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DOI : 10.4000/books.psorbonne.40783
Éditeur : Éditions de la Sorbonne, École française de Rome
Année d'édition : 2018
Date de mise en ligne : 13 février 2020
Collection : Histoire ancienne et médiévale
ISBN électronique : 9791035105648
http://books.openedition.org
Édition imprimée
Date de publication : 17 mai 2018
ISBN : 9791035100452
Nombre de pages : 418
Référence électronique
BOUCHERON, Patrick (dir.) ; FOLIN, Marco (dir.) ; et GENET, Jean-Philippe (dir.). Entre idéel et matériel :
Espace, territoire et légitimation du pouvoir (v. 1200-v. 1640). Nouvelle édition [en ligne]. Paris : Éditions de
la Sorbonne, 2018 (généré le 15 février 2020). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/
psorbonne/40783>. ISBN : 9791035105648. DOI : 10.4000/books.psorbonne.40783.
I La légitimité implicite
II Vérité et crédibilité : la construction de la vérité dans le système de
communication de la société occidentale (xiiie-xviie siècle)
III Valeurs et systèmes de valeurs (Moyen Âge et Temps modernes)
IV The Languages of Political Society. Western Europe, 14th-17th Centuries
(publié sous la direction d’Andrea Gamberini, Jean-Philippe
Genet, Andrea Zorzi, Rome, Viella, 2011)
V Immagini, culti, liturgie : le connotazioni politiche del messaggio
religioso / Images, cultes, liturgies : les connatations politiques du
message religieux (publié sous la direction de Paola Ventrone et
Laura Gaffuri dans les Annali di storia moderna et contemporanea,
16, 2010, p. 107-482)
VI Marquer la prééminence sociale
VIII Marquer la ville. Signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie-xvie siècle)
IX De Dante à Rubens : l’artiste engagé
X Église et État, Église ou État ? Les clercs et la genèse de l’État moderne
XI Consensus et représentation
XII La naissance du concept de constitution
XIII Vecteurs de l’idéel et mutations des sociétés politiques
XIV Pouvoir symbolique et sémantique de l’État : conclusions
Histoire ancienne et médiévale – 152
sous la direction de
Patrick Boucheron, Marco Folin
et Jean-Philippe Genet
ISBN : 979-10-351-0045-2
ISSN : 0290-4500
Les opinions exprimées dans cet ouvrage n’engagent que leurs auteurs.
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patr ick boucheron, m a rco folin et je a n-philippe genet
5. L. Gaffuri, P. Ventrone (dir.), Immagini, culti, liturgie : le connotazioni politiche del messagio
religioso. Images, cultes, liturgies : les connotations politiques du message religieux, dans les Annali
di Storia moderna e contemporanea, 16, 2010, réimprimé en 2014 : L. Gaffuri, P. Ventrone
(dir.), Images, cultes, liturgies : les connotations politiques du message religieux, Paris/Rome,
Publications de la Sorbonne/École française de Rome (Le pouvoir symbolique en Occident
[1300-1640], 5), 2014.
6. A. Gamberini, J.-P. Genet, A. Zorzi (dir.), The Languages of Political Society. Western Europe,
14th-17th Centuries, Rome, Viella, 2011 ; il n’est pas prévu de réimprimer ce volume, déjà dispo-
nible en e-book, dans la collection dont il forme virtuellement le volume 4.
7. J.-P. Genet, I. Mineo (dir.), Marquer la prééminence sociale, Paris/Rome, Publications de la
Sorbonne/École française de Rome (Le pouvoir symbolique en Occident [1300-1640], 6), 2014.
8. J.-P. Genet (éd.), Rome et l’État moderne européen, Rome, École française de Rome (Collection
de l’École française de Rome, 377), 2007.
9. Id., F. Foronda, J. M. Nieto Soria (dir.), Coups d’État au Moyen Âge ? Aux fondements des
pouvoirs politiques en Europe au Moyen Âge, Madrid, Casa de Velázquez (Collection de la Casa
de Velázquez, 91), 2005.
10. F. Foronda (dir.), Avant le contrat social. Le contrat politique dans l’Occident médiéval (xiiie-
xve siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, 2011.
11. V. Challet et al. (éd.), La sociedad politica a fines del siglo XV en los reinos ibéricos y en Europa.
La société politique à la fin du xve siècle dans les royaumes ibériques et en Europe, Paris/Valladolid,
Publications de la Sorbonne/Universidad de Valladolid, 2007.
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Avant-propos
État : il était en outre dédié à Hélène Millet qui, au sein de notre laboratoire,
le LAMOP, a œuvré inlassablement sur cette problématique à laquelle elle
a fait accomplir des progrès décisifs 12. Les autres colloques constitueront les
volumes 9, 11 et 12 de la collection Le pouvoir symbolique en Occident (1300-
1640) : Patrick Boucheron et Étienne Anheim ont organisé en septembre 2012
le colloque intitulé De Dante à Rubens : l’artiste engagé, à Versailles et à Saint-
Quentin-en-Yvelines ; Jean-Philippe Genet, Dominique Le Page, Olivier
Mattéoni et Mireille Touzery ont organisé en mars 2013 à Dijon un colloque
sur Consensus et représentation 13, tandis que Jean-Philippe Genet et François
Foronda ont organisé à la Casa de Velázquez à Madrid en janvier 2014 la
dernière rencontre du programme SAS, La naissance du concept de constitution.
Des chartes aux constitutions.
Grâce à la Scuola Normale Superiore et au président de la Classe acadé-
mique des lettres et de philosophie, le professeur Michele Ciliberto, que nous
remercions pour leur hospitalité, les travaux se sont déroulés dans le cadre pres-
tigieux du Palazzo della Carovana, dont les fenêtres ouvrent sur la magnifique
Piazza dei Cavalieri : le lieu s’accordait idéalement avec l’objet de la rencontre.
Des remerciements particuliers sont dus à Matteo Ferrari qui a veillé à tous les
détails matériels de l’organisation. Comme les rencontres qui l’ont précédée,
celle-ci a bénéficié du précieux soutien de l’École française de Rome : que
Stéphane Gioanni et Grazia Perrino trouvent ici l’écho de notre gratitude. Pour
des raisons indépendantes de notre volonté, il n’a pas été possible de publier ici
les communications de Mauro Mussolin, « Ponti, fortificazioni, strade : dimen-
sione territoriale e funzione comunicativa nei disegni di Michelangelo », et de
Fleur Marçais, « Tra paesaggio e territorio. Baccio del Bianco, ingegnere dei
Capitani di Parte Guelfa, al servizio del Granducato di Toscana nella prima
metà del Seicento ».
Laurent Tournier et les Éditions de la Sorbonne ont réalisé avec leur cou-
tumière compétence la préparation du volume, avec le concours précieux de
Clémence de Clavière et de Pierre Cousseau : que tous trouvent ici l’expression
de notre reconnaissance.
Enfin, nous tenons à évoquer la mémoire de Maria Monica Donato. Elle
a joué un grand rôle dans la préparation de cet atelier qui doit beaucoup aux
problématiques qu’elle a développées dans ses travaux : l’atelier s’est d’ailleurs
12. C. Barralis et al. (dir.), Église et État, Église ou État ? Les clercs et la genèse de l’État moderne.
Hommage à Hélène Millet, Paris/Rome, Publications de la Sorbonne/École française de Rome
(Le pouvoir symbolique en Occident [1300-1640], 10), 2014.
13. J.-P. Genet, D. Le Page, O. Mattéoni (dir.), Consensus et représentation, Paris/Rome, Publi
cations de la Sorbonne/École française de Rome (Le pouvoir symbolique en Occident [1300-
1640], 11), 2017.
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déroulé quelques mois après la belle exposition Dal Giglio al David : arte civica
a Firenze fra Medioevo e Rinascimento, à l’organisation de laquelle elle avait
collaboré avec Cristina Acidini, la surintendante pour le Patrimoine historique,
artistique et ethno-anthropologique de Florence. Elle avait prévu de donner à
l’atelier une communication et devait présider l’une de ses sessions. La maladie
en a décidé autrement, même si avec un courage exemplaire, elle a tenu à
honorer la rencontre de sa présence. Ce volume lui est dédié.
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Introduction
jean-philippe genet
C’est au thème de l’espace que nous avons souhaité revenir lors de ce col-
loque de Pise, un thème qui avait déjà été abordé à Rome en 2009, mais
obliquement, en s’attachant au marquage symbolique de l’espace urbain et de
ses composantes 1. Le parcours de cette précédente rencontre ne sera recoupé
qu’incidemment. Il était d’ailleurs impossible de l’éviter, puisque nous nous
occupons avant tout des signes et de leurs fonctions symboliques, et que toutes
les constructions et toutes les dispositions spatiales volontaires sont autant de
signes adressés à tous ceux qui les voient, qu’ils vivent dans leur environnement
ou qu’ils les parcourent en visiteurs. De tous ces bâtiments, le plus riche en
portée symbolique pour toute la période que nous étudions est évidemment
l’église 2, mais depuis les palais royaux et impériaux du haut Moyen Âge, la
gamme des monuments laïcs n’a cessé de s’enrichir et de se diversifier et nous
en rencontrerons de toutes sortes dans ces pages, et pas seulement dans celles
qui se présentent comme explicitement consacrées à ces monuments que sont
les mausolées dynastiques et les palais communaux.
Au cœur du projet Signs and States se trouve le pouvoir symbolique et donc
les signes par lesquels il s’exprime : moins que les signes dans l’espace, ce sont
les signes de l’espace qui ont été l’objet principal des préoccupations à Pise,
notamment dans leurs rapports avec l’expression du pouvoir et plus particu-
lièrement celle du pouvoir symbolique. Dans la plupart des cas, l’enquête a
été menée en partant du signe, du marquage – pour reprendre le terme que
nous avions employé à Rome. Il s’est agi aussi bien des signes perceptibles et
perçus dans l’espace, que des signes qui servent à la représentation de l’espace,
1. P. Boucheron, J.-P. Genet (dir.), Marquer la ville : signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie-
xvie siècle),
Paris/Rome, Publications de la Sorbonne/École française de Rome (Le pouvoir
symbolique en Occident [1300-1640], 8), 2013.
2. Voir D. Iogna-Prat, La Maison Dieu : une histoire monumentale de l’Église au Moyen Âge, Paris,
Seuil, 2006.
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mais il convient de rappeler avant toute chose et contre nos intuitions les
plus élémentaires que la notion d’espace n’est pas une donnée objective de la
conscience et qu’elle n’a rien de naturel, mais qu’elle est une construction 3, ou
plutôt une production, pour emprunter l’expression d’Henri Lefebvre 4, qui
pense avant tout à sa production sociale : la perception d’un espace comme
surface homogène et mesurable qui appartient à notre sens commun est en
complète rupture avec celle des hommes du Moyen Âge et n’a émergé que
graduellement entre le xiiie et le xviiie siècle.
C’est précisément cette rupture qui explique que les médiévistes ont montré
un intérêt particulier pour l’espace, privilégiant notamment deux approches
qu’il faut bien sûr mettre en rapport l’une avec l’autre, les pratiques de l’espace
et les représentations de l’espace 5. Pour ce dernier aspect, un ouvrage récent
fait ainsi le point de façon très complète sur le problème des représentations
de l’espace au Moyen Âge 6, mais il a paru trop tard pour que les participants
à la rencontre de Pise aient pu en faire usage, à l’exception d’Emmanuelle
Vagnon, qui en est l’un des auteurs 7. Quant aux pratiques de l’espace, la diver-
sité des points de vue envisageables est bien mise en évidence dans les mélanges
d’histoire médiévale récemment offerts à Monique Bourin, notamment les
problèmes soulevés par l’écriture de l’espace, c’est-à-dire par la façon dont les
textes rendent compte de la dimension spatiale 8. L’un des intérêts de ces tra-
vaux est l’analyse du vocabulaire latin, qui met en évidence la distinction entre
spatium, un mot qui désigne le plus souvent un intervalle, un espace entre deux
bornes, et locus, le lieu où l’on est, et démontre a contrario l’absence du sens
dans lequel nous utilisons le mot « espace » pour désigner un espace continu et
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Introduction
9. Voir en particulier J.-C. Schmitt, « “De l’espace aux lieux” : les images médiévales », dans
Construction de l’espace au Moyen Âge…, op. cit., p. 317-346, et E. Grélois, « Habitans, com-
morans, parrochianus, residens : “habiter” en Basse-Auvergne de l’an mil au xive siècle. Étude
sémantique », dans D. Boisseuil et al. (éd.), Écritures de l’espace social…, op. cit., p. 117-138.
10. A. Guerreau, « Quelques caractères spécifiques de l’espace féodal européen », dans N. Bulst,
R. Descimon, A. Guerreau, L’État ou le roi. Les fondations de la modernité monarchique en France
(xive-xviie siècles), Paris, Éd. de la Maison des sciences de l’homme, 1996, p. 83-101 ; voir aussi id.,
« Il significato dei luoghi nell’Occidente medievale : struttura e dinamica di un “spazio” specifico »,
dans E. Castelnuovo, G. Sergi (dir.), Arti e storia del Medioevo, Turin, Einaudi, 2002, p. 201-239,
et id., « Structures et évolution des représentations de l’espace dans le haut Moyen Âge occiden-
tal », dans Uomo e spazio nell’alto Medioevo, Spolète, Centro italiano di studi sull’alto Medioevo
(Settimane di studio del Centro italiano di studi sull’alto Medioevo, 50), 2003, p. 91-115.
11. R. Fossier, Enfance de l’Europe, xe-xiie siècles, Paris, Presses universitaires de France (Nouvelle
Clio, 17), 1982, vol. 1, p. 288-601.
12. Ibid., vol. 1, p. 393 ; P. Toubert, Les structures du Latium médiéval : le Latium méridional et la
Sabine du ixe à la fin du xiie siècle, Rome, École française de Rome (Bibliothèque des Écoles fran-
çaises d’Athènes et de Rome, 221), 1973, vol. 1, p. 303-447. Mais depuis sa thèse, avec le concours
de nombreux historiens et archéologues, P. Toubert a considérablement élargi le concept de
castrum et de seigneurie castrale en même temps qu’il a étendu son enquête à l’ensemble du
monde méditerranéen et même au-delà : voir L’incastellamento, Actes des rencontres de Gérone
(26-27 novembre 1992) et de Rome (5-7 mai 1994), Rome, École française de Rome (Collection
de l’École française de Rome, 241), 1998, avec la mise au point de P. Toubert, « L’incastellamento
aujourd’hui : en marge de deux colloques », p. XI-XVIII, et les volumes de la série Castrum :
A. Bazzana, P. Guichard, J.-M. Poisson (éd.), [Castrum 1]. Habitats fortifiés et organisation de
l’espace en Méditerranée médiévale, Lyon, Maison de l’Orient, 1983, et vol. 2-8, Rome/Madrid,
École française de Rome/Casa de Velázquez, 1988-2008 : G. Noyé (éd.), Castrum 2. Structures de
l’habitat et occupation du sol : les méthodes et l’apport de l’archéologie extensive [1988] ; A. Bazzana
(éd.), Castrum 3. Guerre, fortification et habitat dans le monde méditerranéen au Moyen Âge
[1988] ; J.-M. Poisson (éd.), Castrum 4. Frontière et peuplement dans le monde méditerranéen au
Moyen Âge [1992] ; A. Bazzana (éd.), Castrum 5. Archéologie des espaces agraires méditerranéens au
Moyen Âge [1999] ; id., É. Hubert (éd.), Castrum 6. Maisons et espaces domestiques dans le monde
méditerranéen au Moyen Âge [2000] ; J.-M. Martin (éd.), Castrum 7. Zones côtières littorales dans
le monde méditerranéen au Moyen Âge : défense, peuplement, mise en valeur [2001] ; P. Cressier,
P. Toubert (éd.), Castrum 8. Le château et la ville : espaces et réseaux [2008].
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Introduction
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aussi citer les travaux des chercheurs toulousains, beaucoup plus tournés vers
l’espace agraire et son utilisation concrète mais qui, en adoptant une démarche
pluridisciplinaire, posent aussi des questions théoriques importantes 24. Enfin,
une vision synthétique très pertinente de la structuration sociale de la société
féodale – y compris dans sa dimension symbolique – a été présentée à partir
de ses travaux et de sa propre vision globale par Jérôme Baschet 25.
Mais cette vision d’un espace hétérogène organisé autour de pôles discon-
tinus a été remise en cause, ou plutôt complétée, par la prise de conscience de
l’importance croissante d’une autre notion, celle de territoire. Le problème de
la rencontre entre cet espace polarisé et le territoire a été posé avec une grande
clarté par Michel Lauwers et Laurent Ripart dans un autre article très impor-
tant pour notre propos. Ils constatent en effet que « ce n’est pas le moindre
paradoxe de cette histoire qu’au moment où s’estompait, dans les actes de la
pratique, la référence aux anciens cadres territoriaux, une attention nouvelle
était portée aux délimitations territoriales 26 ». Cette attention vient d’abord de
l’Église, qu’il s’agisse des monastères soucieux de faire respecter les lieux sacrés
et de protéger leurs biens de l’avidité de l’aristocratie laïque en faisant respecter
les limites de ce qui, ce faisant, devient un territoire, ou des évêques, et même
surtout des évêques, toujours restés, même quand l’Église elle-même s’adaptait
à la structure dominante de l’espace polarisé, conscients des limites territo-
riales de leur diocèse 27. Même s’il a peut-être tort de minimiser le poids de la
transmission du système territorial romain via la structure de l’espace chré-
tien en des diocèses et des provinces correspondant aux cités et aux provinces
romaines, en parlant notamment des « limites fossiles des cités antiques 28 »,
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Introduction
Florian Mazel a raison d’insister dans une enquête remarquable par sa pré-
cision et son ampleur sur le développement d’une nouvelle conception de
la territorialité par les évêques entre le ixe et le xiiie siècle selon les régions :
il montre que ce processus passe par la recherche de limites qui déterminent
une morphogenèse locale qui part du niveau inférieur des paroisses périphé-
riques quand l’on n’a pas affaire, comme sur les franges de l’Empire et le front
marchant de la christianisation, à une morphogenèse globale par création de
diocèses nouveaux 29. Le Provinciale Romanum qui nous est connu par le Livre
des cens et qui donne une liste complète des diocèses catholiques, remplaçant la
documentation tardo-antique et l’adaptant à la nouvelle géographie séculière,
bonne occasion pour fractionner l’Empire en plusieurs parties et le priver ainsi
de toute apparence d’universalité, ne date que de la fin du xiie siècle 30, mais
la prise en main du processus par la papauté grégorienne l’a renforcé dès le
xie siècle et aboutit ainsi à une véritable territorialisation du gouvernement de
l’Église sous l’égide de la papauté.
L’héritage territorial romain a aussi joué un certain rôle pour les pouvoirs
séculiers, mais la conception d’un espace polarisé qui ressort des analyses d’Alain
Guerreau reste ici dominante. Michel Lauwers et Laurent Ripart montrent qu’elle
est l’aboutissement d’un long processus de « déterritorialisation » qui aboutit à
la polarisation de l’espace féodal 31. Mais ils montrent aussi que la création de
« puissants ancrages locaux » permet, et notamment en réaction aux processus
initiés par l’Église et à la nouvelle conception grégorienne de l’espace, un début
de territorialisation du pouvoir qui va très vite pouvoir prendre appui sur le droit
romain 32. Florian Mazel reprend lui aussi ce thème de l’influence grégorienne
2000, p. 177-191, notamment sur la « cause célèbre » de l’interminable procès pour la fixation
des limites entre les diocèses de Sienne et d’Arezzo (sur les suites, voir J.-P. Delumeau, « Le
diocèse d’Arezzo v. 1000-v. 1200 », dans F. Mazel [dir.], L’espace du diocèse…, op. cit., p. 325-
344), et C. Mériaux, « De la cité antique au diocèse médiéval. Quelques observations sur la
géographie ecclésiastique de la Gaule du Nord mérovingienne », Revue du Nord, 351/3, 2003,
p. 595-609 (http://www.cairn.info/revue-du-nord-2003-3-page-595.htm) pour une région où
l’emprise romaine est beaucoup moins forte.
29. F. Mazel, L’évêque et le territoire…, op. cit.
30. Ibid., p. 359-363 ; P. Fabre, L. Duchesne (éd.), Le Liber censuum de l’église romaine, Paris,
Fortemoing et Thorin [puis De Boccard] (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de
Rome, 6), 1889-1952, 3 vol. [ici vol. 1] ; voir F. Delivré, « Du nouveau sur la “liste de Florence” : la
chronique du pseudo-Godel (v. 1175) et la préhistoire du Provinciale Romanum du xiiie siècle »,
Bibliothèque de l’École des chartes, 167, 2009, p. 353-374, et « Les diocèses méridionaux d’après le
Provinciale Romanum (xiie-xve siècle) », Cahiers de Fanjeaux, 46 : Lieux sacrés et espace ecclésial
(ixe-xve siècle), 2011, p. 395-419.
31. M. Lauwers, L. Ripart, « Représentation et gestion de l’espace… », art. cité, p. 149-150 (« déter-
ritorialisation ») et 163-164 (« polarisation de l’espace féodal »).
32. Ibid., p. 164-167.
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sur la conception que se font de l’espace les pouvoirs séculiers 33. Mais il ne s’agit
pas d’une pâle copie ou d’un pur et simple transfert de technologie de gouver-
nement. Dès qu’ils se dessinent, notamment à travers les pratiques de l’écrit,
les progrès de la pratique administrative permettent aux détenteurs des pôles
séculiers du pouvoir (donc, encore dans le cadre d’un espace polarisé autour d’un
lieu, ou plus précisément autour du lieu où s’est enracinée la personne qui en est
la détentrice) d’étendre leur emprise au-delà des relations personnelles de fidélité
de l’individu ou du lignage pôle. Le moyen le plus ancien est le déplacement
à l’intérieur de l’espace contrôlé : cette méthode utilisée en fait depuis le haut
Moyen Âge reste employée tout au long du Moyen Âge dans les dominations
de type impérial. Elle peut éventuellement se passer de support administratif
et reposer uniquement sur une itinérance de type domanial où l’on se déplace
d’un domaine à l’autre pour consommer ses productions : cela permet de tenir
des plaids et des cours resserrant les liens de fidélité locaux. Mais elle gagne for-
midablement en efficacité si elle s’appuie sur un vaste réseau de lieux de pouvoir
dispersés et hiérarchisés – palais, forteresses, hôtels urbains, manoirs ruraux,
loges de chasse – grâce à des supports financiers et administratifs qui permettent
de l’édifier et de l’entretenir et qui en conditionnent donc la puissance. L’analyse
du cas de l’« empire angevin » à travers les déplacements d’Henry II et de ses fils
Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre en fournit l’éclatante démonstration 34 :
grâce à cette mise en réseau à son profit des lieux polarisés qu’il contrôle, le roi
crée ainsi un espace étatique. Non seulement, la « mesnie Hellequin 35 » voyage
à une vitesse proprement diabolique qui stupéfie les contemporains à travers
l’espace impérial, mais encore, par l’intermédiaire de constructions et d’archi-
tectures audacieuses, ce réseau est porteur de signes symboliques qui expriment
une « représentation monumentale du pouvoir 36 ». La constitution de ce réseau
est redoublée par une politique agressive de « protection » religieuse 37. Mais le
réseau reste malgré tout instable, perpétuellement remis en question, notam-
ment exposé en cas de dissensions à l’intérieur du lignage.
À l’intérieur même de l’empire angevin, l’Angleterre, qui fournit d’ailleurs
une part importante du support administratif et financier qui sert à mainte-
18
Introduction
38. J. H. Round, Feudal England : Historical Studies on the XIth and XIIth Centuries, Londres,
Sonnenschein, 1895 ; dernières parutions : S. Harvey, Domesday Book of Judgement, Oxford,
Oxford University Press, 2014 ; D. Roffe, K. S. B. Keats-Rohan (éd.), Domesday Now : New
Approaches to the Inquest and the Book, Woodbridge, Boydell Press, 2016.
39. F. F. Kreisler, « Domesday Book and the Anglo-Norman Synthesis », dans W. C. Jordan,
B. McNab, T. F. Ruiz (éd.), Order and Innovation in the Middle Ages, Princeton, Princeton
University Press, 1976, p. 1-16.
19
je a n-philippe genet
comme le Catasto florentin de 1427 40 : s’il ne comporte pas de carte, il offre une
image précise des territoires, de leur étendue et de leur complexité.
Un deuxième élément est capital dans cette avancée vers la territorialisa-
tion, le développement du droit romain et du droit canon à partir de la fin
du xie siècle. Les programmes sur la genèse de l’État moderne se sont arrêtés
à plusieurs reprises sur les rapports du droit, de l’État et de l’espace 41, qu’il
s’agisse de la connaissance de l’espace 42 ou de la façon dont le droit conçoit
les espaces autonomes de pouvoir, que les canonistes ont d’abord dû détacher
de la gangue universalisante de l’Empire romain 43. Ils ont mis l’accent sur
l’importance des « instruments juridiques du pouvoir » qui ont été analysés
dans une perspective comparatiste sur la longue durée du xiie au xviiie siècle 44.
Il faut en particulier insister, dans le cas de la construction de l’espace étatique,
sur le rôle des mécanismes juridiques d’appel aux cours supérieures, comme
l’illustrent dans le cas du royaume de France les appels au Parlement de Paris
venus du duché de Guyenne 45 et de la Flandre, pour donner sa réalité concrète
au territoire 46. Et sur ce plan, Michelle Bubenicek attire ici même l’attention
sur l’importance de l’élaboration de la définition d’un espace public sur lequel
s’exerce seul le dominium du souverain, que les juristes distinguent désormais
40. D. Herlihy, C. Klapisch-Zuber, Les Toscans et leurs familles. Une étude du catasto florentin de
1427, Paris, Presses de Sciences Po, 1978.
41. N. Coulet, J.-P. Genet (éd.), L’État moderne : le droit, l’espace et les formes de l’État, Paris, Éd. du
Centre national de la recherche scientifique, 1990, et Théologie et droit dans la science politique
de l’État moderne, Rome, École française de Rome (Collection de l’École française de Rome,
147), 1991.
42. D. Nordman, « La connaissance géographique de l’État (xive-xviie siècles) », dans N. Coulet,
J.-P. Genet (éd.), L’État moderne : le droit, l’espace…, op. cit., p. 175-188.
43. A. Rigaudière, « Regnum et civitas chez les décrétistes et les premiers décrétalistes (1150 env.-1250
env.) », dans Théologie et droit…, op. cit., p. 117-153.
44. A. Padoa-Schioppa (dir.), Justice et législation, Paris, Presses universitaires de France (Les ori-
gines de l’État moderne en Europe [coll. dir. par W. Blockmans et J.-P. Genet]), 2000 ; pour
la France, voir aussi A. Rigaudière, Penser et construire l’État dans la France du Moyen Âge (xiiie-
xve siècle), Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2003, p. 175-341.
45. P. Chaplais, « La souveraineté du roi de France et le pouvoir législatif en Guyenne au début
du xive siècle », Le Moyen Âge. Volume jubilaire, 1888-1963, 1963, p. 449-469, et id., « Les
appels gascons au roi d’Angleterre sous le règne d’Édouard Ier (1272-1307) », dans Économies
et sociétés au Moyen Âge. Mélanges offerts à Édouard Perroy, Paris, Publications de la Sorbonne,
1973, p. 382-399, réédités en no IV et en no V dans id., Essays in Medieval Diplomacy and
Administration, Londres, The Hambledon Press, 1981 ; J. Kicklighter, « Appeal Procedure in
the Medieval Parliament of Paris : Phillipps Charter 6 in the John Rylands University Library
of Manchester », Bulletin of John Rylands Library, 72, 1990, p. 37-50.
46. R. C. Van Caenegem (éd.), Recueil de l’ancienne jurisprudence de la Belgique. Les Arrêts et jugés
du Parlement de Paris sur appels flamands, Bruxelles, Commission pour la publication des
anciennes lois et ordonnances de Belgique, 1966-2000, 3 vol. ; voir J. Hilaire, « Recherches sur
le fonds du Parlement de Paris : à propos des appels flamands au Moyen Âge », Revue historique
du droit français et étranger, 82, 2004, p. 263-279.
20
Introduction
47. Très bel exemple dans M. Bubenicek, « Définir l’espace économique, imposer l’autorité
politique. Les bornes péagères, un enjeu pour la souveraineté princière (État bourguignon –
Franche-Comté, xive-xve siècles) », au sein du présent ouvrage.
48. Pour le cas de la France et de l’Angleterre, G. Dodd, S. Petit-Renaud, « Grace and Favour :
the Petition and its Mechanisms », dans C. Fletcher, J.-P. Genet, J. Watts (dir.), Governing in
Medieval and France. Office, Network, Idea, Cambridge, Cambridge University Press, 2015,
p. 240-278, avec une très riche bibliographie.
49. Comme le signale Patrick Gautier Dalché (La Terre. Connaissance…, op. cit., p. 165), ce sont
en fait les astronomes/astrologues qui se sont surtout intéressés à l’approche scientifique de
l’espace et à sa mesure, qu’il s’agisse des coordonnées ou de l’utilisation de l’astrolabe : voir les
deux textes édités et commentés, une table de coordonnées géographiques du xve siècle (ibid.,
p. 222-234) et des textes de Walcher de Malvern et de Roger de Hereford, ainsi que l’horoscope
d’Henry VI sur les calculs de longitude et de latitude (ibid., p. 235-241).
50. P. Portet, Bertrand Boysset, la vie et les œuvres techniques d’un arpenteur médiéval, Paris, Le
Manuscrit, 2004, 2 vol. ; voir A. Querrien, « La mesure du sol », dans P. Gautier Dalché (dir.),
La Terre. Connaissance…, op. cit., p. 625-672, spécialement p. 641-650.
51. M. Zerner, R. Lozi, J.-A. Cancellieri, « Quelques réflexions inspirées par un document cadas-
tral de la fin du xve siècle. Pratique de l’arithmétique et mesure de la terre », Histoire & Mesure,
8/3-4 : La mesure de la terre, 1993, p. 295-312.
52. Voir le schéma qui accompagne le compte rendu du débat sur la délimitation entre les nations
anglo-allemande et picarde de la faculté des arts de l’université de Paris et la consultation de
Maître Nicholaus Macer de Almekerc : H. Denifle, É. Chatelain, Liber procuratorum nationis
anglicanae (alemanniae) in Universitate Parisiensi, Paris, Delalain, 1894, vol. 1, col. 212-218.
53. P. D. A. Harvey, Maps in Tudor England, Londres, The Public Record Office and the British
Library, 1993, p. 7.
21
je a n-philippe genet
Le recours aux cartes s’est généralisé dans plusieurs domaines : la base « Auteurs
anglais », limitée aux auteurs actifs avant 1600, recense plus de 300 cartes 54,
et elle exclut les cartes anonymes. Ce ne sont pas les cartes marines qui sont
les plus nombreuses et même à la fin du xvie siècle les Anglais seront encore
dans ce domaine surtout des consommateurs de cartes étrangères, notam-
ment hollandaises, mais c’est dans d’autres directions qu’ont surtout lieu les
développements. Tandis qu’Henry VIII se faisait faire des cartes paysagées des
principaux sites militaires de son royaume pour orner les murs de ses palais,
ses ingénieurs militaires comme Richard Lee (Écosse), John Rogers (Boulogne,
Ambleteuse, Guînes) ou Stephan von Haschenperg (Carlisle) multipliaient
les cartes et les relevés pour s’adapter aux exigences de l’artillerie. Douvres,
Plymouth et l’embouchure de la Tamise faisaient aussi l’objet d’une attention
particulière. Mais c’est surtout en Irlande que les cartographes comme Boazio,
Joanes, Paul Ive ou Francis Jobson se déchaînent, aussi bien pour des raisons
militaires qu’en vue des projets de « plantation » (c’est-à-dire de colonisation).
Il subsiste un grand nombre de ces cartes dans les portfolios des hommes poli-
tiques, comme les Cecils 55. Un autre domaine en plein essor est celui du survey :
apparus dès le xve siècle, les surveys se multiplient et les grands surveyors comme
Ralph Treswell ou Edward Agas réalisent des dizaines de cartes pour les grands
propriétaires fonciers et des manuels apparaissent, comme celui d’Agas 56, et
surtout celui de John Norden, The Surveyors Dialogue 57. Agas a aussi publié des
cartes urbaines, pour Londres, Westminster et Cambridge, qui sont à dire vrai
plutôt des vues à vol d’oiseau. Enfin, la grande réalisation de la fin du xvie siècle
et du début du xviie siècle est la cartographie topographique et chorographique
des comtés anglais par Christopher Saxton d’abord qui, subventionné par le
22
Introduction
gouvernement et avec l’aide de John Rudd, produit entre 1574 et 1578 des cartes
de tous les comtés d’Angleterre, réunies en 1579 dans un atlas qui fut un grand
succès commercial 58 ; puis, après des essais inaboutis par John Norden (trois
comtés publiés, six autres restés en manuscrit), William Smith (12 comtés),
c’est John Speed qui publie un nouvel atlas des comtés pour accompagner son
histoire d’Angleterre 59.
Les cartes de John Norden et de John Speed sont assez précises topographi-
quement, mais elles fournissent aussi des éléments de paysage (forêts, collines,
ponts, etc.) à défaut d’indiquer les altitudes. Le titre de « théâtre » choisi par
Speed est significatif. Le paysage est perçu comme la scène d’un théâtre, sur
laquelle s’est joué le passé comme s’y jouera le futur : l’histoire est indissociable
de l’espace représenté. Mais ce sentiment précède l’ère des cartes et l’activité
des premiers « antiquaires » anglais, et les écrits d’un John Rous 60 ou d’un
William Worcestre le montrent bien. Ce dernier est un laïc passé par l’univer-
sité d’Oxford, devenu à partir de 1438 le principal homme d’affaires de Sir John
Fastolfe, l’un des capitaines anglais de la guerre de Cent Ans 61. Il sillonnait
l’Angleterre pour son patron jusqu’à la mort de ce dernier en 1459, mais une
fois libéré de ses obligations, il remonte à cheval pour son plaisir et entreprend
un nouveau périple pendant lequel il tient un carnet de notes qui a survécu 62.
On s’aperçoit qu’il note scrupuleusement les distances d’un lieu à un autre :
il questionne tous ceux qui lui paraissent détenir une documentation utile
à ses recherches, interrogeant notamment les bibliothécaires des monastères
qui sont sur son chemin ; il recherche les traditions, associant à chaque lieu
un « calendrier », c’est-à-dire une liste de noms de personnes avec leur jour et
parfois l’année de leur décès. Surtout, il n’hésitait pas à descendre de cheval
pour mesurer les églises et les monuments qui lui paraissaient remarquables.
Il notait scrupuleusement le nom de leurs fondateurs, copiait les inscriptions
anciennes, et parfois dessinait les motifs ornementaux ou les blasons qui lui
58. W. Ravenhill (éd.), Christopher Saxton’s 16th Century Maps of England and Wales, Shrewsbury,
Chatsworth Library, 1992.
59. The Theatre of the Empire of Great Britaine : Presenting an Exact Geography of England, Scotland
and Ireland, Londres, Humble, 1611 (dix éditions jusqu’en 1646 et une version latine publiée en
1632) : N. Nicolson, A. Hawkyard (éd.), The Counties of Britain : a Tudor Atlas by John Speed,
Londres, Pavilion Book, 1995 [1988].
60. Joannis Rossi Antiquarii Warwicensis Historia Regum Angliae… Accedit Joannis Lelandi
Antiquarii Naenia in Mortem Henrici Duddelegi Equitis, éd. par T. Hearne, Oxford, E Theatro
Sheldoniano, 1716 ; voir J.-P. Genet, « John Rous et l’histoire ancienne de l’Angleterre », dans
M. Coumert et al. (éd.), Rerum gestarum Scriptor : histoire et historiographie au Moyen Âge.
Mélanges Michel Sot, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2012, p. 225-235.
61. K. B. McFarlane, « William Worcester : a Preliminary Survey », dans id., England in the Fifteenth
Century, Londres, The Hambledon Press, 1981 [1957], p. 199-224.
62. J. H. Harvey (éd.), William Worcestre. Itineraries, Oxford, Clarendon Press, 1969.
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je a n-philippe genet
24
Introduction
71. P. Ventrone (éd.), « Le temps revient » : ’L Tempo si rinuova. Feste e spettacoli nelle Firenze di
Lorenzo il Magnifico, Milan, Silvana Editoriale, 1992.
72. Voir M. Ferrari, « Palatia que appellantur de comuni. I Palatia nova di Brescia come figura della
città comunale : aspetti costruttivi e architettonici, elementi decorativi, evoluzione urbana »,
au sein du présent ouvrage.
73. P. Boucheron, « Introduction générale », dans id., J.-P. Genet (dir.), Marquer la ville…, op. cit.,
p. 9-19 (citation p. 14).
74. Id., « L’implicite du signe architectural : notes sur la rhétorique politique de l’art de bâtir entre
Moyen Âge et Renaissance », Perspectives, 1, 2013, p. 173-180.
75. D. Iogna-Prat, La Maison Dieu…, op. cit.
76. M. Ferrari, « Palatia que appellantur de comuni. I Palatia nova… », art. cité ; voir en général
P. Boucheron, J. Chiffoleau (dir.), Le palais dans la ville. Espaces urbains et lieux de la puissance
publique dans la Méditerranée médiévale, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2004.
77. Voir M. Folin, « Demeures des vivants, demeures des morts. Considérations comparatives sur
les formes d’implantation urbaine des seigneurs en Italie aux xive et xve siècles », au sein du
présent ouvrage.
78. Voir C. Tosco, « Pétrarque et les espaces du pouvoir », au sein du présent ouvrage.
79. Voir V. Camelliti, « Oltre le mura : identità civica, idea del sacro e superstizione nelle città
comunali », au sein du présent ouvrage.
80. Voir F. Madeline, « Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt… », art. cité, et
M. Bubenicek, « Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique… », art. cité.
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je a n-philippe genet
81. Voir R. Descendre, « Lo stato, il diritto, il territorio. Dominazione territoriale e crisi del
modello giuridico nel pensiero politico italiano del XVI secolo », au sein du présent ouvrage.
82. Voir J. Dumasy-Rabineau, « Représentation de l’espace et exercice du pouvoir : cartes et figures
de l’espace français, xive-xvie siècle », au sein du présent ouvrage.
83. Voir E. Vagnon, « Les cartes marines, xive-xviie siècle : une appropriation de l’espace mari-
time », et A. Savorelli, « Atlanti simbolici dello spazio politico. I portolani e il Libro del cono-
cimiento de todos los reinos (secolo XIV) », au sein du présent ouvrage.
84. Voir A. Chassagnette, « La géographie au service des princes : cartes, inventaires et descriptions
des territoires, xvie-xviie siècle », au sein du présent ouvrage.
85. Voir L. Dauphant, « Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
(France, 1258-1529) », au sein du présent ouvrage.
86. Voir V. Theis, « Se représenter l’espace sans carte. Pratiques d’écriture de la Chambre aposto-
lique au xive siècle », au sein du présent ouvrage.
87. Voir M. R. Silvestrelli, « La città dipinta di Benedetto Bonfigli nella cappella del Palazzo dei
Priori di Perugia », au sein du présent ouvrage.
88. Voir D. Giorgi, « Una proposta di risarcimento iconografico per il perduto San Dionigi di
Gherardo Starnina », au sein du présent ouvrage.
26
Introduction
Ce vaste parcours vise à réintroduire l’espace dans cet imaginaire qui fait par-
tie des vecteurs de l’idéel que nous traquons inlassablement dans ce programme
de recherche, convaincu que ce sont eux qui, en dernière analyse, déterminent
le comportement social et politique des individus au sein de ce qui est de plus
en plus une société politique. À côté de la légitimité implicite des valeurs ou
du sentiment de vérité, l’espace est un terrain d’enquête essentiel pour mieux
comprendre l’imaginaire des membres des sociétés politiques européennes.
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matteo ferrari
Scuola Normale Superiore (Pisa, Italia)
Salimbene de Adam narra che nel 1247 le donne di Parma offrirono alla Vergine
un modello tridimensionale d’argento della città per invocarne la protezione
contro Federico II, che minacciava la distruzione del centro abitato e la depor-
tazione della sua popolazione. Nell’immagine urbana, che il cronista afferma
d’aver visto coi propri occhi, erano riconoscibili i maiora et precipua edificia
che qualificavano e identificavano la città padana, enumerati in un ordine che
si direbbe topografico più che solo d’importanza. La cattedrale, il battistero, il
palazzo vescovile e il communis palatium spiccavano tra le molte altre fabbriche
(alia edificia quam plura) che, pur concorrendo alla costruzione del volto citta-
dino, dovevano presentare tratti convenzionali e indifferenziati, tanto da non
meritare una specifica menzione 1. Erano dunque i luoghi deputati all’esercizio
del potere, vescovile e comunale, a caratterizzare il centro urbano in una raffi-
gurazione che immaginiamo simile a quelle «figur[e] dimunutiv[e] di città 2»
che, dal Trecento inoltrato, serviranno da frequente attributo ai santi patroni 3.
1. Salimbene de Adam, Cronica, a cura di G. Scalia, Bari, Laterza, 1966, t. 1, p. 283.
2. Sul tema delle immagini di città si veda M. Ferretti, «Le rappresentazioni di città e la cappella
dei Priori (qualche ipotesi di lettura)», in M. L. Cianini Pierottin (a cura di), Benedetto Bonfigli
e il suo tempo, Atti del convegno di Perugia (21-22 febbraio 1997), Perugia, Volumnia editrice,
1998, p. 99-109, in part. a p. 103 da dove traggo la citazione.
3. Cfr. V. Camelliti, Città e santi patroni: offerta, protezione, difesa della città nelle testimonianze
figurative dell’Italia centro-settentrionale tra XIV e XV secolo, tesi di dottorato, rel. V. Pace,
Università degli studi di Udine, 2010, 2 t.
31
m at teo fer r a r i
4. A. Rinaldi, «La formazione dell’immagine urbana tra XIV e XV secolo», in J.-C. Maire Vigueur
(a cura di), D’une ville à l’autre: structures matérielles et organisation de l’espace dans les villes
européennes (xiiie-xvie siècle), Atti del convegno di Roma (1-4 dicembre 1986), Roma, École
française de Rome, 1989, p. 773-811: p. 777.
5. V. Camelliti, Città e santi patroni…, op. cit., t. 1, p. 110-117.
6. A tale proposito, per limitarci ai due casi sopra citati, si ricorderà che il palazzo di Parma data
al 1221 (J. Schulz, «The Communal Buildings of Parma», Mitteilungen des Kunsthistorisches
Institutes in Florenz, 26/3, 1982, p. 279-324), quello di Padova al 1218 (cfr. S. Bortolami,
«“Spaciosum, immo speciosum palacium”. Alle origini del Palazzo della Ragione di Padova»,
in E. Vio [a cura di], Il Palazzo della Ragione di Padova. La storia, l’architettura, il restauro,
Padova, Signum, 2008, p. 39-73). Per una più ampia indagine sui palazzi comunali della
regione si rimanda almeno, per il Piemonte, a C. Tosco, «I palazzi comunali nell’Italia nord-
occidentale: dalla pace di Costanza a Cortenuova», in A. Gambardella, C. D. Fonseca (a cura
di), Cultura artistica, città e architettura nell’età federiciana, Atti del convegno internazionale
di studi (Reggia di Caserta, 30 novembre-1 dicembre 1995), Roma, De Luca, 2000, p. 395-422,
e, per la Lombardia, a R. D. Russell, Vox Civitatis: Aspects of Thirteenth-Century Communal
Architecture in Lombardy, Ann Arbor, Princeton University, 1989, e F. Buonincontri, Scultura a
Bergamo in età comunale. I cantieri di S. Maria Maggiore e del Palazzo della Ragione, Bergamo,
Biblioteca Civica Angelo Mai, 2005, p. 83-118.
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Palatia que appellantur de comuni
alle magistrature civiche (dal podestà agli Anziani del Popolo) 7. Negli stessi anni,
un identico processo interessò anche la città di Milano, dove tra il 1228 e il 1233
fu completato il Broletto Nuovo, l’edificio destinato alle riunioni dei consigli e
all’amministrazione della giustizia realizzato a qualche decina di metri dall’area
delle cattedrali e del primo palazzo del Comune, sorto forse già attorno alla metà
del XII secolo su un terreno concesso dall’arcivescovo 8. Nel volgere di pochi
anni, lo spazio circostante fu organizzato in modo da accogliere altri edifici con-
nessi all’amministrazione civile. Nel 1251 attorno alla curia comunis si strinse così
una corona di nuove fabbriche 9, più volte rimaneggiate nel tempo per ragioni
funzionali e, ancor più, per innalzare il decoro e l’impatto monumentale dell’a-
rea: il Palazzo del podestà, il portico di Azzone Visconti e la più nota Loggia
degli Osii, costruita forse dal podestà Oldrado da Tresseno nel 1233, ma rinno-
vata da Matteo Visconti a partire dal 1316 10. Nell’immediato, però, il Broletto e
la sua piazza costituirono anche il punto di partenza per un vero e proprio piano
regolatore che dal 1228 riorganizzò la forma urbana, da allora non più fedele al
tracciato ortogonale romano e non più incardinata sull’area del Duomo 11. La
loro centralità funzionale e topografica rispetto all’insieme della città racchiusa
nelle mura fu subito ribadita dalla costruzione di nuovi assi viari che, assecon-
dando lo sviluppo radiocentrico dell’abitato, collegarono la sede del potere civile
7. Cfr. S. Bortolami, «“Spaciosum, immo speciosum palacium”. Alle origini…», op. cit. La stessa
progressione ritornerà a Firenze dalla fine Duecento, con la costruzione del Palazzo della
Signoria, la sistemazione della piazza, la creazione della Loggia dei priori e di altri edifici
destinati alle magistrature (Palazzo della Condotta, della Mercanzia): cfr., da ultimo, M. Folin,
«Edifici comunali e retorica civica a Firenze (secolo XII-XV)», in M. M. Donato, D. Parenti
(a cura di), Dal giglio al David. Arte civica a Firenze fra Medioevo e Rinascimento, catalogo
della mostra (Firenze, Galleria dell’Accademia, 14 maggio-8 dicembre 2013), Firenze, Giunti,
2013, p. 56-65, e S. Diacciati, L. Tanzini, «Uno spazio per il potere: palazzi pubblici nell’Italia
comunale», in eid. (a cura di), Società e poteri nell’Italia comunale. Studi degli allievi per Jean-
Claude Maire Vigueur, Roma, Viella, 2014, p. 59-80.
8. Una domus o casella consularie è nota dalla metà del XII secolo, ma pare che sorgesse nei
pressi della chiesa di San Barnaba; a questa seguì, tra il 1188 e il 1196, la costruzione del
primo palatium comunis sul terreno dell’arcivescovo; vedi F. Bocchi, «Il Broletto», in Milano
e la Lombardia in età comunale. Secoli XI-XIII, catalogo della mostra (Milano, Palazzo Reale,
15 aprile-11 luglio 1993), Cinisello Balsamo, Silvana, 1993, p. 38-42: p. 39.
9. Galvaneus Flamma, Manipulus florum, in Rerum Italicarum Scriptores, a cura di L. A. Muratori,
Mediolani, Typographia societatis palatinae in regiae curia, 1727, t. 2, col. 538-740: col. 683,
CCLXXXV, e Annales mediolanenses ab anno 1230 ad annum 1402, a cura di L. A. Muratori, in
Rerum Italicarum Scriptores, Mediolani, Typographia societatis palatinae in regiae curia, 1730,
t. 16, col. 641-840: col. 655, XXIII. Una descrizione dell’area, quando gli interventi edilizi più
consistenti erano stati ormai ultimati, è offerta nel 1288 da Bonvesin de la Riva, Le meraviglie
di Milano, a cura di P. Chiesa, Milano, Mondadori, 2009, II, 3, p. 25.
10. Cfr. P. Boucheron, Le pouvoir de bâtir. Urbanisme et politique édilitaire à Milan (xive-xve siècles),
Roma, École française de Rome, 1998, p. 102-108.
11. C. Ghisalberti, «Il Broletto nel quadro dello sviluppo urbano della Milano medievale», Arte
medievale, 2/3, 1989, p. 78-83.
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m at teo fer r a r i
direttamente alle sei porte urbane principali 12. Com’è noto, l’intervento ebbe un
forte impatto sull’immagine della città ambrosiana (fig. 1). Bonvesin de la Riva
ne ricondurrà idealmente la forma, grossomodo ellittica, a una circonferenza,
riducendola al modello della Gerusalemme celeste; in Galvano Fiamma questa
forma perfetta troverà il suo centro proprio nel Broletum […] in medio civitatis
fundatum 13. Sul finire del Trecento, poi, la traduzione «cartografica» della città
descritta dal frate predicatore 14 consacrerà il palazzo nuovo milanese nel suo
ruolo di «matrice originale dell’espansione cittadina» e di perno urbanistico 15,
che conserverà fino al pieno Quattrocento, quando la costruzione del castello a
cavallo delle mura muterà nuovamente la gerarchia degli spazi 16.
Il piano urbanistico attuato a Milano, come ha rilevato Patrick Boucheron,
pose per la prima volta il problema dell’articolazione tra un’opera monumen-
tale e il tessuto urbano 17, ma, per quanto precoce e clamoroso negli esiti, non
costituì un caso isolato. Non minori ripercussioni sulla forma e sull’immagine
urbana ebbe infatti, negli stessi anni, la costruzione del nuovo complesso dei
palazzi civici di Brescia (fig. 2), centro di prima importanza nell’area padana per
consistenza demografica e rilevanza politico-economica, nonché città natale di
quell’Aliprando Fava che era stato podestà all’avvio dei lavori del broletto
milanese 18. In questo caso la centralità geometrica del palazzo municipale nel
tracciato urbano non è altrettanto evidente ma, cronologie alla mano, è chiaro
che la sua costruzione precorse, e forse favorì, l’ampliamento verso ovest della
cerchia muraria e innescò una serie di interventi architettonici e urbanistici
che segnarono profondamente il volto della città.
La questione non è certo inedita. Gaetano Panazza e, più recentemente,
Giancarlo Andenna e Marco Rossi hanno già ricostruito i tempi, i caratteri e le
ricadute delle imprese edilizie promosse, nel corso del Duecento, dal Comune
12. Galvaneus Flamma, Manipulus florum, op. cit., col. 683, CCLXXXV; Annales mediolanenses ab
anno 1230…, op. cit., col. 655, XXIII. Sull’operazione si veda anche A. Grimoldi, Il Palazzo della
Ragione. I luoghi dell’autorità cittadina nel centro di Milano, Milano, Arcadia Edizioni, 1983, p. 28.
13. Galvaneus Flamma, Chronicon extravagans de antiquitatibus Mediolani, a cura di A. Ceruti,
Miscellanea di storia italiana, 7, 1869, p. 445-505: p. 452-453.
14. Milano, Bibl. Ambrosiana, ms. A 275 inf., fol. 46v.
15. Cfr. P. Boucheron, «La carta di Milano di Galvano Fiamma/Pietro Ghioldi (fine XIV secolo)»,
in M. Folin (a cura di), Rappresentare la città. Topografie urbane nell’Italia di antico regime,
Reggio Emilia, Diabasis, 2010, p. 77-97: p. 86 per la citazione.
16. Cfr. A. Scotti, «Le trasformazioni cinquecentesche delle piazze di Milano», Annali di architet-
tura, 4/5, 1992/1993, p. 202-214: p. 204.
17. P. Boucheron, Le pouvoir de bâtir…, op. cit., p. 108.
18. Cfr. Cronaca di Goffredo da Bussero, a cura di L. Grazioli, Archivio storico lombardo, 33/10,
1906, p. 227-245: p. 244 e Galvaneus Flamma, Manipulus florum, op. cit., col. 670. Cfr. anche
A. Grimoldi, Il Palazzo della Ragione…, op. cit., p. 71, nota 2. Su Aliprando Fava cfr. F. Menant,
s. v. «Faba (Fava), Aliprando», in Dizionario Biografico degli Italiani, Roma, Istituto della
Enciclopedia Italiana, 1993, t. 43, p. 604-606.
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Palatia que appellantur de comuni
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Fig. 2 – Iscrizione con la sentenza del 1177, Brescia, Palazzo della Loggia
(dal portale maggiore della cattedrale di San Pietro). © M. Ferrari.
19. Per citare i titoli più esemplificativi: G. Panazza, L’arte medioevale nel territorio bresciano,
Bergamo, Istituto italiano d’Arti grafiche, 1942, p. 158-174; G. Andenna, «La signoria del
vescovo Berardo Maggi e la creazione della piazza del potere. Brescia tra XIII e XIV secolo», in
E. Guidoni, U. Soragni (a cura di), Lo spazio nelle città venete (1152-1348), Atti del II convegno
nazionale di studio (Verona, 11-13 dicembre 1997), Roma, Edizioni Kappa, 2002, p. 182-191;
M. Rossi, «Il centro del potere e i luoghi del popolo: le cattedrali e il Broletto di Brescia (1187-
1308)», Commentari dell’Ateneo di Brescia, 205, 2006 (2009), p. 88-118.
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Palatia que appellantur de comuni
20. F. Odorici, Storie bresciane dai primi tempi sino all’età nostra, seconda edizione, Brescia, Edizioni
del Moretto, 1984 (ed. or. 1853-1865), t. 6, p. 49, doc. CLVII. Cfr. almeno G. Panazza, L’arte
medioevale…, op. cit., p. 161; J. Paul, Die mittelalterlichen Kommunalpaläste in Italien, Dresden,
Photostelle der Universität, 1963, p. 131.
21. Liber potheris communis civitatis Brixiae, a cura di F. Bettoni Cazzago, L. F. Fè d’Ostiani e
A. Valentini, in Historiae Patriae Monumenta, Augustae Taurinorum, E regio Typographeo,
1899, t. 19, X, col. 25.
22. L’intervento edilizio fu preceduto da una serie di demolizioni lungo il lato settentrionale
dell’antica cattedrale; cfr. V. Volta, «Diario del cantiere. Regesto cronologico delle fonti», in
G. Capra et al., Le cattedrali di Brescia, Brescia, Grafo, 1987, p. 103-125.
23. Statuti bresciani del secolo XIII, in Historiae Patriae Monumenta, t. 16: Leges municipales, t. 2/2,
Augustae Taurinorum, E regio Typographeo, 1876, col. 95-280: col. 100 (la disposizione data
al 1248), ripreso anche da V. Volta, Il palazzo del Broletto di Brescia, Brescia, Editrice La Scuola,
1987, p. 13 che colloca però il palazzo davanti alla cattedrale.
24. Cfr. Milano, Archivio di Stato, PE, cart. 65, doc. 224 riportato, in estratto e in traduzione, da
P. Trotti, «San Cosma e Damiano a Brescia. Per una rilettura critica delle origini del monastero
femminile», Brixia sacra, 1/2, 2000, p. 45-72: p. 61.
25. G. Andenna, «Potere politico e comunicazione simbolica del potere nel Medioevo lombardo:
il palacium Comunis», in Il Complesso Monumentale del Broletto di Novara e la nuova Galleria
Giannoni, Torino, Edizioni Celid, 2011, p. 25-37: p. 30.
26. F. Bocchi, «Il disegno della città negli atti pubblici dal XII al XIV secolo», in C. Bertelli (a cura
di), Il Millennio ambrosiano, t. 3: La nuova città dal Comune alla Signoria, Milano, Electa, 1989,
p. 208-237: p. 225.
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27. Non si trattava comunque di un utilizzo stagionale della cattedrale, dal momento che vi
furono siglati atti tanto in inverno (F. Odorici, Storie bresciane…, op. cit., t. 6, p. 45, doc. CLI,
13 gennaio 1180), quanto in estate (Liber potheris…, op. cit., doc. X, col. 27, 8 giugno 1187).
28. Statuti bresciani del secolo XIII, op. cit., col. 185.
29. L’iscrizione, smurata dalla sua sede originaria (dove la documenta Sebastiano Aragonese,
Monumenta antiqua urbis et agri brixiensis, Brescia, Biblioteca Civica Queriniana, ms. A.II.14,
fol. 91, 118) con l’abbattimento della cattedrale medioevale, fu inserita nel 1671 sul portale
d’accesso allo scalone del Palazzo della Loggia, dove ancora si conserva; cfr. M. Ferrari, La pro-
paganda per immagini nei cicli pittorici dei palazzi comunali lombardi (1200-1337). Temi, funzioni,
committenza, tesi Ph. D., rel. M. M. Donato, Scuola Normale Superiore, 2011, p. 270-271 e,
in breve, M. Rossi, «Le cattedrali e il Broletto di Brescia fra XII e XIV secolo: rapporti e com-
mittenze», in A. C. Quintavalle (a cura di), Medioevo: la Chiesa e il Palazzo, Atti del convegno
internazionale di studi (Parma, 20-24 settembre 2005), Milano, Electa, 2007, p. 528-542: p. 528.
30. Cfr. U. Soragni, «La cultura urbanistica a Brescia da piazza del Mercato Nuovo a Piazza della
Vittoria (secc. XII-XX)», Storia della città, 15/54-56, 1990, p. 11-22: p. 11-12. Sull’urbanizzazione
del settore occidentale della città si veda G. Andenna, «Il monastero e l’evoluzione urbanistica
di Brescia tra XI e XII secolo», in C. Stella, G. Brentegani (a cura di), S. Giulia di Brescia.
Archeologia, arte, storia di un monastero regio dai Longobardi al Barbarossa, Atti del convegno
internazionale (Brescia, 4-5 maggio 1990), Brescia, s. n., 1992, p. 93-118.
31. Cfr. E. Guidoni, La città dal Medioevo al Rinascimento, Roma/Bari, Laterza, 1989, p. 115-
117 e id., «Appunti per una storia dell’urbanistica nella Lombardia tardo medioevale», in
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C. Pirovano (a cura di), Lombardia. Il territorio, l’ambiente e il paesaggio, t. 1: Dalle incisioni
rupestri alla sintesi leonardesca, Milano, Electa, 1981, p. 109-162: p. 127-136.
32. È comunque possibile che, fin dalla fine del XII secolo, il comune bresciano possedesse più
sedi destinate alle proprie magistrature; nel 1220 il consiglio generale si riunì infatti in pallatio
maiori comunis: Liber potheris…, op. cit., doc. LXXII, col. 313.
33. Statuti bresciani del secolo XIII, op. cit., col. 242, anno 1282.
34. F. Odorici, Storie bresciane…, op. cit., t. 7, p. 34, doc. CCXXXVIII (6 marzo 1206).
35. Brescia, Archivio di Stato, ASC 1044/4, Statuta communis civitatis Brixie, fol. 198r (anno 1278):
porticus broletti novi et veteris.
36. Troviamo atti siglati […] supra lobiam lignorum comunis Brixie […] (http://cdlm.unipv.it/
edizioni/bs/serle-spietro/carte/serle1199-11-07, in data 7 novembre 1199) e sopratutto super
laubia lignorum Palatii Veteris Comunis Brixie (B. Zamboni, Memorie intorno alle pubbliche
fabbriche più insigni della città di Brescia, Brescia, Pietro Vescovi, 1778, p. 5, in data 1251; ripreso
da G. Panazza, L’arte medioevale…, op. cit., p. 161). Sulle funzioni dei portici nei palazzi comu-
nali vedasi ora K. Sexton, «Political Portico: Exhibiting Self-Rule in Early Communal Italy»,
The Art Bulletin, 97/3, 2015, p. 258-278.
37. Liber potheris…, op. cit., col. 113, doc. XLI (citato anche da G. Panazza, L’arte medioevale…,
op. cit., p. 161, 163; F. Buonincontri, Scultura a Bergamo…, op. cit., p. 122, nota 211; M. Rossi,
«Le cattedrali e il Broletto…», op. cit., p. 528). Su questo primo palazzo si veda ora il mio
«Il Broletto di Brescia. Dalla prima laubia al Palazzo nuovo del Comune», in A. Calzona,
G. M. Cantarella (a cura di), Dalla Res Publica al Comune: uomini, istituzioni, pietre dal XII al
XIII secolo, Atti del convegno (Mantova, 3-6 dicembre 2014), Verona, Scripta Edizioni, 2016,
p. 207-229.
38. Cfr. Liber potheris…, op. cit., doc. CXXVI, col. 567, anno 1282 (per l’utilizzo dell’edificio come
residenza del podestà) e Statuti bresciani del secolo XIII, op. cit., col. 242, anno 1282 (per il suo
impiego come sede della magistratura degli Otto). Un broletto vecchio è nominato ancora negli
statuti del 1385: Brescia, Archivio di Stato, ASC 1045, Statuta communitatis Brixiae 1385, fol. 8v.
39. Cfr. F. Bocchi, «Il disegno della città…», op. cit., p. 227.
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il Palatium novum maius, in uso dal 1226 48, e a est il Palatium novum minus,
forse completato in un secondo tempo, ma comunque già operativo nel 1227 49.
La cittadella del potere civico, accessibile da cinque portali aperti nei giorni
e negli orari stabiliti dagli statuti 50, costituiva un insieme organico col vecchio
palazzo, cui era forse collegato per mezzo di un ponte ligneo innestato sul peri-
metrale meridionale del Palatium maius. A questa struttura potrebbe infatti
essere connessa la porta tamponata individuabile all’altezza del mezzanino
(fig. 5), accostata da scassi nella muratura che ci sembrano compatibili all’inse-
rimento di mensole di sostegno, lignee o lapidee, per un apparato a sporgere 51.
Del resto, negli stessi anni, altri centri dell’Italia settentrionale stavano creando
simili «insulae amministrative» mettendo in comunicazione gli edifici civici
attraverso passaggi aerei, al modo in cui erano di solito collegati i fabbricati
appartenenti a un’unica consorteria: un ponte univa, a Padova, il Palazzo della
Ragione con la prima residenza del podestà; a Reggio Emilia, il Palazzo del
Comune con la residenza del capitano del Popolo 52; a Parma il Palazzo del
Comune con quello del podestà 53. In questo modo si garantivano comodi col-
legamenti tra le varie sedi amministrative e si evitava che i magistrati forestieri
si trovassero quotidianamente a contatto col mondo esterno, esponendosi a
pericoli di aggressione e, soprattutto, a possibili pressioni o tentativi di corru-
zione 54. Più in generale, e l’esempio di Milano o quello più tardo di Padova lo
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55. Cfr., per Padova, S. Bortolami, «“Spaciosum, immo speciosum palacium”. Alle origini…»,
op. cit., passim.
56. Dalle fotografie d’epoca si evince che questi elementi furono abbondantemente integrati nel
corso dei restauri otto-novecenteschi, ma non inventati; cfr. anche G. Panazza, L’arte medio
evale…, op. cit., p. 165, 170. La ricerca di un effetto coloristico attraverso l’uso di materiali diversi
è una costante nei palazzi civici lombardi (si pensi al Broletto di Como!): «I broletti lombardi»,
in M. P. Alberzoni et al., La Lombardia dei Comuni, Milano, Electa, 1988, p. 111-116: p. 112.
57. Sulle pitture del Broletto rimando al mio «Pittura e politica nel tardo Medioevo b resciano. Note
sull’uso delle immagini», in S. Marazzani (a cura di), Storia dell’arte? Percorsi tra Brescia e la Valle
Camonica, Brescia, Fondazione Annunciata Cocchetti, 2013, p. 57-65 con bibliografia indicata.
58. Da ultima, F. Stroppa, «Natura e figura nella rappresentazione dei mesi», in A. C. Quintavalle
(a cura di), Medioevo: natura e figura, Atti del convegno di Parma (20-25 settembre 2011),
Ginevra/Milano, Skira, 2015, p. 447-461.
59. Cfr. A. Draghi, «I dipinti dell’Aula Gotica», in ead. et al. (a cura di), Gli affreschi nell’Aula gotica
nel Monastero dei Santi Quattro Coronati. Una storia ritrovata, Ginevra/Milano, Skira, 2006,
p. 17-107 e S. Romano, Eclissi di Roma. Pittura murale a Roma e nel Lazio da Bonifacio VIII a
Martino V (1295-1431), Roma, Argos, 1992, p. 48-49. Sui cicli dei Mesi, con specifici riferimenti
a quelli realizzati nell’Italia settentrionale tra XII e XIII secolo, vedasi G. Tigler, Il portale
maggiore di San Marco a Venezia. Aspetti iconografici e stilistici dei rilievi duecenteschi, Venezia,
Istituto veneto di scienze, lettere ed arti, 1995, p. 153-218.
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Fig. 6 – Brescia, Palazzo del Broletto, facciata occidentale del Palatium maius
con la Loggia delle Grida. © M. Ferrari.
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60. Sulla porta come soglia cfr. J.-C. Schmitt, «Le seuil et la porte. À propos de la Porta Romana
de Milan», in P. Boucheron, J.-P. Genet (a cura di), Marquer la ville: signes, empreintes et traces
du pouvoir dans les espaces urbains (xiiie-xviie siècle), Atti del convegno (Roma, 10-12 dicembre
2009), Parigi, Publications de la Sorbonne, 2013, p. 163-180.
61. Cfr. G. Panazza, L’arte medioevale…, op. cit., p. 167 e A. Calzona, «Scheda 40 (due picchiotti
con protomi leonine)», in id., A. C. Quintavalle (a cura di), Wiligelmo e Matilde. L’officina
romanica, Milano, Electa, 1991, p. 433: entrambi anticipano la datazione dei pezzi e li riten-
gono, a mio avviso senza ragioni evidenti, provenienti da altra sede.
62. La fontana fu probabilmente costruita nell’ambito del cantiere di restauro diretto da Cesare
Bertea (1928-1931), quando fu realizzata anche la scala retrostante; cfr. E. Mongiat, «Il restauro
del Broletto tra la fine dell’Ottocento e la prima metà del Novecento», in Il Complesso
Monumentale del Broletto…, op. cit., p. 74-75.
63. Cfr., in breve, A. Trivellone, «Têtes, lions et attributs sexuels: survivances et évolutions de
l’usage apotropaïque des images de l’Antiquité au Moyen Âge», Les Cahiers de Saint-Michel de
Cuxa, 39, 2008, p. 209-221: p. 216-218.
64. Ricordati da Annales Cremonenses 1096-1270, a cura di O. Holder-Egger, Hannover, Hahn
(MGH. Scriptores, 31), 1903, p. 1-21: p. 17, e, più tardi, da A. Campi, Cremona fedelissima città
e nobilissima colonia de Romani, Cremona, Antonio Campi, 1585, p. 41.
65. Iacobus Malvecius, Chronicon brixianum ab origine urbis ad annum usque MCCCXXXIII, a
cura di L. A. Muratori, Mediolani, Typographia societatis palatinae in regiae curia (Rerum
Italicarum Scriptores, 14), 1729, col. 771-1004: col. 901-902, cap. CI.
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negli stessi anni troviamo in altri edifici pubblici di area padana (a Como, a
Cremona, a Padova) 66.
Varcata la soglia, il discorso simbolico abbandonava la figurazione. La
monumentalità dell’edificio era qui trasmessa, piuttosto, dall’andamento
ritmico delle architetture, dall’accostamento dei materiali, dalla posa accu-
rata dei conci, con limitate concessioni all’ornamentazione. La sobrietà delle
murature dava però evidenza agli elementi antichi di reimpiego, la cui presenza
viene a confermare l’uso affermato nei centri comunali contemporanei di mar-
care con frammenti romani i luoghi nevralgici della vita politica: a Milano,
frammenti di iscrizioni romane sono inseriti negli archi del Broletto Nuovo,
dove fu murato anche il rilievo della scrofa semi-lanuta, forse di fattura medie-
vale 67, ma comunque evocatore della leggenda eziologica di Mediolanum 68; a
Padova, due capitelli tardo antichi impreziosiscono il portico del Palazzo del
Consiglio, realizzato nel 1285 69; a Verona, un rilievo antico figurato è innestato
sullo spigolo del portale meridionale del Palazzo della Ragione. In generale
la presentazione esibita, e perciò intenzionale, di questi materiali rispondeva
a un’intenzione comunicativa e non soltanto funzionale o ornamentale. Il
materiale antico permetteva, infatti, di evocare il passato romano della città, già
allora avvertito come parte integrante dell’identità locale, garantendo all’isti-
tuzione comunale un sicuro ritorno in termini di prestigio e di rivendicazione
di appartenenza alla comunità che governava 70.
66. Ne abbiamo riferito in La propaganda per immagini…, op. cit., p. 25. Sulla testa cremonese si
veda G. Voltini, «Le fasi della costruzione del palazzo e l’impianto medievale originario», in
A. Foglia (a cura di), Il Palazzo Comunale di Cremona. L’edificio, la storia delle istituzioni, le
collezioni, Cremona, Banca Cremonese, 2006, p. 59-119: p. 75, 78 che la interpreta come una
«metafora della regalità».
67. Cfr. A. Calderini, «Storia e leggenda intorno alle origini di Milano», in id. (a cura di),
Lombardia Romana, Milano, Casa Editrice Ceschina, 1938, p. 13-35: p. 18. Più in generale, sul
tema del reimpiego dell’antico in area lombarda si rimanda a A. Sagagni Malacart, «La ripresa
dell’antico nelle testimonianze romaniche lombarde: alcuni esempi a Milano e a Pavia», in
A. C. Quintavalle (a cura di), Medioevo: il tempo degli antichi, Atti del convegno (Parma,
24-28 settembre 2003), Milano, Electa, 2006, p. 382-397.
68. La legenda onomastica, la cui versione più antica risale almeno a Sidonio Apollinare, collega
la fondazione della città al ritrovamento di una scrofa (o cinghiale) parzialmente coperta
di lana. In generale, sull’uso «repubblicano» dell’antico valgono le riflessioni di A. Esch,
«L’uso dell’antico nell’ideologia papale, imperiale e comunale», in Roma antica nel Medioevo:
mito, rappresentazione, sopravvivenze nella «Respublica Christiana» dei secoli IX-XIII, Atti
della XIV settimana internazionale di studio (Mendola, 24-28 agosto 1998), Milano, Vita e
Pensiero, 2001, p. 3-25: p. 13-22.
69. G. Valenzano, «La cultura architettonica…», op. cit., p. 280-281 e, anche per una più ampia rifles-
sione sul reimpiego in area padovana, G. Bodon, «Il reimpiego dell’antico nella Padova medio
evale: aspetti e significati del fenomeno», in G. Cuscito (a cura di), Riuso di monumenti e reimpiego
di materiali antichi in età postclassica: il caso della Venetia, Trieste, Editreg, 2012, p. 219-228.
70. A. Esch, «L’uso dell’antico…», op. cit., p. 15-16.
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71. Per una panoramica si veda P. Guerrini, Iscrizioni bresciane, Brescia, Scuola tipografica Istituto
figli di Maria Immacolata, 1925, t. 1. Per uno studio di caso cfr. F. Morandini, «Marmi antichi
nel monastero di Santa Giulia a Brescia», in G. Cuscito (a cura di), Riuso di monumenti…,
op. cit., p. 203-217: p. 208-213.
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72. Così nelle parole di Ottavio Rossi, Elogi historici di Bresciani illustri, Brescia, Bartolomeo
Fontana, 1620, p. 517. Sulla produzione antiquaria del pittore si veda G. Lang, «Un protagonista
del Rinascimento bresciano: Sebastiano Aragonese», in V. Grohovaz (a cura di), Produzione e
circolazione del libro a Brescia tra Quattro e Cinquecento, Atti della giornata di studi (Brescia,
4 marzo 2004), Milano, Vita e Pensiero, 2006, p. 95-113.
73. Sebastiano Aragonese, Monumenta antiqua urbis et agri brixiani, Brescia, Biblioteca Civica
Queriniana, ms. A.II.14, tav. 74, num. 443; tav. 23, num. 134; tav. 59, num. 363; tav. 6, num. 36.
74. Solitamente si ritiene che i lavori di costruzione della nuova cinta muraria siano stati completati
attorno al 1255, sulla base della notizia riferita dal Malvezzi, per il quale in quell’anno condita fuit
porta Septentrionalis Urbe […] Haec Porta Pilarum dicituri ibi pari modo turrim construxerunt:
Iacobus Malvecius, Chronicon brixianum…, op. cit., col. 922, cap. XI. Sulle mura di Brescia si
veda E. Guidoni, «Appunti per una storia…», op. cit., p. 122-154 e G. Andenna, «“Foris muros
civitatis”. Lo spazio urbano fuori porta Bruciata dai Longobardi alla conquista veneta», in
V. Frati, I. Gianfranceschi, F. Robecchi (a cura di), La Loggia di Brescia e la sua piazza: evoluzione
di un fulcro urbano nella storia di mezzo millennio, Brescia, Grafo, 1993, vol. 1, p. 237-243.
75. Sugli investimenti edilizi e monumentali dei comuni di Popolo si vedano le considerazioni di
J.-C. Maire Vigueur, «Les inscriptions du pouvoir dans la ville: le cas de l’Italie communale (xiie-
xive siècle)», in É. Crouzet-Pavan, É. Lecuppre-Desjardin (a cura di), Villes de Flandre et d’Italie
(xiiie-xvie siècle). Les enseignements d’une comparaison, Turnhout, Brepols, 2008, p. 207-233.
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76. Cfr. G. Panazza, L’arte medioevale…, op. cit., p. 164, 172. In altri Comuni le fabbriche civiche
si svilupparono attorno a una corte comune: a Novara, i paratici si insediarono sul medesimo
sedime dell’Arengo (cfr. G. Andenna, «Potere politico e comunicazione simbolica…», op. cit.,
p. 32); a Cremona, il Palazzo del Podestà risultò dall’ampliamento verso ovest del primitivo
palazzo comunale (G. Voltini, «Le fasi della costruzione…», op. cit., p. 89-100); a Como, il
Palazzo del capitano fronteggiava quello del comune, affacciandosi su un cortile chiuso fra
la cattedrale e la chiesa di San Giacomo (F. Buonincontri, Scultura a Bergamo…, op. cit.,
p. 89-102).
77. L’ipotesi formulata da G. Andenna, «La signoria del vescovo Berardo Maggi…», op. cit., p. 184-
185 è ripresa da M. Rossi, «Il centro del potere…», op. cit., p. 106-108, che però data la costru-
zione dell’edificio alla fine del secolo. Il sopralzo sarebbe invece anteriore al 1270 per V. Volta,
Il Broletto e la Cittadella, Darfo Boario Teme, La Cittadina, 1993, p. 78.
78. Nel palazzo si collocherebbe allora la […] caminata domini capitanei populi Brixie, in civitate
Brixie […]: Liber privilegiorum Comunis Mantue, a cura di R. Navarrini, Mantova, Arcari,
1988, p. 189, doc. 49, 25 novembre 1288.
79. Statuti bresciani del secolo XIII, op. cit., col. 240; cfr. G. Andenna, «La signoria del vescovo
Berardo Maggi…», op. cit., p. 185. L’identificazione sembra confermata da un articolo statutario
del 1355 che prescrive che certe mercanzie siano vendute […] inter portam palacii populi Brixie
que est a sero parte dicti palacii et ecclesiam Sancti Augustini […]: Brescia, Archivio di Stato,
ASC 1046, Statuta communitatis Brixiae 1355, fol. 163v. Bisogna tuttavia considerare che dal
XIV secolo l’intero complesso del Broletto prese sempre più spesso il nome di Palatium populi.
80. Milano, Archivio di Stato, Pergamene San Cosma e Damiano, cart. 65, 22 agosto 1298 (citato
da G. Andenna, «La signoria del vescovo Berardo Maggi…», op. cit., p. 190, nota 65). A
metà Trecento, il consiglio dei Cento si riuniva «super Pallacio a sero parte Comunis Brixie»:
B. Zamboni, Memorie intorno…, op. cit., p. 18, nota 5, 30 settembre 1353.
81. Liber potheris…, op. cit., col. 871-872, doc. CLXXIX.
82. Ibid., col. 875-877, doc. CLXXXIII-CLXXXIV.
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83. Liber potheris…, op. cit., col. 884, doc. CLXXXVIII. I documenti d’acquisto datano tra il 12
aprile (ibid., col. 875-876, doc. CLXXXIII) e il 1 giugno 1284 (ibid., col. 890, doc. CLXXXXII).
Nel 1282 il Comune aveva ricevuto un primo appezzamento in eredità: ibid., col. 871-872,
doc. CLXXIX. Per un punto sull’area si veda A. Breda, «La chiesa di Sant’Agostino…»,
op. cit., p. 137-142.
84. Raccolta già da G. Panazza, L’arte medioevale…, op. cit., p. 172. Il vescovo dovette sempli-
cemente autorizzare la vendita delle aree di proprietà della curia: Liber potheris…, op. cit.,
col. 882, doc. CLXXXVII.
85. Cfr. A. Breda, «La chiesa di Sant’Agostino…», op. cit., p. 142.
86. G. Andenna, «La signoria del vescovo Berardo Maggi…», op. cit., p. 186-188.
87. Questo si verificò a Piacenza per l’ampliamento, nel 1179, della piazza davanti alla cattedrale;
cfr. P. Racine, «Naissance de la place publique en Italie», in J. Heers (a cura di), Fortifications,
portes de villes, places publiques dans le monde méditerranéen, Parigi, Presses de la Sorbonne,
1985, p. 301-322: p. 304-305, 313.
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armi a difesa delle porte del Broletto 88. Furono dunque le necessità funzionali
dell’edificio comunale a imporre un intervento tanto ampio e radicale che,
incidentalmente, finì per accentuare quella centralità del complesso Broletto-
Cattedrali destinata a durare fino alla definitiva sistemazione di Piazza della
Loggia allo scadere del XV secolo 89.
A dispetto dell’urgenza dimostrata dai rappresentanti del Comune, l’opera-
zione fu attuata con una certa lentezza. Si procedette innanzitutto all’abbatti-
mento degli edifici che più premevano sugli edifici comunali, mentre il mona-
stero benedettino – effettivamente traslato in una nuova sede dal 1320 – e le
case più vicine alla primitiva piazza della concione rimasero probabilmente in
alzato per tutto il secondo decennio del Trecento 90. Le demolizioni, comunque,
non incisero solo sull’assetto urbano della città, ma ebbero ripercussioni anche
sull’aspetto del palazzo civico. In effetti, credo che la visibilità così acquisita dal
prospetto occidentale del Palatium maius, finalmente affacciato su un ampio
slargo, possa essere all’origine della creazione della balconata monumentale
con il suo corredo scultoreo, in sostituzione di più piccoli ballatoi (fig. 6). La
struttura che oggi vediamo, correntemente chiamata Loggia delle Grida, è
frutto di una ricostruzione molto discussa d’inizi Novecento, comunque rea-
lizzata reimpiegando elementi appartenuti al complesso originario (all’epoca
ricoverati nel Museo cittadino da quasi un secolo) e sulla base dell’analisi delle
tracce lasciate dal balcone medievale nella muratura del palazzo. Possiamo
quindi affermare, con una certa sicurezza, che la loggia medievale non rispose
soltanto a un’esigenza di carattere funzionale, quella cioè di poter disporre di
uno spazio da cui leggere proclami e sentenze alla cittadinanza riunita nella
piazza; essa servì anche da supporto per la rappresentazione dell’autorità poli-
tica o, meglio ancora, del suo legittimo esercizio dell’potere giudiziario. Opera
della stessa maestranza veronese che nel 1308 realizzò il sepolcro del vescovo-
signore Berardo Maggi, la loggia esibiva, infatti, un programma decorativo
centrato sull’immagine della Giustizia (fig. 13), precocemente ritratta (siamo
entro il secondo decennio del Trecento) con tanto di corona, spada e bilancia 91.
88. La risposta del pontefice alle richieste del Comune è pubblicata da G. L. Luchi, Monumenta
monasterii Leonensis brevi commentario illustrata, Roma, Ottavio Puccinelli, 1759, p. 197-198.
89. Sulle piazze di Brescia si veda anche D. Hamsoll, «Le piazze di Brescia nel Medioevo e nel
rinascimento», Annali di architettura, 4/5, 1992-1993, p. 168-177.
90. Cfr. P. Trotti, «San Cosma e Damiano a Brescia. Per una rilettura critica delle origini del
monastero femminile», Brixia sacra, 1-2, 2000, p. 45-72: p. 64-65. A titolo d’esempio ricordo
che la porta coenobii Sancti Cosmei e una casa a questa addossata sono ricordate ancora
negli statuti del 1313, a conferma del protrarsi delle opere di demolizione; Statuti di Brescia
dell’anno MCCCXIII, in Historiae Patriae Monumenta, t. 16: Leges municipales, t. 2/2, op. cit.,
col. 1585-1914: col. 1648, art. VI.
91. Cfr. M. Ferrari, «La scultura a Brescia nell’età dei Maggi…», op. cit.
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92. Sul ruolo comunicativo delle facciate dei palazzi secolari cfr. X. Barral i Altet, «Il racconto del
palazzo nel contesto della città tardo-romanica (secoli XII-XIII)», in A. C. Quintavalle (a cura
di), Medioevo: la Chiesa e il Palazzo, op. cit., p. 166-182: p. 167-168, 173-175.
93. Liber potheris…, op. cit., col. 1200-1206: col. 1204-1205.
94. Cfr. F. Pagnoni, Brescia viscontea (1337-1403), Milano, Unicopli, 2013.
95. Iacobus Malvecius, Chronicon brixianum…, op. cit., col. 901, cap. C.
96. La definizione è di R. Bordone, «Il paesaggio sonoro delle città comunali italiane», in id., Uno
stato d’animo. Memoria del tempo e comportamenti urbani nel mondo comunale italiano: http://
www.rm.unina.it/rm_old/biblioteca/e-books/e-book-bordone.htm. Sulle campane civiche, cfr.
C. Beranzzani, «La campana civica: tra signum, simbolo e celebrazione visiva», Opera, Nomina,
Historiae. Giornale di cultura artistica, 2/3, 2010, p. 287-392, passim (http://onh.giornale.sns.it).
60
Palatia que appellantur de comuni
religioso 97, spicca «il palazzo magnifico, grande et memorato in Italia […] tutto
di piere crude, altissimo et bello» caratterizzato dalle due torri, del Popolo e
quella «incompida» – in realtà scapitozzata – che era stata dei Poncarali 98.
Lo stesso palazzo tornerà, un secolo più tardi, in un’illustrazione del registro
d’estimo del 1588 99, sempre accanto alle due cattedrali (fig. 14). In una sorta di
97. Sul tema cfr. M. Spigaroli, «La città divisa. Strutture urbane e urbanistica militare a Brescia,
Verona, Padova», in E. Guidoni, U. Soragni (a cura di), Lo spazio nelle città venete (1348-1509).
Urbanistica e architettura, monumenti e piazze, decorazione e rappresentazione, Atti del I conve-
gno nazionale di studio (Verona, 14-16 dicembre 1995), Roma, Kappa, 1997, p. 89-100 e, in una
prospettiva più ampia, E. Valseriati, «Aspetti dell’identità patrizia a Brescia nel Cinquecento:
le committenze dell’architetto Ludovico Beretta», p. 1-3 (http://gesta.scuoladottorato.it/IMG/
pdf/Valseriati_paper.pdf ).
98. Marin Sanudo, Itinerario per le terra ferma veneziana nell’anno MCCCCLXXXIII, a cura di
R. Brown, Padova, Tipografia del seminario, 1847, p. 71.
99. Brescia, Archivio di Stato, ASC, C IV 458, Estimo della Città di Brescia. 1588, fol. 119r.
61
m at teo fer r a r i
parata degli «edifici insegna 100» del cuore urbano, come nel modellino descritto
da Salimbene, sono ancora gli edifici del vescovo e quelli del Comune a rap-
presentare l’identità del luogo.
62
Pétrarque et les espaces du pouvoir
carlo tosco
Politecnico di Torino (Italie)
1. A. Tomei, « Un contributo per il perduto affresco dell’Aracoeli », Storia dell’arte, 44, 1982, p. 81-83.
La fresque est rappelée par Vasari dans la Vita de Pietro Cavallini : Ma la migliore opera che in
quella città facesse, fu nella detta chiesa d’Araceli sul Campidoglio ; dove dipinse in fresco, nella volta
della tribuna maggiore, la Nostra Donna col Figliolo in braccio, circondata da un cerchio di sole ; e
a basso, Ottaviano imperadore, al quale la Sibilla Tiburtina mostrando Gesù Cristo, egli l’adora.
2. D. Comparetti, Virgilio nel Medio Evo, nouv. éd. par G. Pasquali, Florence, La Nuova Italia,
1941, vol. 2, p. 91-92, et G. Giannelli, « La leggenda dei “Mirabilia” e l’antica topografia
dell’Arce Capitolina », Studi Romani, 26/1, 1978, p. 60-71.
3. Epistolae familiares [désormais Fam.], IX 13, 38, dans V. Rossi, U. Bosco (dir.), Le familiari,
Florence, Sansoni (Edizione nazionale delle opere di Francesco Petrarca, 10-13), 1933-1942.
63
c a r lo tosco
temple de Jupiter capitolin avait été érigé. Le poète met donc en évidence une
continuité « archéologique » entre la Rome païenne des empereurs et la Rome
chrétienne des papes. Les signes du pouvoir perdurent dans le temps, se trans-
forment, assument de nouvelles valeurs, mais ils restent enracinés dans les lieux.
Pétrarque, comme tous les grands intellectuels italiens du xive siècle, vit un
rapport très étroit avec la vie politique et avec les pouvoirs dominants, tant laïcs
qu’ecclésiastiques. À différentes occasions, il montre son habileté diplomatique,
son charme personnel et sa capacité à se lier avec les sommets du pouvoir. Sa
personnalité d’intellectuel engagé dans la vie politique de son époque a été
examinée de manière approfondie et, récemment, on a parlé d’un « Pétrarque
civil », qui fréquente les cours des princes, comme un premier noyau d’un état
laïc en Italie 4. Dans toutes ses activités, le poète tisse des liens avec les lieux sym-
boliques d’exercice du pouvoir de la société médiévale, il reconnaît les valeurs
qui entrent en jeu, lit les rapports avec l’histoire et avec l’héritage du passé 5.
Le Capitole était le centre sacré du pouvoir de Rome, mais Rome n’était
pas la seule ville à avoir un Capitole. Pétrarque sait bien que dans leur œuvre
de colonisation, les Anciens avaient fondé des villes et attribué aux lieux de
conquête des noms qui rappelaient les espaces les plus représentatifs de la
capitale. Quand il atteint Cologne, pendant un voyage en Allemagne en 1333,
dans une lettre envoyée au cardinal Giovanni Colonna, il reconnaît aussitôt
les valeurs « archéologiques » de la ville du Rhin, fondée par Marcus Agrippa,
beau-fils d’Auguste 6. Le poète est orgueilleux de retrouver dans des terres
4. U. Dotti, Petrarca civile. Alle origini dell’intellettuale moderno, Rome, Donzelli, 2001, p. 25.
Voir aussi : F. Rico, I venerdì del Petrarca, Milan, Adelphi, 2016.
5. Pour les liens entre Pétrarque et les arts figuratifs : E. H. Wilkins, « On Petrarch’s Appreciation
of Art », Speculum, 36, 1961, p. 297-300 ; G. F. Contini, « Petrarca e le arti figurative », dans
A. S. Bernardo (dir.), Francesco Petrarca Citizen of the World. Proceedings of the World Petrarch
Congress (Washington D.C., 1974), Padoue/Albany, Antenore/State University of New York
Press, 1980, p. 115-132 ; P. M. Stewart, « L’arte e la natura nel gusto figurativo del Petrarca
e del Boccaccio », dans A. Franceschetti (dir.), Letteratura italiana e arti figurative. Atti del
XII Congresso dell’Associazione internazionale per gli studi di lingua e letteratura italiana (Toronto,
1985), Florence, Olschki, 1988, vol. 1, p. 41-68 ; B. Doege, « Petrarch and the Arts », dans
K. Eisenbichler, A. A. Iannucci (dir.), Petrarch’s Triumphs : Allegory and Spectacle, Ottawa,
Dovehouse, 1990, p. 177-182 ; L. Patetta, « Petrarca e l’architettura delle città italiane », dans
L. Rotondi Secchi Tarugi (dir.), Petrarca e la cultura europea, Milan, Nuovi orizzonti, 1997,
p. 161-180 ; M. Ariani, s. v. « Petrarca », dans Enciclopedia dell’arte medievale, Rome, Istituto della
Enciclopedia Italiana, 1998, vol. 9, p. 335-343 ; M. M. Donato, « “Veteres” e “novi”, “externi”
e “nostri”. Gli artisti di Petrarca : per una rilettura », dans A. C. Quintavalle (dir.), Medioevo :
immagine e racconto. Atti del convegno internazionale (Parma, 2000), Parme, Electa, 2003, p. 433-
455 ; M. Bettini, Francesco Petrarca e la arti figurative. Tra Plinio e sant’Agostino, Livourne,
Sillabe, 2002 ; C. Tosco, Petrarca : paesaggi, città, architetture, Macerata, Quodlibet, 2011.
6. Fam. I 5, 1-3 ; voir Pétrarque, In difesa dell’Italia (Contra eum qui maledixit Italiae), éd. par
G. Crevatin, Venise, Marsilio, 1995, cap. 25 : Coloniam Agrippinam Marcus Agrippa, Augusti
gener, ad sinistra Rheni ripam condidit.
64
Pétrarque et les espaces du pouvoir
7. Les observations pessimistes de Pétrarque sur l’empire médiéval sont exprimées surtout dans
De remediis utriusque fortune, I, 96 et 106, éd. par C. Carraud, Grenoble, Millon, 2002.
8. Paradis XVIIII, 43.
9. Pour les observations de Pétrarque sur la résidence des papes : G. Mollat, Les papes d’Avignon
(1305-1378), 10e éd., Paris, Letouzey et Ané, 1964, p. 47.
65
c a r lo tosco
L’image architecturale qui évoque Avignon est celle de la ville munie de tours,
où les tours sont dressées non contre les hommes mais contre le ciel :
Gl’idoli suoi sarranno in terra sparsi,
e le torri superbe, al ciel nemiche,
e i suoi torrer di for come dentro arsi 10.
En Italie, la situation semble très différente et là, le scénario des pouvoirs
s’articule dans toute sa complexité. La mosaïque des États italiens comptait,
au xive siècle, une grande fragmentation territoriale qui se reflétait dans les
structures et les sièges de gouvernement. Dans de nombreuses villes, le pas-
sage à un domaine seigneurial était désormais établi et marquait le déclin
des autonomies communales. Les nouveaux seigneurs étaient extrêmement
attentifs à exprimer, par des interventions symboliques, leur autorité sur les
centres urbains, et les châteaux représentaient le symbole architectural le plus
fort de la nouvelle réalité politique. Pétrarque se présente comme un observa-
teur attentif à ces scénarios du pouvoir. À de nombreuses occasions, le poète
noue des rapports d’amitié avec les représentants des dynasties seigneuriales
italiennes, il se prête aux activités diplomatiques, il adresse des lettres présen-
tant des exemples et des programmes, il offre des conseils et des exhortations
aux hommes qui gouvernent. Il est fréquent, dans ses lettres, de constater
une attention privilégiée pour les lieux emblématiques de représentation de
l’autorité. La République de Venise entretenait des rapports de faveur avec
Pétrarque et les autorités de la ville lui avaient offert une prestigieuse résidence
au Palazzo Molin, sur la rive des Schiavoni, en échange de la promesse de
laisser sa bibliothèque en héritage à la Sérénissime. Dans une lettre, Pétrarque
raconte avoir assisté, en août 1364, aux jeux qui se sont déroulés sur la place
Saint-Marc pour célébrer la reconquête de l’île de Crête 11. À cette occasion, il
avait été accueilli dans la loge supérieure de la basilique, donnant sur la place,
aux côtés du doge. Pétrarque exprime des mots de grande admiration pour
l’église et pour les fameux chevaux exposés sur la loge, et montre son attention
pour les œuvres d’art et d’architecture. La basilique Saint-Marc apparaît dans
toute sa splendeur dans son rôle symbolique de temple civique, comme la
chapelle palatine adossée au palais de résidence du doge 12. Le scénario de la
10. Canzoniere 137, 9-12, éd. par S. Stroppa, Turin, Einaudi, 2011. Le sonnet forme avec les 136 et
138 une triple invective poétique contre Avignon.
11. Sen. IV 3, 18-19 (Le Senili, éd. par E. Nota et U. Dotti, t. 1 : Libri I-VI, Turin, Aragno, 2004).
12. Pour le développement du siège du pouvoir à Venise : W. Dorigo, « I palazzi comunali dei dogi
nel XII secolo », dans A. Calzona, R. Campari, M. Mussini (dir.), Immagine e Ideologia. Studi
in onore di Arturo Carlo Quintavalle, Milan, Electa, 2007, p. 254-260 ; voir aussi G. Padoan
(dir.), Petrarca, Venezia e il Veneto. Atti del convegno internazionale (Venezia, 1974), Florence,
Olschki, 1976, et É. Crouzet-Pavan, « Quando la città si diverte. Giochi e ideologia urbana :
66
Pétrarque et les espaces du pouvoir
Venezia negli ultimi secoli del Medioevo », dans G. Ortalli (dir.), Gioco e giustizia nell’Italia di
Comune, Trévise/Rome, Fondazione Benetton/Viella, 1993, p. 35-48.
13. La longue lettre ouvre le livre XIV des Senili et constitue un véritable pamphlet consacré au
gouvernement de la ville : G. Vasoin, « Il Petrarca e i Carraresi tra Padova e Arquà », Padova e il suo
territorio, 6, 1991, p. 22-23 ; voir également I. Tamassia, « Francesco Petrarca e gli Statuti di Padova »,
Atti e memorie della Regia Accademia di Padova di scienze, lettere ed arti, 13, 1896-1897, p. 201-205.
14. Fam. IV 7, 5.
15. Itinerarium ad sepulcrum Domini nostri Ihesu Christi, cap. 38 (éd. par F. Lo Monaco, Bergame,
Lubrina, 1990 ; voir aussi l’édition française par C. Carraud et R. Lenoir, Grenoble, Millon,
2002). Pour les restes des fresques encore conservés : P. L. De Castris, Giotto a Napoli, Naples,
Electa, 2006, p. 168-197.
16. Epystole metrice I 3, v. 101-113, dans E. Bigi, Opere di Francesco Petrarca, Milan, Mursia, 1966,
p. 403-405.
67
c a r lo tosco
17. F. Flores d’Arcais, « Petrarca e le arti figurative nella Milano viscontea », dans Petrarca e la
Lombardia. Atti del convegno (Milano 2003), Rome/Padoue, Antenore, 2005, p. 51-63.
18. Pétrarque décrit Pavie dans une lettre de 1365 adressée à Giovanni Boccaccio (Sen. V 1, 7-9).
19. Pétrarque, In difesa dell’Italia, op. cit., p. 146 et note 265, p. 179 ; voir également M. Berté, Jean
de Hesdin e Francesco Petrarca, Messine, Centro interdipartimentale di studi umanistici, 2004.
La statue se trouve aujourd’hui au musée du Castello Sforzesco, dans une salle aménagée par
Luca Beltrami en 1898 : A. Lee Palmer, « Bonino da Campione’s Equestrian Monument of
Bernabò Visconti and the Popular Piety in the Late Middle Ages », Arte Lombarda, 121, 1997,
p. 57-67, et G. A. Vergani, L’arca di Bernabò Visconti al Castello Sforzesco di Milano, Cinisello
Balsamo, Silvana, 2001.
20. Fam. XVII 4, 2.
68
Pétrarque et les espaces du pouvoir
déroulées les négociations pour la signature des traités qui liaient la République
de Gênes à Milan. Une fois encore, l’architecture seigneuriale exprime parfai-
tement sa fonction de représentation dans un contexte politique.
Les exemples mentionnés aident à comprendre les liens qui se consolidaient
dans l’Italie du xive siècle entre l’architecture, l’espace urbain et les symboles
du pouvoir. Pétrarque s’avère être un témoin attentif et offre, de ces processus,
une description vivante, fruit de son expérience politique. Pour conclure, on
pourrait évoquer un épisode qui se serait déroulé au cours de l’été 1350. Le
poète traversait la Lombardie en compagnie du legs papal, Gui de Boulogne,
et de son entourage, de retour d’une visite à Rome, et il avait visité la région
du lac de Garde. Contemplant le spectacle qui se présentait sous ses yeux,
le cardinal avait fait l’éloge des beautés du paysage, mais avec une certaine
préoccupation : l’Italie était un pays magnifique, mais malheureusement mal
gouverné 21. Le lien entre pouvoir et territoire reste la clé pour comprendre les
caractères de l’Italie au crépuscule de la civilisation médiévale.
21. U. Dotti, Vita di Petrarca, 2e éd., Rome/Bari, Laterza, 1992, p. 212, et E. H. Wilkins, Vita
del Petrarca, nouv. éd. par L. C. Rossi, Milan, Feltrinelli, 2003, p. 240 (éd. orig. Chicago,
University Press, 1961).
69
Demeures des vivants, demeures des morts
Considérations comparatives sur les formes
d’implantation urbaine des seigneurs en Italie
aux xive et xve siècles 1
marco folin
Université de Gênes (Italie)
On sait que la possession au Moyen Âge d’un palatium – palais entendu comme
siège et lieu de représentation d’une autorité souveraine, et caractérisé en tant
que tel par une série d’éléments de prestige – constituait l’un des attributs dis-
tinctifs de la royauté. De la même façon, l’une des principales formes de célé-
bration du pouvoir monarchique était, à la mort du souverain, son inhumation
dans un tombeau monumental : une sorte de mausolée suivant une tradition
illustre dont l’origine se perdait dans la nuit des temps, mais que l’Occident
chrétien n’avait jamais oubliée. En ce sens, les demeures des vivants et celles
des morts présentaient certaines fonctions communes, du moins dans le cas des
souverains : des fonctions matérielles et symboliques qui contribuaient à mar-
quer un espace de domination, à le connoter politiquement en rendant mani-
festes les raisons, la force et les titres de légitimité du pouvoir en place. Leur
emplacement, leurs formes, les rapports que ces demeures entretenaient avec le
cadre environnant constituaient des éléments-clés de la rhétorique du pouvoir,
dont la signification était accentuée par un cortège de liturgies, cérémonies,
processions (entrées triomphales, intronisations, funérailles, anniversaires…)
qui, périodiquement, cycliquement, se déployait autour de ces landmarks et
ritualisait les messages inscrits dans la pierre.
Les pages qui suivent voudraient proposer quelques considérations de
caractère comparatif sur les configurations des résidences et sépultures des
71
m a rco folin
seigneurs italiens entre les xive et xve siècles, et sur leurs évolutions en grande
partie parallèles. Étant donné l’ampleur du sujet, il est évident que les consi-
dérations ici exposées, nécessairement quelque peu schématiques, devront faire
l’objet de développements ultérieurs.
2. S. L’Occaso, « Studi sul Palazzo Ducale di Mantova nel Trecento », Atti e Memorie dell’Acca
demia Nazionale Virgiliana di Scienze, Lettere ed Arti, 70, 2002, p. 135-167 ; sur les Este à
Ferrare, voir M. Folin, « La committenza estense, l’Alberti e il palazzo di corte di Ferrara », dans
A. Calzona et al. (dir.), Leon Battista Alberti. Architetture e committenti, Atti dei convegni inter
nazionali del Comitato Nazionale VI Centenario della Nascita di Leon Battista Alberti, Firenze,
Rimini, Mantova, 12-16 ottobre 2004, Florence, Olschki, 2009, p. 277-304. Sur les Della Scala à
Vérone, voir G. Sandri, « I palazzi scaligeri di Santa Maria Antica : ricerca storico-topografica »,
dans Il palazzo della Provincia di Verona, Vérone, Tipografica Veronese, 1931, p. 3-31 ; voir
aussi les diverses reconstitutions de F. Arduini, « Scaligerorum palatia », Labyrinthos. Studi e
ricerche sulle arti dal Medioevo all’Ottocento, 5/11, 1987, p. 3-25 ; P. Hudson, « Il palazzo scaligero
di Santa Maria Antica », dans G. M. Varanini (dir.), Gli Scaligeri 1277-1387. Saggi e schede
pubblicati in occasione della mostra storico-documentaria allestita dal Museo di Castelvecchio di
Verona, giugno-novembre 1988, Milan, Mondadori, 1988, p. 225-235 ; sur Mantoue, G. Rodella,
« Le strutture architettoniche », dans G. Algeri (dir.), Il Palazzo ducale di Mantova, Mantoue,
Sometti, 2003, p. 17-52.
3. Sur l’installation de Charles d’Anjou, duc de Calabre, au Bargello entre 1325 et 1327 – l’édi-
fice est alors appelé « palais ducal » dans les sources –, voir R. Davidsohn, Storia di Firenze,
Florence, Sansoni, 1960, vol. 4, p. 1071-1073 ; L. Giorgi, P. Matracchi, « Il Bargello a Firenze.
Da Palazzo del Podestà a Museo Nazionale », dans G. Rocchi (dir.), S. Maria del Fiore. Teorie e
72
Demeures des vivants, demeures des morts
la commune devint le cœur de l’un des complexes palatiaux les plus imposants
de la péninsule, célébré en son temps par Galvano Fiamma comme le plus
bel exemple de magnificence souveraine 4. Cette situation connaît une durée
remarquable : juste après la conquête de Fermo en 1354, par exemple, le cardinal
Albornoz choisit de s’installer dans le Palazzo dei Priori, qui venait d’être réqui-
sitionné à la commune, là où tous les seigneurs successifs de la cité continueront
à résider jusqu’à Francesco Sforza au milieu du xve siècle. À Imola, les Alidosi,
après s’être rendus maîtres de la ville en 1365, s’établirent également dans le
Palazzo Vecchio de la cité, élevé d’un étage et relié aux édifices environnants de
storie dell’archeologia e del restauro nella città delle fabbriche arnolfiane, Florence, Alinea, 2006,
p. 133-138. Quant à la transformation du Palazzo Vecchio en siège de cour sous le duc d’Athènes
(1342-1343), voir N. Rubinstein, The Palazzo Vecchio, 1298-1532. Government, Architecture, and
Imagery in the Civic Palace of the Florentine Republic, Oxford, Clarendon Press, 1995, p. 15-16.
4. P. Boucheron, Le pouvoir de bâtir. Urbanisme et politique édilitaire à Milan (xiv e-xv e siècles),
Rome, École française de Rome, 1998, p. 108-128 et 200-208 ; E. S. Welch, Art and Authority
in Renaissance Milan, New Haven/Londres, Yale University Press, 1995, p. 168-175 ; plus récem-
ment, voir surtout E. Rossetti, « In “contrata de Vicecomitibus”. Il problema dei palazzi viscon-
tei nel Trecento tra esercizio del potere e occupazione dello spazio urbano », dans P. N. Pagliara,
S. Romano (dir.), Modernamente antichi. Modelli, identità, tradizione nella Lombardia del Tre e
Quattrocento, Rome, Viella, 2015, p. 11-43. Sur la référence à Galvano Fiamma, voir L. Green,
« Galvano Fiamma, Azzone Visconti and the Revival of the Classical Theory of Magnificence »,
Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, 53, 1990, p. 98-113.
73
m a rco folin
façon à abriter les logements seigneuriaux à côté – ou plutôt au-dessus – des
vieux bureaux communaux 5. En 1407, à Brescia, c’est encore dans le Broletto
que Pandolfo Malatesta voulut s’installer, faisant appel à des artistes parmi
5. T. Lazzari, « Il Palazzo comunale nel Medioevo », dans M. Montanari, T. Lazzari (dir.), Imola,
il comune, le piazze, Imola, Mandragora, 2003, p. 65-72 ; sur le cas de Fermo, voir L. Tomei,
« Le fortificazioni di Fermo », dans M. Mauro (dir.), Castelli, rocche, torri, cinte fortificate delle
Marche, Ravenne, Istituto italiano dei castelli, 2001, vol. 4/2, p. 81-88.
74
Demeures des vivants, demeures des morts
les meilleurs d’Italie, comme Gentile da Fabriano, pour en décorer les salles
les plus prestigieuses, à commencer par la chapelle de Saint-Georges. Taddeo
Manfredi, après avoir succédé aux Alidosi dans la seigneurie d’Imola en 1448,
logea quant à lui dans le Palazzo Nuovo, voisin du Palazzo Vecchio, mettant
en évidence à la fois la césure représentée par l’avènement de son règne et son
esprit d’ouverture à l’égard des institutions communales 6.
Nous sommes donc en présence d’une contiguïté – voire imbrication – très
marquée, si ce n’est affichée, de lieux, d’édifices et de fonctions. Il y a toutefois
un aspect sur lequel les demeures remaniées pour loger les seigneurs se diffé-
renciaient profondément des palais construits par les communes comme sièges
de leur gouvernement. Dans ce dernier cas, il s’agissait en général d’édifices à
l’architecture immédiatement reconnaissable, soit par leur échelle, nettement
plus imposante que les bâtiments environnants, soit parce qu’ils constituaient
un bloc isolé et libre de tous côtés, ou du moins muni d’une ou plusieurs
façades monumentales ornées de multiples éléments de prestige (créneaux,
tours, loggia, horloge…) qui les distinguaient dans le paysage urbain. Cette
distinction était sanctionnée sur le plan juridique par une série de règles qui
définissaient le bâtiment et les espaces adjacents comme des biens publics,
voire « consacrés 7 ». Il s’agissait à proprement parler de « palais », et personne
n’aurait employé un autre terme pour les désigner. En revanche, partout où
les expériences de gouvernements seigneuriaux se sont prolongées pendant
plusieurs générations et ont eu le loisir de modeler les espaces qui leur étaient
dévolus, on observe des typologies d’édifices radicalement différentes : non
pas des corps de logis isolés, mais des grappes de bâtiments – maisons, tours,
entrepôts, dépendances… – en général insérés sans solution de continuité dans
le tissu urbain, souvent entrecoupés de cours et d’espaces non construits, mais
presque jamais de « places », appelées et considérées comme telles 8. Ce n’est
6. T. Lazzari, « Il Palazzo comunale nel Medioevo », art. cité, p. 77-78. Sur les interventions de
Pandolfo Malatesta dans le Broletto de Brescia, voir E. Conti, « La corte bresciana di Pandolfo
Malatesta », dans G. Chittolini, E. Conti, N. Covini (dir.), Nell’età di Pandolfo Malatesta :
signore a Bergamo, Brescia e Fano agli inizi del Quattrocento, Brescia, Morcelliana, 2012,
p. 47-58 ; S. Buganza, « Pandolfo III Malatesta tra Brescia e Fano. La committenza artistica »,
dans G. Chittolini, E. Conti, N. Covini (dir.), Nell’età di Pandolfo Malatesta…, op. cit.,
p. 59-82, et la bibliographie. Braccio da Montone fit encore de même à Pérouse en 1416 : voir
N. Regni, « Il Palazzo come sede del governo comunale », dans F. F. Mancini (dir.), Il Palazzo
dei Priori di Perugia, Pérouse, Quattroemme, 1997, p. 144.
7. C’est par exemple le cas à Ferrare, Modène et Reggio, comme démontré dans M. Folin,
« Il governo degli spazi urbani negli statuti cittadini di area estense », dans R. Dondarini,
G. M. Varanini, M. Venticelli (dir.), Signori, regimi signorili e statuti nel tardo Medioevo,
Bologne, Pàtron, 2003, p. 360-361.
8. Même les piazze des seigneurs de Padoue et de Vérone – cas où l’appellation est enracinée
de longue date dans la toponymie locale – ne semblent pas avoir connu leur configuration
75
m a rco folin
pas un hasard si dans les sources ces ensembles sont le plus souvent désignés
par des mots employés au pluriel (domus, palatia, edificia…), révélateurs du
caractère discontinu des bâtiments qui les constituaient et de leur manque
d’unité, tant sur le plan architectural que fonctionnel. En effet, les fonctions
et destinations des différents espaces étaient itinérantes, mouvantes, super
posables, au point que certains édifices semblent parfois interchangeables – il
n’était d’ailleurs pas rare qu’un seigneur choisisse pour résidence un autre édi-
fice que son prédécesseur. Le terme aujourd’hui souvent employé pour définir
ces ensembles – « palais » au singulier – ne permet nullement de traduire la
réalité de leur articulation interne. L’appellation de « quartiers » semble plus
propre à rendre compte de cette physionomie composite et éparse, qui nous
échappe en partie aujourd’hui, mais dont nous pouvons retrouver les traces
lorsque les campagnes successives de restructuration n’ont pas totalement
effacé l’organisation ancienne des espaces de cour. C’est le cas à Mantoue,
Vérone, Ferrare, Urbino, Pesaro, Foligno ou encore Carpi – pour ne citer que
quelques cas parmi les mieux documentés –, où les archives et la morphologie
même des palais de la Renaissance montrent clairement l’éclatement originel
des demeures seigneuriales, morcelées en divers noyaux détachés les uns des
autres, bien que par la suite reliés par des passages et couloirs (corridori) plus
ou moins précaires (fig. 3) 9. Aussi les palais célébrés par les chroniqueurs du
moderne avant la fin du xive siècle ; et leur rôle de premier plan dans les rituels civiques de la
cité semble remonter essentiellement aux interventions des recteurs vénitiens : sur ce thème,
voir S. Zaggia, « Padova : XV-XVII secolo. Trasformazione e continuità negli spazi urbani
centrali », dans D. Calabi (dir.), Fabbriche, piazze, mercati. La città italiana nel Rinascimento,
Rome, Officina, 1997, p. 260 ; H. Porfyriou, « Verona : XV-XVI secolo. Da “virtù civile” a
“decoro pubblico” », dans D. Calabi (dir.), Fabbriche, piazze, mercati…, op. cit., p. 195-200.
9. Sur les cas de Vérone et de Ferrare, on peut se référer à la bibliographie mentionnée plus
haut, note 2 ; sur les demeures des Malatesta à Pesaro, en partie unifiées par la suite dans le
palais ducal des Sforza, voir S. Eiche, « La corte di Pesaro dalle case malatestiane alla residenza
roveresca », dans M. R. Vallazzi (dir.), La corte di Pesaro. Storia di una residenza signorile,
Modène, Panini, 1986, p. 13-56 ; M. Frenquellucci, « Il Palazzo Ducale sulla scena della piazza
di Pesaro all’epoca dei Malatesta e degli Sforza », dans M. R. Vallazzi (dir.), La corte di Pesaro…,
op. cit., p. 57-66. Sur le cas du Palazzo Trinci à Foligno, particulièrement bien documenté,
voir V. Franchetti Pardo, « Palazzo Trinci nel contesto della città di Foligno », dans G. Benazzi,
F. F. Mancini (dir.), Il Palazzo Trinci di Foligno, Pérouse, Quattroemme, 2001, p. 29-50. Sur
Carpi, voir M. Rossi, E. Svalduz (dir.), Il palazzo dei Pio a Carpi Sette secoli di architettura e arte,
Venise, Marsilio, 2008 ; quant à Urbino, la bibliographie est riche et parfois contradictoire :
voir entre autres J. Höfler, Der Palazzo Ducale in Urbino unter den Montefeltro (1376-1508),
Ratisbonne, Schnell & Steiner, 2004 ; plus récemment, on peut se référer aux analyses de
F. P. Fiore, « Urbino : i Montefeltro e i Della Rovere. 1444-1538 », dans M. Folin (dir.), Corti
italiane del Rinascimento. Arti, cultura e politica, Milan, Officina Libraria, 2010, p. 288-289 ;
voir aussi E. Svalduz, « “Small Mice, Large Palaces” : from Urbino to Carpi », dans S. Beltramo,
F. Cantatore, M. Folin (dir.), A Renaissance Architecture of Power. Princely Palaces in the Italian
Quattrocento, Leyde/Boston, Brill, 2016, p. 235-262.
76
Demeures des vivants, demeures des morts
10. Incipit Azo Vicecomes supradictus duo opera magnifica construere ; primum id quod respicit cultum
divinum, scilicet capellam mirabilem in honorem beate Virginis, et pallatia magnifica sue habi
tationi convenientia. […] Edificia eius sive pallatia nullos potest sufficienter exprimere. Inter
alia est una turris magna, distinctis solariis habens cameras, sallas, deambulatoria, lavatoria,
hortos et plura alia diversis picturis ornata (Galvano Fiamma, Opusculum de rebus gestis ab
Azone, Luchino et Iohanne Viceomitibus, éd. par C. Castiglioni, Bologne, Zanichelli [Rerum
Italicarum Scriptores, 2/12/4], 1938, p. 16). Sur l’articulation des habitations des Visconti à
Milan au xive siècle, voir aujourd’hui E. Rossetti, « In “contrata de Vicecomitibus”. Il pro-
blema… », art. cité.
77
m a rco folin
11. Pietro Azario, Chronicon, éd. par F. Cognasso, Bologne, Zanichelli (RIS2, 16/4), 1925, p. 152 : in
divisione habuit etiam domos in quibus consueverant habitare domini Mathei eius avus, Galeazius,
Azo et Luchinus de Vicecomitibus praecessores. […] Quas domos et multas alias sibi propinquas
fecit funditus dirui, non dimisso solo lapide recto […], quae domus cum ornamentis et picturis et
fontibus hodie non fierent cum tercentibus millibus florenis.
12. Sur ce point (concernant le palais de la Via Dante qu’a fait construire Montorso, fils de
Guglielmo Montorsi, lui-même proche de Francesco il Vecchio), voir A. Verdi, « La Reggia car-
rarese. Le vicende architettoniche del complesso trecentesco », intervention prononcée à l’Acca-
demia Galileiana le 30 novembre 2007 et publiée en ligne à l’adresse suivante : http://www.
muradipadova.it/lic/index.php?option=com_content&view=article&id=154&Itemid=175 ; sur
la structure architecturale du palais, voir également G. Lorenzoni, « L’intervento dei Carraresi,
la Reggia e il Castello », dans L. Puppi, F. Zuliani (dir.), Padova. Case e palazzi, Vicence, Pozza,
1977, p. 29-49 ; plus récemment, voir N. Nicolini, A. Rossi, La Reggia dei Carraresi a Padova.
La Casa della Rampa : scoperte, storia e restauro delle strutture trecentesche dell’angolo sud-ovest,
Milan, Skira, 2010.
78
Demeures des vivants, demeures des morts
constituaient depuis des siècles un pilier des monarchies héréditaires, pour les
familles régnant sur les villes italiennes l’idée même de dynastie représentait
un horizon lointain, qui ne fut atteint que tardivement et non sans difficultés,
au gré d’équilibres précaires et incertains jusqu’à la fin du xve siècle 13. On ne
peut en effet parler de « dynasties » en Italie, dans la mesure où le pouvoir de
gouverner ne se transmettait pas nécessairement (et presque jamais dans cer-
tains cas) de père en fils. Et il n’était pas davantage établi que le fils succédant
à son père devait être le fils aîné légitime.
Prenons l’exemple des Este, la plus ancienne lignée seigneuriale italienne (et
celle qui connut la plus grande longévité). Après l’élection d’Obizzo II comme
dominus perpetuus de Ferrare, en 1264, presque tous ses descendants au cours
13. Concernant les coutumes successorales des familles seigneuriales en Italie, voir F. Niccolai, « I
consorzi nobiliari e il comune nell’alta e media Italia », Rivista di Storia del Diritto Italiano,
13, 1940, p. 116-147 ; M. Barbagli, Sotto lo stesso tetto. Mutamenti della famiglia in Italia dal XV
al XX secolo, Bologne, Il Mulino, 1984, p. 189-203 ; et plus récemment F. Leverotti, Famiglia e
istituzioni nel Medioevo italiano, Rome, Carocci, 2005, p. 73-83 et 162-167.
79
m a rco folin
14. Sur les coutumes successorales de la maison d’Este, voir J. F. Bestor, « Bastardy and Legitimacy
in the Formation of a Regional State in Italy : the Estense Succession », Comparative Studies
in Society and History, 38/3, 1996, p. 549-585 ; ead., « Gli illegittimi e beneficiati della Casa
estense », dans A. Prosperi (dir.), Storia di Ferrara. VI. Il Rinascimento. Situazioni e personaggi,
Ferrare, Corbo, 2000, p. 77-102.
15. Enea Silvio Piccolomini, Commentarii, éd. par L. Totaro, Milan, Adelphi, 1984, vol. 1, p. 39
(De Ferraria eiusque origine, et Estensium spurcitia).
80
Demeures des vivants, demeures des morts
16. E. Mattaliano, « L’autonomia del territorio di Carpi dagli inizi al passaggio sotto il dominio
estense », dans Società, politica e cultura a Carpi ai tempi di Alberto III Pio, Padoue, Antenore,
1981, vol. 2, p. 385-393.
17. M. Folin, « Nei palazzi quattrocenteschi dei Pio : apparati decorativi e organizzazione degli
spazi di corte », dans M. Rossi, E. Svalduz (dir.), Il palazzo dei Pio a Carpi…, op. cit., p. 51-60 ;
et plus généralement M. Ghizzoni, « Ordinamenti politici e strategie signorili : note di storia
urbanistica carpigiana tra Medioevo e Rinascimento », dans E. Svalduz (dir.), L’ambizione di
essere città. Piccoli, grandi centri nell’Italia rinascimentale, Venise, Istituto di scienze, lettere ed
arti, 2004, p. 121-154.
81
m a rco folin
Fig. 5 – Les palais des trois principales branches de la famille Pio au xve siècle :
A) palais de Giberto II et Marco II (Castelvecchio, 1443-1494) ;
B) palais d’Alberto II, Leonello et Alberto III (ca. 1443-1506) ;
C) palais de Galasso III et Giberto III (1443-1499).
© M. Folin, d’après un plan de Carpi de la moitié du xviiie siècle,
Archivio Storico Comunale di Carpi, AG, b. 142, c. 7.
82
Demeures des vivants, demeures des morts
18. On peut se référer à la bibliographie citée plus haut, note 4 ; outre N. Covini, « Visibilità
del principe e residenza aperta : la Corte dell’Arengo di Milano tra Visconti e Sforza », dans
A. Calzona (dir.), Il principe in-visibile, Atti del convegno internazionale di studi (Mantova,
Centro Studi Leon Battista Alberti, 27-30 novembre 2013), à paraître.
19. Pour une vue d’ensemble des formes du pouvoir seigneurial dans l’Italie de la fin du Moyen
Âge, voir J.-C. Maire Vigueur (dir.), Signorie cittadine nell’Italia comunale, Rome, Viella, 2013 ;
ou A. Zorzi, Le signorie cittadine in Italia, Milan, Mondadori, 2010 ; R. Rao, Signori di Popolo.
Signoria cittadina e società comunale nell’Italia nord-occidentale 1275-1350, Milan, Angeli, 2012 ;
P. Grillo (dir.), Signorie italiane e modelli monarchici (secoli 13.-14.), Rome, Viella, 2013.
83
m a rco folin
C’est le cas de Marsilio da Carrara, par exemple, qui encore en 1338 – après
avoir été seigneur de Padoue pendant vingt ans – se fit enterrer dans l’abbaye de
Carrara Santo Stefano, en face du château qui avait été le cœur du pouvoir de sa
famille pendant des siècles 20. Dans les mêmes années, Rizzardo VI da Camino,
dernier descendant de la famille qui avait régné sur Trévise entre 1283 et 1312,
était enterré dans la chapelle nobiliaire du château familial de Serravalle 21. Les
comtes de Savoie faisaient de même dans le territoire subalpin, tout comme
les marquis de Saluzzo et de Monferrat, qui continuèrent tout au long du
xiiie siècle à se faire ensevelir dans les abbayes cisterciennes fondées par leurs
ancêtres, bien qu’ils aient depuis longtemps jeté leur dévolu sur une sépulture
urbaine 22. Trente ans plus tard Obizzo II d’Este, élu gubernator et rector et gene
ralis et perpetuus dominus de Ferrare en 1264, voulut – au moment de r édiger son
testament – que son corps fût transféré dans un couvent franciscain à l’extérieur
de Rovigo qu’il avait richement doté à cet effet : en d’autres termes à l’endroit où
se concentraient les propriétés foncières de la famille, pas très loin de l’abbaye de
la Vangadizza où reposaient ses aïeuls depuis la fin du xie siècle (fig. 6) 23.
Il en était bien autrement lorsque la famille avait depuis des générations
enraciné son pouvoir dans le territoire urbain et que son ascension avait eu lieu
au sein des institutions communales, au cœur de la ville et de ses trafics. Dans
ce cas, l’église choisie pour conserver la dépouille du seigneur n’était en général
pas une fondation blasonnée en pleine campagne, mais une paroisse citadine,
20. F. Mangani, « La tomba di Marsilio nell’abbazia di Santo Stefano di Due Carrare », dans
D. Banzato, F. Flores d’Arcais (dir.), I luoghi dei Carraresi. Le tappe dell’espansione nel Veneto
nel XIV secolo, Trévise, Canova, 2006, p. 121-128.
21. G. B. Cervellini, « Il monumento Caminese di Serravalle (Vittorio) », Bollettino d’arte del
Ministero della Pubblica Istruzione, 19, 1929-1930, p. 456-477 ; C. Esposito, « Il monumento
funebre di Rizzardo VI da Camino », dans Il dominio dei Caminesi tra Piave e Livenza,
Vittorio Veneto, Circolo TIPSE, 1988, p. 101-111 ; T. Franco, « Pro honore altissimi Salvatoris
mundi et ipsius domini comitis. La magnificenza signorile dei Collalto e dei da Camino », dans
A. C. Quintavalle (dir.), La chiesa e il palazzo, Milan, Electa, 2007, p. 280-290.
22. C. Tosco, « Il mausoleo del principe », dans id., Architetture del Medioevo in Piemonte, Turin,
Valerio, 2003, p. 143-182.
23. M. Innocenti, « L’abbazia della Vangadizza di Badia Polesine : i suoi rapporti con la grande
storia europea del Medioevo e con i monasteri tedeschi di Weingarten e Altomünster », Beni
culturali e ambientali in Polesine, 5, 2002, p. 41-49. Sur le testament d’Obizzo II, voir Archivio
di Stato di Modena, Casa e Stato, B. 324, 28 juin 1292 : construatur et fiat unus locus religiosus in
quo quidem loco religioso morentur et morari possint continue viri religiosi numero quinquaginta
de ordine beati Francisci, qui minores fratres vulgariter appellantur […] in Policino extra portam
terre nostre Rodigii super cantonem vie per quam viam et portam itur ad villam Sarzani. […]
Item elegimus sepulturam nostram et volumus sepelliri apud domum fratrum minorum in loco
nostro religioso quem apud Rodigium fieri ordinavimus, sicut est superius declaratum, et hoc si
tempore mortis nostre dictus locus fuerit incohatus ; quod si non fuerit incohatus eligimus sepelliri
apud domum fratrum minorum de Ferraria quousque dictus locus fuerit inchoatus, quo inchoato
ad eum locum volum transferri et portari et corpus nostrum ibi sepelliri.
84
Demeures des vivants, demeures des morts
24. E. Napione, Le arche scaligere di Verona, Venise, Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti,
2009, p. 41-54.
25. Sur les caractéristiques générales de l’implantation de l’aristocratie dans les territoires urbains
à la fin du Moyen Âge, voir J. Heers, La città nel Medioevo, Milan, JacaBook, 1995, p. 227-232,
235-253 et 260-275 et la bibliographie qui y figure ; sur le cas de Vérone, on peut se référer plus
particulièrement à A. Castagnetti, « La famiglia veronese degli Avvocati (secoli XI-XIII) », dans
Studi sul Medioevo cristiano offerti a Raffaello Morghen, Rome, Istituto Storico Italiano per il
Medioevo, 1974, vol. 1, p. 251-292 ; G. M. Varanini, « Torri e casetorri a Verona in età comu-
nale : assetto urbano e classe dirigente », dans Paesaggi urbani dell’Italia padana nei secoli VIII-
XIV, Bologne, Cappelli, 1988, p. 173-249 ; id., « Spazio urbano e dinamica sociale a Verona in
età comunale e scaligera. Linee di interpretazione », dans P. Lanaro, P. Marini, G. M. Varanini
(dir.), Edilizia privata nella Verona rinascimentale, Milan, Electa, 2000, p. 23-36.
85
m a rco folin
26. Rappelons au passage qu’à la fin du xiiie siècle, une autre branche de la famille avait com-
mencé à se faire enterrer dans le couvent cistercien de San Fruttuoso à Capodimonte : voir
G. Chiavari, « Tombe dei Doria a San Fruttuoso di Capodimonte : diagnostica dei materiali
in funzione di un restauro », Arkos, 5/7, 2004, p. 44-51.
27. E. Napione, Le arche scaligere di Verona, op. cit., p. 67-92.
28. P. Seiler, « La trasformazione gotica della magnificenza signorile. Committenza viscontea e
scaligera nei monumenti sepolcrali dal tardo Duecento alla metà del Trecento », dans V. Pace,
M. Bagnoli (dir.), Il Gotico europeo in Italia, Naples, Electa, 1994, p. 130 ; M. M. Donato,
« I signori, le immagini e la città. Per lo studio dell’“immagine monumentale” dei signori di
Verona e di Padova », dans A. Castagnetti, G. M. Varanini (dir.), Il Veneto nel Medioevo : le
signorie trecentesche, Vérone, Banca Popolare di Verona, 1995, p. 391-392.
86
Demeures des vivants, demeures des morts
29. J. Gardner, « L’introduzione della tomba figurata in Italia centrale », dans V. Pace, M. Bagnoli
(dir.), Il Gotico europeo in Italia, op. cit., p. 207-219 ; sur les monuments voulus par Henri VII,
voir V. Herzner, « Herrscherbild oder Grabfigur. Die Statue eines thronenden Kaisers und
das Grabmal Heinrichs VII. von Tino di Camaino in Pisa », dans B. Brock, A. Preiss (dir.),
Ikonographia. Anleitung zum Lesen von Bildern. Festschrift Donat de Chapeaurouge, Munich,
Klinkhardt & Biermann, 1990, p. 26-77 ; A. R. Calderoni Masetti, « Per il monumento funebre
di Arrigo VII nel Duomo di Pisa », dans A. C. Quintavalle (dir.), Le vie del Medioevo. Atti
del convegno internazionale di studi (Parma, 28 settembre-1 ottobre 1998), Milan, Electa, 2000,
p. 374-387 ; id. (dir.), Giovanni Pisano. La tecnica e il genio. 1. Novita e approfondimenti sul
monumento a Margherita di Brabante, Gênes, Museo di Sant’Agostino, 2001, p. 1-15.
87
m a rco folin
seigneuriaux les plus imposants des premières décennies du siècle – les seuls
qui affichent à cette date l’ambition de s’affirmer comme des monuments
civiques dans la ville, s’adressant en tant que tels à la collectivité urbaine –
destinés à Ottone Visconti à Milan (après 1295 ; fig. 8), à Berardo Maggi à
Brescia (1308-1311) et à Guido Tarlati à Arezzo (1329-1332) 30. Trois personnages
qui, avant de devenir des seigneurs, avaient été évêques de leurs villes respec-
tives et avaient à ce titre exercé le pouvoir – si bien que le caractère propre-
ment seigneurial et politique de leur domination a été récemment fortement
remis en question 31. Dans chacun de ces cas, les messages écrits et figurés dont
les sarcophages étaient porteurs, de même que leur emplacement dans les
cathédrales de leurs villes, n’établissaient aucune distinction entre l’exercice
du pouvoir politique et la dignité ecclésiastique, et visaient ouvertement à
légitimer le premier par la seconde. Ce fait extrêmement significatif confirme
ce qui émerge des recherches les plus récentes sur l’évolution des relations de
pouvoir dans les villes italiennes des xiiie et xive siècles 32 : sur le plan des insti-
tutions comme du langage politique, mais également en termes de stratégies
conscientes de communication par l’image, les premières phases d’affirmation
30. G. A. S. Pelham, « Reconstructing the Programme of the Tomb of Guido Tarlati, Bishop
and Lord of Arezzo », dans J. Cannon, B. Williamson (dir.), Art, Politics and Civic Religion
in Central Italy, 1261-1352 : Essays by Postgraduate Students at the Courtauld Institute of Art,
Aldershot, Ashgate, 2000, p. 71-115 ; V. Conticelli, « Una sepoltura ricchissima e “quanto più
si potesse onorata” : osservazioni sul cenotafio di Guido Tarlati nel duomo di Arezzo », dans
A. Galli, P. Refice (dir.), Arte in terra d’Arezzo : il Trecento, Florence, Edifir, 2005, p. 179-189 ;
R. Bartalini, « “Segnori al tutto d’Arezzo”. Alcune considerazioni sui Tarlati al potere e la loro
committenza », dans A. C. Quintavalle (dir.), Medioevo. Arte e storia. Atti del convegno interna
zionale di studi (Parma, 18-22 settembre 2007), Milan, Electa, 2008, p. 554-563. Sur le tombeau
de Berardo Maggi, voir J.-F. Sonnay, « Paix et bon gouvernement : à propos d’un monument
funéraire du Trecento », Arte Medievale, 2/4/2, 1990, p. 179-193 ; G. Archetti, « Immagine e
memoria di un episcopato nell’iconografia del sarcofago Maggi (sec. XIV) », dans Scritti in
onore di Gaetano Panazza, Brescia, Accademia di scienze, lettere ed arti, 1994, p. 117-137 ;
W. Cupperi, « Il sarcofago di Berardo Maggi, signore e vescovo di Brescia, e la questione dei
suoi ritratti trecenteschi », Annali della Scuola Normale Superiore di Pisa, Classe di Lettere e
Filosofia, 4/2, 2002, p. 387-438 ; E. Freeman, « The Tomb as Political Narrative at the Turn of
the Fourteenth Century. Reassessing the Funerary Monument and Statue of Berardo Maggi,
Bishop of Brescia (d. 1308) », Church Monuments, 24, 2009, p. 53-72 ; M. Ferrari, « I Maggi a
Brescia. Politica e immagine di una “signoria” (1275-1316) », Opera Nomina Historiae, 4, 2011,
p. 19-66 ; G. Archetti (dir.), Berardo Maggi. Un principe della chiesa al crepuscolo del Medioevo,
Brescia, Fondazione Civiltà Bresciana, 2012. Sur le monument d’Ottone Visconti, voir P. Seiler,
« La trasformazione gotica della magnificenza signorile… », art. cité, p. 122 ; E. S. Welch, Art
and Authority in Renaissance Milan, op. cit., p. 15-18 ; G. C. Cariboni, « Comunicazione simbo-
lica e identità cittadina a Milano presso i primi Visconti (1277-1354) », Reti medievali Rivista,
9/1, 2008, p. 13-14.
31. F. Negro, « I signori vescovi : note sul senso di una categoria », dans J.-C. Maire Vigueur (dir.),
Signorie cittadine nell’Italia comunale, op. cit., p. 263-301.
32. Voir la bibliographie mentionnée plus haut, note 19.
88
Demeures des vivants, demeures des morts
89
m a rco folin
Ce n’est qu’à partir des années 1330 que les choses commencent, lentement, à
évoluer. En premier lieu, les abbayes rurales cessent un peu partout de consti-
tuer un lieu de sépulture convoité par les seigneurs et leurs parents. Partout,
ceux-ci tendent à abandonner les anciens tombeaux extra-urbains au profit
de nouvelles chapelles funéraires fondées dans les églises les plus importantes
des villes – si l’on excepte le cas des moines et des abbés, qui jouissaient tou-
jours du privilège de pouvoir être enterrés dans l’église où ils avaient officié 33.
L’évolution des formes mêmes des tombeaux est sans doute encore plus signi-
ficative : plus ambitieuses, plus grandioses, elles témoignent de toute évidence
du désir d’un nombre croissant de seigneurs de se doter d’une sépulture au
caractère monumental et somptuaire conforme à leur statut, ce qui était encore
tout à fait inusité quelques années auparavant.
Les cas les plus connus et étudiés sont ceux des Della Scala et des Visconti,
pour qui furent érigés en l’espace de cinquante ans pas moins de cinq tombeaux
aux prétentions ouvertement monarchiques : les trois tombeaux de Cangrande
(vers 1335), Mastino II (à la fin des années 1440) et Cansignorio (1374-1375 ;
fig. 9) à Vérone 34 ; et à Milan les monuments destinés à Azzone dans l’église
33. Deux exemples parmi d’autres : à Vérone, Giuseppe Della Scala, abbé de San Zeno, fut enterré
dans le cloître de « son » monastère en 1313 ; à Ferrare, Gurone d’Este, commanditaire du
monastère de Sant’Antonio in Polesine, y fut inhumé en 1556. On peut observer au passage que
le même principe valait pour les religieuses, en particulier les abbesses, qui pouvaient d’autant
plus légitimement prétendre à une sépulture d’exception dans le monastère où elles avaient
vécu qu’elles étaient auréolées d’une réputation de grande dévotion, voire de sainteté. Dans ce
cas, leur sépulcre pouvait devenir l’objet d’un culte, de rituels et de pèlerinages : ce fut le cas
au milieu du xiiie siècle pour la bienheureuse Beatrice d’Este († 1239) et sa nièce homonyme
(† 1262), enterrées respectivement dans l’abbaye de Gemmola et le monastère de San Lazzaro
à Ferrare ; ou plus tard pour les bienheureuses Margherita († 1464) et Ludovica de Savoie
(† 1503), inhumées à Alba et Orbe, dans les monastères qu’elles avaient fondés. Pour une mise
en perspective de cette question sur le plan européen, voir A. Vauchez, « Beata Stirps : sainteté
et lignage en Occident aux xiiie et xive siècles », dans Famille et parenté dans l’Occident médiéval.
Actes du colloque de Paris (6-8 juin 1974), Rome, École française de Rome, 1977, p. 397-406 ;
G. Klaniczay, Holy Rulers and Blessed Princesses. Dynastic Cults in Medieval Central Europe,
Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
34. E. Napione, Le arche scaligere di Verona, op. cit.
90
Demeures des vivants, demeures des morts
91
m a rco folin
35. Sur le tombeau d’Azzone, voir P. Seiler, « Das Grabmal des Azzo Visconti in San Gottardo in
Mailand », dans J. Garms, A. M. Romanini (dir.), Skulptur und Grabmal des Spätmittelalters
in Rom und Italien, Vienne, Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, 1990,
p. 367-392 ; P. Boucheron, « Tout est monument. Le mausolée d’Azzone Visconti à San Gottardo
in Corte (Milan, 1342-1346) », dans D. Barthélemy, J.-M. Martin (dir.), Liber largitorius. Études
d’histoire médiévale offertes à Pierre Toubert par ses élèves, Genève, Droz, 2003, p. 303-329. Sur le
monument de Bernabò, voir A. Lee Palmer, « Bonino da Campione’s Equestrian Monument
of Bernabò Visconti and Popular Piety in the Late Middle Ages », Arte Lombarda, 121/3, 1997,
p. 57-66 ; et surtout G. A. Vergani, L’arca di Bernabò Visconti al Castello Sforzesco di Milano,
Milan, Silvana, 2001.
92
Demeures des vivants, demeures des morts
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36. A. Poloni, « Il trono del doge. Giovanni dell’Agnello signore di Pisa e di Lucca (1364-1368) »,
dans P. Grillo (dir.), Signorie italiane…, op. cit., p. 321 ; sur les sarcophages des Gonzague dans
la cathédrale de Mantoue, voir P. Bertelli, « I Gonzaga sepolti in duomo », dans R. Golinelli
Berto (dir.), Sepolcri gonzagheschi, Mantoue, Associazione per i Monumenti Domenicani
(Quaderni di San Lorenzo, 11), 2013, p. 23-56. Giovanni Visconti di Oleggio († 1366) se fit
aussi enterrer dans la cathédrale de Fermo : voir G. A. Vergani, « Un signore lombardo, uno
scultore romagnolo e un sepolcro “alla veneziana” nelle Marche del Trecento. Bonaventura
da Imola e l’Arca di Giovanni Visconti da Oleggio nel duomo di Fermo », dans S. Maddalo,
I. Lori Sanfilippo (dir.), Civiltà urbana e committenze artistiche al tempo del maestro di Offida
(secoli XIV-XV), Ascoli Piceno, Istituto Storico Italiano per il Medioevo, 2013, p. 219-240.
37. H. Saalman, « Carrara Burials in the Baptistery of Padua », The Art Bulletin, 69, 1987, p. 376-394.
38. La question du coût matériel de ces monuments constitue une intéressante piste de recherche :
pour quelques informations à ce sujet, on peut se reférer à C. Di Fabio, « I sepolcri della regina
Margherita, del cardinale Luca Fieschi e dei dogi Simone Boccanegra e Leonardo Montaldo »,
Bollettino dei Musei Civici Genovesi, 20/64, 2000, p. 7-20 ; plus généralement, voir S. Badham,
S. Oosterwijk (dir.), Monumental Industry. The Production of Tombs Monuments in England and
Wales in the Long Fourteenth Century, Donington, Shaun Tyas, 2010.
94
Demeures des vivants, demeures des morts
marquant de leur présence un édifice, une place ou, plus largement, tout l’espace
liturgique d’un pôle de l’identité civile et religieuse de la ville.
Dans les mêmes années, les quartiers résidentiels des seigneurs semblent
engagés dans la voie de changements analogues, qui tendent à rendre plus
manifestes les revendications de pouvoir des commanditaires (fig. 12) 39. Dans
ce contexte, il est significatif que les textes voués à exalter la magnificence des
palais des Visconti, des Della Scala ou des Carrara multiplient les allusions
à des éléments de prestige issus du répertoire de « l’architecture de pouvoir »
à caractère impérial (ou pontifical, en Italie) : chapelles palatines, mausolées
dynastiques, jardins, ménageries d’animaux exotiques, appareils décoratifs et
programmes iconographiques liés au thème du « triomphe »… Dans la majo-
rité des cas, il est vrai que ces éléments, indépendamment – ou peut-être à
cause – de leur signification explicite de célébration du pouvoir, étaient confi-
nés dans les parties intérieures et privées des demeures seigneuriales, tandis
que les façades extérieures restaient fidèles à la tradition architecturale locale.
Toutefois, l’existence même de ces décors, comme le fait que l’on s’adresse de
plus en plus souvent pour leur réalisation à des artistes de renom (la récurrence
39. Le cas de Vérone, entre autres, est significatif : voir V. Bertolini, « Cansignorio e la città marmo-
rina », dans G. M. Varanini (dir.), Gli Scaligeri 1277-1387…, op. cit., p. 255-260 ; M. M. Donato,
« I signori, le immagini e la città… », art. cité, p. 430-437. Avec une attention particulière au
programme décoratif du palais de Cangrande, on peut se référer plus récemment à F. Piccoli,
« Dentro e fuori la corte : note sulle pitture trecentesche nel palazzo di Cangrande della Scala a
Verona », dans S. Romano, D. Zaru (dir.), Arte di corte in Italia del Nord. Programmi, modelli,
artisti (1330-1402 ca.), Rome, Viella, 2013, p. 147-170 ; E. Napione, « Tornare a Julius von
Schlosser : i palazzi scaligeri, la “sala grande dipinta” e il primo umanesimo », dans S. Romano,
D. Zaru (dir.), Arte di corte in Italia del Nord…, op. cit., p. 171-194.
95
m a rco folin
du nom de Giotto est à cet égard significative), sont des signes éloquents des
changements profonds qui voient alors le jour et de l’importance grandissante
que l’image du Prince venait à jouer dans le débat politique de l’époque 40.
L’évolution du goût des seigneurs ou la compétition entre les différentes
cours italiennes 41 ne peuvent suffire à expliquer ces transformations. Bien sûr,
ces données ont leur importance. Mais d’autres facteurs de nature politique,
liés à la faillite des projets hégémoniques d’Henri VII et de ses émules, à la
frustration des ambitions de la Maison d’Anjou, à la stabilisation du cadre ins-
titutionnel dans lequel s’inscrivaient les seigneurs grâce au développement de la
pratique du vicariat, ont très probablement joué un rôle déterminant dans ce
processus. De ce point de vue, les transformations qui touchent les demeures
seigneuriales – dont les sépultures des Della Scala et des Visconti étaient l’exact
reflet – peuvent apparaître comme les témoins d’un profond changement des
équilibres politiques dans la péninsule italienne et des nouvelles ambitions que
cultivait la génération des seigneurs arrivée au pouvoir au milieu du xive siècle.
Cependant, les opérations de grande envergure évoquées plus haut appa-
raissaient sous d’autres aspects comme relativement atypiques dans le contexte
de l’époque, et étaient généralement perçues comme telles par leurs contem-
porains. Les allusions de Galvano Fiamma aux sommes fabuleuses dépensées
par Azzone Visconti pour décorer San Gottardo ou les critiques de l’Anonyme
romain contre les « palais démesurés » (esmesurata palatia) érigés par Mastino
Della Scala pour se montrer « roi digne de couronne » (rege da corona) sont à
cet égard révélatrices : bien que militant dans des coalitions idéologiquement
opposées, les deux auteurs partagent comme une évidence le sentiment de
se trouver face à des entreprises au caractère somptuaire hors norme 42. En
matière de représentation funéraire, les choix des seigneurs de l’Italie centrale
et septentrionale semblent en effet, au moins jusqu’aux premières décennies
du xve siècle, se porter non sur des monuments « triomphaux » mais sur des
sépultures qui, même si elles reflètent les changements d’orientation évoqués
plus haut, restent fortement ancrées dans la tradition et ne se distinguent guère
40. G. M. Varanini, « Propaganda dei regimi signorili : le esperienze venete del Trecento », dans
P. Cammarosano (dir.), Le forme della propaganda politica nel Due e nel Trecento. Relazioni
tenute al convegno internazionale organizzato dal Comitato di studi storici di Trieste, dall’École
française de Rome e dal Dipartimento di storia dell’Università degli studi di Trieste (Trieste,
2-5 marzo 1993), Rome, École française de Rome, 1994, p. 331-336 ; M. M. Donato, « I signori,
le immagini e la città… », art. cité, p. 381-384.
41. B. Cassidy, Politics, Civic Ideals and Sculpture in Italy, c. 1240-1400, Turnhout, Brepols, 2007,
p. 233 ; P. Seiler, « La trasformazione gotica della magnificenza signorile… », art. cité, p. 133-134.
42. Sur Galvano Fiamma, voir L. Green, « Galvano Fiamma, Azzone Visconti… », art. cité ; sur
l’évocation de Mastino et de son monument dans la Cronica de l’Anonyme romain, voir
E. Napione, Le arche scaligere di Verona, op. cit., p. 273-286.
96
Demeures des vivants, demeures des morts
43. Sur les rapports des Malatesta avec les franciscains, et en particulier sur le cas de Pesaro, où
entre 1355 et 1373 Pandolfo Malatesta rénova complètement l’église San Francesco, commandi-
tant une chapelle dédiée à la bienheureuse native de la ville Michelina Metelli, voir J. Dalarun,
La sainte et la cité. Micheline de Pesaro († 1356), tertiaire franciscaine, Rome, École française
de Rome, 1992, p. 110-122. Quant au cas des Este, voir M. Folin, « Mausolei estensi fra tardo
Medioevo e prima età moderna », dans A. Calzona (dir.), Il principe in-visibile…, op. cit.
44. La pierre tombale d’Ostasio da Polenta († 1396) représenté en habit franciscain, qui est tou-
jours conservée dans la nef gauche de l’église San Francesco à Ravenne, est en particulier
remarquable.
45. Dans la chapelle des Ordelaffi à San Francesco Grande furent enterrés, entre autres, Francesco
Ordelaffi et Cia Ubaldini en 1381, Teobaldo Ordelaffi († 1382), Giorgio Ordelaffi († 1422),
Caterina Rangoni († 1467). Barbara Manfredi (1466) et Pino II Ordelaffi († 1480) furent en
revanche ensevelis à San Girolamo : sur leurs tombeaux, voir G. Mazzatinti, « Il principato
di Pino III Ordelaffi secondo un frammento inedito della cronaca di Leone Cobelli », Atti
e Memorie della Regia Deputazione di Storia Patria per le Provincie di Romagna, 3/13, 1895,
p. 18-19 ; A. Colombi Ferretti, L. Prati (dir.), Il monumento a Barbara Manfredi e la scultura del
Rinascimento in Romagna, Bologne, Nuova Alfa, 1989.
46. Castruccio avait déjà dans son propre testament pris des dispositions pour être enterré dans
l’église San Francesco, revêtu de l’habit franciscain (M. Luzzati, « Castracani degli Antelminelli,
Castruccio », dans Dizionario Biografico degli Italiani, Rome, Enciclopedia Italiana, 1989,
vol. 22, p. 203-204), et son fils Guarniero suivit encore ses traces en se faisant inhumer dans
l’église San Francesco de Sarzana en 1328, dans un sarcophage commandité à Giovanni di
Balduccio. Francesco Castracani fut également enterré à San Francesco, en 1355. Sur la chapelle
Guinigi, fondée par Francesco di Bartolomeo en 1356, on peut se référer à G. Donati, « Arte
e architettura in San Francesco di Lucca fino alle soglie del Cinquecento (con la vera storia
della cappella Guinigi) », dans M. T. Filieri, G. Ciampoltrini (dir.), Il complesso conventuale di
San Francesco in Lucca. Studi e materiali, Lucques, Fondazione Cassa di Risparmio di Lucca,
2009, p. 13-111 ; voir aussi les enquêtes du Laboratorio di Paleopatologia de l’université de Pise,
en ligne à l’adresse suivante : http://www.paleopatologia.it/attivita/pagina.php?recordID=29.
47. P. Artoni, « San Francesco in Mantova. Il pantheon dei primi Gonzaga », dans R. Golinelli
Berto (dir.), Sepolcri gonzagheschi, op. cit., p. 57-86 ; L. Cavazzini, « Da Jacobello Dalle Masegne
a Bonino da Campione, da Margherita Malatesta ad Alda d’Este. Qualche altro frammento
di Mantova tardogotica », dans S. Romano, D. Cerutti (dir.), L’artista girovago. Forestieri,
97
m a rco folin
Urbino et aux Petrucci à Sienne à la fin du siècle suivant 48. Le choix des sei-
gneurs pouvait aussi se porter sur une église augustinienne, comme ce fut le
cas pour les Bentivoglio à Bologne (San Giacomo Maggiore, 1445-1486) ou,
plus fréquemment, sur une église dominicaine : ce fut l’option retenue, entre
autres, par les Visconti à Milan (Sant’Eustorgio, à partir de 1297) 49, les marquis
de Saluzzo à Saluzzo (1336-1474) 50, les Pepoli à Bologne (1347) 51, ou encore les
Carraresi à Padoue (Sant’Agostino, 1345-1350) 52.
D’une manière générale, la préférence pour tel ou tel ordre – notamment
lorsqu’il ne s’agissait pas des franciscains – semble dériver principalement de la
proximité de l’église choisie avec le lieu d’habitation traditionnel de la famille
au pouvoir : le cas des Bentivoglio, dont le palais se trouvait quasiment en face
avventurieri, emigranti e missionari nell’arte del Trecento in Italia del Nord, Rome, Viella, 2012,
p. 241-268 ; sur le décor peint de la chapelle, voir A. De Marchi, « Un’aggiunta al catalogo di
Serafino de’ Serafini », Atti e Memorie della Deputazione di storia patria per le antiche province
modenesi, 11/10, 1988, p. 119-130.
48. Sur les rapports d’Antonio et Pandolfo Petrucci avec l’église de l’Observance de Saint-
Bernardin, où ils furent tous deux enterrés en 1457 et 1512, voir F. Nevola, Siena. Constructing
the Renaissance City, New Haven/Londres, Yale University Press, 2007, p. 196-197, et la biblio-
graphie de cet ouvrage. Sur le mausolée de Frédéric de Montefeltro à Urbino, voir H. Burns,
« San Bernardino a Urbino, anni Ottanta del XV secolo e seguenti », dans F. P. Fiore, M. Tafuri
(dir.), Francesco di Giorgio architetto, Milan, Electa, 1993, p. 230-244 ; A. Festa, « La commit-
tenza feltresca e l’Osservanza francescana : ipotesi sull’originaria funzione della chiesa conven-
tuale e mausoleo di San Bernardino in Urbino », dans F. Colocci (dir.), Contributi e ricerche su
Francesco di Giorgio nell’Italia centrale, Urbino, Comune di Urbino, 2006, p. 135-155.
49. Sur la chapelle San Tommaso, fondée à Sant’Eustorgio par Matteo I Visconti en 1297, voir
R. Bossaglia, « La scultura », dans G. A. Dall’Acqua (dir.), La basilica di Sant’Eustorgio a Milano,
Cinisello Balsamo, Pizzi, 1984, p. 93-123.
50. G. Repaci Courtois, « La cappella funeraria dei marchesi, nella chiesa di San Giovanni a
Saluzzo », Bollettino della Società Piemontese di Archeologia e Belle Arti, 20, 1966, p. 64-77 ;
C. Tosco, « Il mausoleo del principe », art. cité, p. 164-168.
51. I. B. Supino, La tomba di Taddeo Pepoli nella chiesa di San Domenico in Bologna, Bologne,
Zanichelli, 1908. Sur la chapelle Bentivoglio à San Giacomo Maggiore, voir A. Ottani Cavina,
« La cappella Bentivoglio », dans C. Volpe (dir.), Il tempio di San Giacomo Maggiore in Bologna.
Studi sulla storia e le opere d’arte, Bologne, Padri Agostiniani di San Giacomo, 1967, p. 117-131 ;
A. M. Matteucci, « Le sculture », dans C. Volpe (dir.), Il tempio di San Giacomo Maggiore in
Bologna…, op. cit., p. 74-78 ; P. L. Perazzini, « La cappella Bentivoglio in San Giacomo Maggiore
alla luce di nuovi documenti », Strenna Storica Bolognese, 49, 1999, p. 351-372 ; D. Drogin,
« Professors and Princes : Patronage of Sculpture in the Cappella Bentivoglio, Bologna », dans
K. Wren Christian, D. Drogin (dir.), Patronage and Italian Renaissance Sculpture, Farnham,
Ashgate, 2010, p. 43-59.
52. Voir M. M. Donato, « I signori, le immagini e la città… », art. cité, p. 402-406 ; A. M. Spiazzi,
« Le tombe carraresi nella chiesa degli Eremitani », dans D. Banzato, F. Flores d’Arcais (dir.), I
luoghi dei Carraresi…, op. cit., p. 125-128 ; L. Cavazzini, « Un’incursione di Bonino da Campione
alla corte dei Carraresi », dans S. Romano, D. Zaru (dir.), Arte di corte in Italia del Nord…,
op. cit., p. 37-62 ; Z. Murat, « Il Paradiso dei Cararresi. Propaganda politica e magnificenza
dinastica nelle pitture di Guriento a Sant’Agostino », dans S. Romano, D. Zaru (dir.), Arte di
corte in Italia del Nord…, op. cit., p. 97-122.
98
Demeures des vivants, demeures des morts
53. Sur la fonction funéraire des églises des ordres mendiants, en particulier franciscaines, dans
les villes italiennes de la fin du Moyen Âge, voir C. Bruzelius, « I morti arrivano in città : pre-
dicare, seppellire e costruire. Le chiese dei frati nel Due-Trecento », dans C. Bozzoni, A. Roca
De Amicis (dir.), Colloqui d’architettura, vol. 2 : Architettura, pittura e società tra Medioevo e
XVII secolo, Rome, Gangemi, 2012, p. 11-48 ; et plus généralement M. Bacci, Investimenti per
l’Aldilà. Arte e raccomandazione dell’anima nel Medioevo, Rome/Bari, Laterza, 2003, p. 111-152.
Sur le rapport entre franciscanisme et pouvoir seigneurial, on peut se référer en particulier
à G. G. Merlo, « Francescanesimo e signorie nell’Italia centro-settentrionale del Trecento »,
dans Francescani nel Trecento. Atti del XIV Convegno Internazionale (Assisi, 16-18 ottobre 1986),
Pérouse, Soc. Internazionale degli Studi Francescani, 1988, p. 101-126.
54. Pour quelques exemples, voir P. Marini, E. Napione, G. M. Varanini (dir.), Cangrande
della Sala. La morte e il corredo di un principe nel Medioevo europeo, Venise, Marsilio, 2004 ;
E. Napione (dir.), Il corpo del principe. Ricerche su Cangrande della Scala, Venise, Marsilio,
2004 ; B. Pagliari, « I Funerali di Gian Galeazzo Visconti di Pietro cantarino da Siena : novità
documentarie e prospettive di ricerca », dans S. Romano, D. Zaru (dir.), Arte di corte in Italia
del Nord…, op. cit., p. 397-411.
55. Sur les arche dei dottori, voir R. Grandi, I monumenti dei dottori e la scultura a Bologna (1267-
1348), Bologne, Comune di Bologna, 1982 ; sur le tombeau de Raimondino Lupi dans l’Ora-
toire Saint-Georges, voir P. Pettenella, « Sull’arca di Raimondino Lupi », Il Santo, 32/1, 1992,
p. 31-61 ; sur la chapelle Scrovegni, parmi une bibliographie considérable, on peut citer deux
ouvrages récents : L. Jacobus, Giotto and the Arena Chapel : Art, Architecture and Experience,
Turnhout, Brepols, 2008 ; et C. Frugoni, L’affare migliore di Enrico. Giotto e la cappella degli
Scrovegni, Turin, Einaudi, 2008.
99
m a rco folin
une certaine visibilité dans l’espace : ils entretenaient également des rapports
analogues avec leur environnement. Même les mausolées les plus somptueux
n’étaient presque jamais de nature à accaparer complètement l’espace de l’église
où ils se trouvaient, dont ils occupaient en général une ou deux chapelles
latérales (fig. 13). En effet, s’il est un aspect qui – au-delà des autres différences
d’ordre formel – caractérise la plupart des sépultures seigneuriales entre xive et
xve siècle, c’est bien le fait qu’elles ne se positionnent presque jamais comme le
point focal exclusif de l’espace liturgique où elles prennent place. Le contexte
dans lequel elles s’intégraient était pluriel, habité par une diversité de présences
pas nécessairement liées à l’expression de la prééminence du pouvoir seigneu-
rial. Les sépultures des seigneurs se trouvaient au milieu des autres tombes qui
s’entassaient dans les nécropoles urbaines : les « tyrans » reposaient à côté des
évêques et des juristes, des condottieri et des marchands, des professeurs et des
chevaliers. Et c’est sans doute ce dernier aspect qui manifeste le plus clairement
la distance qui sépare ce type de sépulture du mausolée d’un « vrai » roi comme
celui de Robert d’Anjou à Naples (1343-1345), situé de façon à dominer visuel-
lement et conceptuellement toute la nef de l’église Santa Chiara au point d’en
faire, comme cela a été dit, une « reproduction éternelle de la cour » et de son
organisation hiérarchique – avec le roi derrière l’autel majeur et à ses côtés les
héritiers au trône, tandis que les nobles et les courtisans leur faisaient une haie
d’honneur dans les chapelles latérales (fig. 14) 56.
Un dernier aspect plutôt conservateur, voire réactionnaire, distinguait de
nombreux tombeaux de ces seigneurs du xive siècle des plus grands monu-
ments construits par les dynasties couronnées de la même époque, de Naples
à Saint-Denis : le fait qu’il s’agisse – et cela restera longtemps le cas pour une
bonne partie d’entre eux – de tombes collectives, possédées, gérées, « habitées »
par plusieurs générations de parents. À Ferrare, par exemple, les Este dispo-
saient à l’intérieur de l’église San Francesco d’un grand sarcophage de porphyre
(appelé Arca rossa, aujourd’hui disparu mais probablement d’un type proche
des premiers sarcophages des Della Scala), dans lequel reposaient vraisembla-
blement tous les marquis d’Obizzo III d’Este († 1352) à Alberto V († 1393), et
qui continua à être utilisé pour les cadets de la famille jusqu’aux années 1470 57.
56. C. Bruzelius, « I morti arrivano in città… », art. cité, p. 20-21 ; plus généralement, sur les
sépultures de la maison d’Anjou à Santa Chiara, voir ead., Le pietre di Napoli. L’architettura
religiosa nell’Italia angioina, 1266-1343, Rome, Viella, 2005, p. 159-171 ; T. Michalsky, Memoria
und Repräsentation. Die Grabmäler des Könighauses Anjou in Italien, Göttingen, Vandenhoeck
& Ruprecht, 2000, p. 149-152 et 169-171.
57. En 1476 y fut encore inhumé Nicolò di Leonello d’Este : voir Bernardino Zambotti, Diario
ferrarese dall’anno 1476 sino al 1504, dans G. Pardi (dir.), Rerum Italicarum Scriptores 2, Bologne,
Zanichelli, 1937, vol. 29/7, p. 19 (fu posto in l’archa rossa dela Cha’ da Este, dove se sepeliscono
quelli dela Chaxa).
100
Demeures des vivants, demeures des morts
101
m a rco folin
Il ne s’agissait pas d’un cas isolé. À Lucques, dans la seconde moitié du xive siècle,
Francesco Guinigi († 1384) avait ainsi fondé dans le couvent San Francesco une
chapelle sous laquelle se trouvaient deux grandes fosses côte à côte, destinées
à accueillir respectivement les hommes et les femmes de la famille (fig. 15). Ils
continuèrent à y être ensevelis pendant plusieurs siècles, si bien que dans ces
fosses ont été retrouvés les restes de pas moins de quarante-huit squelettes 58.
Les différents sarcophages de la famille Della Scala dans le cimetière de Santa
Maria Antica – à l’exception des trois tombeaux de Cangrande, Mastino et
Cansignorio – contenaient eux aussi de nombreux corps, selon une pratique
certes commune à cette époque mais qui n’en demeure pas moins significative.
58. Voir G. Fornaciari, Le sepolture della cappella Guinigi : bioarcheologia di una nobile famiglia
lucchese (secoli XIV-XVII), conférence prononcée à la Fondazione Cassa di Risparmio de
Lucques le 17 décembre 2012, en ligne à l’adresse suivante : http://www.paleopatologia.it.
102
Demeures des vivants, demeures des morts
Il est vrai que dans plusieurs villes l’utilisation de ce type de tombe familiale
allait se faire de plus en plus rare pour des seigneurs de haut rang ; mais la
conception du tombeau comme patrimoine commun d’une Maison n’allait
jamais totalement disparaître. Elle est encore très vive au milieu du xve siècle
à Rimini, par exemple, où Sigismondo Pandolfo Malatesta – bien qu’il aspirât
à un type de mausolée tout à fait nouveau – ne manqua pas dans le temple
Malatestiano en construction de dédier deux chapelles à ses aïeuls (hommes)
et aux femmes de la maison : ces dernières furent ensevelies dans une fosse
commune, sous l’autel consacré à l’Archange Raphaël, tandis que les premiers
étaient inhumés dans un grand sarcophage à l’antique décoré de scènes de la
vie de Scipion, souche mythique du lignage 59. À Bologne, en 1501, Giovanni
Bentivoglio demanda encore dans son testament à être inhumé dans la cha-
pelle familiale de San Giacomo, dans le sarcophage où reposaient – outre son
grand-père Antonio Galeazzo († 1435) – son père, son oncle, sa mère, sa sœur et
plusieurs de ses enfants morts avant lui : en tout, trois générations de seigneurs
et leurs plus proches parents 60.
59. On peut se référer aux articles de M. Campigli et A. Turchini dans l’ouvrage dirigé par
A. Paolucci, Il Tempio Malatestiano Rimini, Modène, Panini (Mirabilia Italiae, 16), 2010, vol. 1,
p. 202-204 et 208-211.
60. Voir F. Pellegrini, « Due atti testamentari di Giovanni II Bentivoglio, Bologna, 17.XII.1501 e
4.II.1506 », Atti e memorie della Regia Deputazione di Storia Patria per le Provincie di Romagna,
3/11, 1894, p. 303.
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m a rco folin
Conflits de famille
61. Sur l’« individualisme héroïque » des monuments des Della Scala, voir M. M. Donato,
« I signori, le immagini e la città… », art. cité, p. 405.
62. Sur cette histoire et celles qui suivent, on peut se référer aux articles de M. C. Ganguzza
Billanovich et B. Kohl dans le Dizionario Biografico degli Italiani, Rome, Enciclopedia Italiana,
1977, vol. 20, p. 649-656, 671-675, 687-688, 692-693, 696-698, 700-702.
104
Demeures des vivants, demeures des morts
Padoue jusqu’en 1388, non sans devoir faire face à pas moins de trois conjura-
tions ourdies par ses propres frères bâtards, Nicolò et Marsilio.
Cette petite tranche de vie familiale n’avait rien d’exceptionnel. Des histoires
de ce genre s’attachent à quasiment toutes les familles qui régnaient sur une
ville italienne à la même époque : dans les années où les Carrara s’entretuaient,
à Vérone Cangrande expirait sous les coups de son frère Mastino, tandis qu’à
Milan Matteo Visconti était empoisonné par ses frères inquiets, murmurait-
on, de ses abus de pouvoir. Les choses n’allèrent guère autrement au xve siècle,
comme le démontrent les histoires des Baglioni à Pérouse ou des Montefeltro
à Urbino : si bien que Burckhardt avait vu dans cette « malédiction de l’illégi-
timité », qui était si répandue dans les familles au pouvoir, l’un des ingrédients
fondamentaux du « déploiement de l’individualité » qui allait donner naissance
à la conception renaissante de l’« État considéré comme œuvre d’art 63 ».
Bien que généralement occultées dans les textes encomiastiques qui exaltaient
le régime des tyrans – et l’on comprend aisément pourquoi –, ces dynamiques
influencèrent profondément l’organisation des sépultures et la configuration des
demeures des seigneurs du xive siècle. On a déjà évoqué la nature concurrentielle
des rapports entre les différents édifices regroupés dans les quartiers seigneuriaux,
qui dans bien des cas, comme à Carpi ou à Milan, étaient fortifiés les uns contre
les autres. On ne s’étonnera pas que les programmes funéraires des seigneurs
soient souvent marqués par des tensions et antagonismes analogues, dirigés
– plus que contre les autres cours de la péninsule – contre les branches rivales
d’une même famille. Le cas de Milan est à ce titre particulièrement révélateur :
la rivalité entre les résidences de Bernabò et Galeazzo Visconti vers le milieu
du xive siècle (qui fut à son comble quelques années plus tard lorsque Gian
Galeazzo succéda à Galeazzo, son père) façonna de la même façon leurs sépul-
tures. En effet, il semble qu’aucun des deux frères n’ait jamais eu l’intention de
se faire inhumer dans le mausolée érigé pour leur cousin Azzone à San Gottardo,
ni à Sant’Eustorgio – où étaient pourtant regroupées d’autres tombes familiales
et où avait été construite depuis peu la somptueuse chapelle destinée à accueillir
les dépouilles de leurs parents, Stefano Visconti et Valentina Doria (fig. 10 et
13). Ces espaces, trop partagés, caractérisés par une pluralité de présences, ne
pouvaient voir leur force et leur prestige accaparés par un seul homme : d’où
le choix de Bernabò de faire de l’église San Giovanni in Conca un mausolée
pour sa personne et ses descendants. Il restaura l’intérieur de façon à créer un
manifeste parfaitement clair de ses ambitions « monarchiques » et de ce qu’elles
impliquaient en termes d’équilibres familiaux. Le grand monument équestre
63. J. Burckhardt, La civiltà del rinascimento in Italia, Florence, Sansoni, 1990 [1876], p. 18-22
(trad. fr. : La civilisation en Italie au temps de la Renaissance, Paris, Plon, 1885).
105
m a rco folin
dressé à côté de l’autel majeur, qui constituait le point focal de l’église entière,
traduisait ces vues, tout comme les sépultures de sa femme, de son fils aîné et
de l’épouse de celui-ci, qui soulignaient le dessein proprement « dynastique » de
l’opération (fig. 11). Les membres des autres branches de la famille en étaient par
nature exclus 64. Ces messages devaient avoir une claire résonance non seulement
pour les sujets et observateurs étrangers, mais aussi (et surtout ?) au sein même
de la famille ramifiée des Visconti, ainsi avertie de la succession qui se préparait.
La réplique de Gian Galeazzo à la mort de son oncle ne pouvait être plus
explicite : tout en exécutant les dernières volontés de Bernabò (peut-être aussi
pour détourner les rumeurs qui l’accusaient d’avoir commandité le meurtre),
le nouveau duc de Milan conçut le projet de construire un complexe funéraire
de taille à faire taire toute concurrence, se référant aux modèles les plus pres-
tigieux d’Europe, comme Saint-Denis et la chartreuse de Champmol, fondée
seulement quelques années auparavant par son beau-frère Philippe le Hardi
comme mausolée des ducs de Bourgogne. Ainsi, dans son testament de 1397,
le duc donnait des dispositions pour faire ériger dans la chartreuse de Pavie,
post altare magnum dicte ecclesie, une grande cathedra marmorea surélevée, sur
laquelle se dresserait une figura et imago ipsius testatoris quamproproprius fieri
poterit in lapide marmoreo, in forma et habitu ducali, videcelicet cum bereto sive
diademate ducali in capite et cum manto ducali, habente baveriam ad collum ; et
que imago in habitu predicto sedeat super predicta cathedra 65. Pour couronner
son sarcophage, Gian Galeazzo n’envisage donc pas un monument équestre
comme celui de son oncle – qui suivait un modèle illustre, mais désormais lié
à l’univers chevaleresque et seigneurial plutôt que royal – mais sa propre effigie
assise en majesté, ornée des habits et des insignes du souverain légitime : un
type jusqu’alors strictement réservé aux rois et empereurs, au rang desquels il
déclarait ouvertement vouloir se hisser. Et dans ce cas encore le message était
appuyé par les autres tombeaux prévus dans l’église : le long des chapelles de la
nef, en effet, devaient s’aligner les sarcophages des deux épouses et des enfants
de Gian Galeazzo, membres de cette souche dynastique clairement identifiée
et dont les prérogatives étaient désormais sanctionnées formellement et incon-
testablement par l’investiture ducale.
64. Sur la rénovation de l’église San Giovanni in Conca et les tombeaux de Regina Della Scala
(† 1384), Marco Visconti († 1382) et sa femme Isabelle de Bavière († 1382), voir G. A. Vergani,
L’arca di Bernabò Visconti…, op. cit. ; A. Tagliabue, « La decorazione trecentesca della chiesa di
San Giovanni in Conca a Milano », Arte cristiana, 77, 1989, p. 209-221.
65. L. Osio, Documenti diplomatrici tratti dagli archivi milanesi, Milan, Bernardoni, 1864, vol. 1,
p. 321 (c’est nous qui soulignons). Sur le monument de Gian Galeazzo, voir aussi E. S. Welch,
Art and Authority in Renaissance Milan, op. cit., p. 24-28 ; et A. S. Norris, The Tomb of Gian
Galeazzo Visconti in the Certosa of Pavia, thèse de doctorat, New York University, 1977 (non
consulté).
106
Demeures des vivants, demeures des morts
66. Sur cette histoire, voir I. Lazzarini, « Gonzaga, Ludovico », dans Dizionario Biografico degli
Italiani, Rome, Enciclopedia Italiana, 2001, vol. 57, p. 797-801.
67. P. Artoni, « San Francesco in Mantova… », art. cité, p. 62-63 ; plus généralement, sur la chapelle
de San Ludovico, on peut se référer à la bibliographie citée à la note 33.
68. M. C. Ganguzza Billanovich, « Carrara, Marsilietto Papafava da », dans Dizionario Biografico
degli Italiani, Rome, Enciclopedia Italiana, 1977, vol. 20, p. 688 ; sur les monuments voulus
par Iacopino da Carrara à Sant’Agostino, on peut se référer à la bibliographie citée à la note 38.
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Demeures des vivants, demeures des morts
69. S. Beltramo, F. Cantatore, M. Folin (dir.), A Renaissance Architecture of Power…, op. cit. ;
voir plus particulièrement pour ce qui suit M. Folin, « Princes, Towns, Palaces : a Renaissance
“Architecture of Power” », dans le même ouvrage, p. 3-27.
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m a rco folin
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ii
vittoria camelliti
Università degli studi di Udine (Italia)
Le pagine che seguono sono dedicate al problema del significato e della per-
cezione dei confini urbani così come emerge dalle testimonianze letterarie e
iconografiche medievali.
Si tratta, com’è noto, di un argomento che si presta a essere affrontato da
molteplici punti di vista; senza contare che esiste al riguardo una letteratura
critica vastissima 1. Mi concentrerò pertanto solo su alcuni aspetti particolari
che offrono maggiori spunti di riflessione.
115
v it tor i a c a melliti
La prerogativa della città medievale è quella di essere una città murata e, senza
dubbio, alla cerchia muraria e agli accessi fortificati è sempre stato affidato
un compito rappresentativo dell’identità cittadina, oltre che una funzione
difensiva.
La storia della città medievale è però una storia «singolare», condizionata
da eventi non sempre prevedibili o prevenibili – calamità naturali o inva-
sioni nemiche – a cui sono legati a seconda dei casi distruzioni, successive
ricostruzioni e ampliamenti; e ciò implica una coesistenza, nell’immaginario
popolare, di confini diversi: confini visibili, ovvero esistenti, reali o materiali
Papers, 41, 1987, p. 199-213; V. Camelliti, «Il “progetto” per la decorazione scultorea delle porte
urbiche di Milano e il problema della componente scultorea nell’arredo degli accessi urbani in
età medievale», Arte Lombarda, 172, 2015, p. 30-44. Sulla rappresentazione dello spazio urbano
C. Buttafava, Visioni di città nelle opere d’arte del Medioevo e del Rinascimento, Milano, Libreria
Salto, 1963; A. Peroni, «Raffigurazione e progettazione di strutture urbane e architettoniche
nell’alto Medioevo», in Topografia Urbana e vita cittadina nell’Alto Medioevo in Occidente,
Spoleto, CISAM, 1974, p. 679-710; G. C. Romby, «La rappresentazione dello spazio: la città»,
in L. Rombai (a cura di), Imago et descriptio Tuscia. La Toscana nella geocartografia dal XV
al XIX secolo, Venezia, Marsilio, 1993, p. 305-358; M. Aromberg Lavin, «Rappresentazione
di modelli urbani nel Rinascimento», in H. Million, V. Magnago Lampugnani (a cura di),
Rinascimento da Brunelleschi a Michelangelo. La rappresentazione dell’Architettura, catalogo
della mostra (Istituto di Cultura di Palazzo Grassi, 31 marzo-6 novembre 1994), Milano,
Bompiani, 1994, p. 676-680; L. Nuti, Ritratti di città. Visione e memoria tra Medioevo e
Settecento, Venezia, Marsilio, 1996; ead., «Lo spazio urbano: realtà e rappresentazione», in
E. Castelnuovo, G. Sergi (a cura di), Arti e Storia nel Medioevo, Torino, Einaudi, 2002, vol. 1,
p. 241-282; ead., Cartografie senza carte. Lo spazio descritto dal Medioevo al Rinascimento,
Milano, JacaBook, 2008; F. Bocchi, R. Smurra (a cura di), Imago urbis: l’immagine della
città nella storia d’Italia, Atti del convegno (Bologna, 5-7 settembre 2001), Roma, Viella,
2003; J. Rykwert, L’idea di città: antropologia della forma urbana nel mondo antico, Milano,
Adelphi, 2002; S. Romano, «L’immagine di Roma, Cola di Rienzo e la fine del Medioevo»,
in M. Andaloro, S. Romano (a cura di), Arte e iconografia a Roma: da Costantino a Cola di
Rienzo, Milano, JacaBook, 2000, p. 227-256; P. De Vecchi, G. A. Vergani, La rappresentazione
della città nella pittura italiana, Milano, Silvana, 2004; F. Ratté, «Architectural Invitations:
Images of City Gates in Medieval Italian Painting», Gesta, 3, 1999, p. 142-153; ead., Picturing
the City in Medieval Italian Painting, Jefferson, McFarland, 2006; R. Barzanti, A. Cornice,
E. Pellegrini (a cura di), Iconografia di Siena. Rappresentazione della Città dal XIII al XIX secolo,
Siena, Monte dei Paschi, 2006, p. 2-27; M. Seidel, R. Silva (a cura di), Potere delle imma
gini, immagini del potere: Lucca città imperiale; iconografia politica, Venezia, Marsilio, 2007;
M. Ferretti, «Madonne antiche e mura di Bologna», in A. Calzona (a cura di), Immagine
e ideologia: studi in onore di Arturo Carlo Quintavalle, Milano, Electa, 2007, p. 498-508;
J. Oberste (a cura di), Repräsentationen der mittelalterlichen Stadt, Regensburg, Schnell &
Steiner (Forum Mittelalter, 4), 2008; S. Ehrich, J. Oberste (a cura di), Städtische Räume im
Mittelalter, Regensburg, Schnell & Steiner (Forum Mittelalter, 5), 2009; eid. (a cura di),
Städtische Kulte im Mittelalter, Regensburg, Schnell & Steiner (Forum Mittelalter, 6), 2010.
116
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
(come le mura); e confini invisibili, percepiti come esistenti per quanto imma-
teriali e ideali.
Un esempio di soggettività nella percezione dei confini urbani è offerto, ad
esempio, nell’ambito dell’iconografia urbana, dalla rappresentazione del tutto
arbitraria e simbolica della città nella forma di un quadrato, di un ovale o di
un cerchio; problema al quale si lega quello della forma della città perfetta, la
Civitas Dei, e della sua proiezione sulla città ideale e terrestre. Esiste però un
problema più concreto, propriamente urbanistico, ovvero quello della coesi-
stenza di più cerchie murarie, progressivamente assorbite all’interno del tessuto
urbano nella città in espansione. Non di rado, infatti, le mura erano inglobate
da nuovi edifici, oppure demolite e i conci riutilizzati per altre costruzioni; nelle
fonti ufficiali (Statuti, Provvisioni) e nelle cronache del Trecento – epoca in cui
molte città italiane furono dotate di una nuova cerchia – si parla anche della
loro vendita a privati cittadini 2. La fondazione delle nuove mura implicava,
come ricorda ad esempio il Villani con riferimento a Firenze, riti propiziatori
(come la benedizione della prima pietra da parte del vescovo) ed era considerata
un motivo di lustro e vanto per la grandezza e popolosità della città 3.
Nonostante le trasformazioni dello spazio urbano, non di rado restava però
viva la memoria dei vecchi confini ai quali continuava a essere riconosciuto dai
contemporanei un valore fortemente simbolico: è questo ad esempio il caso
delle quattro Croci di Bologna che la tradizione vuole posate da sant’Ambrogio
insieme con san Petronio in prossimità dei quattro punti principali della città,
su cui insistevano le vecchie mura di selenite 4 (fig. 1). Ma si ricordi a questo
proposito anche la leggenda tramandata da Opicino de Canistris, secondo cui
Pavia era stata fondata su quattro grandi statue antiche, identificate come le
2. Per Firenze vedi ad es. Giovanni Villani, Nuova Cronica, ed. critica a cura di G. Porta, Parma,
Fondazione Pietro Bembo, 1991, vol. 2, libro 10, X, p. 218-219; sulla vendita della vecchia
Porta San Frediano vedi la Provvisione (Firenze, Archivio di Stato, 1333, XXVI, c. 32 ssg.) ed.
in R. Manetti, M. C. Pozzana, Firenze. Le porte dell’ultima cerchia di mura, Firenze, CLUSF,
1979, p. 200. Vedi inoltre O. Muzzi, San Gimignano. Fonti e documenti per la storia del
Comune, Firenze, Olschki, 2008, p. 383, 403, 431; E. Menesto (a cura di), Gli statuti comunali
umbri,
Spoleto, Centro italiano di studi sull’alto Medioevo, 1997, p. 91. Per una attestazione
di salvaguardia delle mura vedi invece il caso di Perugia: U. Nicolini, «Le mura medievali di
Perugia», Storia e arte in Umbria nell’età comunale, 2, 1971, p. 695-769.
3. Giovanni Villani, Nuova Cronica, op. cit., vol. 2, libro 9, XXXI, p. 49. Su questo aspetto anche
J. Rykwert, L’idea di città…, op. cit., p. 253-262.
4. P. Porta, «Croci medievali di Bologna», in F. Bocchi (a cura di), Medieval Metropolises:
Proceedings of the Congress of the Atlas Working Group International Commission for the History
of Town (Bologna, 8-10 May 1997), Bologna, Grafis, 1999, p. 167-171; I. Pini, «Mura e porte di
Bologna medievale. La piazza di Porta Ravegnana», in J. Heers (a cura di), Fortifications, portes
de villes…, op. cit., p. 197-235.
117
v it tor i a c a melliti
118
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
Virtù cardinali, sepolte sotto le tre porte principali (Porta Marenga, Porta del
Ponte, Porta S. Giovanni) e sotto la cattedrale 5.
Appartengono alla categoria dei confini immateriali anche i confini «rituali»,
delineati da percorsi che venivano tracciati da processioni e cortei lungo le
mura o lungo le strade principali e che ne delimitavano uno spazio identita-
rio: uno spazio che comprendeva luoghi e itinerari rappresentativi del potere
politico e religioso 6. Si pensi alle processioni di ingresso trionfale dei sovrani
o pontefici – che avevano una funzione principalmente celebrativa 7 – o alle
processioni propiziatorie e penitenziali finalizzate a richiamare la benevolenza
divina sulla città – largamente documentate in occasione di pestilenze o assedi
militari, che prevedevano solitamente il trasporto e l’ostensione di immagini
sacre o reliquie lungo le mura urbane fino alle porte o lungo le strade principali
all’interno della città 8. Si devono inoltre considerare processioni di altro tipo,
che avevano una precisa funzione «espiativa» e lustrale, ovvero i cortei dei
condannati a morte. Nel codice lucchese contenente la Cronaca di Giovanni
Sercambi (Lucca, Archivio di Stato, Biblioteca Manoscritti, n. 107) troviamo
in più occasioni l’illustrazione di supplizi e pene di vario genere 9. Tra queste
si rintraccia l’immagine di un traditore condannato a morte, condotto per le
5. M. Greenhalgh, «Ipsa ruina docet: l’uso dell’antico nel Medioevo», in S. Settis (a cura di),
Memoria dell’antico nell’arte italiana, vol. 1: L’uso dei classici, Torino, Einaudi, 1984, p. 115-
170: p. 141 (ricordato in Anonymi Ticinensis, Liber de Laudibus civitatis ticinensis que dicitur
Papie, a cura di R. Maiocchi e F. Quintavalle, Città di Castello, Lapi [Rerum italicarum
scriptores, 11, 1.19], 1903, p. 6-13). Le quattro statue sarebbero state in origine sulle porte della
città (A. Stenico, «Intorno alle Quattuor Cardinalium Ymagines di Opicinus de Canistris»,
Bollettino della Società Pavese di Storia Patria, 15/2, 1963, p. 33-37).
6. G. Tullio, Speculum naturale: percorsi del pensiero medievale, Roma, Ed. di Storia e Letteratura,
2007, p. 110-112.
7. Ad esempio P. Carmassi, «Processioni a Milano nel Medioevo», in N. Bock, P. Kurmann (a cura
di), Art, cérémonial et liturgie au Moyen Âge. Actes du colloque (Lausanne-Fribourg, 2000), Roma,
Viella, 2002, p. 397-414; P. Boucheron, Le pouvoir de bâtir: urbanisme et politique édilitaire à
Milan (xive-xve siècles), Roma, École française de Rome, 1998, in particolare il cap. 1, p. 71-127:
fig. 5, p. 107.
8. Su questo aspetto ad esempio M. Bacci, Il pennello dell’Evangelista. Storia delle immagini sacre
attribuite a san Luca, Pisa, ETS, 1998.
9. Per un orientamento: A. Zorzi, «La pena di morte in Italia nel tardo Medioevo», Clío &
Crímen: Revista del Centro de Historia del Crimen de Durango, 4: La pena de muerte en la socie
dad europea medieval, 2007, p. 47-62; id., «Le esecuzioni delle condanne a morte a Firenze nel
tardo Medioevo tra repressione penale e cerimoniale pubblico», in M. Miglio, G. Lombardi
(a cura di), Simbolo e realtà della vita urbana nel tardo Medioevo, Atti del V Convegno storico
italo-canadese (Viterbo, 11-15 maggio 1988), Manziana [Roma], Vecchiarelli, 1993, p. 153-253;
id., «Rituali di violenza, cerimoniali penali, rappresentazioni della giustizia nelle città italiane
centro-settentrionali (secoli XIII-XV)», in Le forme della propaganda politica nel Due e nel
Trecento, Roma, École française de Rome, 1994, p. 395-425.
119
v it tor i a c a melliti
vie della città sopra un carro trainato da due buoi, mentre viene «attanagliato»
prima di essere giustiziato (fol. 108r) (fig. 2) 10.
Gli «ignobili» erano solitamente impiccati; alle persone nobili e di censo
era generalmente riservata la decapitazione in luoghi rappresentativi dell’au-
torità politica – come successe ad Alvise e Filippo Forzaté che vennero giu-
stiziati sulle scale del Palazzo della Ragione a Padova 11 o a tali Bonincontro di
Giovanni d’Andrea e Raniero di Michele Cattani, dottori di Castelsanpietro,
che furono decapitati nel giugno 1350 sulla ringhiera di Palazzo del Podestà a
Bologna 12. Ai sodomiti spettava invece il rogo – e fu questa la sorte del giovane
lucchese arso vivo a Lucca al cospetto dell’imperatore per mano dello stesso
10. O. Banti, M. L. Testi Cristiani, Giovanni Sercambi: le illustrazioni delle Croniche nel Codice
Lucchese, Genova, Basile, 1978, p. 70 ssg.
11. Galeazzo e Bartolomeo Gatari, Cronaca Carrarese: confrontata con la redazione di Andrea Gatari,
1, AA. 1318-1407, a cura di A. Medin e G. Tolomei, Città di Castello, Lapi (Rerum italicarum
scriptores, 55, 17.1), 1909, p. 134.
12. Corpus chronicorum Bononiensium, a cura di A. Sorbelli, Città di Castello, Lapi (Rerum itali-
carum scriptores, 18, 1), 1906-1939, vol. 2, p. 599 (37), 600 (40).
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Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
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che nel ricordare l’esecuzione di tale Lucio di Lando nel 1386 precisa che il
condannato «fu apichato per traditore, o vero depinto per traditore, al palaxio
di signuri, cum certi altri soi compagni 15».
Molte testimonianze figurative ci restituiscono però una immagine delle
esecuzioni capitali al di fuori del confine murario e si tratta nella maggior
parte dei casi di impiccagioni, come si osserva ad esempio in diverse miniature
a corredo della cronaca del Sercambi (Lucca, Archivio di Stato, Biblioteca
Manoscritti, n. 107, fol. 150r, 343v) 16. Due impiccati si vedono anche all’esterno
della città della Principessa difesa da San Giorgio nella cappella affrescata da
Pisanello nella chiesa di S. Anastasia a Verona 17 (fig. 4). A Venezia le esecuzioni
capitali avvenivano generalmente tra le due colonne in Piazza San Marco,
luogo deputato al mercato, dopo una processione condotta prima su una
chiatta, lungo Canal Grande, quindi, in un secondo momento, via terra 18. Il
condannato era in genere legato alla coda di un cavallo e trascinato sul luogo
del delitto dove gli veniva amputata una mano; giungeva quindi tra le due
colonne sulla piazza dove veniva finito per «descopamento», ovvero mazzolato,
oppure decapitato o impiccato. E si noti che in cima a queste due colonne vi
erano (e vi sono tutt’oggi) la statua di san Teodoro, antico patrono della città,
e il leone marciano 19. Il corpo era quindi ridotto in quattro pezzi che venivano
issati ed esposti su apposite forche site nei quattro punti principali di ingresso
alla città: il Porto di San Nicolò al Lido (o Isola di San Giorgio) e gli accessi in
direzione Mestre, Padova e Chioggia 20.
Atti del Convegno internazionale (Firenze-Avignone, 7-11 aprile 2011), Firenze, Sismel, 2014,
p. 23-38; id., «Prime pitture d’infamia nei Comuni italiani: immagini come documenti, imma-
gini come fatti», in C. Behrmann (a cura di), Schandbilder. Infamie, Diffamierung und die
Ethik der «oeconomia», Atti delle giornate di studio (Firenze, Kunsthistorischen Institutes,
27-28 marzo e 16-17 novembre 2012), Berlino, De Gruyter, 2016, p. 49-74.
15. Corpus chronicorum Bononiensium, op. cit., vol. 2, p. 377 (35-38).
16. O. Banti, M. L. Testi Cristiani, Giovanni Sercambi…, op. cit., p. 70; S. Bongi (a cura di),
Le Croniche di Giovanni Sercambi lucchese pubblicate sui manoscritti originali, Lucca, Giusti,
1892-1893, vol. 1, p. 331; vol. 2, p. 404.
17. Vedi anche i disegni a New York, The Frik Collection, Inv. 36.3.54. Al riguardo B. Degenhart,
A. Schmitt, Pisanello und Bono da Ferrara, München, Hirmer Verlag, 1995, p. 132; D. Gasparotto,
«Scheda n. 42», in P. Marini (a cura di), Pisanello, catalogo della mostra (Verona, 1996), Milano,
Electa, 1996, p. 269-269.
18. L. Puppi, Lo splendore dei supplizi: liturgia delle esecuzioni capitali e iconografia del martirio
nell’arte europea dal XII al XIX secolo, Milano, Berenice, 1990, p. 20.
19. Al riguardo di recente V. Camelliti, «San Giorgio: culto, immagini e sacre rappresentazioni
nelle città dell’Italia centrosettentrionale tra XII e XV secolo», in C. Caserta (a cura di), I
santi Giorgio ed Eustachio. Milites Christi in terra amalfitana, Atti del Convegno (Ravello,
24-26 luglio 2010), Napoli, ESI, 2012, p. 237-276: p. 275.
20. P. Gilli, «Venise: une cité sans muraille, discours et pratiques (xve et début du xvie siècle)», in
D. Le Blévec (a cura di), Défendre la ville dans les pays de la Méditerranée occidentale au Moyen
Âge, Montpellier, Université Paul-Valéry – Montpellier 3, 2002, p. 103-127.
122
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
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v it tor i a c a melliti
il passaggio dal luogo del delitto, dalla Croce dei santi (una delle quattro croci
bolognesi ricordate supra) e dal mercato di Porta Ravegnana, per concludersi
con lo squartamento in pubblica piazza e l’esposizione dei miseri resti appiccati
alle quattro principali porte della città.
Questi rituali cruenti, largamente documentati, avevano un carattere volu-
tamente pubblico e scenografico ed erano riservati solitamente agli assassini
o a coloro che agivano contro natura (i sodomiti) o contro Dio (gli eretici o i
blasfemi): si ricorderà, al riguardo, l’episodio famoso dell’ebreo di Firenze che
aveva compiuto atti di vilipendio nei confronti di alcune venerate immagini
sacre, e che venne lasciato per questo in balia della furia del popolo 22. Erano
atti dimostrativi; c’era, dunque, sicuramente, la volontà condivisa di punire
e denigrare l’esecutore di un misfatto, ma c’era anche l’intento di ammonire
e dissuadere i cittadini dall’agire nello stesso modo. Era avvertita inoltre in
tutti i casi come prioritaria l’esigenza di rimediare a un torto – la violazione
dello spazio sacro interno alle mura – e di riequilibrare il rapporto di fiducia
tra la città e Dio. Nell’immaginario urbano medievale, infatti, la sicurezza e
la stabilità della città erano garantite dalla capacità degli uomini di vivere in
pace e concordia, nel corretto esercizio della giustizia, in modo tale da non
scatenare l’ira funesta di Dio: ira che si poteva manifestare, a seconda dei
casi, con guerre, carestie, pestilenze e altre calamità. Il radicamento di questa
idea è dimostrato, ad esempio, dalla fortuna riscossa (anche nell’ambito della
produzione figurativa-devozionale) dal tema delle «tre frecce» simboleggianti la
peste, la fame e la guerra delle quali il Cristo voleva servirsi per punire i peccati
di lussuria, avarizia e orgoglio: ciò non avviene solo grazie alla Vergine Maria
che si fa garante per l’umanità presso il Figlio, promettendone la remissione
dai peccati attraverso la pietà degli Ordini mendicanti rappresentati da san
Francesco e san Domenico 23.
22. G. Zaccariotto, «Scheda n. 37», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di), Dal giglio al David:
arte civica a Firenze fra Medioevo e Rinascimento, catalogo della mostra (Firenze, Galleria
dell’Accademia, 14 maggio-8 dicembre 2013), Firenze, Giunti, 2013, p. 186-187.
23. Cfr. al riguardo P. Lippini O.P. (a cura di), Storie e leggende medievali: le «Vitae Fratrum» di
Geraldo di Frachet O.P., Bologna, Studio Domenicano, 1988, p. 22-24. Vedi anche Il Libro d’Oro
domenicano, volgarizzamento anonimo del secolo XV delle Vitae Fratrum O.P. di fra Gerardo
di Frachet O.P., edito dal P. Innocenzo Taurisano O.P., Roma, Ferrari, 1925. La leggenda è
recepita da Iacopo da Varazze, Legenda Aurea, a cura di A. e L. Vitale Brovarone, Torino,
Einaudi, 1995, vol. 2, p. 724 e dallo Speculum Humanae Salvationis, al riguardo P. Perdrizet,
La Vierge de miséricorde: étude d’un thème iconographique, Parigi, Fontemoing, 1908; id.,
Étude sur le «Speculum Humanae Salvationis», Parigi, Champion, 1908; J. Lutz, P. Perdrizet,
«Speculum Humanae Salvationis»: texte critique; traduction inédite de Jean Mielot (1448); les
sources et l’influence iconographique, principalement sur l’art alsacien du xive siècle, Mulhouse/
Leipzig, Hiersemann, 1907-1909; E. Silber, «The Reconstructed Toledo Speculum Humanae
Salvationis. The Italian Connection in the Early Fourteenth Century», Journal of the Warburg
124
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
and Courtauld Institute, 43, 1980, p. 32-51; di recente T. Castaldi, «L’iconografia della Madonna
della Misericordia tra San Domenico e San Francesco», in C. Pedrini (a cura di), Arte gotica
a Imola: affreschi ritrovati in San Francesco e in San Domenico, Imola, Musei civici di Imola,
2008, p. 111-118; C. Frugoni, F. Manzari, Immagini di san Francesco in uno Speculum Humanae
Salvationis del Trecento, Roma, Biblioteca dell’Accademia Nazionale dei Lincei e Corsiniana 55.k.2
(c. 46v), Padova, Editrici Francescane, 2006, p. 190: Maria mediatrix nostra placat iram Dei
contra nos. Sul tema agiografico dell’incontro tra i due santi cfr. S. Brufani, «Domenico e
Francesco, Predicatori e Minori», in Domenico di Caleruega e la nascita dell’Ordine dei Frati
Predicatori, Atti del XLI Convegno storico internazionale (Todi, 10-12 ottobre 2004), Spoleto,
Centro italiano di studi sull’alto Medioevo, 2005, p. 401-430.
24. La delibera è del 7 novembre 1357: quod statua marmorea ex inde, cum inhonestum videatur,
et fiat ex inde et de ea quod dominis Duodecim videbitur et placebit. Al riguardo F. Bargagli
Petrucci, Le Fonti di Siena e i loro acquedotti, Siena, Periccioli, 1974, vol. 1, p. 24-25. Cit. anche
in L. Bortolotti, Siena, Roma, Laterza, 1983, p. 34. Bartolomeo Benvoglienti, De urbis Senae
origine et incremento opusculum, Senis, per Simeonem Nicolai, 1506, MDVI (versione volgare
p. 21) parla invece di una statua di Diana ridotta poi in polvere.
25. Su questi aspetti vedi A. Esch, «L’uso dell’antico nell’ideologia papale, imperiale e comunale»,
in Roma antica nel Medioevo. Mito, rappresentazioni, sopravvivenze nella «Respublica Christiana»
dei secoli IX-XIII, Atti della Quattordicesima Settimana Internazionale di Studio (Mendola,
24-28 agosto 1998), Milano, V&P Università, 2001, p. 3-25; id., «Reimpiego dell’antico nel
Medioevo: la prospettiva dell’archeologo, la prospettiva dello storico», in Settimane di studio del
Centro italiano di studi sull’alto Medioevo, Spoleto, Centro italiano di studi sull’alto Medioevo,
1999, vol. 1, p. 73-108. Vedi quindi P. Golinelli, «Quando il santo non basta più: simboli cittadini
non religiosi nell’Italia bassomedievale», in A. Vauchez (a cura di), La religion civique à l’époque
médiévale et moderne (Chrétienté et Islam), Roma, École française de Rome, 1995, p. 375-389.
26. E. Napione, Le Arche Scaligere, Venezia, Umberto Allemandi & C. per Istituto Veneto di
Scienze, Lettere ed Arti, 1999, p. 230, nota 36.
125
v it tor i a c a melliti
analoga spettò anche al famoso Regisole di Pavia, una statua equestre in bronzo di
epoca romana distrutta nel 1796, che un celebre disegno di Opicino de Canistris
(1330 ca.) ricorda eretta su una colonna di fronte alla cattedrale e che divenne
un importante simbolo cittadino, tanto da comparire sui sigilli 27. Sopravvissuta
a secoli di trasformazioni anche la statua nota come «Kinzica dei Sismondi»,
27. G. C. Bascapè, Sigillografia: il sigillo nella diplomatica, nel diritto, nella storia, nell’arte, vol. 1:
Sigillografia generale, Milano, Giuffrè, 1969, p. 126. Sul Regisole: S. Lomartire, «La statua del
Regisole di Pavia e la sua fortuna tra Medioevo e Rinascimento», in J. Poeschke, T. Weigel,
B. Kusch-Arnhold (a cura di), Praemium Virtutis III: Reiterstandbilder von der Antike bis zum
Klassizismus, Münster, Rhema, 2008, p. 31-73.
126
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
forse in origine parte di un sarcofago romano, oggi murata sulla facciata di casa
Tizzoni a Pisa, e che una tradizione radicata identifica con la giovane pisana che
sventò un assedio dei saraceni salvando in tal modo la città 28 (fig. 6).
È andata invece perduta la famosa statua di Marte che una illustrazione
delle Cronache del Villani (Biblioteca Vaticana, Chigiano L VIII 296) ricorda
alloggiata «in sul pilastro a piè del detto ponte Vecchio di qua 29». Fu proprio
la sua caduta in Arno nel 1333 a destare grande apprensione nei fiorentini; era
infatti credenza che «quando la statua di Mars cadesse o fosse mossa, la città
di Firenze avrebbe gran pericolo o mutazione». Il terribile diluvio che ne seguì
confermò i pronostici degli antichi e, stando a quanto racconta sempre il
Villani, «fu allora fatta grande questione se ciò accadde per fatti naturali o per
giudizio di Dio». Sebbene gli astrologi avessero interpretato un quadro astrale
decisamente sfavorevole per Firenze, i savi religiosi e i maestri di teologia non
esitarono a riconoscere in questo evento disastroso la mano di Dio: poiché
solo Dio ha il potere di giudicare il mondo in linea con il corso della natura,
forzando il corso della natura o ancora contro natura così come a lui piace.
E identifica i due motivi principali per i quali Dio agisce in tal modo; dice
Villani: o «per graziosa misericordia» o per esecuzione della giustizia.
28. Cfr. A. Panaja, I palazzi di Pisa nel manoscritto di Girolamo Camici Roncioni, Pisa, ETS, 2004,
p. 196-198.
29. Per le citazioni che seguono cfr. Giovanni Villani, Nuova Cronica, op. cit., vol. 2, libro 12, I,
p. 3-12: p. 8.
127
v it tor i a c a melliti
La città difesa.
Il mito della Vergine defensatrix nei Libri miraculorum
30. Il possesso di sacri corpi è un topos della letteratura delle Laudes Medievali. Su questo aspetto
si veda: G. Fasoli, «La coscienza civica nelle “laudes civitatum”», in La coscienza cittadina nei
comuni italiani del Duecento, Atti del XI Convegno storico internazionale dell’Accademia
Tudertina, Todi, Accademia Tudertina, 1972, p. 11-44; G. B. Pighi (a cura di), Versus de Verona:
Versum de mediolano civitate, Bologna, Zanichelli, 1960. Di recente E. Occhipinti, «Immagini
di città: le “laudes civitatum” e la rappresentazione dei centri urbani nell’Italia settentrionale»,
Società e storia, 14/51, 1991, p. 23-52.
31. Per i casi di Parma e Rocamadour e l’offerta di ex voto in forma di città si veda V. Camelliti,
«“Patroni celesti” e “Patroni terreni”: dedica e dedizione della città nel rituale e nell’immagine»,
in S. Ehrich, J. Oberste (a cura di), Städtische Kulte im Mittelalter, Regensburg, Schnell &
Steiner (Forum Mittelalter. Studien, 6), 2010, p. 97-124.
32. M. Bacci, Il pennello…, op. cit., p. 114-130; B. V. Pentcheva, Icons and Power: the Mother of God
in Byzantium, University Park [PA], Pennsylvania State University Press, 2006.
33. M. Tarayre, La Vierge et le miracle: le «Speculum historiale» de Vincent de Beauvais, Parigi,
Champion, 1999, p. 164-166, XXIII, 147.
128
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
34. Alfonso X el Sabio, «Cantigas de Santa Maria», in C. Beretta (a cura di), Miracoli della Vergine:
testi volgari medievali (Gautier de Coinci, Gonzalo de Berceo, Alfonso X el Sabio), Torino, Einaudi,
1999, p. 1048-1051, Cantiga n. 264, note p. 1272-1273. W. Mettermann, Afonso X, o Sabio.
Cantigas de Santa Maria, Coimbra, Por ordem da Universidade, 1959-1972, vol. 3, p. 34-35:
Como Santa Maria fez pereçer as naves dos mouros que tiin(n)am çercada Constantinopla, tanto
que os crischaos poseron a ssa ymagen na rriba do mar.
35. Http://www.warfare.altervista.org/Cantiga/Cantigas_de_Santa_Maria-028.htm. J. Guerrero
Lovillo, Las Càntigas. Estudio Arqueolòlogico de sus miniaturas, Madrid, s. n., 1949, cant. XXVIII,
in particolare il riquadro: Como o Soldan viu Santa Maria que parava o seu manto en que ferissen
as pedras: p. 383. Per la trascrizione W. Mettermann, Afonso X, o Sabio…, op. cit., vol. 1, p. 83-87:
Como o soldan viu Santa Maria que parava o seu manto en que ferissen a pedras; id., «Os Miracles
de Gautier de Coinci como fonte das Cantigas de Santa Maria», in Estudos portugueses: homena
gem a Luciana Stegagno Picchio, Lisbona, DIFEL, 1991, p. 79-84: p. 84 (nr. 405: Constantinopoli
velamen die sabbati attolitur).
129
v it tor i a c a melliti
130
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
alla Madre di Dio pregandola davanti alla sua sacra icona 39. L’evento cruciale, di
forte impatto scenico e destinato a radicarsi profondamente nell’immaginario
popolare, è però rappresentato dalla miracolosa apparizione della Madonna 40.
Il testo dell’Anonimo lionese ha termine con la fuga dei nemici; la sconfitta dei
saraceni diventa invece, in Gautier, una occasione per dimostrare la superiorità
della fede cristiana, che si rivela infine più efficace rispetto a quella islamica,
ripudiata dallo stesso Muselin. La vicenda si conclude infatti felicemente, senza
alcuno spargimento di sangue e con la conversione del re saraceno. Questo
dettaglio è registrato nella miniatura di un codice di primo Trecento (Parigi,
BNF, ms. fr. 22928, fol. 200r 41) dove troviamo illustrati i diversi momenti della
vicenda: dall’apparizione mariana, alla conversione del re saraceno e alla som-
ministrazione dei sacramenti. Il più prestigioso codice miniato da Jean Pucelle
(Parigi, BNF, nouv. acq. fr. 24541, fol. 154v) illustra invece solo il momento
culminante della vicenda, allorché la Vergine sopraggiunge distendendo il suo
mantello sulla città che diventa in tal modo inespugnabile 42 (fig. 8).
Un altro racconto incentrato sull’intervento della Vergine in difesa della
città è quello del miracolo così detto di Orleans: anche in questo caso la sal-
vezza di un vicino castello è garantita dal potere di una sacra immagine della
Vergine custodita nella chiesa cittadina che, portata in processione fino alla
131
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Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
porta urbica è esposta alla sua sommità rivolta verso l’esterno contro gli assa-
litori. Nello Speculum Historiale di Vincenzo di Beauvais si parla di una statua
della Vergine che si anima miracolosamente e che, nel sollevare il ginocchio,
riesce a salvare un cittadino dalla freccia scoccata da un soldato nemico 43.
Questa leggenda è ripresa in seguito da Le Miroir Histoire, volgarizzamento
francese dello Speculum ad opera di Jean Le Vignay 44: nelle miniature di due
codici francesi di metà Trecento contenenti il racconto la Vergine però non
ha più le fattezze di una statua, ma si presenta in forma umana, in piedi
davanti alla porta urbica; nella prima immagine (Parigi, BNF, ms. fr. 312,
fol. 327v, De celi pour qui l’ymage de la vierge marie se mist contre le glaive 45)
si serve di una lancia per colpire un soldato nemico; nella seconda (Parigi,
BNF, nouv. acq. fr. 15940, fol. 69v, De celi pour qui l’ymage de la beneoite virge
marie tresoriere de grace se mist encontre le gleve et le reçut 46) tiene in braccio il
Bambino e fronteggia il soldato che, visibilmente stupito, resta con la lancia
sospesa a mezz’aria.
L’assedio è descritto con maggiore fedeltà nella miniatura che correda la più
tarda (metà del XV secolo) collezione di Miracoli scritta da Jean Mielot (Parigi,
BNF, ms. fr. 9198, fol. 121r, Miracle d’un ymage de nostre dame que ung archier
trait apres et elle tendy son genoul encontre) 47. Viene qui scelto il momento
precedente all’evento, quando ancora infuria la battaglia e la statua della
Madonna è alloggiata alla sommità della porta urbica. Ancora una statua si
trova rappresentata nella miniatura a corredo della Cantiga 51 nel codice dell’El
Escorial (Ms. T.I.1, fol. 76r) 48. Lo stesso racconto è narrato anche nel Libro di
Miracoli della Madonna di Soissons di Gautier de Coincy; nelle miniature di
due codici francesi: la prima è tratta da un codice di primo Trecento (Parigi,
BNF, ms. fr. 22928, fol. 116v 49), la seconda dal già ricordato codice miniato da
133
v it tor i a c a melliti
50. Http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6000451c/f152.image.r=fr.
51. N. Black, «Images of the Virgin Mary…», op. cit., p. 260.
52. Al riguardo E. Levi, Il Libro dei cinquanta miracoli della Vergine, Bologna, Romagnoli-
dall’Acqua, 1917, p. XXXII. Jean Le Marchant versifica (in ottosillabi) il testo latino dei mira-
coli della Vergine di Chartres, composto verso il 1210 dal prete Gilon. Il testo latino originario
è edito da A. Thomas, «Les miracles de N. D. de Chartres, texte latin inédit», Bibliothèque
de l’École des chartes, 42/1, 1881, p. 505-550. Il testo in volgare è edito da M. G. Duplessis, Le
livre des Miracles de N.D. de Chartres écrit en vers, au xiiie siècle par Jean Le Marchant, Chartres,
Garnier, 1855. I testi sono comparati in Jean Le Marchant, Miracles de Notre Dame de Chartres,
a cura di P. Kunstmann, Ottawa, Éditions de l’Université, 1973, XXVIII, p. 217-221.
53. H. Kjellman, La deuxième collection…, op. cit., p. XXX.
54. Jean Le Marchant, Miracles de Notre Dame de Chartres, op. cit., p. 219-220.
55. M. Tarayre, La Vierge et le miracle…, op. cit., p. 166-169, XXIV; 46, De fuga Rollonis: Rollo
autem iste de quo supradictum est nobili quidam, sed per venustatem obsoleta prosapia Noricum
editus regis praecepto patria pulsus, multos quos vel aes alienum vel coscientia scelerum exagitabat,
magnis spebus sollicitatos secum adduxit, pyraticam aggressus, Carnoti adhaesit. Cuius cives nec
armis nec muris confisi beatae Mariae supparum idest camisam adorant, quam Carolus Caluus a
Costantinopoli cum aliis reliquiis aduehi fecerat. Hanc camisam in modum vexilli super propu
gnacela custodum trita pectoribus ventis exponunt. Hostes visam coeperunt ridere et in eam sagitta
dirigere. Quorum oculis mox obtenebratis, nec antecedere nec retro tendere valebant. Quod videntes
oppidiani multa eorum se caede satiarunt. Evasit tamen Rollo quem suae fidei Deus reservavit, nec
multopost Rothomagum et confines urbes obtinuit. Altri manoscritti che contengono entrambe
le leggende sono Parigi, BNF, ms. lat. 12593 e 17491: cfr. al riguardo la tavola comparativa in
E. Faye Wilson, «A Study of Certain Collections of Mary Legend Made in Northern France in
the Twelfth and Thirteenth Centuries», in ead., The Stella Maris John of Garland, Cambridge,
Medieval Academy of America, 1946, p. 1-79: p. 22, 73-74.
134
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
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Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
Marrakech contro i suoi nemici è garantita dalla presenza della bandiera della
Vergine Maria che viene portata in battaglia insieme a delle croci sorrette dai
cristiani 60. Si tratta di un grande miracolo: la storia insegna, infatti, che la
Vergine aiuta sempre coloro che si dimostrano suoi amici, anche se in origine
appartenenti, come in questo caso, a un’altra fede (fig. 10).
L’idea di una sacralizzazione dello spazio esterno alla città murata, così
come si rintraccia in alcuni passi delle leggende mariane, trova un parallelo
sul piano rituale e simbolico in una pratica storicamente documentata qual
è quella di condurre nel campo di battaglia il carroccio o gli stendardi con le
insegne dei santi patroni: pratica che aveva, sì, lo scopo di rappresentare la
città ed esortare i cittadini in armi, ma anche di accompagnarli in sicurezza,
garantendo loro una protezione divina 61. Una miniatura, tratta dal codice degli
60. J. Guerrero Lovillo, Las Càntigas…, op. cit., p. 416, CXXXI sine testo. W. Mettermann,
Afonso X, o Sabio…, op. cit., vol. 2, p. 202-203: Esta CLXXXI è como Aboyuçaf foy desbaratado
en Marrocos pela sina (de) Santa Maria.
61. H. C. Peyer, Stadt und Stadtpatron im Mittelalterlichen Italien, Zürich, Europa, 1955 (ed. it.: Città e
santi patroni nell’Italia medievale, a cura di A. Benvenuti, Firenze, Le Lettere, 1988, p. 49 e 74). Testi
base di riferimeto: C. Erdmann, Die Entstehung des Kreuzzugsgedankens, Stuttgart, Kohlhammer,
1935, p. 42 sg., 100 sg.; P. E. Schramm, Herrschaftszeichen und Staatssymbolik: Beiträge zu ihrer
Geschichte vom dritten bis zum sechzehnten Jahrhundert, Stuttgart, Hiersemann, 1954-1956.
137
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Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
64. V. Camelliti, «“Patroni celesti” e “Patroni terreni”: dedica e dedizione…», op. cit., p. 100-
102; A. Cavinato, La sconfitta di Monte Aperto di Niccolò di Giovanni di Francesco di Ventura.
Per l’edizione di una cronaca illustrata senese del Quattrocento (Siena, Biblioteca Comunale
degli Intronati, ms. A.IV.5), tesi di laurea specialistica, Università di Pisa, 2010, p. 232, 242;
ead., «Stemmi a Siena e a Montaperti: i manoscritti di Niccolò di Giovanni di Francesco di
Ventura», in M. M. Donato, A. Savorelli (a cura di), L’arme segreta. Araldica e storia dell’arte
nel Medioevo (sec. XIII-XV), Atti del Convegno internazionale (2011), Firenze, Le Lettere, 2015,
p. 235-247; ead., «“Nicolò di Giovanni da Siena à fatto questo libro di sua propia mano e di sua
spontana volontà”: note su due manoscritti illustrati senesi del Quattrocento», Opera Nomina
Historiae. Giornale di cultura artistica, 2-3, 2010, p. 219-262 (http:// http://onh.giornale.sns.it/
numero_2_3_2010.php).
139
v it tor i a c a melliti
65. Vedi G. Fattorini, «Pio II e la Vergine di Camollia: l’Assunta di Simone Martini, la pala del
Vecchietta per Pienza e una cappella di Antonio Miraballi Piccolomini», in F. Nevola (a cura
di), Pio II Piccolomini, il papa del Rinascimento a Siena, Atti del Convegno internazionale
di studi (Siena, 5-7 maggio 2005), Siena, Protagon, 2009, p. 324-253; M. Mussolin, «Il culto
dell’Immacolata Concezione nella cultura senese del Rinascimento: tradizione e iconografia»,
in M. Lorenzoni, R. Guerrini (a cura di), Forte Fortuna: religiosità e arte nella cultura senese dalle
origini all’umanesimo di Pio II ai restauri del XIX secolo, Siena, OPA (Quaderni dell’Opera, 1),
2006, p. 131-307.
66. Sulla valenza devozionale dei gonfaloni umbri si segnalano D. Arasse, «Entre dévotion et
culture: fonctions de l’image religieuse au xve siècle», in Faire croire. Modalités de la diffusion
et de la réception des messages religieux du xiie au xve siècle (Rome, 22-23 juin 1979), Roma, École
française de Rome, 1981, p. 131-146; M. Nerbano, Il teatro della devozione: confraternite e spetta
colo nell’Umbria medievale, Perugia, Morlacchi, 2007, p. 332; L. Marshall, «Confraternity and
Community: Mobilizing the Sacred in Times of Plague», in B. Wisch, D. Cole Ahl (a cura
di), Confraternities and the Visual Arts in Renaissance Italy: Ritual, Spectacle, Image, Cambridge,
Cambridge University Press, 2000, p. 20-45. Vedi peraltro C. Frugoni, «Iconografia e vita reli-
giosa nei secoli XIII-XV», in G. De Rosa, T. Gregory, A. Vauchez (a cura di), Storia dell’Italia
religiosa, t. 1: L’Antichità e il Medioevo, Roma/Bari, Laterza, 1993, p. 486-488. F. Mancini, «Temi
e stilemi della “Passio” umbra», in M. Chiabò, F. Doglio (a cura di), Le laudi drammatiche
umbre delle origini, Atti del V Convegno di Studio (Viterbo, 1980), Viterbo, Union Printing,
1981, p. 22-25.
67. Il gonfalone è noto dalle descrizioni di due cronisti contemporanei: il mercante Francesco di
Angeluccio di Bazzano e il frate francescano Alessandro de Ritiis; vedi V. Camelliti, «Tradizione
e innovazione nell’iconografia dei santi patroni in Abruzzo nel corso del Quattrocento», in
C. Pasqualetti (a cura di), La via degli Abruzzi e le arti nel Medioevo (secc. XIII-XV), L’Aquila,
One Group Edizioni, 2014, p. 141-154: p. 148-150.
68. I. Tozzi, «I gonfaloni perugini, testimonianza d’arte sacra e di devozione popolare», Arte
Cristiana, 90, 2002, p. 30-34. M. Bury, «Tabernacoli e gonfaloni», in M. L. Cianini Pierotti
(a cura di), Benedetto Bonfigli e il suo tempo, Perugia, Volumina Editrice, 1998, p. 52-57. Sui
gonfaloni marchigiani si veda invece V. M. Schmidt, «Gli stendardi processionali su tavola
nelle Marche del Quattrocento», in A. De Marchi, P. L. Falaschi (a cura di), I Da Varano e le
arti, Atti del Convegno internazionale (Camerino, 2001), Ripatransone [AP], Maroni, 2003,
140
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
I santi difensori
141
v it tor i a c a melliti
1853], a cura di V. Bartoloni, Certaldo, Arti Grafiche Nencini, 2006, p. 32. Si deve però ricono-
scere che non ci sono elementi utili al certo riconoscimento della città e che sono noti almeno
due episodi in cui il santo vescovo è ricordato come defensor non di san Gimignano, ma di
Modena: la prima volta in vita, contro Attila, re degli Unni; quindi post mortem contro gli
Ungari. Vedi P. Golinelli, «San Geminiano e Modena. Un santo, il suo tempo e il suo culto nel
Medioevo», in F. Piccinini (a cura di), Civitas Geminiana. La Città e il suo Patrono, catalogo
della mostra (Modena, 13 dicembre 1997-22 febbraio 1998), Modena, Franco Cosimo Panini
Editore, 1997, p. 10-33: p. 20; Appendice, p. 30-32; nello stesso volume id., «Descriptio urbis
Mutinae», p. 161-162. Vedi anche A. Dietl, Defensor civitatis: der Stadtpatron in romanischen
Reliefzyklen Oberitaliens, München, Fink, 1998, p. 28 ssg.
74. Giovanni V. Coppi, Annali, memorie…, op. cit., p. 257.
75. L’identificazione della figura femminile con la città si trova già in C. Frugoni, Una lontana città,
op. cit., p. 84. G. E. Solberg (Taddeo di Bartolo…, op. cit., p. 836-837) invece identifica la figura
142
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
ersonificazione della città come vedova è conosciuta sin dal primo Trecento
p
attraverso la Roma vidua dei Carmina Regia di Convenevole da Prato (Londra,
British Library, Royal 6 E IX) per essere in seguito impiegata nelle illustra-
zioni del Dittamondo di Fazio degli Uberti (Venezia, Biblioteca marciana,
Ital. cl. IX 40, fol. 18r e Parigi, BNF, ms. ital. 81, fol. 18r [fig. 14] 76). Appare
significativo quindi che la stessa formulazione, che ben si prestava a dare
risalto alla condizione di miseria in cui versava allora Roma, sia adattata nella
tavola sangimignanese per rappresentare la città minacciata dal nemico: San
Gimignano si troverà, di fatto, sottomessa formalmente ai fiorentini a partire
dalla seconda metà del Trecento.
Sorte non più felice che ai fuoriusciti sangimignanesi spettò a colui che li
aveva appoggiati, Gualtieri di Brienne che fu scacciato da Firenze il 26 luglio
del 1343, giorno in cui si festeggiava sant’Anna che fu accolta, com’è noto,
nel pantheon dei patroni cittadini di Firenze, divenendo in tal modo il sim-
bolo della propaganda antitirannica del Comune 77. Ed è proprio sant’Anna la
sola dei santi patroni fiorentini ad essere rappresentata nella seconda metà del
Trecento con il modello della città di Firenze stretto tra le sue mani: nella pala
per la Zecca (1375), nella volta sovrastante l’altare a lei dedicato nella chiesa
di Orsanmichele e in una delle vetrate settentrionali della navata del Duomo
(entro il 1396) 78.
L’uso strumentale di «miracolose apparizioni» di santi protettori si rintrac-
cia precocemente anche a Padova: il vescovo Prosdocimo, di cui è ricordata
un miracoloso intervento in difesa della città contro Cangrande della Scala nel
1320, fu assunto intorno alla metà del Trecento quale emblema della politica
antitirannica di Iacopo II da Carrara 79. L’immagine di Prosdocimo come santo
civico, rappresentato mentre sorregge il modellino della città protetta, si vede
con il donatore. D. Norman («The Case of the Beata Simona: Iconography, Hagiography and
Misogyny in Three Paintings by Taddeo di Bartolo», Art History, 18/2, 1995, p. 154-184: p. 158)
avanza il nome della beata Simona da Sangimignano. Cfr. anche R. Bosi, «Le storie del Santo»,
in F. Piccinini (a cura di), Civitas Geminiana…, op. cit., p. 47-57: p. 51.
76. S. Maddalo, In figurae Romae. Immagini di Roma nel libro medieoevale, Roma, Viella, 1990,
p. 119-121, nota 32.
77. Per il famoso affresco delle Stinche oggi a Palazzo Vecchio cfr. di recente M. Ferrari, «Scheda
n. 48», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di), Dal giglio al David…, op. cit., p. 212-213.
78. Si rinvia per un riepilogo a V. Camelliti, «I santi patroni: le immagini della “devozione civica”
a Firenze fra Duecento e primo Cinquecento», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di), Dal
giglio al David…, op. cit., p. 79-85: p. 82-84.
79. A. Tilatti, Istituzioni e culto dei santi a Padova fra 6. e 12. secolo, Roma, Herder, 1997, p. 337;
I. Daniele, San Prosdocimo vescovo di Padova: nella leggenda, nel culto, nella storia, Padova,
Istituto Storia Ecclesiastica Padova, 1987, p. 247; G. De Sandre Gasparini, «Chiese venete
e signorie cittadine: vescovi e capitoli fra pressione politica e autonomia istituzionale», in
A. Castagnetti, G. M. Varanini (a cura di), Il Veneto nel Medioevo. Le signorie trecentesche,
Verona, Banca Popolare di Verona, 1995, p. 311-357: p. 324.
143
v it tor i a c a melliti
144
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
sul carrarino, emesso tra 1345-1350: una delle più antiche immagini sicura-
mente datate che ritraggono in santo patrono in associazione con il modello
della città protetta in Italia; a oggi la prima moneta a noi nota 80.
Sant’Antonio trova invece una importante codificazione come protettore
di Padova in un famoso affresco di fine Trecento che ricorda un avvenimento
precedente di oltre un secolo: la miracolosa apparizione in cui annuncia al
beato Luca Belludi l’imminente liberazione di Padova da Ezzelino da Romano
(il 20 giugno 1256) 81 (fig. 15). Si tratta di una immagine che, come ha già
osservato Maria Monica Donato, possiamo definire a ragione di propaganda
signorile, realizzata nella cappella di una famiglia vicina ai Carraresi e destinata
ad accogliere le spoglie mortali del beato Luca Belludi 82; ciò in piena sintonia
con la politica antitirannica dell’ultimo dei Carraresi, Francesco Novello: poli-
tica che trovò, peraltro, una piena legittimazione nel 1390 con la riconquista di
Padova a seguito della sconfitta di Giangaleazzo Visconti, l’ennesimo tiranno
che aveva soggiogato la città (1388).
Tra i santi «eletti» come patroni cittadini e rappresentati per questo in associa-
zione con la città protetta ricordo anche san Pietro Alessandrino, onorato a Siena
perché il 26 novembre 1403, giorno della sua festa, venne rovesciato il governo dei
Dodici di osservanza viscontea 83; sant’Andrea apostolo, festeggiato a San Ginesio
nel giorno della vittoria contro i fermani, il 20 novembre 1377 84; nonché i santi
80. Di recente V. Camelliti, «Gli affreschi del coro della Cappella Scrovegni: una nuova proposta»,
Mitteilungen des Kunsthistorischen Institutes in Florenz, 54/3, 2010-2012, p. 387-304: p. 390;
F. Benucci, «Il santo che vigila sulla città. San Prosdocimo, Padova e le sue mura», in id. (a
cura di), Un uomo chiamato Prosdocimo a Patavium, Atti del Convegno (Padova, 5 novembre
2011), Trieste, Editreg, 2013, p. 81-117.
81. Si ricordano qui di recente P. Scholz, «Constructing Space and Shaping Identity: the Painted
Architectures of Giusto de’ Menabuoi and Altichiero in Padua», in S. Romano, D. Cerutti (a
cura di), L’artista girovago: forestieri, avventurieri, emigranti e missionari nell’arte del Trecento in
Italia del Nord, Atti del Convegno (Losanna, 7-8 maggio 2010), Roma, Viella, 2012, p. 269-306;
D. Umberto, «La veduta di Padova di Giusto de’ Menabuoi (1382-1383) nella Cappella Belludi della
basilica del Santo a Padova/the View of Padua by Giusto de’ Menabuoi (1382-1383) in the Belludi
Chapel of the Basilica of St. Anthony in Padua», Storia dell’urbanistica, 29, 2010 [2011], p. 7-20.
82. Al riguardo cfr. M. M. Donato, «I signori, le immagini e la città: per lo studio dell’immagine
monumentale dei signori di Verona e di Padova», in A. Castagnetti, G. M. Varanini (a cura
di), Il Veneto nel Medioevo…, op. cit., p. 379-454: p. 422.
83. Orlando Malavolti (Della Historia di Siena, Venezia, Marchetti, 1599, libro X, parte II, p. 195)
ricorda che la Balia decretò in quella occasione che «si dovesse per l’avvenir guardar quel giorno,
come se fusse il giorno della Pasqua». Girolamo Gigli (Diario Sanese, II, Lucca, Venturini, 1723,
ed. Siena, G. Landi e N. Alessandri, 1854, p. 545-546) ci informa più tardi che nel 1414 a ricordo
dell’avvenimento fu istituito un Palio. Per l’affresco di Taddeo di Bartolo si veda di recente cfr.
A. Cornice, E. Pellegrini, «Schede iconografiche», in R. Barzanti, A. Cornice, E. Pellegrini (a
cura di), Iconografia di Siena…, op. cit., p. 1-29: p. 21, nota 16.
84. V. Camelliti, «Tradizione e innovazione nell’iconografia dei santi patroni marchigiani…»,
op. cit., p. 94-96.
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v it tor i a c a melliti
146
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
85. Venezia, Biblioteca Marciana, Lettera di Nicola Colzè a Nicola Chieregato, 10 gennaio 1439.
Vedi al riguardo F. Lechi, L’assedio di Brescia nel 1438. I SS. Patroni di Brescia simbolo delle virtù
romane e cristiane dei bresciani, trad. P. Guerrini, Brescia, s. n., 1938, p. 37; E. Ferraglio, «La città
e i patroni», in D. Gobbi (a cura di), Florentissima proles Ecclesiae: miscellanea hagiographica,
historica et liturgica Reginaldo Gregoire O.S.B. 12. lustra complenti oblata, Trento, Civis, 1996,
p. 241-267: p. 245, 266.
86. V. Camelliti, Città e santi patroni. Offerta, protezione e difesa della città nelle testimonianze
figurative dell’Italia centro settentrionale tra XIV e XV secolo, tesi di Dottorato di Ricerca in
Storia dell’Arte, Università degli Studi di Udine, 2010.
87. A. Rigon, «Da “pater Padue” a “patronus civitatis”», in id., Dal Libro alla folla. Antonio di
Padova e il francescanesimo medievale, Roma, Viella, 2002, p. 177-189: p. 177-181.
88. M. M. Donato, D. Giorgi, «Giotto negato, Giotto “reinventato”: la “Fede cristiana” al Palagio
di Parte Guelfa», Mitteilungen des Kunsthistorischen Institutes in Florenz, 58/3, 2016, p. 291-317.
Al riguardo di recente D. Giorgi, «Scheda n. 29», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di),
Dal giglio al David…, op. cit., p. 164-165.
89. Http://asict.arte.unipi.it/index.html/scheda_cli.php?op=3&loc=Pisa&op_a=10&op_s=109,
Pisa, Museo Nazionale di San Matteo, donazione Franceschi (inv. n. 7390). Vedi M. Baldassarri,
«Scheda n. 352», in M. Tangheroni (a cura di), Pisa e il Mediterraneo. Uomini, merci, idee dagli
etruschi ai Medici, Milano, Skira, 2003, p. 486.
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v it tor i a c a melliti
90. Http://asict.arte.unipi.it/index.html/scheda_cli.php?op=3&loc=Siena&op_a=10&op_s=131.
R. Villoresi (a cura di), Monete della Pinacoteca di Volterra, Volterra, Cassa di risparmio di
Volterra, 1993, p. 23; B. Paolozzi Strozzi (a cura di), Monete fiorentine della Repubblica dei
Medici, catalogo della mostra (Firenze, Museo Nazionale del Bargello, 1984), Firenze, Museo
Nazionale del Bargello, 1984, p. 67-68.
148
Oltre le mura: identità civica, idea del sacro e superstizione
come abbiamo visto, tipica della tradizione figurativa senese) si trova prece-
dentemente impiegato proprio a Siena con intento celebrativo sul dritto della
moneta commemorativa della città ancora Repubblicana coniata in occasione
dell’arrivo di Carlo V in città nel 1536 91.
Oltre ai santi difensori «ufficiali», schierati in prima linea per garantire l’or-
dine interno della città, si devono ricordare altre categorie di santi protettori
specializzati nella difesa della città contro pericoli specifici: ad esempio san
Nicola da Tolentino e san Rocco, protettori contro la peste; o san Floriano di
Lorch, protettore contro le alluvioni e gli incendi 92. Né si possono dimenticare
i santi ai quali è attribuita una funzione esorcistica e di riequilibrio con il
sacro: ricordo a titolo di esempio il caso di santa Benoite che scaccia i diavoli
da Leon 93 o il più famoso episodio della cacciata dei diavoli da Arezzo da parte
di san Francesco d’Assisi 94.
Vorrei però concludere il mio intervento ricordando il graffito che si vede
ancora oggi sulla Porta Appia a Roma e che raffigura san Michele arcangelo
(fig. 17). Come recita l’iscrizione che lo affianca, l’immagine fu incisa in ricordo
del 29 settembre del 1327, giorno in cui si festeggiava questo santo e giorno
in cui i ghibellini, guidati da Giovanni Ponziano, riuscirono a respingere i
91. Http://asict.arte.unipi.it/index.html/scheda_cli.php?op=3&loc=Siena&op_a=10&op_s=129,
Firenze, Museo Nazionale del Bargello, Inv. 345. B. Paolozzi Strozzi, G. Toderi, F. Vannel
Toderi, Le monete della Repubblica Senese, Milano, Silvana, 1992, p. 438. Questa moneta (grosso
o Giulio), insieme al grosso da 40 quattrini variato (conservato a Siena presso il Museo Civico
– inv. 334 – e differente da questo solo per la presenza di due cherubini ai lati della Vergine)
e al grosso da 20 quattrini (mezzo Giulio) fa parte di una coniazione eccezionale a carattere
commemorativo della quale non si trova traccia nei documenti dell’epoca. Queste monete non
sono contemporanee all’avvenimento storico cui sono dedicate, ovvero la Battaglia di Camollia
del 1526, ma sono successive di un decennio, realizzate con molta probabilità in occasione della
visita di Carlo V a Siena, avvenuta tra il 24 e il 28 aprile 1536 (sulla moneta compare infatti il
segno dello zecchiere guido Biringucci, reggente la Zecca senese tra il 1528-1531 e il 1536-1539).
L’iconografia della moneta è assolutamente innovativa: l’immagine della Vergine sulla città
sostituisce la consueta lettera S o la rappresentazione della lupa; la Vittoria alata, posta sul
rovescio al posto della croce ricorda il successo dell’esercito senese.
92. V. Camelliti, «Il santo patrono e la città. Petronio e Floriano: due mostre, due modelli di
santità», Sanctorum, 5, 2008, p. 200-209; ead., «Devozione e conservazione. Culto dei santi e
identità civica a Pisa», in D. La Monica, F. Rizzoli (a cura di), Municipalia. Storia della tutela,
vol. 1: Patrimonio artistico e identità cittadina: Pisa e Forlì (sec. XIV-XVIII), Pisa, ETS, 2012,
p. 39-58.
93. Si veda la miniatura del ms. 78 B 16, fol. 13v-14 (Berlino, Staatliche Museen zu Berlin,
Kupferstichkabinett). Al riguardo E. Morrison, «Scheda n. 11. Vie de Sainte Benoite d’Origny»,
in ead., A. D. Hedeman (a cura di), Imagining the Past in France: History in Manuscript
Painting, 1250-1500, catalogo della mostra (J. Paul Getty Museum, Los Angeles, 16 novembre
2010-6 febbraio 2011), Los Angeles, J. Paul Getty Museum, 2010, p. 125-126.
94. A. Piroci Branciaroli, La città immaginata: Arezzo nella leggenda francescana, Città di Castello,
Edimond, 2005.
149
v it tor i a c a melliti
guelfi guidati da Gaetano Orsini 95. Si tratta dunque, ancora una volta, di una
immagine che celebra un santo dimostratosi «amico» della città nel momento
del pericolo. La particolarità di questa raffigurazione è però del tutta riposta nel
luogo dove la stessa si trova, una porta urbica, luogo privilegiato di passaggio
e di osmosi tra «dentro» e «fuori» le mura: luogo evocativo di un passato mai
dimenticato, in cui la leggenda si fa immagine e l’immagine si fa memoria. La
figura di san Michele arcangelo è qui, sì, evocativa di un reale intervento divino
in favore della città, ma ha la duplice funzione di ricordare e di proteggere: si
carica quindi della valenza apotropaica e taumaturgica che viene riconosciuta
alle immagini sacre che da sempre sono schierate a guardia e difesa della città
sulle porte urbiche 96.
95. J. Gardner, «An Introduction to the Iconography…», op. cit., p. 208. Sulla funzione dell’im-
magine di san Michele arcangelo come allegoria di giustizia cfr. di recente C. D’Alberto, Roma
al tempo di Avignone, Roma, Campisano, 2013, p. 94-110; con particolare riferimento al graffito
p. 102-103.
96. V. Camelliti, «Il “progetto” per la decorazione scultorea…», op. cit., in particolare p. 36-44.
150
Territoires et lieux de pouvoir
dans l’empire Plantagenêt :
circuler, contrôler et construire (1154-1216)
fanny madeline
Pensionnaire de la Fondation Thiers, LAMOP (UMR 8589),
CNRS/université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
1. Sur ce point voir A. Gautier, L’empire angevin : une invention des historiens ?, mémoire de
Maîtrise d’histoire médiévale sous la direction de P. Contamine et F. Lachaud, université
Paris 4 – Sorbonne, 1996.
2. J. Le Patourel, Norman Empire, Oxford, Clarendon Press, 1976 ; id., Feudal Empires : Norman
and Plantagenet, Londres, Hambledon Press, 1984.
3. J. Gillingham, The Angevin Empire, Londres, Arnold, 1984 [rééd. 2001].
4. M. Aurell, L’empire Plantagenêt, Paris, Perrin, 2003. Voir notamment l’introduction dans
laquelle il propose un résumé de ces débats.
5. D. Bates, The Norman and Empire, Oxford, Oxford University Press, 2014.
6. R.-H. Bautier, « Conclusion : “Empire Plantagenêt” ou “Espace Plantagenêt” : y eut-il une
civilisation du monde Plantagenêt ? », Cahiers de civilisation médiévale, 29/113-114 : Y a-t-il une
civilisation du monde Plantagenêt ? Actes du colloque d’histoire médiévale (Fontevraud, 26-28 avril
1984), 1986, p. 139-147.
151
fa nn y m a deline
7. J. C. Holt, « The End of Anglo-Norman Realm », Proceedings of the British Academy, 65, 1975,
p. 223-265.
8. M. Billoré, De gré ou de force. L’aristocratie normande et ses ducs (1150-1259), Rennes, Presses
universitaires de Rennes, 2014.
9. Pour la Normandie, voir notamment les travaux de É. Van Thoroudt, et en particulier
« Historiographie de la territorialisation des pouvoirs en Normandie », dans G. Bührer-Thierry,
S. Patzold (dir.), Territoires et frontières : un regard franco-allemand sur les historiographies des
xixe et xxe siècles, université Paris-Est – Marne-la-Vallée (26 mars 2010), dans Territorium, mis
en ligne le 21/12/2011 à l’adresse suivante : http://nbn-resolving.de/urn:nbn:de, TOBIAS-lib,
Universität Tübingen. Pour l’Anjou, voir J. Boussard, Le comté d’Anjou sous Henri II et ses fils
(1151-1204), Paris, Champion, 1938 ; C. W. Hollister, T. K. Keefe, « The Making of the Angevin
Empire », Journal of British Studies, 12/2, 1973, p. 1-25 ; N. Brooks, « Medieval Bridges : a Window
onto Changing Concepts of State Power », The Haskins Society Journal, 7, 1995, p. 11-30.
10. L. Harf-Lancner, « L’enfer de la cour : la cour d’Henri II Plantagenêt et la Mesnie Hellequin
(dans l’œuvre de Jean de Salisbury, de Gautier Map, de Pierre de Blois et de Giraud de Barri) »,
dans P. Contamine (dir.), L’État et les aristocraties (France, Angleterre, Écosse), xiie-xviie siècle,
Paris, Presses de l’École normale supérieure, 1989, p. 27-50.
152
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
11. Les rouleaux produits par la justice royale commencent à être enregistrés et conservés à partir
de 1196. Curia regis rolls, éd. par C. T. Flower, Londres, His Majesty’s Stationery Office, 1922,
puis l’enregistrement des plaids effectués pendant les itinéraires des juges d’Eyre sont enregistrés
séparément, Eyre par Eyre. De la tournée de 1194-1195, où 25 cours de justice ont été tenues,
2 rouleaux de plaid (Plea rolls) ont survécu, de celle de 1198-1199 (32 cours) 6 Plea rolls, de celle
de 1201-1203 (33 cours) 7 Plea rolls, de celle de 1208-1209, où seulement 14 cours ont été tenues,
2 Plea rolls.
153
fa nn y m a deline
seigneur rebelle 12. Jusque-là, la cour résidait dans les grands centres, tandis que
le roi déambulait dans un espace plus ou moins étendu, difficilement palpable
à travers la documentation. La combinaison de données de différentes natures
ne doit donc pas faire oublier qu’il y a deux logiques distinctes à l’œuvre dans
l’itinérance royale : celle de la cour, à vocation gouvernementale, et celle du
roi, à vocation essentiellement cynégétique 13. Le roi se déplace avant tout pour
contrôler militairement son territoire et le marquer des signes de sa domina-
tion. De fait, les chroniqueurs nous relatent avant tout les batailles, les traités,
les négociations qui constituaient l’essentiel, selon eux, des pratiques royales,
et expliquaient leur occupation de l’espace. Mais il ne faut pas surestimer ces
narrations qui avaient souvent une dimension de propagande importante. De
même qu’il ne faut pas non plus considérer les pratiques bureaucratiques de
la royauté, principalement orientées vers le patronage, comme le seul reflet
d’une itinérance dont le rythme devenait de moins en moins compatible avec
les lourdeurs de l’enregistrement des actes.
Ainsi, le choix de faire de l’itinérance un mode de gouvernement constitue
un bon révélateur de la capacité des Plantagenêts à dominer effectivement
l’espace de leur empire (fig. 1, 2 et 3) 14. Si elle s’impose comme une nécessité
pour Henri II et pour Jean, Richard ne semble pas, quant à lui, avoir eu
besoin de parcourir son empire pour le gouverner. Selon John Edward Austin
Jolliffe, Henri II avait un « gouvernement in itinere, non pas de ceux qui vont
12. Sur cet aspect voir T. K. Keefe, « Place-Date Distribution of Royal Charters and the Historical
Geography of Patronage Strategies at the Court of King Henry II Plantagenet », Haskins
Society Journal, 2, 1990, p. 179-188 ; N. Vincent, « Les Normands de l’entourage d’Henri II
Plantagenêt », dans P. Bouet, V. Gazeau (dir.), Angleterre et Normandie au Moyen Âge, Caen,
Publications du CRAHM, 2003, p. 75-88 ; id., « Why 1199 ? Bureaucracy and Enrolment under
John and his Contemporaries », dans A. Jobson (dir.), English Government in the Thirteenth
Century, Woodbridge, Boydell Press, 2004, p. 18-48.
13. F. Madeline, « Penser l’Empire normand et Plantagenêt avec des cartes : itinéraires royaux
et pensée politique de l’espace », dans D. Bates, P. Bauduin (dir.), 911-2011. Penser les mondes
normands médiévaux, Actes du colloque de Cerisy (29 septembre-2 octobre 2011), Caen, Presses
universitaires de Caen, 2016, p. 443-474 ; ead., « Circuler pour gouverner : mise en perspective
de l’itinérance des rois normands et Plantagenêt d’Angleterre (1066-1204) », dans Gouverner les
hommes, gouverner les âmes, Actes du XLVIe congrès de la SHMESP (Montpellier, 2015), Paris,
Publications de la Sorbonne, 2016, p. 221-240.
14. L’itinéraire d’Henri II a été cartographié à partir des données de J. Everard, « Itinerary
of Henry II », introduction dans N. Vincent, J. Everard, J. C. Holt (éd.), The Acta of the
Plantagenets, 1154-1204, Oxford, Oxford University Press, à paraître ; l’itinéraire de Richard à
partir de L. Landon, The Itinerary of King Richard I, with Studies on Certain Matters of Interest
Connected with his Reign, Londres, Publications of the Pipe Roll Society (New Series, 13), 1935,
et de Jean sans Terre à partir de T. D. Hardy, « Itinerarium Johannis Regis Angliae. A Table of
the Movements of the Court of John King of England, from his Coronation, to the End of
his Reign », dans Rotuli Litterarum Patentium in Turri Londinensis asservati, Londres, Public
Records, 1835 (désormais Rot. Lit. Pat.), p. xlix.
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Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
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Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
21. J. Kanter, Peripathetic and Sedentary Kingship. The Itineraries of the Thirteenth-Century English
Kings, thèse du King’s College London, 2011 ; l’auteure confond cependant Saint-Léon avec Saint-
Léonard-de-Noblat en Limousin, où le roi se trouvait quelques semaines plus tôt. B. P. Hindle,
Medieval Roads and Tracks, Princes Risborough, Shire (Shire Archaeology, 26), 1998, p. 34-40 ;
R. J. Bartlett, England under the Norman and Angevin Kings, 1075-1225, Oxford, Clarendon Press
(The New Oxford History of England), 2000, p. 136, cite M. Reinke, « Die Reusegeschwindigkeit
des deutschen Köningshofes im 11. und 12. Jahrhundert nördlich der Alpes », dans Blätter für
deutsche Landesgeschichte, Göttingen, Aisch Schmidt in Komm, 1937, p. 225-251.
22. Robert Wace, Le Roman de Rou, Paris, Picard (Société des anciens textes français), 1970-1974,
v. 70-73.
23. J. Kanter, Peripathetic and Sedentary Kingship…, op. cit., p. 705, annexe 1.
24. J. Hudson, The Oxford History of the Laws of England, vol. 2 : 871-1216, Oxford, Oxford
University Press, 2012, p. 516.
25. Ibid., p. 514.
159
fa nn y m a deline
sont mises en place en 1170 afin de mener une vaste enquête à l’échelle du
royaume, concernant les exactions commises par les agents royaux et notam-
ment les shérifs. En 1176, lors des Assises à Northampton, ces circuits sont sys-
tématisés dans l’objectif de couvrir de manière régulière la totalité du royaume
ainsi que la Normandie 26. Le nombre de ces circuits ainsi que le nombre des
juges royaux n’ont cependant cessé de varier. Ainsi, alors qu’en 1179, il y a
quatre circuits dans lesquels officient quatre ou cinq juges, en 1194, il y a désor-
mais une dizaine de juges dans chacun des huit circuits 27. Les juges se rendaient
dans leur Eyre environ tous les deux ans entre 1176 et 1194, puis la fréquence
des circuits s’atténua à mesure que leur durée s’allongeait. Ce n’est qu’en 1218,
lorsque la nécessité de réaffirmer l’autorité royale se fait sentir après les troubles
des dernières années du règne de Jean et de la minorité d’Henri III, que les cir-
cuits d’Eyre sont plus précisément fixés. Le registre des lettres patentes montre
qu’en 1218, des lettres sont envoyées aux shérifs les informant de la composition
des commissions de juges itinérants (des clercs et des laïcs) et de l’organisation
géographique de ces circuits d’Eyre 28. Les shires sont alors regroupés en huit
circuits 29 (voir fig. 4) et les lettres royales indiquent le lieu et le jour du début
de l’itinérance des juges. Les lieux choisis pour établir les cours de justice
correspondent généralement aux centres des cours de justice des hundreds 30.
Les circuits des juges au sein des Eyres pouvaient être plus ou moins étendus.
Ainsi, tandis que les juges du Lincolnshire ne rendirent la justice qu’à Lincoln
et Nottingham en 1218-1219, les juges chargés de rendre la justice dans l’Ouest
commencèrent à Worcester en 1221, puis se rendirent à Gloucester, Bristol,
Hereford, Leominster puis à nouveau à Worcester, Gloucester et Hereford
26. J. Hudson, The Oxford History…, op. cit., vol. 2, p. 545 ; M. Billoré, De gré ou de force…, op. cit.,
p. 232 ; ead., « Justice royale et cours seigneuriales en Normandie sous le règne de Henri II
Plantagenêt et de ses fils », dans M. Aurell, F. Boutoulle (dir.), Les Seigneuries dans l’espace
Plantagenêt (c. 1150-c. 1250), Bordeaux, Ausonius, p. 93-116.
27. Roger de Hoveden, Chronica, éd. par W. Stubbs, Londres, s. n., vol. 2, p. 190-191.
28. P. Brand, J. Getzler, Judges and Judging in the History of Common Law and Civil Law : from
Antiquity to Modern Times, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 7 ; Patent
Rolls of the Reign of Henry III. AD. 1216-1225, éd. par H. C. Maxwell-Lyte, Londres, His
Majesty’s Stationery Office, 1901, p. 206-208 ; Rotuli Litterarum Clausarum in Turri Londinensi
conservari, éd. par T. D. Hardy, Londres, Eyre and Spottiswoode, 1833, I, p. 380b (désormais
Rot. Lit. Claus.). Ces circuits seront ensuite réformés au milieu du xiiie siècle.
29. 1) Yorkshire et Northumberland ; 2) Bedfordshire, Buckinghamshire, Huntingdonshire,
Cambridgeshire, Northamptonshire, Rutland ; 3) Wiltshire, Hampshire, Berkshire,
Oxfordshire ; 4) Cornouailles, Devon, Sommerset, Dorset ; 5) Cumberland, Westmorland,
Lancashire ; 6) Sussex, Surrey, Kent et Middlesex ; 7) Essex, Hertfordshire, Norfolk, Suffolk ;
8) Lincolnshire, Nottinghamshire, Derbys.
30. Le hundred est une ancienne circonscription administrative héritée de la centurie romaine qui
perdura sous la monarchie anglo-saxonne.
160
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
31. Rolls of the Justices in Eyre, being the Rolls of Pleas and Assizes for Lincolnshire 1218-19 and
Worcestershire 1221, éd. par D. M. Stenton, Londres, Quaritch (Selden Society, 53), 1934, p. xlix.
161
fa nn y m a deline
32. Système de sécurité mutuelle composé d’un groupe d’hommes chargés d’assurer l’ordre
public à un niveau local. Le groupe était responsable du comportement de chacun de ses
membres et devait assumer certaines responsabilités publiques : contribuer aux amendes et
taxes imposées sur le groupe, participer aux procès de la cour du hundred, lorsque cela était
requis, etc. J. Masschaele, Jury, State and Society in Medieval England, Londres, Palgrave
Macmillan, 2008, p. 55.
33. J. Hudson, The Oxford History…, op. cit., vol. 2, p. 555 ; H. Cam, The Hundred and the Hundred
Rolls. An Outline of Local Government in Medieval England, Londres, Merlin Press, 1963, p. 176.
34. Calendar of the Close Rolls Preserved in the Public Record Office, AD 1231-34, éd. par
H. C. Maxwell-Lyte, Londres, His Majesty’s Stationery Office, 1905, p. 588-589.
35. Pipe Rolls of the 13th Year of the Reign of Henry II, AD 1166-67, Londres, Pipe Rolls Society (désor-
mais PR), p. 1, 3 ; PR 14 H.II, p. 1, 200 ; PR 17 H.II, p. 148 ; PR 19 H.II, p. 183 ; PR 20 H.II,
p. 8-9 ; PR 21 H.II, p. 80, 108 ; PR 22 H.II, p. 60 ; H. M. Colvin, R. A. Brown, A. J. Taylor, The
History of the King’s Work, the Middle Ages, Londres, s. n., 1976, vol. 1, p. 57-58 ; J. H. Harvey,
« The King’s Chief Carpenters », The Journal of British Archaeological Association, 3/11, 1948,
p. 13-34 ; id., English Mediaeval Architects. A Biographical Dictionary down to 1550, Londres,
Batsford, 1987, p. 2-3.
36. PR 7 R.I, p. 2, 113, 240 ; N. Vincent, « Master Elias of Dereham (d. 1245) : a Reassessment »,
dans C. Barron, J. Stratford (dir.), The Church and Learning in Late Medieval Society : Studies
in Honour of Professor R. B. Dobson, Donington, Shaun Tyas (Harlaxton Medieval Studies, 11),
2002, p. 128-159 ; H. M. Colvin, R. A. Brown, A. J. Taylor, The History of the King’s Work…,
op. cit., vol. 1, p. 60-61.
162
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
163
fa nn y m a deline
37. Voir sur ce point F. Madeline, « La pierre des chantiers royaux en Angleterre fin xiie-début
xiiie siècle : origines et distribution », dans J. Lorenz, J.-P. Gély (dir.), Carriers et bâtisseurs de la
période préindustrielle : Europe et régions limitrophes, Actes du CXXXIVe congrès national des
sociétés historiques et scientifiques, Paris, Éd. du Comité des travaux historiques et scienti-
fiques, 2011, p. 207-222.
38. Ead., « Formes et figures de l’expertise dans les chantiers royaux en Angleterre aux xiie et
xiiie siècles : des compétences techniques au service du politique », dans Experts et expertise au
Moyen Âge. Consilium quaeritur a perito, Actes du XLIIe congrès de la SHMESP (Oxford),
Paris, Publications de la Sorbonne, 2011, p. 229-242.
39. J. H. Harvey, English Mediaeval Architects…, op. cit., p. 305 ; J. H. Round, The King’s Serjeant
and Officers of State with their Coronation Services, Londres, s. n., 1911, p. 15-16 ; H. M. Colvin,
R. A. Brown, A. J. Taylor, The History of the King’s Work…, op. cit., vol. 1, p. 61.
40. Rotuli Normaniae in Turri Londinensi asservati, éd. par T. D. Hardy, Londres, His Majesty’s
Stationery Office, 1835, vol. 1, p. 23, 27 ; H. M. Colvin, R. A. Brown, A. J. Taylor, The History
of the King’s Work…, op. cit., vol. 1, p. 61-62.
41. F. Madeline, Les Plantagenêts et leur empire. Construire un territoire politique, Rennes, Presses
universitaires de Rennes, 2014, p. 150-151.
42. V. Theis, « Pratiques artisanales et politique de grands travaux : l’exemple du palais de Pont-
de-Sorgues au xive siècle », Cahiers d’histoire et de philosophie des sciences, 52 : Artisans, industrie.
Nouvelles révolutions du Moyen Âge à nos jours, 2004, p. 307-319.
164
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
43. Guillaume de Newburgh, Chronicles of the Reign of Stephen, Henry II and Richard I, éd. par
R. Howlett, Londres, s. n., 1884, vol. 1, p. 331.
44. C. H. Haskins, « The Norman “Consuetudines et Iusticie” of William the Conqueror », English
Historical Review, 23/91, 1908, p. 502-508, republié dans id., Norman Institutions, Cambridge
(Mass.), Harvard University Press, 1918, p. 277-284, appendice D : clause 4 ; C. A. Coulson,
Castles in Medieval Society. Fortresses in England, France, and Ireland in the Central Middle Ages,
Oxford, Oxford University Press, 2003.
45. J. C. Holt, « Politics and Property in Early Medieval England », Past & Present, 57, 1972, p. 3-52 ;
R. Eales, « Castles and Politics in England 1215-1224 », dans R. Liddiard (dir.), Anglo-Norman
Castles, Woodbridge, Boydell Press, 2003, p. 367-388.
46. A. Debord, La société laïque dans les pays de la Charente : xe-xiie siècles, Paris, Picard, 1984.
47. F. Boutoulle, Le duc et la société : pouvoirs et groupes sociaux dans la Gascogne bordelaise au
xiie siècle, Bordeaux, Ausonius, 2007, p. 209-228.
165
fa nn y m a deline
être investi du fief de leur père. Le refus de remettre son château, et donc de
ne pas reconnaître son origine publique, était considéré comme une trahi-
son et s’accompagnait alors d’une intervention du roi, qui se saisissait manu
militari du château rebelle, le retenant en y plaçant des gardiens, ou le fai-
sant détruire. La normalisation de cette disposition légale fut utilisée par
Henri II comme un véritable instrument pour gouverner l’aristocratie de son
empire, en renforçant son pouvoir coercitif par le rétablissement d’une forme
d’insécurité des tenures et des fiefs. La carte des 425 châteaux répertoriés
saisis et détruits par Henri II et ses fils au cours de la période permet de s’en
convaincre (fig. 6).
Le cas breton est significatif 48. Nombre de nobles bretons avaient participé
à la conquête de 1066 et furent dotés de terres en Angleterre 49. En tant que
vassaux du roi d’Angleterre, ils étaient soumis au principe de reddibilité de leur
fief, sans pour autant que ce principe s’applique sur leurs terres bretonnes. La
pression d’Henri II pour contrôler les marches entre Bretagne et Normandie
provoque une révolte menée par le duc Conan IV en 1166. En représailles,
Henri II se saisit des terres anglaises des barons rebelles, et s’empare militai-
rement de leurs châteaux en Bretagne. Conan IV fut contraint d’abdiquer et
les barons bretons durent rendre hommage au roi pour reprendre possession
de leurs châteaux, reconnaissant ainsi de facto l’application du principe de
reddibilité s’appliquant aussi sur leurs fiefs bretons. Ce principe de reddibilité
fut un instrument puissant de la politique coercitive des Plantagenêts, qui
s’en servirent pour normaliser les rapports « féodaux » qu’ils entretenaient avec
les groupes aristocratiques de leur empire. Considérer l’usage de ce droit de
« prise » comme un instrument de gouvernement offre l’avantage de l’associer
à d’autres dispositifs utilisés par les Plantagenêts, comme la garde des fiefs des
mineurs et des héritières 50, ou bien la lutte pour conserver le droit de nom-
mer les prélats, contre les prétentions de l’Église grégorienne à s’approprier le
contrôle des espaces sacrés.
48. J’ai développé cet exemple dans F. Madeline, « Les enjeux politiques et territoriaux autour
de la frontière bretonne sous domination des Plantagenêts (1156-1202) », dans H. Bouget,
M. Coumert (dir.), Histoire des Bretagnes. 2. Itinéraires et confins, Brest, CRBC-UBO, 2001,
p. 55-73.
49. J. Everard, Brittany and the Angevins. Province and Empire, 1158-1203, Cambridge, Cambridge
University Press, 2000, p. 42-43.
50. Sur ce point voir notamment J. C. Holt, « Presidential Address : Feudal Society and the Family
in Early Medieval England : IV. The Heiress and the Alien », Transactions of the Royal Historical
Society, 5/35, 1985, p. 1-28.
166
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
167
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51. D. Walker, « Crown and Episcopacy under the Normans and Angevins », Anglo-Norman
Studies, 4, 1982, p. 220-233 ; R. V. Turner, « Richard Lionheart and English Episcopal
Elections », Albion, 29/1, 1997, p. 1-13 ; id., « Richard Lionheart and the Episcopate in his
French Domains », French Historial Studies, 21/4, 1998, p. 517-542 ; D. Spear, « Power, Patronage
and Personality in the Norman Cathedral Chapter, 911-1204 », Anglo-Norman Studies, 20, 1998,
p. 205-222 ; J. Peltzer, « Henry II and the Norman Bishops », English Historical Review, 191/484,
2004, p. 1202-1229 ; id., « Les évêques de l’empire Plantagenêt et les rois angevins : un tour
d’horizon », dans M. Aurell, N.-Y. Tonnerre (dir.), Plantagenêts et Capétiens : confrontations et
héritages, Turnhout, Brepols, 2006, p. 461-484.
52. J. Everard, Brittany and the Angevins…, op. cit., p. 67.
53. M. Murphy, « Balancing the Concerns of Church and State : the Archbishops of Dublin 1181-
1228 », dans T. B. Barry (dir.), Colony and Frontier in Medieval Ireland : Essays Presented to
J. F. Lydon, Londres, Hambledon Press, 1995, p. 41-56.
54. Rot. Lit. Pat., p. 7b et 14b ; voir aussi S. R. Packard, « King John and the Norman Church »,
The Harvard Theological Review, 15/1, 1922, p. 15-40.
55. G. Mollat, « Le droit de patronage en Normandie du xie au xve siècle », Revue d’histoire ecclé-
siastique, 33, 1937, p. 463-484, et 34, 1938, p. 725-788.
168
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
56. D. J. Power, « Norman Church and the Angevin and Capetian Kings », Journal of Ecclesiastical
History, 56/2, 2005, p. 205-234 ; J. Peltzer, Canon Law, Careers and Conquest. Episcopal Elections
in Normandy and Greater Anjou, c. 1140-c. 1230, Cambridge, Cambridge University Press, 2008,
p. 168-169.
57. E. Cownie, « Religious Patronage and Lordship : the Debat on the Nature of the Honor », dans
K. S. B. Keats-Rohan (dir.), Family Trees and the Roots of Politics. The Prosopography of Britain
and France from the Tenth to the Tweltfh Century, Woodbridge, Boydell Press, 1997, p. 133-
146 ; id., Religious Patronage in Anglo-Norman England, 1066-1135, Londres, Royal Historical
Society, 1999.
58. PR 10 H.II, p. 15, 22 ; PR 11 H.II, p. 86 ; D. Knowles, R. N. Hadcock, Medieval Religious
Houses : England and Wales, Londres, Longmans & Green, 1971, p. 177, 181. E. M. Hallam,
« Henry II as a Founder of Monasteries », Journal of Ecclesiastical History, 28/2, 1977, p. 113-132.
59. D. Knowles, R. N. Hadcock, Medieval Religious Houses…, op. cit., p. 262, cite W. Dugdale,
R. Dodsworth, Monasticon Anglicanum : a History of the Abbies and Other Monasteries, Hospitals,
Frieries, and Cathedral and Collegiate Churches, with their Dependencies, in England and Wales,
Londres, s. n., 1846, vol. 2, p. 98.
169
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170
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
60. Robert de Torigni, Chroniques, éd. par L. Delisle, Rouen, Le Brument, 1872, vol. 1, p. 368.
61. M. Chibnall, « The Empress Matilda and Church Reform », Transactions of the Royal Historical
Society, 38, 1988, p. 107-130.
62. Rot. Lit. Pat., p. 58.
63. A. Chédeville, « Le mouvement communal en France aux xie et xiie siècles », dans R. Favreau
et al. (dir.), Bonnes villes du Poitou et des pays charentais (xiie-xviiie siècles), Poitiers, Société
des antiquaires de l’Ouest, 2002, p. 9-24. N. Vincent, J. Everard, J. C. Holt (éd.), The Acta
of the Plantagenets…, op. cit. (1814H) ; Recueil des actes de Henri II, roi d’Angleterre et duc
de Normandie concernant les provinces françaises et les affaires de France, éd. par L. Delisle et
É. Berger, Paris, Klincksieck, 1916-1920, vol. 2, p. 82-83, no DXIX ; R. Favreau, « Les débuts de
la ville de La Rochelle », Cahiers de civilisation médiévale, 30, 1987, p. 9-10.
171
fa nn y m a deline
64. Sur ce point voir F. Madeline, « Rouen and its Place in the Building Policy of Angevin Kings »,
dans L. Hicks, E. Brenner (dir.), Society and Culture in Medieval Rouen, 911-1300, Turnhout,
Brepols, 2013, p. 65-100.
65. R. Favreau, La Rochelle aux xiie et xiiie siècles, La Rochelle, Académie des belles-lettres, sciences
et arts de La Rochelle, 1993.
66. G. Pon, Y. Chauvin, « Chartes de libertés et de communes de l’Angoumois, du Poitou et de la
Saintonge (fin xiie-début xiiie siècle) », dans R. Favreau et al. (dir.), Bonnes villes du Poitou…,
op. cit., p. 25-149.
67. Ibid.
68. V. Moss, « The Norman Fiscal Revolution 1193-1198 », dans W. M. Ormrod et al. (dir.), Crisis,
Revolutions and Self-Sustained Growth. Essays in European Fiscal History, 1130-1830, Stanford,
Shaun Tyas, 1999, p. 38-57. La participation des villes normandes en 1198 aux revenus de
l’Échiquier avait été particulièrement importante.
69. Rigord, Vie de Philippe Auguste, éd. et trad. par F. Guizot, Paris, Brière (Mémoires relatifs à
l’histoire de France), 1825, p. 171 ; É. Robert-Barzman, « La conquête de la Normandie dans
la Philippide de Guillaume Le Breton », dans A. M. Flambard Héricher, V. Gazeau (dir.),
1204. La Normandie entre Plantagenêts et Capétiens, Caen, Publications du CRAHM, 2007,
p. 153-188.
70. PR 2 J., p. 153 ; Rotuli de Oblatis et Finibus in Turri Londinensi asservati, tempore regis Johannis,
éd. par T. D. Hardy, Londres, Record Office, 1835, p. 11 ; C. N. L. Brooke, G. Keir, London,
800-1216, the Shaping of a City, Londres, Secker & Warburg, 1975, p. 114. Au cours de l’année
1215, il envoie plusieurs lettres pour réparer et renforcer les murs de la ville : Rot. Lit. Claus.,
I, p. 198.
172
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
71. Magni Rotuli Scaccarii Normaniae sub regis Angliae, éd. par T. Stapleton, Londres, Société des
antiquaires de Londres, 1844, vol. 2, p. 386, 429. Les rouleaux de l’Échiquier normand enre-
gistrent la somme de 5 125 livres angevines, prêtée aux bourgeois « pour les travaux des remparts
de la ville d’Eu ». Il s’agit, plus précisément, d’une avance sur la taille levée par le roi dont les
bourgeois devaient rendre compte à l’Échiquier. En réalité, elle servira surtout à financer les
travaux de Château-Gaillard et de Radepont (534 livres angevines au total).
72. Ibid., vol. 1, p. 239, 233 ; vol. 2, p. 501. A. Lemoine-Descourtieux, « La ville fortifiée de Verneuil-
sur-Avre », dans Construire, reconstruire, aménager le château en Normandie, Caen, Annales
de Normandie, 2004, p. 51-70 ; ead., La frontière normande de l’Avre. De la fondation de la
Normandie à sa réunion au domaine royal (911-1204), Mont-Saint-Aignan, Presses universitaires
de Rouen et du Havre, 2011, p. 217, 302.
173
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73. B. Dufay, « Premier bilan des fouilles de la forteresse de Chinon, 2003-2009 », Revue archéolo-
gique du Centre de la France, 48, 2009, mis en ligne le 2 mars 2010 à l’adresse suivante : http://
racf.revues.org/1371.
74. Gervais de Canterbury, Historical Work, éd. par W. Stubbs, Londres, Kraus Reprint, 1965,
vol. 1, p. 156, 161 ; PR 20 H.II, p. 49 ; H. M. Colvin, R. A. Brown, A. J. Taylor, The History of
the King’s Work…, op. cit., vol. 2, p. 574.
75. T. Pearson, Scarborough Castle, North Yorkshire, Swindon, National Monuments Record/
English Heritage (Archaeological Investigation Report Series), 1999 ; PR 4 H.II, p. 146.
174
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
175
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176
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
Puis en 1175, il fait aménager une cour intérieure en l’entourant d’un talus et
d’un fossé ouvert au nord par une porte fortifiée toujours visible aujourd’hui 76
(fig. 10). Sur les terres d’Hugues Bigot, il fait ériger le donjon d’Orford (fig. 11),
probablement avec le remploi des pierres des châteaux du baron à Walton
et Framlingham, dont il avait fait surveiller la destruction par son ingénieur
Ailnoth 77. La forme polygonale du donjon constitue alors une caractéristique
qui se retrouve sur de nombreux donjons construits par les Plantagenêts en
Angleterre et en Normandie (fig. 12).
Au sud de la Tamise, la politique de construction correspond davantage à
l’espace investi par la présence d’Henri II. Hormis les forteresses de Douvres et
Windsor, vitrines de la puissance militaire de la royauté, l’essentiel des dépenses
a été affecté à l’extension des espaces résidentiels des demeures royales, et
notamment des palais de Westminster, de Woodstock au nord d’Oxford et de
Clarendon 78. La domestication des constructions dans les résidences royales
s’est manifestée sous diverses formes : par l’extension et la multiplication des
espaces domestiques ainsi que par leur privatisation. À partir de 1162, toute
une série de travaux vise à aménager le palais royal de Westminster : la aula
est décorée et couverte de bardeaux de bois, une vingtaine de colonnes en
calcaire fin sont acheminées des Cotswolds et des fenêtres sont percées dans
les appartements de la reine 79. À la fin des années 1170, les travaux consistent
à faire une garde-robe, aménager un « cloître » au milieu des bâtiments des-
tinés à abriter les chambres royales, emplir le vivier et réparer la chambre à
177
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Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
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fa nn y m a deline
coucher 80. Puis une cuisine est construite ainsi qu’un système d’adduction
d’eau permettant de se laver dans la grande salle ; du plomb est alors acheté à
cette fin en 1176 81. En 1186, il est question de réparer les latrines dans la mai-
son du trésor 82. De nouveaux espaces apparaissent également : un bâtiment
neuf est construit dans le cloître des chambres royales tandis que l’espace du
roi dans la aula principale est rehaussé 83. En 1187 et 1188, c’est au tour de la
chapelle Saint-Jean d’être embellie 84. La fragmentation de l’espace contribue
à distinguer plus nettement les espaces privatisés des espaces publics et à les
hiérarchiser. Par leur monumentalité, leur faste et la richesse des décorations,
les espaces résidentiels acquièrent une place de plus en plus grande dans la
topographie des lieux de pouvoir, au sein même des châteaux mais aussi en
dehors d’eux 85. Philippe Dixon remarque deux différences importantes dans les
partis pris architecturaux entre le nord et le sud de l’Angleterre : tandis que la
grande salle de plain-pied avec charpente prédomine dans le sud (ainsi qu’au
nord de la Loire), les espaces résidentiels se déploient surtout dans les grandes
tours au nord 86.
Cette résidentialisation des lieux de séjour va se poursuivre sous Richard
et Jean notamment après 1204. Le développement d’espaces résidentiels, plus
vastes et plus adaptés à l’augmentation du personnel de la cour et de la maison
du roi, concerne aussi bien les vastes donjons carrés que les demeures non forti-
fiées : qu’elles soient monastiques, urbaines ou forestières. On ne peut cependant
80. PR 23 H.II, p. 198 : 101 s. ad faciendam warderobam regis de Westmonasterio ; PR 26 H.II, p. 150 :
32 l. in operatione claustri inter cameram regis de Westmonastrio et pro vivario peremplendo et
cumulum thalami fractum reficiendo.
81. PR 27 H.II, p. 156 : 32 l. in operatione coquinarum regis de Westmonasteri ; PR 16 H.II, p. 14 : 12 l.
15 s. 10 d. in operatione domorum regis de Westmonasterio et aqueductus ; PR 22 H.I, p. 13 : 10 s. pro
plumbo ad faciendum conductum ad domos regis apud Westmonasterium ; PR 30 H.II, p. 136 : 28 l.
in operatione lavatorii in aula regis apus Westmonasterium ; PR 31 H.II, p. 43 : 50 l. in operatione
lavatorii regis apud Westmonasterium.
82. PR 31 H.II, p. 49 : 28 s. pro facienda camera in claustro quod est inter cameras et emendatione
stillicidii domus Thesauri.
83. PR 30 H.II, p. 137 : 62 s. pro exaltanda area dominice aule regis apud Westmonasterium.
84. PR 34 H.II, p. 18 : 7 l. 2 s. 7 d. pro arcu lapideo et sede Regis in capella sancti Johannis apud
Westmonasterium.
85. Sur l’importance de la chorographie voir notamment P. Dixon, « The Donjon of Knares
borough : the Castle as Theatre », Château Gaillard, 14, 1988, p. 121-139, et P. Marshall, « The
Ceremonial Function of the Dunjon in the Twelfth Century », Château Gaillard, 20, 2002,
p. 141-151 ; A. Salamagne, « Le symbolisme monumental et décoratif : expression de la puissance
seigneuriale », dans Seigneurs et seigneuries au Moyen Âge, Actes du CXVIIe congrès national
des sociétés savantes (Clermont-Ferrand, 1992), Paris, Éd. du Comité des travaux historiques
et scientifiques, 1993, p. 563-579.
86. P. Dixon, « Le Nord et le Sud. Glissement et mutation des pratiques architecturales dans
l’Angleterre médiévale », dans G. Meirion-Jones (dir.), La demeure seigneuriale dans l’espace
Plantagenêt. Salles, chambres et tours, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, p. 19-42.
180
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
oublier que ces lieux restaient la plupart du temps vides de la présence royale.
Il revenait alors à l’architecture de conserver symboliquement le souvenir de
cette présence et d’assurer la permanence du pouvoir dans l’espace et le paysage.
Pallier l’absence du roi devient une véritable problématique sous le règne de
Richard, qui part en Croisade dès 1190 et qui ne reviendra de captivité qu’en
1194. En outre, les dernières années de son règne ont été consacrées à fortifier
la Normandie contre les prétentions de plus en plus agressives de Philippe
Auguste. La carte des constructions de Richard montre qu’il s’est essentielle-
ment concentré sur ses « capitales » : la Tour de Londres et Les Andelys sont
pratiquement les seuls chantiers importants de son règne, avec Chinon (fig. 13).
L’investissement défensif redoublé par une présence mobile de Richard au sein
de la vallée de la Seine contribue à la territorialisation croissante du duché
au cours de ces décennies. Celle-ci passe par la construction identitaire de
l’aristocratie à partir d’un territoire plutôt que par l’attachement à des fidélités
vassaliques, qui n’ont cessé de changer au gré des traités, mais aussi par les
délimitations frontalières, elles aussi soumises aux évolutions du conflit entre
Plantagenêts et Capétiens entre 1193 et 1200 87.
Sous le règne de Jean, l’investissement dans les forteresses baronniales du
Nord se poursuit et s’accentue au cours des années 1210, alors que la fronde
des Northerners s’étend dans le royaume (fig. 14). Mais comme son père, c’est
dans le sud-ouest de l’Angleterre et dans la vallée de la Tamise qu’il réside
le plus souvent. Là, il entreprend plusieurs grands chantiers. Au début des
années 1200, il fait ériger les enceintes du château de Corfe dans le Dorset,
ainsi qu’une tour polygonale à l’extrémité de l’éperon (fig. 15) 88. Cette tour,
connue sous le nom de Butavant Tower au Moyen Âge, explicite assez bien les
présupposés de sa construction : défier autant qu’impressionner les attaquants
potentiels. Cependant, une part importante des dépenses sont consacrées à
la construction des demeures royales (297 livres contre 360 livres pour le cas-
tellum), un aspect qui suggère que le chantier de Corfe avait une fonction
moins militaire que de mise en scène de la résidence royale. Par ailleurs, Corfe
était une prison importante ainsi que l’un des châteaux destinés à abriter une
partie du trésor royal. Les constructions, qu’elles soient domestiques ou plutôt
de fortification, doivent donc s’inscrire dans le processus de développement
de la machine gouvernementale qui a besoin d’espace pour fonctionner. De
même, dans les espaces peu soumis à l’instabilité politique, comme la vallée
de la Tamise, les fortifications doivent se comprendre avant tout comme la
87. Voir notamment D. J. Power, The Norman Frontier in the Twelfth and Early Thirteenth Centuries,
Cambridge, Cambridge University Press, 2004.
88. H. M. Colvin, R. A. Brown, A. J. Taylor, The History of the King’s Work…, op. cit., vol. 2, p. 619.
181
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182
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
183
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Conclusion
184
Territoires et lieux de pouvoir dans l’empire Plantagenêt
les fonctions sont redéfinies. L’intensité des espaces parcourus par le roi et sa
cour, et par ses représentants, constitue un indice du degré de territorialisa-
tion de l’institution royale en 1200. Forte en Angleterre, où elle a hérité des
structures territoriales de la monarchie anglo-saxonne, et faible sur le continent
et notamment au sud de la Loire, l’emprise territoriale des Plantagenêts est à
peine compensée par leur politique castrale. En effet, le cas de l’Angleterre
montre qu’ils ont investi dans les forteresses des espaces peu fréquentés, mais ils
consacrèrent l’essentiel de leurs dépenses à développer leurs lieux de résidence.
L’analyse topologique de leur pouvoir offre ainsi une manière d’interpréter
le rôle des changements d’échelles sur l’émergence de nouveaux modes de
gouvernement et sur le choix des stratégies de contrôle de l’espace permettant
d’articuler la mobilité du centre, l’invisibilité du roi et la diversité de pouvoirs
locaux. Les réponses apportées au xiie siècle par les Plantagenêts ont mobilisé
des instruments à la fois normatifs (réformes légales et affirmation des droits
féodaux – reddibilité, patronage), administratifs (mise en place d’un maillage
d’officiers parcourant le territoire du royaume – shérifs, juges royaux et séné-
chaux) et symboliques (affirmation de l’image monumentale de la puissance
royale). Mais ce n’est pas avant la fin du xive siècle, lorsque la concentration
des pouvoirs en un centre « capital » ne nécessite plus d’allier conquête du
territoire et villégiature, que la construction politique du territoire peut plei-
nement se réaliser 89.
89. V. Theis, « Les stratégies d’implantation palatiale dans la région d’Avignon de Jean XXII à
Clément VI (1316-1352) », dans P. Boucheron, J. Chiffoleau (dir.), Les palais dans la ville. Espaces
urbains et lieux de la puissance publique dans la Méditerranée médiévale, Lyon, Presses universi-
taires de Lyon (Histoire et archéologie médiévales), 2004, p. 165-187. L’auteure montre com-
ment l’implantation de résidences pontificales et leur organisation en un réseau contribuèrent
à la territorialisation du pouvoir des papes en Comtat Venaissin.
185
Définir l’espace économique,
imposer l’autorité politique
Les bornes péagères, un enjeu pour la souveraineté
princière (État bourguignon – Franche-Comté,
xive -xve siècles)
michelle bubenicek
École nationale des chartes – PSL
1. Voir N. Coulet, J.-P. Genet (éd.), L’État moderne : le droit, l’espace et les formes de l’État, Actes du
colloque d’Aix-en-Provence (octobre 1984), Paris, Centre national de la recherche scientifique,
1990 et A. Rigaudière, Penser et construire l’État dans la France du Moyen Âge (xiiie-xve siècle),
Paris, Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie (Histoire économique et finan-
cière de la France), 2003 (« Rétrospective » et surtout « Perspectives », aux p. 695 et suiv.), qui
conclut à la prise en compte encore insuffisante de cette variable dans les travaux récents.
2. Ibid., p. 689 : territoire, population, gouvernement forment, pour nombre de médiévistes,
comme pour les constitutionnalistes modernes, les « trois éléments essentiels qui donnent
existence à l’État ».
187
michelle bubenicek
188
Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
Cette prétention à lever des taxes sur les marchands et voituriers « menans
danrees » à travers les routes jurassiennes via Champagnole, puis Saint-
Laurent-la-Roche, deux villes du Jura appartenant au sire d’Arlay, n’était
pourtant pas sans fondements juridiques, car elle reposait sur l’interprétation
large d’une concession impériale majeure remontant à 1288, celle du péage de
Jougne. Le 17 septembre 1288 exactement, au camp devant Berne, Rodolphe
de Habsbourg, roi des Romains, avait concédé à perpétuité à son beau-frère,
Jean Ier de Chalon-Arlay, ancêtre de Jean III, le droit de percevoir dix sous
lausannais de taxe sur « chaque balle, ou sac, ou trousse, ou fardeau, contenant
la valeur d’une balle ou environ de laine, drap, toile, poivre, peaux et autres
marchandises […] qui transiteraient par son chatel de Jougne 3 ». Mais l’acte
comportait surtout un privilège bien plus vaste, promis à toutes les interpréta-
tions : afin de pouvoir assurer financièrement la conduite des marchands, pour
laquelle le revenu du seul péage de Jougne se révélait notoirement insuffisant 4,
le sire d’Arlay se vit accorder en sus, et à perpétuité, le droit de percevoir sur
les marchandises en provenance de Besançon ou d’ailleurs, qui transiteraient
à travers les archidiocèses de Besançon, Lyon, Vienne et le diocèse de Valence,
un droit de six sols par balle de laine ; disposition qui n’ouvrait à Jean de
Chalon pas moins que la perspective d’un monopole du péage lainier dans
les pays de l’Entre-Deux. Longtemps considérée comme apocryphe du fait de
son ampleur, cette double concession de 1288 trouve en réalité son explication
dans les excellentes relations que le sire de Chalon-Arlay entretenait alors avec
l’Empire. En cette fin du xiiie siècle, où l’influence française sur la Comté était
croissante et indéniable, le roi des Romains se cherche un représentant et un
champion capable d’y contrecarrer la présence française 5. Et Jean de Chalon se
vit précisément concéder ce rôle lors de l’accord de Berne de 1288. L’octroi de
privilèges commerciaux importants fut sans conteste un moyen de rémunérer,
à la mesure des services attendus, le nouvel allié de l’empereur 6.
3. Le texte de l’acte figure en tête des privilèges accordés à la maison de Chalon-Arlay par l’empe-
reur Albert en 1299 : voir B. Prost, S. Bougenot (éd.), Cartulaire d’Hugues de Chalon (1220-
1319), publié d’après le manuscrit original du British Museum, Lons-le-Saunier, Declume, 1904,
p. 16-18, au no 17 ; une autre version, dotée de quelques variantes, figure dans V. Chomel,
J. Ebersolt, Cinq siècles de circulation internationale vue de Jougne, Paris, Armand Colin (Centre
de recherches de l’École pratique des hautes études, VIe section. Ports, routes et trafics, 2), 1951,
p. 169-170, à la pièce justificative no 1.
4. cum pedagium actenus castro de Joigne recepi conductum onera conductus non valeat supportare.
5. V. Chomel, J. Ebersolt, Cinq siècles de circulation internationale…, op. cit., p. 35.
6. Cette première charte fut, du reste, suivie d’autres concessions, non moins prestigieuses :
l’inféodation de la seigneurie de Neuchâtel (1288), le droit de battre monnaie (1291) ; enfin,
l’avouerie de l’abbaye Saint-Oyand-de-Joux, plus connue sous le nom de Saint-Claude (1291).
189
michelle bubenicek
7. C’est en 1266 que Jean de Chalon l’Antique achète à de petits seigneurs de la région de
Pontarlier – Étienne, Ferri et Othenin de Bannans ; Hugues de Pontarlier et Guy de Mièges – le
bourg de Jougne, la maison-forte et le péage attenant, alors que les abbés de Montbenoît et de
Mont-Sainte-Marie se portent garants de la transaction : B. Olivier, M. Malfroy, J. Guiraud,
Histoire de Jougne, Besançon, Cêtre, 1988, p. 29.
8. V. Chomel, J. Ebersolt, Cinq siècles de circulation internationale…, op. cit., p. 77.
190
Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
raires en furent eux aussi modifiés. Cette phase critique pour l’existence du
péage de Jougne s’ouvre entre 1399 et 1410 du fait d’une dérivation d’une
partie des échanges transitant auparavant principalement entre Pontarlier
et le plateau suisse. Il faut en rendre responsables plusieurs facteurs : l’éveil
commercial et industriel de ce même plateau suisse et des pays rhénans, qui
fournissent désormais eux aussi du drap et des tissus, le déplacement vers l’est
des industries textiles des Pays-Bas et, surtout, l’essor des foires de Genève,
qui deviennent le nouveau rendez-vous d’affaires et point de rencontre des
courants commerciaux du Nord et du Midi. Les marchands du Nord qui fré-
quentent d’abord les places de Dijon et de Chalon convergent ensuite volon-
tiers vers Genève et ses foires qui offrent désormais les épices et les articles
des industries de luxe italiennes. Ce nouveau circuit de Dijon à Genève ou
de Chalon à Genève s’établit définitivement vers 1400, grâce à des liaisons
plus rapides que celle passant par Salins, Pontarlier et Jougne : celles du Jura
méridional (par Gex – Saint-Oyand – Orgelet – Saint-Laurent-la-Roche –
Bellevesvre ou Gex – Saint-Oyand – Champagnole – Salins – Augerans –
Saint-Jean-de-Losne), et la voie bressane, menant par les plaines de la Saône
de Chalon jusqu’à la Cluse de Nantua (fig. 1).
C’est à la lumière de ce contexte précis qu’il faut comprendre la tentative
de perception par les Chalon d’un péage à Champagnole, puis Saint-Laurent-
la-Roche : Hugues de Chalon-Arlay, puis son neveu Jean III, ne purent assis-
ter au relatif déclin de leur péage de Jougne, délaissé du fait des nouveaux
itinéraires, sans tâcher d’y remédier. À Champagnole, qui constituait aussi un
point de convergence des flux issus de (ou se dirigeant vers) Bâle, Fribourg et
Neuchâtel, on pouvait être assuré de capter tant une partie des flux créés par
les nouveaux itinéraires vers Genève, que ce qui subsistait des anciens. Le sire
d’Arlay pouvait alors espérer combler le manque à gagner de la désaffection du
péage de Jougne, lequel devait d’ores et déjà être très sensible, car, à l’extrême
fin du xive siècle, les rentrées d’argent procurées par Jougne à Jean de Chalon
équivalaient au moins au revenu d’une ville comme Bâle, et représentaient près
des trois quarts de ses revenus seigneuriaux 9. Le péage de Champagnole paraît
bien avoir été envisagé d’emblée comme une solution de compensation à la
moindre rentabilité de la passe de Jougne.
9. Comptage effectué par V. Chomel et J. Ebersolt (ibid., p. 90), à partir des comptes du receveur
du péage de Jougne pour 1393-1394 : le péage rapporte environ 2 475 florins, quand le péage et
le banvin de Bâle rapportent à son évêque environ 2 223 florins ; le péage est donc au moins
égal, sinon supérieur au revenu de Bâle. Le revenu total de la seigneurie de Jean de Chalon,
en 1394, étant d’environ 3 377 florins, avec 2 475 florins pour le péage de Jougne, on atteint
presque les 75 %.
191
michelle bubenicek
10. Arch. dép. Doubs, B 457 : acte de la duchesse Marguerite, en date du 13 janvier 1395 (nou-
veau style), par lequel la duchesse exempte la femme et la fille du receveur du péage de
Champagnole, Nicolas Oiselet, de comparaître en personne aux assises d’Aval.
192
Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
Mais le sire d’Arlay était-il autorisé à déplacer, comme bon lui semblait, les
« bornes » matérielles de son péage de Jougne ? Les barrages que constituaient
les péages étaient des constructions légères dressées aux points de passage des
marchands, des constructions par nature facilement transportables au lieu le
plus favorable, s’agissant la plupart du temps de claies – sorte de treillages
servant de clôtures –, d’où, par exemple, le nom de « Clées » pour désigner le
péage du versant oriental du Jura, dépendant du comte de Savoie. En 1299, en
tout cas, le même péage de Jougne avait déjà été déplacé, semble-t-il, sur ordre
de l’empereur, à Lucerne, où il était resté deux ans durant 11. En 1393-1395, en
outre, la place de Jougne, qui avait fait l’objet d’une confiscation par le duc de
Bourgogne suite à la rébellion du sire d’Arlay, n’était plus disponible : le fait
pouvait expliquer que Jean III ait eu à cœur de percevoir ailleurs sa principale
source de revenus… En 1402, cependant, alors même qu’il s’est vu restituer sa
place de Jougne, c’est bien plus à l’ouest, à Saint-Laurent-la-Roche cette fois,
que le sire d’Arlay fait arrêter les marchands, toujours sous le prétexte de leur
faire acquitter son « péage de Jougne 12 ». En déplaçant de la sorte le péage à sa
guise, en saisissant, à Saint-Laurent-la-Roche ou ailleurs, les chargements des
marchands refusant de lui verser le tonlieu, Jean de Chalon se juge en tout cas
parfaitement dans son droit, car il interprète les nouvelles routes empruntées
par les marchands comme autant de tentatives de fraude de son péage originel
de Jougne ; « peaige brisié » est, en effet, l’expression qu’il emploie constam-
ment pour qualifier le comportement de ces mêmes marchands : « m’a dit que
les dictes denrees lui sont commises et escheues a cause de son dit peaige brisié,
et que point de restitution d’icelles n’an feroit 13 ».
L’argumentaire déployé par Jean III de Chalon-Arlay pour justifier la mobi-
lité de son péage de Jougne apparaît sans doute de la façon la plus complète
dans la lettre qu’il adresse, le 11 mars 1402, aux conseillers du duc siégeant à
11. M.-T. Allemand-Gay, Le pouvoir des comtes de Bourgogne au xiiie siècle, Paris, Les Belles Lettres
(Annales littéraires de l’université de Besançon, 368/Cahiers d’études comtoises, 36), 1988,
p. 267.
12. « lidit seigneur d’Arlay m’a respondu que les dictes denrees sont passeex par les mectes, termes
et destrois de son peaige de Joigne, sanz paier icelluy peaige d’icelles… » : arch. dép. Doubs,
B 457 : acte du 11 mars 1402 (nouveau style).
13. Ibid.
193
michelle bubenicek
14. Arch. dép. Doubs, B 458 : la lettre est seulement datée du quantième (11 mars) ; nous avons resti-
tué l’année grâce à l’enchaînement des faits contenus dans les diverses pièces de correspondance.
15. « quar y ne fut onques depuis si longtemps ença qu’il n’est memoire du contraire que toutes
fois que marchans ont passez par le païs du conté de Bourgoigne senz aler ou venir paier le
piaige de Joigne, que les denrees n’y aient estez prises par les gens de mes devanciers et de moy
toutes foys qu’il ont estez trovez mesusant ; et de ce j’ay bonnes lettres donnees des emperours
et confermees des contes de Bourgoigne… ».
16. Arch. dép. Doubs, B 458 : document daté du 11 avril [1402] : « interrogué ou l’on avoit acous-
tumé soy acquitter a paier ledit paaige, dist et afferma que audit lieu de Jouigne avoit acous-
tumé estre paié et, depuis grant intervalle de temps, dist que ledit seigneur d’Arlay le pouvoir
faire recevoir la ou bon li sembloit ».
194
Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
Le contrôle d’un espace précis passe de toute évidence par sa définition. Cet
effort est très sensible, chez le duc et ses équipes, à propos de l’affaire des
péages. Car l’interdiction de nouveaux péages seigneuriaux de Champagnole
et de Saint-Laurent-la-Roche, puis la fixation précise du péage de Jougne sont
finalement autant d’occasions pour le pouvoir princier de définir une « zone
externe » au comté, celle de la frontière, sur laquelle le duc-comte affiche des
prétentions réduites ; et une « zone interne » constituée par le reste de la pro-
vince, ensemble quant à lui soumis au seul contrôle du prince.
17. Les nombreuses négociations menées avec le sire d’Arlay, maître du péage de Jougne, au cours
des xiiie et xive siècles, sont détaillées par V. Chomel, J. Ebersolt, Cinq siècles de circulation
internationale…, op. cit., aux premiers chapitres de l’ouvrage.
18. Arch. dép. Doubs, B 458 : document daté du 9 avril [1402].
195
michelle bubenicek
se fondait certes, pour étayer ses prétentions, sur l’acte impérial de 1288 19.
Qu’à cela ne tienne, après s’être vu confirmer la non-existence d’un diplôme
impérial plus récent, qui aurait pu conforter davantage encore la position du
sire d’Arlay 20, les conseillers du duc vont s’acharner à prouver que, depuis 1288,
les taxes acquittées du fait de Jougne n’ont jamais été perçues ailleurs en Comté
que dans la localité frontalière 21. Deux enquêtes par témoins sont ainsi menées
en mars 1402 22, dans le but de prouver l’évidente « nouvelleté » de l’extension
du péage. De fait, tous les témoins interrogés – marchands ou simples voitu-
riers – affirment que, de toute leur vie, jamais ils n’ont versé de taxe péagère
aux nouvelles étapes instituées par le sire d’Arlay, qu’il s’agisse d’Orgelet ou
de Saint-Laurent-la-Roche 23, qu’ils n’ont jamais entendu parler de tels péages
et qu’il s’agit bien d’une extorsion pure et simple de la part de l’autorité sei-
gneuriale 24. Le péage exigé par Jean de Chalon sur la route de Saint-Claude à
Orgelet était, en revanche, tout récent et remontait à deux ans au plus.
La question des « mectes et termes » ou des « mectes et destrois » du péage de
Jougne, c’est-à-dire de ses limites matérielles précises, est en outre centrale dans
les interrogatoires, comme dans la correspondance échangée par les conseillers
du duc. L’affaire est l’occasion de réaffirmer qu’un péage a ses limites, des limites
qu’il convient de ne pas dépasser sous peine d’empiéter sur la juridiction v oisine :
19. « et de ce j’ay bonnes lettres donnees des emperours et confermees des contes de Bourgoigne »
(propos de Jean de Chalon-Arlay, en date du 11 mars 1402 : arch. dép. Doubs, B 458) ; « maistre
Jehan de Chatenay, procureur et en nom de procureur dudit seigneur d’Arlay, lequel a presenté,
monstré aus diz messieurs du conseil et des comptes le vidimus fait soubz le seel de la court de
Monseigneur en son conté de Bourgoigne d’une lettre de l’ampereur Raoul, donnee en l’an CC
IIIIxx VIII, et d’une confirmation du conte Othe de Bourgogne, donnee l’an CC IX [sic pour
CCC IX] faisant mention dudit paaige de Jouigne » (ibid., document daté du 11 avril 1402).
20. « et disoit, sur ce interrogué par mes diz seigneurs, que ledit seigneur d’Arlay n’en avoit aucuns
aultres tiltres… » (propos du procureur de Jean de Chalon, interrogé par les conseillers ducaux,
le 11 avril 1402 : ibid.).
21. Nous avons mentionné, plus haut, un déplacement de plus de deux ans du péage à Lucerne,
en vertu d’une décision impériale, mais c’était en dehors du comté.
22. Arch. dép. Doubs, B 458 : 4 témoins interrogés sur ordre du procureur du duc.
23. Voir, par exemple, l’enquête du 13 mars, de loin la plus complète et la plus détaillée : « Estevenon
Lievre, de Gez, voicturier par terre […] il a acoustumé continuelment de frequenter ung
chacun an les foires de Chalon chaudes et froides, et de y admener et en ramener des denrees
aucunes fois par chemin devisié en l’intitulation dessus escripte et aucunes fois prenre son
chemin dois Saint Claude a Moran, dez Moran a Orgellot, des Orgellot a Louans et des Louans
a Chalon, sens ce que oncques devant le temps dessus dit aucun peaige lui fust demandé a
cause ne pour occasion du peaige de Jouigne » ; ou encore : « François Maignien, de Crusilles
ou conté de Geneve, muletier de bestes par terre […] il ne oïst oncques dire ne sceust que en
venant par les chemins dessus diz messire Jehan de Chalon ne ses gens demandassent a aucuns
voicturiers aucun peaige pour occasion du peaige de Jouigne ».
24. « dient que ce que messire Jehan de Chalon ou ses gens ont fait a present, c’est assavoir de
demander peage sur les dis chemins a cause du peage de Joigne, est une nouvelleté de nouvel
estontrouiiee, et que les gens du pais le tiegnent ainsi ».
196
Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
197
michelle bubenicek
eslever ne mectre suz nouvel peage, ne aussi les anciens peages extendre
ne lever autrement qu’il est accoustumé d’ancienneté.
L’emploi de l’expression « aucuns de noz subgez […] de quelque estat qu’ilz
soient » est sans appel ; on ne saurait être plus clair dans la description par l’au-
torité souveraine d’un bloc de sujets tous soumis au même régime, qui est celui
de l’observance de la coutume dont le prince est en quelque sorte le garant. Et,
en dépit de son statut de baron, Jean de Chalon-Arlay, le principal visé par les
lettres ducales, n’échappe pas à la règle (« de quelque estat qu’ilz soient ») ; pour
le duc, il est ainsi manifeste que le sire d’Arlay est en définitive autant « sujet »
qu’un autre… Une vraie révolution mentale pour l’intéressé, considérant son
état d’esprit qui est, plus généralement, celui de la haute noblesse confrontée
aux progrès de la souveraineté.
Pour le duc et ses agents, le contenu du domaine comme du pouvoir d’un
« simple » seigneur sont donc limités : ils ne sont ni modifiables, ni extensibles
conformément au seul souhait de leur détenteur. Pas d’exception, donc, en matière
de péage pour le grand baron Jean de Chalon, prié de se contenter de l’existant, à
savoir de son péage frontalier de Jougne. Car, en souhaitant étendre son pouvoir,
c’est forcément sur le « comté » qu’empiète le vassal présomptueux, une notion
qu’il faut de toute évidence entendre ici comme l’espace soumis au contrôle du
prince dans l’intérêt général 28 : « sur toutes les denrees et marchandises passans
par nostre conté… ». Grâce au concept de « bien publique », pleinement exprimé
comme tel dans l’ensemble du dossier 29, puisqu’il s’agit de protéger l’intérêt de
ses marchands comme de ses gouvernés, l’aire d’action du prince vise désormais
la principauté dans son intégralité, au-delà des enclaves et des domaines annexes.
Dans ce but de protection, certains marqueurs physiques autres que les
« mectes et termes », correspondant aux péages, sont alors d’une aide précieuse,
tel le « grant chemin » qui quadrille le territoire et constitue, en Bourgogne
ducale notamment 30, un sous-espace directement soumis au contrôle p rincier 31.
28. Tout comme le terme de « royaume » est doté d’une compétence générale, allant au-delà de la
notion de « domaine royal », puisqu’il comprend aussi les fiefs.
29. Voir supra les termes cités.
30. Concernant les voies publiques, l’apport des commentateurs des constitutions de Sicile au
xive siècle est primordial (voir G. Leyte, Domaine et domanialité dans la France médiévale [xiie-
xve siècles], Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 1996, p. 58 et 73 et suiv.), mais il
faut noter que la coutume de Bourgogne reconnaissait aussi au duc la connaissance expresse de
tous les délits commis sur les « grands chemins », au motif qu’ils étaient pour lui des « héritages »
en justice et seigneurie (M. Petitjean, M.-L. Marchand [éd.], J. Metman [dir.], Le coutumier
bourguignon glosé [fin du xive siècle], Paris, Centre national de la recherche scientifique, 1982,
p. 86 et 198-199).
31. D’une manière générale, fleuves et voies de communication furent, en effet, d’une grande
utilité dans la construction progressive d’un « espace public » garanti par le prince : G. Leyte,
Domaine et domanialité…, op. cit., p. 170-171.
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Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
Dans le dossier de l’affaire des péages, la notion est récurrente : on insiste sur
les « drois chemins anciens frans de peaiges » empruntés d’antiquité par voi-
turiers et marchands 32. De même, l’arrestation de voituriers par les agents du
sire d’Arlay est dite avoir été effectuée « ou grant chemin 33 », donc en violation
manifeste de la sauvegarde ducale qui s’appliquait normalement à ce type d’iti-
néraire 34. Avec celle de « bien publique », seule la notion de « grant chemin »
semble permettre d’affirmer la capacité du duc à intervenir sur des biens rele-
vant a priori du domaine privé 35, tels les péages possédés de longue date par des
seigneurs locaux comme le sire d’Arlay. Le duc affirme ainsi progressivement
sur tout le territoire du comté, lié à la sécurité et à la nécessaire affectation
publique, un monopole qui apparaît surtout comme une expression de la sou-
veraineté 36. La politique ducale concernant le sel procédera aussi, du reste, de
cette même conception d’un territoire de la souveraineté susceptible d’englo-
ber jusqu’à l’activité économique : Philippe le Hardi emploiera ainsi, en 1397,
concernant le problème de la réglementation des cours du sel, l’expression de
« debat qui touche grandement notre souverainneté et domaine 37 », traduc-
tion exacte des deux termes latins de dominium et de domanium, employés
conjointement par les juristes du xive siècle pour distinguer la supériorité et
la puissance du prince (le dominium), d’un des espaces de déploiement de
cette même supériorité, le « domaine » (le domanium) ; une distinction bien
présente, notamment, chez les commentateurs des Constitutions du royaume
de Sicile 38.
Pour le duc de Bourgogne, il est ainsi manifeste que contrôler l’espace comtal
en y consacrant éventuellement de nouveaux péages revient donc au prince et à
lui seul, garant du « bien commun » ou du « bien publique 39 », et ne constituait
en aucun cas l’attribution d’un « simple » seigneur, fût-il baron. Interdire au sire
d’Arlay d’« étendre » son péage de Jougne fut donc, de toute évidence, du côté
199
michelle bubenicek
40. Au moment de la reconnaissance du péage par le roi des Romains, le comte Othon IV et
Jean Ier de Chalon-Arlay s’affrontaient d’ailleurs déjà pour le contrôle d’un espace précis, celui
de la frontière du comté au niveau de la Cluse de Pontarlier : en réplique au péage de Jougne,
reconnu par privilège impérial, le comte de Bourgogne Othon IV avait en effet tenté de créer
à son profit un péage concurrent à Pontarlier et d’interdire le passage à Jougne, mais il avait
dû y renoncer en 1293, tant faute d’accord impérial qu’en raison des remontrances du roi
Philippe le Bel : V. Chomel, J. Ebersolt, Cinq siècles de circulation internationale…, op. cit.,
p. 72, note 47 ; nouvelle analyse du dossier dans M.-T. Allemand-Gay, Le pouvoir des comtes…,
op. cit., p. 270-271.
41. Sur ces nouvelles « exclusivités » comtales, je me permets de renvoyer à M. Bubenicek, Entre
rébellion et obéissance. L’espace politique comtois face au duc Philippe le Hardi (1384-1404),
Genève, Droz (Rayon Histoire, 2), 2013, au chap. 8, p. 322 et suiv.
200
Définir l’espace économique, imposer l’autorité politique
201
Lo stato, il diritto, il territorio
Dominazione territoriale e crisi
del modello giuridico nel pensiero politico
italiano del XVI secolo 1
romain descendre
École normale supérieure de Lyon/IUF
203
rom a in descendr e
vista della storia lessicale, stato è il risultato di una perdita. «Stato», in effetti,
non è altro che il residuo di una locuzione nominale, la quale ha perduto
proprio quel genitivo che gli donava tutto il suo senso: un genitivo che, per
l’appunto, esprimeva il pubblico, la città, la comunità. Negli ultimi secoli del
Medioevo, a favore della ben nota «volgarizzazione» della riflessione politica,
ovvero del suo trasferimento da un latino giuridico relativamente rigido ad
una lingua volgare tanto più fluida quanto meno normata, delle espressioni
assai correnti come quelle di status reipublicae, status civitatis o status regni
risultano troncate e lasciano spazio al solo «nome testa» (come dicono i lin-
guisti) stato. Un processo che si può osservare presso i cronisti fiorentini del
XIV secolo. Già Marchionne di Coppo Stefani parla solo di «stato», senza
complemento determinativo, per designare ciò che Villani chiamava «stato
del nostro comune», «stato ch’avea il nostro comune», traduzione della locu-
zione consacrata dal latino di cancelleria – status communis o status civitatis
Florentiae. Tuttavia, il fenomeno è, a queste date, puramente sintattico, e non
ancora semantico: certamente lo Stefani non concepisce ancora lo stato come
un’entità politica. Stato resta il calco di status, parola derivata da un verbo che
significa semplicemente «star fermo», e dunque lo «stato» nel quale una cosa si
trova, la sua condizione: la condizione propria della città, quello che è o dev’es-
sere il suo proprio. L’evoluzione semantica s’impone tra il XV ed il XVI secolo.
Si tratta di un processo che non è semplicemente formale: esso non riguarda
soltanto la storia linguistica, ma è al contrario ricco di conseguenze in termini
di semantica storica 2.
2. In merito a tali questioni, si vedano O. Condorelli, «Per la storia del nome “Stato” (il nome “Stato”
in Machiavelli)», Archivio Giuridico Filippo Serafini, 4/5, 1923, p. 223-235, e 5/6, 1923, p. 77-112;
F. Chiappelli, Studi sul linguaggio di Machiavelli, Firenze, Le Monnier, 1952; F. Chabod, «Alcune
questioni di terminologia: stato, nazione, patria nel linguaggio del Cinquecento» [1957], in
id., Scritti sul Rinascimento, Torino, Einaudi, 1967, p. 625-661; F. Chiappelli, Nuovi studi sul
linguaggio del Machiavelli, Firenze, Le Monnier, 1969; N. Rubinstein, «Notes on the Word
Stato in Florence before Machiavelli», in J. G. Rowe, W. H. Stockdale (a cura di), Florilegium
Historiale: Essays Presented to W. K. Ferguson, Toronto, University of Toronto Press, 1971, p. 313-
326; A. Tenenti, Stato un’idea, una logica, Bologna, Il Mulino, 1987. Q. Skinner, «The State», in
T. Ball, J. Farr, R. L. Hanson (a cura di), Political Innovation and Conceptual Change, Cambridge,
Cambridge University Press, 1989, p. 90-131 (ripubblicato come: «From the State of Princes to
the Person of the State», in Q. Skinner, Visions of Politics. II. Renaissance Virtues, Cambridge,
Cambridge University Press, 2002, p. 368-413); J.-L. Fournel, J.-C. Zancarini, «Sur la langue du
Prince. Des mots pour comprendre et pour agir», in Machiavelli, Le Prince/De Principatibus, a
cura di J.-L. Fournel e J.-C. Zancarini, Parigi, Presses universitaires de France, 2000, p. 556-567.
J.-L. Fournel, «Frontiere ed ambiguità nella lingua del Principe: condensamenti e diffusione
del significato», in A. Pontremoli (a cura di), La lingua e le lingue di Machiavelli, Firenze,
Olschki, 2001, p. 71-86. C. Vivanti, «Note intorno al termine stato in Machiavelli», in A. Merola
et al. (a cura di), Storia sociale e politica. Omaggio a Rosario Villari, Milano, Angeli, 2007,
p. 79-98. R. Descendre, «Le cose di stato. Sémantique de l’État et relations internationales chez
204
Lo stato, il diritto, il territorio
In questa nuova lingua volgare della politica, stato, nome testa che ha per-
duto i suoi determinanti, è così contraddistinto da una rilevante polisemia, e
concentra rapidamente una buona parte delle manifestazioni proprie allo Stato
(soprattutto in Machiavelli, il quale impiega il termine nella sua più ampia
estensione semantica, ciò che spiega per altro come, sin dalle prime tradu-
zioni francesi del XVI secolo ed ancora oggi, la maggior parte dei traduttori
tendano ad utilizzare dei vocaboli molto diversi per renderlo in francese) 3.
Dominano, comunque, due principali ordini di significato: l’uno, di origine
antica, rimanda al potere nella sua effettività; l’altro, più recente, tende a desi-
gnare il territorio posseduto. Lo «stato» di un principe diventa la forza politica
che gli procura il territorio che possiede ed il potere effettivo che esercita.
A questa doppia dimensione dello Stato, il pensiero politico italiano del
XVI secolo avrebbe dedicato una grande attenzione. Rispetto alle tradizioni
dottrinali sino ad allora dominanti, due caratteristiche lo distinguono netta-
mente, che potremmo definire, attraverso due termini alquanto barbari, «degiu-
ridicizzazione» e «territorializzazione». Due termini che fanno eco ai referenti
principali della parola stato: quello del potere, considerato non tanto dal punto
di vista del diritto quanto dal punto di vista della dominazione, e quello del
territorio sul quale si esercita questa dominazione. Da un lato, prende campo
la consapevolezza del fatto che il trattamento degli affari politici si faccia a mar-
gine del diritto o persino in opposizione al diritto. Dall’altro e parallelamente,
all’interno dei testi la parte accordata ai territori (da conquistare, controllare
o conservare) diventa predominante, tanto nelle fonti appartenenti al campo
delle pratiche (cancelleria e diplomazia) quanto nelle opere di trattatistica.
Se il primo fenomeno è ben noto, così com’è esibito in primo luogo dallo
«scandalo» del pensiero machiavelliano e della sua diffusione – scandalo che,
evidentemente, non può essere ridotto alla vulgata della cosiddetta «autonomia
del politico» –, il secondo è stato meno studiato. Se è ormai da molto che gli
specialisti di storia politica e sociale del Medioevo e della prima Modernità
considerano da vicino i fenomeni della territorializzazione, gli storici delle
idee e della filosofia hanno impiegato diverso tempo ad interessarsi al posto
occupato dallo spazio e dal territorio all’interno della letteratura politica 4.
Machiavel», Il pensiero politico, 41, 2008, p. 3-18; id., «Introduction», in Giovanni Botero, De la
raison d’État, edizione, traduzione e note di P. Benedittini e R. Descendre, Parigi, Gallimard,
2014, p. 7-57 (si veda il testo in traduzione italiana nel volume Della ragion di Stato, Torino,
Einaudi, 2016); id., s. v. «Stato», in G. Sasso, G. Inglese (a cura di), Enciclopedia machiavelliana,
Roma, Istituto dell’Enciclopedia italiana, 2014.
3. Si possono consultare con profitto i risultati ormai messi a disposizione dalla piattaforma
online HyperPrince (http://hyperprince.ens-lyon.fr).
4. I lavori di E. Fasano Guarini, dedicati a Machiavelli ed a pensatori e storici fiorentini, costi-
tuiscono in tal caso un’importante eccezione. Si noterà, tuttavia, che le sue analisi intorno
205
rom a in descendr e
al pensiero politico fiorentino sono, com’è naturale che sia, effettuate a partire dal punto di
vista della storica delle istituzioni politiche, concentrandosi sulla trasformazione italiana dei
comuni medievali in Stati territoriali. Si veda, soprattutto, E. Fasano Guarini, Repubbliche
e principi. Istituzioni e pratiche di potere nella Toscana granducale del ’500-’600, Bologna, Il
Mulino, 2010.
5. Mi pemetto di rinviare, nello specifico, a P. Carta, R. Descendre (a cura di), Laboratoire italien,
8: Géographie et politique au début de l’âge moderne, 2008; R. Descendre, L’État du monde.
Giovanni Botero entre raison d’État et géopolitique, Ginevra, Droz, 2009; id., «Dall’occhio
della storia all’occhio della politica. Sulla nascita della geografia politica nel Cinquecento», in
E. Mattioda (a cura di), Nascita della storiografia e organizzazione dei saperi, Firenze, Olschki,
2001, p. 155-179.
206
Lo stato, il diritto, il territorio
***
207
rom a in descendr e
nasca ne’ popoli questa affezione del vivere libero; perché si vede per esperienza
le cittadi non avere mai ampliato né di dominio né di ricchezza, se non mentre
sono state in libertà 6». Un concetto forgiato quarant’anni fa da Raymond Aron
per rendere conto della politica internazionale degli Stati Uniti ben corri-
sponde a ciò cui mira Machiavelli nei Discorsi: in primo luogo e prima di tutto,
una repubblica imperiale 7 (e questo è forse il vero «momento machiavelliano»
della tradizione repubblicana anglo-americana). A ben guardare, l’insieme dei
grandi temi che costituiscono i Discorsi, che si tratti degli ordini e delle leggi
– ossia dell’armatura giuridica dello Stato – , dei costumi, della religione o della
virtù individuale di cittadini e capitani, tutti sono sottoposti ad un’esigenza di
conquista mai rimessa in questione: leggi, costumi, religione e virtù servono
innanzitutto a combattere la guerra e ad espandere lo Stato. Ciò non significa
che il diritto e le sue esigenze vengano completamente meno (non soltanto la
riflessione sulle leggi resta onnipresente all’interno dei Discorsi, ma perdurano
l’esigenza di giustizia e di realizzazione del bene comune); ciò significa, però,
che il diritto è ormai sottomesso alle necessità dello Stato, secondo la struttura
propria del positivismo giuridico inteso nel suo senso più ampio – ed è in
tal senso che non è illegittimo vedere nell’opera di Machiavelli una forma di
avvento del pensiero politico moderno.
Non che, in passato, il diritto non abbia funto ai sovrani da puro strumento
di potere. Lungi da ciò. Ma rappresentava precisamente ciò che bisognava
scongiurare, specie attraverso l’onnipresenza della questione della tirannia.
Machiavelli è il primo a individuare sistematicamente il fatto che l’esigenza
politico-militare del controllo dei territori prevalga su ogni considerazione di
ordine giuridico, spingendosi sino ad assumerla al cuore stesso della propria
riflessione politica e storiografica. Fra diversi altri passaggi, ce n’è uno che
evidenzia perfettamente l’ancoraggio storico di questo processo. Quello in
cui l’autore delle Istorie Fiorentine descrive con un acume e un’ironia a lui
tipici che cosa sia stata l’istituzionalizzazione dei regimi signorili nel corso del
XIV secolo, sotto l’effetto delle politiche papale ed imperiale – qui, più preci-
samente, in riferimento al periodo che separa l’elezione al soglio pontificio dei
Papi avignonesi Benedetto XII (1334) e Clemente VI (1342):
Era pervenuto al pontificato Benedetto XII, e parendogli avere perduto
in tutto la possessione di Italia, e temendo che Lodovico imperadore
non se ne facesse signore, deliberò di farsi amici in quella tutti coloro
6. Machiavelli, Discorsi sopra la prima deca di Tito Livio, a cura di G. Inglese, Milano, Rizzoli,
1984, II.II.9, p. 296-297.
7. R. Aron, République impériale. Les États-Unis dans le monde, 1945-1972, Parigi, Calmann-Lévy,
1973.
208
Lo stato, il diritto, il territorio
8. Machiavelli, Istorie fiorentine, I, XXX, in id., Opere, III, a cura di C. Vivanti, Torino, Einaudi,
2005, p. 350-351.
209
rom a in descendr e
9. Francesco Guicciardini, Ricordi, B95, a cura di G. Masi, Milano, Mursia, 1994, p. 76, ricordo
che riformula una redazione precedente, A70, anteriore al 1525. Sin dal 1512, nel suo Discorso
di Logrogno, Guicciardini affermava che «Non è altro lo stato e lo imperio che una violenza
sopra e’ sudditi, palliata in alcuni con qualche titulo di onestà». Questa idea è nuovamente
avanzata nell’ultima redazione dei Ricordi ed è ripresa tale e quale nel Dialogo del reggimento
di Firenze (a cura di G. M. Anselmi e C. Varotti, Torino, Bollati Boringhieri, 1994, p. 231). Si
vedano anche J.-L. Fournel, J.-C. Zancarini, La grammaire de la République. Langages de la
politique chez Francesco Guicciardini (1483-1540), Ginevra, Droz, 2009 (in particolare il cap. 11
e, per le citazioni, p. 276-277), così come le analisi di P. Carta, Francesco Guicciardini tra diritto
e politica, Padova, Cedam, 2008 (in particolare i cap. 8 e 9).
10. Fondata sui versetti del Genesi dedicati a Nemrod, «primo potente sulla terra» (Gn, 10, 8-9),
l’affermazione della natura originariamente tirannica del potere politico vantava una lunga
tradizione; da Giuseppe Flavio, San Gerolamo e la Glossa Ordinaria alla Bibbia, essa passò ai
canonisti (Graziano, in primo luogo), ai teologi (Tolomeo da Lucca) ed ai civilisti (Alberico da
Rosate). D. Quaglioni, Civilis sapientia: dottrine giuridiche e dottrine politiche fra medio evo ed età
moderna. Saggi per la storia del pensiero giuridico moderno, Rimini, Maggioli, 1989, p. 27-30. E’
nel suo commento alla legge decernimus, C. de sacrosanctis ecclesiis (C. 1, 2, 16), che Alberico da
Rosate precisava come, nel corso della storia, la tirannia avesse preceduto il buon governo (Prius
tamen fuit tyrannus quam rex. nam Nembrot primis fuit tyrannus et nemo ante eum reperitur).
11. Sull’Impero come «principio di validità» si vedano P. Costa, Iurisdictio. Semantica del potere
politico nella pubblicistica medievale (1100-1433), Milano, Giuffrè, 1969 (ripubblicato nel
2002) e D. Quaglioni, «Empire et monarchie: aspects du débat juridique», in F. Crémoux,
J.-L. Fournel (a cura di), Idées d’Empire en Italie et en Espagne, xive-xviie siècles, Mont-Saint-
Aignan, Publications des universités de Rouen et du Havre, 2010, p. 37-46.
210
Lo stato, il diritto, il territorio
***
12. «[…] e meno quella dello imperatore che è in tanta autorità che dà ragione agli altri», Francesco
Guicciardini, Dialogo del reggimento di Firenze, op. cit.
13. Pedro de Cieza de León, La prima parte de la cronica del grandissimo regno del Perù […] tradotta
pur hora nella nostra lingua italiana per Augustino de Cravaliz, Roma, Valerio e Luigi Dorico,
1555; Francisco López de Gómara, Historia di Mexico, et quando si discoperse la nuova Hispagna,
conquistata per l’illustriss. et valoroso principe don Ferdinando Cortes […] tradotta nel volgare
italiano per Augustino de Cravaliz, Roma, Valerio e Luigi Dorico, 1555; id., La historia generale
delle Indie occidentali, con tutti li discoprimenti, & cose notabili, che in esse sono successe, da che
si acquistorno fino a hora […] tradotta nel volgare italiano per Augustino de Cravaliz, Roma,
Valerio e Luigi Dorico, 1556.
211
rom a in descendr e
era Augustín Cravaliz, che rappresentava gli interessi della corona spagnola
presso la Curia. Cravaliz fece precedere ciascuna delle sue traduzioni da una
lettera dedicatoria, componendo così un elogio in tre tempi della conquista
spagnola, diretto ad un pubblico italiano al quale si trattava di far accettare
l’egemonia di Carlo V e di suo figlio Filippo sulla penisola, per mezzo di una
vasta storia dell’impero ispanico: una «storia imperiale ufficiale 14». Il contesto
è lungi dall’essere irrilevante: il 1555 è l’anno dell’elezione al soglio pontificio
del Papa più vigorosamente anti-spagnolo che abbia conosciuto il XVI secolo,
l’ex inquisitore generale Gian Pietro Carafa, poi Paolo IV (23 maggio); il 1556,
quello in cui egli dichiarò guerra agli Spagnoli del regno di Napoli, innescando
così l’ultimo atto bellico delle Guerre d’Italia 15. Paolo IV fu anche lo stesso
Papa che diede un colpo d’inizio molto forte all’organizzazione della censura
ecclesiastica, puntando ben più lontano che al semplice campo del dogma,
determinato com’era a prender le mosse dalla distruzione delle opere complete
di Machiavelli, Erasmo o Boccaccio.
Cravaliz apriva la lettera dedicatoria della Cronica del Perù, che indirizzava
ad uno dei principali cardinali filo-spagnoli della Curia, Giovanni Michele
Saraceni, con il topico motivo giuridico dei due pilastri dell’imperio che sono
le leggi e le armi – rivisto in «religione e leggi», da un lato, e «armi», dall’altro –,
ma per ribaltarlo nel senso di una chiara esaltazione della conquista militare,
radicalizzando il celebre passaggio del capitolo XII del Principe, al quale faceva
chiaramente eco:
[…] quantunque tra gli huomini più lodati, et famosi, si giudichino
degni di non picciola lode i fondatori delle religioni, et appresso i dat-
tori delle leggi, sono nondimeno oltre a tutti laudatissimi i principi
che preposti a gli esserciti hanno ampliato il regno loro, o i confini
della patria 16.
14. L. Binotti, «Cultural Identity and the Ideologies of Translation in Sixteenth-Century Europe:
Italian Prologues to Spanish Chronicles of the New World», History of European Ideas, 14/6,
1992, p. 769-788.
15. L’ostilità del nuovo Papa nei confronti degli Spagnoli era in parte dovuta ad un rifiuto di
qualsivoglia concessione nei confronti dei protestanti, nel momento in cui Carlo V si era, in
principio, fatto promotore della riconciliazione in occasione del Concilio ed aveva, in seguito,
accettato de facto e de iure la Riforma nel corso della pace di Augusta del 1555.
16. «I grandi et maravigliosi imperii non solamente con la religione et con le leggi (Illustriss. et
Reverendiss. Signore) ma ancora con le armi, hanno ogni hora mostrato al mondo la grandezza
delle estreme lor forze, et sparso di ogni intorno la maraviglia del lor sommo valore, aprendosi
col ferro la strada per le strette foci, et per gli occulti golfi dell’impetuoso mare, per le profonde,
et precipitose valli, et per gli alti, et asprissimi monti, a molti principati, et a molti regni; là
onde, quantunque tra gli huomini più lodati, et famosi, si giudichino degni di non picciola
lode i fondatori delle religioni, et appresso i dattori delle leggi, sono nondimeno oltre a tutti
laudatissimi i principi che preposti a gli esserciti hanno ampliato il regno loro, o i confini della
212
Lo stato, il diritto, il territorio
Se questa messa a latere delle leggi (qui, accoppiate alla religione) a bene-
ficio delle armi ricorda già il progetto del Principe di Machiavelli, le righe che
seguono non lasciano sussistere alcun dubbio in merito alla fonte cui questa
introduzione attinge senza vergogna:
il perché si dee sforzare ogni principe non havere altro oggetto né altro
pensiero, se non gli ordini, et gli essercitii della guerra; percioché la
guerra è sola arte che convien a chi comanda, et è di tanta virtù che
non solo mantiene quei che son nati principi, ma molte volte fa gli
huomini di picciola, et privata fortuna salire ad alti, et honoratissimi
gradi, sì come all’incontro quando non se ne è fatto stima; tutti i più
grandi sono, o ruvinati, o caduti al basso, non si dovria per tanto non
solo mai levare il pensiero dallo essercitio delle armi, ma nella pace non
meno essercitarle che nella guerra 17.
E’ questa una ripresa, pressappoco parola per parola, delle prime righe del
XIV capitolo del Principe 18, che introduce una storia della Spagna ridotta alle
sue conquiste militari, dalle origini sino all’anno 1494. Cravaliz spiega come
proprio nel corso di quell’anno, quando il re Cattolico voleva, in seguito alla
Reconquista, «serrare il tempio di Iano», Dio non glielo permise, destinando
questa «natione […] ad imprese più gloriose, et nuovi acquisti»: così, lo obbligò
ad andare in soccorso dell’Italia, dove il re di Francia Carlo VIII era calato per
conquistare il regno di Napoli. Ora, nello stesso frangente, Dio permise altresì
che cominciasse la conquista del Nuovo Mondo per portarvi la fede, «parte con
l’armi, et parte con le prediche et ammonitioni delle sacre lettere».
Un solo ed unico movimento di conquista armata unisce, così, la
Reconquista, la conquista del Nuovo Mondo e le Guerre d’Italia. Il parallelo e
la simultaneità tra conquista del Nuovo Mondo e vittoria imperiale su delle
armate francesi che non hanno fatto altro che seminare il caos nella penisola
patria», cito qui sulla base della seconda edizione: Pedro de Cieza de León, Cronica del gran
regno del Perù, con la descrittione di tutte le provincie, e costumi, e riti, con le nuove città edificate,
et altre strane et maravigliose notitie. Parte prima. Scritta da Pietro di Cieca di Lione in lingua
spagnuola. Tradotta nella italiana per Agostino di Cravaliz, Venezia, Francesco Lorenzini da
Turino, 1560, n. p.
17. Ibid.
18. «Debbe dunque uno principe non avere altro obietto né altro pensiero né prendere cosa alcuna
per sua arte, fuora della guerra e ordini e disciplina di essa: perché quella è sola arte che si
aspetta a chi comanda, ed è di tanta virtù che non solamente mantiene quelli che sono nati
principi, ma molte volte fa gli uomini di privata fortuna salire a quello grado. E per avverso si
vede che, quando e’ principi hanno pensato più alle delicatezze che alle arme, hanno perso lo
stato loro […] Debbe pertanto mai levare il pensiero da questo esercizio della guerra; e nella
pace vi si debbe più esercitare che nella guerra», Machiavelli, Il Principe, XIV, in id., Opere, I,
a cura di C. Vivanti, Torino, Einaudi, 1997, p. 157.
213
rom a in descendr e
19. Così come hanno liberato dalla dannazione gli abitanti del Nuovo Mondo, gli Spagnoli hanno
liberato dai Francesi gli Italiani; questi ultimi sono, per altro, parte integrante di una Conquista
che cominciò, sottolinea Cravaliz, per opera del «glorioso Christofano Colombo nativo di
Savona [sic]». Il congiungimento degli Italiani alla potenza imperiale e l’esaltazione della vit-
toria spagnola apparivano, in tal modo, come motori della diffusione italiana della letteratura
sul Nuovo Mondo – a partire da ciò, non è soprendente che si verifichi altrettanto bene il
fenomeno, perfettamente speculare, di una letteratura geografica anti-spagnola: il rigetto della
dominazione iberica in Italia venne ampiamente alimentato dalla legenda nera della conquista,
soprattutto nel caso della Historia del Mondo Nuovo di Girolamo Benzoni (1565).
20. Si veda la voce «Machiavel», ad indicem, in Giovanni Botero, De la raison d’État, op. cit.
214
Lo stato, il diritto, il territorio
qui era nato, né perché la repubblica qui era sopravvissuta per un così lungo
spazio di tempo, quanto piuttosto perché Roma si fondava sulla potenza, la
grandezza e la conquista. Un modello considerato buono per la pura e semplice
ragione che il diritto non è più di questo mondo. Il terzo ed ultimo libro delle
Cause della grandezza della città fornisce, sin dalle prime righe, le ragioni per
le quali è importante far questa scelta della «grandezza», ovvero della crescita
territoriale e demografica:
Gli antichi fondatori delle città, considerando che le leggi e la disciplina
civile non si può facilmente conservare dove sia gran moltitudine d’uo-
mini, perché la moltitudine partorisce confusione, limitarono il numero
de’ cittadini, oltre il quale stimavano non si poter mantener l’ordine e la
forma ch’essi desideravano nelle loro città. Tali furono Licurgo, Solone,
Aristotile. Ma i Romani, stimando che la potenza (senza la quale una
città non si può lungamente mantenere) consiste in gran parte nella
moltitudine della gente, fecero ogni cosa per aggrandire e per appopolar
la patria loro […]. Se il mondo si governasse per ragione e se ogn’uno
si contentasse di quello che giustamente gli si appartiene, sarebbe forse
degno d’esser abbracciato il giudizio de gli antichi legislatori; ma l’espe-
rienza, che c’insegna che, per la corruzione della natura umana, la forza
prevale alla ragione e le arme alle leggi, c’insegna ancora che il parer de’
Romani si deve preferire a quel de’ Greci 21.
L’affermazione testimonia della logica tutta machiavelliana entro la quale si
muove l’autore: l’esperienza ci mostra come gli uomini facciano passare la forza
prima del diritto; non si danno, quindi, né sicurezza né conservazione possibili
senza potenza. All’epoca di Machiavelli, l’opposizione del modello romano
a quello delle città greche era così lontano dal configurarsi come evidente
– giacché andava contro la posizione comune agli umanisti che amavano leg-
gere le città italiane nello specchio della Grecia antica – che essa ebbe bisogno,
per esser sostenuta, di un’opera così densa e singolare come i Discorsi sopra la
prima deca di Tito Livio; ormai, questa stessa opposizione è presentata come
una verità d’esperienza, pressappoco come un’evidenza. Evidenza dell’indeboli-
mento del diritto, di un diritto che, pure, era inseparabile dalla forza di Roma.
Nonostante l’estensione del diritto e quella dei territori della romanità fossero
una volta pensate di concerto 22, è oramai la debolezza del diritto che giustifica
21. Id., Delle cause della grandezza delle città, III, 1, ed. critica e commento a cura di R. Descendre,
Roma, Viella, 2016, p. 118.
22. Si veda, fra diversi altri possibili, Leon Battista Alberti, I libri della famiglia, a cura di
R. Romano e A. Tenenti, nuova edizione a cura di F. Furlan, Torino, Einaudi, 1994, p. 187:
«Avea certo in sé l’antico nostro imperio dignità e maiestà maravigliosa, ove a tutte le genti
amministrava intera iustizia e summa equità […]».
215
rom a in descendr e
***
La «nascita dello Stato moderno», così come la chiamano comunemente gli sto-
rici, è stata pensata da coloro che ne furono i contemporanei sullo sfondo di una
crisi particolarmente acuta che coinvolgeva il rapporto tradizionale tra il diritto
ed il potere. Tale crisi era inseparabile dalle nuove esigenze di dominazione
territoriale che si esprimevano a tutti i livelli: dalle città italiane che s’impone-
vano sui propri dominii agli imperi iberici di dimensione mondiale, passando
per le monarchie territoriali europee, il lessico della dominazione, fosse essa di
tipo statuale o imperiale, era fondamentalmente omogeneo 23. Una larga parte
di questo lessico dello «stato» è stata trasmessa alla modernità dai testimoni
italiani di un processo che, dopo l’insignorimento e la territorializzazione dei
comuni, si è risolto in una perdita più o meno completa dell’autonomia politica
di territori diventati preda delle potenze oltramontane. In questo contesto, gli
strumenti intellettuali forgiati da Machiavelli, che ha fatto della Roma antica
un nuovo modello di potenza, sono stati largamente ripresi, permettendo così
di pensare le diverse forme della dominazione territoriale moderna.
23. R. Descendre, «Stato, imperio, dominio. Sur l’unité des notions d’État et d’Empire au
xvie siècle», Astérion, 10, 2012 [URL: http://asterion.revues.org/2243].
216
iii
emmanuelle vagnon
CNRS/université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, LAMOP (UMR 8589)
Introduction
219
emm a nuelle vagnon
de pouvoir ou des faits religieux : l’espace construit par les hommes reflète ainsi
les rapports politiques, sociaux, idéologiques établis entre les communautés 2.
L’interaction avec le milieu maritime attire également l’attention.
L’abondance des analyses actuelles sur l’espace méditerranéen antique et
médiéval reflète la complexité du sujet et l’intérêt qu’il suscite aujourd’hui.
La Méditerranée est ainsi envisagée, dans une stimulante perspective néo-
braudélienne, comme un cadre géographique écologiquement cohérent, déter-
minant les activités humaines au cours de l’histoire 3. Elle peut aussi être consi-
dérée comme un ensemble de réseaux économiques et sociaux, dans lesquels
interviennent essentiellement les relations entre les hommes, les déplacements,
les échanges et les conflits 4. La Méditerranée médiévale est ainsi présentée
comme le cadre d’une appropriation de l’espace maritime. Ce vocabulaire est
emprunté à celui de l’anthropologie sociale et de la géographie actuelles, qui
définissent le « territoire » de manière très large, comme « un espace approprié »,
dans la mesure où cet espace fait l’objet d’une appropriation humaine, pratique
(usage ou exploitation), juridique (domination, possession), ou même seule-
ment symbolique (représentation, nomination) 5. Cette définition pose à vrai
dire un problème pour l’espace maritime, dans la mesure où, par définition, il
ne relève pas d’une « terre », il n’est pas fixé par des frontières ni balisé par des
repères monumentaux. La question de la « propriété » ou de l’« appropriation »
de la mer relève de débats juridiques anciens et toujours d’actualité 6.
Cette épistémologie convient-elle à la perception médiévale de l’espace mari-
time telle qu’elle apparaît sur les documents cartographiques, en particulier les
220
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
7. C’est notamment le point de vue de P. Gautier Dalché (dir.), La Terre. Connaissance, représen-
tations, mesure au Moyen Âge, Turnhout, Brepols (L’Atelier du médiéviste, 13), 2013, volume
collectif qui s’appuie sur le commentaire de documents médiévaux.
8. P. Gautier Dalché nous met en garde contre les éléments de langage académique trop souvent
plaqués sans réflexion sur les documents géographiques médiévaux : P. Gautier Dalché, L’espace
géographique au Moyen Âge, Florence, Sismel, 2013, p. 35.
9. R. Descendre, « Quand la mer est territoire. Paolo Sarpi et le Dominio del mare Adriatico »,
Studi Veneziani, 53, 2007, p. 55-74. Je remercie R. Descendre pour cet article et les références
qui l’accompagnent.
10. La bibliographie sur les cartes marines s’est renouvelée ces dernières années : P. Gautier Dalché,
« Cartes marines, représentations du littoral et perception de l’espace au Moyen Âge. Un état
de la question », dans J.-M. Martin (éd.), Castrum 7. Zones côtières littorales dans le monde médi-
terranéen au Moyen Âge : défense, peuplement, mise en valeur, Rome/Madrid, École française de
Rome/Casa de Velázquez, 2001, p. 9-33 ; R. Pujades i Bataller, Les cartes portolanes : la represen-
tació medieval d’una mar solcada, Barcelone, Institut Cartogràfic de Catalunya, 2007 ; P. Billion,
Graphische Zeichen auf mittelalterlichen Portolankarten – Ursprünge, Produktion und Rezeption
bis 1440, Marbourg, Tectum Verlag, 2011 ; C. Hofmann, H. Richard, E. Vagnon (dir.), L’âge d’or
221
emm a nuelle vagnon
des cartes marines. Quand l’Europe découvrait le monde, catalogue d’exposition (Bibliothèque
nationale de France, 23 octobre 2012-27 janvier 2013), Paris, Bibliothèque nationale de France/
Seuil, 2012 ; E. Vagnon, C. Hofmann (dir.), Cartes & Géomatique. Revue du CFC, 216 : Cartes
marines : d’une technique à une culture, xiiie-xviiie siècle. Actes du colloque du 2 décembre 2012, 2013.
Le recensement et la synthèse bibliographique sur les cartes marines anciennes par T. Campbell
sont poursuivis et mis à jour en ligne : T. Campbell, « Portolan Charts from the Late Thirteenth
Century to 1500 », dans J. B. Harley, D. Woodward (dir.), History of Cartography, op. cit., vol. 1,
p. 441-444 ; voir http://www.maphistory.info/portolanextra.html.
11. C’est le point de vue classique de M. Mollat, M. de La Roncière, Les Portulans, Paris, Nathan,
1984 ; de même Y. K. Fall, L’Afrique à la naissance de la cartographie moderne, Paris, Karthala,
1982 (ouvrage parsemé d’erreurs et d’approximations).
222
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
223
emm a nuelle vagnon
autae, par o pposition aux fanti, et novelli, les novices) doivent savoir maîtri-
n
ser la lecture d’une carte de navigation.
Les marins sont des hommes qui doivent diriger notre navigation et
ils sont dits « marins de la mer », en latin nautae a navigando. Ceux-ci
doivent savoir la carte de navigation, la boussole et la raison des vents
et l’arbitrage, bref l’ensemble de notre art […] 15.
La ragion de li venti désigne aussi bien le régime des vents dans la voilure du
navire que l’ordre et la répartition (du latin ratio) des directions de la rose des
vents, avec laquelle on détermine un cap ; « l’arbitrage » fait référence à la capacité
de jugement du marin, qui doit prendre en compte le sens du vent, les courants
et la dérive du navire pour choisir la manœuvre appropriée. La carte faisait donc
partie de l’apprentissage pratique et théorique à un certain niveau de compétence
et d’autorité, nécessitant une vue d’ensemble et une formation intellectuelle
sanctionnée par un examen de passage : le jeune est placé entre deux marins et
doit répondre à des questions sur des situations pouvant survenir (passage étroit
entre deux îles, vents qui changent de direction), en s’aidant de la carte.
Le débat entre les historiens porte plutôt sur la manière d’utiliser les cartes
marines comme aide à la navigation alors que leur échelle plutôt petite ne per-
met pas à première vue de montrer les détails utiles de la côte. Patrick Gautier
Dalché a d’abord souligné, à propos de la traversée de saint Louis en 1270, qu’il
ne fallait pas imaginer pour cette époque une méthode proche de la navigation
moderne où l’on fait le point en s’aidant de la carte : son rôle était certainement
bien plus modeste et occasionnel, après une tempête en l’occurrence 16. Un
nouveau document, édité et commenté par Ramon Pujades i Bataller, présente
une situation similaire, au début du xve siècle. Là encore, la carte est montrée
après la tempête, et sert d’image de référence à cause de la perte des repères
visuels traditionnels ; mais elle est aussi suffisamment précise pour choisir entre
plusieurs options : les navigateurs aragonais, égarés à proximité de la Sicile
en 1405, cherchent à déterminer la dérive du navire et à reconnaître les îlots,
« montrant leurs doutes par les cartes et les compas 17 ». Selon une théorie qui
me paraît tout à fait convaincante, le dessin mnémotechnique des îles et des
estuaires, aux contours géométriques et parés de couleurs vives, était proba-
blement une aide au repérage des manœuvres pour entrer dans des détroits
15. Benedetto Cotrugli, De navigatione. Yale University, Beinecke Rare Book and Manuscript Library,
Medieval and Renaissance Manuscript, MS 557, éd. par D. Salopek, Zagreb, Ex Libris, 2005 ; le
passage est cité dans R. Pujades i Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit., p. 446. Transcription
en ligne de la totalité du texte par P. Falchetta : http://geoweb.venezia.sbn.it/cms/images/
stories/Testi_HSL/Cotrugliy.pdf.
16. P. Gautier Dalché, Carte marine et portulan…, op. cit., p. 26-27.
17. R. Pujades i Bataller, « Les cartes de navigation, premières cartes… », art. cité, p. 66-67.
224
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
Un symbole culturel
Après l’appropriation intellectuelle et l’appropriation fonctionnelle de l’es-
pace maritime, la troisième forme est une appropriation culturelle et sociale,
dont les cartes marines étaient le symbole et le vecteur. Ces cartes magnifiques,
soigneusement enluminées, acquises par des armateurs et des patrons de navires,
18. T. Campbell, « Why the Artificial Shapes for the Smaller Islands on the Portolan Charts (1300-
1600) Help to Clarify their Navigational Use », dans E. Vagnon, C. Hofmann (dir.), Cartes &
Géomatique. Revue du CFC, 216 : Cartes marines…, op. cit., p. 47-54 ; je remercie également
R. Pujades i Bataller pour les nouveaux exemples apportés à cette démonstration au cours du
séminaire du 9 avril 2014 (IRBIMMA, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne).
19. J.-M. Pardessus, Collection de lois maritimes antérieures au xviiie siècle, Paris, Imprimerie royale,
1828, chap. 8 : « Coutumes de la mer connues sous le nom de Rooles ou Jugemens d’Oléron »,
p. 283-354. Les articles 25, 39 et 40 concernent la responsabilité du pilote ; Consulat de la mer,
ou Pandectes du droit commercial et maritime, éd. par P.-B. Boucher, traduit du catalan en
français d’après l’édition originale de Barcelone de l’an 1494, Paris, Arthus-Bertrand, 1808, t. 2,
p. 429-431, en particulier le § 809.
20. Les Rôles d’Oléron, dans l’édition de J.-M. Pardessus, Collection de lois maritimes…, op. cit., pré-
cisent que le châtiment est justifié si le pilote provoque volontairement le naufrage pour livrer
le navire et sa cargaison à des pirates complices ; le Consulat ne mentionne que la négligence ou
la tromperie. P.-B. Boucher, à propos du même passage dans le Consulat, souligne le caractère
exagéré des peines (tête cassée du pilote § 809, vigie jetée à la mer § 817) ; G. Guyon s’accorde
avec l’idée que le châtiment est « tout à fait métaphorique dans sa forme et son exemplarité » ;
il juge pourtant vraisemblables les peines atroces énoncées pour ceux qui attaquent et volent
les naufragés : G. Guyon, « Les coutumes pénales des Rôles d’Oléron : un droit pénal maritime
original ? », dans Études à la mémoire de Christian Lapoyade-Deschamps, Pessac, Presses univer-
sitaires de Bordeaux, 2003, p. 327-343.
225
emm a nuelle vagnon
signalaient la fierté des cités maritimes et des gens de mer, attestaient de leurs
compétences et de l’étendue de leurs connaissances. Ce qu’on appelle encore les
« écoles » de cartographie manifestent par le style commun de leurs cartes et le
soin apporté à leur décoration le lien entre leur cité et la mer. Cet aspect que nous
dirions aujourd’hui publicitaire et identitaire se renforce à l’époque moderne, en
particulier pour Venise et Gênes, mais aussi à Lisbonne ou à Dieppe 21.
Certains documents, parmi lesquels beaucoup n’ont pas encore été étudiés
dans cette perspective, montrent également que des armateurs ou des mar-
chands possédaient et commandaient des cartes, de manière à se représenter les
parcours des navires chargés de denrées, et l’ampleur de leurs affaires 22. L’usage
de la carte de navigation comme instrument de commerce n’est donc pas
négligeable, et elle manifeste une forme d’appropriation de l’espace maritime
par des réseaux commerciaux très actifs dans les cités marchandes italiennes
et catalanes à la fin du Moyen Âge 23. Par ailleurs, la valeur des cartes marines
comme outils de référence géographique à terre, et sans doute comme matériel
pédagogique, est un champ qu’il reste à explorer 24.
21. C. Astengo, « Les cartographes de la Méditerranée aux xvie et xviie siècles », et S. Toulouse, « Les
hydrographes normands (xvie et xviie siècles) », dans C. Hofmann, H. Richard, E. Vagnon
(dir.), L’âge d’or des cartes marines…, op. cit., respectivement p. 72-85 et 136-147.
22. De nouveaux documents permettraient d’approfondir cet aspect, par exemple, dans les archives
de la compagnie du marchand de Prato Francesco Datini ; par exemple la lettre de Luca del
Biondo demandant une carte de navigation à l’agent de la compagnie Datini à Majorque.
R. Pujades i Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit., no 101, p. 435. I. Houssaye, « Entre Majorque
et l’Afrique. Configuration de l’espace et réseaux juifs d’après les sources commerciales ita-
liennes (fin xive-début xve siècle) », Revue des études juives, 172/3-4, 2013, p. 337-372 : ici p. 370.
Notons que, même si les cartographes de Majorque appartiennent à la communauté juive, ce
ne sont pas spécialement les réseaux commerçants juifs qui sont représentés. La plupart des
commanditaires sont des chrétiens. R. Pujades i Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit., p. 452.
23. Benedetto Cotrugli (1416-1469), auteur de L’art de naviguer cité ci-dessus, truffé de références
littéraires, a signé également un manuel de commerce qui s’apparente davantage à un livre de
morale humaniste destiné à l’élite marchande qu’à un traité technique : Benedetto Cotrugli, Il
libro dell’arte di mercatura, éd. par U. Tucci, Venise, Arsenale Editrice, 1990.
24. Quelques remarques en ce sens par P. Gautier Dalché, « Une géographie provenant du milieu
des marchands toscans (début du xive siècle) », dans id., L’espace géographique au Moyen Âge,
op. cit., p. 171-179.
226
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
25. B. Degenhart, A. Schmitt, « Marino Sanudo und Paolino Veneto », Römisches Jahrbuch für
Kunstgeschichte, 14, 1973, p. 1-137.
26. BNF, ms. esp. 30, Atlas catalan.
27. El Libro del conoscimiento de todos los reinos (The Book of Knowledge of All Kingdoms), éd. par
N. F. Marino, Tempe, Arizona Center for Medieval and Renaissance Studies, 1999 ; Libro del
conosçimiento de todos los rregnos et tierras et señorios que son por el mundo, et de las señales et armas
que han. Edición facsimilar del manuscrito Z, Múnich, Bayerische Staatbibliothek, cod. hisp. 150,
éd. par M. J. Lacarra, M. d. C. Lacarra Ducay et A. Montaner, Saragosse, Institución Fernando
el Católico (CSIC), 1999.
28. Je rejoins sur ce point l’opinion de A. Savorelli (dans ce même volume) et je le remercie pour
les discussions à ce sujet. L’iconographie héraldique des cartes marines est une tentative pour
formaliser visuellement, même de manière imprécise, de grands ensembles géopolitiques.
227
emm a nuelle vagnon
et la pratique de ces cartes, destinées aux initiés, une grande part d’impli-
cite préside à la lecture et à la compréhension des vignettes héraldiques qui
parsèment les plus beaux exemplaires. L’emplacement des pavillons n’est pas
toujours très clair, et l’aire de contrôle de chaque puissance n’est pas définie.
La réalité des pouvoirs exercés reste floue : flotte militaire ? contrôle juridique ?
monopole commercial ? L’espace maritime lui-même est neutre : ni coloré, ni
délimité, entre les zones littorales. De même, on cherche en vain sur les cartes
médiévales des signes ou des couleurs établissant la juridiction de telle cité, tel
État, sur une portion de littoral 29. Nous ne voulons pas ici suggérer que ces
cartes seraient lacunaires, ou moins exactes par rapport à des exemplaires plus
récents ; il faut comprendre que du point de vue des utilisateurs de ces cartes au
Moyen Âge, ces informations n’avaient pas besoin d’être explicitées, soit parce
qu’elles n’étaient pas jugées pertinentes pour l’usage que l’on avait de la carte,
soit parce qu’elles étaient connues par ailleurs. Une autre explication tient à
la nature du pouvoir, tel qu’il est conçu à la fin du Moyen Âge : pouvoir sur
les hommes plus que sur des lieux, il ne se laisse pas aisément cartographier.
Les portulans textuels, qui pourraient dans une certaine mesure être consi-
dérés comme des compléments des cartes, n’apportent pas plus d’informations
sur la géographie politique des espaces maritimes. Le Compasso da navigare,
par exemple, énumère les toponymes côtiers sans interruption, traitant l’espace
géographique de manière politiquement neutre, contrairement aux récits de
voyages ou aux traités de commerce, où la prise en compte des puissances poli-
tiques et des tracas douaniers est un aspect important des négociations 30. La
plupart du temps, la portion de littoral décrite n’est pas attribuée à une région
précise, encore moins à un État. Cette neutralité assurait-elle la postérité du
document au-delà des vicissitudes historiques ?
Les cartes marines médiévales, nous l’avons vu, fournissent quelques élé-
ments à partir des pavillons héraldiques, mais en revanche ne donnent jamais
le nom des différentes parties de la mer Méditerranée. On ne trouvera pas par
exemple la mention du « golfe de Venise ». Contrairement aux dessinateurs
des cartes de Ptolémée, copiées au xve siècle pour les éditions latines de la
Géographie, qui détaillent les noms antiques des golfes de la mer Méditerranée,
29. Ce n’est que plus tard, sur des cartes anglaises de la fin du xviie siècle (et encore sans légende
explicative), qu’on peut déceler une signification territoriale de couleurs alternées le long des
littoraux ; par exemple les cartes de John Thornton : C. Hofmann, H. Richard, E. Vagnon
(dir.), L’âge d’or des cartes marines…, op. cit., p. 179.
30. Une exception ancienne dans le De viis maris (xiie siècle), qui est à mi-chemin entre le portulan
et la description vivante d’un itinéraire de croisade. L’auteur signale les terres chrétiennes et
musulmanes de part et d’autre du détroit de Gibraltar. P. Gautier Dalché, Du Yorkshire à l’Inde.
Une « géographie » urbaine et maritime de la fin du xiie siècle (Roger de Howden ?), Genève, Droz,
2005, § 6, p. 195.
228
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
et parfois les actualisent, les cartographes des cartes portulans, même les plus
ornementales, renforcent l’illusion d’une neutralité de l’espace maritime, par
opposition aux terres soumises explicitement à un souverain ou une puissance
territoriale par la présence du blason et par un nom de région.
La réalité des territoires maritimes
Cette représentation contraste avec la réalité de pouvoirs maritimes attestés
par la toponymie dans les sources littéraires et les archives : la mer Adriatique
est appelée fréquemment « le golfe de Venise », la Manche est la « mer des
Anglais 31 ». Il existait d’importants moyens de contrôle de ces espaces dès le
Moyen Âge : droits de douane perçus lors du passage entre deux îles, à l’arrivée
dans un port, monopole de circulation des convois de coques ou de galées, acti-
vités de piraterie organisée ou au contraire de police des mers 32. Les premiers
traités de droit maritime sont formalisés très tôt : nous avons cité plus haut les
Rôles d’Oléron et le Consulat de mer qui constituent les bases de différents textes
de droit maritime en Europe du Nord et en Méditerranée jusqu’à l’époque
contemporaine. Néanmoins, il est à noter que ces règles générales s’appliquent
aux rivages, aux activités maritimes et aux gens de mer, mais ne définissent pas
de zones maritimes rattachées à des territoires.
Sur la côte atlantique, la création de la charge d’amiral de France, sous le
règne de Louis IX, au début du xiiie siècle, témoigne de l’extension du pouvoir
symbolique du roi sur les espaces maritimes océaniques ; au niveau local, la
notion d’eaux territoriales et de frontière maritime apparaît comme en fili-
grane 33. Mais c’est à Venise que s’affirme le plus nettement le dominium sur
une mer, l’Adriatique, revendiquée comme « territoire maritime », et substituée
à la seigneurie classique sur des terres 34. Une historiographie abondante et un
appareil juridique important justifient, jusqu’au début du xviie siècle, cette
31. M. Russon, Les côtes guerrières. Mer, guerre et pouvoirs au Moyen Âge. France-Façade océanique
(xiiie-xve siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004, p. 22.
32. H. Lecohérel, « La mer dans l’équilibre des pouvoirs entre Capétiens et Plantagenêts », dans
C. Buchet, J. Meyer, J.-P. Poussou (dir.), La puissance maritime, Actes du colloque international
tenu à l’Institut catholique de Paris (13-15 décembre 2000), Paris, Presses de l’université Paris-
Sorbonne, 2004, p. 145.
33. J.-C. Cassard, « Frontières de mer et marine ducale, l’exemple breton, fin ve-début xvie siècle »,
dans J.-P. Bois (dir.), Défense des côtes et cartographie historique, Actes du CXXIVe Congrès natio-
nal des sociétés historiques et scientifiques (Nantes, 19-26 avril 1999), Paris, Éd. du Comité
des travaux historiques et scientifiques, 2002, p. 33-51. J.-L. Sarrazin, « L’état et la seigneurie :
le contrôle du littoral poitevin à la fin du Moyen Âge », dans G. Le Bouëdec, F. Chappé (dir.),
Pouvoirs et littoraux du xve au xxe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2000, p. 29-40.
34. R. Descendre, « Quand la mer est territoire… », art. cité, p. 61, cite Paolo Sarpi (1612) : Il mar
Adriatico e il territorio di Venezia.
229
emm a nuelle vagnon
35. B. Doumerc, « L’Adriatique, une proie dans les griffes du lion vénitien (xie-xvie siècle) », dans A. Nef
(dir.), Les territoires de la Méditerranée…, op. cit., p. 15-34, avec une abondante bibliographie.
36. Ainsi sur les atlas vénitiens de Grazioso Benincasa, voir T. Campbell, http://www.maphistory.
info/portolan.html, et la présentation des cartes portulans sur Gallica, http://expositions.bnf.
fr/marine/gallica/index.htm.
37. Par exemple, la carte de Petrus Roselli, 1462, BNF, département Cartes et Plans, GE C-5090
(RES) (permalien sur Gallica : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53064888c).
38. Palma de Majorque, Arxiu del Regne de Mallorca, A. J. 474, fol. 129r-v. Édité par R. Pujades i
Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit., p. 436-437. Traduit et commenté par E. Vagnon, « La
représentation cartographique de l’espace maritime », dans P. Gautier Dalché (dir.), La Terre.
Connaissance…, op. cit., p. 495-499.
39. Nous avons utilisé Hugo Grotius, Mare liberum. De la liberté des mers, 1609 (traduction de
A. Guichon de Grandpont, Paris, Imprimerie royale, 1845), réédité par l’université de Caen
(Caen, Centre de philosophie politique et juridique, 1990) ; P. Adam, « Méditerranée, mer
230
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
231
emm a nuelle vagnon
42. R. Descendre souligne que le plaidoyer de Grotius n’est donc pas en contradiction, comme on
le croit souvent, avec les arguments de Sarpi, qui s’appliquent à la mer Adriatique limitée par
des terres, et dont l’appropriation repose sur la coutume, l’histoire et la défense effective de cet
espace (R. Descendre, « Quand la mer est territoire… », art. cité, p. 56-57). Pour un exposé des
étapes de cette domination, lire l’excellent exposé de B. Doumerc, « L’Adriatique, une proie
dans les griffes… », art. cité, notamment p. 19-28.
43. Hugo Grotius, Mare liberum…, op. cit., p. 683-687 ; Grotius distingue d’ailleurs clairement la
protection et juridiction sur la mer et ses usagers, de la propriété, p. 687.
44. Il récuse en cela l’argument du droit romain qui permet la prise de possession d’une chose
n’appartenant à personne, res nullius. L’argument est a contrario valable pour Venise, qui
prend possession d’une lagune déserte lors de sa fondation, selon Paolo Sarpi. B. Doumerc,
« L’Adriatique, une proie dans les griffes… », art. cité, p. 17-18.
232
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
Le rôle de la cartographie
Par ailleurs, la critique de l’argument de la donation pontificale, c’est-à-
dire du traité de Tordesillas de 1494, par Grotius, éclaire sous un jour par-
ticulier les usages de la cartographie moderne comme instrument de propa-
gande et de légitimation de l’appropriation des espaces maritimes. En effet,
le plaidoyer du juriste hollandais revient sur l’abus de pouvoir que représenta
autrefois le tracé d’une frontière, partageant le monde entier entre l’Espagne
et le Portugal. Ce tracé implique une représentation du monde, proposée par
les « géomètres » et les « astronomes » – on pourrait ajouter sans contresens, il
me semble, les cartographes.
S’en faut-il à tel point que, tandis qu’ils se partagent le monde au préju-
dice des autres peuples, ils ne puissent invoquer de limites posées, soit par
la nature, soit de main d’homme, mais se prévalent seulement de lignes
imaginaires dans l’espace ? En vérité, si de telles déterminations suffisent
pour déterminer la possession, autant dire que les géomètres nous ont
ravi la terre, que les astronomes nous ont dérobé l’espace des cieux 47 !
233
emm a nuelle vagnon
L’auteur fait référence ici bien sûr au méridien pris comme ligne de démar-
cation entre les espaces sous domination espagnole et l’Empire portugais. Si
ce méridien est bien fixé sur des critères astronomiques, on le voit souvent
dessiné, et donc matérialisé, « territorialisé », si j’ose dire, sur les cartes marines
espagnoles et portugaises du xvie siècle ; le message politique est renforcé par
la peinture de pavillons aux armes de l’Espagne et du Portugal sur les terres de
l’Amérique du Sud et de l’Asie 48. Il est clair que Grotius dénie à ce type de carte
tout caractère légitimant : la carte n’est qu’un instrument que l’on modifie à
son gré, et le droit naturel des peuples ne peut être soumis aux « astronomes 49 ».
De plus, la métaphore du tracé, de la route ou de la limite imprimés sur la
carte, et non à la surface du territoire, est filée dans la suite de la page :
Mais personne n’ignore qu’un navire qui traverse la mer n’y prend pas
plus de droit qu’il n’y laisse de trace 50.
Cette belle formule dénie aux explorations maritimes des Portugais la
valeur d’occupation, et donc d’appropriation, d’un territoire. La démonstra-
tion est renforcée par des références savantes classiques, très universitaires,
aux histoires antiques d’une découverte maritime des Indes par Alexandre
le Grand, par des habitants de Cadix au temps d’Auguste, ou encore par les
Carthaginois 51. L’argument cartographique, cette fois clairement ptoléméen,
est retourné contre les Portugais. Comment peuvent-ils prétendre avoir décou-
vert l’océan Indien puisque celui-ci est déjà représenté sur les cartes de la
Géographie de Ptolémée ?
Les gestes de Trajan et les tables de Ptolémée font assez voir que, du
temps de la grandeur de Rome, on faisait des voyages du golfe Arabique
aux Indes, aux îles de l’océan Indien et jusqu’au Chersonèse d’Or,
considéré par la plupart comme le Japon […]. Ces anciens exemples
234
Les cartes marines, xiv e -x vii e siècle
prouvent assez que les Portugais n’ont pas été les premiers à parcourir
cet Océan, mais qu’il était déjà connu quand ce peuple y a pénétré 52.
La conclusion de Grotius est sans ambiguïté : l’appropriation de l’espace
maritime, y compris symbolique, par un tracé sur un planisphère, est une
usurpation, illégitime au regard du droit naturel.
Conclusion
Cette brève analyse des relations entre pouvoir et espace d’après la cartographie
marine médiévale et moderne nous amène à la conclusion que ces cartes, éta-
blies d’abord par et pour les navigateurs, ne représentent pas explicitement, au
Moyen Âge, les contours des puissances maritimes. Elles sont d’abord le signe
d’une appropriation intellectuelle et culturelle de l’espace maritime, selon des
conventions qui sont en rapport étroit avec leur fonction nautique initiale ;
elles ont pu également jouer le rôle d’affirmation d’une domination politique
et économique sur les mers, en particulier dans le cas des cartes ornementales.
Cet aspect de propagande s’est accentué au xvie siècle, en particulier dans
la production des planisphères ibériques, figurant le partage du monde entre
Espagnols et Portugais. Mais cette appropriation reste en grande partie sym-
bolique : affirmée par les cartes, mais récusée dans les faits, par le recul des
colonies portugaises en Orient, et dans le droit, par le succès du plaidoyer de
Grotius pour une « mer libre ».
Non sans paradoxe, les Hollandais eux-mêmes, en cultivant la liberté du
commerce au nom de la liberté dite naturelle des espaces maritimes, finissent
aussi par affirmer leur suprématie par leurs cartes, mais plus subtilement que
leurs prédécesseurs. Aux cartes portugaises, espagnoles et normandes, lourde-
ment chargées d’ornements, de blasons et de légendes, succède la production
de cartes hollandaises toute en sobriété protestante, sillonnées de lignes et par-
semées de toponymes, mais sans aucune indication explicitement politique…
si ce n’est la langue utilisée, le néerlandais, et l’ampleur d’une production
manuscrite et imprimée qui supplante rapidement les autres écoles cartogra-
phiques. Finalement c’est aussi par les cartes que les navigateurs hollandais
marquent symboliquement une domination maritime qui ne s’arrête pas aux
frontières d’un territoire.
235
Atlanti simbolici dello spazio politico
I portolani e il Libro del conocimiento
de todos los reinos (secolo XIV)
alessandro savorelli
Scuola Normale Superiore (Pisa, Italia)
237
a lessa ndro savor elli
238
Atlanti simbolici dello spazio politico
e cioè i più antichi tra quelli decorati con bandiere – dei circa trenta superstiti,
italiani e catalani – tutti realizzati nell’arco di un sessantennio, che servirono
da prototipo per gran parte della produzione posteriore. Si tratta, fra gli altri,
dei portolani Vesconte (1321, 1327), Dalorto/Dulcert (1325 ca./1339), Pizzigani
(1367), Soler (1380) e del cosiddetto Atlante catalano (1375), destinato a Carlo V
di Francia (dunque ad una committenza alta), il primo esteso a tutta l’Asia e
non solo al Mediterraneo 9.
Ad essi va aggiunto un testo assai singolare, come il Libro del conocimiento
de todos los reinos (Libro del conosçimiento de todos los rregnos et tierras e señoríos
que son por el mundo, et de las señales et armas que han), compilato qualche
decennio dopo la metà del secolo e ritenuto a lungo, non diversamente dai
Viaggi di John Mandeville, letteratura d’evasione. In realtà, come ha scritto
Patrick Gautier Dalché, il Libro del conocimiento s’emploie à représenter par la
fiction du voyage, l’unification du monde par le commerce, corrispondendo aux
goûts culturels du milieu des marchands 10.
9. Perrino Vesconte (Roma, Biblioteca Vaticana, ms. Pal. Lat. 1362A; Firenze, Biblioteca
Laurenziana, Med. Palat. 248); Angelino Dalorto (Collezione Corsini, Firenze); Angelino
Dulcert (Parigi, Bibliothèque nationale de France, GE B-696 [RES]); Domenico e Francesco
Pizzigani (Parma, Biblioteca Palatina, ms. Parm. 1612); Atlante catalano (attr. a Abraham
Crescas; Parigi, Bibliothèque nationale de France, ms. esp. 30); Guillem Soler (Parigi,
Bibliothèque nationale de France, GE B-1131 [RES]). Sulle discussioni relative all’identifi-
cazione e alla nazionalità di Dalorto/Dulcert, sulla storia della tradizione manoscritta e altri
aspetti filologici, v. ora G. Caraci, Segni e colori degli spazi medievali. Italiani e catalani nella
primitiva cartografia nautica medievale, a cura di I. Luzzana Caraci, Reggio Emilia, Diabasis,
1993, e R. Pujades i Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit., p. 254-256.
10. P. Gautier Dalché, L’espace géographique au Moyen Âge, op. cit., p. 377-378. Il Libro del
conosçimiento fu edito la prima volta da M. Jimenez de la Espada (Madrid, Fortanet, 1877)
e tradotto in inglese da C. Markham (Londra, Hakluyt Society, 1912). Si tiene conto qui
delle due edizioni più recenti: El Libro del conoscimiento de todos los reinos (The Book of
Knowledge of All Kingdoms), a cura di N. F. Marino, Tempe, Arizona Center for Medieval and
Renaissance Studies, 1999, p. XLV (d’ora in poi: Libro-ed. Marino), e il Libro del conosçimiento
de todos los rregnos et tierras et señorios que son por el mundo, et de las señales et armas que han.
Edición facsimilar del manuscrito Z, Múnich, Bayerische Staatbibliothek, cod. hisp. 150, a cura
di M. J. Lacarra, M. d. C. Lacarra Ducay e A. Montaner, Zaragoza, Institución Fernando
el Católico (CSIC), 1999 (d’ora innanzi: Libro-Ms. Z); questa edizione, assai ben curata,
è dotata di un apparato filologico molto ampio e di una buona bibliografia (p. 257-267);
contiene inoltre il facsimile dell’Atlante catalano del 1375 e le tavole con la raccolta completa
delle bandiere contenute nei vari mss. dell’opera. Una traduzione italiana del Libro è apparsa
come Il libro della conoscenza di tutti i regni paesi e signorie che esistono nel mondo e delle ban-
diere e degli stemmi di ciascun paese e signoria come dei re e signori che li governano, a cura di
C. Astengo, Genova, Erga, 2000. Quanto ai Viaggi di Mandeville, è da condividere il giudizio
di T. Kohanski che invita a considerarli una encyclopedia of geography, utile per le informazioni
che è in grado di trasmettere (The Book of John Mandeville. An Edition of the Pynson Text, with
Commentary on the Defective Version, Tempe, Arizona Center for Medieval and Renaissance
Studies, 2001, p. IX-X).
239
a lessa ndro savor elli
11. Il lavoro più aggiornato sui portolani è R. Pujades i Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit.,
come riconosce T. Campbell nella sua prefazione (ibid., p. 15-17), che contiene fra l’altro un
eccellente apparato di illustrazioni e un censimento di carte, portolani e atlanti anteriori al 1470
(ibid., p. 60-70): tra le sue tesi principali, sulla base di un’ampia documentazione d’archivio,
è la smentita del presunto carattere «non pratico» dei portolani (cfr. ibid., p. 16): tesi tuttavia
in parte contestata, con buone argomentazioni, da P. Gautier Dalché, «Les cartes marines:
origines, caractères, usages. À propos de deux ouvrages récents», Geographia antiqua, 20-21,
2011-2012, p. 215-227, che sottolinea la preminenza dell’aspetto culturale su quello tecnico-
pratico. Resta un classico comunque il lavoro di T. Campbell, «Portolan Charts from the Late
Thirteenth Century…», op. cit. (sul sito web http://www.maphistory.info/portolanref.html
si possono consultare studi e aggiornamenti bibliografici a integrazione della bibliografia ivi
contenuta), cui si devono aggiungere, tra l’ampia letteratura in argomento, almeno: M. de La
Roncière, M. Mollat Du Jourdin, I portolani. Carte nautiche dal 13. al 17. secolo, presentazione
di O. Baldacci, Milano, Bramante arte, 1992; S. Pittaluga (a cura di), Relazioni di viaggio e
conoscenza del mondo…, op. cit.; si veda inoltre l’importante rassegna contenuta in expositions.
bnf.fr/marine/gallica/index.htm.
12. Cfr. in particolare: G. Gerola, «L’elemento araldico nel portolano di Angelino dall’Orto»,
Atti del Reale Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, 93, 1933-1934, p. 407-443; id., «Le carte
nautiche di Pietro Vesconte dal punto di vista araldico», in Atti del Secondo Congresso di Studi
Coloniali (Napoli, 1-3 ottobre 1934), Firenze, Olschki, 1935, vol. 2, p. 102-123; di G. Pasch,
si vedano i vari contributi apparsi in Vexillologia. Bulletin de l’Association française d’études
internationales de vexillologie: «Les drapeaux des cartes-portulans. L’atlas dit de Charles V
(1375)», 1, 1967, n. 2-3, p. 38-60; «Les drapeaux des cartes-portulans. Drapeaux du Libro del
Conoscimiento», 2, 1969, n. 12, p. 8-32; «Les drapeaux des cartes-portulans (portulans du groupe
Vesconte)», 3, 1973, n. 2, p. 52-62; N. F. Marino, «Introduzione», in Libro-ed. Marino, in partico-
lare p. XLIII-XLVIII; A.-D. von den Brincken, «Portolane als Quellen der Vexillologie», Archiv
240
Atlanti simbolici dello spazio politico
für Diplomatik, Schriftgeschichte Siegel- und Wappenkunde, 24, 1978, p. 408-426; A. Montaner,
«El “Libro del conosçimiento” como libro de armería», in Libro-Ms. Z, p. 43-69. P. E. Russell,
«La heraldica en el Libro del conosçimiento», in Studia Riquer, Barcellona, Quaderns Crema,
1987, vol. 2, p. 687-697; M. de Riquer, «La heráldica en el Libro del Conocimiento y el problema
de su datación», Dicenda. Cuadernos de Filología Hispánica, 6: Estudios y textos dedicados a
Francisco Lopez Estrada, 1987, p. 313-319; id., «La heráldica en el Libro del Conocimiento por
tercera vez», in Letters and Society in Fifteenth-Century Spain. Studies Presented to P. E. Russell
on his Eightieth Birthday, Londra, Dolphin, 1993, p. 149-151. Torna invece ad una valutazione in
chiave meramente decorativistica, come variabile di prezzo degli esemplari di lusso, R. Pujades
i Bataller, Les cartes portolanes…, op. cit., p. 224-234, meno interessato agli aspetti «culturali»
inclusi nei portolani.
13. T. Campbell, «Portolan Charts from the Late Thirteenth Century…», op. cit., p. 397-401: da
qui anche la sua cautela, del tutto giustificata, relativamente all’uso degli emblemi vessillari
come strumento per la datazione delle mappe.
14. P. Billion, Graphische Zeichen…, op. cit., p. 146: Symbole der Macht strukturieren als Bezugspunkte
den Raum; sie bilden ein eigenes Netzwerk von Entitäten der Herrschaft. Diese Visualisierung von
Netzwerken ist eine Kulturtechnik par excellence, und ihre bewusste Benutzung bedeutet einen
grossen Fortschritt in der Geistesgeschichte del Menschheit.
241
a lessa ndro savor elli
242
Atlanti simbolici dello spazio politico
mondo urbano/gerarchia del dominio 20, come ritiene Billion, non esiste, giacché
l’iconografia araldica dei portolani Vesconte, ad esempio, che egli considera
rappresentativi della fase decorativistica, non si limita al mondo urbano ma
comprende anche l’emblematica di potenze statali mediterranee, dalla Spagna
e dalla Francia fin verso Bisanzio; viceversa, il prodotto più maturo del genere,
il portolano Pizzigani, che apparterrebbe secondo Billion alla seconda fase con-
notata da una presunta «rigorosa struttura gerarchica 21», ha sì ampliato, sulla scia
di Dalorto/Dulcert, la raffigurazione dell’emblematica a tutti gli stati europei,
compresi quelli dell’Europa centrale e settentrionale, ma continua ad aggiun-
gervi un inedito, ampio gruppo di segni di città, italiane e non. L’evoluzione
segna dunque un arricchimento in direzione spaziale e quantitativa, ma non
un cambiamento di strategia visuale: l’emblematica cittadina, ovviamente
concentrata dapprima sulle repubbliche mediterranee, da Barcellona alla
Dalmazia, passando per Marsiglia, Genova, Pisa, Firenze e Venezia, ossia sul
mondo urbano in cui operano gli atelier dei cartografi, si estende al resto degli
stati d’Europa, ma non muta perciò funzione. L’evoluzione è dunque legata
a contingenze di informazione e produzione e a sensibilità locali (relative ai
luoghi di produzione), e non delinea affatto due diverse e successive tipologie
di prodotti. Per rendersene conto è sufficiente dare uno sguardo alle tabelle
in Appendice, qui di seguito, e considerare la relativa casualità di inclusioni e
omissioni nelle varie liste.
L’errore prospettico in cui è caduto Billion (e prima di lui altri autori, alcuni
dei quali ipotizzavano addirittura, senza alcun serio argomento, l’intervento
di uno specialista, un «araldo», nella redazione del Libro del conocimiento),
dipende in parte anche dalla mancata comprensione del carattere degli «stem-
mari universali» medievali e dalla sua astratta sovrapposizione a quello dei
portolani. Scopo primario degli stemmari medievali è la rappresentazione
enciclopedica, o autocelebrazione contingente, per segni, di una gerarchia del
mondo feudale, di tipo «piramidale» (sovrani, vassalli, arrière-vassaux), estesa
talora al mondo extraeuropeo: questa piramide esclude di regola – salvo rare
eccezioni – l’emblematica delle istituzioni religiose e cittadine, come sostan-
zialmente priva di interesse per i compilatori. Quando il catalogo si estende a
stati e paesi extraeuropei, ciò avviene senza nessuna ambizione ad un benché
minimo controllo fattuale di dati, ma sulla base di informazioni di seconda
mano o addirittura immaginarie. La genesi di questi prodotti è sempre legata
ad ambienti di corte o signorili-cavallereschi, che vi riflettono la propria visione
243
a lessa ndro savor elli
22. Sugli stemmari cfr. almeno: M. Pastoureau, Traité d’héraldique, seconda edizione, Parigi,
Picard, 1993, p. 224-225; id., L’art héraldique au Moyen Âge, Parigi, Seuil, 2010, p. 192-200;
L. Holtz, M. Pastoureau, H. Loyau (a cura di), Les armoriaux médiévaux. Actes du colloque
international «Les armoriaux médiévaux» (CNRS, Paris, 21-23 mars 1994), Parigi, Le Léopard
d’or, 1997.
23. A. Savorelli, «L’araldica nel codice chigiano: un “commento” alla “Cronica” del Villani», in
C. Frugoni (a cura di), Il Villani illustrato. Firenze e l’Italia medievale, Firenze, Le Lettere, 2005,
p. 53-59. Ma si veda anche, per qualche riscontro, l’iconografia delle Cronache di Giovanni
Sercambi (cfr. Giovanni Sercambi, Le illustrazioni delle Croniche nel codice Lucchese, coi com-
menti storico e artistico di O. Banti e M. L. Testi Cristiani, Genova, Basile, 1978, 2 vol.),
dei Regia carmina di Convenevole da Prato (Convenevole da Prato, Regia carmina dedicati a
Roberto d’Angiò re di Sicilia e di Gerusalemme, a cura di un Gruppo bibliofili pratesi, Prato,
Gruppo bibliofili pratesi, 1982), il codice senese della Sconfitta di Montaperti (su cui cfr.:
A. Cavinato, La sconfitta di Monte Aperto di Niccolò di Giovanni di Francesco di Ventura. Per
l’edizione di una cronaca illustrata senese del Quattrocento, tesi di laurea, Università di Pisa,
2009-2010; ead., «Stemmi a Siena e a Montaperti: i manoscritti di Niccolò di Giovanni di
Francesco di Ventura», in M. Ferrari [a cura di], L’arme segreta. Araldica e storia dell’arte nel
Medioevo [secoli XIII-XV], Firenze, Le Lettere, 2014, p. 235-247). E infine le eloquenti descri-
zioni araldiche contenute nella Cronica dell’Anonimo Romano sulla vita di Cola di Rienzo.
Tra le cronache svizzere del Quattrocento, di impareggiabile vivacità narrativa (delle quali è
disponibile qualche buon facsimile), cfr.: Berner Chronik (1470) di Benedikt Tschachtlan e i
tre volumi (Amtlichen Berner Chronik, 1483; Spiezer Chronik, 1484; Grosse Burgunderchronik,
1486) di Diebold Schilling il Vecchio.
24. Cfr. veda l’Appendice, alla fine di questo saggio, tabella C.
244
Atlanti simbolici dello spazio politico
II
Le bandiere dei portolani e del Libro del conocimiento vanno dunque conside-
rate, oltre che come elemento decorativo, come un corpus di segni di carattere
enciclopedico, orientato alla descrizione e definizione visiva di spazi geopolitici,
frutto di una sensibilità di carattere urbano. Dalla fine del XIV secolo, e poi
in maniera sistematica nel secolo seguente, con la riduzione degli spazi com-
merciali nel Mediterraneo e in Asia, questa sensibilità si attenua: bandiere e
stemmi diminuiscono di numero e vengono applicati in maniera stereotipa,
ricalcando i più famosi esemplari trecenteschi, ma riproducendo in tal modo
situazioni sempre più anacronistiche, soprattutto in aree come i Balcani, l’Asia
Minore e l’Africa. È a questo punto che l’araldica della seconda generazione dei
portolani si trasforma in un apparato prevalentemente esornativo, destinato ad
arricchire esemplari di pregio. Il numero limitato di ateliers specializzati – tra
Maiorca/Barcellona, Genova e poi Venezia – e le caratteristiche ripetitive e
seriali della produzione spingono chiaramente in questa direzione 25. La funzio-
nalità politico-enciclopedica cui sono attenti i primi catalani trecenteschi, tra
Genova e Catalogna, si ritroverà quasi solo sporadicamente nel Quattrocento
– per esempio nella mappa di Albino da Canepa (1489), attenta all’afferma-
zione della sovranità genovese sulle colonie del Mar Nero, quindici anni dopo
la caduta di Caffa in mano turca 26 –, e poi a partire dalle scoperte scientifiche,
25. L’evoluzione si coglie bene anche solo sfogliando le raccolte di portolani: per esempi omogenei
rispettivamente di area veneziana e maiorchina, cfr. Carte da navigar. Portolani e carte nautiche
del Museo Correr 1318-1732, a cura di S. Biadene, Venezia, Marsilio, 1990; R. Pujades i Bataller,
Les cartes portolanes…, op. cit.
26. Cfr. T. Campbell, «Portolan Charts from the Late Thirteenth Century…», op. cit., p. 401.
245
a lessa ndro savor elli
27. Cfr. P. Gautier Dalché, L’espace géographique au Moyen Âge, op. cit., p. 59.
246
Atlanti simbolici dello spazio politico
28. Libro-ed. Marino, p. 24-26; Libro-Ms. Z, p. 160-162. Per tutte queste definizioni, e in seguito
per i riferimenti alle varie aree geografiche, si veda l’Appendice, alla fine di questo saggio.
29. Libro-ed. Marino, p. 32.
247
a lessa ndro savor elli
non è sempre coerente: ora esplicita con insegne identiche o simili un’unione
dinastica; ora duplica arbitrariamente i domini, chiamandoli impropriamente
«regni», o viceversa, li frammenta, assumendo dati approssimativi dalle sue
fonti scritte e iconografiche; ora collega una bandiera al nome di una specifica
città riportata dai portolani, definendola «regno», senza capire che la bandiera
si riferisce a un’entità politica più ampia, nella quale la città in questione è com-
presa. Tutti questi caratteri tradiscono immediatamente la stretta dipendenza
dall’iconografia empirica e relativamente disordinata dei portolani, che si tenta
di ritrascrivere in un discorso argomentato e coerente.
Abbiamo calcolato che il Libro del conocimiento descriva, illustrandone gli
emblemi, circa 120 entità politiche, delle quali forse un 70 % sono ritenute
indipendenti (alcune variamente e assai dubbiosamente identificate dalla cri-
tica): le rimanenti sono pertinenze, vassalli e domini a vario titolo. La lista
è naturalmente sbilanciata: prevalgono nettamente porti, località e territori
mediterranei, europei e non, a testimoniare, di nuovo, il carattere delle fonti
impiegate dall’autore 30.
Con tutte queste imprecisioni e lacune, l’uso delle bandiere è un espediente
che anticipa, come sì è anticipato, ciò che nelle carte moderne diventeranno i
confini politico-statali. In generale, i confini così segnati testimoniano un’infor-
mazione relativamente aggiornata: a parte le ovvie deformazioni delle mappa e
gli errori o difetti d’informazione, chi sovrapponga i confini degli imperi asia-
tici dei portolani, dell’Atlante e del Libro del conocimiento con i confini riportati
dagli atlanti storici moderni, nota una sorprendente e sostanziale coincidenza 31.
Il punto di forza della rappresentazione dello spazio politico nei portolani
e nel Libro del conocimiento sta nella definizione delle potenze in alcune aree
extraeuropee. In primo luogo il Maghreb, con la sua frammentazione politica e
dinastica; quindi l’Africa nera, i cui regni, pur con nomi e collocazioni misteriose
(il che non significa necessariamente che si tratti di regni immaginari, come
pensano alcuni interpreti), hanno qualche fondamento reale nelle informazioni
che venivano dalle esplorazioni atlantiche partite dai porti spagnoli 32. In Asia
l’Atlante e il Libro del conocimiento elencano regni e imperi con notevole reali-
smo: la Persia, l’impero di Delhi, i tre grandi canati mongoli (Gran Khan, Orda
d’Oro o Kipchaq, e Chagatay); l’area del Turkestan appare divisa nell’Atlante
tra Persia a canato di Chagatay, ma il Libro del conocimiento vi distingue anche
dominazioni intermedie, i regni di Buchara e «Cato», non troppo diversamente
248
Atlanti simbolici dello spazio politico
da Mandeville e dalla sua fonte principale, Hayton di Corico, autore del Fiore
delle storie d’Oriente (1307) 33. Ovunque marginalizzata, in ogni caso, è l’area
grigia del «mito», che avvolgeva in passato presunte realtà geopolitiche. Rimane
sì nei portolani e nel Libro del conocimiento, all’estremo confine del mondo, il
misterioso popolo di Gog e Magog, al di là della muraglia cinese: si direbbe un
inevitabile pegno pagato al favoloso 34. E nell’Atlante, l’iconografia di pigmei,
i cannibali, Alessandro Magno, l’Anticristo, i Magi, Noè, le isole felici, etc.
Ma si tratta di reminiscenze colte e slegate dal contesto, prive di connotazione
politica, mentre si nota la quasi generale scomparsa del regno delle Amazzoni,
che Mandeville invece conserva caparbiamente e colloca a casaccio.
Esemplare è la ricollocazione politica e spaziale di un grande, mitico
stato medievale, quello del Prete Gianni. La sua leggenda perdura almeno
fino a Sebastian Münster: il quale per non rinunciarvi continuerà a duplicare
l’Etiopia in una Etiopia africana e una indiana, o in un’India africana e un’India
asiatica, come nel Medioevo 35. Del resto, per Ulrich von Richental l’Etiopia,
come la «Libia», era un misterioso impero a sovranità incerta, ma unter dem
Grossen Can 36; persino Schiltberger – meno fantasioso di altri, per conoscenze
dirette – pone il Prete Gianni in una non meglio definita enclosed Rumany 37.
Portolani e Libro del conocimiento compiono invece un decisivo spostamento
del Prete Gianni: non più re in India, ma «patriarca» in Etiopia, protetto da un
«imperatore» (a calco della situazione europea), in un’Etiopia finalmente solo
africana – dalla quale giungevano evidentemente notizie sulla chiesa copta 38.
Rimangono in India solo due regni tra Malabar e Bengala, cui l’Atlante cata-
lano assegna emblemi «cristiani», forse per via della tradizione delle chiese che
si dicevano fondate da San Tommaso e della presenza dei Nestoriani.
Se si confrontano questi dati coi Viaggi di Mandeville o la Cronaca di
Richental, a parte il caso clamoroso del Prete Gianni, si constatano altre diffe-
renze: intanto il netto riferimento al sultanato di Delhi (l’unico che ne parla con
33. Libro-ed. Marino, p. 72-78; Libro-Ms. Z, p. 173-176. R. Pujades i Bataller, Les cartes portola-
nes…, op. cit., p. 231, tenta di datare i dati politici contenuti nell’Atlante catalano, agli anni
trenta del Trecento.
34. Ibid., p. 174-175.
35. Sebastian Münster, Cosmographia universalis, Basileae, apud H. Petri, 1552, p. 1145, 1159.
36. Ulrich von Richental, Das Concilium buch geschehen zu Costencz…, Augsburg, Anton Sorg,
1483, fol. CXII (per l’ed. in facsimile dei mss. della cronaca, abbiamo consultato Das Konzil zu
Konstanz. 1414-1418, a cura di O. Feger, Starnberg/Konstanz, Keller/Thorbecke, 1964; è dispo-
nibile anche un’edizione in CD-ROM [2002], a cura del Rosgarten Museum di Costanza).
37. The Bondage and Travels of Johann Schiltberger: a Native of Bavaria, in Europe, Asia, and Africa
(1396-1427), a cura di J. Buchan Telfer, Londra, Hakluyt Society, 1879, p. 52.
38. Libro-ed. Marino, p. 60-64; Libro-Ms. Z, p. 169-171. P. Billion, Graphische Zeichen…, op. cit.,
p. 132, non stabilisce alcun legame tra la croce patriarcale che connota la Nubia nei portolani
e il Prete Gianni.
249
a lessa ndro savor elli
III
39. Jean de Mandeville, Le livre des merveilles du monde, a cura di C. Deluz, Parigi, CNRS Éditions,
2000, p. 318; The Bondage and Travels…, op. cit., p. 47.
40. Jean de Mandeville, Le livre des merveilles du monde, op. cit., cap. XXVI-XXVII.
41. Libro-ed. Marino, p. 74, 84; Libro-Ms. Z, p. 173, 175.
42. Cfr. S. Clemmensen, Arms and People in Ulrich’s Richental’s Chronik des Konzils zu Konstanz
1414-1418 in http://www.armorial.dk/german/Richental.pdf, in particolare segment 19,
n. 194-304 e relativi commenti. Più oggettiva è la descrizione, limitata però solo al alcune
aree europee, di un altro partecipante al Concilio, contenuta nel De ministerio armorum (cfr.
A. A. Nascimento, Livro de arautos. De ministerio armorum, script. anno 1416, ms. lat. 28,
J. Rylands Library [Manchester]. Estudo codicológico, histórico, literário, linguistico, texto crit. e
trad., Lisboa, s. n., 1977; http://armorial.dk/german/Arautos.pdf ).
250
Atlanti simbolici dello spazio politico
43. Ulrichs von Richental Chronik des Constanzer Concils: 1414-1418, a cura di M. R. Buck, Tübingen,
Gedrückt für den litterarischen Verein in Stuttgart, 1882, p. 154 sgg.
44. Cfr. Armorial Grünenberg, édition critique de l’armorial de Conrad Grünenberg (1483), présenté
par M. Pastoureau, publié par M. Popoff, Milano, Orsini de Marzo, 2011, p. 62-95 (tav. XXVI-
XLIII): alle immagini Grünenberg aggiunge schede illustrative – in genere assai confuse – con
notizie storico-politiche desunte da Marco Polo, Mandeville, Richental e altre fonti. Si tratta
dell’ultimo grande «stemmario universale» del Medioevo, un genere molto diffuso fra Tre e
Quattrocento e anche in seguito. A. Montaner, «El “Libro del conosçimiento” como libro…»,
op. cit., p. 71-75, mette a confronto i dati del Libro con quelli di alcuni stemmari. Anche
per il Wappenbuch di Grünenberg cfr. l’edizione di S. Clemmensen nella sezione «German
Armorials» del sito web: http://www.armorial.dk/.
251
a lessa ndro savor elli
45. M. MacLean, The Cosmographia of Sebastian Münster. Describing the World in the Reformation,
Aldershot, Ashgate, 2007, p. 322, 344.
252
Atlanti simbolici dello spazio politico
46. Cfr. L. A. Mayer, Saracenic Heraldry, Oxford, Oxford University Press, 1999 [reprint dell’opera
del 1933], p. 9; Libro-ed. Marino, p. 40; Libro-Ms. Z, p. 164. P. Billion, Graphische Zeichen…,
op. cit., p. 286, 292, senza rendersi conto dell’origine mamelucca di questo segno, lo attri
buisce fantasiosamente, insieme ad altri presenti sulla bandiere islamiche dei portolani, ad una
tradizione del «giudaismo egiziano»: si tratta di suggestioni palesemente infondate.
47. Libro-ed. Marino, p. 86; Libro-Ms. Z, p. 176. Cfr. in proposito quanto osservano G. Pasch,
«Les drapeaux des cartes-portulans. L’atlas dit de Charles V…», op. cit., p. 57-58; G. Gerola,
«L’elemento araldico nel portolano…», op. cit., p. 433-434; I. Lebedinski, «Tamgas: Flag
Emblems from the Steppes», The Flag Bulletin, 184, 1998, p. 216-232. Non riconosce nella
figura un tamga P. Billion, Graphische Zeichen…, op. cit., p. 135, che si limita – erroneamente – a
considerarlo un non meglio precisato «monogramma».
48. Cfr. il dettaglio dell’immagine del ms. arabe 5847, fol. 47v (Parigi, Bibliothèque nationale de
France), del 1237, che illustra la «processione del Ramadan», ove si nota una bandiera identica.
Ancora una volta P. Billion, Graphische Zeichen…, op. cit., p. 289-291, si è fatto suggestionare
da qualche pallida analogia con certa simbologia ebraica, attribuendo tout court all’influenza
di colonie giudaiche l’origine di questo segno, così come delle varie «stelle di Salomone»
presenti sulle bandiere attribuite ad altre città, come Semiso in Asia Minore (ibid., p. 288-289).
In entrambi i casi si tratta di una lectio facilior, indimostrabile e di impianto filologicamente
assai debole.
253
a lessa ndro savor elli
forse sono ispirate a vessilli arabi o turchi realmente usati o reinterpretati dall’oc-
chio occidentale. Le stesse più generiche figure geometriche usate per la Persia,
Delhi e il canato di Chagatay, potrebbero echeggiare i classici rombi o buqia
(«tovaglia») o i «quadrati» contenenti versetti e formule coraniche estremamente
diffusi nella monetazione islamica (ma anche in certe raffigurazioni di vessilli
militari), o storpiare lettere alfabetiche o altre figure del repertorio simbolico
arabo. Che l’emblematica mamelucca abbia potuto costituire per i disegnatori
dei portolani un modello estendibile a terre più lontane, in fondo, non stupi-
rebbe, data la sua contiguità e vicinanza con l’Occidente. Ma il caso del leone
mamelucco e del tamga fa persino ipotizzare – è un’ipotesi tutta da verificare
e approfondire – che la monetazione islamico-turco-mongola potrebbe essere
stata per i portolani nati nell’ambiente dei mercanti e dei navigatori, uno dei vei-
coli più immediati di segni (magari solo decorativi), reinterpretati in Occidente,
come emblemi veri e propri: per le bandiere, così frequenti, con rosette stilizzate
o stelle di Salomone, elementi ricorrenti della numismatica d’oltremare, si tratta
forse più che di un’ipotesi.
A proposito dell’araldica dei portolani non si può dunque parlare propria-
mente – come per gli stemmari – di «araldica immaginaria», come se si trattasse
di una variabile della pratica delle tecniche retoriche di invenzione o manipo-
lazione di segni analoga a quella che porta ad attribuire insegne a Re Artù, ad
Alessandro, ai Re Magi o a Cristo: Nancy F. Marino, riassumendo la questione
sbaglia completamente su questo punto, assimilando pratiche completamente
diverse 49. Un esempio lampante lo danno gli stemmi dei Re Magi usualmente
loro attribuiti in Germania, già dalla Cronaca del Concilio di Costanza e poi
sempre copiati per un secolo: qui siamo di fronte a una vera e propria araldica
immaginaria, in quanto i tre stemmi più o meno consapevolmente ricalcano, e
non si sa certo per quali canali e fonti, modelli usati per vari paesi dai portolani
e dal Libro del conocimiento, copiandoli cioè da una presuntiva attribuzione a
stati reali per proiettarli su personaggi del mito 50.
In conclusione, il caso dei portolani e del Libro del conocimiento è completa-
mente diverso. Non si tratta qui di un esercizio dell’immaginario, ma piuttosto
di un’araldica «imitativa» o «interpretativa», un espediente pratico di sempli-
ficazione ottica o un possibile calco o trascrizione di un’emblematica tipica:
islamico-turca, maghrebina, vicino-orientale e perfino estremo-orientale (set-
tore nel quale il Libro del conocimiento diverge in parte dall’Atlante catalano).
Una tecnica che gioca sulla semplicità visiva, con sobri emblemi lineari, che
254
Atlanti simbolici dello spazio politico
51. Il Catay resta più affidato all’immaginazione: l’Atlante catalano dà semplicemente tre mezze-
lune; il Libro del conosçimiento la figura del Gran Khan in trono. Sulla valenza «culturale» della
scelta di questi segni apocrifi d’individuazione, ha correttamente insistito anche P. Billion,
Graphische Zeichen…, op. cit., p. 126.
52. M. Pastoureau, «L’armorial universel de Conrad Grünenberg (1483)», in Armorial Grünenberg,
édition critique de l’armorial…, op. cit., p. XVII, XXIII. Per un istruttivo confronto con l’aral-
dica propriamente «immaginaria» degli stemmari europei, cfr. per es. gli stemmari Vijnbergen
e Vermandois: http://www.briantimms.fr/Rolls/wijnbergen/0wnintroduction.html; http://
www.briantimms.fr/Rolls/vermandois/rois01.html.
255
a lessa ndro savor elli
Nelle tabelle che seguono è messo a confronto il quadro politico del mondo
come risulta dal Libro del conocimiento con altre fonti dell’epoca. Abbiamo
raggruppato i territori in distinte aree geografico-storiche: all’interno di esse,
sono considerati insieme territori e località indicati con sufficiente chiarezza
nel Libro come appartenenti alla medesima dominazione politica, ma il dato
è dubbio per la frequente ambiguità dell’esposizione, le incongruenze e le
differenze tra i vari mss. dell’opera.
Nelle col. 1, 2, e 3 sono riportati i dati desunti dal Libro del conocimiento,
e cioè:
– col. 1: il rango attribuito a un territorio o località;
– col. 2: il nome di un territorio o località (principalmente secondo l’ed.
Marino);
– col. 3: il nome attuale o storico (si è tenuto solo parzialmente conto
delle ipotesi di identificazione di territori o città, variamente proposte dai vari
editori del Libro del conocimiento).
Nella col. 4:
– i segni = o ≈ indicano territori o località cui sono attribuite bandiere
uguali o simili a quella della potenza o territorio che precede immediatamente
(es.: Sardegna = Aragona, Maiorca ≈ Aragona);
– il segno • indica i vessilli sicuramente riferibili a una città (o città-stato)
e non a uno stato o signoria territoriale.
Le colonne seguenti (V, d, D, P, A, S) indicano la presenza di una ban-
diera attribuita allo stesso territorio o località (indipendentemente dal fatto
che la bandiera sia uguale o meno, a quella del Libro del conocimiento) dai
seguenti portolani: V = Perrino Vesconte, 1327; d = Angelino Dalorto, 1327;
D = Angelino Dulcert, 1339; P = Pizzigani, 1367; A = Atlante catalano, 1375;
S = Guillem Soler, 1380. I dati relativi al portolano Pizzigani sono solo indi-
cativi per la scarsa leggibilità dei vessilli, dovuta alle non buone condizioni di
conservazione. Le presenze nei portolani divergono in parte da quelle proposte
nella tavola di concordanze compresa in A. Montaner, in Libro del conocimiento
(Libro-Ms. Z), p. 70-75.
Nell’ultima col. (JM), solo per i paesi extraeuropei, il segno » indica la
menzione del territorio o potenza politica nei Viaggi di John Mandeville.
256
Atlanti simbolici dello spazio politico
1. Europa
A) Penisola iberica
1 2 3 4 V d D P A S
reyno Castilla Castiglia x x x x x x
reyno Portogal Portogallo x x x x x
reyno Navarra Navarra
reyno Aragon Aragona x x x x x x
rey çerdeña Sardegna = x x x x
rey Mayorca Maiorca ≈ x x x x x
reyno Granada Granada x x x x
B) Italia
1 2 3 4 V d D P A S
señor de çibdat Genova Genova • x x x x x x
isla Corçega Corsica = x x
reyno Lonbardia Lombardia
señor Pisa Pisa • x x x x x x
señor de çibdat Florençia Firenze • x x x x x x
cabeza Roma Roma • x x x x
de imperio
reyno Napol Napoli x x x x
reyno Çeçilia Sicilia x x x x x
señor Venecia Venezia • x x x x x
C) Francia
1 2 3 4 V d D P A S
reyno Françia Francia x x x x x x
señor Bayona Bayonne x
señor Tolosa Tolosa
señor Narbona Narbona = x x x x x
condado Flandes Fiandra x x
257
a lessa ndro savor elli
D) Isole britanniche
1 2 3 4 V d D P A S
reyno Escoçia Scozia x x x x
reyno Inglaterra Inghilterra x x x x x
rey desta isla Irlanda/Ibernia Irlanda = x x x
E) Impero
1 2 3 4 V d D P A S
ynperio Alemaña Germania x x x x
reyno Boemia Boemia x x
F) Polonia
1 2 3 4 V d D P A S
reyno Polonia Polonia x x
reyno Litefama Lituania ≈
reyno Leon Leopoli, Galizia ≈ x
G) Ungheria – Schiavonia
1 2 3 4 V d D P A S
reyno Ungheria x x x x x
reyno Transilvania
reyno señ. Exclavonia Schiavonia x x x x
destos montes Boxnia Bosnia =
rey desta terra Narent Narenta x x x x
258
Atlanti simbolici dello spazio politico
H) Scandinavia
1 2 3 4 V d D P A S
reyno Dacia Danimarca x x x x
Frisa Frisia =
reyno Suevia Svezia x x x x
rey destas islas Gotlandia, Oxilia Gotland, Ösel ≈ x
reyno Gotia Götaland (Svezia) ≈
reyno Noruega Norvegia x x x
rey desta isla Irlanda Islanda? = x
rey desta isla Salanda Shetland? Sjaelland? =
1 2 3 4 V d D P A S JM
rey desta isla Morea Morea
ynperio Costantinopla Costantinopoli x x x x x x
reyno Salonico Salonicco = x x x x x
reyno Lodomago ? ≈
reyno Meseber Mesembria, ≈
o Greçia? Grecia?
reyno Castelle ? ≈ x x x x x
reyno Palolimen ? = x
cabeza Veçina Widdin? x? x
de reyno (Bulgaria?)
ynperio Trapesonda Trebisonda x x x x x x »
reyno Semiso Samsun x x x x x x
Orden Rodas Rodi, Ord. x x x x x
di S. Giovanni
reyno Armenia Armenia x x x x x x »
(Minor)
rey Chipre Cipro x x x x x
reyno, çibdat Feradelfia Filadelfia x x x x
reyno Sant Estopoli Sebastopoli x x x x x x
(Georgia)
259
a lessa ndro savor elli
3. Turchia
1 2 3 4 V d D P A S JM
çibdat Satalia Atalia x x x x x »
(Panfilia)
rey Turquia Turchia x x x x »
reynado Savasco Sebaste, Sivas? ≈ x x x x
rey Cunyo Iconio ≈ x x x x
reyno Antroçeta Tarso e Corico x
e Corincho
reyno Atologo Aydin? x x
1 2 3 4 V d D P A S JM
provinçia Iherusalem Gerusalemme »
terra, rey Jafet Giaffa? (Siria) x x x »
(Damasco)
reyno Egipto Egitto x x x x x x »
rey (Soldan) Alixandria Sultano x x x x x x »
Mamelucco,
Alessandria
reyno Arabia Arabia x »
ysla Sicroca Socrota =
260
Atlanti simbolici dello spazio politico
5. Maghreb/Africa mediterranea
1 2 3 4 V d D P A S JM
rey çibdat Luchon Lukk (Libia) x x x
rey Tolometa Tolmeta x x x x x x
(Libia)
rey, çibdat Tripul Tripoli (Libia) x x x x x
rey, çibdat Africa Mahdia x
(Tunisia)
rey, çibdat Tunez Tunisi x x x x x
rey, çibdat Bona Bona (Algeria) x x x x
rey, çibdat Costantina Costantina
(Algeria)
rey, çibdat Bugia Bugia (Algeria) x x x x x x
rey, çibdat Birschan Birshak x x x x x
(Algeria)
reyno Tremecen Tlemcen x x x x x
(Marocco)
rey, çibdat çepta Ceuta x x x x
(Marocco)
rey Benamarin Marocco x x x x
rey, çibdat Marruecos Marrakesh x
tierra çuçia Sous?
(Marocco)
6. Africa nera
1 2 3 4 V d D P A S JM
rey, çibdat Sulgumença Sigilmasa
reyno Guinoa Guinea x x
rey, çibdat Tocoron ? = x
reyno Tauser ? = x x
reyno Organa ? x x
reyno Tremisin ? x x
reyno Dongola Dunqula x
(Sudan)
rey Ynsula Gropis ?
reyno Gotonie ?
rey Amenuam ?
ynperio Abdeselib, Nubia, Etiopia x x x »
patriarca Prete Gianni x x
ynperio Magdasor Mogadiscio
261
a lessa ndro savor elli
1 2 3 4 V d D P A S JM
ynperio Persia x x x »
reyno Saldania ? =
reyno Caraol ? =
rey, provinçias Bandach, Bagdad, x »
Caldea Caldea
8. India
1 2 3 4 V d D P A S JM
reyno Dilini Sultano x
di Delhi
reyno Viguy ? =
reyno Oxanap ? =
reyno Java Giava »
e Trapovana e Sumatra?
262
Atlanti simbolici dello spazio politico
9. Cina, Tartaria
1 2 3 4 V d D P A S JM
ynperio Catayo, Gran Cina, Impero x »
Can Mongolo
reyno Sçim ? =
ynperio Armalet Canato x »?
di Ciagatay
reyes Bocarin e Cato Buchara »
e Kattakurgan
ynperio Uxbeco, imp. Saray, Canato x x x x x x »
de Sara di Quipciaq
cabeça Pidea ? (Ucraina), = x
de reyno vassallo
reyno Canardi ? vassallo =
reyno Tana Tana (Ucraina), = x x x x x x
vassallo
reyno Comania Cumania, =
vassallo
rey Dernent Derbent =
(Russia),
vassallo
10. Russia
1 2 3 4 V d D P A S JM
reyno Sabur, ?, Kostroma =
Castrama
reyno Roxia Russia x
reyno Xorman ?
reyno Sicça, Scizia, »
Nogarado Novgorod
reyno Maxar ?
rey Ircania »
263
a lessa ndro savor elli
4 V d D P A S
Almeria x
Galizia (Spagna) x x
Barcellona • x x x x x
Bretagna x x
Marsiglia • x x x x x x
Montpellier • x x x x x
Milano • x
Padova • x
Aquileia • x
Albenga • x
Bologna • x
Ravenna • x
Siena • x
Savona • x x x x x
Ventimiglia (o Monaco?) • x x x x
Gaeta • x
Messina • x
Napoli (città) • x
Zara • x x x
Ragusa • x x
Durazzo x x x
Varna (Bulgaria) x x x
Focea x x x x
Creta (= Venezia) x x
Armenia (Maior) x
Gabes (Tunisia) x x
Orano x
Melilla x
Tripoli di Siria x
Aden x
264
Atlanti simbolici dello spazio politico
4 V d D P A S
Jaffa o Tiro? x
Caffa (= Genova) x x
Maurocastro (Ucraina) x
Mosca? (Russia) x
Sinope (Asia Minore) x
Re Stefano (India) x
Re Colombo (India) x
265
Cartes et figures de l’espace français,
xive -xvi e siècle : représentation de l’espace
et exercice du pouvoir
juliette dumasy-rabineau
Centre d’études supérieures sur la fin du Moyen Âge, EA POLEN,
université d’Orléans
267
juliet te dum asy-r a bine au
4. Pour une présentation, voir M. Pelletier, De Ptolémée à la Guillotière (xve-xvie siècle). Des cartes
pour la France, pourquoi, comment ?, Paris, Éd. du Comité des travaux historiques et scienti-
fiques, 2009 ; J. Dumasy, « Le paysage des vues figurées (début xive-début xvie siècle) », dans
C. Souchon (dir.), Les outils de représentation du paysage, Actes du CXXXVe Congrès des socié-
tés historiques et scientifiques (Neuchâtel, 6-10 avril 2010), publication électronique sur le site
du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2012, p. 87-99.
5. À l’époque moderne, le « plan perspectif », « plan en perspective » ou encore « plan visuel » présente
les objets en plan (c’est-à-dire selon leur implantation au sol, appréciée depuis un point de vue à
la verticale) mais aussi en élévation et en perspective, comme si on les voyait réellement depuis un
point de vue surélevé. Il s’oppose au plan « géométral » ou « géométrique », qui est un plan exact
en proportion et en échelle et se veut, en principe, dénué de toute imitation. Voir N. Verdier, La
carte avant les cartographes. L’avènement du régime cartographique en France au xviiie siècle, Paris,
Publications de la Sorbonne, 2015, p. 240-249 et 302-303. Pour une typologie de ces différents
types de figuration à l’époque moderne, voir M. Morel-Deledalle (dir.), La ville figurée. Plans et
vues gravées de Marseille, Gênes et Barcelone, Marseille, Parenthèses/Musées de Marseille, 2005.
6. Voir par exemple H. Brunon, « L’essor artistique et la fabrique culturelle du paysage à la
Renaissance. Réflexions à propos de recherches récentes », Studiolo. Revue d’histoire de l’art de
l’Académie de France à Rome, 4, 2006, p. 261-290.
268
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
7. Par exemple dans le livre des hommages du comté de Clermont-en-Beauvaisis pour le comte de
Bourbon, réalisé dans les années 1373-1376 (l’original, perdu, est conservé par une copie moderne :
BNF, ms. fr. 20082 ; voir C. Beaune, Les manuscrits des rois de France au Moyen Âge, le miroir
du pouvoir, Paris, Bibliothèque de l’image, 1997, p. 88-89 et 181) ou dans certaines chroniques,
comme le manuscrit français 4991 de la BNF, A tous nobles, qui contient plusieurs vignettes de
cathédrales de France, et dont on reparlera plus loin (voir C. Serchuk, « Picturing France in the
Fifteenth Century : the Map in BNF MS Fr. 4991 », Imago Mundi, 58/2, 2006, p. 133-149).
8. On peut citer par exemple le plan du château de Gaillon (le premier en France fait à l’échelle,
semble-t-il), arch. dép. Vienne, carton 37, pièce 8. Reproduit dans : France 1500. Entre Moyen
Âge et Renaissance, catalogue d’exposition (Grand Palais, 2010), Paris, Éd. de la Réunion des
musées nationaux, 2010, p. 70. Voir aussi É. Hamon, « Le cardinal Georges d’Amboise et ses
architectes », dans L’artiste et le clerc. La commande artistique des grands ecclésiastiques à la fin
du Moyen Âge (xive-xvie siècle), Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2006, p. 329-348.
9. Les données fournies dans cet article reflètent l’état actuel d’un inventaire que j’ai entrepris
pendant mes années de thèse (voir un premier état de cet inventaire dans J. Dumasy, Le feu et
le lieu. La baronnie de Sévérac-le-Château à la fin du Moyen Âge, thèse de doctorat de l’université
Paris 1 Panthéon-Sorbonne, dir. par M. Bourin, 2008, dactyl., p. 89-121 ; et de la question dans
la version publiée au Comité des travaux historiques et scientifiques sous le même titre en
2011, p. 27-63). On dispose aujourd’hui d’un inventaire publié : P. Gautier Dalché, « Essai d’un
inventaire des plans et cartes locales de la France médiévale (jusque environ 1530) », Bibliothèque
de l’École des chartes, 170/2, 2012, p. 421-471. Voir aussi la liste de cartes du royaume de France
établie par L. Dauphant, Le royaume des Quatre rivières. L’espace politique français au xve siècle
(1380-1515), Seyssel, Champ Vallon, 2012, p. 387-391.
269
juliet te dum asy-r a bine au
Dans la moitié des cas répertoriés, les figures cartographiques sont directement
liées à une cause judiciaire ou à un contexte conflictuel qu’elles doivent contri-
buer à régler. Elles étaient faites le plus souvent lors de la dernière phase (c’est-
à-dire en général la phase d’appel) de procès particulièrement disputés et qui
portaient sur un conflit territorial ou foncier – par exemple sur des limites de
propriété ou de juridiction, des droits d’usage ou des assiettes fiscales. La pra-
tique est apparue dès le xive siècle, comme le montre la figure d’Albi, datable
des environs de l’année 1314 et liée à un conflit de juridiction entre l’évêque
10. I. Laboulais, « Les “coulisses” des cartes à l’époque moderne », dans ead. (dir.), Les usages
des cartes (xviie-xixe siècle). Pour une approche pragmatique des productions cartographiques,
Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2008, p. 5-14.
270
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
271
juliet te dum asy-r a bine au
272
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
17. J. Petrowiste, « L’empreinte du commerce sur le paysage urbain. Une vue figurée du bourg de
Rodez de la fin du Moyen Âge », dans C. Souchon (dir.), Les outils de représentation…, op. cit.,
p. 121-135. P. Fermon, « Du paysage peint aux territoires : l’avènement des représentations de
l’espace en Provence à la fin du Moyen Âge », dans D. Poulot (dir.), Paysage et iconographie,
Actes du CXXXVe Congrès des sociétés historiques et scientifiques (Neuchâtel, 2010), publi-
cation électronique sur le site du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2013.
18. J. Dumasy, « Les vues figurées, un cas d’expertise par le dessin ? (France, xve-xvie siècle) », dans
L. Feller, A. Rodriguez (dir.), Expertise et valeur des choses au Moyen Âge, vol. 2 : Savoirs, écritures,
pratiques, Madrid, Casa de Velázquez, 2016, p. 203-214.
19. G. C. Boyce, « The Controversy over the Boundary between the English and Picard Nations in
the University of Paris (1356-1358) », dans Études d’histoire dédiées à la mémoire de Henri Pirenne,
Bruxelles, Nouvelle société d’éditions, 1937, p. 55-66 ; P. Gautier Dalché, « Limite, frontière et
organisation de l’espace dans la géographie et la cartographie de la fin du Moyen Âge », dans
G. P. Marchal (éd.), Grenzen und Raumvorstellungen (11.-20. Jh.), Zurich, Chronos, 1996,
p. 93-122.
20. Arch. dép. Gard, G 1181.
21. Arch. dép. Marne, 19 H 31/9.
273
juliet te dum asy-r a bine au
22. Arch. dép. Isère, B 3707 à 3710, 4496 (Château-Dauphin), B 3501, 3504 et 3505 (Valentinois et
Diois).
23. Jean Richard, « Enclaves royales et limites des provinces. Les élections bourguignonnes »,
Annales de Bourgogne, 20, 1948, p. 89-113, et J. Paviot, « Les cartes et leur utilisation à la fin du
Moyen Âge. L’exemple des principautés bourguignonnes et angevines », Itineraria, 2, 2003,
p. 201-228.
24. Cité par M. Pelletier, « Vision rapprochée des limites. Les cartes et “figures” des xve et xvie siècles »,
Le Monde des Cartes [revue du Comité français de cartographie], 187, 2006, p. 15-25.
25. Arch. nat., J 789.
274
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
C’est le cas de celles qui ont pour but l’enregistrement de droits fonciers sei-
gneuriaux. Beaucoup moins nombreuses que les précédentes (une dizaine) et
prenant la forme de plans parcellaires plus ou moins détaillés, elles font partie
des documents de gestion comptable des seigneuries et peuvent être considé-
rées comme le pendant imagé des écrits d’enregistrement foncier habituels
(censiers, terriers et autres). Mais elles pouvaient avoir pour objectif secondaire
d’établir le droit et de le prouver en cas de conflit, comme les figures de conten-
tieux. Cependant la similitude s’arrête là : de façon générale, ces plans étaient
beaucoup moins travaillés que ces dernières, et répondaient à un usage interne ;
ils n’étaient pas l’œuvre de peintres, mais de gestionnaires ou notaires chargés
de la description des terres ; enfin, ils ne correspondent pas à une pratique
courante et bien établie. Les plus anciens et les plus remarquables par leur
précision sont ceux accompagnant les marchements de l’abbaye Saint-Étienne
de Caen (1477-1491), étudiés par Thomas Jarry 26. Les plans des fiefs de l’hôpital
Saint-Antoine d’Albi, réalisés dans le dernier quart du xve siècle 27, ou ceux
contenus dans le cueilleret de Cergy pour l’abbaye de Saint-Denis, de 1528 28,
sont plus rudimentaires (fig. 2). Pour notre période, ces plans d’enregistrement
restent peu fréquents et témoignent d’une pratique encore embryonnaire, qui
ne se développera qu’à l’époque moderne avec les plans-terriers 29.
Une occasion plus fréquente de confection de figures trouve son origine
dans des projets de travaux et d’aménagements d’ampleur, de nature civile ou
militaire. Beaucoup sont liées au contexte guerrier de la période (guerre de Cent
Ans puis guerres d’Italie) et figurent tout ou partie du système défensif d’une
ville ou d’une région, en l’état ou en projet, ou parfois même en prévision d’un
siège. La figuration de sites à des fins militaires est une tradition qui remonte
au moins à la fin du xiiie siècle 30. Les autres sont liées à des travaux civils
d’importance, comme des aménagements hydrauliques, fluviaux, portuaires
26. T. Jarry, « Autour d’un plan médiéval. Le plan parcellaire d’Allemagne (Fleury-sur-Orne) de
1477 », Histoire et sociétés rurales, 23, 2005, p. 169-204 ; et id., « Sevestre le Caretel et la mesure
de l’espace dans la plaine de Caen à la fin du xve siècle. Les marchements de l’abbaye Saint-
Étienne de Caen », dans Construction de l’espace au Moyen Âge : pratiques et représentations, Actes
du XXXVIIe Congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur
public (Mulhouse, 2-4 juin 2006), Paris, Publications de la Sorbonne, 2007, p. 357-368.
27. Arch. dép. Tarn, 1 HDT 68.
28. Arch. nat., S*25714.
29. G. Brunel, O. Guyotjeannin, J.-M. Moriceau (dir.), Terriers et plans-terriers du xiiie au
xviiie siècle, Actes du colloque de Paris (23-25 septembre 1998), Paris, Association d’histoire des
sociétés rurales/École nationale des chartes, 2002 ; N. Verdier, La carte avant les cartographes…,
op. cit., p. 213-259.
30. E. Vagnon, Cartographie et représentation de l’Orient méditerranéen en Occident, du milieu du
xiiie à la fin du xve siècle, Turnhout, Brepols, 2013 ; P. Gautier Dalché, « Les usages militaires de
la carte, des premiers projets de croisade à Machiavel », Revue historique, 673, 2013, p. 45-80.
275
juliet te dum asy-r a bine au
276
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
31. C. Serchuk, « À la limite. La vie et la carrière de Zacharie de Celers », dans É. Hamon, D. Paris-
Poulain, J. Aycard (dir.), La Picardie flamboyante : arts et reconstruction entre 1450 et 1550, Actes
du colloque d’Amiens (2012), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, p. 1-13.
32. É. Hamon, « La demeure en chantier : hommes et techniques à la fin du Moyen Âge », dans
id., V. Weiss (dir.), La demeure médiévale à Paris, catalogue d’exposition (Archives nationales,
17 octobre 2012-13 janvier 2013), Paris, Somogy/Archives nationales, 2012, p. 62.
33. Il faut noter une difficulté pour les figures qui n’ont pas été conservées et sont connues seule-
ment par une mention : comment savoir si elles correspondaient à un plan technique ou bien
à une vue d’ensemble ? Parfois la description fournit une indication, dans d’autres cas le doute
demeure.
34. G. Durand, « Peintres d’Amiens au xvie siècle », Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie,
31, 1924-1925, p. 650 et suiv. ; C. Serchuk, « À la limite… », art. cité.
35. J. Paviot, « Les cartes et leur utilisation… », art. cité.
36. É. Lecuppre-Desjardin, « Annexions, conquêtes, héritages : réflexions sur la perception du
complexe territorial bourguignon (xive-xve siècle) », dans S. Péquignot, P. Savy (dir.), Les dépla-
cements de frontières et annexions dans l’Occident médiéval (xiie-xve siècle), Paris, Éd. de l’École
pratique des hautes études, à paraître.
37. C.-L. de Grandmaison, « Documents inédits pour servir à l’histoire des arts en Touraine »,
Mémoires de la Société archéologique de Touraine, 20, 1870, p. 28.
277
juliet te dum asy-r a bine au
Fig. 3 – Grande vue de Rouen, dans le Livre des Fontaines de Jacques le Lieur (1526).
Collections de la bibliothèque municipale de Rouen, Ms g 3-5
(CGM 742 – 2e suppl.)
38. R. Gandilhon, Politique économique de Louis XI, Paris, Presses universitaires de France, 1941,
p. 88 et 264.
39. Arch. nat., KK 64, fol. 92 ; R. Gandilhon, Politique économique…, op. cit., p. 268.
40. Arch. mun. Rouen, bibliothèque de Rouen. B. Éliot, S. Rioland, Une vue de Rouen en 1525, par
Jacques le Lieur. Extrait du Livre des Fontaines, Bonsecours, Point de vues, 2001.
41. BNF, Rés. Ge. EE. 146. M. Mauger et al. (dir.), En passant par la Vilaine. De Redon à Rennes
en 1543, Rennes, Apogée, 1997. D. Pichot, « Images du paysage : les bords de la Vilaine au
xvie siècle », Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, 78, 2000, p. 261-283.
278
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
279
juliet te dum asy-r a bine au
280
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
281
juliet te dum asy-r a bine au
52. C. Serchuk, « Cartes et Chroniques : Mapping and History in Late Medieval France », dans
R. J. A. Talbert, R. W. Unger (éd.), Cartography in Antiquity and the Middle Ages. Fresh
Perspectives, New Methods, Leyde/Boston, Brill, 2008, p. 257-276 ; ead., « Gaul Undivided :
Geography and Identity in France at the Time of the Hundred Years War », dans K. Lilley (éd.),
Mapping Medieval Cartographies, Cambridge, Cambridge University Press, 2013, p. 175-200.
53. BNF, ms. fr. 5694. La similitude très forte entre la carte de Provence et la carte de France
d’Oronce Fine, dans sa partie provençale, suggère que la première a été copiée sur la seconde.
54. Ibid., fol. 11-15.
55. Ibid., chap. XIX-XXI.
56. Père F. de Dainville, « Cartes et contestations au xve siècle », art. cité.
282
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
283
juliet te dum asy-r a bine au
63. C. Jacob, L’empire des cartes. Approche théorique de la cartographie à travers l’histoire, Paris, Albin
Michel, 1992, p. 351.
64. M. Pelletier, De Ptolémée à la Guillotière…, op. cit., p. 22 et 33.
65. Ibid., p. 93.
284
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
66. M. Boudet, Registres consulaires de Saint-Flour, Paris/Riom, Champion, 1900, p. 7-10 et 68 ;
L. Dauphant, Le royaume des Quatre rivières…, op. cit., p. 387.
67. Jean Bouteiller, Grand coutumier et practique de droict civil et canon observé en France, ou Somme
rural (1370-1392), éd. par Louis Charondas le Caron, Paris, Macé, 1621, titre 32, p. 207.
68. Pour Albi, voir note 11. Pour Maguelone, voir P. Fermon, « Les représentations des pêcheries de
Maguelone, Saint-Gilles et Lérins ou les usages de la figura dans les milieux ecclésiastiques du
milieu du xive siècle à la fin du xve siècle », dans M. Lauwers (dir.), Monastères et espace social.
Genèse et transformation d’un système de lieux dans l’Occident médiéval, Turnhout, Brepols, 2014,
p. 185-209. Pour la Meuse, voir note 18.
69. Les Institutes de praticque en matiere civile et criminelle, Paris, Jeanne de Marnef, 1545. BNF,
RES-F-2027 (2). Je n’ai pu consulter que l’édition de 1548 (Paraphrase en langage francois des
quatre livres des Institutions forenses, à Paris, chez Regnaud et Claude Chaudière).
70. Le traité De fluminibus seu Tiberiadis (1355) de Bartole, qui recommandait l’usage de figures
géométriques pour résoudre des querelles de propriété (et non de vues d’ensemble de terrain),
ne semble pas avoir joué un rôle déterminant dans l’émergence des figures judiciaires : voir la
discussion dans J. Dumasy, « La vue, la preuve et le droit… », art. cité.
71. Ibid.
285
juliet te dum asy-r a bine au
Mais les cours de justice n’ont pas été les seuls acteurs impliqués dans le
développement de la figuration judiciaire : les parties elles-mêmes ont large-
ment contribué au phénomène. Comme on l’a vu, certaines précédaient la
volonté de la cour en faisant réaliser leur propre figure, ou en obtenant de
la cour l’ordre de l’exécuter. Même dans le cas où elles n’en étaient pas les
commanditaires directs, elles en ont autorisé l’existence en la finançant. Or,
elles n’étaient pas de simples particuliers, mais des princes, des seigneurs laïcs
et ecclésiastiques ou bien des communautés urbaines ou rurales détenant des
droits de propriété, de juridiction ou d’usage sur des territoires. Le rôle de
leurs procureurs, qui étaient sans doute les meilleurs des juristes gradués de
l’université, et bien informés des pratiques recommandées par le Parlement,
est certainement déterminant. Mais ces élites ont su comprendre l’intérêt de
tels documents, et plusieurs indices montrent qu’elles n’ont pas eu une attitude
passive mais s’en sont emparées pleinement. Ainsi des milieux ecclésiastiques,
sans doute parce qu’ils étaient plus cultivés que les autres et usaient plus faci-
lement du contentieux judiciaire. On les trouve en effet parmi les acteurs des
trois premiers cas de figuration juridique (Albi, Maguelone, Meuse), et en
nombre parmi les commanditaires de figures. Certaines institutions religieuses
sont à l’origine de plusieurs plans de contentieux réalisés à quelques décennies
d’intervalle. Ainsi l’abbaye Saint-Victor de Paris est-elle liée à la confection
de trois figures entre 1466 et 1538 72, et les clercs de la cathédrale de Beauvais à
cinq entre 1508 et 1550, avec un rôle de commanditaire direct dans au moins
deux cas 73. La figuration était devenue, pour ceux-là, un outil judiciaire sinon
habituel, en tout cas connu et visiblement apprécié. On observe le même
phénomène dans le milieu des officiers princiers. Dans le Dauphiné, Antoine
Actuhier, notaire du secrétaire delphinal, a supervisé la confection des vues de
la vallée de Château-Dauphin en 1422 et des comtés de Valentinois et Diois
l’année suivante 74 ; en 1436, Mathieu Thomassin, membre de la chambre des
comptes de Dauphiné, a réalisé lui-même la figure de Bellecombe, à la suite
d’une dispute qui posait la question des limites entre Savoie et Dauphiné 75.
72. Figure des moulins de Corbeil-Essonnes (1466) : Musée des Archives nationales, AE II 2481 ;
de Puiseaux et Briarres-sur-Essonne (1497) : Arch. nat., Cartes et Plans, S 2152 ; de
Champeaux (1538) : ibid., L 898, no 52, 4.
73. Le chanoine de Beauvais Thibaut le Bastier a commandé en 1508 celle du bois de Belloy, à côté
du village d’Aux Marais près de Beauvais (arch. dép. Oise, G 910) ; l’évêque de Beauvais celle
des marais de Bresles en 1513 (ibid., plan 433, G 246). Trois autres figures ont été faites pour des
procès concernant le chapitre ou l’évêque (ibid., plan 554, plan 906 et mention dans G 246).
74. Pour Château-Dauphin : arch. dép. Isère, B 3707 à 3710, 4496 ; pour le Valentinois et Diois :
B 3501, 3504, 3505, 3495.
75. Ibid., B 3274 ; L. Dauphant, « Matthieu Thomassin et l’espace dauphinois : naissance d’un
humanisme géopolitique (1436-vers 1456) », Journal des savants, 1, 2008, p. 57-105.
286
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
Même chose en Bourgogne, avec la série déjà citée de cartes des enclaves royales
commanditée par les officiers ducaux dans les années 1444-1466 76. Les autorités
urbaines ne paraissent pas en reste : dès le début de la période elles sont mêlées
à des affaires ayant occasionné la confection d’une figure, comme le montre le
cas d’une vue des murailles de Saint-Flour financée par les consuls lors d’un
procès qui les opposait à l’évêque devant le Parlement de Paris 77. Dans d’autres
cas il est avéré qu’elles ont pris elles-mêmes l’initiative de la figuration : ainsi les
consuls d’Avignon ont-ils commandé plusieurs portraits de leur ville dans les
années 1480-1490 dans le cadre d’un conflit avec les officiers royaux 78, tandis
que les consuls de Millau et de Rodez ont été à l’origine directe de la confec-
tion de trois plans de contentieux entre 1495 et 1504 79. Les élites municipales
pouvaient même s’en servir pour porter une revendication ou un projet poli-
tique : en 1544, les consuls d’Ambert firent confectionner une carte de la Basse
Auvergne pour appuyer leur requête auprès du Conseil privé du roi d’accéder
au statut de bonne ville, après que l’Assemblée des bonnes villes d’Auvergne
leur eut refusé cette promotion 80. Il est clair que, aiguillés par leurs avocats
et officiers, les pouvoirs territoriaux, qu’ils soient souverains, seigneuriaux ou
municipaux, ont pris à leur compte l’usage de la figuration judiciaire.
Le rôle des autorités territoriales se manifeste également dans les com-
mandes de plans d’aménagement. Les princes chefs de guerre font établir des
plans de siège, on l’a vu, ou des relevés en prévision d’opérations militaires :
de façon anecdotique mais néanmoins révélatrice, une figure de la région
entre Joigny et Auxerre a été faite par un peintre en 1476 à la demande de
Charles le Téméraire, en prévision d’une rencontre avec Louis XI : le souvenir
de Montereau devait hanter le duc 81… Les villes commandent pour leur part
des plans de fortifications, sur ordre du prince ou de leur propre initiative, en
287
juliet te dum asy-r a bine au
82. T. Lévy, « Mysteres » et « joyeusetés » : les peintres de Lyon autour de 1500, thèse de doctorat de
l’université Paris 4-Sorbonne, 2013, t. 1, p. 170, et t. 2, p. 377.
83. La première attestée date de 1469 ; suivront beaucoup d’autres. Voir G. Durand, « Peintres
d’Amiens… », art. cité ; C. Serchuk, « À la limite… », art. cité.
84. Voir P. Boucheron, Conjurer la peur. Sienne, 1338, Paris, Seuil, 2013.
85. J. Paviot, « Les cartes et leur utilisation… », art. cité.
288
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
justifie le choix de ce cadeau par le souvenir de son aïeul le roi René, qui,
comme les « souverains empereurs et roys » du temps passé, se délectait « a avoir
la cognoissance de toutes les provinces et diverses nations qui sont au monde
universel 86 ». Cet exercice d’écolier prouve aussi que la géographie et les cartes
faisaient partie de l’éducation des princes, comme l’atteste également le très
beau portulan illustré fait pour le futur François Ier au début du xvie siècle 87.
Il est probable que de leur côté, les clercs de haut niveau et les édiles munici-
paux qui étaient passés par l’université connaissaient au moins l’existence de
mappemondes et de cartes, et qu’une partie d’entre eux en avaient vu dans
des manuscrits à un moment ou un autre de leurs études ou carrières 88, sans
compter le recours à la figuration dans les manuscrits savants.
Ainsi, on peut formuler l’hypothèse selon laquelle, entre le xive et le début
du xvie siècle, les autorités – royales, princières, seigneuriales, urbaines –, par
l’intermédiaire des gens de justice, des architectes et des peintres, et par l’élé-
vation de leur niveau de culture générale, se sont familiarisées avec les repré-
sentations figurées de l’espace, et ont progressivement intégré cette pratique
jusqu’à en user de leur propre chef. Elles ont donc joué un rôle important dans
l’émergence des cartes et plans locaux, par leur financement et leur commande,
et les ont utilisés de façon plus importante que ce que l’on a cru. Cependant
de nombreuses questions subsistent sur la part qui leur revient précisément, et
celle qui revient aux juristes, aux architectes et aux peintres.
Force est de constater que les élites ont restreint cette pratique à des fins
bien précises (les contentieux et les travaux d’aménagement), et que dans leurs
autres domaines d’action, elle est restée modeste. Dans la gestion seigneuriale,
par exemple : on a vu que les plans parcellaires sont très peu nombreux. Les
seigneurs et leurs gestionnaires n’ont manifestement pas considéré comme
utile de représenter de manière graphique leurs possessions. Dans la pratique
administrative quotidienne ensuite ; tout au plus a-t-on pu repérer quelques
figures, dont l’usage d’ailleurs n’est pas toujours bien établi. Dans la mesure
où il s’agit d’instruments de travail sans valeur probatoire, destinés à un usage
interne, il est possible que ces documents n’aient pas été conservés. Mais
cette absence semble trop marquée pour être un simple effet de source. Il
semble que, sauf exception et hors contexte conflictuel, les agents du pouvoir
ne recouraient guère à la figuration pour organiser leur travail administratif,
289
juliet te dum asy-r a bine au
89. R. Fawtier, « Comment le roi de France, au début du xive siècle, pouvait-il se représenter
son royaume ? », dans Mélanges offerts à M. Paul-E. Martin par ses amis, ses collègues, ses élèves,
Genève, Comité des mélanges P.-E. Martin (Mémoires et documents publiés par la Société
d’histoire et d’archéologie de Genève, 40), 1961, p. 65-77.
90. L. Dauphant, Le royaume des Quatre rivières…, op. cit.
91. Le sujet est vaste : on proposera quelques pistes de lectures parmi d’autres : De l’estime au
cadastre en Europe (xiiie-xviiie siècle). Le Moyen Âge, Actes du colloque organisé par le Comité
pour l’histoire économique et financière de la France (Bercy, 11-13 juin 2003), Paris, Comité
pour l’histoire économique et financière de la France, 2006 ; Construction de l’espace au Moyen
Âge : pratiques et représentations, Actes du XXXVIIe Congrès de la SHMESP (2006), Paris,
Publications de la Sorbonne, 2007 ; C. Gauvard (coord.), L’enquête au Moyen Âge, Rome, École
française de Rome, 2009.
92. Le terme est attesté dans un document de 1513, arch. dép. Oise, G 246.
93. Voir par exemple la façon dont l’auteur de la vue figurée de la baronnie de Sévérac-le-Château
(qui représente un espace d’une cinquantaine de kilomètres de long, sur une vingtaine de large)
a procédé : J. Dumasy, Le feu et le lieu… [CTHS], op. cit., p. 53-63.
290
Cartes et figures de l’espace français, xiv e -x vi e siècle
Mais au-delà d’une certaine dimension, ils n’en avaient pas la compétence : les
figures de dimension régionale (comme celles du Gapençais ou du comté de
Grignan 94) sont en effet très approximatives et n’offrent qu’une information
partielle sur les lieux figurés, d’un intérêt limité. On peut même se demander
si la sorte de monopole acquis en France par les peintres – qui étaient déjà en
contact avec les milieux de pouvoir par le biais de la commande artistique –
pour faire des figures n’a pas retardé l’apparition de cartographes et de cartes
topographiques « modernes ». Il faut attendre des hommes comme Oronce
Fine ou Jolivet, formés à la géométrie et aux méthodes ptoléméennes, pour que
de telles cartes soient établies et portées à la connaissance des élites, par le fait
que leurs auteurs se placent sous leur patronage. Ce seraient ces hommes qui,
comme les juristes, les peintres et les architectes en leur temps, auraient amené
les pouvoirs à faire usage de cette cartographie. Sur toutes ces questions, une
comparaison avec d’autres pays européens serait instructive.
Conclusion
Les figures de l’espace français faites entre la fin du Moyen Âge et le début de
la Renaissance apparaissent bien plus nombreuses et courantes que ce que l’on
a longtemps cru. Avant les années 1520, elles n’étaient pas établies pour pro-
duire un savoir topographique en tant que tel, mais faites de manière contin-
gente et utilisées comme des outils : beaucoup ont été produites dans un cadre
judiciaire, pour procéder à un jugement ou régler un contentieux ; d’autres,
pour servir de relevé ou de plan-projet pour des aménagements militaires ou
civils ; plus rarement, pour enregistrer des droits fonciers ou pour donner à voir
l’espace politique où s’exerce une souveraineté ou une administration. Toutes
répondaient aux besoins de commanditaires qui étaient dépositaires d’une
autorité territoriale : les rois et les princes avec leurs cours de justice et leurs
agents, les villes, les seigneurs fonciers laïcs et ecclésiastiques. Ces derniers ont
donc joué un rôle majeur dans l’essor des représentations de l’espace à grande
échelle. Mais s’ils ont adopté cet usage, ils l’ont davantage amplifié qu’initié :
il semble que c’est plutôt aux gens de justice, aux peintres, aux architectes, aux
hommes de l’art pourrait-on dire, que l’on doit l’essor de ces figures. Les pou-
voirs n’ont pas, de fait, particulièrement encouragé la production de cartes sur
l’espace politique qu’ils gouvernaient. Néanmoins, cette période est celle où,
291
juliet te dum asy-r a bine au
292
La géographie au service des princes : cartes,
inventaires et descriptions des territoires,
xvi e -xvii e siècle
axelle chassagnette
Maître de conférences en histoire moderne,
université Lumière – Lyon 2/LARHRA (UMR 5190)
1. Voir N. Broc, La géographie de la Renaissance, 1420-1620, Paris, Éd. du Comité des travaux
historiques et scientifiques, 1986 ; J.-M. Besse, Les grandeurs de la Terre. Aspects du savoir géo-
graphique à la Renaissance, Lyon, ENS Éditions, 2003.
2. D. Woodward (dir.), History of Cartography, vol. 3 : Cartography in the European Renaissance,
Chicago/Londres, University of Chicago Press, 2007 ; id., Five Centuries of Map Printing,
Chicago, University of Chicago Press, 1975.
3. G. Atkinson, La littérature géographique française de la Renaissance, Paris, Picard, 1927.
293
a x elle ch assagnet te
4. D. Woodward, Maps as Prints in the Italian Renaissance : Makers, Distributors and Consumers,
Londres, The British Library, 1996 ; voir également les contributions sur la cartographie et la
littérature dans id. (dir.), History of Cartography, op. cit. : T. Conley, « Early Modern Literature
and Cartography : an Overview », p. 401-411 ; H. S. Turner, « Literature and Mapping in
Early Modern England, 1520-1688 », p. 412-426 ; N. Bouzrara, T. Conley, « Cartography and
Literature in Early Modern France », p. 427-437 ; F. Reitinger, « Literary Mapping in German-
Speaking Europe », p. 438-449 ; T. J. Cachey Jr., « Maps and Literature in Renaissance Italy »,
p. 450-460.
5. Cette question a déjà fait l’objet d’un ouvrage collectif : D. Buisseret (dir.), Monarchs, Ministers
and Maps : the Emergence of Cartography as a Tool of Government in Early Modern Europe,
Chicago, University of Chicago Press, 1992.
6. André Rivet, Instruction du prince chrétien par dialogues, Leyde, Ian Maire, 1642, p. 47-48.
294
La géographie au service des princes
7. F. Fiorani, « Cycles of Painted Maps in the Renaissance », dans D. Woodward (dir.), History of
Cartography, op. cit., p. 804-827.
8. Pour un inventaire et une étude des productions cartographiques nationales en lien avec les
gouvernements, voir D. Buisseret (dir.), Monarchs, Ministers and Maps…, op. cit. L’ouvrage,
qui rassemble une série de conférences « Kenneth Nebenzahl Jr. » en histoire de la cartogra-
phie, met en lumière des chronologies disparates dans l’adoption des cartes comme outils de
gouvernement, et le rôle essentiel que pouvait jouer dans ce domaine l’intérêt personnel du
prince.
9. R. Hervé, « L’œuvre cartographique de Nicolas de Nicolay », Bulletin de la section de géographie
du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1956, p. 223-263 ; F. Lestringant, M. Pelletier,
« Maps and Descriptions of the World in Sixteenth-Century France », dans D. Woodward
(dir.), History of Cartography, op. cit., p. 1463-1479, en particulier p. 1468-1471.
295
a x elle ch assagnet te
10. D. Buisseret, « Spanish Peninsular Cartography, 1500-1700 », dans D. Woodward (dir.),
History of Cartography, op. cit., p. 1069-1094 ; C. Koeman, M. Van Egmond, « Surveying and
Official Mapping in the Low Countries, 1500-ca. 1670 », dans D. Woodward (dir.), History of
Cartography, op. cit., p. 1246-1295.
11. B. Mundy, The Mapping of New Spain : Indigenous Cartography and the Maps of the Relaciones
Geograficas, Chicago, University of Chicago Press, 2000.
12. R. W. Karrow, Mapmakers of the Sixteenth Century and their Maps. Bio-Bibliographies of the
Cartographers of Abraham Ortelius, 1570, Chicago, Speculum Orbis Press, 1993, p. 64-70 ;
S. Günther, Peter und Philipp Apian. Zwei deutsche Mathematiker und Kartographen. Ein Beitrag
zur Gelehrten-Geschichte des XVI. Jahrhunderts, Prague, Verlag der königlichen böhmischen
Gesellschaft der Wissenschaften (Abhandlungen der königlichen böhmischen Gesellschaft der
Wissenschaften. VI. Folge. 11. Band), 1882.
296
La géographie au service des princes
13. L. Schmidt, Kurfürst August von Sachsen als Geograph. Ein Beitrag zur Geschichte der Erdkunde,
Dresde, Druck und Verlag von Wilhelm Hoffmann Kunstanstalt auf Aktien, 1898 ; H. Torke,
Matthias Öder in der Sächsischen Schweiz. Öders Nachlaß vom Bild der Landschaft am Ende des
16. Jahrhunderts, Pirna, Stadtmuseum, 2002.
297
a x elle ch assagnet te
14. Voir notamment D. Buisseret (dir.), Monarchs, Ministers and Maps…, op. cit., introduction.
298
La géographie au service des princes
15. Pour une discussion sur la question du secret dans la péninsule ibérique, voir notamment
A. Sandman, « Spanish Nautical Cartography in the Renaissance », dans D. Woodward (dir.),
History of Cartography, op. cit., p. 1095-1142.
16. K. H. Burmeister, Sebastian Münster. Versuch eines biographischen Gesamtbildes, Bâle/Stuttgart,
Helbing & Lichtenhahn (Baseler Beiträge zur Geschichtswissenschaft, 91), 1969 ; id., Sebastian
Münster, eine Bibliographie, Wiesbaden, Pressler, 1964.
17. G. Strauss, Sixteenth-Century Germany. Its Topography and Topographers, Madison, University
of Wisconsin Press, 1959.
299
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300
La géographie au service des princes
301
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302
La géographie au service des princes
303
a x elle ch assagnet te
29. A. Chassagnette, « Échelles, milieux et paysages : les éléments naturels dans les cartes alle-
mandes au xvie siècle », Le Monde des Cartes, 199, 2009, p. 147-156.
30. A. Gotthard, In der Ferne : die Wahrnehmung des Raums in der Vormoderne, Francfort-sur-le-
Main, Campus Verlag, 2007.
31. R. W. Karrow, Mapmakers of the Sixteenth Century…, op. cit., p. 371-375.
32. P. H. Meurer, « Die Wittenberger Universitätsmatrikel als kartographiegeschichtliche Quelle »,
dans H. P. Brogiato, H.-M. Closs (dir.), Geographie une ihre Didaktik. Festschrift für Walter
Sperling, Trèves, Geographische Gesellschaft, 1992, vol. 2, p. 201-212.
304
La géographie au service des princes
33. Cet ouvrage a fait l’objet d’une édition fac-similé : Johannes Mellinger Atlas des Fürstentums
Lüneburg um 1600, éd. par P. Aufgebauer et al., Bielefeld, Verlag für Regionalgeschichte, 2001.
34. Sur l’utilisation de la figure du lion (et plus généralement des figures animales issues de l’héral-
dique) dans la cartographie européenne de l’époque moderne, voir notamment L. Baridon, Un
atlas imaginaire. Cartes allégoriques et satiriques, Paris, Citadelles & Mazenod, 2011, p. 44-57.
L’historien d’art analyse différentes versions cartographiques du Leo Belgicus.
305
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306
La géographie au service des princes
Fig. 3 – Michael von Aitzing, Leo Belgicus, 1583. Gravure sur cuivre.
35. L. Baridon, Un atlas imaginaire…, op. cit., p. 57 ; A. Chassagnette, « Le jeu des échelles. Le
pouvoir et son inscription spatiale dans les cartographies et les descriptions du Saint-Empire
et de ses territoires au xvie siècle », Astérion. Philosophie, histoire des idées, pensée politique, 10,
2012, revue en ligne à l’adresse suivante : http://asterion.revues.org/2274.
307
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Fig. 4 – Wolfgang Lazius, Ducatus Carniolae, 1561. Gravure sur bois enluminée.
308
La géographie au service des princes
36. M. Pelletier, La carte de Cassini. L’extraordinaire aventure de la carte de France, Paris, Presses de
l’École nationale des Ponts et Chaussées, 1990.
309
a x elle ch assagnet te
fonction à ces documents, on la trouvera sans doute avant tout dans le support
qu’elles offrent à la communication symbolique : la représentation graphique de
l’espace, associée à différents symboles, sert l’affirmation et la légitimation du
pouvoir, auxquelles on associe souvent une évocation laudative des princes et
de ses territoires. Il faut d’ailleurs souligner, une fois encore, que cette intention
échappe souvent aux cercles mêmes du pouvoir, puisqu’un nombre croissant des
cartes et descriptions qui célèbrent nations et territoires émanent des milieux
universitaires et savants, et des ateliers de graveurs spécialisés dans le savoir géo-
graphique. La géographie est au service des princes, donnée à lire à tous ceux qui
les fréquentent et les entourent, et plus encore à un très large public européen.
310
iv
léonard dauphant
Université de Lorraine, Metz
313
léona r d dauph a nt
Comment le ressort royal défini par les Quatre rivières remodèle-t-il l’espace
français ? Pour répondre, il faut distinguer l’intérieur du royaume et l’espace
de la frontière.
3. Traité de Paris, 28 mai 1258, ratifié le 4 décembre 1259 avec l’hommage d’Henri III.
4. Arch. nat., J 629, Angleterre, III, no 4.
5. L. Dauphant, « La rivalité des pardons. Géographie politique de la grâce dans le royaume de
France et les Pays-Bas bourguignons, de Charles VI à François Ier », Revue historique, 665, 2013,
p. 57-88.
314
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
315
léona r d dauph a nt
10. La complémentarité des deux notions avait déjà été énoncée par L. Febvre, « Frontière, le mot
et la notion », dans Pour une histoire à part entière, rééd. B. Mazon, Vivre l’histoire, Paris, Robert
Laffont/Armand Colin, 2009, p. 387-388.
316
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
11. K. Daly, « “Centre”, “Power” and “Periphery” in Late Medieval French Historiography : some
Reflections », dans C. Allmand (dir.), War, Government and Power in Late Medieval France,
Liverpool, Liverpool University Press, 2000, p. 132 ; D. Vondrus-Reissner, « La formule “par la
grâce de Dieu” dans les actes de Jean IV d’Armagnac », Bibliothèque de l’École des chartes, 151/1,
1993, p. 172 et 176-177.
12. Gilles le Bouvier, Le Livre de la Description de Pays, éd. par É.-T. Hamy, Paris, Leroux, 1908,
p. 30-52 (royaume) et 54-55 (Dauphiné).
317
léona r d dauph a nt
Le discours des Quatre rivières est un discours d’État, énoncé d’en haut ou du
centre contre les concurrents de la monarchie. Il impose une représentation
générale à très petite échelle, qui ne prend pas en compte les réalités multiples
du terrain et, de fait, rares sont les segments frontaliers effectivement fixés sur
le cours des rivières. Il s’agit d’une stylisation, mais, en descendant à l’échelon
local, trouve-t-on un véritable contrôle de la limite par le pouvoir central ou
la limite est-elle une marge contrôlée indirectement ?
Marquer ou déléguer
Les situations locales ou micro-locales semblent très diverses. Examinons
trois cas concrets qui offrent trois degrés de domination de la limite, nulle (les
Pyrénées) ou plus ou moins indirecte (le Roussillon et la Champagne orientale).
Dans les hautes vallées des Pyrénées, il n’y a pas d’officiers royaux. Les
communautés des vallées françaises et castillanes marquent leurs limites sur
les crêtes et régulent elles-mêmes leurs conflits frontaliers selon des modes
traditionnels : guerres mitoyennes et malédictions, traités (« faceries ») et tributs
saisonniers 14. Ces vallées demeurent longtemps hors de portée des pouvoirs
castillans et français. Au début du xvie siècle, elles signent des paix séparées
pour ne pas participer aux guerres entre Capétiens et Habsbourgs. La frontière
n’est fixée par les États que sous Napoléon III 15.
13. Philippe de Commynes, Mémoires, éd. par J. Blanchard, Genève, Droz, 2007, t. 1, p. 443-444
(livre 6, chap. 2).
14. J.-P. Allinne, « Frontière négociée, frontière disputée. Une représentation coutumière des conflits
frontaliers dans les Pyrénées sous l’Ancien Régime », dans M. Lafourcade (dir.), La frontière
franco-espagnole, lieu de conflits interétatiques et de collaboration interrégionale, Bordeaux, Presses
universitaires de Bordeaux, 1998, p. 43 ; J.-P. Barraqué, « Du bon usage du pacte : les passeries
dans les Pyrénées occidentales à la fin du Moyen Âge », Revue historique, 124/1, 2000, p. 309-310.
15. M. Lafourcade, « La frontière franco-espagnole, lieu de conflits interétatiques et de collabora-
tion interrégionale », dans id. (dir.), La frontière franco-espagnole…, op. cit., p. 9-12.
318
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
La situation est fort différente dans les collines de l’est du massif, entre le
Fenouillèdes et le Roussillon aragonais. Le traité de Corbeil définit la frontière
en 1258 ; elle dure jusqu’à l’annexion du Roussillon en 1648. Cette frontière
est contrôlée et puissamment fortifiée dès le règne de saint Louis 16, comme en
témoigne le « gigantisme » de la forteresse de Peyrepertuse 17. On peut cepen-
dant remarquer qu’après le xiiie siècle, la monarchie se contente d’entretenir
sans vraiment moderniser : côté français, on ne trouve rien d’équivalent au
fort catalan de Salses (v. 1497-1502), modèle d’architecture militaire moderne.
Le marquage de la frontière est également une réalité, dont on conserve
trois bornes. L’une d’entre elles, datée de 1617, est dite « la Roque d’en Talou 18 ».
Il s’agit d’un rocher remarquable, marqué d’un côté de la croix d’Aragon et
de l’autre des armes du seigneur du village de Latour (Montesquieu). Ici, le
pouvoir capétien semble s’être progressivement éloigné, jusqu’à déléguer le
bornage aux notables locaux, induisant un marquage asymétrique de la limite.
En Champagne orientale, dans le bailliage de Chaumont, la situation
est encore différente. Le centre de contrôle royal est la forteresse et le péage
d’Andelot. En retrait de la limite, il surveille une route qui est une des « issues
du royaume » : depuis la fin du xiiie siècle, la monarchie a organisé et sécurisé
un itinéraire obligatoire pour les marchands, jalonné de péages 19. Ce seuil reste
très en retrait de la frontière de Barrois et de Lorraine. À la fin du xve siècle, le
bailli de Chaumont est Jean de Baudricourt, cinquième de six baillis issus de
la même famille de 1385 à 1516 20. Baudricourt achète la seigneurie de Lafauche,
située sur la route entre Andelot et la ville lorraine de Neufchâteau, juste sur
la limite du royaume. Il y construit un énorme château doté de 18 tours adap-
tées à l’artillerie. Gouverneur de Bourgogne, il construit de grandes citadelles
d’État à Dijon, Auxonne et Beaune ; ici, il semble réutiliser les techniques de
fortifications mises au point pour le roi (et sans doute les techniciens) 21. Dans
le bailliage de Chaumont, la monarchie n’est ni loin ni près : elle délègue
ses intérêts locaux à une dynastie. La confusion est donc complète entre le
16. L. Bayrou et al., Archéologie du Midi médiéval, 3, 2000 [supplément] : Peyrepertuse. Forteresse
royale, p. 32 et carte de la frontière p. 33.
17. Ibid., p. 130.
18. Borne située sur le territoire de Latour-de-France (Pyrénées-Orientales, ancien côté français),
face à Montner (côté catalan). Une autre borne, maçonnée et non datée, ne porte plus qu’une
croix d’Aragon (située entre les finages de Bélesta et de Montalba [Pyrénées-Orientales, ancien
côté français] et d’Ille-sur-Têt [côté catalan]).
19. R.-H. Bautier, « La route française et son évolution au cours du Moyen Âge », Académie royale
de Belgique. Classe des lettres et des sciences morales et politiques. Bulletin, 5/73, 1987, reprint
dans id., Sur l’histoire économique de la France médiévale. La route, le fleuve, la foire, Aldershot,
Variorum, 1991, t. 1, p. 90-91.
20. Généalogie dans L. Dauphant, Le royaume des Quatre rivières…, op. cit., p. 326.
21. Ibid., p. 320.
319
léona r d dauph a nt
22. Lieu-dit l’Arbret, commune de Bavincourt, sur la route de Doullens à Arras (parallèle à la
Chaussée-Brunehaut), mentionné au xiiie siècle. Sous Louis XV, Cassini y place un relais de
320
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
poste. Mais la limite entre Artois et Picardie est alors plus au sud-ouest, entre Doullens et
Pommera (aujourd’hui limite départementale signalée par un « Calvaire Saint-Christophe »).
23. Aujourd’hui l’Arbre de Guise, commune de Mazinghien, Nord, à la limite du département de
l’Aisne.
24. Réponse de M. de Vitry, qui vient de trahir la Ligue et livrer Meaux à Henri IV, à une lettre
de menace de M. de Rhône ; citée dans B. Capefigue, Histoire de la Réforme, de la Ligue et du
règne de Henri IV, Paris, Dufey, 1834-1835, t. 7, p. 110 (note).
25. Mentionné dans le tonlieu de Saint-Vaast (1036) cité par J.-L. Auduc, « Bapaume : un carrefour
routier aux xiiie et xive siècles », dans Centre culturel de l’abbaye de Flaran, L’homme et la route
en Europe occidentale au Moyen Âge et aux Temps modernes, Auch, Commission d’histoire de
Flaran, 1982, p. 242.
26. Ancien lieu-dit la Motte-Bérenger, commune du Transloy (Nord), au sud du lieu-dit l’Abbaye.
Le site a été bouleversé par la construction de l’autoroute A2.
27. Les Grandes Chroniques de France, vol. 6 : Louis VII le Jeune et Philippe II, éd. par J. Viard, Paris,
Société de l’Histoire de France, 1930, p. 130.
28. J.-L. Auduc, « Bapaume : un carrefour routier… », art. cité, p. 244.
29. Layettes du Trésor des Chartes, éd. par A. Teulet, Paris, Plon, 1866, t. 2, no 1639, p. 26.
30. Un arrêt du Parlement de 1345 évoque les aubenorum seu personarum ultra territorium Berengarii
oriundarum. Un arrêt des Grands Jours de Troyes de 1391 déclare aubain, « selon la coustume
de Champaigne […] auculne personne nee de oultre le tron Beranger » : B. d’Alteroche, De
l’étranger à la seigneurie à l’étranger au royaume (xie-xve siècles), Paris, LGDJ, 2002, p. 101, qui
ne parvient pas à identifier l’arbre en question.
321
léona r d dauph a nt
Luglianus, ces deux frères irlandais partis en pèlerinage d’Irlande à Rome sont
martyrisés à Lillers en Artois (vers la fin du viie siècle ou au début du viiie) 31.
La Vita précise qu’ils ont été tués par trois frères bandits, Bovo, Exelmus et
Berengerius. À la fin du xiie siècle, Gautier, abbé d’Arrouaise, inclut dans son
cartulaire abbatial une Vita des deux saints. Il déplace alors leur légende en
Arrouaise : son abbaye est construite à côté d’un tumulus qui est la tombe d’un
des trois bandits, Bérenger. Sur la tombe est planté un arbre : le Tronc Bérenger
(fig. 4). Ainsi, depuis la fondation du monastère, la spelunca latronum est
devenue une maison de prière 32 ; la Strata publica devient une Via Sanctorum 33.
Au xve siècle, ces légendes sont sécularisées et rattachées à la frontière poli-
tique. En 1442, une enquête compile les tarifs du péage de Bapaume pour le
duc de Bourgogne. L’enquête est précédée par un récit des origines raconté par
le péager lui-même :
Jadis en temps passé ce que nous avons oy de nos prédécesseurs furent
toutes forestz entre Lens et Péronne, où que estoit le grant chemin de
Franche en Flandres. Sy passoit par là toute marchandise qui de lung
pays aloit en l’autre, car il y avoit pau d’autres chemins. Sy estoit le
chemin périlleux par les dictes forestz, car il y avait des robeurs pluseurs,
31. Acta Sanctorum, Octobris t. X, 23-24, Anvers, Bollandistes, 1861, p. 108-122. Leurs reliques sont
conservées sur place et à Montdidier en Picardie.
32. Éd. dans M. Gosse, Histoire de l’abbaye et de l’ancienne congrégation des chanoines réguliers
d’Arrouaise, Lille, Danel, 1786, p. 535 : hic itaque locus super stratam publicam constitutus, in
silva que dicitur Arida-Gamantia situs, que quidem silva a Castro quod Encra dicitur usque ad
fluvium Sambre tunc temporis continua protendebatur, olim spelunca latronum fuerat, unde &
hunc quidam Truncum Berengarii ad ejusdem nominis latronum principe vulgo denominant.
33. Ibid., p. 8, note e : « Maillart dit que ce Chemin est appelé dans les anciens MS, Via Sanctorum.
Mercure de France, 1737, p. 1523 ».
322
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
entre lesquelz estoit ung appellez Bérengiers, qui fut gayans et demeuroit
au troncq Bérengier emprès l’abbaye d’Arouaise, et ung autre ses frères
demouroit emprez l’abbeye Nostre-Dame d’Yaucourt 34 à Coppegueulle,
qui, pour les fais que on y fist d’icelluy temps, en porte encoires le nom
de Coppegueulle […] 35.
Selon le péager, les marchands obtiennent l’intervention du comte Baudouin
de Flandre 36, qui construit une tour à Bapaume et rase la forêt pour chasser les
brigands. La fixité des limites contraste avec les changements du paysage (de la
forêt à l’openfield) et des monuments (le péager affirme que la tour de Bapaume
a été détruite en 1335). Dans cette enquête ducale, les saints martyrs ont dis-
paru, la mémoire de la frontière s’est sécularisée. Ce n’est plus l’abbaye qui
pacifie la région, mais le comte de Flandre, héros civilisateur et prédécesseur de
Philippe le Bon, qui rase la forêt et fonde Bapaume. Les officiers ont remplacé
les bandits sur les lieux de leurs forfaits et les moines dans la transmission de
la mémoire ; les abbayes ne sont plus que les sites des bureaux de douane. Mais
c’est toujours autour du Tronc Bérenger que s’organisent l’espace et le temps,
dans un vertigineux passage des origines féodales et monastiques à l’émergence
de l’État fiscal moderne.
323
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324
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
43. 11 ont un nom propre ou dialectal sur 28, identifié comme francoprovençal : « violet » pour
chemin, « molard » pour colline, « rui » pour ru ; ou comme occitan : « gaysson » pour drageon.
44. Arch. dép. Isère, B 3870 (fin xive siècle) et B 3872 (1433).
45. La Pierre Hachée, le Crest Alliod, le poirier Putet et le noyer de Basin. La plupart des topo-
nymes cités sont impossibles à identifier, soit éphémères, soit détruits par l’aménagement
brutal de la vallée (drainage et remembrement) au xxe siècle.
46. La construction du château des Marches par le comte de Savoie (années 1340) a bouleversé
l’équilibre de la zone. Mais le souvenir de l’ancienne limite demeure peut-être.
325
léona r d dauph a nt
Nombre d’entre eux sont des points qui organisent des lignes abstraites, « en
tirant droit » de l’un à l’autre. Seuls quelques-uns sont vraiment ancrés dans les
pratiques, telle la Pierre Hachée. Cet énorme bloc de pierre marque le paysage
au pied de la Chartreuse ; il est toujours cité dans les enquêtes et existe encore
comme lieu-dit 47. Mais d’autres n’apparaissent que dans une source : la maison
de Michel Rosier, dessinée sur la carte de Thomassin, est éphémère. La pratique
du seuil localement prestigieux contrarie la logique de la ligne, définie par le
pouvoir mais difficile à ancrer dans le paysage.
47. La Pierre Hachée, commune des Marches, Isère. Le rocher est proche des Abîmes de Myans,
un vaste champ de pierres issu de l’effondrement d’un des sommets de la Chartreuse, le mont
Granier, à la fin du xiiie siècle.
48. « Le Maire Thierry de Reynel […] disait aussi que qui tirerait au cordeau depuis le Val de
l’Orne, là où furent mises les bornes, jusqu’au milieu de la rivière qui passe par Verdun, le
cordeau serait tout droit de l’un à l’autre en allant aval. De même, le cordeau serait tout droit
si on le tirait depuis le val de l’Orne jusqu’en amont, à la source de la Meuse, qui est près de
Montigny-le-Roi. C’est ce qu’il pense et ce qu’on pense au pays. Mais en allant aval, la rivière de
Meuse fait des méandres jusqu’à Saint-Mihiel, et après elle descend tout droit jusqu’à Mézières.
On pense communément au pays que c’est pour cela que ces bornes furent posées. Et on dit
encore que les charretiers bourguignons qui viennent de la région des sources de Meuse ne
suivent pas la rivière pour aller à Mézières mais tiennent les hauts, en suivant la ligne des bornes
car s’ils suivaient le cours de la rivière de Meuse, ils devraient trop tourner, car la rivière a trop
de méandres » : « Information faite par ordre du conseil de France 1490 touchant les limites du
Royaume de France devers la Lorraine & les bornes mises à l’entreveue de l’empereur Albert I
& du Roy Philippes le Bel devers Vaucouleur », dans Gottfried Wilhelm Leibnitz, Codex Juris
gentium diplomaticus […], Hanovre, S. Hammonii, 1693, t. 1, p. 453-456. Je traduis.
326
Frontière idéelle et marqueurs territoriaux du royaume des Quatre rivières
Conclusion
49. J. Richard, « Les débats entre le roi de France et le duc de Bourgogne sur la frontière du
royaume à l’ouest de la Saône : l’enquête de 1452 », Bulletin philologique et historique du Comité
des travaux historiques et scientifiques, 1964 : Actes du LXXXIXe Congrès des sociétés savantes, 1964,
p. 127.
50. Information aimablement communiquée par M. J.-M. Moeglin.
51. Pour la France : L. Dauphant, Le royaume des Quatre rivières…, op. cit., p. 48-50 ; pour l’Italie :
O. Redon, « Sur la perception des espaces politiques dans l’Italie du xiiie siècle », dans S. Gensini
(éd.), Le Italie del tardo Medioevo, Pise, Pacini, 1990, p. 51-70.
327
léona r d dauph a nt
52. M. Foucher, L’invention des frontières, Paris, Fondation pour les études de défense nationale,
1987, p. 37.
53. J. Rigault, « La frontière de la Meuse, l’utilisation des sources historiques dans un procès devant
le Parlement de Paris en 1535 », Bibliothèque de l’École des chartes, 106/1, 1945-1946, p. 80-99.
328
Se représenter l’espace sans carte
Pratiques d’écriture de la Chambre apostolique
au xive siècle
valérie theis
École normale supérieure de Paris
329
va lér ie theis
tour nourri les recherches autour des questions portant sur l’affirmation des
pôles de sacralité, les processus de déterritorialisation et de reterritorialisation
et la construction progressive des territoires ecclésiastiques 3. Ils ont permis
de tisser de nouveaux liens entre les problématiques concernant l’exercice du
pouvoir à l’époque féodale et celles portant sur la réforme dite grégorienne,
qui avaient été disjointes d’une manière préjudiciable à la compréhension des
mécanismes sociaux de cette période. De nombreux débats sont nés de l’usage
fait par Michel Lauwers du concept d’inecclesiamento, dont le succès rapide a
fait surgir un certain nombre de difficultés, sur lesquelles il est revenu dans ses
travaux les plus récents 4. Cependant, au-delà de ces difficultés, un des grands
apports de ces recherches a été de redonner une place importante à la question
des représentations de l’espace, qui n’avait jamais été au cœur du modèle de
l’incastellamento, alors qu’elle occupe une place centrale dans les études sur
l’inecclesiamento et, plus largement, sur la spatialisation du sacré 5.
de l’homme, 1996, p. 103-122 ; id., « Structure et évolution des représentations de l’espace dans
le haut Moyen Âge occidental », dans Uomo e spazio nell’alto Medioevo, Spolète, Centro italiano
di studi sull’alto Medioevo, 2003, p. 91-116.
3. M. Lauwers, Naissance du cimetière : lieux sacrés et terre des morts dans l’Occident médiéval, Paris,
Aubier (Collection historique), 2005 ; D. Iogna-Prat, La Maison Dieu : une histoire monumen-
tale de l’Église au Moyen Âge, v. 800-v. 1200, Paris, Seuil (Points. Histoire), 2012 ; M. Lauwers,
L. Ripart, « Représentation et gestion de l’espace dans l’Occident médiéval (ve-xiiie siècle) »,
dans J.-P. Genet (dir.), Rome et l’État moderne européen, Rome, École française de Rome, 2007,
p. 97-114 ; F. Mazel (dir.), L’espace du diocèse : genèse d’un territoire dans l’Occident médiéval,
ve-xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes (Histoire), 2008 ; Cahiers de Fanjeaux,
46 : Lieux sacrés et espace ecclésial (ixe-xve siècle), 2011.
4. Dans son article « De l’incastellamento à l’inecclesiamento… », art. cité, p. 323, M. Lauwers a
insisté sur le fait que de son point de vue, il n’avait jamais été question de mettre en concur-
rence l’inecclesiamento et l’incastellamento : « La mise en valeur du rôle polarisateur des lieux
sacrés ou, pour le dire autrement, la relative substitution des “églises” aux “châteaux” dans
l’historiographie récente de l’espace féodal a pu induire l’idée que les premières se seraient
imposées contre les seconds, dans un contexte de concurrence ou de compétition… La ques-
tion est ainsi mal posée ». La confusion vient probablement de la formulation qu’il avait choisie
dans Naissance du cimetière…, op. cit., p. 273 : « […] davantage que le brusque incastellamento
naguère décrit par les médiévistes – réaménagement de l’espace et des liens sociaux autour du
château –, c’est un lent et progressif inecclesiamento qui semble avoir caractérisé l’occupation
du sol et l’organisation sociale au cours du Moyen Âge ». La structure strictement parallèle des
deux termes et la tendance de beaucoup de travaux récents à se focaliser sur le seul dominium
ecclésial ont par ailleurs eu pour conséquence de renforcer ce risque de confusion.
5. Le concept de Toubert mettait en avant la traduction dans l’espace d’un important changement
social. Cette traduction prenait la forme d’une concentration de l’habitat dans des sites per-
chés et fortifiés et une réorganisation des terroirs. Au-delà de la remise en cause profonde du
modèle original, aussi bien par les apports de l’archéologie que de l’histoire des textes, il laissait
largement de côté la question des représentations de l’espace, qui est au contraire au cœur du
concept de M. Lauwers : « Contrairement à ce que supposent la notion d’incastellamento et
ses avatars, désignant une réorganisation brusque des espaces habités, l’inecclesiamento doit
être envisagé comme un processus long, coextensif à l’histoire de l’Occident médiéval, dont
330
Se représenter l’espace sans carte
les dimensions topographiques ne constituent que l’un des aspects : il suppose, en effet, une
large part d’idéel, imposant l’image d’une Ecclesia faite de tous les fidèles, vivants et défunts,
identifiée au corps social » : M. Lauwers, « De l’incastellamento à l’inecclesiamento… », art. cité,
p. 323-324.
6. P. Chastang, Lire, écrire, transcrire : le travail des rédacteurs de cartulaires en Bas-Languedoc,
xie-xiiie siècles, Paris, Éd. du Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS Histoire,
2), 2001 ; id., « Du locus au territorium. Quelques remarques sur l’évolution des catégories en
usage dans le classement des cartulaires méridionaux au xiie siècle », Annales du Midi, 119, 2007,
p. 457-474.
331
va lér ie theis
l’espace produites par l’Église 7. Au-delà même des institutions ecclésiales, les
recherches portant sur l’organisation et les représentations de l’espace sont
certes très nombreuses et de grande qualité, mais peu d’entre elles prennent
pour objet principal la question des liens qui ont pu exister entre le dévelop-
pement des structures et des techniques de gouvernement et de gestion à la fin
du Moyen Âge, et les modes de représentation de l’espace et des territoires dans
les textes 8. La plus grande abondance de sources a certes permis de développer
des études mettant en relation les questions de représentation de l’espace et la
gestion seigneuriale à l’échelle locale 9. Les sources savantes, mais aussi le déve-
loppement des représentations figurées de l’espace, ont aussi été à l’origine des
très nombreux travaux qui mettent la question des représentations de l’espace
au premier plan en tant que forme de la connaissance ou qui en font le point
de départ d’études portant sur les usages de ces représentations dans un cadre
qui peut aussi bien concerner l’histoire militaire que les milieux lettrés et les
cours princières 10. Cependant, lorsqu’il s’agit de s’interroger sur les liens plus
332
Se représenter l’espace sans carte
D’un point de vue méthodologique, les travaux auxquels j’ai fait référence
nous ont d’abord appris que si les transformations des usages du vocabulaire
et des modes d’organisation des concepts relatifs à l’espace évoluent en étroite
relation avec la société, il faut ensuite faire la part des rythmes propres à l’évo-
lution des pratiques de l’écrit, ainsi que celle des objectifs qui étaient ceux des
institutions qui produisaient ces écrits. En effet, il ne faut pas se tromper sur le
type d’apport à l’histoire sociale que ces documents peuvent proposer : le chan-
gement dans les pratiques de description de l’espace ne renvoie jamais méca-
niquement à un changement de pratiques sociales, que l’on pourrait espérer
11. R. Fawtier, « Comment, au début du xive siècle, un roi de France pouvait-il se représenter son
royaume ? », Comptes rendus des séances de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 103/2, 1959,
p. 117-123.
333
va lér ie theis
12. Cette remarque de bon sens vaut pour toutes les tentatives de mise en relation de l’usage d’un
certain vocabulaire avec le changement social. C’est ce que rappelait récemment A. Luven
dans son article « From Plebs to Parochia : the Perception of the Church in Space from the
Ninth to the Twelfth Century (Dioceses of Rennes, Dol, and Saint-Malo) », dans M. Cohen,
F. Madeline (éd.), Space in the Medieval West. Places, Territories and Imagined Geographies,
Farnham, Ashgate, 2014, p. 99-114 ; elle citait à cette occasion M. Bloch : « au grand désespoir
des historiens, les hommes n’ont pas coutume, chaque fois qu’ils changent de mœurs, de
changer de vocabulaire ». M. Bloch, Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien, Paris, Armand
Colin (U prisme, 34), 1974, p. 40.
13. N. Bouloux, « Culture géographique et représentation du territoire… », art. cité, p. 95-96.
14. Un des premiers exemples de ce type d’action par l’imposition d’un certain mode de description
ou par l’usage d’un certain vocabulaire est le Domesday Book. V. H. Galbraith, Domesday Book :
its Place in Administrative History, Oxford, Clarendon Press, 1974 ; D. Roffe, « Place-Naming in
Domesday Book : Settlements, Estates, and Communities », Nomina. Journal of the Society for
Name Studies in Britain and Ireland, 14, 1990-1991, p. 47-60 ; S. Baxter, « The Representation
of Lordship and Land Tenure in Domesday Book », dans D. Bates, E. M. Hallam (dir.),
Domesday Book, Stroud, Tempus, 2001, p. 73-102 ; id., « The Making of Domesday Book and
the Languages of Lordship in Conquered England », dans E. M. Tyler (éd.), Conceptualizing
Multilingualism in England, c. 800-c. 1250, Turnhout, Brepols, 2010, p. 271-308.
334
Se représenter l’espace sans carte
335
va lér ie theis
des échelles très différentes, puisqu’il s’agit dans le premier cas de se représenter
l’espace des domaines du pape dans la région d’Avignon, le Comtat Venaissin,
et, dans le second, de se représenter l’espace sur lequel la papauté d’Avignon
exerçait un contrôle effectif, c’est-à-dire, en grande partie, l’espace sur lequel
s’exerçait sa fiscalité.
La première des sources sur laquelle nous allons ici nous arrêter est constituée
par les registres de comptes des trésoriers du Comtat Venaissin, que ces der-
niers, placés sous l’autorité de la Chambre apostolique, devaient verser chaque
année à cette Chambre afin de rendre compte de leur exercice comptable
annuel, ainsi que de celui de tous les officiers locaux travaillant au service de
l’administration pontificale 17. Ces comptes enregistraient toutes les recettes et
toutes les dépenses liées aux pouvoirs comtaux du pape dans cette région 18. Au
sein de ces registres, qui forment des séries continues à partir de 1317, date d’en-
trée dans le patrimoine pontifical, par le biais d’une donation, des domaines et
revenus des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem dans la région d’Avignon,
plusieurs types de listes de données spatialisées peuvent être distingués 19.
Le premier type, qui est celui qui pose le moins de problème, est celui d’une
liste qui, même si elle ne s’affiche pas de cette manière, rend compte simple-
ment d’un parcours qui fut réellement effectué par des officiers pontificaux,
parcours dont on peut même imaginer les conditions du déroulement. En
effet, la première liste continue de castra conservée dans les comptes du tréso-
rier fut établie sur une étroite bande de papier collée dans le registre qui faisait
le bilan des recettes et des dépenses suscitées par la prise de possession des biens
de la donation des Hospitaliers de Saint-Jean 20. Lorsqu’on représente sur une
carte l’ordre des castra ainsi enregistrés (fig. 1), il apparaît clairement que cet
ordre est celui d’un itinéraire. Celui-ci fut peut-être parcouru à l’occasion de
17. Sur ces officiers et leurs livres de comptes, voir C. Faure, Étude sur l’administration et l’histoire
du Comtat Venaissin du xiiie au xve siècle (1229-1417), Paris, Champion, 1909 ; V. Theis, Le
gouvernement pontifical du Comtat Venaissin vers 1270-vers 1350, Rome, École française de Rome
(Collection de l’École française de Rome, 464), 2012, p. 68-75, 315-318, 393-461.
18. Pour un inventaire de ces registres, voir R.-H. Bautier, J. Sornay, Les sources de l’histoire éco-
nomique et sociale du Moyen Âge. 1. Provence, Comtat Venaissin, Dauphiné, États de la Maison
de Savoie, Paris, Éd. du Centre national de la recherche scientifique, 1968, 3 vol., et C. Faure,
Étude sur l’administration et l’histoire du Comtat Venaissin…, op. cit., p. 10-13.
19. La donation est éditée dans ibid., p. 204-207.
20. ASV, Collect. 260, fol. 118 (1319-1320).
336
Se représenter l’espace sans carte
337
va lér ie theis
21. On peut penser ici aux travaux qui ont été présentés dans le séminaire commun de l’École
doctorale d’histoire de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne : « Territoires et communauté »,
organisé par M. Bourin et É. Zadora-Rio en 2003-2004. Voir M. Bourin, É. Zadora-Rio,
« Pratiques de l’espace : les apports comparés des données textuelles et archéologiques », dans
Construction de l’espace au Moyen Âge. Pratiques et représentations, Paris, Publications de la
Sorbonne, 2007, p. 39-56, notamment p. 54.
22. V. Theis, Le gouvernement pontifical du Comtat Venaissin…, op. cit., p. 400-408, 413-420.
L’envoi de messagers n’est pas documenté sur toute la période et les quelques mentions comp-
tables qui le font montrent que d’une année sur l’autre le système employé n’était pas forcé-
ment le même. En 1336, ce sont deux messagers qui se partagent le Comtat : ASV, Cam. Ap.
Intr. et Ex. 141, fol. 112v : die 16 augusti, misi ego thesaurarius supradictus duos nuncios per totum
Comitatum Venayssini cum letteris meis ut facerent in locis preconizari redditus qui debebant
vendi in festo Sancti Michaelis sequenti quibus dedi pro eorum expensis et labore IX tur. argent.
gross. En 1340-1341, ibid., Reg. Av. 53, fol. 412 : Item pro missione litterarum preconizationis
reditum Comitatus Venaysini missarum per loca singula dicti Comitatus de mense augusti. En
1341-1342, ibid., fol. 452 : Item solvi Johanni Navarre servienti qui fuit missus cum scilicet litteris
apud Interaquis, Pontemsorgiem, Cadarossam, Mornacium, Abolenam et Paludem XII solidos
VI denarios monete current. En 1346, ibid., Cam. Ap. Intr. et Ex. 223, fol. 133 : die X mensis feb.,
solvi Petro de Trienis, nuncio, qui fuit missus ad locum Sancti Saturnini et loca circumvicina cum
litteris ut preconizarentur redditus dicti loci vendendi V s. clem. Die XXX julii, tradidi et solvi
Bernardo Rosselli, nuncio, qui portavit litteras preconizationis reddituum vendendorum per singula
loca Comitatus Ven. XXV s. clem.
338
Se représenter l’espace sans carte
Fig. 2 – Ordre d’enregistrement des revenus dits « généraux » dans les comptes
du trésorier du Comtat Venaissin en 1325-1326. © V. Theis.
339
va lér ie theis
de 1317, ces deux types de revenus étant enregistrés séparément dans les comptes
jusqu’en 1334 (fig. 3) 23. On la retrouve aussi, mais avec un parcours légèrement
différent, pour l’enregistrement des comptes qui étaient rendus chaque année par
les clavaires devant le trésorier (fig. 4) 24. Chaque officier financier local était en
effet convoqué annuellement à Carpentras pour l’audition de ses comptes et rien
n’aurait obligé à enregistrer ces redditions de compte dans l’ordre d’un itinéraire.
Ce choix conscient d’avoir recours à des itinéraires pour mettre en ordre
mentalement ces données apparaît encore plus clairement lors de la réforme
que connaît l’administration locale de la papauté au début du pontificat de
Benoît XII (1334-1342) 25. À ce moment-là, l’organisation des officiers sur le
terrain est profondément transformée et l’organisation des comptes du tréso-
rier fait aussi l’objet d’une refonte totale qui a, entre autres, pour conséquence
de rassembler en un même chapitre des comptes l’enregistrement des ventes à
l’encan pour les différents castra du Venaissin, qu’ils aient appartenu au pape
depuis 1274 ou qu’ils proviennent de la donation des Hospitaliers de 1317.
Or, au lieu de coller bout à bout les deux listes antérieurement existantes, on
forge une autre liste qui propose un autre parcours mental du territoire, dont
on remarque d’ailleurs qu’il est désormais beaucoup plus clair que ne l’étaient
les deux parcours précédents (fig. 5) 26. Est-ce à dire que cette mise en forme
sur le papier traduisait par les pratiques d’écriture l’amélioration effective
de la maîtrise du territoire par les officiers pontificaux ? Sans aller jusque-là,
on peut au moins être frappé par le fait que cette logique de l’itinéraire ait
été systématiquement privilégiée dans les comptes des trésoriers du Comtat
Venaissin, ce qui indique qu’il existait au moins au sein du groupe de ceux qui
les établissaient une manière dominante de se représenter ce territoire, manière
qui transparaît dans les modes d’enregistrement des lieux, mais qui allait pro-
bablement au-delà de la seule question des pratiques d’écriture.
En effet, il est possible de mettre en parallèle ces cartes non seulement entre
elles, mais aussi avec celle d’un parcours réel d’officier, qui n’est pas enregistré
dans les comptes sous forme de liste, mais que l’on peut reconstituer grâce aux
comptes des clavaires. Le juge du Venaissin, qui exista jusqu’au pontificat de
Benoît XII, devait venir deux fois par an dans chaque castrum du Venaissin pour
y tenir des assises au nom du pape 27. Lors de sa reddition de compte, chaque
340
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341
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342
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va lér ie theis
28. Sur les clavaires, V. Theis, Le gouvernement pontifical du Comtat Venaissin…, op. cit., p. 351-359.
29. ASV, Cam. Ap. Intr. et Ex. 80, fol. 11-117v (1323-1324) et V. Theis, Le gouvernement pontifical du
Comtat Venaissin…, op. cit., p. 288-289.
30. Ibid., p. 192-200, 621-626.
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va lér ie theis
31. ASV, Instr. Misc. 5833. Voir V. Theis, Le monde de la Chambre apostolique (xie-xive s.). Ordonner
les archives, penser l’espace, construire l’institution, mémoire inédit d’habilitation à diriger
des recherches soutenu en novembre 2016 sous la garantie de P. Chastang, université de
Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines.
32. Index inventarii scripturarum camerae sive introitum et exitum camerae ap. ratione taxarum
camerae, visitationum, servitiorum communium, expensarum pro operibus et subsidiis pro guerra,
censuum, distributionum d. collegii, officiorum proventus etc. collectorum, thesaurariorum, recto-
rum, libris pontificum regesta aliqua, scripturae auditoribus camerae seu curiae diversique generis,
exempli gratia theologiae, parvi valoris, cartae orig. ff 1-101 0,250 x 0,150, post aug 1353.
33. P. Gasnault, « La transmission des lettres pontificales au xiiie et au xive siècle », dans
W. Paravicini, K. F. Werner (éd.), Histoire comparée de l’Administration, Zurich/Munich,
Artemis, 1980, p. 81-87, ici p. 82-83. Y. Renouard, « Comment les papes d’Avignon expédiaient
leur courrier », dans id., Études d’histoire médiévale, Paris, SEVPEN, 1968, p. 739-764.
34. ASV, Cam. Ap. Collect. 352.
35. Quand bien même ce classement ne concernerait qu’une partie des écrits de la Chambre
apostolique, il reste beaucoup plus détaillé et complet dans ses catégories que celui qui a été
édité pour le xve siècle : F. M. Baath, « L’inventaire de la Chambre apostolique de 1440 », dans
Miscellanea archivistica Angelo Mercati, Città del Vaticano, Biblioteca apostolica vaticana, 1952,
p. 135-157.
346
Se représenter l’espace sans carte
Il est probable que ce carnet ait été un instrument de travail qui fut utilisé
pour tenter de passer d’un mode de classement qui était celui auquel la pra-
tique quotidienne de la Chambre apostolique avait abouti à la fin du pontificat
de Clément VI, à un nouveau mode de classement, plus ordonné mais aussi
plus synthétique, dont il est cependant pour l’instant impossible de dire s’il
fut réellement mis en œuvre ou s’il resta toujours à l’état de projet. Les trois
premières listes étaient accompagnées par un système de renvoi au classement
antérieurement existant et suivies par un index alphabétique. Les quatre listes
successives ordonnaient leurs catégories dans un ordre particulièrement inté-
ressant pour la question qui nous intéresse comme on le constate dans le
tableau 2 (voir en fin d’article) 36.
36. Quelques avertissements doivent être ajoutés à ce tableau. Les listes sont reprises ici de manière
continue mais, dans le registre, elles présentent des discontinuités et des rassemblements de
certaines thématiques autour d’autres systèmes de signes et de numéros qu’il est impossible
de reproduire ici (mais qui le seront dans l’édition à venir). On a fait aussi le choix de ne pas
développer les abréviations, car les mentions développées sont alternativement au nominatif
ou au génitif dans le texte (singulier ou pluriel), et peuvent parfois renvoyer à un nom de ville,
parfois à un nom de région. Afin d’introduire le moins de biais possible, on a préféré, pour
347
va lér ie theis
le sujet qui nous intéresse ici, donner le texte sans choisir nous-mêmes l’une ou l’autre de ces
solutions à chaque fois que plusieurs étaient possibles. Les parenthèses renvoient à des systèmes
de correspondance entre les listes par le biais de numéros suscrits dans l’original. Les numéros
en chiffres arabes et romains apparaissent de cette manière dans le texte.
37. Sur les collecteurs et les collectories, voir en priorité C. Samaran, G. Mollat, La fiscalité ponti-
ficale en France au xive siècle : période d’Avignon et grand schisme d’Occident, Rome/Paris, École
française de Rome/De Boccard (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome,
96), 1905 ; Y. Renouard, Les relations des papes d’Avignon et des compagnies commerciales et
bancaires de 1316 à 1378, Rome/Paris, École française de Rome/De Boccard (Bibliothèque des
Écoles françaises d’Athènes et de Rome, 151), 1941 ; H.-J. Schmidt, Kirche, Staat, Nation…,
op. cit. ; C. Schuchard, Die päpstlichen Kollektoren im späten Mittelalter, Tübingen, Niemeyer
(Bibliothek des Deutschen historischen Instituts in Rom, 91), 2000 ; A. Le Roux, « Mise
en place des collecteurs et des collectories dans le royaume de France et en Provence (1316-
1378) », Lusitania sacra, 22, 2010, p. 45-62, dans l’attente de la publication de sa thèse : Servir
le pape, le recrutement des collecteurs pontificaux dans le royaume de France et en Provence de la
papauté d’Avignon à l’aube de la Renaissance (1316-1521), thèse de l’université Paris-Ouest –
Nanterre-La Défense soutenue le 30 novembre 2010.
38. Sur les travaux du palais sous Benoît XII, voir D. Vingtain, Avignon, le palais des papes, Saint-
Léger-Vauban, Zodiaque, 1998, p. 87-179.
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39. ASV, Instr. Misc. 5833, fol. 10 : Beneven. et Sicilie xv / Sicilie locus secundus xvi / Sicilie tercius locus
xvii.
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42. Nous ne développons pas ici les aspects de comparaison entre les listes qui font l’objet d’un
travail en cours.
43. M. Tangl, Die päpstlichen Kanzleiordnungen von 1200-1500, Innsbruck, Wagner, 1894 ;
L. Duchesne, P. Fabre (dir.), Le « Liber censuum » de l’Église romaine, Paris, Fontemoing
(Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome), 1901, « Introduction », p. 36-56 ;
F. Delivré, « Du nouveau sur la “Liste de Florence” : la chronique du Pseudo-Godel (v. 1175)
et la préhistoire du “Provinciale Romanum” du xiiie siècle », Bibliothèque de l’École des chartes,
167, 2009, p. 353-374 ; id., « Les diocèses méridionaux d’après le Provinciale Romanum (xiie-
xve siècle) », Cahiers de Fanjeaux, 46 : Lieux sacrés…, op. cit., p. 395-419.
44. Fond de carte emprunté à H.-J. Schmidt, Kirche, Staat, Nation…, op. cit., p. 239.
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45. O. Guyotjeannin, « Les méthodes de travail des archivistes du roi de France (xiiie-début
xvie siècle) », Archiv für Diplomatik, 42, 1996, p. 295-373, ici p. 315 ; H.-F. Delaborde, Étude sur
la constitution du Trésor des Chartes, Paris, Plon-Nourrit, 1909, p. CXLIJ.
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Tabl. 2 – Comparaison des quatre listes du registre 5833 des Instrumenta Miscellanea.
355
provincie thesaurar. rector (3) 16
v. Idem ut proxime 5. Sicilie regnum citra Farum : v. Beneven. collector. v. Beneven.
thesaurarius (3) 17, 46, 47, 48, 49
vi. Idem ut proxime Beneven. civitas : collector (4) vi. Campan. et Maritim. rector vi. Campanie Maritime
Se représenter l’espace sans carte
3, 53
Beneven. civitas : collector
thesaurarius (5)
6. Campania et Maritima : rector
(6) 3, 53
vii. Bavar., anthipape et 7. Campania et Maritima : vii. Campan. et Maritim. vii. Campanie Maritime
Templariorum thesaurarius (7) 3,53 thesaur. 3, 53
Liste I Liste II Liste III Liste IV
Urbe vicarius (8) altararius (9)
LII
viii. Tucie et Ryparie Januensis 8. Patrimonium Beati Petri : viii. Urbis vicarii 52 viii. Vicariatus Urbis
rector (10) 18, 19
ix. Bituritencis et Lemovicensis 9. Patrimonium Beati Petri : ix. Urbis Altariatus ix. Altarariatus Urbis
thesaurarius (11) 18, 19
x. Operum Benedicti 10. Spoletani ducatus : rector (12) x. Patrimon. beati Petri rector x. Patrimonium beati Petri
32-33 18, 19
xi. Claramontensis, Aniciensis et 11. Spoletani ducatus : xi. Patrimonium beati Petri xi. Patrimonium beati Petri
Mimatensis ac Sancti Florii thesaurarius (13) 32-33 thesaur. 18, 19
xii. Ferrar. 12. Marchia Anchonitana : rector xii. Spoletan. ducatus rector 32, xii. Spoletani ducatus
(14) 4, 5, 6 33
v a lér ie
356
xiii. Guerr. Lombard. 13. Marchia Anconitana : xiii. Spoletan. ducatus thesaur. xiii. Spoletani ducatus
thesaurarius (15) 4, 5, 6
theis
xiiii. Juramentorum prelatorum 14 Romandiola : rector (16) 40 xiiii. Marchie Anchonitane rector. xiiii. Marchie Anchonitane
4, 5, 6
xv. Beneven. et Sicilie 15. Romandiola : thesaurarius xv. Marchie Anconitane thesaur. xv. Marchie Anconitane
(17) 40
xvi. Sicilie locus secundus 16. Tuscia et Riparia Janue : xvi. Romandiole rector 1 xvi. Romandiole
collector (18) 8, 19
Mediolanensis, Raven. provinc.,
(19) Romanhie collector (19)
Liste I Liste II Liste III Liste IV
xvii. Sicilie tercius locus 17. Romania, Aquilegensis, xvii. Romandiole collector xvii. Romandiole
Jadrensis, Gradensis et thesaur. 1
Patracensis : collector (19) 1
xviii. Patrimonii beati Petri in 18. Aquensis provinc. : (20) xviii Tuscie et Riparie Januensis xviii. Tuscie et Riparie Januensis
Tucia collector 20 collector 8, 18, 19
xix. Patrimonii secundus locus 19. Arelatensis : collector (21) 56 xix. Romanie collector Romanie xix. Romanie
in Tucia 40
xx. Aquensis 20. Ebredunensis (22) collector xx. Aquensis collector 20 xx. Aquensis
62
xxi. Pecuniar. visitation. 21. Lugdunensis, Viennensis, xxi. Arelatensis collector 56 xxi. Arelatensis
Tharentasiensis, Bisuntinensis :
collector (23) 44
357
Alamanie 27
xxii. Turonensis 22. Coloniensis : collector (24) 34 xxii. Ebredunensis collector 67 xxii. Ebredunensis
xxiii. Burdegalensis et Agenensis 23. Treverensis : collector (25) xxiii. Lugdunensis collector 43 xxiii. Lugdunensis
xxiiii. Mortuorum clericorum 24. Maguntinensis : collector xxiiii. Coloniensis collector 34 xxiiii. Alaman.
Se représenter l’espace sans carte
libri (26)
xxv. Secundus locus 25. Pragensis : collector (27) xxv. Treverensis collector 34 xxv. Coloniensis
xxvi. Tesauri depositi in Acisio 26. Polon. et Ungar. regnis : xxvi. Maguntinensis collector 34 xxvi. Treverensis
collector (28) 41
xxvii. Alammanie 27. Dacie et Norvegie regnis et xxvii. Pragensis collector 34 xxvii. Maguntinensis
Suecie : collector (29) 39
xxviii. Regestra antiqua pappalia 28. Anglie terr. et Insularum xxviii. Polonie et Ungarie xxviii. Pragensis
subditarum : collector (30) 37 collector 41
Liste I Liste II Liste III Liste IV
xxix. Castelle collector 29. Scotie et terrarum xxix. Dacie, Norvegie, et Suecie xxix. Polonie et Unguarie
subiectarum : collector (31) 38 regnorum collector 39
xxx. Portugalie 30. Rothomagensis et xxx. Anglie et Insularum xxx. Dacie, Norvegie, Suecie
Senonensis : collector (32) 44 collector
xxxi. Aragonie 31. Remensis (33) collector 54 xxxi. Scotie et partium xxxi. Anglie et Insularum
adiacentium collector
xxxii. Spoletani ducatus 32. Bituricensis (provincie) xxxii. Rothomagensis et xxxii. Scotie et partium adiacen.
quibusdam except. : collector Senonensis collector
(34) 9
xxiii. Statio secunda Spoletan. 33. Claromontensis, Mimatensis, xxxiii. Remensis collector xxxiii. Rothomagensis et
Aniciensis et Sancti Florii : Senonensis
collector (35) 11
v a lér ie
358
xxxiiii. Colonia 34. Caturcensis xxxiv. Bituricensis collector xxxiiii. Remensis
(provincie), Castrensis,
Albiensis, Ruthenensis,
theis
359
collector (49) 55
xlviii. Tercia statio 46. Baionensis, Vasatensis, xlviii. Narbonensis collector xlviii. Avinion.
Adurensis, Lascurensis, Olorensis
provincie Auxitanensis : collector
(50)
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xlix. Quarta statio 49. Portugalie regn. : collector xlix. Tholosanensis et Auxitanensis xlix. Avinionensis dyocesis
(51) 30 collector clavar.
l. Subsidiorum diversorum 50. Castelle regn. except. dyoc. l. Bayonensis collector l. Nicholai III script.
Calagur. que est provincie
Cesaraugustanensis : collector
(52) 29
Liste I Liste II Liste III Liste IV
li. Marescalli thes. 51. Aragon., Tarraconensis, li. Portugalie collector li. Bonifacii VIII script.
Cesaraugustanensis provincie
atque Maioricarum Insula :
collector (53) 31
lii. Urbis altariatus 52. Sardinie et Corsice : collector lii. Castelle et Legionensis lii. Clementis V script.
(54) 44 collector
liii. Johannis XXII script.
liii. Campanie thesaur. 53, 54, 55 Venayssini comitatus liii. Aragonie collector liv. Benedicti XII script.
liv. Remensis collect. rector et thesaur. et de Montilio, liiii. Sardinie et Scorcice
Carpentoraten., Tricastrin., collector
Montilii Ademari et Avisan.
lv. Tholosa rector, thesaurarius (55, 56) 60 lv. Venaysini comitatus rector lv. Clementis VI script.
360
lvi. Arelatensis 56. Urbis Alterarius, alterarius, lvi. Venaissini comitatus lvi. Innocentis VI script.
vicarius thesaurarii
lvii. Montilii Ademarii 57. Avinion. palatii expen., lvii. Avinionensis palatii expense lvii. Censuum romane ecclesie
v a lér ie theis
361
lxiv. Palhasse 64. Clementis VI (72) gesta 63 lxiiii. Avinionensis bona lxiv. Imperialium
decedentium
lxv. Expen. pape Johannis XXII 65. Innocentii VI (73) gesta lxv. Avinionensis dyocesis lxv. Clericorum mortuorum
clavariorum
lxvi. Scriptur. ipsius 66. Nicholay III (67) gesta 90 lxvi. Beneficiorum per papam
Se représenter l’espace sans carte
362
lxxvii. Officialis curie 77. Juramentorum prelatorum 14 lxxvii. Servitiorum prelatorum 7
lxxviii. Auditor. camere 78. Censibus romane ecclesie lxxviii. Beneficiorum taxation. 8
(75) script.
v a lér ie theis
lxxix. Theologice scripture parvi 79. Imperialibus script. 74 lxxix. Tricesime exaction. 9
valoris
Serviciorum prelatorum (76)
Taxationibus beneficiorum (78)
Inquisit. script. (81)
Librorum clericorum camere
mort. (87)
lxxx. Hereticorum et rebellium 80. Visitationibus pecuniar. 21 lxxx. Guerrarum apostolicarum x
scriptur.
Liste I Liste II Liste III Liste IV
lxxxi. Multiplices littere bullate 81. Subsidiis peccuniar. 50 lxxx. 81 Inquisitorum scriptur.
et bullande
lxxxii. Idem ut proxime 82. Passagiis (86) ultramarin. 34 lxxxi. 82 Antipaparum script.
lxxxiii. Recepte et expense 83. Regestris antiquis 28 lxxxii. 83 Templariorum script.
Johannis et Benedicti
lxxxiiii. Sacculi designati de 84. Rebellantium ecclesie script. lxxxiii. 84 Bavar. et sibi adheren.
scripturis 80
lxxxv. Scripture quasi inutiles de 85. Sacculis script. 84 lxxxiiii. 85 Passag. ultramar.
Narbona
lxxxvi. Varie scripture modic. 86. Sede vacante (89) apostolica lxxxv.86 Imperialium
utilit. 68
363
lxxxvii. Recepte et expense 87. Templariorum (83) scriptur.
Johannis 7
lxxxviii. Vetustes et inutiles 88. Decimarum (76)
scripture taxationibus 73
lxxxix. Contra Bavarium, 89. Thesaur. script. 24, 26 lxxxix. 87 Sede vacante
Se représenter l’espace sans carte
Mediolan. et antipapam
xc. Bulle multe Nicholai, 90. Scriptur. antique et vetuste xc. 88 Clericorum mortuorum
Johannis et Benedicti 84, 86, 88, 89 libris
Mortuorum clericorum libris
24, 25
Marescalli thes. 51, 55
Marescallie pape 70
Liste I Liste II Liste III Liste IV
Script. minus utilibus (90)
xci. Bulle multe Johannis xci. 89 Scriptur. quasi inutilibus
Tricesima
xcii. Bulle Johannis
364
v a lér ie theis
La città dipinta di Benedetto Bonfigli
nella cappella del Palazzo dei Priori di Perugia 1
365
m a r i a r ita silv estr elli
tempi della Petra Iustitie e della Fontana Maggiore. È nel cuore del Palazzo, nel
luogo destinato alle riunioni più «segrete» dei priori, oltre che alla preghiera
e alla contemplazione, che si vuole ora riassumere e rappresentare il Buon
Governo della città 3.
L’obiettivo imponeva allora un cambiamento di indirizzi e un maggiore
dinamismo; già dall’agosto del 1449 si era nominato un nuovo cappellano il
frate domenicano Ricciardo di Antonio Chiavelli da Camerino in sostituzione
di dominus Franciscus Marci cacciato per aver violentemente ingiuriato un pri-
ore 4. Francesco di Marco era stato il successore di Egidio di Lapo di Servadio,
fedelissimo e valente cappellano che durante il suo lungo mandato si era fatto
carico della realizzazione dell’ampliamento del Palazzo dei Priori 5. I lavori ini-
ziati nel 1429 erano condotti a buon punto già nella primavera del 1437 e la
nuova imponente costruzione si compiva nel giugno del 1443, una data riferita
dalle cronache e confermata dalla ricca documentazione 6. Con questa nuova
aggiunta la mole del Palazzo continuava ad accrescere la magnificenza della
piazza, sostituendosi a strutture più antiche e irregolari. I documenti ricordano
come fin dal 1433 Bartolomeo di Mattiolo, figura di primo piano di tutti i prin-
cipali cantieri aperti in città per circa quaranta anni, fosse coinvolto in questa
fabbrica, chiamato a eseguire le finestre del palazzo con Antonio da Norcia.
Ancora un maestro perugino, Nardo Paulucci, ne costruiva le murature, in
parte già compiute nell’agosto del 1437 quando riceve dai Priori un salario di
circa 77 fiorini, da mettere in relazione con le notizie fornite dalle cronache
che ricordano come «A dì 17 maggio fu posta e murata una pietra col griffone
3. M. Ferretti, «Le rappresentazioni di città e la cappella dei Priori (qualche ipotesi di lettura)», in
M. L. Cianini Pierotti (a cura di), Benedetto Bonfigli e il suo tempo, Atti del convegno (Perugia,
21-22 febbraio 1997), Perugia, Volumnia editrice, 1998, p. 99-109.
4. Franciscus Marci è rettore della chiesa di Santa Maria del Mercato. Cfr. ASPg, ASCPg, Consigli
e riformanze, 85, c. 89v. Il 12 maggio del 1450 è ancora sottoposto a sindacato per le spese da
lui effettuate in expendio dicti Palatii circa aconcimen palatii novi et veteris e per tutto ciò che
ha amministrato (ASPg, ASCPg, Consigli e riformanze, 86, c. 47r). F. F. Mancini, Benedetto
Bonfigli. L’opera completa, Perugia, Electa, 1992, p. 86.
5. Egidio di Lapo è già cappellano nel 1417 (ASPg, ASCPg, Consigli e riformanze, 62, c. 42v) inca-
rico che detiene fino alla morte avvenuta nel 1446. S. Magliani, «L’architettura quattrocentesca
del Palazzo dei Priori: il Collegio del Cambio e i suoi artefici», in P. Scarpellini (a cura di), Il
Collegio del Cambio in Perugia, Cinisello Balsamo, Silvana, 1998, p. 45-66, in part. p. 45-47, da
ASPg, ASCPg, Consigli e riformanze, 75, c. 77v. Per la onerosa parte amministrativa era stato
affiancato da due abili mercanti, Angelus Rentii de Cantagalina e dopo la sua morte dal figlio
Lorenzo, entrambi coinvolti anche nella gestione di altri cantieri cittadini.
6. A. Fabretti (a cura di), «Cronaca della città di Perugia dal 1309 al 1491 nota col nome di Diario
del Graziani», Archivio storico italiano, 16/1, 1850, p. 418: 1443, 19 giugno, «Adì ditto fo fornito
de murare el palazzo nuovo de Priori e mierlare, el quale fu comenzato nel 1429; della qual
fabrica ne fo soprastante don Gilio de Lapo de Servedio».
366
La città dipinta di Benedetto Bonfigli
intagliato nel Palazzo nuovo dei Priori 7». Giacomo di Nicola del Pelato con i
suoi aiuti si era occupato delle coperture del Palazzo (fig. 1).
Dati concreti per ricordare come già in questa impresa si afferma una mae-
stranza che interviene nel rifacimento della cattedrale di San Lorenzo, nell’ora-
torio della Maestà della Volta, all’udienza dei Notai e poco dopo anche al pro-
lungamento della navata della fabbrica di San Domenico, continuando a essere
presente con cottimi importanti nelle principali opere condotte senza sosta in
tutta la città 8. Pur nel rispetto dello stile del corpo di fabbrica precedente, vi
si osserva l’introduzione di elementi moderni come l’inserimento di finestre
quadrate e crociate nel fascione mediano della facciata: matura e si afferma uno
stile architettonico composito e ibrido, fortemente legato ai modelli gotici, ma
anche pronto a ricevere precocemente gli stimoli che Perugia sente attraverso
la presenza di artisti provenienti da Siena come Sano di Matteo, o da Firenze,
come Pagno di Lapo Portigiani, coinvolto nel cantiere della cattedrale e molti
7. ASPg, ASCPg, Consigli e riformanze, 73, c. 63v-64r; ASPg, ASCPg, Catasti, 16, c. 89v-90rv.
8. Antonio da Norcia è impegnato con Bartolomeo Mattioli e Antonio da Lugano nel rifaci-
mento della cattedrale. A. Rossi, Documenti inediti sopra alcune fabbriche perugine del XV secolo.
Duomo, Ponte Felcino, Palazzo del Capitano del Popolo, Mercatale, Perugia, Boncompagni, 1870,
in part. p. 15.
367
m a r i a r ita silv estr elli
9. A. Rossi, «Sano di Matteo, architetto e scultore senese in Perugia», Giornale di erudizione
artistica, 3, 1874, p. 243-246.
10. P. Matracchi, «La diffusione delle chiese a sala a Perugia: l’edificazione della cattedrale di
San Lorenzo coeva al San Domenico», in G. Rocchi Coopmans de Yoldi, G. Ser Giacomi (a
cura di), La Basilica di San Domenico di Perugia, Perugia, Quattroemme, 2006, p. 121-139;
M. R. Silvestrelli, «La Maestà della Volta», in A. Calzona, M. Ceriana (a cura di), Per un nuovo
Agostino di Duccio. Studi e documenti, Verona, Scripta/Centro Studi Leon Battista Alberti
(Bonae Artes; 1), 2012, p. 207-226, in part. p. 213-214.
11. A. Rossi, «Giunte ai maestri d’organi e di legname», Giornale di erudizione artistica, 3, 1874,
p. 278-285, in part. p. 278-281. Ricciardo Chiavelli è fratello di Arcangelo Chiavelli e docu-
mentato a Camerino, cfr. M. Mazzalupi, «Il volto del traditore. Documenti per Arcangelo
Chiavelli alias Arcangelo di Fiordimonte», in G. De Rosa (a cura di), I monti azzurri. A Pier
Luigi Falaschi per il suo ottantesimo compleanno, Ariccia, s. n., 2015, p. 263-275. F. Coltrinari,
«Apollonio da Ripatransone, Tommaso di Antonio da Firenze e la tradizione lignaria ascolana
del Quattrocento: cori e intagli fra Perugia, Assisi e le Marche», in P. Dragoni (a cura di),
Percorsi. Studi per Eleonora Bairati, Macerata, EUM, 2009, p. 117-140, in part. p. 125, n. 24.
12. ASPg, ASCPg, Conservatori della moneta, 81, c. 7v, 1448, luglio 31, Iannes Arigi theotonicus
substitutus loco fratris Ricciardi de Camereno gubernatoris horilogii civitatis Perusii 10 fiorini.
368
La città dipinta di Benedetto Bonfigli
13. ASPg, ASCPg, Consigli e riformanze, 86, c. 75r. G. Cristofani, «Per la storia dell’Arte del
legname nell’Umbria», Augusta Perusia, 3/1-2, 1908, p. 8-9. ASPg, ASCPg, Consigli e rifor-
manze, 86, c. 75r. S. Cavatorti, Giovanni Teutonico. Scultura lignea tedesca nell’Italia del secondo
Quattrocento, Passignano sul Trasimeno, Aguaplano, 2016, p. 56.
14. Residui di lamina metallica sono ricordati nell’inventario della sacrestia. ASPg, ASCPg,
Consigli e riformanze, 90, c. 104r: unum fogliatello argenti residui celi capelle nove palatii domi-
norum Priorum.
15. M. R. Silvestrelli, «Vite di artisti a Perugia al tempo della formazione di Pintoricchio», in
V. Garibaldi, F. F. Mancini (a cura di), Pintoricchio, catalogo della mostra (Perugia e Spello, 2008),
Cinisello Balsamo, Silvana, 2008, p. 27-37, in part. p. 28-29. G. Strack, «Ein Rektoratsprozeß
in Perugia 1442/43 und die Zusammenarbeit der Maler Benedetto Bonfigli und Giovanni di
Tommasino Crivelli», Quellen und Forschungen aus italienischen Archiven und Bibliotheken, 90,
2010, p. 464-469. T. Biganti, «Le decorazioni ceramiche», in F. F. Mancini (a cura di), Il Palazzo
dei Priori di Perugia, Perugia, Quattroemme, 1997, p. 327-335, in part. p. 334, n. 23.
16. ASPg, ASCPg, Notarile, Bastardelli, 328, c. 66r. Mariano d’Antonio detiene una delle botteghe
più importanti della città: M. R. Silvestrelli, «Bartolomeo and Giapeco Caporali», in S. N. Fliegel
(a cura di), The Caporali Missal: a Masterpiece of Renaissance Illumination, catalogo della mostra
(Cleveland Museum of Art, 2013), Cleveland, Cleveland Museum of Art, 2013, p. 35-49.
17. L. Melli, «Il disegno per Benozzo», in B. Toscano, G. Capitelli (a cura di), Benozzo Gozzoli.
Allievo a Roma, maestro in Umbria, catalogo della mostra, Cinisello Balsamo, Silvana, 2002,
p. 117-129.
369
m a r i a r ita silv estr elli
Anche l’esecuzione della residenza lignea della cappella dei Priori è stata ini-
zialmente commissionata a un altro maestro – Gaspare di Iacopo da Foligno –
che ha comunque iniziato l’opera e che vi lavora nei mesi precedenti fino al
saldo finale del 10 di ottobre del 1452 18. Il giorno prima, infatti, Ricciardo ha
stipulato un nuovo contratto con Paolino da Ascoli che prevede l’esecuzione
di ventidue seggi per il prezzo di 16 fiorini ciascuno secondo el desegno già facto
o veramente megliore e più bello che è presso di lui 19.
Seguendo le annotazioni del cappellano per la sua realizzazione si ha un’idea
dell’incalzare serrato del lavoro. Il contratto è stato infatti preceduto dalla
ricerca accanita di Paolino raggiunto nel mese di giugno a Recanati da un
messo comunale e già definito maestro del Coro 20. Fra Ricciardo, come da
contratto, si è poi impegnato nella scelta dei legni pregiati per le tarsie, giunti
da Ancona, Città della Pieve, Cortona, Città di Castello, Isola Maggiore del
Trasimeno. Lo stesso maestro Paolino e i suoi «compagni» sono andati a cer-
care legname nero «per lu choro» anche negli immediati dintorni della città
scendendo a Ponte Pattoli verso il Tevere 21; ogni più minuta registrazione rac-
conta gli scambi della città con il suo territorio idealmente e concretamente
«condotto» in questo spazio (fig. 2-3).
Intanto nel novembre del 1454 era subentrato a Ricciardo Chiavelli, seb-
bene fosse stato riconfermato nell’aprile precedente, Bartolomeo di maestro
Rachamino da Siena, che aveva ottenuto l’incarico grazie all’appoggio di Pietro
da Noceto segretario del papa Niccolò V 22. Una nomina certo ben meditata
18. ASPg, ASCPg, Cappella dei Priori, 1, c. 14v. Il disegno del coro è fatto da maestro Antonio
orefice, ibid.: «Adì 2 de maggio pagai ad maestro Antonio orefice lu quale fece el designo del
cuoro e dello inginocchiatoio denanti e della porta della cappella del palazzo l.5».
19. Il prezzo complessivo sarà di 352 fiorini. Per il contratto cfr. A. Rossi, Maestri e lavori di
legname in Perugia nei secoli XV e XVI, Perugia, Boncompagni, 1873, p. 4-5. Il coro attuale
di soli 11 pezzi è frutto di un largo restauro eseguito nel 1906-1907 da Wenceslao Moretti
su disegno di Francesco Moretti allora direttore della Galleria. F. Santi, Galleria Nazionale
dell’Umbria. Dipinti, sculture e oggetti dei secoli XV-XVI, Roma, Poligrafico e Zecca dello Stato,
1985, p. 265-266; G. Benazzi, «Gaspare di Jacopo da Foligno, Paolino di Giovanni da Ascoli.
Residenze lignee della cappella dei Priori», in C. Bon Valsassina, V. Garibaldi (a cura di),
Galleria Nazionale dell’Umbria. Dipinti, sculture e ceramiche: studi e restauri, Firenze, Arnaud,
1994, p. 204-205.
20. ASPg, ASCPg, Cappella dei Priori, 1, c. 8r.
21. Si ricordano anche pagamenti per argento e cinabro nel giugno del 1454. Su Paolino da Ascoli,
cfr. F. Coltrinari, «Apollonio da Ripatransone…», op. cit., p. 125, n. 24.
22. Tam suis virtutibus quamquam precibus magnifici viri domini Petri de Noxeto domini nostro pape
secretario. Bartolomeo sarà riconfermato cappellano il 25 maggio del 1456 per i successivi due
anni, ma solo un mese dopo verrà rimosso dalla carica per dissidi intercorsi con i Priori e al
suo posto sarà eletto Uguccione Fatii. ASPg, ASCPg, Consigli e riformanze, 92, c. 58r e ibid.,
c. 73r. A. Caleca, «Benedetto Bonfigli e Roma», in M. L. Cianini Pierotti (a cura di), Benedetto
Bonfigli e il suo tempo, op. cit., p. 77-78.
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
Fig. 3 – Perugia, Palazzo dei Priori, Cappella dei Priori, verso il 1907
(da R. Gigliarelli, Perugia Antica e Moderna, Perugia,
Unione Tipografica Cooperativa, 1907, p. 618).
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m a r i a r ita silv estr elli
che riporta in primo piano l’influenza politica del legato pontificio e i legami
della città con il raffinato ambiente umanistico della corte papale 23.
1454 novembre 5
Al nome de Dio et della Vergine Maria et di tucta la celestiale corte del
paradiso e principalmente delli gloriosissimi appostoli sancto Pietro e
sancto Paulo e delli sanctissimi martiri San Lorenzo e sant’Ercolano
io ser Bartholomeo de maestro Rachamino da Siena rectore de sancto
Donato de Perugia et cappellano delli magnifici signori priori delle arti
eletto al tempo di Biordo de Fioravante dal 5 di novembre scriverò tutte
le spese che farò per la cappella e per il palazzo. Perché da questo giorno
comincia il mio salario.
Pochi giorni dopo, il 2 dicembre successivo, in un memorabile contratto,
Bartolomeo da Siena affida metà della decorazione della cappella a Benedetto
Bonfigli, riconosciuto come l’interprete più alto dell’Umanesimo perugino 24.
Il pittore dovrà dipingere sopra l’altare la Crocifissione con la Vergine e san
Giovanni, san Ludovico e sant’Ercolano e «nella dicta mezza capella che remane
se ponga la storia de sancto Ludovicho».
Ad opera finita sono tre i maestri indicati che dovranno essere chiamati
a esprimersi sul suo lavoro: «El frate del Carmine, mastro Domenecho da
Vinegia e el frate da Fiesole». La posta è alta, evoca già il capolavoro.
Bonfigli dotato di una sua spiccata e raffinata declinazione poetica allestisce
la sua decorazione componendo le scene entro spazi conosciuti, minutamente
descritti e carichi di allusioni delimitati da eleganti fascioni. Il lavoro è comunque
iniziato e se ne trova concreta conferma tra maggio e il 6 di giugno: «El Rosso
aquarino de avere per aqua che ha portato su nella cappella per intridare calcina
a Benedecto pentore 25». Se resta incerta l’esecuzione dell’affresco dell’altare fatto
comunque subito oggetto di varie attenzioni 26, le indicazioni contrattuali che
impongono di inserire nella Crocifissione Ercolano e Ludovico chiariscono che
tutto il programma iconografico è già stabilito 27. L’accostamento del d efensor
23. Il richiamo all’importanza delle relazioni con gli Osservanti e con altri personaggi politici è
già in S. Miccolis, «L’arco di Costantino e i Turchi nella pittura italiana del Quattrocento»,
Belfagor, 53, 1998, p. 277-296, che identifica Bartolomeo di Maestro Rachamino con Bartolomeo
Mariani Buonsignori compagno di san Bernardino da Siena e personaggio notissimo.
24. B. Toscano, «La pittura in Umbria nel Quattrocento», in La pittura in Italia. Il Quattrocento,
Milano, Electa, 1987, t. 2, p. 355-383, in part. p. 368.
25. L. Mazzerioli, «Documenti», in F. F. Mancini, Benedetto Bonfigli. L’opera completa, op. cit., p. 153.
26. ASPg, ASCPg, Cappella dei Priori, 2, c. 73r: «Batista de maestro Guaspare pentore de avere
uno panno depento da altare do sta depento el crocifixo et nostra Donna et sancto Giovanni
adì 29 febbraio, 7 fiorini 35 ss».
27. Le due finestre di vetro saranno dipinte nel 1461 dallo stesso Bonfigli con le figure di san Lorenzo
e san Costanzo gli altri due patroni della città. L. Mazzerioli, «Documenti», op. cit., p. 156.
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
373
m a r i a r ita silv estr elli
dato un forte impulso alla celebrazione del santo con una solenne processione
e luminaria che dalla cappella di Palazzo doveva raggiungere la chiesa dei con-
ventuali di San Francesco al Prato e doveva essere condotta come quella che
già si celebrava per la festa di san Pietro martire; il provvedimento era vigoro-
samente riconfermato nel 1445 e ancora nel 1456.
Tutto il decennio segnato dal passaggio di Bernardino da Siena a Perugia
e poi dalla sua morte e dalla canonizzazione, accresce considerevolmente l’in-
fluenza degli Osservanti in città con la presenza continua di illustri france-
scani in stretto contatto con la classe dirigente locale che abbraccia e sostiene
momenti d’intenso trasporto popolare suscitati da predicatori travolgenti come
Giovanni da Capestrano, presente a Perugia nel 1445, anno in cui si veste sulla
pubblica piazza un gran numero di scolari forestieri e cittadini. È il momento
in cui si fonda lo Studium di Monteripido e la Compagnia di San Gerolamo.
Si susseguono a ritmo serrato e anche a distanza, episodi rappresentativi che
toccano la città e vedono protagoniste persino figure femminili di ceto elevato.
È il caso di Battista, figlia di Benedetto Barzi celebre professore di Diritto a
Ferrara che proprio in quella città, nel 1446, indossa l’abito delle clarisse di
povera vita con grave dolore da parte della famiglia. Toccanti sono le parole
del padre in una lettera inviata a Perugia al fratello Angelo, coinvolto quest’ul-
timo in prima persona ai lavori del palazzo priorale 33. «E oggie 13 gennaio .x.
se sonno vestite frati de l’Osservanza per le prediche de fra Iacomo, el quale
volesse Dio mai non fusse venuto qua.» Perentoria e incisiva giunge la risposta
di Giovanni da Capestrano diretta proprio a Angelo Barzi: «Non de meno da
Dio l’omo non se po reparare 34».
Ancor più trascinante due anni dopo è la presenza in città del giovane
Roberto da Lecce che organizza in piazza una spettacolare rappresentazione
della Passione di Cristo, che provoca ancora numerose vestizioni, fra le quali
anche quella di Giacomo Oddi, l’autore della Franceschina, testo dove si trac-
cerà anche una lunga biografia di Ludovico d’Angiò 35.
dell’Umbria, 7/4, 2011, p. 65, riporta la descrizione dell’affresco fatta prima dello stacco: «In alto
nell’apposto lato mirasi un miracolo di san Ludovico Vescovo in che si scorge una giovinetta su
un feretro per virtù del santo tornata in vita. Composizione ricca di 10 figure», che permette
così di identificare l’affresco con quello conservato nei depositi della Galleria Nazionale.
33. ASPg, ASCPg, Cappella dei Priori, 2, c. 17v, 1456 marzo 18: «[…] Angelo Barzi e dompno
Bartolomeo cappellano cappelle palatii deputatis super reparatione muralii dicte capelle
vighore legis», fol. 100.
34. U. Nicolini, «Motivi per una cronaca di sette secoli», in Francescanesimo e società cittadina:
l’esempio di Perugia, Perugia, Università di Perugia, 1979, p. XI-LXXI, in part. p. XXVIII-XXXI.
35. BAP (Biblioteca Augusta Perugia), ms. 1238, c. 136-140. N. Cavanna (a cura di), La Franceschina.
Testo volgare umbro del secolo XV scritto dal P. Giacomo Oddi di Perugia, Firenze, Olschki, 1931.
374
La città dipinta di Benedetto Bonfigli
Un’eco di questi eventi e del clima in cui essi maturano sembra di poter
cogliere allora nella prima scena del ciclo dipinto dove si vede la vestizione
di san Ludovico per opera del generale dell’Ordine fra Giovanni da Murro,
mentre è pronto per lui il galero verde da vescovo di Tolosa (fig. 4). La figura di
Ludovico, punto focale della composizione, è tutta protesa verso l’alto, con le
braccia sollevate e a mani giunte già trascende la terrestrità, evocando il gesto del
sacerdote al momento della consacrazione eucaristica, vista la contiguità della
rappresentazione con l’altare della cappella. Santus Lodovicus rex Fra(ncorum) si
legge sull’aureola dorata, quasi una corona (fig. 5). Il messaggio immediato e più
percepibile che bene si confrontava con quanto era avvenuto in tempi recenti
anche in città, era proprio l’abbandono del potere e il disprezzo delle ricchezze
da parte del giovane sovrano. Una rinuncia che si compiva con la benedizione di
Bonifacio VIII e alla presenza di altri personaggi rappresentati di spalle al santo;
in uno di essi, coperto con un cappuccio scuro si è voluto riconoscere il padre
Carlo II d’Angiò che volge lo sguardo altrove, manifestamente contrario 36. La
scena si svolge in un’ampia sala dal soffitto a cassettoni decorato e delimitato
da colonne costruite con fasce di pietra bianche a rosa, un portico che si chiude
con due porte sulle cui lunette compaiono le figure dei santi Pietro e Paolo, e ai
lati un’Annunciazione e un santo vescovo (lo stesso san Ludovico?). Le imposte
lignee sono intagliate a fioroni. Una di esse si apre verso un cielo luminoso.
Sebbene non sia possibile fare alcun riferimento preciso a un ambiente oggi
conosciuto, la bicromia delle colonne rammenta fabbriche perugine, dal portico
del Palazzo dei Priori o a quello della Maestà delle Volte 37. Sulla parete lunga,
punto di osservazione privilegiato dei priori e dei convenuti seduti nei preziosi
36. Ludovico aveva preso segretamente i voti nel dicembre del 1296, ma la cerimonia pubblica
si ebbe il 5 febbraio del 1297, festa di Sant’Agata. Nella chiesa perugina di S. Agata si con-
servano affreschi con l’immagine del santo. Per un repertorio iconografico vedi M. Roncetti,
«Iconografia ludoviciana. Nuovi successi della ricerca sul santo angioino», in Bollettino della
Deputazione di Storia Patria per l’Umbria, 107/1-2, 2010, p. 383-394 (con bibliografia).
37. Sulle vedute urbane e la vicenda critica vedi principalmente: W. Bombe, «Die Tafelbilder,
Gonfaloni und Fresken des Benedetto Bonfigli», Repertorium für Kunstwissenschaft, 32, 1909,
p. 231-246; F. Santi, «Decorazione della cappella dei Priori», in id., Galleria Nazionale dell’Um-
bria. Dipinti, sculture e oggetti…, op. cit., p. 46-51 (con bibliografia); F. F. Mancini, Benedetto
Bonfigli. L’opera completa, op. cit., p. 86-105 (con bibliografia); id., «Benedetto Bonfigli», in
C. Bon Valsassina, V. Garibaldi (a cura di), Galleria Nazionale dell’Umbria. Dipinti, sculture e
ceramiche…, op. cit., p. 185-198; E. Lunghi, «Appunti per la storia urbanistica di Perugia negli
affreschi della cappella dei Priori», in V. Garibaldi (a cura di), Un pittore e la sua città…, op. cit.,
p. 96-105; id., «Luoghi e santi di Perugia negli affreschi di Bonfigli della cappella del Palazzo dei
Priori», in R. Mencarelli (a cura di), I lunedì della Galleria. Atti delle conferenze maggio-giugno/
ottobre-novembre 1995, Perugia, Quattroemme, 1996, p. 7-14. M. Ferretti, «Le rappresentazioni
di città…», op. cit.; V. Garibaldi, «Cappella dei Priori», in ead., Galleria Nazionale dell’Umbria.
Dipinti e sculture…, op. cit., p. 431-441 (con bibliografia). Gli affreschi di Bonfigli sono poi
continuamente utilizzati e analizzati per la ricostruzione dei singoli monumenti rappresentati.
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40. Chronica XXIV Generalium Ordinis Minorum (1209-1374), in Analecta Franciscana, 3, 1897, in
part. p. 451-452.
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
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41. A. M. Sartore, «Per Benedetto Bonfigli e Mariano d’Antonio: nuovi documenti», in V. Garibaldi
(a cura di), Un pittore e la sua città…, op. cit., p. 23-24.
42. Già indicata come luogo di sepoltura nel primo testamento del 1463, cfr. F. F. Mancini, «La
formazione di Benedetto Bonfigli (e alcune considerazioni sulla pittura tardogotica a Perugia)»,
in M. L. Cianini Pierotti (a cura di), Benedetto Bonfigli e il suo tempo, op. cit., p. 59-74, in part.
p. 69, n. 1. L. Manzoni, «Ricerche sulla storia della pittura in Perugia nel secolo XV», Bollettino
della Regia Deputazione di Storia Patria per l’Umbria, 6/1, 1900, p. 313-316. L. Mazzerioli,
«Documenti», op. cit., p. 178-179.
43. Sulla storia del complesso di San Domenico, vedi ora G. Rocchi Coopmans de Yoldi, G. Ser
Giacomi (a cura di), La Basilica di San Domenico di Perugia, op. cit.; M. R. Silvestrelli, «Perugia
al tempo di Gentile. Artisti, botteghe, committenti», in A. De Marchi (a cura di), Intorno a
Gentile da Fabriano e a Lorenzo Monaco. Nuovi studi sulla pittura tardogotica, Atti del convegno
(Fabriano, Foligno, Firenze, 31 maggio-3 giugno 2006), Livorno, Sillabe, 2007, p. 169-186.
44. Cfr. F. F. Mancini, Benedetto Bonfigli. L’opera completa, op. cit., p. 153. S. Tarquinio, «I docu-
menti della cappella dei Priori», in V. Garibaldi (a cura di), Un pittore e la sua città…, op. cit.,
p. 86-89.
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
cappella di San Bernardino in Duomo, nel 1469 sarà uno dei dieci camerari
eletti a stipulare con Benedetto Bonfigli la convenzione per il completamento
delle pitture della cappella dei priori 45. Altro influente personaggio molto legato
all’ordine è Contolo di Francesco Ansidei di Catrano, a più riprese notaio dei
priori sono noti i suoi rapporti con Angelo del Toscano e con Roberto da
Lecce, difensore in una causa interminabile di Mariano d’Antonio cui affida
l’esecuzione di un dipinto con storie di san Bernardino per la sua cappella in
Duomo 46. Sono forse costoro a partecipare alla definizione del programma
iconografico di tutta la cappella.
La terza scena del ciclo così lacunosa rende difficile l’identificazione del
soggetto (fig. 9). La critica è discorde. Ettore Ricci riteneva fosse il miracolo
del fanciullo travolto da un cavallo e resuscitato grazie alle preghiere rivolte a
san Ludovico ricordato nella Cronaca dei XXIV Generali 47. Più recentemente
45. A. Fantozzi, «Documenta perusina de S. Bernardino senensi», Archivum Franciscanum
Historicum, 15, 1922, p. 103-154, in part. p. 148-149.
46. M. R. Silvestrelli, «Genealogia di Bernardino di Betto. Perugia tra il 1450 e il 1480», in
P. Scarpellini, M. R. Silvestrelli, Pintoricchio, Milano, Motta, 2004, p. 28.
47. Chronica XXIV Generalium Ordis Minorum…, op. cit., p. 446-454.
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52. Gregori Magni, Dialogi, a cura di U. Moricca, Roma, Istituto Storico Italiano, 1924, p. 160-163;
A. Scaramucci, Leggenda e miracolo di sant’Ercolano: da un codice perugino del secolo XV, Perugia,
Santucci, 1880 (BAP, ms. 626).
53. E. Ricci, Leggende di S. Ludovico e di S. Ercolano dipinte nella Cappella dei Priori di Perugia da
Benedetto Bonfigli, Perugia, Spinola/Baldeschi, 1919, p. 26-29.
54. A. Savorelli, Piero della Francesca e l’ultima crociata: araldica, storia e arte tra gotico e Rinascimento,
Firenze, Le Lettere, 1999, p. 96-98. Vi riconosce echi della guerra di Napoli.
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
anche un orologio, era situata sulla piazza antistante a Santa Maria dei Servi
chiesa contigua alle case di Braccio Baglioni e la Sapienza nuova 55.
Proprio lì sotto ferve la battaglia, dall’antica porta etrusca entrano gli inva-
sori (fig. 13-14).
Case in rovina, dalle murature lacerate, dalle finestre aperte o tamponate,
evocano nel silenzio la presa della città e la morte del suo amato vescovo. Anche
in questo caso si potrebbe pensare al ricordo preciso di un evento fedelmente
riportato dalle cronache avvenuto nel 1449 quando «caddero li casalini, dove
erano le case de Filippo del Priore dei Baglioni, lì alla croce de sant’Ercolano
alla porta vechia dei Dadari sotto l’Ospitale della Misericordia 56».
Mentre l’animula di Ercolano sale al cielo fra gli angeli, il suo corpo insan-
guinato abbandonato a terra con la testa staccata dal tronco giace ai piedi delle
55. M. Regni, «Apporti documentari per la ricostruzione delle vicende di Santa Maria dei Servi»,
in Perugino: il divin pittore, Cinisello Balsamo, Silvana, 2004, p. 547-553, in part. p. 547.
S. Tiberini, «Dalla “torre degli Oddi” alla torre degli Sciri: un possibile percorso storiografico
sulle torri private perugine», Bollettino della Deputazione di Storia Patria per l’Umbria, 112/1,
2015, p. 43-69.
56. Cronaca della città di Perugia dall’anno 1309 al 1491 nota col nome di Diario del Graziani, a cura di
A. Fabretti, in Cronache e storie inedite della città di Perugia dal 1150 al 1563, a cura di A. Fabretti,
F. Bonaini, F. L. Polidori, in Archivio Storico Italiano, 16, 1850, p. 69-750, in part. p. 614.
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squadrate e possenti mura di travertino, proprio accanto alla sua chiesa, costru-
ita in loco ubi occidit caput eius 57. Tutto si placa nella scena del seppellimento
del santo amorevolmente ricomposto e rivestito con i paramenti liturgici rossi
del martire con accanto il fanciullo che sarà miracolosamente resuscitato, un
evento raccontato nell’ultima scena del ciclo. V’è, sullo sfondo, la bellissima
rappresentazione della chiesa di sant’Ercolano, rara chiesa torre a pianta ottago-
nale, trova qui il più alto significato che le si volle attribuire al momento della
fondazione avvenuta nel 1297, al tempo del Comune di Popolo (fig. 15-16).
Martyrium del santo, baluardo e sostegno della città appoggiata alle mura
etrusche, si rafforza con questa nuova fabbrica originale e austera il culto del
venerato protettore e Bonfigli ne coglie e tramanda tutto il suo valore. La sua
raffigurazione è più che mai puntuale e analitica: negli archetti che sostengono
il piano superiore, nella balaustra di pietre rosa e colonnine, nelle luci che
bagnano la scala. Si riconosce senza sforzo lì accanto anche la porta del Leone
e sull’altro lato è descritta la facciata della casa dove si aprono le porte gotiche e
quella rinascimentale, c’è un affresco con la Madonna col Bambino e due santi
domenicani; il fumo che esce dal camino sul tetto da un segno di vita (fig. 17).
Nella parete a fianco la scena è continua, un gran corteo ripercorre i luo-
ghi dell’antica processione, vero atto annuale di rifondazione della città. Se
perduta, è una vasta porzione di affresco – e viene da chiedersi cosa vi fosse
rappresentato nel dettaglio – ciò che resta ci fa certi che in questa scena si voglia
celebrare la perenne vittoria di Perugia, con il popolo riunito che segue lento
e compatto il feretro del suo sant’ Ercolano, di cui viene ricordata la seconda
traslazione in cattedrale. Era l’evento di maggiore identità e coesione della città
riproposto ogni primo di marzo nella più importante luminaria di Perugia 58.
La statua di sant’Ercolano era conservata in Duomo e ogni anno era cura
dell’arte dei Pittori di ravvivarne la decorazione in preparazione della fastosa
processione che nel suo rituale percorso partiva dalla cattedrale per raggiungere
San Domenico e poi ritornare indietro. Proprio a questa statua de lignamine si
era dedicata nuova attenzione, prevedendone il rifacimento nel 1456 59.
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Una città trionfante quella che si distende dietro al corteo su cui si può a
lungo ragionare. Immagine di coesione sociale che ha come sfondo le architet-
ture più importanti della città 60. Al gruppo delle donne che procedono in coda fa
da sfondo la chiesa di San Domenico vecchio, con i suoi due portali e la facciata
scandita da fasce alternate di pietre bianche e rosa e ancora oggi, nonostante
le alterazioni, ben riconoscibile (fig. 18-19). La parte più importante del corteo
quella con il feretro del santo, ha raggiunto il Palazzo dei Priori e si blocca sotto
al portale scolpito, dove al centro della lunetta c’è sant’Ercolano, insieme ai due
altri protettori, Lorenzo e Costanzo. Son descritti con cura gli stemmi pontifici
– v’è quello di Sisto IV – accompagnati dai grifi perugini, le botteghe serrate per
la festa, la lunga serie di finestre (fig. 20).
Arduo è portare a termine l’impresa rallentata come già ricordato da
problemi di carattere statico della struttura, poi da una grave malattia con
tutta probabilità la peste, che colpisce Bonfigli nel 1463 tanto da indurlo a
dettare testamento e che ancora lo affligge tre anni dopo 61. Gravi ritardi si
registrano anche nei pagamenti al pittore che richiederanno provvedimenti
radicali volendo evitare che qualora il ciclo non fosse stato terminato cederet
60. P. Rihouet, «Entre (é)motions et arrêts sur image: la performativité des bannières sacrées
ombriennes», in K. Gvozdeva, H. R. Velten (a cura di), Medialität der Prozession, Heidelberg,
Winter, 1991, p. 291-306, in part. p. 294-296.
61. L. Mazzerioli, «Documenti», op. cit., p. 161.
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m a r i a r ita silv estr elli
62. L. Mazzerioli, «Documenti», op. cit., p. 164-166. Il 5 dicembre del 1469 gli viene assegnato
Bartolomeo di Gregorio debitore del comune di Perugia per i pagamenti della cappella dei
Priori. Si tratta di un particolare di un certo interesse che si inquadra in una precisa volontà
da parte del comune di favorire l’arte della seta di cui il personaggio è protagonista, evento
ricordato anche da Pellini.
63. F. F. Mancini, Benedetto Bonfigli. L’opera completa, op. cit., p. 121.
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
Fig. 19 – Perugia, veduta della facciata della chiesa di San Domenico vecchio.
© M. R. Silvestrelli.
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m a r i a r ita silv estr elli
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La città dipinta di Benedetto Bonfigli
Accoglie il popolo col feretro del santo, il rinnovato campanile della chiesa di
San Pietro, la cui facciata a doppio saliente rivestita in alto di riquadri bianchi
e rosa è preceduta da un portico, sotto al quale compaiono antichi affreschi.
Al campanile, la più bella architettura della città, si dedica ogni attenzione.
Fra i tanti dettagli si osservino in particolare le quattro fasce orizzontali che si
stringono attorno al suo fusto dodecagonale. Esse risultano ben visibili ancora
oggi, anche se, essendo eseguite in mattoni, si presentano corrose (fig. 22-23).
393
m a r i a r ita silv estr elli
Oltre alla precisione con cui viene descritta la città, altrettanto puntuale è in
alcuni casi la caratterizzazione di alcuni personaggi di cui, se è quasi impossi-
bile tentare una identificazione, vi si riconosce almeno una precisa definizione
del ruolo svolto, essendo rappresentati con i loro abiti e attributi. È il caso
del mazziere che guida il corteo che conduce sant’Ercolano verso la chiesa di
San Pietro (fig. 22). È Pellini a ricordare come in seguito alla morte dei leoni
donati alla città dal signore di Foligno nel 1439, con il denaro già stanziato per
loro, si realizzino due mazze d’argento ornate d’oro, portate dai mazzieri che
precedono i priori che escono da palazzo 64. Quasi come un lungo registro di
fabbrica, la città dipinta da Bonfigli raccoglie e interpreta i segni più profondi
della sua stessa comunità, raccontandone idealità e realtà fuse nel colore e nella
grazia del pittore.
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Una proposta di risarcimento iconografico
per il perduto San Dionigi di Gherardo Starnina 1
daniele giorgi
Scuola Normale Superiore, Pisa (Italia)
1. Nel presente contributo è pubblicata parte degli esiti di un più ampio studio sulla politica
monumentale della Parte Guelfa fiorentina tra XIV e XV secolo. Per la disponibilità e per i
suggerimenti e le agevolazioni ricevute prima e durante la stesura del testo ringrazio Patrick
Boucheron, Vittoria Camelliti, Marco Collareta, Maria Monica Donato, Massimo Ferretti,
Marco Folin, Jean-Philippe Genet, Giovanni Giura, Monia Manescalchi, Marco Matteo
Mascolo, Eleonora Mazzocchi, Cristiana Pasqualetti, Stefano Riccioni. Devo un ringrazia-
mento speciale a Matteo Ferrari, che ha riletto attentamente il testo.
2. Lirici toscani del Quattrocento, a cura di A. Lanza, Roma, Bulzoni, 1973-1975, t. 1, p. 196.
3. S. Tognetti (a cura di), Firenze e Pisa dopo il 1406. La creazione di un nuovo spazio regionale,
Atti del convegno di studi (Firenze, 27-28 settembre 2007), Firenze, Olschki, 2010.
4. Bartolomeo di Michele del Corazza, Diario fiorentino (1405-1439), a cura di R. Gentile, Anzio,
De Rubeis, 1991, p. 20.
395
da niele giorgi
5. Matteo Villani, Cronica, con la continuazione di Filippo Villani, a cura di G. Porta, Parma,
Guanda, 1995, t. 2, p. 737.
6. Marco di Bartolomeo Rustici, Dimostrazione dell’andata al Santo Sepolcro, ms. ss., 1447-1453.
Firenze, Biblioteca-Archivio del Seminario Arcivescovile Maggiore. Sulla letteratura artistica
precedente a Vasari si vedano Il Libro di Antonio Billi, a cura di F. Benedettucci, Anzio, De
Rubeis, 1991, p. 76; Il codice Magliabechiano, cl. XVII.17, contenente notizie sopra l’arte degli
antichi e quella de’ Fiorentini da Cimabue a Michelangelo Buonarroti, a cura di C. Frey, Berlino,
Grote, 1892, p. 61; G. Mancini, «Vite d’artisti di Giovanni Battista Gelli», Archivio storico ita-
liano, 5/201/1, 1896, p. 47-48. Sull’intervento vasariano sul Palagio si veda S. Benzi, L. Bertuzzi,
Il Palagio di Parte Guelfa a Firenze, Firenze, Firenze University Press, 2006, p. 145-156.
7. G. Vasari, Le Vite de’ più eccellenti pittori, scultori e architettori nelle redazioni del 1550 e del 1568,
testo a cura di R. Bettarini, commento secolare a cura di P. Barocchi, Firenze, SPES, 1966-1987,
t. 2, p. 294.
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Una proposta di risarcimento iconografico per il perduto San Dionigi
8. G. B. Cavalcaselle, J. A. Crowe, Storia della pittura in Italia dal secolo II al secolo XVI, Firenze,
Le Monnier, 1883-1908, t. 2, p. 234; J. A. Crowe, G. B. Cavalcaselle, A History of Painting in
Italy. Umbria, Florence and Siena from the IInd to the XVIth Century, Londra, Murray, 1903-1914,
t. 2, p. 290-292; A. Schmarsow, Wer ist Gherardo Starnina? Ein Beitrag zur Vorgeschichte der
italienischen Renaissance, Leipzig, Teubner, 1912, p. 34.
9. Su questi lavori, descritti in «Il Palazzo di Parte Guelfa», Arte e storia, 3/11-12, 1905, p. 93, si
vedano Archivio Storico del Comune di Firenze, Affari legali, CF 6361, contratto n. 20; ibid.,
Lavori e servizi pubblici, CF 7533, filza 25; e S. Benzi, L. Bertuzzi, Il Palagio di Parte Guelfa…,
op. cit., p. 193. Le vicende che condussero al restauro dell’edificio sono state ripercorse in
M. M. Donato, D. Giorgi, «Giotto negato, Giotto “reinventato”: la Fede cristiana al Palagio
di Parte Guelfa», Mitteilungen des Kunsthistorischen Institutes in Florenz, 58/3, 2016 [2017],
p. 291-317.
397
da niele giorgi
Gli ultimi lacerti ancora visibili sulla parete furono cancellati all’inizio degli
anni Venti del XX secolo, nel corso dell’impegnativa opera di ripristino dell’e-
dificio diretta da Alfredo Lensi 10. Proprio nella fase di allestimento dei ponteggi
fu realizzata l’unica fotografia conservata del murale, che fu poi sacrificato
perché giudicato troppo lacunoso per essere restaurato (fig. 2) 11. Da questa
immagine, che permette di osservare estesi tratti dell’underdrawing su un unico
strato di arriccio, converrà prendere avvio per tentare cautamente, tenendo
anche conto del fatto che il colore vero e proprio doveva essere a quell’epoca
quasi del tutto scomparso, un’ipotesi di ricostruzione della facies dell’affresco
e per proporre qualche precisazione iconografica.
La figura del santo era ospitata all’interno di un finto tabernacolo, simile a
quelli, frammentari, che ornavano il quasi completamente perduto ciclo parie-
tale con Storie di San Girolamo – sempre di mano di Starnina – nell’omonima
cappella nella basilica del Carmine di Firenze. Di questa architettura dipinta
costituivano parte integrante semicolonnine addossate ai pilastri di sostegno,
specchiature, una copertura poligonale forse configurata esteriormente a guisa
di vano cupolato, ghimberghe gattonate, forate al centro da oculi, e pinnacoli.
All’interno il vescovo era avvolto in un piviale di colore blu 12, del quale la
fotografia consente di scorgere le tracce di un vistoso fermaglio, ed era seduto
su di un trono, al pari di una buona parte dei santi patroni delle Arti raffigurati
nelle tavole destinate a Orsanmichele e alle sedi delle Corporazioni. Che il
santo apparisse seduto piuttosto che in posizione stante è confermato tanto
da uno schizzo approssimativo del dipinto visibile nel disegno del progetto di
restauro delle facciate del 1904 13 quanto dalle parole di Schmarsow e di Toesca,
che avevano osservato l’opera prima della sua scomparsa e che ricordavano il
San Dionigi proprio in trono 14. Inoltre, in trono è rappresentato anche il San
Biagio di Rossello di Jacopo Franchi in Santa Maria del Fiore, terminato prima
del 1408, con il quale Carlo Gamba confrontava in modo implicito il perduto
affresco della Parte Guelfa nel 1934 15.
Come è stato ben evidenziato di recente, il San Dionigi di Gherardo
Starnina costituisce la prima raffigurazione del santo in qualità di patrono a
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Una proposta di risarcimento iconografico per il perduto San Dionigi
Fig. 2 – Gherardo Starnina, San Dionigi tra due angeli in trono con la città
di Pisa al di sotto, affresco, 1406 ca. Già Firenze, Palagio di Parte Guelfa, facciata.
Su concessione dei Musei Civici fiorentini – divieto di ulteriori riproduzioni
o duplicazioni con qualsiasi mezzo.
399
da niele giorgi
Firenze 16. Nella città toscana gli intercessori che avevano assicurato la vittoria
contro i nemici erano rappresentati con un ramo di ulivo come attributo. Sono
così raffigurati San Vittore papa e San Barnaba, ad esempio, nell’Incoronazione
della Vergine e Santi (Firenze, Galleria dell’Accademia) commissionata dagli
ufficiali della Zecca fiorentina nel 1372-1373 17. Quest’iconografia è attestata
anche per Dionigi. Questi compare con un ramoscello d’ulivo in mano in
un’opera attribuita al Maestro dell’Epifania di Fiesole e databile intorno alla
metà del nono decennio del XV secolo (fig. 3) 18. La tavola, con un Padre eterno
benedicente tra cherubini e serafini al centro e Sant’Andrea e San Dionigi ai
lati, fu assemblata, in un momento successivo alla data di esecuzione, con un
affresco staccato rappresentante una Madonna con Bambino tra due serafini di
diversa provenienza, insieme al quale costituiva almeno dal 1754 l’ornamento
di un altare nella chiesa fiorentina intitolata alla Vergine Annunziata annessa
all’asylum di Orbatello. L’originaria appartenenza a questo luogo è confer-
mata dalla presenza di un’Annunciazione dipinta sul fermaglio del piviale di
San Dionigi 19. Committente di questo manufatto fu molto probabilmente
proprio la Parte Guelfa, che nel 1401, come ricorda Giuseppe Richa, aveva
assunto la gestione dell’Ospizio, dove il 25 marzo di ogni anno, secondo una
consuetudine documentata già nel 1409, si recava in processione il «Magistrato
della Parte 20». Dunque, risulta estremamente plausibile che l’iconografia del
santo vescovo dipinto nella tavola tardoquattrocentesca discenda da quella del
medesimo santo dipinto da Starnina sulla facciata del Palagio della Parte: si
tratterebbe di una scelta coerente con le strategie di autorappresentazione di
quest’istituzione, che, alla fine del XV secolo, era peraltro ormai quasi del tutto
priva del ruolo politico rivestito prima dell’ascesa dei Medici.
16. V. Camelliti, «I santi patroni: le immagini della “devozione civica” a Firenze fra Duecento e
primo Cinquecento», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di), Dal Giglio al David. Arte Civica
a Firenze fra Medioevo e Rinascimento, catalogo della mostra (Firenze, Galleria dell’Accademia,
14 maggio-8 dicembre 2013), Firenze/Milano, Giunti, 2013, p. 79-85.
17. Su questa tavola si veda da ultimo ead., «12. Jacopo di Cione, Niccolò di Tommaso, Simone di
Lapo; Incoronazione della Vergine e i santi Giovanni Battista, Caterina, Anna, Matteo, Vittore
papa; Zanobi, Barnaba, Antonio abate, Reparata, Giovanni Evangelista; i profeti Isaia ed
Ezechiele», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di), Dal Giglio al David…, op. cit., p. 132-133.
18. G. Kaftal, Iconography of the Saints in Tuscan Trecento Painting, Firenze, Sansoni, 1952,
p. 307-308.
19. Su questo pastiche D. Giorgi, «29. Ambito di Domenico Ghirlandaio, Maestro dell’Epifania
di Fiesole; Madonna con Bambino tra due serafini, Sant’Andrea, san Dionigi e il Padre Eterno
benedicente», in M. M. Donato, D. Parenti (a cura di), Dal Giglio al David…, op. cit., p. 164-
165; G. Giura, «Un insolito pastiche: David Ghirlandaio e il Maestro dell’Epifania di Fiesole»,
in C. De Benedictis, C. Milloschi (a cura di), L’Ospedale di Orbatello: carità e arte a Firenze,
Firenze, Polistampa, 2015, p. 222-226.
20. Giuseppe Richa, Notizie istoriche delle chiese fiorentine divise ne’ suoi quartieri, Firenze, Viviani,
1754-1762, t. 1, p. 297.
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Una proposta di risarcimento iconografico per il perduto San Dionigi
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da niele giorgi
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Una proposta di risarcimento iconografico per il perduto San Dionigi
Fig. 4 – Maestri della Zecca fiorentina, Grosso guelfo di Piero da Farnese, argento,
1363. Firenze, Museo Nazionale del Bargello, inv. Monete n. 61. Su concessione
del Ministero dei beni e delle attività culturali e del turismo – Museo Nazionale
del Bargello; divieto di ulteriori riproduzioni o duplicazioni con qualsiasi mezzo.
403
da niele giorgi
riportano che Piero da Farnese organizzò un palio e altri rituali alle porte della
città di Pisa, alla quale aveva inferto una pesante sconfitta, e diede ordine di
battere moneta per commemorare l’avvenimento. Le fonti di parte fiorentina
e i pagamenti registrati nella Zecca di Firenze nel primo semestre del 1363
confermano che l’animale ritratto in basso, calpestato dal santo e capovolto in
segno di denigrazione 28, era una volpe, con la quale i pisani erano identificati
per il loro comportamento infido e malizioso 29.
Dunque, con la combinazione della carica dimostrativa della figura del
santo con la rappresentazione del luogo dell’azione politico-militare l’affresco
di Starnina mirava a realizzare quella tensione verso un’efficacia comunicativa
che è propria dell’arte politica cittadina. Se agli occhi dei fiorentini la pittura
era stata eseguita in segno di vittoria, ai numerosi pisani, ai quali dopo il 1406 fu
comminato il confino a Firenze, dovette al contrario suscitare sentimenti simili
a quelli che, oltre quattro secoli più tardi, spinsero Giovanni Rosini a definire
l’opera un «monumento tristissimo di quel che possano gli odj cittadini 30».
Con questa commissione, affidata a un artista d’importanza cruciale per
l’introduzione degli stilemi del gotico internazionale in Toscana, la Parte
Guelfa, nel cui Palagio Giotto aveva dipinto – probabilmente negli anni Venti
del Trecento – la mezza figura e la storia della Fede Cristiana 31, perseguiva una
politica monumentale ambiziosa. Quest’ultima sarebbe proseguita nei decenni
successivi con il reclutamento di Donatello, che eseguì la statua in bronzo
dorato di San Ludovico di Tolosa per il tabernacolo di Orsanmichele, e di
Filippo Brunelleschi, che fu coinvolto nel cantiere della Sala Grande, avviato
agli inizi del quarto decennio del XV secolo per ampliare la sede della magi-
stratura e mai definitivamente portato a compimento.
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Conclusions
patrick boucheron
1. J. Michelet, Histoire de France, t. 1 : La Gaule, les invasions, Charlemagne, rééd. Paris, Éd. des
Équateurs, 2015, p. 313 [éd. orig. 1833].
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406
Conclusions
6. Id., L’évêque et le territoire. L’invention médiévale de l’espace (ve-xiiie siècle), Paris, Seuil, 2016,
p. 380.
7. C. Nicolet, L’inventaire du monde. Géographie et politique aux origines de l’Empire romain, Paris,
Fayard, 1988, p. 285.
8. P. Boucheron, J.-P. Genet (dir.), Marquer la ville : signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie-
xvie siècle), Paris/Rome, Publications de la Sorbonne/École française de Rome (Le pouvoir
symbolique en Occident [1300-1640], 8), 2013.
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patr ick boucheron
408
Conclusions
10. Ce point est développé dans P. Boucheron, « L’implicite du signe architectural : notes sur la
rhétorique politique de l’art de bâtir entre Moyen Âge et Renaissance », Perspective, 1, 2012,
p. 173-180.
11. F. Braudel, L’identité de la France. Espace et histoire, Paris, Arthaud-Flammarion, 1986, p. 287
et 297.
12. L. Dauphant, Le royaume des Quatre rivières. L’espace politique français au xve siècle (1380-1515),
Seyssel, Champ Vallon, 2012.
409
patr ick boucheron
13. Cardin Le Bret, De la souveraineté du roi : de son domaine et de sa couronne, Paris, s. n., 1632 (I, 9),
cité par J. Cornette, « Fiction et réalité de l’État baroque (1610-1652) », dans H. Méchoulan
(dir.), L’État baroque. Regards sur la pensée politique de la France du premier xvii e siècle, Paris,
Vrin, 1985, p. 7-87 : ici p. 10.
14. Voir toutefois L. Nuti, Ritratti di città. Visione e memoria tra Medioevo e Settecento, Venise,
Marsilio, 1996.
15. J. Schulz, « Jacopo de Barbari’s View of Venice : Map Making, City Views, and Moralized
Geography before the Year 1500 », The Art Bulletin, 1978, p. 425-474.
16. D. Arasse, Histoires de peinture, Paris, Denoël, 2004.
410
Conclusions
17. C. Jacob, L’empire des cartes. Approche théorique de la cartographie à travers l’histoire, Paris, Albin
Michel, 1992, p. 42 et 138.
18. Sur ce sujet, voir désormais G. Calafat, Une mer jalousée. Souveraineté et juridiction des mers
dans la Méditerranée du xviie siècle, Paris, Seuil, sous presse.
411
patr ick boucheron
19. D. Nordman, Frontières de France. De l’espace au territoire, xvie-xixe siècle, Paris, Gallimard, 1994.
20. Cette hypothèse est développée dans P. Boucheron, « La ville, la cour, la modernité de l’État.
Un “modèle européen” au risque de la world history », dans L. Courbon, D. Menjot (dir.), La
cour et la ville dans l’Europe du Moyen Âge et des Temps modernes, Turnhout, Brepols (Studies
in European Urban History, 35), 2015, p. 237-249 ainsi que dans « Le Moyen Âge à l’épreuve
du monde : entre altérité et familiarité », dans P. Josserand, J. Pysiak (dir.), À la rencontre de
l’autre au Moyen Âge. In memoriam Jacques le Goff. Actes des premières assises franco-polonaises
d’histoire médiévale, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017, p. 217-228.
412
Conclusions
formelle concordante avec l’image mentale qu’il pouvait s’en faire 21. On dira de
même des grandes villes du monde, que l’on décrira comme faisant partie d’un
archipel urbain, parce qu’elles sont comme des îles, fragiles et isolées, dans un
océan plus faiblement humanisé, mais aussi parce qu’elles sont connectées par
des circuits d’échanges, d’influences ou au moins de ressemblances.
Cette notion d’archipel, théorisé aujourd’hui par les géographes, semble à
même de rendre compte de la territorialité médiévale avant son lissage terri-
torial. Il décrit un monde médiéval où la puissance est davantage réticulaire
que territoriale – et dès lors qu’on prend un peu de recul, qu’on quitte le
Mâconnais pour une vision élargie du monde, dès lors que l’on envisage du
même regard les caravanes du Sahel et les caravelles de l’océan Indien, alors se
lève un monde articulé mais non unifié, dominé par les spécialistes des seuils,
les portiers, les courtiers, ceux qui savent se situer aux points de captation de
la valeur et tissent l’interconnexion du monde 22.
Nous retrouvons donc bien ici la notion d’englobement, mais ressaisie par
l’histoire connectée. Romain Descendre a montré que la crise de la morale
éthico-juridique du Moyen Âge est inséparable du primat de la question de la
domination territoriale. Le stato machiavélien est, diraient les linguistes, un
nom-tête qui a perdu ses attributs. Quand le stato del nostro comune ou le stato
ch’avea il nostro comune (qui traduit chez le chroniqueur florentin Giovanni
Villani ce que le latin de chancellerie désignait comme status communis)
devient simplement le stato dans la langue de gouvernement de l’Italie du
xive siècle, il abandonne son génitif qui disait le bien public. Ainsi a-t-il fait
rimer territorialisation et déjudiciarisation. Il y a une incompatibilité foncière
entre le respect du droit et l’ambition territoriale des états. La communication
de Mauro Mussolin, qui n’a malheureusement pas pu être jointe à ce volume,
permettait de visualiser ce stato machiavélien : c’est la machine territoriale
conçue, mesurée et dessinée par Michel-Ange. Cette contemporanéité entre
l’absolutisation des pouvoirs princiers, la révolution de l’art des fortifications
et l’amélioration des moyens graphiques pour en rendre compte est évidem-
ment constitutive de cette modernité politique d’englobement. Reste qu’on
serait bien naïf de penser que cette abstraction souveraine de l’État territorial
est un abandon de la logique médiévale de l’exception – c’est au contraire sa
21. M. Carruthers, Machina memorialis. Méditation, rhétorique et fabrication des images au Moyen
Âge, traduction française, Paris, Gallimard, 2002 [éd. orig. 1998].
22. P. Boucheron, F.-X. Fauvelle, J. Loiseau, « Rythmes du monde au Moyen Âge », dans I. Cattedu,
H. Noizet (dir.), Quoi de neuf au Moyen Âge ?, Paris, La Martinière, 2016, p. 150-166. Pour un
exemple récent de ce type de description réticulaire, voir L. Malbos, Les ports des mers nordiques
à l’époque viking (viie-xe siècle), Turnhout, Brepols, 2017.
413
patr ick boucheron
414
partie i
LES MARQUEURS SYMBOLIQUES DE L’ESPACE –
INDICATORI SIMBOLICI DELLO SPAZIO
partie ii
POUVOIR ET SYMBOLIQUE DE L’ESPACE –
POTERE E SIMBOLOGIA DELLO SPAZIO
415
Entre idéel et matériel
partie iii
REPRÉSENTATION ET SYMBOLIQUE DE L’ESPACE –
RAPPRESENTAZIONE E SIMBOLOGIA DELLO SPAZIO
partie iv
PERCEPTIONS DE LA SYMBOLIQUE DE L’ESPACE –
LA PERCEZIONE DELLA SIMBOLOGIA DELLO SPAZIO
416
table des matières
417