit traitté comme un
PASTOURELLE, v. pâtre. petit coq au panier ». Comp. norm. Comme
PAT, 1689. Peut-être empr. de l’it. pattia un coq dans un panier. — Dér. : pâté, xr1°,
dans l'expression essere pari e patta, qui pâtée, 1332; pâteux, x111° ; pâton, 1483;
s’emploie quand il y a partie nulle (paita empâter, xr11°, empâtement, 1603.
est le fém. de païlo « accord », lat. pactum ; PATELINER, 1470. Déformation dou-
l’esp. a tiré du mot it. un adj. pato « égal », cereuse de patiner. Le nom du héros de la
qui s'emploie surtout en jouant aux célèbre farce de Maistre Pierre Patihelin,
cartes). 1474, qui, par ses flatteries, se fait vendre
PATACHE, 1573. D'abord « bâtiment du drap à crédit et dupe les gens avec de
léger pour le service des grands navires, belles paroles, est tiré du verbe. Patelin,
l’usage de la douane » ; d’où le sens mo- 1860, terme vulg. au sens de « pays natal »,
derne, 1762, ces bâtiments étant souvent déjà attesté en ce sens en argot dp. 1628
de vieux navires. Empr. de l’esp. paiache, sous la forme pacquelin, est un dér. de
qui n’a que le sens de « bateau », probabl. l’a. fr. pasliz « pacage », dér. de pasi, du
pris de l’arabe baïd$s « bateau à 2? mâts », part. passé de pascere, v. paître. — Dér. :
qui paraît être une substantivation de patelinage, xv°, patelineur, 1546, Rab.
l’adj. batfâ$ « rapide ». — Dér. : patachon, PATELLE, 1555. Empr. du lat. palella,
dans mener une vie de patachon, 1842; proprement « petit plat »; ainsi nommé à
propr. «conducteur de patache », parce que cause de sa forme.
le conducteur de patache est toujours en
route. PATÈNE, 1380. Empr. du lat. patena,
PATAQUÉS, 1784. On trouve aussi pata- autre forme de patina « plat ».
qui-pataquiès, 1823, et pat-à-qu'’est-ce. Mot PATENÔTRE, x11° ; on trouve aussi pa-
plaisamment forgé sur des fautes de liaison. Lernostre et patrenostre. Empr. du lat. pater
L’historiette rapportée par Domergue a noster « notre père », début de l’Oraison
peut-être été imaginée après coup : « Un dominicale. A pris de bonne heure le sens
plaisant était à côté de deux dames ; tout de « prières » et différentes acceptions figu-
à coup il trouve sous sa main un éventail. rées, notamment « grains de chapelet,
Madame, dit-il, à la première, cet éventail chapelet », dès le xrr1°. On dit aussi paler,
est-il à vous ? Il n’est point-z-à moi, Mon- relevé depuis fin xvi® (d’Aubigné), pour
sieur. Est-il à vous, Madame ? dit-il en désigner la prière ou les grains du chapelet.
le présentant à l’autre. Il n’est pas-l-à moi,
Monsieur. Puisqu'il n’est point-z-à vous PATENT, vers 1370 (Oresme), au sens
et qu’il n’est pas-t-à vous, ma foi, je ne sais moderne ; a signifié aussi «ouvert », en par-
pas-t-à qu'est-ce. » lant de lettres, d’où leltre patenie, terme de
chancell., 1307. Empr. du lat. palens « ou-
PATARAFE, v. paraphe. vert, manifeste ». — Dér. : patente, 1595,
PATARD, 1330. Nom d’une anc. mon- abrév. de lettre palente, 1292 ; dit d’abord
naie de peu de valeur ; aujourd’hui terme d’un diplôme, d’un certificat, d’où, dans
fam. Empr. du prov. paiar, d’abord palac, la Constitution de 1791, « brevet que toute
empr. lui-même de l'esp. palaca « pièce personne qui veut faire du commerce ou
d’argent, du poids d’une once ». L’ét. arabe exercer une industrie quelconque est tenue
qu’on a donnée de ce mot est peu probable. d'acheter du gouvernement », 1787 (en
parlant de l’Angleterre), d’où l’acception
PATATE, 1599 ; antérieurement baiate, de « contributions spéciales aux commer-
1519, forme encore signalée au début du çants, etc. », d’où patentable, 1791, pa-
xixe. Empr. de l'esp. batala, palata, lui- tenté, 1791, avec sens parallèles à palenle.
même empr. de l’arouak d'Haïti. Nom de
la pomme de terre dans les parlers de PATER, v. patenôtre.
l'Ouest et du Sud-Ouest et dans le fr. pop. PATÈRE, 1762 ; une première fois vers
PATATI-PATATA, xix° (Béranger), cf. 1500. Empr. du lat. palera « coupe », d’où
palatin patatac, 1650. Onomatopée. diverses acceptions techn. au xixe.
PATERNE 468

PATERNE, vers 1770, Voltaire. Empr. PÂTISSIER, x1re. D'un a. fr. *paslilz,
du lat. paternus « paternel », en vue d’une qui doit avoir disparu avant le xrr° $.,
nuance de sens différente de paternel, lui- mais qui est aussi attesté par l’anc. verbe
même formé au moyen âge, xr1e, sur le lat. pastissier et qui représente le lat. pop.
paiernus. Paterne a déjà été emprunté au *paslicium « pâté » (de pasia « pâte »),
moyen âge au sens de « paternel »; mais, d’où viennent l’a. pr. pastitz et l’it. pastic-
au moyen âge, s’employait surtout comme cio, V. pastiche. — Dér. : pâtisserie, 1328.
subst. fém., au sens de « Dieu, en tant que
père des hommes », empr. du latin médiéval PATOIS, vers 1285. Dér. de patte, avec
paterna (scil. imago) « image de Dieu le le suff. qu’on a dans françois, etc. Le radi-
Père . cal exprime la grossièreté des gens qui
parlent ce langage. L'expression en son
PATERNITÉ, x11e. Empr. du lat. pater- patois (G. de Lorris), en parlant du chant
nilas, v. le préc. des oiseaux, est due à l’emploi plaisant du
PATHÉTIQUE, xvi®, adj. ; subst. à par- mot, à peu près comme dans l'expression
tir du xviie. Empr. du lat. de basse ép. fréquente en son latin. — Dér. : patoiser,
pathelicus (du grec pathélikos, dér. de pa- 1842.
thos au sens de « passion », tous deux em-
ployés dans la langue de la rhétorique ; de PATRAQUE, 1743. Empr. du prov. pa-
là aussi le fr. pathos, 1671, Molière). iraco, qui désignait d’abord une monnaie
usée de peu de valeur, empr. lui-même de
PATHO-. Premier élément de mots sav. l'Italie supérieure, où la forme pairaca est
comp., tels que pathogène, fin x1Ix° (pré- née par déformation de l’esp. pataca, v.
cédé par pathogénie, 1836, d’abord -géné- patard.
sie, 1823), tiré du grec pathos « souffrance »,
ou de mots empr. du grec, tels que patho- PÂTRE. Aujourd'hui littéraire. Lat. pas-
logie, 1550. tor; était en a. fr. le cas sujet de pasteur,
lat. pasiorem, qui a été de quelque usage
PATIBULAIRE, 1395. Dér. sav. du lat.
au sens de « pâtre » jusqu’au xvii*, encore
patibulum « gibet en forme de fourche ».
usité sous les formes patou(r) dans l'Ouest ;
PATIENT, vers 1120. Patience, vers mais pasteur a pris de bonne heure, dès le
1120. Empr. du lat. patiens, patientia (de xIIe, en français proprement dit, une ac-
pati « souffrir, supporter »). — Dér. de ception religieuse (v. ouaille), à laquelle il
palient : patienter, 1560. a pu être réservé en raison de l’existence
de pâtre, « gardien de troupeaux, surtout
PATIENCE, plante, dite aussi parelle, de moutons », ce qui a en outre amené le
1564. Altéré du lat. lapathium (du grec rétablissement de l’s d’après le mot latin ;
lapathon), attesté au xvi® sous la forme pasieur est usité aussi dans le style élevé
lapacion, d’après le préc. et avec suppres- depuis le xvir. Pastourelle, x111°, a été
sion de la syllabe initiale /a, prise pour refait de même d’après sa forme écrite,
l’art. comme pastoureau, xr1°, dont il a été tiré,
PATINE, xviue (Buffon). Empr. de lit. dér. lui-même de pasleur ; au xvii® et
patina, qui désigne aussi un mélange pour aujourd'hui dans quelques patois de
préparer les peaux de veau, ce qui est pro- l'Ouest on trouve encore la forme sans s
babl. le premier sens ; le mot it. est sans patoureau. Cf. it. pastore, esp. a. pr. pastor,
doute emprunté du lat. patina « poêle », aussi au sens religieux ; mais le nom. pastor
aussi « contenu d’une poêle », d’où l’emploi ne survit que dans l’a. pr. pasire et en
du mot pour désigner ce mélange préparé rhéto-roman.
dans une poêle ou conservé dans une
écuelle. — Dér. : patiner « donner la PATRIARCHE, xnu°; patriarcal, 16850
patine », 1867. (une 1re fois vers 1400 comme subst. et
dans un sens spécial); patriarcat, 1491
PATINER, PATINEUR, v. patte. (une 1re fois vers 1280). Empr. du lat. eccl.
PATIO, 1840. Empr. de l'esp. palio, patriarcha, paitriarchalis, patriarchatus (du
d’origine inconnue (on a voulu le mettre grec eccl. patriarkhés « chef de famille »,
en rapport avec l’anc. prov. pali « pacte », fait pour traduire l’hébreu rôché aboth
paltu, empr. du lat. paclum, mais cette « chef de famille », mais qui ne désigne les
étymologie se heurte à des difficultés premiers patriarches que dans le Nouveau
phonétiques insurmontables). Testament ; l'emploi que nous faisons de
patriarche dérive de ce dernier sens). De-
PÂTIR, 1546 (Rab.), au sens de « sup- puis le moyen âge, patriarche désigne aussi
porter » ; sens moderne dès le XvI® ; a signi- certains dignitaires ecclésiastiques et pa-
fié aussi «endurer » au xvire. Empr. du lat. triarcat a pris une valeur correspondante.
pati « souffrir, supporter ». — Dér. : pâti-
ra(s), 1790, « souffre-douleurs », emploi PATRICE, 1506 ; une première fois fin
plaisant du futur, d’après des expressions x11° ; patriciat, 1565 ; patricien, vers 1354,
telles que il en pâtira. Bersuire. Les deux premiers sont empr. du
lat. patricius (dér. de paier au sens de
PÂTIS. Lat. pop. *pasticium, dér. de « chef de famille patricienne, sénateur »),
paslus (part. passé de pascere « paître »). patriciatus ; le troisième est un dér. sav. de
Pâquis, 1284, mot dial. usité surtout dans pairicius avec le suff. -ien de mots comme
l'Est, une variante de pâtis par croisement chrétien ; cf. plébéien.
avec l’anc. pasquier, attesté notamment
dans des textes de l’Est, lat. pop. pascuä- PATRIE, 1511 (Gringore) ; Fontaine re-
rium ; V. pacage. proche encore à du Bellay de l’avoir em-
469 PATURON

ployé : « Qui a païs n’a que faire de patrie. » basse ép. patronymicus (du grec patrôny-
Empr. du lat. pairia, appuyé par l’it. pa- mikos, comp. de patér « père » et de onoma
iria, déjà en usage. — Comp. : expatrier, « nom »). — Dér. régressif : patronyme,
1731, le subst. expairié dp. 1479, d’après s. m. (vers 1895).
le lat. pairia, d'où expatriation, dès
le xvie ; rapatrier, 1462, souvent au sens de PATROUILLE, etc., v. le suiv.
« réconcilier », aux xvri® et xvIrIe s. et
PATTE, xt. Aussi esp. pata. L'’a. fr.
encore aujourd’hui en wallon ; d’où rapa-
triement, vers 1675, développement de disait de préférence poe ; cf. aussi a. pr.
sens parallèle au verbe ; rapatrier a sans
paula, encore vivant dans les parlers méri-
doute été fait d’après repairier, qui a eu dionaux, cat. pota. Même mot que l’all.
Pfote (all. rhénan pote). Attesté par le nom
les mêmes sens que rapairier au xvI® 8.,
propre Paulo très fréquent à l’époque
et qui est empr. du lat. médiéval repatriare
« rentrer dans sa patrie ». Le développe- gallo-romaine dans la région de Trèves.
ment du sens « réconcilier » se suit mal dans Inconnu en gaul., le mot appartient très
les textes ; sans-patrie, fin xixe.
probabl. à une couche préceltique (illy-
rienne) ; il a passé au parler des Francs
PATRIMOINE, xxrr°; patrimonial, xive. et a été apporté par eux en Gaule. Le
Empr. du lat. pairimonium (de pater) et du mot paille et la famille qui se groupe
dér. de basse ép. patrimonialis. autour sont sans doute dus à une onomato-
pée, fréquente aussi dans les autres langues
PATRIOTE, xve. Empr. du lat. de basse
romanes pour rendre le bruit que font deux
ép. et médiéval pairiota (du grec patriôtés)
objets qui se heurtent dans toute leur lar-
au sens de « compatriote », qu’on trouve
geur, comp. corse paione « gifle ». L’onoma-
encore chez J.-J. Rousseau ; le sens mo-
topée est toujours sensible dans beaucoup
derne apparaît depuis 1562 ; il est devenu de mots de cette famille, comme patouiller,
usuel au xvirie, probabl. d’après l’angl.
de sorte qu’il n’est pas nécessaire de sup-
patriot. — Dér. : patriotique, 1750 (d’Ar- poser pour chacun d’entre eux une déri-
genson, une première fois 1532, Rab., au vation du mot en-tête. Grâce à cette forte
sens de « paternel ») ; patriotisme, id. valeur onomatopéique patte a pu remplacer
PATRON, x11°, « protecteur », sens domi- poe. — Dér. et Comp. : pataud, 1501 (écrit
nant au moyen âge, surtout en parlant de palaulx) ; au xv° comme nom de chien :
saints, d’où, plus ou moins directement, les Clabault, Palaull, etc.; patauger, xvire
différents sens du mot : « modèle », 1312 (Cyrano : Des crapauds qui palaugeoient
(aujourd’hui surtout terme de couturière ; dans la vase) avec une terminaison insolite,
cf. l'expression étre taillé sur le même pa- variante dialectale de patouiller ; patin,
tron) ; « patron », dans la langue de marine, xIIIe (patin à glace dp. 1660, venu des
1357 (dans un contrat entre le roi de Flandres), patiner, 1732, au sens de « mar-
France et un marin génois), probabl. d’a- cher sur des patins »; « caresser une fille,
près l’it. padrone ; « maître d’une maison » etc. » (1408, dér. direct de patte, comp.
(fam.) dp. 1611; « chef d’un établisse- Diétiner, de pied), patinage, 1829, patineur,
ment industriel ou commercial », 1834. 1732, au premier sens du verbe, au second,
Empr. du lat. paironus « protecteur, avo- 1651, patinette, fin xix° ; patrouille, 1538,
cat ». — Dér. : patronage, vers 1180 ; au tiré de pairouiller « piétiner dans la boue »,
sens d’ «association de bienfaisance », 1874 ; xv°, encore dans beaucoup de parlers,
patronal, xvi° ; patronat, 1832 ; déjà relevé variante de paiouiller, attesté dès 1213,
en 1587 et au début du xvi° comme terme usuel aujourd’hui dans les parlers du Cen-
de droit (surtout eccl.) ; fait alors sur le tre et de l'Ouest ; c’est un dér. de paile,
modèle du lat. patronatus « qualité, droit formé avec le suff. -ouiller de barbouil-
du patron vis-à-vis de l’affranchi » (sens ler, etc., et une r due à des mots de sens
qu’on reprend aussi aujourd'hui) ; patron- analogue, notamment gadrer, gadrouiller,
ner, 1838 « protéger »; une première fois répandus dans les patois, cf. aussi vadrouil-
en 1501 (Digne pairone, qui justice pa- ler ; patouiller « manier sans ménagement »,
trone) ; depuis 1392 comme terme techn., relevé vers 1540, peu usuel aujourd’hui,
au sens de « reproduire d’après un pa- est un autre dér. de paille; pattu, 1492;
tron »; patronnesse, 1833 (d’après l’angl. empatter « fixer avec des pattes », 1327;
paironess), aurait été employé pour la pre- épater, vers 1370, a pris au xix° le sens
mière fois à propos d’un bal par souscrip- familier de « faire tomber sur les quatre
tion à l'Opéra ; patronnet, 1800 ; dit ainsi pattes », cf. s’épaler « tomber sur le ven-
pour une raison obscure ; impatroniser (s’), tre », 1808, d’où le sens fam. actuel, 1835 ;
1552. épatement, 1837 (déjà créé fin xvie comme
terme techn.) et par abrév., épate, 1846;
PATRON-MINET, 1321. Altération, par épateur, 1835; patte-fiche, 1868; patte-
étymologie pop., de potron-minet, 1835 ; on pelue, 1548 (Rab.). — V. aussi pateliner;
a aussi au XVII® poitron-jaquel, qui paraît patois.
venir de la région normande où jaquel
est usuel au sens d’ « écureuil »; poitron PÂTURE. Lat. de basse ép. pasiüra
représente le lat. posterio « cul » ; la locution (dér. de pasius, de même sens, de pascere
s'explique par le fait que l’écureuil dresse « paître »). — Dér. : pâturer, xr1°, v. paître,
souvent sa queue, faisant ainsi voir son d’où pâturage, x11°.
derrière, son sens est « dès que le der-
rière de l’écureil se fait voir (le matin) ». PATURON, vers 1510. Dér. de l’a. fr.
pasture « paturon », 1340, qui est probabl.
PATRONYMIQUE, 1679 ; une première dér. du verbe empasiurer « entraver »;
fois x111° (paitrenomique). Empr. du lat. de l’entrave se mettant au paturon, le verbe a
470
PATURON

facilement pu être rapporté à celui-ci, PAVIE, xvi* (R. Belleau) ; parfois paui.
tandis que du xr1e au xves. pasture, d’où Tiré de Pavie, nom d'une ville de Gas-
dérive empasturer, désigne l’entrave (sens cogne, d’où cette esp. de pêche s’est ré-
conservé en Normandie). L’a. fr. pasiure pandue.
est issu du lat. pastoria (conservé tel quel PAVILLON. Propr. « sorte de tente »,
dans l’it. pastoia) par un changement de puis « tenture », xrr1°, d’où « sorte d’éten-
suff. avec -ura. dard », spéc. dans la marine, xvie ; d'autre
PAULOWNIA, 1868. Mot à terminaison part «corps de bâtiment », xvie. Lat. päpi-
latine, sur le modèle de nombreux noms liônem, acc. de papilio, propr. « papillon »
bot., tiré de Anna Paulowna, nom d’une (v. ce mot), d’où, par comparaison, « ten-
fille du tsar Paul Ier (1754-1801), à laquelle te », sens attesté dès le r1v°s.
cette fleur fut dédiée. PAVOIS, 1336, « sorte de bouclier »,
PAUME. Lat. palma. Dominant dans d’abord aussi escu pavaiz (1337); ce mot
les parlers gallo-romans (a. pr. palma). It. ayant été employé dès le xvr® s. pour dési-
esp. palma. Comme terme de jeu, xIv° gner le bouclier sur lequel les Francs éle-
(Froissart) ; ainsi nommé, parce que le jeu vaient le chef qu’ils avaient élu comme roi,
de paume se jouait primitivement avec la Michelet en a formé la locution élever sur
paume de la main, cf. dans un texte latin le pavois ; d’autre part pavois, qui désignait
de 1356 lusus pilae cum palma ; V. palme. depuis le commencement du xvi® des bou-
—— Dér. : paumelle (serrurerie), 1314 ; em- cliers dont on garnissait certaines parties
paumer, xve, au sens fam. 1662 (Molière). d’un navire, a été pris ensuite dans le sens
de « tentures (servant spécialement à orner
PAUMELLE, sorte d'orge, 1611. Empr. un navire) », XVII® ; au XVII®S., COMIME ON
avec substitution de suff., du pr. paumola, se contentait quelquefois de soustraire
au moyen âge palmola, lat. palmula, propr. l’équipage à la vue de l’ennemi, on rempla-
« petite palme »; cette plante a été ainsi ça en partie les boucliers en bois par des
nommée à cause de la forme de l’épi. toiles tendues, qui devinrent par la suite
PAUMELLE, terme de serrurerie, v. un ornement de parade. Empr. de lit.
paume. pavese (d’où aussi esp. pavés), qui semble
PAUPÉRISME, 1823 ; dit d'abord à pro- être propr. un adj. signifiant « de Pavie »;
pos du paupérisme en Angleterre. Empr. on suppose que ces boucliers auraient été
de l’angl. pauperism, lui-même dér. sav. primitivement fabriqués à Pavie, d’où ve-
du lat. pauper « pauvre ». naient déjà, aux xr1° et x111° s., des casques
(comp. dans les chansons de gestes les
PAUPIÈRE. Lat. palpetra, attesté chez hiaumes de Pavie). — Dér. : pavoiser, XIV®
Varron, à côté du lat. class. palpebra.
(Froissart) ; d’abord paveschier, id., au
PAUPIETTES, terme de cuisine, 1767, sens de « protéger avec des pavois »; on
aussi poupieites, dès 1691, dér. de l’anc. comprend par la suite sous ce terme l’ac-
fr. polpe « partie charnue », qui représente tion de garnir un navire de tentures avec
le lat. pulpa, v. pulpe. La substitution de celle de hisser les pavillons. et, avec la dis-
-au- à -ou- provient peut-être de paupier, parition des toiles tendues autour du na-
forme des patois de l'Est pour papier, les vire, dans la 1re moitié du xIX® Ss., pavoiser
paupiettes étant enveloppées de papier. finit par rester attaché à cette dernière
PAUSE, 1530. Empr. du lat. pausa (du action seule; de là pavoisement, 1845,
grec pausis). Comme terme de musique comme terme de marine ; pavois «ensemble
(1671), peut venir de l’it. pausa, également des pavillons », 1874.
repris au lat. et qui a recu ce sens spécial, PAVOT, xirre. Issu, par substitution de
d’où pauser, 1690. Se pauser « cesser de suff., de pavo (xri°, Chrestien), lat. pop.
crier » dans un texte du xv® dérive de l’a. *papavus, altération du lat. class. papauer.
fr. pose « repos » et est écrit avec au
d’après le lat. pausa. PAYER. Lat. pacare « pacifier » (de pax,
PAUVRE. D'abord poure au moyen âge ; päcis « paix »), qui a pris au 1v®s. le sens
pauvre à partir du xvie d’après l’ortho- d’ « apaiser », d’où, dans les langues
graphe du mot latin. Lat. pauper. L’expres- romanes, « satisfaire, payer ». Les sens
sion pauvre d’espril, qui dans Matthieu, V, 3, d’ « apaiser, satisfaire » sont encore fré-
signifie « qui a l’esprit de pauvreté » (on quents en a. fr., qui dit d’abord soudre
traduit aussi « Heureux les pauvres en pour « payer » (lat. solvere). Le sens de
esprit ») a pris le sens de « qui a peu d’in- « payer » paraît s'être développé d’abord
telligence ». — Dér. et Comp. : pauvret, dans les pays méridionaux et n'apparaît
xinie (écrit povrel) ; appauvrir, 1125, d’où en fr. que vers 1170. — Dér. et Comp. :
appauvrissement, 1333. payable, 1255, d’où impayable, 1672 (Mo-
lière), une première fois au xIv°; paie,
PAUVRETÉ. D'abord povrelé. Lat. pau- vers 1170 ; paiement, vers 1170, d’où non-
perlälem, acc. de paupertaäs. paiement, 1752; payeur, xrr1°; impayé,
PAVANE, 1530. Empr. de l’it. pavana, 1838.
pour danza pavana « danse padouane », la PAYS. Lat. de basse ép. pagè(n )sis, em-
ville de Padoue s’appelant Pava dans le ployé par Grégoire de Tours au sens d’ «ha-
dialecte régional. — Dér. : pavaner (se), bitant d’un pägus (qui a chez César le sens
1611 (se paonner, 1544). . de « canton ») », et qui a dû prendre aussi
PAVER, xxre. Du lat. pop. *pavuäre, lat. celui de « territoire d’un pägus ». À pris
pavtre « niveler le sol », cf. a. pr. pavar. au xvii® le sens fam. de « personne du
— Dér. : pavage, 1331 ; pavé, 1312; pa- même pays » (relevé en 1640, une 1re fois
veur, 1260 ; dépaver, xrri° ; repaver, 1335. le fém. payse en 1512), cf. : « Pays est
471 PÉDANT

aussi un salut de gueux, un nom dont ils PÉCHEUR. Lat. eccl. peccatorem, acc.
s’appellent l’un l’autre quand ils sont du de peccätor, dér. de peccäre, au sens chré-
même pays », 1690 (Furetière), d’où le tien, v. pécher. L'a. fr. a possédé aussi un
fém. payse, 1765-70 (J.-J. Rousseau). — cas sujet pechiere, et le fr. pécheresse,
Dér. : paysage, 1549, d’abord t. de peintre, xX1I11°, a remplacé pecheriz, lat. eccl. pecca-
d’où paysagiste, 1651; paysan; d’abord tricem, acc. de peccätrix. Les parlers méri-
paisenc, x1i1*, avec le suff. -enc d’origine dionaux emploient les formes avec le suff.
germ., rapidement changé en paisant, en- d’ancien nom. -aire (v. pêcheur), pecaire,
core au xv°, puis paysan ; le fém. a d’abord pechaire comme exclamations au sens
été paisante et paisande, qu’on trouve en- d’ « hélas ! Mon Dieu ! etc. », qui se disent
core au xvi°; la prononciation dialectale aussi dans le français local.
pézan, encore usitée dans le Centre et
l'Ouest, était admise au xvrie s.; paysan PÊCHEUR. Lat. piscälôrem, acc. de pis-
signifie souvent au moyen âge « homme cätor. A. pr. pescador ; aujourd'hui, les
d’un pays »; d’où paysannerie, 1668 (pay- patois provençaux emploient l’ancien no-
santerie au xvi°); dépayser, 1220, d’où minatif pescaire (de -ator), quand il s’agit
dépaysement, 1838; arrière-pays, 1959, d’un individu qui pêche sans que ce soit
qui a remplacé hinterland, en usage en son métier, tandis que pescadour, l’ancien
franc. dp. 1907. accusatif, désigne le pêcheur de profession.
PÉCORE, 1512 (aux xvie-xvire aussi
PÉAGE. Très ancien dér. de pied, formé « pièce de bétail »). Empr. de l’it. pecora
probabl. dans la langue de l’administration « brebis », d’où « sot, niais », lat. pop.
dès l’époque carolingienne, propr. « droit pecora plur. pris comme subst. fém. de
de mettre le pied », dér. de pés, pedis pecus, pecoris « bétail » ; v. le suiv.
« pied ». — Dér. : péager, vers 1210.
PECQUE, 1630. Empr. du prov. peco,
PEAU. Lat. pellis, propr. « peau d’ani- fém. de l’adj. pec « sot, niais », qui est le
mal », qui, dans le parler pop., a éliminé lat. pecus, pris comme terme d'’injure, v.
culis « peau d'homme ». — Dér. : peaussier, le préc.
fin x111°, d’où peausserie, 1723 ; pelletier,
x11°, d’après la forme ancienne pel, d’où PECTINÉ, 1735. Terme techn., empr.
pelleterie, 1202. — Comp. : oripeau, x11° du lat. pectinalus « en forme de peigne
(sous la forme oripel), comp. avec l’anc. (pecten) ».
adj. orie « d’or, doré » (empr. du lat. au- PECTORAL, xvi® (Paré, au sens mo-
reus), comme oriflamme ; devenu rapide- derne ; une première fois, au xv®, dans un
ment masc. par oubli de la composition sens fig.). Empr. du lat. pectoralis, dér. de
et sous l'influence de la terminaison, cf. pectus, pecloris « poitrine ». Au sens d’orne-
lat. médiéval auripellum ; désignait spé- ment ecclésiastique, 1355, empr. du lat.
cialement en a. fr. des ornements sur les médiéval pectorale.
boucliers ; sens péj. à partir du xvire. PÉCULAT, 1530. Empr. du lat. pecula-
PÉCARI, 1699 (1640 pacquire). Empr. lus, dér. de peculari « être concussionnaire »,
de begare, mot de la langue des Caraïbes de péculium, v. le suiv.
du Venezuela ou des Guyanes. PÉCULE, vers 1300. Empr. du lat. pe-
PECCADILLE, xvie; d’abord peccatile, culium, dér. de pecunia, v. le suiv.
au masc., genre encore attesté au xvrie. PÉCUNE. S’employait encore comme
Empr. de l'esp. pecadillo, dim. de pecado archaïsme plaisant jusque vers 1930 ; vers
« péché ». Le changement de genre est dû 1120 (d’abord sous la forme pecunie) ; pécu-
à la forme de la terminaison. niaire, x111°; pécunieux, 1370 (Oresme).
PECCANT, dans l'expression humeurs Empr. du lat. pecunia (dér. de pecus « bé-
peccantes, 1314. Empr. du lat. peccans, tail », qui constituait dans la Rome primi-
part. prés. de peccare « pêcher, être défec- tive la richesse, v. fief), et des dér.
tueux », par l'intermédiaire du lat. médical pecuniarius «relatif à l’argent », pecuniosus
du moyen âge. « qui a beaucoup d'argent ».
PÊÉCHE, fruit. Lat. pop. persica, plur. PÉDAGOGUE, xive (Oresme : écrit pe-
neutre pris comme subst. fém. du lat. dagoge) ; pédagogie, 1495. Empr. du lat.
class. persicum (malum ou pomum) « (pom- pædagogus (du grec paidagôügos, littér. « qui
me, fruit) du pêcher » ; l’arbre se disait en conduit les enfants (pais, paidos) », ce mot
lat. persica arbor, propr. « arbre de Perse », ayant d’abord désigné des esclaves chargés
ainsi nommé à cause de sa provenance. de conduire les enfants à l’école) et du grec
V. alberge. L’angl. peach vient du fr. — paidagôgia. — Pédagogique, 1702, du grec
Dér. : pêcher, arbre, x11°. paidagôgikos.
PÉCHÉ. Lat. peccätum « faute », qui a PÉDALE, 1560, au sens de « pédale
pris dans le lat. eccl. le sens partic. de d'orgue ». Empr. de l’it. pedale, lat. pop.
« faute contre la loi religieuse ». pedäle, neutre pris comme subst. de l’adij.
pedalis « relatif au pied ». — Dér. : pédaler,
PÉCHER. Lat. peccäre « commettre une vers 1890. Pédalier, 1877.
faute » ; même développement de sens que PÉDANT, 1566 (H. Estienne) : « J’enten
dans peccatum. pedant en sa propre signification et non
PÉCHER, verbe. Lat. pop. “*piscäre, comme ils en usent par dérision »; le
lat. class. piscärt. — Dér. et Comp. : théâtre a beaucoup contribué au succès de
pêche, 1261 ; pêcherie, vers 1155 ; repêcher, ce sens, cf. le Pedant joué de C. de Berge-
TL rac, etc. ; le sens propre de « maître d'école,
PÉDANT 472

pédagogue » est cependant encore usuel au repris au latin. Les sens affaiblis de « tra-
xviI1e ; pédantesque, 1558 ; a suivi le déve- vail, fatigue, difficulté » apparaissent de
loppement sémantique de pédant. Empr. bonne heure et se sont répandus dans tous
de l’it. pedanie, et du dér. pedantesco. Pe- les parlers gallo-romans. La locution à
dante paraît bien avoir été fait sur le grec peine a des correspondantes dans les lan-
paideuein « éduquer » (on prononçait alors gues voisines : it. appena, esp. a penas. —
pè- ; la prononciation érasmienne n’a triom- Dér. : peinard 1881, Père-Peinard, fin du
phé qu’au xvri). — Dér. : pédanterie, xixe (vers 1890, il y a eu un journal anar-
1560, peut-être empr. de l’it. pedanteria; chiste Le Père Peinard qui a contribué à la
pédantisme, 1580 (Montaigne). diffusion du mot), terme pop. signifiant
PÉDÉRASTE, xvic; pédérastie, 1581 «tranquille, qui ne se fait pas de bile, etc. »,
(Bodin). Empr. du grec paiderastés (de par antiphrase de penard, fin xvi® (d’Au-
pais, paidos « enfant » et de erdn « aimer »), bigné), « vieillard usé et grincheux », encore
paiderastia. dans l’argot de la 2e moitié du xIx® &.;
peiner, x° (Fragment de Valenciennes) ;
PÉDESTRE, xve s. Empr. du lat. pedes- penaud, 1544 (B. Despériers), propr. « qui
ter, dér. de pes, pedis « pied ». est en peine » ; a remplacé peneux au même
PÉDICURE, 1781. Comp. avec les mots sens (qui signifie en outre en a. fr. « péni-
lat. pes, pedis « pied » et curare « soigner ». ble »); pénible, 1580 (Montaigne), au sens
moderne ; auparavant et depuis le xrre
PEDIGREE, 1828. Empr. de l'angl. pe- signifie « dur à la peine ».
digree, qui passe pour être une altération
du fr. pié de grue ; ainsi nommé parce qu’il PEINTRE. Lat. pop. *pincior, réfection
désignait à l’origine une marque faite de du lat. class. pictor, d’après pingere « pein-
trois petits traits rectilignes, dont on se dre ». L’a. fr. a employé aussi jusqu'au xv®
servait dans les registres officiels d’Angle- peintor, etc., qui représente l’acc. *pinclo-
terre pour indiquer les degrés ou les rami- rem, et en outre peignor, etc., refait d’après
fications d’une généalogie. le radical peign- de formes de peindre.
PÉDONCULE, 1748. Empr. du lat. pe- PEINTURE. Lat. pop. pinctüra, lat.
dunculus, plus rare que pediculus, dim. de class. pictüra, v. le préc. — Dér. : peinturer,
pes, pedis « pied ». xiie, d’où peinturage, 1791, peintureur,
1792, peinturlurer, 1743 (p. passé dès 1628),
PEDZOUILLE, 1878, d’abord pezouille déformation fantaisiste faite probabl.
« paysan, rustre » (en 1800). Semble être d’après turelure, facilitée par l'identité
un emploi plaisant du méridional pezouy de la première syllabe de ce mot avec la
« pou »; l’initiale rappelle pétrousquin, de dernière syllabe de peinture, la peinturlure
formation obscure. étant par rapport à la peiniure à peu près
PÉGASE, 1564. Nom propre, en lat. ce que la turelure est par rapport à l’art
Pegasus (du grec Pêgasos), cheval ailé qui du chant.
fit jaillir d’un coup de pied la source Hip- PÉJORATIF, 1794. Dér. sav. du lat.
pocrène, où l’on puisait l'inspiration poé- de basse ép. pejorare « rendre pire ».
tique ; déjà au sens figuré dans les langues
anc. PÉKIN « sorte d’étoffe de soie », 1759
(Raynal) : « Valence fabrique des pékins
PÈGRE, 1797. Paraît empr. de l'argot supérieurs à ceux de la Chine même »).
marseillais pego « voleur des quais », propr. Tiré de Pékin, nom de la ville de Chine,
« poix », cf. pour le sens poissard. où cette étoffe se fabriquait à l’origine.
PEIGNE, xr1°. Réfection de pigne, qui a PÉKIN (« civil » argot militaire), fin
subsisté jusqu’au xvi*, d’après peigner. xvine. Écrit aussi péquin. Probabl. empr.
Lat. peclinem, acc. de pecien. It. pettine, du pr. pequin « malingre » qui correspond à
esp. peine. — Dér. pignon (t. de mécan.), l'esp. pequeño « petit », représentant un
1332 (alors peignon), à comparer l’all. radical pekk-, qui existe à côté de pikk-,
Kamm, même sens. d’où it. piccolo ; introduit dans l’argot des
PEIGNER. Souvent pigner au moyen armées révolutionnaires par des soldats
âge d’après pigne « peigne » et les formes du Midi.
accentuées du verbe. Lat. pectinäre, dér. PÉKINOIS, 1923. Cette race de chiens
de pecien, v. le préc. — Dér. : peigné, introduite d’abord en Angleterre, a été
subst., terme de tissage, 1842; peignée, appelée d’après le nom de la ville de
terme familier au sens de « rossée », 1808 ; Peking.
peigneur, 1410, mais le fém. pinerece déjà
en 1243; d’où peigneuse, 1800 ; peignoir, PELAGE, v. poil.
1534 (Rab.) ; a désigné antérieurement une PELER. Lat. piläre « enlever le poil »,
sorte de peigne, xv® (écrit peignouer), sens dér. de pilus « poil ». Le sens d’ « enlever
encore relevé dans les dict.; peignure, la peau » s’est développé en partie sous
xvIIe ; dépeigner, fin xIx°. l'influence de pel, forme ancienne de peau ;
PEIGNIER, marchand, fabricant de pei- il est inutile de distinguer deux verbes.
gnes. Lat. pectinärius. Dominant aujourd'hui dans les parlers
gallo-romans, mais fortement concurrencé
PEINDRE. Lat. pingere. It. pingere. NV. par le type plumer. V. poil. Dére
dépeindre, etc. — Dér. : repeindre, 1290. pelade, 1545; pelard, dans bois pelard,
PEINE. Lat. pœna (du grec poiné « châ- 1611; pelure, xrre.
timent »), d'où « chagrin » à l’époque impé- PÈLERIN. Lat. de basse ép. pelegrinus,
riale. It. esp. pena. Le sens juridique est lat. class. peregrinus, « étranger, voya-
473 PENDULE

geur » qui a dû prendre le sens nouveau PELVIEN, 1812. Dér. sav. du lat. pelvis
de « pèlerin » dans le lat. eccl. du haut « bassin de métal », pris par comparaison,
moyen âge ; signifie aussi « étranger » par comme bassin, terme d'anatomie, et, sans
latinisme au xvie. L’all. Pilger, Pilgrim et doute, à l’imitation de cet emploi.
l’angl. pilgrim viennent de la même forme
lat. pelegrinus. — Dér. : pèlerinage, xr1°; PEMMICAN, 1836. Empr. de l’angl.
pèlerine, sorte de vêtement, 1813. pemmican, empr. lui-même de la langue
des Algonquins (Canada).
PÉLICAN, 1210. Empr. du lat. pelicanus PENAILLE, v. pan.
(en outre pelecanus, du grec pelekan).
PÉNAL, vers 1550. Empr. du lat. pænalis
PELISSE, vers 1170. Lat. de basse ép. au sens jurid. (de pœna, v. peine). — Dér. :
pellicia, dér. de l’adj. pellicius « de peau, pénalité, 1803 (du x1v° au xvie s. au sens
de fourrure » (de pellis « peau »). de « souffrance »).
PELLAGRE, 1810 ; comp. sav. du lat. PÉNALISER, fin xixe, pénalisation,
pellis « peau » et du grec agra « action de id. Empr. de l’angl. {o penalize, penalization,
saisir ». termes de sport. Aujourd’hui aussi penalty,
PELLE. Lat. päla. It. esp. pala. Depuis empr. de l’angl. penalty.
la fin du xir1° on trouve une forme pale, PÉNARD, v. peine.
au sens de « partie plate de l’aviron », puis
avec d’autres sens techniques ; cette forme PÉNATES, 1488. Empr. du lat. penales
est vraisemblablement d’origine dialectale « dieux protecteurs du foyer », d’où le sens
(soit du prov. pala, soit d’un parler de figuré de « foyer domestique, habitation »,
l'Ouest) ; de cette forme a été tiré empale- déjà latin.
ment « vanne d’écluse », 1775 (en 1750 PENAUD, v. peine.
empellement d’après pelle). — Dér. : pale-
ron, vers 1250 ; palet, 1375 ; ainsi nommé PENCHER. Lat. pop. *pendicäre, dér.
à cause de sa forme ; palette, xr11° ; comme du lat. class. pendere « pendre ». — Dér. :
terme de peinture, 1615 ; au sens vieilli de penchant, subst., 1642 ; penchement, 1538.
« petite écuelle d’étain », c’est une altéra- PENDELOQUE, 1640. Altération, par
tion, d’après palette, de l’a. fr. paeleite croisement avec breloque, de pendeloche,
(dim. de paele, v. poêle) ; les deux dim. se x111°, dér. de l’anc. verbe pendeler « pen-
sont confondus de bonne heure; pelletée, diller », dér. lui-même de pendre, v. effi-
1690; les dict. donnent aussi pellée, x1°, locher.
et pellerée, 1534 (alors sous la forme palerée).
PENDENTIF, 1567. D'abord terme d’ar-
PELLICULE, 1503. Empr. du lat. pelli- chitecture ; récent pour désigner une sorte
cula « petite peau » en vue d’un sens techn. de bijou. L’orthographe montre que ce
PELOTARI, fin xix°. Empr. du basque, mot a été formé sur le lat. pendens, pen-
qui a formé ce mot avec deux éléments dentis, part. prés. de pendere « pendre » et
non sur le fr. pendant.
empr. pelot-, v. le suiv., et le suff. -ari,
lat. -arius. PENDRE. Lat. pop. *pendère, lat. class.
pendere. La locution pendre à l'œil, déjà
PELOTE, vers 1150. Lat. pop. *pilolla, attestée au x1r1°, est probablement faite
dim. de pila « balle ». — Dér. : peloter, sur le modèle de pendre au nez; on a dit
vers 1280, propr. « manier la balle », aussi pendre devant les yeux, x1v®, encore
cf. l'expression aujourd’hui figurée peloter chez Voiture. V. pencher. — Dér. et Comp. :
en attendant partie, d’où les sens familiers pendable, 1283 (Beaumanoir) ; pendaison,
de date récente, d’où pelotage, 1866 (Gon- 1656; pendant, 1° adj. et subst., xrre;
court, déjà chez Saint-Simon dans un 2° prép., issue de l’adj. au xrve (cf. alors
sens figuré), peloteur, 1874, au sens mo- le terme pendant, le temps pendant, le siège
derne; peloton, 1435 « petite pelote »; au pendant, etc.), sur le modèle de l’emploi
sens de « groupe de personnes » et spéc. de pendens dans le latin de la procédure ;
« de soldats », fin xvi® (d’Aubigné) ; d’où de l’adj. est issu aussi cependant, 1309,
pelotonner, 1617. cf. chez Joinville fout ce pendant, v. du-
rant ; pendard, 1380 (au sens de « bour-
PELOUSE, xvrre (Saint-Amant). Forme reau »; sens moderne, xvi*); penderie,
dialectale ; probabl. empr. du pr. pelouso, 1539 ; pendeur, vers 1260 ; pendiller, xrr1°
fém. pris subst. de l’adj. pelous « poilu », (Rose) cf. fendiller ; pente, 1335, qui re-
lat. pilôsus (de pilus « poil »), par compa- monte au fém. d’un part. *penditus, dis-
raison d’un terrain couvert de gazon avec paru avant les premiers textes, d’où pen-
un corps velu, couvert de poils. ture, terme technique, 1294, contrepente,
PELUCHE, 1591. Dér. du verbe a. fr. 1694 ; dépendre, x11° ; rependre, 1315. V.
pelucher « éplucher » (encore dans les pa- pendentif, soupente.
tois), qui représente un lat. de basse ép. PENDULE, m. 1656; f. 1664, d’abord
*pilüccare issu par syncope de *pilücicare, funependule, 1646, chez le P. Mersenne :
lequel est un fréquentatif de “*pilücare; (« Au sieur Huggens, Hollandais, grand
celui-ci, conservé à Toulouse sous la forme mathématicien, inventeur de l'horloge de
peluga « éplucher », est dér. de pilare la pendulle », Comptes des bâtiments du roi).
(v. peler) sur le modèle de manducare Empr. du lat. des savants funependulus
(v. manger). — Dér. : pelucher, 1798; pe- « suspendu à un fil », de l’adj. lat. pendulus
lucheux, 1822. « qui est suspendu » (de pendere « pendre »)
PENDULE 474

dû à l'inventeur du pendule, Galilée (1629). non, xire, «sorte de drapeau » (parfois écrit
Le fém. est issu de l'expression une horloge panon, pannon) ; penon n'existe plus dans
à pendule, d’où une pendule. — Dér. : la langue générale, de là l’hésitation de la
pendulette, fin x1x° ; pendulier, 1836. graphie, mais panonceau garde la pronon-
ciation ancienne; panneton, 1581, dér.
PÊNE. Altération de péle (d’abord pesle), diminutif de penon, à cause de la ressem-
forme usitée jusqu’au xvrie : « On dit pêne
blance de la forme des deux objets.
ou pêle, mais le plus usité de ces deux,
c’est pêle » (Richelet). Péle représente le PÉNOMBRE, 1666. Empr. du lat. scien-
lat. pessulus « verrou » (du grec passalos tifique paenumbra, créé par Kepler (1604)
« cheville, etc. »). Des représentants du avec le lat. paene « presque » et umbra
mot lat. n’ont été relevés dans d’autres « ombre » pour désigner la zone de la lune
pays romans que dans les dialectes. où la lumière du soleil est interceptée
seulement en partie.
PÉNÉTRER, 1314; pénétrable, 1370
(Oresme) ; pénétration, id. Empr. des mots PENSER. Lat. pensäre, propr. « peser,
lat. penelrare, penelrabilis, penelralio (eréé juger », fréquentatif de pendere « peser » ;
à basse époque). a dû prendre à basse ép. le sens de « pen-
ser », cf. de même it. pensare, eSP. pensar;
PÉNIBLE, v. peine.
n devant s tombant normalement et pefn )-
PÉNICHE, 1818. Empr. de l’angl. pin- säre étant représenté par peser, la forme
nace, empr. lui-même du fr. pinace, pi- penser n’est explicable que comme venant
nasse ; celui-ci, relevé en 1461 sous la de la langue écrite : mais, comme le sens
forme pinace (souvent altérée au xv®e et de « penser » n’y est pas attesté, il en
au xvi* en espinace, -asse), plus usité dans résulte que pensare a été repris à basse
l’ancienne marine qu'aujourd'hui, est pro- époque à la langue écrite dans les milieux
babl. empr. de l’esp. pinaza (dér. de pino savants et qu’il a pris rapidement le sens
« pin ») ; était particulièrement usité sur les de « penser ». Panser n’est qu’une spéciali-
côtes de l’Atlantique, où il survit encore. sation de penser ; on a dit d’abord penser
PÉNICILLINE, 1949. Dér. savant du de, c’est-à-dire « s'occuper de, soigner »,
lat. penicillus « pinceau », à cause de la dès le x1ve, cf. en après pense de la plaie,
forme de la moisissure dont provient cet H. de Mondeville, et penser sans prép. au
antibiotique. sens de « soigner », du xIv® au xvi®; on a
utilisé, à partir du xvr®, la double ortho-
PÉNIL. Lat. pop. “*pectiniculum, dim. graphe pour distinguer les sens par la
de peclen « peigne » (déjà employé au sens forme ; la graphie panser au sens de « pen-
de « pénil » par Juvénal, VI, 370), ainsi dit ser », apparaît au xIII*, mais penser « pan-
par comparaison des poils du pénil avec ser » est encore usité au xvrI® ; on trouve
les dents d’un peigne. A. pr. penchenilh. en outre dès le xI11° s. ({pencer) pancer,
L’it. a formé un dér. analogue pettignone. même au sens de « penser » ; en dehors du
PÉNINSULE, 1518. Empr. du lat. paen- sens médical (le mot signifie encore « médi-
insula « presqu'île ». — Dér. : péninsu- camenter » au xvri*), panser s'emploie au
laire, 1836 ; une première fois en 1556. sens restreint d’ « étriller un cheval » ; d'où
PÉNIS, 1618. Empr. du lat. penis « queue pansement, 1611 (écrit pensemeni). Pan-
(des quadrupèdes) ». sage, 1798. — Dér. : pensée, « ce qu'on
PÉNITENT, x1v°; pénitence, xr° (Alexis); pense », vers 1165 (auparavant pensé), d’où
pénitentiel, xvi°, en outre -al, xrve, emploi arrière-pensée, 1798 (une 1'e fois en 1587).
plus restreint. Empr. de pænilens (de pæni- Pensée, espèce de fleur, 1512 (était consi-
lere « se repentir »), pænitentia, au sens que dérée comme le symbole du souvenir, cf.
ces mots ont pris dans le lat. eccl. et de herbe de la pensée, xvi®, et l’angl. heari-
pænitentialis, créé dans ce latin. L’a. fr. a ease, littéral. « aise du cœur ») ; pensement
employé parallèlement des formes franci- « action de penser », xII°; penser, subst.,
sées peneanl, peneance (et un verbe très XII°; penseur, xir1®, mais n'est devenu
rare peneir). — Dér. de pénitence : péni- usuel qu’au xviui°; pensif, x1° {Alexis);
tencier, 1838, au sens moderne ; a été formé repenser, vers 1185 ; impensable, fin xix°.
au moyen âge d’après le lat. médiéval V. guet-apens.
pænilentiarius, comme terme eccl., encore PENSION, vers 1225, au sens de « paie-
relevé dans les dict. ; pénitentiaire, 1835; ment », d’où celui de « gages, etc. », encore
d’abord subst. au sens du préc., 1806. au xviie ; le sens de « somme annuelle ver-
PENNE. Au moyen âge aussi « plume sée régulièrement par l’État, comme ré-
pour écrire ». Réfection, d’après le lat., compense de services rendus » apparaît
d’une forme pop. panne, rarement attes- vers Le xv® ; celui de « somme versée pour
tée, lat. penna ; mais il est impossible de l'entretien d’un enfant », au xvire, d'où
dater cette réfection, car penne, au moyen « maison d'éducation », vers le xvrrre.
âge, peut n’être qu'une variante graphique Empr. du lat. pensio au sens de « paie-
de panne. Ce mot est du reste peu popur- ment », dér. de pensus, part. passé de
laire; il a été éliminé en gallo-roman par pendere « payer ». — Dér. : pensionnaire,
plume et ne survit qu’en quelques points 1323, développement de sens parallèle au
de la Wallonie. — Dér. : pennage, 1552 simple ; pensionnat, 1788; pensionner,
(Rab.) ; panonceau, d’abord penoncel, xue : vers 1340 ; rare avant le xvirre.
au moyen âge signifie « écusson d’armoi- PENSUM, 1743. Empr. du lat. pensum
ries »; apparaît au xvi® avec un sens « tâche, devoir » en vue d’un sens spécial g
lig. proche du moderne; dér. de panne, pour l'emploi de mots latins dans la langue
penne par l’intermédiaire de penon, pen- des collèges. v. accessit.
475 PERCOLATEUR

PENT(A)-. Premier élément de mots PÉPLUM, 1581; rare avant le xixe.


sav. comp., tels que pentaëdre, 1823, tiré Empr. du lat. peplum (du grec peplon,
du grec penle « cinq », ou de mots empr., forme également admise dans nos dict.).
tels que pentagone, 1520 (déjà 1377, PEPSINE, 1855. Dér. sav. du grec pepsis
Oresme).
« digestion », proprement « cuisson » (de
PENTE, v. pendre. pessein « cuire, faire digérer »).
PENTECOTE. Lat. eccl. penltecosle, du PERCALE, 1701. Empr., par l’intermé-
grec pentekosié (sous-entendu hémera «jour ») diaire de l’Inde, du mot turco-persan pàr-
« cinquantième jour après Pâques », fait gâlä (en persan pergäle signifie « lam-
sur le modèle de l’hébreu scheba‘oth « fête beau »). — Dér. : percaline, 1829.
des semaines ou Pentecôte », dér. de scheba‘ PERCEPTEUR, 1789 (une 1re fois en
« sept »; après avoir désigné dans les Sep- 1432) ; perception, terme de finances,
tante la Pentecôte juive, a servi à désigner 1370. Le premier est un dér. sav. de
la fête chrétienne, à cause de la coïncidence perceplus, part. passé de percipere, au
des dates, v. pâques, cf. aussi Acies des sens de « recueillir », pour servir de nom
Apôtres, II, 1 : « Le jour de la Pentecôte, d'agent à percevoir « recueillir l'impôt » et
ils étaient tous ensemble, dans le même à perceplion (le lat. très rare percepior ne
lieu. » Le lat. eccl. a traduit aussi le grec signifie que « qui apprend ») ; le second est
par quinquägésima, qui a donné un certain empr. du lat. perceplio « action de recueil-
nombre de formes romanes, dont il ne reste lir » pour servir de nom d’action au même
aujourd’hui que le wallon cincwème et le percevoir, V. le suiv.
rhéto-roman {schunqueisma.
PERCEPTIBLE, 1372; perception, 1611
PÉNULTIÈME, 1260. Empr. du lat. (au sens philos.). Empr. des mots lat. per-
pænullimus (de pæne « presque » et ultimus ceplibilis, perceplio, qui ont déjà un sens
« dernier »), avec terminaison francisée philos. (de percipere au sens de « saisir
d’après celle des adjectifs ordinaux. par l’esprit »). Perception a déjà été empr.
au moyen âge et au xvi® avec d’autres
PÉNURIE, 1468; rare avant le xvrrre. sens. V. imperceptible. — Dér. de l’adij. :
Empr. du lat. penuria. perceptibilité, 1760.
PÉOTTE, gondole de l’Adriatique, 1687. PERCER. Lat. pop. *perlüsiäre, dér.
Empr. de l’it. peotla, peota, mot d’origine de perläsus, part. passé de perlundere
vénitienne, correspondant à l’it. commun « trouer ». Les formes accentuées pertluise
pedoita, v. pilote. (indic. prés.), lat. *perlüsiat, etc., ont donné
PÉPERIN, sorte de roche volcanique, naissance à perluisier, etc., usuel jusqu’au
1694. Empr. de l’it. peperino, lat. de basse xvie, et encore répandu dans les patois,
ép. piperinus (sous-entendu lapis ; dér. de d’où le substantif pertuis, x11°, également
piper « poivre »}, de même sens, littér. répandu dans les patois au sens de « trou,
« parsemé de grains semblables à ceux du passage » (a. pr. pertuzar, perluis). — Dér.
poivre ». et Comp. : perce, 1493 ; percée, 1750 ; per-
cement, 1500; perceur, 1606; perçoir,
PÉPIE. Lat. piluila, propr. « pituite », vers 1200 ; repercer, 1549; perce-neige,
devenu en lat. pop. *püllita (cf. battre), 1660 ; perce-oreille, 1530 (écrit persoreille) ;
puis *pippila par assimilation, d’où pipie transpercer, x11°, aussi frespercier jusqu’au
dans certains parlers gallo-romans, pipila XVI.
en it. ; la forme pépie est. née d’une dissi-
milation des deux i, comp. lat. divinare, PERCEVOIR, xr1°. Réfection de l’anc.
fr. deviner. Pippila est aussi à la base de perçoivre, lat. percipere « saisir par les sens,
l’all. Pips, et de l’angl. pip. comprendre »; le sens de « recueillir les
impôts » qui paraît dès 1377 (au xrr1e et
PÉPIER, vers 1550. Une forme pipier au xive s. on dit apercevoir) est repris au
est attestée du xive au xvi® s. Verbe lat. percipere, qui a reçu ce sens à l’époque
onomatopéique. — Dér. : pépiement, vers impériale. — Comp. : apercevoir, vers 1080
1840 (une 1'° fois en 1611). (Roland), d’où aperception, xviI*, créé
par Leibniz; aperçu, subsi., 1760 ; ina-
PÉPIN, x11e. Dans les patois aussi pipin, perçu, adj., 1782.
pimpin, papin, pupion, etc. Mot de créa-
tion romane (aussi esp. pepila, it. pippolo), PERCHE, poisson. Lat. perca (du grec
où la répétition du p doit exprimer l’exi- perké). Port. perca ; rare ailleurs.
guité de l’objet, v. aussi pelil et cf. le lat.
pipinna « verge de petit garçon ». — Dér. : PERCHE « longue pièce de bois ». Lat.
pépinière, 1538, pépiniériste, 1690. pertica. It. perlica, esp. pértiga. — Dér. :
percher, 1314, d’où percheur, terme d’orni-
PÉPIN « parapluie » dans la langue fam., thologie, 1836 ; perchis, terme de sylvicul-
xix€. Serait ainsi nommé d’après Pépin, ture, 1701; perchoir, 1584, au sens de
nom d’un personnage qui entrait en scène « sorte d'étagère », 1402 (écrit percheur).
armé d’un grand parapluie dans un vaude- PERCHERON, 1842. Propr. « originaire
ville joué en 1807 aux Variétés, Romain- du Perche ».
ville ou la Promenade du Dimanche, v.
riflard. PERCLUS, 1420. Empr. du lat. perclusus
part. passé de percludere « obstruer ».
PÉPITE, 1729; d’abord pepilas, 1649,
dans un récit de voyages. Empr. de l’esp. PERCOLATEUR, 1856. Terme techn.,
pepila, propr. « pépin », v. pépin. dér. sav. de percolare « filtrer ».
PERCUTER 476

PERCUTER, 1825; une première fois PERFORER, xrie. Perforation, xive.


en 1610 (Quand... l'air est perculé) ; per- Empr. des mots lat. perforare, perforatio
cussion, vers 1330, rare avant le xvrre. (propre à la langue médicale). — Dér. :
Empr. du lat. percutere « frapper forte- perforateur, -atrice, 1832.
ment »,percussio. — Dér. : percuteur, 1868.
PERFORMANCE, 1839. Empr. de l’angl.
PERDITION, vers 1080 (Roland, au sens performance, empr. lui-même de l’a. fr.
moral). Empr. en ce sens du lat. eccl. per- parformance « accomplissement », xvie,
dilio (de perdere « perdre »); le sens gén. dér. d’un verbe parformer « accomplir,
de « fait de perdre, de se perdre », xIII°, exécuter ».
vient du verbe perdre et non du lat. per-
ditio, très rare en ce sens. PERGOLA, début xx°; empr. de lit.
pergola (du lat. pergula).
PERDRE. Lat. perdere. It. perdere, esp.
perder. — Dér. perdable, xirri°, d’où PÉRI-. Premier élément de mots sav.
imperdable, 1721 ; perdant, subst., 1288 ; comp., tiré du préf. grec peri « autour »,
perdeur, 1838 (déjà du xIv® au xvi® s.); ou de mots empruntés tels que péricarpe,
perte, xie (Alexis), fém. pris substan- 1556, périmètre, 1541.
tivement du part. perditus disparu avant
les premiers textes; éperdu, xr1°, part. PÉRI, génie oriental de sexe féminin,
passé de l’anc. verbe soi esperdre « se début du xvrre (traduction des Mille et
troubler », encore usité au xvi* ; reperdre, une nuits de Galland). Empr. du persan
XII. peri, proprement « ailé ».
PERDREAU, xvit. Adaptation de per- PÉRICLITER, 1390. Empr. du lat. peri-
driau, antérieurement perdrial, xIx°; clitari, dér. de periculum, v. le suiv.
probabl. formation parallèle à l'a. pr.
perdigal, comp. du lat. perdix et de gallus PÉRIL, xe. La prononciation moderne
« coq », le coq et le jeune oiseau étant avec é et L est due à l’orthographe ; péril
davantage l’objet de la chasse que la avait anciennement une / mouillée que
femelle. Littré recommande encore. Empr. du lat.
peric(u )lum, propr. « essai, épreuve », d’où
PERDRIX. Issu d’une anc. forme perdis. « péril », seul sens conservé. V. danger.
Lat. perdicem, acc. de perdix. — Comp. :
œil-de-perdrix, sorte de cor, xIx®. PÉRILLEUX. Lat. peric{u )lôsus. Déve-
loppement en contact avec celui du mot
PÈRE. Lat. pater. Concurrencé par des
préc. It. periglioso, esp. peligroso, a. pr.
termes fam. V. grand, paternel, paternité.
perilhos.
— Par réduplication pépère, 1920 (comme
adj.). PÉRIMER, xv®, terme jurid. Empr. du
PÉRÉGRINATION, xn°. Empr. du lat. lat. jurid. perimere, propr. « détruire ».
peregrinatio, dér. de peregrinari « Voyager PÉRIODE, en parlant du temps, xive;
à l'étranger », v. pèlerin. périodique, id. Empr. du lat. de basse ép.
PÉREMPTOIRE, 1647, au sens moderne ; periodus, periodicus (du grec periodos, pro-
antér. terme jurid., 1283 (Beaumanoir), pr. « circuit », appliqué par suite au mou-
« relatif à la péremption, annulation par vement des astres et au retour des saisons,
prescription d’une procédure civile ». periodikos) ; d’où, en fr., « le plus haut
Empr. du lat. jurid. perempiorius (de point où une chose puisse arriver », xvI®,
perimere, V. périmer). en ce sens au masc. à partir du xvire,
d’après le genre du mot latin. — Dér. de
PÉRENNITÉ, xue. Empr. du lat. peren- l’adj. : périodicité, 1665.
nilas, dér. de perennis « continuel », propr.
« qui dure une année fannus) entière ». PÉRIODE, terme de rhétor., xvire (Bal-
zac). Empr. du lat. periodus (du grec perio-
PÉRÉQUATION, 1829 (une 1re fois en dos, par un développement de sens issu du
1521). Empr. du lat. jurid. peraequatio, précédent). — Dér. : périodique, 1634 ;
dér. de peræquare « égaliser ». À déjà été le lat. periodicus n’a pas ce sens.
formé au début du xIx®, comme terme de
mathém. au sens d’ « équation parfaite », PÉRIPATÉTIQUE, 1495. Empr. du lat.
d’après équation et le verbe latin. peripaleticus (du grec peripatétikos, de peri-
PERFECTIBLE, 1767 (Diderot). Dér. palein « se promener en conversant » ; mot
sav. du lat. perfectus « parfait », v. le sui- répandu par suite de l'emploi qui en fut
vant. — Dér. : perfectibilité, 1755 (J.-J. fait autour d’Aristote). — Dér. : péripaté-
Rousseau) ; imperfectible, 1823, imperfec- ticien, xive (Oresme); depuis la fin du
tibilité, 1823. XIX®, péripalélicienne se dit par plaisan-
terie d’une prostituée qui exerce son mé-
PERFECTION, xr°; signifie souvent tier en « faisant le trottoir » ; péripatétisme,
« achèvement » au xIve et au xve. Empr. 1660 (G. Patin).
du lat. perfectio, proprement «achèvement »,
dér. de perfeclus, part. passé de perficere PÉRIPÉTIE, 1643 (Corneille). D'abord
« achever ». — Dér. : perfectionner, xve, terme littéraire, concernant le théâtre ; au
perfectionnement, 1725. sens gén. 1762 (Voltaire : « En ma qualité
de faiseur de tragédies, j'aime beaucoup
PERFIDE, 1606; une première fois les péripéties »). Empr. par Corneille du
au x€ (Saint Léger). Perfidie, vers 1510. grec peripeleia, propr. « événement im-
Empr. du lat. perfidus, propr. « qui trans- prévu », au sens qu’Aristote lui a donné
gresse la foi (fides) », perfidia. dans sa Poélique, en parlant du théâtre.
477 PERQUISITION

PÉRIPHÉRIE, 1544; rare avant le dans un sens spécial : « qui a permission


XVIIIe, perifere, vers 1360. Empr. du lat. de du chantre de N. D. de tenir de petits
basse ép. peripheria (du grec peripheria pensionnaires » ; sens moderne, 1836.
« circonférence »). — Dér. : -ique, 1838.
PERMUTER, 1342. Permutation, vers
PÉRIPHRASE, 1548. Empr. du lat. 1180. Empr. du lat. permulare « changer »,
periphrasis (mot d'origine grecque). permutatio. — Dér. : -able, -abilité, 1836.
PÉRIPLE, 1629. Empr. du lat. periplus PERNICIEUX, 1314 Empr. du lat.
(du grec periplous, propr. « navigation perniciosus, dér. de pernicies « ruine, des-
autour », d'où « récit de navigation »). truction, etc. ».
Longtemps employé seulement en parlant
des anciens ; aujourd’hui de tout voyage PÉRONÉ, 1541. Empr. du grec peroné
de circumnavigation. « id. », propr. « agrafe, cheville ».
PÉRIR. La prononciation de l'é est PÉRONNELLE, 1672 (Molière). Tiré de
refaite sur celle du mot lat. Lat. perire (qui Perronnelle, nom d’une héroïne d’une chan-
servait de passif à perdere « perdre »). — son célèbre du xv° qui débutait ainsi :
Dér. : périssable, vers 1380, d’où impéris- « Av'ous point veu la Perronnelle que les
sable, 1528 ; périssoire, 1868. gendarmes ont emmenée ? »; au xvVII®S.
on signale des expressions qui en dérivent,
PÉRISCOPE, v. télescope. notamment la locution chanter la perron-
PÉRISTALTIQUE, 1618 ; péristole, 1752. nelle « dire des sottises », qui existe encore
Empr. du grec peristaltikos, peristolé (de dans le Bas-Maine au sens d’ « être gai »;
peristellein « envelopper »). cf. aussi le provençal cantar la peronelo
« parler pour rien, chanter ». Perronnelle
PÉRISTYLE, 1547. Empr. du lat. peris- est un nom de femme, qui remonte à
tylum (du grec perisiylon, de stylos « co- Pierre par les dérivés Perron, Perronnel ;
lonne »). ce nom peut venir aussi de Perronelle (qui
PÉRITOINE, 1541; péritonite, 1802 se dit « en quelques lieux », d’après Mé-
(Laënnec). Empr. du lat. médical perito- nage), nom d’une sainte du calendrier
næum (du grec médical peritonaion, littér. (31 mai), forme fr. du lat. de basse ép.
« ce qui est tendu autour », de periteinein) Petronilla.
et du lat. moderne peritonilis. PÉRORAISON, 1671 (au xvi® on trouve
PERLE, xre. Probabl. empr. de lit. peroration). Empr., avec francisation d'’a-
pèrla, lat. perna, attesté chez Pline au sens près des mots tels que oraison, du lat. pero-
de « pinne marine » (on trouve parfois des ratio, qui a le même sens dans la langue
perles dans cette espèce de coquillage); de la rhétorique, dér. de perorare au sens
comp. napol. sicilien perna « perle ». Le de « conclure un discours ».
remplacement de -n7- par -l- est peut-être PÉRORER, 1507. Empr. du lat. pero-
dû à l’influence du lat. sphaerula « petite rare « plaider, exposer jusqu’au bout »; a
boule ». — Dér. : perler, xive (Froissart) ; pris un sens défavorable en français. —
perlette, 1380; perlière, 1686; perlure, Dér. péroreur, 1775 (J.-J. Rousseau).
terme de vénerie, 1578.
PÉROU. Fin xvrie (Saint-Simon, au
PERLIMPINPIN (poudre de), 1680. Mot sens fig.) Nom d’une contrée de l’Amé-
de fantaisie. rique du Sud, très riche en or et en argent.
PERMANENT, 1370 (Oresme). Perma- PERPENDICULAIRE, 1520, l’adv.
nence, id. Empr. du lat. permanens, part. -ement dès 1512; au xiv® perpendicu-
prés. de permanere « durer » et du dér. lat. lière. Empr. du lat. de basse ép. perpendi-
médiéval permanentia ; remplacent les cularis, dér. de perpendiculum «fil à plomb»
anciens parmanant, parmanance, XII° S., (de perpendere « peser, apprécier exacte-
dér. de l’anc. franc. parmaindre « rester », ment »).
lat. permanere.
PERPÉTRER, 1232; perpétration,
PERMÉABLE, 1557. Empr. du lat. de 1532 ; rare avant le xrx°. Termes jurid.
basse ép. permeabilis, dér. de permeare empr. du lat. perpetrare « accomplir », per-
« passer à travers ». — Dér. : perméabilité, petralio (lat. eccl.).
1625 ; imperméable, 1770 (une première
fois chez Rabelais, 1546) ; n’est pas empr. PERPÉTUER, xive; perpétuel, xII°;
du lat. impermeabilis, attesté une seule perpétuité, 1238. Empr. des mots lat. per-
fois, au vies. peluare, perpetualis, perpetuilas, dér. de
l’adj. perpetuus « perpétuel ».
PERMETTRE, 1410, une 1re fois vers
l'an mille. Empr. du lat. permitiere, avec PERPLEXE, 1354 (Bersuire) ; souvent
francisation d’après mettre. — Dér. : perplex jusqu’au xvri®; perplexité, 1362.
permis, subsi., 1721. Empr. des mots lat. perpleæus «embrouillé,
équivoque » (de plectere « tisser »), per-
PERMISSION, 1180 (dans la formule pleæitas.
eccl. venant de saint Augustin et fréquente
au moyen âge par la Dieu permission, PERQUISITION, xve. Empr. du lat. de
c’est-à-dire « la liberté qu’a Dieu de faire basse ép. perquisilio « recherche » (de per-
ce qui lui plaît ») ; sens moderne à partir quirere « rechercher ») ; a d’abord eu le sens
de 1404. Empr. du lat. permissio, dér. de général de « recherche » ; a été spécialisé,
permissus, part. passé de permiliere, v. le depuis le xvrie, dans son acception jurid.
préc nDér: permissionnaire, 1680, — Dér. : perquisitionner, 1838.
PERRON 478

PERRON, v. pierre. PERSISTER, 1321. Empr. du lat.


persisiere. — Dér. : persistance, vers 1460.
PERROQUET, fin xive (sous la forme
paroquel). Probabl. dér. de Pierre, em- PERSONNALITÉ, 1697, une l'e fois
ployé comme terme de caresse; dans le en 1495. Empr. du lat. personalitas, dér. de
premier texte où il est attesté il est em- personalis, v. personnel. Du sens didactique
ployé comme nom propre, à côté du terme se sont développés les sens modernes d’a-
générique papegaul. À éliminé l’anc. pape- près personnel ; celui de « personnage » date
gai, xu® (parfois altéré en papegaui), de 1867.
encore vivant dans certains parlers, empr.
de l’arabe babaghä (lui-même étranger) par PERSONNE. Lat. persona (mot d’origine
l'intermédiaire d’un parler méridional, cf. étrusque, « masque de théâtre ») « person-
l’a. pr. papagai, l'esp. papagayo, d’où aussi nage », et simplement, dès l’époque class.,
l’it. papagallo ; le mot a pénétré dans les « personne ». À pris aussi dans le lat. eccl.
langues germ. par le fr., cf. all. Papa- et jurid. diverses acceptions qui ont passé
gey, etc. Comme terme de marine, attesté dans les langues romanes. Les patois, sur-
en 1525 dans voile de perroquet, en 1643 tout septentrionaux, disent volontiers, com-
dans mât de perroquel, V. cacatois ; par me le français populaire, gens ou monde
comparaison avec le bâton de perroquet. au sens général de « personnes » au plur.
Existe dans toutes les langues romanes,
PERRUCHE, 1732. Parfois perriche. sauf en roumain : it. esp. persona. Est de-
Issu de perroquet, par substitution de venu pronom négatif en fr. depuis le x1v®;
suffixe. les parlers méridionaux ont des formes cor-
PERRUQUE, xv°. Empr. de l'it. par- respondantes à l’a. pr. degun, lat. necüunus,
rucca, perrucca, qui signifiait d’abord «che- et le franco-provençal a un type nion. —
velure », ce qui est également le sens de Dér. : personnage, xr11°, au sens de « charge
perruque jusqu’au xvi® ; le sens de « che- ecclésiastique », cf. de même angl. parso-
velure postiche » s’est développé en fr. nage « cure » (et parson « curé », sens fré-
et a passé en it. L’esp. peluca est éga- quent en a. fr., conservé dans le breton
lement empr. de l’it.; mais l’origine du person) ; Sens moderne 1403 ; personnifier,
mot it. est obscure. — Dér. : perruquier, 1674 (Boileau), d’où personnification, xVI11°
1564. (Piron, D).
PERS. Lat. de basse ép. persus, attesté PERSONNEL, 1174, comme terme gram-
dans des gloses, notamment celles de Rei- matical, rare avant le xve s. Empr. du lat.
chenau, où il glose hyacinthinus « violet de basse ép. personalis, à la fois terme
tirant sur le bleu » ; le mot est peut-être grammatical, jurid. et eccl., dér. de persona,
dû à l'importation de matières colorantes v. les préc.; au sens de « qui ne songe qu’à
de la Perse, v. azur. It. perso « rouge sa personne » depuis Saint-Simon (XvVIt1°8.);
sombre », a. pr. pers « bleu foncé ». personnel, subst. « ensemble de personnes
attachées à un service » depuis 1835, peut-
PERSE, 1730. Cette étoffe a été ainsi être imité de l’all. Personal (dp. 1811).
nommée parce qu’on la croyait fabriquée — Dér. personnalisme, 1737; personna-
en Perse; en réalité cette sorte de toile liste, 1907.
peinte venait de l’Inde.
PERSPECTIF, vers 1360, d'abord au
PERSÉCUTEUR, xx1°; persécution, id. sens de « réfraction ». Perspective, id.;
Empr. des mots du lat. eccl. persecutor, terme de peinture, 1551 ; pris au sens fig.
persecutio « persécuteur, persécution des dès le xvrie. Empr. du lat. de basse ép.
Chrétiens », propr. « celui qui poursuit, perspectivus et du lat. médiéval perspectiva
action de poursuivre (de persequi « pour- (sous-entendu gars), de perspectus, part.
suivre »). — Dér. du premier : persécuter, passé de perspicere « pénétrer de ses regards,
une l'e fois fin x° (Saint-Léger), ensuite apercevoir, etc. ». L'emploi de perspective
xIV® (Oresme),; a signifié aussi « pour- comme terme de peinture a été suggéré par
suivre » d’après persécution. l’it. prospeltiva.
PERSÉVÉRER, x1I° ; persévérance, id. PERSPICACE, 1788 (aussi en 1496, puis
Empr. du lat. perseverare, perseverantia. en 1546). Perspicacité, 1488. Empr. des
PERSICAIRE, xrr1°. Empr. du lat. per- mots lat. perspicax, perspicacitas (créé à
sicaria, dér. de persicus « pêcher »; ainsi basse ép.), de perspicere, v. le préc.
nommée à cause de la ressemblance des
feuilles des deux plantes. PERSUADER, xive (Oresme) ; persua-
sif, 1376 ; persuasion, 1315. Empr. du lat.
PERSIENNE, 1752. Fém. pris substan- persuadere et des dér. persuasivus (créé à
tivement de l’adj. persien, attesté dès le basse ép.), persuasio.
x1Ve, dér. de perse « de Perse » ; ainsi nom-
mée parce que cette sorte de contrevent PERTINENT, 1377. Empr. comme terme
passe pour venir de la Perse. jurid., du lat. pertinens, part. prés. de per-
tinere au sens de « concerner » ; sens géné-
PERSIFLER, v. siffler. ral, fin xvri® (Saint-Simon). — Dér.
PERSIL. D'abord perresil, avec L mouil- -ence, vers 1320 ; -emment, 1366.
lée. Altération du lat. petroselinum (du grec
petroselinon) ; la forme correspondante de PERTUIS, v. percer.
l’a. pr. peiresilh vient à l’appui d’un lat. PERTUISANE, 1468 (pourlisaine, par-
pop. “*petrosilium. — Dér. persillade, lisane, puis perluisagne). Empr. de lit.
1690 ; persillé, 1694. partigiana, fém. de partigiano (v. partisan) ,
479 PÉTITION

appelé ainsi sans doute d’après des parti- misme ; l’oiseau a été ainsi nommé parce
sans qui s’en servaient, altéré ensuite sous que, quand il fuit, il se déleste et produit
l'influence de pertuis, v. percer. ainsi de petits bruits), pétiller, 1453, pétil-
lement, 1549. Comp. : pet-en-l’air, 1729 ;
PERTURBATEUR, 1418 ; perturbation,
désignait d’abord une robe de chambre;
1295. Empr. du lat. perturbator (créé à pet-de-nonne, 1795, auparavant pet de
basse ép.), perlurbatio, de perturbare « trou- pulain ; antér. on trouve pet dans un sens
bler fortement » qui a aussi été empr. vers analogue, cf. aussi pet d’'Espaigne au
1350, mais qui a disparu au xvrres. XIVe ; pet(e)-en-gueule, jeu de gamin, 1698.
PERVENCHE. Lat. pervinca ; dite aussi PÉTALE, 1718 (Jussieu). Empr. du lat.
vinca pervinca. des botanistes pelalum (relevé en 1649),
PERVERTIR, vers 1120 ; pervers, id.; empr. lui-même du grec petalon « feuille ».
perversion, 1444; perversité, vers 1190. PÉTANQUE, vers 1930. Comp. de
Empr. du lat. perveriere, propr. « renver- l’occitan pé « pied » et tanco « étançon,
ser » et des dér. perversus, perversio, per- pieu planté pour fixer qch. », du même
versilas. — Dér. du verbe : pervertisse- radical qu’élancher, donc « pied fixé à
ment, 1453 ; pervertisseur, 1534. l'instar d’un pieu ».
PESER. Lat. péfn)säre (de pendere PÉTARADE, xve. Empr. du pr. peiar-
« peser »). It. pesare, esp. pesar. Le sens rada, dér. du verbe petarra, augment. de
d’ « être à charge », non attesté en latin, peta « péter ».
a dû exister dans la langue pop., car il se PÉTARD, v. pet.
trouve dans tout le roman. — Dér. : pe-
sage, 1236, le terme existe toujours dans PÉTASE, chapeau des anciens, xvri°.
la langue des courses ; pesant, vers 1080 Empr. du lat. pelasus (du grec petasos).
(Roland), d’où pesanteur, vers 1170, appe- PÉTAUDIÈRE, 1694. Dér. du nom pro-
santir, vers 1120, appesantissement, 1570 ; pre de fantaisie (le roi) Pétaud, qui ne
dans la locution valoir son pesant d’or, s'emploie plus que dans la locution la cour
1538, au xv® s. déjà valoir son pesant d’ar- du roi Pétaud, 1546 (Rab.), dér. de péter.
gent, pesant a été à tort regardé comme une
altération de l’a. fr. besant, lat. byzantium PÉTIOLE, 1749. Empr. du lat. petiolus
« monnaie de Byzance, d’or ou d’argent », « queue d’un fruit », propr. « petit pied ».
acheter son pesant d’or « acheter au prix — Dér. : pétiolé, 1766.
d'autant d’or que pèse l’objet même » se PETIOT, v. le suiv.
trouve déjà dans Wace, vers 1170 ; pesée,
1331 ; peseur, 1252; peson, 1244. V. poids. PETIT. Attesté dès 775 dans un texte
— Comp. Nombreux mots avec pèse bas-latin : in pitito villare. Paraît formé
comme premier élément. Soupeser, x1II°. avec un radical piit- du langage enfantin,
exprimant la petitesse, qui se trouve dans
PESSAIRE, x1r1e. Empr. du lat. médi- le latin de basse ép. pitinnus « petit »,
cal pessarium, dér. de pessum, pessus (du « petit garçon ». Seulement gallo-roman,
grec pessos, propr. « jeton en forme de cf. a. pr. petit, et cat. id. Les autres langues
gland », d’où « tampon de charpie »). romanes ont pour exprimer l’idée de « pe-
tit » des adjectifs de formation assez ana-
PESSIMISME, 1759; pessimiste, 1789. logue : it. piccolo, esp. pequenño, etc. V. peu.
Dér. sav. du lat. pessimus « très mauvais », — Dér. : petiot, 1379 ; petitesse, vers 1130 ;
par opposition à optimisme, -sle. rapetisser, 1349 (sous la forme -ichier), par
PESTE, 1514. Empr. du lat. pestis. — l'intermédiaire d’un verbe apelisser, XII°,
Dér. de peste, terme d’imprécation : pester, encore dans les patois, d’où rapetissement,
1617 (trans., construction rare : pester un 1547. — Comp. : petit-fils, vers 1560 (a.
homme) ; pestler contre, 1639. — Comp. : pr. petit-filh dans un texte de date indéter-
malepeste, xvrr°. minée), petite-fille, 1636, petits-enfants, vers
1555. Ces trois expressions ont été formées
PESTIFÉRÉ, 1503. Dér. de pestifère en imitation de grand-père, etc.; elles se sont
« pestilentiel », xive (Bersuire), encore dans implantées en fr. par suite de la confusion
les dict., empr. du lat. pestifer, v. le préc. que causait quelquefois le mot neveu, qui
PESTILENCE, xri° dans la locution : avait en a. fr., comme le lat. nepos, les
chaere de pestilence, cf. encore aujourd’hui deux significations de « neveu » et de
chaire de pestilence, qui vient du lat. ecel. « petit-fils ». Il y a eu d’abord un certain
Ne s’emploie aujourd’hui même que dans tâtonnement, puisqu'on a essayé aussi de
cette locution ; a signifié aussi au moyen arrière-fils (Amyot), et de sous-fils, 1509.
âge « fléau, destruction, malheur » et PÉTITION, terme de logique dans la
« peste », comme le lat. pestilentia ; d’où locution pétition de principe, 1661 (Logique
pestilentiel, 1503. de Port-Royal). Issu de pétition « action de
demander », xr1°, empr. du lat. petitio
PET. Lat. péditum. — Dér. : pétard,
(dér. de peltilus, part. passé de pelere « cher-
1495 ; péter, 1380, anciennement peler, cher à atteindre »), et qui ne s'emploie plus
encore usité dans des parlers (a éliminé que dans cette locution ou dans des accep-
l’a. fr. poire, encore chez Villon, lat. pédere, tions jurid.
d’où aussi a. pr. peire) ; d’où péteur vers
1380 ; péteux, xrr1° (d’où le comp. cane- PÉTITION, terme de langue polit., 1787.
pétière, 1534 (Rab. cannes pelières) ; pélière Empr. de l’angl. petition, même mot que
est une altération de péteuse, par substitu- le préc. — Dér. : pétitionnaire, 1784 ; péti-
tion de suff. due sans doute à un euphé- tionner, id. (Necker : « On introduit chaque
PÉTITION 480

jour des nouveaux verbes : petitionner, PETUN, v. tabac.


vetoter »), se trouve déjà vers 1700 chez PÉTUNIA, 1868 (-unie, en 1823). Dér.
Saint-Évremond, empr. alors de l’angl. de petun, autre nom du tabac (v. ce mot)
lo petition, d’où pétitionnement, 1836. avec le suff. lat. -ia, fréquent dans les
PETON, v. pied. noms de plantes.
PÉTONCLE, 1552. Empr. du lat. pec- PEU. Lat. pop. paucum, neutre adver-
tunculus, dim. de peclen « peigne ». bial tiré du lat. class. pauci « peu nom-
breux », rare au sing. ; a éliminé les adv.
PÉTRÉ, 1545. Empr. du lat. peiræus class. parum « peu » et paulum « un peu ».
(du grec petraios, de peira « rocher »). Existe dans toutes les langues romanes,
sauf en roumain : it. ESP. pOco, a. pr. pauc ;
PÉTREL, 1705. Empr. de l’angl. petrel mais concurrencé aujourd’hui dans les par-
(pitteral en 1676), d’origine obscure ; au lers gallo-romans par diverses expressions
xvies.,les traducteurs d'ouvrages anglais, nouvelles, notamment dans l'Ouest par le
dans la fausse supposition que peirel type un petit, attesté en fr. depuis les pre-
voulait dire « petit Pierre, oiseau de Saint-
Pierre » par allusion au miracle de saint miers textes jusqu’au xvri® s. et en a. pr.
La locution pop. un petit peu paraît être
Pierre marchant sur les eaux, parce que
cet oiseau « a la faculté de se soutenir sur un mélange de un peu et de un pelil.
les ondes soulevées et d’y marcher en frap- PEUPLE. Lat. pôpülus. D'abord poblo
pant de ses pieds la surface de l’eau », ont (Serments), puis pueble, xr1°; devenu
essayé de rendre cette dénomination par peuple par assimilation du b intérieur au
pierrot. L’all. Petersvogel est dû à la même p initial, comme le montre le développe-
interprétation par ét. populaire. ment de peuplier, comparé à double, lat.
duplus. Par son sens peuple est un de ces
PÉTRIFIER, xvie. Comp. avec le lat.
pelra « pierre » sur le modèle des nombreux mots qui sont restés en contact avec le
lat. ; il est donc vraisemblable que populus
verbes en -fier. — Dér. : pétrification, 1503.
a pu contribuer à refaire pueble en peuple.
PÉTRIN. Lat. pistrinum « meule, bou- Ailleurs certaines formes ont un aspect
langerie » ; a pris le sens de « pétrin » seu- pop. : esp. pueblo ; d’autres sont sav. : it.
lement en gallo-roman, cf. a. pr. pestrinh. popolo. — Dér. : peuplade, 1564 au sens de
Ce sens s’est évidemment développé dans « gens envoyés en terre étrangère pour
la langue de la boulangerie urbaine; c’est former une colonie », sens probabl. empr.
ce qui explique qu’il soit peu répandu dans de l’esp. poblado et encore usité au xvirre,
les patois ; le mot prépondérant vient du cf. aussi en 1581 une peuplade et pépinière
lat. magidem, acc. de magis, d'abord «sorte de mauvais garnemenis) ; le sens moderne
de plat » (comme le grec magis d’où il vient apparaît en 1752. Peupler, xr1°, d’où
et qui désignait propr. une sorte de pain), peuplement, 1260, dépeupler, 1343, dépeu-
attesté chez M. Empiricus au sens de plement, 1469, repeupler, vers 1210, re-
« pétrin », d’où le fr. mait (écrit aussi mai, peuplement, 1559, surpeupler, 1876. V. dé-
maie, etc.), l’a. pr. mag (lire madj) et, avec population.
modification de la terminaison, lit. madia ;
on dit surtout arche et aussi huche dans PEUPLIER, vers 1170. Dér. de l’a. fr.
un certain nombre de parlers de la France peuple, encore chez les paysans de l’Isle-de-
septentrionale. Le grec makira « pétrin ». France, lat. püpülus. It. pioppo, esp. chopo.
non attesté en lat., a donné en outre l’a. PEUR. Lat. pauvôrem, acc. de pavor. —
pr. mastra (encore usité aujourd'hui en Dér. : peureux, x1r° ; apeuré, 1885 ; épeuré,
Provence) et de nombreuses formes it. On 1873 (auparavant déjà au xvi® s.; le
notera l’origine grecque de magis et mak- verbe épeurer, très usité encore dans les
ira, qui indique un empr. techn. parlers, remonte au x111° s.).
PÉTRIR. Lat. de basse époque pisirire PEUT-ÊTRE, v. pouvoir.
formé d’après pistriæ « celle qui pétrit »
sur le modèle de nutrix : nutrire ; V. aussi PHAÉTON, 1723. Dit ainsi par plaisan-
pétrin. Seulement gallo-roman, cf. a. pr. terie d’après Phaëéton, nom du fils du Soleil
pestrir. — Dér. : pétrissable,; 1749 ; pétris- (lat. Phaethon, grec Phaethôn), qui périt en
sage, 1764 ; pétrisseur, 1260 ; repétrir, 1549. voulant conduire le char de son père.
PÉTROLE, xu1e (« Por ce la claime l’en -PHAGE, -PHAGIE. Deuxième élé-
petrole que c’est une huile que l’en fait ments de mots sav. comp. tels qu’aéro-
de pierre »). Empr. du lat. médiéval petro- phage, -ie, fin xrx°, faits sur le modèle de
leum, littéral. « huile (oleum) de pierre mots fr. tels qu’anthropophage et de mots
(petra) ». Mot devenu européen. — Dér. : grecs terminés par -phagos, -phagia (de
pétrolerie, 1867; pétroleur, -euse, mots phagein « manger »).
créés à propos des incendies allumés à PHALANGE, 1213, au sens militaire.
Paris par les insurgés de la Commune
Empr. du lat. phalanx (mot d’origine grec-
(mars-mai 1871); pétrolier (bateau), fin
que, qui signifie propr. « gros bâton », v.
XIX®.
palan, et qui, par l'intermédiaire du sens
PÉTULANT, vers 1330, rare avant le anatomique « os des doigts, de la main et
Xvi1° ; pétulance, 1527 (une 1re fois en 1372 du pied », a servi à désigner un certain
chez Oresme). Empr. des mots lat. peiu- ordre de bataille, par comparaison de cet
lans, propr. « querelleur, emporté, inso- ordre avec celui de ces os). Le sens anato-
lent », pelulantia ; le sens est moins défa- mique a été repris directement au grec au
vorable en fr. qu'en lat. XVII.
481 PHILOSOPHE
PHALANSTÈRE. Mot comp. arbitraire nein « (ap)paraître »), comme terme d’as-
ment par Fourier (1772-1837) avec pha- tron. ; étendu rapidement à d’autres scien-
lange, qui désigne un groupement de son ces ; comme terme général, au sens de « ce
système et la terminaison de monastère. qui est surprenant », 1737, issu de l'emploi
— Dér. : phalanstérien, 1836. de phénomène en parlant de manifestations
PHALÈNE, 1568. Empr. du grec pha- extraordinaires de l'atmosphère : comètes,
laina. météores, etc. — Dér. : phénoménal, 1803,
développement de sens parallèle au simple.
PHALLUS, 1615, rare avant le x1xe s.
Phallique, 1823. Empr. du lat. phallus, PHIL(O)-, -PHILE. Premier ou deuxiè-
Phallicus (du grec phallos, phallikos). me élément de mots sav., tiré du grec
PHANÉRO-. Premier élément de mots philos « ami », ou de mots empr. ; v. les
suiv.
sav. comp., tels que phanérogame, 1791,
tiré du grec phaneros « visible » par imi- PHILANTHROPE, xvrre (Fénelon) ; une
tation de cryptogame. première fois xive (Oresme) ; philanthro-
PHARAON, 1691. Tiré du nom propre pie, xvire (Fénelon), une première fois en
Pharaon, titre des souverains de l’anc. 1567; philanthropique, 1780. Empr. du
Égypte, qui désignait d’abord très probabl. grec philanthrôpos, -pia, -pikos (de philos
un roi de cartes, « ami » et anthrôpos « homme ») ; Oresme a
pris philanthrope aux traductions lat. d’A-
PHARE, 1546 (Rab.). Empr. du lat. ristote, v. anarchie.
pharus (du grec pharos), nom d’une île
située dans la baie d'Alexandrie, célèbre PHILATÉLIE. Mot créé par Herpin,
par le phare que Ptolémée Philadelphe y collectionneur de timbres-poste, et proposé
avait fait bâtir au r11e 8. av. J.-C. par lui dans Le Collectionneur de T.-P. du
15 novembre 1864 ; adopté aussitôt ainsi
PHARISAÏQUE, 1541 (Calvin); phari- que le dér. -iste ; fait sur un grec hypo-
sien, 1553, une première fois vers 1260. Le thétique *phil-ateleia, fait lui-même sur le
premier est empr. du lat. eccl. pharisaicus, grec ex ateleias « gratuitement », considéré
le deuxième est dér. du lat. eccl. pharisæus arbitrairement comme équivalent de «fran-
(du grec eccl. pharisaios, empr. lui-même co (de port }) ».
de l’araméen parschi, qui désignait une
secte juive du temps de Jésus-Christ, à PHILIPPINE, 1868. Altération, par
laquelle l'Évangile reproche un attache- étym. pop., de l’all. Vielliebchen « bien
ment affecté aux pratiques de la religion, aimé », qui s'emploie de même dans la for-
cf. Mathieu, III, 7, etc.). Le sens fig. est mule de salutation de ce jeu; le mot all.
propre au fr. — Dér. du premier : phari- est lui-même une altération de l’angl. Va-
saïsme, 1541 (Calvin). lentine « saint Valentin (patron des amou-
reux) », v. valentin.
PHARMACIE, 1314; pharmaceutique,
1547 ; pharmacopée, 1571. Empr. du lat. PHILIPPIQUE, 1624, au sens moderne.
médical pharmacia, pharmaceuticus (du Tiré de Philippiques, nom des discours vio-
grec pharmakeia, pharmakeutikos, de phar- lents prononcés par Démosthène contre
makon «remède ») et du grec pharmakopoiia Philippe de Macédoine et par Cicéron con-
« confection (de poiein « faire ») de remè- tre Antoine (en lat. Philippicæ, en grec
des », ce dernier pris pour désigner le livre Philippikai).
qui en enseigne l’art. — Dér. du premier : PHILISTIN, 1832 (en 1847 Th. Gautier :
pharmacien, 1620 ; en outre adj. au xvrre; « Vous n'êtes, ne fûtes et ne serez jamais
pharmacopole, 1537, empr. du lat. phar- que ce que les étudiants allemands appel-
macopola (du grec pharmakopôlés, du verbe lent un philistin et les artistes français un
pôlein « vendre ») a été employé par plai- bourgeois »). Tiré de Philistin (lat. eccl.
santerie. Philistinus, empr. de l’hébreu phelichti),
PHARYNX, 1541. Empr. du grec nom d’un peuple de Palestine ennemi des
pharynz, pharyngos « gorge ». — Dér. : Juifs ; doit son sens fig. à l’all. Philister qui,
pharyngite, 1836. dans l’argot des étudiants (d’abord des étu-
diants de théologie), servait à désigner par
PHASE, 1661. Empr. du grec phasis plaisanterie le bourgeois, considéré comme
« apparition d’une étoile qui se lève » (de ennemi de ceux qui se consacrent aux
phainein « paraître ») comme terme d’as- choses de l'esprit, comme le Philistin était
tron., appliqué à la lune. Sens fig., 1810 l'ennemi du peuple élu.
(Staël, une première fois en 1544, Scève). PHILOLOGUE, 1534 (Rab.) ; philologie,
PHÉNIX, xne. Empr. du lat. phænix, XIVe. Empr. du lat. philologus, -gia (du
oiseau fabuleux qui passait pour être uni- grec philologos, -gia, de logos au sens
que de son espèce et renaître de ses cendres, d’ «étude, science »). — Dér. : philologique,
après avoir vécu plusieurs siècles. Sens fig., 1666.
1552: PHILOSOPHE, xr1° ; philosopher, 1488 ;
PHÉNOL, 1843. Comp. avec le grec phai- philosophie, x11° ; philosophique, vers 1500.
nein au sens de « briller » et le suff. chi- Empr. des mots lat. philosophus, -phari,
mique -o1 (tiré d'alcool). — Dér. phénique, -phia, -phicus (du grec philosophos, -phia,
1841. -phikos, de sophos « sage »). — Dér. : phi-
losophal, xv°, d'après le sens d’ « alchi-
‘PHÉNOMÈNE, 1554. Empr. du grec (la) miste » qu'a eu philosophe; philosophe,
phainomena « phénomènes célestes » (pro- philosophie signifient souvent « savant,
prement « ce qui apparaît », du verbe phai- science », jusqu’au XVIIIe 8.
DICT. ÉTYM. 51
PHILTRE 482

PHILTRE, 1381. Écrit aussi filtre, par ler » au xviire s. — Dér. : phraser, 1755;
confusion avec filtre. Empr. du lat. phraseur, 1788 ; on a dit d’abord phrasier.
phillrum (du grec philtron, de philein — Phraséologie, 1778.
« aimer »). PHRÉN(O)-. Premier élément de mots
PHIMOSIS, xvi° (Paré). Empr. du grec sav. comp., tels que phrénologie, 1829, tiré
médical phimôsis « rétrécissement » (de du grec phrén « diaphragme », d’où « âme,
phimoûn « serrer fortement »). pensée », v. frénésie.
PHLÉBITE, créé par le médecin Bres- PHTISIE, 1545 (au x1v® s. {esie); phti-
chet en 1818. Dér. sav. du grec phleps, sique, 1606 (au xrr1e s. tisike). Empr. du
phlebos « veine ». lat. phihisis, phihisicus (du grec médical
phthisis, propr. « dépérissement », phihisikos
PHLEGMON, 1314. Empr. du lat. mé-
de phihinein « se consumer »).
diéval phlegmon, en lat. anc. phlegmone (du
grec médical phlegmoné, propr. « chaleur PHYLACTÈRE, xrr1e (J. de Meung qui
brûlante », de phlegein « brûler »). dit filatiere ou philalere) ; au moyen âge
formes diverses ; la forme moderne est
PHLOGISTIQUE, 1747. Empr. du lat. postérieure au xvi*. Empr. du lat. eccl.
scientif. moderne phlogisticum, fait sur le
grec phlogisios « combustible » (de phlox, phylacterium (du grec eccl. phylaktérion,
flamme) par le chimiste allemand Becher proprement « amulette », de phylattein
« préserver »), qui a servi à traduire l’hé-
(1628-1685). breu thephilin) ; a été pris dans d’autres
PHLOX, 1794. Empr. du grec phlox sens au moyen âge, notamment au sens
« flamme »; ainsi nommée parce qu'une de « reliquaire », xtIe (sous la forme fila-
variété a des fleurs d’un rouge intense. tire); aujourd’hui dans l’iconographie
-PHOBE, -PHOBIE. Deuxième élément « banderole portant une inscription ».
de mots sav., tels que francophobe, fin PHYLLOXÉRA. Empr. du lat. des natu-
xix°, agoraphobie, 1873, tiré du grec phobos ralistes phylloxera vastatrix, créé après 1865
« effroi ». Phobie est devenu un mot indé- par Planchon, professeur à Montpellier,
pendant, commenc. xx° 5. avec les mots grecs phyllon « feuille » et
PHONÈME, 1873. Phonétique, 1838, æéros « sec » au sens de « qui dessèche les
adj. et subst. Empr. du grec phônéma, feuilles »; appelé d’abord par Planchon
-étikos (de phôné « voix »). — Dér. : -isme, en 1865 rhizaphis vastatriæ.
1859. Les linguistes ont tiré de phonème PHYSIO-. Premier élément de mots sav.
un suff. -ème, dont ils ont formé mor- comp., tels que physiocratie, 1768, mot
phème, etc. créé par Dupont de Nemours (d’où phy-
PHON(O)-, -PHONE, -PHONIE. Pre- siocrate, id.), tiré du grec physis « nature »,
mier ou deuxième élément de mots sav. ou de mots empr., tels que physiologie,
comp. ou empr., qui vient du grec phôné 1547.
« voix ». Parmi les premiers, phonographe PHYSIONOMIE, 1260 (sous la forme
(d’où phono ; ce mot a été créé en 1877 phisanomie ; mot souvent altéré ; écrit phi-
par l’abbé Lenoir, ami de Ch. Cros, qui zionomie au xVI® au sens moderne) ; signifie
avait trouvé le principe du phonographe d’abord « art de déterminer le caractère
avant Edison, qui le rendit pratique en d’une personne d’après les traits de son
1878, et lui avait donné le nom de paléo- visage ». Empr. du lat. physiognomia, alté-
phone ; le mot phonographe avait déjà été ration, par superposition syllabique, de
créé par Nodier, Voc. de la langue fr., 1836, physiognomonia (du grec physiognômonia,
au sens de « celui qui orthographie en de physis « nature » et gnômôn « qui con-
mettant d'accord la lettre et le son »);
naît »), d’où on a fait aussi physiognomonie,
parmi les mots empr., polyphone, 1829,
polyphonie, 1859, etc.
1576. — Dér. : physionomiste, 1555.
PHOQUE, 1532. Empr. du lat. phoca (du PHYSIQUE, subst. fém. Au sens de
grec phôké). « science de toute la nature matérielle »,
fin du xv°, sens du mot chez Des-
PHOSPHORE, 1677. Empr. du grec cartes ; au sens moderne, distinct de chi-
phôsphoros « lumineux », littér. « qui ap- mie, 1708 (Fontenelle). Au moyen âge
porte (pherein) la lumière (phôs).— Dér. : signifie « médecine », depuis le xr1e s. (alors
phosphorescence, 1784; phosphorescent, sous la forme fisique). Empr. du lat. phy-
1789 ; phosphoreux, 1787 (G. de Morveau) ; sica qui signifie également « médecine » au
phosphorique, 1753 ; avec radical abrégé : moyen âge (du grec physiké « science de la
phosphate, 1782 (G. de Morveau) ; phos- nature »). — Dér. : physique, adj., paraît
phure, 1787. avoir été rare avant le xvire, développe-
PHOTO-. Premier élément de mots sav. ment de sens parallèle au subst. ; d’où phy-
comp., tels que photomètre, 1792, -géni- sique, subst. masc. « constitution physi-
que, 1840, devenu récemment usuel, tiré que », 1776 ; physicien, xvrrre (Condorcet),
du grec phôs, phôtos « lumière ». Photogra- au sens moderne ; formé d’après le lat.
phie, 1839 (d’où photo, photographe, -ier), physicus ; au moyen âge signifie « méde-
est fait sur l’angl. photograph, créé par cin », depuis le xr1° (écrit alors fisicien),
J. Herschel; de là, plus tard, photo- comme le lat. physicus ; de là l'angl. phy-
gravure, phototypie, 1883, etc. sician « médecin ».
PHRASE, 1546. Empr. du lat. phrasis PHYTO-. Premier élément de mots sav.
(du grec phrasis, de phrazein « expliquer ») ; comp., tels que phytographie, 1780, tiré
signifie parfois « expression, façon de par- du grec phyton « plante ».
483 PICOTIN
PIAFFER, 1584 (« Plein de paroles piaf- cuivre de Savoie et de Piémont ; empr. du
fees ») ; signifie d’abord « faire de l'embar- pr. picaioun, dér. de picaio, fém., peut-être
ras », cf. le mot aujourd'hui inusité piaffe, mot collectif dérivé du verbe pica au sens
1574 : « Nous appelons parade et bravade, de « sonner », c’est-à-dire « de la monnaie
eux (les courtisans) diroyent piaffe, ce que qui sonne », avec le suff. -aio qui corres-
nous nommions magnificence », 1579, pond au fr. -aille.
H. Estienne. Mot onomatopéique. — Dér. :
piaffeur, 1581. PICARESQUE, 1859. Empr. de l'esp.
picaresco, dér. de picaro « coquin »; on ne
PIAILLER, 1606. Onomatopéique, v. le dit guère qu’à propos de romans ou de
piauler. — Dér. : piaillard, 1746 ; piaillerie, pièces de théâtre espagnols.
1642 ; piailleur, 1611.
PIANO, terme de musique, 1752. Empr. PICCOLO « petit vin de certains pays »,
1876 ; « sorte de flûte », 1828. Empr. de
de lit. piano « doucement » (opposé à forte, lit. piccolo « petit ». Dér. piccoler « boire »,
XVIIIe, J.-J. Rousseau), adverbe issu de
l’adj. piano « plat, uni, doux », lat. planus, 1901, fam. (se rattache aux deux sens de
piccolo en même temps).
v. plain. On emploie aussi le superlatif
pianissimo (au sens figuré, 1775, Beaumar- PICHENETTE, 1820. Peut-être empr.
chais). du prov. pichouneto « petite », qui a pu
passer en franç. dans une question mena-
PIANO, instrument de musique, 1798. çante où le subst. équivalent à gifle aurait
Abréviation de piano-forte, 1774 (Voltaire), été omis.
empr. de l’it. pianoforte, terme encore usité
aujourd’hui, comp. de piano et forte, v. le PICHET. Mot dialectal du Centre et de
préc. ; ainsi nommé parce que, à la diffé- l'Ouest ; c’est une autre forme, attestée dès
rence du clavecin dont les cordes étaient le moyen âge, de pich(i)er, altération,
toujours pincées de la même manière, les d’après pot, de bichier, relevé en anc. wallon
marteaux permettent d’adoucir ou de ren- (cf. aussi biche « ancienne mesure de
forcer les sons (piano « doucement », forle grains », 1226, encore dans les diction-
« fortement ») ; on a dit aussi, mais plus naires), cf. aussi lat. médiéval picarium et
rarement, fortepiano, d’après l’it. fortepiano angl. piicher, etc. ; bichier est le même mot
qui, du moins aujourd’hui, n'est plus que le lat. de basse ép. becarius « orceoli
qu’un terme de musique indiquant l’art genus », relevé dans une glose du 1xe s.,
de renforcer et d’adoucir les sons. — Dér. : dér. du grec bikos « sorte de vase » : ce mot
pianiste, 1829; pianoter, 1847 (Balzac). a pénétré aussi de bonne heure dans les
langues germ., d’où anc. haut all. béhhéri,
PIANOLA, xxe., Empr. de l’anglo-amé- all. Becher. Lit. bicchiere est de la même
ricain pianola. famille.
PIASTRE, 1595. Empr. de l’it. piastra, PICKLES, terme de cuisine, 1857. Empr.
propr. « lame de métal » (tiré de impiastro
« emplâtre »), pour désigner des monnaies de l’angl. pickles (qui passe pour venir du
it. ; a servi ensuite à désigner des monnaies holl. pekel « saumure »).
d’autres pays, soit d’après l’it., soit d’après PICK-POCKET, 1726 ; récent au sens
l'esp. piastra (qui vient lui-même de l’it.), général de « voleur à la tire ». Mot angl.
soit directement (p. ex. la piastre d’Indo- comp. de {o pick « enlever, éplucher » et
Chine). pocket « poche ».
PIAULE, 1867, terme d’argot, pour dési- PICK-UP « appareil pour phonographe »,
gner une chambre, au sens de « taverne », 1932 ; mot angl. proprem. « recueille ».
1628-1837, dér. de l’argot pier « boire »
(du x au xvire 8.), qui est dér. de pie PICOLER, 1901. Dér. de piccolo « petit
(oiseau), v. piot. vin léger », 1876, empr. de l'it. piccolo
« petit ». Quand le vin est léger, on croit
PIAULER, 1540 (écrit pioler, orthogra- pouvoir en boire d'autant plus. Le radical
phe ordinaire du xvi*). Onomatopée. — de piccolo, pikk-, est un mot expressif,
Dér. : piaulement, 1570 (écrit pio-).
PICORER, 1581. D'abord « marauder »,
PIC, oiseau. Lat. pop. *piccus, class.
picus, avec redoublement expressif du c, terme de l’argot des soldats. Probabl.
d’où la conservation du c final en fr., v. sec, formé plaisamment sur piquer; le suff.
que le verbe piquer, contribuait aussi à vient probabl. de pécore « pièce de bétail »
maintenir. Esp. pico. — Comp. : pivert, (cf. pécorée « fait d’aller à la maraude »,
1488. 1571). L’esp. pecorear « aller à la maraude »
a été probabl. formé par des soldats espa-
PIC, outil d’ouvrier, xri°. Paraît être un gnols en Italie; datant seulement du
emploi fig. du préc., v. pioche ; de même XVIIIe 8., il ne peut pas être la source
esp. pico, a. pr. pic. — Dér. : picot, xr1e, du verbe fr. — Dér. : picorée, 1587 :
terme de diverses techn. (Le soldat)... va (comme on dit) à la piquo-
PIC, terme de jeu de piquet, dans l’ex- rée, Cf. aussi « Aller à la picorée, c’est aller
pression faire pic « faire soixante », xvire, à la petite guerre » (Ménage); picoreur,
v. piquer. 1585.
PICADOR, 1788. Mot esp., dér. de picar PICOTIN, xive. Comparez l'a. fr. picul,
« piquer » (équivalent de piqueur). picole, XIVe, « mesure de vin », tous deux
de la région franco-provençale ; probabl.
PICAILLON, 1750 (Vadé). Mot fam. qui dér. de picoter, bien que celui-ci ne soit
désignait d’abord une petite monnaie de attesté que dp. le xvie; v. piquer.
PICRATE 484

PICRATE, 1836 ; picrique, id. Dér. sav. sens). — Comp. : contre-pied, 1561, terme
du grec pikros « amer ». de chasse; pied-à-terre, xvii® (on pro-
nonçait alors pié-à-terre) ; pied-de-biche,
PIE, oiseau. Lat. pica, forme fém. de nom de divers instruments, 1685; pied-
picus, v. pic. Moins usité aujourd’hui dans droit, 1694; mille-pieds, xvie; sous-pied,
les parlers gallo-romans (où il n’est vivace 1477 ; va-nu-pieds, 1615, etc.
que dans l'Ouest et le Sud-Ouest) que le
type agace (a. pr. agassa); agace, XIII® PIÉDESTAL, 1542. Empr. de l’it. pie-
(sous la forme agache) est une forme dialec- destallo « support de colonne, etc. », comp.
tale, venue du Nord-Est ou du Sud, d’ori- de piede « pied » et stallo au sens de « sup-
gine germ., cf. anc. haut all. agaza. Depuis port » (propr. « demeure », v. étal, d’où le
le xvrie s. environ pie, pris adjectiv., dési- sens de « maintien, support » seulement
gne un cheval blanc et noir, au moyen âge dans ce comp.).
on disait baucent, v. balzan. Dér. : piat, PIÉDOUCHE, 1676. Empr. de l’it. pie-
1611 ; piette, 1553. — Comp. : pie-grièche, duccio, autre forme de peduccio, propre-
1553; grièche est le fém. de l’anc. adj. griois ment « petit pied », dim. de piede « pied ».
« grec » (v. grec et grégeois). Les Grecs pas-
sent pour avares et très querelleurs, et cela PIÈGE. Lat. pedica, dér. de pes, pedis
depuis le moyen âge, cf. le cat. gresca (pour « pied ». Dér. : piéger, t. de chasse, 1875
*greesca) « querelle, tapage », souvenir des (une 1re fois au xiri° s.; le sens actuel
Croisades. La pie-grièche est un des oiseaux n’est attesté que depuis 1959).
les plus querelleurs qui soient. L’adj. griè- PIE-MÈRE, xrn1°, sous la forme pieue
che figure aussi dans orlie grièche, nom d’une mere, Cf. « Et est dite pie mère car elle
ortie qui brûle plus fortement que d’autres envolepe debonairement le cervel si comme
espèces (urlica urens). Comp. encore franc- la debonnaire mere son filz », 1314 (Monde-
comt. fruit grièche « acide », noix grièche ville). Empr. du lat. médiéval pia mater,
« ligneuse, difficile à casser », a. fr. griesche v. dure-mère.
« esp. de jeu de dés » (parce qu'il en naît
facilement des querelles). PIERRE. Lat. petra « roche » (mot pris
au grec), qui a éliminé lapis au sens général
PIE, adj.; ne s'emploie plus que dans de « pierre (nom de matière) ». It. pietra,
la locution œuvre pie, 1544. Du lat. pia, esp. piedra, Si le mot l’a emporté sur ses
fém. de pius, v. pieux. concurrents, il le doit peut-être à son em-
ploi figuré dans la Vulgate et chez les
PIÈCE. Même mot que petia du lat. Pères (Chrisius sicut petra in medio rerum
médiéval, cf. ei alia pelia « et une autre posita). Pierre à aiguiser a éliminé depuis
pièce (de terre) », vers 730. It. pezza, esp. le xvrie s. l’anc. queux, lat. pop. colis (en
pieza. D'un gaul. *peitia pour *peltis, qui lat. class. côs, côtis). — Dér. : perron, vers
peut être supposé d’après le gall. peth et 1080 (Roland) ; pierraïlle, vers 1400; pierre-
le breton pez. Pièces rapportées, terme de ries, xive; d’abord perrerie, 1328 ; pier-
sculpture, est déjà chez Sully, vers 1630, rette, vers 1130, alors peret; pierreuse,
au sens fig. — Dér. et Comp. : piécette, 1808, au sens de « prostituée », c’est-à-dire
x111e ; dépecer, vers 1080 (Roland), dépè- « qui traîne sur les pierres »; empierrer,
cement, xil°, dépeceur, xir1®; dépiécer,
1552 (une 1re fois en 1323) ; empierrement,
vers 1400 ; empiècement, 1870 ; piéça, x11°, 1750 ; épierrer, 1546, une 1re fois vers 1100.
vieux mot, qui ne s'emploie plus que par
archaïsme, comp. de pièce et de a «ily a PIERRETTE « déguisement de femme »,
une pièce de temps », cf. it. è gran pezza v. pierrot.
«il y a longtemps » et a. pr. pess’a « id. »; PIERREUX, xiie. Réfection, d’après
rapiécer, xIV° (Froissart). pierre, de perreux, lat. petrosus. Cf. it. pe-
PIED. Lat. pedem, acc. de pês. Comme iroso, esp. pedroso.
terme de versification, repris au lat. (qui PIERROT « moineau franc », 1694 (La
le doit au grec pous). V. haut, plain, plat. Fontaine, Fables, XII, ?, où il figure com-
Faire un pied de nez, xvri, vient de la me nom propre : « Du pétulant Pierrot et
locution avoir un pied de nez « avoir un du sage Raton »). Nom propre, dim. de
nez très long (long d’un pied) », relevé éga- Pierre, donné par plaisanterie à cet oiseau.
lement au xvrie. Le coup de pied de l’âne
est une allusion à la fable de La Fontaine, PIERROT, personnage de pantomime,
Le lion devenu vieux (III, 14). Faire le pied 1821. Nom propre, v. le préc. donné à un
de grue « attendre longtemps » (1608, personnage qui vient de la Comédie-Ita-
M. Régnier ; d’abord faire de la grue, vers lienne, peut-être d’après l’it. Pedrolino ;
1540, faire la jambe de grue, vers 1580). a été popularisé par le mime célèbre
Avoir bon pied, bon œil, attesté depuis G. Deburau (on écrit aussi aujourd’hui
le xve (dans Le Jouvencel où l’on a : avoir -reau). — Dér. : pierrette, 1834, avec chan-
bon pié et bon œil). — Dér. : peton, 1532 gement de suff.
{Rab.); piéter, 1466 (une 1re fois au xr11° 8.) ; PIÉTÉ, 1050. Empr. du lat. pielas, mais
piétin, 1770; piétiner, 1642, d'où piéti- au moyen âge n'est pas réellement distinct
nement, 1780 ; piéton, vers 1300 ; dépiéter,
1821 ; empiéter, vers 1310, terme de fau-
de pitié, v. ce mot. A côté du sens ordi-
connerie « prendre dans ses serres », trans.
naire de « piété », piélé filiale est un lati-
nisme, rare avant le xvrre.
au sens de « s’emparer de », qu’on trouve
encore chez Bossuet, l'emploi moderne PIÉTISTE, 1699 (Bayle dans un passage
date du xvrie s., d’où empiètement, 1611 traitant de la Suisse). Empr. de l’all. Pie-
(une première fois en 1376, dans un autre tist, fait sur le lat. pietas ; cette secte luthé-
485 PILE

rienne fondée à Leipzig en 1698 par l’Alsa- PIGER. Terme fam. attesté pour la pre-
cien Spener ne s’est développée que dans mière fois en 1808 comme terme de jeu
les pays de langue allemande. — Dér. : des écoliers au sens de « prétendre qu'on
piétisme, 1743. a gagné ». Empr. des parlers de la Bour-
gogne, où il a le sens de « fouler, piétiner ».
PIÈTRE. D'abord peestre, xir1e, chez Lat. de basse époque *pinsiare « piler,
G. de Coincy, qui l’emploie plusieurs fois, broyer », dér. du lat. pinsere « id. ».
de même que l’adverbe, en parlant du
diable : « … li diable tuit peestre Peestre- PIGMENT, 1813 ; déjà relevé, mais rare-
ment t’emporteront », dans un sens qui ment au moyen âge. Empr. du lat. pigmen-
n'est pas clair. Lat. pedesiris « qui va à tum au sens de « matière colorante », v.
pied », qui a perdu son sens propre et pris piment.
un sens péj., par opposition à « celui qui
va à cheval », dans les milieux féodaux; PIGNOCHER, 1630 (en outre pinocher
a aussi le sens de « boîteux » dans l'Ouest dans Trévoux), au sens de « manger du
ou de « qui a le pied contrefait » en nor- bout des dents »; a pris vers la fin du
xIxe s. le sens de « peindre à petits coups
mand, cf. « C’est un pietre qui se moque
d'un boyteux », Tahureau (du Mans), de pinceau », d’après peindre. Altération
d’un anc. verbe épinocher de même sens,
XVIe s. — Dér. : piètrerie, 1611.
xvrie s., attesté fin xvie au sens de « vétil-
PIEU, xuie. Forme issue de pieus, nom. ler », d’après peigner, pigner ; épinocher est
de pel. Pieu a éliminé pel, lat. palus, cf. dér. d’épinoche, parce que, quand les pê-
it. esp. palo. — Dér. de la forme ancienne cheurs prennent le petit poisson de ce nom
{avec a alternant régulièrement dans une en pêchant les ables, etc., ils le rejettent à
syllabe inaccentuée avec e accentué) cause de ses aiguillons, et que même les
palis, xrr°, d’où palissade, xve, palissader, poissons voraces se méfient de lui. —
1585. Dér. : pignochage, fin xix°; pignocheur,
vers 1870.
PIEU, mot d’argot (1829), devenu fam.
au sens de «lit », xix°. Étymologie obscure. PIGNON, terme d'’archit., 1211. Lat.
V. pioncer. — Dér. : pieuter (se), id. pop. *pinnionem, acc. de *pinnio, dér. de
pinna « créneau »; seulement franç. Voir
PIEUVRE. Mot du parler des îles anglo- aussi peigne.
normandes, popularisé par V. Hugo, qui
l’a employé dans Les travailleurs de la PIGNON « amande de la pomme de pin »,
mer, IV, 2, 1866 : « Ce monstre est celui xvi®. Empr. d’un parler méridional, cf.
que les marins appellent la poulpe.. dans a. pr. pinhon, lui-même dér. de pinha
les îles de la Manche, on le nomme la « pomme de pin », lat. pinea (nux) « id. »,
pieuvre. » Lat. polypus, par les stades cf. de même esp. piña et piñôn.
puelve, pueuve pieuve (v. yeux), puis PIGNOUF, 1860. Mot pop. dér. du verbe
pieuvre. pigner « crier, grincer » très répandu dans
PIEUX, xive. Réfection, d’après les adj. les parlers de l'Ouest, et qui est d’origine
en -eux, -euse, de l’a. fr. pieuf(s), piu(s), onomatopéique (comp. piauler), à l’aide
pi(s), masc., pieue, pive, etc., fém., lat. du suff. dépréciatif -ouf (comp. berr.
pius, pia, d’où aussi it. esp. pio. pagnioufe « homme bête ».
PIF, PIFFRE, PIFFRER, v. empif- PILAF, 1834. Transcrit aussi pilaw,
frer (s’). 1853. Empr. du turc pilaf (du persan
pilaou).
PIGE, x1x°, dans faire la pige à quelqu'un
« surpasser qn ». Dér. de piger « attraper », PILASTRE, 1545. Empr. de l’it. pilastro,
qui est dér. lui-même d’un adj. lat. *pedi- dér. de pila, v. le suiv.
cus (de pes), répandu dans les parlers
gallo-romans. PILE « pile de pont », d’où « pile d'objets
posés l’un sur l’autre »; d’où « pile élec-
PIGEON. Lat. de basse ép. pipiônem, trique (composée primitivement de pla-
acc. de pipiô, « pigeonneau », mot pop. ques de métal disposées en pile) ». Lat.
d’origine expressive (pi-, onomatopée du pila « colonne » (qui est un autre mot que
cri), dont le groupe intérieur -pi- est de- pila « mortier »). — Dér. et Comp. : pilotis,
venu d’abord -bi- par dissimilation contre 1365 (pilotich, forme picarde), par l’inter-
le p- initial, cf. Clichy, Clipiacum; le médiaire d’un simple pilot « sorte de gros
même accident se retrouve dans les parlers pieu », vers 1400, d'où aussi piloter, 1321,
de l'Italie septentrionale ; mais l’it. a une pilotage, 1491 ; empiler, xr11°, empilement,
forme régulière pippione « pigeonneau ». 1548, rempiler, fin xix°, terme d’argot
Pigeon, qui signifiait proprement « pigeon- militaire, « prolonger le service en contrac-
neau », encore attesté en ce sens fin du tant un engagement ».
xue s., a refoulé l’ancien mot coulon,
parce qu’on préfère au marché les pigeon- PILE « côté d’une pièce de monnaie
neaux aux pigeons ; coulon, usuel jusqu’au opposé à la face (dite autrefois croix) »,
xvie s., n’est usité aujourd’hui que dans 1260. Désignait aussi, dès 1258, le coin
les parlers excentriques du Nord-Est, de servant à frapper le revers; on trouve
l'Est, du Sud-Est et en catalan ; il continue en ce sens pila en lat. médiéval; désigne
le lat. columbus ; d’où aussi it. colombo. V. encore au xIxe s. un morceau de fer acéré
palombe. — Dér. : pigeonneau, xvI*; pi- pour imprimer l'effigie ou la devise; il
geonner, « plumer comme un pigeon », semble donc que pile soit issu du mot
1553 ; pigeonnier, 1479. précédent.
PILE 486

PILE « rossée », en langage fam., v. le PIMPANT, vers 1500. Adj. sous forme
suiv. d’un part. prés., formé sur le radical pimp-
PILER. Lat. de basse ép. piläre « enfon- contenu dans pimper « attifer » (xvire s.),
cer, empiler ». — Dér. : pile, 1821, de piler, a. pr. pimpar « id. », formation expressive
id., au sens fam. de « rosser » : pileur, 1313 ; parallèle à pompe, et comparez l’anc.
pilon, xr1° ; pilonner, 1700. Comp. pimpesouée « femme prétentieuse »,
Xv°, formé avec ce radical et l’anc. adj.
PILEUX, xvie (Paré). Empr. du lat. souef « doux » pris adverbialement.
Pilosus, dér. de pilus « poil ».
PILIER. D'abord piler, devenu pilier, PIMPRENELLE, xr11e (d’abord pipinella,
vers 700, en lat. médiéval, au xrre en fr.
par substitution de suff. Lat. pop. *pilare, piprenelle). Mot répandu sous des formes
dér. de pila, v. pile. Esp. pilar. variées : lat, médiéval pimpernella, it. pim-
PILLER. D'abord « houspiller, malme- pinella, a. pr. pempinela, etc. Désignait
ner, déchirer », xi11°-xIv°, sens actuel vers d’abord le boucage, dont la racine, d’un
1300, très en vogue depuis le commen- goût âpre, est employée en médecine.
cement de la guerre de cent ans, grâce à la Pipinella est peut-être un dér. de piper
montée de mots expressifs dans le domaine « poivre », conservé dans le moyen fr.
de la guerre. Dér. du lat. pilleum « chif- bevrenelle (d’où le néerl. bevernel), tandis
fon », à. fr. peille (dans les patois aussi que l’anc. fr. piprenelle est resté plus près
pille). — Dér. : pillage, vers 1300; pil- du lat. grâce aux botanistes. L'insertion
lard, 1360 ; pillerie, 1345 ; pilleur, id. d’une nasale devant un p est un phéno-
PILON, v. piler. mène irrégulier, mais assez fréquent.
L’all. Pimpernelle et l'angl. pimpernel
PILORI, vers 1165. Francisation du lat. viennent du fr.
médiéval pilorium, id., très probabl. dér.
de pila « pilier », où le suff. -orium sert à PIN. Lat. pinus. It. esp. pino. — Dér. :
exprimer que l’on y séjourne pendant un pine, x111° (J. de Meung), propr. « pomme
certain temps. Les formes de l’a. pr. espi- de pin », sens encore répandu dans l'Ouest
lori, etc., d'un siècle plus récentes que le et le Sud-Ouest. Pineau, xve (pinot Eust.
fr. pilori, n’en sont pas la source, comme Deschamps), variété de raisin, puis vin
on l’a prétendu, mais en sont tirées par fait avec ce raisin ; ainsi nommé parce que
la grappe ressemble à une pomme de pin ;
adaptation.
usité surtout dans les parlers provinciaux :
PILOSELLE, 1503. Empr. du lat. mé- Bourgogne, Champagne, vallée de la Loire,
diéval pilosella (de pilosus « poilu »). Lorraine ; si le mot est originaire de la
PILOT, PILOTER
vallée de la Loire, il a pu être dérivé de
« mettre des pilots », pine « pomme de pin », usuel dans cette
v. pile (de pont).
région. C’est de pineau que vient pinard
PILOTE, 1482 ; pilot dès 1369, et jus- par substitution de suff. péjor., terme
qu'en 1641. Empr. de l’it. piloto, pilola, d’argot militaire, entré dans le langage
à côté desquels on a aussi pedolo, pedotto, pop. pendant la guerre de 1914-18.
pedotia. De pédén « gouvernail » le grec
byzantin avait probabl. tiré un *pédoltes, PINACE, PINASSE, v. péniche.
qui a passé en Sicile, où il a donné les deux PINACLE, 1261 (Du pinacle del Temple
formes pidotu et pilotu. De là les deux fu Sainz Jaques trabuichiez) ; aujourd’hui
types romans. — Dér. : piloter, 1484, ne s’emploie guère que dans des locutions
pilotage, 1483; pilotin, 1771, chez Bernar- fig. telles que mettre sur le pinacle, xvrre, etc.
din de Saint-Pierre désigne un petit pois- Empr. du lat. eccl. pinnaculum (dér. de
son (dans le deuxième sens peut-être pinna, v. pignon), qui désigne le faîte
imité de l’angl. pilot-fish, comp. colin). du temple de Jérusalem, où le Démon
PILOU, tissu de coton pelucheux, transporta Jésus pour le tenter, cf. Ma-
1875. lots IV, 5-7. Rare au sens général de
Rappelle par sa forme et son sens le lat.
pilosus, v. pileux ; mais les circonstances « faîte ».
de la création de ce mot ne sont pas PINAILLER, 1959. Peut-être en rapport
connues. avec bourg. pinocher « se plaindre pour
PILULE, 1314. Empr. du lat. médical rien », dont il pourrait être sorti sous
pilula, propr. « petite balle, boulette ». l'influence des nombreux verbes comme
criailler. Du radical expressif pi-.
PIMBÊCHE, xvie. Peut-être comp. al-
téré de pince, bêche, impér. de pincer et de PINARD, v. pin.
bécher « donner des coups de bec », verbe PINCEAU. Lat. pop. *pénicellus, dér. du
usuel au moyen âge, cf. la formation ana- lat. class. péniculus, dim. de penis « queue
logue espinbesche qui désigne une sorte de (des quadrupèdes) ». L’: anormal de pin-
préparation culinaire au x1ve s. (un verbe ceau, pinsel est dû probabl. à une assimi-
espincier est alors usuel). lation anc. de l’ê qu'avait étymologique-
PIMENT, xvrie (une 1re fois vers 1270). ment la première syllabe à l’i de la syllabe
Empr. d’une langue méridionale, cf. a. pr. suiv.
cat. pimen, esp. pimiento, lat. pigmentum PINCER. Aussi it. pinzare, esp. pinchar.
(v. pigment), qui a pris à basse ép. le sens Mot expressif, comme piquer. À côté du
d’ « aromates, épices », d’où aussi en a. fr. radical pinis- les parlers gallo-romans ont
piument, piment « boisson composée de utilisé aussi une variante piis- et une
miel et d'épices », encore enregistré dans les autre pits- (d’où l’occitan pessugar). —
dict. — Dér. : pimenter, 1845. Dér. : pince, 1375 ; pincée, 1642 ; pince-
487 PIPER

ment, 1560; pincette, 1321; pinçon, picassa et pigassa, encore usuelles aujour-
« marque qui reste sur la peau quand on a d’hui. — Dér. : piocher, xive (Froissart),
été pincé », 1640 (autre sens dès 1423); piocheur, 1534 (Rab.).
pinçoter, 1569. — Comp. : pince-maille,
1482 ; v. maille ; pince-nez, 1856 ; pince- PIOLET, 1868. Empr. du valdôtain pio-
monseigneur, 1828, terme de l’argot des let « petite hâche », dér. du piémontais
voleurs ; pince-sans-rire, 1803; épincer, piola « hache » (aussi a. pr.), qui est lui-
XIIIe ; repincer, xXIII°.
même un dim. de apia, avec déglutination
de l’a initial ; apia est empr. en piém. de
PINDARISER, vers 1500. Dér. sav. de l’a. pr. apia, qui correspond au fr. hache.
Pindare, nom du célèbre poète lyrique
grec ; a été rapidement pris dans un sens PION. Lat. pedônem, acc. de pedo, attesté
ironique. à basse ép. au sens de « qui a de grands
pieds », mais déjà usité à l’époque class.
PINÉAL, dans glande pinéale (Descartes, comme surnom ; a dû prendre plus tard le
cf. : « Il (Descartes) assure que c’est à la sens de « qui va à pied », d’où « fantassin »,
glande pinéale que l’âme est immédiate- qu'on lit encore chez Scarron; comme
ment unie », Malebranche, 1674) ; déjà en terme péj., au sens de « pauvre diable »,
1534, comme terme médical (de figure xve; au sens de « surveillant dans un
pinéale). Dér. sav. du lat. pinea « pomme établissement scolaire », 1834, comme ter-
de pin », en raison de la forme de cette me du jeu d’échecs, xni°, puis, plus tard,
glande. terme du jeu de dames. It. pedone « fan-
PINÈDE, 1838. Empr. du méridional tassin », esp. peén «id. ». — Dér. : pionnier,
pinedo, a. pr. pineda, lat. pinéium, v. xIIe, « fantassin », plus tard, spéc. « tra-
pin vailleur d'armée » ; a pris au cours du xIx®
le sens de « défricheur dans les pays colo-
PINGOUIN, 1600. Empr. de l’angl. pin- niaux », d’où « celui qui ouvre les voies au
guin, lui-même d’origine inconnue. progrès, etc. ». — Comp. : morpion, 1532
(Rab.) ; comp. de l’impér. de mordre et de
PING-PONG, 1904. Empr. de l’angl. pion « fantassin ».
ping-pong, d'origine onomatopéique.
PINGRE. 1800. Mot pop., d’origine in- PIONCER, 1827. Terme d’'argot, qui
connue, déjà anc., d’après le nom propre paraît être une altération, d’après ronfler,
P. Le Pingre, qui se trouve dans un texte d’un plus anc. piausser, dér. de piau, forme
de 1406 (Journal de N. de Baye). En outre, dialectale de peau, pris au sens de « lit »,
les pingres est un nom du jeu des osselets plus exactement « couverture ». Pieu « lit »
aux xve et xvies. et encore en Anjou. paraît avoir des rapports avec ce verbe;
mais ils sont obscurs. On explique ordinai-
PINNE, ordinairement pinne marine, rement pieu comme étant la forme picarde
sorte de mollusque, 1558. Empr. du lat. de peau, sans rendre compte du change-
pinna (mot pris au grec). ment de genre.
PINSON. Lat. de basse ép. *pincionem, PIOT, 1532 (Rab.). Vieux mot, qui se
dont le radical correspond au cri de l’oi- dit encore par plaisanterie. Tiré de l’anc.
seau (des formes qui semblent apparen- verbe pioter, de même ép., dér. lui-même
tées existent en germ., cf. all. Fink, de pier « boire », attesté en 1292 par le
angl. chaffinch), le lat. class. fringuilla surnom Jehan qui pie ; on a aussi le subst.
ne subsiste que dans des parlers it. Usité. pie « boisson », xv° ; pier est un mot argo-
aujourd’hui dans la plupart des parlers tique d’origine obscure. On a proposé d'y
gallo-romans souvent avec un autre suff. voir un verbe burlesque, créé dans les
et l'initiale k. It. pincione, esp. pinzôn. milieux d'étudiants sur la forme grecque
piein « boire », mais la date du surnom
PINTADE, 1643. Empr. du port. pintada exclut cette hypothèse. Plus probable est
(attesté en 1609 dans un ouvrage traitant l'hypothèse que pier est dér. du nom de
de l'Éthiopie, v. dinde), dér. de piniar l'oiseau pie à cause de l’avidité bien connue
« peindre » ; la pintade a été ainsi nommée
de cet oiseau.
à cause des taches (en port. pinia) de son
plumage. PIOUPIOU, 1838. Terme enfantin, ono-
matopéique pour désigner les poussins, dit
PINTE, 1200. Aussi a. pr. esp. pinla, par plaisanterie des jeunes soldats.
angl. pint, all. pinie. Tous ces mots sont
empr. du fr. Très probabl. lat. pincia PIPELET, 1855. Tiré de Pipelet, nom
(part. passé de pingere, v. peindre), au d’un concierge dans Les mystères de Paris,
sens de « pourvu d’une marque » (comp. d’E. Sue, publiés en 1844.
esp. pinta « marque »), employé d’abord
comme adj. avec un subst. fém. désignant PIPER. Aujourd'hui peu employé en
une mesure de capacité, quand celle-ci dehors de l'expression pop. il n'a pas pipé
était étalonnée. — Dér. : pinter, xrtIe. «il n’a pas dit un mot » et de dés pipés;
propr. « siffler, jouer du pipeau », puis
PIN-UP f., 1951. Empr. de l’angl. spécial., comme terme de chasse « prendre
pin up « épingler fermement ». les oiseaux à la pipée », d’où « tromper,
PIOCHE, 1363 (écrit pioiche). Dér. enjôler » ; tous ces sens sont attestés dès le
(avec le suff. pop. -oche) de pic prononcé moyen âge. Lat. pop. *pippare, lat. class.
pipäre « glousser » et, à basse ép., « pépier,
pi; cette prononciation est attestée par crier (en parlant de l’épervier) », avec re-
les dér. de l’a. fr. pial, piarde, piasse, piache, doublement expressif du p. V. pimpant. —
cf. aussi à l’appui les formes de l’a. pr.
PIPER
488
Dér. : pipe, x11° « chalumeau », pipeau, xvie PIRE, Lat. pejor ; était d’abord une
(Ronsard), pipette, x1r1e 8. ; a pris successi- forme de cas sujet dont le cas régime peior,
vement les sens de « tuyau », puis de « me- pieur, lat. pejôrem, a disparu au xve s
sure pour les liquides », x1ve (v. cannette), V. pis. Empirer, x1I°, réfection, d’après
et enfin de « pipe pour fumer le tabac », pire, d’empeirier, x1° (Alexis), encore at-
début du xvrre. Pipée, XIVe; piperie, xrr°, testé au xrrre, lat. pop. *impejoräre (le
au sens de « action de jouer du pipeau », simple pejôrare existe à basse ép.), conservé
sens moderne, xve; pipeur, 1460, « trom- seulement en fr.
peur ».
PIRIFORME, 1698. Formé du lat. pirus
PIPE-LINE, 1887. Empr. de l'angl. pipe- « poire » et de -forme sur le modèle de mul-
line (composé de pipe et de line, qui vien- liforme, etc.
nent des mots fr. pipe et ligne).
PIROGUE, 1640. Empr., par l’intermé-
PIPI, v. pisser. diaire de l'esp. piragua, de la langue des
PIQUE, sorte d'arme, 1376 (à distinguer Caraïbes de la côte, cf. « Les Caraïbes les
du moyen franç. pique « pioche », fém. de appellent piraguas », J. Poleur, 1555.
pic), apparaît d’abord dans des textes PIROUETTE, 1510 (au xv® pirouel,
du Nord-Est et sous la forme pique de mascC., au XIVe pirouelle, refait ensuite sur
Flandres ; empr. du néerl. pike, attesté girouette). Désigne d’abord une sorte de to-
depuis le xrr1 s., comme nom d’une figure ton ; sens fig. dès le xvre. Se rattache à un
de jeu de cartes, xvi®, ainsi nommée à groupe de mots comme fr. piron « gond »,
cause de sa forme en fer de pique ; masc. auquel appartiennent aussi it. pirolo
en ce sens, d’après celui des trois autres « cheville ; toupie », piro, etc., qui sont
figures. probabl. d’origine grecque (peiroô « je
PIQUE « brouille légère », v. piquer. perce », prononcé piro vers la fin de l’'Em-
pire ; comp. grec mod. peiros « cheville
PIQUENIQUE, 1694. Comp. du verbe pointue », prononcé piros). —
piquer au sens de « picorer » (cf. piquer Dér.
pirouetter, 1530.
les tables « vivre en parasite », Au XVIIe et
XVIIIe s.) et de nique « chose sans valeur, PIS, subst. Signifie « poitrine » jusqu’au
moquérie », formation favorisée par la XVI 8.; sens devenu rare et archaïque à
rime. L’angl. picnic (depuis 1748) et l’all. partir du xvire. Lat. pectus, neutre, « poi-
picknick (dp. 1753) viennent du franc. trine ». L’acception rurale de « mamelle de
vache, de chèvre » s’est étendue à la majo-
PIQUER. Représente un type *pikkare rité des parlers gallo-romans. V. poitrine.
qui existe dans toutes les langues romanes,
à l’exception du roumain. Il est né de PIS, adv. S'emploie aujourd’hui dans
l’impression que fait un mouvement rapide des locutions, où la langue pop. tend par-
suivi d’un petit bruit sec. Le p- peint le fois à substituer pire, notamment dans
déclic du mouvement, le -k- son aboutis- tant pis. Lat. pejus. It. peggio.
sement, la voyelle -i- l’acuité du bruit. PISCI-. Premier élément de mots sav.
Le -Xk- n’a pas été palatalisé, parce que comp., tels que pisciculture, 1854, tiré du
cette évolution aurait détruit l’expressivité lat. piscis « poisson », sur le modèle d’agri-
du mot (le franco-prov. connaît aussi des cullure, etc.
formes avec -kk- palatalisé). Le même PISCINE, vers 1190 (en anc. franc. aussi
radical existe aussi dans les langues ger- pecine). Empr. du lat. piscina, propr. « vi-
maniques, sans qu’on puisse penser à un vier », v. le préc. Vers 1877, le mot a reçu
emprunt ni d'un côté ni de l’autre. En lat. l’acception nouvelle d’ « établissement où
class. cette onomatopée avait déjà fourni l’on peut faire de la natation en toute sai-
le subst. picus « pic (oiseau) », v. pic.— Dér. son » ; se rencontre quelquefois auparavant
et Comp. : pie, dans faire pic, terme de jeu au sens de « vivier, réservoir d’eau » ; s’em-
de piquet, xvrre, d’où repic, dans faire pic, ployait surtout comme terme de liturgie
repic et capot, 1659 (Molière) et piquet « jeu Catholique (d’où des sens fig.), d’après la
de cartes », xvI° ; piquant, subst., vers 1430 : piscine probatique, cf. Jean, V, 2, où Jésus
picoter, x1ve (sans doute, d’après picot,
v. pic), d’où picotement, 1552, picoterie, guérit un malade.
XV<; piquage, 1803; pique, xve ; piqué, PISÉ, 1562 (Du Pinet, de la région lyon-
subst., 1819 ; piquet, « sorte de pieu », 1380, naise, traducteur de Pline) ; mot rare avant
comme terme militaire « petit détache- le xix® 8. ; Voltaire écrit encore en 1775 :
ment », 1718, a d’abord désigné un groupe « Je me bornerai cette année à bâtir des
de cavaliers « de piquet », dont les chevaux, granges de ce que vous appelez pizai, si
attachés à des piquets, étaient équipés et je ne me trompe », dans une lettre adressée
prêts à partir; piqueter, xvre s. (piqueter de Ferney à l’astronome Lalande, né à
au xIvV*S. à un autre sens et est empr. du Bourg. Mot techn. de la région lyonnaise,
néerl.) ; piquette, boisson (qui pique), part. passé du verbe piser « battre la terre
XVI®; piqueur, 1300, comme terme de à bâtir », relevé depuis 1800 (Boiste), une
vénerie, 1572; piqûre, vers 1380, une fois au xvie s. au sens de « broyer » chez
première fois vers 1100; dépiquer, 1690 B. Aneau (qui a passé presque toute sa vie
(au sens de « piquer » déjà au xrrre s.); à Lyon) ; ce verbe est, comme pisé, un mot
pique-assiette, 1807; pique-bois, 1838;
de la région lyonnaise où il est encore usité
repiquer, 1508, repiquage, 1801. en ce sens et au sens général de « piler
lat. pop. *pifn)siare (ainsi à cause des»,
PIRATE, 1213. Empr. du lat. pirata (du formes locales), variante du lat. class.
grec peiralés). — Dér. : pirater, fin XVI) Pi(n)säre « broyer », cf. aussi esp. pisar
piraterie, 1505.
« fouler », etc.
489 PIVOT

PISSER. Verbe de formation expressive, V. piste. — Le piston d’une machine à


qui existe presque partout : it. pisciare, vapeur servant à la mettre en fonction,
esp. pivar (au xvIIe s. ; aujourd’hui plutôt on a dérivé de piston le verbe pistonner,
mear, Comme le port. mijar, lat. méjare), « recommander », d’où est dérivé piston
a. pr. pissar. L’all. pissen et l’angl. to piss « recommandation », 1880.
viennent du fr. — Dér. : pipi, mot formé
par réduplication enfantine, relevé depuis PITANCE, v. pitié.
1692, certainement plus ancien; pissat, PITCHPIN, 1875. Empr. de l’angl. pitch-
XIH1*, probabl. fausse graphie pour pissas ; pine (avec finale francisée d’après pin),
pisse, 1611, chaude-pisse, xvie s. (Paré; littéralement « pin (pine) à résine (pülch) ».
Rab. en 1532, dit pisse chaulde) ; pisse- PITE, sorte d’agave, v. agave.
ment, 1565; pisseur, 1482; pisseux, xvI° ;
pissoir, 1489 ; pissoter, xvi®, d’où pisso- PITEUX. Signifie propr. « qui éprouve
tière, 1534 (Rab.) ; — Comp. : pisse-froid, de la pitié », sens encore usité au xvre;
1767 ; pissenlit, xve (désigne, dans beau- puis « digne de pitié », jusqu’au xvire s. ;
coup de régions, et chez certains auteurs, sens moderne depuis lors. Lat. de basse
p. ex. chez Claudel, la renoncule) ; pisse- ép. pietôsus, dér. de pielas, v. pitié.
vinaigre, « esprit chagrin », 1628. PITHÉCANTHROPE, v. anthropo-.
PISTACHE, 1552. Empr. de l'Italie du PITIÉ. Lat. pielälem, acc. de pielas,
Nord f(pisiaccio). A remplacé l’ancien propr. « piété », qui a pris dans la langue
pistace, en usage du x111° au xXvI® s., empr. des chrétiens le sens de « compassion pour
du lat. pistacium (du grec pistakion, d'’ori- le malheur d'autrui » (pietas exprime déjà
gine orientale). — Dér. : pistachier, 1557 chez Suétone des sentiments analogues de
(écrit pistacier). bonté miséricordieuse) ; présente aussi au
PISTE, 1571. D'abord terme d’équitation, moyen âge le sens propre de « piété ». —
rapidement sens plus étendu (déjà en 1562, Dér. : pitance, issu de pitié par substitu-
du Pinet). Empr. de l’it. pista, variante de tion de suff., xn° ; a d’abord les sens de
pesia (aujourd’hui seule forme usuelle), « piété, pitié » ; a pris rapidement celui de
tiré du verbe pestare « broyer », lat. pisiare « portion qu’on donne à chacun dans les
« id. » (d’où aussi esp. pisiar, a. pr. pestar) ; repas des communautés religieuses », XI11°,
l’i en esp. est dû à pisar, v. pisé; en it. il ces distributions de vivres ayant alors
est romain ou napolitain. — Dér. : pister, souvent été assurées par des fondations
1859, d’où pisteur, 1874 ; dépister, 1737, au pieuses ; dans ce terme on ne compre-
sens de « retrouver la piste » ; a pris à date nait pas le pain, de là le sens moderne de
a celui de « détourner de la piste », « chair ou poisson qu’on mange outre le
875. pain »; pitoyable, xrr12 (G. de Lorris pi-
PISTIL, 1694 (pistille en 1685). Tiré du leable), d’où impitoyable, xv°; apitoyer,
XIV£.
lat. pistillus « pilon » en raison de la forme
du pistil. PITON, 1382. Au sens de « sommet de
montagne en pointe », 1640. Dér. d’un
PISTOLE, 1544, au sens de « petite radical pitt- répandu dans les langues
arquebuse »; sens moderne au cours du romanes, analogue à “*pikk(are) et dési-
Xvie s. Empr. de l’all. Pisiole qui vient du gnant quelque chose de pointu.
tchèque pichtal « arme à feu » (cf. pour
l’origine de ce mot obus) ; du fr. viennent PITRE, 1661 (Saint-Amand) qui dit bon
l’it. l’esp. pistola. Le sens moderne propre * pitre au sens de « brave homme »; sens
au français et qui a éliminé le sens ancien moderne, 1828 (Vidocq). Empr. du franc-
vers la fin du xvi® s. est né d’une compa- comtois pitre, qui correspond au fr. piètre.
raison plaisante, due au fait que la pistole PITTORESQUE, 1708. Empr. de l'it.
était une petite arquebuse, cf. : « Comme pitloresco, dér. de pitiore « peintre ».
ayant les escus d’Espagne esté réduits à
une plus petite forme que ceux de France, PITUITE, 1541 ; pituiteux, 1538. Empr.
ont pris le nom de Pistolets et les plus du lat. piluila, v. pépie, piluitosus.
petits Pistolets, Bidets » (C1. Fauchet). PIVERT, v. pic.
La plaisanterie a été faite d’abord avec PIVOINE, xvi®; d’abord pyone, XIVe
pistolet et a gagné ensuite pistole. A pris (Froissart), peone, x11e, formes auxquelles
vers 1840 le sens de « chambre à part se rattachent de nombreuses formes dialec-
accordée à un prisonnier » et qu'il obtenait tales des parlers septentrionaux. Empr. du
moyennant, dit-on, le paiement d’une pis- lat. pæonia (du grec paiônia). Désigne
tole par mois. d aussi par comparaison le bouvreuil, no-
PISTOLET, Vers 1570, dans un texte tamment dans des parlers du Nord-Est et
où il paraît avoir le sens de pisiole « pièce de l'Est ; employé en ce sens en 1562 par
de monnaie »; au xvie s. signifie surtout du Pinet, écrivain franc-comtois.
« petite arquebuse » et aussi « poignard» PIVOT, xrre. Dér. d’un simple non attesté
(en ce sens dér. de Pistoja, ville où on fabri- en fr., mais qui paraît être représenté,
quait cette arme). Dér. de pistole dont il malgré la différence de la voyelle, par
est à peu près l'équivalent au xvi® s. l’ang. pue « dent de peigne de tisserand, de
Au sens d’ « homme bizarre », 1833. herse, etc. », l’a. pr. pua « dent de peigne »
PISTON, 1534, au sens de « pilon »; (aujourd’hui pivo), l'esp. pua, puga « poin-
comme terme de mécanique, « piston de te », d’origine inconnue. Il semble qu'il n’y
pompe », 1648 (Pascal). Empr. de l’it. pis- ait pas lieu de rapprocher pive « cône de
tone, dér. de pisiare, autre forme de pestare, sapin » usité dans la région franco-proven-
PIVOT 490

çale, où l’on voit un lat. pop. *pipa (de « plaire », cf. la formule initiale des lois
la famille de pipäre, v. piper). — Dér. : romaines : Senaiui Populoque Romano pla-
pivoter, 1508. cuit), d’où, dans le lat. mérovingien et
PLACAGE, PLACARD, v. plaque. carolingien, le premier sens de l'a. fr., cf.
aussi le verbe placitare de ce latin « aller
PLACE. Lat. plalea « rue large » (peut- devant un plaid ». — Dér. : plaideur, 1213.
être du grec plateia, fém. de l’adj. platys
« large »), qui a pris à basse ép. le sens de PLAIDOYER, 1519; en outre plaidoyé
« place publique » ; devenu *plattea d’après jusqu’au xvires. ; plaidoierie, 1318. Le pre-
*plaltus, V. plat. It. piazza. — Dér. et mier est l’inf. (ou le part. passé), pris subs-
Comp. : placer, 1564, d’où placement, fin tantiv., d’un anc. verbe plaidoyer, dér. de
XvI°, placeur, 1765 ; placier, 1690 « fermier plaid, v. le préc.; le deuxième est dér. de
des places d’un marché » jusqu’au début ce verbe.
du xixe s., 1840, au sens moderne ; dépla- PLAIE. Signifie parfois « blessure » jus-
cer, 1404, déplacement, xvi®; emplace- qu’au début du xvri® s. Le sens moral de
ment, 1611 (par l'intermédiaire d’un verbe plaie, usité depuis le moyen âge, vient de
emplacer, Xiv®-xve) ; remplacer, 1549, rem- la langue religieuse et se rattache par figure
placement, 1549 ; replacer, 1669. à la fois aux plaies de Jésus-Christ et aux
PLACENTA, 1654 (sens botanique 1694, dix plaies d'Égypte. Lat. plaga « coup,
Tournefort). Empr. du lat. des naturalistes blessure, plaie ».
placenta, tiré du lat. class. placenta « gâ- PLAIN. Ne s'emploie plus que dans la
teau, galette » ; ainsi nommé à cause de sa locution de plain-pied et dans le comp.
forme. plain-chant, outre quelques acceptions
PLACER, subst., 1851. Empr., à propos techn. ; a disparu en partie à cause de son
des gisements de Californie, de l’esp. placel, homonymie avec plein ; a été remplacé par
placer « banc de sable, sable aurifère », plan, V. plan. Anc. adj. usuel jusqu’au
empr. du cat. placer, dér. de plassa « place ». XvI®s. (devenu rare au xvir® et au xvIr1e 8.)
au sens de « plan, uni », lat. plänus, d’où
PLACET, 1365. Tiré du lat. placet « il aussiit. piano, esp. llano. Plaine, qui semble
plaît », employé comme formule d’accepta- rare avant le xvi® s., est le fém., pris subs-
tion en réponse à une requête, encore relevé tantiv., de cet adj. ; l’a. fr. emploie surtout
au XvI®s.; d’où, par abus, la requête elle- au sens de « plaine » le masc. plain et plus
même. rarement plaigne, lat. pop. *plänea. —
PLACIDE, vers 1500; rare avant le Dér. : pénéplaine, 1907, formé avec le
XIX° $S.; placidité, xix° (Mme de Staël). lat. paene « presque ». — Comp. : aplanir,
Empr. du lat. placidus, placiditas. x1*, aplanir a été en outre usité du xrv®
au xvi*s. au sens de « caresser, flatter »),
PLAFOND, v. fond. réfection, par changement de conjugai-
PLAGAL, terme de musique, vers 1620 son, de l’anc. verbe aplanoyer, aplanier;
(d’Aubigné). Dér. du lat. médiéval plaga d'où aplanissement, 1370 (Oresme), au
qui désigne ce mode musical. sens de « flatterie », sens qui a disparu en
même temps que le verbe a perdu celui de
PLAGE, 1456 (une 1re fois chez M. Polo). « flatter »; sens moderne, 1539.
Empr. de l’it. piaggia, qui signifie aussi
« coteau, pays »; ce mot appartient, au PLAINDRE. À eu aussi au moyen âge
moyen âge, presque exclusivement à l’Ita- le sens de « regretter, donner à regret »,
lie méridionale, où il apparaît comme masc. qui ne survit que dans la locution plaindre
(plagius dans les documents lat. médié- sa peine. Lat. plangere. — Dér. : plaignant,
Vaux) et comme fém. (plagia). Il vient terme de droit vers 1225; plainte, xr1e,
du grec plägios « oblique », substantivé au d’où plaintif, xr1° ; replaindre (se), xrre.
sens de « côté, flanc », ensuite « coteau »,
PLAINE, v. plain.
au masC. aussi bien qu'au plur. neutre,
d’où le fém. PLAIRE, xr1e. À remplacé plaisir, usité
PLAGIAIRE, 1584 (écrit plagere). Empr. comme inf. jusqu’au xirIe s., mais déjà
du lat. plagiarius, propr. « celui qui dé- subst. au x11° s., qui représente régulière-
bauche et recèle les esclaves d'autrui » ment le lat. placëre ; plaire est d’origine
(dér. de plagium, qui désigne ce détourne- analogique : comme on disait faire, traire
ment, tiré du grec plagios « oblique, four- à côté de fil) fait, (il) trait, etc., on a dit
plaire à côté de (il) plaît ; v. aussi taire.
be »). — Dér. : plagiat, 1735 ; plagier, 1801.
It. piacere. — Dér. : plaisance, XIII, au
PLAID, « sorte de manteau », 1708 et sens de « plaisir » ; ne s'emploie plus depuis
jusqu’au milieu du x1xe s., dans des ou- la fin du xvi®s. que dans les locutions lieu,
vrages traitant de l'Angleterre et spécial. maison, etc., de plaisance ; plaisanter, 1539 :
de l'Écosse. Empr. de l’angl. plaid, empr. plaisanterie, 1538 (une 1re fois en 1279) ;
lui-même de l’écossais plaide. plaisantin, 1530, par l'intermédiaire de
l’adj. plaisant ; fréquent au xvres. ; paraît
PLAIDER, vers 1080 (Roland). Dér. de avoir été peu usité du xvir® au xix°:
plait, anc. mot (hors d'usage depuis le plaisir, v. plus haut, d’où déplaisir, XIIIC ;
XVII< S., Sauf comme terme d'histoire), qui déplaire, x11°, déplaisant, x11°, au moyen
signifiait propr. « assemblée solennelle où âge (et encore chez Saint-Simon) signifie
se rendait la justice », d’où « procès, ac- souvent « mécontent », d’après le prono-
cord », lat. placitum, propr. « ce qui est minal se déplaire; malplaisant,
conforme à la volonté xrrre. V.
» {dér. de placère complaire.
491 PLAQUER

PLAN : 1° adj.; 2° subsi. (au sens de tions les plus générales auxquelles leur
« surface plane »), d’où son emploi dans la conception s'était élevée étaient celles de
langue des arts plastiques, p. ex. dans plan « herbe » et d’ « arbre ». Ce n’est qu’au
d'un paysage, d’un bas-relief, 1553 (Un temps de la scolastique qu’Albert le Grand
plan ou autre lieu uny dans un traité d’ar- reconnut l'identité du principe vital du
chitecture) ; en ce sens s’est confondu au- règne végétal. Ayant besoin d’un mot pour
jourd’hui avec le suivant. Empr. du lat. désigner cette notion plus générale, il choi-
planus, v. plain, pour des emplois techn. sit le mot plania, en le détournant de
— Dér. : biplan, début xx s.; monoplan, l’acception qu’il avait eue en latin. Le
id. V. planer. franc. ne le suivit qu’assez tard. L’anc.
PLAN « dessin représentant une con- franc. plante désigne une vigne récemment
trée, etc. », v. plant. plantée et est un dér. du verbe planter.
PLANCHE. Lat. de basse ép. planca, PLANTER. Lat. planiäre. — Dér.
modification de *palanca (voir palan) par plant, 1495, « action de planter », d’où « ce
une dissimilation des deux a favorisée par qui est planté » (cf. déjà en 1508 La porie
l'influence de l’adj. planus. — Dér. : des plans au château de Gaillon); plan
planchéier, 1335 (écrit planchoier, plus tard « dessin d’une contrée, etc. », pris au sens
aussi plancheer, peut-être sous l’influence fig. dès la fin du xvie s., est ce même mot
de planché, qu’on trouve à la même époque plant, confondu graphiquement avec plan
au sens de « plancher »); plancher, xri° ; « surface » (la prononciation étant sem-
a aussi le sens de « plafond », notamment blable et les sens proches), le premier sens
au xvi® et au xviie s.; planchette, xrrre. paraît avoir été « surface occupée par un
bâtiment, une statue », cf. Le plan de
PLANÇON. Lat. pop. *plantiônem, acc. Rome est la carte du Monde, 1569 (J. du
de *plantio, dér. du lat. class. planiare, v. Bellay), à côté de Le plant du fort d’Edim-
planter ; d’où aussi pr. planson, cat. planso. ton, 1596, César voulut que la statue demeu-
PLANCTON, fin xixe. Empr. du grec rât en son plant (Amyot) ; il est probable
plankion « ce qui erre », neutre de l’adij. que le développement du sens n'est pas
plankios « errant »; relevé en angl. de- spontané, mais qu'il est dû à l’it. pianta
puis 1892. (v. plante), qui signifie aussi à la fois « es-
pace qu’occupe un bâtiment » et « dessin
PLANE « platane », v. platane. d’une contrée, etc. » ; l’altération graphique
PLANE « rabot, etc. ». Réfection, d’après a de même atteint l'expression pop. laisser
le verbe planer, de l’a. fr. plaine, encore en plan, 1821, faite d’après planter là
usité dans les parlers du Nord-Est et de quelqu'un, xXv®; d'où planifier, 1949;
l'Est, lat. de basse ép. pläna (tiré de pla- arrière-plan, 1811; plantage, 1427 ; plan-
nâäre). Planer, terme de diverses techn., teur « celui qui plante », vers 1280;
représente de même le lat. de basse ép. plantoir, 1640; planton, 1790, dans la
plänäre (dér. de plänus, v. plain et plan) locution de planion, depuis Béranger
«aplanir », d’où aussiit. pianare «aplanir » ; au sens fig., une première fois au xvIes.
d’où planure, 1680. au sens de « jeune plant »; déplanter,
1306, d’où déplantoir, 1640; replanter, 1190.
PLANER « rendre uni », v. le préc.
PLANTEUR « celui qui exploite une
PLANER « se soutenir en l’air »; vers plantation coloniale », 1667. Empr. de
1380, en parlant de la position du cavalier l’angl. planter (lui-même dér. du verbe to
qui baisse le haut du corps sur le cheval plant « planter », qui vient du fr.) et fran-
déjà vers 1270 ; d’où vol plané. Terme de cisé d’après planteur (v. planter).
fauconnerie, dér. de l’adj. plain ; sens fig.,
XVIII, — Dér. : planeur, « sorte d’aéro- PLANTIGRADE, 1795. Comp. avec les
plane », début xx°. Aéroplane, 1855, v. mots lat. plania « plante du pied » et gradi
aéro-. « marcher ».
PLANÈTE, 1119. Empr. du lat. de basse PLANTUREUX, x (Villehardouin).
ép. planela (du grec planétés « (astre) er- Altération de l’anc. adj. plenteïveus, par
rant »). — Dér. : planétaire, 1553. croisement avec l’adj. (h)eureux, v. heur,
PLANQUER, 1790. Forme argotique croisement que le sens explique, cf. la rime
eüreux : planteüreux, en 1314 (Fauvel,
de planter. On trouve planter chez Villon 2803-4). Plenteiveus vient lui-même de
dans le même sens. l’anc. adj. plentif, plenteif, qui dérive à son
PLANT, v. planter. tour de l’anc. subst. plenié (écrit aussi
PLANTAIN. Lat. plantäginem, acc. de planté, par étymologie pop. d’après plante,
plantägô. It. piantaggine, esp. llantén. planter) « abondance », encore usité dans
de nombreux parlers septentrionaux, lat.
PLANTATION, xive. Empr. du lat. plan- de basse ép. plénitäiem, acc. de pleniäs,
lalio, v. planter. conservé seulement par le gallo-roman et
PLANTE « plante du pied ». Lat. plania. par le roumain plinätale, « id. ».
It. pianta, esp. [lanta « bande de fer au- PLAQUER, xu1° ; rapidement pris dans
tour d’une roue ». un sens plus étendu. Empr. du moyen
PLANTE, végétal, 1542. Lat. plania, néerl. placken « rapiécer, enduire, coller ».
, propr. « rejeton, bouture », v. plançon. Les — Dér. et Comp. : placage, 1318. Placard,
Romains (Pline) n’ayant pas reconnu l’uni- xvi, comme terme de menuiserie « revé-
té idéale du règne végétal n'avaient pas tement d’une porte, d'une paroi », d’où
de mot pour la notion « plante ». Les no- « sorte d’armoire pratiquée dans un mur »,
PLAQUER 492

1828 (mais dès 1785 à Marseille et dans un marin célèbre (aujourd’hui l'esp. dit
l'Auvergne ; ce sens semble être né dans le platino, masc., d'après le fr.), dér. de plaia
Sud-Ouest ; au sens de « écrit ou imprimé « argent »; ce mot qui vient lui-même de
qu'on affiche sur les murs », xvi® s. (anté- l’a. pr. plala, propr. « lame de métal »,
rieurement « nom d’une petite monnaie », d’où spécial. « lame d’argent, argent », ou
1406, qui est emprunté du moyen néerl. de l’a. fr. plaie, qui a les mêmes sens, no-
plackael) : aussi « pièce officielle non pliée », tamment dans or, argent en plate, v. plat;
1444 ; d’où aussi le sens du mot dans la cf. pour un développement de sens ana-
langue de l'imprimerie), d’où placarder, logue le fr. vaisselle plate, propr. « vaisselle
1586 ; plaque, 1611 (antér. on disait plate) ; en métal non montée, d’une seule pièce »,
au xves. désigne une sorte de monnaie, qui XVIIe. On a donné vers 1780 le genre masc.
venait de Flandre, empr. en ce sens du à platine, d’abord fém. d’après l'esp. pla-
moyen néerl. placke ; d'où plaquette, 1727 ; tina, quand on a voulu uniformiser le
désigne dans le fr. pop. de l'Est une pièce genre des noms de métaux.
de deux sous, en ce sens dér. de plaque,
sorte de monnaie ; plaqué, sorte de métal, PLATONIQUE, au sens de « purement
1802 ; plaqueur « ouvrier qui fait du pla- idéal » en parlant de l'amour, 1750. Em-
cage », 1239; sens fam. récent, d’après ploi fig. de plaionique, terme de philos.,
celui qu'a pris le verbe; contre-plaqué 1488 (une première fois au x1v°), empr. de
(bois), fin xIx°, d’où -cage, id. plaïonicus (du grec plaionikos, de Platon,
célèbre philosophe de la fin du ve s. av.
PLASMA, 1855. Mot créé en 1836 par J.-C.). — Dér. : platonisme, 1672 (Molière) ;
le médecin all. Schulz qui l’a tiré du grec développement de sens parallèle à celui de
plasma « ouvrage façonné », v. le suiv., en l’adj.
vue d’un sens spécial; plasma, plasme
existait en fr. antér. dans la langue médi- PLÂTRE, v. emplâtre.
cale pour désigner de l’émeraude brute,
qu'on pilait pour la faire entrer dans des PLAUSIBLE, 1552. Empr. du lat. plau-
médicaments. — Dér. : protoplasma, 1869, sibilis « qui est digne d’être applaudi, ap-
créé en 1846 par le physiologiste all. prouvé » (de plaudere « applaudir »). —
Hugo von Mohl. Dér. : plausibilité, 1725.
PLASTIQUE, 1553, adj.; 1788, subst. PLÈBE, 1802 (une 1re fois vers 1354,
Empr. du lat. plasticus (attesté à basse Bersuire, en parlant de la plèbe de Rome).
ép.), plastica (du grec plastikos « qui con- Empr. du lat. plebs. — Dér. : plébéien,
cerne le modelage », plastiké (tekhné « art »), X1IV® (Bersuire, en parlant de la plèbe de
du verbe plassein « façonner »). Rome); pour le suff. cf. pairicien ; sens
fig. dès le xrve s., d'après le lat. plebeius
PLASTRON, 1492, au sens d’ « armure qui a aussi les sens fig. de « commun, vul-
protégeant la poitrine », d’où les sens mo- gaire ».
dernes à partir du xviie s. Empr. de lit.
piasirone « sorte de haubert », dér. de PLÉBISCITE, 1743 (en parlant de Ro-
piastra « armure protégeant le dos »; pour me ; une 1re fois au xive s., Bersuire) ; a
le sens propre du mot it., v. piastre. — été adopté par notre langue politique lors
Dér. : plastronner, 1611, sens parallèle au du plébiscite de 1852, d’où plébiscitaire,
subst. 1870, plébisciter, fin xix°. Empr. du lat.
plebiscitum.
PLAT, adj. Lat. pop. *platius, empr. du
grec plaiÿs « plat, étendu ». It. piaïto, esp. PLÉIADE, 1556 (mais répandu surtout
chato. Pied plat, terme d’injure, xvrre, vers 1563), nom que prit le groupe des sept
désigne proprement les gens du peuple, poètes Ronsard, Baïf, Du Bellay, P. de
qui portaient des chaussures sans talon, Thyard, Jodelle, Belleau, Daurat (après
à la différence des gentilshommes. V. pla- s'être appelé Brigade dès 1549), à l’imita-
tine. — Dér. : plat, subst., xive, d’où platée, tion de la Pléiade d'Alexandrie, qui exis-
1798 ; plateau, xrre; platine, pièce plate tait sous Ptolémée Philadelphe, au re s.
dans différentes techniques, xr1°; plati- av. J.-C.; le mot grec pleias désignait
tude, 1694 ; méplat, 1676 (préfixe de sens propr. la constellation des Pléiades où
négatif me(s), propr. « ce qui n’est pas tout l’on compte sept étoiles (Pléiades, cons-
à fait plat ») ; replat (géogr.), fin xixe, — tellation, se dit depuis le xrr1°, d’après le
Comp. : aplatir, xiv°, d’où aplatissement, lat. pleiades) ; depuis une date récente, se
1600 ; plat-bord, 1573 ; plate-bande, 1508 ; prend aussi au sens de « groupe (de nombre
plate-forme, xve, indéterminé) d’artistes ».
PLATANE, 1535. Empr. du lat. platanus PLEIN. Lat. plénus. It. pieno, esp. lleno.
(du grec platanos). Une forme pop. plane Pleine, en parlant d'une femelle, xrr1e s., a
survit dans des parlers du Nord-Est et de absorbé l’a. fr. prainz (dont le fém. preigne
l'Est. est précisément du xvie s.), lat. pop.
*praegnis, issu du lat. class. praegnans ; en
PLATE-FORME, terme de la langue Normandie, pays d'élevage, on a conservé
politique, 1855, dans un texte traitant de 0 mot prinse, — Comp. : trop-plein,
l'Amérique ; récent en un sens plus géné-
ral. Empr. de l’anglo-américain platform,
qui vient lui-même du fr. plate-forme. PLÉNIER. Lat. de basse ép. plénärius.
PLATINE, métal, 1752. Empr. de l’esp. PLÉNIPOTENTIAIRE, xvire (Balzac).
plalina, fém. employé pour la première Formé avec les mots lat. plenus et potentia
fois par Ulloa, savant qui fut également « puissance ».
493 PLOYER

PLÉNITUDE, vers 1300. Empr. du lat. plomberie, 1304 ; plombier, 1316 ; aplomb,
plenitudo, dér. de plenus « plein ». 1547, cf. encore au xvit® une ligne élevée
à plomb; déplomber, 1838; surplomber,
PLÉONASME, 1610. Pléonastique, 1838. 1694, d’où surplomb, id.; dér. de plomb
Empr. du grec pleonasmos, pleonastikos. dans fil à plomb.
PLÉSIO-. Premier élément de mots sav. PLOMBAGINE, 1559 (d’abord plombage,
comp., tels que plésiosaure, 1836 (d'abord 1556). Empr. du lat. plumbago, plumbagi-
-us, 1825, chez Cuvier), mot créé par le nis, de plumbum, v. le préc.
naturaliste anglais Conybeare, tiré du grec
plésios « voisin ». PLONGEON, oiseau aquatique. Lat. de
basse ép. plumbiônem, acc. de plumbiô
PLÉTHORE, 1537. Empr. du grec médi- (Polemius Silvius, né en Gaule, v° s.),
cal pléthôré « surabondance (des humeurs) » ; dér. de plumbum; ainsi nommé parce
sens fig. depuis la fin du xvirie s. — Dér. : qu’il reste longtemps sous l’eau, où il dis-
pléthorique, 1660. paraît comme le plomb, v. le suiv. Par
PLEURER. Lat. plôräre « crier, se la- comparaison faire le plongeon, d’où faire
menter, pleurer ». Concurrencé dans les des plongeons, en partie d’après le verbe
parlers septentrionaux, notamment par suiv.
crier, brailler, braire. Esp. llorar. — Dér. : PLONGER. Lat. pop. *plumbicäre, dér.
pleur, xu1°; pleurard, 1552 (Rab.); pleu- de plumbum « plomb »; dit ainsi propr.
reur, x111° ; éploré, x11°, avec o des formes des filets et des sondes qu’on garnit de
accentuées sur la terminaison. plomb pour les faire descendre au fond de
PLEURÉSIE, x1r1e (sous la forme pleu- l’eau. Propre au fr., mais dont le type
risie) ; pleurétique, id. Empr. du lat. mé- étymologique est assuré par le pic. plon-
diéval pleuresis, -elicus, altération du lat. quer. — Dér. et Comp. : plongée, xv°;
médical pleurisis (d’où la forme pleurisie), plongeur, xrr1° (Joinville), plongeur (de
-ilicus (du grec pleuritis, pleurilikos, de restaurant), 1867, propr. « qui plonge ses
pleura, v. plèvre). mains dans l’eau pour laver la vaisselle »;
replonger, xII°.
PLEURNICHER, 1739. Empr., avec
dissimilation des deux consonnes labiales, PLOT. Terme techn., 1868 ; récent pour
du norm. pleurmicher, comp., en vue d’un désigner une sorte de pavé métallique ser-
renforcement expressif, de pleurer et du vant à transmettre la force électrique au
norm. micher « pleurer », celui-ci très ré- moteur d’un tramway ; vivait au moyen
pandu sous une forme plus complète (comp. âge surtout en Bourgogne, dans la Franche-
norm. chemicher, gasc. chemicä, cat. somi- Comté et dans les régions franco-proven-
car, bmanc. choumicher), mais d’origine çales, avec le sens de « billot », 1290. Peut-
inconnue. — Dér. pleurnicheur, 1774; être croisement du lat. plautus « plat » et
pleurnicherie, 1845. du germ. blok (cf. bloc).
PLOUTOCRATIE, 1845 (d’abord plu-
PLEUTRE, 1750. Peut-être du flamand locratie, en 1831), -CRATE, vers 1860;
pleute, à la fois « chiffon » et « mauvais empr. de l’angl. plutocracy, pluiocrat, qui
drôle » ; l'emploi de pleutre dans les parlers sont formés d’après le grec ploûlos « ri-
du Nord-Est au sens de «lâche, rustre, etc. » chesse », sur le modèle d’aristocratie. La
est favorable à cette hypothèse.
première forme plu- reproduit l’orthogra-
PLEUVOIR. Lat. pop. plouëre (cf. plove- . phe anglaise, la forme définitive suit la
bat, Pétrone), lat. class. pluere, d’où le fr. prononciation anglaise.
pleuvoir par changement de conjugaison. It. piegare,
— Dér. : repleuvoir, 1549. PLOYER. Lat. plicäre.
du grec roum. pleca « partir » (cf. en fr. plier ba-
PLÈVRE, 1552 (Rab.). Empr. gages), esp. llegar « arriver ». Plier n’est
pleura « côté » en vue d’un sens spécial, qu'une variante analogique de ployer ; sur
prononciat ion du grec byzantin.
avec la le modèle de verbes tels que nier, prier qui
PLEXUS, xvie (Paré). Empr. du lat. de avaient au moyen âge un radical accentué
basse ép. pleæus, propr. « entrelacement » nie, prie et un radical inaccentué nei-,
(de plectere « tresser ») en vue d’un sens prei-, noi-, proi-, p. ex. à l'inf., on a dit,
spécial. à côté de pleier, ploier, dès le xr1° 8.,
xItI*, qui remonte plie, etc., d'où a été tiré tout un verbe
D'abord plais,
PLIE. plier, vers le xvi® s.; le XvII° 8. a fixé
au lat. de basse ép. plalessa (Ausone), l'emploi des deux verbes, plier plus concret
d’origine obscure, par une forme *plalicem, (en rapport avec pli), ployer plus littéraire,
refaite sur un modèle indéterminé, mais mais le xvrrre s. n’a guère employé ployer,
assurée par d’autres formes dialectale s, cf.
qui n’a été remis en honneur qu'au xIX°.
le wallon playis’, et par l’angl. plaice. _— Dér. de ployer : déployer, x11°, d'où
PLIER, v. ployer. déploiement, 1538 ; éployé, vers 1500; re-
PLINTHE, 1544. Empr. du lat. de basse ployer, vers 1200, d’où reploiement, 1190.
ép. plinthus (du grec plinthos, proprement — Dér. de plier : pli, xun° ; d'abord ploi,
« brique »). xue, d'où plisser, 1538, plissement, 1636,
plissure, xvi®, déplisser, 1611; pliable,
PLIOCÈNE, v. éocène. 1559 ; pliage, 1611; pliant, subsl., 1665
PLISSER,v. ployer. (Molière), issu de siège pliant, 1632 ; pliure,
PLOMB. Lat. plümbum. — Dér. et 1314; déplier, 1538; replier, 1538 (une
Comp. : plomber, 1539, d’où plombé, adj., première fois en 1213), d’où repli, 1539
1618, plombage, xvi®, plombeur, 1723; (écrit replis), repliement, 1611.
PLUIE 494
PLUIE. Lat. pop. *ploia, issu, d’après allant de la Vendée à la Suisse romande, on
plovere, v. pleuvoir, de *pluia, lat. class. dit mais en ce sens ; mais, dans les phrases
pluvia. It. pioggia, esp. lluvia. — Dér. : négatives, mais (ordinairement précédé de
parapluie, 1622, fait sur le modèle de para- pas) ne s'emploie que dans le Sud-Ouest,
sol ; mal établi avant la fin du xvrre s. : et pour exprimer le comparatif, il est
« Quelques dames commencent à dire ce limité au gascon. It. pit. — Comp. : sur-
mot, mais il n’est pas établi, et tout au plus, vers 1090.
plus on ne le peut dire qu’en riant, et c’est
ce qu'on appelle un parasol », 1680 (Ri- PLUSIEURS. Lat. pop. *plüsicres, alté-
chelet). ration, d’après plüs, de plüriôres, réfec-
tion, attestée à basse ép., du lat. class.
PLUM-CAKE, 1854. Empr. de l'angl. plüres d'après la formation générale des
plum-cake (de plum, v. plum-pudding) et
comparatifs.
de cake « gâteau », mot d’origine germ.
PLUME. Lat. plüma, propr. « duvet » : PLUVIAL, 1488 ; une première fois au
XII° S.; pluvieux, 1213; pluviôse, 1793
a éliminé dans presque tous les parlers (créé par Fabre
gallo-romans les représentants de penna d’Églantine, cf. nivôse,
ventôse). Empr. du lat. pluvialis, pluviosus
« plume », v. penne. It. piuma « plume,
duvet ». L'emploi de plume au sens de (de pluvia « pluie »).
« petite lame de métal dont on se sert pour PLUVIER, xvie. Empr. du pr. pluvier
écrire » vient de ce qu’on écrivait depuis ou forme refaite, d’après cette forme pro-
l'antiquité avec de grandes plumes d’oi- vençale ou le lat. pluvia, de l’a. fr. plovier,
seau taillées, surtout d’oie (l'invention de Plouvier, lat. pop. *plovärius (de plovere
la plume en métal remonte au début du «pleuvoir ») ; dit ainsi parce que cet oiseau
XVIII S., mais l’usage n’en est courant arrive en troupe vers la saison des pluies.
que depuis le premier quart du xixe s.;
on a employé alors aussi des tuyaux de PNEUMATIQUE, 1520, comme terme
métal). — Dér. : plumage, 1375 ; plumas- de physique. Empr. du lat. pneumaticus
sier, 1480, par l'intermédiaire de plumas (du grec pneumatikos, également employé
« plumet », xve, d’où plumasserie, 1505 ; en parlant de la machine pneumatique, de
plumeau, 1802; plumée (d’encre), 1623 ; Pneuma «souffle »). — Dér. : pneu, fin x1xe,
plumer, xr1°, v. peler ; plumet, 1618 (une par abréviation, au sens de « tube de
première fois en 1478 comme mot d’in- caoutchouc gonflé d’air, garnissant la jante
jure) ; plumetis, 1498, par l’intermédiaire d’une roue »; cette sorte de tube à été
d’un adj. plumelé, 1364, « qui imite la inventée à cette époque par le mécanicien
plume »; plumier, 1872, de plume (à anglais Dunlop. Plusieurs comp. dans la
écrire) ; déplumer, x111° ; remplumer, 1245, langue médicale, comme pneumothorax,
par l'intermédiaire 1836 (avec le grec thorax « poitrine »)
d’un anc. emplumer,
XIIe, PNEUMONIE, 1787, une première fois
PLUMITIF, 1583 (1611 plumetis, dp. en 1707 (D.). Empr. du grec pneumonia
1765, au sens moderne). Signifiait au (de pneumôn « poumon »).
sens propre « registre où sont résumées POCHADE, POCHARD, v. le suiv.
les délibérations d'un tribunal »; le sens
moderne est dû à une plaisanterie par POCHE « poche de vêtement ». Du fran-
rapprochement du mot avec plume ; plumi- cique *pokka, cf. angl. poke. Propre au
tif est une altération de plumelis, probabl. fr.; mais concurrencé dans les parlers du
Nord-Est par des formes issues du germ.
d'après primitif, au sens « d’original », *taska, cf. all. Tasche « poche ». La région
donc née dans les milieux de cleres Ménage
signale que dans le chapitre de l’ glise de de Lyon, la Savoie et la Suisse française
Paris on disait encore primitif en ce sens) ; possèdent un mot fata, du burgonde */fatta
quant à plumetis, c’est un dér. d’un anc. (qui correspond à l’all. fetzen). — Dér. :
verbe plumeier « prendre des notes » (at- pochard, propr. « rempli comme une po-
testé vers le xvi® s., dér. lui-même de che », 1837, cf. sac à vin (en 1466 on a déjà
plume). le nom propre Simonne la Pocharde) ; po-
cher, x111, dans la locution pocher les yeux,
PLUPART (la), v. part. probabl. « les faire gonfler comme une
poche »; pocher des œufs, XIVe, les faire
PLURALITÉ, xine. Empr. du lat. de cuire de manière que le blanc enveloppe
basse ép. pluralitas, dér. de pluralis, v. le le jaune comme une poche ; pocher, terme
suiv. de peinture, 1767 (Diderot) ; doit s’expli-
PLURIEL, vers 1470, forme qui a triom- quer comme croquer, d’où pochade, 1828,
phé grâce à l’appui que lui a donné Vau- pochoir, 1875, pochon, 1862: pochetée, fin
gelas. Réfection, d’après le lat. pluralis, XIX°; expression pop. pour désigner une
de plürier, usuel du xvie au début du grande bêtise, une forte ivresse, comparée
XIX® S., refait lui-même sur singulier ; au contenu d’une poche pleine; pochette,
antér. plurel (et plurer d’après singuler), xX11°; empocher, 1588, rempocher, 1743.
XIIe, empr. du lat. des grammairiens plu- POCHE « louche ». Lat. de basse ép.
ralis (dér. de plus, pluris, v. le suiv. ; au popia. Seulement fr.; usité surtout dans
moyen âge on trouve aussi les formes plu- les parlers de l’Est et de la région franco-
riers, plurieus, etc., au sens de « plusieurs »).
provençale.
PLUS. Lat. plüs. Comme adv. de quan- PODAGRE, 1215. Empr. du lat. podager
tité, p. ex. dans j'en ai Plus, propre aux
(du grec podagros, de podagra « goutte aux
parlers septentrionaux ; au Sud de la ligne Pieds », propr. « piège »). De ce même mot
495 POINT

lat. vient pouacre, x11°, au sens de « gout- POIGNARD, 1512. Réfection, par chan-
teux »; a pris au xvi* le sens aujourd’hui gement de suff., de l’a. fr. poignel, poignal
vieilli de « sale, laid », dû à celui de «rogne, (également usité comme adj. au sens de
gale » que pouacre a aussi au moyen âge, « qu'on tient dans le poing »), lat. pop.
peut-être sous l'influence de l’interjection *pugnälis, dér. de pugnus « poing », adj.
pouah. pris substantiv. au sens de « poignard »,
cf. it. pugnale, esp. puñal. — Dér. : poi-
-PODE. Deuxième élément de mots sav., gnarder, 1556.
tels que myriapode, 1802, tiré du grec pous,
podos « pied ». POIL. Lat. pilus. It. esp. pelo. — Dér. :
poilu, xve, antér. pelu, xr1° (encore usité
PODESTAT, 1571 (au xve s. une fois au XVIIe s.) ; a pris dans le fr. pop. le sens
potestat). Ne s'emploie qu’en parlant de de « fort, brave »; déjà relevé dans Le
magistrats des villes du Nord et du Centre médecin de campagne de Balzac, d’où,
de l'Italie. Empr. de l’it. podestà, lat. potes- dans l’argot militaire, dès avant la guerre
tälem, acc. de potestäs « puissance ». de 1914-1918, le sens d’ « homme robuste »
PODIUM, 1910 (dès 1765 comme t. ou simplement d’ « homme », et, pendant
d’antiquité). Empr. du lat. podium. cette guerre, celui de « combattant » sur-
tout en usage parmi les civils de l'arrière ;
POËÊLE, fém., ustensile de cuisine. D’a- pelage, 1469 (très vieux dér. collectif de
bord paele, puis pail(l)je au xv°, d’où poil, plutôt que dér. de peler); se poiler
poi(s)le, id., au moment où oi a hésité « rire aux éclats », 1901, dér. régressif de
dans la région parisienne entre les deux s’époiler, fin XIX°, pOp., même sens, propr.
prononciations oè (écrit oi) et à (écrit ai). « s’arracher les poils ».
Lat. patella. It. padella, esp. padilla « petite
poêle ». — Dér. : poêlée, xir1° ; poêlette, POILE, v. poêle « fourneau ».
1610 ; poëlier (ou poilier), 1480 ; d’où poë- POINÇON. Dér. d’un verbe It. *punctiare
lerie, xv°; servent aussi de dér. à poêle « piquer », formé sur le part. passé de
« fourneau »; il n’y a pas de distinction pungere et dont l'existence est assurée par
nette, le même homme faisant souvent l’it. ponzare « se raidir », l'esp. punzar
les deux métiers; poêlon, 1329 (écrit « piquer », le prov. ponsilhar « étayer ».
paalon). L'it. punzone, l'esp. punzén sont formés de
POËÊLE, masc. « étoffe noire dont on la même façon. — Dér. : poinçonner, 1324,
couvre le cercueil pendant les cérémonies d’où poinçonnage, 1402.
funèbres », sens qui date du xxI° $.; POINDRE. Signifiait d’abord « piquer » ;
antér. désigne aussi un dais et diver- sens disparu depuis le xvrIe s., sauf dans
ses sortes de voiles. D'abord palie, -xI° le proverbe : Oignez vilain, il vous poindra ;
(Alexis), d'où paile, puis poële vers le a pris le sens de « commencer à pousser
xvie, forme qui s'explique comme la préc. (comme une pointe) » dès le xxr11° s., puis
Empr. du lat. pallium « sorte de manteau, s’est dit du jour qui point, xvie. Lat. pun-
couverture », V. pallier. gere « piquer ». It. pungere « piquer ». —
Dér. : poignant, xr1° ; d’abord « piquant »,
POËÊLE, masc. « sorte de grand four- encore chez Buffon ; sens moderne, relevé
neau » ; écrit aussi poile. À désigné d’abord depuis 1704.— Comp. pourpoint, vers 1200,
une chambre chauffée; signifie encore adj. signifiant « brodé, piqué » (dès 1160),
« chambre à coucher, chambre où se trouve pris substantiv.; l’apr. perpoint et l’anc.
le fourneau (qui se dit aussi poéle) » en lor- pic. parpoint montrent qu'il faut partir
rain et dans les parlers voisins. Lat. pë(n)- de *perpunctus, part. passé d’un verbe du
silis, propr. adj. signifiant « suspendu », latin du Bas-Empire *perpungere « percer
qui a dû prendre le sens de « chambre en piquant »; l’afr. a remplacé le préf.
chauffée », par opposition à *exiüfa « étu- par- par pour-.
ve », v. étuver, cf. pour l'explication de ce
sens l'expression ancienne balnea pensilia POING. Lat. pugnus. It. pugno, esp.
«bains construits sur des voûtes et chauffés puño. — Dér. : poigne, 1807 (alors en Lor-
par-dessous » (rer s.). raine, passe dans l’argot et le franc. pop.
dès 1835 ; issu du précédent par change-
POÈME, 1213. Poésie, 1405. Poète, x11°. ment de genre dû à l'influence des autres
Poétique, xiv°. Empr. du lat. poema, poe- mots fém. en -gne et de main, manche;
sis, poeta, poeticus (du grec poiéma, poié- attesté sporadiquement dès le x1v® s. dans
sis, poiétés, poiétikos, de poiein « faire »). les régions où poing se prononçait avec
— Dér. de poète : poétereau, 1639. Poé- -gne, comme la Flandre ; à ne pas confondre
tesse, 1642. Poétiser, xive (Oresme, d’abord avec a. fr. poigne « combat », du lat. pu-
« faire des vers »). gna) ; poignée, xri*; poignet, 1243 ; po-
POGNON, v. poing. gnon, 1840 (aussi poignon), très répandu
dans les parlers; dér. du verbe poigner
POGROM, 1907. Empr. du russe pogrôm. « saisir avec la main », aussi très fréquent
dans les parlers ; il n’est pas possible de
POIDS. D'abord pois, écrit poids de- dire de quelle région pognon est venu;
puis 1495 par suite d’un faux rapproche- émpoigner, xr1°, empoignade, 1867, em-
ment avec le lat. pondus « poids ». Lat. poigne, attesté en 1773 dans la locution
pê(n)sum « ce qu’une chose pèse ». It. esp. argotique foire d'Empoigne.
peso. V. peser. — Comp. : contrepoids,
xr1e (écrit -pois) ; surpoids, 1588 (Montai- POINT. Lat. puncium « piqûre, point ».
gne). Comme adv. de négation, propre au gallo-
POINT
496
roman ; apparaît en fr. dès 1050, — Dér. : gréable que parce qu’on
pointer « marquer d'un point », xrre; ne savait plus
bien ce qu’elle était ; angoisse est le nom
« pointer une bouche à feu », etc., xvie, d’un village de la Dordogne.
d’où pointage, 1628, pointeur, 1499 (« qui
marque d’un point »); développement de POIREAU, x1r1e; plus usité que por-
sens parallèle à celui du verbe ; pointillé, reau, aujourd’hui surtout provincial, dont
XvIr1e (Buffon), une 1re fois en 1414, part, poireau est une altération, due sans doute
pris substantiv. de poiniiller, 1611, « par- à poire et propre à la région parisienne.
semer de petits points » d’où aussi poin- Porreau est un dér. anc. d’un simple non
tilliste, -isme, terme de peinture, fin xIx° 5. attesté en fr., lat. porrum, mais conservé
— Comp. : appointer, XIII, Créé comme ailleurs : it. porro, esp. puerro. D’autres
terme jurid. signifiant « régler une affaire », dér., notamment un type Porrée, xiII°
sens disparu depuis le xvir® s.; sens mo- (d’où poirée, relevé dans les dict., où il
derne dp. xvni®; d’où appoint, xvre s., désigne une variété de bette) concurren-
appointement, 1304, développement de cent poireau dans les parlers gallo-romans.
sens parallèle à celui du verbe, désappointé, — Dér. : poireauter, de faire le poireau,
1761, au sens moderne, qui est un angli- fin xixe,
cisme d’après disappoinied, mais avait déjà POIS. Lat. pisum. Usuel aujourd’hui
vécu en fr. dans ce sens dans la première dans les parlers gallo-romans (mais a. pr.
moitié du xvire 5. ; antér. -er, « rayer un ceze(r), lat. cicer, aujourd’hui encore usité
officier des contrôles » ; d’abord « destituer
(en général) », 1395, d’où désappointement, dans le Sud-Ouest), outre des dérivés en
-el dans l’Est et l'Ouest. V. chiche. La
sens moderne en 1783 d’après l’angl. disap-
poiniment ; antér. dp. le xve s., avec des variété dite pelits pois, xvirie, ne paraît
pas porter un autre nom dans la majorité
sens correspondants à ceux du verbe.
Contre-point, x1ve (E. Deschamps) ; point des patois.
ici « note » ; les notes étaient représentées POISON. Fém. comme lat. pôtiô, jus-
au moyen âge par des points ; embonpoint, qu’au début du xvrre s., encore usuel dans
1528, cf. vers 1377, {u es en bon point ; un grand nombre de patois et le fr. pop.
rond-point, 1740; mal-en-point, 1538. Lat. potiônem, acc. de potio, propr. « breu-
vage », d’où « boisson magique » et de là
POINTE, Lat. pop. puncia, subst. fém., « breuvage médicinal » dès l’époque class.,
issu du part. passé de Ppungere « poindre » ; sens conservés en a. fr., et d’autre part,
attesté au 1ve s. au sens de « coup de à basse ép., « breuvage empoisonné » (cf.
pointe d’une arme ». — Dér. : pointer, un développement de sens semblable dans
« frapper de la pointe, pousser en pointe », le grec pharmakon). V. potion. — Comp. :
XVI; pointu, 1377 ; appointer « tailler en contre-poison, vers 1500: empoisonner,
pointe », vers 1280 ; épointer, vers 1100. X1€, d’où empoisonnement, XII, empoison-
POINTER « chien d'arrêt, de race an- neur, xirre.
glaise »; écrit aussi pointeur ; 1852 (Th. POISSON. Dér. très ancien (cf. pescion
Gautier; d'abord spanish pointer, 1834). dans le Fragment de Valenciennes) d’un
Empr. de l’angl. pointer, propr. « indica- simple attesté en a. fr. par les comp. cras-
teur » (du verbe jo point « montrer », de pois « baleine », porpois « esturgeon », dont
point « point », empr. du fr.). les premiers éléments sont cras « gras »,
por « porc » et le deuxième pois, lat. piscis :
POINTILLEUX, 1587. Dér., sur le mo- aussi à. pr. peis. Le dér. est rare en dehors
dèle de l’it, puntiglioso, de pointille, 1571, du gallo-roman où il a été développé pour
« minutie dans un débat », lui-même déjà échapper à la gêne que causait, du moins
empr. de l’it. puntiglio, « id. » (de punto en fr., l'homonymie de pois et poids;:ail-
« point ») ; de là aussi pointiller « chicaner », leurs on a le simple : it. pesce, esp. pez. —
1575, pointillerie, 1694. Dér. : poissonneux, 1555 (Ronsard) ; pois-
POINTURE. Aujourd'hui terme techn. ; sonnier, vers 1210 ; poissonnerie, 1285 :
jusqu’au xvie a le sens général de « pi- poissonnière, xvie; empoissonner, vers
qûre ». Lat. punclüra « piqûre ». It. esp. 1240, empoissonnement, 1531, rempois-
puntura. Le sens de « mesure de chaus- sonner, 1405, rempoissonnement, 1664 (Col-
sures ou de gants », 1866, est un dévelop- bert).
pement récent d’après l'emploi de pointure POITRAIL. Propr. « partie du harnais
au sens de « forme, pièce allant du talon du cheval, qui passe sur le poitrail » ; sens
jusqu’à la pointe », 1765; cf. aussi dans moderne postérieur au xvie. Issu au XVI®,
la langue de la typogr. « petite lame de par substitution de suff., de poitrel, poitral,
fer avec une pointe à l’une de ses extré- lat. pectoräle (de pectus, Pectoris « poitri-
mités », 1762. ne »), attesté au sens de « cuirasse ». It.
POIRE. Lat. pop. pira, pl. neutre pris pellorale, esp. pretal. — Dér. : dépoitraillé,
comme subst. fém. du lat. class. pirum ; 1876.
cf. cerise, pomme, prune. It. esp. pera. — POITRINE. Signifie d’abord « cuirasse,
Dér. : poiré, 1529 : antér. peré, XII1°; poi- harnais du poitrail du cheval »; sens mo-
rier, XVi*; antér. perier, XI11°, — Comp. : derne dès le x1°, mais qui n’a triomphé
poire d'angoisse, qui désignait proprement qu’au xvie pour remplacer pis qui, en rai-
une sorte de poire ; attesté en ce sens dès son de son
1094; au sens fig., xve, par jeu de mots; sens nouveau, ne convenait
plus. Lat. pop. *peciorina, fém. pris subs-
cette poire ne paraît avoir été définie tantiv. d'un adj. *pectorinus (de pectus,
depuis le xvire s. comme un fruit désa- v. le préc.), d’où aussi it. pellurina, « sorte
497 POLITIQUE

de ceinture », esp. prelina « id. ». Aujour- byzantin apodeixis (qui remonte au grec
d’hui usuel dans les parlers gallo-romans, ancien où il signifie « preuve ») ; l’a. pr.
sauf quelques traces de pis et une forme podissa « reçu, quittance » est également
pitre, lat. pop. *peciorem, dans la région empr. du lat. médiéval (polissia, en 1428,
rhodanienne. — Dér. : poitrinaire, 1752 ; à Nîmes, est pris à l’it.). V. prime.
poitriner, 1890.
POLICHINELLE, 1649 (écrit Polichinel,
POIVRE. Lait. piper. — Dér. : poivrade, dans des titres de mazarinades ; polichi-
1505 ; poivrer, xirI® (sous la forme pe- nelle, 1680). Tiré de Pulecenella, forme
vrer); poivrier, 1562, déjà au xre s$., napolitaine (d’où l’it. litt. Pulcinella), nom
au sens de « marchand de poivre »; poi- d’un personnage de farces napolitaines
vrière, 1718 ; poivrot, 1867, dit ainsi parce représentant un paysan balourd, rendu
que le poivre entre comme ingrédient dans pop. par les jeux de marionnettes.
des boissons alcooliques ; poivron, 1578.
POLICLINIQUE, fin xix®; comp. sav.
POIX. Lat. picem, acc. de pix. It. pece, du grec polis « ville » et du fr. clinique, cet
esp. pez. — Dér. : poissard, 1743 (dans établissement étant ouvert aux malades de
Bouquets poissards, titre, de Vadé), au la ville; quelquefois poly-, par confusion
xvi® signifiait « voleur », propr. « qui a avec les mots en poly-.
comme de la poix aux mains pour voler »,
cf. poisser « voler », 1800 ; d’où le sens de POLIOMYÉLITE, 1907. Dér. d’une
« bas, vulgaire »; le sens du fém. « ven- composition du grec poliés « gris » el
deuse de poissons », 1640, vient d’un jeu myelés « moelle », la maladie consistant en
de mots sur poisson et poissard ; poisser, une lésion de l’axe gris de la moelle épi-
1380, poisse, fin xIx°, terme vulg., « vo- nière. La langue médicale évite plutôt le
leur » argot, 1800, cf. pour le sens purée, terme synonyme, paralysie infantile, em-
également vulg.; poisseux, XVI s. ployé dans le langage courant.
POKER, 1858. Mot angl., d’origine obs- POLIR. Lat. polire. N'est traditionnel
cure. qu'au sens concret. Le sens de « mettre la
dernière main à un ouvrage », xvii®, est
POLARISER, 1810. Polarisation, id.
repris au lat. class., celui d’ « adoucir les
Dér. de polaire, compris comme contenant mœurs, orner l'esprit », xvi®, vient de
le radical du verbe grec polein « tourner » ; l’adj. poli, lui-même empr. en ce sens du
en effet les premières expériences de pola- lat. politus ; enfin le sens moderne de poli
risation ont été faites au moyen d’un cristal lui vient de politesse ; d’où impoli, 1551.
biréfringeant qu’on faisait tourner. encore peu usuel au xviie s. — Dér. de
POLDER, « terre entourée de digues polir au sens concret : polissage, 1749;
(en Hollande) », 1805. Empr. du néerl. polisseur, 1389 ; polissoir, xvi® (on a le
polder. fém. -oire au xve) ; polisson, 1616, d’abord
terme d’argot des gueux, dér. de polisse
PÔLE, 1295; rare avant le xvir® s. « action de voler » (fait lui-même sur polir
Polaire, 1555. Empr. du lat. polus (du grec qui a eu le sens de « voler » dans cet argot) ;
polos), polaris (médiéval). d’où, depuis le xvirre, les sens modernes ;
POLÉMIQUE (1578). Empr. du grec d’où polissonner, 1718, polissonnerie, 1696 ;
polemikos « de la guerre (polemos) » en vue PE 1520 ; dépolir, 1690; repolir,
d’un sens spécial. — Dér. : polémiste, 1845 ; 1389.
polémiquer, fin xixe. POLISSON, v. le préc.
POLENTA, 1812. Empr. de l’it. polenta, POLITESSE, 1578. Empr. de l’it. poli-
qui représente le lat. polenta « gruau tezza (ou pul-) « qualité de celui qui est
d’orge ». Dans ce dernier sens le mot lat. polito (charmant, civilisé, etc.) »; signifie
a été empr. par le fr. au xvi® s. (polente), aussi au xviie s. « culture morale et intel-
mais il n’a vécu que peu de temps. lectuelle » d’après le verbe polir. — Dér. :
POLICE, 1361 (une 1r'e fois vers 1250); impolitesse, 1646 (Vaugelas qui le note
du x1v® au xvi® s. aussi policie, cf. polilie comme un mot qu'on forme accidentelle-
encore chez J.-J. Rousseau. Signifie « or- ment dans la conversation).
ganisation politique, administration » jus- POLITICIEN, 1865, en parlant de poli-
qu'au xviie s., rare ensuite; spécialisé ticiens de l'Amérique ; puis sens plus éten-
dès lors au sens moderne. Empr. du lat. de du ; une première fois chez Beaumarchais
basse ép. politia au sens anc. du fr. (du (1779) déjà avec une nuance péjorative.
grec politeia, de polis « cité »). V. civilisa- Empr. de l’anglo-américain politician (de
tion. — Dér. policer, 1461; policier, politic, v. le suiv.).
d’après le nouveau sens de police, 1836
(une 1re fois en 1611, d’après l’ancien sens). POLITIQUE, subst. fém., 1265 (Latini).
Empr. du lat. politice, lui-même empr. au
POLICE, 1371, au sens de « certificat »; 1e s. du grec politike (sc. téchneé).
celui de « contrat » est du xvi® s. (police
d'assurance en 1673) ; celui de « connaisse- POLITIQUE, 1370 (Oresme), adj., d’où
ment » du xvire s. (en 1606 p. de charge- a été tiré le subst. masc. 1546. Empr. du lat.
ment). Empr. dans tous ces sens (par des politicus (du grec politikos, de polis « cité »,
empr. successifs) de l’it. polizza «certificat, v. police). — Dér. politiquer, xvii®
contrat (signalé par H. Estienne), connais- (Mme de Sévigné); impolitique, 1750,
sement », empr. lui-même du lat. médiéval comp. de l’adj. ; apolitique, 1949 ; politiser,
apodixa « reçu »; celui-ci vient du grec 1949; politisation, 1949 ; dépolitiser, 1958.

DICT. ÉTYM. 32
POLKA 498

POLKA. 1842. Polonais polska, fém. de grises et blanches; d’où (se) pommeler
polski « polonais ». La danse est venue de depuis le xvi®. — Comp. : pomme de terre,
Pologne. Depuis employé arbitrairement 1655, désigne d’abord le topinambour, au
pour désigner une sorte de pain. V. mazur- sens actuel depuis 1754, qui s’est imposé,
Ka. — Dér. : polker, 1846. grâce surtout à l’action de Parmentier,
entre 1770 et 1789 ; c’est probablement un
POLLEN, 1766. Empr. du lat. des bota- calque du néerl. aardappel ou d’une forme
nistes pollen, tiré du lat. class. pollen « fa- dialectale de l’all., cf. l’alsacien Ertèpfl;
rine, poudre très fine ». la pomme de terre, qui s’est répandue
POLLUER, vers 1460; pollution, xrre. dès 1588 en Allemagne, a dû pénétrer
Empr. du lat. class. polluere et du dér. du dans le Nord de la France par l'Est ;
lat. eccl. pollutio. depuis son introduction d'Amérique en
Europe, au xvi® s., la pomme de terre a
POLO, 1882. Empr. de l’angl. polo, empr. porté en France plusieurs noms, v. patate,
lui-même d’un dialecte thibétain du Nord topinambour, truffe, si bien qu’aujour-
de l’Inde; le jeu de polo s’est répandu en d’hui le nom de la pomme de terre est
partant de Calcutta, pour arriver en An- encore très divers dans les patois.
gleterre vers 1871. Au sens de « petite
coiffure ronde » (comme en portent les POMMEAU, vers 1100. Dér. de l’a. fr.
joueurs de polo), fin xix®, cf. en 1895 : pom « poignée d'épée », qui a disparu
« Un bonnet de polo » (A. Hermant). devant pommeau ; pom représente lui-même
une forme masc. de pomme, lat. pomum, v.
POLONAISE « danse », 1820 ; de l’adj. pomme, qui a perdu son sens propre avant
polonais. les premiers textes.
POLTRON, 1509 (J. Marot). Empr. de POMOLOGIE, 1828. Dér. savant du lat.
lit. poltrone, propr. « poulain » d'où «lâche, pomum, v. pomme.
etc. », propr. « qui s’effraie comme un pou-
lain », dér. de poltro « poulain », lat. pop. POMPE « cortège, appareil magnifique »,
*pulliter, dér. lui-même de pullus « petit x111e. Empr. du lat. pompa (du grec pompé).
d’un animal », v. poutre. — Dér. : poltron- — Dér. : pompeux (vers 1370, Oresme),
nerie, 1556. d’après le lat. de basse ép. pomposus.
POLY-. Premier élément de mots sav. POMPE « machine à élever ou refouler
comp., tels que polyandrie, 1787, comme un liquide », 1517 (v. pompier), pompe à
terme de botanique, 1842, comme terme incendie, 1722. Empr. du néerl. pompe at-
de sociologie, tiré du grec polys « nom- testé dès avant 1450. L’angl. pump, l’all.
breux », polyurie, 1836 (mais l’adj. -ique Pumpe sont également empr. du néerl.
est déjà signalé en 1810), ou de mots tandis que l’it. pompa est empr. du franc.
empr., tels que polygamie, 1558. En néerl. le mot est de création onomato-
péique, tout comme l'esp. bomba, attesté
POLYNÔME, v. binôme. dp. 1504, à moins que celui-ci ne soit aussi
POLYPE, xrr1° ;comme terme de méde- un emprunt adapté du mot néerl. — Dér. :
cine, xve. Empr. aux deux sens du lat. pomper, 1558 ; pompier, 1517, « fabricant
polypus (du grec polypous) ; v. pieuvre et de pompes »; au sens moderne, 1750:
poulpe. — Dér. : polypeux, 1552 ; polypier, pompiste, 1926 (attesté d’abord à Mâcon).
1752.
POMPETTE, 1808. Ne s'emploie que
POLYPTYQUE, v. pouillé. dans la locution familière être pompeite.
Même mot que pompeite, Xxv®, « pompon »,
POMMADE, 1598. Empr. de l’it. pomata, qui a été dit au xvi®s. par plaisanterie du
dér. de pomo « fruit »; ainsi dit parce que nez d’un ivrogne, cf. nez... à pompellte,
ce cosmétique était parfumé avec de la Rabelais, II, I, et l'expression pop. d’au-
pulpe de pomme d’api (mela appiuola ou jourd’hui avoir son pompon. Pompette est
appia), suivant l'indication du dict. de la étymologiquement une autre forme de
Crusca. — Dér. : pommader, xvre. pompon.
POMME. Lat. pop. poma, plur. neutre POMPON, 1556. Mot de formation
pris comme subst. fém. du lat. class. po- expressive parallèle à pimpant, mais avec
mum « fruit », qui a pris dans une partie une autre voyelle. — Dér. : pomponner
du domaine roman le sens de « pomme » (se), -6, fin xvrrre.
(attesté au ve s. après J.-C. chez M. Empi-
ricus) à la place du lat. class. malum. Cf. PONANT, vers 1300 (écrit ponent). Empr.
a. pr. pom conservé dans la vallée du de l’a. pr. ponen ; cf. de même it. ponente,
Rhône. Pomum au sens de « fruit » survit esp. poniente, qui remontent à une expres-
surtout dans le roum. poamä, peut-être sion du lat. pop. s0/ pônens « soleil cou-
dans l’it. pomo. — Dér. : pommer, 1545: chant », formé avec le part. prés. de pônere
pommé, au sens fam. de « complet », vers au sens de « se poser, se coucher » (en par-
1700 (Saint-Simon), vient d’une compa- lant du soleil ou des astres), non relevé en
raison plaisante avec les légumes : chou, lat., mais supposé par l'esp. ponerse.
laitue, qui pomment, quand ils sont arrivés PONCE, dans pierre ponce. Lat. de basse
à maturité complète ; pommette, 1138 « pe- ép. pômicem, acc. de pômex, forme dialec-
tite pomme »; sens fig. xvi®: pommier, tale (osque, semble-t-il ; c’est en effet dans
vers 1080 (Roland), d’où pommeraie,
x117° : la région où habitaient les Osques qu’on
pommelé, vers 1185; dit proprement du recueillait cette pierre volcanique) du lat.
pelage d’un animal qui a des taches rondes, class. pumex. — Dér. : poncer, XIIIe, d’où
4199 POPULATION

poncif, 1551, propr. « dessin piqué et sur Dér. : pontifier, 1801, dér. de pontife au
lequel on passe un sachet de poudre de sens fig.; a déjà été créé au xv° au sens
charbon ou de craie, appelé ponce », aussi d’ «élever à la papauté ».
poncis aux xvrie et XvIrIe 5. ; le sens péjor.
qu'a pris le mot dans la langue des Beaux- PONTON. Lat. poniônem, acc. de pont
Arts est attesté depuis 1828. « bateau servant à faire un pont de ba-
teaux, bac ». — Dér. : pontonnier, x11®.
PONCEAU, couleur d’un rouge vif. Em-
ploi figuré, datant du xvire s., de ponceau, POOL, 1907. Empr. de l’angl. pool, qui
autre nom du coquelicot, x11° (sous la est empr. du fr. poule, t. de jeu, voir
forme poncel), aujourd’hui usité surtout celui-ci. Le sens de « entreprise pour
dans les parlers de la vallée de la Loire, laquelle s’allient plusieurs hommes d’af-
dér. de paon ; par comparaison de l'éclat faires » paraît être né en Amérique (1874).
de la fleur avec la beauté du plumage du POPE, 1655. Pris du russe pop (du grec
paon ; de là aussi l’emploi de paon pour eccl. pappos, v. pape) ; ne se dit que des
Sa. le coquelicot au Nord-Est de prêtres de l’église orthodoxe slave.
aris.
POPELINE, 1735. Popeline est empr. de
PONCER, PONCIF, v. ponce. l’angl. poplin, attesté dès 1710; poplin
vient lui-même du fr. papeline, 1667. Les
PONCTION, xr11e. Empr. du lat. punctio draps de Poperinghe en Flandre étaient
« piqûre », v. poindre. très connus au moyen âge et se vendaient
PONCTUEL, x1v® ; rare avant le xvrres. sous le nom de dras de Poperinghes ou
Empr. du lat. médiéval punciualis (de vergaii di Popolungo (Florence). La forme
puncium « point »). — Dér. : ponctualité, avec pa- est attestée en Espagne dès 1268,
1629. sans qu’on voie nettement ce qui a causé
la transformation de la voyelle. Le réta-
PONCTUER, début xvie. Empr. du lat. blissement de l'o dans la forme anglaise
médiéval punctuare (de puncium « point »). est dû à l'influence de l’angl. pope « pape »,
— Dér. : ponctuation, 1520. parce qu’on prenait papeline pour un dér.
PONDÉRÉ, vers 1770 (Rousseau), on de pape.
trouve pondérer, du xive au xvie, et, bien POPOTE, 1886, comme terme d'argot
que rarement, depuis la fin du xvitIe; militaire. Tiré d’un mot du langage enfan-
pondérable, 1798, une première fois fin xve® ; tin qui désigne la soupe.
pondération, vers 1470. Empr. du lat. pon-
deratus (de -are, « peser », de pondus POPULACE, 1555 (Pasquier : « Mot que
« poids »), ponderabilis (créé à basse ép.), nous avons esté contraincts d'innover par
ponderatio (id.). — Dér. : pondérateur, faute d'autre pour dénoter un peuple
1845 ; impondérable, 1795. sot »). Empr. de l’it. popolaccio, dér. péjor.
de popolo « peuple »; le genre masc. de
PONDRE. Lat. pünere « poser », d’où lit. se rencontre fréquemment jusqu’au
« déposer ses œufs », cf. chez Ovide ôva xXvile ; le fém. a été entraîné par la forme
poneére, seul sens conservé en gallo-roman de la terminaison. — Dér. : populacier,
et en cat. pondre ; pour cette restriction 1571.
du sens, v. couver. Ailleurs pônere a été
conservé au sens général de « poser, met- POPULAGE, 1778. Empr. du lat. des
tre » : it. porre, esp. poner (mais on dit naturalistes, populago (xvI®), dér. de popu-
poner huevos « pondre »). — Dér. : ponte, lus « peuplier », sur le modèle des noms
1570. de plantes tels que plantago « plantain »,
tussilago « tussilage », etc., parce que le
PONEY, 1825 (alors ponet, en 1828 La- populage pousse souvent sur le même ter-
martine écrit : des poneys, comme on dil rain que les peupliers. Le franç. a conservé
à Londres). Empr. de l’angl. pony, d'origine cette dénomination savante que les bota-
obscure. nistes, par la suite, ont remplacée par
PONGÉE, fin xix°e. Empr. de l’angl. caliha.
pongee, d’origine incertaine. POPULAIRE, x11° (sous la forme popu-
PONT. Lat. poniem, acc. de pons. It. leir) ; subst. au sens de « vulgaire, foule »
ponte, esp. puente. Pont s'emploie depuis le à partir du xve; popularité, 1725; une
x11€ s. comme terme de marine, mais ne première fois au Xv° au sens de « popu-
désigne longtemps qu’un pont pour s’em- lace ». Empr. du lat. popularis, popularitas
barquer. — Dér. et Comp. : ponceau, x11° ; (le sens de « population » est attesté à basse
ponté, 1558; appontement, 1789; entre- ép.). — Dér. de l’adj. : populariser, fin
pont, 1758 ; pont-levis, vers 1190. xvI1® (Saint-Evremond) ; populo, terme
vulg., 1867, fait sur le modèle de mots
PONTER, « jouer contre celui qui tient en -0 : arisio, camaro, proprio ; impopu-
la banque », 1718. Dér. de pont, anc. part. laire, 1780; impopularité, 1780 (Beau-
passé de pondre « mettre ». — Dér. ponte, marchais).
terme de jeu de cartes, « celui qui joue
contre celui qui tient la banque », 1708. POPULATION, 1750 ; quelques exemples
au xive et au xv® s.; mais n’est devenu
PONTIFE, vers 1500; pontificat, xve; usuel qu’au xvrrie s. Empr. alors de l’angl.
pontifical, 1269. Empr. des mots lat. pon- population (du lat. de basse ép. populatio,
lifex, pontificaltus, pontificalis, qui, après de populus « peuple ») d’où vient aussi la
avoir été des termes de la religion païenne, forme fr. du moyen âge; le lat. class.
ont été conservés par le christianisme. — populatio signifie « dévastation ».
POPULEUX 200

POPULEUX, vers 1500. Empr. du lat. de PORTE. Lat. poria « porte de ville,
basse ép. populosus, de populus « peuple ». grande porte ». It. poria, esp. puerla ; le
wallon et le lorrain, à côté de huis, conser-
POPULO, v. populaire. vent porte, le lorrain spéc. au sens de
« grande porte, porte de grange ». — Dér. :
POQUET, 1868. Terme de jardinage, portail, xve, qui s’est substitué à porial,
d’origine picarde, dér. de la forme dialec- x111e, encore usité au xv11°, par suite d’une
tale de poche, cf. pour cette origine caïeu. confusion de suff. partie du plur. poriaux,
PORC. Lat. porcus. Usité surtout pour dont la terminaison -aux correspond à la
désigner la viande, v. cochon, goret, pour- fois à -al et -ail du sing. Portillon, 1867.
ceau. — Dér. : porcin, 1792 (ne se dit guère Portière, subst., 1539. — Comp. : contre-
qu'au fém.); a déjà été formé au moyen porte, 1582 ; porte-fenêtre, 1676.
âge et est resté usuel jusqu’au xvIes. PORTER. Lat. poriäre (qui apparte-
PORCELAINE, 1298, au sens moderne ; nait à la langue pop., le terme littéraire
propr. « sorte de coquillage univalve poli », ayant été plutôt ferre). It. poriare, esp.
1298, dont on utilisait la nacre pour faire portar. — Dér. et Comp. : port, 1265 ; si-
divers objets (se dit encore ainsi sur bien gnifie souvent « aide, faveur » au moyen
des points de la côte); xvi® s. « poterie âge, jusqu’au xvi® s.; portable, vers 1275
blanche, importée d'Orient ». Empr. au (Rose) ; portage, 1260; portant, subst.,
sens propre de l’it. porcellana, dér. de por- xinIe; portatif, 1375; portée, xII°; por-
cella « truie »; dit ainsi par comparaison tière, adj., 1326 (dans brebis portière);
de la fente de ce coquillage avec la vulve emporter, vers 1180, emportement, xvII°,
d’une truie. — Dér. : porcelainier, 1836. au moyen âge « action d’emporter », em-
porte-pièce (à 1’), 1700 (dans l’expression
PORC-ÉPIC. Altération (xvie), d’après greffe à emporte-pièce) ; désigne aussi divers
piquer, de porc-épi, xrr1°, lui-même altéra- outils et désignait autrefois un cautère,
tion de porc-espin, XIIIe, empr. de l’a. pr. 1611, remporter, 1461; reporter, xi®
porc-espin ; cette forme est elle-même em- (Alexis), report, terme de la bourse, 1835,
pr. de l’it. porcospino, c’est-à-dire « porc- d’après un sens récent du verbe; porte-
épine ». allumettes, 1845; porte-bonheur, 1876;
porte-cigares, 1841; porte-cigarettes, fin
PORCHE. Lat. porticus. It. portico.
xixe; porte-clefs, 1559; porte-crayon,
PORCHER. Lat. de basse ép. porcärius. 1609 ; porte-croix, 1561; porte-drapeau,
It. porcaio, esp. porquero. — Dér. : por- 1578 ; porte-faix, 1270 ; portefeuille, 1544 ;
cherie, xr1°. porte-manteau, « valise », 1547, sens mo-
derne, 1660 ; porte-mine, fin x1xe; porte-
PORE, 1314. Empr. du lat. porus (du monnaie, 1859 ; porte-montre, 1752 ; porte-
grec poros, propr. « passage »). — Dér. : parole, 1874 (au sens de « messager »
poreux, id., d’où porosité, id. dès 1552 et au xvii® s.); ; porte-plume,
PORION, surveillant de mines, 1838; 1725 ; porte-voix, 1680.
popularisé par Germinal de Zola, 1885. PORTER, sorte de bière, 1726 (dans
Mot hennuyer et picard, attesté à Mons une traduction de l’angl.). Empr. de l’angl.
dès 1812; y désigne d’abord le poireau; porter, abréviation de porter’s ale (proba-
a été employé pour désigner le surveillant, blement parce que cette bière forte était
parce que celui-ci reste planté au même bue par les porteurs ou portefaix), mot
endroit pendant longtemps ; évolution pa- empr. lui-même de l’a. fr. porterre, porteor,
rallèle à celle du franc. populaire poireau v. le suiv.
« agent de police ».
PORTEUR. Lat. de basse ép. poriato-
PORNOGRAPHE, 1769 (dans le titre rem, acc. de portätor, dér. de poriare, v. le
d’un ouvrage de Restif de La Bretonne). préc. — Dér. : triporteur, début xxe, dont
A signifié d’abord « auteur qui traite de le premier élément {ri est une abréviation
la prostitution », conformément au sens du de tricycle.
mot grec pornographos (de porné « prosti-
tuée »); sens moderne au cours du xixe®, PORTIER. Lat. de basse ép. portarius.
— Dér. : pornographie, 1803 (une pre- Esp. portero; l’it. porliere vient du gallo-
mière fois en 1558, sous la forme porne- roman. Le fém. portière est plus anc. pour
graphie). désigner une religieuse qui garde la porte
d’un couvent qu’au sens de « concierge »,
PORPHYRE, xre (écrit porfire); en signalé depuis le xvirre s. V. huissier,
outre porfie, XIIIe ; écrit porphyre au xvi®
d’après le grec porphyra « pourpre ». Empr. PORTION, xrr1e. Empr. du lat. portio
« partie, portion ».
de l’it. porfido, porfiro (cette deuxième
forme est moins usuelle), qui remonte au PORTIQUE, 1544. Empr. du lat. porti-
lat. porphyrites (du grec porphyrités (li- cus, V. porche.
thos), littéral. « pierre ressemblant à la
pourpre »). — Dér. : porphyriser, 1752, PORTRAIT, x11e (Chrétien). Part. passé,
d’où porphyrisation, 1764. pris substantiv., de l’anc. verbe po(u)r-
traire « dessiner, représenter », disparu au
PORT. Lat. portus. It. porto, esp. puerto. XVIII, COMpP. de pour et de fraire au sens
Port, terme de géographie « col (dans les de « tirer », usuel au moyen âge, cf. pour
Pyrénées) », remonte à l’a. pr. port, attesté ce sens lirer un porirait. — Dér. : portrai-
en ce sens. — Comp. : avant-port, 1792. tiste, 1693 ; portraiturer, 1872 (une fois en
A roport, vers 1920. 1540), dér. d’un anc. portraiture « portrait »,
501 POT

vers 1200, usuel jusqu’au début du xvrri° ; prononce pas ; du reste s y a été rapide-
on donne aussi un aspect archaïque à ce ment rétabli d’après la locution it. a posia
verbe en l’écrivant portraicturer. « à dessein ». — Dér. : postal, 1836 ; poster,
terme de commerce, « mettre à la poste »,
PORTULAN, 1578. Empr. de l’it. porlo-
fin xixe; postier, 1841.
lano, portulano, propr. « pilote », dér. de
porto « port », comme oriolano « jardinier » POSTE, masc., 1636. Empr. de lit.
de orto. poslo, masc. correspondant au fém. posia,
v. le préc. — Dér. : poster « mettre dans un
POSER. Lat. pop. pausäre (dér. de nn », vers 1600. — Comp. : avant-poste,
pausa, v. pause) « cesser, s'arrêter » (en ce
sens déjà chez Plaute), d’où, dans le lat. où:
des inscriptions chrétiennes, « se reposer POSTÉRIEUR, xv°. Empr. du lat. pos-
(en parlant d’un mort) » ; a pris le sens de terior. Comme subst. désignant le derrière,
« poser » dans le lat. parlé de basse ép., 1566 ; on a dit au moyen âge poistron, lat.
en absorbant les principaux sens du verbe pop. *posierionem, acc. de “*posterio. —
pônere (v. pondre), sens qui a éliminé en Dér. : postériorité, 1442, d'après le lat.
fr. le sens propre, réservé à reposer, mais postlerior.
qui subsiste plus ou moins ailleurs. It. POSTÉRITÉ, 1332. Empr. du lat. pos-
posare « poser », esp. posar « se reposer, lerilas.
loger » au sens de « poser ». — Dér. et
Comp. : posage, 1524 ; pose, 1694 ; poseur, POSTFACE, 1736 (Voltaire). Formé avec
1676 ; apposer, vers 1120 ; réapposer, 1690 ; le lat. post « après » et le fr. face à l’imita-
déposer, 1688 ; entrepôt, 1600 (O. de Ser- tion de préface.
res), d’abord « temps pendant lequel on POSTHUME, 1491; une première fois
dépose une marchandise » (dér. de l’afr. au xive s. (écrit alors postume). Empr. du
entreposer « intercaler un laps de temps », lat. posthumus, modification graphique de
francisation du lat. inlerponere), entreposer, postumus « dernier », par fausse étymologie,
au sens moderne, 1636, est dér. d’entrepôt ; poslumus ayant été considéré comme comp.
d’où entrepositaire, 1814, sur le modèle de de humus « terre », au sens de « né après la
dépositaire. V. reposer. mort de son père ».
POSITIF, xir1e (J. de Meung). Empr. du POSTICHE, 1585. Empr. de l’it. postic-
lat. scol. positivus (déjà attesté à basse cio, dér. de posto, part. passé de porre
ép.) ; a pris un sens général vers le xvrres., « mettre » (du lat. ponere).
tout en restant un mot techn. — Dér.
d’après le terme de philosophie positive POSTILLON, 1540 (Marot). Empr. de
d'A. Comte, 1830 : positivisme, 1838, posi- l’it. postiglione (de posta, v. poste).
tiviste, 1838, diapositive (1907-1923), -if, POST-SCRIPTUM, 1673. Mots lat. signi-
1948. fiant « écrit après »; francisés en posi-
POSITION, vers 1200. Empr. du lat. scri(p)t du xvIi® au XVIIIe.
positio (de ponere « placer »). POSTULAT, 1752. Empr. du lat. postu-
POSSÉDER, x1v®. Réfection, de la même latum « demande » (de postulare, v. le suiv.),
ép., d’après possesseur, possession, de pos- en vue d’un sens spécial ; on dit aussi pos-
sider, empr. du lat. possidere. Des formes tulatum.
plus francisées : posseoir, etc., ont été éli- POSTULER, xu1°. Empr. du lat. pos-
minées peu à peu. — Dér. : déposséder, . tulare « demander ».
XVe S.
POSTURE, 1588 (Montaigne). Empr. de
POSSESSEUR, x1v® (Bersuire) ; posses- lit. postura (de poslo, part. passé de porre,
sion, x11° ; possessif, terme de grammaire, v. pondre).
xve. Empr. du lat. possessor, possessio (de
possidere, v. le préc.), possessivus. — Dér. POT. Le fr. a ce mot en commun avec
de possession : possessionné, 1776 (Vol- le bas-all. et le néerl. (pot). Il n’a de corres-
taire). pondant ni en lat., ni en celt., ni dans les
langues germ., mais les inscriptions de la
POSSIBLE, 1265; possibilité, x111° (Ro- région de Trèves offrent fréquemment le
se). Empr. du lat. de basse ép. possibilis, nom d'homme Poitus, particulièrement
possibilitas (de posse « pouvoir »). comme nom de potiers, sur les objets de
POSTE, fém. Au sens de « relai de che- poterie trouvés dans la région ; le mot dési-
vaux », 1480, l'établissement des postes en gnant l’objet avait été employé comme
France est de 1475 environ, sous le règne dénomination hypocoristique du fabricant.
de Louis XI; en ce sens empr. de lit. Il appartient sûrement à la population
posia (de porre « poser ») ; de là courir la préceltique, qui doit donc avoir possédé un
poste, xvi*. Le transport public de la cor- potl- « pot ». Poit- a passé à la langue des
respondance commence au XVIIe S., mais Francs quand ils s’établirent dans la région
la distribution des lettres à Paris, sous le de Trèves, et il a été apporté par eux en
nom de pelite posle, est de 1758. Dès le Gaule. — Dér. : potage, 1260, d’abord au
x11e s., on trouve posle au sens de « posi- éens de « tout ce qui se met dans le pot »;
tion »; c’est le subst. verbal de pondre au xvire 8. le potage contient à la fois de
avant la spécialisation de sens de celui-ci la viande et des légumes cuits dans le pot ;
et il a peut-être survécu jusqu’au XvIr1° 8. restreint au sens moderne depuis le xvrtIe ;
dans les locutions à sa posle « à son gré », la locution pour tout potage se trouve déjà
à poste « à souhait, à dessein »; car elles au xve ; d’où potager, x1ve (E. Deschamps);
potée, xr1°; potiche, 1740; potier, xr1°,
riment parfois avec des mots où s ne se
POT 902

d’où poterie, xir1°; dépoter, 1613, d’où POTENCE, xrie. Signifie d’abord « bé-
dépotoir, 1842, au sens moderne ; désigne quille » jusqu’au xvi® s.; d’où les nom-
au sens propre un vase destiné à dépoter, breuses acceptions techn. de ce mot et
mesurer des liquides, l'emploi nouveau de spécialement de « gibet », xve. Empr. du
dépotoir résulte d’une plaisanterie, peut- lat. médiéval polentia « béquille », emploi
être par jeu de mots d’après dépôi ; empo- fig. du lat. class. potentia « puissance,
ter, 1690, rempoter, 1835. — Comp. : pot à force », pris au sens d’ « appui ».
feu, xvi° ; pot-au-feu, 1673 ; pot-aux-roses,
XIIIe; pot-pourri, 1564 ; propr. « mélange POTENTAT, xive (Oresme) au sens de
de viandes et de légumes cuits ensemble », « souveraineté »; d’où le sens moderne à
traduction de l’esp. olla podrida ; se trouve partir du xvi® s. Empr. du lat. médiéval
en ce sens dans Gil Blas, mais a déjà un potentalus, dér. de potens « puissant » sur
sens fig. chez Régnier; pot-de-vin, 1501, le modèle de magistratus, etc.
cÎ. pourboire ; pot de chambre, 1560. V. POTENTIEL, xive (terme médical).
potin. Empr. du lat. potentialis (de potentia, v.
POTABLE, 1532 (une première fois vers potence) ; étendu ensuite à d’autres techn.
1260, en outre de la fin du xve jusqu’au POTERNE, vers 1100. Altération de
XIX° s. dans le terme d’alchimiste or po- poslerle, encore attesté au xurre s., lat. de
table « sorte d'élixir »). Empr. du lat. de basse ép. posterula « petite porte dérobée »,
basse ép. potabilis (de potare « boire »). dim. de posilera « porte de derrière » (fém.
de l’adj. posterus « qui est derrière »).
POTACHE, 1864. Terme d’argot sco-
laire ; réduction de pot-à-chien, 1874, ap- POTIN, 1842. Pris au norm., où il est
pellation injurieuse d’un élève sot. attesté dès le xvire s., et où il a été tiré
POTAGE, v. pot.
du verbe potiner, dér. de potine « chauffe-
rette », dimin. de pot. Les femmes du vil-
POTASSE, 1676. Empr. du néerl. po- lage se réunissaient autrefois pendant les
lasch, propr. « cendre de pot » ; (du) potas, longues veillées d’hiver pour filer et pour
en 1577, dans un texte liégeois. — Dér. : causer, chacune apportant sa potine ; po-
potasser, argot scolaire, 1867, par compa- liner voulait donc dire d’abord « se réunir
raison plaisante du travail ardent avec le autour des polines pour bavarder ». —
bouillonnement de la potasse dans cer- Dér. : potiner, 1867; potinier, 1871 ; poti-
taines réactions. nière, 1890.
POTASSIUM, 1808 : « Je me suis ha- POTIRON, vers 1500, au sens de « gros
sardé à nommer ces deux substances nou- champignon », usuel aujourd’hui dans les
velles par les noms de potassium et de parlers de l’Ouest (ce qui explique que
sodium » (dans un article du chimiste an- Chateaubriand l'ait employé) jusque dans
glais H. Davy, publié dans les Annales de la région de la Garonne, sous des formes
chimie) ; Davy découvrit ces deux corps diverses ; sens moderne, 1654. Probabl.
en 1807 et nomma le potassium d’après empr. de l’ar. fut(u)r « esp. de gros cham-
l’angl. poiass, empr. du fr. poiasse. pignon », qui aurait été introduit par des
médecins juifs ou arabes.
POTEAU, xr1° (d’abord postel). Dér. de
l’a. fr. post, usuel jusqu’au xvit s., lat. POTRON-MINET, v. patron-minet.
postis ; rare en dehors du gallo-roman, POU. Issu du plur. de l’anc. forme pouil,
a. pr. post. Poteau, pop. au sens de « cama- encore employée par Montaigne. Lat. pop.
rade », se rencontre déjà en ce sens fin *péduc(u )lus, lat. class. pédiculus (de pé-
xive, Cf. « Le dit Denisart. lui dist... que dis). — Dér. : pouilleux, XIIIe ; épouiller,
ses posteaux, c'est-à-dire les meilleurs de XIV.
ses amis, estoient mors » (lettre de rémis-
sion de 1400). POUACRE, v. podagre.

POTELÉ, xr1e. Dér. de l’a. fr. main pole POUAH. Onomatopée qui n’a été relevée
« gauche », xr1e-xive, fr. mod. « engour- qu’au XvIe s.
die », xvnie-xvirre (encore Voltaire), « grosse POUBELLE, 1884 ; du nom de Poubelle,
et enflée, dont on ne saurait s’aider que préfet de la Seine, qui imposa cette boîte
malaisément », xvire-xixe. Cet adj., qui ne à ordure.
se trouve qu'accouplé avec main, est sorti
de l’a. fr. pole « patte » par emploi adjec- POUCE. Lat. pollicem, acc. de pollex.
tival (« une main qui n’est qu’une pote »). It. pollice. — Dér. : poucette, 1823; pou-
Ce subst. est de la même origine que l’a. fr. cier, 1549.
poue, v. patle. La conservation du -{ dé- POU-DE-SOIE, 1667; on écrit aussi
note une base *paulta, qui peut être due poult-de-soie. Étymologie inconnue. L’angl.
soit à un redoublement expressif de cette paduasoy, du xvirie s., est une altération
consonne, soit à un croisement avec paile ; du français, par étym. pop., comme si le
on pourrait aussi penser à une différence mot signifiait « soie de Padoue ».
chronologique due au bilinguisme de la
Gaule septentrionale du ve au 1x° 8. : en POUDINGUE, 1753. Empr. de l’angl.
passant dans la langue romane au vie s. Pudding, abréviation de pudding-stone
*paula serait devenu poue, accueilli une « pierre ayant l'aspect du pudding », v.
deuxième fois vers le virre il pouvait fort pudding. à
bien donner pole. De pote au sens ci-dessus POUDRE. A eu d’abord le sens de
dérive aussi l’adj. empoité, 1870, qui n’a « poussière » (qui survit dans quelques
certainement rien à faire avec pot. locutions : jeter la poudre aux yeux, etc.)
503 POUR

et celui de « poudre médicinale ». Lat. pul- POULARDE, v. le suiv.


verem, acc. de pulvis. Quand on inventa POULE. Lat. pulla, fém. de pullus, v.
la poudre à tirer, on étendit la dénomi- poulain ; pullus est attesté de bonne heure
nation de poudre à ce nouvel objet. La au sens de « jeune coq », et c’est au sens
surcharge sémantique qui en résultait était de « jeune poule » que poule a éliminé
telle que la langue s’est vue forcée de cher- l’a. fr. geline, lat. gallina; celui-ci est par
cher un autre mot pour « poussière » ; elle contre conservé dans les patois, surtout au
l’a trouvé dans le lorrain poussière, qui Nord-Est, à l'Est et dans le Midi (a. pr.
remplace poudre dans sa première accep- galina) et dans it. gallina, esp. gallina.
tion depuis le xve s. Celui-ci ne survit que Poule, terme de jeu, d’abord au jeu de
dans quelques patois au sens de « pous- cartes « mise de chacun des joueurs qui
sière ». Le lat. puluis ,-eris a été transformé appartient à celui qui gagne le coup »,
à basse ép. en *pulvus, et on lui a bientôt XVIIe, puis par extension au jeu de billard,
donné un plur. collectif analogue au plur. de courses, etc., est un terme d’argot des
neutre *pulvera, de là l’a. pr. pols (forme joueurs, dont le développement sémantique
qui arrive jusqu’à la Loire), l’anc. esp. est obscur. — Dér. : poulailler, 1385, par
polvos, esp. mod. polvo, et d’autre part fr. l'intermédiaire d'un ancien poulaille, xr1r°,
poudre, rhéto-roman puolvra. Cf. it. polvere encore chez La Fontaine et dans les patois,
« poussière, poudre », esp. poluvera « pou- qui signifiait « volaille » ; poularde, 1562;
dre ». — Dér. et Comp. : poudrer, vers 1180, poulet, xrr1e ; au sens de « billet doux »,
d’où dépoudrer, 1740 (une première fois, xvI£ ; l’origine de cette acception est dou-
1393), saupoudrer, propr. « poudrer avec teuse, peut-être a-t-on nommé ainsi ces
du sel », fin xive; poudrerie, 1807; pou- billets, parce que, en les pliant, on y faisait
drette, x11° ; poudreux, vers 1080 (Roland) ; deux pointes qui ressemblaient à des ailes
poudrier, 1599; poudrière, xviI°; pou- de poulet. Poulette, XIIIe.
droyer, xvi° (du Bellay), au sens moderne ;
parfois transitif depuis le x1v® s. ; poudre- POULICHE, xvi° (Baïf). Mot dialectal,
de-riz, fin xix° (mais l'emploi de la poudre picard ou normand, terme d’éleveur, qui
pour des fins de toilette est attesté depuis a remplacé pouline (relevé seulement chez
le début du xvi® s.), poudrerizé, id. Buffon, mais certainement antérieur, fém.
de poulin, v. poulain), par altération d’a-
POUF, 1458, exclamation. Pouffer, 1530 près la forme dialectale geniche « génisse ».
(en parlant du vent qui souffle). Mots ono-
matopéiques ; cf. aussi patapouf, 1821. POULIE, xr1e. Se rattache au grec polos
Pouf a été employé par plaisanterie pour « pivot » par un dér. du bas grec *polidion,
désigner divers objets : au xvirie s. (relevé cf. it. pulleggia (rare), esp. polea.
en 1774) un bonnet de femme; aujour- POULIOT, xve. Issu par changement de
d’hui un gros tabouret cylindrique et rem- suff., de pouliol, xiv*, poliol, x1°, dér. d’un
bourré, 1876 (Th. Gautier). — Dér. : pou- représentant du lat. pop. *puleium (en
fiasse, 1864. lat. class. pü-), d’où aussi it. poleggio,
POUILLÉ, 1624 (Ménage écrit poulier; esp. poleo ; v. serpolet.
mais on a déjà pueille en 1442). Alté- POULPE, 1546 (Rab.). Empr. du prov.
ration mal expliquée du lat. médiéval po- poupre, qui représente le lat. polypus,
lypiycum, qui se trouve lui-même sous des avec reprise d’abord seulement orthogra-
formes altérées polelicum, pulegium, etc.; phique de l’/ de la forme latine. V. encore
polypiycum remonte au lat. de basse ép. pieuvre et polype.
polypiyca « rôles, matricules » (du grec
polyptykha, propr. « (livres, etc.) formés de POULS. Réfection graphique qui date
quelques feuilles », de polys « nombreux » du xvie s., de pous, lat. pulsus (venarum)
et de piyz « pli »). Sur la forme lat. on a « battement (des artères) ». It. polso.
fait polyptyque, 1732, à la fois au sens du POUMON. Lat. pulmünem, acc. de pul-
mot chez les anciens et de « pouillé ». mô. It. polmone. — Dér. : époumonner,
POUILLES, dans chanter pouilles, 1623 ; 1743.
antér, dire des pouilles, 1574. Dér. du verbe POUPARD, vers 1200 (écrit poupart).
pouiller « dire des injures à qn », sens fig. Dér. du lat. pop. püppa, autre forme de
du même verbe, qui avait autrefois le sens päpa « petite fille, poupée », avec redou-
d’ « épouiller ». blement expressif du langage enfantin;
POUILLEUX, v. pou. d’où, avec d’autres suffixes, poupine, vers
1470, poupin, xvi® (Marot), poupon, vers
POULAIN. Dér. très anc. du lat. pullus 1540. De ce même mot *püppa, au sens
« petit d’un animal » et notamment « pou- de « poupée », dérive poupée, vers 1100.
lain », représente peut-être le lat. pullä- Puppa, mot du langage enfantin, est ré-
men, attesté dans la Mulomedicina, qui pandu au sens de « sein, mamelle » : it.
aurait été d’abord un collectif. Seulement poppa, etc.
fr. De la variante poulin viennent pouliner,
1555, poulinière, 1671 (Molière). POUPE, 1246 (écrit pope). Empr. de
l'a. pr. poppa (du lat. puppis), comp. aussi
POULAINE, dans souliers à la poulaine, it. esp. poppa.
sorte de souliers qui ont été à la mode
dp. 1365. Fém. de l’anc. adj. poulain « Po- POUR. Lat. prô, propr. « devant », d’où
lonais »:; dit ainsi parce que cette mode « à la place de, à titre de, selon », de là,
passait pour venir de Pologne. Pris par en roman, l'emploi de la préposition pour
comparaison, dp. 1573, comme terme de marquer la destination. Est devenu en lat.
marine. pop. por, par métathèse de l’r; on a déjà
POUR 504

en lat. class. des comp. avec un préverbe POUSSIER, xiv°. Signifie « poussière »
por de la famille de pro, cf. porricere « je- jusqu’au xvre s.; restreint aujourd’hui à
ter », porrigere « tendre », portendere « pré- quelques emplois techn. Autre forme de
sager, annoncer », etc.; et le succès de poussière, usuelle aujourd’hui encore dans
cette forme a été favorisé par l’analogie de les parlers situés au Sud-Est de Paris.
per. N’existe que dans la partie septen-
trionale de la France, dans la péninsule POUSSIÈRE, xrie. V. poudre. Dér. de
ibérique (esp. port. por) et dans le sarde pous (attesté dans l’Orléanais), né dans
logoudorien pro; l’it. et l’a. pr. disent per. l'Est de la France, où l’on trouve encore
d’autres dér. de pous, comme poussel,
POURCEAU. Usité aujourd'hui surtout poussier, et le fém. pousse (celui-ci en
dans la langue écrite. Lat. porcellus « petit franco-provençal). — Dér. épousseter,
porc, cochon de lait ». A le sens général de 1480 (mais époussette, 1314), formé sur le
« porc » dans le Nord-Est, en lorrain, dans dér. pousset. Poussiéreux, 1786 ; dépous-
l’Ouest et en languedocien. siérer, 1908.
POURCENTAGE, 1877, dér. de la for-
mule pour cent (percentage en 1839). POUSSIN. Lat. pop. *pullicinus, modi-
fication, par changement de suff., de pulli-
POURPIER, xrnu° (écrit porpié). Issu cénus, attesté à basse ép. (dér. de pullus,
d’une forme non attestée *polpié, lat. pop. v. poule). It. pulcino. — Dér. : poussinière,
pulli pedem, acc. de pulli pes, attesté au 1741, au sens de «cage à poussins, couveuse
moyen âge, littéral. « pied de poulet » (le artificielle » ; a été aussi employé en parlant
fr. pop. appelle de même cette plante pied de la constellation des Pléiades (estoile
de poulet) ; on trouve aussi par interversion poucinière, relevé en 1372, se disait encore
des deux termes composants pieth pu(e)l au xvi1e s. et poussinière est usité aujour-
au x11° S., d'où piedpoul au xvi® s. et pié- d’hui dans des patois au sing. et au plur.,
pou, signalé en Anjou, dès le xvire. cette constellation a été ainsi nommée
parce qu’elle forme comme un groupe de
POURPOINT, v. poindre. poussins); geline pociniere « poule cou-
POURPRE. Lat. purpura (du grec por- veuse », 1196.
phyra). It. porpora. — Dér. : empourprer,
1552 (Ronsard). POUTRE, 1332, au sens moderne. Em-
ploi fig. de poutre « pouliche », sens usuel
POURPRIS, v. prendre. jusqu’au xvie s., et qui survit encore dans
quelques patois, par une métaphore fré-
POURQUOI, v. quoi. quente dans le parler pop., cf. bélier, che-
POURRIR. Lat. pop. *puirire, lat. class. valet, chèvre, chevron, etc. Poutre représente
putrescere (et putrère, rare). — Dér. : pour- le lat. pop. *pullitra, avec accent maintenu
riture, xIIe. sur la première syllabe, d’après *pulliter
(dont la restitution est appuyée par pulle-
POURTANT, v. tant. trus des Capitulaires de Charlemagne, cf.
POURTOUR, 1528. Dér. de l’anc. verbe aussi le dér. de l’a. pr. poldrel « poulain »
soi pouriourner « se tourner et l’it. poltro, sous poltron) et dont on
», comp. de
pour et de {ourner. compare la formation au lat. class. porcetra
« truie qui n’a mis bas qu’une fois » (de
POURVOIR. Lat. providere. En concur- porca). À éliminé l’a. fr. tref qui a été usuel
rence en anc. fr. avec pourvoir « examiner jusqu’au xvres. et qui subsiste encore dans
attentivement », lequel est comp. de pour les parlers de l'Est (lorrain et franco-
et voir. — Dér. pourvoyeur, 1248 ; pourvu prov.), lat. trabem, acc. de trabs, d'où aussi
que, 1396 ; dépourvu, 1190. it. irave, esp. trabe (aujourd’hui arch.),
a. pr. {rau, v. entraver, travée. Pouire est
POUSSA, 1782 (pussa, 1670). Empr. du aujourd’hui usuel dans les parlers septen-
chin. pou-sa, idole bouddhique assise, les trionaux au sens du fr. (sous la forme
jambes croisées ; a désigné d’abord un poudre dans la région du Maine et du Poi-
jouet, originaire de Chine, consistant en tou). La phrase proverbiale : « voir une
une figurine trapue, puis, par plaisanterie, paille dans l’œil du voisin et ne pas voir
un gros homme court. une poutre dans le sien » vient d’un pas-
POUSSER ; le sens sage du Sermon sur la montagne, cf. Ma-
de « croître » ne thieu, VII, 4. — Dér. : poutrelle, 1676.
paraît pas être antérieur au xvie s. Lat.
pulsare. Plus usuel depuis le xvi® s. qu’au POUVOIR. Lat. pop. *polère, réfection
moyen âge qui employait beaucoup bou- du lat. class. posse, d’après les formes à
ler. — Dér. et Comp. : pousse, xve, au sens radical poi- : poiui, poteram, Potero, etc.;
« d'action de pousser »; le sens « petite Cf. vouloir avec lequel pouvoir fait couple.
branche qui pousse » n’est pas ancien ; cf. — Dér. : pouvoir, subst., x11°. Puissant,
pousse de blé, 1611 ; poussée, 1530 ; pous- vers 1080 (Roland), d’après les formes en
sette, fin x1x°, « petite voiture d’enfant » ; pois-, puis- du verbe, d’où puissance, xrre
poussif, x111°, de pousser au sens de « pous- (sous la forme poissance), impuissant, 1474,
ser la respiration », sens relevé au xvres. ; impuissance, 1361,
repousser, XIV°, repoussoir, 1429, comme tout-puissant, x1re,
toute-puissance, 1377 (Oresme), ces deux
terme techn., récent au sens figuré ; derniers sur le modèle du lat. omnipoiens,
“époustoufler, 1960 (mot né en Belgique omnipolentia (créé à basse ép.). — Comp. :
comme renforcement expressif); pousse- peut-être, vers 1175 ; au moyen âge sur-
café, 1859 ; pousse-cailloux, 1827 ; pousse- tout peut cel esire, cf. puet cel esire, X1I°,
pousse, 1889; entre-pousser (s’), 1549. qui signifie littéral. « cela peut être »,
505 PRÉCONISER

POUZZOLANE, 1670. Empr. de l’it. poz- PRÉCEPTE, x11°, Empr. du lat. præcep-
zolana, dér. de Pozzuoli, ville située près tum (de præcipere au sens d’ « enseigner »).
de Naples ; Pline dit déjà puteolanus pulvis. PRÉCEPTEUR, xv°. Empr. du lat. præ-
PRAGMATISME, terme de philosophie, cepior « maître qui enseigne », v. le préc. ;
début du xx°. Empr. de l’angl. pragma- au sens restreint d'aujourd'hui, fin xvIre.
lism, répandu par W. James (1898), qui — Dér. : préceptorat, fin xvrre.
l’a fait lui-même sur l’all. philosophique PRÉCESSION, 1690. Empr. du lat. de
Pragmatismus « sorte de positivisme histo- basse ép. præcessio « action de précéder »
rique », usuel depuis la fin du xvrie s. Le (de præcedere) en vue d’un sens techn.
mot all. remonte lui-même au grec prag-
malikos au sens que Polybe lui a donné PRÊCHER, x° (Saint Léger, où se lit
dans l'expression pragmatiké histéria « his- prediat, passé simple ; plus tard preechier).
toire des faits » (de pragma « fait »). Du Francisation du lat. eccl. prædicare (en lat.
reste pragmatique a été pris aussi directe- class. signifie « publier, annoncer »). Par-
ment au grec, par exemple par Renan dans tout sous des formes plus ou moins proches
L'avenir de la Science, au sens de « réel ». du lat. — Dér. : prêche, 1562 ; prêcheur,
xi11e (J. de Meung), d’abord au sens de
PRAIRIAL, PRAIRIE, v. pré. « prédicateur », au sens moderne, 1668 (La
PRALINE, 1680 (cf. amandes à la pra- Fontaine) ; préchi-précha, x1x° (Béranger).
line, 1690). Dér. de du Plessis-Praslin, PRÉCIEUX, vers 1050 (Alexis). Empr.
nom du personnage dont le cuisinier inven- du lat. preliosus. Par suite de l’emploi
ta cette sorte de bonbon. — Dér. : praliner, du fém. précieuse vers 1656, pour désigner
1748. des dames qui fréquentaient l'hôtel de
PRATIQUE, subsi., 1256. Empr. du Rambouillet ou celles qui imitaient leurs
lat. de basse ép. practice (du grec praktiké manières, précieux a pris un sens partic.
« science pratique » par opposition à la dans la langue des lettres et des arts. —
science spéculative chez Platon), devenu Dér. : préciosité, 1664 (une première fois
usuel sous la forme practica dans le lat. créé vers 1300).
scolast. et le lat. jurid. du moyen âge. Est PRÉCIPICE, xvie (Amyot). Empr. du
devenu, dès le moyen âge, un terme de la lat. præcipitium.
langue générale. Au sens de « clientèle PRÉCIPITER, 1386 ; précipitation, 1429.
commerciale », 1588 (Montaigne) ; pris pour Empr. du lat. præcipitare (de præceps « qui
désigner les personnes qui forment la clien- tombe la tête en avant »), præcipilatio,
tèle, 1670. — Dér. : pratique, adj., 1370, propr. « chute en avant », d’où « hâte
d’après lat. médiéval practicus (rare en excessive » à basse ép. ; le sens du subst.
lat. de basse ép.) ; développement de sens s’est développé parallèlement à celui du
parallèle à celui du subst. ; praticien, 1314 ; verbe. — Dér. : précipité, terme de chimie,
pratiquer, 1370 (Oresme), d’où praticable, 1573.
1545, pris substantiv. comme terme de
théâtre, 1835 ; impraticable, xvie. PRÉCIPUT, 1510 ; écrit en outre précipu
au xvi®s. Empr. du lat. præcipuum, neutre
PRÉ. Lat. pratum. — Dér. : prairie, x11° pris substantiv. de l’adj. præcipuus, propr.
(sous la forme praerie), d’où prairial, 1793, « qu’on prend en premier », d’où « extraor-
créé par Fabre d'Églantine ; cf. floréal, dinaire, supérieur, etc. »; écrit précipul
germinal ; préau, xr1° (Chrétien, au sens d’après caput au sens de « capital ».
de « petit pré », encore usité au xvi®) ; au
sens de « terrain découvert et entouré de PRÉCIS, adj., 1377 (Oresme). Précision,
bâtiments », déjà x1r1e s., d’où sont issus 1520. Empr. du lat. præcisus « abrégé,
les sens modernes. succinct » (de præcidere « trancher, abré-
ger ») et du dér. præcisio (rare et avec des
PRÉALABLE, v. aller. sens partic. : « réticence, etc. ») pour servir
PRÉAMBULE, 1314. Tiré de l’adj. de de subst. à l’adj., qui a reçu un sens nou-
basse ép. præambulus « qui marche de- veau en fr. — Dér. : précis, subst., XVII°
vant » (usité au moyen âge dans des sens (Bossuet) ; préciser, 1797; une première
variés). fois en 1350 ; imprécis, 1886 ; imprécision,
1860.
PRÉBENDE, xive (Deschamps). Empr.
du lat. médiéval præbenda, fém. pris subs- PRÉCOCE, 1672. Empr. du lat. præcox
tantiv. de l’adj. verbal præbendus « qui (de præcoquere « hâter la maturité »). —
doit être fourni » (de præbere) ; v. provende. Dér. : précocité, 1697.
— Dér. : prébendé, 1350 ; prébendier, 1365. PRÉCONISER, 1660, au sens moderne.
PRÉCAIRE, 1336, comme terme de Le Dict. de l’Académie de 1694 dit que le
droit ; au sens général, fin xvi® (d’Aubi- mot ne s'emploie qu’en plaisantant ; le
sné). Empr. du lat. jurid. precarius « ob- sens usuel alors : « déclarer en consistoire
tenu par prière (preces) ». — Dér. : pré- que celui qui est nommé à un évêché, etc.,
carité, 1823. a les qualités requises » se dit encore; le
mot paraissait nouveau à Pasquier, fin
PRÉCAUTION, 1471. Empr. du lat. xyie s. Empr. du lat. de basse ép. præco-
præcautio (de præcavere « prendre garde »). nizare « publier » (de præco, -onis « crieur
— Dér. : précautionner, 1671 ; précaution- public »); préconiser avait déjà été em-
neux, 1787. : prunté au moyen âge (xIv° s.) au sens de
PRÉCÉDER, xive (Oresme). Précédent, « publier, annoncer publiquement » ; c’est
xu1e. Empr. des mots lat. præcedere, præce- très probabl. de ce sens juridique qu’est
dens, part. prés. sorti le sens moderne.
PRÉCURSEUR 506

PRÉCURSEUR, vers 1415, en parlant toral, 1836, sur le modèle d’électoral, etc.
de saint Jean-Baptiste, précurseur de Jé- — Comp. : sous-préfet, 1800 ; sous-préfec-
sus-Christ (sens du mot jusqu’au xvre 5.); ture, 1800.
est resté un terme eccl. jusqu’au xvire s.
Empr. du lat. eccl. præcursor, fréquent PRÉFIGURER, 1541 (Calvin) ; -ation,
notamment en parlant de saint Jean- 1756 (Voltaire). Termes de la langue reli-
Baptiste (en lat. class. signifie « éclai- gieuse, empr. du lat. eccl. praefigurare,
reur »; de præcurrere « Courir en avant »). -atio.
PRÉDÉCESSEUR, 1283. Empr. du lat. PRÉFIXE, 1751 (Dumarsais) Empr.
de basse ép. prædecessor (comp. de deces- du lat. præfitus « fixé devant » (de præfi-
sor, qui a le même sens). gere) en vue d’un sens spécial. — Dér. :
préfixer, 1869, d’où -ation, 1877.
PRÉDELLE, terme de beaux-arts, 1873.
Empr. de l’it. predella, propr. « banc », mot PRÉHENSION, 1793 (alors au sens de
d’origine germ., cf. longobard prelil, de la « réquisition », au sens actuel dp. 1834;
famille de l’all. Brett « planche ». dans d’autres sens du x1v® au xvIe s. Au
premier sens empr. du lat. jurid. prehensio,
PRÉDESTINER, vers 1190. Prédestina- au deuxième formé par les naturalistes sur
tion, id. Empr. du lat. eccl. prædestinare (en le p. p. lat. prehensus.
lat. class. signifie « (se) réserver d'avance »),
prædestinatio. PRÉHENSION, « action de saisir avec
PRÉDÉTERMINER, 1530. Empr. du la main ou un autre organe », terme techn.,
lat. eccl. prædelerminare. — Dér. : prédé- 1798. Empr. du lat. prehensio (de prehen-
termination, 1636.
dere « saisir ») en vue d’un sens spécial.

PRÉDICANT, 1523 (dans une sottie de PRÉJUDICE, xu1° (J. de Meung). Empr.
du lat. præjudicium, propr. « opinion pré-
Genève) ; pris ensuite en parlant des mi-
nistres protestants (cf. « Ministres qui conçue » (de præjudicare « préjuger »). —
Dér. : préjudiciable, 1266, par l’intermé-
furent par nous appelez predicanz », Pas-
quier) et en mauvaise part. Tiré du part. daire d’un verbe préjudicier, du x1ve au
XVII S., « porter préjudice », rare aujour-
prés. de prédiquer, usité au moyen âge et d’hui, sauf dans la langue de la procédure.
jusqu’au xvi® s., empr. du lat. prædicare,
v. prêcher. PRÉJUDICIEL, 1752, terme de droit.
PRÉDICATEUR, 1239, devient usuel Empr. du lat. jurid. præjudicialis (de præ-
surtout dp. le xvrre s., v. prêcheur; prédi- judicium au sens de « premier arrêt »).
cation, x11°, Empr. du lat. eccl. prædicaior, Préjudiciel (ainsi dès 1276), et surtout pré-
prædicatio (de prædicare, v. prêcher) ; en judicial se trouvent aussi au sens de « pré-
lat. class. ont des sens en rapport avec celui judiciable ».
du verbe : « panégyriste », « action de pro- PRÉJUGER, 1470, au sens de « juger
clamer, louer, etc. ». (en général) »; le sens moderne appa-
PRÉDIRE, 1258 ; prédiction, 1549. Em- raît au xviie s. Francisation, d’après ju-
pr. du lat. prædicere, prædictio. ger, du lat. præjudicare « juger préalable-
ment ». — Dér. : préjugé, 1584 : d’abord
PRÉÉMINENT, vers 1520 ; prééminence, au sens d’ « opinion qu'on se fait par
1376. Empr. du lat. de basse ép. præemi- avance », encore usité au XVIII s.; sens
nens, præeminentia (de eminere « s'élever moderne vers 1600.
de »).
PRÉLART, terme techn., sorte de grosse
PRÉEMPTION, 1796. Comp. avec les toile destinée à préserver de l’eau des
mots lat. præ « avant » et empiio « achat ». marchandises, etc., 1670. Dans l'artillerie
PRÉEXISTER, 1377; rare avant le on préfère la forme prélat. D'origine in-
XVIrIe s. Empr. du lat. médiéval præexis- connue,
lere. — Dér. : préexistence, 1551, sur le
modèle d'existence. PRÉLAT, 1155. Empr. du lat. médiéval
prælatus (tiré du part. passé de præferre
PRÉFACE, vers 1300. Empr. du lat. « porter en avant ». — Dér. : prélasser (se),
præfatio « préambule » (de præfari « dire 1532 (Rabelais), par un rapprochement
d'avance »). — Dér. : préfacer, fin xix°; plaisant avec lasser ; prélature, xive.
préfacier, 1833 (Vigny).
PRÊLE, 1539. Altération d'asprele, xrrre
PRÉFÉRER, xive (Bersuire). Empr. du (dans un texte wallon), qui s’est produite
lat. præferre. — Dér. : préférable, 1587 ; dans l’asprele, coupé faussement en /a
préférence, xive (Oresme). sprele. Le mot est surtout usité en franco-
provençal, d’où il a pu être introduit en fr.
PRÉFET, vers 1200 ; jusqu’au xvie s., Lat. pop. *asperella, assuré par l’it. aspe-
en parlant de magistrats romains ; a servi rella ; le mot lat. dérive de l’adj. asper
à désigner les titulaires de diverses fonc- « rude » ; la plante a été ainsi nommée à
tions ou charges dans l'administration cause de sa tige ligneuse qui sert à net-
française, depuis 1800 ; au sens de « maître toyer des ustensiles ; de là aussi le verbe
chargé de surveiller les études », xvire s. préler, 1680, usité dans
Préfecture, vers 1300, rare avant le xvrres. 5 diverses techn. ;
prêle se disait en lat. class. equisetum, lit-
développement de sens parallèle à celui de téral. « crin de cheval » :;on dit de même
préfet. Empr. du lat. præfectus, propr. queue de cheval, queue de rat dans beaucoup
« préposé » præfectura. — Dér. : préfec- de patois.
507 PRÈS
PRÉLEVER, 1629. Empr. du lat. de s'emploie qu'au réfl. et au part. passé au
basse ép. prælevare. — Dér. : prélèvement, sens fig. de « s’enflammer d'amour », at-
1767. testé dès le x11° s.; méprendre (se), x1re,
PRÉLIMINAIRE, v. liminaire. d’où méprise, id. ; pourpris, x111° « enclos,
jardin »; ne s'emploie plus que dans la
PRÉLUDER, 1660; prélude, 1530. langue poétique ; part. passé, pris substan-
Le premier est empr. du lat. præludere tiv., d’un ancien verbe pourprendre « en-
« se préparer à jouer », employé au sens clore, etc. », usuel jusqu’au xv® s.; sur-
fig., le deuxième a été tiré du verbe lat. prendre, x11° (à la forme a sorprise) (pour
PRÉMATURÉ, 1685; l’adv. -ément le préf., v. sur), d’où surprise, XVI, au sens
a été relevé dès 1577. Fait sur le lat. præma- moderne ; dès 1294, au sens d’ « impôt
turus. On a emprunté d’abord l’adv. lat. extraordinaire », fréquent au moyen âge.
praemature, sous la forme prematurè (1509), PRÉNOM, 1701 (peut-être une première
qu’on pourvoit plus tard du suffixe ad- fois en 1556). Empr. du lat. prænomen. —
verbial. Dér. : prénommer, « donner un prénom »,
PRÉMÉDITER, 1474. Préméditation, 1845, sur le modèle de nommer, surnommer.
XIVe (Oresme). Empr. du lat. præmeditari, PRÉNOMMER, « nommer avant », v.
præmeditatio, v. méditer. nommer.
PRÉMICES, xr°, dans une traduction PRÉOCCUPER, 1354 (Bersuire), au sens
des Psaumes ; pris de bonne heure dans d’ « avoir l'esprit occupé d’une idée »,
un sens général. Empr. du lat. eccl. primi- sens repris vers le xviie s. Empr. du
tiae avec un changement d’i en é dû sans lat. præoccupare « prendre d'avance », d’où
doute à praemissa, v. prémisse ; en lat. « s'emparer de (l'esprit) » ; a été également
class. a déjà des sens semblables (de primus pris au sens propre du lat. au xvi® et au
« premier »). xvIIe s. — Dér. : préoccupation, 1552, au
PREMIER. Lat. primarius, dér. de pri- sens de « prévention » d’après le sens du
mus ; Celui-ci a été conservé par l’a. fr. verbe à cette époque et sur le modèle du
prin (qui a eu peu de vitalité, mais qui se lat. præoccupatio (qui ne signifie que « ac-
dit encore dans la région de Lyon au sens tion de prendre d’avance ») : au sens de
de « fin, mince »), v. prime, printemps et « souci » en 1486 et depuis 1875.
l’it. primo. Esp. primero. PRÉPARER, 1314; préparation, 1314;
PRÉMISSE, vers 1295. Empr. du lat. préparatoire, 1322. Empr. du lat. præparare,
scolast. præmissa (sententia) « (propo- præparatio, præparalorius (créé à basse
sition) mise en avant » (de præmiltiere ép.). — Dér. : préparateur, 1791; déjà
« mettre en avant »). créé au xvi®s. ; préparatif, 1377 (Oresme).
PRÉMONITOIRE, 1869 (comme t. de PRÉPONDÉRANT, 1723. Empr. du lat.
médecine). Empr. du lat. praemonilorius
præponderans, part. prés. de præponderare
« qui rappelle qch. à l’avance ». «avoir le dessus » (de pondus « poids »). —
Dér. : prépondérance, 1752 (Turgot).
PRÉMUNIR, xive. Empr. du lat. præ- PRÉPOSER, vers 1460. Empr., avec
munire (de munire « protéger, etc. »). francisation d’après poser, du lat. præ-
PRENDRE. Lat. prehendere « saisir », ponere.
devenu de bonne heure prendere. It. pren-
PRÉPOSITION, xrr°. Prépositif, 1765.
dere (l’it. dit aussi pigliare, v. piller), esp. Empr. du lat. des grammairiens præposi-
prender « emprisonner »; v. rendre, avec
tio, præpositivus.
lequel prendre fait couple. Prendere, qui
est beaucoup plus énergique que capere, a PRÉPUCE, fin x1° s. Empr. du lat.
absorbé la plupart des sens de celui-ci, qui præputium.
ne survit que dans des emplois restreints,
cf. esp. a. pr. caber « tenir une place, etc. ».
PRÉROGATIVE, vers 1235. Empr. du
— Dér. et Comp. : prenable, xr1°, impre- lat. jurid. prærogativa qui désignait propr.
nable, xiv°; preneur, x11° (sous la forme la centurie qui était appelée à voter la pre-
mière ; de là est issu le sens de « privilège ».
prendeor) ; prise, xII°, priser « aspirer du
tabac, etc., par le nez », 1807, priseur, PRÈS. Continue le lat. pressé, attesté
1807 ; déprendre (se), xiv® (Christine de à basse ép. au sens de « de près », adv. de
Pisan) ; antér., depuis le xr1° s., on trouve pressus « serré » (de premere « presser,
le part. passé despris au sens de « dénué, serrer »), conservé dans le sarde logoudorien
misérable » ; déprendre, qui signifiait « sépa- de presse, a presse « en hâte », le franc. près
rer », s’est toujours employé surtout au peut représenter soit pressé, soit une forme
réfl., qui est encore de quelque usage dans modifiée *presso, qui est aussi à la base de
la langue écrite ; entreprendre, x1I°; au lit. presso, v. après. — Comp. : auprès,
moyen âge signifie souvent « saisir, sur- 1424 ; presque, d’abord seulement pres,
prendre » (d’où entrepris « gêné, embar- x11e s.; la combinaison presque, attestée
rassé », usuel jusqu’au xvI® s.), d’où entre- depuis Chrestien, signifie d’abord « à peu
preneur, x111°, au sens général de « celui près ce que » dans des expressions où le
qui entreprend », restreint au sens moderne Verbe est est sous-entendu ; devient
depuis le xvrr1e s., entreprise, x11° ; épren- adverbe au x1v® s.; pour la prononciation
dre, vers 1080 (Roland), en parlant du feu de ce mot, v. jusque ; à peu près, 1688
« qui saisit, enflamme »; ce sens a duré (comme subst.. Bossuet ; dès 1487 comme
jusqu’au xvre s. et survit encore dans un adv., comp. à beaucoup près, dp. Commy-
certain nombre de patois ; aujourd’hui ne nes).
PRÉSAGE 50 e7)

PRÉSAGE, vers 1390. Empr. du lat. PRÉSOMPTUEUX, xr1e. Empr. du lat.


præsagium (de præsagire « prévoir »). — de basse ép. præsumpiuosus (de même
Dér. : présager, 1539. sens, de præsumere, v. le préc.).
PRESBYTE, 1690. Empr. du grec PRESQUE, v. près.
presbytés, au même sens, propr. « vieil- PRESSENTIR, 1414. Empr. du lat.
lard » ; les vieillards sont en effet souvent præsentire. — Dér. : pressentiment, xvr®
atteints de presbytie. — Dér. : presbytie, (Amyot).
1829.
PRESBYTÈRE, xri°, peu usité au PRESSER. Lat. pressäre, fréquentatif
moyen âge; le sens moderne date du
de premere (par le supin pressum). — Dér.
et Comp. : presse, 1080 (Roland) au sens
XVIIIe S.; presbytéral, 1352, au sens de
« de prêtre » ; a suivi le sens de presbyière. d’ « action de presser » ; depuis le xrrre s.
désigne diverses sortes de machines à pres-
Empr. du lat. médiéval presbyterium, ser, d’où, spécialement, la machine à im-
-alis ; presbylerium, en lat. eccl. anc.,
signifiait « fonction de prêtre, collège de primer, depuis le xvi® s., puis les produits
de l’imprimerie, depuis le xvirre $., cf. li-
prêtres » (du grec eccl. presbyterion
«conseil des anciens »), v. prêtre ; de même berté de la presse, id., et, spécial., les jour-
naux, au XIX® S.; v. imprimer ; empres-
presbyteralis signifiait « de prêtre ».
ser (s’), 1609, au sens moderne, antér.
PRESCIENCE, vers 1180, rare avant le trans. au sens de « presser », x111° ; d’où
XVIIe s. Empr. du lat. eccl. præscientia. empressement, 1608 ; presse-papier, 1875;
represser, 1549. V. compresse, oppresser.
PRESCRIRE, terme de droit, 1355;
prescription, id., xitie. Empr. du lat. jurid. PRESSING, 19149. Empr. de l'angl.
Præscribere (propr. « écrire en tête »), pressing « action de presser ».
præscriplio. — Dér. : prescriptible, 1374,
imprescriptible, 1481. PRESSION, xvrre (Pascal), comme terme
de physique ; une première fois au sens
PRESCRIRE, « ordonner », 1544, au de «épreinte » en 1256 ; sens moral dp. 1840
sens médical, 1788. Prescription, « précep- (Balzac). Empr. du lat. techn. pressio
te », 1580, au sens d’ «ordonnance de méde- « pression, pesanteur, point d’appui d’un
cin », 1829. Empr. du lat. præscribere « or- levier » (de premere, v. presser); empr.
donner », præscriptio. aussi au XVIe s. au Sens de « machine à
PRÉSÉANCE, v. séance. imprimer ».

PRÉSENT, adj., x11° ; présence, id. Em- PRESSOIR. Lat. de basse ép. pressô-
pr. du lat. præsens, præsentia. Présent a rium (de premere). — Dér. : pressurer,
signifié aussi au xviie s. « actif, qui agit 1336; altération de pressoirer (cf. pressoir
immédiatement », en parlant d’un remède pressoirant, xir1°, Beaumanoir), encore si-
gnalé dans les environs de Paris au xvires.
d’après le lat. præsens, class. en ce sens.
Présence a pris le sens d’ « aspect » au xvre et dans le Berry au xix®, altération qui
et au xvries. est due à une substitution de suff., et non
à l’a. fr. pressure, usuel au sens d’ « Op-
PRÉSENT, subsi., v. le suiv. pression, tourment, violence » (empr. du
lat. eccl. pressura) jusqu’au début du
PRÉSENTER, 1080 (Roland). Empr. du XVII S., puisque, en 1382, pressurer appa-
lat. de basse ép. præsentare (de præsens, raît au sens de « faire passer au pressoir »,
v. les préc.). V. représenter. Dér. : pré- et que pressoirer apparaît au xIve s. au
sent, x1I1°; présentable, 1746; présenta- sens fig. de « faire violence à quelqu'un » ;
teur, xvi°; présentation, 1263. pressurage, 1296.
PRÉSERVER, xive, Empr. du lat. de PRESTANCE, 1583, au sens moderne ;
basse ép. præservare. — Dér. : préserva- au xve et au xviIe s. signifie « excellence,
teur, 1514; préservatif, 1314; préserva- supériorité ». Empr. du lat. præstantia,
tion, 1314. -cia « supériorité » (de præstare « l'emporter
PRÉSIDER, 1388 ; président, 1296. Em- Sur »). On a attribué le sens moderne à
pr. du lat. præsidere « être à la tête », l’it. prestanza, mais celui-ci ne signifie
præsidens. — Dér. du subst. : présidence, qu’ « excellence », comme le fr. du xve et
1380; rare avant le xvinre s. ; d’où prési- du xvi® s. ; le développement du sens est
dentiel, 1791 ; vice-président, 1483, d’où donc propre au fr.
-ce, 1771. PRESTATION, «redevance » ; Xitie, Em-
PRÉSOMPTIF, 1375. Empr. du lat. de pr. du lat. jurid. præstatio (de praestare au
basse ép. præsumpliivus « qui repose sur sens de « fournir »).
une conjecture, présomptueux » (de præsu- PRESTATION, dans
mere « prendre d’avance »), en vue d’un presiation de ser-
ment, vers 1480, mais déjà vers 1300 pres-
sens spécial. lacion de foy. Formé sur le lat. jurid. jusju-
PRÉSOMPTION, vers 1180; a dès le randum præstare « prêter serment » pour
moyen âge les deux sens du fr. moderne. servir de subst. à la formule prêter serment.
Empr. du lat. præsumptio « conjecture », PRESTE, 1460; prestesse, fin xvie
qui a pris à basse ép. le sens d’ « excès de (Brantôme qui écrit pretezze). Empr. de
confiance » (de præsumere « présumer », l’it. preslo (v. prêt), prestezza. — Dér. :
d’où à basse ép., « être présomptueux »). prestement, fin xvI° ; s’est substitué à l’a.
V. présumer. fr. presiement (dont l’s ne se prononçait
509 PREUX

pas, adverbe de l’adj, prêt), usuel depuis un objet, etc. » paraît avoir été le seul po-
le xr1° s. et qui avait des sens analogues pulaire. Les locutions variées où l’on ra-
au moderne prestement. mène le sens de préler à celui de « mettre
PRESTIDIGITATEUR, 1823. Prestidi- à la disposition », qui apparaissent de
gitation, 1829. Formés avec l’adj. preste et bonne heure et dont on retrouve les corres-
le lat. digitus « doigt ». pondantes ou d’analogues en it. et en esp.
semblent être reprises au lat. class. ou
PRESTIGE, 1518, d’abord au sens d’ «il- faites sur le modèle de locutions de ce lat. ;
lusion attribuée à des sortilèges », d’où cf. notamment prêler serment et jusjuran-
« fantasmagorie » ; sens moderne depuis le dum præslare ; d’où, ensuite, des dévelop-
XVIIe s.; prestigieux, 1556 ; rare avant la pements nouveaux : se prêler à, XVI®S., etc.
fin du xvine s. Empr. du lat. præstigium — Dér. : prêt, subsi., XII° ; prêteur, x1I1°.
(moins usité que præsligiæ) «illusion, arti- — Comp. : prête-nom, 1718.
fice », præsligiosus « éblouissant, trom-
peur ». PRÉTÉRIT, x. Empr. du lat.
des grammairiens præieritum (tempus)
PRESTO, terme musical, 1762. Empr. « (temps) passé » (de prælerire « passer,
de l’it. presio, v. prêt. s’écouler »).
PRESTOLET, 1657. Empr. du pr. pres- PRÉTÉRITION, 1510. Empr. du lat. de
ioulet, dim. de sens péjor. de prest(r)e la rhétorique prælteritio, v. le préc. ; comme
« prêtre ». terme de droit, 1622.
PRÉSUMER, xue. Empr. du lat. præsu- PRÉTEUR, 1213; prétoire, x11°; pré-
mere, propr. « prendre d’avance », d’où ture, vers 1500. Empr. des mots lat. prælor,
« conjecturer », et à basse ép., « être pré- prælorium, prælura, comme termes d’anti-
somptueux »; ce dernier sens a été repris quité romaine. Préloire a pris récemment
à partir du xvie s. V. présomption, pré- les sens de « tribunal de juge de paix »
somptueux. Dér. : présumable, 1781. et de « tribunal (en général) », ce dernier
PRÉSURE. Lat. pop. *pre(n)süra, pro- sens est déjà usité au XvIes.
pr. « ce qui est pris » ou « ce qui fait pren- PRÉTEXTE, 1549. Empr. du lat. præ-
dre », dér. de pre(n)sus (de prendere, v. textus (de prætexere « prétexter ») ; cf. déjà
prendre). It. presura. dans le lat. jurid. du moyen âge sub hujus
PRÊT, adj. Lat. pop. præsius, attesté à prælextu dans une charte de 1463. — Dér. :
basse ép., issu de l’adv. class. præsio « à prétexter, 1456, au xvri® s. aussi « couvrir
portée de la main, tout près »; cet adj. a d’un prétexte ».
dû se développer dans l'expression usuelle PRÉTINTAILLE, v. prétantaine.
præsio esse « être présent, assister, etc. ».
It. esp. presto «prompt, diligent ». V. presto. PRÉTORIEN, 1213. Empr. du lat. præ-
lorianus, id. ; a été appliqué, au xix°s.
PRÉTANTAINE, 1645 (Muse normande ; (Balzac), à des militaires qui interviennent
où on lit venir en prétentaine); courir la par la force dans la vie politique de leur
prétantaine, signifie au xviie s. « courir les pays, par allusion aux mœurs de la garde
aventures (en général) ». En rapport avec prétorienne de l’époque impériale.
norm. pertintaille « collier de cheval garni
de grelots » (aussi Sologne, etc.), fr. pre- PRÊTRE. Lat. eccl. presbyter (du grec
tintaille « découpure dont on ornait les eccl. presbyteros, qui a d’abord désigné
robes des femmes », xvir1®, qui existe aussi . dans le Nouveau Testament un des « an-
avec la voyelle tonique de prétantaine, ciens du peuple » ; v. presbytère). Conservé
comp. Bas-Maine pertantaille « collier à partout d’après presbyter ou une forme de
grelots », et avec le sens de celui-là, comp. basse ép. præbyter (due à l'influence du lat.
nant. courir la peurtantaille. Tandis que le præbitor « celui qui pourvoit du nécessaire
suff. -aille de pertintaille a une valeur col- les fonctionnaires voyageant dans les pro-
lective (collier de grelots), -aine y a été vinces », d’où « celui qui pourvoit au salut
substitué par évocation des nombreux re- des fidèles », développement de sens ana-
frains de chanson ({onion tontaine, trique- logue à celui du grec parochos, v. paroisse) :
dondaine laridondaine). La différence de it. prele, esp. presle, a. pr. p(rJestre et
la voyelle provient de l'opposition entre preire. L’a. fr. a possédé une forme pre-
tinter et relentir, v. ces deux mots. voire, qui représente l’acc. presbyterum et
qui survit dans la rue des Prouvaires à
PRÉTENDRE, xive. Empr. du lat. præ- Paris, cf. aussi a. pr. preveire. — Dér. :
tendere, propr. « tendre en avant, présen- prêtraille, 1498 ; prêtresse, xr1° ; au moyen
ter ». — Dér. : prétendant, xve, prétendu, âge signifie « concubine de prêtre »;
« celui qui doit se marier, qui recherche depuis le xv®s., terme d’antiquité ; prêtrise,
une fille en mariage », 1650, terme fam. ; xive; archiprêtre, x111° (sous les formes
d’abord gendre prétendu (Molière, Malade arce-, arche-), sur le modèle du lat. eccl.
imag.). archipresbyter.
PRÉTENTION, 1489. Dér. de præltenlus,
PREUVE, v. prouver.
part. passé de prælendere, v. le préc., pour
servir de subst. à prétendre. — Dér. : pré- PREUX. D'abord proz; preu au cas
tentieux, 1789. régime est rare. Représente un adj. du lat.
PRÊTER. Lat. præsläre « fournir, pré- de basse ép. prôdis, tiré de prôde, attesté
senter », qui a pris à basse ép. le sens de dp. le iv s. dans prôde est, etc. (au lieu du
« prêter un objet, de l'argent », d’où aussi lat. class. prodest, etc. du verbe prôdesse
it. prestare, esp. prestar. Le sens de « prêter « être utile »), qui a dû être pris comme
PREUX 210

subst. neutre au sens de « profit, avantage », au sens d’ « action de devancer » ; à partir


v. prou, cf. de même a. pr. pros, pro « bon, du xvi® prévention a eu un développement
excellent » ; it. prode ; proz, pros, pro ont de sens parallèle à celui de prévenir.
été rapidement sentis en a. fr. et en a. pr.
comme des adj. — Dér. : prouesse, vers PRÉVENTORIUM, v. préventif.
1080 (Roland). — Comp. : prud’homme, PRÉVOIR, x111° ; rare avant le xvre &. :
XI1° (id., sous la forme produme, d'où, au prévision, vers 1270 (Roman de la Rose).
xir1e s. le plur. prodeshomes, preu-), ancien
Empr. du lat. prævidere, francisé d’après
comp. de preu(x), de et homme, avec déve- voir, et du dér. de basse ép. prævisio. L'a.
loppement partic. de la voyelle de la syl-
fr. disait de préférence pourvoir. — Dér. :
labe initiale; au moyen âge signifiait prévoyance, vers 1410; prévoyant, vers
« homme sage et loyal » (cf. Zi a grant dif- 1570; en a. fr. po(u)rveance, -veani,
ference entre preu home et preudome Join-
po(u)rvoyance, -voyant, d’où imprévoyan-
ville) et aussi « homme versé dans la con- ce, 1611, imprévoyant, 1784; imprévu,
naissance de certaines choses »; depuis le 1544 ; imprévisible, 1840.
XIXe s., emploi restreint à la juridiction
des prud'hommes, 1806 ; d’où prud’homie, PRÉVÔT. Emplois restreints aujour-
1372 (Oresme), aujourd’hui rare. Prude, d’hui ; au moyen âge et sous l’ancien ré-
XVIIe, issu de preudome et de preudefemme, gime désignait des magistrats, des officiers
XIIIe, qui correspondait au moyen âge et chargés d’une juridiction, ou des digni-
jusqu’au xvi® s. à prud’homme ; employé taires ecclésiastiques. Lat. præpositus « pré-
pendant quelque temps comme adj. et posé », également employé dans la langue
comme subst. pour les deux genres: administrative. Seulement gallo-roman :
signifiait d’abord au fém. « forte, sérieuse, l’it. prevosto, l'esp. preboste viennent du
modeste » ; le sens de « qui fait la modeste », gallo-roman. Une variante de basse ép.
date du milieu du xviie s. (signalé depuis propositus a donné l’a. fr. provost et l’a.
1652) ; la voyelle u est probabl. due à pr. probost ; de là aussi l’all. Propsi, angl.
l'adj. prudent; d’ou pruderie, 1666 (Mo- provosi ; une autre forme de l’all. Profoss,
lière). vient du fr. — Dér. : prévôtal, 1514; pré-
vôté, xIIe.
PRÉVALOIR, 1420. Empr. du lat.
prævalere « l'emporter sur ». PRIAPÉE, vers 1500. Empr. du lat. de
basse ép. priapeia, plur. neutre, « poèmes
PRÉVARIQUER, fin xive, d’abord tran- sur Priape (dieu des jardins et de l'amour
sitif jusqu'au xvie s. d’après le lat. de basse physique) »; d’où le sens moderne.
ép. ; prévaricateur, xive (Oresme) : préva-
rication, xri°, Empr. du lat. jurid. præva- PRIAPISME, 1495. Empr. du lat. médi-
ricari « entrer en collusion avec la partie cal priapismus (du grec médical priapismos,
adverse (se dit d’un avocat) » (proprement V-“lempréc.):
terme de la langue rustique signifiant PRIER. Lat. de basse ép. precäre, lat.
« faire des crochets, enjamber ») et des class. precärt. L’inf., et les formes accen-
dér. prævaricaior, prævaricatio ; ont été tuées sur la terminaison étaient régulière-
pris dans le lat. eccl. au sens de « violer ment preier, proier, etc.; prier, etc., est
la loi, pécher, etc. », d’où les emplois ana- refait d’après les formes accentuées sur le
logues de prévarier, prévarication en a. fr. radical prie, etc. En a. fr. prier s'emploie
PRÉVENIR, 1467. Empr. du lat. præve- de préférence avec un rég. direct (prier
nire « devancer », sens usuel jusqu'au Dieu), tandis que l’activité en elle-même
XVIIIe s., d’où, en fr., par développement était exprimée le plus souvent par le verbe
propre, « aller au-devant de ce que quel- orer, du lat. orare. Après le xv® s. orer
qu'un peut désirer, disposer par avance a cédé la place à prier, mais il apparaît
quelqu'un dans un sens favorable ou défa- au XVI® S. comme empr. du lat. au sens
vorable », dès le xvie s. et, par un autre de « haranguer ». — Comp. : prie-dieu,
développement, « avertir », depuis 1709, 1603 (Ménage le blâme et recommande
de sorte que, aujourd’hui, il y a deux verbes, prié- Dieu, seule forme que donne l’Acadé-
sans rapport de sens. — Dér. : prévenant, mie jusqu’en 1762).
1718, au sens moderne, antér. « qui de- PRIÈRE. Lat. du temps des Mérovin-
vance », 1514, prévenance, 1732; prévenu, giens precäria, « supplique » pour charla
terme de droit, 1604. precaria, de l’adj. precärius « qui s’ob-
tient par des prières » ; a remplacé le lat.
PRÉVENTIF, 1820. Dér. sav. du lat. class. precès qui a complètement disparu.
præventus (part. passé de prævenire, v. le Seulement gallo-roman et cat. pregaria.
préc.) pour servir d’adj. à prévenu, préven- Pour le traitement du radical, v. le préc.
lion dans la langue jurid. ; la langue médi-
cale s’en empare vers 1870. Elle a fait aussi PRIEUR, vers 1110. Empr. du lat. prior
un dér. préventorium, 1923, sur le modèle de « premier de deux », qui a reçu le sens spé-
sanalorium pour désigner un établissement cial de « prieur » dans le lat. eccl. du moyen
sanitaire où l’on « prévient » certaines âge. — Dér. : prieuré, id.
maladies. PRIMA DONNA, 1830. Empr. de lit.
PRÉVENTION, XVII, au sens moderne ; prima donna « première chanteuse à
au sens jurid. moderne, 1792 : a eu d’autres l'Opéra ».
acceptions du x1Iv® au xvie s. : «action de PRIMAIRE, 1791 (Talleyrand, en par-
devancer, privilège, etc. ». Empr. du lat. lant de l'école primaire, par opposition à
de basse ép. præventio, attesté seulement l'école secondaire ; a reçu d’autres sens
511“ PRISER

techn. au cours du x1x® s.; comme terme PRIME-SAUTIER, v. saut.


de géologie, fin xvrrre). Empr. du lat. pri-
marius, V. premier. PRIMEVÈRE, xvi® s.; au moyen âge
primevoire, xir°. Emploi fig. de l’anc. pri-
PRIMAT, 1155. Empr. du lat. eccl. pri- mevère, d’abord primevoire « printemps »,
mas, primatis, en lat. class. « qui est au peut-être d’après une expression telle que
premier rang » (de primus « premier »). — « fleur de primevère »; primeuère « prin-
Dér. : primatie, x1v®. temps », disparu depuis le xvie s., repré-
PRIMATE, 1838, comme terme de z00- sente le lat. pop. prima vera (vera est at-
logie. Empr. du lat. primas, -atis, v. le testé dans des inscriptions), fém. issu de
préc., en vue d’un sens spécial. primum ver, tiré lui-même de l’ablatif
class. primo vêre « au début du printemps »,
PRIMAUTÉ, x1r°, rare avant le xvie. d’où «au printemps », cf. d’une part it. esp.
Dér. sav. du lat. primus « premier » sur le primavera, d'autre part a. pr. primuer,
modèle de royaulé, etc. tous trois au sens de « printemps ». La pri-
mevère se dit surtout coucou dans les
PRIME, adj.; ne se dit que dans les patois.
locutions de prime abord, 1623, et de prin-
saut « tout d’abord », 1390. La locution PRIMIPARE, 1823. Empr. du lat. pri-
de prime abord a été formée sur le modèle mipara (de parere « enfanter »).
de de prime face « à première vue », 1370,
encore chez La Fontaine, où prime est le PRIMITIF, 1310. Empr. du lat. primi-
fém. de l’anc. adj. prin (du lat. primus) tivus (à l’origine « qui naît le premier »)
qui, dès les premiers textes, est restreint dans la combinaison avec ecclesia, d’où
à des locutions (outre quelques comp., v. d’abord en fr. primitive église ; primilivus
primevère, primerose), mais survit encore est déjà employé par les grammairiens lat.
dans les patois de la région franco-proven- en parlant d’un verbe simple ou d’un adj.
çale, au sens de « mince, délicat », Au au positif.
XVIe s., rarement auparavant, et encore PRIMO, 1322; ellipse de la locution
quelquefois au xvii®, on trouve prime, latine primo loco « en premier lieu ».
masc. et fém., au sens de « premier »,
d’après le lat. primus ; v. saut ; v. aussi PRIMOGÉNITURE, 1491; dér. du
printemps. Comme terme d’algèbre, dans mir. primogenit « premier né », empr.
a prime, etc., repris également du lat. à du lat. primogeniius, id.
date récente. Prime est d’autre part em-
ployé comme subst. dans diverses accep- PRIMORDIAL, 1480, rare avant le
tions spéciales : 1° au sens de « première xviie s. Empr. du lat. de basse ép. primor-
heure canoniale », 1165 ; 2° comme terme dialis (de primordium « commencement »).
d'escrime, xvii® (on peut aussi, pour ce PRINCE, 1120. Empr. du lat. princeps,
dernier sens, penser à l’it., mais les autres propr. « premier », qui a servi notamment
termes désignant des parades d'escrime : à désigner l’empereur. — Dér. : princesse,
seconde, tierce, quarie, sont fr., et rien ne 1320 ; princier, xvi°; principauté, x1v®
prouve qu'ils aient été faits sur le modèle (Oresme), le suffixe est pris de l’anc.
de l’it.) ; etc. — Dér. : primer « tenir le fr. principauté « fête principale, etc. », qui.
premier rang », 1564; primeur, xIII° $.; est empr. du lat. principalitas «excellence »;
depuis le xvire se dit des fruits ou légumes principicule, 1831 (Barthélemy), d’après
dont on a poussé la maturation. le lat. princeps, principis.
PRIME, subst., « prime d'assurance », PRINCEPS, dans édition princeps, 1811.
1620. Empr. de l’angl. premio, premium, Mot lat., v. le préc.
francisé d’après sa prononciation ; le mot
angl. est empr. lui-même de l’esp. premio PRINCIPAL, vers 1080 (Roland); en
« prix, récompense », du lat. praemium, outre principel au moyen âge. Empr. du
id., d’abord en ce sens d’où a été tiré en- lat. principalis (de princeps, v. les préc.).
suite le sens particulier de « prime ». — — Dér. : principal, subst., « directeur d’un
Dér. : primer, « gratifier d’une prime (en- collège », 1549 ; « capital d’une dette », 1283
couragement pécuniaire, etc.) », 1869; (Beaumanoir).
surprime, 1877.
PRINCIPE, vers 1265. Empr. du lat.
PRIMEROLE, « primevère », xI11° (Ro- principium, propr. « origine » (de prin-
se) ; aujourd’hui ne s'emploie plus qu’en ceps, v. les préc.).
normand. Probabl. dér. de l’afr. primier
« premier », à l’aide du suffixe -ole (comp. PRIORITÉ, xive (Oresme). Empr. du
féverole, fougerole, etc.). V.encore primevère. lat. médiéval prioritas, v. prieur. — Dér. :
prioritaire, 1949.
PRIMEROSE, 1845, nom pop. de la
rose trémière. Aux x11° et XII1° primerose PRISER, « évaluer à un certain prix ».
désignait la primevère, comme aujour- Aujourd’hui d’un usage restreint. Lat. de
d’hui encore en anglais. En revanche le basse ép. preliäre (de pretium « prix »). —
fr. appelait la primerose passerose dès Dér. : prisée, xrr1e ; priseur, 1252, aujour-
le xirie, parce qu'elle atteint jusqu’à d’hui ne s'emploie que dans commissaire-
3 mètres de haut. Au x1x°® passe- a été priseur ; mépriser, xii®, d’où mépris,
échangé contre prime- qu'on joignait vers 1225, méprisable, xIv® (supposé d’a-
volontiers au début du nom d’une plante près l’adv. -ment, Bersuire).
qui fait l’admiration des amateurs de
fleurs. V. prime, adj. PRISER, PRISEUR, v. prendre.
PRISME 512

PRISME, 1613. Empr. du grec prisma, nière », xive. Empr. du lat. jurid. procedere
prismalos (de prizein « scier »). — Dér. : « procéder à une action judiciaire », d’où
prismatique, 1647 (Pascal), d’après le radi- le sens général du fr. s’est développé rapi-
cal prismat- du mot grec. dement ; procedere en lat. class. signifie
«s’avancer, progresser, réussir », sens par-
PRISON. Propr. « prise », d’où « empri- fois repris du x1v® au XvI® 8. — Dér. :
sonnement », puis « endroit où l’on est procédé, 1627 ; procédure, au sens jurid.,
détenu », dès le xre s. ; a aussi le sens de 1344, aussi au sens de « procédé », encore
« prisonnier », v. ci-dessous ; a éliminé au au début du xvrie s. (chez Sully, en 1609) ;
sens de « prison » charitre et geôle. Lat. procédurier, 1823.
pre(n)sionem, acc. de *pre(n)sio (pour
prehensiô, v. prendre) « action d'arrêter » ; PROCÈS, comme terme jurid., 1324.
devenu preison, puis prison, d'après pris. Empr. du lat. jurid. du moyen âge pro-
— Dér. : prisonnier, 1181, rare en a. fr., cessus, en lat. class. « action de s’avancer,
qui emploie surtout prison, masc. en ce progrès » (de procedere, v. le préc.); fré-
sens ; emprisonner, x11°, emprisonnement, quent aussi au moyen âge dans un sens
XIIIe. plus général de « développement, progrès,
PRIVÉ, 1138. Lat. privätus « particulier, marche », cf. par pruches de tans, 1209,
domestique, etc. ». It. privato, esp. privado. sens repris récemment par la langue scien-
tifique, v. processus. — Dér. : processif,
— Dér. : privauté, xr11°, d’après royauté, etc.
1511. — Comp. : procès-verbal, 1367.
PRIVER, 1307. Empr. du lat. privaäre.
Le fr. a possédé aussi depuis le xve s. un PROCESSION, xr1°. Empr. du lat. eccl.
verbe priver « apprivoiser », aujourd’hui processio ; désignait aussi à basse ép. d’au-
hors d'usage, qui a été formé sur privé, tres cortèges solennels ; propr. « action de
pris au sens d’ « apprivoisé », XIIIe, encore s’avancer », sens class. (de procedere, v. les
chez La Fontaine. — Dér. : privation, 1290 préc.). — Dér. : processionnaire, terme de
(le lat. privalio avait un autre sens). zoologie, 1734 (Réaumur), au xIVe-XVIIe $.
en un autre sens ; processionnel, xv® (d’a-
PRIVILÈGE, xn1e, Empr. du lat. privi- près l’adv. -ellement) ; en outre -al, 1563.
legium, propr. terme jurid. qui désignait
une loi concernant un particulier, d’où PROCESSUS, terme scient., xvi® (Paré).
« privilège ». — Dér. : privilégier, 1223. Mot. lat. signifiant « progrès », v. procès.
PRIX. Lat. prelium. It. prezzo. PROCHAIN. Lat. pop. *propiänus, dér.
de prope, « près de », comme *antianus de
PROBABLE, vers 1285. Probabilité, 1370 anle, v. ancien, comp. lointain. La restitu-
(Oresme). Empr. du lat. probabilis, proba- tion de cette forme est justifiée par le sarde
bilitas (de probare « prouver »). — Dér. de probianu ; l’a. pr. probdan est refait sur
l'adjectif : probabilisme (d’après le lat. lonhdan « lointain ». L’a. fr. a eu aussi
probabilis) ; 1° doctrine théologique des jusqu’au xvi® s. proisme, lat. proximus.
Jésuites, xvr1° ; 2° doctrine philosophique, Prochain, subsi., « notre semblable », usuel
fin xixe, d’où probabiliste, aux deux sens depuis 1377, vient de la langue eccl. et
(aux dates correspondantes) ; improbable, remonte au Sermon sur la Montagne, cf.
1606 (aux xv®-xvi® s. « qui est à réprou- Tu aimeras lon prochain, Mathieu, V, 43.
ver », empr. du lat. improbabilis, « id. »), — Dér. : proche, 1259, peu usité avant le
d’où improbabilité, 1610. XVI® S$., Où il apparaît avec les valeurs
PROBANT, vers 1570 (dans la locution modernes ; a éliminé un anc. adv. pruef,
en forme probanie), usuel depuis 1790; prof « près », lat. prope.
masc. dès 1793. Terme jurid. entré ré- PROCLAMER, 1380 ; proclamation, 1320.
cemment dans la langue générale. Empr. Empr. du lat. proclamare, proclamatio (mé-
du lat. probans, part. prés. de probare diéval).
« prouver ».
PROCONSUL, 1496; proconsulaire, 1512:
PROBE, 1464; probité, xve (A. Char- proconsulat, 1552. Empr. du lat. proconsul,
tier). Empr. du lat. probus, probitas. proconsularis, proconsulatus.
PROBLÈME, xive; rare avant le PROCRÉER, vers 1300; procréateur,
XVII Ss.; problématique, xve. Empr. des 1540 ; procréation, 1213. Empr. du lat.
mots lat. problema, problematicus (créé à procreare, procreator, procrealtio.
basse ép.; du grec problêéma, probléma-
tikos). PROCURATEUR, vers 1180, au sens de
« procureur, qui a pouvoir d’agir pour au-
PROBOSCIDIEN, 1822. Dér. de probos- trui »; depuis le xvrie s. désigne diverses
cide, 1532 « trompe d’éléphant, etc. », sortes de magistrats anciens ou modernes.
empr. du lat. proboscis, -cidis (du grec Empr. du lat. procuraitor « mandataire »
proboskis). (et spécial. « magistrat impérial »), usuel
PROCÉDER, dans procéder de, propr. dans le lat. médiéval au premier sens, v.
terme de théol., vers 1300 (Le Saint Espe- le suiv.
rit qui procede ou ist du pere), d’où, vers PROCURATION, 1219. Empr. du lat.
le xvre s., le sens général d’ « être l’effet procuralio « commission », avec le sens
de ». Empr. du lat. eccl. procedere de ou jurid. qu'avait procurare dans le lat. mé-
a « sortir de », v. le suiv. diéval « faire office de procureur ».
PROCÉDER, dans procéder à « se mettre PROCURER, vers 1180, au sens de
à une besogne, agir de telle ou telle ma- « prendre soin », usité jusqu’au xvrie 8.,
513 PROGRÈS

d’où « amener, obtenir par ses efforts », PROFESSION, « action de déclarer hau-
depuis le x111e s., également usité jusqu’au tement sa foi », 1155, jusqu’au xvre s.
XVII® ; puis le sens moderne, xv®; le sens seulement en parlant de la religion; sens
de « préparer l'édition d’un écrivain » est plus étendus à partir de cette ép.; cf. la
récent. Empr. du lat. procurare « s'occuper, Profession de foi du vicaire savoyard.
prendre soin de » — Dér. : procureur, Empr. du lat. eccl. professio (en lat. class.
1213, au sens de « celui qui agit par pro- « déclaration », v. les préc.). — Dér. : pro-
curation » (en ce sens a un fém. procura- fesser « déclarer sa foi, son opinion », 1584,
trice) ; a éliminé en ce sens procurateur ; a
été pris en outre rapidement pour désigner PROFESSION, « état, emploi, condi-
diverses sortes d'officiers de justice, no- tion », 1410. Empr. du lat. professio « état
tamment celui qu’on appelle aujourd’hui qu’on déclare exercer », issu du sens de
avoué et des magistrats. « déclaration », v. le préc. — Dér. : pro-
fessionnel, 1842.
PRODIGE, xive (Bersuire) ; prodigieux,
1474. Empr. du lat. prodigium, prodigiosus. PROFIL, 1621. Empr. de l’it. profilo (de
PRODIGUE, 1265; prodigalité, id. Em- profilare « dessiner en profil ») ; a éliminé
pr. des mots lat. prodigus, prodigalitas porfil (d’où porfiler « border »), xr1e-xve 8.
(créé à basse ép.). — Dér. de prodigue : au sens de « bordure », qui a laissé une
prodiguer, 1552. trace dans l’anc. forme pourfil « profil »,
XVIE-XVIIE., — Dér. : profiler, 1615 ; en 1653
PRODROME, 1765, comme terme médi- on trouve encore pourfiler, faire en pourfil.
cal. Empr. du lat. prodromus « précur-
seur (en parlant du vent, etc.) » (du grec PROFIT. En a. fr. surtout pourfit, refait
prodromos, de même sens) en vue d’un sens en proufit, profit d'après le mot lat. Lat.
spécial. A été antér. employé dans d’autres prôfeclus (de prôficere « progresser, donner
sens : « préface, signes avant-coureurs de du profit »). — Dér. : profiter, vers 1120 ; au
l'orage, précurseur », du xv® au début du moyen âge surtout pour- (parfois trans.
XIX® S. au xvie et au xviri® 8.); signifie parfois
« réussir » au xv® s., d’où profitable, vers
PRODUIRE, 1377. Empr. du lat. produ- 1155, profiteur, fin x1xe (une 1lre fois en
cere, francisé d’après conduire, etc. — Dér. 1636).
et Comp. : producteur, 1442, rare avant le
XVIIIe, d’après productus, part. passé de PROFOND, 1377, quelques attestations
producere ; productif, 1470, peu usité avant isolées au xrr1e s. Réfection, sous l’in-
la fin du xvu1es. ; d’où productivité, 1766, fluence du lat. profundus, de parfond,
improductif, 1785 ; production, 1283 (Beau- usuel en a. fr. et aujourd’hui encore dans
manoir) ; productor, productivus, productio les parlers du Nord-Est, issu de profundus,
ont en lat. d’autres sens sans rapports avec avec substitution de préf.; l’a. pr. preon,
ceux du fr. ; au moyen âge production est pregon (d’où viennent de nombreuses
surtout un terme jurid. ; le sens s’est déve- formes des parlers méridionaux) continue
loppé à partir du xvi® s., d’abord pour le lat. prôfundus avec dissimilation de la
désigner « ce qui produit, cause, fait voir»; voyelle o en e. La substitution de profond
d’où surproduction, 1867 ; produit, 1554; à parfond vient sans doute de ce que par-
reproduire, 1600, reproducteur, 1762, re- fond causait une gêne, parce qu'il semblait
productible, 1798, reproductibilité, id., re- comp. de par « très » et fond ; c’est ce qu'in-
productif, 1760, reproduction, 1690, d’après dique le traitement de nombreux parlers
producteur, etc. septentrionaux qui disent fond, fonde. —
PROÉMINENT, 1556. Empr. du lat. Dér. : profondeur, 1377 (au moyen âge
proeminens, part. prés. du verbe de basse parfondor); approfondir, xiri®-xXive s.,
ép. proeminere, en lat. class. prominere, d’où approfondissement, fin xvre.
d’où parfois prominent, prominer. — Dér. : PROFUSION, 1495. Empr. du lat. pro-
proéminence, xvir1e (Buffon). fusio (de profundere « répandre »).
PROFANE, 1229. Empr. du lat. profa-
nus, propr. « non consacré » (de pro « de- PROGÉNITURE, 1481. Dér. du radical
vant » et de fanum « temple ») ; déjà fig. du moyen franc. progenileur « ancêtre »,
en lat. au sens de « non initié aux arts », empr. du lat. progenitor, le couple géniteur
repris depuis le xvri®s. « père », géniture « descendance » (empr.
du lat. genilor, genitura) ayant servi de
PROFANER, x1ive; profanateur, 1566; modèle.
profanation, xv°. Empr. du lat. profanare
(de profanus, v. le préc.), profanator (lat. PROGNATHE, 1838. Comp. avec les
eccl.), profanatio (id.). mots grecs pro « en avant » et gnaihos
« mâchoire », — Dér. : prognathisme, 1869.
PROFÉRER, xu1e. Empr. du lat. pro-
ferre, propr. « porter en avant », d’où PROGRAMME, 1680. Empr. du grec
« publier, déclarer ». programma « affiche, placard ».
PROFS, xrie. Empr. du lat. eccl. pro- PROGRÈS, 1532; progression, x1v°;
fessus, en lat. class. « qui déclare » (de pro- progressif, 1372. Les deux premiers sont
fiteri « déclarer »). empr. du lat. progressus « action d'avancer,
PROFESSEUR, 1337. Empr. du lat. pro- progrès », progressio de même sens, en
fessor (de profileri au sens d’ « enseigner outre terme de mathém. (à basse ép.), le
publiquement »). — Dér. : professer « ensei- troisième est dér. de progressus « qui
gner publiquement », 1648; professoral, avance » (de progredi « avancer, faire
1686 ; professorat, 1685. des progrès »). — Dér. de progrès : pro-
DICT. ÉTYM. 33
PROGRÈS 514

gresser, 1831 ; progressiste, 1846. Formés puie sur allonger, l'emporte ; signifie aussi
comme termes antithétiques : dégressif, « remettre à plus tard, retarder » du xmie
1907 ; dégression, 1907. au xvire s.; prolongation, 1265. Empr. du
PROHIBER, 1377; prohibition, 1237. lat. de basse ép. prolongare, prolongatio.
Empr. du lat. prohibere, propr. « tenir — Dér. du verbe : prolonge, 1752; une
éloigné » (de pro « en avant » et de habere première fois au x1v®e s. (G. de Machault
au sens de « tenir »), prohibitio. — Dér. : sous la forme prolongue) ; prolongement,
prohibitif, 1503, d’après prohibitus, part. vers 1180.
passé du verbe lat. PROMENER, v. mener.
PROIE. Signifie souvent « butin de PROMETTRE, x1r1e (mais pramis, vers
guerre » jusqu'au xive, et « troupeau (de 1080, Roland); promesse, vers 1155.
bétail, de moutons) » jusqu’au xvr1®, encore Empr. du lat. promittere (francisé d’après
dans les patois. Remplacé aujourd’hui dans meltre), promissa, plur. neutre, pris subs-
une partie de ses emplois par butin et tantiv., de promissum. — Dér. du verbe :
prise. Lat. præda. It. preda, anc. esp. prea. prometteur, xIri®; promis, « fiancé »,
PROJECTION, 1314; projectile, 1750 ; terme fam., 1538, cf. prétendu.
projecteur, 1890. Le premier est empr. PROMISCUITÉ, 1752 (J.-J. Rousseau).
du lat. projectio « action de jeter en avant » Dér. sav. de l’adj. promiscuus « commun,
(de projicere), les deux autres sont dér. de confus ».
projectus, part. passé du verbe lat.
PROMISSION, xre. Ne s'emploie au-
PROJETER, 1452. Au x11° s. porjeier jourd’hui que dans la locution biblique
« jeter dehors, au loin, en avant », comp.
terre de promission pour parler de la terre
de l’adv. puer « en avant » (en position promise aux Hébreux, locution attestée
atone por, du lat. porro, id.) et du verbe depuis le xrr1° s.; promission a toujours
jeter. Vers 1400, pourgeler une ville, etc.,
été rare au sens général de « promesse ».
prend la signification militaire de «se faire,
par une reconnaissance poussée en avant,
Empr. du lat. promissio « promesse » qui
a été préféré dans le lat. eccl. à promissum.
une idée précise d’un objet ». De là pour-
jeter une embusque « dresser une embus- PROMONTOIRE, 1213, rare avant 1500.
cade » chez Froissart. Au xve s. le verbe Empr. du lat. promoniorium.
prend la signification plus générale qu’il
a en fr. mod. ; en même temps le préf. pour PROMOTEUR, vers 1330. Empr. du lat.
est latinisé en pro. — Dér. : projet, vers de basse ép. promotor, v. le suiv. Attesté
1470 (pourget), d'où avant-projet, 1853. jusqu’au xvrri1e s. pour désigner une sorte
de procureur ; empr. en ce sens du lat. mé-
PROLÉGOMÈNES, fin xvie (d’Aubi- diéval promotor.
gné). Empr. du grec prolegomena « choses
dites avant » (part. passif du verbe prole- PROMOUVOIR, fin x11° s.; promotion,
gein). vers 1350, au sens moderne, rare avant
le xviie s. Empr. du lat. promovere
PROLÉTAIRE, 1748 (Montesquieu) com- propr. « faire avancer », d’où « élever
me terme d’antiquité romaine ; se ren- aux honneurs » et du dér. de basse ép.
contre dès le xIv® s., mais rarement ; ap- promotio « élévation » (en lat. médiéval
pliqué à la société moderne, 1761 (J.-J. spécial. « dignité ecclésiastique »), d’où la
Rousseau). Empr. du lat. proleiarius (de valeur des mots fr.; promouvoir a été en
proles « descendance » ; l’adj. dér. a pris outre repris du xvI® au xvii® s. avec le
le sens partic. de « citoyen de la dernière sens général du verbe lat. et a de plus reçu
classe » dans la langue politique, v. les au moyen âge (depuis 1200 env.) d’autres
suiv.). — Dér. : prolétariat, 1836 ; proléta- sens nouveaux : « inciter, proposer, exci-
riser, fin xiIxe. ter », passés par suite à promotion, qui
PROLIFÈRE, 1766. Dér. du lat. proles signifie notamment « instigation » du xrve
« descendance » sur le modèle d’adj. tels au XVI® S.
que frugifer « qui porte des fruits », etc., PROMPT, 1205 ; promptitude, xve. Em-
v. -fère. — Dér. : proliférer, 1859, d’où pr. des mots lat. promplus, promptitudo
prolifération, 1838. (créé à basse ép.) ; ont eu aussi parfois les
PROLIFIQUE, 1503. Dér. avec le lat. sens de « prêt », « aptitude » qu'ont les
proles, v. le préc., sur le modèle d’adij. tels mots lat.
que calorificus « qui fait de la chaleur », PROMULGUER, 1354 (Bersuire) ; rare
v. -fique. avant le xvirie s.; promulgation, xrrie.
PROLIXE, vers 1200 (d'après l’adv. Empr. du lat. promulgare, promulgatio.
-ment); prolixité, x111° (J. de Meung). PRÔNE, x11° (Chrétien : devani les pro-
Empr. des mots lat. prolirus (de liquere nes). Désigne au moyen âge la grille qui
« être liquide »), propr. « qui se répand sépare le chœur de la nef ; comme le curé
abondamment », d’où « prolixe » (à basse se plaçait devant cette grille pour s’adres-
ép.), prolititas (créé à basse ép.). ser aux fidèles, prône a pris vers le xvire s.
PROLOGUE, x11° (écrit prologe). Empr. le sens moderne de « sermon familier »,
du lat. prologus (du grec prologos, propr. mais l’ancienne acception vit encore dans
« discours (logos) qui est en avant (pro) »). les patois, cf. Yonne proune « porte à
claire-voie ». On a voulu le rattacher à
PROLONGER, 1213 ; du x111° au xvines. l’a. fr. esparron « grosse pièce de bois », du
souvent prolonguer, puis prolonger, qui s’ap- francique sparro, mais le s de l’a. fr. prosne
515 PRORATA

était certainement prononcé, comme le surtout de la faveur divine ;mais sens plus
prouve entre autres la forme picarde prorne étendus de bonne heure. Empr. du lat.
(J. Bodel). Il n’y a pas d’objection sérieuse propitius, surtout en parlant des dieux,
à l’idée de ceux qui rattachent prône au d’où son emploi dans le lat. eccl.
lat. prothyra, plur. neutre (empr. du grec
prothyra) « couloir allant de la porte d’en- PROPITIATION, xive; propitiatoire,
trée à la porte intérieure », dont est né un 1541 (Calvin). Empr. du lat. eccl. propi-
nouveau sing. protirum, attesté dans des lialio, propitiatorius, v. le préc. Au moyen
gloses, et qui est devenu par dissimilation âge depuis le x11° s., propiliatorie, -oire
*protinum ; le développement phonétique s’employait dans des textes religieux pour
de celui-ci est parallèle à celui de retina désigner la table d’or placée au-dessus de
en resne. — Dér. : prôner, fin xvi® (d’Au- l'arche.
bigné), prôneur, xvri® (Balzac). PROPORTION, 1230; proportionnel,
PRONOM, x1r1e ; pronominal, 1714. Em- x1V®e (Oresme) ; proportionnalité, id. ; pro-
pr. des mots lat. pronomen, pronominalis portionner, 1335. Empr. du lat. proportio
(créé à basse ép.). et des dér. de basse ép. proportionalis, pro-
portionalitas, proportionare. — Dér. : dis-
PRONONCER, vers 1120. Empr. du lat. proportion, 1549; d’où disproportionner,
pronunliiare « proclamer, prononcer un juge- 1534, au part. passé, qui est encore la
ment, prononcer des paroles ». — Dér. au forme la plus employée.
troisième sens : prononciation, xvie; le
lat. pronuntiatio signifiait « déclaration », PROPOSER, x1i°. Empr., avec franci-
sens jurid. qu'a eu prononciation depuis le sation d’après poser, du lat. proponere ;
XIIIe jusqu’au xXvII® Ss., rare depuis ; pro- signifie parfois « proposer, placer devant »
nonçable, 1611 ; imprononçable, xvre. au moyen âge, par interprétation étymo-
logique du verbe latin; signifie souvent
PRONOSTIC, xrr1e (écrit alors pronos- aussi « exposer (une affaire) » jusqu’au
lique, parfois fém. au xve® s.; pronostic xvIIe s. et « projeter » jusqu’au xvirr®. —
depuis le xvie ). Empr. de l’adj. lat. de Dér. et Comp. : propos, vers 1180, sur le
basse ép. prognosticus « de pronostic », issu modèle du lat. proposilum ; mais le sens
de prognostica, plur. neutre, employé sur- de « discours qu'on tient dans la conversa-
tout comme titre d'ouvrage (du grec pro- tion » s’est développé en français vers le
gnôstika, de même emploi, du verbe pro- xve s.; d’où à-propos, 1700, avant-propos,
gnôstikein « connaître d'avance »); de là 1584 ; proposable, 1747 ; reproposer, 1762.
aussi l’anc. orthographe prognostic, conser-
vée dans l’adj. médical prognostique. — PROPOSITION, xr1°. Empr. du lat. pro-
Dér. : pronostiquer, 1314, pronostiqueur, positio, v. le préc.
XIV°.
PROPRE, vers 1090. Empr. du lat. pro-
PRONUNCIAMENTO (ou pronon-), 1838. prius « qui appartient en propre », d’où se
Mot esp., v. prononcer, qui s'emploie sur- sont développés les sens du fr. : « qui a les
tout en parlant d'événements politiques qualités nécessaires pour quelque chose »,
de l'Espagne ou de pays de langue esp. XV, puis « convenablement arrangé »,
Xvi® (sens aujourd’hui disparu), et « net »
PROPAGANDE, 1753, au sens général; (par opposition à sale), qui date du milieu
propr. terme eccl. qui s'emploie dans le du xvii® 8. — Dér. et Comp. : propret,
nom propre Congrégation de la Propagande, vers 1500 (aussi propet, 1478 et au xvir®) ;
1689, traduction du lat. Congregaltio de propreté, 1539, d’abord « caractère de
propaganda fide « congrégation pour pro- ce qui est convenable », puis « netteté
pager la foi », fondée en 1622. — Dér. : (par opposition à salelé) », xvrI°; mal-
propagandisme, 1794 ; propagandiste, 1792. propre, xv°, développement de sens paral-
PROPAGER, 1752 (une 1re fois au p. lèle à celui de propre ; d’où malpropreté,
passé, en 1480); propagateur, 1495; 1663.
propagation, x1r1°. Empr. du lat. propa-
gare, propagator, propagaiio. PROPRÉTEUR, 1546. Empr. du lat.
propraelor, v. préteur.
PROPÉDEUTIQUE, 1877. Empr. de
l’all. Propädeutik, t. de Kant, de la prép. PROPRIÉTÉ, t fait de posséder, droit de
pro et du verbe grec paideüein « élever ». possession », x11°. Propriétaire, 1263 (parfois
au sens de « propre à ») ; l'emploi moderne
PROPENSION, 1528. Empr. du lat. pro- date du xvrie. Empr. du lat. jurid. proprie-
pensio (de propendere « pencher »). tas, proprielarius, v. le préc.
PROPHÈTE, vers 980 (Passion) ; pro- PROPRIÉTÉ, « qualité propre d'une
phétesse, xive; prophétie, x11° ; prophéti- chose », x111°. Empr. du lat. philosophique
que, x1ve ; prophétiser, 1150. Empr. du lat. proprietlas.
eccl. propheta, prophetissa, prophetia, pro-
PROPULSEUR, 1845 ; propulsion, 1834 ;
pheticus, prophetizare (du grec prophéiés,
littéral. « qui dit d'avance », etc.). une première fois en 1640. Dér. sav. du
lat. propulsus, part. passé de propellere
PROPHYLACTIQUE, 1546 (Rab.) ; rare «pousser devant soi ».
avant le xvirie s. Empr. du grec médical
prophylaktikos (de prophylatlein « veiller PRORATA, 1257. Emploi limité à la
locution au prorata depuis le xvie s. Empr.
‘sur »). — Dér. : prophylaxie, 1793.
de la locution lat. pro rala (parte) « en
PROPICE, vers 1190. D'abord dans des proportion », propr. « selon la part déter-
textes religieux ; se dit encore aujourd’hui minée ».
PROROGER 516

PROROGER, 1509 ; d’abord proroguer, PROSTERNER, 1478, au sens moderne


depuis le xive s.; prorogation, 1313 ; pro- de se prosierner ; au xiv® s. et jusqu’à
rogatif, 1800. Empr. du lat. prorogare « ac- Chateaubriand signifie aussi « abattre ».
corder une prolongation », prorogatio, pro- Empr. du lat. prosternere, propr. « étendre
rogativus. Comme terme de la langue poli- à terre », d’où, d’une part, au réfl., « se
tique, proroger, -gation, 1779, doivent leurs prosterner » et, d'autre part, « abattre ».
sens aux mots angl. correspondants {o — Dér. : prosternation, 1568 ; prosterne-
prorogue, -gation. ment, 1586.
PROSAÏQUE, 1482. Empr. du lat. de PROSTITUER, x1ve (Oresme). Prostitu-
basse ép. prosaïcus, v. prose. — Dér. : tion, x111°, dans un texte religieux. Empr.
prosaïsme, 1785. du lat. prostituere, propr. « exposer publi-
quement », d’où « étaler, déshonorer » et
PROSATEUR, 1666. Empr. par Ménage spécial. « livrer à la débauche », notam-
de l’it. prosatore ; d’abord mal accueilli. ment dans le lat. eccl., et du dér. du lat.
V. prose. eccl. prostitutio. — Dér. : prostituée, 1596.
PROSCRIRE, xri° ; rare avant le xvies. ; PROSTRATION, 1743, dans prostration
proscripteur, 1721; une première fois en des forces, terme médical; se trouve au
1542 ; proscription, 1539; une première XIV® s. et jusqu’au début du x1x® au sens
fois au xIv®, à propos des proscriptions de « prosternation »; prostré, 1869. Empr.
romaines. Empr. des mots lat. proscribere du lat. eccl. prostratio « abattement » et
(avec francisation d’après écrire), propr. aussi « prosternation » (de prostratus, part.
« afficher », d’où spécialement « décréter passé de prosternere, v. prosterner) et du
de mort un citoyen en inscrivant son nom part. passé prostratus « abattu ».
sur une affiche », d’où le sens du fr., pros-
cripior, proscriptio. PROT(O)-. Premier élément de mots
sav. comp., tels que protozoaire, 1838,
PROSE, xrr1e. Empr. du lat. prosa, issu tiré du grec prôtos « premier », ou de
de prosa oratio, antér. prorsa oratio « dis- mots empr., tels que prototype, xvi® (Rab.).
cours qui va en droite ligne (sans inver-
sion) ». PROTAGONISTE, vers 1790 (Goldoni).
Empr. du grec. prôtagônistés « acteur
PROSECTEUR, 1743. Dér. sav. du lat. chargé du rôle principal » (de prôtos, v.
prosectus, part. passé de prosecare ; pro- le préc., et de agônizesthai « combattre,
sector, attesté une seule fois en lat. eccl., concourir »).
n’a pas servi de modèle.
PROTE, 1710. Empr. du grec prôtos
PROSÉLYTE, xrr°, au sens du mot « premier »,; d’après Littré, l'emprunt de
lat., encore en 1681; d’où, à partir du ce mot aurait eu lieu dans des imprimeries
XVIIL® s., sens moderne. Empr. du lat. où l'on a commencé à imprimer le grec,
eccl. proselylus « païen converti au ju- mais cette explication manque de preuves.
daïsme », cf. Mathieu, 23, 15 (du grec eccl.
prosélytos, d’abord « étranger domicilié » PROTÉE, 1657. Tiré de Protée, lat.
dans la Septante, dér. d’un verbe signi- Proteus (du grec Prôteus), nom d’une
fiant « venir »). — Dér. : prosélytisme, 1721. divinité de la mer, qui pouvait prendre
toute sorte de formes ; déjà pris au sens
PROSODIE, 1562. Empr. du grec pro- fig. en lat. — Dér. : protéisme, 1877. Pro-
sôidia « ensemble des faits de prononcia- téiforme, 1761.
tion : accent, quantité, qui caractérisent
le vers », d'abord « acent tonique » (seul PROTÉGER, 1395; protecteur, 1234 ;
sens pris par le lat. prosodia). protection, x11°. Empr. du lat. protegere et
des dér. de basse ép. protector, protectio. —
PROSOPOPÉE, vers 1500 (Molinet). Em- Dér. du premier : protégé, subsi., 1747 ; du
pr. du lat. prosopopoeia (du grec prosépo- troisième : protectionnisme, 1845, d’où -iste,
poiia, de prosôpon « personne » et de id., de protection, terme d'économie poli-
poiein « faire », propr. « figure qui consiste tique depuis 1664 ; du deuxième : protec-
à faire parler des personnes absentes ou torat, 1869, au sens moderne ; antér. «digni-
mortes ou des êtres irréels »). té de protecteur », 1751 (Voltaire), en par-
PROSPECTER, 1864 ; prospecteur, 1866 : lant de Cromwell.
prospection, 1861. Empr. de l’anglo-amé- PROTESTER, 1343, au sens de « décla-
ricain {o prospect (du lat. prospectus, v. le rer publiquement », d’où « protester
suiv.), prospector, prospection. contre », sens qui date du xvie s. et dont
PROSPECTUS, 1723. Empr. du lat. le succès paraît lié à celui du dér. pro-
prospectus « vue, aspect » (de prospicere lesiant; sens commercial relevé depuis
« regarder devant soi »). 1611 ; protestation, xr11° (Rose) : dévelop-
pement de sens parallèle à celui du verbe.
PROSPÈRE, xiv° (Bersuire ; plus fran- Empr. des mots lat. protestari « déclarer
cisé en prospre, xI1°) ; prospérer, xive (Ber- publiquement », proiesiatio (créé à basse
suire) ; prospérité, x11°. Empr. du lat. pros- ép.). — Dér. : protestant, d’après l’all.
perus, prosperare, prosperitas. Protestant, nom qu’on donnait aux parti-
sans de Luther, parce qu’en 1529, à l'issue
PROSTATE, 1555. Empr. du grec pros- de la diète de Spire, ils protestèrent publi-
latés « qui se tient en avant » pour désigner quement d’appeler du décret de l’Empe-
le viscère en question. reur, à un Concile général ; en fr., le mot
517 PROVINCE

a été dit par rapport aux protestants de dans la Suisse romande au sens de « beau-
France, dès 1546, mais il reste rare jus- coup ». Comme subst., au sens de « profit »,
qu’au xvi® s.; de là protestantisme, conservé dans l’it. pro(de) et l’esp. pro.
1623 ; protestataire, 1869, usuel surtout
en parlant des députés qui protestèrent PROUE, 1246 (écrit proe). Empr. de
contre l'annexion de l’Alsace-Lorraine l'a. pr. proa ou du génois prua, issus tous
en 1871 ; protêt, 1479, au sens de « décla- deux, par dissimilation, du lat. prora (du
ee », d’où le sens commercial, depuis grec prôra). Le fait que le premier texte,
où proue est attesté, est un traité passé
entre le roi de France et des armateurs
PROTHÈSE, terme médical, 1695* génois, parle peut-être en faveur d’un em-
attesté de 1765 jusque vers 1870 aussi sous prunt au génois.
la forme prosthèse (conservée uniquement
au sens de « addition d’un son, d’une lettre PROUESSE, v. preux.
au commencement d’un mot »); du grec
PROUVER. Jusqu'au xvi® s. signifie
prosthesis « action d’ajouter, de mettre
aussi « mettre à l'épreuve », surtout au
devant ». Celui-ci a été souvent confondu
part. passé. Lat. probäre, propr. « mettre
avec prothesis « proposition », dès le lat.
à l'épreuve », d'où « approuver, faire ap-
du Bas-Empire dans lequel les deux subst. prouver, prouver ». It. provare, esp. probar.
avaient passé. En fr. la forme sans s a
— Dér. : preuve, xrr1°, de même it. prova,
fini par l'emporter, sous l'influence des
esp. prueba; prouvable, xirr° (Rose);
nombreux mots commençant par pro-,
éprouver, 1080 (Roland), d'où épreuve,
dans lesquels ce préfixe a le sens de «pour ». xII1, contre-épreuve, 1676, éprouvette,
— Dér. : prothétique, 1869.
1534 ; reprouver, 1690.
PROTOCOLE, 1335 (Cesie cedulle ou PROVENDE, xri°. Francisation, avec
protocolle) ; au moyen âge et jusqu’au modification de la syllabe initiale d’après
début du xvrre s. signifie « minute de les mots commençant par pro-, du lat.
contrat » et « registre de minutes notariés », eccl. praebenda, v. prébende; a parfois le
désigne en outre des formulaires divers sens de « prébende » au moyen âge, mais,
(sens encore conservé) ; ceux de « procès- dès les premiers textes, apparaît avec le
verbal d’une conférence diplomatique » et sens moderne, ce qui indique que le mot
de « formulaire de l'étiquette des cérémo- est devenu pop.
nies officielles », d’où « l'étiquette elle-
même » sont du xix®s. Empr. du lat. jurid. PROVENIR, xrre; d’abord « se pro-
médiéval protocollum, issu de protocollum duire », d’où « venir de », 1460. Empr. du
qui désigne dans le Code Justinien une lat. provenire au sens de « naître, se pro-
feuille collée aux chartes, etc., portant duire ». — Dér. : provenance, 1801, comme
diverses indications qui les authentiquent terme de commerce.
(du grec de la version grecque de ce code
prôtékollon, propr. « ce qui est collé en pre- PROVERBE, xr1°. Proverbial, 1566. Em-
mier »). — Dér. : protocolaire, fin x1xe. pr. du lat. proverbium, proverbialis.
PROTON, vers 1940. Empr. du grec PROVIDENCE, x1I°; rare au sens mo-
prôton « la première chose ». Introduit en derne avant le xvrie s. Empr. du lat. eccl.
anglais par Rutherford (vers 1920), en providentia, qui avait déjà un sens analogue
franc. par les physiciens Langevin et de .dans la langue du paganisme ; au moyen
Broglie. âge et jusqu’au xviie s. a aussi le sens de
« prévoyance », que providentia a en lat.
PROTONOTAIRE, vers 1390. Empr. du class. ; d’autre part le moyen âge dit aussi
lat. eccl. protonotarius. po(u)rveance, dér. de po(u)rveoir, au sens
de « prévoyance » et de « providence ». —
PROTUBÉRANT, xvi® (Paré). Empr. du Dér. providentiel, vers 1792, d’après
lat. protuberans, part. prés. du verbe de l’angl. providential.
basse ép. protuberare « être protubérant »
(de fuber « excroissance, tumeur »). — PROVIN. Jusqu'au xvi® s. provain. Lat.
Dér. : protubérance, 1687 (aux xvi® et propäginem, acc. de propägô (cf. le verbe
xviI® s. exiubérance). propägäre, propr. « provigner », V. propa-
ger). — Dér. : provigner, xrr1° (sous la
PROU. Ne s'emploie plus que dans les forme prooignier), d’où provignement, 1538.
locutions peu ou prou, ni peu ni prou,
depuis le xvri® s. Jusqu'à cette époque PROVINCE, vers 1170 ; peu usuel avant
usuel au sens de « beaucoup, assez ». Em- le xves. Provincial, xr11e, id. Empr. du lat.
ploi adverbial de l’anc. subst. prou, preu provincia, provincialis ; provincia s'emploie
« profit, avantage » usuel jusqu’au xve 8., au moyen âge surtout au sens de « circons-
cf. la locution bon prou vous fasse, encore cription ecclésiastique » ; provincia (et, par
chez La Fontaine par archaïsme, lat. pop. suite, province) n’a servi à désigner une
prôde, v. preux. La forme prou de l’adv. division administrative que depuis la se-
est due à sa fonction souvent inaccentuée ; conde moitié du xive s. et surtout à partir
comme subst., prou est une forme de du xvi®, d’où les sens modernes ; provincial
langue écrite, à moins que l’adv. prou ne a suivi le développement du sens de pro-
se soit substitué à la forme régulière du vince. Provincia, terme d’administration
subst. preu. Prou, adv., a complètement romaine, survit dans le nom de la Pro-
disparu des parlers septentrionaux, mais vence. — Dér. de l’adj. : provincialisme,
survit dans le Midi au sens d’ « assez » et 1719:
PROVISEUR F.
518

PROVISEUR, 1807, au sens moderne, prünum ; cf. poire. It. pruna ; les parlers
v. lycée. Antér. en parlant d’administra- gallo-romans du Nord et de l'Est ont des
teurs de collèges et surtout de la Sorbonne ; formes se rattachant au lat. de basse ép.
au moyen âge, depuis le xive s., signifie bulluca « prunelle », d’origine préceltique,
aussi « administrateur (en général), four- cf. aussi beloce « petite prune sauvage »,
nisseur ». Empr. du lat. provisor « celui qui xt (J. de Meung ; au xt1e, buloce). —
pourvoit à »(v.le suiv.). — Dér. : provisorat, Dér. : pruneau, 1507 ; prunelle, xr1°, déjà
1835, d’après le lat. provisor. au fig., d’où prunellier, xve; prunier,
PROVISION, xive (Oresme) au sens de XIIIe, prunelaie, 1690.
« quantité de choses nécessaires et amas- PRURIGO, 1825. Empr. du lat. prurigo
sées par prévoyance », ce qui est un des « démangeaison », v. le suiv.
sens modernes. Empr. du lat. prouisio (de
providere « prévoir, pourvoir »), propr. PRURIT, 1271. Empr. du lat. pruritus
« prévoyance, action de pourvoir » (sens (de prurire « démanger »).
fréquents au moyen âge, et jusqu'au
XVIe s., notamment dans des textes jurid,. PRUSSIQUE (acide), 1787; prussiate,
et administratifs, cf. la formule fréquente id. Dér. de Prusse dans bleu de Prusse,
la provision el défense du royaume) d’où, 1723 (Savary) et de Prussia, forme lati-
à basse ép., « approvisionnement ». Le sens nisée de Prusse ; ainsi nommé parce qu’il
jurid. moderne, attesté dès la fin du xves. fut trouvé au début du xvrrre s. par le chi-
par le dér. provisionnel (d'où, depuis le miste all. Diesbach (la découverte est ordi-
XVII, « somme versée d'avance à un nairement attribuée au chimiste all. Dip-
avoué », etc.), paraît s'être développé en pel). On l’a appelé aussi bleu de Berlin
fr. d’après le sens de « prévoyance ». — (Savary l'indique comme importé de Ber-
Dér. : approvisionner, vers 1500, d’où ap- lin).
provisionnement, 1636.
PRYTANÉE, 1579, comme terme d’anti-
PROVISOIRE, 1499. Dér. sav. du lat. quité grecque ; pris au sens fig. au xvI1°6.,
provisus, part. passé de providere, v. le puis, sous la Ire République, au sens mo-
préc., sur le modèle des nombreux adj. derne d’ « école d'éducation instituée pour
jurid. en -oire. des fils de militaires ». Empr. du grec pryta-
neion « édifice où se réunissaient les magis-
PROVOQUER, x11°; provocateur, 1501 ; trats dits prytanes et où ils étaient nourris
provocation, x1v®, au sens d’ «action d’exci- aux frais de l’État pendant la durée de
ter à »; au xvi° s. au sens d’ « action de leur charge ».
défier » ; se trouve aussi vers le xr11e s. au
sens d’ « appel ». Empr. du lat. provocare, PSALMODIE, xri°. Empr. du lat. eccl.
propr. « appeler », d’où « défier, exciter psalmodia (grec psalmôidia), v. le suiv.;
(avec un complément de chose )», provo- sens fig., 1803. — Dér. : psalmodier, 1406,
calor, provocatio « appel (en justice), défi ». sens fig. 1674 (Boileau).
PROXÉNÈTE, 1521. Empr. du lat. PSALTÉRION, terme d'antiquité, xr11e
proxeneta, propr. « courtier » dans un sens (Rose). Empr. du lat. psallerium (du grec
non défavorable (qu'on trouve empr. au psallérion).
XVIe s.), d’où « entremetteur » (du grec de
basse ép. proxenélés « médiateur »). — PSAUME, 1377 ; au moyen âge surtout
Dér. : proxénétisme, 1842. saume ; au xvVI® s. on dit aussi salme;
PROXIMITÉ, xive. Empr. du lat. proxi- psautier, x11° ; au moyen âge surtout sau-
milas (de protimus « proche »). L’a. fr. lier ; psalmiste, x11°. Empr. du lat. eccl.
proismeté, dér. de proisme, lat. proximus, psalmus (du grec psalmos, propr. « air joué
ne s’employait que comme terme jurid. au sur le psaltérion », de psallein, « faire vibrer
sens de « parenté », sens qu'a eu aussi les cordes d’un instrument de musique »),
Ponte du xve au xvi® s., comme le mot psalmisia, psallerium (tiré de psallerium
atin. « psaltérion », v. le préc.), psalmisia.

PRUDE, PRUDERIE, v. preux. PSEUDO-. Premier élément de mots


sav. comp. tels que pseudo-science, 1869,
PRUDENT, vers 1090. Prudence, xrrre. tiré du grec pseudos « mensonge », ou de
Empr. du lat. prudens « sage, prévoyant », mots empr., tels que pseudonyme, 1690.
prudentia, d’où le sens plus partic. du fr.
Avoir la prudence du serpent, 1670 (Molière), PSITTACISME, 1869 (une Jlre fois
se dit par allusion à la subtilité attribuée en 1704 chez Leibniz). Dér. du lat.
par la Bible au serpent qui séduit Eve, cf. psillacus (grec psillakos) « perroquet ».
GENESC RTE PSORE, 1765 ; d’abord psora depuis le
PRUD’HOMME, v. preux. Xvi® s. (Paré). Empr. du lat. psora (du
grec psôra « gale »). Psoriasis, 1868 (psoriase,
PRUDHOMMESQUE, 1848 (Balzac). dès 1830), nom d’une affection cutanée,
Dér. de Joseph Prudhomme, nom d'un est empr. du grec médical psériasis, de la
personnage créé par H. Monnier (1830), famille de pséra.
qui représente un bourgeois satisfait, débi-
tant sur un ton solennel des banalités et PSYCH(O)-. Premier élément de mots
des sottises. sav., tiré du grec psykhé « âme », ou de
mots empr., ainsi psychose, 1869; psy-
PRUNE. Lat. pop. prüna, neutre pl. chanalyse, 1923 (adapté de l’all. Psychoana-
pris comme subst. fém. sing., du lat. class. lyse, de Freud). V. aussi les suiv.
519- PUISSANCE

PSYCHÉ, 1812, au sens de « grande Barbares, au vie s.), dimin. de pulla « jeune
glace mobile ». Tiré de Psyché, nom d’une d'un animal », v. poule, avec altération
jeune fille de la mythologie, qui épousa de à en à sous l'influence du lat. püius
Érôs ; dit ainsi parce que la femme qui se « garçon ». It. pulcella, a. pr. piussela. —
voit dans cette glace s’y voit belle comme Dér. : puceau, xr11e ; pucelage, x11° ; dépu-
Psyché. celer, xr1°, d’où -eur, 1580.
PSYCHIATRE, 1802. Comp. avec les PUDDING, 1678; écrit aussi pouding,
mots grecs psykhé « âme » et iatros « méde- jusqu’au xix° s., dans des ouvrages trai-
cin ». — Dér. : psychiatrie, 1842. tant de l'Angleterre. Empr. de l’angl. pud-
PSYCHIQUE, 1808; au xvieet au xvIIes. ding. On dit aussi plum-pudding (de plum
(depuis 1557) les psychiques au sens de « raisin sec »), 1756 (Voltaire); v. pou-
« matérialistes », d’après Tertullien. Empr. dingue.
du grec psykhikos (de psykhé « âme »). PUDDLER, 1834. Empr. de l’angl. to
PSYCHOLOGIE, 1698; au xvie et au puddle, propr. « humecter, rouler, etc. ». —
xviie s. sens différent ; cf. en 1600, psi- Dér. : puddlage, 1837 ; puddleur, 1859.
chologie ou traité de l'apparition des esprits.
Empr. du lat. psychologia, créé au xvIes. PUDENDA, 1845 (-um en 1765). Empr.
par Mélanchton (1497-1560) avec le grec du lat. pudenda, littéral. « ce dont on doit
psykhé « âme » sur le modèle des noms de avoir honte » (de pudere, v. les suiv.).
sciences en -logia. — Dér. : psychologique, PUDEUR, 1542; pudibond, 1488 ; une
1795; v. moment; psychologue, 1760 première fois au xIV® s., pudique, XIV°
(Bonnet). (d’après l’adv. -ment). Empr. du lat. pudor,
PTÉR(O)-. Premier élément de mots pudibundus, pudicus. — Dér. du deuxième :
sav. comp., tels que ptérodactyle, 1825, pudibonderie, 1875. Dér. du troisième : pu-
tiré du grec pleron « aile ». dicité, 1417 ; v. impudique. Comp. du pre-
mier : impudeur, 1789 (en 1794, J. de
PTOMAÏNE, fin xixe. Empr. de lit. Maistre, en l’employant, ajoute : pour me
piomaina, fait en 1878 par Selmi sur le servir d’un mot à la mode ; une 1re fois en
grec plôma « cadavre ». 1659).
PUBÈRE, 1488 ; puberté, xive s. Empr. PUER. À remplacé au xvii° s. (se ren-
du lat. puber, pubertas, v. le suiv. contre déjà auparavant, mais rarement) la
PUBIS, 1534. Empr. du lat. pubis, autre forme usuelle au moyen âge puir, lat. pop.
forme de pubes, propr. « poil follet », d’où *pülire, lat. class. pütére; puir est rare
« os pubis » (près de la région qui se couvre aujourd'hui dans les parlers septentrio-
de poils au moment de la puberté »). — naux, mais le type est encore usuel dans
Dér. : pubien, 1796. le Sud-Ouest (a. pr. pudir). It. pulire. —
Dér. : puanteur, x1v°, dér. du part. prés.
PUBLIC, 1311 ; jusqu’au xvies. publique puant; d’où aussi empuantir, 1495, em-
est des deux genres ; subst. pour désigner puantissement, 1636.
le peuple en général depuis le xvi®, puis
ceux qui assistent à un spectacle depuis le PUÉRICULTURE, 1869. Comp. avec le
xvirie s. Publier, x11° (Chrétien) ; au moyen lat. puer « enfant », sur le modèle des nom-
âge on a souvent la forme puplier (d'après breux mots en -culiure.
peuple). Empr. du lat. publicus, publicare. PUÉRIL, vers 1460; a signifié souvent
La chose publique, depuis le début du « d'enfant », sens peu usité aujourd’hui ;
xve s., est un calque du lat. res publica. puérilité, 1394 ; a eu le sens d’ « enfance »,
— Dér. du premier : publiciste, 1748 « qui encore usité au xvie s. Empr. des mots
écrit sur le droit public »; aujourd’hui lat. puerilis, puerilitas, qui ont les deux
« journaliste » depuis 1789 ; publicité, 1694
(« Se dit d’un crime commis à la vue de sens du fr., v. le préc.
tous ») ; sens plus étendus depuis le xvir1e8. PUERPÉRALE (fièvre), 1783. Dér. sav.
Dér. du deuxième publication, x1v°, du lat. puerpera « femme en couches » (de
d’après le verbe lat. publicare ; rare avant parere « enfanter »). Le mot a été formé
le xvrre s.; le lat. publicatio ne signifie d’abord en anglais (1768).
que « confiscation »; impubliable, 1907
(une 1re fois chez Montaigne). PUGILAT, 1570. Empr. du lat. pugilatus
(de pugilari «combattre à coups de poing >)
PUBLICAIN, xr1°; au moyen âge uni- — Dér. : pugiliste, 1789, d'après le la
quement dans des textes religieux. Empr. pugil « athlète pour le pugilat ».
du lat. publicanus « fermier d'impôts »,
fréquent dans les Évangiles, cf. Luc, 18 PUÎNÉ, v. naître.
et 19, etc.
PUIS. Lat. pop. *postius, réfection de
PUCE. Lat. pülicem, acc. de pülex. Con- post, posiea d'après melius, cf. aussi l’a. fr.
servé partout : it. pulce, esp. pulga, sauf ainz « avant », lat. pop. *antius, v. aîné.
dans la région orientale du Midi qui dit A. pr. pois. Postea survit dans l’it. poscia
aujourd'hui negro, nero, etc., « noire ». La « après » et l’a. pr. poissas. — Comp. :
locution meitre la puce à l'oreille est déjà depuis, x11° ; puisque, id. ; pour la pronon-
dans Fauvel (en 1316). — Dér. : puceron, ciation, v. jusque.
xir1° ; épucer, 1564.
PUISQUE, v. puis.
PUCELLE (Eulalie pulcella). Lat,.
pop. *pällicella (cf. pulicella dans les Lois PUISSANCE, PUISSANT, v. pouvoir.
PUITS 520
PUITS. Lat. puleus. La voyelle du fr. ponche, 1701, bonne ponse, 1705. Empr. de
est due à un développement anormal, l’angl. punch, qui passe lui-même pour être
propre au fr. ; cette particularité s'explique empr. de l’hindoustani pénch « cinq », et
probabl. par l'influence du francique *puiti, être ainsi nommé à cause des ingrédients
restitué d’après l’anc. haut all. putti (d’où qui composaient alors cette liqueur (d’après
all. Pfütze « mare, bourbier »), le mot ger- l'indication de Fryer, voyageur anglais, en
manique étant lui-même empr. du lat.: 1673) : arak, jus de citron, épices et eau.
puils serait ainsi un exemple de ces formes
hybrides dues au bilinguisme de la France PUNIR. Lat. pünire. It. punire, esp.
du Nord après l'invasion des Francs. — punir. — Dér. : punissable, 1364 ; punis-
Dér. : puisard, 1690 ; puisatier, 1845 ; pui- seur, 1356 (Bersuire).
ser, vers 1120, puisage, 1466, puiseur,
vers 1220, épuiser, vers 1120, épuisable, PUNITION, 1250. Empr. du lat. punilio.
1355 (Bersuire), inépuisable, vers 1470,
épuisement, 1347, épuisette, 1709. PUPAZZI, 1852. Empr. de l’it. pupazzi,
plur. de pupazzo « poupée », de la famille
PULLMAN, 1892 (D.); empr. de l’angl. de poupon, poupée.
pullman, abréviation de pullman-car, du
nom de l'ingénieur américain Pullman, qui PUPILLE, terme de droit, 1334 ; pupil-
inventa ce type de wagon vers 1870. laire, id., 1409 (d’où -arité, 1398). Empr.
du lat. pupillus « enfant qui n’a plus ses
PULL-OVER, 1925. Nom d’un vête- parents, mineur » (de pupus, v. poupard) ,
ment d'homme, sorte de gilet à manches pupillaris.
se passant par la tête, empr. d’un mot
angl. formé avec le verbe {o pull over «tirer PUPILLE, prunelle de l’œil, 1314. Empr.
par-dessus (la tête) ». du lat. pupilla, fém. de pupillus « petit
enfant », v. le préc. ; cette dénomination,
PULLULER, 1320; pullulation, 1555. dont on retrouve l’analogue dans d’autres
Empr. du lat. pullulare (de pullulus « jeune langues, cf. entre autres le grec koré « jeune
animal » ) et du dér. de basse ép. pullulatio. fille », d’où « pupille », est expliquée comme
PULMONAIRE, 1572. Empr. du lat. désignant la petite figure qui se reflète dans
Pulmonarius (de pulmo « poumon »); en la prunelle. — Dér. : pupillaire, 1727.
1555, employé comme nom de plante.
PUPITRE, 1357 (pepistre ; en outre pul-
PULMONIQUE, xvi® (Paré), usité par- pire au XVI® s., poulpite au xv€). Empr.
tic. au sens de « poitrinaire » du xvire au du lat. pulpitum « estrade, tréteau, pu-
début du xixe s. Dér. sav. du lat. pulmo, pitre ».
-onis « poumon ».
PUR. Lat. pürus. It. esp. puro. — Dér. :
PULPE, 1503; en outre poulpe, 1359. pureté, 1324, réfection de l’a. fr. purté, lat.
Empr. du lat. pulpa. — Dér. : pulpeux, de basse ép. püritäs, d’où aussi a. pr. pur-
1539 (sous la forme poulpeux). daï, etc. ; puriste, 1625 (déjà dans un sens
moral et religieux, en 1586), purisme, 1704 :
PULSATION, xive. Empr. du lat. pul- apurer, Xr1° (d’abord au sens de « puri-
salio, propr. «action de pousser (pulsare J». fier »), d'où apurement, 1388, au sens mo-
PULTACÉE, dans angine puliacée, litté- derne ; épurer, xr11e, d’où épuration, 1611,
ral. « qui a l’aspect de la bouillie », 1836 épure, 1676.
(autre sens dès 1790). Dér. sav. du lat.
puls, pultis « bouillie ».
PURÉE, 1210. Dér. de l’anc. verbe pu-
rer, propr. « purifier, nettoyer », lat. de
PULVÉRISER, xive, Empr. du lat. de basse ép. püräre (de pürus, v. le préc.),
basse ép. pulverizare (de pulvis, pulveris d’où le sens partic. de « presser des fruits,
« poussière »). — Dér. : pulvérisateur, 1869 R des légumes pour en exprimer la pulpe »,
pulvérisation, 1390. usité encore aujourd'hui dans les parlers
du Centre, et celui de « couler, s’égoutter »,
PULVÉRULENT, 1773. Empr. du lat. en normand. Purer paraît aussi avoir été
pulverulentus, v. le préc. influencé dans son sens, vers le xvie s.,
PUMA, 1633. Ce mot quechua est entré par rapprochement avec suppurer. De pu-
en fr. par l'intermédiaire de l'esp. rée, pris au sens de « manque d’argent »,
le fr. pop. a dérivé, fin xrxe S., purotin,
PUNAISE, x. Fém. de l’anc. adj. avec la même finale que calotin et de nom-
punais « qui sent mauvais du nez », encore breux noms propres comme Ragotin, etc.
dans les patois, lat. pop. *pütinäsius (comp.
de *pülire, v. puer, et de näsus « nez »), PURGATIF, 1325, au sens moderne.
probabl. sur le modèle du lat. de basse ép. Purgation, xvrre. Empr. du lat. médical
näripülens ; à. pr. puinais. Le lat. class. Purgativus, purgatio (de Purgare, v. le
cimez n’a survécu dans le domaine gallo- suiv.). Ont été employés dans des sens
roman que dans l’a. pr. cimia, et des formes moraux d’après le verbe purger et le lat.
modernes du Midi; cf. it. cimice, esp. purgatio dès le xri° s. Purgation a servi en
chinche (v. chinchilla). outre à traduire le grec katharsis « purifi-
cation » qu’Aristote a employé dans sa
PUNCH, 1708; d’abord de la porche, théorie de la « purgation des passions »,
1698 et belle ponche (qui paraît être une depuis le xvire s. (chez Corneille ; une pre-
altération de bol de ponche), 1653 : « Mot mière fois chez Oresme, au XIV, d’après
anglais qui signifie la boisson dont les “à one
Anglais usent aux Indes » ; en outre bonne latines d’Aristote, v. anar-
chie).
521 PYRAMIDE

PURGATOIRE, xni°. Empr. du lat. eccl. puiare « compter, estimer ») ; ce mot existe
purgalorium, v. le suiv. déjà en lat. de basse ép., mais au sens
d’ « imaginaire ».
PURGER. Lat. pürgäre, propr. « net-
toyer », d’où spécial., comme terme de PUTOIS, vers 1170. Dér. de l’anc. adj.
médecine, « purger ». It. purgare, esp. put au sens de « puant », v. putain.
purgar. — Dér. : purge, xvri® , au sens mo-
derne ; xive, terme jurid.; purgeur, 1869, PUTRÉFIER, 1482; putréfaction, xive.
terme techn. Empr. du lat. puirefacere (de putris « pour-
ri »), avec francisation d’après les nom-
PURIFIER, xu°; purification, id., en breux verbes en -fier, et du dér. de basse
parlant de la fête de la Purification ; au ép. putrefaclio.
sens d’ « action de purifier », xive. Empr.
des mots lat. purificare, purificatio, qui PUTRESCIBLE, 1764 (Bonnet); une
ont un sens moral surtout dans le lat. eccl, première fois au xvi® s. Putride, 1314.
— Dér. du verbe : purificateur, 1869, déjà Empr. des mots lat. puirescibilis (créé à
créé au xXvI° s. basse ép.), putridus (de putris « pourri »,
PURIN, 1842. Mot dialectal, dér. du v. le préc.). — Dér. du premier : imputres-
verbe purer au sens de « s’écouler, dégout- cible, 1802; formé une première fois
d’après l’adj. lat. au xrve s. ; d’où -bilité,
ter » (sens qui se rattache à celui de « pres-
ser des fruits, etc. », v. purée), avec d’au- 1859.
tres suffixes déjà anciennement, cf. puriel PUTSCH, vers 1925. Mot all., de forma-
à Lille (1360), pureau à Tournai (1457), tion expressive, qui désigne une tentative
encore en picard, en outre ang. purot. de coup d’État ; ne s'emploie qu'à propos
Le latin ne paraît pas avoir transmis de de l’Allemagne ou d’un pays de langue
terme spécial pour cette notion rurale, de allemande, l'Autriche.
là la grande variété des mots en gallo-
roman; toutefois le mot lat. lotium PUZZLE, 1909. Empr. de l’angl. puzzle
« urine » survit dans des dérivés en lorrain, (tiré d’un verbe signifiant « embarrasser »).
en franc-comtois et dans la Suisse romande. « sorte de jeu de patience »; au sens fig.
de « rébus, devinette », 1913 (Maeterlinck).
PURITAIN, 1562 (Ronsard); au sens
figuré xvire. Empr. de l’angl. puritan (de PUY. Terme de géographie, choisi pour
purity « pureté »), nom qu'ont pris au désigner des montagnes de formation ana-
XvI® s. des protestants calvinistes d’An- logue aux puys d'Auvergne, xixe. Usuel
gleterre et d'Écosse, qui prétendaient être en a. fr. au sens de « hauteur, monta-
plus fidèles à la doctrine de l’Écriture que gne, etc. », lat. podium « tertre, monticule »,
les autres presbytériens. Sens plus étendu propr. « support, piédestal » (du grec po-
vers la fin du xviri1e . — Dér. : puritanisme, dion) ; d’où aussi it. poggio « coteau,
1691. tertre », a. pr. poi, pog (lire -dj) « colline »,
v. appuyer.
PURPURIN, 1503. Réfection, d’après le
lat. purpura (v. pourpre), de l’anc. adj. PYGMÉE, 1488; au moyen âge pimain
po(u)rprin, encore chez Ronsard. et pymeau. Empr. du lat. Pygmaeus (du
grec Pygmaios), nom d’un peuple fabuleux
PUS, 1606. Purulent, 1542 ; purulence, de nains que les Grecs plaçaient en Éthio-
1555. Empr. du lat. pus, puris, et des dér. pie ou en d’autres contrées ; sens fig. 1588
purulentus, purulentia (créé à basse ép.). (Montaigne).
PUSILLANIME, xrr°; pusillanimité, PYJAMA, 1837. Empr. de l’angl. pyjam-
xIve. Empr. du lat. de basse ép. pusilla- (m)as, empr. lui-même au xix® s. de
nimis (tiré de pusillus animus « esprit l’hindoustani péé-jâma « vêtement (jéma)
étroit », attesté chez Cicéron), pusillani- de jambes (pdé) ».
milas.
PYLÔNE, 1823, en parlant des pylônes
PUSTULE, 1314 ; pustuleux, 1549. Em- des temples égyptiens. Empr. du grec
pr. du lat. pusitula, pustulosus. pylôn « portail, vestibule de temple » (de
pylé « porte »).
PUTAIN, xr1e. Ancien cas régime en -ain
(v. nonnaïin) de l’a. fr. pute, encore dans PYLORE, xvie (Paré). Empr. du lat.
les dialectes, fém. de l’adj. pui, propr. médical pylorus (du grec médical pyléros,
« puant », d’où « sale, mauvais, etc. » (au- propr. « portier, qui garde la porte », de
jourd’hui usité dans les parlers de l’Est au pylé « porte » et éra « soin, garde »).
sens de « laid »), lat. pütidus (de püiere,
v. puer) ; cf. de même a. pr. pui « mauvais » PYORRHÉE, 1810. Comp. du grec
et puta, putan(a) « putain » (d’où l’it. pui- pyon « pus » et rhein « couler ».
tana et l’esp. pula). Aujourd’hui on dit
aussi pute d’après le prov. moderne puio. PYR(O)-. Premier élément de mots sav.
comp. tels que pyrotechnie, 1556, tiré du
PUTASSER, xv°. Dér. de l’a. fr. pule, grec pyr « feu », ou de mots empr., tels
v. putain, — Dér. : putasserie. XVI° ; pu- que pyrophore, 1753.
tassier, 1549.
PYRAMIDE, xre; pyramidal, 1507.
PUTATIF, xive (E. Deschamps). Empr. Empr. du lat. pyramis, -idis, « monument
du lat. jurid. du moyen âge pulativus (de égyptien » et « figure géométrique » (mot
PYRAMIDE 522

pris au grec) et du dér. de basse ép. pyra- Python (du grec Pythôn), nom d’un serpent
midalis. monstrueux tué par Apollon près de
PYRÈTHRE, vers 1100. Empr. du lat. Delphes.
pyrethrum (du grec pyrethron).
PYTHONISSE, xvi*; une première fois
PYRITE, x. Empr. du lat. pyriltes, philonise au xiv®e s., dans les Grandes
masc. (du grec pyrilés (sous-entendu li- Chroniques. Empr. du lat. de la Vulgate
thos) « (pierre) de feu »). pythonissa, cf. Samuel, I, 28, 7, dér. du
PYRRHONISME, 1596. Dér. de Pyrrhon, grec Puythôn, cf. pour le sens de cette déri-
nom d’un philosophe grec sceptique du vation l’emploi de Pythôn au sens d’ « ins-
ive s. avant J.-C. piré par Apollon Pythien » (v. le préc.)
dans le Nouveau Testament, cf. Apôtres,
PYTHON, 1803, nom d’une sorte de 16, 16. Sens fig. dès le xvrie s. (La Fon-
serpent. Tiré de Python, empr. du lat. taine, Fables, VII, 15).
QUADRAGÉNAIRE, 1569. Empr. du qualifier et qualification, 1869, sont empr.
lat. quadragenarius. de l’angl. qualify, -ification, eux-mêmes
empr. du fr., au sens général. — Dér. :
QUADRAGÉSIME, 1680, au sens ac- qualificatif, terme de grammaire, 1740;
tuel ; du xIv®e au XvIIe s. « carême ». Qua-
inqualifiable, 1836.
dragésimal, vers 1500. Empr. du lat. ecel.
quadragesima « carême » ; et du dér. qua- QUALITÉ, xn°. Empr. du lat. philoso-
dragesimalis, v. carême. phique (déjà pris dans un sens plus étendu
QUADRATURE, 1407. Empr. du lat. en lat. class.) qualitas, mot tiré par Cicéron
quadratura (de quadrare « rendre carré »). de qualis « quel » sur le modèle du grec
poiotés (de poios « lequel »), « le fait d’être
QUADR(I)-. Premier élément de mots tel ou tel, d’avoir telle ou telle propriété »,
empr. au lat., tels que quadrilatère, 1554 cf. les paroles de Cicéron dans les Acadé-
(d'où -ral, 1556), où il est issu de quadr-, miques : « Qualitates igitur appellavi, quas
forme que quattuor prend dans les comp., Totorhtræc Graeci vocant, quod ipsum
ou de mots faits sur leur modèle, tels que apud Græcos non est vulgi verbum, sed
quadrijumeaux, 1753. philosophorum ».
QUADRIENNAL, 1663. Empr. du lat. QUALITATIF, xve (d’après l’adv. -ive-
de basse ép. quadriennalis. ment). Empr. du lat. scolastique qualita-
QUADRIGE, 1667. Empr. du lat. qua- tivus.
drigæ, mot plur. QUAND. Lat. quando, à la fois adv. in-
QUADRILLE, « petite troupe de soldats terrogatif et conjonction; cf. it. quando,
à cheval (env. 25, le quart d’une centaine) », esp. cuando.
Brantôme. Empr. de l’esp. cuadrilla, de
même sens; de là « troupe de cavaliers QUANQUAM, v. cancan.
évoluant dans un carrousel » (dp. 1679),
QUANT, adj. de quantité, v. combien,
ensuite « un des quatre groupes d’une
sous bien. — Dér. : quantième, 1487, une
contredanse » (1740, à partir de cette date
masc.), enfin « esp. de contredanse », 1781. première fois au xIv® s.
L'it. quadriglia est aussi empr. de l’esp. QUANT, adv. Ne s'emploie plus que dans
QUADRILLON, v. mille. la locution quant à, qui a toujours été d’un
emploi prépondérant ; d’où quani-à-moi,
QUADRUMANE, xvire (Buffon). Comp. etc., pris substantivement, 1585. Lat. quan-
avec le lat. manus « main » sur le modèle tum « combien, autant que » (cf. quantum
du suiv. ad Pirithoum « quant à Pirithoüs » chez
QUADRUPÈDE, 1495. Empr. du lat. Ovide), neutre pris adverbialement de
quadrupes, -pedis. quantus, v. le préc. It. quanio a, esp. (en)
cuanio a.
QUADRUPLE, xu1° ; quadrupler, 1493.
Empr. du lat. quadruplus (ou quadruplex), QUANTA, terme de physique, vers 1930,
quadruplare. d’après la théorie des physiciens all. Planck
QUAI, 1167, d’après le lat. médiéval et Heisenberg. Quantum, terme didactique,
caiagium qui est un calque de quayage. 1764 (Voltaire). Empr. des mots lat. quan-
Forme normande, qui représente un gau- la, quantum, neutre plur. et sing. de l’adij.
lois caio-, attesté par une glose et appuyé quantus « combien grand ».
par l’anc. irlandais cai « maison », gallois QUANTITÉ, x11° ; signifie parfois « taille,
cae « haie », vieux breton cai « id. ». V. chai. stature » au moyen âge. Empr. du lat.
QUAKER, 1657. Mot angl. signifiant quantitas, dér. de quantus « combien grand »
propr. « trembleur » (de fo quake « trem- (v. quant), d’après le grec posoiés (dér. de
bler »), dit ainsi parce que les quakers sont posos), postér. à qualitas, v. qualité, et sur
pris d’une sorte de tremblement, quand ils ce modèle, — Dér. : quantitatif, vers 1780
se sentent « possédés de l'esprit »; on (Euler) ; une première fois en 1586.
trouve aussi au xvie s. érembleur, par * QUARANTE. Lat. pop. quäranta (attesté
exemple chez Bossuet. notamment dans des inscriptions de la
QUALIFIER, xv°; qualification, 1431. Gaule), lat. class. quadrägintä. It. qua-
Empr. du lat. scolastique qualificare (dér. ranta, esp. cuarenta. — Dér. : quarantaine,
de qualis « quel », d’après qualitas, V. qua- xI1e ; quarantième, Xv® (quarantisme, XII°-
lité), qualificatio. Comme termes de sport xve), v. centième.
QUART 924
QUART. Au moyen âge est l’ordinal de QUATRE. Lat. quailor, attesté dans des
quatre ; disparu, sauf dans des archaïsmes, inscriptions, lat. class. quattor. —
depuis la fin du xvie s., au profit de qua- Dér. :
quatrain, xvie (Marot) ; quatrième, xrve,
trième. Lat. quartus. It. quarto, esp. cuarto. V. quart.
— Dér. et Comp. : quart, subsi., XIVe
quartanier, sanglier de quatre ans, vers QUATUOR, 1722. Empr. du lat. quatuor,
1600, dér. de quart an ; dans la langue de autre forme de quatluor « quatre ».
la vénerie, on disait le quart an d’un san-
glier; quartaut, 1280; issu de quartal, QUE, pron., v. qui.
forme dialectale, probabl. de l'Est de Paris, QUE, conj. It. che, esp. a. pr. que. Le
attestée au moyen âge notamment dans lat. du Bas-Empire avait la tendance de
la région franc-comtoise, au sens de « me- simplifier le système des conjonctions, D:
sure de blé », etc., cf. aussi a. champ. cartel, ex. il a laissé tomber peu à peu ui. La
a. pr. cartal « quart de muid, de setier » ; conj. favorite était quod, mais depuis le
quarte, terme d'escrime, vers 1650, au IVe Ss. quia s'étend de plus en plus au
moyen âge « mesure pour liquides » ; quar- détriment de quod. Par la suite quia est
tier, vers 1080 (Roland); les locutions simplifié de deux façons qui devant
figurées donner, faire, demander quartier voyelle, qua devant consonne. Qua vit
viennent de l'emploi de quartier au sens de sous la forme ca au moyen âge en Italie,
« lieu de retraite, de sûreté », peut-être en Sardaigne, en Espagne, et s’y est con-
issu lui-même de la langue de la vénerie servé dans beaucoup de dialectes. Qui vit
où quartier désigne le lieu où le sanglier
surtout en gallo-roman, dans l'Italie cen-
se tient; d’où quarteron, « poids : quart
trale, mais aussi en ibéro-roman. Son fré-
d’un cent, etc. », 1244, écarteler, x11, issu quent usage l’affaiblit en que (bien attesté
d’*équarterer, par dissimilation de l’r inter-
dans les textes dp. virre s.), de sorte qu'il
vocalique, écartèlement, 1611 ; écarquiller,
en vient phonétiquement à s'identifier avec
1530, altération d’écartiller, par assimila- le pron. relatif quem et même souvent à
tion consonantique et sous l'influence de
li suivant (ne vient pas d'écarier, qui avait s’écrire quem. De là le fr. que, le toscan
à l’époque de la formation de ce verbe une (d’où it.) che, cat. esp. port. que.
signification tout autre), d’où écarquille- QUEL. Lat. quälis. It. quale, esp. cual.
ment, 1572. — Comp. : lequel, vers 1080 (Roland) ;
quellement, vers 1260, tellement quellement,
QUARTE, terme de musique, 1611. Em-
XIVe (Oresme) ; quelque, xri° s., d’abord
pr. de l’it. quarta. quel suivi d’un subst., plus que, relatif,
QUARTERON, « homme ou femme, nés cf. encore en quel lieu que ce soit, Molière,
de l’union d’un blanc et d’une mulâtresse, Les Fâcheux, III, I, et même chez Cha-
ou inversement », 1752. Empr. de l'esp. teaubriand et Valéry et encore aujourd’hui,
cuarterén (de cuarto « quart ») : « S’est dit dans l’emploi attributif, avec le verbe être,
ainsi parce qu’il (le quarieron) a un quart quelle que soit votre douleur. En a. fr. on
d’indien et trois d'espagnol, » En fr. d’a- emploie quelquefois quel que sans verbe,
bord quarteroné, 1721-1771, dû à la ten- ainsi... les ont chaciez a quel que painne
tative de ranger le nouveau mot dans «ils les ont chassés avec quelque peine que
une catégorie morphologique française. ce soit ». D'une contamination entre quel
V. métis. peine que j'aie et a quel que peine naît
enfin l’expression concessive quelque... que,
QUARTETTE, v. quintette. xIV®, et de là, fin xve, quelque, employé
QUARTIER-MAÎTRE, 1637. Traduc- indépendamment, comme pron. indéfini ;
tion de l’all. Quartier-meister formé lui- quelquefois, 1490 ; quelqu'un, xrve.
même de deux mots d’origine romane ;
a désigné d’abord les maréchaux des logis QUELCONQUE, xrre, Jusqu'au xvre s.,
des régiments de cavalerie étrangère ; en ordinairement relatif. Francisation du rela-
ce sens écrit aussi quartier-mestre ; appliqué tif lat. qualiscumque. On trouve parfois
d’abord à la marine, 1670. quel ki onques, quel ke onkes, qui paraissent
être des formes refaites d’après le latin sur
QUARTZ, 1749 (Buffon). Empr. de l’all. le modèle de celles qui sont à la base de
rs — Dér. : quartzeux, 1749, quartzite, quiconque.
1830.
QUASI, adv., xve; mais déjà fin xe, QUÉMANDER, 1570 (écrit alors quey-
Empr. du lat. quasi, propr. « comme si », mander ; cf. aussi caimander, Académie,
d’où « presque ». Sert à faire des comp. — 1694-1740). Dér. de l'a. fr. caimand, 1393
(écrit aussi caymant, etc.), mot trisyllabique
Dér. : quasiment, 1607. signifiant « mendiant », usuel jusqu’au
QUASI, terme de boucherie, 1767. Éty- XVI S., encore dans les patois {quémand) :
mologie inconnue. origine inconnue. Aujourd’hui, dans le sen-
QUATERNAIRE, timent populaire, le verbe est rapproché
1488, comme terme de demander. —
d’arithmétique ; comme terme de géologie, Dér. : quémandeur, 1740.
fin xvinre, Émpr. du lat. quaternarius (de . QUENELLE, 1750. Empr. de l’all. alsa-
quaterni « quatre à la fois »). cien Knüdel « boule de pâte ».
QUATORZE. Lat. quattuordecim, devenu QUENOTTE, 1642. Mot dialectal, de
*quaitordecim en lat. POP., v. quatre. — Normandie ou d’une région voisine, dér.
Dér. : quatorzaine, XIII ;Quatorzième, x1ve
de l’a. fr. cane « dent », attesté aussi sous
(quatorzime, xrre-xrve). la forme kenne au sens de « joue », mot
525 QUIÉTISME

rare et disparu de bonne heure. Du fran- Dér. : couard, vers 1080 (Roland), propr.
cique *kinni « mâchoire, joue », cf. all. « qui porte la queue basse » ; d’où couar-
Kinn « menton », angl. chin, « id. ». dise, id. ; queuter, 1765.
QUENOUILLE ; parfois altéré en que- QUEUX, « pierre à aiguiser », v. pierre.
loigne au moyen âge et dans les patois. QUEUX, « cuisinier ». Ne s'emploie plus
Lat. de basse ép. conuc(u)la (Loi Ri- que par plaisanterie dans l'expression mai-
puaire), issu, par dissimilation du pre- ire queux; a désigné aussi une charge de
mier /, de coluc(u)la, élargissement pop. la cour jusqu’à la Révolution. Lat. coquus.
vie s., du lat. class. colus. It. conocchia. It. cuoco.
L’all. Kunkel vient de la même forme
latine. — Dér. : quenouillée, 1552. QUI, QUE, QUOL, relatifs et interroga-
tifs. Qui représente le lat. qui qui, dès le
QUERELLE, vers 1165. Au moyen âge, IVe s., a éliminé les formes du fém. et du
signifie surtout « contestation » ; d’où « dé- neutre (sauf la forme accentuée quid) ;
bat » ; le sens de « plainte », sens propre du jusqu’au xvri® s. qui s'emploie également
mot lat., est attesté jusqu’au xvire s., comme interrogatif neutre, cf. « Qui fait
d’où celui de « cause d’une des parties (dans l'oiseau ? », La Fontaine, Fables, II, 5.
un procès) », puis le sens moderne, 1538; L'ancienne langue avait en outre conservé
quereller, x11°, au moyen âge « faire un pro- le datif cui qui a été employé comme cas
cès », d’où « disputer quelque chose à quel- régime des deux pronoms jusqu’au XIIIe $. ;
qu'un », xvi® et début du xvrre s.; sens cette forme s’est conservée sous la graphie
moderne, 1611. Empr. du lat. jurid. que- qui, due à une confusion de la prononcia-
rella (forme moins usuelle que querela) tion (cui était d’abord prononcé différem-
« plainte en justice », en lat. class. propr. ment de qui), pour le relatif après les prép.,
« plainte » (de queri « se plaindre ») et du pour l'interrogatif dans tous ses emplois
lat. de basse ép. querellare. — Dér. et anc. : Cf. « Qui as-tu vu ? A qui est cette
Comp. du verbe : querelleur, 1611 ; d’abord maison ? ». Que représente l’acc. quem, qui
« celui qui fait un procès », xIII° ; entre- a éliminé toutes les autres formes régimes
quereller (s°’), 1568. du sing. et du plur., sauf cui. Quoi repré-
QUÉRIR. Ne s'emploie plus qu’à l’infi- sente le lat. quid. It. chi, esp. que, quien
nitif ; a été éliminé par chercher. Réfection, (de quem). — Comp. du relatif : quiconque,
relevée au xve s., de l’a. fr. querre (encore x11e ; issu de l’anc. comp. qui qu’onquefs)
chez La Fontaine, par archaïsme), lat. « qui jamais », à côté duquel on trouve
quærere. It. chiedere « demander », esp. ki ki onques et qui unques ; plus tard rap-
querer « vouloir, aimer ». V. chercher. proché du lat. quicumque, de même sens,
et par suite écrit en un seul mot et sans s
QUESTEUR, 1488, au sens lat.; une adverbial. — Comp. de quoi ; pourquoi,
première fois au x1v®s. ; questure, 1680, id. xI° (Alexis, por queit). Quoique, xr1e ; on
Empr. du lat. quæsior, quæstura ; pris pour trouve aussi que que, XI®-XIIIe S.
désigner des membres d’assemblées légis- QUIA. S’emploie seulement dans les lo-
latives, chargés de surveiller l’emploi des cutions étre, meltre, réduire à quia, xv°. On
fonds, etc., depuis le Corps Législatif (sous distinguait, dans la philosophie aristoté-
Napoléon Ier). licienne du bas moyen âge, la connaissance
QUESTION, x11°. Empr. du lat. quæstio d’une chose d’après son essence et d’après
« recherche » (de quærere, v. quérir), d’où, sa cause (scire quia et scire propier quid) ;
en lat. jurid., « enquête, litige (sens fré- - de là les expressions didactiques demons-
quent du xrr1° au xvi® s.) » et spécialement ratio quia et demonsiratio propter quid,
« torture ». Le sens de « demande à l'effet dont la première dénote une étape moins
de s'informer de quelque chose », qui appa- avancée de la connaissance. De l’école quia
raît dès les premiers textes, est un déve- a passé au fr. parlé comme expression de
loppement du fr. — Dér. : questionnaire, la résignation, ainsi dans les Mistères. Les
1845 ; déjà en 1533 et en 1555 ; question- plus anciens passages de quia se trouvent
ner, xIII*, rare avant le xvii® s., d’où tous dans des textes provenant d’un milieu
questionneur, 1554. ecclésiastique.
QUETCHE, 1807. De l’all. queische, QUIBUS, xve. Mot lat., ablatif plur. du
autre forme de Zwelschge « grosse prune », relatif qui au sens de « au moyen des-
Le mot vit surtout dans les parlers de quelles choses », employé par plaisanterie
l'Est; c’est de là qu’il a pénétré en fran- dans les milieux parlant latin, au même
çais, grâce au commerce de ces fruits. sens que le fr. avoir de quoi.
QUÊTE, xr1e. Propr. « action de cher- QUICHE, 18345. Probabl. d'origine alle-
cher », cf. encore se melitre en quêéle ; sens mande.
moderne, vers le x1v® s. Fém., pris subs- QUICONQUE, v. qui.
tantiv., d’un part. passé, disparu avant les
premiers textes, de l’anc. verbe querre, QUIDAM, xive. Pron. lat. qui signifie
lat. quæsitus, v. aussi enquête ; cf. de même « un certain »; semble venir de la langue
it. chiesta. — Dér. : quêter, x11°, d’abord de la procédure, où on désignait ainsi dans
« aller chercher », jusqu’au xvi® s., rare des actes des personnes dont on ne con-
après ; d’où quêteur, x11I®, au sens de naissait pas ou dont on ne disait pas le
« celui qui cherche ». nom.
QUEUE. Lat. coda, autre forme de QUIÉTISME, vers 1671 (Nicole) ; quié-
cauda. It. coda, esp. cola (l de culo). — tiste, id. Dér. sav. du lat. quietus « tran-
QUIÉTISME 926

quille » ou de l’adj. quiet, empr. de ce même QUINQUE, v. quintette.


mot. lat., xrr1e-début xvire, aussi Mon-
taigne. QUINQUET, 1789. Lampe inventée par
le physicien Argand vers 1782 et fabriquée
QUIÉTUDE, vers 1482 ; peu usuel avant par le pharmacien Quinquet (qui la perfec-
le xvre s. Empr. du lat. de basse ép. tionna en y ajoutant les cheminées de
quieludo. verre).
QUIGNON, « gros morceau de pain », QUINQUINA, 1661 (G. Patin : Je may
XIV-. Altération de coignon, dér. de coin, jamais donné de quinquina ; en 1653 Patin
littéral. « morceau de pain en forme de
écrit encore Kinakina). Empr., par l’inter-
coin ». Le gallo-roman présente divers médiaire de l’esp., de quinaquina, du que-
autres dér. désignant un morceau, ainsi
chua (langue indigène du Pérou) ; on a dit
wallon cougnet « quignon », et même le mot aussi quina au XVII s., Comme en esp. Le
simple fr. coin de beurre, xvie-xixe. D’au-
quinquina fut introduit en Europe, en
tres dér. désignant des gâteaux : coignel, 1639, par la comtesse de Chinchén, femme
cugneul, coignet, cuignot, encore usités dans du vice-roi du Pérou. — Dér. de quina :
les parlers de l’Est, du Nord-Est et franco-
quinine, découverte en 1820 par Caventou
provençaux pour désigner des gâteaux de et Pelletier.
Noël qui viennent du lat. cuneolus « petit
coin ». QUINTAINE, xrie. Terme du moyen
QUILLE, terme de jeu, xirre. Empr. de âge ; ne s'emploie plus que dans des textes
l’anc. haut all. kegel (conservé par l’all. de caractère historique. Lat. quintäna, fém.
moderne). — Dér. : quiller, 1330; quillon, de l’adj. quintänus « du cinquième rang »
1570. désignait, dans un camp romain, la ruelle
qui séparait le 5e du 6° manipule de la
QUILLE, terme de marine, 1382. Aussi cohorte et où était établi le marché du
néerl. kiel, all. Kiel, mais ces deux mots camp. Dans l’expression fr. courir la quin-
ne sont attestés que depuis le xvre s. et laine, le subst. aura désigné d’abord le
sont différents de moyen néerl. kiel, anc. chemin à parcourir, et ensuite seulement
haut all. kiol, anor. kjoll, qui désignent une le poteau servant de but, changement de
esp. de grand bateau. Le néerl. kiel et signification particulièrement aisé parce
l'all. Kiel sont empr. plutôt de l’angl. keel, que le verbe courir a les deux sens de
attesté depuis 1352, et celui-ci vient, com- «parcourir » et de « courir sus à, poursuivre »
me le fr. quille, du v. nor. kilir, plur. de (cf. courre le cerf).
kjôllr « quille de bateau » (le plur. s'explique
par le fait qu'il faut joindre plusieurs QUINTAL, xrr1e. Empr., par l’intermé-
poutres pour faire la quille). diaire du lat. médiéval quintale, de l’arabe
gintâr « poids de cent » (qui vient lui-même
QUINAUD, 1532 (Rab.). Étym. obscure. du lat. de basse ép. centenarium « poids de
QUINCAILLIER, 1428 (XvVe-xIXe aussi cent livres » par l'intermédiaire du grec
clincailler). Quincaillerie, 1268. Dér. de
byzantin kenténarion, puis de l’araméen) ;
quincaille « objets, ustensiles de fer, etc. », d’où aussi it. quinlale, esp. quintal.
1360 (xvre-xixe aussi clincaille) ; quincaille, QUINTE, terme de musique, xive (E.
peu usité aujourd’hui, dérive, avec chute Deschamps, mais quintoier « faire l'accord
de l’7 de cl par assimilation des deux ini- de quinte », xrr1e-xve). La quinte a joué
tiales syllabiques, du même radical ono- un rôle dans la musique longtemps avant
matopéique que clinquant. la quarle, ce qui explique la différence des
QUINCONCE, 1534 (Rab. : arbres fruic- dates de leur apparition. Fém. de l’anc.
liers en ordre quincunce) ; la forme a été adj. quint. Quint a été concurrencé de
hésitante au xvire et au xvrrre S., Cf. no- bonne heure par cinquième (mais il était
tamment quinconche au XVIIe, qui paraît encore usuel au x1v® s.) et n’a subsisté que
due à l'influence de l’it. quinconce. Empr. dans des expressions jurid. et des noms
du lat. quincunx, propr. « pièce de monnaie d’origine étrangère : Charles Quint, Sirte-
valant cinq onces (sur laquelle cinq boules Quint ; quint continue le lat. quintus; cf.
étaient marquées pour en rappeler la va- it. esp. quinto.
leur) », d’où, par comparaison, « plantation QUINTE, dans quinle de toux; déjà at-
d'arbres disposés comme les cinq points de testé au xvie s. au sens d’ « accès de mau-
cette pièce de monnaie ». vaise humeur, caprice ». Autre emploi du
QUININE, v. quinquina. fém. de l’adj. quint, v. le préc.; pour le
développement du sens, cf. ce passage de
QUINQUAGÉNAIRE, xvie (Paré). Em- Gui Patin en 1644 : « Certaine toux à la-
pr. du lat. quinquagenarius (de quinquageni quelle sont sujets les petits enfants, que
« cinquante à la fois »). les Parisiens appellent une quinte, quod
QUINQUAGÉSIME, 1281. Empr. du lat. quinta hora fere recurrere videatur (« parce
quinquagesima (fém. de -esimus « cinquan- qu’elle semble revenir à peu près toutes
tième ») pour désigner le dimanche qui suit les cinq heures ») »; les mots latins sont
la quadragésime, sur le modèle de quadra- une citation du médecin de Baïillou (1538-
gesima (le lat. eccl. anc. quinquagesima dé- 1616). — Dér. : quinteux, 1542.
signait la Pentecôte, v. ce mot). QUINTE, terme d'escrime, 1690. Autre
QUINQUENNAL, 1740 ; parfois au xvres. emploi du fém. de l’anc. adj. quint.
mais dans un autre sens. Empr. du lat. QUINTESSENCE, vers 1265
quinquennalis. (Mahieu le
Vilain, qui écrit quinie essence ; à la même
527 QUOTITÉ

époque Brunetto Latini, quini element), traditionnelle, d’où déjà en lat. médiéval
ensuite 1377 (Oresme). D'abord terme de quitus, quitare. Dans les langues voisines
philosophie scolastique au sens de « subs- les deux mots sont empr. du fr.; pour la
tance éthérée » et d’ « alchimie » ; d’où le locution quitte ou double, cf. Ilz en eussent
sens figuré moderne dès 1534. Empr. du lat. joué à quitte et à double, xv° s. (Le Jou-
médiéval quinia essentia, qui est traduit du vencel). — Dér. du verbe : quittance, x11°
grec pémpion soma ou pémpie ousia; c’est (d’après quitier quelqu'un « le dispenser de
ainsi qu'Aristote appelait l’éther qui, payer », x11e-xviie), d’où quittancer, 1396.
d’après lui, plane dans l'univers au-dessus — Dér. de l’adj. : acquitter, vers 1080
des quatre autres éléments. L’éther étant (Roland), d’où acquit, x11°, acquittement,
l'élément le plus subtil et qui porte la 1539 ; une première fois au XIII° S. au sens
vie aux autres, quinta essentia, et par la de « délivrance ». — Comp. du verbe :
suite, le fr. quiniessence furent employés entre-quitter (s’), 1655 (Corneille); déjà
pour désigner l’ingrédient le plus efficace, une fois au XIIIe S.
le meilleur de quelque chose. — Dér. : quin-
tessencier, 1584; usité aujourd'hui sur- QUITUS, 1546 (Rab., dès 1421, à Lyon).
Empr. de quiius, mot du lat. de la langue
tout au part. passé. financière de cette ép.; v. quitte.
QUINTETTE, 1838; d’abord quinieito,
1778. Empr. de lit. quinietto (dér. de QUOI, lat. quid. — Comp. pourquoi,
quinio, V. quinte); a remplacé quinque, vers 1050.
1722-1858, empr. du lat. quinque « cinq », QUOLIBET, vers 1300 (Joinville). La dis-
cf. de même quatuor. Au contraire quar- pute jouait un grand rôle dans l’enseigne-
tette, empr. de l’it. quartetto, 1869 (d’abord ment scolastique. On distinguait les dispu-
sous la forme it. 1838) n'est pas entré dans lationes ordinariae, qui se faisaient tous les
l'usage ; mais l’all. dit Quariett, où nous quinze jours et qui étaient en étroit rap-
disons quatuor. port avec la leçon, des disputationes de quo-
QUINTUPLE, 1484. Empr. du lat. de libet, qui avaient lieu deux fois par an,
basse ép. quintuplex. — Dér. : quintupler, avant Noël et pendant le Carême. On pou-
1789 (auparavant en 1493 et 1520). vait y mettre en avant n'importe quel
problème, et ces questions étaient appelées
QUINZE. Lat. quindecim. — Dér. : quaestiones de quolibei ou quodlibeticae. Ce
quinzaine, xr1° ; quinzième, XIV® (XI1°-XV° mot passa ainsi en fr., sous la forme de
quinzime). l’ablatif.
QUIPROQUO, 1482 ; écrit alors qui pro QUORUM, 1672, dans des ouvrages trai-
quo, orthographe longtemps conservée. tant de l'Angleterre ou des États-Unis ;
Empr. de la locution du lat. scolastique depuis 1868, relevé à propos d’assemblées
quid pro quod, où on voulait dire que quel- françaises. Empr. de l’angl. quorum, at-
qu’un avait pris un quid pour un quod, cf. testé en ce sens depuis le xvrI® s.; ce mot
encore chez Bon. Despériers : « Ils vous est le lat. quorum « desquels », qui figurait
feront lire un quid pro quod. » L'emploi dans la formule indiquant les noms des
fréquent de qui pro quo au sens d’ « erreur membres d’une assemblée dont la présence
commise sur un remède, etc. » dans la était nécessaire pour que la délibération
langue des apothicaires au xvii® et au fût valable.
xvirre s. a dû jouer un rôle dans la diffu-
sion du mot. QUOTA, 1949. Empr. de l’angl. où
il est employé depuis le xviie s., empr. du
QUITTANCE, v. le suiv. lat. quota (pars) « (part) de quelle gran-
QUITTE, vers 1080 (Roland). Quitter, deur ». V. le suivant.
xrre. D'abord termes jurid., dont le sens
est encore usité; sens figuré de bonne QUOTE-PART, v. cote.
heure, notamment quitter « se séparer de QUOTIDIEN, x11e. Empr. du lat. quoli-
quelqu'un ». Empr. du lat. jurid. du moyen dianus (de quotidie « chaque jour »).
âge quietus (en lat. class. « tranquille »),
pour lequel une accentuation hypercor- QUOTIENT, 1484. Empr. du lat. quoiiens,
recte quielus (par réaction des milieux autre forme de quoties « combien de fois ».
cultivés contre la prononciation vulgaire
pariétem au lieu de parietem) était devenue QUOTITÉ, v. cote.
R
RABÂCHER, 1611 (Cotgrave, qui le raable en 1401 dans un compte de Paris.
donne comme synonyme de l’anc. rabasier Lat. ruläbulum « fourgon de boulanger,
« faire du tapage », vers 1175, d’où rabater, etc. ». A. pr. redable.
encore dans les patois, aussi en a. pr.
rabasta « querelle »), rabat, usité au xvre s. RÂBLE, « partie du dos de certains
au sens de « lutin, esprit follet ». Le verbe animaux : lièvre, etc., qui s'étend des côtes
rabâcher appartient à une grande famille à la queue », 1532 (Rab.). Même mot que
de mots formée avec un radical *rabb- le préc., dont il est une extension méta-
(d'origine préromane ou germanique) et phorique, certains râbles étant munis de
divers suff. (outre -dcher et -asier encore fourchons fixés dans la barre comme
-aler, etc.), aussi piém. rabastè, rabascè l’échine de ses côtes. Comp. en dauph.
« entasser », rablè « traîner ». — Dér. : riable « échine » et le dialectal râleau,
rabâchage, 1735 (Voltaire) ; rabâcherie, au même sens. — Dér. : râblé, xvre.
vers 1761 ; rabâcheur, 1758.
RABOBINER, 1845. Altération, d’après
RABAN, 1573. Empr. du néerl. raband, bobine, de rabobeliner, attesté du xvre au
littéral. « lien (band) de vergue (raa) ». XVIII S.; V. embobeliner.

RABBIN, 1540 (rabain en 1351). Re- RABOT, 1368. Probabl. masc. formé
monte à l’araméen rabbi « mon maître » sur un fém. rabolle « lapin » (encore vivant
(de rabb « maître »); rabbi lui-même, dans le Berry) issu par dissimilation des
usité au xve et au xvi® s., ne s'emploie voyelles de *roboile, dér. du moyen néerl.
plus guère que dans les noms propres ; la robbe « lapin ». Le sens s’explique par une
forme rabbin paraît être faite sur le pluriel comparaison de la forme de l'objet avec
araméen rabbin. — Dér. : rabbinique, xvre ; celle de l'animal, cf. pour ce procédé
on disait aussi rabbinesque à la même chevalet, poutre, etc. — Dér. : raboter,
époque. 1409, rabotage, 1845, raboteur, 1802;
raboteux, 1539. L'’a. fr. rabot « pierre de
RABIBOCHER, 1842. Mot dialectal, ré- pavage », xXIv* s., est dû à une compa-
pandu dans les patois septentrionaux; se raison de l’arête du pavé avec le tranchant
rattache à un groupe de mots dont le radi- du rabot.
cal est bib- et qui désignent quelque chose
de peu d'importance, de peu de consistance, RABOUGRIR, v. bougre.
une action qui ne promet rien de durable RABOUILLÈRE, 1534 (Rab.). Semble
(fr. bibelot, saint. biber « importuner », être le même mot que le berrichon rabouil-
béarn. bibalhe « menus brins de bois pour lère « trou où se tiennent les écrevisses
allumer »). »,
dérivé du verbe rabouiller « remuer l’eau
pour effrayer les poissons ou les écre-
RABIOT. Écrit aussi rabiau, 1875. Terme visses », de bouiller, v. bouillir, dit ensuite
d’argot militaire, qui est devenu populaire du lieu où se tiennent les lapins de ga-
et familier au sens de « supplément » ; ap-
paraît dès 1831 comme terme d’argot des
renne.
marins au sens de « reste que le distribu- RABROUER, xive (E. Deschamps). Pa-
teur s’adjuge indûment ». A pris dans raît être formé avec le fr. de la même épo-
l’argot militaire et marin le sens de « dis- que brouer « gronder, être furieux », propr.
tribution de ce qui reste », puis celui de « écumer », cf. aussi rebrouer, au sens de
« temps de service qu’un homme doit rabrouer, en picard, etc.; rabrouer signi-
faire, après sa libération, par suite d’une fierait donc propr. « être furieux contre
peine disciplinaire ». Probabl. du gascon quelqu'un, le repousser »:; brouer est un
rabiot « fretin, rebut de la pêche », dér. de dérivé de breu « sorte de bouillon », usuel
rabe « œufs de poisson ». Celui-ci est né au sens d’ « écume » dans la région nor-
d’un emploi métaphorique de rabe « rave », mande ; v. brouet et s’ébrouer.
les œufs de poisson formant un renflement
du corps du poisson comparable à une rave. RACA, xvrie, dans la locution crier raca
à quelqu'un. Cette locution est issue du
RABIQUE, 1829. Dér. sav. du lat. rabies passage de Matthieu, V, 22 : « Celui qui
« rage ». dira à son frère raca mérite d’être puni
par les juges »; raca est un mot araméen,
RÂBLE, outil. S'est dit roable jusqu’au connu par ce seul passage, et qui est peut-
XV°S. ; au XvI1e rouable est signalé comme
provincial ; rable apparaît ue de la famille de l'hébreu roq « cra-
sous la forme chat ».
529"
É
RADIS

RACAHOUT, 1833. L’arabe réqaout au- raclette, 1864; racle, 1561 (une 1re fois
quel on renvoie n'est pas un mot assuré, vers 1200); racleur, 1576 ; racloir, 1538;
racloire, 1329 ; raclure, 1372 ; raclage, 1845.
RACAILLE, 1138 (écrit alors rascaille).
Les premières attestations se trouvent RACOLER, v. cou.
toutes dans des textes anglo-normands. RADAR, 1949. Empr. de l'anglais, où
C’est de là ou du normand que le mot a il a été fait avec les initiales de radio
pénétré en franç. Dér. d’un verbe *rasquer deleclion and ranging « détection et repé-
(fr. *rascher), qui a disparu de la langue à rage par radio ».
l’époque prélittéraire, mais dont l’exis-
tence est assurée par l’anc. pr. rascar RADE, 1474. Empr. de l’anc. angl. rad
« racler », liég. rahi, ang. râcher « dréger (d’où angl. road « rade » et en outre «route,
du lin », etc. Lat. vulg. *rasicare, dér. de chemin »); lit. et l'esp. rada viennent
rasus, qui vit aussi dans l'esp. rascar probabl. du fr.
« gratter », sarde rasigare, etc. Le verbe, RADEAU, 1485 (on a déjà radelle, au
appliqué aux hommes, aura aussi eu l’ac- XIVe s., Bersuire). Empr. de l’a. pr. radel,
ception « se réunir en masse, tumultueuse- dim. de rat « id. », lat. ralis « id. ».
ment », et le suff. -aille a souligné fortement
a valeur péjorative du mot. L’angl. rascal RADER, v. radoire.
« vaurien » vient de l’anc. forme rascaille. RADIAIRE, 1795; radial, « qui rayon-
RACE, vers 1490. A. pr. rassa « bande ne », dans plusieurs techn., 1490; radiant,
d'individus qui se sont concertés dans un vers 1230 (usité surtout depuis 1765);
certain but; complot, conjuration », radiation « émission des rayons du soleil »,
attesté dès 1180, est sans doute le même 1448, a reçu de nouveaux sens techn. au
mot, de même rassa dans les parlers de xixe s. Les deux premiers sont des dér. du
l'Italie Supérieure qui a le sens de «conven- lat. radius « rayon », le troisième est empr.
tion entre les membres d’une famille ou du lat. radians, part. prés. de radiari
entre ceux qui ont le même métier ». «rayonner », le quatrième est empr. du lat.
Au xIve s. l’it. razza est employé au sens radiatio. — Dér. de radiation : radiateur,
de « espèce (de gens) ». Ces mots remontent comme adj., dans la langue de la physique,
à un emploi que les savants faisaient de 1877; subst. pour désigner un système
ratio au sens de « espèce (d'animaux, de de chauffage, fin xIx® s. — Comp. : radies-
fruits) » attesté dès le vie. [Il est donc fort thésie, 1949.
probable que des personnes qui avaient RADIAL, terme d’anat., v. radius.
l'habitude de se servir du latin ont fait
passer ce mot du bas-latin au roman, et RADIATION, « action de rayer », 1378.
en particulier à celui qu’on parlait dans Dér. du lat. médiéval (xIv®) radiare, qui
la France méridionale et dans l'Italie paraît être une traduction, par fausse
septentrionale. De ces parlers le mot a étymologie, du fr. rayer. Sur ce mot a été
passé ensuite dans les autres langues fait le verbe radier, 1823, créé pour un des
romanes. — Dér. : racé, fin x1x° ; racisme, sens de radiation « action de rayer d’une
1932 ; raciste, id. liste » ; à radiation d’une hypothèque cor-
respond le verbe rayer.
RACHIS, xvie (Paré). — Empr. du grec
rhakhis « épine dorsale ». — Dér. : rachi- RADICAL, 1314, d’après l’adv. -ement.
dien, 1806, formé irrégulièrement, comme Employé à la fois dans plusieurs techn. et
si le mot grec avait un radical en -id-; au sens général de « qui a rapport au prin-
rachitique, 1707, d’après l’adj. grec rhakhi- cipe d’une chose » ; terme politique, 1820.
lés ; rachitisme, 1732, en parlant du blé; Empr. du lat. de basse ép. radicalis (de
en parlant de l'organisme humain on disait radix « racine »). — Dér. : radicalisme,
au xvirie s. surtout rachitis, encore dans 1820, dans un texte parlant de l’Angleterre.
les dict. RADICULE, 1676 ; radicelle, 1815. Le
premier est empr. du lat. radicula (dim.
RACINE. Lat. de basse ép. rädicina, de radix « racine »), le deuxième est tiré
dér. de radir, rädicis. Roumain rädäcinä, de radix, radicis, pour former un dim. dif-
sarde raigina. À supplanté sur le territoire férent de radicule.
gallo-roman l’ancien représentant du lat.
rädix, a. fr. raiz (v. raïfort), sauf dans quel- RADIÉ, 1690. Empr. du lat. radiaius
ques patois méridionaux. — Dér. : déraci- « rayonnant, formé de rayons » (de radius
ner, x111°, d’où -6, dans un sens fig., fin « rayon », v. radial, et les suiv.).
xIx® s., sous l'influence du roman de RADIER, subsi., xive. Étym. obscure.
M. Barrès, Les déracinés ; déracinement,
xv°; enraciner, xi1°, enracinement, xXVI°. RADIER, verbe, v. radiation.
RACKET, 1949. Empr. de l'anglais RADIEUX, vers 1460. Empr. du lat. ra-
d'Amérique racket. diosus (de radius « rayon »).
RADIO-. Premier élément de mots sav.
RACLER, xive. En raison de sa date comp., tels que radiologie, radiographie,
tardive et de l’absence de formes avec s, xx£, tiré du lat. radius « rayon ». Aujour-
paraît être d’origine dialectale, d’une ré- d’hui radio est souvent employé comme
gion voisine du provençal. Des formes cor- abréviation de radiographie, donc fém.
respondantes sont très répandues : a. pr.
rasclar « râcler », it. raschiare « id. », etc., RADIS, 1507 (écrit radice) ; devenu ra-
lat. pop. “*rasclare (pour *rasicülare, dér. pidement radis. Empr. de lit. radice,
de rasus), v. râler. — Dér. : raclée, 1829 ; propr. « racine », v. raifort.

DICT. ÉTYM. . 34
RADIUM 930

RADIUM. Corps découvert par Curie, RAGE. Lat. pop. *rabia, lat. class. ra-
Mme Curie et Bémont en 1898 et nommé bies, les subst. de la cinquième déclinaison
d’après le lat. radius « rayon ». ayant passé dans le lat. pop. à la première.
RADIUS, 1541. Empr. du lat. radius It. rabbia, esp. rabia. — Dér. et Comp. :
«rayon », déjà employé au même sens que rager, vers 1150, rare au sens moderne ; au
le fr., par comparaison de cet os avec le moyen âge signifie surtout « s’agiter, folà-
rayon d’une roue. — Dér. : radial, 1490, trer », rageur, 1832 ; enrager, 1160.
dérivé directement du mot lat. RAGLAN ; vers 1855, pour désigner un
pardessus à pèlerine ; repris depuis la fin
RADOIRE, 1321 (écrit radouire). Mot du xiIxe s. pour désigner un pardessus
techn., correspondant à l’a. pr. rasdoira, d’une coupe spéciale. Tiré de (Lord) Ra-
lat. *rasiloria et au lat. médiéval (1145), dér. glan, nom du général qui commandait
de räsitäre « raser », qui a pris le sens de l’armée anglaise dans la guerre de Crimée,
« racler ». On trouve à côté de ces formes et en souvenir de qui ce pardessus fut
en a. fr. raloir, ratoire, en a. pr. raloira, nommé.
qui sont des variantes, issues d’une forme
*radiloria, réfection de rasitoria d’après RAGOT, 1800, au sens de « commérage ».
rädere « raser, râcler », v. raser. Dérs: Tiré du verbe peu usité ragoter, 1640,
rader, 1723, terme ftechn., a été fait « quereller », proprement « grogner comme
pour servir de verbe à radoire. un ragot (sanglier) »; ragot « sanglier »,
1392, qui a été pris aussi au sens de « per-
RADOTER, xr11° ; le part. passé au xr1°, sonne grosse et courte » au XVII® s., appar-
et redoté (part. passé) dès 1080 (Roland), tient à une famille de mots abondamment
« tombé en enfance, qui radote ». Dér., représentés dans les patois, cf. le berrichon
avec le préf. re-, renforcé ensuite en ra-, rague « vieille brebis ». Formés sur un radi-
d’un simple non attesté, qui remonte à cal expressif rag-, déjà représenté par
une langue germ., probabl. au moyen le lat. ragère et qui dépeint de préférence
néerl. doien « rêver, sommeiller, tomber en une voix criarde.
enfance », cf. angl. {o dote « avoir l’esprit
faible par suite de l’âge ». — Dér. : rado- RAGOUT, v. goût.
tage, 1740 ; radoterie, xr1° ; radoteur, vers RAI ; écrit ordinairement rais. Ne s’em-
1540. ploie plus guère qu’au sens de « rayon de
RAFALE, 1640. Empr. de lit. raffica, roue » ; le sens de « rayon de lumière » est
mais adapté au verbe affaler au sens de archaïque ; a été remplacé par rayon, dont
« porter (un navire) sur la côte (du vent) ». le suffixe exprime l'idée de la division de
L'it. raffica est fait avec le radical expres- la lumière en de multiples sous-unités,
sif raff-, qui rappelle le mouvement subit comme dans échelon. Lat. radius, aux deux
du vent. sens du mot fr. It. raggio, esp. rayo, aux
deux sens. — Dér. : rayon (de lumière),
RAFIOT, 1842. Mot d’argot, issu de la 1534, d’où rayonner, 1549, rayonnement,
langue de la marine, où rafiau désigne une 1558 ; enrayer, de rai « rayon de roue »,
petite embarcation, en usage dans la Mé- 1552, d’où -yage, 1826 ; enraiement, 1812.
diterranée.
RAID, 1883. Empr. de l’angl. raid (forme
RAFISTOLER, 1649 (dans une mazari- écossaise de l’anc. angl. réd, aujourd’hui
nade). Dér. de l’anc. afistoler, usuel au road « route »), v. rade.
Xv° s. au sens de « piper, tromper par de
beaux semblants » (cf. aussi apistolé à cette RAIDE. Roide est une ancienne forme,
époque), d’où aussi « arranger, orner ». maintenue artificiellement par l’orthogra-
Afistoler est probabl. formé sur l’it. fistola phe. Raïide est propr. le fém. qui a éliminé
« chalumeau, flûte »; l’évolution séman- vers le x1v® s. le masc. roit (v. large), lat.
tique est à comparer avec l’a. fr. flageoler rigidus. — Dér. raideur, vers 1170 :
« jouer de la flûte », ensuite « tromper, raidillon, 1762; raïdir, xrr1°, d'où rai-
piper ». dissement, 1547, raidisseur, 1875 ; déraidir,
1559:
RAFLE, x1rie, alors « instrument pour
racler le feu ». Empr. de l’all. raffel, id., RAIE « ligne tracée sur une surface ».
de la famille de l’all. raffen « rafler »: on Représente un gaul. *rica (attesté au vrres.
a relevé le verbe raffer au xrrre et au sous la forme riga, chez un écrivain né en
XVISS. ; a pris, par la suite, des sens figurés, Angleterre), qu’on restitue d’après le gal-
notamment « coup où chacun des dés lois rhych et l’anc. breton rec. Usuel au-
amène le même point, ce qui fait gagner jourd’hui dans les parlers gallo-romans au
(rafler) la partie », « action de rafler »; sens de « sillon » (a. pr. rega). — Dér. :
rafle « grappe de raisin, dépouillée de ses rayer, XII, au part. passé roié, forme fré-
grains », 1549, est le même mot. — Dér. : quente au moyen âge ; rare à l’inf. et aux
rafler, xvi®, Baïf ; érafler, 1447 (on trouve autres formes verbales au moyen âge;
déjà arrafler en ce sens dans une charte d’où rayure, 1611 ; rayer « rayonner » d’où
de 1394), éraflure, 1671. « ruisseler, couler », dér. de rai, a été usuel
au moyen âge jusqu'au xvie s. et s’est
RAFUT, 1889. Dér. du verbe raÿfuter, fondu avec rayer, dér. de raie; on a de
dans les patois dp. le xvirre au sens de même au moyen âge raie au sens de
« gronder, faire du bruit, rosser », extension « rayon » qui résulte d’une confusion de
sémantique du fr. rafusier « réparer », rai « rayon » avec raie « ligne ». La famille
XV° S., dér. de l’a. fr. afusier « ajuster », de ces deux mots se distinguait mal pour
v. affûter. la forme, et le sens les rapprochait.
B3L RALLYE

RAÏIE, poisson. Lat.-raia. Esp. raya. — d’où enfin « parole, discours » (attesté en
Dér. : raïton, 1553 (écrit rayion); écrit a. fr. vers 980); d’autre part du sens
aussi raielon depuis 1803. « argument qu'on allègue » sort celui de
RAIFORT, xve (sous la forme raiz fors). « ce qui est de droit, d'équité » (dans
Comp. de l’a. fr. raiz, fém., v. racine, et avoir raison, etc., attesté dès l’an 1000).
de l’adj. fort, qui a été longtemps des deux Cicéron emploie ralio aussi pour indiquer
genres; puis, le fém. n'ayant plus été le pourquoi d’une chose, tel qu’un hom-
senti, raifori est devenu masc. d’après la me se l’explique en le distinguant de
causa « cause réelle », comme l’all. a
terminaison. Fort a été ajouté soit au sens
d’ « âcre », soit pour donner plus de corps toujours distingué Grund et Ursache. Cette
à raiz, trop court, qui risquait en outre distinction se perd au moyen âge, parce
d’être confondu avec raie. Raiz, propr. que la philosophie médiévale confond les
« racine », a signifié aussi « raifort » depuis deux concepts; ce n’est que depuis la
l’époque latine et survit encore au sens de Renaissance que grâce à l'emprunt de
« radis » dans quelques patois de l'Est. cause, raison est de nouveau restreint au
sens que lui donnait Cicéron. Le sens
RAIL, 1817. Empr. de l’angl. rail, propr. de « faculté de connaître le vrai » appartient
« barre d’appui » (lui-même continuant aussi au latin, où il est dû au double sens
l’a. fr. reille, raille « poutrelle, barreau, du grec l6gos « compte ; faculté de connafî-
etc. », du lat. rêgula « règle, barre »). — tre ». It. ragione, esp. razon. — Dér. :
Re : dérailler, 1838, d’où déraillement, raisonnable, xr11° (Rose), l’a. fr. dit aussi
1839. raisnable, d’où déraisonnable, vers 1330;
raisonner, x1II1*; au moyen âge signifie
RAILLER, vers 1450. Empr. de l’a. pr.
aussi « parler », comme l’anc. forme
ralhar « babiller, plaisanter », qui paraît raisnier, d'où déraisonner, x1r1°, raisonne-
représenter un lat. pop. *raguläre, cf. it. ment, 1380, raisonneur, 1666 (Molière),
ragghiare « braire » (c’est un dérivé du lat. une première fois au XIvV® s.; arraison-
de basse ép. ragere, d'où a. fr. raire « bra- ner, comme terme de marine, 1826 (rai-
mer », encore dans les dictionnaires, et sonner est déjà attesté au xvrie s. chez
aussi roumain rage « beugler »), dès 1270 Colbert, dans une acception semblable),
au sens de « abover ». Tous ces verbes antér. « s'adresser à quelqu'un », vers 1080
désignant des cris, le prov. a dû avoir (Roland), «chercher à persuader », sens peu
d’abord un sens analogue, d’où est sorti usité depuis le xvie s.: au moyen âge ce
celui de « bavarder » qui aura fait dispa- verbe se rencontre surtout sous la forme
raître le sens propre. — Dér. : raillerie, araisnier, disparue du fr. avant le xvi® s.,
id. ; raïlleur, id. mais qui survit dans quelques patois ; d’où
RAINE, v. grenouille. arraisonnement, x11° s. (et araisnement au
moyen âge), développement de sens paral-
RAINETTE, 1425, « grenouille de buis- lèle à celui du verbe; irraisonné, 1842;
son ». Dér. de l’a. fr. raine, v. grenouille. irraisonnable, 1360.
RAINURE, v. rouanne.
RAJA(H) (ou radjah), 1666 (Taver-
RAIPONCE, vers 1460 (écrit responce nier) ; dès 1540 en port. Empr. de l’hin-
et prononcé ainsi encore aujourd’hui dans doustani raja (du sanscrit rdjd, de la fa-
beaucoup de patois). Empr. de lit. ra- mille du lat. rêx « roi »). On a empr. aussi
ponzo, raponzolo (dér. de rapa, v. rave), maharajah « grand roi » (maha est de la
dont la première syllabe a été modifiée famille du lat. mag-nus « grand ») depuis
d’après l’afr. raïz « racine, rave » (v. 1758 (alors sous la forme marraja), rare
raifort). avant la fin du xix®s.
RAIRE « bramer », v. railler.
RAKI, 1829. Empr. du turc régi, d’'ori-
RAISIN. Lat. pop. *racimus, lat. class. gine arabe, v. arack.
racèmus, propr. « grappe de raisin » (ce qui
est encore le sens de l’it. (g)racimolo et RÂLE « action de râler » et nom d'oi-
de l'esp. racimo), d’où « raisin », cf. de seau, v. râler.
même a. pr. razim. À éliminé du gallo-
roman le lat. class. äva « raisin », sauf uva RÂLER, 1456. Doublet français de ra-
en a. pr. Cf. it. esp. uva. Les quelques cler, qui est d’origine méridionale. La si-
exemples de l’a. fr. uve sont des latinismes ; gnification première est encore conservée
uve y figure surtout dans la locution uve dans les verbes éraler, déraler « écorcher »
passe, francisation du lat. uva passa «raisin répandus dans les parlers. — Dér. : râle
sec ». Sert à désigner un grand format de «action de râler », 1611 ; râle, nom d'oiseau,
papier (relevé depuis 1715), marqué primi- 1164, est de même formation; l’a. pr.
tivement d’une grappe de raisin. — Dér. : appelle cet oiseau rascla d’après rasclar
raisiné, 1508. « racler »; râleur, 1845 (comme adj.
dès 1571).
RAISON. Lat. ralionem, acc. de ratio,
propr. « calcul, compte », d’où livre de RALINGUE, vers 1155 (Wace). D'un
raison, « livre de compte », usuel jus- anc. nor. *rdr-lik, comp. de rd « vergue »
qu'au xvie s. En lat. ralio avait aussi le et lik « lisière d’une voile »; les comp.
sens de « justification d’une action regardée de rà en anc. nor. se forment avec rar, le
comme criminelle », «argument qui justifie génitif de ce mot. — Dér. : ralinguer, 1687.
une action » (dès Cicéron), d’où, quand il
s’agit d’exposés contradictoires, le sens RALLYE, 1959. Terme de sport. Empr.
de « dispute, discussion » (ainsi vers 600), de l’angl. rally « rassembler ».
RAMADAN 532

RAMADAN, 1553 (sous la forme altérée RAMER, « se servir de rames », 1538,


radaman). Empr. de l'arabe ramadän, nom une Jre fois en 1213. Dér. de l’anc."fr.
du neuvième mois de l’année musulmane. raim « rame de bateau », qui représente
RAMAGE. Au sens de « représentation le lat. rémus « rame », d’où aussi it. esp.
de feuillages, de fleurs, etc., sur une étof- remo ; raim s'étant confondu de bonne
fe », 1611; au sens de « branchage » heure avec raim, rain « rameau », a été
dès 1270 et jusqu'au xvirre s. De l’adj. éliminé et l’a. fr. s’en est tenu jusqu’au
XV® s. au mot aviron. Dér. : rame, qui
ramage « qui vit dans la forêt » (xrr°-
XVIIIe 8.) vient le subst. au sens de paraît avoir d’abord désigné surtout les
« chant des oiseaux se tenant dans la rames des grands bateaux, des galères
ramée », 1549, Ramage, qui a encore (aux xIve et xve s. aussi raime, reme).
d’autres acceptions au moyen âge, dér. RAMETTE, terme de typogr., 1690.
de l’anc. subst. raim « rameau », v. ra- Dér. de rame ,« id. », attesté en 1655, empr.
meau et ramée. de l’all. rahmen « cadre » ou du néerl.
RAMBARDE, 1773. Au sens moderne Voir encore rame.
de « garde-corps placé autour des gaillards RAMEUX. Lat. rämosus, der. de ramus,
et des passerelles ». Altération de rambade, v. rameau.
1546 (Rab.), qui désignait une « construc-
tion élevée à la proue d’une galère », empr. RAMIER, 1393. Dès xr1° s. adj., signi-
de l’it. rambala, dér. de arrembar « aborder fiant « rameux », dér. de l’anc. raim ; en-
(un bateau) », vénit. rambar « enlever de suite au sens de « vivant sur les branches »,
force », qui représentent probabl. un lon- coulon ramier, puis subst.
gob. *rammôn « enfoncer » (comp. all.
rammen ; -mm- peut devenir -mb- dans RAMIFIER, 1314; ramification, 1541.
certains dialectes italiens). Empr. du lat. médiéval ramificare (francisé
d’après les nombreux verbes en -fier), rami-
RAMBOUR, 1536 « (Mala) quae ab Am- ficatio (de ramus « rameau »).
bianensi municipio rambura vulgus nomi-
nat », Ruellius, nom latin de J. de La RAMILLES, xrrIe. Dér. de l’anc. raim,
Ruelle. Rambures, qui a donné son nom à v. les préc.
cette variété de pomme, se trouve dans le RAMONER, vers 1220 au sens de « net-
département de la Somme. toyer »; s’est spécialisé au sens de « net-
RAME « piquet servant de tuteur à des toyer une cheminée » vers le xve s. Dér. de
plantes grimpantes », xvi®, dans beaucoup l’anc. subst. ramon, x1r1°-xIve s., encore
de patois réme. Forme fém. de l’afr. raim dans les patois au sens de « balaï », dim.
« branche », v. rameau, qui doit sa voyelle de l’anc. raim, v. ramer. Dér. : ramo-
(a, au lieu de é, ai) à l’influence des dér. nage, 1317 ; ramoneur, vers 1520.
comme rameau, ramer. Est à distinguer de
rame « châssis de bois sur lequel on étend RAMPE, v. le suiv.
le drap », 1405 (dès 1340 raime), mot empr. RAMPER, 1150, au sens de «grimper »,
du moyen néerl. rame, raem, de même cf. plante rampanie « plante grimpante »,
sens, même mot que l’all. Rahmen « chàs- au XVIIIe s., rampe « clématite ; lierre »
sis ». — Dér. : ramer, 1549 (ramer des dans les patois, et lion rampant comme t.
pois). de blason ; sens moderne dp. 1487. Les
RAME « réunion de vingt mains de langues germ. connaissent un radical
papier », 1360. Empr. de l'esp. resma, *hramp- qui désigne quelque chose de cro-
empr. lui-même de l’arabe rizma « ballot » chu, d’où, avec apophonie, entre autres
et spécial. « rame de papier », de là aussi anc. haut-all. rimpfan « courber, rider »,
lit, risma ; pour le rôle des Arabes d’Es- moyen néerl. ramp « crampe », etc. Cette
pagne dans l’industrie du papier au moyen famille de mots vit dans l’it. rampa « grif-
âge, v. papier. À reçu au xix® 8. le sens de fe », rampo « crochet », cat. esp. rampa
«convoi de bateaux » (1875), d’où «attelage « crampe », etc. Le verbe fr. vient du fran-
de plusieurs wagons » (1922). cique, où un verbe *hrampon, ou, plus
tard, *rampon pouvait se former facile-
RAMEAU, xrie. Lat. pop. *rämellus, ment. Le fait que le fr. n’a pas fr-, mais r-,
dim. du lat. class. ramus. L’a. fr. a possédé montre que le mot a passé du francique
jusqu’au xvie 8. le mot raim, rain, encore dans la langue de la population romane à
dans les patois, lat. ramus.
une époque assez tardive. — Dér. : rampe,
RAMÉE, xive. Dér, de l’anc. raim, rain, d’après le sens propre du verbe, 1669 (La
v. le préc. Fontaine) ; rampement, 1538.
RAMENTEVOIR, xre. Vieilli depuis le RAMPONNEAU, 1836. Jean Rampon-
XVIIe S.; ne s'emploie plus que par plai- neaux était un cabaretier très populaire, à
santerie. Comp. de l’anc. verbe amentevoir, Argenteuil près de Paris, qui avait un
comp. lui-même de mentevoir (ces deux certain embonpoint. Son nom a été donné
verbes ont disparu avant le xvie s.), lat. à une figurine lestée de plomb et qui se
menle habëre « avoir dans l'esprit, se rap- tient toujours debout.
peler », d’où « rappeler ».
RAMURE, 1376. Dér. de l’anc. raim,
RAMEQUIN, 1654, sorte de pâtisserie v. rameau,
au fromage. Mot pris au moyen néerl. ram-
meken, de sens analogue (dim. du mot qui RANCART, dans la locution /meltre)
correspond à l’all. Rahm « crème »). au rancart, 1755 (Vadé). Altération du
533 RAPIDE

norm. melire au récart, id., dér. de récarier sonnes assistant à une assemblée »; seule-
« répandre du fumier, éparpiller » (norm. ment gallo-roman. — Dér. : ranger, xrr°,
et berr.), de écarter. Un t. du jeu de cartes d’où rangée, xr1°, rangement, 1630, —
rencarter, qu’on a mis en avant pour ratta- Comp. : arranger, x11°, d’où arrangement,
cher rancart à carte, n’est attesté nulle 1318, arrangeur, xvr1° ; déranger, vers 1080
part. (Roland), d'où dérangement, 1636.
RANCE, 1373. Empr. du lat. rancidus. RANG(I)ER, v. renne.
— Dér. : rancidité, 1752, d’après le lat.
rancidus ; rancir, 1538, rancissure, 1538. RANZ (des vaches), 1767 (J.-J. Rous-
seau qui dit : « Le célèbre ranz des vaches.
RANCH, 1872. Empr. de l’anglo-améri- cet air si chéri des Suisses. ») De semblables
cain ranch, empr. lui-même de l'esp. ran- chansons pastorales se rencontrent aussi en
cho, v. le suiv.
Suisse allemande, où l’on les appelle Kuh-
RANCHO, fin xixe. Empr. de l'esp. de reihen. Ranz (= rang) des vaches est sim-
l'Amérique rancho, tiré, par extension de plement une traduction de ce mot aléma-
sens, de l’esp. d'Europe rancho « cabane, nique.
réunion, repas en commun de soldats, etc. »,
dér. de rancharse « se loger », empr. du fr. RAOUT, 1824 (Stendhal) ; écrit d’abord
se ranger. rout, 1804, dans un ouvrage traitant de
l'Angleterre. Empr. de l’angl. rout qui est
RANCŒUR. Lat. de basse ép. rancôrem, le fr. route au sens anc. de « troupe, compa-
acc. de rancor, propr. « rancidité », qui a gnie », v. routier.
pris dans le lat. eccl. les sens de « ran-
cœur, rancune ». It. rancore, esp. rancor et RAPACE, vers 1460 (mais dès le xxrre
rencor. V. rancune. rapal, avec changement de suffixe dû au
fait qu'on identifiait la graphie -ax du
RANÇON. D'abord raençon. Lat. redemp- mot latin avec la terminaison franc. -aus
liô (aux deux sens, de redimere « rache- écrite souvent -ax); rapacité, vers 1380.
ter »), au sens actuel et au sens religieux; Empr. du lat. rapax, rapacitas (de rapere
dans le deuxième il est remplacé au xrr1e 5. « saisir vivement »).
par l’emprunt rédemption). — Dér. ran-
çonner, xIII®, d'où rançonnement, xiv®°, RÂPE, 1202, attesté alors indirectement
rançonneur, 1406. par le lat. raspa « grappe de raisin » ; 1269,
RANCUNE, vers 1080 (Roland). Alté-
au sens d’ « ustensile servant à râper ».
ration de rancure qui a subsisté jusqu’au Tiré d’un verbe rasper attesté rarement
XIVE s. (d’où rancurer, encore usité au au moyen âge, venant d’un germ. occiden-
XVI° s.), par substitution de suffixe d’après tal *raspôn « rafler » (cf. anc. haut all.
‘a. fr. amertune (à côté de ameriume, comp. raspôn « gratter »), d'où aussi it. raspare,
esp. a. pr. raspar « gratter, râcler »; l’it.
rancume en norm.) ; rancure représente lui-
même le lat. pop. *rancüra, forme altérée et l’a. pr. raspa signifient aussi « grappe
de rancor, v. rancœur, par croisement avec dépouillée de ses grains ». — Dér. : râpé,
vers 1200 (vin raspé, Chrestien), « vin
cära « souci », d’où aussi it. et esp. archaï-
obtenu en faisant passer de l’eau sur la
ques rancura. — Dér. : rancuneux, vers râpe du raisin » ; râper, 1568, râpure, 1646 ;
1170 ; rancunier, 1718.
râpeux, xvi® (R. Belleau).
RANDONNÉE, x1u°; après avoir été RAPETASSER, 1532 (Rab.). Empr. des
usuel jusqu’au xvi® s. au sens de « course parlers de la région de Lyon, où le verbe
impétueuse », s’est restreint en un sens
propre à la langue de la vénerie : « circuit
est très répandu, ainsi que le simple pelasser
« rapiécer »; comp. aussi le languedocien
que fait à l’entour du même lieu une bête petassar « id. ». Ces verbes sont dér. de
qu’on a lancée », 1690 ; puis repris à cette
pelas « morceau de cuir ou d'’étoffe (pour
langue, 1798. Dér. de l’anc. verbe randon- rapiécer) », lat. pitlacium qui, outre ce sens,
ner, XIIe, « Courir rapidement », dér. des a celui « d’emplâtre » (du grec pitlakion
locutions adverbiales très usuelles de ran- « emplâtre, billet »); de là aussi l'esp.
don, à randon « avec rapidité, etc. », qui pedazo « pièce, morceau », avec un d non
sont à leur tour dér. de l’a. fr. randir « cou- expliqué, qui se trouve dans une autre
rir avec impétuosité », comp. à reculons, etc. forme de l’a. pr. pedas. — Dér. : rapetas-
Ce verbe randir est dér. d’un ancien subst. seur, 1564 (Rab.).
non attesté “*rant (comp. fr. brandir, de
brant), ‘qui vient d’un francique *rani RAPHIA, 1804. Empr. de la langue de
« course », subst. verbal correspondant au Madagascar dont le raphia est particuliè-
verbe all. rennen (comp. all. brand, bren- rement utilisé.
nen), qu’on trouve dans les dialectes alle-
mands méridionaux (Bavière, Suisse, Lor- RAPIAT, 1836. Mot dialectal, qui comme
raine all.). rapiamus, même sens, est usité un peu
partout, depuis la Picardie jusqu’à Lyon,
RANG. D'abord renc, xr1e, Francique issu de la locution de l’argot scolaire faire
*hring « cercle, anneau » (cf. all. Ring rapiamus « chiper ».
« anneau »), qui a dû être introduit au sens
d’ « assemblée, soit judiciaire, soit mili- RAPIDE, 1509; rapidité, 1573. Empr.
. taire », sens en rapport avec les mœurs des du lat. rapidus, rapidilas (de rapere « saisir,
anciens Germains (qui avaient l’habitude entraîner ») ; l’a. fr. a eu une forme pop.
de tenir des assemblées de ce genre), cf. rade, encore usitée dans les patois du Nord-
aussi harangue, d’où « ordre, rang des per- Est.
RAPIÈRE 534

RAPIÈRE, 1474 (d’abord espée rapière). Buffon ; on avait formé sur ces locutions
Dér. de râper (la poignée trouée a été à rez de chaussée, 1506, d’où est issu le
comparée à une râpe). français moderne rez-de-chaussée, 1548.
RAPIN, 1832. Mot de l’argot des ateliers V. araser. — Dér. : rasade, propr. « ce
de peinture, d’origine inconnue. qui remplit le verre à ras de bord », 1670.

RAPINE, vers 1180. Empr. du lat. RASCASSE, 1769. Empr. du prov. ras-
rapina (de rapere « saisir, piller »). — Dér. : casso, dér. de rasco « teigne », v. racaille,
rapiner, vers 1250.
RASER. Lat. pop. *rasäre (du lat. class.
RAPSODE, 1552 ; rapsodie, 1582. Empr. rädere « racler » et partic. « tondre, raser
des mots grecs rhapsôidos (littéral. « qui la barbe »). It. rasare « rendre lisse, passer
coud ensemble des chants »; se disait de près de », esp. rasar « racler, etc. ». L’a. fr.
chanteurs qui allaient de ville en ville, réci- avait encore raire, rere, lat. class. rädere,
tant des poèmes et notamment des frag- qui, au sens de « raser la barbe », a été
ments des poèmes homériques), rhapsôt- largement conservé : it. radere, esp. raer.
dia ; rapsodie a pris, au XVII® S., un sens — Dér. : raseur, 1853, au sens fam. de
défavorable, attesté dès le xvi® dans le « personne ennuyeuse » ; antér. au sens de
verbe dér. rapsodier, aujourd’hui hors « destructeur », 1604. — Comp. : en rase-
d'usage. mottes, 1932.
RAPT, xvic. Réfection de l’a. fr. rat RASIBUS, xive (E. Deschamps). Mot
(1237), d’après le lat. rapius. On pourrait plaisamment forgé dans l’argot scolaire
aussi considérer rat comme un emprunt sur le lat. rasus, v. ras, avec la terminaison
francisé. Rapius survit sous une forme de l’ablatif des mots latins de la troisième
transmise par la langue parlée dans la déclinaison.
péninsule ibérique, où rato a pris le sens
d’ «instant » par un développement séman- RASOIR. Lat. pop. rasorium (de rädere,
tique comparable à celui de momentum, v. raser), attesté à basse ép. au sens de
v. moment. « burin ». It. rasoio.
RÂPURE, v. râpe. RASSASIER, vers 1180. Comp. de l’a.
RAQUER « payer », pop., fin xix°, de fr. assasier, francisation du lat. médiéval
raquer « cracher », qui vit dans les patois assatiare (du lat. class. satiare « rassasier ».
du Nord. de salis « assez ») ; le verbe n’a pas vécu
dans la langue pop., assaisier, qui n’est
RAQUETTE, au xv® s. au sens mo- attesté que très rarement, n'étant qu'une
derne ; antér. au sens de « paume de la francisation plus complète qu'assasier ; cf.
main » sous les formes rachette, 1314, ras- de même a. pr. asaziar. — Dér. : rassasie-
selte, 1549, cf. aussi rasquelle (du pié), ment, xive (Christine de Pisan).
XIVe s. Raquelte a été emprunté dans un
sens anatomique du lat. médiéval rasceta RASTACOUËRE (écrit aussi -quère),
(manus), employé pour la première fois 1881, d’où, par abréviation, rasta, 1886.
par Constantin l’Africain (v. nuque), et Empr. de l'esp. d'Amérique rasiracuero,
qui dérive de l'arabe réhat « paume de la littéral. « traîne-cuir », surnom donné aux
main », ou plutôt de la forme vulg. réhet parvenus.
(cf. aussi le lat. médiéval racha « plante du
pied »). Quant au sens moderne qu’a aussi RAT, xri° (d’après le fém. rate). Mot
l’it. raccheïta, il semble qu’en raison de la d’origine obscure. On admet généralement
vogue du jeu de paume en France, depuis que le rat, venant d’Asie, n’a pénétré en
le moyen âge, ce soit le fr. qui ait été le Europe que dans les premiers siècles du
point de départ de ce sens (l’angl. racket moyen âge. Le mot est commun aux lan-
vient du fr. et probabl. aussi l'esp. raquela). gues germaniques et aux langues romanes,
comp. it. ratto, esp. rato (aujourd’hui « sou-
RARE, 1377. Empr. du lat. rarus ; on ris »), rata « rat », a. pr. rat, all. raite,
trouve rere une fois au xIv® s. (Bersuire), angl. rat, etc. Il est impossible de dire où
mais l’adv. rerement au x1I1° et au XIIIe 5. le mot a pris origine. De toute façon il ne
— Dér. : rarissime, 1544. peut pas, comme on l’a proposé, représen-
ter le lat. rapidus « rapide ». L’explication
RARÉFIER, 1370 (Oresme). Raréfac- la plus vraisemblable est celle d’après la-
tion, id. Empr. du lat. rarefacere, rarefieri quelle l’élément rait- est né de l’imitation
et du dér. médiéval rarefactio (de rarus, du bruit que fait en grignotant l'animal
v. le préc.). tant redouté pour les dégâts qu'il cause.
RARETÉ, xve. Francisation du lat. rari- Rat a le sens de « souris » dans beaucoup
tas (de rarus, v. les préc.) ; on trouve par- de patois soit au masculin, notamment dans
fois rarilé au xvIe s. la région franco-provençale et le Midi, soit
au féminin, dans l'Est et le Midi (a. pr.
RAS, xvit, mais attesté isolément dès raia). Rat a reçu au commencement du
fin xie, surtout au sens de « rempli XvVirIe s. le sens de « caprice » (cf. aussi
jusqu’au bord ». Réfection d’une forme all. Ralten « caprices ») dans des expressions
res « rasé, raturé, radié », du lat. rasus, telles que avoir des rats dans la tête, cf.
part. passé du verbe radere « raser » l'emploi comparable d’araignée et de ca-
(v. raser) déjà rare au xvIe s., mais qui a fard, d’où, par suite, celui de rater (d’une
survécu dans des locutions, cf. rez pied, arme à feu, d’une serrure). — Dér. :
rez lerre chez Bossuet et à rez de terre chez 1° au sens propre : ratier, vers 1200. Ra-
535 RAVAUDER

tière, vers 1380 ; raton, xr11° ; dératisation, RÂTEAU. Lat. rasiellum, dér. de ras-
1906. 2° au sens de «rat d'église » : ratichon, trum. — Dér. : râtelée, xv® ; râteler, x111° ;
1725 (d’abord rastichon, argot, 1628). 3° au râteleur, 1694 ; râtelier, 1250.
sens de « rater (d’une arme à feu) » ; rater,
1718, d’où raté, subsi, 1876. RATIBOISER, 1875, mot de l’argot des
joueurs. Mot de fantaisie, fait par croise-
RATAFIA, 1675. Autre forme, égale- ment de rétisser et d’emboiser « tromper »,
ment créole, de fafia. Les deux formes ont encore dans les patois (comp. de l’a. fr.
été en usage au xvrr® s. comme toast. boisier « id. », d’un francique “*bausjan,
Veyssière de Lacroze, qui vécut de 1675 qu'on restitue d’après l’anc. haut all. bôsi,
à 1677 à la Guadeloupe, raconte que d’où all. büse « méchant »).
« quand un Indien du pays boit du brande- RATIFIER, 1294; ratification, 1328.
vin à la santé d’un François, il lui dit Empr. des mots du lat. médiéval ralificare
lafiat, à quoi le François répond en faisant (francisé en -fier sur un modèle répandu),
raison, ralafiat ». Il n’est donc pas impos- ralificatio (de ratum « ce qui est confirmé »,
sible que l’anc. étymologie, d’aprèslaquelle neutre de l’adj. ratus).
ralafia reproduirait une formule latine rata
fiat (scil. conventio), soit assez près de la RATINE, 1593; en 1260, rastin. Dér. du
réalité. Tafia serait alors une réduction de verbe “*rasler (v. rater sous rature; on
ralafia due aux difficultés que devaient aplaigne cette étoffe après le tissage).
éprouver les indigènes à prononcer la forme
complète. RATIOCINER, 1546 (Rab.); ratiocina-
tion, 1495. Empr. du lat. ratiocinari, ratio-
RATATINER, 1611, au part. passé, cinatio (de ratio, au sens de « compte,
seule forme usitée jusqu’au xvirie s. Mot calcul »).
expressif formé autour d’un radical tat-, RATION, 1290. Au moyen âge, terme
qui, avec des suffixes diminutifs, exprime jurid. du droit eccl. ; depuis le xvire s. s’est
l’amoindrissement d’un état, d’une action ; dit surtout de la ration des soldats ou des
comp. Manceau fatiller « bavarder, chu- marins. Empr. du lat. médiéval ralio, dont
choter », champ. fatiner « manier », rela- le sens est issu de celui du lat. class.
linis « ragoût de viandes qui ont passé par «compte, somme ». — Dér. : rationner, 1795,
plusieurs sauces », fr. latin « petite quan- d’où rationnement, 1875, rationnaire, 1777.
tité » (1611), retaliner « effacer les plis »
(1508). RATIONNEL, vers 1120. Empr. du lat.
philosophique ralionalis (de ratio au sens de
RATATOUILLE, 1821. Autour du verbe « raison »). — Dér. : rationalisme, 1803,
louiller (v. ce mot) s’est formé dans les particul. en parlant de la philosophie de
patois tout un fouillis de verbes expressifs, Kant ; d’où rationaliste, 1718; en 1539,
dér. avec des préf. ou simplement avec des dit des médecins « qui se contentent de
syllabes de renforcement, comme fertouil- l’art tant seulement » (CI. Gruget), par
ler, iantouiller, entouiller, tarlouiller, la- opposition aux empiriques ; rationalisation,
iouiller, raiouiller, dont la signification io (dès 1842, dans un autre sens), -iser,
tourne autour des notions « se vautrer, 1842.
agiter (un liquide), tremper, salir ». De
nombreux dér. de ces verbes désignent des RATISSER, 1390. Dér. d’un anc. verbe
mets consistant surtout en une sauce et raier, usuel au xIv® et au xv®s. au sens de
souvent faits sans soin, comme poit. {an- « raturer, racler », tiré lui-même de raiure.
touillade « compote de fruits », fr.-comt. - A pris le sens de « râteler » d’après réleau.
tatouille « ragoût ». D’un croisement de — Dér. : ratissoire, 1537, développement
talouiller et ratouiller la langue a tiré le sémantique parallèle à celui du verbe ; ra-
subst. ratatouille, qui doit être du xvrr1es8., tissure, 1552, id.
puisque le français canadien le connaît RATURE, x1r1e au sens de « raclure »;
aussi, et qu'il est dès l’origine très répandu le sens usuel aujourd’hui peut dater du
(Champagne, Normandie, Poitou, etc.). x1ve s., étant donné l'existence d’un verbe
D'où, par abréviation, rata, mot d’ar- raler à cette époque, v. ratisser. On restitue
got militaire, 1837, avec changement de un mot du lat. pop. *radilüura, dér. de
genre. rädere « racler, raser », v. raser; mais
RATE, vers 1165. La rate présente une ralure peut aussi être une réfection de
certaine ressemblance avec un rayon de rasure (dér. de raser), usité du x1r1° au
miel, son enveloppe se prolongeant dans xvi® s., d’après raloire, autre forme de
l’intérieur de l'organe sous forme de cloi- radoire. — Dér. : raturer, 1550 ; on a dit
sons limitant les aréoles. C’est pourquoi on d’abord rasurer depuis le xive s. et raser
a proposé de voir dans rale un empr. du au xves.
moyen néerl. rdle « rayon de miel » (cf. ma- RAUQUE, 1406 ; raucité, xve. Empr. du
gyare lép « rayon de miel; rate »). Mais le lat. raucus, raucitas. Rauque a remplacé
mot néerl. ne se trouve nulle part attesté l’a. fr. rou(c), qui ne paraît pas avoir
au sens de « rate », pas plus que le mot fr. dépassé le xv® s., v. enrouer.
au sens de « rayon de miel », ce qui n’est
guère favorable à l’hypothèse. — Dér.: RAVAGE, v. ravir.
ratelle, xr11°, au sens de rate, xv® « maladie RAVALER, v. val.
du porc »; dératé, 1743, part. passé de
déraier « enlever la rate à un chien pour RAVAUDER, 1530. Dér. de ravaull
le rendre plus propre à la course », depuis « diminution de valeur », XvI® s., Variante
1535. de raval, id., 1445, subst. verbal de ravaler,
RAVAUDER 536

v. val. D'autres acceptions de ravauder de meuble, etc. », vers 1770. Dér. de l’a. fr.
en franc. et dans les parlers partent toutes ree « rayon de miel », x11° ; ree vient du
de l’idée de valeur diminuée, ainsi « répri- francique *hräta, id. (comp. moyen néerl.
mander en humiliant » (xvi-xIxe s.), râta « miel vierge », et la glose 100 des
« marchander en dépréciant la marchan- Gloses de Reichenau : favum : frata mellis).
dise » (Suisse). — Dér. : ravaudage, 1553 ; RAYONNE « soie artificielle », 1930.
ravaudeur, 1530. Empr. de l’angl. rayon (empr. à son tour
RAVE, 1530. Empr. du franco-prov. du fr. rayon), prononcé à l'anglaise, avec
rava (on a rave en 1322 dans un texte la consonne finale, ce qui a fait passer le
franco-prov.), lat. räpa, autre forme de subst. au féminin.
räpum, d’où aussi it. rapa, a. pr. raba; RAYONNER, v. rai.
rave s’est répandu dans les parlers septen-
trionaux et a éliminé une forme régulière RAYURE, v. raie.
rêve, rare en a. fr., mais qui survit dans RAZ, au sens de « courant violent dans
le Nivernais, en Champagne et en Franche- un passage étroit », vers 1400 (Froissart),
Comté ; la forme méridionale raba (d’où d’où raz-de-marée, 1678 ; comme le bre-
rabe vers 1400, chez Christine de Pisan), ton raz, empr. au normand, qui vient
s'étend jusqu’à la Loire. — Dér. : ravier, lui-même de l’anc. scandinave rés «courant
1838. V. bette, chou. d’eau », cf. aussi l’anc. angl. ræs « mou-
RAVELIN, 1450. Anc. terme de fortifi- vement rapide » (d’où l’angl. race).
cation, empr. de l’it. ravellino, variante RAZZIA, 1841. Empr., à la suite de la
anc. de rivellino. conquête de l’Algérie, de l'arabe algérien
RAVIGOTER, 1611. Altération, par subs- ghäzya (en arabe class. ghäzwa « attaque,
titution de suff., de ravigorer, usuel du incursion militaire »). — Dér. : razzier,
XVe s. jusqu’au début du xvr® s., verbe 1845.
comp. de vigueur (avec o du lat. vigor). — RE-, préf. ; ré-, id. Re représente le lat.
Dér. : ravigote, 1720. re, qui se dit propr. d’un mouvement en
RAVINE, 1388 (Chemins... empeschiez arrière (cf. regredi « revenir sur ses pas »),
par ravines d’eaues, Ordonn. de Charles VI) puis d’une action renouvelée (cf. « reficere,
au sens de « torrent d’eau », usité jusqu’au refaire ») ; de là s’est dit de la réciprocité
xviie s. d’où l'emploi moderne dès lors; et a servi parfois simplement à exprimer
signifie aussi parfois au moyen âge « chute une idée de renforcement. A gardé tous
de terre », cf. raveine de terre, xn1° ; mais ces sens dans toutes les langues romanes.
le sens ordinaire du moyen âge est « vol Exprime en outre, notamment en fr., une
fait violemment », d’où « impétuosité, vio- idée « perfective », cf. garder — regarder,
lence », puis « chute violente, etc. », cf. en lier — relier, etc. Ré-, en dehors des mots
outre l’adj. ravinous « impétueux », qui où il est issu de re devant un verbe com-
s’est dit notamment de l’eau torrentielle, mençant par é-, cf. récrier et écrier, figure
dès le xr11° s., emploi qui a pu contribuer dans des mots repris au latin.
au développement sémantique de ravine. RÉ, v. gamme.
Ravine « vol, etc. » représente le lat.
rapina « rapine », au sens actuel il est RÉALGAR, nom ancien du sulfure rouge
refait sur raviner. — Dér. : raviner, xnr°, d’arsenic, depuis le xvi®s. ; en outre riagal,
au sens de « se précipiter avec impétuosité » 1377 ; réagal, xv° (Villon) ; réalgal, xvire.
(d'animaux, d’une rivière) ; sens moderne Altérations diverses de l'arabe rahadj el-fâr
au xvie s., d’où ravin, 1690. « poudre des rats ; mort aux rats », empr.
par des intermédiaires indéterminés, cf. lat.
RAVIOLI, 1842, attesté en Savoie, sous du xvi® s. re(i)algar, esp. rejalgar, a. pr.
la forme raviole, depuis le xvi® s., un peu rialgar, it. risigallo.
plus tard en Dauphiné et à Lyon. Empr.
de l’it. ravioli, qui est dér. du lombard rava RÉALISER, RÉALITÉ, v. réel.
« rave », les raves entrant autrefois dans la
composition de ce mets d’origine italienne. RÉBARBATIF, xive. Mot pris à l’argot
scolaire, dér. de l’anc. verbe (se) rebarber
RAVIR. Sens fig. dès le xrr1e. Lat. pop. « faire face à l'ennemi », d’où « tenir tête
*rapire, lat. class. rapere. It. rapire, roum. à », usuel jusqu’au xvi® s., dér, de barbe,
râpi. — Dér. : ravage, xIv® ; se disait aussi littéral. « faire face barbe contre barbe »,
au xvi® s. de chutes violentes de pluie ou cf. de même rebéquer.
de neige, d’où ravager, xvi®, ravageur,
XVIe; ravissement, xi17° ; ravisseur, 1216. REBEC, xve. Autre forme de l’a. fr. re-
bebe, rubebe, xini° (J. de Meung), au xrve
RAVITAILLER, xve. Comp. de l’anc. aussi rebelle ; rebebe est empr. de l’arabe
verbe avitailler, xri°, hors d’usage depuis rabäb, sorte de vielle, probabl. par l’inter-
le xvi® s., comp. lui-même de l’anc. subst. médiaire de l’a. pr. rebeb, esp. rabel (anc.
vilaille, v. victuaille. — Dér. : ravitaille- it. ribeba est peut-être empr. du gallo-
ment, 1561. roman) ; la forme rebec paraît être due à
RAY-GRASS, 1758. Empr. de l’angl. un croisement avec bec (à cause de la forme
ray-grass (aujourd’hui on dit plutôt rye- de l'instrument) ; aussi 2. pr. rebec, d’où
grass). également l’it. ribeca.
RAYON, « jet de lumière », v. rai. REBELLER (se), vers 1180, souvent au
moyen âge rebeller (sans se); rare depuis
RAYON, « rayon de miel », 1538 ; d’où le xvirie s.; rebelle, x11e ; rébellion, 1306.
le sens de « casier, tablette de bibliothèque, Empr. du lat. rebellare (de bellum « guer-
537 RÉCIDIVE

re »), rebellis, rebellio. Rebeller a supplanté RECENSER, 1532 ; assez fréquent au


reveler, forme plus francisée de rebelläre, moyen âge et au xvi® s. au sens d’ « énu-
usuelle jusqu’à la fin du xv® s., d’où revel mérer ». Empr. du lat. recensere « faire un
« rébellion », qui a disparu en même temps recensement », d’où « énumérer ». — Dér. :
que reveler. recensement, 1611 ; recenseur, 1789.
REBÉQUER, v. bec. RECENSION, 1753. Empr. du lat. re-
censio « recensement », v. le préc.
REBLOCHON, 1877. Nom savoisien d’un
fromage fabriqué dans cette région et qui RÉCENT, 1488. Empr. du lat. recens,
a passé en franc. ; dér. d’un verbe blossi recentis, propr. « humide », « frais » ; l’a. fr.
« pincer » répandu en Savoie et en Suisse, a eu un adj. roisant « frais » qui continuait
qu’on ramène à un type *bloitiare, d’origine le lat. recentem, acc. de recens.
inconnue.
RÉCÉPISSÉ, 1380. Tiré du mot lat.
REBOURS. Ne s'emploie plus que dans recepisse (inf. parf. de recipere « recevoir »),
les locutions à rebours (déjà attestée au extrait de la formule cognosco me recepisse
XIIe s.), au rebours; en a. fr. rebours était « je reconnais avoir reçu », qui s’écrivait
un adj. signifiant « qui est à contre-poil », sur des reçus.
d'où « revêche, rétif », usité jusqu’au RÉCEPTACLE, 1314. Empr. du lat. re-
xvirie s. Lat. de basse ép. reburrus « qui ceplaculum (de receptare « reprendre, rece-
a les cheveux retroussés », d'où rebours, voir »).
sous l'influence, antérieure aux premiers
textes, de revers « renversé, ébouriffé », lat. RÉCEPTEUR, 1845, au sens moderne ;
reversus (d’où aussi it. rovescio « envers », déjà formé au moyen âge au sens de «rece-
a rovescio « à l'envers », a. pr. revers « qui veur »; réceptif, 1836. Dér. sav. du lat.
va à rebours »). — Dér. : rebrousser, XvI° ; receplus (part. passé de recipere « rece-
antér. rebourser, vers 1170, devenu rebrous- voir ») pour servir de nom d’instrument
ser au XvI° s., peut-être d’après irousser ; (ou d’agent) et d’adj. à réception, v. le suiv.
signifie en outre jusqu'alors « retrousser, — Dér. de réceptif : réceptivité, 1812.
relever, refouler, remonter le cours d’un
fleuve, etc. », cf. l'expression rebrousser RÉCEPTION, vers 1200. Empr. du lat.
chemin, qui date du xv® s. (sous la forme receptio (de recipere « recevoir ») pour servir
de nom abstrait à recevoir. — Dér. : récep-
rebourser le chemin dans Le Jouvencel)
tionnaire, 1874, terme techn. d’administra-
d'où rebrousse-poil (à), 1694.
tion et d'industrie ; réceptionner, fin xix°,
REBOUTEUR, v. bouter. id.
REBROUSSER, v. rebours. RÉCESSION, 1864. Empr. du lat.
recessio « action de se retirer ».
REBUFFADE, fin xvi® (d'Aubigné). RECETTE, v. le suiv.
Dér. de l’anc. mot rebuffe, de même sens,
1558, empr. de l’it. qui hésitait entre les RECEVOIR. Réfection, qui apparaît au
trois formes ribuffo, rebuffo, rabuffo, au- xie s. de receivre, reçoivre, lat. recipere.
jourd’hui surtout rabuffo, de la famille du — Dér. : recette, x11°, d’après le lat. re-
verbe rabbuffare « déranger, houspil- cepla, fém. du part. passé receplius; rece-
ler, etc. », de buffare, v. bouffer. vable, xrr1°, d’où recevabilité, 1829, irre-
. cevable, 1588 (Montaigne) ; receveur, x11° ;
RÉBUS, 1480. Le point de départ n’est reçu, 1611.
pas, comme on l’a cru, d’après Ménage,
l'expression rébus de Picardie, puisque cel- RÉCHAMPIR, v. champ.
le-ci n’est attestée que beaucoup plus tard.
Il est à chercher plutôt dans le jeu d'esprit RÈCHE, xin°, sous la forme picarde
qui consiste à représenter les objets et les comp. resque, cf. normand réque (vin). Du
personnes par des dessins (rebus, au lieu gaul. *reskos « frais ».
de lilteris), en remplaçant ceux-là par des RECHIGNER, xr1° s. (denz rechignier
objets ou des personnes dont les noms se «montrer les dents »), d’où le sens moderne.
prononcent de la même façon. On a ainsi En a. fr. aussi rechiner, eschignier et res-
dès le xvie s. des dessins à devinettes, chignier (des denis, les denis), qui signi-
comme l'indique Des Accords au xvI°s. : fiaient en outre « faire la grimace pour
« On avoit trouvé une façon de devis par refuser », eschignier, & se moquer » et, en
seules peintures qu’on souloit appeler des fr. pop., chigner « pleurnicher » (déjà dans
rebus. » le Père Duchesne). D'un francique *kînan
REBUT, REBUTER, v. but. qu'on restitue d’après l’anc. haut-all. kînan
« tordre la bouche », moyen néerl. kinen
RÉCALCITRANT, 1696 (Regnard) ; une « ouvrir la terre ».
première fois en 1551. Part. prés. de l’anc.
verbe récalcitrer, x11°, encore dans les dict., RÉCIDIVE, vers 1550 (Paré), au sens
empr. du lat. recalciirare, propr. « ruer » médical ; 1593, aux sens général et jurid.
Récidiver, 1488 ; développement séman-
(de calx, calcis « talon »). tique parallèle à récidive. Empr. du lat.
RÉCAPITULER, vers 1360; récapitu- médiéval recidiva (tiré de l’adj. anc. reci-
lation, 1248. Empr. du lat. de basse ép. divus, propr. «retombe », d'où « qui revient»
recapitulare (de capitulum au sens de « cha- (en parlant de la fièvre), et du verbe dér.
pitre »), recapitulatio. — Dér. du verbe : recidivare). — Dér. : récidiviste, 1845 ; seu-
récapitulatif, 1831. lement au sens jurid.
RÉCIF 538

RÉCIF, 1688. D'abord en usage dans Les deux mots ne se sont rejoints que plus
les colonies d'Amérique ; introduit en fr. tard. Le mot a pris récemment dans la
par les colons d'Amérique qui ont reçu ce langue commerciale le sens d’ « appel à
mot des Espagnols ; le mot esp. arrecife, la clientèle par un rabais sur le prix ».
propr. « chaussée », est empr. lui-même de
l’arabe ar-rasif « chaussée, digue, levée ». RECLUS, vers 1170. Part. passé de l’anc.
verbe reclure (qui a toujours été plus rare,
RÉCIPIENDAIRE, 1674. Dér. sav. du sauf au part. passé et aux formes comp.
lat. recipiendus « qui doit être reçu » (de avec ce part., que reclore), lat. de basse
recipere « recevoir »). ép. reclädere (en lat. class. « ouvrir »;
depuis Tertullien, re- prenant le sens du
RÉCIPIENT, 1555 (En un mesme vais- renforcement, «enfermer »), aussi it. richiu-
seau recipient). Empr. du lat. recipiens, dere. Reclus signifie aussi en a. fr., dès 980,
part. prés. de recipere « recevoir », qui « lieu où l’on est reclus ». — Dér. : réclu-
paraît avoir été employé avec le sens mo- sion, réfection récente de reclusion, x1rre.
derne de « récipient » dans le lat. des alchi-
mistes. RÉCOLER, 1356, « se souvenir » (recolé
subst. « minute d’un acte » dès 1337) ; le
RÉCIPROQUE, 1380. Réciprocité, 1729. sens actuel de « réviser, vérifier », xvne,
Empr. du lat. reciprocus, reciprocitas (créé dérive de l’emploi du verbe dans la langue
à basse ép.).
jurid. : récoler les dépositions des témoins,
RÉCITAL, 1884. Empr. de l’angl. recilal XVIe. Empr. du lat. recolere « se rappeler »
(du verbe {o recite, empr. lui-même du fr. et « rappeler », sens habituel du xrve
réciter). au XVI® 8. — Dér. : récolement, 1389.

RÉCITATIF, 1690. Empr. de l’it. reci- RÉCOLLECTION, « résumé », 1372, « es-


tativo (du verbe recilare, v. le suiv.). prit de recueillement », 1553; récollet,
1468, ordre de franciscains réformés de la
RÉCITER, vers 1170, au sens de « lire fin du xve s. Dér. sav. de recollectus, part.
à haute voix », puis de « raconter » qui passé de recolligere, v. recueillir, ou plutôt
s’est maintenu jusqu’au xvirI® s.; au empr. des mots du lat. médiéval recollectio,
sens de « dire de mémoire », depuis 1530; recollectus, non attestés par accident; les
récitation, 1680, au sens moderne ; antér., Récollets ont pris ce nom pour indiquer
depuis le x1ve s., « récit ». Empr. des qu’ils voulaient se livrer à la récollection
mots lat. recitare, propr. « lire à haute voix et, à cette intention, ils demandèérent au
un acte, un ouvrage », d’où « débiter, dire pape l'autorisation de se retirer dans des
de mémoire », recitalio « lecture à haute couvents.
voix d’un acte juridique, lecture publique ».
— Dér. du verbe : récit, xv®; récitant, 1771. RÉCOLTE, 1558 ; cf. « nous disons la
récolte, au lieu qu’on souloit dire la cueil-
RÉCLAMATION, 1238. Empr. du lat. lette », H. Estienne, 1578. Empr. de lit.
reclamatio pour servir de nom abstrait à ricolla (de ricogliere, v. recueillir). — Dér. :
réclamer. récolter, 1762, encore blâmé par Voltaire
qui préfère recueillir.
RÉCLAMER, 1219, au sens moderne;
au moyen âge on a des formes accentuées RÉCOMPENSER, xiv® (Oresme), au
reclaime, etc. Empr. du lat. reclamare « se sens de « compenser », encore usité au
récrier, protester », usité notamment dans XVIIe s., d’où se récompenser de « se dédom-
la langue jurid. Depuis le xr1° et jusqu’au mager », encore usité au XVIIIe S. ; au sens
XVIIe s. signifie aussi « invoquer, implorer moderne, xive (Froissart). Empr. du lat.
Dieu, les saints, etc. », d’où aujourd’hui de basse ép. recompensare « compenser,
« demander le secours d'autrui ». Se récla- récompenser », v. compenser. DÉTE
mer de vient de la langue jurid., où cette récompense, vers 1400, développement sé-
expression signifie dès le xr11e s. «interjeter mantique parallèle à celui du verbe.
appel, en appeler d’une cour inférieure à RÉCONCILIER, xri°; réconciliateur,
une cour suzeraine ». Jusqu'au xviI° s. on 1512 ; réconciliation, xir1e. Empr. du lat.
semble avoir dit reclamer, dont réclamer reconciliare, reconciliator, reconciliatio. Ré-
serait une réfection d’après la prononcia- concilier signifie aussi au moyen âge « puri-
tion du lat. reclamare. — Dér. : réclame, fier un lieu saint (qui a été souillé) », d’après
1560, comme terme de fauconnerie, masc., le sens du lat. anc. « réparer un dom-
parce qu’il a remplacé reclaim, du xrre mage ». — Dér. : réconciliable, fin xvre
au début du xviI® s.; comme terme de (Malherbe). V. irréconciliable.
Lypogr., 1625, fém. Réclame « publicité »
est un sens spécial de ce terme typogra- RECONDUCTION, terme jurid., 1602.
phique ; il s’est dit d'abord d’un « petit Empr. du lat. jurid. reconduclio (de recon-
article que l’on insère dans le corps d’un ducere « reprendre à bail ») ; le verbe cor-
journal, avec les nouvelles et les faits respondant reconduire est moins usuel.
divers, et qui contient ordinairement l'éloge RÉCONFORTER, xire (Alexis ; ré- a été
payé d’un livre, d’un objet d'art, dont le probabl. substitué à re- vers 1600). Comp.
titre se trouve aux annonces » (1838); de l’anc. verbe conforter, sorti de l'usage
déjà signalé en 1834 dans un sens moins depuis le xvrie 8., lat. eccl. confortäre (de
précis ; cette annonce payée était naturel- fortis « fort, courageux ») ; aussi it. confor-
lement laudative. L'influence de l’angl. lare, esp. conforiar. Au moyen âge, on a
d'Amérique reclaim (du verbe lo reclaim tiré de conforter un subst. confort « ce qui
« attirer l'attention », empr. du fr. du donne de la force, etc. », v. confort. —
moyen âge), est peu probable à cette date. Dér. : réconfort, xrre.
539 RECUEILLIR

RECONNAÎTRE. Lat. recognoscere, dont RECROQUEVILLER, 1332. Mot aux


le développement a été parallèle à celui du formes multiples, cf. racroquevillie, recro-
simple. It. riconoscere, esp. reconocer. — quillie, recoquillie, dans ce même texte
Dér. : reconnaissance, vers 1080 (Roland), de 1332. Mot de fantaisie, issu de recoquiller
au sens d’ « action de se reconnaître »; (1399), composé de coquille; la syllabe
pe Re eent de sens parallèle à celui du croque- peut être due à croc, le v à ville
verbe. (forme ancienne de vrille) ; on trouve aussi
recroquebiller, 1611, recrobiller, chez Saint-
RECOQUILLER, v. recroqueviller. Simon, qui rappellent recorbelées, xxr1®
RECORD, 1883. Empr. de l’angl. re- (G. de Lorris), dér. de courbe.
cord, propr. « enregistrement », récent avec RECRU, v. croire.
son acception sportive, subst. verbal de to
record « rappeler, inscrire, enregistrer », RECRUDESCENCE, 1810 ; d’abord ter-
lui-même de l’a. fr. recorder « rappeler », me médical, d’où des sens plus étendus.
V. recors. Dér. sav. du lat. recrudescere « devenir plus
violent » (propr. « devenir saignant » en
RECORS, vers 1240 f(recort) ; n’a plus parlant d’une blessure, de crudus, propre-
qu’une existence littéraire. D'abord « té- ment « saignant »).
moin », puis spécial. « Témoin pris par un
huissier pour assister à un exploit », 1552, RECRUE, v. croître.
et « officier subalterne de justice qui RECTA, 1718. Tiré du mot lat. recia,
prêtait main-forte à un huissier en cas de adv., propr. « en droite ligne ».
besoin » ; doit le premier sens de « témoin »
à l’anc. verbe recorder qui était d’un emploi RECTANGLE, 1556. Empr. du lat. mé-
fréquent dans la langue jurid. au sens de diéval reclangulus, comp. de rectus « droit »
« rapporter comme témoin » (d’où aussi et de angulus « angle » sur le modèle du
recordeur « témoin », dès le xrri® s.). Etait lat. anc. friangulus. — Dér. : rectangu-
usité antér. comme adj. au sens de « qui laire, 1571, d’après le lat. rectangulus.
se souvient »; comme l’anc. subst. record
« mémoire, souvenir », usuel jusqu’au RECTEUR, 1806, au sens moderne de
xXvI® s. et qui se trouve encore chez « chef d’une académie (circonscription uni-
Montesquieu comme terme de jurispru- versitaire) »; sous l’ancien régime, « chef
dence, c’est un mot tiré du verbe recorder d’une université », 1261. Empr. du lat.
« se rappeler, rappeler », usuel jusqu’au médiéval reclor, en lat. class. « celui qui
xvIre s., lat. de basse ép. recordäre, lat. dirige, chef, etc. » (de regere « diriger »),
class. recordäri « se souvenir ». La forme sens assez fréquemment repris du xIv® au
recors qui a triomphé depuis le xvrre s., xvirie s. Recteur a été pris aussi au sens
se trouve déjà au moyen âge pour l’adi. ; de « curé » dès le xvi®s. et s'emploie encore
c’est probabl. une forme du plur. (on trouve ainsi en Bretagne et dans le Midi. — Dér.
aussi une forme altérée recorps). d’après la forme du lat. recior : rectoral,
1588 ; rectorat, xvie (Pasquier), dévelop-
RECOURIR. A supplanté au xvi® s. pement sémantique parallèle à recleur;
l’anc. forme recourre, V. courir. Au sens de vice-recteur, 1872.
« retourner en courant », représente le lat.
recurrere ; le sens de « courir une deuxième RECTIFIER, 1314; rectification, id.
fois, » attesté dès le xr11 s., a pu exister Empr. du lat. de basse ép. reclificare (avec
en tout temps. Le sens d’ « avoir recours . une francisation en -fier d’un type ré-
à », 1283, est repris au lat. pandu), rectificatio (de rectus « droit »). —
Dér. du verbe : rectificatif, 1829 ; recti-
RECOURS, xrr1e (Rutebeuf). Empr. du fiable, xvir1e (Fontenelle).
lat. jurid. recursus, v. le préc.
RECTILIGNE, xive (Oresme) ; usuel seu-
RECOUSSE, v. rescousse. lement depuis le xvrie s. Empr. du lat.
RECOUVRER. Du xve au xviie s. fré-
de basse ép. reclilineus, v. le préc.
quemment confondu avec recouvrir, Cf. no- RECTITUDE, xiv® (Oresme). Empr. du
tamment recouveri au sens de « recouvré ». lat. de basse ép. recliludo « caractère de ce
Lat. recuperäre. It. ricoverare, esp. reco- qui est droit (au physique et au moral) ».
brar. — Dér. : recouvrable, vers 1450, d’où
irrécouvrable, 1418, d’après le lat. de basse RECTO, 1663. Abréviation de la formule
ép. irrecuperabilis (d'où vient aussi lé); latine folio reclo « sur le feuillet qui est à
recouvrement, « action de recouvrer », vers l'endroit », opposé à folio verso « sur le
1080 (Roland). feuillet qui est à l'envers » d'où verso, id. ;
comme anciennement chaque feuillet n’a-
RÉCRÉER, xive (Oresme ; on trouve vait qu’un chiffre, il fallait un nom pour
au x11e s. une forme d’ind. prés. plus fran- chacune des deux pages.
cisée recrie). Récréation, 1215, au sens de
« repos, délassement »; le sens dominant RECTUM, vers 1514. Empr. du lat.
aujourd’hui de « récréation des écoliers » médical rectum (sous-entendu inleslinum) ;
s’est développé au xviie s. Empr. du lat. le rectum a été ainsi nommé à cause de sa
recreare, recreatio. — Dér. : récréatif, 1487. forme droite.
RÉCRIMINER, 1543 ; récrimination, RECUEILLIR. Signifie aussi jusqu’au
1550, comme terme jurid. Empr. du lat. xvie s. « accueillir ». Lat. recolligere (de
médiéval recriminari (de crimen au sens colligere), avec développement parallèle à
d’ « accusation »), recriminalio. celui de cueillir, accueillir. Le sens qu'a se
RECUEILLIR 540

recueillir n’est pas attesté avant le xvrie de parler ou d'écrire; avaient jusqu’au
(Bossuet) ; il est peut-être dû en partie à XvI® s. un sens plus étendu. Empr. des
l'influence du lat. eccl., v. recollection. — mots lat. redundare « regorger, déborder »
Dér. : recueil, xiv® (Froissart) au sens (de unda « onde »), redundans, redundantia,
d’ « accueil » ; sens moderne, xvi° ; recueil- qui étaient également employés en parlant
lement, xv11°, au sens moderne ; 1429, au du style.
sens d’ « action de recueillir ».
REDOUTE, 1616, comme terme de for-
RECUIRE. Lat. pop. *recocere, lat. tification (d’Aubigné qui dit ridoitte). Em-
class. recoquere. pr. de l’it. ridotta, aujourd’hui ridotto «lieu
RÉCUPÉRER, 1495 ; récupération, 1356. où l’on se retire » (du verbe ridurre « rame-
Empr. du lat. recuperare, recuperatio, v. ner, réduire », au réfl. « se retirer »), cf. le
recouvrer. fr. réduit; devenu redoute au xvrIe s.
d’après le verbe redouter. Au sens de «lieu
RÉCURRENT, 1541, en parlant des où l’on s’assemble pour jouer et danser »,
nerfs ; comme terme de mathém., 1713. repris au xvirie s. à l’it., parfois sous les
Empr. du lat. recurrens, part. prés. de formes ridoilo, ridoile, rapidement assimi-
recurrere « Courir en arrière ». lées à redoute, terme de fortification. Au
XVII® s. On a dit aussi réduit au sens de
RÉCUSER, xrIe. HRécusation, 1332. «lieu de réunion » d’après l’it. auquel réduit
Empr. des mots lat. recusare, propr. « re- doit aussi son emploi comme terme de for-
fuser », recusalio, avec leur sens jurid. — tification.
Dér. : récusable, 1529. V. irrécusable.
RÉDACTEUR, 1752; rédaction, 1560. REDOUTER, v. douter.
Dér. sav. de redacius, part. passé de redi- RÉDOWA, 1855. Empr. de l’all. Re-
gere, pour servir de noms d'agent et d’ac- dowa, empr. lui-même du tchèque rejdovak,
tion au verbe rédiger. — Dér. : rédaction- sorte de danse rustique de Bohême.
nel, 1907.
RÉDUIRE, 1370, aux sens de « ramener,
REDAN, v. dent. rétablir », sens principaux du mot jus-
REDDITION, 1356. Empr. du lat. de qu’au xvi®s.; Cf. aujourd’hui réduire une
basse ép. reddilio (de reddere « rendre »). fracture ; réduction, xir1°; sens parallèle
au verbe. Empr. du lat. reducere « rame-
RÉDEMPTEUR, x11° ; rédemption, id. ner », d’où les sens nouveaux du fr. (fran-
Empr. du lat. eccl. redemptor, redemptio, cisé d’après conduire), et du dér. reductio,
propr. « celui qui rachète, rachat » (de redi- dont le sens a suivi celui du verbe. — Dér.
mere), V. rançon; rédemption est aussi du verbe d’après reducius, part. passé de
jurid. au sens de « rachat, rançon » depuis reducere réductible, xvi®, irréductible,
le moyen âge, comme le lat. redemptio. 1676 ; réductif, 1314.
L’a. fr. a fait sur le verbe raembre « rache-
ter », v. rédimer, un subst. raembeor (au RÉDUIT, xrre. Reduit a été refait à une
Cas sujet raemberres), qui a été de quelque date qu'on ne peut déterminer en réduit
usage au sens de « rédempteur ». d’après réduire et représente le lat. pop.
reductum, neutre pris substantiv. de reduc-
RÉDHIBITOIRE, xive. Empr. du lat. lus « qui est à l'écart », cf. pour ce sens
jurid. redhibilorius (de redhibere « rendre redoute ; reduit ne peut pas être un dér.
un objet vendu », proprement « rendre, de réduire qui est non seulement tardif,
restituer »), cf. aussi rédhibition, 1549, du mais dont les sens ne concordent pas avec
lat. jurid. -tio ; dans un sens plus étendu, celui de réduit « lieu retiré ».
depuis 1869.
RÉDUPLICATION, 1520, comme terme
RÉDIGER, 1455. Empr. du lat, redigere, de rhétorique. Empr. du lat. de basse ép.
propr. « ramener »; le sens du fr. est dû reduplicalio, de même sens (de reduplicare
à un développement qui lui est propre et « redoubler », de duplus, « double »). En
qui est parti de celui de « disposer, arran- 1503, comme terme médical, dér. sav. du
ger » que redigere a parfois ; v. rédacteur, lat. reduplicare « redoubler ». — Dér. :
rédaction. À parfois aussi été pris du xrv® réduplicatif, 1679, avec la terminaison -atif,
au xvI*s. au sens « réduire (en servitude, fréquente dans les adjectifs de formation
en cendres) ». savante.
RÉDIMER, xive (Deschamps), comme RÉEL, 1283 (Beaumanoir), comme ter-
terme de langue religieuse. Empr. du lat.
redimere «racheter », qui avait donné l’a. fr. me jurid. ; au sens philosophique, xvre ; a
pris un sens plus étendu depuis la fin du
raembre, disparu devant rédimer. XVIII $. ; l’adv. réellement est devenu par-
REDINGOTE, 1725 : « Redingote, habil- ticulièrement pop. au sens de « véritable-
lement qui vient des Anglais et qui est ment »; parfois francisé au x1ve s. en
ici très commun à présent. surtout pour roial, qui n’a pas pu se maintenir à côté
monter à cheval », Barbier, Chronique de de royal « de roi ». Empr. du lat. médiéval
la Régence. Empr. de l’angl. riding-coat, realis (de res « chose »). — Dér. d'après
littéral. «habit (coat) pour monter à cheval l’a. fr. real, autre forme de réel : réaliser,
(riding) » ; francisé d’après la forme écrite. 1495, au sens jurid. ; « rendre réel » en
général, xvii; réaliser sa fortune, a été
REDONDER, vers 1200. Redondant, créé vers 1719, cf. : « Ceux qui avaient
X111e (J. de Meung). Redondance, xive. Ne réalisé : c'était un terme nouveau introduit
se disent plus depuis que d’une manière dans la langue par ce système (de Law) »,
ai REFRAIN

Voltaire, Parlement de Paris. Sous l’in- RÉFLECTEUR, 1808. Dér. sav. du lat.
fluence de l’anglo-américain {o realize, réa- reflectus, part. passé de reflectere, v. réflé-
liser a pris à la fin du xixe s. (en 1895, chir.
chez P. Bourget) et surtout depuis une REFLET, 1677. Empr., comme terme
vingtaine d’années le sens de «comprendre, de peinture, de l’it. riflesso (empr. lui-
se représenter »; d'où réalisable, 1780 même du lat. de basse ép. refleæus « retour
(Mirabeau), irréalisable, 1842, réalisation, en arrière » pour servir de nom abstrait au
1544, au sens jurid.; réalisme, 1850, verbe rifleltere « refléter »), d’où sens plus
surréalisme, 1924, réaliste, 1796, comme étendu dès le xvrr1e s. Orthographié reflel
termes d'art et de littérature ; comme d’après le lat. reflectus et aussi, dès 1662
termes de philosophie, le premier en 1803, et au xvirie s., reflex d'après reflexus. —
le deuxième en 1798; comme terme de Dér. : refléter, 1762.
scolastique, xvi® ; réalité, xIv°.
RÉFLEXE, 1556; une première fois,
RÉFECTION, vers 1120. Empr. du lat. en 1372; jusqu'au xixe s., terme de phy-
refectio (de reficere « refaire ») pour servir sique ; 1870, comme terme de physiologie.
de nom abstrait à refaire. À signifié aussi Empr. du lat. reflexus, part. passé de re-
au xvi® et au XVIIe Ss. « nourriture », sens flectere, en vue de ces sens techniques, v.
également attesté en lat. réfléchir.
RÉFECTOIRE, xu° (écrit alors refec- RÉFLEXION, xive (Oresme), comme
loir ; en outre formes variées au moyen terme de physique ; à la même époque pris
âge : refeitor, etc.). Jusqu'au xvri° s. s’em- comme terme d'anatomie. Empr. du lat.
ploie surtout en parlant des communautés de basse ép. reflexio « action de tourner en
religieuses. Empr. du lat. médiéval refec- arrière » (de refleciere, v. les préc.) pour
torium, neutre pris substantiv. de l’adj. de servir de nom abstrait à réfléchir; a
basse ép. refeciorius « qui restaure » (de reçu, en outre, au xvii® s. son sens intel-
reficere, v. le préc.). lectuel d’après réfléchir. — Dér. au dernier
RÉFÉRENDAIRE, 1310 (Fauvel, sous sens : irréflexion, 1785, d'après irréfléchi.
la forme -ares). Ne s'emploie aujourd'hui REFLUER, 1488. Empr. du lat. refluere
que pour désigner un magistrat de la Cour « couler en arrière », qui se disait notam-
des Comptes. A désigné sous l’ancien ré- ment de la marée.
gime divers officiers, notamment de la
chancellerie, depuis le xiv® s. Empr. du RÉFORMER, xu° ; réformateur, 1332;
réformation, 1213. Empr. du lat. reformare,
lat. de basse ép. referendarius « chargé de reformator, reformatio ; il est difficile de
ce qui doit être rapporté » (de referre, v. le
suiv.), qui a servi au moyen âge et depuis dater la prononciation ré-, le moyen âge
ne se servant pas d’accents. Réformation
l’époque mérovingienne à désigner certains n’a servi comme réforme à désigner la révo-
officiers. lution religieuse du xvi® s. qu’au XVIIe S.
RÉFÉRENDUM, 1781. Terme de droit — Dér. du verbe : réformable, 1521, irré-
constitutionnel, mot lat., neutre referendus, formable, 1725 ; réforme, 1640 ; réformiste,
de l’adj. verbal de referre, propr. « ce qui terme politique, 1836.
doit être rapporté », v. le suiv. Ecrit RÉFRACTAIRE, 1539. Empr. du lat.
referendum jusque vers 1950 et encore refraciarius « indocile » (de refragari « bri-
aujourd’hui par certains ministères, excepté ser »). Comme terme de physique, 1762,
en Suisse, où le référendum est une insti- - doit ce sens à réfraction.
tution constitutionnelle depuis près d’un
siècle. RÉFRACTION, vers 1360. Empr. du lat.
de basse ép. refractio « réfraction (de la lu-
RÉFÉRER, xive (Oresme), au sens de mière) » (de refringere « rompre », qui se
« rapporter », plus usuel autrefois qu’au- disait aussi de la réfraction des rayons du
jourd’hui, cf. cependant se, s’en référer à ; soleil). — Dér. : réfracter, 1739.
en outre acceptions jurid. Empr. du lat.
referre « rapporter ». — Dér. : référé, REFRAIN, vers 1260. Antér. refrail,
1806 (Code), au sens moderne; antér. part. passé pris substantiv. de l’anc. verbe
« rapport que fait un juge sur un incident refraindre, propr. « briser », d’où « répri-
d’un procès » ; référence, 1845. mer, modérer, contenir » et, en parlant de
la voix, « moduler », lat. pop. *refrangere,
RÉFLÉCHIR, « renvoyer », en parlant réfection, d’après le simple frangere, du
de la lumière, du bruit, etc., xvrie. Empr. lat. class. refringere, d’où aussiit. rifrangere
du lat. refleciere « fléchir », d’où « faire « rompre », a. pr. refranher « réprimer »
tourner », en vue de ce sens spécial, et et aussi « moduler », ce qui explique le
francisé d’après fléchir. À été empr. antér. sens de refrain « partie d’une chanson qui
depuis le xrr1° jusqu’au xvi® s. dans la revient à intervalles réguliers en brisant
langue de l'anatomie, au sens de « se re- la suite du chant ». La modification de
courber, se relier ». Le sens grammatical refrait en refrain est due à l’action de
est également lat. — Dér. : réfléchisse- refraindre ; l'a. pr. refranh « chant des
ment, XIVe. oiseaux, refrain » (lui-même tiré de re-
RÉFLÉCHIR, « penser mürement à franher, cf. aussi refrach « chant des oi-
quelque chose », xviie (Bouhours préfère seaux ») n’est attesté qu’une fois. Les sens
encore faire réflexion). Empr. du lat. reflec- de « moduler » et de « refrain » sont posté-
ere (meniem, animum) « détourner son rieurs au lat.; ils se sont développés
esprit vers ». — Comp. : irréfléchi, 1786. en fr., peut-être d’abord dans les chansons
V. réflexion. de danse.
RÉFRANGIBLE 542

RÉFRANGIBLE, 1720 ; réfrangibilité, id. RÉGALE, anc. terme de droit, 1246,


Empr. des mots angl. refrangible, refran- Empr. du lat. médiéval regalia (sous-en-
gibility, créés par Newton d’après le lat. tendu jura) « droits du roi ».
refringere avec le radical de frangere qui
lui a paru plus clair, v. réfraction. RÉGALIEN, vers 1610. Dér. sav. du lat.
regalis « royal ».
RÉFRÉNER, vers 1120. Empr. du lat.
refrenare, propr. « retenir par le frein (fre- REGARDER, v. garder.
num) ».
RÉGATE, 1679. S’est dit d’abord de
RÉFRIGÉRANT, xive (rare avant le courses de bateaux à Venise, Empr. du
XVI® s.); réfrigératif, xive (Oresme) ; ré- vénitien regata, propr. « défi », tiré du verbe
frigération, 1520. Le premier est empr. du regalar « rivaliser », qui est très probabl.
lat. refrigerans, part. prés. du verbe refri- un dér. de l’it. gatlo « chat », les chats pas-
gerare « refroidir », de frigus « froid » sant pour très querelleurs. Dit d’une sorte
(refrigérer, 1380, est rare ; maïs aujourd’hui de cravate analogue à celle que portent les
le part. passé est assez usuel), les deux marins, fin xixe,
autres sont empr. du lat. refrigerativus
(créé à basse ép.), refrigeratio. RÉGÉNÉRER, au sens moral, xi°
(Alexis), emploi dominant au moyen âge ;
RÉFRINGENT, 1720. Empr. du lat. re- régénération, vers 1170. Empr. du lat. eccl.
fringens, part. prés. de refringere « briser », regenerare, propr. « faire renaître », rege-
v. réfraction. — Dér. : -ence, 1808. neralio.
REFUGE, xr1e. Empr. du lat. refugium
(de refugere « se réfugier »); l’a. fr. dit RÉGÉNÉRER, « produire par une nou-
surtout refui, forme plus francisée, v. fuir. velle génération », 1314, dans la langue de
— Dér. : réfugier, 1473, d’après la forme la médecine. Empr. du lat. regenerare, v.
du lat. refugium. le préc. — Dér. régénération, 1314 ;
régénérateur, 1495.
REFUSER. En a. fr. signifie aussi « re-
pousser, écarter, répudier » et « reculer ». RÉGENT, 1261 (désigne alors un régent
Lat. pop. *refüsäre, qui paraît être une d'université) ; comme titre politique, xvre.
altération de recüsäre au sens de « refuser » Empr. du lat. regens, part. prés. de regere
par croisement avec refüläre, propr. « réfu- « diriger ». — Dér. : régence, 1488, sens
ter », qui a pris aussi à basse ép. le sens de parallèle à celui du verbe ; régenter, vers
« refuser ». L’esp. rehusar représente le 1420, id.
même type étymologique que le fr. refuser. RÉGICIDE,
— Dér. : refus, xrre. celui qui commet l'acte,
XVI°; « l’acte lui-même », id. Empr. des
RÉFUTER, 1520 ; réfutation, id. Empr. mots du lat. médiéval regicida, regicidium,
du lat. refutare, refutatio. — Dér. du verbe : faits sur le modèle du lat. class. homicida,
réfutable, 1552, rare avant le xixe. V. irré- homicidium ; v. parricide.
futable.
REGAIN, xri° (sous la forme regain).
RÉGIE, v. régir.
Comp. de l’a. fr. gaïn, de même sens, encore REGIMBER, x1I°; propr. « résister,
usité dans les patois de l'Est et du Nord- ruer (en parlant d’un cheval, etc., touché
Est, qui représente une forme de latin par l’éperon, etc.) » ; sens fig. dès le moyen
gallo-roman *waidimen, faite avec un fran- âge. Forme nasalisée de regiber (encore
cique *waida, qu’on restitue d’après l’anc. usité au xvie), dér. d’un anc. verbe giber
haut all. weida « prairie, fourrage », cf. ga- « secouer », d’origine inconnue.
gner ; l’m étymologique existe encore dans
l'adj. (prez) gquimaulx, employé par Rab. RÉGIME, xrr1e (sous la forme regimen,
Le préf. re- s'explique par le fait que le encore usitée au x1v® s.) ; d’abord au sens
regain est une deuxième coupe, une re- d” « action de régir, gouvernement », jus-
coupe ; la plupart des termes qui désignent qu’au XVIIe s., encore chez Bossuet ; d'où
le regain dans les patois commencent aussi les sens modernes à partir du xvre s., v. le
par re- : revivre dans le Sud-Est, recor (issu suiv. ; au sens d’ « assemblage de fruits
du lat. chordum (fenum) dans la région (bananes, etc.) », 1787 (B. de Saint-Pierre).
franco-provençale), refoin dans le Sud- Empr. du lat. regimen « direction, gouver-
Ouest, etc.
nement » (de regere « diriger »).
RÉGAL, xv® (faire regalle et banquet) RÉGIMENT, 1314, au sens de « régime
; (médical) », cf. encore chez Brantôme « pour
l’orthographe régale est encore chez Mo-
lière ; on trouve dès 1314 dans Fauvel, rigale. dire un régiment, ils disent un régime »;
À signifié d’abord « partie de plaisir offerte au sens général de « direction », xve, d’où
à quelqu'un », d’où le sens moderne, le sens moderne de « corps de troupe sous
XVII. Les mots it. regalo, regalare sont les ordres d’un colonel », 1553 (sens empr.
postérieurs à notre régal, d’où ils viennent de l’all. Regiment, qui est antérieur). Empr.
comme l'indique le préf. re- (au lieu de du lat. de basse ép. regimentum « conduite,
ri-). L’a. fr. rigale est tiré de l’a. fr. gale direction » (de regere, v. le préc.). — Dér. :
« réjouissance », v. galant, et il a emprunté régimentaire, 1791 ; enrégimenter, 1722.
son préf. à l’a. fr. rigoler « se divertir », RÉGION, xxre, Empr. du
ce qui a été facilité par l'identité de son lat. regio,
propr. « direction » (de regere « diriger »).
et de sens. Dans régal le préf. ri- a été L’a. fr. a possédé une forme
remplacé par ré-, qui est beaucoup plus Pop. reion,
roion, qui n’a pas dépassé le xrve s., cf.
PEUR — Dér. : régalade, 1719 ; régaler, aussi it. rione « quartier (dans
07. une ville) ».
— Dér. : régional, 1348, une première fois
543 RÉINTÉGRER

en 1538 (le lat. de basse ép. regionalis est au xvie s. L’a. fr. dit aussi regrater, forme
trop rare pour avoir servi de modèle), qui survit jusqu’au xvirie s. dans l’angl.
régionalisme, 1875, régionaliste, fin xiIx®. regrale (pour regrel, qui est plus récent).
Dér. peut-être de l’anc. scandinave grâia
RÉGIR, 1409. Empr. du lat. regere « diri-
« pleurer, gémir » (de la famille du gotique
ger, gouverner ». — Dér. : régie, xvI®, pour
grétan « pleurer, se plaindre », cf. aussi l’an-
des sens administratifs particuliers ; régis- gl. lo greel « pleurer ») ; l'alternance des
seur, 1740, id.
voyelles a, e s'explique probabl. par un
REGISTRE, xrr1e. La prononciation re- verbe comme acheler : achale. Le préf. re-
gître était encore usuelle au xvuie s. Empr. a été joint au verbe par analogie avec les
du lat. de basse ép. regesta « registre, cata- nombreux verbes de la vie affective et
logue », plur. neutre, pris substantiv., de intellectuelle qui commencent par re- (re-
regesius, part. passé de regerere «rapporter, peniir, remembrer, recorder, etc.). — Dér. :
inscrire »; la forme regesie est très rare regret, x11° ; regrettable, 1478.
(elle a été reprise avec un sens techn. par
les historiens, 1870) ; registre paraît avoir RÉGULARISER, 1794 ; régularité, xive
(Oresme). Dér. sav. du lat. regularis « régu-
été refait sur épisire. Pour l'emploi techn.
de regisire au sens de « règles de bois lier » (de basse ép. en ce sens ; « qui a la
forme d’une règle, d’une barre » à l’époque
d’un orgue que l'organiste tire pour se impériale, de regula, v. règle). — Dér. du
servir des différents jeux », d’où registre verbe : régularisation, 1323.
en parlant de la voix, xvie, cf. le lat. mé-
diéval regisirum campanæ « corde de clo- RÉGULATEUR, 1765. Dér. sav. du lat.
che »; l'emploi de registre au sens de de basse ép. regulare « régler ».
« régulateur » dans diverses techniques se
rattache à ce sens. — Dér. : enregistrer,
RÉGULIER, xr1°, sous la forme regu-
x, d’où enregistrement, 1310, enregis- ler, d’où regulier, 1308, par substitution de
suff., v. bouclier, sanglier, singulier. Empr.
treur, 1829, une première fois en 1310 au
sens de « celui qui enregistre ». du lat. regularis, v. régulariser. L'’a. fr. a
employé des formes reuler, rieuler, franci-
RÈGLE, xnu°. Empr. du lat. regula; a sées d’après reule, rieule, v. règle.
éliminé une forme plus francisée rieule, qui
n’a pas atteint le xvie s. (d’où l’angl. rule). REIN. Lat. rên. It. rene. Le pluriel seul
L’a. fr. a eu en outre une forme pop. reille a toujours appartenu à la langue, avec
« ais, bardeau, etc. ». — Dér. : régler, 1288, le sens qu’il a encore aujourd’hui. Le sing.
d'où réglage, 1836, réglement, 1538, désignant l’organe intérieur de l'homme est
réglementaire, 1768, réglementation, 1845, attesté pour la 1re fois dans un texte
réglementer, 1768, régleur, 1606; réglette, médical du xive s., ensuite seulement
1680, en 1478, rieulette ; dérégler, vers 1280,
depuis 1538. Il a sans doute été emprunté
du latin par la médecine. V. rognon. —
d’où déréglement, xve.
Dér. : éreinter, 1690, propr. « rompre les
RÉGLISSE. Le grec glykyrrhiza, propr. reins » ; a éliminé en ce sens un ancien verbe
« racine douce », a été empr. par le lat., esrener, vers 1130, encore usité dans les
où il est devenu, à basse ép., liquirilia, patois ; éreintement, 1842, usité seulement
sous l'influence de liquor. De là l’a. fr. au sens fig.
licorece, xx1°, licorice, d’où par métathèse
ricolice, xu1°-x111°, réglisse, 1393, probabl. REINE. D'abord reine, puis reine; par-
sous l'influence de règle, la réglisse étant fois roiïne d’après roi au moyen âge. Lat.
vendue en forme de longs bâtons. Parmi rêgina. It. regina, esp. reina. — Comp. :
vice-reine, 1718.
les nombreuses autres déformations rey-
galisse, xvie, est une interprétation du mot REINE-CLAUDE, 1690. Tiré du nom de
par rai (de radix) de Galice, la Galice ayant la reine Claude, épouse de François Ier.
été longtemps le principal fournisseur de On a dit aussi prune de la reine-claude
réglisse (rai de Galice encore en Suisse). (1628) ; écrit souvent reine-glaude, suivant
RÈGNE, x° (Saint Léger); jusqu’au une prononciation encore répandue dans
XvI°s. signifie surtout «royaume » ; régner, les patois.
xe. Empr. des mots lat. regnum « royauté, REINETTE, 1611, pomme de renelle,
royaume, règne », regnare. dès 1535, pomme de rainelle encore en 1694.
RÉGNICOLE, 1509. Empr. du lat. mé- Il est évident que dans cette combinaison
diéval regnicola, fait sur le modèle du lat. renelle ne peut pas se rattacher au lat.
agricola, etc. rana, Comme on l’a cru, mais que c'est un
diminutif de reine. Ce mot et ses dér. sont
REGRATTIER, v. gratter. souvent employés pour désigner des fruits,
RÉGRESSIF, 1842; régression, 1877. des plantes qu'on estime particulièrement
Faits sur le modèle de progressif, progres- (reine « esp. de tulipe », roynelle « spirée
sion auxquels ils s'opposent, d’après le lat. ulmaire », etc.). V. rainette.
regressio « marche en arrière » (de regredi RÉINTÉGRER, 1352. terme jurid. qui
« retourner en arrière »). Le lat. regressio atsignifié « rétablir, reprendre possession
a été empr. une première fois au xIv® s. dé » (cf. l'expression moderne réintégrer le
au sens propre et au xviri® s. dans une domicile conjugal ; au xvi£s. on a une locu-
acception de la langue de la rhétorique. tion analogue), « rétablir dans la possession
REGRETTER, xi® (Alexis). Signifie de quelque chose », d’où diverses acceptions
spécial. au moyen âge « se lamenter sur (mais en mathém. c’est un comp. d’inté-
un mort » ; le sens moderne a pris le dessus grer). Empr. du lat. médiéval reinlegrare,
RÉINTÉGRER 544

en lat. anc. redintegrare « rétablir, remettre verbe depuis le xvre s.; ont reçu en 1885
dans son premier état » (de inieger « in- une nuance jurid. nouvelle. Empr. des mots
tact »). — Dér. : réintégration 1326, déve- lat. relegare « bannir », « reléguer » (c'est-à-
loppement de sens parallèle à celui du dire « bannir temporairement »), relegatio
verbe. (de sens parallèle à celui du verbe).
RÉITÉRER, 1314; réitération, 1419. RELENT, 1608. Issu d’un ancien adj.
Empr. du lat. reiterare (de iterare) « recom- relent, vers 1200, encore usité au début du
mencer », reiteratio. — Dér. : réitératif, XVIIIE $.; au moyen âge se disait souvent
1495. à propos de cadavres. Du lat. lentus, qui
REÎTRE, xvi® (Ronsard). Empr. de avait aussi le sens de « visqueux », encore
l’all. Reiter « cavalier » ; mot introduit par vivant à Mons, d’où « humide, moite »,
les mercenaires au service de la France. sens très vivant (Berry, Bourgogne, Midi),
aussi dans l’esp. liento, le rhéto-roman lien,
REJETER. Lat. de basse ép. rejectare. le sarde lentu, le cat. rellent, de même pic.
— Dér. : rejet, 1241 ; rejeton, 1539, a rem- relent « moiteur ». Le préf. re- aura pro-
placé un anc. jeion, même sens, xrr1e- babl. exprimé d’abord le fait que l’objet
XVIIe (encore dans les patois), dér. de jeter en question a été enfermé dans un endroit
« produire des scions (d’une plante) ». humide pendant un laps de temps excessi-
vement long.
RELAPS, 1431 (sous la forme relapse,
Procès de Jeanne d'Arc). Empr. du lat. RELEVER. Lat. relevare. — Dér. : rele-
médiéval des théologiens relapsus, tiré du vaille, 1322; relève, 1872; relevée, xrr°,
part. passé du verbe du lat. class. relabi c’est-à-dire « le temps après la méridien-
« retomber ». ne »; relevé (de compte), 1740; relève-
RELATER, 1362. Terme de procédure, ment, x11° ; relief, vers 1050 (Alexis), com-
dér. sav. du lat. relaius, part. passé de me t. de sculpture, 1571, d’après l’it. rilie-
referre au sens de « rapporter, raconter ». vo, d’où bas-relief, 1633, d’après l’it. basso
rilievo, puis haut-relief, 1669.
RELATIF, terme didactique, 1256. Em-
pr. du lat. de basse ép. relativus, adj. de RELIGION, vers 1085 ; religieux, 1174 ;
religiosité, xi11°. Empr. des mots lat. reli-
relalio au sens philosophique, v. relation,
— Dér. : relativité, 1805 ; relativisme, -iste, gio, religiosus, religiositas (terme eccl.).
fin xixe. Religiosus désigne déjà en latin eccl. « celui
qui appartient à un ordre monastique ».
RELATIF, terme de grammaire, x1ve Religion signifie aussi au moyen âge « com-
(Oresme). Empr. du lat. des grammairiens munauté religieuse », et enirer en religion
relativus, adj. de relatio au sens gramma- se dit depuis le x1r1° s. — Dér. du premier :
tical, v. les suiv. religionnaire, 1562, d’après l’emploi de
religion, au xvi® et au xviI® s. pour dési-
RELATION, « récit, narration », xr1re. gner spécialement la religion protestante.
Empr. du lat. relatio, v. relater.
RELIQUAT, 1409 ; antér. reliqua, x1v®,
RELATION, terme didactique, xive usité jusqu’à la fin du xvie s. (s’employait
(Oresme) ; d’où « rapports d'amitié », xvie. notamment dans la formule rendre (bon)
Empr. du lat. philosophique relatio, v. les compile ei reliqua), empr. du lat. reliqua
préc.
« reste », plur. neutre de l’adj. reliquus « qui
RELAXER, fin xn1°, comme terme reli- reste ». La forme reliquat est refaite sur le
gieux ; vers 1320, comme terme jurid., lat. de basse ép. reliquaium « reliquat » (de
d’abord au part. passé ; s’est employé au reliquare « avoir un reliquat ») ; d’où aussi
sens général de « remettre à plus tard », reliquataire, 1566, « celui qui doit un reli-
XIVe (Froissart) et comme terme de méde- quat ».
cine, xvI® (Paré) ; relaxation, xvrr° comme
RELIQUE, vers 1080. Empr. du lat.
terme jurid.; au sens médical, 1314.
Empr. des mots lat. relaxare « relâcher », reliquiae «restes », qui a pris un sens partic.
relatatio (qui a déjà à basse ép. le sens en lat. eccl. — Dér. : reliquaire, 1328.
d’ « élargissement d’un prisonnier »). — RELUIRE. Lat. relücére; développe-
Dér. : relaxe, 1870 (une 1re fois en 1671). ment parallèle à celui de Zuire.
RELAYER, xrr1e, terme de chasse, con- RELUQUER, vers 1750 (dans un texte
cernant les chiens, d'où « prendre un cheval poissard). Mot pop. et fam. Empr. du
de relais », xvI® ; sens plus étendu au xvrre. moyen néerl. loeken, de la famille de l’angl.
Comp. de l’anc. verbe laier « laisser »; lo look. La voyelle u (au lieu de ou, cf. le
propr. « laisser les chiens fatigués pour en liégeois riloukt, comp. de louki), s'explique
prendre de frais » ; v. délai. — Dér. : relais, probabl. par l'influence de luquet « œil-de-
XVIe; d’abord relai, xrr1e, altéré en relais bœuf » (Flandres xve, du moyen néerl.
d’après le verbe relaisser qui s’employait lûke « fermeture ») et de lucarne.
au réfléchi comme terme de chasse au sens
de « s'arrêter de fatigue », ou simplement REMAKE, 1962. Empr. de l'angl.
d’après le post-verbal relais « ce qui est remake « faire de nouveau » dans une
laissé », attesté depuis le xr1e s. dans diffé- acception spéciale.
rentes techniques.
REMBALLER, v. balle.
RELÉGUER, 1370 (Oresme). Reléga-
tion, id. Employés d’abord comme REMBARRER, v. barre.
termes
d’antiquité romaine ; sens plus étendu du REMBLAI, REMBLAYER, v. blé.
545 RÉMUNÉRER

REMBÜCHER, v. bûche. REMORDRE. Lat. remordére ; remordre


REMÈDE, vers 1190 ; s’est employé par a suivi le développement de mordre. Le
euphémisme au xvII® s. au sens de « lave- sens moral, attesté dès le xr1° s., hors
ment »; meitre remède, xIvV®; remédier, d'usage depuis le xvrrre, appartient déjà
1355 (Bersuire) ;remédiable, xive (E. Des- au lat. class. et a été maintenu par la
champs) ; rare avant le xix® s. Empr. du langue de l’Église. — Dér. : remords, xrr1®
lat. remedium, remediare; on a dit au (écrit remors), tiré de l’anc. part. passé du
moyen âge remire, forme plus francisée de verbe ; remords, qui apparaît vers la fin du
remedium. XIVe s., est une modification purement
graphique d’après remordre ; cf. it. rimorso,
REMÉMORER, 1374. Empr. du lat. de esp. remordimiento.
basse ép. rememorari (employé par des
auteurs eccl.), fait sur le modèle de com- REMORQUER, 1530. Empr. de lit.
memorari, Variante de basse ép. du lat. rimorchiare, qui se rattache au lat. de
class. commemorare. À éliminé une forme basse ép. (attesté dans des gloses) remul-
Pop. remembrer, hors d’usage depuis le care, dérivé de remulcum « corde de ha-
XVI® Ss., sauf par affectation archaïsante lage », mot d’origine grecque. Remolquer
au xvIIe Ss., comme le dér. remembrance. de Rabelais, IV, 21, est empr. de l'esp.
remolcar. — Dér. : remorque, 1694 ; remor-
RÉMÉRÉ, vers 1470. Empr. du lat. queur, 1823.
médiéval reemere « racheter » (le lat. class.
disait redimere). RÉMOULADE, sorte de sauce, 1693
REMETTRE. Lat. remitiere ; le sens de
(sous la forme ramolade). Paraît être une
remeiire, cf. notamment « mettre de nou-
altération du rouchi rémola « gros radis
veau », a suivi celui de meitre sur lequel
noir » ou du picard ramolas (eux-mêmes
remeitre a été sans cesse refait. Les sens formes altérées du lat. armoracia, -cium
de « livrer, pardonner » qui ne semblent « raifort sauvage ») avec le suff. -ade, fré-
pas avoir été usités avant le xve s. sont quent dans les termes de cuisine, cf. sur-
tout salade. Rémoulade, ancien terme de
probabl. repris au lat. (remitiere signifie
en lat. class. « faire remise d’une peine », vétérinaire, 1640, « sorte d’onguent pour
les chevaux », empr. de l’it. remolata (de
d’où, en lat. eccl., « pardonner »); au remolo « son », lat. des gloses remolum),
moyen âge remeltre a aussi les sens de
paraît avoir aussi agi sur la forme du pré-
« repousser, vomir, fondre », également
cédent.
latins ; le dernier sens a été particulière-
ment usité, d’où le part. remis au sens de RÉMOULEUR, 1334. Dér. du verbe ré-
« mou, paresseux ». Dans tous ces cas il moudre, 1680, issu lui-même de l’anc. verbe
est difficile de distinguer ce qui est repris émoudre, V. émoulu.
et ce qui est traditionnel. — Dér. : remise,
vers 1500, au sens d’ « action de remettre, REMOUS, 1687 (écrit remoux). Empr.
replacer » (déjà en 1311, dans un texte du prov. remou, qui n’est qu’en apparence
jurid., en un sens qui n’est pas clair); tiré du verbe remoure « mouvoir en arriè-
comme terme de chasse, 1564 ; au sens de re »; le prov. dit en effet aussi revou qui
« lieu où l’on met les voitures à couvert », vient, comme l’anc. revolim, du verbe re-
xvI1e (d’où remiser, 1761 (J.-J. Rousseau), volver « retourner » ; remou est une réfection
remisage, 1867); comme terme de com- récente de revou d’après remoulina « tour-
merce, xvIIe, d’où divers emplois nouveaux noyer », lat. pop. *remolinäre « tourner
dans la langue du commerce et de la comme un moulin », cf. de même it. rimo-
finance, d’où remisier, 1860. linare, esp. remolinar ; l’a. pr. revolinar
RÉMIGE, adj. et subst. fém., 1789. « tourbillonner » montre l’action inverse de
Empr. du lat. remex, remigis « rameur »; revolver sur remolinar qui n’est pas attesté
pris en fr. en parlant des ailes d’après le directement à date ancienne. Le sens voi-
sin des deux verbes explique qu'ils se soient
sens de remigium (alarum) qui se trouve
chez Virgile. influencés ainsi réciproquement.

RÉMINISCENCE, xive. Empr. du lat. REMPART, v. emparer.


philos. de basse ép. reminiscentia (de remi-
nisci « se souvenir »). REMUER, v. muer.
REMISE, etc., v. remettre. REMUGLE, 1507 (le simple mugle est
attesté vers 1330 comme nom d’une maladie
RÉMISSION, x1r° ; rémissible, xive. Em- des yeux). De l’anc. nor. mygla « moisis-
pr. du lat. eccl. remissio (de remiliere, v. sure ». Le norm. mucre « moisi », attesté
remettre), remissibilis. depuis le xirI® s. (aussi chez Maupas-
RÉMITTENT, 1803. Empr. de remillens, sant), remonte probabl. à l’anc. nor.
part. prés. de remillere « se calmer » ; comp. mjükr « mou, souple »; il a modifié son
chez le médecin romain Celsus febres sens sous l'influence de remugle. Pour la
remilluntur. formation avec le préf. re-, v. relent.
RÉMORA, xvie (Paré) ; en outre remore, RÉMUNÉRER, 1358; rémunérateur,
1562 (Rab.). Empr. du lat. remora, subst. x1r1e, rare avant le xvi®; rémunération,
verbal de remorari « retarder, arrêter » ; ce 1302. Empr. des mots lat. remunerare,
poisson a été ainsi nommé parce que les remunerator (créé à basse ép.), remuneratio
anciens lui attribuaient le pouvoir d’arré- (de munus, muneris « présent »). — Dér.
ter les vaisseaux. du verbe : rémunératoire, 1514.
DICT. ÉTYM. 35
RENÂCLER 546

RENÂCLER, xvrie ; propr. « renifler en RENÉGAT, 1575. Empr. de l’it. rinnegalo


signe de mécontentement », d’où sens plus « qui a renié sa religion », de rinnegare.
étendu, xviie. Altération, par croisement L'a. fr. a dit de même reneié, renoié, de
avec renifler, de renaquer, xiv® (Bersuire; se reneier, se renoier ; on disait encore
forme attestée jusqu’au xvirIe s.), qui est moine renié au XVII. S.
lui-même un comp. de naquer « flairer », RÉNETTE, v. rouanne.
attesté dès le xrr1° s. sous la forme naskier
et répandu dans les patois. Représente très RENFLOUER, v. flot.
probabl. un lat. *nasicäre, dér. de nasus; RENFONCER, v. fond.
naquer peut être la forme picarde, à la-
quelle correspond une forme ndâcher du RENFORCER, xr°. Comp. de l’anc.
lorrain, etc., il peut s'être répandu dans verbe enforcier, v. enforcir. — Dér. : ren-
d’autres régions comme terme pittoresque ; fort, 1340 ; renforcement, 1388.
sur le préf. v. renfrogner. RENFROGNER, xvi° ; antér. refrogner,
RÉNAL, xvie. Empr. du lat. médical xve, encore dans les patois. Comp. de
renalis (de ren « rein »). — Comp. : sur- l’anc. verbe froignier, de sens analogue,
rénal, 1765.
xIve; on trouve à la même époque un
subst. froigne « mine renfrognée » que l’on
RENARD, 1240 (écrit d’abord renarl). considère comme d’origine gauloise, et l’on
Tiré de Renarit, nom propre d'homme, restitue *frogna d’après le gallois ffroen
d’origine germ., francique *Reginhart. De- « nez »; des formes dialectales de l'Est,
puis le 1x° s. on commence à prendre des notamment le vosgien frognon « groin »,
animaux pour héros de petits poèmes épi- sont encore plus près du sens étymolo-
ques en lat. médiéval, partic. dans les gique. Pour le préf., v. renâcler, renifler.
régions de l'Est et du Nord, où se mêlent — Dér. : renfrognement, 1553, d’abord
le fr. et l’all. C’est en Flandres qu’on paraît ref-, 1539.
appliquer pour la première fois des noms RENGAINE, 1842. Probabl. subst. ver-
humains aux animaux (en 1151 l’épo- bal de rengaîner au sens de « rentrer ce
pée latine Ysengrinus du maître Nivar- qu’on allait dire », comp. je rengaine ma
dus, dans lequel paraît aussi Reinardus). nouvelle, dans Molière, la suppression d’une
Renart apparaît comme nom propre d’un nouvelle qu’on voulait annoncer amenant
certain renard partic. astucieux dès 1211 souvent l'individu en question à la répé-
dans le Besliaire de Guillaume le Clerc, tition de ses racontars.
auteur normand. Grâce au grand succès
du Roman de Renart, au xt s., renard RENIER. Au moyen âge signifie surtout
devient la désignation préférée du renard « apostasier », rarement « refuser » ; du sens
et élimine l’anc. goupil, xi°-xvire (au xr1° 5. principal du moyen âge sont issus des sens
aussi vorpil, werpil), du lat. de basse ép. plus étendus à partir du xvire s. Lat. pop.
vulpiculus, attesté seulement en Gaule, *renegäre, qui a dû prendre dans les mi-
sorti par changement de suff. du lat. class. lieux chrétiens ce sens d’ « apostasier »,
vulpecula. La consonne initiale de goupil également attesté par lit. rinnegare, v. re-
est due à un croisement avec le francique négat, l'esp. renegar. Le développement
hwelp « petit d’un carnassier », les jeunes phonétique de renier à été parallèle à celui
renards étant autrefois souvent tenus de nier. — Dér. : reniement, xrrre.
comme animaux domestiques. Le fém. gou- RENIFLER, 1530. Dér. de l’a. fr. nifler,
pille vit encore dans des acceptions techn. encore très usité dans les patois. Le mot a
Aujourd’hui, sauf dans quelques patois une origine onomatopéique ; il imite le
des régions alpines et pyrénéennes, renard bruit qu’on fait en flairant ou en aspirant
est le mot de tout le domaine gallo-roman. la morve, de même all. niffeln « flairer » :
— Dér. : renarde, xir1e (Rutebeuf) ; re- n- rend la résonance nasale, -f le bruit de
nardeau, 1288; renardière, 1512 (relevé l'aspiration. Pour le préf., v. renâcler. —
en 1463 comme nom de lieu en Anjou). Dér. : reniflement, 1596; renifleur, 1642.
RENDRE. Lat. pop. *rendere, altération RENNE, 1552, cf. « une beste qu’ilz ap-
du lat. class. reddere sous l'influence de pellent reen », dans une traduction de la
prendere « prendre », auquel « rendre » s’op- Cosmographie de l'Allemand S. Munster.
pose. It. rendere, esp. rendir. La forme du Empr. de l’all. Reen (du xvie s.), empr.
lat. class. a laissé quelques traces : a. pr. lui-même du scandinave, cf. suédois ren,
redre, Cat. reire. — Dér. et Comp. : rende- islandais hreinn ; une autre forme islan-
ment, 1838, déjà créé une première fois au daise hreindéjri a donné all. Renniier, angl.
xI1e s. (rendement de grâces), et signalé de reindeer et a. fr. rangier, xrrr (J. de
nouveau en 1611 ; rente, xr1°, d’après un Meung), encore dans les dict. comme terme
part. *rendilus, disparu avant les premiers de blason.
textes, cf. aussi it. rendila, a. pr. renda,
d’où renter, vers 1300, rentier, x11°, arren- RENOM, v. nommer.
ter, 1213, arrentement, 1236 ; rendez-vous, RENONCER, 1247; renonciation, id.
XVIe. Empr. des mots lat. renunliare, renuntiatio,
RENDURCIR, v. dur. propr. « annoncer », « fait d'annoncer »,
qui ont pris dans les langues jurid. et eccl.
RÊNE. Lat. pop. *relina tiré du verbe les sens du français. Renoncer a eu aussi
relinere « retenir », cf. antér. retinaculum en a. fr. le sens d’ « annoncer, exposer »,
« lien, attache ». L’s de resne, vers 1080 d’où renonceur « celui qui annonce »,
(Roland), est une trace de la dentale 1. encore usité au XvI® s. — Dér. : renonce,
It. redini, esp. rienda, a. pr. renha. 1690 ; renoncement, xve.
547 REPORTER
RENONCULE, 1549 (sous la forme ra- REPAS, vers 1160, sous la forme repast,
nuncule). Empr. du lat. ranunculus, propr.
usitée jusqu’au xve s.; signifiait d’abord
« petite grenouille » ; ce nom a d’abord été surtout « nourriture (en général) », sens
donné à la renoncule aquatique, appelée encore attesté chez Marot, puis éliminé au
aussi en fr. grenouilletie, parce qu’elle profit du sens moderne à partir du xvre.
pousse dans les fossés, les étangs, sur le Dér. de l’a. fr. past « nourriture, repas », v.
bord de l’eau. — Dér. : renonculacée, 1798. appât, avec le préf. re- d’après repaître.
RENOUÉE, v. nouer. REPENTIR (se). Lat. de basse ép.
RENOUVELER. Dér. anc. de nouveau, repænilere, 1X° s., attesté aussi dans l’anc.
fait d’après l’a. fr. renover. — Dér. : renou- lomb. repentirse, anc. esp. rependirse,
veau, vers 1200; renouvelable, dér. du lat. pop. pœnitere, lat. class. paeni-
XIVE;
renouvellement, xrre. lere ; la forme pœnitire est attestée dès le
vire s. et vit aussi dans l’it. pentirsi, cat.
RÉNOVER, xix° (Balzac) ; rénovateur, penedirse ; le verbe est usité sous la forme
1787 (mais rénovairice en 1555) ; rénova- réfléchie dès le 1r1° s.; on trouve à côté
tion, xi1°. Empr. des mots lat. renovare, en a. fr. peneir et en a. pr. penedir, plus
renovaior (créé à basse ép.), renovalio. Le proches du lat. pænilére, ce qu’explique
verbe a déjà été usité au moyen âge: il le sens moral et religieux de ces verbes,
était peut-être alors de tradition pop. v. pénitence. — Dér. : repentance, xr1° ;
comme l’it. rinnovare, l’esp. renovar. repentir, subsi., id.
RENSEIGNER, v. enseigner. RÉPERCUTER, vers 1370 ; répercussion,
RENTE, v. rendre. 1314. Empr. du lat. repercutere, repercussio.

RENTOILER, v. toile.
REPÈRE, v. repaire.
RENTRAIRE, 1404. Terme techn. du
RÉPERTOIRE, xive (E. Deschamps).
Empr. du lat. jurid. repertorium (de repe-
travail des étoffes. Dér. de l’anc. verbe rire « trouver »).
entraire, propr. « tirer », qui s’est lui-même
spécialisé dans la même techn. dès le xr1°s., RÉPÉTER, vers 1200 ; répétiteur, 1671 :
lat. intrahere « traîner, tirer »; le préf. re- répétition, 1377 (Oresme); depuis 1392,
s'explique par le mouvement de va-et-vient comme terme jurid., vers 1295 au sens de
qu’on exécute avec l’aiguille ; dès 1611 les « copie ». Empr. des mots lat. repeicre,
couturières disent par confusion rentrer. repelilor (employé à basse ép., en un sens
Seulement fr. Le part. entrait a servi en analogue à celui du fr.), repelilio.
a. fr. à désigner une sorte de cataplasme,
proprement « ensemble de bandes tirées REPIC, v. piquer.
pour couvrir une plaie ». V. entrait, — RÉPIT. Lat. respectus, propr. « regard
Dér. : rentraiture, 1530 ; rentrayage, 1802 ; en arrière » (de respicere « regarder en ar-
rentrayeur, 1564. rière »), d'où « égard, recours », puis, en
lat. parlé « délai, répit ». L'’a. fr. a eu aussi
RENVERSER, 1280. Dér. de l’anc. le sens de « sentence, dicton ». V. respect.
verbe enverser, lat. pop. *inversäre (v. en-
vers), conservé aussi dans l’a. pr. enversar REPLÂTRER, v. emplâtre.
et dans quelques dialectes it. — Dér. :
renverse, xv®, la locution à la renverse est REPLET, vers 1180; replétion, xrrre.
le seul emploi du mot aujourd’hui; ren- Empr. du lat. class. replelus « rempli »
versement, 1538 ; renverseur, 1486. et du lat. de basse ép. repletio « action
de remplir », qui a dû être employé dans
RENVI, v. envi. le latin médical du moyen âge.
REPAIRE, vers 1125 au sens de « lieu RÉPLIQUER, xr11°. Empr. du lat. repli-
où se retirent les bêtes sauvages », d’où care, propr. « déplier », d’où « dérouler,
« lieu où se tiennent des gens malfaisants », raconter », et en lat. jurid. « répliquer ».
1653. Au moyen âge repaire signifie aussi — Dér. : réplique, vers 1310.
« retour chez soi », vers 1080 (Roland), RÉPONDRE. Lat. pop. *respondère, lat.
d’où « demeure »; c’est un mot tiré de class. respondère. Les sens de « se porter
l’anc. verbe repairier « revenir chez soi », garant », xir1*, et « d’être en rapport de
usité jusqu’au début du xvie s., lat. de conformité, correspondre », vers le x1ve,
basse ép. repairiäre, d’où aussi a. pr. repai- sont repris au lat. It. rispondere, esp. res-
rar ; rare ailleurs. Repère, 1578, d’où point ponder.
de repère, 1835, est le même mot, ortho-
graphié repère, d’après le verbe lat. reperire RÉPONSE, vers 1300 (Joinville). Tiré
« retrouver », dont il a été faussement rap- de répons, vers 1080 (Roland), aujour-
proché ; repérer, 1823 (répéré dès 1676), d’hui restreint à la langue de la liturgie
d’où repérage, 1845, alors comme ter- (usité au moyen âge au sens général de
me de diverses techniques d'impression; réponse), lat. responsum, avec n conservé
comme terme militaire, répandu depuis la devant s d’après répondre, cf. a. pr. respos
guerre de 1914-18. et resposa; ailleurs mots dér. du part.
passé du verbe (v. le préc.) : it. risposta,
RÉPARER, x11°; réparateur, 1350 ; ré- v. riposte, esp. respuesla.
paration, 1310. Empr. des mots lat. repa-
rare, reparalor (employé à basse ép., au REPORTER, subst., 1829 (Stendhal, en
sens du fr.), reparalio (créé à basse ép.). parlant de reporters anglais). Empr. de
— Dér. : réparable, vers 1470. l'angl. reporler, qui date, avec son sens
REPORTER 48

actuel, du début du xix° s. (du verbe fo cher ». Seulement gallo-roman, cf. a. pr.
report « rapporter », d’origine fr.). — Dér. : repropchar. L’esp. reprochar est empr. du fr.
reportage, 1865. — Dér. : reproche, vers 1080 (Roland) ;
au moyen âge, signifie aussi « honte, op-
REPOSER. Lat. de basse ép. repausäre,
probre » ; irréprochable, vers 1460, par l’in-
v. poser. It. riposare. — Dér. : repos, vers
termédiaire de reprochable, xrt1°, aujour-
1080 (Roland) ; reposée, vers 1170; repo-
d’hui rare ; -ré-, d’après réprouver.
soir, 1373, au sens d’ « endroit où l’on se
repose », usité jusqu’au xvrie s. REPRODUCTEUR, etc., v. produire.
RÉPRÉHENSION, x11° ; de peu d'usage RÉPROUVER, Lat. eccl. reprobare ;
aujourd’hui ; répréhensible, 1314. Empr. l'initiale ré- est une réfection d’après le
du lat. anc. reprehensio et du lat. eccl. re- verbe lat., due au fait que réprouver expri-
prehensibilis (de reprehendere « reprendre » me des notions morales et religieuses, v.
dans tous les sens du verbe fr.). réprobation ; au moyen âge signifie aussi
« reprocher, faire des reproches ». — Dér. :
REPRENDRE. Lat. reprendere, v. pren- réprouvable, xive (Oresme).
dre, à la fois « saisir pour retenir » et
« gourmander » ; le sens de « prendre de REPS, 1812. L'angl. rep (depuis 1860,)
nouveau » a pu se développer à toute épo- reps (depuis 1867), est le même mot, mais
que, v. re-. — Dér. : reprise, vers 1200, sens on ne sait pas si le français vient de l’angl.
variés ; comme terme de couture, n’a pas ou inversement, et l’origine du mot est
été enregistré avant le xvire s., d’où incertaine.
repriser, « faire des reprises », 1836. REPTATION, 1836. Empr. du lat.
REPRÉSAILLES, 1401 (sous la forme reptatio.
reprisailles). Empr. du lat. médiéval repre- REPTILE, 1530. Empr. du lat. eccl.
salia, qui paraît calqué sur l’it. rappresa- reptile, neutre de l’adj. reptilis du même
glia ou ripresaglia (de riprendere, v. re- lat. (de repere « ramper »), par les traduc-
prendre), propr. « action de reprendre ce teurs de la Bible, de là l'emploi de reptile
qui a été pris ». comme adj. au xv11®s., Cf. animaux reptiles
REPRÉSENTER, x1e. Comme terme chez Fénelon (qu’on peut rapprocher du
de théâtre, xvi®; comme terme de la
lat. reptile animal de saint Jérôme); on
langue politique, 1283, d’où son emploi trouve aussi en 1314 foules reptilles au
dans la langue du commerce, xix® ; repré- fém., calqué sur le plur. neutre replilia
sentation, 1250 (comme terme jurid.) ; au- de la Vuigate.
tres sens parallèles à ceux du verbe. Empr. REPU, v. paître.
des mots lat. repræsentare « rendre présent, RÉPUBLIQUE, vers 1410. Empr. du
reproduire », repræsentatio « action de met- lat. respublica « chose publique, etc. »;
tre sous les yeux, tableau (au fig.) » (de vers la fin du 1° siècle avant J.-C. il est
praesens « présent »). — Dér. du verbe : déjà devenu rare. Tite-Live et Horace
représentable, 1270 ; représentant, 1508, parlent plutôt de res romana, etc. En
comme terme jurid.; au sens politique, franç. le sens de « gouvernement répu-
1748 (Montesquieu); comme terme de blicain » apparaît dès 1410, où il se rapporte
commerce, 1875 ; représentatif, vers 1380, aux villes italiennes de constitution répu-
sens parallèle aux préc. blicaine. Ce n’est qu’au xvI® s. que réap-
RÉPRESSION, 1372 (Oresme) ; répressif, paraît, grâce au nouveau contact avec
1798, une première fois au XIV* s., comme l'Antiquité, le sens de « Etat (sans égard
terme médical. Dér. de repressus, part. à l’organisation du gouvernement) ».
passé du lat. reprimere, le premier sur le Comp. Bodin (1576) : « il n’y a que trois
modèle de suppression, oppression, le estats ou trois sortes de Républiques, à
deuxième d’après oppressif, pour servir sçavoir la monarchie, l'aristocratie et la
de subst. et d’adj. à réprimer. démocratie ». De même Rousseau : « J'ap-
pelle république tout Etat régi par les
RÉPRIMANDE, 1549 (écrit alors repri- lois, sous quelque forme d’administration
mende, qui a été modifié en réprimande à que ce puisse être ». Le sens qu’on donne à
la fin du xvi® s., sans doute d’après man- ce mot aujourd'hui a été sanctionné par
der). Empr. du lat. reprimenda (en sous- la constitution du 21 sept. 1792, qui
entendant culpa) « (faute) qui doit être proclamait la République Française. —
réprimée » (de reprimere). — Dér. : répri- Dér. : républicain, fin xvi® (d’Aubigné),
mander, 1615. d’où républicaniser, 1792, républicanisme,
RÉPRIMER, 1314 Empr. du lat, 1750 (d’Argenson).
reprimere ; la langue médicale l’emploie RÉPUDIER, xive: répudiation, vers
aussi depuis le xive s. au sens d’ « arrêter 1440. Empr. du lat. repudiare, -atio.
un effet physique ».
: RÉPUGNER, xXIv®, au sens de « résister
REPRISER, v. reprendre. à »; répugnance, x1r1°, au sens de « désac-
RÉPROBATION, 1496. Empr. du lat. cord ». Empr. des mots lat. repugnare
eccl., reprobatio (de reprobare, v. réprouver). « lutter contre, s'opposer à », d’où « être
— Dér. réprobateur, 1787. en contradiction avec », repugnantia « dé-
saccord » (sens du mot fr. jusqu’au xvr1® 5.) ;
REPROCHER. A signifié aussi dans de même l’adj. répugnant, 1213, signifie
l’ancienne langue du droit « récuser ». Lat. jusqu’au xvire s. « contradictoire » ; le sens
pop. *repropiäre, propr. « rapprocher, met- moderne de ces mots s’est développé vers
tre sous les yeux », d’où « objecter, repro- le xvire.
549 RÉSILLE

RÉPULSION, 1450, comme terme techn. ; RESCRIT, xu1°. Empr. du lat. rescrip-
antér. « action de repousser », vers 1550, tum qui désignait une réponse de l’empe-
sens plus étendu au xix® 5. ; répulsif, 1705, reur et s’est appliqué au moyen âge à des
aussi 1496. Le premier est empr. du lat. bulles du pape; rescrit se dit depuis le
de basse ép. repulsio, le deuxième est un XVII s. d'ordonnances de souverains de
dér. de repulsus, part. passé de repellere certains pays.
« repousser », pour servir de subst. et RÉSEAU, v. rets.
d’adj. techn. à repousser.
RÉSECTION, v. réséquer.
RÉPUTER, 1261; réputation, 1372
(Oresme). Empr. du lat. reputare « compter, RÉSÉDA, 1659; une première fois en
évaluer », repulatio « compte, évaluation ». 1562, dans la traduction de Pline par
Le sens de répulalion a suivi celui du Du Pinet. Empr. du lat. reseda, propr.
verbe, puis s’en est séparé vers le XVIe Ss. impér. de resedare « calmer » ; d’après Pline
en devenant surtout « bonne opinion cette plante s’employait pour résoudre des
répandue sur quelqu'un ou quelque chose », tumeurs et, en l’appliquant, on prononçait
sens qui a entraîné celui de l’adj. réputé la formule magique : reseda morbos « calme
« qui a de la réputation ». les maladies ».
REQUÉRIR, vers 1300. Réfection, RÉSÉQUER, 1834, comme terme de
d’après quérir, de requerre, encore chez La chirurgie ; usité depuis le x1v® s., au sens
Fontaine par archaïsme, lat. pop. *requæ- de «retrancher », ou de « biffer » ; résection,
rere, lat. class. requirere. Signifie aussi au 1799, également comme terme de chirur-
moyen âge « attaquer ». — Dér. : requé- gie ; une première fois en 1552, expliqué
rant, 1342 ; requête, x11°, pour cette forme, alors par rongnement. Empr. du lat. resecare
v. quête. « couper » et du dér. resectio (attesté seule-
ment au sens de « taille de la vigne »),
REQUIEM, 1277. Premier mot de celui-ci pour servir de nom abstrait au
la prière requiem aelernam dona eis, domine. verbe.
REQUIN, 1539, écrit requien en 1578 et RÉSERVATION, (d’une place dans un
requiem au xvil® s.; cette dernière ortho- avion, etc.), vers 1930. Empr. de l’angl.
graphe est due à l’étymologie qui a été reservation.
donnée alors de ce mot : « Quand il a saisi
un homme... il ne reste plus qu’à faire RÉSERVER, xu1e. Empr. du lat. reser-
chanter le Requiem pour le repos de l’âme vare. — Dér. : réserve, 1342, comme terme
de cet homme-là » (Huet). Étymologie jurid., xvirie, au sens moral, au sens de
obscure. « troupe de réserve », xvII®, d’où, d’après
REQUINQUER, 1578 (Camus requin- l’emploi de réserve dans l’organisation mili-
taire, réserviste, 1872; réservoir, 1547.
qué ; en 1611 se requinquer, chez Cotgrave,
qui le donne comme picard). Paraît être RÉSIDER, 1380. Résident, 1260. Empr.
issu d’un anc. *reclinquer, dér. de clinquer, du lat. residere « rester, demeurer », resi-
v. clinquant, avec chute de 1’! comme dans dens ; résident a remplacé une forme
quincaille, et qui aurait signifié « se donner populaire reseant attestée du x11° au XVIIe.
du clinquant ». — Résidence, 1271, empr. du lat. médiéval
RÉQUISITION, 1180 ; rare avant le xvie. residentia, formé dans le langage admi-
Empr. du lat. requisilio (de requirere, v. nistratif sur les précédents.
requérir) pour un sens jurid. différent de RÉSIDU, 1331; d’abord terme jurid.,
requêle. — Dér. : réquisitionner, 1796, au a pris rapidement des sens plus étendus.
sens moderne. Empr. du lat. residuum, neutre pris subs-
tantiv. de l’adj. residuus « qui reste », v.
RÉQUISITOIRE, 1539 ; antér. adj., 1379 le préc. — Dér. : résiduel, 1870.
(lettres réquisitoires). Dér. sav. de requisi-
lus, part. passé de requirere (v. le préc.), RÉSIGNER, vers 1225, au sens jurid. ;
sur le modèle des nombreux adj. juridiques résignation, 1278 (au sens d’ «abdication »).
en -oire. Empr. des mots du lat. médiéval resignare
RESCAPÉ, v. échapper. (en lat. anc. « décacheter » (de signum
« sceau »), qui a pris aussi le sens de
RESCINDER, 1422. Empr. du lat. « rendre »), resignatio (attesté au sens de
rescindere. « action de résigner un bénéfice »). Le
RESCOUSSE. Ne se dit plus que dans sens moral et religieux de se résigner appa-
la locution à la rescousse reprise à la langue raît au xvi® s. dans résigner son Cœur, se
anc. par V. Hugo. Réfection de l’anc. mot résigner à Dieu (en 1541, chez Calvin), par
recousse, d'abord seulement graphique (d’a- un développement propre au fr., d'où celui
près l’anc. verbe rescourre, V. plus loin, de résignation, XVII°.
pour donner un aspect arch. au mot), puis : RÉSILIER, 1679. Altération, par chan-
qui a fini par triompher dans la prononcia- gement de conjugaison, de resilir, 1501,
tion. Recousse est le fém., pris substantiv., encore usité au xvires., empr. du lat. jurid.
du part. de l’anc. verbe recourre, autre rêsilire, propr. « sauter en arrière, se reti-
forme de rescourre « reprendre, délivrer », rér », — Dér. résiliation, 1740, une
hors d'usage depuis le xvri® s., dér. 1re fois en 1429, aussi résilimeni, xvI°s.
d'un anc. verbe escourre « secouer », lat.
exculere (au part. excussus), d’où aussi it. RÉSILLE, 1833. D'abord rescille dans
scuolere, a. pr. escodre « délivrer de » (et le Barbier de Séville, 1775, empr. de
aussi « battre le blé »). l'esp. redecilla. Quand la résille devint à la
RÉSILLE 590

mode, au temps du romantisme, le mot RESPECTABILITÉ, 1862 (V. Hugo, Mi-


rescille, connu grâce aux représentations sérables), une 1re fois en 1784. Empr. de
de la pièce de Beaumarchais, fut adopté, l’angl. respectabilily (de respectable, qui
avec une transformation phonétique due vient du fr.); Balzac, en 1842, emploie
à l'influence de réseau. V. rets. la forme angl. ; le mot est toujours senti
RÉSINE, xure. Lat. resina. Depuis le comme un anglicisme, même lorsqu'il ne
XIIIe S. souvent COMpP. avec poir; poix- s'applique pas directement à des choses
résine désigne partic. la résine de téré- angl.
binthe, très vivant dans les patois. — RESPECTIF, 1415. Empr. du lat. sco-
Dér. : résineux, 1538. lastique respeclivus (de respectus, v. les
RÉSIPISCENCE, 1542; une première préc.) ; a signifié aussi « attentif » ou « res-
fois en 1405 au sens de «retour à la raison » pectueux » au xvI® s., d’après respect.
à propos de Charles VI. Empr. du lat. RESPIRER, x11° ; respiration, xv° ; res-
eccl. resipiscentia (de resipiscere « revenir pirable, xvie (Ronsard), une première fois
à la raison, se repentir »). au sens de « qui est propre à la respira-
RÉSISTER, vers 1240. Empr. du lat. tion » au xive s. Empr. des mots lat. res-
resisiere « s'arrêter, résister » (de sisiere pirare (de spirare « souffler »), respiratio,
« s'arrêter »). — Dér. : résistance, 1314. respirabilis (créé à basse ép.). — Dér. du
verbe : respiratoire, 1566 ; de l’adj. : irres-
RÉSOLUTION, vers 1270 (1314, t. mé- pirable, 1779.
dical). Empr. du lat. resolutio « action de
dénouer, relâcher », en vue de ce sens spé- RESPLENDIR, x11°. Empr. du lat. res-
cial; les autres sens se sont développés plendere.
d’après résoudre, vers le xvi® s. — Dér. RESPONSABLE, 1284. Dér. sav. de res-
irrésolution, 1553. ponsus, part. passé de respondere au sens
RÉSONNER, vers 1150. Empr. du lat. de « se porter garant », pour servir d’adj.
resonare. — Dér. résonance, 1372 à répondre en ce sens. — Dér. : responsa-
(Oresme) ; résonateur, 1870. bilité, 1783 ; irresponsable, 1786, d’où irres-
ponsabilité, 1791.
RÉSORBER, 1764 ; résorption, 1746. Le
premier est empr. du lat. resorbere « absor- RESQUILLEUR, Terme d’argot, récent,
ber », le deuxième est fait sur le part. passé vers 1930, devenu pop. formé sur le prov.
resorplus pour servir de nom abstrait à resquihaire « qui disparaît sans payer », dér.
résorber. du verbe resquiha « glisser », d’où aussi
RÉSORCINE, fin xix°. Empr. de l’angl. resquiller, usité depuis 1930 environ. Le
resorcin (depuis 1868), mot fait artificielle- verbe prov. resquihä, aussi esquihä, esl
ment avec le début de resin (empr. du fr. un dér. du prov. quiho « quille (jeu) ».
résine) et orcin (d’où le fr. récent orcine RESSAC, 1613. Empr. peut-être par
« produit de certains lichens »), empr. du l’intermédiaire du prov. ressaco, de l'esp.
lat. scientifique orcina (fait lui-même avec resaca, propr. « action de tirer en arrière »,
le radical de l’it. orcella « orseille »). tiré du verbe resacar (de sacar « tirer »),
RÉSOUDRE, 1330. Antér. on n’a que d’où aussi l’it. risacca.
le part. resout, employé surtout comme RESSAUT, 1651. Empr. de lit. risalto,
terme techn. au sens de « désagrégé, etc. », comme terme d'architecture.
empr. du part. lat. resolutus. Résoudre est
empr. (avec francisation d’après l’ancien RESSOURCE, xri° (écrit ressourse).
verbe soudre « payer » et aussi « résoudre », Part. fém., pris substantiv., de l’anc. verbe
disparu au Xvi® s., lat. solvere) du lat. resol- resourdre, propr. « rejaillir », d’où « se rele-
vere, propr. « délier », d’où « dissoudre, ver, se rétablir », parfois transitivement
« rétablir », lat. resurgere, v. souräre, d’où
désagréger, annuler un engagement, résou-
aussi it. risorgere ; ressource signifie parfois
dre une difficulté » ; tous ces sens ont été « relèvement,
repris vers le xvi® s. ; celui de « décider » » d’après le verbe, du xrre
s’est développé au xvi® s., d'où celui du au XVIe Ss.
part. pris adjectivement résolu, attesté RESSUSCITER, vers 1110. Empr. du lat.
aussi dès le xve s. au sens, disparu rapide- eccl. resuscitare (en lat. class. « réveiller »,
ment, d’ « éclairé, instruit ». — Dér. de de suscilare « faire lever, éveiller »).
l’adj. : irrésolu, 1536 (cf. irrésolution, sous
résolution) ; a signifié aussi « qui n’a pas RESTAURER, vers 980 ; restaurateur,
été résolu » (en parlant d’un problème, etc.), XIV, au sens de « celui qui restaure » ; au
p. ex. chez Montaigne. sens de « celui qui tient un restaurant »,
1771, d’après le sens du verbe « redonner
RESPECT, 1287, au sens d' « action des forces en mangeant », 1498 ; restau-
de prendre en considération, motif », ration, fin xire. Empr. des mots lat. res-
disparu au XVIIe s.; xIV® aussi au sens laurare (de l’époque impériale), restaurator,
de « redevance ». Les sens modernes sont reslauralio. L’a. fr. disait d’abord restorer,
issus du premier sens au xvI® S., par déve- forme plus francisée. — Dér. : restaurant,
loppement propre au fr. Empr. du lat. XVI®, au sens d’ « aliment qui restaure » ;
respectus « égard, considération », v. répit. au sens moderne, 1765, date où fut ouvert
— Dér. et Comp. : respecter, 1560, dont le le premier restaurant ;on ne servait d’abord
sens s’est développé parallèlement à res- dans les restaurants que des bouillons, de
pecl ; respectable, xv°; respectueux, xvie la volaille, des œufs, etc., mais non des
(Amyot), d’où irrespectueux, 1611 ; irres- ragoûts, comme le faisaient les traiteurs ;
pect, 1834 (Balzac). le restaurateur Boulanger avait pris pour
li) RETRAIT

enseigne Venile ad me, omnes qui siomacho En lat. le mot est expressif grâce à la répé-
laboratis, el ego vos restaurabo, à l’imita- tition de l’i; en gallo-roman l’i a disparu,
tion de certains passages de l'Évangile, mais on a en compensation la répétition
mais la plaisanterie portait aussi sur le sens des dentales. Le lat. class. (re)tinnire sur-
de restaurer en français. vit surtout dans l'esp. reliñir, le port.
RESTER, xri°. Empr. du lat. resiare (re)linir, — Dér. : retentissement, xrre.
« s’arrêter », d’où « rester ». — Dér. : res- RÉTIAIRE, fin xvie (d’Aubigné). Em-
tant, 1323 ; reste, 1230, d’abord au fém., pr. du lat. retiarius (de rele, v. rets).
cenre qui a survécu dans la locution à
loule reste jusqu’au xvrie s.; mais le masc. RÉTICENCE, 1552. Empr. du lat. reli-
est prépondérant dès le xvie s. cenlia « silence obstiné » (de reticere « se
taire »). Le sens spécial du mot fr. dérive
RESTITUER, 1261. Restitution, 1251. peut-être de l’acception de réticence comme
Empr. du lat. resliluere, reslitulio (de terme de rhétorique « suspension d’une
slatuere « établir »). — Dér. : restituable, phrase, par laquelle on fait entendre ce
1460. qu'on ne dit pas », sens qu'a aussi le lat.
RESTREINDRE, vers 1150 ; restrictif, reticentia (traduction du grec aposiôpésis).
1393 ; restriction, 1380; d’abord res- — Dér. : réticent, fin xixe.
lrinclion, 1314, terme médical, d’après le RÉTICULE, 1701. Empr. du lat. reti-
lat. médiéval restrinclio. Le premier est culum « petit filet » en vue d’un sens spécial
empr. du lat. restringere « serrer forte- dans la langue de l’astronomie ; v. ridicule.
ment, restreindre » avec francisation
d’après les verbes en -eindre, v. étrein- RÉTIF, Lat. pop. *restivus, dér. de res-
dre, etc., le deuxième est un dér. du part. iäre « s’arrêter » ; le rapport de sens avec
passé restriclus, le troisième est empr. du resler n'ayant plus été senti, l’s s’est amui
lat. de basse ép. restrictio. conformément au développement d’s en fr.
RÉSULTER, 1491 ; résultat, 1589. Em- devant consonne. It. restio. La formation
pr. du lat. scolastique resuliare (en lat. de “*restivus a quelque chose de surpre-
class. « rebondir », de saliare « sauter »), nant ; il est probable que restivus est issu
resultatum. — Dér. : résultante, 1652, com- de *restilivus par haplologie.
me terme de physique. RÉTINE, 1314: Empr. du lat. médical
RÉSUMER, 1370 (Oresme). Empr. du du moyen âge retina (de rele « filet, ré-
lat. resumere « reprendre, recommencer ». seau », v. rets).
— Dér. : résumé, 1762. RETORDRE. Lat. reiorquére ; reiordre
RÉSURGENCE, vers 1900. Dér. savant s’est développé parallèlement à tordre. It.
du lat. resurgere « se relever », créé par rilorcere, esp. retorcer. — Dér. : retors, vers
le spéléologue Martel. 1200, anc. part., devenu adj.; dit par ex-
tension d’un homme fin, artificieux, 1740
RÉSURRECTION, vers 1120. Empr. (Voltaire).
du lat. eccl. resurrectio (de resurgere, qui
a pris en lat. eccl. le sens de « ressusciter », RÉTORQUER, 1549, au sens moderne ;
sens qu’a parfois aussi l’anc. verbe resour- 1355 (Bersuire) «retourner ». Empr. du lat.
dre, représentant pop. du verbe lat., v. relorquere, propr. « retordre, retourner »,
ressource). d’où « rétorquer un argument ».
RETABLE, 1671. Empr. de l’esp. rela- RETORS, v. retordre.
blo, id., formé de tabla « planche » et du RÉTORSION, 1607. Dér. de rélorquer
préf. re-, qui a souvent en esp. le sens de sur le modèle du fr. torsion. Se trouve déjà
« en arrière » (cf. recädmara « chambre où une fois au moyen âge (vers 1300) en par-
l’on conserve les vêtements »). lant de lèvres retournées, où il est dér. de
RETARDER. Lat. relardäre. L’a. fr. lorsion.
disait aussi jusqu’au xvi® s. relarg(ijer,
v. tarder. — Dér. : retard, 1677 ; retarda-
RÉTRACTER, « retirer ce qu'on a dit »,
taire, 1808 ; retardement, 1384.
1370 (Oresme) ; rétractation, 1247. Empr.
du lat. retractare, propr. « retirer », relrac-
RETENIR. Lat. relinère; relenir s'est talio.
développé parallèlement à tenir. — Dér. : RÉTRACTILE, 1770; rétraction, terme
retenue, vers 1170. techn. Le premier est un dér. sav. du lat.
RÉTENTION, 1291, comme terme médi- relractus, part. passé de retrahere « retirer »,
cal et jurid. Empr. du lat. relentio, qui a le deuxième est empr. du lat. retraclio
les mêmes sens (de retinere, v. le préc.). A « action de retirer » — Dér. : rétracter,
signifié aussi « action de retenir dans la 1803, terme médical (autre sens vers 1605) ;
mémoire » (du xir1e au xvire s.) et « habi- rétractilité, 1835.
tude, retenue, etc. », d’après le verbe relenir RETRAIT, terme de droit et d’admi-
ou le lat. retentio (qui, outre les sens indi- nistr., dont l’acception ne paraît pas être
qués plus haut, signifie aussi « action de antérieure au x1x° s. ; antérieur. « retraite »
retenir l’attention, etc. »). au moyen âge ; « lieu où l’on se retire »,
RETENTIR. Lat. pop. *relinnilire, au depuis le moyen âge jusqu'au xvi® 8.;
lieu du lat. class. retinnire, d’après le supin « lieu d’aisances » du xIV® au XVIIIe ; en
retinnitum ; l’a. fr. a dit aussi jusqu’au outre divers sens jurid. ou techn. Part.
xve s. tentir, lat. pop. *linnittre, lat. class. passé, pris substantiv., de l’anc. verbe
tinnire ; cf. a. pr. tendir, tenir et relendir. retraire « retirer », lat. retrahere.
RETRAITE 552

RETRAITE, vers 1180. Fém., pris subs- REVANCHE, v. venger.


tantiv., du part. passé retrait, v. le préc. Du
sens d’ «action de se retirer du monde, etc. » REVÊCHE, xiue. Probabl. d’un anc.
xvIIe, est issu le sens administratif de francique *hreubisk « raboteux, rude »
« action de quitter les fonctions actives » qu’on peut supposer d’après l’anc. nor.
(qui s’est dit d’abord des officiers mili- hriüfr.
taires), 1752, et de « pension », id., d’où RÉVÉLER, vers 1120 ; révélateur, 1444 :
retraité, 1823. révélation, vers 1180 ; au moyen âge, sur-
RÉTRÉCIR, xive. Dér. de l’anc. verbe tout au sens chrétien. Empr. des mots lat.
étrécir, 1366, aujourd’hui peu usité (qui revelare, propr. « mettre à nu, découvrir »
s’est substitué à estrecier, usuel jusqu’au (de velum « Voile »), revelator, revelatio (les
XVI° s.), d’après les verbes en -cir, tels que deux derniers du lat. eccl.). Les deux
éclaircir, noircir, etc.; on trouve aussi subst. ont suivi en fr. le sens du verbe.
quelquefois restrecier. Estrecier représente
le lat. pop. *sirictiäre (de strictus « étroit »), REVENDICATION, 1506, mais reiven-
d’où aussi a. pr. estreissar ; l’a. fr. estresse, dication dès 1435 et encore au xvie s.
fém., « étroitesse, défilé », et l’a. pr. estreissa Empr. du lat. jurid. rei vindicatio « action
peuvent avoir été tirés de ces verbes ou de réclamer une chose » (déjà dans les
bien représenter un lat. *sirictia et être Digestes). Le premier élément rei- a été
antérieurs aux verbes, qui en seraient confondu par la suite avec le préf. re-, —
alors des dér. — Dér. : rétrécissement, 1547. Dér. revendiquer (1437), mais aussi rei-
vendiquer au xv°es.
RÉTRIBUER, 1370 (Oresme). Rétribu-
tion, 1120. Empr. des mots lat. reiribuere, REVENIR. Lat. revenire. — Dér. : reve-
reiributio (créé à basse ép.). Le verbe qui nant, 1690, au sens d’ « esprit qu’on sup-
avait d’abord le sens plus large de «rendre, pose revenir de l’autre monde »: a aussi
restituer », comme en lat., s’est restreint le sens de « profit éventuel » dans revenant-
d’après rélribution. bon, 1549 ; revenez-y, 1638 (Muse Nor-
mande) ; revenu, 1320, au xive et au xves.,
RÉTRO, v. rétrograder. on a préféré revenue ; revient (prix de),
RÉTROACTIF, 1534; rétroaction, 1762. 1835.
Dér. sav. du lat. retractus, part. passé de
reiroagere « ramener en arrière ». — Dér. RÊVER, vers 1130. A signifié d'abord
du premier : rétroactivité, 1812. « vagabonder », jusqu’au xve s., ainsi
que « délirer », encore au xvrire s. ; le sens
RÉTROCÉDER, 1534; rétrocession, moderne apparaît clairement vers 1670.
1550. Rares avant le xvirie s. Empr. des Probabl. dér. d’un anc. *esver « vagabon-
mots du lat. médiéval retrocedere, retro- der » (d’où aussi a. fr. desver « perdre le
cessio ; en lat. anc. ces mots signifiaient sens », v. endéver), dér. d’un anc. gallo-
« reculer, recul ». roman *esvo «errant, vagabond », réduction
RÉTROGRADER, 1488 ; rétrograda- phonétique normale de *exvagus, comp. de
tion, 1488 ; rétrograde, xive (Mach). Empr. l’adj. lat. vagus, id. (comp., pour la forma-
des mots lat. retrogradere (créé à basse ép.), tion, multivagus, etc.). — Dér. : rêvasser,
-alio (id.), retrogradus. On a tiré de l’ex- xve, d'où rêvasserie (Montaigne), rêvas-
pression effet rétrograde, terme du jeu de seur, 1736 (Voltaire) ; rêve, 1680, v. songe;
billard, le subst. rétro, 1889. rêverie, vers 1200, au sens de « délire »,
encore au xvil® s., sens actuel depuis
RÉTROSPECTIF, 1779. Formé artifi- Montaigne ; rêveur, XIII‘, au sens de
ciellement avec le préf. lat. retro « en ar- « vagabond ».
rière », v. les préc., et le radical spect- de
mots lat. tels que speciare « regarder », etc., RÉVERBÉRER, vers 1380 (au sens de
cf. aussi respectif, perspective qui ont pu « frapper »); sens moderne 1496. Réver-
contribuer à la création du mot. bération, 1314. Le premier est empr. du
RETS. Aujourd’hui peu usuel, sauf dans lat. reverberare « (repousser un coup, etc. »,
d’où « rejaillir (en parlant des rayons du
des locutions. Fém. jusqu’au xvire s. Lat.
rélis, masc. et fém., moins correct que le soleil) » (de verberare « donner des coups de
fouet, etc. »), le deuxième est un dér. sav.
neutre rêle. L'’a. fr. roiz et raiz, d’où est
issue la forme moderne avec { étymologique, du verbe lat. (reverberatio, créé à basse
peut venir du plur. lat. rètés, plus fréquent ép., ne signifie qu’ « admonestation »). —
Dér. : réverbère, 1676, en 1781, Lavoisier
que le sing. — Dér. : réseau, vers 1180.
préconisait l'emploi du mot, une première
RÉUSSIR, 1578 (Qu'est-il reusci de tout fois vers 1500 au sens d’ « écho ».
cela, Lanoue) ; encore blâmé par H. Es-
tienne ; réussite, 1622 (Balzac, qui l’em- RÉVÉRER, 1404 ; révérence, vers 1155,
ploie par dérision); cf. encore en 1639 : faire la révérence, vers 1400 (Froissart) ;
« Votre traduction aura fait la réussite que révérend, xir1°; révérendissime, 1529,
nous pouvons désirer (voyez qu’il m'a (vers 1350 reverentissime, empr. du lat.
échappé une phrase italienne) » (Chape- reverentissimus, même sens); empr. des
lain). Empr. de l’it. riuscire, propr. « res- mots lat. revereri, reverentia, reverendus,
sortir » (de uscire, v. issue), riuscita. Réus- reverendissimus, les deux derniers attestés
sir, conformément à son origine, signifiait en lat. eccl. comme titres honorifiques.
d’abord « avoir une issue (heureuse ou V. irrévérent. — Dér. de révérence : révé-
malheureuse) » ; le sens moderne triomphe rencieux, 1642.
au xvire s. et a entraîné celui de réussite, REVERS. Anc. adj., signifiant « à re-
— Comp. : non-réussite, 1775. bours », usité jusqu’au xvie s. ; pris subs-
553" RHUBARBE

tantiv., depuis le xir1e s. environ. Lat. sur une sentence (en lat. jurid.) », revoca-
reversus, part. du verbe reveriere, reverti bilis, revocatio. Révoquer en doute, xv®°, est
« retourner, revenir ». On considère aussi calqué sur le lat. in dubium revocare.
revers Comme repris au lat., à cause de la
rareté de l’adj. et de l’absence du subst. RÉVULSION, 1552. Révulsif, 1555. Le
dans les plus anc. textes. premier est empr. du lat. revulsio « arra-
chement » (de revellere), en vue d’un sens
REVERSI (et -is), 1611. Anc. jeu de médical, le deuxième a été formé sur revul-
cartes. D'abord reversin, xvi®, empr. de sus, part. passé de revellere, pour servir
l’it. rovescino (on a dit aussi rovescina), dér. d’adj. à révulsion.
de rovescio « à rebours » ; ce jeu a été ainsi
nommé parce que c'est celui qui fait le REZ-DE-CHAUSSÉE, v. ras.
moins de levées qui gagne. Le mot it. a RHABDO- Premier élément de mots
été francisé d’après revers ou peut-être sav., tels que rhabdoïde, 1690, tiré du grec
d’après un adj. reversi « retourné », usité rhabdos « baguette », ou de mots empr.,
au xvi® s., empr. de l’it. de cette ép. ri- tels que rhabdomancie, 1579 (Bodin).
versio.
RHABILLER, v. bille.
RÉVERSIBLE, 1682. Dér. sav. du lat,
reversus, part. passé de revertere, v. revers. RHAPONTIC, v. rhubarbe.
— Dér. : réversibilité, 1745 ; irréversible,
fin xixe. RHÉTEUR, 1534; jusqu’au début du
xixe s. seulement au sens de « maître de
REVERSION, 1304. Terme jurid., empr. rhétorique » ; sens défavorable depuis lors.
du lat. reversio, propr. « retour » (de rever- Rhétorique, vers 1155. Empr. du lat. rhetor,
ere « retourner ») ; s'emploie aussi depuis rhetorica (du grec rhélor « orateur, maître
le xixe s. dans d’autres techniques. d’éloquence », rhétoriké « art oratoire »).
RÉVISER, xrr1e ; on a dit aussi reviser. RHINGRAVE, sorte d’anc. vêtement,
Empr. du lat. revisere. — Dér.: réviseur, 1567. xviie (Scarron). Empr. de l’all. rheingraf,
Le lat. médiéval a formé un dér. revisio titre de seigneur, littéral. « comte du
« examen, inspection », d’où a été empr. Rhin »; ce vêtement a été ainsi nommé
le fr. révision, 1298, rare avant le xvi®s. ; vers le milieu du xvri® s., quand il a
dér. : -niste, 1872. été introduit, cf. ce que dit Ménage :
« On m'’assure que ces hauts de chausse
RÉVOLTER, vers 1500 (Les cheveulx se ont été ainsi appelés d’un Seigneur Alle-
revolteront en sus, chez J. d’Authon; jus- mand, qu’on appeloit M. le Rheingrave,
qu’au début du xvrie s. signifie surtout qui étoit gouverneur de Mastrict (il s’agit
« se retourner, faire volte-face, changer de du rhingrave Salm, qui, marié avec une
parti »). Empr. de l’it. rivoliare « échanger, Française, venait souvent en France);
retourner », d’où est issu le sens nouveau lequel introduisit la mode. » Rhingrave
du fr.; rivoltare dérive du verbe rivolgere existait déjà depuis le xvi® s. comme
« retourner » (du lat. revolvere) par l’inter- titre de seigneurs allemands des bords du
médiaire du part. rivolto ; le sens nouveau Rhin, en all. Rheingraf.
du fr. a passé ensuite en it. — Dér. : ré-
volte, vers 1500 (déjà au sens moderne), RHIN(O)-. Premier élément de mots
tiré du verbe (ce sens est plus récent pour sav. comp., tels que rhinoplastie, 1822,
l’it. rivolta) ; révoltant, 1749. tiré du grec rhis, rhinos « nez ».
RÉVOLU, 1377. Empr. du lat. revoluius, RHINOCÉROS, 1380, une première fois
qui s’employait aussi en parlant du temps, rhinocerons en 1288 ; au xviie s., on disait
part. passé de revolvere « rouler, etc. ». aussi rhinocerot. Empr. du lat. rhinoceros
(du grec rhinokerôs, de rhis « nez » et
RÉVOLUTION, vers 1190. Empr. du lat. keras « corne »).
de basse ép. revolutio « retour, révolution
du temps », v. le préc. Du sens propre du RHIZ(O)-. Premier élément de mots
lat. sont issues les acceptions du fr., au sav. comp., tels que rhizophile, 1842, tiré
moyen âge surtout sens astronomique, du grec rhiza « racine », cf. aussi le dér.
puis « changement violent dans le gouver- rhizome, 1817.
nement d'un État », 1680 (dès 1636 révo-
lution d'Etat). — Dér. et Comp. : révo- RHODODENDRON, 1500. Empr. du lat.
lutionnaire, 1789 ; révolutionner, 1793 ; rhododendron (d'un mot grec, formé de
contre-révolution, 1790 (Danton), d’où rhodon « rose » et de dendron « arbre »).
-naire, 1790. RHOMBE, 1536, terme de géom. Empr.
REVOLVER, 1853. Empr. de l’angl. du lat. rhombus (du grec rhombos, propr.
revolver (du verbe {o revolve « tourner »), « toupie »). Comme terme de zoologie, dési-
créé en 1835, par l'inventeur, le colonel gnant des poissons de mer, notamment le
S. Colt, des États-Unis. turbot, remonte de même au grec par l’in-
termédiaire du lat. — Dér. : rhomboïde,
RÉVOQUER, x1v®, au sens de « rappe- 1542 (déjà grec rhomboeides) ; rhomboïdal,
ler », encore usité au xvi1® ; « annuler », 1671 ; rhomboëdre, 1817.
xive (Froissart), d’où « retirer un emploi,
une fonction », vers 1400; révocable, 1307; RHUBARBE, 1570; aussi r(h)eubarbe,
‘révocation, xir1° (avec une valeur jurid. xrie-xvirie, et d’autres formes. Empr.
particulière), sens parallèle à celui du verbe. du lat. r(h)eubarbarum, vue, chez Isidore
Empr. du lat. revocare « rappeler », «revenir de Séville, qui dit que rheu est un mot
RHUBARBE 554

barbare signifiant « racine ». Rabelais, qui XVIII S., mais au sens fig. de « donner le
emploie aussi reubarbe, IT, 33, a une autre bon air à quelque chose ». Le sens propre
forme rhabarbe, qu’il explique ainsi : « du de ce verbe paraît être perdu, ce qui n’est
fleuve barbare nommé Rha (il s’agit de la pas surprenant dans un terme d’argot.
Volga, comme atteste Ammianus) », III,
50 ; on a également en lat. médiéval rha- RIBOULDINGUE, fin xix°, -dinguer, dé-
barbarum ; le lat. médiéval dit aussi rha- but xxe°. Origine obscure. Mot comp., dont
ponticum, littéral. « rhubarbe du Pont », la première partie contient probabl. le
d’où le fr. rhapontic, xvie (Paré), encore forézien riboulla « festin à la fin de la mois-
dans les dict. (on trouve aussi rheupontic, son » (aussi vellavien reboula), dér. du verbe
au xves.) ; Dioscoride, au rer s. après J.-C., riboulâ « manger jusqu’à la satiété », né
donne rha au sens de « rhubarbe », mais probabl. d’un croisement de riber (v. ribote)
on ne voit pas clairement le rapport des et du fr. bouler « enfler sa gorge (du pi-
deux formes rha et rheu. Les langues euro- geon) ». -dingue provient sans doute de la
péennes ont des formes se rattachant aux famille de dinguer (comp. champenois,
deux types : it. rabarbaro, reobarbaro, all. bourguignon dinguer « rebondir avec un
Rhabarber, etc. bruit sonore, faire sauter en l'air », dingot
« fou, détraqué »), d’origine onomatopéique
RHUM, 1688 (écrit rum, dans un ou- (à l’origine imitation du son et du balan-
vrage sur l’Amérique anglaise). Empr. de cement des cloches).
l’angl. rum, 1654, abréviation de rum-
bullion ; un mot dialectal angl. signifiant RICANER, vers 1400 (au sens de « brai-
« grand tumulte », puis, par extension, a re », sens moderne depuis 1538). Réfection,
désigné à la Barbade une liqueur forte sous l'influence de rire, de recaner, « braire »
fabriquée par les planteurs, et qui provo- (forme norm. à laquelle correspond l’a. fr.
quait souvent des bagarres, après boire. rechaner). Ce verbe est dér. de l’a. pic.
kenne « joue », chane, qui représente le
RHUMATISME, 1549 (écrit rheu-). Rhu- francique *kinni « mâchoire » (comp. all.
matisant, 1780, une première fois en 1534. Kinn « menton »). — Dér. : ricanement,
Empr. des mots lat. rheumatismus (du 1702 ; ricanerie, vers 1700 ; ricaneur, 1555.
grec rheumatismos, propr. « écoulement
d’humeurs », ce qui était, pour la médecine RIC-À-RIC, 1470 (Pathelin). Mot pop.
ancienne, la cause des rhumatismes), rheu- qui présente des variantes ric-à-rac, ete.
malizans, part. prés. de rheumatizare (créé de formation onomatopéique.
à basse ép.). — Dér. du premier : rhuma-
tismal, 1758. RICHE, xi° (Alexis). Du francique
*riki, propr. « puissant », sens conservé
RHUMB, v. rumb. dans les premiers textes (d’une famille de
RHUME, x11° (écrit reume, puis rheume ; mots germ. répandus, cf. all. reich, angl.
rhume s’est établi à partir du xvrre s.). Par- rich) ; empr. aussi par les langues méridio-
fois fém. au xvi® s., genre encore répandu nales : it. ricco, esp. rico. Nouveau riche se
dans les patois. Empr. du lat. rheuma (d’un trouve déjà au xvrrre s., chez Montesquieu
mot grec qui signifie propr. « écoulement »). dans la 132€ leltre persane, aussi chez Sten-
— Dér. : enrhumer, xr1°, d’où désenrhu- dhal. — Dér. : richard, 1466 ; richesse, x1re,
mer, 1690. signifie d’abord « puissance » ; richissime,
1801, une première fois au xr11° s. dans un
RIBAMBELLE, 1798. Mot fam., peut- texte italianisant ; enrichir, xr1°, d'où enri-
être contamination du dialectal riban « ru- chissement, 1530 (une 1re fois au xrrre).
ban » et de mots du radical onomatopéique
bamb- (comp. fr.-comt. bamballer « balan- RICIN, 1732. Empr. du lat. ricinus.
cer », lorr. bambiller « osciller »), contami-
nation favorisée par l'identité de la syllabe RICOCHET, xvrie (Scarron, au sens mo-
ban. derne). Tiré par comparaison avec les
bonds répétés qu’on appelle ricocheis,
RIBAUD, v. le suiv. d’une ancienne locution : c’est la chanson
du ricochet, qui désigne un raisonnement
RIBOTE, 1804 (dans faire ribote). Tiré sans fin, cf. Rabelais, III, 10 ; antér. on
du verbe riboter, 1745 (Vadé), mot pop. trouve fable du ricochet (xr1°), qui désigne
issu, par substitution de suff., de l’anc. une ritournelle de questions et de réponses
ribauder « paillarder », encore vivant dans sans fin. L'origine même du mot ricochei
les patois. Ribauder est lui-même dér. de est obscure; la langue a vu dans ricochet
l’anc. ribaud, xr1°, « débauché » qui dérive un mot de la famille de cog, cochet, cf. fable
lui-même de l’anc. verbe riber « faire le du rouge cokelet (forme dialectale) et lit.
ribaud »; quant à riber, c’est un verbe favola dell” uccellino (« oiselet »). — Dér. :
empr. de l’anc. haut-all. riban « être en ricocher. 1807.
chaleur; coïre », propr. « frotter ». Ribaud
a passé dans les langues voisines : it. RICTUS, 1821 (J. de Maistre). Empr. du
ribaldo, etc. lat. rictus (de ringi « grogner en montrant
les dents »).
RIBOUIS, « soulier, vieux soulier » en
fr. pop., fin xixe. Remonte à bouis, anc. RIDELLE, vers 1280 (sous la forme
forme de buis, encore très répandue dans reidele). Empr. du moyen haut-all. reidel
les parlers, v. buis, qui désigne dans la « forte perche », all. moderne Reilel, cf.
langue des cordonniers un brunissoir de la définition donnée par Richelet, 1680 :
buis qui sert à polir la semelle ; le préf. «morceau de bois rond et plané qui règne
vient probabl. de rebouiser, attesté dès le sur le haut et tout le long du chariot ».
555 RIME

RIDER, xrie (Chrétien : Chemise ridée, mière syllabe du néerl. explique l’hésita-
c’est-à-dire « plissée », sens fréquent au tion du fr. entre re- et ri-. Le dér. rigoler,
moyen âge ; sens moderne dès le xr11e s.). 1297, signifie d’abord « égaliser les bords
Probabl. de l’anc. haut-all. ridan « tourner, d’une rivière ».
tordre »; l’adj. de l’anc. haut-all. reid
« crépu, frisé » permet de se rendre compte RIGOLER, xr11° ; souvent trans. au sens
comment le sens a pu se développer. — de «se moquer de », plus rarement de « di-
Dér. et Comp. : ride, 1488 ; rideau, « pièce vertir » jusqu’au xvI® $S.; on a aussi se
d’étoffe servant à couvrir, cacher » (sens rigoler « se divertir », jusqu’au xvirIe $.;
qui apparaît dès le premier texte, en 1347), de là l’usage moderne depuis 1875. Les
a eu aussi le sens de « repli de terrain », parlers gallo-romans ont une forte ten-
fréquent au xve® s. Dérider, 1538. dance à former sur rire des verbes qui en
modifient un peu le sens, ainsi rioler « rire
RIDICULE, adj., xve. Empr. du lat. un peu », riocher, riauder » rire d’un air
ridiculus (de ridere « rire »). — Dér. : ridi- niais ». Le fr. possédait du x111° au XVIIe 6.
culiser, 1666 (Sévigné). un subst. riole « partie de plaisir ». Quand
on sentit le besoin de former un verbe sur
RIDICULE, « petit sac de dame », 1799, ce subst., son synonyme gale, flanqué
Altération, par étymologie pop., de réticule, d’un verbe galer (V. galant) se présenta à
empr. à la même ép. du lat. reliculus au l'esprit et passa son g- au nouveau verbe.
sens de «sachet ». Depuis le commencement — Dér. : rigolade, 1815; rigolo, 1852;
du xx° s. rélicule est redevenu la forme a reçu aussi par plaisanterie le sens de
normalement employée, tandis que ridi- « revolver » ; rigolard, fin x1x° ; rigolboche,
cule ne se dit plus que par plaisanterie. V. 1860, surnom d’une danseuse de bas étage,
réticule. v. boche.
RIEN. Lat. rem, acc. de rés « chose »; RIGOLLOT, 1875, papier sinapisé. Tiré
ici l’acc. a été conservé, parce que chose de Rigollot, nom de l'inventeur.
est plus souvent l’objet de l’action, cf. au
contraire on qui vient du nominatif. Con- RIGUEUR, x1r1° ; rigoureux, x111e, at-
formément à son origine, rien a été d’abord testé indirectement par l’adv. -sement. Le
un subst. fém. et a gardé cette valeur jus- premier est empr. du lat. rigor, le deuxième
qu’à la fin du xvi® s.; mais, par suite de un dér. sav. de ce mot. — Dér. de rigueur,
son emploi dans des phrases de sens néga- d’après la forme lat. rigor : rigorisme, 1696
tif, rien est devenu lui-même mot négatif (Saint-Simon) ; rigoriste, 1683.
et a pris ensuite le genre masc., qui appa-
raît au xve s. A éliminé le pronom négatif RILLETTE, 1845. Mot de la famille de
néant, V. ce mot. A. pr. res, cat. res repré- rillons « résidus de porc ou d’oie dont on
sentent le nom. res, avec un développement a fait fondre la graisse », 1611, rillé, de sens
sémantique semblable à celui du fr. analogue, 1546 (Rab.) ; rillée, « id. », fin
xvi s. (Bouchet), tous ces mots, usités
RIFLARD désigne divers outils : rabot, dans la région de l’Ouest, notamment en
grosse lime, ciseau, 1622. Dér. de l’anc. Touraine, sont des dér. de rille « mor-
verbe rifler, x11° «érafler, piller, raboter », ceau de porc », 1480, qui est une forme
empr. de l’anc. haut all. riffilôn « déchirer dialectale de reille « planchette, latte, etc. »
en frottant ». (r. règle) ; ce mot a pu se dire de mor-
RIFLARD « parapluie » en fr. vulgaire, ceaux de viande minces et longs, cf. le
1828. Passe pour être tiré de Riflard, nom norm. rilles « longs et minces morceaux de
d’un personnage de la comédie de Picard, lard qu’on a fait griller »; rillette désigne
La petite ville, 1801, qui se présentait sur un hachis, mais il n’y a pas loin de ce sens
la scène avec un parapluie énorme. à ceux des autres mots cités.
RIFLE, 1833 (alors fém.). Empr. de RIME, vers 1160. L’ét. par le lat. rhyth-
l’angl. rifle (du verbe to rifle « faire des mus « rythme » est peu probable, parce
rainures dans le canon, etc. », lui-même du que celui-ci désigne en bas-lat. le vers non
fr. rifler, v. riflard). métrique qui a été pourvu d’une rime plus
tard ; une forme intermédiaire *rilme ou
RIGIDE, 1457; rigidité, 1641. Empr. *ridme ne se trouve pas dans les textes,
du lat. rigidus, rigiditas ; V. raïde. de sorte que l’évolution phonétique à
RIGODON, 1694 (on écrit aussi rigau- laquelle il faudrait s’attendre, n’est pas
don). Étymologie douteuse. L’indication de attestée. Par contre un francique *rim
J.-J. Rousseau dans son Dictionnaire de « série, nombre », dont l'existence est
Musique est vague : « On trouve rigodon assurée par l’anc. haut all. rim, peut très
dans le Dictionnaire de l’Académie ; mais bien avoir pris le sens de « suite, série de
cette orthographe n’est pas usitée, j'ai oui fins de vers semblables » et de là celui de
dire à un maître à danser que le nom de « rime ». Le genre masc. du mot germ. est
cette danse venait de celui de l'inventeur, conservé dans l’a. prov. rim et dans l’all.
lequel s'appelait Rigaud. » reim emprunté du gallo-roman. Le fém.
rime est peut-être dér. du verbe rimer,
RIGOLE, 1339, auparavant regol, vers lequel peut avoir été dér. du subst. en
1210. Vit au moyen âge surtout dans gallo-roman, mais pourrait aussireprésenter
l'extrême Nord. Empr. du moyen néerl. un verbe *riman formé déjà en francique.
regel « rangée, ligne droite », richel « fossé A passé aussi dans les langues voisines :
d'écoulement dans l’étable », qui tous sont it. esp. a. pr. rima. On a expliqué la locu-
empr. du lat. regula. La variété de la pre- tion sans rime ni raison, 1875 (dès fin
RIME 996

XIVe s. il n’y a rime ne raison, dès xvI® s. RIPOSTE, 1578. Issu, par dissimilation
il n'y a ni rime ni raison, comp. l’angl. du premier s, de risposie, 1527, encore
without rhyme or reason) comme issue du lat. au xvil® s., empr., à la fois au sens de
médiéval ; on opposait alors dans la versi- «repartie » et de « botte (terme d'escrime) »,
fication lat. le metrum fondé sur la quan- de lit. risposta, de rispondere, v. répondre.
tité et le rythmus fondé sur l’accent, cf. ce — Dér. : riposter, xvii® (Scarron).
passage d’un grammairien : « Metrum est
ratio cum modulatione, rhythmus modu- RIQUIQUI, 1789, au sens d’ « eau-de-
latio sine ratione. « Par suite, une œuvre qui vie ». Terme du langage enfantin, aux sens
n’était pas conforme à un de ces deux modes variés, comme les mots de ce genre ; se
était mauvaise ; le sens se serait ensuite dit aussi par exemple pour désigner le
étendu. — Dér. : rimer, vers 1120, rimeur, petit doigt.
vers 1180, rimailler, 1564 (Rab., qui écrit RIRE. Lat. pop. *ridère, lat. class. ri-
rithm-), rimailleur, 1518 (Marot, qui écrit dére. It. ridere, esp. reir. — Dér. : rire,
également rithm-). subst., xit1° ; rieur, 1460.
RINCEAU. Au moyen âge rainsel ; l’or- RIS, « façon de rire » ; aujourd’hui em-
thographe rinceau a été arbitrairement rap- ployé seulement dans la langue littéraire.
prochée de rincer. Signifie « rameau » jus- Lat. risus. It. esp. riso. — Dér. : risée,
qu’à la fin du xvi® s. ; réservé ensuite à la xtIe; risette, 1844, d’après risée.
langue du blason et de l’architecture. Lat.
pop. *ramuscellus, dér. du lat. de basse RIS, terme de boucherie dans ris de
ép. ramusculus. veau, 1640 ; mais un dér. de sens analogue,
risée, est déjà attesté à la fin du xvies.
RINCER. D'abord reincier, raincier. Pa- tymologie inconnue.
raît bien être issu, par dissimilation, de
RIS, terme de marine, 1155 (a deus ris).
l’a. fr. recincier, même sens, du lat. pop.
*recentiäre (dér. de recens au sens de De l’anc. scandinave rif, cf. angl. reef ; ris
« frais »), continué par des formes dialec- est la forme du plur., d’abord *rifs ; le mot
tales d'Italie (à côté d’autres qui conti- s’emploie en effet surtout au plur. —- Dér. :
arriser, 1643.
nuent “*recentare) au sens de « rafraîchir,
laver ». — Dér. et Comp. : rinceur, 1500; RISIBLE, xi1ve (Oresme). Empr. du lat.
rinçure, 1393 ; rincette, 1856 ; rince-bouche, risibilis (de ridere, v. rire). Risible a parfois,
1842. par développement propre au fr., le sens de
« qui a la faculté de rire », du xvie au
RING, terme de sport, 1829. Empr. de XVIIIE 8. — Dér. : risibilité, xvre.
l’angl. ring, propr. « anneau, cercle ».
RISOTTO, 1907; empr. de l’it. risotto,
RINGARD, 1731; mot techn. Empr., dér. de riso « riz ».
avec substitution de suff., du wallon rin-
guële « pince, levier », empr. lui-même de RISQUE, 1578 (H. Estienne, au fém.,
l’all. dialectal Rengel « bûche, rondin »; genre conservé dans l'expression à ioule
l’all. dialectal a aussi un verbe rangeln qui risque jusqu’à la fin du xvrie s.). Empr. de
signifie « écarter les scories dans un four- l’it. risco, aujourd’hui plutôt rischio (d'où
neau de forge avec un crochet de fer », qui l’all. Risiko), cf. aussi le verbe risicare ;
est précisément une des actions qu’on peut l'esp. a riesgo et l'a. pr. rezegue. Lit.
faire avec le ringard. risco représente un lat. résècum, subst.
verbal de résècare, donc « ce qui coupe »,
RIPAILLE, 1579 dans l'expression d’où « écueil », ensuite « risque que court
faire ripaille. S’'est dit d’abord des soldats une marchandise en mer »; comp. a.
qui allaient s’approvisionner chez les nor. sker « écueil », d’un germ. *skarja « ce
bourgeois et les paysans. — Dér. de l’a. fr. qui a été découpé », all. schären. En Tos-
riper « gratter », empr. du m. néerl. rippen cane résèécare a dù devenir risicare et ris-
« tirailler ; palper ». care. — Dér. et Comp. : risquer, xvi° ;
risque-tout, 1870.
RIPOLIN, fin xixe. Empr. du néerl.
ripolin, mot créé en 1888 par l'inventeur RISSOLE, 1240. Altération de roissole,
de cette peinture Riep au moyen de son XII1 (on a en outre une forme rousole au
nom, d’un élément -o/- (du néerl. olie XII s. d’après l’adj. roux), lat. pop. *rus-
« huile ») et du suff. sav. -in. Le ripolin, seola, fém. de russeolus « rougeâtre »; ce
d’abord fabriqué en Hollande à partir de genre de préparation culinaire a été ainsi
1886, l’est en France depuis 1893. — Dér. : nommé à cause de sa couleur, cf. l’expres-
ripoliner, id. sion de cuisine moderne faire un roux. —
Dér. : rissoler, 1549.
RIPOPÉE, vers 1770; auparavant ri- RISTOURNE, 1829. D'abord resiorne,
popé, masc. depuis le xv® s. ; en outre adj. 1723, et exiorne, 1723. Celui-ci a été
dans un petit vin ripopé, xv® (A. de La emprunté de l’it. siorno, même sens. En
Sale). Mot pop. issu du langage des enfants, empruntant ce mot le franc. a latinisé
à l’origine alternance vocalique de la le préfixe s- en ex-; en outre le sens du
famille du lat. pappare (v. papoter). La mot contenant une répétition on a senti
voyelle arrondie -0- dépeint l’ouverture des le besoin de souligner ce fait par le préfixe,
lèvres de celui qui sirote le liquide. Le pré- auquel on a donné ensuite la forme ita-
fixe est pris de ripaille, qui bien qu'attesté lienne ri-. Un emprunt de lit. ristorno
seulement au xvi® s., a probabl. existé n'entre pas en ligne de compte, ce mot
dès le xve. signifiant seulement « rebondissement ».
557 ROCHE

RITE, 1676; ril se trouve une première vêtements de femme. On trouve (gens) de
fois au xiv° s. L’orthographe ri se main- robe longue, au xvi® s., en parlant du
tient, quand on parle de l’ensemble de la clergé. Robe de chambre est du xvi®s.;
liturgie d’une confession (le rit catholique, de là, par plaisanterie, pommes de terre en
grec, etc.). Rituel, 1564 (Rabelais, sous la robe de chambre, xix°. Empr. du germ.
forme ritual). Empr. des mots lat. rilus, occidental *rauba « butin » (v. dérober),
ritualis (qui se disaient déjà de livres trai- d’où spécial. « vêtements (qu'on a pris
tant de rites païens). comme butin) » ; l’a. fr. a encore fréquem-
ment le sens de « butin », encore relevé au
RITOURNELLE, 1670 (Molière), comme début du xvi® s. Aussi it. roba « vêtement,
terme de musique ; fig., 1671, Mme de Sé- biens mobiliers et immobiliers », esp. ropa
vigné. Empr. de lit. ritornello (de ritorno (avec un p hétéroclite) « vêtement », a. pr.
« retour »), V. tourner. rauba « butin, robe ». — Dér. et Comp. :
RIVAL, xv®. Rivalité, 1656 (Molière). enrober, 1858, comme terme techn. ; créé
Empr. des mots lat. rivalis, propr. « rive- au xr1° s. au sens de « fournir de robes,
rain qui est autorisé à faire usage d’un revêtir »; robin, dér. de robe dans homme
cours d’eau (rivus) » (au xvie s. on disait de robe, 1627, fait par plaisanterie d’après
surtout corrival, du lat. de basse ép. corri- robin « personnage sans considération »,
valis, peu attesté, propr. « riverain autorisé vers 1340, aujourd’hui hors d’usage, forme
à faire usage d’un cours d’eau avec un familière de Robert, qui était dans l’anc.
autre riverain »), rivalitas. — Dér. : riva- littérature un terme de dénigrement et
liser, 1770. désignait notamment un paysan pré-
RIVE. Lat. ripa. It. riva (dialectal), esp. tentieux.
riba. Au moyen âge désigne aussi le bord ROBINET, 1401. Dér. de robin, id., qui
de la mer ; depuis ne s'emploie ainsi que est attesté dans l’Ardenne depuis le xvies.,
dans la langue poétique. — Dér. : rivage, et qui est un emploi fig. de robin « mou-
vers 1200; dériver, « écarter de la rive », ton » (on a souvent donné autrefois aux
xive (quand la nef desriva) ; au moyen âge robinets la forme d’une tête de mouton);
desriver est en outre attesté au sens de robin est un de ces noms d'homme (v. le
« déborder, faire déborder ». préc.) qui ont souvent été employés pour
RIVER, vers 1170, au sens d’ «attacher»; désigner des animaux domestiques. —
l'expression river le clou est déjà du x1r1°8., Dér. : robinetier, 1870 ; robinetterie, 1845.
de même l’a. pr. ribar. Dér. de rive au sens ROBINIER, 1778. Nom créé par Linné
de « bord », le clou étant rabattu et aplati en l'honneur de J. Robin, ancien directeur
sur le bord de la planche qu'il a traversée. du Jardin des Plantes sous Louis XIIT, qui
— Dér. : rivet, vers 1260; rivure, 1480; introduisit cet arbre en 1601.
dériver, « enlever la rivure », XIII S.
ROBOT, vers 1935; tiré du tchèque
RIVIÈRE. Lat. pop. ripäria, fém. pris robota « travail, corvée » par l'écrivain
substantiv. de l’adj. ripärius « qui se trouve tchèque Tchapek dans sa pièce R. U. R.
sur la rive », v. rive, donc propr. « région (= les Robots Universels de Rossum, 1921).
proche d’un cours d’eau ou de la mer »,
sens attesté au moyen âge, mais qui n’exis- ROBUSTE, xr11e. Empr. du lat. robustus
te plus que dans des expressions techni- (de robur « force », v. rouvre). — Dér. :
ques : veau de rivière (nourri en Norman- robustesse, 1863 (Th. Gautier).
die, près de la Seine), vin de rivière (fait
avec du raisin récolté en Champagne, sur ROC, v. roche.
les bords de la Marne). Le sens moderne ROC, « tour au jeu d’échecs », v. roquer.
apparaît dès le xr1° s. L’esp. ribera signifie
« rive, rivage », l’a. pr. ribiera « rive » et ROCAMBOLESQUE, fin xix°. Dér. de
« rivière », de même it. riviera (dans les Rocambole, nom d’un héros aux aventures
dial. septentrionaux), qui sert notamment extraordinaires, créé par Ponson du Ter-
à désigner la côte de Gênes, entre La rail (1829-71). Celui-ci l’a tiré arbitraire-
Spezia et Nice, de là rivière en ce sens chez ment, à cause de la sonorité de ce mot, de
Voltaire ; aujourd’hui on emploie de pré- rocambole, fém., « ail d'Espagne », 1680,
férence la forme italienne. — Dér. rive- qui se prenait en outre au sens de « ce
rain, 1690 (chez Rab. sous la forme lyon- qu'il y a de piquant dans une chose », mot
naïise riveran, mais au sens de « batelier »). empr. de l’all. Rockenbolle, qui désigne la
même sorte d’ail.
RIXE, 1568; rare avant la fin du
xvines. Empr. du lat. rixa « querelle, etc. » ROCHE, xne. Représente un type roc-
pour exprimer une nuance différente de ca, d’origine inconnue, sans doute prélatin,
bataille. d’où aussi it. rocca, esp. roca. À côté on
a la forme roc, 1512, cf. sac et sachel,
RIZ, vers 1270 (écrit ris ; le z a été rétabli coq et cochet ; d’où rocaille, 1658 (Scarron;
d’après le lat. oryza). Empr. de lit. riso,
du lat. oryza (d’un mot grec, d’origine une ire fois dans Froissart ; 1611 déjà
orientale). Mot devenu européen : all. Reis, rochaille), rocailleux, 1692, et le mot de
formation fam. rococo, terme de l’argot
angl. rice, etc. — Dér. : rizière, 1718.
des ateliers, dit ainsi à cause de l'emploi des
ROB, ROBRE, 1835 ; en outre rubber, rocailles, dans les œuvres de ce style, cf.
1856. Terme des jeux de whist et de bridge, en 1829 : « Le Bernin fut le père de ce mau-
empr. de l’angl. rubber, du xv®s. vais goût désigné dans les ateliers sous le
ROBE, x1r1°, au sens de « vêtement »; nom un peu vulgaire de rococo » (Stendhal).
heure employé en parlant des — Dér. : rocher, x11° ; rocheux, 1823.
de bonne
ROCHET D98

ROCHET, sorte de surplis, x11e; au ROGATOIRE, terme jurid., 1642. Dér.


moyen âge désigne aussi des vêtements de rogalus, part. passé de rogare, v. le prée.,
d'homme et de femme. Dér. du francique avec le suff. -aloire, répandu dans la langue
*rok, cf. roccus dans les Capilulaires de sav.
Charlemagne et l’all. Rock « robe ». V. froc.
ROGATONS, 1662; au moyen âge et
ROCHET, dans roue à rochel « sorte de jusqu’au xvrie s. avait le sens d’ « humble
roue dentelée » ; attesté dès le xvie s., chez requête », qui est devenu péjor., notam-
Paré sous la forme rocquel ; c'est une exten- ment dans l’expression porleur de rogatons,
sion du sens médiéval « extrémité des Cf. « Appelez porieurs de rogatons pour ce
lances de joute » par comparaison de la qu’ils ne vivent que des aumônes des gens
forme des dents de cette roue avec celle de bien », 1578 (H. Estienne). Empr. du
de l'extrémité de ces lances ; le sens de lat. médiéval rogatum « demande » (de ro-
«bobine », 1669, est secondaire, d’après la gare, v. les préc.) ; pour la prononciation,
chronologie, malgré le sens du type étymo- v. dicton.
logique, v. la suite. Dér. (par l’intermé-
diaire d’un simple non attesté) du fran- ROGER-BONTEMPS, xve (Roger Bon-
cique *rokko « quenouille » (cf. all. Rocken lemps. liens à saige, René d'Anjou, mort
«id. »), qui a été employé par comparaison en 1480 ; une première fois au xives. dans
pour désigner l’extrêmité de la lance. Lit. par un homme Rogier Bontens). On a long-
rocca « quenouille » et l'esp. ruecca « id. » temps cru à tort que c’avait été d’abord
se rattachent à la forme gothique du même le surnom du poète R. de Collerye, joyeux
mot germ. viveur, qui « gallait le bon temps », mais
il est né seulement en 1470; l’on voit du
ROCKING-CHAIR, 1851 (dans un ou- reste par le texte du xiv° que le surnom,
vrage sur l'Amérique). Empr. de l’angl. dont le sens est transparent, est bien anté-
rocking-chair (de rocking (de lo rock « ba- rieur au xve s.
lancer ») et de chair, v. chaire).
ROGNE, « sorte de gale », xrrre. Cf. it.
ROCOCO, v. roche. rogna, esp. roña. Le lat. aranea « araignée »
est attesté à basse ép. au sens de « rogne » :
ROCOU, matière colorante, 1614 (dans il vit encore dans le roum. rîie. Dans les
le récit de voyage dans les Antilles de autres pays romans il a été modifié en
Claude d’Abbeville) ; parfois roucou. Empr. *ronea, probabl. sous l'influence de rodere,
de urucü, d'une langue des indigènes du cf. it. rogna, esp. roña. — Dér. : rogneux,
Brésil (tupi ou guarani). — Dér. : rocouyer, vers 1130.
1645.
ROGNE, « action de grogner entre ses
RODER, terme techn., 1723. Empr. du dents, 1501. À longtemps vécu surtout
lat. rodere « ronger », cf. corroder, éroder. dans la région de Lyon et de Genève
— Dér. : rodage, 1836 (terme d’automo- (dans l'expression chercher rogne « chercher
bilisme en 1933). noise »), d’où il semble avoir été apporté
RÔDER, 1418 (dans roder le pays, cons- à Paris par le fr. populaire vers la fin du
truction qui a duré jusqu’au début du XIX° s. Dér. de rogner « grommeler »,
XVIII s.); signifie aussi «tourner çà et là », qui vit surtout dans les patois, mais dont
Cf. après avoir rodé les yeux partout, 1588 le dér. rognonner est attesté pour Paris
(Montaigne) ; fin xXvi®, rauder, sans com- depuis 1680, pour la Normandie depuis
plément (rauder « plaisanter, se gausser », 1556. Il s’agit d’une famille de mots d’ori-
de la même époque, est probablement un gine onomatopéique très répandue en
autre mot). ARôder est empr. de l’a pr. gallo-roman avec des variantes vocaliques
rodar « rôder », propr. « tourner » (encore (comp. norm. roincer, lim. rundir).
très usité dans les parlers occitans), lat. ROGNER.
roläre « tourner, faire tourner (comme Propr. « couper autour »,
d’où souvent « tondre, tonsurer, trancher
roue) » ; raudir, attesté aux xveet xvre CR la tête » au moyen âge: « rogner de la
est une transformation de rauder d’après monnaie, les ongles », dès le xrrres. D'abord
courir. — Dér. : rôdeur, 1539. rooignier, reoignier, etc. Lat. pop. *rotun-
RODOMONT, 1527 (-one), diäre « couper en rond » (de rotundus
1594 (-ont, « rond »), puis *relundiare, v. rond. A. pr.
Salire Ménippée). Tiré de Rodomont,
empr. de l’it. Rodomonie, nom d’un roi redonhar. — Dér. : rogneur, 1495, jusqu’au
d'Alger, guerrier brave, mais altier et XIXe s. toujours en parlant de rogneurs de
insolent de l'Orlando monnaie ; rognure, vers 1100.
Innamoralo de
Boïardo et de l’Orlando Furioso de l’A- ROGNON. Rare en parlant de l'homme.
rioste (qui est la suite du poème de Boïardo). Lat. pop. *réniônem, acc. de *rénio, dér.
—— Dér. : rodomontade, 1587 (dans le titre de rên « rein »; a servi longtemps pour
d’un ouvrage). désigner le rein de l’homme. L’emprunt du
ROGATIONS, 1530. Empr. du lat. eccl. lat. ren par les médecins a permis de
rogaliones, plur. du lat. class. rogatio « de- restreindre l’emploi du mot aux reins des
mande »; les Rogations sont en effet des animaux et en a fait un terme de bouche-
prières publiques faites pendant une pro- rie. V. rein. It. rognone, a. pr.renhon, ri-, ro-,
cession. Au moyen âge et jusqu'au xvie s., ru-. La voyelle o s'explique par assimila-
il y avait une forme pop. rovaisons, en rap- tion vocalique.
port avec le verhe rover « demander, ROGOMME, 1700 (Mme de Maintenon
prier », lat. rogäre. qui écrit rogum) ; aujourd’hui usité seule-
559 ° ROMAN

ment dans voix de rogomme; désignait xviIe s., mais les caractères dits romains
d’abord de l’eau-de-vie, une liqueur forte. ont été inventés vers 1466 par un impri-
Étymologie inconnue. meur d’origine française, Jenson, établi en
Italie. Romaine, ou laitue romaine, n’a été
ROGUE, adj., xir1e (Rose). Peut-être de relevé qu’au xviie s.; cette salade aurait
l’anc. scandinave hrôkr « arrogant ». été introduite par Bureau de La Rivière,
ROGUE, « œufs de morue salée, servant chambellan de Charles V et de Charles VI,
à la pêche de la sardine », 1723. Empr. qui l'aurait apportée d'Avignon où siégeait
de l’a. nor. hrogn, cf. danois-norvégien alors la cour pontificale.
rogn (mot de la famille de l’all. Roggen
« œufs de poisson » et de l’angl. roe « id. »). ROMAINE, sorte de balance, xve, à côté
de roumane, encore usité au xv1® ; en outre
ROI. Lat. régem, acc. de rêëx. — Dér. : romman, masc., au xive 8. La forme ro-
roitelet, 1459 (une 1re fois en 1180), par maine, 1520, a visiblement subi l’influence
l'intermédiaire d’un premier dér. roielel, de l’adj. préc. Empr. de l’arabe rommana
roitel. Royal, xr1°, d’après le lat. regalis, « balance » et « peson » par l'intermédiaire
d’où royalisme, 1770, royaliste, 1589, de l’a. pr. (qui a les deux sens) ou de l’esp.
devenu usuel seulement au moment de la romana, Cf. aussi it. romand « peson ».
Révolution, royauté, 1155, cf. féaulé, La base de ces mots est l’arabe rummäna
loyauté ; vice-roi, 1463, d’où vice-royauté, « grenade », les fruits du grenadier ayant
1680. servi de pesons dans l'Orient.
ROIDE, v. raide.
ROMAN. D'abord romanz, puis ro(m)-
RÔLE, xr1e (sous la forme role ; au xv® mani, du x111° au xviI*, enfin roman au
et au xvie s. roole, d’où la forme moderne xvie s.(Pasquier : « On appelle roman nosire
rôle). Empr. du lat. médiéval rotulus, at- nouveau langage »), romans ayant été consi-
testé déjà à basse ép., mais très rarement déré comme un plur.; en outre romand et
(de rota « roue »), « rouleau », sens conservé le fém. romande en parlant de la Suisse
jusqu’à la fin du xvine s. dans quelques romande, xvi® (Bonivard). Désigne d’abord
techn., d’où « feuille roulée portant un la langue vulg., par opposition à la langue
écrit » et spécialement « registre d'actes, savante qu'était le latin ; puis, dès le xr1°5.,
liste » dans la langue jurid. et administra- a désigné tout récit en langue vulg. et,
tive (d’où l'expression à {our de rôle, dès spécialement, au xrves.,les romans d’aven-
le xve s.) et, d’autre part, « ce que doit ture (en vers), puis au xv® s., les récits de
réciter un acteur dans une pièce de théà- chevalerie en prose ; a pris le sens moderne
tre », d’où sont issus des emplois fig. dès au xvire s. Se trouve aussi dès le x1v® 8.
le xrie s., cf. servoit au role d’escuier dans pour désigner le fr. par opposition à l’all.
le premier texte où le mot ait été relevé. Romanz représente le lat. pop. *romaänice,
L’a. pr. role, rotle, etc. « rouleau, écrit » adv. qui signifiait propr. « à la façon des
et l’esp. rolde « cercle de personnes » sont Romains » (notamment « en langue latine »)
également empr. de rotulus; lit. ruolo au sens que Romanus a pris après l’inva-
« liste » et l’esp. rol viennent du fr. Il est sion des Barbares, c’est-à-dire par opposi-
assez difficile de faire le départ entre la tion aux Francs, comme on le voit p. ex.
famille de rôle et celle de rouelle, le radical dans la Loi Salique ; rômaios a servi de
des deux aboutissant souvent au même même à Byzance à désigner la langue lat.,
résultat. Ainsi rouleau comme t. d’agri- d’où aujourd’hui romaïque « grec moder-
culture se rattache à rouelle, tandis qu’au . ne ». De même a. pr. romans « langue vul-
sens de « volute » qu'il avait au xvirie8., il gaire, récit en langue vulgaire », rhéto-
représente une forme plus ancienne roleau, roman rumonisch « parler roman de la val-
dér. de rôle. — Dér. : rôlet, x111° (Rose, au lée du Rhin », d’où le fr. romanche ; v.
sens de « petit rouleau »; celui de « petit aussi romance. L’angl. romance vient de
rôle de théâtre » est de 1574; dérouler, l’a. fr. romanz. L’adj. roman, romane, qui
1538, déroulement, 1704. — Comp. enrou- sert depuis le xix° s. à désigner les langues
ler, 1334, enroulement, 1694; enrôler, issues du lat. (d’où romanisme, -iste, qui
1174 «inscrire sur un rôle », puis spécial. en ont été déjà créés au xvIT1° Où au XVII°S.
parlant de soldats, 1536, d'où enrôle- avec d’autres sens) a été tiré de roman, tel
ment, 1285 (sens parallèle à celui du verbe), qu’il vient d’être étudié, voir le texte de
enrôleur, 1660, au sens moderne ; contrôle, Pasquier, cité plus hout. Pour désigner le
1611 ; issu de contrerole, 1367, par super- style d'architecture antérieur au gothique
position syllabique, proprement « regis- roman a été choisi par analogie avec l’ex-
tre qu’on tenait en double », d’où con- pression langue romane, créée par les philo-
trôler, 1310 (écrit contreroller), proprement logues pour marquer qu'on regardait
« porter sur le registre dit contrôle », con- celle-ci (qui était alors seulement le pro-
trôleur, 1292 (écrit countreroullour) ; in- vençal) comme du latin dégénéré, tout
contrôlable, 1840. comme on voyait dans l'architecture ro-
mane une forme abâtardie de l’architec-
ROLL-MOPS, 1923. Empr. de lJ’all. ture romaine. V. romantique. — Dér. :
rollmops « hareng enroulé ». romancer, xix° (Sainte-Beuve) ; une pre-
ROMAIN, vers 1200. Empr. du lat. Ro- nière fois au xvire 8. chez Patru qui ajou-
manus. Le sens moral « qui rappelle les Le : « Si j'ose user de ce mot »; romancier,
qualités des anciens Romains » s'est déve- xve, d’après l’anc. forme romanz ; a suivi
loppé au xvrie s., sous l'influence de Cor- le développement sémantique de roman;
neille (et aussi de Montaigne). Romain, l’a. fr. a dit d’abord romanceor, -ceur,
terme d'imprimerie, n’a été relevé qu’au qu’on trouve encore au XVI*S. ; romanes-
ROMAN
560
que, 1627 (Sorel), déjà au sens fig. ; propr. lance ; rumex a pris par suite le sens de
« qui tient du roman »; a pris une nuance «ronce » d’après l’un ou l’autre de ces sens.
péjor. au xvrrre s, — Dér. : ronceraie, 1823, certainement
ROMANCE, 1599, Brantôme, au masc. ; plus anc. ; roncier, xvre.
fém. dès Corneille, 1648 ; tous deux en par-
RONCHONNER, 1867. Venu probable
lant des romances du Cid ; cf. déjà en 1599 :
« J’ay veu. chanter en Espagne une vieille
de la région de Lyon où le verbe roncher
chanson, que proprement on appelle la ro- « ronfler », qui représente le lat. roncare,
est entouré de nombreux dér., comme
mance » (Brantôme). Empr. de l’esp. ro-
mance, masC., spécialement « petit poème ronchonner, ronchund, ronchind, ronchillà,
tous avec le sens de « gronder, etc. ». La
en stances », emprunté lui-même du prov.
romans (comme l’it. romanzo « roman »), forte valeur onomatopéique du mot a
certainement été pour beaucoup dans son
v. roman; une collection de romances admission en fr. pop. — Dér. : ronchon-
s’appelle romancero, empr. vers 1831 ; TO-
neur, 1878; ronchonnot, id., fait sur
mance est devenu fém. à cause de la termi-
Ramollot, type créé par C. Leroy dans sa
naison ; ce mot a pris au xvirre s. le sens
publication Le Colonel Ramolot (depuis
de « petit poème sentimental accompagné
de musique » (d’où l’all. Romanze; l’angl. 1883).
romance a pris également ce sens au dm) ROND. Lat. pop. *relundus, issu, par
puis, au xXIX° s., a servi à désigner l’air dissimilation de la première voyelle, du
lui-même, d’où les Romances sans paroles lat. class. rolundus. — Dér. : rond, subst.,
de Mendelssohn, traduction de l’all. Lieder 11° ; au sens de « sou », déjà 1461 ; ronde,
ohne Worie. vers 1170 (dans à la ronde) ; comme terme
ROMANICHEL, 1844. Terme d'argot pa- militaire, 1559 (Amyot), il est probabl.
risien, dér. de romani, mot tsigane, dér. dér. du verbe ronder « faire la ronde », en
de rom « tsigane », qui désigne aussi le dia- usage aux xve et XvIeSs. ; « chant à danser
lecte des tsiganes. en rond, danse en rond », 1798 (une 1re fois
au xXI11° 5.) ; rondeau, x1ve (G. de Machaut);
ROMANTIQUE, 1776 (Le Tourneur, en rondelet, xIv®; rondelle, vers 1200 :
tête de sa traduction de Shakespeare ; rondeur, vers 1460 ; rondin, 1526, en 1387
auparavant, en 1675 et 1694, au sens de «sorte de tonneau », a désigné une sorte de
«romanesque »). Empr. de l’angl. romantic coussin au XVIIIe s.; rondouillard, 1888 ;
attesté depuis 1650, et qui s’est formé arrondir, vers 1270, d’où arrondissement,
d’après l'a. fr. romant, variante de 1529, dès 1737 au sens de « division terri-
roman. Le mot fr. romantique devient toriale », d’où son emploi en 1800, pour
usuel au cours du xvrr1e s., surtout pour désigner des circonscriptions administra-
qualifier des paysages, d'après l’angl. tives nommées d’abord districts, v. dépar-
romantic; cf. Plusieurs Anglais essayent tement.
de donner à leurs jardins un air qu'ils
appellent « romantic », c’est-à-dire à peu RONDACHE, xvie (Ronsard). Souvent
près pilloresque, 1745 (J. Leblanc). Le masc. au XvI® s. Aussi rondace au xvi® 8e
latin médiéval romanticus qu’on a dit avoir rondache est la forme picardo-normande ;
trouvé dans un texte du xve s. repose sur elle est sortie par changement de suffixe
une faute de lecture. L’anglais romantic de rondelle, qui a le même sens au XVI®,
a été empr. aussi par l’all. (1695), où mais dont l'emploi devait créer souvent
romantisch finit par s'appliquer aussi à la des embarras à cause de la polysémie de
littérature (dp. 1740), sous l'influence des ce mot.
critiques suisses. C'est de lall que RONFLER, xrIe. Aussi répandu
Mme de Staël a emprunté ce sens et l’a en
introduit en fr. (De l'Allemagne, 1810) en
Italie (ombrien ronfiare) et en Espagne.
l’opposant, à l'instar de Schlegel, au mot Création onomatopéique du type de ron-
chonner, ronron, maïs dans laquelle
classique. L'application de cette distinction le
à la littérature française se fait entre 1820 radical expressif ron- a été allongé du
et 1830 ; de là romantisme, 1822, qui a groupe de consonnes -fl- tout fait pour
supplanté romanticisme, 1818, sens paral- peindre le bruit du souffle qui sort de la
lèle. bouche. On peut aussi y voir une modifi-
cation expressive, d’après souffler, siffler,
ROMARIN, xrr1e, Empr. du lat. rosma- de l’a. fr. ronchier, lat. de basse ép. roncaäre,
rinus, littéral. « rosée de mer ». d’où aussi a. pr. roncar, ronchar, eSp. roncar.
Le type ancien survit encore dans les par-
ROMBIÈRE, 1896. On trouve aussi le lers du Nord-Est et de l'Est et surtout dans
masCc. rombier ; on écrit parfois le mot le Midi. — Dér. : ronflement, 1553; ron-
avec rh. Termes d'’argot, d’étymol. in- fleur, 1552 (Rab..).
connue.
RONGER. Lt. rümigare « ruminer ».
ROMPRE. Lat. rumpere. It. rompere, D'abord rungier, qui a été appliqué aussi
esp. romper. V. route. bien à l’action de ronger qu’à celle
ruminer. Ronger, qui est plus récent de
RONCE. Lat. rumicem, acc. de rumez, que
runger « ronger », est dû à l'influence
des deux genres, attesté au ve s. au sens du lat. rôdere « ronger » qui à été largement
de « ronce »; au sens propre rumex dési- conservé : it. rodere, esp. roer, a. pr. roire,
gnait une sorte de dard, d’où une sorte
a. fr. rore, ainsi que de ses dér. *rodicare
d’oseille ou de patience, ainsi nommée à (ang. rouger, occitan rouzegä, etc.)
cause de la forme de la feuille en fer de *rôsicare (norm. roucher). Seulement gallo- et
561 ROSSIGNOL

roman. La forme runger est encore très sur le modèle d'huile rosat on a fait ensuite
répandue dans les patois, au sens de vinaigre rosat, etc., où rosat reste inva-
« ruminer » aussi bien qu’au sens de « ron- riable. On trouve une fois eve rosade, au
ger ». D'autre part ronger vit aussi au sens XI1* s. Le lat. disait aussi rosaceus, cf.
de « ruminer » (Allier, etc.) et est conservé rosaceum oleum chez Pline, d’où parfois en
en franc. comme terme de vénerie, en a. fr. rosach dans sucre rosach de quelques
parlant du cerf. Le croisement de rümigare textes picards.
avec les verbes signifiant « ronger », est dû
à l’analogie des deux actions, cf. aussi le ROSBIF, 1798. Empr. de l’angl. roasi-
gascon aroumega qui a les deux sens. — beef (de roast « rôti » et de beef « viande
Dér. : rongeur, xve. de bœuf »); Voltaire, en 1756, écrit rost-
beef ; et on trouve antér. une forme plus
RONRON, 1761 (J.-J. Rousseau). Ono- francisée rol-de-bif, 1698 (deux Ros de Bif,
matopée. — Dér. : ronronner, vers 1860 d’où, au sing., rôt-de-bif, 1740).
(Baudelaire).
ROSE, x11°. Empr. du lat. rosa. Ailleurs
ROQUEFORT, 1721. Tiré de Roquefort, également sous une forme prise au lat.
nom d’un village de l'Aveyron, où se écrit des poètes et des livres d'histoire
fabrique ce fromage. naturelle it. esp. rosa. Pris adjectiv.
ROQUENTIN, 1631 ; écrit aussi rocan- depuis le xv® s. environ. Eau de rose s’est
lin, 1669, au sens de « vieillard qui fait dit d’abord eau rose, 1418, encore chez Vol-
le jeune homme »; a désigné aussi, au taire ; on a aussi eve rose, aig(uJe rose, dès
XVII® S., pour une raison obscure, un le xir1° 8. — Dér. : rosace, 1547, d’après le
chanteur de chansons satiriques et les lat. rosaceus ; rosacée, 1694 (Tournefort),
chansons elles-mêmes. Le sens de « vieux terme de botanique, également d’après le
soldat » que donnent les dictionnaires lat. rosaceus « de rose »; rosâtre, 1823 ;
pour roquentin n’est confirmé par aucun rosé, vers 1200; roséole, 1828, fait sur le
texte, de même que vieux roquart (XV® 8.) modèle de rougeole avec le suff. -éole, tiré
n’a jamais ce sens. De ce fait il devient de mots scientifiques tels qu’aréole ; on a
impossible de rattacher ces mots à roque fait ensuite, sur le modèle de roséole, ru-
« roche, forteresse », comme on a proposé. béole (1855) avec le radical du lat. rubere
Villon appelle vieux roquart un vieillard « rougir »; rosette, vers 1200; rosier,
morose et qui toussote. Il s’agit de dér. vers 1270, d’où roseraie, 1690, rosiériste,
d’un radical onomatopéique rok- employé 1868, rosière, 1779, ainsi nommée parce
pour exprimer le bruit d'objets qui se que la jeune fille, choisié comme la plus
heurtent. Un verbe roquer « heurter; vertueuse, reçoit une couronne de roses;
roter ; craquer, etc. » est très répandu dans rosir, 1823.
les parlers ; roquentin a probabl. été formé ROSEAU, x11e. Dér. de l’a. fr. ros « id. »,
sur le part. prés. de ce verbe, d’après encore dans les patois. D’un germ. *raus
ignorantin, plaisantin, etc. (à une époque antérieure à l’époque fran-
ROQUER, terme du jeu d'échecs, 1694. cique, en raison de la présence de la diph-
Dér. de roc, ancien nom de la tour, xrre, tongue au), cf. gothique raus, all. Rohr, d’où
usuel jusqu’au xvi® s., empr. probabl. par aussi a. pr. raus.
l'intermédiaire de l’esp. roque, du mot ROSÉE. Lat. pop. *rosäta, dér. du lat.
arabo-persan rokh, v. échec, fou. — Dér. : class. rôs, rôris (conservé par l’a. pr. ros).
rocade, fin xixe, propr. terme de jeu d'é- A. pr. rozada (d’où l’it. rugiada). Les par-
checs, d’où ligne de rocade, passé récem- lers méridionaux ont en outre des dér. de
ment dans la langue militaire pour dési- aiga « eau », v. aiguail.
gner un chemin de fer ou une route paral-
lèle à la ligne de feu. ROSSE, 1460 {au x11e ros m.). Empr.,
avec un sens péj., de l’all. Ross « cour-
ROQUET, 1544. Appartient comme sier », aujourd'hui mot poétique, qui a dû
rokè « grenouille verte » dans le Pas-de- être introduit en fr. par l’intermédiaire des
Calais, et rokè « crécelle » dans le Nord, mercenaires allemands ; d’où aussi probabl.,
à la famille du dialectal roquer « craquer, par l'intermédiaire du fr., l’a. pr. rossa. —
croquer, heurter ». Ce verbe, répandu dans Dér. : rossard, 1867.
presque tous les parlers gallo-romans du
Nord, est dû à une onomatopée qui rend ROSSER, 1650 (Scarron). L'’a. fr. a
un son soudainement interrompu. un verbe roissier de même sens, qui con-
tinue le lat. pop. *rusliäre, dér. de *rustia
ROQUETTE, nom de plante, 1538. Em- « gaule » (de rustum « ronce »), cf. à l'appui
pr. de l’it. rochetla, variante, attestée au le prov. rouisso « branche morte » ; rosser
xvIes., de rucchetta, dér. de ruca, lat. érüca, en est peut-être une déformation sous
propr. « chenille ». l'influence de rosse, si ce n’est directement
ROS, v. roseau.
dér. de celui-ci, au sens de « traiter comme
on traite une rosse ». — Dér. : rossée, 1834.
ROSAIRE, 1495. Empr. du lat. médiéval
rosarium, qui désignait propr. la guirlande ROSSIGNOL, xrre (Chrétien). Empr. de
de roses dont on couronnait la Vierge; l'a. pr. rossinhol, qui passe pour avoir été
d’où aussi it. esp. rosario ; pour le déve- empr. aussi par les langues voisines : it.
loppement du sens, v. chapelet. (l)usignuolo, esp. ruiseñor ; le mot prov.
doit sans doute sa diffusion au rôle du
ROSAT, x1rie, dans huile rosat, franci- rossignol dans la poésie des troubadours.
sation du lat. de basse ép. rosatum oleum ; Rosinhol continue le lat. pop. *lusciniolus,
DICT. ÉTYM. 36
ROSSIGNOL 262

masc. tiré de lusciniola, déjà ch:z Plaute, roue »), les deux derniers ont été faits sur
dim. de luscinia. L’r initiale, attestée déjà rolalion, avec les suff. -atoire, -atif, fré-
dans roscinia d’une glose du vie s., est quents dans les adj. de formation sav.
peut-être due à une dissimilation d’l ini-
tiale ; on l’attribue aussi à un croisement ROTANG, v. rotin.
avec russus « roux », le rossignol ayant en ROTE «instrument de musique des jon-
effet le plumage roussâtre. On trouve par- gleurs bretons », xr1°. Du germ. hréta, at-
fois au moyen âge des formes telles que testé sous la forme chrotia chez Fortunat,
losseignol (cf. aussi lourseignos au xr1° 5.), vie, et par l’anc. haut-all. hruozza. Le gal-
roussigneul qui ont l’aspect de formes trai- lois crwth « violon » et l’irlandais cruil
tées suivant la phonétique du fr. Au xvr®s. « harpe », qui sont certainement le même
rossignol désigne un instrument de torture, mot, signifient aussi l’un « ventre », l’autre
parce que celui-ci arrache au torturé des « bosse ». Ils sont donc peut-être nés par
émissions intermittentes de voix; par la emploi métaphorique de ces dernières si-
suite ce terme a été appliqué au crochet gnifications. Si cette manière de voir cor-
employé pour ouvrir les serrures. — Dér. : respond à la réalité, le mot a été empr.
rossignoler, 1601, déjà Zloussegnoler au d’abord par les Francs des parlers celtiques
xI1€ s.; rossignolet, xr112 (G. de Lorris). et porté ensuite par eux en Gaule.
ROSSINANTE, xvirie ; d'abord écrit ro- ROTE « tribunal ecclésiastique de Ro-
cinante, puis rossinante, d’après rosse. Tiré me », 1545. Empr. du lat. rota, propr.
de Rocinanie, nom du cheval de Don Qui- « roue », qui a reçu ce sens nouveau dans
chotte (cf. Don Quichotte, I, I), dérivé plai- le lat. de la cour pontificale, parce que
samment de rocin, V. roussin. chacune des trois sections de quatre mem-
bres dont ce tribunal était composé ins-
ROSSOLIS, plante de la famille des ro- truisait à tour de rôle les affaires qui
sacées, 1669, appelée aussi rosée du soleil étaient soumises à un tribunal.
(dès 1611). Empr. du lat. médiéval ros
solis, littéral. « rosée du soleil »; ce nom ROTIFÈRE, 1762. Terme scientifique,
vient de ce que les feuilles de cette plante du lat. rola « roue » et du suff. -fère, sur le
portent de petits poils terminés par des modèle de mots tels que frugifer « qui porte
vésicules transparentes semblables à des des fruits », etc.
gouttes de rosée, v. droséra. ROTIN, nom de plante, 1688; antér.
ROSSOLIS, sorte de liqueur, 1645 ; écrit rotiang, 1663, chez le voyageur Herbert;
aussi rossoli, dès 1667. Probabl. identique de là la forme rofang, dep. 1725. Empr. du
avec le précédent ; le nom de la plante a malais rôtan; l’angl. dit rat(t)an, de là la
pu être employé pour faire de la réclame forme ratan qu’on trouve au xvIIIe $.
pour une certaine liqueur ou parce qu’on ROTIN « sou », terme d’argot et de la
s’est servi d’une décoction de cette langue pop., 1837. Étymologie obscure.
plante comme ingrédient ; de toute façon
lit. rosoli, transformé plus tard en rosôlio, ROTIR. Du germanique *raustjan, cf.
est empr. du mot fr., et n’en est pas la all. rôsten, angl. lo roast; aussi a. pr.
source. raustir, it. arrostire; empr. par le latin
du Bas-Empire dans les garnisons le long
ROSTRE(S), 1823, comme terme d’anti- du Rhin. L'’argotique roustir (d’où -is-
quité romaine ; ordinairement au plur.; seur, -issure), usité surtout dans éfre rousli,
une première fois au xiv° s. (Bersuire). vient du prov. — Dér. : rôt, 1155 ; rôti,
Rostral, 1663, surtout au fém. dans colonne XIIIe s. ; rôtie, x1r1e ; rôtisseur, 1396, d’où
rostrale (une première fois au xvi® s. au rôtisserie, xve ; rôtissoire, 1462. V. roustir.
sens de « en forme de bec »). Empr. du lat.
rosira « tribune aux harangues » (plur. de ROTONDE, 1488, dans un texte où on
rostrum « bec », d’où « éperon », ainsi lit : « Un temple nommé panthéon... main-
nommé parce que cette tribune était ornée tenant c'est une église nommée sainete
des éperons des navires pris aux Volsques marie la rotonde » ; il s’agit de Notre-Dame-
d’Antium pendant la guerre latine) et du de-La-Rotonde, établie dans l’ancien Pan-
dér. rosiralis (créé à basse ép.). Rostre est théon ; s’est d'abord employé seulement
aussi pris parfois au sens de « bec » dans la en ce sens; peu usité avant la fin du
langue de l’histoire naturelle, d’où des XVIIe s.; depuis sens plus étendu. Empr.
comp., tels que rostriforme, 1812. de l’it. Rotonda, nom propre, tiré du lat.
rotunda, fém. de l’adj. rotundus.
ROT, ROTER. D'abord rout, router, dont
la voyelle ou a été remplacée par o qui ROTONDITÉ, 1314. Empr. du lat. rotun-
ditas.
rend ces mots plus expressifs. Lat. ructus,
ruciare, altérés en gallo-roman en rupius, ROTULE, 1487. Empr. du lat. rotula,
rupiäre, attestés à basse ép., peut-être dim. de rola « roue », en vue d’un sens
d’après ruplus, part. passé de rumpere. spécial.
À. pr. rot, rotar, it. rutlo, rultare.
ROTURE. Lat. rupiüra « rupture » (de
ROTATEUR, 1611 ; rotation, xive, rare rumpere « rompre »), qui a pris dans le lat.
avant la fin du xvrre 8. ; rotatoire, xVIrIe ; pop. le sens de « terre récemment défrichée,
rotatif, 1838, d’où rotative, subst., fin xixe. rompue » (rompre une terre s'est dit au
Termes techn. dont les deux premiers sont moyen âge et se dit encore dans le Berry),
empr. des mots lat. rotaior, rotatio (créé à d’où, par suite de l’organisation sociale de
basse ép. ; de rotare « tourner comme une la France, « redevance due à un seigneur
563 ROULER

pour une terre à rompre », puis « terre ville. It. rolella « petite roue », esp. rodilla
soumise à cette redevance » (cf. coterie), « genou », propr. « rotule », — Dér. et
et enfin « état d’un héritage qui n’est pas Comp. : rouler, vers 1170 (sous la forme
noble ». L’esp. dit de même rotura « terre roueller), d’où roulade, 1622, roulage, 1567,
défrichée », roturar « défricher ». — Dér. : roulant, vers 1500 (1883, au sens fam.
roturier ; attesté au xrr1e s. dans le Poitou d’ « amusant »), roulée, terme fam. « vigou-
et en Bretagne, le mot a été adopté dès 1306 reuse correction », 1836, roulement, 1538,
par Paris et de là il s'étend aux xve et rouleur, 1715 (dans un tarif), on trouve une
XVIe s. dans les autres régions. première fois le fém. roleresse en 1284,
ROUAN, 1340; se dit d’un cheval rouleuse, « prostituée », 1796, roulier, 1549,
dont la robe est mêlée de poils blancs, au sens moderne, roulis, 1671, au sens
noirs et roux. Empr. de l’esp. roano, dér. moderne ; au moyen âge usité au sens de
d’un simple disparu qui continuait le lat. « mêlée, fortification faite d'arbres roulés »,
rävus « gris foncé ». roulotte, 1800, roulure, terme vulg., de
même sens que rouleuse, 1775 ; roulette,
ROUANNE, sorte de tarière servant aux x1Ie ; rouleau, 1328; dérouler, 1538.
tonneliers, aux sabotiers, etc. Écrit roisne
au moyen âge, puis rouanne vers 1680. ROUENNERIE, 1799. Dér. de Rouen,
Grec rhykané « rabot » propagé par les Grecs où ce genre de cotonnade est fabriquée.
de Marseille (le lat. class. runcina « id. » ROUF, 1752; on trouve aussi roufle,
empr. du grec, a été altéré d’après run- vers la même ép. Empr. du néerl. roef
cäre « sarcler »). Seulement fr. — Dér. : « id. ».
rainure, 1410 (écrit royneure), par l’inter-
médiaire d'un verbe roisner, vers 1210; ROUFLAQUETTE, 1881. Mot pop:,
roisne désigne plutôt une tarière, mais le de formation obscure.
sens anc. des termes techn. est souvent ROUGE. Lat. rubeus « rougeâtre ». Con-
imprécis et roisne a pu désigner au moyen servé presque partout, mais désigne des
âge un instrument propre à faire des nuances diverses du rouge. Esp. rubio
rainures, Cf. le sens de « rabot » qu’a « blond doré (surtout en parlant des che-
le lat. runcina et celui du dér. rénette, veux) ». — Dér. : rougeâtre, vers 1360;
1660 (d’abord royenelle au xxr11e s.), « outil rougeaud, 1640 ; rougeoyer, 1845 (V. Hugo),
de charpentier ou de bourrelier pour faire auparavant déjà du x11° au XIv®Ss. ; rouget,
des raies ». XIII, comme nom de poisson ; au XIIe $.,
ROUBLARD, 1835, au sens actuel; a
adj. dim. de rouge ; rougeur, XIIe ; rougir,
signifié d’abord « chevalier d'industrie ex- 1155,'d’où dérougir, vers 1220. — Comp. :
torquant des directeurs de jeux une somme rouge-gorge, 1530 ; on disait aussi gorge-
qui lui permette de regagner son pays, rouge au XVII® $.; V. roupie ; rouge-queue,
après avoir fait une perte dont il exagère vers 1640.
l'importance », 1858. Peut-être extension ROUGEOLE. Lat. pop. *rubeola, fém.
plaisante, argotique, de roublard « richard, pris substantiv. de *rubeolus, dér. de ru-
homme à roubles » que Littré considère beus, v. rouge. La terminaison -ole est
comme le sens propre. — Dér. : roublar- refaite sur vérole, cf. rougeule au xive et
deries, 1846 ; roublardise, 1881. au xves. (en 1425 dans un texte qui donne
aussi vereule). Mot propre en ce sens à la
ROUCOULER, 1549 ; antér. rencouller, . France du Nord ; le masc. a donné le
xv°e, rouconner, 1495. Onomatopée. — normand rouvieu, d’où le fr. rouvieux, 1743
Dér. : roucoulement, 1611. (parfois écrit par étymologie pop. roux
ROUE. Réfection d’après rouelle, rouer, vieux), qui désigne la gale du cheval ou du
rouet, d’une forme ruee, qui aurait donné chien.
en fr. reue, forme attestée dans de nom-
ROUILLE. Lat. pop. *robicula, altéra-
breux parlers de l'Est, du Nord et de
l'Ouest, lat. rota. It. ruola, esp. rueda. —
tion, par substitution de suff., du lat.
Dér. : rouet, xIII° s.; rouage, XII S.; class. r6b1g6, rôbiïginis. L’a. fr. a aussi le
masc. ro(u)il; de même l’a. pr. a des
rouer, vers 1450 (différent de l’afr. rouer
« rouler », qui vient du lat. rolare), le sup- formes des deux genres rovilh, roïlh, ro-
plice de la roue, d’origine germanique,
vilha, roïlha, et le masc., bien que moins
fréquent que le fém., est usité dans de
n’était guère appliqué, avant le xvie s., nombreux patois. L’esp. robin continue
que dans les régions limitrophes de l’'Em- rôbiginem. — Dér. : rouiller, vers 1185;
pire, où l’on disait alors enrouer « rouer » ; rouillure, 1464 ; dérouiller, 1196, -ement,
roué, d’abord « qui a été roué », d’où
vers 1600.
« très fatigué », 1690, employé par la suite
pour désigner les compagnons de débauche ROUILLER, « rouler les yeux », v.
du régent, le duc d'Orléans, probabl. parce érailler.
que les lendemains de débauches ils étaient
épuisés ; rouerie, 1777. ROUIR, 1340. Du francique “roljan,
cf. all. rüsien (forme altérée), angl. to rel.
ROUELLE. Spécialisé aujourd’hui com- Propre à la France du Nord. — Dér. :
me terme de boucherie; au moyen âge rouissage, 1706.
signifie « petite roue, bouclier rond, ro-
‘ tule, etc. » jusqu’au xvie s. Lat. de basse ROULADE, v. rouelle.
ép. rotella (de rota, v. le préc.). Fréquent ROULEAU, v. rôle.
dans les patois pour désigner les roues de
la charrue ; se trouve en ce sens chez Join- ROULER, v. rouelle.
ROUND 564

ROUND, 1869. Empr. de l’angl. round, la bonne direction », xvi® s. (quelquefois


t. de sport. au xt); a fait disparaître, en l’absor-
bant en partie, un verbe homonyme
ROUPIE, « goutte d'humeur qui pend
dérouler, x11° (Chrétien) « débander, dis-
au nez », XIIIe (J. de Meung), attesté indi- perser », usuel jusqu’au xvi® s., dér. de
rectement par le dér. roupieux. Etymologie
route « bande » (v. routier, subst.) et d’où
inconnue. Roupie est attesté dès le xvres.
dans la région angevine au sens de « rouge- a été tiré déroute, 1541 (antér. aussi rolle,
probabl. de lit. rotla). De dérouter, terme
gorge »; mais en raison de l’obscurité de de marine, déroutement, 1876.
l’'étymologie du mot, on ne peut dire quel
en est le sens propre. ROUTIER, subsi., 1247, « soldat d’aven-
ROUPIE, monnaie de l’Inde, 1616 (sous ture faisant partie d’une bande », sens qui
les formes roupia et -ie). Empr., par l’in-
n’est plus qu’un souvenir historique, d’où
« qui a de l’expérience, finaud », fin xvie
termédiaire du port. rupia, de l’hindous-
tani räpiya (du sanscrit räpya, propr. (M. Régnier). Dér. de route « bande, trou-
« argent »). pe », usuel jusqu’au xvie s., fém. pris subs-
tantiv. de rout « rompu » (anc. part. passé
ROUPILLER, 1597. Assez répandu dans du verbe rompre) qui continue le lat. ruplus.
les parlers avec le sens de « ronfler;
ROUVIEUX, v. rougeole.
grommeler, etc. ». Mot d’origine onoma-
topéique, parallèle à la formation de ron- ROUVRE, 1401. A peu près inconnu
fler, mais qui a probabl. marqué d’abord des parlers septentrionaux. Mais de nom-
un ronflement saccadé. — Dér. : rou- breux noms de lieux dans presque toutes
pilleur, 1740 ; roupillon, « petit somme », les régions de la langue d’oïl l’attestent pour
fin xixe, le haut moyen âge. Peut-être a-t-on alors
distingué entre quercus pedunculata et le
ROUQUIN, 1896 (en Champagne quercus sessiliflora, cet arbre-ci étant
dès 1845). Le mot étant attesté d’abord appelé aujourd'hui par les botanistes
dans le voisinage de la Picardie il est chêne rouvre, distinction qui n’a été main-
probable qu’il est comp. de l’adj. roux tenue que dans peu de parlers (le mot,
et du pic. quin « chien ». sous des formes diverses, est usité surtout
ROUSCAILLER, dès 1628 dans l’argot, dans le Midi), lat. pop. *roborem, acc. de
a pénétré dans le franc. vers le milieu du forme masc., au lieu du lat. class. robur
XIX® S.; Comp. de rousser « gronder », qui était neutre, d’où aussi it. rovere, esp.
attesté vers 1611, et de caillette « femme roble. — Dér. : rouvraie, 1870.
bavarde », peut-être même d’un verbe non ROUVRIR, v. ouvrir.
attesté cailler « bavarder ».
ROUSPÉTER, 1881, terme d’argot, ROUX. Lat. russus. It. rosso ; esp. rojo
(de russeus). — Dér. : roussâtre, 1401;
devenu fam. Altération expressive du
rousseau, vers 1190; rousselet, 1538;
précédent par substitution de péter au
deuxième élément. — Dér. : rouspétance, roussette, id. (rousette en 1530); en 1560
1878 ; -teur, fin xIx° 8. désigne une variété de chien de mer dans
un texte norm.; rousseur, xII1°; roussir,
ROUSSIN, 1507. Altération, par croise- xI112 (Rose).
ment avec roux, de l’anc. roncin, vers 1080
(Roland) « cheval de charge » (d’où lit. ROYALTIES, 1962. Empr. de l'angl.
runzino), aussi a. pr. rocin (d’où l'esp. royalties, qui, désignant d’abord les pré-
rocin, v. rossinante), d’origine incertaine. rogatives du roi, a été employé parti-
On a proposé un lat. d'époque très basse culièrement pour désigner les droits sur
ruccinus (sous-entendu caballus), qui serait les minéraux et enfin le paiement fait
dérivé de l’anc. haut all. rukki « dos » au propriétaire d’une terre par celui qui a
(cf. all. Rücken), au sens de « cheval équipé obtenu la permission d'y exécuter certains
sur le dos », mais cette supposition se heurte travaux.
au fait qu'à l’époque où le mot aurait été ROYAUME, vers 1080 (Roland, reial-
formé, la forme germ. était encore *ruggi. me). Altération, par croisement avec
ROUSTIR, 1789; d’origine argotique; royal, v. roi, de reia(m )me, compris comme
empr. du prov. rousli « rôtir, griller », en- un dér. de rex, regis « roi », et qui est, en
suite « tromper ». — Dér. : roustisseur, réalité, empr. du lat. regimen « direction,
1859 ; roustissure, fin x1xe. gouvernement », cf. à l'appui l’a. pr. rege-
me, regeime et realme « royaume »; lit.
ROUT, v. raout.
reame, l’esp. arch. reame, realme et l’angl.
ROUTE. Lat. pop. (via) rupia, littéral. realm viennent du gallo-roman.
« (voie) rompue, frayée » (de rumpere « rom-
pre »). D'abord « chemin percé dans une RU. Mot dial., encore usité dans de
forêt » (encore « sentier » dans les parlers). nombreux parlers septentrionaux, mais
— Dér. : routier, adj. 1834; a déjà été qui ne se trouve plus dans la langue litté-
créé au moyen âge au sens de « qui court raire depuis le xvie s. Lat. rivus. It. esp.
les routes »; a désigné aussi un livre rio, A. Pr. riu ; V. ruisseau.
de routes marines ou terrestres, 1573; RUBAN, vers 1260 ; en a. fr. et dans les
routine, xvi® (Amyot), d’où routinier, parlers pop. plus fréquemment riban, du
1761 (J.-J. Rousseau); dérouter, terme moyen néerl. ringhband « collier ». — Dér. :
de vénerie « mettre les chiens hors de la rubanier, 1387, d’où rubanerie, 1490 (texte
route » ou terme de marine « écarter un de Rouen); enrubanner, 1773; une pre-
navire de sa route », d’où « mettre hors de mière fois enrubanné, 1532.
565 RUGUEUX

RUBÉFIER, 1413 (sous la forme rubi- en forme de ruche », 1818. — Dér. : rucher,
fier) ; rare avant le xixe s. Empr. du lat. subst., 1600 (O. de Serres) ; rucher, verbe,
rubefacere « rendre rouge », avec francisa- 1842, « plisser une étoffe, etc., en forme de
tion d’après les nombreux verbes en -fier. ruche ».
— Dér. : rubéfaction, 1812, sur le modèle
RUDE, 1213. Empr. du lat. rudis « brut,
de mots tels que raréfaction. inculte, grossier »; ce dernier sens est le
RUBÉOLE, v. rose. principal du fr. jusqu'au xvie s. et n’a pas
totalement disparu ; le sens de « dur (au
RUBESCENT, 1817. Empr. du lat. ru-
physique et au moral) » qui apparaît chez
bescens, part. prés. de rubescere « rougir ». Froissart est un développement du fr.;
RUBIACÉE, 1719. Dér. sav. du lat. cf. aussi : IL faisoit fort rude temps, xXv®°.
rubia « garance ». — Dér. : rudesse, xrr1° (Rutebeuf) ; ru-
doyer, 1372.
RUBICON, dans les locutions passer,
franchir le Rubicon, vers 1700 (Saint-Si- RUDIMENT, 1495. Empr. du lat. rudi-
mon). Allusion à un épisode fameux de la mentum « début des études (d’un enfant),
vie de J. César. Le Rubicon, entre Ravenne commencement, etc. » (de rudis). — Dér. :
et Rimini, constituait la frontière entre rudimentaire, 1812.
l'Italie et la Gaule cisalpine ; César, au RUE, « voie bordée de maisons ». Lat.
mépris de la loi qui interdisait à un général räga « ride » (conservé en ce sens par lit.
de franchir cette frontière avec son armée, ruga, l'esp. arruga, l’a. pr. ruga; V. ru-
la franchit, en janvier 49, en disant : gueux), qui a pris en lat. pop., par méta-
« Alea jacia est (Le sort en est jeté) ». phore, le sens de « chemin (spécialement
RUBICOND, vers 1400. Empr. du lat. bordé de maisons) ». Rare au sens de « rue »
rubicundus (de la famille de rubeus «rouge », en dehors du fr., cf. anc. it. ruga. — Dér. :
v. aussi les suiv.). d ruelle, 1138 ; depuis le xve s. a désigné
l’espace laissé entre un lit et la muraille,
RUBIS, 1170 (écrit rubi ; rubis est propr. d’où, au xvire s., les chambres à coucher
la forme du plur. qui a fait disparaître rubi où certaines dames de qualité recevaient.
vers le xvi® s. ; en outre rubin de 1170 au leurs visiteurs.
xrt1e s.). Même mot que l’a. pr. robi(n),
robina, lit. rubino (d’où l'esp. rubin et RUE, nom de plante. Lat. rüla. It. rula,
l’all. Rubin) qui sont empr. du lat. médié- esp. ruda.
val rubinus, dér. du lat. anc. rubeus
« rouge ». La forme fr. s'explique par
RUER. D'abord trans. au sens de « lan-
cer violemment, précipiter », encore usité
l'influence de la forme provençale robi, où
au xviie s. et, aujourd’hui, dans la région
le -n était normalement tombé. picarde ; se ruer est déjà du x111° $., ruer-
RUBRIQUE, x1r1e (écrit alors rubriche) en parlant du cheval, du xiv® (E. Des-
au sens de « titre en lettres rouges des champs). Lat. de basse ép. *rütäre, inten,
livres de droit ou des missels »; par suite sif du lat. class. ruere (supin rulum).
« les titres eux-mêmes » (encore chez Cor- Aussi piém. rudè « heurter ». — Dér. :
neille) ou « les règles de la liturgie »; au ruade, xve; rueur, 1551 ; antér. au sens
xviie et au xviri1es. a pris le sens de « pra- de « celui qui lance ».
tique, ruse »; dans la première partie du RUFIAN. Rufian est une orthographe
xixe s. a désigné dans les journaux le titre récente ; d’abord rufien, xive (E. Des-
qui indique le lieu d’où une nouvelle est . champs). Empr. de l'it. ruffiano (d'où
venue ; aujourd'hui c’est plutôt le titre aussi a. pr. rufian, rofian, qui a pu servir
indiquant la matière dont il va être traité. d’'intermédiaire), dér. de roffia « moisis-
Empr. du lat. jurid. rubrica « titre en sure, saleté » (souvent avec u dans les.
rouge des lois d'État », puis « des livres parlers de l’Italie supérieure), du germ.
de droit », propr. « terre ocre, rouge » (de
ruber « rouge ») ; aussi « craie rouge » dans
hrüf « escarre ».
la langue de la charpenterie ou dans d’au- RUGBY, 1859 ; devenu usuel vers la fin
tres langues techn. — Dér. : rubricateur, du x1xe 8., au moment du développement
1836. des sports. Empr. de l’angl. rugby, tiré de:
Rugby, nom d’une célèbre école anglaise,
RUCHE. Du gaul. rüsca « écorce » (dans dans le comté de Warwick.
des gloses du 1x° s.), cf. en ce même sens
l’anc. irlandais rüsc ; attesté en outre par RUGIR, vers 1120 ; mais rare avant le:
l'a. pr. rusca « écorce », le catalan rusc xvi® s. Empr. du lat. rugire; rugir a
« écorce de chêne-liège » et « ruche ». Le éliminé une forme plus francisée, usuelle:
sens de « ruche » du gallo-roman et du cata- au moyen âge, ruir(e) ; le sens du verbe qui
Jan vient de ce que l’on s’est servi d’écorce ne se dit que du lion indique de toute
pour faire des ruches. La ruche en paille évidence que le mot est empr. — Dér. :
tressée a été apportée dans la Gaule sep- rugissement, 1539.
tentrionale par les Francs, mais l’ancienne
désignation est restée, parce que, rusca RUGUEUX, 1520 ; déjà en 1461 en un
ayant été remplacé par le lat. scorlea au sens fig. en parlant d’un pays dévasté.
sens d’écorce, le rapport du mot rusca avec Empr. du lat. rugosus, propr. « ridé » (de
la matière dont les Gaulois avaient fabriqué ruga, v. rue). Rugosité, 1503, est un dér.
la ruche n'était plus senti. La ruche en sav. de l'ad)j. lat.; le lat. rugositas n’est
écorce est restée dans une grande partie du attesté qu’au sens de « froncement de
Midi. Pris au sens d’ « étoffe, etc., plissée sourcil ».
RUINE 566

RUINE, 1130. Ruineux, 1296, au sens RUPTURE, x1v®; rare avant le xvie s.
de « qui menace ruine », usuel jusqu’au Empr. du lat. ruplura (de rumpere « rom-
XVII® Ss. (sens aujourd’hui littéraire) : au pre ») pour servir de nom d’action au verbe
sens de « qui cause la ruine », attesté une rompre, V. roture.
première fois au xn1° s. Empr. des mots
lat. ruina « chute, écroulement », au plur. RURAL, vers 1350. Empr. du lat. de
« ruines, décombres », ruinosus « qui me- basse ép. ruralis (de rus, ruris, « cam-
nace ruine » et « qui cause la ruine » (de pagne »).
ruere « S’abattre, renverser »). — Dér. : RUSER. D'abord reüser. Signifiait d’a-
ruiner, 1260 ; a eu aussi le sens d’ « abat- bord « faire reculer, écarter, reculer, se
tre, jeter à terre », qui est aujourd’hui hors retirer », jusqu'au xvi® s. Au sens de
d'usage, sauf au part. passé. « faire des détours pour mettre les chiens
RUISSEAU. Lat. pop. *rivuscellus, dim. en défaut (du cerf) », 1561, et dans celui,
de rivus, v. ru ; pour la formation, cf. rin- plus général, de « tromper », xrre s. (G. de
ceau. Seulement fr. septentrional. — Dér. : Lorris), d’où le sens moderne au xive sa
ruisseler, 1188, rare avant le xve s., c’est un dér. du subst. ruse, t. de chasse.
ruissellement, 1875, une première Lat. recüsäre « refuser », qui a dû prendre en
fois en lat. pop. le sens de « repousser », cf. déjà
1613 ; ruisselet, vers 1180.
dans Ovide frena recusare « regimber contre
RUMB, terme de marine, d’abord ryn le frein ». L’a. pr. rebuzar « reculer, empi-
(1483), qui est empr. de l’angl. rim « cercle rer » s'explique comme dû à un croisement
extérieur d'une roue ; coin extérieur d’un de reüzar, raüzar (la chute du c intervocali-
objet, en forme circulaire », rym (encore que atteste que ces formes viennent de la
1606), transformé en rum, xvire, ensuite région septentrionale du domaine proven-
rumb (dès 1611), sous l'influence de l’angl. çal) avec rebotar « repousser ». L’it. ricusare
rhumb et de l'esp. rumbo, qui sont empr. a gardé le sens du lat. class. — Dér. : ruse,
du lat. rhombus. Cf. arrimer. 1270, t. de vénerie, au xrr1e s. aussi « men-
songe », ; rusé, 1393 (Ménagier : Aucunes
RUMBA, 1932, mot de l'esp. d'Amé- vieilles qui sont rusées et font les sages).
rique (des Antilles).
RUSH, terme de sport, 1878. Empr. de
RUMEUR. Au moyen âge signifie l’angl. rush.
« grand bruit » et aussi, jusqu'au xvie s.
RUSTAUD, v. le suiv.
« querelle, mouvement de révolte » ; de là,
en partie, le sens moderne. Lat. rumoôrem, RUSTIQUE, 1352; rusticité, 1380.
acc. de rumor « bruit, rumeur publique ». Empr. du lat. rusticus, rusticitas, v. rural.
It. rumore, esp. rumor. L’a. fr. avait possédé une forme ruisle,
rusle, ruisire, dont le sens avait été « brutal,
RUMSTEAK, 1843 (Th. Gautier) ; ou violent » (d’un coup, d’un combat), d’on
romsleak. Empr. de l’angl. rumpsleak (de « vigoureux, vaillant » (d’un chevalier)
rump « Croupe » et steak « tranche »). et qui était un représentant mi-savant de
rusticus. Au xive s. cet adj., au contact
RUMINER, 1350, déjà au fig.; rumi- du mot lat., avait repris la signification de
nation, xiv® (Deschamps). Empr. des celui-ci, d’où rustre, attesté au sens actuel
lat. ruminare, ruminalio: le verbe a depuis 1375. A côté de rusire, la forme sans
éliminé au sens propre un verbe POP. ron- -r- est attestée jusqu’au xvrre s., d’où le
ger, V. ronger. Dér. : ruminant, 1680 dér. rustaud, 1530.
(cf. déjà Des bestes ruminantes, en 1555).
RUSTRE, v. le préc.
RUNE, 1670. Empr. d’une langue scan-
‘dinave, cf. norvégien rune et suédois runa, RUT. D'abord ruit, encore usité au
cf. l’anc. scandinave rânar (plur.) « écriture XVIe s. Lat. rügitus, propr. « rugissement »
secrète, runes » et le gotique rüna « secret, (de rügire « rugir »), qui s’est dit spéciale-
mystère ». — Dér. : runique, 1750, ment du bramement du cerf, quand il est
en rut ; a signifié « tumulte » en a. fr. Pour
RUOLZ. Métal préparé suivant un pro- rui de ruit, v. futé. On ne retrouve le sens
cédé qui fut inventé vers 1841 par le chi- du fr. que dans le frioulan arul ; ruido de
miste fr. Ruolz (1808-87). l'esp. et du port. signifie « bruit ».
RUPIN, RUTABAGA, 1803 (Le rulabaga des
1628. Terme pop., ne vit que Suédois).
dans l’argot jusqu’au xixe s. On a proposé Empr. du suédois rotabaggar
à tort un empr. de l’angl. argotique rip- « chou-navet ».
Ping « épatant » (de {o rip « ouvrir en cou- RUTILANT, 1793 (Lavoisier) ; de quel-
pant, etc. »), lequel n’est attesté que depuis que usage vers le xvie s. Empr. du lat.
1826. Rupin est un dér. de rupe « dame », rutilans, part. prés. du verbe rutilare « ren-
ripe « id. » (attesté dans l’argot en 1596) ; dre rouge ».
celui-ci est très probabl. un emploi figuré RYTHME,
du m. fr. ripe « gale » (par une étape séman- écrit encore récemment
rhythme, 1512 (écrit ri-). Rythmique, id.
tique intermédiaire non attestée « mtc- (fin xve)
chante femme »), dér. du verbe riper « grat- Empr. du lat. r(h)ythmus,
r(h)ythmicus (du grec rhylhmos, -mikos).
{er », qui est empr. du moyen néerl. rip- V. rime.
Pen « tirailler violemment ; toucher ». Dér. de rythme : rythmé, 1825,
d’où -er, 1877.
S
SABBAT, x11°, en parlant du repos reli- SABORD, 1402. Paraît contenir bord;
gieux des Juifs, qui tombe le samedi; a mais le premier élément n’est pas expliqué.
pris au moyen âge le sens de « réunion — Dér. : saborder, 1831.
nocturne de sorciers », par assimilation SABOT, x11e (sous une forme çabot, cf.
injurieuse de la cérémonie juive et des le picard chabol), au sens de « toupie »; le
réunions de sorciers, puis de « bruit désor- sens de « chaussure », qui est pourtant le
donné », xiv® (Froissart). Empr. du lat. sens propre, n'a été relevé par hasard
eccl. sabbatum, empr. lui-même, par l’in- qu'au xve s. Altération de bof (usuel au-
termédiaire du grec sabbaton, de l’hébreu jourd’hui dans la région du Poitou, où il
schabbat, proprement « repos ». — Dér. : a été signalé dès 1564), autre forme de
sabbatique, 1569. V. samedi. boite « sorte de chaussure » (v. botte et bot),
par croisement avec savaie. Sabot est le
SABIR, 1852. Désigne le jargon mêlé terme des parlers septentrionaux ; ceux du
d’italien, d'espagnol, de français et d’arabe Midi ont des formes qui continuent l’a. pr.
que parlent les indigènes du Nord de esclop, lat. siloppus « bruit produit en frap-
l'Afrique, quand ils veulent converser avec pant sur la joue gonflée ». — Dér. : saboter,
les Européens. Sabir est une altération de vers 1300, au sens de « heurter » ; a signifié
l'esp. (ou du prov.) saber « savoir », qui à aussi « secouer, tourmenter » au xvi® et
été tiré de phrases souvent répétées telles au xvire s.; au sens de « faire un travail
que mi non sabir « moi pas savoir », cf. déjà sans soin », 1838, d’où sabotage, fin x1x°,
dans Le Bourgeois gentilhomme, IV, X, Si saboteur, 1838 ; sabotier, 1518.
li sabir, Ti respondir, paroles du muphti
en langue franque ou lingua franca, jargon SABOULER, vers 1500. Paraît être
de même type, parlé alors dans les états dû au croisement de saboler au sens de
barbaresques. « secouer » ou de « travailler sans soin »
et de bouler.
SABLE, xve. Dér. régressif de l’a. fr.
en fr. SABRE, 1598 (en 1625 sable). Empr. de
sablon « sable », qui n’a conservé l’all. Sabel, autre forme de Säbel, qui est
moderne que le sens spécial de « sable fin empr. du magyar széblya, soit directement,
pour écurer la vaisselle » ; sablon continue soit par l'intermédiaire du polonais szabla.
le lat. sabulonem, acc. de sabulo « gra- A été introduit par les mercenaires alle-
vier », dér. du lat. sabulum « sable », qui vit mands. — Dér. : sabrer, 1680, d’où sabreur,
encore au sens de « gravier » dans quelques . 1790.
patois, mais cf. it. sabbione « sable » (à
côté de sabbia, du fém. de sabulum), a. pr. SABRETACHE, 1752. Empr. de l’all.
sablon. — Dér. : sabler, 1507 (au part. Säbeltasche, fait de Säbel « sabre » et de
sablé) ; sabler du champagne, 1718 (d’abord, Tasche « poche » ; désigne en effet une sorte
vers 1695, v. n.) ; dit par comparaison avec de sac pendant à côté du sabre.
l’action de fondre un métal en le jetantdans
un moule de sable fin, opération qui se dit SAC. Lat. saccus (du grec sakkos, qui
sabler ; sableux, 1559 ; sablier, vers 1640 ; vient lui-même de la langue préhellénique
sablière, 1580 ; ensabler, 1537, d’où ensa- de la Cilicie. It. sacco, esp. saco. À pénétré
blement, 1673, désensabler, 1694. aussi dans les langues germaniques
gotique sakkus, all. Sack, angl. sack. —
1288 ; sachet,
SABLE, x11° (Chrétien), autre nom de Dér. et Comp. : sachée,
la martre zibeline, qui a servi par la suite à vers 1190 : sacquer, 1867, mot fam. « ren-
désigner la fourrure de cet animal; en voyer quelqu'un, le congédier », dès 1611
outre terme de blason. Mot d’origine slave, donner à qn son sac ; ensacher, vers 1220 ;
cf. polonais sabol, russe sobol, d'où aussi bissac, v. besace.
all. Zobel ; a pénétré en fr. par l’intermé- SAC « action de piller une ville », vers
diaire du lat. médiéval sabellum. V. zibe- 1400 (Mettre la ville à sac qui est à dire la
line. courir et piller). Une première fois dans les
SABLIÈRE, terme de charpenterie, mémoires du maréchal de Bouciquaut, qui
1368. Étymologie inconnue. avait été gouverneur de Gènes, ensuite
dep. 1466, probabl. empr. de lit. sarro,
SABLONNEUX, x11° ; sablonnier « celui attesté depuis le milieu du xiv° s. En
qui vend du sablon », 1557 (en 1422 comme même temps et chez les mêmes auteurs
nom propre); sablonnière, x11*. Dér. de italiens on trouve saccomanno, dans Îles
sablon, v. sable. sens de « pillard » et de « pillage », et depuis
SAC F.
268

la deuxième moitié du xrve s. un mot fr. SACRILÈGE, « celui qui viole une chose
saqueman est attesté pareillement dans les sacrée », 1283; sacrilège, l’action elle-même,
deux sens, souvent chez les mêmes auteurs. vers 1190. Empr. du lat. sacrilegus, sacri-
Ces deux mots sont empr. de l’all. sakman legium, v. les préc.
« goujat, pillard, brigand », comp. de sak
«sac » et de man « homme », parce que l’on SACRIPANT, vers 1600. Empr. de lit.
avait l’habitude d’emporter les objets pil- Sacripante, nom d'un faux brave du poème
lés dans de grands sacs. L'’it. sacco « pil- de Bojardo (v. rodomont) ; cf. ce que Berbi,
lage » est une réduction de Saccomanno; la un continuateur, a dit de ce personnage :
chronologie des passages où l’on trouve le « Era fuor de’perigli un Sacripante, Ma
mot fr. sac ne laisse guère de doute sur le ne’perigli avea Cara la vita. » Sacripani a
fait qu’il est empr. de l'it. eu aussi le sens de « faux brave », confor-
mément au sens original. En it. Sacri-
SACCADE, 1534 (Rab.). D'abord terme panlie est un nom de fantaisie formé sur
de manège. Dér. de l’anc. verbe saquer l’adj. sacro.
« secouer, tirer », usuel au xvie s. (avec le
suffixe -ade, cf. ruade), forme dialectale SACRISTIE, 1339; sacristain, 1375 ; au
de l’a. fr. sachier « tirer » (saquer est encore moyen âge segrelain, d’après segret, encore
usuel au même sens en normand et en signalé par Ménage comme usité en Anjou
picard); sachier ainsi que l'esp. sacar et ailleurs, rare aujourd’hui. Empr. du lat.
«tirer » sont dér. de sac ; ils signifient propr. médiéval sacristia (dér. de sacrista « sacris-
« retirer d’un récipient ». — tain » du même lat., qui l’a tiré du lat.
Dér. : saccadé, class. sacer « sacré »), sacristanus. — Dér.
1788 au sens moderne: antérieurement
saccader, 1532 (Rab.). du ?° : sacristine, 1671.

SACCAGER, SACRO-SAINT, 1546. Empr. du lat.


vers 1450: l'on trouve
saccagenies (-ium) dans un document mar- sacrosancius.
seillais de 1376, ce qui fait présumer que SACRUM, xvie (Paré, dans os sacrum).
le mot a passé au moins dans les parlers Os sacrum « os sacré » est un terme du
du Midi dès le xive. Empr. de l’it. saccheg- lat. médical, ainsi nommé parce que cet
giare, dér. de sacco, v. sae « pillage ». — os était offert aux dieux dans les sacrifices ;
Dér. : saccage, 1596 ; saccageur, 1553. le fr. en a tiré sacrum par abréviation Ô
SACCHAR(O-). traduit aussi os sacré.
Premier élément de
mots sav., tels que saccharine, fin xvrrre s. SADE, v. maussade.
(alors adj.), tiré du lat. saccharum (du grec SADISME, 1888; sadique, id. Tirés de
sakkharon) ; v. sucre. Sade, nom d’un auteur, le marquis de
SACERDOCE, xve. Sacerdotal, 1325, id. Sade (1740-1814), dont les romans con-
Empr. du lat. sacerdotium, sacerdotalis (de tiennent un érotisme particulier.
sacerdos « prêtre »). SAFRAN, x11e. Empr. du lat. médiéval
SACOCHE, 1611 ; d’abord sacosse, 1606. safranum, qui vient lui-même du mot ara-
Empr. de l’it. de Toscane bo-persan za‘farän : d’où aussi it. zafferano,
saccoccia, dér. esp. azafarän, etc. ; l’all. Safran et l’angl.
de sacco, v. sac.
saffron viennent du fr. — Dér. : safrané,
SACQUER, v. sac. 1549 (d’autres formes verbales sont rares).
SACRAMENTAIRE, v. sacrement. SAGACE, 1495, rare avant la fin du
SACRE, « sorte d'oiseau de proie, » xrve XVIII S.; sagacité, 1444 ; rare avant le
(sacri en 1298), d’où « coquin », 1579 XVIIe s. Empr. des mots lat. sagax, propr.
(H. Estienne). Empr., au moment des « qui a l’odorat subtil » (en parlant du
Croisades, de l’arabe çagr, d'où aussi esp. chien; de sagire), sagacitas.
sacre, it. sagro. SAGAIE. Altération récente de zagaie,
seule forme donnée par Littré. Zagaye,
SACRÉ (os), v. sacrum. 1538-1658 (antér. azagaie, 1546 (Rab.),
SACREMENT, 842 ;sacramentaire, 1537; archegaie, vers 1300), est empr., par l’in-
sacramentel, 1382 ; on a dit aussi sacramen- termédiaire de l’esp. azagaia, de l’arabe
tal, 1541 (Calvin). Empr. du lat. eccl. sacra- az-zaghâya (mot d’origine berbère) « sorte
mentum (en lat. class. « obligation, ser- de javelot » (qui sert aujourd’hui à désigner
ment », v. serment), sacramentarius, -lalis. la baïonnette). S’emploie aujourd’hui sur-
tout pour désigner des javelots de peu-
SACRER, vers 1138. Empr. du lat.
sacrare (de sacer « sacré »). Sacrer a pris le plades sauvages.
sens de « dire des jurons », 1727 à cause SAGE. En outre savie, x1e (Alexis),
de l'habitude d'employer sacré dans les d’où saive (Roland) ; signifie aussi « sa-
jurons. — Dér. : sacre, 1165. De sacré, vant » au moyen âge. Représente le lat.
employé dans les jurons, on a tiré des mots sapidus » qui a du goût » (d’où le fr. sade,
aux formes créées arbitrairement par eu- V. maussade) et « sage », chez Ausone
phémisme sapré, sacristi, saprisli, saper- au 1ve s.), ces deux sens correspondant à
loite, etc., relevées seulement au xrxe 8., ceux du lat. sapere. Sapidus est devenu
mais sans doute antér. *sabidus dans le lat. du Bas-Empire,
et
celui-ci, en connexion étroite avec *sabere,
SACRIFICE, vers 1120; sacrifier, id.; « savoir », est devenu, par changement de
sacrificateur, vers 1500. Empr. des mots suffixe, *sabius. Sapidus est représenté
lat. sacrificium, sacrificare, -ator (lat. d'une façon normale par a. pr. sabi,
ecel:)}: A. pr. Cat. savi, esp. pg. sabio. L'it. savio
569 ‘
SAISIR
est empr. de l’a. pr., saggio de l’a. fr. sage. SAIN. Lat. sänus. — Comp. : assainir,
— Dér. et Comp. : sagesse, xrrre (Rose); 1774 (Buffon),
assagir,
assainissement, XVIII ;
x1Ir1° ; sage-femme, 1212; le lat. malsain, xive.
obsletriz n’a pas laissé de traces ; outre
sage-femme on trouve dans les parlers SAINDOUX, x1r1e (écrit saïm dois, cor-
gallo-romans sage mère, matrone, accou- riger dous). Comp. de l’a. fr. saïm (plus tard
cheuse, bonne femme, mère aleresse, (de sain) « graisse », usuel jusqu’au début du
alitrix), etc. XVIIe s. et de l’adj. doux. Ce comp. paraît
avoir été formé pour éviter une équivoque
SAGETTE. Vieux mot, qui ne s'emploie avec les nombreux homonymes de sain,
plus que dans la langue littéraire. Réfec- notamment sein. Saïm représente un lat,
tion (qui date du xve s., d’après le lat.) pop. *sagimen, réfection du lat. class. sa-
de l’a. fr. saele, saiele, lat. sagitta; it. gina « engraissement, pâture, embon-
saella, esp. saela. point »; pour le suff., v. regain. Sain survit
encore dans les parlers de l’Est et dans des
SAGITTAIRE, 1780, fém. Empr. du dérivés techn. ou dial. L’a. pr. sain, sagin
lat. des botanistes sagitiaria, créé par (d’où l'esp. sain) « graisse » représente un
Linné, à cause de la forme des feuilles lat. pop. *saginum.
(v. le préc.) ; cette plante s’appelle populai-
rement flèche d’eau ou flèchière. Sagittaire, SAINFOIN, v. foin.
vers 1120, masc., nom d’un signe du
zodiaque, est empr. du lat. sagillarius, SAINT. Lat. sancius, qui a pris en lat.
eccl. une valeur spéciale, qui est la suite
propr. « archer » (sens repris, depuis le
du sens class. « consacré, vénéré ». It. esp.
XVI® S.). Santo. — Dér. et Comp. : sainteté, 1487
SAGOU, « sorte de fécule (qu'on retire (une première fois vers 1250), réfection,
de la moelle de diverses esp. de palmiers, d’après le lat. sanctitas, de l’a. fr. sain-
notamment de sagoutier, qui croît aux leé; toussaint, xirr, issu d'expressions
Moluques et dans les régions voisines) », comme la fesie saint Jean, la saint Michel
1620, comme mot fr., déjà mentionné par el la ious sainz, où la est pron. détermi-
les voyageurs comme mot malais, dep. natif en a. fr., mais a fini par être pris
1521. Empr., par l'intermédiaire du port. comme article, quand la valeur de Le, la
sagu, du malais sagû. — Dér. : sagoutier, comme pronom déterm. a disparu ; d’où
1791. le fém. de foussaint.

SAGOUIN, 1537 (Marot). Empr. du tupi


SAINT-CRÉPIN, v. frusque.
(langue indigène du Brésil), probabl. par SAINT-FRUSQUIN, v. frusque.
l'intermédiaire du port. sagui.
SAINTE-NITOUCHE, v. toucher.
SAIE. Ne s'emploie plus que dans la SAINT-HONORÉ, sorte de pâtisserie.
langue écrite, notamment en parlant du Gâteau inventé vers 1879, par un pâtis-
manteau des acteurs jouant le rôle d’an- sier, nommé Chiboust, qui a donné à ce
ciens Romains, pour traduire le lat. sagum. gâteau le nom de la rue Saint-Honoré où
Au moyen âge « sorte d’étoffe », surtout il était établi.
Saie continue un lat. pop. *sagia, plur.
neutre, dér. de sagum « petit manteau SAISIR. Propr. terme de droit féodal
d'étoffe grossière, casaque militaire », signifiant à la fois « mettre en possession »,
indiqué comme celtique par Polybe. Saie de là se saisir de (cf. aussi la locution jurid.
(masc. au xvie et au xvirre s.) au sens de le mort saisit le vif, xt, Beaumanoir,
« manteau » est empr. de l'esp. sayo encore usuelle aujourd’hui), et « prendre
(attesté au xve s. à côté de saya, de même possession », d’où « saisir vivement (en
origine que le fr. saie). V. sayon. général) », dès la Chanson de Roland. Mot
d’origine germ. attesté dans les Lois
SAIGNER. Lat. sanguinäre. It. sangui- Barbares dès 700 par le verbe sacire, cf.
nare, esp. sangrar. — Dér. : saignée, xr1°; ad proprium, ad proprielatem sacire ; celui-
saignement, 1680; saigneur, x111°; sai- ci ne représente pas, comme on l’a pré-
gneux, 1539; ressaigner, 1549. tendu, un francique *sakjan « revendiquer
des droits », qu’on restitue d’après l’ancien
SAILLIR. Jusqu'au xvi® s. « sauter, sSaxon saca « procès », l’anc. haut all.
s’élancer » ; aujourd’hui le verbe est défec- sahha « id. ». Dans ce cas le sens de « mettre
tif et s'emploie au sens de « faire saillie » en possession » ne s'explique pas bien;
et en parlant du mâle qui couvre une fe- on pourrait penser à un francique *satjan
melle. Lat. salire « sauter, couvrir une (cf. gotique saljan, anc. haut all. sezzen,
femelle » ; l’2 mouillée, régulière à la troi- d’où all. seizen « poser, mettre »), mais
sième personne du plur. saillent, lat. sa- *saijan serait devenu *sair, comme *hatjan
liunt, à l’imparf. saillais, etc., a gagné le a donné hair. Saisir, ne peut s'expliquer
reste du verbe. V. sauter. — Dér. et que par l’anc. haut all. sazjan, lequel cor-
Comp. : saillant, x11°, comme adj. ; s’em- respond à un francique *satjan. Comme
ploie aussi comme subst., depuis 1560; on sait, le francique occidental parlé dans
saillie, vers 1170, au sens d’ « attaque », la Gaule septentrionale encore vers 800 a
encore usité au xvii® s.; employé en participé à l’évolution haut-allemande de
parlant de mouvements de l'âme au en z, de sorte qu'une forme *sazjan peut
XVI® s. d’où « trait d'esprit », xvii®; très bien être la base du fr. saisir. Le mot
tressaillir, vers 1080, d’où tressaillement, a donc pénétré en gallo-roman relative-
xvie (Amyot). ment tard. Pour le sens, comp. le moyen
SAISIR 570

haut-all. einem elwas selzen « assigner à SALAMANDRE, vers 1120. Empr. du


qn un objet en propriété ». L’a. pr. sazir lat. salamandra (mot pris au grec). Au
signifiait aussi à la fois « mettre en pos- sens d’ «esprit, animal vivant dans le feu »,
session » et « prendre possession ». Quant à d’après Paracelse (xvi°) ; d’où l’emploi du
lit. sagire c’est un mot empr. du gallo- mot, fin xix®, pour désigner une sorte de
roman, comme ordinairement les termes fourneau (d’abord nom d’une marque).
féodaux. — Dér. : saisie, xvie (parfois au
moyen âge, dès le xII° s., au sens de « pos- SALAMI, 1923 (salame en 1875). Empr.
session »), d’où saisie-brandon, relevé seu- de l’it. salami, qui avait d’abord un sens
lement au xixe s., certainement antérieur ; collectif pour désigner de la viande salée.
saisine, 1138, terme jurid.; saisissable, SALE, vers 1170. Du francique salo
1764 ; saisissant, 1690 ; saisissement, x1r1°, « trouble, terne ». — Dér. : salaud, 1584 ;
au sens d’ «action de saisir » ; le sens domi- saleté, 1511; salir, vers 1180, salissant,
nant aujourd’hui « fait d’être saisi par une 1694; salissure, 1564; salope, 1611,
impression soudaine » date du xvuie s.; Cotgrave le donne comme orléanais;
dessaisir, 1155, d’où dessaisissement, 1609 ; probabl. comp. de sale et hoppe, forme
insaisissable, 1770 ; ressaisir, 1207. dialectale de Ahuppe, cet oiseau étant
connu comme très sale, témoin le proverbe
SAISON. L'’a. pr. a de même sazon ; au- lorrain sale comme une hoppe ; d’où le masc.
jourd’hui dans tous les parlers gallo-ro- salop, 1837, salopard, vers 1925, saloperie,
mans. Lat. salionem, acc. de-satiô « ense- 1694, salopette, 1836, salopiau, 1879,
mencement, semailles » (de serere «semer », marie-salope, 1831, terme de marine.
supin salum), puis, du sens de « saison des
semailles », la saison par excellence, SALICAIRE, 1694. Empr. du lat. des
vivant en fr. depuis le x11° s., s’est étendu à botanistes salicaria, dér. de salix « saule » ;
toutes les autres saisons. Lit. stagione vient la salicaire commune a été ainsi nommée
du lat. siatio propr. « arrêt », qui s’em- parce qu’elle croît au bord de l’eau comme
ployait comme terme d'astronomie en le saule.
parlant de l’immobilité apparente des pla- SALICOQUE, « crevette de mer », 1554
nètes et qui a dû se dire des «stations » du (sous les formes salecoque et salcoque ; donné
soleil dans les différents signes du zodia-
que, d’où « moment de l’année, saison ». comme terme de Rouen, saige coque, 1530).
Mot normand, de formation obscure ; une
L’esp. sazôn, de même origine que le fr.
saison, ne signifie que « temps favorable ». autre forme salicot est aujourd’hui usitée
— Dér. et Comp. : assaisonner, dès le
dans le Midi. Une forme saillecoque, relevée
XIII® s. au sens moderne ; au sens propre en 1642, contient le verbe saillir, cf. aussi
de « cultiver dans une saison favorable »,
le norm. sauticot ; mais ce peut être par
1371, sens encore usité en berrichon et suite de croisements secondaires.
en norm., d’où « faire müûrir », xXvI°; SALICOR, nom de plante, 1564 ; aujour-
d’où assaisonnement, 1539 ; arrière-saison, d’hui plutôt salicorne, d’après corne. D'’a-
xve; 2 morte-saison, xv°; saisonnier, 1775. près l'indication d’O. de Serres : Salicor
par les Arabes dit salcoran, une origine
SALACE, 1555; salacité, 1542. Empr. arabe est probable.
du lat. salax « lubrique » (de salire au sens
de « couvrir une femelle », v. saillir), sala- SALIGAUD, 1656; en 1611 saligoi
cilas. «négligent dans sa mise », dès 1380 comme
épithète injurieuse à Liège, où il est attesté
SALADE, vers 1350. Empr. de lit. comme surnom depuis 1269. Saligot est
insalata (dial. salata, salada), comme aussi aussi le nom de deux rois sarrasins dans
esp. ensalada, occitan ensalado, propr. deux chansons de geste d’origine picarde
« (mets) salé », v. sel. — Dér. : saladier, (dès 1170). Le mot a donc appartenu
1580. d’abord aux parlers wallon et picard. Il a
SALADE, sorte de casque, 1419. Empr., été formé très probabl. dans un milieu
de l’it. celata. Il s’agit de casques très pro- plus ou moins bilingue à l’aide de l’adij.
fonds ; celala veut donc dire « pourvu d'une francique salik «sale » (dér. de salo, v. sale),
grande voûte », comp. a. fr. ciel « voûte ». avec le suff. péjoratif -of.
Dès 1417 un document savoisien parle de SALIN, adj., v. sel.
quelques cellatas que le duc Amédée VIII
a fait venir de Milan. L'’esp. celada est lui- SALINE. Lat. salina, dér. de sal « sel ».
même empr. de l’it. La transformation de It. esp. salina. Peut-être simplement repris
cel- en sal- peut provenir du passage du au lat. — Dér. : salinier, vers 1460.
mot à travers le franc-provençal ou le prov. SALIVE. Lat. saliva. — Dér. : saliver,
1611 ; salivaire, 1690 ; salivation, xvi® (Pa-
SALAIRE, vers 1260. Empr. du lat. ré) ; d’après les mots latins salivare, sali-
salarium (de sal « sel »), propr. « solde pour
varius, salivatio (créé à basse époque).
acheter du sel », d’où « solde, indemnité,
honoraires ». — Dér. : salarié, 1369, d’après SALLE, en a. fr. sale. Du francique *sal
la forme du lat. salarium ; rare avant le (cf. all. Saal), mot masc., qui est devenu
XVIIe s., où salarié devient usuel, 1758; rapidement fém., cf. sala des Lois Barba-
salariat, 1845. res, et qui a conservé la voyelle accentuée a
SALAMALEC, 1559, dans un livre sur
sous l'influence de halle.
la Turquie. Empr. de l’arabe salâm ‘alaïk SALMIGONDIS, 1552 (sous la forme
« paix sur toi » (qui est la salutation arabe). salmigondin) ; d’où, par abréviation, sal-
51 Le
SANCTIFIER
mis, 1718. Klargissement irrégulier et tion) et il a éliminé le fém. aux autres sens ;
expressif de salemine (1393), dér. de sel la graphie salut, d’après le lat., apparaît
à l’aide des deux suffixes collectifs -ain dès le xrr1e s. It. saluie, fém., esp. salud
(du lat. -amen) et -ine ; -gondin, -is est « id. ».
probabl. tiré du verbe m. fr. condir « assai-
sonner ». SALUTAIRE, vers 1400. Empr. du lat.
salutaris, v. les préc.
SALON, 1664 (Loret). Empr. de l'it.
salone, augment. de sala « salle ». Au sens SALUTATION, vers 1275. Empr. du lat.
de « galerie où l’on expose des œuvres de salulatio pour servir de nom d'action à
peinture, etc. », vers 1777 ; cette acception saluer.
vient de ce que, à partir de 1737, des
expositions bisannuelles eurent lieu dans SALVATRICE, 1898. Empr. du lat.
le Salon Carré du Louvre. — Dér. : salon- eccl. salvatrix (de salvare, v. sauver).
nier, 1870 ; salonnard, fin xrxe. SALVE, 1559. De nombreux termes
SALOPE, v. sale. militaires ayant été pris à cette époque à
l’it., on a pensé à l’it. salva, mais celui-ci
SALPÊTRE, 1338. Empr. du lat. n’a été relevé qu’en 1614 et au sens de
médiéval salpetræ, littéral. « sel de pierre ». « salutation »; salve paraît donc avoir été
— Dér. : salpêtrer, 1585, salpêtrage, 1838 : créé en fr. et être empr. du lat. salve «salut »,
salpêtrière, 1660. formule de salutation, les salves étant
tirées en l’honneur de quelqu'un; le
SALSEPAREILLE, 1570, sous la forme genre masc. de salve, qui se trouve dans
salseparille ; Ménage dit sarzepareille. Em- d’Aubigné, appuie cette explication.
pr. avec francisation d’après l’adj. pareille,
du pg. salsaparrilla, l'esp. zarzaparrilla, SAMBA, vers 1923. Empr. du portugais
dont le premier élément zarza « ronce » du Brésil samba, lequel est empr. d'une
est empr. de l'arabe scharag, « plante langue indigène.
épineuse », et le deuxième semble être SAMEDI. Forme réduite de sambedi,
un dim. de parra « treille », d’origine pré- encore en Franche-Comté, en outre semedi
latine. Les Espagnols ont donné à la dans le Nord-Est, sous l'influence de seme
smilax salsaparilla L., plante qu'ils ont « septième », de septimus. Sambedi repré-
importée d'Amérique et dont la racine est sente le lat. pop. sambati dies, issu de sam-
dépurative, le nom d’une plante indigène, balum, lequel est une variante, d’origine
la smilax aspera; l'explication erronée grecque, de sabbalum, v. sabbat; elle se
suivant laquelle parrilla aurait été tiré retrouve dans le roumain simbatä, dans
de Parillo, nom d’un médecin espagnol qui l’engadin sonda et dans l’alll Samsiag
aurait le premier reconnu et utilisé les (anc. haut all. sambaz-lac) et elle est à la
propriétés dépuratives de la salsepareille base des formes slaves, ce qui fait supposer
d'Amérique, a été répandue par Scaliger. que cette forme est venue de la région
SALSIFIS, 1600 (O0. de Serres sous la balkanique par le Danube et le Rhin avec
forme sercifi; en outre formes diverses, une première vague de christianisation.
salsefie, sassefique, sassefrique, sassefy, sas- Les autres langues rom. ont des formes
sify, serquify, vers la même époque). Empr. remontant à sabbalum : it. sabaio, esp.
d’un mot it. d’origine inconnue aux formes säbado, a. pr. disapie, disabde, sapie.
également variées : aujourd’hui sassefrica, . SAMOVAR, 1855. Mot russe.
antér. sassifrica (au xviI® s.), salsefica,
d’abord erba salsifica au x1ve s. SAMPAN(G), 1876; une première fois
en 1540 dans un récit de voyages (sous la
SALTIMBANQUE, xvie (Pasquier). Em- forme ciampane). Mot signalé en Extrême-
pr. de l’it. sallimbanco, littéral., «saute-en- Orient, à la fois malais et chinois, mais qui
banc » ; lit. dit aussi cantimbanco « chante- y à peut-être été importé de l'Amérique
en-banc ». par les Portugais.
SALUBRE, 1444 ; salubrité, 1444. Empr. SANATORIUM, 1890. Tiré du lat. de
du lat. salubris, salubritas. basse ép. sanalorius « propre à guérir » (de
sanare « guérir »), d’où aussi l’adj. techn.
SALUER. Lat. salüläre, propr. « souhai- sanatoire, 1845. V. préventorium sous pré-
ter à quelqu'un le salut fsalus) », par venir.
exemple quand il éternue. It. salulare,
esp. saludar. SANBÉNITO (ou sam-), 1688 ; d'Aubigné
avait francisé le mot en santbéni; on a
SALURE, v. sel. aussi au xviIe s. sac béni. Empr. de l'esp.
sambenilo, tiré du nom propre San Beniülo
SALUT. Lat. salülem, acc. de salüs,
fém., « conservation de la vie, sauvegarde, « saint Benoît », par allusion ironique à
salutation », terme moral, resté en contact
l'habit des religieux de l’ordre de Saint-
Benoît.
avec le lat. écrit ; le sens de « salut éternel »
vient du lat. eccl. Jusqu'au xire $s. on SANCTIFIER, 1486, antér. sainiifier,
trouve salu, fém., au sens de « conservation x11°, V. sanctuaire ; on disait encore sanli-
de la vie, salut éternel »; mais, dès la fier au xvrIe s.; sanctificateur, id.; au
Chanson de Roland, le mot est masc. au moyen âge sainlifierre, -fieur ; sanctifica-
sens de « salutation », parce qu'il a été tion, x11°, à côté de saini-. Empr. du lat.
senti comme subst. verbal de saluer (cf. eccl. sanctificare, -ficator, -ficalio (de sanc-
l’it. salulo « salutation », de même forma- tus « saint »).
SANCTION 972

SANCTION, xive. Empr. du lat. sanclio SANGSUE. Lat. sanguisüga (de sanguis
(de sancire « établir une loi, etc. »). Prag- «sang » et de sügere « sucer »). Sanguisüga,
malique sanction, qui date du xv® s., est littéral. « suce-sang » (Pline indique que
empr. du lat. jurid. pragmalica sanctio c'est un mot pop. récent), plus expressif
« rescrit solennel de l’empereur ». — Dér. : que le lat. anc. hirüdo, a éliminé celui-ci
sanctionner, 1777. qui n'a laissé quelques traces que dans les
SANCTUAIRE, xiv°; antér. sainluaire, parlers méridionaux, a. pr. eruge.
x1Ie; cf. aussi santuaire, xvi® (Amyot), SANGUIN, 1138 ; sanguinaire, 1503 ; san-
encore usité au xVII® s., v. sanctifier ; a guinolent, xive. Empr. du lat. sanguineus,
souvent le sens de « reliquaire » au moyen -arius, -olentus (de sanguis « sang »). —
âge. Empr. du lat. eccl. sancluarium (de Dér. de sanguin : sanguine, xvi* ; d’abord
sanclus « saint »). pierre sanguine, x111° ; dessin à la sanguine,
SANDAL, v. santal. 1767 (Diderot).
SANDALE, xrie, cf. au x111e s. dans les SANHÉDRIN, 1663 ; en 1669 on a la
Récits d’un ménestrel de Reims : « Uns forme seinedrime ; déjà en 1573, mais dans
solers que li clerc apelent sandales ». Se un sens différent (livre nommé senedrin).
disait d’abord seulement de chaussures de Empr., par l'intermédiaire de la Bible
religieux. Empr. du lat. sandalium (du (cf. Mathieu, V, 22), de l’araméen sanhedrin.
grec sandalion). empr. lui-même du grec synedrion « assem-
SANDARAQUE, sorte de résine, 1547. blée, conseil ».
Empr. du lat. sandaraca « réalgar » (du SANIE, 1503 ; sanieux, 1314. Empr. du
grec sandarakhé, d’origine orientale). lat. sanies, saniosus.
SANDWICH, 1804. Empr. de l’angl. SANITAIRE, 1801. Dér. sav. du lat.
sandwich, tiré du nom de John Montagu, sanitas pour servir d’adj. à un sens spécial
comte de Sandwich (1718-1792), pour qui de sanlé.
son cuisinier inventa ce mets, qui lui per-
mettait de ne pas quitter la table de jeu. SANS. D abord sens, en outre seinz (Ro-
land), senz. Sans, comme l’a. pr. sen, sens,
SANG. Lat. sanguen, neutre, fréquent à senes, l’esp. sin, continuent évidemment
côté de sanguis, masc. — Comp. : sang- le lat. sine, cf. aussi l’a. fr. senoec « sans
froid, 1569 (antér. froit sang, dès 1395), on cela », lat. sine hoc (l’s finale serait l’s ad-
trouve aussi sens froid au xvi® et au verbiale) ; mais il y a eu croisement avec
xvir1e s.; d’après Littré c’est probabl. l’ablatif lat. absenlia, pris adverbialement
«sens, qu'on a entendu primitivement dans (sans doute dans des expressions jurid.) au
la locution »; mais cette hypothèse ne sens de « en l’absence de », d’où « sans »,
s'accorde pas avec les faits; demi-sang, de là l’a. pr. sensa (aujourd’hui encore usité
1870 ; pur-sang, 1842. dans le Sud-Est) et l’it. senza. La forme
SANGLANT. D'abord sanglent. Lat. de senz doit son z à enz « dedans », lat. intus.
basse ép. sanguilentus, altération du lat. Nombreux comp. avec sans comme pre-
class. sanguinolentus. Esp. sangriento. — mier élément, voir ces mots sous le deuxiè-
Comp. : ensanglanter, vers 1080 (Roland) me terme.
SANGLE, vers 1080 (d’abord cengle, Ro- SANSONNET, 1493. Tiré de Sansonnel,
land, puis sengle). Lat. cingula (de cingere nom propre, dim. de Sanson, autre forme
« ceindre »). It. cinghia ; l'esp. cincha vient de Samson ; pour des dénominations de ce
du lat. cincia (part. passé de cingere). — genre, cf. pierrot, jaquette (sous jacasser),
Dér. : sangler, x11° (sous la forme cengler) ; geai.
cingler « frapper avec une baguette flexi- SANTAL, 1568, antér. sandal, dès 1298;
ble, etc. » est un autre dér. de sangle, au en outre sandle, sandre au moyen âge.
stade sengle, v. cingler ; dessangler, 1530 Empr. du lat. médiéval sandalum, empr.
(descengler au xrrre s.).
lui-même de l'arabe sandal (mot d’origine
SANGLER, v. le préc. indienne, comme le grec santalon, sur lequel
est refaite la forme récente santal).
. SANGLIER. D'abord sengler, d’où, par
substitution de suff., sanglier, 1295. SANTÉ. Lat. sänitätem, acc. de sänilas.
Lat. pop. singuläris (porcus), littéral.
SANTON, figurine de la crèche en Pro-
« (porc) solitaire »; a d’abord désigné le
mâle qui vit seul. Dans les patois aussi porc vence, fin xixe, Empr. du prov. sanioun,
sanglier, également chez Paré, de même propr. « petit saint » (dér. de san(t), v.
saint).
a. pr. porc senglar.
SANGLOT, SANGLOTER. D'abord sen-
SANTONINE, 1823. Altération de sanio-
glout, senglouter, sanglout, sanglouier, en- nique, 1546 (Rab.), empr. du lat. santonica
core usités au xvies. ; le verbe est devenu (herba), littéral. « herbe de Saintonge (de
sangloter, d’après les nombreux verbes en Saniones, peuple gaulois qui habitait la
-olier et a entraîné sanglot. Lat. pop. *sin- région de la Saintonge) », sorte d’absinthe,
gluitus, *singlutiäre, formes altérées du lat. par croisement avec barbotine, qui désigne
class. singullus, singulläre, par croisement également un vermifuge. Sanioline, xvi°,
avec *glutlus « gosier », glultire « avaler ». qui désigne une autre plante vermifuge,
It. singhiozzo, -are (lat. singultiare, attesté dite aussi petit cyprès, est une autre forme
dans des gloses), esp. sollozar (lat. pop. du même mot.
*subglultiare ; subgluttus, -llius attestés SANVE, « sénevé sauvage ». Lat. sinapi
dans des gloses). « moutarde » (mot pris au grec); le lat.
573 SARCOME

pop. a gardé l’accent sur la première syl- plante a été ainsi nommée parce qu’en en
labe, conformément à la prononciation du frottant les feuilles dans l’eau, elles mous-
mot grec, malgré la quantité de l’a, cf. sent comme du savon.
beurre, encre; il en est de même de l’it.
senape « moutarde » et de l’a. pr. senebe, SAPONIFIER, 1797; saponification,
serbe « sénevé » ; ont l’accent sur l’a, l'esp. 1792. Faits avec le lat. sapo, saponis « sa-
jenabe « moutarde » et de nombreuses for- von » sur le modèle des nombreux mots en
mes dial. de l'Italie. — Dér. : sénevé, -[ier, -fication.
xt11e, dér. d’une anc. forme seneve, encore
SAPOTE, 1666 (en 1598 çapole) ; empr.
usitée dans les patois. de l’esp. zapote ; empr. lui-même de l’aztè-
SAPAJOU, 1614 (Yves d’'Évreux qui que ézapotil.
écrit : « guenons.. appelées par les sauva-
ges sapaious »). Empr. du tupi, langue indi- SAPRISTI, v. sacrer.
gène du Brésil, spécial. de l’île Maranhäo SARABANDE, 1605 (sous la forme sara-
où Yves d'Évreux a été en mission, v. bante). Désignait autrefois une danse lente,
palétuvier. à trois temps. Empr. de l'esp. zarabanda
SAPE, v. le suiv. « danse lascive, accompagnée de casta-
gnettes », d’où « vacarme », empr. lui-
SAPER, 1547. Empr., comme terme du même du mot arabo-persan serbend « sorte
génie militaire, de lit. zappare, dér. de de danse ». Le sens de « ribambelle » que
zappa « hoyau » (aussi esp. zapa, etc.). sarabande a dans le fr. fam., est dû à
Sape « tranchée souterraine », vers 1560, est l'oubli du sens propre et sous l'influence
dér. de saper. Les parlers franco-proven- de la forme même du mot qui a une allure
çaux et avoisinants possèdent un subst. expressive.
sape « hoyau » qui est indigène et qui
apparaît quelquefois dans les dict. français. SARBACANE, 1540 ; d’abord sarbalen-
Le subst. lat. sappa est attesté au viries.; ne, 1519. Altération, d'après canne, de
le z- des formes italiennes est né au contact sarbatane encore dans l’Académie de 1798.
de mots comme la prép. con. Un rapport Aussi esp. zarbatana, port. sarabatana, ara-
avec isapo « bouc », qui vit dans l'Italie be zarbatäna. La sarbacane, un long tuyau
centrale, est tout à fait improbable. — Dér. servant à lancer, en soufflant, des flèches,
sapeur, 1547. p. ex. pour atteindre les oiseaux, a été en
usage à Bornéo, où elle est désignée sous
SAPHIQUE, 1342, au sens de les- le nom de sumpitan, sëmpitan. On suppose
bien ; saphisme, 1842. Dér. sav. de Sapho, généralement que ce mot malais aurait
v. lesbien. Saphique est aussi un terme de passé au persan, de là à l'arabe, et de cette
prosodie ancienne, empr. depuis le x1v® 5. langue enfin aux langues européennes. En
du lat. sapphicus (du grec sapphikos). esp. il apparaît pour la première fois en
SAPHIR, vers 1120. Empr. du lat. 1476, sous la forme zebraiana.
de basse ép. sapphirus (antér. sappirus) SARCASME, 1552 (Rab.). Empr. du
(du grec sappheiros, mot d’origine sémi- lat. sarcasmus (du grec sarkasmos, de sar-
tique). kazein « mordre la chair »). — Dér. : sar-
SAPIDE, 1754 (une 1re fois au xvi® 8.). castique, fin xvirre (Mme de Staël); dér.
Empr. du lat. sapidus « qui a de la saveur » arbitrairement de sarcasme avec ! sur le
(de sapere, v. savoir), par opposition à modèle d’enthousiasie par rapport à en-
insipide, v. ce mot. — Dér. : sapidité, 1762. thousiasme et le suffixe -ique d’ironique, etc.

SAPIENCE, archaïque, vers 1090; sa- SARCELLE. D'abord cercelle : sarcelle


piential, 1374. Empr. du lat. sapientia (de date du xvie s. Lat. pop. *cerceédula, plus
sapiens « sage »), -ialis. proche du grec kerkithalis que le lat. class.
querquëédula ; le mot lat. est refait sur le
SAPIN. Lat. sappinus (rare). En a. fr. modèle d’autres noms d'oiseaux : ficedula
et en a. pr. aussi sap, encore très répandu « bec-figue », monedula « choucas ». Les
dans les patois tant du Midi que du Nord, formes romanes sont diversement alté-
qui est probabl. la forme première et dont rées : it. farchetola, esp. cerceta, etc.
sapin, ou plutôt sappinus, attesté chez
Pline, paraît tiré par composition avec SARCLER. Lat. sarculäre. It. sarchiare,
pinus. On peut supposer un mot prélatin, esp. sachar. — Dér. : sarclage, 1318 ; sar-
peut-être gaulois *sappus. — Dér. : sapine, clette, 1869 (sarclet, depuis 1380, est plus
« solive en bois de sapin », 1694; au rare aujourd'hui); sarcleur, XxXIII° S$.;
moyen âge on trouve l'adj. sapin « de sarcloir, xive, l’a. fr. dit plutôt sarcel, lat.
sapin » et sapine au sens de « sapinière » ; pop. sarcellum, réfection du lat. class.
sapinière, 1690. sarculum, d’où it. sarchio, esp. sacho;
sarclure, 1562.
SAPINE, 1870. « Assemblage de poutres
et de solives ou construction métallique SARCO-. Premier élément de mots sav.
pour soulever des matériaux ». Dér. du tels que sarcoderme, 1836, tiré du grec
dialectal sape « hoyau », v. saper. sarz, sarkos « chair », v. aussi les suiv.
SAPONAIRE, 1562. Empr. du lat. des SARCOME, terme médical, 1660 ; d’a-
botanistes saponaria, latinisation de l’anc. bord sarcoma, xvi® (Paré). Empr. du lat.
fr. erbe savonniere, attesté comme subst. de basse ép. sarcoma (du grec sarkôma, v.
(savonnière) jusqu'au xix° s.; cette lé préc.):
SARCOPHAGE 074

SARCOPHAGE, 1496, mais rare avant SARRAU, vers 1100 (écrit sarroc).
le xvirie s. Empr. du lat. sarcophagus (du Empr. du moyen haut all. sarrok, sorte de
grec sarkophagos), v. cercueil. vêtement militaire.
SARDINE. Lat. sardina, dér. de sarda, SARRIETTE, nom de plante, 1339. Dér.
autre nom de poisson, littéral. « de Sardai- de sarriee, xir1®, lat. saluréja, d’où aussi
gne ». It. esp. sardina. Lit. dit aussi sardella, a. pr. sadreia ; les formes romanes sont
d’où all. Sardelle, angl. sardelle. — Dér. : souvent altérées, comme il arrive fréquem-
sardinier, 1871 ; au sens de « filet », 1765. ment dans les noms de plantes, cf. it. san-
SARDOINE, sorte de pierre précieuse, toreggia ; l'esp. ajedrea vient de l’arabe
X11e, Empr. du lat. sardonyx (pris au grec). ach-chetriya, lui-même empr. du lat.
SARDONIQUE, xvie (Paré qui dit à la SAS, sorte de tamis fait de crin, de
fois ris sardonic et ris sardonien). Cette soie, etc. D'abord seas, saas. Lat. de basse
expression, d’abord médicale, est faite sur ép. séläcium (dans des gloses), dér. de séta,
le lat. sardonicus risus qui est lui-même un sæla « soie de porc, crin de cheval, poil
calque du grec sardonios gelôs ; Paré en rude », v. soie. It. sfaccio, esp. sedazo. —
explique bien l'origine : « L’apium risus, Dér. : sasser, 1197, ressasser, 1549, -eur,
autrement appellé sardonia, espèce de ra- 1764 (Voltaire).
nunculus, rend les hommes insensés... en SATANÉ, 1823 ; satanique, 1475 : rare
sorte qu’il semble que le malade rie, dont avant le xvirie s. Dér. de Satan, nom de
est venu en proverbe sardonien, pour un l'Esprit du Mal dans la Bible (cf. Job, I,
ris malheureux et mortel. » Sardonia (her- 7, Mathieu, IV, etc.), qui se disait en hé-
ba) signifie littéralement « herbe de Sar- breu Satan, d’où en grec et en lat. Satan,
daigne ». Sardonien, 1558, qui est encore Salanas.
dans les dict., est fait sur sardonius ; sardo-
nique est refait d’après les adj. en -ique ou SATELLITE, 1265 (sens incertain). Em-
empr. du grec sardonikos. pr. du lat. salelles, satellitis « garde du
Corps », déjà employé dans la langue de
SARGASSE, terme de géographie, 1604. l’astronomie (depuis Kepler, 1611) ; pris en
Empr. du port. sargaço, nom d’une esp. de ce sens en fr. depuis 1665 ; en dehors de cet
ciste, qui, par suite d’une certaine ressem- emploi, satellite, est ordinairement pris en
blance avec l’algue marine, a passé aussi mauvaise part au sens d’ « homme qui est
à celle-ci ; sargaço est dér. du lat. salicem aux gages d’un despote » depuis le xvre s.
(v. saule), les feuilles de ce ciste rappelant
par leur forme celles du saule. SATIÉTÉ, vers 1120. Empr. du lat.
salielas (de la famille de salis « assez »).
SARIGUE, 1578 (dans le récit de voyage
au Brésil de J. de Léry sous la forme sari- SATIN, xive, On a aussi zatoui, zalany,
goy). Empr. du tupi, langue indigène du -in, satanin, etc., au xives. Empr., probabl.
Brésil ; la forme sarigue ressemble plus au par l'intermédiaire de l'esp. aceiluni, de
port. sarigué qui remonte, sous des formes l’arabe zayloûni, propr. « de la ville de
légèrement différentes, au xvre s. Zailoûn », nom arabe de la ville chinoise
SARMENT. Parfois serment du xve au Tseu-Toung, aujourd'hui Tsia-Toung, où
XVIIe s. Lat. sarmentum. It. sarmento, esp.
se fabriquaient des étoffes de satin. Il y a
quelque difficulté pour la forme ; il est pos-
Sarmiento. — Dér. : sarmenteux, 1559,
d’après le lat. sarmentosus. sible que salin ait été influencé par lit.
selino, empr. lui aussi de l’arabe avec une
SARRASIN, 1554; on dit aussi blé altération due à sea « soie ». — Dér. :
sarrasin « blé noir »; cf. en outre millet satiné, 1603 (d’autres formes verbales sont
sarrazin dès 1547 ; on lit déjà /rumentum rares) ; satinette, fin xIxe.
sarracenorum en lat. médiéval, en 1460. SATIRE, vers 1372; satirique, 1380.
Emploi fig. de sarrazin, qui se disait au Empr. du lat. satira, Satiricus. Satira a
moyen âge des peuples non chrétiens de été parfois écrit salyra à basse ép. par
l'Espagne, de l'Afrique et de l'Orient; rapprochement avec Salyrus, satyricus « Sa-
empr. du lat. de basse ép. sarracenus, nom tyre, relatif aux Satyres », d’où parfois
d'une peuplade de l'Arabie, qui a été l'orthographe saiyre en fr. Satira dési-
étentu par les Byzantins à tous les peuples gnait proprement un mélange de vers et
soumis au Calife. L’opinion d’après laquelle de prose, cf. notamment la Satire Ménippée
ce nom serait dér. de l'arabe charqi de Varron, d’où a été tiré le titre de notre
« oriental » est insoutenable. L'emploi de Satire Ménippée en 1594. — Dér. : satiri-
sarrasin comme nom d’une sorte de ser, 1544; satiriste, 1683.
céréale est dû à la couleur noire du grain
de la plante ; de là aussi le nom de blé noir SATISFAIRE, x1v°; satisfaction, vers
qui, avec sarrasin, couvre presque tout le 1155. Empr. du lat. satisfacere, salisfactio ;
territoire gallo-roman. Dans le Nord depuis les mots fr. ont des sens plus larges que les
la fin du xvie s. aussi bucaïl(le), adapta- mots lat. qui sont surtout jurid. et n’ont
tion dialectale (de la région picarde) du pas les sens de « causer un sentiment agréa-
néerl. boekweit (comp. all. Buchweizen, ble », « sentiment ou état agréable » que le
propr., « froment à hêtre », ainsi appelé à fr. a tiré de celui de « réparation d’un
cause de la forme de la semence, qui res- dommage, etc. ». L’a. fr. disait aussi salis-
semble un peu à la faîne), d’où aussi fier, salefier. — Comp. : insatisfait, 1840:
bouquette, 1690, aujourd’hui usité dans (une 1re fois vers 1510).
les parlers du Nord-Est de et l'Est, et SATISFECIT, 1845. Mot lat. (parfait du
beaucuit, 1838. Le sarrasin a été introduit verbe salisfacere, v. le préc.) signifiant « il
en Europe au xve s., de l’Asie Centrale. a satisfait », v. accessit.
575 SAUR

SATRAPE, xr11e (Br- Latini) ; satrapie, SAULE, vers 1215. D'un francique
fin xve. Empr. du lat. satrapes, satrapia *salha (cf. anc. haut-all. salaha); au
(du grec satrapés, d’origine perse). Satrape provient de -all- issu de -alh- par assimi-
se prend aussi en un sens fig. depuis lation (comp. Gaule, de Walha) ; surtout
1485 (Tallemant des Réaux appelait dans l'Est et dans l'Ouest, souvent fém.
Richelieu satrape). conformément au genre du mot germ. et
sous l'influence de saus, sausse ; le masc.
SATURER, vers 1300 ; saturation, 1748 est dû à celui des autres noms d’arbre
(au sens de «rassasiement » déjà au xvi®s.). osier, etc. ; l’a. fr. avait deux formes saus,
Empr., en vue d'emplois techn., des mots sausse, des deux genres, encore usitées, la
lat. salurare « rassasier, etc. », saturatio première dans le Nord-Est, la deuxième
(créé à basse ép.). Salurer est pris dans un dans l'Est, le Centre, et l'Ouest ; ces deux
sens plus étendu dès le xvrrie s. formes représentent le lat. salicem, acc. de
SATURNALES, 1354 (Bersuire). Empr. salix, cf. it. salce, salcio, esp. sauz, sauce;
du lat. saturnalia « fêtes en l’honneur de a. pr. saulz, sauze. Un comp. marsaux
Saturne ». A pris un sens plus étendu de- « salix caprea », dans beaucoup de parlers
puis le début du xix®5s. marsaule (avec substitution de saule au
SATURNIEN, 1558, au sens de « triste », saus), qui représente le lat. märem salicem
vers 1380 au sens propre du lat. salur-
« saule mâle » (désignation due peut-être
nius) ; sorti de l’usage puis repris par au fait que cette variété a les feuilles plus
P. Verlaine, cf. Poèmes saturniens, 1866. larges que les autres arbres de cette famille
Dér. sav. du lat. saturnius « de Saturne »;
et peut donc paraître plus robuste) survit
d’après les astrologues, la planète Saturne en Bourgogne et ailleurs. — Dér. : saulaie,
était pour ceux qui naissaient sous son 1328 ; moins usuel que saussaie, lat. pop.
signe une source de tristesse, cf. au sens *salicèla, lat. de basse ép. salicètum; d’où
opposé jovial.
aussi a. pr. sauzeda.
SATURNIN, terme médical, qualifiant SAUMATRE, vers 1300. Lat. pop.
*salmaster, altération, par substitution de
des maladies causées par le maniement des
suff., du lat. class. salmacidus. It. sal-
alliages de plomb, 1812. Dér. sav. de Sa-
turne, nom de la planète (v. le préc.), que mastro.
les alchimistes ont donné au plomb, « parce SAUMON. Lat. salmünem, acc. de salmo.
qu'on le regardait comme très froid (comme It. salmone, esp. salmén. Au sens de « masse
la planète) » (Fourcroy). de métal, surtout de fonte », attesté par
SATYRE, 1372. Empr. du lat. salyrus, le fém. saumone chez Rabelais, I, 23. —
Dér. : saumoné, 1564 ; saumonneau, 1552
personnage divin, compagnon de Bacchus
(du grec saiyros) ; au sens d’ « homme lu- (Rab.).
brique », xvii® (Scarron). SAUMURE. D'abord saumuire. Lat.
SATYRIASIS, xvi® (Paré). Empr. du pop. salimuria, comp. de sal « sel » et de
lat. médical satyriasis (mot pris au grec; muria « saumure » attestée au xvi s. It.
salamoia, esp. salmuera. Pour le traite-
v. le préc.). ment de la voyelle u en fr., v. puis. Il
SAUCE. Longtemps écrit aussi sausse semble qu’en lat. pop. du Nord de la
conformément à l’étymologie. Lat. pop. Gaule l’à de puleus, muria soit devenu à
salsa, fém. pris substantiv. de salsus « salé », sous l'influence de la semi-voyelle y sui-
propr. « assaisonnement salé ». It. esp. vante. Muire, encore de quelque usage,
salsa. — Dér. : saucer, x111°; saucière, est une forme dialectale, originaire de
1328 (au xXIII° s. saucer, Mmasc.). la Franche-Comté; les textes qui le
SAUCISSE. Lat. pop. salsicia, fém. pris donnent sont de Salins (Doubs) ou d’en-
substantiv. tiré du plur. neutre de salsicius droits voisins, et le mot survit encore dans
« assaisonné de sel », v. le préc.; cf. au cette même région. Cf. en outre toscan
11e s. salsicia farla au sens de « saucisses ». moida.

It. salsiccia. SAUNA, 1959. Empr. du finnois sauna.


SAUCISSON, 1546 (Rab.). Empr. de SAUNER, « fabriquer du sel » ; saunier,
l’it. salsiccione, augm. de salsiccia, v. le « ouvrier qui fabrique le sel, marchand de
préc. et, pour le suff., ballon. sel »; faux-saunier, sous l’ancien régime
(relevé depuis 1622). Mots techn. Lat. pop.
SAUF, SAUVE. Lat. saluus, -a « entier, *salinäre, salinärius (attesté à basse ép.
intact », qui a pris des sens moraux dans comme adj. au sens de « de sel » ; l’ouvrier
le lat. de l'Église. It. esp. salvo. La prép. se disait plutôt salinälor), dér. de salina,
sauf s’est développée dans des construc- v. saline. Le verbe est rare en dehors du
tions où sauf était placé devant le subst., fr.; mais pour le subst., cf. it. salinaro,
cf. sauve vosire grace, xt11°, encore saulve esp. salinero. — Dér. de sauner : saunage,
l'honneur de toute la compaignie chez Rab. ; 1497, d’où faux-, 1606 ; de saunier : sau-
déjà sauf tant que chez Froissart. — Comp. : nerie, 1234.
sauf-conduit, x11°, v. conduit ; sauvegarde,
1232, d’où sauvegarder, 1788. SAUPIQUÉ, v. sel.
SAUGE. Lat. salvia (de salvus, v. le SAUPOUDRER, v. sel.
préc. ; ainsi nommé à cause des vertus SAUR, dans hareng saur ; en outre saure
qu'on attribuait à cette plante). It. esp. et sor, xirie (dans harenc sor). Empr. du
salvia. moyen néerl. soor, V. la suite. L’a. fr. sor
SAUGRENU, v. sel. {Roland) « jaune brun », encore dans les
SAUR 976

dict. sous les formes saur, sor, représente SAUVEUR, xrie (sous la forme salve-
un francique *saur « jaune brun » (en par- dur) ; on a aussi le cas sujet salverres. Fran-
lant des feuilles) (cf. le néerl. cité ci-dessus cisation du lat. eccl. salvator « le Sauveur,
et le frison oriental ’n soren bom « un arbre le Rédempteur » (de salvare, v. sauver).
desséché »). Cet adj. a passé en roman avec
d’autres adj. désignant la couleur du pe- SAVANE, 1529. Empr. de l'esp. sabana,
lage des chevaux. Il s’est répandu comme empr. lui-même de la langue des Arouaks
terme militaire dans les autres langues ro- d'Haïti.
manes, d’où a. pr. saur, it. sauro « alezan », SAVARIN, gâteau, 1875, d'abord bril-
it. esp. soro « (d’un faucon) qui n’a pas lat-savarin, 1856. Tiré de Brillat-Savarin,
encore mué », — Dér. : saurer, 1606 ; en nom d’un célèbre gourmet (1755-1826).
outre saurir, 1318 ; sauret (ou soret), 1360
(d’abord subst., adj. depuis 1573). SAVATE, xrie (sous la forme picarde
chavaie qui permet de restituer une forme
SAURIEN, 1800. Dér. sav. du grec saura primitive çavate, v. sabot). A. pr. sabala,
« lézard ». it. ciabatta, esp. zapaio « soulier » (attesté
SAUSSAIE, v. saule. dès 978 par zapalones dans un texte lat.),
SAUT. Lat. sallus. It. esp. sallo. — port. capato. On a proposé de voir dans
Comp. : primesautier, 1751 (Voltaire) ; ré- toutes ces formes des empr. à l'arabe
fection de prinsaulier, x (seule forme sabbât « savate », maïs, sous cette forme et
usitée jusqu’au xvrrre s.), d’après de prime d’autres légèrement différentes, le mot
saut; prinsaulier est dér. de prin saut, arabe passe lui-même pour être empr.
antér. à (de) prime saut, qui n’est que du Toutefois le mot vit dans tous les pays de
XVII® S., V. prime ; sursaut, vers 1170. langue arabe, de sorte que, bien que sab-
bât ne soit attesté que dans des textes
SAUTER. Lat. salläre « danser », étymo- arabes postclassiques, il n’est pas impos-
logiquement « sauter », qui a repris le sens sible qu’il soit d’origine orientale. La diffé-
de « sauter » dans le lat. pop. au détriment rence entre le -p- de l’esp. et du port.
du mot propre salire dont il dérive, v. d’un côté et la consonne intervocalique des
saillir ; le sens de « danser » survit encore autres langues romanes doit provenir des
en it.; en fr. il est exprimé surtout par migrations du mot et des tentatives plus
des mots d’origine germ., cf. danser. It. ou moins réussies de l'adapter. — Dér. :
saltare, esp. sallar. — Dér. et Comp. : saveter, 1633 (Peiresc) ; savetier, 1213.
saute (de vent), 1771 ; aujourd’hui on dit
aussi saule d'humeur ; sauterelle, xrre ; do- SAVEUR ; a quelquefois au moyen âge
minant aujourd’hui dans les parlers gallo- le sens de « sauce » et d’ « assaisonnement »
romans au milieu d’une grande variété de (encore attesté au xvrre s.). Lat. sapôrem,
termes ; une forme masc. saulereau, 1393, acc. de sapor. V. aussi le suiv. et savou-
survit dans les parlers du Centre et de reux. — Dér. : savourer, xtre ; le lat. de
l'Est ; existe en outre dans des emplois basse ép. saporäre signifie « donner de la
techn. ; sauterie, 1824, dér. dans lequel le saveur », mais il a pu prendre aussi le sens
sens de « danse » reparaît ; sauteur, xr11°, de « savourer ».
attesté alors par le fém. sauteresse : sautil- SAVOIR. Lat. pop. *sapèére, lat. class.
ler, 1564 (Rab.), a remplacé sauteler, xxr°, sapère « avoir de la saveur », d’où « avoir
encore usité en wallon ; sautillement, 1718 ; de la pénétration », puis, trans. « com-
sautoir, ne se dit guère que dans la locution prendre » dès l’époque républicaine et « sa-
en sautoir ; désignait proprement une pièce
voir » à basse ép. ; ce verbe, soutenu par
du harnais pendant à la selle et servant sapiens et dont le développement séman-
d’étrier, 1352; de là l'emploi de sautoir tique a quelque chose d’argotique, a éli-
pour désigner des objets disposés en forme miné le lat. class. scire qui ne survit que
de croix de Saint-André, etc. ; en sautoir, dans le roumain sti et le sarde logoudorien
dit du cordon d’un ordre, vient de la langue iskire. — Dér. et Comp. : savoir, subst.,
du blason, où le terme est attesté dès 1230 ; vers 1080 (Roland); assavoir, 1237:
ressauter, 1387; saute-mouton, 1867 ; savant, x11°; d’abord part. prés. (encore
saute-ruisseau, 1796 ; tressauter, vers 1370 ; usité en ce sens au xv® s.), qui a été rem-
sursauter, 1542. placé par sachant (fait sur le subj. sache) ;
SAUVAGE. Lat. de basse ép., salvaticus celui-ci est de même fréquent au sens
(Mulomedicina, etc.), altération du lat, de « savant » au moyen âge ; comme subst.
class. silvaticus (de silva « forêt »), par assi- savant est en usage depuis 1634; Des-
milation vocalique. It. salvatico ; salvaggio cartes (1637) l’emploie pour désigner
et sel-, esp. salvage sont empruntés. — l’homme de la recherche scientifique et
Dér. : sauvagesse, 1640 ; sauvageon, 1396 Ê l’oppose à docle, lequel est employé par
sauvagerie, vers 1739; sauvagine, vers 1125. lui pour désigner les partisans de la
SAUVEGARDE, v. sauf. vieille science scolastique (comp. le Journal
des Savants, depuis 1665); savantasse,
SAUVER. Lat. de basse ép., surtout 1646, d’abord sabanias, fin xvie s. (d’Au-
eccl., salväre. It. salvare. — Dér. et bigné, qui a beaucoup de gasconismes),
Comp. : sauvetage, 1773, formé d’après d’après le méridional sabentas, cf. Furetière :
sauvelé, x1° (Alexis), qui est vieilli depuis « Injure gasconne »; savantissime, 1579:
le xvrI® s.; un dér. sauvage (1671) ne su, dans au su, xr1°, figurait aussi dans
pouvait pas vivre ; d’où sauveteur, 1836; d’autres locutions, notamment sans le su,
sauveur était également impossible, parce XVIIe; d’où insu (à l’), 1538 ; savoir-faire,
qu’il existait déjà avec une acception au- 1671 (le P. Bouhours
tre, v. ce mot ; sauve-qui-peut, qui le blâme);
1614. savoir-vivre, 1665.
577 SCARE

SAVON. Lat. säponem, acc. de säp6. parlant des Indiens d'Amérique. Empr. de
Pline indique que ce mot désigne un pro- l’angl. Scalp « cuir chevelu », mot d’origine
duit fait de suif et de cendre, inventé par germ., {o scalp « arracher le cuir chevelu ».
les Gaulois pour rougir les cheveux ; le mot
est empr. du germ. *saipôn; parmi les SCALPEL, 1539. Empr. du lat. scal-
tribus germ. on l’a connu sous deux formes, pellum, également terme de chirurgie (de
solide et liquide (v. éeume) ; c’est d'eux scülpere « gratter, tailler »).
que le mot et la chose ont été intro- SCAMMONÉE, xre (Chrétien, sous la
duits chez les Romains. Cf. all. Seife, forme escamonée). Empr. du lat. scammo-
angl. soap. It. sapone, esp. jabén. — Dér. : nia, -nea (du grec skammônia).
savonner, vers 1500 ; savonnette, 1579;
savonneux, vers 1700 (Saint-Simon) ; sa- SCANDALE, xi°; scandaliser, xrIe.
vonnier, 1292, d’où savonnerie, 1313. Empr. des mots du lat. eccl. scandalum,
propr. « piège, obstacle, contre lequel on
SAVOUREUX. Lat. pop. *saporôsus. trébuche », cf. Lévitique, XIX, 14, d’où
SAXIFRAGE, xirie (écrit alors sassi- «scandale, occasion d’errer pour soi-même,
frage). Empr. du lat. de basse ép. saxifraga ou pour les autres par le mauvais exemple
(herba) littéral. « (herbe) qui brise les qu'on leur donne », cf. Marc, IX, 42, Mat-
pierres » (de saxzum « pierre » et de frangere hieu, XVIII, 8 (du grec eccl. skändalon,
« briser ») ; de là aussi les noms populaires mot qui traduit l’hébreu mikchôl « ce qui
de perce-pierre, 1545, frainpierre, xv®, etc. fait trébucher, obstacle »), et scandali-
zare. Scandale est d’abord un terme reli-
SAXOPHONE, 1843. Comp. du nom de gieux au sens de l'Évangile, d’où se sont
l'inventeur belge, À. Sax (1814-94), et du développés rapidement des sens plus éten-
grec phôné « voix ». dus. On a dit aussi depuis le xvri® s. pierre
SAYNÈTE, 1764. Empr. de l’esp. sainele, de scandale et d’achoppement d’après Isaïe,
propr. « morceau de graisse, de moelle ou VIII, 14 (où cette répétition est une redon-
de cervelle qu’on donne aux faucons quand dance de rhétorique poétique) et la Pre-
ils reviennent » (dér. de sain « graisse », mière Épitre de Pierre, II, 8 (qui doit évi-
v. saindoux), d’où « assaisonnement », et, demment l'expression à Isaïe). Esclandre,
par extension « petite pièce bouffonne ». xu11e (J. de Meung), est une forme plus
Le mot esp. est masc. (genre conservé par francisée de scandalum, cf. escandele, xnr°,
Th. Gautier) ; le fém. du fr. est dû au suff. escandle, xux1°; elle a d’abord eu le même
-elle. On comprend le mot, aujourd’hui, sens que scandale et a été spécialisée vers
par étymologie populaire, comme un dér. le xvrie s., parfois fém. Scandaliser a suivi
de scène. le développement sémantique de scandale.
— Dér. : scandaleux, 1361 (Oresme).
SAYON, 1487. — Empr. de l’esp. sayôn ;
v. Ssaie. SCANDER, 1516 ; scansion, 1750. Empr.
des mots du lat. des grammairiens scandere,
SBIRE, 1546 (Rab.). Empr. de lit. propr. « monter », d’où « lever, puis baisser
sbirro, forme altérée de birro, lat. de basse le pied pour battre la mesure », scansio.
ép. birrus (en outre byrrus, byrrhus, bur-
rus), empr. lui-même du grec pyrrhos SCAPHANDRE, 1796, au sens moderne ;
« rouge »; cette dénomination peut venir antér. « ceinture de sauvetage en liège »,
de ce que le sbire était vêtu d’une casaque 1767. Comp. avec les mots grecs skaphé
rouge ou être due à un emploi fig., compa- « barque » et anér, andros « homme » au
rable à celui qui a donné naissance à l’argot sens de « homme-bateau ». — Dér. : sca-
fr. rousse « police », la couleur rouge étant phandrier, 1805 ; aussi -dreur, 1868.
prise souvent comme le symbole de la ruse SCAPIN, vers 1700 (Saint-Simon), com-
à cause de la couleur rouge du diable. me nom commun. Tiré de Scapin, nom
SCABIEUSE, 1314. Empr. du lat. mé- d’un valet de la Comédie-Italienne, intro-
diéval scabiosa (fém. pris substantiv. du duit par Molière dans les Fourberies de
lat. class. scabiosus « raboteux, galeux » de Scapin, 1671.
scabies « gale ») ; la scabieuse a été ainsi SCAPULAIRE, 1195 (sous la forme capu-
nommée parce qu'elle passait autrefois laire, encore chez Christine de Pisan; cf.
pour être un remède contre la gale. aussi cha- au xive s.). Empr. du lat. mé-
SCABREUX, 1501, au sens de « difficile, diéval scapulare (de scapula « épaule ») ;
périlleux »; souvent au sens concret en ainsi nommé parce qu'il se passe sur les
parlant d’un chemin; le sens dominant épaules.
aujourd’hui de « difficile à traiter ou à dire SCARABÉE, 1539. Empr. du lat. sca-
d’une façon décente » apparaît au XVIIIe $. rabæus (altération du grec karabos).
Empr. du lat. de basse ép. scabrosus « iné-
gal, rude » (dér. du lat. class. scaber). SCARAMOUCHE, 1666 (Molière). Tiré
de Scaramouche (en it. Scaramuccio, tiré
SCAFERLATI, 1707 (D.). Étymologie par plaisanterie du mot qui signifie « escar-
obscure. L’explication suivant laquelle sca- mouche », v. ce mot), surnom de l'acteur
ferlati serait le nom d’un ouvrier italien qui napolitain Fiorelli qui vint jouer à Paris
travaillait à la ferme du tabac dans la pre- sous Louis XIII; le surnom est resté au
mière moitié du xvrrie s. et aurait inventé personnage de la Comédie-Italienne que
un nouveau procédé pour hacher le tabac cet acteur jouait.
manque de preuves. SCARE, nom de poisson, xvi® (Paré).
SCALPE, 1827 (Chateaubriand); écrit Empr. du lat. scarus (du grec skaros, de
aussi scalp ; scalper, 1769. Dits surtout en même sens).

DICT. ÉTYM. 37
SCARIFIER 578

SCARIFIER, vers 1300; scarification, grois, a été introduit en France au cours


1314. Empr. du lat. médical de basse ép. du xvirres., mais il n’a été usuel que depuis
scarificare (du grec skariphasthai « inciser le début du xix®; v. hussard et soutache.
légèrement », de skariphos « stylet »), scari-
ficatio ; scarificare est une réfection de SCHALL, v. châle.
scarifare, d’après les verbes en -ficare. — SCHAPSKA, 1838 (shapka en 1836).
Dér. : scarificateur, xvi® (Paré). Empr. du pol. czapka, czapska, qui dési-
SCARLATINE, 1741. Dér. sav. du lat. gnait une coiffure militaire ; introduite une
médiéval scarlatum, -la « écarlate »; on a première fois en 1808 comme coiffure de
dit aussi fièvre écarlaline, 1771, d’après chevau-légers levés en Pologne, elle n’est
écarlate, v. ce mot. devenue usuelle en France que comme coif-
SCAROLE, xvirie s. (scariole dès le fure des lanciers du Second Empire.
XIVe s.). Empr. du lat. escariola « sorte SCHEIK, v. cheik.
d’endive », signifie, à proprement parler,
« mangeable ». SCHÉMA et SCHÈME, 1803, comme
terme de philosophie de Kant ; une pre-
SCEAU. D'abord seel; l'orthographe mière fois en 1586 (Ronsard, sous la forme
scel, sceau, se trouve dès 1247 avec un c schème), comme terme de rhétorique ; au
arbitraire pour distinguer ce mot de seau. cours du xix° s. sens plus étendus. Empr.
Lat. pop. *sigellum, lat. class. sigillum, dim. du lat. schema « manière d’être, figure géo-
de signum, propr. « figurine », d’où « figu- métrique, figure de rhétorique » (du grec
rine gravée sur un cachet », puis « cachet ». skhêma). — Dér. : schématiser, 1800, com-
It. suggello, esp. sello ; v. sceller. — Comp. : me terme de philosophie de Kant ; a suivi
sceau de la Vierge, 1573 ; sceau de Notre- le sens de schéma ; schématisme, id. ; les
Dame, nom de plante, 1538 ; ainsi nommé formes latines schematismus, schematizare
parce que la racine a la forme d’un sceau ; (créé à basse ép.) ou les formes grecques
sceau de Salomon, 1549 ; ainsi nommé skématismos, -lizein ont pu servir de mo-
pour la même raison que le préc. dèles formels ; schématique, 1842, sens dé-
SCÉLÉRAT, 1536 ; au xve et au xvies., veloppé d’après les précédents, a pris en
on a une forme plus francisée scéléré. Empr. outre un sens particulier, en parlant d’une
du lat. sceleratus (de scelus, sceleris « cri- œuvre artistique ou scientifique dont le
me »). — Dér. : scélératesse, xvi° (Pasquier). détail n’est pas poussé, et est devenu ainsi
plus usuel que le subst.
SCELLER. Lat. pop. “*sigellare. lat.
class. sigilläre, v. sceau. It. suggellare, SCHERZO (t. de musique), 1842. Empr.
esp. sellar. — Dér. : scellé, xve; scelle- de l’it. scherzo « plaisanterie », dér. de
ment, 1469 ; scelleur, 1283 (Beaumanoir) ; scherzare « plaisanter », qui représente le
desceller, xr1°; resceller, 1334. longobard skerzôn « id. ».
SCÉNARIO, 1764. Empr. de l’it. scena- SCHIBBOLETH, 1838. Se dit d’une
rio, dér. de scena « scène », propr. « décor ». difficulté insurmontable ou d’une épreuve
SCÈNE, vers 1375; rare avant le qui doit montrer la capacité d’une per-
XVII S.; scénique, id.; rare avant le sonne, par allusion à un passage des
XVIIIe s. Empr. du lat. scæna « scène de Juges, XII, 6, où il est raconté que les
théâtre », déjà employé dans des sens plus gens de Galaad, en guerre avec ceux
étendus, scænicus (du grec skéné, skénikos). d’Ephra m, reconnaissaient les fuyards en
Au sens de « paysage », scène est un calque leur demandant de prononcer le mot schib-
de l’angl. scene (dès 1722 dans une traduc- boleth (« épi ») que ceux d’Ephraim ne
tion). — Comp. : avant-scène, 1795, au ur pas à répéter et prononçaient
sens moderne ; antér., depuis le xvi®, avec sibb…
des sens fig. SCHIEDAM, 1842. Empr. du néerl.
SCEPTIQUE, 1546, comme terme de schiedam, propr. nom d’une province de la
philosophie. Empr. du grec skeptikos (de Hollande méridionale où se fabrique l’eau-
skepsesthai « observer » ; les sceptiques fai- de-vie de ce nom.
saient profession d'observer sans rien affir-
mer) ; sens plus étendus depuis la fin du SCHISME, vers 1170 (sous la forme
XVII€ S. — Dér. : scepticisme, 1669. cisme) ; schismatique, vers 1196 (sous la
forme cismaltique). Empr. du lat. eccl.
SCEPTRE, vers 1080 (Roland). Empr. schisma, -maticus (du grec ecci. skhisma,
du lat. sceptrum (du grec sképiron, propr. propr. « séparation », skhismatikos, de
« bâton »). skhizein « fendre »).
SCHABRAQUE, 1800, « couverture, or- SCHISTE, 1742 ; parfois schite ; une pre-
dinairement en peau de mouton, recou- mière fois en 1555 (sous les formes scisth,
vrant la selle du cavalier ». Empr. de l’all. sciste). Empr. du lat. schisitus (lapis) (du
Schabracke qui remonte au turc ichaprak grec skhistos « qu’on peut fendre, séparer »,
par l'intermédiaire du hongrois. de skhizein « fendre »). — Dér. et Comp. :
SCHAH, 1653 (1626 schach, 1546 siach). schisteux, 1762 (d’abord schiteux, 1758);
ol persan, titre des rois de Perse; v. micaschiste, 1824.
chec.
SCHIZO-. Premier élément de mots sav.
SCHAKO, 1761 ; écrit aussi shako, cha- comp., tels que schizophrénie, 1917 (mot
ko, etc. Empr. du hongrois csäk6 : le scha- créé en 1908 par le psychiatre zurichois
ko, qui était la coiffure des hussards hon- Bleuler), schizophrène, vers 1920, tiré du
579 SCORBUT
grec skhizein « fendre », sur le modèle de sawmill, l’all. sägemühle) ; scieur, 1247 ;
mots tels que schizopode, 1819, pris au pour scieur de long, v. long; sciure,
grec. 1480 (sous la forme sayeure).
SCHLAGUE, 1820. Empr. de l’all. Schlag SCIER, terme de marine, v. sillage.
{ COUP » au sens partic. de « châtiment
corporel infligé aux soldats allemands » ; SCINDER, 1791 (Mirabeau). Empr. du
le dér. schlaguer, 1842, a eu aussi d’abord lat. scindere « fendre » pour avoir un verbe
ce sens restreint. Devenus usuels surtout correspondant à scission, v. ce mot.
dans les parlers de l’Est.
SCINTILLER, 1377; rare avant le
SCHLINGUER, « puer », 1845. Mot vul- XVIII S.; Sscintillation, 1490 ; id. Empr.
gaire ; probabl. empr. de l’all. schlingen du lat. scintillare, scintillatio, v. étincelle.
«avaler » ; le mot fr. signifie d’abord « puer — Dér. : scintillement, 1764 (Bonnet).
de la bouche », sens qui a pu sortir par
antinomie ironique de « avaler ». SCION, xrni° (écrit cion ; picard chion).
Mot propre à la France du Nord, du fran-
SCHLITTE, sorte de traîneau, servant à cique *kith « rejeton », cf. anc. haut all.
charrier le bois dans les Vosges, 1864. Em- kidi ; -on est suff. dim., comme dans reje-
pr. du vosgien schlitte, empr. lui-même de ton.
l’all. Schlitten « traîneau », qui a été ap-
porté par des bûcherons alsaciens. — Dér. : SCISSION, 1762; déjà au xive s., au
schlitter, 1875, d’où -age, 1870, -eur, 1853. sens du mot lat. Empr. du lat. de basse
ép. scissio « division, déchirement » (de
SCHNAPS, xvir1e (Boufflers). Empr. de scindere, v. scinder). — Dér. : scissionnaire,
l’all. Schnaps (du verbe schnappen « hap- 1702;
per, aspirer »). Paraît avoir été introduit
par les mercenaires au service de la France. SCLÉRO-. Premier élément de mots sav.
comp., tels que scléropode, 1838, tiré du
SCHNICK, fin xvure. Empr. de l’alsa- grec skléros « dur ».
cien schnick.
SCLÉROTIQUE, 1314. Empr. du lat.
SCHOONER, 1801. Empr. de l’angl. médiéval sclerotica, qui remonte au grec
schooner (d’abord scooner, dér. du dialectal sklérotés « dureté »,.v. le préc.
lo scoon « glisser sur l’eau »).
“SCOLAIRE, 1807. Empr. du lat. de
SCIATIQUE, xr11° (écrit ciatique). Empr. basse ép. scholaris (de schola « école »). —
du lat. de basse ép. sciaticus, altération de Dér. : scolarité, 1867 ; au sens de « privilège
ischiadicus (du grec iskhiadikos, de iskhias, qu’avaient les étudiants des anciennes uni-
-ados, « sciatique », de iskhion « hanche »). versités », 1383, le mot est empr. du lat.
SCIEMMENT, xive. Formé, sur le mo- médiéval scholarilas, propr. « état d’éco-
dèle de l’adv. lat. scienter, du lat. sciens, lier ».
scientis « sachant » et du suff. -ment, v. SCOLASTIQUE, xir1° (comme adj. au
escient. sens médiéval de « d’école ») ; le sens mo-
SCIENCE, vers 1080 (Roland) ; scien- derne n’a été relevé qu’au xvri® s. ; le mot
tifique, 1370 (Oresme). Empr. des mots lat. est du reste rare auparavant. Empr. du
scientia (de scire « savoir »), scientificus lat. scholasticus (du grec skholastikos « rela-
(créé à basse ép.). tif à l’école, etc. ») pour qualifier la philo-
sophie du moyen âge. Scholasilicus dési-
SCIER. Lat. secäre « couper », qui a gnait aussi au moyen âge un clerc qui diri-
donné régulièrement seier, soier, formes geait l’école attachée à une église, d’où le
encore usitées dans les patois ; sier s'est fr. écolâtre, xrr1e.
développé au cours du moyen âge d’après
les formes accentuées et surtout d’après le SCOLIE, 1546 (écrit scholie) ; scoliaste,
subst. scie ; le c a été introduit dans l’or- 1552 (Rab., qui écrit scholiasie). Empr. du
thographe d’abord dans le subst. scieur, grec skholion « explication » (de skholé
dès le xr11° s., pour le distinguer de sieur, « école »), skholiastés. Scolie « chanson à
il n’a été étendu au verbe qu’au milieu du boire » chez les Grecs, relevé depuis 1765,
XvI® s., en partie aussi pour rappeler le est un autre mot; il est empr. du grec
- verbe lat. « Scier » se disait en lat. serr& skolion (neutre de l’adj. skolios « tortueux,
secare, dp. le 1ve s. aussi serräre. Ce dernier oblique », c’est-à-dire « chanson qui va en
survit encore dans les parlers gallo-romans zigzag, d'un convive à l’autre »).
du Sud-Est et du Sud-Ouest et en outre SCOLOPENDRE, sorte d’insecte, 1552
dans le sarde logoudorien serrare et l'esp. (Rab.) ; « grande fougère », 1314 (sous la
serrar, Cf. aussi sierra « scie », d’où « chaîne forme -drie). Empr. des mots lat. scolo-
de montagnes abruptes ». D'autre part pendra, -drion (pris au grec).
le lat. secare a aussi été employé au sens
de « faucher (l’herbe) » et le fr. scier a SCORBUT, xvie. Empr. du lat. médiéval
pris le sens de « couper le blé, moissonner », scorbulus créé probablement sur la base
aussi « faucher »; dans ces acceptions il d’un moyen néerl. *scrbut (néerl. mod.
est encore usité dans de nombreux parlers, scheurbuik) qu’on peut supposer d’après
cf. de même esp., a. pr. segar « moissonner, le moyen bas-all. schorbuk (dp. 1404);
faucher », et it. segare. — Dér. : sciage, celui-ci a été empr. de l’anc. suéd. skôrbjug,
1340 (écrit seage) ; scie, xrr1° (écrit sie); anc. nor. skyr-bjügr, comp. de skyr « lait
scierie, 1801 (dialectal dès le xve s.; au caillé » et bjügr « œdème ». Dans leurs
xviue moulin à scier, analogue à l’angl. longues courses sur mer les anciens Nor-
SCORBUT 580

mands emportaient souvent des provi- du lat. médiéval scrutinium, attesté en lat.
sions de lait caillé ; la consommation de de basse ép. au sens d’ « action de fouiller,
grandes quantités de celui-ci passait pour examiner » (de scrutari, v. scruter),
créer facilement des œdèmes. Le sens (E )scrutine et scrutin, 1638 (Chapelain).
premier du mot était donc « œdème dû à la ont été aussi employés au sens du lat. anc.
consommation de grandes quantités de — Dér. : scrutiner, 1794.
lait caillé ». De même viennent du norois
all. Scharbock, néerl. scheurbuik, angl. SCULPTEUR, 1380; sculpture, vers
scuruy, russe skrobota. — Dér. : scorbu- 1500. Empr. du lat. sculptor, sculptura (de
tique, 1672 ; anti-, 1671. sculpere). Sculplier, 1718, est une réfection
de sculper, 1694, empr. du verbe lat.
SCORIE, 1553. Empr. du lat. scoria d’après sculpteur, -ure. Christine de Pisan
du grec skôria). avait dit de même sculpure (déjà une fois
SCORPION, 1119. Empr. du lat. scorpio créé au xiv® s.). — Dér. de sculpture :
sculptural, 1788.
(du grec skorpios).
SCORSONÈRE, « salsifis noir », 1667. SCYLLA, v. charybde.
Empr. de l’it. scorzonera, dér. de scorzone SEAU. Lat. pop. “*sitellus, lat. class.
« sorte de serpent venimeux », contre la sitella. Propre à la France du Nord. Cf.
morsure duquel on préconisait l'emploi de dialectal seille, lat. situla, qui est en con-
la scorsonère ; scorzone représente, avec currence avec seau dans les parlers du
l's de scorio « court », le lat. de basse ép. Centre (en ce cas, souvent avec une valeur
curtio, attesté dans des gloses (dér. lui- différente) et qui est la seule forme usitée
même de curius « court »), c’est-à-dire dans de nombreux parlers de l’Est et de
« (animal) aux membres écourtés ». l'extrême Ouest ; cf. aussi it. secchia.
SCOTTISH, 1850. Empr. de l’angl. scot- SÉBACÉ, 1734. Mot techn., empr. du
tish, propr. « d'Écosse » par l'intermédiaire lat. de basse ép. sebaceus (de sebum «suif »,
de l’all. Schoïtisch, cette danse, d’origine v. suif).
écossaise, ayant passé par l'Allemagne
avant d’être adoptée en France. L’ortho- SÉBILE, 1417. Étymologie inconnue. Ce
graphe angl. a été rétablie vers 1872. qui caractérise la sébile dans tous ses em-
plois, c’est d’être un vase de bois. Le rap-
SCOUT, v. boy. prochement avec le mot perse zebbil « pa-
SCRIBE, xrie. Empr. du lat. scriba nier d’osier destiné à renfermer des dattes,
«greffier, secrétaire » (de scribere « écrire ») ; corbeille, sac, besace » est très peu pro-
sert spécial. à désigner les docteurs de la bable, parce que ni l’Italie, ni l’occitan,
loi chez les anciens Juifs d’après l'emploi ni les langues ibéro-romanes ne possèdent
de scriba dans le lat. eccl. — Dér. : seri- le mot.
bouilleur, fin xix°, mots fam. signifiant
« mauvais écrivain », d’après des verbes en SEC, SÈCHE. Lat. siccus, sicca. It.
-ouiller, tels que bafouiller, tripatouiller; secco, esp. seco. V. sécher. — Dér. : séche-
scribouillard, mot péjor. pour « fonction- resse, vers 1120; cf. a. pr. secaressa.
naire », 1923. SÉCANTE, 1634. Fém. d’un adj. secant,
SCRIPTEUR, 1907. Empr. du lat. 1542, empr. du lat. secans, part. prés. du
scriptor « celui qui écrit ». — Dér. : télé- verbe secare « couper » ; sécant, dans plan
seripteur, 1949, formé d’après télégraphe. sécant, est récent.
SCROFULES, 1534 (écrit avec -ph-). SÉCATEUR, 1827. Dér. sav. du lat.
Empr. du lat. de basse ép. scrofulæ, v. secare « Couper », d’après les nombreux
écrouelles. — Dér. : scrofuleux (id. écrit mots de formation sav. en -aieur.
avec -ph-). SÉCESSION. Ne s'emploie guère que
SCROTUM, 1541. Empr. du lat. médical comme terme d'histoire. Premièrement
scrotum. comme terme d'histoire romaine, désignant
la retraite de la plèbe sur le Mont Sacré
SCRUPULE, xive; scrupuleux, xIve. en 493 (avant J.-C.), 1838 (en 1354 en un
Empr. du lat. scrupulus, propr. « petit sens plus général de « sédition »), empr. du
caillou », d’où « inquiétude de la conscience lat. secessio (de secedere « se retirer »);
sur un point minutieux », par comparaison deuxièmement, comme terme d'histoire
plaisante avec un petit caillou qui gêne le des États-Unis, dans guerre de Sécession,
pied », scrupulosus. Scrupule « poids très désignant la guerre civile de 1861-65, cal-
petit, etc. » chez les Romains est empr. du que de l’anglo-américain war of secession
lat. scrupulum, de la famille de scrupulus. (où secession vient du mot lat. cité plus
SCRUTER, 1501 ; rare avant le xvrr1es.;
haut).
scrutateur, 1495. Empr. du lat. scrutari SÉCHER. Lat. siccäre (de siccus). —
« fouiller, chercher à pénétrer », scrutator ; Dér. : séchage, 1797, une 1re fois en 1336;
scrutateur a pris en 1789 le sens de « celui sécherie, xr11° s. ; séchoir, 1660 (une 1re fois
qui dépouille ou surveille un scrutin », v. au xv° s.); dessécher, xr1°, desséchement,
le suiv. 1534. V. assécher.
SCRUTIN, 1326 ; répandu au xvrrie s., SECOND, vers 1138 (sous la forme
comme terme de langue politique, par segonz ; mais l'orthographe second est déjà
l'abbé de Saint-Pierre ; déjà attesté au prépondérante au moyen âge); secon-
moyen âge sous la forme scrutine. Empr. daire, 1372 ; rare avant le xvie s. ; secon-
581 SEIGLE

der, 1417. Empr. du lat. secundus, propr. SÉCULAIRE, 1550 (Rab.). Empr. du
«suivant » (de sequi « suivre »), secundarius lat. sæcularis (de sæculum « siècle », v. ce
« qui est de second rang », secundare « favo- mot).
riser, aider » ; au xvie et au xviies. seconder
signifiait aussi « venir après, suivre » d’après . SÉCULIER ; d’abord seculer, vers 1170,
second. Pour l’emploi de secondaire dans puis seculier, vers 1260, par substitution de
l’organisation de l’enseignement public et suff. Empr. du lat. eccl. sæcularis (de
comme terme de géologie, v. primaire. sæculum au sens de « vie mondaine,
monde »; v. siècle), — Dér. : séculariser,
SECOUER. Réfection, qui date du 1586, d’après la forme du lat. sæcularis,
XvI®Ss., de l’anc. secourre d’après les formes d’où sécularisation, 1567.
secouons, Secouez, secouent, etc. Secourre,
qui survit encore dans les parlers de l'Est SÉCURITÉ, vers 1190, devenu usuel au
et du Nord-Est, continue le lat. succutere, cours du xvi1° s. Empr. du lat. securitas
cf. esp. sacudir. On attendrait une forme (de securus « sûr »), pour exprimer une
sequeurre ; celle-ci, qui est très rare, a été nuance de sens distincte de sürelé.
refaite en secourre, en partie d’après secou- SÉDATIF, 1314. Empr. du lat. médiéval
rir ; Cf. recousse. — Dér. : secouement, sedativus (de sedare « calmer »).
1528 ; secousse, vers 1460, fém. de l’anc.
part. passé de secourre, secous (cf. le lat. SÉDENTAIRE, 1492. Empr. du let. se-
succussus), encore chez d’Aubigné. dentarius (de sedere « être assis »).
SECOURIR. D'abord secorre, refait en
SÉDIMENT, xvi° (Paré), comme terme
médical ; devenu usuel au xviie s. dans
secourir, Comme corre en courir. On trouve d’autres acceptions techn. Empr. du lat.
du xI1Ie au xv® s. des formes avec -eu-,
sedimentum « affaissement » pour rendre le
dues à l'influence analogique de sequeurre, lat. médical sedimen « dépôt d'urine » (de
v. le préc. Lat. succurrere. — Dér. : secou- sedere au sens de « se poser, s’affaisser »)
rable, xr1°; secours, vers 1050, sorti du
qui se francisait moins bien. — Dér. :
supin succursum. sédimentaire, 1842 ; d’abord -teux, 1718.
SECRET, adj., vers 1180. Empr. du lat. SÉDITION, 1209 ; séditieux, xrv® (Ber-
secrelus, propr. « séparé » (de secernere suire). Empr. du lat. seditio, seditiosus de
« trier, séparer ») ; l’a. fr. a aussi employé la famille de ire « aller » avec l’ancienne
une forme plus francisée segrai, segroi ; on préposition sed exprimant la séparation).
trouve en outre segret jusqu'au xvi® s.
SÉDUIRE, xv°; séducteur, xive (Ores-
SECRET, subst., xrI°. Empr. du lat. me) ; séduction, x11° ; rare avant le xvries.
secretum « lieu secret, chose secrète », v. Séduire est une réfection, d’après le lat.
le préc. eccl. seducere, de l’a. fr. souf{s)duire, lat.
SECRÉTAIRE, vers 1180. Jusqu'au dé- subdücere « retirer », qui a dû prendre le
but du xvii® s., encore chez Corneille, si- sens de « séduire » à sédücere dans le lat.
gnifiait « confident, dépositaire de secrets ». pop., cf. de même it. soddurre, aujourd’hui
Pris comme terme administratif depuis la en recul devant sedurre. Séducteur, séduc-
même époque. Désigne celui qui transcrit, lion sont empr. du lat. eccl. seducior, se-
rédige pour un autre, depuis Froissart; ductio (en lat. class. a le sens concret
désigne aussi une sorte de meuble depuis d’ « action de tirer de côté ») ; au moyen
1765. Empr. du lat. médiéval secrelarius, âge on disait aussi souduitor, souduison,
v. les préc. Secrétaire d'état qui, au xvrres., souduior, souduiement. — Dér. de séduire. :
était le titre. des ministres, a été fait au séduisant, 1542 ; au moyen âge souduiant.
xvie s. sur le modèle de l’esp. secretario de SEGMENT, 1613. Empr. du lat. seg-
estado et s’est substitué à secrélaire des menium « morceau coupé » (de secare « cou-
commandements. — Dér. et Comp. : per ») en vue d’un sens spécial. — Dér. :
secrétairerie, 1568; secrétariat, 1587 ; segmentaire, 1838 ; segmenter, 1877, d’où
sous-secrétaire, 1680 ; d’où -riat, 1834. -ation, fin xix°, -able, id.
SÉCRÉTION, 1495. Empr. du lat. secre- SÉGRÉGATION, 1374 (t. scientifique
lio « séparation, dissolution » (de secernere, dp. 1933). Empr. du lat. segregaltio, subst.
v. secret), en vue d’un sens spécial. — de segregare « séparer ».
_ Dér. : sécréter, 1798 ; sécréteur, 1753 ; une
première fois au xvi® s. (Paré, au fém. SÉGUEDILLE, 1687 (D.) ; une première
secretrice), fait alors directement sur le lat.
fois séguidille en 1630 dans le Guzman
secretio ; sécrétoire, 1711.
d’Alfarache de Chapelain. Empr. de l’esp.
seguidilla, dér. de seguida « suite » (de
SECTE, vers 1300; sectateur, 1495. seguir « suivre »).
Empr. du lat. secia (de sequi « suivre »), SEICHE ; on écrit aussi sèche. Lat. Sépia
sectalor (de sectari « suivre, accompagner », (du grec sépia). It. seppia, esp. jibia. V.
de secta). — Dér. de secte : sectaire, 1561 ; sépia. 6
d’où sectarisme, fin xixe.
. SÉIDE, 1842. Tiré de Séide, nom d’un
SECTEUR, terme didactique, 1542; affranchi de Mahomet, aveuglément sou-
section, id., 1366. Empr. du lat. sector, at- mis à ses ordres, en arabe Zayd (ibn Nä-
testé à basse ép. comme terme de géomé- ritha), mis en scène par Voltaire dans sa
trie (en lat. class. signifie « celui qui coupe tragédie de Mahomet en 1741.
(du bois), assassin, etc. »), sectio (de secare
« couper »). — Dér. de section : sectionner, SEIGLE, x1r1e. Forme demi-savante d’a-
1872, sectionnement, id. sun, près le lat. sécale ou empr. d l’a. pr. segle ;
SEIGLE 282

seigle ne peut pas être considéré comme « courbure » qu’on trouve dans des langues
une forme populaire de la France du Nord, techn., cf. le sein persique « Golfe Persique »
car on trouve à la fois soile, attesté dès le chez Montesquieu, est repris au latin.
xX111€ s. (Beaumanoir), encore usité dans le
Nord-Est et seille, aujourd’hui répandu SEINE ; on écrit aussi senne ; en outre
depuis l'Océan jusqu'à la Savoie, dans les saime au moyen âge par altération. Sorte
parlers qui bordent au Nord les parlers de filet. Lat. de basse ép. sagèna (du grec
méridionaux ; l’a. pr. a des formes variées sagéné), devenu *saiieine, puis saine.
segle, segal, seguel, etc., d'où celles de SEING. Ne survit aujourd’hui que dans
l’époque contemporaine ; le type particu- quelques expressions : sous seing privé,
lier du mot lat. explique sans doute la sin- blanc-seing (qui s'est substitué au xvire s.
gularité des formes gallo-romanes. à blanc signé) ; cf. aussi le comp. contre-
seing, 1355. Lat. signum « signe, etc. ». Le
SEIGNEUR. Lat. seniorem, acc. de se-
sens de « signe tenant lieu de signature »
nior « plus âgé », comparatif de senex
« vieillard » ; est devenu spécialement dans est une spécialisation d’origine jurid. ;
le lat. eccl. un terme de respect (mais se sein(g) signifiait en a. fr. « marque » et
trouve déjà chez Stace au 1er s.); de là aussi « cloche », sens qui remonte au lat.
aussi it. signore, esp. señor. À pris un déve- de basse ép., v. tocsin et signe. It. segno
loppement particulier pour suppléer à do- « signe », esp. seña (d’après le pluriel neu-
tre) « id. ».
minus, devenu d’un emploi restreint ; de
là les sens de seigneur pour désigner les SÉISME, fin xixe. Empr. du grec seis-
grands propriétaires féodaux, puis des per- mos « tremblement de terre » (de seiein
sonnages de très haut rang, et, d’autre « secouer ») dont les deux voyelles ont été
part Dieu, en lat. eccl. Dominus. L'’a. fr. transcrites littéralement, ce qui a amené
avait un Cas sujet sendra avec un a final la prononciation sé-isme d'après les mots
qui est une notation de e (Sermenis) ; il a terminés en -isme. Du mot grec seismos on
disparu rapidement devant sire. Sire, qui a tiré aussi sismique, 1871, sismographe, id.
n’a aujourd'hui qu’une valeur historique,
en dehors de l’emploi péjoratif de triste, SEIZE. Lat. sédecim. — Dér. : seizième,
pauvre sire (a eu parfois le simple sens de x11e (sous la forme sezismes) ; pour le suff.
notre monsieur du xIv® au xvi® s.) est issu v. centième.
d’une prononciation du mot lat. senior, SÉJOURNER. D'abord sojourner, rapi-
devenu “*seior, quand il servait pour s’a- dement remplacé par séjourner, v. semon-
dresser à quelqu'un ; d’où le composé mes- ce ; aussi surjourner. Lat. pop. *subdiur-
sire, x11°, dont mes est l’ancien cas sujet nûre, propr. « durer un certain temps »,
de mon ; il y a des formes analogues dans d’où « séjourner », comp. de diurnäre « du-
les langues voisines, en partie prises au rer, vivre longtemps », rare, mais ancien.
fr., cf. it. messere, repris au xvi® s. sous It. soggiornare. — Dér. : séjour, vers 1080
la forme messer, employée plusieurs fois (Roland).
par La Fontaine. L’acc. de sire était sieur,
encore honorifique au xvire s., aujourd’hui SEL. Lat. sal, masc. ; devenu fém. dans
usité seulement dans la langue de la pro- toute la péninsule ibérique et au Sud de
cédure ou comme terme péjoratif ; d’où le la ligne allant de l'embouchure de la Loire
composé monsieur, 1314, d'abord titre don- au Sud des Vosges. — Dér. et Comp. :
né à des personnes de rang élevé ; devenu saler, x11°, d’où salage, 1281, salaison, xv°,
simple terme de politesse depuis le xvre s. salant, dans marais salant, 1520, saleur,
— Dér. et Comp. : seigneurie, xrr° ; sei- XVI® (Paré); saloir, 1363 ; salure, xrrr°;
gneurial, 1434; influencé par seigneurie; salière, id. ; salin, vers 1450 ; dessaler, xrrr°;
monseigneur, XII°; pince-monseigneur, v. saugrenu, 1578 (écrit sogrenu, H. Estien-
pincer. ne) ; réfection, d’après l’adj. grenu, de sau-
SEILLE, v. seau.
greneux, XVI®, qui paraît avoir été suggéré
par saugrenée, xVi® (Rabelais), « sorte de
SEIME, terme de vétérinaire, 1607 (alors fricassée de pois », comp. de sau, autre
seme) ; v. bleime. Peut-être d’une expres- forme de sel, de grain et du suff. -ée. Sau-
sion non attestée *corne seime « corne mu- piquet, vers 1380, dér. d’un verbe non attes-
tilée »; seime serait le fém. d’un adj. qui té saupiquer « piquer avec du sel», cf. a. pr.
continuerait le lat. de basse ép. semus salpicar. Saupoudrer, xive (E. Deschamps).
glosé par un mot grec signifiant « à moitié Pré-salé, d’abord « pré voisin de la mer »,
vide » (autre forme de sémis « demi-as, 1732, ensuite « viande d’un mouton qui
moitié »), conservé par it. scemo « incom- paît dans ce genre de pré », 1836.
plet, sot », a. pr. sem « incomplet, etc. »; SELECT, 1869 (Mérimée). Empr. de
mais cet adj. n’a pas laissé d’autres traces l'angl. select (du lat. selectus, v. le suiv.).
en fr.; On a aussi expliqué seime comme
un subst. tiré du verbe semer « dépérir, SÉLECTION, 1801, comme terme d'éle-
maigrir », lat. pop. *sémäre (de semus), vage ; 1866 (dans sélection naturelle, traduc-
d’où aussi it. scemare « amoindrir », a. pr. tion de l’angl. de Darwin). Empr. de l’angl.
semar « priver, diminuer »; mais le sens selection (du lat. selectio « choix, tri »), qui
ne satisfait pas. a pris une acception nouvelle dans la
langue de l'élevage d’après le sens philo-
SEIN. Lat. sinus « pli », d’où « pli de sophique que Darwin lui a donné dans
la toge, giron », puis « fond d’une chose, l'Origine des Espèces. Déjà cependant re-
etc. ». Cf. it. esp. seno. Le sens de « ma- levé depuis 1609 dans un sens général.
melle » existe en fr. et en it. Le sens de L’empr. du mot angl. en a été facilité. —
583 SEMER

Dér. : sélectionner, 1899 ; sélectionneur, adj. -kos « qui indique » (de sémainein « si-
1923 ; sélectif, 1871, sur le modèle d’élec- gnifier ») par opposition à phonétique «scien-
lion, électif, etc. ce des sons » (une première fois en 1561 :
SÉLÉNIUM. Corps découvert en 1817 « dictions et paraphrasmes symentiques »).
par Berzélius qui a tiré sélénium du grec Mais sémantiké lekhné « art des significa-
seléné « lune » à cause des analogies de ce tions » que Bréal donne en note, p. 8 de
corps avec le {ellure, mot formé avec le lat. son Essai de Sémantique, est du grec re-
tellus « terre » ; sorte de jeu de mots sur le construit.
fait que la lune est le satellite de la terre. SÉMAPHORE, 1812. Comp. avec les
mots grecs séma « signe » et phoros « qui
SELF-GOVERNMENT, 1875. Empr. de porte ».
l'anglais.
SEMBLER. Lat. de basse ép. similare
SELLE. Lat. sella « siège », qui a pris
« être semblable, ressembler » (de similis
le sens de « selle de cheval » à basse ép. « semblable »), d’où s’est développé le sens
Le sens de « siège de bois sans dossier »
s'emploie encore dans diverses techn. et de « paraître » dès les plus anciens textes ;
mais le sens propre a vécu à côté jusqu’au
des locutions proverbiales ; telles que le cul xvie s. et survit encore dans de nombreux
entre deux selles, xvi® (Montaigne) ; le mot
parlers méridionaux. En dehors du gallo-
a pris le sens de « chaise » dans un certain roman, n'existe sous une forme régulière
nombre de parlers de l'Est. Selle, au sens que dans le roumain sämäna « ressembler »
de « chaise percée » (l'usage de la chaise et le cat. semblar « id. ». L’it. sembiare,
percée a été extrêmement répandu), date sembrare « ressembler, sembler » et l'esp.
du xiv® s., d’où aller à la selle, cf. le lat. semblar « ressembler » sont empr. — Dér. :
médical adsellari au même sens, de là selle
semblable, vers 1200, d’où dissemblable,
«évacuation, quand on va à la garde-robe »,
vers 1330 ; d’abord des- xri°, d’après le
dès fin xive s. (E. Deschamps). L'it. sella, lat. dissimilis ; dissemblance, 1520, d'’a-
l'esp. silla ont les deux sens de « siège » près ressemblance, pour traduire le lat.
et de « selle de cheval ». — Dér. : sellette,
dissimilitudo ; ne continue pas l’a. fr. des-
XIIIe ; la sellette était un petit siège de bois semblance, attesté du xr1° au xive s., fait
sur lequel on faisait asseoir les accusés, sur dessembler « être dissemblable » ; sem-
d’où les expressions mettre, tenir quelqu'un blant, vers 1080 {Roland), au sens de « ma-
sur la sellette, Xvx1° ; seller, xr1°, d’où des- nière d’être » usuel au moyen âge; en
seller, x11°, resseller, 1797 ; sellier, x1r1°,
outre « apparence, mine, physionomie,
d’où sellerie, 1319.
avis, etc. » ; la locution faire semblant ap-
SELON. D'abord sulunc, selonc, puis se- paraît dès le x11° s. ; ressembler, vers 1080
lon. Signifie propr. « le long de », encore (Roland), d’après le sens propre de sem-
chez Flaubert ; le sens figuré apparaît dès bler ; a été construit transitivement jus-
les premiers textes. La forme sulunc est qu’au xvires., l’est encore dans des patois ;
à l’appui d’un lat. pop. *sublongum, propr. la construction avec à s’est développée au
« le long de ». On admet aussi que selonc XVIe s., d’où ressemblance, 1268, ressem-
est une réformation, d’après long, de l’a. fr. blant, 1503.
son « selon », x11°, qui a disparu de bonne SEMELLE, xr11e. Mot propre au fr., qui
heure, lat. secundum, reformation qui se s’est répandu dans tout le territoire gallo-
serait produite à l’étape non attestée *seon, roman, sauf dans quelques parlers excen-
cf. l’a. pr. segon(z), encore usité aujour- triques du Sud-Est qui ont conservé le
d’hui ; mais en cette hypothèse, la forme terme du lat. pop. *sola, altération du lat.
sulunc est mal expliquée. L’it. secondo class. solea, d'où aussi it. suola, esp. suela.
peut être repris au lat., de même que l’a. fr. Vient probabl. de la Picardie où l’art fém.
segond, encore signalé au xviie s. par Mé- était le et où existait au x111° s. un lemelle
nage comme employé par les paysans du « lame » ; prenant la première syllabe pour
Vendômois. l’art., on l’aura remplacée par *se, du lat.
SELTZ (eau de), 1771 (Bougainville : ipsa ; ipse a en effet concurrencé ille dans
« Des eaux de Selse qu'ils font venir de les siècles pendant lesquels la langue éla-
Hollande à grands frais »). L’eau de Seltz borait un art. déf., et ipse est souvent
naturelle vient de Seltz, village de Prusse, employé comme art. chez des auteurs du
sur l’'Ems ; mais le mot ne s’est répandu Nord de la Gaule, p. ex. chez Frédégaire.
que depuis qu’on fabrique une eau de com- Cf. des mots comme gascon lighe « saule »,
position analogue. pour salighe, avec aphérèse de sa pris pour
l’article. — Dér. : ressemeler, 1622, d’où
SEMAINE. Lat. eccl. seplimäna « espace ressemelage, 1782.
de sept jours » (tiré de septimänus « relatif
à sept »), calqué du grec eccl. hebdomas. SEMENCE. Lat. de basse ép. sémentia,
Le lat. eccl. hebdomas, hebdomada, pris au plur. neutre, qui a été plus tard pris comme
grec, V. ci-dessus, ne survit que dans quel- subst. fém., de sémentium, réfection, égale-
ques parlers rhéto-romans et it. ; cf. a. it. ment de basse ép., du lat. class. sëmentis,
edima, d’où Toscane mezzedima « mercre- propr. « semailles ». It. semenza. — Dér. :
di ». La semaine des trois jeudis est déjà semenceau, 1842 ; ensemencer, 1355, ense-
chez Oudin, en 1640; prêter à la petite mencement, 1552.
semaine est attesté depuis 1740. — Dér. : SEMER. Lat. sëeminäre (de semen, sëmi-
semainier, vers 1200. nis « semence »); a éliminé le lat. class.
SÉMANTIQUE, 1833. Mot créé par serere, dont les formes étaient difficiles;
Bréal d’après le grec sémantiké, fém. d’un séminäre avait à la fois l'avantage d’avoir
SEMER D84

plus de corps et d’être plus près d’autres lat. L’a. fr. a des formes simle, simbre, etc.
dér. semen, sèmentis, etc. It. seminare, esp. « sorte de gâteau », dont plusieurs qui sont
sembrar. — Dér. et Comp. semaille, dans des textes du Nord-Est peuvent venir
vers 1260, continue peut-être le lat. pop. des parlers germ. voisins, cf. notamment
séminälia, plur. neutre de l’adj. sémi- symel à Valenciennes au xv®es.
nâlis, Cf. à. pr. semenalha « semence »;
semeur, vers 1180, continue peut-être SEMPITERNEL, xrrie; rare avant le
le lat. séminäior; semis, 1759; semoir, xviie s. Ne s'emploie aujourd’hui que par
1328; clairsemé, xr1e (Chrétien, sous la plaisanterie. Dér. sav. du lat. sempiternus
forme clar-) ; parsemer, vers 1480; ressemer, (comp. de semper « toujours » et de æternus)
1334. d’après éternel. On trouve quelquefois en
a. Îr. sempiterne et -neux.
SEMESTRE, xvrie; antér. adj. signi-
fiant « qui dure six mois », xvie (Ronsard), SÉNAT, 1213. Sénateur, x11°. Jusqu'au
encore usité au xviri® s. L’adj., d’où le XvI® s., seulement comme termes d’anti-
subst. a été tiré, est empr. du lat. semestris. quité romaine ; sont devenus depuis des
— Dér. : semestriel, 1829, d’après trimes- termes de l’organisation politique des états
triel ; on a dit aussi semestral, 1823. modernes. — Dér. : sénatorial, 1518, d’a-
près le lat. senatorius.
SEMI-. Préf. sav., empr. du préf. lat.
semi « demi, à demi », cf. semi-direct, etc. SÉNATUS-CONSULTE, 1477 : Bersuire
a francisé le mot au xive s. en senal-
SÉMILLANT, 1546. Issu par changement consult ; d’abord terme d’antiquité romai-
de suffixe de semilleus « rusé, remuant,
capricieux » (le verbe sémiller a été formé ne ; a été pris comme terme politique sous
le Consulat et le Premier Empire ; cf. pour
d’après sémillant) ; semilleus est dér. de
l’anc. franç. semille « action (soit valeu- des empr. de ce genre à cette ép. consul, etc.
reuse, soit méchante) », sens secondaire de
Empr. du lat. senaius consulium « décision
du Sénat ».
semille « progéniture, descendance »,
l’action étant regardée comme la produc- SÉNÉ, xirie. Empr. du lat. médiéval
tion d’un certain personnage ; semille est sene, empr. lui-même de l’arabe send ; d’où
un diminutif de l’anc. fr. seme « origine », aussi it. esp. sena.
lequel représente le lat. sëmen, -inis.
SÉNÉCHAL, xue. Du francique *sinis-
SÉMINAIRE, 1584. Empr. du lat. mo- kalk « serviteur le plus âgé » (cf. ma-
derne seminarium ; les séminaires ont été réchal ; le premier élément de ce mot
institués par le Concile de Trente, en 1545 ; comp. correspond au gotique sinisia « af-
seminarium, en son sens nouveau, a été né »), attesté par siniscalcus de la loi des
tiré du lat. anc. seminarium, qui avait Alamans, cf. aussi l’a. pr. senescal(c).
le sens propre de « pépinière » (empr. L’all. Seneschall vient du fr., l’it. siniscalco
au XVIIe s., 1635, etc.) et, par figure, du lat. médiéval.
celui de « principe, source » (empr. au xvi®
(en 1570) et au xvire s.). — Dér. : sémi- SÉNEÇON, vers 1200 (senechiun). Empr.
nariste, 1609. du lat. senecio, dér. de senex « Vieillard »
SÉMINAL, 1372. Empr. du lat. seminalis sur le modèle du grec hérigerôn, littéral.
(de semen, seminis, v. les préc.). « vieillard du printemps », ainsi nommé
parce qu’il devient tout blanc au prin-
SÉMITE, 1845. Dér. de Sem, nom d’un temps.
des fils de Noë, cf. Genèse, X, dont les Sé-
mites passent pour être les descendants. SÉNÉGALIEN, fin xixe, Se dit en par-
— Dér. : antisémite, fin x1ixe, où sémite lant de chaleurs excessives. Dér. de Séné-
désigne spécialement les Juifs ; d’où -tisme, gal, nom d’une région de l'Afrique; Th.
1894. Gautier (en 1843) dit au même sens séné-
gambien.
SEMONCE. D'abord semonse, x11°. Fém.
pris substantivement de semons, part. passé SENESTRE, v. gauche.
de l’anc. verbe semondre, encore de quelque
usage à l’inf. au xvire s., d’abord somondre, SÉNEVÉ, v. sanve.
lat. pop. *submonere, lat. class. submonèére SÉNILE, 1812, une première fois vers
«avertir secrètement », avec le changement 1500. Empr. du lat. senilis (de senex » vieil-
de conjugaison qu'a subi répondre. Pour lard ») en vue d’un sens spécial. Déjà
le traitement du préf., v. séjourner. A. pr. empr. au XVI s. au sens général de « qui
somonre, etc. Semonce (comme le verbe a le caractère du vieillard ». — Dér. :
semondre) est d’abord un terme jurid. dési- sénilité, 1836.
gnant une sorte de convocation ; sens plus
étendu depuis le xvri® s. A désigné aussi SENIOR, vers 1890. Empr. de l’angl.
une convocation de vassaux et d'hommes senior « le plus âgé ».
d'armes depuis le x1v® s. — Dér. : semon-
cer, 1540. SENS, vers 1080 (Roland). Empr. du
lat. sensus « fait de sentir, organe des sens,
SEMOULE, xviie ; d’abord semole, xvre. sensation, manière de sentir, de voir, de
Empr. de l'it. semola, lat. simila « fleur penser, etc. » (de seniire « sentir »). La pro-
de farine ». Mot de civilisation qui a beau- nonciation de l's finale, d’après celle du
coup voyagé ; l’angl. semola vient égale- mot lat., s’est établie au xvrr® s. A absorbé
ment de l'it.; l’all Semmel remonte à l’a. fr. sen, empr. du francique *sin, v.
l’anc. haut-all. simila, semala, empr. du asséner. Sens commun, 1534 (Rab.) est
F
585 SEOIR

calqué sur le lat. sensus communis ; bon SENTE. Moins usuel que sentier, mais
sens est déjà du xive s. Sens au sens de encore bien employé dans la partie sep-
« direction », propre au fr., apparaît dès le tentrionale de la France. Lat. sémita. Esp.
X11° Ss. dans des expressions telles que en senda. Le dér. sentier peut continuer un
mal sens, en tuz sens ; il est dû au mot dér. du lat. pop. *sémitärius, cf. a. pr. sem-
d’origine germ. sen « chemin, direction », dier, esp. sendero ; le lat. class. sémitarius
v. asséner ; le mot germ., d’où est issu est un adj. qui signifie « qui se tient dans
l’all. Sinn, doit probabl. à son tour son les ruelles ».
sens intellectuel au lat. sensus. — Dér. et
Comp. : sensé, 1629 (Corneille), peut-être SENTENCE, x1ri°, au sens jurid.; au
d’après le lat. eccl. sensatus ; on ne peut sens de « parole renfermant une pensée
pas dire que sensé se soit substitué à l’a. fr. morale », 1580 (Montaigne) ; sentencieux,
sené (dér. de sen, v. ci-dessus), adj. qui ne x. Empr. du lat. senienlia (de sentire
paraît pas avoir dépassé le x1v® s. ; insensé, au sens de « juger »), qui a les deux sens
1488, d’après le lat. eccl. insensalus ; du mot fr., sententiosus.
contre-sens, 1560 (Pasquier), sens-devant- SENTIER, v. sente.
derrière, sens-dessus-dessous, xvri® (dès
1607, chez Maupas); altérations, par SENTIMENTAL, 1769, dans la traduc-
fausse étymologie, des anc. formes cen tion du Voyage sentimental de L. Sterne;
dessus dessous, cen devant derrière, où cen cf. ce que dit le traducteur : « Le mot
est un composé (encore usité au xve s.) angl. sentimental n’a pu se rendre en fr.
de ce et de l’adverbe en, d'où aussi, au par aucune expression qui püt y répondre,
XVIe s., s'en et même sans, qui a été et on l’a laissé subsister. » Le mot angl.,
défendu au xvri® s.; on a dit aussi qui était alors récent, se rattache lui-même
ce dessus dessous et ce devant derrière au fr. sentiment. — Dér. : sentimentalisme,
depuis le xrr1° s. V. forcené. V. encore 1801 ; sentimentalité, 1804.
non-sens. SENTINE, x11e, dans un sens fig.; on
trouve aussi sentine pour désigner une
SENSATION, xive (Oresme). Empr. du sorte de bateau au xive s. Empr. du lat.
lat. de basse ép. sensatio « fait de com- sentina « fond de la cale, sentine », d’où
prendre » en vue d’un sens spécial. — Dér. : « rebut, lie » (le sens propre du mot lat.
sensationnel, fin xix°, d’après l'expression n’a été relevé en fr. que vers le xiIves.,
faire sensation, qui date de la deuxième mais cela n’a rien de surprenant, puisque
moitié du XVIIIe 8. nous avons affaire à des emprunts) ; senie
SENSIBLE, x111°, comme terme didac- « fond de cale » chez Joinville paraît avoir
tique (signifie parfois « sensé », comme été tiré de sentine.
insensible « insensé », au x1ve et au Xv° 8.) ; SENTINELLE, 1546 (Rab.). Empr. de
des sens plus étendus de « qui ressent une l'it. sentinella, qui se rattache au verbe
impression morale », d’où « facilement sentire au sens d’ « entendre ».
ému » se sont développés au XvII® 8.; a
pris une valeur particulière de « qui a des SENTIR. Lat. seniire. It. sentire, esp,
sentiments humains » au XvirI® 8. ; sensi- sentir. Le sens d’ « exhaler une odeur ».
bilité, 1671, une 1re fois en 1314; dévelop- xive (E. Deschamps) est issu facilement de
pement sémantique parallèle à celui de celui de « percevoir une odeur »; lit. et
l’adj. Empr des mots du lat. philosophique l'esp. ont également ce sens ; sentir a éli-
sensibilis (de sentire « sentir »), sensibililas .miné en ce sens l’a. fr. oloir, verbe isolé
(créé à basse ép.). — Dér. de sensible : et de conjugaison compliquée, lat. olére,
sensiblerie, 1782; supra-sensible, 1872 ; d’où aussi esp. oler. — Dér. : senteur, 1375;
désensibiliser, 1929. cf. de même it. sentore ; sentiment, 1314,
réfection de l’a. fr. senlement, xr1°, qui a
SENSITIF, terme didactique, xr11°. Em- survécu jusqu’au XvVI® s., v. sentimental;
pr. du lat. médiéval sensilivus, v. les préc. ressentir, xi11°, d’où ressentiment, 1580;
— Dér. : sensitive, 1665 (herbe sensilive antér. ressentement, XIV°.
dès 1639); ainsi nommée parce que ses
feuilles se replient dès qu’on les touche. SEOIR. Propr. « être assis », sens sorti
de la langue depuis le début du xvrres.,
SENSORIUM, 1720. Empr. du lat. v. asseoir ; le sens de « siéger » au part.
philosophique de basse ép. sensorium séant et d’« être situé » au part. sis sont des
(de sentire, v. les préc.) ; on dit quelquefois survivances de la langue du palais. S'em-
en lat. moderne sensorium commune. — ploie aussi dans quelques formes au sens
Dér. : sensorial, 1830 ; sensoriel, 1871. d’ « être convenable ». Lat. sedëre. — Dér.
SENSUALISME, 1803 ; sensualiste, 1812. et Comp. : séance, 1538, préséance, 1580
Termes philosophiques, dér. du lat. eccl. (Montaigne) ; séant, adj., vers 1180, d’où
bienséant, vers 1080, bienséance, 1538,
sensualis « qui concerne les sens », v. les
préc. malséant, 1165 ; on a créé récemment la
variante seyant (relevé depuis 1871), au
SENSUEL, xve (attesté indirectement sens de « qui va bien à l'extérieur, à la
par l’adv. -ellement), propr. « qui concerne figure de quelqu'un » ; séant, subst., dans la
les sens » ; a pris vers le xvi® s. le sens de locution sur son séant, XVI1°, auparavant
« qui recherche les plaisirs des sens » ; sen- en son séant, qui remonte au x1I° S.; mes-
sualité, x11° ; propr. « faculté de percevoir seoir, vers 1200 ; encore usité aujourd'hui
les sensations »; développement séman- à la forme messied, de là l’adj. participial
tique parallèle à celui de l’adj. Empr. du messéant, x11° ; surseoir, vers 1090, seule-
lat. eccl. sensualis, sensualitas. ù ment terme jurid., à l’imitation du lat.
SEOIR 586

supersedere, de même sens, d’où surséance, SEPTUOR, 1836. Dér. sav. de sept sur
1372, sursis, x111° s., sursitaire, 1923 ; on le modèle de quatuor.
trouve antér. sursise, x11°, et sursoy, début
du xviie s., de même sursoyer au XVIe s. SEPTUPLE, 1484. Empr. du lat. de
basse ép. septuplus. — Dér. : septupler,
SÉPALE, 1790. Mot créé par le botaniste 1771 (une 1re fois en 1493).
allemand Necker avec le mot grec skepè
« couverture » et le suffixe de pélale. SÉPULCRE, vers 1120 ; sépulcral, 1487,
SÉPARATISTE, en 1669 pour désigner au sens de « lugubre » dès le xvrre s. ;
une secte anglaise, en 1871 à propos des sépulture, vers 1110, au moyen âge souvent
séparatistes des États-Unis, plus tard de sepolture, sepouture, formes plus francisées.
l'Irlande, et, depuis 1914, de séparatistes Empr, du lat. sepulcrum, sepulcralis, sepul-
tura (de sepelire « ensevelir »).
de divers pays. Empr. de l’angl. separatist,
dér. du verbe {o separaie, qui est empr. du SÉQUELLE, 1369. Empr. du lat. sequela
lat. separare. « suite » (de sequi « suivre »).
SÉPARER, 1314 ; séparable, 1390 : sépa- SÉQUENCE, 1170, comme terme litur-
ration, 1314. Empr. du lat. separare, sepa- gique ; 1583, comme terme de jeu de cartes.
rabilis, separatio. V. sevrer. — Dér. sépa- Empr. du lat. de basse ép. sequentia « sui-
rément, 1370 (Oresme). te » (de sequi) en vue de sens spéciaux.
SÉPIA, 1804. Empr. de lit. seppia, SÉQUESTRE, « personne à qui est con-
v. seiche. fié ce qui est séquestré », 1380 ; « état de
SEPT. D'abord set; écrit sept par gra- ce qui est séquestré », 1281 ; séquestrer,
phie étymologique. Lat. septem. — Dér. : 1463 (au part. pass. dès 1260) ; séquestra-
septième, x11° s. (sous la forme seitisme) ; tion, 1403. Empr. du lat. jurid. sequester,
a éliminé l’a. fr. sedme, semme, usité jus- propr. « médiateur » d’où « séquestre »,
qu’au xiv® s., lat. sepiimus, d’où aussi it. sequesirum, sequestrare, sequestratio ; le ver-
sellimo; encore employé au xvirie s. dans be a pris un sens plus étendu au xvres.
la langue administrative et signalé par SEQUIN, 1598 (essequin, 1400; chequin,
Ménage comme désignant alors dans l’An- 1540 ; sechin, 1570). Monnaie d’origine vé-
jou et le Poitou le service qui se fait pour nitienne, qui s’est répandue dans les pays
les morts sept jours après leur enterrement. voisins. Empr. de l’it. zecchino, lui-même
SEPTANTE, v. soixante. empr. du vénitien, qui l’a pris à l’arabe
sikki « pièce de monnaie » ; ce dernier mot
SEPTEMBRE. D'abord setembre, refait dérive de sekka « coin à frapper la mon-
en seplembre par réaction étymologique. naie » et « monnaie », d’où it. zecca «atelier
Lat. september. La prononciation ancienne monétaire », esp. seca « id. ».
est rare dans les parlers septentrionaux;
cependant on a encore à Pontoise la forme SÉRAC, terme de géographie, 1779 (de
la siembre pour désigner une fête locale. Saussure). Mot de la Savoie et de la Suisse
It. sellembre, esp. seliembre. — Dér. romande, qui désigne propr. une espèce de
septembral, 1534 (Rab., dans purée sep- fromage blanc et compact et s’est dit par
tembrale au sens de « vin », locution qui se comparaison de masses de glaces plus ou
dit encore par plaisanterie). moins compactes sur le Mont Blanc, puis
sur d’autres montagnes. Sérac est une
SEPTÉNAIRE, xve s. Empr. du lat. forme du fr. local (avec un c surprenant)
seplenarius.
à laquelle correspondent serai au xvIe s.
SEPTENNAL, 1723 (une première fois et seré aujourd'hui dans les patois ; ce mot,
vers 1330). Empr. du lat. de basse ép. sep- sous ces différentes formes, représente un
tennalis (de sepiem « sept » et de annus dér. du lat. serum « petit lait » ; une forme
« an », v. biennal). — Dér. : septennat, *seräceum convient à seré, mais d’autres
1823, sur le modèle de mots tels que déca- formes de la région franc-comtoise et le
nat, etc. savoyard sérai du xvi® s. ont un suff. qui
. SEPTENTRION, xre; septentrional, paraît être autre.
XIV; rare avant le xvie s. Empr. du lat. SÉRAIL, x1ve (Christine de Pisan, déjà
sepiemtrio, sing. tiré du plur. septemtriones, dans un sens figuré ; écrit souvent serrail
littéral. « les sept bœufs » (qui désignait les jusqu’en 1740). Empr. de l’it. serraglio,
sept étoiles de la Grande Ourse) et du dér. empr. lui-même du mot turco-persan serdi
septemtrionalis. « palais, hôtel », v. caravansérail ; la forme
SEPTIQUE, xvi® (Paré). Empr. du lat. serrail est due à l’it. serraglio plutôt qu’à
seplicus (du grec séplikos, de sépein « cor- l'influence de serrer ; maïs la forme de lit.
rompre, pourrir »). — Dér. antisep- serraglio est bien due à serraglio, usuel au
tique, 1763 ; aseptique, 1890 ; septicémie, sens de « clôture ».
1868, dér. de septique sur le modèle d’ané- SÉRAN, xi° (d’abord cerens) ; sérancer,
mie, etc. X111e (sous la forme cerencier). Mots de la
SEPTUAGÉNAIRE, vers 1380. Empr. du technologie du chanvre et du lin, répandus
lat. de basse ép. sepiuagenarius, de septua- dans les parlers gallo-romans sous deux
geni « soixante-dix ». formes : séré (verbe sérézi, Wallonie, Lor-
raine, Franche-Comté, Suisse romande, et
SEPTUAGÉSIME, xrir°. Empr. du lat. jusque dans les parlers rhéto-romans) et
eccl. sepluagesima (dies) « le soixante- séran, sérancer (dans le reste de la France
dixième (jour) ». du Nord). Le radical est sans doute le
587 SERMON

même, peut-être le gaul. *ker- « cerf » (com- soldats en rang » (Ménage), d’où le sens
paraison des nombreuses pointes de l'ins- moderne au xvirIe s., seul sens usité au-
trument avec les cornes du cerf), auquel jourd’hui outre celui qu’il a dans sergent
on a joint le suff. celtique -entios. de ville. A. pr. sirven, qui a des sens ana-
SÉRAPHIN, xrie. Empr. du lat. eccl. es à ceux de l’a. fr. L’it. sergente vient
seraphin, -phim, transcription de l’hébreu u fr.
seraphim, forme de plur. (de saraph « brû- SÉRICICOLE, 1836. Sériciculture, 1845 ;
ler ») ; ces anges sont apparus à Isaïe pour parfois altéré aujourd'hui en sériculture.
le consacrer dans sa mission, cf. Isaïe, VI, Comp. avec le lat. sericus « de soie », v.
2. — Dér. : séraphique, 1470 (D.). serge, et les terminaisons -cole, etc., sur le
modèle d’agricole, etc.
SEREIN, adj., x111° ; au moyen âge sur-
tout seri ; parfois, serain, serin ou serrin. SÉRIE, 1715 (d’abord t. de mathém.).
Seri est issu, par substitution de suff., du Empr. du lat. series. — Dér. : sérié, 1815 ;
lat. serenus, sur lequel serein est refait. sérier, 1871.
It. esp. sereno. Partout, le mot a pu être
influencé par le latin écrit, notamment au SÉRIEUX, vers 1550 (une 1re fois chez
sens moral. Goutte sereine, 1611, expression Oresme). Empr. du lat. de basse ép.
qui vient de ce que l'opinion populaire seriosus, dér. du lat. class. serius.
attribuait la paralysie de la rétine à une SERIN, 1478. Écrit parfois serein aux
goutte d'humeur limpide, sereine, la trans- xvIIe et xvirie s. Pris au sens d’ «imbécile »
parence de l’œil n'étant pas troublée dans depuis 1821. L'’a. pr. serena « guêpier »
cette affection. — Dér. : rasséréner, 1544. représente le lat. de basse époque sirena,
SEREIN, subsi., v. soir. nom qui est dû à une comparaison de la
rapacité de cet oiseau avec celle des sirènes.
SÉRÉNADE, 1556 (L. Labé). Empr. de Le nom du serin de Provence et de celui
l’it. serenala, propr. « ciel serein », dér. de des Canaries représente le grec seirèn
sereno, V. serein; influencé dans son sens « sirène »; c’est que le plumage bariolé de
par sera « soir », d’où « concert donné le ces oiseaux rappelle les couleurs dont se
soir », v. le préc. sont parées les sirènes. Le mot est un des
hellénismes propagés par les Massaliotes.
SÉRÉNISSIME, 1441, dans une traduc- — Dér. : seriner, 1812 ; déjà en 1555 et en
tion de l’it. ; déjà au xr11° s. dans un texte 1593 «chanter comme un serin » ; serinette,
italianisant. Empr. de l’it. serenissimo, su- 1759;
perlatif de sereno, v. serein, ad).
SERINGA, 1718 (écrit seringat; puis
SÉRÉNITÉ, x11°; d’abord surtout au seringa au xIx°Ss. ; en outre syringa, 1715-
sens moral. Empr. du lat. serenitas. 1798). Empr. du lat. des naturalistes sy-
SERF. Lat. servus « esclave ». A désigné, ringa, tiré de syringa « seringue », v. le
depuis l’époque de la féodalité, au cours suiv. ; ainsi nommé parce que le bois, vidé
du moyen âge, des personnes sur lesquelles de la moelle, sert à faire des seringues, des
les seigneurs avaient des droits variant flûtes, etc. C’est cet usage qu'on fait de
selon la coutume ; l'emploi de serf au sens ce bois qui a amené à dire seringa d’après
antique a été repris dans la langue litté- seringue.
raire au XVIII® s., mais assez rarement en SERINGUE, xrrie (écrit ceringue; ordi-
raison de l’existence du mot esclave, v. ser- nairement siringue jusqu’au xvi® s.). Ex-
vir. It. servo, esp. siervo. — Dér. : servage, clusivement médical jusqu’au xvi® s. Em-
x11° ; asservir, id., asservissement, 1443. pr. du lat. médical syringa « seringue à
SERFOUIR. Terme d'agriculture. Or- injections », tiré de l’acc. du mot grec
thographe arbitraire au lieu de cerfouir, syrinx « roseau, flûte ». — Dér. : seringuer,
lat. pop. *circumfodire, lat. class. circum- 1547 (au part. passé -é).
fodere, déjà usité comme terme d’agricul-
SERMENT. D'abord sagrament, 842
ture « entourer d’un fossé des arbres ». —
Dér. : serfouette, 1534 (Rab., cer-); ser- (Sermenis de Strasbourg), puis sairement,
fouissage, 1812 ; d’abord serfouage, fin xvi°. serement, enfin serment au xve s. Lat. sa-
crämentum (de sacrare « rendre sacré »),
SERGE. D'abord sarge, encore usité au d’abord terme jurid., désignant « un dépôt
XviIe s., d’où serge, depuis le xvie s. Lat. soumis aux dieux en garantie de sa bonne
pop. *sarica, altération mal expliquée de foi, etc. », puis « serment militaire », enfin
sérica, fém. pris substantiv. de l’adj. séricus « serment (en général) » (au lieu du lat.
« de soie » (du grec sérikos, de sér « ver à class. jusjurandum) ; cf. aussi sacrement.
soie », de Séres « Sères (peuple de l’Asie) »). Rare en dehors du gallo-roman : a. pr. sa-
* Sarica est à la base des principales langues gramen. — Dér. : assermenté, x11°.
romanes : roumain saricä « bure », esp. SERMON, x°e (Saint Léger). Empr. du
a. pr. sarga « serge » ; l’it. sargia vient du lat. sermo, propr. « conversation », qui a pris
fr. — Dér. : sergé, 1820. en lat. eccl. le sens de « discours prononcé
SERGENT. Lat. servienitem, acc. de ser- en chaire », cf. it. sermone, esp. sermôn.
viens, part. prés. de seruire au sens d’ « être Le sens familier qu'a sermon aujourd’hui
au service ». À souvent au moyen âge le doit venir des dér. sermonner, xII°, ser-
sens de « serviteur »; a été pris ensuite monneur, x111e, d’abord « faire un sermon »,
pour désigner des hommes d’armes ou des « celui qui fait un sermon », mais pris dans
officiers de justice aux attributions diver- un sens fam. dès le moyen âge. — Dér. :
ses ; au xviie s. désigne « celui qui met les sermonnaire, 1584.
SÉRO- D88

SÉRO-, SÉROSITÉ, v. serum. rure, vers 1100, d’où serrurier, 1237, ser-
SERPE. D'abord sarpe ; serpe date de rurerie, 1304 ; desserrer, x11° s. ; au moyen
1380. Lat. pop. *sarpa, tiré du verbe sar- âge signifie aussi « lancer, laisser partir »,
pere « tailler, émonder ». Cf. a. pr. sarpa, etc. ; d’où desserre, dans dur à la desserre,
sarde sarpa. — Dér. : serpette, xIve. xv°, d’après l'emploi de desserre « détente »
en parlant d’une arbalète, vers 1500;
SERPENT. Parfois fém. en a. fr., qui enserrer, xI1° ; resserrer, 1287, d’où resserre
dit aussi serpenie. Lat. serpentem, acc. de vers 1850, resserrement, 1550 ; nombreux
serpens, des deux genres, littéral. « le ram- composés avec serre Comme premier élé-
pant »; le mot anc. était anguis, des deux ment, p. ex. : serre-file, 1680; serre-frein,
genres, qui a laissé peu de traces ; serpens 1872 ; serre-nez, 1872; serre-tête, 1573.
a été créé par euphémisme pour éviter de
prononcer le nom d’un animal malfaisant ; SERTIR. Au moyen âge sartir « ajuster,
la même substitution de « rampant » se joindre (avec des coutures) », en parlant
trouve dans plusieurs langues indo-euro- d’armes, cf. aussi dessartir, usuel du xrre
péennes. Serpens est conservé partout, au xIvV° 6. au sens de « défaire, mettre en
mais les formes d’une grande partie du pièces » ; d’où sertir, xIV® ; pour le change-
roman viennent du lat. pop. *serpem (le ment d’a en e, qui ne devient fréquent que
nominatif serps est attesté à basse ép.) : vers le xvies., cf. serge. Lat. pop. *sartire,
it. serpe, esp. sierpe, a. pr. serp. À serpentem dér. de sartus, part. passé de sarcire « rac-
se rattachent serpent des parlers septen- commoder, mettre en bon état ». Seule-
trionaux, l’it. serpente, l'esp. serpiente, l’a. ment fr.; mais cf. esp. saria « série de
pr. serpen (rare aujourd’hui). — Dér. : ser- choses enfilées, chapelet, collier, etc. » qui
penteau, x1I°; serpenter, XIVe. rappelle le lat. sertum pour le sens. — Dér. :
sertissage, 1872 ; sertisseur, 1847 ; sertis-
SERPENTAIRE, sorte de plante, x111° ; sure, 1328 ; dessertir, 1798.
sorte d'oiseau de proie, 1842 ; serpentin,
XII°, au moyen âge surtout adj., au xve SÉRUM, xvi° (Paré). Empr. du lat.
et au xvi® s. une sorte de bouche à feu; serum, propr. « petit-lait » ; a reçu des sens
en outre sens divers : au fém., sorte de nouveaux au xIXx° s. dans la langue de la
pierre précieuse, xve, etc. Le premier est physiologie et de la thérapeutique. —
empr. du lat. serpentaria, ainsi dit à cause Dér. : séreux, id., d’où sérosité, 1550. En
de la forme de la plante, le deuxième du outre séro- dans des comp. sav. de date
lat. des naturalistes (falco) serpentarius, récente tels que sérothérapie.
Linné, le troisième du lat. serpentinus. SERVAL, xvire (Buffon). Empr. du
SERPILLIÈRE, xr1° (or et argent ei rice port. cerval « cervier » ou de l’esp. (gato)
sarpillière) ; pour le flottement de la cerval « id. », dér. du mot qui désigne le
voyelle de la syllabe initiale, v. serge, cerf, v. cerf.
serpe. Désigne aussi au moyen âge une
SERVICE, xi° (Alexis), sous la forme
étoffe de laine où une saie; depuis sert à
désigner de la toile d'emballage, cf. aussi servise, usuelle jusqu’au xir1e s. Empr. du
lat. servitium « état d’esclave, servitude »,
a. pr. serpeliera (sar-) qui a ce dernier sens,
cat. sarpillera « id. », d’où esp. (h)arpillera. qui a pris en lat. médiéval à la fois un sens
jurid. « devoirs du vassal envers son suze-
Le mot, désignant une étoffe, a pu circuler
et changer de sens ; mais le premier sens rain » et un sens religieux; en outre sens
nouveaux en relation avec servir, surtout
est mal établi, et par suite l’origine du mot à partir du xIv® s., « ce qu'on sert sur la
est incertaine. Le lat. a scirpiculus « de table », etc.
jonc », d’où « nasse, panier » (de scirpus,
sirpus « jonc »). En lat. pop. *sirpicularia SERVILE, xive (Bersuire). Empr. du
au sens de « étoffe faite avec un tissu ana- lat. servilis « d’esclave », qui s'employait
logue à du jonc » est possible ; à l'appui également au sens fig., v. serf. — Dér. :
on peut citer l'esp. herpil « sorte de sac servilité, 1542 ; rare avant la deuxième
grossier » qui rappelle le lat. scirpiculus, moitié du xvrrIe 8.
avec substitution de suff.
SERVIR. Lat. servtre « être esclave » (de
SERPOLET, début xvie. Empr. du prov. servus, v. serf), d’où « être assujetti à.
serpolet, dér. de serpol, lat. serpullum, d'où obéir à, avoir égard à, etc. »; dès le lat,
aussi port. serpäo, roum. särpunel. V. aussi class. servire s'emploie avec un sujet de
pouliot. chose au sens d’ « être utile à ». Les sens
du verbe se sont développés en relation
SERRER. Lat. pop. *serrare, altération avec service. Servir au sens d’« être es-
du lat. de basse ép. serre « fermer avec clave », au xviie s., chez Corneille et Ra-
une barre (sera en lat. class.) » peut-être cine, est un latinisme. It. servire, esp. ser-
par croisement avec ferrum « fer » ; v. scier. vir ; les emplois en sont, dans les deux
It. serrare, esp. cerrar. En fr. et dans les langues, assez différents de ceux du fr. —
parlers gallo-romans le sens de « tenir Dér. : servant, xni°, d’où servante, 1514,
fermé » existe encore, mais celui de « tenir au sens moderne, cf. « La chambriere estoit
à l’étroit, étreindre, presser » est devenu destinee pour servir sa maistresse en la
dominant. — Dér. et Comp. : serre, xr1°; chambre ; maintenant les damoiselles pren-
au moyen âge a des sens aujourd’hui dis- droient a honte d’appeller celles qui les
parus : « serrure, prison, mors, etc. ». Au servent chambrieres, ains les appellent ser-
sens de « serre (des oiseaux de proie) », vantes, mot beaucoup plus vil que l’autre,
1549 ; au sens d’ « endroit où l’on garde que l’on approprie à celles qui servent à
des plantes », xvire ; serrement, 1510 ; ser- la cuisine », Pasquier ; serveur, 1829 ; ser-
39
Qt SEYANT

viable, x11°, réfection d’après amiable de SEUIL. En anc. fr. sueil, soil, dont la
serviçable, usuel au moyen âge ; serviette, consonne finale était certainement mouillée.
1393, cf. pour une formation analogue ou- Du lat. solea « plante des pieds, sandale »,
bliette et essuelle « serviette », xve ; assielte à basse époque « plancher », influencé pour
n'avait pas alors le sens de « pièce de vais- le genre et le sens par solum « sol ».
selle » et ne pouvait donc pas servir de
modèle ; servielle a remplacé touaille, xtre°, SEUL. Lat. sôlus. Les parlers de l'Est
« serviette, nappe », encore dans les dict., préfèrent aujourd’hui un tour formé de
du germ. occidental *pwahlja, cf. aussi tout par suivi d’un pron. pers. pour rendre
a. pr. {oalha, it. tovaglia ; l'angl. towel du seul en fonction de prédicat, p. ex. je suis
fr. ; desservir, « enlever ce qui a été servi lout par moi. La locution à seule fin est une
sur la table », 1393, d’où dessert, 1539, qui altération récente d’à celle fin, xv° s. —
a signifié aussi « action de desservir » ; on Dér. : seulet, vers 1200 ; souleur, « frayeur
a dit aussi desserle au sens moderne de subite », x111° ; aujourd'hui arch. ; esseulé,
dessert (antér. « ce qu’on dessert », 1393, vers 1200 ; aujourd’hui arch.
dans le Ménagier) ; desserte, sorte de meu- SÈVE. Lat. sapa, attesté seulement au
ble, fin xIxe ; suggéré par le préc. ; desser- sens de « vin cuit » ; devait signifier propr.
vir, « rendre un mauvais service », XVII® S. « SuC », cf. sapor chez Pline, au sens de
(on trouve déjà desservice au xvI® s.) ; ce « jus ». It. sapa.
sens s’est développé quand desservir « mé-
riter » a disparu ; resservir, XIII S. SÉVÈRE, x11°; rare avant le xvie s.;
sévérité, id. Empr. du lat. severus, severitas.
SERVITEUR, x1ie (Alexis). Empr. du Sévère a pris le sens de « grave » (en par-
lat. de basse ép. servitor. lant de perte, d'échec) de l’angl. severe dont
SERVITUDE, xrnes. (Rose) ; parfois au ce sens a été répandu par les communiqués
sens de « service » au xvi® s. Empr. du lat. de la guerre de 1914-18.
serviludo (moins class. que servitus, -lulis) SÉVIR, 1583; sévices, terme de palais,
pour servir de nom abstrait à servir dont 1399 ; rare avant le xviie s. Empr. du lat.
il a suivi le sens. Le moyen âge dit surtout sævire « être furieux », d’où « commettre
servitule, calqué sur servitus, -lutis, et des cruautés », sævitia « violence, cruauté »
quelquefois servilune d’après servitudinem, (de sævus « furieux, violent »).
accusatif de servitudo.
SEVRER. Signifie propr. « séparer »,
SÉSAME, vers 1500. Empr. du lat. sesa- sens usuel au moyen âge ; le sens spécial
mum (du grec sésamon). qu'a pris sevrer apparaît au XIII S., V.
SÉSÉLI, nom de plante, 1545. Empr. trier, et explique en partie l'emprunt de
du lat. seseli (pris au grec). séparer. Lat. pop. seperäre, attesté à basse
ép., lat. class. séparare. L’it. scev(e )rare et
SESQUI-. Premier élément de mots sav., l’a. pr. sebrar ne connaissent pas le sens
tels que sesquioxyde, 1829, tiré du lat. de « sevrer » qui est propre au français.
sesqui, surtout préf. signifiant « une fois — Dér. : sevrage, 1741 ; sevreuse, id.
et demie », ou de mots empr., tels que ses-
quialtère, 1377, lat. sesquialter. SEXAGÉNAIRE, vers 1425. Empr. du
lat. sexagenarius (de sexageni « soixante »).
SESSION, terme politique, 1657 (dans
un ouvrage traitant de l’Angleterre) ; ap- SEXAGÉSIMAL, 1724. Dér. sav. du lat.
pliqué à des assemblées françaises au . Sexagesimus « soixantième ».
Xvi11€ s., puis à des tribunaux non perma-
nents (cour d’assises), au xix°. Empr. de SEXAGÉSIME, vers 1380. Empr. du lat.
l’angl. session (du lat. sessio au sens de eccl. sexagesima(dies) « le soixantième
« séance ») ; a triomphé de séance, encore jour ».
préconisé par Féraud, en 1787; s’em- SEX-APPEAL, 1932, de l’angl., propr.
ployait antérieurement, au xviie s., au « attrait du sexe ».
sens de « séance de concile » d’après le lat.
eccl. du moyen âge sessio ; a été parfois SEXE, xri°; rare avant le xvI® &s.;
pris du x11e au xvie s. (Amyot) au sens de sexuel, 1742. Empr. des mots lat. sexus,
« fait d’être assis » d’après le sens propre sexualis (créé à basse ép.). — Dér. de
du mot lat. sexuel : sexualité, 1859.
SETIER, anc. mesure pour les grains SEXTANT, terme technique, 1666. Em-
(encore chez Voltaire) ou pour les liquides ; pr. du lat. scientifique sextans que l’astro-
ne s'emploie plus que comme mesure pour nome danois du xvi® s. Tycho Brahé, a
le vin, principalement dans le composé tiré du lat. anc. sexlans « sixième partie »
demi-selier. Lat. sexlarius « sixième », à la pour désigner l'instrument dit sextani,
fois mesure de liquides et de solides. It. parce que la partie principale est un limbe
slaio. gradué d’un sixième de circonférence. Re-
pris au lat., au xvies., dans un autre sens.
SÉTON, 1503. Terme médical. Empr. du
latin médiéval des médecins selo, latini- SEXTUOR, 1842. Fait avec le lat. sex
sation de l’a. pr. sedon, id., dér. de seda «six » sur le modèle de quatuor.
« soie », v. soie ; propr. « fil de soie de-porc
ou de crin »; a été dit, par suite, de mèches SEXTUPLE, 1450. Empr. du lat. de
de coton qu’on utilise dans la médecine. basse ép. sexiuplus. — Dér. : sextupler,
vers 1750 (une 1re fois en 1493).
SETTER, 1866. Empr. de l’angl. setler
« chien qui arrête le gibier ». SEYANT, v. seoir.
SHAKE-HAND 290

SHAKE-HAND, 1842 (Sue), une 1re fois SI, adv. Usuel au moyen âge en tête de
dans les mémoires de Casanova (vers 1798). propositions au sens d’ « ainsi, pourtant,
Formation nominale tirée de la locution etc. »; l’est encore notamment en wallon.
verbale angl. io shake hand ; le véritable Aujourd’hui particule d’affirmation adver-
comp. angl. équivalent au sens fr. est hand- sative ; cf. si fait, aujourd’hui vieilli, et au
shake. sens de « tellement » devant un adj. ou un
SHAKER, sorte d'appareil pour prépa- adv., etc. Lat. sic « ainsi », également em-
rer les boissons, 1895. Empr. de l’angl. ployé au sens de « tellement » et pour l’af-
shaker (de to shake « secouer »). firmation. Si en it. et en esp., sim en port.
ont donné la particule d’affirmation signi-
SHAKO, v. schako. fiant « oui ». — Comp. : aussi, xrre: le
SHALL, v. châle. premier élément est l’anc. pron. al (el)
« autre chose », lat. pop. Yale, réfection de
SHAMPOOING, 1877. Empr. de l’angl. alid, forme autre de aliud; l’a. fr. altresi
shampooing, dér. de io shampoo « faire un « également », qui a disparu devant aussi,
shampooing », empr. lui-même de l’hin- paraît avoir été d’abord plus usuel ; on ne
doustani champô, qui désigne une sorte de trouve le même comp. que dans le rhéto-
massage des muscles dont les voyageurs roman aschi, ousché. V. ainsi.
ont souvent parlé depuis 1616.
SI, septième note de la gamme, v. gamme.
SHERIFF, 1688 (chérif, 1601). Mot angl.
qui ne s'emploie qu’à propos des institu- SIAMOISE. Étoffe introduite en France
tions anglaises. par les ambassadeurs du roi de Siam en-
SHERRY, 1786 (dans un ouvrage trai- voyés auprès de Louis XIV en 1688.
tant de l'Angleterre). Empr. de l’angl. SIBYLLE, 1213 (sous la forme Sebile),
sherry, propr. « Xérès (ville d’Espagne) ». comme terme d'’antiquité; employé au
Sherry-cobbler, 1859, contient un deuxième sens fig. et souvent avec une valeur péjor.
élément d’origine inconnue. dès le xve s. ; sibyllin, xive (Bersuire), au
SHILLING, monnaie angl., 1656; d’a- sens ancien. Empr. du lat. sibylla (mot pris
bord chelin, 1558. Mot angl. au grec), sibyllinus.
SHIMMY, 1920. Empr. de l'anglais SICAIRE, vers 1300. Empr. du lat. sica-
d'Amérique shimmy. rius (de sica « poignard »).
SHIRTING, 1855. Empr. de l’angl. shir- SICCATIF, 1723 ; une première fois en
ling, littéral. « toile pour chemise », dér. 1495 (seccilif). Empr. du lat. médical
de shirt « chemise ». siccalivus (de siccare « sécher »).
SHOCKING, 1842 (Balzac). Empr. de SICLE, terme d'’antiquité juive, xrre.
l’angl. shocking (de lo shock « choquer », Empr. du lat. eccl. siclus, qui vient lui-
probabl. d’origine fr.). même, par l'intermédiaire du grec ecel.
siklos, de l’hébreu chegel «monnaie d'argent
SHOOT, terme de sport, 1904. Empr. de ou d’or », proprement « poids », cf. Lévi-
l’angl. shoot, tiré du verbe to shoot « lan- lique, XXVII, 3, etc.
cer ». — Dér. : shooter, 1905.
SIDE-CAR, 1923. Empr. de l’angl.
SHRAPNEL, 1860; antér., en 1827, en
parlant de l'artillerie anglaise et dans une side-car « véhicule accouplé à une moto-
locution angl. Empr. de l’angl. shrapnel, cyclette ».
tiré du nom de l'inventeur, le général SIDÉRAL, 1520. Empr. du lat. sideralis
Shrapnell (1761-1842) ; parfois écrit schrap- (de sidus, sideris, « astre »).
nell, d’après l'orthographe all. Littré signale
que ces obus furent employés pour la pre- SIDÉRÉ, 1842. Terme de médecine, qui
mière fois au siège de Dunkerque en 1795. s’emploie déjà dans un sens plus étendu;
usité aussi comme verbe, mais seulement
SI, conjonction. Lat. st, qui s’employait aux temps comp. Empr., en vue d’un sens
aussi comme particule d'interrogation in- spécial, du lat. de basse ép. sideratus « frap-
directe. En a. fr. et jusqu’au xvre s., la pé d’apoplexie, paralysé », de siderari « être
forme prépondérante est se, s’ devant atteint d’une influence maligne des as-
voyelle, d'où encore aujourd’hui s'il, s’ils. tres » ; la médecine et l’astrologie ont em-
Si apparaît cependant de bonne heure, ployé aussi sidération, 1611, empr. du lat.
dans les Sermenis de Strasbourg où c’est sideralio.
peut-être un latinisme ; c’est la seule forme
en anglo-normand et dans plusieurs régions SIDI, fin xixe. Terme pop. servant à
de l'Ouest. La forme se représente un lat. désigner les soldats ou les manœuvres ori-
pop. se, attesté au vie s.; on l'explique ginaires de l'Afrique du Nord. Empr. de
comme une altération de si d’après quid l'arabe sidi « mon seigneur », terme que
qui a été employé à basse ép. comme les indigènes emploient en se parlant entre
conjonction, cf. à l’appui sed « si » dans eux et que les Européens, par ignorance
Saint Alexis. Conservé partout suivant les de la valeur du terme, ont compris comme
deux formes s£ et se : it. se, esp. si, a. pr. si équivalent de notre monsieur.
et se. Sé est encore usuel dans quelques SIÈCLE, xrrre. Autres formes du haut
patois de l'Est et dans le Midi, — Comp. : moyen âge : seule, siegle, secle. Empr.
sinon, xve (Commynes) ; au moyen âge on du
lat. sæculum. A pris aussi le sens de « vie
trouve ordinairement se non avec un ou mondaine », opposé à vie religieuse (cf.
plusieurs mots intercalés. seule dans Sainie Eulalie), d’après le lat.
591 SIGNER

eccl., v. séculier. À eu aussi au moyen âge sifflet, vers 1250, en outre siblel, xrrie
les sens disparus aujourd’hui de « époque Joinville) ; siffleur, 1537 ; persifler, 1762
présente, ensemble des hommes ». J.-J. Rousseau), d’où persiflage, 1735,
SIÈGE. Il est difficile de reconnaître persifleur, 1762.
quel est le premier des deux sens : « lieu SIGILLÉ, 1565. Dér. sav. du lat. sigillum
où l’on s'établit », « place où l’on s’assied », « sceau ». Empr. du lat. sigillatus « orné
attesté tous deux dans la Chanson de Ro- de figurines, brodé » en vue d’un autre
land ; en tout cas chacun d’eux a donné sens.
naissance à de nouveaux sens. Lat. pop. SIGISBÉE, 1764 (Voltaire). Empr. de
*sedicum, qui suppose un verbe disparu lit. cicisbeo, d’origine obscure, cf. à côté
*sedicäre, dér. de sedère « être assis », d’où le verbe cicisbeare « faire la cour à une
aussi a. pr. selge ; on ne peut pas recon-
naître ce verbe dans siéger, relevé seule-
dame »; on a proposé d'y voir un mot
d’origine expressive, ayant signifié d’abord
ment en 1611 ou dans l’a. pr. seigar qui «chuchoter » comme bisbigliare ; on signale
ne signifie qu’ « assiéger », par conséquent à l'appui le vénitien cici qui désignait au
tous deux dérivés du subst. Siège, au sens xvII1e s. le babil des femmes.
militaire, est lui-même fort ancien, cf. pour
le développement du sens : « Si vous dirons SIGLE, terme didactique, 1712. Empr.
dou roi qui tenoit son siege davant Da- du lat. des juristes sigla, plur. neutre,
miette », xrrie, et le dér. assiéger, déjà at- « signes abréviatifs ».
testé dans la Chanson de Roland (asseger
refait en assiéger à la fin du moyen âge; SIGNAL, vers 1200. Réfection d'après
a souvent aussi les sens d’ « asseoir, éta-
signe, de l’a. fr. seignal, dont le plur. sei-
blir »). On n’a pas le moyen de prouver gnaulx est encore attesté au xv° s., lat.
qu'on aurait affaire ici à deux verbes diffé- pop. signäle, neutre pris substantiv. de
rents et qu'on doive admettre un type l'adj. signälis « de signe », d’où aussi it.
segnale, esp. señal.
*assedicäre pour assiéger « au sens d’ « as-
seoir », d’où le fr. aurait tiré siège dans les SIGNALER, xvie, dans se signaler. Tiré
deux premiers sens donnés plus haut, tan- de signalé (d’abord segnalé, refait sur si-
dis qu'assiéger au sens militaire représen- gnal), qui ne s’employait qu’en parlant des
terait un *obstdiare (de obsidium « siège »), personnes, au sens de « remarquable »,
altéré ensuite d’après *assedicäre. De toute d’après le premier texte où le mot appa-
façon les formes romanes sont difficiles : raisse : « Gentilshommes segnalez », 1578
l’it. assediare et l'esp. asediar « assiéger » (H. Estienne); au xvii® s. signaler ne
ne sont guère explicables autrement que signifie encore que « rendre remarquable » ;
si on les considère comme empr. du lat. aux sens d’ «indiquer par un signal, indiquer
médiéval assediare (attesté surtout dans à l'attention » dus à l'influence de signal,
des textes d'Italie), calqué lui-même sur le 1680. Segnalé est empr. de l’it. segnalato,
fr. asseger, et les mots de l’esp. sifiar « as- part. passé de segnalare, qui ne signifie que
siéger », silio « siège » ne sont eux-mêmes «rendre illustre », dér. de segnale. — Dér. :
explicables que comme des empr. au prov. signalement, 1718 ; -létique, 1836 ; -lisation,
seliar, seti (cf. aussi asseliar « assiéger »), vers 1920 ; signaleur, 1890.
dont le traitement a été influencé par asse-
tar « asseoir ». Si ces formes ont ainsi cir- SIGNE, x11e. La prononciation sine est
culé, c’est que nous avons affaire à des attestée au xvie et au xviie s. Empr. du
termes militaires, qui sont fréquemment lat. signum ; a refoulé la forme pop. sein(g)
-qui, , bien qu'usuelle au moyen âge, , a même
empruntés. ns
alors des sens moins étendus que signe.
SIEN, v. mon. Signe de croix est un calque du lat. ecel.
SIESTE, 1715 (Lesage). Empr. de l'esp. signum crucis. Sous le signe de.…, lo-
siesla, lat. sexta (hora) « la sixième heure », cution récente qui a eu un certain succès
c’est-à-dire, d’après la manière de compter dans la langue littéraire, est une extension
les heures des Romains, « midi ». Mme de de la locution sous le signe de la croix. —
Sévigné emploie encore la forme esp. Dér. : signet, vers 1300 (écrit sinet) au sens
d’ « anneau servant de seing »; sens mo-
SIFFLER, Lat. sifilare, autre forme du derne, xviie (Mme de Sévigné).
lat. class. sibilare attestée dès le 1ve s.
-b- a peut-être été remplacé par -f- parce SIGNER, x1v°, encore prononcé siner au
que cette consonne évoque mieux un xvI1® s.; d’abord seign(i)er, vers 1080;
bruit de sifflement. Sauf dans les parlers Rabelais, I, 25, dit encore se seigner « faire
de l'Est qui disent flûler, le verbe lat. est le signe de croix »; refait sur signe. Avait
conservé presque partout. Siffler (souvent au moyen âge le sens général de « marquer
avec la voyelle ü) est le type des parlers d’un signe », d'où s’est développé le sens
septentrionaux ; l’a. pr. siular, siblar (d’où de « mettre la signature » ; celui de « faire
les formes modernes) continue le lat. class. le signée de croix » apparaît dès la Chanson
sibiläre; cf. aussi dans l'Ouest sibler, de Roland. Seignier représente le lat.
subler et esp. silbar, à côté de chiflar ; l’it. signäre « mettre un signe » (de signum) ;
zufolare continue un lat. pop. *süfiläre. aussi it. segnare « marquer, mettre sa si-
Ces variations qui remontent en partie gnature, faire le signe de croix », esp. arch.
au lat. sont dues au caractère expressif « faire des signes ». — Dér. : signataire,
du mot que les langues ont cherché à 1789 ; signature, 1430. — Comp. : contre-
‘ marquer par des modifications phonétiques. signer, 1415 ; soussigner, 1507 (au part.
— Dér. et Comp. : sifflement, xive (E. Des- passé), sur le modèle du lat. subsignare
champs), d’abord ciflement, vers 1180; (soubsigner en 1274).
SIGNIFIER 592

SIGNIFIER, 1119; significatif, vers SILO, 1829. Empr. de l'esp. silo, lat. strus
1480 ; signification, vers 1120. Empr. des (du grec siros). — Comp. : ensiler, 1873.
mots lat. significare, -alivus (créé à basse
ép.), -alio. — Dér. : insignifiant, 1778, SILURE, poisson, 1558. Empr. du lat.
d’après signifiant, 1553, aujourd’hui hors silurus (du grec silouros).
d'usage, mais encore usité à la fin du SILURIEN, terme de géologie, 1839.
XVIIIe s. (Mme de Staël) ; d’où insignifiance, Empr. de l’angl. silurian, mot créé en 1835
1785. par Murchison sur le lat. Silures, nom des
SILENCE, vers 1190 ; silencieux, 1524. anciens habitants du Shropshire, région du
Empr. du lat. silentium, silentiosus (de Pays de Galles où il a étudié la nature des
silere « rester silencieux »). terrains siluriens.
SILVAIN, SILVESTRE, v. sylvain, etc.
SILÈNE, nom de plante, 1765. Empr. du
lat. des botanistes silene (inflata), tiré du SIMAGRÉE, xrr1e. L’explication d’après
nom du dieu romain Silenus. laquelle simagrée serait issu de l’expression
si m'agrée « ainsi cela m'agrée » est plus
SILEX, 1556. Empr. du lat. silex « toute ingénieuse que vraisemblable ; on ne donne
pierre dure, silex ». — Dér. : silicate, 1818. pas d'exemple ancien de cette formule dont
SILHOUETTE, 1801. Tiré de la locution on ne voit guère l'emploi ; donne-moi boire,
à la silhouelle, créée par dérision en 1759 si l’agrée, dernier vers du fabliau du Povre
avec le nom du contrôleur général E. de Mercier, n’en est pas une justification
Silhoueite, dont l’arrivée aux affaires (le suffisante. On propose aussi un comp. de
4 mars 1759) avait fait sensation, mais qui sime a groe « singe avec des griffes », qui
devint rapidement impopulaire (il tomba se serait formé dans le Hainaut (aussi
le 21 novembre 1759), cf. « Nous avions simagraw en Wallon et chimagrue dans
un contrôleur général que nous ne connais- Molinet) ; ce serait une ancienne dénomi-
sions que pour avoir traduit en prose quel- nation du diable ; mais le flottement de la
ques vers de Pope. Il passait pour un aigle, voyelle de la 2e partie du mot reste inex-
mais, en moins de quatre mois, l’aigle s’est pliqué.
changé en oison » (Voltaire). Par suite on SIMARRE, v. chamarrer.
appliqua la locution à la silhouette à des SIMIESQUE, 1846. Dér. sav. du lat.
objets intentionnellement mal faits, incom- simia « singe ».
plets, des tabatières en bois brut, des pro-
fils tracés au crayon sur le contour de SIMILAIRE, 1539; similitude, 1225:
l'ombre d’une figure ou découpés dans du signifie aussi parfois « comparaison ». Le
papier noir, collés ensuite sur un fond premier est un dér. sav. du lat. similis
blanc, qu’on appela poriraits à la silhouelle, «semblable », le deuxième est empr du lat.
d’où silhouettes. similitudo. On fait en outre des mots sav.
Comp. avec simili- comme premier élément,
SILICE, 1787 (G. de Morveau) ; siliceux, tiré du lat. similis, tels que similor, 1742,
1780; silicique, 1818 ; silicium, 1810. Dér. similibronze, 1877, d’où on a tiré un
sav. du lat. silex, silicis. à subst. simili, fin xrxe.
SILLAGE, 1574. Dér. de siller, d’abord SIMONIE, vers 1174 ; simoniaque, 1488.
seiller, attesté indirectement au xve s. par Empr. des mots du lat. eccl. du moyen âge
seillage « sillage », encore relevé en 1671. simonia, simoniacus, tirés du nom propre
Seiller se rattache à sillon. Les dict. enre- Simon (le Magicien), personnage qui
gistrent un verbe scier, 1611 (scier en ar- offrit de l’argent à Pierre et à Paul pour
rière), terme de marine signifiant « ramer recevoir d’eux le don de conférer le Saint-
à rebours pour revenir en arrière », aussi Esprit par l'imposition des mains, ef. Acies
it. sciare, siare, ziare, prov. sia, seia, d’ori- des Apôtres, VIII, 9-24.
gine obscure.
SIMOUN, 1791. Empr. de l'arabe sa-
SILLON. D'abord seillon, jusqu’à début moûm, Cf. aussi angl. simoom.
xviie, et attesté dès le xrr1 s., maïs rare SIMPLE, adj., vers 1138 ; simplicité, vers
avant le xvi® s. Seillon est encore très ré- 1120 ; simplifier, 1406. Empr. du lat. class.
pandu, surtout au sens de « bande de ter- simpleæ, propr. « formé d’un seul élément »,
rain, planche de labour ». A l’origine c’est d’où « pur, sans artifice, ingénu, etc. »,
la bande de terrain qui est laissée à un de simplicilas et du lat. médiéval simpli-
paysan dans la répartition de la terre licare, francisé comme les nombreux verbes
arable. Cette bande peut être plus ou en -ficare. — Dér. de simple : simple
moins large ; là où les champs sont labou- « plante médicinale », xve, tiré de simple
rés en entier, elle n’a plus que la largeur médecine, attesté dès le xrr1° s. qui s’op-
d’un sillon, et ce mot prend ainsi la signi- posait à médecine composée, en lat. médiéval
fication de «sillon ». C’est ainsi qu’il a rem- simplez medicina ; le masc. de simple est
placé dans certaines régions le mot raie. dû à médicament ; on trouve aussi en lat.
Sillon est un dér. très ancien d'un verbe, médiéval medicamentum
qui est attesté dans l’a. fr. silier « labourer » simplex: sim-
plesse, vers 1200, aujourd’hui archaïque,
et qui continue très probabl. un gaul. selj- littéraire ; simplet, xrre; simpliste,
« amasser la terre ». Ce radical vit aussi 1557;
rare avant le xixe s. De simplifier, sur le
dans le rhéto-roman saglia « bande étroite modèle des mots sav. en -fication, -ficateur :
au milieu d'un pré fauché sur laquelle on simplification, 1470 (D.), 1697 (Bossuet),
étend l’herbe du pré entier », parm. sia comme terme de mystique; sens plus
« espace entre les sillons ». — Dér. : sil- étendu, 1798. Simplificateur, x1x° (Sainte-
lonner, 1538 (sous la forme seilonner). Beuve).
293 SIROP

SIMULACRE, xviie, au sens moderne; SINGLETON, 1767. Empr. de l’angl. sin-


antér., depuis le xrre s., « statue, représen- gleton (relevé par accident seulement en
tation d’une divinité païenne » : encore au 1876), dér. de single « seul » (de l’a. fr.
début du xrx®s. « représentation, image ». sengle, lat. singulus, ou du mot lat. lui-
Empr. en tous ses sens du lat. simulacrum, même).
propr. « représentation figurée », d’où « si-
mulacre », cf. simulacrum pugnæ « simu- SINGULIER, d'abord singuler, xni°, puis
lacre de combat » (de simulare « reproduire, singulier, 1295, par substitution de suff.;
imiter »). au moyen âge terme grammatical ou adj.
signifiant « qui concerne un seul », p. ex.
SIMULER, 1375, avant le xIx® s. sur- dans combat singulier ; le sens de « qui se
tout au part. passé et comme terme jurid. ; distingue des autres », en bonne part appa-
simulation, vers 1270 (Rose). Empr. du raît au xIv® s., mais est devenu usuel seu-
lat. simulare au sens de « feindre », simu- lement au xvri® ; le sens péjor. apparaît
latio. — Dér. : simulateur, 1845, comme dès le xves., mais ne semble pas avoir été
terme de médecine mentale; déjà en usuel avant le xvirie; singularité, xrre.
1519 en un sens général, en 1274 au sens Empr. du lat. singularis, qui a les mêmes
de « contrefacteur ». sens sauf le sens péjor. et du dér. de basse
ép. singularitas qui signifie seulement «uni-
SIMULTANÉ, 1701. Empr. du lat. mé- té, le fait d’être seul ». — Dér. de singulier :
diéval simultaneus, dér. du lat. class. si- singulariser, 1555, d’après la forme du lat.
mullas « compétition », attesté seulement singularis.
au sens de « simulé », comme si cet adj.
venait de simulare ; pris d’abord, par les SINISTRE, adj., xi11° s. Empr. du lat.
Jésuites de Trévoux, au sens de « compéti- sinisier, propr. « qui est à gauche », d’où
tion », qui correspond au lat. simulias, « défavorable » ; ce sens a été donné aussi
mais influencé ensuite par le lat. simul vers le xve s. à la forme pop. senesire,
«ensemble », d’où le sens actuel dès 1740. — v. gauche.
Dér. : simultanéité, 1754. SINISTRE, subsi., 1485. Empr. de lit.
SINAPISER, 1503 ; sinapisme, 1572. Em- sinisiro qui est le même mot que le préc.
pr. du lat. médical sinapizare, sinapismus — Dér, : sinistré, 1870.
(du grec sinapizein, sinapismos, de sinapi, SINOPLE, terme de blason, xri° (sous
v. sanve). la forme sinopre). À désigné d’abord la
couleur rouge, puis, vers le xive s., la cou-
SINCÈRE, 1475 ; sincérité, x1r1e. Empr. leur verte par un changement de sens
du lat. sincerus, sinceritas. — Dér. : in-
sincère, 1794.
inexpliqué. Empr. du lat. sinopis « terre
de Sinope, sorte de terre rouge ».
SINCIPUT, 1538. Empr. du lat. sinciput,
propr. « la moitié de la tête », d’où « devant SINUEUX, 1539. Empr. du lat. sinuosus
de la tête ». — Dér. : sincipital, 1793, (de sinus « pli », v. sein). — Dér. : sinuosité,
d’après la forme du lat. sinciput, sincipilis. 1549, d’après la forme du mot lat. sinuosus.

SINÉCURE, 1715, dans un ouvrage trai- SINUS, terme d’anatomie, 1539. Empr.
tant de l’Angleterre ; depuis 1824, appliqué du lat. sinus, — Dér. : sinusite, fin xrxe.
à des usages fr. Empr. de l’angl. sine cura, SINUS, terme de géométrie, 1625. Empr.
puis sinecure, mot forgé vers 1662 sur le du lat. médiéval sinus, traduction de l’ara-
lat. sine cura « sans souci », d’abord en par- be djayb, proprement « ouverture (pecto-
lant de charges eccl. ; en ce sens chez Le- rale) d’un vêtement », qui s’employait en
sage, 1715 (Rem. sur l’ Angleterre) et sous géométrie pour désigner la demi-corde de
la forme lat. qu’employaient, dit-il, les doc- l'arc double (en ce sens probablement
teurs en théologie. empr. du sanscrit djiva « corde »). La tra-
duction par sinus serait donc le résultat
SINE DIE, 1890. Empr. du lat. sine die d’une confusion. — Comp. : cosinus, 1754.
« sans fixer le jour ».
SIPHON, 1611. Empr. du lat. siphon
SINE QUA NON, seulement dans la lo- (du grec siphôn). À eu aussile sens de
cution condilion sine qua non, 1777 (une « trombe » depuis le xrrre s.
première fois en 1565). Locution qui vient
du lat. des écoles, signifiant littéral. SIRE, v. seigneur.
« (condition) sans laquelle non », c’est-à- SIRÈNE, 1377. Du xr° au xvie s.
dire « sans laquelle il n’y a rien à faire ». sereine, forme populaire, qui a été rap-
SINGE. Lat. simius, plus rare que simia. prochée ensuite du lat. de basse ép. sirena,
It. scimmia. Payer en monnaie de singe en lat. class. siren (du grec seirén), v. serin.
apparaît en 1552 chez Rabelais ; on expli- SIROCCO, 1599; d’abord siroch, 1552
que cette locution comme étant une allu- (Rab.), ciroch, 1538 ; siroc est encore dans
sion à l’usage qu'’avaient les montreurs de le Dict. de l’Académie de 1835. Empr. de
singes de payer le péage en faisant gam- lit. scirocco, empr. lui-même de l'arabe
bader leurs singes, cf. à l’appui le texte charqt « (vent) oriental » par l’intermédiaire
de É. Boileau, xur1e 8. : « Si li singes est d’une forme vulgaire choroûq, dont la pre-
au joueur, jouer en doit devant le peagier mière voyelle a été dissimilée.
et pour son jeu doit estre quites. » — Dér. :
singer, 1770, d'où singeur, 1775 (Mirabeau); SIROP, 1181. Empr. du lat. de la méde-
singerie, vers 1350 ; singesse, vers 1180, cine médiévale sirupus, syrupus, empr. lui-
rare aujourd’hui. même de l’arabe chardb, proprement « bois-
DICT. ÉTYM. 38
SIROP 594

son » qui désignait dans la médecine arabe SLOGAN, 1907. Empr. de l’angl. slogan,
des sirops de toute sorte ; d’où aussi it. qui est à l’origine le cri de guerre d’une
sciroppo; l'esp. jarabe, jarope est un empr. tribu écossaise.
direct à l’arabe, comme l’a. pr. eissarop.
V. sorbet. — Dér. : siroter, 1680 (en 1620 SLOOP, v. chaloupe.
on a siroper au sens de « traiter par des SMALAH, 1843. Empr. de l’arabe algé-
sirops »), d’où siroteur, 1680 ; sirupeux, rien zméla (en arabe class. zamala) « réu-
1752, d’après sirupus. nion de tentes (cf. douar) qui suit un chef
SIS, v. seoir. ou sert de demeure à une colonne mili-
taire ». Le mot a été popularisé par la prise
SISTRE, 1527. Empr. du lat. sistrum de la smalah d’Abd-el-Kader en 1843, par
(du grec seistron). la cavalerie du duc d'Aumale ; le fameux
SITE, 1576 (A. du Cerceau). Terme d'art, tableau d’H. Vernet a été exécuté la même
empr. de l’it. sito, empr. lui-même du lat. année.
silus « situation ». SMOKING, 1890. Tiré de smoking-jacket,
SITUER, 1313. Empr. du lat. médiéval 1889, mot angl. qui signifie littéral. « ja-
siluare (de situs). — Dér. : situation, x1ve. quette que l’on endossait après dîner pour
fumer (lo smoke) ».
SIX. D'abord sis. Lat. sex. — Dér. :
sizain, ou sixain, 1299 (écrit sisain), au SNOB, 1857 (dans le titre Le livre des
sens de « sorte de petite monnaie » ; aujour- Snobs, traduction du roman de Thacke-
d’hui ne s’emploie guère que pour désigner ray). Le mot angl. snob a été pris par Tha-
une sorte de poème. Sixième, 1213 (sous ckeray dans son fameux roman, paru en
la forme seiximes). 1848, à l’argot des étudiants de Cambridge
qui désignaient par ce terme (qui signifiait
SIXTE, terme de musique, 1611, cf. aussi en angl. « homme de basse naissance
quarte. Tiré de l’a. fr. sixie, variante ortho- ou de basse condition », notamment « gar-
graphique (d’où est sortie, par suite, la çon cordonnier ») tous ceux qui ne faisaient
prononciation moderne) de sisle « sixiè- pas partie de l'Université ; snobisme, 1857,
me », francisation du lat. sextus d’après six, vient également du roman de Thackeray.
en a. fr. sis ; cet adj. ordinal sisie paraît — Dér. de snob : snobinette, 1898, avec la
avoir été peu pop. et avoir été employé terminaison de midineltle.
surtout dans la langue jurid.
SNOW-BOOT, 1892. Mot angl. signifiant
SKATING, 1876. Empr. de l’angl. ska- littéral. « bottine pour la neige ».
ting (de to skate « patiner »). On dit aussi
skating-ring, 1876 (écrit -rink). SOBRE, vers 1180 : sobriété, id. Empr.
SKETCH, 1903. Empr. de l’angl. skelch, du lat. sobrius, sobrielas.
propr. « esquisse, croquis », qui remonte
SOBRIQUET, xve (sous la forme sou-
lui-même, par l'intermédiaire du holl. briquet). Apparaît au x1Iv® s. au sens de
schels, à lit. schizzo, Vv. esquisse.
« coup sous le menton » ; le développement
SKI, 1841 (sous la forme skie). Empr. du sens est éclairci par la comparaison du
du norvégien ski, peut-être par l’intermé- prov. esqueissa «rompre la mâchoire », d'où
diaire de l’angl. ski (écrit aussi skie); « déchirer, écorner, etc. », et spécial. « don-
l’empr. a été fait d’après la forme écrite, ner un sobriquet », d'où le subst. verhal
ski se prononce chi en norvégien, en angl., escais « sobriquet »; mais l’origine de
en all. ; ie fr. a préféré prononcer d’après so(u)briquet est inconnue.
la graphie, surtout pour éviter les calem-
bours. Les Scandinaves doivent la con- SOC, xri°. Mot de la France septentrio-
naissance des skis aux Lapons ; les Fin- nale qui remonte à un gaul. *soccos ou
landaïs les ont connus déjà dans leur an- *succos (celui-ci influencé par le lat. soccus),
cien habitat primitif, l'Oural. L'invention qu’on restitue d’après l'irl. socc., gall. swch.
est due aux peuples sibériens. — Dér. :
skieur, 1905. SOCIABLE, 1552. Empr. du lat. socia-
bilis (de sociare « associer »). — Dér. :
SKIFF, 1851. Empr. de l’angl. skiff qui sociabilité, 1665 ; insociable, 1552 ; inso-
vient lui-même du fr. esquif. ciabilité, 1721 (Montesquieu).
SKUNKS, fin xixe. Empr. de l’angl. SOCIAL, 1680 (Bayle), dans l'expression
skunk qui vient lui-même de l’algonquin vie sociale, que Charron a déjà employée
du Canada ; la forme skunks est le plur. et qu’on trouve même au xive s.; n’est
qui a été pris tel quel dans des catalogues. devenu usuel qu'au cours du xviri® s., en
SLALOM, 1910. Empr. du norvégien partie sous l'influence du Contrat social de
slalom (de sla « incliné » et lim « trace de J.-J. Rousseau, 1761. Empr. du lat. socia-
ski »). lis « fait pour vivre en société » (de socius
« Compagnon »); socialis avait été aussi
SLANG, argot anglais, 1856. Mot angl. employé par les juristes Grotius et Puffen-
d’origine obscure. dorf dans l'expression jus nalurale sociale.
SLEEPING(-CAR), v. wagon. Social n’a le sens lat. d’ « allié » que dans
guerre sociale, désignant une guerre de
SLIP, 1885 (au sens de « laisse »), vers Rome contre ses alliés d'Italie. — Dér. :
1914 « cache-sexe ». Empr. de l’angl. slip, socialiser, 1786, dans un sens qui n’est pas
id. (propr. « petit morceau d'’étoffe », cf. le sens moderne ; socialisme, 1831 ; socia-
aussi le verbe fo slip « glisser, lâcher »). liste, 1830 (les deux formés dès 1822 en
595° SOLAIRE

anglais) ; socialistus existe déjà chez Gro- bombyx, sericum, v. serge. It. sela, esp.
tius, mais avec un autre sens, et socialista seda. Le sens de « poil de porc » explique
au xvVIIIE s. pour désigner les disciples de les expressions ironiques de marquis, et
l’école de ce juriste, socialiste en 1798 déjà, semblables, répandues dans les patois au
mais au sens de « adversaire de la révo- sens de « porc » ; elles datent d’une époque
lution ». où les vêtements de soie étaient réservés
à la noblesse. — Dér. : soierie, 1328;
SOCIÉTÉ, 1180. Empr. du lat. socielas soyeux, 1380.
(de socius « compagnon, associé ») « asso-
ciation », notamment « association com- SOIF. Altération de soi, lat. silim, acc.
merciale », d’où l'emploi de société pour de sitis. L’f est dû à l’analogie des mots du
désigner des compagnies religieuses, com- type de nois « neige » (cas sujet), noif (cas
merciales ou autres à partir du xvrIe s. régime). La forme en -f a triomphé parce
L’a. fr. avait une forme pop. soistié, usitée qu’elle avait plus de corps. It. sele, esp.
surtout avec la valeur jurid. de « mé- sed. — Dér. : assoiffé, fin xixe (en 1607
tayage » et dont dérive le verbe souater assoifué) ; soiïffer, 1808, d’où -eur, 1864,
en usage dans les parlers de l'Ouest et de -ard, 1844.
l'Yonne, au sens de « se prêter mutuelle-
ment les animaux de labour », etc. — Dér. : SOIGNER, xri, s'emploie jusqu'au
sociétaire, 1787 ; sociologie, créé en 1830
XvI® s. au sens de « avoir des soucis, être
par A. Comte, d’après des mots sav. tels préoccupé ». D'un francique “*sunnjôn
que géologie, etc., d’où sociologue, fin x1x®, « s'occuper de », comme l’a. fr. soigne
-gique, 1871. (s. f.) « souci » d’un francique *sunnja,
qu'on restitue d’après l’anc. saxon sunnea
SOCLE, 1639. Empr. de lit. zoccolo, « soin », Cf. besoin. L’anc. it. sogna, a. pr.
propr. « sabot », lat. socculus « sorte de sonh, sonha sont empr. du fr. — Dér. :
brodequin », v. le suiv. ; le z initial de l’it. soin, vers 1080 (Roland), subst. verbal;
vient de la rencontre de l’s initiale avec un soigneux, xII°.
mot se terminant par consonne. SOIR. Lat. sérô, adv. signifiant « tard »
SOCQUE, 1611, au sens de « chaussure (cf. dans la péninsule ibérique {arde « soir »,
de bois »; désignait principalement une lat. {ardë, adv. « lentement, tard »), d’où
sorte de sabots portés par des religieux. aussi a. pr. ser. Un fém. de basse ép. sera,
Empr. du pr. soca, fém. de soc « sabot », issu de l’adj. serus « tardif » survit dans
qui représente le lat. soccus « espèce de l’it. sera et l’a. pr. sera. — Dér. et Comp. :
soulier bas » ; aussi cat. Soc, esp. zueco. — serein, xr1e (sous la forme sierain), au sens
Dér. : socquette, sorte de chausson, vers de « soir, tombée de la nuit » ; le sens mo-
1930. Dér. hybride, tiré de l’angl. sock derne date du xvi® s. ; la forme médiévale
« bas », sur le modèle de chausselile. est serain, refaite au XVI® s. en serein
d’après l’adj. serein, cf. pour la formation
SODA, 1837. Abréviation de l’angl. soda- le port. seräo « veillée » ; du reste la confu-
waier, empr. en 1820, propr. « eau de sion avec l’adj. serein était imminente, cf.
soude ». l’a. pr. serena « fraîcheur du soir » et inver-
SODIUM, 1307 (Davy). Davy, qui dé- sement seran « serein (adj.) » ; soirée, 1564 ;
couvrit ce corps, en a tiré le nom de l’angl. l’a. fr. disait depuis le xIv® s. serée, encore
soda, empr. du lat. médiéval soda, v. soude. usité au xvi® s.; d’où soiriste, fin xIx°,
soireux, id. ; bonsoir, xve.
SODOMIE, 1370 (Oresme) ; sodomite, vers
1165. Le premier est dér. de Sodome, nom SOIXANTE. Réfection orthographique.
d’une ville de Palestine, où régnait la luxure, d’après le lat. sexaginta, de soissante. Lat,
cf. Genèse, XIII, 12, XVIII et XIX ,; le pop. sexzania (attesté au rve s.), lat. class.
deuxième est empr. du lat. eccl. sodomita. sexagintä. It. sessania, esp. sesenta. —
— Dér. : sodomiser, 1872 (déjà 1587). Comp. soixante-dix, 1276; a éliminé
l’anc. terme septante, encore en 1763 (Vol-
SŒUR. Lat. soror. L’a. fr. a eu aussi taire), réfection, d’après le latin, de setante,
une forme sorour, serour, etc., lat. sororem, lat. pop. *septantä, lat. class. septuaginla,
forme d’acc., qui a disparu de bonne heure d’où aussi it. sellanta, esp. selenta ; survit
devant sœur, cas sujet. Italie mérid. suoro, encore dans les îles normandes, et dans
it. sorella. — Dér. : sœurette, 1458 (pour l'Est depuis la Wallonie jusqu’à la Pro-
désigner des religieuses). vence mais est moins usité dans le Sud-
Ouest ; d’où soixante-dixième, id. — Dér. :
SOFA, 1560, au sens d’ « estrade élevée
soixantaine, 1399 ; soixantième, vers 1200.
couverte de coussins »; 1657 au sens mo-
derne. Empr. de l’arabe suffa « coussin », SOL, nom de monnaie, v. sou.
d’où « estrade à coussins », probabl. par SOL, « étendue sur laquelle reposent les
l'intermédiaire du turc sofa. corps à la surface de la terre », 1510. Empr.
SOFFITE, 1676, terme d'architecture. du lat. solum, v. seuil. — Comp. : sous-sol,
Empr. de l’it. soffitto, lat. pop. *su/ficlus, 1835.
lat. class. suffixus, part. passé pris de suf- SOL, note de la gamme, v. gamme.
{igere « suspendre » ; le fém. soffitla signifie
« mansarde, soupente ». ‘SOLACIER, v. soulager.
SOIE. Lat. pop. séia, lat. class. sæta SOLAIRE, vers 1120. Empr. du lat.
« poil rude », d’où « poil de porc » ; le sens solaris (de sol « soleil »). Désigne dans de
de « matière filée par le ver à soie » a dû nombreux parlers le vent du Sud-Est ou
se développer à basse ép. au détriment de du Sud, sens qui remonte au moyen âge.
SOLANÉES 96

SOLANÉES, 1787. Dér. sav. du lat. SOLE, « dessous du sabot du cheval,


solanum, enregistré aussi dans les diction- etc. », vers 1200, attesté alors indirecte-
naires, xXvI® (Paré), nom de la morelle. rent par le verbe dessoler « enlever la
semelle d’une chaussure ». Empr. du lat.
SOLDANELLE, nom de plante, xve. De solea, de même sens, propr. « sandale »,
l’a. pr. sollz « viande à la vinaigrette » plutôt que de l’a. pr. sola, lat. pop. *sola,
(empr. de l’a. fr. souz, qui est empr. lui- altération de solea d’après solum « sol »,
même de l’anc. haut-all. sulza, all. mod, d’où aussi esp. suela.
sülze), on a formé, probabl. dans la région
de Montpellier, un dér. *soldana pour dési- SOLE, terme de charpenterie, 1213. Ré-
gner la soldanelle, plante qui pousse sur les fection, d’après les dér. solin, solive, de
plages sablonneuses (appelée aussi chou de l’a. fr. suele, seule, encore usité dans des
mer) et qui est employée dans la médecine patois, lat. pop. “*sola, v. le préc. (solea
pour le sel qu’elle contient, d’où le dimin. désigne entre autres une sorte de plan-
soldanelle. Le nom n’a été étendu à la cher) ; l'esp. suela et l’a. pr. sola de même
plante alpestre qu'au x1Ix® s. origine désignent la pièce de charpenterie
appelée en fr. sablière. — Dér. : solin, 1348,
SOLDAT, 1475. Empr. de lit. soldato « intervalle entre les solives, les tuiles » ;
(de soldare « payer une solde »). À remplacé solive, vers 1180 ; avec un suff. rare, d’où
soudard, vers 1356 (de là parfois soldard soliveau, 1296 (sous la forme souliviau).
au XVI s. par croisement), réfection de
soudoier ; Soudard a pris dès lors une SOLE, terme d’agriculture, 1374. Emploi
valeur péjor. ; l’a. fr. soldier, xn1°, soldoier, fig. de seule, sole, terme de charpenterie,
soudoier (plus rarement soldeior, xxre), cf. l'emploi de planche dans la langue de
usité jusqu’au xv® s. (c’est de ce mot que l’agriculture. — Dér. et Comp. : assoler,
vient l’angl. soldier) avait été dér. de sold, 1374, d'où assolement, 1790; dessoler,
soud, forme qui a nécessairement précédé « faire un nouvel assolement », 1357, d’où
sou, d’où aussi a. fr. soudée «solde », v. solde, dessolement, 1700.
et soudoyer ; le fr. soldat s’est à son tour
répandu grâce à l'éclat des armées fran- SOLE, nom de poisson, xt11°. Empr. de
çaises au xvri® s., d'où all. Soldat, russe l’a. pr. sola, lat. pop. *sola, réfection de
soldat, etc. solea (v. sole du sabot), qui a servi à dési-
gner la sole à cause de la forme plate de
SOLDATESQUE. D'abord adj. « qui a ce poisson ; de là aussi esp. suela. It. soglia,
le caractère du soldat », 1580 (Montaigne), port. solha d’après le lat. class. solea.
qui a reçu un sens péjor. d’assez bonne
heure; pris comme subst. à partir du SOLÉCISME, 1488; une première fois
Xvire s., toujours au sens péjor. Empr. de au xiIr1e s. (Br. Latini, soloecisme). Empr.
lit. soldatesco « de soldat ». du lat. solæcismus (du grec soloikismos, de
Soloi (en lat. Soli) « Soles », nom d’une
SOLDE, « paie donnée aux gens de ville de Cilicie, colonie grecque, dont les
guerre », 1465. Empr. de l’it. soldo, propr. habitants passaient pour parler le grec
« pièce de monnaie », v. sou (soulde, 1430, incorrectement.
paraît être une francisation plus forte du
même mot it. d'après le verbe soudoier, SOLEIL. Lat. pop. *süliculus, élargisse-
v. soldat) ; devenu fém. à cause de sa forme, ment du lat. class. sol. Le traitement de o
Les expressions pejor. étre, se melire à la devant /, répandu dans les patois, est dû
solde ont été créées au x1x° s. — Dér. : sol- à l’hésitation entre o et ou, fréquent dans
der, « payer une solde », 1789. cette position. A. pr. solelh. Partout ail-
leurs lat. sl conservé : it. sole, esp. sol ;
SOLDER, d’abord « arrêter un compte », la. pr. lui-même a eu so! qui survit encore
1675, d’où « acquitter ce qui reste d’un dans l’extrême Sud-Ouest. L'’it. solecchio
compte », 1679, puis « vendre des marchan- « parasol » n’est pas exactement le même
dises au rabais », milieu du xix° s. Solde, mot. — Dér. : ensoleillé, 1867 ; on emploie
masc., « règlement d’un compte », 1675, aussi aujourd’hui le verbe -er.
d'où «ce qui reste à payer d’un compte »,
1748 (Montesquieu), SOLENNEL, vers 1200 (écrit solempnel) ;
« vente de mar- solenniser, 1309 ; solennité, 1120. Empr. des
chandises au rabais », milieu xixe. Empr. mots lat. sollemnis, sollemnizare (lat. eccl};
au premier sens de l’it. saldare, saldo sollemmnitas, écrits à basse ép. solennis,
(postverbal), et francisés en solder, solde solempnis, etc. Du x11e au xvres. quelque-
d’après le précédent ; ce croisement ap- fois aussi solene; le dér. en -el a été formé
paraît clairement dans l’emploi de solde pour faire passer l’adj. dans un important
au fém., notamment chez Quesnay ; mais groupe d’adj., tel que éternel. — Dér. du
le mot, plus techn. que solde, « paie », a
pu garder son genre étymologique. L'it. verbe : solennisation, 1396.
Saldare signifie propr. « souder », v. sou- SOLÉN(O)-. Premier élément de mots
der ; l’a vient de saldo « solide », altéré sav., tels que solénoïde, 1842, tiré du grec
lui-même par croisement avec valido (l’al- sôlên « canal, tuyau ».
tération date peut-être de l’époque lat.,
des formes avec a existant dans les dia- SOLFATARE, 1757. Tiré de Solfatare,
lectes|. Le sentiment de l’équivalence de nom d’un volcan éteint entre Pouzzoles et
J'it. saldare et du fr. souder s’est traduite Naples (de solfo « soufre »).
par la création de formes souder, soude, au ; SOLFÈGE, 1790. Embpr. de lit. solfeggio,
XVIIIE 8. — Dér. : soldeur, « marchand de tiré du verbe solfeggiare, dér. lui-même de
soldes », 1887. solfa « gamme », v. le suiv. et gamme,
297 SOMMAIRE

SOLFIER, xir1°. Dér. de solfa, formé aujourd’hui que celui de « prier instam-
des deux noms de note sol et fa, qui s’em- ment ». V. soucier. De même sollicitude
ployait au sens de « gamme » en lat. mé- signifie dans l’ancienne langue « souci,
diéval, d’où it. a. pr. solfa « gamme ». inquiétude » sans la nuance moderne. —
SOLIDAIRE, 1462. D'abord terme ju- Dér. du verbe : solliciteur, 1347, au sens
rid. signifiant « commun à plusieurs de de « celui qui prend soin des affaires »,
manière que chacun réponde du tout »; encore usité au xvirie s. dans l'expression
dér. de la locution du lat. jurid. in sollicileur de procès ; développement du
solidum « solidairement » (usuelle égale- sens moderne parallèle à celui du verbe.
ment dans le lat. jurid. du moyen âge), SOLO, 1703. Empr. de l’it. solo, propr.
propr. « pour le tout » (formé du neutre « seul ». — Dér. : soliste, 1836.
de l’adj. solidus), cf. in solidum deberi « être
dû en totalité ». A pris un sens plus étendu SOLSTICE, vers 1280 (J. de Meung) ;
au cours du xvirI® s. — Dér. du sens nou- rare avant le xvie. Empr. du lat. solstitium
veau : solidarité, 1765, d’abord au sens (de sol « soleil » et de stare « s'arrêter » ;
jurid., 1723; solidariser, 1842. au moment du solstice, le soleil paraît être
stationnaire pendant quelques jours).
SOLIDE, 1314 ; solidité, xvrre ; une pre-
mière fois au xiIve s. Empr. du lat. solidus SOLUBLE, 1690 ; une première fois au
« massif », d’où au sens moral, « ferme, xit1e $s. (J. de Meung), au sens de « qui
sûr », soliditas (de la famille d’un adj. sollus peut être détruit ». Empr., comme terme
« tout entier », comme sollemnis). Le sens didactique, du lat. de basse ép. solubilis
usité dans la langue de la géométrie, d’où (de solvere « dissoudre »); puis sens plus
on a tiré un subst., 1613, existe déjà en étendu en rapport avec solution. — Dér. :
lat. ancien (d’après le grec siereos). Au solubilité, 1753.
XVIIe s. solidité avait le sens jurid. de SOLUTION, xr1°. Empr. du lat. solutio
« responsabilité de l’un à défaut de l’autre » « action de délier, de dissoudre » (de sol-
(comme solidarité), d’après le lat. jurid. vere), d'où notamment « action de résoudre
soliditas. — Dér. de solide : solidifier, une difficulté ». Solulion (d’un problème,
xvit1e (Buffon) ; -fication,.1572, rare avant d’une difficulté) est déjà médiéval; l’ac-
le xix°s. ception chimique paraît dater du xvirre 8. ;
solution de continuité, proprement terme de
SOLILOQUE, vers 1600 (Fr. de Sales).
chirurgie, dès 1314. — Dér. : solutionner
Empr. du lat. de basse ép. soliloquium (de
(un problème), fin xixe.
solus « seul » et de loqui « parler »).
SOLIN, v. sole « poutre ». SOLVABLE, 1328; usité aussi du
XIVe au xVI® s. au sens de « payable » en
SOLIPÈDE, 1556. Empr. du lat. soli- parlant d’une rente, d’une dette, etc. Dér.
dipes, -pedis « au pied massif (dont la sav. du lat. solvere au sens de « payer ».
corne n’est pas tendue) » (de soidus) et — Dér. solvabilité, 1660 ; insolvable,
francisé en solipède par fausse étymologie, 1611, une fois en 1431 au sens de « non
le mot ayant été compris comme s’il était payable »), d’où insolvabilité, 1612.
comp. de solus « seul », c’est-à-dire comme
s’il signifiait « à une seule corne ». SOMBRE, 1433, attesté alors indirecte-
ment par l’adv. qui paraît être pris dans
SOLISTE, v. solo. un sens fig. : « Lequel nous rechut.. un peu
SOLITAIRE, vers 1155. Empr. du lat. plus sombrement »; cf. en outre sombre
solitarius (de solus « seul »). L’a. fr. a dit cop « meurtrissure », 1374, qui appartient
aussi jusqu’au xv® s. sollain, soulain, lat. au Nord-Est, et, dès 1260, essombre
pop. *solitanus (soliläneus est attesté à bas- « obscurité, lieu obscur », formé avec le
se ép.) (cf. aussi a. pr. soldan), et sollif, préf. es-. Très probabl. dér. d’un ancien
soutif, issu du préc. par substitution de suff., verbe *sombrer « faire de l’ombre », lat. de
d’après soulif « adroit, ingénieux », autre basse ép. subumbrare, comme l’esp. sombra
forme de soulil, lat. subtilis, v. subtil; il « ombre » est tiré du verbe sombrar, de
y avait un rapport de sens : une action même sens et de même origine. Comp.
adroite peut être une action secrète. encore l’a. pr. solombrar « mettre à l’om-
bre », issu du même verbe sous l'influence
SOLITUDE, 1213 ; rare avant le xvies. de sol « soleil ». — Dér. : sombrer, 1680.
Empr. du lat. solitudo (de solus « seul »). D'abord dans la locution sombrer sous
SOLIVE, v. sole « poutre ». voiles ; dès 1611 au sens de « assombrir ».
Le sens naval s'explique par le fait qu’un
SOLLICITER, 1332; sollicitation, 1404 ; bateau qui coule, disparaît comme une
sollicitude, vers 1265. Empr. du lat. sollici- ombre dans les ondes qui l’engloutissent.
lare, propr. « secouer violemment », d’où — Comp. : assombrir, xvirie (Mirabeau),
« inquiéter » puis « exciter, inviter », solli- une première fois en 1597.
cilatio « inquiétude, instigation », sollicitudo
« trouble moral ». Solliciler a signifié par- SOMBRERO, 1842. Empr. de l'esp.
fois au moyen âge « troubler » (« attenter sombrero «chapeau espagnol à larges bords »
à », au xvIIe s.), d’après le sens du verbe dér, de sombra « ombre ».
en lat. class., et surtout « s’occuper d’une SOMMAIRE, subst., xive. Empr. du lat.
affaire », encore usité au xvirie s., d’où summarium « abrégé » (de summa « som-
‘« soigner (une maladie) » du xv® au xvit1es. me »). L’adj,, attesté indirectement au
d’après le lat. eccl. qui employait sollicitare xi1e s. par l’adv. -ment, est tiré du subst.,
au sens de « se préoccuper, penser à ». Le malgré le désaccord des dates, qui est sans
sens d’ « exciter, inciter » est moins usuel doute accidentel.
SOMMATION D98

SOMMATION, « action de sommer », v. SOMMET, xr1e. Dér. de l’a. fr. som, lat.
sommer. summum, neutre pris substantiv. de l’adij.
SOMMATION, terme de mathém., v. summus ; de là aussi it. sommo, esp. arch.
somme « quantité ». somo. L’a. fr. a formé aussi l’adj. sommé
« garni au sommet », xIv®, comme terme
SOMME, dans béle de somme. A signifié de vénerie, puis de fauconnerie et de bla-
au moyen âge « bât » et jusqu’au xvres., son.
« charge d’un animal : cheval, âne, etc. ».
Lat. de basse ép. sagma « bât » (mot pris SOMMIER. D'abord « bête de somme »
au grec), attesté sous la forme sauma au (sens encore usité au xviIe s.), pris par
vire s. (Isidore de Séville). It. soma « char- métaphore pour désigner divers objets :
ge », a. pr. sauma, d’où aussi l’all. saumtier « poutre », xIv®, « sorte de matelas qui
« bête de somme ». soutient les autres matelas », xvire, etc.;
sommier « gros registre servant aux offi-
SOMME, « quantité », xrr1°. Au moyen ciers de finance », 1694, est le même mot
âge avait aussi les sens de « résumé, achè- employé par plaisanterie, et ne représente
vement, recueil ». Empr. du lat. summa, pas, comme on l’a proposé, le lat. summa-
fém. pris substantiv. de l’adj. summus « qui rium « abrégé ». Pour le sens, v. poutre.
est au point le plus haut », cf. de même Lat. de basse ép. sagmaärium « bête de
it. somma ; le sens du mot fait penser que somme », V. somme.
partout nous avons affaire à des empr.
plutôt qu’à des mots pop. La locution en SOMMITÉ, xur1e. Empr. du lat. de basse
somme, xIV° (Oresme), est calquée sur le ép. summilas « sommet, cime »; a été un
lat. in summa, cf. de même it. in somma. terme techn. jusqu’à une date récente où
Somme toute, qui équivaut à en somme, est il a pris le sens de « personnage éminent »,
une anc. locution jurid. au sens de «total, 1825.
général », relevée depuis 1320 environ. —
Dér. : sommer, « faire une somme », vers
SOMNAMBULE, 1690. Comp. avec le
lat. somnus « sommeil » et le verbe ambu-
1200 ; d’où sommation, xve.
lare « marcher » sur le modèle du lat. mé-
SOMME, masc., « temps plus ou moins diéval noctambulus, v. noctambule. —
long donné au sommeil », par une restric- Dér. : somnambulisme, 1769 ; somnambu-
tion de sens qui date du xvire s.; jus- lique, 1786 ; -esque, 1870 (Goncourt).
qu’alors signifiait simplement « sommeil »,
comme encore aujourd’hui dans la plupart SOMNIFÈRE, vers 1500. Empr. du lat.
des parlers gallo-romans. On attendrait somnifer (de somnus « sommeil » et ferre
som plutôt que somme; som, rare dans « apporter »).
l’ancienne langue, est encore fréquent dans SOMNOLENT, xv® ; rare avant le xixe® ;
les patois ; somme est refait sur sommeil. somnolence, 1787; auparavant de 1375
Lat. somnus. It. sonno, esp. sueño. Le lat. à 1530. Empr. du lat. de basse ép. somno-
de basse ép. somniculus « léger sommeil » lentus, somnolentia (de somnus, v. sommeil).
n’a été conservé que par le fr. sommeil et On en a tiré au xiXe s. le verbe somnoler,
l’a. pr. somelh ; de là sommeiller, 1130, qui 1874 (Goncourt).
a d’abord le sens de « dormir », que la
nuance moderne a éliminé depuis le xvries. SOMPTUAIRE, 1542 (Dolet : loy sump-
(sauf, parfois, dans la langue écrite), en- luaire, dans une traduction des Leitres de
sommeillé, 1870, aussi au xvre s. Cicéron). S’emploie surtout dans cette ex-
pression qui est faite sur le lat. lex sump-
SOMMÉ, v. sommet. tuaria « loi qui concerne les dépenses »:
SOMMEIL, v. somme. de là des emplois plus étendus.
SOMMELIER, vers 1250. Issu d'une SOMPTUEUX, x1v® ; somptuosité, 1488.
forme “*sommerier, dér. fr. de sommier, Empr. des mots lat. sumpiuosus (de sump-
par dissimilation des deux r (cf. sorcellerie, lus « dépense »), sumptuositas (créé à basse
de sorcier). Au moyen âge a signifié ép.).
« conducteur de bêtes de somme » (xrr1e-
Xve s.), et spécial. « officier chargé de SON, v. mon.
divers services concernant les vivres et SON, « ce qui frappe l’ouie par l'effet
le matériel », 1316 (sens du lat. médiéval des mouvements vibratoires des corps ».
summularius), puis « celui qui est chargé, Lat. sonus. Le traitement de la voyelle o
dans une maison, de tout ce qui concerne n’est pas régulier, on attendrait suon,
la table », xive, d’où le sens moderne, suen ; le mot est refait sur sonner ou sur le
1812; on disait aussi sommellerie, 1504, mot. lat. It. suono, esp. arch. sueno.
pour la charge de sommelier et le lieu
où le sommelier gardait ce qui lui était SON. D’abord saon, seon, 1197, au sens
confié. de « ce qui est rejeté comme étant de
SOMMER, terme jurid., 1283. Empr. du qualité insuffisante », empr. de l’anglo-
lat. médiéval summare qui a dû signifier sax. son « rebut », part. passé du verbe
propr. « dire en résumé », dér. de summa séon « passer, filtrer ». Depuis 1243 appa-
au sens de « résumé, conclusion » (ce verbe raît le sens « résidu de la mouture des
médiéval est attesté sans doute par hasard grains », attesté par le lat. médiéval panis
à une date plus récente que le fr.). — Dér. : de seonno « pain de son ». Le verbe saonner,
sommation, xIve. seonner, usité surtout comme terme jurid.
au sens de « récuser des témoins » et aussi
SOMMER, « faire une somme », v. som- au sens de « rebuter, rejeter » est dér.
me « quantité ». du subst. Son appartient à la France sep-
599 SORT

tentrionale ; bren (ou bran), d'origine pré- au xve et au xvie s. Empr. des mots lat.
latine, est le terme du Sud et de l'Ouest; sonorus, sonorilas (créé à basse ép.). —
les parlers de l’Est ont des termes d’origine Dér. : insonore, 1801.
germanique de la famille de l’all. Grütze
SOPHISTE, vers 1236 (sous la forme
« gTUAU ».
soffistre), au sens de « qui use d’arguments
SONATE, 1695. Empr. de l'it. sonala captieux » ; sophistique, vers 1265, comme
(de sonare, V. sonner). De même sonatine, adj. ; récent comme subst.; sophistiquer,
1836, de l’it. sonalina. 1370 (Oresme) au sens de « tromper »; Le
sens moderne apparaît dès le xve s.;
SONDE, vers 1220 ; pris comme terme sophisme, vers 1175 (sous la forme so/fime),
de chirurgie, 1596 ; sonder, 1382 ; au sens au sens de « ruse » ; le sens usuel aujour-
fis., 1570. Le verbe peut être antér. au d'hui a été repris au lat. ou au grec vers
subst. De l’anglo-sax. sund- « mer » conte- 1672. Empr. des mots lat. sophisies, so-
nu dans sundgyrd « perche pour sonder », phistlicus, sophisticari (créé à basse ép. au
sundrap «eorde employée pour sonder ». En sens de « déployer une fausse habileté »),
empruntant le mot de l’anglo-sax. les ma- sophisma (des mots grecs sophistés, propr.
rins français ont concentré leur attention « sage, savant », qui désignait partic. des
sur l'élément sund- commun à tous ces maîtres d’éloquence et de philosophie,
mots et ont vu dans celui-ci le porteur de à Athènes, au ves., dont les doctrines furent
la signification commune. — Dér. : son- critiquées par Socrate, sophislikos, sophis-
dage, 1769 ; sondeur, 1572 ; insondable, ma, qui ont pris un sens défavorable
1578. d’après sophistés). — Dér. du verbe
sophistication, xive (Oresme), rare avant
SONGE, SONGER. Songer a signifié d’a- le xixe s.; sophistiquerie, 1553 ; sophis-
bord « faire un songe, rêver » jusqu’au tiqueur, xv® ; rare avant le XVIIIe 5.
xvIIe s. ; se dit encore au sens de « s’aban-
donner à la rêverie » ; le sens moderne s’est SOPORIFIQUE, fin xvi° s. Dér. du lat.
développé surtout à partir du xvie s. Lat. sopor « sommeil » sur le modèle des adj.
somnium, somniare (qui signifiait aussi en -fique, tels que sudorifique.
« s’imaginer »). It. sogno « rêve », sognare
SOPRANO, 1768. Empr. de l’it. soprano,
« rêver », esp. sueño, soñar. — Dér. et
Comp. : songerie, xve, fait sur le modèle
propr. « qui est au-dessus », v. souverain.
de rêverie; songeur, XII°; songe-Creux,
On disait antér. dessus. Le comp. mezzo-
1527 (dans le titre Pronoslication de Songe- soprano (où mezzo signifie « qui est au mi-
Creux, surnom de Jehan de L’Espine, dit lieu, moyen ») est attesté en fr. dp. 1838.
Jehan du Pont Alais ou Songecreux, fa- SORBE, xv<. Empr. du pr. sorba, qui
meux joueur de farces, ami de P. Gringore). représente le lat. de basse époque *sorba,
pour sorbum. Le nom anc. était corme,
SONNER. Lat. sonäre. It. sonare, esp. v. ce mot. — Dér. : sorbier, 1544 (sorbier
sonar. — Dér. et Comp. : sonnaille, vers ou cormier).
1300, probabl. empr. des parlers franco-
prov., d’où sonnailler, « animal portant SORBET, 1553. Empr. de l’it. sorbello,
une sonnette au cou », vers 1380, cf. esp. empr. lui-même du turc chorbet; le mot
sonaja, peut-être déjà lat. pop. *sonäculum, turc vient de l’arabe vulgaire chourba,
-a ; d’où le verbe sonnailler, 1762; mal- pour charbât, plur., signifiant propr. « bois-
sonnant, xv®; sonnerie, vers 1210 ; sonnette, sons », v. sirop. S’est répandu dans les
vers 1235 ; sonneur, vers 1260. V. résonner. langues européennes, cf. all. Scherbel. —
Dér. : sorbétière, 1803.
SONNET, 1543. Empr. de l’it. sonnetto,
empr. lui-même de l’a. pr. sonet qui dési- SORCIER, v. sort.
gnait une sorte de chanson, de poème, dér. SORDIDE, 1495. Empr. du lat. sordidus
de son au sens de « poème » ; même déve- (de sordes « saleté »).
loppement dans l’a. fr. son « sorte de chan-
son (d'amour) », sonel « id. ». Le sonnet, SORET, v. saur.
sous la forme que lui a donnée Pétrarque, SORGHO, 1553. Empr. de lit. sorgo,
a probabl. été introduit en France par d’étymologie incertaine, attesté dans des
Maurice Scève et l’école poétique de Lyon. textes du xrr1e 8. sous des formes latinisées
SONNEZ, 1666 (Furetière), terme de jeu surgum, surcum, suricum, qui représentent
de tric-trac, issu de la locution sonnez, le le lat. syricus « de Syrie ».
diable est mort. Sonnez est une altération SORITE, terme de logique, 1558. Empr.
d’un terme antér. sannes, encore dans les du lat. sorites (du grec sôreités, de sôros
dict., antér. senes chez Rabelais, au moyen « tas »; dit ainsi parce que dans le sorite
âge sines, qui remonte au lat. sénas, acc. les prémisses sont accumulées).
fém. plur. de séni « six par six », avec alté-
ration d’après six; senes de Rabelais est SORNETTE, vers 1420. Dim. de sorne
refait sur le lat. ou repris à l’a. pr. senas. « plaisanterie », de la même époque, d’où
Le coup de trois se disait terne(s), lat. aussi le verbe sorner « railler », également
ternas, le coup de quatre carme, 1640, alté- du xve s. Se rattache à l’a. pr. sorn
ration de carne(s), quarnes au x1Ie s., lat. « obscur », d’où aussi sorne « scorie » des
quaternas, le coup de cinq quine(s), lat. parlers de l’Ouest et du Centre, et aussi
quinas. « sobriquet ». Pour l’étymologie, v.sournois.
SONORE, 1560; sonorité, 1770, considéré SORT. Lat. soriem, acc. de sors, fém.,
alors comme un néologisme, déjà relevé qui désignait divers procédés de tirage au
SORT
600
sort, notamment pour consulter les dieux, SOSIE, 1738 (Voltaire). Tiré de Sosie,
d’où « oracle » et « destin, lot, part ». Sort nom de l’esclave d'Amphytrion, dont Mer-
est devenu masc. en fr. ; le fém. se trouve cure prend momentanément la figure. C’est
parfois au moyen âge jusqu’au xvre s. It. la pièce de Molière, 1668, qui a popularisé
sorle, esp. suerle sont fém. — Dér. : sorcier, le personnage.
vire (attesté alors par sorcerius des Gloses
de Reichenau), formé sur l’anc. plur. sorts, SOT, xni°. Mot pop., d’origine obscure.
d’où sorcellerie, vers 1220 pour *sorcererie ; Un rapprochement avec une famille de
au moyen âge on a aussi sorcerie), ensor- mots signifiant « souche, tronc », tentant
celer, 1188 (sous la forme participiale pour le sens, ne tient pas suffisamment
ensorcerés), -leur, 1538, -cellement, 1393. compte de la forme ; les mots cités ont
pour la plupart un {ch initial (cf. roumain
SORTE. Vers 1310. En raison de cette ciot), et l’histoire en est insuffisamment
date récente empr. du lat. sors, sortis qui connue. — Dér. et Comp. : sottie, du xrre
a pris dès le lat. class. le sens de « manière, au xvi°s. au sens de « sottise » ; a été pris
façon » (cf. nova pugnae sors chez Virgile, à partir du xve s. pour désigner un genre
simili sorte chez Grégoire de Tours), qui de satire dialoguée où figurent des sots ;
est assez souvent attesté aussi en bas- sot-ly-laisse, 1798:; sottise, x111°, d’où sot-
latin; l’it. sorta est empr. du fr. — Dér. : tisier, xXvii®; assoter, XII*, rassoter, id.
assortir, vers 1380, jusqu’au xvre s. signifie
SOU. Lat. solidus, propr. adj. v. solide,
souvent « disposer, munir »; d’où assor-
timent, vers 1480, sens parallèle au verbe, qui a été pris substantiv. à l'époque impé-
désassortir, 1629 (Peiresc), rassortir, 1808, riale pour désigner une monnaie d’or de
valeur fixe. Sou a désigné des monnaies de
d’où -iment, 1842 ; la formation en -ir a valeur différente au cours de l’histoire,
été provoquée par la famille de sortir.
entre autres une monnaie de billon; par
suite, a été conservé par la langue cou-
SORTILÈGE, 1213. Fait d’après le lat. rante, lors de l’établissement du système
sorlilegus « qui dit le sort »; on a aussi en décimal, pour désigner les pièces de cinq
lat. médiéval sortilegium, mais au sens de et de dix centimes ; une forme archaïque
« tirage au sort ». sol s'emploie encore par plaisanterie. It.
soldo, aujourd’hui « pièce de cinq centimes »,
SORTIR, esp. sueldo.
xr1e (S’il doit morir et de la
mort puisse sortir, où sortir signifie « échap- SOUBASSEMENT, v. bas.
per »). Rare comme verbe de mouvement
avant le xvi® s. où il a remplacé le vieux SOUBRESAUT, vers 1369 (G. de Ma-
verbe issir, v. issue; mais cf. ressortir. chaut). Empr., comme terme d'équitation,
Continue probabl. le lat. sortiri « tirer au soit du prov. sobresaut, par hasard attesté
sort »; l’évolution sémantique a probabl. seulement à l’époque moderne, mot formé
comme point de départ le part. passé sor- comme le fr. sursaut, soit de l’esp. sobre-
litus « qui a été désigné par un tirage au sallo ; le fr. a pris dès cette ép. des termes
sort ». Âu moyen âge sortir conserve aussi militaires à l’esp., cf. jaquette ; par consé-
le sens d’ « obtenir par le sort », qui sub- quent l’empr. d'un terme d'équitation n’a
siste dans quelques emplois jurid. et même rien de surprenant. A signifié aussi « gam-
de « prendre, jeter les sorts », d’après le bade, saut de clown » au xve et au xvres. ;
lat. sortiri et le fr. sort; a pris aussi le sens moderne depuis le xvire.
sens de « prédire » et celui de « pourvoir »
probabl. d’abord dans se sortir, qui est at- SOUBRETTE, 1640 (Faret). Empr. du
testé en ce sens. A cause du sens et aussi prov. soubreto, fém. de l’adj. soubret « af-
à cause de ressortir qui, au moyen âge, est fecté », propr. « qui fait le difficile », dér.
fréquent au sens de « rebondir », on a pro- de soubra « laisser de côté »; ce sens est
posé de séparer sortir « obtenir par le sort » issu du sens anc. « être de trop, être de
de sortir « aller du dedans au dehors » que reste » qu'avait l’a. pr. sobrar, lat. superäre
l’on considère comme dér. d’un part. passé « être au-dessus »; de là aussi esp. sobrar
*surcius, lat. class. surrectus, de surgere « se « être de plus, excéder ».
dresser »; cette étymologie convient à SOUCHE,
l'esp. surtir « jaillir » ; mais l’o du français 1100 (sous la forme goche, qui
se trouve aussi chez Chrétien). Cette forme
sorlir est en ce cas inexpliqué. Au sens goche est confirmée par chouque du picard
d’ « aller du dedans au dehors », Sorlir est et du normand,
propre au fr. — Dér. : sortable, 1395 (estof- d’où chouquet, 1381,
« sorte de billot ». Continue un gaul.
fes. sortables pour ledit casuble) ; dér. de *isukka, qui correspond à l'all. Stock (un
sortir au sens de « pourvoir », donc au sens ancien sl- devient /s- en celt.). Les parlers
de « propre à pourvoir quelqu'un de ce de l’Ouest ont une variante coche due à
qu’il lui faut », d’où « convenable » ; sortie, une très ancienne métathèse attestée dès
1400 ; ressortir, vers 1080 (Roland, «rebon- le 1x° s. On trouve des représentants
dir »; fréquent aussi dès le xr1e s. au sens de “*isukka en Italie
de «se retirer, reculer »), d’où ressort « ac- (Monferrat SOC,
socca) et en Espagne (arag. zoque). Les
tion de rebondir », 1220, puis ressort (de parlers gallo-romans ont aussi une variante
métal), xvie (Paré), pris dans sens moral avec la voyelle u (norm. chuque, berrichon
au XVI*s. ; ressortir, terme jurid., vers 1320, suche), qui revient aussi en Italie (piém.
vient de ressort qui, dès 1265, a signifié süka) et en rhéto-roman (Engadine ischü-
«recours », et « compétence d’une juri- cha), où la voyelle à, comme du reste dans
diction » ; d’où ressortissant, 1694. quelques autres mots d’origine gauloise, a
601
SOUK
été traitée comme le ü lat. — Dér. : souchet, flure, 1701, comme terme techn.; déjà
nom de plante, 1375, ainsi nommé à cause formé au xvi® s. au sens de « souffle De
des rhizomes dont cette plante est pourvue. boursouflé, 1230 (sous la forme borsoflez),
SOUCI, nom de plante, 1538. Altération usité surtout au part. passé, on emploie
par croisement avec souci « chagrin », d’un peu d’autres formes verbales ; mot pop.
anc.soucie, fém., xirres., cf. en outre solsicle, aux formes variées dont le premier élément
sousicle, etc., formes diversement francisées se retrouve dans le type bourenfler, attesté
du lat. de basse ép. so/sequia « tournesol », depuis le Xtr1° s., partic. en Bourgogne, et
littéral « qui suit (de sequi) le soleil ». Ce dans lequel on peut voir le fr. bourre, bour-
mot, propre à la France septentrionale souflure, 1532 ; essouffler, vers 1185. es-
(qui s’est répandu à une date assez récente soufflement, 1500.
dans le Midi), est repris au lat. et non SOUFFRETEUX, xu1e. D'abord sufrai-
transmis par la voie pop.; c’est ce que lus, X11°, propr. « qui est dans le dénue-
prouvent et le peu d'extension du mot et ment », seul sens du mot jusqu’au xvrrres, ;
le traitement de la terminaison (-equia c’est un dér. de l’a. fr. sou/fraile « disette,
aurait abouti régulièrement à -iece). privation », encore usité dans des parlers
SOUCIER. À toujours été usité surtout du Centre et de l'Ouest, lat. pop. su/fracla,
au pronominal. Lat. pop. *sollictiäre « in- fém. pris substantiv. de su/fraclus, part.
quiéter » (pour ce sens, v. solliciter), alté- passé du lat. pop. *suffrangere, réfection
ration du lat. class. sollicitäre, due à une du lat. class. suffringere « rompre » (d’où
influence de excitus, part. passé de excire a. fr. soufraindre « tourmenter » et intran-
«exciter », cf. pour une altération de même sitivement avec une chose comme sujet
origine les formes de l’a. pr. reissidar, eis- «manquer de », a. pr. sofranher « manquer,
sidar « éveiller », lat. pop. *reexcilare, faire défaut »), cf. de même a. pr. sofracha
*deexcitäre (du lat. class. excitare). — Dér. : « disette », sofrachos « nécessiteux ». Le sens
souci « chagrin », 1213, d’où sans-souci, moderne de souffreleux qui apparaît au
1718, mais on a déjà les Enfants Sans début du xixe s. est dû à une étymologie
Souci, célèbre troupe de sots au xve s.; populaire qui a vu dans cet adj. un dér.
soucieux, vers 1300, insoucieux, 1787; in- de souffrir.
souciant, 1752, insouciance, 1752. SOUFFRIR. Signifie « supporter » jus-
SOUDAIN. Lat. pop. *subilänus, lat. qu’au xvi*s.: remplace alors l’anc. douloir
class. subiläneus (de subitus, de même (du lat. dolere). Lat. pop. *sufferire, lat.
sens). A. pr. soplan. — Dér. : soudaineté, class. sufferre (de ferre «supporter »). It. sof-
XIII. frire, esp. sufrir. — Dér. et Comp. : souf-
france, xr1°, signifie souvent au moyen âge
SOUDARD, v. soldat. « permission, délai », comme se souffrir
SOUDE, 1527 (écrit soulde). Empr. du « s'abstenir, attendre » ; souffrant, id. :
lat. médiéval soda, it. soda. Ces mots vien- souffre-douleur, 1646.
nent de l’arabe suwwäd « suaeda ». La cen- SOUFRE. Lat. sulphur, forme grécisée
dre de cette plante donne une soude excel- de sulpur, mot probabl. dialectal. It. zolfo,
lente, qui a été exportée autrefois par gran- esp. azufre. Sulpur est en outre conservé
des quantités de la Sicile. Cette exporta- par l’a. pr. solpre. — Dér. : soufrer, xir1°,
tion a porté le nom du produit dans toutes soufrage, 1798 ; soufrière, 1529.
les langues européennes.
SOUHAITER, xive (G. de Machaut);
SOUDER. Lat. solidäre, dér. de solidus, ‘on trouve d’abord, du xri° au xve s. une
v. solide. Esp. soldar, it. soldare, v. solder. forme sohaidier, altérée. Remonte à un
— Dér. : soudage, 1459 ; soudeur, 1313; francique *hait « vœu » (comp. gotique
soudure, vers 1100; dessouder, 1165 ; gahait « promesse », all. Verheissung), avec
ressouder, vers 1190. lequel le gallo-roman du Nord doit avoir
SOUDOYER, vers 1170. Dér. de sold, formé très tôt un verbe *sublus-haitare
forme première de sou, v. soldat. «promettre de façon à ne pas trop s’enga-
ger ». A. fr. sohaidier est devenu par la suite
SOUDRE, v. soulte. souhaiter sous l'influence du subst. souhait.
SOUE, mot régional qui paraît aujour- — Dér. : souhait, vers 1170, souhaitable,
d’'hui généralement connu, soft, sau au vers 1500.
xu1e s., etc. Déjà dans la Loi Salique sous SOUILLER, 1155 (au part. prés. déjà
la forme sutem. Représente le gaulois süteg- vers 1100). Signifie en anc. fr. aussi «se
« toit à porcs ». vautrer dans la boue (du sanglier) ». Ce
SOUFFLER. Lat. suffläre « souffler sur » verbe est dér. de l’anc. fr. souil, qui signifie
(de fläre « souffler »). It. soffiare, esp. sollar « abîime de l'enfer », ensuite « lieu bour-
(moins usité que soplar). La plus grande beux où se vautre le sanglier, lequel
partie des parlers gallo-romans, au sud de représente le lat. solium « thrône », mais
la Loire, préfère bufd, d'origine onoma- aussi « baignoire ; baquet de cuisine ».
topéique, v. buffet. — Dér. et Comp. : A. pr. solhar. — Dér. : souillard, 1359, au
soufflage, 1675 ; souffle, xr1° ; soufflerie, sens de « souillon », 1676, comme subst.
x111°; soufflet « instrument servant à techn.; souille, 1538, comme terme de
souffler », x11°; soufflet, 1459 « gifle », marine ; désigne aussi une prairie maré-
d’abord soufflace, xive s., formation cageuse, etc., 1413 ; souillon, vers 1530;
péjorative, refait ensuite sur l’a. fr. bufet souillure, vers 1280.
id., d’origine onomatopéique, d’où souf- SOURK, fin xix°. Mot arabe signifiant
fleter, 1525 ; souffleur, xrri°; souf- « marché », qui sert à désigner des maga-
SOUK 602

sins réunis dans des ruelles ou des passages, ner, 1798 (se trouve d’abord au sens de
surtout dans des villes de l'Afrique du « soumettre », 1629, chez Peiresc) ; insou-
Nord. mission, 1827.
SOÛL ; propr. « pleinement repu », sens SOUPAPE, 1547. Emploi fig., plaisant,
usuel jusqu’au xviie s.; celui d’ « ivre », de sou(s)pape, x11°, « coup sous le menton
attesté au moins depuis le xvi® s., a rendu (qui fait fermer brusquement la bouche) »,
le mot vulgaire ; mais on l’emploie encore la soupape se ferme en effet brusquement ;
dans les locutions telles que {out son soûl, sous-barbe, attesté en 1611 au sens de
xv®,; soûler, « rendre soûl »; développe- « coup sous le menton » et qui a reçu aussi
ment de sens parallèle à celui de l’adij. des sens techn., n’est pas exactement com-
Lat. salullus, salulläre (de salur « rassasié, parable, car les sens « pièce du licol, cor-
gorgé »), termes pop. en face des termes dage, etc. » qui se ramènent tous au sens
du lat. class. salur, saluräre, qui ont laissé d’ « objet qui passe sous la barbe », sous le
quelques traces. It. salollo, salollare. — menton » sont peut-être antérieurs à « coup
Dér. et Comp. : soûlard, 1433 ; soûlaud, sous le menton ». Souspape est formé de
1802 ; soulographie, 1835 (Balzac : « Si je la prép. sous et d’un élément pape, tiré
donne les dix francs aux ouvriers, ils feront de l’anc. verbe paper « manger » (v. pape-
de la soulographie, et adieu votre typo- lard), qui a pu signifier « mâchoire » (il
graphie ») ; soûlerie, 1863; dessoûler, 1557. n’est pas surprenant qu'un tel mot, qui
appartenait à la langue pop. et qui, de
SOULAGER, vers 1210. Antér.souzlegier, plus, a pu ne pas être longtemps employé,
x11e, refait en soulager d’après soulas « con- ne se trouve pas dans les textes) ; les mots
solation », lat. soläcium et soulacier, « con- esp. papar « manger » et papo « jabot,
soler », dér. de soulas ; on admet aussi une goitre, etc. », papada « double menton »,
influence de l’anc. verbe assouagier qui a sopapo « coup sous le menton », confirment
un sens proche de soulager ; sourzlegier l’étymologie.
représente, avec une substitution de préf.,
le lat. pop. *subleviäre, altération du lat. SOUPÇON. Lat. suspectionem, acc. de
class. subleväre, propr. « soulever », d’après suspectio, mot de l’époque impériale, dér.
alleviäre, v. alléger. Esp. soliviar. — Dér. : du verbe suspicere « regarder », d’où « pré-
soulagement, 1495 (soubzlegement, 1384). sumer, soupçonner »; le lat. class. disait
suspicio, V. suspicion; soupçon, d’abord
SOULEUR, v. seul. souspeçon, a été fém. comme le mot lat.
SOULIER. D'abord soller, devenu sou- jusqu’à la fin du xvi® s. A. pr. sospeisso;
lier depuis la fin du x1v®Ss., par substitution ailleurs autres types : it. sospeito, du lat.
de suff., v. sanglier. Lat. de basse ép. suspecius. On admet aussi suspicionem
subleläris, vie (Isidore de Séville) (sous- comme type étymologique des formes gallo-
entendu calceus), dér. du lat. de basse ép. romanes ; pour le fr. on ne peut pas se
sublel « creux sous la plante du pied »; prononcer ; mais l’a. pr. aurait en ce cas
désignait probabl. une chaussure qui ne sospesso, sans i. — Dér. : soupçonner,
couvrait pas le dessus du pied. Seulement 1225 ; d’où insoupçonné, 1840, insoupçon-
gallo-roman ; la forme sans substitution nable, 1840 (signalé alors comme un néolo-
de suff. survit surtout en wallon, en gisme) ; soupçonneux, x11°, aussi « suspect »
lorrain et en franco-provençal. au moyen âge.
SOULOIR, v. habitude. SOUPE, vers 1180. Signifie d’abord
« tranche de pain mince sur laquelle on
SOULTE, terme de droit. Orthographe verse le bouillon », de là les expressions
archaïsante (qui a réagi sur la prononcia- encore usuelles failler, tremper la soupe,
tion au cours du xix® s.), de soute, x11e, trempé comme une soupe ; a pris le sens de
subst. fém. tiré d’un anc. verbe soudre ; « potage », plus spécialement de « bouillon
ce verbe, sorti de l’usage depuis le début avec du pain » au xive s. Du germ. occi-
du xviie s., était usuel au moyen âge au dental *suppa (on a déjà suppa au vies.
sens de « payer », outre ceux de « résoudre » chez Oribase) (de la famille du gotique
et même de « dissoudre » ; il continuait le supôn « assaisonner », néerl. sopen « trem-
lat. solvere, propr. « délier », d’où aussi esp. per », angl. sop « tranche de pain, etc. »,
solver « résoudre ». lo sop « tremper »), d’où aussi it. zuppa,
SOUMETTRE, Lat. submittere ; le préf. esp. sopa; le sens propre est partout
lat. a été remplacé en fr., avant les pre- « tranche de pain qu’on fait tremper dans
miers textes, par la préposition correspon- le bouillon » ; le sens de « mélange de bouil-
dante sous ; mais au moyen âge on trouve lon et de pain ou d’autres aliments » paraît
aussi submeltre. It. sommettere, esp. some- être dû au fr., d'où il a été pris par l’all.
ter. — Comp. : insoumis, 1798, une pre- Suppe et l’angl. soup. V. brouet. — Dér. :
mière fois en 1564. souper, verbe, vers 1138 ; a désigné d’abord
le repas du soir, qui a pris à Paris le nom
SOUMISSION, 1349. On a dit aussi sub- de diner au cours du xIx® s., v. déjeuner;
mission, 1312, encore dans Le Cid, IL, 6. vers 1860, le dîner a été reculé vers la fin
Empr. du lat. submissio « action d’abais- de l'après-midi ; souper a été dès lors ré-
ser », dér. de submiliere, v. le préc., pour servé à un repas qu'on prend après la sortie
servir de nom abstrait à soumettre, d’après du théâtre ou au cours d’une soirée. Mais,
lequel le préf. a été francisé. — Dér. de sauf dans la Suisse romande qui a d’autres
soumission, terme d'administration, xvirre termes, tous les parlers gallo-romans con-
(pour ce sens, cf. soumeltre une proposi- servent encore souper au sens ancien ; d’où
lion) : soumissionnaire, 1687 ; soumission- souper, subs!., vers 980, sens parallèle à
603 SOUS

celui du verbe ; on a-écrit aussi soupé du SOURDRE. Ne s'emploie plus qu’à


XVII® au xIX° s., après-souper, 1671, d’a- l’inf. et dans un style élevé. Lat. surgere
bord après-soupée, au xvi® et jusqu’au « s'élever, jaillir »; v. surgir. It. sorgere.
XIXE s.; soupière, 1729. — Dér. : source, vers 1170 (écrit sourse : la
graphie source est du xvI° s.), issu du fém.
SOUPENTE, 1338 ; on disait aussi sous- de l’anc. part. passé sors, usuel au moyen
pendue, usuel au xv° et au XVIes. ; soupenle âge ; d’où sourcier, 1781, v. ressource;
a plusieurs sens techn., entre autres désigne surgeon, xv°; d’abord sorjon, du x111e au
diverses sortes de courroies. Tiré (sur xvIe s., peut-être altéré en surgeon d’après
le modèle de pente, v. pendre) de l’anc. le lat. surgere prononcé avec ü dans les
verbe souspendre, lat. suspendere, d’où écoles, mais il est difficile d'admettre que le
aussi it. sospendere, V. suspendre, latin des écoles ait pu exercer pareille
SOUPIRAIL, 1332 (écrit sous-) ; au x11°- influence dans ce domaine sémantique;
XIIe s., On a déjà suspiral (en 1100 sospi- le j vient de certaines formes verbales,
riel) ; attesté en 1372 dans un autre sens : notamment du part. prés. sourjant; a
L'air... c'est le souppirail de toutes bestes signifié « source » jusqu’au xvi® $.; le
(par une extension d'emploi hardie). Mot sens de « branche qui naît de la souche ou
techn. qui paraît avoir été tiré de soupirer du collet de l’arbre » date de cette ép.
(qui a quelquefois le sens d’ « exhaler ») sur SOURIRE. Lat. pop. *subridère, lat. class.
le modèle du lat. spiraculum ; l'a. pr. a subridere, v. rire. It. sorridere, esp. sonreir.
aussi sospiralh, réfection, d’après sospirar — Dér. : sourire, subst., 1454 (écrit sourir);
« soupirer », de espiralh, lat. spiräculum jusqu’au x1xe s. on a dit aussi souris (fait
« soupirail » (de spiräre « souffler, respi- sur le modèle de ris) ; souriant, 1871.
rer »): espirail n’est attesté en fr. qu’au SOURIS. Lat. pop. “*soricem, acc. de
xvies., où ilest rare et suspect d’être empr. *soriz, lat. class. sôorexæ, soricis, masc. ; à.
SOUPIRER. Lat. suspiräre. — Dér. : pr. soritz. Attesté au sens de « mollet »,
soupir, x11° ; soupirant, xXI1I1°. au XIVe s.; depuis xvirie s. désigne aussi
le muscle qui tient à l'os du gigot. N'est
SOUPLE. Au moyen âge signifie « abat- usuel que dans la partie septentrionale du
tu, humble, triste » ; le sens moderne appa- domaine gallo-roman ; au Sud de la ligne
raît dans le dér. souplesse dès le x11II° s. allant de l'embouchure de la Gironde au
(Br. Latini); du sens d’ « humble » on Nord de la Lorraine, on a surtout les types
passe à celui de « qui se plie facilement », rat, rale ; il v a en outre un type mürica au
qui a été dit ensuite du corps, puis des Sud-Ouest (dér. de müs, müris), v. rat. —
choses. Pour le passage d’un adj. de sens Dér. souriceau, vers 1500 ; souricière, 1491.
moral à une acception physique, v. large. — Comp. : chauve-souris, xr1°; déjà calvas
Lat. supplex « suppliant », propr. « qui plie sorices au vire s. dans les Gloses de Rei-
les genoux pour supplier ». En dehors du chenau ; l’a. fr. dit aussi souris chauve, encore
fr. on n’a signalé que sopse « mou », lat. chez La Fontaine, XII, 7; le lat. class.
supplicem, à Imola. — Dér. : souplesse, vespertilio n’a survécu qu’en Italie sous des
XIIIe ; assouplir, x11°, sens parallèle à celui formes extrêmement variées : it. pipis-
du verbe, assouplissement, fin xIx°. trello, etc. ; l’a. pr. dit soritz penada, littéral.
« souris ailée », d’où le type d'aujourd'hui
SOUQUENILLE, x11e, sous la forme sos- ralo penado ; parmi les noms variés de cet
chanie, en outre sousquenie, sorquenie, etc. ; . animal dans les parlers gallo-romans un des
sequenie, en 1534 chez Rabelais ; siquenille plus répandus est chaude souris ou souris
et souquenille au xXvi1e s. souq- et soug- au chaude, altération de chauve souris.
xvire et au xviries. Empr. du moyen haut
all. sukenie, qui vient lui-même d’une SOURNOIS, 1640. Probabl. mot d’origine
langue slave, cf. polonais suknia, tchèque méridionale, de la famille de l’a. pr. sorn
sukne, etc. « sombre, obscur »; le rapport des sens ap-
paraît dans le prov. moderne qui dit à la
SOUQUER, terme de marine, 1687. Em- fois sourne « sombre » et l’adv. sournamen
pr. du prov. souca qui signifie aussi «serrer « sournoisement », cf. aussi les dér. sour-
fortement un nœud, raidir un amarrage, nacho, sournaras, sournaru, sournel, tous au
bûcher, peiner », peut-être dér. de soc. sens de « sournois ». Ce groupe de mots est
SOURCE, v. sourdre. très probabl. le résultat d’un croisement
de sourd avec le fr. morne, a. pr. morn.
SOURCIL. Lat. supercilium. A. pr. s0-
brecelh, port. sobrancelha. — Dér. : sour- SOUS. Lat. sublus, adv. signifiant « des-
ciller, vers 1230 ; sourcillier, 1580. sous », attesté à basse ép. comme prép.;
la prép. du lat. class. sub n'a laissé que
SOURCILLEUX, 1548. D'abord et jus- peu de traces. It. soilo, prép. et adv., esp.
qu'au xvirie s. « arrogant, orgueilleux ». solo, aujourd’hui moins usité que (de)bajo,
Émpr. du lat. superciliosus, même sens propr. « en bas ». Concurrencé dans de
(d’abord supercilieux, 1477). Sens moderne nombreux parlers gallo-romans par des-
depuis le xvire s., sous l'influence de sourcil. sous. Sert aussi de préf., v. les comp. sous
lé, simple. — Comp. : dessous, vers 1080
SOURD. Lat. surdus. It. esp. sordo, mais (Roland) ; aussi prép. jusqu’au XvrIe 56. ;
lorrain sourdeau, franc-comtois lourdeau, se prend aussi comme subst. depuis 1393 ;
lourdaud. — Dér. : sourdaud, 1534; as- être dans le troisième dessous, 1864, est une
sourdir, xr1°, assourdissement, 1611. locution qui vient de la langue du théâtre ;
SOURDINE, 1568. Empr. de l’it. sordina, en effet les dessous qui se trouvent sous
dér. de sordo. la scène forment ou formaient trois étages.
SOUSCRIRE 604

SOUSCRIRE, 1506 ; souvent écrit soub- au xXvI® s.) V. subvenir ; succurrere « secou-
scrire au XVI°s., Cf. aussi subscrire en 1356 ; rir » a aussi en lat. class. le sens de « se
on a en outre sousécrire, forme plus fran- présenter à l’esprit ». It. souvenirsi. —
cisée, au xIv® et au xve s.; souscripteur, Dér. : souvenir, subst., XI11° ; souvenance,
1679 ; on a aussi essayé souscriveur, 1675 ; x11°, vieilli depuis le xvr1e s., mais répandu
souscription, 1389; d’abord subscription, dans les patois; aujourd'hui terme poé-
XIe, Empr. du lat. subscribere (francisé tique ; ressouvenir, x1r1°.
d’après écrire), subscriptor, subscriplio.
SOUVENT. Lat. subinde, propr. « im-
SOUS-JACENT, terme techn miel médiatement après, aussitôt », d’où « suc-
Comp. de sous et du lat. jacens, part. prés. cessivement », puis « souvent » à l’époque
de jacere « être étendu » (la langue du droit impériale ; le lat. class. sæpe a disparu de
dit aussi jacent, relevé depuis 1762), sur tout le roman. Aussi a. pr. soven, cat. so-
le modèle d’adjacent. vent. Ailleurs termes nouveaux : it. spesso,
SOUSTRAIRE, vers 1120 ; signifie aussi v. épais. L’it. sovenie est emprunté. —
au moyen âge simplement « retirer » ; sens Comp. : souventefois, x11°; aujourd’hui
mathématique, x1r1° ; soustraction, 1484; provincial.
d’abord subtraction, depuis le x11e s. (sou- SOUVERAIN, xr1e. D'un lat. de basse
vent comme terme jurid.) ; sens parallèle époque *superanus (non attesté, mais qui
à celui du verbe. Empr. des mots lat. sub- doit avoir existé et qu’on trouve en latin
trahere, subtractio (créé à basse ép.), qu’em- médiéval), dér. de super (v. sur). Esp.
ployait aussi Boèce comme termes de soberano, it. soprano. V. suzerain. Souve-
mathém. ; le préf. est refait d’après des rain, nom d’une monnaie anglaise, 1834,
mots tels que souscrire, etc. est un calque de l’angl. sovereign (qui vient
lui-même du fr.) — Dér. : souveraineté,
SOUTACHE, 1838. Désignait propr. une XIIe,
tresse de galon, qui s’attachait au schako
du hussard. Empr. du hongrois sujlds, v. SOYA, 1842 ; mot mandchou, empr. par
schako. l’intermédiaire de l’all. Soja.
SOUTANE, 1550 (sous la forme sotiane). SPACIEUX, vers 1120. Empr. du lat.
Empr. de lit. soffana, propr. « jupe, vête- spaliosus (de spatium « espace »).
ment de dessous », dér. de solo « dessous » ;
francisé en soulane d’après sous. SPADASSIN, 1532 (Rab.). Empr. de lit.
spadaccino, littéral. « homme qui manie
SOUTE, vers 1300 (Joinville). Empr. de l'épée », terme péjor., dér. de spada « épée ».
l'a. pr. sola, de même sens, tiré de la prép.
adverbiale sofa, cf. pour le sens l'emploi de SPAGHETTI, 1923. Empr. de l'it.
dessous en fr. ; sofa continue une forme du spagheili, dimin. de spago « cordelette ».
lat. pop. *subta, transformation de sübius
(v. sous) d’après supra « sur » ; d’où aussi SPAHI, 1538, dans le récit de voyage
notamment cat. sota et sarde suita. — de d’Aramon, ambassadeur de France à
Dér. : soutier, fin x1xe. Constantinople, au sens de « cavalier turc
au service du sultan »; pris en 1831 pour
SOUTENIR. Lat. pop. *susienire, lat. désigner des cavaliers indigènes de l’Afri-
class. sustinère, refait sur *{enire, v. tenir; que du Nord au service de la France.
cf. de même a. pr. cat. soslenir : it. soste- Empr. du turc sipähi, lui-même d'origine
nere, eSp. sosiener continuent le latin clas- persane, v. cipaye ; on trouve parfois si-
sique. — Dér. : soutenable, vers 1390, d’où pahi dans des textes français.
insoutenable, 1460 ; soutenance, 1856, au
sens d’ « action de soutenir une thèse », SPARADRAP, 1314 (sous la forme spe-
d’après soutenant « qui soutient une thèse » radrapu). Empr. du lat. médiéval sparadra-
(dès 1660); soutenance a été usuel au pum, d’origine obscure.
moyen âge et jusqu’au xvie s. au sens de
«soutien » ; soutènement, vers 1170 : usuel SPARDECK, terme de marine, 1813.
jusqu’au xvie s. au sens général de « sou- Empr. de l’angl. spardeck (de spar « barre
tien », spécialisé depuis; souteneur, de bois » et de deck « pont »).
vers 1180, propr. « celui qui soutient, qui
protège » ; aux sens péjor. de «celui qui sou-
SPARTE, nom de plante, 1532. Empr.
du lat. spartum (du grec sparton). — Dér. :
tient les mauvais lieux » et de « celui qui se Sparterie, 1775 ; spartéine, 1875.
fait entretenir par une fille publique »,
1743; soutien, vers 1260; soutien-gorge, SPASME, 1314; au xirre s. espame ;
1923. spasmodique, 1721. Le premier est empr.
du lat. spasmus (du grec spasmos, de spän
SOUTERRAIN, v. terre « tirer » ; v. pâmer), le deuxième est empr.
SOUVENIR. D'abord impersonnel dans de l’angl. spasmodic, dér. sav. du grec
le tour il me souvient, etc., aujourd’hui médical spasmôdés « qui a le caractère du
archaïque, ou construit avec une chose A ». — Comp. de l'adjectif : anti-,
comme sujet ; le tour personnel se souvenir, 740.
fait sur le modèle de se rappeler, apparaît au
XIVe Ss., mais ne devient usuel qu’au xvies. SPATH, 1753 (d'Holbach). Empr. de
Lat. subuenire au sens de « venir à l'esprit », l’all. Spaih.
en construction impersonnelle, propr. « ve- SPATIAL, 1890. Dér. du lat. spatium,
nir au secours » (sens attesté du xrrre pour servir d’adj. à espace.
605 SPHINX

SPATULE, 1377; en outre espalule, mais comme terme de bourse, apparaît dès
XIvV£, encore attesté en 1680. Empr. du lat. 1745 ; spéculatif, 1268 ; a été employé aussi
spatula « sorte de cuiller », dér. de spatha dans la langue de la bourse, dès 1740;
« morceau de bois large et plat pour remuer spéculation, vers 1350 ; d’abord « art d’ob-
les médicaments ». — Dér. : spatulé, 1778. server », encore chez Fénelon ; puis « re-
SPEAKER, 1649, « président de la cherche théorique », xive (Oresme) ; terme
Chambre des Communes » ; au sens d’ « o- de bourse, 1776. Empr. des mots lat. spe-
rateur (en général) », 1866 ; spécialement culari « observer », speculaior (qui signifiait
dans la langue des sports, « celui qui an- aussi « soldat éclaireur », sens repris au
nonce le résultat des épreuves », 1904, xvIIe et au XVIIIe S.), speculalivus (créé à
d’où, dans la langue de la radiophonie, basse ép.), speculalio (id.).
« annonceur » (l’angl. dit en ce sens an- SPECULUM, terme médical, 1534. Jus-
nouncer). Empr. de l’angl. speaker (de to qu’au milieu du x1xe s., speculum, mot lat.
speak « parler »). signifiant « miroir », est presque toujours
SPÉCIAL, 1150 ; au moyen âge souvent accompagné d’un autre mot lat. qui le
especial, notamment dans la formule jurid. détermine : speculum oris, ani, uleri, oculi,
par especial ; spécialité, vers 1250 ; en outre etc. « miroir de la bouche, de l’anus, de
forme plus francisée especiaule, 1283 (Beau- l’utérus, de l'œil, etc. ».
manoir). Empr., comme termes didacti- SPEECH, 1839. Empr. de l’angl. speech
ques, des mots lat. specialis, propr. « relatif (de la famille de {o speak « parler »).
à l’espèce, particulier » (par opposition au
général), specialitas (créé à basse ép.). Spé- SPÉLÉOLOGUE, 1907. Dér. du grec
cialité a pris un sens plus étendu au xix®5s. spelaion « caverne » à l’aide du suffixe
— Dér. de spécial : spécialiser, 1823 (une -logue (philologue, etc.), de même spéléo-
première fois en 1547), d’où spécialisation, logie, 1894.
1830 ; spécialiste, 1832. SPENCER, 1797. Empr. de l’angl. spen-
SPÉCIEUX, vers 1370, au sens de «qui a cer, tiré lui-même du nom de Lord Spencer
une belle apparence », usuel encore au (1758-1834), qui mit ce vêtement à la mode.
XVIIe s.; le sens moderne apparaît alors.
Empr. du lat. speciosus (de species au SPERGULE, nom de plante, 1752. Em-
sens d’ « aspect (brillant ») qui a les deux pr. du lat. médiéval spergula, d'origine
sens du fr. incertaine. Les dialectes offrent des formes
variées dont les rapports sont mal déter-
SPÉCIFIQUE, 1503; spécifier, 1260 minés : espargoule, espargoute, pergoule, etc.
{sous la forme especefier); spécification,
1341. Empr. du lat. de basse ép. specificus, SPERME, xu1e (aussi sparme, XIV°),
specificare et du médiéval -calio (tirés au sens moderne ; spermatique, 1314. Em-
de species au sens d’ « espèce »). — Dér. pr. du lat. de basse ép. sperma, spermaticus
de spécifique : spécificité, 1836. (du grec sperma, spermalikos, de speirein
« semer »). Sperme de baleine, xr11e (sous la
SPÉCIMEN, vers 1700 (Saint-Évremont). forme esperme..) est une traduction du
Empr. du lat. specimen « échantillon, mo- lat. médiéval sperma ceti ; cette matière
dèle ». utilisée pour faire des bougies de luxe, du
SPECTACLE, vers 1200; spectateur, cold-cream, etc., est en réalité extraite
1375. Empr. du lat. spectaculum, spectator d’une huile qui remplit les cavités de la
(qui se disait spécialement de « celui qui -tête du cachalot et qui a reçu ce nom à
assiste à une représentation théâtrale », de cause de son aspect. — Dér. : spermato-
spectare « regarder »). — Dér. du premier : logie, fait d’après le grec sperma, -alos,
spectaculaire, vers 1925, d’après la forme 1741; spermatozoïde, 1855, fait d’après
du mot lat. spectaculum. -zoaire, 1847.
SPECTRE, 1586, « apparition d’un fan- SPHÈRE, 1532 (Rab.); antér. espère,
tôme, etc. ». Empr. du lat. spectrum (de depuis env. 1165 ; sphérique, x1v® (Oresme).
specere « regarder »). Comme terme d’opti- Empr. des mots lat. sphæra, sphæricus
que, 1720, doit ce sens à l’angl. spectrum, (créé à basse ép. ; du grec sphaira, propr.
lui-même pris au lat. par Newton en vue de « balle à jouer », sphairikos). Sphère,
ce sens spécial. — Dér. : spectral, 1862. seulement techn. jusqu’à la fin du xvries.,
SPÉCULER, 1345, au sens d’ « observer a pris alors un sens plus étendu : « éten-
due de pouvoir, de connaissance, etc. »
(surtout les astres) », encore chez Calvin;
en outre, au moyen âge et jusqu’au (relevé depuis 1689, chez La Bruyère, I,
XVII1® $., « faire des recherches théo-
61). — Dér. de sphérique ; sphéricité, 1671.
riques » ; terme de bourse, 1798. Spécula- — Comp. : planisphère, 1555, comp. avec
teur, 1355 ; spéculaleur se trouve au xIv®5. le lat. planus « plat » sur le modèle d’hémis-
phère ; strastophère, vers 1898, créé par le
(Raoul de Presles) et chez Calvin au sens
de « bourreau » ; c’est un autre mot, empr.
météorologiste Teisserenc de Bort avec le
lat. stralum « couverture », sur le modèle
du lat. speculator, forme fautive de spi- d’atmosphère.
culalor, usité surtout dans le lat. eccl. ; le
texte de R. de P. : « Je requerrai son sang SPHINCTER, 1548 (Rab.). Empr. du
de la main du spéculateur, c’est-à-dire de lat. médical sphincler (du grec sphinktiér,
, celluy qui est ordonné à juger les gens » de sphingein « serrer »).
montre que l’auteur a rapproché aussi le
mot de speculaior « observateur, celui qui SPHINX, 1552 (Rab.; d’abord sphinge,
surveille » ; sens parallèle à celui du verbe ; 1546, à propos de statues égyptiennes).
SPHINX 606

Empr. du lat. sphinx (mot pris au grec; SPONTANÉ, x1v°; devenu usuel seule-
parfois fém. comme dans les langues an- ment au xviie s. Empr. du lat. de basse
ciennes). ép. spontaneus (de spons « volonté libre,
initiative », usité surtout à l’ablatif sponte).
SPIC, x11e. Empr. du lat. spicum « épi ». — Dér. : spontanéité, 1695 (Leibniz).
SPINAL, 1541 (dans l’expression spinalle SPORADIQUE, 1669, d’abord terme de
medulle). Empr. du lat. spinalis dans spi- médecine ; sens plus étendu au xix® 8.
nalis medulla « moelle de l’épine dorsale » Empr. du grec sporadikos, étymologique-
(de spina « proprement épine », d’où spé- ment « dispersé » (de la famille de speirein
cialement « épine dorsale »). « semer »).
SPIRE, 1567 ; spiral, 1534 (Rab.). Empr. SPORE, 1817. Empr. du grec spora « se-
du lat. anc. spira (du grec speira) et du mence, rejeton » (de speirein « semer »),
lat. médiéval spiralis. — Dér. de spiral : en vue d’un sens spécial. Sert aussi à faire
spirale, xvie. Sert en outre à faire sous la sous la forme sporo- le premier élément de
forme spiro- le premier élément de mots mots sav. comp. tels que sporophore, 1859.
sav. tels que spirochète, fin x1x° (où -chèle
est empr. du grec khailé « chevelure lon- SPORT, 1828 ; « Le mot de sports, dont
gue »). l'équivalent n'existe pas dans notre langue »
(Journal des Haras) ; sportsman, 1823 ; au
SPIRITE, 1858. Abréviation de l'angl. plur. sporismen, encore usité. Empr. de
spirit-rapper « esprit frappeur », d’où « spi- l’angl. sport, sporisman ; sport est dû à une
rite », comp. de spirit (du lat. spiritus) et aphérèse de disport « amusement, jeu »,
de rapper (de io rap « frapper sur les archaïque aujourd’hui, de l’a. fr. desport,
doigts ») ; pour cet empr., v. médium. — autre forme de deport « amusement, jeu,
Dér. : spiritisme, 1863.
etc. », subst. verbal de l’anc. verbe fse)
SPIRITUEL, vers 1200 (-iel Saint Lé- déporter « (s’}amuser », v. déporter. Le mot
ger) ; terme de théologie et de philosophie ; angl. sport qui date du xv®s. n’a pris lui-
au moyen âge souvent espirituel ; spiritua- même le sens moderne qu’au xvi® s. —
lité, 1283 (Beaumanoir, sous la forme espi- Dér. : sportif, 1862.
ritualite, forme usuelle au moyen âge; en SPORTULE, comme terme d’antiquité
outre esperituaullé chez Christine de Pi- romaine, xvire (Fénelon). Empr. du lat.
san). Empr. du lat. eccl. spiritualis, -litas sportula (dim. de sporta « panier ») qui
(de spiritus « esprit »). Concert spirituel se désignait le panier de provisions dans le-
dit, depuis 1728, des concerts de musique quel les clients emportaient les présents
religieuse qui se donnent pendant la se- que leurs patrons leur avaient donnés.
maine sainte. Spirituel a pris le sens de Sens plus étendu, 1871 (Th. Gautier). A
« qui montre de la finesse d’esprit » au
désigné autrefois des présents offerts aux
XVIIe s., d’après le rapport qu'on a senti
entre cet adj. et esprit. — Dér. de spirituel,
juges, 1566 (déjà en 1560 dans un sens
plus étendu), d’après le sens que sportula
d’après la forme du mot latin : spiritualiser,
avait pris dans le lat. jurid.
1521 ; spiritualisme, 1831, dès 1718 comme
terme de théologie ; spiritualiste, 1771. SPRAT, 1779. Empr. de l’angl. sprat.
SPIRITUEUX, 1687, au sens moderne; SPRINT, 1895; sprinter, subst., 1889.
au xvI° (1503 et chez Paré), à propos du Termes de sport, empr. de l’angl. sprint,
sang. Dér. sav. du lat. spiritus au sens sprinter. — Dér. de sprint : sprinter, verbe,
qu'avait ce mot dans le lat. médiéval de fin xiIxe.
la médecine et de l’alchimie; l’adj. a été
créé pour ne pas donner à spirituel un SPUMEUX, 1429. Empr. du lat. spumo-
excès de sens. sus (de spuma « écume ») pour un sens
techn.
SPLEEN, 1745 (écrit splene ; Diderot et SQUALE, 1754. Empr. du lat. squalus.
Voltaire écrivent aussi splin) ; splénétique,
1776 (écrit aussi spleen-). Empr. de l’angl. SQUAME, 1809 ; au xives. escame, chez
Spleen, propr. « rate », d’où « humeur noi- Rab. esquame ; squameux, xve (écrit sca-
re », splenelic (du lat. splen, spleneticus, meuse, au fém.). Empr. du lat. squama
créé à basse ép., du grec splèn «rate, hypo- « écaille », squamosus pour des sens techn.
condrie »; cet emploi vient de ce que la On fait aussi avec squami- comme premier
médecine plaçait autrefois dans la rate la élément, des comp. sav. tels que squami-
cause de la mélancolie). forme, 1812, etc.
SPLENDEUR, vers 1190; splendide, SQUARE, 1725, dans un texte traitant
1491. Empr. du lat. splendor, splendidus de Londres ; dit à propos de la France,
(du verbe splendere « briller »). 1836. Empr., avec l'usage de faire des
jardins sur les places, de l’angl. square,
SPOLIER, 1452; spoliateur, 1488 ; spo- propr. « carré », lui-même de l'a. fr. es-
liation, 1425. Empr. du lat. spoliare, spo- quarre, autre forme d’esquerre, v. équerre.
liator, spoliatio (de spolium « dépouille
(d’un animal) », spolia, plur., « dépouilles SQUATTER, 1835. Empr. de l'anglais
(d’un ennemi) »). d'Amérique squatlter.
SPONGIEUX, 1314. Empr. du lat. spon- SQUELETTE, 1552 ; écrit aussi scelele
giosus (de spongia « éponge ») pour servir au xvi° s. Empr. du grec skeletos, propr.
d’adj. à éponge. « desséché », d’où aussi « momie » (la
607 STATION

graphie scelele est une autre transcription âge sous la forme s{allum et celle-ci a été
du mot grec). Sens plus étendu depuis de nouveau empr. par le fr. ; les sens de
le xvirre s. — Dér. : squelettique, 1834. « stalle de théâtre, d’écurie » sont attestés
SQUIRRE, 1545 (écrit scirrhe; Paré
depuis 1826 et 1872.
écrit aussi scirre ; v. le préc.). Terme mé- STANCE, 1550 (Héroët). Empr. de l’it.
dical, empr. du grec médical skirrhos. — stanza, propr. « demeure, logis », dér. de
Dér. : squirreux, id. (écrit scyrrheuse fém.). siare « se tenir, être », v. ester et être;
STABAT, 1762 (Diderot : Le stabat de sianza a été pris dans un sens analogue à
Pergolèse). Tiré du mot lat. qui commence celui de sirophe, parce que, formant un
la prose chantée dans les églises pendant sens complet, elle comporte un repos qui
la semaine sainte : Siabat maler dolorosa la caractérise.
Juxta crucem lacrimosa, Dum pendebat fi- STAND, 1875, « emplacement où l’on
lius : « Elle se tenait, la mère pleine de peut s'exercer au tir »; 1893, « emplace-
douleur, pleurant près de la croix, où son ment réservé dans les expositions à chaque
fils pendaïit. » exposant ». Empr. de l’angl. stand, tiré du
STABLE, 1440, forme qui remplace l’a. verbe io stand « se dresser »; au premier
fr. estable, vers 1120, en le rapprochant du sens il a été empr., au moins en Suisse
mot latin ; stabilité, vers 1190. Empr. du romande (où il est attesté dès 1542), du
lat. stabilis, stabilitas (de stare « se tenir suisse all. Siand, à cause des exercices
debout, rester »), v. établir. — Dér. de stable de tir obligatoires pour tout milicien.
d’après la forme du lat. stabilis : stabiliser, STANDARD, 1857, « étalon, type, va-
terme d'économie politique, vers 1780 ; sens leur-unité d’un produit »; une première
plus étendu au xiIX® s. ; d’où stabilisation, fois en 1702 dans un ouvrage sur l’Angle-
id., Sens correspondants, aux mêmes dates terre. Empr. de l’angl. s{andard, qui vient
que le verbe, stabilisateur, 1877. de l’a. fr. estandard, v. étendard ; du sens
STADE, 1530; antér. eslade, pour propre, encore usité, se sont développés
désigner une mesure grecque, x111° (Br. La- en angl. les sens nouveaux de « signe dis-
tini), qu'Oresme fait fém.; Molière a tinctif, étalon, etc. ». Pris aussi aujour-
employé stade au même sens et au fém. d’hui, au sens de « sorte d'appareil télé-
dans Mélicerie, I, 3. Empr. du lat. siadium phonique », 1897. — Dér. : standardiser,
(du grec siadion). A été pris dès 1810 1915 ; -isation, 1904.
comme terme médical. STANNI-. Premier élément de mots sav.,
STAFF, fin du xix® s. Empr. de l’angl. tels que stannifère, 1829, tiré du lat. s{an-
staff, d’origine inconnue. num « étain ».
STAPHISAIGRE, nom de plante, 1685
STAGE, vers 1630. Empr., pour désigner (du xrr1e au xvrIe s. de nombreuses défor-
le stage d’un chanoine ou celui d’un avocat, mations telles que laffisagre, estafiacre, ete.).
du lat. médiéval stagium (fait sur l’a. fr. Empr. du lat. de basse ép. staphis agria
estage, v. étage), qui désignait de même le (mot pris au grec, où il signifie littéral.
stage d’un chanoine ; c'était en outre un « raisin sauvage »).
terme de droit féodal signifiant « devoir
du vassal à l’égard de son seigneur, qui STAPHYL(O)-. Premier élément de mots
consistait à venir demeurer pendant un sav., tels que staphylocoque, fin xiIxe s.,
temps indéterminé dans le château de . tiré du grec staphylé « grappe, grain de rai-
celui-ci, notamment en temps de guerre, sin »; certains termes médicaux, tels que
pour contribuer à la défense »; ce vassal staphyloplastie, 1872, sont faits avec sta-
s'appelait estagier. Sens plus étendu au phylé au sens de « luette » que ce mot grec
XIXe s. — Dér. : stagiaire, 1823. avait aussi.
STAGNER, 1788, rare ; stagnant, 1546 ; STAR, 1933; emprunté de l'anglais
stagnation, 1741. Le premier est empr. du slar « étoile » employé pour désigner les
lat. stagnare « être stagnant » (de s{agnum vedettes de cinéma.
« étang »), le deuxième du part. prés. sta- STARTER, 186?, dans un ouvrage trai-
gnans, le troisième est un dér. sav. du tant de l’Angleterre. Empr. de l’angl. star-
verbe lat. Sens plus étendu à partir du ter, dér. du verbe {o start au sens de « faire
XVIIIE S. partir dans une course », proprement « faire
STAKHANOVISME, 1949. Dér. du nom tressaillir », d’où « faire lever du gibier, etc. ».
de Stakhanov, qui a, le premier, organisé STATÈRE, nom d’une monnaie grecque,
méthodiquement le travail dans les mines 1376. Empr. du lat. de basse ép. siater (du
russes. grec stalér). On trouve aussi dès le xve s.
STALACTITE, 1719; stalagmite, xvrie stalere, fém., au sens de « balance », empr.
(sous la forme salamite, qui est probable- du lat. sialera « peson, balance » (de l’acc.
ment une faute d’impression). Dér. sav., slaléra du même mot grec staltér).
le premier, du grec stalaklos « qui coule STATHOUDER, xviie. Empr. du néerl.
goutte à goutte », le deuxième, du grec sladhouder (avec un { qu'on trouve aussi
sialagmos « écoulement qui se produit en néerl. au xviie s.), formé comme l’all.
goutte à goutte » (tous deux du verbe séa- Statthalier « gouverneur ».
* lazein) en vue de sens spéciaux. STATION, xr1°; mais paraît peu usité
STALLE, 1568 (écrit stal). En a. fr. au moyen âge et a alors d’autres sens que
estal, v. étal ; estal fut latinisé au moyen ceux du fr. moderne ; stationnaire, 1360,
STATION 608

rare jusqu’au xvri s. Empr. des mots lat. STÉARINE, 1814 ; stéarique, 1819. Dér.
stalio, propr. «état de ce qui se tient arrêté, sav. du grec siear « graisse ».
debout » (de sfare « se tenir debout, etc. »),
d’où différents sens : « arrêt, situation, STEEPLE-CHASE, 1828, dans un arti-
sentinelle, garde, etc. » (sens pris au moyen cle traitant de l'Angleterre. Empr. de
âge), siationarius (créé à basse ép.). Le l’angl. steeple-chase (comp. de steeple « clo-
sens astronomique est également latin. cher » et de chase, lui-même du fr. chasse,
D’autres sens, notamment le sens litur- littéral. « course au clocher ») ; on dit aussi
gique dans s{alion de la croix (assez récent, par abréviation steeple, 1885.
issu de l'emploi de station au xvires. «autel STÈLE, 1752. Empr. du lat. siela (du
marqué et ordonné pour y faire des priè- grec stélé).
res », 1552 ; en lat. médiéval s{atio a un
sens analogue), ont été développés en fran- STELLAIRE, 1778. Empr. du lat. de
Çais. Station navale, xvie, cf. l’angl. naval basse ép. stellaris (de stella « étoile »).
slation ; slalion, 1839, comme terme de
STENCIL, papier paraffiné servant de
chemin de fer, est peut-être aussi un pochoir pour la reproduction, 1923. Empr.
anglicisme, bien que slalion au sens de l’angl. siencil, lui-même dér. du verbe
d’ « endroit où s'arrêtent les voitures »
siencil « orner de couleurs étincelantes »,
ait existé dès 1761. — Dér. et Comp. : qui continue l’a. fr. estinceler, id.
stationner, 1596, d’où stationnement, xvrrre
(Turgot) ; sous-station (électrique), 1923. STÉNOGRAPHE, 1792; -phie, 1771
(une première fois 1572 au sens de « repro-
STATIQUE, 1634. Empr. du grec scien- duction résumée », D.). Formés avec le
tifique siatikos « qui concerne l'équilibre grec slenos « étroit, resserré » et les suff.
des corps » (de la famille de ‘istanai « pla- d'origine grecque -graphe, -graphie. —
cer, faire tenir »). Dér. : -phier, 1792 ; -phique, 1812.
STATISTIQUE, 1771. Empr. de l'all. STENTOR, 1610 (à voix de Sientor ; cris
Slatislik, 1749, fait lui-même sur le lat. de Sientor, 1576). Tiré de Stentor, nom d’un
moderne collegium slalisticum « (collège) guerrier grec dont il est dit dans l’/liade,
qui s'occupe de statistique » ; c'est Schmeit- 9, 785, que la voix était aussi puissante que
zel, professeur à Iéna, qui a créé cette celles de cent hommes réunis.
expression et Achenwall qui l’a introduite
en all., mais s/alistica est employé en italien STEPPE, 1679 (écrit step). Terme de
dès 1633, au sens de « science de l'État » ; géographie, empr. du russe siep dont le
stalisticum est un dér. moderne du lat. genre fém. est parfois remplacé en fr. par
slatus « état » avec une terminaison -isti- le masc.
cum d’un type assez rare ; le mot qui a STEPPER, verbe, 1873 ; stepper, subst.,
servi de modèle est peut-être phlogisticum, 1862. Empr. de l’angl. to step « trotter vive-
créé alors et qui eut beaucoup de succès, ment », stepper.
v. phlogistique. — Dér. statisticien,
1834. STERCORAIRE, 1752. Empr. du lat.
slercorarius (de siercus, stercoris « excré-
STATUE, vers 1120; statuaire, 1495. ments, fumier »).
Empr. du lat. slalua, statuarius (de la
famille de slare « se tenir debout »). —
STÈRE, 1795. Empr. du grec siereos
Dér. : statuette, 1800. « solide », lors de l'établissement du sys-
tème métrique.
STATUER, 1474 (une 1re fois vers 1280) ; STÉRÉO-. Premier
on trouve aussi en 1427 fu estalué. élément de mots
Terme sav., tels que stéréotype, 1800, d’où -typé,
jurid., empr. du lat. slaluere « placer, 1845, -ie, 1798, tiré du grec stereos «solide ».
établir », également usité dans la langue
jurid. STÉRÉOSCOPE, v. télescope.
STATU QUO, 1764. Terme de diploma- STÉRILE, 1370 (Oresme); stérilité,
tie, aujourd’hui pris dans un sens plus 1332. Empr. du lat. sterilis, sterilitas. —
étendu, tiré de la locution du lat. de la Dér. : stériliser, xvrrre (de Boufflers) ; une
diplomatie in siatu quo ante « dans l’état première fois en 1495 ; d’où stérilisation,
où (les choses étaient) auparavant ». 1869, -ateur, fin x1xe.
STATURE, xve; d’abord esialure, STERLET, « sorte d’esturgeon qui se
vers pêche en Russie », 1575 : en outre strelet,
1155. Empr. du lat, statura.
1803. Empr. du russe sierlyadi (d’où l’angl.
STATUT, 1282 ; en 1250 estatut. Empr. slerledey, 1591); l’angl. dit aussi sterlet,
du lat. de basse ép. siatutum (du verbe sta- attesté depuis 1698 ; il est pour le moment
luere). — Dér. : statuaire, 1582 ; d’où anti- difficile de reconnaître si le fr. vient de
statutaire, fin xixe. l’angl. ou inversement.
STERLING, dans livre sterling, monnaie
STAYER, 1895. Terme de sport, empr.
de compte anglaise, 1690. Mot angl. déjà
de l’angl. siayer, dér. du verbe to stay
empr. au moyen âge sous les formes fe )ster-
«montrer de l'endurance dans une course »,
propr. « soutenir lin, (e)strelin.
», lui-même de l'a. fr.
eslayer, V. étai. STERNUM, 1555 (alors et jusqu’au
XVI S. slernon). Empr. du grec slernon,
STEAMER, 1829. Empr. de l’angl. stea- remplacé par Paré et dp. le xvrrre s. par
mer, dér. de sleam « vapeur ». la forme latinisée sternum.
609 STRATAGÈME

STERNUTATOIRE, 1429; une pre- gnement à Athènes sous un portique), le


mière fois esternualore au xrrte s. Dér, deuxième est un dér. sav. de ce mot lat.
sav. du verbe lat. siernuiare « éternuer ». Stoïque, qui avait d’abord le même sens
STEWARD, 1833. Empr. de l'angl. que sloïcien, et qui a été encore employé
sleward. Le fém. slewardess a de même en ce sens par À. Chénier, a pris dès le
passé en franc. dès 1906. xXviIIe s., en fonction d’adj., le sens fig.
qui lui est réservé aujourd’hui. — Dér. :
STICK, « sorte de canne mince et sou- stoïcisme, 1688 (La Bruyère); sert aux
ple », 1795. Empr. de l’angl. stick. deux préc. ; on a aussi dit stoïcité, du xvi®
au XVIIIe S.
STIGMATE, 1406, comme terme reli-
gieux (Les stigmates de la Passion) ; au STOMACAL, 1425 ; stomachique, xvie
XVI s. « marque au fer chaud », d’où sens (Paré). Le premier est un dér. sav. du lat.
plus étendus, notamment dans les langues siomachus, le deuxième est empr. du lat.
techn. Empr. du lat. stigmala, plur. neutre stomachicus (du grec stomakhikos).
de stigma « marque de flétrissure, faite
au fer chaud » (mot pris au grec qui STOMATITE, 1836 ; stomatologie, 1859.
signifie proprement « piqûre », de stizein Dér. sav. du grec stoma, stomatos « bouche ».
« piquer »). — Dér. au sens propre du mot
lat. : stigmatisé, 1532, les autres formes STOPPER « faire arrêter un navire,
verbales sont moins usitées. etc. », 1847 ; stop, interjection, 1792. Empr.
des mots angl. {o stop « s'arrêter, arrêter »,
STIMULER, 1356 (Bersuire), déjà au stop, impératif de ce verbe. — Dér. : stop-
sens général; mais, au xvie s. (Paré) et page, 1888 ; auto-stop, 1960.
depuis le début du xix® s., particulière-
ment usité comme terme médical. Empr. du STOPPER « refaire une partie d'étoffe
lat. siimulare « aiguillonner » (de stimulus maille par maille », fin x1x°e, mais dès 1780
«aiguillon »). — Dér. : stimulant, adj., avant dans les patois de l'Ouest, sous la forme
1752 ; pris substantiv. depuis 1765 surtout estoper, et restauper dès 1730 en Flandres.
comme terme de médecine ; développe- Empr. du néerl. sioppen, même mot et
ment de sens parallèle à celui du verbe. même sens que l’all. siopfen. — Dér. :
stoppage, id. ; stoppeur, ou -euse, id.
STIPE, terme de botanique, 1778 ; sti-
pule, id., 1749. Empr. du lat. stipes au sens STORE, 1665. Empr. de l’it. siora,
de « tige », stipula « petite tige ». forme dialectale de l'it. commun siuoja
« natte, store », lat. siorea « natte », d’où
STIPENDIÉ, 1460 (Paiement des stipen- aussi esp. estera.
diés) ; stipendiaire, xive s. Empr. des mots
lat. stipendiatus « qui est à la solde » (du STRABISME, 1660. Empr. du grec sira-
verbe stipendiari), stipendiarius (de sti- bismos (de sirabos « louche »).
pendium « solde militaire ») ; tous deux ont STRANGULATION, 1549. Empr. du lat.
été pris rapidement dans un sens péjor.; sitrangulatio (de sirangulare « étrangler »)
stipendier a pris en outre, dès 1479, le pour servir de nom d’action à éfrangler.
sens de « prendre à sa solde », d’après le
part. passé qui est plus usuel que les STRANGURIE, terme médical, 1314.
autres formes du verbe. Empr. du lat. siranguria (du grec siran-
gouria, de sitranx « goutte » et de ourein
STIPULER, 1289; rare avant le xv1es. ; « uriner »).
stipulation, 1231. Termes jurid., empr. du
lat. stipulari, stipulatio. STRAPASSER, terme de peinture,
« peindre à la hâte », 1684 ; d’abord estra-
STOCK, terme de commerce, 1872 ; une passer, 1611 « harceler, accabler ». Empr.
première fois en 1656. Empr. de l’angl. de l’it. strapazzare « malmener, gâcher (la
stock, propr. « souche, tronc », d’où se sont besogne) ».
développés de nombreux sens dér. (c’est
le même mot que celui d’où vient le fr. STRAPONTIN, vers 1570 ; on a dit aussi
élau). Pris aussi comme terme de Bourse, strampontin, vers 1440, et estrapontin jus-
1769, cf. Siock-Exchange « bourse des va- qu’au xvirie s. Au xvie avait les sens de
leurs à Londres ». — Dér. : stocker, fin « matelas » ou « hamac », encore début
xixe, d’où stockage, id. xIxe; a pris le sens de « siège mobile
dans une voiture » au xvie s., puis de
STOCKFISCH, sorte de morue salée et «strapontin de théâtre » depuis 1764. Empr.
séchée à l’air, 1387; aussi slofir, 1393; de lit. sirapuntino « sorte de matelas »,
autres formes : s{ockvis, stockfisse, stocphis, dér. de strapunlo « id. », autre forme de
xvie (Paré), etc. Empr. du moyen néerl. trapunito (les deux préf. sira et tra alternent
siocvisch (aujourd’hui stokvis), littéral. souvent), dér. de l’anc. it. trapungere « pi-
« poisson de bâton » (soit « séché sur des quer à l'aiguille » (du lat. transpungere
bâtons », soit « raide comme un bâton »); «piquer à travers ») ; c’est de Gênes que le
l’angl. stockfish et l’all. Stockfisch, de même mot a probabl. pénétré comme t. de
origine, ont pu influencer la forme du matelot en Provence et de là en fr.
mot fr.
STOÏQUE, 1488 ; stoïcien, xiv® (Ores-
STRASS ou stras, 1746. Tiré de Stras,
nom du joaillier qui mit à la mode ce genre
me). Le premier est empr. du lat. sioicus de pierre composée.
(du grec sioikos, dér. de sioa « portique »;
ainsi nommé, parce que le fondateur de STRATAGÈME, xvie (H. Estienne);
l'école, Zénon, 1ve s., donnait son ensei- une première fois sirallegeme, au xv® 5.,
DICT. ÉTYM. 39
STRATAGÈME 610

dans un titre. Empr. du lat. strategema STROPHE, 1550 (Ronsard, au sens


« ruse de guerre », d’où « stratagème » (du anc. ; appliqué alors seulement à des odes ;
grec siratégéma). L’a de la deuxième syl- sens moderne au xix° s., équivalent de
labe est dû à une assimilation à l’a de la siance). Empr. du lat. siropha (du grec
syllabe initiale. strophé, du verbe strephein « tourner »). —
STRATE, terme de géol., 1805. Empr. Dér. : strophique, fin x1xe.
du lat. siratum « chose étendue », part. STROPIAT, terme pop., fin xix°. Empr.
passé substantivé de sternere. de l’it. stroppialo « estropié ».
STRATÈGE, 1721, terme d’antiquité STRUCTURE, vers 1500; au xive s.
grecque ; stratégie, 1803 ; stratégique, 1323. au sens de « construction ». Empr. du lat.
Empr. du grec siratégos « chef d’armée », struciura (de siruere « construire »). —
stratégia « fonction de stratège », -gikos. Comp. : superstructure, 1764 (Voltaire),
Stratégie a été pris pour exprimer une no- d’après le verbe lat. superstruere.
tion spéciale de l’art militaire et a entraîné
l’empr. de stratégique ; siratège a pris, par STRYCHNINE, 1818 ; ainsi appelée par
suite, un sens nouveau, bien qu’on préfère Pelletier et Caventou qui découvrirent ce
pour désigner « celui qui connaît la stra- corps en 1818. Dér. sav. du lat. des bota-
tégie » le dér. stratégiste, 1831. nistes sirychnos « vomiquier » (du grec
strykhnos, nom de diverses plantes véné-
STRATIFIER, 1675 ; stratification, 1620. neuses) dont la graine, dite noix vomique,
Termes de chimie, qui servent aujourd’hui contient de la strychnine.
plutôt dans d’autres techniques (minéra-
logie, etc.). Empr. du lat. des alchimistes STUC, 1524 ; stuccateur, 1641 (Poussin).
stratificare, -atio (de siratum qui désigne Empr. de l’it. s{ucco, stuccatore ; stucco est
divers objets étendus : natte, plancher, etc., lui-même empr. d’un longobard *s{ukki,
sur le modèle des nombreux mots en -ficare, qu’on restitue d’après l’anc. haut all.
-ficatio). stucki « morceau ; croûte, enduit », cf. all.
Stück.
STRATOSPHÈRE, 1898. Comp. du lat. STUDIEUX, xri°. Empr. du lat. s{udio-
siralus « étendu » et de sphère. sus (de siudium « zèle, étude ») pour servir
STREPTOCOQUE, 1907. Comp. du grec d’adj. à élude.
strepltés « tordu » et de coque. STUDIO, 1829. Empr. de l’anglo-
STRICT, 1503 (attesté alors indirecte- américain siudio, d'abord au sens d’ « ate-
ment par l’adv. -ment); rare avant le lier de peintre, de sculpteur » (d’où « sorte
Xvii® s. Empr. du lat. siricius « serré, de salon ressemblant à un atelier »), puis
étroit », d’où aussi « strict ». d’ « atelier de photographie » et enfin
« d’atelier de cinématographie »; le mot
STRIDENT, vers 1500 ; mais rare avant anglo-américain est empr. lui-même de
1834. Empr. du lat. siridens, part. prés. du lit. siudio au sens d’« atelier de peintre,
verbe stridere « faire entendre un bruit de sculpteur » (du lat. studium).
aigu ». — Dér. : stridence, 1907 ; on a dit
aussi sirideur, xvi® (une première fois au STUPÉFIER, xvi® (Paré); stupéfait,
XIIe S. sous la forme altérée sirendor), peu 1718; stupéfaction, vers 1500. Empr. des
usité aujourd’hui, empr. du lat. siridor. mots lat. stupefacere (francisé d’après les
verbes en -fier), stupefactus, stupefaclio
STRIDULATION, 1838 ; striduleux, 1778. (créé à basse ép.). — Dér. : stupéfiant, fin
Dér. sav. du lat. stridulus « sifflant », de XVI (Charron narcotique, stupéfiant),
la famille de siridere. comme terme médical ; développement de
STRIE, 1742 (déjà en 1545 et 1553); sens parallèle à celui du verbe.
strié, 1534 (Rab.) ; striure, 1567. Les deux STUPEUR, x1v°, souvent employé com-
premiers empr. du lat. siria, striatus; le me terme de médecine; stupide, 1377;
troisième, francisation du lat. siriatura. d’abord au sens de « paralysé », ensuite de
STRIGE, 1534 (Rabelais, sous la forme «frappé de stupeur », encore chez V. Hugo ;
siryge, orthographe encore usitée). Mot sens moderne dès fin xvi® s.; stupidité,
littéraire. Empr. du lat. striga (moins usité 1541 (Calvin), d’abord au sens de « stu-
que sirir, strigis, du grec strinx) « oiseau peur », encore usité au xvII® s.; sens
de nuit qui passait pour sucer les enfants moderne dès le xvie. Empr. du lat. stupor,
au berceau », propr. « grand-duc » ; strige stupidus, slupiditas (de stupere « être
est fait parfois masc. d’après vampire. engourdi, frappé de stupeur »). Les sens
Une forme siriga au sens de « sorcière » a modernes de slupide, stupidilé existent
vécu dans le latin parlé et a donné notam- déjà en lat. class. : supor même signifie
ment l’a. fr. esirie, cf. it. strega « sorcière », aussi « stupidité ». -
lat. siriga. STYLE, 1548, au sens de « manière
STRIGILE, terme d'antiquité, 1762 d'exprimer sa pensée », d’où sont sortis
(1727 sirigil, masc.; une première fois les sens modernes, notamment en par-
strigile, 1544, Scève). Empr. du lat. sirigi- lant des beaux-arts, au xvrre 5. Empr.
lis « étrille », fém., v. étrille. du lat. stilus, écrit aussi stylus, d’où l’or-
thographe du fr., d’après le grec stylos
STRIP-TEASE, 1963. Empr. de l’an- « colonne » par faux rapprochement ; celui-
glais d'Amérique strip-leuse, comp. de ci signifie propr. « poinçon servant à écri-
strip «enlever » et tease « mystifier ». re », sens empr. vers 1380, d’où aussi de
611 SUBORDONNER

nouveaux sens techn. Avait été empr. sous) » (de subire, v. le préc.). L’a. fr. avait
vers 1280, sous les formes stile, estile, au un adj. soude, rare et attesté seulement à
sens jurid. de « manière de procéder », d’où la forme fém. (il était inutile en effet à
« métier », encore usité au xvire s. dans la côté de soudain) et surtout un adv. soude-
région du Nord-Est, puis « manière de ment, usuel jusqu’au xvi°s.
combattre » au xve s. et « manière d’agir »
(en général), encore usuel au xvII® s., au- SUBITO, 1771. On dit aussi subilo
jourd’hui usité seulement dans des locu- presio. Terme fam., qui vient des écoles,
tions telles que (faire) changer de style ; empr. du lat. subilo, v. le préc. (preslo
c’est le sens de « manière de procéder » est l’it. præsto).
qui explique aussi l'emploi de siyle pour SUBJECTIF, 1801 (déjà rarement du
la chronologie du moyen âge. Clause de XIVe au XVI° s., d’après le lat. scolastique
style est une expression de la langue des subjectivus, d’où aussi l’adv. -ivement,
notaires du xvrie s. environ. Le sens jurid. 1495) ; subjectivité, 1803. Termes de philo-
du moyen âge et celui de « manière d’agir » sophie, empr. de l’all. de Kant subjektiv
ont pénétré dans les langues voisines, cf. (fait sur le lat. scolastique), Subjektivität.
it. siile « façon », esp. estilo « id. ». — Dér. : L’adj. a pris des sens plus étendus. — Dér. :
1° au sens de « manière d'agir » : stylé,
subjectivisme, 1872.
XIVE (ignorans ou mal slilés) ; cf. aussi
notre bien stylé ; d’où -er, 1490 ; 2° d’après SUBJONCTIF, xviie (Grammaire de
les emplois modernes : styliser, fin xix®, Port-Royal, dès 1530 comme adj., chez
d’où -ation, id.; styliste, 1845; stylis- G. Tory). Empr. du lat. grammatical sub-
tique, 1872, est empr. de l’all. stylistik junctivus « subordonné », qui avait toute-
(attesté depuis 1800). fois d’autres emplois ; le subjonctif s’y
disait conjunctivus, d’où conjonctif, du xv®
STYLET, 1586 (écrit slilet). Empr. de au XIXe S.
lit. stiletlo, dér. de stilo « sorte de poi-
gnard », lat. stilus; l'y est dû à l'influence SUBJUGUER, x1i°. Empr. du lat. de
du mot stylus. basse ép. subjugare « faire passer sous le
joug, subjuguer » (de jugum « joug »).
STYLITE, 1608. Empr. du grec stylilés
(de siylos « colonne »). SUBLIME, 1495, au sens moderne ; une
première fois vers 1400, comme terme d’al-
STYLOBATE, 1545. Empr. du lat. stylo- chimie au sens de « sublimé » ; sublimité,
baies (du grec siylobalés). 1212, d’abord au sens de « caractère de ce
STYLOGRAPHE, fin xixe. Empr. de qui est placé très haut », encore chez Bos-
l’anglo-américain siylograph, comp. du suet ; sens moderne, depuis le xvi®s. Empr.
grec stylos « poinçon à écrire » et du suff. du lat. sublimis « haut, élevé dans les airs »,
sav. -graph, v. -graphe. Abrégé en stylo, d’où « sublime », sublimitas « hauteur »,
1923: d’où « sublimité ».
SUAIRE, xri° s. Francisation, d’après SUBLIMER, x1v°, comme terme d’alchi-
suer, du lat. eccl. sudarium, linge qui a mie, conservé ensuite dans la langue de la
servi à ensevelir Jésus, en lat. class. « mou- chimie au sens de « soumettre à la chaleur
choir (pour s’essuyer le visage) » ; rapide- dans un vase clos des corps solides de façon
ment pris dans un sens plus étendu. que les éléments volatiles s'élèvent à la
partie supérieure du vase, où ils redevien-
SUAVE, 1503 (attesté alors indirecte- nent solides et se fixent » ; sens figuré dès
ment par l’adv. -ment); suavité, x1r°. le xvine s., au part. passé pris substantiv. ;
Empr. du lat. suavis, suavilas ; suave a sublimation, xve. Empr. du lat. des alchi-
supplanté souef, forme pop. usuelle jus- mistes sublimare, sublimatio, en lat. anc.
qu’au début du xvire s. (encore angevin « élever, élévation » (de sublimis) ; ces sens
souef « doux au toucher ») et qui avait ont été parfois relevés dans le verbe en
donné naissance à un dér. souevelé (qui a 1350 et encore chez Amyot, dans le subst.,
suivi le sort de souef). au xvie . — Dér. du verbe : sublimé (cor-
rosif), xve (Villon) ; cf. aussi arsenic subli-
SUB-. Préf. sav. empr. du lat. sub
mé, 1314.
« SOUS ». SUBLUNAIRE, 1548 (Rab.). Empr. du
SUBALTERNE, xve. Empr. du lat. de lat. de basse ép. sublunaris (de luna
basse ép. subalternus. « lune »).
SUBDIVISER, 1377 ; en outre sousdivi- SUBMERGER, 1393 ; submersion, x11I° ;
ser, 1314, encore dans le Dict. de l’ Acadé- rare avant le xvire s.; submersible, 1798.
mie ; subdivision, 1314 ; en outre soubzdi- Les deux premiers sont empr. des mots lat.
vision, XV°, d’où sous-, également dans le submergere, submersio (de basse ép.), le
Dict. de l’Académie. Empr. du lat. subdi- troisième est un dér. sav. de submersus,
videre (francisé d’après diviser), -Sio. part. passé du verbe lat. — Comp. : insub-
mersible, 1775.
SUBIR, 1481. Empr. du lat. subire,
propr. « aller sous », d’où « ressortir d’un SUBODORER, 1636 (Richelieu), comp.
tribunal », « supporter ». Le verbe a été sav. du lat. sub et de odorari « flairer ».
empr. d’abord au sens juridique. SUBORDONNER, 1496, rare avant le
SUBIT, xr1° (attesté alors indirectement XVIIe s.; subordiner en 1596; cf. l’adv.
par l’adv. -ement). Empr. du lat. subilus subordinément, en 1578, encore usité au
« qui vient à l’improviste (propr. par des- xvii® s.; subordination, 1610. Empr. du
SUBORDONNER 612

lat. médiéval subordinare, -alio : le verbe du verbe substantif ou verbe être ; a été
a été francisé d’après ordonner. — Dér. : appliqué aussi par les grammairiens fran-
subordonné, subsi., début xrx°, d’où in-, çais au nom substantif, opposé à l’adj. —
1789 ; insubordination, 1770. Dér. : substantiver, 1380, on a dit aussi
SUBORNER, 1278 ; subornation, 1310. -tifier, xvire (Vaugelas).
Empr. des mots lat. subornare, propr. SUBSTITUER, 1355; substitut, 1332,
« équiper », d’où spécial. « dresser en vue terme jurid. qui a charge d’acception;
d’une mauvaise action », subornatio (lat. substitution, x111°, employé surtout dans
médiéval). — Dér. : suborneur, 1495. des langues techn. Empr. des mots lat.
SUBRÉCARGUE, 1704. Empr. de l'esp. subslituere « mettre sous, à la place », substi-
sobrecargo, tiré du verbe sobrecargar « sur-
lulus, part. passé, substitutio.
charger », littéral. « celui qui est en sur- SUBSTRAT « parler original d’un peuple
charge »; Voltaire, en 1764, a employé la qui, vaincu, finit par adopter la langue de
forme supercargue, où le préf. est latinisé ; son Vainqueur, souvent plus faible numé-
l’u de subrécargue paraît être dû à cette riquement », vers 1920 (subsiratum en 1882;
forme. dès 1745 substratum, terme de philos. « ce
qui existe dans un être indépendamment
SUBREPTICE, x1r1° (sous la forme SUTT-, de ses qualités »). Empr. du lat. substratum,
usuelle au moyen âge). Terme de droit, part. passé de substernere « étendre sous ».
pris de bonne heure avec un sens plus
étendu. Empr. du lat. subreplicius « clan- SUBSTRUCTION, 1823 ; une première
destin » (de subrepere «se glisser dessous »). fois en 1544. Empr. du lat. subsiruciio (de
La langue du droit a un subst. correspon- subsiruere « construire en dessous »).
dant subreption, attesté dès le xrve s., SUBTERFUGE, 1316. S’emploie surtout
empr. du lat. jurid. subrepiio. au plur. Empr. du lat. de basse ép. subier-
SUBROGER, xive (Bersuire) ; d’abord fugium (de subierfugere « fuir secrète-
subroguer, 1332, encore xvi° ; subrogation, ment »).
1401, Termes jurid. empr. du lat. subro- SUBTIL, xive ; subtilité, xrre. Empr. du
gare « proposer un magistrat à la place lat. sublilis « délié, ténu », d'où « ingé-
d’un autre », d’où « nommer cette per- nieux, etc. », subiilitas. L’a. fr. disait sur-
sonne proposée », et du lat. médiéval tout soutil, souvent refait en soutif et un
subrogalio. — Dér. : subrogatoire, 1842, dér. soutieuté, soutiveté, tous deux usuels
avec le suff. -aloire, fréquent dans les dér. jusqu'au xve s. Soulil, qui survit dans
sav. quelques patois, continue le lat. sublilis,
SUBSÉQUENT, 1370 (Oresme). Empr. comme l’it. sottile « menu, fluet, subtil » :
du lat. subsequens, part. prés. de subsequi mais l’adj. fr. n’a conservé que le sens in-
tellectuel, ce qui explique qu'il subit de
« suivre de près »; vers 1260 (É. Boileau) bonne heure l’action du mot latin. —
on avait déjà fait un adv. subséquemment
sur le modèle Dér. : subtiliser, xv° « rendre subtil, agir
du lat. de basse ép. subse-
quenter. d’une manière subtile », d'où, dans la
langue fam., « dérober », xvirre (signi-
SUBSIDE, 1314 (succide en 1220). Empr. fiait aussi alors « tromper quelqu'un ») ;
du lat. subsidium « secours, renfort, subtilisation, terme de chimie, 1566.
réserve » (de subsidere au sens de « être
placé en réserve »).
SUBULÉ, terme de botanique, 1749.
Dér. sav. du lat. subula « alène ».
SUBSIDIAIRE, 1355 (Bersuire). Empr. SUBURBAIN, 1380, rare avant le xrxes.
du lat. subsidiarius « de réserve » pour des Empr. du lat. suburbanus (de urbs « ville »).
sens surtout jurid.
SUBVENIR, vers 1380; subvention,
SUBSISTER, 1495. Empr. du lat. sub- 1214. Empr. des mots lat. subvenire « venir
sisiere, propr. « s'arrêter », d'abord « rester, au secours de », subventio (créé à basse
durer », puis « subsister » à basse ép. — ép.) « aide, secours », sens quelquefois pris
Dér. : subsistance, 1471 (en 1514 au sens au moyen âge; subvention, qui désignait
de « fait de subsister » en parlant d’un d’abord un secours d'argent, a pris de-
édifice) ; le plur. au sens de « vivres » de- puis 1770 le sens restreint de « fonds accordé
vient usuel à la fin du xvrre s. ; autre mot pour subvenir à une entreprise ». —
que subsislence, 1541 (Calvin ; déjà 1496, Dér. :
subventionner, 1832.
écrit alors -ance), qui est le calque du lat.
eccl. subsislentia « substance, essence ». SUBVERTIR, 1295, peu usité aujour-
d'hui; subversion, 1190; subversif, 1780.
SUBSTANCE, vers 1120 ; substantiel, Les deux premiers sont empr. des mots
vers 1265. Empr. du lat. philosophique lat. subueriere « retourner, renverser »,
subslantia (de substare « se tenir dessous »), subuersio (créé à basse ép.) ; le troisième
qui traduit le grec hypostasis, et du dér. est un dér. sav. du part. passé subversus,
subsiantialis (créé à basse ép.). Sens plus
étendus depuis le xve s. Substance a sou- SUC, 1488. Empr. du lat. sucus « sève ».
vent un sens proche de subsistance au xvrie SUCCÉDANÉ, 1690 (écrit -née). Empr.
et au xvine s. En substance « en gros », du lat. succedaneus (de succedere au sens
XVIIe (Pascal) est d’abord un terme de de « remplacer »).
procédure, usité depuis le xrve 8.
SUCCÉDER, 1355 (Bersuire), au sens
SUBSTANTIF, xive. Empr. du lat. gram- moderne ; a eu aussi le sens de « parve-
matical substantivum, qui ne se disait que nir à », encore chez Montesquieu (mais la
613 SUFFIXE

construction transitive qu’on rencontre SUCRE, xri°. Empr. de lit. zucchero,


au XIVe S., CÎ. ils n'eurent nuls enfans qui empr. lui-même de l'arabe soukkar ; celui-ci
succedassent le royaume n’a pas vécu au- vient de l'Inde (en sanskrit çarkarä, pro-
delà du xv®s.), et surtout celui d’ «arriver prement « grain ») par l'intermédiaire de
d’une manière favorable ou défavorable », la Perse, où le sucre a été raffiné; d’où,
usuel au xvI° et au XVII 5. ,V. succès ; suc- au 17 s. après J.-Chr., le grec sdkkharon,
cesseur, 1174 ; successif, 1372 ; succession, le lat. saccharum. Employé d’abord uni-
1200. Empr. des mots lat. succedere, propr. quement dans la médecine, à cause de sa
«s’avancer sous », d’où « venir après, suc- rareté, le sucre ne devint un article de con-
céder », puis « avoir un heureux succès », sommation que depuis que les Arabes se
successor, successivus (de l’époque impé- mirent à planter la canne à sucre en An-
riale), successio. Le verbe fr. a un sens plus dalousie et en Sicile. La fabrication du
large que le lat. — Dér. de successeur sucre fut perfectionnée surtout dans cette
d’après la forme du lat. successor : sueces- île, et Frédéric II en favorisa le dévelop-
soral, terme de droit, 1829. pement. L’exportation de Sicile porta le
SUCCÈS, 1546 (Rab.), au sens de mot arabe dans les pays chrétiens (à l’ex-
« suite, succession de temps ou d’actes », ception de l'Espagne, qui dépendait de la
encore chez Ronsard et d’Aubigné; le fabrication andalouse, d’où esp. azücar,
sens de « ce qui arrive de bon ou de mau- port. açucar), d'où it. zucchero, fr. sucre,
vais, résultat bon ou mauvais » apparaît all. Zucker, angl. sugar. V. candi. — Dér. :
chez Rabelais, est usuel au xvri® s., moins sucrer, xv°, le part. passé dès le xx11e 5.
au xvir1e (pourtant Voltaire) et tombe en (sous la forme franc-comtoise socré) ; su-
désuétude au xix® s. Dès La Rochefou- crerie, 1658 ; sucrier, objet, 1611 ; adj. ou
cauld, vers 1660, le sens moderne de subst. « relatif au sucre », 1555, « confi-
« réussite » fait son apparition ; il supplan- seur », 1596.
tera celui de « résultat » dont il est issu. SUD, xr1°. Empr. de l’anc. angl. sup,
Empr. du lat. successus, propr. « action d’où l’angl. south.
d'avancer, succession ». Le sens de « résul-
tat » ne vient pas du mot latin, mais de SUDATION, 1812, une première fois en
l’influence de succéder. Les deux mots 1547 ; sudorifère, 1735 ; sudorifique, xvi®
étaient plus liés alors qu'aujourd'hui. — (Paré) ; sudoripare, 1870. Mots techn. ; les
Dér. : insuccès, 1794. deux premiers sont empr. des mots lat.
sudatio (de sudare « suer »), sudorifer (lat.
SUCCIN « ambre jaune », 1663. Empr. médical), les deux autres ont été faits avec
du lat. succinum (forme moins correcte que le lat. sudor « sueur », et l’un avec le suff.
sucinum). -fique, du lat. -ficus, sur le modèle de mots
tels que prolifique, l’autre avec le verbe
SUCCINCT, 1491; mais l’adv. -ement lat. parere « engendrer », v. vivipare.
est déjà attesté au xrve s. Empr. du lat.
succincius, propr. « retroussé, court-vêtu » SUER. Lat. südäre. It. sudare, esp.
(du verbe succingere « retrousser un vête- sudar. Dér. : suée, vers 1480 ; suette,
ment »), d’où « serré, bref ». XvI® (Paré); suint (1309, au xve s. aussi
suing) ; formé avec le suff. collectif -in, cf.
SUCCION {au lieu de suction), 1314. croitin (-{ d’après oinl, de oindre), d’où
Dér. sav. de sucius « succion » (de sugere suinter, 1553, suintement, 1722 ; ressuer,
« sucer »). XII®,
SUCCOMBER, 1356. Empr. du lat. suc- SUEUR. Lat. südôrem, acc. de südor.
cumbere. It. sudore, esp. sudor.
SUCCUBE, xive. Empr. du lat. succuba SUFFÈTE, ancien magistrat de Car-
« concubine », auquel a été donné un sens thage, xvrie. Empr. du lat. suffes, -etis
spécial ; masc. d’après incube. (moins correct que sufes), mot d’origine
punique, cf. hébreu schôfet « juge ».
SUCCULENT, vers 1500. Empr. du lat.
succulentus. — Dér. : succulence, 1769. SUFFIRE, 1495. Réfection, d’après le
mot lat., de l’a. fr. soufire, x11°, francisa-
SUCCURSALE, 1675 [église succursa- tion plus forte du lat. sufficere, propr.
le). Terme d'administration eccl., pris ré- « mettre sous, fournir, etc. » et spécial., en
cemment dans un sens plus étendu, 1844 ; construction intransitive, « suffire ». —
Buffon l’a déjà pris comme adj. au sens Dér. : suffisant, xve s. (d’abord so/ffeisanz,
de « qui supplée ». Dér. sav. du lat. suc- x11e), d’où insuffisant, 1323 ; en outre in-
currere « secourir » d’après le supin suc- souff- avant le xvre s.; fait à l'imitation
cursum. du lat. de basse ép. insufficiens ; suffi-
SUCER. Lat. pop. *sücliäre, dér. du lat. sance, xv° (d’abord souffisanche, vers
class. sügere (supin süclum) ; rare en dehors 1200), d’où insuffisance, 1323 (et insouff-
du fr., cf. it. succiare (en outre suggere, de avant le xvie s.) ; fait à l’imitation du lat.
sügere), à. pr. sussar. Par sa structure le de basse ép. insufficentia.
verbe fr. a aussi une certaine valeur ono- SUFFIXE, 1838. Empr. du lat. suffixus,
matopéique, cf. it. ciocciare et Cioccia, part. passé de suffigere « fixer sous » en
« voce colla quale i bambini chiamano la vue de son sens grammatical par opposi-
poppa ». — Dér. : sucette, fin xIX°; suçoir, tion à préfixe. On a aussi empr. affixe,
1765 ; suçon, 1690 ; suçoter, 1550 (Ron- 1838, du lat. affixus « fixe à » comme terme
sard) ; resucée, 1883, par l'intermédiaire de grammaire hébraïque, aujourd’hui de
d’un verbe resucer, 1611. sens plus étendu, puis fait infixe, 1877, sur
SUFFIXE 614

le lat. infitus « fixé dans » pour désigner SUIVRE. D'abord sivre, cf. sivral, Ro-
un élément introduit dans le corps d’un land, 136, puis suivre, vers le xrre s.,
mot. — Dér. : suffixer, 1876, -ation, id. d’après (il) suit, d’abord siut, devenu suit
SUFFOQUER, xive, au sens propre: par métathèse, v. suif. Lat. pop. sequere,
sens étendu à la vie psychique à partir lat. class. sequi. — Dér. et Comp. : suite,
du xvu® s.; suffocation, xiv®. Empr. du d’abord siwle (lire siute), xr1°, puis suile,
lat. suffocare « étouffer », suffocatio. XIII, fém. pris substantiv. d’un part,
*sieul, disparu avant les premiers textes.
SUFFRAGANT, vers 1180. Empr. du lat. lat. *sequitus, d’où suitée, dans jumeni
eccl. suffraganeus, dér. du verbe du lat. suilée, 1872, ensuite, 1532, au xvire et
class. suffragari « favoriser, seconder » (de XVIIIe s. aussi ensuile de ; suivant, subsi.,
suffragium) et écrit suffragant d’après le XVI®; au moyen âge se disait des petits
part. prés. du verbe lat. d'un animal (vache, truie, jument) ; sui-
SUFFRAGE, 1289. Empr. du lat. suf- vant, prép., 1459, d’où suivant que, 1534;
fragium, propr. « tesson avec lequel on suiveur (de femmes), 1853 ; ensuivre (s’),
vote ». XIIe (J. de Meung); poursuivre, xrre
(d’abord persuir), d’où poursuite, 1247;
SUGGÉRER, xve (suggerir en 1380); au moyen âge signifie parfois simplement
suggestion, 1174. Empr. des mots lat. « suite ».
suggerere, propr. « porter sous », d’où
«procurer » (sens que M. Régnier a repris), SUJET « soumis à une autorité souve-
puis « inspirer, suggérer », suggeslio (qui raine », vers 1120 (écrit sugez) ; souvent
n’a eu le sens de « suggestion » qu’à basse subject jusqu’au xvie s., outre d’autres
ép.). — Dér. : suggestionner, 1838 (une formes plus francisées ; sujétion, xr1° (sous
1'e fois chez Chastellain, vers 1460). la forme subjection, usuelle jusqu’au
XVI s.). Empr. du lat. subjectus, subjectio
SUGGESTIF, 1857 (Ces écrits. sont très (qui n’a pris le sens d’ « assujettissement »
suggestifs, pour nous servir encore d’un mot qu’à basse ép.), de subjicere « mettre sous »,
anglais, dans la Revue des Deux-Mondes). d’où «soumettre ». — Dér. : assujettir, 1493,
Empr. de l’angl. suggestive (du lat. sug- assujettissement, 1572.
gesius, part. passé de suggerere).
SUJET, terme didactique, xive (Ores-
SUICIDE (acte). Mot attribué à l’abbé me). Empr. du lat. scolastique subjectum
Desfontaines (1685-1745) et fait avec le lat. « ce qui est subordonné », distinct de objec-
sui « de soi » sur le modèle d’homicide. — tum, v. objet, d’où vient en partie l’oppo-
Dér. : suicider (se), 1795. sition de sujet et objet en philosophie. Sujet
SUICIDE (personne), 1765. Tiré de sui- a pris à partir du xvi® s. les sens plus
cide (acte) sur le modèle des deux sens étendus de « matière, cause, motif », puis
d’homicide. de « personne qui est motif de quelque
SUIE, vers 1160. Mot propre au gallo- chose, etc. », puis de « personne (considérée
dans ses aptitudes) ». Sujet, terme de gram-
roman, aux formes multiples qu’on a de la maire, xvie, vient du lat. grammatical.
difficulté à ramener à un seul type étymo-
logique, cf. a. pr. suja, sueja, suga, lorrain SULFATE, 1787 (G. de Morveau) ; sul-
seuche. Continue un gaul. *sudia (attesté fite, id. ; sulfure, id.; sulfureux, 1549 (au
dans des gloses sous la forme sugia, avec Xv°® -ieux), une première fois au XIIIe s.
graphie inverse), dont l'existence est as- (J. de Meung) ; sulfurique, 1787 ; une pre-
surée par le vieil irlandais süide « suie ». mière fois en 1585. Les trois premiers et le
Le lat. disait /ül1go, d'où it. fuliggine (et cinquième sont des dér. sav. du lat. sulfur
fi-) et esp. hollin. « soufre »; le quatrième est empr. du lat.
SUIF. D'abord seu, x11e, d’où siu, puis, de basse ép. sulfurosus. La chimie forme
par métathèse, sui (cf. suivre), et enfin en outre de nombreux comp. avec sulf(o)-
suif, xirie, pour l’f, v. soif. Lat. sébum. It. comme premier élément. — Dér. : 1° de
sego, esp. sebo. — Dér. : suiffer, 1643, sulfate : sulfaté, 1802, -ter, 1872 ; 2° de
d’abord sieuver, 1537. sulfure : sulfuré, id. ; a déjà été formé fin
Xve d’après le lat. sulfuratus, -reus.
SUI GENERIS, 1777. Expression techn.,
mots latins signifiant « de son espèce ». SULKY, voiture légère à une place, 1860.
Mot angl, d'origine incertaine, propr.
SUINT, SUINTER, v. suer.
« boudeur ».
SUISSE, 1668 (Racine), au sens de
« portier », vieilli depuis le xvitre s. ; au- SULTAN, 1540. Empr. du mot arabo-
jourd’hui suisse (d'une église). Tiré de turc solfän. Du xve au xvrrre s. on a em-
Suisse, nom de peuple, pour une raison ployé une forme soudan (conservé dans le
discutée ; les uns disent que l'emploi de nom du Soudan, pays qui était autrefois
suisse a la même origine dans les deux sens, soumis au sultan d'Égypte ; cf. aussi it.
et qu’il vient de ce que le costume du por- soldano), empr. de l’arabe et qui désignait
tier ou du suisse d'église était analogue à des princes mahométans, notamment le
celui des anciens Suisses de la garde du souverain d'Égypte. — Dér. : sultane,
roi; d’autres expliquent suisse « portier » 1561 (dans le titre d’une tragédie La
par le fait que beaucoup de portiers étaient Suliane, de G. Bounyn).
d’origine suisse, au xviie s., et voient dans SUMAC, nom de plante, xt, Empr.
le deuxième emploi une extension de sens. de l’arabe soummäq par l'intermédiaire du
On manque de textes qui justifient l’une latin des apothicaires. Au moyen âge et
ou l’autre de ces deux explications. aujourd’hui encore la culture de cette
615 SUPPLÉTIF

plante a été particulièrement intense en SUPERPOSER, 1762 (J.-J. Rousseau) ;


Sicile, et c’est de là que son nom se sera superposition, 1613. Empr. du lat. anc.
répandu dans les pays chrétiens. superponere (francisé d’après poser) et du
SUMMUM, 1806. Mot lat. signifiant lat. médiéval superpositio (en lat. anc. ne
« ce qui est au plus haut point », d’abord
signifie que « paroxysme d’une maladie »).
employé dans des langues techn. SUPERSTITION, 1375; superstitieux,
SUNLIGHT, vers 1930, terme de ciné-
id. Empr. du lat. superstitio, superstitiosus
matographie; mot anglo-américain, de (de superstare « se tenir au-dessus »; le
développement de sens n’est pas clair).
sun « soleil » et light « lumière ».
SUPERSTRAT « langue parlée par un
SUPER, v. superfin, sous fin.
peuple de conquérants, considérée du point
SUPERBE, adj., xti° ; d’abord « orgueil- de vue de l'influence qu’elle exerce sur la
leux », jusqu’au xIx° s., prend au xvI®Ss. langue parlée dans la région et adoptée
le sens de « d’une beauté imposante », puis, par les envahisseurs eux-mêmes », 1938.
vers la fin du xvire s., celui de « très Formé d’après subsirat, à l'aide de la
beau »; superbe, subsi., « orgueil », XII°; prép. lat. super.
vieilli depuis le xvrie s. Empr. du lat. SUPPLANTER, vers 1120, au sens de
superbus « orgueilleux, fier, etc. », superbia. « renverser », attesté jusqu’au xvie s. (plus
SUPERCHERIE, 1566 (H. Estienne). rarement « enlever, dérober »); souvent
Propr. « insulte », d’où est sorti le sens sous une forme plus francisée sousplanier.
moderne dès le xvi® s., cf. : « Faire une Empr. du lat. supplaniare « renverser »,
supercherie à un homme quand on lui fait propr. « faire un croc-en-jambe ». Le sens
un mauvais tour à l'impourveu », Pasquier. moderne d’ « évincer quelqu'un pour pren-
Empr. de l’it. soperchieria « excès, affront », dre sa place », fin xvie (peut-être déjà au
dér. de soperchiare « surabonder, prédomi- xive s.), vient de ce que le lat. eccl. a eu
ner » et aussi « tromper » ; celui-ci, à son recours à supplantare pour traduire un
tour, est un dér. de soperchio « surabon- verbe hébreu signifiant « attraper, trom-
dant », lat. pop. *superculus, adj. dér. de per » dans le fameux passage de la Genèse
super « au-dessus ». (cf. ch. XXVII) où Ésaü s’écrie : « Est-ce
parce qu’on l’a appelé Jacob qu’il m’a sup-
SUPERCOQUENTIEUX, 1833; anté- planté deux fois ? », après que Jacob a
rieurement superli-, 1623. Mot burlesque, réussi à se faire bénir à sa place par leur
forgé d’après un mot analogue de Rabelais père Isaac. Le lat. eccl. avait créé un dérivé
supercoquelicantieux (fait lui-même sur un supplantator pour parler de Jacob, de là
mot de lat. macaronique, cf. credo in super- en à. fr. supplanieur, cf. « Par droit a non
lycoustequansio creature, etc., d’un texte du Jacob, car il.est sousplantere », vers 1190
xve ou du xvi® s.); on dit aussi superlifi- (Herman de Valenciennes), en 1488 : « Ja-
coquentieux. cob est interprété supplanteur pour ce qu’en
SUPERFÉTATION, xvi° (Paré). Terme sa nativité il pris la plante du pié de son
de physiologie « conception d’un second frère » (La Mer des Histoires), en 1597 :
fœtus quand un premier est déjà conçu », « Jacob en hebrieu signifie supplantateur
encore en ce sens chez Buffon, puis dans et donneur de croc ». (J. de Maumont). Il
un sens plus étendu depuis la fin du y a dans le texte hébreu un jeu de mots
xvirIe s., empr. du lat. médiéval superfe- intraduisible sur le verbe et le nom de
lalio, dér. du lat. anc. superfetare « conce- Jacob (Jacob est interprété comme signi-
voir de nouveau ». ‘ fiant «qui tient le talon » et le verbe comme
signifiant « tenir par le talon ») ; la Sep-
SUPERFICIE, vers 1200 ; superficiel, tante, par suite, a calqué le verbe et fait
1314 ; sens intellectuel depuis 1370, Oresme; pternizein qui est dérivé de plerna « talon » ;
Mme de Sévigné emploie aussi superficie la Vulgate ayant eu recours à supplaniare,
au sens intellectuel. Empr. des mots lat. le sens nouveau s’est peu à peu développé.
superficies « surface », -cialis (du lat. impé-
rial ; déjà dans un sens fig. chez Ter- SUPPLÉER, 1377; jusqu’au xviie s.
tullien). s'emploie aussi transitivement au sens de
« mettre, fournir en place de ». Réfection,
SUPERFIN, v. fin. d’après le lat. supplere, de l’a. fr. souploier,
SUPERFLU, xiu°; superfluité, 1180. usité du x1r1e au xvi® s., première franci-
Empr. du lat. de basse ép. superfluus sation maladroite du lat. supplere « rem-
«excessif, superflu », superfluilas (de super- plir », d’où « compléter, suppléer », qui l’a
{[luere « déborder, surabonder »). fait confondre formellement avec souploier
« supplier », v. supplier, de là aussi parfois
SUPÉRIEUR, xu°; supériorité, xve. l'emploi de supplier au sens de « suppléer »,
Empr. des mots lat. superior, superiorilas du x1ve au xvi® s. — Dér. : suppléant, 1790,
(lat. médiéval). comme terme de droit politique ; sens plus
SUPERLATIF, vers 1170, au sens de étendu au xixe 5. ; -ance, 1791.
« qui est porté au plus haut point », SUPPLÉMENT, 1322 ; d’abord supploie-
seul sens jusqu’au xvie s., et qui s'emploie ment (v. suppléer), 1313. Empr. du lat.
encore familièrement, surtout dans l’adv. süpplementum. — Dér. : supplémentaire,
superlativement, 1564. Comme terme gram- 1792.
matical, xvie. Empr. du lat. de basse ép.
superlalivus qui a les deux sens du mot fr. SUPPLÉTIF, terme techn., 1539. Empr.
(du verbe superferre « porter au-dessus », du lat. de basse ép. supplelivus (de sup-
supin superlatum). plere).
SUPPLICATION 616
SUPPLICATION, xrre. Empr. du lat. SUPRA-. Préf. de mots sav., empr. du
supplicatio. lat. supra « au-dessus de ».
SUPPLICE, 1480. Empr. du lat. suppli- SUPRÉMATIE,
clum, propr. « supplication », d’où « sacri- 1651 (en 1688 chez
Bossuet, à propos de la suprématie angli-
fice offert pour une faute commise », puis, cane dans l'Histoire des Variations, où
par euphémisme, « châtiment infligé, sup- Bossuet a eu l’occasion de faire d’autres
plice ». — Dér. d’après la forme du lat. empr. à l’angl., cf. conformiste) ; sens plus
supplicium : supplicier, xvre (Montaigne). étendu de « supériorité » au xix® s. Littré
SUPPLIER, 1377. Réfection, d’après ne le note pas encore et Boiste, en 1823,
le mot lat., de souploier, xrre, puis sou- qualifie ce mot de barbarisme. Empr. de
plier, xri1e, qui peuvent représenter régu- l’angl. supremacy (attesté dès le xvre s.
lièrement le lat. supplicäre, d’où aussi au sens propre et au sens fig.), dér. de
a. pr. soplegar. L'’a. fr. avait en outre un supreme (du fr. suprême), sur le modèle
comp. de ploier, sous(s )ploier « plier, cour- de primacy « primatie ».
ber »; souploier signifiait donc à la fois SUPRÊME, vers 1500. Empr. du lat.
« Supplier, plier, suppléer » ; c'est une des
raisons pour lesquelles le fr. a refait Sup- supremus.
pléer, supplier, et abandonné en même SUR, prép. D'abord sovre ou soure (Eu-
temps souploier « plier », rare après le lalie), sore (Fragment de Valenciennes),
XV° Ss. (Cotsrave encore souplié). devenu ensuite sur par croisement avec
sus. Lat. super ou supra. It. sopra, esp.
SUPPLIQUE, 1578. Empr. de l’it. sup-
plica, subst. verbal de supplicare, empr. sobre, a. pr. sobre, subre, sur. Sert en outre
lui-même du lat. supplicare. On trouve une de préf. (d’abord sous les formes sore, sr).
fois en 1340 supplic, masc., tiré alors direc- SUR, adj., xrre. Du francique *sér, cf.
tement du lat. supplicare. all. sauer. — Dér. : suret, xr11e ; surir, 1872
SUPPORTER, x1v° ; auparavant sorpor-
(attesté en Normandie depuis début XIx°).
ler, XIIe ; cf. encore surporter, chez Marot. SÛR. Lat. sécürus. It. Sicuro, Sp. seguro.
Empr. du lat. eccl. supportare (en lat. class. — Dér. : sûreté, xve (Commynes), formé
ne signifie que « porter, transporter »),. — d’après le lat. securitas.
Dér. : support, 1466 ; d'abord « action de SURDITÉ,
supporter », encore chez Fénelon ; sens mo-
1530 (d’abord sourdité, au
XV® s.). Empr. du lat. surditas pour servir
derne dès le xvre s.; supportable, 1420, de nom d'état à sourd ; du x1ve au xvres.
insupportable, 1312. on a essayé sourdesse et surdesse. Le fait
SUPPOSER, « faire une hypothèse », d’être sourde, non sonore, en parlant d’une
xXiri® (J. de Meung); supposition, 1291. consonne, est appelé par les linguistes
Empr. du verbe lat. supponere (francisé sourdité, 1933, pour éviter la confusion avec
d’après poser), qui ne signifiait que « mettre le fait de ne pas entendre. Ainsi l'habitude
sous, à la place de », et du dér. supposilio qu’a le fr. de désigner les notions abstraites
« supposition » (sens développé à basse par des mots sav. peut forcer les savants à
ép.) ; le sens du verbe fr. lui vient sans recourir au fonds populaire pour désigner
doute de supposition. — Dér. : présupposer, leurs notions scientifiques.
XIV® (Oresme) ; présupposition, xve.
SUREAU, 1530. Dér. d’une anc. forme
SUPPOSER, terme jurid. « substituer seür, XI11° (d’où sur de quelques parlers de
frauduleusement », 1538 ; supposition, vers la Normandie et de l'Ouest), altération de
1620. Empr. du lat. jurid. supponere, SUp- seü, peut-être par croisement avec l’ad).
posilio. sur, à cause du goût sur des feuilles et des
SUPPOSITOIRE, xui°. Empr. du bas- baies du sureau. Seü, d’abord saü, repré-
lat. des médecins supposilorium, même sens, sente le lat. sabücus, autre forme de sam-
tiré du neutre de l’adij. lat. Suppositorius bäcus. It. sambuco, esp. sauco, a. pr. sam-
«placé dessous » (de supponere). buc.
SUPPÔT, vers 1300 SURÉROGATION, 1610; surérogatoire,
(Supposiz, c’esi-à- fin du xvies. (d’Aubigné). Empr. du lat.
dire les membres ou parties d’un corps nalu-
rel ou civil). Désignait jusqu'au xvrrre s. anc. supererogalio « action de payer en
diverses catégories de subordonnés ; ne plus » et du lat. médiéval Supererogatorius
s'emploie plus que dans des locutions (de supererogare « payer en plus »), avec
suppôt de Satan, etc., dont le sens péjor. francisation du préf. super en sur ; au
s’est développé au xvrre s. Empr. du lat. XVI® s. On disait supererogation. L’emprunt
supposilus « placé au-dessous », en vue de vient du fait que dans l’'évangile de saint
sens spéciaux ; pour la francisation du mot, Luc le bon samaritain emploie superero-
v. dépôt. gare par rapport au paiement de dépenses
supplémentaires que le tavernier aura
SUPPRIMER, vers 1380 ; suppression, éventuellement à faire pour l’homme blessé
id, Empr. du lat. supprimere, suppressio. que le samaritain a déposé chez lui.
SUPPURER, xvie (Paré) ; d’abord sou- SURGE, dans laine surge, 1562. Empr.
Purer, XIn°; Suppuration, 1490. Empr. du de l’a. pr. (lana) surja, surge, qui continue
lat. suppurare (de pus, puris « pus »), sup- le lat. (lana) säcida, de même sens, avec
puralio. métathèse de c et d (comp. it. sudicio à
SUPPUTER, 1570; sSupputation, 1532. côté de sucido) et insertion d’un r prove-
Empr. des mots lat. Supputiare « calculer », nant de sordidus « sale ».
supputalio (créé à basse ép.).
SURGEON, v. sourdre.
617 SVELTE

SURGIR, 1564. Empr. du lat. surgere SUSCITER, vers 980. Empr. du lat.
« s’élever » ; a remplacé en partie sourdre. suscilare, v. ressusciter.
Surgir (notamment dans surgir au port),
au sens de « jeter l’ancre », « aborder », SUSCRIPTION, xvie (Amyot), une pre-
1497 (d’abord sourgir, 1424, cf. aussi sour- mière fois vers 1215. Empr. du lat. de basse
geoit, chez Rabelais, IV, 36), encore chez ép. superscriptio (d'où aussi superscription
Lamartine, est empr. de l’a. pr. sorgir du x1v® au xvie s.), avec francisation du
« jeter l'ancre » attesté dans ce sens préf. super en sur, v. surintendant, etc., et
vers 1300 (du lat. surgere) plutôt que de chute d’une r par dissimilation.
l'esp. surgir. SUSPECT, 1311; suspecter, 1726, une
première fois vers 1500 ; suspicion, xrre.
SURIN, 1827. Terme d'’argot, qui passe Empr. du lat. suspectus (quelquefois plus
pour venir de la langue des romanichels. francisé en sospit), suspeciare, suspicio, v.
— Dér. : suriner, 1827. soupçon.
SURINTENDANT, 1569, comme nom du SUSPENDRE, vers 1460; on dit au
titulaire d’une haute fonction ; en 1556, moyen âge souspendre même au sens d’ «in-
dit d’un ancien Romain. Empr. du lat. terdire momentanément l'exercice d’une
médiéval superiniendens, part. prés. du fonction » ; suspens, 1377, adj., au sens de
lat. de basse ép. superintendere « veiller « qui est suspendu », jusqu’au xvire s. ; ne
sur », dont le préf. super a été francisé en s'emploie plus que dans la locution adver-
sur ; depuis la fin du xive s. on trouve biale en suspens, dès xv° ; suspenseur, xvI®
d’abord superintendent pour désigner un (Paré) ; suspensif, 1355 (Bersuire) ; suspen-
chef, de là -ant, encore en 1625 chez sion, 1174 ; au sens de « support de bous-
Malherbe au sens de « surintendant » ; on sole », 1744, puis au sens de « support de
a tiré de ce mot intendant, 1565, qui a servi lampe suspendue », 1867; suspensoir(e),
à désigner des fonctionnaires de diverses « sorte de bandage », 1611 ; antér. terme
administrations, intendance, 1537; d’où d’anatomie, 1314. Empr. des mots lat.
sous-intendant, 1834, -ce, id. — Dér. : surin- suspendere, suspensus, part. passé, suspen-
tendance, 1556, au sens de « surveillance » ; sor (lat. médiéval), suspensivus (id.), sus-
sens parallèle à surintendant ; depuis 1491 pensio, suspensorius (mot de basse ép.
et encore au xvirI® s., superintendence, dont le neutre servait à désigner des objets
-ance, au sens de « surveillance, direction ». suspendus).
SURNUMÉRAIRE, 1636; antér. super- SUSPENSE, 1963. Empr. de l’angl.
numéraire, 1564 (Rab.), encore attesté suspense.
en 1694. Empr. du lat. de basse ép. super- SUSPICION, v. suspect.
numerarius (de numerus « nombre »), dont
le préf. super a été francisé en sur. — SUSTENTER, xirIe; rare avant le
Dér. : surnumérariat, 1791. XVIe s.; sustentation, 1798 ; de quelque
usage du xr11° au xvi®s. Empr. du lat. sus-
SUROIT, « vent du sud-ouest » et « sorte tentare « alimenter », propr. « soulever »,
de vêtement ou de coiffure de marin pour sustentatio.
s’abriter du suroit », 1872 (syroest 1483).
Empr. aux deux sens du norm. surouet, SUSURRER, 1801 ; susurrement, 1829
forme altérée de sud-ouest d’après norouë (Chateaubriand). Le premier est empr. du
« nord-ouest, vent du nord-ouest », usité lat. susurrare (verbe onomatopéique), le
dans les parlers de l'Ouest. L’adj. norois deuxième est formé d’après le verbe lat. ;
employé pour désigner les langues scan- Chateaubriand a employé aussi susurralion,
dinaves est dér. de l’anc. nor. nordr « nord » empr. du lat. de basse ép. susurratio (déjà
(cf. a. fr. norois « de race norvégienne »). empr. au xvI® s. au sens de « médisance »
qu’a aussi le mot lat.).
SURPLIS, x11° ; en outre sorpeliz, XIIIe,
surpeliz, -is jusqu’au xvie s. Empr. du lat. SUTURE, 1540. Empr. du lat. médical
médiéval superpellicium (fait sur le lat. sulura, propr. « couture » (de suere).
pellicia, v. pelisse), dont le préf. super a été SUZERAIN (attesté alors indirectement
francisé en sur, v. surintendant, etc. par le dér. suzerainelé, 1306, écrit susere-
SUS. Ne s’emploie plus que dans des nele). Dér. de l’adv. sus sur le modèle de
locutions : courir sus, en sus. Adv. et prép. souverain, — Dér. : suzeraineté, v. ci-
jusqu’au xvi® s. ; au contraire encore très dessus.
vivace dans les parlers. Lat. pop. süsum SVASTIKA (ou sw-), 1842. Empr. du
(attesté depuis Caton), lat. class. süärsum sanscrit svastika, propr. « de bon augure »
« en haut, dessus ». It. su, adv. et prép., (de suasti « salut! »).
esp. suso. Sert aussi de préf. — Comp. : SVELTE, 1642 (Poussin). Empr., comme
dessus, x11°, pardessus, sorte de vêtement, terme de peinture (sens plus étendu au
1810 ; déjà au moyen âge au sens de « su- xvi11e 8.), de l’it. svello, part. passé de svel-
périeur, maître ». lere, svegliere « arracher » donc « arraché,
SUSCEPTIBLE, 1564; une première allongé, dégagé ». On a aussi supposé un
fois 1372. Terme didactique ; sens plus empr. de l’esp. suello « vif, léger », propr.
étendu au xvirre s. ; a pris celui de « facile « délié », lat. pop. *solilus, autre forme du
à offenser », à la fin de ce s. Empr. du lat. ‘ lat. class. solütus, part. passé de solvere
.de basse ép. susceptibilis (de suscipere « délier », mais les documents manquent
« concevoir, recevoir »). — Dér. : suscep- pour rendre cet empr. probable. — Dér. :
tibilité, 1752; sens parallèle à celui de sveltesse, d’après l’it. suellezza, 1843 (Th.
l'adj. Gautier) ; une première fois en 1765.
SWEATER 618

SWEATER, 1910. Empr. de l’angl. swea- SYLVESTRE, 1752; déjà empr. du


ler (de io sweat « suer »). xiIve au xvi® s. (souvent écrit siluestre).
Empr. du lat. sylvestris, autre orthographe
SWEEPSTAKE : sorte de loterie », 1828, de silvestris.
vulgarisé vers 1934. Empr. de l’angl.
sweepsiake, comp. de {o sweep « enlever » SYLVICULTURE, 1839. Fait avec le lat.
et stake « enjeu ». sylva, autre orthographe de silva, sur le
modèle d’agriculiure, etc.
SWING, 1895. Empr. de l’angl. swing
« coup de poing donné de côté » (de to SYMBIOSE, fin xix°. Empr. du grec
swing « balancer »). Comme terme de danse, symbiôsis « vie en commun » (de syn «avec »
1940; de l’angl. swing, nom de ce pas de et bios « vie »), en vue d’un sens spécial;
danse, du même verbe. on trouve symbiosis en angl. depuis 1877.
SYBARITE, 1530. Empr. du lat. Syba- SYMBOLE, 1380 ; a pris rapidement des
rila « habitant de Sybaris » ; les habitants sens plus étendus (dès 1488 au sens de
de Sybaris, colonie grecque au sud-est de « morceau, portion », donné comme celui
l'Italie, passaient pour mener une vie de du mot grec, cf. « Ceste norme fut en grec
luxe et d'extrême mollesse. — Dér. : syba- appellée symbole qui vault autant en fran-
ritisme, 1829. çois comme morseau ou portion », La Mer
des histoires) ; symbolique, 1552, a suivi le
SYCOMORE, 1165. Empr. du lat. syco- sens de symbole ; symboliser, xIv°, au sens
morus (du grec sykomoros). de « avoir du rapport avec, s’accorder
avec », seul sens jusqu’au xIX° S. ; au sens
SYCOPHANTE, xve (sicophant, qui est à moderne, d’après les deux préc., 1796.
dire traytre ou calomnialeur, dans une tra- Empr. du lat. eccl. symbolum qui se disait
duction de Térence). Empr. du lat. syco- du symbole des apôtres (propr. « signe,
phanta (du grec sykophantés « celui qui marque » en lat. class.), du lat. de basse ép.
dénonçait ceux qui exportaient des figues symbolicus « allégorique » (du grec symbo-
par contrebande ou ceux qui volaient les lon « signe, etc. », symbolikos) et du lat.
figues des figuiers consacrés ») ; le mot a médiéval symbolizare. — Dér. : symbo-
déjà en grec et en lat. le sens de « déla- lisme, 1831 ; a été pris vers 1880 pour dési-
teur », d’où en fr. « coquin, fourbe », p. ex. gner l’école poétique (dite par suite sym-
La Fontaine, Fables, III, 3. bolisie) de Mallarmé, Verlaine, etc.
SYLLABE, 1160 (écrit sillabe) ; syllabi- SYMÉTRIE, écrit d’abord symméirie,
que, 1529 (G. Tory). Empr. des mots lat. 1529, graphie conservée jusqu’à la fin du
syllaba, syllabicus (attesté à basse ép.) (du xvinie s. Empr. du lat. symmeiria (mot pris
grec syllabé, -ikos, de syllambanein « réu- au grec qui signifie « juste proportion »,
nir »). Le français a empr. de même dis- comp. de syn « avec, ensemble », et de me-
syllabe, 1529, monosyllabe, 1529, polysyl- iron‘ « mesure »). On a de même empr.
labe, 1464, des mots lat. dissyllabus, mono-, asymétrie, 1613, alors comme terme d'a-
poly- (pris au grec). — Dér. : syllabaire, rithm., du grec asymmeiria ; sens déve-
1752 ; syllaber, 1834; une première fois au loppé d’après symétrie, d’où -ique, 1825. —
x11° s., d’où syllabation, 1872 ; syllabisme, Dér. : symétrique, 1530 (écrit symm-).
1872.
SYMPATHIE, vers 1420. Empr. comme
SYLLABUS, 1377. Terme eccl. qui dé- terme techn. et comme terme de la langue
signe une liste des erreurs condamnées par générale à la fois du lat. sympathia et du
le pape, publiée par Pie IX en 1864 ; mot grec sympatheia (d’où vient le mot lat.)
empr. du lat. eccl. syllabus « liste » (d’un « fait d’éprouver les mêmes sentiments ».
grec syllabos, signalé seulement dans les — Dér. : sympathique, 1590 ; sympathiser,
Lettres à Atlicus de Cicéron (IV, 5 et 8), xvie (Ronsard).
altération de sillyba, première altération
de sitiyba « bande de parchemin, titre d’ou- SYMPHONIE, milieu du xvrites. au sens
vrage, table des matières »). moderne ; la symphonie moderne a été
créée en 1754 à la fois par Gossec et Haydn
SYLLEPSE, 1660. Terme de rhétorique, qui se sont servis du mot symphonie lequel,
empr. du lat. de la rhétorique syllepsis (du au xviIe et au xvirie s., désignait un mor-
grec syllépsis, propr. « compréhension »). ceau d’orchestre formant l'ouverture d’un
SYLLOGISME, xr11° (J. de Meung : silo- opéra. Auparavant signifiait, conformé-
gime) ; syllogistique, 1551. Termes de ment au lat. symphonia (du grec symph6-
logique empr. du lat. syllogismus, -isticus nia), « accord de sons », cf. « Symphonie
(du grec syllogismos, -istikos). est concorde de plusieurs sons », x1v®
(Oresme). Au xrIe s. a été pris au sens
SYLPHE, 1604 (écrit sylfe). Empr. du d’ « instrument de musique » qui se trouve
lat. sylphus « génie » qui ne se trouve que aussi dans le lat. de basse ép. — Dér. :
sur quelques inscriptions et qui a été repris symphoniste, 1690.
par Paracelse (1451-1527) au sens de «génie
nain de l’air et des bois » ; Paracelse emploie SYMPTÔME, 1495 (écrit sinthome ; Rab.
aussi sylvesires dans ce sens. — Dér. : écrit symptomale, IV, 63) ; terme médical,
sylphide, 1671 (Mme de Sévigné). pris rapidement dans un sens plus étendu ;
symptomatique, 1503 (écrit sinth-). Empr.
SYLVAIN, 1488 (écrit silvain). Empr. du du lat. médical sympioma (du grec symp-
lat. silvanus, écrit aussi sylvanus « dieu des lôma, propr. « coïncidence ») et du grec
forêts » (de silva (sylva) « forêt »). symplômatikos.
619 SYZYGIE

SYNAGOGUE, vers 1080 (Roland : sina- qui signifie propr. « mise en ordre »). —
goge « temple des Juifs » ; a reçu à partir Dér. : syntaxique « qui se rapporte à la
du xive s. divers sens se rapportant à la syntaxe », 1818 ; du grec syniakiikos on a
religion juive). Empr. du lat. eccl. synagoga tiré un adj. syniactique, relevé depuis 1872,
(du grec eccl. synagôgé, propr. « réunion »). au sens de « qui se rapporte à l’ordre des
SYNCHRONISME, 1752. Empr. du grec mots, à la structure de la phrase ».
synkhronismos (de khronos « temps »). — SYNTHÈSE, xvire (Descartes) comme
Dér. : synchronique, 1750 ; a remplacé un terme de logique ; pris ensuite dans diver-
anc. adj. synchrone, 1743, empr. du lat. de ses langues techn. ; synthétique, 1602, éga-
basse ép. synchronus (du grec synkhronos). lement comme terme de logique; sens
SYNCOPE, 1314 (écrit sincope). Terme parallèle à celui de synthèse. Empr. du grec
médical, empr. du lat. médical syncope, -a synihesis, également terme de logique,
(du grec médical synkopé, de synkoptein propr. « action de mettre ensemble », syn-
« tailler, réduire, briser »). Le sens gram- thelikos. — Dér. : synthétiser, 1833 (Balzac).
matical, 1380, vient également des lan-
gues anciennes, d’où le sens musical, SYPHILIS, 1659 ; le dér. syphililique est
1631. — Dér. syncoper, 1365, déve- de 1725 (alors -idique) et anti- de 1774.
loppement de sens parallèle à celui de syn- Empr. du lat. moderne syphilis, créé par
cope ; au sens de « tomber en syncope », l’humaniste Fracastor de Vérone qui a
on a dit syncopiser, du xXIV® au XVI S. publié en 1530 un poème intitulé Syphilidis
seu morbi gallici libri tres. La syphilis,
SYNCRÉTISME, 1611. Empr. du grec d’origine américaine, est apparue tout à
synkrétismos, propr. « union de Crétois », la fin du xve s. et s’est répandue après
d’où « accord de deux partis opposés contre l'expédition de Charles VIII à Naples;
un ennemi commun », etc. on remarquera que Fracastor appela dans
SYNDIC, 1385 (écrit sindiz). Empr. du son titre la syphilis le « mal français » ; en
lat. eccl. syndicus « représentant et avocat effet chaque peuple a accusé un voisin
d’une ville » (du grec syndikos, propr. de lui avoir communiqué cette maladie,
« celui qui assiste quelqu'un en justice »). en français le mal de Naples, en all. die
— Dér. : syndical, 1561, a suivi le sens Franzosen, en it. il mal francese, etc. Dans
du suivant ; Voltaire parle en 1760 de la le troisième livre de son poème, pour
Chambre syndicale de librairie (au xive et célébrer la découverte du remède tiré
xve s. « procès-verbal », à Lyon); d’où, du guayac, v. gaïacol, Fracastor a imaginé
avec les changements de sens de syndical, une légende d’après laquelle, en Amérique,
syndicalisme, -aliste, fin xix°; syndicat, un berger du nom de Syphilus, ayant
1477 « fonction de syndic », encore au entraîné le peuple de l’île d'Ophise à la
début du x1Ix® s. ; au xiX® s. a d’abord été révolte contre le dieu du soleil, est frappé,
un terme de bourse, avant de prendre le ainsi que le peuple, par Apollon de la
sens de «groupement d’ouvriers réunis pour syphilis dont la nymphe Ammerica leur
défendre leurs intérêts » (dès 1839), depuis donnera le remède. Le mythe est imité de
plus étendu ; syndiquer, 1768 « former en
celui de Niobé ; Sipylus est, chez Ovide,
corps les membres d’une corporation », d’où Métamorphoses, VI, 231, le nom du fils
se syndiquer, 1783, développement de sens aîné de Niobé, qui est né près du mont
parallèle à celui du précédent (au xvi® Sipylus en Lydie. La forme siphylus d’où
« critiquer, censurer »). Fracastor a tiré syphilis se trouve dans un
certain nombre de manuscrits d’Ovide ;
SYNODE, 1511 (au fém.) ; synodal, 1315 ; c'est sur cette forme qu'il a fait Siphylis,
synodique, 1721. Empr. du lat. synodus, sur le modèle de Aeneis, Thebais, pour dési-
synodalis, synodicus (du grec eccl. synodos, gner le poème « poème de Syphilus », com-
propr. « réunion », synodikos). Synodique, me Aeneis est le poème d'Énée, puis la
terme d’astronomie, 1556, remonte égale- maladie elle-même.
ment aux langues anciennes (du grec syno-
dos au sens de « conjonction d’astres »). SYRINGA, v. seringa.
L'a. fr. a dit jusqu’au xve s, senne. SYSTÈME, 1552 ; terme d’abord techn.,
SYNONYME, vers 1380 ; une première qui a pris rapidement un sens plus étendu ;
fois xr1e) ; synonymie, 1582. Empr. du lat. systématique, 1552. Empr. du grec systêéma
ocrammatical synonymus, -ia (du grec « système philosophique », propr. « ensem-
synônymos, -ia, de onoma « nom »).— Dér. : ble » (le lat. de basse ép. syslema n’est que
synonymique, 1801. terme musical) et du lat. de basse ép. sys-
SYNOPTIQUE, 1610. Empr. du grec temalicus (du grec -alikos). — Dér. : systé-
matiser, 1756.
synoptikos « qui embrasse tout d’un coup
d'œil », v. optique. SYSTOLE, 1541 ; systaltique, 1734. Em-
SYNOVIE, 1694. Empr. du lat. médiéval pr. des mots grecs syslolé, propr. « contrac-
synovia qui se trouve pour la première fois tion », systaltikos (de la même famille). V.
chez Paracelse (v. sylphe), mot de forma- diastole.
tion inexpliquée. — Dér. : synovial, 1735. #SYZYGIE, 1584. Empr. du lat. de l’épo-
SYNTAXE, 1572 (Ramus). Empr. du lat. que impériale syzygia (mot pris au grec)
grammatical syniaxis (mot pris au grec «assemblage, réunion ».
T
TABAC, 1599 ; au xviie s. aussi {obac, lat. class. qui signifiait « table », me(n)sa;
qu’on trouve encore dans les parlers du celui-ci s’est conservé en Roumanie et dans
Nord. Empr. de l'esp. fabaco, empr. lui- la péninsule ibérique : roumain masdä, esp.
même de la langue des Arouaks d'Haïti où mesa ; mè(n)sa a cependant survécu dans
tabaco ne signifie toutefois pas « tabac », le fr. moise, mais seulement comme terme
mais désigne ou bien un tuyau recourbé de la charpenterie. Certains emplois de
servant à l’inhalation de la fumée de tabac table : loi des Douze Tables, table de pros-
ou bien une sorte de cigare fabriqué par criptlion, les tables de la lot, viennent du
ces sauvages. Mot devenu mondial : it. lat. anc. ou eccl. ; l’expression able rase
tabacco, all. Tabak, angl. tobacco, hindous- vient du lat. scolastique, cf. anima in prin-
tani {ambäka, etc. On a emprunté aussi, cipio creationis suæ est tanquam tabula rasa
dès 1555, le port. pelum, qui vient lui- in qua nihil depictum est (dans un comput),
même du tupi pelyma ; petun vit encore formule qui remonte à Aristote (De l’âme,
dans les patois de l'Ouest ; v. aussi nico- III, 4, 14). V. tôle. — Dér. : tableau, xrxr1e,
tine. — Dér. : tabatière, 1666, d’abord tableautin, 1862 (V. Hugo) ; tablée, x1r1°;
tabaquière, 1650. tabler, ne s’emploie plus que dans la
TABAGIE, 1603, mot algonquin dési- locution tabler sur quelque chose, xvir°,
gnant d’abord un festin; a modifié dès issue de la langue du trictrac où fabler a
1700 son sens sous l'influence de abac. le sens de « poser deux dames sur la même
ligne », attesté à la même ép.; tabletier,
TABELLION, anciennement officier fai- x111€, dér. de fable au sens de « tablier de
sant fonction de notaire dans les juridic- table à jouer, échiquier », usuel au moyen
tions subalternes, d’où aujourd'hui, par âge, d’où tabletterie, 1429 ; tablette, x111° ;
plaisanterie, « notaire », XIII° (Br. Latini). tablier, xrre (Chrétien); attabler, 1443;
Empr. du lat. jurid. tabellio, sorte de no- entablement, xr1°, signifie « plancher » jus-
taire. qu'au xvie s. V. retable.
TABERNACLE, vers 1110, terme d'’anti-
quité juive ou païenne ; « réceptacle où est TABOU, 1785 (écrit {aboo, dans une tra-
enfermé le saint ciboire » (liturgie catholi- duction de Cook, cf. aussi « Ce mot que je
que), 1345. Empr. du lat. abernaculum connaissais d’après les relations anglaises »,
« tente ». La Pérouse, 1786), tabou depuis 1822.
Empr., par l'intermédiaire de l’angl., d’une
TABÈS, 1752, au sens de « marasme » langue polynésienne où le mot {apu signifie
(en angl. depuis 1651) ; au sens moderne, « interdit, sacré, personne ou chose décla-
1881, d’après l'expression des médecins rée tabou par des prêtres ou des chefs ».
allemands fabes dorsalis (1827). Terme mé-
dical, empr. du lat. {abes « consomption ». TABOURET, v. tambour.
— Dér. tabétique, 1880; tabescent,
1873 ; tabescence, id. TABULATRICE, 1949. Dér. du lat.
labula.
TABIS, xive (E. Deschamps), sorte d’é-
toffe, hors d’usage aujourd’hui. D'abord TAC, onomatopée, 1587.
atabis, par exemple chez Christine de Pi-
san. Empr., par l'intermédiaire du lat. TACHE, vers 1100. A côté du sens
médiéval allabi, de l’arabe ‘attäbi, sorte « souillure, marque qui salit » il a aussi,
d’étoffe de soie, dite ainsi du nom d’un du xive au xviie s., celui de « qualité
quartier de Bagdad où elle était fabriquée; bonne ou mauvaise d’une personne »,
aussi it. {abi, esp. tabi. conservé au sens religieux de « souillure
que l’âme contracte par le péché ». Dans
TABLATURE, 1596 ({abulalure en 1529), les deux sens on a aussi, du xI° au xv®e 8.,
anc. terme de musique, qui désignoait un la forme feche. Le mot vit aussi dans l’a.
tableau de notation servant à déchiffrer : pr. daca « tache », it. lacca « tache ; cran »,
ne s’emploie plus guère que dans la locution cat. arag. astur. ‘iaca « tache », de même
donner de la tablature à quelqu'un « lui it. lecca « tache ; défaut, vice ». La pala-
causer des difficultés », 1669, d'abord « ins- talisation du -cc- ‘ainsi que la large diffusion
truire quelqu'un » (d’Aubigné), ensuite du mot montrent que celui-ci est entré
«être plus habile que quelqu'un, le redres- dans la langue latine à l’époque du Bas-
ser » (1643). Formé, en le latinisant, sur Empire. Il doit être empr. du got. faikns
l’it. intavolatura. « signe » (cf. all. zeichen) dont le -k- a été
TABLE. Lat. {abula, propr. « planche » ; redoublé sous l'influence du -n- suivant,
a remplacé us le lat. pop. de la Gaule d’où a résulté une forme *acca. C’est un
et de l'Italie (cf. it. {avola) le terme du cas analogue à celui du got. *réps, qui
621 TALC

s’est aussi répandu dans tout l'Empire; « tailler ». — Dér. et Comp. : taille, xrr°,
V. désarroi. En got. la diphtongue ai est propr. « action de tailler », d’où acceptions
devenue é un peu plus tard, ce qui explique diverses, notamment « dimension en hau-
la forme teche. — Dér. : tacher, vers 1100 ; teur du corps humain » (acception née dans
tacheter, 1538, issu par changement de le milieu des tailleurs d'images), vers 1223 ;
suffixe de l’anc. fr. {achelé ; détacher « ôter a été pris au moyen âge pour désigner une
les taches », 1501 : entacher, vers 1190 sorte d'impôt, d’où taillon, 1552 (Rab.),
au part. passé, comme verbe dp. 1380, taillable, 1238, v. mortaillable ; servait
v. enticher. aussi autrefois comme terme de musique
TÂCHE, xre (Chrétien). Francisation vocale, v. ténor; taillader, 1540, par l'in-
du lat. médiéval taxa, tiré de taxare, v. termédiaire de {aillade, 1532 (Rabelais),
taxer, propr. « sorte de prestation rurale », « coup qui entaille », empr. de l’it. tagliata
d’où, de bonne heure, le sens moderne; (pour le suff., v. cavalcade) ; l’a. pr. {alhada
cf aussi a. pr. {asca « champart » (attesté « tranche de pain, etc. » n’a pas le sens
dès 800 dans le latin médiéval du Midi). du français; taillandier, 1213, dér. de
L'’angl. task vient d’une forme dialectale laillant, 1444, avec le suff. -andier, qui
tasque, attestée en anc. picard. — Dér. : se trouve dans d’autres noms de mé-
tâcher, vers 1460 : tâcheron, 1508. tier, cf. lavandière, etc. (taillandier a déjà
été formé au sens de « tailleur d’habits »
TACHY-. Premier élément de mots sav. au xv® S.), taillanderie, 1485; taillant,
comp., tels que tachygraphie, 1721, tiré du 1288 ; taille-crayon, 1838; taillerie, 1304;
grec {akhys « rapide ». tailleur, x11° (Chrétien), déjà au sens de
TACITE, 1466. Empr. du lat. facitus (de « tailleur d’habits », bien que l'expression
tacere « (se) taire »). tailleur d’habits soit encore dans les dic-
tionnaires, comme si {ailleur ne suffisait
TACITURNE, vers 1485; taciturnité, pas au sens; c’est aujourd’hui le terme
xive, Empr. du lat. faciturnus, taciturnilas. dominant des parlers gallo-romans ; tou-
TACT, 1375; tactile, 1541. Empr. du lat. tefois l'extrême Ouest et quelques parlers
lactus, tactilis (de tangere « toucher »). Le de la Franche-Comté et de la Suisse ro-
sens fig. de fact, qui date du xvitre s., est mande ont encore le type couturier, on
propre au fr. trouve en outre parmentier (de parement)
en lorrain et en franc-comtois, cousandier
TAC-TAC, 1583. Onomatopée, cf. aussi en Suisse romande, pelletier en Franche-
tic-tac. — Dér. : tacot, « locomotive de Comté et en Suisse romande ; il n’y a de
train local (tortillard) », d’où « le train lui- représentants du lat. sartor que dans quel-
même », «automobile de mauvaise qualité », ques parlers méridionaux, cf. par contre
xxe; signalé au x1x° s. comme terme de it. sarlo, esp. sastre, a. pr. sartor, sartre (en
métier : « outil qui sert à mettre en mou- a. fr. quelques traces seulement) ; taillis,
vement la navette dans un métier à tis- 1215 ; tailloir, 1544, comme terme d’archi-
ser », 1803, « battoir des laveuses », 1872 ; tecture ; désignait au moyen âge une sorte
ce sont des formations indépendantes l’une d’assiette sur laquelle on taillait la viande,
de l’autre. x11e (d’où l’all. T'eller) ; détailler, x11°, d’où
TACTIQUE, 1690. Empr. du grec iaktiké détail, id., détaillant (marchand), 1649,
(sous-entendu fekhné « art ») (de tatlein d’abord délailleur, 1293 (Beaumanoir) ; en-
« ranger »). L’adj. a été formé postérieure- tailler, xr1°, d’où entaille, xr1e ; retailler,
ment d’après le subst. — Dér. : tacticien, . id., d’où retaille, vers 1200.
1788. TAIN, v. étain.
TAFFETAS, 1314 (écrit {aphetas). Empr. TAIRE. Réfection, qui apparaît au xr1°,
de l'it. {affetà, empr. lui-même du mot de {aisir, encore usité au xv® s. Lat. Zacère.
turco-persan {dfla, propr. « tressé, tissé » ; Mot usité seulement dans une partie du
de là aussi all. Taffet, angl. taffeta. gallo-roman ; les parlers de l’Est et de la
TAFIA, 1722 : « Les sauvages et les région franco-provençale ont des formes
nègres l’appellent tafia », dans le récit du du lat. pop. *quëliare, issu de *quiétiäare (de
voyage aux Antilles du P. Labat. Mot quiëlus, v. coi), propr. « rester en repos »,
créole, v. ratafia. cf. a. fr. coisier « rester coi », et une grande
partie des parlers méridionaux et de
TAIAUT, 1661 (Molière); vers 1300 l'Ouest, entre la Loire et la Garonne, ont
laho, taho. Onomatopée. des formes de ce verbe (cf. a. pr. quezar),
TAIE. Souvent joie au moyen âge. Lat. croisés avec faire (a. pr. tazer), c’est-à-dire
théca (du grec théké « boîte, caisse, etc. ») que les parlers ont cherché un mot plus
« étui, fourreau », qui a servi en lat. pop. expressif que le mot ancien. Le Sud-Ouest
à désigner diverses sortes d’enveloppes, a des formes qui correspondent à l'esp.
d’où en fr. notamment « enveloppe de toile callar, qui continue un lat. pop. *callare,
qui recouvre un oreiller », puis « taie sur variante de calare (v. caler), empr. du grec
l'œil », xive. Ailleurs sens divers : roumain chalän « abaisser » ; dans un certain nombre
teacä « gaine, gousse », a, pr. {eca « gous- de mots grecs empr. par le lat. de basse
se », etc.
ép. l'1 a été rendu tantôt par -L, tantôt
par -/l-; pour le sens comp. l’it. calare
TAILLER. Lat. pop. “*aliäre, probabl. « abaisser la voix ».
dér. de {alea « bouture, scion », cf. interta-
liäre « élaguer » à basse ép.; a donc dû TAISSON, v. tanière.
d’abord être employé comme terme rural, TALC, xvie. Empr. de l'arabe £alq, d’où
mais a pris rapidement le sens général de aussi it. esp. {alco, all. Talk, angl. talc.
TALENT 622

TALENT, terme d’antiquité, « poids d’or aussi un bouclier, peut-être d’origine gau-
ou d’argent », xiie. Empr. du lat. {alentum loise. — Dér. : talocher, 1546 (Rabelais).
(du grec falanton).
TALON. Lat. pop. “*älônem, acc. de
TALENT « valeur naturelle ou acquise *{alo, dér. du lat. class. /alus. It. tallone,
dans quelque activité artistique »; xvire. esp. {alôn. — Dér. : talonner, vers 1190;
Ce sens vient de la parabole rapportée dans talonnière, 1512 ; talonnette, 1836.
Matthieu, XXV, 14 sq., où l’on voit, de
trois serviteurs à qui leur maître a confié TALUS, 1160 (écrit {alu). D’un gaul.
des talents (poids d’or) deux faire fructifier talutium « forte inclinaison de terrain » (at-
les leurs, tandis que le dernier enfouit le testé chez Pline en parlant des mines d’Es-
sien en terre ; de là dans le lat. scolastique pagne, au sens spécial de « talus qui révèle
l'emploi de ialentum au sens de « don na- la présence d’une mine d’or à peu de pro-
turel, aptitude », cf. illa litteralis scientiæ fondeur »), dér. du gaul. falo « front »
talenta, chez Abélard (1079-1142) ; en fr. (comp. irl. {aul, breton fl), qui survit en-
toutefois ce sens n’a pris de l'extension core dans d’autres mots dér. ou comp.,
qu’à la suite de la Réforme ; un des pre- comme prov. moderne éauvero « lisière
miers ex. de {alent dans employer son talent d’un champ », dauph. talapan «auvent ».
se rapporte au protestant Duplessis-Mor- — Dér. : taluter, 1690 (auparavant taluer,
nay ; il est donc probable que l'esp. et l’it. 1534, Rab. ; talusser, vers 1600.
ont tiré du fr. l'emploi métaph. de leur
lalento. Au moyen âge et jusqu’au xvi® s. TAMANOIR, 1763. Empr. de {amanoa,
talent a signifié « désir, volonté », d'où le mot de la langue des Caraïbes de la Guyane.
comp. maltalent « mauvais vouloir », encore Une autre espèce de cet animal est appelée
chez Voltaire, cf. de même it. {alento « dé- en tupi éamandua, d'où le fr. {amandua,
sir, volonté », a. pr. talen « id. », d’où aujour- 1640, d’abord tamandoua, 1614.
d’hui « faim ». On a supposé aussi que le
TAMARIN, xve s.; d'abord tamarinde,
mot grec {alantos, qui veut d’abord dire
« plateau de balance », d’où « poids, incli- xin1e, damarandi, xir1°, du lat. médical du
nation », était à l’origine de ce sens ; mais moyen âge iamarindus (employé comme
ce n’est que dans le grec le plus ancien laxatif), empr. de l’arabe {amär hindi « dat-
te de l'Inde ». — Dér. : tamarinier, 1771
qu’on le relève et, comme cette signifi-
cation n’a pas passé en lat., il faudrait (lamarindier en 1604).
admettre qu’elle vient du grec massaliote, TAMARIS, x111°. Empr. du lat. de basse
ce qui n’aurait rien d’impossible ; les mots ép. tamariscus (autres formes de dates di-
grecs apportés par ces premiers colonisa- verses : {amarice, -icium, -ix). L'arbrisseau
teurs et survivants dans les parlers méri- étant partic. répandu dans l'Orient, le
dionaux sont assez nombreux. — Dér. : nom vient probabl. d’une langue orientale,
talentueux, 1881. peut-être de l’arabe {amdr, v. le préc.
TALER, v. taloche. TAMBOUILLE, fin xix°. Peut-être abré-
viation de pot-en-bouille, comp. dans l’An-
TALION, x1ve s. Empr. du lat. falio. jou potbouille, potembouille et tambouille,
tous avec la même signification.
TALISMAN, 1637. Empr. de l'arabe vul-
gaire filsam (en arabe class. filasm), empr. TAMBOUR, vers 1200 (écrit fambor).
lui-même du grec telesma au sens de « rite D'abord tabour, vers 1080 {Roland), encore
religieux » (qui est de basse ép.); d’où au xvie et dans quelques patois modernes ;
aussi it. {alismano, esp. talismän, etc. Les la forme tambour n'est pas attestée avant
formes romanes s'expliquent par le plur. 1300. Dans tous les textes jusqu’au xrr1° 5.
arabe filsamän. Talisman « docteur de la cet instrument n’est employé que par les
loi, prêtre musulman », en 1546, remonte, Maures, le mot doit donc être d’origine
par l'intermédiaire du turc, au persan orientale. On peut rattacher la forme {a-
dânichmand « savant », qui désignait spé- bour au persan {abir, mais on ne voit pas
cialement les prêtres musulmans. très bien par quelle voie le mot est arrivé
en France, puisque la forme sans la nasale
TALLE, terme d'agriculture, 1611 ; une ne paraît pas être attestée en Espagne. La
première fois en 1488. Empr. du lat. {hallus forme avec nasale (esp. {ambor, dans le Cid
(du grec fhallos « jeune pousse »). atamor, port. atambor, cat. tambor, it. iam-
buro) domine partout ailleurs ; la nasale
TALOCHE, xviie (C. de Bergerac). Dér., doit avoir été introduite déjà en arabe,
avec un suff. argotique, du verbe taler peut-être sous l'influence du mot at-tam-
«meurtrir » (surtout en parlant de fruits), bour, nom d’un instrument à cordes ; en
usité aujourd’hui dans les parlers de l'Est tout cas cette forme s’est répandue de
(on le trouve même en lorrain dans l’ac- l'Espagne dans les autres pays. — Dér. :
ception de « donner une taloche »), plus tambourin, xve, antér. fabourin, xv°-
rare dans l'Ouest, peu usité en fr. ; on rap- XVinie ; d'où tambouriner, 1680, -age, id.,
proche l’a. pr. falar « endommager, dé- -eur, 1556, antér. {abouriner, xv°-xvr®,
truire » et l'esp. falar « couper ras des -age, 1558, -eur, xvi°. La forme ancienne
arbres, détruire », empr. d’un germanique a donné le dérivé tabouret, 1525 (au sens
*iâlôn, supposé d’après l’anc. haut all. moderne ; en 1442 désigne une pelote où
zâlôn « piller ». L’a. fr. taloche « sorte de l’on pique les aiguilles, sens conservé jus-
bouclier », xive, est probabl. un autre mot qu’au début du xvrre s.), ainsi nommé à
et va sans doute avec falevas qui désigne cause de sa forme, cf. aussi a. pr. {abor au
623 TANT

même sens ; mais la comparaison n'ayant valent de la locution anglaise al length « à


plus été sentie, il n’a pas suivi le change- la longue », littéral. « en longueur ».
ment de forme de fabour et de ses autres
dérivés. TANDIS. Lat. lamdiu « aussi long-
temps » employé surtout avec quamdiu,
TAMIS, xir1°. Sans doute d’origine pré- quam, etc. De là la conj. tandis que, d’où
latine, probabl. gauloise, bien que les au- se dégage, dès le xr1° s., un adverbe fandis
tres langues celtiques n’offrent aucun mot « pendant ce temps », qui vit jusqu’au
auquel on puisse le rattacher. A. pr. {amis. xvIIe s. L’s finale est l’s adverbiale, cf.
— Dér. : tamiser, xri°, tamisage, 1556. volontiers, etc. Parfois écrit tanz dis par
fausse étymologie d’après l’anc. adj. {ant
TAMPON, 1430. Variante nasalisée de « si nombreux » (cf. l’a. fr. {antes fois, lat.
lapon, 1382, « tampon d’étoffe ». Du fran- tantus) et di « jour ». A. pr. {andius « aussi
cique *{appo (cf. all. Zapfen « bonde, sou- longtemps », forézien {andio « pendant ce
pape, etc. »). Le fr. possède aussi un verbe temps ».
taper « boucher », employé comme terme
techn., qui est le verbe francique corres- TANGENTE, 1626. Tangent, adj., 1705.
pondant *lappôn; lit. tappare, cat. esp. Empr. du lat. tangens, -entis, part. prés.
port. {apar sont probabl. d’origine gotique. de {angere « toucher ». — Dér. : tangence
— Dér. : tamponner, xve; a pris récem- 1815, d’où tangentiel, 1816.
ment le sens de « heurter », en parlant des
trains de chemins de fer, 1875, propr. TANGIBLE, xiv°. Empr. du lat. de basse
« heurter avec les tampons »; d’où tam- ép. tangibilis (de langere « toucher »). —
ponnement, 1771, développement de sens Dér. : tangibilité, 1803 ; intangible, xve.
parallèle à celui du verbe, tamponneur,
fin xIxe. TANGO, vers 1912. Empr. de l'esp. d’A-
mérique {ango.
TAM-TAM, 1773 (B. de Saint-Pierre). TANGON, terme de marine, 1836. L'’esp.
Mot onomatopéique, empr. du créole; cf. dit de même fangén et le prov. moderne
l’angl. fomiom qui désigne un tambour tangoun ; mais l’histoire du mot n’est pas
indien, un gong. faite.
TAN, xrrie. Très probabl. d’un gaul. TANGUER, 1643 ; le dér. {angueur déjà
*lann- « chêne » (cf. bret. {ann « chêne », en 1611. Probabl. dér. de l’anc. fr. {angre
cornique glas-lannen « quercus vel ilex », « extrémité du couteau qui est dans le
auc. irl. {eine, tinne), l'écorce du chêne manche », lequel représente l’anc. nor. {an-
étant employée très tôt pour la préparation gi, du même sens. Le fait que cette extré-
du cuir. Le mot gaulois doit avoir désigné mité de la lame se plonge profondément
une autre variété du chêne que cassanus, dans le manche a pu provoquer une
v. chêne. L’anglo-sax. fannian « tanner » comparaison avec le mouvement de la proue
est empr. du lat. de la Gaule. A. pr. ian, du bateau. La même évolution sémantique
tanar. It. fanno, tannare sont empr. du s’est produite avec le verbe anglais Lo
fr. — Dér. de tan : tanin, 1797 ; tanner, pilch. — Dér. : tangage, 1643.
1260 ; tannage, 1370 ; tanne, 1600 ; tan-
nerie, 1216 ; tanneur, vers 1226. TANIÈRE. D'abord {aisniere, vers 1190,
tesniere, encore au XVI®s. ; {aniere, du Xv®5.,
TANAISIE, nom de plante, x11e s. Lat. est une forme dialectale ; le mot signifie
pop. fanacita, mot d’origine inconnue; proprement « retraite du blaireau », lat.
d’où a. pr. {enazet ; ailleurs formes obscures. pop. {axônäria, attesté en 902 comme nom
Le lat. médiéval fanasia est calqué sur de lieu de la Mayenne (sous la forme Taxi-
1eme narie), dér. de {ax « blaireau », v. blaireau.
Les formes anciennes montrent que {anière
TANCER. Variante graphique, qui appa- ne doit pas être rapproché de {ana « ta-
raît dès le xr1€ s., de tenc(i)er (vers 1080, nière » de lit. et de l’a. pr., issu probabl.
Roland), cf. le picard fencher, que La Fon- par suppression du suffixe d’un lat. tardif
taine a employé, Fables, IV, 16. Lat. pop. *sublanus « qui se trouve au-dessous ».
*{entiäre, dér. de lentus, part. passé de ten-
dere « tendre, faire effort », d’où « com- TANK, au sens de « char d'assaut », 1916.
battre, lutter »; par suite *{entiäre a pris Empr. de l’angl. {ank, propr. « sorte de
le sens de « quereller », puis de « répriman- réservoir, citerne » (empr. aussi en ce sens
der ». On peut considérer aussi *lenliare depuis 1857), mot anglo-indien (le port. a
comme issu de {entäre « faire effort, atta- aussi fanque « réservoir », dont le rapport
quer ». Seulement gallo-roman : a. pr. {en- avec le mot angl. est discuté), qui a été
sar. Lat. pop. *entio a donné le fr. {ençon adopté par les inventeurs de cet engin de
« querelle » et l’a. pr. {enson « id, ». guerre.
TANCHE. D'abord fenche. Lat. du 1ves. TANT. Lat. {antum. It. esp. tanlo. V.
(Ausone) tinca, d'origine gauloise. tandis. En {ant que, début xvrie (cf. mal en
tant comme mal au x1v° s. chez Oresme),
TANDEM, d'abord au sens de « cabriolet est calqué sur le lat. in tanlum quanium.
attelé de deux chevaux en flèche », 1816, Un tant, pris substantiv., terme de com-
, puis de « bicyclette pour deux personnes », merce, xIX° s., est considéré par Littré
1891. Empr. de l’angl. tandem, qui est lui- comme incorrect. Les locutions {ani mieux,
même le lat. {andem, « enfin », pris dans un tant pis, signalées depuis le xvie s. (mais
jeu de mots d’origine scolaire, comme équi- sans doute antérieures) ont été faites à une
TANT 624

époque où {ant s’employait au sens de se prononçait i ; en grec anc. lapétion, dim.


« d’autant »; dans {ant bien que mal, tant de iapés, tapélos, d’où le lat. fapete, tape-
signifiait aulant. — Dér. : tantet (un), tum), cf. aussi a. pr. {api(t). Mot de civi-
1213; tantinet (un), xve (Villon); tan- lisation qui a passé d’une langue à l’autre :
tième, 1562. — Comp. : autant, vers 1170 ; l’it. tappelo est repris au lat. fapetum,
pour le premier élément, v. aussi ; l’a. pr. l'esp. lapele « tapis de table » au lat. tapele,
dit atrelan, des parlers de l'Est et du Nord- mais {apiz « tapisserie » vient du fr. {apis,
Est disent aujourd’hui aussi tant; partant, cf. aussi angl. archaïque fapis et all. Tep-
vers 1165, peu usité aujourd’hui ; pourtant, pich « tapis » (qui vient du fr.), angl. arch.
vers 1160 ; jusqu’au xvi® s. signifie « à tapet et all. Tapele « tapisserie » (qui vien-
cause de cela » ; sens moderne, né de l’em- nent du lat. ou de l’it.). — Dér. : tapisser,
ploi de cette expression dans des phrases xve, -age, fin xixe ; tapisserie, 1347 ; tapis-
négatives, depuis fin xvre. sier, 1226.
TANTE, xr11°. Altération enfantine d’an- TAPON, 1382. Du francique *{appo, v.
le, qui est encore attesté au xvie s. dans tampon. Le sens de {apon a beaucoup varié
belante (cf. belle ante, 1512) et qui a laissé au cours des temps.
quelques traces en Suisse romande et en
poitevin ; continue le lat. amita « tante du TAQUE, « plaque de fer », notamment
côté du père », d’où aussi a. pr. amda; « plaque de cheminée », 1794. Mot dialectal,
survit en outre dans le Nord de l'Italie et usité dans les parlers de l'Est et du Nord-
le roumain mätusäà ; pour l'it. zia, esp. fia, Est, empr. du bas all. t4k. Se trouve dès
v. oncle. L’a. fr. avait une forme d’acc. 1568 dans des textes de la région de l'Est.
antain, disparue de bonne heure, v. non- TAQUET, terme de diverses techniques ;
nain. désigne presque toujours une pièce de bois
TAON. Lat. de basse ép. {abônem, acc. qu’on fixe quelque part, 1382; rare avant
de {abô, altération, par substitution de le xixe s. Dér. de l’anc. norm. estaque
suff., du lat. class. tabänus. Le type tabo (a. fr. estache) allégé de la syllabe es- qu’on
est en outre conservé par le roumain un prenait pour le préfixe. Eslaque représente
et le port. taväo ; le type tabanus est con- le francique *siakka « poteau ». Il pourrait
servé par l’a. pr. {avan et par l’esp. {abano ; aussi être le subst. verbal de l’a. fr. estachier
l’it. {afano représente une forme dialectale « attacher à un poteau », qui est de la
*Jafanus. même famille.
TAPER, « frapper avec le plat de la TAQUIN, 1442 (Le Franc), au sens
main », xt. D'origine onomatopéique, d’ « homme violent emporté », plus tard
cf. l’it. {appele, mot imitant le bruit de « avaricieux », seul sens du mot jusqu’au
coups sourds ; v. aussi toper. — Dér. et xviies. (cf. dès 1411 arlot, tacain.. qui veull
Comp. : tapage, 1695, tapageur, 1743 ; tape, dire... garçon truant). Dès le xrr1° (Douai,
XIVe (Froissart) ; tapecu, terme de diverses 1244) les parlers du Nord connaissent un
techniques, 1453; tapée, 1791; tapette subst. {aquehan, laquehain, qui désigne un
« sorte de palette », 1562, « petite tape », rassemblement tumultueux et illégal des
1750 ; tapeur, vers 1866, d’après taper ouvriers. Pour devenir une insulte le mot
« emprunter », id., en fr. vulg. sens né sans n'avait qu’à passer de l’emploi collectif à
doute d’une allusion plaisante à l’usage de un emploi individuel. Il est évident que
taper dans la main pour conclure un mar- le -h- était d’abord prononcé ; sa dispari-
ché; tapin, xviri*; tapoter, vers 1270, tion a entraîné la contraction des deux
-eur, 1867; retaper, xvi®, retape, terme dernières syllabes en une seule. Il s’agit
Muse 795 donc d’un emprunt à un mot moyen néerl.,
qui n’est pas attesté, mais qui a très bien
TAPER, « boucher », v. tampon.
pu être formé comme comp. du verbe
TAPINOIS, v. tapir. taken « saisir » et d’une forme Han pour
Jean, donc une sorte d'exclamation exci-
TAPIOCA, 1812. Empr. de iypyoca du tante avec le sens « saisis, Jean ». — Dér. :
tupi et du guarani, langues indigènes du taquiner, 1790 ; taquinerie, 1553, dévelop-
Brésil, par l'intermédiaire du port. fapioca.
pement de sens parallèle à celui de taquin.
TAPIR (se), xr1° s. Du francique */ap-
pjan « (enfermer », cf. anc. scandinave TARABISCOTER, 1866, au sens mo-
leppa « id. ». — Dér. : tapinois (en), 1470 derne. Propr. terme de menuiserie : « faire
(Pathelin) ; on a dit aussi en {apinage du une petite cavité, dite farabiscot, qui sépare
X11° au XVI®8., issu de la locution en iapin, une moulure d’une autre ou d’une partie
xrnIe (cf. aussi a lapin, « id. »), tirée elle- lisse », mot de formation obscure.
même de l’adj. tapin « qui se dissimule », TARABUSTER, xive, attesté alors par
tiré probabl. à son tour du part. fapi:; le dér. {arrabustis. Mot pop., d’origine mé-
expressions de l’a. pr. lapin « pauvre, etc. », ridionale, aux formes instables ; remonte à
l’it. {apino « malheureux, bas, vil », Pa. pr. l’a. pr. {abustar « faire du bruit », qui paraît
a lapin «en tapinois » sont empr. du fr. avoir été altéré par croisement avec rabasta
TAPIR, subsi., 1558 (Thevet : « Bestes « querelle, bruit » (v. rabâcher), cf. la forme
qu’ils nomment tapihire » dans un récit de talabust « bruit » ; {abusiar est une variante
voyage dans l’Amérique du Sud). Empr. de iabussar qui est à rapprocher de lit.
du tupi. talabussare « frapper » (synonyme de tam-
burare) et de l’a. fr. iamboissier, tambus-
TAPIS, x11°. Empr., au moment des chier « faire du bruit », tous mots de la
Croisades, du grec byzantin fapétion (où é famille de {abour, tambour.
625° TARSE

TARARE, instrument agricole, 1785. pondante se largd, laquelle est attestée


D'origine onomatopéique ;.v. tarin. depuis le commencement du xvIi® s. au
sens de « se donner de l'importance ». C’est
TARASQUE, 1721. Empr. du prov. {a-
de l’occitan que le mot a passé au français,
rasco, tiré de Tarascon, nom de ville.
par l’intermédiaire d'auteurs comme d’Au-
TARAUD, v. tarière. bigné. L'it. fargarsi est postérieur au
verbe franc. et en est emprunté.
TARD. Lat. iarde « lentement », d’où
« tard ». It. {ardi, qui a les deux sens du TARIÈRE. D'abord {arere, encore au
lat., esp. larde « tard », d’où « après-midi, XVIe s. et aujourd'hui dans un certain
soir ». — Comp. : attarder, x11° s. nombre de patois ; devenu de bonne heure
larière probabl. sous l'influence du verbe
TARDER. Lat. iardäre. It. lardare, esp. afr. {arier « exciter, agacer », mais aupa-
tardar. L’a. fr. disait de préférence, jus- ravant « *forer » (comp. les sens de {arau-
qu’au xvi® s., darg(i)er, lat. pop. *lardi- der), ce qui a entraîné le genre fém., attesté
care ; Cf. a. pr. tarzar, de *lardiare. dès le x1ves. ; mais {arière est encore masc.
TARDIF. Lat. de basse ép. {ardivus, dér. dans la plupart des parlers gallo-romans.
de tarde. It. tardivo, esp. tardio. — Dér. : Lat. {aratrum, vie (Isidore de Séville),
tardiveté, 1460. d’origine gauloise, cf. irl. {arathar ; d’où
aussi a. pr. {araire, esp. taladro, port. trado.
TARDIGRADE, xvie (dit de la tortue) ; Le lat. de basse ép. ferebellum, en lat. class.
rare avant la fin du xvite s. Empr. du ierebra, ne subsiste en gallo-roman que
lat. tardigradus « qui marche lentement ». dans quelques patois de l'Est et dans l’a.
TARE, 1318. Terme de commerce signi- pr. taravel (d’où travel), taravela, d’où les
fiant, propr. « caisse, baril, etc., dont on formes du prov. moderne, cf. aussi it.
déduit le poids pour avoir celui de la mar- trivello. Taraud, 1538 (écrit éarault), est une
chandise », puis « déchet dans le poids ou altération, par substitution de suff., de
la qualité d’une marchandise », d’où, d’une *{areau, autre forme de farel, xrr1°, variante
part, les sens commerciaux, de l’autre, de f{arele, xtr1° (forme dissimilée de {arere),
celui de « dommage, défaut, vice », qui encore usitée en Picardie ; d'où tarauder,
apparaît dès le xv° s. Empr. de l’it. fara 1690, taraudage, 1842; taret, 1756, semble
« tare, déchet, décompte, défaut », empr. également avoir été tiré de tarère, tariere
lui-même de l’arabe tarha « déduction, dé- par substitution de suff.
compte », littéral. « ce qu’on rejette » (du TARIF, 1572 ({ariffe au fém. ; puis tarif
verbe taraha « jeter » et techniquement au xvI1 s., masc., d’après les mots en -if).
« soustraire »). Mot qui s’est répandu au Empr. de l’it. {ariffa, empr. lui-même de
sens commercial : esp. {ara, all. Tara, l’arabe fa‘rif « notification ». — Dér. :
angl. {are. — Dér. : taré, vers 1500; les tarifer, 1762 ; tarification, 1856.
autres formes verbales sont rares ; déve-
loppement de sens parallèle à celui du TARIN, vers 1382. Appartient à une
subst. grande famille de mots formée autour d’une
racine onomatopéique, dont la consonne
TARENTULE, xvie (Paré); en outre explosive { marque le commencement d’un
tarentole (Rab., IV, 64). Empr. de lit. fa- bruit, tandis que l’r final, strident, donne
rantola, dér. de Taranto « Tarente »; ainsi l'impression d’une fin indéterminée.
nommé parce que la tarentule est com-
mune dans la Pouille, près de Tarente, TARIR, xu1e (G. de Lorris). Empr. du
d’où mordu de la tarentule, xvirie (Voltaire), francique *parrjan « sécher », cf. anc. haut
dépuis 1900 piqué de la larentule; le trou- all. tharrjan « id. » ; d’où aussi a. pr. tarir.
ble nerveux attribué à la piqüre de la — Dér. : tarissable, xvre, intarissable, xvI° ;
tarentule a été appelé en fr. tarentisme, tarissement, 1614.
1741, dér. de Tarente. La tarentule se dit TARLATANE, 1752, auparavant {arna-
aussi en it. {arentella, mot qui a servi à dane, 1701, iarnaniane, 1723. Aussi,
désigner, par comparaison avec le taren- depuis le xvirie s., angl. {arnaian, tarlatan,
tisme, caractérisé par une extrême agita- port. esp. cat. {arlatana. Cette mousseline
tion, une danse napolitaine de caractère ayant été importée d’abord des Indes Orien-
très animé, d’où le fr. tarentelle, 1787. tales, on a pensé à une origine hindoue ;
TARET, v. tarière. mais les parlers de ces pays ne connaissent
TARGE, ancien bouclier, vers 1080 (Ro-
pas de mot de ce type. Il est plus probable
land). Représente un francique *{arga, sup-
que le mot y a été apporté d'Europe, peut-
posé d’après anc. angl. large et anc. scan- être par les Portugais (v. veranda), et qu’en
port. c’est une altération irrégulière de
dinave targa « sorte de bouclier », d’où
lirilana, lequel est empr. du fr. firetaine.
aussi a. pr. {arga. L'it. targa (d’où le fr.
largue au xvi®s.) vient du prov. — Dér. : TAROT, xvi®; en outre {arau, 1534
targette, 1321, au sens de « petite targe » (Rab.). Empr. de l'it. farocco, d’origine
(déjà en 1301 pour désigner un ornement) ; obscure, ordinairement employé au plur.
d’où le sens techn. de la serrurerie, 1611. tarocchi comme le fr. tarots. — Dér. : taroté,
TARGUER (se), vers 1570. D'abord se 1642.
larger de qn, « se mettre sous la protection TARSE, xvi® (Paré). Empr. du grec {ar-
de qn » (Froissart), ensuite « s’armer contre s0s, propr. « claie », d’où « plat du pied,
(p. ex. contre la médisance) », jusqu’au pied », en vue d’un sens spécial. — Dér. :
commencement du xvii® s., dér. de targe. tarsien, 1792. Métatarse, 1586, d’après mé-
Les parlers occitans ont la forme corres- tacarpe.
DICT. ÉTYM. 40
TARTAN 626

TARTAN, 1792. Empr. de l’angl. tartan, lonner, 1740 ; tâtonner, xr1°, d’où tâtonne-
à rapprocher peut-être du fr. tirelaine ou ment, 1549 ; tâtonneur, 1762 ; tâtons (à),
du moyen angl. farlarin, primitivement xt1e (Chrétien) ; retâter, xrrre.
« drap de Tartarie » (de l’a. fr. tariarin),
TATOU, 1553 (P. Belon). Empr. de alu
TARTANE, 1622. Mot de la Méditerra- mot du tupi (Brésil).
née : it. iarlana, prov. fariano, cat. esp.
port. tartana ; probabl. emploi métapho- TATOUER, 1769 (dans une traduction
rique de l’a. pr. {artana « buse » (prov. mo- du récit des voyages de Cook). Empr., par
derne iarlano, comp. aussi hirondelle et l'intermédiaire de l’angl. {o tattoo, du tahi-
tien falau. — Dér. : tatouage, 1778 (id.).
d’autres noms d'oiseau qui servent à dési-
gner des types de bateaux), d’origine in- TAUDIS, 1309, au sens d’ «abri pour les
connue. travailleurs qui faisaient des travaux d’ap-
proche d’un siège », d’où « petite pièce »
TARTE, xu1°; en outre larire ; a. pr. au xv®s. et même «sorte de coffre » au xvie;
tarla, lartra. Variante de tourle due à l’in- dès 1611 sens moderne par plaisanterie;
fluence du lat. médiéval {artarum, cf. tartre, J. Bouchet, à la fin du xvi°, emploie {audis
ce sédiment croûteux pouvant facilement comme terme d’argot au sens de maison ».
être comparé avec la croûte d’un mets qui Dér. de l’anc. verbe (se) tauder, xive
s’est attachée au fond de la poêle. Cf. aussi (on a aussi la forme se laudir), « (se) pro-
l’it. {artara « tarte aux amandes ». — Dér. : téger, (se) mettre à l'abri ». Les plus
tartelette, 1349 ; tartine, vers 1500, tar- anciennes attestations venant de textes
tiner, vers 1840. anglo-normands, il faut voir dans le subst.
TARTRE, xvie (Paré, qui dit aussi /ar- lialz « tente qu’on dressait sur les navires
are ; d’abord farlaire, xIve, tartharum, quand ils étaient au repos » (1185) et dans
x111€). Empr. du lat. de basse époque tar- le verbe teolder « établir (une tente) » (1190)
tarum, en bas grec -on (l’adj. tartaralis est le point de départ du subst.; les deux
attesté dès le ve s.), d’origine obscure. — remontent à l’anc. nor. /jald « tente dressée
Dér. : tartrate, 1809; tartrique, 1824 (far- sur un navire ».
tarique en 1787). TAUPE. Lat. {alpa, empr. d’une langue
prélatine, où ce mot est peut-être le dér.
TARTUFFE. Tiré de T'artuffe, nom du d’un mot */ala « terre ». En tout cas le
personnage de la fameuse comédie de Mo- type darbon, qui est franco-prov. et prov.,
lière, 1664, devenu rapidement nom com-
et qui s’oppose à talpa par ses occlusives
mun ; une première fois avec cette valeur
sonores (comp. darpus chez le lexicographe
dans un pamphlet de 1609, puis G. Pa-
de basse ép. Polemius Silvius) présente le
tin, 1669. Molière a pris ce nom à la comédie même radical. Le Nord-Est et l'Est ont
italienne, dont un personnage avait le sur-
nom de Tartufo, propr. « truffe ». — Dér. :
créé, attesté dès le moyen âge, fouant,
tartufferie, 1743. part. prés. de jouir. — Dér. et Comp. :
taupier, 1690 ; taupin, 1521 ; capitaine des
TAS, xr1e. Du francique *tas, cf. le néerl. francs lopins ; il s’agit ici des francs archers,
las « tas de blé », d’où aussi a. pr. tas. — propr. « mineur, pionnier »; d’où l'emploi
Dér. : tasser, x11°, tassement, 1801 ; entas- de ce mot dans l’argot de l’École Poly-
ser, XII, d’où entassement, xrr1e. technique (d’où sortent les officiers du
génie), 1848 ; d’où taupe « classe de pré-
TASSE, 1150 (rare avant le xrve s.). paration à cette école », 1888 ; taupinière,
Empr. de l’arabe sässa (variantes locales : XIIe ; On a dit aussi taupinée, cf. La Fon-
tass, tâs, 1âsa), grâce à l'importation de taine, Fables, XIII, 9 ; taupe-grillon, xvire,
produits de poterie orientaux, dans la- d’après le latin des naturalistes grillotalpa.
quelle le port de Tyr a joué un grand rôle.
Cf. it. fazza, esp. taza, a. pr. tassa. TAURE, v. génisse.
TAUREAU, xrre. Dér. de l’a. fr. lor,
TASSEAU. Lat. pop. “*assellus, altéra- lat. taurus. It. esp. {oro, a. pr. faur (qui a
tion de faxillus « petit dé à jouer » et à
basse ép. « petit morceau de bois » par croi- aussi {aurel). Taureau s’est substitué à tor,
sement avec {essella « dé à jouer, cube »
parce que celui-ci, trop réduit phonétique-
(dim. de fessera « tessère, dé à jouer »). ment, était menacé d'homonymie. Le sim-
L'it. {assello « tasseau » peut représenter ple survit encore dans le Nord-Est et le
Sud-Est, et la région provençale a en outre
régulièrement fatillus, avec le changement un type braou, tiré de l’anc. adj. brau «fa-
de suff. ordinaire en lat. pop.
rouche, rude, brave », v. brave. Un autre
TATER. Lat. pop. *asiare, contraction dér. de faur, taurillon, 1471, est dia-
de lat. vulg. *axitare, fréquentatif du lat. lectal.
taxare « toucher ». En a. fr. le verbe a sou- TAUTOLOGIE, 1596. Empr. du lat. de
vent aussi le sens de « goûter » ; de même basse ép. fautologia (mot pris au grec) ; au
it. {astare, à. pr. tasiar, anc. esp. tasiar ont XVIe et au xvir® s. on a dit parfois {afto-
les deux sens. À cause de ce deuxième sens logie d’après la prononciation du grec mo-
on a proposé aussi une forme hypothé- derne.
tique “*aslare, qui serait née en lat. de
basse ép. de gustare influencée par {angere. TAUX, v. taxer.
Mais le passage sémantique de « tâter » à TAVELÉ, vers 1300 (Joinville) : d’autres
« goûter » se produisant de la façon la plus formes verbales s’emploient peu, cf. se
naturelle, cette hypothèse a peu de vrai- taveler. Dér. de l’a. fr. tavel « carreau (dans
semblance. — Dér. : tâtillon, 1695, tâtil- une étoffe ou un échiquier) », forme masc.
627 TÉLÉ-
correspondant au fém. {avelle « passemen- TECK, 1772 ; d'abord ieka, 1685, théca,
terie étroite, ruban », lat. fabella « plan- 1752. Empr., par l'intermédiaire du port.
chette », cf. a. pr. {avella « bordure étroite ». teca, de tékku du parler de la côte de Mala-
Tavelé signifie done étymologiquement bar, cf. aussi angl. Zeak. Ce bois était déjà
« marqué de taches semblables à des car- importé en Asie mineure vers le début de
reaux ». — Dér. : tavelure, 1564. l'ère chrétienne.
TAVERNE, TAVERNIER. Lat. {averna, TECKEL, 1923. Empr. de l’all. leckel.
tabernärius. It. taverna, lavernaio, esp. ta-
berna, tabernero. TE DEUM, début xve. Premiers mots
du cantique Te Deum laudamus.
TAXER, 1298 ; jusqu’au xvi® s., on a
dit surtout fausser, tauxer ; taxation, TÉGUMENT, 1703. Empr. du lat. tegu-
1294 ; d’abord {aussacion, 1283 (Beauma- menlum, « couverture » (de {egere « cou-
noir). Empr. du lat. iaxare « taxer, éva- vrir »), en vue d’un sens spécial.
luer » (mot d’origine grecque), taxatio.
Les formes /ausser, tauxer, d'où taux, 1320 TEIGNE. Lat. finea, attesté seulement
(d’abord fax, xive), a été tiré, ont une pour désigner l’insecte, mais qui a dû
voyelle au mal expliquée. La date de taux prendre dans le lat. pop. le sens de « ma-
indique que le verbe est antérieur. Et ce- ladie du cuir chevelu », qui existe partout.
pendant faux s’expliquerait facilement com- It. tigna, esp. tiña. Teigneux doit remonter
me une graphie de {ax en taus, taux sur le au lat. fineosus (attesté seulement au sens
modèle des mots tels que chevax, chevaux. de « plein de teignes »), cf. it. {ignoso, esp.
Quant à considérer faux, comme on l’a pro- tinoso. — Dér. : tignasse, 1680, d’abord
posé, comme tiré de tail (masc. correspon- « mauvaise perruque », puis « chevelure
dant à faille), attesté au sens d’ « impôt », mal peignée »; en outre éeignasse, 1762 ;
sur le modèle de bail, baux, c'est une expli- cf. aussi /ignon, xvI° (Marot), « chignon »,
cation qui se heurte au fait que tail ne aujourd’hui hors d'usage, dér. de tigne,
s’est employé qu’au sing. et que {aux lui- forme dialectale de {eigne ; ces mots ont
même s'emploie rarement au plur. — Dér. été faits par comparaison plaisante avec
et Comp. : taxe, 1378, on a déjà {axa dans une chevelure de teigneux.
le lat. médiéval ; taxateur, 1704 ; surtaxe, TEILLER, xive (Christine de Pisan) ; en
1611 ; surtaxer, xvie (Amyot); détaxer, outre {iller, 1311, plus rare et dialectal.
1845. Dér. de feille (en outre fille, dial.), lat.
TAXI-. Premier élément de mots sav. lilia, propr. « tilleul », d'où « écorce de
comp., tels que taxilogie, 1872 (taxologie tilleul », qui a servi ensuite à désigner aussi
en 1838), tiré du grec {axis « ordre, arran- l’écorce du chanvre et du lin.
gement ». TEINDRE. Lat. iingere, It. lingere, esp.
TAXIMÈTRE, vers 1906. Comp. avec teñir. Au moyen âge {eindre signifie sou-
le grec taxis au sens de « taxe » (choisi vent « (faire) changer de couleur, sous
aussi en raison de sa ressemblance avec le l'effet d’un sentiment violent », d’où teint
fr. taxe) et de mètre qui sert à faire des noms « pâle » ou « obscurei ». — Dér. et Comp. :
désignant des objets servant à mesurer. teint, x11° ; teinte, x111°, teinté, 1752 (d'où
A désigné d’abord un compteur adapté teinter, rare), demi-teinte, 1649 (probabhl.
à une voiture ; rapidement abrégé en taxi ; traduit de lit. mezza-linta); déteindre,
désigne aujourd’hui les voitures elles- xiti1e (J. de Meung) ; reteindre, vers 1260.
mêmes. L’inventeur avait d’abord appelé TEINTURE. Lat. finciüra. It. tintura.
ce compteur laxamètre ; sur l’intervention — Dér. : teinturier, 1244.
de Th. Reinach, il a corrigé en taximèlre.
TAYLORISME, vers 1918. Empr. de TEL. Lat. tälis. It. lale, esp. tal. — Dér. :
tellement, xrrr°.
l’angl. taylorism, du nom de l'ingénieur
américain Fr. Taylor (1856-1915) qui in- TÉLÉ-. Premier élément de mots sav.
venta cette rationalisation du travail. — comp., tiré de l’adv. grec télé « loin ».
Dér. : tayloriser, vers 1920 ; taylorisation, id. Télégraphe a été créé par le diplomate
TE, v. me. Miot (1763-1841), qui a déconseillé aux
frères Chappe le terme {achygraphe qu'ils
TÉ, 1704. Nom de la lettre {, qui sert à avaient d’abord adopté pour l'appareil
désigner différents objets en forme de T. qu’ils venaient d'inventer (1792), d’où télé-
TEAM, terme de sport, 1892. Empr. de graphier, 1842, sur le modèle de photogra-
l’angl. {eam, propr. « attelage ». phier, d’où -ique, 1798, -iste, 1801. Sur le
modèle de félégraphe a été fait téléphone,
TEA-ROOM, 1899. Empr. de l’angl. 1834, employé par Sudre, pour désigner
lea-room « salon où l’on prend le thé ». un appareil acoustique, devenu usuel vers
TECHNIQUE, 1721, adj. ; pris substan- 1876, quand Bell a adopté le mot, d’où
-ner, fin xixX°; cf. aussi télépathie, par
tiv. 1744. Empr. du grec lekhnikos (de
tekhné « art »). Sert de deuxième terme à l'intermédiaire de l’angl. telepathy, créé par
Myers en 1882, d’où -ique, 1838, -iste, fin
de nombreux comp., cf. polytechnique, etc.
— Dér. : technicien, 1836, sur le modèle
xixe. Téléphérique, 1923, dér. de téléphérage,
de physique, physicien, etc.; technicité, 1923, réfection, d'après les mots en félé-,
de telphérage, 1887 (Jacquez), empr. lui-
1859. même de l’angl. {elpherage (1883, Fleeming
TECHNOLOGIE, 1800; -gique, 1795. Jenkin) ; télévision, 1923, empr. de l’angl.
Empr. du grec {ekhnologia, -gikos. lelevision (1909).
TÉLESCOPE 628

TÉLESCOPE, 1611 : La lunelle qu'il du lat. {emperamentum « juste proportion »


(Galilée) appelle en un mot telescope (J. Tar- (de iemperare, v. tempérer), d’où l’emploi
de). Empr. du lat. moderne felescopium de tempérament en parlant de la constitu-
(attesté pour la 1re fois en 1611, dans un tion physique du corps humain et spécia-
imprimé publié à Rome), comp. avec les lement au sens de « propension à l’amour
mots grecs télé « loin » et skopein « exami- physique », xvirre, Le sens lat. a été éga-
ner ». Galilée a fait le premier grand téles- lement empr. au xvire et au xvrrre s., d’où
cope en 1609, mais on prétend qu’un lunet- le sens d’ « expédient, adoucissement, ar-
tier de Middelbourg (Hollande) a déjà fait rangement » et l’expression commerciale
des télescopes vers 1590. Sur le modèle payer à tempérament.
de télescope on a fait plus tard micros-
cope (avec le grec mikros « petit »), 1656 TEMPÉRATURE, 1538 ; a signifié aussi
(d’où -ique, vers 1700, Fontenelle), puis « tempérament » jusqu’au xvu® s. Empr.
stéréoscope, 1850 (avec le grec stereos du lat. {emperatura qui a les deux sens du
« solide », par l'intermédiaire de l'anglais, mot fr. (de {emperare).
l’instrument ayant été inventé et baptisé TEMPÉRER, xu°; tempérant, 1553;
par Wheatstone), stéthoscope (avec le tempérance, x111°. Empr. du lat. temperare
grec stêéthos « poitrine »), nom donné à « mélanger (par exemple de l’eau chaude
cet instrument en 1819 par Laënnec qui avec de l’eau froide) », d’où « adoucir, mo-
l'avait inventé en 1816, gyroscope, 1852 dérer » (de éempus au sens de « tempéra-
(créé par le physicien L. Foucault), péris- ture »), femperans, temperantia. Tempérer
cope, fin xix° (créé par l’angl. H. Grubb, a eu aussi jusqu’au xvr1° 5. le sens de « mé-
avec le grec peri « autour »), spectroscope, langer, doser », d’après le lat. femperare.
1872. — Dér. : télescoper, en parlant d’ac- V. tremper. — Dér. : intempéré, 1516, sur
cident de chemin de fer, d’après l’anglo- le modèle du lat. iniemperatus.
américain lo telescope, cf. le premier texte :
« On dit (aux États-Unis) : tel train a été TEMPÊTE. Lat. pop. *{empesia « temps
télescopé », en 1873, et un autre de 1885 : bon ou mauvais » d’où « tempête », fém.
« Pour exprimer que deux trains se sont pris substantiv. de l’adj. fempesius « qui
rencontrés et se sont broyés l’un contre vient à temps ». It. {empesia ; l'esp. tem-
l’autre, les Américains ont créé le verbe pestad continue le lat. class. empestatem,
télescoper », d’où -age, fin x1Ixe. acc. de fempestäs, comme l’a. fr. fempesté,
qui a disparu devant tempête. — Dér. :
TELLURE, 1800. Empr. du lat. moderne tempêter, x11°, au sens propre de « faire
tellurium (de tellus, telluris, « terre »), créé de la tempête », usuel au moyen âge ; sens
en 1798, par opposition à uranium, v. ce moderne depuis le xvre s.
mot, par le chimiste allemand Klaproth TEMPÊTUEUX, xive (Oresme). Empr.
pour désigner le tellure, découvert en 1782 du lat. de basse ép. tempestuosus.
par Müller de Reichenstein dans les mines
d’or de Transylvanie, TEMPLE, vers 1080 (Roland). Empr.
du lat. femplum. — Dér. : templier, nom
TELLURIQUE, terme de géologie, 1836. propre, xrrI°; l’ordre militaire des Tem-
Dér. sav. du lat. tellus. pliers avait été créé à Jérusalem au xrre S.,
TÉMÉRAIRE, vers 1361 (Oresme) ; té- près de l'emplacement où s'élevait aupa-
mérité, xive. Empr. des mots lat. {emera- ravant le temple des Juifs. Boire comme
rius, lemerilas, propr. « accidentel », « évé- un templier, qui se trouve chez Rab. (I,
nement fortuit » (de lemere « par hasard »), 5, etc.). a été signalé au xve s.) C’est une
d’où « inconsidéré », «irréflexion », premiers allusion aux débauches dont on accusait
sens du fr., qui y a ajouté au xve s. l’idée les Templiers ; ces accusations étaient fon-
de hardiesse. dées sur le fait que, comme il est dit dans
la règle même du Temple, la nourriture des
TÉMOIN. Lat. iestimônium « témoigna- Templiers était abondante, en raison de
ge » (de festis « témoin »), sens fréquent en leur Jourde tâche.
fr. jusqu’au xvie s. et qui survit encore
dans les locutions prendre à lémoin, en TEMPO, 1771. Empr. de l'it. tempo,
témoin de quoi (celle-ci seulement jurid.). même sens, propr. « temps ».
Le sens de « personne qui témoigne » est TEMPORAIRE, 1556, rare avant le
attesté dans le lat. de basse ép. — Dér. : XVI $. Empr. du lat. femporarius (de
témoigner, xII°; on a souvent au moyen lempus « temps »).
âge teslemonier, etc., et festemoigne, ete, TEMPORAL, xvie (Paré). Empr. du
« témoignage », formes faites sur le lat. lat. de basse ép. emporalis (de fempus
teslimonium ; d’où témoignage, XII*, qui « tempe »).
a dégagé le sens de {émoin.
TEMPOREL, xre; parfois {emporal.
TEMPE. D'abord femple, considéré jus- Empr. du lat. eccl. femporalis « du monde,
qu’au xvirre s. comme plus correct que de la vie terrestre », opposé à ce qui est
lempe, qui apparaît en 1530; temple est éternel, spirituel, d’où les sens de temporel
encore usité dans les patois. Lat. pop. en fr.; signifiait en lat. class. « tempo-
*lempula, altération, par modification de raire », sens pour lequel on a dû reprendre
la terminaison, du lat. class. lempora, temporaire.
plur. de fempus, mot neutre. It. fempia.
TEMPORISER, xve (Commynes) au
TEMPÉRAMENT, 1537, comme terme sens moderne ; d’abord « durer, vivre »,
médical employé en parlant de la qualité XIVe (Christine de Pisan) jusqu’au xvre s.
du plantain comme médicament. Empr. Empr. du lat. médiéval temporizare + pas-
629 TÉNOR

ser le temps ». — Dér. : temporisateur, TÈNEMENT, v. tenir.


1788, a remplacé iemporiseur, 1552 ; tem-
PU 1788; a remplacé femporisement, TENEUR, subsi. fém., xir1°, au sens
moderne. Empr. du lat. jurid. {enor « dis-
position essentielle, teneur, sens », en lat.
TEMPS. D'abord iens, tans ; puis {emps, class. « tenue, continuité » (de fenere, v.
vers le xIve s. (une lre fois vers 980), tenir). Teneur, fréquent au moyen âge au
d’après l'orthographe du lat. tempus. Lat. sens de « possession » est un autre mot,
tempus. It. tempo, esp. tiempo. — Comp. : dér. de tenir.
contre-temps, 1559 (peut-être adapté de
lit. a contratiempo); printemps, x11°; comp. TENEUR, subs{i. masc., v. tenir.
de l’anc. adj. prin « premier », v. prime et
temps ; peut remonter à l’époque lat., pri-
TÉNIA, xve (sous la forme {ynia). Empr.
mum lempus étant attesté dès l'époque du lat. iænia, propr. « bandelette » (du
grec {ainia, qui a également les deux sens
d’Auguste ; n’a éliminé l’anc. mot prime- du mot lat.) ; on dit souvent ver solitaire.
vère qu’au XVI® S., v. primevère, d’où
printanier, 1503 ; quatre-temps, 1340. TENIR. Lat. pop. *lenire, lat. class. te-
TENACE, 1501 ; ténacité, 1488. Empr. nére. It. tenere, esp. tener, à. pr. tenir, tener.
du lat. {enax, tenacitas (de ienere « tenir »). — Dér. et Comp. : tenable, xr1° s., in-,
1627 ; tenancier, 1490, par l'intermédiaire
TENAILLE. Lat. pop. tenäcula (de ienére de l’a. fr. fenance « tenure, propriété »;
« tenir »); tenäculum est attesté à basse d’abord terme de féodalité ; aujourd’hui
ép. au sens de « lien, attache ». A. pr. te- « celui qui tient un domaine rural, une
nalha (d’où vient l’it. tenaglia ; l'esp. tenaza maison de jeu, de prostitution, etc. »;
représente un lat. pop. *lenäcia). — Dér. : tenant, adj., usuel au moyen âge au sens
tenailler, 1549. de « tenace, ferme, etc. »; ne se dit plus
que dans la locution séance ienante ; tenant,
TENDER, 1837. Empr. de l’angl. {ender, subst., désignait au moyen âge « celui qui
du verbe {0 tend « servir (quelqu'un ». tient des terres en roture »; aujourd’hui
TENDON, 1536 (dès le xive, chez E. Des- on dit le tenant de quelqu'un, d'une opinion,
champs, au sens de « bugrane », mais d’après l’emploi de fenant dans la langue
c’est probabl. un dér. formé sur le verbe de la chevalerie, au sens de « celui qui,
tendre indépendamment du terme ana- dans un tournoi, était prêt à tenir contre
tomique). En anc. prov. tendon est attesté tout adversaire »; fenant, terme de pro-
dès le début du xirie s. C’est peut-être le priété, se dit dans la locution d’un seul
grec {énün, -onios « tendon » modifié tenant, formée comme celle du moyen âge
d’après le verbe tendre; tendineux, xvi® en un tenant « sans interruption », cf. les
(Paré), dér. sav. tenants el aboulissants, déjà pris au fig. au
XIVe S.; teneur, xI11°, au sens de « celui
TENDRE, adj. Lat. lener. It. tenero, qui tient, possède » ; sens commercial mo-
esp. lierno. On sait que Mlle de Scudéry, derne dans teneur de livres, 1670 ; tenon,
en 1656, dans Clélie, imagina un pays du 1380 ; tènement, xr1°, terme de féodalité;
Tendre (dont elle fit une carte), et cette tenue, x11°; tenure, id.; entretenir, id.,
locution resta longtemps usuelle et peut propr. « tenir ensemble », sens aujourd'hui
encore s’employer. — Dér. : tendresse, rare ; d’où « maintenir, conserver », fré-
1319, rare jusqu’au xvrie s. ; on a dit {en- quent au moyen âge, puis les sens moder-
dreur surtout au moyen âge et jusqu’au nes ; d’où entreteneur, xv°, entretien, xvI®
XvI® s., quelquefois tendreté; attendrir, (Amyot).
xit1e, d’où attendrissement, 1561. V. ten-
dron. TENNIS, 1836. Empr. de l’angl. {ennis
qui signifiait d’abord « jeu de paume », dit
TENDRE, verbe. Lat. tendere. It. tendere,
ensuite par abréviation pour lawn-tennis
esp. {ender. — Dér. et Comp. : tendance, qui a été employé aussi en fr., depuis 1880.
xi1e, d’où tendancieux, fin xix° ; tendeur, Tennis est lui-même le fr. tenez, terme que
1262 ; tendoir, 1765 ; tente, tiré du fém. le serveur employait au moment de lancer
du part. fentus ou “*tenditus, cf. a. pr. it. la balle. Teneiz apparaît en angl. en 1400 ;
tenda, esp. tienda, refaits sur le radical du et dès 1370, une chronique italienne signale
verbe, v. perte, vente, etc. ; tenture, 1538, que le jeu de fenes a été introduit à Flo-
réfection d’après tente, d’un anc. tendeüre ; rence par des chevaliers français. On sait
détendre, vers 1150, détente, 1386 ; reten-
quelle vogue avait le jeu de paume en
dre, vers 1170. France au moyen âge.
TENDRON. Au moyen âge signifie « car-
tilage (en général) », d’où aujourd’hui fen- TÉNOR, 1444, rare avant le xvine s.
dron (de veau) ; en outre « bourgeon, reje- Propr. « la voix d'homme qui va du pre-
ton tendre », d’où « jeune fille en âge d’ai- mier ut de l’alto au deuxième sol du vio-
mer », XIIIe ; par plaisanterie d’après l’adij. lon », puis « le chanteur qui a cette voix ».
tendre ; a été relevé aussi au sens de « jeune Empr. de l’it. {enore; l’a. fr. teneur, terme
animal » au xves. En a. fr. on trouve aussi de plain-chant, désignant la partie de la
tendrum, d’où, de bonne heure, {endron par psalmodie qui en est comme la dominante,
substitution de suff., lat. pop. *enerümen usité au xve et au xvi® s., est probabl. un
(de tener « tendre »), cf. it. {enerume « car- premier empr. à l’it., le fr. ayant employé
‘tilage ». laille comme terme de musique (surtout
vocale), dès la fin du xive s. (E. Des-
TÉNÈBRES, vers 1080 (Roland) ; téné- champs), d’où haute-taille, « ténor » et basse-
breux, id. Empr. du lat. {enebræ, lenebrosus. taille, tous deux en 1762; le fr. employait
TÉNOR 630

aussi au xve s. (relevé dès 1452) teneur au d’après liers. Empr. de l'it. {erzello, dér.
masc. pour désigner celui qui chante la de {erzo « tiers » ; lit. dit aussi {erza rima
teneur. L’it. lenore est empr. comme te- pour les tercets de Dante et de Pétrarque.
neur, fém., du lat. {enor ; outre les sens
qu’a le mot fr., le mot it. signifie « forme, TÉRÉBINTHE, x111° ; térébenthine, xr1°
manière, mode », d’où « concert, harmonie » (sous la forme Zerbentine). Empr. du lat.
et l’acception particulière de « voix de lerebinthus, -thina (resina) (du grec tere-
ténor ». binthos (mot égéen), -thiné, sous-entendu
rhétiné « résine »).
TENSION, 1490. Empr. du lat. de basse
ép. tensio (de lendere « tendre »). TÉRÉBRANT, 1836 ; térébration, début
xvinie. Empr. du lat. {erebrans (part. prés.
TENTACULE, 1767. Dér. sav. du lat. de {erebrare « percer avec une tarière ({ere-
tenlare, au sens de « tâter ». — Dér. : ten- brum) »), terebratio.
taculaire, 1797.
TERGIVERSER, 1541 (Calvin); tergi-
TENTATEUR, 1496 (écrit alors {empla- versation, x111° s. Empr. du lat. {ergiver-
leur) ; tentation, 1120 (écrit alors fempta- sari (littéral. « tourner le dos (tergum) »),
liun). Empr. des mots du lat. eccl. {empta- tergiversatio.
tor (ou {entalor) qui se disait en parlant du TERME « fin dans l’espace ou dans le
démon, déjà employé en lat. class. au sens temps ». Lat. ferminus « borne ». En par-
de « séducteur », temptatio (ou tentatio) (en lant de paiement, déjà 1283 (Beaumanoir).
lat. class. « essai, tentative », de {empiare, A limitation des Romains qui avaient un
v. tenter). Le moyen âge avait aussi une dieu Terminus, représenté sous la forme
forme plus francisée {emptere(s) « tenta- d’une borne, on a fait, depuis le xvie s.,
teur ». des figures d'homme ou de femme dont la
TENTATIVE, 1546 (Rab.) au sens d’ «é- partie inférieure se termine en gaine, de là
preuve de baccalauréat en théologie » ; le l’expression de La Fontaine, Fables, IX,
sens moderne s’est développé au xvire s. 18 : « Ils lui promirent tous De ne bouger
d’après le verbe {enter. Empr. du lat. sco- non plus qu’un terme » et étre planté là
lastique fentaliva « épreuve universitaire », comme un terme. À. pr. terme, mais it. {er-
V. tenter. mine « terme, borne » d’un lat. pop. *fer-
TENTE, v. tendre, verbe.
minem, fait sur le neutre {ermen, terminis
« borne » ; v. tertre.
TENTER. Lat. fempiäre « toucher, tâter,
chercher à atteindre », d’où «essayer, cher- TERME « mot, expression », xive (Ores-
cher à séduire » ({empiare est un autre mot me). Empr. du lat. médiéval ferminus « dé-
que tentare « agiter », fréquentatif de ten-
finition », d’où «expression », emploi figuré
du lat. class. {erminus.
dere « tendre »; mais les deux verbes ont
été confondus ; de là aussi hésitation dans TERMINER, x11° ; terminal, 1763. Em-
la graphie des dér., v. tentateur, tentation). pr. du lat. ferminare (de terminus, v. terme
It. {entare, esp. tentar, a. pr. temptar. L'a. « fin »), lerminalis. — Dér. : terminaison,
fr. a. fréquemment aussi l'orthographe x11°, sur le modèle du lat. {erminalio.
tempier. L'influence du lat. écrit s’est faite
TERMINOLOGIE, 1801. Comp. sav. du
en outre sentir dans les sens du verbe, no-
tamment dans la langue religieuse; tenter lat. ferminus au sens « mot » et de l'élément
une plaie « sonder... » qui se disait au -logie (dans fhéologie, ete.).
moyen âge paraît également repris au lat., TERMINUS, « point d'arrêt dans les
cf. de même l'esp. {entar, encore usuel au chemins de fer, etc. », 1842. Empr. de
sens de « tâter ». l’angl. {erminus, empr. lui-même du lat.
terminus. — Comp. : hôtel-terminus, fin
TENTURE, v. tendre, verbe. XIXe.
TÉNU, xvie (Paré) ; ténuité, 1377. Empr. TERMITE, 1795. Empr. du lat. de basse
du lat. {enuis, tenuilas ; ont éliminé l’adj. ép. termes, termitis, autre forme de farmes.
d'origine pop. fenve, encore admis par On a dit aussi {ermès. — Dér. : termitière,
l’Académie en 1694 et usité aujourd'hui 1830, sur le modèle de fourmilière.
dans les parlers de l'Ouest et de l'Est
(angevin lerve, ete.) et les dér. tlenvelé, TERNAIRE, vers 1390. Empr. du lat.
lenvrelé. Le lat. lenuis n'avait été conservé lernarius (de terni « trois »).
sous une forme pop. qu'en fr. et en prov. TERNE, adj., v. ternir.
TÉORBE, xvie (on écrit aussi {héorbe) ; TERNE, subst., terme de jeu de dés,
d’abord uorbe, fin xvie (d’Aubigné), en- V. sonnez.
core préféré au XVIIe s. ; en outre fiorbe à
cette même ép.; on a dit aussi {orbe au TERNIR, 1389. Probabl. d’origine germ.,
Xvirie. Empr. de l’it. {iorba, d’origine in- cf. anc. haut all. arnjan « cacher, obscur-
connue ; le téorbe a été inventé au début cir », moyen haut all. ernen. — Dér. :
du xvi® s. par un musicien florentin du terne, adj., xve,
nom de Bardello. TERRAIN. Lat. {errénum, neutre pris
TÉRATO-. Premier élément de mots Substantiv. de l’adj. terrénus « formé de
sav. tels que tératologie, 1836, tiré du grec terre ». Terrain, qui apparaît dès les pre-
leras, leralos, « prodige, monstre ». miers textes, est dû à une substitution de
suff.; mais it. esp. {erreno, a. pr. terren.
TERCET, vers 1500 (sous la forme tier- On a écrit aussi {errein depuis le xvrre s.
cel, encore dans les Femmes savantes, III, 2), pour rapprocher le mot du lat.
631 TESTIMONIAL

TERRAL, dans vent lerral (ou terral TERRINE, 1412. Tiré de l’anc. adj.
seul), 1716. Empr. du prov. (ven) terral terrin « de terre », lat. pop. *terrinus (de
(de terra « terre »). terra « terre »); terrin au sens de « pot,
marmite » est fréquent au moyen âge dans
TERRAQUÉ, 1750 (Voltaire; d’abord des textes du Nord-Est. Seulement gallo-
écrit {erraquée aux deux genres). Empr. du roman.
lat. médiéval lerraqueus, comp. de {erra et
de aqua « eau ». TERRITOIRE, 1278. Empr. du lat. {er-
ritorium. — Dér. d’après le lat. errilo-
TERRASSE, xv°, au sens moderne. En rium territorial, 1748 (Montesquieu),
ce sens paraît être empr. de l’a. pr. terrassa exterritorialité, 1859.
(de terra); l’esp. terraza vient du gallo-
roman. L’angl. lerrace et l'all. Terrasse TERROIR. Jusqu'au début du xvrre s.
viennent du fr. L’a. fr. {errasse « torchis », (Malherbe) signifie aussi « territoire »;
attesté depuis le x11° jusqu’au xvres., est mais déjà en 1270 au sens moderne. Lat.
un autre dér. de Zerre. — Dér. : terrasser, pop. *errätorium, réfection de {erritorium
1547, propr. « faire une terrasse » ; le sens d’après les mots en -@lorium ou d’après
de « jeter à terre » apparaît en 1581 ; il est terra. Seulement gallo-roman.
dû partiellement à l'influence de terre, mais TERTIAIRE, terme de géologie, 1786
il a succédé à Zerrasser au sens de « réduire, (de Saussure). Empr. du lat. ferliarius en
vaincre », Xvi®, qui a dù sortir de la langue vue d’un sens spécial.
de la guerre de siège, d’où terrassement,
1547, au sens moderne (au xvi® s. a en TERTIAIRE, 1812 (auparavant lierçaire,
outre le sens d’ « action de vaincre »), ter- 1690). Empr. du lat. moderne de l’Église
rassier, XVI°. tertiarius « membre d’un tiers ordre reli-
gieux, c’est-à-dire d’une congrégation
TERRE. Lat. {erra. It. terra, esp. tierra. laïque affiliée à un ordre religieux ».
— Dér. et Comp. : terreau, 1680, au sens
moderne ; au xvi® s. {erreau « terrain », TERTRE. Lat. pop. “*{ermitem, réfec-
n’est qu’une variante graphique de ferrau, tion, par substitution de suff. (probabl.
issu de {erral, usuel au moyen âge ; terrer, d’après limes, limitis « limite, borne », qui
x11e ; terrien, id. ; terrier, terme de féoda- a eu aussi le sens de « monticule, tertre »),
lité, dans papier terrier, XV1°, d’où ferrier, de */erminem, acc. tiré de {ermen, neutre ;
« id. » ; au moyen âge désigne aussi le sei- c’est à cette forme *erminem que se rat-
oneur ; terrier, « trou où se retirent certains tachent l’a. fr. du Nord-Est terne (ainsi
animaux », x11°: terrier, sorte de chien, chez Froissart), encore usité sous la forme
1838 (dès 1530 chien terrier) ; terri, xIx®°, tierne en wallon, et l’a. pr. ferme.
terme de charbonnage du Nord-Est, TESSITURE, terme de musique, fin
formé avec le suff. -is ; atterrer « conster- xixe. Empr. de l’it. {essitura (de fessere).
ner », XVIIe s. ; antér. « renverser à terre »,
xr1e, d’où « abattre » ; le sens nouveau a TESSON, v. têt.
rapproché le verbe de erreur ; atterrer, TEST, terme de psycho-physiologie,
terme de marine, 1424, d’où atterrage, 1895. Empr. de l’angl. est « examen,
1483 ; atterrir, 1686, atterrissage, 1835, épreuve », lui-même de l’a. fr. éesi « pot
atterrissement, au même sens, déjà en de terre (qui servait à des opérations alchi-
1690 ; au sens d’ « amas de terre formé miques, notamment à l’essai de l’or) », lat.
par les alluvions », 1332, alterrissemeni dér. testum, v. têt et tête.
d’un autre verbe atlerrir « remplir de ter- TESTACÉ, terme d'histoire naturelle,
re », 1334 ; déterrer, x11°; enterrer, vers 1578 ; rare avant le xvrrie s. Empr. du lat.
1080 (Roland), enterrement, xr1°, enter- testaceus (de tesia au sens de « coquille »,
reur, 1552 ; parterre, 1546 ; souterrain, x11°;
v. tête).
d’abord adj. et souvent écrit -in; pris
substantiv. vers le xvire s.; formé sur le TESTAMENT, terme jurid., v. tester.
modèle du lat. subterraneus ; terre-à-terre, TESTAMENT, « Bible », xu1°. Empr. du
xvi®, propr. terme de manège, d’un cheval lat. eccl. {estamentum que Tertullien a choisi
qui s’enlève par petits bonds, près de terre. pour traduire le grec diathéké, mot qui si-
TERRE-PLEIN, 1561. Empr. de lit. gnifie en grec class. « convention, pacte »
ierrapieno, tiré du verbe terrapienare (de et qui a été pris dans le grec de la Septante
pieno « plein ») « remplir de terre, terras- pour traduire l’hébreu berith « alliance »,
Ser ». et spécial. « alliance de Dieu avec Noé,
Abraham, Moïse, etc. », d’où, plus tard,
TERRESTRE, x1°. Empr. du lat. {er- « l'Ancien et le Nouveau Testament ».
restris ; V. lierre.
TESTER, 1406; testateur, XIII° S$.;
TERREUR, xu1°; terrible, 1160 ; ter- testament, terme jurid., 1213 ; testamen-
rifier, 1794 (lerrifiant dès 1558). Empr. du taire, 1435. Empr. du lat. leslari, lestator,
lat. terror, lerribilis, terrificare. — Dér. de testamentum (ainsi dit parce qu’il se faisait
Terreur, désignant une époque de la Ré- primitivement devant témoins), lestamen-
volution (1793-94), d’après la forme du larius (de lestis « témoin »).
lat. lerror : terroriser, 1796 ; pris aujour- TESTICULE, xve. Empr. du lat. festi-
d'hui dans un sens plus étendu ; terrorisme,
culus (de testis, de même sens).
1794 ; terroriste, 1794 (Babeuf).
TESTIMONIAL, 1274. Empr. du lat.
TERREUX, Lat. de basse ép. {errôsus. de basse ép. festimonialis (de festimonium,
TERRIFIER, v. terreur. v. témoin).
TESTON 632

TESTON, xvi® (Rab.). Anc. monnaie a. pr. {ela. Le mot a été introduit dans le
d'argent, qui a eu cours, avec des valeurs lat. du Bas-Empire par les nourrices qu’on
différentes, depuis le règne de François Ier, faisait venir en grand nombre des pays
en 1513, jusque sous Louis XIII. Empr. de germaniques. Le mot lat. était puppa,
l’it. testone (de testa « tête » ; monnaie ainsi d’où it. poppa, a. pr. popa, v. poupard. —
nommée parce qu'elle portait une tête de Dér. : téter, vers 1190, tétée, 1611 ; tétasse,
souverain) ; François Ier fit fabriquer les 1493 ; tétin, xive (E. Deschamps) ; tétine,
premiers testons à Milan, ce qui explique vers 1165 ; téton, 1493.
l’'empr. du mot it. qui désignait aussi des
monnaies italiennes ; aussi a. pr. {eston, TEXTE, vers 1120 (alors liste), au sens de
nom d’une monnaie. «livre d’évangile », ordinaire au moyen âge ;
sens moderne depuis le xtr1e s. (J. de
TESTONNER, v. tête. Meung) ; désigne spécial. depuis 1245 le
TÊT. Vieilli aujourd’hui au sens de « tes- passage de l’Écriture sainte que le prédi-
son »; désignait aussi autrefois le crâne, cateur cite au début de son sermon et qui
sens conservé en histoire naturelle ; s’em- en fait ordinairement le sujet, d’où « sujet
ploie aussi en parlant de la coquille des d'entretien, de discours », 1690. Empr. du
mollusques. Lat. {estum « vase de terre », lat. {exlus, propr. « tissu », d’où, à basse
d’où les sens de « coquille, écaille, tesson, ép., « texte ». — Dér. : textuel, 1444. V.
crâne ». It. lesto « sorte de vase », esp. contexte.
liesto « tesson, crâne ». V. tête. Dér. : TEXTILE, 1752. Empr. du lat. textilis
tesson, 1283, d’après le plur. feis, les. « tissé » (de texere « tisser »).
TÉTANOS, 1541 ; tétanique, 1554. Empr.
du grec letanos, tetanikos. — Comp. : anti- TEXTURE, terme didactique, xve (par-
tétanique, 1819. fois « action de tisser », ainsi en 1488).
Empr. du lat. feætura, propr. « tissu »; on
TÉTASSE, v. tette. trouve quelquefois tisiure d’après le verbe
TÊTE. Lat. {esia, propr. « vase de terre lisire, V. tisser.
cuite », d’où « coquille, écaille », puis « crâ-
ne » à basse ép. ; a pris par suite dans le THALASSO-. Premier élément de mots
sav., tels que thalassocratie, 1829, tiré du
lat. pop., par plaisanterie, le sens de « tête»,
cf. it. a. pr. {esta. N'a supplanté les repré- grec thalassa « mer ».
sentants de caput que peu à peu, v. chef; THALWEG, xviie (terme de diplomatie,
l’espagnol n’a même encore qu'un dér. de V. Jal), ensuite terme de géographie. Empr.
caput, cabeza, lat. pop. *capilium. D'autre de l’all. Thalweg, littéral. « chemin (Weg)
part esta a été conservé avec les sens anté- de la vallée (Thal) ».
rieurs à « tête » dans un grand nombre de
parlers romans, cf. roumain fasiä « crâne », THAPSIA, 1876 ; d’abord fhapsie, 1573.
et même a. pr. tesia « écaille, coquille de Empr. du grec thapsia.
noix ». V. têt. — Dér. et Comp. : testonner,
1515 (Marot) « peigner les cheveux »; ls, THAUMATURGE, 1610 (-urgue, Guez
d’abord simplement graphique a été en- de Balzac); -gie, 1836. Empr. du grec
suite prononcé parce que c’est un mot thaumaiurgos « faiseur de miracles (thau-
arch. de la langue marotique ; têtard, 1762 ; ma) », -gia.
au moyen âge au sens de « qui a une grosse THÉ, 1664. Empr. du malais {&h, comme
tête »; têtière, xrrre :; têtu, id. ; en-tête, l’angl. ea, d’où les comp. tea-room, de
1836 ; entêter, xr11°, entêtement, 1649 ; au quelque usage depuis la fin du xrxe s., tea-
sens de « mal de tête », 1566 ; étêter, 1288 ; gown (de gown « robe »), id., etc. C’est par
tête-bêche, 1838 ; altération de béchevet, erreur qu’on a donné 1563 comme date de
XVIe, « la tête de l’un aux pieds de l’autre » la première citation de thé; le texte en
(encore usité dans beaucoup de parlers question ne se rapportant pas à François,
sous des formes diverses), comp. de chevet premier duc de Guise, mais à Henri II, le
et du préf. bes « deux fois », lat. bis, cf. bes- cinquième duc. Depuis 1607 et jusqu’à la
cuit, anc. forme de biscuit ; l’altération de fin du xvrie s. on appelle le thé chia ou
béchevet est due à ce que le mot, n'étant icha, ce qui représente le chinois {cha (d’où
plus compris, a été renforcé au moyen de port. cha). — Dér. : théière, 1723 ; on a
lèle, cf. à tesie à teste bechevel, Rabelais, I, dit aussi thétière, d’après cafetière.
22, parmi les jeux de Gargantua ; tête-à-
queue, 1963. THÉÂTRE, vers 1200; théâtral, 1520.
Empr. du lat. theatrum (du grec theaïron),
TÊTEBLEU, v. dieu. theatralis. — Dér. : théatrophone, vers 1900 ;
TÉTER, v. tette. théâtreuse, id.
TÉTRA-. Premier élément de mots sav. THÉBAÏDE, 1674 (Mme de Sévigné), au
comp., tels que tétragramme, 1842, faits sens fig. Tiré de Thébaïde, nom d'une
sur le modèle de mots remontant au grec, contrée de l'Égypte, voisine de Thèbes, où
tels que tétragone, XIV, Où fétra- est une se retirèrent des ascètes chrétiens.
forme de tetiares « quatre » en composition.
THÉISME, 1756 (Voltaire) ; théiste,
TÉTRAS, xvirie (Buffon): d’abord fe- 1705. Dér. du grec theos « dieu » (probabl.
trax, 1752. Empr. du lat. médiéval tetraæ par l'intermédiaire de l’angl. qui a fheism
(transformation du lat. tetrao, pris au grec). depuis 1698); déisme était déjà créé.
TETTE. Du germ. occidental *itta, cf. THÈME, xure, Empr. du lat. de la rhé-
all. Zitze, angl. feat; aussi it. lella, esp. torique fhema (mot pris au grec qui signifie
633 TIC

propr. « ce qu’on pose», d’où « sujet posé »). THÈSE, 1579. Empr. du lat. de la rhé-
Au sens de «sujet de composition scolaire », torique fhesis (mot pris au grec, qui signifie
1580 (Montaigne), d'où le sens moderne, propr. « action de poser »).
Xvirie (Rollin).
THÉURGIE, 1721, auparavant une fois
THÉO-. Premier élément de mots sav. au xive s. et en 1486. Théurgique, XvIII°
tels que théocratie, 1679, empr. du grec (Voltaire), id. Empr. du lat. de basse ép.
(certains par l'intermédiaire du lat.), ou de theurgia, -icus (du grec theourgia, littéral.
mots faits sur ce modèle, tels que théodicée, « opération de dieu », -ikos). — Dér. : -iste,
créé par Leibniz en 1710 avec le grec diké xvitie (Diderot), ou -ite, 1747 (Voltaire).
« justice ». Le premier élément fhéo (de
theos) signifie « dieu ». THLASPI, nom de plante, 1553. Empr.
du lat. thlaspi (mot pris au grec) ; altéré
THÉOLOGIE, vers 1240 ; théologique, en {alaspis (1680), taraspi(c), léras-, formes
xIVe. Empr. du lat. eccl. fheologia, -gicus relevées en 1769, et usitées dans des patois.
(du grec theologia, -gikos). — Dér. : théolo-
gal, 1375 ; -gien, 1370. THOMAS, « vase de nuit », 1837 (argot),
aujourd’hui pop. Emploi burlesque du nom
THÉORÈME, 1539. Empr. du lat. de baptême, pres jeu de mots sur le
de basse ép. theorema (du grec theôrêma, passage de l'Évangile Jean XX 27 Vide,
propr. « objet d’étude », d’où « principe », Thomas, manus meas, où vide a été pris
pris spécial. au sens mathématique, de pour le verbe vider.
theôrein).
THON, 1393 (Ménagier : « Thon est un
THÉORIE, 1380 ; théorique, 1380, aupa- poisson qui est trouvé en la mer ou estans
ravant (1256) subst. fém., équivalent de marinaulx des parties de Languedoc »).
théorie ; théorétique, 1721. Empr du lat. Empr. de l’a. pr. ton, lat. thunnus, thynnus
de basse ép. theoria (et aussi fheorice), (du grec thynnos), d’où aussi it. {onno. —
theoricus, theoreticus (du grec philoso- Dér. : thonnier, fin xIxe®,
phique theôria, propr. « action d’obser-
ver, de contempler », sens empr. en 1584, THORAX, xvie (Paré) ; d’abord thorace,
d'où « méditation, spéculation », -ikos, fém., 1314 ; thoracique, id. Empr. du lat.
-iké, -étikos, de theorein « observer, contem- thorax (du grec thôrax, propr. « cuirasse »)
pler »). L'opposition de la théorie et de la et du grec thôrakikos. — Comp. : pneumo-
pratique est déjà marquée dans J. de thorax, 1859.
Meung. Théorie a été repris au xvr11e s. au THRÉNE, 1516. Empr. du lat. de basse
sens de « procession, députation solen- ép. threnus (du grec thrénos).
nelle » qui est un des sens du mot grec
theôria. — Dér. : théoricien, 1550 sur le THURIFÉRAIRE, 1690, « clerc qui por-
modèle de mathématicien, etc. te l’encensoir dans les cérémonies de l’Égli-
se catholique » ; depuis 1842, au sens d’ cen-
THÉOSOPHE, 1704 ; théosophie, 1823. censeur ». Empr. du lat. médiéval ihurife-
Empr. du grec theésophos « celui qui connaît rarius, dér. du lat. fhurifer « qui offre de
les choses divines », fheosophia « connais- l’encens » (sens de basse ép.), d’abord « qui
sance des choses divines ». Employés au produit de l’encens » (de ius, thus, turis,
sens moderne, qui se rapproche du boud- thuris, «encens » (du grec thyos) et du verbe
dhisme, depuis 1880 environ. — Dér. ferre « porter »).
théosophique, vers 1784.
THUYA, 1553. Empr. du grec thyia.
THÉRAPEUTIQUE, 1546 (Rab. : -lice).
Empr. du grec therapeutikos (de therapeuein THYM, xrie. Empr. du lat. {hymus (du
« soigner », partic. en parlant du médecin). grec thymos).
THERMES, 1213, en parlant des Ther- THYROÏDE, xvie (Paré). Empr. du grec
mes de Julien, à Paris ; sens plus étendu thyroeidés « qui a la forme d’une porte »,
à partir du xive s. Empr. du lat. thermæ pris par confusion, par suite d’une faute
« bains chauds » (du grec thermos « chaud »). de copiste dans Oribase, à la place de thy-
— Dér. : thermal, 1735. reoeidés « qui a la forme d’un bouclier»
(ainsi chez Gallien). Littré a essayé, mais
THERMIDOR, 1793. Créé par Fabre vainement, de rectifier le mot fr. en thy-
d'Églantine avec les mots grecs {hermos réoide.
« chaud » et dôron « présent », cf. fructidor,
messidor, d’où vient l’i de thermidor. THYRSE, vers 1500. Empr. du lat.
thyrsus (du grec thyrsos « bâton de Bacchus
THERMIQUE, 1847. Dér. sav. du grec et des Bacchantes »); sert aussi comme
thermos « chaud ». terme de botanique, 1742, d’après le la.
THERMO-. Premier élément de mots TIARE, xive (écrit fhiaire). Empr. du
sav., tels que thermochimie, 1872, thermo- lat. tiara (d’un mot grec d’origine persane
mètre, 1624, etc., tiré du grec fhermos qui désignait la coiffure des Perses).
« chaud ».
TIBIA, 1555. Empr. du lat. tibia, v. tige.
THERMOS, 1949. Empr. du grec fher- TIC, 1611, au sens vétérinaire; d’où
mos. sens plus étendu depuis 1654. Paraît être
THÉSAURISER, 1350. Empr. du lat. d'origine onomatopéique, comme tic-tac;
de basse ép. thesaurizare (de thesaurus, v. lit. ticchio, qui a pris dans la langue vul-
trésor). — Dér. : thésaurisation, 1787; gaire le sens de « caprice », peut être empr.
thésauriseur, 1764. du fr. — Dér. : tiquer, 1664, au sens vété-
TIC 634

rinaire (11 y a des chevaux qui liquenl, d’autre part « son du timbre », d’où l’ac-
dans le Parfait Mareschal) ; sens plus ception musicale du mot, XVIIe s. ; timbre
étendu depuis 1888. d’autre part « son du timbre », d’où l’ac-
TICKET, 1727. Empr. de l’angl. ticket ception musicale du mot, xvire s. ; limbre
(de l’a. fr. estiquel, -ele, v. étiquette). a été pris en outre au moyen âge pour dési-
gner une marque d’armoirie, cf. Un timbre
TIC-TAC, 1552. Onomatopée. des armes de M. le Dalphin, xiv®s., de là
TIÈDE. Lat. tepidus. It. fiepido, esp. « marque imprimée sur le papier que l’État
dibio. — Dér. : tiédeur, xr1° ; tiédir, 1496; rend obligatoire pour la validité de certains
attiédir, xX1I11°; atevir du xr1 s. est une actes », xvIr1°, d’où « marque que la poste
forme dialectale de l'Est. mettait sur les lettres », 1802, d’où timbre-
TIEN, v. mon.
poste, milieu xix°. Empr. du grec byzantin
tymbanon, qui a donné les formes succes-
TIERCE, v. tiers. sives *limbene, *timbne, puis timbre (rare-
TIERCELET, 1316. Dér. de l’a. fr. ter- ment impre, qui est une forme secondaire
çuel «id. », lat. pop. *{ertiolus, dér. de tertius et non la première d’où timbre serait issue
« tiers », dit ainsi parce que le tiercelet, par altération) ; le grec anc. disait tympa-
mâle du faucon ou de l’épervier, est d’un non, d’où vient le lat. iympanum « sorte
tiers plus petit que la femelle. It. {erzuolo, de tambour », continué par it. timpano
“Sp. terzuelo, a. pr. tersol. « timbale », a. pr. {emp, lemp{(l)je « sorte
de tambour ». V. tympan. — Dér. et
TIERS. A signifié « troisième » jusqu’au Comp. : timbrer, xr1e, au sens de « battre
début du xvire s.; depuis ne survit que du timbre »; développement de sens pa-
dans des locutions, cf. une tierce personne, rallèle à celui du nom ; timbrage, fin xvrie,
le liers élal, etc. Se trouve comme subst. au sens moderne, une première fois en 1575,
depuis 1174 ; v. troisième sous trois. Lat. à propos de blason ; timbré, « un peu fou »,
lerlius. It. lerzo. — Dér. et Comp. : tierce, XVII®, Cf. piqué ; timbreur, 1797 ; timbre-
1119 ; tiers-point, 1611, comme terme d’ar- quittance, 1872.
chitecture ; 1752, au sens de « lime trian-
gulaire ». TIMIDE, 1528; timidité, vers 1400.
Empr. du lat. fimidus (de timere « crain-
TIFFES, v. attifer. dre »), timiditas. — Dér. : intimider, 1515 ;
TIGE. Lat. {bia « flûte », d’où «os (anté- intimidation, 1552 (Rab,).
rieur) de la jambe »; a pris dans le lat. TIMON. Lat. pop. {imünem, acc. de lim,
pop. le sens de « tige ». Seulement fr. et attesté depuis env. 500, entre autres chez
Sarde fiviu. — Dér. : tigelle, 1815. Grégoire de Tours ; altération du lat. class.
TIGNASSE, TIGNON, v. teigne. lémô ; l'origine de l’i n’est pas claire ;
Si le & de têmo remontait à un ei en indo-
TIGRE, vers 1165. Empr. du lat. igris, eur., lémo pourrait s'expliquer comme la
des deux genres (comme le mot grec d’où forme osco-ombrienne du mot, {mo comme
il vient); souvent fém. jusqu’au xvre s. la forme latine. Mais les éléments man-
comme dans les langues anciennes. — quent pour décider cette question. À éga-
Dér. : tigré, 1718 ; tigresse, 1564. lement pris, presque partout où il est
TILBURY, 1820, dans un ouvrage sur conservé, le sens de « gouvernail »: it.
Londres. Empr. de l’angl. tilbury, tiré du limone, esp. timén. — Dér. timonier,
nom du carrossier qui construisit les pre- 1220 ; une première fois x11° (sous la forme
mières voitures de ce genre, début x1xe. tomonier) ; timonerie, 1791.
TILIACÉE, 1798. Empr. du lat. de basse TIMORÉ, 1578. Empr. du lat. ecel.
ép. tiliaceus. timoralus « qui craint Dieu » (de {imor
« crainte ») ; a d’abord eu ce sens qui a été
TILLAC, 1382. Empr. de l’anc. scandi- élargi au xvirie s. |
nave pilja « planche au fond d’un bateau »
Cf. all. Diele « planche ». TIN, dans laurier-tin, 1721. Empr. du
lat. tinus.
TILLEUL. Lat. pop. “*iliolus, dér. de
“lilius, lat. class. tilia, v. teiller. Seulement TINCTORIAL, 1796. Dér. sav. du lat.
fr. L’a. fr. avait des formes fil, teil. It. linciorius (de tinguere « teindre »).
diglio, roumain feiu, formes qui remontent TINETTE, xur1e. Dér. de tine « sorte de
à un lat. pop. *éilius. tonne, baquet », aujourd’hui peu usité, lat.
TIMBALE, 1492. Altération, d’après ina « vase pour contenir le vin ». It. esp.
‘cymbale, de tamballe, 1471 (cf. encore en tina.
1530 iamballes d’'Espaigne), altéré lui- TINTAMARRE, 1496. Mot expressif,
même, d’après fambour, de l'esp. atabal qui se rattache à finier, mais dont
(cf. atabale au xvre s.) ; ce dernier mot est la
deuxième partie est d’origine obscure. —
empr. lui-même du mot arabo-persan afta- Dér. : -resque, 1856 (Goncourt).
bal « tambour », d’où aussi it. {aballo + tim-
bale ». Timbale a pris d’autres sens depuis TINTER. Lat. de basse ép. tinnitare,
le xvir1e $. — Dér. : timbalier, 1671. dér. de finnire, « sonner, tinter ». On atten-
drait *enler, cf. retentir ; mais, avant la
TIMBRE. D'abord « sorte de tambour », nasalisation de la voyelle, i, voyelle aiguë,
du XIIe au xIv®e s., puis « cloche sans bat- a été substituée à e pour rendre le mot plus
tant, qu’on frappe avec un marteau », d’où expressif, cf. cingler. Seulement fr. — Dér. :
« timbre de table, d'appartement » et tintement, 1490 ; tintouin, 1507, propr.
l'expression avoir le timbre félé, xvire; « bourdonnement d'oreille », d’où le sens
635 TITILLER

moderne au xvire s. ; altération expressive chasse, xvrire (Buffon) ; tirée, xix°; tiret,
de tintin, xrrie, « tintement », mot onoma- 1544 ; tirette, 1812 ; tireur, 1471, sens com-
topéique, tiré de tinter. mercial, 1664; tiroir, 1530 (dès 1380, au
TINTINABULER, 1840 (Balzac). Dér. sens de « fermoir d’un livre »), concurrencé
du lat. #intinnäbulum « clochette »; v. le par tirant dans l'Est et le Sud-Est, firelle
préc. dans l'Ouest et layette, disséminé dans les
parlers septentrionaux ; attirer, vers 1490 ;
TIPULE, terme de zoologie, 1611. Empr. aitirer « arranger » de l’a. fr. est un autre
du lat. tippula « araignée d’eau ». mot, v. attirail ; détirer, x11° ; étirer, x111° ;
TIQUE, 1464. On a voulu rattacher le retirer, X111° ; soutirer, x11°, soutirage, 1732.
mot au néerl. {eek, tiek, mais le moyen — Nombreux comp. avec iire- comme
néerl. n’a que des formes avec la voyelle e, premier élément : tire-botte, 1690 ; tire-
teke, teecke. Il vient donc plutôt de l’angl. bouchon, 1718; tire-bouton, 1680; tire-
tick apporté en France par les troupes fond, 1549; tire-laine, 1611; tire-ligne,
anglaises pendant la Guerre de Cent Ans. 1680 ; tire-pied, 1635; tire-point, 1803, dit
L’it. zecca vient du longobard. souvent par altération liers-poini; tire-sou,
1800, au sens de « receveur de rentes »;
TIQUER, v. tic.
tire-tête, 1734, créé par un inventeur du
TIQUETÉ, « tacheté », 1680 (écrit ficié). nom de Dusse. V. larigot.
Mot dialectal, empr. du picard. Il s’agit
d’abord d’un mot en usage chez les fleu- TIRET, v. tirer.
ristes. Vient du néerl. Lik «légère piqûre », TIRETAINE, sorte de drap grossier;
d’où le hennuyer tique « moucheture ». Le désigne cependant parfois au moyen âge
suff. -elé a été ajouté dans les parlers de une étoffe de prix, 1245. Très probabl.
l'Extrême-Nord. dér. de l’a. fr. tiret « sorte d’étoffe », 1138,
TIRADE, xve°. Plutôt qu’empr. de l’it. qui est dér. à son tour de l’a. fr. fire
dirata « action de tirer », a été dér. en fr. « étoffe de soie », lequel représente le bas
avec le suff. -ade employé dès le xve lat. iyrius (1x°s.) «étoffe importée de Tyr ».
pour former de nouveaux mots ; employé Le suffixe -aine doit être empr. à futaine.
d’abord surtout dans Ia locution lout TISANE, x11e. Empr. du lat. de basse
d'une tlirade « d’un trait » (cf. aussi au ép. tisana, lat. class. ptisana « tisane d’or-
xvIIe s. lirade d’aile « vol sans interrup- ge », puis « tisane de riz », propr. « orge
tion »), d'où des sens comme « dévelop- mondé » (du grec piisané « id. »).
pement de lieux communs »; l'emploi
de tirade comme terme de théâtre, xvrie, TISON. Lat. {itionem, acc. de trio. It.
est sorti facilement des sens préc. tizzone, esp. tizôn. — Dér. : tisonner, x111° ;
tisonnier, xIv®e.
TIRELIRE, xrre (J. de Meung). Pro-
babl. le même mot que tire-lire, sorte de TISSER, xvi° (cf. lissa, 1538). Réfection
refrain, usité au moyen âge, qui aura été de l’anc. titre, encore tistre, en 1694 ({Aca-
dit par plaisanterie pour désigner une tire- démie), par changement de conjugaison,
lire, peut-être à cause du bruit que font en raison de la complication des formes de
les pièces de monnaie, quand on la secoue ; ce verbe. Titre, par les stades successifs
pour des dénominations d’origine analogue, *lieistre, listre, titre, représente le lat. {exere,
cf. dorloter et guéridon. cf. it. {essere, esp. lejer. La forme ancienne
survit encore en Wallonie, etc. — Dér. et
TIRER, vers 1080 (Roland). Cf. it. : Comp. : du verbe titre, dont les formes
lirare, esp. a. pr. lirar. Probabl. réduction comp. du part. passé {issu et d’un auxi-
de l’a. fr. marlirier « martyriser », aussi liaire sont encore usitées au xvire s. (Mi-
« torturer (en général) ». Une des tortures chelet les emploie aussi par archaïsme) :
les plus fréquemment infligées était la dis- tisserand, 1224, pour fisserenc, formé avec
location des membres. Le nom habituel du le suff. d’origine germ. -enc, cf. le nom
bourreau au moyen âge, firanz (du lat. propre Teysserenc. (On a dit aussi au
lyrannus) ayant la même désinence que moyen âge lissier ; le prov. disait teissen-
les part. prés., on pouvait voir dans le part. dier ; de là les noms propres Tissier, Tis-
prés. de martirier, martirant, un comp. de sandier) ; tissu, x1r1° ; tissure, 1501 ; d’a-
ce tiranz avec l’adv. mar « malheureuse- bord tisture, v. texture ; de tisser : tissage,
ment » (du lat. mala hora « à la mauvaise 1819, déjà en 1262 et en 1340 sur tisire;
heure »). A la suite du part. prés. le verbe détisser, xvi°, a remplacé destitre, encore
entier pouvait être senti ainsi, de sorte relevé en 1642.
qu'un simple tirer s’est finalement détaché
de ce verbe. Tirer a remplacé en grande TITAN, xive. Nom propre, empr. du lat.
partie {raire, v. ce mot. — Dér. et Comp. : Titan, personnage mythologique (mot pris
tir, xunre ; tirage, 1479; tirailler, 154%, ti- au grec). Sens fig. au xixe 8. — Dér. :
raïllement, xvie, tirailleur, 1578 ; comme titanique, 1552 ; titanesque, fin x1x° ; tita-
terme militaire, 1740 ; tirant, 1320; tire, nisme, fin xvrie (Saint-Simon), rare avant
dans à tire d’aile, 1532 (Rab.) et dans vol leRxIXe
à la tire, 1837 ; lire, usuel au moyen âge TITI, 1837. Mot pop., de formation en-
au sens de « rang, ordre », est un autre fantine.
mot (v. artillerie), {out d’une lire, encore
signalé par Littré, y remonte (cf. au TITILLER, 1798, rare auparavant, une
moyen âge a tire, de tire, etc. « de sui- première fois au x11° s.; titillation, 1721,
te, etc. »); du reste ce mot a subi dès le id., quelquefois aux xive et xves. Empr. du
début l'influence de tirer ; tiré, terme de lat. titillare « chatouiller », tifillatio.
TITRE 636

TITRE, vers 1165 (sous la forme fille ; servent à se laver, à se coiffer, etc. », fin
d’où litre). Empr. du lat. titulus « inscrip- xvi®, d’où le meuble lui-même, id. (Ré-
tion », puis « titre d'honneur »; le fr. a gnier), puis « action de s'habiller, de se
développé des sens nouveaux ; sens jurid. parer, etc. », xvii*, enfin « ensemble des
dès 1283 (Beaumanoir) ; « acte écrit qui ajustements dont on se pare pour aller
établit un droit », xvi®, d’où « titre de dans le monde (dit spécial. des femmes) »,
rente », xix° ; terme de monnayage, 1543. XVII®; loilelte, terme de boucherie, a été
— Dér. et Comp. : titrage, 1841 ; titrer, expliqué comme un dér. de {aie; c’est une
x111, en parlant d’un rôle de parchemin; hypothèse possible, mais non nécessaire;
sens parallèles à fire ; attitrer, x11° (sous toilier, x11° (sous la forme f{elier), toilerie,
la forme alilelé) ; sous-titre, 1872. 1409 (sous la forme felerie) ; entoiler, 1694,
TÎTRE, v. tisser. entoilage, 1755, rentoiler, 1690, rentoilage,
1752.
TITUBER, 1496, rare avant le xIx° $. ;
titubation, 1377. Empr. du lat. {itubare, TOISE, anc. mesure valant six pieds.
titubatio. Lat. pop. {ë{n)sa, fém. pris substantiv. de
tensus (part. passé de lendere « tendre »),
TITULAIRE, 1502. Dér. sav. du lat. au sens d’ « étendue (de chemin) », d’où
litulus, v. titre. — Dér. : titulariat, 1843, parfois «espace de temps » ; spécialisé pour
d’après notariat, etc.; titulariser, vers désigner une mesure. — Dér. : toiser, 1260
1875, d’où -isation, id. (au sens de « examiner qn d’un regard
TOAST, 1762 (sous la forme toste) ; l’or- dédaigneux », 1782) ; toiseur, 1549.
thographe ioast ne s’est établie qu’au TOISON. Lat. de basse ép. {o{n )sionem,
XIX® S. Empr. de l’angl. foast, propr. acc. de to(n )sio « tonte », qui a pris ensuite
« tranche de pain rôtie » (sens également le sens de « toison » (de tondere « tondre »).
empr. depuis 1769, mais moins usité et A. pr. loizon ; lit. {osone et l’esp. tusén
répandu seulement depuis la fin du x1x®s.), viennent du gallo-roman.
empr. lui-même de l’a. fr. osté, tostée, part.
passé d’un verbe foster « griller » (lat. pop. TOIT. Lat. féclum. Aujourd’hui concur-
*lostäre) ; le sens d’ « action de boire à la rencé dans de nombreux parlers gallo-
santé de quelqu'un » vient de ce que, en romans par couverl, couverture, (cf. cou-
Angleterre, on avait coutume de tremper vreur) et dans les parlers du Midi par des
une rôtie dans son verre avant de porter dér. de tuile, It. telto, esp. techo « plafond ».
la santé de quelqu'un. Le verbe toaster, — Dér. et Comp. : toiture, 1594 ; avant-
1750 (Montesquieu qui écrit loster) vient toit, 1397, cf. aussi avan-they, 1386, dans
de même de l’angl. do toast. un texte de Lausanne.
TOBOGGAN, 1890. Empr. de l’angl. du TÔLE, fer en lames, 1642 (Oudin). Forme
Canada {oboggan, mot qui vient lui-même dialectale de table, peut-être de la région
de la langue des Algonquins. de Bordeaux, cf. fer en taule, c’est-à-dire
« en forme de table », dans un état non
TOC, terme pop., « imitation d’or, etc. », daté des droits perçus à Bordeaux (mais
1837. Mot expressif de la famille de toc-loc. encore au XvirIe) ; taulo est la forme gas-
TOCSIN, 1379 (sous la forme ouque- conne de fable, ce qui va avec la graphie
sain). Empr. de l’a. pr. {ocasenh, comp. de fer en taule, maïs tôle est aussi la forme des
loca (du verbe locar, v. toucher) et de senh parlers de l’Est, du Nord-Est et de la Bour-
« cloche », lat. signum, attesté à basse ép. gogne. — Dér. : tôlier, 1836; tôlerie, 1771-
au sens de « cloche », vie s. (Grégoire de 74 (document de Bordeaux).
Tours), v. seing. TÔLE (aussi aule) « prison », dans l’argot
TOC-TOC, 1697 (Perrault). Onomatopée ; militaire, « chambre » et spécial. « chambre
v. toucher. — Dér. : toquante, 1725, mot de passe », dans l’argot des prostituées,
POp., d’origine argotique, qui signifie d’abord « petite maison » dans l'argot
« montre »; dér. du verbe provincial to- (1800), peut-être issu du préc. par défor-
quer « heurter ». mation sémantique. — Dér. : entôler, 1837 ;
-euse, fin xiIxe.
TOGE, xvi° ; d’abord togue, 1213, encore TOLÉRER, 1393 ; tolérable, xive (Ores-
1611. Empr. du lat. toga. me) ; tolérance, id. Empr. du lat. tolerare,
TOHU-BOHU, 1823, au sens moderne. tolerabilis, tolerantia. — Dér. : tolérant,
Emploi figuré de {ohu-bohu, transcription 1544, tolérantisme, 1722; intolérance,
de la locution hébraïque fohou oubohou, 1611 ; intolérant, 1612. V. intolérable.
employée dans la Genèse, I, 2, pour dési- TOLET, terme de marine, 1611 (écrit
gner le chaos avant la création du monde : thollet). Mot empr. d’un parler des côtes
la phrase de la Genèse a été traduite : La de la Manche, dér. de l’anc. scandinave
terre était tohu-bohu par Voltaire en 1764 : polir « pin; tolet » (d’où danois-norvégien
cf. déjà Rab., en 1552, les isles de Thohu
el Bohu, et foroul boroul au moyen âge.
tol « id. »).
TOLLÉ, xvie (Paré : On cria lollé après
TOILE. Lat. {éla. It. esp. fela. — Dér. : luy). Transformation graphique de l’a. fr.
toilette, 1352 (sous la forme tellelte), propr. tolez, impératif de ioldre « ôter » (qui vit
« petite toile », sens usuel jusqu’au xvre s. encore au XVI° s. et qui se trouve encore
(d’où marchande à la toilette), puis spécial. chez Hardy), lat. tollere, qui était devenu
« morceau de linge orné, étendu sur une un cri de protestation; cette transfor-
table, sur laquelle on met les objets qui mation a été effectuée sous l'influence
637 TONNE

du lat. tolle « prends, enlève(-le) », que, TOME, xvie (Marot). Empr. du lat. de
dans le texte de la Vuilgate, les Juifs basse ép. {omus (du grec {omos, propr. « por-
poussent pour demander à Ponce Pilate tion, morceau coupé »). — Dér. : tomer,
de faire mourir Jésus, Jean, XIX, 15. 1801, d’où tomaison, 1829.
TOLU, dans baume, sirop de tolu, 1748. TOMME, 1581, nom d’un fromage de la
On dit aussi baume de Carthagène, d’ Amé- région franco-provençale et provençale. Ce
rique, du Pérou. Tiré de Tolu, nom d’une mot qu'on trouve déjà dans l’a. pr., le
ville de Colombie, sur la mer des Antilles. sicilien et le calabrais sous la forme toma
TOMAHAWK, 1707. Empr. de la langue est d’origine obscure.
des Algonquins. TOM-POUCE, 1872, au sens de « homme
TOMATE, 1749, une première fois 1598 ; de petite taille », au sens de « parapluie
entre ces deux dates le fr. essaye d’une très court », 1933. Réminiscence de Tom-
autre dénomination {pomme d'amour, pom- Pouce, nom d’un nain dans les Odes funam-
me dorée). Empr. de l'esp. tomata, empr. bulesques de Banville. Tom-Pouce est une
lui-même de l’aztèque tomail. traduction de Tom Thumb (— Thomas le
TOMBE. Lat. eccl. (chez Prudence, 1v°) poucet), le nom du Petit Poucet dans le
tumba (du grec {ymbos « tumulus élevé pour conte anglais correspondant (1630).
une tombe », d’où « tombe »). It. tomba, TON, adj. poss., v. mon.
esp. {umba. Ouire-lombe paraît avoir été
créé par Chateaubriand dans le titre Mé- TON, terme de musique, xr1°. Empr. du
moires d’outre-tombe. — Dér. tombal, lat. ionus, « intervalle de deux notes, etc. »
1836 ; tombeau, xrr°. (du grec ionos), d’où, en fr., « ton de la
voix », et à partir du xvires. les acceptions
TOMBER. Souvent {umber au moyen modernes : « manière de parler, d'écrire,
âge et encore dans beaucoup de parlers de se conduire, etc. » et, d’autre part, les
(normand, berrichon, etc.), d’après {umer, acceptions techniques de la musique. La
v. la suite. Signifie « culbuter » et « faire nature du mot ne permet pas de le consi-
culbuter » jusqu’au xvie s., mais aussi, dès dérer comme un mot pop., d'autant plus
le xrr1° s., « tomber à la renverse (d’un qu’en lat. même c’est surtout un mot sav.
objet, d’une personne qui a été debout) ». Tonus a déjà été pris en lat. comme terme
La signification moderne « tomber du haut de peinture, mais l'emploi de {on au même
en bas » se rencontre depuis la fin du xves. ; sens depuis le xvrire s. en est indépendant.
tomber s’est ainsi substitué à choir ; dès Le sens de « tension, vigueur » qu'a parfois
lors on trouve l’emploi d'aujourd'hui {om- ton depuis le xvir1e s. dans la langue médi-
ber malade ; la construction transitive {om- cale est repris au grec d’après fonique, v. ce
ber quelqu'un, qui s’est développée au mot. Cf. intonation. — Dér. : 1° au sens
xix° s. d’après la langue des lutteurs, re- musical : tonal, 1845; tonalité, 1836 ; dé-
joint par l'intermédiaire de la langue du tonner, 1611 ; entonner, vers 1220 (enton-
peuple, un usage de la langue écrite qui ner au xli1° s. se rattache à tonner) ; 2° au
a été courant jusqu’à la fin du xvi®s. sens médical : tonifier, 1876.
Aussi roumain {umbä « culbute », it. {om-
bolare « faire la culbute », esp. tumbar, id., TONDRE. Lat. de basse ép. {ondere,
lat. class. {ondère. It. iondere, esp. tundir.
tumbo « culbute », port. tombo, id. Il s’agit
— Dér. : tondeur, 1247 ; tondeuse, 1836
évidemment d'un terme de jongleur, qui (d’abord machine à tondre le drap) ; tonte,
a voyagé d’un pays dans l’autre et qui est
: 1387, dér. de londre, représente le fém.
très probabl. né en France, comme onoma- d’un ancien part. passé *londitus ; re-
topée d’une chute ou d’un saut brusque. tondre, vers 1200,
L’a. fr. {umer « gambader, danser » (cf.
aussi le dér. {umbeor « danseur, sauteur », TONIQUE, 1538. Empr., comme terme
à côté de {umeor), est empr. d’un francique de médecine, au sens de « qui a une tension
*lämon, cf. anc. haut all. {ämôn « tour- élastique » en parlant d’un tissu, du grec
noyer », all. {aumeln « chanceler », et a dis- tonikos « qui se tend »; d’où le sens de
paru du français avant le xvi® s., mais « qui fortifie l'organisme » dès le xvixre s.
survit encore dans l’Est, p. ex. en wallon Le sens grammatical a été développé au
et en lorrain, aux sens de « tomber » et xIX° s. (d’après lon).
de « renverser ». — Dér. : tombée, 1477,
au sens de « chute, culbute », antér. {umée, TONITRUANT, 1876. Empr. du part.
xXI11e ; tombereau, x1v® ({omberel) ; antér. prés. du lat. {onitruare « tonner » ; tonitruer,
lumeriaus, xir1°, encore chez E. Deschamps 1884.
et aujourd’hui dans des parlers de l'Est; TONNAGE, terme de marine, 1793 ;
ainsi nommé parce qu’on fait basculer, d’abord « droit payé par un navire d’après
culbuter ce genre de véhicule ; devenu sa capacité », 1656. Empr. de l’angl. {on-
tombereau d’après tomber ; tombeur, terme nage, lui-même de l'a. fr. {onnage « droit
de lutte, 1845 ; retomber, 1510 (écrit avec payé sur le vin en tonneau », 1300, dér.
u), d’où retombée, 1518 (id.). de ionne.
TOMBOLA, 1835. Empr. de l’it. tombola, TONNE. Lat. de basse ép. lunna, lonna,
propr. « culbute », d’où, par plaisanterie, d'origine celtique, cf. moyen irlandais tond,
« sorte de jeu de loto », tiré du verbe {om- tonn « peau » (du sens de « peau » sont sortis
. bolare, v. le préc. et loto ; pris d’abord au ceux de « outre, vase », puis de « tonne »).
sens du mot it. ; aujourd’hui désigne une A. pr. lona, cat. fona. AIl. Tonne, angl.
sorte de loterie de société où on gagne des tun viennent du roman. — Dér. : tonneau,
lots en nature. x11e, tonnelet, xive, tonnelier, x1IIe, ton-
TONNE 638

nellerie, 1295 ; tonnelle, 1340, signifie aussi TOPO-. Premier élément de mots sav.
« tonneau » au x1v® s.; a pris le sens de tels que topographie, 1544, qui remontent
« berceau fait de treillage et couvert de au grec, où {opo- vient de /opos « lieu »,
verdure » par comparaison de la forme ou de mots faits sur ce modèle, tels que
d'une tonnelle avec celle d’un tonneau; toponymie, fin x1ixe, etc.
entonner, vers 1200, entonnoir, xrrre.
TOPPETTE, sorte de petite fiole, 1874.
TONNER. Lat. jonäre. It. tonare, esp. Pris au picard lopele, attesté depuis 1834,
tronar. de la famille des mots germ. cités sous
TONNERRE. Lat. lonitrus. Moins ré- toupie.
pandu dans les parlers que le verbe, cf. TOQUARD, « mauvais cheval », dans
a. pr. loneire; la plupart des langues l’argot du turf. Fin xixe. Empr. de toquart,
romanes ont en effet tiré un subst. du « têtu », très répandu dans les parlers
verbe it. {uono, esp. irueno, cf. a. pr. depuis le xvrtre s., dér. de loquer, v. toqué.
iron, encore en concurrence avec {oneire.
TOQUE, 1462. Empr. de l’esp. loca,
TONSURE, 1245. Empr. du lat. fonsura, id., dont l’étymologie est incertaine. —
propr. « tonte », d’où aussi « action de cou- Dér. : toquet, fin xvie (Régnier).
per les cheveux »; a en outre au moyen
âge d’autres sens : « tonte, émondage, TOQUÉ, 1836. Part. passé d’un verbe
branches coupées, etc. ». — Dér: : tonsurer, loquer « heurter, frapper », fréquent dans
1380. les parlers septentrionaux, mot pop., d'ori-
gine onomatopéique, v. toucher; comp. loc
TONTINE, 1653 (dans un édit de « folie » à Toulouse au xvrr s., oqua
Louis XIV pour la création de la Tontine « femme sotte » à Fribourg dès le xvè s.
Royale). Dér. de Tonti, nom d’un Napoli- Comp. aussi la locution proverbiale qui
tain qui inventa ce genre d'opération. loque l’un loque l’autre, depuis Scarron,
TONUS, 1907. Empr. du lat. tonus qui a d’origine onomatopéique comme le prée.,
aussi Le sens de «tension (d’une corde, etc.) ». ainsi que l’argot. {ocasson « absurde
stupide », très répandu dans les parlers
TOPAZE, vers 1080 (Roland). Empr. du sous la forme {ocson. Dér. : toquade,
lat. {opazus (du grec topazos). 1856 ; toquer (se), 1853 (Goncourt). V.
TOPER, 1165, d’abord « placer en je- toc, toc-toc, toquard.
tant ; appliquer », rare avant le xvire s. : TOQUANTE, v. toc-toc.
au XVIIe et au XVIIIe s., Où on écrit aussi
tôper et tauper. Ces formes sont dues à l’in- TOQUER, v. toqué.
fluence d’un subst. laupe « grosse patte, TORCHE. Le sens de « flambeau
grosse main », qui vit dans la Franche- fait
d’une corde tordue enduite de résine ou
Comté et en fr.-pr. (d’où le verbe tauper de cire, ou d’un bâton de bois résineux »,
«frapper qn », répandu aussi dans l'Ouest), XII, aujourd’hui dominant, est issu de
en outre en frioulan {alpa « patte » et all. celui de « faisceau de choses tordues, no-
du Sud-Ouest lalpe ; ce mot est sûrement tamment de paille, de foin, etc. », sens qui
d’origine préromane, {oper est devenu existe encore aujourd’hui. Lat. pop. *orca,
terme de jeu signifiant « accepter l’enjeu issu de {orqua (déjà chez Varron), lat.
de l’adversaire », d’où le sens moderne, class. {orques, attesté seulement au sens de
dès le xvire s. Onomatopée exprimant le « collier », mais qui a dû se dire de divers
bruit bref de deux objets qui se heurtent, objets faits de choses tordues, d’après le
de deux personnes qui se frappent dans la verbe lorquere « tordre ». Rare en dehors
main, comme l'esp. et le cat. opar. L’expres- du fr.; toutefois la forme forque, attestée
sion du xvries. et du xvirres. fope et lingue au Nord-Est dès le xve s., l'esp. {uerca
est empr. de l’esp. {0po y lengo « je tope et «écrou » et le verbe de l’a. pr. torcar « tor-
je tiens »; beaucoup de termes de jeux de Cher » prouvent que le subst. remonte à
cartes espagnols ont pénétré en fr. au l’époque latine. L’a. fr. a dit aussi torse au
XVII s., V. hombre. sens de « flambeau », tiré de fordre, cf.
TOPINAMBOUR, xvie (sous la forme a. pr., de formation analogue, forta « id. ».
toupinambaux dans un récit de voyages ; — Dér. : 1° de torche « flambeau » : tor-
lopinamboux au xvnie s.; forme moderne chère, 1653 ; 20 de torche au sens propre :
en 1680). Tiré de Topinambour, 1578 (J. de torcher, vers 1150, torchis, x1r1e, pour le
Léry qui écrit Tououpinambaoults), nom développement de sens, cf. a. pr. tortilz
d’une peuplade du Brésil, de la région de « tordu » et « torche, torchis » ; torchon,
Pernambouc, d’où cette plante nous est vers 1200, d’où -onner, (1872, une première
venue. On trouve lopinambou au xvrre 8. fois chez Rab., dans un sens légèrement
au sens de « personne grossière », peut-être différent).
en souvenir des Topinambous qui figurè-
rent aux fêtes données à Rouen à l'entrée TORDRE. Lat. pop. “*orcere, lat. class.
d'Henri II. torquere. It. torcere, esp. forcer. L'’anc. part.
tors survit encore dans quelques locutions :
TOPIQUE, 1538, comme terme médical. du fil lors, des jambes torses. — Dér. et
Empr. du grec médical topikos (de topos Comp. tordage, 1723; détordre, xr1e;
« lieu »). À été pris aussi au lat. de basse torcol, 1555, ou {orcou, sorte de grimpeur,
ép. {opicus au sens de « relatif aux lieux Cf. it. forcicollo, esp. torcecuello ; tord-
communs », xIV® (Oresme), ou de « relatif boyaux, 1867. D'après l’anc. part. {ors tor-
à un lieu déterminé », xvirre, d’où, au sade, 1818. D’après l’anc. part. tort tortil,
XIXe $., « qui se rapporte à la question ». 1582, altération de tortis, xrre, qui était un
639 TORTUE

adj. signifiant « tordu » et a servi à désigner TORRIDE, 1496. Empr. du lat. torridus:
substantiv. divers objets tordus, torche, (de orrere « sécher, griller »).
etc.; tortu, vers 1230. V. tort, tortiller.
TORSADE, v. tordre.
TORE, terme d'architecture, 1596. Em-
pr. du lat. {orus, propr. « brin d’une corde », TORSE, 1676 (Félibien). Empr. de l’it.
d’où « moulure bombée en forme de corde », lorso, propr. « tige d’une plante garnie de-
puis « tore ». — Dér. : toron, 1762. ses feuilles », spécial. en parlant du chou,
d’où « trognon de fruit » et, par plaisante-
TORÉADOR, 1659. Mot esp. dér. de rie, « torse », lat. {hyrsus, v. thyrse; c’est
lorear « combattre le taureau {toro) ». — ce mot lat. qui a donné aussi le fr. trou (de
Est remplacé souvent par forero, 1876, chou), au moyen âge tros « trognon, tron-
empr. de l'esp. forero. çon », aujourd’hui dialectal.
TORGNOLE, 1773. Mot dialectal, ré- TORSION, terme de diverses techniques,
pandu dans les parlers septentrionaux,
1680. Empr. du lat. de basse ép. torsio «tor-
souvent sous la forme tourniole, dér. du
ture » (de iorquere, v. tordre, aussi lortio)
verbe tournier, autre forme de lournoyer.
Tourniole, attesté depuis 1812 au sens de comme nom d'action de {ordre en vue de
« panaris », a été fait parce que le panaris sens spéciaux ; pris du XIII° au XVI S. au
sens de « colique » d’après un des sens du
fait le tour du doigt ; orgnole a été fait mot lat.
parce qu’une forte gifle fait tourner sur
place celui qui la reçoit. TORT. Lat. pop. iorlum, neutre pris
TORMENTILLE, plante, 1314. Empr. substantiv. de {orlus, part. passé de tor-
du lat. médiéval iormentilla (de tormen- quere « tordre », propr. « ce qui est tordu »,
tum), « ainsi dite de ce qu'elle apaise le d’où « action contraire au droit », opposé:
tourment des dents » (O. de Serres) ; d’après à directum « droit », v. ce mot. L’emploi du
d’autres, parce qu'elle calme les douleurs même mot dans les langues voisines : it.
causées par les poisons, de là son nom de torio, esp. luerto, a. pr. fort, prouve que ce
serpent, morsure où racine du diable en développement remonte à l’époque latine.
wallon. TORTICOLIS, 1562, au sens moderne;
TORNADE, 1842, en outre tournade, signifie propr. « qui a le cou de travers »,
1873, iornado, dès 1750. Empr. de l'esp. ainsi chez Rabelais, II, 30, où le fait d’avoir
tornado (de tornar « tourner »), également le cou de travers est l’expression symboli-
empr. par l’angl. On trouve quelquefois que de l'hypocrisie (torty colly). On consi-
aussi la forme non francisée prise soit de dère ordinairement ce mot comme une alté-
l’esp., soit de l’angl. ration du pluriel de lit. torcicollo ; mais.
celui-ci désigne proprement le torcol, et
TORON, terme d’architecture, v. tore. le sens de « torticolis » n’y a été signalé:
TORON, « assemblage de fils de caret qu’au xix°s. ; il est possible que toriy colly,
tordus pour faire des cordages, etc. », 1677. est une création plaisante de Rabelais.
Dér. du lat. {orus, v. tore. d’après un lat. fictif {ortum collum (torcol,
TORPÉDO, 1831. Empr. de l’esp. tor- comme nom d'oiseau, v. tordre, est récent
pedo « torpille » (du lat. torpedo, v. tor- et n’a pu servir de modèle), cf. torcoulx,
pille); l'automobile de ce nom a été dési- I, 54, au même sens, et V, 2? en parlant
gnée par un mot esp. à cause de sa forme d'oiseaux appelés cagots : « Car tous
et parce que la direction de la fabrique avoient le col tors »; de là aussi le sens
qui a créé ce modèle était espagnole. ‘d’ « hypocrite » qu’a eu parfois torticolis,
encore chez J.-J. Rousseau.
TORPEUR, 1470 ; rare avant le xvirres.
(Buffon) ; torpide, 1823. Empr. du lat. TORTIL, v. tordre.
lorpor (de torpere « être engourdi »), {orpi- TORTILLER, vers 1400 (une première
dus. fois lortoillier, vers 1220). Probabl. dér.
TORPILLE, 1538, comme nom de pois- par réduction de entortiller, plutôt que lat.
son. Probabl. empr. du prov. lorpio, pop. “*trliiliare, dont l'existence n’est.
issu, par substitution de suff., du prov. appuyée par aucune autre forme romane.
lorpin, qui représente le lat. torpedo, — Dér. et Comp. : tortillage, 1677 (Mme de
-pedinis. Comme nom d’un engin de guerre Sévigné); tortillard, au sens de « train
sous-marin, traduction de l’angl. {orpedo routier », fin xix° ; en 1700, adj. au sens de
(v. torpédo) ; attesté en 1812 dans la tra- « tordu »; tortillement, 1547; tortillon,
duction d’un ouvrage de Fulton ; mais la 1402; détortiller, xri°; retortiller, 1512
forme angl. a été souvent usitée jusque (au part. passé).
vers le milieu du x1x° s. — Dér. d’après le
TORTIONNAIRE, 1412. Empr. du lat.
deuxième sens : torpilleur, 1872, d’abord
« marin qui dirige une torpille », contre- médiéval {orlionarius, qui, lui-même, est
torpilleur, 1899; torpiller, 1873, -age, une latinisation de l’afr. forçonier, dér. du
fin xIxe. lat. lortio, v. torsion.
TORRÉFIER, vers 1520 ; torréfaction, TORTIS, TORTU, v. tordre.
1690. Empr. du lat. anc. {orrefacere (de TORTUE, vers 1190. L’esp. et l’a. pr. ont
lorrere « sécher, griller ») et du lat. scienti- de même (tortuga; ce sont des formes
fique moderne f{orrefactio. altérées d’un mot attesté par {farluga de
TORRENT, x11°, rare avant le xve, Em- l’a. pr. et tartaruga de l’it. et du port. ; ces
pr. du lat. {orrens. — Dér. : torrentiel, 1836 ; dernières formes remontent à un lat. faria-
torrentueux, 1823. räca fém. de l’adj. {arlarücus « qui appar-
TORTUE 640

tient à l’enfer, au Tartare », p. ex. dans TOUBIB, argot militaire, 1898. Empr.
spirilus tarlarucus (du bas grec tarlaroûkhos, de l’arabe d’Algérie {bib, propr. « sorcier ».
de même sens) ; l'emploi de ce mot pour TOUCAN, xvie s. (Paré). Empr., par
désigner la tortue, sorti sans doute d’une l'intermédiaire de l'esp. fucan, du tupi
expression comme *bestia tarlaruca, vient (Brésil).
de ce que cet animal a été pris pour symbo-
liser les hérétiques, comme il symbolise dans TOUCHER. Lat. pop. *{occäre, mot ono-
des représentations figurées l'esprit des té- matopéique, propr. « faire toc », conservé
nèbres, du mal en lutte avec le coq, sym- par toutes les langues romanes, v. la suite
bole de l'esprit, de la lumière, du bien. Tar- et toquer. Un sens très proche du sens éty-
laruga est devenu {arluga par dissimila- mologique est celui du roumain foca « an-
tion des deux syllabes identiques, et sous noncer l’angélus avec une claquette » et
l'influence de tort « tordu », les tortues de l’esp. tocar « sonner le glas, battre aux
ayant les pattes tordues, la voyelle o s’est champs, etc. », cf. aussi a. pr. {ocar « sonner
substituée à l’a. Le lat. class. {esiüdo survit les cloches », v. tocsin. Du sens de « frap-
dans l'it. lestuggine (avec substitution de per, heurter » s’est développé celui d’ «at-
suff.). teindre », puis celui de « toucher », qui ont
éliminé le premier sens en fr. avant les pre-
TORTUEUX, 1685 (une lre fois vers miers textes, cf. de même it. {occare, qui a
1200). Empr. du lat. lortuosus (de lortus). les mêmes sens que foucher. — Dér. et
TORTURE. Lat. de basse ép. {orlura, Comp. : touchant, prép., xiv° (Froissart),
propr. « action de tordre ». It. esp. {oriura. par l'intermédiaire de l’adj. participial
— Dér. : torturer, 1480. iouchant ; touche, xrr1e (É. Boileau qui dit
à la touche de Paris, au sens d’ « action de
TORVE, « farouche », surtout du regard, toucher l’or avec la pierre de touche »),
1856 (Flaubert). Empr. du lat. {orvus, id. puis « action de toucher (en général) »,
TORY, 1712. Mot angl., empr. du mot d’où les différents sens du mot au cours
irl. téraidhe «criminel », et appliqué d’abord, du moyen âge et depuis ; toucher, subst.,
vers 1680, comme terme politique, aux vers 1226 ; toucheur, 1611 ; intouchable,
partisans de Charles II. (de l’argent), 1873 (dans un autre sens déjà
chez Ronsard); attouchement, x11°, par
TÔT. Lat. pop. {ostum, neutre pris adver- l'intermédiaire d’un verbe hors d'usage
bialement de {ostus « grillé, rôti, brülé » (de attoucher, xXr1°; retoucher, xr11°, retouche,
lorrere), qui a dû signifier d’abord « chau- 1507 ; Sainte-Nitouche, 1534 (Rab.), for-
dement », d’où « promptement ». De même mé plaisamment de sainte et de n’y touche,
it. losto, a. pr. cat. tost. — Comp. : aussitôt, cf. faisant... le non y louche, xv°; au
XIIIe (aussi lost com, vers 1260 ; aussi los XVIIe 8. on préférait sainte mitouche, forme
que, vers 1330, aussitôl, adv., ap. Du Bel- altérée d’après mite « chatte » (en anc. fr.
lay) ; bientôt, 1382 ; plutôt, xrr1°, au sens et dans les patois) ; touche-à-tout, 1841.
moderne, mais encore écrit plus tost ; l’or-
thographe moderne paraît ne dater que TOUER, xrr1°. Empr. de l’anc. francique
du xvire s.; sitôt, vers 1165 (si iost com, togon « tirer », cf. l’angl. de même famille
si lost que, vers 1200); tantôt, xr1° ; au lo tow « touer » (le -g- de Fanc. norois
moyen âge signifie « aussitôt », encore usité loga ne serait probablement plus tombé).
au xvi®s. (aujourd’hui dans le français pro- — Dér. : touage, xr11° ; toue, 1611 ; touée,
vincial), d’où «bientôt », jusqu'au xvrre s., 1415 ; toueur, 1836, au sens de « sorte de
d’où « dès lors » et le sens moderne; l'emploi remorqueur »; on a dit aussi {oueuxt, 1643
de fantôt... lantôl apparaît au xvre s.; tôt- (écrit {oüeux), au sens d’ « ancre de toue ».
fait, sorte de gâteau, 1872, très répandu TOUFFE, vers 1180. Mot d’origine germ.
dans les parlers régionaux, où il est attesté De la même famille que l’all. Zopf, francique
plus tôt qu’en fr. même. *lop, v. toupet. Doit avoir été empr. d’un
TOTAL, xiIve (Oresme). Empr. du lat. dial. all. où la transformation de p en pf
médiéval lotalis (l’adv. totaliter est attesté a fait des progrès plus rapides et plus sen-
à basse ép.). V. tout. — Dér. : totaliser, sibles que celle de # en z. C’est le cas pour
1829, totalisation, 1836 ; totalisateur, 1869 ; l’alémanique, ce qui autorise à penser que
totalité, 1375 ; totalitaire, 1949 (s’est dit c'est de ce dial. que le fr. a eu fouffe, par
d’abord du système politique de Hitler). l'intermédiaire des parlers de l'Est. —
Dér. : touffu, 1438. — V. encore attifer.
TOTEM, 1833. Empr. par l'intermédiaire TOUFFEUR, v. étouffer.
de l’angl., de {olem, mot d’une langue des
indigènes de l'Amérique du Nord. — Dér. : TOUILLER, 1838. Mot dialectal, empr.
totémisme, id., d'après l’angl. {otemism. pour des emplois techn. ; usité dans les
parlers septentrionaux au sens de «remuer,
TOTON, 1611 (écrit {olum ; puis toton). mêler, salir, etc. » ; ce verbe, qui a été usuel
Mot lat. {otum qui signifie « tout entier » ; jusqu'au xvie s. dans des sens analogues
pour la prononciation, v. dicton; on dit et dont la première forme est toeillier,
aussi {onton. Sur les quatre faces de l'espèce représente le lat. iudiculäre, attesté chez
de dé qu’on appelle toton, sont écrites À, Varron au sens de « piler, broyer », dér.
D, R, T, initiales de mots lat. ou fr. : accipe de fudicula « moulin pour broyer les olives »
«reçois (un jeton) », da « donne (un jeton) », (de la famille de {undere « piler, frapper »).
rien (c’est-à-dire rien à donner ni à rece-
voir), totum «tout » (c’est-à-dire tout l'enjeu TOUJOURS, v. jour.
à prendre).
TOUNDRA, 1876. Empr. du russe {ändra
TOUAILLE, v. serviette. « plaine marécageuse, sans arbres ».
641 TOURNER

TOUPET, xrI°; a signifié aussi « som- tourbillonner, 1529 (au part. pass.), d’où
met »; au sens fam. d’ « effronterie », -onnement, 1767.
1808. Dér. de l’a. fr. op, de même sens, du
francique *{op, cf. all. Zopf « tresse de TOURET, v. tour, masc.
cheveux », v. touffe. De l’a. fr. {op dérive
aussi toupillon, 1414, « petite touffe de TOURIE, « sorte de grande bouteille »,
poils, etc. ». 1773. Étymologie inconnue.
TOURISME, 1872; touriste, 1816, en
TOUPIE, xive (Froissart), iopoie en parlant d’Anglais, emploi dominant au
1205; cf. le verbe ioupier dès le x111 5., xixe ; touring, 1889. Empr. des mots angl.
d’où foupiller, par changement de suff., tourism, -isi, -ing. dér. de tour, pris lui-
en 1548. La forme la plus ancienne est même au fr., v. tour, m., au début du
l’anglo-normand {opet, diminutif de l’angl. XVIIIe s. — Dér. de iourisie : touristique,
lop, attesté au même sens dès 1060. Ce vers 1830 (Tœpffer).
mot est identique à l’angl. {op « sommet,
pointe », la toupie ayant reçu son nom TOURLOUROU, 1334, comme nom po-
du fait qu’elle tourne sur sa pointe. Le pulaire du fantassin. Mot de formation
mot anglo-normand paraît avoir passé expressive, attesté en prov. au sens de
en français en subissant un changement « tapageur » ; déjà relevé en 1640 dans un
de suffixe. Voir aussi toupet. refrain de chanson : « Bidon don, mon genti
tourlourou. » Signalé dès 1667 comme nom
TOUPILLON, v. toupet. d’un crabe terrestre des Antilles.
TOURMALINE, 1771 (iourmalin en
TOUR, jém. Lat. furris. It. esp. lorre. 1758). Empr. du singalais toramalli.
— Dér. : tourelle, xr1° ; on a dit aussi {our-
nelle, depuis le xrr1° s., forme altérée par TOURMENT. Lat. iormenium. It. tor-
le verbe tourner, cf. aussi fornier, XIV®, mento. — Dér. : tourmenter, xri°; tour-
« gardien d’une tour, portier », pour fourier, mente, 1155, subst. verbal ({ourmenie se
xuie, et l’all. Turm « tour », en moyen disait autrefois et dès le x11° s. aussi du
haut all. furn ; tourière, 1549, fém. de {ou- vent qui agite un navire).
rier, V. Ce qui précède.
TOURNEBOULER, v. boyau.
TOUR, masc. D'abord torn, devenu rapi- TOURNER. Lat. iornäre « façonner au
dement for. Propr. instrument de tour- tour », déjà pris au sens fig. en parlant de
neur. Dans les sens « mouvement circu- versification. It. {ornare, esp. iornar (au-
laire », « action habile », etc. c’est un dér. jourd’hui plutôt virar), a. pr. tornar. —
du verbe tourner. It. esp. torno, dont les Dér. et Comp. : tour, aux sens de « mouve-
sens sont moins étendus que tour et dif- ment circulaire », etc. ; demi-tour, 1536;
férents (v. le verbe). — Dér. : touret, tournage, 1558; tournailler, 1792 (une
xirI1e (ÉË. Boileau), au lieu de “*lournet première fois en 1610); tournant, subst.,
qu’on attendrait à cette ép. : tourillon, 1272 ; tournée, 1220 ; tourneur, x1r1°, peut
x11e (écrit toreillon), formé comme fouret. continuer le lat. de basse ép. {ornaior;
— Comp. : autour, adv., xv®; entour, vers tournis, 1812 (comme adj. dès 1100);
1080 (Roland), peu usité aujourd’hui sauf tournoyer, xII°, au moyen âge notamment
dans à l’entour, 1424, d’où alentours, 1766 « faire un tournoi », d’où tournoi, xII°;
(Voltaire), entourer, 1538, d’où entourage, ‘tournoiement, x11°, au moyen âge « tour-
1776 ; déjà une fois en 1461 au sens de noi, circuit, tour, etc. », sens moderne
« personnes qui entourent » ; demi-tour, depuis le xvI® s. ; tournure, déjà tornatura
1536. au vince s., dans les Gloses de Reichenau;
entour, vers 1080 (Roland), peu usité au-
TOURBE, « foule » ; le sens péj. apparaît jourd’hui sauf dans à l’eniour, 1420, d’où
au xvI® s.; auparavant « foule (en géné- alentours, 1766 (Voltaire), entourner, 1395,
ral) ». Lat. iurba. A. pr. forba. encore usité comme terme de marine;
entournure, 1538; entourer, 1538, d’où
TOURBE « matière combustible formée entourage, 1776, déjà une fois en 1461 au
par la décomposition de débris végétaux », sens de « personnes qui entourent » (en-
1200. Du francique *{urba, cf. all. Torf et tourer et enlourner se trouvent dans les
v. turf. L'exploitation de la tourbe était deux sens dans les parlers) ; autour, adv.,
inconnue des Romains, mais est déjà at- 1375 ; tourniquet, 1575, dér. de iourner
testée pour le littoral de la Mer du Nord avec le suff. -et fréquent pour former des
par Pline. — Dér. : tourbeux, xviri®; noms d'outils et l’infixe -ig- qui renforce
tourbière, x111°. le sens diminutif (voir dans ce mot un
emploi figuré de tourniquet «cotte d'armes »,
TOURBILLON, D'abord {orbeillon (vers xves., pour anc. fr. {uniquel, dér. de {unicle,
1170 et encore vers 1380), la forme {our- empr. du lat. {unicula, dim. de funica,
billon l'emporte au xv°s. Remonte au n’est guère possible, surtout pour des
lat. class. {urbô, lurbinis auquel on a joint raisons sémantiques) ; détourner, vers 1080
les suff. -fcülus (d'où torbeil, dès 1100, a. (Roland), détour, xir°, détournement,
pr. torbelh), et plus tard le suff. -on. De 1493 ; retourner, 842 (Sermenis de Siras-
même l'esp. {orbellino et le port. {orvelinho bourg : relurnar), retour, x11°, retourne,
sont dus à des substitutions de suff. d’après 1690 ; bistourner, 1680, d’abord besiorner,
remolino de l’esp., remoinho du port., qui xr1e (Chrétien), avec le préf. bes, lat. bis
ont le même sens, v. remous. — Dér. : « deux fois », pris dans un sens péjor.;
DICT. ÉTYM. 41
TOURNER 642

chantourner, 1611, composé avec chant ser ne s’est établi que dans une partie des
« côté ». Nombreux mots ayant lourne parlers septentrionaux ; les parlers de l'Est
comme premier élément : tourne-à-gauche, ont encore foussir, comme ceux du Midi;
1690 ; tournebride, 1611; tournebroche, d’où toussailler, 1877 (Goncourt), tousso-
1500 ; tournedos, 1864, comme terme de ter, fin xixe; tousserie, 1404.
cuisine, bien antérieur dans d’autres
emplois, notamment au sens de « poltron, TOXIQUE, xri°, rare avant le xvie s.
fuyard », xvi° ; tournemain, 1566, dans la Empr. du lat. {oxicum (du grec toxikon,
locution en un tournemain qui se dit aussi propr. « poison dont on empoisonnait les
en un lour de main, XV° ; tournevis, 1723. flèches fioxon) »). Du mot grec a été formé
Tournevirer, 1571, comp. des deux syno- en outre le comp. sav. toxicologie, 1803. —
nymes lourner et virer en vue d’un ren- Dér. : toxicité, 1872 ; toxicomanie, fin xIX° ;
forcement expressif. toxine, id. V. intoxiquer.

TOURNESOL, 1393 ; déjà 1291 comme TRAC « piste », v. traquer.


nom de matière colorante (sous la forme TRAC « sorte de peur », terme fam.,
tournesol). Empr. de l’it. fornasole ou de 1876. Paraît être d’origine expressive, sans
l'esp. {ornasol; dit ainsi parce que les rapport avec le précédent.
fleurs se tournent vers le soleil, cf. hélio-
trope. Dit dans la plupart des parlers TRACASSER, v. traquer.
tourne-soleil ou simplement soleil.
TRACER. Lat. pop. *fracliare, dér. de
TOURTE. Lat. {oria attesté dans la tractus « trait » (de frahere « tirer »), qui a
Vulgate au sens de « pain rond » (dans dû signifier propr. « suivre à la trace » ou
l'expression {orta panis), sens que iourte a « faire une trace »; tracer a fréquemment,
encore dans certains dialectes. It. esp. en a. fr. le sens d’ « aller sur une trace,
lorta. Du lat. {orta, fém. du part. passé chercher » (encore usité dans de nombreux
de lorquere : l’o fermé, qui était bref en parlers) et en outre ceux de « parcourir »
latin, vient d’une tendance à fermer le 0 et de « faire un trait pour rayer » ; l'usage
ouvert devant r suivi d’une autre consonne: moderne, où l’idée de « trait » domine, ne
comp. tourner. — Dér. : tourteau, vers s’est établi qu’au xvies. ; mais l’acception
1100 ; tourtière, 1573. de {racer en parlant de racines qui s’éten-
dent à la surface de la terre ou à peu de
TOURTERELLE. D'abord tourtrelle, profondeur rappelle le sens propre : « faire
puis tourterelle au xrr1e s. Lat. pop. {urtu- une trace ». It. {racciare « suivre une trace »,
rella (mot que Sénèque a déjà employé au esp. trazar « faire un trait ». — Dér. : trace,
sens d’ « homme efféminé »), dér. de éuriur. x1Ie ; tracé, 1792 ; tracement, 1476 ; tra-
Le simple est plus représenté dans les ceret, sorte d'outil, 1690 ; traçoir, id., 1690 ;
langues romanes, cf. d’une part it. forlo- retracer, 1390.
rella, d’autre part it. {ortora, tortola, esp.
tériora, fr. arch. fourtre, a. pr. tortre et tor- TRACHÉE-ARTÈRE, 1503; artere tra-
tora. De iourterelle a été tiré le masc. tour- ciee au xive s. Empr. du grec frakheia
tereau, xiIrre. artéria, littéral. « artère raboteuse », dite
ainsi à cause de ses anneaux; le grec dit
TOUSSAINT, v. saint. aussi simplement artéria, V. artère; on
trouve dès le xiv® s. trachée, pris au lat.
TOUT. Lat. pop. toltus, forme à redou- de basse ép. trachia, et étendu à la langue
blement expressif, attesté à basse ép., au de la zoologie depuis le xvirre s. — Dér.
lieu du lat. class. tôtus, propr. « tout en- de irachée trachéen, 1538; trachéite,
tier »; follus, totus, ont pris en lat. pop. 1836 ; trachéotomie, 1772, sur le modèle de
les sens du lat. class. omnis «tout, chaque », ue chirurgicaux tels que laryngotomie,
qui n’a été conservé que dans l’it. ogni. 620.
L’esp. et le port. fodo continuent tôlus :
ailleurs formes issues de toitus : it. {utlo, TRACHÉLIEN, terme d'anatomie, 1806.
a. pr. tot. — Comp. : atout, xve (« Quand il Dér. sav. du grec trakhélos « cou ».
se virent si assiegez, si jouerent a tout »,
dans le Journal de Paris) ; partout, xrre;
TRACT, 1842. Empr. de l’angl. fract,
abréviation de fractate « traité, opuscule »
surtout, adv., 1490 (au x1° s. ensurelui), (du lat. tractatus).
d’où suriout « sorte de pardessus », cf. « Ce
mot est nouveau et n'a esté en usage TRACTATION, vers 1470. Empr. du lat.
qu’en cette présente année 1684 », Fure- tractatio (de tractare « traiter »).
tière ; grande pièce de vaisselle, 1694.
TRACTION, 1503. Empr. du lat. de
TOUTEFOIS, v. fois. basse ép. fractio « action de tirer » (de
irahere « tirer ») en vue de sens techn. —
TOUTE-PUISSANCE, v. pouvoir. Dér. : tracteur, 1876, sur le modèle d’ac-
tion : acteur, etc.; déjà relevé en 1836
TOUTOU, xviie (Cyrano de Bergerac). comme terme de chirurgie.
Mot enfantin, de formation onomato-
péique. TRADITION, 1488, au sens moderne.
Empr. du lat. traditio, propr. « action de
TOUX. D'abord tous. Lat. iussis. — livrer, transmettre », qui a pris notamment
Dér. : tousser, 1534 (Rab.), a remplacé dans le lat. eccl. le sens de « tradition ».
loussir, encore chez Cotgrave, 1611, lat. À été pris aussi au sens propre du lat., une
iussire, cf. it. fossire, mais esp. foser. Tous- première fois en 1291, puis repris au xvies.,
643 TRAITABLE

et s’est conservé jusqu'à nos jours dans la nasse, nom de plante, 1680 (herbe trainasse
langue jurid. — Dér. traditionalisme, en 1635), filet d’oiseleur, 1660 ; traîne,
1851 ; -iste, 1849 ; traditionnel, 1722. 1174, seulement au xiIxe s. en parlant de
la traîne d’une robe; traîneau, 1227 ;
TRADUIRE faire passer d’une langue
traînée, 1406, au sens de « fille des rues »
dans une autre », 1534 ; traducteur, 1540
vers 1488 et depuis Rousseau ; traînerie,
(E. Dolet) ; traduction, id. Empr. des mots
1555 ; traîneur, 1660 (le fém. {raîneresse
lat. iraducere (ou de l’it. tradurre ?), propr.
dès 1440) ; entraîner, vers 1155, d’où entrai-
« faire passer », {raductor, traductio ; les
nement, 1724, entrain, 1838 ; entraîner, dans
deux derniers n’ont pas le sens du fr.;
la langue du turf, 1828, doit son nouveau
ils ont été pris comme subst. de raducere
sens à l’angl. {0 train (d’origine fr.), d’où
pour servir de noms d’agent et d'action
entraînement, 1828, dans la même langue, et
à traduire. Celui-ci remplace l’a. fr. trans-
entraîneur, id., en angl. {raining, traîner.
later, conservé dans l’angl. {o translate. —
Dér. : traduisible, 1725, d’où intraduisible, TRAINTRAIN, v. trantran.
1687.
TRAIRE. Proprement « tirer », sens du
TRADUIRE, « conduire d’une prison mot jusqu’au xvi® s., conservé seulement
dans une autre, citer en justice », xvrre. dans quelques patois (normand, wallon,
Empr. du lat. fraducere « faire passer, ete. ». parlers de Suisse romande) ; s’est spécialisé
au sens de « tirer le lait d’une femelle »,
TRAFIC, 1339 (aussi trafique, usité au attesté depuis 1292 (aussi les Dauphinois
XVI® S.); trafiquer, xve (Le Jouvencel ; qui accompagnèrent Charles d'Anjou dans
déjà dans un sens fig.). Empr. de l’it. traf- l'Italie méridionale et y fondèrent des colo-
fico, trafficare, d'origine incertaine. — nies l’y apportèrent-ils déjà ; une première
Dér. : trafiquant, 1585 ; d’abord trafiqueur, fois vers 1120). Lat. pop. *tragere, réfection
xve, qui s’est maintenu jusqu’au XvItIe 5. du lat. class. trahere (au part. passé /ractus)
TRAGACANTHE, v. adragant. sur le modèle de agere : actus, qui avait des
rapports de sens ; « mener » n’est pas très
TRAGÉDIE, xive (Oresme), vers 1320 loin de « tirer ». Traire au sens moderne
au sens de « discours fatals ») ; tragique, s’est substitué à l’a. fr. moudre, lat. mulgere
1546 (Rab.) ; tragi-comédie, 1545. Empr. des « traire », là où il était devenu homonyme
mots lat. {ragædia, tragicus (du grec tra- de moudre, lat. molere ; cette substitution
gôidia, tragikos), tragicomædia (pour *tra- a eu lieu également dans la plupart des
gico-comædia par superposition syllabique). parlers septentrionaux (firer s’est depuis
— Dér. de tragédie : tragédien, xvi*, une répandu surtout dans le Centre et l'Ouest),
première fois en 1372; on a dit aussi sauf dans une partie du wallon où mul-
-disle au XvVI®s. ; on a établi au x1x°s. entre gere s’est conservé comme dans le Midi,
les deux mots tragédien et tragique une dif- cf. a. pr. molzer, d'où les formes des
férence d'emploi qui n’existait pas aupa- parlers modernes ; cf. it. mungere, mais
ravant ; de {ragi-comédie : tragi-comique, esp. ordeñar, lat. pop. *ordiniare, propr.
1624, sur le modèle de comédie : comique. « mettre en ordre », qui existe également
ailleurs. — Dér. : traite, xr1°, d’après le
TRAHIR. D'abord trair, vers 1080 (Ro- sens ancien du verbe, d'où développements
land), jusqu’au xv® s.; écrit {rahir pour de sens variés, notamment « chemin par-
séparer a de i. Francisation du lat. {radere couru », d’après un sens de fraire « tirer
« livrer, remettre, trahir » sur le modèle . vers, s’acheminer », spécial. « circulation
des verbes en -ir, tradere ne passant pas des marchandises » au xvie s., d'où traile
facilement en fr., cf. de même it. tradire, des nègres (ou des noirs), 1690, iraite des
a. pr. trair. Le xvi® s. a repris au lat. le blanches, fin xixe° (pour ces sens il y a
sens de « livrer », encore attesté chez Cor- peut-être l’influence de trailer, traitant), et,
neille. — Dér. : trahison, vers 1080 (Ro- sous l’ancien régime, « droit levé sur les
land, traïsun) ; haute-trahison, 1677, cal- marchandises qui entraient dans le royau-
que de l’angl. high treason, ne s’est dit me ou qui en sortaient », d’où le sens du
d’abord qu’à propos d'événements anglais, mot dans la langue de la banque, xvirI°;
étendu à des événements français vers la trait « arme qu'on lance », vers 1150
fin du xvirie s. en remplacement de lèse- (autre mot que frait, « action de tirer »);
majesté. trayon, xvie ; on a déjà freon, au XIIe S8.,
TRAÎNER. D'abord trainer, jusqu’au cf. aussi fraiani, au xt1° s., au sens de
xive s. Lat. pop. */raginäre « traîner », « bout du sein ». V. portrait, rentraire,
dér. d’un type assez rare (cf. cligner) de retraire, -te, etc.
*{ragere, V. traire. A. pr. {raginar, trainar. TRAIT. Lat. iraclus « action de tirer »
— Dér. et Comp. : train, xr1°, d’abord (de trahere), d'où « trait de flamme, trait
traïn, propr. « action de traîner », puis « ce de stylet (pour écrire) », sens conservés ; le
qu'on traîne » et « manière de traîner, al- fr. a créé en outre des sens nouveaux, en
lure », de là les nombreuses acceptions du partie parallèles à celui du verbe : « action
mot ({rain, terme de la langue des chemins de tirer (en parlant des chevaux, etc.) »,
de fer, est probablement dû à l'influence xmure, etc. It. ratio «action de tirer, distance,
de l’angl., qui doit d’ailleurs le mot train espace de temps, manière, etc. », esp. {recho
au fr.), arrière-train, 1827 (Chateaubriand), « distance, espace de temps ».
avant-train, 1628, tringlot, 1863, soldat
du train des équipages, par influence TRAITABLE, vers 1170. Empr., avec
plaisante de fringle; traînage, 1531; francisation d’après {raiter, du lat. tracta-
traînard, 1611 ; traînasser, 1493, d’où traî- bilis « maniable, malléable » (de fractare,
TRAITABLE 644

v. les suiv.). L’a. fr. dit aussi fractable vent du nord ». L’a. fr. tresmontaine au sens
d’après le mot latin. — Dér. : intraitable, d” «étoile polaire », déjà chez J. de Meung,
xv®, sur le modèle du lat. intractabilis. usité jusqu’au xve s., est probabl. une
TRAITE, v. traire. francisation de l’a. pr.
TRAMWAY, 1818. Empr. de l'angl.
TRAITÉ « ouvrage où l’on traite d’une tramway, littéral. « chemin fway) consis-
matière », xive (Oresme). Francisation du tant en rails établis sur une route (tram,
lat. fraclatus d’après le verbe fraiter. dont le sens premier est incertain) », d’où,
TRAITÉ « convention entre deux par- en fr., la voiture elle-même, et, par abré-
ties », v. traiter. viation, ram (qui se dit aussi en angl.).
TRAITER. Signifie quelquefois au TRANCE, v. transe.
moyen âge « tirer, toucher ». Lat. fractäre TRANCHER. D'abord trenchier, puis
(de trahere, v. traire), propr. «tirer, traîner », irancher, vers le x111° s. ; cf. de même a. pr.
d’où « manier, diriger, pratiquer, agir en- trencar et en outre trincar. Probabl. lat.
vers quelqu'un de telle ou telle manière, pop. *rinicäre, propr. « couper en trois »
etc. ». It. trallare « manier, traiter, quel- (du lat. frini), cf. écarter, esquinier. La
qu’un, lui donner à manger ». — Dér. et voyelle en, an, au lieu d’in s'explique
Comp. : traitant, « fermier d'impôts », 1628 probabl. par l'influence du lat. trés « trois »
(Sorel) ; traité « convention », 1300, d’après qui peut avoir passé sa voyelle à *rinicare
un sens de f/raiter « faire une convention (cf. it. {rina « dentelle », du fém. du lat.
politique », xirr®; traitement, 1255 (au irini, à côté de l’occitan frena « chaîne
sens de « convention », usité jusqu’au tressée ; tresse », qui doit son e à la même
XV® s.), développement de sens parallèle à influence). — Dér. et Comp. : tranchant,
ceux du verbe ; celui d’ « appointements subst., x1I°; tranche, 1213; tranchée,
des fonctionnaires de l'État » date du X111°, au sens de « colique », 1538 ; tranchet,
XVIIIe s. ; traiteur, 1648 au sens moderne ; 1364; tranchoir, 1206; retrancher, xrr°,
assez fréquent depuis le x111° s. au sens de retranchement, id.; tranche-lard, 1463 ;
« négociateur » ; maltraiter, vers 1520. tranche-montagne, 1608 ; dès 1389, comme
TRAÎTRE, vers 1080 (Roland) ; d’abord nom propre.
traitre, encore attesté au xvi® s. Francisa- TRANQUILLE, vers 1460; tranquillité,
tion du lat. fraditor d’après trahir; l’a. fr. xXiie. Empr. du lat. franquillus, iranquil-
a eu aussi un Cas complément iraïtor ; le litas. — Dér. : tranquilliser, vers 1420 ; rare
cas sujet a triomphé parce qu’il était fré- avant la fin du xvrres.
quemment employé comme appellatif. —
Dér. : traîtreusement, xr11e, par l’intermé- TRANS-, préf. empr. du lat. frans au
diaire d’un adj. traitreux, hors d'usage sens d’ « au-delà de » pour former des adj.
depuis le xvrre s.; traîtrise, 1810, mot géographiques tels que transatlantique, etc.,
d’origine provinciale (lyonnaise). sur le modèle de transalpin, en lat. tran-
salpinus.
TRAJECTOIRE, 1611. Empr. du lat.
médiéval trajeclorius, dér. de frajectus, v. TRANSACTION, vers 1320. Empr. du
le suiv. lat. jurid. fransactio (de transigere, v. transi-
TRAJET, 1553 (écrit traject, puis trajet, ger). Dér. : transactionnel, 1823.
d’après jet). Empr. de lit. fragelto, -itto TRANSBORDER, v. bord.
« traversée » (de fragettare « jeter, faire tra-
verser », d’où « traverser », dont l’équiva- TRANSCENDANT, 1405 (Christine de
Pisan sous la forme transcendent, graphie
lent iregeler existait aussi en a. fr., et qui encore usitée au xvie s.). Transcendantal,
représente le lat. de basse ép. frajectare). 1585 ; une première fois en 1503 ; en outre
TRALALA, 1864. Onomatopée. -lel, XVIe. Empr. des mots lat. transcendens
TRAMAIL, v. trémail. (part. prés. de franscendere, « franchir, dé-
passer »), -{alis (lat. scolastique). Le moyen
TRAME. D'abord traime, encore écrit âge a eu aussi le verbe transcender, -üre.
irème dans fil de trème en 1717; refait au — Dér. : transcendance, 1640.
XVIe s. sur iramer. Lat. irama « chaîne
d’un tissu ». It. esp. trama. Trame a le sens TRANSCRIRE, 1234; transcription,
figuré de « complot, ruse » depuis le xvres. 1518. Empr. des mots lat. franscribere
(aussi it. et esp.). (francisé d’après écrire), transcripiio (ju-
rid.). — Dér. : transcripteur, 1538, d’après
TRAMER. Lat. pop. */rämäre, dér. de le rapport du lat. scripior « qui écrit » avec
träma, v. le préc. It. tramare, esp. tramar, le verbe scribere ; retranscrire, 1741 (Vol-
qui ont le même emploi fig. de « machiner » taire).
que le fr.
TRANSE, v. transir.
TRAMONTANE, 1549 (J. du Bellay) au
sens d’ « étoile polaire » (xtr1° s. iresmon- TRANSEPT, 1823. Empr. de l’angl. tran-
laigne) ; au sens de «vent u Nord », 1549 sept, xvi®, fait avec les mots lat. trans « au
(R. Estienne sous la forme fransmontane). delà » et sæplum « enclos », c’est-à-dire
Empr. de lit. tramoniana (sous-entendu littéral. « enclos qui est au-delà (de la
Stella) « étoile polaire d’au-delà les monts », nef) ».
d’où « vent du Nord » ; l'expression perdre TRANSFÉRER, 1355 (Bersuire). Empr.
la tramontane, xvrre (Voiture), est faite de du lat. {ransferre, cf. translation.
même sur l’it. perdere la tramontana : l’a. Dér. :
transférement, 1704) ; transférable, 1829
pr. disait aussi {rasmontana « étoile polaire, (une 1re fois en 1596).
645 TRANSPORTER

TRANSFERT, 1724. Probabl. empr. du depuis le xrr1° s., d’après le sens du verbe
lat. transfert « il transfère » (v. ce verbe), lat. ; intransitif, 1679, est de même empr.
3e pers. sing. indic. prés. de fransferre, du lat. des grammairiens iniransitivum
employé sur des registres commerciaux. (verbum).
TRANSFIGURER, xt; transfigura- TRANSITION, 1521, au sens d’ « art de
tion, 1231. Empr. du lat. transfigurare passer d’une idée à une autre », d’où les
« transformer » (v. figurer), -atio. autres sens. Empr. du lat. de la rhétorique
TRANSFIXION, 1872. Dér. sav. du lat. iransitio, propr. « passage »; a déjà été
itransfitus « transpercé ». empr. au moyen âge, depuis le xrrre, et a
alors reçu le sens de « transe de la mort »
TRANSFORMER, 1393 ; on trouve aussi, d’après iransir.
du x11° au XIV®S., tresformer, plus francisé ;
transformation, 1665, une première fois TRANSITOIRE, xuIe. Empr. du lat.
en 1375. Empr. des mots lat. fransformare, eccl. transilorius (de transire) ; en lat. class.
-alio (lat. eccl.). — Dér. : transformateur, ne signifie que « qui sert de passage » (en
1616 (au sens techn. 1890) ; -atif, 1861; parlant d’un lieu).
une première fois en 1636 ; transformisme, TRANSLATION, 1330, comme terme ju-
1867, -iste, 1872. rid. moderne ; 1200, au sens de « action
TRANSFUGE, 1647 (Vaugelas, qui le si- de faire passer (des personnes) dans une
gnale comme nouveau); une première fois autre situation » ; « transport d’un corps »,
en 1355 (Bersuire). Empr. du lat. transfuga xviie. Empr. du lat. translatio « transport,
(de iransfugere « fuir, passer à l’ennemi »). transfert », dér. de franslatus, part. passé
TRANSFUSION, 1539. Empr. du lat.
de iransferre. À signifié aussi « traduction »,
transfusio (de transfundere « transvaser »). comme en lat., depuis le xr1® s., sens au-
— Dér. : transfuser, 1668, d’après irans-
jourd’hui hors d'usage depuis le xvi® s.,
fusus, part. passé de iransfundere. cf. aussi translaier, x11°, translaieur, 1212,
également hors d'usage, v. traduire.
TRANSGRESSEUR, xt, transgres-
TRANSLUCIDE, 1556; rare avant le
sion, 1174. Empr. des mots du lat. eccl.
xixe s. Empr. du lat. franslucidus.
transgressor, transgressio (qui existe déjà
en lat. class., mais seulement au sens TRANSMETTRE, vers 1170 (irameire
d’ « action de franchir un lieu ») (de trans- du x° au xv®s.) ; transmission, xIve. Empr.
gredi « passer, franchir »). — Dér. : trans- du lat. transmiliere (francisé d’après mettre),
gresser, 1393, d’après le lat. {ransgressus, transmissio. — Dér. : transmetteur, 1872
part. passé de iransgredi, cf. transgressa lex (une 1re fois vers 1450) ; transmissible,
« la loi transgressée » en lat. eccl. 1583, d’après le lat. {ransmissus, part. passé
TRANSHUMER, 1823. Empr. de l'esp. de iransmillere, d’où -bilité, 1789, intrans-
trashumar, fait lui-même de fras « au-delà » missible, 1788.
et du lat. humus « terre ». — Dér. : -ance, TRANSMIGRATION, x1r1°, au sens gé-
id.; -ant, adj., 1803. néral; spécial. dans £. des âmes, xvr°.
TRANSIGER, 1342. Empr. du lat. jurid. Empr. du lat. de basse ép. iransmigratio
transigere (de agere « mener »), propr. « me- (de iransmigrare « changer de demeure »).
ner à bonne fin », v. transaction, intransi- TRANSMUER, xurie (J. de Meung);
geant. transmutation, x111°. Empr. des mots lat.
TRANSIR. D'abord « passer de vie à transmutare (francisé d’après muer), trans-
trépas », xr1°, jusqu’au xvi®s. ; d’où le sens mutalio, attesté seulement en un sens gram-
moderne depuis le xve s., où on trouve déjà matical, pris pour servir de nom abstrait
amoureux transi ; en outre au moyen âge à transmuer. — Dér. : transmuable, xive
« passer, partir, s’écouler ». Empr. du lat. (Oresme), d’où transmutabilité, 1721, à la
transire « passer, franchir, s’écouler »; le fois d’après iransmulation et le verbe lat.
sens de « passer de vie à trépas » est propre TRANSPARENT, xive (Oresme), au
au fr. — Dér. : transe, ordinairement au xu1e s. tresparent. Empr. du lat. médiéval
plur., xi® (Alexis) au sens de « trépas », transparens, comp. de la prép. frans « à
encore usité au xvII° s.; le sens moderne travers » et de parens, part. prés. de parere
de « crainte très grande » paraît être du « apparaître ». — Dér. transparence,
xv® s. (Charles d'Orléans). Transe, 1898 1450, une première fois en 1372, rare avant
(Huysmans), pour désigner l’état d’une le xvrres. ; transparaître, 1823, fait d’après
personne en sommeil magnétique, écrit l’adj. sur le modèle de paraitre.
d’abord trance, 1884, est empr. de l’angl.
trance, qui remonte lui-même à l’a. fr., cf. TRANSPIRER, 1503; sens fig., XVIIIe. ;
entrer en transes (en parlant de quelqu'un transpiration, id. Empr. du lat. médiéval
qui a une vision) au xIv®Ss. transpirare (de spirare « souffler, exhaler »,
v. respirer), -alio.
TRANSIT, 1663 (Colbert). Terme de
commerce, empr. de l’it. iransito (empr. TRANSPLANTER, 1528, une première
lui-même du lat. {ransilus « passage »). — fois en 1373. Empr. du lat. de basse ép.
Dér. : transitaire, 1838; transiter, 1839. transplantare (de plantare, v. planter). —
Dér. : transplantation, 1556 ; concurrencé
TRANSITIF, terme de grammaire, xvI® par transplantement au xvrie 5.
(Meigret). Empr. du lat. des grammairiens
transitivum (verbum) « (verbe) trans. » (de TRANSPORTER, 1180, aussi iresporler
transire « passer ») ; a été employé au sens du xr1e au xive s. Empr. du lat. iranspor-
de « passager, changeant » au moyen âge, lare (de portare, v. porter). — Dér. : trans-
TRANSPORTER 646

port, 1312; transportable, 1758, d’où in-, de l’anc. mot frac (parfois écrit tract) « piste
1775 (Condillac); transportation, xvirre des bêtes », xve, d’où «trace » à la même ép.,
(Voltaire), une première fois en 1519 ; le lat. mot onomatopéique. L’angl. do track «suivre
transportatio ne signifie que « changement la trace » passe pour être empr. du fr. ;ona
de séjour »; transporteur, 1869; déjà proposé aussi comme étymologie de {rac le
employé de 1380 au xvires. néerl. treck « action de tirer, trait » ; mais le
TRANSPOSER, xive. Empr. du lat. sens ne satisfait pas et, d’autre part, le mot
transponere « transporter », francisé d’après est déjà signalé au xve s. dans le Midi ; or
poser. — Dér. : transposition, 1428, sur le si le mot est d’origine néerl., la forme méri-
modèle des noms abstraits tels que posi- dionale doit venir du fr., ce qui ne s’accorde
lion, etc., par rapport à poser, etc. guère avec la chronologie des formes, tou-
tes deux du xve s. D’autres explications
TRANSSUBSTANTIER, 1496; trans- ne sont pas plus convaincantes. Dans {out
substantiation, id. Empr. du lat. médiéval à trac « sans réflexion », /rac exprime le
transsubstantiare, -atio (de subsiantia, v. caractère soudain de l’action. — Dér. : tra-
substance). casser, xv°, d’abord « se donner du mou-
vement pour des riens », encore chez
TRANSSUDER, 1700. Formé du lat. J.-J. Rousseau, d’où tracas, 1611, tra-
trans « à travers » et sudare « suer » ; l’a. fr. casserie, 1580 (Montaigne) ; traqueur, 1798.
a formé un comp. fressuer qui a été très
usuel. — Dér. : transsudation, 1763. TRAQUET, « piège ». Formé sur l’ono-
matopée frac, à cause du bruit que fait le
TRANSVASER, 1570. Dér. de vase, piège en se fermant, ou bien dér. du t. de
à l’aide de l’adv. lat. trans. Ne continue pas chasse traquer.
l’anc. fr. transvasé, qui a un autre sens.
— Dér. : transvasement, 1611. TRAQUET « pièce du moulin, qui se
meut régulièrement pour faire tomber le
TRANSVERSAL, 1496. Dér. sav. du lat. blé sous la meule », xve. Paraît être d’ori-
transversus, de même sens (de iransvertere, gine onomatopéique.
littéral. « tourner à travers »).
TRAUMATIQUE, 1549. Empr. du lat.
TRANTRAN, xvie. Onomatopée. Sou- traumaticus (du grec traumatikos, de trauma
vent altéré en {rain-lrain, 1835, d’après « blessure »). — Dér. : traumatisme, 1855.
train dans des locutions telles que aller
bon train, etc. TRAVAIL « machine où l’on assujettit
les bœufs, les chevaux difficiles, etc., pour
TRAPÈZE, 1542. Empr. du lat. de basse les ferrer ». Lat. pop. {ripalium, attesté en
ép. trapezium (du grec irapezion, propr. 578 sous la forme /repalium au sens d’ «ins-
« petite table (érapeza) »). trument de torture » dans une décision du
TRAPPE. Du germ. occidental (plus Concile d'Auxerre : Non licet presbytero nec
précisément peut-être du francique) *trap- diacono ad trepalium ubi rei torquenitur
pa, de la famille du moyen néerl. trappe siare ; tripälium est comp. de tri, qui si-
« lacet »; on a déjà irappa dans ce sens gnifie « trois » en composition, et de paälus
dans la Loi Salique. De même it. rappola « pieu », littéral. « machine faite de trois
(dim. d’un simple disparu), esp. {rampa pieux ». Seulement français, v. le suiv. On
(v. tremplin), a. pr. érapa. — Comp. : attra- attendrait *trevail ; cette forme a été alté-
per, x11°, déjà au sené de « prendre (quel- rée en travail d’après les dér. de {ref « pou-
qu’un) », d’où attrape, xiv°, attrapeur, tre », tels que travelel, etc., v. travée.
1526 (Marot), attrape-mouche, 1700, at- TRAVAILLER. D'abord « tourmenter,
trape-nigaud, 1650, rattraper, xrrre. peiner, souffrir », notamment en parlant
TRAPPEUR, 1833. Empr. de l’anglo- d’une femme qui va accoucher, vers 1170,
américain {rapper, propr. « homme qui seuls sens du mot jusqu’au xvie s., encore
chasse à la trappe » (de {0 frap, v. le préc.). usuels au xvii® s., plus rares depuis le
xvir1e ; s’est substitué à ouvrer depuis 1507.
TRAPPISTE, 1818. Dér. de (La) Trap- Lat. pop. *ripaäliäre, propr. « torturer avec
pe, fameuse abbaye de l’ordre de Ciîteaux, le tripalium », v. travail. Esp. trabajar, qui a
fondée en 1140 près de Mortagne (Orne), pris le sens de « travailler » au fr., a. pr.
rénovée par De Rancé au xvrre s. itrebalhar « tourmenter, peiner », d’où fre-
balh « torture ». — Dér. : travail « action
TRAPU, 1584. Dér. d’un anc. adj. frape, de travailler », 1471, au sens moderne,
irappe, de même sens, usuel au xvie s., depuis le xr1° s. au sens de « tourment »;
d’origine obscure. travailleur, 1654, au sens moderne, au
TRAQUENARD, « sorte de trébuchet », moyen âge, depuis le xr1e s., « celui qui
1680. Empr. du gascon-languedocien fra- tourmente, ennemi »; retravailler, xr1®
canart « id. », qui paraît être un emploi (Chrétien). .
fig. de {racanart « trot décousu d’un cheval TRAVÉE, 1356. Dér. de l'a. fr. tref
qui paraît trébucher », dér. de tracan « poutre ».
« marche », dér. lui-même de raca, v. tra-
quer. S'emploie depuis 1534 (Rab.) au sens TRAVERS. Plus fréquent dès les pre-
propre du mot méridional et aussi pour miers textes dans des locutions adverbiales
désigner le cheval qui a cette allure. ou prépositives en travers, de travers, à tra-
vers, etc., que comme subst. ; le sens intel-
TRAQUER, xv°; propr. « fouiller un lectuel « défaut de l’esprit » date du xvres. ;
bois pour en faire sortir le gibier ». Dér. au moyen âge signifie « chemin de traverse,
647 TRÉMIÈRE

sorte de poutre, etc. ». Lat. de basse ép. TRÉFILERIE, xur1e. Dér. de l’a. fr. fre-
träversum, lat. class. iransversum, neutre filier « celui qui tréfile », id., écrit aussi
pris substantiv. de l’adj. participial trans- traifilier (cf. trai-filerie au milieu du
versus « placé en travers » (de transveriere, xviie s.). Le mot s’explique par le fait
v. transversal), qui formait déjà des locu- que le tréfileur fait passer le fil de fer à
tions adverbiales in transversum, de trans- travers la filière; {ré- est le préfixe fre(s)
verso, comme en roman, cf. it. di, a {raverso, « à travers » fréquent en a. fr. Formés sur
esp. de travieso. L'’it. traverso, l'esp. {ra- tréfilerie : tréfiler, 1800 ; la graphie frai-
vieso s’emploient en outre comme adj. ; en filier a fait penser à tort que tré est dû
cet emploi ils continuent le lat. pop. tra- à une altération, par substitution de pré-
versus, lat. class. transversus, non seule- fixe, de frai- qui serait le radical du verbe
ment dans son sens propre de « transversal, itraire « tirer »; tréfileur, 1800.
oblique », mais dans des sens fig. « contra-
riant, etc. ». — Dér. : traversin, 1368, au TRÈFLE. Grec triphyllon ; de là cat. esp.
sens de « coussin de chevet, s'étendant dans trebol, port. trevo, prov. treoule. Le mot
toute la largeur du lit »; antér. « chemin est dû aux Grecs de Marseille. Du lat.
de traverse », x11° ; en outre terme de char- trifolium, calqué sur le mot grec, viennent
penterie ; a absorbé orthographiquement it. trifoglio, a. pr. trefolh.
traversain, de sens analogues, qui était TRÉFONDS, v. fonds.
proprement un adj., usuel jusqu’au xvies.
TREILLE. Lat. frichila « berceau de
Le moyen âge employait beaucoup aussi
verdure ». A. pr. trelha. — Dér. : treillage,
traversier, adj. et subst. (celui-ci au sens
de « traversin, coussin de lit »), encore usité
1600 (0. de Serres).
dans quelques emplois techn. (cf. rue, flûte TREILLIS. D'abord freliz, puis tresliz,
traversière), qui continue le lat. pop. {ra- « tissé à mailles », adj., pris substantiv. dès
versärius, lat. class. éransversärius « trans- le xr1e s., d’où le sens de « sorte de toile
versal », d'où aussi esp. fraversero « trans- grossière » depuis le xvri® s. ; altéré dès le
versal ». xir1e s. en treillis d’après treille, en même
temps que le mot a été pris dans un sens
TRAVERSE, Du xv® au XVIIIe s. aussi
analogue à {reillage. Treliz, d’où tresliz, par
rue traverse dans le français du Midi; a
substitution de préf., continue le lat. pop.
aussi le sens d’ « obstacle, revers » depuis *rilicius, lat. class. frilix, adj. signifiant
le xve s. Lat. pop. traversa, fém. pris
« à trois fils » (v. lice), d’où aussi it. fraliccio
substantiv. de fraäversus, v. le préc. « sorte de coutil, treillis ». — Dér. : treil-
TRAVERSER. Lat. pop. iräversäre, lat. lisser, 1374.
class. transversäre, v. les préc. It. {raversare,
esp. travesar. — Dér. et Comp. : traversée, TREIZE. Lat. frédecim. It. tredici, esp.
1678 ; a remplacé travers, qui se disait aussi irece. — Dér. : treizième, xr1° (sous la
en ce sens ; retraverser, 1866. forme trezime).
TRAVERTIN, 1611. Empr. de lit. fra- TRÉMA, 1600 (dans points tremalz).
vertino, altération de tivertino, lat. Tibur- Empr. du grec trêma « point (sur un dé) »,
propr. « trou ».
tinus « de Tibur (Tivoli) ».
TRAVESTIR, 1580 (Montaigne). Empr. TRÉMAIL, filet de pêche. On dit aussi
de l’it. ravestire, du préfixe tra, exprimant tramail. Lat. de basse ép. remaculum (Loi
la transformation, et du verbe vwestire « vê- Salique), formé de tri (de fres « trois ») et
tir », cf. tramuiare « changer », travisare - de macula « maille ». Mot propre au fr.
« se masquer le visage (viso) ». — Dér. : auquel les langues voisines l’ont emprunté :
travestissement, 1694; travesti, fin xixe. it. tramaglio, esp. trasmallo, etc.
TRAYON, v. traire. TREMBLE. Lat. de basse ép. {remulus,
tiré de l’adj. tremulus « tremblant » (de
TRÉBUCHER, xr°; pour le dévelop- tremere « trembler »). — Dér. : tremblaie,
pement du sens, v. le dér. Comp. du préf. 1294.
res (on s'étonne toutefois que la graphie
du xrre s. soit ordinairement fre) signifiant TREMBLER. Lat. pop. *iremuläre, dér.
« au delà », indiquant par suite le déplace- de tremulus, v. le préc., verbe plus expres-
ment, et de l’a. fr. buc « tronc du corps », sif que le lat. class. iremere. It. tremolare,
du francique bäk (cf. all. Bauch « ventre » esp. {emblar. Tremere a laissé de nombreu-
et anc. scandinave bûâkr « corps »), d’où ses traces, cf. craindre et a. pr. iremer. —
aussi a. pr. trabucar ; pour le sens on peut Dér. : tremblement, x1r1° ; trembleur, 1657
rapprocher it. tracollare « laisser aller la (Loret ; traduction de l’angl. quaker, v. ce
tête en avant, chanceler », {raballare «chan- mot), a été pris depuis dans un sens plus
celer » (de collo « cou », ballare « danser ») ; étendu ; trembloter, 1549, -otement, 1553.
lit. traboccare, dû à un croisement avec TRÉMIE, terme de meunerie. Altération
bocca « bouche », et l’esp. {rabucar viennent de iremuie, encore dans une ordonnance
du gallo-roman. — Dér. : trébuchet, xr1° de 1680. Lat. pop. trimodia, plur. neutre
(Chrétien), « sorte de piège », d’où « petite pris comme fém. sing. du lat. class. {rimo-
balance pour peser les monnaies »; par dim « vase de la contenance de trois
suite trébucher a pris le sens de « peser les muids ». It. éramoggia.
monnaies avec le trébuchet », 1329, d’où
. « faire peser la balance » ou, en parlant TRÉMIÈRE, dans rose trémière, 1581.
de la balance, « pencher d’un côté », de là Aussi vers 1500 rose de Tremier, 1665, rose
monnaie trébuchante, cf. pistoles bien tré- d'outremer. Altération de rose d’outremer,
buchanies, Molière, Avare, V, I. comme le montre la série des formes.
TRÉMOLO 648

TRÉMOLO, terme musical, 1830. Empr. nique *{rippôn « sauter », cf. angl. to trip
de l’it. tremolo « tremblement de la voix », « faire un croc-en-jambe, trébucher » et
tiré de l’adj. fremolo « tremblant », lat. fre- suédois {rippa « trépigner »; aussi a. pr.
mulus, v. tremble. trepar « trépigner, sauter, danser », a. it.
trepare, esp. trepar « grimper ». Les formes
TRÉMOUSSER (se), 1532 (Rab.). Dér.
de mousse, au sens d’ « écume », à l’aide avec à (aussi lombard fripd, galic. tripar)
sont dues à une reprise de contact avec
du préf. éré- (du lat. trans), comp. l’all.
überschäumen, qui se dit d’une personne le verbe tel qu'il existait dans les diffé-
rentes langues germ. après les invasions.
animée d’une vitalité exceptionnelle. —
Dér. : trémoussement, 1573. V. tripot. — Dér. : trépignement, 1552.
TRÈS. Lat. {rä(n)s, prép. « au delà de.
TREMPER. D'abord temprer, d’où, par
métathèse de l’r, dès le x1r1°5., tremper, qui
à travers ». Très est encore parfois prép,
en a. fr. au sens de «.jusqu’à, auprès, der-
a rapidement éliminé la première forme. rière » (d’où tresqu'à, tresqu’en jusqu’à,
Signifie propr. « mélanger des liquides jusqu’en), et a formé de nombreuses lo-
(p. ex. du vin avec de l’eau) », ci. encore cutions : res puis, tres or, etc. Dès les pre-
aujourd’hui tremper du vin, d’où « imbiber miers textes (Roland) apparaît avec la
d’un liquide », cf. tremper la soupe, et spé- valeur d’adverbe superlatif qu’il a exclu-
cial. {remper l’acier, dès les premiers textes ; sivement depuis le xvie s., valeur qui se
sens figurés surtout depuis le xvi® s.; au rattache au sens propre de la prép. latine
moyen âge signifie aussi « modérer » pro- «au delà de », que des verbes comp. tels
babl. d’après le verbe lat. et, en outre, que irépasser, trésaler « passer, disparaître »
« accorder (une harpe) »; on disait aussi (v. la suite), conservaient, cf. pour le
tremper un bain. Lat. {emperare, v. tempé- développement sémantique la prép. lat.
rer ; on lit vinum temperatum chez Grégoire per « à travers » dans permagnus « très
de Tours. It. femperare et temprare « tem- grand », etc. Ce développement ne se
pérer, tremper (l'acier), accorder des ins- retrouve qu’en it. où tra sert à former
truments de musique », esp. {emplar. — des adj. comp. tels que trafreddo « très
Dér. trempe, 1545; trempage, 1836; froid », plus ou moins
trempée, 1842 ; trempette, 1611 ; détrem- archaïques, mais
sans avoir l’importance que très a prise
per « détremper l’acier », 1692, détrempe, en fr. Ailleurs tra{n)s est resté prép.;
vers 1500 ; retremper, xr1° (Chrétien). esp. iras « derrière, depuis ». Aujourd’hui
TREMPLIN, 1680. Empr. de l’it. tram- même, rès n’est pas très pop. dans les par-
polino, dér. de trampoli « échasses », pro- lers. Très a servi en outre à former des
babl. d’origine germ., cf. all. érampeln « tré- verbes comp. où il marque une idée de
pigner »; on a à côté un verbe trimpellare mouvement au delà, de déplacement, cf.
« hésiter » qui rappelle le gothique trimpan trébucher, trépasser, en a. fr. trescorre, tres-
« marcher » et dont les rapports avec tram- geler, treslancer, ou simplement d’excèés.
poli ne sont pas clairs, v. aussi trappe. cf. tressaillir, en a. fr. fresbattre, tresiorner,
tresirembler.
TRENCH-COAT, 1933. Empr de l’angl.
trench-coat. TRÉSOR, vers 1080 (Roland). Empr. du
lat. hesaurus (du grec thésauros), v. thé-
TRENTE. Lat. pop. *trinia, lat. class. sauriser ; l’origine de l’7 de la syllabe ini-
triginta. — Dér. : trentaine, x11e ; trente- tiale n’est pas élucidée. Le caractère em-
naire, 1495, fait sur le modèle de centenaire ; prunté des formes romanes résulte du sens
trentième, x11° (sous la forme frentisme). plus qu’il n'apparaît dans la forme (sauf
TRÉPAN, 1490. Empr. du lat. médiéval pour l'it. esoro où la syllabe initiale aurait
trepanum (du grec irypanon, propr. « ta- un i, si le mot était populaire). — Dér, :
rière »). — Dér. : trépaner, vers 1490 ; trésorier, vers 1080 (Roland), d’après le
trépanation, id. lat. de basse ép. fhesaurarius ; d’où tréso-
rerie, XIII.
TRÉPAS, v. passer.
TRESSAILLIR, v. saillir.
TRÉPIDATION, 1290. Empr. du lat.
trepidatio « tremblement, agitation » (de TRESSAUTER, v. sauter.
trepidus « agité, troublé, etc. »). De même TRESSE, xri°; tresser, id. It. treccia,
empr. du verbe irepidare, l’adj. trépidant trecciare.
(du part. prés.). Étymologie incertaine. — Dér. :
tresseur, 1680.
TRÉPIED. Lat. iripedem, acc. de tripes TRÉTEAU.
« à trois pieds », d'où « trépied », dont la Lat. pop. *tra(n )stellum,
lat. de basse ép. trä(n)stillum « poutre,
Composition a continué à être sentie, de
là le maintien du p comme s’il était à l’ini- traverse » ; on attendrait */rateau ; tréleau
tiale et l'accentuation sur la deuxième est probabl. dû à une substitution de préf.
d’après les nombreux mots commençant
syllabe. par irès. Le simple trä{n)strum « poutre,
TRÉPIGNER, xive (Bersuire), attesté banc de rameurs » est représenté par it.
alors indirectement par le dér. trepignis. trasio « partie du milieu d’un bateau où
Dér. de l’anc. treper, triper « frapper du s’asseyent les passagers », esp. trasio « meu-
pied, sauter, danser », encore usité dans ble, accessoire, de décors, etc. », a. fr.
de nombreux parlers, cf. en outre tripeler, trastre, traste « tréteau, poutre », COnservé
trépiller, également conservés dans les par- dans quelques patois.
lers (-igner est une forme altérée de -iner, TREUIL. Lat. iürcülum « pressoir
cf. égratigner) ; treper représente le germa- ».
Le sens moderne est attesté depuis le
649 TRICOISES

XIVe s. Auparavant et encore aujourd’hui TRIBU, 1355 (Bersuire). Empr. du lat.


dans beaucoup de parlers le mot désigne tribus. D'abord terme d’antiquité romaine ;
le pressoir. Le changement de sens s’ex- sens plus étendu depuis le xvrre s. ; ribu,
plique par le fait que la poutre du pressoir en parlant du peuple Juif, vient du lat.
tourne dans une position horizontale comme eccl.
le treuil. L’it. forchio et l’a. pr. trolh dé-
signent aussi le pressoir. TRIBULATION, rare au sing., vers 1120.
Empr. du lat. eccl. tribulatio « tourment,
TRÊVE, xr1e (sous la forme irive, usuelle détresse » (de tribulare « tourmenter » en
au moyen âge ; en outre irieve, d'où trève). lat. eccl., propr. « travailler la terre avec
Du francique *iriuwa, propr. « sécurité » une sorte de herse {iribulum) » en lat.
(cf. all. Treue « fidélité, etc. » de la famille class.).
des adj. all. freu « fidèle », angl. true « vrai»), TRIBUN, 1213, d'abord terme d’anti-
d’où aussi a. pr. triuba, treva et treu, masc. quité romaine, sens plus étendu à partir
It. esp. tregua viennent du gotique iriggwa du xviie s.; tribunat, vers 1500 ; tribu-
« convention ». nitien, 1721 ; une première fois 1355 (Ber-
TRI-. Préf. signifiant « trois » dans des suire). Les deux premiers sont empr. du
lat. fribunus, tribunatus, le troisième est
mots sav. tels que trièdre, 1810, trifolié,
1817, faits sur le modèle de mots tels que un dér. sav. de fribunicius (écrit -itius à
basse ép.).
tricorne, 1836, trimètre, 1797, etc., d’ori-
gine latine ou grecque. TRIBUNAL, vers 1200. Empr. du lat.
tribunal (de tribunus) ; l'emploi de tribunal
TRIADE, 1564. Empr. du lat. de basse dans la langue religieuse : tribunal de Dieu,
ép. trias, triadis (du grec irias « groupe de de la pénitence est propre au fr. et date du
trois »). XVIIe s. (iribunal ecclesiæ, au moyen âge,
TRIAGE, « canton de forêt », xvrre.
ne signifie que « sanctuaire, chapelle »).
Altération, par croisement avec friage « ac- TRIBUNE, xv°,; une première fois vers
tion de trier », de l’a. fr. triege, x11° (Chres- 1231. Empr. de l’it. fribuna (du lat. tribu-
tien) « carrefour » (conservé surtout en nal) au sens de « galerie réservée dans une
Franche-Comté et en Bourgogne sous la église » ou de « chaire d'église » ; sens plus
forme irèje « passage »), très probabl. d’un étendu depuis le xvir® s. Parfois altéré
lat. de Gaule *trebiu, dér. soit lat., soit depuis le xvri® s. en {urbine, encore relevé
déjà gaulois d’un gaul. trebo « quartier de par Littré, au sens de « sorte de petit
village » (comp. bret. treb, id., irl. « domi- jubé », d’après le lat. {urbo, turbinis « tou-
cile », et le verbe à. pr. frebar « habiter, pie, objet en forme de cône ».
hanter, fréquenter », qui vit encore dans TRIBUT, xu1°, tributaire, xrIe. Empr.
beaucoup de parlers, ainsi que ses dér.). du lat. tributum, tributarius; tribut a éli-
TRIANGLE, vers 1270 (J. de Meung) ; miné une forme pop. freü, cf. aussi a. pr.
triangulaire, 1377; triangulation, 1823. traüt, esp. treudo « sorte d'impôt foncier ».
Empr. des mots lat. {riangulum, -laris, TRICEPS, xvie (Paré). Empr. du lat.
-latio (médiéval). triceps « à trois têtes » par les anatomistes
qui ont ainsi nommé ce muscle parce qu'il
TRIAS, terme de géologie, 1845. Empr. a trois attaches à sa partie supérieure, v.
du lat. {rias (v. triade) ; ainsi nommé parce biceps.
que ce terrain contient trois formations
distinctes : marne, calcaire, grès. Le mot TRICHER, vers 1170 (Chrétien); en
a été formé d’abord en all. outre {rechier au moyen âge. A. pr. {richar,
a. it. {reccare. Lat. du Bas-Empire *riccare,
TRIBADE, 1568 (H. Estienne). Empr. tiré de {ricare « soulever des difficultés » par
du lat. iribas, -badis (du grec fribas, de un redoublement expressif de la consonne
tribein « frotter »). finale du radical. L’#, qui aurait dû devenir
TRIBORD, 1545; ireboit, fin xve, estri- e, est resté i sous l'influence de fricare,
bord, 1528. A été empr., en même temps les deux verbes vivant longtemps côte à
que bébord, qui s’y oppose, du moyen côte. — Dér. : triche, fém., fam., vers 1165 ;
néerl. siierboord, comp. de stier « gouver- tricherie, vers 1120 ; tricheur, vers 1170.
nail » (comp. all. Sfeuer) et boord « bord TRICHINE, 1845. Empr. du lat. mo-
du vaisseau ». Les deux dénominations derne frichina, dér. du grec thrix, trikhos
proviennent du fait qu’au moyen âge les « cheveu ».
bateaux des tribus germaniques qui s’oc-
cupaient de navigation se gouvernaient à TRICK, 1773, terme du jeu de whist ou de
l’aide de grandes rames latérales. Le côté bridge ; par altération fri, 1841. Empr. de
où se trouvaient ces rames s’appelait « bord l'angl. trick, propr. « ruse, stratagème »,
de gouvernail » (anc. angl. stéorbord, anc. d’où « tour d’adresse » et, par suite, « levée
(au jeu de cartes) », empr. lui-même de
scandinave stjornbordhi), l’autre côté, au-
quel le pilote tournait presque le dos, au l'anc. verbe normand frikier qui corres-
moins en temps de grosse mer, « bord de
pond au fr. {richer ; le normand dit encore
dos » (anc. angl. baecbord, anc. scandinave trique « tour, manigance ».
bakbordhi). Ces dénominations germ. pas- TRICOISES, 1314. On a voulu à tort
sèrent au fr. à une époque où la position faire venir ce mot d’un néerl. *trekijser « fer
du gouvernail avait changé depuis long- à tirer », en prétendant qu'il vit seulement
temps, mais les anciens noms avaient été dans les patois de l’extrême Nord. Le mot
conservés. néerl., qui serait un comp. de érekken « ti-
TRICOISES 650

rer » et ijzer « fer », n'existe pas, et en gallo- (fin xvi*) au sens de « sevrer », antér. il
roman le mot vit partout ; la forme prov. signifie « écarter, séparer ». — Dér. : tri,
lurquezas est aussi ancienne que les formes vers 1370, manque au xvie et au xvrre s.,
fr., parmi lesquelles domine au xive 8., comme terme de jeu de l’hombre, 1764;
lurquoise. La forme tricoises, qui n’appa- triage, 1370 ; trieur, vers 1550.
raît qu’au siècle suivant, en est une défor-
mation, qui s'explique surtout par la suite TRIÈRE, 1872; une première fois au
-de sons un peu difficile (dès le xive s. fre-). xIVe (Oresme). Empr. du grec triérés (Ores-
Du xrie au xvie s. furcoise est le fém. de me l’a pris par l'intermédiaire des traduc-
durc. Il est donc à peu près sûr qu'il s’agit tions latines d’Aristote, v. anarchie).
d’une réduction d’un ancien “*enailles tur- TRIFOUILLER, v. fouiller.
-coises « tenailles telles qu’en emploient les
Turcs », encore que la cause de cette déno- TRIGLYPHE, 1547. Empr. du lat. fri-
mination nous échappe. glyphus (du grec triglyphos, v. glyptique).
TRICOLORE, 1789, en parlant du dra- TRIGONOMÉTRIE, 1613. Empr. du
peau national français ; on trouve fricolor lat. scientifique {rigonometria créé en 1595
‘<omme adj. en 1696 (Regnard) et au par le mathématicien allemand Pitiscus et
XVIIIe S. Comme nom de plante ou d'oiseau. qui est comp. des mots grecs trigônos
Empr. du lat. de basse ép. tricolor. « triangle », metron « mesure » et du suff.
-ie. — Dér. : trigonométrique, 1719.
TRICORNE, 1836. Empr. de l’adj. lat.
iricornis « à trois cornes » pour désigner un TRILLE, 1753 (J.-J. Rousseau) ; écrit
objet à trois cornes à l’imitation de bicorne, aussi {rill. Empr. de l’it. {rillo, subst. verbal
qui désigne un objet à deux cornes. de frillare, onomatopée. Ce verbe a pris
TRICOT « petite trique », v. trique. aussi le sens de « secouer quelqu'un, quel-
que chose avec une très grande vitesse ».
TRICOT « sorte de tissu », v. le suiv.
TRILLION, v. million.
TRICOTER, vers 1560, au sens mo-
derne ; antér. on disait brocher. Emploi TRILOBÉ, v. lobe.
fig. de fricoter, xv°, « s’agiter, danser », TRILOGIE, 1765. Empr. du gr. trilogia.
que continue le fr. pop. fricoter des jambes ;
ce verbe est dér. de fricot « bâton court » TRIMBALER, 1803. Altération, d'après
(Xv®), dim. de trique « bâton », v. celui-ci. brimbaler, de tribaler, 1532 (Rab.), mot
Le flamand sirikken, qui a le même sens expressif, de formation incertaine, peut-
que fricoler au sens moderne, est un autre être altération d’un anc. verbe tribouler
mot, cf. all. siricken « tricoter », qui se « s’agiter, carillonner », d’après baller
rattache à sirick « corde ». — Dér. : tricot, « danser » ; tribouler paraît être lui-même
1701 ; tricotage, 1680; tricoteur, 1585 (au un emploi fig. de tribouler, tribuler « tour-
fém.). menter », empr. du lat. eccl. fribulare, v.
TRICTRAC, xve. Onomatopée. tribulation. Tribaler a été altéré aussi en
trinqueballer, 1534 (Rab.), d’où brinque-
TRIDENT, x111° à 1320 ; 1564. Empr. baller, 1853 (Goncourt), d’après trique-
deux fois du lat. tridens « harpon à trois balle, xve, de sens incertain, peut-être
dents », propr. adj. signifiant « à trois « instrument de torture », aujourd’hui
dents ». « fardier, chariot d'artillerie », lui-même
TRIDUUM, 1876. Empr. du lat. fri- d’origine obscure. — Dér. : trimbalage,
duum « espace de trois jours », auquel la 1859 ; -alement, 1865 (Goncourt).
langue de l’Église a donné un sens spécial. TRIMER. Mot d’origine argotique, qui
TRIÈDRE, v. -èdre. signifie aujourd'hui « se donner de la
peine », relevé au sens de « marcher, aller,
TRIENNAL, 1352. Empr. du lat. de courir » en 1628 dans le Jargon de l’argot
basse ép. iriennalis (de annus « an »). —
reformé, encore signalé comme terme de
Dér. : triennalité, 1681 (Patru) ; triennat,
l’argot des gueux en 1823, antér. rumer,
1752, d’abord triennal, 1671, par substan-
XIVe (E. Deschamps, dans un sens obscur),
tivation de l’adj., ensuite modifié d’après
des mots comme épiscopat. mot d’origine incertaine ; on a rapproché
trumel « jambe », v. trumeau, en supposant
TRIER, vers 1170. Doit représenter le lat que le verbe aurait signifié d’abord « jouer
trilare « broyer », dér. attesté au vie s. du des jambes ». — Dér. : trimard, fin xvre,
lat. class. ferere. L’a. pr. triar doit remonter au sens de « grande route », d’où trimarder,
à une forme lat. *friare, qui a perdu son xix°, trimardeur, id.
-t par dissimilation. Le sens de frier
s’explique par le fait qu’on broie le grain TRIMESTRE, 1562. Empr. du lat. fri-
pour en séparer les parties inutilisables. mestris « qui dure trois mois ». — Dér. :
Trier et les dér. détrier, étrier ont pris trimestriel, 1831.
le sens de « sevrer » dans les parlers gallo- TRINGLE, 1459. Altération de tingle,
romans, situés entre la ligne qui va 1328 (tingles à tingler le channel du mou-
des Hautes-Alpes à l'embouchure de la lin ; se trouve encore dans l’ Encyclopédie,
Gironde et celle qui va de la Loire à la v. plus bas), mot techn. de sens variés,
Suisse romande ; ce sens résulte de celui empr. du néerl. tingel, tengel « cale, pièce
de « séparer » que trier présente parfois, de bois qui joint ensemble les coupons
cf. le premier texte où le mot ait été relevé : d’un train à flotter », cf. dans l’Encyclo-
« Le tort del dreit Trier e conoistre e se- pédie de Diderot : « Tingle, terme de ri-
vrer »; délrier est déjà chez G. Bouchet vière ; pièce de merrain dont on se sert
651 TRIVIAL

pour étancher l’eau dans les bateaux en fluence de celui-ci, en frible, vers 1270,
mettant de la mousse tout autour de la en triple, vers 1380. — Dér. : tripler, 1363,
dingle. » — Dér. : tringlette, 1676. triplement, 1515 ; détripler, xvrrre.
TRINGLOT, v. traîner. TRIPLICATA, 1784. Empr. du lat. tri-
TRINITÉ, vers 1050 (Alexis). Empr. du plicata, fém. du part. passé de triplicare
lat. eccl. frinilas (de trinus « répété trois « tripler » à l’imitation de duplicata.
fois, triple »). — Dér. : trinitarien, 1541
TRIPOLI, 1508. Tiré de Tripoli, nom
(Calvin).
de la ville de Syrie, d’où la terre de ce nom
TRINOME, v. binôme. venait autrefois. — Dér. : tripolir, 1650,
d’après polir.
TRINQUER, vers 1380, signifie d’abord
« boire »; le sens moderne est attesté TRIPOT, fin xvii®, au sens moderne ;
dp. 1690. Empr. de l’all. frinken ; on trouve d’abord « jeu de paume », xve (Villon);
aussi au Xvi® s. drinquer d’après le néerl. « acte amoureux, manège, intrigue », XII°;
drinken ; Benoît de Sainte-More, qui a écrit le sens premier explique que tripot ait
pour Henri II d'Angleterre, au x11e s., abouti au sens défavorable de « maison de
a employé drinker qu’il a pris au moyen jeu de mauvais aloi ». Le premier sens
angl. drinken. L'it. trincare est empr. de permet de voir dans fripot un dérivé de
l’all. On notera cette succession d'emprunts triper, V. trépigner. — Dér. au sens de
du même verbe germanique ; cela corres- « manège, intrigue » tripoter, 1582, tri-
pond évidemment à une manière de boire potage, id., tripoteur, 1582, tripotée, 1856 ;
en société en choquant les verres. tripatouiller, d’abord -trouiller, 1890, est
issu d’un croisement de tripoter et de
TRINQUET, vers 1500. Empr. de lit. patrouiller, patte.
trinchelto, qui apparaît d’abord dans des
textes génois, depuis la fin du xv® s., et TRIPTYQUE, 1838. Empr. du grec trip-
qui semble désigner d’abord non le mât, tykhos « plié en trois, triple », pour désigner
mais une voile \triangulaire. Il est donc un tableau différent du diptyque, v. ce mot.
probable que c’est un dér. de frini « par TRIQUE, 1335, attesté alors dans jouer
trois », comme l’it. {rinca « forte liure (pro- aux triques « sorte de jeu (peut-être avec
babl. à l’origine avec trois nœuds) ». — des bâtons) ». Mot dialectal du Nord-Est,
Dér. : trinquette, vers 1500. autre forme d’estrique « bâton que l’on
TRIO, fin xvie (d'Aubigné). Empr. de passait sur une mesure pour faire tomber le
l’it. trio, terme de musique, fait sur le mo- grain excédant », 1429 (Douai); ce mot
dèle de duo ; le sens de « groupe de trois est tiré d’un verbe estriquer (attesté vers
personnes », 1660 (La Fontaine), est une 1490 chez Molinet) pour indiquer l’action
innovation du français. faite avec l’estrique, mais dès 1275 au sens
d’ « aplagner », dans un texte de Saint-
TRIOLET, 1486 ; en 1538 désigne une Omer, empr. du moyen néerl. siriken
sorte de danse. Emploi métaphorique de « passer un objet sur un autre objet;
triolet « trèfle rampant » (dér. de triphyllon, passer un bâton sur la mesure », v. étriquer.
v. trèfle) répandu dans les patois, par une
TRIQUEBALLE, v. trimbaler.
comparaison de la feuille tripartie du
trèfle avec le couplet dans lequel trois TRIRÈME, 1721; une première fois
vers sont répétés. 1355 (Bersuire). Empr. du lat. friremis
(de remus « rame »).
TRIOMPHE, xre; triomphal, id.;
triomphateur, x1v® ; triompher, xrr1€ (J. de TRISSER, 1872. Fait sur le modèle de
Meung). Empr. du lat. {riumphus, trium- bisser, au moyen du lat.’ ri-, élément de
phalis, -alor, -are. à composition.
TRIPATOUILLER, v. tripoter. TRISTE, vers 1155 ; tristesse, vers 1180.
Empr. du lat. fristis, tristilia. — Dér. :
TRIPE « boyau d’un animal », vers 1280. attrister, 1356. V. contrister.
It. trippa, esp. tripa. Ne peut guère être
‘empr. de l’arabe fherb « pli de la panne ». TRITON, 1512, comme terme de mytho-
On a proposé aussi le lat. exslirpare ; mais logie. Empr. du lat. Triton (du grec Tri-
les formes fr. et pr. qui viennent de ce tôn). Pris comme terme d’histoire naturelle
verbe ont toujours un e comme voyelle dp. 1754 d’après le lat. des naturalistes.
du radical. — Dér. : tripaille, xv® ; tripette, TRITON « intervalle de trois tons dans
id. ; en 1365 comme nom propre; tripier, le plain-chant », 1629. Empr. du lat. mé-
xir1e, d’où triperie, 1393 ; étriper, 1534
diéval frilonum, du grec triltonon « trois
(Rab.). tons ».
TRIPE « sorte d’étoffe », 1317 ; {rippe TRITURER, 1529, rare avant lexvIr1es.;
de veloux en 1483 ; le dér. triperie est déjà trituration, x111° s. Empr. du lat. de basse
dans un texte de Tournay de 1275. Éty- ép. trilurare, trituratio.
mologie inconnue.
TRIUMVIR, 1534; triumvirat, 1560.
TRIPHTONGUE, 1550 (Meigret). Fait Termes d'histoire romaine, empr. du lat.
sur le modèle de diphiongue, avec le préf. triumvir, triumviralus.
dri-, TRIVIAL, 1550 (Rab.). Empr. du lat.
TRIPLE. D'abord freble, vers 1170, trivialis « commun, banal, vulgaire » (de
représentant régulièrement le lat. triplus, irivium « carrefour »). — Dér. : trivialité,
mais transformé successivement sous l’in- 1611.
TROËNE 652

TROËNE. Écrit d’abord troine, xIuIe 5. TROMBLON, 1803. Empr., avec inser-
(J. de Meung) ; iroëne, cf. troesne, 1546, a tion d’un / (en 1669 au sens de « narcisse »,
maintenu l’ancienne prononciation de la lequel est attesté aussi en it.) de l’it. trom-
diphtongue oi. Altération d’une forme at- bone, augmentatif de {romba.
testée par le messin {rôy, du francique *tru-
gil, cf. anc. haut all. hart-trugil, aujour- TROMBONE, 1703. Empr. de l’it. trom-
d’hui Hartriegel, de même sens. bone ; a d’abord été emprunté sous la
forme irombon, vers 1580 (Baïf). À rem-
TROGLODYTE, 1552 (Rab.); une pre- placé l’anc. saquebute.
mière fois en 1372. Empr. du lat. troglodyta
(du grec trôglodytés, de trôglé « trou » et de TROMPE, xr1e. Mot d'origine germ., cf.
dynein « pénétrer dans »); depuis 1791, anc. haut. all. rumpa, trumba « trompe,
désigne aussi une espèce de roitelet, sens trompette », anc. scandinave frumba
repris au grec. « trompette », qui sont probabl. onomato-
péiques ; de là aussi it. {romba, esp. trompa.
TROGNE, x1ve (Christine de Pisan). Du Trompe a eu aussi en a. fr. le sens de « tou-
gaulois *trugna, qu'on suppose d’après le pie », comme l’esp. irompa, trompo; on a
gallois érwyn « nez ». Le caractère popu- comparé pour ce sens le lat. {urbo « tour-
laire du mot explique qu'il apparaisse billon » et « toupie », mais le développe-
tardivement dans les textes. ment des sens n’est pas semblable ; trombe
TROGNON, 1393. Dér. du verbe estron- au sens de « colonne d’eau soulevée par un
gner « étronçonner, ébrancher, élaguer », tourbillon de vent » est plus récent que
attesté depuis 1377, réfection de estronner, trompe au sens de « toupie », qui ne peut
1326, d’après rogne, le moignon de l'arbre s'expliquer que comme dû à une compa-
étêté périodiquement prenant la forme raison du bruit de la toupie avec celui que
d'une tête humaine. Estronner est une produisent des trompes de bois. — Dér. :
forme refaite d’après tronc prononcé sans trompette, 1339 ; dès le xve s. désigne aussi
la consonne finale, d’estronchier « retran- celui qui sonne de la trompette ; alors fém.
cher », 1276, dér. de l’afr. tronchier, lat. et masc. ; d’où trompeter, id.
trüncare, « id. », dér. de trüncus, v. tronc. TROMPER, vers 1420, attesté vers 1400
TROÏKA, 1873. Empr. du russe {réika. par le dér. trompeur, cf. aussi : « Ainsy se
fussent les seigneurs trouvé trompez et
TROIS. Lat. frês. On trouve parfois en desgarnis de leurs gens », xive. Tromper au
a. fr. un cas sujet d’origine analogique frei sens moderne est issu de se tromper de « se
et une forme freie, troie qui continue le lat. jouer de », 1388 (encore usité au xve et
tria, plur. neutre, et qui s’est employée au même au xviie s.), emploi fig. de tromper-
sens de « nombre trois au jeu de dés ». — « jouer de la trompe », encore usité au
Dér. : troisième, 1539, froisime au RIT MY, AVIS ME M Dér. Et Comp: tromperie,
tiers. — Comp. : trois-six, 1836 : d’abord vers 1385; trompeur, xi11°:; détromper,
écrit 3/6, fin xvine ; cette expression re- 1611 ; trompe-l’œil, 1803.
monte à un anc. mode d'évaluation des
spiritueux, dont Littré précise le sens. TROMPETTE, v. trompe.
TRÔLER, d’abord froller, xvie (du TRONC. Lat. {runcus. It. esp. tronco.
Fouilloux), plus anciennement frailler, L’a. fr. a une forme fém. tronche, qui
XIV s. N’a rien à faire avec l’all. frollen, représente un lat. pop. *trunca, souvent
qui désigne une certaine façon de courir refaite en ironse d’après tronçon ; les deux
des bêtes de chasse. La signification est formes sont répandues aujourd'hui dans
d’abord « chercher la bête avec les chiens les parlers septentrionaux au sens de
sans aucune piste », d’où, par la suite, « tronc d’arbre ». Tronc, dans tronc des
« courir de-ci de-là ». Lat. pop. *tragülare pauvres, attesté depuis le x1r1e s., désignait.
« suivre à la trace » (v. tracer), dér. de propr. un coffre en forme de tronc.
trähère, parallèlement à “*traginare (v.
traîner). La forme froller s'explique par TRONCHE, « tronc », v. le préc.
une forme */ragüllare sortie par changement TRONÇON, 1080. Dér. de l’afr. trons
de suff. de *tragülare et attestée aussi par «morceau, tronçon », du lat. pop. *{runceus-
le cat. trahullar « se ballader ». «tronqué », dér. de l’adj. lat. fruncus « id. » >
TROLLEY, 1896. Empr. de l’angl. trol- aussi a. pr. ronson. — Dér. : tronçonner,
ley, dér. du verbe to troll « rouler, rôder » x11*, étronçonner, 1570.
(empr. lui-même du fr. trôler). TRÔNE, x11e, Empr. du lat. {hronus (du
TROMBE, 1642; on trouve aussi une greC {hronos). — Dér. : trôner, 1801 ; dé-
forme altérée trompe (déjà 1643), d’après trôner, 1584, détrônement, 1731 (Voltaire).
trompe, instrument de musique, v. la suite. TRONQUER, 1495. Empr. du lat. trun-
Empr. de l’it. tomba, propr. « trompe », care, V. tronc. L’a. fr. a employé aussi la
dit de la trombe d’eau, sans doute à cause forme pop. ironcher, en outre troncer,
de la forme de ce météore. L’esp. tromba dér. de irons, v. tronçon.
qui n’a que le sens de « trombe d’eau »
vient également de l’it. V. trompe. TROP, vers 1080. À eu aussi en a. fr. les.
sens de « beaucoup, assez », conservés dans.
TROMBINE, 1859 (Flaubert) Terme des patois. Du francique *fhrop « entasse-
d’argot, aujourd’hui courant ; paraît dér. ment », qui prend en lat. médiéval le sens.
de l’it. {romba « trompe », comme trompette de « troupeau » ffroppus), anc. angl. throp
s'emploie dans la langue populaire au sens « village », all. Dorf. A. pr. trop, it. troppo
de « visage », v. trompe. viennent du fr. V. troupe.
653 TROUSSER

TROPE, 1554. Empr. du lat. de la rhé- âge iourbler et de même tourble, subst. et
torique éropus (du grec tropos, propr. adj. — Dér. et Comp. : trouble, subst.,
« tour, manière »). 12383 (Beaumanoir) ; trouble-fête, vers 1300,
TROPHÉE, 1488. Empr. du lat. de TROUFION, fin xixe. On le regarde
basse ép. iropheum, altération hypergréci- comme une altération plaisante de trou-
sante du lat. class. /ropæum (du grec tro- pier ; mais il pourrait aussi être dérivé
paion). d’un emprunt de lit. truffa « truffe;
moquerie », cf. it. truffone « moquerie ».
TROPIQUE, 1532 (une 1lre fois 1377,
Oresme). Empr. du lat. de basse ép. tro- TROUILLE, fin xix°e. Mot pop. signi-
picus (du grec {ropikos, de tropos « tour ») ; fiant « colique » et « peur », d’origine obs-
dit ainsi parce que « quand le soleil est cure, d’où trouilloter « sentir mauvais »,
venu ou arryvé à chacun, il s’en retourne 1832; trouillard, fin x1xe.
vers l’équinoxial (« équateur ») », xvi®. — TROUPEAU, vers 1160 (alors tropel);
Dér. : tropical, 1824, sub-, 1876. signifie « un groupe de personnes », jusqu’à
TROQUER, 1257, attesté alors par tro- la fin du xvres. : le sens moderne apparaît
care dans un document lat. Esp. frocar, vers 1290, mais reste rare jusqu’au xvres.
a. pr. trucar. Etymologie inconnue. On a Dér. d’un subst. */rop « troupe de gens »,
parfois trocher au xv®e s. — Dér. : troc, qui doit avoir existé et qui représente un
1464) ; troqueur, 15856. germ. *porp, francique *{hrop, qui est
attesté par le mot froppus, dans la Loi des
TROTTER, x11°. Empr. de l’anc. fran- Alamans (in iroppo de jumentis). — Dér.
cique troltôn (comp. all. trotten), forme in- par réfection troupe, vers 1180 (alors
tensive de la famille de trelen (ne peut dater irope) ; a aussi le sens de « troupeau »
de l’époque des empr. faits au germ. occi- du xx au xvie s. L’esp. fropa et lit.
dental, le verbe simple ayant eu alors un d-, truppa viennent du fr. Dér. et comp. de
cf. gotique irudan, anc. angl. tredan); a troupe : troupier, 1821 ; attrouper, vers 1205;
passé dans les langues méridionales : it. attroupement, xvie.
trottare, esp. trotar. — Dér. et Comp. : trot,
x11° ; trotte, 1680 ; trotteur, 1539 ; trottin, TROUSSE, -EAU, v. trousser.
1488, comme galopin (mais dès 1198 TROUSSEQUIN, outil de menuisier, etc.,
comme surnom, de même que galopin; xvir1e (Buffon). Antér. rusquin, 1676, mot
c'est comme surnoms que les deux mots wallon, forme sortie par dissimilation con-
ont probablement été créés), aujourd’hui sonantique de crusquin (encore à Liège),
ne se dit que des filles; trottiner, 1410, empr. du flamand kruisken, propr. « petite
trotigner, 1552 (Rab.) ; trottoir, 1580 (Mon- croix », ainsi nommé à cause de sa forme ;
taigne) ; trotte-menu, 1488; trottinette, fin troussequin a lui-même subi l'influence de
xIX®, fait sur palinelte. trousser.
TROU, attesté au virie s. dans la Loi TROUSSER, xiie, parfois forser. Au
des Ripuaires sous la forme fraugum; moyen âge « charger des objets » (d’où
trouer, x11°. Mots propres au gallo-roman « charger une bête de somme »), propr.
et au cat. (cf. a. pr. trauc, traucar, cat. trau « mettre en paquet », cf. encore irousser
« boutonnière »), sûrement d’origine pré- bagage, d’où « relever en pliant », xIve.
latine, probabl. gauloise; toutefois les D'un lat. de basse époque *torsare, dér. de
autres langues celtiques n’offrent pas de *lorsus, part. passé de {orquêre « tordre », à
forme analogue, de sorte qu’on peut sup- côté de torius. Le sens du verbe fr. s’ex-
poser que les Gaulois ont reçu ce mot plique par le fait que l’on entoure de cordes
d’une langue parlée en Gaule avant leur la charge d’une bête de somme. — Dér. et
arrivée. Les parlers de l'Est et du Sud-Est Comp. : trousse, vers 1210 (sous la forme
emploient plutôt les types perluis, pertui- torse), signifie d’abord « paquet, botte de
ser, V. percer, ceux du Sud-Ouest le type paille (d'herbe) », sens encore conservé ; dès
{orer et un dér. de ce verbe pour « trou ». le x1r11° s. « sorte de poche de selle », d’où les
— Dér. : trouée, 1500. — Comp. : trou- différentes acceptions modernes ; étre aux
madame, 1571. trousses, vers 1500, vient de l’acception de
trousses « sorte de haut-de-chausses court
TROU {de chou), v. torse. et relevé que les pages portaient autre-
fois »; trousseau, vers 1160, d’abord
TROUBADOUR, 1575. Empr. de l’a. pr. dans un sens voisin de {rousse, trousseau
irobador propr. « trouveur », v. trouver. « vêtements, linge qu’on donne à une
Troubade « soldat, pioupiou », 1860 (dans fille qui se marie », se trouve déjà vers
un titre de chanson) en a été tiré par plai- 1200, mais désignait alors aussi les meubles ;
santerie. troussis, 1611 ; détrousser, x11°, propr. « dé-
TROUBLE, adj. Lat. pop. “*turbulus, faire ce qui est troussé, empaqueté »,
réfection de {urbidus d’après turbulentus. d’où « dépouiller de ses bagages », x1re,
Roumain iurbure et nombreuses formes détrousseur, 1489; retrousser, 1211 (au
dialectales d'Italie. sens actuel 1530), retroussement, 1606,
rétroussis, 1680 ; trousse-galant, vers 1500,
TROUBLER. Lat. pop. iürbulare, dér. expression plaisante pour dire « maladie
. de */urbulus, v. le préc. Roumain {urbura. foudroyante »; trousse-pet, 1872, tiré de
La métathèse de l’7 dans iroubler est an- trousse-pèle, 1798, comp. de deux impér.,
cienne, elle est déjà dans la Chanson de mot fém., qui se dit d’une petite fille;
Roland ; maïs on trouve souvent au moyen trousse-queue, 1553.
TROUVER 654

TROUVER. Probabl. lat. pop. *tropare, des parlers esp. et it. Empr. une première
dér. de {ropus « figure de rhétorique » (cf. fois par d’Aubigné dans le Baron de
altropare chez Arnobe le Jeune, ves., « par- Foenesle, texte gasconisant, au sens de
ler d’une manière figurée » et contropare, « Coup ». Se trouve au x111° s. au sens de
v. controuver), d’où, à basse ép., dans la «ruse » et au xv®s. dans l'expression argo-
langue de la musique « mélodie, air, chant »; tique faire le trucq, probablement aussi
*iropäre aurait donc signifié d’abord « com- par empr. au prov. — Dér. truquer,
poser, inventer un air », d’où « composer 1840, trucage, 1872, truqueur, 1840.
(un poème) », puis « inventer, découvrir » ;
le sens de « composer » a été particulière- TRUC (ou fruck) « sorte de wagon »,
ment usité dans la langue littéraire du 1843. Empr. de l’angl. truck, d’origine in-
moyen âge et l’a pr. trobar s’est employé certaine.
avec cette même valeur, de là les deux dér. TRUCHEMAN, v. drogman.
trouvère, trobador ; trouver a pris en outre
rapidement le sens général de « trouver », TRUCIDER, 1933. Empr. du lat. {ru-
éliminant le lat. class. inventre (seulement cidare.
it. rinvenire). Les autres langues romanes TRUCULENT, vers 1495, sort d'usage
ont remplacé invenire par afflare « souffler à la fin du xvrie s.; réapparaît en 1737,
sur », Ce qui est probabl. un terme de véne- mais reste rare jusqu'à Th. Gautier;
rie : roumain a/fla, Sicile ascid, esp. hallar, redevient général depuis 1867 ; truculence,
port. achar, sursilvain unflä. L'it. trovare 1853 (Goncourt), une re fois en 1629.
« trouver » et l’esp. {rovar « vérifier, etc. » Empr. du lat. truculenlus, truculentia.
viennent du gallo-roman. Le lat. {urbare
qu'on a aussi proposé, en passant par le TRUELLE. Lat. de basse ép. truella, à
sens « troubler l’eau pour faire sortir le côté du lat. class. trulla, dér. de {rua «cuil-
poisson de sa cachette » (pêche à la bouille), ler à pot »; la forme correcte en fr. serait
présente de trop grandes difficultés d’ordre trouelle, conservé dans des patois septen-
phonétique. Le rhéto-roman éruvar « siéger trionaux; truelle semble être refait sur le
en justice » fait quelque difficulté ; mais mot lat. Seulement fr. Le Sud-Est conserve
on a signalé le français trouver le droit qui le mot de l’a. pr. {ibla, de la même origine
en est peut-être la source. — Dér. : trou- que truble. L’esp. {rulla continue le lat.
vaille, xri° ; trouvère, id., anc. cas sujet, class. {rulla ; mais le mot usuel est /lana, lat.
dont froveor était le cas régime, v. trouba- pläna. — Dér. : truellée, 1344.
dour ; introuvable, xvir® (Balzac : « Un TRUFFE, 1363. Empr. de l’a. pr. {rufa,
Gascon diroit que vous estes introuvable ; lat. pop. lüfera, attesté dans des gloses,
pour moi, qui ne suis pas si hardi, je me issu de */üfer, forme osco-ombrienne du
contente de dire que vous estes impossible lat. class. {über, propr. « tumeur », d’où
à trouver ») ; trouvable, xive (Christine de « tubercule », cf. aussi it. {arlufo, lat. pop.
Pisan), a toujours été rare ; trouveur, peu *lerræ lüfer ; pour cette désignation, cf.
usité, fin xviIe ; retrouver, xrre. terræ lüber qui désigne un autre tubercule
TRUAND, xrue. D'un gaul. *rugant-, chez Pline et esp. {urma de tierra « truffe ».
qui répond à l’irlandais {rôgän, dimin. de Truffe sert en outre à désigner la pomme
truag « malheureux », tr6g, gallois tru. de terre dans un très grand nombre de
Empr. par les langues méridionales : cf. parlers gallo-romans au sud de la ligne
esp. truhän « bateleur ». — Dér. : truan- allant de l'embouchure de la Seine au sud
daille, x1r1° ; truander, xr1°; truanderie, des Vosges ; fartufe est le type du Sud-Est.
X111*, nom d’un ancien quartier de Paris, — Dér. : truffer, 1798.
conservé dans un nom de rue.
TRUIE. Lat. pop. froia, vire s. (Gloses
TRUBLE, filet de pêche. Parfois trouble de Cassel), tiré de porcus troianus « pore
depuis le xvrrres. d’après troubler. Probabl. farci (garni de menu gibier) », ainsi chez
du grec friblion « écuelle » entré en Gaule Macrobe, Salires, II, 9 ; ainsi nommé par
par Marseille. Le changement de genre allusion plaisante au cheval de Troie. Le
peut être dû à l'influence du lat. trulla, mot doit avoir été modifié en *porcus de
v. truelle. Le lat. #rïbula « herse » ne peut Troja et puis transformé en froja par
pas entrer en ligne de compte parce que la omission de porcus. It. {roia, à. pr. {rujassa
forme frible est postérieure à iruble et « grosse truie ».
très rare. TRUISME, 1828. Empr. de l’angl. {ruism,
TRUBLION. Mot créé par A. France, dér. de true « vrai ».
vers 1899, dans un texte écrit en langue TRUITE. Lat. de basse ép. tructa (le
du xvi® s., à la fois d’après /roubler et le grec trôklés, propr. « vorace », désigne un
mot lat. trublium « écuelle », par allusion autre poisson). It. {rota, esp. trucha. On
plaisante à gamelle, surnom du prétendant attendrait troite en fr., forme attestée en
au trône de France, dont les frublions sont normand et dans des textes anc., cf.
les partisans. trouelle au xvi® s.; l’origine de la forme
TRUC « manière d’agir habile, secrète », truite n’est pas claire. —— Dér. : truité, 1680.
d’où, dans la langue du théâtre, « sorte de TRUMEAU, 1624, au sens moderne.
machine à manœuvrer les décors », 1803. Emploi fig. de trumeau « gras de la jambe,
Empr. du prov. truc, subst. verbal de jambe », xr1° (cf. pour ce développement
trucd, au moyen âge trucar « cogner, bat- sémantique jambage), usité jusqu’au xvies.
tre », d’un lat. pop. *rüdicare, dér. du lat. et encore employé aujourd'hui dans la
class. trüdere « pousser », qui vit aussi dans langue de la boucherie au sens de « jarret
655 TUMEUR:

de bœuf ». Probabl. dér. d'un francique le-r1er 5.), qui se seront substituées à exstin-
*prum « morceau », Cf. all. Trumm « tron- guere famen, silim « éteindre la faim, la
çon », Trümmer « décombres », angl. soif », quand exstinguere est devenu défail-
thrum « bout de fil ». Si la voyelle n’est lant, cf. aussi a. pr. {udar, tuar « étein-
pas devenue ou, comme dans d’autres mots, dre, tuer », estudar, atudar « éteindre », dont.
cela pourrait faire penser que le mot a le dernier survit encore en languedocien;
passé assez tard du francique au roman, cf. aussi it. alulare, slulare « éteindre » et
peut-être au virie s. seulement. surtout « adoucir, calmer, etc. ». Le sens
de «tuer » apparaît dès le xrr1e s. et celui
TRUST, 1888. Empr. de l’anglo-améri-
d’ « éteindre » seulement au xve s., mais
cain {rust, tiré de lo trust «avoir confiance » ;
ainsi nommé parce que, en principe, les les régions d’où proviennent la plupart des.
textes littéraires du moyen âge : Norman-
participants d’un trust confient aux diri-
die, région Parisienne, Picardie, Champa-
geants tout ou partie de leurs pouvoirs. gne, Bourgogne ont conservé éleindre (on
TSAR, 1607; aussi {zar, XVIII*, czar, a du reste en lat. médiéval lulal lampadem
1561, zar en 1607. Tsar, lzar est la forme unam). — Dér. et Comp. : tuerie, 1350;
russe, czar la forme polonaise ; toutes deux tueur, vers 1205; tue-tête (à), 1698
sont empr. du lat. Cæsar, comme l’all. (Scarron) ; entretuer (s’), vers 1180.
Kaiser. — Dér. : tsarine, 1717 ; formes pa-
rallèles à celles de {sar, cf. aussi {sarévitch TUF, 1407 (mais le mot lujje est attesté
« fils du Tsar », , d’abord csarowitz au dès la fin du xiIve s. comme nom d’une
XVIII S. poire graveleuse comme du tuf) ; désigne
d’abord une couche pierreuse sous la
TSÉ-TSÉ, 1872. Mot empr. de la langue couche végétale ; le sens de « pierre
des Sechuana de l'Afrique australe. blanche » apparaît au xvies. Empr. de lit.
lufo, qui est lui-même une forme dialectale
TSIGANE, 1872. Nom de peuple, cf. all. du Sud, lat. lôfus (probabl. passé par:
Zigeuner ; l’angl. gipsy est tiré de egyp- l’osque) ; le mot désignait d’abord le tuf
lian « Egyptien », comme l'esp. gitano de volcanique de la région de Naples. — Dér. :
egyptano (de là le fr. gitane, fin du x1Ix°5.) ; tufeau, 1433.
on croyait les tsiganes originaires d'Égyp-
te; v. aussi bohémien et romanichel. TUILE. D'abord feule, puis tiule, d’où.
TU. Lat. {u. It. esp. à. pr. {u ; partout par métathèse, {uile, v. règle. Lat. legula
pron. accentué, sauf dans la France sep- (de la famille de tegere « couvrir »). Le:-
tentrionale où tu n’est plus depuis le xvies. Nord-Est a un mot panne, probabl. lat.
que préf. de conjugaison servant à indi- patina « écuelle » (l’all. Pfanne « plat, tuile
quer la deuxième personne du singulier. creuse » remonte à une forme empr. du
— Dér. : tutoyer, 1394 (auparavant aussi lat.). Sens fam. de « désagrément », 1846.
luloiser) ; au Xvrres. on a dit aussi {ulayer ; — Dér. : tuileau, 1327 ; tuilier, 1300; tui-
tutoiement, 1636. lerie, 1239.

TUB, 1889; d’abord {0b, 1878. Empr. TULIPE, 1611, antér. lulipan, 1600
de l’angl. {ub « cuve, baquet ». (O0. de Serres, encore aujourd’hui dans les.
parlers du Midi). Empr. du turc {ülbend-
TUBE, 1453. Empr. du lat. {ubus. (läle), nom de la tulipe blanche que Bus-
TUBERCULE, xvi° (Paré), au sens de beck, ambassadeur de l’empereur Ferdi-
« proéminence anatomique »; au sens de nand Ier auprès de Soliman le Magnifique:
« tumeur du poumon, etc. », 1741. Empr. de 1552 à 1562, a le premier signalé dans.
du lat. médical {uberculum « petite bosse, la relation de son ambassade : « Per haec
petite tumeur » (dér. de {uber, v. truffe). loca transeuntibus ingens ubique florum
— Dér. : tuberculeux, 1779 (déjà 1570, copia offerebatur, narcissorum, hyacintho-
dans un autre sens) ; tuberculose, 1872. rum et eorum quos Turcae tulipan vo-
cant » ; le mot turc qui signifie proprement
TUBÉREUX, xvi® (Paré; {ubéroux en « turban » a été dit de la tulipe par compa-
1490) ; d’où tubéreuse, nom de plante, raison de la forme de la fleur avec celle
1630 ; tubérosité, 1503. Empr. des mots d’un turban. La forme première vit encore
lat. {uberosus « plein de protubérances », dans it. {ulipano, esp. lulipän, alémanique
tuberositas (créé à basse ép.) (de tuber, v. le tulipane. La forme raccourcie apparaît
préc.). d’abord en Hollande, où {ulipa est du
TUBULAIRE, 1760 ; tubulé, 1743 ; tu- xvIe s.; de là la forme fr., outre all. {ulpe,
buleux, 1771; tubulure, 1762. Termes angl. tulip, port. tulipa. L’'intense culture:
techn., dont le deuxième est empr. du lat. de cette fleur en Hollande a probabl. fait.
tubulatus ; les trois autres sont des dér. passer cette forme, née par apocope de
sav. du lat. {ubulus, dimin. de fubus. l'élément -an pris pour un suff., dans les.
autres langues. — Dér. : tulipier, 1751.
TUDIEU, v. dieu.
TULLE, 1765. Tiré de Tulle, nom du
TUER. À d’abord eu le sens d’ « étein- chef-lieu de la Corrèze, où cette dentelle
dre », encore chez Malherbe et usité au- était d’abord fabriquée.
jourd’hui depuis la Bretagne jusqu’à la
Savoie, d’où « étourdir, abattre, tuer ». TUMEUR, xi1v®; tuméfier, xvi€ (Paré);
. Lat. pop. *lütäre, lat. class. {üläart « proté- tuméfaction, 1552. Les deux premiers sont.
ger, garantir de », qui a dû prendre à basse empr. du lat. {umor, lumefacere (luméfier
ép. le sens d’ «éteindre » dans des expres- étant francisé d’après les verbes en -fier),
sions telles que tulare famen, silim (dès le troisième est un dér. sav. de ce verbe
TUMEUR 656

lat. d’après les subst. en -faction, cf. putré- une première fois 1495. Empr. des mots
faction, etc., pour servir de subst. à {umé- lat. {urbulentus, -tia (créé à basse ép.), de
[ier. la famille de furbare « troubler ».
TUMULAIRE, 1823. Dér. sav. du lat. TURC, vers 1300 (Villehardouin), comme
tumulus « tombeau ». nom de peuple ; sens figuré à partir du
TUMULTE, vers 1220 (dès 1131 dans XvI® s.; l’expression récente téle de turc
la forme femolle) ; parfois fém. au x1ve $.; vient peut-être du jeu de massacre. Empr.
tumultuaire, 1354 (Bersuire) ; tumultueux, du mot turco-persan {ourk ; en persan le
1354. Empr. du lat. tumulus (qui a mot sert à désigner les peuples à peau
eu aussi le sens de « soulèvement, prise blanche et œil noir.
d'armes », sens parfois repris, le der-
nier surtout à propos de faits de l’histoire TURCO, 1859. Empr. du sabir algérien
romaine), {umulluarius (qui signifie « levé lurco, propr. « turc », d’où « algérien », mot
à la hâte » ou « fait à la hâte », pris pour de forme italienne ; l'emploi de iurco au
servir d’adj. à {umulle), tumuliuosus. L'a. sens d’ « algérien » (d’où le sens nouveau
fr. a des formes plus francisées {emolie, de « soldat indigène au service de la
lemoute (parfois féminin au xrve s.), {ou- France ») s'explique par le fait que l’Algérie
moule. a dépendu de la Turquie jusqu’en 1830.
TUNE « pièce de cinq francs », pop., TURELURE ; ne se dit que dans la
d’abord arg., 1800, en 1628 « aumône » ; locution C’est ioujours la même turelure.
souvenir du roi de Thunes (— Tunis), un D'abord sorte de refrain de chanson,
des noms du roi des gueux. XIIIe 8., aussi « Cornemuse », XIV®, AU XII®S.
aussi {urluele « flageolet de berger ». Mot
TUNGSTÈNE, 1783. Empr., peut-être onomatopéique ; v. turlutaine; luron.
par l'intermédiaire de l’all. Tungstein, du
suédois tungsten, littéral. « pierre lourde », TURF, 1828. Empr. de l’angl. turf
mot créé par le chimiste suédois Scheele « gazon, pelouse ». V. tourbe. — Dér. :
qui découvrit ce corps en 1780. turfiste, 1854.
TUNIQUE, 1156. Empr. du lat. {unica. TURGESCENT, 1812 ; turgescence, 1752.
TUNNEL, 1829, dans un texte où l’on Empr. des mots lat. {urgescens (part. prés.
parle de Liverpool. Empr. de l’angl. tunnel de lurgescere « se gonfler »), -centia (dér
qui désigne aussi diverses sortes de galeries créé en lat. moderne).
souterraines et un tuyau de cheminée, lui- TURLUPINADE, 1653 (Molière) ; turlu-
même du fr. {onnelle ; tonnelle est attesté
piner, 1615. Dér. de Turlupin, surnom pris
en 1551 au sens de « tuyau » à Guernesey,
par Legrand, célèbre auteur de farces, du
où il est encore usité au sens de « tuyau
souterrain ». V. tonne. commencement du XvII° s., qui l’a tiré du
nom d’une secte d’hérétiques du x1v® 8.,
TURBAN, 1538 ; aussi {urbant, 1553 (Be- mot d’origine inconnue ; ce mot avait con-
lon), {ulban, 1559, tolliban, 1490 (Com- tinué à vivre comme terme d'injure, et
mynes). Empr. du ture tülbend, du persan Rabelais, I, Prologue, l’a altéré intention-
dulbänd ; on a déjà turbante en it. en 1487. nellement en tirelupin.
V. tulipe. — Dér. : enturbanné, xvre.
TURLUTAINE, 1803, au sens de « seri-
TURBINE, 1824 au sens moderne. Empr. nette »; en outre équivalent de iurelure.
du lat. turbo, turbinis, qui désignait divers Mot onomatopéique comme furelure et iur-
objets de forme arrondie « roue de fu- luiulu, 1654 (Loret), turlututaine, 1872.
seau, etc. », propr. « tourbillon, toupie »,
v. tribune. TURNE, terme d’argot, qui signifiait
d’abord « taudis » ; passé depuis dans l’ar-
TURBINER, 1800, né dans l’argot, n’est got des écoles. Relevé pour la première fois
pas dér. du préc., puisqu'il est attesté en 1800 au sens de « logis » à l’occasion de
avant l’invention de la turbine. Doit avoir l'interrogatoire d’un chef de bande. Empr.
été formé par un membre d’une bande de de l’alsacien iürn « prison », forme dialec-
brigands infestant surtout l'Ouest, à cette tale de l’all. Turm « tour, etc. », qui a aussi
époque-là, qui avait quelques notions de le sens de « prison » dans des parlers popu-
latin. — Dér. : turbin, 1836. laires.
TURBOT, vers 1130 (sous la forme {ur- TURNEP, 1764. Empr. de l’angl. lurnep,
bul), puis turbot, 1215. La deuxième partie lurnip, dont la deuxième partie remonte à
contient l'équivalent du néerl. bulle, all. l’anc. angl. næp (du lat. napus « navet »),
Butt, «barbue », Steinbuit «turbot ». Le tur- et dont la première est peut-être {furn
bot s'appelle en all. Dornbuit, comp. avec « tourner », cf. le fr. racine pivotante.
Dorn «épine », à cause de ses piquants. Les
formes fr. correspondent exactement à un TURPITUDE, xive. Empr. du lat. {ur-
anc. scandinave *porn-butr, équivalent de pitudo (de turpis « honteux »).
l'all. Dornbutt, qui, bien qu'il ne soit pas TURQUIN « bleu foncé », 1471. Empr.
attesté, peut être supposé ; les termes de de lit. {urchino, id., propr. « de Turquie »;
mer viennent en grande partie de cette comp. azur, pers.
langue par l’intermédiaire du normand. —
Dér. : turbotière, 1803; turbotin, 1694. TURQUOISE, xrr1e. Fém. pris substan-
tiv. de l’a. fr. {urquois, dér. de turc ; cette
TURBULENT, 1532, une première fois ur a d’abord été trouvée en Turquie
au x11° S.; turbulence, 1646 (Poussin) » ’Asie.
657 TYROLIENNE

TUSSILAGE, 1671: Empr. du lat. {us- proprement « marque laissée par un coup »,
silago (dér. de fussis « toux ») ; cette plante d’où « marque » et spécial. « caractère
a été ainsi nommée parce que sa fleur fait d'écriture » et d'autre part « image », puis
partie des quatre fleurs qu’on employait «modèle, exemple, type » dans le grec de la
pour faire des tisanes pectorales ; le nom Septante), de là l'emploi de {ype tout d’a-
pop. répandu dans tout le territoire gallo- bord en parlant de l'Ancien Testament,
roman est pas d’âne. figure du Nouveau Testament, et des idées
platoniciennes jusqu’au x1xe 5. ; sens plus
TUSSOR(E), 1877. Empr. de l’angl. étendus depuis ; {ype a pris notamment
lussore, autre forme de iussur, tusser, empr. dans le fr. pop. le sens d’ « individu »
lui-même de l’hindoustani {asar. (vers 1845).— Dér. : typesse, fr. pop., 1888 ;
TUTELLE, 1332 ; tutélaire, 1552 (Rab.) ; typer, 1923; typifié, 1859.
tuteur, vers 1265. Empr. des mots lat. {utela TYPHON, 1504. Empr. de l’angl. iy-
tutelaris (créé à basse ép.), tutor (de tueri phoon, empr. lui-même, comme le port.
« protéger »). tufäo, de l'arabe iufdn (qui viendrait du
TUTU, fin xixe. D'abord « caleçon col- grec {yphôn « tourbillon de vent »). Le chi-
lant de danseuse », puis « jupe de gaze de nois de Formose fai-fung est composé de
danseuse ». Emploi plaisant de fuiu, mot tai, le nom chinois de l’île, et de chin. fung
de formation du langage enfantin, tiré de « vent ». Il est à la base des variantes fr.
cul. toufan, iufan, qu’on trouve au xvirnre s.
TYPHUS, 1784 (se trouve déjà dans une
TUYAU, vers 1100. Dér. du francique lettre adressée à Huet, en 1667, mais sans
*hüta « tuyau », supposé d’après gotique que le sens du mot résulte clairement
päthaürn « cor à sonner », frison fuite du passage). Empr. du lat. scientifique
« tuyau ». Aussi a. pr. tudel. — Dér. : typhus, empr. lui-même du grec mé-
tuyauter, 1822 ; au sens de « donner des dical {yphos « torpeur » (au sens propre
renseignements », fin xix®, vient de la « fumée »). — Dér. : typhique, 1836; ty-
langue des courses où {uyau signifie « ren- phoïde, 1818, proposé par le médecin fran-
seignement » (dp. 1887), ce qui se dit çais Louis, d’où para-, 1907.
dans le tuyau de l'oreille (comp. dès 1798
dire qch. dans le tuyau de l'oreille), tuyau- TYPIQUE, 1496. Empr. du lat. eccl. iy-
tage, 1872, -terie, 1845 ; tuyère, 1389. picus « qui sert de type, de symbole, allé-
gorique » (du grec iypikos « id. ») ; a suivi
TWEED, sorte de laine d'Écosse, 1845 le développement sémantique de type (sauf
(Th. Gautier). Empr. de l’angl. iweed, alté- au sens pop. d’ « individu »).
ration, par croisement avec Tweed, nom
d’une ville d'Écosse, de iweel, forme écos- TYPOGRAPHE, 1554 ; -ie, 1577. Comp.
saise de will « sorte d’étoffe croisée », tiré du grec iypos au sens de « caractère d’écri-
lui-même du verbe {o will « croiser ». ture » (v. type), et de -graphe, -graphie. Le
fr. pop. dit par abréviation typo. — Dér. :
TYMPAN, 1506 (comme terme d’archi- -phique, 1560.
tecture, iympane chez B. Palissy); une
première fois au x1I° s. au sens de « tam- TYRAN, vers 980 (Saint Léger). Lat.
bour » ; sens anatomique depuis le xvire s. tyrannus (du grec iyrannos, prop. « maître »,
Empr. du lat. {ympanum « sorte de tam- qui se disait de Zeus, puis « celui qui s’em-
bour », pris aussi comme terme d’architec- pare du pouvoir », d’où « despote »). —
ture (du grec fympanon, v. timbre). Dér. : tyranneau, 1578 ; tyrannie, 1155 ;
tyranniser, 1370 (Oresme).
TYMPANISER, vers 1520, au sens de TYRANNICIDE, 1487. Empr. du lat.
« faire connaître à grand bruit », usité jus- tyrannicida.
qu’à la fin du xvri® s.; sens moderne de-
puis le xvire 8. Empr. du lat. de l’ép. im- TYRANNIQUE, vers 1370 (Oresme).
périale {ympanizare « jouer du tambour » Empr. du lat. iyrannicus (du grec iyranni-
(du grec iympanizein). kés).
TYPE, vers 1380. Empr. du lat. eccl. TYROLIENNE, 1834. Fém. de Tyrolien
typus « modèle, exemple » (du grec {ypos, « du Tyrol ».

DICT. ÉTYM. 42
Ü
UBAC « versant exposé au nord », début ULULER, 1842 (auparavant déjà aux
xx° s. Empr. des patois du Sud-Est, v. xve et xvi® s.). Empr. du lat. ululare.
adret. Du lat. opacus. V. hurler.
UBIQUITÉ, 1585 (du Fail) D'abord UMBLE, v. ombre.
terme de philosophie et de théologie ; sens
UN. Lat. ünus « un », nom de nombre
plus étendu depuis le début du xix® 5. cardinal, qui a pris de bonne heure (déjà
Dér. sav. du lat. ubique « partout » sur le
chez Plaute et Cicéron) une valeur d’art.
modèle de mots tels qu’unité, élernité, etc.
indéf. Unus pouvait déjà s’employer au
UHLAN, 1748 (écrit houlan) ; écrit aussi plur. dans des cas particuliers, de là le fr.
hulan. Empr. de l’all. Uhlan lors de l’in- les uns, cf. fierent li un, li altre se defen-
troduction de cette sorte de cavalerie par dent ; Roland, 1398; l’a. fr. a eu en outre
le maréchal de Saxe en 1734 ; le mot all. jusqu’au xv® s. un curieux emploi de un
vient lui-même, par l'intermédiaire du po- au plur., souvent avec des objets allant par
lonais, du tatare oglan, propr. « enfant »; deux, cf. unes grandes joes. el unes grans
pour cette dénomination, v. fantassin, in- narines.. el unes grosses levres, Aucassin
fanterie. et Nicolette, XXIV. — Dér. : unième, dans
les noms de nombre comp., xr11e (dans vint
UKASE, 1775; écrit aussi oukase. Ne el unimes).
s'emploie qu’en parlant de choses de la
Russie, sauf par allusion ; formé sur le UNANIME, 1467, attesté alors indirec-
russe ukasali « publier ». tement par l’adv. -ment (une 1re fois 980);
unanimité, xiv® (Oresme). Empr. du lat.
ULCÈRE, 1314; genre d'abord hési- unanimus (de unus et de animus « âme »),
tant ; le masc. est fixé depuis le xvire s. ; unanimilas. — Dér. de l’adj. : unanimisme,
ulcérer, id. ; sens fig. depuis le xvie s.; nom d’une école littéraire, 1910 ; d’où
ulcération, 1314 ; ulcéreux, 1490. Empr. du -iste, id.
lat. ulcus (ulceris), ulcerare, ulceratio, ulce-
TosUs. UNI-. Premier élément de mots sav.,
tels qu’unicellulaire, 1838, unilatéral, 1778,
ULÉMA, 1765. Empr. de l'arabe ‘ou- comme terme de botanique, 1804, comme
lamä, plur. de ‘élim « savant ». terme de droit, faits sur le modèle de mots
ULSTER, vers 1872. Empr. de l’angl. empr. tels qu'uniforme, v. ce mot, ou de
ulsier, tiré de Ulsier, nom de l'Irlande mots lat. de même formation.
septentrionale, d’où provenait d’abord UNIFIER, 1838 ; une première fois vers
l’étoffe servant à faire ce manteau. 1400. Empr. du lat. de basse ép. unificare,
ULTÉRIEUR, 1531. Empr. du lat. ulte- francisé d’après les verbes en -fier. —
rior, de la famille de ultra. ; Dér. : unification, 1838.

ULTIMATUM, 1740. Empr. du lat. des UNIFORME, xive (Oresme); devenu


diplomates ultimatum, dér. de ultimus subst. au xviri® s. pour désigner un habit
« dernier » sur le modèle de mots tels que fait sur un modèle prescrit à un corps
imperatum « ordre ». militaire ; on a dit d'abord habit uniforme,
vers 1700 (Saint-Simon) ; depuis, sens plus
ULTIME, 1834; une première fois au étendu ; uniformité, id. Empr. des mots
XVe s. Empr. du lat. uliimus « dernier ». lat. uniformis, uniformitas. — Dér. : uni-
formiser, début xvirre.
ULTRA-. Préf. de mots sav., empr. du
lat. ulira « au-delà » ; de là ultra qui a été UNION, vers 1200. Empr. du lat. du
parfois pris comme subst. dans la langue IVe s. unio (de unus). — Dér. : unionisme,
politique, cf. notamment les ultras sous la 1836, -iste, 1838, à l’imitation de l’angl.
Restauration. unionisme, -ist.
ULTRAMONTAIN, 1323. Empr. du lat. UNIQUE, vers 1480. Empr. du lat. uni-
médiéval uliramonianus, formé du lat. cus (de unus « un »). — Dér. : unicité,
ultra, et de mons « montagne », sur le mo- vers 1730.
dèle du lat. anc. éransmontanus « d’au-delà UNIR, vers 1180. Empr. du lat. ünire.
des monts », uliramundanus « de l’autre Le part. passé lat. est conservé dans l’a.
monde ». Au moyen âge on trouve une fr. onni «uniforme ». — Dér. : désunir, 1418,
forme plus francisée outremontain, depuis désunion, xve, d’après union ; réunir, 1400,
le XIVe s. — Dér. : -tanisme, 1733. d’où réunion, 1468, d’après union.
699
USINE

. UNISSON, 1375 (Oresme). Terme de mu- URETÈRE, 1541. Empr. du grec ou-
sique, empr. du lat. scolastique unisonus rêtér « id. ».
« d’un seul son »; sens fig., dep. Montaigne.
URÈTRE, 1667. Empr. du lat. médical
UNITÉ, vers 1120. Empr. du lat. unitas urethra (du grec ouréthra, de ourein « uri-
(de unus « un »). — Dér. : unitaire, 1688 ner »). — Dér. : urétral, 1796.
(Bossuet), comme terme d'histoire reli-
gieuse ; depuis, sens plus étendu, d’où URGENT, xive, Empr. du lat. de basse
-arien, 1859. ép. urgens « pressant, urgent », part. prés.
pris adjectiv. de urgere « presser » —
UNIVERS, xvie (Marot). Empr. du lat. Dér. : urgence, 1789; une première fois
universum, neutre pris substantiv. de l’adj. en 1572.
universus « tout entier », littéral. « tourné
de manière à ne former qu’un tout ». Le URINE, xri°. Réfection, d’après le lat.
fr. a également eu d’après cet adj. lat. un urina, de l’anc. forme orine, encore usitée
adj. univers du xr1° au xvie s., cf. l'empire au Xv° s., lat. pop. *aurina, altération de
univers, Rab., I, 33 (d’après le lat. nundus ürina par croisement fait par plaisanterie
universus). avec aurum « Or » à cause de la couleur
jaune de l'urine ; de là aussi it. esp. orina,
UNIVERSEL, vers 1200; universalité, a. pr. aurina. — Dér. : urinaire, 1556;
XIVe. Empr. du lat. de basse ép. univer- uriner, vers 1300; oriner, 1375 ; d’où uri-
salis, universalitas (de universus) ; le plur. noir, 1872, au sens moderne ; au xvirIe s.
d'universal (autre forme d’universel), uni- désigne un vase à col incliné pour uriner;
versaux, XVII (Descartes), a servi comme on disait antér. orinal, xur° (Chrétien),
terme de scolastique. — Dér. : d’universel puis urinal, depuis le xve s. (encore usité
d’après la forme de l’adj. lat. : universa- aujourd’hui), empr. du lat. de basse ép.
liser, 1770. urinal « pot de chambre » ; urineux, 1611.
UNIVERSITÉ, 1218. Empr. du lat. mé- URNE, 1487. Empr. du lat. urna qui
diéval universitas dont le sens est la suite désignait aussi un vase destiné à recueillir
de ceux que le mot avait en lat. jurid. les suffrages ; ce sens a été repris au xix°5.
« collège, corporation » (d’où aussi le sens
de « commune » au moyen âge) et en lat. URO-. Premier. élément de mots sav.,
philosophique « totalité, généralité » (sens tels qu'uroscopie, 1765, tiré du grec ouron
également empr. au moyen âge) ; à la suite « urine ».
du décret de Napoléon Ier, du 1e mars URTICAIRE, 1759. Dér. sav. du lat.
1808, a servi à désigner l’ensemble du corps urlica « ortie ».
enseignant de toute la France, placé sous
la direction du ministre de l’Instruction US. Vieux mot qui ne s'emploie plus que
publique, appelé Grand Maître de l'Uni- dans la locution les us et coutumes. Lat.
versité ; depuis la réforme de L. Liard, vers usus « usage ». — Dér. : usage, x11°, usager,
la fin du xix® s., il y a en France 17 uni- 1320, usagé, 1877; usagé se trouve déjà
versités, groupements de facultés d’ensei- au moyen âge et encore à la fin du xvrr1e8.,
gnement supérieur. — Dér. : universitaire, au sens d’ « habituel, ponctuel », c’est
1824. alors le part. passé, pris adjectiv., d’un
UPPERCUT, terme de boxe, 1908. Em-
verbe usager « (s')habituer » ; non-usage,
1689.
pr. de l’angl. uppercut, comp. de upper
« supérieur » et cul « couper ». USER. Lat. pop. *üsäre, dér. de üsus,
URANIUM. Corps découvert en 1841 part. passé de üii « faire usage de ». Propr.
par le chimiste Péligot, qui a tiré le nom « faire usage de, employer », sens conservé
de ce corps d’urane, 1790, nom d’un corps dans la construction user de, qui apparaît
découvert en 1789 par le chimiste allemand vers le x11e s.; de là « consommer (son
Klaproth; celui-ci a tiré Uran (d’où le fr. temps, sa vie, sa jeunesse, etc.) », vers 1080
urane) d’Uranus, nom d’une planète, en (Roland), puis « détériorer par l’usage »,
hommage à Herschel qui l’a découverte XVI°. It. usare, esp. usar « faire usage de ».
en 1781 et lui a donné le nom du dieu latin — Dér. : usure « action d’user », 1530;
Uranus, père de Saturne (du grec Ouranos, inusable, 1867 ; le simple usable, 1858, est
proprement « ciel »). moins usité ;mésuser, 1283 (Beaumanoir).
URBAIN, 1768 (Rousseau; une 1re fois USINE, 1732 (dans un arrêt du Conseil
vers 1354, puis de 1508 à 1638) ; urbanité, du Roi à propos de Charleville). Mot dia-
xIve au sens moderne, mais établi dans la lectal du Nord-Est, au sens d’« établisse-
langue au xvire s. par Balzac. Empr. du ment où l’on travaille le fer ou d’autres
lat. urbanus, urbanilas (de urbs « ville ») ; métaux avec des machines (mues par
urbanité a été employé au xiIv® s. avec l’eau) », par suite se dit aussi alors de mou-
un sens de « ville, cité » que n’a pas le lins ou de machines mues par l’eau (Buf-
latin. — Dér. : urbanisme, 1842 ; inter- fon) ; sens plus étendu au xixe s. Attesté
urbain, 1920. au moyen âge surtout dans les textes du
Nord-Est (Hainaut, Champagne, Lorraine)
URÉE, 1797. Mot créé par Foureroy auvsens de « fabrique » ou même de « bou-
(1755-1809) avec le radical d'urine. — tique ». Usine qui apparaît déjà au x1ves.
Dér. : urate, 1798 ; urique, 1803 ; urémie, est issu de la forme uisine (wisine, 1274, à
‘employé pour la première fois par le méde- Valenciennes), comme charcultier de char-
cin français Piorry en 1847 ; la deuxième cuitier ; wisine est une altération, peut-être
partie du mot est faite avec le grec haima d’après cuisine, d’un mot picard attesté
« sang ». sous diverses formes oeuchine, ouchine, etc.,
USINE 660

usitées du x111° au Xxv°s., qui serait en fr. avait été fixé pour Calvin à 5 %) et ceux
*o (u)cine, lat. officina « atelier » (lequel n’a à un taux exagéré ; le sens de usure fut
que peu de représentants en dehors du mot alors restreint à ces derniers, après une
fr., cf. it. fucina). — Dér. : usinier, 1845, certaine époque d’hésitation (1690). —
déjà en 1773, dans un texte de Liège, et Dér. : usurier, vers 1170.
déjà créé au x1v®s. dans cette région, 1367
USURE, v. user.
(sous la forme uhenir).
USITÉ, xive (Froissart). Empr. du lat. USURPER, 1340; usurpateur, vers
usilalus, de la famille de usus « usage ». 1430; rare avant le xvii® s.; usurpation,
Le verbe usiler, assez fréquent au xvies., 1550 (une 1re fois en 1374). Empr. des
n’est attesté que dans des dictionnaires mots du lat. jurid. usurpare « id. », usurpator
avant cette époque et ne peut guère être (créé à basse ép.), usurpatio.
à la base de l’ad)j. UT, v. gamme.
USTENSILE, 1439. Altération, d’après UTÉRUS, xvie (Paré); utérin, 1455.
user, d’uiensile, Xiv*, empr. du lat. uien- Empr. des mots lat. uierus « matrice »,
silia, plur. neutre « ustensiles, etc. » (de ulerinus (créé à basse ép.).
la famille du verbe uti « se servir de », v. UTILE, 1260 ; une première fois ulle au
outil) ; fém. jusqu'au xvire s. XII S.; paraît avoir été rare au moyen
USUEL, 1606; une première fois en âge ; utilité, vers 1120. Empr. du lat. ulilis,
1298 ; l’adv. -ellement a été relevé en 1507. utilitas. — Dér. : 1° d’utile : utiliser, 1792
Empr. du lat. de basse ép. usualis (de usus (Necker ; v. influencer, sous influence),
« usage »). d’où utilisation, 1798, utilisable, 1842, d’où
in-, 1845, inutilisé, 1834 ; 2° d'utilité : uti-
USUFRUIT, 1276; au moyen âge aussi litaire, 1831, -arisme, 1831, tous deux
formes plus francisées usefruis, XIII°, us- d’après les mots angl. ulililarian, -ianism.
fruit, xive. Empr. du lat. jurid. ususfruc-
UTOPIE, 1532 (Rab.) Empr. du lat.
tus, mot fait de deux mots juxtaposés,
moderne uiopia, nom d’un pays imaginaire,
signifiant « droit d'usage et jouissance
d’un bien dont onn ’est pas propriétaire ». mot créé par Th. Morus avec les mots grecs
ou « non » et {opos « lieu », c'est-à-dire «lieu
— Dér. : usufruitier, 1411.
qui n'existe nulle part » ‘et donné comme
USURAIRE, vers 1320. Empr. du lat. titre à un de ses ouvrages en 1516. —
jurid. usurarius « relatif aux intérêts » pour Dér. : utopiste, 1792; utopique, x1x®
servir d’adj. à usure. (Proud’hon ; dès 1529, dans un autre sens).
USURE. A eu aussi le sens « intérêt de UTRICULE, 1726. Empr. comme terme
l’argent », encore usité au xvir1e s. dans de ‘botanique, pour désigner les petites
des ouvrages traitant de l’histoire romaine. cavités du tissu cellulaire des plantes, du
Lat. äsüra « intérêt de l'argent ». J usqu’au lat. uiriculus « petite outre ». Au sens de
xvies., l’action de demander des intérêts, « cavité du grain de pollen contenant la
désignée par le mot usure, était regardée matière fécondante », c’est une extension
comme immorale ; cette conception ayant de sens ou un empr. au lat. uiriculus (di-
disparu, on sentait, à partir du xvie s., le min. de ulerus) « grain de blé, bourgeon ».
besoin d’avoir deux termes et on distingua UVAL, 1874, t. de médecine, dér. du lat.
entre les intérêts à un taux normal (qui uv«.
V
VACANT, 1205. Empr. du lat. vacans, VACHER. Lat. pop. *vaccärius, dér. de
part. prés. de vacare « être vacant », propr. vacca.
« être vide » (de la famille de vacuus « vi-
de »). — Dér. : vacance, 1596 (en 1531 VACIET, nom de plante, xvi®. Se rat-
vacance de la foy dans un texte jurid. tache d’une façon obscure au lat. vacci-
« manque »). nium.
VACILLER, vers 1180 ; vacillation, 1512.
VACARME, 1288 (dans Renart le novel
Empr. du lat. vacillare, vacillatio.
(écrit à Lille par J. Gelée) : « Flament seut
(« il savait le flamand »), si cria : Was- VACUITÉ, 1314. Empr. du lat. vacuitas
carme »). Empr., par l'intermédiaire des (de vacuus « vide »).
parlers du Nord-Est, de l’interjection du
moyen néerl. wach arme, « hélas » (qui serait VADE-MECUM, 1465. Mots lat. signi-
en all. weh armer « hélas, pauvre (que je fiant « va avec moi », qui ont servi de
suis) ») ; a été longtemps senti comme un titre à différents manuels.
mot étranger, cf. chez G. Guiart, au x1v®S. : VADROUILLER, 1881. Mot vulgaire,
« En criant wacarme, wacarme. Qui vaut dér. de vadrouille « drôlesse », 1867, terme
autant com dire hélas », et chez E. Des- d’argot, tiré lui-même de vadrouille « tam-
champs : « Et encor me faisoit pis Wacarme pon de laine fixé au bout d’un bâton pour
et alarme et cris Des Flamens. » nettoyer le pont d’un bateau », 1678.
Celui-ci a été formé probabl. dans la région
VACATION, 1390, au sens moderne de
de Lyon, de drouilles « vieilles hardes »
« temps occupé à une affaire » (spéciale- et du préf. va-, assez courant dans la
ment d’un homme de loi), d'où « hono- région pour renforcer le sens d’un mot,
raires pour ce travail » (au xvi® et au surtout d’un adj. (comp. vadous « fade »,
xvI1e s. aussi « profession, métier »). Antér. vadru « très dru, de l’herbe ») et qui repré-
« vacances », XVI°, encore usité en parlant sente le lat. valde. L'expansion du mot
des tribunaux ; empr. en ce sens du lat. est due à la navigation fluviale. Du verbe
vacatio, dér. de vacare. L’autre sens est dû a été tiré un nouveau subst. vadrouille,
à vaquer au sens de « s'occuper de ». 1892, au sens d’ « action d’aller çà et là
VACCIN, 1801 ; vaccine « maladie conta- pour se livrer à la débauche »; aussi
gieuse, dite aussi cowpox, propre à la vadrouilleur, 1881.
vache », 1749, dans la Bibliothèque bri- VA-ET-VIENT, v. aller.
tannique où on lit : « C’est nous qui avons
hasardé le nom de pelile vérole des vaches VAGABOND, 1382, rare avant le xvi®s.
d’après l’angl. cow-pox. Le nom de p.v.d.v. Empr. du lat. de basse ép. vagabundus (de
est incommode. C’est ce qui nous engage vagari «aller çà et là »). — Dér. : vagabon-
à hasarder un autre nom. En lat., on ap- der, vers 1360 (Bersuire), vagabondage,
pellerait cette maladie variola vaccina. Ce 1767.
nom francisé serait la variole vaccine. Pour
abréger, nous l’appellerons à l'avenir la VAGIN, 1710. Tiré du lat. vagina « gai-
vaccine. » Le premier est tiré de vaccin, ne ». — Dér. : vaginal, 1727 ; invaginer,
adj. dans virus vaccin, 1807, empr. du lat. 1836, -ation, 1773.
vaccinus « de vache ». — Dér. : vacciner, VAGIR, 1555; rare avant le xix° s.
1801, d’où vaccination, 1801, vaccine « ac- Empr. du lat. vagire. — Dér. : vagissement,
tion de vacciner », 1800, revacciner, 1855.
1536, usuel depuis le xvr11es.
VACHE. Lat. vacca. — Dér. : vacherie,
VAGUE, subsi. fém., x11° (sous la forme
xue; peut aussi être rattaché à vacher; wage). De l’anc. scandinave vägr, id. (cf.
avachir (s’), xiv® (Christine de Pisan),
d’où avachissement, 1864 (Goncourt). On
all. Woge, moyen bas all. wâge).
a proposé de rattacher ce verbe à un fran- VAGUE, adj. « indéterminé », xvie.
cique *waikjan « amollir », cf. all. weich Empr. du lat. vagus, propr. «errant, vaga-
« mou » ; mais cette étymologie ne convient bond »; déjà empr. en ce sens au moyen
ni à la forme ni à la date à laquelle est âge, usité jusqu'à la fin du xves.
attesté le verbe français ; vachette, sorte
de cuir, 1836 ; attesté au sens de « petite VAGUE, adj. « libre, vide », dans {errains
vache » au xvi® s.; vacherin, 1907, empr. vagues, vers 1266. Au moyen âge se dit
des parlers de la Suisse Romande, où il aussi d’un poste (évêché, chancellerie, etc.)
est attesté dès le xve s,. vacant ; la langue hésite alors entre les
VAGUE 662

formes vaque et vague ; cette dernière forme VALENCE, orange, 1839. Tiré de Va-
a triomphé par confusion avec le mot pré- lence (ville d’Espagne), de la région de
cédent. Empr. du lat. vacuus « vide ». laquelle vient cette esp. d'orange.
VAGUEMESTRE, 1667 ( Vaguemestre de VALENCE, terme de chimie, fin xixe.
l’équipage du roi). Empr. de l’all. Wagen- Empr. du lat. de basse ép. valentia « va-
meister, littéral. « maître des équipages » ; leur » (de valere) pour exprimer une notion
aujourd’hui sens modifié. différente de valeur. On a fait d’après ce
VAGUER, vers 1230. Empr. du lat. mot un adj. polyvalent.
vagari.
VALENCIENNES, 1761. Tiré de Valen-
VAILLANCE, VAILLANT, v. valoir. ciennes, nom de la ville, où cette sorte de
VAIN. Lat. vänus, propr. « vide », sens dentelle a été d’abord fabriquée.
conservé dans vaine pâture ; vain a signifié
aussi au moyen âge « faible, abattu », sens VALENTIN, -TINE, 1838, en Normandie
conservé dans des patois. La locution en 1834, attesté pour la Lorraine dès le
vain, qui a son correspondant dans les XVIIE Ss., aussi au Canada. Tiré du nom
langues voisines : it. in vano, remonte propre saint Valentin ; dit ainsi parce que
probabl. à un lat. pop. in vanum, fait sur dans certaines provinces, le jour de la fête
le modèle du lat. class. in cassum, syno- de ce saint (14 février), les jeunes filles
nyme de frustra. choisissaient un prétendu ; Ménage signale
déjà un usage analogue dont il attribue
VAINCRE. D'abord veintre. Lat. vincere. l'institution à Mme Royale, fille de Hen-
— Dér. : vainqueur, xri°; invaincu, fin ri IV, qui l'aurait établie à l’occasion d’une
xve, imité du lat. invictus. collation qu’elle avait organisée dans une
VAIR. Nom anc. de la fourrure dite propriété près de Turin, le jour de la Saint-
pelit-gris. D'abord adj. signifiant « chan- Valentin, cf. ce que dit Ménage : « Cette
geant, variable », qui se disait spécialement institution ayant été faite dans cette mai-
des yeux dont l'iris est cerclé de blanc; son du Valentin (nom que M. R. avait
hors d’usage depuis le xve s. Lat. varius choisi ainsi en l’honneur de ce saint) et
« tacheté, varié, etc. ». It. vaio. — Dér. : le jour de la Saint-Valentin, on a appelé
vairon, vers 1170, comme adj.; substan- de-là en Piémont un galant, un Valentin ;
tiv. « sorte de goujon », 1579 (H. Es- et sa dame, une Valeniine. Cette façon de
tienne). parler passa ensuite à la cour de France. »
Mais un usage de ce genre se trouve attesté
VAISSEAU. Propr. « vase, récipient », déjà dans les poésies de Christine de Pisan.
sens disparu, d’où « navire (surtout de L’anglais connaît de même Valentine au
guerre) », XII, qui à fini par éliminer nef; sens de « soupirant choisi le jour de la
par suite a pris de nef, vers le xvrre s., le Saint-Valentin » (empr. au fr.), v. philip-
sens d’ « intérieur d'église »; sens anato- pine.
mique, xive. Lat. de basse ép. vascellum,
dimin. de vas « vase ». Devenu rare dans VALÉRIANE, xr1e, Empr. du lat. mé-
les parlers gallo-romans ; conservé au sens diéval valeriana, du nom de la province
de « ruche » en picard et dans la Suisse Valeria, partie de l’ancienne Pannonie,
romande, au sens de « cercueil » en wallon où cette plante était très répandue.
et en lorrain. Vaisseau de guerre se disait
au xXv® s. vaisseau d'armée. VALET, xnu°; signifie propr. « jeune
noble, écuyer au service d'un seigneur »,
VAISSELLE. Lat. pop. vascella, plur. d’où « jeune garçon », sens fréquent au
pris comme fém. sing. de sens collectif, de moyen âge ; le sens moderne s’est déve-
vascellum. Esp. vajilla. — Dér. : vaisselier, loppé dès le xre s. et a triomphé au
1568. XVI s., cf. ce que dit Pasquier : « Valet
VAL, masc. dès l’origine, sauf dans des anciennement s’adoptoit fort souvent à
noms de lieu, tels que Laval. Ne s’emploie titre d'honneur près des rois... et mainte-
plus que comme terme de géographie et nant le mot de valet se donne dans nos
dans la locution par monts et par vaux, familles à ceux qui entre nos serviteurs
Xv°. Lat. vallis, fém. It. valle, esp. valle. sont de moindre condition. » On a dit
Le masc. du fr., qui se trouve aussi en d’abord vaslet, d'où une forme varlet, con-
a. pr. et dans les langues de la péninsule servé dans la langue littéraire au sens pre-
ibérique, est dû probabl. à mont, avec mier du mot. D’un type supposé *vassel-
lequel val est souvent associé. — Dér. et lillus, double diminutif du mot celtique
Comp. : vallée, vers 1080 (Roland) ; aval, vasso-, qui est également à la base de vassal.
contraire d’amoni, id. ; une forme ancienne — Dér. : valetaille, 1585.
avau s’est conservée dans l'expression à VALÉTUDINAIRE, 1346, rare avant le
vau-l'eau, 1552 (Rab.) ; avaler, propr. «faire XVIIS S. Empr. du lat. valetudinarius (de
descendre », 1080; sens hors d'usage sauf valeludo au sens de « mauvais état de
dans des emplois techn., le sens moderne santé »).
apparaît dès le xrr° s., d’où avaloire, xrrr°,
avaleur, 1493, ravaler, xr1° (Chrétien), VALEUR. Lat. valürem, acc. de valor,
propr. « faire descendre », d’où divers sens masc. It. valore, esp. valor. — Dér. et
techn. ; le sens moral est déjà du xxrre s. ; Comp. : valeureux, vers 1400; non-valeur,
d’où ravalement, 1460, développement de 1451. D’après la forme du mot lat. : valo-
sens parallèle à celui du verbe ; dévaler, risation, 1907 ; revaloriser, 1925, -isation,
XIIe, 1923 ; dévaloriser, 1932, -isation, id.
663 VANTER

VALIDE, 1528; valider, 1411 ; validité, lé Midi. — Dér. : 1° de van : vanneau,


1508. Empr. des mots lat. validus « bien xitIé, dit ainsi par comparaison du bruit
portant, fort », validare, validatio (id.), en d’un van avec celui qu’un vanneau fait
vue de sens spéciaux. — Dér. de valider : avec ses ailes (explication donnée par Buf-
validation, 1598 ; revalider, 1465. fon), ou par comparaison de la forme des
ailes avec celle d’un van; en tout cas,
VALISE, 1559. Empr. de lit. valigia, c'est d’après cette dernière comparaison
d’origine obscure ; on a valisia en lat. mé- que la langue de la fauconnerie a fait le
diéval dès le xr11° 5. ; l'arabe waliha « sac même dér. vanneau, 1270, au sens de
de blé » conviendrait pour le sens, mais il « plume d’essor des oiseaux », aussi a. pr.
est peut-être empr. lui-même ; l’all. Fel- van au même sens (d’où it. vanni « plumes
leisen, d’abord velis, est une altération du des ailes », usité seulement en poésie;
fr. valise. — Dér. : dévaliser, 1555, dévali- vanello, fanello « vanneau » est également
seur, 1764 (Voltaire). empr.); on a aussi proposé un gaulois
VALLON, 1529. Empr. de l’it. vallone *vannélo, reconstitué d’après irlandais fan-
« grande vallée », augmentatif de valle, nall « hirondelle », mais l’hirondelle et le
dès 1564 formé en fr. même comme dimin. vanneau sont trop différents pour qu’on
de val d’après la valeur du suff. -on en fr. puisse accepter cette étymologie. Vannier,
— Dér. : vallonner, 1867 ; vallonnement, 1226 ; vannerie, 1642 (déjà 1340) ; vannette,
1869. 1680 ; 2° de vanner : vannage, 1293; van-
neur, xr11° (EË. Boileau); vannure, 1372.
VALOIR. Lat. valère, propr. « être bien
portant, être fort », d'où « valoir ». It. va- VAN, véhicule pour le transport des
lere, esp. valer. — Dér. et Comp. : vaillant, chevaux de course, 1904. Empr. de l’angl.
xI° (Alexis), anc. part., propr. « valant », van, « tapissière, fourgon », d’où le sens
encore usité dans les locutions ne pas avoir spécial de van, abréviation de caravan qui
un sou vaillant, etc., d'où vaillance, xr1°, s'emploie en un sens analogue, en parlant
d’abord « valeur », sens qui se trouve encore de ménageries, etc., qui forment des con-
au xvII° s., sens moderne dès les premiers vois pour le transport du matériel, etc.
textes ; valable, xr11°; value, vers 1180, VANDALE, 1732 (Voltaire). Tiré de Van-
hors d'usage depuis le xvi® s., d’où éva- dale, nom d’un péuple germ., qui ravagea
luer, 1366 (on a dit aussi avaluer du xrrr® la Gaule, l'Espagne et le Nord de l'Afrique
au xvI® s.), d'où évaluable, 1790, évalua- au début du ve s.; de là l'emploi fig. de
tion, xive (Oresme), plus-value, 1457, et ce nom. — Dér. : vandalisme, vers 1793,
sur ce modèle, moins-value, 1765, déva- mot créé par l’abbé Grégoire pour protester
luation, 1929, dévaluer, 1948; reva- contre la destruction des bibliothèques,
loir, vers 1180 ; vaurien, vers 1565. monuments, etc., qui rappelaient la royau-
VALSE, 1800. Empr. de l’all. Walzer, té, cf. ce qu’il dit : « Je créai le mot pour
lequel est attesté dp. 1781, le verbe walzen tuer la chose ».
dp. 1760. — Dér. : valser, 1798, valseur, VANDOISE, xr11e. D'un gaulois *vinde-
1801. sia, dér. du celtique vindos « blanc ». On
VALVE, 1611; valvule, xvi® (Paré). trouve au x111° s. une forme lat. vendesia,
Empr. des mots du lat. moderne valva, cf. ablette, all. Weissfisch, etc.
valvula, tirés du lat. anc. valva « battant VANESSE, espèce de papillon, 1836.
de porte », valvula « gousse », en vue de _ Étymologie inconnue.
sens spéciaux. — Dér. : bivalve, 1718.
VANILLE, 1664. Empr. de l’esp. vainilla,
VAMP, femme fatale, vers 1930. Empr. propr. « petite gaine », dimin. de vaina
de l’anglo-américain vamp, d’abord terme « gaine »; ce mot esp. a servi à désigner
de cinéma, abrégé de vampire. la gousse du vanillier, plante du Mexique,
VAMPIRE, 1746; pris par Voltaire en dont le parfum et la saveur sont particu-
1770 en un sens figuré. Empr. de l’all. lièrement appréciés. — Dér. : vanillé, 1872 ;
Vampir, qui est lui-même la forme serbe, vanillier, 1764.
cf. oupir du russe, du polonais et du tchè- VANITÉ, vers 1120. Empr. du lat.vanilas,
que, d’où les formes oupire, upire dans dér. de vanus. — Dér. : vaniteux, 1743.
Trévoux ; l’histoire de ce mot et des no-
tions qu'il exprime est complexe; on a VANNE. Écrit aussi venne au moyen âge.
beaucoup parlé du vampire au xvrtie s. et Lat. mérovingien venna, peut-être d’origine
le mot se retrouve dans de nombreuses celtique, qui désigne un barrage pratiqué
langues tatares, finnoises, etc. ; c’est Buf- dans un cours d’eau ou un étang pour
fon qui a appliqué le mot à la roussette prendre le poisson.
qu'il appelle vespertilio vampyrus où vam-
VANNEAU, v. van.
pire. — Dér. : vampirisme, 1771.
VANTAIL, v. vent.
VAN, VANNER. Lat. vannus, *vannäre
(au lieu du lat. class. vannere). Vanner a VANTER. Lat. de basse ép. vanilare
reçu dans le fr. pop. le sens de « fatiguer (attesté indirectement par le part. vani-
fortement » (depuis 1744) par allusion tans « vaniteux »), qui a dû signifier « être
plaisante aux secousses qu’on imprime au vain »; au moyen âge on dit surtout se
van. Vanner est refait en venier d'après vanter ; l'emploi trans. ne paraît pas être
vent dans de nombreux parlers gallo-ro- antérieur au xvi® s. — Dér. : vantard, 1592,
mans, d'ou un dér. du type ventadou dans vantardise, 1850 ; vanterie, vers 1235.
VAPEUR 664

VAPEUR, x1rie (J. de Meung); vapo- vérolé, 1520. — Dér. : varicelle, 1810,
reux, xive. Empr. du lat. vapor, vaporo- avec une formation anormale, on a dit
sus ; vapeur a été fait fém., malgré le genre aussi variolelte, id.; varioleux, 1766;
du mot lat., d’après les autres subst. en variolique, 1764.
-eur, mais, quand vapeur est abrégé de
bateau à vapeur (calque de l’angl. steam- VARIQUEUX, v. varice.
boat, 1803), depuis 1842, il est masc. — VARLET, v. valet.
Dér. d’après la forme du mot lat. : vapo-
riser, 1771, -isation, 1771, -isateur, 1829. VARLOPE, fin xve (écrit vrelope ; vuar-
V. évaporer. loppe, en 1564). Empr., par l'intermédiaire
des parlers du Nord-Est, du néerl. voorloo-
VAQUER, xiri au sens d’ « être va- per, littéral. « qui court devant ». — Dér. :
cant »; au sens de « s'occuper de quelque varloper, 1546 (Rab., sous la forme d’im-
chose », vers 1300. Empr. du lat. vacare, parî. vreloppoit).
propr. « être vide », d’où sont sortis les
deux sens que le français a empr., no- VASCULAIRE, 1721; vasculeux, 1734,
tamment dans la langue jurid. Dér. sav. du lat. vasculum « petit vase »
pour servir d’adj. à vaisseau.
VARANGUE, terme de marine, 1382
VASE, masc., 1539. Empr. du lat. vas
(écrit varengue). Empr. d’une langue germ.
« vase ». V. évaser, extravaser, transvaser.
mal déterminée, cf. anc. angl. wrang(a),
moyen bas all. wrange, néerl. vrang. L’esp. VASE, jém., 1484, d’abord voyze, voyse
varenga vient du fr. en 1396 (texte de Dieppe). Empr. du moyen
VARAPPER, 1899 ; dér. du nom d’un néerl. wase (de la famille de mots d’où
couloir rocheux du Salève, près de Genève. vient gazon). — Dér. : vaseux, vers 1560 ;
— Dér. : varappe, vers 1995.
envaser, fin xvi*, envasement, 1792.
VAREC, VARECH, 1125 (écrit warec), VASELINE. Terme créé aux États-Unis
au sens de « goémon », signifie « épave » en 1877 par R. Chesebrough au moyen de
du xvi® au xvirIe s., sauf en normand, où vas- (de l’all. Wasser), el- (du grec elaion
le mot est attesté au sens de « goémon » « huile d’olive ») et du suff. -ine, d’abord
dès le commencement ; a pris alors le sens pour désigner une sorte de gelée de pétrole,
moderne qui a éliminé le sens propre. Du puis des préparations contenant ce produit.
norois vagrek « épave » (comp. aussi l’anc. VASISTAS, 1798 (écrit vagislas, dans
angl. wræc (d’où angl. wreck), cf. aussi all. Faublas, en 1786, avec une note explica-
Wrack, tous au sens d’ « épave »), v. vrac. tive). Empr. de l’all. was ist das ? « Qu'y
VARENNE, v. garenne. a-t-il là ? », donné par plaisanterie à ce
genre d'ouverture par où on peut s’adres-
VAREUSE, 1793. D'abord « chemise en ser à quelqu'un, etc.
grosse toile que mettent les matelots pour
préserver leurs vêtements quand ils sont VASQUE, 1826. Empr. de lit. vasca,
occupés à des travaux de gréement, etc. », qui est une adaptation toscane de vaschia,
attesté partic. en Normandie. Probabl. vasca des dialectes de l'Italie méridionale,
dér. de varer, forme normande de garer signifiant «cuve du pressoir», dulat. vascula,
«garer, protéger », donc à peu près *blouse plur. collectif de vasculum, v. vasculaire.
vareuse « blouse qui protège les habits ». VASSAL, vers 1080 (Roland). Terme de
VARICE, xiv°, variqueux, 1541. Empr. féodalité, en lat. mérovingien vassallus,
du lat. varix, -icis, varicosus. dér. de vassus « serviteur » (Loi des Ala-
mans, etc.), mot d’origine celt., cf. gallois
VARICELLE, v. variole.
gwas « jeune homme », irl. foss « serviteur ».
VARICOCÈLE, 1716. Comp. hybride, Empr. par les langues voisines : it. vas-
fait du lat. varix (-icis) et du grec kélé sallo, etc. Vavasseur, vers 1160, autre terme
« tumeur », fait sur le modèle de cirsocèle, de féodalité, est une francisation du lat.mé-
terme médical de même sens, 1694 (empr. rovingien vassus vassorum. — Dér. : vassa-
du grec kirsokélé, de kirsos « varice »), lité, fin xvrie (Saint-Simon); vasselage,
qu’il a remplacé comme plus clair. vers 1080 (Roland).
VARIER, 1155; variable, fin xure; VASTE, 1495. Empr. du lat. vastus.
variété, vers 1170 ; variation, 1314. Empr.
des mots lat. variare (de varius), varia- VATICINER, 1481 ; rare avant le milieu
bilis, varielas, varialio. L'’a. fr. vairié, du xix° s. Empr. du lat. vaticinari (de
vairé, etc., fréquent comme terme techn. vaies « devin, prophète »).
du blason et de l’orfèvrerie, représente VA-TOUT, v. aller.
le lat. variatus (de variare) plutôt que
d’être dér. de vair. — Dér. de variable : VAUDEVILLE, 1507 (Plusieurs chan-
variabilité, xv® ; invariable, 1370 (Oresme), sons, tant de musique que de vaul de ville,
invariabilité, 1616. N. de La Chesnaie); a signifié d’abord
« chanson de circonstance », puis « pièce
VARIOLE, xive. Empr. du lat. du vies. de théâtre de circonstance » au xvrrre s.,
variola, dér. de varius « varié ». Francisé et « pièce de théâtre entremélée de cou-
en vérole, 1190 (écrit vairole ; cf. vereule plets » au x1xe s. Altération de vaudevire
en 1425), qui a d’abord eu le sens de « va- (qu’on trouve au xve 5.), tiré de Vau de
riole », conservé dans petite vérole, aussi Vire, nom d’une région du Calvados, dont
it. vairuole (plur.), esp. viruela ; désigne les chansons eurent du succès au xve s. —
en outre la syphilis depuis le xvie s., d’où Dér. : vaudevilliste, 1735.
665 VÉNAL

VAU-L'EAU (à), v. val. velar. Le sens de « jour qui précède un jour


VAURIEN, v. valoir.
déterminé » que veille présente de bonne
heure est propre au gallo-roman; il vient
VAUTOUR, xvi®. Forme dialectale, du lat. médiéval de l’Église vigilia. —
probabl. du sud-ouest, qui correspond à Dér. : veillée, 1316 ; veilleur, 1198, depuis
l’anc. franc. vaulour, voltour, vers 1100, du le x1ve s. on employait le fém. veilleresse
lat. vullur ; on a aussi au moyen âge voul- au sens de « garde-malade », d’où veilleuse,
loir, du lat. vulturius. 1798. — Comp. : avant-veille, XII1° ; sur-
veille, vers 1200, rare aujourd'hui; sur-
VAUTRER. Forme dialectale, qui a veiller, 1586; surveillant, 1535, surveil-
triomphé au xvi® s., rare auparavant, de lance, 1633.
voutrer ; le même mot que l'it. vollo-
lare « rouler », voliolarsi « se vautrer »; VEINE. Lat. véna. It. esp. vena. Les sens
représente un lat. pop. *volutulare, dér. de de « filon » et de « veine poétique » existent
volutus, part. passé de volvere, syncopé par déjà en latin. Celui de « chance », attesté
la suite en *voltulare. Au moyen âge des dès le xive s., dér. du sens fig. du lat.;
formes comme vwviuirer, voitrer, qui sont être, se sentir en veine, où veine désigne
encore répandues dans les parlers, s’expli- propr. la veine poétique, est attesté dès
quent par une dissimilation des deux le moyen âge; irouver une bonne veine
voyelles labiales de *voliulare, qui a abouti « trouver un bon filon », n'apparaît pas
à une forme *veltolare. avant le xvri® s.; d’où veinard, 1860,
déveine, 1854. — Dér. : veiné, 1611, veiner,
VAUVERT, v. vert. 1812 ; veineux, 1545 ; venelle, x11°, « ruel-
VAVASSEUR, v. vassal.
le », littéral. « petite veine ».
VEINULE, xvire ; écrit d’abord venule.
VEAU. Lat. vilellus, moins usuel que
vitulus. It. vitello. — Dér. d’après l'anc. Empr. du lat. venula, dim. de vena.
forme veel : vêler, 1328 ; vélin, x1r1e. VÉLER, VÉLIN, v. veau.
VECTEUR, 1752. Empr. du lat. vector VÉLITE, xive (Bersuire), terme d’his-
« conducteur » (de vehere « conduire »). toire romaine. Empr. du lat. veles, velitis
VEDETTE, 1586. Empr. de l’it. vedetia « soldat armé à la légère » ; a servi à dési-
« lieu élevé où l’on place une sentinelle »; gner un corps de chasseurs à pied sous
par suite, s’est dit d’une guérite et surtout Napoléon Ie.
d’un cavalier posé en sentinelle, d’où les VELLÉITÉ, vers 1600 (François de Sa-
expressions meitre, être en vedeite, prises au les). Empr. du lat. médiéval velleilas,
xixe 8. (1855) dans un sens plus étendu; formé sur le subj. impf. vellem «je voudrais »
le sens de « sorte de petit bateau d’obser- (comp. dans saint Thomas : falis volunias
vation » est récent et propre au fr. Lit. magis est dicenda velleitas quam absoluia
vedetta est une altération, d’après vedere voluntas ; quia scilicet homo hoc vellet, si
« voir », de veletta, encore usité aujourd’hui, aliud non obsisierel). — Dér. : velléitaire,
probabl. diminutif de vela « voile », qui fin xiIxe.
désigne une petite voile au haut du grand VÉLOCE, 1607; vélocité, vers 1270.
mât du bâtiment. Empr. du lat. velox, velocitas.
VÉGÉTER, 1375 ; végétal, xvi® (Paré), VÉLOCIPÈDE, 1804. Comp. avec les
végétalisme, 1836, végétalien, 1914 ; végé- . mots lat. velox, v. le préc., et pes, pedis
tatif, xi1e; végétation, 1525. Empr. du « pied », sur le modèle de bipède, etc.;
lat. de basse ép. vegetare « croître » (en lat. plus usuel sous la forme abrégée vélo. —
class. « vivifier », de vegelus « vigoureux »), Dér. vélocipédiste, 1868 ; vélomoteur,
et des dér. médiévaux vegetalis, vegelativus, 1949, comp. de la forme vélo avec moteur.
vegetatio (en lat. class. ne signifie que
« excitation, mouvement »). Végéter a pris VÉLODROME, v. drome-.
au xvinie 8. le sens nouveau de « mener VELOURS, xvie. Altération de velous,
une vie inerte, comparable à celle des végé- x11e (attesté alors par le dér. veloset), par
taux », sens qui a influencé végétatif. — adjonction d’une r, qui s’est produite alors
Dér. de végétal, avec suppression de la ter- que la prononciation de la langue était
minaison -al : végétarien (d’après l’angl. hésitante dans les mots à r finale. Velous
vegetarian), 1875, d’où -arianisme, 1877. est empr. de l’a. pr. velos « velours », lat.
VÉHÉMENT, xr°; véhémence, 1488. villôsus « velu », pris substantiv. — Dér. :
Empr. du lat. vehemens, vehemenlia. velouté, vers 1450 ; velluté, attesté en 1429,
est fait sur le prov. velut.
VÉHICULE, xvie (Paré), comme terme VELU. Lat. de basse ép. villülus (dans
de physiologie. Empr. du lat. vehiculum
« moyen de transport » (de vehere « trans- des gloses), dér. de villus « poil ». It. velluto
porter »), d’où spécial. « voiture », sens
(forme non florentine), esp. velludo, a. pr.
velut, tous trois aussi au sens de « velours ».
repris vers 1816; auparavant véhicule
n’est employé que dans des sens techn. VENAISON. Lat. vénätionem, acc. de vé-
ou issus de ces sens. — Dér. : véhiculer, nätiô, propr. « chasse », d'où « gibier ». A. pr.
1856. venazon, port. veaçäo.
VEILLE, VEILLER. Lat. vigilia, vigi- VÉNAL, vers 1200 ; venalité, 1573. Empr.
lare. It. vegghia, vegghiare (moins usités des mots lat. venalis (de venum « vente »),
aujourd’hui que les formes empr. veglia, venalitas ; ont pris rapidement un sens
vegliare), esp. vela (refait sur le verbe), défavorable.
VENDANGE 666

VENDANGE, VENDANGER, VENDAN- VENGER. Lat. vindicäre « réclamer en


GEUR. Lat. vindèmia, vindémiare, vinde- justice, revendiquer », d’où spécial. « cher-
miätor. It. vendemmia, -are, -atore, esp. cher à punir, venger », se vindicare « se
vendimia, -ar, -ador. venger. » It. vendicare, esp. vengar.— Dér. :
VENDÉMIAIRE, 1793. Mot créé par vengeance, vers 1080 (Roland) ; vengeur,
11° ; revancher, x111° (J. de Meung), pour
Fabre d’Églantine avec le lat. vindemia revencher, dér. de vencher, autre forme de
« vendange ».
venger, a signifié d’abord « venger » jus-
VENDETTA, 1803; vulgarisé surtout qu’au xv° s.; depuis ne s'emploie qu’au
par Colomba de Mérimée, qui toutefois a pronominal ; d’où revanche, vers 1500.
employé une forme plus francisée vendette.
Empr. de l'it. vendetta (lat. vindicta, v. VÉNIEL, 1380 (l’adv. véniellement en
1350) ; d’abord vénial, xir1e (J. de Meung).
vindicte).
Empr. du lat. eccl. venialis (de venia
VENDRE, Lat. vendere. — Dér. : ven- « pardon »).
dable, 1249, invendable, 1764 (Voltaire);
vendeur, vers 1200 ; revendre, 1190, reven- VENIN. D'abord venim, d'où venin par
dage, 1396, revendeur, 1190; invendu,
substitution de suff.; parfois velin au
1706 ; vente, abstrait (devenu concret com- moyen âge et jusqu'au xvire s. Lat. pop.
me terme de sylviculture), fém. pris subs- *venimen, réfection, par substitution de
tantiv. du part. passé venditus, disparu suff. (cf. regain), du lat. class. venenum,
avant les premiers textes, cf. a. pr. esp. d’où it. veleno, a. pr. veren. — Dér. : veni-
venta, it. vendita; d’où mévente,
meux, x11°, signifiait aussi « vénéneux »,
1675.
encore chez Voltaire dans ce sens ; enve-
VENDREDI. Au moyen âge vendresdi nimer, id.
et dans les dialectes, notamment dans
ceux du Nord et de la Bourgogne, di- VENIR. Lat. ventre. — Dér. et Comp. :
venres, divendres. Lat. Veneris dies « jour venue, x1I°; avenir, subsi., 1486 ; issu de
de Vénus ». Vendredi est le type des par- locutions telles que le temps à venir, ordi-
lers septentrionaux, (di)venre(s) celui des nairement écrit iemps advenir ou temps
parlers méridionaux. Conservé ailleurs sous avenir, depuis la fin du xive s. : bienvenu,
les deux types, sauf en portugais : it. ve- XIII, d’où bienvenue, subst., vers 1220,
nerdi, esp. viernes. bienvenir, 1863, seulement dans se faire
bienvenir, antérieurement déjà au xvre s. ;
VENELLE, v. veine. survenir, xII®; tout-venant, « houille
VÉNÉNEUX, non triée », 1837. V. contrevenir, convenir,
1496. Empr. du lat. de devenir, intervenir, parvenir, provenir ;
basse ép. venenosus (de venenum).
revenir.
VENER, v. veneur.
VENT, Lat. venius. It. vento, esp. viento.
VÉNÉRER, 1413 ; vénérable, x1r1e ; vé- — Dér. et Comp. : ventail, 1144 ; désignait
nération, x1rI°, Rares avant le xvrre s. alors une ouverture dans le heaume pour
Empr. du lat. venerari, venerabilis, vene- permettre la respiration: écrit vantail,
ratio. 1762, au sens de « battant d’une porte ou
d’une fenêtre » ; au moyen âge on a aussi
VÉNÉRIEN, 1464 (au sens médical veniaille avec des sens variés ; venter, xII° ;
depuis d’Aubigné). Dér. sav. du lat. vene- éventer, id., évent, 1521, éventail, 1416 ;
rius, adj. de Venus, Veneris « Vénus éventaire, 1690, au lieu d’éventoire, x1Ive,
(déesse de l'amour) ». par substitution de suff. ; inventaire, forme
VÉNERIE, v. veneur. altérée par étymologie populaire, que J.-J,
Rousseau a employée, est postérieur à ce
VENETTE, dans avoir la venelle, 1798. changement et par conséquent n’y est pour
Mot d’origine normande, attesté dans ce rien; éventoir, 1384; contrevent, xve. V.
patois dès le xvrie s. (aussi chez Flaubert), paravent.
passé par la suite en fr. pop.: dér. de
lPanc. verbe vesner « vesser » (d’où aussi VENTEUX. Lat. venlosus. It. esp. ven-
vesne au XVI® Ss.), lat. pop. “*vissinare, loso.
dér. de wissire.
VENTILATEUR, 1744. Empr. de l’angl.
VENEUR. Lat. vénätorem, acc. de véna- venlilator, fait par le physicien Hales avec
tor. Depuis le xvres. veneur est hors d'usage le lat. ventilator « vanneur ».
au sens général de « chasseur »; ne survit
que dans des emplois spéciaux, notam- VENTILER « examiner », 1367 ; ventila-
ment dans le titre historique Le grand tion, 1382 (comme terme de droit civil ;
veneur du roi. De même le verbe corres- adopté par la langue de l’économie poli-
pondant vener, lat. vénari, est sorti de la tique au cours du xvrrre s.). Termes jurid.
langue avant le xvie s. et ne subsiste que Empr. du lat. jurid. venlilare « examiner
dans des emplois techn. peu connus : vener une question », propr. « agiter à l’air » (de
une bêle (bœuf, mouton, etc.) «la faire cou- ventus « vent ») et du dér. ventilatio « van-
rir pour que sa chair soit plus tendre » ; nage », mais non attesté au sens jurid., pris
d’où vénerie, 1267 ; v. aussi venaison. V. Pour servir de subst. à ventiler.
chasser. En fr. la spécialisation de veneur, VENTILER « aérer », 1820 (Lamartine) ;
vénerie en en faisant des mots aristocra- ventilation,
tiques et techn., les a maintenus plus long- 1819, une première fois au
XVi®s. (Paré), au sens d’ « action d’aérer ».
temps qu'ailleurs. Empr. du lat. ventilare, -atio.
667 VERGLAS

VENTÔSE, 1793. Créé par Fabre d’É- VERBE, terme de grammaire, xtrre.
glantine au moyen du lat. ventosus (v. ven- Empr. du lat. des grammairiens verbum,
teux) ; cf. nivôse, pluviôse. qui a servi à traduire le grec rhéma « ver-
VENTOUSE, 1256. Empr. du lat. mé- be », propr. « parole », opposé à onoma
dical de basse ép. ventosa, abréviation de «nom ».

ventosa cucurbita (Juvénal, XIV, 57), lit- VERBE, terme de théologie, xrre. Empr.
téral. « courge pleine de vent » ; on disait du lat. eccl. verbum, traduction du grec
aussi medicinalis cucurbila et aussi cucur- ecclésiastique logos, cf. Jean, I, 14.
bitula. Ventouser a été dér. du mot lat.
dès le xrre s. VERBEUX, 1530 ; une première fois vers
1200 ; verbosité, 1510. Empr. des mots
VENTRE. Lat. venier. It. ventre, esp. lat. verbosus, verbosilas (créé à basse ép.).
vientre. — Dér. et Comp. : ventrée, vers
1200 ; ventrière, x11°, sous-ventrière, 1370 ; VERBIAGE, 1674. Dér. d’un verbe
ventru, 1236 ; éventrer, 1226, éventration, attesté aux xv° et xvi® s. au sens de
1743, éventreur, fin x1X°, répandu d’après « gazouiller (des oiseaux) ». Celui-ci
le surnom d’un assassin célèbre Jack l’É- remonte à un anc. pic. verbloier «chanter en
ventreur ; bas-ventre, 1636. modulant » (aussi gu-, w-), qui est dér. de
werbler, même sens. Les variantes de la
VENTRICULE, 1503. Empr. du lat. mé- consonne initiale dénotent une origine ger-
dical ventriculus- (cordis), propr. « petit manique. Cela nous fait remonter à l’anc.
ventre ». francique “*werbilan « tourbillonner »,
VENTRILOQUE, 1552 (Rab.). Empr. du qui correspond à l’all. wirbeln.
lat. de basse ép. ventriloquus « qui parle du
VERDICT, 1669, dans un ouvrage sur
ventre ». — Dér. : -quie, 1823.
l'Angleterre ; est devenu usuel en fr. de-
VENTRIPOTENT, 1552 (Rab. Leur puis l'institution du jury, signalé cepen-
dieu Ventripotent, IV, 60). Mot plaisam- dant en 1833 comme « manquant à notre
ment forgé par Rabelais avec le lat. venter langue judiciaire », v. jury ; parfois lati-
« ventre » et polens « puissant » sur le mo- nisé en veredictum, 1787. Empr. de l’angl.
dèle d’omnipolent ; il s'agit de Gaster, qui verdict, empr. lui-même de l’anc. anglo-
est appelé au chapitre 58 du même livre normand verdit, verdict, terme de coutume,
leur Dieu omnipolens. en lat. médiéval d'Angleterre veredictum
VÉNUSTÉ, vers 1500. Empr. du lat. (en France signifiait « certificat »).
venusias. VERDUNISATION. Procédé d’assainis-
VENVOLE (à la), v. voler. sement de l’eau inventé par M. Bunau-
Varilla, qui a tiré ce nom de Verdun, parce
VÉPRES, vers 1210. Empr. du lat. eccl. qu’il imagina ce procédé en 1916 pendant
du moyen âge vesperæ, d’abord vespera à la bataille de Verdun pour donner aux
basse ép., tiré du lat. class. vespera « soir » armées françaises une eau saine qui n’eût
et fait plur. sur le modèle de vigiliæ, v. pas le goût de chlore que donne la javelli-
vigile (ainsi nommé parce que ces prières sation.
se disaient le soir) ; vesperæ a été francisé
d’après vespre, vépre «soir », qui a été usuel VERGE. Lat. virga. V. vergue. — Dér.
en à. fr. jusqu’au xvi1e s., et qui est encore et Comp. : vergée, anc. mesure, 1209 ; ver-
de quelque usage dans les patois, lat. class. ger « jauger avec la verge », XIV® ; vergé,
vesper, d’où aussi a. pr. vespre, it. vespero ; XIIe, au sens de « rayé » en parlant d’étof-
l’a. fr. a formé en outre un dér. vesprée, fes, d’armes, etc. ; peut remonter au lat.
usuel jusqu’au xvi* s. et encore usité dans virgälus, qui se disait également d’étoffes ;
les parlers. vergette, x11°, vergeté, « rayé », 1678-9 (La
Fontaine), appliqué récemment à une sorte
VER. Lat. vermis. It. verme ; toutefois de papier, vergeter, xvirie, « fouetter »,
l'esp. verme, au lieu de *vierme, paraît vergeture, 1767 ; vergeure, 1680 ; enverger,
repris du lat. ; c’est un terme médical, le verbe techn., 1721 : sous-verge, 1780, « che-
mot pop. est lombriz, du lat. lumbricus. — val non monté, placé à côté du conducteur
Dér. et Comp. : véreux, 1372; vermine, qui tient le fouet ».
x11e ; ver-Coquin, 1538 (Rab., sous la forme
verd coquin) ; ver-luisant, 1599. VERGER, subst. Lat. viridiärium « lieu
planté d’arbres » (de viridis « vert »). A. pr.
VÉRACITÉ, 1644 (Descartes). Dér. sav. vergier, Cat. verger.
du lat. verax, veracis, « véridique ».
VERGER, verbe, v. verge.
VÉRANDA, 1758. Empr. du mot anglo-
indien veranda, qui vient lui-même du VERGLAS, fin x11° (sous la forme verre-
port. varanda, dér. de vara « verge, perche ». glaz, d’où verglas, xv°). Comp. de glas,
autre forme de glace, et de verre, au sens
VERBAL, 1337. Empr. du lat. de basse de « glace ressemblant à du verre », dit
ép. verbalis (de verbum « parole »). — Dér. : ainsi parce que le verglas est lisse, trans-
verbaliser, xvi®, terme jurid., qui a été parent et cassant comme du verre ; de là
réservé depuis le xvr1e s. au sens de « dres- en a. fr. un verbe verreglacier, verglacer,
ser un procès-verbal ». usité jusqu’au xixe s. et encore en usage
VERBE « parole »; ne se dit plus que dans beaucoup de patois (normand, etc.).
dans la locution avoir le verbe haut, vers On a la même formation dans la région de
1700 (Saint-Simon). Verbe, qui a été de Parme : vederdjais. I1 n’est du reste pas
quelque usage au moyen âge, est empr. impossible que le subst. soit un dér. du
du lat. verbum « parole ». verbe, et que celui-ci soit formé directe-
VERGLAS 668

ment sur un rapprochement des deux VERMICULÉ, 1380. Terme d'’architec-


subst. verre et glace au sens de « geler en ture, empr. du lat. des architectes vermi-
devenant comme du verre ». culatus « marqué comme de piqures de
vers », propr. « vermoulu » (de vermiculus),
VERGNE, VERNE, v. aune.
VERMIFORME, 1532 (Rab.). Comp.
VERGOGNE. Ne s'emploie plus que dans avec le lat. vermis « ver », sur le modèle de
la locution sans vergogne ; usuel jusqu’au mulliforme, etc.
XVII $s. Lat. verëcundia « crainte respec-
tueuse, réserve, pudeur », d’où le sens de VERMIFUGE, 1738. Comp. avec le lat.
« honte » en roman. It. vergogna, esp. ver- vermis « ver », sur le modèle de fébrifuge.
güenza. — Dér. : dévergondé, xrre°; formé VERMILLON, v. vermeil.
avec vergonde, autre forme de vergogne,
VERMINE, v. ver.
usitée au moyen âge, refaite sur le mot
lat. ; d’où dévergonder (se), 1530. VERMISSEAU. Lat. pop. *vermiscellus,
dér. du lat. class. vermiculus.
VERGUE, 1369. Forme dialectale, norm.
ou picarde, de verge. — Dér. : envergure, VERMOULU, v. moudre.
1678, propr. terme de marine, par l’inter- VERMOUT, 1798. Empr. de l’all. Wer-
médiaire d'un verbe enverguer, 1690, « at- mut « absinthe » (de la famille de l’angl.
tacher une voile à une vergue »; dit des wormwood).
oiseaux depuis 1771, puis de l'esprit.
VERNAL, 1634; une première fois au
VÉRIDIQUE, 1456. Empr. du lat. veri- XII S. Empr. du lat. vernalis (de ver
dicus, littéral. « qui dit la vérité » (de verus « printemps »).
« Vrai »). VERNIER, 1797. Du nom de l'inventeur,
Pierre Vernier (1580-1637).
VÉRIFIER, 1358. Empr. du lat. de
basse ép. verificare. — Dér. : vérificateur, VERNIS, xr1° (écrit verniz). Empr., peut-
1631 ; vérificatif, 1608 ; vérification, 1368; être par l'intermédiaire de l’it. vernice, du
vérifiable, 1877 (une première fois au lat. médiéval veronix, veronice « sorte de
XIV® S. sous la forme vere/fiable), d’où in-, résine odoriférante, sandaraque », empr.
1874. lui-même du bas grec vereniké (de Bere-
niké, ville de la Cyrénaïque) ; a servi dès
VÉRIN, terme techn., « sorte de levier l’époque carolingienne à désigner une sorte
formé d’une vis et de deux écrous », 1389. de vernis. Mot devenu européen : all. Fir-
Paraît venir de la région picarde où il niss, angl. varnish, etc. — Dér. : vernir,
désigne encore une vis en fer ou en bois. 1294 ; vernisser, x11°, d’où vernissage, 1837,
Masc. formé sur le lat. veruina « broche » -sseur, 1746, -ssure, xrre.
(v. verrou), qui vit encore dans l’it. verrina
« machine à forer », verricello « vérin » VÉROLE, v. variole.
(ces mots doivent leur -rr- probabl. à verres VÉRONAL, produit
« verrat », grâce à une image sexuelle). pharmaceutique,
1903. Comp. de Vérone, nom d’une ville
VÉRITÉ, vers 1120. Empr. du lat. veritas d'Italie, et de la terminaison chimique -al ;
(de verus « vrai ») ; une forme plus francisée ce nom a été arbitrairement choisi par
verlé a été de quelque usage au moyen âge. l'inventeur allemand, parce qu’il se trou-
— Dér. et Comp. : véritable, 1188 : contre- vait à Vérone quand il a proposé le nom
vérité, 1413. du produit. Postérieurement on a nommé
un produit analogue gardénal parce que,
VERJUS, v. jus. dans une discussion portant sur la déno-
mination de ce produit, un des interlocu-
VERMEIL, adj.; pris substantiv. pour teurs déclara qu'il fallait garder nal de
désigner une sorte de métal, depuis le véronal (communication de M. Tiffeneau).
XVIIe s. Lat. vermiculus « vermisseau »,
qui a servi à basse ép. à désigner la coche- VÉRONIQUE, nom de plante, 1545.
nille, puis la couleur écarlate qu'elle pro- Empr. du lat. des botanistes veronica tiré
duit, enfin pris adjectiv. dès le vie s. (palla de Veronica, nom de la sainte qui, d’après
vermicula). Esp. bermejo ; lit. vermiglio la légende, possédait le saint suaire, ainsi
vient du gallo-roman. — Dér. : vermillon, que de celui-ci même.
xXI1°, d’où vermillonné, 1380 (d’où -er, au VERRAT (Gloses de Cassel : ferrat paer-
XVIC). farh, n° 79). Dér. de l’a. fr. ver qui n’a
laissé que quelques traces dans les patois,
VERMICELLE, 1553, cf. « Vermicelles
ou vermicelli, mot écorché de l'italien », lat. verres, d’où aussi it. verro, a. pr. ver,
1680 (Richelet) ; on a prononcé aussi wer- verre ; l'esp. verraco dérive également du
lat. verres, avec un autre suff. que verra.
michel. Empr. de lit. vermicelli, propr.
« vermisseaux », dit ainsi par comparaison VERRE. Lat. vitrum, qui a donné régu-
de la forme des vermicelles avec celle des lièrement dans le fr. central voir(r)e, usuel
vermisseaux ; vermicelli est le plur. de ver- du xr1° au xvie s., d’où la prononciation
micello, lat. pop. *vermicellus, dér. du lat. voarre signalée à Paris au xvI® s.; verre
class. vermiculus. a été refait sur les dér. ou est dû au flotte-
ment de é, wé, qui s’est produit à Paris
VERMICULAIRE, 1559. Terme physio- à cette ép., cf. craie, croire, etc. It. velro :
logique, dér. sav. du lat. vermiculus « ver- l'esp. vidrio suppose un lat. pop. *vitrium.
misseau ». — Dér. : verrée, xvie (Ronsard) : verrier,
669 VERTU

1230, verrerie, xir1° {J. de Meung, sous la VERSIFIER, x1rre (à côté de versefier) ;
forme voirrerie) ; verrière, vers 1165 ; ver- versificateur, 1488, l’a. fr. disait verse-
roterie, 1679, dér. de verrol, même sens, fieur ; versification, 1548. Empr. du lat.
versificare, -atio, -alor.
VERROU. D'abord verrouil, éliminé
avant le xvii® s. par verrou, forme issue VERSION, « traduction », d’où « manière
du plur., cf. de même genou, pou. Lat. d'interpréter », 1548. Empr. du lat. mo-
pop. *verruculum, altération de veruculum, derne versio (de vertere « tourner »). Version
autre forme de vericulum (de veru « bro- a reçu au xixe s. un sens techn. dans la
che »), d'après ferrum « fer » ; ce croisement langue de la chirurgie d’après son sens
avec fer s’est renouvelé dans l’esp. arch. étymologique et le verbe verser ; on a déjà
herrojo (aujourd’hui cerrojo d’après cerrar rétroversion, 1783, d’après le lat. retro-
« serrer ») et dans certains dialectes gallo- verlere « retourner ».
romans, Cf. le prov. ferou, etc. — Dér. :
verrouiller, xr1°, déverrouiller, xX111°. VERSO, v. recto.

VERRUE. Lat. verrüca. It. verruca, VERT, Lat. viridis. Le fém. verie appa-
esp. verruga. Aujourd'hui concurrencé par raît dès la Chanson de Roland, bien que
poireau ou un type porion dans les parlers vert se soit employé comme fém. jusqu’au
du Centre, de l'Est et du Nord et par xve s.; une forme verde, soutenue par les
fi(c), lat. ficus « figue », d’où « verrue » dér., a coexisté au moyen âge, et survit
dans l'Est, l'Ouest et le Sud-Ouest, cf. le dans un grand nombre de parlers du Nord,
fr. fic, « excroissance qui pousse au pied de l'Est et du Sud-Est. It. esp. verde des
du cheval », et a. fr. fi qui désigne des deux genres comme en lat. Dans l’expres-
excroissances analogues. — Dér. : verru- sion envoyer quelqu'un au diable au vert
queux, 1778, fait d’après le lat verrucosus. (d’où au diable vert), au vert est altération
de Vauvert ; on trouve dès le xv® s. diable
VERS, subst., xr1° ; signifie d’abord sur- de Vauvert, et Rabelais emploie l’expres-
tout « laisse, strophe ». Empr. du lat. ver- sion, cf. II, 18; mais on ne sait rien de
sus. — Dér. : verset, XIII°. précis sur l’origine de cette locution, ni le
lien qu’elle pourrait avoir avec Vauveri,
VERS, prép. Lat. versus, d’abord adv. nom d’un lieu, près de l'emplacement ac-
(du verbe vertere « tourner »). — Comp. : tuel de l’observatoire de Paris, où il y avait
devers, vers 1080 (Roland), d’où par de- une maison de Chartreux, dès l'époque de
vers, XII°. saint Louis, cf. « Il se commenda a nostre
VERSATILE, xve. Empr. du lat. versa- Dame de Vauvert », Joinville, CXXIX.
tilis (de versare). — Dér. : versatilité, 1738 Prendre sans vert, 1546 (Rab.), locution
(d’Argenson). issue d’un terme, aujourd’hui hors d'usage,
jouer au vert qui désignait un jeu où on
VERSÉ, « rompu dans la pratique d’une devait porter, pendant tout le mois de mai,
science, etc. », xvie (Amyot). Empr. du lat. une feuille verte et où l’on payait une
versaius, part. de versari « s'occuper de, amende quand on était pris sans cette
s'appliquer à »; le xvie s. a employé aussi feuille. — Dér. et Comp. : verdâtre, vers
le verbe verser en ce sens sur le modèle du 1350 ; verdelet, 1319 ; verdeur, xr1° ; ver-
verbe lat. dier, nom d'oiseau, vers 1285, pour le sens
d’ « officier de l'administration des eaux
VERSEAU, signe du zodiaque, 1555. et forêts », v. gruyer; verdir, vers 1180,
Tiré de verse-eau, traduction du grec hAy- reverdir, vers 1132 ; verdoyer, vers 1170;
drokhoeus, littéral. « qui verse de l’eau », verdure, vers 1200; vert-de-gris (1337;
d'où aussi lat. aquarius. On a dit aussi écrit verdegris), altération, d’après gris, de
verseur d’eau, relevé en 1547, et qui se vert-de-Grice, 1314, littéral. «vert-de-Grèce »,
trouve encore chez Voltaire. dénomination dont l’origine n’est pas con-
VERSER, parfois au moyen âge « (re)- nue ; vert-de-grisé, 1845.
tourner, faire tourner ». Lat. versäre. —
Dér. et Comp. versant, subst., 1800; VERTÈBRE, 1534. Empr. du lat. ver-
verse, dans pleuvoir à verse, 1680, d’abord lebra (de vertere « tourner »). — Dér. : ver-
pleuvoir à la verse, 1640, dit ainsi comme tébral, 1674; vertébré, 1800, in-, 1804.
si l’on versait de l’eau, d’où averse,
1690 ; versement, 1695, au sens moderne VERTICAL, 1545. Empr. du lat. de
d’ « action de verser de l'argent »; au basse ép. verticalis (de verlex, -ticis, « som-
moyen âge signifie « action de verser, ren- met »). — Dér. : verticalité, fin xvirre.
verser »; verseur, fin XIX®, « garçon qui VERTIGE, 1611; vertigineux, 1495.
verse le café » ; verseuse, 1877, « vase pour Empr. du lat. vertigo (repris aussi sous cette
verser le café »; versoir, 1751, ou oreille de forme depuis Paré, qui a en outre une forme
charrue, au moyen âge attesté pour dési- verligine), vertiginosus (de veritere « tour-
gner une sorte de charrue ; en ce sens re-
monte peut-être à un lat. pop. *versürium, ner »).
représenté dans des parlers italiens ; dé- VERTU. Lat. viriülem, accusatif de vir-
verser, 1755, déversement, 1801, déversoir, lüs, proprement « force virile » (de wir
1754 ; reverser, 1549, relevé au x11° au sens « homme »}), d’où « valeur, courage »; le
de « retourner ». V. revers, renverser. sens propre est fréquent au moyen âge et
VERSICULET, 1770 (Voltaire). Dér. de explique le sens moderne de « qualité qui
versicule, XVI, hors d'usage aujourd’hui, rend propre à produire certains effets »,
empr. du lat. versiculus (de versus). par exemple dans vertu d’un remède et la
VERTU 670
locution en vertu de; le sens moral de VESPASIENNE, 1834 (on dit alors aussi
vertu existe déjà en lat. class., où il s’est colonnes vespasiennes ; les premiers urinoirs
surtout développé sous l'influence du grec publics avaient la forme de colonnes creu-
arele ; il se renforce sous l'influence des ses). Tiré de Vespasien, nom de l’empereur
idées chrétiennes pendant le moyen âge ; romain (69-78), par allusion aux urinoirs
le sens de « chasteté » en parlant d’une qu’il fit établir à Rome. On a dit aussi vers
femme apparaît au xvire s. — Dér. : ver- la même date rambulteau, tiré du nom du
tueux, vers 1080 (Roland), au sens de préfet de la Seine qui fit installer les pre-
«vigoureux, puissant » ; développement de miers urinoirs.
sens parallèle à celui de verlu ; évertuer
(s’), id. VESPÉRAL, 1336 comme adj. Empr.
du lat. de basse ép. vesperalis (de vespera
VERTUGADIN, terme d’ancienne mode, « soir », v. vêpres); relevé depuis 1812
1611 ; d’où terme de l’art des jardins, 1694. comme subst. au sens de « livre de l'office
Dér. de verlugade, xvi®, encore relevé en du soir ».
1694, empr. (avec remplacement de -d-
par - dû probabl. à un rapprochement VESPRÉE, v. vêpres.
plaisant avec vertu, le vertugadin pouvant VESSER, 1606 (une fois au xrrre 5.)
être regardé comme le gardien de la vertu on disait plutôt vessir (conservé dans de
des dames), de l'esp. verdugado (d’où nombreux patois), lat. vissire, d’où aussi
verdugal, 1532, de quelque usage au a. Pr. vessir, roumain bdsi; v. aussi
XVIe S.), propr. « baguette (dont on faisait venette ; vesser est issu de vessir par chan-
le vertugadin) »; verdugado est lui-même gement de conjugaison, probabl. d’après
dér. de verdugo « baguette », premier dér. péter. — Dér. : vesse, xve: vesse-de-loup,
de verde « vert ». nom de plante, 1530 ; vesseur, 1549.
VERVE. A signifié d’abord « fantaisie » VESSIE. Lat. pop. *vessica, altération
jusqu’au début du xvrre s.: d’où le sens du lat. class. vésica. It. vescica, esp. bejiga
moderne depuis le xviie s. Paraît repré- (et veziga d’après la forme du lat. class.).
senter un lat. pop. *verva, autre forme de La locution (prendre) des vessies pour des
verba (le b a eu une articulation flottante lanternes remonte au xrrre 5.
à basse ép., v. aussi le suiv.), plur. neutre
pris comme fém. sing. de verbum « parole », VESTALE, xive (Bersuire), comme ter-
qui aura été pris au sens de « parole de me d'histoire romaine; sens fig. depuis le
fantaisie ». — Dér. : verveux, adj., 1831. XVII s. Empr. du lat. vesialis « prêtresse
de Vesta », parfois déjà pris au sens de
VERVEINE. Lat. verbèna, dont le b a « femme pudique ».
été assimilé au v initial. It. esp. verbena.
VESTE, 1578. Empr. de l’it. vesia, vesle,
VERVELLE, v. le suiv. lat. vestis « vêtement » pour désigner d’a-
VERVEUX, filet de pêche. Représente» bord un vêtement à quatre pans, qui se
comme l’it. verlovello, un lat. pop. *verti- portait sous l’habit, puis « vêtement sans
bellum (de vertere « tourner »), cf. aussi ver- basque » depuis 1680 ; aujourd’hui s’em-
lebolum de la Loi Salique au même sens ; ploie surtout pour désigner des vestes de
ainsi nommé à cause de sa forme et des divers métiers. L'expression remporter une
cercles qui le soutiennent ; verveux, au lieu vesie, XIX°, paraît avoir été faite par jeu
de vervel qu'on attendrait, est issue du de mots d’après capote, terme de jeu de
pluriel de verveil, forme due à une substi- cartes, « coup par lequel un joueur fait son
tution de suff. (-iculum), cf. aussi vervain, adversaire capot », d’où on a tiré faire
XVI*, qui a subi d’autres altérations; la craindre une capote, v. capot. — Dér. : ves-
forme italienne n’est pas non plus normale, ton, 1769.
cf. aussi a. pr. beriuel, bariuel, qui est VESTIAIRE, vers 1200. Empr. du lat.
obscur, et en outre les mots techn. vervelle vestiarium « armoire à vêtements ».
« anneau fixé à la patte d’un faucon » ou
« charnière », xrre (Chrétien, sous la forme VESTIBULE, 1509 (dans une traduc-
verviele) et la forme altérée vertevelle, xrrr°, tion de l’Enéide), cf. en 1553, vestibule que
« anneau, Charnière ». nous disons avantportail, dans une traduc-
tion de lit. Empr. du lat. vestibulum ou
VÉSANIE, 1803 (une fois vers 1490). de l’it. veslibulo (ou -bolo) qui est lui-même
Empr. du lat. vesania (de vesanus « in- empr. du lat.
sensé).
VESTIGE, 1377. Empr. du lat. vestigium
VESCE. Lat. vicia, nom de plante. It. « trace, empreinte du pied », d’où « trace,
veccia. vestige (en général) ».
VÉSICAL, 1835 (déjà en 1575, dans une VESTIMENTAIRE, fin xixe. Dér. sav.
autre acception). Empr. du lat. de basse du lat. vestimentum « vêtement », pour ser-
ép. vesicalis (de vesica « vessie »). vir d’adj. à vétement.
VÉSICATOIRE, 1575 (Paré). Dér. du lat. VÉTÉRAN, 1554, en parlant d'anciens
médical de basse ép. vesicare « former des soldats romains ; sens plus étendu dès le
ampoules » (de vesica « vessie, ampoule ») XVII* S. Empr. du lat. veteranus, propr.
avec le suff. sav. -atoire. «ancien » (de veus, veleris « vieux »).
VÉSICULE, 1541. Empr. du lat. vesi- VÉTÉRINAIRE, 1563. Empr. du lat.
cula, dim. de vesica « vessie ». veterinarius, dér. de velerina, plur. neutre,
671 VICE

-ae plur. fém., « bêtes de somme ou de VEXER, xive, « tourmenter », d’où le


trait » (d’un adj. veterinus « de bête de sens fam. de « contrarier », 1788, qui est dû
somme »). à la façon exagérée de s'exprimer des petits
maîtres ; vexation, 1261 ; développement
VETILLE, 1528. Tiré du verbe vétiller
de sens parallèle à celui du verbe. Empr. du
« s’arrêter à des riens », de même époque, lat. vexare «tourmenter », vexzalio. — Dér. du
qui est lui-même dér. de veite « ruban », verbe : vexatoire, xviri® (Buffon).
donc propr. « s'occuper de rubans », en
bas-manceau ce verbe signifie encore « faire VIABILITÉ, « bon état d’une route »,
un lien de paille pour la gerbe »; veltle, 1845. Dér. sav. du lat. de basse ép. viabilis
assez peu usité, est lui-même empr. de l’a. « où l’on peut passer » (de via « voie,
pr. vetta « ruban », lat. vitta « bandelette ». route »).
L’esp. vetilla est plus récent et empr. du VIABILITÉ : aptitude à vivre d’un nou-
franc. Vétilleux, 1642, est dér. de vétiller ou veau-né », vV. vie.
de vétille.
VIABLE, v. vie.
VEÉTIR. D'un usage plus restreint au-
jourd’hui qu’habiller. Lat. vestire. It. ves- VIADUC, 1838. Empr., comme terme de
tire, esp. vestir. — Dér. : vêtement, vers chemin de fer, de l’angl. viaduct, avec fran-
1080 (Roland), d’après le lat. vestimen- cisation d’après aqueduc ; l’angl. viaduct
tum ; vêture, xr1°, de sens restreint aujour- est lui-même fait avec le lat. via « voie »
d’hui, mais usuel au moyen âge au sens sur le modèle d’aqueduct, empr. du lat.
de « vêtement », et encore usité dans les aquæ ductus, v. aqueduc.
parlers, peut continuer le lat. pop. vestitüra VIAGER, v. vie.
(attesté à basse ép. seulement au sens de
« décoration ») ; dévêtir, x11° ; revêtir, x1® VIANDE. Jusqu'au xvii®s. désigne toute
(Alexis), s'est employé au moyen âge espèce d’aliment ; pris aussi au sens de
comme terme de féodalité, de là l'emploi « Chair » vers le xve s. ; spécialisé au sens
du verbe au sens de « revêtir d’une di- moderne à partir du xvii® s. à la place de
gnité, etc. », d’où revêtement, 1508, au chair. Lat. pop. vivenda « ce qui sert à la
sens moderne ; déjà au x1Iv® s. au sens de vie », dér. de vivere « vivre », devenu ui-
« vêtement ». vanda (attesté dans un capitulaire de 803),
par substitution de suff.; le v intérieur
VÉTIVER, nom de plante ; on écrit aussi est tombé par dissimilation. It. vivanda,
vétyver, wetiver, 1828. Empr. du tamoul esp. vianda, tous au premier sens de
vettiver. viande. V. vivandier. — Dér. : viander,
« pâturer », terme de vénerie, 1375, viandis,
VETO, 1718. Empr. du lat. velo « j'inter- « pâture », 1390.
dis, je m’oppose » pour désigner un droit
de refus accordé au roi; cet empr. est dû VIATIQUE, xive (E. Deschamps), en un
à ce fait que, à Rome, les tribuns du peuple sens fig. issu du sens propre « argent pour
se servaient de ce mot pour s'opposer aux un voyage ». Empr. du lat. viaticum (de via
décrets du sénat, etc. Depuis, sens plus « route »), v. voyage. Comme terme de la
étendu. langue religieuse, 1664, empr. du lat. mé-
diéval (déjà carolingien) viaticum, dont le
VÉTUSTE, 1842; vétusté, 1406. Empr. sens est une extension du sens ancien
du lat. vetustus, velusias. « argent pour le voyage ».
VEUF, VEUVE. Veuf qui ne date que VIBRER, 1752 ; une première fois vers
du xvies. est refait sur veuve, lat. vidua. Au 1500 ; vibration, 1632 (en 1508 « action de
moyen âge on trouve surtout le fém.; à brandir »), comme terme scientifique. Em-
partir du xive s. on trouve parfois veve, pr. des mots lat. vibrare « agiter, brandir »,
veuve au masculin et ordinairement avec d’où « vibrer (en parlant de la voix), etc. »,
homme placé devant. La prédominance du vibratio (créé à basse ép.). — Dér. du verbe :
genre féminin est due à des causes d’ordre vibratile, 1776 ; vibratoire, 1750 ; vibrion,
social ; le fait d’avoir perdu son mari cons- 1795.
tituait au moyen âge pour une femme un
état civil à part, ce qui n’était pas le cas VICAIRE, xue. Empr. du lat. vicarius
pour un homme devenu veuf. De même, en « suppléant, remplaçant » pour désigner
indo-européen, où il y a un nom attesté des fonctions diverses. V. viguier et voyer.
partout pour la « veuve », mais pas pour le — Dér. : vicairie, 1236 ; vicarial, 1570;
«veuf ». It. vedovo, -a, esp. viudo, -a. — Dér. vicariat, xve (A. Chartier).
veuvage, 1374 ; v. viduité. VICE, subst., 1138 (Gaianar) ; vicier,
xuie; vicieux, x11e. Empr. des mots lat.
VEULE, xue (Celle ki le cuer a moult vitium « défaut, vice », vitiare « corrompre,
vuele). Mot anc., qui paraît signifier au altérer », viliosus « défectueux, vicieux »
moyen âge « léger », sens conservé en pi- (écrits avec un c à basse ép.). Viliosus a
card, mais qui n’est devenu usuel qu’au donné en a. fr. un adj. voisous « intelligent,
XVIIIe s. comme terme fam. au sens de rusé », cf. le fr. pop. un enfant qui a du
« mou, faible » ; ce sens paraît s'être déve- vice « malin » (vitium a aussi largement sur-
loppé dans la langue du jardinage en par- vécu dans les langues rom. avec les sens
lant d’un arbre sans force ou d’une terre de «ruse, habitude », cf. it. vezzé « habitude,
légère. Probabl. lat. pop. “*volus « léger, divertissement, etc. »).
qui vole aisément », tiré de voläre « voler ».
Seulement français. — Dér. veulerie, NICE, préf. Empr. du lat. vice « à la
1862; aveulir, 1876, -issement, 1884. place de », ablatif qui a déjà servi à basse
VICE 672

ép. à former des comp., v. vidame; de là bouteille, 1752, au sens moderne, attesté
vice-amiral, 1339 (écrit vis-), vice-chance- en 1560 comme surnom d’un ivrogne;
lier, 1259, vice-consul, 1653, etc. Cf. vice- vide-poches, 1823.
versa.
VIDIMER, terme de chancellerie, 1463.
VICENNAL, 1721 (quelquefois au xvre). Tiré de vidimus, 1355, terme de pratique,
Empr. du lat. de basse ép. vicennalis. qui est propr. un mot lat. signifiant « nous
VICÉSIMAL, 1872. Dér. sav. du lat. avons vu », qui s’inscrivait sur les actes
vicesimus « vingtième ». qu’on avait collationnés sur l'original,
VICE-VERSA, 1700. Locution lat. signi- VIDUITÉ, ximie (Br. Lat.). Empr. du
fiant « réciproquement », formée du préf. lat. viduitas (de viduus « veuf »).
vice et de versa (de verlere « tourner »), VIE. Lat. vita. It. vita, esp. vida. — Dér.
littéral. « la place étant tournée ». et Comp. : viable, 1539, viabilité, 1808;
VICINAL, 1775 (Turgot, une fois au viager, 1417, au moyen âge attesté comme
XVIe s.). Empr. du lat. vicinalis, propr. subst. au sens d’ « usufruitier », dér. de
« de voisin (vicinus) », d’où « (chemin) qui vie par l'intermédiaire d’un anc. subst.
sert aux voisins ». — Dér. : vicinalité, 1839. viage « temps de la vie » et spécial. « usu-
fruit à vie, pension viagère »; survie,
VICISSITUDE, xive (Bersuire). Empr. 1510.
du lat, vicissitudo (de vicis).
VIEILLARD, etc., v. vieux.
VICOMTE, vers 1080 (Roland sous la
forme vezcunles, refaite rapidement en vis- VIELLER, vers 1150. Mot formé comme
comte, vicomle d’après le mot lat.). Empr. onomatopée, parallèlement à l’anc. prov.
du lat. médiéval vicecomes, fait sur le mo- violar, v. viole. — Dér. : vielle, vers 1160,
dèle de vicedominus, v. vidame, et déve- vielleur, vers 1165 ; on dit et on écrit aussi
loppé parallèlement à comte, — Dér. : vi- vielleux.
comté, 1207, qui a conservé son genre VIERGE, xir1°; d'abord virgine, xire,
fém., v. comté ; vicomtesse, xrre. puis virgene, virge, xu°-xtr1e. Empr. du
VICTIMAIRE, 1556. Terme d’antiquité, lat. virgo, virginis « jeune fille », surtout
empr. du lat. victimarius. comme terme de la langue eccl., d’où sens
plus étendu dès le moyen âge.
VICTIME, 1496. Empr. du lat. viciima.
— Dér. : victimer, 1613, rare avant la fin VIEUX, VIEIL, VIEILLE. Lat. veiulus,
du xvirre 8. -a, dim. fam. de veius « vieux », surtout en
parlant de personnes, devenu veïlus, puis
VICTOIRE, vers 1080 (Roland) ; victo- veclus, forme signalée comme fautive dans
rieux, XIIIe, Empr. des mots lat. victoria, l’Appendiz Probi. It. vecchio, esp. viejo.
vicioriosus (de la famille de vincere, v. Au xIve s. encore vieux se disait presque
vaincre). exclusivement de personnes, tandis que
VICTORIA, 1867. Nommé ainsi en l’hon- viez, continuateur de wetus, se disait de
choses, de sentiments, etc. — Dér. :
neur de la reine d'Angleterre Vicioria ; vieillard, 1155 ; vieillerie, 1680 ; vieillesse,
mais le nom a été créé en France ; les pre- 1120 ; vieillir, 1160, vieillissement, 1596 Ë
miers exemples du mot en anglais (1844 vieillot, x111° (d’abord seulement au fém.).
et 1870) sont dans des textes où il s'agit
de la France ou de Paris. VIF, VIVE. Lat. vivus, -a. It. esp. vivo.
— Dér. et Comp. : aviver, 1155 (Wace),
VICTUAILLES, 1502 (en 1359 victaille). raviver, vers 1165 ; pour le comp. vif-ar-
Réfection, d’après le mot lat., de l’a. fr.
gent, v. argent, revif, subst., terme de
vituaille, lat. de basse ép. victuälia (de marine, 1875 ; se prend aussi au sens de
viclus « nourriture »), cf. ravitailler, d’où « ce qui reprend de la force », 1869 (Flau-
aussi it. veltovaglia. bert).
VIDAME, vers 1205 (Villehardouin, sous
la forme visdame). Empr. du lat. eccl. vice- VIGIE, 1691. Empr. du port. vigia, tiré
dominus, littéral. « lieutenant d’un prince », du verbe vigiar « veiller ». Désigne d’abord
officier qui remplaçait, semble-t-il, les sei- et jusqu’à la fin du xvrrie s. des rochers
gneurs ecclésiastiques à titre de juge. cachés sous l’eau dans les environs des
Açores.
VIDE, VIDER. D'abord vuide, vuid{(i er, VIGILANT, 1488; vigilance, vers
formes maintenues au moins orthographi- 1380.
Empr. du lat. vigilans, vigilantia (de
quement jusqu’au xvr1° 5. ; en outre voide, vigilare).
voidier, qui sont des formes dialectales ;
vuide est une forme fém. qui a éliminé VIGILE, 1119. Empr. du lat. eccl.
l'anc. masc. vuit, usité jusqu’au xve 52 vigilia, V. veille.
cf. large. Lat. pop. *vocitus, *vociläre, de VIGNE. Lat. vinea, dér. de vinum « vin ».
la famille d’un *voc{u jus « vide », au lieu It. vigna, esp. viña. — Dér. : vigneau,
du lat. class. vacuus, forme qu'on restitue 1838 ; vigneron, vers
d’après vociuus « vide », qui se trouve chez 1200 ; vignette, vers
1300 (Joinville), propr. « ornement en
Térence à côté de vacivus. It. vuoilo, vuo- forme de branches ou de feuilles de vigne »,
tare. — Dér. et Comp. : vidange, 1286, sens du mot jusqu’au xvi® s.; puis dit
vidanger, 1855, vidangeur, 1676 ; dévider, spécial. d’ornements en forme de branches
vers 1100, dévidage, 1700, dévideur, XVe, de vigne entrelacées en haut de la première
dévidoir, x111° ; évider, xr1e, évidoir, 1756 ; page d’un livre, d’où ont découlé les autres
revider, 1656; survider, 1549 ; vide- sens.
673 VINGT

VIGNOBLE, vers 1200 (L’Escoufle;. le plus souvent autour d’une ancienne cité,
Empr. de l’a. pr. vinhobre, avec substi- sur le terrain d'anciens domaines ruraux
tution de suff. L’a. pr. représente un (villæ) ; la partie la plus ancienne des
*vineéporus du lat. régional, transformation villes a souvent gardé le nom de cité. Ce
du grec ampelophéros « portant des vignes » développement sémantique est propre au
(comp. de dampelos « cep de vigne » et gallo-roman. L’anc. sens de « domaine
-phéros « qui porte »), par substitution rural » est aussi à la base du dér. village,
du lat. vinea au grec ampelos. La culture où le suff. a une valeur collective ; village
de la vigne a été introduite en Gaule par désigne donc d’abord un ensemble de fer-
les Massaliotes. mes. L’it. villa a conservé les sens du lat.
anc. ; « ville » se dit en it. ciltä, en esp.
VIGOGNE, 1672, d'abord vicugne, 1598, ciudad.
vicunna, 1633. Empr. de l'esp. vicuña,
empr. lui-même de vicuña du quechua, VILLÉGIATURE, 1755. Empr. de lit.
langue indigène du Pérou. villeggiatura (de villeggiare « aller à la cam-
pagne », de villa). — Dér. : -er, 1877.
VIGUEUR, vers 1080. Empr. du lat.
vigor (de vigere « être plein de force »). — VILLEUX, 1742. Une première fois au
Dér. : vigoureux, vers 1120. xive s. Empr. du lat. villosus (de villus
« poil »). — Dér. : villosité, 1781.
VIGUIER, anc. terme d'administration
du Midi, x. Empr. de l’a. pr. viguier VIN. Lat. vinum, mot d'origine méditer-
(on trouve aussi veguier), lat. vicärius. — ranéenne, comme le grec (v)oinos. — Dér. :
Dér. : viguerie, 1340. vinasse, 1765 ; vinée, xr11° ; viner, 1867,
au sens moderne d’ « additionner d'alcool
VIL. Lat. vilis « à bas prix », d’où « com- certains vins » (au moyen âge a d’autres
mun, méprisable ». — Comp. : avilir, vers sens), d’où vinage, id. (au moyen âge
1350, avilissement, 1587, ravilir, 1588. « droit sur le vin »). — Comp. : aviné,
xu1e; aviner, attesté dès le xr1° s., est
VILAIN. Propr. « paysan », d'où « rotu- moins usité ; enviné, vers 1500; vinaigre,
rier », vers le xvi®s. ; pris de bonne heure x1I11e, a remplacé l’a. fr. aisi(l), lat. acelum ;
comme terme de mépris, cf. les dér., de d’où vinaigrette, 1393, vinaigré, 1680 (le
là les diverses acceptions péjoratives du verbe est rare), vinaigrier « fabricant de
fr. moderne. Lat. de basse ép. villänus vinaigre », 1514 (d’où vinaigrerie, 1723),
« habitant d’une ferme (villa) ». — Dér. : vinaigrier « vase à mettre le vinaigre »,
vilenie, xir1°, d’abord vilanie, X11°, aujour- 1572 ; épine-vinette, 1545 (d’abord vinelle,
d’hui rapproché de vil; vilainement, x11°; xIHI® s., ensuite espinele vinele, XV°)
péjor. dès le début. comp. d’épine et vineite (dér. de vin), qui
VILAYET, 1869. Empr. du turc viläyet, se dit encore dans le Centre et l'Ouest
empr. lui-même de l’arabe wilâdya « pro- pour désigner l’oseille, dite ainsi à cause de
vince, préfecture », v. vali. son jus acide.
VILEBREQUIN, xive (sous la forme VINAIRE, 1823. Empr. du lat. vinarius
wimbelkin dans un dialogue français-fla- (de vinum « vin »).
mand). Empr. du moyen néerl. wimmel- VINDAS, v. guinder.
kijn, dim. de wimmel « sorte de tarière »,
de la famille de l’angl. wimble. Le mot a . VINDICATIF, vers 1400. Dér. sav. du lat.
été empr. dans les Flandres, où il a subi vindicare au sens de « venger », v. venger.
l'influence du flam. boorkin « tarière »
(d’où l’r de vuibrequin, Tournai, 1427, etc.). VINDICTE, 1555. Empr. du lat. vindicia
En passant des parlers du Nord en fr. au sens de « vengeance » (de la famille de
même il a été plus ou moins adapté à des vindicare).
mots fr., comme virer, vibrer, libre (la par- VINEUX, vers 1200 ; vinosité, 1801. Em-
tie du milieu se meut librement), d’où pr. du lat. vinosus, vinosilas (créé à basse
vilebrequin, 1450, virebrequin, 1485 (encore ép.).
en Normandie, etc.), librequin en Picardie.
Cf. gibelet. VINGT. Lat. viginii, contracté à basse
ép. en vint. Le système vigésimal était
VILIPENDER, 1375. Empr. du bas lat. plus répandu en a. fr. qu’en fr. moderne
vilipendere, comp. de vwilis et pendere, (seize vint, treis vinz et dis, etc.) ; il en est
attesté dp. le 1x°5. resté l'Hôpital des Quinze-Vingis, fondé
VILLA, 1743. Empr. de l’it. villa, v. ville. par Louis IX pour trois cents aveugles.
L’habitude de compter par vingtaines est
VILLAGE, v. ville. particulière aux peuples celtiques (comp.
anc. irl. tri fichit « soixante », côic fichit
VILLANELLE, 1586. Empr. de l’it. wil- « cent », breton daou ugent « quarante »,
lanella « chanson ou danse villageoise » (de tri-ugent « soixante », etc.). Il est donc pro-
villano, V. vilain). bable que le fr. doit les restes de ce sys-
VILLE. Lat. villa « ferme » et « maison tème au gaulois, aussi bien que l’angl. est
de campagne », qui a pris à basse ép. le redevable de son score aux parlers celtiques
sens de « village », encore attesté au moyen qu'il a supplantés. — Dér. : vingtaine,
âge, cf. aussi le sens d’ « agglomération de xir1e ; vingtième, x11e (sous la forme vin-
fermes, domaine rural » à l’époque franque ; time). — Comp. : quatre-vingt, x11° (écrit
mais, dès les premiers textes, ville désigne quatrevins) ; a remplacé oilanle, uilante,
une agglomération urbaine qui s’est formée, octante, etc., disparu vers le xvie s., lat.
43
DICT. ÉTYM.
VINGT 674

ociôgintä (d’où aussi it. oflanta, esp. ochen- VIPÉRIN, adj., 1553 ; vipérine, nom de
la) ; octôginta survit encore dans les régions plante, 1583. Empr. du lat. viperinus, vipe-
franco-provençale, provençale et du Sud- rina.
Ouest ; d’où quatre-vingtième, 1530, qua-
tre-vingt-dix, fin xiv®, en outre quatre VIRAGO, 1452 (Greban), au xvie s.
vingtz et dix, vers 1215, qui est resté plus viragine. Empr. en un sens péjor. du lat.
usuel jusqu’au xvir1® 5. ; a éliminé nonante, virago, viraginis « femme qui a le courage
lat. nonâginta, qui a plus de représentants d’un homme (wir) ».
que octogintä dans les parlers gallo-romans, VIRER. D'un lat. de basse ép. *uirare,
aussi bien dans ceux du Nord que dans issu de vibrare « faire tournoyer » (encore
ceux du Midi, d’où quatre-vingt-dixième, en a. fr. « lancer en faisant tournoyer »),
1671. par dissimilation des deux labiales. En
VINICOLE, 1831; viniculture, 1834. lat. class. vibrare a un ï; celui-ci est
Comp. avec le lat. vinum « vin » sur le devenu ? sous l'influence de /ïbrare qui
modèle d’agricole, -culiure, etc. s'emploie aussi au sens de « lancer une
arme en la faisant tournoyer ». — Dér.
VINIFICATION, 1799. Comp. avec le et Comp. : virage, 1773 ; virement, 1546 ;
lat. vinum « Vin » sur le modèle de mots environ, vers 1000 (Passion) comme adv.
tels que panification, etc. puis prép. signifiant « autour de », du x1e
VIOLACÉ, 1777 (G. de Morvéau). Empr. au XVIIe s.; pris substantiv. d’abord au
du lat. violaceus (dé viola). sing. dans à l'environ, xiv° (Froissart),
puis au plur. vers 1460 ; formé avec l’a.
VIOLÂTRE, v. violet. Îr. viron « tour », usité surtout comme
VIOLE, vers 1200. Empr. de l’a. pr. viola, adv.; d’où environner, xr1°, qui a signifié
viula ; l’it. et l’esp. viola viennent probabl. aussi « faire le tour » ; revirer, x11°, revire-
aussi de l’a. pr. On a voulu voir dans ce mot ment, 1587. V. chavirer.
un dér. du lat. vitulari « entonner un chant VIREUX, 1753 (une 1re fois en 1611).
de victoire » ou un emprunt à l’anc. haut Empr. du lat. virosus (dér. de virus).
all. fidula (d’où l’all. Fiedel). Mais ni l’une
ni l’autre de ces explications n’est satis- VIREVOLTE, 1549. Terme de manège,
faisante. Il faut sans doute voir dans altéré de virevoute (comp. de virer et a. fr.
l’anc. prov. viola un dér. du verbe violar vouler « tourner », de *volvitare, v. voûte)
« jouer de la vielle », et celui-ci est né d’une sous l'influence de lit. giravolta « tour
en r°2J » (de girare et voltare). I1 y a eu
onomatopée reproduisant l'impression
acoustique de la vielle. C’est ainsi que aussi un verbe virevoulter, -volter, 1552,
et des formes altérées virevouste, vers
le berrichon dit viouler, le norm. vionner 1510.
pour exprimer le sifflement d’une pierre
lancée. Parallèlement à l’anc. prov. violar VIRGINAL, vers 1200 ; mais on a l’adv.
l’anc. îr. a formé un verbe vieller, duquel est virginaument au xII® s.; virginité, xe
dérivé vielle. Viole de gambe, 1702, empr. (Sainte Eulalie). Empr. du lat. virginalis,
de l’it. viola di gamba, est un autre nom du virginilas (de virgo, virginis « jeune fille »,
violoncelle. — Dér. : violon, 1500 ; lit. vio- v. vierge).
lone désignait une grosse viole; aujour- VIRGULE,
d’hui « contrebasse » ; le violon se dit en it. 1534. Empr. du lat. virgula
« petite verge »; dit ainsi à cause de la
violino ; d'où violoniste, 1828.
forme de la virgule.
VIOLENT, 1213; violence,
du lat. violentus, violentia (de la famille de
1215. Empr. VIRIL, 1496; virilité, 1482. Empr. du
lat. virilis, virilitas (de vir « homme »). —
violare). — Dér. de violent : violenter, xive. Dér. : viriliser, 1801.
VIOLER, vers 1080 (Roland): viola- VIROLE. Lat. viriola « sorte
teur, 1360 ; violation, xive (Bersuire). Em- de brace-
let » (de viria, de même sens, d’origine
pr. du lat. violare, -ator, -atio. — Dér. :
gauloise ; la voyelle i, au lieu de e, en Pre
viol, 1647 (Vaugelas, qui lui préfère viole- est due à l’influence de virer),
ment). — Dér,
viroler, x11° ; virolet, 1534.
VIOLETTE, vers 1140. Dér. de l’a. fr. VIRTUEL, 1660, une première fois
viole, qui a eu très peu de vitalité, empr. du en 1503. Empr. du lat. médiéval virtualis
lat. viola, d'où violier, 1361. De vwiolette
a été tiré l’adj. violet, vers 1200: il a été (de virlus au sens de « force »). — Dér. :
virtualité, 1752.
aussi pris substantiv. pour désigner un
drap violet, 1359, qui se disait antér. vio- VIRTUOSE, 1640 (cf. Molière dans Le Si-
lelle; d’où violâtre, xve, rare avant le cilien : « Signor, je suis un virtuose »). Empr.
XVIIIS $. de l’it. virtuoso (de viriù, v. vertu) ; signifie
VIOLONCELLE, aussi « personne d’un mérite exception-
1743 (-cello, 1709). nel ». — Dér. : virtuosité, 1859.
Empr. de l’it. violoncello, dér. de violone
v. viole, — Dér. : violoncelliste, 1842. VIRUS, xvie (Paré); virulent, 1490 :
virulence, 1534. Empr. du lat. virus « poi-
VIORNE. Lat. viburnum. Son », propr. « suc des plantes », virulentus,
VIPÈRE, 1314. Empr. du lat. vipera ; virulentia.
a éliminé une forme pop. guivre, v. ce mot VIS, subst. fém. Lat. vitis « vigne » et
et vive ; parfois masc. au xviie s. (encore «vrille de la vigne », qui a dû prendre enlat.
dans les patois), probabl. d’après serpent. pop. le sens de « vis », également attesté
— Dér. : vipéreau, 1526 (Marot). par l’a. pr. vif, viiz et lit. vite, cf. aussi
675
VITUPÉRER
vrille ; le sens d’_« escalier tournant » plus francisé revisder (le simple visder est
est propre au gallo-roman. La forme vis très rare), notamment dans la langue reli-
semble représenter le pluriel, en a. fr. gieuse.
vilz, qui aura éliminé le sing. avant les
premiers textes. Aujourd’hui vis avec s VISQUEUX, 1256; viscosité, id. Empr.
prononcée se dit dans tous les parlers du lat. de basse ép. viscosus (de viscum
gallo-romans ; le mot y est très souvent « gui » et « glu de gui ») et du lat. médiéval
masc. — Dér. : visser, 1762, vissage, 1842, viseositas.
dévisser, 1768.
VISU (de), 1721. Locution lat. de la
VIS « visage », v. visage. langue judiciaire, signifiant « d’après la
vue, oculairement ».
VISA, 1554. Mot lat. visa « choses vues »,
« VU », plur. neutre de visus, part. passé VISUEL, 1545. Empr. du lat. médiéval
de videre « Voir », mot qui se mettait sur visualis.
des actes vérifiés. — Dér. : viser « mettre VIT, toujours au sens qu’il a aujour-
son visa », 1668 (Colbert). d'hui. Lat. vectis «levier, barre (de porte) » ;
VISAGE, vers 1080 (Roland). Dér. de cf. au sens du fr. l’a. pr. vech, vieg ; lit.
l'a. fr. vis « visage », usité jusqu'au xvies., velte signifie encore « levier ». — Dér. :
lat. visus « apparence, aspect », propr. vitelotte, pomme de terre de forme allon-
« vue », qui a dû prendre en lat. pop. le gée, 1812; tiré de vitelot « sorte de pâtis-
sens de « visage », attesté également par serie longue et mince », 1680.
viso de lit. et de l’anc. esp. Vis a donné VITAL, x1v® ; vitalité, 1765 (une première
en outre le comp. vis-à-vis, vers 1212 fois 1587, Cholières). Empr. du lat. anc.
et le dér. visière, 1250. — Dér. : dévisager,
vitalis et du dér. lat. médiéval vitalitas.
1803, au sens de « regarder attentivement — Dér. de vital : vitalisme, 1775 ; -iste,
en plein visage », antér. «déchirer le visage », 1831.
1539, envisager, 1560.
VITAMINE. Fait avec le lat. vita « vie »
VIS-À-VIS, v. le préc. et le terme chimique amine en anglais en
VISCÈRE, 1478 ; viscéral, 1765, d’abord 1912 par C. Funk, introduit en franc. en
vers 1460 dans un sens fig. qui vient 1913.
du lat. eccl. Empr. du lat. viscus (visceris), VITE. D'abord visie, vers 1160, a été adj.
visceralis ; visceralis n’est attesté qu’en lat. jusqu’au xvrie s. ; surtout adv. depuis ; on
eccl. au sens de « de chair, du fond de la trouve aussi vistement dès la fin du x1r1e 5.
Chair », mais il a été pris vers 1765 pour Plutôt que d’un lat. vulg. *visitus, qui aurait
servir d’adj. à viscère. signifié « qui a regardé de près », part.
VISER « regarder attentivement un but passé de visere « regarder de près » ce mot
qu’on veut atteindre ». Lat. pop. *visäre est né d’une onomatopée imitant un mou-
(intensif de vidère « voir »), au lieu du lat. vement imprévu et rapide, comme l’anc.
it. visio, l’it. mod. vispo. — Dér. : vitesse,
class. visere. L'esp. visar, seulement terme 1538 (une l'e fois vers 1160).
d’artillerie et de topographie, est emprunté
du fr. — Dér. : visée, 1219, au sens de VITICOLE, 1842; viticulture, 1845.
« regard » ; sens moderne depuis le xvre s. ; Comp. avec le lat. vitis « vigne », sur le
viseur, 1842, une première fois au xvie s. modèle d’agricole, -culture, etc. Le lat. de
au sens de « celui qui vise », rétroviseur, basse ép. avait vilicola « vigneron », parfois
1929 ; superviser, 1963. repris au début du xixes.
VISER, v. visa. VITRE, 1275; vitré, «transparent comme
du verre », xvi® (Paré); vitreux, xxrre.
VISIBLE, xre°; visibilité, xvie. Empr.
Empr. des mots lat. vitrum « verre »,
du lat. de basse ép. visibilis (de la famille
vilreus, vitrosus (médiéval). L'emploi de
de videre « voir »; chez Pline l'Ancien a le la vitre pour garnir les fenêtres, inconnu
sens de « qui peut voir »), visibilitas. V.
invisible. des anciens, s’est développé au moyen âge.
— Dér. : vitrail, 1493 ; vitrer, 1477, vitrage.
VISION, x11°. Empr. du lat. visio « ac- 1611 ; vitrier, 1370; vitrerie, 1338 ;
tion de voir », d’où « image vaine »; ce vitrifier, 1540, vitrifiable, 1734, vitrifi-
deuxième sens a été pris avant le premier, cation, xvie (B. Palissy).
que les langues techn. ont empr. à partir VITRINE, 1836. Transformation de
du xvie s. Au moyen âge on dit aussi au verrine, qui représente le lat. de basse
deuxième sens avision (d’après aviser « re- époque vitrinus « de verre », d’après vitre.
garder, etc. »). — Dér. : visionnaire, 1620;
télévision, vers 1934. VITRIOL, xr11e, Empr. du lat. médiéval
vitriolum, dér. de vitrum, dit ainsi à cause
VISITER, 1130 ; au moyen âge usité de l’apparence vitreuse du sulfate appelé
surtout dans la langue religieuse et jurid. ; vitriol. Désigne aujourd’hui dans la langue
visitation, x11° ; depuis le xvi1e s. ne s’em-
générale l'acide sulfurique, dit d’abord
ploie plus que comme nom d’une fête reli- huile de vitriol. — Dér. au dernier sens :
gieuse. Empr. du lat. visitare, visitatio. — vitrioler, 1876, d’où -euse, 1888.
Dér. et Comp. du verbe : visite, 1556,
contre-visite, 1680 ; visiteur, x111°; revisiter, VITUPÉRER, x° (Saint Léger). Empr.
vers 1170. L’a. fr. a fait usage d’un verbe du lat. viluperare « blâmer ».
DICT. ÉTYM, 43*
VIVACE 676

VIVACE, 1496; vivacité, 1488. Empr. l'homme pour l'appeler à lui, par exemple
du lat. vivax « qui a de la vitalité », viva- dans la vocation des Gentils, vers 1200, rare
citas « vitalité, vivacité (à basse 6p.) ». Le avant le xvie s.; d’où « mouvement inté-
subst. n’a été pris qu’au deuxième sens, rieur par lequel on se sent appelé par
si bien que vivace et vivacilé ne correspon- Dieu », xvrie, d’où sens plus étendu dès le
dent pas complètement. XVIIe S. ; au moyen âge vocalion a aussi des
VIVANDIER, 1472, au sens moderne.
sens jurid. tels que « appel en justice,
nomination, etc. ». Empr. du lat. vocalio,
Emploi substantival de l’anc. fr. vivendier,
-and-, fréquent au moyen âge au sens
propr. « appel », d'où « citation en justice »,
et, d'autre part, « appel fait par Dieu »
d’ « hospitalier, généreux », lequel est une
dans la langue ecclésiastique (de vocare
réfection, d’après vivenda, de viandier, de « appeler »).
même sens, dér. de viande.
VOCIFÉRER, vers 1380 ; rare avant la
VIVAT, 1546. Mot lat. signifiant « qu'il fin du Xxvrrre 8. ; vocifération, id. Empr. du
vive ». lat. vociferare, -alio.
VIVE, nom de poisson, xive. Altération VODKA, 1829. Mot russe qui signifie
de wivre, vivre « vipère », autre forme de propr. « eau » (de la famille du grec Aydôr,
guivre ; la vive a été ainsi nommée parce cf. aussi all. Wasser).
qu’elle passe pour être dangereuse, de là
aussi son nom de dragon de mer (qui vient VOEU. Lat. votum. It. uvolo. — Dér. :
du grec). vouer, x1I*, ou peut-être déjà lat. pop.
*uôläre, Cf. it. volare; dévouer, 1559;
VIVIER. Lat. vivärium, qui désignait dévouement, 1508, une 1re fois en 1338.
aussi un parc, une garenne, littéral. « lieu
où l’on garde des animaux vivants » (de VOGUER, vers 1210. La première attes-
vivus « vivant »). It. vivaio. tation de lit. vogare est postérieure à
celle du verbe franc. Celui-ci est un des
VIVIFIER, vers 1120 ; vivification, 1380. rares termes nautiques qui ont passé du
Empr. du lat. eccl. wivificare, -atio (de franç. à l’it. au moyen âge, comme p. ex.
vivus « vivant »). — Comp. : revivifier, passage (d’où lit. passaggio), quille (it.
vers 1280, -fication, 1676. chiglia). Le fr. voguer est empr. de l’anc.
VIVIPARE, 1679. Empr. du lat. vivi- bas all. wagon, même sens, dont le a
parus, littéral. « qui met au monde {pa- était devenu o sous l'influence du w-,
rere) des petits vivants » (de vivus) par comme dans won « quand » pour wan, etc.
opposition à ovipare. L’anc. bas all. a donc sans doute déjà
VIVISECTION, 1830. Comp. avec le lat. connu une forme *wogon. La locution vogue
vivus « vivant » et section, sur le modèle la galère est attestée par le calembour sus
de dissection. gallans, vaugue la galée ! dans une sottie
en 1461. — Dér. : vogue, 1466, déjà au
VIVRE. Lat. vivere. — Dér. et Comp. : sens moderne ; a signifié aussi « action de
vivant, dans les locutions du vivant de, en voguer », XVIe (Amyot) ; vogue a pris le sens
son vivant, tirées du gérondif, cf. dès le de « fête annuelle de village » dans la région
XIe s. dans Saint Alexis, à son vivant, et franco-provençale.
aussi à trestut mun vivant, dans la Chanson
de Roland ; viveur, 1830 ; vivoter, vers 1430 VOICI, v. voir.
(A. Chartier) ; vivres, vers 1165 ; qui-vive, VOIE. Lat. via. It. esp. via. Voie lactée,
XvV° (Le Jouvencel) ; le tour vive. est déjà 1640, aussi voie de lait, 1651 (Pascal), est
attesté au xr1° s.; revivre, vers 980 (déjà un calque du lat. lacieus orbis, circulus ;
lat. revivere) ; survivre, vers 1080 (Roland), c’est le terme scientifique ; la plupart des
survivant, subsl., vers 1120, survivance, parlers disent chemin de Saint-Jacques.
1510. Voie de fait, terme jurid., 1378. — Dér.
VIZIR, 1433. Empr. du turc vizir, empr. et Comp. : dévoyer, xrre, dévoiement, id. ;
lui-même du persan vizir (en vieux perse fourvoyer, x11° (v. fors), fourvoiement,
vitchira) (d’où vient aussi l’arabe wézir XIVe; voyou, 1830, mot vulgaire, signi-
« conseiller », v. alguazil). — Dér. : vizirat, fiant propr. « qui court les rues », formé
1664. avec le suff. pop. -ou, cf. filou, etc.:
contre-voie, 1929.
VOCABLE, vers 1380, usuel au xvre et
au XVII $.; puis devenu rare avant le VOILÀ, v. voir.
xXIX° s. Vocabulaire, 1487 ; a d’abord eu le VOILE, fém. Lat. pop. véla, plur. neutre
sens de « dictionnaire ». Empr. du lat. pris comme subst. fém. de vélum, d’où
class. vocabulum (de vocare « appeler ») aussi it. esp. vela, au même sens de « voile
et du dér. médiéval vocabularium. de navire » que le fr. — Dér. : voiler «garnir
VOCAL, 1455. Empr. du lat. vocalis de voiles », 1611 ; d'où voiler (et se voiler)
« doué de la voix (vox), etc. ». V. voyelle. « prendre une forme convexe comme celle
— Dér. : vocaliser, 1821 (-izé, autre sens, d’une voile gonflée par le vent », en parlant
déjà en 1611), sans doute à l’imitation du métal, etc., 1765 ; voilier, 1556 ; voi-
see vocalizzare, -isation, 1821, vocalise, lure, 1678 ; au sens d’ « état de ce qui est
3. voilé », en parlant du métal, etc., 1845.
VOCATIF, xir1°. Empr. du lat. (casus) VOILE, masc., 1170 (d’abord « grand
vocativus. rideau du temple de Jérusalem », mais
dès le xr1° « voile de nonne, ensuite de
VOCATION, propr. terme de la langue femme », écrit d’abord aussi voil). It. esp.
religieuse indiquant l’action de Dieu sur velo au sens du fr. — Dér. : voilette, 1842.
677 VOLONTÉ

VOILER « garnir d’un voile ». Lat. vé- VOLATIL, x1ive, écrit aussi volalile.
lare, dér. de vélum. It. velare, esp. velar. Empr. du lat. volalilis « qui vole, léger,
— Comp. : dévoiler, vers 1460, dévoile- éphémère ». — Dér. : volatiliser, 1611,
ment, 1606. volatilisation, 1641 ; volatilité, 1641,
VOIR. Lat. vidère. It. vedere, esp. ver VOLATILE, « oiseau », vers 1380. Ré-
— Dér. et Comp. : voici, x1r1e, l’a. fr. sépare fection, d’après le lat. volalilis, de volalille,
encore les deux éléments et dit aussi voyez x11€ (sous la forme volalilie), fém. rare
ci, Cf. veiz me ci ; voilà, xve (Commynes) ; aujourd’hui, empr. du lat, de basse ép.
d’abord ves la, xini° (Beaumanoir) ; la for- volalilia, v. volaille.
me vulgaire vla vient de vela, attestée dès
le xv€ s., d’où revoici, vers 1530, revoilà, VOL-AU-VENT, v. voler.
1339 (sous la forme revela) ; voyant, xve,
VOLCAN, 1598 (vulcan, en 1356 et
comme subst. au sens de « personne douée
de seconde vue » ; très ancien comme adij.,
jusqu’en 1640), de l’esp. volcdn, qui était
d’abord, au xvi s., une sorte de nom
d’où clairvoyant, x111° (J. de Meung), clair-
voyance, 1530 Montaigne) ; voyeur, xvi°, propre donné par les Espagnols aux
ne s'emploie plus que dans un sens spécial ; volcans qu’ils trouvaient dans l'Amérique
vu « considérant », prép., xVII*, vu que,
centrale ; empr. du lat. Vulcanus « Vulcain,
XV® ; sur le vu, au vu, 1510 ; vue, vers 1080
dieu du feu » (qui passait pour résider dans
l'Etna). — Dér. volcanique, xvirIe
(Roland), d’où bévue, 1642; entrevoir,
vers 1080 [ Roland), entrevue, 1498 ; revoir,
(Buffon) ; -isé, id., id.
vers 1080 (Roland), d’où revoir, subst., VOLER, des oiseaux, etc. Lat. voläre.
terme de vénerie 1690, revoyure, terme Voler « dérober », 1549, s’est développé
pop., 1821 ; revue, 1317 ; comme titre de dans la langue de la chasse, dans des locu-
périodiques, 1804, comme titre de pièces tions telles que ce faucon vole la perdrix,
de théâtre passant en revue les événements cf. le développement de involare en lat.
de l’année, 1875, d’où revuiste, fin xixe. sous emblée. — Dér. et Comp. de voler au
sens propre : vol, x11° ; volant, subst., 1366
VOIRE. Anc. adv., de peu d’usage au- (alors volant de moulin), autres emplois
jourd’hui, mais encore répandu parmi les depuis le xvire; vole, 1534; volée, vers
parlers pop. dans des phrases impératives 1190 ; volerie, terme de fauconnerie, 1373 ;
où il se confond avec voir p. ex. dans dis volet, x111° (pour la formation du mot,
voire, donne voire, etc. Lat. véra, plur.
cf. forel) « sorte de voile », usuel jusqu’au
neutre pris adverbial. de l’adj. vérus « vrai », XVIE 8., d’où bavolet, 1556, littéral. « volet
d’où it. vero.
descendant en bas de la tête », a désigné
VOIRIE, v. voyer. aussi une sorte de tamis, d’où l'expression
trier sur le volet, cf. triez... comme beaulx
VOISIN. Lat. pop. *vecinus, forme dissi- pois sur le volet, Rab., II, 30; volet « pan-
milée ou dialectale du lat. class. vicinus neau de bois servant à protéger les fené-
(de vicus « ferme, village »). It. vicino, esp. tres » 1611; volette, xve; voleter, x11°;
vecino. — Dér. : voisinage, 1240, l’a. fr. a volière, xive (E. Deschamps) ; volige, 1694,
eu aussi jusqu'au Xvi® 8. visnage d’après altération de voliche, signalé en angevin,
visné, lat. pop. *vicinätus ; voisiner, vers mais sûrement forme normande du fr. vo-
1200; avoisiner, 1554, lice, cf. lattes volices, 1435, fém. d’un anc.
adj. *voleis, *volis, « qui vole, léger » ; vol-
VOITURE. Propr. « moyen de trans- au-vent, 1817 ; envoler (s’), x11°, d’où en-
port », qui survit dans quelques expres- volée, 1875 (A. Daudet), envolement, 1873,
sions techn., d’où « véhicule »; en ce sens envol, 1904; revoler, 1138; survoler,
a remplacé partiellement char depuis le 1911 (déjà au xvres.) ; venvole (à la) « à la
XVII S. environ ; encore assez peu usité légère », xvie, par l'intermédiaire d’un anc.
dans les parlers où il ne sert que pour subst., pris parfois adjectiv. venvole « chose
désigner des voitures de ville, de prome- légère, qui vole au vent », xu1°. — Dér. de
nade. Lat. veclüra « action de transporter » voler « dérober » : vol, 1611 ; volerie, 1541 ;
(de vehere « transporter »). It. vellura, qui voleur, 1549 (fin xve et début xvie s.
a le même sens que voiture. — Dér. : voi- « chasseur au vol »), volereau, 1651.
turer, x111€, -ée, 1876 ; -ette, 1905 ; voitu-
rier, 1213, veclurarius existe déjà à basse ép. VOLITION, 1526. Formé sur le radical
vol- du verbe lat. velle « vouloir », cf. volo
VOIX. Lat. vôcem, acc. de vo. « je veux », cf. de même nolition, moins
usité, attesté à la même date, fait sur le
VOLAGE. Lat. volälicus « qui vole, ailé », lat. nolle « ne pas vouloir ».
d’où « fugitif, passager ».
VOLLEY-BALL, 1963. Empr. de l’an-
VOLAILLE, D'abord voleïlle, volille, puis glais d'Amérique volleyball.
volaille par substitution de suff. Lat. vola-
t{lia, attesté à basse ép. au sens d’ « oi- VOLONTAIRE, 1349 ; l’adv. volunterment
seaux », plur. neutre, pris plus tard comme déjà attesté au xire 8. Empr. du lat.
fém. collectif, de l’adj. volälilis, v. volatil. voluniarius. — Dér, : volontariat, 1866, sur
le modèle de notaire : -arial, etc.
VOLAPÜK. Créé artificiellement en 1879
par J. N. Schleyer de vol, altération de VOLONTÉ, vers 1400. Réfection, d’après
l’angl. world « monde », a, voyelle de liai- le mot lat., de l’a. fr. volenté, encore usité
son, et puk, altération de l’angl. speak au xvi® 8., lat. volunlas, d’où aussi it. vo-
« parler ». lontà, esp. voluntad.
VOLONTIERS 678

VOLONTIERS. D'abord volentiers, voul-, VOMIQUE, dans noix vomique, fin xves.:
refait en volontiers (cf. volonté), vers le une première fois au x1r1e s. (écrit alors
XVIe s. Lat. de basse ép. voluntarié, adv. noiz vomice). Empr. du lat. médiéval vomica
de voluntärius « volontaire », avec s adver- (nux), dit ainsi parce que cette baie a la
biale antérieure aux premiers textes. A. pr. propriété de faire vomir. — Dér. : vomi-
volentier(s), cat. volenters, it. volentieri. A quier, 1808.
pris dans l'Ouest, sous des formes altérées
vaontier, vantier, etc., le sens de « peut- VOMIR. Lat. pop. *vomire, lat. class.
être ». vomere. Le traitement de l’o indique que
le mot est resté sous l'influence du lat.
VOLT, 1881 : voltage, fin xIx° s.; vol- écrit, ce qui est naturel pour un mot em-
taïque, 1815; voltamètre, 1843; sur- ployé par la médecine. A. pr. vomir. —
volter, 1907. Mots tirés de Volta, nom d’un Dér. : vomissement, xir1° (J. de Meung) ;
célèbre physicien italien (1754-1827). vomitif, xive, avec le suff. sav. -itif, sur le
VOLTE, terme de manège, 1435 (écrit modèle de mots, tels que définitif, etc.;
voulste), XVI® (Ronsard), comme terme de revomir, 1538.
danse ; volter, xve (Charles d'Orléans : VOMITOIRE, 1636, terme d’antiquité.
Volte route « tourne, compagnie », Ron- Empr. du lat. vomitorium (de vomere « vo-
deau, 77). Empr. de l’it. volta, propr. «tour», mir », ces larges issues qu’étaient les vomi-
mot aux acceptions nombreuses, voltare toires vomissant pour ainsi dire la foule).
« tourner, etc. », lat. pop. *voluita (de la
famille de volvere « tourner »), *volvitare. VOMITO NEGRO, 1808 ; autre nom de
V. voûte. la fièvre jaune. Empr. de l'esp. vomito
negro, littéral. « vomissement noir ». On
VOLTE-FACE, 1654; surtout avec le sait que cette maladie est particulièrement
verbe faire. Empr. de l’it. volta faccia, répandue dans les pays tropicaux de l’'Amé-
littéral. « tourne face », comp. de volia, rique.
impér. de voliare « tourner », et de faccia
« face ». VORACE, 1603 ; voracité, xive. Empr.
du lat. vorax, voracitas (de vorare « dévo-
VOLTIGER, 1532. Empr. de l’it. wol- rer).
leggiare « faire de la voltige », dér. de
volta. — Dér. : voltige, 1544 ; rare avant le VOTE, 1702, devenu usuel à la fin du
XIX° s.; voltigeur, 1534 (Rab.), pris sous xvies.; Voter, 1704. Empr. de l’angl. vote
Napoléon Ier pour désigner les soldats (du lat. votum « vœu »), to vole. — Dér. du
d'une compagnie d'élite qui, dans chaque verbe : votant, 1762 ; votation, 1789.
bataillon, étaient destinés à se déplacer VOTIF, 1636, une 1re fois en 1374. Empr.
rapidement, repris en 1917-18. du lat. votivus (de votum « vœu »).
VOLUBILE, 1812, comme terme de bo- VOTRE, VÔTRE. Lat. pop. vosier, at-
tanique ; se dit aujourd’hui de la parole; testé à basse ép., réfection du lat. class.
relevé au xvies. en parlant de la mer ou de vester, d’après nosier « notre », vos « Vous ».
la queue du faucon. Volubilité, 1487, au
sens de « mouvement facile » ; en 1522, en VOUER, v. vœu.
parlant de l'instabilité de la Fortune; VOULOIR. Lat. pop. *volére, réfection
se dit de la parole, depuis la fin du xvires., du lat. class. velle d’après les autres formes
d’abord volubilité de la langue, 1547 (Bo- à radical vol- : volo « je veux », volui « je
din), d’après le lat. volubilitas linguae. voulus », etc., et d’après le verbe *poiëre
Empr. du lat. volubilis « qui tourne aisé- « pouvoir » (mais esp. port. querer, du lat.
ment », d’où « rapide (en parlant de la quaerere). — Dér. et Comp. vouloir,
parole) », volubilitas « mobilité, facilité subst., xi1°; revouloir, id.; bienveillant,
de la parole » (de volvere « tourner »). XII*, malveillant, id., d’où bienveillance,
VOLUBILIS, xve. Empr. du lat. des id., mal-, id. ; comp. avec l’anc. part. prés.
botanistes volubilis, tiré de l’adj. volubilis veuillant, qui a été maintenu sous cette
pour désigner le liseron. forme dans ces quatre mots jusqu'au
XVII® S.
VOLUME, xurie. Empr. du lat. volumen
« rouleau (de feuilles écrites) » d’où « livre », VOUS. Lat. vos. Vous, forme développée
propr. « repli, ete. » (de volvere « tourner ») ; en position inaccentuée, est seule usitée
le sens de « développement, ampleur du depuis les premiers textes. Vous de poli-
corps », formé en fr., apparaît à la fin du tesse, qui s’est développé sur le modèle de
XIV® s. (Froissart), d’où l'emploi du mot nous de majesté, existe ou a existé partoul
en géométrie. — Dér. : volumineux, 1739, (sauf peut-être en roumain) ; aujourd'hui
d’après le lat. de basse ép. voluminosus il est, dans les autres langues, souvent
« qui a de nombreux replis » pour servir concurrencé par d’autres tours. — Dér. :
d’adj. à volume au sens d’ « ampleur du vousoyer, xXIX°; auparavant voussoyer,
corps ». X1V® (sous la forme vosier).
VOLUPTÉ, xiv° ; voluptueux, xive, Em- VOUSSOIR, 1213; VOUSSURE, vers
pr. du lat. voluptas « plaisir, volupté », 1150. Lat. pop. *volsorium, *volsüra, dér.
voluptuosus. d’un part. *volsus, au lieu du lat. class
VOLUTE, 1545. Empr. de lit. voluta, volutus (de volvere « rouler »), v. le suiv.
empr. lui-même du lat. des architectes VOÛTE. Lat. pop. *volvita, fém. pris
voluta, fém. pris substantiv. de volutus, substantiv. d’un part. *volvitus, au lieu du
part. passé de volvere « rouler ». lat. class. volutus (de volvere « rouler »), v. le
679 VULVE

préc. Plus spécialisé en fr. que dans les connaissent que ver) ; cetempr. est dû à la
langues voisines où volvere a également recherche d’un mot nouveau, plus expressif
survécu : it. volta, v. volte, volgere « tour- que ver, cf. voire; cette raison explique
ner, etc. », esp. vuelta « tour, repli, etc. », aussi que verai ait remplacé en fr. le repré-
volver « tourner, etc. », a. pr. volia « tour, sentant du lat. class. verus, voir, usuel au
chant, voûte, etc. », voluer « tourner » ; au moyen âge ; l'esp. a également remplacé
contraire l’a. fr. voldre a été peu usité et vero par un nouvel adj. verdadero. — Comp. :
a rapidement disparu. — Dér. : voûter, vraisemblable, 1266, calqué sur le lat.
XIIIe. verisimilis, invraisemblable, 1767, vraisem-
blance, 1358, invraisemblance, 1763.
VOYAGE. Lat. viäaticum (de via « voie,
route »), propr. « argent pour un voyage », VRILLE. D'abord veille, encore usité au
puis « provisions de voyage », d'où « chemin xvi® s., d’où le dér. villelte, 1376, encore
à parcourir » dans le lat. de la Gaule. Seu- usité aujourd’hui en lorrain. Lat. viticula
lement gallo-roman, lit. viaggio et l'esp. « vrille de la vigne », d’où est sorti en fr.
viaje étant empr. du prov. Signifie au le sens de « vrille, outil de fer à vis », dit
moyen âge surtout « pèlerinage » et « croi- par comparaison. L’r de vrille paraît venir
sade » (de là aussi « expédition militaire » de la famille de virer, cf. viron au sens de
en général). Les voyages au sens moderne « vis » dans de nombreux parlers du Midi ;
étant très rares au moyen âge le sens actuel une forme *virille a pu disparaître rapide-
ne paraît que vers la fin du xv° s. Au ment par dissimilation, mais on ne peut
moyen âge encore le sens de « trajet que pas faire état de verilho de la région limou-
fait un bateau, course que fait une char- sine, qui est probablement récent. It. vitic-
rette pour transporter des marchandises chio « vrille de la vigne, bourgeon », esp.
ou des matériaux », d’où au xvi® s. « allée bedija « flocon de laine, etc. ».
et venue d’un endroit à un autre », de là
enfin le sens de « fois », encore très vivant VROMBIR « bourdonner (d’abord des
en franco-provençal et dans beaucoup de insectes, ensuite des avions) », fin xixe®,
parlers du Midi. — Dér. : voyager, 1430; cf. frombir dans l'Yonne, vronder dans la
voyageur, vers 1470. Moselle ; une de ces nombreuses onoma-
topées avec voyelle nasale, qui servent à
VOYELLE, xve s. Tiré de l’adj. a. fr. rendre un bourdonnement. — Dér.
voieul « vocal », xir1e (J. de Meung), refait vrombissement, id.
d’après le plur. voieus ; du lat. vocalis;
le subst. voieul se trouve dans Br. Latini VULCANISER, 1847; -isation, 1853.
et à partir de Deschamps; modifié en Empr. de l’angl. {o vulcanize, -ization, mots
voyel au xv® s., il devient fém. au xv°, tirés du nom du dieu Vulcain, en angl.
sous l'influence de consonne. Vulcan, par Brockedon, ami du chimiste
anglais Hancock qui découvrit le procédé
VOYER. Lat. vicarius, v. vicaire et vi- en 1843.
guier. À désigné d’abord un officier de jus-
tice, jusqu’au xvi*s., et en outre, de bonne VULGAIRE, 1452, mais l’adv. vulgaire-
heure, un officier chargé de la police des ment est déjà attesté au x1r1° s. (écrit alors
voies et chemins (ce qui a suggéré la fausse -arement) ; vulgarité, 1800 (Mme de Staël),
étymologie viarius d'après via « voie ») ; une première fois 1495. Empr. des mots
de là agent voyer, nom d’un agent institué lat. vulgaris (de vulgus « le commun des
en 1836. — Dér. : voirie ; d’abord voierie, hommes »), vulgaritas (créé à basse ép.). —
vers 1170, propr. « fonction de voyer », Dér. de vulgaire, d’après le lat. vulgaris :
d’où « dépôt où l’on jette les ordures, etc. », vulgariser, 1512, rare avant le xix® s$.;
xv®, ce qui a rapproché le mot de voie. -isateur, 1836, -isation, 1872.
VOYOU, v. voie. VULGATE, fin xvie (d'Aubigné : La
version vulgate). Empr. du lat. eccl. (ver-
VRAC. S'emploie seulement dans la lo- sio) vulgata (de vulgare « répandre dans
cution en vrac, 1606, qui ne s’appliquait le public »).
jusqu’au xvir® s. qu’à des harengs non
rangés dans la caque. Empr. du néerl. VULNÉRAIRE, xvie (Paré). Empr. du
wrac, wraec « mal salé, mauvais », en par- lat. vulnerarius « relatif aux blessures », en
lant du hareng, cf. varech; cf. aussi, vue d’un sens spécial.
de 1435 au xvre s., hareng waracq « hareng
de mauvaise qualité ». VULPIN, terme de botanique, 1778. Em-
pr. du lat. vulpinus « de renard » pour dési-
VRAI. D'abord verai, jusqu’au xri° s. gner une plante appelée queue-de-renard
Un lat. pop. *véräcus, au lieu du lat. class. dans les parlers.
vérax, ne convient qu'au fr., l’a. pr. verai
en est emprunté (les plus anciens textes ne VULVE, 1488. Empr. du lat. vulva.
W
WAGON, 1826; concurrencé aujour- l’aide de watt, unité de puissance, surtout
d’hui par voiture. Empr. de l’angl. waggon électrique (tiré de J. Waït, nom du célèbre
« chariot »; a été pris pour désigner les physicien écossais, 1736-1819) et de l’angl.
voitures de chemin de fer parce qu'il avait man « homme » ; watlman n'existe pas en
été empr. antér. pour désigner des chariots anglais.
pour le transport de la houille, 1780 ; déjà
signalé en ce sens au xvri® s. dans un récit WEEK-END, 1906. Mot angl. signifiant
de voyage en Angleterre ; mais l’angl. se « fin (end) de la semaine (week) », popu-
sert du mot car au sens du fr. wagon. — larisé en France à propos des week-ends
Dér. et Comp. : wagonnet, 1872 ; wagon- des ministres anglais ; le week-end des
lit, 1875 (traduction de l’angl. sleeping-car, banques, maisons de commerce, etc., a de
qui se dit aussi en français depuis 1872, son côté amené la création du français
d’où par abréviation sleeping); wagon- semaine anglaise.
restaurant, 1873 ; wagon-salon, 1864, d’a- WESTERN, 1919. Empr. de l’angl.
près l’angl. saloon-car. weslern « occidental » pour désigner les
WARRANT, 1671, à propos de choses films qui sont censés montrer la vie
d'Angleterre ; devenu usuel, comme la pra- mouvementée dans l'Ouest des Etats-
tique elle-même, au milieu du xixe s. Unis.
Empr. de l'angl. warrant, lui-même de WHARF, 1833 (sous la forme plurielle
l’a. fr. warant, autre forme de garant. wharves de l’angl.). Empr. de l’angl. wharf,
WATER-CLOSET, 1816, dans un texte mot d’origine germ.
traitant de l'Angleterre ; devenu usuel vers
le milieu du siècle ; souvent désigné par WHIG, 1704. Mot angl. d’origine his-
l’abréviation w.-c., de là les prononciations torique, cf. dory.
vécé où double vécé. Empr. de l’angl. water- WHISKY (aussi whiskey), 1777. Empr.
closel (de waler « eau » et de closel « cabi- de l’angl. whisky, whiskey, empr. lui-même
net », empr. lui-même de l’a. fr. closet,
de l’irl. uisce, abréviation de uisce-beatha
dim. de clos), c’est-à-dire « cabinet à eau » ; « eau (uisce) de vie (beatha) », abrégé en
abrégé parfois en water. uisce.
WATER-POLO, 1896. T. de sport, empr.
de l’anglais. V. aussi polo. WHIST, 1687; on trouve aussi wisk,
1758, encore relevé en 1798. Empr. de
WATERPROOF, 1775. Empr. de l’angl. l’angl. whist, d'abord whisk. — Dér.
walerproof, littéral. « qui est à l'épreuve whister, fin xixe; whisteur, 1773.
(proof) de l’eau fwalter) ».
WATT, v. le suiv. WIGWAM, 1688. Empr. de l’angl. wig-
wam, lui-même pris à un parler indien de
WATTMAN, 1897. Mot artificiellement l'Amérique du Nord, cf. l’algonquin wiki-
formé au sens de « homme de watt », à wam.

X
XÉNOPHOBE, fin xixe. Fait avec le XYLO-. Premier élément de mots sav.
grec æenos « étranger » et -phobe, v. -phobe. comp. tels que xylographie, 1771, xylo-
—— Dér. : -ie, « id. ». phone, 1872, du grec æylon « bois ».
Y
Y, adverbe de lieu; a pris au cours de YATAGAN, 1787. Empr. du turc yäté-
l'histoire des emplois pronominaux. La ghân.
forme iv des Sermenis de Strasbourg repré-
sente un lat. pop. £bï (en lat. class. bi) YEARLING, 1868. Empr. de l’angl. year-
avec un ? dû à l’? final ou à hïc « ici », ling « d’un an (year) ».
cf. aussi it. ivi; mais y continue hic, YEUSE, 1552. Empr. du Prov. euze,
comme l’a. pr. à, l'esp. y, le cat. hi. La mascC., lat. d'origine dialectale elex, en lat.
forme iv a perdu son -v devant consonne class. Zlex, fém. (d’où aussi it. elce).
et a été absorbée ainsi par y. YOGI, 1842. Empr. du sanserit yogin
YACHT, 1572. Empr. du néerl. jachi «celui qui pratique le yoga »; yoga signifie
d’où vient aussi l’angl. yacht (mot de la € connexion »,
famille de l’all. jagen « chasser »). On a YOLE, 1713 ; d’abord aussi iole, avant
empr. aussi le comp. yachtman, 1859, et 1733 (iole de Norvège), iol, 1722. Empr.,
le dér. yachting, id. par l'intermédiaire du néerl. jol, bas all.
YAK, sorte de buffle, 1791. Empr. du jolle, du mot danois-norvégien jolle : aussi
tibétain gyak, probabl. par l'intermédiaire angl. yawl.
de l’angl. yak. YOUYOU, canot léger, d’abord spéciale-
YANKEE, 1776. Mot anglo-américain, at- ment chinois, 1831. Etymologie obscure,
testé en 1765, dont l’origine est incertaine. probabl. d’un dialecte chinois.
YAOURT, vers 1910. Empr. du bulgare YPRÉAU, 1432. Dér. d'Ypres, nom
jauri ; une variante bulgare, jugurt, appa- d’une ville de Belgique où cette espèce
raît dans des descriptions de voyage franc. d’orme est partic. abondante et belle.
sous la forme yogourt en 1432, jocourt en YUCCA, 1555. Empr. de la langue des
1657. Le yaourt à été introduit en France Arouaks d'Haïti, par l'intermédiaire de
par Metchnikoff. l'esp. yuca.

Z
ZAGAIE, v. sagaie. et en port. le mot zebro, -a désignait jus-
ZANI, 1550 ; zanni est plus rare. Empr. qu'au xvi® s. l’âne sauvage, qui disparut
du vénitien zani, forme familière de l’it, vers ce temps. Les Portugais appliquèrent
Giovanni « Jean » ; v. arlequin. alors ce nom à ce cheval africain. L’esp.
cebra vient du lat. equiferus « cheval sau-
ZANZIBAR, fin xixe, Nom d'un jeu de vage » (de equus et ferus « sauvage »). —
dés, tiré de Zanzibar, nom d’une région de Dér. : zébré, 1831 ; zébrure, 1845.
l'Afrique orientale pour une raison indé-
terminée, d’où, par abréviation, zanzi. ZÉBU, xviie (Buffon : « On le montrait
à la foire à Paris en 1752 sous le nom de
ZAZOU, 1922, surnom donné à un jeune zébu : nous avons adopté ce nom »). On
homme d’une certaine mollesse d’esprit et ne sait pas où les montreurs de cet animal
de caractère, après avoir servi à désigner ont pris ce mot.
la jeunesse excentrique passionnée de la ZÈLE, xvie, une première fois au xrie 8.
danse. Mot créé pour dépeindre la mol- (écrit zel) ; zélateur, 1398. Empr. des mots
lesse des individus en question, peut-être du lat. de basse ép. et surtout eccl. zelus
déformation zézayante de Jean. « émulation » (du grec zélos « ardeur,
ZÈBRE, 1600. Fr. Drake, dans sa rela- zêle, etc. »), zelalor « qui aime d’un amour
tion de voyage, prétend avoir entendu ce jaloux » (du verbe zelare). — Dér. de zèle :
mot de la bouche d’indigènes du Congo. zélé, 1521.
Mais le mot n’a pas été retrouvé dans les ZÉNITH, xive (Oresme, sous la forme
langues de cette région. Du reste l’animal cenith). Altération de l'arabe sami « che-
était connu des Espagnols et des Italiens min », lu par erreur par les scribes du
longtemps avant le voyage de Drake; il moyen âge senit ; sami au sens de « zénith »
vit aussi dans l'Afrique du Nord. En esp. s’employait ordinairement dans l’expres-
ZÉNITH 682

sion sami ar-râs « Chemin (au-dessus) de que ce métal prend, en sortant dans les
la tête » opposé au nadir. Le même mot fourneaux du minerai, la forme de proé-
arabe sous la forme as-samit « le chemin » minences. — Dér. : zinguer, 1839, d’où
a donné le terme d'astronomie azimut, zingage, 1838, zingueur, id.
XvI®. — Dér. : zénithal, 1612 (écrit -éal).
ZINZOLIN, « couleur violet rougeâtre
ZÉPHYR, 1509 (Marot qui écrit ze- tirée de la semence de sésame », 1617,
phyre). Empr. du lat. zephyrus (du grec d’abord zizolin, 1599 ; en outre gingeollin,
zephyros). 1642. Empr. de l’it. giuggiolino, zuzzulino,
ZÉRO, 1485; déjà en 1512 au sens empr. lui-même, par l'intermédiaire de
d’ « homme nul ». Empr., quand chiffre, qui l'esp. ajonjoli, de l'arabe d’Espagne
signifiait d’abord « zéro », a pris le sens mo- djoudjolän « semence de sésame ».
derne, de l’it. zero, 1494, d’abord zefiro,
ancienne transcription de l’arabe sifr, qui a ZIZANIE, vers 1400. Empr. du lat. eccl.
pu se maintenir à côté de cifera (v. chiffre) zizania (du grec eccl. zizania, mot d’ori-
en raison de la différence de sens des deux gine sémitique, qui signifie « ivraie »); a
formes. pris le sens de « mésintelligence » dans la
locution semer la zizanie d'après la para-
ZEST, 1611. Onomatopée. On dit aussi bole de l’ivraie, cf. Matthieu, XIII, 25,
depuis le xvirre s. entre le zist et le zest. et sq.
ZESTE, 1611 (écrit zesi); antér. zec, ZODIAQUE, vers 1240. Empr. du lat.
1530. Si zec a été usuel, zeste pourrait être zodiacus (du grec zédiakos, de zôdion « fi-
une altération d’après baste ou le préc., le gure du zodiaque », diminutif de zéon
zeste étant une chose de peu de valeur. « être vivant, figure dans un tableau »). —
ZÉZAYER, 1832. Onomatopée; on a Dér. : zodiacal, vers 1500.
dit aussi susseyer à la même ép. — Dér. : ZOÏLE, 1537. Empr. du lat. Zoilus (du
zézaiement, 1838.
grec Zôilos, nom d’un critique d’Alexan-
ZIBELINE, 1534 (Rab.), cf. déjà 1396 drie, détracteur d'Homère) ; pris déjà au
sibeline, 1298 gibaline, xv° s. martres zebe- sens figuré en lat.
lines et soub-. Empr. de l’it. zibellino, qui
est d’origine slave, comme le fr. sable, et ZONA, 1810. Empr. du lat. zona « cein-
de même formation que l’a. fr. sebelin et ture ».
l’a. pr. sebelin, qui signifient tous deux
« zibeline »; mais le rapport des trois ZONE, 1119 ; rare avant le xvies. Empr.
formes n’est pas exactement déterminé. du lat. zona, propr. « ceinture » (du grec
zônêé « id. ») comme terme d’astronomie ou
ZIEUTER, v. œil. de géographie ; cette deuxième valeur se
ZIG, 1837 (Vidocq) ; on écrit aussi zigue. trouve également en grec. — Dér. : zonier,
Mot pop., déformation de gigue (v. gigot) fin xix°, de zone (militaire) «terrain compris
qui avait au xvirie s. aussi le sens de « fille dans les fortifications militaires de (Paris) ».
enjouée ». La substitution de zi- à gi- ironise ZOO-. Premier élément de mots sav.
un défaut de prononciation de certains comp., tels que zoologie, 1750, tiré du
individus. — Dér. : zigoteau, fin xIxe. grec zéon « être vivant, animal », ou de
ZIGOUILLER, 1923. Dér. de la 1re par- mots empr., tels que zoophyte, 1546 (Rab.).
tie du mot zigzag, à cause du mouvement
de va-et-vient que fait le meurtrier avec ZOUAVE, 1830. Empr. de zwdwa, nom
le couteau. Comp. angevin zigailler «couper propre d’une tribu kabyle, pour désigner
mal », saintongeais zigue-zigue « mauvais un corps d'infanterie formé avec des hom-
couteau ». mes levés en Algérie.
ZIGZAG, 1662. Désigne d’abord une ZOZOTER, fam. « zézayer », fin xixe.
petite machine composée de tringles mo- Création onomatopéique.
biles et disposées en losange, qui s’al-
longent ou se resserrent suivant le mou- ZUT, 1833. Exclamation de même
vement qu’on lui donne par deux branches origine que Zest, v. ce mot, avec un u
servant à la tenir. Mot expressif du type qui peut venir de flûte, employé au même
tic-tac, dans lequel la variation de la voyelle sens.
avec la conservation des consonnes, dépeint
le va-et-vient d’un mouvement identique ZYGOMA, xvie (Paré; parfois sous la
dans sa répétition. — Dér. : zigzaguer, forme zygome, depuis 1694). Empr. du lat.
1842. scienti'ique zygoma (du grec zygôma, de
même sens, propr. « jonction », de la famille
ZINC, 1666. Empr. de l’all. Zink, iden- de zygon « joug, ce qui sert à joindre »). —
tique avec all. Zinken « fourchon », parce Dér. : zygomatique, 1654.
1964. — Imprimerie des Presses Universitaires de France. — Vendôme (France)
ÉDIT. N° 27 838 IMPRIMÉ EN FRANCE IMP. N° 18 235
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