Vous êtes sur la page 1sur 297

Archéologie du Midi médiéval.

Supplément

Construire en terre pendant la Guerre de Cent ans : les


fortifications de Castelnaudary (Aude) vers 1355 - vers 1450
Frédéric Loppe

Citer ce document / Cite this document :

Loppe Frédéric. Construire en terre pendant la Guerre de Cent ans : les fortifications de Castelnaudary (Aude) vers 1355
- vers 1450. In: Archéologie du Midi médiéval. Supplément n°7, 2010. Construire en terre pendant la Guerre de Cent ans
: les fortifications de Castelnaudary (Aude) vers 1355 - vers 1450. pp. 1-296.

doi : 10.3406/amime.2010.1972

http://www.persee.fr/doc/amime_1278-3358_2010_sup_7_1_1972

Document généré le 21/10/2015


CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT
LA GUERRE DE CENT ANS :
LES FORTIFICATIONS
DE CASTELNAUDARY (Aude)
vers 1355 - vers 1450
Copyright C.A.M.L. Editeur 2010
Centre d’Archéologie Médiévale du Languedoc
5 rue de l’Olivier 11000 CARCASSONNE - France

Directrice des publications : Nelly POUSTHOMIS, C.A.M.L.


Diffusion : C.A.M.L.
Tous droits de reproduction (même partielle)
et de traduction réservés pour tous pays.

ISSN : 1278 - 3358


ISBN : 978 - 2 - 9183650 - 7 - 5

Conception de la couverture : Dominique BAUDREU, C.A.M.L.


Mise en page et impression : Grapho 12 - 12200 Villefranche-de-Rouergue

Achevé d’imprimer en décembre 2010


Dépôt légal : 4e trimestre 2010
Frédéric LOPPE

CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT


LA GUERRE DE CENT ANS :
LES FORTIFICATIONS
DE CASTELNAUDARY (Aude)
vers 1355 - vers 1450

Préface de Claire-Anne de CHAZELLES


Chargée de recherche au C.N.R.S.
À mes grands-parents

À mon père

À M. René Viala
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

sommaire
Préface 11

INTRODUCTION 13

Chapitre 1 - Présentation générale 15

Chapitre 2 - Les comptes consulaires de Castelnaudary : 1359-1447 19


2.1 - Présentation 19
2.1.1 - Présentation formelle des comptes 19
2.1.2 - Réflexions sur les comptes 20
2.2 - Les poids et mesures 22

Chapitre 3 - La ville (milieu XIVe-milieu XVe siècle) 25


3.1 - Castelnaudary au bas Moyen Âge : morphologie générale 25
3.2 - Castelnaudary en 1355-1356 28
3.3 - 1356-1366 : de la reconstruction à la bastida 30
3.4 - 1366-1448 : la bastida ou nova ampliatio 31
3.5 - Barrières et palissades 33

PARTIE 1 - LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE 37

Chapitre 4 - Le fossé de la ville : principale source d’approvisionnement pour la construction en terre ? 40


4.1 - Creusement et curage du fossé : « curar le valat » 40
4.2 - Conditionnement et transport des décombres : « trayre l’escombre del valat » 42
4.3 - Evacuation et vidange des décombres : « gitar el escombre del valat » 43

Chapitre 5 - Essai d’identification des techniques 45


5.1 - Les observations de terrain 45
5.1.1 - Une constante : des couches de terre superposées séparées par des végétaux 45
5.1.2 - La terre employée : nature et mise en œuvre 49
5.1.3 - Formes et dimensions des vestiges 51
5.1.4 - L’emploi du solin : deux cas sur quatre ? 52
5.2 - L’apport des textes 52
5.2.1 - Outillage et récipients pour la construction en terre crue en Lauragais 55
5.2.1.1 - Andusat, prual, rabassieyra 55
5.2.1.2 - Semals et grazalas 57
5.2.2 - La paret en Lauragais et Toulousain (milieu XIVe-milieu XVe siècle) 58
5.2.2.1 - La paret, un mur de terre crue 58
5.2.2.2 - L’eau et la paret : un danger permanent 60
5.2.2.3 - Les « parets coffrées » : principale technique de construction des enceintes urbaines
pendant la guerre de Cent Ans en Lauragais et Toulousain ? 62
5.2.2.3.1 - La terre employée dans la paret coffrée 62
5.2.2.3.2 - Les végétaux : la bruyère (broc, broch, brog, bruch, bruc), le genêt (ginosta, ginesta) 63
5.2.2.3.3 - Les taulas : des banches pour le coffrage 65
5.2.2.3.3.1 - Essai de définition 65
5.2.2.3.3.2 - Dimensions et nature des planches 65
5.2.2.3.4 - Les perches (puntier, apuntier) et les étais obliques (paliera, palma) 66
5.2.2.3.5 - L’assemblage des éléments : pigar, pijar la paret ? 68

5
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

5.2.2.3.6 - La fixation des banches : clous et cordes 69


5.2.2.3.7 - Le compactage de la terre : damage ou foulage ? 70
5.2.2.3.8 - La période de travail 71
5.2.3 - La présence de la bauge en Lauragais et Toulousain : une certitude 72
5.2.3.1 - Une bauge « traditionnelle » ? 72
5.2.3.2 - Le gason ou gaison : une forme particulière de bauge ? 73
5.2.3.2.1 - Des gasons de bart, des gasons et du bart 73
5.2.3.2.2 - Des échafaudages ? 75
5.2.4 - La tapia en Lauragais et Toulousain : technique particulière ou terme général ? 75
5.2.4.1 - Les mentions du terme 75
5.2.4.2 - Essai de définition 77

Chapitre 6 - Nature, place et rôle des fortifications de terre massive à Castelnaudary


pendant la guerre de Cent Ans 79
6.1 - Les courtines 79
6.1.1 - Le pied de la paret 79
6.1.1.1 - La fondation du « pied » de la paret 79
6.1.1.2 - Le solin, « pied » de la paret : élévation et composition 80
6.1.1.2.1 - Solin à pierres et chaux 80
6.1.1.2.2 - Solin en terre crue et briques cuites 81
6.1.1.3 - Les aménagements du pied de la paret : conduits d’écoulement des eaux
(stillicidium, galveg, galucho, aguerium, vallum) et larmiers (get) 83
6.1.2 - L’élévation en terre crue : la paret 85
6.1.2.1 - Les dimensions de la paret 85
6.1.2.2 - Nature de la terre, enduit, ouvertures 88
6.1.2.3 - De la paret à terre à la paret en terre : palissades provisoires et palissades d’urgence 89
6.1.3 - Le sommet de la paret : chemin de ronde, parapet, crénelage 90
6.1.3.1 - Chemin de ronde et parapet : suspeyrar, un « mur sur la paret » 90
6.1.3.2 - Les merlons (dentels, dentils) 91
6.2 - Les portes, tours et barbacanes 91
6.2.1 - Formes, dimensions, base des ouvrages 92
6.2.1.1 - Formes et dimensions 92
6.2.1.2 - La base des portes et des tours 92
6.2.2 - L’élévation des constructions 94
6.2.2.1 - Une élévation mixte : terre et pierre 94
6.2.2.2 - Planchers, escaliers, ouvertures 95
6.2.2.3 - Superstructures d’observation et de défense, couverture 96
6.2.3 - L’accès principal de la porte : porta, portanel, ponts, ponts levadis 98
6.2.3.1 - Portes et poternes : composition et système de fermeture 98
6.2.3.2 - Ponts-levis 100
6.2.3.3 - Ponts dormants 101
6.2.3.3.1 - Fondations 101
6.2.3.3.2 - Tablier et superstructures 103

PARTIE 2 - LE COLOMBAGE / TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE 107

Chapitre 7 - La technique du colombage/torchis 109


7.1 - La structure en bois 109
7.1.1 - La sablière ou sola 109
7.1.2 - Le pied-droit ou coronda 109
7.1.3 - Le contreventement ou riosta 111

6
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

7.1.4 - Les baguettes de bois : sparos ; sparros, esparros 111


7.1.5 - L’assemblage des éléments 112
7.2 - Le torchis 112
7.2.1 - La terre préparée : le bart 112
7.2.2 - Le foin : fe, fenum 113
7.2.3 - L’eau : aygua, aqua 114
7.2.4 - La mise en œuvre du torchis : tortissar, tortisar, tortitiar, atortissar 114
7.2.4.1 - La technique 114
7.2.4.2 - La période de travail 115

Chapitre 8 - Nature, place et rôle du colombage/torchis à Castelnaudary pendant la guerre de Cent Ans 117
8.1 - Les barbacanes (barbacanas) 117
8.1.1 - Morphologie générale de la barbacana 117
8.1.2 - L’enceinte de la barbacana 118
8.1.2.1 - Les enceintes en pieux et torchis 118
8.1.2.2 - Autres types d’enceintes 118
8.2 - Le pal ou palissade 120
8.2.1 - Les pieux ou pals de la palissade 121
8.2.2 - Les supports du torchis : sparos ou latas ? 122
8.2.3 - Bart et fe : La fabrication du torchis pour le pal 122
8.2.4 - Enduire la structure : tortissar le pal 122
8.2.5 - Des superstructures de défense 123
8.2.5.1 - Ambans et aleyas : morphologie générale 123
8.2.5.2 - De l’utilisation des fuelhas et des latas 124
8.3 - Les hourds de l’enceinte : ambans, enbans, envans 125
8.3.1 - L’armature du hourd 125
8.3.1.1 - Poutres et solives 125
8.3.1.2 - Chevrons et planches 127
8.3.2 - Portes, fenêtes, volets… et ponts 128
8.3.3 - Le torchis sur les hourds 129
8.3.4 - La couverture du hourd : folias, latas, plansons, teules 130
8.3.5 - Les fixations du hourd : clous et chevilles 131
8.4 - Une sorte de hourd : le cadafalc 132
8.5 - Le chemin de ronde de l’enceinte : corseria, aleya 133
8.6 - Edifices d’observation et de défense : guettes, échauguettes, bretèches : gaytils, gaychils, agassiers 135
8.6.1 - Essai d’identification 135
8.6.2 - L’armature des gaytils et agassiers : charpente et colombage/torchis 136
8.6.3 - La couverture : latas, folias, teules 137
8.6.4 - Les fixations : cavillas, claves 137

Chapitre 9 - Les autres utilisations de la terre crue 141


9.1 - La terre comme élément de protection et d’isolation 141
9.2 - La terre comme élément de remblai et de stabilisation 143
9.3 - la terre comme liant : le mortier de terre 144

PARTIE 3 - LA DIMENSION SOCIO-ÉCONOMIQUE DE LA TERRE CRUE DANS LA FORTIFICATION


MÉDIÉVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN 149

Chapitre 10 - Les hommes de la terre : qualifications, origines, contrats, salaires 152


10.1 - Les « maîtres » : qualifications et origines 152
10.1.1 - Les parediers et valadiers 152

7
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

10.1.1.1 - Qualifications 152


10.1.1.2 - Origines 156
10.1.1.2.1 - Castelnaudary 156
10.1.1.2.2 - Toulouse 159
10.1.1.2.3 - Montréal 161
10.1.2 - Les tortissayres 163
10.1.3 - Les responsables des opérations d’« enterrement » 166
10.2 - Compagnons, ouvriers, manœuvres : qualifications et origines 167
10.2.1 - Pour les opérations relatives à la terre massive 167
10.2.2 - Pour les opérations relatives au torchis 169
10.2.3 - Pour les opérations relatives à l’« enterrement » 173
10.3 - Le mode d’exécution du travail et des salaires 178
10.3.1 - Pour le personnel de la terre massive 179
10.3.1.1 - Parediers et valadiers 179
10.3.1.1.1 - Castelnaudary 179
10.3.1.1.1.1 - Des prix-faits de gré à gré ? 179
10.3.1.1.1.2 - Des prix faits attribués à l’encan 180
10.3.1.1.1.3 - La régie directe 184
10.3.1.1.2 - Toulouse, Verlhac, Castelginest 184
10.3.1.1.3 - Montréal 185
10.3.1.1.3.1 - La fourniture des matériaux 185
10.3.1.1.3.2 - Les délais 186
10.3.1.1.3.3 - Les garanties et engagements 187
10.3.1.1.3.4. - Les salaires 187
10.3.1.2 - Les aides, ouvriers et manœuvres 188
10.3.2 - Pour le personnel du torchis 189
10.3.2.1 - Les tortissayres 189
10.3.2.1.1 - Les prix-faits 189
10.3.2.1.2 - La rétribution à la journée 190
10.3.2.1.3 - Les ouvriers et manœuvres 191
10.3.3 - Pour le personnel de l’« enterrement » 194

Chapitre 11 - Le coût de la construction en terre crue 199


11.1 - Le prix des matériaux et de l’outillage 199
11.1.1 - La terre et les végétaux 199
11.1.1.1 - La terre : acquisition et préparation 199
11.1.1.2 - Les végétaux (bruyère, foin) 200
11.1.2 - Le colombage 202
11.1.3 - Coffrages, perches, étais, échelles : éléments et fixations 203
11.1.3.1 - Les pièces de bois 203
11.1.3.2 - Les fixations (clous et cordes) 204
11.2 - Le coût du transport 205
11.2.1 - Les végétaux 205
11.2.1.1 - La bruyère 205
11.2.1.2 - Le foin 206
11.2.2 - Le colombage 206
11.3 - Le coût global des ouvrages en terre crue 207
11.3.1 - Les constructions en terre massive 207
11.3.1.1 - Castelnaudary 207

8
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

11.3.1.2 - Toulouse 211


11.3.1.3 - Montréal 212
11.3.2 - Les constructions en torchis 212

CONCLUSION GÉNÉRALE 217

Glossaires 223
Glossaire occitan 226
Glossaire latin 255

Sources 269

Bibliographie 275

Index 285
Noms de lieux 285
Noms de personnes 289

Remerciements 295

9
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Préface

Voici un ouvrage entièrement consacré à des fortifica- Toulouse, à des données archéologiques qui, pour être peu
tions médiévales en terre crue. L’imagerie ordinaire, nombreuses, n’en constituent pas moins un des fondements
qu’elle soit populaire ou scientifique, ne possède guère de du raisonnement. Comptes, prix-faits, délibérations, sont
références susceptibles d’évoquer de puissantes enceintes des sources incomparables de renseignements pour les
bâties en terre sur le territoire français. Au mieux, à historiens ; ils sont souvent examinés à travers le prisme de
l’énoncé d’un tel sujet, on imaginera ces amoncellements telle ou telle recherche portant, selon l’intérêt des cher-
de « terres » qui constituent les mottes castrales. Les seules cheurs, sur l’anthroponymie, les usages d’une corporation,
images qui viennent à l’esprit sont celles des incroyables la fiscalité, les mesures, les chantiers, les matériaux et les
forteresses en pisé du Maroc ou d’Al-Andalus, dans le sud techniques de construction..., mais, en définitive, peu de
de l’Espagne. Et pourtant il s’agit bien dans ce livre de corpus ont été exploités de manière aussi exhaustive que
murs édifiés avec de la terre, de courtines de plusieurs l’a fait Frédéric Loppe. Toutes les informations ont été
mètres de hauteur, de tours, de portes… Dans la région recueillies et chacune a apporté sa contribution à un
étudiée ici -le Lauragais audois- les parois de terre crue ont chapitre du livre.
souvent été appelées parets en occitan, au moins jusqu’à Dans ces textes, rédigés en latin ou en occitan, il a fallu
l’époque moderne, et c’est aussi ce terme qui a prévalu repérer les mentions relatives à la construction, mais aussi
pour désigner les enceintes de terre massive. les termes d’architecture militaire et ceux des constructions
Ce livre met donc en valeur le rôle majeur de la terre de terre et de bois. Une attention particulière a en effet été
dans les fortifications de l’Aude -mais aussi du Toulousain- portée au champ lexical qui englobe les matériaux et la
pendant la guerre de Cent ans, et vient enrichir une double mise en œuvre de la terre crue. Ce secteur était resté très
problématique : celle des fortifications médiévales en rarement exploré jusqu’aux travaux pionniers de
général et celle des usages constructifs d’un matériau très Dominique Baudreu, dont l’apport essentiel est d’avoir
modeste, mieux connus dans le cadre domestique qu’à cette montré que certains termes restés abscons pour beaucoup
échelle monumentale. Être parvenu à restituer à ce type de chercheurs pouvaient être interprétés à la lumière des
d’enceintes une place honorable parmi les ouvrages fortifiés connaissances acquises sur les architectures de terre. Seuls
représente un apport essentiel à la connaissance des archi- des archéologues de terrain, à qui ces techniques construc-
tectures militaires. Mais le défi lancé par Frédéric Loppe au tives et leurs subtiles variantes sont familières, étaient à
départ de cette recherche consistait à utiliser principalement même de donner un sens à des termes comme « tapia »,
des sources textuelles pour étayer son argumentation, « taula », « bart », « tortissayre », « gason », « paret »,
puisque les murailles en terre des cités étudiées, et en parti- voire d’imaginer les manières dont ces parets avaient pu
culier celle de Castelnaudary, avaient disparu ! Pari tenu. être dressées. Il était en effet nécessaire de savoir que la
Souhaitons que cette reconnaissance permette de porter à terre massive peut être montée entre des planches de
l’avenir un autre regard, en d’autres régions, sur des fortifi- coffrage pour interpréter l’usage des taulas, il fallait
cations mal comprises qui ne pourront plus, en tout cas, être connaître les différents procédés de la bauge pour
considérées comme de simples défenses temporaires. comprendre que les gasons correspondaient à des pains de
Ce n’est pas le moindre mérite de ce livre que d’arriver terre plastique, et pour pouvoir déterminer le rôle des
à concilier les éléments foisonnants mais d’un hermétisme tonnes de bruyères figurant dans les comptes…
sévère, scrupuleusement collectés dans les archives de Frédéric Loppe n’a pas hésité non plus à bousculer
Castelnaudary, auxquelles sont parfois adjointes celles de quelques idées figées concernant les modes de construction

11
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

en terre en proposant, à l’issue de sa minutieuse enquête, Derrière cette talentueuse évocation, il y a la rigueur
l’existence d’une technique à peu près inédite qu’il nomme d’une recherche et une somme d’érudition qui émane, tout
« paret coffrée », procédé indéniablement ambigü, puis- d’abord, du dépouillement de dizaines de livres de comptes
qu’il emprunte certains de ses caractères à d’autres tech- arides. Erudition, aussi, dans le domaine des maçonneries
niques plus orthodoxes, mais qui prend corps au fil de la en terre puisque les investigations de l’auteur l’ont conduit
lecture. à interroger des vestiges antiques aussi bien que des bâti-
ments en élévation, en vue d’interpréter ses propres objets
Cet ouvrage passionnant offre au lecteur la vision d’une
d’étude. Erudition, enfin, parce que les connaissances de
enceinte en terre massive aux dimensions impression-
Frédéric Loppe ne se limitent pas à la castellologie médié-
nantes, avec au sommet ses hourds en bois et torchis, en
vale des régions audoises, mais s’étendent bien au-delà de
avant ses fossés et palissades, des portes, des ponts, des
cette zone géographiques et de cette période.
escaliers. Il restitue les étapes du chantier dont il décrit les
échafaudages, l’outillage spécifique des maçons de terre Nul doute qu’un tel livre devienne une référence indis-
(les parediers), les quantités phénoménales de terre, de pensable dans le domaine de l’architecture défensive du
foin, de bruyère, de bois ; il esquisse le portrait des Moyen Âge comme dans celui des techniques de construc-
hommes qui y travaillent, en donnant non seulement leurs tion en terre. Sa contribution à l’élargissement des registres
noms (et quelquefois leurs origines) mais aussi leurs quali- lexicaux propres à ces deux domaines, tant en français
fications, leurs salaires, le détail de leurs tâches : creuse- qu’en langue d’Oc ou en latin (occitanisé), marquera égale-
ments, transport des matériaux, mise en œuvre, etc, sans ment une étape essentielle de la recherche.
oublier les travaux de maintenance et les réfections qui Claire-Anne de Chazelles
ponctuent toute la période de la guerre de Cent ans. Chargée de recherche au CNRS – UMR 5140 Lattes

12
INTRODUCTION

13
PRESENTATION GENERALE, P. 15-17 INTRODUCTION

Chapitre 1

Présentation générale

Au cours de mes recherches de DEA, le choix de la Ces ouvrages défensifs ont néanmoins laissé des traces
ville de Castelnaudary, capitale du Lauragais1, s’est rapide- très importantes au sein de la documentation consulaire
ment imposé en raison de la richesse de ses sources dont ils forment bien souvent le plus clair des dépenses tout
textuelles médiévales, particulièrement pour la période de au long des années de la guerre de Cent Ans. Cependant,
la guerre de Cent Ans. ces registres étaient, comme je m’en suis aperçu à plusieurs
En 2002, durant la préparation de ma thèse, une reprises grâce au sage conseil de Ph. Bernardi, « aussi
rencontre avec D. Baudreu aux Archives départementales importants par ce qu’ils disent que par ce qu’ils omettent ».
de l’Aude fut le « déclic » décisif qui donna une orientation En effet, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, les
nouvelle à mes investigations : ce chercheur, qui travaille constructions en terre crue massive, tant répandues à
depuis plusieurs années sur les constructions en terre crue, Castelnaudary comme dans bien des villes et villages du
m’a conduit à m’interroger au travers des sources consu- Lauragais et du Toulousain à cette époque, sont pratique-
laires sur la nature même des fortifications présentes à ment « invisibles » tout au long des comptes, si bien
Castelnaudary aux XIVe-XVe siècles. Après quelques qu’elles m’étaient totalement passées inaperçues dans le
recherches et recoupements, je suis assez rapidement arrivé cadre de mon DEA (Loppe 2000-2001) : les sources n’uti-
au constat que la totalité de l’enceinte de la ville n’était pas lisent généralement jamais le terme de « terre » mais des
construite en pierre, comme je le croyais alors, mais en vocables, la plupart du temps occitans, dont l’emploi
grande partie en terre crue. permet à lui seul de désigner une construction faite de terre
crue massive.
Ainsi, la construction de terre crue, si présente en
Lauragais et Toulousain au Moyen Âge, et pourtant si peu Comme l’avait fait D. Baudreu avant moi, il a donc
étudiée (Baudreu 2002, 2003), ouvrait, en collaboration fallu s’intéresser à d’autres mentions ou publications, pour
constante avec cet historien, une perspective de recherche la plupart assez anciennes, qui suggéraient la présence de
très intéressante capable d’apporter des éléments novateurs terre crue massive, sans avoir vraiment pris conscience de
et inédits sur cette architecture traditionnelle et les hommes sa nature réelle. Ce travail de « relecture historiographique »
qui la mettaient en œuvre. Comme bien des villes de a permis de se rendre compte que certaines méthodes de
France, Castelnaudary a vu la quasi-totalité de ses fortifica- construction en terre crue étaient connues depuis long-
tions disparaître à l’époque contemporaine (XVIIIe- temps en Lauragais et Toulousain, que ce soit à travers les
XIXe siècles), période à laquelle elles étaient devenues sources ou les monuments encore en élévation, mais que
inutiles, obsolètes et même gênantes. Victimes d’une urba- bizarrement elles étaient restées comme « en sommeil » au
nisation sans cesse croissante, ces défenses ont fait les frais regard du petit nombre de publications récentes les concer-
de l’acharnement de l’homme à les détruire comme d’autres nant. Ce travail était donc pour moi l’occasion de tenter de
hommes s’étaient auparavant évertués à les construire. renouveler la vision de la fortification dans ces régions

1
« Le nom de Lauragais désigne, jusqu’au milieu du XIIIe siècle, les possessions de la maison de Laurac, situées sur les limites orientales du comté de
Toulouse. Ces terres, confisquées par Raymond VII en 1237, passent aux mains du roi de France en 1271. En 1478, Louis XI érige la judicature de
Lauragais en comté et le remet à Bertrand de La Tour, en échange du comté de Boulogne. Le Lauragais est, à la fin du Moyen Âge, une riche région
agricole, produisant des céréales et du pastel et où la plupart des petites villes exercent une activité drapière » (Marandet 2006a, 459). Sa superficie est
d’environ 1700 km2 (Ibid., note 1).

15
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

souvent dépourvues en pierre à bâtir, où la terre crue devait de la terre crue dans le bâti médiéval, en pointant les
représenter le mode traditionnel et majoritaire d’édification lacunes de la recherche historique et archéologique dans ce
des enceintes villageoises aussi bien qu’urbaines. domaine (Pesez 1985)8,
Pour le Sud-Ouest de la France, les plus anciennes Signalons également, pour les périodes protohisto-
publications traitant de l’usage de la terre crue dans la forti- riques et antiques, les recherches de Cl.-A. de Chazelles
fication médiévale remontent au XVIIe siècle avec G. de qui tentent, entre autres, de proposer des techniques de
Catel, premier historien local à avoir relevé la distinction fouilles propres à identifier ce type de construction,
opérée par G. de Puylaurens au XIIIe siècle (Puylaurens souvent très difficiles à détecter (de Chazelles, Poupet
1996, 98) entre les murs (de briques cuites) de la ville de 1985 ; de Chazelles 2003).
Toulouse et les parois (de terre crue) du bourg (Catel 1663,
On s’attardera brièvement à ce stade sur les nombreux
132). Une quarantaine d’années plus tard, La Faille, dans
articles traitant des « fortifications de terre » qui connais-
ses Annales de la ville de Toulouse… mentionne, lors de la
sent une importante diffusion en cette fin des années 1970
description d’événements relatifs aux guerres de Religion
et dans le courant des années 1980, avec le renouveau de
(en 1595), que Castanet2 « n’est qu’un fort, n’ayant qu’une
l’archéologie médiévale en France. On a eu naguère l’ha-
ceinture de terre sans angles ny flancs » (La Faille 1701,
bitude de désigner sous cette acception, particulièrement
504). En 1753 Lebrun, dans Les us et coutumes de la ville
de Toulouse…, décrit trois sortes de mortier « sçavoir, le au début des années 19809, des mottes castrales ou des sites
mortier franc, le mortier de terre, la bauge ou paillevard » fossoyés façonnés par la main de l’homme. Par ailleurs, la
(Lebrun 1753, 44)3, signe que la terre crue est encore quasi-absence de pierres de construction sur ces sites doit
utilisée en Toulousain au milieu du XVIIIe siècle. En outre, aujourd’hui susciter la réflexion quant à la nature réelle des
les murailles en terre crue massive du faubourg Saint- ouvrages supportés par ces retranchements.
Cyprien de Toulouse étaient toujours visibles en 1713 L’expression « fortification de terre » recouvre vrai-
puisque Du Puy des Grais écrivait alors, au sujet des semblablement, pour un nombre important de ces sites, une
menaces anglaises autour de la ville en 1345-1346, que définition beaucoup plus large que celle attribuée au début
« les frayeurs que causoient les Anglais qui tenoient alors des années 1980… Ainsi, des « enceintes en terre crue »
la Guienne firent prendre des précautions à la ville de (élévations de plusieurs mètres de haut en terre coffrée ou
Toulouse pour se défendre de leurs incursions… Il est vrai- en bauge) étaient peut-être mêlées au sédiment des sites
semblable que c’est dans cette occasion que furent élevés fossoyés, couches que l’on a pu interpréter tour à tour
les remparts du quartier St Ciprien qui sont de terre comme provenant d’une levée de terre avec palissade, de
batüe »4. l’érosion de la motte elle-même, ou de remaniements struc-
Dans le courant du XIXe siècle et au début du turels de la plate-forme10. En Lauragais audois, les fouilles
XXe siècle, quelques rares études monographiques ou de deux mottes castrales illustrent ce problème (Dauzat
synthétiques sont menées par des érudits locaux ou des 1984a, 1984b, 1988).
ecclésiastiques : elles portent généralement sur des fortifi- Les années 1990 voient un intérêt croissant pour les
cations villageoises du Toulousain et mettent en évidence constructions médiévales en terre crue, surtout en Espagne
des enceintes de terre crue signalées dans les textes médié- et au Maghreb (Bazzana 1992). D’autres recherches s’inté-
vaux ou encore visibles en élévation pour un certain ressent à la fois aux techniques et à la signification du
nombre d’entre elles5. vocabulaire employé dans les sources (Molénat, Passini
Il faudra ensuite attendre les années 1960-1970 pour 1999, Van Staevel 1999).
que des écrits, peu nombreux et souvent succincts, Dans le Sud de la France, et particulièrement en
mentionnent des éléments fortifiés de cette nature en Languedoc, les publications de Cl.-A. de Chazelles décri-
Toulousain, mais également en Basse-Auvergne6. D’autres vent les constructions en terre crue des fouilles de Lattes
publications sont à signaler pour les années 1980, notam- (de Chazelles 1999), tout autant qu’elles synthétisent les
ment pour le Vaucluse (Vaucluse 1981), l’Espagne (Riu connaissances sur les maisons de terre crue de la
1985)7 et le monde en général (Dethier 1986). Protohistoire et de l’Antiquité (de Chazelles 1997). Pour le
Toujours dans les années 1980, les travaux de J.-M. Sud-Ouest enfin, quelques travaux épars, pour certains non
Pesez soulèvent concrètement le problème de la présence publiés, mentionnent ou laissent supposer l’existence de

2
Village situé à 10 km au sud-est de Toulouse.
3
Nous restons cependant perplexe quant à l’attribution du qualificatif de « mortier » à la bauge, qui, on le verra, est une technique de terre massive.
4
du Puy des Grais, 1713, 408. Cité dans : Leblanc 1983-1984, 32.
5
Pottier 1865 ; Du Bourg 1872-1873 ; Galabert 1901 ; Forestié 1908 ; Chalande 1914 ; Latouche 1923 ; Grimal 1935, 1936.
6
Chauliac 1960 ; Fournier 1966, 1972 ; Eclache 1974.
7
L’auteur emploie néanmoins improprement le terme de « torchis » qu’il faut remplacer par celui de « pisé ».
8
Ses travaux ultérieurs, tout à fait fondateurs pour le « lancement », certes tout relatif, de la recherche médiévale en France dans ce domaine, sont égale-
ment forts instructifs. On pense en particulier à : Pesez 1998a, 1998b, 1998c.
9
Cette formule est également souvent employée de nos jours.
10
Ainsi comme le relèvent certaines auteurs, « la principale difficulté à laquelle se heurte l’archéologie est la fragilité des documents de terre crue et
de bois qui leur vaut d’être plus fréquemment rencontrés sous formes de couche de démolition, argileuses et compactes, qu’en élévation. C’est précisé-
ment cet état extrême de désagrégation qui a longtemps permis de passer sous silence l’architecture de terre, les archéologues interprétant ces couches
anonymes et quasi stériles en mobilier comme des remblais » (de Chazelles, Poupet 1985, 154).

16
PRESENTATION GENERALE INTRODUCTION

défenses et de maisons en terre crue massive pour l’époque bâtir en France en tentant de réhabiliter l’image erronée de
médiévale (Bertrand, Briançon 1989 ; Briançon 1991 ; matériau « non noble » véhiculée par la terre crue, phéno-
Gardel 1994, 1999a ; Lucas 1996). mène qui a très souvent conduit à sa quasi-disparition,
Ce n’est que très récemment, au début du XXIe siècle, particulièrement pour les vestiges de fortification en éléva-
que l’on prend véritablement conscience de l’importance tion, qui -on le verra- sont très rares dans la région étudiée.
de cette technique dans la fortification médiévale de cette La plupart des travaux publiés jusqu’ici pour le Sud-
région11 : un auteur, D. Baudreu, par une relecture des chro- Ouest de la France se sont souvent contentés, pour les plus
niques médiévales et de la bibliographie (anciennes anciens, de signaler cette technique de manière anecdo-
fouilles archéologiques, sources imprimées) mais égale- tique ou de tenter de la décrire très sommairement.
ment par des observations de terrain, apporte des éléments Pourtant, à Castelnaudary comme ailleurs, différents
de connaissance novateurs et contribue à renouveler la procédés, quelquefois difficiles à identifier, ont été
vision des moyens de défense employés par les populations employés pour mettre en œuvre la terre crue13.
rurales et citadines, notamment pendant la guerre de Cent Pourtant, si la terre crue constitue le « fil directeur » de
Ans (Baudreu 2002). cette recherche, il a paru difficile, voire inopportun, de la
Les récents actes des tables-ronde de Montpellier détacher de son contexte, puisqu’elle n’est pas le seul
(2004) et Villefontaine (2007), qui regroupent des cher- élément entrant dans les fortifications chauriennes.
cheurs d’horizons divers, sont un outil très précieux pour D’autres matériaux comme le bois, la pierre et la terre cuite
dresser un inventaire général des techniques de terre crue (tuiles et briques) sont aussi employés pour offrir à la capi-
utilisées dans diverses régions françaises depuis la tale du Lauragais un système défensif élaboré que nous
Protohistoire jusqu’à la période moderne (de Chazelles, avons souhaité étudier dans sa globalité.
Klein 2003 ; Guillaud, de Chazelles, Klein 2007). Ils Ainsi, après avoir exposé dans une vaste introduction
tentent d’établir un nouveau bilan des connaissances générale la documentation, la ville, et les principales étapes
actuelles en la matière, mais force est de constater que les de sa mise en défense, on s’attachera à présenter dans une
techniques médiévales sont encore les plus mal connues et deuxième partie les techniques de construction en terre
ne peuvent soutenir la comparaison avec les travaux sur les crue massive, puis dans une troisième celles concernant le
périodes plus anciennes12. colombage/torchis, avant d’aborder dans une dernière
Le présent ouvrage souhaite ainsi s’inscrire dans ce partie la dimension socio-économique de la terre crue en
récent mouvement de « redécouverte » de cette manière de Lauragais et Toulousain.

11
Alain Salamagne signale pour sa part que « les écrits de Froissart ou d’autres chroniqueurs du XIVe siècle, témoignent du fait que nombreuses étaient
alors les enceintes dont les défenses étaient constituées, en tout ou partie, par des levées de terre palissadées, tant en Savoie, que Rouergue ou
Bourgogne, etc. Autour des années 1350, on se contenta –ainsi qu’en Angleterre- de restaurer les anciennes murailles, en ruine ou délabrées faute d’en-
tretien, ou de recreuser leurs fossés. Cet état de fait se prolongea parfois en raison d’un manque de ressources financières : des villes de l’importance
de Bruges ou Toulouse conservaient encore au XVe siècle de longs tronçons de terre » (Salamagne 2001a, 69). Comme on le verra cependant, il est
désormais certain que les fortifications toulousaines n’étaient pas de simples levées de terre mais de véritables enceintes de terre coffrée.
12
Récemment, dans un article concernant le site fossoyé de Labrit (enceinte du XIIIe siècle), dans les Landes, Y. Laborie indique qu’il « ne faut égale-
ment pas exclure l’éventualité d’un couronnement du rempart par un mur de terre, type de construction ne laissant ordinairement que des traces fugaces
et qui ici, en sommet de talus fortement soumises à l’érosion, purent totalement disparaître ». En outre, concernant les vestiges arasés de la tour sur
motte du site, l’auteur signale également que « l’hypothèse d’une édification en terre damée est à prendre en compte et pourrait expliquer l’absence de
toute autre empreinte de fondation lisible des parois entre lesquelles s’effondrèrent et brûlèrent, lors de leur destruction, les éléments en bois de la
construction, plancher et charpente de couverture » (Laborie 2006, 350, 352).
13
La mention la plus explicite de l’utilisation de la terre crue comme élément construit dans la fortification à Castelnaudary est inscrite dans un compte
de 1363 : AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°124 v°4]. « Item dare fecerunt Petro Saulonis pro faciendo unam turrim de terra retro hospicium B.
Raudi… ».

17
LES COMPTES CONSULAIRES DE CASTELNAUDARY (1359-1448), P. 19-24 INTRODUCTION

Chapitre 2

Les comptes consulaires de Castelnaudary (1359-1448)

2.1 - Présentation Elles sont évidemment variables selon les années17,


Les registres consulaires conservés sont au nombre de mais concernent toujours à peu près les mêmes catégories :
dettes dues par des particuliers ou des marchands (dont
trente-huit14, dont trente-deux pour la période de la guerre
de Cent Ans. Leur taille, assez variable, se situe générale-
ment autour de 70 à 80 folios.

2.1.1 - Présentation formelle des comptes


Ces documents se présentent sous la forme de recettes
et de dépenses inscrites à la plume sur des cahiers aux
feuilles de papier reliées et protégées par une couverture
souple faite de morceaux de parchemins réutilisés (fig. 1).
Chaque registre débute par une petite introduction
mentionnant quelquefois les noms des consuls de l’année
écoulée15, la date, ainsi que le détail et le montant des
recettes. Ces dernières sont systématiquement présentées
en premier mais selon l’état des documents (dégradations
dues au feu ou à l’humidité, pages arrachées), elles ne sont Fig. 1 : Compte trésoraire de Castelnaudary, 1359-1362, (AD
pas toujours conservées16. Aude, 4E76/CC48).

14
AD Aude, 4E76/CC48-87, Comptes trésoraires et pièces à l’appui. 1359-1785 (38 registres ou cahiers, 2 liasses).
15
Le consulat se développe très tôt en Lauragais, et à cette époque l’ensemble des villes, bourgs et villages en possèdent un. Généralement « l’assem-
blée générale de la communauté reste malgré tout un événement exceptionnel. En règle générale, les consuls ne prennent guère de décision sans avoir
recours à l’avis de leurs « conseillers ». Ces conseillers existaient dans toutes les communautés, bien avant l’arrêt du Conseil du Roi, du 20 septembre
1689, qui institue un conseil politique de six, douze ou vingt-quatre personnes dans chaque localité. Mais la composition de ces conseils était extrême-
ment imprécise. Les coutumes de Castelnaudary, de 1333, nous apprennent que chacun des six consuls nomme trois conseillers. […]. Même lorsque
le nombre et les fonctions de ces conseillers ne sont pas précisées par les textes, leur importance reste indéniable, ce sont des riches bourgeois, les
possédants, les « notables », tous ceux qui composaient jadis l’ancienne cour seigneuriale, avant que se dégage nettement l’institution consulaire. Il est
difficile de régler les attributions d’une assemblée aussi variable par nature. C’est une institution de fait ». Par ailleurs, « auprès des consuls se tenaient
un certain nombre d’« officiers », fonctionnaires nommés par les consuls pour les assister dans l’exercice de leur charge. Le premier de ces fonction-
naires était autrefois le bayle, dont les attributions sont à la fois celles d’un huissier et celles d’un homme d’affaire. Il est parfois doublé par un lieutenant
de bayle. La cour consulaire comprend ensuite un « notaire » ou greffier. D’après le dénombrement des consuls d’Auterive, 1548, II, § 5, le greffier a
pour rôle de rédiger les ordonnances consulaires « expédier les plaidoyez et causes par devant eulx demenez ». Il rédige aussi le registre des délibéra-
tions. Les consuls nomment un ou plusieurs messeguiers (gardes-champêtres) ». En outre, « l’exécution des ordonnances consulaires est confiée à des
agents dont le nom est extrêmement variable : sergents, massiers-sergents (Castelnaudary, 1688), gardes, valets consulaires. Certaines communautés
créent encore d’autres charges municipales. Il y a en 1333 à Castelnaudary « dos o may proshomes sobrepausats » pour le contrôle de chaque métier et
de chaque marchandise. À la même époque, la ville possède un receveur-trésorier, qui tient ses livres en double » (Ramière de Fortanier 1939, 93-95).
16
Ce type de présentation est commun à tous les comptes urbains des XIVe et XVe siècles, comme le relève A. Rigaudière (Rigaudière 1982, t. 2, 659).
17
Les comptes consulaires chauriens adoptent en effet le style de l’Annonciation, c’est-à-dire que l’année commence le 25 mars. Dans d’autres cas,
c’est la fête de Pâques qui est retenue, comme par exemple à Saint-Flour, entre 1376 et 1468 (Rigaudière 1996, 101).

19
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

certains obtiennent un allègement fiscal), arrentements Toutefois, leur abondance a également été un handicap,
concernant les étals des commerçants du marché, taxes dans le sens où il a fallu aller puiser au milieu d’une multi-
prélevées sur les Juifs, recettes provenant d’autres commu- tude d’autres dépenses celles concernant la fortification.
nautés lors de frais engagés par la jugerie de Lauragais Ces registres, de par leur nature comptable, sont par
pour rendre la justice, imposition sur les boucheries, etc. ailleurs la plupart du temps très laconiques : les dépenses
se contentent de mentionner les personnes rémunérées ou
À la suite des recettes, les dépenses sont regroupées
le matériau acheté, le travail réalisé ou la destination de la
sous formes d’alinéas débutant par « Item » auxquels
pièce, et les sommes versées.
correspondent des sommes inscrites en marge par le même
scribe18. Hormis les comptes exclusivement relatifs aux On ne sait donc pratiquement jamais comment s’as-
dépenses de fortifications et à la mise en défense semblent les matériaux entre eux ni quelle est la taille ou la
(« comptes spécialistes »19), les dépenses recouvrent divers forme des ouvrages édifiés. Les étapes de la construction
domaines touchant à la vie économique et administrative sont elles aussi souvent « brouillées » : en effet, les
de la ville (achats de draps, de chandelles, de robes pour les comptes n’adoptent pas toujours un ordre chronologique
consuls, de cadeaux pour les dignitaires, frais de déplace- strict et classent parfois les dépenses par lieu géographique
ments pour les messagers, frais de copies d’actes et de ou selon la personne qui a engagé ou surveillé les travaux
lettres, etc). d’un secteur particulier21. Il arrive même bien souvent que
les « Item » apparaissent sans ordre chronologique, voire
Le contrôle des comptes est systématiquement réalisé que les dates ne soient jamais mentionnées…
par une main distincte de celle ayant enregistré les
dépenses (graphie et couleur d’encre différentes). Cette Un élément contenu dans le premier registre (AD Aude,
vérification se fait au bas des recto et verso de chaque folio, 4E76/CC48, 1360-1362), indique que ces documents ont
été rédigés au terme de l’exercice à partir de « brouillons »
la somme totale des dépenses étant ensuite généralement
ou de « fragments de comptes » (certaines dépenses sont
mentionnée (mais pas toujours) à la fin de l’inventaire. On
regroupées à la fois par lieu et par date).
constate souvent des ratures dans ces chiffres, faits qui
trahissent des erreurs commises par le vérificateur lors des Certaines personnes étaient certainement tenues d’enre-
additions20. gistrer les heures effectuées par chaque travailleur (la
mobilité de certains ouvriers sur le chantier est grande), ou
2.1.2 - Réflexions sur les comptes les matériaux achetés22. Ces informations étaient ensuite
transmises au scribe, qui les consignait dans le compte
L’importance quantitative et qualitative des comptes selon une organisation propre, ce qui expliquerait la diver-
consulaires chauriens conservés pour les XIVe et sité des modes de présentation des dépenses23.
XVe siècles a globalement été une chance extraordinaire :
outre une étude sur les techniques de construction, qu’elles Les registres consulaires chauriens utilisent principale-
soient ou non en terre crue, ce facteur a également permis ment trois formules pour mentionner qu’une dépense a été
de faire des recoupements sur plusieurs années, d’étudier enregistrée (paiement des ouvriers ou des marchandises) :
l’évolution professionnelle d’une personne, et d’engranger Le « libre », document intermédiaire rédigé par un des
une très grande variété de termes techniques. consuls ou un maître d’œuvre24 sous ses ordres pour chaque

18
Dans l’ensemble des comptes, les dépenses relatives aux achats de matériaux et aux salaires se succèdent sans ordre particulier. Ce phénomène peut
également s’observer à Lille, où « les comptables lillois raisonnent en termes de « travaux publics ». Jamais ils ne prennent en considération la fortifi-
cation urbaine en tant que telle. Leurs comptes mentionnent donc, pêle-mêle, les dépenses relevant de l’urbanisation, sans qu’ils jugent utiles de les
classer. Ici par exemple, aucune distinction n’est établie entre les salaires versés et les achats de matériaux, comme cela se fait souvent ailleurs »
(Clauzel 1996, 278).
19
Nous avons forgé ce mot pour désigner des registres chauriens qui consignent uniquement des dépenses relatives aux fortifications : AD Aude,
4E76/CC48 (1359-1361), 4E76/CC50 (1363), 4E76/CC52 (1367), 4E76/CC74 (1432). Il s’agit très probablement de cahiers annexés au compte général
annuel, malheureusement perdu pour ces années.
20
Les comptes des villes sont en effet régulièrement contrôlés durant la guerre de Cent Ans : c’est le cas par exemple à Saint-Flour, en Auvergne, dès
1367, où est instituée une commission de contrôle des comptes hebdomadaire composée de jurés « réunis chaque lundi en la maison consulaire. Les
consuls sont tenus de leur rendre compte des dépenses faites dans la semaine écoulée. Nature et motifs doivent en être précisés » (Rigaudière 1982 t. 1,
175). Sur les modalités du contrôle des comptes, voir également : Rigaudière 2004.
21
Cette présentation désordonnée se retrouve également quelquefois dans les comptes de Saint-Flour. En effet, « l’énumération par ordre chronologique
n’est même pas constamment respectée et, bien souvent, le scribe n’indique plus les dates, faisant simplement précéder certaines dépenses de mentions
aussi vagues que item una festa ques passada ou item, un jorn passat » (Rigaudière 1982, t. 2, 660).
22
Philippe Bernardi note qu’en 1524 c’est « le maître fustier chargé de l’exécution du moulin qui doit : [faire talha de toutas las journadas que metra
a faire lad. besonha tant d’el que d’autres et de lasd. journadas una fes la semana dara conte] » (Bernardi 1995, 93-94, note 38).
23
Cette observation soulève le problème du suivi des travaux. Comme le relève A. Salamagne, ce dernier demandait, de la part du maître d’ouvrage
« outre certaines capacités techniques, une présence sur le terrain pour vérifier la réalité des tâches exécutées. Cette vérification était d’autant plus
nécessaire que le bâtiment médiéval ne semble avoir connu que rarement le régime de l’entreprise générale où un entrepreneur soumissionne l’ensemble
des travaux ; le choix d’une série d’entreprises spécialisées –si elle assure en principe une haute qualité des travaux- impose par contre au maître d’ou-
vrage une surveillance particulière. Les villes eurent alors tendance à spécialiser certains de ces contrôleurs ou responsables financiers dans le suivi des
travaux » (Salamagne 2001b, 221).
24
À Saint-Flour également, les consuls « délèguent leurs pouvoirs à un maître de chantier. La coutume voulait qu’on le choisît parmi les membres du
conseil, ou, tout au moins au sein d’un groupe de personnes en vue dans la cité. C’est peut-être ce qui explique que cette charge ait été, la plupart du
temps, exercée sans contrepartie et qu’on en trouve peu de traces dans les registres. […] ce maître de chantier n’était d’ailleurs pas seul. Souvent, il
était aidé dans son travail par un sergent que lui adjoignaient les consuls. Sa fonction essentielle était de conduire les manœuvres sur le lieu de travail.
Là, il devait exercer sur eux une surveillance de tout instant » (Rigaudière 1982, t. 1, 543, 544).

20
LES COMPTES CONSULAIRES DE CASTELNAUDARY (1359-1448) INTRODUCTION

opération d’envergure25. Le compte, pour justifier la pouvaient surveiller ou contrôler : cette délégation est
dépense, fait ainsi quelquefois référence à ce « livre », particulièrement flagrante pour l’année 1359-1360 où sont
probablement pour laisser une trace quant à la raison de consignés à la fin du registre, sous forme de paragraphes
l’engagement de l’argent public lors de l’opération de distincts, les achats et autres embauches de personnels
contrôle des comptes26. Dans ce cas précis, les consuls réalisés par plusieurs personnes, dont aucune ne fait partie
restent donc « entre eux » pour la collecte des informa- des consuls élus pour l’année en cours : on peut ainsi citer
tions, système qui était peut-être destiné à éviter les
Bernard Gui, qui remet au scribe une charte ou un docu-
fraudes.
ment (cartellus) répertoriant ses dépenses31 ou Dominique
Une deuxième formule, « a relatio de »27 permet de Gaston, maçon-carrier bien connu32.
savoir quelles personnes ont travaillé sur une tâche particu- En 1361-1362, Jean Séguin est par ailleurs qualifié
lière, ou quels matériaux ont été achetés. Ainsi, le consul d’« operarius deputatum per dictos dominos consules »33,
Bertrand Robert « rapporte » à partir de mai 1360 que operarius pouvant désigner un « ouvrier ou un manœuvre »
Raymond Jacques a travaillé un jour dans un fossé28, ou que (Gaffiot 2000, 1096), ou une « tierce personne chargée de
le forgeron G. Gilat a fabriqué deux serrures29. Toute la
surveiller les travaux »34, définition qui semble s’appliquer
question est cependant de savoir quelle distinction on peut
en l’espèce.
opérer entre le « libre » précédemment cité et le « rapport »
(écrit ?), émis par certains consuls30. Pierre Bosc et Jean Raysh font mention d’une saisie de
Dans d’autres cas cependant, ces derniers donnent neuf pièces de bois en 1360-1361 auprès d’un charpen-
« procuration » à certaines personnes pour engager des tier35. Le premier est mentionné en 1356 comme consul de
dépenses à leur place ou aux endroits de la ville qu’ils ne la ville36, fonction qu’il occupe à nouveau en 1359-136037.

25
Ailleurs, « la constitution accordée à Douai par Charles V en 1368 et rétablissant la commune, prévoyait la nomination de six bourgeois, les VI-
Hommes, à la tête des travaux. Ces responsables sermentés, qui ne pouvaient être nommés pour deux années consécutives, avaient le contrôle des
dépenses afférentes aux travaux, travaux dont l’engagement ne se faisait qu’avec le sceau d’au moins trois d’entre eux ; leur pouvoir était donc vérita-
blement un pouvoir de direction et d’ordonnancement ». En outre, « à la commission financière constituée par les VI-Hommes et le Receveur de la
ville, devait se joindre une commission technique –la commission des IV-Hommes- formée par deux maîtres charpentiers et maçons qui avaient non
seulement la charge d’inspecter les travaux urbains mais encore, avec le titre de maistres desserveurs des hiretages de le ville, de délimiter les propriétés
privées ou publiques » (Salamagne 2001a, 105, 106).
26
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°50 v°2]. « …an Peyre Alsieu per la fusta de un osdal que avia al pueg de Cuquels que fo meza a las obras de
las clausuras de la vila le qual deute era en un libre escrit de la ma de mastre Galhart Matieu per le qual deute li foro pagatz 16 floris d’aur que valo
comptat le flori a 12 s. 19 l. 4 s. tor. » ; Ibid., [f°45 r°1]. « L’an de nostre senhor 1360 le dia XXII d’abril nos Johan de la Sala juge de Lauragues per
le rey nostre senhor de Fransa cret e ordenet senhor cossols del Castelnou aquestz dejos escritz : mosenhor Bertolumeu Contasti, senhor Johan
Tocabuen, mastre Galhart Matieu, mastre Bernat Servit, senhor Bertran Robert, senhor Ramon Bartas ».
27
« Relatio : relation, narration, récit, rapport sur une affaire » (Gaffiot 2000, 1354).
28
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°56 v°3]. « Item fero pagar le dit dia an Ramon Jacmes per 1 jornal que avia estat en la dita obra del valat a
relacio del senhor Bertran Robert… ».
29
Ibid., [f°57 v°1]. « …a mastre G. Gilat favre per 2 clavaduras la 1 fo mesa al pont levadis de la barbacana e l’autra fo mesa a la bara de la barba-
cana que es de palissa fora le valat costero al relacio del senhor Bertran Robert… ».
30
Concernant cette dernière expression, certains auteurs ont en effet jugé qu’elle concernait un rapport : « À chaque fois les paiements furent effectués
par la Chambre des comptes à la suite d’un « rapport » (relatio) ou d’un « achat » (emptio) faits par Jean de Louvres. Ce dernier prenait donc des déci-
sions mais en tant qu’agent de la Chambre apostolique, à laquelle il rendait des comptes » (Bernardi, Dautrey, Mignon 2001, 48, 49).
Ce rapport peut, dans certaines circonstances, émaner d’un directeur des œuvres : « l’autonomie du maître apparaît sévèrement contrôlée par la
Chambre, dans une sorte de lutte d’influence sur le chantier et auprès du pape. En ce sens, coursiers et directeurs des œuvres se présentent comme des
agents de la Chambre apostolique chargés de relayer à différents niveaux les velléités d’autonomie du maître d’œuvre. Nous trouvons l’illustration de
cette hiérarchisation dans une mention du 29 décembre 1354 qui rapporte qu’un paiement a été ordonné à la suite de l’estimation faite (ad estima-
tionem) par maîtres Jean de Louvres et Bertrand Capelier et du rapport (ad relationem) qu’en a donné Raymond Guitbaud, directeur des œuvres. Les
ordres que ce dernier peut donner sont subordonnés à l’initiative de la Chambre qui en définit l’objet et le champ d’application. Leur exécution et leur
réception sont surveillés, comme les comptes » (Ibid., 51).
31
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, « Sequitur expense facte per manus Bernardi Guini in operibus clausurarum prout in cartello per ipsum super
hoc tradito continetur », [f°31 r°1] à [f°31 r°8].
32
Ibid., « Sequitur opera facta ad pretium factum per Dominicum Guastonis peyrerium anno dicti consulatus pro quibus persolvi fecerunt eidem
summas infrascriptas », [f°31 v°1] à [f°34 r°1].
33
AD Aude, 4E76CC48, 1361-1362. Entre les [f°121 v°1] et [f°121 v°2].
34
Bernardi 1995, 455. Pierre Maurel agit donc ici en tant que maître d’œuvre pour le compte de la ville. Pour Castelnaudary, précisons que le terme de
« maître de l’œuvre » (magister operis) ou « maître des œuvres » n’est utilisé qu’une seule fois dans les registres (AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°61
r°10]. « Item a XIII de jun mossenhor le senescalc venc dinnar a Castelnou en estet per tot le jorn al castel am le mestre de las hobras am totz les
fustiers e am mastre Arn. Lo Senheyre per hordonar et coumpasar las cauzas que y fazian mestiers al dit castel… »). Pour M. Aubert, « le terme de
« magister operis », maître de l’œuvre, est celui qui est employé le plus souvent ; il ne peut, comme les précédents, s’appliquer à un ouvrier aussi bien
qu’à un architecte et désigne seulement le directeur du chantier, le constructeur. Au vrai, l’expression « maître d’œuvre » n’a pas de sens, mais seule-
ment « maître d’œuvre de tel édifice » ou « maître des œuvres » du roi ou d’un prince. Il n’y a pas, à proprement parler, pendant une grande partie du
Moyen Âge, d’architecte de carrière, mais des tailleurs de pierre et des maçons ou des charpentiers plus habiles, plus instruits, ayant fait un apprentis-
sage plus poussé, sous un maître remarquable, ayant voyagé plus longuement et acquis une expérience plus grande. C’est parmi eux que l’on choisira
celui qui sera chargé d’une œuvre déterminée ; il sera alors « le maître de l’œuvre de tel édifice ». Celui-ci achevé, il redevient tailleur de pierre, maçon,
charpentier sur un autre chantier et travaille sous la direction d’un maître qui a reçu la charge d’un édifice déterminé. Il reprend son métier qu’il n’a
d’ailleurs pas abandonné même lorsqu’il dirigeait le chantier » (Aubert 1961, t. 1, 11, 12).
35
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°50 r°4]. « …an B. Embri per 9 pessas de fusta que fo preza de lu per metre a las obras del port de las Bordas
a relacio de senhor Peyre Bosc e den Johanno Raysh…».
36
Ibid., [f° 2 r°].
37
Ibid., 1359-1360, [f°1 r°1].

21
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

En 1371, un sergent royal de Toulouse portant ce nom vient d’année par le receveur47, expliquerait par ailleurs la rareté
visiter les fortifications chauriennes durant deux jours des ratures concernant le descriptif des dépenses et les
(s’agit-il de la même personne ?)38. Le second peut éven- sommes elles-mêmes48.
tuellement être assimilé à Jean Rayshac, qui réside au port
des Bordes en 135639. Même si on ne connaît pas sa qualifi- 2.2 - Les poids et mesures
cation précise, il s’agirait d’une personne fiable ou occupant Les unités de poids et les mesures utilisées à l’époque
un rang élevé, fait qui justifierait la confiance des consuls. médiévale dépendent de la situation géographique. Dans
les années 1940 et 1960, R. Hyvert avait réalisé pour
Ainsi, chaque consul (ou son délégataire), pouvait, dans
l’Aude, commune par commune, la seule étude sur les
un secteur particulier de la ville, engager dans la journée
correspondances entre les mesures de l’Ancien Régime et
des personnes40 (ou des dépenses) de son propre chef. Ces
les poids et mesures actuels (Hyvert 1941, 1941-1943,
ordres étaient probablement consignés par écrit le jour 1961). Selon lui c’est la canne de Carcassonne (1,78 m) qui
même sur un document41 servant à élaborer le compte défi- était en vigueur à Castelnaudary durant l’Ancien régime :
nitif. Ce système tend apparemment à se généraliser en elle était subdivisée en huit pans (pan de Carcassonne :
1361-1362 où les mentions « a relatio de » deviennent très 0,223 m ; pan de Toulouse : 0,225 m) égaux à la palme
fréquentes42. On pourrait ainsi multiplier les mentions43, majeure antique (0,2234 m) (Hyvert 1941, 133). Depuis
mais ce type d’organisation paraît se raréfier ou disparaître 1994, l’étude de J.-L. Abbé est venue enrichir considéra-
en 1363-1364 : ce fait traduirait-il un changement dans le blement les informations que l’on pouvait avoir sur le
mode de suivi des travaux ? département (Abbé 1994). Cependant ces données concer-
Enfin, une troisième formule est utilisée dans les nent des unités de mesures et de poids en vigueur au
comptes : l’expression « de mandato »44, trace d’un ordre XVIIIe siècle dont certaines n’étaient pas utilisées à
donné par les édiles afin que des travaux soient exécutés : l’époque médiévale.
il s’agirait soit d’une injonction directe donnée à une Nous avons donc eu recours au travail de Ph. Wolff qui
personne pour la fourniture d’un matériau ou l’accomplis- établit de manière précise les poids et mesures en usage à
sement d’une tâche45, soit d’un ordre indirect intimé à une Toulouse durant les XIVe et XVe siècles (Wolff 1954,
tierce personne pour qu’elle fasse exécuter les tâches XVII-XXX ; fig. 2), même si on ne sait avec certitude si ces
demandées46. En tout état de cause, elle sous-entendrait chiffres s’appliquaient à la capitale du Lauragais…
qu’au moins un consul s’est au préalable déplacé sur le lieu
Toutefois, certaines dépenses chauriennes laissent
des travaux pour programmer les opérations nécessaires à entrevoir que l’opération mathématique consistant à effec-
la fortification de la ville. tuer une simple conversion en mesures actuelles serait
Cette rédaction a posteriori des comptes définitifs, sur quelquefois vouée à l’échec : ainsi, en janvier 1361, la
la base de livres ou d’écrits divers enregistrés en cours réalisation de hourds à prix-fait implique le versement de

38
Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°35 v°6]. « Item die prima mensis septembris solvi fecerunt Petro de Bosco alias Labat et eius socio vocato Justaret servi-
entis regiis Tholose qui in dicto Castronovo venerant visitare fortalicium dicti loci cum unus comissarius domini senescalli Tholose et facere reparare
dictum fortalicium et victualia recludere in quibus vacarunt per duos dies... ».
39
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°25 r°13].
40
Le premier compte mentionne en effet souvent l’expression « conducere in dicto opere » formule qui, selon certains auteurs, correspondrait à une
possibilité d’embaucher : « dernière pièce à verser à ce dossier du recrutement, le texte de la procuration qui vient d’être évoquée précise que lesdits
H. Godefridi et G. Richome pourront « promettre et payer un salaire aux ouvriers ». […] il reste que le fait de pouvoir promettre un salaire apparaît
comme une possibilité d’embaucher –ce que confirme l’expression « prendre à solde les ouvriers nécessaires à ladite œuvre » (conducere operarios
necessarios ad dictum opus). S’agit-il alors de passer des contrats forfaitaires ou de recruter des salariés ? La formulation est trop large pour que l’on
puisse conclure » (Bernardi, Dautrey, Mignon, 2001, 45).
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°74 v°5]. « …dicti domini consules fecerunt interrare cadafalcos de retro hospicium G. Olrici et
de super hospicium Bertrandi Olibe et fuerunt conducti in dicto opere videlicet Jacobus Madrerie et Johannes Carrerie...».
41
Ces documents pourraient-ils correspondre aux « registres particuliers » dont A. Salamagne soupçonne l’existence pour certaines villes du Nord de
la France ? (« Lors de chantiers importants, des maîtres d’ouvrage particuliers étaient nommés ; les sommes qu’ils recevaient étaient globalement
reportées sur le registre de comptabilité général de la ville, mais ils devaient tenir un registre particulier des dépenses engagées, registres, qui,
malheureusement ne nous sont pas parvenus » ; Salamagne 2001b, 222).
42
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 r°2], [f°88 v°7].
43
Ibid., [f°89 v°8], [f°92 r°4], [f°93 v°3], [f°93 v°7], [f°94 r°3], etc. Des artisans sont également « rapporteurs » cette année-là des œuvres ou des achats,
tels Jean Martin, charpentier ([f°106 v°4]. « Item cuidam brasserio qui portavit quinque brachiatas de fuelha in guacillo retro castrum ad relationem
Johannis Martini... »). Il agit donc probablement en tant que maître d’œuvre.
44
« Mandatus : part. de mando » (Gaffiot 2000, 954) ; « Mando : confier à qqun la tâche de, donner un mandat de, confier » (Ibid., 954, 955).
45
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°105 r°5]. « Item Guillelmus Faures de mandato Johannis Tocabonis in embannis retro G. Olricii
die predicta… ».
46
Ibid., 1359-1360, « Sequitur expense facte de mandato dictorum dominorum consulum per Arnaudum Fabre in operibus clausurarum portus de
Astrata », [f°34 r°2] à [f°35 r°5].
47
Pour les villes du Nord de la France, dans le cadre des travaux publics, « le receveur, pris et élu parmi les membres du Magistrat, n’avait que l’écri-
ture et la tenue des comptes ; il était par contre rétribué. Le receveur apparaît donc comme le contrôleur et responsable de la tenue des comptes, les
membres des Six-Hommes comme les ordonnateurs » (Salamagne 2001b, 222).
48
Pour Saint-Flour, A. Rigaudière note qu’il est « ainsi très clair que tous ces registres sont des copies, des mises au net des comptes, tenus par le
receveur tout au long de l’année. Il s’agit avant tout de récapituler méthodiquement l’ensemble des opérations comptables accomplies par les consuls
et leur receveur au cours de l’exercice, afin de pouvoir présenter à leurs successeurs et à la commission annuelle de contrôle le bilan de l’exercice
écoulé » (Rigaudière 1982, t. 2, 659).

22
LES COMPTES CONSULAIRES DE CASTELNAUDARY (1359-1448) INTRODUCTION

La canne de Toulouse : 1 canne = 1,79 m = 8 empans.


1 canne = moins de 1,5 aune.
MESURES DE LONGUEUR

1 empan = 0,22 m.
1 perche = 10 empans, puis 14 empans après le XIVe siècle.

1 arpent = 240 pieds carrés = 24 perches carrées = 4


mésalhées = 2 pogésées.
MESURES DE SURFACE

1 mésalhée = 0,14 ha.


1 pogésée : 0,07 ha*.

1 l.: env. 400 grammes (entre 407 et 479).


1 quintal : 104 l.= 42 kg.
POIDS

½ quintal : 52 l.= 21 kg.


Cartayron de quintal : 26 l.
Le ½ cartayron : 13 l.
Le poids : 6 l.½ (poids de pierre ou de métal).

En dessous, les poids étaient obligatoirement de métal :


Mesalhal : 4 l. Les poids de 2 l., 1 l., ½ l., 1 cartayron de l.
puis l’once que quelques exemplaires conservés montrent
égale au 1/16 de l., le denier, l’obole, enfin l’uchau (1/8
d’once).

Pour le pastel La charge ou sarcinée, égale à trois quintaux du poids commun


de Toulouse (donc sans doute 127,26 kg)**.
La tinée, de 4 quintaux (soit 169,68 kg).
Il est plus rarement question de pipes, une pipe valant 27 ou
28 quintaux.

Pour le vin Le tonneau (tonellum), de 2 pipes, elles-mêmes de deux


barriques chacune.
La sarcinée, une pipe contenant 4 sarcinées.
Le pipot, dont la relation avec la pipe varie beaucoup. On
compte dans la pipe :
9 pipots, en 1451.
7 pipots entre 1371 et 1416.
6 pipots entre 1380 et 1428.
Pour la vente au détail, le péga, dont le rapport avec la pipe ne
peut être établi de façon sûre.
À la mesure de Toulouse ou de Gaillac, la barrique de 60
pégas valait 190,098 litres, soit 3,16 l. pour le péga. À la me-
sure du comte Raymond, employée dans une partie du dépar-
tement, le péga valait 3,78 l., ce qui, en calculant la barrique
sur la même base de 60 pégas, donnerait 226,92 l.

Pour le bois L’unité est la pagelle. Au dessus d’elle se trouve des ligniers :
gros ligniers de 6 pagelles, petits ligniers de 3 pagelles. La
charretée contenait 2 pagelles, la navée (navata) douze.
1 pagelle = 0,93 stère.
1 pagelle « surchargée » : 1,25 stère***.

* En outre, selon R. Maguer, la canne carrée, aux XVIe-XVIIe siècles, valait à Castelnaudary 3,469 m² (Maguer 2003, 591).
** Selon J.-L. Abbé cependant, à Castelnaudary, la charge équivaut à 338 livres, soit 138,58 litres (donc autant de kg) (Abbé 1994, 93).
*** Il est difficile de savoir à laquelle des deux correspondait la pagelle du XIVe siècle, en admettant qu’elle correspondit à l’une des deux, ces conversions

étant en effet déduites des tables de comparaison de l’an X.

Fig. 2 : Poids et mesures en vigueur à Toulouse aux XIVe et XVe siècles (d’après Wolff 1954, XVII-XXX).

23
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

dix gros d’argent par canne de dix palmes (2,23 m49) et non tronçon est mesuré au moyen d’une brasse de dix palmes,
de 1,78 m (canne de Carcassonne) comme on aurait pu le soit également 2,23 m, alors que l’on aurait naturellement
croire. On ne sait cependant s’il s’agit de « canne linéaire » opté pour la brasse traditionnelle, équivalente à cinq pieds
ou de « canne carrée », autrement dit si l’on envisage le (soit 1,64 m)52. Là encore, rien de permet de savoir s’il
hourd de manière rectiligne ou comme une construction s’agit d’une mesure linéraire ou de surface.
dont on doit mesurer chaque surface50.
On peut également citer une dépense de 1363 concer-
nant la construction d’une enceinte de terre crue51 : ce

49
AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°117 v°1]. « Die XX januarii. Item dicti domini consules tradiderunt dictos embannos pretio facto ad tortisandum,
Ramundo Saraceni de portu Bordarum et debuit habere pro canna decem palmorum 10 grossos argenti... ».
50
Cette incertitude est certainement propre à toutes les régions pour l’époque médiévale : ainsi, pour la Provence, certains auteurs constatent que « les
totaux (de mesures ndlr.) exprimés dans nos sources ne se présentent pas avec la claire évidence arithmétique que paraît recouvrir leur expression
chiffrée, et notre connaissance de la valeur précise de la canne s’avère passablement inutile si l’on ne sait de quelle manière on est passé des dimen-
sions de l’œuvre à la mesure finalement couchée sur le papier. Application de coefficients, utilisation de la longueur dans certains cas et de la surface
dans d’autres… les modalités de calcul peuvent avoir été multiples et leur restitution s’avère impérative pour l’utilisation des données fournies par les
textes » (Bernardi, Mignon 2002, 312). On peut également citer en ce sens l’intéressant travail de G. Butaud pour l’enceinte de Carpentras (Butaud
2002).
51
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°24 r°4]. « ...magistro Petro Saurini pro faciendo parietem de la Strada videlicet pro 126 brachiatis parietis qualibet
brachiata 10 palmorum... ».
52
« Brachiata : brassée, mesure linéaire » (Niermeyer 1984, 103) ; « brasa : mesure de longueur des deux bras étendus » (Lévy 1909, 53). « Ancienne
mesure de longueur valant en France 5 pieds soit 1,624 m ; mesure de capacité pour le bois ; les bras » (Robert 1982, 215).

24
LA VILLE (MILIEU XIVE-MILIEU XVE SIÈCLE), P. 25-36 INTRODUCTION

Chapitre 3

La ville (milieu XIVe-milieu XVe siècle)

Implantée sur une éminence nord-ouest/sud-est 10,8 hectares) qui témoignent de sa réussite économique
comprise entre 180 et 209 m, Castelnaudary domine la sur une voie commerciale très fréquentée, entre
plaine du Lauragais audois. Son substrat se compose de Carcassonne et Toulouse (chef-lieu de la sénéchaussée
bancs de grès, de médiocre qualité pour la construction, dont elle fait partie)54 : à l’est de la colline, un ouvrage
mais également de molasse et de marne. Par ailleurs, si l’on castral (milieu XIe siècle d’après les sources) s’étend sur
excepte le canal du Midi construit au XVIIe siècle, le réseau une superficie d’environ 3240 m2 (90 x 36 m)55 (fig. 4) va
hydrographique environnant est assez pauvre : les cours attirer une agglomération de type « bourg castral »56 qui
d’eau les plus proches sont le ruisseau du Tréboul à environ devient rapidement capitale du Lauragais. Une première
1,5 km au sud, et la petite rivière du Fresquel, à 3 km au enceinte d’environ 150 x 150 m (2,2 hectares) pourrait
nord (fig. 3). Cependant, les nappes phréatiques sont avoir été créée dans la première moitié du XIIe siècle57 puis
nombreuses au cœur même de la ville, d’où la présence de une deuxième enceinte (seconde moitié du XIIe siècle ?),
nombreux puits creusés à même la roche, et ce dès le englobant totalement la première, aurait atteint une super-
Moyen Âge53. ficie d’environ 4,8 hectares58.
Les plans du XVIIIe siècle et le cadastre napoléonien
3.1 - Castelnaudary au bas Moyen Âge : morphologie
permettent de distinguer deux nouvelles extensions vers
générale l’ouest : la première, d’environ 2,4 hectares repousse la
Entre le milieu du XIIe siècle et 1366, Castelnaudary a limite occidentale de la ville d’environ 160 m, et la
connu plusieurs extensions successives (au total env. seconde, de 1,4 hectares, la déplace de seulement 70 m.

53
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°88 v°7]. « Item pro una tralha de jonc Poncio de Lauraco a trahendum aquas de puteis castri... » ; Ibid.,
4E76/CC62, 1398, [f°113 r°3]. « ….pro abstrahendo aquam tam de putheo Sancti Antonini et de putheo viridarii magistri Petri de Senossa… ».
D’autre part, des toponymes comme Font-Rouzaud (à 2,5 km au nord), voire l’Estambigou (à 750 m à l’est) dénotent peut-être l’existence de sources
ou de marécages permettant un approvisionnement en eau.
54
Castelnaudary, comme bien des villes de France, a vu la quasi-totalité de ses fortifications disparaître aux XVIIIe-XIXe siècles, d’où la difficulté dans
laquelle se trouve le chercheur pour en restituer aujourd’hui le tracé.
55
Ces dimensions s’appuient sur l’examen du cadastre napoléonien. Comme le relève en effet J.-P. Cazes, il est probable que la superficie réellement
disponible ait été bien plus réduite (environ 2000 m2 ? Cazes 1998, t. 1, 150, 151). Les 1240 m2 subsistants correspondraient donc vraisemblablement
à l’emprise du socle rocheux supportant la forteresse royale.
56
Debord 1990, 56. Ainsi, le bourg castral « est toujours lié à un château majeur ancien, siège d’un pouvoir politique fort et chef-lieu de circonscrip-
tions châtelaines (châtellenie, mandement, district). […] Le bourg castral s’est développé en même temps que s’installait et se stabilisait la seigneurie
châtelaine, le plus souvent au milieu du XIe siècle. […] Engendrés au XIe siècle, les bourgs castraux ont poursuivi leur maturation aux XIIe et
XIIIe siècles […]. Les bourgs castraux regroupaient alors des territoires de plusieurs milliers d’hectares qui constituent encore, sauf exceptions, les terri-
toires des communes […]. Plusieurs bailies royales ont conservé à leur création les contours des anciennes châtellenies, celle de Castelnaudary par
exemple. […] Au XIIIe siècle celle de Castelnaudary comptait 25 agglomérations, dont 13 castra… » (Berthe 2005, 31, 32).
57
Déduction faite de la superficie supposée du château et de sa basse-cour, l’extension réelle atteindrait environ 14750 m2.
58
Déduction faite des 2,2 hectares de la première extension (château compris). Ce tracé nous a été en partie suggéré par J. Serres de Gauzy. Selon lui,
lors du premier siège de 1211, la position de l’armée du comte de Toulouse « était sur l’avenue de Toulouse et s’étendait au midi et au nord. La ville
s’étendait, pour lors, jusqu’à l’endroit où est aujourd’hui l’hôtel de ville ; l’ancienne ville commençait à la première maison sur l’avenue de
Carcassonne, au faubourg Saint-Antoine, appartenant à maître Surbin, procureur et notaire ; c’est là qu’était placée la première porte Saint-Antoine.
On y découvre encore les anciens fondements du mur de défense de la place. Le quartier est appelé dans les anciens titres : les batailleries de la ville.

25
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

PUGINIER
Montagne Noire
l
SOUILHE
l
PEYRENS
AUDE l

SOUILHANELS Bois
RICAUD l
l de Rouzilhac ?
Castelnaudary l Pech Busque Rouzilhac
AUDE (Podio Buscano ?) Le n
n F r es
Font Rouzaud q La Roquette
n el

u
(La Roqueta)
n ST PAPOUL
Cucurou U
n pl
Sostomagus
La Planque l Raynaud (Nolet)
ll CASTELNAUDARY
(Plancaprès ?) Le Griffoul
Cuquels Montléon
n
ln
MAS SAINTES PUELLES L'Estambigou
l Le
carrière Tréb p Montmer Les Brugues
de chaux ? o (alt. : 209 m) n
l
u
St Jean
n St Bénazeth
n (Peyre Albe l
ou Pierre Blanche) ST MARTIN
VILLENEUVE LALANDE l
LASBORDES
LA COMPTAL
Bois La Grange (Agassens ?)
des Brougues
l
n
n La Bruyère Noire
MONTAURIOL
l Les Brougues

FENDEILLE
PAYRA SUR L'HERS l
l

Monts de la Piège
l Village

PEYREFITTE SUR L'HERS l Oppidum


n ll
Feuillès
l
Les Brouguets n Ferme

U
p Abbaye

p Hauteur naturelle

Cours d'eau

Bois Chemin ou voie


Calvayrac
de n
Calvayrac ?
0 2 km
Clos
de Brugues fond de carte : carte géologique, BRGM, 1975
DAO : F. Loppe, 2009
Longues

Fig. 3 : Castelnaudary et ses proches environs (fond de carte : BRGM, 1975).

26
1. Emplacement du ch‚teau (XIe-XVIe siècles) 29. Bastions (XVIe s.)
2. Donjon ? 30. Porte Neuve de l'Estrade ?
3. Four 31. Porte de Sainte-Croix ? (= porte
N
4. Emplacement de l'église saint Pierre et Paul de Toulouse ?)
5. Eglise Saint-Michel 32. Porte citée en 1356 ?
(ADA, 4E76/CC2, [f∞75 v∞1])
6. Place Saint-Michel E
7. Couvent, église et cimetière des Frères Mineurs
8. Place Saint-Bernard
9. Couvent, église et cimetière des Carmes O
G 10. Emplacement du cimetière Notre-Dame ou Sainte-Marie
11. Porte Saint-Antoine (seconde porte Saint Antoine ?) S
12. Porte Narbonnaise ? (première porte Saint Antoine ?)
H 13. Porte de Peyralbe ?
14. Porte du Terrier ?
15. Porte du Marché ?
A. Port de la Baffe/Port de Peyralbe
16. Porte de Montdebo
LA VILLE (MILIEU XIVE-MILIEU XVE SIÈCLE)

B. Port des Bordes


17. Porte de la Place ? C. Port de l'Estrade/Port Narbonnais
18. Porte des Cloches D. Port de Dins (anciennement "barrium infra" ou "barrium interius")
28 19. Porte de la Baffe E. Port de la Place
20. Porte Vieille de la Baffe ? F. Barrium de Sainte Croix (anciennement "barrium extra"), puis
10 21. Porte de Goufferand
"Port Sainte Croix" (après le milieu du XVe siècle)
UUUU G. Quartier de Montdebo
UU 22. Porte du Barri/de la Bastide H. Bastide
23. Tour des Frères Mineurs I. Faubourg de la Bastide
24. Tour des Carmes J. Port de la Baffe/Port de Peyralbe ? (extension originelle ?)
I 22 29 K. Port de l'Estrade/Port Narbonnais (extension originelle ?). En 1780
25. Porte de l'Estrade ? "Faubourg Saint Antoine"
26. Porte de Foix ? L. Faubourg de la Baffe (depuis au moins 1553)
(porte de Contresty en 1700 ?)
9 31 27. Porte Neuve (= porte de Sagos) ? 0 50 m
UU F fond de plan : cadastre napoléonien
28. Porte de la Buade ? DAO : F. Loppe, 2008
U
16
32 29
24 8

14
30
27 D
26 E
17
6 25 11
12
5 C
U

K
U
UU
7

18 3
23 15 4
1
2
B

A J
U Èglise
20
UU cimetière 21
19
tracé de l'enceinte
tracé supposé de l'enceinte ou de l'emprise de l'ouvrage castral 13
première extension (première moitié du XIIe siècle ?)
L
deuxième extension (seconde moitié du XIIe siècle ?)
troisième extension (mi-XIIIe siècle-déb. XIVe siècle ?)
quatrième extension (première moitié XIVe siècle ?)

Fig. 4 : Castelnaudary : essai de restitution de la morphologie urbaine d’après le cadastre napoléonien et les sources textuelles.
cinquième extension (nova ampliatio : ap. 1366)
rétraction du périmètre (XVIe siècle ?)

27
INTRODUCTION
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Elles ont probablement été créées entre le milieu du


QUARTIERS PORTES
XIIIe siècle et le début du XIVe siècle, puisqu’en 1366 un
(PORTS)
dernier agrandissement, la bastida, sera décidé par les
autorités royales (infra).
Porte de la Baffe
Porte-Vieille de la Baffe
Castelnaudary était par ailleurs divisée en six quartiers Port de la Baffe/

Porte de Peyralbe,
dénommés « ports »59, qui ne tiennent pas compte des limites = Port de Peyralbe ?

à l’est du port de La Baffe


imposées par les enceintes60 : le port de de la Baffe61 (ou port

(vers le lieu-dit Pierre-Blanche ou


de Peyralbe ?), le port des Bordes62 autour de l’église Saint-

Saint-Bénazet/Saint-Benoît ?)
Michel, le port de Dins63, le port de l’Estrade64 (ou port
Narbonnais), le port de la Place65 au nord-est du couvent des
Frères Mineurs et enfin le barrium de Sainte-Croix, future Porte de Goufferan
Porte des Cloches
Port des Bordes
extension fortifiée de la Bastide désignée sous le terme de

Porte de Montdebo
« barrio extra portam » en 135666. Elle sera dénommée

Porte de Foix ?
« port Sainte Croix » après la guerre de Cent Ans. Barrium de Dins

(correspond peut-être à l’ancien


Barrium infra
Enfin, d’après le recensement opéré sur l’ensemble des
nom de la porte sud du port, porte
Port de Dins
comptes consulaires, la ville comportait dix-neuf portes
de Contresty, attestée en 1700*).
entre 1359 et 1448 (fig. 5).
3.2 - Castelnaudary en 1355-1356 Porte de l’Estrade
Porte-Neuve de l’Estrade
Port de l’Estrade/

Porte Saint-Antoine
En octobre-novembre 1355 l’armée du Prince de Galles Port Narbonnais

Porte du Terrier
(ou Prince Noir) ravage le Sud-Ouest du royaume de

Porte Narbonnaise
France, en incendiant notamment plusieurs aggloméra-
tions, dont Castelnaudary, le 1er novembre (fig. 6).
Porte de la Place
Porte du Marché ?
Le roi de France, par l’intermédiaire du comte Port de la Place
d’Armagnac, son lieutenant en Languedoc, prend diverses
dispositions dans une charte du 1er février 1356, afin que la Porte de Sainte-Croix
(= porte de Toulouse ?)
Barrium de Fora
cité se relève de ses ruines et se repeuple au plus vite67 : pour
Porte de la Bastide
Barrium extra
faciliter la construction de maisons intra-muros, le roi
Porte de la Buade ?
Barrium de
concède aux habitants cent arpents de bois dans la forêt
Porte Neuve ?**
Sainte-Croix
royale, en échange d’une somme qui ne sera exigible
(= Porte de Sagos ?)
Port Sainte-Croix
qu’après un délai de quinze ans. Ils pourront détruire des (après milieu XVe s.)
- Porte de Valence
bâtiments proches de l’enceinte et utiliser le bois, les tuiles

(non localisée)
et les pierres pour la construction de cette dernière, moyen-
nant une estimation légitime faite par les consuls, sauf si
*Maguer 2003, 315.
ceux-ci souhaitent employer ces matériaux pour des réalisa-
tions intra-muros. Par ailleurs, personne ne sera autorisé à **Mentionnée en 1394 (AD Aude, 4E76/CC60, 1394, [f°18 r°6]). Roger
Maguer la situe au niveau de l’enceinte méridionale de la nouvelle bastide
(Maguer 2003, 310).
bâtir à l’intérieur des fortifications à moins de deux brasses68
des murs ou des fossés, ni au dessus des vieux fossés, ni
même en dehors de l’enceinte à moins de soixante brasses69. Fig. 5 : Castelnaudary : quartiers et portes de la ville au Moyen Âge.

58 (suite)
La clôture embrassait le premier pont de la Baffe, sous lequel, actuellement (1780), passe le chemin de la Province, aboutissait à la porte de
Goufferan, de là venait joindre la porte de Toulouse placée à l’entrée de la place Saint-Michel et continuait vers la tour qui existe encore à l’angle
du jardin de M. Sanche, elle allait se terminer à la seconde porte Saint-Antoine. Le château était dans le milieu de la place, sur le bord et au plus
haut de la colline, très escarpée, et naturellement fortifiée à l’aspect du levant ; la colline s’aplatissait dans la direction du couchant ; c’est là que les
Toulousains avaient établi leur attaque. Le premier agrandissement de Castelnaudary, dont on ignore l’époque porta cette ville jusqu’à la porte des
Sons, vulgairement appelée des Sens (Cimbala ou Stimbala) ou de la Terrasse et jusqu’à la maison de ville actuelle. Telle était la place de
Castelnaudary lors de ce premier siège. L’armée du comte Raymond occupait ce qui fait aujourd’hui le reste de la ville et les faubourgs. Le quartier
de l’armée commandée par Savary de Mauléon était sur un emplacement qui porta depuis son nom et sur lequel on a bâti un faubourg qui s’appelle
maintenant le faubourg de Mauléon » (Serres de Gauzy 1780, 30).
59
Ils ont été précisément circonscrits pour les XVIe-XVIIIe siècles dans l’ouvrage de R. Maguer, et il est probable qu’ils n’ont pas dû beaucoup varier
depuis le bas Moyen Âge, raison pour laquelle nous nous appuyons ici sur cette publication (Maguer 2003). Chaque port est pourvu d’un consul
(Marandet 2006a, 467).
60
Ainsi, à Lodève (Hérault), en 1401, « le compoix montre une répartition des taillables lodévois en quartiers appelés consulats […] C’est à la fois une
division administrative, un cadre de gestion, une cellule de base fiscale et juridique. À Lodève il en existe huit […] Cette répartition (géographique)
des contribuables à l’intérieur des compoix n’est pas exceptionnelle. Dans le registre de Saint-Flour, la ville est divisée en 6 quartiers intra muros et
3 quartiers à l’extérieur des remparts. À Toulouse il est question de 12 capitoulats » (Demaille 2002, 46).
61
De baffe : atelier de teinture.
62
De borda : ferme, métairie, domaine agricole ; au départ, petit bâtiment.
63
De dins : à l’intérieur ; il est désigné comme « barrio infra portam » en 1356 (AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°9 r°]).
64
De estrada : route pavée.
65
De plathea, plaça : place publique ou grand rue, probablement celle située au nord de l’église Saint-Michel.
66
AD Aude, 4E76/CC2, [f°2 r°].
67
Ramière de Fortanier 1939, 338-343. Quelques correctifs ont cependant été apportés à partir de l’original (AD Aude, 4E76/AA1, [f°59 v°-61r°], acte X).
68
Soit une distance de 3,20 m par rapport au mur.
69
Soit 96 m.

28
LA VILLE (MILIEU XIVE-MILIEU XVE SIÈCLE) INTRODUCTION

n MONTAUBAN
Verlhaget
l
l Village
Esparsac Montbéqui
l l n Ville
l Orgueil
Cours d'eau
Fronton
l
l Le Chemin ou voie
Le Burgaud Grisolles Tarn
l
0 20 km
lThil
Fond de carte : IGN R16/R17, 2006
DAO : F. Loppe, 2009

l
Forêt Castelginest
de
Bouconne
TOULOUSE
Léguevin
l

Fonsorbes l l Castanet Caraman


Cugnaux l
lTolosan
Donneville
l l Montgiscard St Félix REVEL
l l n
Clermont l Lauragais
le Fort Ayguesvives Forêt de Cabra Mortua
Labécède
Montferrand l
ne

Renneville l Montagne Noire


l l Issel Villemagnel
Avignonet l Souilhe l
ro n

a Auterive l St l Saissac
G

Caignac l CASTELNAUDARY lPapoul Cabardès


La

Mas Stes Puellesl n lSt Martin


Lézat l Villeneuve l FendeilleLalande
sur Lèze la Comptal l l
Peyrefitte l Mireval l Pexiora BRAMl ie ro CARCASSONNE
sur l'Hers Lauragais
l Villasavary Arzens vo
Trèbes
maine d'Aqu
itai
Lauragais Laurac l e

l n l
n

lBelpech FANJEAUX n lLavalette


n MONTREAL
l Leuc
Plaigne l l
Saint-Julien Razès
de Briola Alaigne Cépie
nPAMIERS l
l
Les Pontils
l n LIMOUX
Peyrefitte l n Val de Daigne
l Dun du Razès La Digne
d'Aval
Laroque
l d'Olmes Corbières
FOIX n
e
ud
A

Fig. 6 : Le Toulousain et l’ouest audois, carte générale de présentation des lieux cités (fond de carte : IGN R16/R17).

Chaque personne intéressée devra construire dans le pour une année entière seulement, de deux cent écus d’or
délai d’un an avec ses propres matériaux. Ceux qui ne sur le produit de la vente des terrains de la ville appartenant
souhaiteraient pas édifier de maison avant ce terme pour- au roi.
ront voir leurs emplacements (locales) attribués à d’autres, Un registre70 permet d’estimer la population chaurienne
moyennant un prix fixé par les consuls. Enfin, dans le but à au moins 4700 personnes (764 feux réels imposables71) le
d’accélérer la construction de l’enceinte, il est fait don, 15 mars 135672, chiffre auquel il faut probablement ajouter

70
AD Aude, 4E76/CC2.
71
Jean-Louis Biget note qu’à Albi, en 1357, la ville comptait environ 685 feux réels, soit 4300 personnes (et donc environ 6,2 personnes par feu). En
appliquant ce ratio à Castelnaudary, on obtient donc environ 4700 personnes (données citées dans Leguay 2002, 150). Grâce au registre d’estime de
1496, M.-C. Marandet évalue la population de Castelnaudary –a minima-, entre 3000 et 4000 personnes (Marandet 2006, 460, note 14).
72
Selon M.-C. Marandet, cette date, bien qu’inscrite dans le registre, serait sujette à caution. Il pourrait s’agir d’une liste de foyers taillables antérieure
à 1348 (information personnelle).

29
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

d’autres individus non imposables (habitants ayant perdu notamment sur la porte de la Baffe et sa barbacane80, la
leurs biens dans l’incendie ? ordres religieux ?73). porte de Peyralbe81, la porte de Goufferan82 (port des
On compte ainsi, lors de la première taille, 205 feux Bordes), et enfin celle de Montdebo83 (port de Dins).
déclarés imposables au « barrio extra portam », au moins D’autres matériaux sont destinés à un accès situé « entre la
140 au « barrio infra portam », 57 au port de la Place, 154 Place et le faubourg intérieur (port de Dins), peut-être le
au port de l’Estrade, 90 à Peyralbe74, 104 au port des signe que l’entrée bâtie sur la troisième extension84 était
Bordes (« de portus Bordarum », [f°23 r°] à [f°26 r°]), et encore en état à cette époque et bénéficiait de renforce-
enfin 14 dans les « campmasiis »75. ments85. Des travaux ont également lieu au port de
l’Estrade86 ou port Narbonnais (porte de l’Estrade87, porte
À cette date, le roi autorise les habitants à prendre du Neuve de l’Estrade, portes Saint-Antoine, du Terrier, et
bois dans les forêts royales pour réparer le château76 et les Narbonnaise88).
sources confirment qu’ils y effectuent des travaux, notam-
ment afin de s’acquitter des trois tailles successives établies Quant à la porte du Marché (port des Bordes ?), elle est
cette année-là77. citée le 16 mars 1245 dans un registre de l’Inquisition
Quant à l’enceinte de la ville, les dépenses la concer- faisant référence à des événements de 1211 ou 122189. Cet
nant étaient vraisemblablement consignées dans des accès, déjà assez ancien au milieu du XIVe siècle90, ferait
comptes consulaires aujourd’hui disparus (1356-1359), si ainsi partie des ouvrages ayant subi les deux sièges de la
bien qu’on ne peut rien en dire à l’heure actuelle78. croisade albigeoise : c’est la raison pour laquelle on pour-
rait le localiser à l’ouest, sur l’hypothétique tracé de la
Au final, après la destruction de novembre 1355, dont première enceinte du XIIe siècle. Les travaux réalisés en
on a bien du mal à évaluer l’ampleur réelle et l’impact sur
1360 montrent que l’on se soucie tout autant de renforcer
le tissu urbain, les sources documentaires offrent le visage
l’enceinte extérieure que le périmètre intérieur, peut-être
d’une ville, qui, bien que détruite par l’incendie, a rapide-
ment mis en place un vaste chantier de reconstruction où la parce que les défenses du « barri de Dins » ne sont pas
priorité semble être accordée à la fortification. jugées suffisamment solides par les consuls.
À partir du 30 mai 1360, un noble91 et un autre capitaine
3.3 - 1356-1366 : de la reconstruction à la bastida font détruire les constructions parasites autour de l’en-
Ainsi, entre 1357 et 1360, les consuls portent une atten- ceinte, (probablement l’habitat civil des faubourgs, en terre
tion particulière à la poursuite des travaux sur les entrées79, crue massive, d’où le terme de paretz). Ces démolitions,
73
Ces individus sont souvent très nombreux. Pour le Lauragais, M.-C. Marandet estime ainsi que « dans les registres, le pourcentage des exemptés est
du même ordre que dans ces villes du Midi de la France, et correspond entre 35 % et 50 % de la population totale. Les allivrés représenteraient donc
de 50 à 65 % des foyers réels ». Ainsi, pour la fin du XVe siècle, 465 chefs de famille sont allivrés à Castelnaudary, mais il est possible que la ville en
compte jusqu’à 930 (Marandet, 2006, 208).
74
Ce chiffre, très élevé, est étonnant pour un endroit fort peu peuplé à cette époque (information communiquée par M.-C. Marandet). Se pourrait-il que
le scribe ait confondu ce lieu avec le port de la Baffe, ou que ce dernier ait été rattaché exceptionnellement au premier cette année-là ?
75
« Campmas : exploitation rurale, bien foncier d’étendue variable, en général d’un seul tenant ». (Cayla 1964, 119). Il s’agit des exploitations rurales
hors les murs encore habitées dans le ressort de Castelnaudary.
76
AD Aude, 4E76/AA1, [f°59 v°-61r°], acte X, 2 février 1356.
77
Ce cas se présente également ailleurs, comme à Narbonne : « preuve des difficultés à verser l’impôt cette année 1376 : de nombreux brassiers et arti-
sans se libèrent de leur taille en journées de travail pour la communauté… » (Larguier 2004, 154).
78
Les Registres des aides et subsides extraordinaires (AD Aude, 4E76/CC2, 1356-1357 et CC3, 1357-1358) consignent toutefois quelques dépenses
sur l’enceinte, preuve que les travaux touchent aussi la fortification urbaine dès cette époque.
79
L’ordonnance royale du 14 mai 1358 demandant le renforcement des places fortes défendables et la destruction des autres a d’ailleurs pu avoir pour
effet un accroissement du rythme des travaux de fortification chauriens (Chapelot 2001, 368).
80
AD Aude, 4E76/CC48, 7 juin 1359, [f°4 r°3] ; 1360, [f°11 v°2] ; 1359, [f°4 v°4] ; [f°14 v°3] ; [f°17 r°2] ; [f°21 r°9].
81
Ibid., [f°1 v°1], [f°21 v°8]. Le lieu-dit Peyralbe est en effet un ancien fief et prieuré sous le vocable de Saint-Benoît, uni à la collégiale de Saint-
Michel (Sabarthès 1912, 306) établi au sud/sud-est de la ville, à environ 2 km, près du ruisseau du Tréboul (aujourd’hui Saint-Bénazeth) (Maguer 2003,
60, carte 14). L’accès du même nom serait une porte tournée vers ce lieu-dit, mais un port de Peyralbe est cité l’année suivante (AD Aude, 4E76/CC48,
1360, [f°10 r°6]. « …fecerunt vallos stillicidiam in clausuris portus de Petra Alba…»). Se confond-il avec celui de la Baffe ?
82
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°4 r°3] ; [f°4 v°1] ; [f°31 v°2].
83
Ibid., 4E76/CC3, 1358, [f°10 r°2] ; [f°12 r°1] ; Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°35 r°6].
84
Il faudrait donc envisager cet ouvrage au niveau de l’enceinte ouest de la troisième extension, entre le port de la Place et le « barrium interius »
(= « barrium infra » = futur port de Dins ?). La troisième enceinte, qui recoupe le port de Dins dans le sens nord-est/sud-ouest possède donc peut-être
encore sa porte occidentale, tournée vers Toulouse.
85
AD Aude, 4E76/CC2, [f°75 v°1]. « ...pro lapidibus ab ipsis receptis de suo lignarum ad opus porte que est inter platheam et barrium interius... ».
86
AD Aude, 4E76/CC2, [f°53 r°14].
87
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°7 v°5] ; [f°7 v°7], [f°8 v°3], [f°15 r°7] ; 1360, [f°15 v°4]. « …Johanni Stephani, Barneto de Vito et Ramundo Gonterii
qui dicta die portaverunt lapides ad claudendum portam de Astrata…». Ce type d’action est fréquent à cette époque : ainsi, à Langres, lors de la mise
en défense de la ville en 1356, « il est décidé de ne maintenir ouvertes que quatre portes. […] toutes les autres portes seront murées, à l’extérieur et à
l’intérieur » (Wilsdorf-Colin 1998, 174, 175).
88
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°34 r°2] ; [f°34 r°3] ; [f°34 r°4] ; [f°15 r°4] ; 1359, [f°6 r°2] ; 1361 ou 1362, [f°112 v°16].
89
Duvernoy s.d., 440. « Item dixit quod cum i.t. et Petrus Salomon et Petrus Syrven et Poncius Amelii venirent de Bordas apud Castrum Novum d’Arrio
invenerunt duos homines de nocte ad portale Castri Novi et cum non possent intrare per illud portale vererunt homines simul cum i. t. et aliis predictis
ad portale del Mercadal… ». Mention aimablement signalée par M.-E. Gardel.
90
À moins de penser qu’elle ait été déjà totalement reconstruite à cette époque.
91
Il s’agirait du seigneur de Souilhe, capitaine de la ville à cette époque, qui aurait également ordonné la destruction de fermes à proximité des
murailles, au nord et au sud de la cité (Cayla 1959, 155). Ce type d’opération est largement répandu à cette époque comme par exemple à L’Ecluse, en
1395, date à laquelle le duc de Bourgogne « ordonna aux capitaines de la ville et du château de faire abattre tous les édifices bâtis dans un rayon de
IIc verges (environ 900 m) autour de l’enceinte urbaine » (Schnerb 1999, 348).

30
LA VILLE (MILIEU XIVE-MILIEU XVE SIÈCLE) INTRODUCTION

qui s’effectuent peut-être par corvées92, ne coûtent à la ville les matériaux106 : une fois encore, des pièces de bois stoc-
que les aliments achetés pour sustenter les travailleurs qui, kées dans cet accès sont envoyées à deux reprises au
si l’on se fie au nombre de pains, devaient être assez château107, à la porte des Cloches108, et à la palissade du port
nombreux (une centaine ?)93. des Bordes109. La porte du Marché reçoit pour sa part trois
Parallèlement, les consuls poursuivent la fortification cordes (pour la herse, le pont-levis, et des travaux de
urbaine grâce à des ouvriers salariés : travaux au port de la levage110) alors que des tâches se poursuivent au niveau de
sa barbacane111, tout comme à la porte de l’Estrade où un
Baffe94, creusement d’une tranchée devant la Porte-Vieille
ouvrage similaire, doté d’une enceinte en pierre percée de
de la Baffe95. Au port des Bordes, les activités se résument
huit archères, absorbe une grosse partie des dépenses112. La
à quelques menus travaux96, notamment sur la porte des
porte Narbonnaise voit son pont entièrement refait (achat
Cloches97 (porta Stimbala, Cimbala, du latin cymbalum :
de poutres113). Pendant ce temps, d’autres tâches de fortifi-
cloche) qui jouxte le couvent des Frères Mineurs. Au port
cation, prises en charge par les finances municipales, se
de Dins, les opérations portent principalement sur la porte
poursuivent au château.
Montdebo (réparation du pont), ce qui ne l’empêche pas de
servir de lieu de stockage pour des pièces de charpente diri- Cette période de cinq années (1361-1366) correspond à
gées vers d’autres ouvrages98. Quant à la porte de Foix un temps fort dans la reconstruction de l’enceinte de
(ancienne porte de Contresty ?), elle est également Castelnaudary. Malgré la menace constante que font planer
réparée99, mais c’est la construction de sa barbacane et de les routiers (phénomène qui a dû gêner l’approvisionne-
son pont-levis qui engloutit la majeure partie des dépenses ment en matériaux et le déplacement des travailleurs), il se
de cet accès100. peut que ces événements aient paradoxalement conduit la
cité à envisager un nouvel essor : abandonnant des lieux
Les opérations au port de l’Estrade sont de loin les plus faiblement peuplés ou mal défendus, de nouveaux arrivants
abondantes, notamment au niveau du secteur dénommé se sont installés dans la capitale chaurienne, et ce à un
Terrier ou Terier (travaux aux fossés101 ou sur les super- moment où elle avait besoin de « bras » ; mais cet afflux de
structures de défense : corsieyras, agassiers102) mais population a corrélativement engendré des problèmes de
quelques rares tâches se déroulent également à « Saint- salubrité (épidémies, hygiène114), de sécurité, d’approvi-
Antoine » (au nord et à l’est du port de l’Estrade ?), parti- sionnement en nourriture, et surtout de logement, l’agglo-
culièrement sur la porte103. mération se trouvant désormais trop à l’étroit dans ses
Entre 1361 et 1364 quatre portes sont provisoirement murailles fraîchement reconstruites.
bouchées (celles de La Baffe, de Saint-Antoine104, de
l’Estrade et du Marché105). Les tâches au port des Bordes, 3.4 - 1366-1448 : la bastida ou nova ampliatio
nombreuses durant cette période, concernent principale- C’est en partie pour pallier ce manque d’espace que le
ment les murailles. La porte Montdebo (port de Dins) est à procureur du roi de la judicature et les consuls demandent
un stade de construction (ou de réparation) avancé, puis- au duc d’Anjou d’agrandir leur ville. Le prince répond
qu’elle dispose au moins d’une toiture capable de protéger favorablement à leur demande au mois d’août 1366 par une

92
Cependant, aucune mention de corvée n’a pu être relevée par M.-C. Marandet dans l’ensemble des séries du domaine royal concernant Castelnaudary
(information personnelle).
93
AD Aude, 4E76/CC48, 30 mai 1360, [f°67 v°7]. « …per 83 pas que donero a las gens que deffazian las paretz que eran devant la clausura… » ;
[f°67 v°8]. « …per 115 pas e per vi que donero a las gens que derocavan las dictas paretz…» ; 2 juin 1360, [f°68 r°3] ; [f°74 r°2]. « Item die XXVIII
madii cum dominus comes predicti capitaneus facent operare gentium et disruere parietes fecit dare operariis unum pipotum vini… ».
Ce système se retrouve également en Bresse et en Bugey aux XIIIe-XIVe siècles, où « les corvées engendrées par les gens de châtellenies sont norma-
lement gratuites et ne devraient engendrer aucune dépense. Malgré cela, elles apparaissent de manière très régulière dans les comptes parce que les
châtelains ont l’obligation de nourrir les corvéables. De ce fait ils indiquent toujours dans leurs comptes l’équivalence financière totale du pain et du
vin dus par journée de travail et par corvéable » (Kersuzan 2005, 320).
94
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°60 v°1] ; [f°61 v°5] ; [f°61 v°4] ; [f°63 r°7].
95
Ibid., [f°60 r°5]. Signe qu’une nouvelle porte a été créée il y a peu ou que l’on souhaite distinguer deux accès du même nom.
96
Ibid., 1360, [f°50 r°4] ; [f°63 v°6] ; [f°63 v°5] ; [f°64 r°3].
97
Ibid., [f°72 v°5]. « …interrare cadafalcos de juxta portam Campanarium…».
98
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°58 v°6] ; [f°59 r°3] ; [f°66 r°4].
99
Ibid., [f°75 r°7] ; [f°77 r°7] ; [f°82 r°1] ; [f°73 v°3].
100
Ibid., [f°80 v°1] à [f°82 r°9].
101
Ibid., [f°65 v°1] ; [f°65 v°2] ; [f°68 v°6].
102
Ibid., [f°69 v°4] ; [f°68 r°1].
103
Ibid., [f°67 r°2] ; [f°69 r°10] ; [f°69 v°7] ; [f°70 r°2]. [f°72 v°1].
104
Ibid., [f°87 v°8]. La première avait déjà été murée aux alentours du 26 janvier 1360. Elle a donc dû être rouverte entre-temps.
105
Ibid., [f°89 r°4] ; [f°88 r°6] ; [f°89 r°7].
106
Ibid., [f°95 v°4].
107
Ibid., [f°88 r°4] ; [f°97 r°6].
108
Ibid., [f°95 r°3].
109
Ibid., [f°110 r°3] ; [f°110 r°4].
110
Ibid., [f°87 r°10] ; [f°87 v°10] ; [f°98 v°1].
111
Ibid., [f°87 v°3].
112
Ibid., [f°119 r°1].
113
Ibid., [f°120 r°5] ; [f°120 v°3] ; [f°120 v°8] ; [f°121 r°1].
114
À ce sujet, voir : Leguay 2002, 147-172.

31
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

nouvelle charte115 : comme en 1356, ce document contient peine de commencer. Dans le même temps, les opérations
diverses dispositions d’ordre financier, foncier et militaire, menées dans les quatre principaux quartiers de la ville
d’une part afin de favoriser les personnes qui viendront (Baffe, Estrade, Bordes, Place) portent uniquement sur des
résider dans cette « nova bastilla seu ampliatio », et d’autre ouvrages déjà existants. On signalera cependant qu’en
part pour aider à la fortifier. 1368 le sénéchal de Toulouse ordonne la destruction de
Ainsi, la nouvelle bastide s’étendra au delà du couvent bâtiments situés extra-muros119.
des Carmes (déjà bien fortifié) du côté du couchant, en Toutefois, comme le montre le cadastre napoléonien,
englobant ce dernier, mais sans que le mur de son cloître seuls 3 hectares sur les 8,5 projetés pour le lotissement de
fasse partie de la nouvelle enceinte. L’acte défend cepen- la bastide (plan régulier au nord/nord-ouest de la ville) ont
dant de construire une église paroissiale, une place été effectivement mis en défense, et encore très progressi-
publique, et d’établir des boucheries ou de tenir marché, vement, puisqu’une nouvelle injonction de fortifier est
autre que celui du lundi et des foires (mais il permet la prise par le sénéchal le 28 septembre 1368120.
construction de fours à pain). Les emplacements bâtis ou à De 1371 à 1394, la ville connaît des difficultés récur-
bâtir seront par ailleurs dévolus selon des modalités rentes pour entretenir ses ouvrages fortifiés, et surtout pour-
précises. En outre, le duc exige que l’ancien tronçon d’en- suivre les aménagements défensifs de sa dernière exten-
ceinte intérieur séparant désormais la ville de l’extension sion : seule exception, la porte du Barri, dénommée « porte
ne soit pas détruit, et que la population du nouveau quartier de la Bastide », pratiquement achevée durant cette période,
atteigne un nombre minimum d’homines116 de 300, de avec ses ouvrages associés (pont et barbacane). En 1391-
manière à pouvoir le défendre contre les ennemis. Les 1392, soit 25 ans après la charte de 1366, on relève une
habitants auront enfin toute latitude pour fortifier la timide tentative pour amorcer la construction de l’enceinte
nouvelle extension en l’entourant de fossés et d’une (paret) entre la bastida et le barrium de Dins121. Deux
enceinte pourvue de portes et de tours. nouvelles portes sont par ailleurs citées (celle de la Buade122
D’autre part, selon J. Serres de Gauzy117, la guerre se et celle de Sagos123) mais malheureusement non locali-
rallume à cette époque entre les comtes d’Armagnac et de sées124.
Foix, malgré un traité conclu en 1363. Comme en 1359, ce Par la suite, c’est-à-dire jusqu’en 1448, les tâches de
dernier opère des pillages en Toulousain et Lauragais, s’ap- fortification se concentrent essentiellement sur les super-
prochant peu à peu de Castelnaudary. De fait, entre août structures de défense (hourds de Montdebo, de la Baffe, et
1366 et la mi-avril 1367, consuls et habitants, craignant son du Terrier), les ponts (la Bastide), les portes (Bastide,
arrivée, mettent le feu à l’église et au couvent des Carmes Cloches, Estrade), mais on refait également la barbacane
ainsi qu’aux maisons environnantes de la Bastide. Ils se de la porte de l’Estrade, qui menace ruine125. En 1400, les
repentent néanmoins de leurs actes auprès du sénéchal de consuls commencent par ailleurs à démolir le tronçon d’en-
Toulouse, offrant en échange 150 livres tournois. Ce ceinte compris entre la Bastide et le port de Dins126 mais le
dernier, instruit des circonstances ayant précédé la révolte sénéchal de Toulouse, informé de cette action, leur interdit
et l’incendie, accède à leur demande118. de poursuivre cette opération le 21 août127. Cet ordre fut
Entre 1366 et 1371, les travaux à la Bastida (dénommée rigoureusement respecté comme nous l’apprend un acte
Barrium) concernent essentiellement des tâches de terras- notarié de 1411128. En 1421-1422, le barrium de Fora, qui
sement et de creusement du fossé, ce qui semble indiquer désignait le secteur de la Bastide, a été remplacé par l’ap-
que les travaux de délimitation de l’enceinte viennent à pellation « barrium de Sainte-Croix »129, peut-être un signe

115
Ramière de Fortanier 1939, 348. 1366, août, Toulouse. Louis, duc d’Anjou, lieutenant en Languedoc pour le roi son frère, concède des privilèges à
ceux qui viendront habiter à l’intérieur de la nouvelle enceinte à édifier pour agrandir la ville de Castelnaudary.
116
Personnes ou chefs de famille ?
117
AD Aude, 2J82, Serres de Gauzy (J.), Essai historique sur la ville de Castelnaudary, capitale du comté de Lauragais, 1780, 17 cahiers et complé-
ments (copie dactylographiée). Ce travail retrace de manière exhaustive l’histoire de la ville, de ses origines jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.
118
Ibid., 75, 76. Un acte en ce sens est dressé à Toulouse dans la salle neuve royale, le 13 avril 1367 et son authenticité est confirmée le 4 août 1368
par Gaston de la Parade (Ibid.). Ce dernier acte est conservé (AD Aude, 4E76/FF24, acte n° 9).
119
Cet ordre ferait-il suite à l’ordonnance royale du 19 juillet 1367 concernant la mise en défense du royaume ?
120
AD Hérault, J. Berthelé, Archives départementales de l’Hérault, période antérieure à 1790, archives civiles, série A, actes du pouvoir souverain,
Montpellier, 1918, A1. Lettres patentes de la sénéchaussée de Toulouse (copie du XVIIIe siècle). [f°122]. Lettres concernant la closture, murailles,
fortifications, garde et augmentation de la bastide de Castelnaudary, 1368, [f°124 v°].
121
AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°42 v°6]. Cette opération nécessite en outre la levée d’un impôt spécial par les consuls (Ibid., [f°22 r°]).
122
Ibid., 4E76/CC59, 1393-1394, [f°26 v°3].
123
Ibid., [f°26 v°2].
124
Ont-elles été créées sur l’enceinte de la Bastide, en cours d’édification, au nord et au sud, à un endroit où le cadastre napoléonien montre distincte-
ment le débouché de deux rues, déjà présentes sur les plans de 1700 (Maguer 2003, 308, rue de l’Hôpital ; 313, rue de la porte Neuve).
125
AD Aude, 4E76/CC62, 26 août 1398, [f°87 r°4].
126
Cette décision est assez peu compréhensible puisque, d’après les comptes, la bastide est loin de posséder des fortifications convenables à cette date.
La destruction de cette l’enceinte affaiblissait donc considérablement la ville du côté occidental, mais les consuls, conscients de cette menace, avaient
peut-être d’ores et déjà prévu de récupérer les matériaux pour les défenses de la nouvelle extension.
127
AD Aude, 4E76/EE5, 21 août 1400. Lettre du sénéchal de Toulouse, Colard d’Estouteville faisant défense aux consuls de détruire l’enceinte entre
la ville et la bastide.
128
Ibid., 3E9447, 1411, Minutes de J. Rivière, notaire à Castelnaudary, [f°41 v°]. « ...videlicet quoddam hospicium scitum in carreria nova Bastite
eiusdem Castrinovi confrontatum altano cum parietibus antiquis ville predicti Castrinovi… ».
129
AD Aude, 4E76/CC70, 1422, [f°15 r°8]. « ...la porta de la barbacana del bary de Santa Crotz… ».

32
LA VILLE (MILIEU XIVE-MILIEU XVE SIÈCLE) INTRODUCTION

de l’évolution, sinon spatiale, du moins fiscale et institu- Le terme exclusif désignant cette défense dans les
tionnelle, de cette zone130. Toutefois, durant cette cinquan- registres consulaires de Castelnaudary est, comme à Albi et
taine d’années, l’enceinte de la Bastide n’est jamais Toulouse, celui de barriera, qui apparaît en 1360 au niveau
mentionnée, si bien que l’on peut légitimement se poser la de la porte Montdebo : des éléments en bois sont trans-
question de savoir si sa construction s’est réellement pour- portés jusqu’à l’ouvrage132, travaux ordonnés par un certain
suivie… comte de Perdiac (un des capitaines chargés de la mise en
défense de la ville ?)133. D’autres barrières sont citées en
3.5 - Barrières et palissades 1363 au devant des portes du Barri134, du Marché, ainsi que
Durant la guerre de Cent Ans, les comptes de du port Narbonnais (ou port de l’Estrade135).
Castelnaudary, à l’exemple de ceux d’autres villes proches Il s’agirait d’une palissade faite de pieux verticaux
comme Albi, signalent l’existence de barrières et de palis- (pal/corondas)136 plantés dans le sol et renforcés intérieure-
sades établies en avant du fossé principal, ménageant ainsi ment par des pièces de bois (pecias fuster) fixées au moyen
une lice aux assiégés131. de chevilles en fer (cavillas de fer, fig. 8)137. Le terme de
Cette zone « tampon » entre le grand fossé et l’exté- pecia semble pouvoir être rapproché de peça, pecilh,
rieur, permettait de masser des piétons ou des cavaliers pecilha (« petite pièce » ; Alibert 1966, 534), en l’occur-
pour tenir l’ennemi à distance respectable, tout en essayant rence une petite pièce de bois, mais également de pesa
de détruire ses machines (fig. 7). (« pièce, un morceau, un fût, un tonneau, ou une poutre » ;
La barrière, établie au devant des portes de la ville, Lévy 1909, 292). Ce vocable est cité en Haut-Dauphiné
devait se présenter comme une sorte de barbacane avancée. (pecia [fuste, mayerie]) avec comme définition « pièce de
Elle devait toujours rester à portée de tir des arbalétriers bois, planche » (Nicolas 2005, 324), ce qui laisse toute lati-
postés sur la muraille de manière à gêner la progression de tude pour imaginer la forme et les dimensions de ces
l’assaillant ou sa tentative de franchissement de cet éléments. On a vraisemblablement voulu désigner par ce
obstacle, mais aussi pour couvrir un éventuel repli des mot divers types de planches ou de poutres dont l’énumé-
assiégés tentant de la défendre et souhaitant se réfugier de ration aurait donné trop de travail au scribe138.
l’autre côté du fossé, entre le pal et l’enceinte. Cette À une seule reprise, en 1363, la « barrière » est associée
barrière devait être elle-même précédée d’un premier fossé, à la « barbacane » de la porte139, puisque ces élements
même modeste, de manière à casser l’élan d’une attaque (semi-circulaires ?140) devaient être très proches, au devant
brusquée, notamment par la cavalerie. Néanmoins cette de l’accès principal de la ville. Dans ce cas précis, un
première excavation n’est jamais signalée dans les comptes passage est bouché (réparation d’un tronçon de palissade
chauriens. détérioré ?) alors qu’un autre est ouvert afin de faciliter

130
Ce barrium de Sainte-Croix supplante ainsi le barrium de Fora en tant que subdivision territoriale de la ville (la liste des personnes ayant des dettes
envers la communauté est inscrite sous ce nom dans le compte). Néanmoins, cette appellation disparaît dès 1424 car le registre consulaire mentionne
à nouveau le barrium de Fora à la place du barrium de Santa Crotz.
131
Eugène Viollet-le-Duc avait déjà mis en évidence le rôle important de ces barrières : « Depuis les premiers temps du Moyen Âge jusqu’à nos jours,
il est d’usage de disposer devant les ouvrages de défense des villes ou châteaux, tels que les portes, des palissades de bois avec parties mobiles pour le
passage des troupes. Mais c’est surtout pendant les XIe, XIIe et XIIIe siècles que les barrières jouent un rôle dans l’art de la fortification. Les parties
ouvrantes des ces barrières se composaient ou de vantaux à claire-voie, roulant sur des gonds, ou de tabliers à bascule ou de simples barres de bois qui
se tiraient horizontalement, comme nos barrières de forêts, se relevaient au moyen d’un contrepoids, et s’abaissaient en pesant sur la chaîne. Ces
dernières sortes de barres ne servaient que pour empêcher un corps de cavalerie de forcer brusquement un passage. Lorsqu’une armée venait mettre le
siège devant une forteresse, il ne se passait guère de jour sans qu’il se fît quelque escarmouche aux barrières ; et les assiégeants attachaient une grande
importance à leur prise, car une fois les défenses extérieures en leur pouvoir, ils s’y retranchaient et gênaient beaucoup les sorties des assiégés. Ces
barrières, souvent très avancées et très vastes, étaient de véritables barbacanes, qui permettaient à un corps nombreux de troupes de se réunir pour se
jeter sur les ouvrages et les engins des assaillants ; une fois prises, les assiégés ne pouvaient sortir en masses compactes par les portes étroites des
défenses construites en maçonnerie ; forcés de passer à la file par ces issues, ils étaient facilement refoulés à l’intérieur. Dans toutes les relations de
sièges des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, il est sans cesse question de combats aux barrières extérieures des places fortes ; elles sont prises et reprises avec
acharnement et souvent en perdant beaucoup de monde, ce qui prouve l’importance de ces défenses avancées. Pour éviter que les assaillants n’y missent
le feu, on les couvrait extérieurement, comme les bretèches et les beffrois, de peaux fraîches, et même de boue ou de fumier. On défendait les faubourgs
des villes avec de simples barrières, et souvent même les rues de ces faubourgs, en avant des portes. L’attaque devenait alors très dangereuse, car on
garnissait les logis à l’entour des combattants, et les assaillants se trouvaient arrêtés de face et pris de flanc et en revers. Les barrières étaient un poste
d’honneur ; c’était là que l’élite de la garnison se tenait en temps de guerre » (Viollet-le-Duc s.d., t. 1, 118-121).
132
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°74 v°2]. « ...pro 30 pecias fusterii emptari ab ipso quas fuerunt positas in ambanamento de retro hospicium Petri
Constanti et in barreria extra portam Mondebonis... ».
133
Ibid., [f°75 v°1]. « ...fecerunt quandam barreriam ante portam Mondebonis de mandato domini comiti Perdiaci...».
134
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°87 v°5]. « ...barras barrerie porte Barri…».
135
Ibid., [f°114 v°4]. « ...ad reparandum passum peyrerie portus Narbonensis prope barreriam... ».
136
Ibid., [f°92 r°4]. « ...pro 19 corondis receptis de locale sui filii ad relationem Bernardi Johannis que posite fuerunt in barreria porte Mercadalis…» ;
[f°96 r°5]. « ...et ponendum palem in bareria Mercadalis…».
137
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°77 v°4]. « ...magistro B. de Podio pro [...] 13 l.cavillarum que fuerunt posite in barreriam ante portam ».
138
À Aix, « le terme de « pièce » (pecia) désigne, pour sa part, une série de fustes de longueur très variable (environ 6 à 16 m) et d’une largeur comprise
entre 0,17 et 0,25 m » (Bernardi 1995, 132).
139
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°80 v°5], «…ad claudendum quoddam foramen quod erat in barreria seu barbacana pontis porte Montis Lebonis et
ad aperiendum aliud foramen ibidem pro que laberent aque… ».
140
En 1999, les fouilles de la place du Vigan, à Albi, ont mis en évidence une barbacane de forme presque semi-circulaire au niveau de la tête du pont
franchissant le fossé principal, défense qui pourrait être antérieure à la seconde moitié du XIVe siècle (Grimbert 2002, 132). Néanmoins, il est impos-
sible de généraliser cette observation, puisque les comptes chauriens ne précisent jamais la forme de ces ouvrages.

33
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

5m
maison

Dessin : F. Loppe, 2009


0
maison

rue
enceinte
tour-porte

lice
pont-levis

pal

grand fossé
pile
pont-dormant

lice ?
barbacane
palissade
de la ville

fossé ?
petit
barriera
bara

Fig. 7 : Castelnaudary : coupe schématique des défenses de la ville d’après les comptes consulaires des XIVe et XVe siècles.

34
LA VILLE (MILIEU XIVE-MILIEU XVE SIÈCLE) INTRODUCTION

27 juin 1439 : Bernard Béarnais, charpentier, utilise à cette


pal/coronda fin quatre grosses poutres de sapin et reçoit pour son travail
cavilla de fer la somme de 15 écus. Le texte situe ces barrières « au
dehors de la porte Matabiau et des lices des fossés »,
pecia fuster
confirmant bien que ces ouvrages font partie des défenses
2,50 m
les plus avancées de la porte144. Déjà, en 1218, lors du
second siège de cette ville, la Chanson de la Croisade
mentionne la construction de barreiras dans les préparatifs
de défense des Toulousains145.
À Albi, la barriera est qualifiée de « coladissa » ou
0
petit fossé
levée de terre ? « levadissa » et s’intègre dans un système défensif
extérieur ?
complexe dont l’agencement est proche de celui de
Castelnaudary146. Enfin, à Rodez, il existait une ligne de
défense supplémentaire dénommée mureta : « ces murettes
étaient des murs extérieurs aux remparts, situées entre ces
Fig. 8 : Castelnaudary : la barreria ou barrière. Essai de restitu- remparts et le fossé (valat) ; elles formaient ainsi une
tion d’après les comptes consulaires.
première ligne de défense et elles étaient elles-mêmes
protégées le plus souvent par une barrière de pieux
l’écoulement des eaux de pluie (sillon sous la palissade ?), (palenc). Un chemin de ronde existait entre les remparts et
signe probable d’une pente naturelle à ce niveau et d’une la murette, qui était munie de meurtrières. L’assaillant,
nécessaire évacuation des eaux vers l’extérieur : cette pour pénétrer dans la ville, devait donc enlever successive-
dernière donnait peut-être dans un fossé secondaire situé au ment le fossé, le palenc, la murette et le rempart »
devant de la barrière, même si les mentions du compte ne (Bousquet 1943, 342, note 2).
le signalent pas en tant que tel (fig. 7, 8)141. Enfin, en 1391,
des charpentiers travaillent « à la barrière de la tête du Cette barrière devait être associée à une palissade cein-
pont » (barbacane ?) de la porte des Cloches142. turant l’agglomération chaurienne et défendant l’approche
du fossé : il s’agit là d’un dispositif très courant à l’époque
Cette barrière était vraisemblablement implantée dans médiévale, comme ont pu le montrer les recherches archéo-
un terre-plein (vallum), de forme conique, de manière à logiques et historiques147. La croisade contre les Albigeois
assurer sa stabilité et accroître la hauteur de l’ouvrage143 ; offre d’ailleurs un bon exemple de son utilisation dès le
cependant, les dimensions des pièces de bois ne sont début du XIIIe siècle : en juin 1211, lors du premier siège
jamais évoquées. En tant que première défense de la porte, de Toulouse, « courait à l’extérieur de ces fossés une bande
la barrière devait bénéficier de soins assez attentifs. de terrain vague, elle-même bordée d’une palissade et d’un
Les sources toulousaines font également mention de second fossé. C’étaient les lices, où les soldats pouvaient se
barrieras lors de réparations devant la porte Matabiau, le grouper et manœuvrer à l’aise en cas de danger immédiat.

141
Les fouilles au devant de la porte du Vigan ont fait apparaître deux fossés : un fossé principal (Ibid., 132, fig. 5, A) et un fossé secondaire (F) situé
au devant d’une levée de terre qui supportait probablement autrefois une palissade avancée (« barrière » ou élément intermédiaire ? ). Par ailleurs, à
Toulouse, au XIIIe siècle, M. Roquebert pense également qu’un fossé secondaire était établi au devant de cette barriera (Roquebert 1971-1989, t. 1,
407).
142
AD Aude, 4E76/CC56, 1391, [f°30 r°6]. «…pro supplimento jornalis barrerie capitis pontis de porta Cimbalorum… ».
143
C’est également l’hypothèse retenue pour la barbacane au devant de l’entrée du pont, entre les fossés E et F (« rempart de terre palissadé ») (Grimbert
2002, 132). À Douai, au devant des portes de la ville existent des « bailles, ou barrières derrière lesquelles s’abritaient arbalétriers et archers, et qui
constituaient un premier poste de défense contre les tentatives de surprise d’un parti adverse. Elles étaient constituées d’un palis –pieux de chêne à la
pointe aiguisée fermés par des planches horizontales ou ventrières, parfois même par des barres de fer- contre lesquelles des terres étaient massées, en
manière de bollewercq » (Salamagne 2001a, 32).
144
AC Toulouse, CC2322, pièce n° 79, 27 juin 1439. « …per catre fielas grossas de avet que per nostres predecessors capitols de l’an passat foron
prezas de lu per far barrieras fora la porta de Matabuou e las lissas dels valatz…».
145
« E feiron las clauzuras e ls fossatz e ls terriers E ls pons e las barreiras e ls murs e ls escaliers Ez embans e corseiras e portals e solers E lhissas
e arqueiras e dentelhs batalhiers E bocals e gueridas e guisquetz traversers E trencadas e voutas e camis costeners » (Tudèle, l’Anonyme 1960, t. 3,
300, 302).
146
Ainsi durant la guerre de Cent Ans, Albi disposait des défenses suivantes : « La barriera coladissa ou levadissa formée de pièces de bois horizon-
tales soutenues par des pieux, établie en avant et tout le long du fossé, même sur les berges du Tarn, arrêt de peu de résistance mais suffisant pour éviter
une attaque brusquée ; le fossé, large d’une douzaine de mètres et profond de six en moyenne. Il n’y avait pas d’eau dans ces fossés, sauf en cas de
fortes pluies, mais les talus et le fond étaient plantés de buissons épineux, garnis d’épais ronciers qui formaient un fourré impénétrable où pullulaient
les lapins. Le pal ou palenc, palissade de pieux armés de pointes en fer et de poutres serrées les unes contre les autres. Le rempart proprement dit,
muraille d’une épaisseur de 3,50 m et d’une hauteur moyenne de 8 m, construite, en partie de briques, mais, le plus souvent, de terre silicieuse ou de
débris de matériaux, entre les parements. L’épaisseur de 3,50 m n’existait que sur le haut du mur, car, à l’intérieur, du côté de la ville, celui-ci était
évidé par une série de profonds arceaux. On peut encore voir, dans la cour de la Maîtrise, ce qui reste de ces fortifications, dans la partie que l’on
appelait le mur des Chanoines. Sur la crête du rempart courait une galerie couverte appelée amvan ou bien hourd dont le plancher faisait saillie à l’ex-
térieur et à l’intérieur » (Grimal 1935, 18).
147
Le diagnostic archéologique au lieu-dit « Les Pontils » à Limoux (Aude) a mis en évidence les défenses de la ville haute désertée de Limoux (XII-
XIIIe siècles). Un aménagement correspondant à une palissade, situé environ sept mètres au devant du fossé, a été mis en évidence (Ginouvez 2003).
À Lille, en 1452-1453, la protection des portes, lors de la mise en défense de la ville, est « systématiquement complétée en amont par des barrières qui
sont sans doute des palissades disposées en chicane et destinées à briser toute attaque surprise » (Blieck 1998, 201). C’était d’ailleurs déjà le cas en
1411 (Blieck 1999, 304).

35
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Elles servaient aussi de glacis : tout ennemi qui y prendrait possèdent également. Il s’agissait d’un obstacle composé
pied se trouverait en terrain découvert, à portée du tir des de pieux édifié au devant du fossé : ainsi, dans un acte pour
murailles et des tours » (Roquebert 1971-1989, 417). Par l’agrandissement du fort de Fronton149, le 30 septembre
ailleurs, la « pierre du siège », conservée à la cathédrale 1371, un accord entre le prieur et les consuls du lieu prévoit
Saint-Nazaire de Carcassonne, représente, en avant du que ces derniers seront tenus d’édifier un pal autour du
fossé derrière lequel se trouvent des défenseurs, une lice castrum, le seigneur étant chargé de leur fournir les poutres
protégée par une palissade à l’intérieur de laquelle on se et autres éléments charpentés, et ce autant de fois qu’il sera
bat furieusement148. nécessaire de les réparer150. En temps de guerre, ce palenc
Mais cette palissade n’est pas l’apanage des grandes servira, de même que le mur du castrum, de refuge aux
villes, puisque certains villages, à la même époque, en animaux des consuls et habitants151.

148
La « pierre du siège » est un bas-relief scellé dans le mur du croisillon sud du transept de la cathédrale Saint-Nazaire de la cité de Carcassonne. La
provenance de cette sculpture, qui date probablement du XIIIe siècle, est inconnue.
149
Haute-Garonne, à une trentaine de kilomètres au nord de Toulouse (fig. 6).
150
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 194, liasse 3, pièce n° 15, 30 septembre 1371. Fronton. Accord entre les habitants et le prieur pour l’agran-
dissement du fort.
« Item fuit actum et conventum quod dicti consules et singulares teneantur facere circum circa castri predicti domini prioris predicti dum erit neces-
sarium de palo sicut modo est sufficienter per in perpetuum et vallatos dicti castri recurare et recuratos tenere ad ordinationem et electionem dicti
domini prioris vel eius locumtenentis et successorum suorum eorum propriis sumptibus et expensis acto tamen quod dictus dominus prior et succes-
sores sui dare teneantur dictis consulibus et singularibus de fusta nemoris sui ad faciendum dictos palos tosciens quosciens erit necessarium repa-
randi ».
151
Ibid., « Item fuit actum et conventum quod dictus dominus prior et successores sui teneantur recolligere infra palencum predictum et murum castri
predicti animalia dictorum consulum et singularorum tempore guerre ».

36
1ère Partie

LES CONSTRUCTIONS
DE TERRE MASSIVE

37
LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Les techniques de construction en terre crue massive précisément datables encore en élévation sont très peu
sont nombreuses et variées de par le monde152 : terre battue nombreux. Bien des cœurs de villes ou de villages, où ce
dans un coffrage (pisé), terre empilée (bauge), coffrée ou mode constructif était employé dans des réalisations mili-
non, brique comprimée (dans une presse manuelle), brique taires aussi bien que civiles, ont vu ces édifices détruits et
moulée (adobe), torchis (en remplissage de colombage). remplacés par des maçonneries en pierre, brique cuite et
béton, dans le courant des XIXe et XXe siècles. Les obser-
vations de terrain que l’on peut alors réaliser aujourd’hui
Cependant, comme le relève D. Baudreu, « dans les
sont donc rares, la plupart du temps sur des édifices
synthèses récentes sur l’architecture traditionnelle régio-
modernes (fermes, annexes agricoles, maisons de villages)
nale, il est impossible de trouver un exposé détaillé et
qui ont peu ou pas subi de modifications depuis leur
exhaustif sur les mises en œuvre de la terre crue, faute
d’enquêtes adéquates et suffisamment poussées. Plus géné- construction (Klein 2003).
ralement, dans le vocabulaire normalisé de l’architecture
publié par l’Inventaire général des monuments et richesses À l’heure actuelle, les données de terrain, les sources,
artistiques de la France, il est significatif de ne trouver et la bibliographie ont permis d’effectuer un premier essai
qu’une nomenclature incomplète relative à la terre crue ; ne d’identification des techniques de construction en terre
sont effectivement retenus que les termes « pisé » et
massive pour les fortifications en Lauragais et Toulousain
« torchis ». De plus, bien souvent, le vocabulaire de la terre
durant l’époque médiévale : il s’agit de la bauge (sans
crue souffre de confusions graves qui entretiennent impré-
coffrages), et d’une autre méthode que nous avons
cisions et contresens entre diverses techniques pourtant
dénommée « paret coffrée »153. Par ailleurs, la technique du
nettement différenciables » (Baudreu 2002, 58).
colombage/torchis, où la terre ne joue qu’un rôle de garni-
ture, est également souvent utilisée pour différentes
Cerner les techniques de construction en terre crue, leur constructions défensives. Enfin, on verra dans un dernier
place et leur rôle à Castelnaudary et plus généralement en temps que la terre peut avoir d’autres usages, que ce soit
Lauragais et Toulousain aux XIVe-XVe siècles à travers les comme élément de protection et d’isolation, comme
sources n’est pas chose aisée, d’autant que les monuments remblai, ou comme mortier.

152
Pour l’origine de ces techniques, on pourra se référer à : CRAterre 1995, 20, 21.
Afin de rester aussi neutre que possible, nous avons forgé ce mot, ne sachant pas, comme on pourra le constater, si cette technique peut s’apparenter
153

à de la bauge coffrée ou à une variante du pisé (méthode du Bugey, infra).

39
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Chapitre 4

Le fossé de la ville : principale source


d’approvisionnement pour la construction en terre ?

Etudier la construction en terre crue dans la fortification sent : néanmoins, si l’on se fie aux données concernant
suppose au préalable de s’interroger sur la provenance de Albi, le fossé principal pouvait atteindre 12 à 20 m de large
la matière première. À Castelnaudary comme ailleurs, il pour une profondeur de 6 à 7 m (Grimal 1935, 18 ;
semblerait naturel de penser que la terre destinée à la Grimbert 2002, 131).
construction était tirée des opérations de creusement du
Les opérations relatives au fossé emploient un
fossé154. En outre, lorsqu’une paret s’effondre dans le fossé
attenant, la terre de l’ouvrage détruit était peut-être récu- personnel nombreux, parfois féminin, mais aussi des efans
pérée pour le rebâtir, mais dans le silence des textes, rien ou puer (enfants ou adolescents ?). Elles se décomposent
ne permet de l’affirmer… en trois phases successives : creusement, conditionnement
et transport de la terre et des décombres, et enfin évacua-
Les comptes de Castelnaudary, pas plus que ceux d’Albi tion de la matière hors du fossé.
ou que le compte toulousain de 1354-1355, ne citent la
provenance de la terre destinée aux enceintes de terre 4.1 - Creusement et curage du fossé : « curar le valat»
coffrée ou au torchis. Une seule exception, quoique
ambiguë, pour une dépense chaurienne de 1441, encore que Cette opération consiste à excaver le grès, la molasse158
l’on ait effectivement peine à déterminer si ce bart155 destiné et la marne qui composent le substrat chaurien. Elle s’ef-
au torchis des hourds était fabriqué dans le fossé pour des fectue au moyen de rabassieras159 (infra) dont les mentions
raisons de commodité, ou si la terre de ce dernier lui servait de réparations sont relativement fréquentes.
effectivement de matière première156. On est donc bien Cependant, à ce stade, deux outils posent des
obligé de supposer que la grande majorité de la terre, voire problèmes d’interprétation : le pic et la pica : le premier
la totalité, provenait du creusement du fossé mais aussi de désigne généralement un pic de carrier, c’est-à-dire un outil
la destruction de constructions militaires ou civiles gênant en fer, lourd et volumineux, propre à fendre la pierre et
la nouvelle organisation du dispositif défensif157. éclater le rocher160 ; le second, la pica, a également pu être
Quant aux dimensions du fossé, ni les sources chau- utilisé pour attaquer les couches de terre de manière à les
riennes, ni les sources toulousaines consultées ne les préci- ramollir et les fractionner en mottes. En effet, s’il a géné-

154
Ainsi, par exemple, en Bresse et en Bugey, « la création des douves suit le même principe que les fossés secs, c’est-à-dire que les matériaux qui en
sont extraits servent aux constructions des murailles et qu’il y a plusieurs campagnes successives d’élargissement et d’approfondissement. En l’occur-
rence, l’argile sert à la fabrication des briques dont sont construits ces châteaux » (Kersuzan 2005, 211, 212).
155
Terre ayant subi une préparation spécifique pour la construction (infra).
156
AD Aude, 4E76/CC76, 1441, [f°43 v°5]. «…per tirar lo bart de la cava als embans cant se tortisegon…».
157
La charte de 1356 prévoyait expressément la possibilité de détruire les maisons proches de l’enceinte et de récupérer leurs matériaux (et donc la terre
de leurs murs… ?) pour édifier cette dernière (supra ; AD Aude, 4E76/AA1, [f°59 v°-61r°], acte X. 10). Plus tard, aux alentours du 30 mai 1360, des
corvées mentionnent bien la destruction de « paretz » (murs de maisons) situées devant l’enceinte (AD Aude, 4E76/CC48, [f°67 v°7]. « …las gens que
deffazian las paretz que eran devant la clausura… » ; [f°74 r°2]).
158
Grès tendre, mêlé d’argile, de quartz (Robert 1982, 1216).
159
AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « ...manobras, qui dicta die steterunt pro cavando cum pix et cum rabasseriis pro perquirendo le ferm
pede turris porte Strate et pro amovendo le tap cum palis et amovendo lapides...».
160
Bernardi 1995, 456, « Pic : pic de carrier ».

40
LE FOSSÉ DE LA VILLE : PRINCIPALE SOURCE D’APPROVISIONNEMENT POUR LA CONSTRUCTION EN TERRE ?, P. 40-44 LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

ralement le sens de « pic de tailleur de pierre »161 ou de Ces fers sont forgés avec de l’acier (marlar170) afin d’ac-
smille (Alibert 1966, 546), ce terme peut également dési- croître leur résistance171.
gner une pioche (Ibid.). Que penser cependant d’une La préhension de la terre pose quant à elle moins de
mention de 1361 indiquant que 200 picas ont été aiguisées difficultés : une fois la croûte de terre ou les mottes gros-
« pour extraire la pierre » (et non la tailler) : les picas en sièrement fractionnées par les « pioches », les travailleurs
question étaient-elles des pics de carriers, et non des utilisent des pelles en bois (palas)172, également employées
smilles162 ? La question s’embrouille davantage lorsqu’un pour l’entretien régulier du fossé (nettoyage des encom-
forgeron est rémunéré pour avoir fabriqué 150 punctis, la brants, détritus, boue ?)173.
puncta (ou punta, poncha) pouvant désigner entre autres Les comptes chauriens -en particulier celui de 1360-
choses, une pioche (et donc ici le fer de cet outil)163. 1361- consignent à plusieurs reprises l’expression « curar
Que dire également des 150 punctis picarum aiguisées le valat »174 (« vider, curer le fossé »), pour un fossé déjà
par cet autre forgeron ? S’agit-il de fers de pioches, de fers creusé nécessitant seulement un entretien régulier175 géné-
ralement réalisé par des hommes, mais aussi parfois par
de pics de tailleurs de pierre, ou de fers de pics de
des femmes176. L’expression « cavar le valat » (« creuser le
carriers164 ? L’interrogation est difficile, voire impossible à
fossé ») n’est quant à elle jamais employée peut-être parce
trancher au travers des sources lorsque le contexte n’ap- que, cinq ans après le passage du Prince Noir, la majorité
porte aucune aide165. Il faut donc considérer comme très du fossé a déjà été réalisée177 (du moins sur le pourtour des
probable l’existence de pioches pour creuser la terre166 aux fortifications existantes).
côtés d’outils plus adaptés pour attaquer le substrat167. Par
Par ailleurs, à de rares reprises, les consuls concèdent à
ailleurs, le grès chaurien étant relativement tendre (des prix-faits le creusement de parties du fossé : ces travaux
caves et des silos ont été creusés dans certaines maisons de sont attribués à des spécialistes, en l’occurrence Paul Huc
la ville), le piochage de la terre et le débitage superficiel (maçon-carrier de Peyrefite), et Arnaud Masip (ou Mancip)
du rocher pouvaient être réalisés avec un même instrument que l’on retrouve notamment en 1366 et 1371, en tant que
(un pic ou une pioche solide ?168), et ne nécessitaient pas probable paredier, c’est-à-dire professionnel de la
forcément d’outil spécialisé pour le travail en carrière169. construction des murs en terre crue massive (infra).

161
Ibid.
162
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°99 r°6]. « Item pro ducentis punctis picarum apunctatarum pro extrahendo petram ».
163
Lévy 1909, 302 ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°100 v°7]. « Et primo G. Gelati pro centum quinquaginta punctis…».
164
AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°113 r°14]. « …Petro Martini de Petris pro 150 punctis picarum quas apunctavant… ».
165
Ibid., 1360, [f°60 r°2]. « …avian obrat am las picas per far le dit valat… ».
166
À Rodez, les ouvriers emploient des « marra » que H. Bousquet traduit par « pic de terrassier » (Bousquet 1926, 210, note 2). Ce terme n’est jamais
employé à Castelnaudary.
167
Pour P. Reignez, « les formes des pics et des pioches sont à la fois simples et un peu difficiles à évoquer. Les chercheurs mêmes ne sont parfois pas
tous d’accord entre eux sur la définition de tel ou tel instrument, ce qui n’est pas fait pour faciliter la description de l’outil et son analyse […] Pour
nous, le pic n’est constitué que d’un seul fer, droit ou courbe, de section ronde, carrée, ou rectangulaire. Ce fer est emmanché sur une extrémité par un
œil, généralement circulaire, dans lequel un manche court ou moyen vient s’emboîter en accusant par rapport à lui un angle en principe proche des 90
degrés […] Tous les outils doubles seront ensuite dénommés pioches. Ces fers sont constitués de deux parties au centre desquelles se trouve un œil
circulaire dans lequel un manche vient s’emboîter, dans un angle de 90 degrés par rapport à elles » (Reigniez 2002, 106, 107).
168
Peut-on penser qu’on a également eu recours à Castelnaudary à une sorte de « pioche de terrassier équipée de deux tranchants disposés perpendic-
ulairement au manche » comme cela a été mis en évidence sur une iconographie flamande de 1482 ? (Bessac 1985, 169, 171, fig. 1/1). Quant à
P. Reignez, il note que « le pic, au Moyen Âge, était essentiellement lié au défonçage, sans oublier le fait qu’il constituait aussi l’outil de l’excavation
profonde comme l’attestent les scènes d’enfouissement des morts. Au XVe siècle par exemple, dans la région des Alpes du Dauphiné (dans l’Oisans),
le pic servait à travailler les sols durs situés dans des terrains d’accès difficiles où il était impossible de faire passer les araires » (Reignez 2002, 109).
169
Pour Ph. Bernardi, « pique (pica) est un instrument en fer qui se distingue du précédent (pic ndlr.) par sa taille moindre. Son usage n’est manifeste-
ment pas réservé aux carriers car on le retrouve dans divers inventaires de biens de personnes étrangères au travail de la pierre. Sa présence parmi les
houes laisse à penser qu’il s’agit alors peut-être d’une simple pioche de terrassier –cette dernière sert en effet à l’occasion à détacher des blocs dans
une roche à formation très stratifiée, ou à « découvrir » les carrières » (Bernardi 1995, 216). En Bresse et Bugey, lors de la découverte des carrières,
les terrassiers chargés d’évacuer le mort-terrain utilisent toutes sortes d’outils : « des houes (liguones) en bois ferré, des bêches (bessa), des pioches
(piachas) ou des pics (pici ferri) pour la pierraille » (Kersuzan 2005, 325).
170
C’est du moins en ce sens que ce terme est traduit par C. Verna (Verna 2001, 106-108).
171
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361 [f°106 r°8]. « Item pro quatuor libris minus uno quartone de marlar recep[t]as per Johannem Seguini et quos
poni fecit in piquis quas facere fecit Petro de Petris… » ; [f°113 r°6]. « Item ad opus picarum quas fecit Petrus de Petris. 16 l. de marlar ». Il s’agit là
des deux seules mentions « marlar » sur l’ensemble des 32 registres chauriens.
172
AD Aude, 4E76/CC48, 12 mai 1360, [f°56 v°4]. « …per 4 palas de fust que foro compradas obs de las obras dels valatz… ».
173
Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°5]. « …per 2 palas de fust per curar las cavas… ».
174
Ibid, 4E76/CC48, 1360, [f°54 r°3]. « …que aquel dia obrero a curar le valat devant la barbacana de la porta de la Plassa… ».
175
D’ailleurs, à Toulouse, en 1418, à l’approche du comte de Foix, les consuls de la ville demandent de « curar les valatz » partout où cela sera néces-
saire, ce qui montre bien que ce terme s’applique à des fossés déjà creusés (AC Toulouse, BB3. 1418, [f°28 v°3]. « Item que prestament se curen los
valatz per tot la on sera necessi…»). Cette opération devait consister à enlever les immondices et les encombrants, ainsi que divers végétaux ayant
réussi à pousser dans le fossé et sur l’escarpe (AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°28 r°2]. «…qui dalhiavit et amovit erbas quas erant in cava e in
costonibus de porta Terrerii… »).
176
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f° 67 r°1]. « …fero pagar a 8 homes e a 8 femnas que avian obrat a curar le dit valat… » ; [f°67 r°3].
177
Ce fossé existait d’ailleurs peut-être depuis les XIIe-XIIIe siècles, à moins de penser que le traité de Meaux-Paris (1229), qui prévoit le démantèle-
ment de certaines places-fortes appartenant au comte de Toulouse, suite à la croisade albigeoise, n’ait eu pour conséquence de le faire remblayer.

41
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Pour l’heure, ce sont ses compétences de valadier (ingé- compagnons ne se contentent peut-être pas de creuser un
nieur des fossés) qui sont requises ; cette « double fossé mais ont éventuellement d’autres obligations dans
casquette » de valadier/paredier apparaît également à leur contrat (tri des terres à utiliser pour la construction ?
Toulouse, le 16 mars 1450, où un certain Jean Darenton, débitage de blocs de construction ?), contraintes requérant
valadier, est rémunéré « per adobar e reparar las paretz del un savoir-faire inconnu du simple terrassier.
hostal public »178. Le nettoyage du fossé est une activité « routinière »,
Arnaud Masip surgit ainsi dès le premier compte, en puisqu’elle entrait dans les obligations des consuls de la
1360, pour un prix-fait relatif au fossé derrière le couvent plupart des villes du royaume de France à cette époque, et
des Frères Mineurs (17,5 brasses)179, puis le 6 mai pour cinq ce pour des raisons d’hygiène et de sécurité. La nature des
brasses un tiers, le contrat prévoyant que chaque brasse (de décombres enlevés n’est pratiquement jamais précisée mais
long) devra être profonde de 10 palmes (env. 2,20 m ?) et il s’agissait vraisemblablement de boue, de débris de maté-
atteindre toute la largeur du fossé. riaux de construction (chutes de bois, tuiles, éclats de débi-
Si l’on se base sur les données proposées par A. Grimal tage), voire de détritus183. Dans de rares cas, les comptes
pour le fossé d’Albi (12 m de large en moyenne), le volume précisent que le curage a consisté à « gitar la terra del dit
excavé en l’espèce atteindrait 227 m3, mais on ne sait s’il valat »184.
s’agit de terre, de roche, ou les deux, ni si Arnaud Masip a
4.2 - Conditionnement et transport des décombres :
travaillé seul ou avec son équipe habituelle, voire avec des
« trayre l’escombre del valat »
manœuvres occasionnels ou des habitants réquisitionnés
par corvées180. Le recours à cette personne peut ne pas être Que le fossé soit en cours de creusement ou de
anodin, puisqu’en tant que probable paredier, comme on le nettoyage, il faut systématiquement conditionner et trans-
verra par la suite, son rôle de valadier a peut-être un rapport porter les déblais issus de ces travaux.
avec son autre activité. Dans un fossé aux dimensions certainement impres-
Paul Huc par contre, a apparemment œuvré avec des sionnantes (20 m de large et 7 de profondeur, comme à
compagnons carriers. Les creusements ont une longueur de Albi ? ; Grimbert 2002, 129-131), la vidange de cet
6 brasses un quart (env. 10 m ?), pour une profondeur de ouvrage, surtout lorsqu’il s’agissait de terre ou de pierres,
brasse équivalente (10 palmes)181. En reprenant comme devait réclamer des moyens d’accès (plans inclinés en bois
modèle-type la largeur du fossé d’Albi, on obtiendrait amovibles, escaliers taillés ? échelles ?) dont les comptes
environ 264 m3 de volume excavé, probablement de la ne parlent que rarement (infra).
roche, puisque l’on fait appel à des spécialistes de l’extrac- Comme l’opération de nettoyage (curar), celle-ci est
tion. Pour leur peine, la ville leur fait don d’un pipot de vin dominée par la main d’œuvre masculine adulte185 mais des
(15 s. 4 d. tournois)182. enfants peuvent être salariés à cette fin, à de rares reprises
Globalement, on peut se demander quel était l’avantage il est vrai186.
pour la ville de concéder à prix-fait les travaux du fossé : Les travaux de creusement du fossé du cimetière
outre un tarif fixé à l’avance qui préserve des mauvaises Sainte-Marie engendrent quant à eux des déblais (terre et
surprises (contretemps obligeant des ouvriers journaliers à pierre) qui sont évacués par des hommes, mais également
rester plus longtemps, intempéries, etc.), on pourrait envi- des femmes, quelquefois par vingtaine187. Elles participent
sager dans ces cas d’espèces une certaine technicité aussi à l’évacuation de la terre des tranchées de fondation
demandée par le travail : Arnaud Masip, Paul Huc et ses du mur de la barbacane de la porte de la Place188.

178
AC Toulouse, CC2332, pièce n° 22, 26 mars 1450.
179
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°25 r°6]. « ...Arnaudo Mancipii dicti Tasari pro 17 brachiatis et media valli per ipsum facti in clausuris retro domum
Fratrum Minorum... ».
180
Ibid., [f°61 v°4]. « ...an Ar. Masip per 5 brassas 1 tertz de valat que avia fayt a pretz fayt le qual valat era pres de la porta de la Baffa entro lo pe
del castel avia per brassa cavar 10 palms de preon del ample del valat…». Si l’on se base sur la fouille de sauvetage de la place du Vigan à Albi, le
fossé pouvait atteindre jusqu’à vingt mètres de large. Le volume excavé par Arnaud Masip serait alors porté à environ 380 m3 (Grimbert 2002, 129).
181
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°62 r°3]. « …an Paul Huc am sos companhos peyriers de Peyra Fita en diverses jorns e en diversas pagas per raso
de 6 brassas 1 carto de valat que avian fayt a pretz fayt entre dos betz le qual valat fo fayt entre la porta de la Baffa el castel avian per brassa de
10 palms de preon e del ample del valat… ».
182
Ibid., [f°62 v°1].
183
Ici comme ailleurs, il est probable que le fond du fossé « était la plupart du temps un bourbier infect. L’eau y stagne et n’a aucun moyen naturel pour
s’évacuer. Indépendamment de la boue, des pierres et des touffes d’herbe qui y sont tombées, le fond des fossés est encombré et pollué en permanence
par une grande quantité de détritus, d’ordures et d’immondices de toutes sortes. À cela s’ajoutent les déjections tombées des latrines en encorbellement
et les eaux usées provenant des cuisines. Il faut donc régulièrement curer ces fossés et évacuer tous ces déchets dont l’entassement autour et à prox-
imité des villes et des châteaux sont caractéristiques de la pollution médiévale » (Kersuzan 2005, 210).
184
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°66 v°5]. « …a 15 homes que avian estat a curar le dit valat e a gitar la terra am paniers…» ; [f°66 v°6]. « …a
8 femnas que estero per gitar la terra del dit valat am paniers…».
185
Ibid., [f°60 r°1]. « Favre Bordas an Pons Fayres an Miquel Guiraut an Ramon Calart que aquel dia traysero del escombre del valat am paniers… ».
186
Ibid., [f°60 v°2]. « …a tres efans de Planha e an G. Sauri que am paniers trasian del escombre del dit valat… ». Plaigne est un village situé à environ
20 km à vol d’oiseau au sud-ouest de Castelnaudary ; Ibid., 1361-1362, [f°91 r°2]. « Item Petro Michaelis, Geraldo Carerie, Johanni de Montilh pueris
qui fuerunt ad careiandum terram de vallis juxta Got Feran… ».
187
Ibid., 1360, [f°31 r°5]. « Item conduxit ex alia parte ad extrahendum petram et terram a dicto vallo viginti mulieres […] et quinque homines ad
honerandum dictas mulieres… ».
188
Ibid., f°52 v°4]. « …an Pons At, Nayselina, P. Ramon, Bernarda Asta, Vidal de Martelo, R. de la Landa que aquel dia traysero am las paniers de
la terra de la dita cavalha… ». Pour une approche du rôle des femmes dans la construction, voir : Bernardi 1993.

42
LE FOSSÉ DE LA VILLE : PRINCIPALE SOURCE D’APPROVISIONNEMENT POUR LA CONSTRUCTION EN TERRE ? LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Cette activité, « trayre l’escombre del valat », devait de contenir la charge. Il s’agit en outre du seul mode de
consister à conditionner les décombres au fond du fossé transport requérant deux personnes puisque les paniers, et
dans des récipients, la plupart du temps des paniers189, afin même le cabas à deux anses étaient certainement charriés
de les amener au bord de l’escarpe ou de la contrescarpe sur l’épaule (ou sur le dos ?) par un seul manœuvre.
pour les évacuer : ces cabas, tressés au moyen de fibres
d’osier190, sont régulièrement achetés pour divers chan- 4.3 - Evacuation et vidange des décombres : « gitar el
tiers191, comme par exemple lors de la « découverte »192 escombre del valat »
d’une carrière derrière chez Bertrand Olive193, ou pour les Troisième et dernière opération destinée à évacuer tota-
travaux des fossés194. Dans de rares cas, ces paniers sont lement les « escombres » du fossé, elle avait probablement
loués à un habitant de la ville195 mais ils proviennent la lieu dans le prolongement direct de la précédente, mais les
plupart du temps de localités extérieures : sept d’entre eux comptes distinguent quelquefois deux étapes dans l’éva-
sont achetés à Raymond Fabre, de Sorèze (Tarn)196, ou cuation des déblais, sans que l’on sache vraiment pour
Pierre de la Font, de Revel (Tarn)197, alors que d’autres sont quelle raison.
réparés par un habitant de Pechbusque198.
Cependant, le principal fournisseur (Pierre Bonet) Le fait de « gitar el escombre » entraînait un certain
habite à Villemagne, sur le piémont sud de la Montagne transport à distance, trajet rémunéré, puisqu’il fallait bien
Noire, à une douzaine de kilomètres au nord-est de éloigner ces déblais du fossé de manière à poursuivre l’ex-
Castelnaudary : il apparaît durant trois années successives, cavation dans des conditions optimales. On sait d’ailleurs,
livrant au total 65 paniers pour le transport de la terre199. grâce à deux mentions de 1367, que des plans inclinés en
Lorsque la pénurie se fait sentir, les consuls vont même bois (ou des passerelles), parfois dénommés « ponts »,
jusqu’à dépêcher un messager afin que les artisans du étaient bâtis entre le fond du fossé et la contrescarpe (ou
village en fabriquent immédiatement pour les nécessités du l’escarpe ?) afin de permettre l’évacuation des déblais203 :
chantier200. une fois le travail achevé, cet ouvrage était démonté204.
En dehors des paniers, mode de conditionnement le Cependant, la distinction avec l’opération précédente
plus courant, deux autres récipients sont cités à une seule pose des difficultés pour savoir où s’arrête réellement la
reprise par les textes : le premier, un cabas, est un « panier première et où commence vraiment la seconde : « trayre
de jonc à deux anses » (Alibert 1966, 187), acheté en l’escombre del valat » (extraire les déblais du fossé) signi-
plusieurs exemplaires auprès d’un certain Pierre de Dun201. fiait peut-être « remplir le panier de déblais », « monter sur
Le second est un bayart : cette civière à claire-voie, géné- un plan incliné permettant d’atteindre le sommet de la
ralement destinée au transport de pierres ou de mortier, est contrescarpe ou de l’escarpe » et « déposer là son
fabriquée pour « gitar la terra de las cavas ». Les trois panier »205, l’opération « gitar el escombre del valat » (jeter
exemplaires à construire nécessitent 50 clous baradors, les décombres du fossé) impliquant quant à elle « ramasser
c’est-à-dire le modèle le plus volumineux de ces fixa- le panier » puis « transporter le panier jusqu’à un endroit
tions202. Ces bayarts devaient se présenter sous l’aspect déterminé » puis « vider le panier et le ramener au chantier
d’une cuve en bois (dotée de quatre poignées) permettant du fossé ».

189
Ces paniers se retrouvent également à Rodez, en 1368-1369 : « …per 9 paniers que comprero los senhors ad obs dels valatz… » (Bousquet 1926,
57). Il s’agirait de « paniers ou hottes, destinés à évacuer la terre des fossés » (Ibid., note 1).
190
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°101 r°7]. « …qui aptaverat panherios cum vimis…». Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°21 r°2]. « …pro 6 paneriis bridole
ad opus clausurarum pro portando terram…».
191
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°22 r°6]. « …cuidam homini extraneo pro 10 paneriis ab ipso emptis pro operibus clausurarum... » ; 1360, [f°72
v°2]. « …Petrus Danini operarius emit 6 paneria pro portando terram… ».
192
Opération consistant à déblayer « la masse de terre et de roches (découverte ou morts terrains) pour atteindre le premier banc exploitable » (Bayrou
1988, 81).
193
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, « Sequunt nomina hominum conductorum ad discoperiendum peyreriam retro Bertrandum Oliba... ». [f°129 v°5].
« Item duobus panheriis emptis ad trahendum terram… ».
194
Ibid., 1360, [f°49 r°2]. « per 12 paniers as obs de las obras dels valatz… » ; [f°70 r°6].
195
Ibid., [f°27 r°8]. « ...Johanni Aureoli pro loguerio diversorum paneriorum ab ipso conductorum pro extrahendo terram a dictis vallis... ». Ibid.,
4E76/CC2, [f°12 r°7].
196
Gros bourg situé à 16 km à vol d’oiseau au nord de Castelnaudary. AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°95 r°9]. « Item Ramundo Fabri de Soricinio pro
septem paneriis receptis et emptis ad trahendum terram de vallis... ».
197
Ibid., 1360, [f°49 r°2]. « …an Peyre de la Font de Revel per 12 paniers as obs de las obras dels valatz… ».
198
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°101 r°7]. « Item cuidam de Podio Buscano qui aptaverat panherios… ». Pechbusque, ferme (commune de Ricaud),
ancienne communauté, annexe de Soupex, au diocèse de Saint-Papoul à cinq kilomètres au nord-ouest de Castelnaudary (Sabarthès 1912, 297).
199
Ibid., [f°70 r°6]. « …an P. Bonet de Vilamanha per 20 paniers obs de las obras dels valatz… » ; 1361, [f°101 r°8] ; Ibid., 4E76/CC49, 1363,
[f°34 r°6].
200
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°66 v°2]. « …an Johan Dosqua lequal per mandament dels senhors anet a Vilamanha per dire ad aquels que fan les
paniers quen fesson obs de las obras de la vila… ».
201
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°9 v°5]. «…Petro de Duno pro quibusdam cabassis ab ipso receptis […] pro operibus clausurarum… ». Le seul
« Dun » que nous connaissions dans les environs est un village ariégeois situé à environ 35 km au sud de Castelnaudary.
202
AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°3]. « ...per 50 clavels barados per far tres bayarts per gitar la tera de las cavas... ».
203
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°22 r°6]. « …pro faciendo plancas in dictis vallatis portus Astrate cum quibus transire possent cum terra qui proiciebant
de ipsis vallatis… ».
204
Ibid., [f°26 r°6]. « …B. Farole et P. Guilaberti qui […] removerunt pontem fuste per ubi abstracta fuit terra vallatorum Astrate… ».
205
Les opérations de remplissage du panier puis son transport n’étaient peut-être pas réalisées par la même personne.

43
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Cette tâche emploie également, en plus des hommes206, mais cela n’est pas du tout certain, puisque la terre utilisée
des femmes207 et des enfants. Ces derniers, une fois de plus pour les parets avait peut-être la même consistance et des
originaires de Plaigne, ont été logatz (« loués », probable- inclusions identiques (naturelles210 ou artificielles211) à celle
ment aux parents) par le senhor Ramon Bartas, un des employée dans le torchis ou de simples opérations de
consuls de Castelnaudary en cette année 1360-1361 : cette remblaiement et d’isolation212 (infra).
démarche dénoterait à la fois d’un manque de main
d’œuvre locale pour les travaux peu qualifiés, mais aussi Avant 1359, et probablement dès 1355, il faut donc
d’une volonté parentale de gagner quelque argent avec supposer que la majorité des parets de la ville, ainsi que les
leurs rejetons208… Toujours est-il que cette activité est la ouvrages en torchis (pal, échauguettes, hourds, coursières)
moins bien rémunérée des trois, les hommes étant payés ont été édifiés grâce à de la terre issue de différents
cette année-là 20 d. toulzas (soit 1 s. 8 d.), les femmes 1 s., endroits : tout d’abord, du recreusement d’anciens fossés,
et les enfants seulement 8 d. On ne sait rien du devenir de ensuite, de tronçons d’enceintes détruits, mais aussi grâce
ces décombres et de la terre extraite209. à de la terre provenant des rues213 ou des maisons des
Ainsi, au bilan, en l’absence de lien direct entre la terre faubourgs alentours (détruites pour créer un espace dégagé
extraite du fossé et la fortification de terre crue, il est autour des défenses extérieures de la ville). Enfin, le maté-
impossible de dire si la première servait à édifier les riau pourrait également provenir de la création d’une ou
ouvrages de la seconde, même si cela peut paraître fort plusieurs carrières de terre, soit par enlèvement d’un
probable, compte tenu des énormes quantités nécessaires. cubage important sur une superficie limitée, soit par un
On ne sait si une opération de tri s’effectuait à ce stade, piochage de surface dans des champs situés à proximité214.

206
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f° 61 v°2].
207
Ibid., [f°66 v°6].
208
Ibid., [f°60 r°4].
209
Ailleurs, lors du creusement des tranchées ou des fossés, « la terre et les cailloux sont mis dans des sacs appelés borra parce qu’ils sont réalisés avec
du bourrat qui est une toile faite d’un mélange de chanvre et de laine. Ces matériaux sont déposés non loin du chantier, pour servir ultérieurement à
couvrir les planchers des chaffaux et des tours, le tablier des ponts dormants ou pour combler et aplanir des espaces extérieurs comme le pralet du
seigneur et les recepts » (Kersuzan 2005, 326). En outre, « la terre glaise qui constitue le sol de cette région est appelée sablon. Elle est récupérée lors
du creusement des fossés et transportée par chariot vers les fours à briques proches du château que les comptes nomment globalement la carronnerie »
(Ibid., 328).
210
Pierres, galets, etc.
211
Tessons de tuiles ou de céramique, etc.
212
Cela dépendait certainement du type de technique employé : bauge, bauge coffrée, variante du pisé ?
213
En effet pour la construction civile, « quelques coutumes autorisent les habitants à se servir de la terre des rues et des places pour bâtir. C’est ce que
l’on voit à Saint-Félix, en 1463 : « item, quod quilibet habitator de Sancto Felice et ejus pertinentiis potest recipere impune de terra carreriarum publi-
carum et planorum et ponere in campis suis, seu hortis vel vineis, et facere tortitia sive parietes… » (Marandet 2006b, 286). Pouvait-il en être de même
pour les fortifications ?
214
D’après un texte énumérant les droits des co-seigneurs d’Auterive, vers 1410, c’est un champ communal qui sert de réserve de terre pour la construc-
tion civile : « item, otra le pont de l’Arieya, les cossols et universitat an hun camp costa las hostalarias, que confronta am la carriera publica et am
Guilhem Castanh, en Germa Thomas de Tholosa et Bernat de Mibilla, delqual camp la gent de la vila se previsis de terra per tortissar, o far muralha
ho pasimentar » (Marandet 2006b, 286). Pourquoi ne pas envisager une telle hypothèse pour la fortification ?

44
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES, P. 45-78 LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Chapitre 5

Essai d’identification des techniques

Afin de rester aussi neutre que possible, nous avons


choisi de diviser ce chapitre en deux paragraphes : le
premier présentera les observations de terrain réalisées sur
des vestiges d’enceintes en terre crue, afin de déterminer si
des éléments discriminants permettent de mettre en valeur
une ou plusieurs méthodes d’édification en terre crue pour
les régions concernées. Dans un second temps, on exami-
nera l’apport des sources textuelles dans ce domaine à
travers l’étude des termes employés dans les documents
médiévaux et modernes.

5.1 - Les observations de terrain


Les observations de terrain menées avec la collabora-
tion de D. Baudreu ont permis de découvrir quelques
vestiges d’enceintes médiévales en terre crue dans l’Aude
et la région toulousaine (quatre d’entre eux ont été étudiés
en détail).
Plusieurs éléments distinctifs ressortent de cet examen
(végétaux, nature de la terre, formes et dimensions des
vestiges, existence ou non d’une base maçonnée).

5.1.1. - Une constante : des couches de terre superpo-


sées séparées par des végétaux
Ces constructions fortifiées sont toutes mises en œuvre
Fig. 9 : La Digne d’Aval (Aude). Vue du mur d’enceinte en terre
selon une ou plusieurs techniques utilisant des couches de crue du village.
terre superposées (dites « filantes »), de plusieurs centi-
mètres d’épaisseur, séparées par des lits de végétaux, la Moyen Âge216 a permis de réaliser des observations en mars-
plupart du temps de la bruyère. avril 2004 (fig. 11). Sur une hauteur d’environ deux mètres,
Ainsi, à la Digne d’Aval, en Bas-Razès (Aude), lors de le mur se compose en partie basse de couches de terre crue
travaux de réhabilitation de l’ancien périmètre ecclésial, en séparées par des lits très minces de végétaux (probablement
septembre 2005, la dépose du crépi a fait apparaître un de la bruyère) dont les écarts varient en moyenne entre 0,14
tronçon de muraille en terre crue de plusieurs mètres de haut et 0,16 m (fig. 12, 13). Au premier étage cependant, une
(fig. 9). La hauteur moyenne des lits de terre est de 0,17 m, partie du parement interne laisse apparaître cinq couches
certaines couches pouvant atteindre 0,23 m215 (fig. 10). Les filantes, sur une hauteur totale de 1,60 m. Leur espacement
végétaux qui assurent l’interface sont assez peu visibles. est légèrement supérieur à celui des couches du rez-de-
Au village castral d’Alaigne (également en Bas-Razès), chaussée (reprise de construction ou changement de parti au
le bon état de conservation d’un pan d’enceinte du bas cours de l’édification de la structure ?)217.

215
Partie droite du mur : H max. des lits : 0,17 à 0,18 m, H min. : 0,11 m. Partie gauche du mur : H max. des lits : 0,23 m, H min. : 0,12 m.
216
Datation d’après le mobilier céramique prélevé à l’intérieur de l’élévation en terre crue.
217
Hauteur des couches filantes de haut en bas : US 2001 : H : indétermnée ; US 2002 : H : 0,19 m ; US 2003 : H : 0,17 m ; US 2004 : H : 0,23 m ;
US 2005 : H : 0,18 m.

45
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Fig. 10 : La Digne d’Aval (Aude). Vue détaillée des couches de Fig. 12 : Alaigne (Aude). Parement intérieur du mur en terre crue,
terre superposées du mur d’enceinte, séparées par des vue générale. On remarque le solin à pierres et chaux,
lits de végétaux. sur lequel est appuyé le jalon ainsi que la lucarne percée
à l’époque contemporaine (cliché : D. Baudreu, 2004).

comprise entre 0,08 et 0,16 m en moyenne mais les végé-


taux, (bruyère ?), sont relativement peu visibles.
Enfin, en décembre 2005, un nouveau tronçon de
muraille a pu être étudié au village castral de Thil219, en
Haute-Garonne, à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de
Toulouse (fig. 15). Les couches ont une hauteur comprise
entre 0,06 et 0,10 m, à l’exception de deux lits (0,15/0,16 m
et 0,20 m). Là encore, les végétaux se distinguent assez
mal (fig. 16).
Ces observations sont également valables pour les
constructions civiles : d’autres études, effectuées en
compagnie de D. Baudreu (notamment en ville basse de
Carcassonne), ont permis de découvrir des murs porteurs
en terre crue lors de travaux de réhabilitation de logements
(fig. 17) : ces constructions, d’une épaisseur moyenne
(0,60 à 0,80 m env.), peuvent atteindre plusieurs mètres de
haut, quelquefois sur deux ou trois étages. Elles auraient
été élevées grâce à la technique de la bauge : on distingue
en effet des « gachouls », c’est-à-dire « très certainement
des paquets ou pains de terre juxtaposés, nécessaires à
l’édification d’une paret. […] En toute logique, la fabrica-
tion et la pose de gachols impliquerait donc, par façonnage
direct, l’assemblage de lits de terre superposés » (Baudreu
2003, 367). Toutefois, en l’absence de tessons de céra-
mique, ces élévations n’ont pu être datées.
D’autres exemples (maisons incluses dans des forts
villageois du sud-Carcassonnais) renforceraient l’idée que
cette technique par couches filantes remonte au moins aux
Fig. 11 : Alaigne (Aude). Vue extérieure de l’enceinte en terre
XIVe-XVe siècles : ainsi, à Cazilhac, dans le passage
crue. Cette dernière apparaît en haut, à droite, sous le longeant l’entrée du fort, à l’est, un mur de terre crue en
crépi en partie tombé. grande partie crépi vient s’appuyer contre le parement de
l’enceinte à pierres et chaux220: les couches de terre
En outre, en avril 2005, un fragment d’enceinte en terre (H : 0,07 à 0,09 m) sont séparées par des branchettes de
crue a été signalé chez un particulier, au village d’Esparsac bruyère. La terre inclut des graviers naturels de diamètres
(Tarn-et-Garonne), à 4 km à l’ouest de Beaumont-de- variables mais néanmoins relativement petits (0,5 à 3 cm).
Lomagne (fig. 14)218. La hauteur des lits de terre est Cette construction aurait une épaisseur d’environ 0,76 m221.

218
Vestige signalé dans l’article de L. Sévègnes (Sévegnes 2002).
219
Inventeur du site : A. Klein.
220
Sa technique de construction pourrait remonter aux XVe-XVIe siècles (Baudreu, Loppe 2004, 133).
221
Ibid., 131.

46
plancher étage
plancher étage

crépi contemp.

3
terre crue linteau en bois

1009 terre crue 1017


ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES

1008 1016
1007 crépi 1 1015
crépi
cont.
1006 1014 2
baie
contemp. 1013
1005

1004 1012
piédroit
contemp. terre crue 1003 1011

1002
porte d'entrée 1010
creusement 1001 terre crue
contemporaine
contemp.

bûchage moderne
(enduit à la chaux : mangeoire ?)
SOLIN
mur

Fig. 13 : Alaigne (Aude). Relevé du parement intérieur du mur d’enceinte en terre crue M1.
pierres
et
chaux

sol actuel sol actuel


axe
tesson de céramique médiévale coupe
1. ancrage solive ?
tesson de tuile
2. ancrage bois ?
galets 3. "niche" semi-circulaire
lits de végétaux 0 1m
relevé, DAO : F. Loppe, avril 2004

47
LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Fig. 15 : Thil (Haute-Garonne). Vue extérieure de l’enceinte de


terre crue du village castral (cliché : D. Baudreu, 2005).

Fig. 14 : Esparsac (Tarn-et-Garonne). Vestige d’enceinte médié-


vale en terre crue, vue cavalière (cliché D. Baudreu,
2005).

Selon un habitant du lieu, les murs de terre sont


nombreux dans le village, mais souvent invisibles du fait
des crépis qui les recouvrent. Un autre mur de terre (avec
inclusion de tessons de tuiles), comportant des lits de Fig. 16 : Thil (Haute-Garonne). Vue détaillée d’un lit horizontal
bruyère alternant avec des lits de paille, existait d’ailleurs de végétal, juste au-dessus du jalon.
auparavant entre deux parcelles mitoyennes du fort.
Enfin, aux villages de Cépie et Leuc, une maison située comme le laissent supposer certaines sources médiévales
dans le fort possède également un mur de terre crue bâti (infra) : on aurait alors là une méthode de bauge coffrée ou
avec des lits de terre superposés222. une variante du pisé n’utilisant pas de clés traversantes…
Cette technique de couches filantes séparées par des lits Pourrait-on avancer l’hypothèse selon laquelle, en l’ab-
de bruyère est donc fréquente en pays audois occidental, sence d’indices plus probants, la hauteur des couches de
particulièrement en Carcassès et Bas-Razès (Baudreu terre pourrait être un élément discriminant entre la bauge et
2003, 367-369). Elle se rapprocherait fortement du un possible dérivé du pisé (infra) ? : en effet, A. Klein a pu
relever que dans le cas du pisé par couches filantes, les
« type 3 » de « bauge par couche filante, de 8 à 39 cm de
hauteurs de lits sont comprises entre 5 et 15 cm au
hauteur » identifié par A. Klein en Midi-Pyrénées, et daté
maximum223. A contrario, les édifices dont la hauteur des
entre les XVIe et XVIIIe siècles (Klein 2003, 428-431).
couches dépasse de beaucoup cette dernière mesure, pour-
Cependant, ces constructions ont pu utiliser un coffrage raient-ils être considérés comme utilisant la technique de la
externe (qui n’a donc laissé aucune trace sur le parement), bauge224 ?

222
Ibid., 122, note 78, 132.
223
Klein 2003, 419. L’auteur note en effet, pour le « type 1 » (pisé par couches filantes), que « les couches de terre sont fines, avec une hauteur de l’ordre
de 5 à 15 cm maximum (moyenne de 8 à 10 cm). Elles courent sur toute la périphérie de l’édifice, sans ruptures, et sont généralement bien horizon-
tales. Dans un même mur, leur hauteur est relativement constante, sans écarts excessifs ».
224
Le damage utilisé dans la construction en pisé, pour pouvoir être efficace, ne pourrait peut-être pas dépasser une hauteur « plafond » de 0,15 m pour
chaque lit.

48
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Ainsi, à la Digne d’Aval, plusieurs objets ont pu être


prélevés dans la maçonnerie : deux fragments de tuiles, un
tesson de céramique à cuisson oxydante avec glaçure de
couleur jaune (fragment d’anse), huit de céramique médié-
vale à cuisson réductrice, et enfin un os. On ne relève pas
de traces visibles de paille ou de foin mêlés à la terre et
l’examen du parement n’apporte pas d’indices permettant
d’incliner ou non en faveur d’une éventuelle présence de
coffrages (négatifs de planches par exemple226).
Quant à Alaigne, la terre utilisée dans le tronçon d’en-
ceinte est de couleur brun-ocre, voire d’aspect jaune-
verdâtre lorsque sa surface est grattée. Elle inclut pêle-mêle
tessons de tuiles, céramiques (dont une anse de marmite du
bas Moyen Âge ; fig. 18), fragments d’os, dents animales,
galets227 d’assez petites dimensions228, nodules de charbon
vitrifiés, rares morceaux de métal souvent fortement
oxydés229. Par ailleurs, le percement au rez-de-chaussée
d’une baie moderne a révélé dans l’ébrasement gauche la
présence d’un morceau de bois de section ovoïde dont les
fibres sont nettement visibles (grume sans écorce ; diam. :
4 x 5 cm env., fig. 19). De couleur marron clair, il apparaît
comme étant très sec et semble de toute évidence disposé
horizontalement dans le mur en terre crue, à peu de
distance du haut du solin en pierre chargé d’isoler la
construction du sol (infra).
En outre, certaines limites verticales pourraient faire
songer à des « paquets » de terre, mais cette observation
faite sur le blocage (le parement interne a été entamé sur
une profondeur de 0,30 m) empêche d’être davantage affir-
Fig. 17 : Carcassonne (Aude), ville basse, quartier Saint-Vincent. matif : on relève cependant, au dessus de la porte, (US
Vue en coupe de lits de bruyère inclus dans un mur de 1008), une forme de « pain »230 et d’autres fissures verti-
terre massive (cliché : D. Baudreu).

Cette hyptohèse permettrait de supposer que les


vestiges d’enceinte découverts dans l’Aude (la Digne
d’Aval, Alaigne) se rapprocheraient davantage de la
méthode de la bauge, eu égard à certaines hauteurs de
couches (jusqu’à 0,23 m dans les deux cas), alors que les
deux exemples de la région toulousaine, et particulière-
ment celui d’Esparsac (où les hauteurs de couches ne
dépassent pas 0,16 m225), seraient assimilables à une
variante du pisé. Cependant, faute de certitude, on ne peut
conclure définitivement en ce sens…

5.1.2 - La terre employée : nature et mise en œuvre


Les quatre vestiges présentés ont également pour déno-
minateur commun d’utiliser une terre de « seconde main », Fig. 18 : Alaigne (Aude). Anse de marmite datable du bas
dans le sens où elle n’est pas vierge de déchets relatifs à Moyen-Âge prise dans la terre de l’enceinte (cliché :
l’activité humaine, bien au contraire. D. Baudreu, 2004).

225
Au Thil, en effet, une couche atteint 0,20 m de haut.
226
En effet « si l’examen des façades ne rend compte d’aucun trous de clés, de fonds de coffrage ou de croisement de couches aux angles, il dévoile
néanmoins parfois l’empreinte de planches, symptomatiques de la technique du pisé. Ces empreintes à profil concave, sont visibles sur des parements
intérieurs, protégés des intempéries » (Klein 2003, 420).
227
La présence de galets dans des murs de terre se retrouve également ailleurs, comme à La Tourasse (Lamasquère, Haute-Garonne), où une tour carrée
d’environ 5 m de côté (XIe-XIIe siècles), dont les murs mesurent entre 1,20 m et 1,60 m de large, sont « constitués de gros galets de la Garonne, liés
par un mortier très maigre, parfois inexistant d’ailleurs » (Ameglio 1999, 519). Selon D. Baudreu, « d’après la photographie présentée, il y aurait tout
lieu de parler d’une terre compactée incluant une forte densité de galets et cailloutis, donc d’une véritable terre massive constituant a minima la partie
inférieure de la tour » (Baudreu 2003, 360).
228
3 x 2 cm à 7 x 6 cm.
229
Par exemple : US 1003, L x l : 7 x 2 cm.
230
L x H : 0,20 x 0,16 m.

49
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Fig. 19 : Alaigne (Aude). Vue intérieure de la baie moderne per- Fig. 20 : Esparsac (Tarn-et-Garonne). Vue détaillée de la terre de
cée dans l’enceinte en terre crue. Un élément en bois est l’enceinte. On remarque les nombreux galets, cailloutis,
noyé dans la structure (voir la flèche) (cliché : tessons de tuiles et briques cuites (cliché D. Baudreu,
D. Baudreu, 2004). 2005).

cales, dont l’écartement varie entre 0,18 et 0,20 m, sur le manière elle a pu être mise en œuvre. En effet, les pare-
reste de l’élévation interne, observation qui ferait pencher ments, lessivés par les intempéries, ou rognés par l’action
en faveur de la technique de la bauge. de l’homme, ne permettent plus de distinguer des indices
À Esparsac, le mur d’enceinte se compose d’une terre déterminants comme d’éventuels négatifs de planches de
coffrage, ou, dans le cas de la bauge (sans coffrages), de
argileuse brun clair dotée de graviers et de galets de dimen-
possibles traces de triquage : cette dernière opération,
sions quelquefois importantes231. Des tessons de tuiles, de
consistait en effet à battre (à l’aide d’un bâton ou d’un
briques cuites232 et de céramique médiévale233 sont inclus
trique en bois) les parements du mur afin de limiter les
dans la masse, ainsi que d’autres éléments234 (fig. 20).
fissures et redresser le parement. En Midi-Pyrénées, sur les
Enfin, au Thil, la terre, argileuse, se compose de galets de
différents types de bauge mis en lumière par A. Klein, seul
taille variable (jusqu’à 0,20 m pour les plus gros), de
le « type 4 » (Klein 2003, 432-435) présente cette opéra-
graviers, de tessons de tuiles et de rares éléments de céra-
tion de rectification, apparemment davantage usitée
mique médiévale. ailleurs, comme par exemple en Ille-et-Vilaine235.
L’examen de la terre, s’il ne révèle pas à l’œil nu la En définitive, la terre n’est jamais triée et ses inclu-
présence de végétaux, empêche également dans la plupart sions ne sont pas particulièrement calibrées : il s’agit d’une
des cas (sauf peut-être à Alaigne) de savoir de quelle terre de réemploi utilisant des fragments d’objets issus de

231
Environ 6 cm de diamètre pour les plus gros galets ; diamètre inférieur à 1 cm pour les graviers.
232
Quatre fragments de briques, dont une surcuite, d’environ 6 cm d’épaisseur.
233
Treize tessons datés du XIIIe siècle par J.-M. Lassure et G. Villeval : 6 tessons à cuisson réductrice dont un avec traces de polissoir, 5 tessons à cuisson
oxydante, 1 tesson à post-cuisson réductrice avec traces de polissoir, 1 tesson à post-cuisson réductrice externe.
234
Deux scories, un charbon de bois (3,5 x 2,5 cm).
235
En effet, dans ce département, les murs de bauge subissent deux opérations complémentaires : la parure et le triquage. Ainsi, après un séchage de
trois jours à une semaine selon les conditions climatiques, « lorsque la bauge a atteint la consistance d’une pâte à modeler, on recoupe l’excédent de
terre pour former le parement définitif du mur. Le maçon taille d’abord les angles, au jugé, ou à l’aide d’un fil à plomb. À l’aide de piquets plantés dans
la bauge, il tend ensuite un fil qui va conduire son geste le long du mur. Monté sur la levée, il recoupe l’excédent de terre à l’aide d’une bêche aigu-
isée, la paroire, par un mouvement alternatif de haut en bas » (Bardel, Maillard 2002, 43).

50
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

dépotoirs de sols d’occupations, ou de murs de maisons en 5.1.3 - Formes et dimensions des vestiges
terre, peut-être détruites à l’occasion de l’édification de ces Ces quatre vestiges sont dans des états de conservation
enceintes, voire d’éléments issus du curage des fossés qui,
très variables. Par ailleurs, la présence de constructions
à cette époque, servaient souvent de décharges236.
médiévales ou modernes accolées contre leurs parements
Les constructeurs pouvaient fort bien s’accommoder de internes n’a pas toujours permis de réaliser des observa-
terre de « remploi » dont l’hétérogénéité ne paraissait pas tions dans les meilleures conditions, ni d’effectuer les
nuire à la cohésion de la structure mais au contraire la mesures nécessaires à une étude exhaustive.
renforcer, tout en permettant une édification plus rapide de
ces maçonneries, souvent érigées dans l’urgence. Il s’agit C’est par exemple le cas à la Digne d’Aval, où le mur
là d’une des solutions retenues à Castelnaudary, notam- d’enceinte fait désormais partie intégrante d’un pan de la
ment lors de la campagne de destruction des maisons des sacristie contemporaine (XIXe siècle) accolée à l’église
faubourgs aux alentours du 30 mai 1360 (supra). médiévale, dont les parties les plus anciennes remontent
aux XIe-XIIe siècles. Ainsi, le percement d’une fenêtre
Enfin, à Alaigne, le parement extérieur du mur possède éclairant la sacristie a permis d’évaluer l’épaisseur de la
un enduit (mélange de paille, de chaux, de terre, et
structure (0,80 à 0,85 m) mais cette mesure, relativement
d’eau ?), qui ne correspond peut-être pas à l’apprêt d’ori-
faible compte tenu de ce que l’on sait sur les dimensions de
gine, puisque cette partie a certainement subi une impor-
ces constructions (infra), laisse supposer que le mur a
tante érosion. À Esparsac, un badigeon du même type237,
perdu de sa matière.
d’environ 8 mm d’épaisseur, subsiste également au niveau
de la partie inférieure du parement intérieur, sur une Au Thil, le mur, autrefois plus étendu comme le montre
hauteur de 0,30 m, et sur presque toute la longueur visible une carte postale du début du XXe siècle (fig. 21), est dans
(4,90 m). un meilleur état de conservation : sa hauteur actuelle est de

Fig. 21 : Thil (Haute-Garonne). Carte postale du début du XXe siècle montrant l’enceinte de terre crue dont seule la partie gauche est
aujourd’hui conservée. On remarquera les superstructures en colombage-torchis.

236
À Tolède, au Moyen Âge, pour la construction des murs de tapia de maisons, la terre employée en ville était, « soit de la terre végétale, prise sur
place, provenant des cours intérieures (corrales), des jardins et étables, des décharges publiques (basureros, muladares), soit récupérée à partir des murs
anciens écroulés. Elle offre un mélange de boue, d’os, de charbons de bois, de brique écrasée et de paille, et présente une couleur assez foncée. Ce
matériau, pris à proximité de la construction nouvelle à réaliser, ne nécessitait pas de transport, dont on sait qu’il a toujours été très coûteux et difficile
à effectuer à Tolède, étant donné la topographie urbaine accidentée. La mise en œuvre de la terre était relativement facile, et la tapia pouvait être aisé-
ment réutilisée dans les cas de démolition ou d’écroulement d’un édifice ancien » (Molénat, Passini 1999, 134). Pour les murs de terre massive proto-
historique, « on rencontre cependant des bétons réalisés de toute évidence avec de la terre prise dans l’habitat lui-même et qui contiennent des propor-
tions très élevées de cendres, charbons de bois et tessons, mais aucun mur n’est entièrement réalisé avec ce matériau » (de Chazelles 1999, 249).
237
Cet enduit est d’une couleur grisâtre, différente de la terre du mur (couleur jaunâtre).

51
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

5,20 m hors sol, l’épaisseur à la base de 1,95 m, et celle au 5.1.4 - L’emploi du solin : deux cas sur quatre ?
sommet de 1,26 m (fig. 22). Néanmoins, son parement a lui Un solin de mur peut se définir comme la « partie infé-
aussi été rogné, particulièrement du côté interne : les rieure formée d’une assise ou d’un petit nombre d’assises
déductions réalisées permettraient de restituer une largeur dans un matériau ou dans un appareil différent du reste du
d’environ 2,50 m à la base et entre 1,30 et 1,40 m en partie mur, isolant celui-ci du sol » (Pérouse de Montclos 1995,
haute, dimensions très proches de celles relevées dans les 176). D’ailleurs, la présence de solins à la base des
sources médiévales (infra). D’après ce profil restitué du enceintes urbaines est systématiquement citée par les
parement interne, le fruit atteindrait environ 12 %. sources documentaires (infra). Pourtant, à la lumière des
Dans le cas d’Esparsac, le vestige d’enceinte a subi une quatre exemples villageois conservés, ces aménagements
érosion encore plus forte : d’une hauteur conservée de destinés à isoler la construction du sol des remontées d’hu-
2,80 m, son épaisseur à la base n’est que de 1,50 m, et celle midité et des eaux de ruissellement n’ont pu être mis en
au sommet, fortement entamée par l’action humaine et le évidence que dans deux cas sur quatre.
lessivage des intempéries, n’est plus que de 0,40 m (fig. 23, À La Digne d’Aval tout d’abord, la maçonnerie de terre
24, 25, 26). Un mur moderne, doté d’un solin en briques crue repose sur un soubassement de galets de gros calibre
cuites et moellons calcaires liés à la chaux, et d’une éléva- (diam. : 0,20 à 0,25 m), liés à la chaux, visible sur une
tion en briques crues, a détruit une partie de son parement hauteur de 3,20 m (fig. 28). L’appareil est irrégulier mais ne
extérieur. Quant au fruit, il est difficile à restituer, compte possède pas de fruit. Quant à Alaigne, l’élévation de terre
tenu de l’état de la structure. crue s’appuie sur une base en moellons et galets239 à l’appa-
Enfin, pour Alaigne, le parement intérieur a été bûché reil assez irrégulier (fig. 13, 29) : les premiers sont pour la
sur une épaisseur d’environ 0,30 m, si l’on se fie au pare- plupart des éléments en grès assez mal dégrossis240 ou au
ment visible du solin à pierres et chaux (fig. 27). Du côté contraire bien, voire très bien équarris (tableaux dressés à la
externe, le vestige est recouvert à la base d’un enduit au smille) et utilisés en réemploi241. Les galets242, plutôt
ciment. Il est même possible que le parement du solin ait concentrés dans la partie basse, attestent également du
été rogné. En tenant compte de ces paramètres, on pourrait caractère fruste de ce soubassement. Ces élements sont liés
restituer une épaisseur d’au moins 1,80 m à la base de la par un mortier de chaux blanchâtre relativement bien dosé.
paret, soit très proche des dimensions constatées dans les Une réfection matérialisée par un léger décalage d’as-
sources médiévales et modernes (2 m au minimum, infra). sises (et la présence de tessons de tuiles) montre deux
À une hauteur de trois mètres, l’épaisseur de la paret n’est phases de construction, la seconde étant vraisemblable-
plus que de 1,40 m, et à environ 5,80 m de haut (non ment une reprise en sous-œuvre.
compris le solin), elle atteint seulement 0,70 m, chiffre Pour des constructions civiles, on a également pu
mettre en évidence l’existence de soubassements
deux fois inférieur aux mesures relevées dans la plupart des
maçonnés, comme par exemple un solin de briques cuites
sources : cependant, en restituant le profil du parement
pour une maison de Castelnaudary (fig. 30).
intérieur, cette mesure revient à 1,36 m environ, donc très
proche des dimensions textuelles relevées pour Montréal A contrario, l’observation des vestiges d’Esparsac et du
(Aude) et Verlhac (Tarn-et-Garonne) au XVe siècle (infra). Thil n’a pas permis d’établir la présence de solins, fait
D’après le mobilier recueilli, l’origine bas-médiévale du confirmé pour ce dernier site par la carte postale du début
vestige d’Alaigne ne fait pratiquement aucun doute (anse du XXe siècle (fig. 21). Dans ces deux cas cependant, le
de marmite typique du XIVe siècle, fig. 18). Ainsi, même niveau visible au pied des constructions ne correspond pas
diminuée, la maçonnerie a tenu bon durant près de six au substrat, laissant envisager un possible solin dissimulé
siècles... sous le remblai. Cependant, ces fortifications en terre crue
ont pu être édifiées à même le sol, le soubassement ayant
Comme les documents le confirmeront par la suite, ces pu être jugé trop long ou trop coûteux à mettre en œuvre.
courtines sont donc systématiquement élevées avec un Une photographie d’un vestige de mur d’enceinte aujour-
fruit, leur épaisseur à la base étant toujours plus importante d’hui disparu, (ancien fort villageois d’Ayguesvives,
que celle mesurable au sommet. Haute-Garonne) confirmerait cette hypothèse (fig. 31).
Enfin, dans le cas d’Alaigne, un creusement est visible
dans le parement interne : il paraît assez ancien (on 5.2 - L’apport des textes
remarque un coup de pic) et affecte une forme en berceau L’étude des rares édifices en élévation apporte un lot
surbaissé238. Il s’agissait peut-être d’une niche ou d’un important d’informations. Cependant, aucun élément véri-
placard, voire d’un ancrage de poutre par la suite supprimé, tablement déterminant ne permet de réaliser à ce jour une
mais on ne peut totalement écarter l’hypothèse d’une distinction claire entre la bauge (ou la bauge coffrée) et une
lucarne, voire d’une archère oblitérée par l’actuelle baie possible variante du pisé, si tant est que cette dernière ait été
(fig. 13). employée à l’époque médiévale dans les régions étudiées243.

238
L x H conservée : 0,62 x 0,26 m.
239
H max hors sol : 1,10 m ; ép. à la base : 2 m.
240
L x H moy. : 0,54 x 0,17 m.
241
L x H moy. : 0,40 x 0,30 m.
242
L : 0,12 à 0,14 m ; H : 0,10 à 0,15 m.
243
Pour l’architecture civile rurale (périodes moderne et contemporaine, XVIIIe-XIXe siècles), un article récent d’A. Klein montre clairement l’exis-
tence de constructions en pisé procédant par banchées appareillées dans les départements du Gers et des Hautes-Pyrénées (Klein 2007).

52
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

lits de végétaux µ
lucarne

µ plaquage moderne en briques cuites


(liant : argile)

lits de végétaux µ

terre crue poutre et plancher modernes

niveau
µ actuel
du
parement
tracé
supposé
du
parement
d'origine
µ
µ tracé supposé
du parement
d'origine

briques cuites

0 1m
inventeur du site : A. Klein
relevé, DAO : F. Loppe, décembre 2005
sol actuel

Fig. 22 : Thil (Haute-Garonne). Coupe de l’enceinte de terre crue.

53
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Fig. 23 : Esparsac (Tarn-et-Garonne). Vestige de l’enceinte mé-


diévale en terre crue, vue frontale (cliché D. Baudreu,
2005). Fig. 24 : Esparsac (Tarn-et-Garonne). Vestige de l’enceinte mé-
diévale en terre crue, vue intérieure (cliché D. Baudreu,
2005).

solive

poutre

mur moderne
briques crues

parement µ
actuel terre crue
(masqué)

µ parement actuel
solin
moderne
à
pierres
et chaux
terre crue
µ

fissure
briques cuites

moellons calcaires
lits de végétaux
0 1m
relevé, DAO : F. Loppe, mars 2005

Fig. 25 : Esparsac (Tarn-et-Garonne). Coupe de l’enceinte en terre crue.

54
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

toiture

comble

plancher
terre
crue

fenêtre
contemporaine

terre crue plancher

1016
1015
1014 lit de végétaux
1013 ébrasement
µ baie contemporaine
1012
crépi
1011
1010
terre crue

parement
ciment
(bûchage
du solin ?)
µ solin
pierres et chaux

sol actuel

Fig. 26 : Esparsac (Tarn-et-Garonne). Enceinte médiévale de terre


crue, vue en coupe (cliché : D. Baudreu, 2005). 0 1m
relevé, DAO : F. Loppe, avril 2004

Fig. 27 : Alaigne (Aude). Coupe du mur M1, enceinte de terre


De fait, on tentera d’apporter, grâce aux textes, de crue.
nouvelles données essentielles à la discrimination des
méthodes de construction en terre crue massive pour et d’une poignée en T au sommet du manche (manilha). Les
l’époque médiévale en Lauragais et en Toulousain. Les pointes sont appelées puas » (Alibert 1966, 102).
sources écrites renseignent ainsi sur l’outillage et les réci- « Rabassieyra, rabasiera : pioche dont on se sert pour
pients employés dans l’édification de ces défenses, mais déterrer les truffes et déchausser les vignes » (Lévy 1909,
sont également intéressantes par le vocabulaire qu’elles 312).
emploient (paret, gason ou gaison, tapia).
Ces deux outils d’origine agricole, propres à travailler
5.2.1 - Outillage et récipients pour la construction en la terre, sont utilisés par les parediers et les manœuvres
terre crue en Lauragais opérant avec eux, comme nous l’apprend un contrat du
XVIe siècle pour la réfection d’une paret au château de
Ce domaine est le moins bien documenté par les Montréal (Aude) : ainsi, les entrepreneurs « …seront tenus
sources. Ceci s’explique certainement par le fait que les de faire lesdites murailles de six palms de largeur et vingt
parediers possédant leur propre matériel, les villes palms de hauteur compris les fondements, les faire de
n’étaient pas tenues de le leur fournir ; seuls quelques bonne terre bien atrampée et pastée deux fois avec la
outils et récipients sont cités : la rabassieyra, l’andusac (ou rabassière et une fois avec l’andusat »244. Dans ce cas
andusat), le prual ou pual ainsi que les semals et grazalas. précis, « la mise en œuvre de la terre était donc précédée
par une phase préparatoire qui consistait à humidifier la
5.2.1.1 - Andusat, prual, rabassieyra terre et à la pétrir » (Baudreu 2002, 61) mais on ne sait à
« Andusac, andusat : sorte de bêche à deux pointes quelle méthode précise se rattache cette opération (bauge
munie d’un talon pour l’enfoncer dans la terre (marcadoira) ou bauge coffrée ?245).

244
Baudreu 2002, 60, 61. (AD Aude, 3E384, [f°206 v°], [f°207].
245
En effet, la phase de pétrissage de la terre exclurait le pisé ou une de ses variantes, ces techniques ne requérant pas une telle préparation.

55
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Fig. 28 : La Digne d’Aval (Aude). Vue détaillée du solin à pierres Fig. 30 : Castelnaudary, dernière extension de la ville (bastida).
et chaux supportant l’enceinte de terre crue. Mur de maison en terre massive reposant sur un solin de
briques cuites (cliché : D. Baudreu).

Fig. 29 : Alaigne (Aude). Vue détaillée du solin à pierres et chaux Fig. 31 : Ayguesvives (Haute-Garonne). Vestige de l’enceinte
(cliché : D. Baudreu, 2004). nord du fort villageois (XIVe- XVe siècle), avant sa des-
truction totale. L’ouverture centrale n’est pas d’origine.
La construction de paraît pas utiliser de solin (cliché :
L. Grelat, 1989, communiqué par D. Baudreu).

56
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

L’andusat serait donc une sorte de bêche à deux dents, réparations ou fabrications de rabassieyras datées de 1360,
éventuellement munie d’un appuie-pied246 et d’une poignée 1361, 1363 et 1367, étaient destinées à autre chose qu’à des
en T perpendiculaire au manche247. La bêche est « avec la outils pour le creusement de fondations ou l’évacuation des
houe, l’outil le plus utilisé au Moyen Âge pour le travail du remblais251. Si cet instrument est une sorte de pioche, il
sol », sa variante, la bêche à dent, étant pour sa part attestée s’agissait donc d’un outil double doté d’un tranchant et
en France dès les IXe-Xe siècles (Reigniez 130, 139). d’un fer ressemblant à un pic pointu. Généralement, « la
L’iconographie médiévale montre que l’utilisateur pioche est un instrument assez proche du pic par son fonc-
« s’appuie d’une main sur l’extrémité de l’outil alors que, tionnement. Elle pouvait être maniée soit en douceur, soit
de l’autre main, il saisit le bas du manche et guide le fer en force, la position de l’utilisateur variant alors selon ce
vers l’endroit du sol qu’il faut travailler. Ensuite, avec le choix » (Reigniez 2002, 109).
pied correspondant à la main placée au plus bas, il appuie Ainsi, les énormes quantités de terre englouties par le
parfois sur la tête de la bêche pour qu’elle puisse s’en- torchis (et par certains murs bâtis en bauge, ou éventuelle-
foncer plus aisément » (Ibid., 138, 139). ment en bauge coffrée) devaient en effet requérir une
Quant à la prual, une seule mention chaurienne de 1408 préparation préalable au moyen de la rabassieyra (pour
précise que deux parediers sont indemnisés pour des fendre les mottes ?) et l’andusat (pour pétrir et
achats réalisés afin de bâtir des parets (notamment pour mélanger ?), comme le précise la citation du XVIe siècle
l’acquisition de cet outil)248. Ce terme, inconnu des diction- (supra).
naires d’occitan sous cette forme orthographique, pourrait
être rapproché de celui de « pual » ou « pua », (grosse dent 5.2.1.2 - Semals et grazalas
d’outil, râteau, peigne ou fourche)249. Par extension, cette Concernant l’édification des maçonneries de terre
prual correspondrait à une sorte de râteau ou de fourche massive, l’utilisation des semals est avérée dans un docu-
permettant de brasser la terre pour la rendre homogène ment du 15 août 1599 : en effet, les consuls de Fanjeaux,
avant sa mise en œuvre, indice qui une fois encore laisse- entre autres choses, « seront tenus de bailler ausdits pare-
rait penser à une construction en bauge… diers deux semals » (Cayla 1964, 531), sans que l’on sache
La rabassière par contre, est citée plusieurs fois dans s’il s’agit de seaux ou de comportes252. Dans le premier cas,
les registres consulaires chauriens mais on ne connaît géné- ils pourraient servir à amener de l’eau pour humidifier la
ralement pas son emploi précis ; à une seule reprise, elle est terre ; dans le second, ils permettaient peut-être de trans-
utilisée pour creuser « au pied de la tour de la porte de porter les gachouls253 cités dans le texte et façonnés par les
l’Estrade » : s’agit-il d’excaver la base de la porte elle- cinq manœuvres chargés de les poser254.
même (substrat), ou bien le départ du second fût de la S’il s’agit bien de comportes, les pains ou boules de
porte, généralement dénommé « tour », et souvent construit terre étaient peut-être enveloppés dans des morceaux de
en pierre (infra) ? toile, comme l’a constaté F. Guyonnet à propos d’un mur
Cette citation laisse en effet supposer que les pix (pics en bauge à Perpignan255 : outre l’absorption de l’eau excé-
de carrier ; Bernardi 1995, 456) ont été employés par les dentaire évitant aux gachouls de se tasser avant leur pose,
carriers pour attaquer le substrat rocheux, alors que la ces bouts de tissu jouaient-ils aussi un rôle de séparateur
rabassieyra, (pioche ?) dont l’utilisation est davantage liée dans le récipient, évitant que les pains ne se collent entre
à la terre, était peut-être plus adaptée pour creuser le tap eux, et facilitant par là-même leur mise en œuvre ? Dans ce
(terre), ce dernier étant ensuite évacué au moyen de pelles cas toutefois, il devait être difficile de hisser les comportes
par les manœuvres250. Cependant, rien n’indique que les au sommet de la paret en construction, puisque leur poids

246
L’existence de cet élément est révélée par une indication iconographique du XVIe siècle conservée à la BNF. Cette dernière « nous confirme qu’une
pièce de fer, l’appuie-pied, pouvait être rajoutée au bas du manche, juste au-dessus de la tête de la bêche pour aider à la pénétration de l’outil dans le
sol. Nous ne savons pas si cet élément existait déjà au Moyen Âge » (Reigniez 2002, 139).
247
Ce type de poignée, dit « simple », est recensé par P. Reigniez dans l’iconographie (Ibid., 378).
248
AD Aude, 4E76/CC64, 1408, [f°35 r°2]. « Item a XV d’abril fero donar an G. Trialh, an Guillelm de Verguas de Sant Julia les cals avian prezas a
far las paretz de la porta Mondebo […] a tendut lors pruals e autras causas que avian compradas per far las ditas paretz… ».
249
Prual : de pual ? Grosse dent, clou de toupie ; de pua ? : pointe, dent de peigne, de râteau, fourchon (dent d’une fourche : Robert 1982, 817) ; grosse
dent qui dépasse des autres ; clavette (Alibert 1966, 567).
250
AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « ...pro cavando cum pix et cum rabasseriis pro perquirendo le ferm pede turris porte Strate et pro
amovendo le tap cum palis et amovendo lapides...».
251
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°24 v°5]. « …Petro Coste fabro, pro […] 2 rebasseriis preparandis pro dictis operibus… » ; Ibid., 1361, [f°99 r°7]. « Item
pro reboliendo unam rebaseriam… ». Ce terme a probablement ici le sens de « reforger » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°36 r°1]. « …magistro Guillelmo
Gelati […] pro aptando quatuor bucas rabasseriarum… ». 11 juillet 1363. « magistro Guillelmo Gelati » ; [f°53 r°6]. « Item pro acuendo et aptando
20 bucas rabasserias... » ; [f°53 r°7]. « Item pro aptando et (?) faciendo in igne 4 bucas rabasserias… » ; Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°4 r°5]. « …pro
causando unam rabasseriam ad opus clausurarum… ».
252
La confection du torchis requiert également quelquefois l’emploi de semals (infra).
253
Pains de terre servant à édifier les parements d’un mur en bauge (infra).
254
« …et leur bailler cinq maneouvres le jour que poser les gachouls tant seulement… » (Cayla 1964, 531).
255
En effet, F. Guyonnet, au sujet d’un mur de terre crue d’une maison de Perpignan, précise que les « pains quadrangulaires » étaient utilisés à l’état
plastique, « mais ces pains de terre étaient acheminés aux appareilleurs, aux maçons, dans un morceau de toile. Ce fait est suggéré par la découverte
d’une toile épaisse prisonnière dans un mur en terre. Ces pains étaient peut-être préparés au sol, près du chantier, puis transportés à l’épaule vers les
échafaudages. Les pains étaient alors libérés de cette toile juste avant leur mise en place dans le mur » (Réflexion de l’auteur au cours du débat 6, de
Chazelles, Klein 2003, 413).

57
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

devait être assez important, même pour deux hommes. Un Enfin, la grazala (grasal, grassala, grasala) désigne
seau, avec une anse capable d’être accrochée, était une pour sa part une « auge » ou un « grand baquet » (Mistral
alternative plus pratique, même si sa capacité d’emport 1878, t. 2, 87). À l’instar des seaux (ferrats), ces deux
était moindre… grazalas étaient certainement renforcées par des armatures
Cette même dépense signale que les consuls fourniront métalliques nécessitant le recours à un forgeron. Elles
servaient vraisemblablement de récipients pour le stockage
aux parediers un chaudron256 : était-il également destiné à
des préparations de terre crue (gachouls ? bart ?), un peu
accueillir des gachouls ou a-t-il servi de réserve d’eau
comme nos auges ou gamates actuelles pour le mortier ou
pour que les parediers puissent humidifier la terre si
le ciment266.
nécessaire ?
En 1420, une série de dépenses consacrée à la réfection 5.2.2 - La paret en Lauragais et Toulousain (milieu
d’une paret chaurienne est suivie de quelques achats et XIVe-milieu XVe siècle)
réparations de matériel qui pourrait avoir été utilisé lors de
ces travaux ; Quelques indices incitent à penser que le 5.2.2.1 - La paret, un mur de terre crue
terme « semal » désigne en l’espèce une comporte : si les Prise largement, la définition du terme paret est relati-
achats de deux fonzels257 ne sont pas discriminants, ceux vement vague : « paroi, mur, muraille, escarpement
pour deux guarbas de serches258 et des vims259 en revanche rocheux » (Mistral 1878, t. 2, 481). En latin, « paries »
plaident en faveur de l’utilisation de comportes tressées signifie également « mur [de maison] ou muraille », voire
avec des végétaux260. Le forgeron est par ailleurs rémunéré une « clôture en osier ou une haie » (Gaffiot 2000, 1131).
dans le même temps pour réparer un ferat ou ferrat261, Selon F. Mistral, pour désigner un mur en pisé, et donc
c’est-à-dire un « seau de bois cerclé de fer » (Mistral 1878 ; coffré, ce mot a besoin d’un qualificatif supplémentaire
t. 1, 1122), ce qui lève en l’espèce l’équivoque entre les (paret batudo, paret de terro ; Mistral 1878, t. 2, 481).
deux acceptions possibles du terme semal. Ce dernier peut Dans les textes médiévaux pourtant, paret, paries ou paroit
toutefois avoir le sens de « seau » dans certains cas, comme (ancien français, XVIe-XVIIIe siècles) désigne systémati-
par exemple lors de son utilisation pour éteindre un feu262. quement en Lauragais et Toulousain un mur de terre crue
Toujours dans ce même cadre, les comptes font massive267. De fait il a rarement -pour ne pas dire presque
mention de l’achat de huit paniers263 et de deux grazalas264, jamais- besoin de l’épithète « terre », en l’espèce superflu :
ces dernières étant acquises auprès de Bartholomé Rogier, on peut seulement citer en ce sens un document de
forgeron de son état. Les paniers étaient jusque là Fanjeaux, en 1410268, trois contrats de réparation pour l’en-
mentionnés pour l’évacuation de la terre du fossé, terre ceinte de Montréal en 1475, 1478 et 1481269, et pour celle
vraisemblablement destinée, en tout ou partie, à construire de Mireval-Lauragais le 25 mars 1411 (n. st.)270.
des parets. Ceci expliquerait que l’on retrouve ici le même Parfois, le terme paret est opposé à celui de mur ou de
récipient265, acheminé au sommet de la paret par on ne sait murus, qui révèle pour sa part quasi-sytématiquement une
quel moyen (sur l’épaule, au moyen d’échelles, ou grâce à construction à pierres et chaux en Lauragais et Toulousain
une corde enroulée autour d’une poulie ?). durant l’époque médiévale271. Ainsi, à Castelnaudary, les

256
« …seront tenus de bailler ausdits parediers deux semals et ung chauderon… » (Cayla 1964, 531).
257
« Petite pièce de fond » (Alibert 1966, 406). AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°47 v°6]. « Item pagueguo per […] dos fonzels a las semals…». Il s’agit
certainement de changer le fond des comportes, percé ou défectueux.
258
« Guarba, garba : gerbe, botte » (Alibert 1966, 421). La signification du mot « serche » n’a pu être déterminée mais il s’agit vraisemblablement
d’un végétal, comme l’indique son transport en bottes.
259
« Vim : osier, brin d’osier » (Mistral 1878, t. 2, 1125).
260
AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°47 v°8]. « …per dos guarbas de serches e vims per adobar las semals…».
261
Ibid., [f°47 v°1]. « …an Bertolomieu Rogier, favre, per adobar le ferat per tyrar l’aygua… ».
262
Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°28 r°5]. « Item cum dicta die aliquis possuisset ignem in pale barbacane porte Stimbalorum solvi fecerunt Jacobo
Folquerii, B. Johannis le petit et G. Bole qui traxunt de cava octo semales aque et dictum ignem extinxerunt et amortarunt ne totum palum combuiret ».
263
Ibid., 4E76/CC69, 1420, [f°47 v°6]. « …per 8 paniers…».
264
Ibid., [f°47 v°1]. « …an Bertolomieu Rogier, favre, […] per dos grazalas… ».
265
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°27 r°8], [f°66 v°5].
266
Il arrive d’ailleurs que les grazalas soient employées à cet usage : AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°68 r°2]. « …per una grassala per destempar del
mortier… ».
267
Cependant, pour V. Nègre, « le mot paroi, qui désigne le pisé, apparaît aussi parfois comme synonyme de torchis », assertion qui n’est argumentée
par aucune mention textuelle ou démonstration, et à laquelle nous ne pouvons souscrire à l’heure actuelle (Nègre 2003, 55). On citera également ici
une mention extrêmement intéressante concernant la boucherie du château de Bayeux, en Normandie, que l’on entoure au XVe siècle d’une palissade
de pieux « pour et affin que les chiens ne rompent les parestz qui sont de terre argile » (Le Pogam 2003, 154). L’auteur relève ainsi que « l’hôtel de la
boucherie est très probablement réalisé en colombage avec un remplissage fragile » (Ibid., note 20), mais par rapprochement avec ce que l’on vient
d’exposer, il est vraisemblable qu’il s’agisse d’un mur de terre massive, sans structure porteuse en bois.
268
AD Aude, 3E5205, 1410, [f°7 v°1]. « …usque ad parietem terre dicte domus a parte predictum aquilhonis… ».
269
AC Montréal, 1D2, 1475, [f°119 r°1]. « …tradiderunt ad edifficandi de pariete terre certam partem muralhie ville… » ; [f°118 r°1], 1478 ;
[f°117 v°1], 1481.
270
AD Aude, 3E9444, 1411, [f°93 v°1]. « …apud locum de Miravalle […] et de construendo seu construi faciendo eorum proprie sumptibus et expensis
de parietibus terre quoddam foramen in clausura dicti loci… ».
271
Il peut également désigner un mur de briques cuites, particulièrement en Toulousain.

58
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

coutumes de la ville de 1333, recopiées dans le cartulaire « paret » et « mur de terre massive » dans la région consi-
de 1356, opèrent clairement la distinction entre paret, mur dérée. Plus tard, à Frouzins283, une coutume de 1472
et tortices (cloisons en colombage-torchis)272, et en 1363 on désigne l’enceinte du village sous le nom de « parez »284.
distingue le mur maçonné à pierres et chaux ou « pied de D’ailleurs, Catel, en 1663, relève une différence nette
la paret » (solin) et l’élévation en terre crue, appelée « entre les murs du bourg et ceux de la cité de Toulouse, lors
paret »273. Lorsque ce n’est pas le cas, comme par exemple du siège de Simon de Montfort au début du XIIIe siècle :
à Limoux en 1460, on prend soin de préciser la composi- « Mais la différence qu’il y avoit entre la closture de la ville
tion de la maçonnerie274. En outre, quand les termes sont de Tolose et du bourg c’estoit que les murailles de la ville
employés « à contresens », on indique la nature de la estoient de briques et celles dudit bourg de paroit, ainsi
construction, afin qu’il ne subsiste aucune ambiguïté : le que le dit Guillaume de Puylaurens au Chapitre quinzième
notaire prend ainsi la peine d’écrire « pariete lapidea » de son Histoire des Albigeois, où il escrit que le comte de
pour une partie de l’enceinte, le terme « paret » n’étant Montfort s’estant rendu maistre de Tolose il fist abbatre
habituellement pas employé pour décrire une maçonnerie à muros civitatis et parietes Burgi. Autant en escrit Bernard
pierres et chaux275. Guido en la vie du Pape Innocent III parlant du mesme
Ailleurs, à Saint-Félix-Lauragais (Haute-Garonne), une comte de Montfort, lequel comme il dit fecit dirui muros
charte du 2 juin 1463 énumère les domaines dont les civitatis et parietes Burgi. Ce mot de paries, ou paroy, est
consuls ont connaissance, et fait également clairement la distingué en nostre langage, et commune façon de parler
distinction entre les « murs » et les « parets » en tant que celuy de muraille : car les murailles sont de brique ou terre
cuite, et les parois faictes de terre battue et formée entre
constructions de nature différente276. Ces dispositions se
deux aiz. Lesquelles parois nous appellons communement
retrouvent encore dans divers lieux au XVIe siècle, comme
tapie. Isidore au livre 16 de ses Origines, et au chapitre de
à Bram (Aude)277 ou Auterive (Haute-Garonne)278.
munitionibus faict mention de ces parois, lors qu’il escrit
Le terme « paret » est également fréquemment employé qu’en Espagne, ou en Afrique l’on appelle les parois
dans des sources plus anciennes : en 1205, à Fonsorbès279, faictes de terre battue entre deux aiz formatum, sive forma-
« parietes » a le sens d’« enceinte en terre » dans les rium, parce qu’on jette la terre entre deux aiz. La Glosse
premières coutumes de la ville280. À Renneville, en 1227, qui est au marge d’Isidore remarque qu’auiourd’huy les
lors d’un acte d’acquisition d’une maison, on relève l’exis- Espagnols appellent ces parois, tapias, comme nous
tence d’une « paroit batalhère », c’est-à-dire très probable- faisons encore en Gascogne. Et ces parois de terre, ou
ment là aussi un mur d’enceinte en terre crue281. À tapies, quand elles sont bien battues et espaisses sont aussi
Montbéqui (Tarn-et-Garonne), lors de la construction du fortes que les murailles. Les murailles donques de la ville
fort en 1382, on prévoit de construire des « parietes, valla, estoient de briques, et comme dit Ausone, Tolose estoit
ambana et alia opera deffensabilia » (Forestié 1908, 206). close coctilibus muris, et le Bourg de paroit de terre, ou de
À Montgiscard, dans des minutes notariales, un document tapie » (Catel 1663, 132).
du 21 avril 1386 signale la vente d’une maison confrontant Dans les régions où la pierre à bâtir existe, les
la « paret de la vila »282. Or, en 1355, lors du sac de la ville « parietes » sont davantage sujettes à caution, puisque le
par le Prince de Galles, « la forteresse n’étoit fermée, fors terme pourrait désigner des murs maçonnés à pierres et
(sauf) de murs de terre et de portes de terre couvertes d’es- chaux285 : ainsi, à Montpellier, l’article 10 des additions aux
train », preuve de l’adéquation presque systématique entre coutumes de la ville (13 juin 1205) signale que les consuls

272
[V. Experts]. « Item es us costuma e observancia el dit loc de Castel Nau que cum les cossols sien juges e conoychedors e a lor se apertenga la
conoychensa del pa, […] hieyses e miegas de paretz, murs e tortices,…» ; [17. Murs mitoyens]. « Item que degu ny deguna que obre e hedifique costa
so vezi ne se aja mur o paret o tortis siau propi del vezi…» (Ramière de Fortanier 1939, 304, 309).
273
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°25 r°5]. « …pro quinque sesteriis caucis emptis per Petrum Negues custodi ad opus muri pede parietis de la
Strada… » ; [f°46 v°2]. « …pro portando petram et reble ad opus assetiamenti pede parietis de la Strada… ».
274
Ibid., 4E206/DD1, 29 mai 1460. Permission accordée par Jean Rabot, régent de la viguerie de Limoux, à Arnaud Assalit et Bernard de Maisonneuve,
consuls, de procéder au renforcement de diverses parties de l’enceinte qui menaçaient ruine. « …necessaria reparatione erat et est quoddam frustum
muri constructi ex terra sive tapia… ».
275
Ibid., « …cum pariete lapidea turri novis et cum ipso portale de la Tholosana… ».
276
« Item quod dicti consules habent cognitionem de omnibus aedificiis domorum seu hospitiorum et de omnibus meganis, torticiis, parietibus atque
muris… » (Ramière de Fortanier 1939, 611, art. 2).
277
[53]. [Murs mitoyens]. « Item hordenaran que tout bastiment de paret de terre ou de peire…» (Ibid., 239, 1509. Bram).
278
[18. Murs mitoyens]. « Congnoissent aussi des diférens provenans entre deux ou plusieurs voisins à cause des murailles, tortiz et parois moyens
d’entre eulx ou non moyens, des dommages et intérestz que l’un pourroit porter à l’autre en édifiant » (Ibid., 158. 1548. Auterive).
279
Haute-Garonne, à une quinzaine de kilomètres au sud-ouest de Toulouse.
280
« Dominus Bertrandus d’Orbasan debet in primis claudere castrum de Fonsorbas de pariete, de corseria… » (du Bourg 1872-1873a, 346, 347).
281
AD Haute-Garonne, H Malte Renneville 1, 1227. « … cum omnibus hedificiis et bastimentis ibi existentibus et pertinentibus que est nunc honorem
que fuit Johannis Calveti et paryetem batalheriam… ».
282
AD Haute-Garonne, 3E10154, 1386. [f°317]. « …el solier bas que stequa am la paret de la vila… ».
283
Haute-Garonne, à une douzaine de kilomètres au sud-ouest de Toulouse.
284
« Es de coustuma anticqua que la cossier es liberal a totz les habitans de passar per dessus a tout l’environ de la parez tant de neït comme de journ,
et tant au temps de guerra comme de pax, et deu demourar averta per pouder passar et repassar par tot l’environ… » (Lestrade 1899, 277).
285
Claire-Anne de Chazelles a toutefois pu mettre récemment en évidence des constructions en terre crue massive à Montpellier même, ou dans des
villages à l’ouest de cette ville, comme par exemple à Montagnac (entretien personnel).

59
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

ont la charge de veiller aux « ruinosi parietes »286. Mais Parallèlement, la terre proche des parets (celle tombée
ailleurs, à Carpentras, dans le Vaucluse, une enceinte de en raison de l’érosion des eaux ?) doit être enlevée, et une
tapia est provisoirement édifiée dans l’attente d’une clôture certaine « profondeur » (crevasse ?) située du côté ouest,
définitive à pierres et chaux (Butaud 2001, 461). près du pilier de pierre, fermée ou colmatée (avec de la
Dans d’autres zones géographiques (Auvergne, terre ?), très certainement afin d’éviter l’écroulement de la
construction289. Ces dispositifs d’évacuation des eaux, ainsi
Bourgogne, les sources indiquent la présence de « murs de
que le bouchage d’une quatrième ouverture située dans
terre » : s’agit-il de véritables élévations structurées ou de
l’enceinte jouxtant le couvent des Frères Mineurs devront
simples « levées » ou amoncellements287 ?
être réalisés en pierre290.
Ainsi, en définitive, le terme « paret » désigne à coup
L’absence de drains d’évacuation est en effet très préju-
sûr en Lauragais et Toulousain un mur de terre crue massive,
diciable au mur en terre crue, et le 10 mai 1360 Raymond
et ce quelle que soit sa destination (civile, militaire, voire
Montdebo et Jean Martin sont ainsi obligés d’évacuer l’eau
religieuse) et la technique employée pour l’édifier.
(au moyen de seaux ?) stagnant au pied de l’angle (inté-
5.2.2.2. L’eau et la paret : un danger permanent rieur ?) de l’enceinte, près de la porte de la Baffe291. Dans
certains cas, on est même contraint d’agrandir une brèche
La paret entretient tout au long de son existence une causée par l’eau dans une paret, vraisemblablement pour
relation étroite avec l’eau. Outre les phénomènes de rétrac- faciliter l’écoulement et empêcher qu’elle ne s’effondre
tion et dessiccation, inhérents à toute construction de ce totalement292.
type, et qui peuvent conduire à une fissuration plus ou
moins importante de l’élévation, le mur en terre est menacé Afin d’éviter ces problèmes, les consuls veillent donc
à la fois par les eaux de pluies (érosion de sa surface, voire scrupuleusement au nettoyage régulier des stillicidia ou
pénétration à l’intérieur de sa structure), mais également galveg (également galucho, galochia) : il s’agit de conduits
par les eaux de ruissellement (sape de la base d’une maçonnés à l’intérieur de la base en pierre de la paret, ou
construction mal assise ou mal isolée). de drains aménagés le long des rues de la ville, que ce soit
des accès en pente débouchant vers les portes ou le long
Les textes médiévaux ou modernes ont quelquefois des lices jouxtant la muraille293.
gardé la trace de telles actions, soit que le mal, déjà fait, ait
Malgré ces mesures de prévention, des incidents ou
conduit à la détérioration de l’ouvrage, soit que face à un
accidents se produisent, quelquefois en raison d’un
danger imminent on décide de parer au plus pressé.
mauvais entretien ou d’un manque de précautions : ainsi,
Ainsi, en 1359-1360, en pleine reconstruction des forti- au début de l’année 1392, les eaux tombant de la toiture de
fications chauriennes, les consuls confient à plusieurs la maison du seigneur du Palais donnent au pied de la paret
hommes la réalisation de fossés et de canalisations d’écou- de la ville (enceinte) et entament un travail de sape de la
lement près de l’enceinte et de la porte de Goufferan. Ces structure qui risque alors l’effondrement294.
aménagements ont vraisemblablement pour but de conduire
À Montréal, en 1409, la maison de maître Bernard
les eaux de ruissellement288 hors de l’enceinte afin que sa
Favre, mitoyenne ou proche de l’enceinte, ne possède
base, à pierres et chaux (infra), ne soit pas endommagée. apparemment plus de toiture (ou une couverture défec-
Vers le 5 juin 1360, l’inondation de parets derrière l’ala tueuse), si bien que les eaux de pluies donnent une fois de
menace de les faire effondrer, et les édiles ordonnent alors plus au pied de la paret urbaine et menacent de la faire
le percement de trois ouvertures (dans la base des parets ?) effondrer. Les édiles décident donc de faire réparer et
pour créer des ayguiers (tonitz ?). arranger les tuiles de l’autre muraille, et constatent que le

286
« Viri consiliatores communitatis Montispessulani eligant 2 viros probos et legales, qui duo habeant potestatem ut carrerie, et ruinosi parietes…»
(Chaumet 1973, 32).
287
En Auvergne, en 1422, le nouveau mur d’enceinte en pierre du village d’Herment est par endroits surélevé avec de la terre, car il n’est pas complète-
ment achevé (« et dit que aucuns endroits de lad. muralhe novelle, là où elle estoit basse, lesdits habitans l’ont aussée de terre… » (Fournier 1966,
191 note 3, 192). En Bourgogne, au Mont-Saint-Vincent, entre 1370 et 1420, « les charges qui pesèrent sur la ville furent telles qu’elles empêchèrent
les habitants de parfaire l’enceinte urbaine en y employant les matériaux adéquats ains l’acomplirent de matiere de terre qui tous les jours se desroiche
et demollit » (Schnerb 1999, 350, 351).
288
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 r°3]. « ...qui fecerunt valla stillicidia juxta clausuris ne diruerentur propter aquas... » ; [f°11 r°4].
« ...fecerunt vallos et stillicidia juxta clausuris prope portam de Got Feran ne dampnificareantur propter aquas...».
289
Ibid., 1360-1361, [f°75 r°2]. « Item dicti consules cum inundatione aquarum parietes qui sunt de retro alam essent in periculo ruinandi ordinaverunt
quod ibi fierent tria foramina pro faciendo tonitz et quod terra que erat juxta parietes removeretur et quadam profunditas que erat a parte circii juxta
pilarum lapidum clauderetur... ».
290
Ibid., [f°75 r°3]. « …ordinaverunt dicta foramina in dicta pariete facta et etiam alia foramina que simili tertio in pariete Fratrum Minorum fuerunt
facta cum lapidibus clauderentur... ».
291
Ibid., 10 mai 1360, [f°62 r°2]. « …R. Mondebo e an Johan Marti que avian gitada l’ayga que era al pe del angle dejos le gaytil dejos la porta de
la Baffa car l’ayga fazia mal a la paret… ».
292
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°83 v°3]. « …qui steterunt ad perforandum parietem veterem de la Strada unde exiret aqua… ». Faut-il alors supposer
que cette paret, peut-être d’une conception ancienne (veterem), et comme ont pu le montrer les exemples du Thil et d’Esparsac, ne comportait pas de
solin ?
293
Ibid., [f°134 v°2]. « …ad curandum vallum et ad ponendum terram juxta parietem retro dominum Poncium Gayraudi ne aqua prejudicaret
parieti… » ; 1364, [f°190 r°3]. « ...pro curando galochia portus Bordarum qui erant engorguatis occasione undationis aquarum… ».
294
AD Aude, 4E76/CC58, 1392, [f°52 r°3]. « ...per adobar l’enban que es detras l’ostal de mossenhor Bertran del Palaytz que totas las ayguas que
cazian del sian hostal danan al pe de la paret de la vila e estava en gran perilh de perdre… ».

60
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

chemin de ronde ayant toujours été abrité, il appartient à enceintes). C’est également le cas à Toulouse, en 1355, où
Bernard Favre de faire recouvrir à ses dépens toute cette un maçon est obligé de construire un contrefort (en
surface, la ville se chargeant cependant de lui fournir si pierre ?) contre une paret en cours de démolition fendue
nécessaire le bois de charpente et les tuiles295. par les eaux301.
Cinquante ans plus tard, le 25 janvier 1459, Guillaume À Limoux, en 1460, une partie du mur d’enceinte de la
Astat et Raymond Pastre, (délégués aux œuvres de la ville ville est détruite ou grandement endommagée sur une
par les consuls de Montréal) signalent qu’une paret296 longueur de douze cannes (env. 21 m), sa base, totalement
située entre les propriétés de Guillaume-Jacques Rodier et attaquée par les eaux de pluie, ayant versé dans la rue302. Le
des héritiers de maître Richard Anglais est tombée par la texte autorise alors la reconstruction, mais prévoit qu’il
faute de ces derniers, car l’eau provenant de leur ruisseau a faudra bâtir le nouveau tronçon avec une base à pierres et
entamé et complètement pourri la structure297. chaux sur laquelle on édifiera un mur de « tapie neuve ».
Le phénomène de ruissellement touche en effet égale- En effet, tout autre type de réparation ne tiendra pas
ment les murs mitoyens entre propriétaires privés (murs de puisque la base de l’ancien mur, entièrement en terre, est
maisons ou de clôtures de cours ou de jardins)298. À complètement détruite et moisie en raison de l’humidité
Castelnaudary, les registres de police consulaire consignent des eaux303.
deux affaires à ce sujet : la première, du 24 juillet 1411, Ce document, unique, prouve ainsi qu’à la fin du
concerne deux voisins, Guillaume La Bayse affirmant que Moyen Âge, et bien que l’on soit tout à fait conscient des
les eaux provenant de chez Pierre Vidal détruisent sa méfaits de l’eau sur les murs de terre, on continue quel-
paret299. La seconde, du 1er août 1413, prévoit dans un cas quefois de bâtir ces derniers sans aucune base maçonnée,
presque similaire plusieurs dispositions : une certaine directement en prise avec le substrat (rocheux ou argileux).
Gimèle devra réparer les gouttières situées derrière sa
Cette technique de construction peut paraître absurde, a
maison de manière à ce que les eaux ne puissent détruire sa
fortiori pour un mur de fortification, mais a vraisemblable-
paret mitoyenne avec Raymond Gayraut. Ce dernier devra
par ailleurs édifier un canal sur la paret le séparant de ment été retenue en raison de sa plus grande rapidité de
Raymond de Villeneuve, cet homme étant pour sa part mise en œuvre. D’ailleurs, les vestiges d’Esparsac et du
chargé de bâtir un talus à la base du mur mitoyen avec Thil ont prouvé qu’elle était effectivement utilisée (supra).
demoiselle Gimèle, afin que l’eau ne puisse stagner. Il
devra enfin nettoyer son évier (ou un bassin ?) pour On ne peut de fait pas exclure que l’absence de base
permettre à l’eau de s’écouler normalement300. maçonnée pour les murs d’enceinte en terre crue ait été
Les menaces représentées par les eaux sont comme on monnaie courante à Limoux ou ailleurs, même si elle tenait
le voit bien réelles pour les parets (murs de maison ou de la gageure. C’est peut-être en partie pour cette raison,

295
AC Montréal, 1D1, 1409, [f°31 r°1]. « …e que hom cobris la cara del ostal de mastre senhor Bernat Favre car la paret de la vialha fora gardada
que l’ayga que dera al pe la fera cazer el cosel volt que hom prenges tota l’ayga que cazes capval la cava, engal le teule de l’autra muralha e que
l’aley ha estes tot jorn cuberta e mastre senhor Bernat Favre deu recobrir a tot son despes la dyta hobra an tant cant durara aquo sieu mays si res y
falia fusta ho teule la vialha ho baylara…».
296
Il s’agit vraisemblablement d’un mur mitoyen et non de l’enceinte.
297
AC Montréal, 1D2, 1459, [f°20 v°1]. « A XXV de genier Guillermus Astati e Ramon Pastre sobre pausatz de las obras per les senhors cossols desus
nominatz per vertut del sagrament que an prestat als ditz cossols reportan que la paret que es tombada entre G. Jacme Rodier e les heretiers de mastre
Richart Engles es tombada per colpa dels ditz heretiers per so car l’ayga es venguda del rec dels ditz heretiers e ha poyrida ladita paret aysso ho
reportan ».
298
Ce litige existe par exemple à Barcelone, au XIIIe siècle : en effet, « le problème des fuites d’eau était une préoccupation constante et pleinement
justifiée par le danger issu de la pénétration de l’humidité dans les parois en pisé, majoritaires dans la ville. Ainsi est expliquée la dispute d’Elisenda
de Banyères et de Berenguer Desvilar à cause des dégâts produits dans le mur mitoyen par le mauvais emplacement d’une conduite d’eau » (Battle
1985, 44 ; 52, note 39 : « dictus Berengarius injuste habebat stillicidium in domibus suis de quadam tegulata sita super parietem comunem… »). Même
lorsque le mur n’est pas en terre, les conflits de mitoyenneté relatifs à l’évacuation de l’eau sont parfois longs, comme à Caen, en 1452-1453, où deux
bourgeois mettent 7 mois pour s’entendre sur le sujet, après trois passages devant le tabellion (Angers 2006, 314).
299
AD Aude, 4E76/FF20, 1411, [f°X r°4]. « …Johan Redorta, G. Teysere, R. La Posonia de mandament dels senhors cossols e de volontat de G. La
Baysa anero vezer un debat de una paret que es entre la Baysa en Peyre Vidal que le dit G. la Baysa ditz que las ayguas den P. Vidal li destrusiso la
paret… ». Ces litiges sont fréquents au Moyen Âge, mais avec les mesures prises par les villes à cette époque, « les délicats problèmes de cohabitation
et de voisinage, avec les querelles qu’engendrent inévitablement la choiste des eaux de pluie ou usées et la mauvaise disposition des gouttières, trou-
vent quelquefois un début de solution » (Leguay 1984, 83).
300
Ibid., 1413, [f°X r°1]. « …que la dita Gimela aya a reparar las gutieyras detras son hostal asi que l’aygua no se pusqua fondre de costa la paret e
que R. Gayraut aya a gitar una canal que dona sus la paret migieyra quas entre les dits R. de Vilanova e R. Gayraut et que le dit R. de Vilanova aya
a far talus de costa la paret detras l’ostal de dona Gimela asi que l’aygua no se pusqua a demorar e que tengua l’ayguieyra qurada asi que l’aygua
pusqua be passar ».
301
AC Toulouse, EE32, mars 1355, [f°40 r°3]. « Dem a pres fait an Ramon de Coss massonier per far 1 yssaillier tras l’ostal del tessaurier a S. Estefe
la on fom far tota la paret e deffar car era estada fanduda per las ayguas… ».
302
AD Aude, 4E206, 29 mai 1460. « …est quoddam frustum muri constructi ex terra sive tapia scituatum sive confrontatum loco dicto ala Tholosana
confrontatur cum pariete lapidea turri novis et cum ipso portale de la Tholosana ? in longitudine duodecim canas vel circa totum diruptum
semiffractum et penitus eius caussol sive pes consumptum et in via cadendi in terram et hoc propter aquas pluviales et putrefactionem… ».
303
Ibid., « …et quod fieret unum caussolum lapideum cum calse et arena et quod supra illud fieret murus de tapia nova et alterum non possi reparari
quia reparatio si qui fieret facto sit in ruynam deveniret cum caussole et pes dicti muri cum sit totum de terra que est jam dirupta et mossada taliter
quod nihi valet propter putreffactionem et propter humiditatem aquarum ». Mossada proviendrait de « mossar » (labourer avec la charrue ; Alibert
1966, 502) indiquant peut-être que la terre de la paret est retournée comme si elle avait été labourée (dans le sens de « non compacte » ?).

61
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

mais aussi par manque d’entretien, que les murailles de la Globalement, l’étude des sources montre qu’il existe à
ville sont dans un état si pitoyable dans la première moitié Castelnaudary, Toulouse, ou Albi, une technique majeure
du XVIIIe siècle304. de construction des enceintes de terre massive faisant inter-
Enfin, une mention chaurienne obscure de 1359-1360 venir trois éléments essentiels : la terre, des végétaux, et
précise que Pierre Saurin, charpentier, fournit un bois (une enfin un coffrage. On désignera cette méthode sous le
poutre ?) pour « valhonar » une paret située devant le terme neutre de « paret coffrée ».
couvent des Frères Mineurs305 : le seul vocable proche 5.2.2.3.1 - La terre employée dans la « paret coffrée »
(« valouna » : fossoyer ; Mistral 1878, t. 2, 1082) est assez
peu éclairant… Aucun document ne permet à ce jour de connaître
précisément la nature de la terre employée dans les
Ainsi, l’eau, en quantités plus ou moins importantes (à enceintes de terre coffrée.
l’état liquide ou sous forme de terre humide), entre dans la
composition des constructions en terre massive (bauge, Les sources se contentent d’employer, très rarement
bauge coffrée, variante du pisé), mais une fois la réalisation d’ailleurs, le terme vague de tera ou terra sous-entendant
achevée, on se défie en permanence de son action destruc- qu’il s’agit d’une terre brute, sans préparation spécifique.
trice comme élément de sape de la base et aussi, dans une Cependant il faut se garder, au simple examen de ces docu-
bien moindre mesure, de son travail d’érosion de surface. ments, de conclure trop rapidement en l’espèce306. Les
textes emploient en effet ce mot comme un élément
5.2.2.3 - Les « parets coffrées » : principale technique « matière » chargé de définir la composition d’une tour,
de construction des enceintes urbaines d’une échauguette307, ou d’une muraille, la plupart du
pendant la guerrre de Cent Ans en Lauragais et temps tombée dans le fossé308, et non comme un vocable
Toulousain ? technique précis (comme celui de « bart », infra), recou-
La « paret » désigne donc systématiquement au Moyen vrant à lui seul une acception plus ou moins bien déter-
Âge un mur de terre crue massive en Lauragais et minée.
Toulousain. Il était mis en œuvre à cette époque grâce à Grâce à une dépense chaurienne des environs du
divers procédés (bauge, bauge coffrée ? variante du pisé ?), 15 juin 1391, on sait seulement que des femmes (onze,
en fonction des us et coutumes locales, de la géologie, du dames et demoiselles) sont chargées de charrier la terre
climat, et selon sa destination (bâtiment religieux, civil, ou destinée à la paret309 mais cette tâche a pu également être
militaire). dévolue à des hommes, ou peut-être à des adolescents.
Néanmoins, en l’absence d’indices plus précis, on Dans ce texte, le terme « taula » se confond avec celui de
partira du postulat selon lequel il existait peu ou prou la « banchée », c’est-à-dire « terre comprise entre deux
même technique pour bâtir des murailles de terre coffrée banches » et n’a pas son sens traditionnel de coffrage de
dans l’ensemble du Lauragais et du Toulousain, et ce afin bois, qu’on lui connaît généralement (infra),
de compléter par d’autres sources textuelles les données La terre employée, comme d’ailleurs pour le torchis,
relevées à Castelnaudary pour la guerre de Cent Ans : on provenait certainement du creusement ou du curage du
utilisera donc également ici les données essentielles du fossé (supra). Dans ce cas, elle était gratuite à l’acquisition,
compte consulaire toulousain de 1354-1355, et dans une mais vraisemblablement pas au transport, encore que les
moindre mesure, celles fournies par des chartes de création registres chauriens consignent rarement des rémunérations
de forts dans le Toulousain, ainsi que quelques rares de manœuvres en ce sens (corvées n’ayant pas laissé de
contrats de réparations ou prix-faits. traces dans la documentation comptable ?).

304
AD Aude, 4E206/DD3. Enceinte de la ville : délibérations consulaires sur des réparations à effectuer aux portes de la ville et sur divers points de
l’enceinte, 25 avril 1699. « …les dites murailhes se sont tellement ruinées par le déffaut des réparations par les pluyes et par le mauvais temps qu’elles
sont tombées tout à fait en plus de dix endroits de la grande et petite ville en sorte qu’il y a des brèches sy considérables qu’on peut entrer dans la ville
à pied et à cheval par la plus part des dites brèches et en dernier lieu pendant la sepmaine sainte la muraille du costé de la porte de la Gouttine se
roulla et fist une brèche de plus de cinquante pas et comme touttes les murailles sont de terre et qu’il n’y a quasy point quy ne soit endommagée il est
d’une nécessité absolue non seullemant de réparer promptemant les dites brèches mais mesme de rebâtir tout ce quy reste… ».
Ibid., 4E206/DD4. Enceinte de la ville : délibérations, devis et toisés sur les réparations à faire aux murs de la grande et de la petite ville, 25 mars 1741.
« Les murailles quy forment l’enceinte de la ditte ville sont baties pour la plus grande partie de terre appelée tapie ce quy fait que les pluyes et les
neiges y font des sillons et les font crouler insensiblement, lesquelles murailles il convient de faire démolir et reconstruire incessament à pierre chaux
et sable… ».
305
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°25 v°4]. « ...eidem pro uno fuste ab ipso recepto pro valhonando illum parietem que erat in clausuris ante domum
Fratrum Minorum... ».
306
Par exemple, en Espagne, le tabiya, une variante du pisé, utilise des terres dont la granulométrie semble étudiée avec soin (Bazzana 1992, 79).
307
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°124 v°4]. « …pro faciendo unam turrim de terra retro hospicium B. Raudi… » ; AC Toulouse, EE32, juin 1355,
[f°94 v°1]. « …per le pres fait per far la tor de tera que es a pres la paret nova… » ; Ibid., CC2334, pièce n° 60, 10 juillet 1460. « …a causa de desro-
quar una torrella de terra vielha la qualla se tenet am la muralha et tombet dedins lo vallatz et portatz la terra de la dita torrella de fora dels vallatz
de mandament nostre… ».
308
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°12 r°2]. « …removerunt et cavaverunt illam terram parietis diruti in porta Narbonesio ut ibidem posset apponi
palum…» ; [f°65 v°9]. « …a 14 homes que avian gitada la terra de la paret del dit valat… » ; Ibid., 4E76/CC69, 1419, [f°45 v°3]. « …a cascu per
tyrar la tera per hun jorn de la dita paret… ».
309
Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°32 r°7]. « Le jorn desus fero paguar a la molher den R. Guayraut e a la molher den Jacmes Catula e a dona Maria
Dermel e a dona Guilhalma de Cordas e a Dona Bona e a Dona Condors que esta a l’ostal den senhor Dermals e a dona Bernarda que esta a l’ostal
den Estene de Tauliat e la molher den Johan Pueg e a dona Jonana Patisiera e a la sirventa den senhor Robert e a la molher del panayrier que care-
gavan de la tera per far las taulas de la paret desus ditas… ».

62
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

À l’opposé, il arrive exceptionnellement (une seule tées aux maisons en démolition ; on réalisait, de cette
mention) que la terre soit prise devant une maison, et donc façon, une sorte de boue armée… colombage grossier,
achetée à son propriétaire pour une somme non négli- suffisant cependant à empêcher des larrons d’entrer dans
geable, qui inclut peut-être la livraison. Les raisons de ce l’enceinte de la ville (Castelnaudary, période des troubles
choix sont difficiles à comprendre : manque de matériaux civils et religieux) » (Cayla 1964, 530). On citera enfin,
à un moment donné du chantier ? Particularité de la terre pour les guerres de Religion, une mention laissant entre-
achetée pour une opération bien spécifique310 ? voir, pour le village de Brugairolles (Bas-Razès), l’exis-
Dans l’état actuel des connaissances, seule une étude tence de bois incorporés dans la terre de l’enceinte314.
de vestiges encore conservés, si tant est qu’ils puissent être Si ce procédé a véritablement été employé pour la
assimilés à la technique de la « paret coffrée », permettrait paret coffrée, ces solives (ou d’autres éléments en bois),
de connaître avec précision la composition de la terre ont pu être placées au niveau des jonctions entre les
utilisée : on renverra ici aux observations réalisées sur les banches ou dans les angles de courtines, points faibles de
quatre vestiges d’enceinte présentés (supra), car il est la structure315. Cependant, cette mention isolée, au surplus
probable que la terre employée dans les parets coffrées assez équivoque, ne permet pas d’apporter à l’heure
n’était guère différente : dans ce cas, la matière première actuelle des éléments précis sur la généralisation de cette
provenait souvent d’autres bâtiments ou de zones de dépo- technique.
toirs, eu égard aux grandes quantités de déchets de l’acti-
vité humaine contenus dans ces structures. 5.2.2.3.2 - Les végétaux : la bruyère (broc, brog, broch,
Toujours à Castelnaudary, en 1361, deux charpentiers brug, bruc), le genêt (ginosta, ginesta)
sont rémunérés pour scier les bois qui « sortent » ou « Bruyère : petit arbrisseau des landes (éricacées) à
« passent à travers » les parets311. tige rameuse, à petites fleurs rouge violacé » (Robert 1982,
En prenant cette mention « au pied de la lettre », des 224).
poutres étaient-elles incorporées dans la paret en construc- « Genêt : arbrisseau épineux ou non, à fleurs jaunes
tion pour servir d’armature ? Si tel était le cas, il faudrait d’or odorantes » (Robert 1982, 859).
peut-être la rapprocher des nombreuses dépenses mention-
nant des achats de fusta pour l’enceinte312. Si une partie de La bruyère (en occitan : broc, brog, broch, brug, bruc),
ces bois a été utilisée pour les hourds, coursières, et autres est très fréquemment citée dans les comptes chauriens
échauguettes, un certain nombre aurait-il pu terminer à (mais aussi à Albi et Toulouse), comme éléments entrant
l’intérieur même de la paret, comme élément de renfort dans la construction de la paret coffrée, et ce dès 1356316.
structurel ?313. Ce Registre des aides et subsides extraordinaires tendrait à
prouver que des murailles (celles du château ?) ont été
D’ailleurs A. Klein signale, pour la technique du pisé
reconstruites dans les quatre mois ayant suivi l’attaque du
par couches filantes, que dans quelques cas « les murs
Prince de Galles, peut-être durant l’hiver 1355-1356, mais
peuvent être consolidés avec des branches ou des planches
plus sûrement dès le début du printemps 1356, afin d’éviter
placées longitudinalement au cœur de la paroi et jouant le
au maximum les intempéries et les périodes de gel, peu
rôle d’armatures, de chaînages horizontaux (observation
propices à ce genre de constructions. A contrario, on ne
effectuée sur quelques murs très érodés) » (Klein 2003,
relève aucune dépense en 1359-1360 et 1360-1361 (soit les
420). Cette observation rejoindrait celle de P. Cayla qui
deux premières années des comptes conservés), pour la
décrit les parets de tapie comme le résultat « d’éléments
taille, l’achat, ou le transport de la bruyère.
solides réunis les uns aux autres par de la terre argileuse
qui se sèchera peu à peu ; dans les environs de Durant cette période en effet, les travaux s’attachent à
Castelnaudary, ce mode de construction est fréquent : les détruire les parets menaçant ruine ou à évacuer la terre de
minutiers font souvent allusion aux tapies ; cependant, les celles déjà effondrées. Il serait pourtant très étonnant
murailles des villes n’étaient pas construites autrement, qu’aucun pan d’enceinte n’ait été édifié durant ces deux
sauf que l’on incorporait à cet ouvrage des poutres emprun- années. Il faudrait alors imaginer, -et c’est probable puisque

310
Ibid., 1391, [f°33 v°8]. « …Ana Mengart guarilha per una cantitat de tera preza davant son hostal per far las taulas de la paret desus ditas hotra
aquela que las femnas desus ditas avian portada costet 12 s. 8 d. valo. 1 l. 2 s. 8 d. ». Il se peut que cette terre provienne d’un surplus destiné à l’en-
tretien de la rue : en effet, les coutumes de Castelnaudary prévoient que « chacun doit réparer la portion de rue qui se trouve devant sa maison ou sa
possession sur simple monition des gardes ou de l’envoyé des consuls, celui qui fait un fossé près de la rue doit mettre la moitié de la terre qu’il sortira
dans la rue pour qu’elle soit meilleure et ne fasse pas un creux et résiste mieux à la pluie » (Marandet 2001, 217).
311
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°88 r°5]. « Item P. Folqui, Geraldo Vitali fusteriis pro ressegando fustes qui apperebant in parietibus... ». Le verbe
utilisé, « appereo », n’existe pas en latin classique, ni, à notre connaissance en latin médiéval : il faut peut-être voir dans ce terme l’application du
préfixe -ap au verbe « pereo » dont une des acceptions est « passer par ou à travers ; sortir de » (Quicherat, Daveluy s. d., 993).
312
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°13 r°1]. « Item aliis quatuor hominibus qui portaverunt fustam in clausuris ».
313
Si l’on prend la dépense au sens large, les charpentiers ont-ils été rémunérés pour couper des éléments de hourds ou de coursières ?
314
« Les murailles faites de terre grasse et de bois entremêlés semblaient si vulnérables… » (Prouzet 1975, 88 ; cité dans Baudreu 2002, 61).
315
En Espagne, A. Bazzana a également pu mettre en évidence l’utilisation de pièces de bois « en renfort interne des maçonneries, comme à Bufilla, où
s’amorce un chaînage » (Bazzana 1992, 84). Par ailleurs, pour la technique traditionnelle du pisé, il existe des coffrages d’angle spécifiques, pour
certains variables (destinés à des angles supérieures à 90°), dotés de « systèmes de charnières ou de paumelles métalliques qui permettent de faire varier
l’angle du coffrage. Le système est délicat et pose toujours des problèmes d’ajustage des coffrages » (CRAterre 1995, 205). De tels systèmes existaient-
ils à l’époque médiévale dans le Sud-Ouest de la France ?
316
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°10 v°8]. « Solvit de jornali ad talhandum brucum pro parietibus ».

63
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

les comptes ne reflètent pas toutes les dépenses- que ces Villeneuve-la-Comptal) et une ferme dénommée « Las
transports ne sont pas consignés dans ces documents Brugues », à 7,5 km à l’est de Castelnaudary (au sud de la
(corvées ?) ou que des végétaux ont pu être récupérés dans commune de Saint-Papoul).
un premier temps sur des enceintes en cours de démolition. Toujours est-il que les murailles de Castelnaudary ont
C’est seulement à partir de 1361-1362 que la bruyère dû engloutir des volumes assez considérables de végétal.
apparaît de nouveau dans les registres. Elle provient cette Ainsi, même s’il n’est pas rare, il faut se demander si cette
année-là de deux endroits : du bois de Calvayrac317, égale- bruyère, qui pousse à l’état sauvage, ne bénéficiait pas
ment dénommé bois de Jean de Calvayrac318 près duquel il d’une gestion stricte règlementant sa taille, et ce afin de la
existe, à environ 1 km au sud-est, le toponyme « Clot de préserver pour la construction.
Brugues longues »319 (fig. 3)… Ce végétal provient égale- À Toulouse, en 1354-1355, le seul compte municipal
ment du bois du seigneur du Palais320, personnage sur lequel conservé mentionne également ce végétal pour la confec-
nous avons peu d’informations321, seulement cité à une seule tion des parets, mais ne cite jamais sa provenance326. En
reprise dans ce compte. Faute de données suffisantes, il est 1484, à Riscle (Gers), les consuls font transporter deux
donc impossible de localiser le bois en question. charrettes de bruyère destinées à une tapia327. Enfin, à Albi,
Dans le compte suivant, en 1363, seul le bois de on relève, parmi tant d’autres, un achat de 28 fagots de
Rosilhac322 apparaît comme lieu de provenance exclusif de bruyère en 1381-1382328, signe que l’utilisation de ce
la bruyère323 (fig. 3). végétal dans la construction était généralisée en Lauragais,
Le transport se fait par animal324 (âne ou mulet ?), et Toulousain, et Albigeois.
contrairement aux années 1359-1361, les mentions de L’emploi du genêt dans le mur de terre massive serait
charroi du végétal sont très nombreuses en 1363-1364325. quant à lui avéré par un unique document, non daté (fin
Le changement de provenance d’une année sur l’autre XIVe siècle d’après la graphie) : cette transaction entre les
correspond-il à une pénurie du bois de Calvayrac ayant consuls et le seigneur de Caignac329 pour la construction
nécessité un approvisionnement au bois de Rosilhac, par d’un fort villageois précise en effet que le commandeur330
ailleurs plus près de la ville ? Difficile de le savoir, d’autant sera chargé de fournir « la bruyère et les genêts, ainsi que
que les registres ne mentionneront plus par la suite l’ori- des arbres de ses terres personnelles pour les besoins de
gine de la bruyère, qui pousse sur des terrains majoritaire- l’édification du fort »331. L’apparition dans le texte du genêt
ment acides, dénommés brugailh en Languedoc (Cayla immédiatement après la bruyère sous-entendrait ainsi
1964, 106). L’examen des cartes topographiques indique fortement qu’elle avait le même usage dans la construction,
au moins deux autres toponymes attestant la présence mais à l’heure actuelle aucun mur encore en élévation
(actuelle ou passée) de bruyères, dans un rayon inférieur à employant ce végétal n’a pu être découvert332.
10 km autour de la ville (fig. 3) : le lieu-dit « La Bruyère Les branches les plus fines des pieds de bruyère, une
Noire », à environ 6 km au sud-ouest, (commune de fois taillées, sont disposées sous forme de lits horizontaux

317
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°92 r°8]. « …fuerunt conducti ad scindendum brugum in nemore de Calvayrac… ».
318
Ibid., [f°98 r°1]. « …pro quatuor sarcinatis de broc quos portare fecerat de nemore Johannis de Calvayraco ad parietes retro Guillelmum Olricii… ».
319
Calvayrac est actuellement une ferme de la commune de Cazalrenoux, village située à 13,5 km au sud de Castelnaudary. Cependant, selon M.-C.
Marandet, une famille de Calvayrac possède des terres dans les proches environs de Castelnaudary, et il se pourrait donc que le bois en question ait été
situé à un endroit différent (entretien personnel).
320
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°117 v°3]. « …112 trossas de broc de nemore domini de Palacio… ».
321
Il possède entre autres un quart de la seigneurie de Montesquieu-Lauragais (information aimablement communiquée par M.-C. Marandet).
322
Rosilhac, aujourd’hui Rouzilhac, est une ferme de la commune d’Issel située à 6 km au nord-est de Castelnaudary.
323
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°31 v°5]. « ...pro portando unam sarcinata brochi de nemore de Rosilhaco... ».
324
Ibid., [f°61 v°4]. « …pro portando cum animali suo tres sarcinatis brochi de nemore de Rosilhaco… ».
325
Lors de grands travaux, les consuls emploient souvent des particuliers possédant des bêtes. Ainsi, à Saint-Flour, « que ce soit en 1388 ou en 1397,
le poste transport varie en fonction de l’opération en cours. Il est particulièrement élevé chaque fois que des travaux sont effectués aux murailles car il
faut charrier de grosses quantités de pierres, qui ne sont pas nécessairement mentionnées par le comptable dans la mesure où elles n’occasionnent pas
de dépenses. Tous ces charrois sont effectués par des particuliers que les consuls embauchent avec leurs bestias. […] Ces bêtes devaient être des bœufs,
mais plus souvent des ânes et des mulets, car on voit bon nombre de transporteurs venir sur les chantiers avec une seule bête, quelquefois deux ou
trois » (Rigaudière 1982, t. 2, 713).
326
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°50 r°1]. « Comprem den Ramon Bastart de Cunhals 4 dotzenas de saumadas de broc quas deu aportar a las
obras a las paretz a Sant Estefe… ». La bruyère provenait-elle de l’endroit où réside la personne chargée de l’amener, c’est-à-dire Cugnaux, village
situé à 10 km au sud-ouest de Toulouse ? ; 26 mars 1354, [f°52 r°1]. « Comprem den P. Gaieras fornier de Sant Estefe 4 dotzenas de saumadas de broc
a obs de las paretz… ».
327
« Item, fen carreyar dus cars de brana per mete en la tapia deu forat de la gleysa, a dus boes de besiau » (Parfouru, Carsalade du Pont 1886, 313).
« Brana, branda : brande, broussaille, bruyère » (Lévy 1909, 53). Cependant, dans ce cas précis, rien n’indique que l’enceinte a été bâtie avec des
coffrages.
328
Vidal 1911, 48, [f°80 v°]. 825. « A P. Corbieyra per 28 faysses de bruguiera ad obs de far la dicha paret…».
329
Haute-Garonne. Village situé à 20 km à vol d’oiseau à l’ouest de Castelnaudary.
330
Caignac dépendait de l’ordre de Malte.
331
Là encore, on ne sait si c’est la technique des « parets coffrées » qui a été employée.
332
AD Haute-Garonne, H Malte, liasse 20, n° 1. Caignac. « 6. Item que le dit comandador lor dara tot lo broc e ginosta e mays aybres de las terras
personals que seran necessarias per far lo dit fort franc et quiti. ». Ailleurs, en Seine-Maritime, le genêt a également servi « comme couverture provi-
soire pendant l’hiver sur les constructions inachevées » (Lardin 1999, 139) tout comme en Bretagne où « la cathédrale de Tréguier fut provisoirement
couverte de genêts au cours des différentes étapes de sa construction » (Leguay 1985, 60).

64
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

relativement réguliers et très fins, espacés de 0,15 à 0,20 m qu’assez tard, en 1391. Pourquoi ces éléments indispen-
environ. Leur fonction est de permettre au mur de sables à la confection de la paret coffrée ne se retrouvent
« respirer » tout en stoppant un retrait et une dessiccation pas plus tôt dans les dépenses ?
trop rapide de la terre : cette dernière pourrait en effet Si l’on écarte d’emblée un changement dans la tech-
conduire à une fissuration de l’ouvrage, alors démuni nique de mise en œuvre, on peut estimer que les parets
contre les eaux d’infiltration, entraînant une ruine totale ou étant la plupart du temps concédées à prix-fait, les scribes
partielle à plus ou moins brève échéance. Par ailleurs, la ne ressentaient pas toujours la nécessité de consigner cet
bruyère et le genêt présentent l’atout majeur, qui a certai- élément souvent apporté par le titulaire du contrat. Par
nement conditionné leur choix pour la construction, d’être ailleurs, le détail des prescriptions techniques était certai-
pratiquement imputrescibles. nement contenu dans l’acte notarié.
Pour la technique des parets coffrées, la bruyère aurait 5.2.2.3.3.2 - Dimension et nature des planches
peut-être permis une édification plus rapide du mur, puis-
qu’à l’inverse de l’ouvrage en pisé « traditionnel », que Les comptes chauriens sont très avares sur le sujet : une
l’on doit laisser reposer afin d’évacuer l’eau résiduelle, la seule mention d’achats de planches (postz) explicitement
reliée à la confection de taulas a été relevée sur l’ensemble
bruyère agirait ici comme un « drain » permettant une
des 32 registres ! Il s’agit d’un transport du 25 avril 1408,
évaporation progressive de l’eau tout en empêchant la
durant lequel douze planches de sapin de quatre cannes de
structure de se lézarder. Ce constat rejoindrait ainsi les
long (7,12 m environ selon la canne de Carcassonne) sont
observations de A. Klein réalisées sur des fermes des XVIIe
achetées par B. Laguarde à Toulouse, à la demande des
et XVIIIe siècles utilisant la technique du « type 1 » (pisé
consuls. Ces planches ont en effet été retenues « pour faire
par couches filantes de 5 à 15 cm de hauteur)333. Ainsi, les parets de la porte Montdebo, lesquelles devaient être de
« parfois des lits de brindilles (sarments de vignes et taula », laissant supposer que ces éléments sont destinés à
surtout bruyères) de 0,5 à 15 mm de diamètre sont disposés fabriquer les coffrages336.
entre les couches de terre (transversalement ou longitudi-
nalement par rapport au mur). Ces tapis de brindilles ont Ainsi, en imaginant une largeur moyenne de planche de
pour intérêt de renforcer la cohésion du mur et contrer les 0,30 m337, et en supposant que le lot était divisé en trois
phénomènes de retrait de la terre crue lors de la dessicca- pour faire quatre taulas338, soit deux coffrages complets, on
obtiendrait une hauteur de banche de 0,90 m, dimension
tion » (Klein 2003, 419, 420).
proche des hauteurs de tabiyas relevées en Espagne
5.2.2.3.3 - Les taulas : des banches pour le coffrage (Bazzana 1992, 81). Mais il ne s’agit bien sûr là que de
conjectures…
5.2.2.3.3.1 - Essai de définition
Le terme occitan « taula », peut désigner une « table,
une planche ou un ais »334. Dans les textes médiévaux rela-
tifs aux constructions en terre crue, ce mot est employé
pour décrire une banche de bois formée de plusieurs
planches (ou ais), peut-être munie dans quelques cas de
poignées de transport (fig. 32)335. Cet assemblage, mis en
position horizontale sur deux tréteaux, avait certainement
une forme très proche de la table médiévale, d’où proba-
blement le nom de « taula ». En Espagne, on appelait
d’ailleurs tablas mayores (grandes tables) les banches
destinées au pisé ou au tabiya (Bazzana 1992, 80).
Cependant, en Nouvelle Castille, le terme « tapial », déri-
vant directement de « tapia » (infra), a apparemment pu
aussi désigner une banche, deux tapiales formant un Fig. 32 : Coffrage à pisé ayant appartenu à un agriculteur menui-
coffrage (Molénat, Passini 1999, 122, note 5). sier de la commune de Duffort (Gers) et qui aurait été
employé avant 1920, voire avant 1914. Il a été récupéré
Les mentions de taulas ne sont pas très nombreuses par M. Pérès (maçon) et transformé en coffrage à béton
dans les comptes de Castelnaudary, et n’apparaissent pour son usage professionnel (cliché : A. Klein, 1994).

333
À ceci près que rien ne permet à l’heure actuelle d’affirmer que la technique de la « paret coffrée » utilise une variante du pisé pour son édification.
334
Lévy 1909, 358. « Taula : planche » (Bernardi 1995, 461).
335
C’est en tout cas ce que suggère l’architecte Cointereaux au XVIIIe siècle sur son schéma de la technique du Bugey, certainement très proche de celle
employée en Lauragais et Toulousain, du moins concernant la structure charpentée (Klein 2003, 423, fig. 9).
336
AD Aude, 4E76/CC64, 1408, [f°36 r°3]. « …per 12 postz d’avet de quatre canas de lonc cascuna las cals foro compradas per B. La Guarda fustier
al loc de Toloza car ayssi li foc mandat per les senhors de cossols atendut que lom avia cologuadas affar las paretz de la porta Mondebo las cals
devian estre de taula… ». À la ferme des Haouasses, dans les Hautes-Pyrénées, il existe des banchées longues de 8,80 m, preuve que les importantes
dimensions des planches relevées dans les documents médiévaux ne sont pas improbables (Klein 2003, 423).
337
Largeur moyenne relevée sur les traces de planches laissées sur le parement d’un mur de la ferme d’En Vidalot, à Beaumont de Lomagne (Tarn-et-
Garonne) (Klein 2003, 422, fig. 8).
338
Le schéma de la méthode du Bugey utilise trois planches pour chaque banche (Ibid., 423, fig. 9).

65
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

La longueur par contre est bien supérieure à celle des bien loin (jusqu’à Toulouse, à environ 60 km), des planches
coffrages utilisés dans la péninsule ibérique (entre 1,80 m susceptibles de les fabriquer. De fait, afin d’accroître leur
et 4 m ; 2,30 m en moyenne ; Bazzana 1992, 81). Quant au durée de vie, elles étaient stockées lorsqu’elles ne servaient
sapin, généralement peu apprécié pour les gros travaux de pas : à Albi, le 10 avril 1382, les taulas employées pour
charpente339, il devait être utilisé pour sa souplesse et sa l’édification de la paret du mur de la Teula ont été rame-
légèreté, qui facilitaient la manipulation des taulas (mise nées à l’hôpital où elles avaient été empruntées par cinq
en place, transport). Une seconde mention chaurienne du hommes347.
12 août 1419 précise que Pierre de Laroque fournit « deux Ainsi, cinq personnes étaient nécessaires pour trans-
charges de planches pour faire la paret »340, vraisemblable- porter ces éléments, vraisemblablement l’un après
ment pour les taulas, mais leur taille n’est pas précisée. l’autre348, car leur poids et leur taille devaient être relative-
Enfin, à Toulouse, en 1354-1355, des planches « razals »341 ment élevés. À Riscle (Gers), les consuls font acheter en
sont destinées aux taulas de la Porte Neuve342. 1497 « duas taulas de corau349 » pour réparer les tapias
Si ces coffrages étaient la plupart du temps installés en (enceintes en terre massive) de la ville (Parfouru, Carsalade
position horizontale, pouvaient-ils quelquefois être du Pont 1892, 497). À la différence de Castelnaudary, les
disposés verticalement pour réaliser des tracés courbes, banches sont ici réalisées dans un bois de très bonne
que ce soit pour les murailles ou les tours ? qualité : souhaitait-on privilégier la longévité et la résis-
tance des taulas, au détriment de leur poids et de leur
En effet, comme le note A. Bazzana pour le tabiya souplesse ?
d’Al Andalus, « l’emploi d’un coffrage entraîne apparem-
ment une certaine facilité de mise en œuvre mais limite les 5.2.2.3.4 - Les perches (puntier, apuntier) et les étais
conditions d’emploi du procédé, lui interdisant par obliques (paliera, palma)
exemple les tracés en arc de cercle343. À Alcira cependant, Les comptes chauriens ne renseignent jamais sur les
les tours hémi-circulaires de la muraille d’époque musul- éléments verticaux qui constituent le système charpenté
mane, dont une partie très bien conservée vient d’être mise maintenant le coffrage. C’est donc à Toulouse qu’il faut
au jour par A. Ferrer, sont comme le reste de la construc- aller chercher des informations en ce sens : ainsi, tout
tion, en tabiya : […] dans ce cas, les planches du coffrage d’abord, plusieurs dépenses de 1354-1355 font état d’achat
sont disposées verticalement » (Bazzana 1992, 78). de pernas pour des parets : selon E. Lévy la perna dési-
Des tours rondes existent également à Castelnaudary, gnerait une « planche mince », mais d’après le contexte, il
mais les comptes ne précisent jamais de quelle manière s’agirait plutôt d’une pièce de bois utilisée comme perche
elles sont construites (à pierres et chaux ou en terre ?)344. A (puntier, infra) maintenant en place le coffrage (formé de
contrario, la seule fois où ces registres indiquent la nature deux taulas). Frédéric Mistral donne en effet comme une
en terre de la tour, ils ne précisent pas sa forme345. À des acceptions possibles à « perno », celle « d’éclisse
Toulouse par contre, une unique mention du 13 avril 1354 d’osier », l’éclisse pouvant être un « éclat de bois » ou un
précise que Jean Olier est rémunéré pour détruire et rebâtir « bois de fente utilisé en boisselerie » (Robert 1982, 599),
la tour ronde en terre située sur la porte Neuve (partie haute donc peut-être ici un tronc refendu dans le sens des fibres,
de la tour), preuve que la technique des murs courbes en éventuellement utilisé presque brut, afin de constituer la
terre était parfaitement maîtrisée346. Cependant, aucune perche.
taula n’étant citée, rien ne permet de savoir si la technique Le compte toulousain précise par ailleurs les longueurs
de la « paret coffrée » a été utilisée dans ce cas d’espèce. de ces pernas qui sont, du moins dans les rares mentions
Quoi qu’il en soit, ces « taulas » devaient être relevées, invariablement au nombre de deux : la plus petite
précieuses, car les consuls chauriens vont parfois chercher est illustrée par une dépense de mars 1354 pour 20 pernas

339
Il est pourtant souvent utilisé comme tel, à Castelnaudary ou ailleurs. Ainsi, en Bresse et en Bugey, « il est remarquable que, mis à part les perches
des engins d’artillerie qui sont toujours faites à partir d’un grand tronc de sapin, les essences et les types d’arbres n’ont pas d’utilité spécifique. Ainsi,
les planchers et les bardeaux des toitures sont réalisés aussi bien en sapin qu’en chêne, les portes et les fenêtres sont en sapin, en peuplier, en chêne ou
en noyer, les poutres et les éléments de charpente en chêne ou en sapin. Cela vient très certainement des nombreuses possibilités que ces régions de
montagne offrent dans le choix des essences » (Kersuzan 2005, 342). À Aix également, « le sap connaît, lui aussi, de multiples applications. En char-
pente, il donne des pièces grosses et petites » (Bernardi 1995, 142).
340
AD Aude, 4E76/CC69, 1419, [f°47 v°2]. « …an Peyrot de la Roca per dos carguas de postam per far la paret… ».
341
Selon E. Lévy, la raza est une mesure de longueur (Lévy 1909, 315). S’agit-il de ce que P. Cayla dénomme la « mesure razese » comme étant propre
au Razès, un des anciens pays de l’Aude principalement centré autour de Limoux et de Quillan, mesure « dont la valeur n’a pu être encore déterminée
avec précision » ? (Cayla 1964, 606).
342
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°78 r°2]. « Item may […] e per 2 postz razals a far taulas a la tor porta Nova…».
343
Les coffrages décrits par cet auteur sont plus courts que ceux rencontrés dans nos sources, et donc moins souples…
344
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°50 r°7]. « …e fo meza dins la tor redonda de la Strada… ».
345
Ibid., 4E76/CC49, 1363. « ...pro faciendo unam turrim de terra retro hospicium B. Raudi... ».
346
AC Toulouse, EE32, 1354, [f°63 r°1]. « ….per deffar e derocar la tor de tera que es dessus la porta Nova e aiss que la deu levar de tera e far
redonda e levar la paret de la dicha tor… ».
347
Vidal 1911, 48. [f° 80 v°]. 827. « A Marsal Guorses y a 4 homes que tornero las taulas que aviou malevadas del hospital, ad obs de far las dichas
paretz... ». L’existence de murs d’enceinte en terre crue est encore attestée au XVIIIe siècle dans cette ville (« en 1741, le rempart entre la Porte-Neuve
et le boulevard de la Violette, fait en terrisse, s’est effondré ; on en sort et on entre par la brèche comme on veut » ; Grimal 1935, 24).
348
Rappelons que la taula désigne une banche ; pour pouvoir réaliser un coffrage il fallait donc deux taulas.
349
« Coral, corau : cœur de chêne » (Alibert 1966, 242).

66
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

de quatre brasses chacune (env. 6,4 m ?) employées pour complément des pernas : le premier est acheté « pour être
lever la paret à côté de la porte Neuve350. La seconde employé comme perche en haut de la paret, derrière le
longueur-type est la perna de six brasses (env. 9,60 m ?) : pressoir de Saint-Etienne »354, les deux autres « pour être
plusieurs achats sont ainsi réalisés en mars 1354351 et avril- employés comme perches à la paret, derrière la maison de
mai 1355352. P. Bosc »355. La différence entre les deux éléments tiendrait
Ces éléments permettaient de maintenir le coffrage donc au fait que les cartos étaient équarris alors que les
(taulas), si l’on se fie aux schémas de la méthode du Bugey pernas ne l’étaient pas.
(variante du pisé) présentés en 1790 par l’architecte Pernas et cartos sont donc employés comme
François Cointereaux (Cointereaux 1790 ; fig. 33, 34 F)353. « puntier » ou « pountié », ce terme signifiant « étai » ou
Le même compte indique quelques temps plus tard, en avril « étançon » (Mistral 1878, t. 2, 620). Cette première défi-
1355, deux dépenses concernant des soliveaux (carta, nition doit être complétée par le renvoi de ce même auteur
carto) de six brasses jouant également le rôle de perches ou au vocable « pounchié », « pounché » dont les acceptions
pointaux (puntiers, infra), peut-être en remplacement ou en sont : « pointal, étai, étançon, appui, soutien, pilier »356. Le

Fig. 33 : La technique du Bugey, dans la région Lyonnaise selon l’architecte Cointereaux. 1790. Vue en perspective (planche aima-
blement fournie par A. Klein).

350
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°42 v°1]. « …per 20 pernas de 4 brassas cascuna que fara apuntiers a levar la paret costa porta Nova… ». En
outre, à une seule reprise, le compte mentionne un achat de 30 pernas de « caderna brassa » (AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°42 v°3]. « Item per
30 pernas de caderna brassa que pres en Iahn Degarac paredier de Tilh a puntiers a la paret tras l’ostal del tesaurier a San Estefe… »). Peut-on penser
que le terme de « caderna » est une cacographie de « cazerna » (quatrième) (Vidal 1911, 249) utilisé dans le sens de « quatre », soit également des
planches de quatre brasses ?
351
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°42 v°2]. « Item pus per 12 pernas de 6 brassa que anero aqui mezeis » ; [f°50 v°2]. « An Peyre Baya, fustier de
Sant Subra devem per 18 pernas de 6 brassa qu’avem prezas a obs de puntiers a las paretz detras le truelh de Sant Estefe a las paretz que fazia en
Bomacip… ».
352
Ibid., [f°64 r°3]. « Item per pernas de 6 brassa […] que pres mastre Ramon den Tholosa a obs de puntiers a la paret… » ; [f°78 r°1]. « que devian
per 34 pernas de 6 brassa que avian prezas en diverssas vetz a obs de puntiers desus que avian ab lu autra vetz comtat a X abril e aisso fo apuntiers
a las paretz a S. Estefe e a la tor de porta Nova… ». Une telle longueur pour les perches n’est pas improbable : dans le Rhône, commune de Marcilly-
l’Etoile, du matériel de chantier a été découvert dans une grange pour laquelle un permis de démolir avait été déposé, et notamment « trois perches de
résineux très sec (sapin) de 8 m de long » (Reveyron, Tardieu 2003, 335).
353
Cette technique du Bugey a été à nouveau signalée dans un ouvrage récent sur les méthodes de construction en terre crue (Pignal 2005, 33). En outre,
Cl.-A de Chazelles indique en 1999 qu’il « faut également signaler qu’il existe une manière de coffrer la terre à pisé qui laisse très peu d’indices
repérables. Attestée d’une part en Savoie et, d’autre part sur les rives chinoises du fleuve Jaune et au Pérou, cette méthode fait appel à des coffrages
maintenus par de puissants poteaux verticaux extérieurs ; les coffrages peuvent être continus (« toute longueur »), c’est-à-dire qu’ils couvrent l’inté-
gralité de la longueur de mur à construire en une seule opération » (de Chazelles 1999, 232). Si les sources recueillies indiquent l’existence d’un
coffrage, qui, comme on l’a vu sur les vestiges d’enceinte, ne laisse apparemment pas de traces, rien ne permet cependant de dire, à ce stade, si ces
derniers servaient à contenir une terre à damer ou s’ils servaient simplement de guides pour de la bauge coffrée.
354
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°64 r°2]. « Donem per una carta de 6 brassas que presen Bomacip le paredier a obs de puntier naut a la paret
tras le truelh a Sant Estefe… ».
355
Ibid., [f°64 r°3]. « Item […] per 2 cartos de 6 brassa que pres mastre Ramon den Tholosa a obs de puntiers a la paret tras l’ostal del P. Bosc… ».
356
Mistral 1878, t. 2, 620. Ce pointal peut également être dénommé « pointier » : dans le cadre d’un échafaudage, il s’agit d’une « pièce maîtresse verti-
cale fixée au sol » (Baud et al. 1996, 19).

67
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

D’autre part, une dépense toulousaine de mars 1354


répertorie l’achat de « 5 cartos a far una escala e a pouiar
las palieras » : si deux soliveaux ont été retenus pour faire
les montants de l’échelle359, les trois autres ont apparement
servi à monter360 les palieras361. Ce terme désigne un
« appui » (Alibert 1966, 368) ou un « épaulement »
(Bernardi 1995, 460)362, indiquant que le soliveau a été
utilisé comme étai oblique soutenant la perche, comme on
peut le voir sur le schéma de la méthode du Bugey (fig. 33,
34 G). Cette mention serait à rapprocher d’une dépense
chaurienne de 1360 : à cette occasion, on porte à boire à
des charpentiers ayant œuvré toute la nuit aux murailles du
port des Bordes pour réparer un « palmus »363. Le vocable
« palma » ou « épaule »364, est également une « sorte de
poutre » (Lévy 1909, 275) : dans ce cas précis, il pourrait
désigner une poutre ou un soliveau d’épaulement des
taulas qui, menaçant de s’effondrer, aurait requis le travail
nocturne intensif de plusieurs charpentiers.
Quoi qu’il en soit, les constructeurs ont à leur disposi-
tion des bois d’œuvre de grande longueur permettant d’édi-
fier des étaiements atteignant près de 10 m de haut. Cette
imposante armature était certainement délicate à mettre en
place et exigeait un savoir-faire de professionnels, ce qui
explique le recours à des charpentiers ou des parediers
(infra). La longueur des taulas (env. 7,12 m ?) avait cepen-
dant pour avantage un déplacement moins fréquent de ces
dernières365, et ce d’autant que l’arrimage des perches
devait réclamer un certain temps et des efforts consé-
quents : elles devaient être mises en position par un
personnel nombreux et vraisemblablement au moyen de
Fig. 34 : La technique du Bugey, dans la région Lyonnaise selon cordes, compte tenu de leur poids et de leur hauteur. Nous
l’architecte Cointereaux. 1790. Plan et coupe (planche n’avons par ailleurs jamais rencontré, dans le cadre de la
aimablement fournie par A. Klein). technique de la « paret coffrée », de mention d’utilisation
d’une quelconque forme d’échafaudage extérieur avec
pointal est, en architecture, une « pièce de charpente posée platelage. Il est ainsi probable que les ouvriers opéraient
verticalement pour servir d’étai »357, ce qui conviendrait sur la paret elle-même, directement à l’intérieur des
parfaitement en l’espèce : il faudrait donc comprendre l’ex- banches.
pression « per 18 pernas de 6 brassa qu’avem prezas a obs
de puntiers a las paretz » dans le sens de « pour dix-huit 5.2.2.3.5 - L’assemblage des éléments : pigar, pijar la
poteaux de six brasses que nous avons pris pour servir de paret ?
perches pour les parets ». Toutefois, les cartos peuvent être Pour pouvoir être efficaces, les taulas ont besoin d’être
employés à d’autres usages que ceux des puntiers, puisque fermement plaquées de part et d’autre de la paret en
le texte est dans ce cas obligé de préciser qu’ils sont construction pour former un ensemble solide et indéfor-
expressément utilisés à cet effet (a obs de)358. mable. D’après les sources, rien ne permet de penser que

357
Robert 1982, 1470. À Aix, « lorsque les travaux projetés risquent de compromettre la stabilité des bâtiments voisins, les artisans sont alors sommés
de « retenir » l’édifice, ou la partie d’édifice menacé. On utilise pour ce faire des pièces de bois appelées « ponchiers », qui apparaissent parfois comme
de simples poutres de récupération » (Bernardi 1995, 245).
358
On verra en effet que les cartos ont d’autres emplois dans la construction, ce qui n’était peut-être pas le cas des pernas, puisque les sources n’en
mentionnent pas.
359
L’échelle en question, probablement de grandes dimensions, a pu servir aux travaux permettant la fixation des « palieras ». D’ailleurs, dans les années
1990, dans une ferme de la commune de Marcilly-l’Etoile, (Rhône), on a découvert « deux échelles de 8,15 m, confectionnées dans un tronc de résineux
refendu en deux à la scie mécanique, et deux plus petites, de 7 m environ ; quatre tréteaux » (Reveyron, Tardieu 2003, 335).
360
« Pouiar » est vraisemblablement une cacographie de « pujar » (monter, gravir ; Lévy 1909, 300).
361
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°42 v°3].
362
« Epauler : doubler un support, à l’opposé de la poussée qui s’exerce sur lui, par un massif augmentant la base de sustentation de manière que la
force oblique reste toujours comprise dans les limites de cette base. L’épaulement est la fonction d’épauler et la limite de cette base » (Pérouse de
Montclos 1995, 228).
363
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°18 v°7]. « ...pro potii illis fusterius qui nocte dicte diey vigilarerunt in reparando palmii clausurarum portus
Bordarum...».
364
« Palma : Armus. Gall. Epaule » (Du Cange 1840-1850, t. 5, 304, col. 2).
365
Selon V. Nègre en effet, cette technique (du Bugey) « consistant à planter de grands poteaux ou perches » avait pour principal avantage « d’éviter de
démonter à chaque assise le système de banchage » (Nègre 2003, 59).

68
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

ces taulas étaient fixées au moyen de clés en bois traver- 5.2.2.3.6 - La fixation des banches : clous et cordes
santes comme c’est le cas dans la technique du pisé ou du Les comptes de Castelnaudary, pas plus que les sources
tabiya366. Par contre, tout porte à croire que le coffrage de la ville en général, ne renseignent sur les modes de fixa-
n’était pas solidaire de la structure à bâtir, comme dans la tion des taulas avec les perches, ni sur la manière dont ces
méthode du Bugey. dernières sont étrésillonnées entre elles pour éviter la
Les textes utilisent à plusieurs reprises le terme de déformation de leur partie supérieure pendant le versement
« pigar » ou « pijar »367 dont les deux acceptions connues de la terre. Seul le registre consulaire toulousain de 1354-
sont « étançonner »368 et « étayer »369. Il faudrait à notre avis 1355 possède de très rares informations en ce sens, qui,
retenir la seconde, puisque les étaiements étaient en effet recoupées avec le schéma de la méthode du Bugey, permet-
installés à titre provisoire, car souvent démontés puis tent d’envisager avec une relative précision ces systèmes
déplacés. L’action de « pigar » ou « pijar » devait donc d’attache.
consister, comme dans la méthode du Bugey, à assembler Les taulas étaient vraisemblablement soudées entre
les différents éléments de la structure charpentée (perna, elles par des planches plus petites clouées verticalement
carto, paliera et taulas) afin de pouvoir commencer ou sur le côté extérieur, comme l’indique le schéma de
poursuivre l’édification du mur de terre massive. Cointereaux (fig. 33). C’est peut-être à ce type de fixations
À Castelnaudary, les mentions d’assemblage des étaie- que font référence les dépenses toulousaines : en effet, en
ments (pigar, pijar) au moyen de bois ou de poutres mai 1355, la ville achète mille clous « baradors » renforcés
(fustes) sont relativement nombreuses en 1359 et au début pour servir aux taulas373. Selon H. Bousquet, « il y avait
de 1360, signe que les constructions de parets se sont pour- plusieurs catégories de clous (clavels) désignés d’après
suivies, même si cela n’est jamais clairement précisé370. leur utilisation : les barradors qui servaient à fermer
Elles sont également présentes dans la première moitié du (barrar), c’est-à-dire à assujettir profondément deux
XVe siècle, preuve de la réfection permanente des courtines objets : d’après leur prix, ils devaient être gros et pesants »
de la ville371. On sait en outre, soit grâce à une mention (Bousquet 1926, 79, note 5). Quelques mois plus tard, en
directe des comptes, soit par recoupement avec d’autres août 1355, un total de 350 clous « baradors », dont 250 dits
dépenses, que les personnes dirigeant ces opérations sont « forts », sont à nouveau acquis en trois fois pour les
souvent des charpentiers ou des maçons. taulas374. La présence de clous « renforcés » montre qu’ils
étaient destinés à assujettir des pièces de bois d’assez forte
Le terme « pigar » désignerait donc effectivement le
section résultant de la superposition des longues planches
montage de l’étaiement provisoire d’un mur de terre
horizontales et des courtes planches verticales perpendicu-
massive en construction, puisque les quelques mentions
laires formant la taula. Il paraît en effet peu probable que
relatives à ce verbe sont quasi-systématiquement associées
les taulas aient été fixées aux perches au moyen de clous,
aux parets, et ne parlent par exemple jamais de pijar ou
puisque l’on ne voit pas très bien comment ces derniers
pigar un mur à pierres et chaux. Dans de très rares cas, auraient pu être aisément retirés lorsque l’on déplaçait le
« pigar » est employé dans le sens « d’étayer provisoirement coffrage.
une construction pour éviter qu’elle ne s’effondre », en l’es- En effet, comme illustré par le schéma de
pèce au moyen de pierres agissant comme un contrepoids372. F. Cointereaux, et comme on vient de le supposer à la
Enfin, cette technique pouvait difficilement s’appliquer lumière des textes, la partie basse des taulas devait être
à des enceintes bâties en limite de l’abrupt, puisque dans ce plaquée contre la paret au moyen d’une perche (perna ou
cas on ne voit pas très bien de quelle manière on aurait pu carto servant de puntier) sur laquelle venait s’appuyer à ce
fixer les perches extérieures, et encore moins les étais point précis un étai oblique de renfort (paliera, palma) la
obliques, compte tenu de la déclivité du terrain. Il se peut maintenant fermement (fig. 33, 34).
alors que l’on ait employé une méthode de construction La fixation des perches en partie haute quant à elle,
n’utilisant pas de coffrages. comme le suggère le même dessin et deux dépenses du

366
En effet, pour ce dernier, A. Bazzana signale pour Al Andalus « qu’à la base du coffrage, des traverses de bois (aguja) ou clés sont disposés hori-
zontalement et à distance régulière, à travers le mur ; elles portent, aux extrémités, une double mortaise où viennent se placer les bras verticaux qui
retiennent les panneaux de bois latéraux » (Bazzana 1992, 80).
367
« Etayer, étançonner » (Lévy 1909, 294).
368
« Etançonner : soutenir à l’aide d’étançons » (« étançon : grosse pièce de bois que l’on place le plus verticalement possible pour soutenir quelque
chose. Béquille, contrefort, étai. Placer des étançons contre un mur qu’on reprend en sous-œuvre » ; Robert 1982, 700).
369
Etai : « pièce de charpente destinée à soutenir provisoirement » (Ibid., 698 ; étayer : « soutenir à l’aide d’étais » ; Ibid., 702).
370
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°2 v°4]. « ...portaverunt quasdam fustem Bertholomey Gotnia cum quibus fuerit pigati ille paries... » ; [f°3 v°6].
« ...ad pigandum illum parietem qui est in clausuris ante domum Fratrum Minorum… » ; 1360, [f°11 r°6], [f°16 v°7].
371
Ibid., 4E76/CC74, 1432, [f°8 v°1]. « …an Peyre Ragosta de Sant Papol e an Art. Bergonho fustiers per 2 jorns que estegon per pijar la paret del
Terier…» ; [f°11 v°5]. « …per pijar la paret costa la tor redonda de Sant Antony… » ; Ibid., 4E76CC77, 1441, [f°25 v°1]. « …per pijar la paret ques
detras les Fra Menors e per far portar la fusta que y era necessaria… ».
372
Ibid., 4E76/CC55, 1376, [f°55 v°1]. « …per portar una quantitat de peyra del ostal de Maymer de Sant Germa a far contra pes a pigar les dits
embans… ».
373
AC Toulouse, EE32, mai 1355, [f°81 r°5]. « Item donemle per M (mille) clavels baradors refforssatz que an prezes en diverssas vetz mastre Ramon
den Tholosa en Johan Olier els autres parediers a obs de clavelar las taulas ab que fazian las paretz... ».
374
Ibid., « 55 en aost. Comtem a 4 d’aost que devian. » ; [f°112 v°17]. « Item per 100 clavels baradors fortz a obs de las taulas de las paretz que pres
en Bomacip… » ; [f°113 r°6]. « Item per 150 clavels baradors fortz a barar las las (sic) taulas a las paretz que pres en Bomacip… » ; [f°113 r°18].
« Item per 100 clavels baradors a las taulas a San Subra que pres en Bomacip…».

69
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

compte toulousain, devait être réalisée au moyen de cordes. Georges-Claude Goiffon, dans son ouvrage de 1772 sur
Elles empêchaient ainsi leur écartement et le déplacement L’Art du maçon-piseur, distingue le terme pisé de ceux qui
des taulas (fig. 33, 34) : c’est peut-être à cet usage que sont sont proches, mais qui appartiennent à d’autres domaines,
employées les 24 cordes achetées le 28 mai 1355 à Roger excluant, avec d’autres, les termes fouler et piétiner,
Amiel, cordier de Payrolières375 (« pour lever la paret aux puisque « aucune de ces idées ne convient à l’action qui
perches », si tant est que l’on puisse traduire de cette donne l’existence à nos murs de terre » (Nègre 2003, 48,
manière le sens peu clair de la phrase376). Le poids global note 2).
de ces cordes atteint 44 livres377. Par ailleurs, une observation de Saint-Félix-Mauremont,
En mars 1354 on achète également des soguas propriétaire terrien et agronome, distingue en 1858 la paroi
(grosses cordes, 19 en tout) de 10 brasses chacune (env. de la région toulousaine (édifices civils) de la méthode
16 m ?) pour « l’usage des perches à la paret… » et « pour appliquée à Lyon, principalement en raison des modes de
les besoins des travaux à la paret… »378, leur emploi étant coffrage et de tassement : « il est malheureux que, malgré
vraisemblablement identique. les demandes réitérées, on n’ait pas fait venir à Toulouse,
Ainsi, cette technique de coffrage se rapproche forte- et dans la région du Sud-Ouest de la France, en Languedoc,
ment de celle décrite par F. Cointereaux, mais rien ne en Guienne et en Gascogne, de bons ouvriers piseurs ; car
permet de savoir s’il s’agit d’une méthode de bauge coffrée les ouvrages de ce genre que l’on y construit, appelés
ou d’une variante du pisé, essentiellement parce que les parois, sont défectueux. Cela provient de plusieurs causes.
informations relatives à la mise en œuvre de la terre dans On néglige de construire en maçonnerie à bain de chaux les
ces coffrages sont extrêmement rares. fondations et le soubassement ; les moules dans lesquels on
foule la paroi n’ont point la résistance ni la bonne exécu-
5.2.2.3.7 - Le compactage de la terre : damage ou tion des banches du pisé ; ce qui exige nécessairement une
foulage ? surépaisseur considérable ; la terre n’est frappée qu’à la
Il s’agit là d’une des questions les plus délicates à batte, sans employer le pisoir ; aussi ce genre de construc-
résoudre concernant la technique de la « paret coffrée », tion est-il dédaigné » (Nègre 2003, 52).
puisque aucun élément véritablement décisif pouvant faire Pourtant, Guillaume de Catel, au XVIIe siècle, dans ses
pencher la balance entre les deux méthodes n’a pu être mis Mémoires de l’Histoire du Languedoc, précise clairement
en lumière dans les sources médiévales ou modernes. En que « les parois » sont « faictes de terre battue et formée
outre, si l’on retient l’hypothèse selon laquelle les entre deux aiz » (Catel 1663, 132) : faut-il alors penser que
murailles étaient réalisées en bauge coffrée, aucun l’expression « terre battue » n’implique pas obligatoire-
compactage à proprement parler, ne devait être employé. ment l’emploi d’un pisoir ?
Néanmoins, on pourrait imaginer que la terre était À Toulouse, l’accès des ouvriers au sommet de la
tassée entre les banches grâce aux pieds des bâtisseurs banche, au fur et à mesure de l’élévation de la paret, se
(foulage), puisque les sources ne mentionnent jamais l’uti- faisait au moyen d’échelles posées au sol et relevées depuis
lisation, l’achat, ou la réparation d’une quelconque dame à le haut grâce à une corde passant par une poulie380. Cette
piser. Cependant, on peut penser a contrario que cette échelle, certainement très solide, requiert l’emploi de
opération étant réalisée par des professionnels, ces derniers 100 clous « baradors »381. Dans une autre dépense de mai
devaient posséder leur propre matériel : ainsi, les pisoirs, 1355, deux autres soliveaux équarris de six brasses (env.
outil technique et personnalisé, n’étaient certainement pas 9,60 m ?) ont permis la confection d’une échelle servant « à
fournis par la ville, et n’apparaissent donc pas dans les monter la maçonnerie », terme ne préjugeant en rien de la
dépenses379. nature des matériaux382.

375
La rue Peyrolières est une rue de Toulouse.
376
AC Toulouse, EE32, mai 1355, [f°92 v°1]. « …an Rogier Amielh cordier de Pairolieras qu’el devian per cordas a las obras per 24 cordas que avia
prezas en Johan Olier a obs de las paretz levar als puntiers apres la tor den Tibeli que pezeva 44 libras… ».
377
Environ 17,6 kg si l’on tient compte d’un poids moyen de la livre de 0,4 kg.
378
AC Toulouse, EE32, mai 1355, [f°48 v°1]. « 54 en martz. Devem an Rogier Amielh, cordier questa a Pairolieras per 6 soguas de 10 brassa ? en
Iahn Olier a obs dels puntiers a la paret de costa la porta Nova can levet la paret… » ; Ibid., [f°48 v°2]. « Item pus pres mastre Ramon den Tholosa
paredier de Tilh a obs de las obras a la paret al cauta de Sant Estefe a l’ostal del P. Bosc 13 soguas de 10 brassa… ».
379
Il en est de même pour d’autres outils, notamment ceux en fer. Ainsi, « les haches et les scies des bûcherons, les truelles des maçons, les laies des
tailleurs de pierre, les fers et les varlopes des charpentiers n’apparaissent jamais car tous ces maîtres possèdent en propre leur outillage et en assurent
eux-mêmes l’entretien. Certes, il n’est pas exclu qu’on demande au forgeron de redresser une broche ou d’affûter rapidement une châsse, mais cela
devait être assez rare. Quoi qu’il en soit, c’est un service amical et gracieux qui est demandé, il est donc logique que tous ces petits arrangements ne
figurent pas dans les comptes » (Kersuzan 2005, 361). C’est également le cas en Haut-Dauphiné où N. Nicolas note que « comme cet outillage n’est
jamais mentionné ni dans les comptes de châtellenie ni dans les prix-faits, cela laisse supposer que les artisans intervenaient sur les chantiers avec leurs
propres outils » (Nicolas 2005, 167). À Aix, « dans les prix-faits relevés, l’artisan est toujours chargé de fournir les ustensiles nécessaires à son art.
Cette pratique semble toucher tous les types de chantiers, si l’on en juge par la rareté des achats consignés dans les comptes du clocher de Saint-
Sauveur » (Bernardi 1995, 230).
380
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°92 v°2]. « 55 en may. Item pus que pres en P. de Martas una corda a obs de una poliega e una corda pus grossa
a levar la scala devant la paret a Sant Estefe e pezet tot 12 libras » ; [f°92 v°3]. « Item pus que pres Johan de Garac pro 4 cordas de polieia que pezera
14 libras » ; [f°110 r°1]. « 55 en juli. Deben an Bertran Cabirol fustier per far una escala a Sant Subra per puiar a la paret a la clauzura... ».
381
Ibid., [f°112 v°8]. « 55 en aost. Item per 100 clavels baradors a la scala a San Estefe ».
382
Ibid., [f°78 r°2]. « 55 en may. Item may per […] 2 cartos de 6 [brassa] a far escala a puiar la massonaria…». En effet, cette dépense venant juste
après des achats relatifs à la construction d’une paret, la « maçonnerie » en question doit être en terre crue.

70
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Pourtant, on ne sait de quelle façon les très grandes 6 juillet393, 7 juillet394, 31 juillet395) mais pas durant l’hiver,
quantités de terre nécessaires à l’édification de la paret entre décembre et mars.
étaient acheminées entre les banches, puisque cette diffi- La construction des parets se déroule quant à elle
culté devait croître au fur et à mesure de l’élévation de l’ou- presque exclusivement durant le printemps et l’été : entre
vrage : on peut imaginer que la terre était contenue dans le 13 et le 18 juin 1391396 pour la paret devant « l’obrador
des paniers hissés au sommet au moyen des poulies déjà del cosolat »397 ; le 25 septembre 1367398 pour un autre
évoquées, poulies peut-être fixées au sommet des perches ouvrage ; le 21 septembre 1391399 pour une autre paret
(puntiers). entre la Bastide et le barrium de Dins.
Les ouvriers (au nombre de cinq ?) devaient ainsi Par ailleurs, deux dépenses de 1419 acquittées aux
travailler entre des banches d’une longueur d’environ 7 m environs du 10 octobre rémunèrent deux hommes (vrai-
pour verser la terre (et la tasser ou la fouler ?). À une seule semblablement des parediers), pour avoir travaillé respec-
reprise, les comptes chauriens emploient le mot « verbe- tivement 50 et 42 jours à la construction d’une paret, ce qui
rare »383 associé à la construction d’une paret : ce vocable placerait le début des travaux entre le milieu et la fin août
latin, signifiant « battre » (Gaffiot 2000, 1686), pourrait (si tant est qu’ils aient été effectués en continu)400. En outre,
éventuellement indiquer un compactage ou un damage de d’autres tâches, comme la pose de l’armature charpentée
la terre au moyen d’un outil, mais là encore, s’agit-il d’un soutenant le coffrage, peuvent se dérouler en automne401,
pisoir (donc pour une variante du pisé) ou d’une simple l’achat des planches pour les taulas se produisant au prin-
trique (pour de la bauge coffrée ?). temps402 ou en été403, selon les besoins. À Toulouse, une
dépense de 1354 montre qu’un paredier, Jean Olier, à
5.2.2.3.8 - La période de travail
relevé une tour de terre sur la porte Neuve pendant plus
À l’instar de la mise en œuvre du torchis (infra), y- d’un mois, entre le 23 avril et le 28 mai404 alors qu’une
avait-il des périodes privilégiées pour construire les autre, datée de juin 1355, répertorie la construction d’une
parets ? Les informations permettant de répondre à cette paret durant les deux mois les plus chauds, en juillet-
question sont fragmentaires, car les dépenses ne sont pas août405.
toujours très bien datées (absence de date ou d’ordre chro-
La saison hivernale paraît la plupart du temps écartée
nologique) et les mentions afférentes à la construction de pour édifier des murs en terre crue406 : en effet, les fortes
parets quantitativement faibles. pluies, ainsi que le froid (rarement le gel) étaient des
Toutefois, certaines constatations peuvent être réalisées facteurs souvent rédhibitoires à leur construction. La
d’après les comptes chauriens : en 1361, la taille de la période privilégiée semble être le printemps (avril à juin) et
bruyère a lieu en automne (13 septembre au 5 octobre384 ; la fin de l’été, où les pluies sont quelquefois abondantes
11 septembre au 8 décembre385 ; 15 octobre au mais moins fréquentes qu’en hiver. Cette saison, ni chaude,
16 novembre386) ou durant le printemps et l’été 1363 ni vraiment humide, devait favoriser la « prise » de séchage
(28 mai387, 2 juin388, 3 juin389, 17 juin390, 21 juin391, 26 juin392, lente de la terre et des végétaux et améliorer ainsi le durcis-

383
AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°74 v°3]. « …ad finem ut operariis dicte parietis operare possent et parietem verberare et facere, perficere… ».
384
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°92 r°8].
385
Ibid., [f°94 r°1].
386
Ibid., [f°117 v°5], [f°118 r°1].
387
Ibid., 4E76/CC49, [f°22 v°4], [f°22 v°5], [f°24 r°1], [f°24 r°2].
388
Ibid., [f°29 v°6].
389
Ibid., [f°31 r°1].
390
Ibid., [f°43 r°5].
391
Ibid., [f°45 v°7].
392
Ibid., [f°48 r°3].
393
Ibid., [f°51 r°6].
394
Ibid., 1363, [f°51 v°1]. « Item die veneris VII julii dare fecerunt Johanni Casser pro portando de nemore tres sarcinatas brochi ad opus parietis de
la Strada ».
395
Ibid., [f°61 r°3]. « …Guillelmo de Luios qui stetit ad arrancandum et scindendum brocum in nemore de Rosilhaco ».
396
AD Aude, 4E76/CC58, [f°32 r°4] à [f°33 v°8].
397
« Obrador : ouvroir, atelier, boutique, étude (d’un notaire) » (Lévy 1909, 264). S’agit-il ici d’un entrepôt qui dépend de la ville ?
398
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°9 r°2].
399
Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°42 v°6].
400
Ibid., 4E76/CC69, 1419, [f°48 v°2], [f°48 v°3].
401
Ibid., 4E76/CC74, 1432, [f°8 v°1]. « …per pijar la paret del Terier de costa la tor redonda a III d’octobre l’an 32… ». Si l’on pense que la construc-
tion de ce mur s’est déroulée au printemps suivant, la pose de cette armature, si tôt dans le temps, laisse perplexe, dans la mesure où il devait être néces-
saire de recaler l’ensemble de la structure avant le début des travaux. Cette paret aurait donc pu être édifiée durant l’automne.
402
Ibid., 4E76/CC64, 1408, [f°36 r°3]. « Item a XXV d’abril fero paguar an P. Samata de Tonis per 12 postz d’avet de quatre canas de lonc cascuna
[...] affar las paretz de la porta Mondebo… ».
403
Ibid., 4E76/CC69, 1419, [f°47 v°2]. « Item a XII d’ahost pagueguo an Peyrot de la Roca per dos carguas de postam per far la paret… ».
404
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°63 r°1].
405
Ibid., [f°103 v°3].
406
Cette observation vaut également pour les édifices à pierres et chaux, comme par exemple à Amiens, où les « travaux, qu’ils relèvent d’un marché à
tâche ou à la journée, se déroulent essentiellement de mai à octobre. Certains peuvent débuter en février mais ils subissent parfois de fortes gelées qui
provoquent des dégâts dans la maçonnerie. L’artisan, s’il est engagé à la tâche, doit alors refaire le travail sans supplément » (Baudoux-Jung 1998, 183).

71
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

sement de la structure tout en limitant les problèmes de quement absentes de la documentation. Il est donc certain,
fissuration407. comme l’ont par ailleurs confirmé plusieurs édifices (la
Les parets non terminées à l’approche de l’hiver étaient plupart du temps civils) que la bauge était utilisée en
vraisemblablement protégées à leur sommet par des Lauragais, Bas-Razès et Toulousain, au moins durant le bas
toitures légères (en bois et tuiles ? en genêts ?) de manière Moyen Âge et vraisemblablement avant.
à éviter les eaux pluviales d’infiltration qui auraient pu
destructurer la masse de terre en cours de séchage. Une fois 5.2.3.1 - Une bauge « traditionnelle » ?
la paret achevée, le chemin de ronde (à pierres et chaux), À l’heure actuelle il existe, aussi bien en Lauragais
les hourds et coursières en bois permettaient d’éviter ce qu’en Toulousain, plusieurs méthodes de bauge pour bâtir
problème. en terre sans coffrages, dont la plupart remontent au moins
Ainsi, au final, rien ne permet de savoir si cette tech- à l’Epoque Moderne (Klein 2003).
nique des « parets coffrées » peut être assimilée à la La terre, employée dans la construction en bauge est
méthode du Bugey (et donc à une variante du pisé) ou s’il certainement désignée sous le nom de « bart » dans les
s’agit simplement de bauge coffrée, dispositif dont la textes : en effet, pour se transformer en bart, la terre (terra)
présence dans nos régions n’est pas véritablement établie à a besoin d’une préparation spécifique, les comptes consu-
l’heure actuelle : en effet, en Midi-Pyrénées, cette dernière laires d’Albi établissant clairement cette distinction à la fin
« ne nous est connue que par quelques témoignages oraux du XIVe siècle409. Ce bart était le résultat d’un mélange de
lacunaires et quelques références documentaires fragmen-
terre et d’eau410 incluant quelquefois du foin411, mélange qui
taires : associant terre plastique et coffrage, cette technique
servira également pour le torchis (infra).
est paradoxale. C’est vraisemblablement pour faciliter la
mise en œuvre du mur et notamment de ses parements, que À Castelnaudary, une dépense de 1441 relative à la
la terre (sous forme de pâte ferme), est montée dans un construction d’une paret412 située derrière le couvent des
coffrage » (Klein 2003, 435). Ailleurs en France, et notam- Frères Mineurs signale un approvisionnement en eau413 :
ment en Normandie, l’éventualité de la présence de cette s’agit-il d’élever une construction en bauge414, ou peut-être
technique a également été envisagée408. en bauge coffrée, puisque la très grande majorité des parets
chauriennes utilisaient des taulas ?
5.2.3 - La présence de la bauge en Lauragais et Le terme de bardot, donné comme voisin de bart415 par
Toulousain : une certitude P. Cayla, est pour sa part exceptionnellement employé en
À côté des « parets coffrées » existe une seconde tech- 1445 lors de l’attribution d’un prix-fait : dans ce cadre, le
nique pour édifier des enceintes ou des édifices civils, qui maçon Pierre Melot aura le choix de fermer une porte avec
elle, n’utilise pas de banches, puisqu’elles sont systémati- de la pierre ou avec ce matériau416.

407
À ce sujet, les analyses de géo-archéologues et de paléo-botanistes, à partir de prélèvements de végétaux réalisés sur des édifices conservés, pour-
ront à l’avenir donner de précieuses informations sur leur période de taille.
408
En effet, selon F. Streiff, « l’hypothèse de la bauge coffrée semble possible, mais probablement pas dans le secteur des marais de Carentan. L’absence
générale de boulin suppose un coffrage maintenu par un étaiement extérieur qui réclame une certaine technicité et la disponibilité de bois d’échafaudage
importants, si l’on en juge par la hauteur de certaines réalisations. Un tel procédé devait engendrer des coûts de construction élevés, que seuls les
propriétaires aisés devaient pouvoir assumer. Un autre élément pouvant conforter cette hypothèse serait la nature des terres employées. En effet, entre
Coutances et Saint-Lô, les terres sont particulièrement graveleuses. Les cailloux, ajouts volontaires ou présence naturelle, engendrent probablement une
découpe de la terre au paroir beaucoup plus difficile. De plus, sur ce secteur, peu de fibres végétales sont visibles dans les murs ou les éboulis. Les
hauteurs de levées atteignent aisément 0,80 m à 1 m de hauteur, ce qui paraît peu réalisable avec la technique de la bauge traditionnelle. On peut donc
raisonnablement penser que le coffrage aurait été le meilleur moyen de mettre en œuvre la terre. Peut-on, dès lors, parler de pisé ? Probablement pas
si l’on se réfère à la faible teneur en eau et au compactage de la terre qu’elle induit comme dans le pisé traditionnel. Le climat de la Normandie et de
la Manche en particulier impliquerait une période annuelle de construction extrêmement réduite. Par ailleurs, il semble qu’il existe autour de Vire, une
technique de mise en œuvre laissant également penser à de la terre banchée. Les murs comportent en effet une proportion importante de moellons
disposés sans organisation apparente et noyés dans le mélange de terre et de végétaux. La bauge recouvre parfois totalement ces pierres qui n’appa-
raissent que lorsque le parement est dégradé. Il ne s’agit vraisemblablement pas d’une maçonnerie de pierres hourdées au mortier de terre mais plutôt
d’une forme de béton cyclopéen. Une hypothèse de mise en œuvre serait le remplissage d’un coffrage avec de la bauge dans laquelle sont placées les
pierres, sans précautions particulières quant à leur assise ou leur répartition » (Streiff, Lahure 2003, 321).
409
AC Albi, CC151, 1368-1369, [f°111 r°]. « …femnas que carrejavo terra e bart e aygua… » ; [f°111 v°], « …carrejavo de la terra e fazian bart de
la terra… carrejavo terra e la i fasia lo bart ».
410
La confection du bart nécessite en effet de l’eau : AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°41 v°1]. « …per un baro as ops de pozar de l’aygua per far del
bart… ».
411
En effet, l’adjonction de foin (fe), paraît, du moins d’après les sources textuelles, la plupart du temps liée au bart destiné au torchis (infra). Cependant,
à Castelnaudary, en 1441, on achète trois quintaux de foin « per far lo bart de la paret noba de la Boal » (AD Aude, 4E76/CC76, 1441, [f°42 v°1]).
412
Il s’agit probablement d’un tronçon d’enceinte.
413
AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°26 v°2]. « …per far livrar l’aygua que era nesesaria a la dita paret…».
414
Cette technique requiert en effet environ 15 % d’eau, alors que le pisé et ses variantes n’en nécessitent que 9 à 10 %, proportion la plupart du temps
contenue dans la terre naturelle (information aimablement communiquée par A. Klein). Dans l’absolu bien entendu, rien n’empêche cependant de
penser que cette mention désigne un apport d’eau pour une technique qui serait une variante du pisé, surtout si la terre était trop sèche au moment de
sa mise en œuvre.
415
« Bardot : éléments d’une construction constitués par des plaques de terre battue, juxtaposées. C’était le matériau dans lequel l’argile, la terre
argileuse, était entremêlée avec des débris de végétaux. On le connaissait sous le nom de bard ; et lequel N… sera tenu fournir le foin qui conviendra
à fere les bardots de terre pour le dit Berjes »… (Carcassonne, fonds Folquier, 1606) (Cayla 1964, 76).
416
AD Aude, 4E76/CC79, 1445, [f°8 r°2]. « …a mastre Peyre Melot peirier, per un pretz fait que pres a […] tancar la porta de bardot o de peyra… ».

72
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Le bart était la base de la préparation de la bauge, puis- des Bordes) est « de taula » 424, laisse entendre qu’une autre
qu’il servait à la fois pour la confection des pains de terre technique, sans coffrages, était également en vigueur, ce
(gachouls) destinés à former les parements, mais égale- qui nous ramène certainement à une forme de bauge tradi-
ment comme « blocage » tout-venant entre ces derniers. tionnelle.
Ainsi, à Montréal (Aude), le 10 août 1461, le titulaire du Si cette dernière semble rarement employée pour les
contrat devra réaliser des parets d’enceinte « de bons enceintes médiévales urbaines qui, à la lumière des textes,
bardeto et sufficienti ita in medio parietis situti in late- utilisent systématiquement des coffrages (Toulouse,
ribus417 et prope »418, formule que l’on serait tenté de Castelnaudary, Albi), en était-il de même pour des agglo-
traduire par « de bart bon et suffisant au milieu de la paret mérations de moindre importance ?
situé sur les côtés et auprès ». Le bart doit donc prendre
place de manière convenable sur toute la largeur de la Difficile de trancher la question. Une technique
construction à réaliser, mais il est délicat de savoir à quoi pouvant se passer des banches et de leur système d’étaie-
fait directement référence « prope » : sous-entend-il que ment charpenté était probablement plus simple à mettre en
ces côtés, qui ne sont pas réellement décrits, sont d’une œuvre, et peut-être moins coûteuse. Comme on l’a supposé
autre matière ou mis en œuvre selon une méthode diffé- plus haut, elle était par ailleurs peut-être plus adaptée à des
rente (pains de terre, ou gachouls ?). pentes déclives, comme c’est le cas pour bon nombre de
villages du Lauragais ou du Bas-Razès, puisque la diffi-
Par extension, le verbe « abardissar » pourrait désigner culté d’installation des perches ne se posait plus dans ce
l’action de « bâtir avec du bart », comme en 1363-1364 cas-là.
dans une pièce construite dans la porte Montdebo afin de
ranger l’équipement militaire419. 5.2.3.2 - Le gason ou gaison : une forme particulière de
Il serait ainsi, selon la définition de A. Vidal, l’équiva- bauge ?
lent de celui de « bardeiar » ou « bardejar »420 mais ce 5.2.3.2.1 - Des gasons de bart, des gasons et du bart
dernier, rencontré une seule fois à Castelnaudary en 1442,
paraît plutôt être une variante de celui de « bardar » Certains indices laissent supposer que la bauge, ou une
(recouvrir une surface), compte tenu du contexte, où un de ses variantes, serait encore en vigueur dans l’Aude au
couvreur (recubreyre) se charge de couvrir les hourds et les XVIe siècle sous le nom de « gason » ou « guaison ». Ainsi,
saillies (foraiets) de la toiture421. le 11 avril 1545, à Renneville425, un certain Ensalbert doit
« faire édiffier […] les paretz qui seront de tapie sive gaso
Quant à Toulouse, le 24 mars 1459, un certain Pierre et troys canes de largeur dans paret entre icy et la
Hoyet, paredier breton, est rémunéré « per far hun tros de prochaine feste de la St. Jehan Baptiste a ses propres coustz
la grant paret de l’ostal public he per lo bart e nese- et dépens et sera couverte de postam de polpret dicte seille
sary »422 : l’association dans la même phrase du terme et mise en ordre jusques à la clef et les dits Ribairols ont
« bart » avec celui de « paret » ferait songer à la technique baillé audit sieur commandeur présent ledit Engelbert
de la bauge « traditionnelle » (sans coffrages), puisque ce sçavoir est une pièce de terre labourable contenant un
premier vocable n’est jamais mentionné, du moins dans les arpent plus ou moins en laquelle y a une maison avec soulié
sources consultées, lorsque l’on fait mention de taulas. et une autre petite maison en pezeing dite la fornyel… »426.
En 1441, à Castelnaudary, on fait acheter trois quin- Cette mention pose évidemment le problème de la
taux de foin « per far lo bart de la paret noba de la définition et de la différenciation -véritable ou supposée-
Boal »423. entre les vocables « tapie » et « gaso » : le terme latin
Ainsi, les deux édifices en question sont des bâtiments « sive », s’il indique généralement que le second mot est un
civils (une étable à bœufs à Castelnaudary, la maison équivalent ou un synonyme du premier, peut également
consulaire à Toulouse) n’utilisant pas la même technique signifier « au contraire » ou « soit plutôt » (Gaffiot 2000,
de terre massive que la plupart des enceintes ou des portes 1471), désignant soit une assimilation entre ces deux tech-
des fortifications urbaines : à l’inverse, une mention de niques, soit au contraire une différenciation claire entre
1419, précisant qu’une nouvelle paret de Goufferan (port elles.

417
Le terme « lateribus » se traduirait par « côté » (« latus : côté » ; Gaffiot 2000, 902) et non par « brique » (« later, eris, m » : brique ; Ibid., 900),
les sources désignant exclusivement cette dernière sous les vocables « tegula plana » ou « teula plana » (par exemple : AC Toulouse, EE32, janvier
1354, [f°28 v°2]. « …per 7 milhers e 5 saumadas de teula plana que avia a la sieu teularia… »).
418
AC Montréal, 1D2, [f°23 r°1].
419
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°154 v°3]. « ...Guillermo Rogerii pro corundando et faciendo unam cameram in qua ponatur arnesium in porta
Montis Lebonis et pro sparonando atortissando et recubriendo de tegulis et abardissando et encaucinando cum morterio supra tegulos...».
420
« Bardejar, bardeiar : bâtir avec du bart » (Vidal 1911, 247).
421
AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°1]. « ...an P. de Murat recubreyre, per hun pres fayt a lu baylat e livrat a la candela mens dizen co apar per
carta R. per mastre Miquel Salano per recubrir les enbans de la porta Mondebon tro le castel e bardeiar les foraietz…».
422
AC Toulouse, CC2334, 24 mars 1459. « …pour faire un pan de la grande paret de la Maison publique et pour le bart et le nécessaire ».
423
AD Aude, 4E76/CC76, 1441, [f°42 v°1].
424
Ibid., 4E76/CC69, 1419, [f°52 v°3]. « …per amortir huna cantytat de caus per la barbacana de la Baffa la cal foc meza als ayguiers de la paret
nova de taula de Guot Feran… ».
425
Haute-Garonne. Village situé à une trentaine de kilomètres au sud-est de Toulouse.
426
AD Haute-Garonne, H Malte Renneville 3, liasse 3, n° 79. 11 avril 1545. Echange entre noble frère Philippe Dubroc commandeur de Canhac et
Renneville et Pierre Jean et Barthélémy Ribairols dudit Renneville (texte cité dans Marandet 2005, 170).

73
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Deux autres mentions ont pu être relevées dans la costé du jardin du dit révérand père des Cordeliers d’un
bibliographie : la première à Arzens, « village du Carcassés pavois large de huict pans faicte de guason attandu que la
dans l’Aude, où les réparations de la muraille villageoise ville n’a point de four pour faire une muraille de pierre ou
font encore intervenir la terre crue dans les années 1580- de brique »428.
90. Le registre de délibérations consulaires évoque la répa- Outre le fait qu’elle montre encore l’utilisation -certes
ration d’une brèche en 1587 ; elle « sera bâtie de guaison déclinante- de la terre crue dans les enceintes à cette
de terre de telle largeur et hauteur que sera besoin ». Il faut époque, cette citation souligne également la facilité d’em-
sans doute envisager ici, à travers le mot guaison, la mise ploi de la terre crue, qui, à la différence de la pierre (pour
en œuvre de mottes de terre (garnies d’herbe ?). En 1590, la chaux) ou de la brique, ne nécessite évidemment pas de
une autre brèche doit être réparée dans la muraille ; est cuisson. À cette date cependant, ce bouchage n’a plus
alors adoptée une solution mixte, soit une élévation en vocation de défense mais plutôt celle de contrôler les accès
pierre surhaussée d’une élévation en terre : « a été arrêté à la ville pour empêcher voleurs et autres malfaiteurs de
quant à la muraille qu’elle sera bâtie et remise en état, et commettre des forfaits.
d’autant qu’elle se tient avec la lougade de Jean Chaffoul ;
ledit Chaffoul sera tenu faire arracher pierre et icelle faire Quelques années plus tard, en 1694, « on décide de
apporter au pied de l’œuvre, et d’icelle sera bâtie jusques faire fermer les brèches des murailles de la ville car dans
au sotoul de ladite lougade de ladite pierre et le surplus de toutes les villes de Province on faisait garde aux portes
terre, aux dépens de la communauté. ». La décision est pour empecher l’entrée des pauvres estrangers qui appor-
complétée quelques jours plus tard : « a été arrêté : ladite tent des maladies très dangereuses. On prend ainsi le parti
brèche sera bâtie et remise en son état. Les consuls recou- de faire travailler à fermer les bresches avec de la terre
vreront des maçons pour mettre en œuvre la pierre y étant, par des habitants qui soient payés à la journée et de faire
tant que s’y pourra étendre, et du surplus sera bâtie de faire la manœuvre par les pauvres que la ville nourrit en
terre » (Baudreu 2003, 366). leur donnant le double de ce qu’elle a accoustumé de leur
donner au moyen de quoi on espargnera considérablement
La seconde provient de Lézat-sur-Lèze, en Basse- de cette dépense »429. Rien ne permet de penser avec certi-
Ariège, où « des rénovations de l’enceinte villageoise à la tude que la technique du gason a été employée dans ce cas
fin du XVIe siècle font aussi appel à la terre. Deux mentions d’espèce, mais la proximité chronologique avec la
autorisent à imaginer la nature de la construction ainsi que première citation inciterait à le penser.
certains des gestes effectués par les parediers. En 1572,
une portion de paroit effondrée doit être réparée Cette méthode revenait donc, si l’on en croit les sources,
« …suyvant l’art de paredier… laquelle paroit sera tenu à bâtir à l’instar d’une construction à pierres et chaux : un
fere perfectement de deux gasons de chasque cousté de lad. parement de gasons (bart façonné à la main) et un blocage
paroit et ce que sera dedans entremy lesd. gasons sera de composé de terre (bart en vrac) permettait de remplir l’im-
bon bart bien pasté et cultivé… ». En 1598, dans un autre portante épaisseur des courtines : pourtant, si cette observa-
secteur de l’enceinte, la nouvelle construction doit tion est valable pour le XVIe siècle, aucun élément textuel
atteindre une « …largeur de douze pans (2,60 m) montée décisif ne permet d’affirmer que cette méthode était en
de la haulteur des paroictz vielhes qui y sont desia (et deux vigueur pour les enceintes urbaines ou villageoises pendant
guasons plus hault) sur le hault ara de largeur une canne la guerre de Cent Ans. En outre, on ne peut déterminer
(1,80 m) ou bien le moings sept pans (1,50 m), sera faite jusqu’à quel point cette technique peut être assimilée à celle
de troys guasons vers les foussés, deux guasons vers le de la bauge « traditionnelle », et notamment on ne sait si les
dedans, led. guason n’aura que demy pied (16 cm) de fameux gasons ou guaisons, (voire gachouls430), étaient par
carrure, la fere bien et deument construire, baptir et pouser exemple préparés à l’avance, comme a pu le supposer
lesd. guasons a la ligne et au plom le broug… »427. F. Guyonnet pour une maison de Perpignan (supra), ou au
contraire utilisés directement dans le mur après façonnage.
Le terme « guason » est encore employé au XVIIe siècle
à Castelnaudary, dans une unique mention des délibéra- Il faudrait également savoir dans quelle mesure cette
tions de ville du 2 août 1671 : ce jour-là en effet, on décide technique se rapproche de celle décrite par F. Streiff et
de faire fermer une brèche dans la muraille « qui est du F. Lahure en Normandie (le « gazon »)431, qui utilise notam-

427
Baudreu 2003, 367. Concernant cette citation, M.-C. Marandet relève que l’on « peut aussi penser que les gachouls, la guaison correspondent à un
lit de terre, une banchée » mettant en avant la tournure du texte précisant que « la muraille doit être élevée « deux guaisons plus haut » (Marandet
2006b, 287). Si le terme de « banchée » est impropre en l’espèce (absence de coffrages), on peut toutefois penser qu’à l’instar du mot « tapia » (infra),
et par extension, gachoul ou gason ait parfois pu désigner l’assise réalisée dans cette matière, et non le seul pain de terre.
428
AD Aude, 4E76/BB13, 1671, [f°162 r°].
429
Ibid., 4E76/BB16, 1694, [f°26 r°].
430
Pour D. Baudreu, ces termes sont équivalents : « Le terme gason/guason, déjà repéré à Arzens, est très probablement synonyme de gachol, pain de
terre présentant une arête d’environ 16 cm de long. Leur assemblage forme des deux côtés du mur une sorte de parement plus ou moins épais tandis
que l’espace intermédiaire est comblé par de la terre préalablement malaxée, sans doute après avoir été humidifiée. L’alignement des gasons fait encore
apparaître ici l’usage de la bruyère dont la disposition intercalaire a déjà été soulignée par ailleurs » (Baudreu 2003, 367).
431
Ainsi, « dans la Manche (Le Coutançais et les régions de Gavray et de Brécey), une variante de la bauge a été utilisée : le « gazon ». Le mélange de
terre et de végétaux est préparé selon le même principe, la différence résidant dans la mise en œuvre. Une fois le malaxage effectué, la terre est disposée
en andain d’une dizaine de centimètres d’épaisseur et laissée à reposer plusieurs heures de manière à ce que le mélange perde de l’eau et redevienne
plus ferme. À l’aide d’un outil particulier, sorte de hachoir en métal de la hauteur de l’andain et d’une vingtaine de centimètres de long qui est fixé sur
une pièce de bois reliée à un manche, la terre est alors découpée en « pâtons » ou « gazons ». Ces mottes encore meubles et plastiques sont montées
sur le mur par lits successifs pour atteindre 60 cm à 80 cm de hauteur. […]. Cette technique, contrairement à la bauge, ne nécessite pas que le mur soit
retaillé » (Streiff, Lahure 2003, 319, 320). Selon A. Klein cependant, cette technique du gason nécessiterait au contraire souvent que les parements
soient rectifiés à la batte ou à la trique (entretien personnel).

74
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

ment des végétaux dans sa préparation, fait qui n’est jamais 5.2.4 - La tapia en Lauragais et Toulousain : technique
avéré dans les sources consultées432 : toutefois, en tant que particulière ou terme général ?
variante ou dérivé de la bauge, et comme cela est
mentionné en 1598 à Lézat (supra), cette technique du 5.2.4.1 - Les mentions du terme
gason utilisait des lits de bruyère intercalés avec les Le terme « tapia » se rencontre avec une relative
couches de terre. fréquence dans les documents médiévaux des régions
étudiées, et tout porte à croire qu’il a un rapport étroit avec
5.2.3.2.2 - Des échafaudages ? les murs de terre crue massive, soit qu’il fasse référence à
Les travailleurs mettant en œuvre le gason opéraient une technique particulière pour les édifier, soit qu’il
certainement grâce à des échafaudages sur perches accolés constitue le terme le plus courant, après celui de « paret »,
au(x) parement(s) de la maçonnerie à élever. Cette suppo- pour les désigner.
sition se fonde une fois de plus sur une unique mention de La plus ancienne mention de ce vocable répertoriée
1572 provenant de Lézat-sur-Lèze (Ariège). Lors de la dans le Sud-Ouest de la France date de 1318 : les coutumes
réparation d’une paroict effondrée, les consuls décident de de Troncens (Gers), à l’article 29, précisent en effet que
passer un bail avec un paredier et un charpentier, la ville « fuit ordinatum… quod castrum de Tronsenxis et barre-
étant chargée de fournir « broque, postes et fustaiges pour rium ejusdem claudatur bonis tapiis per ipsum dominum et
fere les enartements » (Lucas 1996, 141). Le vocable homines dicti loci, qua clausura perpetuo teneatur
« enart » d’où dérive le nom « enartement » signifie en integra »435.
effet « échafaud, échafaudage, sorte d’étagère » (Alibert
Au XVe siècle, ce vocable apparaît dans deux textes
1966, 319) et pourrait désigner ici un échafaudage
inédits : le premier, du 17 décembre 1410, provient des
composé de perches et de traverses horizontales (fustaiges)
minutes de Jean Bataille, notaire à Fanjeaux (Lauragais). Il
sur lesquelles reposaient des planches ou bastaings
s’agit d’une plainte déposée par un certain Bertrand-
(postes). Cet assemblage était peut-être renforcé par des
Raymond de Fontaine, milites et seigneur de Belflou, au
étrésillons en croix de Saint-André, structure classique
sujet de sa maison située à l’intérieur des murailles de la
dans la construction médiévale433.
forteresse de Fanjeaux : lors de la construction de l’en-
Il est bien entendu difficile de généraliser à partir de ce ceinte en effet, une partie de sa demeure et d’un lieu
simple exemple, puisque nous n’avons pas d’équivalents contigu ont été bouchés par une fortification de tapia, ce
pour le Lauragais et le Toulousain. Toujours est-il que cette qui le gêne considérablement pour utiliser son bâtiment. Le
méthode nécessitait forcément un dispositif permettant de juge de Lauragais, conscient du problème, l’autorise donc
pouvoir travailler constamment à hauteur d’homme, et ce à réaliser des constructions pour s’affranchir de la diffi-
dans de bonnes conditions de stabilité et de sécurité. culté, tout en prenant garde de ne pas nuire à la défense de
Ainsi, au final, on peut raisonnablement penser que la la ville. Outre le terme tapia, le notaire distingue claire-
technique du gason ou du gaison s’assimile peu ou prou à ment un mur de ladite maison construit en terre (« parietem
une forme de bauge dont elle présente, d’après les rares terre ») d’un mur édifié à pierres et chaux (muro lapidibus
sources recueillies, tous les caractères : en parement, antiquo), preuve de la co-existence de ces types de
montage à la main de pains à l’état plastique (gaisons434 constructions436.
faits de bart), en blocage, utilisation de bart en vrac, Le second document est un acte délivré par Jean Rabot,
absence de coffrages mais nécessité d’un échafaudage pour régent de la viguerie de Limoux (Razès), qui donne
les constructions les plus élevées, et notamment les permission à Arnaud Assalit et Bernard de Maisonneuve,
enceintes. consuls, de procéder au renforcement de diverses parties de

432
Pourtant, le terme même de « gaison », certainement dérivé de « gazon », suggèrerait que cette terre contient des végétaux, soit à l’état naturel, soit
par adjonction.
433
Baud et al. 1996, 18. Le terme de « broque » ou « broc » signifie en effet « bâton, branche ou bûchette » (Alibert 1966, 180) et désignait peut-être
des éléments de moindre section, éventuellement pour étrésillonner.
434
Comme on l’a vu, pour D. Baudreu, ce terme de gason ou guaison est équivalent à celui de « gachoul » cité par P. Cayla (Baudreu 2003, 367 ; Cayla
1964, 346. « Gachoul : boue délayée utilisée parfois dans la construction de murailles… gachouls pour monter parets… (Fanjeaux 1600) »).
435
Monsembernard 1992, 267. En Catalogne cependant, un texte mentionne ce terme dès 1169 (Baudreu 2003, 363).
436
AD Aude, 3E5205, 17 décembre 1410, [f°7 v°1]. « …ad supplicationem nobilis viri domini Bertrandi Ramundi de Fontaynis, milito domini de
Valloflore asserentis se habere tenere, et possidere et habuisse, tenuisse et possedisse ab antiquo tam pro se quam suos predecessores quandam domum
stita infra fortalicium dicti loci Fanujovis cum quadam locata sibi contigua ante constructionem dicti fortalicii paciffice et quiete ; cumque tempore
quod fortalicium dicti loci fuit factam et constructam certa pars locate dicti hospicii de versus cercium in qua penus sive boa dicti hospicii exitum suum
habebat fuerit pro necessitate dicti fortalicii tapta et de supra in parte dictum fortalicium sive [tal. rat.] tapia fortalicii constructa, verum cum de dicta
locata sic tapta maior pars ex extat et restat minus necessaria dicto fortalicio in rei publice, cuius dictus miles necessario indiget pro conservatione
dicte boe sive penoris et dicti hospicii et pro aliis dicto hospicio necessariis construendis et hedifficandi. Id circo, dictus dominus judex Lauragesii…
concesset… pro se et suis hedificandi et construehendi a parte retro domum predicti militis et de versus cercium et versus [usque ad alleyam rat.]
alleyam ultra hedifficamentum nostrum in dicto hospicio factum, videlicet per longitudinem quindecim cannarum incipiendo a muro lapidibus antiquo
a parte meridiey et usque ad alium murum lapides dicti hospicii a parte aquilhonis constructum et quod possit construere de amplitudine deversus
dictum murum a parte aquilhonis per quatuor cannas et 5 palmos faciendo agulam sive punta usque ad parietem terre dicte domus a parte predictum
aquilhonis. Item de amplitudine a parte meridiey incipiendo in pariete dicti hospicii et tenendo usque dictam alleyam duarum cannarum et 5 palmorum.
Item quod habeat de amplitudine ante januam dicti hospicii a parte retro deversus alleyas duas cannas. Item de amplitudine deversus dictas alleyas
ante inhitium muri lapidum a parte aquilhonis ubi incipiet facere angulam sive punta tresdecim palmos reservato trium(?) quod hedifficamentum quod
fiet in predictis non habeat tantum in altitudine quod posset preiudicium facere fortalicio sive muralle dicte ville ut rei publice ».

75
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

l’enceinte de Limoux, qui menacent ruine : cet acte, passé troys canes de largeur dans paret…»445. On a vu plus haut
devant notaire le 29 mai 1460, signale qu’il est nécessaire les incertitudes de traduction du terme « sive » : nous n’y
de réparer un pan de mur construit « ex terra sive tapia »437 reviendrons donc pas. En tout état de cause, cette précision
confrontant notamment un mur de pierre d’une tour signifierait soit qu’il existe seulement deux méthodes pour
nouvellement construite438. Ce texte, très intéressant, insiste construire en terre crue massive, soit que l’on exige l’em-
bien par ailleurs sur le fait que la nouvelle muraille en terre ploi de ces deux manières de bâtir446, en excluant de ce fait
crue doit être bâtie « de tapia sive de terra ad modum tapie tout autre forme de construction empirique n’offrant pas
alterum non esse durabile »439 Ceci laisserait entendre, une garantie de stabilité suffisante pour la bâtisse.
d’une part qu’il existe d’autres méthodes pour bâtir en Par ailleurs, à Toulouse, un « devis et article pour la
terre, et d’autre part que ces dernières ne paraissent pas réparation qu’il faut faire aux murailles de la ville du costé
opportunes à employer, compte tenu de leur manque de de St Cyprien », établi par Jean-Pierre Rivals, architecte-
fiabilité par rapport à celle de la tapia (si ce terme désigne ingénieur de la ville en 1667, constate que « la ville de
effectivement en l’espèce une technique ou une action bien Toulouse est fermée du costé de St Cyprien avec de paroit
particulière). de terre et de distance en distance il y a de grosses tours de
À Toulouse, deux mentions, également inédites, brique qui sont plus hautes que les dittes paroits, au
doivent être signalées : ces mesures de défense, prises en dessus desquelles paroits ou tapies qui sont fort epesses et
1418, visent à condamner certaines portes de la ville au néanmoins ruinées en divers endroits notamment par le pié
moyen de tapias, murs de terre crue élevés à l’extérieur, au du costé de la ville on y a élevé d’autres parois d’environs
devant des portes, dont les vantaux ont été préalablement trois pams [env. 0,67 m] despesseurs et huit pams [env.
1,80 m] de hauteur, en des endroits plus et en d’autres
fermés440. Ce type de condamnation des accès est fréquent
moins suivant que la dite tapie est plus ou moins haute
en cas de menace imminente. Il était également employé à
pour monter au niveau desdites tours servant ladite paroit
Castelnaudary dans la seconde moitié du XIVe siècle, à
d’une courtine au dessus de la dite tapie laquelle courtine
ceci près que le bouchage était à pierres et chaux441.
est couverte de sa doublée de brique pour la conserver… »
Enfin, plusieurs mentions de tapias, datant de la fin du (Leblanc 1983-1984, 54). Cette mention impliquerait donc
XVe siècle, ont pu être relevées dans les comptes consu- pour sa part une adéquation entre le terme de paret, qui
laires de la ville de Riscle (Gers) : elles concernent toutes désigne un mur de terre crue (quelle que soit sa technique)
des enceintes fortifiées et paraissent peut-être, dans un cas, et celui de tapie.
associer les termes bart et tapia, même si l’emploi du
On citera à nouveau à ce stade Catel, qui en 1663 rele-
relatif « et » (« e » en occitan), ne permet pas d’être totale-
vait une différence entre les murs du bourg et ceux de la
ment affirmatif sur ce point442.
cité de Toulouse, lors du siège de Simon de Montfort au
L’usage du terme tapie ou tapia est ensuite plus fréquent début du XIIIe siècle, indiquant que « les murailles sont de
dans les textes aux XVIe-XVIIe siècles en Toulousain, brique ou terre cuite, et les parois faictes de terre battue et
Lauragais, Bas-Razès, Bas-Quercy443, et même dans le formée entre deux aiz. Lesquelles parois nous appellons
Vaucluse444 : en Toulousain, le document du 11 avril 1545 communement tapie » (Catel 1663, 132). On pourrait alors
sur Renneville, déjà rencontré, notifie qu’Ensalbert doit peut-être penser dans ce cas-là que la tapie désignerait
« faire édiffier une maison en peseing de la longueur de six seulement des murs de terre coffrée, et non un autre mode
canes au dedans les paretz qui seront de tapie sive gaso et constructif en terre massive447…

437
On a vu plus haut les difficultés engendrées par la traduction du terme « sive ».
438
AD Aude, 4E206/DD1, 29 mai 1460. « …necessaria reparatione erat et est quoddam frustum muri constructi ex terra sive tapia scituatum sive
confrontatum loco dicto ala Tholosana confrontatur cum pariete lapidea turri novis et cum ipso portale de la Tholosana… ».
439
Ibid. Traduction : « …de tapia et/ou de terre en sorte de tapia, un autre n’est pas durable… ».
440
AC Toulouse, BB3, Mesures de défense générale, 5 janvier 1418, [f°16 r°3]. Travaux réalisés à l’approche du comte de Foix. « Dominus Petrus de
Casilhaco claudantur diversi passi exuntur in clausuris ville et porte claudantur cum tapiis et continuentur excubie in platea petre… » ; [f°17 r°7].
9 janvier 1418. «… et fiat tapia ante portas clausas et quod ordinationes facta actenus super custodia ville tam de die quam de nocte custodiantur et
conserventur… ».
441
Par exemple sur la porte de l’Estrade, où l’on ferme aussi bien la porte charretière que le portail piéton : AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°15 v°4].
« …portaverunt lapides ad claudendum portam de Astrata...» ; [f°20 v°5]. « …quibus fuit manobra ad claudendum portanellum de Astrata ».
442
Parfouru, Carsalade du Pont 1892, 399, [f°27]. « per far la tapias de la bila… » ; [f°28]. « per far lo bart e las tapias au susdit loc » . Egalement,
400, 422, 497. Mentions de 1484 et 1487.
443
Ainsi, « à Montpezat, les maisons et les constructions rurales sont souvent en pisé ou en terre sèche (1656 : une maison de tappias). La terre était
prise sur la pièce de terre où la maison devait être édifiée (1619, Montpezat. « Bail e fere maison… […] seront tenus bastir et ediffier lad. maison a
ung estache de murailhe de tapie faite de terre que icelluy Marsilhac et Mercadié prendront lad. terre de la mesme piesse de terre où led. ediffice ce
doibt construyre » ; Latouche 1923, 385, notes 3 et 4).
444
Dans le Vaucluse, la technique de la tapi semble également en vigueur durant les périodes médiévales et modernes. Ainsi, en pays d’Aigues, une
enquête a révélé l’existence d’une bastide « partiellement bâtie en terre crue ou tapi ». Par ailleurs, « en 1396, à Pertuis, on releva de terre battue les
pans tombés de la vieille enceinte ; à Cucuron, en 1541, lorsque fut passé le prix-fait des nouvelles fortifications, les brèches (nombreuses) des vieux
murs étaient toutes colmatées de la même manière ; à Pertuis encore, la muraille séparant le cimetière de l’église Saint-Nicolas de l’ancien château
comtal, démolie en 1605, se trouvait bastie en terre » (Vaucluse 1981, 108). L’auteur ne précise cependant pas si dans ces deux derniers exemples le
terme de « tapi » a été utilisé dans les sources, ni si ces dernières détaillent réellement la mise en œuvre de ce procédé.
445
AD Haute-Garonne, H Malte Renneville 3, liasse 3, n° 79, 11 avril 1545.
446
À moins, une fois encore, de penser que le vocable « sive » donne ces termes comme équivalents, le mot de « tapie » désignant alors en l’espèce une
construction en bauge.
447
Cette supposition est bien entendu à nuancer puisque l’on peut se demander dans quelle mesure l’auteur est influencé par la littérature antique à
laquelle il fait référence. Avait-il une expérience pratique, ou du moins une réelle connaissance des procédés constructifs ?

76
ESSAI D’IDENTIFICATION DES TECHNIQUES LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

En Toulousain et Montalbanais, l’existence de bâti- désigne au nord et au sud, comme à l’ouest dans les îles, un
ments civils ou religieux « de paroit de tapie » est égale- procédé de mise en forme d’un corps à l’état brut ou frag-
ment attestée à Fronton448 et à Orgueil449 en 1694450. À mentaire, au moyen d’un moule » (Bazzana 1996, 47455). Le
Castelnaudary, seules deux mentions du mot « tapie » ont troisième auteur ne tranche pas véritablement la question,
pu être relevées pour les XVIIe et XVIIIe siècles : la mais semble privilégier une origine hispanique du terme456.
première, de 1685, concernerait un ouvrage d’aménage- Claire-Anne de Chazelles estime pour sa part que « si le
ment urbain451 ; la seconde, du 13 février 1780, a trait à une verbe taipa ou tapia évoque le fait de battre la terre ceci
maison de la ville menaçant ruine452. Même s’ils sont rares, n’implique pas obligatoirement la présence de banches car,
ces témoignages attestent toutefois dans le premier cas la dans plusieurs variantes de la construction en bauge, la
persistance de la technique des murs de terre crue au terre est battue avec une massue ou un gourdin, aussi bien
XVIIe siècle, et dans le second l’existence de bâtiments à la surface de chaque lit de matériau déposé que sur les
civils en tapie à la fin du siècle suivant. Enfin, à Limoux, parements, puisque ce sont les vibrations qui assurent la
des délibérations des XVIIe et XVIIIe siècles mentionnent à cohésion de la masse » (de Chazelles 1999, 253, note 7).
plusieurs reprises des « murailles de tapie » qu’il est Pour D. Baudreu enfin, « la tàpia, dans une aire géogra-
souvent nécessaire de démolir du fait de leur ruine partielle phique qu’il faudrait pouvoir délimiter avec précision
ou de leur dangerosité453. (région toulousaine plus ou moins vaste), peut être tenue
comme un synonyme de paret, terme ayant précisément
Ainsi, les mentions du terme « tapie » sont relativement valeur de mur de terre, y compris pour un mur de fortifica-
fréquentes à partir du XVe siècle pour les régions étudiées, tion. Cette association est clairement explicitée au
constatation déjà relevée par J.-P. Van Staevel454. XVIIe siècle sous la plume de Guillaume de Catel, à propos
5.2.4.2 - Essai de définition de l’ancienne enceinte du Bourg de Toulouse, comme étant
en paroit de terre ou de tapie : la paret ou mur de terre se
Plusieurs auteurs se sont déjà penchés sur l’origine du confond ici totalement avec la tàpia. C’est bien ce qui
terme « tapia » et ses possibles définitions, que ce soit semble avoir été le cas jusqu’au XIXe siècle d’après les
F. Mistral, A. Bazzana, J.-P. Van Staevel, Cl.-A. de indications de textes en Toulousain où les expressions
Chazelles ou D. Baudreu. paroi, paroi de tapie, paroi de bâtisse correspondent à une
Le premier donne comme définition du terme « tapa » ou plusieurs technique(s) de terre massive, rapprochées du
« tasser, fouler, presser la terre » (Mistral 1878 , t. 2, 953), terme pisé par abus de langage » (Baudreu 2007, 43). En
le vocable « taipa » ou « tapia » provenant selon lui de outre, au XIIIe siècle, en Catalogne, la tapia pouvait dési-
l’espagnol « tapiar » et signifiant « piser, battre la terre gner une unité de mesure correspondant à environ 0,90 m
entre deux planches » (Ibid., 954). Quant au deuxième, il de haut (soit la hauteur d’une banchée), voire, en
précise « que s’il n’est pas surprenant que, dans le monde Languedoc occidental, et par extension, une maison de
andalou et maghrébin, l’espagnol tapial, le portugais taipa terre ou une dépendance agricole (Baudreu 2003, 363,
et l’arabo-berbère tâbiya aient un sens voisin, pourquoi ne 364).
pas accepter une origine commune dans un occident médi- La question de l’origine du terme « tapia » (et celle de
terranéen utilisant les racines tbl et tpl- au terme qui sa, ou de ses acceptions) ne paraît pas prête d’être tranchée,

448
Haute-Garonne, village situé à une trentaine de kilomètres au nord de Toulouse.
449
Tarn-et-Garonne, village situé à environ 7 km au nord de Fronton.
450
AD Haute-Garonne, H Malte Reg. 418. 1694. Fronton. [f°349 r°1]. « À la suite de la dite tour et joignant l’église il y a un petit bastiment fait en
apend fermé de paroit de tapie couvert de tuille canal… » ; [f°358]. Orgueil. « Maison presbiteralle. De ladite église sommes allés visité le presbitère
qui est à cent pas d’icelle basti à bas étage sur de paroit de tapie couverte de tuille creuse… ».
451
AD Aude, 4E76/BB15, [f°12 v°]. En mai 1685, le travail de la terrasse des Cordeliers a débuté, « l’intendant ayant faict faire une muraille de tapie
de longueur de treize canes et demy dans le fossé de la ville et auprès de la petite porte de Contresty… ».
452
Ibid., 4E76/DD23, 8e liasse : 13 février 1780. Immeuble Roux. Verbal, conclusions et ordonnances pour la démolition d’une maison acquise par le
sieur Antoine Rous, bourgeois. « …de suite avons mandé à venir Joseph Boyer, charpentier et Jean Rigaud, maçon de cette ville, hommes de l’art qui
sur la réquisition du dit procureur du roy ont examiné la ditte maison et ont trouvé que le mur de tapie cotte d’auta sur la nouvelle rue a 3 cannes
6 pans longuer et 3 cannes 4 pans hauteur et du cotté du midy sur la rue de la cave aussy en tapie 2 cannes 2 pans longueur sur trois cannes de haut
et que le tout est hors de son plom et menace par sa grande vétusté une ruine prochaine… ».
453
AD Aude, 4E206/DD2, 17 septembre 1602. Bail des réparations fait par les consuls de Limoux devant le viguier. Contrat pour Blanchard. « Ledit
seigneur viguier… ont baillé à Jean Blanchard charpantier dudit Limoux pour et aceptan a faire la courtine et comble d’icelle de la muraille neufe et
pierre de tailh et autre muraille de tapie joignant la tour de nouveau faite entre le portal de la Goutine et la tour dite de Barbal ensemble d’auta
muralhe aussy de tapie quy est entre le valonard de la Trinité et la tour ronde le tout pourvant faire cent vingt cinq canes de longueur ou environ… » ;
délibération concernant des réparations à faire aux murailles de la ville et au pont-vieux, 13 décembre 1625. ; « …qu’il seroit bon de faire une murailhe
à pierre chaus et non de terre tapie comme elle estoit… » ; Ibid., 4E206/DD4. Devis des réparations à faire aux murailles de la ville de Limoux.
25 mars 1741 ; « Les murailles quy forment l’enceinte de la ditte ville sont baties pour la plus grande partie de terre appelée tapie ce quy fait que
les pluyes et les neiges y font des sillons et les font crouler insensiblement, lesquelles murailles il convient de faire démolir et reconstruire incessa-
ment à pierre chaux et sable en la forme quy sera sy après expliquée en laissant subsister la partie des dites murailles quy se trouve batie a pierre
chaux et sable » ; Ibid, 4E206/DD5. Devis pour la tour de la porte de la Toulzane. 29 mars 1768. « Il faut achever de démolir une muraille de tapie
dont partie a croullé du cotté d’aquilon de la dite tour depuis la voute jusques au couvert et construire à neuf une muraille à pierre chaux et sable
jusques audit couvert avec la cantonade du cotté d’auta… ».
454
« Les formes provençales tàpia, tàpi, tàpio, […] semblent quant à elles devenir d’un emploi plus fréquent dans le Sud de la France aux XIVe et
XVe siècles » (Van Staevel 1999, 107).
455
Pour un panorama récent de l’emploi du terme « tapia » dans les sources hispaniques, voir : Font Arellano 2007.
456
« Les formes provençales tàpia, tàpi, tàpio, vraisemblablement dérivées de la tapia hispanique…» (Van Staevel 1999, 107).

77
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

que ce soit pour les territoires d’Al Andalus ou pour le Sud terrain » (Ibid., t. 1, 161), certainement dans un sens plus
de la France, pris dans un sens large. large. Le vocable tapia -même si cela peut paraître curieux
Ce vocable a d’ailleurs pu avoir, selon les lieux et les compte tenu de la proximité orthographique- pourrait ainsi
époques, des sens différents correspondant peut-être à des n’avoir aucun point commun avec le terme berbère tabiya,
techniques distinctes. Concernant l’origine du mot et son et être finalement une évocation d’une action de tassement
sens, la racine de tapia, « tap », peut désigner un (avec les pieds ou un instrument ?) n’impliquant pas forcé-
« bouchon » (dans le sens de « fermer en pressant » ?) mais ment la présence d’un coffrage457.
également de « l’argile jaune ou bleue » (Mistral 1878, t. 2,
953), ce qui ne serait d’ailleurs pas forcément contradic- On aurait donc finalement tendance à penser, à l’heure
toire puisque les premiers opercules étaient peut-être en actuelle, et à l’instar de D. Baudreu, que le terme de tapia
terre… Mais ce terme désigne également le « sous-sol » est un équivalent de celui de paret, désignant ainsi dans le
(Ibid.), peut-être dans le sens de « terre fermée » ou tassée, Sud-Ouest de la France un mur de terre crue massive, qu’il
à l’état naturel, vocable éventuellement à l’origine du mot s’agisse d’une construction utilisant ou non des coffrages,
« atapi, tapi » signifiant « fouler, piétiner, tasser un et que cette construction soit civile, religieuse, ou militaire.

457
Cette hypothèse selon laquelle le terme « tapi » sous-entendrait une notion de tassement pourrait-elle se fortifier grâce à une mention provenant des
délibérations consulaires de la ville de Limoux, datée du 13 décembre 1625 ? En effet, à cette date, on relève la formulation « murailhe […] de terre
tapie comme elle estoit… » qui paraît indiquer que le terme « terre » utilisé seul ne peut décrire le mode de mise en œuvre du matériau, ce qui oblig-
erait à utiliser le mot « tapie » pour indiquer que le mur est bâti avec de la terre tassée. Le mot « tapie » apparaîtrait alors ici comme un qualificatif et
un adjectif du mot « terre », et non comme un nom qui suffirait à lui seul à expliquer l’ensemble de la méthode de construction (AD Aude, 4E206/DD2.
Délibération concernant des réparations à faire aux murailles de la ville et au pont-vieux. 13 décembre 1625. « Du treitsième décembre mil six cent
vingt cinq dans la maison consulaire et la ville de Limoux…[…] qu’il seroit bon de faire une murailhe à pierre chaus et non de terre tapie comme
elle estoit… »).

78
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS, P. 79-105 LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Chapitre 6

Nature, place et rôle des fortifications de terre massive


à Castelnaudary pendant la guerre de Cent Ans

Les murailles des agglomérations comme Castelnaudary, 6.1.1.1 - La fondation du « pied » de la paret
Albi ou Toulouse étaient donc bâties la plupart du temps
À Castelnaudary, c’est l’expression « far la cavalha »
selon la technique de la « paret coffrée ».
ou « cavar fundamentum » qui décrit l’action de creuser les
Dans la fortification chaurienne, mais également en fondations de la base de l’enceinte. La main d’œuvre
Toulousain, les enceintes de terre crue occupent une place
employée, toujours masculine, est présente en petit nombre
prépondérante au bas Moyen Âge. Construites selon un ou
plusieurs procédés que l’on a tenté d’identifier, elles (groupes de deux à quatre individus)458. Mais dans certains
forment l’ossature principale des ouvrages de défense, cas le creusement de « cavalhas », sans précision géogra-
qu’il s’agisse de courtines, de portes, de tours, et quelque- phique (pour un pal ? une paret ?), enrôlent au contraire un
fois de barbacanes. personnel beaucoup plus nombreux (quelquefois une quin-
zaine de personnes)459.
6.1 - Les courtines
Les courtines en terre crue constituent le cœur du
système de défense médiéval en Lauragais et Toulousain. Cette action devait néanmoins s’effectuer au moyen de
Au sein de ces constructions, les sources distinguent essen- pics ou picas, les décombres (éclats de rocs, terre460) étant
tiellement trois parties : la base, l’élévation, et enfin le pour leur part évacués au moyen de paniers461.
parapet surmonté d’un crénelage.
Lorsqu’une paret s’effondre par accident ou manque
6.1.1 - Le « pied » de la paret d’entretien, les consuls font déblayer l’ensemble de la
masse de terre écroulée462 en faisant rechercher (perquire,
Les textes chauriens emploient le vocable imagé de
« pied » pour désigner le mur maçonné à pierres et chaux serquar463) le « fundamentum », c’est-à-dire la base à
servant de solin à l’enceinte en terre crue. La construction pierres et chaux, opération qui dure quelquefois plusieurs
de cette base nécessite parfois un arasement du substrat ou jours et emploie entre deux et six personnes464. Cette opéra-
le creusement de fondations. tion est quelquefois déléguée à un charpentier, tel Pierre

458
AD Aude, 4E76/CC48, mars 1362, [f°110 r°5]. « Item Pontio Lananerii, Petro Messerii, Hugoni Calveta, Johanni Audonni qui diebus mercuri et
jovis fuerunt ad faciendum cavalham in pariete portus Bordarum… » ; [f°118 v°4]. « Item Bernardo Trilha, nuncio Ramundo Johannis qui per unam
diem fuerunt ad cavandum fundamentum parietis portus Bordarum... ».
459
Ibid., 1361, [f°124 v°1].
460
Ibid., 4E76/CC69, 1419, [f°46 v°2]. « …an Bertran Manent per quatre jorns que avian estatz a tyrar la tera que gitavan de la cavalha... ».
461
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 bis r°10]. « Item Johanni de Blanh pro novem panherios emptis ad caregandum in cavalhis… ».
462
AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°73 r°2]. « …ad aperiendum et curandum fundamentum dicte parietis qui ceciderat pro incipiendo alium pari-
etem novum… ».
463
Ibid., 4E76CC51, 1366, [f°73 r°2]. « ...a serquar le fondament del cap de la paret nova ques a la Baffa entre la nova e la vielha… ».
464
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°4 v°1]. « …cum quidam paries qui erat in clausuris prope portam de Got Feran cetidisset [dicti d. rat.] fecerunt perquire
dicti dicti (sic) consules fundamentum dicti parietis causa ipsum reficiendi ubi steterunt dicta die Ramundus Blanquerii et alii quinque homines
extraneii… » ; [f°4 v°2]. « …Johanni Auriolli et Arnaudo [Johanni rat.] de Vineriis, Petro Bruelli, Guillermo de Lobinhat, Petro Rocelli et Ramundo
Blanquerii qui dicta die fuerunt ad cavandum fundamentum dicti parietis diruti juxta portam de Got Feran... » ; Ibid., [f°10 r°1]. « ...fuerunt ad
cavandum fundamentum illius muri diruti retro hospicium domini Petri Raynardi… ».

79
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Saurin, également chargé de réaliser l’élévation en terre lieux, comme à Aiguesvives (Haute-Garonne), au Thil, et à
d’une muraille au port de l’Estrade465. Esparsac (supra), voire à Castelnaudary même, où des
Ailleurs, en Forez, région où la terre crue massive est lettres d’Arnaud d’Audenham du 26 septembre 1362, (vidi-
aussi utilisées pour les murs de fortifications, M. Gonon mant celles du comte de Poitiers du 9 juin 1360) précisent
signale que « les fondations ne semblent de rigueur que que certains pans d’enceinte se sont effondrés en raison de
pour les bâtisses importantes », en l’espèce un mur d’en- « l’imperfection et de l’insuffisance des fondations »469.
ceinte de la ville de Feurs466. D’après les comptes chauriens pourtant, les solins sont
systématiquement à pierres et chaux470 : c’est le verbe
6.1.1.2 - Le solin, « pied » de la paret : élévation et
« sospeyrar » (littéralement : « empierrer en dessous »471)
composition
qui décrit l’action d’édifier cette construction472. Le mortier
6.1.1.2.1 - Solin à pierres et chaux nécessite sable et chaux à pied d’œuvre473 et les pierres sont
souvent transportées par des bêtes474, mais quelquefois par
Pour être correctement assise et surtout tenue hors
d’eau, la paret en terre crue a donc besoin d’un solin des hommes, faute d’animaux suffisamment dociles pour le
maçonné dont les dimensions ne sont pratiquement jamais charroi475. Il s’agit quelquefois de pierres de récupération476,
précisées : une seule exception cependant, pour le tronçon de déchets de taille, voire de décombres (reble), ces derniers
d’enceinte limouxin dont la réfection est envisagée en 1460 étant vraisemblablement destinés au blocage du solin477.
(supra) ; afin d’éviter un nouvel effondrement, on prévoit Un autre terme (« ampesament » ou « pesament ») n’a
de refaire la base du mur en « paret » (donc en terre) ou en pour sa part aucune définition précise mais dispose d’amé-
pierres, sable et chaux, sur une épaisseur de treize palmes nagements particuliers (infra). Désigne-t-il une zone parti-
(env. 2,90 m ?) et une hauteur de douze (env. 2,65 m ?)467. culière du « pied » de la paret ou se confond-il avec lui478 ?
La fondation des enceintes directement sur le substrat a Constitué de pierres liées à la chaux479, sa construction
en effet été pratiquée à Limoux468 mais aussi dans d’autres requiert parfois la présence d’un maçon durant cinq jours480.

465
Ibid., 4E76/CC49, 28 mai 1363, [f°24 r°4]. « ... magistro Petro Saurini pro faciendo parietem de la Strada videlicet pro 126 brachiatis parietis qual-
ibet brachiata 10 palmorum que fuerunt mensuratas per Michaelem Bartas pariatoris prout retulit dictis dominis pro qualibet brachiata duos florenos
auri et septem gros argenti, assendunt 325 florenos auri. Item dicti domini consules dare fecerunt eidem pro faciendo cavalham dicte parietis ubi asse-
tiaret eam 40 florenos auri... ». La somme versée, très importante, indique que le travail réalisé est allé bien au-delà d’un simple aménagement du
substrat (infra).
466
« pro facere quendam fortificationem, murum de terra et pisonem de subtus » (Gonon 1975, 351).
467
AD Aude, 4E206/DD1, 29 mai 1460. « …propter opportet dictum frustum muri in terram penitus postrari et eius cossole sive pes ipsi muri reffici
de pariete sive caussolo de calse arena et lapidibus ad perpetuam custodiam in amplitudine tresdecim palmorum et in altitudine duodecim vel
circa… ». Rappelons pour mémoire que la hauteur du solin observé à la Digne d’Aval (Aude) est de 3,20 m (supra).
468
Dans cette ville en effet, un procès-verbal de 1770 semble indiquer qu’une paret possède une base en terre, sans autre forme de solin. Cette dernière
étant sapée (probablement par les eaux de pluies) il convient de démolir la muraille pour éviter sa chute accidentelle : AD Aude, 4E206/DD4, verbal
dressé par M. Clercy Poulhairié et Flandry commissaire nommé par délibération du 6e aoust 1770 au sujet du mur de terre éboulée sur la muraille que
le dit Pechou construit à la Petite Ville. « Nous avons encore remarqué que partie du pied de la muraille de terre de laquelle les religieuses du Saint-
Antoine se sont chargées de faire la démolition se trouvant creusée au pied et le dit pied beaucoup plus mince que la partie qui est au dessus il se
voit nécessaire de la démolir jusque au dit creusement pour éviter la chute de cette partie qui venant de crouller causeroit un grand domage a celle
qu’on construit actuelement… ».
469
AD Aude, 4E76/AA1, [f°67v°-69r°], acte XXIIII, 26 septembre 1362. « …necessarium dictam clausuram et fortalicium perfici et repparari propter
inperfecta et insufficiencia fundamenta dictarum clausurarum que pro maiori parte ruerunt seu minantur ruinam ».
470
Comme dans la construction civile aixoise, la chaux est toujours achetée vive (oxyde de calcium). Elle « est ensuite hydratée par aspersion et donne
de la chaux éteinte (hydroxyde de calcium) » (Bernardi 1995, 169, 173). Par exemple : AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°115 r°3]. « …pro amortisando
sertam quantitatem de caus, et faciendo morterium cum arena… ». Cette chaux paraît éteinte sur le chantier même, et était donc transportée depuis le
Mas Saintes Puelles sous forme solide, car « la chaux vive se présente sous la forme de blocs dont la pulvérisation s’obtient par hydratation lors de
l’extinction » (Bernardi 1995, 173).
471
La grande fréquence de ce verbe dans les dépenses exclurait a priori la notion de « reprise en sous-œuvre ».
472
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°6 v°5]. « ...qui per duos dies fuerunt manobricii ad sospeyrandum illum parietem... ». Ce mot ne doit pas être
confondu avec « suspeyrar » (infra).
473
Ibid., 1361-1362, [f°109 r°9]. « Item Johanni Engles de Manso pro calce portata ad opus muri portus Bordarum…» ; [f°109 v°1]. « ...Johannis
Pueg pro portu arene et petre in opere muris portus Bordarum…» ; [f°118 v°5]. « Item Johanni Pueg seu eius filio pro cavando arenam ad opus muri
faciendo in dictis parietibus… ». À Castelnaudary, comme à Aix, il semble que « l’on n’assiste pas à l’exploitation organisée de véritables sablonnières
mais à la multiplication de lieux d’extraction éphémères. Cet aspect de la production est souligné, lors du prix-fait de l’hôpital St Jacques, par l’obli-
gation faite aux ouvriers de reboucher en fin de chantier le trou d’où aura été tiré le sable » (Bernardi 1995, 159). En effet, en l’espèce, le terme « cavar »
(creuser) indiquerait une extraction sommaire dans un lieu qui, on le voit, n’est pas déterminé.
474
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°21 v°2]. « …Johanni Carrerie pro uno jornali quo fuit cum suo animali ad portandum lapides in muro portus
Bordarum… » ; [f°22 r°4]. « ...quelibet cum uno animali ad portandum petram ad opus fundamenti parietes de Strada… »
475
Ibid., 12 juillet 1363, [f°54 r°1]. « …Petro la Fagia, Petro de Maseriis, G. la Casa, Ramundo de Artigua, Johanni de Mespol pro portando dictas
tres brachiatas petre quibus fuerunt magistro Petro Robberti de Platea ad pedem parietis de la Strada que non reperiebantur animalia qui vellent
stare pro portando dictam petram... ».
476
Ibid., 1363, [f°59 v°4]. « …pro portando quandam quantitatem petre que fuit de locali Petri Caramani in pede parietis de la Strada... ».
477
Ibid., [f°46 v°2]. « …pro portando petram et reble ad opus assetiamenti pede parietis de la Strada… » ; Ibid., 4E76/CC69, 1420, [f°47 r°4]. « …per
tres brassas e miega de peyra e per reble per far lo fondament de la dita paret… ».
478
S’agit-il d’une cacographie ou d’une variante de « peazon » ou « pezazon » qui désigne un « lot de terre », un « emplacement pour bâtir » ou un
« fondement » (Lévy 1909, 284), voire une « fondation » (Nicolas 2005, 324).
479
AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°40 v°4]. « …per caregar de la arena del camp den Joan Raynaut le cal sete am le pueg de Cuquels la cal arena
portet per far le mur de la pezament de la paret la cal se fa a la porta Mondebo… ».
480
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°116 r°2]. « …pro quinque jornalibus quos stetit ad faciendum ampesamentum de petra parietis nove de la Strada… ».

80
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

À Albi, deux autres vocables, « entrepeirar » ou au niveau d’une paret mitoyenne, afin que l’eau ne puisse
« entrepeirament », sont définis par A. Vidal comme « l’ac- stagner au pied de la construction493.
tion d’intercaler des pierres dans une construction en La proportion de solins à pierres et chaux dans les bases
torchis ». Cependant, à la lumière de l’exemple proposé par de paret en Lauragais devait dépendre de la possibilité
l’auteur, « entrepeirament » désignerait plutôt dans cette d’accéder -ou non- à quelques rares bancs de pierre, voire
ville la base en pierre de la paret481. Le verbe, formé de à des galets. Dans les autres cas, ou lorsque l’on ne dispo-
« entre » (entre) et de « peyrar » (empierrer), signifie donc sait pas des moyens nécessaires (techniques ? financiers ?),
« bâtir le pied de la paret » « entre » cette dernière et le on pouvait opter pour des bases en terre crue recouvertes de
substrat, et serait donc synonyme de « sospeyrar ». briques cuites.
Mais c’est le mot « pilar » ou « pilarium » (pilier ?482),
souvent cité dans les comptes chauriens, qui pose le plus de 6.1.1.2.2 - Solin en terre crue et briques cuites
difficultés. Il semble dans certains cas désigner un élément Avec les bases en terre et les solins à pierres et chaux,
de fondation de la paret, mais on ne sait véritablement de il s’agit du troisième et dernier mode d’édification des
quelle manière il peut se distinguer du « pied ». Composé « pieds » de paret identifié à travers les sources. Il a pour
de pierres483 liées au mortier de chaux484, ce pilar nécessite l’instant principalement été reconnu à Toulouse grâce aux
parfois l’aplanissement ou le creusement du rocher afin rares mentions, parfois peu claires, du compte de 1354-
d’être placé, voire la réalisation de « trous »485. Ils sollici- 1355494 : ainsi, en janvier 1354, Raymond de Cas, maçon,
tent l’intervention de maçons486, et servent apparemment de reçoit un contrat à prix-fait pour réaliser « le manteau au
support à des étais (en bois ?) de la paret487. Pourraient-il pied de la paret près de la porte de Montgaillard pour
désigner des piliers soutenant la coursière du côté intérieur maçonner de briques avec du mortier de terre et après
de la place, comme le suggérerait une dépense de 1366488 ? couvrir de mortier franc »495.
Enfin, ils permettent aussi parfois de stabiliser des étais Le vocable de « mantel » ou « manteau », à l’instar du
soutenant les hourds489 mais rien ne permet de penser que terme imagé de « pied » (pe, pes), désignerait l’application
les trois acceptions en vigueur à Aix aux XVe-XVIe siècles d’un parement de briques cuites sur un noyau en terre (et
peuvent s’appliquer à Castelnaudary490. non pas une base pleine en briques cuites et chaux), un peu
Un autre terme, au sens obscur, apparaît à une seule à la manière d’un manteau protecteur couvrant le mur de
reprise dans les comptes chauriens ; vers le 10 septembre terre pour empêcher le travail de sape des eaux de ruissel-
1366, trois hommes, dont le premier, Arnaud Masip, est lement496. Si cette interprétation s’avérait juste, on aurait là
vraisemblablement paredier, restent pendant une journée une solution intermédiaire entre un « pied » de paret entiè-
pour « atalussar » la base d’une paret491. S’agit-il d’un rement en terre crue, vulnérable à l’eau, et une base à
synonyme de « talutar » ou « talussar »492, indiquant que pierres et chaux, particulièrement résistante.
ces personnes ont élevé ou rectifié le talus (base de la paret Cette action de parementer est également désignée par
ou solin à pierres et chaux ?) de la paret ? Dans le même le terme « caussar » (chausser) qui, toujours dans le
registre, on mentionnera un règlement de police consulaire registre de la métaphore, fait part de la volonté de mettre le
de 1413 dans lequel un voisin est chargé de « far un talus » « pied » de la muraille hors d’eau.

481
Vidal 1911, 254. « Disero los juratz, que lo pe de la dicha paret… sia entrepeirada… loqual entrepeirament monte en aut entro que la dicha paret
demore… en segur ».
482
« Pilar : pilier, pile, colonne » (Lévy 1909, 294).
483
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°111 v°4]. « ...quinque brachiatas petre de peyreria ville et de qua abstraxerunt unam brachiatam et mediam
et medium cartonem que positi fuerunt in pilario... ».
484
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°75 r°6]. « …per 10 semals de mortier que fo mes a l’obra dels pilars de las paret dels Frayres Menors… ».
485
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°94 r°7]. « ...qui fuerunt die presenti ad cavandum rupem retro Bertrandum Oliba ubi fuit factus pilarius...» ;
1359-1360, [f°7 r°4]. « ...qui dicta die curavit fundamentum cuiusdam pilarii facti in clausuris portus Bordarum...» ; Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°59
v°3]. « ...que aquel dia stero affar les clotz per far les pilars de las paret de la Baffa… ».
486
Ibid., [f°55 v°4]. « …a mastre Johan Gualiguo et a mastre P. Gast peyreros per far les pilars e esclapar la peyra de las paret de la Baffa… ».
487
Ibid., [f°59 v°1]. « …a mastre G. Augeri, per una brassa de peyra que fo meza als pilars en que son mezes les stant de las parets de la Baffa… ».
488
Ibid., [f°60 r°4]. « …an Johan Fizas, Bertholomei Ribiera que aquel dia stero afar les clotz dels pilars de las paretz de la Baffa costa le portanel
de Fizas… ».
489
Ibid., [f°60 v°2]. «…stero ad esclapar peyro per fa les pilars en que son fermat les stant dels embans de la paret dels Frayres Menors e de la
Baffa… ». Est-on ici en présence de corbeaux en pierre ?
490
« Pilier, pilar, pilarium : chaîne d’angle, piédroit de porte, noyau d’escalier en vis » (Bernardi 1995, 456).
491
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°71 r°1]. « …an Ar. Massip, Ar. Guaret, Ramon Huc que aquel dia stero ad atalussar la paret vielha de la Baffa… ».
492
« Talussar, talutar : élever ou couper un talus » (Alibert 1966, 649).
493
AD Aude, 4E76/FF20, 1413, [f°X r°1]. « …et que le dit R. de Vilanova aya a far talus de costa la paret detras l’ostal de dona Gimela asi que l’aygua
no se pusqua a demorar…».
494
Selon Cl. Rivals, la première période de prospérité de la brique cuite est à mettre en rapport avec l’essor des bastides en Toulousain, aux XIIIe-
XIVe siècles. Selon lui, « la brique constitue un matériau de qualité, résistant, digne de rivaliser avec la pierre […]. Aussi est-elle très tôt, appelée à
remplacer la pierre, fort rare, onéreuse, et trop souvent friable, réservée à l’architecture monumentale dont elle est loin d’avoir le monopole : même
églises et châteaux sont en majorité de brique » (Rivals 1979, 36).
495
AC Toulouse, EE32, janvier 1354, [f°27 r°3]. « An Ramond de Cas, massonier. Dem a pres fait per far le mantel al pe a la paret costa la porta de
Montgalhart per massonar de teula ab mortier de terra e apres bassar de mortier franc… ».
496
Cette déduction a été en partie suggérée par un devis de réparation toulousain de 1667 pour les murailles de l’enceinte près de Saint-Cyprien : « ladite
paroit d’une courtine au dessus de la dite tapie laquelle courtine est couverte de sa doublée de brique pour la conserver… » (Leblanc 1983-1984, 54).

81
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Ce parement se compose donc de briques cuites faudra mettre un tiers et un sixième sur pareille quantité de
(teula)497 ou « teula plana » (brique plate) nécessaires en sable de rivière et lorsque le sable de rivière se trouvera
très grandes quantités : 17000 éléments et cinq charges plus grainé qu’à l’ordinaire, et qu’il y aura de petit gravier
(env. 660 kg) pour « chausser » la paret près de la porte mêlé parmi, il faut doubler le mortier, c’est-à-dire mettre
Montgaillard498. À Albi, on utilise un millier de tuiles pour autant de chaux que de sable. Il est à présumer que les
le « mur de la Brique, devant l’hôpital », mais il est diffi- auteurs qui ont défendu de doubler le mortier ne connais-
cile de savoir si elles sont destinées à un mur entièrement soient point la qualité de la chaux de Bourret. Il y a autant
en briques cuites ou seulement à la base d’une paret en d’inconvénient de mettre trop de chaux que de l’épargner ;
terre crue499. Des femmes sont employées comme c’est pourquoi l’on doit faire usage de tout ce qui vient
manœuvres à cette occasion500. Dans cette ville, des dispo- d’être dit, et prendre garde à la qualité du sable qu’on doit
sitions consulaires existaient afin que la base des maisons, employer, car il y en a de bon et de mauvais dans la rivière
en terre crue, soit « chaussée » de briques cuites501. de Garonne. Le bon, qui est grainé et craque dans la main
À Castelnaudary même, de rares constructions civiles, lorsqu’on le presse, est celui qu’on pêche dans le milieu de
difficilement datables, utilisent des solins de briques cuites la rivière ; le mauvais, au contraire, se trouve sur les
liées à la chaux pour constituer une base pleine (fig. 30), bords ; il est fin, et l’on ne peut en faire que de très mauvais
mais ce phénomène semble rare. mortier » (Lebrun 1753, 44).
À Toulouse, les termes « caussar » et « mantel » sont À Toulouse, la provenance de la chaux est inconnue,
quelquefois associés à celui de « pilar », qui peut désigner mais à la différence de Castelnaudary, elle devait être rare
un pilier de briques cuites soutenant ou étayant une paret et donc chère, puisqu’il n’existe à notre connaissance
endommagée502. aucun banc calcaire à proximité de la ville505. Si l’on se fie
La provenance de ces briques est parfois évoquée : aux affirmations de M. Lebrun pour le XVIIIe siècle, on a
tuilerie, briqueterie privée (teularia)503, maisons ou peut-être employé dès le Moyen Âge la chaux de
enceintes en cours de destruction504. Elles sont liées au Bourret506, dont la qualité serait, aux dires de l’auteur, assez
moyen d’un mortier de terre (infra) puis le parement est médiocre.
consolidé ou crépi (bassar ?) par du « mortier franc ». Les documents et la bibliographie507 confirment ainsi la
Comme le détaille M. Lebrun en 1753, ce dernier « doit présence de terre cuite dans la fortification toulousaine
être composé d’un tiers de chaux de montagne et de deux sous forme de briques dès le milieu du XIVe siècle.
tiers de sable de rivière bien grainé. Si au lieu de chaux de Ailleurs, comme au village de Montréal (Aude), les délibé-
montagne on est obligé de se servir de chaux de Bourret, il rations de ville font mention de la construction d’un four à

497
Ne pas confondre avec « teule » (tuile canal).
498
AC Toulouse, EE32, janvier 1354, [f°28 v°2]. « A mastre Ramon de Pueg Casquier deven per 7 milhers e 5 saumadas de teula plana que avia a la
sieu teularia que avet preza a obs de far lo mantel e de caussar la paret costa Montgalhart… » ; février 1354, [f°35 v°2]. « …per 10 milhiers et mieg
de teula que a mezes a Montgalhart a caussar la paret…».
499
Vidal 1911, 46, 1381-1382, [f°75 r°]. « Sec se la mesa facha per lo mur de la Teula de davan l’ospital » ; 744. « A mastre Guilhem Garnier per 1
milhier de teula vielha que aguem de lu ad obs del dig obratge ».
500
Ibid., 762. « Le dia desus, per 12 femnas per servir e per far la manobro e per portar e amassar teula al dig obratge ».
501
Caussada : « disero… que lo dit Guiraut avia caussada la paret del seu hostal… de terra, que far non devia ; que la dicha caussada de la terra se
voste… e que la hi fassa de teula » (Ibid., 249).
502
AC Toulouse, EE32, 1355, [f°131 v°1]. « Dem a pres fait an Ramon de Coss, massonier per caussar e far mantel e pilars a la paret fenduda sus
le valat de costa la porta de Matabuau ». Ces pilars seraient peut-être dans ce cas-là à rapprocher de ceux rencontrés à Castelnaudary (supra).
503
Ibid., [f°28 v°2]. « A mastre Ramon de Pueg Casquier deven per 7 milhers e 5 saumadas de teula plana que avia a la sieu teularia… ».
504
Ibid., [f°37 v°2]. « Item bailem a mastre Ramon den Tholosa paredier del Tilh per razo de deffar le mur de reure l’ostal del P. Bosc e per mudar la
teula aisinat… ». Ibid., CC2324, 1405-1406, [f°94 r°5]. « Item may es degut per lo pres fayt qu’estat baylat de per deffar los murs vielhs qye eran
tras lo collegi de S. Steffe e per portar los dit pertraytz teula e reblo dels ditz murs a la obra novelament fayta l’an present » ; [f°94 r°6]. « …per sos
trebalhs fayts l’an present per mandament dels senhors a decebre teula, cautz arena calhau e autras causas apartenous a la obra de la muralha fayta
l’an present ».
505
AC Toulouse, EE32, mars 1354, [f°36 v°1]. « Prezem den Iahn de Larca caussinier de San Subra a II de marz 8 mieg de cautz que fom portat a
Montgalhart 2 miegz per bassar al mantel del pe de la paret de naut… ».
506
Village du Tarn-et-Garonne, à environ 50 km au nord-ouest de Toulouse.
507
L’existence à Toulouse de ces différents matériaux, assemblés ou formant un tout dans les fortifications du Château Narbonnais, ressort d’une descrip-
tion, certes quelque peu obscure, relevée par J. Chalande au début du XXe siècle. « On ne connaît de l’origine du Château Narbonnais que les légendes
rapportées par Noguier, qui ne sont pas à retenir, et de sa topographie, de son étendue et de son architecture, que la description confuse de ce même
auteur, qui écrivait au seizième siècle, au moment où le célèbre Nicolas Bachelier entreprenait sa démolition. Noguier, qui s’appuie sur le témoignage
de Bachelier dit : le château avait deux grandes tours, l’une regardant le Midi, l’autre le septentrion… fabriquées de terre ferme, de terre cuite, de
cailloux, joints à force de chaux vive… et de grosses pierres de taille, ayant plutôt l’apparence de dépouilles, reliques et vestiges de ruines d’autres
bâtiments, que d’avoir été faites à propos,… lesdites pierres n’étant d’aucun mortier ou ciment assemblées, mais seulement l’une à l’autre crampon-
nées » (Chalande 1914, 223). Les pierres de taille en question étaient des remplois de l’enceinte antique de la ville.
Par ailleurs, selon Ph. Wolff, les consuls toulousains envisagent même, après la reprise de la guerre entre la France et l’Angleterre en 1415, de remplacer
totalement les murs de terre en ruine par des murs de briques et de pierres : « En 1417, on constate qu’il « faut nécessairement, pour deffault de peuple
et la conservation ou fortification de la dicte ville, que les murs principaux d’icelle, qui sont de terre et ruineux, soient refaits et apetissés de circuite,
et faitz de brique et de pierres à grosses tours » (AC Toulouse, AA37, 43 ; considérants de la concession d’un souquet, tirés d’une requête des capi-
touls) ». (Wolff 1954, 98). Par ailleurs « en 1353, Jean II mande au maître des forêts de Languedoc de donner aux capitouls 100 arpents de menu bois,
dans la forêt royale du Fousseret, pour la cuisson des briques destinées aux fortifications (AC Toulouse, AA 37, 107). En 1369, la barbacane de la
porte Saint-Etienne est faite en briques (CC687 bis, f°14). Livraisons de briques en 1440-1442 : St. S., reg. 154, [f°19 v°], [f°34 et 35] ; noter cepen-
dant que Constanty s’engage à élever les murs, près de la porte Arnaud Bernard, de tegulis planis et terras lisa [f°35]. » (Ibid., 98, note 238).

82
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

briques à la fin du XVe siècle, mais rien n’indique que cette d’« évier » ou un « bassin »516 propre à recueillir les eaux
production a été utilisée pour les solins de parets508. débouchant des conduits traversant le pied de la paret.
La base de la paret est en outre percée de conduits Edifié à la base extérieure de l’enceinte, il aurait ainsi
d’écoulements des eaux pluviales et dotée de larmiers. empêché que le ruissellement des eaux dans les lices n’en-
dommage la base du pal (infra).
6.1.1.3 - Les aménagements du pied de la paret : Le terme de « vallum » est pour sa part presque exclusi-
conduits d’écoulement des eaux (stillicidium, vement associé à celui de « stillicidium » : il semble s’agir
galveg, galucho, aguerium, vallum) et d’une sorte d’égout ou de canalisation parfois excavée près
larmiers (get) de la base de l’enceinte, toujours dans le but d’éviter que les
Les textes chauriens désignent tour à tour par les termes eaux pluviales n’endommagent la muraille517.
« galveg, galucho, stillicidium, estillicidium, vallum et Comme les galveg, les stillicidia doivent être
aguerium » des systèmes d’évacuation d’eau (fig. 35). « ouverts » (ou gardés ouverts ?) et nettoyés518, voire
Les galvegs (ou galucho) seraient une sorte de conduit parfois « inondés », peut-être pour parfaire leur assainisse-
maçonné traversant perpendiculairement le solin à pierres ment et vérifier qu’ils ne sont pas bouchés519 : en effet, en
et chaux pour rejeter à l’extérieur de la ville les eaux de plus du risque d’effondrement de la paret en cas de
ruissellement provenant de la rue509. Ces aménagements bouchage, la ville pouvait également être exposée à des
sont quelquefois « ouverts » (créés ?)510 et surtout réguliè- épidémies au cas où des cadavres d’animaux (rongeurs ?)
rement nettoyés, compte tenu du risque encouru par l’en- seraient restés coincés dans ces conduits520. Points particu-
ceinte s’ils venaient à se boucher511. lièrement soumis à l’érosion, ils se dégradent assez rapide-
ment et nécessitent de ce fait des réparations régulières521.
Le terme d’« aguerium »512 serait un synonyme du
précédent : situé dans le solin, au niveau de la tranchée de L’eau évacuée devait donc être conduite vers le fossé
fondation (cavalha)513, sa construction requiert des pierres, principal de la ville au moyen de canalisations maçonnées
parfois de grande taille, apportées par des brassiers514. Il est ou creusées dans le substrat, entre l’enceinte et le pal exté-
par ailleurs employé à une seule reprise avec le terme rieur, drains sur lesquels les textes apportent peu d’infor-
« tonita » (en association ou en opposition ?), mot qui déri- mations522. Durant l’automne et l’hiver, ce dispositif devait
verait de « tona » (« tuyau d’aération d’une fosse d’ai- contribuer, en même temps que la remontée des nappes
sance »), peut-être le signe de conduits réservés à cet phréatiques, à maintenir humide le fond du fossé.
effet515. Quant aux ampesaments (supra), les textes signalent
Quant au vocable « aygueria » ou « ayguier », il dési- par deux fois qu’ils sont dotés de « getus »523, c’est-à-dire
gnerait plus particulièrement dans ce cas une sorte un larmier524 : à la différence de l’élévation en terre crue

508
AC Montréal, 1D2, 1484, [f°79 v°2]. Construction d’un forn de teula.
509
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°91 r°1]. « …a cavar arena al pe del castel e per aquela portar a la Strada per far mortier lequal fec mes als gualveg
de las paret de la Strada… ».
510
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°63 v°5]. « …que aquel dia avian ubertz dels galueg que eran dejos les pes de las paretz del port de las Bordas… ».
511
Ibid., 1361, [f°125 r°8]. « …quia curaverat tres gualveges parietum portus Bordarum… » ; Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°57 r°7]. «…qui dicta die
stetit ad curandum et aperiendum galochia parietis Batalharie portus Bordarum… » ; [f°74 r°3]. « …peyreriis qui dicta die steterunt ad faciendum
[…] duo galochia petre in dicta cavalha fundamenti dicte parietis pro ponendo et asetiando ibi parietem novum… ».
512
Probablement de « ayguier » : « ruisseau d’évacuation des eaux usées et des eaux de pluie » (Cayla 1964, 60).
513
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°6], « …ad portandum petram in cavalhis dicte parietis pro faciendo aguerium… ».
514
Ibid., [f°118 v°1]. « Item Stephano Baravi, Ramundo Gaucerii braseriis qui per duos dies fuerunt ad portandum magno lapides in dictis agueriis... ».
515
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°44 r°3]. «...qui curaverunt ayguerias seu tonita parietis retro hospicium juponerii...». Toutefois, rien n’indique que ces
dispositifs sont situés au pied de la paret.
516
« Aiguiera, aygueria : évier » (Lévy 1909, 12).
« Ayguier, ayguerium : évier, bassin » (Bernardi 1995, 437).
517
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 r°3]. « ...qui fecerunt valla stillicidia juxta clausuris ne diruerentur propter aquas...».
518
Ibid., 1359, [f°5 r°1] « ...qui dicta die aperuit quoddam stillicidium in clausuris retro hospicium Arnaudi Tolzane » ; [f°5 r°2]. « ...qui dicta die
curavit quoddam stillicidium in clausuris portus Bordarum… ».
519
Ibid., [f°9 r°1]. « Item Johanni Martini qui inundavit quoddam stillicidium juxta portam de Got Feran… ».
520
La salubrité et l’hygiène des villes sont un souci constant pour les consuls au Moyen Âge. D’ailleurs, « la saleté est aussi la conséquence directe de
l’érection des enceintes. B. Chevalier a noté, fort à propos, qu’en s’enfermant derrière un mur, la ville s’isole dans l’ordure. Ce ne sont pas les conduites
aménagées dans la muraille au point d’aboutissement d’un ruisseau ou d’un réseau d’égouts qui peuvent résoudre le problème » (Leguay 1984, 57).
Ainsi, « on sait combien l’édification d’un rempart est source de perturbations durables, de rues et de places remplies de matériaux, de terrains et de
maisons expropriées, de lourdes obligations fiscales. Rennes, qui a triplé sa surface enclose en un siècle, est pendant une soixantaine d’années un
immense chantier à ciel ouvert. Le mur d’enceinte amplifie les nuisances, retient la saleté individuelle et collective, bloque les déchets organiques même
si des conduites sont maçonnées, des trous ou pertuys, des puisards sont prévus dans le mur d’enceinte au point de les fragiliser. Le creusement des
nouveaux fossés, l’élargissement des anciens signifient aussi une extension des étendues d’eau à l’abri des déblais et des remblais, trop souvent des
réserves mal évacuées, stagnantes, connues pour leur insalubrité » (Leguay 2002, 155). À Castelnaudary, les coutumes prévoient par exemple que les
bouchers ne devront pas jeter le sang et autres tripes, têtes et os des bêtes abattues « dans les rues et ruelles, ni dans les murailles ni dans les fossés ni
tout autour à une distance de vingt pas » (Marandet 2001, 215).
521
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°9 v°4]. « …Jacobo Cauciderias et eius sociis qui reparaverunt quedam stillicidia in clausuris de Astrata… ».
522
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°49 v°2]. « …per un galueg que prezo a pretz fayt dejos le pal de la paret… ».
523
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°44 r°5]. « …pro faciendo ampesamentum unius geti parietis de la Strada de muro… » ; [f°49 r°5]. « ...pro faciendo
unum magnum getum de petra in ampesamento parietis de la Strada Ramundo Johannis peyrerio… ».
524
Lévy 1909, 206. Ce terme provient certainement de l’occitan « get » qui désigne l’action de jeter, en l’occurrence le rejet des eaux pluviales (Alibert
1966, 429). « Larmier : membre horizontal en saillie sur le nu du mur, destiné à en écarter les eaux pluviales » (Pérouse de Montclos 1995, 176).

83
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

teule/tegula terra
(enterrar)
folia/fuelha/lata ?

cabiro
AN
E NV
N/
BA
AM

hostium
post ?
sparo travatel
coronda esparo

YA
sola LE
dentel
RIA
/A 10 m
dencil E
RS
CO

tortis
(tortissar)
mur
mur
(suspeyrar)
reble 8
mortier

broc
brug
paret
6

get, getum
paret
4

pe/pes 2
(sospeyrar)

reble
peyra/lapis galveg
stillicidium

mortier 2m
dessin : F. Loppe

Fig. 35 : Castelnaudary. Essai de restitution d’un pan d’enceinte-type d’après les comptes consulaires (XIVe-XVe siècles).

84
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

(infra), le solin à pierres et chaux ne possèderait donc pas 0,33 m 1,33 m (6 palmes) 0,33 m
de fruit525, comme ont d’ailleurs pu le montrer les vestiges
d’Alaigne et de la Digne d’Aval (supra).
6.1.2 - L’élévation en terre crue : la paret
La paret représente, compte tenu de ses dimensions, un
cubage de terre considérable à l’échelle d’une ville comme
Castelnaudary. Le mur d’enceinte se doit théoriquement
d’être en parfait, sinon en bon état, pour pouvoir parer à un
danger immédiat526. Toutefois, les effondrements ne sont
pas rares, et les consuls sont alors obligés de trouver des
solutions provisoires afin de combler une brèche dans le
dispositif de défense.
6.1.2.1 - Les dimensions de la paret
L’élévation en terre crue, ou paret, constitue en volume Hauteur :
la partie la plus importante de l’enceinte de la ville : le 4,8 m
(3 brasses)
développement de Castelnaudary, non compris l’extension
de la nova ampliatio ni les tronçons intérieurs, atteint
environ 1475 m (fig. 4). Si l’on ajoute le périmètre fortifié
de la bastida (barrium de Sainte-Croix), la première exten-
sion, et deux portions d’enceinte intérieure (seconde exten-
sion à l’ouest, porte du Marché, quatrième extension, à
l’ouest, porte de la Place), on arrive à un total d’environ
2850 m527. Les consuls avaient ainsi au minimum la néces-
sité d’entretenir trois kilomètres de parets dans la première
moitié du XVe siècle, si tant est, comme on l’a vu, que les
fortifications de la bastida aient été achevées durant cette
période…
Les textes renseignent parfois sur les dimensions de
certaines enceintes de terre crue. Ainsi, à Toulouse, au 10% 10%

quartier Saint-Etienne, en avril 1355, on prévoit la réfec-


tion ou la confection d’une paret longue de 26 brasses (env. 0 2m
41,6 m ?), épaisse de dix palmes (env. 2,20 m) et haute de 9 palmes Dessin. F. Loppe, 2008
quatre brasses et deux palmes (env. 6,8 m ?)528.
Fig. 36 : Verlhac (auj. Verlhaguet, commune de Lacourt-Saint-
Une autre paret, située près de la porte de la fontaine Pierre, Tarn-et-Garonne). Essai de restitution de la cou-
Sainte-Marie, est « levée » (édifiée) en deux fois : un pe de la paret d’après le document de 1428.
premier ouvrage, de sept brasses de long (env. 11,2 m ?),
atteint quinze palmes de haut (env. 3,35 m) ; un second, pas : ainsi, à Caignac (Haute-Garonne), à la fin du
d’une longueur de seize brasses (env. 25,6 m ?), monte à XIVe siècle, la transaction pour la construction du fort
quatorze palmes (env. 3,12 m). On ne sait cependant s’il prévoit que consuls et habitants bâtiront des parets d’une
s’agit de deux phases superposées d’un même travail hauteur de 20 palmes « dessus terre » (environ 4,46 m ;
(auquel cas la hauteur atteindrait 6,47 m) ou de deux sans le solin ?)530.
tranches linéaires de paret édifiées côte à côte529. En 1368, une sentence arbitrale entre le commandeur et
D’autres sources permettent de connaître les dimen- les habitants de Renneville (Haute-Garonne) prévoit l’édi-
sions de certaines enceintes, mais rien n’indique qu’elles fication d’une paret de dix palmes d’épaisseur (env.
ont été édifiées avec des coffrages, le texte ne le précisant 2,20 m) et de trente de hauteur (env. 6,70 m) « supra

525
Dans le cas contraire, le larmier serait alors inefficace.
526
Toutefois, malgré les travaux très importants engagés par les villes durant la guerre de Cent Ans, les enceintes sont bien souvent en mauvais état, et
l’on se contente généralement de renforcements d’urgence en cas de danger, le rempart, comme à Marseille en 1374, apparaissant la plupart du temps
« comme un bouclier usé que l’on rapièce à la hâte » (Bernardi 2001, 97).
527
Ce chiffre n’inclut par ailleurs ni les portes, ni le périmètre et les constructions du château.
528
AC Toulouse, EE32, avril 1355, [f°75 r°5]. « Fom comte quel devian per 26 brassas de lonc de paret aitant cant te ? al truelh a Sant Estefe e trobem
que lor devian per 4 brassas e 2 palms den aut e montan las 26 brassas de lonc a 4 brassas 2 palms den aut al aco que es costera montan 110 brassas
e media e d’aissa abatem per le totz per razo car no avia mas 10 palms d’ample… ».
529
Ibid., [f°103 v°3]. « An Bomacip de San Salvi de Tilh deven per levar la paret costa la porta de la font de Santa Maria debas le Bazagle e trobem
que fe 7 brassas de lonc et de 15 palms de naut que montan 13 brassas e pus 16 brassas de 14 palms de naut... ».
530
AD Haute-Garonne, H Malte, liasse 20, n° 1. Caignac. « 5. Item que les ditz cossols et habitans se obligaran a totas cortz e en la compulsio d’aquelas
de far e de complir lo dit fort de paretz desus terra 20 palms… ».

85
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

5
3
2 1

10
9
12
8 16
13 14 17 15
3
11 6

3
7
19
2
2

20

1. Tracé partiel et hypothétique de la première enceinte médiévale


2. Tracé partiel de la seconde enceinte médiévale
N
3. Emplacement des anciennes mares, vestiges du fossé médiéval
4. Emplacement de la porte du Château ou porte Tolosane
5. Emplacement de la porte Esquive
6. Emplacement de la porte de Barcelone ou porte du Carme
7. Emplacement de la porte du Razès O E
8. Eglise collégiale St Vincent (XIVe s.)
9. Emplacement du château primitif
10. Place de l'Espérou
S
11. Place Vieille (ancien marché)
12. Porte ogivale (XIVe s.)
13. Quartier de la Terrasse (site du second château disparu)
14. Halles (XVIIIe s.)
15. Ancien couvent des Carmes
16. Ancienne chapelle des Pénitents Blancs
17. Ancien couvent des Filles de la Charité
18. Anciens greniers du Chapitre 0 250 m
19. Place de l'Amandier fond de plan : cadastre actuel
Interprétation : D. Baudreu
20. Chapelle ND des Anges (XIXe s.) DAO : F. Loppe, 2007

Fig. 37 : Montréal (Aude). Plan du village.

86
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

teram »531. La même année, à Castelginest532, pour la huit au sommet (env. 1,78 m), la hauteur n’étant pas
construction du fort, on prévoit d’édifier des parets de précisée539. Trois ans plus tard, le 15 février 1484, une
douze palmes de large à la base (env. 2,6 m), huit au paret, récemment effondrée dans le même secteur (s’agit-il
sommet (env. 1,8 m), pour une hauteur de trois brasses de la même ?) doit être relevée : la muraille, d’une
(env. 4,8 m ?), soit 0,80 m de différence et un fruit de 12 % longueur de douze cannes (env. 21,6 m ?) aura douze
environ533. palmes de large à la base (env. 2,67 m) et sept en haut (env.
1,5 m)540.
À Verlhac534, en 1428, les parets auront trois brasses de
haut (env. 4,8 m ?), neuf palmes d’épaisseur à la base (env. À Limoux, en 1770, une enceinte dont l’épaisseur est
2 m) et six à la cime (env. 1,33 m), soit environ 0,67 m de proche (dix palmes, soit 2,23 m) menace ruine sur une
décalage et un fruit de 10 % (fig. 36)535. longueur de trois cannes (env. 5,30 m ?) près de la porte
Saint-Antoine541.
À Montréal (Aude), plusieurs documents de la seconde
moitié du XVe siècle font également état d’enceintes aux Ces dimensions sont encore confirmées au milieu du
épaisseurs variables (fig. 37) : ainsi, le 10 août 1461, les XIXe siècle, l’abbé Pottier, qui signale plusieurs murailles
consuls attribuent à un habitant de Lavalette536 la réfection de terre crue encore en élévation dans quelques villages
de tronçons de paret. À chaque fois, les murailles de terre près de Montauban542.
auront une épaisseur de treize palmes à la base (env. 2,9 m) Ainsi, en définitive, outre une épaisseur très impor-
et sept palmes de large à la cime (env. 1,5 m) mais on ne tante à la base (entre 2 et 3 m), ces élévations possédent
sait pour quelle hauteur537. systématiquement un fruit prononcé d’environ 12 %,
Six ans plus tard, le 15 avril 1467, les consuls décident comme l’avait déjà observé A. Klein en Midi-Pyrénées sur
de refaire une partie de l’enceinte près de la porte de Razès, des constructions civiles (« pisé par couches filantes de
sur une longueur d’environ dix cannes (18 m ?) : la « type 1 »)543.
construction aura onze palmes d’épaisseur à la base (env. Ce fruit avait aussi pour avantage d’économiser le
2,45 m) et sept en haut (env. 1,5 m), soit une différence de volume de terre utilisé : en prenant comme gabarit l’en-
moins d’un mètre538. ceinte de Verlhac (supra), la superficie « sur le papier »
Par la suite, deux autres délibérations, postérieures à la atteint environ 7,9 m2, contre 9,6 m2 si l’épaisseur au
guerre de Cent Ans, montrent que les systèmes constructifs sommet avait été la identique à celle de la fondation : l’éco-
et les dimensions n’ont pas changé : le 7 mai 1481, dans le nomie réalisée par le fruit de 12 % est donc d’environ
secteur de la porte Esquive, une nouvelle paret à construire 1,7 m2, soit 17,7 % du total, ce qui est loin d’être négli-
aura douze palmes de large au fondement (env. 2,67 m) et geable…

531
Ibid., H Malte Renneville 3, liasse 3, n° 46. Sentence arbitrale sur l’édifice d’un tiers de muraille du fort de Renneville et du gage et garde d’icelluy
en temps de guerre. 1368. « …teneatur facere et de novo construere per magistros in talibus expertos suis tamen propriis sumptibus et expensis dictum
parietem de dicto capite muri castri Hospitalis a parte austri usque ad capud eclesie dicti loci a parte meridiei habentem dictis paries quelibet
brachiata in amplitudine decem palmos et in altitudine supra teram triginta palmos ultra vallos seu fossatos dicti parietis… ».
532
Haute-Garonne, village situé à 10 km au nord de Toulouse.
533
AD Haute-Garonne, 101H598, 2MI1106, acte 784, 1368. Accord entre les habitants et le chapitre de Saint-Sernin pour la construction d’un fort à
Castelginest. « …quod ibi in dicto fortalicio fiant parietes que habeant in eorum pede in fundamento de amplitudine duodecim palmos et assendant
de altitudine tres brachiatas cum dimidia super terram et veniant cum erunt complete de in alto octo palmos amplitudinis ».
534
Aujourd’hui Verlhaguet, commune de Lacourt-Saint-Pierre (Tarn-et-Garonne).
535
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « Item devo aver las ditas paret de nautheza de terra en sus tres
brassas e de ample a la peaso nau palms e a la sima devo aver d’ample sies palms… ».
536
Village situé à 5 km à l’est de Montréal.
537
AC Montréal, 1D2, 1461, [f°23 r°1]. « …tradiderunt ad reparandum et de novo construendum et hedifficandum quosdas parietes meniaram ville
eiusdem loci qui sequitur : Et primo quoddam frustum parietis existens inter januam porte Reddensii et porte Aquerie et quodam aliud frustum
etiam existens inter portam vocatam porte del Carme et januam porte vocatam Aquerie et quoddam aliud frustum quod est in periculo cadendi inter
januam porte del Castelh et porte Squive etiam videlicet Petro Durandelli valliffactori habitator loci de La Valheta ibid presenti et acceptanti etiam
et hoc ad pretium et nomine precii pro qualibet cana mensurando in longitudine et altitudine eiusdem et habebit in pede de amplitudine tresdecim
palmos et in summitate habebit de amplitudine septem palmos… ».
538
Ibid., 1467, [f°34 r°1]. « …hun tros de muralha pres de la porta Rezes que ha be de lonc 10 canas […] e que deu aver al pe de ample 11 palms
e denaut deu aver 7 palms ».
539
Ibid., 1481, [f°117 v°1]. « …tradiderunt ad edifficandi de pariete terre certam parietem muralhe ville ejusdem loci scitam in gayta porte Squive
[…] et dicta pariete debet habere de fundamento 12 palmos et octo de supra… ». Soit une différence de 0,89 m.
540
Ibid., 1484, [f°80 r°1]. « …videlicet ad faciendi e construendi de novo quandam parietem nuper ruptam e foc de muralha porte Squive e foc de
longitudine duodeci cannarum e erit de latitudine […] ? duodeci pal[morum] […] alto […] septem palmos […] ». Soit une différence de 1,17 m.
541
AD Aude, 4E206/DD4, 28 juillet 1770. « …est exposé à Messieurs les consuls et communauté dudit Limoux qu’ils ne peuvent ignorer que le dit
Guillaume Péchou entrepreneur n’ait souvent averti les dits consuls de faire démolir une muraille construite de terre d’environ dix pans d’espais-
seur et trois cannes de longueur qui étoit à la porte de Saint-Antoine du cotté du nord laquelle muraille menaçoit une ruine prochaine, de la démo-
lition de laquelle ladite communauté étoit chargée… ».
542
« Ce sont des murs construits en briques crues, ou simplement en terre, ayant de 1 à 3 m d’épaisseur, et de 6 à 8 m d’élévation » (Pottier 1865, 489).
Toutefois, rien ne permet de dire à l’heure actuelle que des briques de terre crue ou des adobes ont pu être utilisées dans les enceintes médiévales.
L’auteur a-t-il été abusé par les limites verticales des pains de terre (bauge) qui, lorsqu’elles sont très visibles, ont pu passer pour des adobes pour un
œil non averti ?
543
En effet, « les parements montés d’aplomb sont exceptionnels. Les murs présentent généralement une épaisseur moindre à leur sommet qu’à leur
base. On comprend que ce montage à fruit soit recherché car il améliore la stabilité de la paroi comme celle de l’ensemble du coffrage pendant la phase
de chantier. Ce fruit varie entre 2 et 7 % » (Klein 2003, 425).

87
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Ainsi, en supposant que l’enceinte chaurienne avait les d’un mur de terre possédant des épaisseurs aussi impor-
mêmes dimensions, on arriverait, pour un maximum de tantes, la présence d’un crépi ne serait pas forcément indis-
trois kilomètres de muraille, à un volume approximatif de pensable à la bonne conservation de l’ouvrage, puisque par
26488 m3 de terre. La hauteur totale d’une muraille-type, sa massivité et son tassement, l’eau de pluie ruisselant sur
en prenant comme modèle le solin de douze palmes de haut le parement ne pourrait atteindre le cœur de la structure, et
(2,65 m544) cité à Limoux en 1460545 atteindrait, en tenant ne menacerait donc pas l’édifice549.
compte de la présence d’un parapet et d’un crénelage d’en- Il y aurait en outre un sérieux inconvénient « pratique »
viron deux mètres, un total de neuf mètres (fig. 35). à la pose d’un tel enduit : de quelle manière pouvait-il être
appliqué sans échafaudage sur des enceintes aussi hautes ?
6.1.2.2 - Nature de la terre, enduit, ouvertures…
Des plateaux étaient-ils fixés aux perches de l’étaiement
Il faut s’interroger à ce stade sur la nature de la terre durant la construction pour enduire la structure au fur et à
employée, l’éventualité d’un crépi externe (et/ou interne) et mesure550?
enfin sur la possibilité de créer des ouvertures dans l’en-
ceinte de terre massive. Enfin, les textes manquent pour savoir si ces enceintes
possédaient des systèmes de tir (archères), des jours, ou des
Sur le premier point, on a vu, concernant les « parets espaces de rangement (niches, placards) : seul un document
coffrées », que la qualité de la terre n’était jamais précisée Fronton (Haute-Garonne) précise que les consuls seront
dans les sources. Les quatre vestiges d’enceinte (La Digne tenus de réaliser à leurs frais une paret entre le castrum et
d’Aval, Alaigne, Esparsac, Thil) apportent des informa- l’ampliatio du fort : cette construction, de deux brasses de
tions intéressantes sur la provenance de cette terre et la haut (env. 3,20 m) et seulement quatre palmes de large (env.
mise en œuvre des végétaux. 0,80 m) sera munie d’archères551. Compte tenu de ses faibles
Les consuls chauriens ont certainement aussi utilisé des
dimensions et de la présence exceptionnelle de dispositifs
terres de récupération provenant d’édifices en cours de
de tir552, il doit s’agir là d’une construction particulière
destruction, comme ces maisons rasées en 1360546 qui
(enceinte intérieure ?), puisqu’elle délimite l’espace entre la
devaient utiliser la terre locale (le substrat est principale-
maison du commandeur et la nouvelle extension.
ment constitué de molasse mais aussi de marnes, roches
relativement friables). L’exemple de l’enceinte d’Alaigne montre que le mur
Ces murailles étaient-elles par ailleurs enduites ou de terre peut s’accommoder de percements d’ampleur
badigeonnées, à l’instar des colombages ? Les textes chau- limitée, et qu’ils ne nuisent en rien à la stabilité de la struc-
riens sont muets sur le sujet547, mais on relèvera une ture (supra). Cependant, qu’en était-il pour une ville
mention de P. Cayla concernant le « brom » : ce vocable est comme Castelnaudary où une rue militaire séparait les
défini comme « une bouillie liquide faite de terre, de brin- maisons de la ceinture défensive ? Les sources textuelles
dilles végétales diverses et d’eau utilisée pour enduire les sont muettes à ce sujet, et ne parlent jamais d’archères ou
parois d’une bâtisse », l’auteur citant en référence d’autres percements à vocation défensive.
l’exemple de Fanjeaux, en 1604, dans lequel « les consuls Quant à des fenêtres ou des jours, les registres font état
feront apporter ou conduire l’eau nécessaire à faire les à deux reprises de bouchages de luzas553 percées dans l’en-
parets et murailles pied d’œuvre ensemble le brom… » ceinte : on aurait alors pu croire à des ouvertures pratiquées
(Cayla 1964, 106). dans la terre massive, mais la qualification des trois indi-
Cette citation relancerait l’hypothèse d’une protection vidus en question (maçons-carriers), laisse toutefois planer
contre les eaux de ruissellement, comme le suggèrent des un doute : ne s’agit-il pas plutôt d’obturer des jours dans
lambeaux d’enduit548 sur les vestiges d’Alaigne et des maçonneries en pierre (partie haute des tours-portes,
d’Esparsac (supra). Pourtant, selon A. Klein, dans le cadre infra ?)554.

544
Cette hauteur semble excessive par rapport aux nécessités visant à tenir l’ouvrage hors d’eau. Souhaitait-on offrir une meilleure résistance au travail
de sape de l’ennemi ?
545
AD Aude, 4E206/DD1, 29 mai 1460. « …propter opportet dictum frustum muri in terram penitus postrari et eius cossole sive pes ipsi muri reffici de
pariete sive caussolo de calse arena et lapidibus ad perpetuam custodiam in amplitudine tresdecim palmorum et in altitudine duodecim vel circa… ».
546
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°67 v°7] ; [f°67 v°8] ; [f°68 r°3] ; [f°74 r°2].
547
Toutefois, en 1363, un certain Arnaud Sicard a été rémunéré pour avoir « recouvert et chaulé les ateliers des seigneurs consuls » mais on ne sait si
le chaulage s’applique aux parets ou aux colombages de cette construction civile (AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°42 v°2]. « …Arnaudo Sicardi qui
stetit ad recubriendum et encaucinandum operatoria dictorum dominorum consulum… »).
548
Cet enduit est-il cependant contemporain de l’élévation de terre crue ?
549
Entretien personnel.
550
Cependant, pour être réellement efficace, un enduit à base de terre et de végétaux devrait être régulièrement refait, ce qui excluerait, du moins dans
un second temps, l’utilisation du système d’étaiement comme support d’échafaudage.
551
AD Haute-Garonne, 2MI52/2 (422 et s.), H Malte Toulouse 194, liasse 3, n° 15. Fronton, septembre 1371. Accord entre les habitants et le prieur pour
l’agrandissement du fort. « Item quod dicti consules et singulares faciant et facere teneantur eorum propriis sumptibus et expensis quandam parietem
duarum brachiatarum altitudinis et ultra fundamentum et quatuor palmorum amplitudinis inter dictum castrum et ampliationem predictam cum
arqueriis necessariis et tales quales dictus dominus prior voluerit et devisabit aut per suum locumtenentem ».
552
Seule mention répertoriée à ce jour concernant la présence d’ouvertures de tir dans une structure de terre massive.
553
Luza : de l’occitan « lutz » ? (lumière, Alibert 1966, 471), pris ici dans le sens de « jour d’éclairage » ?
554
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°15 r°8]. « ...Dominico Gastonis pro claudendo quasdam luza que erant in clausuris prope domum Fratrum
Minorum... » ; 1361-1362, [f°94 v°1]. « Item predictis Ramundo Johannis, Johanni Maurini qui per tres dies quilibet […] clauserunt luzas parietis… ».
On pourrait cependant envisager l’hypothèse d’ouvertures en pierre incrustées dans l’élévation en terre, comme au village de Trèbes (Aude) : un mur
de maison en terre crue massive, aujourd’hui détruit, était percé de deux ouvertures en arc brisé ornées de remplages (bas Moyen Âge).

88
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

6.1.2.3 - De la paret à terre à la paret en terre : palis- Mais lorsque l’effondrement survient de façon
sades provisoires et palissades d’urgence… soudaine, les édiles prennent des dispositions énergiques
Des palissades provisoires en bois peuvent être édifiées clairement exposées dans une série de dépenses de 1372 :
afin de délimiter un périmètre défensif avant la construc- ainsi, vers la mi-avril, un pan de « paret batailhère »
tion ou la reconstruction de l’enceinte en terre crue555. s’écroule subitement durant la nuit ; le lendemain, les
consuls ordonnent à quatre charpentiers de fermer la
C’est le terme de « passus » qui désigne cette brèche par une palissade560, opération qui requiert 32 livres
« brèche » dans le dispositif de défense, entre une vieille de chevilles de fer achetées à un forgeron561.
paret et une nouvelle en cours de construction556. En 1366,
d’autres palissades sont érigées au port des Bordes, de la Dans le même temps, des brassiers récupèrent les restes
Baffe, et du quartier Saint-Antoine (port de l’Estrade), à d’un gaytil effondré avec la paret (dont les bois sont
l’évidence en tant que substitut de l’enceinte en terre. Faut- enfouis sous la masse de terre éboulée dans le fossé) ou
il penser que même dans ces secteurs, pourtant parmi les aident les charpentiers, en leur apportant bois et autres fixa-
plus anciens de la ville, la muraille n’est par endroits tions nécessaires à la confection de la palissade562.
toujours pas achevée en 1366, ou bien s’agit-il véritable- Ce bois d’œuvre est assez varié : deux poutres de
ment de palissades d’urgence comblant un espace 22 palmes (env. 4,9 m)563, quatorze pièces récupérées auprès
provoqué par la destruction de l’enceinte557 ? Difficile de le d’un charpentier564, matériaux issus de la destruction d’une
dire. Un mois plus tard cependant, on édifie quatre brasses vieille coursière565, ou éléments provenant de la grosse tour
de paret entre la paret vieille et la paret neuve de la Baffe, de l’Estrade et des portes de Goufferan et de la Baffe566.
signe du remplacement de la palissade provisoire558.
Peu après le 19 avril ou à cette date, les consuls délè-
Dans d’autres cas, l’établissement d’une palissade est
guent à deux hommes le soin de rechercher et réparer les
directement lié à l’effondrement accidentel d’un pan d’en-
bases saines de la paret détruite (solin de fondation), afin
ceinte. En effet, malgré le solin en pierre destiné à la stabi-
liser, la paret reste fragile : les comptes chauriens mention- de pouvoir entamer la construction d’une nouvelle
nent souvent l’écroulement de tronçons de murailles, sans enceinte567. Vers le 21 avril, deux maçons bâtissent à cet
jamais en préciser les causes. endroit une assise de pierre (filata568) et deux conduits
d’écoulement des eaux pluviales569. Arnaud Mancip devra
Plusieurs étapes interviennent généralement avant que réaliser la nouvelle paret sur une longueur de 67 palmes
l’enceinte éboulée ne puisse être réédifiée. (env. 15 m), de manière « bonne et suffisante », et munie
Tout d’abord, il arrive que la paret menaçant ruine soit de bruyère570. Mais un ou deux jours plus tard, alors que cet
préventivement détruite sur ordre des consuls, tâche géné- homme et son équipe sont à pied d’œuvre, la palissade
ralement confiée à des maçons ou à des charpentiers559. provisoire, trop proche de l’ouvrage en cours de construc-

555
C’est également le cas à Rodez lors de la reconstruction du mur de la ville, situé près de Castel-Cotau en 1357-1358. Un palenc est transporté depuis
la maison communale à l’endroit où on est en train de reconstruire le mur d’enceinte, afin de boucher le trou (pas) dans le périmètre (Bousquet 1926,
457, 458).
556
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°96 v°7]. « …qui clauserunt de fusta duos passas inter parietes antiquos et novos... » ; [f°99 r°2]. « qui fuerunt
per unam pausa ad claudendum passum parietis de portu Bordarum inter embans…» ; [f°103 r°5]. « …per unam diem ad claudendum de pale inter
parietem anticum et parietem novum…».
557
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°20 v°2]. « …portet fusta quera a l’ostal de l’ala de Montholiu e fo portada per metre per pal entre la paretz noba del
port de las Bordas e la paret vielha de la Baffa… » ; [f°23 r°2]. « …per tanquar de pal le pas quera entre la paret noba e la vielha de la Baffa… ».
558
Ibid., [f°72 r°4]. « …an Ar. Masip en sos companhos per 4 brassas e miega de paret que avian faytas entro la paret vielha e la nova de la Baffa… ».
559
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°24 v°3]. « ...pro diruendo quandam parietem in clausuris retro hospicium magistri Bernardi Servici qui erat in
periculo cadendi... »; Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°183 r°7]. « ...Ramundo Johannis peyrerio, Johanni Maurini pro dirruendo parietem veterem juxta
portam Montis Lebonis… » ; Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°103 r°1]. « Item fero pagar an B. Farola, P. Malcasal, G. Segui, P. Roquas, P. Ramon Calvet,
G. Arsenh, R. Malhol, Ar. Casser que aquel dia stero a deffar de la paret vielha de la Strada… ». Bernard Farola est charpentier.
560
AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°72 r°3]. « Item cum nocte preterita paries Batalharie retro domos Petri Alsey, Fabri de Podio et Jacobo Madrerie
cecidisset, dicti domini consules voluerunt et ordinaverunt quod ibi clauderetur de palo subito solvi fecerunt dicti domini consules magistris G. Saurini,
B. Embri, B. Conquas et Geraldo Vitalis fusteriis qui dicta die steterunt ad claudendum foramen dicte parietis et claudendum de palis… ».
561
Ibid., [f°72 r°4]. « …pro 32 libris cavillarum ferri Petro Paratoris et Petro Bedocii, fabro, pro 26 libris cavillarum feri ab ipsis habitis et positatis
in dicto opere dicti pali… ».
562
Ibid., [f°72 v°1]. « …braseriis, qui dicta die steterunt ad trahendum fustes gachilli qui erat supra dictum parietem qui ceciderat in cava de subtus
terram et ad aplanandum terram dicte parietis fracte et adjuvandum dictis fusteriis ad claudendum dictum passum de palis portando eis fustes et
alia cementa necessariis… ».
563
Ibid., [f°72 v°2]. « …Andree Capitisbonis pro duobus fustis 22 palmorum ab ipso habitis et positis in dicto opere dicti palenchi dicti foramis qui
fustes fuerunt extimati per dictos fusterios qui eos posuerunt in dicto opere… ».
564
Ibid., [f°72 v°3]. « …B. Embri fusterio pro 14 pecias fustis ab ipso habitis et positis in dicto opere dicti palenchi… ».
565
Ibid., [f°72 v°4]. « …G. Saunas etaim fusterio qui dicta die stetit per maiorem parte diey ad diruendum fustes corserie veteris juxta portam inte-
riorem de Baffa pro portando et ponendo dictos fustes in dicta clausura pale… ». La récupération du bois est très courante dans la construction forti-
fiée médiévale (Kersuzan 2005, 348-349).
566
AD Aude, 4E76/CC53, [f°72 v°5]. « …qui dicta die steterunt ad portandum dictos fustes et alios de turi grossa de Astrata et de porta de Got Feran
et de Baffa in dicto opere dicti palenchi retro domum Fabri de Podio… ».
567
Ibid., [f°73 r°2]. « …Ar. Mancipii et G. Guilaberti qui dicta die steterunt ad aperiendum et curandum fundamentum dicte parietis qui ceciderat
pro incipiendo alium parietem novum… ».
568
« Filata » peut en effet avoir ce sens, en dehors de celui de « poutre », (Bernardi 1995, 447).
569
AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°74 r°3]. « ...R. Johannis et Ramundo de Planhas peyreriis qui dicta die steterunt ad faciendum de muro unam
filatam et duo galochia petre in dicta cavalha fundamenti dicte parietis pro ponendo et asetiando ibi parietem novum… ».
570
Ibid., [f°74 v°1]. « …Ar. Mancipi ad faciendum parietem novum in dicto foramen ubi sunt 67 palmos longitudinis et debuit ibi facere parietem
novum bonum et sufficienter suis propriis sumptibus et expensis et munita de brugo… ».

89
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

tion, gêne les parediers dans leur travail. On décide alors Il se compose d’un chemin de ronde et d’un parapet
de la déplacer plus loin571, ce qui est fait le 23 avril par deux surmonté d’un crénelage.
charpentiers572.
6.1.3.1 - Chemin de ronde et parapet : suspeyrar, un
Cette palissade est composée de pals ou pieux573, quel- « mur sur la paret »
quefois enfoncés dans une arase de paret encore intacte
Les comptes chauriens utilisent le verbe « suspeyrar »,
après la chute de l’élévation : les trous sous l’ouvrage
(littéralement « empierrer en dessus ») pour désigner l’ac-
doivent néanmoins être bouchés574.
tion de bâtir des maçonneries à pierres et chaux sur un mur
Du moment que les finances de la ville le permettent, de terre577. Ces constructions (chemin de ronde, parapet et
les consuls sont très soucieux de maintenir une certaine crénelage) sont en outre attestées par de rares mentions
continuité dans le système défensif : s’ils font parfois faisant état de « murs sus la paret »578. Une petite partie du
édifier des palissades en attendant l’érection de l’enceinte, chemin de ronde « en dur » (à pierres et chaux à
ils font plus sûrement établir ces ouvrages lorsqu’une Castelnaudary) est doublée intérieurement par celui de la
portion de paret s’effondre accidentellement, et ce dès la coursière en bois, plus large (infra). Sa largeur n’est jamais
constatation des dégâts. précisée mais en se basant sur les sources de Verlhac,
Ce seul exemple empêche à l’évidence de généraliser, Montréal et Castelginest (supra), la largeur du sommet de
mais force est de constater que les édiles ont agi avec une la paret oscille entre 1,30 m et 1,50 m environ579, soit 1 m à
1,20 m, déduction faite du parapet supportant les merlons.
extrême promptitude : entre l’éboulement de la paret et le
Si cette largeur semble suffisante pour une simple ronde, les
début de sa réfection, il s’écoule tout au plus cinq jours
besoins de la défense exigeront son élargissement, tâche qui
durant lesquels une palissade assure l’intérim. Cet empres- sera dévolue aux corserias et aleyas (infra).
sement est peut-être à lier au contexte très menaçant de ce
printemps 1372, où des routiers bretons sont signalés Pour quelles raisons les constructeurs chauriens ont
autour de la ville575, ou à mettre en rapport avec la visite de systématiquement opté pour un chemin de ronde en pierre,
puisque les difficultés techniques (et peut-être le coût ?)
contrôle des fortifications effectuée par les sergents royaux
n’étaient certainement pas négligeables ?
toulousains le 1er septembre 1371 : ont-ils donnés à cette
Même si le crénelage était la plupart du temps invisible
occasion des directives au cas où des effondrements de ce
du fait de la présence du hourd, souhaitait-on se défier de
type surviendraient576 ? l’action de l’eau de pluie, qui, en s’infiltrant par le sommet
de la paret, pouvait la faire effondrer ?
6.1.3 - Le sommet de la paret : chemin de ronde,
parapet, et crénelage Par ailleurs, en cas de destruction partielle ou totale des
hourds, les solives traversant le parapet (infra) étaient
Le sommet de la paret constitue, avec les hourds et les parfois remplacées : si ce dernier avait été en terre crue, la
coursières (infra), le cœur du système de défense active de rectitude des fourreaux, en raison des phénomènes de
Castelnaudary, mais aussi la dernière ligne de repli au cas rétraction de la terre, aurait pu se trouver perturbée, rendant
où les défenses extérieures (barriera, palissade, barbacane, alors peut-être impossible, ou du moins très difficile, l’en-
fossé, pal) seraient enfoncées. lèvement des travatels.

571
Ibid., [f°74 v°3]. « Item dicta die cum palum factum in dicto foramine dicte parietis impediret ad faciendum parietem cum esset multum prope
amoveri fecerunt dictum palum seu dirui per maiorem parte ad finem ut operariis dicte parietis operare possent et parietem verberare et facere,
perficere… ».
572
Ibid., [f°75 r°2]. « Item die veneris XXIII aprilis solvi fecerunt R. Sarraceni et J. Redorte, fusteriis, qui per maiiorem parte dicte diey steterunt ad
faciendum palum seu dresandum in dicto foramen dicte parietis et ponendum magis longe dicte parietis incepte ut non impediret parederiis... ».
573
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°49 v°3]. « …que aquel dia portero 29 quintals de pal del bosc den G. Tort de Sielh ad obs de reparar a las paretz que
eran casutas…».
574
Ibid., 1360-1361, [f°69 r°1]. « Item le dit dia fero pagar a 3 homes que tanquero las crebassas de la paret dejos le pal detras mastre B. Servit… ».
575
Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°68 v°1], [f°69 v°2], [f°70 v°3], [f°70 v°6], [f°71 r°1].
576
Ibid., 1371, [f°35 v°6]. « Item die prima mensis septembris solvi fecerunt Petro de Bosco alias Labat et eius socio vocato Justaret servientis regiis
Tholose qui in dicto Castronovo venerant visitare fortalicium dicti loci cum unus comissarius domini senescalli Tholose et facere reparare dictum fort-
alicium et victualia recludere in quibus vacarunt per duos dies... ». Ce phénomène de « visites » régulières a également été mis en lumière en Haut-
Dauphiné à la même époque : « Les maîtres d’œuvre du Dauphiné multiplient leurs visites dans les châteaux delphinaux à partir de 1366. Humbert
Colonel, nommé par le gouverneur Raoul de Louppy en juin 1365, avait déjà visité les ports du Rhône et de l’Isère et ordonné les réparations appro-
priées alors qu’il était châtelain de Pisançon (Drôme), en novembre 1363. En juillet 1365, il entame ses visites en Graisivaudan puis en Viennois. Le
rôle de ces maîtres d’œuvre est renforcé quand le gouverneur du Dauphiné instaure deux visites annuelles obligatoires dans les châteaux delphinaux à
partir de 1398 » (Nicolas 2005, 196). Dans d’autres cas « les maîtres d’œuvre travaillent en association avec le commissaire visiteur auquel ils appor-
tent leurs conseils techniques, mais c’est à ce dernier que revient la décision finale par la maîtrise du financement et le pouvoir de contraindre les
officiers locaux… » (Jacquier 2001, 146).
577
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°32 r°2]. « ...cum suo animali ad portandum lapides in opere Portus Bordarum ubi Johannes Gualigonis
suspeyrabat parietes clausurarum... » ; Ibid., 1361-1362, [f°92 r°6]. « Item Johanni Engles filio Bernardi Engles de Manso pro decem sextariis calcis
conputatis pro 7 sesteriis cum non esset sufficiens que posita fuit in suspeyramiento parietis... ».
578
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°86 v°2]. «…que aquel dia stet affar mur sus las paret de la Strada tras le vergier de Johan Ferrier entre la paret dentel-
hada et aquela ques enbanada… » ; Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°45 r°1]. « …an Johan de Cutssac alias le Breto per sinc jorns que stet a far hun tros
de mur sus la paret costa la porta de Sant Antoni… » ; [f°46 r°7]. « …a mastre P. le Peyrier per far le mur sus la paret costa la porta de Sant Antoni
debas le castel… ».
579
Jusqu’à 1,80 m (8 pans) à Castelginest en 1368, dimension apparemment exceptionnelle.

90
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Enfin, merlons et parapet, lorsqu’ils ne sont pas le soin de récupérer les pierres qui roulent au fond du
masqués par les hourds580, constituent des cibles de choix fossé587.
pour les projectiles et les traits ennemis, et une réalisation D’autre part, en 1366-1367, deux maçons effectuent sur
en maçonnerie devait apparaître comme davantage apte à certains merlons un travail un peu particulier : le premier
protéger les défenseurs.
entreprend d’équarrir des pierres et de réaliser les trous de
Quant aux enceintes toulousaines, elles présentent en
hourds à leur base, de manière à pouvoir ancrer solidement
1354-1355 un chemin de ronde et un parapet en briques
les solives (travatels) de la superstructure au sommet de
cuites, mais on ne sait si ces dernières forment deux pare-
l’enceinte588. Par la suite -sans que l’on sache pour quelle
ments protégeant le sommet en terre crue (comme pour le
raison- on fait détruire à deux reprises des merlons afin
« pied » de la paret ; supra), ou bien entrent dans la compo-
d’installer ces fameuses poutres589.
sition d’un véritable massif de chaux parementé de briques.
Enfin, une unique dépense de 1388 fait état de l’achat
Ainsi, le 24 avril 1355 deux maçons travaillent de
chaque côté de la porte Neuve à « dentelhar, (bâtir des d’un chevron non équarri « dans le but de faire une protec-
merlons), pavementer, et faire le parapet », utilisant à cet tion sur les merlons près de la porte de Goufferan »590. Le
effet 11000 briques581. Cette couverture en « dur », sorte de scribe semble volontairement préciser la forme (ou plutôt
« chapeau » de la paret, doit être rapidement réalisée (pour l’absence de forme…) du bois : s’agit de créér l’axe d’un
éviter les dégâts des eaux ?) : c’est ce qui ressort d’une mantelet pivotant entre les merlons afin de protéger les
autre dépense d’avril 1355, où un maçon toulousain est défenseurs postés sur un crénelage sans hourds ?
rémunéré pour « pavementer sur la paret le premier On ne sait, et il n’est d’ailleurs pas certain que ce
tronçon édifié par Raymond de Toulouse », signe qu’aus- chevron non équarri puisse être mis en relation avec l’achat
sitôt le premier pan d’enceinte construit, il faut se dépêcher de quinze autres bois identiques pour les hourds, matériaux
de le recouvrir582. dont l’utilisation n’est pas précisée591.

6.1.3.2 - Les merlons (dentels, dentils) 6.2 - Les portes, tours et barbacanes
Ces merlons, dénommés « dentels » ou « dentils », La ville de Castelnaudary comportait, d’après les
constituent, par leur alternance avec les créneaux, le créne- comptes consulaires, au moins dix-neuf portes (dont
lage de la paret (fig. 35). À Toulouse, ils sont en briques certaines situées sur des tronçons d’enceintes intérieures).
cuites, mais à Castelnaudary ils sont en pierres liées à la Toutefois, on sait rarement si ces ouvrages sont des
chaux583 ou au mortier de terre (infra). constructions monumentales ou de simples poternes de
service destinées à la garde et aux usages quotidiens.
Malgré tout, les merlons restent fragiles, et les consuls
sont souvent obligés de veiller à leur entretien de manière Si l’on se fie aux sources, les tours sont quant à elles
à éviter des dommages (au besoin en murant les beaucoup plus rares. Hormis celle du château, toujours
créneaux584). La plupart du temps cependant, ils se conten- citée comme unique (donjon ?), les murailles de la ville
tent de rebâtir les éléments endommagés585, mais ils n’hési- comportent très peu d’ouvrages de flanquement ou d’angle
tent pas à les faire détruire pour des raisons de sécurité586. de ce type, vraisemblablement en raison de leur coût et
Quand les merlons tombent, ils confient à des manœuvres peut-être de certaines difficultés de réalisation.

580
Cela arrive quelquefois à Castelnaudary : les textes mentionnent en effet des tronçons de paret « dentelhada » (avec crénelage visible, et donc sans
hourds), et d’autres « embanada », donc dotés d’un hourd. S’agit-il d’un parti-pris des constructeurs, ou bien ces portions d’enceinte « à nu » vont-
elles être rapidement couvertes ? (AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°86 v°2]. « …entre la paret dentelhada et aquela ques enbanada… »).
581
AC Toulouse, EE32, 1355, [f°70 v°2]. « Fom comte a XXIII abril ab en P. de la Font ab en Bertran del Pandelier, massoniers, d’aco que avian obrat
a dentelhar e a pazimentar costa la porta Nova de cada part la en avian faita levar la paret an Johan Olier tra la tor que fom deffar e trobem que
avian mes per tot a dentelhar e a pazimentar e a far l’ampara entre tot 11 milhiers de teula… ».
Ce travail avait d’ailleurs été engagé par ces mêmes personnes un an auparavant : ibid., 1354, [f°57 r°1]. « …per dentelhar e per pazimentar sus la
paret que a levada en Johan Olier costa la porta Nova de cada part an P. de La Font e an Bertran del Pandelier massoniers ».
582
Ibid., avril 1355, [f°67 r°1]. « …an Ramon de Coss massonier de San Subra per far le mur a la cava al cap de la paret a Sant Estefe e per pazi-
mentar sus la paret le premier tros que avia levat en Ramon den Tholosa... ».
583
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°119 v°1]. « ...pro aliis viginti sestariis calcis quos portaverat ad opus dicte barbacane et dentelorum Fratrum
Minorum...».
584
Ibid., 1359-1360, [f°17 r°6]. « ...fuerunt quilibet ad emurandum illos dentillos qui ceciderunt juxta portam de Astrata....».
585
Ibid., [f°32 v°2]. « ...Paulo Bastonis peyrerio pro tribus jornalibus quibus fuit ad reficiendum illos dentillos... » ; 1361-1362, [f°113 v°2]. « ...que
portaverunt per quatuor dies arenam et morterium in dentellis Fratrum Minorum seu ad reparandum eosdem… ».
586
Ibid., 1359-1360, [f°30 r°2]. « ...magistro Dominico Guastonis cum suibus famulis qui diruerunt dentillos illius parietis retro magistrum
Bernardum Servici qui erant in periculo cadendi... ». On ne sait cependant, si comme à Saint-Flour, existaient des procédures visant à indemiser les
particuliers pour des dommages causés par les travaux publics (Rigaudière 1982, t. 1, 546-548).
587
AD Aude, 4E76/CC48, [f°32 r°4]. « …pro uno die quo fuerunt quilibet ad strahendum a vallis lapides que cesciderant a dentillis dirutis… » ; [f°32
v°3]. « …pro duobus diebus quibus fuit ad prohiciendum lapides dentilorum dirutorum in portu Bordarum qui ceciderunt in vallo… ».
588
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°63 r°4]. « …a mastre Johan Gualiguo per 3 dias que avia stat a esclapar peyra e affar les traucx dels dentels dels
embans de la Baffa per so quels travatels aqui poguesson metre… ».
589
Ibid., [f°80 r°5]. « …an Johan Gualigo que aquel dia stet a tranquar le mur dels dentels de las paret dels Frayres Menors per so quel entrava-
ment aqui se pogues metre… » ; [f°159 r°3]. « …an Johan Mauri, peyrier per un dia que stet a tranquar los dentels de las parets de la Baffa per so
quels mastre fustier poguesso metre les travatels… ».
590
Ibid., 4E76/CC57, 1388, [f°44 r°7]. « …per un cabiro redon as ops de far ampara sus les dentels de costa la porta de Guot Feran… ».
591
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°115 v°10]. «…pro quindecim cabironibus retondis ad opus dictorum embanorum… ».

91
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Les portes sont, et c’est logique, beaucoup plus Ainsi, le fût principal du premier niveau des tours est en
complexes dans leur construction que les rares tours mises grande partie en terre crue (paret), alors que le second est
en évidence : en tant que points de passage obligés, elles en l’occurrence en pierre.
ont un rôle capital dans le système défensif, en même Pour quelles raisons a-t-on choisi d’édifier la partie
temps qu’elles constituent un élément de prestige et d’os- haute des tours-portes en pierre (deux niveaux logeables,
tentation de la ville : à ce double titre elles paraissent béné- soit 7,30 m ?), puisque celle-ci, au demeurant fort rare, est
ficier de certains traitements particuliers. Elles ont toute- par ailleurs d’une qualité médiocre ?
fois comme point commun avec les tours de comporter
d’importantes parties en terre massive, mais la distinction Deux explications pourraient être proposées. Tout
entre ces deux constructions n’est pas toujours tranchée, d’abord, il se pourrait qu’une paret ne puisse être élevée
puisque les documents désignent souvent la partie haute de au-delà d’une certaine hauteur (perches trop courtes ?
la porte par le terme de « tour », entretenant ainsi la confu- stabilité ? sécurité ?). Par ailleurs, une autre hypothèse tien-
sion. Quant aux barbacanes, les informations concernant drait à l’image de la ville, c’est-à-dire à l’effet de prestige
celles bâties en terre massive sont rarissimes… produit par la pierre aux endroits les plus symboliques :
ainsi, les consuls auraient peut-être tenu à édifier la partie
6.2.1 - Formes, dimensions, base des ouvrages supérieure des tours en pierre (sur env. 8 à 10 m de
hauteur ?) de manière à procurer une impression de force
6.2.1.1 - Formes et dimensions et de solidité dans une région où ce matériau est rare595.
Les textes chauriens ne renseignent jamais sur la forme Enfin, à Toulouse, une tour de forme circulaire sera
des portes de la ville ni sur leurs dimensions (hauteur, refaite sur la porte Neuve mais on ne sait si la base de cet
largeur, profondeur). Néanmoins, certains villages audois ouvrage présentait les mêmes dispositions (carrée ? rectan-
et toulousains possèdent encore des tours-portes bas- gulaire ?)596.
médiévales en briques ou en pierre, de plan carré ou rectan-
gulaire, et il est probable que les entrées de Castelnaudary 6.2.1.2. - La base des portes et des tours
avaient la même forme. Les bases de portes sont bâties selon un procédé déjà
Concernant les tours ou tourelles isolées, les comptes décrit pour les courtines chauriennes : après égalisation de
précisent à plusieurs reprises que la tour de l’Estrade ou de l’assiette rocheuse ou creusement d’une tranchée de fonda-
Saint-Antoine, seul ouvrage de ce type véritablement digne tion (cavalha)597, les maçons entreprennent la construction
de ce nom, est de forme circulaire592. Elle n’est pas précisé- d’une base en pierres équarries dont la hauteur n’est jamais
ment localisée (tour d’angle ou de flanquement ?) mais sert précisée598. Cette « base » en pierre a pu monter jusqu’à
quelquefois de point de repère pour les travaux de la ville. cinq ou six mètres, de manière à englober les portes char-
Les textes dénomment également « tour » la partie retière et piétonne, et une probable voûte en pierre, un
haute des portes593 puisqu’elle avait des fonctions de couvrement en terre crue étant techniquement très
défense et de surveillance. Elles sont parfois modifiées complexe à mettre en œuvre.
après-coup, comme en 1359-1360, où l’on surélève (en À ce sujet, deux citations pourraient avoir comme sens
pierre) la tour de la porte Saint-Antoine de 33 palmes « s’occuper de l’arche (ou du coffrage) de la porte » ou
(environ 7,30 m)594. bien « creuser ou vider le coffre de la porte »599, ce

592
AD Aude, 4E76CC51, 1366, [f°50 r°7]. «…e fo meza dins la tor redonda de la Strada… » ; [f°64 r°2]. « …per portar 46 travatels de cor de la tor
redonda de Sant Anthoni a l’obra dels embans de la Baffa… ».
593
Cette appellation est toujours d’actualité à la fin du XVIIe siècle, comme à Labécède-Lauragais (Aude), en 1688 : [3. Murailles de la ville]. « Plus,
que ledit lieu de La Bécède est une ville fermée à deux portes, l’une appelée la porte d’amon, l’autre la porte d’abail, et sur chacune d’icelle est bastie
une tour » (Ramière de Fortanier 1939, 466).
594
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°31 v°1]. « ...dicto Dominico Gastonis pro triginta tribus palmis quibus elevavit seu auctmentavit in altitu-
dine turris porte Beati Antonini dicti castri... ».
595
Cette disposition semble reproduite par une illustration de la page de garde d’un compte chaurien représentant les armes de la ville (AD Aude,
4E76/CC61, 1397). Deux anges encadrent une tour-porte (basée sur un socle) dont l’entrée en plein cintre est fermée par une serrure et encadrée par
deux archères (fig. 38). Le dessinateur a symbolisé la partie basse de la tour de manière uniforme, sans traitement particulier (paret ?), alors que la
partie haute est bâtie en pierre comme l’indique le dessin des moellons. L’ensemble est couronné de trois échauguettes en pierre dont deux sont percées
de fenêtres, alors que deux autres ouvertures, l’une rectangulaire, l’autre couverte en plein cintre, sont visibles à l’intersection de la zone terre/pierre.
Toutefois, on remarquera que la base des tours, comme celle des courtines, était bâtie en pierre (infra), détail qui n’apparaît pas sur cette représenta-
tion (ce qui incite à considérer cette œuvre schématique avec la plus grande réserve). Toutefois, certaines représentations graphiques sont fiables, même
lorsqu’il s’agit de représenter la terre crue (en l’occurrence la tapia). C’est le cas par exemple d’une gravure extraite des Cantigas d’Alphonse X El
Sabio réalisée dans seconde moitié du XIIIe siècle (Font Arellano 2007, 62, fig. 3).
596
AC Toulouse, EE32, mars 1354, [f°63 r°1]. « Dem a pres fait an Johan Olier de las Elatas per deffar e derocar la tor […] que es dessus la porta
Nova e aiss que la deu […] far redonda… ». La technique du pisé permet la réalisation de murs courbes et d’édifices circulaires, comme le montrent
des moulins en Isère (Chazelles, Poupet 1985, 151, fig. 2) ou en Espagne (Font Arellano 2007, 55, fig. 1).
597
AD Aude, 4E76/CC64, 1408, [f°39 v°2]. « …tant a derocar la paret vielha la hon se fec la cavalha del mur de la porta Mondebo… ».
598
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°187 v°2]. « …Paulo Guiraudi peyrerio pro abstrahendo et trassando unam brachiatam petre ad opus muri porte
Montis Lebonis… » ; Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°40 v°4]. « …la cal arena portet per far le mur de la pezament de la paret la cal se fa a la porta
Mondebo… ».
599
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 bis r°3]. « Item Hohaneto Bastoni qui per unam diem fuit ad curandum arquam porte Astrate... ». « arqua » :
« coffre », « arche » ou « coffrage » (Gaffiot 2000, 156) ; « curar » : « creuser », « vider » (Alibert 1966, 254) ; « curare » : « avoir soin de, traiter »
(Gaffiot 2000, 462).

92
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

« coffre » désignant peut-être un « batardeau », comme on D’autres « aygueria » possèdent des pentures : étaient-
le verra pour le vocable « caxa » à propos des ponts (infra). elles en partie fermées ou recouvertes par des éléments en
Les travaux requièrent la présence d’un maçon pour bois montés sur charnières (trappes, panneaux ?) destinés à
« extraire la terre du coffre ? de la dite porte »600 : s’agit-il éviter que des matériaux ne les bouchent609 ?
d’effectuer une reprise en sous-œuvre au moyen d’un
À Toulouse, la base des portes était peut-être édifiée
batardeau au pied de la tour ?
selon la même technique que celle des courtines, c’est-à-
Les comptes chauriens mentionnent également à titre dire avec un noyau de terre crue parementé de briques
exceptionnel la présence de cintres (sindras)601 de coffrage cuites610, mais les sources ne donnent aucune précision à ce
pour les portes (pour réaliser la voûte en pierre du sujet.
passage ?) : ainsi, le 30 avril 1415, deux chevrons de vingt
palmes (env. 4,50 m), trois solives de douze palmes (env. Il existait par ailleurs des cabanes de portiers à la base
2,6 m) et une de huit palmes (env. 1,8 m) permettent de des portes (Castelnaudary, Toulouse) : dénommées mayo-
réaliser un cintre à la porte des Cloches602. Trois planches neta, mayzoneta ou cabana, elles sont construites en
de seize palmes (env. 3,84 m) sont également acquises afin voliges ou lattes de bois611 clouées au moyen de clous
de construire un échafaudage au dessus des cintres603. fulhadors612, et peuvent servir à l’occasion de hangar à
matériaux613. À Toulouse, des badorca614 (ou badorqua)
Peu après, ces derniers sont transportés vers la tour
Saint-Antoine et la tour Ronde604 (pour les entreposer ou paraissent avoir la même fonction, et sont quelquefois bien
réaliser d’autres travaux ?)605. équipées : en 1417-1418, celle de la porte Saint-Etienne
possède en effet deux bancs et une table pour que les
Le passage sous la porte était pour sa part pavé, grâce à portiers puissent manger ou faire le guet615.
des pierres récupérées dans les champs alentours606.
Quant aux tours proprement dites, leur base ne devait
Quant aux conduits d’écoulement des eaux, si fréquents guère différer de celle des courtines ou des portes : ainsi,
pour les courtines, ils sont rarement mentionnés pour les
en 1363, deux personnes égalisent la la roche-mère avec
portes chauriennes607. Ainsi, en 1398, Jean Tocabon
des picas pour asseoir une tour616, et, quelques jours plus
construit une « aqueria » (gargouille, bassin ?) à la base de
tard, des pierres sont apportées pour bâtir la base de cet
« la tour de la porte », afin que l’eau provenant des gout-
ouvrage617.
tières ne soit pas projetée sur l’arche (ou le coffrage ou
batardeau ?) du pont ; il se charge également de la recou- Une dépense exceptionnelle signale l’achat d’une
vrir (l’aqueria ou l’arqua ?) de bois608. planche pour fabriquer des gabarits618 (signa sive

600
Ibid., [f°102 r°11]. « Item cuidam nuncio qui morabatur cum Johanne Maurini et qui in vesperis Beati Martini fuerat ad trahendum terram de arqua
dicte porte ».
601
« Cintre : ferme provisoire soutenant les voussoirs pendant la construction d’un arc ou d’une voûte. Pour construire les voûtes on place sur les cintres
les planches appelées couchis qui forment une sorte de moule en relief » (Pérouse de Montclos 1995, 276).
602
AD Aude, 4E76/CC68, 1415, [f°57 v°1]. « …an Bernat Laguarda per 2 cabiros de 20 palms cayrati per 3 corondas de 12 palms e per una coronda
de 8 palms per far las sindras az ops de la porta del Sens… ».
603
Ibid., [f°57 v°4]. « …a mastre Ar. Guaret per 3 postz de 16 palms que foro mezas per estatgas sobre las sindras… ».
604
Edifice non localisé.
605
AD Aude, 4E76/CC68, 1415 [f°58 r°2]. « …a dos homes que logueren per qurar la dita porta e portar las sindras a la porta de Sant Antoni a la
tor redonda… ».
606
Ibid., 4E76/CC55, 1376-1377, [f°45 r°3]. « …que aquel dia stero ad amasar dels calhaus de fora per les camps les quals foro mezes a la causada
de la porta Mondebo… ».
607
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°44 v°5]. « …qui curaverunt gualochia porte de Got Ferran et parietum… ». Ces portes devaient en effet posséder
sous les vantaux un caniveau à même la chaussée permettant d’évacuer les eaux de pluies vers l’extérieur, comme cela existe fréquemment pour ces
ouvrages.
608
Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°75 r°4]. « ...pro faciendo quandam aqueriam in pede turris porte Bastite ad finem quod aque stillicidantes non darent
in arqua pontis dicte porte et pro ipsam recoperiendo de fusta… ».
609
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°128 r°4]. « …pro mitendo ferraturas in aygueria porte de Terrerio… ».
610
À Monbéqui, près de Montauban (Tarn-et-Garonne), en 1382, la porte du fort et l’arche du pont seront édifiées en briques cuites (« …dedit et
concessit predictis consulibus et singularibus licentiam et potestatem recipiendi de tegulis planis loci sui de Montefolcaudo pro faciendo et constru-
endo portam et arcum pontis levadissi fortalicii dicti loci de Montebequino… » ; Forestié 1908, 210).
611
Ibid., 4E76/CC64, 1408, [f°14 r°6]. « …per un fays de lata obs de la cabana de la porta Nova… » ; Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°43 r°1]. « …per
4 fuelhas de 16 palms per far la mayzoneta de las porties de la porta de Mondebo ».
612
Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°42 v°3]. « …per autres 200 clavels fulhador per far la mayzoneta en que stan les porties de la porta dels Sens… ».
613
Ibid., 4E76/CC59, 1393, [f°15 r°2]. « …a samasar le teule de la dita barbacana e metre a la mayoneta que es a la dita porta… ».
614
À Castelnaudary, en 1688, les consuls « possèdent quatre badorces, c’est-à-dire quatre loges, tout près des autres quatre portes de la ville, qui ont
esté basties par les habitants de temps immémorial pour servir à faire garde en temps de peste, et dont les trois ont esté depuis affermées chacune à
trente sols de rente foncière, sçavoir celles qui sont près les quatre portes de la Baffe, de Saint Antoine et de Montléon ; la quatrième est contre la Porte
de Cers… » ; Ramière de Fortanier 1939, 374).
615
AC Toulouse, CC2327, 1417-1418, pièce n° 22. « …per far dos banx e huna taula a la badorca de la dita porta de S. Stephe en que mangen les
porties quant per far dos banx en que se segan al gayt de la dita porta ». D’autres travaux sont signalés sur la badorca du château Narbonnais (Ibid.,
CC2326, 1416-1417, pièce n° 56 ; CC2327, 1417-1418, pièces n° 37, 41).
616
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°127 r°3]. « ...Ramundo Argilerii et Fabro de Podio peyrerii qui steterant ad aplanandum cum piquas ferri ruppem
ubi Petrus Saulonis assetiaret turrim… ».
617
Ibid., [f°129 v°3]. « ...Petro Duoc et Bernardo Galhardi qui steterunt ad portandum petram ad opus ampesamenti turris Petri Saulonis… ».
618
« Molle : modèle, gabarit » (Bernardi 1995, 454).

93
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

molles)619 : ils serviront pour les fondations d’une barba- vielha » qui s’effondre dans le fossé de la ville, qu’il faut
cane et le « pezegot » d’une tour620, terme désignant quel- alors nettoyer632.
quefois « des tuyaux d’argile ou de pierre » (Cayla 1964, Les parties en pierre des portes sont mieux documen-
558), peut-être ici des systèmes de chéneaux en pierre621. tées : ainsi, hormis la base de ces ouvrages, les portes de
Castelnaudary comportent au moins un niveau, sinon deux
6.2.2 - L’élévation des constructions ou plus, édifiés avec ce matériau633.
6.2.2.1 - Une élévation mixte : terre et pierre Ainsi, les transports de pierres vers les portes sont assez
fréquents, mais sont parfois destinés à les boucher634. Dans
À Castelnaudary, une partie de l’élévation des tours et
la plupart des autres cas, leur emploi, non précisé, reste
portes était en terre crue et, à l’instar des courtines, cette
sujet à caution635.
paret venait s’établir directement sur la base en pierre622.
En outre, si l’on prend « au pied de la lettre » une
Comme pour les parets de l’enceinte, les portes néces-
dépense du 20 octobre 1398, l’édification en pierre de la
sitent bruyère623 et coffrages624. Ces murs de terre s’effon-
« tour » de la porte de l’Estrade nécessite un travail au
drent parfois et requièrent alors un bouchage d’urgence par niveau de la partie supérieure du fût en terre : en effet, deux
une palissade625, installation qui réclame au préalable le maçons et trois manœuvres doivent « creuser avec des pics
creusement d’une tranchée de fondation626, l’utilisation de et rabassieyras pour rechercher la partie stable du pied de
bois627, et 30 livres de chevilles de fer628. la tour de la porte de l’Estrade et pour enlever l’argile avec
À Toulouse, en 1354 et 1355, la « tour » de la porte des pelles et enlever les pierres »636.
Neuve doit être élevée au moyen d’une paret de terre Certaines constructions en pierre sont parfois destinées
jusqu’à une « autre tour en terre »629, preuve que ces à contrebuter les poussées : ainsi, en 1364, un maçon
ouvrages sont très semblables à ceux de Castelnaudary. réalise « un épaulement de pierre à la porte du Marché ».
Quant aux tours proprement dites, seule une mention Cette « spallaria »637 est-elle une sorte de contrefort provi-
chaurienne de 1363 précise la nature en terre de leur éléva- soire destiné à éviter un effondrement ou bien un mode de
tion630. À Toulouse, en juin 1355, on fait également élever construction classique pour toutes les portes de la ville ?
une tour en terre631 et un siècle plus tard, en 1459, les D’autres éléments (pila, pilar) servent à soutenir des
consuls font détruire une petite tour (torrella) de « terra ouvrages638 : il s’agirait de piliers de pierre dont le rôle

619
Ces gabarits étaient-ils destinés à la taille des pierres (pour la fondation ?) comme cela est attesté ailleurs ? (« Sur les chantiers douaisiens, la réali-
sation par le maître-maçon d’un modèle, molle ou maurle –gabarit à échelle réelle pour la taille des pierres- est fréquemment attestée. Le maître-maçon
donnait les dessins de ces modèles ou les reportait directement sur un support, bois, toile, métal, découpé ensuite par un charpentier ou un artisan du
fer » ; Salamagne 2001a, 126). Ainsi, il « est donc clair que la réalisation de modèles concernait la taille des pierres spécifiques […] c’est-à-dire des
pierres dont les formats, les angles, les surfaces de parement et les profils présentaient des particularités telles qu’elles devaient être taillées à partir de
modèles, et non plus des devis » (Ibid., 128). Dans le cas chaurien, s’agissait-il de donner le rayon de courbure des pierres de parement d’une barba-
cane semi-circulaire ainsi que le profil de la concavité du pezegot (chéneau ?).
620
AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°4]. « ...pro quadam poste pro faciendo signa sive molles quomodo inceperant fundamentum barbecane et
pezeguot dicte turris… ».
621
Ibid., 4E76/CC79, 1445 [f°8 r°2]. « …a mastre Peyre Melot peirier, per un pretz fait que pres a zadobar lo pezegot de la tor del Terier… ».
622
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°172 r°5]. « ….qui steterunt ad […] faciendum parietem […] super portam Mercadalis… ».
623
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°94 r°4]. « …pro tribus sarcinatis de broc quas portaverunt de nemore dicti Johannis de Calvayraco ad pari-
etes porte Mondebonis… ».
624
Ibid., 4E76/CC64, 1408, [f°35 r°2]. « …les cals avian prezas a far las paretz de la porta Mondebo las cals devian estre de taula… ».
625
Ibid., 4E76/CC63, 1405, [f°32 v°3]. « …a far la palisa a la porta Mondebo la ou era rompuda la paret… ».
626
Ibid., [f°32 v°4]. « …a far la cavalha al pe de la paret per metre le pal desus dit… ».
627
Ibid., [f°33 r°1]. « …per un jorn a portar la fusta a far la dita palisa… ».
628
Ibid., [f°33 r°2]. « …per 16 libras de cavilhas de fer lascals foro mesas a la desus dita palisa… » ; [f°33 r°3]. « …per 14 libras de cavilhas de fer
lascals foro mesas a la desus dita palisa… ».
629
AC Toulouse, EE32, 1354, [f°63 r°1]. « …per deffar e derocar la tor de tera que es dessus la porta Nova e aiss que la deu levar de tera […] e levar
la paret de la dicha tor tro la tor den Tibeli… » ; [f°56 v°2]. « E trobem quel devia per levar 17 brassas de paret de la tor de la porta Nova tro una
tor de tera que levet una C de naut » ; [f°94 v°1]. « … per far la tor de tera que es a pres la paret nova […] e pus per levar 24 brassas de paret de 6
palms de naut que es de la dicha tor de terra tro la tor den Tibeli… ».
630
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°124 v°4]. « ...Petro Saulonis pro faciendo unam turrim de terra… ».
631
AC Toulouse, EE32, juin 1355, [f°94 v°1]. « …per far la tor de tera que es a pres la paret nova… ».
632
Ibid., CC2334, 1459, pièce n° 60. « …a causa de desroquar una torrella de terra vielha la qualla se tenet am la muralha et tombet dedins lo vallatz
et portatz la terra de la dita torrella de fora dels vallatz… ».
633
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°32 v°1]. « ...G. Salas et Guillermo Robberti peyreriis de Monte Mauro pro eo quod eis debebatur de resta pro
precio facto quod fecerunt in opere turris porte Mercadalis... » ; [f°33 v°5]. « ...Petro Calveti peyrerio de Monte Mauro et eius sociis pro precio facto
turris porte Mercadalis... ».
634
Ibid., 1360-1361, [f°87 v°8].
635
Ibid., [f°95 r°5]. « ...ad portandum petram que erat in Mercadal intus portam...».
636
Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « ...pro cavando cum pix et cum rabasseriis pro perquirendo le ferm pede turris porte Strate et pro amovendo
le tap cum palis et amovendo lapides… ».
637
AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°173 v°4]. « ...magistro Johannem Galigo, peyrerio, pro faciendo spallaria porte Mercadalis de petra… ».
638
Ibid., 4E76/CC59, 1393, [f°14 r°6]. « ...an Germa Sacrot peyrier de Miravalh le cal estet per 6 jorns per suspeyrar la paret de la porta Mondebo e
per suspeyrar les pilas que aqui meteys… ».

94
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

précis nous échappe, et il se peut même que dans certains Les tours-portes chauriennes devaient donc posséder
cas ces « pilars » correspondent à une colonne ou une quatre niveaux (auxquels il faut ajouter la plate-forme
colonnette monolithe639. sommitale) destinés aux salles de garde ou au stockage de
On signalera aussi l’existence de stagias (échafau- divers matériels et matériaux.
dages) pour le mur de la porte Montdebo640, mais plus
6.2.2.2 - Planchers, escaliers, ouvertures…
étrange est l’achat d’un barron641 pour réparer (ou
nettoyer ?) la pierre de cette entrée et des parets adja- Les planchers des tours isolées ne sont jamais cités
centes642. dans les sources chauriennes. Quant aux « tours » édifiées
Quoi qu’il en soit, l’ensemble de ces pierres étaient sur les portes, des soliers (ou solerius) sont mentionnés à
liées au mortier de chaux : « recherche »643 puis transport de de rares reprises. Ils devaient supporter des salles aména-
sable pour la porte de l’Estrade644, charroi de mortier par gées à la fois dans les parties en terre mais également dans
âne pour celle de Goufferan645. La chaux est acquise auprès celles en pierre : ainsi, en 1359, on achète auprès des
de Bernard Anglais, chaufournier du Mas Saintes-Puelles, Chanoines de la ville six poutres et un étai pour le plancher
comme c’est le cas des 65 setiers nécessaires pour la tour de la porte Saint-Antoine648, de même que trois éléments
de la porte du Marché en 1359-1360646. pour les travaux de la tour de la porte du Marché649.
Enfin, on évoquera brièvement l’enceinte de la barba- Ces planchers sont, d’après les comptes, rarement
cane de la porte Montdebo, dont une unique mention de réparés, signe d’une solidité suffisante : celui de la porte
1391 précise qu’elle est en terre crue647. de Goufferan fait toutefois l’objet de soins en 1361-
1362650 et surtout en 1430, date à laquelle deux planchers
Pour les autres défenses du même type (au moins cinq,
infra), les registres sont trop laconiques, ou bien les travaux de l’ouvrage, qui menacent ruine, sont entièrement
y afférents, ne portant pas sur l’enceinte, ne permettent pas refaits651. La plupart du temps cependant, les dépenses ont
de savoir quelle était leur nature. trait à l’« enterrement » (infra) de ces planchers ou
plafonds. Les salles des tours-portes peuvent servir à l’oc-
En définitive, et malgré les incertitudes, la base des casion au stockage des armes, comme en 1373 à la porte
portes devait être à pierres et chaux au moins jusqu’à la Montdebo652.
hauteur de la clé de l’arc du passage (env. 5 à 6 m pour le
passage d’un homme à cheval ?), niveau auquel la paret Quant aux systèmes de circulation, les scribes utilisent
prenait le relais jusqu’à une hauteur indéterminée, mais exclusivement le terme de « scaleria » et non celui de
comprise entre 11 et 12 m (env. deux étages ?), solin « gradarius » pour désigner des escaliers charpentés : en
compris. Les parties supérieures de la porte, dénommées 1359, deux charpentiers travaillent pendant deux jours à
« tour » étaient en pierre, et si l’on se fie à la seule mention réaliser une scaleria sur la porte Neuve de l’Estrade653 avec
relevée pour Castelnaudary (supra), pouvaient atteindre quatre brasses de voliges (pour les marches et contre-
plus de 7 m, soit deux au moins deux niveaux. marches ?) et 200 clous baradors654.

639
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°4 r°4]. « ...Johanni Chamani junioris pro uno pilario lapidis ab ipso recepto pro operibus clausurarum… ». En
effet, la formulation (« ab ipso recepto ») est fréquemment utilisée dans les comptes pour un achat de matériaux auprès d’un particulier (bois, tuiles,
etc.). Elle implique donc que l’élément soit transportable.
640
Ibid., 4E76/CC65, 1410, [f°23 v°1]. «...que deffero las stagias del mur de la porta de Mondebo e metero la fusta naut als embans… ».
641
« gros bâton court » (Alibert 1966, 146).
642
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110 v°5]. « …pro uno barone ad curandum petram in porta Mondebonis et parietis circumquaque ».
643
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°8 v°2]. « …qui dicta die cavaverunt arenam pro opere porte de Astrata ».
644
Ibid., [f°7 v°5]. « …portaverunt arenam in opere porte de Astrata… ». À Aix, « pour transporter le sable qui n’est pas extrait sur le chantier, les
Aixois utilisent, dans la plupart des cas, des mules. À moins qu’ils ne disposent d’une charrette ou d’un tombereau. Sur les grands chantiers, l’achem-
inement de ce matériau à pied d’œuvre est confié à des hommes payés à la journée » (Bernardi 1995, 159). Par ailleurs, à Castelnaudary, à l’instar de
la cité provençale, « les documents qui mentionnent la fourniture de sable ne font jamais état d’un achat de ce dernier. Seul est alors comptabilisé le
transport. Il n’est en effet question que de paiements à la journée, et pas à la charge. Ce qui est aussi le cas en Forez et à Avignon » (Ibid.).
645
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°7 r°1]. « …Bernardo Embrini pro uno jornali […] cum suo asino ad portandum morterium in opere porte de
Got Feran… ». À Aix également, « seuls les équidés (cheval, mule et âne) semblent employés. Ils sont généralement équipés d’un bât dont nous
ignorons la forme exacte. D’après les tarifs pratiqués au péage d’Aix au XIVe siècle et sur le chantier des remparts de Pertuis en 1396, cheval et mule
paraissent porter des charges équivalentes, alors que l’âne n’est imposé qu’à la moitié ou aux deux-tiers de ces derniers. Les services rendus par ces
animaux sont multiples. Ils assurent le transport des matériaux pulvérulents (chaux, sable, plâtre), des petites pierres, du mortier, des petites pièces de
bois, des provisions de bouche et, parfois, des cintres » (Bernardi 1995, 199).
646
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°33 v°2]. « ...Bernardo Englesii caucinerio de Manso pro 65 sestariis calcis ab ispo emptis pro opere turis
porte Mercadalis… ».
647
Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°22 r°]. « …per reparar e far las paret de la barbacana de la porta Mondebo las cals eran casutas… ».
648
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°7 r°3]. « …a dominis Canonicis dicti castri 6 travatels et unum stantum qui positi fuerunt in solerio turris porte Beate
Antonii… ».
649
Ibid., [f°7 r°5]. « …a dominis canonicis 3 fustes qui positi fuerunt in opere turis porte Mercadalis... ».
650
Ibid., 1361-1362, [f°87 v°12]. « Item magistro Burdi fusterio pro reparando solerium porte de Guot Ferran... ».
651
Ibid., 4E76/CC73, 1430, [f°13 v°]. « Siec se la despesa que es esta fayta sus la porta de Goferan que les dos soliers que eran desus volian tombar
e coment tot deffar e far de nou ».
652
Ibid., 4E76/CC54, 1373, [f°19 v°7]. « pro quadam clavatura per ipsum posita ad portam camere arnesii porte Montis Lebonis… ».
653
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°8 r°2]. « ...Bernardo Farolo et Petri Mali Casalis pro duobus jornalibus quibus fuerunt quilibet ad faciendum scaleria
in porta nova de Astrata… ».
654
Ibid., [f°8 r°3]. « …pro quatuor brachiatis folie ab ipso receptis […] et pro 200 clavis baratorum ab ipso receptis pro dicto opere… ».

95
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

En janvier 1360, cinq escaliers sont bâtis par deux char- l’accès aux courtines adjacentes : la « tête » du pont de la
pentiers et deux manœuvres sur la tour de la porte de la tour Saint-Etienne autorisant l’accès à la coursière est ainsi
Baffe655. En 1405, celui de la porte des Cloches656, qui édifiée, et deux autres éléments, en chêne, sont bâtis sur
accède aux ambans, requiert l’utilisation de chevrons657. des tours « découvertes » entre la porte Saint-Etienne et la
Ces accès sont parfois condamnés par des portes, tel celui porte Neuve, ainsi qu’un pont en sapin sur le « château de
de la porte de la Baffe en 1432658, et servent quelquefois Pi », fortification non identifiée668.
assez curieusement de lieu de stockage pour des matériaux Concernant les accès secondaires et les ouvertures
de construction659. Les marches proprement dites sont
(portes intérieures, fenêtres, volets), les informations sont
dénommées « locas » : quarante éléments de ce type sont
rares : le 1er juin 1359669, deux charpentiers réalisent portes
nécessaires pour les travaux de la porte du Barri en 1363660.
et fenêtres sur la porte de Valence, ce qui nécessite voliges,
En 1371 toutefois, une dépense vient complexifier clous, chevilles et pentures670. D’autres sont obturées,
l’analyse : le 23 décembre, on fait acheter à Pons de comme pour la porte Montdebo en mai 1360671.
Serrailler, d’Issel, 24 « scalonibus sive loquis » pour
Peu de temps auparavant, le 18 mai, les consuls font
construire un « pontem sive scaleriam » près de la porte de
réaliser un « hostium » (porte ou volet ? infra : ambans). Il
Goufferan. Si l’énigme des « ponts » sur les ambans
est situé « dans le mur, au dessus de la porte de Valence »,
semble levée (infra), pour quelle raison ces structures
c’est-à-dire dans la partie haute en pierre) de la construc-
auraient nécessité des marches, puisqu’il s’agissait vrai-
tion, et nécessite quatre planches de seize palmes de long
semblablement de passerelles de bois661 ?
(env. 3,5 m), quatre pentures, et cinquante clous672. En
À côté des scalerias, on trouve également des 1361-1362, sur la porte du Terrier, un autre hostium (ici
« scalas » (également pour les cadafalcs, infra) : s’agit-il une porte ?) est équipé d’une serrure par Guillaume Gelat,
d’échelles, d’escaliers, voire de « ponts » ou passerelles662 ? forgeron chaurien673. Ces dernières sont bien évidemment
Des escalas sont ainsi réalisées aux portes Montdebo663 et fermées par des clés674.
de la Place en 1360-1361664, grâce notamment à l’emploi de
deux chevrons non équarris665. 6.2.2.3 - Superstructures d’observation et de défense,
couverture
En 1416-1417, à Toulouse, scalas, portes et fenêtres
sont construites pendant quatre jours sur la tour de Comme les courtines, les tours et tours-portes de
Lascrosses par un charpentier666. Par ailleurs, en 1417- Castelnaudary disposent d’un niveau de défense sommital
1418, une escala est édifiée sur la « grande tour » (il y en constitué d’un crénelage et d’ambans (infra). Les informa-
avait donc plusieurs ?) de la porte Saint-Etienne ; dans le tions concernant le premier sont très rares : le 11 mai 1360,
même temps, le plancher est réparé667. Les tours toulou- plusieurs pierres destinées au crénelage de trois tours ont
saines disposent comme on le verra de « ponts » (passe- été prélevées près de la porte du Marché675, et la réfection
relles de bois, amovibles ou rétractables) permettant de ce parapet défensif exige quelquefois la confection

655
Ibid., 1360, [f°11 v°2]. « …Ramundo Vitali et Guillermo Saunas qui fecerunt quinque scaleria in turi porte de Baffa… » ; [f°11 v°4]. « …Petro
Bocas et Petro Bocelli qui dicta die fuerunt manobricii cum fusteriis qui fecerunt scaleria dicte turis… ».
656
Ibid., 4E76/CC63, 1405, [f°35 r°4]. « …per un cabiro que foc mes per Guilhem Garigua al escalier de la porta dels Sens… ».
657
Ibid., [f°33 v°4]. « …per un jorn a sadobar l’escalier de la porta dels Sens ou puges hom als embans… ».
658
Ibid., 4E76/CC74, 1432, [f°9 v°5]. « …per far la porta del escalier de la porta de la Bafa… ».
659
Ibid., [f°15 v°3]. « …per devalar lo teule de la porta del Terier lo cal foc mes sus lo escalier de la Bafa… ».
660
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°75 r°2]. « …pro 40 locas scalerii ad opus scalerias porte de Barrio ».
661
Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°52 r°7]. « ...pro viginti quatuor scalonibus sive loquis ab ipso emptis pro faciendo et preparando pontem sive scalerium
quod est juxta portam de Got Feran... ».
662
« Escala : échelle, escalier, pont volant qui s’abattait d’un navire sur un rempart, civière, brancard de charrette » (Lévy 1909, 159).
663
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°72 v°9]. « ...fecerunt fieri unam scalam pro assendendo in dicta porta... ».
664
Ibid., [f°57 v°3]. « …que aquel dia fe escalas ad obs de puiar sus la porta de la Plassa… ».
665
Ibid., [f°58 r°5]. « …per 2 cabiros redons de que fo fayta escala per puiar sus la porta de la Plassa… ».
666
AC Toulouse, CC2326, 1416-1417. « Despessas faytas per far portas e fenestras e per tancar los trauhs de las arcs de la tor de Las Crozas ».
Pièce 12, r°4. « Item per 4 jornals de fustier tant per far las fenestras e portas e scalas desus… ».
667
Ibid., CC2327, 1417-1418, pièce n° 22. « Primieyrament per far la escala de la gran tor de la porta de Sant Estephe et per reparar lo solier de la
dita tor. ».
668
Ibid., pièce n° 22. « Item per far lo cap pont per on hom entra de la dita tor sus l’aleya. Item per far dos pontz de coral a las tors descubertas entra
la porta de Sent Stephe e de porta Nova. Item per far un pont d’avet al castel del Pi ».
669
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°1]. « …Petro Lauras et Ramundo Saraceni fusteriis qui dicta die steterunt pro portis et fenestris faciendis in
turi porte Valincii… ».
670
Ibid., [f°3 r°4]. « …Belenguario Malas Annas pro sex brachiatis et media folie ab ipso recepte pro opere dicte turis 36 s. tur. Item pro 60 clavis 2 s.
tur. Item pro quatuor libris cavilharum ferri quatuor s. tur. Item pro quatuor l. et media relharum… ».
671
Ibid., 1360, [f°72 v°8]. « ...magistro Dominico Gastonis peyrerio pro claudendo fenestralla porte Montis Lebonis… ».
672
Ibid., [f°2 v°5]. « …fecerunt fieri hostiam in muri qui est supra portam dictam Valincii et receperunt pro dicto opere a Berenguario Malas Annas
quatuor postes 16 palmorum longitudinis, quatro relhatas […] 50 clavos… ».
673
Ibid., 1361-1362, [f°91 v°8]. « Item Guillermo Gelati pro una clavatura quam posuerat in quodam hostio soleris porte Terrerii… ». Cet homme
réside en effet au « Barrio extra portam » en 1356 (Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°5 v°7]).
674
Ibid., 4E76/CC64, 1409, [f°29 r°2]. « …fero paguar al saralhier que trena allostal de mastre Johan Alayrac per huna clau az op de la tor que es
sus la porta de la Bastida… ».
675
Ibid., [f°73 r°7]. « …fecerunt ponere seu assendere de lapidibus qui erant juxta portam Mercadalis superius 3 turri et indentellibus... ».

96
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

d’une auge en bois pour tenir le mortier de chaux, comme On est par contre davantage renseigné sur les ambans
on le signale pour la porte Saint-Antoine en 1442676. défendant les tours-portes chauriennes : leur conception est
Quant à la ville de Toulouse, ses portes devaient très proche de ceux installés sur les courtines de l’enceinte
posséder un crénelage en briques cuites identique à celui (infra) : ils se composent de bois divers (fusta, corondas,
des courtines, même si les sources consultées n’ont pu le cabiros, fuelha683) et leur construction est confiée à un char-
prouver. Deux dépenses chauriennes exceptionnelles attes- pentier.
tent également la présence de ces matériaux dans la Portes et tours servent également d’entrepôt pour des
construction677 : en 1360, cinq hommes montent des éléments de hourds : ainsi, en 1366, trois charretées de
briques sur la porte de la Place678 : manquait-on à ce point « fusta nova » et 46 travatels sont apportés depuis la porte
de pierres pour le crénelage ou ces briques ont-elles été et la tour ronde de Saint-Antoine vers les hourds de la
utilisées pour une opération spécifique, comme par Baffe684. En 1363, une trentaine de corondas sont acquises
exemple la confection d’un conduit de cheminée ? En auprès d’un habitant d’Issel, et une partie d’entre elles
outre, leur lieu de provenance679 et leur moyen de transport utilisée pour les hourds de la porte Montdebo685.
ne sont jamais précisés.
Deux années auparavant, cette dernière a fait l’objet
La tradition de la brique cuite en Lauragais ne s’est
d’ailleurs implantée qu’assez tard, vers le milieu du d’une couverture massive de ses ambans grâce à l’apport
XVIe siècle680 : à cette époque en effet, afin de veiller à la d’environ 2500 tuiles686, transport assuré parfois par une
sûreté des citoyens (vols, incendies, accidents), les consuls douzaine de personnes687.
de Castelnaudary décident de remplacer les cloisons des Ces toitures subissent quelquefois des dommages :
maisons, alors en torchis681, par des murs de briques, ainsi, en 1382, deux individus doivent ramasser et remettre
conformément à la coutume de Toulouse et à la jurispru- en place les tuiles des hourds (portes Montdebo et de la
dence du Parlement682. Bastide), emportées par le vent688.

676
Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°44 r°7]. « …per clavels reforssatz e barados per far hun nauc de fusta per tenir le mortier […] per adobar le dentelh
de la porta de Sant Antoni… ». C’est également le cas en Dauphiné où il arrive que le « châtelain achète une grosse corde pour monter les matériaux
à l’aide d’une poulie ainsi que deux auges constituées de planches clouées pour transporter le mortier et les pierres » (Nicolas 2005, 167). Pour Aix,
Ph. Bernardi note que « c’est probablement sur l’épaule que se portent, en revanche les auges (gamatal) en bois avec lesquelles le mortier est amené
du lieu de gâchage à pied d’œuvre » (Bernardi 1995, 199).
677
Seules mentions relevées sur l’ensemble des comptes.
678
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°58 v°4]. « …per 1 home que avia logat per puiar teula a l’obra desus la porta de la Plassa… » ; [f°58 v°5]. « …per
4 homes que avian portada teula detras mastre B. Servit entro la obra desus la dita porta… ».
679
Il se peut d’ailleurs que ces dernières aient été fabriquées sur place. Il existe en effet une « tuilerie vieille » à la fin du XIVe siècle, au nord de la ville,
et une seconde, près de la porte de Montdebo, au début du XVe siècle (M.-C. Marandet 2006b, 290). Par ailleurs, comme l’a montré Ph. Wolff dans la
région toulousaine, le tegularius fabrique deux produits : « tegule cavate pro retegendo vel coperiendo, tegule plane pro faciendo menia sive mural-
hias » (Wolff 1954, 279, note 82), et il en est apparemment de même en Lauragais où « les registres d’estimes montrent qu’il existe, au moins, une
tuilerie par village, elle fabrique tuiles (tegulos concavos) et briques (tegulas planas) » (Marandet 2006b, 289).
680
Cette constatation rejoindrait ainsi l’observation de M.-C. Marandet selon laquelle, « en Lauragais oriental, la brique ne doit pas être très fréquente,
même aux XVIIIe et XIXe siècles ; on ne retrouve pas de bâtiment de ferme antérieur au début du XXe siècle construit dans ce matériau. Elle est peut-
être plus courante dans le Lauragais occidental. Je pense que l’est du Lauragais utilise des bancs de grès et de calcaires locaux » (Marandet 2005, 172).
681
À Toulouse également, la plupart des cloisons étaient réalisées dans ce matériau : ainsi, en 1402-1403, dans un inventaire concernant l’hospicium
magnum et paternale de la rue Temponières « rien n’est dit sur les matériaux de construction, mais compte tenu des dimensions et des élévations, la
brique semble plus que probable. La seule mention de ce type concerne le matériau des murs intérieurs : des candélabres sont fixés in tortitio »
(Lamazou-Duplan 1994, 47).
682
De fait, cette décision du 25 avril 1553 prise avec le concile des habitants exige que dorénavant les murs mitoyens des maisons de la capitale du
Lauragais soient uniquement bâtis en briques cuites (AD Aude, 4E76/BB4, [f°174 r°]).
683
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°52 r°3]. « ...pro portando fustam ad opus ambanamenti porte de Barrio… » ; [f°54 r°5]. « ...pro septem corondis
emptis [...] ad opus dicti ambanamenti dicte turris de Barrio… » ; [f°60 r°6]. « ...pro 24 brachiatis fuelhe ad opus ambanamenti porte de Barrio… » ;
[f°60 v°7]. « ...pro portando 9 cabirones ad ambanamenta retro juponerium et pro portando fuelham ad ambanamenti porte de Barrio… ».
684
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°20 v°4]. « ...lequal portet 3 caretadas de fusta nova laqual era a la porta de Sant Anthoni e fo portada als embans
de la Baffa… » ; [f°64 r°2]. «…per portar 46 travatels de cor de la tor redonda de Sant Anthoni a l’obra dels embans de la Baffa… ».
685
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°134 r°1]. « ...pro 31 corundis emptis [...] ad opus ambanamenti porte Montis Lebonis...».
686
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°116 r°9]. « ...pro duobus milheriis de tegulis emptis ad opus dictorum embanorum et embanorum porte
Mondebonis... » ; [f°116 v°7]. « ...pro 525 tegulis emptis ad opus dictorum embanorum de quibus major pars fuit posita in embans porte
Mondebonis… ».
687
Ibid., 1362, [f°127 r°1].
688
Ibid., 4E76/CC56, 1382, [f°116 v°1]. « ...qui dicta die steterunt pro ajustando tegulum circum circa ambanamenta qui ceciderat propter fortunam
ventis altani et dictum tegulum apportarunt super dictos ambanamentos et super portas Mondebonis et Bastite... ». Les tuiles devaient se chevaucher
partiellement et n’étaient pas fixées par des clous ou des chevilles, ce qui semble être également le cas à Toulouse dans la construction civile : « la tuile
canal est le matériau qui est habituellement considéré comme le plus fréquent dans le Midi, hors les zones de montagne » ; « aux matériaux employés
ne correspondent pas nécessairement des pentes de toit différentes. Tuiles dérivées de la tuile romaine et tuiles canal imposent des pentes faibles (de
18° à 27° selon les normes qui ne sont sans doute pas celles du Moyen Âge), à moins qu’elles ne soient retenues par un clou, aucun exemplaire mérid-
ional de ce type n’étant cependant connu pour la période qui nous intéresse. En tenant compte de l’obligation de recouvrements importants, les charges
supportées par la charpente sont alors de l’ordre de 100 kg/m2 » (Carcy, Scellès 2002, 206, 210). Ce n’est pas le cas dans certains endroits de Normandie
(« En 1386, un couvreur chargé de refaire la toiture des tours de l’enceinte du château de Caen se voit prescrire de mettre en chaque ardoise et tuille
un clou a quantier en lieu de cheville » ; Boüard 1965, 433). Afin d’éviter qu’elles ne glissent du voligeage, les tuiles canal chauriennes étaient donc
posées sur une toiture dont la pente ne dépassait vraisemblablement pas 30°, comme c’est généralement la règle (Hoffsummer 1999, 53). En outre, la
tuile « ne pouvant être posée que sur des pentes supérieures à 25°, elle exerce des charges très fortes sur les murs gouttereaux et nécessite des murs
épais ; en fonction de leur poids, de leur recouvrement et de leurs dimensions, 25 à 85 tuiles sont nécessaires par m2. D’une durée de vie inférieure à
l’ardoise –de 20 à 30 ans contre 100 ans pour la première- elle est plus vulnérable aux intempéries » (Salamagne 2001, 176).

97
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Par ailleurs, les données textuelles sont rares pour Enfin, et pour conclure, quelques dépenses font état de
déterminer si, en plus des hourds, tours et tours-portes transports d’éléments charpentés pour des tours et portes de
possédaient une toiture protégeant la plate-forme. En 1360- l’enceinte, mais sans destination précise : une sablière et dix
1361 toutefois, on relève des travaux de couverture sur la travatels pour la tour de la porte du Marché701, une coronda
porte Montdebo, signe qu’elle possédait charpente et pour la porte du Terrier702, un étai de trois cannes (env.
toiture distinctes des hourds689. En 1361-1362, un certain 5,4 m ?) pour celle de la Baffe, ainsi qu’une poutre (saume-
Pierre Ot se charge également de « recouvrir la porte de rius) de quatre cannes et demi (env. 8,1 m ?) pour la tour
l’Estrade » (toiture de la plate-forme ou celle des ronde de l’Estrade703. Des pièces de moindres dimensions,
hourds690 ?). En avril 1372, deux brassiers sont chargés de tel ce bois d’environ un mètre de long, sont également utili-
« déterrer » et découvrir la grosse tour d’angle du port de sées pour réaliser une subbarba704 à l’intérieur d’une tour705.
l’Estrade, alors en ruine691, puis en 1393, on s’occupe de la
couverture de la tour de la porte de la Bastide692, ce qui 6.2.3 - L’accès principal de la porte : porta, portanels,
nécessite un transport de tuiles depuis la porte Montdebo693. ponts, et ponts-levadis
Enfin, une vague dépense de 1376 précise que la ville fait
L’accès principal des portes de Castelnaudary (en
acheter à un forestier de la forêt de Cabra-Mortua
quelque sorte « la porte de la porte ») et le, voire les ponts-
12 poutres ou solives destinées à arranger (entuinar) la tour
levis généralement associés, sont bien détaillés dans les
de la porte de la Bastide694.
sources comptables : lieux de passage obligés d’une multi-
Il n’est cependant pas du tout certain que la totalité des tude de gens, d’animaux, de matériaux, et de moyens de
tours et portes aient été couvertes : en effet, la toiture aurait transport, ces éléments étaient soumis à une usure et une
empêché l’installation de machines de jet (pierrières, dégradation rapides, nécessitant un entretien et une
bricoles) mais aussi peut-être de l’artillerie à poudre surveillance rigoureux.
(petites bombardes, canons)695 dont les plates-formes
Par ailleurs, ces points vitaux de la défense concen-
sommitales des tours et portes devaient être le lieu d’ins-
traient, avec leurs ouvrages avancés (pals, barbacanes,
tallation privilégié, ici comme ailleurs696.
palissades et barrières), toute l’attention des consuls. Ces
Des constructions de défense et de surveillance existent accès, de conception complexe, possédaient donc de
également : en 1359-1360, la porte Montdebo possède un manière assez systématique une porte charretière associée
gaychil (échauguette, infra)697, tout comme celle de à une porte piétonne (portanel), toutes deux dotées de
Goufferan en 1372, ce dernier servant d’ailleurs de stoc- ponts-levis venant s’abattre sur un pont dormant706.
kage pour la charpente d’un autre gaytil détruit698. En 1381,
Jean Capelle, forgeron, est chargé de réparer deux pentures 6.2.3.1 - Portes et poternes : composition et systèmes
de porte (ou de volet ?) pour le gaytil de la porte des de fermeture
Cloches dans lequel les guetteurs restent pour effectuer Les portes de Castelnaudary se composent de deux
leur garde699. Ces gaytils, particulièrement nombreux, vantaux de bois (au moins pour la porte charretière),
étaient établis sur la plupart des tours et portes de la ville. comme illustré sur le registre de 1397 (fig. 38)707.
Par ailleurs, une dépense de 1360-1361 mentionne Les sources ne donnent toutefois aucune indication sur
l’achat d’une planche pour le mâchicoulis (machacol) de la la taille de ces accès, et ne citent jamais clairement les
porte du Marché (bretèche en encorbellement ou assom- différents éléments en bois entrant dans la composition des
moir ?)700. parties mobiles : on ne sait donc si la fusta et autres

689
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°80 r°2]. « …in cohoperiendo dictam portam Montis Lebonis… ».
690
Ibid., 1361-1362, [f°103 v°2]. « ...Petro Ot alias Ferandi pro [...] recoperiendo turim Astrate...».
691
Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°69 r°2]. « …Jacobo Causideriis et Ramundo de Frigidimonte braseriis qui dicta die steterunt ad desterandum ac
discoperiendum turi grossa anguli portus Astrate cum esset in ruina… ».
692
AD Aude, 4E76/CC59, 1393, [f°16 v°1]. « …a recubrir la tor de la porta de la Bastida… ».
693
Ibid., [f°16 v°5]. « …que aportet teule de la porta Mondebo a la tor de la Bastida… ».
694
Ibid., 4E76/CC55, 1376, [f°32 v°5]. « ...an R. Bergonho, forastier de Cabra Mortua pro 12 travatels de cor les quals foro comprat per entuinar la
tor de la porta de la Bastida… ».
695
Et ce en raison du fort dégagement de fumée provoqué par le tir de ces engins.
696
En Bresse et Bugey, au sommet de certaines tours de châteaux, « un engin, prêt à fonctionner, est installé. Cet engin peut être une espingualle, les
comptes ne le précisent pas, mais ce peut être aussi une bricole et pour cette raison, certaines tours demeurent sans couverture » (Kersuzan 2005, 250).
697
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°19 r°5]. « …fustam ad opus gaycillorum porte Mondebonis... ».
698
Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°58 r°4]. « …et portando fustes dicti gachilli diruti in gachillo porte de Got Feran pro custodiendo ibi ne perderetur… ».
699
Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°68 r°3]. « ...Johanni Capellani, fabro, qui reparavit duas relatas hostii quod erat retro hospicium magistri B. Servici et
fuit apportatis super gathillum porte Cimbolorum et positum ubi excubiatores remaneant pro faciendo excubias… ». Ce gaytil pourrait toutefois être
une guérite (en bois ?) posée au pied de la porte(Alibert 1966, 415 ; Mistral 1878, vol. 2, 4), et non un édifice situé au sommet des ouvrages.
700
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 v°9]. « …pro uno poste posito in machacollo porte Mercadalis… ».
701
Ibid., [f°33 r°4]. « ...pro quadam sola per ipsum posita in opere turris porte Mercadalis et pro assendendo in dicto opere 10 travatellos... ».
702
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°2 r°3]. « ...pro una coronda que erat necessaria ad opus porte Terrerii... ».
703
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°97 r°2]. « Item pro quadam stanto recepto per Petrum Narbone ad opus porte de Baffa longitudinis trium cannarum.
Item pro quodam saumerio longitudinis quatuor cannarum et medie quod fuit portum anno preterito in turre rotunda de la Strada… ».
704
« Subbarba, subarba : pièce de bois ou pierre verticale supportant une charge » (Bernardi 1995, 461).
705
AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°40 v°6]. « …pro alio fusto de 5 palms recepti per dictos fusterios pro faciendo una subbarbam dicte turris… ».
706
En effet, « à la fin du XIVe siècle et surtout au XVe, on revient à une ancienne pratique romaine : deux portes, percées côte à côte, chacune étant
pourvue d’un pont à bascule indépendant. La première porte, de grandes dimensions, véritable porte charretière, est presque toujours fermée et le pont,
relevé, ne s’abaisse qu’à bon escient. La deuxième, étroite poterne, ne laissant place que pour un homme de front, est utilisée pour le va-et-vient
habituel » (Finó 1970, 266).
707
AD Aude, 4E76/CC61, 1397.

98
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Fig. 38 : Castelnaudary. Page de garde du compte consulaire de 1397 (ADA, 4E76/CC61). On remarquera la représentation de la por-
te, dont seule la partie haute comporte un appareil à pierres et chaux, la partie basse étant représentée lisse (terre crue ?).

99
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

corondas sont précisément destinées aux battants, ou si ces portes de la ville étaient fermées au moyen de chaînes
matériaux sont utilisés à d’autres fins708. Ces vantaux, munies de grands cadenas721.
consolidés par des pentures et autres ferrures, sont installés Les portes chauriennes sont par ailleurs protégées par
sur des gonds709 grâce à une opération de levage utilisant des herses en bois renforcées de clous722 dénommées
des cordes710.
comportas723 : en 1361-1362, celle de la porte du Marché
Les pièces métalliques sont souvent fournies ou fabri- utilise une corde de l’église Saint-Michel, vraisemblable-
quées par G. Gelat, principal forgeron de la ville (au moins ment pour la lever724. Un « ausaprem » ou « ansaprem »,
pour les années 1359-1363) ; elles concernent des systèmes composé de bois725 et d’une arpa, constitue apparemment la
de fermeture (porte principale, portanel, portes internes à pièce principale du mécanisme de levage de la herse726.
l’édifice) : serrures711, parfois « renforcées » installées sur
Enfin, « ultime » système de fermeture en cas de
des poternes encore murées712 ; verrous, doublant peut-être
danger, la condamnation d’une ou plusieurs portes de la
les serrures sur certaines portes. Ils possèdent un moraillon,
ville peut être décidée par les consuls, comme par exemple
tel celui de la porte des Cloches en 1361-1362713, à nouveau
en 1359-1360 lors des menaces que fait peser le comte de
réparé en 1363714, des charnières, et une ou plusieurs verte-
Foix sur la ville. Une fois le danger passé, on décide bien
velles715 coulissant dans un anneau fixé sur l’encadrement,
souvent de les rouvrir tout en prenant soin de conserver les
comme à la porte de l’Estrade en 1398716. Tous ces éléments
moellons dans la porte même (à l’étage, dans les salles ?),
sont assujettis aux boiseries par des clous717. D’autres
de manière à pouvoir de nouveau condamner l’accès au
dépenses pour les portes de l’Estrade ou Montdebo font
plus vite si le besoin s’en fait sentir727.
également mention de ferrures, de chaînes, et d’un grand
anneau en fer718. 6.2.3.2 - Ponts-levis
En plus de ces dispositifs, les portes de la ville sont Les ponts-levis728 (pons-levadis dans les comptes chau-
protégées par des barres (éparts ou amovibles ?) mises en riens) sont constitués d’un tablier composé de planches
place la nuit ou en cas d’alerte : certaines sont en bois719, (postz)729 relevé en position haute au moyen d’une ou
d’autres en fer720. Mais à Toulouse, en 1417, les douze plusieurs cordes730.

708
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°95 r°3] ; Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°39 r°4].
709
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°53 r°5]. « ...magistro Guillelmo Gelati pro relhadis ferri et pro gossonibus… » ; [f°91 r°7]. « Item eidem pro duobus
guofonibus ad opus porte Portus Bordarum… ».
710
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°98 v°1]. « Item pro una corda ad opus porte Mercadalis ad ad (sic) levandum eandem…».
711
Ibid., 1359-1360, [f°4 r°3]. « ...G. Gelati pro reparando quandam clavaturam et clavem porte Mondebonis... ».
712
Ibid., 1360-1361, [f°77 r°7]. « …pro quadam clavatura munita quam posuit de mandato dominorum consulum in portanello porte Foy enmurate… ».
713
Ibid., 1361-1362, [f°92 r°1]. « ...quia reparaverat clavaturam porte Stimbalorum et fecerat moralham in ferollo... ».
714
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°53 r°5].
715
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°145 r°2]. « ...per un ferolh e per armelas […] lasquals cauzas foron mezas a la porta vielha de Sant Anthoni… ».
716
Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°57 v°1]. « ...pro reparando ferollum porte Strate et pro faciendo veruolas ibi necessarias et pro ponendo dictum
ferrollum et dictas veruolas… ».
717
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°145 r°2].
718
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°14 v°7]. « ...pro duobus cathenis et alia feratura per ipsum positis in porta de Astrata… » ; [f°24 r°1]. « ...pro
quodam anulo magno ferri que fuit positus in opere porte Mondebonis… ».
719
Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°41 r°2]. « ...G. Garrigue fusterio pro faciendo et pro ponendo barram quod est retro portam Cimbalorum… » ; [f°55
r°5]. « …pro quadam barra de tilhio pro barrando portanellum dicte porte… ».
720
Ibid., 4E76/CC59, 1393-1394, [f°26 v°3]. « …per tres baras de fer per barar la porta de la Buada ».
721
AC Toulouse, CC2327, 1417-1418, pièce n° 21. « …per la factura de dotze cadenatz grans per luy faitz per tancar las cadenas de cascuna de las
12 portas… ».
722
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°77 v°4]. « …pro 150 clavibus refforsatis et 50 clavibus relhe qui fuerunt recepti ad operibus comporte… ».
723
Eugène Lévy donne comme définition probable à ce terme « pont-levis » ou « herse » (Lévy 1909, 87). Pour Castelnaudary, nous retiendrons la
seconde puisque le pont-levis est expressément dénommé « pons levadis » (AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°82 r°4]. « …per quinque dies in
ponte levadis »).
724
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 r°10]. « Item Vitali Marcaderii pro portando cordam nove de ecclesia Beati Michaeli ante turrim
Mercadalis et ponendo in comporta dicte turris. ».
725
Ibid., 1360-1361, [f°94 v°4]. « ...pro uno ausaprem faciendo et pro fusta eiusdem ad opus porte Stimbalorum... ».
726
Ibid., 1361-1362, [f°92 r°2]. « ...pro una arpa quam fecerat ad opus ansaprem porte Stimbalorum... ».
« Arpa : griffe, herse » (Lévy 1909, 29) ; « Griffe, serre, gaffe, hoyau à trois dents » (Alibert 1966, 116). Cette « arpa » désignait peut-être une sorte
de crochet en fer (cet élément est en effet acheté à Guillaume Gelat, forgeron) qui, associé à une corde, permettait de lever la herse.
727
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°58 v°3]. « …a 3 homes que avian uberta la porta la qual era clausa de peyra a relacio del senhor Bertran
Robert les quals el avia logatz per la dita porta ubrir e metre la peyra dedins… ».
728
On sait par ailleurs l’importance de tels ouvrages. En effet, « à la lecture des documents conservés à la Bibliothèque nationale de France, on constate
que, pendant presque toute la fin du Moyen Âge, l’installation, l’entretien et la réparation des ponts-levis et ponts-dormants occupèrent le plus fréquem-
ment les charpentiers. Environ 20 % des quittances de charpenterie envers des organismes royaux concernent ces deux types d’installations, et, si l’on
y ajoute les barrières, on atteint près de 30 % du total » (Lardin 1999, 188, 186, fig. 1).
729
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°48 r°4]. « …per una postz que fo meza al pont lebadis de la porta de Sant Anthoni… ». En Normandie, « les planches
des ponts-levis sur lesquelles passaient les hommes, les chevaux et les charrettes se détérioraient rapidement et il fallait les remplacer, mais les mécan-
ismes servant à les lever et les baisser ne tenaient pas non plus très longtemps » (Lardin 1999, 189). C’est également le cas à Lille, au château dit de
Courtrai, où « l’entretien des ponts du château occupe sans conteste la première place dans les travaux de charpente périodiquement entrepris durant
la période considérée. […] La fréquence de la réparation des ponts s’explique aisément : non seulement ils sont exposés de plein fouet aux intempéries,
mais aussi soumis à des charges considérables » (Blieck 2003, 72).
730
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°82 r°5]. « …pro quadam quantitate corde cum qua pons predictus traheretur... » ; [f°72 r°1]. « …duas
brachiatas et duos palmos tralhe per levando et retinendo pontem porte Montis Lebonis… » ; 1361-1362, [f°87 v°10]. « Item pro una corda canapis
de tribus brachiis cum dimidia ad levandum pontem porte Mercadalis… » ; [f°113 r°13]. « ...pro una corda ad levandum pontem porte Narbonesie
quo ponderavit 11 ?… ». Environ 4,4 kg ; [f°109 v°7]. « ...pro una corda de mola ad opus pontis porte Mondebonis... » ; [f°109 v°8]. « …pro alia
corda […] ad opus pontis porte Mercadalis que inter ambas [pendebant rat.] ponderabant 3 l.3 quartos… ».

100
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

Le pont-levis de la porte des Cloches, nécessite une 1361-1362 (verrou et vertevelles745) et à la porte des
tralha (grosse corde731) de chanvre en 1363, celui de la porte Cloches en 1363 (serrure « couverte » (copata), 21 livres
de la Place une tortorieyra732 en 1376733. À une seule reprise, de chevilles de fer746). Huit ans plus tard, en 1371, un serru-
en 1381, on précise que le pont-levis est remonté au moyen rier réalise un cadenas pour ce même ouvrage747.
d’une chaîne et se maintient en position haute grâce à une
autre chaîne (éléments sectionnés par la force du vent734). 6.2.3.3 - Ponts dormants
Ces cordes et chaînes étaient peut-être rattachées à des
Ces édifices possèdent des fondations particulières, un
éléments en bois (pertica735 : flèche736 ?) permettant de
tablier, et une superstructure.
relever le tablier du pont737, aidées par des contrepoids738.
Ce mécanisme était complété par des poulies 739 mises en
place au moyen d’échafaudages740. Elles étaient fixées par 6.2.3.3.1 - Fondations
plusieurs livres de chevilles de fer (cavillas de fer)741. Ces fondations sont évoquées en 1363 dans une série de
En 1361-1362 et 1371, on relève des informations en dépenses pour le pont de la porte des Cloches, notamment
rapport avec l’axe du tablier du pont-levis742 des portes par l’utilisation du mot « caxa » (ou caysha), dont les
Narbonnaise et de l’Estrade743. De la graisse est générale- acceptions sont nombreuses748. Toutefois, son « associa-
ment utilisée pour faciliter la rotation744. tion »749 au vocable « fovea » (« excavation, trou, ou
En position relevée, le pont-levis paraît maintenu par fosse » ; Gaffiot 2000, 690), conforterait son sens très
des systèmes de fermeture comme à la porte du Barri en probable de « batardeau »750.

731
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°49 v°2]. « …pro una tralha canapis ad opus levandi pontem porte Cimbalorum… ».
732
« Tortière : grosse corde faite de plusieurs brins de chanvre entortillés » (Cayla 1964, 688).
733
AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°25 r°6]. « …per una tortorieyra laqual fo mesa al pont de la porta de la Plasa… ».
734
Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°131 r°3]. « ...G. Gelati pro reparando cathenam quam tenet pontem de porta Mondebonis quando est elevati et pro
reparando cathenam pede dicti pontis cum quam assendit qui quid catheno erant fracte propter fortuna ventis… ».
735
« Pièce de bois, perche » (Bernardi 1995, 456).
736
Ces flèches se généralisent en France à partir du milieu du XIVe siècle (Châtelain 1981, 91). Pour J. Mesqui « un énorme pas en avant fut franchi
dès lors que l’on eut inventé les ponts-levis à flèche. Le système de ces ponts consiste à aménager la bascule au dessus du passage : les deux bras action-
nant le pont, placés en hauteur, sont équilibrés par un cadre muni d’un contrepoids, l’axe se situant à quelques mètres au-dessus du sol du passage de
l’entrée. Les exemples conservés de ce type de pont-levis ne permettent pas de remonter antérieurement à la seconde moitié du XIVe siècle. [ …] La
diffusion du pont-levis à flèche fut extraordinairement rapide : en moins d’un quart de siècle, il était devenu l’accessoire indispensable du couloir
d’accès ». Par ailleurs, « la généralisation des systèmes de pont-levis à flèches alla le plus souvent de pair avec une simplification des couloirs d’accès
qui ne furent plus guère dotés, dès le dernier tiers du XIVe siècle, que d’une herse, de vantaux et éventuellement d’assommoirs » (Mesqui 1991, 339,
340).
737
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°73 r°2]. « ...duo coronde a B. Embrini quarum una fuit posita in capite dicti pontis et alia in capite perticarum
cum quibus levatur… ».
738
Ibid., 4E76/CC78, 1442 [f°49 v°1]. « …per adobar les maymos del pont levadis de la porta de Sant Antoni les cals eran decorbatz… ». Le terme
« maymo » ou « maymon », désigne les « accessoires d’un moulin à foulon » ou des « masses dont le poids tombant sur les draps chassait l’eau dont
ils étaient imbibés (les maymons de fer, Carcassonne, 1609) » (Cayla 1964, 463). S’agit-il des contrepoids des flèches ou de ceux du tablier du pont-
levis ?
739
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°45 v°4]. « ...Germano Saurini fusterio pro faciendo duas carrelas novas ad opus pontis porte Cimbalorum et pro
aptando dictum pontem... » ; Ibid., [f°48 v°10]. « ...Bernardo Embrini pro una carela nova et pro aptendo eandem in ponte porte de Barrio… ».
740
Ibid., [f°43 v°1]. « ...Germano Saurini pro aptando stagiam carrele pontis predicti Cimbalorum… ».
741
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°53 r°8]. « ...pro una cavilla ferri ad opus pontis porte de Barrio… » ; [f°92 r°3]. « ...pro sex libris cavilharum ad
opus carelle pontis porte Cimbalorum. Item plus pro tribus libris ibidem… » ; [f°120 r°], [f°121 r°5].
742
Ibid., [f°120 v°6]. « ...pro portando unum fustem fuzelli dicti pontis de porta Mondebonis et alios quatuor fustes de ante domum Beati Antonini ad
dictum pontem... » ; ibid., [f°121 r°6]. « ...pro uno stant magno [...] ad opus fuzelli pontis porte Narbonesie... ». Fuzel ou fusel paraît en effet avoir ici
le sens de « pivot » (Niermeyer 1984, 458 : « Fusolus, fusillus, fusellus (de fusus) : fuseau, pivot) ». Le pivot est « une extrémité amincie (ou pièce
rapportée à l’extrémité) d’un arbre tournant vertical. Axe, crapaudine, palier, tourillon » (Robert 1982, 1444).
743
AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°46 r°3]. « ...Petro Guilaberti fusterio qui dicta die steterat ad preparandum pontem porte Astrate ut posset
levare… ».
744
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°102 v°3]. « ...pro quinque cartonibus de grays ad unhendum fusellum turi ».
745
Ibid., [f°92 r°3]. « ...pro una clavatura quam fecerat ad opus porte pontis Barii uno ferrollo cum armellis… ».
746
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°36 r°1]. « ...magistro Guillemo Gelati […] pro una clavatura copata ad opus pontis porte Cinbalorum et pro 21 libris
cavillarum ferri… ».
747
Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°40 r°1]. « ...Gauberto Gelati, seralerio, qui dicta die preparavit cadenatum seu tartugam pontis porte Stimbalorum
cum non posse claudere nec aperire cum clave... ».
748
« Caisso, caicho, caissa, caycha : caisse, coffre de paysan, coffre-fort, cercueil, corps d’une charrette, tranchée, fouille dont on a enlevé les terres,
compartiment d’un fossé que l’on vide » (Mistral 1878, vol. 2, 422). Ce terme aurait ici l’acception de « caisse » ou de « fouille dont on a enlevé les
terres ».
749
On a vu en effet toute l’ambiguïté de « seu » ou « sive ».
750
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°37 v°6]. « ...ad curandum caxam seu foveam pontis porte Cimbalorum… ». Le batardeau est un « obstacle artifi-
ciel permettant d’assécher temporairement une partie de fossé, de cours d’eau, ou un emplacement précis où l’on veut faire des travaux » (Pérouse de
Montclos 1995, 520). En ce sens, il pourrait se rapprocher du terme d’arca (infra).
Jean-Louis Delmas interprète caissa comme une sorte de « scaphandre » ( ?) construit spécialement pour permettre de dégager le lit de la rivière (?).
Cependant, le contexte permet de penser qu’il s’agit-là d’un batardeau : « Le pont d’Albi, un des grands monuments de l’Albigeois, réclame des soins
constants et exceptionnels : pour enfoncer les pilots ou les batardeaux, on construit en 1404 un grand trépan, lo tarayre. À cette occasion, on fabrique
un véritable scaphandre, afin de dégager le lit de la rivière : c’est une création spontanée, comme le prouve l’absence de termes propres pour la dési-
gner ou la décrire, una caissa (caisse). (...) » (Delmas 1968a, 52).

101
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Ainsi, le 8 juin, deux grandes poutres sont transportées connaît d’ultimes préparatifs764. Il faudra par la suite
par huit hommes751 vers ce pont brisé ; puis dix personnes attendre février 1364 pour que l’arca soit à nouveau
s’occupent du « nettoyage » de la caxa vers le 10 juin752. nettoyée (en vue d’une réparation de la pile ?)765. Enfin, en
Aux alentours du 13 juin, Pierre Madrier s’emploie 1376, des cloisons de tonneau sont utilisées pour la confec-
pendant une journée à nettoyer et arranger la tranchée de tion de la caysha de la planqua (infra) de la porte de la
fondation où le mur de la caxa va être implanté753. Le même Place, preuve que ces batardeaux étaient quelquefois
jour Jean Doste évacue la terre de la caxa754, et Pierre réalisés avec des éléments de récupération766.
Madrier et Guillaume Hugo s’affairent au nettoyage de la
Les comptes chauriens emploient ainsi « arca »,
caxa, laquelle était « inbroguata »755. Ce terme, formé à
comme synonyme de « caxa » (donc dans le sens
partir de « bruga » (bruyère), sous-entendrait que le batar-
d’« emprise d’un décaissement », en l’occurrence pour
deau était rempli par ce végétal : or, ce dernier n’a pu
établir la pile du pont). Les actions en rapport avec cette
pousser en l’espace d’une journée dans une fosse qui vient
arca sont en effet les mêmes que pour la caxa : creuse-
d’être nettoyée756 mais on peut penser que certaines
ment767, transport de bois jusqu’à l’ouvrage768 puis
branches (pour la construction des parets ?) ont pu tomber
construction de la pile du pont avec extraction préalable de
accidentellement ; on prend donc la peine de les évacuer
la terre présente dans l’arca769. Pour leur construction, ces
avant de bâtir le « mur de la caxa » (pile du pont757), la
dernières requièrent des douves770 (dogas771, douelas772),
présence de végétaux étant comme on sait fortement
comme par exemple en 1376773.
nuisible à la tenue du mortier de chaux.
Les pierres pour le « mur de la caxa » sont transportées La « planca »774 correspond pour sa part à une petite
par animal758 et Raymond Jean (maçon) et Pierre La Broa passerelle sur pilotis bâtie dans le fossé pour puiser l’eau
dirigent la manœuvre pour le construire759, opération à dans le batardeau (caysha, arca), comme c’est le cas à Lille
laquelle participe peut-être Pierre Madrier les 15 et au début du XVe siècle (planquier)775. Une planca en bois
16 juin760 ; trois jours plus tard, Raymond Jean y travaille de sapin est ainsi édifiée en 1373 près de la porte Montdebo
de nouveau761, tandis que Jean Ribayrenx transporte pierres et équipée d’une poulie évacuer l’eau (avec un seau ?) s’ac-
et mortier pour l’ayguier du pont762, construction réalisée cumulant au fond du batardeau776. En septembre 1363, une
par trois maçons763. Vers le 3 juillet, le « mur de la caxa » planca, dotée d’un « volet » ou d’une « trappe » (hostium)

751
AD Aude, 4E76/CC49, [f°35 v°5]. « …octo hominibus qui portaverunt duos fustes magnos ad opus pontis porte Cimbalorum qui erat fractus… ».
752
Ibid., [f°37 v°6]. « …steterunt ad curandum caxam seu foveam pontis porte Cimbalorum… » ; [f°37 v°7], [f°39 r°3].
753
Ibid., [f°39 v°3]. « …Petro Madrieras qui stetit ad curandum cavalham ubi assetiaretur murus caxe pontis porte Cimbalorum… ».
754
Ibid., [f°39 v°6]. « …Johanum Dosta qui stetit ad abstrahendum terram de caxa pontis porte Cimbalorum… ».
755
Ibid., [f°40 r°6]. « ...Guillelmo Hugonis et Petro Madrieras qui steterunt ad curandum caxam pontis porte Cimbalorum que caxa erat inbroguata… ».
756
Peut-on cependant penser que ces végétaux entraient dans la confection d’une sorte d’étoupe destinée à colmater le batardeau ?
757
La « caxa » désigne une « fouille dont on a enlevé les terres, compartiment d’un fossé que l’on vide » : il s’agit donc d’un « vide » et non d’une
construction. Le « mur de la caxa » signifierait « le mur qui est dans la caxa », autrement dit la pile du pont.
758
AD Aude, 4E76/CC49, [f°40 r°7]. « …Johanni de Podio qui stetit cum uno animali ad portandum petram ad opus muri dicte caxe de pontis ».
759
Ibid., [f°40 v°1]. « ...Ramundo Johannis et Petro la Broa eius nuncio quibus steterunt ad pigandum et curandum caxam pontis porte Cimbalorum
et ordinandum ubi fieret murum dicte caxe ».
760
Ibid., [f°41 r°3], [f°42 r°5].
761
Ibid., [f°43 v°6]. « …Ramundo Johannis peyrerio pro tribus brachiatas et media unius tertia parte unius cartonis muri [...] quem murum fecit in
caxa pontis porte Tintinabulorum...».
762
Ibid., [f°44 v°4]. « …Johanni Ribayrenx qui stetit pro portando petram et morterium ad opus ayguerie pontis porte Cimbalorum ». « Ayguier :
ruisseau d’évacuation des eaux usées et des eaux de pluie. « confrontant de cers l’ayguier commun de la ville… » 3E3, Etude Loup, 135, Montréal,
1605 ; Cayla 1964, 60. Dans le cas de la porte des Cloches, l’ayguier se situait-il au fond du fossé, de manière à éloigner les eaux de pluie de la base
de la pile du pont, ou s’agit-il d’une rigole latérale parallèle au tablier et rejetant les eaux dans le fossé au moyen d’une gargouille ?
763
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°44 v°7]. « ...Ramundo Johannis peyrerio Petro Durandi et Petro de la Broa peyreriis eius nunciis qui steterunt ad
faciendum aygueriam de petra pontis porte Cimbalorum… ».
764
Ibid., [f°50 r°6]. « ...pro quadam quantitate petre empta ab eodem ad opus muri caxe pontis porte Cimbalorum… ».
765
Ibid., [f°146 r°6]. « …qui curaverunt arcam pontis porte Cimbalorum ».
766
Ibid., 4E76/CC55, 1376, [f°25 v°4]. « …pro 2 miianas de tonel de las quals foc fayta la caysha de la planqua de la porta de la Plasa… ».
767
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°121 r°7]. « ...ad cavandum archam dicti pontis...».
768
Ibid., [f°120 v°1]. « ...ad portandum fustam in dicto ponte...».
769
Ibid., 4E76/CC54, 1373-1374, [f°34 v°7]. « G. Martini, Durando de Fraxino, Johanni Fabri, Petro Bertrandi et Ramundo Fabri qui stetit per 2 dies
steterunt portarunt petram ad opus pontis Platee et abstraxerunt terram arche dicti pontis et servierunt Johannem Maurini qui faciebat murum
dicte arche… ».
770
« Doga : douve d’un tonneau » (Alibert 1966, 300).
771
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°121 r°3]. « ...pro carejando dictam postem et dictas dogas ad dictum pontem... ».
772
« Douela, de douelle : planches de vaisselle vinaire, douves ; portaient aussi ce nom l’armature de bois provisoirement employée pour établir la
voûte d’un pont » (« faire les douelles de trois pans et demi de longueur et de la largeur et espesseur requise » (Extrait du bail à besogne de la construc-
tion du pont sur l’Aude à Trèbes, 3E906, Carcassonne, 1614) » (Cayla 1964, 237).
773
AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°57 v°3]. « …per 3 douelas de carga que foro mezas al pont de la porta de mastre P. de Vilavielha… ».
774
« Planca : planche, ais, passerelle, petit pont » (Lévy 1909, 297).
775
À Lille, au début du XVe siècle, en vue de l’entretien des fossés, « des batardeaux (estanques) sont mis en place afin d’isoler progressivement la
partie à nettoyer. L’eau est évacuée en permanence, à partir d’un planquier fixé sur des pieux (pillos), par des espuiseurs qui se relaient jour et nuit »
(Blieck 1999, 302).
776
AD Aude, 4E76/CC54, 1373, [f°37 v°8]. « …pro uno fuste abietis pro faciendo plancam ad portam Mondebonis et pro una cairella ad opus dicte
planque… ».

102
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

avait déjà été installée près de la porte du Barri777 dont le La plupart de ces bois sont solidarisés par différents
pont est en mauvais état (ou détruit ?), quelques mois aupa- types de fixations : ainsi, en 1361-1362, pour le pont de la
ravant778 : cet hostium permettait le puisage régulier de porte Narbonnaise, on emploie 18 livres de chevilles et/ou
l’eau sans pour autant gêner la circulation des ouvriers. des clous de taille moyenne793, 4 livres de gros clous794, et
D’ailleurs on précise par ailleurs que deux personnes enfin des chevilles de très grande taille (près de 0,30 m),
sont chargées d’extraire du sable sous le pont de la porte du pour un poids de 9 livres795. Elles sont quelquefois fabri-
quées avec « le fer de la ville »796. En 1376, on acquiert
Barri779, afin que l’eau puisse s’écouler librement (vers un
également douze clous et une plaque de fer pour le pont de
endroit où elle ne gênera pas les bâtisseurs ayant en charge
la porte de la Place 797.
la réfection ou la construction de la pile ?). Enfin, en 1367,
deux autres hommes créent une « trassa » 780 dans le fossé Par ailleurs, en 1363, un charpentier répare et « espa-
de la porte Montdebo, sorte de percement ou de tranchée ronne » le pont de la porte des Cloches798 : si le terme
d’écoulement des eaux781. « sparonar » (poser des baguettes de bois) apparaît de
manière courante pour les constructions en torchis (infra),
6.2.3.3.2 - Tablier et superstructures c’est la première et unique fois qu’on le rencontre pour un
En 1361-1362, le pont de la porte Narbonnaise est refait pont. En outre, aucune mention ne prouve l’existence
à neuf782. Ces travaux nécessitent plusieurs pièces de char- d’une quelconque construction en torchis sur ces ouvrages
pente : quatre grandes pièces783, deux poutres ( ?) d’environ : peut-on penser que les sparos avaient ici un autre emploi
7 m de long (32 palmes), cinq soliveaux équarris et une (barreaux du garde-corps ?).
« palme »784, un bois de sapin et une poutre d’environ 5 m Pourtant, le bois n’est pas le seul matériau employé
de long785, une pièce en orme786, et divers autres éléments787. dans les superstructures : en 1430 en effet, deux personnes
Trois planches sont mentionnées : deux sont en sapin788, travaillent sur le parapet en pierre de trois ponts de la ville
et une en noyer789. En outre, en 1373, Bernard Jean fournit (support d’un garde-corps en bois799 ?).
à la ville deux étais, deux poutres ou solives, et deux bois Comme les ponts-levis, les ponts-dormants possèdent
(« anguilas »790) pour le pont de la porte de la Place791. un système de protection, en l’espèce une barrière mobile
Lorsqu’ils ne sont finalement pas employés, ces éléments destinée à empêcher une attaque brusquée ou l’entrée non
sont stockés à l’abri des intempéries 792. désirée des charrettes dans la ville800. Un autre obstacle

777
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°102 v°1]. « …ad faciendum plancam in ponte porte de Barrio et etiam ad faciendum hostium dicte planque… ». En
1398, une dépense fait mention d’un « portanel », terme peut-être synonyme d’hostium dans ce cas d’espèce (Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°35 v°3].
« …pro 4 cavillas ferri positis in dicto portanello dicte planque… »).
778
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°43 r°3]. « ...pro duabus postibus emptis pro mitendo easdem in ponte porte de barrio qui erat fractus...».
779
Ibid., [f°102 r°4]. « ...ad abstrahendum arenam de subtus pontem de Barrio ut aqua posset labere…».
780
Très probablement de « trasar », percer (Lévy 1909, 369).
781
AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°13 r°4]. « …qui fecerunt unam trassam per quam aquam transisse de cavis porte Mondebonis… ».
782
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°120 r°2] à [f°121 r°8].
783
Ibid., [f°120 r°2]. « …quatuor fustes magnos de [porta rat.] ponte Baffe ad dictam portam Narboneziam… ».
784
Ibid., [f°120 r°3]. « ...pro uno fuste ab eisdem capta pro dicto ponte et erat longitudinis 32 palmorum extimatis per fusterios qui construebant dictum
pontem » ; [f°120 r°5]. « ...pro dicto suo fuste recepto ad opus dicti pontis erat longitudinis 32 palmorum et quinque quartonum et unius palmi. ».
« Palmus » a-t-il ici le sens d’épaule ou de « pièce d’épaulement » (Du Cange 1840-1850, t. 5, 304, col. 2 ), voire de « poutre » (Lévy 1909, 275, palma) ?
785
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°120 v°3]. « …pro uno fuste abietis recepto ad opus dicti pontis 22 palmorum…» ; [f°120 v°4]. « …pro uno
travatello 22 palmorum ad opus dicti pontis. ».
786
Ibid., [f°120 v°8]. « …pro uno fuste ulmi ad opus dicti pontis…». L’orme est très rarement employé à Castelnaudary, peut-être en raison de sa rareté
ou de son coût. Il s’agit pourtant d’un « bois résistant et compact, utilisé de nos jours encore pour les pièces comportant de nombreuses mortaises »
(Bernardi 1995, 142). Son utilisation est attestée ailleurs comme par exemple à Lille (Blieck 2003, 70).
787
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°120 v°2].
788
Ibid., [f°120 v°5]. « …pro duabus postibus habietis emptis ad opus dicti pontis… ».
789
Ibid., [f°121 r°1]. « …pro uno poste de noguerio empta ad inquantum ad opus dicti pontis ». Comme le hêtre et l’orme, le noyer est rarement utilisé
à Castelnaudary. Généralement, ce dernier est employé en ébénisterie et en sculpture mais Ph. Bernardi note également que « sa dureté fait que les
Aixois l’utilisent sur les chantiers pour en faire des gabarits de tailleur de pierre ou des poulies » (Bernardi 1995, 141). Cette dernière propriété est en
effet fort utile pour le tablier du pont, soumis à de fortes charges et à des passages répétés.
790
« Anguilo, enguielo, anguielo : pièce de bois qui glisse entre les jumelles d’un pressoir et repose sur le couvercle de la maie ; pièce de bois sur
laquelle glisse un navire qu’on lance à la mer » (Mistral 1878, vol. 1, 100).
791
AD Aude, 4E76/CC54, 1373, [f°16 r°5]. « …B Johannis ac deducti de suis questis pro 2 stantis, 2 travatellis et 2 fustibus vocatis anguilas ad opus
pontis porte Platee 6 flor. auri valent. 7 l. 13 s. ».
792
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°103 r°8]. « ...cuidam forestario pro quatuor fustibus emptis ad opus pontis de Baffa loco illorum quatuor qui de
dicto ponte fuerunt remoti et portati in porta Narbonesia… ».
793
Ibid., [f°120 r°7]. « ...pro 18 l.cavilharum modicarum sive clavorum modicorum...».
794
Ibid., [f°121 r°4]. « ...pro quatuor l.cavilharum sive clavorum magnorum ad opus dicti pontis... ».
795
Ibid., [f°120 r°6]. « Item Petro Martini de Petris pro novem l.cavilharum quinque quartonum palmi vel circa…».
796
Ibid., 1360-1361, [f°73 r°6]. « …pro operando 12 l.et mediam cavillarum de ferro ville quas fuerunt portare in ponte porte Mondebonis… ».
797
Ibid., 4E76/CC55, 1376, [f°25 v°1]. « …pro una plata de fer e per 12 clavels que foro mezes al pont de la porta de la Plasa… ».
798
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°43 r°8]. « ...ad aptandum et sparonandum pontem porte Cimbalorum qui erat fractus ».
799
Ibid., 4E763/CC73, 1430, [f°16 v°4]. « ...a far las espondieras de peyra dels ditz tres ponts…» ; « espondiera : parapet » (Lévy 1909, 172).
800
AD Aude, 4E76/CC60, 1394 [f°18 r°6]. « …an Johan del Perier per una coronda de 12 palms ops de far barreias sus les pontz de la viela de la
porta Nova so que las carretas non poguesso passar per la viela… ». Cette largeur correspond-elle en gros à celle du tablier ?
Roger Maguer situe la porte Neuve au niveau de l’enceinte méridionale de la bastide (Maguer 2003, 310).

103
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

insolite (barranquas) est créé en 1376 devant plusieurs les termes « gasons » ou « gachouls » (pains de terre
portes pour interdire le passage des véhicules : issu de l’oc- façonnés à la main).
citan « barranc » (ravin ; Alibert 1966, 147), il désignerait Il paraît cependant à peu près certain que deux tech-
une petite tranchée excavée dans la chaussée afin de niques principales de construction en terre massive co-
coincer les roues801. existent à l’époque médiévale (avec et sans coffrages).
En outre, une dépense de 1394 laisse entendre que Peut-être même en existe-t-il d’autres (variantes des
certains ponts dormants possédaient eux-mêmes une porte premières ?).
(associée à une palissade ?) barrant leur entrée802. Enfin, en Enfin, les vocables « paret » et « tapia » peuvent être
1366, un autre terme, celui de cavalet803, se rapporte aux donnés comme équivalents en Lauragais et Toulousain,
supports en bois qui, posés sur les piles à intervalles régu- puisqu’ils désignent systématiquement un mur de terre crue
liers, permettent de soutenir le tablier et ses superstruc- massive, sans préjuger de sa technique de mise en œuvre.
tures804.
Certaines sources signalent l’emploi de la terre crue
Ainsi, on constate en définitive que la discrimination massive dans la défense dès le début du XIIIe siècle en
entre les techniques de terre massive (bauge, bauge coffrée, Toulousain, et ce même si les fouilles archéologiques ne
voire une variante du pisé) est souvent très délicate à permettent pas toujours de l’affirmer avec certitude,
réaliser, tant sur le terrain qu’au travers des sources médié- compte tenu des difficultés réelles pour repérer un bâti de
vales : dans ce dernier cas par ailleurs, la sécheresse des terre effondré. Les méthodes de construction identifiées
registres comptables n’est malheureusement pas pour le bas Moyen Âge ne seraient donc que les héritières
compensée par des archives d’ordinaire prolixes (comme (améliorées et perfectionnées ?) de techniques pratiquées
les actes notariés), puisque les contrats avec les parediers, depuis au moins un siècle et demi dans la même région.
comme on aura l’occasion de s’en rendre compte, sont Enfin, à ce jour, aucun élément tangible, dans les
curieusement absents de ces documents durant le bas sources ou sur le terrain, ne permet d’affirmer que les tech-
Moyen Âge en Lauragais805. niques de l’adobe806 et du pisé « traditionnel » (utilisant des
De fait, à l’heure actuelle, la distinction entre une tech- clés traversantes en bois807) étaient utilisées dans les fortifi-
nique d’édification des enceintes recourrant aux coffrages cations du Lauragais et du Toulousain.
(parets coffrées : bauge coffrée ou variante du pisé ?) et la Les maçonneries de terre crue massive forment l’arma-
bauge « traditionnelle » n’utilisant pas de banches, ne peut ture principale de la plupart des ouvrages de défense
être réalisée que grâce à la présence -ou à l’absence- de (enceinte, avec ses portes et ses tours, plusieurs barba-
taulas. La bauge se signale néanmoins dans les textes par canes808). Elles jouent systématiquement un rôle porteur (à

801
Ibid., 4E76/CC55, 1376, [f°26 r°4]. « …que aquel dia estet adobar las baranquas de la porta del Bari… » ; [f°51 r°2]. « …a far las baranquas de
la porta de la Baffa et de la Bastida per so que las caretas no passeson per la vila… ».
802
Ibid., 4E76/CC59, 1393-1394, [f°27 r°7]. « …per dos clavaduras lascals foc mesa la una a la porta de la Buada […] e l’autra foc mesa a la primera
porta del cap del pont… ».
803
« Cavalet : 1. tréteau, baudet de scieur de long » (Alibert 1966, 214). « 2. chevalet » (Lévy 1909, 73).
804
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°126 r°3]. « …an G. Roger, G. Ar. Favres, fustiers, que aquel dia stero per adobar le pont de la porta Mondebo, les
cavaletz que sosteno le dit pont… ». Cette interprétation nous est suggérée par des observations en Bresse et Bugey. En effet, le pont menant aux portes
« est posé sur des séries de chevalets en bois ou en briques assez hauts car la profondeur des fossés peut atteindre sept mètres » (Kersuzan 2005, 256).
805
Du moins dans les rares registres conservés aux Archives départementales de l’Aude.
806
En effet, pour Cl.-A de Chazelles et E. Léal, « la brique crue moulée ne semble pas avoir été utilisée au Moyen Âge, contrairement à l’Antiquité, où
cette technique est bien attestée à Narbonne » (de Chazelles, Léal 2003, 248). En effet, la brique crue ou adobe est ainsi attestée au Ve siècle av. J.-C.
sur l’oppidum de Montlaurès, près de Narbonne (Chausserie-Laprée, Chazelles 2003, 302). Par ailleurs, une structure à pan de bois/adobes a été mise
en évidence sur un établissement daté des environs du Ier siècle av. J.-C. à Gruissan (Aude) (Sanchez, Dellong et al. 1999, 334). Cependant, toujours
dans cette même ville, des fouilles réalisées par O. Ginouvez ont mis en évidence plusieurs maisons excavées datées des environs de l’an Mil, dont
certaines ont apparemment conservé des traces de construction en adobe (Ginouvez 1993, 61). Ainsi, pour l’unité n° 9, un solin de moellons bruts et
de galets non assisés « est couronné par une assise de briques crues larges de 34 cm et hautes de 12 cm –longueur impossible à évaluer- jointoyées à
l’argile. Lors de ce même deuxième état, une structure construite de briques crues, posée sur le sol alors utilisé, vient s’appuyer contre le solin. Haute
de 34 cm, et observée sur une largeur de 23 cm, elle résulte de l’agencement d’adobes (50 x 22 x 10 cm) posées en carreau au niveau de la seconde »).
En Basse-Auvergne, G. Fournier signale que, d’après l’Armorial de Revel, au Breuil, « l’enceinte, composée d’un soubassement maçonné avec de
grands arcs de décharge et d’une partie supérieure en briques crues, semble dater de la fondation de la ville neuve » (Fournier 1972, 58). Il se peut donc
que la technique de la brique crue ait été employée dans d’autres régions de France dès le milieu du XVe siècle, et peut-être même avant. Pour Al
Andalus, « si l’adobe est encore utilisé pour des constructions secondaires au sud du Portugal ou au Maroc, son emploi n’est que très rarement attesté
pour l’époque médiévale » (Bazzana 1992, 72). Des adobes sont signalées dans le Gard et dans l’Aude, à Bellegarde-du-Razès, pour des périodes
comprises entre les IXe et XIe siècles (Pesez 1998c, 68). Mais D. Baudreu (responsable de la fouille de Bellegarde-du-Razès) a plus tard remis en cause
cette première interprétation, estimant qu’il s’agissait plutôt de bauge et non d’adobes (entretien personnel).
807
Un exemple de construction en pisé a cependant été récemment découvert au village de la Digne d’Aval, à l’intérieur du périmètre ecclésial : c’est
à l’heure actuelle le seul témoignage de l’utilisation de cette technique dans l’ouest audois. Les tessons de céramique prélevés dans ce mur de maison
datent au moins du bas Moyen Âge. Par ailleurs, lors des fouilles de sauvetage INRAP du chantier de la médiathèque à Narbonne, un quartier des XIIIe
et XIVe siècles a révélé de nombreux murs de terre crue en pisé (murs porteurs et cloisons). Les saignées transversales perpendiculaires aux parements
(négatifs des clés), ont ainsi permis d’identifier cette technique de manière irréfutable (Chazelles, Léal 2003, 247-261). En Forez pour l’époque médié-
vale, « dans la plaine (terrains d’alluvions et de sable, parfois argileux), ces murs étaient en pisé, mélange de terre et de chaux, finement broyé, que
l’on tassait entre deux planches verticales, les banches ; nom et technique subsistent ». Ainsi, « le maçon, outre la pelle, se servait d’une broie, « brey »
pour pilonner le pisé entre les deux banches » (Gonon 1975, 351, 357).
808
Ces constructions diffèrent donc totalement des simples « levées de terre » ou « terraulx » qui constituent par exemple l’essentiel de l’enceinte de
Lille en 1452-1453 (Blieck 1998, 201).

104
NATURE, PLACE ET RÔLE DES FORTIFICATIONS DE TERRE MASSIVE À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS LES CONSTRUCTIONS DE TERRE MASSIVE

la différence du torchis, infra), ce qui en fait l’élément sont d’une conception complexe et souvent sujettes à des
architectural « pivot » de l’ensemble des autres matériaux réparations, en raison du passage répété des hommes et des
destinés à la fortification (bois, pierre, chaux, briques marchandises. Elles sont dotées de hourds (ambans),
cuites, tuiles) : ces derniers « servent » en effet la plupart couverts de tuiles canal (tegula, teule)809, et bâtis selon la
du temps l’élévation de terre crue, soit en l’isolant du sol technique du colombage/torchis (infra). L’accès est fermé
contre l’écoulement des eaux pluviales (bases en pierres, par une herse, des vantaux, et un pont-levis qui s’abat sur
ou parementées en briques cuites), soit en lui assurant un un pont dormant.
« chapeau » de protection à son sommet (chemins de ronde Néanmoins, les sources ne permettent que rarement, et
et merlons en pierre ou en briques cuites, tuiles). pour ainsi dire jamais, de connaître la provenance de la
Les constructions fortifiées chauriennes et toulousaines terre (fossé ? champs ? maisons détruites ?), sa nature (terre
sont donc « mixtes », car des matériaux divers, jouant brute ? terre « triée » ?), ou son mode de mise en œuvre
chacun un rôle particulier, sont systématiquement dans le cas de la terre coffrée (pains de terre ? damage ?
employés. Les portes (de plan carré ou quadrangulaire ?) foulage ?).

809
Dans ses Chroniques, Froissart signale qu’à Montgiscard les portes étaient « couvertes d’estrain », phénomène qui n’a jamais pu être mis en lumière
à travers les sources (Baudreu 2003, 365).
« Estrain : paille servant de litière, litière, chaume » (Algirdas Greimas 2004, 251).

105
2ème Partie

LE COLOMBAGE-TORCHIS
ET LES AUTRES UTILISATIONS
DE LA TERRE CRUE

107
LA TECHNIQUE DU COLOMBAGE / TORCHIS, P. 109-115 LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

Chapitre 7

La technique du colombage / torchis

Cette technique nécessite plusieurs éléments : un cadre à faire au chœur de l’église Saint-Michel de Castelnaudary,
en bois comportant des baguettes ou des claies-support, de fonds Fongarnaud, 1561) » (Cayla 1964, 653).
la terre, un végétal (la plupart du temps du foin), et de De fait, la sablière ou sola est la pièce maîtresse de la
l’eau, ces trois derniers éléments constituant le torchis charpente en colombage sur laquelle vont reposer corondas
proprement dit. et riostas (fig. 39, 40, 41, 42). Son utilisation est néanmoins
très rarement signalée dans les comptes chauriens (trois
7.1 - La structure en bois
mentions812). Ce phénomène serait dû à l’emploi fréquent
La structure porteuse utilisée pour le torchis, que ce soit du mot « fusta » (généralement « tout bois de construc-
à Castelnaudary ou à Albi dans la seconde moitié du tion »).
XIVe siècle, est un colombage classique ou pan-de-bois810.
Trois éléments principaux entrent dans sa composition : la 7.1.2 - Le pied-droit ou coronda
sola ou sablière, la coronda ou pied-droit, la riosta ou Le terme coronda possède deux acceptions principales :
contreventement (fig. 39). L’ensemble de ces éléments d’abord, celle de « poteau ou solive » ; ensuite, celle de
forme le colombage, dénommé « trenh » dans l’Albigeois « pied-droit de colombage » qui retient ici notre attention.
(Delmas 1968a), terme qui n’est jamais employé à Paul Cayla définit ainsi le terme corondes : « solives de
Castelnaudary, les comptes ne donnant par ailleurs aucun bois entrecroisées ou parallèles verticales et dans ce cas
autre équivalent pour désigner cet assemblage811. placées en règle générale à un pan l’une de l’autre ; dans
ces intervalles libres du pisé (corriger : torchis ; ndlr.) ou du
7.1.1 - La sablière ou sola mortier de chaux unissaient pierres et cairons ; cet
D’après P. Cayla, la solles ou soles désigne une ensemble était d’ordinaire recouvert d’une couche de
sablière, c’est-à-dire des « éléments d’une charpente, chaux, d’un enduit » (Cayla 1964, 196). Pour A. Vidal, la
assises d’un toit ou d’un plancher sur lesquelles doivent coronda est « une pièce de bois posée à plomb dans une
reposer les solives (divers anciens pays de l’Aude). On peut sablière ou réunissant obliquement deux contre-fiches »
les définir comme des pièces de bois posées à plat comme (Vidal 1911, 251).
une semelle pour recevoir les arbalétriers et les poutres De tous les éléments entrant dans la structure du pan-
obliques ou verticales d’un colombage… Item seront de-bois, la coronda est la pièce de bois la plus fréquem-
tenues recouvrir ledit cueur et mettre les solles en bon ment citée dans les comptes chauriens : on sait cependant
ordre comme y estoient auparavant… Bail des réparations rarement si elle va être employée comme poteau de bois

810
Selon certains auteurs, « on pourra parler véritablement de pan-de-bois quand cet assemblage, dans des plans verticaux formant parois, de poteaux,
sablières et décharges, constituera une structure homogène et indéformable qui possèdera sa statique propre, le remplissage, quel qu’il soit, n’ayant
aucune fonction porteuse » (Saint Jean Vitus, Seiller et al. 1998, 76). Pour J.-M. Pérouse de Montlcos, il s’agit d’un « ensemble de pièces de charpente
assemblées dans un même plan » (Pérouse de Montclos 1995, 139).
811
À l’exception peut-être du terme « cleda » (infra).
812
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°33 r°4]. « ...pro quadam sola per ipsum posita in opere turris porte Mercadalis... » ; 1361, [f°98 v°7]. « ...pro una
sola 24 palmorum.... » ; Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°39 v°6]. « …pro una sola, una testeria, et una coronda positis in meiano inter hospicium dicti G.
et curcerias ville… ».

109
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

sola

sparo/esparo
coronda

riosta

bart

sola

Fig. 39 : Schéma d’assemblage des éléments du colombage.

teule
riosta folia/fuelha/lata

tortis cabiro

tortis

sparo/esparo

coronda

sola

Fig. 40 : Pieusse (Aude) Exemple de colombage-torchis au premier étage d’une maison (cliché : D. Baudreu).

110
LA TECHNIQUE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

Fig. 42 : Saint-Hilaire (Aude). Détail d’un colombage-torchis au


premier étage d’une maison (cliché : D. Baudreu).

de contre-fiches » ; Alibert 1966, 610). On retiendra plutôt


le terme de « contreventement », comme le font B. Saint
Jean Vitus et M. Seiller815, vocable plus général se définis-
sant comme un « assemblage de charpente destiné à lutter
contre les déformations » (Robert 1982, 385). La riosta est
donc une pièce de bois, (souvent de moindres dimensions
par rapport à la coronda et surtout à la sola) dont la fonc-
tion est de maintenir l’ensemble du colombage, en liant les
éléments entre eux (fig. 39). Il peut également quelquefois
désigner un « poteau de cloison » (Alibert 1966, 615). Le
vocable « riosta » est utilisé aussi bien en Lauragais qu’en
Toulousain et se retrouve également à Albi en 1359-1360816.
Comme pour la sola, les citations de riostas sont très rares
dans les registres chauriens817 mais on a trace de la présence
de riostas corbas818 : cette précision de forme, unique,
Fig. 41 : Carcassonne (Aude), ville basse, quartier du Pont- indique-t-elle un emploi en tant que contreventement, peut-
Vieux. Exemple de colombage (cliché : D. Baudreu).
être au niveau des angles supérieurs du pan-de-bois,
isolé ou en tant qu’élément d’un colombage/torchis813 ; en comme c’est parfois le cas dans l’architecture médiévale819 ?
revanche, en 1361, Géraud Vital est bien payé pour
remplacer certaines corondas ou en mettre de nouvelles 7.1.4 - Les baguettes de bois : sparos, sparros, esparos
dans un colombage, le verbe « sparonar » (infra) ne lais- Une fois la structure porteuse assemblée, des baguettes
sant que peu de doutes sur la présence de torchis sur la de bois vont être intégrées obliquement entre les pièces de
structure en question814. charpente820 : elles sont dénommées « sparo, sparro,
esparo », terme duquel dérive le verbe « sparonar » ou
7.1.3 - Le contreventement ou riosta « esparonar » (« poser des sparos dans un colombage »).
D’après L. Alibert, une riosta est une « contre-fiche » ou L’appelation « sparo » est en vigueur en Toulousain,
une « pièce de bois en écharpe », ce terme dérivant de Lauragais et Albigeois821 ; à Castelnaudary, les mentions de
« riostar » (« assujettir plusieurs pièces de bois au moyen sparos sont très nombreuses : souvent utilisés pour les

813
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°93 r°12]. « Item cuidam nuncio qui portavit corondas in corseriis... » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°54 r°5]. « ...pro
septem corondis emptis ab eodem per dictum Bernardum Embrini ad opus dicti ambanamenti dicte turris de Barrio... ».
814
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°115 v°1]. « ...Geraldo Vitalis pro latando, sparonando, ponendo aliquas riostas corondas que difficiebant… ».
815
« Si, en dessous de la couverture, le poteau reste l’élément de base de la construction à ossature de bois –son appellation de colonne, au Moyen Âge,
étant à l’origine de notre mot colombage-, les nécessités de la statique conduisent à l’assembler avec des pièces de bois horizontales, les sablières, et à
prévoir entre horizontales et verticales toutes sortes de contreventements obliques » (Saint Jean Vitus, Seiller et al. 1998, 76).
816
AC Albi, CC140, [f°57 v°]. « … tramesen M. Thibaut a la forest per comprar la fusta que nos avia mestiers e comprec la una carada e mieja de
lata et entre corondas e riostas e cabiros, 6 caradas… ».
817
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°115 v°1]. « …pro latando, sparonando, ponendo aliquas riostas, corondas que difficiebant... ». Là encore, la rareté
de leur apparition peut être liée à l’emploi du terme général de « fusta ».
818
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°100 v°4]. « …per portar 20 riostas corbas de la tor de la Strada als embans de Frayres Menors… ».
819
Ainsi, dans une maison de Tours, datée de la fin du XVe siècle, des aisseliers courbes, très courts, permettent de raidir les angles d’un pan-de-bois à
la jonction entre la sablière de toit et le poteau cornier (Bonnin 1998, 299). Ces formes courbes sont quelquefois précisées dans les textes comme au
château d’Orgelet, dans le Jura, en 1453 où deux pièces de chêne sont qualifiées de corbes et esquarrés (Gresser 2003, 103).
820
En effet, ces baguettes étant encastrées « de force » entre les poteaux et contreventements, leur position finale dans l’assemblage reste toujours légère-
ment inclinée.
821
AC Albi, 1381-1382, CC156, [f°71]. « … far lo bart per tortissar lo gachil de la Trebalha per los sparos que fiero obs… » ; [f°81 v]. « … per mil
et 300 sparos, ad obs de sparona. ».

111
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

échauguettes822 ou les hourds823, ils sont quelquefois trans- comme le suggère une série de dépenses de 1367 : aux alen-
portés à dos d’animal jusqu’au chantier824. Certains (ou la tours du 4 octobre, des travaux sont réalisés sur une cloison.
totalité ?) de ces sparos sont fabriqués dans des baguettes de Pour ce faire, on utilise une sola, une testeria (pièce de char-
saule dont les arbres poussent dans les marécages du lieu-dit pente), quatre corondas, trois quintaux de foin (env.
« Font Rosand »825, aujourd’hui Font-Rouzaud, ferme située 130 kg ?), et bien entendu de la terre pour le torchis. Nulle
à 2,5 km au nord de Castelnaudary (fig. 3) : ainsi, en 1363, trace de chevilles en fer ou de clous834.
quatre personnes nettoient (sporgar826) ces baguettes pour Il s’agit là d’un mode d’assemblage très courant pour
faire des sparos destinés aux hourds827. En 1361, d’autres l’époque835. On peut également songer à un système d’as-
sparos sont nettoyés à « Stagnum Vivo », aujourd’hui semblage mixte (tenons et mortaise pour certaines pièces,
l’Estambigou, quartier situé à 750 m à l’est de la ville intra- mi-bois pour d’autres), tel que l’on peut par exemple en
muros (fig. 3)828. Cette opération de nettoyage consistait voir à Cahors (Lot) au XIIIe siècle836. Le colombage avait
peut-être à enlever les jeunes pousses ou les petites bran- par ailleurs pour avantage de pouvoir être assemblé hors de
chettes, voire à ôter l’écorce pour ne garder que la grume, la structure à bâtir, le montage, guidé par des marques, se
l’enveloppe du bois étant en effet davantage sensible à la faisant par la suite élément par élément (Pesez 1985, 164).
putréfaction, phénomène préjudiciable au maintien du Il est ainsi tentant de se demander si, pour les constructions
torchis sur l’armature829. Enfin, ces branches devaient être militaires utilisant cette technique (hourds, gaytils, etc.,
retaillées pour pouvoir être utilisées dans la construction830. infra), la plupart des pans-de-bois n’étaient pas en grande
On ne sait cependant si d’autres bois que le saule étaient partie standardisés, rendant ainsi la mise en œuvre et l’as-
employés : les baguettes étaient intégrées à la structure en semblage plus aisés et plus rapides.
colombage au moyen d’encoches réalisées à l’outil de char-
pentier, et ne nécessitaient donc aucune fixation. Ces 7.2 - Le torchis
éléments se rencontrent dans la plupart des édifices à pan- Le torchis va donc être appliqué sur la structure en bois.
de-bois, avec quelques variantes selon les régions831. Cette préparation requiert trois éléments principaux (terre,
7.1.5 - L’assemblage des éléments foin, eau). Il s’agirait là du matériau de remplissage du
pan-de-bois « le plus ancien et le plus largement répandu,
Les comptes de Castelnaudary sont très laconiques sur la à toutes les époques » (Pesez 1985, 164).
manière dont s’assemblent les matériaux de la structure à
pan-de-bois : il est vraisemblable, compte tenu des observa- 7.2.1 - La terre préparée : le bart
tions réalisées sur des colombages de maisons (Lauragais, Pour la préparation du torchis, on retrouve à Albi837 et
Toulousain), que ces éléments étaient liés par un système à Castelnaudary le terme de « bart » (terre humidifiée), déjà
tenons et mortaises avec des chevilles en bois (ou quelque- rencontré pour la technique du gason (terre massive). La
fois par embrèvement ou mi-bois ?), à l’exclusion de tout matière première, la terre, était vraisemblablement extraite
type de fixation en fer832 ; ainsi, les mentions d’achats de sur place (champs, fossé). Cependant, d’après une mention
chevilles en fer pour les hourds ne devaient concerner que de 1441, il est difficile de savoir précisément si le bart était
les fixations des poutres maîtresses de la structure833, les bois fabriqué dans le fossé pour des raisons de commodité, ou
du colombage/torchis étant encastrés par assemblage direct, s’il tirait de là sa matière première838.

822
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 v°2]. « …quindecim quintalia sparonum pro tortisando guacillos portus Astrate...».
823
Ibid., 1360, [f°61 r°5]. « …per 2 quintali de sparo que foro meses per tortissar l’amban…».
824
Ibid., 1359, [f°7 r°7]. « ...pro portu 3 sarcinatarum sparonum quas portare fecit cum suis animalibus in operibus guacillorum... ».
825
Le saule est un « arbre ou arbuste qui croît dans les lieux frais et humides ». Il fournit « un bois blanc utilisé en menuiserie » (Robert 1982, 1768).
826
« Esporgar : nettoyer, épurer » (Alibert 1966, 375).
827
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°91 r°3]. « ...qui steterunt ad sporguandum salices nause fontis Rosandi pro faciendo sparones ad opus ambana-
mentorum...».
828
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°116 r°8]. « ...pro sporgando sparonem apud Stagnum Vivo...».
829
Informations aimablement communiquées par A. Klein.
830
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°7 v°6]. « …ad scindendum sparonem pro operibus guacillorum... ».
831
Ainsi, « un peu partout, le torchis (mélange d’argile et de paille) est posé sur un entrelacs de baguettes et de branchages (maintenus par des liens de
chanvre en Avignon, au XIVe siècle), dont les extrémités sont fichées dans des trous et rainures pratiqués dans les bois. On voit parfois en Bourgogne,
de petits tasseaux grossièrement fendus, qui sont embrevés entre les pans et dont les surfaces rugueuses accrochent le torchis » (Saint Jean Vitus, Seiller
et al. 1998, 78).
832
C’est également le cas en Belgique où « du XIIIe au XIXe siècle, la forme du tenon-mortaise n’a pour ainsi dire pas évolué. En fonction des dimen-
sions de l’assemblage et des poutres, le tenon est maintenu en place dans la mortaise à l’aide d’une, deux ou trois chevilles » (Hoffsummer 1999, 66).
833
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°76 v°3]. « …una libra et media cavillarum a B. Goza pro firmando dictum ambanamentum… ».
834
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°39 v°6]. « …pro una sola, una testeria, et una coronda positis in meiano inter hospicium dicti G. et curcerias ville » ;
[f°39 v°7]. « Item solvit G. Ardi qui tortissavit dictum meianum » ; [f°39 v°8]. « …pro 2 corondis positis in dicto meiano » [f°39 v°9]. « …pro una
coronda posita in dicto meiano » ; [f°39 v°10]. « …qui portavit terram dicti meiani » ; [f°39 v°11]. « …pro 3 quintallis feni ad opus ipsius meiani ».
Pour la construction civile, les coutumes de Castelnaudary prévoient « qu’il est interdit de bâtir près de la rue jusqu’à ce que les gardes de la ville et
les experts aient vu ce qui est prévu et aient donné les modèles des chevilles (probablement pour éviter que l’on n’emploie des chevilles trop fines pour
fixer les pans de bois) » (Marandet 2001, 216).
835
En effet, les pièces « peuvent se fixer l’une dans l’autre à mi-bois ou à tenons et mortaises chevillées. Cette dernière solution semble largement
répandue un peu partout à partir du XVe siècle… » (Saint Jean Vitus, Seiller et al. 1998, 80, 81).
836
« Au XIIIe siècle, à Cahors, les assemblages à tenons et mortaise sont réservés aux liaisons des pièces horizontales et verticales, alors que les courtes
pièces de contreventements sont assemblées à mi-bois avec poteaux et sablières, dans les angles de la façade : sans doute ce choix assure-t-il, par une
meilleure liaison aux extrémités, une cohésion plus forte de l’ensemble de la structure » (Ibid., 81).
837
AC Albi, CC156, 1381-1382, [f°71]. « …far lo bart per tortissar lo gachil de la Trebalha… ».
838
AD Aude, 4E76/CC76, 1441, [f°43 v°5]. « …per unas cordas grosas que fogon de senhor Vidal Concordia per tirar lo bart de la cava als embans
cant se tortisegon…».

112
LA TECHNIQUE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

Comparativement au volume très important employé Enfin, une unique dépense chaurienne concerne l’achat
dans la construction, les mentions d’emploi ou de fabrica- d’un bois destiné à fabriquer une « gaffa » pour le torchis848 :
tion du bart pour le torchis sont relativement rares. À Albi, cette gaffe est un outil à long manche de bois doté d’un
en 1381-1382, cette dernière emploie des hommes aussi crochet à son extrémité849, mais il faut bien admettre que son
bien que des femmes : à cette occasion, on fabrique à utilisation précise nous échappe à l’heure actuelle850.
l’avance des « pomels »839, vraisemblablement de petites
boules de bart compactes avec lesquelles on recouvre les 7.2.2 - Le foin : fe, fenum
sparos840. Les femmes étaient chargées de transporter le
bart mais pas de le fabriquer (tâche dévolue aux Le foin est, après la terre, le deuxième élément entrant
hommes)841. Deux équipes distinctes se relayaient à Albi, la dans la composition du bart destiné au torchis. Il est tout
première préparant le bart (malaxage), la seconde l’étalant aussi rarement mentionné à Castelnaudary en tant qu’achat
sur l’ouvrage. indépendant (seulement quatre mentions en 1359851). Ce
foin est exclusivement réservé au torchis, notamment pour
À Castelnaudary le bart était préparé dans une les échauguettes852 ou les hourds853. À une seule reprise, les
bardiera842, c’est-à-dire une fosse creusée à même le sol et registres chauriens paraissent distinguer un gros foin
dans laquelle les éléments (terre, foin, eau) étaient pétris (fenas) d’un autre (plus fin ?) habituellement employé854.
avec les pieds puis retournés avec une fourche843, comme
c’est généralement le cas844. En outre, vers le 9 août 1363, G. Marnela est rétribué
pour faucher l’herbe du cloître (des Frères Mineurs ?) en
Concernant les récipients, deux semals comme on vue de son emploi pour le torchis : à cette période en effet,
(« seau » en latin ; « comporte » en occitan) ont été loués l’herbe devait être particulièrement sèche et donc bien se
pendant deux jours pour les travaux de confection du prêter à ce type de travaux855. Doit-on y voir une situation
torchis845. Le semal est généralement employé pour divers de pénurie imposant d’utiliser tous les végétaux dispo-
usages (transport de mortier846, de vin847) et il est fort nibles, ou bien les religieux avaient-ils donné leur autorisa-
possible que son sens varie selon les cas. Dans ce cas d’es- tion afin que l’herbe soit régulièrement coupée pour les
pèce, s’il s’agit d’une comporte, a-t-il servi à transporter à
besoins de la ville ?
pied d’œuvre le bart (déjà préparé sous forme de pomels ?)
ou bien, s’il désigne un seau, à faire en sorte que les tortis- Le foin peut également provenir d’une ferme856, mais
seurs disposent d’une réserve d’eau durant le travail ? aussi de zones proches des cours d’eau857 (le Fresquel858 et

839
« Pomel : boule » (Lévy 1909, 301).
840
Vidal 1911, 41. AC Albi, CC156, 1381-1382, [f°68 r°]. 651. « Per tres jornals de home, a 17 d. e media per home, e per 5 jornals de femna a 7 d. e
media per femna, ad obs de far lo bart e portar la ayga e far los pomels e portar aquels al dig obratge ».
841
Ibid., 46. [f°75 r°]. « Sec se la mesa facha per lo mur de la Teula de davan l’ospital. ». 763. « Lo dia deus, per dos homes a far bart e cargua las
femnas ».
842
AD Aude, 4E76/CC48, 3 juin 1360, [f°68 r°10]. « que avian fayta una bardiera per tortissar le pal detras dona Feriera » ; Ibid., 4E76/CC52, 1367,
[f°15 r°13]. « …qui fecerunt bardieram et portarunt terram pro faciendo dicta tortitia… ».
843
Ibid., 4E76/CC3, [f°45 r°2]. Taille du 21 février 1357. « P. Montanha. Pagat 2 s. 5 d. Pagat per una forca de fer venduda 2 s. ». Ces fourches
pouvaient également pu servir, à l’instar de la pual ou pua, à brasser la terre pour une paret édifiée selon la technique de la bauge, puisque cette dernière
employait également du bart. Globalement, « nous n’avons que peu d’informations sur la forme des fourches médiévales. Elles étaient faites le plus
souvent en bois selon un procédé plus ou moins complexe de cintrage au feu dont l’ethnographie peut aujourd’hui nous donner une bonne indication.
Plus rarement, et dans certaines exploitations, leurs têtes étaient en fer et s’adaptaient au manche par une douille. Lorsqu’il était en bois, l’outil ne reve-
nait pas cher au paysan qui pouvait même, au besoin, le fabriquer à partir d’une branche solide choisie en fonction de sa forme. On comprend donc
que la fourche ait vraisemblablement eu, selon les régions, les modes de fabrication et les époques, des formes sensiblement différentes. On peut
supposer qu’il en existait de toutes les tailles, à deux ou bien à trois dents, celles-ci pouvant être courbées ou droites. Cependant, les formes de fourches
représentées sur plusieurs manuscrits ne varient pas beaucoup, elles n’ont souvent que deux dents » (Reigniez 2002, 292).
844
Informations aimablement communiquées par A. Klein.
845
AD Aude, 4E76/CC48, 10 septembre 1361, [f°89 v°1]. « …pro loguerio duarum semalium per duos diebus qui servierunt in operibus tortitiorum… ».
846
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°75 r°6]. « …per 10 semals de mortier que fo mes a l’obra dels pilars de las paret dels Frayres Menors… ». Comportes
ou seaux ?
847
Ibid., [f°27 v°4]. « …per tornar las semals am que foc portat le vi a mossenhor Olivier de Mauni... ».
848
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°5 v°6]. «…pro uno fuste pro faciendo gaffa ad tortissium porte Mondebonis…».
849
« Gaffa, gafa : gaffe, perche avec un croc, davier de tonnelier, barre de pressoir » (Alibert 1966, 319).
« Davier : outil de menuisier, de tonnelier, formé d’une barre de fer recourbée en crampon à l’une de ses extrémités » (Robert 1982, 447) ; « gaf : croc,
crochet, gaffe » (Lévy 1909, 200) ; « gaffa : outil utilisé en tonnellerie, davier » (Bernardi 1995, 448).
850
Toutefois, à Lille, « le torchis est toujours appliqué sur des cloyes (claies) formées de lattes entrelacées. Il peut s’agir soit de chêne fendu, soit de
branches souples. Le charpentier pourvoit généralement aux quantités nécessaires dans le premier cas ; dans le second, les lattes sont livrées par un
fournisseur spécialisé dans les bois flexibles, le lateur, qui procure par ailleurs aux maçons les perches à hourder » (Blieck 2003, 75, 76). La gaffa a-
t-elle le même usage que ces perches ?
851
Les comptes ne consigneraient-ils qu’une partie des achats effectués en une année pour la fortification ?
852
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 v°2]. « …8 quintalia feni et quindecim quintalia sparonum pro tortisando guacillos portus Astrate...».
853
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°35 r°4]. « ...pro tribus sarcinatis feni emptis per Johannem Martini ad opus tortitiorum ambanamenti parietis castri...».
854
Ibid., [f°29 v°1]. « …pro portando duas faxas fenasse in ambanamento castri... ».
855
Ibid., [f°69 r°4], « … G. Marnela pro talhando erbam claustre [dominorum canoni- rat]) ad opus atortissandum…».
856
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°3 v°5]. « …portaverunt fenum et sparonum a borda nobilis Hugonis de Aurenta usque ad guacillos portus Astrate…».
857
« Ripperia, ribeirage : produit d’une rivière, arbres qui croissent sur ses bords, bois qu’on y coupe » (Mistral 1878, vol. 2, 788). Ce terme de ripparia
ou de rivaleria « désigne donc les bordures d’une rivière et la ripisylve. On en trouve l’équivalent un peu partout, en Provence, en Périgord. Ces riva-
leria servent à la pâture du bétail, constituant des prairies humides, à foin peu abondant et de médiocre qualité à cause des plantes aquatiques qu’elles
contiennent (un acte mentionne l’inféodation d’une « pradasse sive rivaleria » à Noueilles). Les rivaleria ne se réduisent pas à des prés, on y trouve
des arbres, saules têtards, peupliers, ormes, aulnes, des plantes, osiers, roseaux » (Marandet 2006b, 162).
858
AD Aude, 4E76/CC48, 3 février (1361 ou 1362 ?), [f°107 v°8]. « …portaverat decem trosas de feno de reperia Fisculi... ». Le Fresquel : rivière
située au nord de Castelnaudary, à environ 2,5 km.

113
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

celui de Paythalières859), mais hormis ces cas, son origine « résultat probable d’un glissement sémantique » (Baudreu
est rarement précisée. 2002, 58). Selon P. Cayla, le « tortis » est un « mélange de
terre plus ou moins argileuse et de balles de grains que l’on
7.2.3 - L’eau : aygua, aqua étalait sur les parois extérieures des constructions, à la
L’eau va servir de liant aux deux autres composants façon d’un crépi… (tous les anciens pays de l’Aude) »
(terre et foin). Compte tenu du nombre et de l’importance (Cayla 1964, 688). Peut-on penser au contraire qu’à l’ori-
des structures en torchis dans les fortifications de gine le vocable « tortis » (dans le sens de torchis) aurait
Castelnaudary, elle était certainement nécessaire en très dans un second temps évolué pour désigner un « crépi » ?
grandes quantités. En effet, comme le montrent les comptes albigeois du
Paradoxalement, elle apparaît de manière assez clair- XIVe siècle, le terme « tortis » est exclusivement utilisé
semée dans les comptes, soit en tant que danger pour la avec son sens littéral de « torchis »866. D’ailleurs, cette
construction860, soit comme élément entrant dans la compo- ambivalence subsiste encore aux XVIe-XVIIe siècles, où
sition du mortier861, soit, enfin, comme liant pour le torchis « tortisser » signifie « recouvrir de torchis », le mot de
(une mention sur l’ensemble des registres)862. L’eau, « tortisseur » désignant soit « un maçon construisant des
comme le sable, est donc semble-t-il un bien gratuit à l’ac- murailles avec du matériau lié au torchis », soit « un
quisition. Quant à son colportage, si l’on néglige un unique ouvrier spécialisé dans le crépissage des parois externes
transport payant entre 1359 et 1362 pour une utilisation d’un local (Carcassonne, 1616) » (Cayla 1964, 688)867.
dans le mortier, aucune autre dépense n’apparaît. De fait, À Castelnaudary, le verbe tortissar (tortisar, tortitiar,
l’eau était-elle acheminée au moyen de corvées dues par atortissar), dérivé de tortis, a semble-t-il le sens exclusif de
les habitants863 ? « action de bâtir avec du torchis »868, même si dans
Si l’on excepte le canal du Midi, construit au quelques rares cas il peut avoir celui de « crépir ». L’action
XVIIe siècle, le réseau hydrographique autour de consistant à « tortissar » constitue la plupart du temps la
Castelnaudary est assez pauvre : les cours d’eau les plus dernière étape de la construction en torchis : c’est le
proches sont le ruisseau du Tréboul à environ 1,5 km au moment où le bart va être appliqué sur les sparos préala-
sud, et la petite rivière du Fresquel, à environ 3 km au nord blement mis en place sur la structure porteuse à pan-de-
(fig. 3). Cependant, les nappes phréatiques sont nombreuses bois.
au cœur même de la ville, d’où la présence des puits creusés Néanmoins, un verbe (enbardar), utilisé une seule fois
à même la roche (grès), au château et dans la ville864. en 1441, suggèrerait-il l’existence d’une protection à base
En outre, des toponymes comme Font-Rouzaud (à de bart appliquée sur le colombage immédiatement après
2,5 km au nord), voire l’Estambigou (à 750 m à l’est) déno- la pose du torchis869 ? Si tel était le cas, cet enduit à base de
tent peut-être l’existence de sources ou de marécages foin (préalablement haché), s’il limitait le retrait au
permettant un approvisionnement plus facile pour les séchage et donc les risques de fissures, avait à terme
nécessités du chantier et des habitants (fig. 3)865. comme inconvénient un pourrissement en raison des
intempéries et de l’humidité.
7.2.4 - La mise en œuvre du torchis : tortissar, tortisar, Pourrait-on néanmoins rapprocher cette dépense des
tortitiar, atortissar observations faites par P. Cayla concernant le brom,
« bouillie liquide faite de terre, de brindilles végétales
7.2.4.1 - La technique diverses et d’eau utilisée pour enduire les parois d’une
Le sens premier du terme « tortis » serait celui de bâtisse »870 ? Il est difficile de trancher, mais on peut
« crépi » ; il peut également avoir le sens de « torchis », estimer qu’un enduit sur le pan-de-bois/torchis, dont le but

859
Ibid., 10 novembre 1361, [f°99 v°7]. «…ad caregandum fenum de riperia Paythelatorum… ». Paythalières (Les), lieu-dit, ancien fief, commune de
Fonters-du-Razès. Las Paythalieras, 1405 (AD Haute-Garonne, H Malte, Fonters, I, 29). Ce lieu-dit n’existe plus aujourd’hui mais d’après les comptes
il devait se situer à proximité d’un cours d’eau. La seule rivière traversant cette commune est l’Hers Mort qui se trouve à une distance minimale de
8,5 km de Castelnaudary.
860
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 r°3], [f°11 r°4].
861
Ibid., 1361-1362, [f°92 v°3]. « …que portaverunt aquam ad faciendum morterium...».
862
Ibid., 1361, [f°88 v°7], « Item pro una tralha de jonc Poncio de Lauraco a trahendum aquas de puteis castri ad opus tortitiorum…».
863
Dans d’autres régions cependant, comme en Forez, M. Gonon a pu mettre en évidence que « les charrois se font aussi par des tenanciers soumis à
corvées et recevant un salaire au titre de ces prestations » (Gonon 1973, 28). À Albi, les ouvriers sont rémunérés, entre autres, pour le transport de l’eau
destiné au torchis (Vidal 1911, 41, 1381-1382, [f°68 r°]. 651. « ...ad obs de far lo bart e portar la ayga e far los pomels e portar aquels al dig obratge ».
864
AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°113 r°3]. « ….pro abstrahendo aquam tam de putheo Sancti Antonini et de putheo viridarii magistri Petri de
Senossa… ».
865
En septembre-octobre 1211 néanmoins, lors du premier siège de Castelnaudary, P. des Vaux-de-Cernay nous apprend que les croisés enfermés dans
la place « menaient boire leurs chevaux à une demi-lieue du château » soit environ 2,5 km (Vaux-de-Cernay 1951, 107). Compte tenu de la présence
des troupes toulousaines à l’ouest de la ville, les croisés devaient se diriger vers l’Est, en direction de Saint-Martin-Lalande.
866
AC Albi, CC155, 1380, [f°70]. « 2 quintals de fe que fo mes al tortis ».
867
Le terme de « muraille » n’a pas ici, à notre avis, le sens d’enceinte à vocation militaire. Il doit s’agir de tout type de mur, y compris des cloisons.
868
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°63 r°7]. « …per esparonar e per tortisar le dit gaytil… ».
869
AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°28 r°3]. « …per 6 quintals de fe per tortisar e per enbardar… ».
870
Cayla 1964, 106. « … les consuls feront apporter ou conduire l’eau nécessaire à faire les parets et murailles pied d’œuvre ensemble le brom… ».
(Fanjeaux, 1604).

114
LA TECHNIQUE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

était essentiellement défensif, avait pour avantage d’offrir 7.2.4.2 - La période de travail
une meilleure protection contre les risques d’incendies871. Généralement, « la bonne période pour poser le torchis
Ainsi, la technique du torchis est très employée dans le s’étale d’avril à octobre pour éviter les périodes de gel »
bâtiment à l’époque médiévale en Lauragais et Toulousain, (Casel, Colzani et al. 2000, 51). Dans les comptes chau-
mais également dans d’autres régions françaises872 : les riens, et pour s’en tenir aux dates à peu près certaines, la
sources textuelles et les ouvrages en élévation conservent mise en place du torchis sur les structures (colombages ou
de nombreuses traces de son utilisation dans la construc- des clayonnages de palissades, infra) s’effectue générale-
tion militaire ou civile873. Elle est indissociable du colom- ment à partir du printemps, comme entre le 6 et le 17 juin
bage qui forme l’armature en bois accueillant la terre crue. 1359 (échauguettes du port de l’Estrade)875. L’année
Ce procédé est d’ailleurs « un des plus anciens que suivante, la pose de torchis sur les structures est effectuée
l’homme ait inventé pour édifier l’habitat de plein air, entre avril et juin, moment où le gel est moindre, et où les
comme l’attestent d’innombrables exemples qui remontent grosses chaleurs de l’été sont généralement absentes876. Ces
au Néolithique sur le pourtour de la Méditerranée ainsi périodes ne semblent cependant plus respectées trois ans
qu’en Europe tempérée » (Chazelles 2003, 20).
plus tard (travaux entre le 25 août 1363 et le 1er mars 1364),
De fait, et comme le souligne D. Baudreu « il s’agit du signe que l’on travaillait également par grosse chaleur ou
procédé le plus aisément identifiable. La terre, pouvant être pendant la mauvaise saison. Ce « changement de cap » est
mêlée à des fibres végétales, n’intervient que comme maté- peut-être dû à des réparations urgentes ou à une volonté
riau de garnissage dans les espaces formés par des éléments d’accélérer les travaux877. La même constatation vaut pour
en bois assemblés pour constituer une armature porteuse : Albi, où en 1381-1382 on pose le torchis durant le mois
colombage ou pans de bois (corondatge, buget en occitan) » d’avril878 mais aussi au mois de novembre879.
(Baudreu 2002, 58). Cependant « le mot occitan palhabart
semble bien traduire le mélange de paille et de terre Ainsi, on s’efforce en règle générale de réaliser les
détrempée (bard/bart) qui devait être réalisé avant sa mise opérations à la belle saison, mais les nécessités de la mise
en œuvre » (Ibid.). Ce terme de « palhobart » voisine en en défense imposent parfois d’accroître le rythme en
effet avec celui de « tortis » dans les différents pays du œuvrant en automne ou en hiver : les toitures des hourds,
Languedoc occidental (Ravier 1986, 839). Il n’apparaît débordantes d’environ 0,40 m au minimum, devaient
toutefois jamais dans les sources médiévales consultées, permettre aux ouvriers de travailler à couvert malgré la
peut-être un signe que la paille, très précieuse (fourrage, pluie, sachant qu’une cloison de torchis épaisse d’environ
autres usages), n’était pas employée dans ce mélange, et ne 0,10 à 0,12 m demande une durée de séchage d’environ un
le sera que beaucoup plus tard (à partir du XIXe siècle ?)874. mois en Toulousain880.

871
D’ailleurs, plus tard, il arrive que « de nombreuses constructions de bois soient recouvertes d’enduit, surtout à partir du XVIe siècle, où plutôt du
XVIIe, au fur et à mesure que les injonctions royales et les décisions municipales tenteront d’imposer cette pratique pour lutter contre les incendies »
(Saint Jean Vitus, Seiller et al. 1998, 83). Aujourd’hui, il est « pratiquement de règle d’enduire la face extérieure d’un torchis. La pose de l’enduit n’est
possible qu’après séchage complet du torchis, qui doit être suffisamment dur et sec à cœur. Il faut compter un délai de deux mois, l’idéal étant de laisser
passer un hiver complet » (Pignal 2005, 83).
872
Pour un rapide aperçu des constructions en colombage/torchis en France, voir : Guillaud 1996, 216-218.
873
Pour cette dernière, voir quelques exemples dans : Esquieu, Pesez 1998.
874
Information aimablement communiquée par A. Klein. Pourtant, à Dieppe, qui connaît également la technique du colombage/torchis pendant la guerre
de Cent Ans, « les colombages étaient remplis de terre, c’est-à-dire d’un torchis fait d’argile et de paille ou de foin séché ». En outre, en 1406, « pour
réparer le pignon d’une maison de la rue de la Poissonnerie, on utilisa deux charretées d’argile et une charretée d’eau douce indispensable pour mouiller
les carreaux de terre, parce que l’eau salée ne valait rien. Les ouvriers chargés de ce travail, appelés terreurs, mélangeaient l’argile et le foin, les
plaçaient dans des moules de bois, puis les empilaient et les mettaient en place à l’aide de planches clouées sur la paroi jusqu’à ce qu’elle fut complète-
ment sèche » (Lardin 2006, 81).
875
AD Aude, 4E76/CC48, [f°3 v°2].
876
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°49 r°1] ; 26 avril 1360, [f°63 r°6] ; [f°63 r°7] ; 4 mai 1360, [f°61 r°5] ; 18 mai 1360, [f°66 v°3] ; 20 mai, [f°67 r°2] ;
29 mai 1360 ([f° 67 v°1] et [f°67 v°3], [f°67 v°5]) ; 30 mai [f°67 v°6] ; 3 juin ([f°68 r°10], [f°68 v°1]) ; 6 juin ([f°68 v°3]) ; 9 juin ([f°68 v°7]) ; 15 juin
([f°69 r°3]) ; 16 juin ([f°69 r°5]).
877
Ibid., 4E76/CC49, [f°80 r°5], [f°101 r°6], [f°109 v°3], [f°154 r°2], [f°154 v°3].
878
Vidal 1906, 333, [f°70 r°]. 785. « a 11 d’abril, a G. Balmier al qual fo bailat a pretz fag per tortissar e terrar los amvans de la paret nova de Bordas…».
879
Vidal 1911, 41. 650. « A III de novembre, a Johan Talhafer per dos dias que estec per tortissar los gachils de la glieya vielha e de davan mastre
R. Debar... ».
880
Information aimablement communiquée par A. Klein.

115
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS, P. 117-139

Chapitre 8

Nature, place et rôle du colombage / torchis


à Castelnaudary pendant la guerre de Cent Ans

Le torchis a plusieurs destinations dans la fortification Ainsi, d’après les sources consulaires, Castelnaudary
en Lauragais et Toulousain : il entre dans la construction de était dotée d’au moins onze barbacanes dans la seconde
certaines barbacanes, du pal ou palissade situé au sommet moitié du XIVe siècle.
de l’escarpe du fossé, des hourds et des coursières, et enfin
des échauguettes (gaytils). 8.1.1 - Morphologie générale de la barbacana
Les ouvrages chauriens, dont la forme n’est jamais
8.1 - Les barbacanes (barbacanas) précisée, étaient peut-être semi-circulaires, comme celui de
Une définition de E. Viollet-le-Duc illustre le rôle la place du Vigan, à Albi, au débouché du pont conduisant
essentiel de la barbacane dans la fortification médiévale881. à la porte (Grimbert 2002, 130) : en effet, cette morpho-
À Castelnaudary, toutes les portes principales (du moins logie avait pour avantage de battre efficacement tous les
secteurs de tir882.
une porte par « port ») possèdent ainsi leur propre barba-
cane : la porte de la Baffe, des Cloches, Montdebo, de Les comptes signalent à une seule reprise l’existence
l’Estrade (construction exceptionnelle en pierre), de la d’une « bara » près de la porte de la Place : une serrure est
Place, du faubourg Sainte-Croix (plus tard, porte de la ainsi mise « a la bara de la barbacana que es de palissa
fora le valat »883. Cette bara est donc une palissade consti-
Bastide), Saint-Antoine, de Goufferan, et enfin la porte du
tuée de pieux, située au devant de la barbacane et de son
Marché. D’autres portes plus difficiles à localiser (Peyralbe fossé (se confond-elle avec la barriera ?), tout en venant
et Foix) sont également dotées de tels ouvrages. Enfin, vraisemblablement se raccorder à ce dernier (fig. 7). Dotée
d’autres accès ne semblent pas en bénéficier, ou du moins elle-même d’une porte dont on répare la serrure, la bara
les dépenses les concernant n’apparaissent pas dans les servait à filtrer les entrées et peut-être à prélever des taxes
registres conservés (portes du Terrier, de la Buade, porte sur les marchandises ou les personnes (« bara » signifie
Vieille de la Baffe). aussi « droit d’entrée »)884.

881
« On désignait pendant le Moyen Âge, par ce mot, un ouvrage de fortification avancé qui protégeait un passage, une porte ou poterne, et qui perme-
ttait à la garnison d’une forteresse de se réunir sur un point saillant à couvert pour faire des sorties, pour protéger une retraite ou l’introduction d’un
corps de secours. Une ville ou un château bien munis étaient toujours garnis de barbacanes, construites simplement en bois, comme les antemuralia,
procastria des camps romains, ou en terre avec fossé, en pierre ou moellon avec pont volant, large fossé et palissades antérieures. La forme la plus ordi-
naire donnée aux barbacanes était la forme circulaire ou demi-circulaire, avec une ou plusieurs issues masquées par la courbe de l’ouvrage. Au moment
d’un siège, en dehors des murs des forteresses, on élevait souvent des barbacanes, qui n’étaient que des ouvrages temporaires, et dans lesquels on logeait
un surcroît de garnison. Mais le plus souvent les barbacanes étaient des ouvrages à demeure autour des forteresses bien munies » (Viollet-le-Duc s. d.,
vol. 2, 111, 112).
882
D’autres options ont pu être retenues par les constructeurs chauriens (barbacanes carrées ou rectangulaires ?).
883
AD Aude, 4E76/CC48, [f°57 v°1], 1360. « …a mastre G. Gilat favre per 2 clavaduras la 1 fo mesa al pont levadis de la barbacana e l’autra fo mesa
a la bara de la barbacana que es de palissa fora le valatt…».
884
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°1 r°2]. « Et primo de impositione barre recepit que sequuntur.
Primo recepit de Ramundo Poncii dicti castri pro emolumento arrendamenti barre barii quam arendant anno predicto. » ; [f°1 v°1]. « Item recepit at
Johanne Pagnani pro arrendamento barre porte de Petra Alba quam arrendant nomine procuratoris Bernardi Mas…» ; [f°1 v°2]. Porte Montdebo ;
[f°1 v°3]. Porte de Goufferan.
Un espace de quelques mètres devait exister entre cette « bara » et le fossé de la barbacane, mais les comptes n’en font pas mention.

117
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Le fossé quant à lui, protégeait la barbacane, mais il construction d’un mur à pierres et chaux « du côté de la
n’était certainement pas distinct de celui protégeant la barbacane »897, vraisemblablement le mur-bahut supportant
barriera (et/ou la bara ?), et sur lequel nous ne savons rien. les poutres dormantes de 21 palmes (longrines d’environ
Les travaux au fossé sont fréquents, et emploient un 4,6 m) sur lesquelles l’axe du pont va se mouvoir898. Les
personnel nombreux885, notamment féminin886. éléments en bois sont parfois fort imposants : six poutres
de 6,2 m de long, et de 0,22 x 0,14 m d’équarrissage, ainsi
8.1.2 - L’enceinte de la barbacana qu’une grande poutre de 4 m destinée à la « tour du pont »
(superstructure en bois de la porte solidaire de l’enceinte de
D’après les sources, il existe au moins quatre types
la barbacane899 ?). Enfin, ce pont était relevé au moyen de
d’enceinte différents.
cordes, et non de chaînes900.
8.1.2.1 - Les enceintes en pieux et torchis La barbacane de la porte Montdebo possède apparem-
Les sources n’indiquent pas les dimensions de ces ment une enceinte identique : le 11 juillet 1363, cinq
ouvrages, ni s’ils sont dotés de systèmes de défense active. hommes y travaillent (pose de lattes et de torchis) en utili-
Ces enceintes en pieux et torchis concernent au moins deux sant du bois provenant de la tour du Barri901. L’opération se
ouvrages : la barbacane de la porte de Foix et celle de la poursuit le jour suivant902.
porte Montdebo. L’enceinte de ces barbacanes devait se présenter ainsi :
La première est en cours de construction en avril des poteaux verticaux plantés de distance en distance (2 à
1360887 : elle requiert une cinquantaine de poteaux 3 m ?), liés entre eux par des lattes de bois horizontales
(corondas)888, trois poutres (fustes) de 20 palmes de long relativement serrées, et clouées individuellement. Le
(env. 4,50 m)889, sept « pièces » ou « poutres » de bois torchis (peut-être employé sous forme de longues tresses),
(pecias fustorum)890, et enfin quatre soliveaux équarris pouvait alors être installé sur cette barrière.
(cartos)891. Pour solidariser ces éléments, on achète
19 livres (env. 8,5 kg) et un carton892 de chevilles de fer 8.1.2.2 - Autres types d’enceinte903
(cavillas)893, 300 clous renforcés « pro latando seu sparo-
nando dictam barbacanam », et dix clous baradors « pro Seules deux barbacanes possèdent avec certitude des
firmando portam »894. Trois sarcinées de foin sont enceintes en pierre : celle de la Place, et celle de l’Estrade.
employées (env. 400 kg ?)895 et cinq hommes sont rému- La barbacane de la porte de la Place est bien connue
nérés pour étaler le torchis896. grâce à une longue série de dépenses d’avril 1360. Elle se
Il y a donc là une différence notable par rapport au situe « au delà du fossé (principal), devant la dite porte »904.
système colombage/torchis traditionnel (hourds, cour- Ainsi, des travaux sont réalisés pour la cavalha du mur de
sières) qui ne paraît pas utiliser de telles fixations (infra). la barbacane, c’est-à-dire la tranchée de fondation (creuse-
Cette barbacane est également dotée d’un pont-levis : ment905 et évacuation de la terre906). Parallèlement, l’ache-
principalement composé de bois, il requiert également la minement des pierres pour l’édification du mur débute le

885
Ibid., [f°54 r°3]. 11 hommes ; [f°54 r°4]. 13 hommes. [f°54 v°1]. 12 hommes.
886
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°51 v°5]. « …pagar an Johan Casier, an Peyre G., an G. Delias, an Ar. de Sul Pont que per 2 dias avian obrat a
curar le valat devant la barbacana de la porta de Plassa…» ; [f°52 r°1]. « Item le dit dia estero en la dit obra mays aquestz dejos escrit. dona Sebelia
del Bes dona Rossela dona Freyra la serventa den Huc de la Estura…».
887
Ibid., [f°80 v°]. «…quod quandam barbacana fieret ante portam Foy et fuit inceptam ibi operari die XXIIII aprilis et fuerunt empti fustes cavilhe
et alia ut sequitur ».
888
Ibid., 24 avril 1360, [f°80 v°1]. « Primo 50 coronde et una modica... ».
889
Ibid., [f°80 v°3]. « …3 fustes viginti palmorum… ».
890
Ibid., [f°80 v°6]. « …pro 7 peciis fustorum ibidem positis…».
891
Ibid., [f°80 v°5]. « …pro quatuor cartonibus ibidem positis ».
892
Environ 15 kg. ?
893
AD Aude, 4E76/CC48, 24 avril 1360, [f°80 v°7]. « …pro 12 libris cavillarum emptis a B. Ricardi positis in dicta barbacana… » ; [f°80 v°8]. « …pro
7 libris et uno cartone cavillarum… ».
894
Ibid., [f°80 v°10]. « Item […] fuerunt empti a magistro B. de Podio 300 clavi reforsatis pro latando seu sparonando dictam barbacanam et decem
clavi baradors pro firmando portam ». Vers le 13 mai, cette porte sera également dotée d’un verrou (Ibid., [f°73 v°3]. « ..pro ponendo et muniendo
ferrollum in barbacana porte Foy… »).
895
Ibid., [f°80 v°11]. « Item fuit empta una sarcinata feni a R. Alsey pro tortissando dictam barbacanam […] Item alia a R. Jumeriis […] Item a
Michaele Sancti Martini alia…».
896
Ibid., [f°80 v°12]. « Item die penultima aprilis tortissaverunt dictam barbacanam 5 homines… ».
897
Ibid., [f°81 r°2]. « ...quod fieret pons in dictam barbacanam et fuit factum murum de versus dictam barbacanam... » ; [f°81 r°3]. « …pro portando
morterium in dicto opere…».
898
Ibid., [f°81 r°6]. « …Item tres pecias fusti 21 palmorum in quibus stat taulatum et pons volvitur sive rotat… ».
899
Ibid., [f°81 v°1]. « …sex trabes quelibet 28 palmorum in longitudine unius palmi alti et trium quartonis lati quelibet 11 crosatos. Item magnum
fustem 18 palmorum longitudinis de quo fuit factum turrim pontis …».
900
Ibid., [f°82 r°5]. « ...pro quadam quantitate corde cum qua pons predictus traheretur… ».
901
Ibid., 4E76/CC49, 11 juillet 1363, [f°52 v°4]. « ... Poncio Fabri, Fabro Bordas, Johanni G., Petro Danini, Vitali Mercaderii qui steterunt ad
latandum et tortissandum barbacanam porte Montis Lebonis quia fustam dicte barbacane receperant ad opus turris de Barrio… ».
902
Ibid., 12 juillet 1363, [f°54 r°3]. « ...Fabro Bordas, Johanni Subrani furnerio, Petro Danini, Vitali Mercaderii, Arnaudo Boca Vigna de Manso quibus
steterunt ad tortissandum barbacanam porte Montis Lebonis… ».
903
Les enceintes en terre massive de certaines barbacanes ont été rapidement évoquées plus haut. Nous n’y reviendrons donc pas.
904
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°57 v°4]. « …per far la barbacana que es fora del valat davant la dita porta… ».
905
Ibid., [f°51 v°1]. « … a far la cavalha del mur de la barbacana de la dita porta… ».
906
Ibid., 26 avril 1360, [f°52 r°5]. « …trasian am las paniers la terra de la cavalha de la barbacana… » ; Ibid., 27 avril 1360, [f°52 v°4].

118
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

23 avril, alors que la tranchée n’est pas encore achevée907. où sont stockés chevrons et voliges921. Elle possède égale-
Dans le même temps, le fossé est nettoyé par un personnel ment un pont-levis dont l’extrémité mobile (ou une partie
masculin et féminin908 : il est donc déjà terminé ou en passe dormante ?) repose sur un mur en pierre922 situé au-delà du
de l’être. fossé de la barbacane923. Il se lève grâce à une corde de
Dans un premier temps ouvriers et terrassiers devaient chanvre924. Une chaîne, peut-être destinée à filtrer les accès,
excaver le sol argileux au moyen de pelles en bois909, est amenée depuis « l’atelier des consuls » (remise où
jusqu’à mettre au jour par endroits la roche encaissante étaient stockés des équipements destinés à être utilisés pour
(grès). À cette occasion, des carriers sont parfois appelés si les nécessités de la communauté ?)925.
des bancs exploitables sont mis au jour910. Dans ce cas d’es- La barbacane de la porte de l’Estrade est attribuée à
pèce en revanche, la pierre pour la barbacane de la porte de prix-fait le 10 octobre 1361 aux trois principaux maçons
la Place est récupérée sur « un mur en cours de destruction œuvrant en ville (Raymond Jean, Jean Maurin, et Pierre
du côté de la porte de maître B. Servit »911. Cette opération Baston). Mais les travaux ne semblent débuter qu’à partir
dure plusieurs jours et emploie un personnel nombreux912. du 28 janvier 1362 (mise en place de l’échafaudage)926.
Quinze jours après le début des travaux, trois maçons sont
rémunérés pour avoir édifié 21,5 brasses (linéaires ?) de Fait unique à Castelnaudary, cette barbacane comporte
mur913. Le sable destiné au mortier est transporté par trois huit archères : quatre en partie basse, près du pont, et
quatre en partie haute, en décalage ( ?) de trois palmes (env.
hommes et deux femmes914, manœuvre répétée une
0,70 m) par rapport à ces dernières. L’ouvrage dispose
semaine plus tard915. La chaux est quant à elle employée à
donc d’au moins deux niveaux de défense (et d’un chemin
hauteur de sept sestairadas (env. 230 kg ?)916.
de ronde ?)927.
Enfin les maçons passent quatre jours à tailler ou
Le 8 février 1362, l’ouvrage est achevé et mesuré : on
sculpter917 l’amortissement du pilar de la barbacane918 en
dénombre 21 brasses trois quarts de mur, de piliers pour la
réalisant par ailleurs un galveg (sorte de drain ?) à l’inté-
porte, et la « découverte » réalisée à la carrière pour extraire
rieur de l’édifice919. Ce pilier était-il placé à équidistance de les pierres928. L’arc de la porte, également en pierre, n’entre
l’enceinte de l’ouvrage, de manière à recevoir les sablières pas dans le prix-fait, mais fait l’objet d’un nouveau contrat
d’une toiture rayonnante couvrant l’ensemble920 ? avec les mêmes personnes le 10 février 1362929. Après le
Certaines barbacanes devaient en effet être couvertes rapport du maçon Jean Fabre, les travaux réalisés sur cette
puisque celle de la porte Montdebo, contient une maison arcature se montent à 17 florins et 5 gros d’argent930.

907
Ibid., 23 avril 1360, [f°51 v°4]. « …que aquel dia portero peyra ad obs del mur de la barbacana… ».
908
Ibid., [f°51 v°5]. « …avian obrat a curar le valat devant la barbacana de la porta de Plassa… ». Comme on l’a vu, l’expression « curar le valat »
signifie en effet « vider ou nettoyer le fossé » et non pas « creuser le fossé » opération pour laquelle les comptes utilisent le terme « cavar » ; [f°52
r°1]. « …estero en la dit obra mays aquestz dejos escrit. dona Sebelia del Bes, dona Rossela, dona Freyra, la serventa den Huc de la Estura… ».
909
Ibid., [f°56 v°4]. « …per 4 palas de fust que foro compradas obs de las obras dels valatz… ».
910
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°7]. « Item solvi fecerunt G. le Rog et aliis duobus britonibus qui fuerunt per duos dies pro manobris cum peyreriis
ad cavandum vallum retro castrum...».
911
Ibid., 27 avril 1360, [f°52 v°5]. « …que aquel dia portero peyra ad obs de l’obra de la barbacana la qual peyra portavan del mur que hom deffe
la qual era pres de la porta de mastre B. Servit… ». On ne sait cependant s’il s’agit d’un ancien mur de fortification ou d’un bâtiment civil.
912
Ibid., 29 avril 1360, [f°53 r°3] ; 30 avril, [f°53 v°2].
913
Ibid., 7 mai 1360, [f°55 v°4]. « …an Ramon Johan e an Johan Mauri e a mastre P. Gast peyriers per 21 brassa e media de mur que avian fayt a la
obra de la barbacana de la porta de la Plassa… ».
914
Ibid., 30 avril 1360, [f°53 v°3]. « …que aquel dia portero arena per mesclar al mortier que fazian a l’obra de la barbacana de la porta de la
Plassa… ».
915
Ibid., 7 mai 1360, [f°56 r°3]. « …per portar arena de gerlada ad obs del mur de la barbacana de la dita porta… » ; [f°56 r°4]. « …an Ramon Johan
e an Johan Mauri que avian fayta trayre la dita arena del riu… ».
916
Ibid., 7 mai 1360, [f°56 r°2]. « …per 7 sestairadas de caus que avian mesas a la obra del mur de la barbacana de la porta de la Plassa ».
917
« Talha » peut en effet avoir ces deux sens (Bernardi 1995, 461).
918
AD Aude, 4E76CC48, 7 mai 1360, [f°55 v°5]. « …als ditz peyriers per 4 jornals que avian meses a far la talha del amortiment del pilar de la dita
barbacana… ».
919
Ibid., [f°56 r°5]. « ...per far le galueg que es dedintz la dita barbacana… ».
920
Dans ce cas, cette structure devait être ouverte à la gorge de manière à être commandée depuis l’enceinte de la ville.
921
AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°29 v°6]. « ...pro portando et ponendo foliam veterem et cabironos [...] intus domum quae est in barbacana porte
Montis Lebonis… ».
922
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°52 r°3]. « ….per far manobra al mur que es al cap del pont levadis de la barbacana de la porta de la Plassa… ».
923
Ibid., 29 avril 1360, [f°53 v°1]. « …que avian obrat a far le mur que es al cap del pont levadis fora le valat de la barbacana de la porta de la
Plassa… ».
924
Ibid., 26 avril 1360, [f°52 v°2]. « …7 brassas de corda de carbe que fo comprada per levar le pont de la barbacana de la dita porta… ».
925
Ibid., 27 mai 1360, [f°57 v°2]. « …per una cadena de fer que fo comprada per metre al pont levadis la qual cadena es a l’obrador cossols… ».
926
Ibid., 1362, [f°104 v°17]. « …Johannes Seguini die XXVIII januarii quas tradi fecit Ramundo Johannis ad opus stagiarum barbacane Astrate... ».
927
Ibid., [f°119 r°1]. « Item die decima mensis octobris dicti domini consules tradiderunt barbacanam portus Astrate ad perficiendum Ramundo
Johannis, Johannis Maurini et Petro Bastonis peyreriis pretio facto [...] et debuerunt facere in dicta barbacana quatuor arquerias inferius seu juxta
pontem et quatuor arquerias de supra predictas quatuor et reddere de tribus palmis supra alignuentum dictarum arqueriarum…».
928
Ibid., [f°119 r°2]. « Postque die octavia febroarii Johannes Fabri operarius retulit fecisse perticare murum confectum per dictos operarios seu peyre-
rios in dicta barbacana et reperusse in eodem 21 brachiatas et tres quartones et quod computaverant buegum pro pleno et inclusere pilariis factis in
porta dicta barbacane et etiam discobre quod fecerant in peyreria...».
929
Ibid., [f°119 v°7]. « Item die decima febroarii dicti domini consules tradiderunt pretio facto archam barbacane Petro Bastonis, Ramundo Johannis,
Johanni Maurini et debuerunt habere pro brachiata 3 florenos et 9 grossos argenti. [somme manquante]. ».
930
Ibid., [f°119 v°8]. « Posque fuit facta relatio per Johannem Fabri quod in dicta arqua dicti peyrerii operaverant seu construerant quatuor brachi-
atas et duas partes unius brachiate de muro medius quarta parte unius palmi que assenderunt 17 florenos 5 grossos argenti …».

119
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

La chaux nécessaire a été livrée en plusieurs fois par un Contrairement à l’enceinte de la ville, ces ouvrages
des deux seuls fournisseurs attitrés du chantier, à savoir présentent donc un visage assez hétérogène. Les raisons de
Bernard Anglais (parent proche de Jean Anglais ?), chau- cette variété sont inconnues mais on peut supposer, hormis
fournier du Mas Saintes-Puelles931 : la quantité totale pour la barbacane de la porte de l’Estrade, défense en
atteint au moins 96 setiers (environ 3120 kg)932. Bien des pierre tout à fait hors normes, que les bâtisseurs ont donné
années plus tard, en août 1398, cette barbacane est en priorité à la construction de l’enceinte principale en lui
ruine. Les consuls prennent alors deux mesures destinées attribuant les meilleurs matériaux ; les « chutes » de ces
à éviter des accidents fâcheux : tuiles, voliges et chevrons derniers étaient récupérées pour servir à la construction des
sont mis en lieu sûr à l’intérieur de la porte de l’Estrade ; édifices défendant les portes : de fait, selon « l’arrivage » et
les pierres des merlons (dentels) sont déposées pour entre- les moyens financiers du moment, on décidait peut-être de
prendre la réfection933. construire les barbacanes en pieux et torchis, terre massive,
Enfin, l’existence de barbacanes entièrement en bois bois, ou pierre.
n’est pas clairement établie : toutefois, durant l’été 1371,
des hommes éteignent à plusieurs reprises le feu mis au pal
(palissade en bois ?) de la barbacane de la porte des La part de la terre dans ces constructions -sous forme
Cloches934. Il s’agit là par trois fois d’actes volontaires de torchis ou de terre massive- est donc, dans cinq cas sur
(gestes d’enfants ? escarmouches avec l’ennemi ?). Lors de onze, assez équilibrée par rapport aux autres matériaux
la seconde tentative, le feu a été mis à la fois sur un tas de (pierre, bois).
fumier et au pal de la barbacane. Les quatre personnes Au final, la barbacane « type » de Castelnaudary devait
chargées de l’éteindre ont tiré l’eau du fossé ; ce dernier se composer de plusieurs éléments (fig. 7) : une « bara » ou
était donc au moins en partie en eau, fait étrange car « barriera » (palissade ?) dotée d’une porte avec serrure ;
d’après la dépense on se situe en plein été (orage ? un fossé ; une enceinte (reliée à la palissade de la ville ?)
remontée de nappes phréatiques ?)935. Lors de la première dotée d’un pont-levis enjambant ce dernier.
tentative, huit seaux d’eau avaient été tirés du fossé au
début du mois de juillet 1371 : l’eau était donc déjà 8.2 - Le pal ou palissade
présente et le feu n’était pas très important, compte tenu du À Albi, selon A. Grimal, le « pal ou palenc » est une
petit nombre de récipients employés936. « palissade de pieux armés de pointes en fer et de poutres
L’existence d’une barbacane entièrement en bois n’au- serrées les unes contre les autres » (Grimal 1935, 18). Pour
rait ainsi rien d’étonnant puisque c’est souvent le mode H. Bousquet, à Rodez, le palenc est « une barrière de bois
privilégié de construction de ces ouvrages937. formée de pieux destinée à protéger l’entrée d’un passage
ou à constituer une enceinte extérieure aux remparts »
(Bousquet 1926, 321, note 1).
Ainsi, sur les onze barbacanes de la ville, au moins
deux sont en pierre, deux en bois et torchis, une en terre À Castelnaudary, cette construction existe également,
massive (supra), et peut-être une en bois938. Pour les autres, dénommée la plupart du temps « pal » mais aussi quelque-
les mentions sont trop imprécises, ou bien les travaux y fois « palenc » ou « palisse ». Elle se situe entre l’escarpe
afférents, ne portant pas sur l’enceinte, ne permettent pas du fossé principal et l’enceinte de la ville dont elle était
de connaître leur nature. séparée par une lice d’une largeur inconnue (fig. 7).

931
Ces personnes semblent ainsi jouir d’un certain monopole de la fourniture de chaux à la ville, comme cela est quelquefois le cas ailleurs, comme par
exemple en Normandie (« Cette concentration de la production et de la vente de chaux n’était pas spécifique à Rouen puisque la famille Voibert,
installée au Câtelier, fût la seule à approvisionner de 1424 à 1475 aussi bien la ville de Dieppe que la région de Longueville-sur-Scie » ; Lardin 2001,
186, 187).
932
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°119 v°1],
[f°119 v°2].
933
Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°87 r°4]. « ...steterunt in barbacana porte Strate pro dessendendo tegulum, latam, cabirones de dicta barbacana ad
terram cum esset in magno periculo cadendi et dictum tegulum et fustas assenderunt supra dictam portam ad finem ne depredarentur et de inde
amoverunt lapides dels dentels et dictos lapides posuerunt ad terram intus dictam barbacanam cum minaretur ruynam et ipsam repararunt intus dictam
barbacanam… ».
934
Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°34 r°6]. « ...qui dicta die extinxerunt ignem appositi in pale barbacane porte Stimbalorum per aliquem et portarunt
ibi aquam ne comburentur palum... ».
935
Ibid., [f°32 v°5]. « …qui dicta die extinxerunt et amortarunt ignem appositum per aliquos in fimo et palum barbacane porte Stimbalorum cum dicti
palum comburetur et ibi portarunt aquam de cava ne cremarent pali…».
936
Ibid., [f°28 r°5]. « Item cum dicta die aliquis possuisset ignem in pale barbacane porte Stimbalorum solvi fecerunt Jacobo Folquerii, B. Johannis le
petit et G. Bole qui traxunt de cava octo semales aque et dictum ignem extinxerunt et amortarunt ne totum palum combuiret... ».
937
Ainsi, à Albi, la barbacane au débouché du pont de la porte du Vigan devait être dotée d’une enceinte palissadée implantée sur une levée de terre
(Grimbert 2002, 130).
938
Ces constructions se retrouvent à peu près partout à la même époque. Ainsi, en Haut-Dauphiné, « d’autres dispositifs, en dur cette fois-ci, les ravelins
et les barbacanes, traduisent la nécessité de renforcer les abords du château à la fin du XIVe siècle. La barbacane est une construction peu élevée, semi-
cylindrique, ouverte à la gorge et aménagée face à l’entrée du château. En terre et en bois ou même maçonnée, la barbacane est quelquefois munie
d’une porte à bascule, montée sur des charnières horizontales, mais n’est jamais complètement fermée afin d’empêcher le repli des assiégeants à l’in-
térieur » (Nicolas 2005, 257). En Bresse et Bugey, « au bord de la contrescarpe et souvent sur le « dos d’âne » qui sépare deux larges fossés en avant
des entrées, des constructions fortifiées organisent et défendent l’entrée sur le pont dormant. On appelle barbacane ce genre de construction de forme
souvent semi-cylindrique et de faible élévation. La porte de ces constructions est pratiquée sur le bord de la barbacane, à proximité du fossé pour obliger
les assaillants à se tenir sous le tir des défenseurs placés sur les murailles des braies. Ainsi, à l’intérieur de la barbacane, le chemin de l’entrée fait un
coude pour empêcher tout passage droit et direct vers le pont » (Kersuzan 2005, 257, 258).

120
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

Sa structure assez complexe semble bien plus volumi- cavalha ; un clayonnage de sparos enduit de torchis fixé
neuse qu’une simple palissade. Il s’agit en effet d’une ligne sur ces poteaux ; un chemin de ronde intérieur charpenté
de défense active à part entière, plus sophistiquée que la dénommé aleya ; enfin, au sommet, des hourds (ambans),
palissade extérieure de la ville, entièrement en bois. destinés à pilonner au plus près un ennemi ayant réussi à
descendre dans le fossé.
Il y a en fait trois « sortes » de « pal » dans les textes
chauriens : le pal ou palissa (en bois et torchis) entre le
8.2.1 - Les pieux ou pals de la palissade
fossé principal et l’enceinte ; le pal, construction provisoire
destinée à boucher une brèche lors de l’effondrement d’une Les pieux en bois destinés à la palissade sont également
paret (toujours en bois, supra) ; le pal de clôture (par dénommés « pals ». En 1363, ils sont taillés et importés
exemple pour un cimetière) apparemment sans fonctions depuis trois endroits (fig. 3) : Stagnum Vivum, aujourd’hui
défensives, mais également en bois. l’Estambigou, à environ 750 m à l’est de la ville939 ; le bois
ou le bosquet de Nonet ou Nolet (actuellement ferme
Seul le premier d’entre eux sera détaillé ici. Raynaud, commune de Saint-Papoul, à 4 km à l’est de
Ce pal, très souvent cité dans les comptes, se compose Castelnaudary)940 ; le lieu de « Plancapres », (ferme de la
de plusieurs éléments (fig. 43) : une ossature de pieux Planque ? commune du Mas Saintes-Puelles à environ
plantés dans le substrat au moyen d’une fondation appelée 3,75 km à l’ouest de Castelnaudary ?)941.

clavis folia/fuelha

5m

lata
amban
aleya

pal
tortis
tortis
0 5m
sparo

valat

Fig. 43 : Castelnaudary. Essai de restitution du pal d’après les comptes consulaires (XIVe-XVe siècles).

939
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°102 v°5]. « …pro portando duas sarcinatas palis de loco vocato de Nolet et pro portando alias duas sarcinatas
palis de Stangno Vivo… ».
940
Ibid., [f°79 v°8]. « ...pro talhando palum in brolhio de Noneto ad opus clausuris juxta portam Sancti Antonini… » ; selon l’abbé H. Sabarthès en
effet, la mention « Nonet » désigne la ferme Raynaud (Sabarthès 1912, 341).
941
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°81 r°4]. « …pro portando 12 sarcinatis de palo de loco vocato de Plancapreso ad opus palenque de Strada…».

121
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Ces pals sont parfois dénombrés par charges942 ou sarci- dans ce cas-là d’armatures à vocation défensive et non plus
nées, (environ 1,6 t. pour les éléments venant de de simple structure à pan-de-bois : en effet, en cas d’at-
Plancapres943). Dans d’autres cas cependant, ils peuvent taque, certains projectiles (traits, pierres) pouvaient frapper
être achetés à l’unité (pieux d’une taille hors norme ? utili- cette palissade en avant de l’enceinte. Elle devait donc être
sation précise ? remplacement d’un seul élément défec- assez solide pour protéger les défenseurs circulant dans la
tueux944 ?). On ne connaît cependant ni leurs tailles, ni la lice entre les deux ouvrages.
largeur de leur espacement, dans lequel prenaient place les
sparo, supports du torchis. 8.2.3 - Bart et fe : la fabrication du torchis pour le pal
Si la technique utilisée pour fabriquer ce dernier est En 1360-1361, on relève seulement trois mentions
certainement la même, les termes désignant la structure- d’achat de foin (palissade « derrière chez dona Feriera ») ;
support sont très différents de ceux d’un colombage clas- les quantités sont assez modestes et les modes de calcul des
sique (absence de corondas ou de riostas pour ces pals). La charges variés (sestairada, saumada, quintal) ; quant à la
fusta nécessaire est quelquefois récupérée dans une provenance, on pourrait éventuellement la déduire du lieu
ferme945 et certains éléments doivent parfois être sciés946. de résidence (ou de naissance ?) des personnes à qui le foin
Pour être correctement implantée, ces pals nécessitent est acheté : ainsi, le 18 mai la ville acquiert deux seterées
une cavalha947 : cette tâche dévolue aux hommes consiste à (env. 65 kg ?) à Guillaume des Plas, de Ferrals (actuels
tailler des saignées ou des trous de poteaux dans le roc château et ferme, commune de Saint-Papoul, à environ
(absence de mentions relatives à l’évacuation de terre) pour 9 km à l’est de Castelnaudary952). On se procure également
asseoir les supports. Les équipes sont au minimum de une charge (env. 130 kg) auprès d’un homme de
trois948, au maximum de huit personnes949, cette activité Montferrand, village situé à 12,5 km à l’ouest de la ville,
pouvant très bien se dérouler l’hiver, peut-être pour près de la route de Toulouse953. Enfin, quatre quintaux (env.
permettre d’installer la structure avant le printemps 160 kg ?) sont acquis auprès de Huc d’Aurenta, dont le
(période la plus propice au torchis)950. domicile (ou le lieu d’origine) n’est pas précisé954.

8.2.2 - Les supports du torchis : sparos ou latas ? Pour ces mêmes travaux, du bart est préparé à deux
reprises : la première fois en mai 1360 par quinze
La technique du torchis requiert plusieurs éléments : hommes955, la seconde par trois hommes quinze jours plus
une structure-support (colombage ou pieux-supports) des tard956, une bardiera étant réalisée dans l’intervalle le
sparos, de la terre préalablement préparée (bart). 3 juin957. Enfin, le transport de l’eau directement en relation
Cependant, comme pour les barbacanes dont l’enceinte est avec ces travaux n’est pas répertorié, comme c’est presque
en torchis (supra), on peut se demander si quelquefois des toujours le cas pour les opérations relatives au torchis.
latas (ou lattes) ne sont pas employées à la place des
sparos951 afin de raidir davantage la structure sous forme 8.2.4 - Enduire la structure : tortissar le pal
d’un clayonnage dense (épaisseur inconnue) suffisamment
solide pour supporter un chemin de ronde et un hourd « Tortissar le pal » (enduire le pal de torchis) est une
(infra). Pourtant, l’absence de mentions relatives à des fixa- tournure fréquemment rencontrée dans les comptes chau-
tions en fer empêche d’en être certain. riens. Elle désigne le fait de couvrir les sparos (ou latas ?)
avec le bart.
Ces supports étaient peut-être seulement d’une taille
supérieure à ceux destinés aux opérations de colombage En 1360, cette tâche emploie des équipes variant entre
pour les hourds ou les gaytils (infra), puisqu’ils servaient deux et sept individus958 (quatre ouvriers en moyenne), la

942
Une charge : env. 127 kg à Toulouse, 138 kg à Castelnaudary.
943
Pour d’autres utilisations (palissade autour d’un cimetière), les quantités peuvent être beaucoup plus importantes : ainsi, le 29 novembre 1361,
150 quintaux de pieux sont achetées à Guillaume Got, habitant du village d’Issel, et à Guillaume Robert, soit environ 19 t. de bois (AD Aude,
4E76/CC48, [f°108 r°4], [f°108 r°5], [f°108 r°6]).
944
Ibid., 1360, [f°81 v°8]. « ...pro palo empto ab eodem quod fuit positum de retro portam Montis Lebonis in angulo de versus Sanctum Antonium in
palo tortissato… ».
945
Ibid., 1360-1361, [f°67 r°6]. «…per fusta de una borda laqual fo meza a reparar le pal… ».
946
Ibid., [f°67 r°7]. « …per 11 pessas de fusta brena que fo meza al dit pal... ».
947
« Cavalha : de cavalho, cabalho, chavalho : petit ravin dans le Haut Languedoc » (Mistral 1878, vol. 1, 507).
948
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°108 r°8]. « …tribus hominibus qui fuerant per unam diem ad cavalham dicti palis… ».
949
Ibid., [f°107 bis v°6]. « Et primo Ramundo Baronis ; G. Durandi, Petro Astrada, Gualhardo Guini, Vitali Mercaderii, Aymerico Rayshat, Petro
Semeyrat, Michaeli Guiraudi qui per duas dies steterunt ad cavandum cavalham palis turim Terii... ».
950
Ibid., 19 décembre 1361, [f°108 v°5] ; 11 et 12 janvier 1362, [f°126 r°5].
951
Ibid., 4E76/CC48, 20 décembre 1361, [f°110 v°6]. « Item Johanni Martini qui per quatuor dies fuerat ad latandum et sparonandum palem retro
castrum… ». On sait que Jean Martin est charpentier grâce à une dépense de l’année précédente (Ibid., 1360, [f°28 r°5]) ; Ibid., 4E76/CC49, 27 mai
1363, [f°23 v°7]. « ...Ramundo Jacobi, Ramundo Gauberti, fusteriis qui steterunt [...] pro sparonando dictum palum… ».
952
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°66 r°10]. « ...an G. dels Plas de Ferrals per dos sestairadas de fe que foro mezas al dit pal… ».
953
Ibid., [f°67 v°1]. « …a 1 home de Mon Feran per una saumada de fe que fo meza a tortisar le dit pal… ».
954
Ibid., [f°67 v°3]. « …al senhor Huc d’Aurenta per 4 quintals de fe obs de tortissar le pal detras dona Feriera…».
955
Ibid., [f°67 v°6]. « …a 15 homes que fero bart e tortissero al pal detras dona Feriera…».
956
Ibid., [f°69 r°3]. « …a 3 homes que fero le bart per tortisar le pal detras dona Feriera… ».
957
Ibid., 3 juin 1360, [f°68 r°10]. « …fero pagar an P. de Bederes e an Ramon de Lom que avian fayta una bardiera per tortissar le pal detras dona
Feriera… ».
958
Ibid., 20 mai 1360, [f°67 r°2]. « …an G. Mala Mosta e an P. de Bederes que avian tortissat al pal de l’angle dejos la porta de Sant Antoni… » ;
[f°68 v°7]. « …a 7 homes que avian estat a tortissar le pal detras dona Feriera… ».

122
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

plupart du temps directement rémunérés par la ville959, rare- En 1360, du bois est acquis pour les palissades, notam-
ment titulaires d’un prix-fait960. Les noms ne sont pas ment pour celle du Terrier : 18 cabiros (chevrons) de
toujours précisés, mais des travailleurs sont plus particuliè- 20 palmes (env. 4,50 m), 16 travatels (poutrelles ou
rement chargés de cette opération : Stéphane Ramno (ou solives) de sapin et de chêne969 ; deux saumadas (env.
Ranno) par exemple, qui apparaît souvent en 1361-1362 260 kg ?) de cabiros redons970 ; six chevrons redons de
dans des travaux relatifs au terrassement961, mais surtout en 20 palmes, 24 de 30 palmes (près de 7 m), et deux planches
rapport avec le torchis962, activité qui deviendra pour lui en sapin de six brasses (9,6 m ?), ainsi que d’autres poutres
exclusive en 1363-1364963. À défaut de pouvoir le qualifier (fusta), sont vendus par le commandeur de Saint-
de « maître tortisseur », il s’agit peut-être là d’un ouvrier Antoine971.
Le 2 juin 1360, Pierre Saurin fournit deux chevrons de
spécialisé. Nous aurons l’occasion de revenir sur son cas.
24 palmes (env. 5,50 m) pour la palissade « derrière chez
dona Feriera »972. Le 3 novembre, deux bûcherons fournis-
8.2.5 - Des superstructures de défense
sent d’autres travatels pour les palissas et les gaytils de
8.2.5.1 - Ambans et aleyas : morphologie générale l’enceinte : douze d’une longueur de 28 palmes (env.
6,20 m), sept autres de 3 cannes (env. 5,4 m)973. D’autres
L’existence d’un chemin de ronde (aleya) et de hourds éléments ont des tailles indéterminées, tels les 65 pecias
(ambans) au niveau du pal de Castelnaudary est attestée fuste pour la palissade « derrière chez Bernard Service »974
par quelques rares mentions964. « Aleya », s’il peut signifier ou les dix exemplaires pour celle du port des Bordes975.
« allée »965, désigne plus sûrement ici un « chemin de
Les bois utilisés possèdent des dimensions proches ou
ronde »966. Quant aux hourds, on apprend leur présence à ce
identiques à celles des matériaux employés pour les hourds
niveau grâce à deux mentions de 1361967.
de l’enceinte (infra). On pourrait donc estimer qu’ils
On ne sait toutefois quelle ampleur revêtent ces super- étaient destinés aux superstructures de la palissade (hourds,
structures pour lesquelles, à la différence des coursières et chemin de ronde)976.
des hourds de l’enceinte, on n’utilise ni torchis ni tuiles On relève également plusieurs fixations métalliques :
pour l’isolation et la couverture, mais seulement fuelhas et 1200 clous (latadors, compte tenu de leur nombre ?977), des
latas (infra). La palissade de l’Estrade possède également chevilles en fer (cavillas de fer) pour la palissade de la
une guette ou gaytil (au-dessus du hourd ? (infra) ; guérite porte Montdebo978, celle derrière le château979 et celle du
à même le sol ?). Il requiert l’emploi de 4 l. de chevilles, Terrier (45 l. au total, env. 18 kg)980. Or, ces chevilles sont
trois soliveaux, et trois brasses de voliges pour la couver- aussi employées pour la fixation des hourds de l’en-
ture968. ceinte981… Avaient-elles ici la même destination ?

959
Ibid., 29 mai 1360, [f°67 v°5].
960
Ibid., 1361, [f°76 r°8]. « …in tortissando dictum palum G. Johannis, Petrus Lamberti qui precio facto dictum torticium operati fuerunt… ».
961
Ibid., 11 décembre 1361, [f°100 r°10].
962
Ibid., [f°88 v°1]. « Item Stephano Ramnos, P. Bertrandi qui die presenti fuerunt ad tortissandum palem castri… » ; [f°90 v°3].
963
Ibid., 4E76/CC49, [f°24 v°2], [f°26 r°4], [f°26 r°6].
964
AD Aude, 4E76/CC49, 27 mai 1363, [f°23 v°7]. « ...Ramundo Jacobi, Ramundo Gauberti, fusteriis qui steterunt pro faciendo aleyas in palo de la
Strada... ».
965
Mistral 1878, vol. 1, 67. Aleio, aleo.
966
Lévy 1909, 15. En Haut-Dauphiné, le terme équivalent serait celui d’« allour » ou « alour » (Nicolas 2005, 304). Au château de Lille, on note la
présence d’allees, « terme qui recouvre non seulement le chemin de ronde couronnant l’édifice, mais aussi les galeries voûtées ménagées sur deux
niveaux à l’intérieur des courtines » (Blieck 1999, 308).
967
AD Aude, 4E76/CC48, 6 avril 1361, [f°51 r°3]. « …an Peyre Saulo per 3 postz de avet que foro mezas al amban del pal detras mastre B. Servit…» ;
ibid., 12 septembre 1361, [f°90 r°6]. « …Guillelmo Guanga, Guillelmo Arnaudi fusteriis qui per duos dies operaverunt in embans palis porte
Mondebonis...».
968
Ibid., 20 décembre 1361, [f°109 r°1]. « …pro quatuor libris cavilharum et tribus quartonibus quos recepit en Lauras ad opus guacilli palis
Astrate… » ; [f°109 r°3]. « Item pro tribus brachiatis de fuelha receptis ad opus dicti palis... ».
969
Ibid., 1360, [f°70 r°10]. « …an Jacmes Arsey per 18 cabiros de 20 palms e 16 travatels de cor e d’avet que foro mezes a l’obra del pal del Terier… ».
Ces deux essences sont également employées à la fin du Moyen Âge dans le Jura, au château d’Orgelet (Gresser 2003, 100).
970
« Redon : pièce de bois non équarrie » (Bernardi 1995, 458) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°70 v°1]. « …an Ysarn Paythelayre per 2 saumadas
de cabiros redons cascu de 18 palms obs de la dita obra del pal… ».
971
Ibid., [f°70 v°10]. « …al comandayre de Sant Antoni per 6 cabiros redons cascu de 20 palms e per 24 cabiros redons cascu de 30 palms e per
2 pernas d’avet cascuna de 6 brassas e per d’autra fusta […] la qual fusta fo meza al pal del Terier ». Plusieurs commanderies répondant au nom de
Saint-Antoine existent dans l’Aude sur les communes de Carcassonne, Limoux, et Montréal (Sabarthès 1912, 368, 369).
972
Ibid., 2 juin 1360, [f°68 r°4]. « Item le dit dia fero pagar an P. Sauri per 2 cabiros de 24 palms cascu que foro mezes al pal detras dona Feriera… ».
973
Ibid., [f°50 r°1]. « …an Ramon Bergonho e an Ar. Saurat boscatiers per 19 travatels les 12 de 28 palms els 7 de 3 canas cascu que lor foro prezes
as obs de las palissas e dels gaytils de la clausura de la vila… ».
974
Ibid., 1362 ?, [f°111 r°1]. « …pro 65 peciis fuste easdem receptas ad opus dicti palis… ».
975
Ibid., [f°110 r°4]. « Item aliis quatuor faxeriis qui portavant decem pecias fuste de porta Mondebonis ad dictum pale… ».
976
D’ailleurs, les matériaux provenant de la destruction de la palissade de l’Estrade peuvent être réutilisés sur l’enceinte pour la construction de hourds :
Ibid., 4E76/CC49, [f°185 r°5]. « ...pro diruendo palum de Strada ad opus construendi et hedifficandi ambanamentum… ».
977
Ibid., 4E76/CC48, 19 mai 1360, [f°66 v°1]. « ...per 1200 clavels as obs del dit pal… ».
978
Ibid., 1361, [f°103 v°10].
979
Ibid., 1361-1362, [f°103 v°4], [f°104 r°13], [f°104 r°15].
980
Ibid., 30 mai 1360, [f°67 v°11].
981
Ibid., 25 février 1361, [f°76 v°3]. « … una libra et media cavillarum a B. Goza pro firmando dictum ambanamentum… ».

123
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

8.2.5.2 - De l’utilisation des fuelhas et des latas Ces clous, également dénommés « plancadors » à
Deux autres éléments (fuelhas, latas) apparaissent dans Rodez, sont « analogues à nos pointes et s’appliquaient aux
les dépenses concernant les pals. Les premières (voliges) planches et au lattis » (Bousquet 1926, 79, note 5). Ainsi
se retrouvent fréquemment pour les hourds et les échau- arrimées, les latas remplissaient un rôle de protection
guettes (infra)982 À l’inverse des poutres, solives et contre les éléments naturels (pluie, vent) et les projectiles.
chevrons, elles ne sont pas prédécoupées983 et s’achètent Cette opération fait partie des « finitions » apportées à
généralement par brassées984. Lorsque la destination de ces la palissade, car elle est souvent réalisée avant (ou après) la
fuelhas ou folias est indiquée, elle est systématiquement en pose du torchis, comme par exemple pour un pal près de la
rapport avec les hourds985. porte Montdebo990 qui nécessite 385 clous991. Une fois
Quant aux latas ou lattes (longue pièce de charpente en encore, la fixation des latas est dévolue aux charpentiers992.
bois, mince, étroite, et plate), il s’agit généralement d’une Enfin, en cas de destruction volontaire d’une palissade,
« planche d’environ cinq centimètres de largeur, employée comme par exemple au port de l’Estrade en 1364), on
dans les plafonds, dans les couvertures, dans les treillages » prend soin de récupérer le maximum de matériaux afin de
(Pérouse de Montclos 1995, 138). Toutefois, hormis les les réutiliser ultérieurement993.
quantités achetées (en fagots ou fays)986, on ne sait rien des
dimensions de ces latas. Elles couvraient probablement les
planchers (hourds et aleya), et servaient peut-être égale- Ainsi, et pour conclure, la structure du pal est assez
ment de planches de garde contre les projectiles. clairement matérialisable mais les dimensions générales de
L’acception « baguette ou branche de saule »987, qui siérait l’ouvrage font défaut, même si elles étaient certainement
davantage à une utilisation comme support de torchis, ne inférieures (trois à quatre mètres, hourd compris ?) à celles
paraît pas opportune ici, les textes distinguant clairement de l’enceinte urbaine (huit à dix mètres ?), qui devait
« sparonar » et « latar »988. nécessairement la commander.
Existe-t-il cependant une réelle distinction physique ou Des renforts de bois maintenaient éventuellement cette
dimensionnelle entre les latas et folias, ou s’agit-il du structure du côté intérieur de la place, ou bien une levée de
même matériau qui change de nom selon sa destination terre était établie à ce niveau, de manière à renforcer l’en-
dans la construction ? semble. Nous ne savons rien par ailleurs du système
d’accès aux superstructures (échelles ? escaliers ? plans
Habituellement, « les tuiles sont fixées sur un lattis, les inclinés994 ?).
ardoises sur un voligeage » (Pérouse de Montclos 1995, Cette palissade pouvait en définitive avoir plusieurs
167), mais en l’espèce, rien ne permet de penser que les fonctions défensives : avec les hourds de l’enceinte, elle
hourds de ces palissades étaient couverts avec autre chose constituait une seconde ligne de tir, à mi-hauteur, puisque
que des planchettes de bois… la muraille ne possédait apparemment pas d’archères
Ces latas devaient donc ressembler à de petites lattes percées dans son parement ; elle empêchait un ennemi
fixées au moyen de clous latadors, utilisés en très grand ayant réussi à franchir le fossé de pouvoir accéder au
nombre : ainsi, entre le 3 et le 16 juin 1360, pour les sommet de l’escarpe de manière à entamer une échelade ou
travaux du pal « derrière chez dona Ferreria », pas moins une sape de l’enceinte ; elle pouvait protéger les défenseurs
de 2759 fixations de ce type sont achetées auprès de divers circulant à la base extérieure de l’enceinte pour les néces-
fournisseurs989. sités de la défense ou pour tenter d’effectuer une sortie.

982
« Folia, folha, fuelha : planche, volige, planche mince » (Lévy 1909, 192).
983
Il en est de même ailleurs avec les bardeaux : « seuls les bardeaux des toitures sont à recouper quoique l’on donne parfois un gabarit aux destraliers
pour qu’ils les réalisent, dans les bois, à la longueur voulue » (Kersuzan 2005, 345).
984
AD Aude, 4E76/CC48, [f°5 v°6]. « …pro quatuor brachiatis folie ab ipso receptis pro operibus clausurarum… ».
985
Ibid., 12 septembre 1361, [f°90 r°7]. « …qui portaverunt fuelham de domo magistri Bernardi de Podio in dicto opere… ».
986
Ibid., [f°71 r°5]. «…per 6 fayses de lata que foro mezes al pal del Terier… ».
987
« Lata : pièce de bois refendue mince, baguette, branche de saule, poutrelle ; latar : latter. Garnir de lattes. Planchéier un toit ». (Alibert 1966, 461).
Pour H. Bousquet, les latas sont « vraisemblablement des planches reposant sur les chevrons du toit et auxquelles on agrafait les tuiles au moyen de
chevilles en bois » (Bousquet 1926, 78, note 1).
988
AD Aude, 4E76/CC48, 20 décembre 1361, [f°110 v°6]. « …ad latandum et sparonandum palem retro castrum… ».
989
Ibid., 3 juin 1360, [f°68 r°9]. « …per mil clavels a latar le pal detras dona Feriera… » ; 16 juin 1360, [f°69 v°1]. « …per 609 clavels latadors obs
de latar le pal detras dona Ferieyra… » ; [f°69 v°2]. « …per 250 clavels latadors que foro mezes obs de la dita obra… » ; [f°69 v°3]. « …per
900 clavels latadors obs de la dita obra… ».
990
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°76 r°6]. « ...quod palum juxta portam porte Montis Lebonis de retro hospicium Bernardi Ricardi tortissaretur et
fecerunt eum latare...».
991
Ibid., [f°76 r°7]. « Item pro 385 clavis cum quibus fuit latatum dictum palum fuerunt empti a magistro Bernardo de Podio…».
992
Ibid., mars 1362, [f°110 v°6]. « Item Johanni Martini qui per quatuor dies fuerat ad latandum et sparonandum palem retro castrum…». Jean Martin
est effectivement charpentier comme le prouve une mention antérieure (Ibid., 15 février 1360, [f°28 r°5].
993
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°187 v°3]. « …qui stetit ad colligendum clavellos et cavillas ferri de palo Strade que dirruebatur et ad recolligendum
latas… ».
994
Ce pal pourrait se rapprocher de certaines défenses de Rouen à la fin du Moyen Âge. Dans cette ville, « on se déplaçait autour des fortifications de
guérite en guérite, sur des allées de bois appelés aussi planché de soliau, et pour protéger ceux qui circulaient dessus, on installait des rampes de bois
appelées liches ou licheis. Ces alees qui servaient donc en quelque sorte de chemin de ronde étaient installées par les charpentiers. Le principe en était
très simple et pratiquement identique à celui des échafaudages puisqu’il consistait à mettre en terre, à intervalles réguliers, des poteaux solidement
étayés ainsi que des apuyes sur lesquelles des claies étaient clouées ou attachées avec des cordages » (Lardin 1999, 188).

124
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

Ailleurs, comme à Albi, le pal ou palenc est « une palis- en 13571002, mais les opérations sur ces structures apparais-
sade de pieux armés de pointes en fer et de poutres serrées sent seulement dans les comptes en 1360-1361. Jusqu’à la
les unes contre les autres » (Grimal 1935, 18), fait confirmé fin de la guerre de Cent Ans, les hourds sont très régulière-
par l’examen des comptes995 : il a parfois besoin d’être ment cités, puisqu’en tant que superstructure exposée aux
réparé lorsque l’enceinte (par défaut d’entretien ?), s’ef- intempéries (et notamment au vent), ils nécessitent un
fondre dessus996. À Toulouse, une palissade est aussi entretien constant.
mentionnée en 1417 : un homme doit faire une palissa sur Comme on le verra cependant, la distinction entre cette
« l’allée » (ananera) de Saint-Cyprien et réparer celle située construction en surplomb extérieur et la coursière inté-
devant les abattoirs (simple obstacle composé de pieux ou rieure (corseria, aleya) n’est pas des plus aisée, et le
système plus complexe comme à Castelnaudary997 ?). vocable « amban » a quelquefois pu servir à désigner l’en-
semble de ces systèmes de défense et de circulation1003.
8.3 - Les hourds de l’enceinte : ambans, enbans, envans
Ce hourd se compose de plusieurs éléments : une arma-
Pour E. Viollet-le-Duc, le hourt, hour, ourdeys, gourt, ture charpentée solidarisée par des fixations en fer, des
est « un échafaud ferme de planches ; appliqué à l’archi- ouvertures pour le tir et/ou l’observation, un remplissage
tecture militaire, c’est un ouvrage de bois, dressé au de torchis, et enfin une couverture (voliges et tuiles).
sommet des courtines ou des tours, destiné à recevoir des
défenseurs, surplombant le pied de la maçonnerie et 8.3.1 - L’armature du hourd
donnant un flanquement plus étendu, une saillie très favo-
rable à la défense » (Viollet-le-Duc s. d., vol. 6, 123). Cette ossature charpentée est dotée de diverses pièces,
Comme on vient de le voir, des hourds existaient au qui, pour certaines, ont déjà été signalées dans d’autres
sommet du pal, mais les constructions les plus complexes constructions. Il faut distinguer l’armature principale
sont établies au sommet de cette dernière ainsi qu’au faîte proprement dite, c’est-à-dire les pièces de bois de section
des tours et des tours-portes (fig. 35). Dans tous les cas, ces importante (poutres, solives), des éléments de moindre
galeries sont installées à demeure, et non en cas de siège ou épaisseur dont l’emploi était différent (chevrons, planches,
pannes ?).
d’attaque : cette structure élaborée requiert de nombreux
soins, car il s’agit du niveau unique de défense de l’en- 8.3.1.1 - Poutres et solives
ceinte de terre massive qui -du moins d’après les sources-
ne possède pas d’ouvertures de tir dans son parement998. Ces pièces de forte section sont désignées sous
plusieurs appellations : certaines, comme les pecias fuster,
Toute la défense est ainsi concentrée au sommet des ont déjà été mises en évidence pour les barrieras ou les
courtines et au niveau du hourd du pal, quelques mètres pals ; dans le premier cas, il devait s’agir de soliveaux ou
plus bas, établissant ainsi deux lignes de tir superposées de poutres cloués horizontalement du côté intérieur de la
pour les arbalétriers. Des rondes de nuit pour la palissade pour solidariser les pieux entre eux. Dans le
surveillance des abords extérieurs de l’enceinte y sont second, elles devaient être utilisées pour les hourds de la
également effectuées999, particulièrement lorsque l’ennemi palissade avancée, d’où leur présence pour ceux de l’en-
est proche et menaçant1000. ceinte.
À Castelnaudary, ce hourd est fixé au parapet d’un Cependant, comme pour les palissades, leurs dimen-
chemin de ronde en pierre situé au sommet de la paret de sions ne sont jamais précisées1004, et leur place dans l’arma-
terre massive. Les textes le nomment la plupart du temps ture générale est donc de ce fait difficile à établir. Il s’agis-
« amban »1001, « envan », ou « emban ». Quelques rares sait peut-être de petites poutres (poteau, longrine1005,
mentions de hourds sont citées dans le registre de la taille moise1006 ou chevron de toit).

995
Vidal 1906, 112, 1368-1369. « Johan Barrau per 3 cartayros de fer a far las ponchas al pal que fon plantat al pe de la tor » ; « poncha : pointe,
morceau coupé en pointe, clou de fer » (Alibert 1966, 557).
996
Vidal 1911, 48, 1381-1382, [f°80 r°]. 814. « A XX de mars, a Ramon Marens per un jornal que estec per adobar lo palenc, quant fo casech lo mur
de la Teula… ».
997
AC Toulouse, CC2322, pièce n° 66, 26 mars 1417. « …a mossenhor Ramonet de PuegBusca […] per far la palissa que es sus l’ananera de Sant
Subra e per reparar la antiqua palissa que es devant los afachamens de Sant Subra… ».
998
Cependant, certaines maçonneries de terre crue possèdent des ouvertures de tir : à Sainte-Christie d’Armagnac (Gers), la maison forte, datable au
plus tard du XVIe siècle, et bâtie avec des murs de terre massive, possède des dispositifs de tir percés a posteriori dans les courtines (information
aimablement communiquée par A. Klein).
999
AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°42 r°3]. « ...pro 16 candelas de cen las quals foro despendudas a far le gayt la nueyt sus las enbans… ».
1000
Ibid., 4E76/CC77, 1442, [f°29 r°5]. « …per 8 l. candelas de seu per far le reyregayt dels enbans e a la plasa a causa dels rotiers que eran sus le
pais… ».
1001
Vidal 1911, 244 (amvan).
1002
AD Aude, 4E76/CC3, 1357, [f°51 v°4], [f°19 v°10].
1003
Ailleurs, le hourd apparaît également comme solidaire de la coursière (« la toiture des hourds se prolonge en deçà du parapet maçonné et couvre le
chemin de ronde en s’appuyant sur l’extrémité interne des furons pour former ce que les comptes appellent des coursières » ; Kersuzan 2005, 221).
1004
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°74 v°2]. « ...pro 30 pecias fusteris emptari ab ipso quas fuerunt positas in ambanamento de retro hospicium Petri
Constanti et in barreria extra portam Mondebonis… » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°56 v°5]. « ...pro portando 16 pecias fuste de pariete de la Strada
ad ambanamenta retro juponerium… ». ; Ibid., [f°57 v°6]. « …pro portando octo pecias fuste de tenerio ad ambanamenta retro juponerium Ramundo
Artigua… ». Le terme « tenerio » (de l’occitan « tenor » ? valeur) désignerait un bois coûteux.
1005
« Pièce horizontale reposant sur plusieurs points d’appui et répartissant une charge sur ceux-ci. Cette pièce se définit donc par sa fonction et non
par sa destination particulière à une place précise d’un ouvrage de charpente » (Pérouse de Montclos 1995, 143).
1006
« Couple de deux pièces jumelées, enserrant plusieurs autres pièces » (Ibid., 144).

125
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Cette dénomination se rapprocherait du mot Le bois utilisé, de très bonne qualité1016, démontre l’im-
« fustalha », lui aussi très rarement employé1007. Selon portance accordée à cet élément du hourd ; de plus, les
Ph. Bernardi, il s’agit d’un « terme générique pouvant dési- longueurs relevées (16 et 28 palmes) laissent penser que
gner l’ensemble des pièces de bois utilisées dans une dans certains cas on utilise une solive d’environ deux
construction (planches, poutres, étais, échafauds) mais mètres de saillie du côté externe, mais que dans d’autres on
généralement réservé aux seuls bois de charpente » choisit une solive traversante servant à la fois de plancher
(Bernardi 1995, 448). Pour L. Alibert, « fustalha » désigne au hourd et à la coursière (et donnant également une saillie
généralement une « boiserie, un bois de charpente, ou une d’environ deux mètres des deux côtés de l’enceinte)1017. De
futaille » (Alibert 1966, 413) alors qu’à Albi il aurait plutôt plus, ces travatels pouvaient être soutenus par une équerre
comme sens « débris de bois » (Vidal 1911, 257). (lien/potelet ? aisselier ?) chargée de soulager le porte-à-
À Castelnaudary, peu d’éléments permettent de tran- faux1018.
cher la question, mais la définition de Ph. Bernardi paraît la
plus adéquate. Dans un cas seulement, fustalha a plus Cette observation rejoindrait celle d’E. Viollet-le-Duc
précisément servi à désigner des bois entrant dans la pour lequel « les hourds avaient rarement plus de 1,95 m de
composition de la structure pour le torchis (corondas, saillie (une toise) » (Viollet-le-Duc s. d., vol. 6, 128). Ainsi,
riostas, solas, sparos) mais on ne sait en l’occurrence si « pendant le XIIIe siècle, on simplifia encore le système des
cette fustalha est destinée aux hourds, aux coursières, ou à hourdages en charpente au sommet des remparts. On
d’autres éléments en torchis de l’enceinte (gaytils ?)1008. renonça aux trous doubles, on se contenta d’un seul rang de
D’autres termes apparaissent, comme celui de larges trous carrés (0,30 x 0,30 m environ) percés au niveau
« travatel » (« sorte de poutre » : Lévy 1909, 370), dérivé des chemins de ronde ; et, en effet, une pièce de bois de
du latin trabs, trabis (poutre). Ses autres acceptions chêne de 0,30 m d’équarrissage, fut-elle de trois mètres en
(« poutrelle », « solive »1009, « chevron », « entrait »)1010 ne bascule, peut porter un poids énorme » (Ibid.).
facilitent pas dans l’absolu son identification, car il sert On relève également l’achat de fustes (de fust ou
aussi bien pour la toiture que pour le plancher. On le fusta ?), vocable désignant tout type de bois (mais vrai-
rencontre la plupart du temps dans des quantités limitées : semblablement des poutres, chevrons, ou solives) dont
un travatel de 16 palmes (env. 3,60 m) en 1361 pour le l’emploi est parfois précisé : c’est par exemple le cas pour
hourd « derrière chez maître Pierre de Villevieille »1011, six cinq « chevrons », chacun d’une longueur de 24 palmes
élément de même longueur pour les hourds des parets (env. 5,30 m), et destinés « ad opus textanarum dictorum
« derrière chez G. Olric »1012. Un autre élément atteint embanorum »1019. Le mot « texta » peut être rapproché de
cependant 28 palmes (env. 6,20 m)1013.
« testa » (« tête, un sommet, ou une extrémité » (Alibert
Par ailleurs, certains travatels constituent l’armature 1966, 659) et peut-être de « testeria, testiera » ou
basse principale de l’amban en pénétrant dans les trous de « testière »1020. Ces cinq bois ont donc pu servir comme
hourds percés dans les merlons1014. chevrons-supports pour des gouttières. D’autres éléments,
Peu de temps après, on achemine 46 travatels de chêne de moindres longueurs (13, 16, 18 palmes, soit environ
depuis la tour ronde de Saint-Antoine jusqu’aux hourds de 2,8 m, 3,5 m, et 4 m)1021, étaient peut-être des sablières
la Baffe, dépense que l’on est tenté de relier aux travaux (solas) reposant sur les travatels, comme les quatre bois de
précédents1015. charpente achetés aux Carmes le 5 juillet 13611022.

1007
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°3]. « ...pro quadam quantitate fustalhe que fuit empta ab eodem et posita tam in reparatione cadafalcorum
quod ambanamentorum… ».
1008
Ibid., [f°76 r°1]. « ...pro quadam quantitate fustalhe et latarum positarum in torticiis clausure portus Astrate… ».
1009
Cayla 1964, 692. « Le plancher sera travatelat » (Castelnaudary, fonds Fongarnaud, 1578) ; « Travatela : solive » (Alibert 1966, 673) ; les solives
sont « les pièces horizontales d’un plancher posées à distance régulière les unes des autres, sur lesquelles on établit l’aire du parquet, du carrelage, etc.
» (Pérouse de Montclos 1995, 141).
1010
Alibert 1966, 673. Un entrait est une « pièce maîtresse horizontale de gros équarrissage, perpendiculaire aux solives et soulageant celles-ci »
(Pérouse de Montclos 1995, 141).
1011
AD Aude, 4E76/CC48, [f°98 v°7]. « …pro uno travatello 16 palmorum […] positis in embannis retro magistrum Petrum de Villaveteri… ».
1012
Ibid., 1361, [f°115 v°2]. « Item Johanni Tocabonis pro sex travatellis quemlibet sexdecim palmorum… ».
1013
Ibid., [f°115 v°3]. « Item pro uno travatello viginti octo palmorum... ».
1014
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°63 r°4]. « …per 3 dias que avia stat a esclapar peyra e affar les traucx dels dentels dels embans de la Baffa per so
quels travatels aqui poguesson metre… ».
1015
Ibid., 1366, [f°64 r°2]. « …per portar 46 travatels de cor de la tor redonda de Sant Anthoni a l’obra dels embans de la Baffa… ».
1016
On sait en effet que « le chêne est, en principe, le bois de charpente par excellence » (Bernardi 1995, 142).
1017
Comme on l’a vu en effet, l’épaisseur moyenne de la courtine au sommet était d’environ 1,50 à 1,60 m (supra).
1018
Dans d’autres régions, des corbeaux de pierres situés sur le parement externe des courtines, et dénommés bochets ou avanpes « empêchent les flexions
longitudinales des poutres et permettent ainsi d’augmenter la largeur des galeries tout en leur donnant une plus grande stabilité » (Kersuzan 2005, 221).
1019
AD Aude, 4E76/CC48, décembre 1361, [f°115 v°4]. « …pro quinque fustibus quemlibet viginti quatuor palmorum ad opus textanarum dictorum
embanorum… ».
1020
« Elément d’une charpente ou une pièce de bois placée entre deux arcs-boutants pour soutenir les conduits d’évacuation des eaux de pluie » (Cayla
1964, 678).
1021
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°111 r°9]. « ...pro septem fustibus quorum quatro sunt 18 palmorum et tres 13 palmorum receptis ad opus
embanorum... » ; [f°115 v°6]. « ...pro quatuor fustibus quemlibet 16 palmorum…».
1022
Ibid., [f°130 r°4]. « ...pro quatuor fustibus pro solis in embannis… ».

126
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

De la fusta est également aquise pour faire des équarris ?), étaient fixées perpendiculairement sur les
« ruestas » sur les hourds du quartier de l’Estrade1023. Ce travatels pour accueillir les lattes du plancher. Ces soli-
terme désigne des « planches réunies par deux traverses veaux ou cartos ne sont mentionnés qu’à une seule reprise
qu’on place sur les roues d’un char pour empêcher le frot- dans le premier compte1034 ; ils étaient donc peut-être
tement du foin » (Alibert 1966, 616), définition indentique dénommés par des termes généraux (pecias fuster, fusta), à
à l’une des acceptions données pour « riosta » (Alibert moins d’estimer que les travatels, suffisamment nombreux
1966, 610). Ces ruestas nécessitent quelquefois de retailler et rapprochés, pouvaient se passer de soliveaux, comme
le parapet en pierre pour être installé (s’agit-il d’ancrer des c’est le cas pour la maison-forte de Juilles (Gers,
aisseliers pour soulager le travatel supportant le plan- XVIe siècle ; Casel, Colzani et al. 2000, 40).
cher ?)1024.
8.3.1.2 - Chevrons et planches…
Les lieux d’approvisionnement varient selon que le bois
Si dans certains cas « travatel » a pu désigner un
est neuf ou a déjà servi : dans le premier cas, en 1366, la « entrait » ou un « chevron », ce dernier est plutôt appelé
fusta est achetée auprès de forestiers de Cabra Mortua1025 « cabiro » dans les comptes chauriens. Le chevron est
(fig. 6). La plupart du temps cependant, la ville se contente « une pièce oblique d’un versant de toit, incliné dans le
d’acquérir du bois cédé par un habitant1026 ou provenant de même sens que l’arbalétrier, posée sur les pannes et portant
fermes ou de maisons (ruinées ou en cours de destruction la couverture » (Pérouse de Montclos 1995, 143) : dans le
?)1027. Il peut aussi être récupéré sur des hourds tombés à cadre d’une construction partiellement en torchis, comme
terre1028, sur les échafaudages d’un mur1029, ou enfin sur c’est le cas des hourds chauriens, il devait afficher un
d’autres constructions fortifiées1030 : dans ces cas, le coût est débord extérieur de plusieurs dizaines de centimètres afin
moindre, compte tenu de la quasi-absence de transport. Ce de protéger le colombage des intempéries1035. Ces chevrons
dernier s’effectue généralement grâce à deux mules étaient donc installés sur la toiture du hourd et servaient de
(couplées de front ?)1031, ou par l’intermédiaire d’un porte- support aux folias ou fuelhas (voliges). Les quantités
faix1032. La fusta est ensuite hissée depuis les hourds grâce commandées sont quelquefois assez importantes1036, et
à un engin dénommé « tour de pied »1033. leurs formes étaient certainement parallélépipédiques1037 ; à
Enfin, appuyées à l’extrémité des travatels, des solas une seule reprise cependant, on mentionne l’achat de
devaient servir de base-support aux cledas du torchis quinze chevrons « ronds » (non équarris) dont l’utilisation
(infra), alors que d’autres solives plus petites (soliveaux n’est pas précisée1038.

1023
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°24 v°2]. «...pro fusta ab ipsa recepta pro faciendo ruestas in ambanamento Astrate… ».
1024
AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°26 r°3]. « …ad trancandum murum pro ponendo ruestas enbani portus Narbonesii… ».
1025
Chèvre-Morte : forêt à la limite du Tarn et de l’Aude, sur les communes des Cammazes et de Saissac, à environ 16 km à vol d’oiseau au nord-est
de Castelnaudary. Elle dépendait de l’abbaye de Villelongue (Sabarthès 1912, 89) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°66 v°4]. « …an P. Carcanier, R..
Bergonho forastres de la forest de Cabra Mortua per una quantitat de fusta que lor fo comprada laqual fusta fo per els portada laqual fo meza als
embans de la Baffa e dels Frayres Menors e a d’autres obratges de la vila… ».
1026
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°24 v°2]. « Item solvit Johanne uxor Johannis Seguini pro fusta ab ipsa recepta pro faciendo ruestas in ambanamento
Astrate…».
1027
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°99 v°5]. « …ad carejandum fustam tegulos domus Johannis Olricii in embans… » ; Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°47
v°4]. « …et dictas fustas ibi apportando de ante bordam Andrei Guisalfredi usque ad dictam portam Mondebonis… » ; Ibid., 4E76/CC73, 1431, [f°4
v°4]. « …a corondar l’enban de la paret nova tras la scola e hi meson cabiros lata e teule de la fusta e del teule de l’ostal den Vidal… ».
1028
Ibid., 4E76/CC55, 1377, [f°54 r°6]. « …a trayre fusta et teule de la cava del castel dels enbans que eran casut…».
1029
Ibid., 4E76/CC65, 1410, [f°23 v°1]. « …que deffero las stagias del mur de la porta de Mondebo e metero la fusta naut als embans… ».
1030
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°185 r°5]. « ...pro diruendo palum de Strada ad opus construendi et hedifficandi ambanamentum… ».
1031
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°99 v°5]. « ...duarum mularum ad carejandum fustam […] in embans… ».
1032
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°20 v°4]. « …an Stene Baran, fayshier, lequal portet 3 caretadas de fusta nova laqual era a la porta de Sant Anthoni e
fo portada als embans de la Baffa… ».
1033
Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°47 v°4]. « …et pro assendendo fustam cum quodam turno de pede muris super dictum ambanamentum… ». S’agit-il
d’un engin à cage d’écureuil ? Cette machine de levage est attestée dans l’iconographie médiévale, notamment pour les représentations de la construc-
tion de la tour de Babel (Baud et al. 1996, 37, fig. 18 ; 85, fig. 59 ; 88, fig. 63). À Aix, « plusieurs engins (ingenia, enghiens…) sont mentionnés dans
les texes » (Bernardi 1995, 211). Cependant, en Dauphiné, « comme seuls engins de levage, des systèmes de poulies et de cordes appelés fauconneaux
sont employés pour monter les matériaux les plus encombrants lors de la construction du palais delphinal d’Embrun » ; ADI, 8B624, [f°123 v°], 1340
(1334) Embrun : « Item pro tribus trabibus positis in falconibus qui elevaverunt mayeriam grossam… » (Nicolas 2005, 167, texte et note 30). En Bresse
et en Bugey, « les comptes sont peu explicites à propos des systèmes et des engins de levage. Ils n’en font aucune description et ce n’est qu’à l’occa-
sion des achats de cordes et du paiement des salaires des charpentiers qui les construisent que l’on en a quelques mentions » (Kersuzan 2005, 353).
1034
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°1]. « …pro 7 cartonibus […] pro ponendo in reparatione cadafalcorum et ambanamenti facti de torticio… ».
Ils serviraient dans ce cas là de solive, c’est-à-dire de « pièces horizontales d’un plancher posées à distances régulières les unes des autres, sur lesquelles
on établit l’aire du parquet, du carrelage, etc. » (Pérouse de Montclos 1995, 141).
1035
C’est le cas par exemple sur la grange cistercienne de Juilles (Gers), datée du XVIe siècle (Casel, Colzani et al. 2000 , 40) mais également sur la
maison-forte de Sainte-Christie d’Armagnac (Gers), datée des XVIe-XVIIe siècles (Klein 2003, 431, fig. 23). Généralement, ce débord est compris entre
0,40 et 0,50 m (information aimablement communiquée par A. Klein).
1036
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°116 r°3]. « Item Audiardi uxori Ramundi Bernardi pro triginta sex cabironibus emptis ad opus dictorum
embanorum…».
1037
À Aix, « le chevron se présente, en principe comme une poutrelle non équarrie. Sa section est précisée à plusieurs reprises. Il s’agit de 6 doigts sur
4 (probablement 0,12 m sur 0,08 m), en 1533 […] La longueur s’avère quant à elle fort variable. Elle peut atteindre jusqu’à trois cannes ? (env. 7 m).
Pour le confectionner, on utilise du pin, du « sap », ou du mélèze » (Bernardi 1995, 302).
1038
AD Aude, 1361, [f°115 v°10]. « …pro quindecim cabironibus retondis ad opus dictorum embanorum… ».

127
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Leurs dimensions oscillent généralement entre coursières de la ville1051. La fenestra tout d’abord, peut être
17 palmes (env. 3,8 m)1039 et 20 palmes (env. 4,46 m)1040, une « baie, fenêtre, trappe, niche, ou menuiserie de baie »
longueur courante pour ce genre d’éléments dont le trans- (Bernardi 1995, 447), mais a généralement le sens de
port est parfois dévolu à des porte-faix1041. Le verbe « cabi- « fenêtre » à Castelnaudary. Elles devaient en effet être
ronar » désigne l’action de « poser les chevrons »1042. indispensables, à la fois pour apporter un peu de lumière,
Quant aux planches (post), elles sont encore plus rare- mais également comme points d’observation des abords de
ment citées : souvent en bois de sapin, on ne sait jamais l’enceinte et fentes de tir pour les arbalétriers.
clairement quel est leur usage1043. À Toulouse par contre, À la différence de hourds entièrement en bois, dans
lors de mesures de défense prises par les consuls à l’ap- lesquels on pouvait pratiquer des orifices dans les madriers
proche du comte de Foix, au début de l’année 1419, on de garde, les hourds chauriens, dont la cloison externe était
prévoit de faire « hun enbanament de post a Posanvila »1044. en torchis, devaient prévoir, dès l’édification de la struc-
Les charpentiers étaient logiquement chargés de la mise ture, des ouvertures rectangulaires entre les corondas du
en œuvre ces éléments : tel est le cas de Bernard Embri1045 colombage. Par ailleurs, pour faire face à certaines néces-
qui apparaît souvent dans ces opérations1046, quelquefois sités (défense ? infiltrations d’eau ?), les consuls décident
avec son collègue Pierre Saurin1047. parfois de fermer des ouvertures par du torchis, comme en
En 1361 et 1363, le premier est par ailleurs titulaire de 1367 pour une fenêtre des hourds du port Narbonnais,
deux prix-faits pour la construction de hourds (portes obturée en même temps que deux autres trous1052.
Montdebo et du Barri). Il est qualifié à cette de « moli- Quant au terme « hostium », déjà rencontré à propos
nerio » (meunier), signe que son activité de charpentier des tours et des portes (supra), il pose à nouveau quelques
n’était pas exercée à temps plein1048.
difficultés : s’il a généralement le sens de « porte » ou de
Il est parfois chargé d’estimer le prix des pièces de
« porte d’entrée » (Bernardi 1995, 449), il peut également
charpente achetées pour les hourds et divers autres usages,
mais on ne sait s’il était rémunéré pour cette tâche1049. Les désigner un « volet »1053, puisque les fenêtres devaient en
charpentiers sont de temps à autre mandés par les consuls être munies pour des raisons défensives (une fois le trait
pour faire le tour de l’enceinte et des hourds afin de décoché, l’arbalétrier pouvait se mettre à couvert en refer-
constater l’avancée des travaux et déceler d’éventuelles mant le volet pour recharger son arme, puis le rouvrir pour
réparations à effectuer1050. tirer à nouveau).
Toutefois, pour désigner une porte, les registres chau-
8.3.2 - Portes, fenêtres, volets… et ponts riens emploient le terme de « porta », et pas seulement
L’existence d’ouvertures (fenêtres, portes, et probable- pour les portes de la ville1054. Dans l’absolu, leur existence
ment volets) est parfois mentionnée sur les hourds ou les au niveau des hourds pourrait être envisagée, mais les

1039
Ibid., 10 novembre 1361, [f°98 v°7]. « …pro […] unum cabironum 17 palmorum positi in embannis… ».
1040
Ibid., 1361, [f°115 v°10]. « Item domino Bernardo Fogueti pro quindecim cabironibus […] ad opus dictorum embanorum et erant 20 palmorum… ».
1041
Ibid., [f°115 v°11]. « Item Petro de Bretz et socio suo faxeriis pro portu dictorum cabironum in dicto opere ».
1042
Ibid., 4E76/CC49, 2 juin 1363, [f°30 v°2]. « ...Geraldo Miri, G. Arnaudi fusteriis qui steterunt ad cabironandum per ambanamentum parietis nove
castri… ».
1043
Ibid., 4E76/CC48, 5 juillet 1361, [f°130 r°3]. « ...pro 16 postibus abietis receptis ad opus embanorum… ».
1044
AC Toulouse, BB3, Délibérations de la ville de Toulouse, 28 novembre 1418-1er août 1421, [f°29 r°1]. « Item que hom fassa hun enbanament de
post a Posanvila on es la muralha nova ». Les hourds de planches sont représentés dans l’iconographie médiévale : « la courtine elle-même peut être
intégralement chemisée de hourds de planches, comme au tout début du XVe siècle dans le cas du château de Lusignan (Vienne), représenté dans le
calendrier des Très riches heures du duc de Berry, de même que pour le château breton de Châteaugiron, dans le troisième quart du même siècle »
(Alexandre-Bidon 2003, 28).
1045
En 1356, habitant de Castelnaudary, au « barrium infra portam » (AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°12 v°4]).
1046
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°114 v°4], [f°114 v°5].
1047
En 1356, habitant de Castelnaudary, au « barrium extra portam » (Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°3° r°10]).
1048
Ibid., 4E76/CC48, [f°117 r°6] ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°51 r°1].
1049
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°116 v°2]. « ...pro duobus fustibus ab eodem emptis ad opus dictorum embanorum [...] ad extimationem Bernardi
Embrini... ». Il se peut ainsi que cet homme ait fait partie des experts (sobrepausats) de la fustaria désignés par la ville pour « donner leur avis sur ce
que les gardes ou autres leur soumettront » (Marandet 2001, 219).
1050
AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°37 r°4]. « ...an G. Guarigua et an R. Guaubert et an Johan Tocabuon jove et an Johan Burgo et an G. Sauri fustiers
que anego per les embans per vezer e per saber que fera mestiers per reparar e per adobar las clausuras…» ; Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°13 v°5].
« …an Johan Redorta e a mastre Guilhem Sauri fusties que aneron per mandament dels senhors de cossols per tot les embans per vesitar la on avia
mesties de reparar… ». En Normandie cependant, les charpentiers sont quelquefois chargés de superviser l’ensemble des travaux de fortification
urbains : « les maîtres des œuvres de charpenterie avaient d’ailleurs une compétence assez large et on leur demandait aussi d’organiser ou de contrôler
les travaux qui ne concernaient pas seulement la charpenterie. […] Les travaux de P.-Y. Le Pogam sur les œuvres royaux ont d’ailleurs montré l’ac-
tivité multiforme de Jacques de Sotteville, fils du précédent (Jean de Sotteville, ndlr) et maître des œuvres de charpenterie de la ville de Rouen et du
roi dans le bailliage de Rouen au temps de l’occupation anglaise, puisque, comme le montre le schéma qu’il a réalisé, ce maître des œuvres intervenait
pour organiser ou certifier des travaux dans tous les secteurs du bâtiments et pas seulement dans la charpenterie ou la menuiserie » (Lardin 1999, 192).
1051
AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°154 r°2]. « ...ad atortissandum in ambanamento Portus Bordarum et ad enterrandum corserias et ad faciendum
fenestras… ».
1052
Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°26 r°5]. « …qui tortissavit fenestram et 2 traucos enbani portus Narbonesii... ». La fermeture des ouvertures pour les
nécessités de la défense est fréquente à cette époque : « dans les châteaux aussi, la condamnation des ouvertures est une opération courante, rapide-
ment mise en œuvre et, puisqu’elle est effectuée par des maçons, probablement pérenne » (Nicolas 2005, 221, 222).
1053
Hostium : porte, volet. « ostio duplicato… pro 12 ostiis fenestrarum duplicatis », Embrun, 1340 (1334), ADI, 8B624, [f°121 v°] » (Nicolas 2005, 318).
1054
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°1]. « …Petro Lauras et Ramundo Saraceni fusteriis qui dicta die steterunt pro portis et fenestris faciendis in
turi porte Valincii…».

128
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

dépenses pour la création ou la réfection de serrures les puiar sus las paretz »1064 paraît également aller dans le sens
concernant sont quasiment inexistantes1055. de cette analyse. Dans la plupart des cas, les « ponts des
Pour cette raison, le vocable « hostium » aurait généra- hourds » sont des dispositifs en bois reliant les portes
lement le sens de « volet » à Castelnaudary1056, comme situées dans la partie haute des tours et tours-portes avec
peut-être en 1360 pour un hourd devant le mercadal : la les ambans ou les coursières1065.
construction menaçant ruine, les consuls décident de faire 8.3.3 - Le torchis sur les hourds
apporter plusieurs hostia1057 et des éléments de fixation (une
livre et demi de chevilles de fer, 100 clous barradors1058). Cette technique, désormais bien connue, est également
D’autres hostia sont réalisés sur les hourds du port des employée sur les hourds de l’enceinte1066. Pour ce faire,
Bordes : cette action s’inscrit apparemment dans une suite l’ossature principale du hourd (travatels, cabiros, etc.) doit
logique (torchis, pose de corondas) laissant penser qu’il être complétée par une armature secondaire (colombage),
s’agit effectivement de volets1059. Ces derniers sont quel- selon le système classique des corondas/sparos1067. Les
quefois enlevés pour être entreposés ou réaffectés à une premières sont quelquefois achetées aux enchères1068 ou
autre utilisation1060. directement auprès de forestiers, et leurs dimensions
peuvent varier du simple au double (de 12 à 24 palmes :
Enfin, il faut maintenant aborder la question des env. 2,6 m et 5,3 m)1069.
« ponts » : dans la capitale chaurienne, leur présence au
niveau des hourds est avérée par deux dépenses de 1363 et Les sparos, pour certains en bois de saule (supra), fixés
1398 : on arrange en effet des « ponts » au port des Bordes entre les corondas et quelquefois les riostas, servent de
et « l’entrée des têtes de ponts des hourds de la Baffe et les support au torchis1070. Ces dernières sont très discrètes, à
barrières des dits ponts »1061. À Toulouse, ces constructions l’exception notable d’un transport de 20 contreventements
sont également citées au début du XVe siècle : en sapin ou courbes1071.
en chêne, elles sont situées au sommet des tours ou des Le verbe « corondar » désigne l’action de poser des
chemins de ronde des courtines (aleya)1062. corondas sur les hourds1072, « sparonar » la fixation des
Michèle Eclache assimile ces « ponts » à des passe- sparos sur la structure1073, et « tortisar » ou « atortisar »
relles permettant de faire la liaison entre la courtine et une l’application du torchis sur l’ensemble.
tour, système amovible isolant cette dernière si la ligne de Pour les ambans, une action de finition (« encau-
défense venait à être submergée par l’ennemi1063. La cinar »1074) pourrait consister à badigeonner le colombage
mention chaurienne d’« un pont al port de las Bordas per d’un enduit à la chaux : si l’on se fie à l’ordre proposé par

1055
Une seule mention a été relevée : Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°55 v°1]. « …per una clau que fo meza a la porta de la passada dels embans… ».
1056
Ailleurs, on lui préfère systématiquement celui de « porte » (Poisson 2003, 441).
1057
AD Aude, 4E76/CC48, 22 avril 1360, [f°72 r°2]. « Item eadem die cum diceretur embanamentum quod est ante mercadal fori debile et timeatur
quod de facili posset rumpi dicti domini consules ordinaverunt quod dictum ambanamentum a parte infra fortificaretur et quod hostia ibi ponerentur
et fecerunt portare hostia de domo Johanni Guisalsiedi et Germani Gauberti per quatuor colerios… ».
1058
Ibid., [f°72 r°3]. « Item pro una libra et media cavillarum feri ibidem positari…» ; [f°72 r°4]. « Item pro centum clavis emptis a magistro Bernardo
de Podio pro firmando dicta hostia cum dicto embanamento que erant baradors…».
1059
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°80 r°5]. « …et ad faciendum hostia in dicto ambanamento… ».
1060
Ibid., 4E76/CC48, 11 décembre 1361, [f°100 r°9]. « …pro portando hostia que erant remota de embans porte Mondebonis ad ecclesiam Beati
Michaelis…».
1061
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°80 r°5]. « …qui steterunt ad reparandum pontes et ad atortissandum et corundandum ambanamenta in portu
Bordarum… » ; Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°9 v°3]. « ...pro reparando intratam capitis pontis ambanamenti de Baffa et pro reparando barrerias dicti
pontis… ».
1062
AC Toulouse, CC2326, Pièces à l’appui des comptes, pièce n° 42, 1417. « …per alquus pontz de fusta de coral faytz sus alqunas tors novas que
son sus las clausuras de la vila entre la porta de Montoliu et Vila Nova…» ; CC2327. 1417-1418, pièce n° 10. « Primieyrament per far 2 ponts de fusta
sus duas tors de l’ala construidas et scituadas sus las clausuras de la vila…» ; pièce n° 16. « …per fustas per far les pons a 2 tors e al castel del Pi
que tot es entre porta Nova e la porta de Sant Estephe. » ; pièce n° 22. « Item per far lo cap pont per on hom entra de la dita tor sus l’aleya. Item per
far dos pontz de coral a las tors descubertas entra la porta de Sent Stephe e de porta Nova. Item per far un pont d’avet al castel del Pi… ».
1063
Eclache 1974, 74 ; 97, note 42.
1064
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°64 r°4]. « …per adobar un pont al port de las Bordas per puiar sus las paretz…».
1065
Ce dispositif se retrouve également sur des courtines en pierre : « cependant, l’accès d’une courtine à une tour n’est jamais direct. Seul le manteau
du mur fait la jonction avec les tours. L’épaisseur du mur sur laquelle est établi le chemin de ronde ne se colle pas à celle-ci, et laisse un large et profond
intervalle entre les deux. Pour passer, il faut emprunter un pont de planches qui est retiré en cas de danger ou un pont-levis… » (Kersuzan 2005, 224).
1066
Elle est également utilisée à Albi en 1380-1381 (Vidal 1906, 333, [f°70 r°]. 785. « …per tortissar e terrar los amvans de la paret nova de Bordas… »).
1067
AD Aude, 4E76/CC73, 1430, [f°11 r°3]. « …a sadobar l’enban que es a la Bastida sus le semeteri de Nostra Dona que eran casut les tortises els
corondat… ».
1068
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°103 v°3]. « …pro 23 corondis ab eodem emptis ad inquantum ad embanandum…».
1069
Ibid., 1361, [f°87 r°1]. « …cuidam forasterio vocato En. Doayh pro 10 corondis quelibet 14 palmorum receptas per B. Alaberti et B. Johannis et
positas in ambanis qui sunt de turre Mercadalis ad portam magistri Bertolomei… » ; [f°87 r°2]. « Item Saurato forasterio pro 5 corondis quelibet
12 palmorum, una coronde 24 palmorum, duabus corondis quelibet 17 palmorum positas in dictis ambanis...».
1070
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°115 v°1]. « Item dicto Geraldo Vitalis pro latando, sparonando, ponendo aliquas riostas, corondas que difficiebant... » ;
Ibid., 1360, [f°61 r°5]. « …per 2 quintali de sparo que foro meses per tortissar l’amban detras le moli del castel… ».
1071
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°100 v°4]. « …per portar 20 riostas corbas de la tor de la Strada als embans de Frayres Menors… ».
1072
Ibid., 4E76/CC73, 1430, [f°4 v°4]. « …a corondar l’enban de la paret nova tras la scola… ».
1073
Ibid., 4E76/CC49, 1363. [f°101 r°6]. « …pro sparonando […] tres brachiatas ambanamentorum parietis nove castri… ».
1074
Encaussina, enchaussina, encaussigna, encalzina : chauler (un mur : blanchir à la chaux), échauler, couvrir de chaux (Mistral 1878, vol. 1, 891).

129
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

le document, cette action interviendrait après la pose des gnerait ainsi l’assemblage des corondas et des sparos en
tuiles sur le hourd, c’est-à-dire en tant qu’ultime travail sur tant qu’élément indivis1082. Elle est fabriquée à l’avance et
la structure1075. hissée pour être fixée sur la galerie défensive1083.
En 1442, la ville achète à P. Baronie, entre autres Enfin, les textes se contentent la plupart du temps de
choses, « dos esparos de siber per tirar peyra e bart sus les citer des travaux de torchis sur les tours, sans précisions
enbans ». Le mot « siber » pourrait se rapprocher de géographiques : on ne sait donc jamais s’ils sont destinés
« cibergo » (« corde de jonc ou de sparte » ; Mistral 1878, aux ambans, gaytils, ou autres cloisons1084.
vol. 1, 54), mais dans ce cas on ne voit pas clairement l’as-
sociation qui peut être faite avec les sparos. Un « esparo de 8.3.4 - La couverture du hourd : folias, latas, plansons,
siber » désigne-t-il ici une corde et non pas une baguette de teules
bois, ou cette tournure de phrase signifie-t-elle que les deux À l’instar des hourds du pal (supra), ceux de l’enceinte
éléments sont liés, une baguette étant fixée à chaque extré- de la ville utilisent des folias (ou fuelhas) et des latas.
mité de la corde pour servir de moyen de préhension afin Comme on l’a vu pour le pal, il n’est pas certain que ces
de tirer les matériaux ? éléments soient réellement différents, leur nom changeant
On sait seulement que le bart est hissé depuis les peut-être selon leur destination (ils sont par ailleurs peut-
hourds1076, et que l’eau nécessaire est transportée dans des être quelquefois donnés comme équivalents)1085.
seaux1077. Les fuelhas ou folias pour la toiture sont fixées par des
Quant au foin, il n’y a pas grand chose à dire à son clous latadors, également utilisés pour clouer les latas.
sujet : les quantités, calculées par quintaux ou charges Parfois remployées1086, leur fonction première est de
(sarcinata), sont quelquefois importantes (quinze quintaux, supporter les tuiles1087. Lorsque la couverture est absente,
soit plus de 600 kg) mais restent dans une moyenne mais que le torchis est déjà en place sur le hourd, il s’avère
comprise entre 80 et 130 kg par commande1078. Il n’était pas parfois nécessaire de clouer rapidement quelques voliges,
hissé tel quel sur les hourds, car la préparation du bart se de manière à préserver la terre de la pluie1088. Elles recou-
faisait au pied de l’ouvrage, ou dans le fossé. À une seule vrent en effet la saillie (env. 0,50 m ?) opérée par le toit du
reprise (foin pour le château) on semble distinguer une hourd1089.
sorte de « gros foin » (fenas)1079. Les latas (associées au verbe latar : garnir de lattes 1090)
Un unique transport de 12 cledas destiné aux hourds servent elles aussi d’éléments de couverture1091 et peut-être
des Frères Mineurs est également à souligner1080 : ce terme de plancher pour le hourd. Les quantités sont souvent
a plusieurs définitions, mais on retiendra ici une des deux calculées par fagots1092, rarement par charges1093. Certains de
principales, à savoir celle de « claie »1081. La « cleda » dési- ces matériaux sont acquis aux enchères1094.

1075
AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°161 r°2]. « ...pro corundando, sparonando atortissando et coperiendo de tegulis et encaucinando ambanamenta… ».
1076
Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°46 v°2]. « …an P. Baronada […] per dos esparos de siber per tirar peyra e bart sus les enbans... ».
1077
Ibid., [f°47 r°8]. « …an Ponsset Baro de Caramanh per un par de semals que pres del senhor Estene Blanh manobrier per portar aygua a far le
bart per tortissar les enbans… ». « Caraman » serait soit une ferme de la commune de Montréal (Sabarthès 1912, 68), soit un gros bourg de Haute-
Garonne, à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Castelnaudary.
1078
AD Aude, 4E76/CC48, 11 avril 1362, [f°111 v°5]. « …pro 15 quintalibus feni ad opus embanorum seu tortitiorum… » ; [f°116 v°5]. « …pro duobus
quintalibus feni ad tortisandum dictis embans… » ; [f°116 v°6]. « …pro una sarcinata feni empta ad opus dictorum embanorum tortisandum ».
1079
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°29 v°1]. « …pro portando duas faxas fenasse in ambanamento castri…».
1080
AD Aude, 4E76/CC48, 28 juillet 1360, [f°76 r°5]. « …tribus coleriis qui portaverunt 12 cledas de hospicio domini de Cani in ambanamento
Fratrum Minorum… ».
1081
« Cleda, clida : claie, grille ; cledis : treillis, grillage » (Lévy 1909, 79) ; « cleda : claie, porte à claire voie, herse » (Alibert 1966, 226) ; « cleda :
mot qui désigne un treillage de branches entremêlées de pieux servant à faire clôture. Il existe encore dans le rouergat moderne avec la même signifi-
cation » (Bousquet 1926, 329, note 2) ; « cleda : 1. grille, treillis, clôture. 2. tamis » (Bernardi 1995, 442) ; « clede : grille, claie, barrière de bois »
(Cayla 1964, 164) ; « cledis : carcasse en pièces de bois destinées à être garnie de torchis » (Vidal 1911, 250) ; « Cleda, cledo : claie, barrière mouvante,
claire-voie, porte à barreaux » (Mistral 1878, vol. 1, 570) ; « claie : treillis d’osier à claire-voie. Treillage en bois ou en fer » (Robert 1982, 321).
1082
Pourrait-il être l’équivalent du vocable « trenh » utilisé à Albi (supra) ?
1083
À Rodez, l’expression « per lo portar de las cledas davan dichas » indiquerait également que ces éléments peuvent être transportés (Bousquet
1926, 330).
1084
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°29 v°4]. « ... pro [...] tortisando partem porte de Got Feran... » ; 1360-1361, [f°63 r°7]. « ...per esparonar
e per tortisar le dit gaytil e la porta de la Baffa… » ; [f°63 v°1] ; [f°95 v°6]. « …ad tortissandum portam Terrerii... » ; [f°96 r°1 à 3].
1085
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°31 v°6]. « …ad latandum seu fulhandum ambanamenta parietis nove castri… ». Comme on l’a vu, le terme seu ou
sive peut tout à la fois signifier « ou » ou bien « soit ».
1086
Ibid., [f°116 r°1]. « pro fuelha antiqua ab eodem empta ad opus dictorum embanorum…».
1087
On verra qu’une couche de terre était également présente entre ces deux matériaux.
1088
AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°8]. « …per 25 clavels latados per clavelar fuelha sus l’enban de sos la scola per so car no era recubert e la
plueia gastava le tortis ».
1089
Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°43 v°4]. « ...per una brassa de fuelha de 16 palms per far foraget al dit emban ».
1090
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°101 r°6]. « ...pro sparonando atortissando coperiendo de tegulis latando et bardando tres brachiatas ambanamentorum
parietis nove castri… ».
1091
Ibid., 4E76/CC73, 1430 [f°4 v°4]. « ...per un jorn a corondar l’enban de la paret nova tras la scola e hi meson cabiros lata e teule de la fusta e
del teule de l’ostal den Vidal…».
1092
Ibid., [f°96 r°9]. « …pro quatuor faxis late ad opus dictorum embanorum ».
1093
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°116 r°11]. « pro duabus sarcinatis late ad opus dictorum embanorum ».
1094
Ibid., [f°96 v°3]. « pro quanda quantite late empta ad inquantum publicum ad opus dictorum embanorum. ».

130
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

Des essences (chêne, peuplier1095, et peut-être châtai- mules)1104, rarement par bras1105. Les quantités commandées
gnier) sont précisées pour quelques éléments assimilables sont parfois des plus modestes (40 exemplaires1106), ou très
à des voliges : ainsi, en 1362, la ville achète 25 cannes de importantes (20001107), la moyenne se situant généralement
« plansone coris » pour des travaux sur les hourds, pièces entre 200 et 500 unités1108.
fixées et « enterrées » sur la structure le lendemain par sept
La pose des tuiles sur le hourd peut être réalisée à prix-
personnes1096. Ces mentions sont à rapprocher d’un prix-fait
fait par un couvreur (recubreyre)1109 mais également par un
de la même année dans lequel apparaît le verbe « plan-
charpentier, tel G. Roger en 13641110. La plupart du temps
conar »1097.
cependant, les comptes ne précisent pas la qualification des
« Planson » désigne un « tronc d’arbre refendu », un personnes employées1111.
« jeune arbre », voire « un jeune châtaignier » (planchon)1098.
L’association de ce terme avec les tuiles, le verbe enterrar 8.3.5 - Les fixations du hourd : clous et chevilles
(couvrir de terre ; Lévy 1909, 153), et leur dénombrement
par quantités indéterminées (comme les folias), laisserait La plupart des éléments du hourd, à l’exception du
penser qu’il s’agit de voliges (avec une destination spéciale colombage, étaient solidarisés par des fixations en fer de
sur la toiture ?). Quant au verbe (planconar), il dérive certai- deux types : les clous et les chevilles.
nement de « planca » (planche en occitan ; Alibert 1966, Pour les premiers, une série de dépenses de 1362
551), et signifierait donc tout simplement « planchéier »1099. permet de mesurer leurs quantités et leur diversité. Tous
Enfin, la couverture finale du hourd était réalisée en types confondus, 6990 clous sont utilisés pour les hourds
tuiles, vraisemblablement en tuiles canal comme c’est situés « derrière chez G. Olric », ceux du port des Bordes,
l’usage dans la région. Leur production ne semble pas et enfin ceux « derrière chez Bernard Service », fixations
locale, même si un tuilier, Guillaume Jean, réside au Barrio livrées entre le 6 octobre 1361 et le 15 février 13621112.
extra portam (futur barrium Sainte-Croix)1100, au moins dès Parmi ces éléments, il y a 1100 clous renforcés (reforsatis),
1356. De fait, ces tuiles sont récupérées sur les toitures de 2990 clous dont le type n’est pas mentionné, 2500 clous de
maisons1101, dans les fossés (suite aux dégâts du vent)1102, et « penture » (clavis de relha), et enfin 200 clous de lata. Si
éventuellement livrées par des personnes extérieures1103. ces derniers servent vraisemblablement au maintien des
Leur transport s’effectue par animal (généralement des voliges (latas, fuelhas1113), il est difficile de savoir à quoi

1095
Ibid., 1362, [f°107 bis v°5]. « ...pro novem brachiatis et media de polpet receptis per Johannem Fabri ad opus embanorum... ».
1096
Ibid., 1362, [f°109 r°6]. « Item Bernardo Raynerii forestarius pro viginti quinque cannis de plansone coris ad opus embanorum » ; [f°109 r°8].
« ...ad ponendum plansonem supra parietes et interrandum... ».
1097
Ibid., [f°117 v°1]. « ...debuit reddere tortisatis a quolibet latere reddere copertum de supra de tegulis et bardatum et planconatum supra parietes ».
1098
« Planchon : jeune châtaignier, meule de paille ; plançon, plauçon : jeune plant d’arbre, tige, poteau, gros bâton » (Alibert 1966, 552) ; « planson :
plançon, jeune arbre, lance » (Lévy 1909, 297). Le plançon est, entre autres, « un tronc d’arbre refendu » (Robert 1982, 1451).
1099
« Garnir d’un assemblage de planches » (Robert 1982, 1451).
1100
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°6 r°13].
1101
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°116 r°5]. « Item Johanni Olrici pro fustibus, fuelha, tegulis, cementis cuiusdam domus fue emptis ad opus dictorum
embanorum...» ; [f°116 r°10]. « Item G. la Caza seu eius hedibus [sic, pour heredibus] pro 700 tegulis receptis de suo locali ad opus dictorum
embanorum... ». Bien que les tuiles soient fragiles, la récupération des éléments de couverture est fréquente au Moyen Âge. Ainsi, en Normandie « nous
savons aussi qu’il était d’usage assez courant, lorsque l’on démontait pour la refaire la couverture d’un bâtiment, de récupérer pour les réemployer les
matériaux encore utilisables ; mention est faite de cette condition dans beaucoup de marchés ; en cas de démolition, d’un édifice, on trie et on conserve
les matériaux de couverture en bon état. En 1391, on recouvre la chapelle du château de Falaise avec de la tuile récupérée sur le toit de la vieille cuisine
du tinel, construction vétuste qui vient d’être démolie » (Boüard 1965, 434).
1102
AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°54 r°6]. « …a trayre fusta et teule de la cava del castel dels enbans que eran casut… » ; [f°116 v°1]. « ….pro ajus-
tando tegulum circum circa ambanamenta qui cetiderat propter fortunam ventis altani et dictum tegulum apportarunt super dictos ambanamentos et
super portas Mondebonis et Bastite… » ; Ibid., 4E76/CC57, 1389, [f°33 r°8]. « Item an Guiraut Landrinia que amasset le teule de las cavas del bari
de Dins que fec cazer le gran vent dels embans » ; [f°33 r°9]. D’autres villes connaissaient le même problème. Ainsi, sur les maisons de Dieppe, « les
parties sensibles au vent, comme le faîte et les corniers, étaient renforcés à l’aide d’un mortier de sable et de chaux, car ces couvertures devaient résister
aux tempêtes qui soufflaient violemment et fréquemment, projetant les toitures parfois jusqu’à des distances assez grandes de la côte. En 1368, le grand
vent qui souffla la veille de la Sainte-Luce emporta, paraît-il, les tuiles de certaines toitures jusqu’à Arques » (Lardin 2006, 84).
1103
AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°110 v°2]. « Et primo Guillermo Comitis de Podio Stuirano pro 230 tegulis receptis ad opus embanorum... ».
Pexiora est un village situé à 8 km à l’est de Castelnaudary ; ibid., 1361, [f°116 r°9]. « Item Petro Soguerii de Villanova pro duobus milheriis de tegulis
emptis ad opus dictorum embanorum et embanorum porte Mondebonis...». L’abbé Sabarthès donne Villanova comme désignant, entre autres, le village
de Villasavary, à 12 km au sud-est de Castelnaudary (Sabarthès, 585) ; Ibid., [f°116 v°3]. « Item cuidam homini de Manso a quo fuerunt empti
225 tegules...». Mas-Saintes-Puelles, à 6 km à l’ouest de Castelnaudary.
1104
Ibid., [f°99 v°5]. « …Geraldo Valincii pro uno jornali duarum mularum ad carejandum fustam tegulos domus Johannis Olricii in embans… ».
1105
Ibid., 1362, [f°127 r°1]. « ...qui per quatuor dies fuerant in dictis operibus tam in valle quam in portando fustam et tegulis in embannis porte
Mondebonis...».
1106
Ibid., 1361, [f°109 r°5].
1107
Ibid., [f°116 r°9].
1108
Ibid., [f°116 v°4]. « ...pro 240 tegulis ab eodem emptis ».
[f°116 v°7]. « ...pro 525 tegulis emptis ad opus dictorum embanorum de quibus major pars fuit posita in embans porte Mondebonis.. ».
1109
Ibid., 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°1]. « ...an P. de Murat recubreyre, per hun pres [...] per recubrir les enbans de la porta Mondebon tro le castel… ».
1110
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°161 r°2]. « ...G. Rogerii fusterio pro corundando, sparonando atortissando et coperiendo de tegulis et encaucinando
ambanamenta supra portam domini Bertholomei Constantini… ».
1111
Par exemple : Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°101 r°6].
1112
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°105 r°1] à [f°105 v°13].
1113
En Haut Dauphiné, les clous destinés à clouer les lattes et les planches sont dénommés « chapellus » (Nicolas 2005, 194).

131
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

sont employés les autres : les clous de relha étaient peut- pratiquement rien des formes et dimensions de ces
être destinés à la fixation des pentures des volets, mais que ouvrages1123 : s’ils se distinguent du hourd1124, les textes ne
dire des clous « renforcés » et des presque 3000 clous dont les assimilent par ailleurs jamais à une coursière (infra)...
la nature n’est pas indiquée ? Déjà présent à Carcassonne au début du XIIIe siècle
Enfin, les clous les plus gros (baradors) sont cités pour (Tudèle, l’Anonyme 1960, vol. 1, 62, 63, note 4), le cada-
la fixation des volets sur les hourds1114, mais il est probable, falc possède plusieurs acceptions1125.
compte tenu du nombre de pièces de charpente à assembler, Il se rapprocherait de « chaffal » ou « chaffalum »,
qu’ils étaient utilisés en quantités bien plus importantes1115. terme désignant en Haut-Dauphiné une « tourelle en bois
Le second type de fixation, les chevilles1116, est évalué couverte, parfois aménagée à l’angle de mur, souvent au-
au poids (en livres) : assez fréquemment employées en dessus d’une porte, à usage défensif »1126. Le cadafalc ferait
Lauragais et Toulousain1117, elles se rencontrent dans ainsi partie du chemin de ronde mais s’en distinguerait
d’autres régions, comme par exemple en Savoie-Dauphiné quelque peu (ainsi que du hourd), davantage par sa fonc-
aux XIVe-XVe siècles1118, mais paraissent absentes de la tion que par sa constitution. Elizabeth Jacquier a en effet
construction civile aixoise1119. Elles sont également mis en lumière en Bourgogne « la variété de concepts que
présentes dans des régions plus septentrionales, comme en peut impliquer une seule et même appellation selon
Bourgogne, au moins dès la fin du XIIIe siècle1120, ou à Lille l’époque et le lieu. Le mot chaffaud en est la parfaite illus-
durant le bas Moyen-Âge1121. tration. C’est à la fois un organe défensif -tour de bois et
torchis, fala, selon la signification première dérivée du latin
À Castelnaudary, leur destination est rarement catafalcium, un bâtiment couvrant et flanquant le faîte
précisée1122 mais elles servaient certainement à assembler d’une tour d’entrée, sorte de hourd, ce qui est le cas le plus
les pièces de forte section (travatels, solas, cabiros) fréquent en Bourgogne, mais aussi une construction civile
comme au fort de Comigne (Aude), en 1374, où certaines -échafaud ou estrade publique- et un élément technique -
chevilles atteignent une palme de long (Loppe, Allabert plate-forme temporaire des ouvriers du bâtiment- »
2002, 118, 119). (Jacquier 2003, 115).
8.4 - Une sorte de hourd : le cadafalc Les matériaux composant le cadafalc sont d’ailleurs, à
Le mot « cadafalc » désignerait une construction s’as- peu de choses près identiques à ceux des corserias (infra),
similant à une défense sommitale. Toutefois, on ne sait et à peine plus détaillés : fustalha1127 et cartons (soliveaux

1114
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°72 r°4]. « Item pro centum clavis emptis a magistro Bernardo de Podio pro firmando dicta hostia cum dicto embana-
mento que erant baradors...».
1115
L’emploi de gros clous est également attesté en Haut Dauphiné pour les charpentes et les couvertures, comme par exemple lors de la construction
du palais delphinal d’Embrun. Les poutres de la charpente et les essandoles du toit emploient notamment « 12000 clous pour fixer les planches (taula-
torum), d’une longueur d’une palme (24 cm) […] 1500 clous d’une longueur d’un demi pied (17 cm) […] et enfin 96 autres clous d’une longueur d’une
palme (24 cm)… » (Nicolas 2005, 193, 194).
1116
« Cheville : tige de bois ou de métal dont on se sert pour boucher un trou, assembler des pièces » (Robert 1982, 303).
1117
Par exemple à Toulouse : AC Toulouse, EE32, 1354, [f°9 v°1]. « Item pus per 6 livras de cavilhas menudas e per 300 clavels baradors que pres en
Jolia companho den B. Ros a obs dels agassiers de Matabuou… ».
1118
« Cavilia, cavillius, cavillionis : cheville de bois (ou fer) » (Poisson 2003, 439). Cependant, dans une région proche (le Haut-Dauphiné), N. Nicolas
ne mentionne pas ce terme dans son glossaire, ni dans sa partie relative aux artisans du métal (Nicolas 2005, 191-195).
1119
En effet, Ph. Bernardi n’en fait pas mention dans son paragraphe concernant le métal ni dans son glossaire (Bernardi 1995, 189, 190).
1120
Elles sont ainsi citées dans un compte de fabrique de l’église Saint-Lazare d’Autun, daté de 1294-1295 : « Item pro cavillis ferreis… » (Mortet,
Deschamps 1995, vol 2, 323).
1121
Gilles Blieck note en effet que « d’importantes quantités de métal sont régulièrement consommées par les charpentiers. Toute une gamme de clous
et de crampons est massivement employée dans les planchers ou les travaux de couverture. Les poutres peuvent être fixées au mur par des ancres. Mais
il faut surtout mentionner la fréquente utilisation des vergues, de bendes et de quevilles comme renforts d’assemblages dans les charpentes des toitures
et des ponts. […] Les chevilles sont parfois dites doubles, comme en 1461-1462 où sont fixées XXIX quevilles doubles de fer qui servent a tenir le bos
de quoy on a couvert au dessus de le tour d’Engleterre. Leur fer est parfois étamé, sans doute pour éviter la rouille » (Blieck 2003, 72).
1122
AD Aude, 4E76/CC48, [f°73 r°6]. « ...Germano de Payranis et G. Cuelha pro operando 12 l.et mediam cavillarum de ferro ville quas fuerunt
portare in ponte porte Mondebonis et pro 3 l.et media quas dominus Johannis Tocabonis consul retulit poni fecisse pro firmandis hostis ambani de
retro hospicium B. Ricardi et reparando passatam... » ; Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°9 v°3]. « ...pro reparando intratam capitis pontis ambanamenti
de Baffa et pro reparando barrerias dicti pontis et pro aliis causis necessariis dicto opere et pro una libra cavillarum ibi necessaria... ».
1123
En Haut-Dauphiné, une mueta ou chaffal doit être construite « à proximité d’une tour : longue de 8,20 m (4 toises) et haute de 3,07 m (1,5 toises),
elle est dressée en même temps qu’une palissade de bois dont elle constitue une excroissance » (Nicolas 2005, 236, 237). En outre, « le chaffal aménagé
en 1368 entre une maison du palais delphinal d’Embrun et la courtine, atteint deux toises de haut (4,10 m), ce qui en fait un ouvrage relativement impor-
tant » (Ibid., 255).
1124
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°3]. « ...tam in reparatione cadafalcorum quod ambanamentorum… ».
1125
« échafaud, estrade, échafaud de bois appliqué sur le rempart » (Lévy 1909, 58) ; « plateforme élevée en bois servant de bastion. Estrade, plate-
forme, tribune. Charpente d’une tour où sont accrochées les cloches. Echafaudage » (Niermeyer 1984, 156).
1126
Nicolas 2005, 309. Il désigne également « une tourelle d’observation mobile destinée soit à protéger une place forte depuis l’intérieur, soit au
contraire à l’attaquer en facilitant l’accès au sommet des murs » (Ibid., 236). En Bresse et Bugey, « Le flanquement s’effectue dans un premier temps
par des sortes de tours en bois que les comptes nomment chaffaux (chaffalus) ou par des échiffes également en bois (eschiffa), fixées en encorbellement
dans les angles des courtines. Les tours en maçonnerie finissent par remplacer les chaffaux dont les matériaux servent alors pour des réparations de
toiture ou d’autres constructions » (Kersuzan 2005, 225). Pour d’autres auteurs, « échiffe » et « chaffal » apparaissent sont quelquefois synonymes
« mais en règle générale on distinguera les échiffes, petites structures en encorbellement, et les chaffauts qui apparaissent plutôt comme des tours ou
des tourelles » (Chalmin-Sirot, Poisson 2003, 173).
1127
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°3]. « ...pro quadam quantitate fustalhe que fuit empta ab eodem et posita tam in reparatione cadafalcorum
quod ambanamentorum… ».

132
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

équarris) pour une réparation1128. Le reste des opérations en pierre monté en encorbellement sur le parapet de la
concerne des poses de lattes (ou de voliges ?) requérant les courtine, et supportant une construction en colombage/
fixations habituelles (clous latadors1129, rarement reffor- torchis couverte par une toiture en tuiles canal. Ce type de
satz1130) et des tuiles1131. L’action de couverture est quelque- défense semble assez marginal à Castelnaudary, si l’on en
fois désignée par le verbe « coronar »1132. Des chevilles sont croit leurs faibles apparitions dans les sources1142.
aussi employées, vraisemblablement pour le gros-
œuvre1133. 8.5 - Le chemin de ronde de l’enceinte : corseria, aleya
Par ailleurs, l’utilisation de pierres suggère que le cada- Le chemin de ronde est un « passage établi au sommet
falc est solidaire du parapet de la courtine, et s’articule des murs de défense, protégé extérieurement par des
avec elle pour former une grosse bretèche de plusieurs merlons (dont l’intervalle forme des créneaux). Sa largeur
mètres de long, peut-être dans les angles de l’enceinte, idéale devait permettre le passage de deux hommes de
souvent peu ou pas flanqués1134. front, le chemin de ronde peut être compris dans l’épais-
seur de la muraille ou porté en encorbellement » (Hallé
Les sparos1135 ou le foin pour le bart1136 confirment la
1983, 50). Dans les comptes chauriens et les sources
présence de torchis sur cette structure, comme par exemple
lors de la construction en 1360 de deux ou plusieurs cada- toulousaines, deux termes correspondraient à la définition
falcs sur l’enceinte de la ville mitoyenne du cloître des de « chemin de ronde » : corseria1143, et aleya1144. Un autre
Frères Mineurs (port de la Place)1137. vocable, « corredor » (Vidal 1911, 251), désigne apparem-
ment la même structure, surtout dans l’Albigeois et à
Enfin, le 3 juin 1360, G. Vital, charpentier, est rémunéré Rodez (Bousquet 1926, 306, 307)1145. La distinction entre
pour avoir construit un « gradarius sive scalam »1138 sur un l’« amban », la corseria ou l’aleya est extrêmement
cadafalc1139. Rigidifié par des clous baradors1140, on ne sait subtile : les secondes faisaient peut-être partie des
toutefois s’il s’agit d’un système d’accès depuis la base de premiers, l’amban désignant alors l’ensemble de la struc-
l’enceinte ou d’un élément interne au cadafalc. ture charpentée de défense (et donc la couverture) et la
Ainsi, les cadafalcs étaient apparemment des sortes de coursière le seul chemin de circulation interne et ses
hourds partiels, voire d’échiffes1141, dotés d’un mur-bahut moyens d’accès1146.

1128
Ibid., [f°77 r°1]. « ...pro 7 cartonibus [...] pro ponendo in reparatione cadafalcorum... ».
1129
Ibid., [f°72 v°6]. « ...Bernardus Grassi latavit cadafalcum de ala quod est inter Bertrandum Olibe e cadafalcum magnum anguli... » ; [f°72 v°7].
[f°74 v°7] ; [f°74 v°8]. « Item 100 clavi latadors pro firmare dictam latam... ».
1130
Ibid., [f°75 v°8] ; [f°77 v°4]. « ...pro 200 clavibus reforsatis [...] qui fuerunt positi in cadafalco anguli quando fuit bayshatum...».
1131
Ibid., [f°79 r°8]. « ...ad portandum tegulas [...] pro cohoperiendo cadafalcum inter hospicium Bertrandi Olibe et cadafalcum anguli... ».
1132
Ibid., [f°76 r°9]. « ...quod quidam cadafalc de retro hospicium G. Olrici coronaretur fecerunt ibi portari foliam... » ; [f°76 r°10], [f°76 v°1].
1133
Ibid., [f°73 r°6] ; [f°75 r°5]. « …36 l. cavillarum quas fecerat de ferro ville […] quas duxi fuisse positas in reparatione cadafalcorum ».
1134
Ibid., [f°75 r°7]. « ...cum maxima quantitas lapidum esset in vallo ville ante porta Foy et videretur expediens dictos lapides mutari versus magnum
cadafalcum ad finem cum eadem ibi operaretur… ».
1135
Ibid., [f°74 r°7] ; [f°74 r°8] ; [f°80 r°7]. « …fecerunt tortissare dictum cadafalcum et fuerunt empta quatuor quintalia sparonis… ».
1136
Ibid., [f°74 r°6]. «...pro una sarcinata feni que fuit posita in dicto opere… » ; [f°74 r°9].
1137
Ibid., [f°74 r°5]. « ...conduxissent ad pretium factum ad tortisandum cadafalcos qui sunt in claustra seu circa claustrum Fratrum Minorum… ».
1138
« Escala : échelle, échelle d’infamie, sorte de pilori, escalier, pont volant qui s’abattait d’un navire sur un rempart, civière, brancard de charrette »
(Lévy 1909, 159). Une fois encore, le mot « sive » (qui signifie « ou », ou « ou bien ») ne permet pas de savoir si la tournure de phrase donne ces termes
comme équivalents ou distincts.
1139
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°75 r°1]. « …Geraldus Vital fusterius pro faciendi gradarius sive scalis in dicto cadafalco super hospicium Bertrandi
Olibe et in alio ibidem de retro alam… ».
1140
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°75 v°9]. « Item 25 clavos baradors pro faciendi scalam cadafalqui… ».
1141
En Bourgogne, l’échiffe est « un édicule de bois placé en encorbellement aux sommets des tours et des courtines pour en défendre l’approche et
servir d’abri aux hommes astreints au guet. Par son matériau, sa mise en œuvre, et ses fonctions, elle peut être assimilée à un hourd qui ne couvrirait
pas la totalité de la courtine. En fait, selon ses dimensions et l’emplacement choisi, elle est assimilée à la bretèche, voire à l’échauguette, édicules qui
dans leurs acceptions anciennes, offraient plus d’ampleur que leurs dérivés maçonnés » (Jacquier 2003, 115). Nathalie Nicolas renvoie également à
« eschiffa » ou « echiffa » et à une mention équivoque de 1367-1369 provenant de Château-Queyras « chaffalis seu eschiffis », ADI, 8B644, [f°30 r°]
(Nicolas 2005, 314). Ailleurs, « les échiffes, que l’on peut assimiler à des échauguettes ne se bornent pas à être la solution minimale d’un flanquement.
En effet, elles viennent aussi renforcer l’efficacité d’une tour ou compenser une faiblesse de celle-ci, principalement dans les angles morts des tours
quadrangulaires ou à la jonction de celles-ci avec les courtines » (Kersuzan, 2005, 225).
1142
S’agissait-il de constructions provisoires d’ampleur limitée en attendant que de véritables hourds soient construits ? En effet, en Bresse et Bugey,
« les chaffaus sont dans la plupart des cas des solutions provisoires de défense pendant que se construisent ou se relèvent des courtines et les tours »
(Kersuzan 2005, 230).
1143
« Corsiera : chemin de ronde, coursive » (Alibert, 1997, 245) ; « corssieira : chemin de ronde » (Vidal 1911, 251) ; « corseria, corceria, cursoria,
corsiere : coursière, chemin de ronde en bois et en encorbellement sur une muraille à l’intérieur d’une place forte » (Nicolas 2005, 311).
1144
« Aleya, aleia : chemin de ronde d’un mur » (Lévy 1909, 15). Le terme « aleya » est également mentionné à Toulouse, au faubourg Saint-Cyprien
(AC Toulouse, CC2322, Pièces à l’appui des comptes, pièce n° 66, 26 mars 1417. « …per reparar en autras loxs e partidas las aleyas de Sant
Subra... ». En Haut-Dauphiné existent les termes « allour, allorium » (chemin de ronde, coursière en bois en encorbellement sur la muraille pour la
circulation intérieure des gardes) (Nicolas 2005, 304) désignés comme synonymes d’aleia et de corseria.
1145
Deux mentions ont toutefois été répertoriées près de Montauban et en Carcassès : la première à Fajolles (Tarn-et-Garonne) dans un acte du
7 décembre 1400 (AD Haute-Garonne, 2MI523, H Malte Le Burgaud 15, liasse 2, n° 1. Bail à cens. Inféodation des emplacements à l’intérieur du fort
à construire de Fajolles. « …et facere corredos vel aleyas… » ; la seconde au village de Comigne (Aude), à 18 km à l’est de Carcassonne, en 1374 :
« Item est necessarium quod in cadro del corredor ante cameram domini abbatis que est in dicto castro fiat et apponatur unum ponchier… » (Loppe,
Allabert 2002, 120, notes 80, 81).
1146
En Savoie et en Bresse, le terme « corseria » désigne seulement la partie interne de la défense en charpente (Chalmin-Sirot, Poisson 2003, 183, fig. 8).

133
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Corserias et aleyas possèdent des points communs retrouvé en ce sens ? (absence de latas ou de folias comme
mais peut-être également des différences, que l’on doit de tuiles…)1154.
souvent tenter de déduire du silence des textes. Le terme « amban » désignerait-il donc également une
Ainsi, la coursière (ou coursive), à l’instar du hourd grande partie du chemin de ronde, notamment son arma-
extérieur, est en majorité composée de bois. L’articulation ture principale et sa couverture, alors que « corseria » ou
entre ces deux éléments est difficilement perceptible à « aleya » feraient référence au seul plancher de circulation
travers les sources : on ne sait par exemple s’ils possèdent et à la façade côté ville ?
une structure charpentée et une toiture communes ou indé- Difficile de trancher la question, d’autant que le
pendantes, ni dans quel ordre précis ils sont assemblés. contraire semble également possible : ainsi, le hourd peut
D’après les sources, la partie haute des enceintes (en pierre être désigné comme faisant partie d’un ensemble plus vaste
ou en brique cuite dans le toulousain), possède une dénommé « coursière », comme le suggère une dépense de
largueur moyenne d’environ 1,50 m (supra). Déduction 1372 à propos de l’installation de gouttières1155. Cependant,
faite du parapet et des merlons, cela laisserait une largeur même dans ce cas, comment interpréter la pose de huit
de circulation à peine supérieure à un mètre, dimension brasses de « peuplier » (voliges ?) pour un « mâchicoulis
tout à fait insuffisante pour faire face aux besoins de la des coursières »1156 ? Y-avait-il des systèmes de défense
défense (circulation rapide des défenseurs, stockage de internes (côté ville) ou le mot « corseria » désigne-t-il en
projectiles1147, etc.). À Castelnaudary comme à Toulouse et l’espèce le hourd extérieur ?
dans beaucoup de villes médiévales, une voie plus ou
moins large, longeait souvent le parement intérieur de l’en- Par ailleurs ces corserias étaient-elles enduites de
ceinte1148 : la coursière (corseria, aleya) empiétait donc sur torchis ? Si leur construction requiert corondas1157 ou
cet espace au moyen de poteaux en bois (ou d’un encor- cledas, matériaux déjà signalés pour les ambans (supra),
bellement ?) permettant d’élargir le chemin de circulation on n’a jamais relevé d’achats de foin, de sparos, ou de
(jusqu’à trois mètres ?). D’ailleurs, la construction des confection de bart en ce qui les concerne.
coursières entraîne quelquefois la démolition de maisons, Ces cledas ou claies (assemblage de corondas et de
que les consuls font alors réédifier ailleurs1149. riostas ?), cette fois-ci présentes en nombre beaucoup plus
Les textes ne citent jamais les pièces utilisées : ces gale- important (66 exemplaires, répartis par trois lots de 22 en
ries intérieures possèdent-elles comme les hourds trava- 1361)1158, formaient donc peut-être un garde-corps ajouré
tels, cabiros, ou solas, peut-être « masqués » par l’utilisa- dans lequel il n’y avait pas de torchis, à la fois pour des
tion de mots tels que « fusta »1150 ou « fustalhe »1151 ? Les raisons d’économie mais aussi pour des raisons défensives,
nombreuses fixations, en particulier les chevilles et les de vastes balcons ajourés permettant plus aisément de
clous baradors, laissent penser que des éléments d’assez hisser des projectiles.
forte section composent cette structure1152. Elles étaient vraisemblablement d’une taille
« standard » afin d’être achetées à l’avance puis placées sur
À la lecture de sources partielles, on se gardera d’af- la structure. En juin 1360, elles sont fabriqués au village de
firmer que les coursières sont d’une construction plus Labécède-Lauragais, puisque les consuls décident d’y
simple que les hourds1153. envoyer un messager, tant pour savoir si les cledas
Ces circulations sont-elles en outre dotées d’une commandées sont prêtes, que pour lancer la production
toiture, puisqu’aucun élément caractéristique n’a pu être d’autres exemplaires1159.

1147
À Toulouse, à l’approche du comte de Foix, les mesures de défenses prises par les consuls vont en ce sens (AC Toulouse, BB3, [f°51 r°4], 19 mars
1418. « …faciant deffentionem et portentur lapides ad corserias… »). En Bresse et Bugey, les courtines ont généralement « cinq pieds de large, soit
1,65 m et en y ôtant les deux pieds du parapet, soit environ 65 cm, il ne reste qu’un mètre pour circuler entre le parapet et le bord de la muraille, ce qui
est, à cette hauteur, périlleux, peu commode et guère rassurant malgré l’habitude que peuvent avoir les soldats. […] Les murs en briques des châteaux
de Bresse étant moins épais, ils offrent un espace encore plus réduit à leur sommet, même si l’épaisseur du parapet est limitée à un pied et demi. Dans
tous les cas, cela complique singulièrement les circulations et limite la rapidité et la force d’intervention d’un point à un autre » (Kersuzan 2005, 220).
1148
Ainsi, à Caen « plusieurs propriétés butent directement sur les murs de la ville, mais il est également fait allusion, à l’« allée des murs de la ville »,
comme s’il y avait, entre les propriétés et la muraille, un chemin ménageant un espace de circulation » (Angers 2006, 311).
1149
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°174 v°1]. « ...Petro Saulonis pro costruendo et rehedifficando hospicium domini Poncii Gayraudi quod diruerent
universitatis pro corseriis ville. 9 l. 12 s. tur. ».
1150
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°30 v°6]. « …pro portando fustam ad opus corseriarum… » ; [f°61 r°7]. « …fustam ad opus aptandi passos corse-
riarum del Terrier… ». Il s’agit probablement de réparer le plancher.
1151
Ibid., 1360, [f°77 r°4]. « Item pro portando dictam fustalha in aleya ale ».
1152
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°112 v°13] ; [f°112 v°15] ; [f°112 v°16]. « ...ad reparandum corserias portus Narbonesii. 4 l. media cavilharum ;
100 clavos baradors ».
1153
Une mention indique d’ailleurs un transport de pierres sur les corserias ; s’agit-il de matériaux ou de projectiles de défense ? ; ibid., 1360, [f°92
v°6]. « Item Petro Bareria, Guillermo Talabatii, Petro Messerii qui die presenti portaverant lapides super corserias…».
1154
En Haut-Dauphiné, les coursières sont généralement découvertes. Cependant, « afin de protéger la muraille, les coursières sont quelquefois couvertes
et, dans ce cas, leur hauteur doit suffire au passage d’un homme debout. La seule mention d’une coursière couverte de lauses est tardive (1470) mais
elle suggère que ces aménagements en bois sont encore rénovés et même élevés dans la seconde moitié du XVe siècle » (Nicolas 2005, 240).
1155
AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°64 r°6]. « …ad preparandum goterias enbanamentum corserie portus Bordarum… ».
1156
Ibid., [f°64 v°2]. « …pro octo brachiatis polpedii ab ipso habitis et positis in machacollis dictarum corseriarum… ». On sait en effet que « le
peuplier est un piètre bois de charpente » (Bernardi 1995, 142), raison pour laquelle il n’est utilisé ici que pour des voliges.
1157
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°93 r°12] ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°33 r°4]. « …pro 20 corundis emptis ab eodem ad opus corseriarum… ».
1158
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°95 r°6]. « …pro 22 cledis ab eodem receptis ad opus curseriarum de Baffa… » ; [f°95 r°7]. « …pro 22 cledis ab
eodem receptis ad opus dictarum corseriarum... » ; [f°95 r°8]. « …pro 22 cledis ab eodem receptis ad opus corseriarum ».
1159
Ibid., 1360, [f°75 r°6]. « Item dicti domini consules miserunt Johannes Raynaudi apud Becetam Petro Mutonis tam sciendi si clede essent factas et
ut facent de cledis pro ponendo in curseriis… ».

134
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

Corserias ou aleyas ne sont pas propres aux défenses des Le terme « gaytil » (gachial, gachil, gachola, formé à
grandes villes : en 1428, à Verlhac1160, on envisage de d’édi- partir du mot occitan « gayt » (guet), désigne une sorte de
fier « parets » et « aleyas » après qu’elles aient été guette ou d’échauguette, voire une guérite en
détruites1161. Un certain mastre Bernat Tinel se chargera du colombage/torchis servant principalement à l’observation
travail, et devra « faire et rendre toutes les dites aleyas char- et peut-être à la défense. Ce type de construction se
pentées, lattés (ou voligées ?) et esparonnées1162, le comman- retrouve aussi bien à Albi, à Rodez1171, qu’à Toulouse1172.
deur du lieu, monseigneur Guilhem Calvat devant pour sa
Ces gaytils sont présents en grand nombre et paraissent
part apporter l’ensemble du bois nécessaire au pied de l’en-
disséminés tout le long de l’enceinte, notamment au niveau
ceinte »1163. À Léguevin (fig. 6)1164, un accord du 8 octobre
des angles1173, qu’ils devaient scander comme autant de
1363 fait également mention d’une « corseria deffensalem »
postes de guet. Ils peuvent également être situés « à la tête
à l’intérieur du fort1165. Par ailleurs, à Orgueil1166, les disposi-
de la paret »1174 ou « dans une coursière, sous le pont ou
tions prises pour la construction du fort le 6 mai 1399 préci-
l’escalier des Frères Mineurs », leur fonction étant peut-
sent que les consuls devront le doter de fossés et d’aleias1167.
être différente dans ce dernier cas (guérite ?)1175. Une autre
Enfin, une « scala » désignerait une sorte de « pont » ou dépense sous-entendrait que certains gaytils sont dotés de
de passerelle charpentée1168 ; ces systèmes d’accès sont cloches pour donner l’alerte, si tant est que la réparation de
dotés de « scalones » (barreaux d’échelles ou marches cette « squela » puisse se rapporter à la guette1176.
d’escalier ; Lévy 1909, 159) qu’il faut installer ou réparer,
afin que rondes et inspections se déroulent dans de À Rodez, ces constructions sont également installées
meilleures conditions de sécurité1169. Ces éléments sont sur le toit de maisons particulières, probablement proches
encadrés par des cambas et/ou des tibias (montants de l’enceinte1177 : les propriétaires sont tenus de les entre-
d’échelle ? d’escalier ? supports de passerelles ?)1170. tenir grâce aux matériaux fournis par la ville1178 ; selon
H. Bousquet, certains habitants dont les demeures
8.6 - Edifices d’observation et de défense : guette, touchaient la muraille, étaient en outre obligés d’édifier des
échauguettes, bretèche : gaytils, gaychils, agassiers gardas, « sorte de petit ouvrage fortifié, analogues aux
guachils »1179.
8.6.1 - Essai d’identification L’agassier (agassier, aguasserius, en provençal
Les dépenses concernant les « gaytils » sont celles qui agachoun, gachoun, agachou1180), quant à lui, est beaucoup
reviennent le plus fréquemment durant la période 1359-1362. plus rare dans les comptes chauriens : il s’agit d’une

1160
Aujourd’hui Verlhaguet, commune de Lacourt-Saint-Pierre (Tarn-et-Garonne).
1161
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « ….baylet lo dit loc de Verlhac a ydifficar e bastir de novel so es
assaber las paretz e las aleyhas del dit loc de Verlhac… ».
1162
Ces sparos servent-ils de support au torchis ou seulement d’éléments dans un garde-corps ajouré ?
1163
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « …lo dit mastre Bernat Tinel deu far e redre totas las dichas aleyas
del dit loc de Verlhac fustadas, latadas e sparonadas e lo dit moss. Guilhem Calvat deu far aportar tota la fusta al pe de las dichas parets… ».
1164
Haute-Garonne, à 16 km à l’ouest de Toulouse.
1165
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 143, liasse 1, n° 13, 8 octobre 1363. « …ad costruendum et edifficandum ibi domum et supra parietem et
corseriam deffensalem… ».
1166
Tarn-et-Garonne, à 12 km au sud de Montauban.
1167
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 241, liasse 1 n° 13, 6 mai 1399. Accord entre le commandeur et les habitants pour la construction du fort.
« …facere et complere dictum fortalicium […] munitum sufficientibus parietibus vallatis et invanientis sive aleis... ». On trouve également peu après
la forme « alea » : « …tenere dictum fortalicium reparatum ac vallata, invannamenta, seu aleas et parietes eiusdem loci reparatas suis propriis
sumptibus et expensis…».
1168
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°110 v°3]. « ...G. Rogerii et Bernardo Conquas fusteriis pro faciendo unum guachillum in corseria subtus pontem
seu scalerium Fratrum Minorum... » ; ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°52 r°7]. « ...pro viginti quatuor scalonibus sive loquis ab ipso emptis pro faciendo et
preparando pontem sive scalerium...».
1169
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°122 r°5]. « ...ad mitendum et ponendum scalones in pugata corserie de Strada ad finem ut visitatorum possent melius
et secure assendere et descendere per dictas corserias… » ; Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°61 v°5]. « ...ad curandum corserias clausurarum de porta
Stimbaloris usque ad portam Terrerii in circuitu ville de versus mercatale ut excubiatores inde melius transire possent et excubias facere...».
1170
Ibid., 4E76/CC53, 1371, [f°52 v°2]. « ...qui portarunt duos fustes longos de retro castrum versus Astratam ad dictam portam de Got Feran pro
faciendo cambas seu tibias in dicto scalerio seu ponte pro ascendendo corserias… ».
1171
« Gachial, gachil : guette » (Vidal 1911, 257) ; « gachil, gachola : échauguette » (Lévy 1909, 200) ; « gachil : lieu où l’on guette, guérite, échau-
guette » (Alibert 1966, 415) ; « gachil : lieu d’où l’on guette, guérite » (Mistral 1878, vol. 2, 4) ; « gachil : échauguette destinée au guetteur » (Bousquet
1926, 174, note 6).
1172
AC Toulouse, EE32, 1355, [f°9 r°4]. « Item pus per 200 clavels baradors fortz […] ...a obs dels gachils de Matabuau ».
1173
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°69 r°10]. « …obs del gaytil de l’angle dejos la porta de Sant Antoni… » ; Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°151 r°1].
« ...juxta guachillum magnum anguli retro hospicium Hugonis Rogerii… ».
1174
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°146 v°3]. « ...ad opus guachilli capitis parietis juxta palum de la Strada… ».
1175
Ibid., 1363, [f°110 v°3]. « ...pro faciendo unum guachillum in corseria subtus pontem seu scalerium Fratrum Minorum... ».
1176
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°71 v°5]. « ...fusteriis qui steterunt per septem dies tam ad aptandum corserias et ad coronandum guachillos in portu
Bordarum et ad aptandum squelam… ».
1177
Bousquet 1926, 306, 1355-1356, « ...e far dos guachils, lo un sul porta nou de Penavaire e l’altre su l’osdal d’Arpaio… ».
1178
Ibid., 338, 1355-1356, « Per 50 clavels plancadors que pres Huc Guaffart per adobar son gachil ».
1179
« Per 150 clavels plancadors, per adobar la garda quelh era bailada » (Ibid., 338, note 1). Voir aussi d’autres exemples dans cette même page et
p. 339. Ces gardas pourraient être des sortes de mantelets mobiles en bois dont chaque habitant avait l’obligation d’entretien et de défense. En Haut-
Dauphiné, il s’agit apparemment d’une « pièce de bois », définition qui ne contredirait pas cette hypothèse (Nicolas 1995, 317) mais qui rendrait inex-
acte la définition de H. Bousquet.
1180
« Lieu d’où l’on épie, échauguette » (Mistral 1878, vol. 1, 43).

135
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

« espèce de guérite, ouvrage de fortification » (Lévy 1909, bage/torchis, une couverture en tuiles, et enfin des fixations
11) tirant son origine de l’occitan « agassié, agassè » (« nid en fer.
de pie » ou « cabane de ramée qu’on établit au haut de trois
arbres pour la chasse au ramiers » ; Mistral 1878, vol. 1, 8.6.2 - L’armature des gaytils et agassiers : charpente
45). Cette sorte d’échauguette (ou de bretèche ?) en colom- et colombage / torchis
bage/torchis servait vraisemblablement à renforcer certains Comme d’autres ouvrages de la ville, la structure se
points particuliers de l’enceinte jugés sensibles (portes, compose de « fusta », c’est-à-dire de diverses sortes de bois
angles). Cette construction, peut-être bâtie à mi-hauteur, de construction1183.
mais plus sûrement au niveau des superstructures, aurait
donc une vocation plus défensive que le gaytil. Toutefois, Le bois privilégié semble être le chêne1184, et la longueur
les fonctions respectives de ces deux constructions ne des éléments varie entre 16 et 22 palmes (de 3,5 m à 4,9 m
transparaissent pas clairement. environ). On ne sait rien en revanche de la taille de ces
structures une fois achevées1185 mais une dépense de 1359
D’ailleurs, selon E. Viollet-le-Duc, « on établissait des fait état d’un gaytil à deux étages, signe d’une certaine
échauguettes transitoires en bois sur les chemins de ronde importance1186. On indique également l’achat d’une tartuga
des fortifications du Moyen Âge. Ces échauguettes se (sorte de cadenas1187) et la confection d’escaliers1188 : les
reliaient aux hourds et formaient des sortes de bretèches » gaytils étaient donc fermés par une porte et se situaient au-
(Viollet-le-Duc s. d., vol. 5, 133). On ne sait pas non plus, dessus des hourds ou des coursières1189, puisqu’il est néces-
à la seule lecture des textes, dans quelle mesure la fonction saire de construire un passage indépendant1190. D’autres
des agassiers se distingue de celle des cadafalcs… informations iraient en ce sens : achat d’un pestel (pêne de
Dans d’autres lieux, les agassiers peuvent être utilisés serrure ou verrou ; Alibert 1966, 544) pour une porte ou un
pour protéger des constructions civiles intégrées au volet1191, d’une vertevelle de verrou1192, et de deux
système de défense : c’est le cas pour une salle à manger « plaques » (landas) en fer (pour fixer le verrou ?)1193.
(tinellus) à Comigne (Aude) en 1374, où des agassiers, Comme souvent, la fusta employée aux gaytils est issue
édifiés à chaque angle, affichent un surplomb extérieur de de récupérations (planchers ou plafonds)1194 ; a contrario,
deux palmes (Loppe, Allabert 2002, 119, 120). À les bois de gaytils détruits ou ruinés sont réutilisés à
Montsaunès1181, en 1397, on prévoit d’édifier des agassiers d’autres usages1195. Lorsque la nature des poutres est
sur l’église et le palatium du lieu et « partout où cela sera précisée, les éléments de forte section (travatels, solas)
nécessaire »1182. sont rares1196, ces constructions étant essentiellement
Comme les ambans, gaytils et agassiers présentent de édifiées grâce à des corondas1197 : elles peuvent quelquefois
nombreux points communs (matériaux, techniques de servir de cloison, certains gaytils, assez vastes, possédant
construction) : une structure charpentée dotée d’un colom- des divisions internes1198. Comme d’habitude, des sparos

1181
Haute-Garonne, à 90 km au sud-ouest de Toulouse.
1182
AD Haute-Garonne, H Malte Montsaunès 1, liasse n° 2, pièce 4, février 1397. Montsaunès. Acte d’inféodation aux consuls d’un lot de terre situé
dans le fort pour construire des maisons, février 1397. « …teneantur facere aguasserios in ecclesia et palatio dicti loci et alibi ubi erit neces-
sarium…».
1183
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°4 r°2]. « …cuiusdam quantitatis fuste ad guacillos de Astrata » ; [f°4 r°6] ; [f°63 v°6].
1184
Ibid., 1360, [f°69 r°10]. « …4 pessas de fusta de cor obs del gaytil de l’angle dejos la porta de Sant Antoni… » ; Ibid., 1360, [f°70 r°2]. « …per
1 fust de cor de 16 palms obs del gaytil de l’angle dejos la porta de Sant Antoni… ».
1185
Ibid., 1361, [f°94 v°3]. « …pro duobus fustibus receptis ab eodem ad opus guacilli retro castrum et erat quilibet 22 palmorum… » ; [f°98 v°6].
1186
Ibid., 1359, [f°8 r°6]. « …pro alio guaycillo quod fecerunt ibidem cum duobus soleriis… ».
1187
Lévy 1909, 358. AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°160 r°3]. « …pro una tartugua empta ad opus guachilli… ».
1188
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°8 r°2]. « …ad faciendum scaleria in porta nova de Astrata et in guacillis que sunt ibi de prope… ».
1189
Ibid., 1361, [f°107 bis r°6]. « Item Bernardo Farola fusterio, qui per duos dies fuit ad costruendum unum guacillum coronatum supra embannos
retro magistrum Bernardum Servici... ».
1190
Une dépense toulousaine montrerait également que les agassiers se situaient au-dessus des ambans (AC Toulouse, EE32, juillet 1355, [f°110 r°1].
« Deben an Bertran Cabirol fustier […] per refar 2 agassiers que estan casutz sus los ambans… ». Se pourrait-il cependant qu’il s’agisse là de
constructions tombées d’une tour commandant les courtines ? En Savoie et en Bresse, « la guette ou baeta est une autre petite construction de bois
destinée à surveiller de loin. Elle est implantée le plus haut possible, sur des tours ou des bâtiments : à Bagé au dessus de la grande tour, à Chatillon,
Billiat, et à Saint-Rambert, elle supporte la bannière » (Chalmin-Sirot, Poisson 2003, 174).
1191
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°101 v°2]. « …pro uno pestello ad opus hostii guachilli… ».
1192
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110 r°8]. « …pro una armela feri […] in guacillo Johannis Fizas… ».
« Armela : vertevelle de verrou (pièce métallique en forme d’anneau dans laquelle tourne et glisse un verrou lorsqu’on le pousse ou qu’on le tire) »
(Alibert 1966, 115).
1193
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110 r°9]. « Item eidem pro duabus landis de fero positas in dicto guacillo... ».
1194
Ibid., 1359, [f°6 r°3]. « ...ad diruendum fustam solerii hospitalis Beate Marie et portandum dictam fustam […] in gaycillis barii interiorum… ».
1195
Ibid., 1360, [f°12 v°2] ; [f°12 v°3] ; [f°12 v°4]. « ...tribus bastonibus qui dicta die reposuerunt fustam dicti gaycilli in hospiciio G. Barre... » ; [f°68
r°5] ; Ibid., 4E76/CC51, 1367, [f°125 r°2]. « …a deffar le agassier de las parets tras l’ostal del senhor P. Narbona e per portar la fusta d’aquel a la
tor de la Strada…».
1196
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°50 r°1]. « …per 19 travatels les 12 de 28 palms els 7 de 3 canas cascu que lor foro prezes as obs de las palissas e dels
gaytils de la clausura… ».
1197
Ibid., 1359, [f°5 r°5]. « ...quindecim corondas ad opus guacillorum clausurarum…».
[f°8 r°1] ; [f°63 r°2] ; [f°63 r°5] ; [f°103 v°1] ; [f°103 v°3]. « ...pro 23 corondis ab eodem emptis ad inquantum ad embanandum et construendum
guacillos inter castrum et portam Narbonesiam…».
1198
Ibid., 1361, [f°134 r°1]. « ...pro 31 corundis emptis ad opus miganorum guachillorum… ».

136
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

sont nécessaires pour supporter le torchis sur la struc- quelquefois transportés par des brassiers1209, ou achetés à
ture1199 : parfois resciés1200, ils proviennent souvent d’en- des étrangers, notamment à un homme de Laroque
droits extérieurs à la ville1201, et sont généralement trans- d’Olmes1210. Les latas, servent également à la couverture
portés à dos d’animal1202. des gaytils1211, et leur présence sur les agassiers laisse
Quant au foin, les quantités commandées restent globa- supposer qu’elles avaient le même usage1212.
lement modestes (une charge, soit environ 130 kg), le Quant aux tuiles, elles sont la plupart du temps achetées
volume de torchis étant probablement peu élevé (en parti- par centaines1213, et proviennent parfois d’un lieu interne à
culier pour les gaytils, petites guettes destinées à une, voire la ville1214, mais aussi de Pexiora (Podio Stuirano), à
deux personnes au maximum)1203. Le bart est cité une seule environ 8 km à l’est1215 : deux hommes, Arnaud Vitarel et
fois, en l’occurrence pour des agassiers1204. Pierre de Planvilar fournissent en effet un millier de
Toutefois, trois dépenses isolées mentionnent la tuiles1216.
présence de sable et de chaux dans la construction de
gaytils1205. 8.6.4 - Les fixations : cavillas, claves
En 1363 par ailleurs, un certain Guillaume Roger est Les clous utilisés dans la construction des gaytils et
rémunéré pour « encaucinar » un gaytil, (« chauler » ou agassiers sont de diverses sortes : la première catégorie est
« couvrir de chaux »), signe probable que ces structures représentée par des fixations présentes en grand nombre,
étaient dotées d’un badigeon protecteur en raison de leur mais dont le type n’est pas précisé. Leur association avec
forte exposition au vent et à la pluie1206. Enfin, l’armature de les folias laisse penser qu’il s’agit de clous latadors pour
la toiture, comme celle des hourds, est constituée de fixer les voliges sur les chevrons de la toiture1217.
chevrons (cabiros)1207. Une deuxième catégorie est constituée par des clous
barradors, désormais bien connus : nécessaires en
8.6.3 - La couverture : latas, folias, teules moindres quantités, il sont cités à deux reprises entre 1359
Les matériaux utilisés pour la couverture sont les et 1362, et employés pour le « couronnement » des
mêmes que ceux des hourds : les chevrons reçoivent ainsi ouvrages, du moins si l’on traduit littéralement le terme
folias ou fuelhas accueillant les tuiles1208. Ces éléments sont « coronar »1218. Ces clous devaient donc fixer le sommet de

1199
Ibid., 1359, [f°3 v°2]. « ...quindecim quintalia sparonum pro tortisando guacillos portus Astrate... » ; [f°4 r°5].
1200
Ibid., [f°7 v°6]. « ...pro uno jornali ad scindendum sparonem pro operibus guacillorum… ».
1201
Ibid., [f°3 v°5]. « ...portaverunt fenum et sparones a borda nobilis Hugonis de Aurenta usque ad guacillos portus Astrate…» ; Ibid., 1360, [f°63
v°3]. « …an Estene Compte de Mont Ferran per 2 quintals media de sparo que fo pres de lu as obs de las ditas obras… ». Montferrand, village situé
à 12,5 km à l’ouest de Castelnaudary.
1202
Ibid., 1359, [f°7 r°7]. « ...3 sarcinatarum sparonum quas portare fecit cum suis animalibus in operibus guacillorum… ».
1203
Ibid., 1360, [f°63 r°6]. « una saumada de fe as obs de tortisar le dit gaytil… » ; [f°63 v°1]. En Bresse et Savoie, les guérites ou guettes « sont
édifiées avec une ossature de bois -poutres et montants- mais les parois sont soit en planches, soit en hourdis de terre sur clayonnage (ou même sans
comme à Remens en 1343 : terram necessariam pro dicto chaffolo torchiando de grosso torchiamento sine vergis » (Chalmin-Sirot, Poisson 2003,
174) ; AD Aude 4E76/CC48, [f°63 v°2]. « …an P. Squirol de Mont Feran per 7 quintals de fe que hom avia agut de lu as obs de las ditas obras
tortisar… ». Cette quantité est exceptionnelle (près de 300 kg). Elle montre que le village de Montferrand (ou du moins ses proches environs) fournit
au chantier chaurien des quantités régulières de sparos et de foin pour le torchis (Ibid., [f°67 v°1]).
1204
AD Aude, 4E76/CC54, 1374, [f°31 r°4]. « ...qui fecerunt bart pro preparando agasserios et curcerias portus Narbonesii… »).
1205
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°6 r°4]. « …Petro de Brina et cuidam britoni qui dicta die portaverunt arenam ad opus gaycilli… » ; [f°6 v°1].
« …Oliverio le Breto, Petro de Brina Raimundo Gonteni, Bernardo de Vito et cuidam alterii britoni qui dicta die portaverunt arenam in opere gaycilli
de Baffa et calcem stancinerunt... » ; 1361, [f°103 r°6]. « ...ad cavantarum arenam ad opus guacillorum... ».
1206
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°72 v°2]. « ...Guillermo Rogerii fusterio pro [...] sparonando atortisando recobriendo bardando et encaucinando
dictum guachillum…».
1207
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°94 r°5]. « ...pro 11 cabironibus quos receperat Michael Barilli ad opus guacilli retro castrum… » ; [f°95 v°1].
1208
Ibid., 1360, [f°6 r°2]. « ...duas brachiatas folie pro gaycillis portus Narbonesii… » ; 1361, [f°91 v°4]. « ...pro quatuor decim palmis de fuelha
quos recepit Bernardus Babonis et posuit in gacillo retro ecclesiam Fratrum Minorum… ».
1209
Ibid., [f°106 v°4]. « Item cuidam brasserio qui portavit quinque brachiatas de fuelha in guacillo retro castrum ».
1210
Ibid., 1359, [f°7 v°1]. « ...a quodam homine de Ruppe Ulmesii 5 brachiata et unum palmum folie pro guacillis clausurarum… » ; [f°7 v°8] ; [f°11
r°7]. Laroque d’Olmes (Ariège) est un village situé à 40 km au sud de Castelnaudary.
1211
Ibid., 1361, [f°88 v°3]. « …quatuor faxerios late ad coperiendum guacillum… ».
1212
Ibid., 1361, [f°98 v°4]. « …pro sex faxis late receptis et positis in aguacerio… ».
1213
Ibid., 1361, [f°92 r°5]. « Item pro 500 tegulis receptis ad opus guacillorum… » ; [f°93 v°7]. « …pro 400 tegulis ad opus gacilli retro castrum… ».
1214
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°72 v°2]. « ...pro portando tegulos de hospitale Beate Marie in dicto guachillo... ».
1215
Ibid., 4E76/CC48, 1361. [f°98 r°4]. « Item Arnaudo Vitarel de Podio Stuirano pro 200 tegulis quos portaverat ad opus guacilli inter portam
Narbonesiam et castrum » ; [f°99 r°8]. « …Petro de Plano Villario innuori de Podio Stuirano pro 800 tegulis emptis per ipsum portatis et positis in
guacillis circumcirca castrum et turibus… ».
1216
Selon M.-C. Marandet, les tuileries sont très fréquentes en Lauragais à l’époque médiévale, puisque l’ensemble des registres d’estimes consultés
« montrent qu’il existe, au moins, une tuilerie par village » (Marandet 2006b, 289).
1217
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°8 v°1]. « …pro 760 clavis et quatuor brachiatis folie ad opus dictorum gaycillorum... ».
1218
« Former le faite horizontal ou le sommet pyramidé d’une élévation ou d’une partie d’élévation » (Pérouse de Montclos 1995, 23). AD Aude, [f°8
r°3]. « …pro quatuor brachiatis folie […] et pro 200 clavis baratorum ab ipso receptis pro dicto opere… » ; [f°69 v°7]. « …pro 60 clavels baradors
que foro mezes obs de coronar le gaytil de l’angle dejos la porta de S. Antoni… ». Ces clous baradors sont également utilisés à Toulouse, pour les
gaytils ou les agassiers : AC Toulouse, EE32, 1354, [f°9 r°4]. « Item pus per 200 clavels baradors fortz […] a obs dels gachils de Matabuau… » ; [f°9
v°1]. « Item pus […] per 300 clavels baradors […] a obs dels agassiers de Matabuou ».

137
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

l’armature du gaytil supportant les chevrons de la toiture. s’agit-il d’un fer fabriqué à partir d’objets reforgés, ou de
Par ailleurs, trente « gros clous » sont employés pour métal directement acheminé en lingots pour être trans-
« clouer les planches derrière le dit gaytil »1219. formé à la forge ?
Une unique mention de « clavis de moli » (clous de De fait, ces chevilles sont fabriquées en grosses quan-
moulin ? clous de rouelles de cerceau ?) désigne-t-elle un tités et souvent reforgées ou réutilisées, même usagées1228.
type de clou utilisé en meunerie ou en tonnellerie et Enfin, ces gaytils possèdent également des portes ou des
employé ici pour le gaytil 1220 ? Les claves de relha (clous volets nécessitant l’emploi de vertevelles de verrou1229 et
de penture) sont quant à eux utilisés indifféremment pour
d’éléments de ferrures, comme des anneaux1230.
les gaytils et les agassiers1221.
Les chevilles sont pour leur part commandées par Ainsi, en conclusion, on constate l’omniprésence du
ensembles de sept à huit livres en moyenne1222, le maximum torchis en Lauragais, Toulousain et Albigeois, ce qui
étant atteint avec un achat de 76 l.1223 : cette dépense dénote une parfaite maîtrise technique du procédé, en
distingue deux types de cavilhas, les premières à 13 d. même temps qu’une utilisation optimale des ressources
tournois la livre, les secondes à 14 d. tournois, signe d’une naturelles comme l’eau, les végétaux (bois, foin), et bien
différence de taille ou de qualité, voire les deux. D’autres sûr la terre.
cavillas sont acquises auprès de forgerons locaux (Pierre
Le torchis ne joue cependant jamais de rôle porteur,
Coste, Bernard Dupuy, Guillaume Gelat) au prix de 16 d.
tournois la livre1224. mais seulement de remplissage, d’isolant, ou de protection
contre les projectiles de l’ennemi. Il nécessite donc systé-
Ces écarts de prix peuvent s’expliquer par des change- matiquement une structure-cadre en bois, ce qui le rend
ments dans l’approvisionnement du fer : à plusieurs
donc très dépendant des propriétés physiques et tech-
reprises en effet, on évoque la fabrication de chevilles
grâce au « fer de la ville », par opposition au « fer niques de ce matériau, et d’éventuelles difficultés liées à
personnel » de l’artisan, le second étant systématiquement son approvisionnement. Sa préparation s’effectue en
plus cher que le premier1225 ; en effet, dans le premier cas, plusieurs étapes mais on ne sait si la terre était préalable-
le métal était gratuit à l’acquisition, alors que dans le ment criblée ou tamisée avant d’être utilisée. Par ailleurs,
second le forgeron était chargé de le fournir1226. un badigeon vernait recouvrir in fine la terre et le colom-
Des chaînes (ou du fer ?) livrées par la ville sont réuti- bage. La toiture participait à cette protection, grâce à un
lisées comme cavillas, toujours au même prix, puisque le débord extérieur de plusieurs dizaines centimètres empê-
métal est donné par les consuls (6 d. tournois la livre)1227. Le chant la pluie de pénétrer par le faîte de l’ouvrage, le
« fer de la ville » correspondrait à la réutilisation d’objets torchis, comme le mur en terre massive, étant particulière-
de provenances diverses mais appartenant tous à l’univer- ment sensible aux infiltrations. Une fois achevée, la
sité (serrures, chaînes, etc.). Quant au « fer personnel » construction en torchis présentait cependant certains avan-
employé par les forgerons, on ne sait rien sur ses origines : tages : facilité pour se procurer les matériaux, isolation

1219
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°68 v°4]. « ...per 30 clavels groses obs de clavelar las postz detras le dit gaytil… ».
1220
Ibid., [f°10 r°7]. « ...pro 500 clavis de moli pro operibus gaycillorum » ; « Mola : meule, pierre à aiguiser, rocher, moulin, rouelle de cerceaux »
(Lévy 1909, 250). On le rencontre aussi parfois pour des travaux sur l’enceinte, sans plus de précisions : AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°8 r°5]. « ...pro
[...] viginti quinque clavis de moli, 25 clavis barratorum [...] pro operibus clausurarum » ; [f°24 r°9]. « ...pro 1600 clavis de moli ab ipso receptis pro
operibus clausurarum… ».
1221
Ibid., 1361, [f°105 r°11]. « Item pro aliis 200 clavibus de relha quos receperat dictus Geraldus et posuit in dicto guacillo » ; [f°105 v°4]. « Item
pro 200 clavis de relha [...] ad opus aguaserii retro castrum ».
1222
Ibid., 1359, [f°5 r°8]. « Item pro octo libris cavilharum ferri ad opus guacillorum… » ; [f°5 v°1].
1223
Ibid., [f°5 v°7]. « ...Robineto Fabro Gallico pro 25 libris cavilharum ferri ab ipso receptis ad opus guacillorum pro qualibet libra 13 d. tur. et plus
eidem pro 51 libris cavilharum ferri ab ipso receptis pro dictis gaycillis pro libra 14 d. tur.… ».
1224
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°3°r°9], [f°4 v°13] ; [f°5 v°7].
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°8 v°1]. « ...magistro Bernardo de Podio pro 11 libris cavilharum ferri ab ipso receptis pro operibus guacillorum pro
qualibet libra 16 d. tur. » ; [f°9 v°7] ; Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°146 v°3].
1225
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°29 r°3]. « ...Simoneto Fabro pro 83 l. cavilharum ferri facta de ferro dicte universitate pro operibus clausurarum pro
libra 6 d. tur. et pro libra ferri de ferro suo pro dictis operibus pro libra 10 d. tur.… ». Ce dernier peut aller jusqu’à 16 d. tournois la livre ([f°19 r°6].
« ...pro 31 libris cavilharum ferri factis de ferro suo propro pro operibus clausurarum pro qualibet l. 16 d. tur.… ». À Rodez, le fer de la ville est
appelé « nostre fer » par le scribe : « …a P. Jolia, favre, per 7 dotzenas quens fes de nostre fer… » (Bousquet 1926, 339). Du fer de très bonne qualité
provenant d’Ariège (« fer de Foix ») était aussi utilisé dans cette ville (« …per 7 l. de fer de Foys que n’ac R. Palhargues per calsar 3 marras, a for
la livra de 6 d… » ; Bousquet 1926, 340). Il n’est jamais mentionné à Castelnaudary, et ce bien qu’il se « diffuse jusqu’en Gascogne, Périgord, et
Rouergue, à partir du comté de Foix et de Toulouse » (Verna 2001, 217).
1226
C’est apparemment l’avis de O. Chapelot : « Le plus souvent, on achète des éléments en fer, soit finis, soit semi-finis. Que le fournisseur soit un
revendeur ou que l’on ait affaire à un artisan qui fabrique « de son fer », on ignore tout de l’origine exacte du métal. Que signifie l’expression « de son
fer » ? Que le forgeron est lui-même producteur ? Rien n’est moins sûr. Par contre, on peut très bien concevoir qu’ayant au départ acheté la matière
première (locale ou non) il établisse un devis tenant compte à la fois de la fourniture du métal et de son propre travail de forge. Les registres fiscaux et
les actes notariaux, dans la mesure où ils donnent des indications sur l’extraction du minerai, la production et la distribution du métal brut, nous inci-
tent à préférer la seconde hypothèse » (Chapelot 1985, 309).
1227
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°14 v°4]. « ...pro 442 l. cavilharum ferri per ipsum factas pro operibus clausurarum de ferro seu cathenis dicte
universitatis pro qualibet libra 6 d. t... ».
1228
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°105 r°6]. « …pro quatuor l. cum dimidia cavillarum ferri antiquarum ad opus dicti scalierii… ».
1229
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110 r°8]. « …pro una armela feri quam receperant operarios et poni fecerant in guacillo Johannis Fizas... ».
1230
Ibid., [f°110 r°9]. « Item eidem pro duabus landis de fero positas in dicto guacillo... ».

138
NATURE, PLACE ET RÔLE DU COLOMBAGE / TORCHIS LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE
À CASTELNAUDARY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS

thermique efficace, mise en œuvre aisée, moindre sensibi- ment au « ras du sol » (pals des barbacanes ou situé devant
lité à la combustion qu’un ouvrage entièrement en bois. l’enceinte urbaine). Dans ce dernier cas, il permettait
Dans la fortification, on retrouve le torchis sur la d’économiser le bois, déjà fort utilisé dans pour la palis-
plupart des superstructures défensives (ambans, cadafalcs, sade extérieure de la ville et dans nombre de structures
agassiers), des postes d’observation (gaytils), mais égale- défensives.

139
LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE, P. 141-148 LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

Chapitre 9

Les autres utilisations de la terre crue

Hormis les deux utilisations majeures dans la fortifica- Cette rareté, également constatée dans les registres
tion chaurienne (terre massive et torchis), la terre crue peut suivants, indiquerait que ce procédé, certainement appliqué
servir d’agent de protection et d’isolation pour certaines à tous les planchers des ouvrages de la ville, ne nécessitait
constructions, d’élément de remblai et de stabilisation, ou pratiquement pas d’entretien : on relève ainsi, à titre
enfin de composant pour un mortier destiné à divers d’exemple, l’« enterrement » en mai 1363 du plancher de
usages. la tour de l’Estrade1235 et vers le 12 août celui d’un gaytil de
la porte du Barri, besogne réalisée par un charpentier1236.
9.1 - La terre comme élément de protection et d’isolation En 1360-1361 des opérations similaires ont lieu sur les
Quantitativement parlant, il s’agit là de la plus impor- cadafalcs1237, notamment derrière une ala1238.
tante utilisation de la terre crue en tant que « matière » (et Pour les hourds, cette tâche concerne à la fois le toit
(tetz, tectum) avant la pose des tuiles1239 mais aussi le plan-
non plus en tant que « matériau ») entrant dans la compo-
cher, comme celui des Frères la même année1240. C’est
sition de structures bâties. Les sources désignent ainsi par
également aux hourds qu’il faudrait rattacher une dépense
« interrar » ou « enterrar » (couvrir de terre, enterrer1231), de 1366 où P. Belengier se charge de mettre « du peuplier »
l’action consistant à recouvrir à demeure certaines parties (certainement des voliges) et d’« enterrer » une partie des
de la construction avec une couche de terre. parets de la Baffe (toit et plancher ?)1241.
Cette opération porte sur plusieurs points de la fortifi- Cette essence est également associée aux coursières, les
cation : les planchers tout d’abord, cités à seulement trois plus grandes bénéficiaires de l’« enterrement » : à l’instar
reprises entre 1359 et 1362 (tour de la porte de Valence1232, des hourds, la terre est appliquée sur les voliges (pour le
tour de la porte de la Baffe1233, porte de Goufferan1234). toit) ou les lattes (plancher ?) de peuplier1242.

1231
Lévy 1909, 153. La troisième acception de ce terme, « crépir », ne semble pas avoir cours à Castelnaudary.
1232
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°3 r°3]. « ….cuidam homini extraneo qui dicta die interraverat solerium dicte turris ».
1233
Ibid., [f°11 v°3].
1234
Ibid., 1361-1362, [f°97 v°9]. En Savoie et en Bresse, « dans la plupart des édifices à étages, notamment les tours ou corps de logis, l’espace est
généralement divisé en plusieurs niveaux par des planchers, composés le plus souvent de solives assez rapprochées. Dans le cas de grandes surfaces,
une grande poutre (pos) supporte des solives (tablamento solani) recouvertes de planches (lattae), au dessus desquelles est étendue une couche de
terre » (Chalmin-Sirot, Poisson 2003, 179).
1235
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°26 r°3]. « ...ad enterrandum solerium turrim de la Strada... » ; [f°26 v°1].
1236
Ibid., [f°72 v°2]. « ...Guillermo Rogerii fusterio pro enterrando solerium guachilli porte de Barrio… ».
1237
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°72 v°5]. « ...fecerunt interrare cadafalcos de juxta portam Campanariu et de juxta portam magistri Bertholomei
Constantini et fuerunt conducti ad id agendum 2 homines et 3 mulieres… » ; [f°74 v°5] ; [f°74 v°6] ; [f°80 r°5]. « ...pro interrando cadafalcum de
retro hospicium Bernardo Ricardi, Pontius Dennierii, Favre Bordas […] et tres mulieres… » ; [f°80 r°6]. « ...pro interrando et coperiendo cadafalcum
de retro alam fuerunt conducti B. Grassi, Ramundus Dandant… ».
1238
Ce terme est difficile à définir : il pourrait désigner soit une « partie de fortification » (Lévy 1909, 14), soit une « hale » (Du Cange 1840-1850, t. 1,
158 ; 2e col : « hala, forum, macellum tectum »), soit une « aîle de bâtiment » (Ibid., 3e col ; « cujusvis aedificii latus »).
1239
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°56 r°1]. « …e per enterar le tetz […] laqual obra fec ledit R. Sarasi als enbans de las paretz de la Baffa… ».
1240
Ibid., [f°69 r°2]. « …que aquel dia stero a pugar terra per enterar le solier dels embans dels Frayres Menors… ».
1241
Ibid., [f°93 v°3]. « …an P. Belengier per metre le polpet et enterar una partida de las parets de la Baffa… ».
1242
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°52 v°5]. « …Bernardo Farola fusterio qui stetit ad enterandum et ponendum polpetum in corseriis inter castrum et
portam Sancti Antonini… ».

141
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

D’après les données fournies par les deux premiers L’enterrement des toits et planchers était également
comptes (1359-1362), ces opérations se déroulent durant le utilisé dans la construction civile, comme on peut encore le
printemps1243 ou l’été1244, parfois pendant l’automne, mais constater de nos jours sur certains édifices : ainsi, dans le
apparemment jamais après novembre1245. Il s’agissait Gers, selon A. Klein, la grange de Juilles et la maison-forte
certainement d’éviter les intempéries, et notamment la de Sainte-Christie d’Armagnac (XVIe siècle) possèdent un
pluie, qui rendaient la tâche bien plus pénible (matériau plancher recouvert de terre1255 ; quant aux toits, certaines
nettement alourdi, boue, etc.). fermes du XIXe siècle possèdent encore des couches de
terre sur les voliges, comme à la ferme de Panquère
Cette opération d’« enterrement » est souvent associée (Castelnau-Magnoac, Hautes-Pyrénées, fig. 44). Cette
aux travaux du torchis1246 ; il est probable qu’elle employait technique de protection des toits et planchers était large-
une terre « brute », c’est-à-dire sans mise en œuvre spéci- ment employée dans la construction médiévale du Sud-
fique, directement issue du fossé ou des champs alen- Ouest de la France, et ce jusqu’à l’Epoque Moderne,
tours1247. période à laquelle on la signale également en Vaucluse1256.
Dans le cas contraire, c’est le terme
Quel était le, ou les intérêt(s) de cette pratique dans la
« bardar/enbardar », voire « abardissar »1248, qui désigne,
fortification, puisque la terre alourdissait considérablement
à quelques rares reprises, l’action de recouvrir une toiture
les charges supportées ? Pour les planchers des tours et des
avec du bart, c’est-à-dire de la terre plastique mêlée d’eau
tours-portes, outre un rôle d’assainissement des pièces, la
(supra), quelquefois composée de foin : en effet, en tenant
couche de terre (dont l’épaisseur n’est d’ailleurs jamais
compte de l’énumération proposée par le scribe, ces deux
précisée), devait avoir une fonction ignifuge1257. Pour les
verbes s’insèrent dans un processus visant à parfaire le toit, hourds et les coursières, en plus de cet avantage, elle avait
après les termes « cooperire » et « latar »1249. À également pour objectif de renforcer la capacité défensive
Castelnaudary, le terme « bardar » ne s’applique jamais à de ces superstructures face aux tirs de l’ennemi, les défen-
un plancher, mais systématiquement à une toiture (pour un seurs étant ainsi protégés, en bas par un plancher
hourd ou un gaytil)1250. Dans un registre proche, une unique « enterré », de front par une protection en torchis, et en
dépense montre que du lutum1251 et du mortier ont été trans- haut par des voliges recouvertes de terre puis de tuiles
portés pour couvrir un cadafalc1252. canal. Dans ce dernier cas également, la terre avait peut-
Le 28 novembre 1376, les consuls font acheter dix être une fonction de régulation thermique dans ces longs
seaux de terre qui sont étalés sur la toiture de l’église Saint- corridors de bois.
Michel (colmatage d’une fuite ?). Cette petite quantité, Enfin, une mention du 30 octobre 1398 précise que deux
acquise auprès du marchand de poix d’Issel, laisse penser hommes sont rémunérés, entre autres, pour couvrir un mur à
à une préparation spéciale (poix1253 et terre ?), eu égard à la pierres et chaux (murus) par une couche de terre, de manière
faible quantité et au prix payé (3 l. 4 s. tournois)1254. à le protéger des pluies1258. La terre pouvait donc servir le cas

1243
Ibid., [f°26 v°1]. « Item die penultima madii dari et exsolvi fecerunt Petro Messier, Ramundo Blanquier, Bertrando Unerii et Ramundo de Caucels
qui steterunt ad enterrandum solerium turris de la Strada... ».
1244
Ibid., [f°62 v°6]. « Item die jovis IIII augusti dare fecerunt Arnaudo Martini et eius uxori quibus steterunt ad enterandum dictas corserias... ».
1245
Ibid., 4E76CC51, 1366, [f°98 v°7].
1246
Ibid., 4E76/CC49, [f°33 r°5]. « ...pro sparonando atortissando et enterrando 17 brachiatas et media ambanamenta parietis nove retro castrum...».
Cependant, à la différence du torchis, cette opération n’utilisait apparemment pas de végétaux.
1247
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°98 v°7]. « ...an P. Strada, B. Concordia que aquel dia stero a cavar terra per metre a las corsieras de las parets dels
Frayres Menors per enterar… ».
1248
Ibid., 4E76/CC49, 1363-1364, [f°154 v°3]. « ….et pro sparonando atortissando et recubriendo de tegulis et abardissando et encaucinando cum
morterio supra tegulos... ».
1249
Ibid., 1363, [f°101 r°6]. « ...pro sparonando atortissando coperiendo de tegulis latando et bardando tres brachiatas ambanamentorum parietis nove
castri… » ; Ibid., 4E76, CC77, 1441, [f°28 r°3]. « Item foc pagat per 6 quintals de fe per tortisar e per enbardar… ».
1250
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°72 v°2]. « ...pro enterrando solerium guachilli porte de Barrio sparonando atortisando recobriendo bardando et
encaucinando dictum guachillum…».
1251
« Lutum : boue, limon, argile, terre de potier » (Gaffiot 2000, 938-939).
1252
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°79 r°8]. « …ad portandum tegulas, lutum et morterium pro cohoperiendo cadafalcum…».
1253
« Matière visqueuse à base de résine ou de goudron de bois » (Robert 1982, 1473). C’est également du goudron (du brai) qui est utilisé à Dieppe
pendant la guerre de Cent Ans pour colmater les fissures des gouttières en bois des maisons de la ville (Lardin 2006, 84).
1254
Ibid., 4E76/CC55, 1376, [f°37 r°3]. « …al pegarier d’Isselh pro 10 selas de tera las quals foro mezas sus le cuberts de la gleysa de Sant Miquel
2 francs d’aur valo. 3 l. 4 s. tur. ».
1255
Dans le premier édifice, le plancher du second étage possède une épaisseur de 2,5 cm. Il est recouvert par une couche de terre de 10,5 cm d’épais-
seur ainsi que par des carreaux de terre cuite modernes (XIXe siècle) de 2,5 cm d’épaisseur. À Sainte-Christie, les lattes du plancher, d’une épaisseur
de 2 cm, sont recouvertes d’une couche de terre de 7 cm, elle-même masquée par des tomettes de 3 cm d’épaisseur, soit au total 12 cm (informations
aimablement communiquées par A. Klein).
1256
Ainsi, « divers prix-faits, du XVIe au XVIIIe siècle, attestent l’emploi courant de la terre pour le nivelage des sols et la pose des éléments de couver-
ture sur l’extrados des voûtes » (Vaucluse 1981, 108).
1257
En Suisse, au château d’Yverdon, « on s’est beaucoup préoccupé de la protection contre l’incendie, ce qui a d’ailleurs permis aux maçonneries prin-
cipales de survivre à deux catastrophes majeures. La charpente était complètement isolée des corps d’habitation ; en effet, sa base ne formait pas le
plafond de l’étage d’habitation, puisque celui-ci la dédoublait, environ 80 cm au-dessous, et était couvert d’une importante couche de terre coupe-feu »
(Raemy 2003, 232, 231, fig. 4a).
1258
AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°115 r°3]. « Item die jovis XXX octobris solvi fecerunt Poncio Maurini et Arnaudo Cumbelli [...] pro coperiendo
murum de terra ad finem ne aques pluviales non dampnificarent dictum murum… ».

142
LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

échéant d’isolant temporaire pour une maçonnerie en cours


d’édification, mais on ne sait si elle était laissée là jusqu’au
printemps1259 ou si les ouvriers ont continué de bâtir les jours
suivants, après l’arrêt des intempéries.
9.2 - La terre comme élément de remblai et de stabilisation
Dans d’autres cas, beaucoup plus rares d’après les
sources, la terre est utilisée comme élément de remblai
et/ou de stabilisation : le 20 mai 1360 par exemple, quatre
hommes apportent une partie de la terre du fossé (en cours
de creusement ?) jusqu’à la barbacane de la porte de la
Place (enceinte en pierre, supra), afin d’aplanir le sol1260.
L’année suivante, trois femmes portent également de la
terre dans une barbacane durant une journée entière1261.
Ces deux mentions concernent des ouvrages avancés
dont le sol a vraisemblablement été régularisé de manière à
faciliter la circulation, que ce soit pour la défense ou le
transit des hommes et des marchandises.
D’autres dépenses, toutes uniques, laissent envisager
divers emplois de la terre dans la construction ou l’aména-
gement de Castelnaudary : le 4 septembre 1363, trois
personnes comblent avec de la terre une certaine fosse
située derrière le « juponerium »1262 (trou dans la
chaussée ?)1263. Aux environs du 17 juin 1366, deux
hommes (des parediers ?) doivent « arranger de terre les
cavalet1264 de la paret » de la Baffe1265 : le terme « cavalet »,
rencontré pour les ponts (supra), paraissait alors désigner
le ou les support(s) du tablier. Mais dans ce cas précis, les
deux personnes ont-elles consolidé ou stabilisé un étaie-
ment provisoire en bois destiné à soulager une paret mena-
Fig. 44 : Ferme de Panquère, à Castelnau-Magnoac (Hautes-
çant ruine ?
Pyrénées, cliché : A. Klein, 1992). Voliges de toiture, cô-
té ouest, recouvertes d’une couche de terre sans végé- Deux autres cas de 1363 restent quelques peu obscurs :
taux. Ce dispositif jouait un rôle d’isolation contre les dans le premier, trois personnes ont bouché avec de la terre
vents pluvieux et la chaleur en même temps qu’il facili- un certain (ou une certaine) « strenha » derrière le jupo-
tait le calage des tuiles canal (diminution du risque de
nier1266. Dans le second, Stéphane Barrau et Pierre de Fargia
glissement et de soulèvement face au vent d’ouest).
Cette couche de terre servait également de protection ont obturé un trou donnant vers les fossés, situé dans une
contre l’incendie. « paret strinhe »1267. Ce vocable proviendrait du verbe
« estrenher » dont l’une des acceptions est « restreindre,
rétrécir » (Alibert 1966, 386). La paret en question est donc
« amincie » car sa base a été sapée par l’eau de pluie : en
conséquence une réparation s’impose de toute urgence, car
elle menace de s’effondrer…

1259
Cette protection est fréquente au Moyen Âge. Ainsi, lors de la reconstruction de la porte de Montrescu, à Amiens, à partir de 1390, et juste avant
l’hiver, période durant laquelle on suspend les travaux de maçonnerie, « les hottiers éparpillent des terres sur la forteresse pour protéger les maçonneries
et renforcer les murs. Les dégradations dues au gel sont réelles » (Baudoux-Jung 1999, 292). Certaines carrières sont recouvertes de la même manière
(« En mai 1392, les hottiers enlèvent les terres qui recouvraient les carrières des fossés de Montrescu, de Gaiant, puis de Saint-Pierre » ; Ibid., 293).
1260
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°57 r°2]. « …an Ar. Garet e an Jacmes Foguet e an Peyre Paga e an Peyre Baro que aquel dia portero terra
de fora le valat per aplanar le sol dedintz la barbacana de la porta de la Plassa… ».
1261
Ibid., [f°93 r°7]. « Item tribus mulieribus que fuerunt seu steterunt per unam diem ad portandum terram in barbacana… ».
1262
« Juponerius : Qui facit jupones. Le jupo peut être un pourpoint ou une cotte rembourée ou ferrée pour la guerre. Ex. : in qua (navi) ultra 353,
guarnimenta ferri, ultra jupones, hermos, clypeos et alia arma, multa ceperunt ». (Du Cange 1840-1850, t. 3, 927, col. 1). Il s’agirait ici de la boutique
de l’artisan ou de sa maison.
1263
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°86 r°2]. « ...Ramundo de Caucels, G. Talabastii, G. Arsen qui steterunt ad ponendum terram in quadam fovia
qui erat retro juponerium… ».
1264
« Cavalet : tréteau, baudet de scieur de long » (Alibert 1966, 214) ; « chevalet » (Lévy 1909, 73). Le chevalet ou tréteau est un « assemblage de
pièces de bois comprenant chaque fois une pièce horizontale portante montée sur deux ensembles de pièces obliques en triangle » (Baud et al. 1996,
136).
1265
AD Aude, 4E76/CC55, 1366, [f°24 v°3]. « ...an Ar. Massip, an Ar. Guaret per engalhar de terra les cavalet de la paret de la Baffa ».
1266
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°62 r°7]. «...Guillelmo Talabasti, Guillelmo Arsen, Ramundo de Caucels qui steterunt ad claudendum de terra quandam
strenham retro juponerium… ».
1267
Ibid., [f°104 r°8]. « Item Stephano Barravii et Petro de Fargia pro claudendo quoddam foramen quod erat in pariete strinhe Guillermum Raynardi
quod exiebat in vallis… ».

143
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Enfin, vers le 30 octobre 1363, deux hommes réalisent En 1360-1361, trois individus se chargent du transport
une « payssière de terre »1268. Ce vocable (payssiera, pais- « de pierre et de terre avec lesquelles on faisait le mur de la
siera, paxeria) possède plusieurs acceptions, et le contexte dite barbacane (de la porte de la Place) »1277. Cet ouvrage
empêche véritablement de trancher entre elles1269. Ces devait apparemment posséder un mur d’enceinte en pierre,
aménagements, systématiquement présents au fond du en partie lié à la terre (en partie seulement, puisqu’une
fossé, sont quelquefois construits à pierres et chaux par des dépense pour le même ouvrage révèle également un trans-
maçons1270, et peuvent exiger jusqu’à 15 jours de travail1271 port de chaux1278). Dans ce contexte, quelle est la destina-
et d’importantes opérations de terrassement1272. Ils servent tion du sable stocké dans une jarre apporté par Raymond
à retenir et canaliser l’eau et doivent être régulièrement Noguier ? Servira-t-il à confectionner un mortier de terre
nettoyés1273. D’après une mention d’avril 1364, ils possè- ou un mortier de chaux, voire les deux1279 ?
dent un système de vannes (en fer ? en bois ?)1274. Toujours pour la même barbacane, trois hommes trans-
Ainsi, l’existence d’une « paissière de terre » peut portent de « la terre et du sable pour faire du mortier pour
surprendre, puisqu’on a vu que les maçonneries de terre faire les merlons ». Cette construction possédait donc un
crue s’accommodaient fort mal de la présence de l’eau. Les chemin de ronde en pierre lié par un mélange de ces deux
comptes désigneraient par là une levée de terre servant de éléments1280. L’utilisation du mortier de chaux pour sceller
digue ou de « barrage »1275. Si elles ne servaient pas de des merlons est également évoquée à une seule reprise,
réservoirs à poissons, ces paissieras devaient permettre de signe que les deux liants sont employés de manière
cloisonner l’eau dans une partie du fossé pour divers concommittante1281.
usages. Ces observations faisant état de sable dans le mortier de
terre rejoindraient celles de Lebrun, faites au milieu du
9.3 - La terre comme liant : le mortier de terre XVIIIe siècle : « le mortier de terre se compose avec du
La terre crue peut également entrer dans la composition sable et de la terre glaise, autant de l’un que de l’autre, à
d’un mortier de terre liant des blocs de pierre1276 ou des moins que la terre glaise ne se trouvât un peu plus grasse
briques cuites. qu’à l’ordinaire, ce qu’on connoît lorsque le mortier s’at-

1268
Ibid., 4E76/CC50, 1363, [f°38 r°7]. « Item Arnaudo Guarreti, Poncio de Sant qui steterunt ad faciendum unam paysseriam de terra in vallo retro
dominos canonicos… ».
1269
« Paissiera : barrage de rivière, digue, chaussée d’un moulin, batardeau, écluse, réservoir à poissons ; meule de moulin à huile » (Alibert 1966, 520) ;
« paissière : (du lat. paxillum), barrage de pieux, barrière faite de pieux maintenant des fascines afin de créer une retenue d’eau » (Cayla 1964, 524).
1270
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°115 v°4]. « ...ad portandum petram et caucem et sirviendum Johannem Galigo qui operabatur in paysseria
valli… » ; 1364, [f°172 r°5]. « …ad portandum petram et morterium ad opus faciendum payseriam… ».
1271
Ibid., 1363, [f°115 r°1]. « ...magistro Johanni Gualigonis peyrerio qui stetit per 15 dies ad faciendum paysseriam in vallo de barrio… ».
1272
Ibid., [f°135 v°2]. « …Fabro de Podio qui stetit ad aplanandum ruppem valli de Barrio ubi Johannes Maurini assetiaret paysseriam dicti
valli… » ; 1364, [f°173 r°1]. « …Johanni Maurini et Ramundo Johannis, peyreriis […] ad cavandum in vallo de Barrio ubi assetiarent paysseriam ».
1273
Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°73 v°3]. « …amoverunt aquam paxerie Strade a parte austri qui est in cava porte de Got Feran pro curando eam ut
dicta cava curaretur… ». La nature argileuse de la terre a pu favoriser la rétention d’eau. Il en est ainsi à Saint-Trivier-de-Courtes, agglomération qui
« profite du sol très argileux qui l’entoure pour que ses fossés, à l’instar des étangs alentours, conservent l’eau et l’isole des terres voisines » (Kersuzan
2005, 211) ; à Toulouse, en 1418, à l’approche du comte de Foix, les consuls ordonnent de faire rapidement des resclausas dans les fossés, terme équiv-
alent à celui de « paissière » à Castelnaudary (AC Toulouse, BB3, 1418, [f°28 v°3]. « Item que prestament se curen los valatz per tot la on sera necessi
e se fassan resclausas…») ; « resclausa : écluse, chaussée, batardeau » (Alibert 1966, 602).
1274
AD Aude, 4E76CC49, 1364, [f°178 v°4]. « …pro portando capellos de Barrio ad portum Bordarum ad opus payseriarum… » ; Le terme « capel »
possède trois définitions distinctes : « chapeau, couche de terre, pièce supérieure d’une vanne » (Alibert 1966, 204), la dernière s’appliquant en
l’espèce : en effet, ces « capellos » (donc au moins deux), sont transportés depuis le barrium jusqu’au port des Bordes. Il s’agit donc d’objets définis
et non d’une matière.
À Lille, au début du XVe siècle, la cité maintient ses fossés en eau « grâce à toute une série d’écluses (rabats) que la ville possède en amont, sur la haute
Deûle. L’eau pénétrant dans les fossés est ensuite maintenue au niveau voulu grâce à des vannes (ventelles, aussuelles). Certaines sont installées à
demeure sous la tour de la Neuve Arque, la tour de Rihout ou devant la porte du Molinel, là où les eaux entrent en ville, ou sous la tour des Clercs, par
où elles en ressortent. D’autres semblent mises en place pour l’occasion, par exemple devant la porte Saint-Pierre ou la porte de la Barre » (Blieck 1999,
302). C’est également le cas en Bresse et en Bugey où « des vannes placées à la jonction des fossés en amont et en aval de la rivière permettent, d’une
part de contrôler le débit dans les douves et de l’autre de les vider, puis de les remettre en eau lorsque le travail est terminé » (Kersuzan 2005, 212).
1275
Dans ce cas, elle pourrait peut-être ici se rapprocher d’un « dodasne », terme désignant à Douai un « batardeau, digue de terre ou de maçonnerie
construite dans les fossés des fortifications ou dans le cours d’une rivière » (Salamagne 2001a, 219).
1276
Cette utilisation doit être faite à dessein. Ailleurs, on a pu mettre en évidence l’adjonction de terre au mortier de chaux à des fins frauduleuses, opéra-
tion ayant entraîné l’écroulement total d’un ouvrage en pierre, en l’occurrence la tour d’Eygeliers de l’enceinte de Guillestre en 1397 (Nicolas 2005,
208). Dans un autre domaine, en Bretagne, J.-P. Leguay signale que « des quantités variables de terre « à terrace », d’argile, de sable et de chaux appa-
raissent aussi dans les comptabilités des chantiers » (Leguay 1985, 31). Cette argile servait-elle également de liant pour la construction ?
1277
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°57 r°4]. « …an G. Peri e an Peyre Ramon e an Estene Ramon que aquel dia avian portada peyra et terra de
que fazian mortier a far le mur de la dita barbacana… ».
1278
Ibid., [f°56 r°2]. « …per 7 sestairadas de caus que avian mesas a la obra del mur de la barbacana de la porta de la Plassa… ».
1279
Ibid., [f°56 r°3]. « …an Ramon Noguier per portar arena de gerlada ad obs del mur de la barbacana de la dita porta… » ; « gerlada : contenu
d’une jarre » (Alibert 1966, 428).
1280
Ibid., [f°58 r°1]. « …que aquel dia avian portada terra e arena per far mortier a far les dentels de la barbacana de la porta de la Plassa… ».
1281
Ibid., 1361-1362, [f°119 v°1]. « ...pro aliis viginti sestariis calcis quos portaverat ad opus dicte barbacane et dentelorum Fratrum Minorum… ».
Par ailleurs, à Dieppe, lors de la construction d’un boulevard d’artillerie « en juillet et août 1446, des ouvriers lièrent des pierres qui composaient cet
avant-poste avec un mortier à base de chaux fabriquée à partir de marne » (Lardin 2006, 103). En effet, la marne est un « mélange naturel d’argile et
de calcaire » (Robert 1982, 1156).

144
LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

tache au rabot, auquel cas il faut y mettre un peu plus de Par ailleurs, à Toulouse, au milieu du XVe siècle, des
sable… » (Lebrun 1753, 44). travaux sont réalisés au château Narbonnais : réparation
À Toulouse, en janvier 1354, une dépense détaille la des pavements et bouchage de certains trous (dans des
technique d’édification du « mantel » au pied de la paret : chambres et des salles) avec des briques cuites et de la
cette construction (parement de briques cuites couvrant un « terra liza », dont il faut employer cinq charretées1286.
noyau de terre crue à la base de l’enceinte, supra), a en Cette « terra liza » ou « lhisa » est également employée à
effet été attribuée à prix-fait à un certain Raymond de Cas, Albi en 1381-1382, lors des travaux de réfection du mur de
maçon. Il devra édifier cet ouvrage avec des briques cuites la Brique : outre la réutilisation d’un millier de vieilles
briques (teula vielha), l’ouvrage requiert 540 saumadas1287
(teulas) liées au mortier de terre (mortier de terra), l’en-
de lhisa, soit environ 70 tonnes de cette terre1288. Le
semble étant ensuite « couvert ?» ou « crépi ?» (bassar) par
« noyau » de ce « mur » est une paret coffrée employant
du mortier franc1282. Ce dernier devait consolider le pare-
28 fagots de bruyère1289. Pendant plusieurs jours, cinq
ment et empêcher les eaux de ruissellement de saper la
personnes sont chargées, avec leurs bêtes, de transporter
base de la paret1283.
briques, riblo1290 et lhisa vers cette construction1291 alors que
En 1442, Bartholomé Ricart est chargé de confec- douze femmes transportent et amassent les briques1292.
tionner une auge de bois pour contenir du mortier ou du Deux hommes fabriquent le bart et « chargent » les
« bart » pour réparer un merlon de la porte Saint- femmes (dans des hottes ou des paniers ?)1293.
Antoine1284, protection sur laquelle deux maçons travaille- L’enceinte en question était une paret coffrée dont le ou
ront quelques temps plus tard1285. les parements étaient recouverts de briques cuites liées
L’expression « bart » aurait à première vue de quoi avec cette fameuse terre « lisa » ou « liza » définie par
surprendre dans ce contexte, puisque ce mélange (terre, A. Vidal comme de la « terre argileuse »1294 ou donnée
eau, quelquefois foin), était jusque là uniquement employé comme équivalent de « mortier de terre » à la frontière
pour la bauge ou le torchis (supra). Une indication fournie entre le Tarn et la Haute-Garonne (liza) ou au centre du
par un atlas linguistique vient éclaircir la question : en Tarn (liza, mortier de liza) (Ravier 1986, 838).
effet, dans certaines zones géographiques (Tarn, Ariège, Globalement, « lisa » peut se définir comme un « dépôt
Aude), l’enquête a révélé que le « mortier de terre » était de terre fine ou de sable fin, laissé par l’eau d’une rivière »
dénommé « bart » ou quelquefois « mortier d’agaça » ou comme de la « glaise » (Mistral 1878, vol. 2, 223), cette
(« mortier de pie ») (Ravier 1986, 838). L’expression dernière étant une « terre grasse compacte et plastique,
« mortier o bart » donnerait donc ces deux termes équiva- imperméable » (Robert 1982, 868). Ainsi, la terre liza ou
lents. Toutefois, le « bart » utilisé pour le mortier de terre lisa serait une terre argileuse à l’état naturel, la plus
contenait-il davantage de sable (à l’état naturel ou par collante possible pour lier les matériaux, qui présenterait
adjonction) que celui destiné aux constructions en bauge et en outre l’avantage de constituer des joints étanches pour la
en torchis ? construction1295.

1282
AC Toulouse, EE32, janvier 1354, [f°27 r°3]. « An Ramond de Cas, massonier. Dem a pres fait per far le mantel al pe a la paret costa la porta de
Montgalhart per massonar de teula ab mortier de terra e apres bassar de mortier franc… ».
Le terme « bassar » pose en effet quelques difficultés de traduction. Le seul vocable s’en rapprochant au niveau graphique et phonétique, mais égale-
ment quant au sens, serait celui de « bacha » (« mettre la bâche » ; Mistral 1878, vol. 1, 202). Toujours dans un registre imagé, fréquent dans les
comptes, « bassar » aurait-il ici le sens de « couvrir » ou de « crépir » ?
1283
Comme on le sait, la chaux est hydrofuge une fois la prise réalisée.
1284
AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°44 r°7]. « …an Bertholomiau Ricart per clavels reforssatz e barados per far hun nauc de fusta per tenir le mortier
o bart per adobar le dentelh de la porta de Sant Antoni… ».
1285
Ibid., [f°48 v°5]. « …a mastre Marti Ser peyrier e a son companho per 2 jorns que sten a far le mur del dentelh costa la porta de Sant Antoni… ».
1286
Couderc 1895, 451. 1445, 14 octobre. « Etat des réparations faites à l’hôtel de la Viguerie de Toulouse et au château Narbonnais ». 26. « Item, de
adobar de teula, am terra liza, los pazimens et emmurar algus trauxc de las cambra et sala, et y aver et empleguar III carretadas de terra liza et de
la teula desus extimada » ; 27. « Item de adobar de teula, am terra liza, la porta et l’alar de la cambra del portier del Castel Narbones junhent ald.
Hostal de la viguaria, et y aver ett empleguar II carretadas de terra liza ; et prendra la teula d’aquela que lo Rey a de sobras en lod. Castel ».
1287
« Saumada : charge d’une bête de somme » (Alibert 1966, 627). Environ 130 kg à Toulouse (supra).
1288
Vidal 1911, 1381-1382, 46. [f°75 r°]. « Sec se la mesa facha per lo mur de la Teula de davan l’ospital » ; 744. « A mastre Guilhem Garnier per
1 milhier de teula vielha que aguem de lu ad obs del dig obratge » ; 756. « An Phelip Vaysiera per 540 saumadas de lhisa que ac hom de luy ad obs
de far lo dig obratge ; a un barsalo la saumada ».
1289
Ibid, 46, [f°80 v°]. 824. « A X de abril, a mastre Bernat Serras per far la paret del mur de la Teula ajustada ab lo dig mur… ». 825. « A P. Corbieyra
per 28 faysses de bruguiera ad obs de far la dicha paret… » ; 48, [f° 80 v°]. 827. « A Marsal Guorses y a 4 homes que tornero las taulas que aviou
malevadas del hospital, ad obs de far las dichas paretz… ».
1290
« Riblo : débris de briques et de moellons » (Ibid, 268).
1291
Ibid., 1381-1382, 46, [f°78 v°]. 800. « A XIIII de mars, tant a Ramon Cabirol, tant an Ademar de la Tor, a mastre Ademar Grasset, a Johan Garnier,
a P. Guilhem de Tays, per 5 jornals de bestia per portar teula e riblo e lhisa al dig obratge… ».
1292
Ibid., 46, 762. « Le dia desus, per 12 femnas per servir e per far la manobro e per portar e amassar teula al dig obratge… ».
1293
Ibid., 763. « Lo dia deus, per dos homes a far bart e cargua las femnas... ».
1294
Ibid., 260.
1295
Selon G. Leblanc, « toutes les terres qui pouvaient et qui furent effectivement utilisées pour élever les courtines de Saint-Cyprien, présentaient aussi
les qualités voulues pour être transformées en briques, à condition de contenir plus d’argile (matière plastique) que d’autres substances (sables siliceux,
calcaire, oxydes de fer, etc.). C’est la terra lisa que Constantin s’engage à employer en 1442 ; en occitan la lisa, c’est la glaise » (Leblanc 1983-1984,
76). Jean Constantin, un maître maçon toulousain, s’engage en effet dans un contrat à élever pour la fortification de la ville des murs de briques cuites
liées avec de la terra lisa (de tegulis planis et terra lisa) (Ibid., 77, note 322).

145
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Les différents termes rencontrés (mortier de terra, bart, Enfin, en conclusion de cette partie, on s’aperçoit que la
lisa) désigneraient donc une même « matière », à savoir un terre crue, utilisée de façon massive, dans les constructions
liant argileux dont le nom varierait seulement en fonction en torchis, ou pour d’autres usages, est omniprésente dans
de la géographie et des coutumes locales, et non systéma- les fortifications chauriennes et toulousaines pendant la
tiquement en raison des modifications de sa composition. guerre de Cent Ans.
Hormis l’imperméabilité, quel était l’avantage pour les Pour expliquer ce phénomène, la première raison
bâtisseurs, de l’emploi d’un tel mortier de terre ? venant naturellement à l’esprit est celle de l’absence de
On pourrait penser, à l’instar de J.-M. Pesez, que le pierre (Toulouse), ou de sa moindre qualité pour la
mortier de terre, « argileux, assure par exemple une construction (Castelnaudary).
certaine élasticité, permettant d’accepter des déformations Ainsi, même au Mas Saintes-Puelles, village proche de
et des déversements, alors que le mortier, trop dur, fixant le Castelnaudary, la pierre est uniquement employée pour
mur en une raideur définitive, ne lui laisse d’alternative faire de la chaux, et n’est donc jamais importée comme
qu’entre l’immobilité et la chute » (Pesez 1998b, 65). Ce moellon pour le chantier chaurien. De fait, ce dernier ne
phénomène n’induit cependant pas que les murs soient plus dispose que de « micro-carrières », mises au jour au gré des
rapides à réaliser, même si la terre présente l’avantage excavations entreprises (fossé, fondations de l’enceinte,
d’être facilement accessible1296. Etait-ce finalement en etc.)1298.
raison de son moindre coût que ce type de liant était privi- Dans ce contexte, la matière première principale la plus
légié1297 ? proche et immédiatement disponible était la terre. Avec
elle, aucun risque de pénurie. Partant, pourquoi les consuls
Ainsi, pour conclure sur ce chapitre, on relèvera qu’à chauriens n’ont-ils pas pris le parti d’établir des murailles
côté des deux techniques majeures employant la terre crue de briques cuites puisque l’on sait, à travers les sources
(terre massive et torchis), ce matériau a d’autres applica- toulousaines et albigeoises, que cette technique était parfai-
tions dans la fortification dont il est difficile, au vu des rares tement maîtrisée et employée ?
mentions, d’évaluer avec précision l’étendue et l’impact. Outre le fait que la terre destinée aux briques se devait
Si l’« enterrement » des éléments charpentés tient un de présenter des propriétés légèrement différentes, on peut
rôle prépondérant, compte tenu de la grande surface à se demander si ce n’est pas en raison du coût1299 (et de la
couvrir (planchers et toitures des tours, des hourds, des rapidité de mise en œuvre1300?) que la plupart des commu-
gaytils, etc.), l’utilisation de la terre comme élément de nautés ont opté pour la terre crue, puisque tuileries et
remblai ou mortier est également avérée, même si les cita- briqueteries étaient déjà largement présentes en Lauragais
tions, quantitativement faibles, ne permettent pas de savoir et Toulousain dès cette époque1301.
si ces usages sont élevés au rang de techniques systéma-
tiques ou de méthodes exceptionnelles. Même dans ce cas, les briques cuites sont employées
Elles confirment cependant les grandes capacités de ce pour des opérations bien spécifiques (parements de la base
matériau dont la souplesse plastique et l’association à ou de l’élévation, parapet et merlons), et ne forment pas le
d’autres éléments (sable, végétaux) permettent de réaliser cœur de l’ouvrage.
des préparations pour des usages très divers. Ces emplois Certaines constructions de terre massive, par l’emploi
dénotent toute l’intelligence et le savoir-faire des construc- de coffrages d’importantes dimensions et d’un personnel
teurs pour utiliser au mieux les ressources naturelles à leur adéquat, autorisaient une rapidité de construction impos-
disposition. sible à mettre en œuvre avec la pierre ou la brique1302. Or,

1296
Selon J.-M. Pesez, dans l’architecture civile, « les murs liés de terre paraissent plus soignés : il convient d’obtenir la plus grande régularité compat-
ible avec la dimension régulière des pierres ; il faut, en effet, caler celles-ci en leur donnant la meilleure assiette possible, en les disposant à plat.
L’absence de coffrage et de mortier oblige à élever le mur assise après assise. On a donc affaire à des murs assisés où les joints sont réduits au
minimum » (Pesez 1998b, 68).
1297
En effet, « mêlée ou non de chaux, la terre fournit au monde rural un mortier à bas prix pour l’édification de murs de clôture, de bergeries, mais
aussi de bastides ou de maisons de village. Il est alors probable que l’on utilise de préférence l’argile, abondante dans la région. La mention systéma-
tique de pierre avec cette terre montre qu’il s’agit bien d’une maçonnerie liée à la terre et non de pisé (dont nous n’avons pas trouvé d’exemple dans
les environs immédiats d’Aix) » (Bernardi 1995, 160).
1298
C’est également le cas ailleurs, comme par exemple à Nantes, en Bretagne, où « au fur et à mesure de la reconstruction de l’enceinte et de l’amé-
nagement de nouveaux ouvrages avancés, on exploita les « perrières » de la « douve Saint-Père », du « pignon Saint-Nicolas », de la « Grosse Tour »,
de la « tour Saint-André », de la « tour Barquin », etc. » (Leguay 1985, 32).
1299
Par ailleurs, les briqueteries pouvaient-elles toujours fournir suffisamment de matériaux ? En effet, à Toulouse, « les briqueteries toulousaines ne
suffisaient pas à alimenter les chantiers de la ville. Les massoniers devaient en acheter dans le Tolosan ou dans le Lauragais ; par exemple, Constantin
lui-même, à Saint-Julia-Lauragais en 1458 (vingt écus d’or), à Lacroix-Falgarde en 1460 (10000 briques pour 23 écus et 6 gros d’or) » (Leblanc 1983-
1984, 77, 78).
1300
Pour les maison d’Al-Andalus, « la terre est le matériau le plus commun, le plus directement accessible, et le plus facile à utiliser » (Bazzana 1992, 72).
1301
Marandet 2006b, 289. Le tegularius fabrique deux produits : « tegule cavate pro retegendo vel coperiendo, tegule plane pro faciendo menia sive
muralhias » (Wolff 1954, 279, note 82).
1302
À Carpentras, pendant la guerre de Cent Ans, on construit un mur d’enceinte en terre crue massive (tapia) à partir de 1367, en attendant de pouvoir
édifier une muraille en pierre, beaucoup plus longue et plus coûteuse à mettre en œuvre, et qui ne sera définitivement achevée qu’en 1392 (Butaud 2002,
346-348).

146
LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE LE COLOMBAGE-TORCHIS ET LES AUTRES UTILISATIONS DE LA TERRE CRUE

on sait à quel point ce facteur « rapidité » peut être essen- En définitive, lorsque l’on examine la construction
tiel pour la fortification, particulièrement pendant la guerre fortifiée en général (fig. 45), on reste admiratif de la
de Cent Ans où les bandes armées sont omniprésentes tout manière dont consuls et bâtisseurs ont su gérer les
au long de l’année, et peuvent apparaître avec une grande ressources naturelles, chacune d’entre elles ayant un but
célérité aux portes des cités. précis dans l’ouvrage collectif :
De fait, si la majeure partie de la terre mise en œuvre - Le substrat (pierre de grès) et son dérivé, la chaux
dans la construction était tirée du fossé de la ville et des (calcaire du Mas Saintes-Puelles) pour la base des
champs alentours, le coût du transport était pratiquement ouvrages (enceintes, portes) mais également les parties
nul et la matière d’autant plus rapidement acheminée à pied hautes (parapets, crénelages, étages supérieurs des portes).
d’œuvre que la distance à parcourir était faible. - La terre crue pour la majeure partie de l’élévation de
Enfin, les propriétés intrinsèques du matériau pour la l’enceinte, les constructions en torchis, et divers autres
fortification, notamment pour les constructions de terre usages (isolation, protection, remblai, mortier).
massive, sont également à prendre en compte : la terre crue - La terre cuite, pour la couverture des ouvrages
est incombustible, avantage non négligeable vis-à-vis des (tuiles) ou pour les briques des solins, parapets et créne-
projectiles enflammés envoyés par l’adversaire. lages de l’enceinte (Toulouse, Albi).
Par ailleurs, lorsqu’elle est correctement mise en - La végétation pour les parets (bruyère, genêts), pour
œuvre, sa résistance est extrêmement grande : pour les charpentes, colombages, portes et volets (arbres des
A. Bazzana, il en est ainsi du tabyia, procédé mentionné forêts environnantes), pour le support du torchis (baguettes
dans les sources pour le Sud de l’Espagne aux XIe- de saule), pour la confection de ce dernier (foin), et pour
XIIe siècles, et également en vigueur au Maghreb dans le les outils (manches) et coffrages (taulas).
courant du XIVe siècle : en effet « à Fès, un chroniqueur
arabe décrit des murailles de tabiya, [c’est-à-dire d’un - L’eau, pour le mortier (de chaux et de terre) ainsi que
mélange d’argile, de sable et de chaux, moulé en caissons ; pour le torchis et la bauge.
la résistance est telle, souligne-t-il, qu’elles se comportent
mieux que la pierre et résistent aux machines de guerre] » Les techniques liées à la construction de terre crue
(Bazzana 1992, 76). paraissent parfaitement rôdées à Castelnaudary pendant la
Les constructions de terre crue du Toulousain et du guerre de Cent Ans et plus généralement en Lauragais et
Lauragais offraient-elles également au bas Moyen Âge, Toulousain : nulle trace de tâtonnements ou d’hésitation de
une meilleure défense contre les premières pièces d’ar- la part des constructeurs au travers des sources consultées,
tillerie (bombardes), attestées dans les sources chauriennes preuve qu’elles puisent dès cette époque leurs racines dans
dans la seconde moitié du XIVe siècle1303 ? une longue tradition pour laquelle on serait cependant bien

petit
fossé ? palissade lice ? grand fossé pal lice ? enceinte rue ? maisons

0 5m
Dessin : F. Loppe, 2009

Fig. 45 : Castelnaudary. Essai de restitution de l’ensemble des défenses de la ville. Profil.

1303
Seule l’archéologie expérimentale permettrait véritablement d’apporter une réponse sur ce point.

147
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

en peine de donner une date d’apparition (ou de « redécou- seul constituer la totalité des ouvrages fortifiés, à l’inverse
verte » ?) pour l’époque médiévale dans le Sud-Ouest de la par exemple de l’Afrique du Nord ou de certaines régions
France. d’Espagne et du Portugal. En Lauragais et Toulousain en
La place de la terre crue apparaît désormais comme tout effet, les contraintes climatiques font que l’élévation en
à fait essentielle dans le dispositif défensif de terre crue a souvent besoin d’être isolée, à la base et au
Castelnaudary, même si ce matériau, dont les propriétés sommet, par d’autres matériaux.
plastiques sont grandes et les emplois variés, ne peut à lui

148
3ème Partie

LA DIMENSION
SOCIO-ÉCONOMIQUE
DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION
MÉDIÉVALE EN LAURAGAIS
ET TOULOUSAIN

149
LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Dans un premier temps, il s’agira de présenter les diffé- essaiera de déterminer le coût de la construction en terre
rentes catégories de personnes et corps de métiers mettant elle-même, qu’il s’agisse des matériaux pris en tant que
en œuvre la terre crue, afin de voir dans quel cadre s’inscrit tels (terre, bois pour les coffrages et étaiements, végétaux)
leur travail (prix-faits, dépenses à la journée, corvées ?), et ou de l’ouvrage dans sa globalité, une fois sa réalisation
quels sont leurs salaires. Dans un second chapitre, on terminée.

151
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Chapitre 10

Les hommes de la terre :


qualifications, origines, contrats, salaires

Une étude des corps de métiers et de la qualification des sables de « l’enterrement », aucun qualificatif précis ne les
personnes à l’échelle de l’ensemble des registres consu- désigne et on verra également que les charpentiers tiennent
laires chauriens n’a pu être menée, compte tenu du gigan- un rôle non négligeable dans certaines tâches.
tisme de l’entreprise. Seul le premier registre (4E76/CC48, Enfin, quelles que soient les sources, le trait commun
1359-1362), intégralement transcrit, donne, sur une courte de toutes ces personnes est d’être de sexe masculin, les
durée, des informations relativement fiables sur les femmes ne jouant aucun rôle dans la direction des opéra-
personnes employées dans la construction en terre, même tions pour les constructions de terre crue.
s’il ne détaille que très rarement celles affectées aux
enceintes de terre massive. Pour les comptes suivants, mais 10.1.1 - Parediers et valadiers
également pour les autres sources (toulousaines notam-
ment) les mentions relevées, quoique éparses, ont bien 10.1.1.1 - Qualifications
souvent permis d’obtenir des informations sur la qualifica- Les constructions de terre massive (enceinte, portes,
tion et parfois le lieu de provenance de certains person- tours) édifiées à Castelnaudary et Toulouse selon la tech-
nages1304. nique de la « paret coffrée » emploient des personnes appe-
lées « parediers », très rarement « paradeiayres »1306 ou
10.1 - Les « maîtres » : qualifications et origines
« mestres de la paret »1307, cette dernière expression étant
À travers les sources chauriennes, il n’est pas toujours par ailleurs celle retenue par E. Lévy1308. Pour P. Cayla, le
possible de déterminer précisément la qualification des terme « paredier » désigne un « ouvrier spécialisé dans la
personnes chargées de bâtir des murs de terre ou d’utiliser construction des parois de maisons ou d’ouvrages défen-
ce matériau pour le torchis ou l’enterrement des struc- sifs » (Cayla 1964, 529). À Castelnaudary, ce terme appa-
tures1305. On doit donc parfois tenter de la déduire du raît dans les comptes assez tard, en 1391, lors de la réfec-
contexte ou de la répétition de dépenses similaires. tion d’une « paret de taula » devant l’« obrador del
On peut semble-t-il distinguer a priori deux catégories cosolat »1309, mais il ne fait aucun doute que les parediers
principales : les parediers, ou quelquefois valadiers, étaient en activité bien avant cette date.
spécialisés dans les constructions de terre massive et les Ainsi, d’après la nature et le contexte des dépenses,
tortissayres ou tortisseurs, chargés de fabriquer le torchis Arnaud Massip (ou Mancip) pourrait se voir attribuer ce
et de l’appliquer sur les constructions. Quant aux respon- qualificatif. On évoquera son cas pour le creusement du

1304
L’anthroponymie fait l’objet, en France et dans le bassin méditerranéen, d’études très sérieuses, pour certaines menées par M. Bourin (Bourin 1990 ;
Bourin, Chareille 1992 ; Bourin, Martin, Menant 1996). Toutefois, « les noms de personnes étaient assez bien fixés vers le milieu du XIVe siècle pour
qu’il soit possible de suivre le destin des familles et des individus » (Wolff 1978b, 354, 355).
1305
D’où l’emploi dans le titre de guillemets pour le terme « maître ».
1306
AC Montréal, 1D1, Registre des délibérations de ville, 1409, [f° ?, r°1]. « …que si la vila vol levar la dit paret que los paradeiayres sian tengutz
de la acabar… ».
1307
AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°25 v°2]. « Item foc paguat als mestres de la paret e als companhos cant agarero acabada la dite paretz… ».
1308
« Paredier : maestre de las paretz » (Lévy 1909, 230, 278).
1309
AD Aude, 4E76/CC58, 1391. « …an R. Ytier que ajudeo als parediers que paredo del jorn… ».

152
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES, P. 152-197 DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

fossé et les tortisseurs (infra), mais en 1363, il peut égale- différence de son homonyme, tuilier, ne jouit d’aucun
ment être employé pour charrier des pierres1310 ou s’occuper qualificatif, si bien que celui de « paredier » pour ces deux
de la destruction de ponts au niveau des fossés du port des seules opérations paraîtrait quelque peu exagéré, d’autant
Bordes1311. plus que dans la seconde il apparaît plutôt comme un aide
Néanmoins, son activité la plus technique est la ou un ouvrier1318, eu égard à sa moindre rémunération. En
construction de parets, même si elle est quantitativement effet, ce sont quatre autres personnes (Arnaud Denat,
moins représentée que les premières. Elle arrive en outre G. Spelit ou Espelit, G. le Bigourdin, G. le Béarnais) qui
assez tard, seulement à partir de 1366 (alors qu’Arnaud supervisent les opérations relatives à la paret ; ils apparais-
Massip est présent dès 1359 dans les comptes) : à cette sent également brièvement dans les travaux du torchis
date, il effectue plusieurs travaux sur les parets de la Baffe (infra) et G. Spelit est en outre titulaire de deux opérations
en compagnie d’autres personnes1312, et en 1372 il est titu- d’envergure pour le creusement de fossés en 1359-1360
laire d’un prix-fait pour l’édification d’une quinzaine de (une fois à prix-fait), peut-être le signe qu’il possède égale-
mètres d’enceinte en terre crue1313. Dès 1366, cette profes- ment des compétences de valadier (infra)1319. Vers la fin de
sion devienne pour lui exclusive : cet homme, au départ l’année 1361, les consuls confient par ailleurs à prix-fait à
simple manœuvre ou ouvrier peu qualifié1314 a-t-il acquis, quatre hommes (Bernard Brezeyt, Bernard Bocenhac, Pons
en quelques années, des compétences lui permettant de de Salt, et G. Lavalh) le soin de construire certaines parets
devenir paredier ? du port des Bordes1320. Les trois premiers interviennent
Il est bien difficile de le savoir, mais le fait qu’il ait pu assez rarement dans les comptes entre 1359 et 13631321 et
assimiler un savoir auprès de parediers reconnus ne paraît sont généralement préposés au creusement des fossés1322,
pas du tout impossible : en tant qu’habitant de Bernard Brezeyt se chargeant en outre à une seule reprise
Castelnaudary, il travaille pour la ville pendant au moins d’aider un maçon comme manœuvre1323. Quant à G. Lavalh,
treize ans (de 1359 à 1372), durée qui aurait amplement il ne fait son apparition que pour cette seule et unique
permis à cette personne de connaître une sorte de « promo- opération.
tion sociale »1315, peut-être d’ailleurs favorisée par le En dehors de ces cas d’espèce, la grande discrétion des
contexte local, puisque les consuls recherchaient en perma- registres sur les personnes chargées de construire les parets
nence des personnes compétentes. jusqu’en 1366 (à l’exclusion de probables charpentiers,
Quant à Guillaume Jean1316, il fait une apparition à deux infra) empêche de qualifier certains individus de pare-
reprises en 1361 dans la construction d’une paret en diers : c’est par exemple le cas de Raymond Huc1324 et
compagnie de Raymond Tocarel, Jacques Madrerias et Arnaud Garret1325 qui, même s’ils travaillent sur une paret
Bernard Anhant1317 : comme on le verra, cette personne, à la en 1366 avec Arnaud Massip1326, n’ont par ailleurs jamais

1310
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°59 v°7]. « …Arnaudo Mancipii et Petro Belenguerii qui steterunt quilibet cum uno animali ad portandum petram de
borda Petro Mancipii ad parietes de la Strada… ».
1311
Ibid., [f°75 v°3]. « …Petro Casalis, Arnaudo Mancipi et Ramundo Sacrot pro dirruendo pontes vallorum de Portu Bordarum… ».
1312
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°71 r°1]. « …an Ar. Massip, Ar. Guaret, Ramon Huc que aquel dia stero ad atalussar la paret vielha de la Baffa… » ;
[f°73 r°2]. « an Johan Fizas, Ar. Massip, Ar. Guaret per un dia que stero cascus a serquar le fondament del cap de la paret nova ques a la Baffa entre
la nova e la vielha… » ; [f°72 r°4], « …an Ar. Masip en sos companhos per 4 brassas e miega de paret que avian faytas entro la paret vielha e la
nova de la Baffa... ».
1313
Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°74 v°1]. « …dicti domini consules dederunt ad pretium factum ac liberavunt Ar. Mancipi ad faciendum parietem novum
in dicto foramen ubi sunt 67 palmos longitudinis et debuit ibi facere parietem novum bonum et sufficienter suis propriis sumptibus et expensis… ».
1314
À l’exception du creusement du fossé, pour lequel il est titulaire de prix-faits (infra).
1315
Pour J. Gimpel en effet, « dans la hiérarchie des bâtisseurs de cathédrales, le manœuvre est évidemment au bas de l’échelle mais, tant que dure la
période ascendante du Moyen Âge, toutes les possibilités lui sont ouvertes pour s’élever. Par son travail et son intelligence, il peut devenir un ouvrier
spécialisé, il peut amasser un peu d’argent et s’installer à son compte comme entrepreneur ou étudier pour devenir capable de remplir les fonctions
d’architecte. La société médiévale a permis aux plus humbles d’accéder à de hautes fonctions. L’avenir est à l’ambitieux » (Gimpel 1980, 49).
1316
Probablement celui résidant à Peyralbe (infra).
1317
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°114 r°8]. « ...dicti domini consules tradiderunt parietes retro G. Olricii et porte Mondebonis videlicet : G. Johannis,
Bernardo Anhant, Jacobo Madrerias, Ramundo Tocarelli ad extinctum candele tanquam ultimas offerentibus et debuunt habere diruendo parietes
retro Guillermum Olricii usque ad furnum et reficiendo pro cava... » ; [f°116 v°1]. « Item Arnaudo Denat, G. Speliti, G. le Begorda, G. le Bearnes,
Bernardo Anhant, Ramundo Tocarelli, G. Johannis qui per unam diem fuerunt ad perficiendum parietem retro Guillermum Olrici culibet primorum
4 s. 4 d. aliorum tertium ultimorum 4 s... ».
1318
Mais pas forcément comme un simple manœuvre.
1319
Ibid., 1359-1360, [f°30 v°7]. « Item dederunt ad pretium factum dicti domini consulis G. Spelici et Aymerico de Raychaco ad faciendum illus vallum
quod est in clausuris retro hospicium Bernardi Bicardi pro quo debuit habere pro quolibet palmo quatuor grossos… » ; [f°32 r°5]. « Item cum
Guillelmus Speliti et Aymericus de Rayshaco fecissent tam anno proxime precento quam anno precedenti retro domum Fratrum Minorum sexdecim
brachiatas et octo palmos valli in clausuris… ».
1320
Ibid., 1361-1362, [f°118 r°2]. « Item dicti domini consules tradiderunt parietes portus Bordarum pretio facto Bernardo Brezeyti, G. Lavalh,
Bernardo Bocenhac, Pontio de Saltu... ».
1321
Treize fois pour le premier, sept pour chacun des deux autres.
1322
AD Aude, 1359-1360, [f°10 r°5]. « ...Bernardo Bocenac, Bernardo Brezeyti, Pontio de Saltu, Arnaudo Guareti, Petro Mattinerii, et Arnaudo Petri
Ramundi qui dicta die fecerunt vallos juxta clausuram portus Bordarum... ».
1323
Ibid., [f°14 r°6]. « ...Bernardo Brezeyti et Petro Stephani qui dicta die fuerunt manobrerii in operibus clausurarum cum Oliverio le Breto peyreris... ».
1324
Il habite au Barrio extra portam en 1356 (Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°4 v°7]).
1325
Réside au port de l’Estrade en 1356 (Ibid., [f°15 v°1]).
1326
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°71 r°1]. « …an Ar. Massip, Ar. Guaret, Ramon Huc que aquel dia stero ad atalussar la paret vielha de la Baffa… ».

153
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

été titulaires d’un prix-fait pour ce type d’ouvrage. N’ont- Pierre Hoyet, qui dans un même document toulousain de
ils pas, à eux seuls, les compétences requises pour encadrer 1459 est désigné à la fois comme « paredier » et « valade-
cette opération ? Ils sont parfois engagés pour des travaux rius »1333. Toujours à Toulouse, on mentionne un certain
relatifs au fossé, Raymond Huc se contentant de l’entre- « mastre Ramon den Tholosa de Tilh paredier » mais il
tenir1327, alors qu’Arnaud Guarret est quelquefois employé paraît difficile de savoir si ce terme de « mastre » se
pour le creuser1328. Même dans ce cas, ils ne peuvent obtenir rapporte à celui de « paredier » ou à un autre métier, voire
le titre de valadier, puisque rien n’indique, au sein de ces à un titre détenu par cette personne1334. Selon Ph. Wolff, le
dépenses, une quelconque prééminence sur les autres indi- métier de paredier est réglementé dans cette ville avant
vidus, tant au niveau de la formulation du texte que de la 1405, ce qui implique vraisemblablement des conditions
rémunération salariale. On en est donc réduit à des conjec- strictes d’accès à la profession et des règles précises à
tures quant à la, ou les qualification(s) précise(s) des pare- observer par le maître lors de la construction (Wolff 1954,
diers chauriens jusqu’en 1361, date à laquelle plusieurs 548).
personnes sont chargées de la construction de la paret Enfin, à Montréal, en 1461, le qualificatif de « valli-
derrière chez G. Olric (supra). factor » est attribué à un certain Pierre Durandel lors de la
À partir de cette date, les sources comptables ne reconstruction de deux tronçons d’enceinte1335 : ce vocable,
donnent que rarement la qualification de « paredier » à une synonyme de celui de « valadier » (et de « vala-
personne, se contentant, comme en 1391, de la formule daire » ?1336), ne se rencontre jamais dans les comptes chau-
vague « les parediers », comme si cet attribut s’appliquait riens : il désigne généralement un terrassier chargé de l’en-
à diverses personnes chargées de la construction de la tretien et du soin des fossés1337. À Toulouse, en juillet 1460,
paret, et non à un ou plusieurs hommes dont c’était le trois valladies, Jean Boys, Sevetre Piron et Pierre Hunault,
métier unique1329. sont chargés de démolir les restes d’une petite tour en terre
Cette règle souffre de quelques rares exceptions : aux ayant en partie versé dans le fossé, et d’évacuer la terre
environs du 19 mars 1408 en effet, G. Trialh et G. de hors de ce dernier1338. Cette rare dépense confirmerait ainsi
Verguas, deux parediers de Saint-Julien, sont mandés par la fonction des valadiers (nettoyage du fossé), mais il est
les consuls pour prendre à prix-fait la paret de la porte vraisemblable que ces hommes étaient également pare-
Montdebo1330. Une trentaine d’années plus tard, un certain diers1339.
P. Hebrearn est désigné comme « paredier » lors de la réfec- Pour quelle raison, ces deux professions de
tion d’une paret située derrière la maison d’un des consuls, paredier/valadier, a priori assez différentes, se retrouvent
Guiraut del Ryu, résidant au barrio Sainte-Croix1331. à chaque fois réunies en une seule personne ? La qualité de
Certains individus s’occupent à la fois du creusement valadier -si comme on le suppose ce terme peut désigner
du fossé et de la construction de parets (Arnaud Massip, également les personnes creusant les fossés- permettait
G. Espelit, etc. supra), et à ce titre possèderaient donc la peut-être d’être particulièrement au fait des différents types
double qualité de paredier/valadier. C’est également le cas de terre, et par là-même de choisir au mieux celui conve-
à Toulouse, où le 16 mars 1450 un certain Jean Darenton, nant pour telle ou telle construction en terre crue.
valadier, est rémunéré « per adobar e reparar las paretz Par ailleurs, à Toulouse, en 1355, une autre dépense
del hostal public », signe vraisemblable qu’il possède aussi intrigue : en effet, un certain P. de Lauretgia est à la fois
la qualité de paredier1332. Encore plus frappant est le cas de qualifié de « brassier »1340 et de « paredier »1341. Soit ces

1327
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°54 r°4]. « …an B. Johan, R. la Boyria, Ramon Gastanh, G. At, R. Huc, R. Blanquier, Faure Lavat, Pons At, R. la
Boria, P. Ribieyra, P. Gastanh, Ramon At, G. Maurelha que aquel dia avian obrat a curar le valat devant la dita barbacana… » ; [f°61 v°2]. « …an
R. Mondebo, Pons Aymeric, Pons Fayres, G. Got, B. Tagier, P. Paga, R. Huc, P. Ribieyra, que aquel dia avian estat a gitar am paniers l’escombre del
valat detras le castel… ».
1328
Ibid., [f°60 v°1]. « …an Bertolomeu Ribiera Johan Marti, Favre Bordas, Ar. de Sulpont, R. Amielh, Ar. Garet, Vidal de Martelon, G. Ysalguier, P.
R. de Mayrevila, P. Bonet que aquel dia avian obrat a far le valat de pres la porta de la Baffa… ».
1329
Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°33 v°6]. « …an R. Ytier que ajudeo als parediers que paredo del jorn… ».
1330
Ibid., 4E76/CC64, 1408, [f°32 v°1]. « …an G. Trialh an G. de Verguas paredies de Sant Julia les cals venguo per dire e per pendre a pretz fayt la
paret de la porta Mondebo les cals venguo per mandament dels senhors…».
1331
Ibid., 4E76/CC77, 1441, [f°25 r°1]. « Item foc pagat an P. Hebrearn, paredier, […] les cals avian presa a far ladita paretz tras mon ostal… ».
1332
AC Toulouse, CC2332, pièce n° 22, 1450-1451. « …pague e delivre a Johan Darenton valadier […] per son trevalh pena e salari e autras causas
necessarias per adobar e reparar las paretz del hostal public e per pretz fait am el laquals reparatios son specifficadas… ».
1333
Ibid., CC2334. pièce n° 80, 1459. « Peyre Hoyet breto paredier… » ; verso : « Anno retro et die XXIIII mensis martii Petrus Hoyet valaderius patrie
Britanie… ».
1334
Ibid., EE32, 1354, [f°34 r°1]. « …a mastre Ramon den Tholosa de Tilh paredier per far la paret tras l’ostal del P. Bosc a Sant Estene ».
1335
AC Montréal, 1D2, 1461, [f°23 r°1]. « Petro Durandelli valliffactori… ».
1336
« Valadaire : celui qui creuse les fossés » (Alibert 1966, 688).
1337
« Valadier : terrassier qui entretient les fossés » (Alibert 1966, 688). « Cureur de fossés, terrassier » (Lévy 1909, 377) ; « valadié : celui qui est
chargé du soin des fossés, de leur entretien, terrassier » (Mistral 1878, vol. 2, 1079).
1338
AC Toulouse, CC2334, pièce n° 60, 10 juillet 1460. « ….a Johan Boys, Sevetre Piron e a Pierres Hunault valladies habitans de Tholosa la soma
de dotze livres tornes a els degudas a causa de desroquar una torrella de terra vielha la qualla se tenet am la muralha et tombet dedins lo vallatz et
portatz la terra de la dita torrella de fora dels vallatz… ».
1339
À Toulouse « beaucoup d’entre eux (parediers bretons ndlr.) sont valadiers, spécialisés à la fois dans le curage des fossés et la construction de
murailles -on pourrait dire : de petits entrepreneurs de fortifications » (Wolff 1954, 82).
1340
« Brasier : ouvrier, manœuvre » (Lévy 1909, 53).
1341
AC Toulouse, EE32, 1355, [f°122 r°3]. « …an P. de Lauretgia brassier e paredier que sta a San Subra a la cariera dels Espanhols per deffar et
per far la paret de las Sors Repentidas de Sant Subra… ».

154
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

deux appellations sont distinctes (et dans ce cas le paredier également charpentier (il édifie à prix-fait l’année précé-
doit posséder des qualifications supérieures à celle d’un dente les hourds de la paret des Bordes1349).
manœuvre ou d’un ouvrier), soit elles relèvent du même
En définitive, les personnes exerçant uniquement le
niveau technique, un paredier n’étant rien d’autre qu’un
ouvrier qualifié… métier de constructeur de murs en terre crue, sont, d’après
En 1421, Pierre Maurel senior est désigné par un les sources, extrêmement rares. Le qualificatif de paredier,
conseil de ville de Montréal comme « operarius pro repa- s’il se rapporte quelquefois à un individu ayant cette seule
rando muralhas »1342, c’est-à-dire soit un « ouvrier ou un fonction, désigne bien souvent une personne à « double
manœuvre » (Gaffiot 2000, 1096), soit une « tierce casquette » (paredier/valadier), ou à plusieurs facettes,
personne chargée de surveiller les travaux »1343 : il peut ici dont l’essentiel du travail n’est pas toujours l’édification de
s’agir d’un paredier, puisque l’enceinte de Montréal, est à murs en terre. Il en est de même pour les charpentiers, dont
cette époque, en grande partie, sinon en totalité en terre on connaît les diverses tâches dans la fortification chau-
crue ; mais cet individu exerce peut-être une autre profes- rienne, et dont on voit qu’ils peuvent aussi intervenir dans
sion en rapport avec la construction (maçon ? charpen- l’édification de parets.
tier ?) ou n’a éventuellement que peu (ou pas) de liens avec
D’ailleurs, à l’Epoque Moderne, « comme le torchis, la
cette dernière1344.
terre battue était en tout cas du ressort des charpentiers.
Enfin, certaines sources mentionnent clairement (ou Deux marchés pour la construction de maisons situées dans
suggèrent l’existence) de fustiers afin de diriger des opéra- les environs de Toulouse datant de 1770 et 1777, qui pres-
tions pour la construction de murs en terre massive1345 : crivent respectivement des « parois de terre batue de
dans le premier cas, en 1363, Pierre Saurin, charpentier 16 pans de haut avec fondation » et des « paroi de tapié de
bien connu, est chargé de construire une paret au port de 16 pans de haut au-dessus du sol », sont passés avec des
l’Estrade et de creuser la tranchée de fondation (celle du charpentiers » (Nègre 2003, 55). Par ailleurs « la plupart du
mur en pierre servant de solin ?)1346. À Verlhac, le temps, les charpentiers étaient les véritables maîtres
22 septembre 1428, maître Bernat Tinel, « fustie cabi-
d’œuvre du pisé, du fait de leurs connaissances dans l’art
rador », va se charger de l’édification des parets et des
de bâtir et dans la manipulation des banches »1350.
superstructures en bois (chemin de ronde)1347.
Dans le second cas, les comptes d’Albi laissent penser Devant la désaffection progressive de la construction de
qu’un certain maître Bernat Serras, chargé en 1381-1382 murs de terre crue à l’Epoque Moderne en Toulousain, les
de la construction de la paret du mur de la Brique1348, est parediers ont eu tendance à progressivement disparaître ;

1342
AC Montréal, 1D1, 1421, [f°53 v°3]. « …quod cresetur talliam ville anni preteriti et quod incontinenti deputetur unius operarius pro reparando
muralhas […] fuit electus Petrus Maurelli senior pro reparando muralhas… ».
1343
Bernardi 1995, 455. Pierre Maurel agit donc ici comme maître d’œuvre pour le compte de la ville. À Castelnaudary, le terme « maître de l’œuvre »
(magister operis) ou « maître des œuvres » n’est utilisé qu’une seule fois dans les registres (AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°61 r°10]. « Item a XIII de
jun mossenhor le senescalc venc dinnar a Castelnou en estet per tot le jorn al castel am le mestre de las hobras am totz les fustiers e am mastre Arn.
Lo Senheyre per hordonar et coumpasar las cauzas que y fazian mestiers al dit castel… »). Pour M. Aubert, « le terme de « magister operis », maître
de l’œuvre, est celui qui est employé le plus souvent ; il ne peut, comme les précédents, s’appliquer à un ouvrier aussi bien qu’à un architecte et désigne
seulement le directeur du chantier, le constructeur. Au vrai, l’expression « maître d’œuvre » n’a pas de sens, mais seulement « maître d’œuvre de tel
édifice » ou « maître des œuvres » du roi ou d’un prince. Il n’y a pas, à proprement parler, pendant une grande partie du Moyen Âge, d’architecte de
carrière, mais des tailleurs de pierre et des maçons ou des charpentiers plus habiles, plus instruits, ayant fait un apprentissage plus poussé, sous un
maître remarquable, ayant voyagé plus longuement et acquis une expérience plus grande. C’est parmi eux que l’on choisira celui qui sera chargé d’une
œuvre déterminée ; il sera alors « le maître de l’œuvre de tel édifice ». Celui-ci achevé, il redevient tailleur de pierre, maçon, charpentier sur un autre
chantier et travaille sous la direction d’un maître qui a reçu la charge d’un édifice déterminé. Il reprend son métier qu’il n’a d’ailleurs pas abandonné
même lorsqu’il dirigeait le chantier » (Aubert 1961, 11, 12).
1344
En effet, au Moyen Âge, l’operarius désigne quelquefois « le chanoine ou l’officier du chapitre chargé de surveiller les travaux ; mais, en 1346, le
maître de l’œuvre de la cathédrale de Narbonne, Raimond Aicard, est dit « massonus seu operarius ecclesie Narbonne » (Aubert 1961, 9). Par ailleurs
« le maître maçon et le maître charpentier de la ville avaient la responsabilité de la conservation et de l’inspection des bâtiments communaux, de la
surveillance des chantiers, de l’approvisionnement des matériaux. Pour ces activités, ils étaient rétribués, outre une pension annuelle, d’un salaire corre-
spondant au nombre de journées de travail effectuées. Cette fonction de conservation semble avoir été primordiale. Le patrimoine communal était
constitué dans la seconde moitié du XIVe siècle, non seulement par l’enceinte urbaine, mais encore par l’hôtel de ville et autres bâtiments civils, parfois
des édifices religieux, outre les nombreux ouvrages de franchissement ou de capture des cours d’eau, les ponts, écluses, digues, etc. » (Salamagne
2001b, 227).
1345
Dans les sources étudiées, le charpentier est exclusivement désigné sous le terme de « fustier ». Ailleurs, en Haut-Dauphiné, il existe deux appella-
tions supplémentaires, lignifabre et chapuis (Nicolas 2005, 174). En Languedoc, on rencontre les termes de « carpentarii » ou « carpentii », comme
au château de Peyrepertuse en 1250-1251 (Bayrou 2000, 104).
1346
AD Aude, 4E76/CC49, 28 mai 1363, [f°24 r°4]. « ...magistro Petro Saurini pro faciendo parietem de la Strada videlicet pro 126 brachiatis pari-
etis [...]. Item dicti domini consules dare fecerunt eidem pro faciendo cavalham dicte parietis ubi assetiaret... ».
1347
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « …baylet lo dit loc de Verlhac a ydifficar e bastir de novel so es
assaber las paretz e las aleyhas del dit loc de Verlhac a mastre Bernat Tinel fustie cabirador…».
1348
Vidal 1911, 48, [f° 80 v°]. 824, 1381-1382. « …a mastre Bernat Serras per far la paret del mur de la Teula ajustada ab lo dig mur… ».
1349
Vidal 1906, 332, [f°67 v°]. 754, 1380-1381, « …a mastre Bernat Serras per so que lhi era degut de amvanar la paret de Bordas, que lhi fo bailada
per amvanar a pretz fag… ».
1350
Casel, Colzani et al. 2000, 43. En effet, comme dans le Nord de la France, « cette prééminence en milieu urbain du maître charpentier jusqu’à la
fin du XIVe siècle s’explique aussi en raison d’une tradition ancienne qui donnait au maître charpentier les responsabilités de maître d’œuvre et
ingénieur ». Ainsi, en Lauragais, il est vraisemblable qu’à l’instar des « villes du nord-ouest de l’Europe –qui restaient des villes de bois- le charpen-
tier joua longtemps un rôle prépondérant, l’intervention du maçon étant plus limitée » (Salamagne 2001b, 226).

155
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

toutefois, leur savoir a pu néanmoins être conservé grâce à Quant à G. Espelit, Bernard Anhant, et Raymond
certains charpentiers dont l’activité, au contraire des Tocarel1356, ils sont au « Barrio extra portam »1357, c’est-à-
premiers, ne faiblissait pas. dire dans le faubourg voué à être transformé en bastida à
partir de 1366, dernière extension médiévale de la ville. La
Pour l’époque médiévale, le terme de paredier permet à
ville s’est à chaque fois développée vers l’ouest, le
coup sûr de distinguer une personne capable de mener à
« Barrium extra portam », aux contours assez peu définis
bien l’édification d’un mur en terre crue (civil ou militaire),
(une bonne partie du futur barrium Sainte-Croix ?)
quelle que soit la technique (avec ou sans coffrages). Ainsi,
marquant en 1356 la limite occidentale de l’habitat urbain.
des charpentiers ont pu être considérés à cette occasion
C’est peut-être à cet endroit que les nouveaux arrivants se
comme de véritables parediers, même si les sources ne leur
concentrent en priorité (était-ce leur cas ?), attirés par le
attribuent pas ce qualificatif. Cependant, le titre de
travail et les dispositions favorables promulguées dès
« maître » (« mastre » ou « magister »1351) est très rarement
février 13561358.
employé par les comptes pour les parediers (une fois) : ces
individus, compte tenu de leur polyvalence, peuvent-ils Bernard Breseyt habite au même endroit, mais semble
être considérés comme tels, voire comme des ingénieurs, être dans un cas de figure différent, puisque ce patronyme,
ou s’agit-il la plupart du temps d’ouvriers, plus ou moins bien représenté, laisse songer à une lignée familiale à l’im-
qualifiés selon les cas ? plantation ancienne : on ne relève en effet pas moins de
sept personnes ou chefs de famille imposables, la mention
10.1.1.2 - Origines « les héritiers » laissant par ailleurs supposer qu’ils sont
Pour Castelnaudary, Toulouse et Montréal on peut encore plus nombreux1359 : ils résident soit au Barrio extra
parfois établir, avec plus ou moins de certitude, la prove- portam1360, soit à Peyralbe1361, à l’autre bout de la ville, soit
nance de plusieurs parediers/valadiers. au port des Bordes1362.
Quant à G. Lavalh, son absence dans ce registre et son
10.1.1.2.1 - Castelnaudary apparition éphémère feraient songer à une personne qui
Dans cette ville, seules seize personnes pourraient se n’est pas restée sur le chantier après cette opération.
voir attribuer le qualificatif de paredier, mais seulement Par ailleurs, au moins douze personnes d’origine
trois avec certitude (expressément mentionné par le texte). bretonne travaillent sur le chantier de fortification chaurien
À l’échelle d’une soixantaine d’années1352, et compte tenu en 1359-1360 et 1361-1362. Elles effectuent généralement
de l’ampleur des travaux à réaliser, ce chiffre est donc fort des tâches peu qualifiées qui n’ont pas de lien direct (ou
peu élevé. En 1356, neuf personnes résident avec certitude aucun rapport) avec la terre crue. En outre, leurs rares traces
à Castelnaudary (soit environ 56 % du total) (fig. 46). dans la comptabilité laissent penser à des individus de
Deux individus, Guillaume Jean1353 et Arnaud Masip1354, passage (aucun n’est d’ailleurs inscrit sur le registre de
habitent dans le même quartier, à Peyralbe, à l’est du 1356) : six hommes s’occupent entre autres de transporter du
château1355. sable1363, cette tâche étant également effectuée par un certain

1351
À Aix, « le maître (magister) est la personne qui intervient le plus fréquemment dans les actes notariés. Seul ou associé, c’est lui qui passe les
contrats et embauche les ouvriers. Il se comporte le plus souvent comme un chef d’entreprise qui offre aux commanditaires les services d’une équipe
qualifiée et outillée » (Bernardi 1995, 27).
1352
En déduisant bien entendu les années pour lesquelles les comptes ont disparu.
1353
Guillaume Jean a peut-être repris le nomen paternum, phénomène très courant au Moyen Âge classique lors de l’évolution onomastique : « le nomen
paternum est le type de surnom le plus répandu dans tous les groupes sociaux, et il est également courant dans les élites urbaines lombardes, comme
chez les milites castri du Latium » (Menant 1996a, 354). Dans le Midi, il semble que ce phénomène soit toutefois à nuancer : « Midi de la France et
Catalogne n’attachent qu’une importance marginale aux références familiales dans la surnomination : le nomen paternum n’y est dominant que pendant
quelques générations des Xe et XIe siècles, vite remplacé, soit par des surnoms individuels (sobriquets, noms de métier, anthroponymes sans référence
familiale), soit par des surnoms toponymiques évoquant la participation à un patrimoine ou l’adoption d’une résidence. Les solidarités impliquées
relèvent plus du voisinage que de la famille. Il faut cependant s’empresser d’apporter un correctif à ce tableau d’un Languedoc ou d’une Catalogne
indifférents à la famille, puisque la Catalogne notamment semble être la région qui a adopté le plus précocement le nom de famille au sens où nous
l’entendons, c’est-à-dire un surnom fossilisé et transmis par les mâles à l’ensemble des descendants en ligne directe » (Durand 1996, 419).
1354
« Macip, mancip : jeune, garçon, jeune homme, domestique, serviteur, employé, ouvrier, compagnon » (Lévy 1909, 235). On reviendra sur son cas
lors des opérations pour le torchis.
1355
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°22 r°8], [f°22 r°9].
1356
Espelit proviendrait peut-être de « espelir » (« naître, s’épanouir » ; Alibert 1966, 371) et serait donc un sobriquet « le bien né ? ». Quant à Tocarel,
ce nom est formé de la racine « tocar » (« toucher » en occitan ; ibid., 663).
1357
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°2 v°15].
1358
Le Registre des aides et subsides extraordinaires (AD Aude, 4E76/CC2, 1356) qui permet de déterminer leur lieu de résidence, débute par une
première taille le 15 avril 1356, soit à peine deux mois après la charte promulguée par le roi par l’intermédiaire du comte d’Armagnac.
1359
On se demande d’ailleurs si cette « appellation de « héritiers un tel » correspond à une succession non encore réglée, à une indivision car il y a des
enfants mineurs ou est utilisée pour qualifier une frérèche » (Marandet 2006a, 477).
1360
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°4 v°15]. « Heredes den P. Breseyt » ; [f°5 r°13]. « Bernat Breseyt » ; [f°5 v°11]. « Heredes den Ramon Breseyt » ;
[f°5 v°16], « G. Breseyt. ».
1361
Ibid., [f°21 r°9]. « P. Breseyt » ; [f°21 v°6]. « Sa sor den P. Breseyt ».
1362
Ibid., [f°23 v°15]. « Ar. Breseyt ».
1363
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°6 v°1]. « ...Arnaudo de Martino, Oliverio le Breto, Petro de Brina, Raimundo Gonterii, Bernardo de Vito et
cuidam alterii britoni qui dicta die portaverunt arenam in opere gaycilli de Baffa et calcem scaucinerunt… ». L’expression « cuidam alterii britoni »
sous-entendrait en effet qu’ils le sont tous.

156
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Document Date NOM, prénom Qualification Lieu de résidence Origine supposée


certaine (date)
ou supposée ( ?)

AD Aude, 1361 JEAN paredier ? Peyralbe, ?


4E76/CC48 Guillaume 1356
[f°114 r°8]
Ibid, [f°116 v°1]. 1361 ESPELIT, paredier/valadier ? Barrium extra portam ?
SPELIT 1356
G.
Ibid, [f°116 v°1]. 1361 DENAT paredier ? ? ?
Arnaud
Ibid, 1361 LE BIGOURDIN paredier ? ? ?
[f°116 v°1] G.
Ibid, 1361 DE BEARN paredier ? ? ?
[f°116 v°1] Guillaume
Ibid, 1361 TOCAREL paredier ? Barrium extra portam ?
[f°114 r°8] Raymond 1356
Ibid, [f°114 r°8] 1361 ANHANT paredier ? Barrium extra portam ?
Bernard 1356
Ibid, [f°118 r°2] 1361 BRESEYT paredier ? Barrium extra portam ?
Bernard 1356
Ibid, [f°118 r°2]. 1361 LAVALH paredier ? ? ?
G.
Ibid, [f°118 r°2] 1361 BOCENHAC paredier ? Port des Bordes Boucenac ? Ferme,
Bernard 1356 commune de
Fonters-du-
Razès ?
Ibid, [f°118 r°2] 1361 DE SALT/DE paredier ? Port de l’Estrade ?
SANT 1356
Pons
Ibid, 4E76/CC49 1363 SAURIN charpentier/fusterius Barrium extra portam ?
[f°24 r°4] Pierre 1356
Ibid, 4E76/CC51 1366 MASIP/ paredier/valadier ? Peyralbe ?
[f°72 r°4] MANCIP 1356
Arnaud
Ibid, 4E76/CC64 1408 TRIALH G. paredier Saint-Julien (de Briola ?) ?
[f°32 v°1] 1408
Ibid, [f°32 v°1] 1408 DE VERGUAS paredier Saint-Julien (de Briola ?) ?
G. 1408
Ibid, 4E76/CC77 1441 HEBREARN P. paredier ? ?
[f°25 r°1]
Fig. 46 : Castelnaudary, les parediers. Qualifications et origines.

Jean le Breton1364, par ailleurs employé comme manœuvre1365, Trois personnes font exception à la règle, accomplis-
ou au fossé1366, en même temps que quatre de ses compa- sant des besognes plus spécialisées sans lien direct toute-
triotes (Raulin le Breton, Raymond Pi, Alen Breton, et Jean fois avec la terre crue : en 1359, un certain Yvonet le
Briant), vers la fin janvier-début février 13601367. Quant à Breton (maçon ?) répare la base d’un pilier sur l’enceinte
Aliet Breton, il n’apparaît qu’à une seule reprise, le du port des Bordes1369 ; entre 1359 et 1362 Olivier le
12 septembre 1360, pour un transport de bois au château1368. Breton, maçon-carrier1370, effectue quelques tâches, comme

1364
Ibid., [f°7 v°5]. « ...Johanni le Breto, Bernardo de Valle, Guillermo Sicardi pro duobus diebus qui quilibet portaverunt arenam in opere porte de
Astrata... ».
1365
Ibid., [f°6 v°5]. « ...Petro de Brina et Johanni le Breto qui per duos dies fuerunt manobricii ad sospeyrandum illum parietem qui est in clausuris
prope portam Mondebonis... ». Ailleurs, comme dans l’Yonne, à Sens, un manœuvre, dénommé « Le Breton » dans les comptes, équarrit du bois
pendant quatre jours (Cailleaux 1985, 149).
1366
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°24 r°6]. « Item Johanni le Breto pro duobus diebus qui etiam fuit in dicto opere [opere valli retro castrum
ndlr.] ».
1367
Ibid., 1360, [f°26 r°1]. « …Raulinum le Breto, [....] Ramundum Pi britonem ad operandum in vallo retro hospicium domini Petri Raynardi... » ;
[f°26 r°2] ; [f°26 r°3]. « ...Raulinum le Breto, Alen Britonem, Johannem Brianti, Raymundum Pi Britonem... ».
1368
Ibid., [f°90 r°8]. « ...Alieto Britoni quia portaverat fustam in castro ad relacionem magistri Petri Robberti… ».
1369
Ibid., 1359-1360, [f°7 r°4]. « ...Yvoneto le Breto qui dicta die curavit fundamentum cuiusdam pilarii facti in clausuris portus Bordarum… ».
1370
Ibid., [f°6 v°6]. « ...Oliverio le Breto, peyrerio… ».

157
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

la construction du solin d’une paret1371 ou la taille d’une déterminée)1382, une autre le 26 novembre 13611383, et une
brasse de pierres1372. Enfin, un de ses compatriotes Jean dernière le 20 janvier 13621384 ; il logeait donc peut-être sur
Olivier, participe à la découverte1373 de la carrière Saint- place durant ces quelques mois. Il serait un travailleur
Jacques1374. temporaire, mandé pour une tâche particulière. Quant à son
La présence de ces quelques personnes, même sur une patronyme, il indiquerait sa région d’origine (La
courte période, soulève la question de la communication Bigorre1385), à moins que ce ne soit celle de ses ancêtres…
avec les maîtres d’œuvre et travailleurs locaux : les langues La même constatation peut être faite pour Guillaume de
bretonnes et occitanes, très différentes, ne devaient en effet Béarn qui intervient à de rares reprises en 1361 (transport
pas faciliter les échanges ni la compréhension et l’applica- de bois avec deux porte-faix1386 et aide pour le torchis, en
tion des directives, d’un côté comme de l’autre, ce qui compagnie d’un autre béarnais1387). Il disparaît des registres
laisse quelque peu dubitatif sur la facilité d’intégration des l’année suivante. Peut-être originaire du Béarn, il ne paraît
ouvriers bretons dans le chantier chaurien1375. On peut de pas résider durablement à Castelnaudary ou dans ses envi-
fait légitimement se poser la question de savoir s’il y avait rons, compte tenu du peu de tâches réalisées.
des traducteurs… Ces hommes étaient peut-être en transit dans la région
Intéressons-nous maintenant à d’autres personnes : pour diverses raisons. Faisaient-ils partie d’une ou
trois autres protagonistes chauriens résident pour leur part plusieurs bandes de routiers sillonnant la région, notam-
chacun dans un quartier différent : Bernard Bocenhac au ment à partir de février 1361, et obligeant le comte de
port des Bordes1376, Pons de Sant ou de Salt au port de Poitiers à nommer un commissaire chargé de visiter les
l’Estrade1377, et enfin Pierre Saurin, charpentier, au Barrio fortifications de ces territoires dès le mois de mars1388 ?
extra portam1378. Si le premier est assez peu évocateur quant Leur capacité à construire une paret, sollicitée à une seule
à ses origines1379, le deuxième l’est tout autant, même s’il reprise, traduit à la fois le caractère fugace de leur contri-
vaut mieux privilégier une origine occitane, « sant » signi- bution aux travaux mais aussi le fait que ces régions (Béarn
fiant en effet « saint » dans cette langue1380. Quant à et Bigorre) connaissaient la technique des murs en terre
G. Trialh et G. de Verguas, ils résident apparemment à crue et savaient la maîtriser.
Saint-Julien, localité que l’on pourrait assimiler, sans certi- La présence de ces individus, si loin de leurs probables
tude, au village de Saint-Julien1381 de Briola, à environ terres d’origine, a de quoi quelque peu surprendre : même
17 km au sud de Castelnaudary (fig. 6). Les documents les si la mobilité de certains ouvriers est grande au Moyen
désignent tous deux comme « parediers ». Âge1389, peut-on envisager qu’un chantier comme
Le cas de G. Le Bigourdin soulève davantage d’interro- Castelnaudary ait attiré des personnes de contrées aussi
gations. Il apparaît seulement à trois reprises, en 1361- éloignées, surtout en nombre aussi faible1390 ? Rien ne
1362 : une fois pour la construction d’une paret (date non permet de l’affirmer, mais la question se posera à nouveau

1371
Ibid., [f°2 r°1]. « ...pro sospeyrando [quandam rat.] parietem que est media ante domum Fratrum Minorum et reparando Johanni Maurini et
Olivario le Breto... ».
1372
Ibid., [f°3 v°3]. « …Dominico Gastonis et Oliverio le Breto pro sclapando unam brachiatam lapidis que fuit posita in operibus clausurarum… ».
À Aix également « 16 personnes ont néanmoins pu être identifiées, de manière certaine, comme extracteurs de pierre. Ce sont pour la plupart des Aixois.
Mais on rencontre parmi eux, 2 Bretons, 1 Lorrain et 1 Forézien » (Bernardi 1995, 151).
1373
Il s’agit d’enlever les couches supérieures (ou « morts terrains ») pour accéder aux bancs exploitables.
1374
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°100 r°3]. « ...ad discoperiendum peyreriam Sancti Jacobi... » ; [f°100 r°8]. « …Johanni Olivarii britoni qui
fuit die martis in dicto opere… ». Un certain « Guillaumin le Breton » est également signalé sur le chantier de Peyrepertuse en 1250-1251 (Bayrou
2000, 119).
1374
Cette constatation serait cependant à nuancer dans le cas où ces bretons viendraient de la partie non celtophone de la Bretagne (région de Nantes et
de Rennes) où l’on parle le gallo, forme de langue d’oïl (information aimablement communiquée par D. Baudreu).
1376
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°24 r°1].
1377
Ibid., [f°18 v°2].
1378
Ibid., [f°3° r°10].
1379
Originaire de Boucenac ? (ferme, commune de Fonters-du-Razès, Aude, à environ 10 km au sud de Castelnaudary (Sabarthès 1912, 40).
1380
Alibert 1966, 625. Le prénom « Pons » est très utilisé dans le Midi au moment de la révolution anthroponymique des XIe-XIIIe siècles (Cursente
1996, 44, 46).
1381
De nombreux lieux portant ce nom existent dans l’Aude ; cependant il est vraisemblable, compte tenu que les consuls font quérir ces personnes,
qu’elles habitaient dans un hameau ou un village proche de Castelnaudary.
1382
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°116 v°1]. « Item Arnaudo Denat, G. Speliti, G. le Begorda, G. le Bearnes, Bernardo Anhant, Ramundo
Tocarelli, G. Johannis qui per unam diem fuerunt ad perficiendum parietem retro Guillermum Olrici... ».
1383
Ibid., [f°117 r°2]. « Item G. Spelici, Arnaudo Denat, G. le Bigorda, G. de Bearno, Bernardo Anhandi, cuidam alio bearnesio, Fabro de Podio,
Jacobo Madrerias, qui diebus jovis et veneris fuerunt in dicto opere ad tortisandum… ».
1384
Ibid., [f°126 v°10]. « Item cum Bernardus Cardona, G. Cardona, G. Bigordani, Petrus Bertrandi, Petrus Lamberti, G. Speliti, Faber Bordas,
Ramundus Tocarelli, G. Johannis die presenti fuissent conducti ad tortissandum embanna retro magistrum Bernardum Servici... ».
1385
Ancien comté de la région Hautes-Pyrénées.
1386
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°93 v°6]. « Item Guillermo de Bearno et aliis duobus faxeriis pro portando unam quantitatem de fusta…».
1387
Ibid., [f°116 v°1]. « Item Arnaudo Denat, G. Speliti, G. le Begorda, G. le Bearnes... ».
1388
Devic, Vaissète 1872-1885, t. X., pr. 480, col. 1259-1261. 1361, 23 et 27 mars : « si reparatione seu fortifficatione indigeant, fortificare muris,
turribus, fossatis, artilayria et aliis necessariis et edificia quecumque obstancia eu novica dirui et ad terram poni, et in eis victualia quecumque apponi
hominesque et mulieres recolligi seu recipi una cum bonis mobilibus suis omnibus faciatis… ».
1389
Ainsi, « parmi les 861 maîtres recensés à Aix se trouvent, au total, plus de 35 % d’étrangers, soit 304 individus » (Bernardi 1995, 43).
1390
Toutefois, « au bas Moyen Âge, un certain nombre de facteurs, multiplication des petits chantiers, activités des confréries, semblent au contraire
avoir favorisé le déplacement des artisans » (Salamagne 2001b, 234).

158
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

pour d’autres individus et d’autres lieux, notamment Quant à leurs origines, réelles ou supposées, elles
Toulouse (infra). seraient majoritairement à rechercher dans le Sud de la
Quant à Arnaud Denat, il est signalé comme manœuvre France (Espelit, Denat, Le Bigourdin, de Béarn, Tocarel,
(auprès de maçons ?) dès janvier 1361, en compagnie de Bocenhac, de Sant, Massip) au sein d’une aire linguistique
Raymond Ytier1391. Par la suite, il apparaît à trois reprises en occitano-provençale1394.
1361-1362 (infra) pour à son tour disparaître l’année
10.1.1.2.2 - Toulouse
d’après. Rien ne permet de connaître son lieu de résidence
mais à l’instar des deux « étrangers » (G. le Bigourdin, À Toulouse, la liste des parediers est légèrement infé-
Guillaume de Béarn), il semble n’avoir été qu’un rieure à celle de Castelnaudary : douze noms, en tout et
travailleur de passage sur le chantier chaurien, où il n’est pour tout, qui présentent toutefois l’avantage inestimable
resté que quelques mois (février-novembre 1361). d’être tous désignés sous les termes de « paredier » ou
« valadier », levant d’emblée l’incertitude sur leur qualifi-
Enfin on ne s’attardera pas sur le cas de P. Hebréarn,
cation réelle (fig. 47).
qui, comme G. Trialh et G. de Verguas avant lui, se voit
attribuer par le scribe le titre de « paredier » en 14411392. Ainsi Raymond de Toulouse et Bomacip de Saint-
Son apparition unique ne permet pas d’en dire plus sur son Sauveur1395, pourraient, d’après leurs patronymes, rensei-
compte et ses possibles origines. gner sur leur lieu de naissance (ou du moins leur domi-
cile)1396. Quant à Jean de Garac1397, Jean Olier1398, Jean
Au final, ces quelques personnes paraissent en nombre
Boys1399 proviennent-ils du Sud de la France comme le lais-
tout à fait insuffisant pour ériger et réparer la totalité de
seraient entendre leurs noms ?
l’enceinte chaurienne pendant la guerre de Cent Ans. Il est
ainsi probable que les travaux de construction de parets En 1438, les origines d’Alain Rao et Guillaume Riat
étaient le plus souvent réalisés à prix-faits1393 ou selon des sont pour leur part précisées par le notaire : ils viennent
modalités n’apparaissant pas dans les documents comp- tous deux de Saint-Brieuc, en Bretagne (Côtes
tables, et dont nous ne savons rien. La vision que l’on a des d’Armor1400). Pierre Hoyet est également d’origine
parediers chauriens est donc nécessairement réductrice et bretonne, le document le désignant comme « breto pare-
fortement tronquée… dier » et comme « valaderius patrie Britanie »1401.

1391
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°17 r°2]. « Item Ramundo Yterii et Arnaudo Denat pro uno jornali quo fuerunt manobrerii ad claudendum
portanellum de Baffa… ».
1392
Ibid., 4E76/CC77, 1441, [f°25 r°1]. « Item foc pagat an P. Hebrearn, paredier… ».
1393
Pourtant, les quelques notaires chauriens conservés pour la période de la guerre de Cent Ans, tous consultés, n’ont livré aucun prix-fait pour la
construction de parets à Castelnaudary.
1394
Cette hypothèse pourrait être renforcée par le fait que dans le Midi, lors de la « révolution anthroponymique » entre les XIe et XIIIe siècles, on observe
une « très forte concentration des choix sur un petit groupe de noms, formant une combinaison stable dans la longue durée (jusqu’au XIIIe siècle) »
(Cursente 1996, 46). En effet, certaines études régionales, comme à Agde (Hérault) ont montré la forte présence de prénoms dominants (65 % des choix)
qui sont Pierre, Guillaume, Bernard et Pons, complétés dès 1100 par Raymond » (Ibid., 47). « En Toulousain (Lézat) et dans le Gers (Auch), le même
phénomène se produit, mais Pons semble supplanté par Arnaud » (Ibid., 48). Ces prénoms se retrouvent massivement chez les quelques parediers
présentés.
1395
Haute-Garonne ; village situé à une quinzaine de kilomètres au nord de Toulouse (fig. 6).
1396
Il faut toutefois se méfier de vouloir systématiquement assimiler un patronyme « géographique » au lieu de résidence effectif de la personne. En
effet, pour les ouvriers du métal en Bourgogne, « la prudence s’impose pour les patronymes semblant indiquer le lieu de résidence. Sur cent quarante
sept ouvriers, seize se nomment Untel d’Aisey, d’Etalente, de la Perrière, etc. Or, à chaque fois, le document donne, à la suite du nom, de celui du
métier, l’indication du village ou de la ville où l’artisan habite effectivement –il n’y a concordance que dans la moitié des exemples. Souvent un
patronyme de ce genre indique simplement l’origine plus ou moins lointaine de celui qui le porte » (Chapelot 1985, 312). Pour A. Salamagne, « les
anthroponymes sont finalement d’un intérêt relatif pour préciser les origines géographiques des personnes –tout au moins au XIVe siècle- comme en
atteste parmi d’autres le cas du maçon Frémin d’Arras, originaire non pas de cette dernière ville mais de Sainghin-en-Weppes (village entre Lille et la
Bassée) » (Salamagne 2001a, 118). Patrick Bonnet observe la même prudence pour le chantier du château de Peyrepertuse en 1250-1251 en notant que
« ce genre d’indications (présence d’un nom de ville –ou village- de province ou de pays à la suite du prénom) ne signifie pas forcément que notre
homme est bien personnellement originaire de cette localité ou de cette contrée. Nous sommes au milieu du XIIIe siècle, à un moment où les noms
tendent à se fixer. Ainsi, Guillot n’est peut-être qualifié d’anglais que parce que son père ou son grand-père l’étaient avant de se fixer dans la région (la
Guyenne anglaise est toute proche) » (Bayrou 2000, 117). D’autres auteurs estiment que « la référence à la famille (la plupart du temps sous forme de
nomen paternum) et au lieu (qui est d’origine plutôt que de résidence, surtout pour les citadins) domine massivement le deuxième élément des noms »
(Menant 1996b, 21).
1397
De « garach » ? (« terre labourée » en occitan ; Alibert 1966, 421).
1398
De « oliera » ? « huilier, fabricant d’huile » (Ibid., 515).
1399
De « bois » ? (« buis » ; ibid., 165).
1400
AD Haute-Garonne, 3E6761, 1438, [f°39 v°2], « Item anno quo supra die XI augusti quod Alandus Rao, Guillermus Riati, paraderiis loci de Sancto
Briou in Britania… ». Le prénom « Guillaume » connaît d’ailleurs un essor notable en Bretagne dès le XIIe siècle (Bourin 1996, 189).
Philippe Wolff avait déjà mis en lumière cette provenance géographique particulière pour ces artisans : « toutes les régions du Bassin parisien fournis-
sent des immigrants : Champagne (74), Brie (75), Beauce (76), Val-de-Loire (77), Ile-de-France (78), Normandie (79). Particulièrement intéressante
est l’immigration bretonne, pour laquelle les données se font plus nombreuses. Dans la plupart des cas, ces Bretons proviennent d’une région bien déter-
minée, les environs de Saint-Brieuc. Beaucoup d’entre eux sont valadiers, spécialisés à la fois dans le curage des fossés et la construction de murailles
-on pourrait dire : de petits entrepreneurs de fortifications. Des travaux leur sont confiés à Toulouse et dans la région. Ce sont d’assez modestes person-
nages, qui semblent avoir conservé des liens avec leur pays natal. C’est sans doute leur nombre et leur cohésion qu’illustra le nom de Bretonnières
donné à une rue de Toulouse » (Wolff 1954, 82).
1401
AC Toulouse, CC2334, pièce n° 80, 1459. « a Peyre Hoyet breto paredier… » ; verso : « Petrus Hoyet valaderius patrie Britanie… ».

159
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOM, prénom Qualification Lieu de résidence Origine certaine


certaine (date) ou supposée ( ?)
ou supposée ( ?)

AC Toulouse, 1354- DE TOULOUSE paredier Thil ? Toulouse ?


EE32 1355 mastre Ramon (février 1354) (Haute-Garonne)
Ibid. 1354- DEGUARAG, paredier Thil ? ?
1355 DEGARAC (mars 1354)
DE GARAC
Iahn
Ibid. 1354- DE SAINT- paredier Thil ? Saint-Sauveur ?
1355 SAUVEUR (mai 1355) (Haute-Garonne)
Bomacip
Ibid. 1354- OLIER paredier Las Elatas (lieu inconnu) ?
1355 Johan (mars 1354)
Ibid. 1354- DE LAURETGIA brassier e paredier San Subra ?
1355 P. (Saint-Cyprien)
Toulouse
rue des Espagnols
(1355, en vehaire)
AD Haute- 11 août RAO parader ? Saint-Brieuc,
Garonne, 1438 Alanus (Côtes d’Armor)
3E6761,
[f°39 v°2]

Ibid. 11 août RIAT parader ? Saint-Brieuc,


1438 Guillermus (Côtes d’Armor)
AC Toulouse, 16 mars DARENTON valadier ? ?
CC2332, pièce 1450 Johan
n°22
Ibid., CC2334, 24 mars HOYET breto paredier ? ?
pièce n°80 1459 Peyre valaderius patrie
Britanie
Ibid., CC2334, 10 juillet BOYS valladié Toulouse ?
pièce n°60 1460 Johan également paredier ?
Ibid., 10 juillet PIRON valladié Toulouse ?
1460 Sevetre également paredier ?
Ibid., 10 juillet HUNAULT valladié Toulouse ?
1460 Pierre également paredier ?
Fig. 47 : Toulouse, les parediers. Qualifications et origines.

Les deux derniers personnages, Sevetre Piron et Pierre Ainsi, les quelques parediers repérés dans les sources
Hunault arborent des patronymes inconnus ou fort rares en toulousaines présentent essentiellement deux sortes d’ori-
Lauragais, et pourraient également être originaires de gines : hormis P. de Lauretgia et J. Darenton, dont il est
régions du Nord-Ouest de l’Hexagone. difficile de déterminer les lieux de provenance, cinq
Enfin, on évoquera pour conclure le cas de Bernat d’entre eux (Jean de Garac, Raymond de Toulouse,
Tinel, le « fustie cabirador » chargé d’édifier les parets de Bomacip de Saint-Sauveur, Jean Olier et Jean Boys) pour-
Verlhac en 1428 : il réside (ou est originaire ?) de Grisolles, raient provenir d’une aire linguistique occitane. Les cinq
dans la sénéchaussée de Toulouse, à environ 18 km au sud
autres par contre (Alain Rao, Guillaume Riat, Pierre Hoyet,
de Verlhac (fig. 6)1402, distance à peu près équivalente de
celle séparant Thil de Toulouse. Là encore, son nom pour- Pierre Hunault et Sevetre Piron) possèdent des patronymes
rait avoir pour origine la racine occitane « tina » (cuve), ou dont l’existence n’est connue que dans les contrées du
« tinel » (cuvier) (Alibert 1966, 661), accréditant l’hypo- Nord, et plus particulièrement en Bretagne et dans les
thèse d’une piste géographiquement proche… départements limitrophes.

ADHG, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n°9, 22 septembre 1428. « Es assaber que l’an el jorn dejotz scrigz costituitz personalmen en la ciotat real
1402

de Montalba en presentia de mi notario e dels testimonis dejotz scrigz, lo dit moss. Guilhem Calvat de son bon grat per si e en nom de la dicha coman-
daria baylet lo dit loc de Verlhac a ydifficar e bastir de novel so es assaber las paretz e las aleyhas del dit loc de Verlhac a mastre Bernat Tinel fustie
cabirador de Grisolas de la dita senescalcia de Tholosa… ».

160
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Pourtant, comme à Castelnaudary, ce nombre, très faible Ces sources sont, à l’heure actuelle, les documents
compte tenu des besoins de la ville en matière de fortifica- présentant le plus grand éventail de parediers, certains ou
tion, est certainement loin de refléter la réalité. Néanmoins, supposés : les deux registres de délibérations1408 ont permis
est-il le fruit du hasard ? Peut-on se poser la question d’un de recenser 17 individus engagés par la ville entre 1409 et
« appel » des capitouls toulousains à des spécialistes de la 1484 pour diverses réparations à faire sur l’enceinte en
terre crue venant de régions aussi éloignées1403 ? terre (fig. 48). Quatre d’entre eux sont qualifiés de « pare-
Les artisans bretons paraissent ainsi particulièrement diers » ou « paradeyares », un seul de « vallifactor »1409.
prisés à Toulouse, mais seule une étude similaire menée en Les douze autres, tous retenus dans le cadre de contrats,
Bretagne pour la guerre de Cent Ans ou plus généralement sur n’ont reçu aucun attribut particulier de la part du scribe.
la période médiévale, permettrait d’en savoir davantage1404… Toutefois, compte tenu de la tâche effectuée, ils peuvent se
voir attribuer celui de paredier, même s’il ne s’agit pas
Ce « phénomène breton », déjà mis en lumière par
forcément de leur activité principale.
Philippe Wolff, aurait ainsi favorisé un départ de
travailleurs expérimentés vers Toulouse et sa région, et Six individus résident à Montréal même (environ 35 %
donc peut-être un apport extérieur de savoir-faire quant aux du total) : Jean Gamacha, Jean La Sala, Jean Grele (ou
techniques de construction en terre crue1405. La présence de Greule), Guillaume Clerc-Prunier, Jacques Spert et Pierre
bretons a dû apporter un atout important (et recherché ?) Pujols. Un seul (Pierre Durandel, vallifactor), habite
pour la construction des enceintes de terre crue, et pourrait Lavalette, petit village situé à environ 10 km à l’est de
traduire une carence en personnel local qualifié capable, à Montréal (fig. 6). Le domicile des onze autres n’est pas
un instant donné, de mener une entreprise aussi vaste1406. indiqué (André Rogier, Jean de Basser, Jean Jenle le
Grand et le Petit, Antoine Blanc, Antoine Guiraud, fils de
10.1.1.2.3 - Montréal Jean Guiraud alias « Le Besso »1410 ; Ysarn Saura,
Montréal1407, cité d’environ 10,7 hectares au Moyen Raymond et Jean Greule1411 ou Grele, Jacques de Blanh,
Âge, était d’une taille pratiquement comparable à Jean Marti). Enfin, leur origine géographique n’est jamais
Castelnaudary (fig. 6, 37). précisée.

1403
Kerhervé 2002. Même si la construction n’est pas le thème de cet article, cet auteur n’a apparemment pas relevé dans les sources de départs massifs
de personnes (et en particulier des parediers) vers le Toulousain.
1404
À l’exception d’une publication récente sur la bauge en Ille-et-Vilaine au XIXe siècle (Petitjean 2003), les travaux actuels ne font pas, à notre
connaissance, mention de l’existence de techniques de construction en terre crue dans la fortification médiévale en Bretagne mais il est fortement prob-
able, au vu des documents toulousains, qu’une telle pratique existait.
1405
Au Moyen Âge, la mobilité de certains ouvriers est importante, et ce pour diverses raisons. Pour les chantiers des cathédrales « les tailleurs de pierre
et les maçons font partie d’une main d’œuvre essentiellement flottante ; de multiples motifs les ont poussés à se déplacer de chantier en chantier, de
pays en pays. Les jeunes ont eu l’ambition de contempler de nouveaux horizons, de connaître des mœurs et des techniques différentes […] En l’espace
d’une année, ils pouvaient espérer se faire embaucher successivement au Mont Saint-Michel, au Mans, à Notre-Dame de Paris, à Reims et à Strasbourg.
[…] Ceux qui menaient une vie errante ne le faisaient évidemment pas pour le seul plaisir de voir du pays. Certains quittaient un chantier dans l’espoir
de trouver ailleurs un salaire supérieur. Souvent aussi pour des raisons indépendantes de leur volonté, les ouvriers devaient prendre la route à la
recherche d’un nouveau travail, soit que le chantier fut terminé, soit que le chef de chantier, mécontent de leur travail, les congédiât sans préavis et sans
indemnité, soit que, les fonds de la fabrique venant à s’épuiser, la construction fût provisoirement interrompue » (Gimpel 1980, 63).
Pour Aix « la spécialisation observée au sein de l’immigration aixoise montre que chaque métier se présente comme une entité relativement homogène,
au regard de flux migratoires complexes. De tels « regroupements » ne sont sans doute pas sans conséquences sur les pratiques artisanales elles-mêmes.
Les étrangers véhiculent en effet un savoir faire technique qui peut être adopté, durablement ou non, par l’architecture aixoise. Lier les transferts tech-
nologiques aux seuls déplacements des artisans serait certes une erreur grossière qui reviendrait à nier l’influence, par exemple, du commanditaire »
(Bernardi 1995, 71).
1406
Selon Ph. Wolff, la mortalité serait à l’origine de cette crise de main d’œuvre : « nous ne pouvons aboutir à mieux qu’une impression, somme toute
assez vague : celle d’un milieu fortement atteint par la mortalité, où la moyenne de la vie était sans doute assez courte, et qui se reproduisait relative-
ment peu. Bien des faits permettent de penser qu’il souffrait, de façon plus ou moins continue, d’une crise de main d’œuvre. Ainsi l’importance et la
durée des travaux confiés aux femmes. L’insistance des règlements de métiers et des contrats d’embauche, à interdire les débauchages d’apprentis et
de valets entre maîtres et concurrents. Le besoin où l’on se trouve de faire appel, pour des travaux agricoles effectués à une dizaine de kilomètres de
Toulouse, à une main d’œuvre étrangère à la région : Périgourdins, Limousins, Auvergnats, Rouergats, Béarnais, voire Bretons, qu’engageait pour
plusieurs mois le prieur du collège de Périgord. Immigration temporaire sans doute. Il existait aussi une immigration plus durable, qui apportait à la
population toulousaine des éléments de remplacement. Un premier fait peut donner quelque idée de l’importance de ce renouvellement : l’évolution de
l’anthroponymie toulousaine. Sur les 546 noms différents correspondant aux 953 chefs de famille estimés dans le Bourg de Toulouse en 1335, il ne
s’en retrouve que 297 (54 %) sur les registres d’impôts de toute la ville établis en 1398 ; 249 de ces noms (46 %) ont disparu » (Wolff 1954, 77, 78).
1407
Village situé à 18 km au sud-est de Castelnaudary.
1408
AC Montréal, 1D1, Registre des délibérations de ville, fin XIVe siècle-début XVe siècle ; Ibid., 1D2, Registre des délibérations de ville, seconde
moitié du XVe siècle.
1409
Pierre Durandel, bien que dénommé comme tel, travaille comme « paredier », puisque les consuls lui confient la reconstruction d’importants
tronçons d’enceinte (AC Montréal, 1D2, 1461, [f°23 r°1]. « …tradiderunt ad reparandum et de novo construendum et hedifficandum quosdas pari-
etes meniaram ville eiusdem loci qui sequitur : Et primo quoddam frustum parietis existens inter januam porte Reddensii et porte Aquerie et quodam
aliud frustum etiam existens inter portam vocatam porte del Carme et januam porte vocatam Aquerie et quoddam aliud frustum quod est in periculo
cadendi inter januam porte del Castelh et porte Squive etiam videlicet Petro Durandelli valliffactori… »).
1410
De « besson, bessona » ? (« jumeau » ; Alibert 1966, 156).
1411
De « greule » ? (« grêle, mince » ; Alibert 1966, 440), utilisé comme sobriquet ? On sait que « les sobriquets caustiques caractérisent l’Ouest de la
France. Le Midi méditerranéen préférant (peut-être sous forme ironique) les surnoms laudatifs. Ce type d’évaluation est, à l’évidence, dangereuse, tant
on risque l’anachronisme. De toutes façons, le sobriquet constitue partout une forme très minoritaire de surnomination, rarement supérieure à 10 % du
total des individus » (Bourin 1996, 193).

161
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOM, prénom Qualification Lieu de résidence


certaine
ou supposée ( ?)
AC Montréal, 25 juin ROGIER paradeyare ?
1D1, 1409 Andrieu
[f°non écrit r°1].
Ibid. 25 juin DE BASSER paradeyare ?
1409 Johan
Ibid., 1D2, 10 août DURANDEL vallifactor Lavalette
[f°23 r°1]. 1461 Petrus paredier ?
Ibid., [f°34 r°1]. 15 avril GAMACHA paredie Montréal
1467 Johan
Ibid. 15 avril LA SALA paredie Montréal
1467 Johan
Ibid., [f°80 r°1]. 15 GREULE, paredier ? Montréal
février GRELE maior
1484 Johan
Ibid. 15 CLERC paredier ? Montréal
février PRUNIER
1484 Guillermus
Ibid. 15 PUJOLS paredier ? Montréal
février Petrus
1484
Ibid., 7 mai JENLE maior paredier ? ?
[f°117 v°1]. 1481 Johan
Ibid. 7 mai JENLE minor paredier ? ?
1481 Johan
Ibid. 7 mai BLANC paredier ? ?
1481 Anthonius
Ibid. 7 mai GUIRAUD paredier ? ?
1481 Anthonius (fils de
Johan GUIRAUD
alias LE BESSO)
Ibid., [f°118 r°1]. 5 mai DE BLANH paredier ? ?
1478 Jacob
Ibid. 5 mai SAURA paredier ? ?
1478 Ysarn
Ibid. 5 mai GREULE, paredier ? ?
1478 GRELE
Ramundus
Ibid. 5 mai MARTI junior paredier ? ?
1478 Johan
Ibid., [f°119 r°1] 14 SPERT paredier ? Montréal
février Jacob
1475
Fig. 48 : Montréal, les parediers. Qualifications et origines.

162
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

10.1.2 - Les tortissayres mais on a vu que les termes « paredier » et « valadier », s’ils
Le dictionnaire de P. Cayla, désigne par « tortisseur » ne sont pas totalement absents des documents, sont toutefois
le « maçon construisant des murailles avec du matériau lié rarement employés, même si ces métiers étaient certaine-
au torchis ; ce nom se disait aussi d’un ouvrier spécialisé ment bien plus représentés. Il ne faut donc pas en conclure
dans le crépissage des parois externes d’un local trop hâtivement que la profession de « tortissayre » n’existe
(Carcassonne, 1616, etc.) » (Cayla 1964, 688). Ce terme pas1415. L’étude des faits, en l’occurrence du premier compte
est synonyme de celui de « tortissayre » qui, selon chaurien conservé1416, a ainsi permis de relever treize noms
Ph. Wolff, désigne « un fabricant de torchis »1412. Pourtant, associés aux travaux du torchis comme chefs d’équipe
les dictionnaires d’occitan ignorent complètement ce mot, certains ou probables (fig. 49).
alors qu’ils donnent tous une acception pour celui de Ainsi, lorsque le registre précise le nom des ouvriers,
« tortissar » (de même que le lexique de A. Vidal1413). deux d’entre eux sont exclusivement associés aux opéra-
Le mot « tortissayre » n’est d’ailleurs jamais employé tions de mise en œuvre du torchis : Pierre de Bédarieux,
dans les comptes chauriens pendant la guerre de Cent Ans1414 habitant du port de l’Estrade1417, qui en 1360 intervient

Document Date NOM, prénom Qualification certaine Lieu de résidence


ou supposée ( ?) (date)
AD Aude, 1360- DE BEDARIEUX tortissayre ? Port de l’Estrade
4E76/CC48, 1361 Pierre 1356
[f°49 r°1].
Ibid. 1360- FARGUES tortissayre ? Port de l’Estrade
1361 Elie 1356
Ibid., [f°95 v°5] 1361- LE GASCON (?) manœuvre ? Port de l’Estrade
1362 Peyrot 1356
Ibid., [f°88 v°1]. 1361- RANNO tortissayre ? ?
1362 Stéphane
Ibid., [f°80 r°9] 1360- DE L’HÔPITAL tortissayre ? ?
1361 Jean
Ibid., [f°103 v°2] 1361- OT/FERRAN tortissayre ? ?
1362 Pierre
Ibid., [f°76 r°8] 1361- JEAN tortissayre ? Peyralbe
1362 Guillaume paredier ? 1356
Ibid. 1360- LAMBERT tortissayre ? Barrium extra portam
1361 Pierre 1356
Ibid., [f°99 v°9] 1361- SARRASIN charpentier Port des Bordes
1362 Raymond 1356
Ibid., [f°29 v°4] 1359- BURD G. charpentier ?
1360
Ibid., [f°97 v°8] 1361- BURD charpentier ? ?
1362 Pons
Ibid., [f°116 v°8] 1361- TOCAREL tortissayre ? Barrium extra portam
1362 Raymond paredier ? 1356
Ibid. [f°63 r°7] 1360- MANCIP tortissayre ? Peyralbe
1361 Arnaud paredier/valadier ?
1356
Fig. 49 : Castelnaudary (1359-1362) : les « tortissayres ». Qualifications et lieu de résidence.

1412
« Pierre et brique constituaient donc pour l’industrie toulousaine du bâtiment des matériaux secondaires. La première place revenait au torchis -dont
la confection était le fait des tortissayres, et au bois » (Wolff 1954, 280).
1413
Vidal 1911, 271. « Tortissar : bâtir en torchis ».
1414
De fait, et comme pour le terme de « maître », on emploiera des guillemets pour « tortissayre ».
1415
À Toulouse, « l’œuvre de réglementation frappe par son ampleur. La plupart des catégories d’artisans se sont vu donner des statuts avant le milieu
du XVe siècle. […] Les seuls métiers qui ne nous apparaissent pas comme réglementés sont : -dans le bois et le bâtiment : les coupiers, rodiers,
carboniers, massoniers et peyriers, tortissayres, recubrayres (couvreurs), causiniers » (Wolff 1954, 549). Ces artisans seraient incontournables dans la
construction civile toulousaine : « un Toulousain veut-il se faire élever un hôtel ? C’est au charpentier et au tortissator qu’il s’adresse : le bois, le torchis
constituent les matériaux habituels » (Ibid., 89).
1416
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1362.
1417
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°16 v°9]. Serait-il originaire de Bédarieux (Hérault) ?

163
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

quatre fois (une fois à prix-fait avec d’autres) pour enduire prix-fait réalisé avec d’autres, il pourrait s’agir d’un
des coursières ou des palissades avec du torchis, et égale- « tortissayre »1430. En outre, son absence du registre de 1356
ment Elias (quelquefois Helias) Fargues (résidant au même indiquerait qu’il ne réside pas en ville (du moins à cette
endroit1418), qui apparaît deux fois dans l’année, mais date) ou qu’il n’était pas imposable à cette époque.
uniquement pour cette tâche1419. Pierre Ot alias Ferran, se manifeste à une seule reprise
En 1359 déjà, ces deux individus sont associés dans un comme titulaire d’une opération d’envergure liée à la
prix-fait pour la porte du Terrier et les échauguettes du port couverture et au torchis1431. Il est également cité en 1360 en
de l’Estrade1420. Habitants tous deux le même quartier, cette
compagnie d’Elie Fargues et Pierre de Bédarieux (supra)
proximité géographique devait faciliter l’adéquation entre
pour le tortissage d’un amban, opération où personne ne
leurs disponibilités respectives. Quant à ce fameux
semble avoir de prééminence particulière1432. Ses appari-
« Peyrot » mentionné à une seule reprise pour la mise en
tions sont très rares dans le premier compte (trois seule-
œuvre du torchis, on serait tenté de l’assimiler à « Peyrot
ment entre 1359 et 1361), signe, comme pour Stéphane
Le Gascon », qui réside dans le même quartier1421 : il ne
travaille qu’à trois reprises, toujours pour des tâches de Ramno, d’un travail « intérimaire » ; d’ailleurs, le registre
manœuvre1422, mais sa seule intervention dans le torchis de 1356 ne fait aucune mention de ces trois noms : ces
(titulaire d’un prix-fait), lui donnerait une qualification personnes ne résident peut-être pas en ville à cette date,
supérieure1423. Son patronyme indique peut-être son mais s’y sont peut-être installées provisoirement ou à
origine, la Gascogne, mais eu égard à son faible volume de demeure par la suite…
travail, il ne s’est peut-être pas installé à Castelnaudary Quant à Guillaume Jean, il agirait également comme
pour être exclusivement employé aux travaux de fortifica- responsable à deux reprises. Il peut aussi être associé à
tion. Son établissement en ville remonte donc peut-être Pierre Lambert pour un prix-fait1433, ce qui dénote un
bien avant la fin 1355 ou le début 1356. certain savoir-faire en matière de torchis, ou faire partie
Le cas de Stéphane Ramno ou Ranno est un peu simi- d’un groupe de plusieurs individus dans le cadre de
laire1424 : il apparaît à plusieurs reprises en 1361-1362 lors dépenses générales, toujours en rapport avec le torchis1434.
de travaux liés au torchis1425, comme par exemple la pose de Cet individu est assez complexe à cerner, car il existe en
sparos sur la porte du Terrier1426, même si en général ces 1356 deux personnes portant ce nom : la première réside
activités sont pour lui loin d’être exclusives, car il s’occupe dans le même quartier qu’Arnaud Massip, à savoir
également de fossés1427, d’escarpes1428, et peut également Peyralbe1435 ; la seconde au Barrio extra portam1436. La
servir à l’occasion de manœuvre pour un maçon1429. première n’a pas de qualification connue, mais la seconde
Jean de l’Hôpital apparaît dans les comptes à une seule est un tuilier et/ou un briquetier1437, le seul cité à
reprise, en 1360-1361: seul nommément désigné pour un Castelnaudary en 1356 et encore en 13591438. Les registres

1418
Ibid., [f°16 r°4].
1419
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°49 r°1]. « …fero pagar an Elias Fargas, an Peyre Bertran, an Peyre Espanal, an Peyre Ferran, an Peyre de
Bederes que tortissero aquel dia l’amban del castel de Bays… » ; [f°67 r°2]. « …an G. Mala Mosta e an P. de Bederes que avian tortissat al pal de
l’angle dejos la porta de Sant Antoni... ». ; [f°68 r°10]. « …an P. de Bederes e an Ramon de Lom que avian fayta una bardiera per tortissar le pal
detras dona Feriera » ; [f°74 r°5]. « …ad pretium factum ad tortisandum cadafalcos qui sunt in claustra seu circa claustrum Fratrum Minorum Elie
Fargas P. Bederes G. Malamostra… ».
1420
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°25 r°1]. « Item dederunt ad pretium factum dicti domini consules Petro Bedaresii et Helie Farguas ad torti-
sandum portam Terrerii et gaycillos portus Astrate... ».
1421
Ibid., 4E76/CC2, [f°19 r°12].
1422
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°12 r°5]. « ...Bertholomeo Ripperie, G. Lobinhat, Ramundo Hugonis, Ramundo Mondebonis, Bernardo de Vito et
Peyroto le Gasco qui dicta die fuerunt manobreriis cum Johanne Galigonis ad suspeyrandum quodam parietem in clausuris portus Bordarum... ».
1423
Ibid., 1361, [f°95 v°5]. « Item Peyroto pro tortissando guacillum juxta portam Narbonesiam precio facto…».
1424
Cet homme n’est pas mentionné sur le registre de 1356 et n’habite donc peut-être pas Castelnaudary à cette date (à moins qu’il ne soit pas imposable ?).
1425
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°88 v°1]. « Item Stephano Ramnos, P. Bertrandi qui die presenti fuerunt ad tortissandum palem castri… » ;
[f°90 v°3], [f°95 v°7].
1426
Ibid, [f°96 r°2]. « Item Stephano Ramnos qui per unam diem fuerat ad sparonandum in dicta porta… ».
1427
Ibid., [f°91 r°4]. « Item Bernardo Christiani, Johanni Palherii, Stephano Ramnos, Petro Bertrandi, Guillermo Durandi, Ramundo de Caucelli, Petro
de Seveyraco, Vitali Mercaderii, Ramundo de Podio, Petro Michaelis, Arnaudo Hugonis, qui die presenti fuerunt ad reparandum vallos retro ecclesiam
Fratrum Minorum...» ; [f°124 v°4].
1428
Ibid., [f°100 r°10]. « Item Guermano Gueti, Stephano Ramnos, Audito de Guilhannia, Petro Raynardi, Ramundo Blanquerii, Petro Ramundo
Calveti, Vitali la Caza, Vitali de Bido qui fuerunt quilibet per duos dies in cavalhas porte Mondebonis...».
1429
Ibid., 1359-1360, [f°2 r°1], [f°2 r°2].
1430
Ibid., 1360-1361, [f°80 r°9]. « Item Johannes de Hospitali cum non nullis aliis tortissavit dictum cadafalcum ad pretium factum… ».
1431
Ibid., 1361-1362, [f°103 v°2]. « Item solvi fecerunt Petro Ot alias Ferandi pro tortisando et recoperiendo unum aguaserium inter portam et castrum
et recoperiendo turim Astrate... ».
1432
Ibid., 1360, [f°49 r°1]. « ....fero pagar an Elias Fargas, an Peyre Bertran, an Peyre Espanal, an Peyre Ferran, an Peyre de Bederes que tortis-
sero aquel dia l’amban del castel de Bays… ».
1433
Ibid., 1360-1361, [f°76 r°8]. « ...in tortissando dictum palum G. Johannis, Petrus Lamberti qui precio facto dictum torticium operati fuerunt…».
1434
Ibid., 1361-1362, [f°126 v°10]. « Item cum Bernardus Cardona, G. Cardona, G. Bigordani, Petrus Bertrandi, Petrus Lamberti, G. Speliti, Faber
Bordas, Ramundus Tocarelli, G. Johannis die presenti fuissent conducti ad tortissandum embanna retro magistrum Bernardum Servici… ».
1435
AD Aude, 4E76/CC2, 1356. [f°22 r°9].
1436
Ibid., [f°6 r°13]. « G. Johan, teulier ».
1437
« Teulier : tuilier, briquettier » (Alibert 1966, 660). « Tuilier » (Lévy 1909, 363).
1438
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°22 v°2]. « Item Petro Lamberti et G. Johannis teulerii pro uno jornali quo fuerunt quilibet ad sporgandum ligna
pro cledis faciendis in clausuris… ».

164
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

comptables précisent souvent le métier en cas d’homo- sage (infra), ces hommes seraient de fait mis en exergue,
nymie1439, raison pour laquelle les multiples activités réali- soit que les autres individus n’habitent pas Castelnaudary,
sées par « Guillaume Jean » peuvent être attribuées, non soit qu’ils agissent effectivement sous les ordres des gens
pas au tuilier, mais à l’autre individu ; en effet, les tâches nommément cités.
effectuées par cet homme n’ont jamais de rapport avec la
fabrication ou la livraison de tuiles : transport de pierres1440, Toutefois, un autre corps de métier, quant à lui parfai-
fixation d’un pal, avec ou sans ses socios1441. Comme en tement identifiable, est souvent chargé d’encadrer les
1359, il s’occupe aussi du nettoyage de baguettes de saules opérations relatives au torchis : il s’agit des charpentiers,
(sparos pour le torchis)1442. Cependant, ce seul prix-fait fait somme toute logique, le colombage ayant un rôle
attribué pour le torchis peine à le ranger parmi les essentiel à jouer dans ce type de construction : ainsi, en
personnes encadrant cette activité de manière systéma- 1361-1362, Raymond Sarrasin, charpentier1447 et habitant
tique, c’est-à-dire parmi les « tortissayres », mais on a vu du port des Bordes1448, se voit attribuer trois prix-faits pour
par ailleurs que cet homme possède aussi des compétences le torchis1449 puis est salarié en 1363 pour des travaux sur
de paredier. les hourds du quartier des Bordes1450.
Le cas de Pierre Lambert soulève peu d’interrogations : Un autre charpentier, Guillaume Burd1451 est payé en
résidant au Barrio extra portam1443, il apparaît rarement 1359 pour « enduire de torchis, et couvrir deux échau-
dans le premier compte, et s’occupe généralement du trans- guettes des murailles du port des Bordes et pour enduire de
port de pierres ou du bouchage d’une porte, toujours torchis une partie de la porte de Goufferan »1452. L’année
comme manœuvre1444. Ces rares interventions pour le suivante il s’occupe, en compagnie de Pons Burd, d’en-
torchis semblent donc faire de lui un « tortissayre » occa- duire un gaytil près de la porte de Goufferan1453. Il s’ap-
sionnel, mais sans compétence bien définie. plique également à « enduire des fenêtres de torchis »1454.
Dans tous les cas, il est difficile de savoir s’il s’agit de Il faut maintenant se pencher sur deux autres individus,
véritables « maîtres tortisseurs » (les comptes n’emploient quelquefois associés aux travaux du torchis, et possédant
jamais les termes « magister » ou « mastre »1445) ou de une qualification particulière, même si le compte ne
simples ouvriers quelque peu rompus à cette technique1446. l’énonce pas clairement : le premier, Raymond Tocarel,
Cependant, les registres n’évoquant que rarement le nom habite au Barrio extra portam (futur barrium Sainte-Croix)
d’autres personnes employées dans les opérations de tortis- en 13561455 : il s’occupe parfois du torchis1456, et générale-

1439
En effet, en Lauragais, « les registres d’estime ne permettent guère de connaître leur activité (les déclarants résidents ndlr.), elle n’est précisée que
pour les homonymes, les nobles et les gens d’Eglise » (Marandet 2006a, 475).
1440
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 v°2]. « ...Jacobo Madreras, G. Johannis, Petro Lamberti, G. Aliberti, Petro Nuncio R. Johannis qui dicto
R.. servierunt ad carreriandum lapides ad claudendum portam magistri Bertholomei… ».
1441
Ibid., [f°108 r°9]. « Item Guillermo Johannis et quibusdam sociis suis qui sclaverant dictum palum » ; [f°108 v°2] ; [f°108 v°3] ; [f°108 v°5]. « Item
Guillermo Johannis, Jacobo Madrerias, Bernardo Anhandi qui die presenti fuerunt ad faciendum cavalham in palo… » ; [f°108 v°9]. « Item Guillermo
Johannis, Bernardo Anhant qui fuerunt die presenti ad ponendum palum in dicto cimmiterio... ».
1442
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°91 r°3]. « Item G. Johannis, G. Breseyti, B. Gauberti et Stephano Baronis qui steterunt ad sporguandum salices nause
fontis Rosandi pro faciendo sparones ad opus ambanamentorum… ».
1443
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°5 r°7].
1444
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 v°2]. « Item solvi fecerunt Jacobo Madreras, G. Johannis, Petro Lamberti, G. Aliberti, Petro Nuncio
R. Johannis qui dicto R.. servierunt ad carreriandum lapides ad claudendum portam magistri Bertholomei… » ; [f°87 v°6]. « Item Petro Bertrandi
G. Aliberti, P. Strate, P. Lamberti qui fuerunt ad claudendum portam magistri Bertholomei et carreiandum qui erant necessaria inter omnis una die… ».
1445
Au Moyen Âge, « dans le monde de l’artisanat, ce terme ne se diffuse qu’avec la fixation de la hiérarchie corporative ; le maître est le chef d’ate-
lier, jugé capable de « lever le métier » (ouvrir boutique) et d’avoir des apprentis » (Gauvard, De Libera, Zink 2002, 868).
1446
Marie-Claude Marandet relève qu’en Quercy, un prix-fait pour la construction d’une maison à pan-de-bois indique que le charpentier bâtira l’ossa-
ture de l’édifice mais n’aura pas à sa charge l’opération consistant à « bastire et tortissare, le paysan la garnissant de terre lui-même ». Un autre
exemple, cette fois-ci pour une maison d’un village lauragais (non précisé), montre que « le tenancier doit tortissare quelques pièces », probablement
à ses frais » (Marandet 2005, 171). Ces exemples conforteraient l’hypothèse selon laquelle la technique du torchis était à la portée d’une grande partie
des paysans.
1447
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°1]. « …Petro Lauras et Ramundo Saraceni fusteriis qui dicta die steterunt pro portis et fenestris faciendis in
turi porte Valincii… ».
1448
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°25 r°1] ; Ibid, 4E76/CC48, [f°117 v°1]. « …dictos embannos pretio facto ad tortisandum, Ramundo Saraceni de portu
Bordarum… ». Des « Sarrazi » seraient présents à Castelnaudary dès le XIIIe siècle (information aimablement communiquée par M.-C. Marandet).
1449
Par exemple : Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°99 v°9]. « …Ramundo Saraceni pro tortisando e tortisia que erant super parietes novos primo
factas portus Bordarum datis sibi pretio facto…» ; [f°117 v°1], [f°126 v°10].
1450
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°80 r°5]. « Item dare fecerunt Ramundo Sarasseni et Guillermo Borc qui steterunt ad reparandum pontes et ad atortis-
sandum et corundandum ambanamenta in portu Bordarum... ».
1451
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°29 v°3]. « ...Guillermo Burdi fusterio pro 20 jornalibus quibus fuit in operibus clausurarum…».
1452
Ibid., [f°29 v°4]. « ...eidem pro tortitiando, bardando et coperiendo duos gaycillos in clausuris portus Bordarum et pro tortisando partem porte
de Got Feran...».
1453
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°97 v°8]. « Item Poncio Burdi, Guillermo Burdi qui per duos dies fuerunt ad tortisandum guacillum juxta
porta de Got Feran… ». Pons Burd apparaît à deux autres reprises cette année-là, toujours en rapport avec des travaux de charpente (Ibid., [f°104 v°12],
[f°106 r°2]), ce qui laisse penser qu’il est également charpentier.
1454
Ibid., [f°96 v°5]. « Item G. Burdi qui pretio facto [...] tortisaverat fenestras ad relacionem Johannis Fabri… ». Des ouvertures de hourds ont-elles
été condamnées ?
1455
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°6 r°8].
1456
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 v°9]. « Item Ramundo Tocarelli, Ramundo Jacobi qui die presenti fuerunt ad tortissandum, interandum
gacillum juxta palem prope portam Beati Antonii… ».

165
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

ment comme responsable1457, ce qui lui permet de gagner mais devient très fréquente en 1363, peut-être un signe
1 s. tournois de plus par jour1458. Il est quelquefois chargé de probant de l’avancement des travaux vers les parties supé-
la construction ou de la réparation de parets, son travail de rieures de la fortification.
tortisseur n’étant donc pas réellement sa qualification Cette tâche d’« enterrement » emploie un personnel
première (ou unique ?). nombreux au sein duquel il est souvent difficile de distin-
Quant à Arnaud Massip (ou Mancip), de Peyralbe, il guer un responsable si le texte ne le met pas en exergue.
semble dans le même cas1459. Il apparaît à deux reprises Plusieurs personnes qualifiées, en l’occurrence des char-
pour des opérations concernant le torchis1460. Il peut égale- pentiers, pourraient se voir attribuer ce qualificatif pour
ment être titulaire de prix-faits ou spécialisé dans d’autres certaines besognes : Bernard Farole par exemple, qui en
tâches, comme par exemple la construction de parets1461 ou juillet 1363 se charge d’enterrer les coursières entre le
le creusement du fossé1462 (il possède la « double château et la porte Saint-Antoine1465. Cet homme, bien
casquette » de paredier-valadier). connu (il apparaît à de très nombreuses reprises entre 1359
Ainsi, au final, si le terme « tortissayre » n’apparaît et 1363) réalise cette unique opération en rapport avec la
jamais dans les comptes chauriens, ce sont souvent les terre. Il n’habite pas, ou n’est pas imposé à Castelnaudary
mêmes personnes qui semblent tenir ce rôle, même s’il en 13561466, mais son omniprésence dans cette ville durant
n’est pas toujours exclusif : si Pierre de Bédarieux ou Elie ces quelques années incite à penser qu’il a pu s’y installer
Fargues sont quelque peu spécialisés dans le torchis, ce après cette date.
sont la plupart du temps des charpentiers1463 (Raymond Guillaume Roger ou Rogier est un peu dans le même
Sarrasin, Guillaume Burd, Pons Burd ?), ou des parediers cas : il apparaît plusieurs fois en 1359-1361 dans diverses
(Arnaud Massip, Guillaume Jean, Raymond Tocarel) qui tâches liées aux travaux de charpente, mais n’est employé
sont chargés de diriger les opérations. Toutes ces personnes qu’à une seule reprise (août 1363) pour l’enterrement d’un
habitent Castelnaudary, du moins en 1356, à l’exception plancher1467. Toutefois, Guillaume Roger réside en ville dès
peut-être de Guillaume et Pons Burd, dont il n’est pas fait 1356 (Barrio infra portam, soit à peu près à l’emplacement
mention dans le registre d’imposition cette année-là. du port de Dins1468).
Quant à Guillaume Burd, déjà rencontré en pour les
10.1.3 - Les responsables des opérations d’« enterrement » « tortissayres », il n’habite pas en ville en 1356, et apparaît
Les sources chauriennes désignent par le terme très peu (neuf fois) entre 1359 et 1362. Trois opérations en
« interrar » ou « enterrar » (couvrir de terre, enterrer1464), liaison avec l’enterrement ont pu être relevées, soit deux
l’action consistant à recouvrir certaines parties de la prix-faits1469 et une tâche salariée en compagnie de
construction avec une couche de terre. Cette opération est Raymond Sarrasin1470, charpentier bien connu (habitant du
assez rare durant les quatre premières années (1359-1362) port des Bordes1471). En juin 1363, ce dernier s’occupe par

1457
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°116 v°8]. « Item solvi fecerunt Arnaudo Denat, Bernardo Anhant, [Ramundo Tocarelli rat.], Jacobo Madrerias, G. Bela
Garda, G. Biarnesii, G. Speliti, Fabro Bordas, G. Johannis, Ramundo Tocarelli, Ramundo Aybrandi qui diebus lune martii mercuri fuerunt ad torti-
sandum dictos embans cuilibet pro die 3 s. et prenominatis Ramundo Tocarelli, Guillermo Johannis pro avantagio quia regebant operas… ».
1458
Ibid., [f°117 r°2]. « Item G. Speliti, Arnaudo Denat, G. le Bigorda, G. de Bearno, Bernardo Anhandi, cuidam alio bearnesio, Fabro de Podio, Jacobo
Madrerias, qui diebus jovis et veneris fuerunt in dicto opere ad tortisandum cuilibet pro die 3 s. tur... » ; [f°117 r°3]. « Item Ramundo Tocarelli,
G. Johannis qui per dictos duos dies fuerunt quilibet in dicto opere cuilibet pro die 4 s. tur... ».
1459
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°22 r°8]. Peyralbe, parfois désigné comme quartier (« port »), s’étend apparemment en 1407 jusque dans la partie orien-
tale fortifiée de la ville au pied même de l’enceinte du château (« Par ailleurs le décimaire de Saint Bénazet de Peyre Albe, du côté est, s’étendait
jusqu’au pied du château comme l’indique explicitement la mention de 1407 » (Cazes 1998, vol. 1, 156 ; notule, 179 : 1407, AD Haute-Garonne,
H Malte, Puysubran, 2128. « …terra et ortus l. v. al Port de Sant Antoni inter duas portas in decimario de Petra Alba confront. ex austra cum via
publica et circii cum pariete castri vallato in medio meridiey cum porta de Baffa et aquilone cum porta Sancti Antonini).
1460
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°63 r°7]. « …an Ar. Masip e an Ramon Vidal per esparonar e per tortisar le dit gaytil e la porta de la Baffa la qual
obra avian fayta a pretz fayt… » ; 1361-1362, [f°97 r°3]. « Item Arnaudo Mancipii pro tortisando guacillum retro castrum qui fuit sibi datus pretio
facto… » ; [f°97 r°4]. « Item eidem pro coperiendo dictum guacillum de tegulis pretio facto… ».
1461
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°72 r°4], « …an Ar. Masip en sos companhos per 4 brassas e miega de paret que avian faytas entro la paret vielha e la
nova de la Baffa... ».
1462
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°61 v°4]. « …an Ar. Masip per 5 brassas 1 tertz de valat que avia fayt a pretz fayt… ».
1463
Ailleurs, comme au château de Courtrai à Lille au XVe siècle, « le charpentier œuvre aussi beaucoup pour les bâtiments en pan-de-bois en associa-
tion avec les plaqueurs qui les enduisent de torchis » (Blieck 2003, 75). Ces plaqueurs sont apparemment des plâtriers (« plaqueur : ouvrier qui enduit
une muraille de plâtre ou de ciment » ; Algirdas Greimas 2004, 461) qui peuvent donc se voir attribuer la mise en œuvre du torchis sur la structure
porteuse.
1464
Lévy 1909, 153. La troisième acception de ce terme, « crépir », ne paraît pas employée à Castelnaudary.
1465
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°52 v°5]. « ...Bernardo Farola fusterio qui stetit ad enterandum et ponendum polpetum in corseriis inter castrum
et portam Sancti Antonini… ».
1466
Il n’apparaît pas sur le registre de 1356.
1467
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°72 v°2]. « Item dare fecerunt Guillermo Rogerii fusterio pro enterrando solerium guachilli porte de Barrio sparo-
nando atortisando recobriendo bardando et encaucinando dictum guachillum et pro portando tegulos de hospitale Beate Marie in dicto guachillo… ».
1468
Ibid., 4E76/CC2 1356, [f°9 r 13].
1469
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°96 v°5]. « Item G. Burdi qui pretio facto interaverat guacillum retro Canonicos… » ; Ibid., [f°97 v°9]. « Item
dicto Guillermo [Burd, ndlr.] qui pretio facto interraverat solerium porte de Got Feran… ».
1470
Ibid., 4E76/CC49, 1364, [f°154 r°2]. « ...Ramundo Sarasseni et G. Burdi qui steterunt ad atortissandum in ambanamento Portus Bordarum et ad
enterrandum corserias… ».
1471
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°25 r°1].

166
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

ailleurs, en compagnie de ses sociis (et donc vraisembla- des confrontations entre diverses méthodes de construction
blement comme responsable) du tortissage et de l’enterre- en terre crue soient intervenus à cette époque, et même
ment de 18,5 brasses de hourds1472. peut-être avant (XIIe-XIIIe siècles ?), échanges qui auraient
permis certains progrès et perfectionnements durant le bas
En dehors de ces quelques personnes, il est bien difficile Moyen Âge.
de distinguer d’autres individus faisant figure d’encadrants.
Les dépenses se contentent en effet d’énumérer plusieurs Enfin, les documents chauriens ne permettent pas de
individus percevant une rémunération identique et agissant savoir si ces métiers de la terre (parediers, valadiers, tortis-
donc sur un pied d’égalité (ouvriers ou manœuvres)1473. sayres…) connaissaient une quelconque réglementation,
ou étaient libres de tout contrôle, en clair, s’ils disposaient
Les opérations d’enterrement ne sont donc jamais de confréries ou autres métiers jurés soudant leurs
confiées à des hommes spécialisés dans cette tâche mais membres et encadrants les pratiques de construction1476.
parfois attribuées à des charpentiers dont elles constituent
une tâche annexe. Parediers et valadiers ne sont jamais 10.2 - Compagnons, ouvriers, manœuvres : qualifica-
concernés par ces travaux qui ne devaient requérir aucune tions et origines
qualification particulière, sinon peut-être dans la prépara- En dehors des responsables, les sources désignent quel-
tion de la terre, mais du moins pas dans son application. quefois sous trois appellations (socius, companho,
Ainsi, si la construction des murs en terre massive exige famulus) des individus servant d’aides ou d’associés pour
des personnes qualifiées (parediers, valadiers, charpen- les travaux mettant en œuvre de la terre crue.
tiers), les opérations relatives au torchis et à l’enterrement
La plupart du temps cependant, nombre de personnes
des structures, c’est-à-dire lorsque la terre ne joue pas de
sont mentionnées sans aucun qualificatif particulier
rôle porteur, sont la plupart du temps confiées à des indi- (ouvriers ou manœuvres, brassiers ?), cette dernière caté-
vidus dont la qualification n’est pas précisée ou dont le rôle gorie ayant des emplois très divers dans le chantier
premier (en l’occurrence les charpentiers pour l’enterre- médiéval1477 ; en outre, ces opérations emploient quelque-
ment) n’a pas de rapport direct avec la terre crue. Dans ce fois des femmes.
cas, il est ainsi vraisemblable, comme on le verra avec
l’étude des rémunérations, que ces tâches étaient le plus 10.2.1 - Pour les opérations relatives à la terre massive
souvent attribuées à des ouvriers qualifiés.
Les comptes chauriens sont très avares en informations
Ces travailleurs résident la plupart du temps à sur les personnes chargées d’aider les parediers. Ainsi, sur
Castelnaudary, car ces méthodes étaient connues d’un bon l’ensemble des 32 registres, le qualificatif de « compa-
nombre de personnes en Lauragais : même si elles requé- gnon » n’est cité qu’à deux reprises. À Aix, ce terme
raient un minimum de savoir-faire, elles ne devaient pas désigne soit un « ouvrier travaillant pour un maître », soit
différer en l’espèce des préparations utilisées dans l’habitat « un associé » (Bernardi 1995, 442). Pour Castelnaudary,
urbain et les fermes alentours, dont certaines parties étaient les deux acceptions pourraient être retenues.
bâties selon le même procédé. Beaucoup d’individus (et Ainsi, aux environs du 11 septembre 1366, concerne
notamment des paysans) étaient capables de maîtriser peu Arnaud Massip, désormais bien connu, « et ses compa-
ou prou ce procédé. gnons » (donc au moins deux), se chargent d’édifier une
Pour la terre massive, et donc la construction de l’en- paret entre la vieille enceinte de la Baffe et la nouvelle1478.
ceinte proprement dite, le tableau est quelque peu diffé- On ne sait rien sur le nom de ces hommes, ni sur leur lieu
rent : si certains techniciens paraissent originaires du lieu de résidence ou leur origine. Beaucoup plus tard, en 1441,
ou des environs1474, d’autres artisans proviennent de le paredier P. Hebréarn s’engage à réaliser à prix-fait une
Bretagne (au sens large ?), région qui connaît au moins une paret avec l’aide de son « companhon », un certain
technique de construction en terre crue (la bauge ; Petitjean P. Lamet1479 (véritable associé ou simple ouvrier ?) dont on
2003)1475. Il se peut ainsi que des apports technologiques ou ne sait s’il est ou non autochtone.

1472
Ibid., 1363, [f°33 r°5]. « ...Ramundo Sarasseni et eius sociis pro sparonando atortissando et enterrando 18 brachiatas et media ambanamenta pari-
etis nove retro castrum… ».
1473
Par exemple : Ibid., [f°33 v°1]. « …Petro Astrada, Johanni Hugonis, Ramundo Saunas, Jacobo Paxillatoris, Arnaudo Martini, Petro Danini quibus
steterunt ad enterrandum corserias retro furnum de barrio cuilibet eorum 18 d. tol. ».
1474
Comme le Béarn et la Bigorre.
1475
Ce phénomène de recrutement extrarégional, est variable selon les endroits : ainsi, « au contraire de Douai où le recrutement fut d’abord local ou
régional, on a noté sur de nombreux chantiers de construction des XIVe et XVe siècles (en Savoie, en pays de Loire, dans le Sud de la France, etc.),
l’importance d’un recrutement externe. À Avignon, sur le chantier de construction de l’enceinte urbaine dans la seconde moitié du XIVe siècle, sont
mentionnés les maçons Guillaume Lambin du diocèse de Thérouanne, Huard Colin du diocèse de Toul, Jehan Blanchet du diocèse d’Orléans, Etienne
Groison de celui de Bourges, etc. À Aix-en-Provence, on a estimé que sur un total de 1115 artisans travaillant dans la ville à 47,50 % le nombre
d’étrangers, avec un fort recrutement septentrional » (Salamagne 2001a, 118).
1476
Pour Toulouse, on l’a vu, les parediers disposaient d’un statut avant 1405, mais pas les tortissayres. À Aix, « l’enregistrement des statuts de la
confrérie des maçons, gipiers et fustiers, connue sous le vocable de N.D. de Beauvezet, date de 1475 », soit bien après la guerre de Cent Ans. Cependant,
c’est « entre 1450 et 1463 que les métiers du bâtiment annexent en quelque sorte cette confrérie préexistante (sa première mention date de 1393) »
(Bernardi 1995, 71).
1477
En effet, « le travail demandé aux manœuvres est varié. La comptabilité d’Autun nous les a montrés aidant les charpentiers à transporter le merrain,
creusant pour ouvrir une carrière et montant les tuiles en haut de l’église Saint-Lazare » (Gimpel 1980, 49).
1478
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°72 r°4]. « …an Ar. Masip en sos companhos per 4 brassas e miega de paret que avian faytas entro la paret vielha
e la nova de la Baffa… ».
1479
Ibid., 4E76/CC77, 1441, [f°25 r°1]. « …an P. Hebrearn, paredier, e a P. Lamet son companhon les cals avian presa a far ladita paretz… ».

167
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Quant au terme « socius », dont les acceptions sont dans ce même document, et G. Guilabert était peut-être le
relativement proches1480, il a été relevé une seule fois, fils de l’un d’eux, ou un membre de leur famille (hébergé
encore qu’il faille émettre des réserves à son sujet : il temporairement pour travailler sur le chantier ?)1486.
concerne Guillaume Jean (probable bâtisseur de parets), Par ailleurs, à la mi-juin 1391, plusieurs individus inter-
qui en 1361 se charge de la fixation d’un pal en compagnie viennent à différents stades pour aider les parediers : le
de plusieurs de ses sociis1481. Cet homme, qui œuvre 14 juin tout d’abord, huit personnes sont rémunérées pour
souvent dans des besognes en rapport avec la terre crue « far las taulas de la paret » située devant l’obrador1487 du
(torchis, terre massive), possèderait des associés ou des consulat1488. Le jour suivant, onze femmes « caregavan de
compagnons l’accompagnant systématiquement dans ses la tera per far las taulas de la paret » (« taula » doit être
entreprises, comme cela a pu être mis en lumière pris ici dans le sens de « banchée » et non dans celui de
ailleurs1482. On ne sait toutefois si ces personnes habitent en « coffrage »1489). De fait, elles apparaissent comme de
ville ni quels sont leurs éventuels lieux d’origine. simples ouvriers ou manœuvres chargés de verser (et de
En outre, en 1359, des travaux d’étaiement d’une paret tasser ?) la terre dans les coffrages, et peut-être aussi de
emploient trois famulos1483 de Pierre Saurin, charpentier placer la bruyère de manière convenable, quatre fagots de
notoire, qui, on l’a vu, peut également être chargé de ce végétal étant fournis à cette occasion1490.
construire une muraille en terre1484. Ces trois famuli, très Enfin, le même jour, un certain R. Ytier a aidé les pare-
certainement des apprentis-charpentiers, aidaient-ils égale- diers, sans que l’on sache précisément en quoi consiste son
ment le maître dans ses tâches de paredier, ou se conten- travail1491. Un autre Ytier1492 intervient par ailleurs 30 ans
taient-ils uniquement des ouvrages en charpente ? Là plus tôt (janvier 1360) pour « l’enterrement » du plancher
de la tour de la porte de la Baffe1493, puis comme
encore, le mystère demeure, et pas plus que pour les autres,
manœuvre1494. Il apparaît une fois en 1361 pour les travaux
on ne peut déterminer leur lieu de résidence ni leur origine.
du fossé derrière le château1495 et encore en mai 13631496.
Dans une dépense d’avril 1372 concernant Arnaud Cette présence sur les lieux, même discrète, laisse penser
Mancip, G. Guilabert (associé ou manœuvre ?) travaille que cet homme habitait sur place, du moins provisoire-
pour dégager les restes d’une paret effondrée afin d’en ment. Des patronymes identiques sont d’ailleurs visibles
édifier une nouvelle1485 : il n’apparaît jamais dans le premier durant cette période, tels B. Ytier, qui réside à la Baffe en
compte et ne figure d’ailleurs pas dans le registre de 1356. 1360-13611497, ou Jacques Ytier qui travaille au fossé à la
Toutefois, d’autres individus portant ce patronyme existent même époque1498 (sont-ils de la même famille ?). Absents

1480
« Socius : 1. compagnon, associé. 2. associé. 3. allié. 4. voisin, compagnon » (Gaffiot 2000, 1472). « Associé » (Bernardi 1995, 460).
1481
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°108 r°9]. « Item Guillermo Johannis et quibusdam sociis suis qui sclaverant dictum palum… ».
1482
Ces équipes déjà constituées sont parfois décisives pour l’obtention d’un marché. Pour les maçons par exemple « l’adjudication d’une tâche peut
être octroyée à un maître maçon plutôt qu’à un autre parce qu’il possède une assistance technique plus importante. Beaucoup d’artisans sont secondés
par un apprenti et par un ou plusieurs valets qui souvent ne sont pas dépourvus de qualification. Les comptes nomment ces derniers « compagnons »
(socii). Cette aide spécialisée garantit un travail de qualité effectué dans des temps les plus courts qui entraînent des économies importantes sur les
salaires payés à la journée aux manœuvres qui aident les maîtres » (Kersuzan 2005, 312).
1483
« Famulus : serviteur. Ce terme désigne aussi bien le compagnon que l’apprenti ou le manœuvre sous les ordres d’un maître (= manobra, servitor) »
(Bernardi 1995, 447). En Haut-Dauphiné, le famulus « désigne un serviteur qui accompagne le maître d’œuvre et le représente notamment lors de la
négociation des prix-faits » (Nicolas, 2005, 198, 199).
1484
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°3 v°6]. « ...G. Bastiti et Petro Saurini pro duobus jornalibus quibus fuerunt quilibet ad pigandum illum pari-
etem qui est in clausuris ante domum Fratrum Minorum… » ; [f°4 r°1]. « ...Guiraudo Miri et tribus famulis Petri Saurini qui fuerunt in dicto opere
quilibet per duos dies… ».
1485
Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°73 r°2]. « …Ar. Mancipii et G. Guilaberti qui dicta die steterunt ad aperiendum et curandum fundamentum dicte pari-
etis qui ceciderat pro incipiendo alium parietem novum… ».
1486
Ibid., 4E76/CC2, 1356, « De Barrio extra portam ». [f°4 v°1]. « Bernat Guilabert » ; [f°4 v°6] « Ramon Guilabert ». [f°4 v°12]. « Pons Guilabert » ;
« De Barrio infra portam », [f°12 r°9]. « Herediers de mastre Johan Guilabert ». « De strata », [f°16 v°12]. « Heretiers den Bernat Guilabert ».
1487
« Obrador : ouvroir, atelier, boutique, étude (d’un notaire) » (Lévy 1909, 264). S’agit-il ici d’un entrepôt dépendant de la ville ?
1488
AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°32 r°4]. « ...an B. Guiraut e an R. Serero e an R. de la Fita e an Bertran Albert e an R. Guilher e an B. del Truelh
e an Johan Faure e an Johan Loysol per far las taulas de la paret davant l’obrador del cosolat… ». On ne sait rien sur leur lieu de résidence ni sur
leurs origines.
1489
Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°32 r°7]. « Le jorn desus fero paguar a la molher den R. Guayraut e a la molher den Jacmes Catula e a dona Maria
Dermel e a dona Guilhalma de Cordas e a Dona Bona e a Dona Condors que esta a l’ostal den senhor Dermals e a dona Bernarda que esta a l’ostal
den Estene de Tauliat e la molher den Johan Pueg e a dona Jonana Patisiera e a la sirventa den senhor Robert e a la molher del panayrier que care-
gavan de la tera per far las taulas de la paret desus ditas… ».
1490
Ibid., [f°33 v°5]. « …an Johan Caser per 4 faysos de broc comprat de lu los cals foro mezes per far las taulas de la paret davant l’obrador del
cosolat… ».
1491
Ibid., [f°33 v°6]. « Item fero paguar an R. Ytier que ajudeo als parediers que paredo del jorn… ».
1492
S’agit-il du même individu, plus âgé ?
1493
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 v°3]. « ...Ramundo Yterii, Ramundo Amelii et Bernardo eius fratri qui interavunt soleria dicte turis... ».
1494
Ibid., [f°17 r°2]. « Item Ramundo Yterii et Arnaudo Denat pro uno jornali quo fuerunt manobrerii ad claudendum portanellum de Baffa… ».
1495
Ibid., 1360-1361, [f°62 r°1]. « ...an Miquel Bartas, Peyre Gautieri, Johanna Ytieira, Ana Baudriga, Ramon Ytier, Estene Faure, Ana Peyrana de
Peyra Fita, Ana Ondrada de Mon Feran, e a la serventa de dona Ferrieyra e a mays 3 femnas de Planha que aquel dia avian obrat al valat detras le
castel… ».
1496
Ibid., 4E76/CC49, 1363-1364, [f°28 r°5]. « ...Raymundo Montis Lebonis, Petro Gauterii, Petro G., Petro Andree, Arnaudo Martini, Raymundo Yterii
qui steterunt ad curandum intratam adequateria de Got Ferran… ».
1497
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°57 v°2]. « ...an B. Ytier de la Baffa per una cadena de fer... ».
1498
Ibid., [f°60 v°3]. « …an Jacmes Ytier, […] que aquel dia avian obrat en la dita obra del valat… ».

168
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

du registre de 1356, il s’agir de personnes récemment 1361-1362, la plupart du temps comme ouvrier chargé
installées, ou trop pauvres pour être imposées à cette d’assister les maçons1502 ou terrassier1503. Compte tenu de sa
époque. forte activité entre juillet 1361 et janvier 1362, il s’est vrai-
Ainsi, on sait fort peu de choses sur le nombre et la semblablement installé en ville, du moins ponctuellement,
qualification des personnes aidant à la construction des et même peut-être à demeure. On le retrouve en effet en
parets : les quelques individus nommément désignés 1363 comme porteur de lettre pour le maréchal de France,
semblent être des manœuvres, mais également des ce qui dénote une certaine marque de confiance de la part
ouvriers, aides ou apprentis dont les origines ne sont jamais des consuls1504.
indiquées. Le travail des femmes est essentiellement Quant à G. Malamosta, qui apparaît à deux reprises avec
cantonné au transport de la terre (manœuvres). Pierre de Bédarieux et Elie Fargues1505, il est quelquefois
employé comme manœuvre, généralement pour le transport
10.2.2 - Pour les opérations relatives au torchis de pierres1506 ou comme aide auprès des maçons1507.
À Castelnaudary, les moyens humains affectés au En 1361-1362, pas moins de 35 personnes sont
torchis sont souvent importants car les surfaces à couvrir nommément citées comme travaillant au torchis, le
sont vastes (pal, enceinte de certaines barbacanes, hourds, contexte et la rémunération laissant fortement soupçonner
cadafalcs, gaytils1499). Ces individus n’ont jamais de quali- qu’elles n’y jouent qu’un rôle d’ouvriers (même s’il ne
ficatifs particuliers mais on verra, avec l’étude des salaires, s’agit pas toujours de leur qualification première). D’autres
qu’il ne s’agit peut-être pas de simples manœuvres. individus, dont les noms sont passés sous silence en 1360-
1361 (s’agit-il des mêmes, en totalité ou en partie ?) sont
En 1360-1361 seules trois personnes (Pierre l’Espanal,
inscrits dans le registre. Vingt d’entre eux, désignés par
Pierre Bertrand, G. Malamosta) pourraient se voir attribuer
leur patronyme, résident en ville (soit 57 % du total) ; les
un rôle d’assistants dans une opération menée avec des
autres n’étant pas mentionnés dans le registre de 1356.
« tortissayres » (Elie Fargues, Pierre Ferran, Pierre de
Bédarieux, supra)1500. D’après le registre de 1356, aucun Ainsi, trois personnes habitent le quartier de Peyralbe :
d’eux n’habite Castelnaudary ou n’est imposable à cette Jean Gausi1508 (qui apparaît l’année suivante pour le
date (fig. 50) : Pierre l’Espanal (ou l’Espagnol) n’apparaît nettoyage d’un fossé1509), Raymond Montdebo1510, signalé à
d’ailleurs qu’à deux reprises entre 1359 et 13621501. D’après douze reprises entre 1359 et 13621511, et enfin G. Lobinhat1512,
son nom et la brièveté de son passage, il ne s’agissait peut- cité neuf fois (six en 1359-1360 et trois en 1361-1362) : ses
être que d’un travailleur occasionnel ayant quitté le chan- tâches tournent souvent autour du nettoyage des stilli-
tier assez rapidement. cidia1513, mais il peut également en effectuer d’autres1514.
Pierre Bertrand travaille une seule fois en 1359-1360, à Au port de l’Estrade habitent Jean Compte1515 et Arnaud
trois reprises l’année suivante, et enfin dix-neuf fois en Dupont1516 : entre 1359 et 1362, le premier apparaît dix fois

1499
Par exemple : Ibid., [f°80 r°9]. « Item Johannes de Hospitali cum non nullis aliis tortissavit dictum cadafalcum ad pretium factum…».
1500
Ibid., 1360, [f°49 r°1]. « ...an Elias Fargas, an Peyre Bertran, an Peyre Espanal, an Peyre Ferran, an Peyre de Bederes que tortissero aquel dia
l’amban del castel de Bays… ».
1501
Ibid., 1360-1361, [f°68 v°3]. « …an Johan Mauri al senhor P. Raynart an P. Espanhol per 3 quintals 1 cartayro de fe que fo mes obs de tortisar
le dit pal… ».
1502
Ibid., 1361-1362, [f°89 v°4]. « Item Johanni Guillelmi, Petro Bertrandi qui die presenti serviebant peyreriis qui claudebant portas de Mercadalis
et Sancti Antonini… ».
1503
Ibid., [f°94 r°7]. « Item Durando de Fraxino, Petro Bertrandi qui fuerunt die presenti ad cavandum rupem retro Bertrandum Oliba ubi fuit factus
pilarius… ».
1504
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°67 r°2]. « ...Petro Bertrandi pro portando unam literam clausam apud Villarum Savaricum et apud Alsonam domino
marescallo Francie qui erat in dicto loco… ».
1505
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°67 r°2]. « …an G. Mala Mosta e an P. de Bederes que avian tortissat al pal de l’angle dejos la porta de Sant
Antoni… » ; [f°74 r°5]. « …ad pretium factum ad tortisandum cadafalcos qui sunt in claustra seu circa claustrum Fratrum Minorum Elie Fargas
P. Bederes G. Malamostra... ».
1506
Ibid., 1359-1360, [f°15 r°3]. « …Guillermo Mala Mosta, G. de Saliers et Petro Chanardi qui dicta die portaverunt lapides in operibus
clausurarum… ».
1507
Ibid., [f°19 r°8]. « …Sansoni Servici, Dominico de la Rispey et Guillermo Malas Mosta qui dicta die fuerunt manobrerii in muro portus Bordarum
cum Johanne Galigonis… ». Ce dernier est effectivement maçon, comme nous l’apprend une dépense trois ans plus tard (Ibid., 4E76/CC49, mai 1363,
[f°26 v°2]. « …magistro Johanni Galigo peyrerio qui stetit ad operandum in turre de la Strada… ».
1508
AD Aude, 4E76/CC2, 1356. [f°20 v°4].
1509
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°38 r°2]. « ... Johanni Gausi, Guillelmo Lobinhat, Ramundo Montis Lebonis, [...] qui steterunt ad curandum dictum
vallum juxta turrim de la Strada...».
1510
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°20 v°9]. Son nom indique-t-il qu’il est originaire du quartier autour de la porte Montdebo ?
1511
Toujours pour des travaux de manœuvre (par exemple, Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°12 r°5]).
1512
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°22 r°11].
1513
Par exemple : Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°5 r°2]. « …Guillermo Lobinhat qui dicta die curavit quoddam stillicidium in clausuris portus
Bordarum... ».
1514
Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°12 r°5]. « ...G. Lobinhat, Ramundo Hugonis, Ramundo Mondebonis, Bernardo de Vito et Peyroto le Gasco qui dicta
die fuerunt manobreriis cum Johanne Galigonis ad suspeyrandum quodam parietem in clausuris portus Bordarum… » ; 1361-1362, [f°107 bis r°4].
« Item Guillermo Lobinhat, Petro Martinerii, Arnaudo Mancipii, qui die lune fuerunt ad radendum costones retro castrum... ».
1515
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°17 r°13].
1516
Ibid., [f°17 r°2]. Il ne faut pas confondre cet homme, apparemment ouvrier, avec maître Arnaud Dupont, qui réside au « Barrio infra portam » ([f°16
v°10]) et dont la qualification n’est pas précisée.

169
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOM, prénom Qualification certaine Lieu de résidence Origine supposée ( ?)
ou supposée ( ?) (date)
AD Aude, 4E76/CC48 25 avril ESPANAL ? ? Espagne ?
[f°49 r°1] 1360 Pierre
Ibid. Ibid. BERTRAND ? ? ?
Pierre
Ibid., [f°67 r°2]. 1360-1361 MALAMOSTA ? ? ?
G.
Ibid., [f°88 v°2] 1361-1362 GAUSI ? Peyralbe ?
Johan 1356
Ibid., [f°94 r°8] Ibid. MONTDEBO ? Peyralbe Quartier autour de
Ramon 1356 Montdebo ?
Ibid., [f°94 r°8] Ibid. LOBINHAT G. ? Peyralbe
1356
Ibid., [f°94 r°8] Ibid. COMPTE ? Port de l’Estrade
Jean 1356
Ibid., [f°94 r°8] Ibid. DUPONT ? Port de l’Estrade ?
Arnaud 1356
Ibid., [f°95 v°6] Ibid. GUILHEM ? Port des Bordes ?
P. 1356
Ibid., [f°95 v°6] Ibid. ESTENE ? Port des Bordes ?
P. 1356
Ibid., [f°95 v°6] Ibid. GASTANT ? Port des Bordes ?
Jean 1356
Ibid., [f°95 v°6] Ibid. RENNEG ? Port des Bordes ?
Arnaud 1356
Ibid., [f°88 v°2] Ibid. SAVAL ? Port des Bordes ?
G. 1356
Ibid., [f°95 v°7] Ibid. BARRAU manœuvre/braseri Port des Bordes ? ?
Stéphane Barrium infra portam ?
1356
Ibid., [f°94 r°8] Ibid. AURIOL manoeuvre Barrium infra portam ?
Jean 1356
Ibid., [f°88 v°2] Ibid. AUGIER charpentier ?(magister) Barrium infra portam ?
Guillaume maître d’oeuvre torchis 1356
Ibid., [f°126 v°10] Ibid. BORDES Barrium extra portam ?
Favre 1356
Ibid., [f°116 v°8] Ibid. ANHANT paredier ? Barrium extra portam ?
Bernard 1356
Ibid., [f°117 r°2] Ibid. DUPUY maçon-carrier (peyrerius) Barrium extra portam ?
Favre 1356
Ibid., [f°93 v°9] Ibid. JACQUES charpentier Barrium extra portam ?
Raymond 1356
Ibid., [f°116 v°8] 1361 ESPELIT, SPELIC paredier/valadier ? Barrium extra portam ?
[f°126 v°10] G. 1356
Ibid., [f°126 v°10] 1361 LAMBERT tortissayre ? Barrium extra portam ?
Pierre 1356
Ibid., [f°126 v°10] 1361-1362 CARDONA ? ? ?
Bernard
Ibid., [f°126 v°10] Ibid. CARDONA ? ? ?
G.
Ibid., [f°116 v°8] Ibid. MADRERIAS ? Port des Bordes ? ?
Jacques
Ibid., [f°116 v°8] Ibid. BELLEGARDE ? ? ?
G.
Ibid., [f°116 v°8] Ibid. AYBRAND ? ? ?
Raymond
Ibid., [f°95 v°6] Ibid. GONTIER ? ? ?
Pierre
Ibid., [f°88 v°2] Ibid. GONTIER ? ? ?
Raymond
Ibid., [f°95 v°6] Ibid. BORNIANERHI ? ? ?
Bertrand
Ibid., [f°95 v°8] Ibid. JULIEN ? ? ?
Bartholomé
Ibid., [f°95 v°8] Ibid.2 JULIEN ? ? ?
Raymond
Ibid., [f°116 v°8] 1361 DENAT paredier ? ? ?
Arnaud
Ibid., [f°126 v°10] 1361 LE BIGOURDIN paredier ? ? Bigorre?
G.
Ibid., [f°116 v°8] 1361 DE BEARN paredier ? ? Béarn ?
Guillaume
Ibid., [f°117 r°2] 1361-1362 Un Béarnais ? ? Béarn

Fig. 50 : Castelnaudary (1359-1362) : les aides pour le torchis. Qualifications et lieu de résidence.

170
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

et le second onze, toujours pour des travaux ne requerrant dernière année, où il se charge deux fois de la mise en
pas de qualifications particulières1517. Les cinq personnes du œuvre du torchis1529 et le reste du temps du transport de
port des Bordes (Pierre Guilhem1518, Pierre Estenne1519, Jean pierres1530, pour certaines volumineuses (pierres de taille ou
Gastant1520 Arnaud Renneg1521 et G. Saval1522) sont un peu moellons)1531 ; faut-il voir là un signe supplémentaire de la
dans le même cas : bien qu’étant établis au cœur de la ville, jeunesse de cet homme, mais aussi de son manque de
ils travaillent rarement pour les travaux de fortification qualification, une dépense lui attribuant le titre de « bras-
(respectivement quatre, six, sept, et deux fois chacun), et sier » (ouvrier ou manœuvre ?)1532 ?
très souvent pour des besognes peu qualifiées
Jean Auriol et Guillaume Augier sont les deux seuls
(manœuvres)1523.
individus affectés au torchis dont la localisation du domi-
Quant à Stéphane Barrau, son cas est plus complexe. cile au « Barrio infra portam » ne fait pas de doute1533. Le
On sait en effet qu’en 1359 un certain G. Barrau possède premier apparaît à sept reprises, ses six autres prestations
un fils (Stéphane ?)1524 mais deux personnes portant ce n’ayant aucun rapport direct avec la mise en œuvre de la
patronyme habitent Castelnaudary en 1356 : la première au terre1534. Le second1535 se manifeste deux fois en tant que
Barrio infra portam1525, la seconde au port des Bordes1526. simple ouvrier, puisque son salaire ne se distingue pas de
Par ailleurs, deux autres sont signalés, l’une au Barrio infra celui des autres protagonistes1536. Cet homme (ou un
portam (Bernat Barrau)1527, l’autre au port de l’Estrade homonyme ?) est cependant désigné à trois reprises
(Arnaud Barrau)1528. Si ces individus font partie de la même comme un « magister », toujours en relation avec des
famille, cette lignée semble donc bien implantée à pièces de charpente1537, ce qui ferait de lui un probable
Castelnaudary, et peut-être de longue date, puisqu’ils habi- fustier1538.
tent d’anciens quartiers. Au Barrio extra portam résident Raymond Jacques1539,
Stéphane Barrau apparaît en tout à neuf reprises entre Favre Bordes1540, Favre Dupuy1541, Bernard Anhant1542,
1359 et 1362, les huit autres étant toutes concentrées la G. Spelit, et Pierre Lambert1543 : le premier (charpentier1544)

1517
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°13 r°4]. « ...Arnaudo de Ponte [...] Johanni Comitis [...] qui sabbati tunc precedenti fuerunt ad curandum vallos
in clausuris de Astrata… ».
1518
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°25 r°16].
1519
Ibid., [f°24 v°7].
1520
Ibid., [f°25 v°14].
1521
Ibid., [f°25 r°15]. Ce patronyme provient-il de l’occitan « renegar » (« jurer, blasphémer ») ou de « renec » (juron) ? (Alibert 1966, 599).
1522
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°24 r°7].
1523
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1362, [f°16 v°8]. « …Petro Guillelmi, […] Petro de Alverniam pro uno die quo fuerunt manobrerii... » ; [f°13 v°6]. « ...
Petro Stephani, Bernardo Brezeyti et Poncio de Saltu qui dicta die operati fuerunt in vallis portus Bordarum... » ; [f°56 v°5]. « …P. Gastanh, […] que
aquel dia deroquero del mur dejos la paret de pres la porta de mastre B. Servit e portero de la peyra a l’obra de la barbacana… » ; [f°98 v°8].
« ...Arnaudo Renneg qui portaverunt fustam de plateam de aliis locis in dicto aguaserio… ». ; [f°17 v°6]. « G. Savalli pro tribus jornalibus quibus
fuit in operibus clausurarum... ».
1524
Ibid., 1359-1360, [f°20 v°4]. « Item G. Concordie et filio G. Baravii qui dicta die portaverunt de dicta fusta… ».
1525
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°12 v°3].
1526
Ibid., [f°23 v°4].
1527
Ibid., [f°14 r°7].
1528
Ibid., [f°16 r°6].
1529
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°90 v°3]. « Item Stephano Ramnos, Stephano Baravii, Guillermo Augerii qui fuerunt die presenti ad tortissandum
palem retro castrum... » ; [f°95 v°7]. « Item Stephano Baravum, Ramundo Gonterii, Stephano Ramnos qui presenti die fuerunt ad tortisandum dictam
portam… ».
1530
Ibid., [f°111 r°7]. « Item Stephano Baravi pro trahendo petram de vallis ante mercadal pretio facto… ».
1531
Ibid., [f°100 r°11]. « Item Stephano Baravi qui fuit per unam diem ad strahendum cayrones de valle Mercadalis…. ».
1532
Ibid., [f°118 v°1]. « Item Stephano Baravi, Ramundo Gaucerii braseriis qui per duos dies fuerunt ad portandum magno lapides in dictis
agueriis… ».
1533
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°12 r°7].
1534
Par exemple : Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°14 r°2]. « …Johanni Aurioli, Jacobo Arcerii, Petro Messerii, Johanni Vaquerii, et eorum sociis qui
fuerunt novem qui dicta die fuerunt in opere illius valli retro dictum Petrum Raynardi... ».
1535
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°38 v°13].
1536
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°88 v°2]. « Item Johanni Gausi, R. Gauterii, G. Augerii, G. Savalli qui ipsa die fuerunt ad tortissandum dictum
palum cuilibet 3 s… » ; [f°90 v°3]. « Item Stephano Ramnos, Stephano Baravi, Guillermo Augerii qui fuerunt die presenti ad tortissandum palem retro
castrum cuilibet 4 s. summa. 12 s. ».
1537
Ibid., [f°95 r°8]. « …pro 22 cledis ab eodem receptis ad opus corseriarum quas recepit magistrum G. Augerii… » ; [f°120 r°4]. « Item quatuor
faxeriis qui dictum fustem portaverunt de Mercadali ad dictum pontem et duos alios de Platea quorum unius erat magistri G. Augerii… » ; [f°120 r°5].
« Item dicto magistro G. Augerii pro dicto suo fuste recepto ad opus dicti pontis… ».
1538
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°59 v°1]. « …a mastre G. Augeri, per una brassa de peyra que fo meza als pilars en que son mezes les stant de las parets
de la Baffa… ».
1539
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°6 r°14].
1540
Ibid., [f°4 r°8].
1541
Ibid., [f°2 v°7].
1542
Ibid., [f°5 r°11].
1543
Nous avons déjà évoqué leurs cas pour les parediers et les tortissayres ; nous n’y reviendrons donc pas. Ils travaillent ici sous les ordres de Raymond
Sarrasin, le 20 janvier 1362 : Ibid., 4E76/CC48, 1362, [f°126 v°10]. « …Petrus Lamberti, G. Speliti, Faber Bordas […] die presenti fuissent conducti
ad tortissandum embanna retro magistrum Bernardum Servici et ipsa die date fuerunt pretio facto Ramundo Saraceni ad tortissandum…».
1544
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°23 v°7]. « ...Ramundo Jacobi, Ramundo Gauberti, fusteriis qui steterunt [...] pro sparonando dictum palum… ».

171
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

apparaît quatre fois (et une seule pour le torchis), le déterminer le lieu de résidence. Bernard Cardona1552 est
deuxième huit fois en quatre ans, toujours pour des travaux dans ce cas : il apparaît à une seule reprise, en 1361, alors
de manœuvre1545. que Guillaume (son frère ?) n’est quant à lui mentionné que
Les deux autres personnes présentent des profils plus deux fois.
complexes : ainsi, Favre Dupuy (une seule apparition Jacques Madrerias (ou Madrieyras) est bien plus
comme aide-tortisseur), serait en réalité un maçon-carrier présent (quatorze fois) : trois en 1359-1360, quatre en
(peyrerius)1546. La plupart de ses activités se concentrent 1360-1361, et enfin sept en 1361-1362. Il ne réside appa-
d’ailleurs sur l’extraction de la pierre1547, et vont croissant remment pas en ville, mais deux autres personnes possè-
tout au long de ces années : une apparition en 1359-1360, dent le même patronyme en 1356 (B. et G. Madrieyras,
deux l’année suivante, quatorze en 1361-1362. toutes deux au port des Bordes)1553 : s’agit-il de membres de
Il n’est toutefois pas qualifié de « mastre » (ou de sa famille qui auraient pu l’héberger à l’occasion des
« peyrier ») en 1356, à la différence d’autres personnes, travaux ? Entrevu lors des responsables pour la terre
comme Bernard Dupuy, forgeron bien connu (un membre massive, il est également souvent associé au torchis ; même
de sa famille ?)1548. On peut alors se demander si Favre s’il semble être davantage qu’un simple ouvrier ou
Dupuy n’a pas acquis cette qualification entre 1356 et manœuvre, eu égard à ses interventions pour la construc-
1359, période durant laquelle il aurait pu se former auprès tion d’une paret, ses autres travaux ne s’en distinguent
d’autres maçons-carriers œuvrant sur le chantier. guère (transport de pierres, de bois1554, etc.).
Durant ces quatre années, il semble être le seul maçon
à travailler comme ouvrier pour le torchis. Quant à G. Bellegarde et Raymond Aybrand, leurs
Cette observation intrigue dans la mesure où il réalise apparitions éphémères (trois entre 1359 et 1362) laisse-
beaucoup de travaux en 1361-1362. Faut-il y voir un raient songer à des ouvriers de passage, seul ce dernier se
manque de main d’œuvre ponctuel dans cette discipline ou retrouvant à nouveau dans les sources en 1363, en l’occur-
s’agit-il d’un homonyme ? rence pour des travaux de terrassement1555.
Pierre Gontier n’est visible que trois fois en quatre ans :
Quant à Bernard Anhant, déjà rencontré pour les pare-
si l’on excepte sa contribution aux travaux du torchis en
diers, il ne travaille pour la ville qu’à cinq reprises en 1362,
et se voit confier des tâches comme la pose d’une palis- 1361, ses deux autres apparitions se résument à un trans-
sade1549 ou une intervention sur une paret1550. Ainsi, s’il agit port de matériaux. Comme Jacques Madrerias, il possède
dans ce dernier cas comme paredier, il peut être, rarement un animal, chose très prisée des consuls1556. Quant à
il est vrai, employé pour d’autres besognes, et notamment Raymond Gontier (parent du précédent ?), il apparaît à six
le torchis, la mise en œuvre de la terre ne lui étant pas reprises dès la première année, la plupart du temps pour
étrangère, comme peut-être pour G. Espelit, probable pare- des opérations ne nécessitant pas de qualifications1557.
dier/valadier (supra). Bertrand Bornianerhi et Bartholomé Julien ne se mani-
En 1361-1362, on dispose d’une série de quinze festent pour leur part qu’à l’occasion d’un seul travail pour
personnes1551 pour lesquelles il n’a pas été possible de le torchis1558. Quant à Raymond Julien, (parent du précé-

1545
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°60 r°1]. « ...an Favre Bordas an Pons Fayres an Miquel Guiraut an Ramon Calart que aquel dia traysero del
escombre del valat am paniers… ».
1546
Ibid., 1359-1360, [f°3 v°1]. « ...Ramundo Redorte et Fabro de Podio peyreriis… ».
1547
Ibid., 1361-1362, [f°100 v°5]. « Item Fabro de Podio, Ramundo Argelerii, qui per duos dies fuerunt ad trasandum peyreriam seu discoperiendum
usque bone petre... ».
1548
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°3°r°9].
1549
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°108 v°9]. « Item Guillermo Johannis, Bernardo Anhant qui fuerunt die presenti ad ponendum palum in dicto
cimmiterio… ».
1550
Ibid., [f°114 r°8]. « ...tradiderunt parietes retro G. Olricii et porte Mondebonis videlicet : G. Johannis, Bernardo Anhant, Jacobo Madrerias,
Ramundo Tocarelli ad extinctum candele tanquam ultimas offerentibus et debuunt habere diruendo parietes retro Guillermum Olricii usque ad furnum
et reficiendo pro cava... » ; [f°116 v°1]. « Item Arnaudo Denat, G. Speliti, G. le Begorda, G. le Bearnes, Bernardo Anhant, Ramundo Tocarelli,
G. Johannis qui per unam diem fuerunt ad perficiendum parietem retro Guillermum Olrici culibet primorum 4 s. 4 d. aliorum tertium ultimorum 4 s... ».
1551
Quatorze si l’on excepte Pierre Bertrand, déjà rencontré l’année précédente.
1552
De l’occitan « cardon » ? (chardon ; Alibert 1966, 469).
1553
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°4 v°11], [f°5 r°8].
1554
Cet individu possède un animal de bât (âne ou mulet ?) (Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°23 r°5]. « …Jacobo Madrerias pro uno die quo fuit cum suo
animali ad portandum cledas pro clausuris ».
1555
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°42 v°4]. « ...Ramundo Aybrandi, Johanni Bastonis, Ramundo Ruphi, Johanni Palher qui steterunt ad faciendum vallum
seu trencatam juxta porta Montis Leboni... ». Ce phénomène n’est cependant pas systématique. Ainsi, pour Saint-Flour, A. Rigaudière note que « le
grand nombre d’ouvriers ou de manœuvres occasionnels, qui n’effectuaient que quelques journées de travail, pourrait laisser supposer que cette main
d’œuvre ne résidait pas à Saint-Flour et qu’elle était essentiellement composée de gens de passage. En fait, il n’en est rien et l’examen de quelques cas
extrêmes le prouve bien. Jean Manent qui ne fournit qu’une journée de travail est toujours sanflorain en 1408, puis en 1422, Gérard Gubert l’est aussi
en 1404 et 1406. Quant à la famille des Yvernat, c’est une pépinière de manœuvres. Jean l’est de 1398 à 1416 et Etienne de 1403 à 1422. Il n’y a aucun
doute, toute cette main d’œuvre temporaire habitait bien la ville » (Rigaudière 1982, t. 2, 709).
1556
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°21 v°10]. « Item Petro Gonterii pro uno die quo fuit cum suo animali ad portandum lapides in muro portus
Bordarum. 3 s. tur. ». ; 1361-1362, [f°97 v°10]. « Item Petro Gonterii pro uno jornali quo stetit ad portandum tegulos de porta Stimbalorum ad castrum
cum suo animali. 6 s. tur. ».
1557
Ibid., [f°15 v°4]. « ...Johanni Stephani, Barneto de Vito et Ramundo Gonterii qui dicta die portaverunt lapides ad claudendum portam de Astrata… ».
1558
Ibid., [f° 95 v°6]. « Item Ramundo Mondebonis, Petro Guillelmi, Petro Gonterii, Petro Stephani, Johanni Gastant, Arnaudo Renneg, Bertrando
Bornianerhi qui die presenti fuerunt ad tortissandum portam Terrerii...» ; [f°95 v°8]. « Item Bertholomeo Juliani, Ramundo Juliani qui ipsa die
fuerunt in dicto opere ad tortisandum cuilibet 3 s. summa. 6 s. tur. ».

172
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

dent ?), il travaille à trois reprises entre 1359 et 1362, les Une bonne moitié (20 individus sur 37, soit 54 % du
deux autres fois pour le transport de pierres1559. total), des personnes nommément désignées habitent à
Il faut également signaler par deux fois la présence Castelnaudary même. Pour les autres, rien ne permet de
comme aides-tortisseurs de personnes déjà connues, connaître avec précision leur lieu de résidence : si certaines
sont peut-être de passage, eu égard au nombre très faible de
comme G. le Béarnais et Arnaud Denat, qui, en novembre
besognes remplies pour la ville, d’autres, comme nous
1361, travaillent avec d’autres sous les ordres de Guillaume
l’avions déjà soulevé avec le cas de Pierre Bertrand, ont pu
Jean et Raymond Tocarel1560. Ces individus, ici assistants
être attirées par le travail proposé par les consuls, et se sont
(salaire inférieur aux responsables), sont de probables
par la suite installées à demeure à Castelnaudary, afin de
parediers, ou du moins agissent comme tels (supra). À
profiter de la manne offerte par la reconstruction des forti-
cette occasion un autre béarnais, peut-être venu avec
fications.
Guillaume Le Béarnais, apparaît une seule fois1561. Ne rési-
dant pas en ville, ses origines, comme celles de Guillaume, 10.2.3 - Pour les opérations relatives à l’« enterrement »
sont peut-être à rechercher en Béarn.
Dix-huit personnes identifiables travaillant comme
Enfin, le registre consigne une série de dépenses (du aides à l’enterrement des structures ont été répertoriées
18 mai au 16 juin 1360) répertoriant 65 personnes1562. On entre 1359 et 1362 (fig. 51).
ne sait donc si parmi elles se trouvent des travailleurs déjà
connus, ou si elles étaient toutes étrangères à la ville, ni Ces opérations emploient un personnel dont l’effectif
même si ce sont les mêmes hommes qui ont œuvré varie généralement entre deux1564 et dix personnes1565, essen-
plusieurs jours de suite. tiellement des hommes. Cependant, comme pour les aides-
parediers et le curage du fossé de la ville, des femmes sont
Que ce soit pour des personnes nommément désignées quelquefois présentes, en moins grand nombre il est vrai.
ou des anonymes, le chantier chaurien n’emploie durant
En 1359-1360, les personnes citées dans les travaux
ces années jamais de femmes, ni dans la préparation du
d’enterrement sont rares : trois individus, tous absents du
torchis, ni dans sa mise en œuvre. On a pu voir qu’il n’en
registre de 1356. Raymond Ytier tout d’abord, rencontré
va pas de même à Albi, ces dernières apparaissant parfois
comme aide pour les parediers, et sur lequel on ne
lors de la phase préalable au « tortissage »1563.
reviendra donc pas ; les frères Raymond et Bernard Amiel
En définitive, la plupart des personnes œuvrant au ensuite1566, apparaissant à de très rares reprises, toujours
torchis en 1359-1362 occupent des emplois d’ouvriers ou pour un travail peu qualifié1567. Comme pour le précédent,
quelquefois de manœuvres, souvent peu qualifiés (29 sur on peut penser, compte tenu du grand nombre d’« Amiel »
37, soit 78,3 % du total), et le tortissage ne constitue pas résidant en ville en 1356 (au moins huit chefs de
pour elles une spécialité à proprement parler. D’autres, plus famille1568), qu’ils étaient parents avec certains d’entre eux,
rares, ont un autre lien avec la terre crue, comme probables ou la totalité, et qu’ils résidaient sur place.
parediers (cinq personnes, soit 13,5 % du total) ou « tortis- Quant à Jacques Madrerias, déjà croisé pour les opéra-
sayre » (un cas, 2,7 %). D’autres encore possèdent une tions relatives au torchis et à une reprise comme interve-
autre qualification : charpentier (un cas, 2,7 %) ou maçon- nant dans la construction d’une paret1569, on ne s’attardera
carrier (un cas, 2,7 %). Ainsi, même qualifiés, certains arti- pas sur son cas. Il est cependant fort possible qu’il réside
sans sont parfois obligés de travailler comme simples au port des Bordes. Sa qualification est difficile à déter-
ouvriers, vraisemblablement pour des raisons écono- miner, mais il participe aux trois modes principaux de mise
miques. en œuvre de la terre (terre massive, torchis, terre de protec-

1559
Ibid., [f°98 r°5], [f°118 r°6].
1560
Ibid., [f°116 v°8]. « …Arnaudo Denat, Bernardo Anhant, [Ramundo Tocarelli rat.], Jacobo Madrerias, G. Bela Garda, G. Biarnesii, G. Speliti,
Fabro Bordas, G. Johannis, Ramundo Tocarelli, Ramundo Aybrandi qui diebus lune martii mercuri fuerunt ad tortisandum dictos embans cuilibet pro
die 3 s. et prenominatis Ramundo Tocarelli, Guillermo Johannis pro avantagio quia regebant operas… ».
1561
Ibid., [f°117 r°2]. « Item G. Speliti, Arnaudo Denat, G. le Bigorda, G. de Bearno, Bernardo Anhandi, cuidam alio bearnesio, Fabro de Podio, Jacobo
Madrerias, qui diebus jovis et veneris fuerunt in dicto opere ad tortisandum cuilibet pro die 3 s. tur... ». Cette tâche ponctuelle était-elle liée à un
passage fortuit dans les environs ?
1562
Ibid., 1360, [f°66 v°3], [f°66 v°4], [f°67 v°5], [f°67 v°6], [f°68 v°1]. [f°68 v°7], [f°69 r°3], [f°69 r°5].
1563
Vidal 1911, t. II, 41, [f°68 r°]. 651. « Per tres jornals de home, a 17 d. e media per home, e per 5 jornals de femna a 7 d. e media per femna, ad obs
de far lo bart e portar la ayga e far los pomels e portar aquels al dig obratge ; monta. 7 s. 6 d. ». Ailleurs, les femmes sont souvent employées comme
manœuvres pour porter de l’eau ou faire le mortier (Rigaudière 1982, t. 2, 715).
1564
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°25 v°9]. « …Johanni Fabri et Petro Danini qui steterunt ad enterrandum corserias retro Fratrum Minorum... ».
1565
Ibid., [f°28 r°8]. « …Johanni Raynardi, Jacobo Paxillatori, Petro Rocas, Ramundo de Podio, Johanni Hugonis, Ramundo Baronis, Petro Martini,
Petro Astrada, Germano Garrigue, Petro Daunii qui steterunt ad enterandum corserias retro Fratrum Minorum... ».
1566
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 v°3]. « ...Ramundo Yterii, Ramundo Amelii et Bernardo eius fratri qui interavunt soleria dicte turis... ».
1567
Ibid., 1361-1362, [f°88 r°7]. « ...ad reparandum cavam retro castrum videlicet [...] R. Amelii, R. de Caucelli et aliis octo hominibus… » ; [f°89 r°10].
« ...Ramundo Amelii, [...] Bernardo Amelii, [...] qui per duos dies fuerunt quilibet ad raddendum costones de Baffa… » ; [f°94 v°6].
1568
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°9 r°]. « De barrio infra », [f°10 v°8]. « Johan Amielh » ; [f°11 r°9]. « Ar. Amielh » ; « De Petra Alba », [f°20 v°3]. « Ar.
Amielh » ; [f°20 v°11]. « Heretiers den Johan Amielh » ; [f°21 r°4]. « Heretiers den Estene Amielh » ; [f°21 r°6]. « Johan Amielh dit Peyre Ramon » ;
[f°21 v°7]. « Germa Amielh ». [f°26 r°8]. « P. Amielh servent ».
1569
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°114 r°8]. « ...tradiderunt parietes retro G. Olricii et porte Mondebonis videlicet : G. Johannis, Bernardo Anhant, Jacobo
Madrerias, Ramundo Tocarelli ad extinctum candele tanquam ultimas offerentibus et debuunt habere diruendo parietes retro Guillermum Olricii usque
ad furnum et reficiendo pro cava... ».

173
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOM, prénom Qualification certaine Lieu de résidence


ou supposée ( ?) (date)

AD Aude, 1359-1360 YTIER Raymond ? Castelnaudary ?


4E76/CC48
[f°11 v°3]
Ibid. 1359-1360 AMIEL Raymond ? Castelnaudary ?
Ibid. 1359-1360 AMIEL Bernard ? Castelnaudary ?
(frère du prcdt.)
Ibid., [f°74 v°5] 1360-1361 MADRERIAS manœuvre ? Port des Bordes ?
Jacques
Ibid. 1360-1361 CARRIERE manœuvre ? Port de l’Estrade
Jean 1356
Ibid., [f°80 r°6] 1360-1361 DANDANT ? Port de l’Estrade
Raymond 1356 ?
Ibid., [f°80 r°5] 1360-1361 DENNIER Pons ? Barrium extra portam
1356
Ibid. 1360-1361 BORDES Favre ? Barrium extra portam
1356
Ibid., [f°93 v°9] 1361-1362 TOCAREL tortissayre ? Barrium extra portam
Raymond Paredier? 1356
Ibid. 1361-1362 JACQUES charpentier/fusterius Barrium extra portam
Raymond 1356
Ibid., [f°80 r°6] 1360-1361 GRAS B. ? Barrium extra portam
1356
Ibid., [f°109 r°8] 1361-1362 BLANQUIER ? Barrium extra portam
Raymond 1356
Ibid. 1361-1362 JEAN ? Barrium extra portam
Pierre 1356 ?
Ibid., [f°109 r°8] 1361-1362 GUILHEM ? ?
G.
Ibid. 1361-1362 DE RASTOS ? ?
G.
Ibid. 1361-1362 DE MORAT ? ?
Arnaud
Ibid. 1361-1362 DE ARTIGUE charpentier/fusterius ? ?
Raymond
Ibid. 1361-1362 RANNO tortissayre ? ?
Stéphane ouvrier spécialisé ?
manœuvre ?
Fig. 51 : Castelnaudary (1359-1362) : les aides pour l’enterrement. Qualifications et lieu de résidence.

tion), ce qui en fait un cas à part. On verra toutefois avec 1362) et ne doit pas être confondu avec un certain « maître
l’étude des salaires que dans ce cas précis il est vraisem- Jean Carrière » (un parent ?), domicilié au « Barrio infra »,
blablement employé comme manœuvre. dont nous ne connaissons pas la qualification, puisqu’il
Au port de l’Estrade habitent Jean Carrière1570 et peut- n’apparaît jamais dans les registres consulaires1571. Jean
être Raymond Dandant. Le premier n’est visible qu’assez Carrière est donc très vraisemblablement simple
brièvement (trois fois ; une en 1359-1360, deux en 1361- manœuvre1572, comme en témoignent ses travaux1573.

1570
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°18 r°7].
1571
Ibid., « De barrio infra », [f°9 v°8]. « Mastre Johan Carrieyra. ».
1572
Ou du moins employé en tant que tel pour cette opération.
1573
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°21 v°2]. « ...Johanni Carrerie pro uno jornali quo fuit cum suo animali ad portandum lapides in muro portus
Bordarum... » ; 1360-1361, [f°74 v°3]. « ...quandam trencadam in carreria juxta burdarum de Carmelo et fuit conducti ibidem Johannes Carrerie et
B. Concordia… » ; [f°74 v°5]. « ...fecerunt interrare cadafalcos de retro hospicium G. Olrici et de super hospicium Bertrandi Olibe et fuerunt conducti
in dicto opere videlicet Jacobus Madrerie et Johannes Carrerie… ».

174
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Quant à Raymond Dandant, son patronyme, rare, et la reprise il peut travailler au fossé1584 ; cependant, même dans
présence d’un certain P. Dandant au port de l’Estrade en ce dernier cas, sa rémunération plus importante (2 s. 6 d.
13561574 laissent penser qu’il est peut-être son fils. Sa seule toulzas, contre 18 d. pour les manœuvres) laisse penser à
apparition concernera ainsi la couverture et l’enterrement une activité en rapport avec son métier principal (construc-
d’un cadafalc en compagnie de B. Gras le 14 mai 13601575, tion d’une rampe en bois permettant aux manœuvres d’éva-
action permettant difficilement de se faire une idée sur ses cuer la terre ?1585).
aptitudes réelles.
Bernat Gras1586 ne se manifeste que cinq fois entre 1359
Le quartier du « Barri extra portam » est représenté par et 1362, et semble plutôt spécialisé dans les opérations
sept personnes (soit 38 % du total). Pons Dennier tout liées au couvrement1587, même si à une reprise il peut servir
d’abord1576, qui n’apparaît qu’une seule fois durant ces de messager1588. Il apparaît à chaque fois comme un simple
quatre années1577. En 1363 cependant, ses apparitions sont exécutant. Trois autres patronymes « Gras » sont inscrits
plus fréquentes et concernent toujours des travaux de dans le registre de 1356 (proches parents ?), tel Jean Gras
terrassement1578 ou l’évacuation de décombres1579, incitant à qui réside au même endroit1589, ou les Pierre Gras du
voir en lui un simple manœuvre, sans qualification particu- « Barrio infra »1590, dont l’un est boucher, et chez qui il
lière. travaille peut-être en 1356 pour s’acquitter d’une partie de
Le cas de Favre Bordes a déjà été évoqué pour les aides son impôt1591.
du torchis, et son apparition ici ne nous surprend donc pas. Raymond Blanquier est quant à lui une « figure » du
Le cas de Raymond Tocarel, interprété comme un probable chantier chaurien où il apparaît à soixante reprises en
paredier et un « tortissayre », est plus intéressant, puisque quatre ans, ce qui en fait le travailleur le plus assidu jamais
son intervention en compagnie de Raymond Jacques ne le rencontré1592. Egalement domicilié au « Barrio extra
fait plus apparaître comme un donneur d’ordre, mais plutôt portam »1593, il est le seul à porter ce patronyme en 1356.
comme un ouvrier qualifié, eu égard à sa rémunération Ses tâches sont sans qualifications : terrassier1594, collecteur
identique1580. de matériaux1595, manœuvre1596, transporteur de pierres1597,
Raymond Jacques1581 est charpentier1582 : il apparaît en etc. Il ne participe qu’à une seule besogne liée à l’enterre-
effet souvent en relation avec le bois1583, même si à une ment des structures au cours de ces quatre années (début

1574
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°17 v°9].
1575
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°80 r°6]. « …pro interrando et coperiendo cadafalcum de retro alam fuerunt conducti B. Grassi, Ramundus
Dandant… ».
1576
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°5 v°4].
1577
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°80 r°5]. « …pro interrando cadafalcum de retro hospicium Bernardo Ricardi, Pontius Dennierii, Favre Bordas… ».
1578
Par exemple : Ibid., 4E76/CC49, 1363, [°29 r°5]. « ….Poncio Dennierii, […] qui steterunt ad faciendum trencatas valli juxta portam Montis
Lebonis... » ; [33 r°6], [f°32 v°2].
1579
Ibid., [f°113 v°1]. « ...Poncio Dennueri, [...]qui steterunt ad abstrahendum scombrilhas peyreriorum de vallo juxta portam domini Bertholomei... ».
1580
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 v°9]. « Item Ramundo Tocarelli, Ramundo Jacobi qui die presenti fuerunt ad tortissandum, interandum
gacillum juxta palem prope portam Beati Antonii cuilibet 4 s. tur. summa. 8 s. ».
1581
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°6 r°14].
1582
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°23 v°7]. « …Ramundo Jacobi, Ramundo Gauberti, fusteriis qui steterunt pro faciendo aleyas in palo de la Strada et
pro sparonando dictum palum... ».
1583
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 v°5]. « Item G. Rogerii R. Jacobi pro ressegando barras barrerie porte Barri… » ; [f°91 v°1]. « Item Guillermo
Rogerii, Ramundo Jacobi, Ramundo Brezeyti qui laboravunt in dictis embans… ».
1584
Ibid., 1360-1361, [f°56 v°3]. « …an Ramon Jacmes per 1 jornal que avia estat en la dita obra del valat a relacio del senhor Bertran Robert prenia
per jornal 2 s. 6 d. tol.».
1585
Sa rémunération de 4 s. 9 d. tournois est en effet très proche du salaire d’un maître maçon à Saint-Flour en 1383 ou 1386 (en moyenne, 4 s. 6 d.
tournois ; Rigaudière 1982, t. 2, 716, tableau 39).
1586
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°8 r°1].
1587
Ibid., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°72 v°6]. « ...Bernardus Grassi latavit cadafalcum de ala quod est inter Bertrandum Olibe e cadafalcum magnum
anguli fuit conductus… » ; [f°80 r°1]. « ...pro cohoperiendo portam magistri Bertholomei Constantini et etiam Montis Lebonis fuerunt conducti B.
Grassi, Petrus Boerii… » ; [f°80 r°4]. « ...pro cohoperiendo ac bardam tectum Montis Lebonis B. Grassi, G. Ruphi… » ; [f°80 r°6]. « ...pro inter-
rando et coperiendo cadafalcum de retro alam fuerunt conducti B. Grassi, Ramundus Dandant… ».
1588
Ibid., [f°73 v°7]. « Item Bernardus Grassi et Johannes Helie messegarii fuerunt missi per duos consules pro peyreriis de Monte Mauro ut venirent
si vellent operari in muris clausurarum… ».
1589
Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°3° r°4].
1590
Ibid., [f°9 v°6]. « P. Gras ». [f°11 v°10]. « P. Gras maselier ».
1591
Ibid., [f°8 r°1]. « Bernat Gras. 8 s. Item solvit de 1 jornali quo fuit in macello 2 s… ».
1592
Il travaille douze fois en 1359-1360, huit fois en 1360-1361 et quarante fois en 1361-1362. Par rapport à d’autres chantiers, ce chiffre reste toute-
fois bien modeste. Ainsi, à Sens par exemple, un certain Jehan Coignet, maçon, effectue 74,5 journées de travail entre janvier et avril 1479 (Cailleaux
1985, 145).
1593
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°2 r°9].
1594
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°4 v°1]. « …cum quidam paries qui erat in clausuris prope portam de Got Feran cetidisset [dicti d. rat.] fecerunt perquire
dicti dicti [sic] consules fundamentum dicti parietis causa ipsum reficiendi ubi steterunt dicta die Ramundus Blanquerii et alii quinque homines
extraneii… ».
1595
Ibid., 1359-1360, [f° 12 v°2]. « ...Raimundus Blanquerii et Arnaudo Amelii qui dicta die colligerunt fustes e tegulos illius gaycilli diruti... ».
1596
Ibid., [f°15 v°9]. « ...Ramundo Blanquerii qui per mediam diem fuit manobrerius in opere porte Terrerii… ».
1597
Ibid., 1360, [f°54 v°2]. « …an R. Blanquier e an Peyre Lobiera e an G. Freyre que aquel dia portero peyra del mur de costa la porta de mastre B.
Servit a l’obra de la dita barbacana… ».

175
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

13621598), mais ces tâches deviennent plus fréquentes sier e paredier », étant là pour démontrer cette réalité
l’année suivante (trois entre le 29 mai et le 24 juin 1363)1599. (supra)1607.
Quant à Pierre Jean, c’est sa femme, pour une raison Enfin, le cas de Stéphane Ranno a déjà été évoqué pour
inconnue, qui tient lieu de chef de famille en 13561600. Il les « tortissayres » : on se bornera donc à constater qu’il
résidait donc également au Barrio extra portam dès cette s’agit ici d’une activité supplémentaire à mettre à son actif,
époque1601. Cette seule opération effectuée en quatre ans ne fait qui rend très incertain sa qualification.
permet pas d’en savoir plus sur son compte. G. de Rastos, On n’oubliera pas d’autres personnes non dénommées
Arnaud de Morat, et G. Guilhem sont dans le même cas, travaillant à de rares opérations d’enterrement durant cette
mais leur lieu de résidence est en outre inconnu : pour ce période : en 1359, un étranger opère sur la porte de
dernier cependant, deux personnes chefs de famille portent Valence1608, comme plusieurs autres individus sur divers
ce nom en 1356, un certain Jean Guilhem au Barrio extra chantiers l’année suivante1609, en tout dix hommes et dix
Portam1602 et P. Guilhem au port des Bordes1603, laissant femmes : s’agit-il des mêmes répétés à plusieurs reprises
supposer que G. Guilhem habite peut-être à l’un de ces ou au contraire de personnages différents ?
deux endroits. De fait, en retenant la première hypothèse, on arriverait
Raymond Artigue apparaît à onze reprises, et seulement pour la période 1359-1362 à un total de 28 hommes (73 %)
entre septembre 1361 et février 1362 : il vient d’arriver sur et dix femmes (26 %) travaillant à l’enterrement des struc-
le chantier chaurien où il réside peut-être, du moins tempo- tures, soit 38 personnes au total. Treize d’entre elles rési-
dent avec certitude ou une grande probabilité à
rairement, puisqu’il n’est pas mentionné sur le registre de
Castelnaudary même (34 % du total), chiffre atteignant
1356, pas plus d’ailleurs que des patronymes similaires.
72 % si l’on ne tient compte que des seules personnes
Une dépense suggèrerait que cet homme est charpentier1604
dénommées.
mais les tâches effectuées pour la ville n’ont pratiquement Pour ces dernières, les cas (deux avec certitude, deux
aucun lien avec cette activité 1605, même si on relève incertains, soit 22 % du total) et la nature des professions
quelques opérations en rapport avec le bois, mais plutôt qualifiées sont rares, mais toutefois en adéquation avec la
avec son transport1606. On ne sait donc réellement s’il s’agit tâche à réaliser (charpentiers, spécialistes du torchis),
d’un homonyme ou de la même personne, l’une étant puisque l’enterrement des structures requiert à la fois
ouvrier ou manœuvre, l’autre charpentier. quelques notions en rapport avec la terre et la mise en
Cependant, le fait qu’un artisan qualifié puisse œuvre de la charpente.
travailler comme brassier ne doit pas étonner, le cas de P. Cependant, on peut considérer que ce total est bien
de Lauretgia à Toulouse en 1354-1355, qualifié de « bras- faible, puisqu’on peut se demander si un groupe d’à peine

1598
Ibid., 1362, [f°109 r°8]. « Item [...] Ramundo Blanqueri, Ramundo de Artigua qui die XV febroarii fuerunt ad ponendum plansonem supra pari-
etes et interrandum… ».
1599
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°26 r°3]. « ...Ramundo Blanquerii qui steterunt ad enterrandum solerium turrim de la Strada… » ; [f°26 v°1] ; [f°46
r°3]. « ...Ramundo Blanquerii, Bernardo Galhardi cuidam vocato Vidalo quibus steterunt ad enterandum corserias … ».
1600
Dans les registres fiscaux, « la présence des femmes, sur laquelle il conviendra de s’interroger, est toujours importante. Variant en moyenne de 10
à 15 % des contribuables recensés, elle a conduit les juristes du temps à réfléchir sur leur situation. Sont-elles mariées, veuves ou célibataires, et, dans
ce dernier cas, vivent-elles seules ou sous le toit familial ? Autant de situations qui conduisent à les soumettre à un régime fiscal différent et à connaître
avec précision leur régime matrimonial dans l’hypothèse où il s’agit d’épouses » (Rigaudière 2006, 18). Le pourcentage des femmes imposables sur
quelques registres d’estime du Lauragais est d’ailleurs faible et « inférieur à 4 %, sauf à Castelnaudary, dans le registre CC9 du début du XVe siècle,
où elles représentent 8,47 % des déclarants laïcs… » (Marandet 2006a, 475).
Pierre Jean se trouve-t-il dans un cas d’espèce identique à celui de G. Le Sabatier, de Pont-Saint-Esprit, en 1390 ? (« Plus étonnant est le cas de Guainot
le Sabatier, unique homme dont le nom s’efface du compoix pour cause de mariage : son cap est alors transféré sur celui de sa femme qui réside dans
le quartier du Mercat, sans doute parce que lui-même ne possédait pas de maison d’habitation à Villabones » ; Challet 2006, 300).
1601
AD Aude, 4E76/CC2, 1356, [f°5 v°2]. « La molher den P. Johan ».
1602
Ibid., [f°3° v°12].
1603
Ibid., [f°25 r°16].
1604
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°97 r°5]. « Item Ramundo Talart, Guillermo Audiberti, Ramundus Artigua, fusteriis qui portaverunt aliquos fustos
in castro... ».
1605
Ibid., [f° 92 v°5]. « Item Raimundo de Artigua, Johanni Arsalat, Johanni Martini et cuidam alio pro portando petram in dicta portam… »; ibid.,
[f°114 r°2]. « Item Ramundo de Artiga, Garcieto de Castro, Petro de Breta qui per unam diem fuerunt ad amortifficandum dictam calce… » ; ibid.,
[f°128 v°7]. « Item Ramundo Blanquerii, Bernardo Seguini, Ramundo de Artigua, Johanni Melis qui die presenti operavunt in dictis vallis... ».
1606
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°92 v°1]. « ...Ramundo de Artigua, Johanni Arsalat, Johanni Martini faxeriis pro portando fustam et petram in
dicto portanello... » ; [f°96 r°6]. « Item Guillermo Faure, Ramundo de Artiga, Johanni de Jota pro portando 12 faxos late de domo Germani Gauberti
et aliam fustam in opere retro G. Olricii... ».
1607
Ainsi, « pour remédier au manque de travail -celui-ci, faute d’argent, étant très irrégulier, même sur les chantiers les plus importants- les maîtres
maçons, comme les ouvriers et les compagnons, exerçaient un autre métier ; ils étaient notamment jardiniers ou fermiers ; ils faisaient valoir le lopin
de terre qui leur avait été donné par l’abbé ou l’évêque qui les employait. Certains s’occupaient de l’organisation des transports ; ils vendaient du sable,
de la chaux, de la pierre taillée ou non, parfois même des bas-reliefs et des sculptures qu’ils exécutaient chez eux ou à la carrière pendant l’hiver »
(Aubert 1961, 94).
1608
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°3]. « …cuidam homini extraneo qui dicta die interraverat solerium dicte turris… ».
1609
Ibid., 1360, [f°72 v°5]. « …fecerunt interrare cadafalcos de juxta portam Campanarium […] et fuerunt conducti ad id agendum 2 homines et 3
mulieres… » ; [f°74 v°6]. « …fuerunt conducti in dicto opere videlicet quatuor homines… » ; [f°80 r°3]. « …fuerunt conducti pro interrando coronam
porte magistri Bertholomei Constantini videlicet quatuor homines […] et quatuor mulieres… » ; [f°80 r°5]. « ….fuerunt conducti pro interrando
cadafalcum de retro hospicium Bernardo Ricardi, Pontius Dennierii, Favre Bordas […] et tres mulieres… ».

176
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

quarante individus a pu réaliser à lui seul cette tâche durant qui ne veut pas dire, comme on vient de le voir pour l’en-
quatre années. Il faut cependant objecter à cela la possibi- terrement, que cette tâche était réservée aux hommes,
lité -toujours présente- de personnes effectuant ces puisque les femmes, à hauteur d’environ 20 %, y partici-
besognes par corvées, mais également considérer que l’état pent également1612.
d’avancement des travaux, à cette date, n’en était pas aux
Ces travailleurs sont apparemment peu ou pas qualifiés
finitions, ce qui pourrait quelque peu modérer ce jugement.
(environ 70 à 80 % du total) : ces tâches n’exigeaient donc
D’ailleurs, l’année suivante, en 1363, on relève davan- pas toujours de compétences particulières, encore, que -on
tage de dépenses en ce sens : 29 entre le 29 mai et le 4 août, le verra en détail lors de l’étude des salaires- ce jugement
soit plus du double de celles réalisées en quatre ans (douze soit à nuancer pour le torchis, opération n’employant
occurrences entre 1359 et 1362). Si l’on retient ces deux jamais de femmes dans sa mise en œuvre1613.
mois pour base d’étude, 52 personnes différentes
En outre, pour la période 1359-1362, les personnes
travaillent à l’enterrement, soit 41 hommes (78 %) et
salariées pour ces deux activités (torchis et enterrement),
11 femmes (21 %)1610, pourcentages assez peu éloignés du
même si elles sont quantitativement nombreuses, n’appa-
reste de ceux constatés pour les quatre années précédentes.
raissent au final que rarement : le travail réalisé pour la
Parmi ces hommes, quatorze résident en ville en 1356-
ville n’était pas, loin s’en faut, leur activité principale,
1357 (soit 34 % des hommes et 26 % du total de la main
puisqu’on les imagine mal subsister en œuvrant seulement
d’œuvre), alors que seules deux femmes sur onze sont dans
deux ou trois jours dans l’année. Les comptes et autres
ce cas (18 % des femmes, 3,8 % du total de la main
documents atteignent ici leurs limites, puisqu’il n’est pas
d’œuvre). Certaines travaillent avec leurs maris1611 selon
possible de trouver en leur sein des informations suscep-
des modalités salariales qui, on le verra, sont parfois diffi-
tibles d’éclairer ces autres occupations.
ciles à comprendre.
On en est donc réduit aux simples conjectures de
Ainsi, en définitive, si l’on s’en tient dans un premier
rigueur en la matière : certaines étaient vraisemblablement
temps aux personnes expressément dénommées, sur
artisans (hors secteur constructif), paysans, ou commer-
18 individus, dix habitent avec certitude en ville en 1356
(soit 55,5 % du total), treize si l’on tient compte de trois cas çants, professions que la guerre et les menaces perma-
probables (soit 72 % du total). nentes des routiers ont peut-être par moments mises à mal
La plupart ne semble pas posséder de qualifications ou freiné dans leur activité, les obligeant à travailler dans
précises (14 sur 18, soit 77,7 %) alors que d’autres, très d’autres domaines, du moins provisoirement1614.
rares, ont une profession bien plus qualifiée, certaine (deux Quant aux travailleurs aidant parediers et autres vala-
charpentiers, soit 11 % du total) ou probable (un « tortis- diers, ils restent, comme d’ailleurs ces derniers, les plus
sayre », 5,5 % ; un paredier, 5,5 %). mystérieux, probablement parcequ’un bon nombre était
réquisitionné par corvées.

Au bilan, que conclure de cette étude sur les aides pour Globalement, l’ensemble des personnes travaillant dans
les travaux en rapport avec la terre ? Pour le torchis, ces trois secteurs provient -pour autant que l’on puisse en
comme pour l’enterrement, les individus sont toujours en juger d’après le registre de 1356- de la ville même, à
nombre élevé, chiffre qui s’explique certainement par l’im- hauteur d’environ 40 à 50 %.
portance des surfaces à couvrir, et donc en conséquence par Quant à l’autre moitié, il s’agissait peut-être de
la nécessité de pouvoir transporter un gros volume de terre. corvéables, d’individus résidant près de Castelnaudary (ou
Ces personnes devaient donc être capables de charrier des non-imposables en 1356), voire de travailleurs sans
poids importants, et donc d’être physiquement robustes, ce emplois, attirés par les embauches, qui se sont par la suite

1610
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°53 r°1]. « …Amade uxor Ramundi de Calhavilla, uxor Guillelmi Seramigana et uxor Johannis Tarreti
quibus steterunt etiam ad enterrandum dictas corserias...» ; [f°60 v°3]. « …Graside uxor Bernardi Monola, Conineati, uxor Rogerii Noguareda, uxor
Bernardi Teneni, Amade uxor Ramundi de Calhavilla quibus steterunt ad enterrandum dictas corserias...».
1611
Ibid., [f°62 v°2]. « ...Arnaudo Martini et eius uxorem quibus steterunt ad enterandum corserias in Portu Bordarum retro dictum Guillelmum
Fabri… » ; [f°62 v°3]. « Item Guillelmo Hugonis et eius uxorem qui steterunt ad enterandum dictas corserias… ».
1612
Pour Ph. Wolff, la présence de femmes dans le bâtiment à Toulouse serait essentiellement à lier à la pénurie de main d’œuvre : « le travail consis-
tait à réunir et aménager cinq hôtels particuliers achetés par les exécuteurs testamentaires du cardinal de Talleyrand-Perigord, fondateur du Collège.
Les tâches spécialisées –maçonnerie, charpente, etc.- furent accomplies à forfait, et le détail ne nous en est pas donné. Mais il y a avait aussi de
nombreuses besognes confiées à des manœuvres : démolition de murs et de cloisons, déblaiement des matériaux, etc. La rémunération de ces manœu-
vres est indiquée, jour par jour, pendant six ans et demi. Observons tout d’abord que hommes et femmes étaient employés en nombre à peu près égal
sur ce chantier. Il semble que les femmes aient été chargées des travaux un peu moins pénibles : ainsi transportaient-elles des pierres et des briques
dans des paniers que les hommes les aidaient à placer sur leur tête ; elles remplissaient de ces matériaux les brancards que déplaçaient les hommes.
Cependant, on en voit aussi participer à la démolition des murs, au creusement des fossés… Nous soulignons à dessein ce très large emploi de la main
d’œuvre féminine, signe probable d’un manque de bras » (Wolff 1954, 441).
1613
À Paris, dans le registre des impôts de 1292, J. Gimpel a pourtant pu relever « les noms de plusieurs femmes, plâtrières, mortellières et même, plus
exceptionnellement, maçonnes… », signe que cette observation est très loin d’être généralisable (Gimpel 1980, 51).
1614
À Aix, « les constructeurs cherchent bien souvent dans l’agriculture un revenu d’appoint. Ce phénomène -qui ne se limite pas aux artisans du bâti-
ment- se traduit dans nos sources par de nombreux actes d’achat, de vente ou de location de champs et de vignes. […] en second lieu il se peut que le
constructeur ait de multiples activités. […] Dans la plupart des cas on ignore s’il s’agit de simples activités d’appoint, de métiers exercés en parallèle,
ou bien encore de la profession réelle de l’artisan, complétée par la pratique d’un métier du bois ou de la pierre » (Bernardi 1995, 26).

177
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

installés en masse dans la capitale chaurienne1615. D’ailleurs prit, pour l’ensemble de ces travailleurs, que certains
ce phénomène de renouvellement de la population est registres, et en l’occurrence le premier, ne sont pas
observable à Albi à la même époque1616. complets1619, c’est-à-dire que des informations ont été -
Ainsi, il est très vraisemblable que les différents chan- volontairement ou non- omises par les comptables et les
tiers de fortification urbains ont eu un fort impact socio- personnes encadrant les travaux. Des données essentielles
économique sur la région environnante, notamment pour à la connaissance du milieu social de ces individus nous
les métiers en rapport avec la construction1617. échappent donc peut-être…

Il faut en outre penser à une troisième catégorie, celle 10.3 - Le mode d’exécution du travail et des salaires
des travailleurs de passage, qui pour diverses raisons, ne À Castelnaudary, les modes d’exécution des travaux
résident pas à Castelnaudary ni dans ses proches environs : liés à la construction en terre sont essentiellement de deux
ils ont peut-être trouvé dans le chantier chaurien un moyen sortes : la régie directe de la ville (impliquant une rémuné-
de payer leur nourriture et une éventuelle nuitée sur place ration, à la journée ou sur plusieurs jours) et les prix-
avant un départ le lendemain. faits1620. Quant aux salaires, ils sont bien entendu différents
Ces observations souligneraient l’importante mobilité selon que la personne est paredier, « tortissayre », ouvrier,
de la main d’œuvre, phénomène que Ph. Wolff attribue en ou manœuvre, et que l’opération est relative à la terre
grande partie à des causes économiques, du moins pour massive, au torchis, ou à l’enterrement des structures, voire
Toulouse1618. Enfin, il faut également toujours avoir à l’es- selon la saison durant laquelle se déroulent les travaux1621.

1615
À Toulouse, Ph. Wolff a montré qu’une bonne partie des travailleurs (apprentis et valets) provient d’autres régions, quelquefois éloignées : « nous
avons donc essayé de représenter par une carte la répartition géographique des origines des apprentis et valets embauchés à Toulouse pendant le siècle
1350-1450. Il est tout naturel que Toulouse fournisse une fraction importante de ces apprentis et valets : un peu plus de 27 %. On admettra même que
cette fraction ne représente la réalité que de façon incomplète : nombre de fils d’artisans n’avaient pas besoin de contrat pour faire leur apprentissage
dans l’ouvroir paternel, dont ils devaient un jour prendre la direction. Il est normal aussi que des abords mêmes de la ville, il ait été tiré un peu plus de
17 % de cette main d’œuvre. Il reste que 56 % environ des contrats d’embauche constituant notre documentation portaient sur des individus venus de
régions plus éloignées : Albigeois, Quercy, Gascogne, encore assez proches. Au delà, les grands pourvoyeurs sont les zones relativement pauvres du
Massif Central, Rouergue en premier lieu, puis Auvergne et Limousin ; et d’autre part Béarn. Mais on remarquera qu’à peu près aucune région de
France n’est absente totalement de ce tableau » […] « Sans prétendre à épuiser la liste des Toulousains, dont l’origine plus ou moins lointaine nous est
précisée par notre documentation, signalons la présence de quelques Bourguignons (81), Savoisiens (82), Rhodaniens (83) » (Wolff 1954, 80-82).
1616
D’ailleurs, à Albi, au quartier du Vigan, « sur 638 personnes recensées dans ce quartier en 1343, les noms de famille de 142 seulement (soit 22 %)
se retrouvent en 1357 : 74 dans ce même quartier, 68 dans d’autres quartiers de la ville. Par contre, 496 (soit 78 %) disparaissent totalement ; inverse-
ment, sur 242 chefs de foyer signalés en 1357 dans ce quartier, 118 (soit 49 %) portent des noms nouveaux, que l’on chercherait en vain sur le registre
de 1343. Le renouvellement réel de la population peut n’avoir pas été aussi général que le suggère l’anthroponymie. Il faut tenir compte des succes-
sions en ligne féminine. D’autre part, il n’est pas exclu que les membres de certaines familles, jusqu’alors répartis en plusieurs foyers, se soient
regroupés. Il semble cependant que décès et émigration aient fait disparaître bien plus de la moitié de la population, et que par contre un mouvement
d’immigration urbaine ait ensuite comblé partiellement ces vides : malgré tout, le nombre des foyers n’atteint même pas en 1357 la moitié du chiffre
de 1343 » (Wolff 1978b, 355).
1617
Ainsi, les Béarnais, que l’on vient de croiser à Castelnaudary, sont également employés à Toulouse dans divers secteurs : « nous nous bornerons à
attirer l’attention sur deux de ces courants, qui nous semblent plus particulièrement intéressants. L’un d’eux est celui de l’immigration béarnaise. Il
s’agit là d’un phénomène qui ne concerne pas que Toulouse : dans toute la région, des laboureurs, artisans et charretiers béarnais s’établissent. À
Toulouse même, on trouve des Béarnais employés dans toutes les branches de l’artisanat, ou comme serviteurs, brassiers… » (Ibid., 83.).
1618
« Ces mouvements de population traduisent des phénomènes économiques : courants commerciaux le long desquels ils s’opèrent, pauvreté de régions
dont la main d’œuvre vient chercher des ressources supplémentaires. Béarn et Rouergue participent, entre autres, de ces deux aspects. Des causes plus
artificielles contribuent aussi à les expliquer : ainsi, la répartition des impôts, souvent défavorable au plat pays, a pu encourager la fuite des contribuables
vers les grandes villes, les loca solempnia, pour employer l’expression de lettres royaux de 1373 ; par contre, en 1441, les capitouls signalent que de
nombreux Toulousains vont vivre dans les Comtés d’Armagnac et de Foix, où les aides royales n’ont pas cours. Dans l’ensemble, et même si l’on se
garde de généralisations hâtives, notre documentation, par l’abondance de ses données, par l’éloignement de certains pays d’origine, laisse sous l’im-
pression d’une assez remarquable mobilité de la population. Les malheurs des temps peuvent avoir déraciné bien des gens, accentué la mobilité inquiète
de la jeunesse. Il nous paraît que la population toulousaine était assez largement renouvelée par ces migrations. Nous devrons avoir cette fluidité présente
à l’esprit pour comprendre le caractère de cette société urbaine, l’absence en son sein de classes nettement séparées » (Wolff 1954, 85, 86).
1619
On sait en effet que le premier registre consulaire (AD Aude, 4E76/CC48) est formé à partir de trois fragments de comptes correspondant à autant
d’exercices.
1620
Ce système se retrouve un peu partout à la même époque : ainsi en Bresse et Bugey, « d’une manière générale, les salaires se présentent sous deux
formes. Le forfait pour un travail global, précisément défini, appelé « à la tâche », et un salaire fixe payé par journée de travail effectué » (Kersuzan
2005, 310). À Saint-Flour, « deux systèmes étaient envisageables. Les magistrats pouvaient réaliser eux-mêmes les travaux en fournissant tous les
matériaux nécessaires et en rémunérant directement les ouvriers. Ce mode de gestion directe n’était autre que la régie. Au contraire, dans le marché
passé directement avec un particulier, les consuls abandonnaient tout contrôle et versaient à l’entrepreneur une somme forfaitaire, à titre de rémunéra-
tion. C’est le système du prix-fait » (Rigaudière 1982, t. 1, 539).
1621
On rappelera ici certaines considérations d’ordre général sur les horaires et le travail au Moyen Âge : généralement, « on travaille du lever du jour
à trente minutes avant le coucher du soleil, avec trois interruptions : une pour la collation, à la sonnerie de l’Angélus ; une autre pour boire au premier
coup de vêpres, vers 5 heures, et une plus longue pour le déjeuner de midi, suivi, en été, de la sieste, ce qui faisait en tout huit heures de travail en hiver,
de Saint-Michel à Pâques, et douze à treize heures en été, de Pâques à la Saint-Michel, le 29 septembre. On était d’ailleurs plus payé en été qu’en hiver.
Le travail est généralement suspendu en hiver, même après la tombée du jour, à la lumière des chandelles achetées exprès. L’heure de none, qui marquait
la cessation du travail les samedi et veilles de fêtes, donnait lieu souvent à contestation ; elle était généralement fixée, non au milieu de la journée,
comme les jours ordinaires, mais à 3 heures ; la paye n’en était pas moins d’une demi-journée. Les jours de fête chômée étaient nombreux, mais vari-
aient d’un chantier à l’autre : à Vale Royal, il y avait vingt-sept fêtes chômées en 1279, vingt-deux en 1280 ; au château de Beaumaris, en 1319-1320,
vingt ; à Eton, en 1444-1445, quarante-six, dont huit tombaient un dimanche. Le 8 novembre, jour de la fête des Quatre-Couronnés, tous les ouvriers
assistaient à la messe. À la cathédrale de Rouen, au début du XVIe siècle, on ne travaillait guère que quatre jours à quatre jours et demi, à cause des
fêtes chômées. Sur beaucoup de chantiers, les ouvriers avaient leur cloche personnelle, accrochée à la loge, qui sonnait l’arrêt et la reprise du travail »
(Aubert 1961, 208, 209). Ces observations rejoignent celles de J.-P. Leguay pour la Bretagne aux XIVeet XVe siècles (Leguay 1985, 62).

178
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

10.3.1 - Pour le personnel de la terre massive modalités du paiement et des délais d’exécution »
(Bernardi 1995, 102).
10.3.1.1 - Parediers et valadiers
À Castelnaudary, les prix-faits pour la terre massive
sont, comme ceux concernant le torchis (infra), assez peu
10.3.1.1.1 - Castelnaudary
détaillés, puisque la plupart devaient être passés devant
Dans cette ville, trois personnes sont qualifiées de notaire : les scribes successifs se sont donc bien souvent
parediers par les textes. Les treize autres le sont très contentés d’inscrire que le marché avait été conclu avec
probablement, car titulaires d’opérations d’envergure telle personne à une date plus ou moins déterminée, mais
consistant à édifier des courtines ou des ouvrages de terre les contrats n’étant pas toujours achevés, ils n’ont quel-
crue massive. Sur les sept engagements passés avec les quefois pu noter la somme attribuée aux parediers pour
parediers, trois sont des prix-faits (de gré à gré ?), deux leur œuvre, d’où son absence (et celle des dimensions
autres des ventes à l’encan (donc des prix-faits attribués au construites). Le mode de rémunération est un paiement par
moins-disant), et un seul une location à la journée (régie brasse ou par canne (carrées ?)1622 mais on ne sait si cette
directe de la ville) mais dans ce dernier cas il s’agit plutôt somme, en partie ou en totalité, était versée au début ou à
de l’achèvement d’un travail en grande partie réalisé au la fin de l’ouvrage, ni même si certains termes échelonnés
moyen d’une adjudication à la chandelle. Enfin, une étaient envisagés entre ces deux dates1623. Il est probable
dernière opération prévoyait à l’origine un prix-fait (de gré que c’est principalement en raison de la durée importante
à gré ?), puis s’est tournée vers une attribution à l’encan, des travaux que des tronçons de paret étaient attribués
pour apparemment en définitive avorter, raison pour grâce à ce système1624.
laquelle elle n’a pas été comptabilisée dans ce total.
Par ailleurs, les monnaies distinctes et les années
10.3.1.1.1.1 - Des prix-faits de gré à gré ? successives ne permettent pas véritablement de réaliser
des comparaisons de coûts, d’autant que l’on ne sait pas,
À Aix, les prix-faits se présentent « comme une
dans deux cas sur trois, la dimension réelle de la brasse
convention passée pour un travail précis et à un prix déter-
utilisée, ni s’il s’agit de mesures linéaires ou de superficie
miné. Le contrat enregistre les termes de l’accord inter-
(probable)1625.
venu entre le constructeur et le commanditaire. Il peut
être rédigé par l’une des parties ou par le notaire. Le prix- En outre, ne connaissant pas le détail de la procédure de
fait peut porter sur toutes les phases de la construction passation des marchés publics dans la capitale chaurienne
d’un bâtiment ou une partie de celui-ci. Le nombre des (négociation libre entre les parties dans certains cas ?), on
clauses, leur contenu et leur ordre s’avère très variables. a souhaité distinguer trois prix-faits, éventuellement quali-
[…]. Le prix de l’ouvrage, forfaitaire ou à l’unité, figure fiables de « gré à gré », de ceux adjugés à l’encan1626,
toujours dans le contrat, accompagné le plus souvent des puisque dans ce dernier cas le scribe indique expressément

1622
Il s’agirait donc dans ce cas là d’un prix fait réglé selon le mode du « paiement à l’unité » (Bernardi 1995, 261).
1623
C’est en effet souvent le cas en Haut-Dauphiné : « le paiement s’effectue en trois termes : généralement un tiers à la conclusion du prix-fait, un
tiers au milieu des travaux, et le dernier tiers à leur réception ; plus rarement un quart au début, un quart au milieu du chantier et la moitié restante
à la fin. Le fractionnement des échéances sous formes de forfaits est une pratique courante pour les travaux de reconstruction de murailles payés «
à la toise ». C’est le cas en 1393 à Briançon où le maçon Bertrand de Lazer reçoit 100 florins au début des travaux et ainsi de suite à chaque fois
qu’il achève 20 toises supplémentaires. Il en est de même à Gap pour la construction de la tour du Verger où le maçon perçoit 20 florins au début
des travaux puis 20 gros par canne de mur qu’il construit –chaque paiement intervenant quand une canne est élevée à mi-hauteur » (Nicolas 2005,
201, 202).
1624
« C’est ainsi que les travaux sont payés à la tâche lorsqu’ils relèvent du gros œuvre avec des difficultés importantes de réalisation et par
conséquent d’une durée supposée assez longue, ne pouvant être précisément calculée à l’avance. À l’inverse, des travaux sont payés à la journée
lorsque, sans être moins importants ou primordiaux, on peut plus justement en déterminer la durée, donc le prix. La comparaison des deux coûts
prévisionnels fait choisir l’un ou l’autre mode de paiement » (Kersuzan 2005, 310). En Auvergne pourtant, « la préférence des consuls pour la régie
est très nette. Elle permet un contrôle constant au cours de la réalisation, c’est sans doute ce qui explique qu’elle ait toujours été utilisée pour tous
les gros travaux effectués aux murailles, tours et portes. La règle est constante et ne paraît avoir jamais souffert d’exception, c’est du moins ce qui
ressort de l’examen très attentif des livres de comptes. Le système du prix-fait, au contraire, se rencontre beaucoup plus rarement. Les consuls répug-
naient toujours à passer directement un marché avec un entrepreneur. Ils ne le faisaient que pour l’exécution de menus travaux, ou pour confier l’en-
tretien de tel ou tel ouvrage à un artisan dont ils connaissaient le sérieux » (Rigaudière 1982, t. 1, 539, 540).
1625
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°2]. « Item dicti domini consules tradiderunt parietes portus Bordarum pretio facto Bernardo
Brezeyti, G. Lavalh, Bernardo Bocenhac, Pontio de Saltu et debuerunt habere pro qualibet brachiata duos scutos antiquos » ; [f°118 r°3].
« ...Michael Bartas perticator dicti castri dixit perticassere parietes per prenomintatos homines factas et operatas et reperisse in dictis parietibus
quindecim brachiatas et mediam pro quibus habuunt in diversis solutionibus 31 scutos veteres valent. 49 l.12 s. tur. » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363,
[f°24 r°4]. « ...magistro Petro Saurini pro faciendo parietem de la Strada videlicet pro 126 brachiatis parietis qualibet brachiata 10 palmorum que
fuerunt mensuratas per Michaelem Bartas pariatoris prout retulit dictis dominis pro qualibet brachiata duos florenos auri et septem gros argenti,
assendunt 325 florenos auri. Item dicti domini consules dare fecerunt eidem pro faciendo cavalham dicte parietis ubi assetiaret eam 40 florenos
auri habuit de predictis in auro et argento praeter illa que habuerat a Petro Gelati centum quinquaginta florenos auri et duos gros argenti valent.
180 l. 4 s. tur. » ; Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°72 r°4]. « …an Ar. Masip en sos companhos per 4 brassas e miega de paret que avian faytas entro la
paret vielha e la nova de la Baffa 10 flor. 1 gros. mieg valo. 12 l. 3 s. tor. ».
1626
Les coutumes de la ville de 1333, si elles règlementent la vente à l’encan, ne détaillent cependant pas les biens, fournitures ou matériaux qui
feront l’objet de ces marchés (Ramière de Fortanier 1939, 329-331).

179
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

ce mode de passation1627 (infra). Néanmoins, il se peut Les prix-faits requièrent toutefois des garanties juri-
qu’ils aient tous été attribués selon ce dernier mode1628. diques et financières (fermansas), qui, si elles ne sont pas
Ce type de contrat inclut également certains matériaux réunies, empêchent quelquefois la conclusion du contrat.
et matériels fournis par l’artisan, si bien qu’il est impos- On s’attardera en détail sur les sommes versées lors de ces
sible d’isoler du montant total la part salariale proprement prix-faits dans le paragraphe consacré au coût global de la
dite1629. construction.
Ces prix-faits ont pour avantage de désigner précisé- 10.3.1.1.1.2 - Des prix-fait attribués à l’encan
ment le travail à réaliser à un tarif déterminé à l’avance
(cela évite toute mauvaise surprise lors de la réalisation de L’attribution aux enchères ou « à l’encan », retenue dans
l’ouvrage)1630, ce qui impliquait peut-être un surcoût s’ils au moins deux cas sur sept, est en effet souvent moins
n’étaient pas attribués selon le système de l’encan (infra). onéreuse pour les consuls, puisqu’elle fait jouer la concur-
À Aix, le paiement à l’unité et au forfait « permettent à l’ar- rence entre plusieurs artisans, et donc nécessairement
tisan de gérer, comme il l’entend, le travail à exécuter et lui baisser les tarifs1631. Ainsi, les édiles, au risque de voir l’ou-
offrent, apparemment, une plus grande possibilité de profit. vrage mal réalisé, retiennent apparemment le seul aspect
En effet, en dehors du gain réalisable sur la fourniture des financier comme critère d’attribution du marché1632 : c’est le
matériaux, le maître dispose, avec l’équipe qu’il entretient cas pour un contrat remporté le 5 octobre 1361 par quatre
à demeure, d’une main d’œuvre meilleur marché qui personnes chargées de refaire des parets (fig. 52)1633. Une
augmente sa compétitivité et/ou sa marge bénéficiaire » fois terminés, ces travaux, doivent être mesurés afin d’être
(Bernardi 1995, 261). justement rémunérés : le 6 décembre, Michel Bartas, arpen-

1627
À Lille, les travaux « sont attribués de deux façons : soit à la journée pour les petits, soit en tasque pour les grands, c’est-à-dire à forfait. La mise
en adjudication obéit dans ce cas à des règles immuables. Le marché est soigneusement établi par les officiers de la Chambre des Comptes et les détails
d’exécution décrits avec minutie. Puis il est publié es lieux accoutumés. À l’expiration des délais, l’adjudication se fait à la chandelle. Une fois la chan-
delle éteinte, le marché est attribué au dernier rabaisseur, c’est-à-dire au moins disant. Cette procédure est scrupuleusement respectée dans le cas des
travaux qui nous intéressent. En conséquence, un marché peut échapper au maître charpentier du château. C’est par exemple le cas en 1395-1396,
lorsqu’échoit à un certain Thomas Le Hacoul la réalisation d’un nocq en bois de 90 pieds de long sur la porte de derrière, c’est-à-dire une gouttière.
Mais force est de constater que le charpentier du château est l’adjudicataire exclusif dans l’immense majorité des cas. Pourquoi avoir alors maintenu
aussi longtemps cette procédure ? Sans doute la Chambres des Comptes a-t-elle tenté, par ce moyen, de limiter le coût des travaux. Quoi qu’il en soit,
le maître charpentier du château peut s’adjoindre des charpentiers et des manouvriers une fois le marché adjugé ; mais il demeure seul responsable de
l’exécution » (Blieck 2003, 78).
1628
À Douai certains marchés à la tâche sont « négociés de gré à gré, compromis qui permettait à la ville de choisir l’ouvrier comme dans la procédure
en régie, mais sans les contraintes de la gestion directe. À condition qu’un accord sur le montant des travaux puisse être trouvé entre les contractants,
puisque n’existaient pas de criées à la baisse » (Salamagne 2001a, 137). Cette pratique était attestée dès 1268. À Saint-Flour, « la procédure d’appel
d’offres, avec enchères au rabais, ne paraît pas avoir été utilisée, ce qui limitait considérablement la concurrence. Tel n’était pas le cas dans bien d’autres
villes au même moment » (Rigaudière 1982, t. 1, 510, note 299).
Par ailleurs, concernant les chantiers royaux « les variations locales dans leur organisation (circonscriptions avec ou sans maîtres d’œuvre ; variété des
gages et rémunérations des maîtres) semblent souvent difficiles à expliquer, au delà de la simple évidence d’une tradition spécifique à chaque baillage
ou sénéchaussée, voire à chaque subdivision administrative. Pourtant il existe bien une subdivision plus globale, celle qui oppose les deux moitiés du
royaume. Deux indices semblent montrer qu’il y a déjà, en ce second tiers du XVe siècle, une France du Nord et une France du Sud, statistiquement
éprouvée, entre les types de marchés entre lesquels se répartissait le choix des officiers royaux. Il y a dans les sénéchaussées méridionales –Toulouse,
Beaucaire, Carcassonne- une forte proportion de travaux à forfait, et surtout, à l’intérieur de cette catégorie, une très nette prédominance des adjudica-
tions, alors qu’en Normandie on a recours plus volontiers tant aux travaux en régie qu’à l’autre type de travaux à forfait, c’est-à-dire les marchés de
gré à gré » (Le Pogam 2001, 274). Peut-on penser que les communautés urbaines agissaient de même ?
1629
En Belgique, la tentative visant à mesurer le poids des travaux publics sur les finances de la ville « risque d’être faussée par l’usage des adjudica-
tions, dont les montants comptabilisés amalgament les coûts des matériaux et de la main d’œuvre sans qu’il soit possible de les ventiler » (Sosson 1985,
104). Pour la Bresse et le Bugey, « il est souvent inclus, dans la même dépense, plusieurs ouvrages, ou bien on trouve mêlés au prix du travail le coût
des matériaux et celui du transport. Les comptes sont des synthèses et à ce titre ils regroupent différents types de paiement. Il faudrait pouvoir posséder
les reçus et les attestations à partir desquelles les comptes furent dressés (particula) pour faire une étude juste et précise de tous les salaires et de tous
les matériaux » (Kersuzan 2005, 309).
1630
Des variantes existent, comme les « contrats à forfaits » où « l’architecte reçoit une somme à forfait pour l’exécution, en un temps fixé, d’une
construction arrêtée sur un dessin ou un modèle, et pour laquelle l’employeur fournit les matériaux, les instruments de travail et parfois les ouvriers »
(Aubert 1961, 96).
1631
Cependant, pour la Bresse et le Bugey, « en théorie, l’adjudication à la tâche offre au maître d’ouvrage des conditions plus favorables que le travail
à la journée. Le jour de la mise aux enchères, ce dernier peut espérer obtenir un moindre prix pour un travail complet. En réalité, l’avantage de l’adju-
dication n’est pas systématique et le relevé complet des procédures d’embauche laisse entrevoir que le choix se fait plutôt à partir de la nature des
travaux et des avantages financiers correspondants. Pour fixer la mise à prix des travaux, on effectue des études préalables. On a vu plus haut que des
châtelains et des maîtres spécialisés viennent à Saint-Rambert ou Pont d’Ain « pour voir à combien peuvent s’élever les dépenses des travaux que le
seigneur entend faire ici ». Ensuite, le châtelain ou le bailli et ses agents rédigent les marchés et les font annoncer en place publique, trois fois dans les
huit jours qui précèdent la mise aux enchères. À partir de 1335, cette disposition est, sur ordre du comte de Savoie, devenue obligatoire. L’adjudication
se fait au rabais. C’est-à-dire que pour un travail clairement établi, chaque maître propose de l’effectuer pour moins cher que la mise à prix. On peut
aussi, pour le prix fixé par l’adjudicateur, surenchérir sur la quantité de travail. Le chantier est adjugé au plus offrant dans l’un ou l’autres des systèmes.
On dit « au mieux disant », cette expression étant encore utilisée de nos jours » (Kersuzan 2005, 310).
1632
À Saint-Flour, c’est pour éviter ce genre d’écueil que « la plupart du temps, les travaux qui sont ainsi confiés à prix-faits, font partie d’un vaste
ensemble que les consuls conduisent en régie. Ils confient alors certaines tâches précises à des artisans, dont le travail indépendant vient s’intégrer dans
la réalisation d’une œuvre de longue haleine » (Rigaudière 1982, t. 1, 540). En était-il de même à Castelnaudary ?
1633
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°114 r°8]. « Item die quinta octobris dicti domini consules tradiderunt parietes retro G. Olricii et porte Mondebonis
videlicet : G. Johannis, Bernardo Anhant, Jacobo Madrerias, Ramundo Tocarelli ad extinctum candele tanquam ultimas offerentibus et debuunt
habere diruendo parietes retro Guillelmum Olricii usque ad furnum et reficiendo pro cava...».

180
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Document Date NOM, prénom Qualification Localisation Nature du contrat Dimensions Prix global ou salaire
du travail bâties individuel
certaine/
supposée ( ?)
JEAN porte Montdebo prix-fait 66 brasses un
Guillaume adjudication à la quart 69 florins
AD Aude, 5 chandelle au moins 4 gros
4E76/CC48 octobre TOCAREL parediers ? paret derrière chez G. disant 9 brasses 6 barsalos
[f°114 r°8] 1361 Raymond Olric et demi un quart

Jacques MADRERIAS

ANHANT
Bernard
ESPELIT, SPELIT paredier 4 s. 4 d. tur.
G. /valadier ?

DENAT 4 s. 4 d. tur.
Arnaud

Ibid., 1361 LE BIGOURDIN 4 s. 4 d. tur.


[f°116 v°1] G.
finition de la paiement à la journée ?
DE BEARN paret derrière chez 4 s. 4 d. tur.
Guillaume G. Olric

JEAN parediers ? 4 s. tur.


Guillaume

TOCAREL 4 s. tur.
Raymond
4 s. tur.
ANHANT Total :
Bernard 25 s. 4 d. tur
BREZEYT
Bernard

Ibid., LAVALH
[f°118 r°2] 1361 G.
[f°118 r°3] parets du port des prix-fait 15,5 brasses 31 écus vieux :
BOCENHAC parediers ? Bordes à deux écus 49 l. 12 s. tur.
Bernard vieux/brasse

DE SALT/DE SANT
Pons
paret du port de 2 florins
l’Estrade et 7 gros
Ibid., 1363 SAURIN charpentier 126 brasses d’argent/brasse
4E76/CC49 Pierre /fusterius prix-fait ? (1 brasse total :
[f°24 r°4] = 10 palmes) 325 florins
(390 l. tournois)

cavalha de la paret 150 florins, 2 gros


d’argent
(soit 180 l. 4 s. tur.)
Ibid., 1366 MANCIP paredier paret du port de la prix-fait ? 4 brasses et 10 florins
4E76/CC51 Arnaud et ses /valadier ? Baffe demi 1,5 gros =
[f°72 r°4] compagnons 12 l. 3 s. tor.
Ibid., 15 avril TRIALH G. parets de la porte prix-fait (de gré à
4E76/CC64 1408 parediers Montdebo gré ?) prévu
[f°32 v°1] DE VERGUAS puis prix-fait adjugé - -
G. à la chandelle au
moins disant
En définitive :
opération avortée

Ibid., 1420 Pons SABATIER paredier ? paiement à la journée - 8 s. par./jour


4E76/CC69, Total : 400 s. parisis (25
[f°48 v°2] fr.)
Ibid., 1420 Jean Le BRETON paredier ? paiement à la journée - 6 s. 8 d. par.
[f°48 v°3] Total : 17 fr. 8 s.
Ibid., 1441 HEBREARN P. paredier parets derrière l’ostal prix fait, adjudication 27,5 brasses 2 moutons d’or/brasse
4E76/CC77 et son compagnon du consul Guiraut del à la chandelle au total : 60 moutons 5 gros
[f°25 r°1] LAMET P. Ryu moins disant d’or = 44 l. 10 s. par.

Fig. 52 : Castelnaudary (1359-1362) : types de contrats pour les constructions en terre massive.

181
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

teur attitré de la ville1634, répertorie 66 brassées un quart de La cause semble ainsi entendue, et à l’issue de cette
parets pour la porte Montdebo1635 ; les ouvrages derrière la visite, les deux parediers emportent vraisemblablement le
maison de G. Olric étant pour leur part évalués à environ marché : le 28 mars en effet, un coursier est envoyé par les
neuf brassées1636. La réalisation de cet ouvrage a duré deux consuls auprès de G. Sadorni, habitant de Fanjeaux, à qui
mois presque jour pour jour, même si ce laps de temps l’on demande de venir à Castelnaudary afin de s’assurer
n’était peut-être pas imposé aux parediers par les consuls. des matériaux qui seront pris dans sa maison (destruction
Une autre adjudication a lieu 80 ans plus tard, en 1441 : totale ?) pour réaliser l’élévation de la porte Montdebo1641.
elle concerne la paret située derrière la maison de Guiraut Cependant, le 15 avril, on précise que les deux parediers
del Ryu (consul cette année-là), et est attribuée « a l’encant ne construiront pas les parets à prix-fait (de gré à gré ?) mais
e a l’estint de la candela »1637 à P. Hebrearn et P. Lamet. au moyen de l’adjudication au moins disant, au prix de 4 fr.
Pour deux moutons d’or la brasse (carrée ?), 27,5 brasses la brasse. La raison de ce revirement des consuls est expli-
sont réalisées, pour une somme totale de 60 moutons 5 gros quée par le scribe : le contrat n’a pas été enregistré (encartat)
(44 l. 10 s. parisis)1638. La dépense suivante suggère la car G. Trialh et Guillaume de Verguas ne présentaient pas de
présence d’autres personnes (als companhos) et précise que garanties bonnes et suffisantes, lesquelles étaient exigées par
lors de l’achèvement de l’ouvrage, l’ensemble des interve- les édiles avant la foire de la petite Pâques (soit aux environs
nants (parediers et compagnons), ont reçu comme cadeau de la fin mars ?). Les deux parediers seraient toutefois
ou pourboire (estrena) 4 s. parisis. Il s’agit d’ailleurs là d’un parvenus par la suite à réunir les gages ou cautions néces-
usage bien établi pour ce type de contrat1639. saires, mais après le terme fixé par les consuls, laps de temps
Par ailleurs, une opération exceptionnelle de 1408 durant lequel ces derniers ont décidé d’enregistrer comme
permet de se rendre compte de la difficulté de remporter un nouveaux titulaires du contrat deux maçons, Jean Colom et
marché, et du libre-arbitre des consuls en la matière : aux Guillaume Tolos, pour réaliser la maçonnerie à pierres et
environs du 19 mars en effet, G. Trialh et G. de Verguas, chaux, et non en terre crue comme cela était prévu au départ.
viennent à Castelnaudary à la demande des édiles afin de Néanmoins, les deux parediers, pensant être détenteurs
prendre à prix-fait (de gré à gré ?) la paret de la porte du marché, avaient déjà acheté du matériel en vue de la
Montdebo. Ces derniers leur donnent à cette occasion, réalisation de la paret, et notamment des pruals (fourches
« per maniera d’estrena » 4 s. parisis pour les dédommager ou râteaux d’un type particulier, supra). De fait, les consuls,
des dépenses réalisées durant le voyage (nourriture et peut- pour avoir la conscience tranquille, décident de dédom-
être nuitée ?)1640. mager les deux hommes à hauteur de 24 s. 8 d. parisis1642.

1634
Il réside d’ailleurs à Peyralbe en 1356 (Ibid., 4E76/CC2, [f°21 r°14]). Dans d’autres pays, comme par exemple en Italie centrale, ce n’est apparemment
que très rarement le cas : « d’autre part, les arpenteurs ne sont pas ressortissants de la commune ; ils doivent être capables de lever les mesures de la
propriété avec des unités qui ne leur sont pas familières et qui -les exemples précédents le prouvent- peuvent varier du simple au double, dans des terri-
toires proches les uns des autres. A contrario, la capacité démontrée par les équipes itinérantes d’arpenteurs à maîtriser les systèmes de mesures différents
confirme leur compétence. Ils passaient systématiquement dans les communes dont ils n’étaient pas originaires, mais ne pouvaient y revenir fréquemment :
une enquête d’arpentage cadastral pouvait durer de six mois à trois ans » (Jansen 2006, 129).
1635
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°114 v°2]. « Pos[t]que die sexta decembris Michael Bartas dixit perticasse parietes porte Mondebonis et reperisse in
eisdem 66 brachiatas unum quartonem… ».
1636
Ibid., [f°114 v°3]. « Item in parietibus retro Guillelmi Olrici novem brachiatas medius unum quartonem... ».
1637
Ce type d’adjudication est très courant au Moyen Âge : ainsi, à Amiens, fin XIVe siècle-début XVe siècles, « l’adjudication est faite au plus grand rabais :
une chandelle est allumée et chaque artisan ou groupe d’artisans peut baisser son prix tant que la flamme est encore vive. Après avoir marchandé, un devis
ou un bail est établi. Chaque partie discute des conditions précises du contrat, à savoir si la municipalité fournit les matériaux ou s’il est nécessaire de
déblayer tel ou tel terrain » (Baudoux-Jung 1998, 182). En Bretagne, « la solution la moins compliquée pour les édiles, est, en effet, de s’adresser directe-
ment à des fournisseurs, entrepreneurs-carriers ou simples marchands qui s’engagent, par contrat, à livrer à une date déterminée et pour une somme conv-
enue la quantité de matériaux souhaitée. Les marchés, conclus « à la chandelle allumée » et accordés aux plus offrants… » (Leguay 1985, 60).
1638
AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°25 r°1]. « …an P. Hebrearn, paredier, e a P. Lamet son companhon les cals avian presa a far ladita paretz tras mon
ostal daqual paretz li foc lyvrada a l’encant e a l’estint de la candela per le pretz de 2 motos en aur la brasa laqual paretz foc pagelada am les senhors
de cosols 27 brasas media que monta al pretz desus dit saysanta motos sinc grossos d’aur valon. 44 l. 10 s. ».
1639
Ibid., [f°25 v°2]. « Item foc paguat als mastres da la paret e als companhos cant agarero acabada la dite paretz per estrena car aysies acostumat per
tot catre so. 4 s. ». À Saint-Flour également, des avantages en nature, en plus du salaire en numéraire, étaient donnés aux travailleurs. Ainsi « en 1386,
c’est l’idée de récompense qui préside à la distribution de plusieurs setiers de vin, on parle alors de estrenar les obrers ou de donner des estranas. La notion
d’encouragement et d’incitation au travail n’est pas non plus absente de l’octroi de ces rémunérations en nature. Ne voit-on pas, en 1391, à un moment où
le temps presse, les consuls donner en semaine, à leurs ouvriers, une importante quantité de pain et de vin affin que si avancessont mielhs per tot. […] Le
plus souvent les gratifications consenties en nature aux ouvriers se faisaient en vin. Un chantier important s’ouvrait quelque part en ville ? Alors les consuls
faisaient aussitôt une provision dont ils pourraient disposer, tout aussi longtemps que duraient les travaux. Il est difficile de savoir si ces distributions se
faisaient à parts égales entre les manœuvres et les ouvriers » (Rigaudière 1982, t. 2, 725, 726). Parfois « il arrive que les services municipaux se montrent
plus larges dans le calcul de leurs distributions en nature. C’était le cas au début et à la fin de certains grands travaux. Les ouvriers recevaient, avec le pain
et le vin, une certaine quantité de viande » (Ibid., 727).
1640
AD Aude, 4E76/CC64, 1408, [f°32 v°1]. « Item le dia desus dit fero donar per maniera d’estrena an G. Trialh an G. de Verguas paredies de Sant Julia
les cals venguo per dire e per pendre a pretz fayt la paret de la porta Mondebo les cals venguo per mandament dels senhors cossols e per so foro lor donar
per les despens que avian fayt per tot. 4 s. ».
1641
Ibid., [f°34 r°2]. « Item a XXVIII de martz fero paguar an P. de la Razet lo cal portet de mandament dels senhors de cossols huna letra an G. Sadorni de
Faniaus que contenia que li plagues que volgues venir vezer so que la vila volia pendre de son hostal per far la clausura de la porta Mondebo… ».
1642
Ibid., [f°35 r°2]. « Item a XV d’abril fero donar an G. Trialh, an Guillelm de Verguas de Sant Julia les cals avian prezas a far las paretz de la porta
Mondebo las cals devian estre de taula à quatre franxs la brassa e ayssi lor foc livrat a l’estinh de la candela e non pas encartat quar aqui no aguo ponh
de fermansas que ennans les senhors de cossols no lor volguo encartar entro que amenesso las fermansas que fosso bonas e sufeciens e romazo averlas
a la fiera de Pasquetas e quan venguo am las fermansas les senhors de cossols am voler del cosselh aguo encartat affar de mur an Johan Colom e an
Guillelm Tolos peyries e per so lor foc donat a tendut lors pruals e autras causas que avian compradas per far las ditas paretz reguardan la cossencia
dels senhors de cossols per tot. 24 s. 8 d. ».

182
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Le nouveau contrat est consigné dans le registre du devant notaire le 15 avril : les clauses du prix-fait sont
notaire Jean Rivière le 15 avril 1408 : les deux maçons rappellées mais par la suite, le texte, peu clair, précise que
seront tenus de réaliser la construction avec des ouvriers ces personnes ont dû fournir deux cautions et deux « expé-
qualifiés et de fournir sur leurs propres dépenses tout ce qui dients »1650 (des garanties ?), et qu’apparemment leurs
sera nécessaire à l’édification de l’ouvrage, à l’exception femmes se sont portées garantes pour la réalisation d’une
du mortier et du sable. Le mur devra avoir huit palmes1643 partie de l’ouvrage1651, dont le montant atteint 100 fr.
(de large) au niveau du pied, et six palmes1644 au sommet, la parisis1652. Une partie seulement, puisque l’adverbe « enda-
brasse étant égale à dix pans1645. bans » (« dorénavant » ?) indiquerait que les consuls n’ont
Mais l’opération connaît par la suite de nouvelles péri- pas souhaité prolonger le contrat pour des raisons incon-
péties : ainsi, l’édification des fondations de la porte nues (« e que endabans no lor volguo baylar la manobra
Montdebo nécessite la destruction de l’ancienne paret le del mur de la porta Mondebo dessus dita ni encartar »).
29 mai 1408, tâche effectuée sous la direction de trois char- Cette précision pourrait éclaircir la dépense du 5 juin
pentiers (rémunérés 4 s. parisis par jour)1646. Puis, le 5 juin, précédent : bien qu’ayant souscrit un contrat avec Jean
les fameux maçons G. Tolos et Jean Colom entament Colom et G. Tolos le 15 avril, la ville a peut-être eu des
pendant six jours les fondations (cavalha) du mur de la difficultés avec eux par la suite1653 (manque de garanties ?),
porte Montdebo, certainement parce que les consuls ceci expliquant que l’édifice ne soit toujours pas achevé à
souhaitent accélérer les travaux : en effet, les édiles n’ont cette date1654.
pas encore choisi les maîtres qui vont édifier la maçon- Cette affaire aura duré plusieurs mois : elle révèle que
nerie, et de ce fait la porte n’est pas « close », autrement dit les consuls exigent de manière systématique des garanties
il y a un risque important pour la sécurité de la ville1647. Le financières pour les artisans titulaires de prix-faits (conclus
14 juin, R. Boyot et B. Aycart obtiennent à prix-fait (à la de gré à gré ?), afin d’être certains qu’ils possèdent une
criée, au moins-disant) la réalisation des fondations du mur trésorerie suffisante, un matériel et un personnel adéquats.
de la porte (à peine entamées par les deux précédents ?), au De fait, il se peut que l’adjudication à l’encan, du moins
prix de 11 s. parisis la brasse1648. dans ce cas précis, ait été choisie en raison du manque de
Enfin, quelques mois plus tard (vers le garanties (ou de caution insuffisante) du ou des artisans
4 septembre ?1649), on mentionne à nouveau le contrat passé pressentis pour emporter le marché1655. En outre, les édiles

1643
Soit environ 1,792 m.
1644
Soit environ 1,344 m.
1645
Ce registre est par chance conservé : AD Aude, 3E9444, [f°61 r°1], 15 avril 1408. « Item anno quo supra et die XV mensis aprilis quod G. Tolas…
et Arnaudo Bastonis, consules Castrinovi de Arrio presentibus nomine universitatis dicti loci stipulanti et de construendo seu construi faciendo
quoddam murum in porta vocata de Montdebo de decem palms pro brassa, octo palmorum in fundo et sex palmorum in acabamento dicti muri, et
de habendo bonos et sufficientes operarios ad dictum murum costruendum et operandum expertos nec non et de habendo eorum propriis sumptibus et
expensis omnia que circa constructionem dicti muri necessaria fuerunt seu opportuna deperto morterio et arena…et hoc pro precio… quatuor l. t. pro
brachiata… ». Ces épaisseurs différentes sous-entendent que le mur aura un fruit, tout comme la paret qu’il est censé remplacer.
1646
Ibid., 4E76/CC64, 1418, [f°39 v°2]. « Item a XXIX de may fero paguar an Johan Redorta, an Guillelm Teyseire an R. de la Possonia, fustiers, les
cals estro per l’espazi de dos jorns cascu tant a pigar l’ostal den G. Sadorni tant a derocar la paret vielha la hon se fec la cavalha del mur de la
porta Mondebo a cascu per jorn ses autres avantatge 4 s. per tot. 24 s. ».
1647
Ibid., [f°40 v°1]. « Item a V de jun fero paguar an G. Tolos, an Johan Colom, peyriers les cals estero per l’espazi de 6 jorns cascu a trassar e far
le comensament de la cavalha del mur de la porta Mondebo atendut que enquara no era clauza ni baylada a pretz fayt els mastres que volian
comensar le dit mur a cascu per jorn 3 s. per tot. 2 fr. 4 s. ».
1648
Ibid., [f°41 r°2]. « Item a XIIII de jun fero paguar an R. Boyot an B. Aycart per la cavalha del mur de la porta Mondebo la cal prenian affar a
pretz fay a la huca en pretz de 11 s. per brassa e romas lor coma mens dizens la cal cavalha foc pagelada e noyat sino quatre brassas a 11 s. la brassa
montan. 2 fr. 12 s. ».
1649
Il s’agit en effet de la dernière date relevée dans les dépenses antérieures. Les dépenses de ce compte n’étant pas toutes datées précisément, il est
difficile, voire impossible de dire quel jour précis celle-ci a été enregistrée.
1650
« Espedient : expédient » (Mistral 1878, vol. 1, 1027). Une des acceptions du terme est « moyen extrême pour se procurer de l’argent » (Robert
1982, 733). Avait-il déjà ce sens à l’époque ?
1651
À Aix, certaines femmes d’artisans peuvent ainsi se porter garantes pour leurs maris lors de prix-faits (Bernardi 1995, 31).
1652
AD Aude, 4E76/CC64, 1418, [f°45 v°1]. « Item fero paguar an Johan Colom, an G. Tolos peyriers per la hobra del mur de la porta Mondebo la
cal an preza affar a 4 francs per brassa de 8 palms al pe e de 6 palms a la fy dessus de peyra tant solament fora que no y meta ponh de mortier la
cal hobra lor foc baylada aysy com apar per carta ressebuda per mastre Johan Ribiera notarii d’esta vila en la cal carta son am dos hopbliguatz
am dos espediens e quascu per le tot fermansas per lor las molhers de cascu car ayssy ho volguo les senhors de cossols e que endabans no lor volguo
baylar la manobra del mur de la porta Mondebo dessus dita ni encartar e per so lor foc paguatz en diversas paguas per la hobra dessus dita que
monta. 100 fr. ».
1653
Ceci expliquant la nouvelle attribution de l’ouvrage le 14 juin à R. Boyot et B. Aycart (supra).
1654
En effet, si les travaux ont débuté le 16 avril et qu’un paiement partiel est intervenu le 4 septembre, la tâche a duré environ 4 mois et demi, délai
relativement long pour un ouvrage de ce type, qui plus est inachevé. Ailleurs, comme en Haut-Dauphiné, les tractations pour la passation et l’obten-
tion des marchés publics sont quelquefois difficiles, et des baisses de prix, même minimes, sont souvent demandées aux artisans par les maîtres d’ou-
vrage afin qu’ils se voient attribuer le marché (Nicolas 2005, 198, 199).
1655
C’est la raison pour laquelle certains artisans s’associent (était-ce le cas en l’espèce ?), comme par exemple en Bourgogne : « en Charolais, l’ex-
emple de Guillaume Mellin illustre bien cette disproportion que l’on saisit néanmoins à l’analyse des faits. Durant cinq années consécutives, cet
entrepreneur en maçonnerie prend en charge les marchés de fortification du château de Charolles (Saône-et-Loire) pour un montant total de près de
300 francs, une somme rien moins que négligeable. Or, Guillaume en assume seul la responsabilité : il a donc les capacités financières de fournir la
caution exigée dans ces cas-là, outre les compétences techniques qu’il doit partager avec les maçons travaillant à son service. C’est à cause de cautions
trop élevées que certains artisans sont amenés à s’associer pour mieux remporter les marchés » (Jacquier 2001, 157, 158).

183
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

(du propre chef de l’un d’entre eux ou après une réunion en nérer avec d’autres pour seulement une journée afin de
conseil1656), peuvent décider d’attribuer le marché à des terminer l’ouvrage ?
maçons plutôt qu’à des parediers, même si ces derniers Difficile de le savoir. En outre, le trio de départ est indi-
étaient apparemment les légitimes titulaires de l’opération. viduellement moins rémunéré (4 s. tournois) que les quatre
Enfin, et même dans un contexte économique difficile, les autres individus (4 s. 4 d. tournois). Ainsi, à titre de compa-
édiles n’hésitent pas à rembourser les deux hommes pour raison, un maçon bien connu, Dominique Gaston, perçoit
les frais engagés dans l’acquisition du matériel. Mais cette en 1359-1360 un salaire variant entre 4 1661 et 6 sous tour-
« largesse » municipale ne constitue-t-elle pas en réalité nois1662 selon la tâche effectuée, mais rien ne permet de
une habile manière de désamorcer une possible revendica- savoir s’il s’agit d’une rémunération journalière
tion des parediers, mécontents de voir la transaction leur (probable), puisque cela n’est pas précisé1663.
échapper de cette manière ? Ainsi, sous couvert d’une
apparente « bonté consulaire », les 24 s. 8 d. parisis La même année deux autres personnes, des carriers1664,
déboursés pourraient-ils être le montant d’un règlement à sont rémunérés 5 s. tournois par jour pour creuser le fossé
l’amiable entre les deux parties1657 ? derrière le château, alors que durant la construction d’une
base de paret à pierres et chaux, Olivier le Breton, peyrier,
10.3.1.1.1.3 - La régie directe peut être payé 8 s. tournois par jour1665.
En 1420, deux autres dépenses font état d’une location
Trois dépenses témoignant d’une régie directe de la
à la journée1666 : deux personnes ont été rémunérées pour
ville1658 (location de personnel à la journée pour travailler travailler sur la même paret : Pons Sabatier, pendant
sur une paret) ont été relevées. La première date des envi- 50 jours, pour un salaire quotidien de 8 s. parisis (soit 10 s.
rons du 1er janvier 13621659 : sept individus achèvent le tournois), Jean le Breton, durant 42 jours, pour un salaire
travail sur la paret derrière chez G. Olric, opération journalier de 6 s. 8 d. parisis, soit au total respectivement
revenue par adjudication à trois d’entre eux le 5 octobre 25 fr. (400 s. parisis) et 17 fr. 8 s. parisis1667. Rien n’indique
13611660. Il s’agit donc ici d’effectuer des finitions sur l’ou- avec certitude que ces deux hommes sont parediers ;
vrage dirigé depuis le mois d’octobre précédent par cependant, le montant quotidien élevé de leur rémunération
Bernard Anhant, Raymond Tocarel et Guillaume Jean, titu- incite à le penser : ainsi, à titre d’exemple, et la même
laires du marché. année, cinq personnes, chargées d’évacuer la terre d’une
Ces personnes travaillant dans le domaine de la terre paret, ne sont rémunérées que 4 s. parisis par jour1668.
crue, il est fort probable que les travaux avaient un
rapport direct avec sa mise en œuvre, et ne concernaient 10.3.1.1.2 - Toulouse, Verlhac, Castelginest
pas le parapet (en pierre) ou les superstructures (en bois). À Toulouse, les sources ont permis de relever neuf
Cependant, pour quelle raison, alors que ces trois dépenses relatives à la construction ou la réparation de
hommes ont, selon l’arpenteur, réalisé plus de neuf parets, et une destruction pour une tour en terre, soit en tout
brasses de paret à cet endroit, faut-il à nouveau les rému- dix opérations dirigées par des parediers.

1656
Les travaux devaient être jugés suffisamment importants pour que l’avis de tous soit nécessaire. En effet, à Saint-Flour, « les consuls doivent toujours
consulter le conseil ou, au moins certains de ses membres, quand ils projettent d’entreprendre de grosses réalisations. Au contraire, si des travaux plus
modestes sont envisagés, ils peuvent en décider seuls et leur pouvoir paraît alors avoir été discrétionnaire » (Rigaudière 1982, t. 1, 539).
1657
À Aix également, « il arrive quelquefois qu’un litige survienne au cours d’un chantier ou à la fin de celui-ci. Ce différend peut alors être réglé à
l’amiable ou faire l’objet d’une action en justice » (Bernardi 1995, 102).
1658
La ville est donc dans ce cas-là un « maître d’ouvrage de fait », phénomène qui se développe largement dans le courant du XIVe siècle. En effet,
« après les grandes ordonnances royales qui font suite aux premières défaites de la guerre de Cent Ans et organisent la mise en défense du royaume,
notamment des villes, la bourgeoisie urbaine se trouve en situation de prendre en charge de grands chantiers. Albert Rigaudière, Philippe Contamine
et d’autres auteurs ont montré l’importance du phénomène et l’ampleur des budgets ainsi mobilisés » (Chapelot 2001a, 23).
1659
AD Aude, 4E76/CC48, [f°116 v°1]. « Item Arnaudo Denat, G. Speliti, G. le Begorda, G. le Bearnes, Bernardo Anhant, Ramundo Tocarelli,
G. Johannis qui per unam diem fuerunt ad perficiendum parietem retro Guillermum Olrici culibet primorum 4 s. 4 d. aliorum tertium ultimorum 4 s.
summa. [somme manquante] ».
1660
Ibid., 4E76/CC48, 5 octobre 1361, [f°114 r°8].
1661
Ibid., 1359-1360, [f°15 r°8]. « ...Dominico Gastonis pro claudendo quasdam luza que erant in clausuris prope domum Fratrum Minorum. 6 s. tur ».
1662
Ibid., [f°15 v°8]. « ...Dominico Gastonis pro reparando quoddam pilarum quod erat in clausuris prope portam Mondebonis. 4 s. tur ».
1663
À Saint-Flour, en 1383, un maître maçon touche entre 4 s. et 4 s. 6 d. tournois par jour de mars à octobre 1383 (Rigaudière 1982, t. 2, 722).
1664
AD Aude, [f°3 v°1]. « …Ramundo Redorte et Fabro de Podio peyreriis pro sex jornalibus quibus fuerunt quilibet ad cavandum vallum retro castrum
cuilibet pro die 5 s. tur. facit. 60 s. tur. ».
1665
Ibid., [f°6 v°6]. « …Oliverio le Breto, peyrerio, pro duobus diebus quibus fuit in dicto opere pro die 8 s. tur. facit. 16 s. tur. ». À titre informatif, et
pour avoir une idée du pouvoir d’achat des artisans, en 1360-1361, à Castelnaudary, le prix d’un pain, calculé d’après une dépense du compte (AD
Aude, 4E76/CC48, [f°67 v°8]) revient à environ 4,4 d. tournois. En Haut-Dauphiné, les salaires sont voisins de ceux observés à Castelnaudary. Ainsi,
un charpentier gagne 2 gros (4 s. tournois), 3 gros, ou 4 gros (8 sous tournois) entre 1363 et 1398, un maçon entre 3 et 5 gros (Nicolas 2005, 206).
1666
Les tailleurs de pierre, autre corps d’artisans expérimentés, étaient « parfois payés à la journée ou à la semaine. Nous ne savons pas toujours exacte-
ment pourquoi certains ouvriers ont été payés à la tâche et d’autres à la journée. Mais il semble bien que, lorsqu’un ouvrier venait se présenter au chef
de chantier pour être embauché et qu’il était inconnu de celui-ci, il était engagé à la tâche pour que l’on puisse ainsi vérifier son habileté et son rende-
ment au travail ; après avoir jugé ses capacités professionnelles, on pouvait le payer à la journée. L’ouvrier devait naturellement préférer ce mode de
rémunération » (Gimpel 1980, 58).
1667
AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°48 v°2]. « …an Pos Sabatier de Sant Marti per sinquanta jornals que stet a far la dita paret a 8 s. per jorn ac per
tot. 25 fr. » ; [f°48 v°3]. « …an Johan le Breto per 42 jornals que estet a far la dita paret a 6 s. 8 d. per jorn per tot. 17 fr. 8 s. ».
1668
Ibid., [f°45 v°3]. « ...an Peyrat, an Bertran Manent, an P. Dazemeras, an B. Guayzart, al gendre den Bernat Redon a cascu per tyrar la tera per hun
jorn de la dita paret a cascu per jorn 4 s. per tot. 1 fra. 4 s. ».

184
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Ces actions ont été réalisées grâce à des prix-faits et on communauté de Castelginest (Haute-Garonne) pour l’édifi-
ne peut donc que renouveler l’observation faite pour cation du fort en 1368 : consuls et l’université financeront
Castelnaudary, à savoir que la somme globale affichée l’édification des parets du fortalicium, excepté dix brasses
empêche de connaître la seule rémunération de l’artisan carrées que l’abbé prendra à sa charge sur les cinquante
adjudicataire1669. Il faut toutefois relever une clause intéres- brasses de côté qu’aura l’enceinte1678. Dans ce cas, il se peut
sante, que l’on retrouvera dans les sources montréalaises : que que le seigneur ait eu à rétribuer les journées de travail
lors du prix-fait conclu entre la ville et P. de Lauretgia, il réalisées par les parediers.
est inscrit, en marge de la dépense, « el broc pus », signe
que la bruyère n’est pas comptabilisée dans le prix global 10.3.1.1.3 - Montréal
de l’ouvrage. On ne sait cependant dans ce cas précis qui, Dans ce bourg castral audois, sept prix-faits relatifs à la
de l’artisan ou des consuls, devait la faire tailler et l’ap- construction de parets ont été recensés : trois d’entre eux
porter à pied d’œuvre1670. sont attribués à l’encan (précision du texte), et c’était vrai-
Quant à Verlhac (Tarn-et-Garonne), le contrat de semblablement le cas pour les autres, même si on ne peut
rien affirmer, compte tenu du silence des documents1679.
construction des parets de 1428 énonce plusieurs clauses :
ainsi, maître Bernard Tinel, fustie cabirador (et maître Ces registres de délibérations consulaires détaillent
d’œuvre ?), devra rebâtir les parets et les aleyas de toutefois les principales conditions incombant à chaque
Verlhac1671, et rendre ces dernières, « charpentées, lattées et partie pour la réalisation de ces ouvrages. Trois points prin-
esparonnées », le commandeur du lieu (et maître d’ou- cipaux sont abordés : la fourniture des matériaux, les délais
vrage1672?), maître Guilhem Calvat, se chargeant pour sa part d’exécution, les garanties, et, à deux reprises seulement, les
d’apporter l’ensemble du bois nécessaire au pied des dites sommes versées aux seuls parediers.
parets1673. Bernard Tinel s’engage à réaliser ces dernières
avant la prochaine fête de Saint-Martin (11 novembre1674) et 10.3.1.1.3.1 - La fourniture des matériaux
les aleyas avant la fin du mois de janvier, le paiement des Six des sept actes relatent cet aspect du contrat : ainsi,
travaux étant également échelonné : les 68 écus d’or seront le 10 août 1461, Pierre Durandel, vallifactor, se chargera
attribués en deux fois : 50 écus d’or lorsque les parets de tailler (ou de faire tailler…) la bruyère, la conditionnera
seront terminées, le solde après achèvement des aleyas1675. sous forme de fagots à ses frais et dépens, mais les consuls
Par ailleurs, l’artisan aura également une part de paiement devront la faire apporter à pied d’œuvre1680 et fourniront le
en nature : quatre setiers de missol1676 selon la mesure de bois nécessaire à l’échafaudage des murs1681 : il s’agit vrai-
Montauban, et une pipe de vin1677. semblablement ici du « pied » de la paret, c’est-à-dire du
Enfin, on signalera pour terminer une clause contenue solin à pierres et chaux (ou briques cuites ?) bâti pour
dans l’accord entre le chapitre de Saint-Sernin et la asseoir l’élévation en terre crue1682 ; ainsi, Pierre Durandel

1669
Ainsi, la dépense relative au contrat de Jean Darenton pour la réparation des parets de l’ostal public mentionne que la somme globale versée est due
« per son trevalh, pena e salari, e autras causas necessarias », peut-être une preuve qu’il a fourni matériel et matériaux, et tout ou partie du personnel
pour mener à bien cette tâche (AC Toulouse, CC2332, 16 mars 1450, pièce n° 22). De fait, on envisagera de manière plus précise l’ensemble de ces
dépenses dans le chapitre relatif au coût de la construction.
1670
Ibid., EE32, 1354-1355, [f°122 r°3].
1671
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « a ydifficar e bastir de novel so es assaber las paretz e las aleyhas
del dit loc de Verlhac… ».
1672
En effet, cette construction, dont les dimensions ont été évoquées plus haut, se fera « …en la maniera que lo noble Peyre Dauchant senher de Favas
ordenara… ». S’agit-il du maître d’ouvrage ?
1673
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « …lo dit mastre Bernat Tinel deu far e redre totas las dichas aleyas
del dit loc de Verlhac fustadas, latadas e sparonadas e lo dit moss. Guilhem Calvat deu far aportar tota la fusta al pe de las dichas parets que fara
mestres per las dichas aleyhas… ».
1674
Soit en un mois et demi, et ce durant une saison assez peu favorable.
1675
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428. « Primieramen sinquanta scutz d’aur de bon aur e de bon pes de
cunh e de la ley de Fransa del pes cascun de tres denies d’aur tantost cum las dichas paretz seran fachas e acabadas e la resta dels d. 68 scutz d’aur
tantost cum las dichas aleyhas seran fachas e acabadas so es assaber fustadas, latadas e sparonadas… ».
1676
Aucune définition n’a été trouvée pour ce terme, mais d’après le contexte il s’agit d’une céréale.
1677
AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428, « …may quatre cesties de missola a mesura de Montalba e una pipa
de vi tot bo e sufficien… ». Une partie du salaire pouvait en effet être donnée en nature (souvent du pain ou du vin ; Rigaudière 1982, t. 2, 725-727).
La présence d’une céréale (missol ou nussol ?) est plus rare dans les dons en nature, mais du blé peut être attribué directement aux artisans en complé-
ment du salaire en numéraire (Ibid., 726).
1678
AD Haute-Garonne, 101H598, 2MI1106, acte 784, Castelginest, 1368. Accord entre les habitants et le chapitre de Saint-Sernin pour la construc-
tion d’un fort à Castelginest. « Item statuerunt et ordinaverunt et ex pacto expresso firma stipulatione intervenientes vallato quod ibi in dicto fortal-
icio fiant parietes que habeant in eorum pede in fundamento de amplitudine duodecim palmos et assendant de altitudine tres brachiatas cum dimidia
super terram et veniant cum erunt complete de in alto octo palmos amplitudinis exceptis tamen decem brachiatas quadrata ex illis quinquaginta quas
dictus dominus abbas faciat et fieri faciat suis propriis sumptibus et expensis in dicto reducto seu fortalicio prout inferius continetur ».
1679
Comme à Toulouse, ils ne permettent pas toujours de déterminer la rétribution exacte du ou des adjudicataires, si bien que les aspects économiques,
qui se rapportent davantage au coût global de la construction, seront examinés plus tard.
1680
AC Montréal, 1D2, 10 août 1461, [f°23 r°1]. « Durandelli talhabit et infayssiabit brugum suis expensis et proprii consules seu villa adportabit seu
faciet adportare in pede operis… ».
1681
En effet, même dans le cadre d’un contrat par adjudication, le maître d’ouvrage est quelquefois tenu de fournir les matériaux. C’est par exemple le
cas en Normandie, où trois maçons décident de s’associer provisoirement en 1396 lors de l’adjudication de la tour Guillaume Lyon à Rouen, « parce que
la tâche était importante et devait être achevée dans un très bref délai. Leur entente leur permettait de réunir une main-d’œuvre relativement nombreuse
puisque chacun des maçons venait avec son équipe et que la ville s’engageait à fournir tous les matériaux nécessaires » (Lardin 2001, 184, 185).
1682
AC Montréal, 1D2, 10 août 1461, [f°23 r°1]. « Item proprii consules providebunt de lignis necessariis pro faciendo statgum murorum… ».

185
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

serait également chargé de l’édifier, et non pas un véritable frais la bruyère nécessaire à la paret1689 ; en 1475, le béné-
maçon (peyrier) comme on aurait pu s’y attendre1683. ficiaire du contrat, Jacques Spert, devra fournir pierres et
Six ans plus tard, un nouveau prix-fait, attribué à mortier pour la construction d’un ou plusieurs ayguiers
l’encan à Jean Gamache et Jean Lassale, prévoit des dispo- ainsi que les bois, planches, tuiles et bruyère, cette
sitions identiques1684. Plus tard, le 15 février 1484, dans dernière étant également taillée et apportée par ses
une attribution aux enchères, les trois adjudicataires sont soins1690.
tenus de fournir la bruyère (taille et transport ?) à leurs Enfin, pour clore cet aperçu relatif aux matériaux et à
dépens1685, la ville se chargeant cependant de la plupart des l’équipement, on rappellera ici l’acte du 15 août 1599 dans
autres fournitures, qu’il s’agisse du bois, des tuiles (ou des lequel les consuls de Fanjeaux « seront tenus de bailler
briques ?), des voliges, des sparos, du foin, des clous et ausdits parediers deux semals et ung chauderon…» (Cayla
des chevilles1686 : ainsi, ces artisans étaient vraisemblable- 1964, 531), preuve que les édiles fournissent quelquefois
ment tenus, comme à Verlhac (supra), de réaliser la super- une partie du matériel1691.
structure de la paret (hourds, d’où la présence de fixations
en fer et de sparos pour le torchis). 10.3.1.1.3.2 - Les délais
Les trois autres contrats (adjudications à l’encan ?), Cinq de ces conventions prévoient un terme pour la
prévoient eux aussi des dispositions relatives aux maté- réalisation du travail. Quatre d’entre elles (1475, 1478,
riaux : le 7 mai 1481, quatre hommes (Jenle, le Grand et le 1461, 1481) indiquent la fête de Saint-Michel
Petit, Blanc, et Guiraud), se voient attribuer la construction (29 septembre1692) comme date d’achèvement des travaux :
d’une paret au quartier de la porte Esquive, et sont tenus la première, du 14 février, laisse environ sept mois et demi
d’apporter eux même bois, planches, tuiles et bruyère à Jacques Spert pour terminer la paret du quartier de la
nécessaires à la paret1687. Comme en 1484, le contrat envi- porte Esquive, délai relativement long (on ne connaît
sage l’ouvrage dans sa globalité, hourds compris, puisque cependant pas l’ampleur de la tâche à réaliser1693). La
la délibération précise (comme d’ailleurs deux autres de seconde, du 15 mai, laisse quatre mois et demi pour la
1478 et 1475), que la paret devra être remise « charpentée, réalisation d’une paret au quartier de la porte de Razès
recouverte, et tortissée »1688. (fig. 37)1694. Dans la troisième (10 août 1461), l’artisan s’en-
Toutefois, dans ces deux derniers cas, des modalités gage à débuter l’ouvrage à la mi-février suivante (1462) et
différentes pour la fourniture des matériaux sont envisa- à l’achever pour la prochaine fête de Saint-Michel1695, soit
gées : en 1478, les quatre parediers (Jacobo de Blanho, sept mois et demi de chantier pour trois grandes réalisa-
Ysarno Saura, Ramundo Grelini, Johanni Marti junior) tions : un tronçon de paret entre la porte Razès et la porte
seront tenus de tailler et d’apporter à pied d’œuvre et à leur de l’Eau, un autre entre cette dernière et la porte des

1683
Un artisan peut être chargé de superviser une construction hors de sa spécialité directe, comme à Tournai, au milieu du XIVe siècle : « parfois même
le charpentier pouvait se retrouver adjudicataire général : à Tournai en février 1345 (n. st.), le charpentier Jehan Martin passait marché pour réaliser
aux Frères Mineurs une chapelle, comprenant non seulement les œuvres de charpenterie, mais encore de maçonnerie » (Salamagne 2001b, 226).
1684
AC Montréal, 1D2, 15 avril 1467, [f°34 r°1]. « Item de la bruga los ditz paredies deven far e los ditz senhors de cossols la deven far carregar a lor
despens ».
1685
Ibid., 15 février 1484, [f°80 r°1]. « …exceptada la bruga que los dits Grele e Clerc sont tengutz de aver a leurs despens ».
1686
Ibid., « …que lesdits consuls sont tengutz de aver balhat als dits Grele e Clerc la fusta e lo teule [ou teula ?] e la fuelha e sparrous e fen e clavels
e cavillas que en aquo sont necessarias… ». La terminaison du terme « teul » est abrégée : on ne sait donc s’il s’agit du mot « teule » (tuile canal ;
probable) ou « teula » (brique cuite).
1687
D’ailleurs, « la participation du maître d’œuvre à la fourniture des matériaux de son chantier n’a, en soi, rien d’exceptionnel » (Bernardi, Dautrey,
Mignon 2001, 50).
1688
AC Montréal, 1D2, 7 mai 1481, [f°117 v°1]. « Item eisdem Jenle, Blanchi et Gayraudi tradere fustes postes, tegulos et dicti Jenle et Blanchi et
Gayraudi tenebuntur habere brogum eorum sumptibus pertinens et expectantibus in dicta pariete ac necessu… » ; [f°118 r°1]. « Anno Domini 1478 et
die quinta mensis maicii […] et hoc dicti Saura, de Blanno, Grelini, Marti tenebitur facere dictam parietem bene et debite et eadem reddere fustatam
et recubpertam… » ; [f°119 r°1]. « Anno Domini 1475 die XIIII mensis febroarii […] Et cum hoc idem Jacobus tenebit facere dictam parietem bene et
debite et ? reddere fustatam et recupertam… ».
1689
Ibid., « Anno Domini 1478 et die quinta mensis maicii […] tenebuntur talhare brogum eorum sumptibus pertinens et expectans in dicta pariete ac
necessaria et sibi adportari facere juxta parietem predictam… ».
1690
Ibid., 14 février 1475, [f°119 r°1]. « Item sibi Sperto tradere morterium et lapides pro faciendo aguerium seu aguerios necessarios nec non fustes,
postes et tegulos et [alias reis necessarias rat.] brogam et dictum Spert tenebit taliare brogam suis sumptis pertinens et spectans in dicta pariete ac
necessariis, et sibi adportari facere juxta parietem predictam. ».
1691
On a vu plus haut quelles interprétations (et quelle utilisation) pouvaient être attribuées à ces deux termes, raison pour laquelle nous n’y reviendrons
pas ici.
1692
À Montpellier, en 1294, un contrat de construction d’une maison retient cette même fête comme date-butoir (Aubert 1961, 99). C’est également le
cas « à Gap, le 19 juin 1406, où les prix-facteurs s’accordent pour une réalisation en deux temps : la tour du Verger doit atteindre la hauteur des cour-
sières des remparts de la ville avant le 29 septembre 1406 (Saint-Michel) et les travaux doivent être entièrement achevés le 24 juin 1407 (Saint-Jean-
Baptiste) » (Nicolas 2005, 199). Cette fête du 29 septembre, qui précède d’une quinzaine de jours l’arrivée de l’automne, était-elle donc souvent donnée
comme terme afin de se prémunir des intempéries ?
1693
AC Montréal, 1D2, 14 février 1475, « Et cum hoc idem Jacobus tenebit facere dictam parietem bene et debite et ? reddere fustatam et recupertam
huic ad festum Beati Michaelis archangeli proxime ventur pace et quiete ».
1694
Ibid., 15 mai 1478, [f°118 r°1]. « …hinc ad festum Beati Miquaelis proxime ventur pace et quiete ».
1695
Ibid., 10 août 1461, [f°23 r°1]. « …quod prope Durandelli incipiet facere l’escombre et pedem dictorum parietum de die in diem et incipient coperari
et construere dictos parietes in medio mensis febroari proxime futuris et debent patrasse dictos parietes hinc ad festum Beati Michaelis mensis septem-
bris inde proxime sequenti bene et debite ad noticiam et cognitionem exepertorum etiam ».

186
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Carmes, et un enfin un pan, qui menace de s’effondrer, s’est obligée et a hypothéqué sur ses biens propres, ceux
entre la porte du château et la porte Esquive1696. Dans la de l’université pour Montréal, les biens personnels pour
dernière, le 7 mai 1481, les quatre hommes ont à nouveau Pierre Durandel, cet acte étant réalisé sous couvert des
quatre mois et demi pour accomplir leur tâche, en l’espèce sceaux de plusieurs villes importantes1701. Ces recomman-
une paret au quartier de la porte Esquive, mais une fois de dations sont rappelées dans l’acte de 1467 qui précise en
plus on ne connaît pas les dimensions de l’ouvrage1697. outre que le contrôle de la régularité des travaux sera
Enfin, la cinquième délibération, du 15 février 1484, réalisé par les consuls ou des prud’hommes experts en la
indique la Pentecôte prochaine (premier dimanche de juin) matière1702.
comme terme, laissant environ trois mois et demi aux deux Pourtant, contrairement à ce que l’on peut constater
titulaires pour terminer l’opération. On prévoit également ailleurs, aucune pénalité ou amende n’est prévue en cas de
la possibilité d’évaluer l’avancement des travaux au jour le non respect des obligations par l’une des deux parties, à
jour, selon les nécessités du moment, peut-être un signe de moins de penser que celles-ci étaient inscrites dans l’acte
souplesse de la part des consuls, conscients des difficultés notarié, plus détaillé, et n’apparaissent donc pas dans le
de l’entreprise (problèmes pour se procurer des matériaux registre municipal1703.
et/ou de la main d’œuvre ?)1698.
10.3.1.1.3.4 - Les salaires
10.3.1.1.3.3 - Les garanties et engagements
Les délibérations de 1475 et 1478 indiquent le montant
Ces délibérations précisent souvent de manière
de la rétribution des constructeurs (fig. 53). Ces personnes
succincte les engagements de chaque partie et les garanties
(quatre hommes dans le premier, un seul dans le second)
apportées à la réalisation de ces entreprises1699. Les deux
recevront de chaque habitant solvable de la ville, soit le
plus anciennes (1461 et 1467) fournissent le plus d’infor-
paiement d’une journée de travail (dont le montant n’est
mations : dans la première, les consuls s’engagent à payer
et apporter la bruyère à pied d’œuvre, alors que Pierre pas précisé), soit 2 s. 6 d. tournois1704.
Durandel préparera ce végétal et construira de manière Si l’on part du postulat que ces deux sommes étaient
correcte les parets dans le délai imparti1700. Chaque partie d’un montant proche, ou identique, il est intéressant de

1696
Ibid., [f°23 r°1]. « Et primo quoddam frustum parietis existens inter januam porte Reddensii et porte Aquerie et quodam aliud frustum etiam exis-
tens inter portam vocatam porte del Carme et januam porte vocatam Aquerie et quoddam aliud frustum quod est in periculo cadendi inter januam
porte del Castelh et porte Squive ».
1697
Ibid., 7 mai 1481, [f°117 v°1]. «…hinc ad festum Beati Miquahelis proxime ventur paciffice et quiete… ».
1698
Ibid., 15 février 1484, [f°80 r°1]. « Item es pacta que los dit Greule e Clerc sont tengutz de rendre la dita muralha bastida d’ayssi a Penthecosta
proda venent e autrement de jorn en jorn selon la opportunitat del temps ». Cette souplesse est rarement de rigueur car généralement « tout retard au
temps convenu entraîne un dédit qui peut être très lourd pour le maître de l’œuvre. Des sanctions graves, généralement inscrites au bas du contrat,
prison, saisie des biens, sont prévues, en cas de faute grave dans l’exécution, de retard ou de malfaçon » (Aubert 1961, 100, 101). À Aix, dans la
construction civile, « certains contrats se contentent d’indiquer que les travaux doivent être menés jusqu’à leur terme ; il n’est cependant par rare que
le texte fixe un délai d’exécution. Cette échéance, vague ou précise, ne paraît néanmoins bien souvent qu’indicative. Dans les faits, les constructions
peuvent s’avérer plus rapides, ou plus longues que prévues. Les commanditaires tentent ponctuellement de lutter contre les retards par l’instauration
de pénalités, mais les dépassements de délais ne sont pas toujours imputables aux artisans. Un chantier peut, en effet, être momentanément interrompu
par manque d’argent –l’avancement des travaux est, dans bien des cas, lié aux subsides reçus-, ou par l’arrêt de la fourniture des matériaux » (Bernardi
1995, 256, 257). En Haut-Dauphiné « dans chaque contrat, le prix-facteur doit jurer qu’il s’engage à respecter les délais de réalisation des travaux dont
l’échéance est souvent fixée à une fête religieuse (la saint Michel, Toussaint, Noël) » (Nicolas 2005, 199).
1699
Clauses très fréquentes dans les prix-faits. En effet, généralement, « le rappel des peines encourues en cas de non respect du contrat précède la
mention du lieu de rédaction de l’acte, les noms des témoins et celui du notaire » (Bernardi 1998a, 31).
1700
AC Montréal, 1D2, 10 août 1461, [f°23 r°1]. « …etiam pro quibus omnibus et singularis premissis actendendis videlicet dicti consules pro solvendo
pretium et portando brugum et dictus Durandelli pro faciendo et construando bene et debite infra dictum tempus dictas parietes et preparando
brugum… ». La préparation de la bruyère devait consister à découper des branchettes en quantité suffisante et à la bonne longueur.
1701
Ibid., [f°23 r°1]. « …ut dictum est una pars alteri et altera relique ypothecarunt et obligarunt omnia eorum bona videlicet dicte universitatis et
propria dicti Durandelli videlicet viris et rigoribus sigillorum maiorum Tholose Carcassone Limosi Montis Regalis… ». Dans les contrats, les artisans
donnent souvent leurs biens en garantie, comme par exemple un maçon en 1272 pour la construction d’une grange (Aubert 1961, 99).
1702
AC Montréal, 1D2, 15 avril 1467, [f°34 r°1]. « …e sobre ayso los ditz senhors de cossols se obligan a pagar los ditz vint scutz aysi est besonaran
de jorns en jorns e los dit paredies de far la dita paret bonamen e deguda a conoguda dels dit senhor de cossols ho de prodomes spertz sobre aquo e
sobre ayso la una partida se obliga a l’autra so meto se a las forsas e rigors del sagel mage de Montréal… ». Ces personnes sont probablement des
maîtres maçons ou des maîtres charpentiers qui interviendront donc pour effectuer une expertise à la demande des consuls. En effet, « soit pour acheter
un terrain ou un immeuble, soit par suite d’hésitation dans la marche des travaux d’un édifice en cours de construction, d’un désaccord entre l’archi-
tecte et ceux qui l’emploient, entre les maîtres et les compagnons, soit parce qu’un grave accident menace l’édifice, soit après quelque désastre,
incendie, écroulement, on provoque une expertise où l’on appelle les plus fameux maîtres maçons et charpentiers, maître des œuvres du roi, d’un grand
seigneur, de la ville de Paris ou d’une ville importante, d’une cathédrale ou d’une abbaye, des maîtres venus des chantiers voisins et parfois de très loin.
Ceux-ci passent une ou plusieurs journées à faire la visite du monument en cause avec le maître de l’œuvre, son chef de chantier et parfois un ou deux
compagnons maçons ou charpentiers, et rédigent un rapport sur les conclusions de leur expertise » (Aubert 1961, 116).
1703
En Haut-Dauphiné en effet, « en cas de non-respect des délais d’exécution, la plupart des prix-faits prévoient des amendes dont le montant est
proportionnel à celui du prix-fait. Plus rarement une amende peut s’appliquer au châtelain s’il ne paie pas le prix-facteur ou s’il n’assure pas les appro-
visionnements dans les délais » (Nicolas 2005, 201).
1704
AC Montréal, 1D2, 14 février 1475, [f°119 r°1]. « …videlicet quod dicti consules tenebuntur eisdem Blan, Saura, Grelini, Marti facere exsolvere
per habitantes dicti loci unum jornalem hominis pro quelibet homo facere suis sumptibus sive expensibus aut summam duorum solidos 6 d. tur. pro
quolibet habitanti solvabile » ; Ibid., 15 mai 1478, [f°118 r°1]. « Et hoc cum pactis sequentis, videlicet quod dicti consules tenebuntur sibi Spert facere
exsolvere pro habitantis dicti loci unum jornalem hominis et quilibet homo facere suos sumptus sive expensionis aut summam duorum solidorum sex
denarios tur. pro quolibet habitanti solvabile ».

187
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOM, Qualification Localisation Salaire


prénom certaine du travail journalier
ou supposée
( ?)

AC 5 mai DE BLANH parediers ? Paret dans le 2 s. 6 d. tur. par


Montréal, 1478 Jacob quartier porte habitant
1D2, Razès solvable
[f°118 r°1] SAURA pour une
Ysarn journée
d’homme
GREULE,
GRELE
Ramundus

MARTI
junior
Johan
Ibid., 14 SPERT paredier ? Paret dans le 2 s. 6 d. tur. par
[f°119 r°1] février Jacob quartier Porte habitant
1475 Esquive solvable
pour une
journée
d’homme
Fig. 53 : Montréal : rémunération des parediers.

comparer ces 2 s. 6 d. tournois avec le revenu quotidien 10.3.1.2 - Les aides, ouvriers et manœuvres
d’un maître maçon de Saint-Flour en 1466 (3 s. 4 d. tour- Les sources chauriennes s’étendent très peu sur la ques-
nois), et avec celui d’un ouvrier maçon (2 s. 6 d. tournois tion des modalités d’engagement et de rémunération des
en 1427 ; 2 s. 8 d. à 3 s. tournois en 1437)1705. Si tant est que personnes chargées d’assister les parediers. On citera
cette comparaison soit fiable compte tenu des fluctuations toutefois une dépense de 1359 dans laquelle trois
monétaires, on aurait donc tendance à penser que la rému- apprentis1706 de Pierre Saurin, charpentier, l’aident à
nération des constructeurs montréalais équivalait davan- « pigar »1707 une paret pendant trois jours, recevant 4 s.
tage à celle d’un ouvrier qualifié qu’à celle d’un maître… tournois de salaire quotidien, somme élevée1708, mais de
Faut-il alors penser que ces individus ne sont pas consi- moitié inférieure à celle reçue par le maître pour la même
dérés comme des mestres parediers, et qu’à ce titre ils opération1709. Les charpentiers sont très bien rémunérés
perçoivent un salaire moindre ? Ou bien peut-on estimer pour cette tâche (8 s. tournois) puisque par comparaison
que ces deux adjudications, probablement attribuées à avec Saint-Flour, un maître maçon ne reçoit au plus que
l’encan, ont permis de tirer les prix vers le bas, au point de 5 s. tournois quotidiens en 1376. Il en est de même pour les
rétribuer les parediers comme de simples ouvriers quali- apprentis dont les salaires se rapprochent ainsi de ceux des
fiés ? On peut enfin envisager que cette somme de 2 s. 6 d. maîtres maçons, mais peuvent également être équivalents à
tournois, apparemment versée en cas d’impossibilité de ceux des ouvriers maçons (4 s. tournois en 1376)1710.
payer une journée de travail de paredier, est bien inférieure L’opération d’installation du coffrage, particulièrement
au montant de cette dernière. La différence serait alors périlleuse et délicate, nécessitait d’importantes connais-
éventuellement prise en charge par les finances de la ville, sances techniques de la part du charpentier et de ses aides,
les consuls se devant peut-être d’apprécier, au cas par cas, raison pour laquelle leurs rémunérations auraient été forte-
la solvabilité -ou l’insolvabilité- de chaque habitant. ment majorées.

1705
Rigaudière 1982, t. 2, 717, tableau 39 ; 719, tableau 40. À Toulouse, sur le registre de la taille de 1398, Ph. Wolff a relevé la présence d’un valadier
imposé dans la tranche de 6 à 19 livres, c’est-à-dire la plus basse (Wolff 1956, 113).
1706
Pour avoir quelques exemples des modalités d’engagement des apprentis dans l’artisanat au Moyen Âge, voir : Radzihovska 1998.
1707
Il s’agirait ici comme on l’a vu de mettre en place le système de coffrage (structure charpentée et taulas) pour bâtir l’élévation en terre.
1708
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°4 r°1]. « ...Guiraudo Miri et tribus famulis Petri Saurini qui fuerunt in dicto opere quilibet per duos dies et
Petro Aynerii qui etiam fuit in dicto opere per tres dies cuilibet pro die 4 s. tur. facit. 44 s. tur. ».
1709
Ibid., [f°3 v°6]. « ...G. Bastiti et Petro Saurini pro duobus jornalibus quibus fuerunt quilibet ad pigandum illum parietem qui est in clausuris ante
domum Fratrum Minorum cuilibet pro die 8 s. tur. facit. 32 s. tur. ».
1710
Rigaudière 1982, t. 2, 717, tableau 39 ; 719, tableau 40.

188
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Une trentaine d’années plus tard, le compte de 1391- boissons (potum), sans que d’autres dépenses, postérieures
1392 apporte quelques rares informations supplémentaires ou antérieures, ne fassent mention d’une quelconque rému-
en la matière : lors des travaux de la paret devant l’obrador nération en numéraire1720.
del cosolat, les femmes chargées du transport de la terre La plupart de ces enceintes, sinon toutes, utilisaient
reçoivent 1 s. parisis de salaire quotidien1711 et Raymond donc vraisemblablement une main d’œuvre bon marché :
Ytier, qui pourtant assiste les parediers, ne touche à cette cette besogne ne demandait donc pas de qualifications, et
occasion que 8 d. parisis1712. Ces faibles revenus les classent au besoin les parediers étaient là pour donner des instruc-
dans la catégorie des simples manœuvres, puisque la même tions précises aux manœuvres.
somme (8 d. tournois) est versée aux manœuvres femmes à La même interrogation se pose pour le texte du 15 août
Saint-Flour en juin 13761713. 1599 concernant Fanjeaux, déjà évoqué à plusieurs
Enfin, on précise que les consuls font donner pain et vin reprises : dans cet acte, les obligations des consuls, outre la
aux travailleurs (hommes et femmes) œuvrant aux fourniture de récipients, sont de « donner » aux parediers
banchées de la paret, ces victuailles, qualifiées de « cinq manœuvres le jour que poser les gachouls tant
« cadeau » ou de « pourboire » (estrena), coûtant la somme seulement » (Cayla 1964, 531). On ne sait, une nouvelle
de 3 s. 2 d. parisis1714. Les personnes désignées sont vrai- fois, si ces personnes sont rémunérées ou si elles agissent
semblablement celles dont on vient de parler : ainsi, en dans le cadre de corvées. Toujours est-il que leur emploi
plus du salaire, certes assez modique, elles recevaient à dans le temps est très limité, puisqu’elles pourront seule-
manger et à boire au titre de la coutume ou d’un usage ment être employées par les parediers le jour où les
local1715. gachouls (pains de terre) seront posés sur l’ouvrage, enca-
drant ainsi leur temps de travail, peut-être de manière à ce
Quelques années plus tard, en 1441, le contrat pour les que les titulaires du contrat n’en fassent pas un usage
travaux de la paret derrière la maison de Guiraut del Ryu abusif.
passé avec les parediers P. Lamet et P. Hebréarn prévoit
que les édiles sont tenus de faire livrer l’eau1716 nécessaire à 10.3.2 - Pour le personnel du torchis
l’opération : en l’espèce, c’est un certain Gibel1717, qui pour
une somme de 4 d. parisis (5 d. tournois) -également quali- 10.3.2.1 - Les tortissayres
fiée de « pourboire » ou de « cadeau »- va se charger de ce Les individus dirigeant la mise en œuvre du torchis
transport (vraisemblablement en plusieurs fois)1718. On ne présentent des qualifications assez diverses : charpentiers,
sait cependant si cette somme s’ajoute à son salaire ou si parediers, valadiers, peuvent ainsi se voir confier le rôle de
cet homme travaillait dans le cadre de corvées, auquel cas chefs d’équipe. Les systèmes d’embauche les concernant
le paiement des consuls devrait être considéré comme un correspondent soit à des prix-faits, soit à une rétribution
geste de générosité. quotidienne.
De fait, la faiblesse des données concernant ces
travailleurs pourrait peut-être trouver une explication dans 10.3.2.1.1 - Les prix-faits
le fait qu’ils étaient réquisitionnés au moyen de corvées, et À Castelnaudary, les dépenses se contentent la plupart
n’apparaissaient donc pas dans les registres fiscaux de la du temps de mentionner que les personnes ont travaillé
ville1719. Une dépense du 6 juin 1363 pourrait aller en ce « ad pretium factum » (conclu devant notaire ?) : on ne
sens : ce jour-là, les édiles se rendent près d’une paret du connaît donc pas les modes d’attribution du travail (prix-
quartier de l’Estrade et donnent aux travailleurs aliments et fait de gré à gré ou à l’encan ?).

1711
AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°32 r°7]. « Le jorn desus fero paguar a la molher den R. Guayraut e a la molher den Jacmes Catula e a dona Maria
Dermel e a dona Guilhalma de Cordas e a Dona Bona e a Dona Condors que esta a l’ostal den senhor Dermals e a dona Bernarda que esta a l’ostal
den Estene de Tauliat e la molher den Johan Pueg e a odna Jonana Patisiera e a la sirventa den senhor Robert e a la molher del panayrier que care-
gavan de la tera per far las taulas de la paret desus ditas per femna 1 s. per tot. 1 l. 1 s. ».
1712
Ibid., [f°33 v°6]. « ...an R. Ytier que ajudeo als parediers que paredo del jorn. 8 d. ».
1712
Rigaudière 1982, t. 2, 721, tableau 42.
1714
AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°32 v°2]. « Item le jorn desus fero donar als homes e a las femnas que hobravan a las taulas de la paret desus
ditas per estrena entre pa e vi per tot. 3 s. 2 d. ».
1715
À Saint-Flour, « pour l’année 1391 cependant, une mention extrêmement intéressante figure au livre de comptes. Pendant toute la durée de travaux,
Jean Pertuzat et Michel Migo, tous deux maçons, reçoivent chaque jour du pain dont la valeur est estimée, pour chacun, à deux deniers, tandis que la
quantité donnée aux manœuvres-femmes qui travaillaient avec eux ne représente qu’un denier. Cette année-là Jean Pertuzat gagne quatre sous six
deniers, un manœuvre-femme huit deniers. Le pain donné chaque jour constitue donc une part non négligeable du salaire, surtout pour les travailleurs
qui se trouvent en bas de la hiérarchie » (Rigaudière 1982, t. 2, 726, 727).
1716
Liquide nécessaire à la construction de la paret (en bauge ?) ou éventuellement pour le torchis des hourds ?
1717
Un Jean Gibel (membre de sa famille ?) apparaît dans une dépense quelques 80 ans plus tôt (AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°82 r°7]).
1718
Ibid., 4E76/CC77, 1441, [f°26 v°2]. « ...al dit Gibel per far livrar l’aygua que era nesesaria a la dita paret per estrena. 4 d. ».
1719
Les corvées sont en effet souvent utilisées pour le transport de la terre destinée à édifier des ouvrages défensifs. Ainsi, en Belgique, « une part impor-
tante de la défense est constituée par les terrées. Leur construction fait appel à une technique éprouvée, celle des mottes et des levées de terre. Les
comptes mentionnent les fosseurs qui creusent les fossés, mais font plus rarement mention de ceux et de celles qui portent les terres, souvent dans des
hottes, pour les évacuer ou pour édifier les terrées. Il y à là une masse de travail non spécialisé, fondamentale pour l’édification rapide de l’enceinte,
mais aussi pour son financement. Certains documents attestent, à Binche notamment, le recours à des corvées de fortification pour porter les terres. Les
redevables avaient le choix entre se racheter ou effectuer leur travail » (Waha 1999, 204, 205).
1720
AD Aude, 4E76/CC49, 6 juin 1363, [f°32 v°5]. « Item dicti domini consules accesserunt in parietem de la Strada et dederunt tam in servici potum
hominibus qui faciebant dictam parietem et decostitit 2 s. tol. ».

189
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Les informations apportées par ces registres sont du bas » pour une somme de 2 s. toulzas chacun (soit 4 s.
inégales, car on ne sait pas toujours quelle a été la nature tournois)1723 et le 20 mai, ce même Pierre de Bédarieux
exacte du travail de tortissage, qu’il est bien souvent impos- (accompagné de G. Malamosta), intervient sur le pal de
sible d’isoler du reste des opérations relatives à la couver- l’angle situé sous la porte Saint-Antoine, pour un salaire
ture complète de l’ouvrage (voliges, tuiles quelquefois…). commun de 11 s. toulzas (1 l. 1 s. 1,5 d. tournois), sans que
Il est donc difficile dans ces conditions de pouvoir l’on sache si l’un des deux a été davantage rémunéré, ou si
comparer des rémunérations, d’autant que les comptes ne la somme à été partagée à parts égales (soit 5 s. 6 d. toulzas
chacun) ; en outre, on ne connaît pas la durée réelle de l’in-
détaillent jamais le volume des constructions réalisées, que
tervention (un jour°?)1724.
ce soit sous forme de longueurs ou de surfaces. Par ailleurs,
la somme totale versée, lorsqu’elle est mentionnée, prend Quant à Stéphane Ramno, il effectue en 1361-1362
en compte, comme dans tout prix-fait, les salaires du trois journées qui lui rapportent à chaque fois un salaire
« tortissayre » et des ouvriers, mais également celui des journalier de 4 s. tournois (2 s. toulzas)1725. Pons et
matériaux. Ainsi, à l’instar des constructions de terre Guillaume Burd œuvrent pendant deux jours sur une
massive, on envisagera plutôt les sommes versées lors de échauguette près de la porte de Goufferan, et touchent
ces contrats lors de l’étude du coût global de la construc- également 4 s. tournois par jour (16 s. tournois au
tion (infra). total)1726.
Raymond Tocarel, probable paredier, effectue en six
10.3.2.1.2 - La rétribution à la journée
jours trois opérations en 1361-1362, pour lesquelles il
Ces tâches sont effectuées par les mêmes individus que perçoit à chaque fois un salaire quotidien de 4 s. tour-
ceux travaillant dans le cadre de prix-faits1721, mais selon nois1727. Dans la deuxième, il est chargé de diriger (regere)
des modalités différentes : dans ce cas-là en effet, ils les opérations en compagnie de Guillaume Jean, ce qui lui
perçoivent une rémunération quotidienne pour un travail permet de gagner 1 s. tournois de plus par jour par rapport
déterminé (en l’occurrence le torchis), et probablement aux autres participants.
quelle que soit la longueur ou la surface couverte dans la
Ces salaires quotidiens se situent dans une moyenne
journée1722. Ils louent donc uniquement leur savoir-faire et tout à fait honorable, voire relativement haute, par rapport
ne sont pas tenus d’apporter avec eux ouvriers, manœuvres à ceux d’autres artisans travaillant en 1361-1362 : dans le
ou matériaux, fournis par la ville. cas du charpentier Guillaume Burd, qualifié de
Neuf opérations réalisées par sept personnes différentes « magister », le tortissage d’une échauguette est une tâche
ont été répertoriées entre 1359 et 1362, (fig. 54). assez rémunératrice s’intercalant entre la réparation d’un
Ainsi, le 25 avril 1360, Pierre de Bédarieux et Elie plancher de porte (16 d. tournois)1728 et un prix-fait pour
Fargues s’occupent, avec d’autres, du hourd du « Château l’enterrement et le tortissage de fenêtres (6 s. tournois)1729.

1721
Certains de ces individus tentaient-ils de créer leur propre entreprise en alternant travail salarié à la journée et tâche réalisée pour leur compte,
comme par exemple en Normandie ? : « comme la création d’une entreprise demandait des capitaux et, sans doute aussi, une clientèle stable, on pouvait
parfois être en même temps salarié à la journée et agir comme artisan indépendant. On peut trouver une illustration de cette réalité sur le chantier des
stalles de la cathédrale de Rouen qui se déroula de 1457 à 1471. Le huchier Jean Hermen, sans doute d’origine flamande et apparemment maître dans
sa profession, y arriva en juin 1466. Il y fit plusieurs séjours de durées variables et s’absenta notamment pendant dix-huit jours aux cours des mois d’oc-
tobre et novembre 1467, parcequ’il était allé travailler à son compte, à la forteresse du Pont de Seine où logeait le bailli de Rouen. Il y avait refait des
fenêtres, des portes, plusieurs tables et des « pentures mortoisées […] pour pendre harnoys et armures ». Il avait ainsi touché une somme quatre fois
supérieure à ce qu’aurait été son salaire sur le chantier des stalles, mais celui-ci avait sans doute permis de se procurer les fonds nécessaires pour acheter
les matériaux et pouvoir ainsi prendre à tâche, lors des enchères au rabais, les travaux à effectuer dans la forteresse » (Lardin 2001, 183).
1722
À Douai, cette rétribution à la journée, ou salariat, « fut retenue par la ville lorsque le travail à exécuter était limité dans le temps (quelques jours
ou quelques semaines au plus) ou qu’elle ne pouvait trouver adjudicataire pour le marché, en particulier lors des chantiers à risques techniques. La régie
directe obligeait le maître d’ouvrage à tenir la comptabilité du chantier, à surveiller la main d’œuvre employée, à fournir et entretenir ses outils, à mettre
à sa disposition l’infrastructure nécessaire, etc. Aussi ce système était-il réservé la plupart du temps aux ouvrages courants d’entretien des charpentes
et toitures, des planchers des portes des maisons, etc. » (Salamagne 2001a, 136).
1723
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°49 r°1]. « ...an Elias Fargas, an Peyre Bertran, an Peyre Espanal, an Peyre Ferran, an Peyre de Bederes que torti sero
aquel dia l’amban del castel de Bays auta prenian cascu per jornal flori a 12 s. 6 d. 2 s. tol. montero 10 s. tol. valo flori a 12 s. 9 s. 8 d. tol. 1 tor. ».
1724
Ibid., 20 mai 1360, [f°67 r°2]. « …an G. Mala Mosta e an P. de Bederes que avian tortissat al pal de l’angle dejos la porta de Sant Antoni. 11 s.
tol. que valo comptat flori a 12 s. 1 l.1 s. 1 d. media tor. ».
1725
Ibid., 1361-1362, [f°88 v°1]. « Item Stephano Ramnos, P. Bertrandi qui die presenti fuerunt ad tortissandum palem castri cuilibet 4 s. summa. 8 s. » ;
[f°90 v°3]. « Item Stephano Ramnos, Stephano Baravi, Guillermo Augerii qui fuerunt die presenti ad tortissandum palem retro castrum cuilibet 4 s.
summa. 12 s. » ; [f°95 v°7]. « Item Stephano Baravum, Ramundo Gonterii, Stephano Ramnos qui presenti die fuerunt ad tortisandum dictam portam
quia magistri cuilibet 4 s. tur. summa. 12 s. tur. ».
1726
Ibid., [f°97 v°8]. « Item Poncio Burdi, Guillermo Burdi qui per duos dies fuerunt ad tortisandum guacillum juxta porta de Got Feran pro die cuilibet
4 s. summa. 16 s. ».
1727
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 v°9]. « Item Ramundo Tocarelli, Ramundo Jacobi qui die presenti fuerunt ad tortissandum, interandum gacillum
juxta palem prope portam Beati Antonii cuilibet 4 s. tur. summa. 8 s. » ; [f°116 v°8]. « ....Arnaudo Denat, Bernardo Anhant, [Ramundo Tocarelli rat.],
Jacobo Madrerias, G. Bela Garda, G. Biarnesii, G. Spelici, Fabro Bordas, G. Johannis, Ramundo Tocarelli, Ramundo Aybrandi qui diebus lune martii
mercuri fuerunt ad tortisandum dictos embans cuilibet pro die 3 s. et prenominatis Ramundo Tocarelli, Guillermo Johannis pro avantagio quia rege-
bant operas cuilibet 12 d. pro die summa. 4 l.16 s. tur. » ; [f°117 r°3]. « Item Ramundo Tocarelli, G. Johannis qui per dictos duos dies fuerunt quilibet
in dicto opere cuilibet pro die 4 s. tur. summa. 16 s. tur. ».
1728
Ibid., [f°87 v°12]. « Item magistro Burdi fusterio pro reparando solerium porte de Guot Ferran. 16 d. ».
1729
Ibid., [f°96 v°5]. « Item G. Burdi qui pretio facto interaverat guacillum retro Canonicos et tortisaverat fenestras ad relacionem Johannis Fabri.
6 s. tur. ».

190
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Document Date NOM, prénom Qualification réelle Localisation Durée Salaire Somme
ou supposée ( ?) du travail individuel globale
journalier
DE BEDARIEUX tortissayre ?
Pierre amban du
AD Aude, château du un jour 2 s. tol. -
4E76/CC48 25 avril bas (4 s. tur.)
[f°49 r°1] 1360 FARGUES tortissayre ?
Elie
Ibid. 1360- DE BEDARIEUX tortissayre ? Pal de 11 s. tol.
[f°67 r°2] 1361 Pierre l’angle sous soit 1 l. 1 s.
la porte un jour ? 5 s. 6 d. tol. ? 1 d. media
MALAMOSTA manœuvre, ouvrier ? Saint- tur.
G. Antoine
Ibid. 1361- pal du un jour 4 s. tur. -
[f°88 v°1] 1362 château (2 s. tol.)
Ibid. 1361- pal derrière un jour 4 s. tur. -
[f°90 v°3] 1362 RANNO tortissayre ? le château (2 s. tol.)
Ibid. 1361- Stéphane porte du un jour 4 s. tur. -
[f°95 v°7] 1362 Terrier (2 s. tol.)
Ibid. BURD charpentier gaytil près de deux jours 4 s. tur. 16 s. tur.
[f°97 v°8] Guillaume la porte de (2 s. tol.)
1361- Goufferan
1362
BURD charpentier ?
Pons
Ibid. gaytil près du un jour 4 s. tur. -
[f°93 v°9] TOCAREL pal de la (2 s. tol.)
Raymond porte Saint-
Antoine
Ibid. TOCAREL embans des trois jours 4 s. tur. -
[f°116 v°8] 1361- Raymond tortissayre ? parets (2 s. tol.)
1362 JEAN Guillaume parediers ? derrière chez
G. Olric
Ibid. TOCAREL embans des deux jours 4 s. tur. -
[f°117 r°3] Raymond parets (2 s. tol.)
JEAN Guillaume derrière chez
G. Olric
Fig. 54 : Castelnaudary, (1359-1362) : « tortissayres », les tâches à la journée.

Elle est égale au salaire perçu à l’occasion de la réparation 10.3.2.1.3 - Les ouvriers et manœuvres
d’un agassier ou d’un gaytil1730. Les assistants employés au torchis sont essentiellement
Cette somme est également équivalente au salaire d’un recrutés sous forme de locations à la journée, système
maçon-carrier tel que Jean Maurin, qui réalise avec « très souple » qui convient « aussi bien aux petits travaux
d’autres la « découverte » de la carrière Saint-Jacques1731, qu’aux très gros chantiers » (Bernardi 1995, 102).
mais cependant bien inférieure à celle obtenue par ce Cependant, il est quelquefois bien difficile, au vu de la
même homme pour fermer des ouvertures dans une paret formulation des dépenses, de distinguer un simple exécu-
(8 s. tournois)1732. tant d’un chef d’équipe, d’autant que le premier peut
parfois se transformer en donneur d’ordres et le second
Ainsi, les « tortissayres » sont assez bien rémunérés redevenir simple ouvrier pour les besoins d’une opération
pour leur travail1733 puisque ces 4 s. tournois quotidiens sont particulière. C’est donc essentiellement le montant des
par exemple la rétribution moyenne perçue à Saint-Flour rémunérations quotidiennes qui permet de distinguer l’un
par un maître maçon en 1380 et 13821734. et l’autre. On insistera donc sur le fait que l’appellation

1730
Ibid., [f°88 r°11]. « Item G. Burdi, Johanni Bosqui, qui fuerunt ad reparando agasserium juxta portam Baffe et guacillum portam Strate dicto
G. quod fusterius 4 s., dicto Johanni 3 s. 4 d. summa. 7 s. 4 d. ».
1731
Ibid., [f°113 v°3]. « ... Johanni Maurini pro quatuor diebus [...] ad discoperiendum peyreriam Beati Jacobi, cuilibet pro die 4 s. tur. summa.
10 l.8 s. tur. ».
1732
Ibid., [f°94 v°1]. « Item predictis Ramundo Johannis, Johanni Maurini qui per tres dies quilibet stetit in operando dictum pilarum cuilibet et
clauserunt luzas parietis retro Petrum Constantini et retro G. Raynardi cuilibet pro die 8 s. summa. 2 l.8 s. tur. ».
1733
À Toulouse pourtant, les tortissayres exercent un métier assez rare, et sont la plupart du temps assez démunis : en effet, en 1398, d’après le registre
de la taille, sur 180 personnes imposées, il y a seulement quatre tortissayres, dont trois 3 sont déclarés « nichils » et un est imposé dans la tranche de
6 à 19 livres tournois (Wolff 1956, 113). En 1405, ce sont « six tortissayres qui apparaissent sur le registre de la taille de 1405 : tous humbles nichils »
(Wolff 1954, 280, note 93).
1734
Rigaudière 1982, t. 2, 716, tableau 39.

191
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

d’« ouvrier » (ou de « manœuvre ») devrait souvent être En outre, lors de trois opérations distinctes, d’autres
considérée par rapport à la nature de la tâche réalisée par hommes perçoivent une somme de 4 s. tournois par jour,
une personne dans le cadre d’une activité bien précise, et c’est-à-dire un salaire équivalent à celui des
non retenue en raison de la véritable qualification de l’in- « tortissayres » (supra). Si pour Raymond Jacques et
dividu en question. Raymond Tocarel on peut arguer du fait qu’ils « enterrent »
Généralement, la grande majorité des rémunérations la structure en plus du « tortissage »1740, pourquoi les autres
quotidiennes de ces personnes est de 3 s. tournois, somme individus, dont le travail consiste seulement à « tortissar »
relativement élevée si on la rapproche de celle des bénéficient-ils également d’un régime plus favorable que
manœuvres travaillant aux fossés la même année (2 s. 6 d.
les 3 s. tournois par jour1741 ?
tournois ; fig. 55)1735. Cependant, ceux chargés de l’évacua-
tion de la terre, même s’il ne s’agit que d’enfants, peuvent Si l’on peut penser que la durée de leur engagement
se voir attribuer une somme équivalente1736. aurait pu leur valoir un traitement de faveur1742, l’explica-
Par rapport aux brassiers transportant des pierres, le tion la plus rationnelle tiendrait simplement à la variation
personnel affecté au torchis se situe dans une position saisonnière des salaires : la dernière dépense date du
intermédiaire : si certains perçoivent une très faible rému- 11 septembre1743 mais une autre, du 26 novembre, montre
nération journalière (8 d. tournois ; manœuvres ?)1737, que les personnes ne sont payées que 3 s. tournois, la
d’autres en revanche reçoivent un salaire assez confortable journée de travail automnale étant plus courte1744.
de 3 s. 4 d.1738 (multiplié par cinq ; ouvriers-maçons ?).
Au final, les travailleurs du torchis sont des individus
Dans le cadre du torchis, certains individus, transpa- relativement bien payés : ils s’agirait ainsi d’« ouvriers-
raissant généralement comme des exécutants, gagnent, lors
tortisseurs » et non de simples manœuvres, eu égard à leur
d’autres opérations, une rémunération supérieure. Ainsi,
neuf personnes touchent 4 d. tournois supplémentaires par rémunération1745. En effet cette opération devait requérir
jour par rapport au salaire moyen de 3 s. : elles travaillent des notions minimales de savoir-faire à lier à la nature
dans le cadre d’un prix-fait accordé à Raymond Sarrasin, même du matériau, le bart, dont les propriétés devaient
auquel cas ce dernier n’avait visiblement pas la charge de s’altérer s’il était employé dans des conditions ou selon une
les salarier en l’espèce1739. méthode inappropriées.

1735
Par exemple : AD Aude, 4E76/CC48, 1362. [f°128 r°2]. « Item Ramundo Martini, Bernardo de Rosseriis, Petro Messerii, Bernardo Cauciderias,
Petro Ramundo Calveti, Vitali la Caza, Petro Calveria, Ramundo Blanquerii culibet pro die presenti qui fuerunt in dicits vallis 2 s. 6 d. summa. 20 s.
tur. ». Par ailleurs, à Saint-Flour, « le manœuvre-homme gagne à peine plus du quart (1 s. 2 d. à 1 s. 4 d. tournois) du salaire versé au maître maçon et
un peu plus du tiers de celui que perçoivent les ouvriers maçons » (Rigaudière 1982, t. 2, 722). Cette dépense chaurienne est datée du 12 février, période
de l’année durant laquelle les journées sont plus courtes, et les travailleurs moins rémunérés.
1736
AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°91 r°2]. « Item Petro Michaelis, Geraldo Carerie, Johanni de Montilh pueris qui fuerunt ad careiandum terram de
vallis juxta Got Feran cuilibet 3 s. summa. 9 s. ».
1737
Ibid., [f°88 r°3]. « Item R. de Crosilha, R. de Maloburgueto, Vitali de Cuelha qui die dominica laboraverant in claudendo portam de Guot Ferran
portando petram et alia necessaria cuilibet 8 d. : 2 s. ».
1738
Ibid., [f°88 r°6]. « Item G. Cuinengesio, P. Maurandi, Stephano de Lauserta, Johanni de Bauro qui fuerunt per una diem ad portandum petram ad
claudendum portam Mercadalis cuilibet 3 s. 4 d. : 13 s. 4 d. ».
1739
Ibid., [f°126 v°10]. « Item cum Bernardus Cardona, G. Cardona, G. Bigordani, Petrus Bertrandi, Petrus Lamberti, G. Spelici, Faber Bordas,
Ramundus Tocarelli, G. Johannis die presenti fuissent conducti ad tortissandum embanna retro magistrum Bernardum Servici et ipsa die date fuerunt
pretio facto Ramundo Saraceni ad tortissandum et essent conducti quilibet 3 s. 4 d. et post ipsa die operassent in dictas vallis habuerunt quilibet septem
primorum nominatorum 2 s. 8 d. et dicti tres ultimi quilibet 4 s. tur. summa. 30 s. 4 d. ».
1740
Ibid., [f°93 v°9]. « Item Ramundo Tocarelli, Ramundo Jacobi qui die presenti fuerunt ad tortissandum, interandum gacillum juxta palem prope
portam Beati Antonii cuilibet 4 s. tur. summa. 8 s. ».
1741
Ibid., 1361-1362, [f°94 r°8]. « Item Guillermo Lobinhat, Ramundo Mondebonis, Johanni Comitis, Johanni Auriolli, Arnaudo de Ponte, qui die
presenti fuerunt ad tortisandum guacillum retro castrum cuilibet 4 s. summa. 20 s. » ; [f°95 v°7]. « Item Stephano Baravum, Ramundo Gonterii,
Stephano Ramnos qui presenti die fuerunt ad tortisandum dictam portam quia magistri cuilibet 4 s. tur. summa. 12 s. tur. ». On remarquera l’expres-
sion « quia magistri » dont on ne comprend pas le sens. Ces hommes sont-ils qualifiés de « maîtres » ?
1742
À Sens, en effet, dans la seconde moitié du XVe siècle, « les différences de salaires journaliers entre les manœuvres semblent tenir essentiellement
à la durée de leur engagement. Les manœuvres touchant plus de 2 s. travaillèrent pour les Célestins plus de dix jours, alors que ceux qui touchent moins
de 2 s. ne figurent dans les comptes que pour trois journées… » (Cailleaux 1985, 152).
1743
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, « Die XI septembris », [f°94 r°8].
1744
Ibid., « Die XXVI novembris », [f°117 r°2]. « Item G. Speliti... [...], Jacobo Madrerias, qui diebus jovis et veneris fuerunt in dicto opere ad torti-
sandum cuilibet pro die 3 s. tur. summa. 2 l.8 s. tur. ». En effet, « s’agissant des variations saisonnières, elles apparaissent de mars à septembre mais sont
plus sensibles encore pour la période d’hiver lorsque les données -trop rares malheureusement- existent pour ces mois-là. Cette baisse des salaires, très
sensible à partir d’octobre, et surtout de novembre, frappe toutes les catégories de manière assez uniforme. Rien d’étonnant à cela. Les journées de travail,
alors plus courtes, sont moins payées. […] Les salaires des manœuvres au contraire, surtout des hommes, sont beaucoup plus sensibles aux fluctuations
saisonnières. D’après les indications relevées, la hausse intervient très tôt, dès le mois de juin souvent, quelquefois en mai, c’est le cas en 1404 et 1429
par exemple. Puis, cette hausse des mois de la belle saison est aussi suivie, comme pour les salaires des ouvriers, d’une baisse à l’automne, mais elle est
souvent plus tardive dans la mesure où elle n’intervient la plupart du temps que dans le courant du mois de novembre et, parfois même, seulement en
décembre » (Rigaudière 1982, t. 2, 723). À Toulouse également, Ph. Wolff constate qu’« un trait non moins frappant est la variation saisonnière des
salaires. Très régulièrement, ils sont plus élevés en été qu’en hiver […] Ces variations sont un peu moins fortes pour les salaires féminins, sans doute
parce que ces salaires, fixés au plus bas, avaient par là-même moins d’« élasticité ». Elles peuvent s’expliquer par la plus grande durée de la journée de
travail en été, mais aussi par l’influence des moissons et vendanges, qui rendaient alors la main d’œuvre plus rare » (Wolff 1954, 441).
1745
À Saint-Flour, les ouvriers maçons touchent des rémunérations à peu près équivalentes. Ainsi, en 1376, ils gagnent entre 3 s. 4 d. et 4 s. tournois
entre juin et septembre, mais en 1380 leur salaire descend à 2 s. 6 d. entre octobre et décembre (Rigaudière 1982, t. 2, 716, tableau n° 40).

192
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Document Date NOM, prénom Qualification Localisation du Durée Salaire individuel


certaine travail journalier
ou supposée ( ?)
ESPANAL
AD Aude, 4E76/CC48 25 avril Pierre
[f°49 r°1] 1360 BERTRAND amban du château du un jour 2 s. tol.
Pierre bas
Ibid., [f°67 r°2] 1360-1361 MALAMOSTA pal de l’angle sous la ? ?
G. porte Saint-Antoine
Ibid., [f°88 v°2] 1361-1362 SAVAL pal du château un jour 3 s. tur.
G. (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 GAUSI pal du château un jour 3 s. tur.
Johan (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 AUGIER charpentier ? pal du château un jour 3 s. tur.
Guillaume (magister) (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 GONTIER pal du château un jour 3 s. tur.
Raymond (1,5 s. tol.)
Ibid., [f°93 v°9] 1361-1362 JACQUES gaytil près du pal de un jour 4 s. tur.
Raymond la porte Saint- (2 s. tol.)
Antoine
Ibid., [f°94 r°8] 1361-1362 MONTDEBO gaytil derrière le un jour 4 s. tur.
Ramon château (2 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 LOBINHAT G. gaytil derrière le un jour 4 s. tur.
château (2 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 COMPTE gaytil derrière le un jour 4 s. tur.
Johan château (2 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 DUPONT gaytil derrière le un jour 4 s. tur.
Arnaud château (2 s. tol.)
Ibid., 1361-1362 AURIOL gaytil derrière le un jour 4 s. tur.
Johan château (2 s. tol.)
Ibid., [f°95 v°6] 1361-1362 GUILHEM porte du Terrier un jour 3 s. tur.
P. (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 ESTENE porte du Terrier un jour 3 s. tur.
P. (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 GASTANT porte du Terrier un jour 3 s. tur.
Johan (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 RENNEG porte du Terrier un jour 3 s. tur.
Arnaud (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 GONTIER porte du Terrier un jour 3 s. tur.
Pierre (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 BORNIANERHI porte du Terrier un jour 3 s. tur.
Bertrand (1,5 s. tol.)
Ibid., [f°95 v°7] 1361-1362 BARRAU porte du Terrier un jour 4 s. tur.
Stéphane (2 s. tol.)
Ibid., [f°95 v°8] 1361-1362 JULIEN porte du Terrier un jour 3 s. tur.
Bartholomé (1,5 s. tol.)
/Raymond
Ibid., [f°116 v°8] 1361-1362 MADRERIAS embans de la paret un jour 3 s. tur.
Jacques derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 BELLEGARDE embans de la paret un jour 3 s. tur.
G. derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 AYBRAND embans de la paret un jour 3 s. tur.
Raymond derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361 DENAT paredier ? embans de la paret un jour 3 s. tur.
Arnaud derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361 DE BEARN paredier ? embans de la paret un jour 3 s. tur.
Guillaume derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361 ESPELIT, SPELIT paredier/valadié embans de la paret un jour 3 s. tur.
G. ? derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 ANHANT paredier ? embans de la paret un jour 3 s. tur.
Bernard derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid., [f°117 r°2] 1361-1362 DUPUY maçon-carrier embans de la paret un jour 3 s. tur.
Favre (peyrerius) derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid. 1361-1362 Un Béarnais embans de la paret un jour 3 s. tur.
derrière chez G. Olric (1,5 s. tol.)
Ibid.,[f°126 v°10] 1361-1362 BORDES embans derrière chez un jour 3 s. 4 d. tur
Favre Bernard Service
Ibid. 1361 LAMBERT tortissayre ? embans derrière chez un jour 3 s. 4 d. tur
Pierre Bernard Service

Ibid. 1361-1362 CARDONA embans derrière chez un jour 3 s. 4 d. tur


Bernard et G Bernard Service
Ibid. 1361 LE BIGOURDIN paredier ? embans derrière chez un jour 3 s. 4 d. tur
G. Bernard Service

Fig. 55 : Castelnaudary, (1359-1362) : les aides pour le torchis. Qualifications et rémunérations.

193
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

10.3.3 - Pour le personnel de l’« enterrement » Quelques temps plus tard, Raymond Dandant et
Les informations dont on dispose sur les dix-huit B. Gras reçoivent 3 s. 10 d. tournois, mais pour une action
personnes dénommées (plus trois femmes anonymes) qui, en plus de « l’enterrement », consiste à couvrir un
participant à ces opérations en 1359-1362 sont, de loin, les cadafalc (d’où une hausse d’1 s. 4 d. tournois par rapport
plus minces de toutes. En outre, les rétributions accordées, à la rémunération « moyenne » d’un ouvrier ou d’un
correspondant toutes à une journée de travail, sont, dans manœuvre1752). La même observation peut être faite pour
quatre cas sur six, versées de manière concomitante pour les dépenses suivantes, datées de 1361-1362, où chaque
une autre opération, si bien qu’il est impossible de homme est rémunéré 4 s. tournois pour une opération
connaître le coût réel de la seule tâche d’enterrement. d’enterrement systématiquement associée à une autre
(torchis ou travail sur la charpente)1753.
Néanmoins, si l’on considère la première dépense
Il faut donc aller chercher des informations supplé-
(fig. 56), où trois personnes ont travaillé à la porte de la
mentaires dans le compte de 1363-1364 qui consigne,
Baffe en 1359-13601746, la somme individuelle déductible
de la dépense globale (8 s. tournois pour trois personnes, contrairement au précédent, de nombreuses dépenses
soit environ 2 s. 6 d. tournois) se situe dans la moyenne de isolées relatives à l’enterrement : ainsi, aux environs du
celles attribuées aux manœuvres-hommes à 29 mai 1363, deux hommes perçoivent 20 d. toulzas
Castelnaudary1747. Elle est également pratiquement compa- chacun pour enterrer les coursières derrière les Frères
rable à la rémunération haute d’un manœuvre-maçon Mineurs1754, mais quelques temps plus tard, trois indi-
homme à Saint-Flour en 1376 (2 s. 8 d. tournois)1748 et iden- vidus, qui recouvrent de terre le plancher de la tour de
tique à celle d’un ouvrier-maçon de cette même ville1749. l’Estrade, ne touchent chacun que 18 d. toulzas1755. Il
s’agit là d’ailleurs la rémunération moyenne la plus
L’année suivante par contre, l’enterrement de deux
fréquente versée aux hommes dans ce type d’opération1756.
cadafalcs par Jacques Madrerias et Jean Carrière est
Les femmes, quant à elles, sont payées un tiers de mois
rétribué moins d’1 s. tournois par personne (11,25 d.) : ils
(12 d. toulzas)1757.
agissent probablement ici comme simples manœuvres1750,
puisque ce chiffre est comparable au salaire qu’un Ainsi, cette opération d’enterrement est assez mal
manœuvre-maçon homme peut toucher à Saint-Flour en rémunérée, car celle exigeait assez peu de technicité et de
13891751. Toutefois, le laconisme des registres chauriens savoir-faire.
empêche de connaître les raisons de cette forte disparité Les individus (hommes ou femmes) sont ainsi salariés
salariale. au coup par coup (une journée en moyenne), au gré des

1746
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 v°3]. « …Ramundo Yterii, Ramundo Amelii et Bernardo eius fratri qui interavunt soleria dicte turis.
8 s. tur. ».
1747
Par exemple, pour un manœuvre travaillant avec les maçons 2 s. tournois : Ibid., [f°15 v°5]. « …Benedicto Bastonis pro uno jornali quo fuit manobra
cum peyreriis in operibus clausurarum. 2 s. tur. » ; ou 2 s. 4 d. tournois : Ibid., [f°16 v°8]. « …Petro Guillelmi, Samsoni Servati, G. de Alba Rocha,
G. Helie, Bernardo de Lenpis, Arnaudo de Sonpoy, G. de Alginam, Johanni Raynes, Petro de Alverniam pro uno die quo fuerunt manobrerii cum
Johanne Gualigonis in muro portus Bordarum cuilibet 2 s. 4 d. tur. facit. 21 s. tur. ».
1748
Rigaudière 1982, t. 2, 717, tableau n° 41.
1749
Ibid., 716, tabeau n° 40.
1750
Pour J. Gimpel, « le milieu de recrutement des manœuvres doit être recherché dans la classe des déracinés. Ces déracinés étaient souvent des serfs
qui fuyaient leurs seigneurs et venaient chercher refuge dans les villes éloignées de leurs terres natales. On sait que, s’ils n’étaient pas réclamés par
leurs maîtres au bout d’un an et d’un jour, ils devenaient libres et citoyens de la ville. Les manœuvres se recrutaient aussi, probablement, chez les fils
de paysans, enfants de familles nombreuses qui partaient à la ville chercher l’aventure et la liberté. Les uns et les autres pouvaient se faire embaucher
immédiatement sur un des nombreux chantiers de la ville. La main d’œuvre des chantiers a été une main d’œuvre libre » (Gimpel 1980, 49). Le travail
des manœuvres est en effet très irrégulier, car sollicités au cas par cas selon les besoins et la saison : ainsi, pour l’abbaye de Westminster en 1253, le
nombre de manœuvres recrutés par semaine peut varier entre 30 et 220 (Ibid., 56). Concernant ces personnes, il « est possible d’observer que la propor-
tion des mentions (de noms de métiers ndlr) est de plus en plus faible au fur et à mesure que l’on descend sur l’échelle des fortunes, et qu’elle baisse
surtout pour les nichils. Aucun doute : si tant de pauvres diables n’apparaissent pas pourvus d’un métier bien défini, c’est qu’ils n’en exerçaient aucun.
Manœuvres n’ayant jamais suivi d’apprentissage régulier, ils vivaient de tâches de force qui leur étaient proposées en nombre variable selon les saisons :
travaux agricoles, transport de matériaux… Ainsi l’incertitude où nous sommes laissés doit souvent correspondre à la réalité » (Wolff 1978a, 276).
1751
Rigaudière 1982, t. 2, 717, tableau n° 41.
1752
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°80 r°6]. « …pro interrando et coperiendo cadafalcum de retro alam fuerunt conducti B. Grassi, Ramundus
Dandant. 7 s. 8 d. tur. ».
1753
Ibid., 1361-1362, [f°93 v°9]. « Item Ramundo Tocarelli, Ramundo Jacobi qui die presenti fuerunt ad tortissandum, interandum gacillum juxta
palem prope portam Beati Antonii cuilibet 4 s. tur. summa. 8 s. tur. » ; [f°109 r°8]. « Item Stephano Ramnos [...] qui die XV febroarii fuerunt ad
ponendum plansonem supra parietes et interrandum cuilibet pro suo jornali 4 s. summa. 28 s. tur. ».
1754
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°25 v°9]. « ...Johanni Fabri et Petro Danini qui steterunt ad enterrandum corserias retro Fratrum Minorum cuilibet
eorum 20 d. tol. 3 sol. 4 d. ».
1755
Ibid., [°26 r°3]. « ...Petro Ramundi Calveti, Petro Messerii, Ramundo Blanquerii qui steterunt ad enterrandum solerium turrim de la Strada cuilibet
eorum 18 d. tol. 4 sol. 6 d. ».
1756
Par exemple : Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°26 v°1], [f°33 v°1], [f°35 r°6].
1757
Ibid., [f°53 r°1]. « …Amade uxor Ramundi de Calhavilla, uxor Guillelmi Seramigana et uxor Johannis Tarreti quibus steterunt etiam ad enter-
randum dictas corserias cuilibet eorum 12 d. tol. 3 sol. » ; [f°60 v°3]. Cette disparité salariale entre les deux sexes est généralisée, et varie quelque-
fois du simple au double, comme par exemple pour des hottiers amiénois (Baudoux-Jung 1998, 190, note 41). En Bresse et Bugey, « la journée de
manœuvre est payée douze deniers pour un homme, six deniers seulement pour une femme, un enfant ne gagnant que trois deniers » (Kersuzan 2005,
313). Pour Saint-Flour, en 1383, les femmes-manœuvres « sont beaucoup moins bien traitées. Avec 8 d. tournois par jour, elles reçoivent un peu plus
de la moitié de la rémunération de leurs collègues hommes, mais ne touchent même pas le cinquième du salaire journalier du maître maçon et moins
du quart de la rétribution perçue par un simple ouvrier » (Rigaudière 1982, t. 2, 722).

194
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Document Date NOM, prénom Qualification Localisation Durée Salaire


certaine du travail individuel
ou supposée ( ?) journalier

AD Aude, 1359-1360 YTIER Raymond ? 2 s. 6 d. tur.


4E76/CC48, Plancher de
[f°11 v°3] AMIEL Raymond la tour de la 2 s. 6 d. tur.
porte de la
AMIEL Bernard Baffe 2 s. 6 d. tur.
(frère du prcdt.)

Ibid., [f°74 v°5] 1360-1361 MADRERIAS Cadafalc un jour 11,25 d. tur.


Jacques derrière la
maison de G.
CARRIERE Olric 11,25 d. tur.
Jean Cadafalc au
dessus de la
maison de B.
Olive
Ibid., [f°80 r°6] 1360-1361 DANDANT Enterrer et un jour 3 s. 10 d. tur.
Raymond couvrir un
cadafalc
GRAS B. retro ala 3 s. 10 d. tur.
Ibid., [f°80 r°5] 1360-1361 DENNIER Pons Enterrer un un jour 2 s. tol.
cadafalc
BORDES Favre derrière la 2 s. tol.
maison de B.
Trois femmes Ricard 1 s. tol
Total : 13 s. 5 d.
tur.
Ibid., [f°93 v°9] 1361-1362 TOCAREL tortissayre ? Gaytil près un jour 4 s. tur.
Raymond de la porte
Saint-
JACQUES paredier Antoine 4 s. tur.
Raymond charpentier/fusterius (torchis +
interrar)
Ibid., [f°109 r°8] Ibid., BLANQUIER 4 s. tur.
Raymond
Ibid. Ibid., JEAN 4 s. tur.
Pierre
Ibid. Ibid., GUILHEM 4 s. tur.
G. Charpente et Un jour
Ibid. Ibid., DE RASTOS intererrar 4 s. tur.
G.
Ibid. Ibid., DE MORAT 4 s. tur.
Arnaud
Ibid. Ibid., DE ARTIGUE charpentier 4 s. tur.
Raymond /fusterius ?
Ibid. Ibid., RANNO tortissayre ? ouvrier 4 s. tur.
Stéphane spécialisé ?
manœuvre ?
Fig. 56 : Castelnaudary, (1359-1362) : les aides pour l’« enterrement ». Qualifications et rémunérations.

195
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

besoins, et il est très rare, voire exceptionnel, que l’on Par ailleurs, pour quelles raisons, à de rares reprises, la
rencontre des prix-faits pour cette seule activité1758. ville préfère retenir une location à la journée plutôt qu’un
prix-fait ? Veut-elle utiliser ce dernier système en raison de
sa souplesse et parceque les travaux à réaliser sont
Ainsi, au final, les données fournies par les documents moindres, ou au contraire plus étendus1759 ? Faut-il voir
sur les systèmes d’embauche et les salaires sont très dans le choix du contrat à tâche, comme à Amiens, un
inégales selon les villes et les catégories de personnes. « élément de la politique municipale » 1760?
Néanmoins, au vu des données recueillies, quelques D’un point de vue strictement salarial, si les parediers
constatations s’imposent. sont les mieux rémunérés, les salaires versés aux ouvriers
D’un point de vue contractuel, les prix-faits concernant et/ou aux manœuvres connaissent de grandes disparités :
la terre massive montrent que le maître d’ouvrage souhaite elles sont parfois liées à la nature de l’opération mais aussi
systématiquement s’entourer de solides garanties afin que à d’obscures modalités, puisque pour une tâche transpa-
la tâche puisse être menée à son terme sans mauvaises raissant dans les comptes comme similaire, deux individus
surprises. Cela se comprend aisément dans la mesure où peuvent percevoir une rétribution différente.
ces constructions forment le cœur du système de défense, Globalement, les personnes employées au torchis se
et devaient être édifiées selon des procédés éprouvés et situent dans une tranche de rémunération relativement
dans les délais prévus, sous peine de voir l’agglomération haute (« ouvriers-tortisseurs » et non simples manœuvres).
en danger face à l’ennemi. Cependant, la différence entre ces deux catégories n’est pas
Les clauses relatives aux prix-faits pour le torchis toujours très nette, et ne peut s’apprécier qu’au cas par cas,
étaient peut-être d’une nature similaire, mais le silence des grâce à l’étude des salaires individuels, à l’heure actuelle la
textes empêche de l’affirmer. Ce dernier est probablement méthode la plus sûre pour réaliser cette distinction. Cette
dû au fait que ces opérations étaient souvent comprises observation vaut d’ailleurs également pour les personnes
dans des travaux de plus grande ampleur (prix-fait pour préposées aux travaux d’enterrement.
l’édification d’une paret par exemple) et donc pratique- Les deux principaux modes d’embauche (prix-fait et
ment jamais détaillées à part. régie directe) sont ceux rencontrés dans les autres villes du

1758
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°96 v°5]. « Item G. Burdi qui pretio facto interaverat guacillum retro Canonicos et tortisaverat fenestras ad
relacionem Johannis Fabri. 6 s. tur. » ; [f°97 v°9]. « Item dicto Guillermo qui pretio facto interraverat solerium porte de Got Feran ad relacionem
Johannis Martini. 6 s. tur. ». Ailleurs, comme en Bresse et Bugey, « il existe pourtant des travaux précis géographiquement bien définis dans le château
comme l’étalage de la terre sur les toitures et sur les planchers ou le nettoyage des chantiers ou le curage des écuries qui sont adjugés à la tâche, aux
plus offrants des manœuvres, qui, pour le coup, ne travaillent pas aux ordres d’un artisan, mais seuls sous la responsabilité directe du châtelain. Ces
manœuvres effectuent ainsi plusieurs tâches, dont les coûts sont groupés dans les comptes, ce qui ne permet pas d’évaluer précisément le prix d’un
travail particulier » (Kersuzan 2005, 313).
1759
Pour Amiens, il est « difficile de cerner les raisons des choix municipaux entre le contrat à la tâche et le contrat à la journée. En 1388-1389, les deux
tours qui encadrent la porte de Montrescu sont reconstruites, l’une par Hue Poullette par marché à tasque, l’autre par Pierre Grisleu et Jehan Wicart à
la journée. L’une nécessite-t-elle plus de travaux que l’autre en raison de reconstructions plus importantes ? Le marché n’a-t-il pu être négocié au prix
voulu par la ville ? Le 13 février 1408, l’échevinage d’Amiens se réunit : pour ce que en cest an il est necessaire d’ouvrer au beffroy d’Amiens, lequel
ouvrage est moult dangereux et sumptueux, deliberé a esté que, afin qu’il soit mieux et plus deuement fait, il y sera ouvre a journee et non en tasque.
Il est possible que les plus gros travaux aient été réalisés à la journée, mais les exceptions sont nombreuses. Il n’y aurait donc pas de règlement strict
à ce sujet » (Baudoux-Jung 1998, 184). D’autres exemples montrent qu’à Lille « lorsque l’ouvrage est important et bien défini ils [les élus] établissent
un devis puis l’adjugent aux enchères publiques […] Pour les multiples besognes routinières, ils embauchent des salariés payés à la journée ou à la
semaine ». Ainsi, dans cette ville, il semble que « le travail à la tâche va plus vite tout en coûtant moins cher mais risque d’être moins bien fait ; la
rémunération à la journée constitue alors l’écrasante majorité des rétributions » (Ibid., 184, 185, note 20).
1760
L’auteur suggère que pour cette ville, c’est l’accroissement très sensible des travaux de fortifications, et donc du coût de tels ouvrages, conjugué à
une nécessité vitale de les réaliser au plus vite en raison de la guerre, qui aurait orienté la politique consulaire de la ville vers les marchés à tâche, plus
rapides à mettre en œuvre et moins coûteux (Ibid., 192).
1761
En effet, la hiérarchie des maîtres d’ouvrage et des maîtres d’œuvre connaît bien souvent des « subdivisions » : « mais plus largement, il semble
bien que très tôt, dans le cas des souverains et des grands seigneurs importants propriétaires fonciers, cette organisation classique avec maîtres des
œuvres et payeurs (ceux-ci pouvant être remplacés par la Chambre des comptes, un organisme classique dans toutes les grandes seigneuries au moins
à partir de la seconde moitié du XIVe siècle) n’ait pas été suffisante. Il est nécessaire dans des cas de ce genre de déléguer une partie des attributions
du souverain ou du grand seigneur à un spécialiste qui est chargé de la collecte, du moins de la gestion des fonds et de la surveillance du ou des
chantiers. On voit ainsi apparaître une subdivision dans la maîtrise d’ouvrage entre le décideur et celui qui lui sert d’intermédiaire auprès des maîtres
des œuvres, eux-mêmes souvent représentés sur le chantier par des maîtres chargés du suivi quotidien des travaux » (Chapelot 2001a, 29). Pour
Castelnaudary, une seule mention de 1391, déjà citée, indique la présence d’un maître des œuvres, mais on ne peut clairement savoir s’il s’agit de celui
de la sénéchaussée ou de celui de la ville. Par ailleurs, compte tenu de la présence de tous les charpentiers, ces derniers agissaient vraisemblablement
en tant que maîtres des œuvres, soit pour le compte de la ville, soit pour celui du roi, puisque les travaux vont s’effectuer au château, qui rappelons-le,
est du ressort du monarque (AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°61 r°10]. « Item a XIII de jun mossenhor le senescalc venc dinnar a Castelnou en estet
per tot le jorn al castel am le mestre de las hobras am totz les fustiers e am mastre Arn. Lo Senheyre per hordonar et coumpasar las cauzas que y
fazian mestiers al dit castel… »). L’absence de maçons dans cette affaire s’explique-t-elle parce que « jusqu’à la fin du XIVe siècle, en raison de l’in-
suffisance du volume des travaux de maçonnerie, des villes durent juger inutile de pensionner à plein temps un maître maçon et préférable de traiter
avec lui, en cas de besoin, selon la procédure des marchés. En 1400-1401, le maître maçon de la ville de Cambrai, Jehan Boutry, ne reçut que 12 livres
tournois au lieu des 20 livres tournois prévues, pour « ce que en ycelle (ville) on a peu ouvré de machonnerie » (Salamagne 2001b, 226). Pourtant, à
Troyes, à la fin du Moyen-Âge, les maçons ont la prééminence sur les charpentiers : ces derniers « sont en fait présents aux visites d’inspection de
chantier au cours desquelles ils donnent leur avis au même titre que les maçons ou les fondeurs. Mais leur rôle et leurs implications sont moins évidents
et leur travail paraît subordonné aux directives du conducteur de l’ouvrage, du maître maçon qui, lui, impose les formes architecturales. Aussi, quand
l’édifice est achevé, il ne reste rien de visible des opérations que ces charpentiers ont menées pendant le déroulement des travaux » (Collet 2001, 250).

196
LES HOMMES DE LA TERRE : LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
QUALIFICATIONS, ORIGINES, CONTRATS, SALAIRES DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

royaume de France à la même époque. Le premier (ou les) maître(s) d’ouvrage(s)1763 et les maîtres d’œuvre1764,
implique généralement que l’artisan agit comme maître les informations dont on dispose sont trop fragmentaires
d’œuvre de la construction dont il a la responsabilité, mais pour pouvoir clairement distinguer, notamment pour les
en l’absence d’une connaissance plus précise sur la chaîne opérations relatives à la terre crue, les champs d’interven-
de décision et d’exécution du travail pour les aggloméra- tion respectifs de ces deux catégories de décideurs1765. De
tions étudiées1761, on se gardera de l’affirmer de manière fait, on ne sait pas non plus si les différents maîtres
systématique1762. Pour Castelnaudary, même si l’étude du d’œuvre apparaissant dans les sources consultées ont une
premier compte a tenté de dégager des pistes de réflexion renommée régionale ou inter-régionale1766.
concernant la hiérarchie et la répartition des tâches entre le

1762
Et ce bien que l’on sache que certains maîtres peuvent en effet être des maîtres d’œuvre, même si les textes ne les désignent pas comme tels :
« certains maîtres d’œuvre ne sont pas expressément nommés comme tels, mais l’examen de la comptabilité permet de les identifier, par exemple à
Pont-d’Ain en 1336-1338, il est fait appel à Jean Amédée, maçon (lathomo) pour faire la tour appelée « la tour du châtelain » à la tâche. Dans le même
compte, Jean Amédée fait trois escaliers de pierre, des portes, des fenêtres, des murs de refend, des latrines et toutes les autres petites choses néces-
saires dans la grande tour, relevant du métier de maçon (officium lathomii). Dans le compte précédent (1335-1336), Jean Amédée était déjà très actif :
il construit un four à chaux, édifie des murs et des tours, appareille des fenêtres dans la grande salle. Il fait aussi partie de la mission d’évaluation. En
1342, il construit la chapelle du château de Pot-d’Ain, et y réalise notamment trois arcs. Il agit donc en tant que véritable maître d’œuvre bien qu’il ne
soit jamais qualifié de cette fonction » (Poisson 2001, 169).
1763
Les représentants du roi ont pu directement agir comme tels pour la fortification de la ville, mais comme l’a relevé P.-Y. Le Pogam, leur domaine
d’intervention, assez restreint au sud de la Loire, a pu quelquefois limiter cette possibilité : « au nord de celle-ci (la Loire, ndlr.), on peut multiplier les
exemples d’intervention des officiers royaux tant dans le domaine des bâtiments à caractère économique (marchés, halles, moulins, même s’ils n’ap-
partiennent pas au domaine du roi), ainsi que dans celui des grands travaux (routes, ponts, canaux, assèchement des marais, création de ports, etc.). Au
sud, les exemples en sont rarissimes, puisque ce rôle y était traditionnellement assumé par les communautés urbaines. L’action de la royauté s’arrête
là où commencent les limites des traditions urbaines méridionales » (Le Pogam 2001, 274, 275).
1764
Ces maîtres d’œuvre sont la plupart du temps des artisans qualifiés et reconnus : « au sommet de la hiérarchie, quelques professionnels émergent,
charpentiers, maçons, couvreurs, menuisiers, etc. qui se voient confier des travaux importants. Ce sont de véritables architectes : ils conçoivent et
réalisent une construction. Les comptes les nomment « maîtres des œuvres », tels Perret, maître d’œuvre à Pont d’Ain (1298-1299), Roux, charpentier,
« maître de cette œuvre » (1310-1311), maître Martin de Rippes, maître de l’œuvre du pont de Chanaz sur le Rhône (1322), maître Martin Terratia, de
Saint-Genix, terrassier maître des œuvres (1344 à 1346), ou « capitaine de travaux », comme Jean de Bourdeau (1381), Jean Mistral, pour Le Bourget
(1382) » (Poisson 2001, 169).
1765
Alain Salamagne a magistralement exposé en 2001 les attributions de ces deux personnages-clés dans la chaîne de décision des travaux publics
urbains : « dans son sens actuel, le terme maître d’ouvrage désigne la personne physique ou morale pour le compte de laquelle une mission est effec-
tuée par le maître d’œuvre ou architecte. Le maître d’ouvrage détermine le programme en fonction de ses capacités financières et en précise éventuelle-
ment le délai d’exécution : entre ces deux intervenants s’interpose l’entrepreneur qui soumissionne les marchés de travaux. Le maître d’œuvre est
chargé de mener à bien le programme, d’en fournir l’avant-projet, et par tous moyens à sa disposition, de renseigner le maître d’ouvrage sur le projet
final. Il examine les offres des entreprises, la faisabilité des solutions techniques proposées, leur fournissant les informations nécessaires (sous forme
de communication orale, de plans ou de descriptifs) à l’appréciation de la nature du projet. Il contrôle ensuite la réalisation des travaux, en vérifie
l’avancement, et la conformité par rapport aux marchés établis. Enfin, il assure leur réception en rédigeant un ou des procès-verbaux.
Dans le cadre du marché, le contrôle financier est assuré par l’architecte qui vérifie le niveau de prix et –en fonction de ses compétences ou de ses
moyens- par le maître d’ouvrage. Dans le cadre du travail en régie, le maître d’ouvrage est par contre dans l’obligation de déléguer à des responsables
la surveillance du chantier. Le terme magister operis ou operum, fréquemment rencontré dans les comptes médiévaux, peut être traduit aussi bien par
maître d’œuvre que par maître d’ouvrage. Ces deux termes désignent aussi bien l’administrateur financier des travaux que l’architecte. De même, sur
les chantiers religieux, le chanoine en charge de la fabrique est-il qualifié de magister fabricae, magister operis. On distingue cependant –ainsi à
Valenciennes- les mestres de l’ouvrage (responsable d’une œuvre particulière) du maistre machon des ouvrages (responsable des travaux urbains) »
(Salamagne 2001b, 220, 221).
Ainsi, pour Castelnaudary, on ne sait, si comme sur nombre de chantiers médiévaux, un ou plusieurs architectes (architectus, architector, architecta-
rius, voire artifex) dirigeaient l’ensemble des travaux chauriens de fortification (Aubert 1961, 7-9). Il est donc difficile de préciser si les personnes enca-
drant les opérations relatives à la construction d’une paret, à une opération de « tortissage » ou d’« enterrement », agissent comme subordonnés d’un
architecte rarement présent, c’est-à-dire comme « contremaître » ou « chef de chantier » (Ibid., 82) ou bien comme artisans travaillant à leur compte
dans le cadre d’une tâche bien déterminée.
1766
On sait « en effet que l’un des acquis de la recherche sur les maîtres d’œuvre de la fin du Moyen Âge est de montrer l’extraordinaire distance qui
semble alors exister entre les grands maîtres (cf. Raymond Du temple ou les Chambiges) et les « petits » maîtres d’œuvre. Dans ses travaux sur les
fortifications des villes des Pays-Bas méridionaux, Alain Salamagne a ainsi montré le monde qui sépare une figure d’exception comme Jean d’Oisy
(v. 1310-v. 1379, « maître des ouvrages du Hainaut », et les multiples maîtres d’œuvre cités dans les sources urbaines » (Chapelot 2001a, 20).

197
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE, P. 199-216 LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Chapitre 11

Le coût de la construction en terre crue

11.1 - Le prix des matériaux et de l’outillage temps et un savoir-faire1768, et avait donc par là-même un
coût, jamais individualisé de celui des autres matériaux,
11.1.1 - La terre et les végétaux mais intégré dans la somme globale attribuée à l’adjudica-
taire lors du paiement des prix-faits (infra).
11.1.1.1 - La terre : acquisition et préparation
Il est donc impossible, au vu des éléments dont on
Les informations concernant la nature et le transit de la
dispose, d’arriver à donner un prix à ce matériau, que ce
terre crue, depuis son lieu d’origine jusqu’à l’ouvrage à
soit pour son éventuelle acquisition ou sa préparation.
édifier (terre massive ou torchis), sont totalement absentes
des sources chauriennes. En effet, la terre était certaine- Quant au torchis, les informations sont un peu plus
ment un bien gratuit, qu’elle soit récupérée dans le fossé, détaillées, bien qu’imprécises : on sait en effet, grâce à
les champs alentours, ou sur des parets de maisons en deux mentions chauriennes de 1360 et 1367, que le bart
cours de destruction : ceci expliquerait que cette acquisi- était préparé dans une bardiera, c’est-à-dire une fosse
tion, comme celle de l’eau, ne laisse aucune trace dans les creusée à même le sol et dans laquelle les éléments (terre,
documents comptables. foin, eau) étaient pétris avec les pieds puis retournés avec
Une seule exception, déjà soulevée, peut être avancée : une fourche, comme c’est généralement le cas1769 ; dans la
aux environs du 18 juin 1391 en effet, les consuls achètent première P. de Bederes et Raymond de Lom sont rému-
à Ana Mengart une quantité indéterminée de terre prise nérés au total 6 s. 5 d. tournois, soit environ 3 s. 2 d. tour-
devant sa maison pour les banchées d’une paret, pour une nois chacun. La seconde implique six hommes qui non
somme notable de 1 l. 2 s. 8 d. parisis, dont on ne sait si elle seulement réalisent la bardiera, mais apportent en même
inclut ou non la livraison à pied d’œuvre1767. Les raisons de temps la terre pour faire le torchis : ils sont payés 12 s.
ce choix sont difficiles à comprendre : manque de matériau toulzas (soit 24 s. tournois, et donc 1 l. 4 s. tournois au
à un moment donné du chantier ? Particularité de la terre total), soit 4 s. tournois par personne (et par jour ?).
achetée pour une opération bien spécifique ? À Albi, en 1381-1382, hommes et femmes fabriquent
Cependant, il faut également envisager, et en premier du bart, puis des pomels, et enfin transportent ces derniers
lieu pour les constructions de terre massive (surtout pour la ainsi que l’eau à pied d’œuvre. À cette occasion, on rému-
bauge), que la préparation de cette même terre exigeait du nère trois journées d’homme à 17,5 d. et cinq journées de

1767
AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°33 v°8]. « …Ana Mengart guarilha per una cantitat de tera preza davant son hostal per far las taulas de la paret
desus ditas hotra aquela que las femnas desus ditas avian portada costet 12 s. 8 d. valo. 1 l. 2 s. 8 d. ».
1768
Grâce à une source du XVIe siècle pour la réfection d’une paret du château de Montréal, on sait qu’il existe une phase préparatoire à la mise en
œuvre : elle devait avoir un coût certain pour le titulaire des prix-faits, peut-être chargé de rémunérer les ouvriers préposés à ce travail, à moins de
penser que ces derniers agissaient au titre de corvées (« …les entrepreneurs « …seront tenus de faire lesdites murailles de six palms de largeur et vingt
palms de hauteur compris les fondements, les faire de bonne terre bien atrampée et pastée deux fois avec la rabassière et une fois avec l’andusat »
(Baudreu 2002, 60, 61 ; AD Aude, 3E384, [f°206 v°], [f°207]).
1769
AD Aude, 4E76/CC48, 3 juin 1360, [f°68 r°10]. « …an P. de Bederes e an Ramon de Lom que avian fayta una bardiera per tortissar le pal detras
dona Feriera 3 s. 4 d. valo. 6 s. 5 d. tor. » ; Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°15 r°13]. « …Johanni Maia et aliis quinque hominibus qui fecerunt bardieram
et portarunt terram pro faciendo dicta tortitia 12 s. th. 1 l. 4 s. tur. ».

199
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

femme à 7,5 d., soit au total 7 s. 6 d. (tournois ?)1770. Rien de Calvayrac scier le végétal, pour une somme de 3 s. tour-
n’indique le nombre des participants (un homme et une nois par personne (fig. 3)1772. Quelques temps plus tard, au
femme ?) et là encore, il est impossible d’isoler le coût réel même endroit, avec le même trio et deux hommes supplé-
de la fabrication du bart ou d’un pomel à la journée. mentaires, le paiement individuel atteint 3 s. 4 d. tournois1773.
Enfin, concernant le mortier de terre, dont on a vu l’em- En 1363-1364, cette opération est rémunérée 2. s. 6 d.
ploi marginal dans la fortification chaurienne, on se repor- toulzas, soit, pour trois hommes, un total de 7 s. 6 d. toulzas
tera aux observations de Ph. Bernardi pour Aix. Il constate (16 s. 2 d. tournois, et donc 5 s. tournois par personne)1774. Le
ainsi que le mur dont les moellons sont liés par ce procédé compte utilise par ailleurs à deux reprises le verbe
« revient trois fois moins cher que le mur à mortier de « arrancar »1775 désignant peut-être une action légèrement
plâtre » et « présente le coût le plus faible »1771 : les bâtis- différente (absence d’outils ?) mais dont la rémunération est
seurs chauriens ont-ils donc opté pour le mortier de terre identique1776.
pour des raisons d’économie, sachant que les merlons, Dans un deuxième temps intervient la collecte et le
recouverts en permanence par les hourds de l’enceinte, ne fagottage. Par exemple, le 15 octobre 1361, deux habitants
nécessitaient pas un liant dont la résistance aux intempéries de Saint-Martin-Lalande amassent pendant plusieurs jours
devait être très importante ? 112 trossas (fagots, paquets ?) de bruyère, au prix de 6 d.
toulza la trossa, l’ensemble coûtant 5 l. 12 s. tournois1777,
11.1.1.2 - Les végétaux (bruyère, foin) somme assez importante, d’autant qu’elle n’inclut pas le
Les données concernant les végétaux sont bien plus transport, comme on le verra par la suite. C’est également
précises : qu’il s’agisse de bruyère pour les parets ou de le cas en 1363-13641778, l’opération coûtant cette fois-ci 2 s.
foin pour les constructions en torchis, les comptes chau- 6 d. toulzas par personne (soit 5 s. tournois par individu),
riens (et d’autres), indiquent le coût de leur taille ou de leur et donc 7 s. 6 d toulzas1779. L’imprécision chronologique
livraison, certainement en raison du fait que les personnes empêche néanmoins de savoir si un délai s’est écoulé entre
chargées de ces opérations n’étaient pas réquisitionnées par les deux phases, autrement dit si la bruyère était laissée au
corvées, mais percevaient presque systématiquement un sol plusieurs jours pour une raison quelconque (temps de
salaire journalier. séchage ?) ou si elle était immédiatement rassemblée en
fagots ou trossas. Quatre autres mentions ont semble-t-il un
La bruyère : poussant à l’état sauvage, elle n’était
rapport avec la collecte et le chargement de la bruyère1780.
peut-être pas forcément un bien gratuit à l’acquisition : ce
végétal servait en effet de combustible pour des usages arti- Enfin, dans un dernier temps, intervient le transport :
sanaux (métallurgie notamment), et devait être à ce titre consistant à apporter la bruyère à pied d’œuvre pour la
relativement recherché. Il fallait par ailleurs le tailler, puis construction des parets, cette phase sera détaillée plus loin.
le transporter, opérations entraînant donc un coût. Les À Toulouse, en mars 1354, deux dépenses font état
parets chauriennes ont ainsi dû consommer des quantités d’achat de bruyère, mais on ne sait si elles prennent en
très importantes de cette plante dont on a vu plus haut la compte le seul végétal ou incluent également son trans-
fonction et la provenance. port : dans la première, Raymond Bastart livre
48 charges1781 qu’il apporte aux travaux des parets de Saint
L’opération de collecte se déroule en trois temps.
Etienne : au prix de 8 écus les quatre douzaines de charges,
Tout d’abord, la taille et/ou l’arrachage. Ainsi, dans une et sachant, grâce au même scribe, que l’écu vaut à l’époque
dépense du 13 septembre 1361, trois hommes partent au bois 9 s. toulzas, on en déduit le prix d’1 s. 6 d. toulzas la charge

1770
Vidal 1911, 41. [f°68 r°]. 651. « Per tres jornals de home, a 17 d. e media per home, e per 5 jornals de femna a 7 d. e media per femna, ad obs de
far lo bart e portar la ayga e far los pomels e portar aquels al dig obratge ; monta. 7 s. 6 d. ». Le total est en réalité de 7 s. 5 d.
1771
Bernardi 1998b, 60. Selon cet auteur, « le faible coût de la confection des ouvrages à mortier de terre tient, lui, probablement à l’absence de prépa-
ration du mortier et au moindre soin apporté à de tels bâtiments » (Ibid., 61).
1772
AD Aude, 4E76/CC48, 13 septembre 1361, [f°92 r°8]. « Item Pontio Lananerii, Guillelmo Arcey, Johanni Stephani, qui per unum diem fuerunt
conducti ad scindendum brugum in nemore de Calvayrac cuilibet 3 s. summa. 9 s. tur ».
1773
Ibid., 1361-1362, [f°94 r°1]. « Item Pontio Lananerii, Guillermo Arceii, Johanni Stephani, Petro Mecerii, Petro Raynardi qui die presenti fuerunt
ad talhandum brugum in nemore den Calvayrac cuilibet 3 s. 4 d. summa. 16 s. 8 d. tur. ».
1774
Ibid., 4E76/CC49, 1363-1364, [f°24 r°1]. « ...Guillelmo Canals, Petro la Comba et Germano le Porgayre qui steterunt pro talhando brocum in
nemore de Rosilhaco ad opus parietis de la Strada cuilibet eorum 2 s. 6 d. tol. valent conputato florenum auri ad 24 s. tur. 7 s. 6 d. ». Cette dépense
intervient au printemps, le 27 mai. L’importante augmentation salariale est donc peut-être due à l’allongement de la journée de travail.
1775
« Arracher, déraciner, détacher » (Alibert 1966, 116).
1776
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°61 r°3]. « …Guillelmo de Luios qui stetit ad arrancandum et scindendum brocum in nemore de Rosilhaco.
2 s. 6 d. ». Dans cette dépense en effet, ces deux opérations ont l’air distinctes ; [f°61 v°1]. « …die martis prima augusti Guillelmo de Luios, Arnaudo
de Una, Petro de Fageto et Arnaudo Botangua quibus steterunt ad arrancandum brocum in nemore de Rosilhaco cuilibet eorum 2 sol. 6 d. 10 sol. ».
1777
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°117 v°3]. « Item die quintadecima octobris Johannes Fabri dixit conduxisse Ramundo Fabri et Bernardo Fabri de
Mirapice habitatorum de Sancto Martino de Landa 112 trossas de broc de nemore domini de Palacio et quorundam aliorum pretio pro trossa 6 d. tol.
pro quibus habuerunt in universo in diversis diebus. 5 l.12 s. tur. ».
1778
Ibid., 4E76/CC49, 1363-1364, [f°22 v°4]. « ...Guillelmo Canalli, Petro de la Castelana, et Guillelmo le Porgayre qui steterunt ad colligendum et
affaysandum broc in nemore de Rosilhaco ad opus parietis de la Strada cuilibet eorum 2 sol. 6 d. tol. 7 s. 7 d. ».
1779
Et non pas 7 s. 7 d. comme indiqué dans le document.
1780
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364 [f°27 r°5]. « …Guillelmo Canals, Petro la Comba et Guillelmo le Porgayre qui steterunt ad anaucandum broci
in nemore de Rosilhaco cuilibet eorum 2 sol. 6 d. 7 sol 6 d. » ; [f°32 r°7], [f°51 r°6], [f°51 v°3].
1781
Ce qui représente tout de même environ six tonnes !

200
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

(soit 3 s. tournois)1782. Pour une quantité identique, la même jour, où l’on donne à P. Squirol, de Montferrand, une
seconde dépense coûte au final 2 écus d’or de moins, et le somme de 3 s. toulzas pour un quintal de foin, c’est-à-dire
prix du transport n’est même pas évoqué1783. Enfin, à Albi, un sou de plus que le précédent1790 ? Cette différence serait
en 1381-1382, on relève, parmi tant d’autres, un achat de peut-être due au coût du transport, ce village se situant tout
28 fays (fagots) de bruyère au prix de 5 barsalos pièce, la de même à 12,5 km de Castelnaudary…
somme totale atteignant 14 s. 7 d. tournois1784. La même interrogation peut être relevée au sujet d’une
Le foin : pour les constructions en torchis, on ne sait autre dépense où trois individus, dont un certain « senhor »
quel est le coût de la taille ou du conditionnement du foin, P. Raynart1791, livrent trois quintaux un cartayron pour le
et ce pour une raison bien simple : l’herbe était certaine- « tortissage » d’un pal : si le prix moyen du quintal attei-
ment coupée et entreposée chaque année, ne serait-ce que gnait environ 4 s. tournois, le prix de la transaction serait
pour le fourrage des bêtes, et une partie de cette « récolte » de 13 s. tournois, tarif bien inférieur au prix versé…1792. La
était vraisemblablement détournée au profit de la construc- différence est encore plus flagrante l’année suivante où le
tion, n’exigeant de ce fait pas de fauchage spécifique (d’où quintal de foin acheté au seigneur Huc d’Aurente atteint le
son absence systématique dans les comptes, chauriens ou prix record de 6 s. tournois, sans savoir si un quelconque
toulousains). La seule exception se rapporte à une opération transport peut être décompté de cette somme globale1793.
d’août 1363 durant laquelle G. Marnela est rémunéré pour
tailler l’herbe du cloître des Cordeliers, pour une somme de En 1361-1362, le prix du quintal de foin varie quelque-
12 d. toulzas (2 s. tournois) située dans la moyenne basse fois du simple au triple : de 2 s. tournois seulement quand
des rémunérations masculines journalières1785. il est acquis auprès de Pierre Constantin1794, il atteint 6 s.
tournois lorsque la marchandise est achetée à Guillaume
D’autres mentions chauriennes, assez rares, font état Dupuy1795 ou par Jean Martin1796. Les autres prix relevés la
d’achats de foin, dont la destination est systématiquement même année sont généralement de 3 s.1797 ou 5 s. tournois1798
-nous l’avons dit- la construction en torchis. Cette denrée le quintal, la moyenne étant de 4 s. tournois le quintal cette
est le plus souvent achetée par quintaux1786 : ainsi, en 1359- année-là. Enfin, en 1441, le quintal de foin coûtait à
1360, on fait acheter deux quintaux et demi de foin pour un Castelnaudary, du moins pour cette transaction, la somme
gaytil au prix de 4 s. tournois le quintal1787, mais quelques de 5 blancs, soit au total 15 gros (7,5 s. tournois ?)1799.
temps plus tard, ce dernier ne coûte plus que 3 s. 4 d. tour-
nois1788 (les consuls étaient-ils libres de donner le prix qu’ils Cependant, le quintal n’est pas la seule unité permettant
souhaitaient ?). L’année suivante, le 30 avril 1360, on de fixer le prix du foin : ce dernier est également décompté
rémunère un quintal de foin 2 s. toulzas, soit apparemment à la saumada (« charge d’une bête de somme » ; Alibert
3 s. 10 d. tournois1789, c’est-à-dire un tarif intermédiaire 1966, 627), évaluable à environ trois quintaux du poids
entre les deux précédents. Si ces variations sont peut-être commun de Toulouse (soit 127 kg), un peu plus à
dues au « cours du marché », fluctuant selon les mois, ou à Castelnaudary si l’on en croit les travaux de J.-L. Abbé1800.
une négociation entre le vendeur et l’acheteur, en l’occur- Ainsi, le 30 mai 1360, on rémunère 14 s. 5 d. tournois un
rence la ville, que penser de la dépense suivante, datée du homme de Montferrand pour une saumée de foin destinée

1782
AC Toulouse, EE32, 1354, [f°50 r°1]. « Comprem den Ramon Bastart de Cunhals 4 dotzenas de saumadas de broc quas deu aportar a las obras
a las paretz a Sant Estefe e costero 8 escud las 4 dotzenas e aisso fo fait a XXIII de marz e per aisso lo paguem quel fom bailat al cartel lo dig jorn.
6 escud d’aur. ».
1783
Ibid., [f°52 r°1]. « Comprem den P. Gaieras fornier de Sant Estefe 4 dotzenas de saumadas de broc a obs de las paretz e costera quel fom bailat
al cartel a XXVI de marz. 8 escud d’aur. ».
1784
Vidal 1911, 48, [f°80 v°]. 825. « A P. Corbieyra per 28 faysses de bruguiera ad obs de far la dicha paret a 5 barsalos lo fays monta 14 s. 7 d.…».
Le fagot reviendrait donc à 6,25 d. tournois.
1785
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°69 r°4]. « …G. Marnela pro talhando erbam claustre [dominorum canoni- rat]) ad opus atortissandum 12 d. tol.».
1786
Un quintal : env. 42 kg.
1787
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°2 v°1]. « Item pro duobus quintalibus et medio feni necessariis in dicto opere pro qualibet quintali 4 s. tur.
facit. 10 s. tur. ».
1788
Ibid., [f°23 r°7]. « Item pro uno quintali feni ad tortissandum gaycillos de Astrata. 3 s. 4 d. tur. ».
1789
Ibid., 1360-1361, [f°63 v°1]. « Item le dit dia fero pagar al dit Ar. Masip per 1 quintal de fe que avia mes a tortissar en la dita obra costet 2 s. tol.
flori a 12 s. 6 d. tol. valo flori a 12 s. 3 s. 10 d. tor. ».
1790
Ibid., [f°63 v°2]. « Item le dia XXX d’abril fero pagar an P. Squirol de Mont Feran [Auriol rat.] per 7 quintals de fe que hom avia agut de lu as obs
de las ditas obras tortisar costero 21 s. tol. flori a 12 s. 6 d. tol. valo comptat flori a 12 s. 2 l.4 d. tor. ».
1791
S’agit-il du lieutenant du juge du Lauragais qui sera mentionné quelques années plus tard (en 1366-1367) lors de l’affaire de la destruction du
couvent des Carmes ?
1792
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°68 v°3]. « …an Johan Mauri al senhor P. Raynart an P. Espanhol per 3 quintals 1 cartayro de fe que fo mes
obs de tortisar le dit pal costet 8 s. 9 d. valo. 16 s. 9 d. media tor. ».
1793
Ibid., [f°67 v°3]. « …al senhor Huc d’Aurenta per 4 quintals de fe obs de tortissar le pal detras dona Feriera 12 grossos valo. 1 l.4 s. tor. ».
1794
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°96 r°7]. « Item Petro Constantini pro duobus quintalibus feni ad opus tortitiorum. 4 s. tur. ».
1795
Ibid., [f°116 v°6]. « Item Guillermo de Podio pro una sarcinata feni empta ad opus dictorum embanorum tortisandum. 6 s. tur. ».
1796
Ibid., [f°107 r°6]. « Item Johannis Martini qui emerat medium quintale feni ad tortisandum guacillum subtus castrum a porte Baffe. 3 s. tur. ».
1797
Ibid., [f°116 v°5]. « Item Jacobo Madrerias pro duobus quintalibus feni ad tortisandum dictis embans pro quintali 3 s. summa. 6 s. tur. ».
1798
Ibid., [f°96 r°3]. « Item Durando Valincii pro duobus quintalibus feni ad opus tortitiorum. 10 s. tur. » ; [f°106 r°7]. « Item pro uno quintale [feni
rat.] feni recepto per Petrum Ferandi ad tortisandum guacillum inter castrum et porta Narbonesiam. 5 s. tur. ».
1799
AD Aude, 4E76/CC76, 1441, [f°42 v°1]. « …per 3 quintals de fe que fogon de senhor Jaques per far lo bart de la paret noba de la Boal costa lo
quintal 5 blancs per tot. 15 gros. ».
1800
Selon lui en effet, à Castelnaudary, la charge équivaut à 338 livres, soit 138,58 litres (donc, autant de kg) (Abbé 1994, 93).

201
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

au tortissage d’un pal1801. Si on prend comme base le prix en partant du postulat selon lequel celles destinées au
moyen de l’année précédente (4 s. tournois le quintal), on hourds, gaytils, et autres agassiers, ont pour fonction prin-
arriverait ainsi à un total d’environ 12 s. tournois pour cet cipale d’édifier un pan-de-bois/torchis, on peut obtenir
individu : là encore, compte tenu de son lieu de résidence, quelques données chiffrées : ainsi, en 1360-1361,
il faut supposer que les 2 s. 5 d. restants correspondent au Raymond Vidal livre 20 corondas pour un gaytil, au prix de
transport. En 1363-1364, le prix de la sarcinée, ou charge, gros d’1 l. 6 s. 3 d. tournois, soit 1 s. 9 d. tournois l’unité1807.
atteint 6 s. toulzas (environ 12 s. tournois ?), soit un prix au L’année suivante, un forestier dénommé « En Doayh » livre
quintal d’environ 4 s. tournois, ce qui est dans la 10 corondas de 14 palmes (env. 3 m ?) pour les ambans de
moyenne1802. la tour du Marché : au total 40 s. tournois, soit 4 s. tournois
la pièce (avec le transport ?)1808. Huit corondas de diffé-
Enfin, il existe un troisième mode de paiement du foin
rentes longueurs sont fournies par Saurat, un autre fores-
illustré par une seule dépense de 1363-1364 : le décompte
tier, pour une somme à peu près équivalente (42 s. tour-
au « faxum », en l’occurrence pour deux fagots de gros foin
nois)1809, sans qu’il soit possible de déduire le prix unitaire
achetés auprès de G. Hugo pour 2 d. toulzas pièce, soit 4 d.
de ces éléments ; leurs tailles étant différentes, leurs prix
toulzas au total (env. 8 d. tournois ?)1803. Ce mode de calcul
devaient l’être aussi, mais rien ne permet de savoir si cette
serait peut-être à rapprocher de la trossa, évoquée pour la
augmentation était proportionnelle, autrement dit si la
bruyère (supra), sans que l’on puisse savoir à quel poids ou
coronda de 24 palmes coûtait exactement le double de celle
à quel volume il correspond.
de 12 palmes… Par la suite, d’autres dépenses montrent
que le prix unitaire de ces bois varie entre 2 s. et 3 s. tour-
11.1.2 - Le colombage
nois, et reste donc relativement constant tout au long de
Le colombage est indispensable à la mise en œuvre des l’année1810.
élévations en torchis dont il constitue l’armature. Il se
Quant aux riostas, elles apparaissent très rarement : une
compose de trois éléments principaux (sola, coronda,
seule mention en rapport avec les hourds pourrait être asso-
riosta) et de petites baguettes-support (sparos) destinées à
ciée au colombage ; malheureusement, il s’agit d’un prix-
recevoir le torchis.
fait, et il est donc impossible de connaître le coût unitaire
La sola, est quasiment absente des registres, et les trois des quelques riostas utilisées1811.
seules mentions relevées1804 (dont une indique que la sola
Les registres chauriens sont un peu plus précis concer-
en question est destinée à un hourd) ne permettent pas de
nant le sparo. On sait qu’il sont fabriqués dans des
déterminer le prix de l’élément seul, car inclus avec celui baguettes de saule poussant dans les marécages du lieu-dit
d’autres matériaux1805. « Font Rosand », aujourd’hui Font-Rouzaud, ferme située
Les corondas sont au contraire fréquemment citées à 2,5 km au nord du centre de Castelnaudary (fig. 3) : vers
mais l’incertitude plane souvent quant à leur destination le 11 septembre 1363, quatre personnes sont payées 2 s.
réelle : on ignore souvent si elles vont servir de cadre- toulzas chacune (env. 4 s. tournois) pour nettoyer ces
support à un remplissage de torchis, et on sait par ailleurs baguettes pour les hourds1812. En 1361, d’autres sparos sont
qu’elles peuvent avoir des usages très divers1806 ; toutefois, « nettoyés » à Stagnum vivo1813 par trois hommes pour un

1801
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°67 v°1]. « …fero pagar a 1 home de Mon Feran per una saumada de fe que fo meza a tortisar le dit pal 7 s.
6 d. valo. 14 s. 5 d. tor. ».
1802
Ibid., 4E76/CC49, 1363-1364, [f°35 r°4]. « ...Petro de Cutsano pro tribus sarcinatis feni emptis per Johannem Martini ad opus tortitiorum ambana-
menti parietis castri. 18 sol. tol. ».
1803
Ibid., [f°29 v°1]. « ...G. Hugonis pro portando duas faxas fenasse in ambanamento castri. 4 d. tol. ».
1804
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°33 r°4]. « Item eidem pro quadam sola per ipsum posita in opere turris porte Mercadalis et pro assendendo in dicto
opere 10 travatellos 11 s. 8 d. tur. » ; Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°39 v°6]. « ... G. Raynardi pro una sola, una testeria, et una coronda positis in meiano
inter hospicium dicti G. et curcerias ville. 6 s. (toulzas) ».
1805
Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°98 v°7]. « Item G. Rollandi heredi den Saurat pro uno travatello 16 pamorum, 1 cabironum 17 palmorum positi in
embannis retro magistrum Petrum de Villaveteri et pro una sola 24 palmorum posita retro G. Olricii extimata per G. Rogerii ad relacionem Bernardi
Johannis summa 28 s. tur. ».
1806
Ainsi, certaines corondas peuvent servir d’affûts pour les pièces d’artillerie : Ibid., 1360-1361, [f°76 r°3]. « Item Bernardo Johannis pro duobus
corondis in quibus dicti canones fuerunt. 2 s. tur. ».
1807
Ibid., [f°63 r°2]. « ...al dit Ramon Vidal per 20 corondas as obs de corondar le dit gaytil costero 13 s. 8 d. tol. flori a 12 s. 6 d. tol. valo flori a 12 s.
1 l.6 s. 3 d. tor. ».
1808
Ibid., 1361-1362, [f°87 r°1]. « …cuidam forasterio vocato En. Doayh pro 10 corondis quelibet 14 palmorum receptas per B. Alaberti et B. Johannis
et positas in ambanis qui sunt de turre Mercadalis ad portam magistri Bertolomei Constantini 20 gros valent. 40 s. tur. ».
1809
Ibid., [f°87 r°2]. « Item Saurato forasterio pro 5 corondis quelibet 12 palmorum, 1 coronda 24 palmorum, duabus corondis quelibet 17 palmorum
positas in dictis ambanis ad relationem dictorum B. Johannis et B. Alaberti. 42 s. tur. ».
1810
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°99 r°1]. « ...pro duabus corondis ab eodem receptis et positis in embans retro ecclesiam Fratrum Minorum ad rela-
cionem Bernardi Johannis. 12 s. ».
[f°100 r°2]. « ...pro duabus corondis emptis et positis in embans que fuerunt Petri Robberti. 5 s. tur. » ; [f°103 v°1] ; [f°103 v°3] ; [f°107 r°8] ; [f°110
v°4]. « Item Guillermo Comitis pro sex corondis. 12 s. tur. ».
1811
Ibid., 4E76/CC48, 1361, « ...pro necessariis ad embanandum parietes retro G. Olricii » ; [f°115 v°1]. « ...pro latando, sparonando, ponendo aliquas
riostas, corondas que difficiebant pretio facto. 34 s. tur. ».
1812
Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°91 r°3]. « Item G. Johannis, G. Breseyti, B. Gauberti et Stephano Baronis qui steterunt ad sporguandum salices nause
fontis Rosandi pro faciendo sparones ad opus ambanamentorum cuilibet eorum 2 sol. tol. 8 sol. tol. ».
1813
Aujourd’hui l’Estambigou, quartier situé à environ 750 m à l’est de la ville intra-muros.

202
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

salaire journalier de 4 s. tournois1814. Par ailleurs, ces carto jouant le rôle d’un puntier) soutenues par des étais
branches devaient être retaillées pour être utilisées : ainsi, obliques (paliera, palma). À Toulouse, une dépense de
Raymond Sacrot, débite des sparos durant une journée, mars 1354 pour 20 pernas de quatre brasses chacune pour
pour une somme de 3 s. 4 d. tournois1815. édifier une paret fournit des indications : le prix total atteint
D’autres dépenses permettent de déterminer le prix au 40 s. toulzas, soit 2 s. toulzas par étai (env. 4 s. tournois)1824.
quintal des sparos ainsi que ses variations : en 1359-1360, La seconde longueur-type est la perna de six brasses, pour
il atteint 20 d. tournois, soit 1 s. 8 d. tournois1816 ; l’année laquelle plusieurs achats sont ainsi réalisés en mars 1354 et
suivante le tarif moyen varie entre 1 s. 3 d. tournois1817 et avril-mai 1355 ; le premier correspond à un lot de
1 s. 11 d. tournois1818, alors qu’en 1361-1362, il peut 12 perches (au total 36 s. toulzas, soit 3 s. toulzas -6 s. tour-
atteindre jusqu’à 2 s. tournois1819. Il reste généralement aux nois- par élément)1825 ; le second est plus complexe : 18 étais
alentours d’1 s. 1 d. tournois1820, la moyenne étant une fois sont acquis pour une somme totale de 6 l. 17 s. toulzas (soit
encore d’1 s. 8 d. tournois1821. Donc, en définitive, le prix de 137 s. toulzas), soit en comptant un écu pour 9 s. (toulzas ?)
ce matériau reste relativement stable sur ces trois années. comme l’annonce le scribe, 15 écus et 2 s. toulzas1826. En
outre, le prix unitaire de chaque pointal est de 3,5 s. 2 d.
11.1.3 - Coffrages, perches, étais, échelles : éléments et toulzas (soit 3 s. 8 d. toulzas), or la division des 137 s.
fixations toulzas par 18 indique 7 s. 6 d. toulzas, soit un peu plus du
double…1827. S’agit-il alors d’une erreur de calcul ?
11.1.3.1 - Les pièces de bois
Le troisième a trait à l’achat d’une quantité indéfinie de
Les mentions de taulas (coffrages en bois) sont assez ces pernas, et de deux soliveaux équarris (cartos), pour un
rares à Castelnaudary. Les comptes (chauriens ou toulou- total de 10 s. toulzas1828. Enfin, en mai 1355, 34 autres
sains) les citent presque toujours comme matériel à réaliser perches de mêmes dimensions sont achetées pour l’étaie-
et donc pratiquement jamais en tant qu’élément déjà ment des parets de Saint-Etienne et de la tour de Porte-
constitué prêt à l’emploi. Neuve, pour 11 écus un tiers (soit 3 étais pour un écu), ce
En outre, le prix des planches (postz) entrant dans leur qui, en comptant 9 s. toulzas pour un écu, revient à 3 s.
composition est rarement précisé : douze planches de sapin toulza par pièce1829.
sont ainsi achetées en 1408 à Toulouse (au prix de 3 fr. Enfin, deux autres dépenses toulousaines font mention
parisis) pour la construction d’une paret chaurienne1822, de perches de longueur indéterminée : en mars 1354, un
c’est-à-dire à peu de choses près (4 fr. parisis) le prix des achat de 30 pernas de caderna1830 brassa et une autre en
« deux charges de planches pour faire la paret » (pour les mai 1355 pour deux planches razals afin de faire les taulas
taulas ?) fournies à Castelnaudary le 12 août 1419 par de la Porte-Neuve. Malheureusement, la somme totale
Pierre de Laroque1823. comprend également d’autres matériaux, et il est donc
Ces taulas sont fermement plaquées de part et d’autre impossible de connaître le coût unitaire de ces éléments1831.
de la paret en construction au moyen de perches (perna ou Cette difficulté surgit également pour les cartos (soliveaux

1814
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°116 r°8]. « Item Arnaudo Rocas, Johanni Comitis, Guillermo Arceii pro sporgando sparonem apud Stagnum Vivo
una die cuilibet 4 s. summa. 12 s. tur. ».
1815
Ibid., 1359-1360, [f°7 v°6]. « Item Ramundo Sacrot pro uno jornali ad scindendum sparonem pro operibus guacillorum. 3 s. 4 d. tur. ».
1816
Ibid., [f°8 r°4]. « …pro uno quintali sparonum. 20 d. tur. ».
1817
Ibid., [f°61 r°5]. « …per 2 quintali de sparo que foro meses per tortissar l’amban detras le moli del castel costero 16 d. tol. flori a 12 s. 6 d. tol.
valo flori comptat a 12 s. 2 s. 6 d. media tor. ».
1818
Ibid., 1360-1361, [f°63 r°4]. « …per 4 quintali de sparo as obs de sparonar le dit gaytil costet per quintal 12 d. tol. montero 4 s. tol. flori a 12 s.
6 d. tol. valo flori a 12 s. 7 s. 8 d. tor. ».
1819
Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 v°8]. «...pro duobus quintalibus sparonum ad sparonandum dictum guacillum. 4 s. ».
1820
Ibid., [f°101 r°6]. « ...pro viginti quatuor quintalis sparonum emptis a Petro Matheii. 28 s. tur. » ; [f°107 bis r°8]. « ...pro 12 quintalibus sparonum
emptis ab eadem ad opus tortitiorum ad relacionem Johannis Seguini. 14 s. tur. ».
1821
Ibid., [f°96 r°1]. « …pro duobus quintalibus sparonum ad opus dicte porte. 3 s. 4 d. ».
1822
Ibid., 4E76/CC64, 1408, [f°36 r°3]. « …per 12 postz d’avet de quatre canas de lonc cascuna las cals foro compradas per B. La Guarda fustier al
loc de Toloza car ayssi li foc mandat per les senhors de cossols atendut que lom avia cologuadas affar las paretz de la porta Mondebo las cals devian
estre de taula […] costero per tot de prima compra. 3 fr. ».
1823
Ibid., 4E76/CC69, 1419, [f°47 v°2]. « Item a XII d’ahost pagueguo an Peyrot de la Roca per dos carguas de postam per far la paret per tot. 4 fra. ».
1824
AC Toulouse, EE32, [f°42 v°1]. « …per 20 pernas de 4 brassas cascuna que fara apuntiers a levar la paret costa porta Nova que levava en Iahn
Olier e costavan doble sol montan 40 sol. tol. ».
1825
Ibid., [f°42 v°2]. « 54 en marz. Item pus per 12 pernas de 6 brassa que anero aqui mezeis. 36 s. tol. ».
1826
Et non pas à 15 écus et 112 d., somme qui est pourtant inscrite. S’agit-il plutôt de « 12 deniers » ?
1827
AC Toulouse, EE32, [f°50 v°2]. « …per 18 pernas de 6 brassa qu’avem prezas a obs de puntiers a las paretz detras le truelh de Sant Estefe a las
paretz que fazia en Bomacip a 3 s. mieg 2 d. tol. per pessa e montan 6 lbr. 17 s. tol. e montan escud a 9 s. 15 escud 112 d. tol ».
1828
Ibid., [f°64 r°3]. « Item per pernas de 6 brassa e per 2 cartos de 6 brassa que pres mastre Ramon den Tholosa a obs de puntiers a la paret 10 s. tol ».
1829
Ibid., [f°78 r°1]. « …per 34 pernas de 6 brassa que avian prezas en diverssas vetz a obs de puntiers desus que avian ab lu autra vetz comtat a X
abril e aisso fo apuntiers a las paretz a S. Estefe e a la tor de porta Nova que fazia en Johan Olier e montant estas 34 pernas las 3 escud. 11 escud e
1 tertz. ».
1830
S’agit-il du chiffre « quatre » ? Voir glossaire.
1831
Ibid., [f°42 v°3]. « …per 30 pernas de caderna brassa que pres en Johan de Garac paredier de Tilh a puntiers a la paret tras l’ostal del tesaurier
a San Estefe e pus 5 cartos a far una escala e a pouiar las palieras e montan a 20 s. tol. 70 s. tol ».
[f°78 r°2]. « …per 2 pernas de 5 brassas e 2 de caderna e 2 cartos de 6 a far escala a puiar la massonaria e per 2 postz razals a far taulas a la tor
porta Nova. 2 escud e mieg. ».

203
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

équarris), probablement utilisés en lieu et place des Deux mois plus tard, en août 1355, 250 fixations du
pernas1832. La seule exception relevée concerne l’achat même type sont acquises par Bomacip pour les taulas de la
d’une solive (carta) en avril 1355 au prix de 2. s. toulzas paret : les 100 premières coûtent 16 d. toulzas1838, les 150
(4 s. tournois) pour servir de pointal à la paret derrière le autres 2 s. toulzas1839, leur prix unitaire de 0,16 d. toulzas se
pressoir de Saint-Etienne1833. Quant aux étais obliques maintenant depuis le mois de mai : ce tarif est d’ailleurs
(paliera, palma), les deux dépenses les concernant ne identique au coût à la pièce des quelques 200 clous bara-
permettent pas non plus d’en connaître le prix. dors achetés pour les mâchicoulis de Matabiau. Ces fixa-
À Castelnaudary, les opérations d’étaiement sont relati- tions étaient donc peut-être standardisées, du moins dans
cette ville1840.
vement nombreuses en 1359-1360 : toutefois, le scribe se
contente de consigner que l’on a rétribué certaines Toutefois, si on part du postulat que ces clous sont du
personnes pour « pigar la paret », en mentionnant parfois même type que ceux utilisés pour les gaytils de Matabiau
des fustes, sans indiquer le coût unitaire des matériaux en janvier 1354, leur prix unitaire a fortement augmenté
utilisés. On ne peut de ce fait pas distinguer la part salariale (ils coûtaient à cette époque 0,12 d. toulzas pièce) à moins
du prix des pièces de bois1834. de penser que le qualificatif de bos (bons) fasse référence à
une monnaie toulza de meilleur aloi, compensant alors la
Quant aux échelles, elles sont absentes des comptes
différence de prix constatée1841.
chauriens, du moins en ce qui concerne leur rapport direct
avec la construction de parets ; elles ont par ailleurs laissé Par ailleurs, les clous barradors « simples » (sans
peu de traces dans le compte toulousain de 1354-1355 : les qualificatif supplémentaire) sont les moins onéreux
montants étaient constitués de deux cartos (également à (0,13 d. toulzas pièce), que ce soit pour les taulas
2 s. toulzas pièce ?)1835 et levés par des cordes enroulées employées à Saint-Cyprien1842 ou pour une échelle à Saint-
autour de poulies installées au sommet de la paret en cours Etienne1843.
de construction : ce fait est confirmé par deux rares Enfin, le sommet des perches était relié au moyen de
dépenses de mai 1355 dans lesquelles on mentionne l’achat cordes, de manière à ce qu’elles ne puissent s’écarter et que
de 26 l. de cordes (env. 10,4 kg) pour la somme de 6 d. la taula ne se déplace : le 28 mai 1355, on achète auprès
toulzas la l., (156 d. toulzas au total), soit 13 s. toulzas, d’un cordier 24 cordes pour un poids (total ?) de 44 l.,
montant assez élevé1836. toujours au prix de 6 d. toulzas (soit au total 22 s.
toulzas1844). D’autres types de cordes, plus imposantes,
11.1.3.2 - Les fixations : clous et cordes peuvent être employés : ces soguas de dix brasses ne sont
Seul le registre toulousain de 1354-1355 possède de pas décomptées au poids mais à l’unité (1 s. toulza pièce).
rares informations en ce sens : pour les clous tout d’abord, On aurait pu penser qu’elles étaient standardisées1845 mais
mille d’entre eux, de type baradors renforcés (fortz) sont la dépense suivante indique un prix de revient unitaire légè-
achetés en mai 1355 pour les taulas, pour un prix de 13 s. rement supérieur (env. 1 s. 2 d. toulzas)1846 ; dans le même
4 d. toulzas, soit 160 d. toulzas ; ceci reviendrait à un coût temps trois soguas de six brasses pour des poulies coûtent
unitaire de 0,16 d. toulzas par clou (env. 0,3 d. tournois ?), 10 d. toulza pièce1847. Le prix des cordes n’est donc pas
ce qui semble assez peu1837. proportionnel à leur longueur.

1832
Ibid., [f°64 r°3]. « …per pernas de 6 brassa e per 2 cartos de 6 brassa que pres mastre Ramon den Tholosa a obs de puntiers a la paret tras l’ostal
del P. Bosc. 10 s. tol. ».
1833
Ibid., [f°64 r°2]. « …per una carta de 6 brassas que presen Bomacip le paredier a obs de puntier naut a la paret tras le truelh a Sant Estefe. 2 sol. tol. ».
1834
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°2 v°4], [f°3 v°6], [f°11 r°6], [f°16 v°7].
1835
AC Toulouse, EE32, mars 1354, [f°42 v°3]. « …e pus 5 cartos a far una escala e a pouiar las palieras e montan a 2 s. tol. 70 s. tol. ».
1836
Ibid., mai 1355, [f°92 v°2]. « …una corda a obs de una poliega e una corda pus grossa a levar la scala devant la paret a Sant Estefe e pezet tot
12 libras » ; [f°92 v°3]. « …pro 4 cordas de polieia que pezera 14 libras. » ; « …e costa la libra 6 d. tol…».
1837
Ibid., [f°81 r°5]. « …per M clavels baradors refforssatz que an prezes en diverssas vetz mastre Ramon den Tholosa en Johan Olier els autres
parediers a obs de clavelar las taulas ab que fazian las paretz. 13 s. 4 d. tol ». Par comparaison, un clou barrador coûterait à Rodez 0,86 d. tournois
en 1350-1351 : « Item pro 30 clavels barrados qu’en portet Johan Dani. 2 s. 2 d. tur. » (Bousquet 1926, 79). Cependant, la précision « qu’en portet »
indique peut-être un transport compris dans la somme totale. Ce chiffre peut atteindre 1 d. tournois pièce la même année : « Item pro 40 clavels
barrados, as obs d’arcar. 3 s. 4 d. tur » (Ibid., 122).
1838
AC Toulouse, EE32, mai 1355, [f°112 v°17]. « …per 100 clavels baradors fortz a obs de las taulas de las paretz que pres en Bomacip. 16 d. tol. ».
1839
Ibid., [f°113 r°6]. « Item per 150 clavels baradors fortz a barar las las [sic] taulas a las paretz que pres en Bomacip. 2 sol. tol. ».
1840
Ibid., [f°112 v°2]. « Per 200 clavels baradors que avia pres en B. Ros a obs dels machacols de Matabuou que avia pres a XII de may e montan
escud a 10 s. 6 d. tol. 2 s. 8 d. ».
1841
Ibid., janvier 1354, [f°9 r°4]. « Item pus per 200 clavels baradors fortz que pres B. Cas fustier a XXX dezembre a obs dels gachils de Matabuau.
2 s. tol. bos. ».
1842
Ibid., mai 1355, [f°113 r°18]. « Item per 100 clavels baradors a las taulas a San Subra que pres en Bomacip. 13 d. tol. ».
1843
Ibid., août 1355, [f°112 v°8]. « Item per 100 clavels baradors a la scala a San Estefe. 13 d. »
1844
Ibid., [f°92 v°1]. « …per cordas a las obras per 24 cordas que avia prezas en Johan Olier a obs de las paretz levar als puntiers a pres la tor den
Tibeli que pezeva 44 libras e costa la libra » ; « …e costa la libra 6 d. tol…».
1845
Ibid., mars 1354, [f°48 v°1]. « …per 6 soguas de 10 brassa en Iahn Olier a obs dels puntiers a la paret de costa la porta Nova can levet la paret e
costava cascu 12 d. tol. montan. 6 sol. tol. ».
1846
Ibid., mars 1354, [f°48 v°2]. « …a obs de las obras a la paret al cauta de Sant Estefe a l’ostal del P. Bosc 13 soguas de 10 brassa que fera.
16 sol. tol. ».
1847
Ibid., mars 1354, [f°48 v°3]. « Item pus 3 soguas de 6 brassa a obs de las poliegas. 2 sol. 6 d. tol. ».

204
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

11.2 - Le coût du transport en effet, les termes cuilibet, inter ambos et portaverunt
suggèrent l’existence d’un autre individu, auquel cas le
11.2.1 - Les végétaux calcul reviendrait également à 2 s. tournois par charge
convoyée1850.
11.2.1.1 - La bruyère Enfin, on mentionnera un dernier transport réalisé par
Les informations concernant le transport, et son éven- Pierre Amouroux pour six trossas de bruyère, pour une
tuel prix, de la terre à bâtir, sont totalement absentes de somme totale de 12 s. tournois. Cette quantité est donc
l’ensemble des sources consultées, si bien que l’on ne peut-être équivalente à celle de la sarcinée, puisque le coût
s’étendra pas davantage sur la question. Seuls les végétaux unitaire du transport est le même1851.
ont laissé des traces en ce sens : ainsi, à Castelnaudary, la Quant au bois du seigneur du Palais (impossible à loca-
bruyère, invisible dans les registres de 1359-1360 et 1360- liser), une seule dépense des environs du 15 octobre 1361
1361, provient ensuite essentiellement de trois endroits permet de savoir que cinq hommes ont convoyé depuis ce
entre 1361 et 1364 : le bois de Calvayrac, à environ lieu jusqu’à pied d’œuvre 112 charges1852 au prix de 2 s.
13,5 km au sud de Castelnaudary, le bois du seigneur du tournois la charge (soit au total 11 l. 4 s. tournois1853).
Palais, non localisé, et le bois de Rosilhac, à 6 km au nord-
est de la ville (fig. 3). C’est en définitive le bois de Rosilhac qui en 1363-1364
fournit le plus d’informations sur le sujet (une vingtaine de
Mais la présence de toponymes comme Brugues ou La
dépenses1854). Le prix, également calculé par charges ou
bruyère dans un rayon d’une dizaine de kilomètres autour
sarcinées, est la plupart du temps de 18 d. toulzas (soit 1 s.
de la cité laisserait entendre que l’approvisionnement
6 d. toulzas) par charge convoyée, quelle que soit la
n’était pas un souci majeur, contrairement à celui du
personne qui s’en occupe1855. Comment expliquer cepen-
colportage, qui pouvait, comme celui des autres matériaux,
dant que, la même année, certains perçoivent une rémuné-
être soumis aux menaces des routiers1848.
ration moindre pour un travail apparemment identique ?
En 1361-1362, quatre dépenses répertorient un trans- Tel serait le cas de Jacques de Caussidières1856, qui le
port de bruyère depuis le bois de Jean de Calvayrac : deux 13 juin transporte quatre sarcinées pour un prix total de 5 s.
d’entre elles concernent le transport de quatre charges de toulzas, soit 15 d. toulzas par charge1857, ou celui de Jean
bruyère (au total, 8 s. tournois, soit 2 s. tournois la Casser et Raymond Stéphane pour trois sarcinées chacun
sarcinée)1849. Or, dans le même temps, Pierre Gautier convoyées au même prix vers le 17 juin1858. Le cas extrême
semble rémunéré 12 s. tournois pour le charroi de seule- est atteint avec Pierre Maurand et Jean Doste, rémunérés
ment trois charges du même végétal jusqu’aux parets de la seulement 12,5 d. toulzas par charge arrivée à bon port :
porte Montdebo, ce qui doublerait le prix de la charge dans ce cas il est vrai, le lieu de provenance n’est pas
transportée (2 à 4 s. tournois). Il s’agit en fait simplement précisé, laissant planer un léger doute, car le prix tenait
d’une erreur du scribe qui a oublié une seconde personne : certainement compte de la distance parcourue1859.

1848
À Castelnaudary cependant, les comptes ne disent pas si certains transports de matériaux doivent être escortés, comme en Bresse et Bugey aux XIIIe
et XIVe siècles : en effet « il convient d’ajouter parmi les salaires payés à la journée ceux versés aux clients en armes, venus spécialement pour protéger
les travaux et les charrois. Sans ces hommes, il est quasiment certain que des chevauchées dauphinoises seraient venues pour tenter de réduire à néant
toutes les constructions » (Kersuzan 2005, 314). Ailleurs, comme en Savoie, c’est souvent le châtelain qui est chargé de cette tâche : « en tant que
responsable militaire, le châtelain assure aussi la mise en place et la sécurité du chantier, notamment dans les zones de conflit : c’est l’organisation du
travail de jour et de nuit, les escortes armées pour les transports de matériaux et la protection des équipes d’ouvriers » (Poisson 2001, 167). D’une
manière générale, et à l’exemple des villes auvergnates et de beaucoup d’autres, la capitale chaurienne a dû quelque peu pâtir des chevauchées de
routiers dans les environs (« les villes auvergnates de cette époque, comme beaucoup d’autres en France, souffrent principalement de l’insécurité des
routes qui bloque le commerce, de l’appauvrissement des campagnes qui ruine les marchés locaux et amoindrit l’approvisionnement urbain, de l’alour-
dissement considérable de la fiscalité pour financer les fortifications et les trêves négociées avec les mercenaires » ; Teyssot 1996, 50).
1849
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°97 v°2]. « Item Pontio Gauberti pro quatuor sarcinatis de broc quas portavit de nemore Johannis de
Calvayraco. 8 s. tur. » ; [f°98 r°1]. « Item Bernardo Guilaberti pro quatuor sarcinatis de broc quos portare fecerat de nemore Johannis de Calvayraco
ad parietes retro Guillermum Olricii. 8 s. tur. ».
1850
Ibid., 1361-1362, [f°94 r°4]. « Item Petro Gauterii cuilibet pro tribus sarcinatis de broc quas portaverunt de nemore dicti Johannis de Calvayraco
ad parietes porte Mondebonis 6 s. inter ambos. 12 s. ».
1851
Ibid., [f°108 v°8]. « Item domino Petro Amorosii pro sex trossatis de broc quos portare fecerat de nemore Johannis de Calvayraco. 12 s. tur. ». On
verra plus loin, lors du transport du foin, qu’une autre hypothèse, peut-être davantage plausible, peut être émise à ce sujet.
1852
En partant du postulat que la charge chaurienne équivaut à environ 138 kg, le poids total convoyé atteindrait environ 15,5 tonnes !
1853
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°117 v°5]. « ...per diversos dies dictos 112 sarcinatas dicti brugui portaverunt in operibus parietum pro qual-
ibet sarcinata 2 s. tur. summa. 11 l.4 s. tur. ».
1854
Recensement non exhaustif.
1855
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°25 r°6] ; [f°27 v°7]. « …Johanni Casser pro portando de nemore de Rosilhaco sex sarcinatas brochi pro qual-
ibet sarcinata 18 d. tol. 9 sol. » ; [f°28 v°1] ; [f°29 v°6] ; [f°29 v°7]. « …Ramundo Stephani juniori pro portando aliam sarcinatam de broc de dicto
nemore. 18 d. tol. » ; [f°31 r°2]. « …Petro Carrerie pro portando duas sarcinatas brochi de dicte nemore pro qualibet sarcinata 18 d. tol. 3 sol. » ;
[f°31 r°4]. « …Jacobo de Caucideriis pro portando tres sarcinatas brochi de dicto nemore pro qualibet sarcinata 18 d. tol. 4 s. 6 d. » ; [f°31 v°5].
« …domino Petro Juliani pro portando unam sarcinata brochi de nemore de Rosilhaco. 18 d. tol. ».
1856
Caussidères est un petit village de Haute-Garonne situé à une trentaine de kilomètres à l’ouest de Castelnaudary.
1857
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°40 r°5]. « …Jacobo de Caucideriis pro adportando quatuor sarcinatas brochi de dicto nemore de Rosilhaco
ad opus parietis de la Strada. Quinque sol. tol. ».
1858
Ibid., [f°43 r°5]. « …Johanni Casser pro portando tres sarcinatas brochi de nemore de Rosilhaco ad opus parietis de la Strada. 3 sol. 9 d. » ; [f°43
r°6]. « …Ramundo Stephani pro portando tres sarcinatas brochi de dicto nemore. 3 s. 9 d. tol. ».
1859
Ibid., [f°61 r°5]. « …Petro Maurandi et Johanni Dosta pro quatuor faxis brochi emptis ab eisdem adportatis in dictum pariete. 4 s. 2 d. ».

205
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Toutefois, le cas inverse peut se produire avec les distance et la quantité emportée, qui d’ailleurs dans ces
mêmes personnes : ainsi, Jean Casser, Bernard Julien, et deux cas n’est pas indiquée.
Raymond Stéphane sont rémunérés à deux reprises 2 s. Un autre mode possible de rémunération consistait appa-
toulzas par charge déplacée1860. Ce dernier a réalisé l’opé- remment à calculer le prix en fonction de la charge trans-
ration avec son animal1861, fait qui pourrait expliquer la portée, que ce soit depuis le Fresquel1865 ou depuis un autre
hausse de tarif si les deux premiers individus sont égale- cours d’eau, dont le nom n’est pas indiqué (le même ?).
ment dans ce cas.
Lors du transport de la bruyère, on avait pensé que la
11.2.1.2 - Le foin trossa, du fait de son prix identique, pouvait être équiva-
lente à la charge ou sarcinée. Or, les deux dépenses pour le
Une forte incertitude plane également sur certaines foin laisseraient envisager que cette même trossa serait le
dépenses relatives au foin, c’est-à-dire qu’il est difficile, pendant du quintal, soit un poids environ trois fois
voire parfois impossible de savoir si ces rares mentions moindre, ce qui laisse dubitatif1866. La « trossa »1867 ne serait
s’arrêtent au prix de la denrée elle-même ou incluent aussi donc peut-être pas une quantité définie, mais plutôt un
son acheminement. terme générique désignant tour à tour un quintal, un fagot,
Pour la période 1359-1362, seules quatre mentions ou une sarcinée, interprétation qui aurait le mérite de
précises font état de manière non équivoque du seul trans- rapprocher ces dépenses, au premier abord inexplicables.
port du foin, toutes durant l’exercice 1361-1362. Les lieux
11.2.2 - Le colombage
d’approvisionnement devaient être très divers (prés des
environs, etc.), au gré des possibilités et des demandes des Les quatre éléments principaux du colombage (solas,
consuls ; à deux reprises néanmoins, le foin provient de la corondas, riostas, sparos) sont inégalement traités dans les
ferme d’Hugues d’Aurente1862 et du pré de Bertrand sources : on ne dispose en effet d’aucune mention de trans-
d’Aurente1863, le premier étant qualifié de « noble ». Ne port de solas ou de riostas pour les quatre premières années
sachant pas où se situe cette borde, il est impossible de conservées (1359-1362), si bien que l’on ne peut rien dire
calculer la distance parcourue. Le charroi dure trois jours et à leur sujet1868. Quant aux corondas, pourtant si souvent
coûte quotidiennement 14 s. tournois, soit 42 s. tournois au citées durant cette période, elles sont à peine mieux loties :
total (quantité non précisée). Notons que cette somme est une seule mention d’acheminement a pu être répertoriée, et
encore en rapport avec des coursières, éléments ne conte-
10,5 fois supérieure au prix moyen d’un quintal de ce
nant pas de torchis1869. En l’espèce, le travailleur n’est pas
même foin (supra).
rémunéré au nombre d’éléments convoyés, mais perçoit un
Les trois autres dépenses indiquent les rives de deux salaire journalier dont le montant se situe dans la moyenne
cours d’eau comme lieu de provenance du foin : Gérald de ceux dévolus aux manœuvres. Une autre mention de
Valence transporte avec sa mule du foin pendant deux jours transport de corondas, en rapport avec des travaux sur la
depuis les rives de Paythalières (Hers Mort ?), probable- porte Narbonnaise -et donc une fois de plus sans rapport
ment situées à une distance d’environ 8,5 km au sud de direct avec le torchis- indique qu’un porte-faix perçoit la
Castelnaudary1864. La somme perçue est la même que dans modique somme de 8 d. tournois (soit 3,75 fois moins)
le cas précédent (14 s. tournois par jour), suggèrant deux pour un travail dont la durée est équivalente1870.
hypothèses : soit la ferme et le pré appartenant aux L’acheminement de sparos est cité quatre fois entre
d’Aurente sont implantés à une distance équivalente (d’où 1359 et 1362.
l’identité de prix), soit les consuls rémunéraient dans ce Un certain « dominus » Pierre du Bosc1871 fait trans-
cas-là les convoyeurs à la journée, quelle que soit la porter avec son animal trois charges (env. 400 kg) pour des

1860
Ibid., [f°59 v°2]. « ...Johanni Casser pro portando unam sarcinatam brochi de nemore de Rosilhaco. 2 sol. tol. » ; [f°60 r°4]. « ...Johanni Casser
pro portando unam sarcinatam brochi de nemore de Rosilhaco ad opus parietis de la Strada. 2 sol. tol. » ; [f°61 v°5]. « …Bernardo Juliani pro
portando duas sarcinatas brochi de ditco nemore de qualibet sarcinata 2 sol. tol. 4 sol. » ; [f°61 v°6]. « …Ramundo Stephani pro portando tres sarci-
natas brochi de dicto nemore. 6 sol. tol. ».
1861
Ibid., [f°61 v°4]. « …Ramundo Stephani pro portando cum animali suo tres sarcinatis brochi de nemore de Rosilhaco de qualibet sarcinata 2 s.
tol. 6 s. ».
1862
Ibid., 4E76/CC48, 1359-1360, [f°3 v°5]. « Johanni Canat et Ramundo de Dorcio qui dicta die portaverunt fenum et sparonum a borda nobilis
Hugonis de Aurenta usque ad guacillos portus Astrate. 4 s. 4 d. tur. ».
1863
Ibid., 1361-1362, [f°99 v°8]. « Item pro tribus jornalibus ad caregandum fenum de prato Bertrandi d’Aurenta pro jornali 14 s. summa. 42 s. ». Il
se peut que ces deux lieux soient très proches.
1864
Ibid., [f°99 v°7]. « Item eidem Geraldo pro duobus jornalibus dictarum duarum mularum ad caregandum fenum de riperia Paythelatorum pro die
14 s. summa. 28 s. tur. ».
1865
Il s’agit rappelons-le d’une rivière située au nord de Castelnaudary, à une distance minimale de 2,5 km.
1866
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 v°8]. « Item Johanni Pueg quia portaverat decem trosas de feno de reperia Fistuli pro qualibet 2 s.
summa. 20 s. tur. » ; [f°111 v°5]. « Item Pontio Recordi pro 15 quintalibus feni ad opus embanorum seu tortitiorum quos portabat Johannes Pueg de
riperia. 30 s. tur. ».
1867
De « tros » ? : « tronçon, morceau, pièce, portion, quantité, paquet » (Lévy 1909, 374).
1868
Compte tenu de la taille de certains, voire de la plupart de ces éléments, ils étaient peut-être transportés par charriots, auquel cas le coût de revient
unitaire final de chaque pièce devait être assez important. Ainsi, « pour le transport en charrette de 30 grosses pièces de bois entre Pertuis et Aix (environ
22 kms) le prix demandé est, le 4 novembre 1496, de 18 florins » (Bernardi 1995, 133).
1869
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 r°12]. « Item cuidam nuncio qui portavit corondas in corseriis. 2 s. 6 d. tur. ».
1870
Ibid., [f°92 v°4]. « Item cuidam faxerio pro portando corondas in dicta porta. 8 d. ». Lorsque le travail n’a en effet duré qu’une demi-journée, le
scribe le précise systématiquement.
1871
Consul de Castelnaudary, puis sergent royal de Toulouse.

206
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

travaux sur un gaytil, mais on ne sait depuis quel endroit ni fournir des informations sur le prix réel de l’ouvrage
pendant combien de temps. Le transport a coûté 3 s. tour- terminé ou sur la rémunération versée pour un certain
nois, le tarif pratiqué étant alors de 1 s. tournois par volume ou une certaine longueur.
sarcinée convoyée1872. Dans la dépense suivante par contre,
Ces prix-faits prennent en compte à la fois le coût de la
un étranger transporte (à dos d’homme ?) des sparos (quan-
plupart des matériaux et de l’outillage, mais également le
tité non précisée) pour les gaytils du port des Bordes pour
une somme modique (6 d. tournois)1873. salaire du paredier et de ses ouvriers ou manœuvres. Ils
Par la suite, Gérald Valence convoie pendant une constituent donc la source la plus fiable permettant d’es-
journée des sparos avec ses deux mules depuis timer le coût d’ensemble de certaines parets.
l’Estambigou (quartier situé rappelons-le à 750 m à l’est de 11.3.1.1 - Castelnaudary
la ville) pour une somme de 14 s. tournois1874. Dans le
même temps, G. Vaquier transporte également des sparos Trois prix-faits, peut-être de gré à gré, et deux adjugés
depuis le même endroit et pendant la même durée, mais à l’encan ont pu être relevés (fig. 57).
pour une somme de 6 s. tournois, et peut-être sans animal, Dans le premier cas, les consuls confient la réalisation
puisque le texte ne le précise pas1875. de parets à quatre hommes pour un tarif de deux écus vieux
Enfin, on notera ici, de manière anecdotique, que le la brasse, aux environs du 15 octobre 13611877. Un mois plus
transport des taulas comme élément déjà constitué n’est pas tard, le 16 novembre, l’arpenteur Michel Bartas mesure
inscrit dans les comptes chauriens ni dans le compte toulou- 15,5 brasses de parets1878. Les titulaires du contrat perçoi-
sain. Seule une rare dépense albigeoise précise que cinq vent alors 31 écus d’or (soit 49 l. 12 s. tournois1879, et
hommes ont rapporté des taulas (sans précision de nombre) environ 3,16 l. tournois la brasse). Mais les choses ne s’ar-
empruntées à un hôpital pour la construction des parets rêtent pas là : fait unique dans les comptes chauriens, ces
d’enceinte, transport qui s’élève à 2 s. 1 d. tournois1876. hommes ont dû arranger ou réparer (engualar, engalhar)
ces mêmes parets, peut-être quelques jours plus tard,
11.3 - Le coût global des ouvrages en terre crue touchant pour cela 32 s. tournois supplémentaires1880. Il
s’agit vraisemblablement d’une demande expresse des
11.3.1 - Les constructions en terre massive consuls, insatisfaits de l’ouvrage livré. Le prix total de la
Pour tenter d’évaluer le coût global de ces construc- construction atteint alors 51 l. 4 s. tournois (soit 1024 s.
tions, deux méthodes pouvaient, a priori, être envisagées. tournois), les 32 s. tournois représentant 3,1 % de l’en-
Premièrement, tenter d’estimer le coût global des semble. Enfin, si l’on inclut la rémunération de l’arpenteur
ouvrages en prenant en compte le prix des matériaux, celui (3 s. 6 d. tournois)1881, on obtient un total 51 l. 7 s. 6 d. tour-
de leur transport, et les salaires (parediers, ouvriers et/ou nois, l’arpentage ne représentant que 0,35 % du total, ou
manœuvres). Cependant, compte tenu des lacunes des 3,45 % si on l’ajoute aux finitions.
sources, cette méthode aurait très vite atteint ses limites, En 1363, le charpentier Pierre Saurin réalise une paret
raison pour laquelle elle n’a pas été retenue. au port de l’Estrade au prix de 2 florins et 7 gros d’argent
Deuxièmement, s’intéresser aux rares prix-faits dont on la brasse : l’arpenteur répertorie 126 brasses au total, pour
dispose, types de contrats ayant pour apport essentiel de un coût de 325 florins1882. Si l’on se base sur le taux de

1872
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°7 r°7]. « ...domino Petro de Bosquo pro portu 3 sarcinatarum sparonum quas portare fecit cum suis animal-
ibus in operibus guacillorum. 3 s. tur. ».
1873
Ibid., [f°7 r°8]. « Item cuidam homini extraneo qui portavit quandam quantitatem sparonum ad guaycillos portus Bordarum. 6 d. tur. ».
1874
Ibid., 1361-1362, [f°99 v°6]. « ...Geraldo pro uno jornali dictarum duarum mularum ad caregandum sparonem de Stanh Vivo in dictis clausuris.
14 s. ».
1875
Ibid., [f°118 v°2]. « Item G. Vaquerii qui per unam diem fuit ad portandum sparonem de Stant Vivo pro sparonando embanna dicti portus Bordarum.
6 s. tur. »
1876
Vidal 1911, 48, [f°80 v°]. 827. « A Marsal Guorses y a 4 homes que tornero las taulas que aviou malevadas del hospital, ad obs de far las dichas
paretz. 2 s. 1 d. ».
1877
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°2]. « Item dicti domini consules tradiderunt parietes portus Bordarum pretio facto Bernardo Brezeyti,
G. Lavalh, Bernardo Bocenhac, Pontio de Saltu et debuerunt habere pro qualibet brachiata duos scutos antiquos ».
1878
On sait relativement peu de choses sur les arpenteurs médiévaux. En effet, comme le relève A. Rigaudière au sujet de l’établissement des documents
cadastraux, aux côtés des notaires, marchands et probi homines qui possèdent des compétences juridiques et comptables, « travaille toute une armée
d’hommes de terrain dont les compétences techniques d’un niveau élevé en font des collaborateurs indispensables. On sait bien peut à leur propos et
tout reste à découvrir de leurs œuvres, à l’instar de la belle étude conduite à propos du traité d’arpentage de Bertrand Boysset. Beaucoup d’autres, sans
doute, dorment encore dans les archives tandis que leurs auteurs prennent toujours rang dans la liste des inconnus » (Rigaudière 2006b, 13). Voir en
effet à ce sujet : Portet 2004.
1879
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°3]. « Item die XVI novembris Michael Bartas perticator dicti castri dixit perticassere parietes per
prenomintatos homines factas et operatas et reperisse in dictis parietibus quindecim brachiatas et mediam pro quibus habuunt in diversis solutionibus
31 scutos veteres valent. 49 l.12 s. tur. ».
1880
Ibid., [f°118 r°4]. « ...Bernardo Brezeyti, G. Lavalh, Bernardo Bocenhac, Poncio de Saltu quia engualavant dictos parietes per quam fuerunt perti-
catis ad relacionem Johannis Fabri pro dicto opere quod perficerant. 32 s. tur. ».
« Perficio, is, ere, feci, fectum : faire complètement, achever ; faire de manière parfaite ». (Gaffiot 2000, 1161).
1881
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°5]. « ...dicto perticatorum pro suo labore. 3 s. 6 d. tur. ».
1882
Ibid., 4E76/CC49, 1363-1364, [f°24 r°4]. « Item exsolvi fecerunt magistro Petro Saurini pro faciendo parietem de la Strada videlicet pro 126 brachi-
atis parietis qualibet brachiata 10 palmorum que fuerunt mensuratas per Michaelem Bartas pariatoris prout retulit dictis dominis pro qualibet
brachiata duos florenos auri et septem gros argenti, assendunt 325 florenos auri ».

207
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOM, prénom Qualification Localisation Nature du Dimensions Prix global
certaine du travail contrat bâties
ou supposée
( ?)
JEAN porte 66 brasses
Guillaume Montdebo Adjudication un quart
AD Aude, 5 à la chandelle 69 florins
4E76/CC48, octobre TOCAREL parediers ? au moins- 9 brasses 4 gros
[f°114 r°8] 1361 Raymond paret derrière disant et demi un 6 barsalos
chez G. Olric quart
MADRERIAS
Jacques

ANHANT
Bernard
BREZEYT
Bernard

Ibid., LAVALH
[f°118 r°2] 15 G. parets du port prix-fait 15,5 brasses 31 écus
[f°118 r°3] octobre parediers ? des Bordes à deux écus vieux :
1361 BOCENHAC vieux/brasse 49 l. 12 s.
Bernard tur.

DE SALT/DE
SANT
Pons

Ibid., 1363 SAURIN charpentier paret du port 2 florins


4E76/CC49 Pierre /fusterius de l’Estrade et 7 gros
[f°24 r°4] d’argent/bras
prix-fait ? 126 brasses se
(1 brasse total :
= 10 325 florins
palmes) (390 l.
cavalha de la tournois)
paret
150 florins, 2
gros d’argent
(soit 180 l. 4
s. tur.)
Ibid., 1366 MANCIP paredier paret du port prix-fait ? 4 brasses et 10 florins
4E76/CC51 Arnaud et ses /valadier ? de la Baffe demi 1,5 gros =
[f°72 r°4] compagnons 12 l. 3 s. tor.
Ibid., 1441 HEBREARN P. paredier parets Adjudication 27,5 brasses 2 moutons
4E76/CC77 et son derrière à la chandelle d’or brasse/
[f°25 r°1] compagnon l’ostal du au moins- total : 60
LAMET P. consul disant moutons 5
Guiraut del gros d’or =
Ryu 44 l. 10 s.
(parisis ?)
Fig. 57 : Castelnaudary, (1359-1362) : prix-faits pour les constructions de terre massive.

208
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

conversion proposé cette année-là par le scribe1883, cette après avoir annoncé que quatre personnes s’étaient vues
somme représenterait 7800 s. tournois, soit 390 l. tournois attribuer le marché, le scribe inscrit immédiatement une
(et donc environ 3,09 l. tournois la brasse). Il s’agit d’un somme de 2 florins (24 s. toulzas à cette époque1889), sans
montant considérable qui représente 42,2 % des 923,4 l. que l’on sache réellement à quoi elle correspond1890.
tournois engagés durant cet exercice pour la fortification, et
La dépense suivante, en droite ligne de la précédente,
8,4 % du total général des dépenses de 1363-1364 !
indique la réalisation d’une « cava au dessus du mur de la
En outre, et si l’on saisit bien le sens du texte, cet indi-
vidu a réalisé les fondations de cette paret pour 150 florins porte Montdebo » par les mêmes personnes pour la somme
et 2 gros d’argent, la ville incluant dans cette somme un de 20 gros d’argent, soit 77 florins et 3 gros d’argent, et
arriéré de 40 florins dû par Pierre Gelat1884. Au total donc, les donc 92 l. 14 s. tournois1891. La « cava » en question a-t-elle
travaux pour cette cavalha atteignent 180 l. 4 s. tournois qui le même sens que celle de l’alinéa précédent qui concernait
s’ajoutent au total précédent pour atteindre 570 l. tournois. les parets derrière chez G. Olric ? A-t-elle plutôt le sens de
« voûte » ou de « pièce voûtée » comme c’est parfois le cas
Ainsi, en partant du postulat que ce prix-fait, comme
à Aix (Bernardi 1995, 443) ?
c’est quelquefois le cas, devait inclure la construction des
hourds et des coursières, on aurait donc là une somme Quoi qu’il en soit, le 6 décembre 1361, on répertorie
globale approchant de près le coût réel de 126 brasses de 66 brasses un quart de paret au niveau de la porte
paret. Le prix à la brasse passerait ainsi à 4,52 l. tournois Montdebo, et 9 brasses et demi et un quart au niveau des
(au lieu des 3,09 l. tournois précédemment calculés), soit parets derrière chez G. Olric, soit au total 76 brasses pour
une augmentation d’environ 1,43 l. tournois par brasse une somme globale de 69 florins 4 gros et 6 barsalos. Les
pour la cavalha, auxquels il faudrait peut-être rajouter le taux de conversion proposés pour Toulouse par Ph. Wolff
prix de la réalisation du solin en pierre1885… ne peuvent s’appliquer en l’espèce1892, puisque d’après les
Trois ans plus tard, Arnaud Massip et ses compagnons calculs effectués grâce au registre, le florin vaut 24 s. tour-
réalisent 4,5 brasses de murs de terre massive pour un total nois en 1361 à Castelnaudary, et le gros 2 s. tournois1893 (et
de 10 florins et 1,5 gros (soit 12 l. 3 s. tournois), c’est-à- donc le barsalo un sou tournois ?). Les travaux attein-
dire un tarif à la brasse de 2,7 l. tournois environ1886. draient ainsi un total de 83 l. tournois, soit un coût à la
brasse extrêmement faible de 0,91 l. tournois, puisqu’on a
À première vue, le coût à la brasse semble rester stable
vu que ce prix est d’environ 3 l. tournois entre 1360 et
entre 1361 et 1366 mais il faut toutefois rester très
1366.
prudent : en effet, en 1361 comme en 1366, rien ne permet
de connaître la taille réelle de l’unité (brasse carrée ?), et Que déduire de cette observation ? La nature du contrat
elle n’était peut-être pas de 10 palmes comme en 13631887… (adjudication au moins-disant) serait essentiellement en
Au moins deux prix-faits attribués à l’encan ont pu être cause, et les tarifs auraient été volontairement tirés vers le
relevés concernant les parets1888 : le premier, le 5 octobre bas, au détriment -et c’est probable- de la qualité de la
1361, est de loin le plus complexe à interpréter. En effet, réalisation finale.

1883
Ibid., [f°1 r°1]. « Et fuerunt dicte summe recepte et solute seu expensi per dictum receptorem conputando recipiendo et solvendo florenum auri boni
ponderi ad 24 solidos turonentium parvorum. ».
1884
Ibid., [f°24 r°4]. « Item dicti domini consules dare fecerunt eidem pro faciendo cavalham dicte parietis ubi assetiaret eam 40 florenos auri habuit
de predictis in auro et argento praeter illa que habuerat a Petro Gelati centum quinquaginta florenos auri et duos gros argenti valent. 180 l. 4 s. tur. ».
1885
À moins de penser, et c’est logique, que la somme très importante de 180 l. tournois concerne également la construction du pied de la paret.
1886
Ibid., 4E76/CC51, 1366, [f°72 r°4]. « …an Ar. Masip en sos companhos per 4 brassas e miega de paret que avian faytas entro la paret vielha e la
nova de la Baffa 10 flor. 1 gros. mieg valo. 12 l. 3 s. tor. ».
1887
Les sources consultées ne mentionnent par ailleurs jamais -à une exception près- l’expression « vel circa » indiquant une marge d’erreur maximale
tolérée correspondant à 1/16e de la mesure considérée (Portet 2006, 159). Le seul cas concerne un acte notarié de Limoux (AD Aude, 4E206/DD1,
29 mai 1460. « …propter opportet dictum frustum muri in terram penitus postrari et eius cossole sive pes ipsi muri reffici de pariete sive caussolo de
calse arena et lapidibus ad perpetuam custodiam in amplitudine tresdecim palmorum et in altitudine duodecim vel circa… »). Dans les livres d’estime
du XVe siècle, « on n’a jamais mention d’une superficie approximative, alors que c’est pratiquement toujours le cas chez les notaires (x superficie « vel
circa ») » (Marandet 2006a, 483).
1888
En Bresse et Bugey, « lorsqu’elle se fait en dehors du mandement de la châtellenie, l’adjudication est en général moins avantageuse pour les maîtres
de métiers. En effet, les maîtres artisans qui ne sont pas originaires de la châtellenie ou de sa proche région ont à compter, pour eux et pour leurs ouvriers
et apprentis, des frais de déplacement et d’hébergement. Cela limite leur marge de manœuvre dans les négociations pour descendre dans les prix ou
pour monter dans la quantité de travail tandis que, résidants sur place, des artisans n’ont pas ces frais annexes et peuvent davantage marchander, ce dont
tirent profit les finances de la châtellenie » (Kersuzan 2005, 311).
1889
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, « Et fuit facta administranto hujusmodi computanto florenum pro 12 s. tol. ».
1890
Ibid., [f°114 r°8]. « Item die quinta octobris dicti domini consules tradiderunt parietes retro G. Olricii et porte Mondebonis videlicet : G. Johannis,
Bernardo Anhant, Jacobo Madrerias, Ramundo Tocarelli ad extinctum candele tanquam ultimas offerentibus et debuunt habere diruendo parietes retro
Guillelmum Olricii usque ad furnum et reficiendo pro cava duos florenos... ». Compte tenu de la somme très élevée, il ne s’agirait pas d’une quittance
de marché, c’est-à-dire une somme inscrite dans le compte municipal pour l’acquittement des frais notariaux, comme c’est quelquefois le cas à Sens
(Cailleaux 1985, 150). Serait-ce alors de la somme effectivement versée aux constructeurs ?
1891
Ibid., [f°114 v°1]. « Item pro cava facienda supra murum porte Mondebonis 20 grossos argenti pro quibus solvi fecerunt prenominatis in diversis
solutionibus 77 florenos 3 grossos argenti valentes. 92 l.14 s. tur. ».
1892
Cités dans : Bompaire, Dumas 2000, 588.
1893
AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°87 r°1]. « …cuidam forasterio vocato En. Doayh pro 10 corondis quelibet 14 palmorum receptis per B. Alaberti et
B. Johannis et positas in ambanis qui sunt de turre Mercadalis ad portam magistri Bertolomei Constantini 20 gros valent. 40 s. tur. ».

209
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Enfin, et pour conclure sur cette affaire, on signalera deniers (soit 1 l. 16 s. 6 d. tournois), davantage que pour
que les détenteurs de l’opération ont outrepassé les direc- une brasse1899 ! Quelle est alors la valeur réelle de cette
tives fixées au départ : ils ont en effet réalisé les parets de dernière ? Le mode de calcul de la rémunération était-il
la porte Montdebo une canne trop haut, fait probablement identique1900 ?
constaté après paiement total du travail, raison pour
L’année suivante, trois maçons ont été rétribués 1 florin
laquelle les titulaires ont indûment perçu 12 florins et
la brasse (1 l. 4 s. tournois) soit au total atteint 25 l. 16 s.
10 gros d’argent. Plutôt que de réclamer l’intégralité de la
tournois pour 21,5 brasses1901. Le prix à la brasse d’une
somme ou de faire détruire une partie de l’ouvrage, les
maçonnerie à pierres et chaux atteindrait donc un peu plus
consuls décident de ne demander que la moitié ou à peu
d’1 l. tournois dans les années 1360.
près de ce total (6 florins)1894.
Ce montant renforcerait le jugement des consuls émis
La seconde adjudication date de 1441 : pour le prix de
quelques 40 années plus tard, en 1408 : en effet, à cette
deux moutons d’or la brasse (carrée ?), les parediers
édifient 27,5 brasses d’ouvrage (au total 60 moutons cinq occasion, ils n’avaient finalement pas choisi de faire
gros, soit 44 l. 10 s. parisis)1895. Si l’on convertit cette construire une paret pour la porte Montdebo, mais au
somme en tournois1896, on obtient 55 l., soit un coût à la contraire un mur à pierres et chaux, ce dernier étant
brasse d’environ 2 l. tournois, montant inférieur au taux « meilleur marché »1902.
calculé 80 ans plus tôt, mais qui, compte tenu des fluctua- Pourquoi, dans ce cas, les constructions de terre crue
tions monétaires, paraît rester dans une moyenne honorable. sont-elles si prépondérantes à Castelnaudary ? Très proba-
Après achèvement de l’ouvrage, parediers et compa- blement parce que la pierre était presque totalement
gnons reçoivent comme cadeau ou pourboire (estrena) 4 s. absente de la région où les ouvrages devaient être édifiés.
parisis (soit 5 s. tournois)1897 qui viennent s’ajouter à la De fait, les édiles avaient vraisemblablement étudié la
somme globale (au final 60 l. tournois). possibilité d’importer pierres et chaux en quantité suffi-
sante pour réaliser tours et enceintes avec ces seuls maté-
Le calcul de ces sommes n’a réellement d’intérêt que si
riaux, et le coût de revient devait être au moins égal -sinon
on peut le comparer au coût d’un ouvrage à pierres et
supérieur- au prix à la brasse versé aux parediers, raison
chaux bâti à la même époque. On possède par chance de
pour laquelle ces derniers avaient peu de motifs de s’in-
rares prix-faits pour des constructions de cette nature en
quiéter pour leur emploi, d’autant que la présence de
1359-1360 : ainsi, en 1359, pour les travaux du maçon
bandes armées dans le secteur devait rendre tout transport
Dominique Gaston, le prix moyen de la brasse atteint
de matériaux assez périlleux1903 et en augmenter de ce fait
1,5 florins, soit 1 l. 16 s. tournois1898, soit moitié moins que
pour un mur de terre crue. Encore faudrait-il bien entendu la cherté et le délai d’acheminement.
savoir si la brasse utilisée était la même… En effet, pour la On pourrait même estimer que le plus bas tarif
surélévation de la porte Saint-Antoine (33 palmes), cet rencontré pour la construction d’un mur de terre (0,91 l.
homme reçoit pour chaque palme 1 florin 1 gros et 6 tournois/brasse, supra) prenait en compte les coûts fixés

1894
Ibid., [f°114 v°3]. « Et fit assendunt 69 florenos 4 grossos 6 barsalonis et fit receperant plus quam debebant 12 florenos 10 grossos argenti de quibus
dicento quod parietes porte Mondebonis operate fuerunt in altum ultra conventiones quia non debebant operare in altum nisi per unam cannam dicti
domini consules remiserunt ipsis sex florenos auri ». Dans d’autres circonstances, certains arpenteurs demandent au contraire au commanditaire de
verser un complément (1 florin et 8 gros) à la somme initiale, considérant que les deux cannes carrées réalisées « sont en haut et plus pénibles à exécuter
que si elles étaient basses » (Bernardi, Mignon 2002, 314).
1895
Ibid., 4E76/CC77, 1441, [f°24] ; [f°25 r°1]. « Item foc pagat an P. Hebrearn, paredier, e a P. Lamet son companhon les cals avian presa a far ladita
paretz tras mon ostal daqual paretz li foc lyvrada a l’encant e a l’estint de la candela per le pretz de 2 motos en aur la brasa laqual paretz foc page-
lada am les senhors de cosols 27 brasas media que monta al pretz desus dit saysanta motos sinc grossos d’aur valon. 44 l. 10 s. ».
1896
Selon le rapport 4 parisis = 5 tournois, équivalence établie depuis Philippe Auguste jusqu’à la disparition du parisis (information aimablement
communiquée par M. Bompaire ; Bompaire, Dumas 2000, 315-316).
1897
AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°25 v°2]. « Item foc paguat als mastres da la paret e als companhos cant agarero acabada la dite paretz per estrena
car aysies acostumat per tot catre so. 4 s. ».
1898
Ibid., 4E76/CC48, 1359. « Sequitur opera facta ad pretium factum per Dominicum Guastonis peyrerium anno dicti consulatus pro quibus persolvi
fecerunt eidem summas infrascriptas » ; [f°31 v°4]. « Item pro quatuor brachiatis et media muri per ipsum factis retro hospicium domini Petri Raynardi
pro qualibet brachiata unum florenum et medium facit 6 florenos 9 grossos valent. 8 l. 2 s. tur. ».
1899
Ibid., 4E76/CC48, 1359, [f°31 v°1]. « Primo solvi fecerunt dicto Dominico Gastonis pro triginta tribus palmis quibus elevavit seu auctmentavit in
altitudine turris porte Beati Antonini dicti castri pro quolibet palmo unum florenum 1 grossos 6 d. facit in universo 37 florenos 1 grossos 6 d. valent
in universo. 44 l. 11 s. tur. » ; [f°31 v°2]. « ...eidem pro 12 brachiatis et media muri per ipsum facti in clausuris portus Bordarum prope portam de Got
Feran pro qualibet brachiata unum florenum et medium faciunt 18 florenos florenos (sic) auri 9 grossos valent. 22 l. 10 s. tur. ».
1900
S’agit-il d’une erreur grossière du scribe qui aurait inscrit « palme » au lieu de « brasse » ?
1901
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°55 v°4]. « ...an Ramon Johan e an Johan Mauri e a mastre P. Gast peyriers per 21 brassa e media de mur
que avian fayt a la obra de la barbacana de la porta de la Plassa avian per brassa de lors mas 1 flori d’aur montero 21 floris d’aur 6 grossos que
valo comptat flori a 12 s. 25 l. 16 s. tor. ».
1902
Ibid., 4E76/CC64, 1408, [f°36 r°3]. « Item a XXV d’abril fero paguar an P. Samata de Tonis per 12 postz d’avet de quatre canas de lonc cascuna
las cals foro compradas per B. La Guarda fustier al loc de Toloza car ayssi li foc mandat per les senhors de cossols atendut que lom avia cologuadas
affar las paretz de la porta Mondebo las cals devian estre de taula e entre mieg foc cologuat affar de mur am voler del cosselh car disso que may
valguera e milhor marcat fora de mur que de paret e per so no foro mezas las postz en opts costero per tot de prima compra. 3 fr. ».
1903
Selon J. Gimpel, « le prix du transport des pierres était tellement élevé au Moyen Âge qu’il y avait un grand intérêt à les dégrossir dans la carrière.
On évalue en effet que le prix du transport d’une charrette de pierres de la carrière au chantier distant de dix-huit kilomètres équivalait au prix de la
pierre achetée dans la carrière » (Gimpel 1980, 58).

210
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

pour les constructions en pierre (un peu plus d’1 l. tour- (fig. 58). Si l’on exclut d’emblée la démolition d’une
nois/brasse) afin de rester concurrentiel vis-à-vis d’éven- vieille tour en terre en 1460 et la réfection des parets de
tuels maçons intéressés par le marché. l’ostal public en 1450-1451, des huit prix-faits restants,
seuls trois permettent de déterminer un prix à la brasse, les
Il s’agit là d’une information d’importance pour notre
autres n’indiquant même pas la somme totale versée aux
étude : jusque là, on aurait pu en effet penser que c’était en
parediers.
raison d’un coût moindre que la construction en terre était
préférée à celle en pierre ; or, compte des déductions faites De fait, si l’on retient un contrat de 1354-1355 concer-
à partir des mentions chauriennes, on aurait plutôt tendance nant la paret près de la fontaine Sainte-Marie, on arrive à
à envisager le contraire1904… un prix de 3 écus la brasse1905.
On ne connaît pas la correspondance entre l’écu et la
11.3.1.2 - Toulouse
monnaie tournois à Toulouse à cette époque, mais si l’on
Malgré les dix prix-faits relatifs aux travaux sur des compare cette dépense avec les travaux réalisés par P. de
parets, les informations relatives au coût global des Lauretgia la même année1906, la valeur représentée est extrê-
édifices, ou au prix à la brasse, sont relativement pauvres mement forte par rapport aux 8 s. tol. par brasse de 4 pans

Fig. 58 : Toulouse : prix-faits pour les constructions de terre massive.

1904
Ailleurs, mais toujours en Lauragais, R. Corraze pensait également qu’« aux quatorzième et quinzième siècles, tous les villages du Lauragais sont
défendus et protégés par un fortalicium, enceinte habituellement formée par des murailles de terre, peu coûteuses à élever, et auxquelles s’appuyaient
les maisons » (Corraze 1934, 14). Cependant, « François Cointereaux, qui fut, à la fin du XVIIIe siècle le théoricien […] de la construction en terre
crue insistait sur l’aspect économique, le vil prix de la terre crue. La maison en terre serait-elle la maison du pauvre ? Pas nécessairement : la terre crue
constituait une réponse à l’absence d’autres matériaux et la tradition faisait valoir les qualités d’isolation thermique que procurent des parois en terre »
(Pesez 1998c, 68).
1905
AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°103 v°3]. « An Bomacip de San Salvi de Tilh deven per levar la paret costa la porta de la font de Santa Maria
debas le Bazagle e trobem que fe 7 brassas de lonc et de 15 palms de naut que montan 13 brassas e pus 16 brassas de 14 palms de naut que montan
a 28 brassas davia que montan per tot 41 brassa que fom 123 escud. ».
1906
Ibid., [f°122 r°3]. « Dem a pres fait an P. de Lauretgia brassier e paredier que sta a San Subra a la cariera dels Espanhols per deffar et per far la
paret de las Sors Repentidas de Sant Subra que era costa la porta de la font Santa Maria e aisso fom per issamplar la leya car era estreita e aisso fo
fait per mandament del capitol e deu aver 8 s. tol. per cada brassa de 4 palms d’espess escud a [21 rat.] 22 sol. tol. e aisso fo fait a XIII vehaire ».

211
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

d’épaisseur versés à cette occasion. Ces derniers attein- postulat que l’écu d’or vaut 27 s. tournois (même si on se
draient ainsi 16 s. tournois par brasse, chiffre bien faible si situe 30 ans après la dépense toulousaine), cela reviendrait à
on le confronte aux mentions chauriennes. Même en englo- un tarif de 54 s. tournois la canne, soit 2 l. 14 s . tournois,
bant la bruyère, (mentionnée en marge comme étant « en c’est-à-dire un montant assez faible, même si, et c’est très
plus »), il paraît difficile d’approcher les 3 l. tournois par surprenant, cette somme est bien supérieure aux 12 s. 6 d.
brasse, ou à peu près, relevées à Castelnaudary... tournois par canne attribués en 1461. Il faut voir là selon
Quant à la dernière mention (1438), elle stipule que les nous un effet tangible de la fluctuation monétaire et des
deux parediers bretons de Saint-Brieuc seront rémunérés grandes difficultés qu’il y a à comparer ou convertir des
un écu d’or les trois brasses de haut. Si l’on part du postulat données à partir de systèmes peu fiables, car trop éloignés de
qu’à cette époque un écu d’or vaut environ 27 s. tour- la zone d’étude.
nois1907, cela reviendrait à 9 s tournois la brasse, c’est-à-dire La seule véritable certitude concerne l’originalité du
fort peu, et en tout cas bien en deçà des tarifs pratiqués mode de paiement des parediers. En 1478, chaque habitant
dans la capitale chaurienne. devait soit leur verser le montant d’une journée de travail,
Hormis l’incertitude des conversions, rendant les soit 2 s. 6 d. tournois1911. Le système mis en place dans les
comparaisons hasardeuses, les différences entre les dépenses de 1481 et 1484 est quelque peu similaire,
mesures selon les villes sont peut-être aussi à l’origine de quoique légèrement différent : dans ces cas en effet, les
ces variations, de même que les clauses contractuelles consuls ne laissent pas d’option aux habitants pour contri-
(inconnues)1908. Dans le cas de Toulouse, les faibles tarifs buer aux travaux de réparation : chacun d’entre eux devra
relevés pourraient peut-être en partie s’expliquer parce que respectivement verser aux parediers 14 d. et 15 d. tour-
la ville fournissait au paredier la plupart, sinon la totalité nois1912. Toutefois, il est impossible de connaître le nombre
du matériel, et une partie du personnel, hypothèse incitant d’habitants à l’époque, même approximativement, nous
donc à rester très prudent et à ne pas tirer de conclusions privant ainsi d’une estimation du prix global des travaux.
trop hâtives.
11.3.2 - Les constructions en torchis
11.3.1.3 - Montréal À Castelnaudary, pour la période 1359-1362, on
Le problème est ici quelque peu identique à celui de recense douze prix-faits réalisés par onze personnes diffé-
Toulouse, quoique différent dans la forme : sur les cinq rentes pour des opérations liées au torchis, le total de ces
contrats répertoriés entre 1409 et 1481, un seul permet dernières atteignant 64 l. 15 s. 8 d. tournois (fig. 60). Ils
véritablement d’estimer le prix global et le coût à la canne n’indiquent toutefois jamais le volume total de l’ouvrage
(et non pas à la brasse), puisque les autres ne donnent ni le achevé, rendant ainsi les informations exploitables extrê-
montant total, ni le tarif unitaire (fig. 59). Une seule excep- mement réduites.
tion cependant : une dépense du 10 août 1461 inscrite lors Dès 1359-1360, Pierre de Bédarieux et Elie Fargues se
d’une adjudication à la chandelle prévoyant que les parets chargent ainsi de la porte du Terrier et des gaytils du port
réalisées par Pierre Durandel seront construites au prix de de l’Estrade pour la somme de 10 florins (12 l. tournois)1913.
12 s. 6 d. tournois la canne (carrée ou linéaire ?), sans Dans un autre cas, le terme « prix-fait » n’est pas expres-
pouvoir connaître les dimensions finales de l’ouvrage1909. sément cité, mais compte-tenu du contexte et de la rému-
La mention la plus complète remonte au 15 avril 1467, nération perçue, il ne s’agit probablement pas d’un paie-
lors d’une attribution aux enchères : deux parediers se ment à la journée : en effet, le charpentier G. Burd reçoit,
voient concéder la construction d’une paret pour 20 écus pour le torchis et la couverture de deux échauguettes,
d’or les 10 cannes, soit 2 écus d’or la canne1910, le transport 4 florins et 6 gros (108 s. tournois, soit 4 l. 12 s. tournois),
de la bruyère étant à la charge des consuls. Si l’on part du montant qui serait démesuré pour un salaire quotidien1914.

1907
On se base pour cela, faute de mieux, sur le cours observé cette année-là à Montpellier (Bompaire, Dumas 2000, 651).
1908
On a vu en effet, pour le village de Montréal (Aude), que les obligations concernant la fourniture de certains matériaux et leur transport étaient rela-
tivement variables selon les cas.
1909
On sait désormais à quel point les méthodes de cannage et d’arpentage médiévales sont complexes et fluctuantes (Bernardi, Mignon 2002, 312 ;
Butaud 2002). Selon P. Portet toutefois, c’est à la fin du XIVe siècle et au début du XVe siècle « que se façonnent des gestes techniques et que se dévelop-
pent les justifications théoriques qui fondent les premières ébauches des théories modernes de précision » (Portet 2006, 160).
1910
AC Montréal, 1D2, [f°34 r°1]. « L’an 1467 a XV de abrial conogan tostz que senhor Johan Sant, senhor Dorde Cadoal, senhor Peyre Malet, senhor
Huc Lavas cossols de l’an presen menro al encan public del loc d’esta vila hun tros de muralha pres de la porta Rezes que ha be de lonc 10 canas ».
1911
Ibid., [f°118 r°1]. « Anno Domini 1478 et die quinta mensis maicii […] videlicet quod dicti consules tenebuntur eisdem Blan, Saura, Grelini, Marti
facere exsolvere per habitantes dicti loci unum jornalem hominis pro quelibet homo facere suis sumptibus sive expensibus aut summam duorum solidos
6 d. tur. pro quolibet habitanti solvabile… ».
1912
Ibid., [f°117 v°1]. « Anno Domini 1481 in die septima mensis maicii […] quod dicti consules tenebuntur eisdem Jenle, Blanchi et Guiraudi facere
exsolvere per habitantes dicti loci summam 1 s. 2 d. tur. pro quolibet habitanti ». [f°80 r°1]. « Anno Domini 1484 e die XV mensis febroari [...] Item
es pacta que los dit Greule e Clerc auront per lors penas e travalx e despens [de cascun habitant de la villa rat. ] quels feront en faisant les causas
dessus dit de cascun habitant del present loc la soma de quinze d. al qual pus e an les partes dessus dit la dita constructiou e edifficaciou sont
escazudas als dits Greule e Clerc al enquant public del dit loc… ».
1913
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°25 r°1]. « Item dederunt ad pretium factum dicti domini consules Petro Bedaresii et Helie Farguas ad torti-
sandum portam Terrerii et gaycillos portus Astrate pro quibus solvi fecerunt eisdem 10 florenos auri precio. 12 l.tur. ».
1914
Ibid., [f°29 v°4]. « ...eidem pro tortitiando, bardando et coperiendo duos gaycillos in clausuris portus Bordarum et pro tortisando partem porte de
Got Feran quatuor florenos auri 6 grossos valent florenum ad 24 s. tur. 108 s. tur. ».

212
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

Document Date NOM, Qualification Localisation Nature du Dimensions Prix global


prénom certaine du travail contrat bâties
ou supposée
( ?)

AC 25 juin ROGIER ? ?
Montréal, 1409 Andrieu paradeyares Porte de 56 cannes somme restant due :
1D1, Razes 5 l. 7 s. 6 d.
[f°non écrit DE BASSER (monnaie inconnue)
r°1] Johan
Ibid., 1D2, 10 août DURANDEL vallifactor Parets près de Adjudication ? 12 s. 6 d. tournois la
[f°23 r°1] 1461 Petrus paredier ? la Porte de à l’encan canne
Razes, de
l’Eau, des
Carmes, du
Château,
Esquive
Ibid., 15 GAMACHA paredies Paret près de Adjudication 10 cannes de 20 écus d’or
[f°34 r°1] avril Johan la porte Razès à l’encan long
1467
LA SALA
Johan
Ibid., 15 GREULE, parediers ? Porte Esquive Adjudication 12 cannes de 15 d. tournois par
[f°80 r°1] février GRELE à l’encan long habitant
1484 maior
Johan

CLERC
PRUNIER
Guillermus

PUJOLS
Petrus
Ibid., 7 mai JENLE maior parediers ? Paret dans le ? ? 1 s. 2 d. tournois par
[f°117 v°1] 1481 Johan quartier Porte habitant
JENLE minor Esquive
Johan
BLANC
Anthonius
GUIRAUD
Anthonius
(fils de Johan
GUIRAUD
alias LE
BESSO)
Fig. 59 : Montréal : prix-faits pour les constructions de terre massive.

En 1360-1361, Arnaud Massip et Raymond Vidal la somme versée1916. Quant à Jean de l’Hôpital, il effectue
enduisent de torchis une échauguette et la porte de la Baffe un seul tortissage sur un « cadafalc retro alam » en compa-
pour 5 florins et 14 s. tournois (6 l. 13 s. 5 d. tournois)1915 ; gnie de plusieurs personnes, opération qui lui rapporte 18 s.
Pierre de Bédarieux et Elie Fargues, accompagnés de toulzas (1 l. 14 s. 7 d. tournois)1917.
G. Malamosta, s’occupent des cadafalcs autour du cloître En 1361-1362, Guillaume Jean et Pierre Lambert
des Frères Mineurs : à cette occasion, ils sont rémunérés travaillent sur un pal près de la porte Montdebo pour
d’un arriéré de paiement (restam eis debitam) de 2 florins 3 florins (3 l. 12 s. tournois)1918 ; dans le même temps,
et 4 s. tournois (2 l.15 s. 8 d. tournois), donc, une partie de Arnaud Massip s’occupe d’enduire de torchis un gaytil

1915
Ibid., 1360-1361, [f°63 r°7]. « …an Ar. Masip e an Ramon Vidal per esparonar e per tortisar le dit gaytil e la porta de la Baffa la qual obra avian
fayta a pretz fayt de que lor fo pagat 5 floris d’aur 14 s. tor. flori a 12 s. 6 d. tol. valo comptat flori a 12 s. 6 l. 13 s. 5 d. tor. ».
1916
Ibid., [f°74 r°5]. « …conduxissent ad pretium factum ad tortisandum cadafalcos qui sunt in claustra seu circa claustrum Fratrum Minorum Elie
Fargas P. Bederes G. Malamostra domini consules anni presentis opere pro petrato fecerunt eis persolvi restam eis debitam 2 florenos auri et quatuor
s. tol. valent. 2 l. 15 s. 8 d. tur… ».
1917
Ibid., [f°80 r°9]. « Item Johannes de Hospitali cum non nullis aliis tortissavit dictum cadafalcum ad pretium factum habuit 18 s. tol. valent. 1 l. 14 s.
7 d. tur. ».
1918
Ibid., [f°76 r°8]. « …in tortissando dictum palum G. Johannis, Petrus Lamberti qui precio facto dictum torticium operati fuerunt habunt 3 florenos
valent. 3 l. 12 s. tur. ».

213
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Document Date NOMS, Qualification réelle Localisation du Dimensions Prix global


prénoms ou supposée ( ?) travail /durée
AD Aude, 1359- FARGUES
4E76/CC48, 1360 Elie porte du Terrier, ?
[f°25 r°1] gaytils du port de 12 l. tournois
DE « tortissayres » ? l’Estrade
BEDARIEUX
Pierre

Ibid., [f°29 v°4] 1359- BURD G. charpentier gaytils port des ? 108 s. tournois
1360 Bordes (4 l. 12 s.
tournois)
MANCIP
Arnaud « tortissayre » ?
Ibid., 1360- paredier/valadier gaytil, porte de la
[f°63 r°7] 1361 Baffe ? 6 l. 13 s. 5 d.
tournois
VIDAL ?
Raymond

FARGUES « tortissayre » ?
Elie
cadafalc près du ? 2 l. 15 s. 8 d.
Ibid., 1360- DE cloître des Frères tournois (partiel)
[f°74 r°5] 1361 BEDARIEUX « tortissayre » ? Mineurs
Pierre
manoeuvre ?
MALAMOSTA
G.

Ibid., [f°80 r°9] 1360- DE L’HÔPITAL « tortissayre » ? cadafalc ? 1 l. 14 s. 7 d.


1361 Jean tournois
1361- JEAN « tortissayre » ? ?
Ibid., [f°76 r°8] 1362 Guillaume paredier ?
pal près de la porte 3 l. 12 s. tournois
LAMBERT « tortissayre » ? Montdebo
Pierre

Ibid., [f°95 v°5] 26 PEYROT ? gaytil près de la ? 18 s. tournois


novembre porte Narbonnaise
1361
Ibid., [f°97 r°3] 1361- MANCIP « tortissayre » ? gaytil derrière le ? 40 s. tournois
1362 Arnaud paredier/valadier château
Ibid., [f°99 v°9] 1361- paret port des ? 4 l. 10 s. tournois
1362 Bordes
Ibid., [f°117 v°1] 1361- embans de la porte ? 27 l. 12 s.
1362 SARRASIN charpentier Montdebo tournois
Ibid., [f°126 v°10] 1361- Raymond embans derrière ? ?
1362 chez Bernard
Service
Ibid., [f°103 v°2] 1361- OT/FERRAN « tortissayre » ? agassier entre la ? 18 s. tournois
1362 Pierre porte ( ?) et le (partiel)
château
Fig. 60 : Castelnaudary, (1359-1362) : prix-faits pour les constructions en torchis.

214
LE COÛT DE LA CONSTRUCTION EN TERRE CRUE LA DIMENSION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA TERRE CRUE
DANS LA FORTIFICATION MEDIEVALE EN LAURAGAIS ET TOULOUSAIN

derrière le château pour 20 s. toulzas (40 s. tournois, soit sage (torchis) devait influer sur le coût final de l’ouvrage,
2 l. tournois)1919. comme c’était le cas en Normandie1925.
Quant à Raymond Sarrasin, le charpentier, il est titu-
laire de trois prix-faits : un pour les hourds des nouvelles
parets du port des Bordes (3 florins et 9 gros, soit 4 l. 10 s.
tournois)1920, un pour les hourds de la porte Montdebo À l’issue de cette partie, plusieurs informations ayant
(23 florins, soit 27 l. 12 s. tournois)1921, et un dernier (rému- trait aux aspects sociaux et économiques de la terre crue
nération inconnue) pour les ambans derrière chez maître dans la fortification sont apparues.
Bernard Service1922. Concernant les aspects sociaux tout d’abord, les
Enfin, Pierre Ot, alias Ferran, se charge d’enduire de personnes dirigeant les opérations de mise en œuvre de la
torchis et de recouvrir un agassier entre la porte (?) et le terre massive sont toujours qualifiées, et ce en raison de la
château, mais également de couvrir la tour de l’Estrade technicité du travail faisant intervenir des calculs géomé-
pour la somme globale de 18 s. tournois (il est impossible triques et une réflexion sur la physique des matériaux et les
de distinguer les deux opérations)1923. poussées, même de manière empirique, surtout lorsque les
enceintes étaient bâties avec des coffrages, ce qui était
De fait, à la lumière de ces rares prix-faits, il est bien
peut-être la majorité des cas, du moins pour les villes d’une
délicat de pouvoir tirer de réelles informations quant au
certaine importance. Néanmoins, la quasi-absence de
coût réel de l’opération de tortissage elle-même, puisque
qualificatifs (à l’exception des charpentiers) empêche de
celle-ci est souvent comprise dans « l’habillage » complet savoir si ces individus peuvent systématiquement se voir
de la structure (amban, gaytil, agassier, etc.). attribuer le terme de « maître », ou s’il ne s’agit que d’ou-
L’absence systématique des dimensions empêche par vriers qualifiés.
ailleurs de calculer un coût à la canne ou à la brasse linéaire Les opérations liées au torchis et à l’enterrement
(ou à la canne ou à la brasse carrée) : on ne peut donc requierrent un savoir-faire moindre, et ne sont souvent diri-
savoir si le prix global de ces opérations reste constant ou gées (mais pas toujours) que par personnes ayant un statut
connaît des fluctuations, mais on peut se demander si cette d’ouvriers qualifiés, ou quelquefois de manœuvres : là
absence systématique ne cache pas un mode de calcul encore, aucune d’entre elles, à l’exception une nouvelle
différent de celui utilisé pour les murs de terre massive… fois des charpentiers intervenant dans le cadre de prix-faits,
En outre, on ne sait si ces prix-faits incluent systémati- n’est en effet dénommée « maître » ou « tortissayre » à
quement le coût des éléments en bois formant le colom- Castelnaudary.
bage (solas, riostas, corondas) et celui des sparos1924, ou Leurs origines, lorsqu’elles sont précisées, sont loin
s’ils ne se rapportent qu’à la seule préparation du bart et à d’être sans intérêt. Si une majorité d’artisans provient des
son étalement sur la structure : si certains contrats mention- environs de Castelnaudary ou du Sud-Ouest de la France,
nent l’obligation de couvrir ces dernières (voliges, tuiles), une autre partie, notamment à Toulouse, est originaire de
certainement pour éviter que le torchis de ne se dégrade, on Bretagne. La plupart des ouvriers ou des manœuvres (quel-
ne sait rien en revanche des clauses contractuelles ni de la quefois des femmes) sont présents en nombre élevé,
nature précise du travail pour ces opérations de tortissage. compte tenu de l’ampleur des volumes de terre à mettre en
Il est par ailleurs probable que la composition du remplis- œuvre. Leurs apparitions fugaces dans le premier compte

1919
Ibid., 1361-1362, [f°97 r°3]. « Item Arnaudo Mancipii pro tortisando guacillum retro castrum qui fuit sibi datus pretio facto viginti solidos tol. ad
relationem Johannis Martini summa. 40 s. tur. ».
1920
Ibid., [f°99 v°9]. « ...Ramundo Saraceni pro tortisando e tortisia que erant super parietes novos primo factas portus Bordarum datis sibi pretio facto
ad relationem Johannis Fabri ad tres florenos novem grossos summa. 4 l.10 s. tur. ».
1921
Ibid., [f°117 v°1]. « ...tradiderunt dictos embannos pretio facto ad tortisandum, Ramundo Saraceni de portu Bordarum et debuit habere pro canna
decem palmorum 10 grossos argenti et debuit reddere tortisatis a quolibet latere reddere copertum de supra de tegulis et bardatum et planconatum
supra parietes ». [somme manquante]. [f°117 v°2]. « De quibus computavit facto opere in presentia Johannis Fabri computato cum eodem et deducto
omne illud opus quod est ante domos Bernardi Ricardi, Germani Gauberti et vicinorum suorum existentum in parietibus in 23 florenos auri valentes.
27 l. 12 s. tur. ».
1922
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°126 v°10]. « Item cum Bernardus Cardona, G. Cardona, G. Bigordani, Petrus Bertrandi, Petrus Lamberti, G.
Spelici, Faber Bordas, Ramundus Tocarelli, G. Johannis die presenti fuissent conducti ad tortissandum embanna retro magistrum Bernardum Servici
et ipsa die date fuerunt pretio facto Ramundo Saraceni ad tortissandum et essent conducti quilibet 3 s. 4 d. et post ipsa die operassent in dictas vallis
habuerunt quilibet septem primorum nominatorum 2 s. 8 d. et dicti tres ultimi quilibet 4 s. tur. summa. 30 s. 4 d. ».
1923
Ibid., [f°103 v°2]. « ...Petro Ot alias Ferandi pro tortisando et recoperiendo unum aguaserium inter portam et castrum et recoperiendo turim Astrate
ad relationem Johannis Martini. 18 s. tur. ».
1924
On sait, d’une manière générale, la place, mais également le coût important que revêt le bois dans la construction médiévale. Ainsi, à Harfleur, à la
fin du XVe siècle « les dépenses dues au bois et à la charpenterie arrivent en deuxième position, derrière les dépenses de maçonnerie (y compris la
pierre). Par ailleurs […] sur l’ensemble du chantier, c’est à dire pour des travaux à peu près complets de fortifications, elles représentent environ un
sixième des dépenses totales. La place du bois et de la charpenterie est donc inférieure à celle de la pierre et de la maçonnerie, mais assez largement
supérieure à celle des autres secteurs d’activité mis en œuvre sur les chantiers… » (Lardin 1999, 195). À Castelnaudary, la place occupée par le bois,
tant quantitative que financière, était encore plus importante, compte tenu de la rareté de la pierre et de son emploi relativement limité.
1925
En effet, « les maisons dieppoises étaient donc différentes de celles de Rouen, qui utilisaient presque toujours du plâtre pour remplir les colombages
des maisons de bois. Cette situation tenait au fait que le gypse dont on tirait le plâtre venait de la région parisienne par la Seine et ne pouvait arriver à
Dieppe que par la mer pour un prix généralement trop élevé... Par conséquent, si le plâtre n’était pas inconnu, il était utilisé par des propriétaires aux
revenus importants et le plus souvent pour des constructions de pierre » (Lardin 2006, 81).

215
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

(1359-1362) laissent sous-entendre que leur emploi dans le notamment les bois de grande taille permettant de les fabri-
secteur constructif n’était pas leur unique source de quer, sont quant à eux rares et chers, si bien que les consuls
revenus, fait impliquant l’existence d’une ou plusieurs chauriens sont parfois obligés d’aller jusqu’à Toulouse
autres professions leur permettant de vivre tout au long de pour se fournir1926.
l’année.
De fait, si le prix des matériaux est assez bien connu,
Le chantier chaurien a certainement drainé toute une celui du transport en revanche, notamment pour les
catégorie de personnes provenant de villages proches, dont éléments du colombage, souffre encore de lacunes impor-
certaines se sont peut-être par la suite installées à demeure tantes. Ces documents ne permettent en outre jamais,
en ville, trouvant une activité complémentaire à leurs comme cela a pu être précisément défini par ailleurs, de
revenus pendant quelques années. Castelnaudary et même connaître les taxes frappant les matériaux de construc-
Toulouse paraissent donc avoir eu dans le secteur d’activité tion1927, ni, a fortiori, de savoir si ces dernières connais-
de la terre crue une attraction non négligeable sur leurs saient de fortes variations selon les périodes et le type de
proches zones géographiques (rayon d’environ 30 km), matériau envisagé1928.
mais aussi sur des régions plus lointaines, essentiellement En conséquence, il paraissait bien hasardeux de tenter
languedociennes et bretonnes. d’évaluer le coût d’une construction au travers de la seule
Au niveau des aspects économiques, les diverses addition arithmétique des tarifs pratiqués. Dans tous les
sources chauriennes, toulousaines et montréalaises ont cas, les prix-faits sont l’indicateur le plus fiable pour
permis d’approcher les rémunérations des différentes caté- évaluer le coût d’ensemble, notamment pour la terre
gories de travailleurs sur une période relativement longue, massive : l’apport essentiel de leur étude est semble-t-il
mais avec des lacunes. d’avoir montré, de façon très probable, la plus grande
Par ailleurs, les clauses contractuelles, particulièrement cherté de ces ouvrages par rapport à ceux réalisés à pierres
celles fournies par les documents de Montréal, sont d’un et chaux, du moins à Castelnaudary pour l’époque consi-
grand intérêt pour cerner au mieux les obligations de dérée1929.
chaque partie sur un thème rarement détaillé par les Les métiers en rapport avec la terre crue ont donc été
registres comptables. absolument indispensables à la construction et la fortifica-
Quant à l’étude des matériaux entrant dans la composi- tion des villes et villages de cette zone géographique, et
tion des ouvrages en terre crue, elle n’aura pas permis de très probablement d’un grand quart Sud-Ouest de la
lever le voile sur la provenance de la terre (fossé ? France, du moins dans les régions non montagneuses et/ou
champs ?), même si cette dernière était très probablement dépourvues de pierre à bâtir, qui utilisaient la plupart du
gratuite à l’acquisition. La bruyère par contre (et le genêt temps ce mode d’édification pour les enceintes. Les profes-
dans certains cas), même si elle pousse à l’état sauvage, sions concernées utililisent la plupart du temps une main
nécessite de coûteuses opérations de taille, conditionne- d’œuvre polyvalente dont l’activité principale n’est que
ment, et transport, pour pouvoir être amenée à pied rarement liée à la terre crue, et dont les emplois annexes ne
d’œuvre, raison pour laquelle elle fait souvent l’objet d’un sont d’ailleurs vraisemblablement pas toujours en rapport
alinéa particulier dans les prix-faits. Les coffrages, et avec le secteur du bâtiment.

1926
À Toulouse également, le bois d’œuvre était omniprésent dans la construction, et les artisans allaient se fournir dans des massifs relativement
éloignés de la ville : « c’est avec les fustiers ou carpentiers que les Toulousains traitaient lorsqu’ils voulaient faire construire leurs oustals. Le bois nous
apparaît donc comme un des matériaux les plus nécessaires à la vie d’une grande agglomération comme Toulouse aux XIVe et XVe siècles. Quelles
ressources offrait la région pour répondre à ce besoin vital ? Les forêts du haut Comminges, de la Barousse et du Couserans formaient un premier
ensemble, qui fournissait surtout du bois de charpente, souvent dénommé « coral ». Les statuts des fustiers, rédigés en 1422, distinguent, parmi le bois
de charpente : le sapin, le coral (qui est sans doute du chêne) et le hêtre » (Wolff 1954, 280).
1927
On sait seulement que le tarif du péage de Castelnaudary, « rédigé en 1356 d’après l’ancien, nous est parvenu grâce à une excellente copie de
l’époque dans le cartulaire municipal. […] ; Le bois d’œuvre, travaillé ou non, s’il se vend ne paie rien, mais deux deniers s’il traverse la ville ; le bois
ordinaire ne paie rien » (Ramière de Fortanier 1970, 219).
1928
Bernardi 1998c. L’auteur souligne en conclusion qu’en Provence « la portée des initiatives prises par les autorités communales en faveur de l’ap-
provisionnement des chantiers reste difficile à apprécier, mais les multiples interventions relevées attestent largement de leur volonté de peser sur le
marché et la production. Elles ne le firent cependant pas de la même manière ni avec la même intensité suivant le matériau considéré. La question du
bois (à la fois bois d’œuvre et de chauffage) apparaît ainsi au centre de leurs préoccupations, puisqu’elle influait notamment sur les décisions prises à
l’encontre de la chaux et du plâtre. À l’inverse, la pierre est peu évoquée. Est-ce en raison de l’abondance des moellons fournis par les ramassages de
surface et la récupération ? Sa fourniture était-elle régie par des dispositions d’un autre type (non écrites, plus anciennes…) ? » (Ibid., 327, 328).
1929
Néanmoins, le faible nombre de prix-faits, tant pour les parets que pour les murs, incite à rester très prudent vis-à-vis de cette affirmation. Seule la
découverte d’autres contrats de ce type dans l’avenir permettra de tirer des conclusions plus solides.

216
CONCLUSION GÉNÉRALE, P. 217-222

CONCLUSION GÉNÉRALE

Au cœur du Lauragais, la ville de Castelnaudary a moindres importances, à la fois plus faciles à surprendre
connu un développement constant depuis sa création au mais également à tenir1932.
XIe siècle pour atteindre vers la fin du XIVe siècle une taille On pourait estimer que si Castelnaudary n’a plus été
intra-muros d’environ 10 hectares, c’est-à-dire à peu de prise ou assiégée après le sac du Prince Noir en novembre
choses près comparable à celle de la cité de Carcassonne à 1355, c’est en raison de « l’aspect dissuasif de la fortifica-
la même époque. Ses quatre extensions successives vers tion, qui fonctionna correctement » (Contamine 2002a,
l’ouest témoignent de sa vitalité et de sa réussite écono- 198). Ainsi, malgré le coût représenté par la construction et
mique, dues en partie à sa situation géographique, le long l’entretien de l’enceinte (très aléatoire, d’après les comptes
d’une voie très fréquentée reliant l’Aquitaine à la chauriens), mais également par les nécessaires indemnités
Méditerranée, qui a grandement favorisé son activité versées aux propriétaires dont les maisons ou les biens
commerçante. Pour la période bas-médiévale, la richesse étaient détruits pour le bien commun, les habitants et autres
des sources consulaires et des informations fournies par les consuls de la ville ont privilégié, dès le départ, et apparem-
travaux de J. Serres de Gauzy1930 permettent de savoir assez ment avec succès, cette notion « d’investissement
précisément dans quel contexte politico-militaire se sont défensif » avancée par Ph. Contamine1933.
déroulés les travaux de reconstruction de l’enceinte, de L’inquiétude des consuls chauriens est néanmoins très
1356 à 1366, puis ceux de son entretien, jusqu’à la fin de la réelle et transparaît souvent par l’intermédiaire de la plume
guerre : force est de constater, comme un peu partout à la du scribe lors des renforcements du guet, de la garde, ou de
même époque dans le royaume de France1931, l’insécurité l’armement de la ville, voire lors de la condamnation de
extrême des temps, engendrée par la présence des compa- certaines portes. Cependant, aucun facteur réellement
gnies, des Anglais et même des bandes armées du comte de objectif ne permet de mesurer l’ampleur de cette menace,
Foix, qui semblent souvent menacer la ville, sans jamais souvent diffuse, sur la bonne marche du chantier de recons-
vraiment oser s’y attaquer, préférant des localités de truction des fortifications. Si les mouvements des bandes

1930
AD Aude, 2J82, Serres de Gauzy (J.), Essai historique sur la ville de Castelnaudary, capitale du comté de Lauragais, 1780.
1931
Favier 1980, notamment 287-325.
1932
Ce n’est pas toujours le cas ailleurs, puisqu’en février 1388 par exemple, les routiers n’hésitent pas à s’emparer de Montferrand, la plus grosse ville
d’Auvergne (Teyssot 1996, 52).
1933
« On pourra en effet considérer les sommes consacrées par les villes et leurs habitants à leur défense non comme de simples dépenses répondant à
des exigences immédiates, impératives, mais comme de véritables investissements, en fonction d’une perspective à moyen ou long terme, dans la
mesure d’une part, où les communautés et les individus, les personnes physiques et morales, acceptaient de consacrer une partie de leurs ressources à
des biens et des équipements militaires durables, dont le profit risquait de n’apparaître que dans un délai déterminé et où d’autre part, ces mêmes
communautés ou individus, par un calcul plus ou moins explicite, en tout cas par une démarche rationnelle, estimaient que les dépenses militaires
étaient susceptibles, en fin de compte, d’être inférieures aux pertes matérielles et humaines qu’entraînerait leur absence ou leur insuffisance.
Lorsqu’une ville décide que la nouvelle enceinte qu’elle projette n’englobera pas tel ou tel faubourg ou nécessitera l’expropriation d’un certain nombre
de biens immobiliers, la destruction d’un bâtiment, l’arrachage d’une vigne ou d’un verger, c’est qu’elle pense que le bénéfice de l’opération sera supé-
rieur à son coût et qu’agrandir l’enceinte de façon à ce qu’elle englobe toutes les maisons, tous les biens urbains, représenterait un poids trop lourd par
rapport aux capitaux qui se trouveraient ainsi à l’abri (Contamine 1978, 23, 24). Ainsi, même si les fortifications avaient un coût certain, « ne serait-ce
que pour indemniser tant bien que mal les propriétaires lésés, sur le long terme, ce coût était jugé rentable : c’est pourquoi il est permis de parler d’in-
vestissement défensif ou dissuasif. On est là en présence d’une dimension capitale du phénomène urbain… » (Contamine 2002a, 210).

217
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

armées ont pu par moments restreindre ou stopper l’appro- (observations, relevés, coupes) mais également grâce à
visionnement en matériaux, on ne sait jamais si ce phéno- l’apport des écrits.
mène s’est véritablement produit, ni quelle a pu être sa L’outillage employé (rabassieyra, andusat, prual, etc.),
durée. En outre, Castelnaudary assurait l’essentiel, pour ne très discret au travers des comptes, demandera des investi-
pas dire la totalité de ses fournitures en matériaux dans un gations supplémentaires afin d’être mieux cerné quant à ses
rayon d’une trentaine de kilomètres en moyenne1934 : cet formes et ses fonctions, notamment en ce qui concerne les
état de fait, utilisant au maximum les ressources locales, a récipients (semals) et l’utilisation ou non de pisoirs ou de
peut-être eu pour effet de pénaliser moins durement la triques dans certains cas.
capitale du Lauragais et ses fournisseurs… D’ailleurs, la
question de l’incidence même de la guerre sur la construc- L’essai de caractérisation des méthodes de construction
tion en général, et sur la fortification en particulier (frein ou a néanmoins mis en lumière la présence de bauge (gason,
moteur de l’activité économique ?), reste également gachouls) pendant la guerre de Cent Ans et au-delà, mais
posée… un doute subsiste encore sur le fait de savoir si la technique
Enfin, Castelnaudary tisse davantage de liens humains des « parets coffrées » employée à Castelnaudary,
et économiques avec le Toulousain, à l’ouest, le pays Toulouse, ou Albi était édifiée selon le procédé de la bauge
tarnais, au nord, et la zone ariégeoise, au sud, qu’avec coffrée ou à partir d’une variante du pisé employant un
Carcassonne, à l’est. Cette constation semble quelque peu damage. Il a cependant permis de confirmer que deux
paradoxale compte tenu de la proximité géographique, termes (paret, tapia) désignaient systématiquement dans
mais rappelons toutefois que cette ville n’appartenait pas à les sources un mur de terre crue massive, et ce quelle que
cette dernière sénéchaussée. soit sa méthode d’édification, pour peu que l’on se trouve
bien entendu dans une région où ces usages constructifs
Les défenses sont quant à elles d’un concept relative- sont connus et utilisés.
ment complexe puisque l’enceinte n’est qu’un élément du
vaste système de protection échelonné en profondeur. Un L’enceinte chaurienne constitue l’ultime élément de
défense de l’agglomération, et ce d’autant que la ville ne
obstacle avancé est constitué par une palissade en bois
s’est pas développée de manière concentrique : dénommée
(précédée d’un probable petit fossé), encerclant la totalité
« paret », ou « paret de la vila », cette construction de terre
de la ville1935, parfois entrecoupée de barbacanes1936 dotées
massive coffrée est bâtie selon une méthode éprouvée, les
d’une barriera. Une lice séparait vraisemblablement ces
documents ne rendant jamais compte de « tâtonnements »
défenses du grand fossé (profondeur : au moins 6 à 7 m ? ;
techniques ou d’effondrements de parets dont la cause
largeur : environ 12 à 20 m, comme à Albi ?). Ces deux
serait imputable à une incompétence des maîtres d’œuvre.
dispositifs d’arrêt sont d’ailleurs fréquents dans la fortifi-
La terre employée devait réutiliser une partie ou la totalité
cation médiévale, urbaine ou rurale1937.
des matériaux de constructions civiles (terre, bois, tuiles)
Outre l’entretien constant demandé par ce fossé1938, la rasées pour établir le nouveau tracé des fortifications. Cette
question de savoir s’il constituait une partie ou l’essentiel déduction est en grande partie confirmée par l’examen des
de l’approvisionnement en terre pour l’enceinte (terre vestiges d’enceintes villageoises en Lauragais et
massive ou constructions en torchis), reste toujours en Toulousain : elles sont composés d’une terre de « seconde
suspens. Quant au pal de Castelnaudary, il s’agit d’une main » contenant des objets très divers (tessons de céra-
construction élaborée de pieux et de torchis, dotée d’un mique et de tuiles, ossements animaux, morceaux de bois,
niveau de circulation et d’un hourd couvert d’une toiture en charbons, objets en fer, etc.) qui proviennent peut-être
bardeaux : nous n’avons pu en trouver d’équivalent aussi de dépotoirs.
ailleurs, du moins avec ces dispositions. Son rôle était vrai- Ce phénomène traduit à l’évidence une volonté d’éco-
semblablement d’établir une seconde ligne de tir à mi- nomie dans l’emploi du matériau et un souhait de rapidité
hauteur au devant de l’enceinte, de manière à compenser la dans l’érection de ces ouvrages, l’un d’entre eux étant
probable absence d’archères percées dans cette dernière, rappelons-le datable du XIIIe siècle (Esparsac, Tarn-et-
mais également afin de battre le fossé, au cas où un ennemi Garonne) et les trois autres du bas Moyen Âge (Thil,
aurait pu y pénétrer et tenterait de remonter l’escarpe. Haute-Garonne ; Alaigne, La Digne d’Aval, Aude).
Les enceintes de terre massive présentent des caracté- La terre massive constitue, quantitativement parlant, le
ristiques morphologiques, dimensionnelles, et techniques plus gros volume bâti de la majorité des ouvrages de
que l’on a tenté d’appréhender, d’une part à travers l’étude défense chauriens (et même toulousains) que sont l’en-
des rares vestiges conservés en pays audois et toulousain ceinte (avec ses portes et ses tours), mais également

1934
Toulouse étant la seule véritable exception à cette règle, puisqu’on a vu qu’à de très rares reprises les consuls achètent du matériel dans le chef-lieu
de la sénéchaussée.
1935
Dans certaines agglomérations, au bas Moyen Âge, la palissade de bois constituait encore bien souvent la seule défense (Lardin 1999, 182). Pour
Y. Esquieu, « la fortification en pierre ne représente pas le cas le plus fréquent. Très souvent on s’est contenté, au moins dans un premier temps, de
compléter le fossé par une simple palissade ou par des levées de terre. Lorsque l’on a envisagé d’améliorer le défense, cela s’est produit peu à peu, au
fil des années, ce qui fait que la muraille présentait un aspect discontinu, des portions maçonnées, souvent près des portes, interrompant les palissades »
(Esquieu 2001, 33). D’autres exemples de villes ceintes de palissades sont également cités par le même auteur (Ibid., 34).
1936
Les portes étaient en effet la plupart du temps précédées de « barrières et barbacanes (antemuralia, barbacanae). Lors du siège de 1218, la défense
de Toulouse comportait 16 barbacanes, confiées chacune à des chefs dont la Chanson énumère les noms » (Contamine 1994, 215).
1937
Nicolas 2005, 247 ; Kersuzan 2005, 207-215.
1938
Cet entretien est très courant sur ces ouvrages (par exemple : Kersuzan 2005, 209, 210).

218
CONCLUSION GÉNÉRALE

certaines barbacanes. Quelle que soit la technique (bauge, l’on parle de terre crue dans le bâtiment médiéval, qu’il soit
bauge coffrée ? variante du pisé ?), elle joue systématique- civil ou militaire. Ici cependant, la terre ne joue pas de rôle
ment un rôle porteur, ce qui en fait l’élément architectural porteur, celui-ci étant assumé par la structure charpentée :
indispensable à la fortification de cette ville et vraisembla- le torchis (mélange de terre, de foin, et d’eau à
blement à celle de l’ensemble des agglomérations du Sud- Castelnaudary) a donc seulement dans ce cas-là une fonc-
Ouest de la France où la pierre à bâtir n’existait pas. Les tion de remplissage, d’isolant, ou de protection contre les
autres éléments (bois, pierre, briques cuites, tuiles) vien- projectiles de l’ennemi.
nent en complément de l’élévation en terre pour constituer Omniprésent dans les maisons du Lauragais, du
une construction originale et hétérogène dans laquelle Toulousain et de l’Albigeois, il apparaît généralement à
chaque matériau fait corps avec l’autre dans un but précis, partir du premier étage de l’édifice, le rez-de-chaussée
et où l’on prend bien soin de tenir la terre crue à l’abri de étant le plus souvent bâti avec des murs de terre massive
son pire ennemi, l’eau, qu’elle soit de ruissellement (parets), quelquefois isolés du sol par des solins en pierre,
(solins) ou d’infiltration (toiture). Les tours-portes de la galets, ou briques cuites. Sa préparation s’effectue en
ville apparaissent comme des ouvrages particulièrement plusieurs étapes mais on ne sait toujours pas, d’après les
complexes, dotés de deux entrées, où la pierre a une place documents, si la terre était préalablement criblée ou
importante, peut-être dans un but de défense (résistance à tamisée avant d’être utilisée.
la sape ?) ou d’ostentation, voire les deux. Protégées par un
En revanche, il est probable qu’un enduit recouvrait à la
hourd, un pont-levis, une herse et des vantaux, leurs abords
fois la terre et le colombage, crépi dont les textes ont gardé
sont surveillés au moyen de gaytils, et l’accès se faisait
peu de traces, mais dont les traités de construction font
grâce à un pont dormant enjambant une partie du fossé.
souvent mention. La toiture participait à cette protection
Ces techniques de construction en terre massive ont contre les éléments naturels grâce à un débord extérieur de
apparemment peu ou pas subi de modifications durant la plusieurs dizaines de centimètres empêchant la pluie de
guerre de Cent Ans à Castelnaudary : on ne relève jamais de pénétrer par le faîte de l’ouvrage, le torchis, comme la terre
réaménagements ou d’adaptations de l’enceinte pour faci- massive, étant particulièrement sensible aux infiltrations.
liter l’utilisation de l’artillerie à poudre (boulevards, Une fois achevée, la construction en torchis présentait donc
fausses-braies, embrasures adaptées, etc.), ou s’en d’indéniables avantages : facilité pour se procurer des
prémunir, comme c’est par exemple le cas à Lille en 1411- matériaux, isolation thermique efficace, mise en œuvre
14141939. L’éloignement des grands théâtres d’opérations aisée, moindre sensibilité à la combustion qu’un ouvrage
militaires a-t-il conduit les consuls chauriens à opter pour entièrement en bois ; autant de facteurs expliquant sa large
des solutions « traditionnelles » pouvant presque être consi- diffusion dans la fortification chaurienne : on le retrouve
dérées comme « archaïsantes » en cette première moitié du ainsi au niveau des superstructures défensives de l’enceinte
XVe siècle, période où le canon connaît un essor important ? de terre massive (ambans, cadafalcs, agassiers), des postes
C’est possible, mais on se gardera d’être trop affirmatif, les d’observation (gaytils), mais également au « ras du sol »
comptes consulaires ayant montré à plusieurs reprises qu’ils (pals des barbacanes ou de l’enceinte).
ne consignaient pas systématiquement la totalité des tâches
en rapport avec les travaux de fortification. Par ailleurs, la En dehors de ces deux procédés principaux (terre
plupart des progrès réalisés par la fortification pour intégrer massive, torchis), la terre a d’autres usages dans la
la révolution de l’artillerie à feu (et le boulet métallique…) construction, comme par exemple la couverture des plan-
n’apparaîtront que progressivement, à partir du milieu du chers et des voliges (interrar, enterar, chape de protection
XVe siècle, c’est-à-dire à une époque située au delà du contre les infiltrations d’eau et l’incendie), ou le mortier de
champ chronologique assigné à cette étude1940. terre, essentiellement pour lier les mœllons de pierre du
Les constructions en colombage-torchis sont pour leur crénelage (Castelnaudary) ou les briques cuites du pied de
part davantage « visibles », que ce soit au travers des la paret (Toulouse).
sources ou dans les villes et villages des zones géogra- Ainsi, la pierre à bâtir, souvent peu présente ou totale-
phiques étudiées : cette méthode de mise en œuvre de la ment absente de ces régions, n’entre que pour une part
terre est d’ailleurs la plus aisée à analyser d’un point de vue assez faible dans la construction militaire en Lauragais
technique, et celle venant immédiatement à l’esprit lorsque (base des constructions, comme solin ; sommet, pour le

1939
Ainsi, entre 1411 et 1414, « les fortifications lilloises, à l’évidence délaissées, ont été remises au goût du jour. Les travaux effectués semblent avoir,
pour une part, reproduit des modèles douaisiens, modèles sans doute élaborés au contact du haut commandement de l’armée bourguignonne. Ils ont
aussi mis en lumière le rôle grandissant de l’artillerie à feu dans la défense. […] Aussi peut-on affirmer que Lille est bien entrée dans la lutte du boulet
contre la cuirasse, suite à la crise qu’elle vient de traverser » (Blieck 1999, 308).
1940
En effet, « à la fin de la guerre de Cent Ans, les frères Bureau, artilleurs de Charles VII, apportèrent au canon une série d’innovations techniques
qui précipitèrent l’issue du conflit : remplacement du projectile de pierre par un boulet de fonte capable de disloquer, sans se fracasser, les maçonneries
les mieux appareillées […] La fortification traditionnelle se révèle alors incapable de résister à la puissance de l’artillerie nouvelle : chemins de ronde
et mâchicoulis rendus inutilisables dès le début du bombardement, toitures effondrées sous l’effet des tirs en trajectoire, portes et maçonneries déman-
telées par les coups de plein fouet des batteries d’attaque […] Face à cette crise de la fortification devenue obsolète, les ingénieurs échafaudèrent
plusieurs solutions de fortune. Tout d’abord ils tentèrent de conserver au maximum les enceintes anciennes et d’y installer de l’artillerie ; cette formule,
qui fut employée un peu partout du fait du coût de plus en plus élevé des constructions neuves, empêcha pendant longtemps de trouver une solution
cohérente ; en effet, chemins de ronde et sommet des tours creuses étaient totalement inadéquats pour recevoir des pièces de gros calibre. Aussi, le
palliatif le plus courant consista à rejeter l’artillerie lourde dans des ouvrages extérieurs appelés boulevards. Certains d’entre eux furent des terrasses
basses doublant l’ancienne muraille et construits dans le fossé pour porter des canons. On les désigne sous le terme de fausse-braie » (Faucherre 1991,
11, 12).

219
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

parapet, le chemin de ronde et le crénelage), l’essentiel des Cette passionnante question de la diffusion des savoir-
fortifications étant de terre et de bois, mais également de faire ne peut qu’être effleurée, en raison de la nature et de
briques cuites (Toulouse, Albi), et ce durant toute la guerre la quantité des sources dont on dispose, ainsi que du cata-
de Cent Ans et même très probablement au delà, pendant logue encore trop restreint des vestiges médiévaux fortifiés
les guerres de Religion, puisque les quelques sources de terre crue massive répertoriés dans les régions étudiées
consultées pour le XVIe siècle suggèrent fortement la ou ailleurs en France.
persistance de ces modes constructifs. Quant aux ouvriers et manœuvres pour la terre massive
Les aspects économiques, géographiques, et sociaux en ou le torchis (parfois féminins), leur nombre est quelque-
rapport avec les personnes mettant en œuvre la terre crue, fois élevé, en raison de l’importante quantité de terre à
tout aussi méconnus jusqu’alors, ont principalement mis en charrier. Ils avaient vraisemblablement d’autres activités,
exergue le maçon de terre massive : ce paredier, à l’instar leur emploi dans le bâtiment ne constituant qu’une rému-
du maçon traditionnel bâtissant à pierres et chaux, était nération d’appoint, eu égard à leurs rares apparitions dans
certainement la principale « figure » et le personnage les textes, trop épisodiques pour leur permettre de subsister
incontournable pour toute localité souhaitant édifier son tout au long de l’année.
enceinte, particulièrement lorsque cette dernière requérait Néanmoins, le chantier chaurien, comme la plupart des
l’emploi de coffrages. Si des charpentiers assumaient grands chantiers urbains, a permis de faire vivre, au moins
souvent ce rôle, compte tenu de l’importance du bois dans durant une dizaine d’années (1356-1366), de nombreux
certaines constructions de terre massive (coffrages, artisans du bâtiment mais également de simples travailleurs
perches, étais obliques) ou de torchis (colombage, sparos), trouvant là une aubaine permettant quelque peu d’atténuer
l’inverse était probablement vrai, c’est-à-dire que des les difficultés économiques des temps1941. Certains étran-
personnes dénommées « parediers » ou « valadiers » par gers se sont d’ailleurs peut-être fixés à Castelnaudary, mais
les sources possédaient les compétences nécessaires pour l’imprécision des sources empêchent de l’affirmer avec
mettre en place la structure charpentée en rapport avec certitude1942. Parediers, « tortissayres », maçons, charpen-
l’élévation en terre. Ces hommes qualifiés devaient enca- tiers, couvreurs, forestiers, porte-faix, chaufourniers,
drer des équipes de travailleurs, pour certains des ouvriers forgerons mais aussi habitants de la ville, hommes, femmes
aguerris à la technique, pour d’autres de simples et enfants, ont vécu au rythme de la reconstruction de l’en-
manœuvres fournis par la ville, peut-être au titre de ceinte de la capitale lauragaise, et devaient reverser au titre
corvées, puisque leurs noms et leurs rémunérations n’ap- de l’impôt destiné à ces fortifications une partie de leur
paraissent pratiquement jamais dans les sources comp- salaire, réinvestissant en quelque sorte le fruit de leur
tables. Quant aux personnes encadrant les opérations rela- labeur dans une tâche accomplie conjointement.
tives au torchis et à « l’enterrement », et compte tenu de
L’étude des clauses contractuelles pour la construction
leurs rémunérations, il s’agissait souvent d’ouvriers quali-
des murs de terre massive a permis d’explorer un domaine
fiés ou de manœuvres.
tout aussi méconnu, notamment grâce aux documents
L’origine géographique d’une bonne partie de ces indi- municipaux de Montréal : les obligations incombant à
vidus serait à rechercher dans un large quart Sud-Ouest de chaque partie sont assez détaillées, même si des registres
la France, où la terre crue est employée dans la construc- notariaux auraient certainement pu nous en apprendre
tion, mais aussi dans la partie orientale de la Bretagne, davantage… Les salaires des parediers ou autres artisans
phénomène soulèvant la question d’un possible « apport se situent dans une tranche haute, comme ceux des ouvriers
technologique » de régions extérieures au Sud-Ouest, qualifiés qui les assistent, mais ceux des manœuvres en
comme on peut le supposer avec la présence à Toulouse de revanche sont nettement inférieurs, fait courant observable
parediers bretons. Par ailleurs, la stupéfiante identité entre sur d’autres chantiers médiévaux à la même époque.
les techniques d’étaiement et de coffrage révélées dans les
Concernant les matériaux, et hormis la bruyère, le coût
sources chauriennes et toulousaines pour la guerre de Cent
des autres fournitures, et surtout celui du transport, n’est
Ans et celle présentée au XVIIIe siècle par l’architecte
que faiblement éclairé par les documents. Les prix-faits
Cointereaux pour le département de l’Ain (méthode du restent donc l’indicateur le plus fiable pour tenter d’évaluer
Bugey) permet de penser que cette dernière était connue le coût d’ensemble d’une construction de terre massive :
depuis au moins déjà quatre siècles… les rares contrats recueillis ont ainsi permis d’avancer
Cette technique (du moins pour les étaiements et le quelques hypothèses selon lesquelles les enceintes de terre
coffrage) est-elle apparue dans des lieux géographiques massive avaient, à Castelnaudary, un coût à la brasse supé-
différents, en « vase clos », et peut-être au même moment, rieur à celui d’un mur à pierres et chaux. Néanmoins, ces
sans diffusion d’une région vers l’autre, ou bien les pare- premières observations demanderont à être complétées, en
diers, de par leur mobilité, ont-ils exporté en divers étendant notamment la recherche à d’autres documents du
endroits plusieurs méthodes dans l’art de bâtir, et ce dès le même type, qui seuls permettront peut-être dans l’avenir de
bas Moyen Âge, et peut-être même avant ? confirmer ou d’infirmer ce premier constat.

1941
Pour la guerre de Cent Ans, il « est vraisemblable aussi qu’une autre conséquence a été l’essor des métiers des bâtiments ou du moins de certains
d’entre eux, une importance nouvelle dans le cadre urbain acquise par les maîtres d’œuvre » (Chapelot 2001a, 23).
1942
À Aix, « sur un total de 1115 personnes apprenant un métier du bâtiment ou le pratiquant, il a ainsi été possible d’identifier avec certitude près de
530 individus non originaires de la ville. Les immigrés représentent donc plus de 47,5 % de la population recensée entre 1401 et 1555. Encore ne s’agit-
il là que d’un minimum » (Bernardi 1995, 43).

220
CONCLUSION GÉNÉRALE

À la lumière des sources dépouillées et des vestiges de sence de cette dernière, la terre crue semble avoir été quasi-
terrain, la terre crue joue un rôle tout à fait essentiel dans systématiquement employée comme matériau principal
les constructions médiévales du Sud-Ouest de la France, et pour l’édification des enceintes, et ce dans des départe-
en particulier dans la fortification, dont elle forme la ments aussi variés que l’Ariège, l’Aude, le Gers, les
colonne vertébrale1943. Hautes-Pyrénées, les Landes, le Tarn-et-Garonne ou la
Cette réalité était encore récemment largement et sous- Haute-Garonne. On serait donc peut-être à l’aube d’un
estimée, voire ignorée, certainement en raison du fait que renouvellement total de la vision de la fortification médié-
ces constructions, pour la plupart aujourd’hui disparues, vale dans ces régions1947…
étaient corrélativement très discrètes au travers des sources De fait, c’est tout un pan du secteur constructif
documentaires médiévales, les termes choisis n’utilisant médiéval, trop longtemps passé sous silence, que cette
pratiquement jamais le vocable « terre »1944, même si ce
étude désire à nouveau faire connaître, bien modestement il
dernier était pourtant employé par Froissart dans les
est vrai, tant l’ampleur de la tâche à accomplir reste grande
nombreuses éditions publiées de ses Chroniques1945. Ainsi,
et les sources inexploitées très nombreuses1948.
les constructions de terre crue massive transparaissent
généralement au travers de « mots-clés » comme « tapia » Ce travail n’est donc qu’une étape dans le long
ou « paret », qui, s’ils ne sont pas décryptés correctement, processus qui permettra peut-être un jour d’identifier avec
peuvent induire en erreur sur la nature réelle des maçonne- davantage de précision les techniques d’édification en terre
ries, ce qui était encore le cas il y a peu. crue, et de mieux connaître les hommes les mettant en
Il est donc de plus en plus vraisemblable que l’image œuvre : dans ce but, il souhaite inciter à une nouvelle
d’Epinal des miniatures médiévales symbolisant la ville ou lecture des textes déjà publiés, des ouvrages d’ethnogra-
le château ceinturés d’une muraille de pierres ne puisse que phie1949, et des stratigraphies issues de fouilles archéolo-
très rarement s’appliquer aux agglomérations fortifiées du giques, passées ou actuelles, où la construction en terre est
Sud-Ouest de la France situées dans des terroirs où la quelquefois souvent présente, mais rarement identifiée en
pierre à bâtir n’existait pas, ou peu1946 : en effet, en l’ab- tant que telle1950…

1943
Cet état de fait n’est pas forcément vrai dans toutes les régions où la terre crue est utilisée dans la construction. Ainsi, par exemple, en Vaucluse, «
il semble donc bien que la terre battue ait été, au moins jusqu’au milieu du XIXe siècle, couramment utilisée pour des constructions de peu de valeur
ou des réparations de fortune » (Vaucluse 1981, 108).
1944
Ainsi, il faut souligner à ce sujet le rôle essentiel joué par l’ethnographie : « on trouvera dans le présent ouvrage un bon exemple de la complé-
mentarité avec les autres sources des données de l’ethnographie : il est offert par la maison de terre crue, qu’elle soit constituée en pisé ou en adobes.
Très peu présente dans le corpus, elle est presque absente des publications archéologiques au moins pour le Moyen Âge. En revanche, l’ethnographe
la rencontre régulièrement dans beaucoup de nos provinces, Picardie, Champagne, région lyonnaise et vallée du Rhône, Toulousain, Poitou, Bretagne,
notamment. Or, si on admet que la maison traditionnelle, celle-là même qu’étudient les ethnographes, présente beaucoup de points communs
avec la maison médiévale, on doit considérer que la terre crue était au Moyen Âge largement représentée dans la construction ordinaire. On
ajoutera même que l’ethnographie nous détourne d’une interprétation simpliste : la maison de terre n’était pas, pas plus au Moyen Âge qu’hier, et sans
doute moins encore, la demeure du pauvre. Les techniques de construction sont relativement sophistiquées et les avantages de l’isolation thermique
sont bien connus. Cependant, sans cette intervention de l’ethnographie, la maison de terre crue aurait pu être ignorée de l’enquête du médiéviste. Les
textes ne l’évoquent presque jamais ou le font de façon tellement ambiguë qu’une controverse s’est installée en Italie autour du terme de casa terranea,
maison de terre ou maison sans étage. L’archéologie, de son côté, peine à identifier les vestiges de la construction en terre crue dont les matériaux sont
retournés à leur milieu d’origine » (Pesez 1998a, 49).
1945
Par exemple : « et de là vinrent à Avignoulet, qui estoit fremmée de murs de terre » (Froissart 1992, 69).
1946
En 1865, l’abbé Pottier signale encore nombre d’enceintes en terre crue visibles dans des villages du Tarn-et-Garonne : « Les enceintes de terre se
présentent d’abord comme les plus élémentaires ; elles se retrouvent encore autour de plusieurs villages : je citerai Escaseaux, Escatalens, Montbartier,
Meauzac, Esparsac, Vigueron, etc. » (Pottier 1865, 489).
1947
Récemment, les historiens ont pris en compte la terre crue comme matériau entrant dans la composition des enceintes urbaines : ainsi, « on appellera
ville une agglomération, même modeste, pourvue normalement ou de préférence d’un fossé, de portes fortifiées, d’une enceinte (palissade ou mur de
pierre, voire de terre)… » (Contamine 2002b, 10).
1948
Ainsi, pour le Tarn-et-Garonne, l’article de F. Galabert (début du XXe siècle), mentionne certaines sources de première main (fonds notariaux,
comptes consulaires de villages) fortement susceptibles de contenir des données intéressant notre domaine d’étude (Galabert 1901, 333-344).
1949
En effet, de plus en plus, « la référence ethnographique apparaît comme une constante, sous-jacente à presque toutes les démarches interprétatives.
Mais elle est souvent discrète, voire non-dite, alors qu’elle gagnerait souvent à être explicitée, non seulement parce qu’elle n’est pas d’une utilisation
si aisée, mais aussi parce qu’elle constitue une source et mérite d’être traitée comme telle » (Pesez 1998a, 51).
1950
Récemment, pour la Normandie, D. Pitte, faisant un bilan des 25 dernières années sur les apports de l’archéologie pour les villes de Haute-
Normandie, constatait « qu’à regarder la question de près, on s’aperçoit qu’aucune partie d’enceinte construite aux XIIe et XIIIe siècles n’a à ce jour
été physiquement identifiée à Rouen. Dans les années 1990, deux fouilles ont mis au jour des portions de murailles, sur un tracé généralement associé
aux règnes de Philippe ou de Louis IX. Au collège Barbey d’Aurevilly, l’enceinte a été datée du milieu du XIVe siècle par des monnaies et l’abondant
mobilier recueillis dans le comblement d’une tranchée liée à son édification ; nous sommes vraisemblablement en présence d’un ouvrage construit à
l’instigation de Philippe VI. L’enceinte et la tour mises au jour au Rectorat ont été datées du début du XVe siècle, mais il ne fait cependant guère de
doute que ces fortifications érigées par les Anglais en bordure du couvent des Jacobins ont remplacé une défense antérieure. Cette absence de trace dans
le sol d’enceintes supposées de Rouen est pour le moins déconcertante, et nous sommes toujours dans l’impossibilité d’interpréter cette allusion à la
double muraille et au triple fossé protégeant la capitale normande assiégée par Philippe Auguste en 1204, émise par Guillaume le Breton. De même,
aucune découverte n’a, à ce jour, permis de localiser la puissante tour de Rouen, édifiée vers l’an mil par le duc Richard Ier. Il ne semble pas que Rouen
constitue sur ces points un cas à part, comme le souligne Alain Salamagne, qui relève dans un opuscule consacré aux villes fortes du Moyen Âge que
le tracé de leurs enceintes reste souvent en particulier pour les périodes antérieures au XIVe siècle, difficile à reconnaître » (Pitte 2006, 151, 152). Peut-
on évoquer l’hypothèse d’une enceinte de terre crue ayant laissé peu de traces dans le sédiment ? Si rien ne permet de l’affirmer dans ce cas, la ques-
tion mériterait d’être systématiquement posée par l’archéologue lorsqu’il se trouve dans une région où la construction en terre massive existe, comme
c’est le cas de la Normandie à l’époque médiévale.

221
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Ainsi, à l’instar de J.-M. Pesez, espérons « que les informations supplémentaires sur les outils utilisés, sur
fouilles, aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural, ne lesquels nous sommes très peu documentés à l’heure
tarderont pas à mettre au jour bien d’autres témoins de la actuelle.
construction en terre crue, une solution qui est trop à la
Ainsi, il sera nécessaire à l’avenir de diversifier et
mesure des besoins et des moyens d’une large part de la
d’étendre les collaborations pour progresser dans le
population médiévale, en tous cas dans certaines
domaine de la connaissance de la terre crue médiévale, que
provinces, pour ne pas avoir été très souvent adoptée »
ce soit dans le Sud-Ouest de la France ou dans d’autres
(Pesez 1998c, 68).
régions, comme le Bugey (Ain) ou la Bretagne, où les
D’ailleurs, les sources documentaires, et notamment les recherches récentes en la matière paraissent très défici-
comptes, comme toute matière offerte au chercheur, attei- taires. Puisse ce travail aider à susciter l’intérêt d’autres
gnent leurs limites à un moment précis1951. Elles ne pour- chercheurs, si possible d’horizons variés, (architectes,
ront donc jamais remplacer l’archéologie expérimentale, historiens, archéologues, géo-archéologues, paléobota-
particulièrement utile dans le domaine de la construction : nistes, etc.) et à fédérer les compétences dans un domaine
il serait ainsi intéressant que les données issues des éléva-
offrant à ce jour un des champs d’étude les plus vastes
tions de terre crue encore en place, des parchemins et
concernant la construction médiévale en France.
autres registres, puissent un jour être complétées et véri-
fiées sur le terrain grâce au concours de techniciens et d’ar- On peut ainsi espérer désormais que la phrase de J.-
chitectes spécialisés, de manière à cerner au mieux les M. Pesez selon laquelle « l’historien et l’archéologue ne
contraintes physiques et techniques s’appliquant sur le rencontrent la terre crue que très rarement », soit, dans les
matériel, les matériaux, et les personnes qui les mettent en années à venir, de moins en moins employée par nos
œuvre. Cette démarche permettrait en outre d’apporter des contemporains et nos successeurs (Pesez 1998c, 68).

1951
Et ce même si « l’exploitation systématique des comptes de construction pour l’étude du bâtiment médiéval constitue l’un des fondements de l’évo-
lution de la recherche sur le bâtiment médiéval depuis une vingtaine d’années » (Chapelot 2001a, 12).

222
GLOSSAIRES

223
GLOSSAIRES

Ces glossaires, principalement établis à partir des 32 re- contrés dans les textes en latin. Le glossaire latin contient à
gistres consulaires de Castelnaudary (ADA, 4E76/CC48 à la fois des termes de latin classique et de latin médiéval.
4E76/CC80, soit de 1359 à 1447) ont été complétés par de Chaque fois que cela était nécessaire, les définitions ont
nombreux termes rencontrés dans les autres sources été enrichies d’un ou plusieurs exemples replaçant le mot
consultées. La plupart d’entre eux sont en occitan (langue- dans son contexte. Les différentes orthographes rencon-
docien occidental du point de vue dialectal) ou langue trées ont été présentées. En outre, lorsqu’un mot possède
d’oc, mais un bon nombre sont également en latin. plusieurs sens, on retiendra souvent (mais pas toujours)
Afin de faciliter la compréhension des extraits de textes ceux rencontrés, afin de ne pas alourdir la définition.
cités dans les notes infrapaginales, on trouvera, de façon dis- Lorsqu’aucun renvoi aux dictionnaires, lexiques, et
tincte, un glossaire occitan et un glossaire latin. Le glossai- autres ouvrages consultés n’est mentionné, c’est que le
re occitan tient compte des termes occitans « latinisés » ren- sens du vocable a été déduit du contexte.

225
Glossaire occitan

A 1878, vol. 1, 43), et probablement dérivé de agassié, agas-


sè : nid de pie ; cabane de ramée qu’on établit au haut de
Abardissar : recouvrir une surface avec du bard / bart trois arbres pour la chasse au ramiers (Ibid., 45). Voir
(Voir ce mot. Glossaire occitan) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363- aguasserius, aguacerius (Glossaire latin).
1364, [f°154 v°3]. « ….et pro sparonando atortissando et recubriendo de
tegulis et abardissando et encaucinando cum morterio supra tegulos... ». Agranar : 1. balayer, nettoyer (Lévy 1909, 11). 2. pourvoir
de grain ou de graines (Ibid.).
Abrasar : réparer (Alibert 1966, 68) ; AC Toulouse, EE32,
1355, [f°110 r°1]. « …o per reparar les autres aguassiers e per abrasar Agravar : couvrir de gravier (Lévy 1909, 11) ; AD Aude,
e reparar e adobar dos barbacanas… ». 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 bis v°2]. « Item Gualhardo Audiberti et
cuidam alio faxerio qui agravavunt operatorum dominorum. ».
Acuchar : remettre en état (Nicolas 2005, 303).
Aguzar, agusar : voir acusar.
Acusar, agusar, aguzar : aiguiser, redresser la pointe d’un
outil (Alibert 1966, 86) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°76 Aireta, ayret : petite aire, petite plate-forme, palier d’un
v°10]. « …magistro Petro de Petris fabro pro acusando 90 punctas pica- escalier (Alibert 1966, 88) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361,
rum… » ; Ibid., 1361-1362, [f°111 v°3]. « …Guillelmo Gelati pro agu- [f°70 r°7]. « …que portero fusta de l’angle de porta de Sant Antoni quam
sando 12 libras cavilharum et duas rebaserias...». faso l’ayret… ».

Adobar, sadobar, zadobar : accommoder, réparer, arran- Aisselier, yssaillier : pièce de bois placée en arc-boutant à
ger (Alibert 1966, 76) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°49 l’intérieur d’un chevron et qui va du pied de chevron à l’en-
v°4]. « …que avian adobat le pont davant la porta de la Baffa… » ; Ibid., trait (Alibert 1966, 88) ; par extension, contrefort maçon-
4E76/CC63, 1405, [f°33 v°4]. « …per un jorn a sadobar l’escalier de la né ? ; AC Toulouse, EE32, mars 1355, [f°40 r°3]. « …an Ramon de Coss
porta dels Sens ou puges hom als embans… ». massonier per far 1 yssaillier tras l’ostal del tessaurier a S. Estefe la on
fom far tota la paret e deffar car era estada fanduda per las ayguas… ».
Afachamen : abattoir (Alibert 1966, 77) ; AC Toulouse,
CC2322, pièce n° 66, 26 mars 1417. « …e per reparar la antiqua palissa Ajustar : mettre en place (Alibert 1966, 89), ajuster (Lévy
que es devant los afachamens de Sant Subra… ». 1909, 14) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°152 v°2]. « …pro re-
colligendo et ajustando reble peyreriorum ».
Afermar : affermer, donner à ferme, prendre à ferme
(Alibert 1966, 79). Ala : partie de fortification (Lévy 1909, 14). Voir ala
(Glossaire latin).
Afita : fiche, élément de fixation (Mistral 1878, vol. 1, 38,
afinca, afincha, afinta, apinca, aficha : ficher, enfoncer Aleia, Aleya : chemin de ronde d’un mur (Lévy 1909, 15).
dans la terre, ajuster, viser). Généralement, ce terme désigne un système de circulation
charpenté au niveau de l’enceinte principale, du côté inter-
Agasier, agassier, : espèce de guérite, ouvrage de fortifi- ne de la place, couvert, et quelquefois enduit de torchis ; AD
cation (Lévy 1909, 11). Terme équivalent de agachoun, ga- Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n°9, 22 septembre 1428.
choun, agachou : lieu d’où l’on épie, échauguette (Mistral « …lo dit mastre Bernat Tinel deu far e redre totas las dichas aleyas del

226
GLOSSAIRE OCCITAN, P. 227-254

dit loc de Verlhac fustadas, latadas e sparonadas… ». À Amortiment : amortissement (Alibert 1966, 101). Dans les
Castelnaudary ce mot désigne également un dispositif de sources consultées, ce terme a un sens architectural : élé-
circulation charpenté au niveau du pal, au devant de l’en- ment décoratif placé au sommet d’une élévation ou d’une
ceinte principale ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°23 v°7]. partie d’élévation et marquant par son volume la terminai-
« …Ramundo Jacobi, Ramundo Gauberti, fusteriis qui steterunt pro fa- son de la ligne verticale de composition qui passe par son
ciendo aleyas in palo de la Strada...» ; rarement au niveau de l’ala axe (Pérouse de Montclos 1995, 360, [172]) ; AD Aude,
(Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°4]. « Item pro portando dictam fustal- 4E76/CC48, 1360, [f°55 v°5]. « …als ditz peyriers per 4 jornals que avian
ha in aleya ale »). meses a far la talha del amortiment del pilar de la dita barbacana… ».

Alogiar, alotjar, allocar, alodiar : se loger (Lévy 1909, Amortir, amortar, amortisar, amortifficar, mortissar :
17) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1367, [f°157 r°1]. « …quels nos fazian sa- éteindre (Alibert 1966, 101) ; AD Aude, 4E76/CC69, 1419, [f°52
ber quel Bastart de Béarn era alotjat als baris de Sant Felit am gran gens v°3]. « per amortir huna cantytat de caus per la barbacana de la
d’armas… ». Baffa…» ; Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°115 r°3]. «…pro amortisando ser-
tam quantitatem de caus...» ; Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°114 r°2].
Alotjament, alutgament : campement, garnison (Lévy
« …per unam diem fuerunt ad amortifficandum dictam calce… » ; Ibid.,
1909, 17) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°27 r°10]. « …per saber si
4E76/CC53, 1371, [f°32 v°5]. « …qui dicta die extinxerunt et amortarunt
hi avia alutgament de gens d’armas car se contava que als dits lox avia
ignem appositum per aliquos…».
gens d’armas alutgatz… ».

Aluda, luda : alude (Alibert 1966, 95). Peau fine et rendue Ampara : protection, appui, défense, rempart ? (Lévy
très souple par sa préparation avec de l’alun ; on en faisait 1909, 20). Parapet ? ; AC Toulouse, EE32, 1355, [f°70 v°2]. « ….e
de petits sacs, des bourses, et même de fines chaussures ; trobem que avian mes per tot a dentelhar e a pazimentar e a far l’ampa-
certains ouvrages de littérature et des registres de compta- ra entre tot 11 milhiers de teula… » ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°44
bilité étaient reliés avec cette peau (Cayla 1964, 22) ; AD r°7]. « …per un cabiro redon as ops de far ampara sus les dentels de cos-
Aude, 4E76/CC69, 1419, [f°24 r°1]. « …e per un sac d’aluda per metre ta la porta de Guot Feran… ».
las ditas polveras… ».
Amparar, emparar : protéger, empêcher (Lévy 1909, 20).
Amasar, amassar : amasser, ramasser, rassembler (Alibert
Ampesament, pesament, pezament : solin de mur ou par-
1966, 98) ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°33 r°9]. « Item
an B. Starel que fec amassar le teule de las cavas del bari tie du solin de mur de la paret. À Castelnaudary, cet ampe-
de Fora que fec cazer le gran vent dels embans… ». sament est systématiquement bâti à pierres et chaux ; AD
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°116 r°2]. « …ad faciendum ampesamentum
Amban, emban, envan : galerie couverte des anciens de petra parietis nove de la Strada… » ; Ibid., 4E76/CC58, 1391, [f°40
murs d’enceinte (dér. Ambanar : munir de galeries, mot dé- v°4]. « ….la cal arena portet per far le mur de la pezament de la paret… ».
rivant du lat. antevannum) (Alibert 1966, 98). Hourd (Vidal
1911, 244). À Castelnaudary, ce terme désigne un hourd en Ample : large (Alibert 1966, 101) ; AD Haute-Garonne, H Malte
charpente et torchis, couvert de tuiles canal, et situé au Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428, Verlhac. « Item devo aver
sommet de l’enceinte et des tours ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361- las ditas paret de nautheza de terra en sus tres brassas e de ample a la
1362, [f°117 v°1]. « …tradiderunt dictos embannos pretio facto ad tor- peaso nau palms e a la sima devo aver d’ample sies palms… ».
tisandum, Ramundo Saraceni de portu Bordarum et debuit habere pro
Amputament : synonyme d’ampesament ? ; AD Aude,
canna decem palmorum 10 grossos argenti et debuit reddere tortisatis a
quolibet latere reddere copertum de supra de tegulis et bardatum et plan-
4E76/CC49, 1363-1364, [f°107 v°2]. « ...que stetit ad portandum
morterium et dandum manobra Johanni Gualiguo peyrerio qui operaba-
conatum supra parietes ».
tur ad faciendum amputamentum muri de Got Ferran… ».
Ambanamen, ambanament, enbanament : hourd, en-
semble des hourds ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°33 r°5], Ananera : de anar : aller et anan : passant (Lévy 1909,
« …Ramundo Sarasseni et eius sociis pro sparonando atortissando et en- 20), dans le sens de « allée », « passage » ; AC Toulouse,
terrando 18 brachiatas et media ambanamenta parietis nove retro cas- CC2322, pièce n° 66, 26 mars 1417. « …per far la palissa que es sus
trum… » ; AC Toulouse, BB3, 28 novembre 1418-1er août 1421, [f°29 l’ananera de Sant Subra… ». Voir anar (Glossaire occitan).
r°1]. « Item que hom fassa hun enbanament de post a Posanvila on es la
Anar : aller, s’en aller, passer (Lévy 1909, 20).
muralha nova ».
Anaucar : synonyme d’ anaussar, anauçar : hausser, éle-
Ambanar, amvanar, embanar : établir le hourd sur le
ver (Alibert 1966, 102), dans le sens probable de « char-
rempart (Vidal 1911, 243) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362,
ger » et de « transporter jusqu’à un point haut » ; AD Aude,
[f°103 v°3]. « …pro 23 corondis ab eodem emptis ad inquantum ad em-
4E76/CC49, 1363-1364, [f°27 r°5]. « …Guillelmo Canals, Petro la
banandum et construendum guacillos inter castrum et portam
Comba et Guillelmo le Porgayre qui steterunt ad anaucandum broci in
Narbonesiam…».
nemore de Rosilhaco... ».
Amonar : synonyme de amontar ? Mettre en tas, empiler,
mettre les gerbes en tas (Alibert 1966, 100). Andusac, andusat : sorte de bêche à deux pointes munie
d’un talon pour l’enfoncer dans la terre (marcadoira) et
Amortayrar : garnir de mortier (Bernardi 1995, 435) ; AD d’une poignée en T au sommet du manche (manilha). Les
Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°160 r°3]. « …per 8 sestairadas de caus que pointes sont appelées puas (Alibert 1966, 102). Outil agrico-
foc meza ad amortayrar les teules de l’ostal de l’ala de Montholiu… ». le, pelle bêche, houe à lame tranchante verticale (Cayla 1964,

227
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

25). Outil utilisé pour la préparation de la terre employée CC2322, pièce n° 79, 27 juin 1439. « …e per so aven apuntat que ladita
dans la construction des murs de terre massive (bauge). soma vos sera deduzida e defalcada de vostra receta e alogada en vostres
contes…».
Anhel : agneau (Alibert 1966, 103).
Apuntier : voir puntier.
Anguila, enguiela, anguiela : pièce de bois qui glisse
entre les jumelles d’un pressoir et repose sur le couvercle Araon, raon : méteil (Lévy 1909, 314). Seigle et froment
de la maie ; pièce de bois sur laquelle glisse un navire mêlés qu’on sème et qu’on récolte ensemble (Robert 1982,
qu’on lance à la mer (Mistral 1878, vol. 1, 100) ; AD Aude, 1191).
4E76/CC54, 1373, [f°16 r°5]. « …pro 2 stantis, 2 travatellis et 2 fustibus
vocatis anguilas ad opus pontis porte Platee… ».
Arazar : raser, niveler (Lévy 1909, 26).

Ansapren, aussapie, ausapie : 1. poignée (ansaprenus : Arc : arc, arche d’un pont, arche d’une voûte (Lévy 1909,
Du Cange 1840-1850 , t. 1, 296). Capulus. Charta ann. 1345 in- 26) ; AC Toulouse, CC2326, 1416-1417, pièce n° 12, r°4. « …per tan-
ter Probat. Tom. 4 Hist. Occ. Col. 201. Ramundus Arquerii, athilator car los trauhs de las arcs de la tor da reblo e de mortier franc ».
Tolose dom. Nostri Franciae Regis recognosco habuisse… pro XII baudr-
Arca, arqua, archa : 1. coffre, bahut, digue formée par
ereis unius pedis, XII ansaprenis, etc.). À Castelnaudary, ce sys-
une cage de gros arbres remplie de pierres, digue en
tème, apparemment en fer et associé à un croc, est destiné clayonnage (Mistral 1878, vol. 1, 124 : arco). À
à recharger les arbalètes ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°34 r°2]. Castelnaudary, terme synonyme de caxa (Voir ce mot.
« …cuidam sabbaterio sive grolhier qui preparavit quoddam croquum del
Glossaire occitan) désignant un batardeau établi provisoi-
aussapiem balhistarum… » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°106 r°3].
rement pour édifier la pile du pont permettant d’accéder
« …G. Rogerii, G. Arnaudi favres et Bernardo de Conquis qui steterunt
aux portes de la ville ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°102
[…] ad preparandum l’ausapiem baliste porte domini Bertholdi
r°11]. « …fuerat ad trahendum terram de arqua dicte porte… » ; Ibid.,
Constantini… ». En Isère, ce terme désigne un haussepied (au-
4E76/CC49, 1363, [f°146 r°6]. « …qui curavunt arcam pontis porte
cipiez), ou tour de l’arbalète, système destiné à recharger
Cimbalorum ». 2. arche (Gaffiot 2000, 156). 3. coffrage
l’arme1 ; AD Isère, B4363, pièce, sept. 1422, « Artifficis fusterum ad
(Ibid.).
tendendum grossas balistas vocatis aucipiez ». Synonyme des ar-
balètes à tour (ribaudequin, passe, passot, à martinet, à Archet : petit arc (Pérouse de Montclos 1995, 578) ; AD
haulce pied (Gay 1887). La graphie « ausapren » pourrait Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°60 v°2]. « …e per far archetz e per metre las
être formée de ausar (hausser, Alibert 1966, 132) et prene corondas desus ditas e per doblar le sobresol... ».
(prendre, saisir, attraper ; Ibid., 563), dans le sens de
« hausse-prise » ? 2. système de levage destiné à remonter Arena : sable (Alibert 1966, 114).
une herse, composé de bois et d’une arpa (voir ce mot) qui
en constitue apparemment l’élément principal ; AD Aude, Arenda : rente, redevance (Lévy 1909, 27).
4E76/CC48, 1360-1361, [f°94 v°4]. « …Petro Saurini pro uno ausaprem
Arendar : arrenter (Lévy 1909, 27).
faciendo et pro fusta eiusdem ad opus porte Stimbalorum... ».
Areyre, arreire, reyre : arrière, en arrière (Alibert 1966,
Aparelhar, aparejar : appareiller, apprêter, préparer, ar- 117).
ranger, pourvoir, munir (Lévy 1909, 23) ; AD Aude,
4E76/CC59, 1393, [f°18 v°5]. « …que aparelhava la peyra e la metra en Arguis, argue, argui : cabestan, argue, (Mistral 1878, vol.
hun mont… ». 1, 129). Treuil à arbre vertical sur lequel peut s’enrouler un
câble, et qui sert à tirer des fardeaux (Robert 1982, p. 229) ;
Apcha : hache (Lévy 1909, 23) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423,
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°160 v°1]. « …pro quatuor cavillas
[f°61 r°10]. « Johan Malazamias una apcha petita… ».
ferri arguis ponderantis circa octo libris prout Petrus Dayde retulilt ad
Aplanar : aplanir, niveler (Alibert 1966, 106) ; AD Aude, opus canonorum…».
4E76/CC49, 1363-1364, [f°68 v°3]. « …ad aplanandum quasdam cavas
Armazi, armari : armoire (Lévy 1909, 28) ; AD Aude,
que erant juxta parietem dicti castri… ».
4E76/CC51, 1366, [f°96 v°1]. « …per adobar les armazis del obrador
Aportar, asportar : apporter, amener (Lévy 1909, 25). dels senhors per so qua les ratz aqui donavan dapnatge… ».

Apresar : s’approcher (Lévy 1909, 25) ; AD Aude, Armela : vertevelle de verrou (Alibert 1966, 115) ; AD
4E76/CC57, 1388, [f°43 r°2]. « …que las gens d’armas avian coregut et Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110 r°8]. « Item G. Mazerolas pro una
apresonat entro las portas de Rabastenx… ». armela feri quam receperant operarios et poni fecerant in guacillo
Johannis Fizas… ».
Aptar : accommoder, adapter (Lévy 1909, 25).
Arpa : de arpar : saisir (Alibert 1966, 116). 1. sorte de cro-
Apunctar, apuntar, aponchar : 1. rendre pointu, aiguiser chet en fer, élément essentiel de l’ausapren, qui sert à ten-
(Lévy 1909, 25) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°113 r°14]. dre les arbalètes ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°23 v°6].
« …Petro Martini de Petris pro 150 punctis picarum quas apuncta- « …G. Mazerolas, fabro per 12 arpis. Item pro 12 tinellis. Item pro 12 an-
vant… ». 2. arranger, convenir (Lévy 1909, 25) ; AC Toulouse, ullis quos et quas fieri fecerunt pro garnimiento balhistarium ville... ».

1
Information aimablement communiquée par N. Nicolas.

228
GLOSSAIRE OCCITAN

2. sorte de crochet en fer, élément essentiel de l’ausapren, Avet : sapin (Alibert 1966, 135).
qui, associé à une corde, permet de soulever la herse ; Ibid,
4E76/CC48, 1361-1362, [f°92 r°2]. « Item eidem Guillermo pro una arpa Avisar : décider, consulter, prendre garde (Alibert 1966,
quam fecerat ad opus ausaprem porte Stimbalorum... ». 135).

Arrancar : arracher, déraciner (Alibert 1966, 116) ; AD Aygua, aigua, aiga : eau (Alibert 1966, 86).
Aude, 4E76/CC49, 1363-1364 [f°61 r°3]. « …Guillelmo de Luios qui ste-
Ayguier, ayguiera : 1. ruisseau d’évacuation des eaux
tit ad arrancandum et scindendum brocum in nemore de Rosilhaco… ».
usées et des eaux de pluie (Cayla 1964, 60 : « confrontant
Arrayrage, arreiratge : arrérages, arriéré (Alibert 1966, de cers l’ayguier commun de la ville ») ; Voir tonitum
117). (Glossaire latin). 2. évier (Lévy 1909, 12), évier, bassin
(Bernardi 1995, 437). Voir Aguerium, aigueria (Glossaire
Arssagaya, alasagaia, arasagaia : sorte de javelot (Lévy latin).
1909, 29) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°28 v°4]. « Item et pro
emendo sertum arnesium necessarium in villa dicti Castrinovi videlicet Aysinat, aizinat, aisinat : de aizin : commode, conve-
bacinetos, jaquis, pavesios et arssagayas… ». nable, prêt (Lévy 1909, 13) ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°37
v°2]. « …a mastre Ramon den Tholosa paredier del Tilh per razo de def-
Asetiar, assetiar : asseoir, placer, établir (Lévy 1909, 30) ; far le mur de reure l’ostal del P. Bosc e per mudar la teula aisinat… ».
AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°74 r°3]. « …qui dicta die steterunt ad fa-
ciendum […] duo galochia petre in dicta cavalha fundamenti dicte parie-
tis pro ponendo et asetiando ibi parietem novum… ».
B
Assag, aissag, essag, ensag : essai (Lévy 1909, 29) ; AD
Bacinet, basinet : voir bacinetus (Glossaire latin).
Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°67 v°4]. « ...pro portii magne bombarde et
eius stagie de Platea usque ad planum castri duobus hominibus qui eam Bada : guet, lieu élévé propre à servir pour guetter (Alibert
portarunt pro faciendo assag... » ; Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°53 r°6]. 1966, 138) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°27 v°2].
« …solvi fecerunt seu tradi magistro Geraldo Vinagre, magistro bombar- « …Johanni Aycardi pro faciendo badam in turre castri… ».
darum quando fuit prima vice in villa Castrinovi et fecit essag bombar-
de…». Badator : guetteur ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°70 v°5].
« …pro aptando bucas cornis castri cum quae cornant badatores…».
Assaltar : assaillir, attaquer (Lévy 1909, 29) ; AD Aude,
4E76/CC56, 1382, [f°104 r°2]. « …et quod se faciebant fortis locum Badorca, badorqua : cabane (Alibert 1966, 139) ; AC
Castrinovi capere et assaltare… ». Toulouse, CC2327, 1417-1418, pièce n° 22. « …per far dos banx e huna
taula a la badorca de la dita porta de S. Stephe en que mangen les por-
Asta : 1. broche, timon d’un char, hampe (Mistral 1878, ties… ».
vol. 1, 159 : asto, ato). Par assimilation, ce terme pourrait
désigner à Castelnaudary une sorte de hampe ou de timon Baiard, bajard, bayart : civière, civière des maçons pour
en fer destiné à soulever la pièce d’artillerie ou à la main- porter le mortier (Mistral 1878, vol. 1, 209) ou pour trans-
tenir sur son affût ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°106 r°3]. porter la terre ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°3]. « …a mastre
« …G. Rogerii, G. Arnaudi favres et Bernardo de Conquis qui steterunt G. Dessolaties per 50 clavels barados per far tres bayarts per gitar la te-
ad faciendum asta canonum…». 2. partie en bois d’une flèche ou ra de las cavas... ».
d’un carreau d’arbalète ; Ibid., 4E76/CC62, 1399, [f°10 r°4].
Baichar, bayshar, baysshar : synonyme de baissar : bais-
« …G. de Monte Acuto de Saxiaco pro 120 astis necessariis pro astando
ser, rabaisser, diminuer (Alibert 1966, 140); AD Aude,
las enganetas… ».
4E76/CC48, 1360-1361, [f°77 v°4]. « …qui fuerunt positi in cadafalco
Astar : emmancher ; AD Aude, 4E76/CC62, 1399, [f°10 r°4]. anguli quando fuit bayshatum… » ; Ibid., 4E76/CC52, 1367, [f°22 r°10].
« ...G. de Monte Acuto de Saxiaco pro 120 astis necessariis pro astando « …qui steterunt pro baysshando costonos vallatis portus Astrate… ».
las enganetas… ».
Bailher, bailler : donner (Cayla 1964, 65).
Atalussar : de talussar, talutar ? : élever ou couper un ta-
Balesta, ballista, balhista : arbalète, arbalète à tour (Lévy
lus (Alibert 1966, 649) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°71 r°1].
1909, 39).
« …aquel dia stero ad atalussar la paret vielha de la Baffa… ».
Banc : 1. siège pour s’asseoir (Bernardi 1995, 437) ; AC
Atrisar, atruisar, atridar : broyer, écraser (Lévy 1909,
Toulouse, CC2327, 1417-1418, pièce n° 22. « per far dos
32).
banx e huna taula… ». 2. lit de pierre (en carrière)
Auca, auqua : oie (Alibert 1966, 130) ; AD Aude, 4E76/CC51, (Bernardi 1995, 437) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107
1366, [f°26 r°5]. « …per 20 auquas lasquals foron donadas al desus dit v°6]. « …fuerunt ad trasandum et levandum tres bancos de peyreria seu
mossenhor Olivier… ». valle Mercadalis… ».

Ausir : ouïr, entendre (Alibert 1966, 132). Bancal : banc de pierre (Alibert 1966, 143) ; AD Aude,
4E76/CC52, 1367, [f°31 v°7]. « …qui portarunt petram pro faciendo
Aussapie, ausapie : voir ansapren. Glossaire occitan. bancallos de retro hospicium domini Poncii Gayraudi… ».

229
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Barranca, barranqua : de barranc : ravin (Alibert 1966, re les bardots de terre pour le dit Berjes »… (Carcassonne,
147) ? Par extension, à Castelnaudary, ce terme désignerait fonds Folquier, 1606). (Cayla 1964, 76) ; AD Aude, 4E76/CC79,
un obstacle en creux dans la chaussée destiné à empêcher 1445, [f°8 r°2]. « …e tancar la porta de bardot o de peyra… ».
les charettes de passer ; AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°51 r°2].
« …an G. Ar. dit Faures, Ar. Rogas que aquel dia stero a far las baran- Baro, baron, barron : gros bâton court, bâton de chaise
quas de la porta de la Baffa et de la Bastida per so que las caretas no pas- (Alibert 1966, 146) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110
seson per la vila… ». v°5]. « …pro uno barone ad curandum petram in porta Mondebonis et
parietis circumquaque » ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388 [f°41 v°1]. « ...an
Barranda, baranda : balustrade, parapet (Lévy 1909, Johan Deblan per un baro as ops de pozar de l’aygua per far del bart… ».
40) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°76 v°4]. « ...pro uno jornali
quo operatus fuit in barandis ante portam Montis Lebonis factis simul Barra, bara : 1. barre ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87
cum aliis qui dictas fecerunt barandas... ». v°5]. « …pro ressegando barras barrerie porte Barri… ». 2. droit
d’entrée. 3. barrière, barrage (Lévy 1909, 41). À
Barbacana : barbacane, ouvrage extérieur de fortification Castelnaudary, ce terme désigne une palissade en bois mu-
(Lévy 1909, 41). nie d’une porte et d’une serrure, située au devant de la bar-
bacane ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°57 v°1]. « …per 2 clavaduras
Bard, bart : 1. dans une construction de terre massive la 1 fo mesa al pont levadis de la barbacana e l’autra fo mesa a la bara
(bauge, gason, voir ce mot. Glossaire occitan), terre argi- de la barbacana que es de palissa fora le valat…».
leuse humidifiée prenant place en vrac entre deux pare-
ments de pains de terre de même composition, mais façon- Barrar, barar : barrer, clore (Lévy 1909, 41) ;AD Aude,
nés à la main. 2. terre argileuse humidifiée, qui, 4E76CC48, 1360-1361, [f°93 r°5]. « …ad barandum portam
additionnée de foin (à Castelnaudary) constitue le torchis. Narbonesiam… ».
3. synonyme de mortier de terra (Ravier 1986, 838) ou de
lisa (Ibid.). Mortier de terre argileuse utilisé pour lier les Barreia, barriera, barreria : 1. barrière, barricade (Lévy
moellons en pierre du crénelage (Castelnaudary) ou les 1909, 42) ; AD Aude, 4E76/CC60, 1394, [f°18 r°6]. « …per una co-
briques cuites (Toulouse) ; AC Toulouse, EE32, janvier 1354, [f°27 ronda de 12 palms ops de far barreias sus les pontz de la viela de la Porta
r°3]. « … per far le mantel al pe a la paret costa la porta de Montgalhart Nova so que las carretas non poguesso passar per la viela ». 2. barriè-
per massonar de teula ab mortier de terra e apres bassar de mortier re de la ville : palissade avancée située au devant d’une por-
franc… ». te ou d’une barbacane, au delà du fossé principal, et consti-
tuant une première ligne de défense ; AC Toulouse, CC2322,
Bardar, enbardar : 1. daller, plaquer (Alibert 1966, 145). pièce n° 79, 27 juin 1439. « …per far barrieras fora la porta de
2. couvrir une surface (Bernardi 1995, 437). Voir bardejar. Matabuou e las lissas dels valatz… ».
3. à Castelnaudary, ce terme désignerait l’action de couvrir
une surface (verticale et/ou horizontale ?) avec une couche Bart : voir bard (Glossaire occitan).
de bard contenant parfois du foin ; il pourrait s’agir d’une
Barsalo : monnaie dont la valeur est 1 denier et 1 pogesal
épaisseur prenant place entre les voliges et les tuiles, ou
(Vidal 1911, 247).
d’un enduit appliqué sur le colombage, après la pose du
torchis ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°101 r°6]. « …Petro Basalart, balazart : coutelas (Du Cange 1840-1850, t. 1,
Belenguerii pro sparonando atortissando coperiendo de tegulis latando et 609, 3e col : basalardus, baselardus ) ; AD Aude, 4E76/CC56,
bardando tres brachiatas ambanamentorum parietis nove castri… » ; 1382, [f°142 v°10]. « Item Hugoni Rogerii pro quoddam basalart perdi-
Ibid., 4E76, CC77, 1441, [f°28 r°3]. « …per 6 quintals de fe per tortisar to quem portabat G. Gualhardi… ».
e per enbardar… ».
Bassar : à Toulouse, dans le sens de « couvrir », « crépir »
Bardejar, bardeiar : bâtir avec du bart (Vidal 1911, 247). ? AC Toulouse, EE32, 1354, [f°27 r°3]. « Dem a pres fait per far le man-
À Castelnaudary, ce terme aurait plutôt le sens de « couvrir tel al pe a la paret costa la porta de Montgalhart per massonar de teula
une surface » (voir bardar, 2.) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, ab mortier de terra e apres bassar de mortier franc… ».
[f°46 r°1]. « …an P. de Murat recubreyre, per hun pres fayt a lu baylat e
livrat a la candela mens dizen co apar per carta R. per mastre Miquel Bastidor : matériau apte à être mis en œuvre dans la
Salano per recubrir les enbans de la porta Mondebon tro le castel e bar- construction, bois d’oeuvre, bois à bâtir ; AD Aude, 4E76/CC56,
deiar les foraietz…». 1391, [f°93 v°1]. « …B. Johannis pro duobus fustibus bastidors qui fuerunt
positi in cosseria muris quod est retro ecclesiam Fratrum Minorum cum ca-
Bardiera : gisement d’argile, fosse de briquetier où l’on birones sive polpet dicte cosserie fuissent fracti et putrefacti... ».
prépare l’argile (Alibert 1966, 145). À Castelnaudary, fos-
se où le torchis était préparé ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°68 Bastier : bâtier, fabricant de bâts (Lévy 1909, 43). Voir
r°10]. « …que avian fayta una bardiera per tortissar le pal detras dona basterius (Glossaire latin).
Feriera ».
Bastonier : 1. bâtonnier de confrérie (Alibert 1966, 149).
Bardot : éléments d’une construction constitués par des 2. porteur ou joueur de bâton (de bastoun : bâton) (Mistral
plaques de terre battue, juxtaposées. C’était le matériau dans 1878, vol. 1, 243). Par extension, muletier ? ; AD Aude,
lequel l’argile, la terre argileuse, était entremêlée avec des 4E76/CC48, 1359-1360, [f°8 v°3]. « …Petro Olerii et tribus aliis basto-
débris de végétaux. On le connaissait sous le nom de bard. nibus qui portaverunt arenam et scalcinunt calcem in opere porte de
« et lequel N… sera tenu fourni le foin qui conviendra à fe- Astrata… ».

230
GLOSSAIRE OCCITAN

Batedor : heurtoir de porte (Alibert 1966, 150) ; AD Aude, Boscatier : bûcheron (Alibert 1966, 173).
4E76/CC70, 1422, [f°15 r°8]. « …per adobar las peyras que so batedors
de la porta de la barbacana del bary de Santa Crotz… ». Braga, bragua : culotte, braie, pantalon (Alibert 1966,
175) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423, [f°22 v°5]. « …per 6 camizas e per
Bathaliera, bathalerie : fortification, retranchement 6 braguas… ».
(Lévy 1909, 43).
Brana, branda : brande, broussaille, bruyère (Lévy 1909,
Baudelha, baudela : loquet (Alibert 1966, 150) ; AD Aude, 53) ; (Parfouru, Carsalade du Pont 1892, 313), [f°82]. « Item
4E76/CC57, 1388, [f°41 v°1]. « …per un baro as ops de pozar de l’ay- fen carreyar dus cars de brana per mete en la tapia… ».
gua per far del bart e per una baudela… ».
Brasa : brasse, mesure de la longueur des deux bras étendus
Bauga, baug, bauja : fou, extravaguant, toqué, nigaud (Levy 1909, 53). Voir brachiata, brachia (Glossaire latin).
(Alibert 1966, 150). Brasier, brassier : ouvrier, manœuvre (Lévy 1909, 53) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362 ; [f°106 v°4]. « Item cuidam brasserio
Baylar : voir bailher.
qui portavit quinque brachiatas de fuelha in guacillo retro castrum… ».
Beyda : de bueja : évacuation d’une place, d’un pays par
Bren : sciure de bois (Alibert 1966, 178). Utilisé comme
l’ennemi (Vidal 1911, 248) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°31].
adjectif dans le sens de « sciée » ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-
« Siegon se les derayraties de la talha de 20000 l. enpauzada a
1361, [f°67 r°7]. « …an R. Calart per 11 pessas de fusta brena que fo me-
Carcassona per la beyda de las jendarmes que eran an Alzona e sus le
za al dit pal ».
pais. ».
Bresc : bois, forêt ? ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°26 v°5].
Besa : bêche (Lévy 1909, 46). « …miserunt fratrem Ramonetum ordinis Beati Antonini apud nemorem
sive bresc de Ramondenx... ».
Besso, besson, bessona : jumeau, jumelle (Alibert 1966,
156). Breto, breton, briton : breton (Alibert 1966, 178).
Bestia : bête, animal (Alibert 1966, 156). Bridola : éclisse (Alibert 1966, 179). Lame de bois
refendue (bois de fente de petite dimensions, utilisé en
Beure : boire (Alibert 1966, 157). boisellerie ; vannerie : lamelle d’osier obtenue par fendage
et mise d’épaisseur ; lamelle de rotin refendue, soit brute,
Bloquier, boclier : bouclier (Alibert 1966, 162) ; AD Aude,
soit préparée industriellement), corde de genêt ; AD Aude,
4E76/CC71, 1423, [f°59 v°3]. Primierament fero paguar an Huc
4E76/CC52, 1367, [f°21 r°2]. « …pro 6 paneriis bridole ad opus
Landribia per hun bloquier… ».
clausurarum pro portando terram…».
Boal : étable à bœufs (Alibert 1966, 163). Brieg : sorte de pierre ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°44
r°1]. « ...pro tribus brachiatis petre de brieg que erant in plathea emptis
Boca : douille d’outil ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°100
ab eodem... ».
v°9]. « ...eidem G. pro 10 bocas rebaseriis aptando ».
Broc, broch : système en fer permettant la suspension ? ;
Bolhir : 1. bouillir (Alibert 1966, 167) ; 2. forger ? AD Aude,
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°160 v°1]. « …pro faciendo landas
4E76/CC49, 1363, [f°175 r°7]. « Item plus pro bulliendo duos cugnos
dictorum canonorum et pro brochis ferri cum quibus se descendunt dicti
ferri ad opus peyreriorum ».
canoni... ».
Boquet : coyau (Lévy 1909, 50) : petite pièce oblique d’un Brolh, broll, bruolh, bruelh : bouquet d’arbres, jeune
versant de toit, portant sur le bas des chevrons et adoucis- taillis, bois (Alibert 1966, 183) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-
sant la pente du versant dans sa partie basse, pièce de bois 1364, [f°90 r°3]. « …pro portando tres sarcinatas de palo de brollio de
dont une extrémité soutient l’égout d’un toit (Pérouse de Noneto Petri de Bossaco… ».
Montclos 1995, 143, [76]) ; AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°25
r°3]. « …per 25 clavels que foron meses als caps boquet de la paret… ». Broc, brog, broch, bruc, brug, bruga, bruguiera :
bruyère, bruyères diverses (Alibert 1966, 182). Végétal uti-
Borda : ferme, métairie, domaine agricole (Alibert 1966, lisé dans la construction des murs en terre crue massive ;
170). Au départ, désigne un petit bâtiment (cabane de jar- AC Montréal, 1D2, 10 août 1461, [f°23 r°1]. « …et portando brugum et
din2). dictus Durandelli pro faciendo et construando bene et debite infra dictum
tempus dictas parietes et preparando brugum… ».
Bordo, bordon : 1. noyau d’un escalier en vis (Bernardi
1995, 438). 2. moulure proche du tore (Ibid.) ; AD Aude, Buada : 1. étable à bœufs (Du Cange 1840-1850, t. 1, 791,
4E76/CC58, 1391, [f°60 v°2]. « …per far le sobresol del obrador del co- 2e col). Bovile, stabulum bovum. Provinc. Buau, bos.
solat e per tartuguar la fuelha e per far bordos e per far archetz e per 2. conduit d’écoulement pour les eaux (Vidal 1911, 248).
metre las corondas desus ditas e per doblar le sobresol... ». 3. nom d’une porte à Castelnaudary ; AD Aude, 4E76/CC59,
1393-1394, [f°27 r°7]. « …a mastre Guilhem Gelat per dos clavaduras
Bosc : bois, forêt (Alibert 1966, 173). lascals foc mesa la una a la porta de la Buada…».

2
Information aimablement communiquée par M.-C. Marandet.

231
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Bueg : synonyme de buget, buge ? : 1. bloc de pierre strahendum cayrones de valle Mercadalis…. » ; Ibid., 4E76/CC68, 1415,
(Bernardi 1995, 439). 2. mur, cloison, garde-corps (Ibid.) ; [f°57 v°7]. « …per 8 cayros grans a 2 s. 6 d. la pessa e per 12 cayros a
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°119 r°2]. « …et quod computave- 4 blanquas la pessa que foron mezes a la dita porta… ».
rant buegum pro pleno et inclusere pilariis factis in porta dicta barbaca-
ne et etiam discobre quod fecerant in peyreria de quibus pilariis et dis-
Calsar : voir causar.
cobre actento quod conputatur dictum bueg pro plano nichil petere Caus : chaux (Lévy 1909, 72).
debent...». Voir buegus, buegum (Glossaire latin).
Camba : 1. jambe ; pilier d’un clocher, d’un pont (Lévy
1909, 61). 2. montant d’un escalier ou d’une passerelle ? ;
AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°52 v°2]. « …qui portarunt duos fustes
C
longos de retro castrum versus Astratam ad dictam portam de Got Feran
Cabana : cabane, hutte, baraque (Alibert 1966, 187) ; AD pro faciendo cambas seu tibias in dicto scalerio seu ponte pro ascenden-
Aude, 4E76/CC61, 1394, [f°14 r°6]. « …an Johan Raynaut per un fays de do corserias… ».
lata obs de la cabana de la Porta Nova… ».
Camisa, camiza : chemise (Alibert 1966, 198) ; AD Aude,
Cabas : cabas, panier de jonc à deux anses (Alibert 1966, 4E76/CC71, 1423, [f°22 v°5]. « …per 6 camizas e per 6 braguas… ».
187) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°9 v°5]. « …pro quibusdam
cabassis ab ipso receptis per Petrum Daurni pro operibus Campmas : exploitation rurale, bien foncier d’étendue va-
clausurarum… ». riable, en général d’un seul tenant (Cayla 1964, 119).

Cabirador [fustie] : employé comme adjectif de fustier Campmasier, cammasier : ouvrier agricole chargé de
dans le sens de « poseur de chevrons » ? ; AD Haute-Garonne, l’exploitation d’un domaine rural (Cayla 1964, 119).
H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428, Verlhac. « …a
Candela : chandelle (Alibert 1966, 201) ; AD Aude,
mastre Bernat Tinel fustie cabirador… ».
4E76/CC49, 1363-1364, [f°27 r°4]. « …pro candelis ad opus faciendi ex-
Cabiro, cabiron : chevron, élément d’une charpente cubias de nocte… ».
(Cayla 1964, 112 : cabirou) ; AD Aude, 4E76/CC63, 1405, [f°35
Canevas : grosse toile écrue, de lin ou de chanvre, ou de fil
r°4]. « …per un cabiro que foc mes per Guilhem Garigua al escalier de
d’étoupe ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 v°2]. « ….e per huna
la porta dels Sens… ».
cana media de canevas per far le penonssel a la bada sus le cloquier…».
Cabironar : poser des chevrons (Alibert 1966, 188) ; AD
Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°30 v°2]. « …ad cabironandum per am-
Cap : tête, extrémité, commencement, cime (Lévy 1909,
banamentum parietis nove castri... ».
64) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°52 r°3]. « …per far mano-
bra al mur que es al cap del pont levadis de la barbacana de la porta de
Cadafalc : échafaud, estrade, échafaud de bois appliqué la Plassa… ».
sur le rempart (Lévy 1909, 58). Plateforme élevée en bois
servant de bastion. Estrade, plateforme, tribune. Charpente Capa : cape (Alibert 1966, 204) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363,
d’une tour où sont accrochées les cloches. Echafaudage [f°55 r°7]. « …pro una capa rubea ad opus faciendi badam…».
(Niermeyer 1984, 156). À Castelnaudary, ce terme désigne Capel : 1. chapeau (Alibert 1966, 204). 2. couche de terre
une sorte de hourd défensif établi au sommet de la paret (Ibid.). 3. pièce supérieure d’une vanne (Ibid.) ; AD Aude,
qui se distingue des ambans ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77
4E76CC49, 1364, [f°178 v°4]. « …pro portando capellos de Barrio ad
r°3]. « …pro quadam quantitate fustalhe que fuit empta ab eodem et po-
portum Bordarum ad opus payseriarum… ».
sita tam in reparatione cadafalcorum quod ambanamentorum et alibi in
clausuris… ». Voir cadafalcus, catafalcus (Glossaire latin). Capela, capella : 1. chapelle (Bernardi 1995, 440) ; AD
Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°29 v°3]. « ….a recubrir la capela de la
Cadena, cathena, catena : chaîne (Alibert 1966, 191).
Plasa... ». 2. voûter ad capellam ou ad chapella signifie voû-
Cadenat : cadenas (Alibert 1966, 192) ; AC Toulouse, CC2327, ter sur croisée d’ogives (Ibid.). 3. chapeau d’un bâtiment
1417-1418, pièce n° 21. « …per la factura de dotze cadenatz grans per (Niermeyer 1984, 131) ; AD Haute-Garonne, 3E6761, [f°39 v°2],
luy faitz per tancar las cadenas de cascuna de las 12 portas… ». 1438. « …et debent habere tres cannis altitudinem computando funda-
mentum et capella… ».
Caderna : synonyme de quaderna, unité de mesure :
« quaternée » ?, fondée sur « quatre » (Raynouard, 1843, V, Capmartel : maçonnerie qui fixe la tête d’une vanne
8) ; AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°42 v°3]. « Item per 30 pernas de (Alibert 1966, 203) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°80 v°1].
caderna brassa que pres en Johan de Garac paredier de Tilh… » ; [f°78 « …per 2 brassas 1 carto de paret que fec al capmartel de las paret de la
r°2]. « Item may per 2 pernas de 5 brassas e 2 de caderna e 2 cartos de 6 Baffa entre la vielha et la nova… ».
a far escala a puiar la massonaria…».
Capval : en descendant, en bas (avec mouvement) (Lévy
Cadrilla : élément du garrot ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363- 1909, 66) ; AC Montréal, 1D1, 1409, [f°31 r°1]. « …el cosel volt que
1364, [f°101 v°1]. « …magistro Guillermo Gelati pro quinquaginta ca- hom prenges tota l’ayga que cazes capval la cava…».
drillis de guarrot… ».
Cara : face, façade (Lévy 1909, 66) ; AC Montréal, 1D1, 1409,
Cairon, cayron, cayro : bloc de pierre équarri (Bernardi [f°31 r°1]. « …e que hom cobris la cara del ostal de mastre senhor Bernat
1995, 441) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°100 r°11]. « …ad Favre…».

232
GLOSSAIRE OCCITAN

Carbe, cambe : chanvre (Lévy 1909, 61) ; AD Aude, 3. unité de poids, sous-multiple de la livre qui
pretz fayt… ».
4E76/CC48, 1360, [f°52 v°2]. « …7 brassas de corda de carbe que fo en contenait quatre (Cayla 1964, 138). 4. mesure de capa-
comprada per levar le pont de la barbacana de la dita porta… ». cité pour les grains, valant 1/8e du setier à Toulouse, soit
environ 15 kg à Castelnaudary (Abbé 1994, 85) ; AD Aude,
Carcais, carcays : carquois (Lévy 1909, 67) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°80 v°8]. « Item pro 7 libris et uno cartone cavilla-
4E76/CC71, 1423, [f°23 r°4]. « …per dos crox e per dos carcayses de rum receptis de domo magistri P. de Villaveteri… ».
quer… ».
Catillus : voir gachil.
Carela, carrela, carela, carella, cairella : poulie (Lévy
1909, 69) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°48 v°10]. « …pro una Causada : chaussée (Lévy 1909, 72) ; AD Aude, 4E76/CC55,
carela nova et pro aptendo eandem in ponte porte de Barrio… » ; Ibid., 1376-1377, [f°45 r°3]. « …que aquel dia stero ad amasar dels calhaus de
4E76/CC54, 1373, [f°37 v°8]. « …pro uno fuste abietis pro faciendo plan- fora per les camps les quals foro mezes a la causada de la porta
cam ad portam Mondebonis et pro una cairella ad opus dicte planque… » ; Mondebo… ».
Ibid., 4E76/CC71, 1423, [f°22 v°4]. « …per tres sins de balesta e per set
carellas guarnidas las cals foron bayladas a los ditz balestiers… ». Causar, caussar, cauzar, cauçar, calsar, : 1. chausser
(Alibert 1966, 213). Dans le sens de « adapter au manche
Caretada, carretada : charretée (Alibert 1966, 209) ; AD le fer d’un outil » ; (Bousquet 1926, 340) : « …a P. Jolia,
Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°20 v°4]. « …an Stene Baran, fayshier, lequal favre, per calsar une marra… ». 2. recharger un outil usé
portet 3 caretadas de fusta nova laqual era a la porta de Sant Anthoni e (Lévy 1909, 72) ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°4 r°5]. « …pro
fo portada als embans de la Baffa… ». causando unam rabasseriam ad opus clausurarum… ». 3. à Toulouse,
ce verbe a également le sens de « recouvrir d’un parement
Caretier : charretier (Alibert 1966, 209). de briques cuites une base de paret en terre crue massive » ;
AC Toulouse, EE32, 1354, [f°28 v°2]. « …per 7 milhers e 5 saumadas de
Carga : 1. charge, poids, fardeau (Alibert 1966, 208). teula plana que avia a la sieu teularia que avet preza a obs de far lo man-
2. mesure de poids (sarcinée). À Castelnaudary, la charge tel e de caussar la paret costa Montgalhart… ».
équivaut à 338 livres, soit 138,58 litres (donc, autant de kg)
(Abbé 1994, 93) ; AD Aude, 4E76/CC69, 1419, [f°47 v°2]. Causinier, caussinier : chaufournier (Lévy 1909, 72) ; AD
« …per dos carguas de postam per far la paret... ». À Toulouse, Aude, 4E76/CC48, [f°33 v°2]. « …Bernardo Englesii caucinerio de
la charge ou sarcinée, est égale à trois quinteaux du poids Manso pro 65 sestariis calcis ab ispo emptis...». Voir caucinerius
commun de Toulouse (donc sans doute 127 kg) (Wolff (Glossaire latin).
1954, XXIX).
Cava : 1. fouille pour les fondations d’un mur, trou (Vidal
Cargador, carguador : endroit où l’on charge (Alibert 1911, 249) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°114 v°1]. « Item pro
1966, 208) ; AD Aude 4E76/CC64, 1408, [f°19 v°2]. « …a 2 homes cava facienda supra murum porte Mondebonis… ». 2. creux, fossé
les cals trayso la dita peyra de la cava per metre a carguador car le dit (Vidal 1911, 72) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°28 r°2]. « …qui
Ar. Cordas no y volia intrar carguar le rossi a la cava… ». dalhiavit et amovit erbas quas erant in cava e in costonibus de porta
Terreni… ». 3. cave, voûte, pièce voûtée (Bernardi 1995, 443).
Carrejar, carejar, caregar : charrier, transporter (Lévy
1909, 69) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°91 r°2]. « Item Petro Cavalet : 1. tréteau, baudet de scieur de long (Alibert 1966,
Michaelis, Geraldo Carerie, Johanni de Montilh pueris qui fuerunt ad ca- 214). 2. chevalet (Lévy 1909, 73). 3. étaiement provisoi-
reiandum terram de vallis juxta Got Feran… ». re ? ; AD Aude, 4E76/CC55, 1366, [f°24 v°3]. « …per engalhar de ter-
ra les cavalet de la paret de la Baffa ». 4. système charpenté per-
Cartairon, carteria, cartayro : 1. quarteron, quart de livre mettant de soutenir le tablier du pont dormant et reposant
(Lévy 1909, 69). 2. mesure de capacité pour les grains sur les piles ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°126 r°3]. « …per ado-
valant un quart du setier (à Castelnaudary, le setier équiv- bar le pont de la porta Mondebo, les cavaletz que sosteno le dit pont… ».
aut à environ 60,4 l), soit environ 15 kg dans la capitale
chaurienne ? (Abbé 1994, 85) ; (Vidal 1906, 1368-1369, Cavalha : petit ravin dans le Haut Languedoc (Mistral
112) : « Johan Barrau per 3 cartayros de fer a far las pon- 1878, vol. 1, 507 : cavalho, cabalho, chavalho). À
chas al pal que fon plantat al pe de la tor. » ; AD Aude, Castelnaudary, ce terme désignerait une tranchée de fonda-
4E76/CC48, 1361, [f°93 v°1]. « Item Petro Casta, fabro pro una carteria tion pour une construction (mur, porte, pal, etc.) ; AD Aude,
carbonis ad opus canonum… ». 4E76/CC64, 1418, [f°40 v°1]. « …per l’espazi de 6 jorns cascu a trassar
e far le comensament de la cavalha del mur de la porta Mondebo… » ;
Cartel : écrit, acte (Alibert 1966, 210) ; AD Aude, 4E76/CC48, Ibid., 4E76/CC48, 1361, [f°108 r°8]. « …tribus hominibus qui fuerant per
1359-1360, « Sequitur expense facte per manus Bernardi Guini in unam diem ad cavalham dicti palis… ».
operibus clausurarum prout in cartello per ipsum super hoc tradito con-
tinetur ». Voir cartellus (Glossaire latin). Cavantar : synonyme probable de cavansar, extraire ? Un
cavansar est aussi un mineur (Raynouard, 1836, II, 366),
Carto, carton, quarton : 1. soliveau équarri (Lévy 1909, celui qui extrait en fouillant ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°103
70) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°1]. « …pro 7 car- r°6]. « Item Fabro de Podio qui per duos dies fuerat ad cavantarum are-
tonibus receptis de hospicio Jacobi de Madreriis seu Bernardi Lequistati nam ad opus guacillorum retro Fratrum Minorum... ».
eius sociis pro ponendo in reparatione cadafalcorum et ambanamen-
ti… ». 2. quart (Lévy 1909, 70) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, Cavar : creuser, fouiller (Lévy 1909, 73) ; AD Aude,
[f°62 r°3]. « …per raso de 6 brassas 1 carto de valat que avian fayt a 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°7]. « …ad cavandum vallum retro castrum...».

233
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Cavilha, cavilla : cheville (Lévy 1909, 73) ; AD Aude, Clavelar, sclavar : clouer (Lévy 1909, 79) ; AC Toulouse,
4E76/CC51, 1366, [f°30 r°5]. « …per 6 £. miega de cavilhas que foran EE32, 1355, [f°81 r°5]. « per M clavels baradors refforssatz que an prezes
mezas a clavelar le pal…». en diverssas vetz mastre Ramon den Tholosa en Johan Olier els autres pa-
rediers a obs de clavelar las taulas ab que fazian las paretz…» ; AD Aude,
Caxa, caissa, caysha, cayssa : 1. caisse (Alibert 1966, 4E76/CC48, 1361, [f°108 r°9]. « Item Guillermo Johannis et quibusdam
193). 2. tranchée, fouille dont on a enlevé les terres, com- sociis suis qui sclaverant dictum palum ».
partiment d’un fossé que l’on vide (Mistral 1878, vol. 1,
422 : caicho). À Castelnaudary, ce terme, systématique- Cleda, clede : claie (Lévy 1909, 79) (treillage en bois ou
ment associé à la construction des piles de ponts, désigne en fer ; Robert 1982, 321) ; barrière de bois (Cayla 1964,
un batardeau (voir arca) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°39 v°3]. 164). Paroi des hourds (Nicolas 2005, 311) ; carcasse en
« …qui stetit ad curandum cavalham ubi assetiaretur murus caxe pontis pièces de bois destinées à être garnie de torchis (Vidal
porte Cimbalorum… ». C’est également le cas à Toulouse pour 1911, 250). À Castelnaudary, ce vocable désigne un as-
la chaussée du Bazacle et les moulins à eau installés des- semblage de corondas et sparos destiné à être enduit de tor-
sus ; AC Toulouse, 2MI62, CC1854, janvier 1391-mai 1392, [f°87 v°1]. chis : cette claie est fabriquée à l’avance, hors de la struc-
« …per reparatio de adobar las cayssas del pes del Bazagle e dels molis ture du hourd, puis hissée pour être fixée sur la galerie
tant per fusta, post, feradura, quant per manobra de fusties… ». défensive ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°76 r°5]. « …qui portave-
runt 12 cledas de hospicio domini de Cani in ambanamento Fratrum
Cayrel : flèche, trait (Alibert 1966, 193) ; AD Aude, Minorum… ».
4E76/CC52, 1367, [f°12 r°10]. « …P. Montolivi de Saxiaco pro mille cay-
rellis quos empti fuerunt ab eodem pro deffensa ville… ». Clesc, closc : coquille (Alibert 1966, 226). À
Castelnaudary, ce terme a le sens de « petit abri » : AD Aude,
Cayro, cayron : voir cairon. 4E76/CC49, 1363-1364, [f°101 r°6]. « …Petro Belenguerii […] pro ator-
tissando duos clescos torticii ubi dominus consul de Strada tenet lumen
Cazer : choir, tomber (Lévy 1909, 73) ; AD Aude, 4E76/CC57,
quando vigilat ».
1389, [f°33 r°8]. « …que amasset le teule de las cavas del bari de Dins
que fec cazer le gran vent dels embans ». Clot : dépression, trou, fosse, cavité (Alibert 1966, 226) ;
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°59 v°3]. « …stero affar les clotz per far
Cementeri : voir sementen.
les pilars de las paret de la Baffa… ».
Cen : voir senh.
Cobrir : couvrir (Alibert 1966, 228) ; AC Montréal, 1D1, 1409,
Certificar, sertificar : 1. certifier (Lévy 1909, 76). 2. in- [f°31 r°1]. « …e que hom cobris la cara del ostal de mastre senhor
former (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 r°11]. Bernat Favre car la paret de la vialha fora gardada que l’ayga que dera
« …cuidam nuncio qui missus fuit Villepicte cum literis pro sertifficando al pe la fera cazer…».
gentes de gentibus armorum. ».
Cofin, coffin : panier, cabas (Lévy 1909, 82) ; AD Aude,
Clau : clé (Alibert 1966, 225) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, 4E76/CC48, 1360, [f°74 v°1]. « …in quandam coffino apportavit viginti
[f°52 r°2]. « …an G. Maserolas per una clau que fo meza a la porta l.t. ...».
Mondebo… ».
Cologar : retenir (Lévy 1909, 83) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360,
Clausura, clauzura : clôture, enceinte fortifiée (Lévy [f°68 r°1]. « …per 3 agassiers que mosenhor de Mont Lazur li avia colo-
1909, 79) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°50 r°1]. « ….as obs de las gatz a pretz fayt…».
palissas e dels gaytils de la clausura de la vila… ».
Comandaire, comandayre : celui qui commande, com-
Clavadura, clavatura : fermeture, serrure (Lévy 1909, mandeur (Alibert 1966, 233) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361,
79) ; AD Aude, 4E76/CC59, 1393-1394, [f°27 r°7]. « …a mastre [f°70 v°10]. « …al comandayre de Sant Antoni per 6 cabiros redons… ».
Guilhem Gelat per dos clavaduras… ».
Comensament, començament : commencement (Alibert
Clavel : clou (Lévy 1909, 79). À Castelnaudary et à 1966, 234) ; AD Aude, 4E76/CC64, 1418, [f°40 v°1].
Toulouse, on rencontre plusieurs types de clous : clavus « …per l’espazi de 6 jorns cascu a trassar e far le comen-
barator ou barador (certains sont dits « fortz ») : clou ser- sament de la cavalha del mur de la porta Mondebo… ».
vant à barrer. Clou de grande taille. Clavus de folhia : clous
Compagnon, companhon : 1. ouvrier travaillant pour un
pour les voliges. Clavus de moli : clous de meules ? Clavus
maître (Bernardi 1995, 442). 2. associé (Ibid.) ; AD Aude,
de relha : clous pour les pentures. Clavus latador : clous
4E76/CC48, 1360, [f°62 r°3]. « …an Paul Huc am sos companhos peyri-
pour fixer les lattes ou voliges. Clavis reforsatis (ou refor-
ers de Peyra Fita…».
satz) : clous renforcés ; AC Toulouse, EE32, 1355, [f°112 v°17].
« Item per 100 clavels baradors fortz a obs de las taulas de las paretz... » ; Comparar : comparer (Alibert 1966, 235).
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°8 r°5]. « …pro viginti quinque clavis de
folhia, viginti quinque clavis de moli, 25 clavis barratorum…. » ; Ibid., Compasar, coumpasar : mesurer au compas (Lévy 1909,
1361, [f°105 r°11]. « Item pro aliis 200 clavibus de relha quos receperat 86) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°61 r°10]. « …mossenhor le senes-
dictus Geraldus et posuit in dicto guacillo. »; Ibid., 1360, [f°80 v°10]. calc venc dinnar a Castelnou en estet per tot le jorn al castel am le mestre
« Item […] fuerunt empti a magistro B. de Podio 300 clavi reforsatis pro de las hobras am totz les fustiers e am mastre Arn. Lo Senheyre per hor-
latando seu sparonando…». donar et coumpasar las cauzas que y fazian mestiers al dit castel… ».

234
GLOSSAIRE OCCITAN

Comporta : 1. pont-levis (Lévy 1909, 87). 2. herse (Ibid.) ; Corondat : colombage ; ensemble de la disposition des co-
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 r°10]. « …pro portando cordam rondes d’une muraille, d’une cloison ; appareillage de
nove de ecclesia Beati Michaeli ante turrim Mercadalis et ponendo in construction constitué par des corondes ; il faut distinguer
comporta dicte turris...». des corondats de cloison séparant des pièces dans une ha-
bitation des corondats servant d’armature aux construc-
Congregar : assembler (Alibert 1966, 238) ; AC Montréal,
tions des murs d’une maison (Cayla 1964, 196) ; AD Aude,
1D1, 1421, [f°53 v°3]. « …congregarunt eorum consilium pro infras-
4E76/CC73, 1430, [f°11 r°3]. « …que eran casut les tortises els coron-
cripti peragendi… ».
dat…».
Conh, cunh : coin à fendre, coin de monnayeur (Lévy
Corsiera, corseria : chemin de ronde, coursive, (Alibert
1909, 90) ; AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9,
1966, 245). Coursière, chemin de ronde en bois et en en-
22 septembre 1428. « Primieramen sinquanta scutz d’aur de bon aur e de
bon pes de cunh e de la ley de Fransa…».
corbellement sur une muraille, à l’intérieur d’une place-
forte (Nicolas 2005, 311) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°92
Consultar : consulter, se consulter (Alibert 1966, 240). v°6]. « Item Petro Bareria, Guillermo Talabatii, Petro Messerii qui die
presenti portaverant lapides super corserias…».
Contrapes : contrepoids (Lévy 1909, 94).
Cosolh, cossol, consol : consul (Alibert 1966, 239).
Cop : crâne (Lévy 1909, 95). Dans le sens de « partie hau-
te » du bacinet ? ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423, [f°60 r°5]. « …an Cosselh, conselh : conseil (Alibert 1966, 239) ; AD Aude,
G. Duran per hun cop de basinet… ». 4E76/CC64, 1408, [f°35 r°2]. « ...les senhors de cossols am voler del cos-
selh aguo encartat affar de mur...».
Copar : couvrir ? (Lévy 1909, 94) ; AD Aude, 4E76/CC49,
1363, [f°36 r°1]. « …magistro Guillemo Gelati […] pro una clavatura Costa : à côté de, du côté de ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°48
copata ad opus pontis porte Cinbalorum et pro 21 libris cavillarum fer- v°1]. « …a la paret de costa la porta Nova can levet la paret…».
ri… ».
Costar, decostar : coûter (Alibert 1966, 247) ; AC Toulouse,
Coperta, coberta : voir cubert (Glossaire occitan). EE32, 1355, [f°92 v°1]. « …que pezeva 44 libras e costa la libra... ».

Cor : 1. cœur (Lévy 1909, 95) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1362, Coston, costo : escarpe (Lévy 1909, 99) ; AD Aude,
[f°109 r°6]. « ...pro viginti quinque cannis de plansone coris ad opus em- 4E76/CC52, 1367, [f°3 r°5]. « …qui radiderunt costones et abstraxerunt
banorum retro G. Olricii. ». 2. chêne (Lévy 1909, 95) ; AD Aude, terram de vallatis anguli Bastite a parte superiori… ».
4E76/CC48, 1360, [f°69 r°10]. « …4 pessas de fusta de cor… ».
Cota malha, cota de malha : cotte de mailles ; AD Aude,
Coral : cœur de chêne (Alibert 1966, 242) ; AC Toulouse,
4E76/CC56, 1382, [f°143 r°9]. « …pro deterioratione et reparatione duo-
CC2327, 1417-1418, pièce n° 22. « Item per far dos pontz de coral a las
rum bacinetorum armorum et unius cote malhe... ».
tors descubertas entra la porta de Sent Stephe e de porta Nova ».
Cotel : couteau (Alibert 1966, 247) ; AD Aude, 4E76/CC66,
Cordier : cordier (Lévy 1909, 96).
1412, [f°15 r°5]. « …que home no aget portar cotel ni spasa ni balesta ni
Corna : cor (Lévy 1909, 96) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°70 autre arnes… ».
v°5]. « Item G. Cuelha pro aptando bucas cornis castri cum quae cornant
Crebar : crever, percer (Alibert 1966, 249) ; AD Aude,
badatores…».
4E76/CC55, 1376, [f°29 v°1]. « …pro tanquar le trauc del portanel de
Corona : larmier, corniche (Gaffiot 2000, 436) ; AD Aude, Fizas a la Baffa lequal era tot crebat ».
4E76/CC48, 1360, [f°80 r°3]. « …pro interrando coronam porte magis-
tri Bertholomei Constantini…».
Crebassa : crevasse (Alibert 1966, 249) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1360-1361, [f°69 r°1]. « …3 homes que tanquero las cre-
Coronar : couronner (Alibert 1966, 244) ; former le faite bassas de la paret… ».
horizontal ou le sommet pyramidé d’une élévation ou
d’une partie d’élévation (Pérouse de Montclos 1995, 23, Croc, croq, groc : croc servant à tendre l’arbalète (Lévy
[12]) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°69 v°7]. « …a mastre 1909, 102) ; croc de l’arbalète, attaché au baudrier (Nicolas
B. Delpueg pro 60 clavels baradors que foro mezes obs de coronar le gay- 2005, 312) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°26 r°1]. « Item pro tribus
til de l’angle dejos la porta de S. Antoni… ». serquals necessariis pro garnimiento croquorum balhistarum ville… ».

Coronat : de coronar ? couronner (Alibert 1966, 244) ; AD Crosat, crozat : croisé, sorte de monnaie (Lévy 1909,
Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 bis r°6]. « …ad costruendum unum 102) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°117 r°6]. «…pro canna 10 pal-
guacillum coronatum supra embannos… ». morum septem crosatorum cum dimidio argenti. ».

Coronda : colonne, poteau, solive, pilier de bois (Alibert Cubert, cuberts, cuvert, quberta : couverture d’une mai-
1966, 244) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 r°2]. « Item son, toit (Mistral 1878, vol. 1, 684) ; AD Aude, 4E76/CC55,
Saurato forasterio pro 5 corondis quelibet 12 palmorum, 1 coronda 1376, [f°37 r°3]. « …pro 10 selas de tera las quals foro mezas sus le cu-
24 palmorum, duabus corondis quelibet 17 palmorum positas in dictis berts de la gleysa de Sant Miquel…» ; Ibid., 4E76/CC74, 1432, [f°44 r°8].
ambanis...». «… per 3 brassas de fuelha per far una quberta per obrar los peyriers…».

235
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Curar : 1. curer, nettoyer, vider (Alibert 1966, 254) ; AD Dentel, dentelh, denthil, dent : merlon (Levy 1909, 111) ;
Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°190 r°3]. « Item G. Hugonis, Petro Remegii, AD Aude, 4E76CC48, 1361-1362, [f°113 v°2]. « ... que portaverunt per
Bernardo Christiani et G. Savalli pro curando galochia portus Bordarum quatuor dies arenam et morterium in dentellis Fratrum Minorum seu ad
2. creuser
qui erant engorguatis occasione undationis aquarum… ». reparandum eosdem… ». Voir dentillum (Glossaire latin).
(Vidal 1911, 251) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°73 r°2]. « ...Ar.
Mancipii et G. Guilaberti qui dicta die steterunt ad aperiendum et cu- Dentelhar, dentelar : construire des merlons ; AC Toulouse,
randum fundamentum dicte parietis qui ceciderat pro incipiendo alium EE32, 1355, [f°70 v°2]. « …que avian obrat a dentelhar e a pazimentar
parietem novum… ». costa la porta Nova… ».

Derayratie : de derraigatge ? arrérage, échu ? (Alibert


1966, 265) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°28 r°]. « Siegon se les de-
D rayraties de la talha fayta per la beyda de Sancta Gavela e de Clarmont
Sobira. ».
Daga, daqua : poignard (Lévy 1909, 91) ; AD Aude,
4E76/CC71, 1423, [f°23 v°4]. « …e per una daqua que compret an Derocar, deroquar : renverser, abattre, démolir (Lévy
Gualhart Alric… ». 1909, 113) ; AD Aude, 4E76/CC64, 1408, [f°39 v°2]. « …tant a de-
rocar la paret vielha la hon se fec la cavalha del mur de la porta… ».
Dalhar : faucher (Alibert 1966, 257) ; AD Aude, 4E76/CC56,
1381, [f°28 r°2]. « Petro Ferrandi qui dalhiavit et amovit erbas quas erant Descobrir, descuebre, descubrir : 1. découvrir (Alibert
in cava e in costonibus de porta Terrerii… ». 1966, 274). 2. découverte d’une carrière : enlever le mort-
terrain ; AD Aude, 4E76/CC52, 1368, [f°16 r°1]. « …qui steterunt ad
Dampnage, damnatge : dommage (Lévy 1909, 104) ; AD peyreriam vallatorum Bastite pro faciendo descuebre dicte peyrerie... ».
Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°52 r°2]. « …per le dampnage que hom
Voir discooperire (Glossaire latin).
avia donat a la dita corda li fero pagar 3 s. tol… ».
Despendre : dépenser (Alibert 1966, 288) ; AD Aude,
Dampnar, damnar, danar : endommager, gâter, éprouver
4E76/CC55, 1376, [f°42 r°3]. « …pro 16 candelas de ceu las quals foro
un dommage (Lévy 1909, 104) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398,
despendudas a far le gayt la nueyt sus las enbans… ».
[f°115 r°3]. « …pro coperiendo murum de terra ad finem ne aques plu-
viales non dampnificarent dictum murum… ». Desplegar : déplier, déployer (Alibert 1966, 289) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1360-1361, [f°52 r°2]. « …per una corda de carbe laqual li
Davant : devant (Alibert 1966, 259) ; AD Aude, 4E76/CC58,
fo desplegada ad obs de tirar la fusta del dit pont… ».
1391, [f°33 v°8]. « …per una cantitat de tera preza davant son hostal per
far las taulas de la paret…». Destemprar, destempar : détremper, délayer, amollir
(Lévy 1909, 120) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°68 r°2]. « …per
Debas : en bas, au rez-de-chaussée (Alibert 1966, 259) ; AC
una grassala per destempar del mortier…».
Toulouse, EE32, 1355, [f°103 v°3]. «…per levar la paret costa la porta
de la font de Santa Maria debas le Bazagle… ». Desterrar, desenterrar : déterrer (Mistral 1878, vol. 1,
784) ; AD Aude, 4E76/CC53, [f°69 r°2]. « …qui dicta die steterunt ad
Debat : contestation, débat (Alibert 1966, 260) ; AD Aude,
desterandum ac discoperiendum turi grossa anguli portus Astrate cum
4E76/FF20. « Item a XXIII de juli l’an 1411, Johan Redorta, G. Teysere,
esset in ruina... ».
R. La Posonia de mandament dels senhors cossols e de volontat de G. La
Baysa anero vezer un debat de una paret que es entre la Baysa en Peyre Detorquar : synonyme de detorcar, décrépir ? perdre le
Vidal que le dit G. la Baysa ditz que las ayguas den P. Vidal li destrusiso crépi ? (torcaditz : crépissage ?, Lévy 1909, 366) ; AD Aude,
la paret… ». 4E76/CC51, 1366, [f°78 r°7]. « …que aquel dia estero a talussar les cos-
tos de la cava de la Baffa quan la paret vielha fo detorquada… ».
Decebre, desebrar : séparer, détacher (Lévy 1909, 116) ;
AC Toulouse, CC2324, 1405-1406, [f°94 r°6]. « …per sos trebalhs fayts Deute : dette (Alibert 1966, 297).
l’an present per mandament dels senhors a decebre teula, cautz arena
calhau e autras causas apartenous a la obra de la muralha fayta l’an pre- Devalar : descendre, ôter (Lévy 1909, 123) ; AD Aude,
sent ». 4E76/CC74, 1432, [f°15 v°3]. « …per devalar lo teule de la porta del
Terier lo cal foc mes sus lo escalier de la Bafa… ».
Decorbar : de corbar ? courber (Lévy 1909, 95). Dans le
sens de « voilés » ou « faussés » ? AD Aude, 4E76/CC78, 1442, Dezenier : dizenier (Lévy 1909, 126) ; AD Aude, 4E76/CC62,
[f°49 v°1]. « …per adobar les maymos del pont levadis de la porta de 1398, [f°29 r°2]. « …et ordinando et assetiando les dezeniers et in quibus
Sant Antoni les cals eran decorbatz… ». locis excubiatoris morarentur... ».

Defar, deffar : défaire ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°37 v°2]. Dieta : vacation (Lévy 1909, 128) ; AD Aude, 4E76/CC56,
« …per razo de deffar le mur de reure l’ostal del P. Bosc…». 1381, [f°28 r°2]. « …Petro Ferrandi qui dalhiavit et amovit erbas quas
erant in cava e in costonibus de porta Terrerii pro sua dieta. 4 s. tur. ».
Degranar : ôter (Lévy 1909, 108) ; AC Toulouse, 2MI66,
CC1859, 1432-1433, [f°120 v°2]. « …a quatre companhos bretos que de- Dobla : monnaie de double valeur (Alibert 1966, 300) ; AD
granen las peyras quant son estadas portadas a l’obra de Sant Suzari ». Aude, 4E763/CC73, 1430, [f°16 v°4]. « …a 5 doblas per jorn…».

236
GLOSSAIRE OCCITAN

Doblar : doubler (Alibert 1966, 300) ; AD Aude, 4E76/CC58, Enartamen, enartement : échafaudage ? ; (Lucas 1996,
1391, [f°60 v°2]. « …e per doblar le sobresol... ». 141) : « broque, postes et fustaiges pour fere les enartements ».

Doga : douve (Alibert 1966, 300), planche servant à la fa- Enbardar : voir bardar.
brication des tonneaux, longues et courbées (Robert 1982,
575). À Castelnaudary, ces éléments sont utilisés pour le Enbrogat, inbrogat : de broc / brog, bruyère (Voir ce mot.
coffrage de l’arche des ponts ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, Glossaire occitan), dans le sens de « rempli de bruyère » ou
[f°121 r°2]. « Item prenominatis tutoribus pro doguis unius cargue emp-
« bouché par de la bruyère » ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363,
[f°40 r°6]. « ….qui steterunt ad curandum caxam pontis porte
tis ad opus dicti pontis... ». Voir douela.
Cimbalorum que caxa erat inbroguata...» ; [f°40 v°2]. « ...qui steterunt ad
Douela : synonyme de douelle : douves ; portaient aussi ce curandum caxam dictam dicti ponte qui se enbrogaverat ».
nom l’armature de bois provisoirement employée pour éta-
Encartar : inscrire, enregistrer (Alibert 1966, 322) ; AD
blir la voûte d’un pont (« faire les douelles de trois pans et
Aude, 4E76/CC64, 1418, [f°45 v°1]. «… e que endabans no lor volguo
demi de longueur et de la largeur et espesseur requise »
baylar la manobra del mur de la porta Mondebo dessus dita ni
(Extrait du bail à besogne de la construction du pont sur
encartar…».
l’Aude à Trèbes, 3E906, Carcassonne, 1614 ; Cayla 1964,
237) ; AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°57 v°3]. « …per 3 douelas de Encaucinar, encaussinar, encausinhar : chauler (un mur :
carga que foro mezas al pont de la porta de mastre P. de Vilavielha… ». blanchir à la chaux), échauler, couvrir de chaux (Mistral
Voir doga (Glossaire occitan). 1878, vol. 1, 891) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°42 v°2]. « …qui
stetit ad recubriendum et encaucinandum operatoria dictorum domino-
Dralha : voir tralha.
rum consulum… ».
Dresar, dreisar : dresser, lever, redresser (Lévy 1909,
Enclaustrar, enclastrar : cloîtrer, enchâsser (Alibert
133) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°75 r°2]. « …steterunt ad facien-
1966, 323) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°31 r°1]. « …a
dum palum seu dresandum in dicto foramen dicte parietis... ».
P. Malgranier per plom as ops de enclaustrar la dita laurigua… ».

Encontre : serrure ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°95


E r°10]. « Item Guillermo Mazerolas qui reparavat encontres porte de Baffa
seu clavaturarum eiusdem… ».
Effan, enfan, efan : enfant, jeune (Lévy 1909, 146) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°60 v°2]. « …a tres efans de Planha e an
Endavans, endabans : dorénavant.
G. Sauri… ».
Endrech, endreg : droit, en face de (Lévy 1909, 145) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°68 r°3]. « …detras le pal d’endreg do-
Embaissada, embarsiada : ambassade (Alibert 1966,
na Feriera… ».
308) ; AD Aude, 4E76/CC66, 1412, [f°12 r°1]. « que hom volgues far
una embarsiada ves le rei nostre senhor per le mal el dabnagge que pasa Enformar : informer (Lévy 1909, 147).
le pais… ».
Engalar, engalhar, engualar, egalar : réparer (Lévy 1909,
Embosca, emboscada, embosquata : embuscade (Lévy 134) ; arranger (Alibert 1966, 331) ; AD Aude, 4E76/CC48,
1909, 137) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1399, [f°22 r°1]. « …et dubitaret 1361, [f°118 r°4]. « …quia engualavant dictos parietes... ».
de embosquata Anglicarum super itinerem... ».
Enganeta : petite flèche (Lévy 1909, 147) ; AD Aude,
Emina : émine (Lévy 1909, 138). Mesure de surface agrai- 4E76/CC62, 1399, [f°10 r°4]. « …pro 120 astis necessariis pro astando
re et aussi mesure de capacité pour les solides ; elle avait la las enganetas… ».
valeur de deux cartières ou quarterées (Cayla 1964, 252).
Engorgar, engorguar : obstruer, boucher, bourrer (Alibert
Empalar : poser des pieux, faire une palissade ? ; AD Aude, 1966, 334) ; AD Aude, 4E76/CC49, [f°190 r°3]. « …pro curando ga-
4E76/CC48, 1359-1360, [f°25 v°3]. « …in empalando retro hospicium lochia portus Bordarum qui erant engorguatis occasione undationis
domini Petri Raynardi… ». aquarum… ».

Emurar, enmurar : murer une porte, une fenêtre (Lévy Enguent, enguen : onguent (Alibert 1966, 335) ; AD Aude,
1909, 149) ; AD Aude, 4E76/CC48, [f°14 v°3]. « Item fecerunt emu- 4E76/CC51, 1366, [f°55 v°2]. « …per les enguens que mes al rosi que
rari portam de Baffa per Dominicum Guastonis peyrerium...». era del botelhier del duc lequal quazet a la cava de Got Feran… ».

Enans, ennans : auparavant, au contraire (Levy 1909, Enroucar : cacographie de enroncar ? Du suffixe en- et de
140). runcare, roncare ? : défricher (Niermeyer 1984, 924), dans
le sens de « laisser à la friche, abandonner » ? ; AD Aude,
Enartar : échafauder (Alibert 1966, 319) ; (Vidal 1906, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°190 v°2]. « …pro agravando et enroucando
1381-1382, 240), [f°91 r°]. « Lo dia dessus, a Isarn Redon operatoris dictorum dominorum consulum ».
per 7 corondas, cascuna de 2 canas que foro presas per en-
artar costa l’arqua, que las gens que estavo al dig obratge Entaulament, entaulamen : 1. entablement (Lévy 1909,
poguesso anar e tornar… ». 152) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°46 r°3]. « …an Johan Redorta

237
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

per les matrasses e per le entaulament del pont de Guot Feran… ». 2. ar- Escazer, esquazer : être déduit, retranché (Lévy 1909,
rangement, disposition (Ibid.). 161) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°50 v°3]. « …fero pagar o
far esquasent a la filha den Johan Amielh de la Baffa per un deute que la
Enterrar : couvrir de terre, enterrer (Lévy 1909, 153) ; AD vila li devia de la fusta de un osdal que la vila li avia preza per metre a
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°26 r°3]. « …qui steterunt ad enterrandum las obras de la vila per le qual deute li fo fayt escasent de la dita ques-
solerium turrim de la Strada... ». ta… ».

Entonament : souterrain pour les eaux, égout, conduit, Esclapar, sclapar : équarrir (Lévy 1909, 161) ; AD Aude,
aqueduc, pierrée, tunnel ; tuyau d’une fosse d’aisance 4E76/CC48, 1359-1360, [f°3 v°3]. « …pro sclapando unam brachiatam
(Mistral 1878, II, 1006-1007 : toun, touno), dans le sens de lapidis que fuit posita in operibus clausurarum… ».
« conduit d’écoulement des eaux » ? ; AD Aude, 4E76/CC53,
1371, [f°47 r°3]. « …pro una brachiata folie ab ipso habite et posite in Escola, scola : école (Alibert 1966, 360).
dicto entonamento dicti operatorii 2 grossos 4 d. tol. et pro 40 clavibus re-
forsatis 10 d. tol. et pro 25 tachis galochiarum positis in dicto entona- Escombre, escombrero, escombrilha, escrombilha,
mento... ». scombrilha : déblais, décombres (Lévy 1909, 162, 163) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°60 r°4]. «…per gitar am paniers del dit
Entorta, entorcha : torche, gros cierge (Lévy 1909, 153) ; escombre del dit valat… ».
AD Aude, 4E76/CC56, 1381 ; [f°18 v°4]. « …et pro consultando super
excubias et portas fecerunt emere duas entorchas a Petro Castelli… ». Escorro, scorro : synonymes de scorrons / escorrons, sy-
nonymes probables d’ escourridou, égouttoir, et d’escour-
Entravament : de trau, poutre, solive (Lévy 1909, 370) rindou, égouttoir constitué par une ou plusieurs tiges de
dans le sens d’ « assemblage de poutres » ; AD Aude, métal fixées sur une paroi ; les deux mots proviennent du
4E76/CC51, 1366, [f°80 r°5]. « …an Johan Gualigo que aquel dia stet a verbe escórrer ou escorrir, écouler (Cayla 1964, 288) ; AD
tranquar le mur dels dentels de las paret dels Frayres Menors per so quel Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°139 v°4]. « …magistro Germano de
entravament aqui se pogues metre… ». Payranno pro faciendo scoros platos et alia ferramenta dicti pontis… ».

Entrefitas, entreficha : clavette (Alibert 1966, 343). Escorba, escorva, scorba, scorva : synonyme d’escorba /
escroba, écrou (Alibert 1966, 361), dans le sens d’ « axe
Entre : entre, parmi, au milieu de (Alibert 1966, 343). autour duquel pivote le pont-levis » ? ; AD Aude, 4E76/CC56,
1381, [f°138 r°8]. « …pro una furqua ferri sive pal de moli de quo fue-
Entrepeirar : à Albi, ce verbe désigne l’action de bâtir le
runt facte scorvas dicti pontis levadis… ». Voir fusel (2.) (Glossaire
solin (en pierre ou en briques cuites) d’un mur de terre
massive ; (Vidal 1911, 254), « Disero los juratz, que lo pe de la dicha occitan).
paret… sia entrepeirada… ». Espalhiera, spalliera, paliera : de espalla / spalla : appui
Entrepeirament : à Albi, ce mot désigne le solin (en pier- (Alibert 1966, 368). Epaule, épaulement (Bernardi 1995,
re ou en briques cuites) d’un mur de terre massive ; (Vidal 460). À Toulouse, ce terme désigne une pièce de bois dis-
1911, 254), « Disero los juratz, que lo pe de la dicha paret… sia entre-
posée en oblique et destinée à maintenir en place les
peirada… loqual entrepeirament monte en aut entro que la dicha paret
perches plaquant le coffrage contre un mur de terre crue
demore… en segur ».
massive en cours de construction ; AC Toulouse, EE32, 1354,
[f°42 v°3]. « Item per 30 pernas de caderna brassa que pres en Iahn
Entro : jusque, jusqu’à ce que (Alibert 1966, 345). Degarac paredier de Tilh a puntiers a la paret tras l’ostal del tesaurier a
San Estefe e pus 5 cartos a far una escala e a pouiar las palieras... ».
Entuinar : agencer, ajuster, arranger (Mistral 1878, vol. 2, Voir palma (Glossaire occitan)., voir spallaria (Glossaire
944) ; AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°32 v°5]. « … pro 12 travatels de latin).
cor les quals foro comprat per entuinar la tor de la porta de la Bastida… ».
Esparo, esparro, sparo, sparro : synonyme de esparon,
Esag, essag : voir assag. esparron, sparon, sparron : petites baguettes de bois pre-
nant place dans le cadre en charpente du colombage et au-
Escala, scala : échelle (Bernardi 1995, 459) ; AD Aude,
tour desquelles on faisait tenir le torchis, (Alibert 1966,
4E76/CC48, 1360-1361, [f°58 r°5]. « …per 2 cabiros redons de que fo
369 : esparron : échelon, balustre, poteau de cloison) ; AD
fayta escala per puiar sus la porta de la Plassa… ».
Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°61 r°5]. « …per 2 quintali de sparo que foro
Escalha : écaille, coquille, carapace (Alibert 1966, 353) ; meses per tortissar l’amban detras le moli del castel…». À
AD Aude, 4E76/CC71, 1423 [f°61 v°5]. « …per una pessa d’armas gar- Castelnaudary, certains (ou la totalité ?) de ces sparos sont
nida de devant e detras e de panciera d’escalha… ». fabriqués dans des baguettes de saule : AD Aude, 4E76/CC49,
1363, [f°91 r°3]. « …qui steterunt ad sporguandum salices nause fontis
Escalon, scalon : 1. échelon (Lévy 1909, 159). 2. degré, Rosandi pro faciendo sparones ad opus ambanamentorum...».
marche d’escalier (Ibid.).
Esparonar : installer des esparons ou sparons sur le co-
Escaramusa, escarmusa, scaramussa : escarmouche lombage ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°33 r°5]. « …pro sparonan-
(Lévy 1909, 160) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°142 r°6]. « …pro do atortissando et enterrando 18 brachiatas et media ambanamenta pa-
quodam glavio quo portabatur penuncellus dicti loci qui fuit fractus in rietis nove retro castrum...». Voir esparo, esparro (Glossaire
scaramussa… ». occitan).

238
GLOSSAIRE OCCITAN

Espasa, espassa, espaza, spasa : épée (Alibert 1966, Estaudel, staudel : tréteau, chevalet (Lévy 1909, 176) ; AD
369) ; AD Aude, 4E76/CC66, 1412, [f°15 r°5]. « …que home no aget Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°63 r°3]. « …G. Saurini et Ramundo
portar cotel ni spasa ni balesta ni autre arnes… ». Sarraceni fusteriis qui dicta die steterunt pro faciendo aybrerium sive sta-
giam magne bombarde et quodam magno staudello ibi necessario pro
Especier : épicier (Alibert 1966, 370) ; AD Aude, 4E76/CC69, sustentando dictam aybrerium… ».
1419, [f°24 r°1]. « …al senhor Guillelm la Sanha especier de Toloza… ».
Estequar, stequar : synonyme d’estacar : attacher, dans le
Espiar, spiar : guetter, espionner (Alibert 1966, 373) ; AD sens de « être en contact avec », « jouxter » ; AD Haute-
Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°104 v°5]. « …Petro Russelli qui acces- Garonne, 3E10154, 1386, [f°317]. « Item may l’ostal paternal tot fora la
sit ad locum de Villanova, de Miravalle, et de Fendelha pro sciendo et cosina e la cambra nauta que estequa am les embans el solier bas que ste-
spiando qui erant gentes armorum que trancierant de mane juxta dicta lo- qua am la paret de la vila… ».
ca pro quibus fecerant tocacen… ».
Estrena, estrenha : cadeau, pourboire (Lévy 1909, 179) ;
Espingala, espingola : espingale, sorte de baliste (Lévy AD Aude, 4E76/CC77, 1441, [f°26 v°2]. « …al dit Gibel per far livrar
1909, 172) ; AD Aude, 4E76/CC48/1, 1359-1360, [f°6 v°2]. « …por- l’aygua que era nesesaria a la dita paret per estrena. 4 d. ».
taverunt spinqualam supra portam de Got Feran…». Voir spinquala
(Glossaire latin).

Esponda, sponda, espondiera : 1. parapet (Lévy 1909, F


172) ; AD Aude, 4E763/CC73, 1430, [f°16 v°4]. « …an jovi Johan que Fag, fach, fau : hêtre, bois de hêtre (Lévy 1909, 181) ; AD
estet per dos jorns a far las espondieras de peyra dels ditz tres ponts… ». Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°41 r°1]. « pro quadam barra de fag recepta
Ibid., 4E76/CC57, 1388, [f°36 r°1]. « …. per 2 cabiros as ops de far spon- per Johannem Redorta fusterium… ».
das al pont de Guot Feran... ». 2. talus (Alibert 1966, 375).
Fanc, fanh, fanqua, fangua : fange, bourbier (Lévy 1909,
Esporgar, sporgar : nettoyer, épurer (Alibert 1966, 375) ; 183) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°33 r°3]. « …pro curando et
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°22 v°2]. « …ad sporgandum ligna pro abstrahendo liota seu fanquam de puteo novello de barrio... ».
cledis faciendis in clausuris... ».
Fays, fais, faix : faix, fagot (Alibert 1966, 390) ; AD Aude,
Esquelha, esquila, esquilha, esquela, squela : cloche 4E76/CC64, 1408, [f°14 r°6]. « …an Johan Raynaut per un fays de lata
(Lévy 1909, 173) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°40 r°1]. « ….ad obs de la cabana de la porta Nova… ».
aptandum dictam tintinabula seu squelas Sancti Petri… ».
Faysier, faisier, faissier : portefaix ou porte-fagots (Lévy
Esquenal : synonyme d’ esquinal, cuir taillé sur le dos de 1909, 182).
la bête (Lévy 1909, 174) ; AD Aude, 4E76/CC68, 1415, [f°29 v°2].
« …per 2 cordas esquenals per tirar le pavalho que estava sobre le ca-
Fe, fen : foin : herbe fauchée et séchée (Alibert 1966,
dafalc… ».
396) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 v°2]. « ...8 quintalia feni et
quindecim quintalia sparonum pro tortisando guacillos portus Astrate...».
Estagn, estanh : étang (Alibert 1966, 379).
Fenas : gros foin, mauvais foin (Alibert 1966, 396) ; AD
Estalsin : égout (Lévy 1909, 175). Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, f°29 v°1]. «…pro portando duas faxas fe-
nasse in ambanamento castri…».
Estalsinar, stalsinar, stalcinar : de estalsin ? : égout
(Levy 1909, 175), dans le sens de « égoutter la chaux » ?, Fendre : fendre, détruire, se fendre (Lévy 1909, 186) ; AC
« évacuer dans un égout » ? AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°8 Toulouse, EE32, 1355, [f°131 v°1]. « …per caussar e far mantel e pilars
v°3]. « … qui portaverunt arenam et stalcinunt calcem in opere porte de a la paret fenduda sus le valat de costa la porta de Matabuau ».
Astrata… ».
Fenestra : baie, fenêtre ou trappe (Bernardi 1995, 447) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 r°1]. « …steterunt pro portis et fenes-
Estant, estan, stant, stanc, : poteau, étai (Lévy 1909, 175) ;
tris faciendis in turi porte Valincii… ».
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°59 v°1]. « …en que son mezes les stant
de las parets de la Baffa… ». Fenestrel, fenestrela, fenestralla : petite fenêtre (Lévy
1909, 186) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°72 v°8]. « …pro clau-
Estar, star : demeurer, habiter (Alibert 1966, 379) ; AC
dendo fenestralla porte Montis Lebonis… ».
Toulouse, EE32, 1355, [f°122 r°3]. « …P. de Lauretgia brassier e pare-
dier que sta a San Subra a la cariera dels Espanhols… ». Fer : fer (Alibert 1966, 187) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°57
v°2]. « …per una cadena de fer que fo comprada per metre al pont leva-
Estatga, estatja, statga, stagia: échafaudage (Lévy 1909,
dis… ».
176 ; Bernardi 1995, 461) ; AD Aude, 4E76/CC68, 1415, [f°57
v°4]. « …per 3 postz de 16 palms que foro mezas per estatgas sobre las Ferm : ferme, stable, fort, solide (Alibert 1966, 397) ; AD
sindras… ». Voir statgum (Glossaire latin). Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. «…pro cavando cum pix et cum ra-
basseriis pro perquirendo le ferm pede turris porte Strate...».
Estatjar, stagiar : 1. échafauder (Lévy 1909, 176). ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°104 v°17]. « …Ramundo Johannis ad Fermansa, fremansa : garantie, caution, assurance (Lévy
opus stagiarum barbacane Astrate ». 2. étayer (Lévy 1909, 176). 1909, 187).

239
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Ferradura, feratura : ferrure (Lévy 1909, 188) ; AD Aude, Folhar, fulhar : voliger, latter (Lévy 1909, 192) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1359-1360, [f°14 v°7]. « …pro duobus cathenis et alia fera- 4E76/CC49, 1363-1364, [f°31 v°6]. « …ad latandum seu fulhandum am-
tura per ipsum positis in porta de Astrata… ». banamenta parietis nove castri… ».

Ferramen, ferrament : ferrement (Lévy 1909, 188) ; AD Folia, folha, fuelha : planche, volige, planche mince (Lévy
Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°139 v°4]. « …magistro Germano de 1909, 192) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°91 r°5]. « …pro tri-
Payranno pro faciendo scoros platos et alia ferramenta dicti pontis… ». bus brachiis et media de fuelha quas receperat Johannes Robberti ad re-
parandum guacillum prope portam de Got Feran. ».
Ferrat, ferat : seau ; ces récipients étaient probablement
faits en fer autrefois mais la notion de cette matière origi- Fondament : base, fondations d’un bâtiment (Alibert
nelle s’est conservée lorsqu’on utilisait plus tard le cuivre, 1966, 405) ; AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°47 r°4]. « …per tres
plus léger et plus malléable (Cayla 1964, 316) ; seau de brassas e miega de peyra e per reble per far lo fondament de la dita pa-
ret… ».
bois cerclé de fer (Mistral 1878, vol. 1, 1122) ; AD Aude,
4E76/CC69, 1420, [f°47 v°1]. « …an Bertolomieu Rogier, favre, per ado- Fondre : fondre, dissoudre, ramollir, démolir, ruiner, dé-
bar le ferat per tyrar l’aygua… ». truire, abattre (Alibert 1966, 405) ; AD Aude, 4E76/FF20, 1413,
« …que la dita Gimela aya a reparar las gutieyras detras son hostal asi
Ferrolh, verrolh : verrou (Lévy 1909, 188) ; AD Aude,
que l’aygua no se pusqua fondre de costa la paret…».
4E76/CC48, 1361-1362, [f°92 r°1]. « Item dicto Guillermo quia repara-
verat clavaturam porte Stimbalorum et fecerat moralham in ferollo... ». Font : Source (Alibert 1966, 406).
Ficar : ficher, enfoncer, planter, fixer (Alibert 1966, 398) ; Fonsel, fonzel : petite pièce de fond (Alibert 1966, 406) ;
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°94 v°1]. « …ad ficandum et nutendum AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°47 v°6]. « Item pagueguo per […] dos
palum ante dictam barbacanam de la Strada… ». fonzels a las semals…».

Fil, fiela, fiel : fil (Lévy 1909, 189) ; AD Aude, 4E76/CC71, Foraget, foraiet : avant-toit, saillie du toit (Alibert 1966,
1423, [f°22 v°3]. « …per 20 pessas de las fiel de carbe per far cordas de 406) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°43 v°4]. « …per una brassa de
balesta... ». fuelha de 16 palms per far foraget al dit emban. ».

Fila, fiela : petite poutre, lambourde (Lévy 1909, 189) ; AC Forastier, forestier : 1. garde-forestier (Lévy 1909, 194) ;
Toulouse, CC2322, pièce n° 79, 1439. « per catre fielas grossas de AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°32 v°5]. « …an R. Bergonho forastier de
avet… ». Cabra Mortua pro 12 travatels de cor… ». 2. étranger (Ibid.).

Filar : filer (Lévy, 1909, 189) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, Forbir : fourbir, parer, armer (Lévy 1909, 193) ; AD Aude,
[f°91 v°4]. « …pro filando seu neudo quatuor libras canapis ad opus fa- 4E76/CC56, 1382, [f°142 v°2]. « …pro reparatione bacineti quod def-
ciendi cordas balistarum… ». ferebat apud Corbarriu cum aliis servientis quod fecit forbir et reparare
in Tholosa… ».
Filata, filate, fillate, fillada, filatat, fillade : 1. poutre min-
ce et longue utilisée pour établir des échafaudages (Cayla Forca : fourche (Alibert 1966, 406) ; AD Aude, 4E76/CC3,
1964, 320). 2. assise de pierre (Bernardi 1995, 447) ; AD 1357, [f°45 r°2]. « Pagat per una forca de fer… ».
Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°74 r°3]. « …R. Johannis et Ramundo de
Forn : four (Alibert 1966, 407)
Planhas peyreriis qui dicta die steterunt ad faciendum de muro unam fi-
latam… ». Fornelha, fornilha, fournilha : fournilles, broussailles
pour chauffer le four (Lévy 1909, 195) ; menu bois, bour-
Fileh : type de pierre ? ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°38 v°1]. rée pour le four (Alibert 1966, 407) ; AD Aude, 4E76/CC48,
« …an R. Boyer que careget una brasa de peyra de fileh de la peyriera 1361-1362, [f°95 v°4]. « Item quatuor faxeriis qui portavant duodecim
del bari de la Bastida as obs del forn de Butlor…». trossas de fornelha de borda de dona Planas intus portam Mondebonis
ne insequi posset dampnum…».
Finar : payer (Lévy 1909, 190) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1399,
[f°41 v°3]. «...et faciebant finare gentes pro eorum victualibus… ». Fornier : fournier, boulanger (Lévy 1909, 195 ; Niermeyer
1984, 458) ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°52 r°1]. « Comprem den
Flequier, flequie : boulanger (Lévy 1909, 191) ; AD Aude,
P. Gaieras fornier de Sant Estefe 4 dotzenas de saumadas de broc… ».
4E76/CC62, 1398, [f°3 v°1]. « Item pelegrino flequie pro 30 panibus… ».
Frachisa, frachissa : charnière (Lévy 1909, 196) ; AD Aude,
Foc : 1. feu (Alibert 1966, 403). 2. maison habitée par une 4E76/CC48, 1361-1362, [f°130 r°6]. « …magistro Guillermo Gelati pro
famille (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°27 v°1]. « …per pa- una frachissa uno ferolho cum armellis… ».
guar les 3 s. per foc que eran enpausatz per aber gens d’armas en contra
aquels de Lorda… ». Fusel, fuzel : 1. fuseau, pivot (Alibert 1966, 413). Pivot ex-
trémité amincie (ou pièce rapportée à l’extrémité) d’un
Folhador, fulhador [clavel] : clou pour planches minces arbre tournant vertical. Axe, crapaudine, palier, tourillon
(Lévy 1909, 192) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°42 v°3]. « …200 (Robert 1982, 1444). 2. écrou ? Axe autour duquel pivote
clavels fulhador per far la mayzoneta en que stan les porties de la porta le pont-levis ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°121 r°6].
dels Sens… ». « …pro uno stant magno quem tradi fecerunt magistro Petro Robberti in

240
GLOSSAIRE OCCITAN

restitutionem alterius magni stant ab eodem magistro Petro receptis ad Garrot, guarrot : 1. trait de grosse arbalète (Nicolas 2005,
opus fuzelli pontis porte Narbonesie... ». Voir scorva (Glossaire 317) ; 2. pétard (Mistral 1878, vol. 2, 31). Projectile en mé-
occitan). tal doté d’ailes destiné aux armes à poudre ; AD Aude,
4E76/CC49, 1363, [f°93 v°2]. « …pro una payrola ponderante 10 £. pro
Fust, fusta : 1. bois de construction (Alibert 1966, 413) ; faciendo alas als guarrotz canonum… ». 3. garrot (Ibid.). Par ex-
bois d’œuvre, bois de charpente (Bernardi 1995, 448) ; AD tension, collier de fer, pour maintenir le canon sur l’affût en
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°45 v°5]. « …pro portando fustam ad opus
bois, voire affût ou pièce de maintien en bois ? ; AD Aude,
pontis dictum pontis... ». 2. poutre (Bernardi 1995, 448) ; AD Aude,
4E76/CC56, 1381, [f°41 r°1]. « …pro quadam barra de fag recepta per
4E76/CC53, 1372, [f°72 v°2]. « …pro duobus fustis 22 palmorum ab ip-
Johannem Redorta fusterium pro faciendo garrotz canonum pro dicta
so habitis et positis in dicto opere dicti palenchi…».
barra… ». Ces garrots seraient ainsi dotés de hampes (astas)
Fustalha : terme générique pouvant désigner l’ensemble en bois transversales, peut-être pour faire pivoter les pièces
des pièces de bois utilisées dans une construction d’artillerie en azimut ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°41 r°2].
(planches, poutres, étais, échafauds) mais généralement ré- « …pro faciendo astas de 6 garrotz canonum… ».
servé aux seuls bois de charpente (Bernardi 1995, 448) ; AD Gasanar, gazanhar : acquérir ; obtenir, recevoir, (Lévy
Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°3]. « …pro quadam quantitate fustalhe
1909, 205) ; AC Montréal, 1D2, 1467, [f°34 r°1]. « Item los ditz pare-
que fuit empta ab eodem et posita tam in reparatione cadafalcorum quod
diers son tengutz de donar a gasanar a cascun habitan del dit loc sa co-
ambanamentorum et alibi in clausuris… ».
ta part… ».
Fustier : charpentier, menuisier, artisan travaillant le bois Gastar : gâter, endommager, ravager, ruiner (Lévy 1909,
(Bernardi 1995, 448). 204) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°8]. « …per clavelar fuelha
sus l’enban de sos la scola per so car no era recubert e la plueia gastava
le tortis… ».
G
Guaunilha : végétal indéterminé ? ; AD Aude, 4E76/CC49,
Gachil, gacil, guacil, gaytil, guaichil, guagil, gachial, 1363-1364, [f°91 r°4]. « …pro faciendo sparones et pro talhando guau-
guaycil : lieu ou l’on guette, guérite (Alibert 1966, 415), nilham ».
échauguette (Lévy 1909, 200), échauguette destinée au
guetteur (Bousquet 1926, 174, note 6) ; AD Aude, 4E76/CC48, Gayt, gach : guet (Lévy 1909, 200) ; stot gayt : ronde ex-
1360, [f°69 r°10]. « …4 pessas de fusta de cor obs del gaytil de l’angle térieure aux remparts ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°26
dejos la porta de Sant Antoni… » ; Ibid., 1361-1362, [f°91 r°3]. « …fue- r°2]. « …Poncio Aymerici, G. Basta, Ramundo Vinatori et Ramundo
runt ad costruiendum unum catillum retro castrum… ». Vitalis qui nocte dicte diey fecerunt stot gayt extra muros… » ; reire
gayt, reyre gayt : arrière guet ; AD Aude, 4E76/CC77, 1442, [f°29
Gachol, gachoul : boue délayée utilisée parfois dans la r°5]. « …per 8 l. candelas de seu per far le reyregayt dels enbans e a la
construction de murailles : gachoul pour monter parets… plasa a causa dels rotiers que eran sus le pais… ».
(Fanjeaux, 1600). (Cayla 1964, 346). Pain de terre humidi-
fiée utilisé comme moellon pour former les parements Gazarma, guazarma, guizarma, juzarma : guisarme, ar-
d’une construction en bauge. Synonyme de gason, gaison ? me tranchante (Lévy 1909, 205) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423,
[f°23 v°1]. « ..paguet senhor P. R. per far adobar una guazarma… ».
Gaffa, gafa : gaffe, perche avec un croc, (Alibert 1966,
319) ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°5 v°6]. « …pro uno fuste pro fa- Gazon, gaso, gason gaison, guason : 1. pain de terre hu-
ciendo gaffa ad tortissium porte Mondebonis…». midifiée utilisé comme moellon en parement d’une
construction de terre massive. Synonyme de gachoul ?
Galveg, galueg : synonyme de galucho ? petite levée de 2. technique de construction en terre crue massive utilisant
terre élevée dans un pré pour la conduite des eaux (Mistral ce procédé (bauge) et un blocage composé de bart en vrac ;
1878, vol. 2, 15). Rigole d’évacuation des eaux pluviales AD Aude, 4E76/BB13, 1671, [f°162 r°]. « …d’un pavois large de huict
courant dans le sens de la rue ou percée dans la base en pans faicte de guason attandu que la ville n’a point de four pour faire une
pierre de la paret ? ; AD Aude., 4E76/CC48, 1360-1361, [f°63 v°5]. muraille de pierre ou de brique… ». Voir gachoul (Glossaire occi-
« …que aquel dia avian ubertz dels galueg que eran dejos les pes de las tan).
paretz del port de las Bordas…» ; [f°56 r°5]. « ..per far le galueg que es
dedintz la dita barbacana… ». Voir galochia, galocha (Glossaire Gerlada : contenu d’une jarre (Alibert 1966, 428) ; AD
latin). Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°56 r°3]. « …per portar arena de gerlada ad
obs del mur de la barbacana de la dita porta… ».
Garba, guarba : gerbe, botte, paquet (Lévy 1909, 202) ;
AD Aude, 4E76/CC69, [f°47 v°8], 1420. « …per dos guarbas de serches Get : larmier ? (Lévy 1909, 206) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363,
e vims per adobar las semals… ». [f°49 r°5]. « …pro faciendo unum magnum getum de petra in ampesa-
mento parietis de la Strada Ramundo Johannis peyrerio… ».
Garda : garde, gardien (Alibert 1966, 422).
Ginosta, ginesta, genesta : genêts divers (Alibert 1966,
Garnimen, garniment : équipement, armure, habit, garni- 428). Végétaux utilisés dans la construction des murs de
ture (d’une robe) (Lévy 1909, 203) ; AD Aude, 4E76/CC56, terre massive, probablement en lieu et place de la bruyère ;
1381, [f°45 v°3]. « …pro garnimento 12 croquorum balhistarum ville AD Haute-Garonne, 2MI531, Caignac, H Malte, liasse 20 n° 1, fin
quos fecerunt eidem reparare et ligare… ». XIVe siècle. « Item que le dit comandador lor dara tot lo broc e ginos-

241
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

ta e mays aybres de las terras personals que seran necessarias per far I
lo dit fort… ».
Inbroguat, embrogat : de brog ? bruyère (Voir ce mot.
Girar : tourner (Alibert 1966, 207) ; AD Aude, 4E76/CC48, Glossaire occitan)). Dans le sens de « rempli de bruyère »
1361-1362, [f°101 r°2]. « Item plus pro girando pontem porte ou « bouché par de la bruyère » ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363,
Narbonesie... ». [f°40 r°6]. « ….qui steterunt ad curandum caxam pontis porte
Cimbalorum que caxa erat inbroguata...» ; [f°40 v°2]. « ...qui steterunt
Gitar : jeter, lancer (Alibert 1966, 207). ad curandum caxam dictam dicti ponte qui se enbrogaverat ».

Gofon, guofon, guoson, gueson, gosson : gond (Lévy Interar : voir enterrar (Glossaire occitan).
1909, 208) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°91 r°7]. « ..pro duobus
guofonibus ad opus porte Portus Bordarum… ». Intrada, intrata : entrée (Lévy 1909, 215) ; AD Aude,
4E76/CC49, 1363-1364, [f°28 r°5]. « …qui steterunt ad curandum intra-
Goga, gogo, gogue : personne lâche, antipathique (Alibert tam adequateria de Got Ferran… ».
1966, 432), molle et sans énergie (Mistral 1878, vol. 2, 63).

Goteria, gotiera : gouttière, égout qui tombe d’un toit


(Lévy 1909, 209) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°64 r°6]. «…ad J
preparandum goterias enbanamentum corserie portus Bordarum… ».
Jaire, jaser : gésir, être couché (Alibert 1966, 452).
Grassala, grasala, grazala : auge, grand baquet (Mistral
Jaqua, jaca : jaque de mailles (Lévy 1909, 216). Sorte de
1878, vol. 2, 87) ; AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°47 v°1]. « …an
justaucorps que portaient les hommes au Moyen Âge
Bertolomieu Rogier, favre, […] per dos grazalas… ».
(Robert 1982, 1042) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°28 v°4].
Grava : sable, grève (Alibert 19766, 211) ; AC Toulouse, « …pro emendo sertum arnesium necessarium in villa dicti Castrinovi
CC2324, 1405, [f°96 r°19]. « Item an Johan Debolet caretier per portar videlicet bacinetos, jaquis, pavesios et arssagayas… ».
50 tumbarelas de grava per metre sus le pons de la porta de la Font Santa
Jonc : jonc (Alibert 1966, 453) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-
Maria…».
1362, [f°88 v°7]. « Item pro una tralha de jonc Poncio de Lauraco a tra-
hendum aquas de puteis castri…».
Grayle, graile : clairon (Lévy 1909, 210) ; AD Aude,
4E76/CC56, 1381, [f°109 v°3]. « …qui preparaverunt trompillum sive Jornal : journée, travail d’un jour (Alibert 1966, 454).
grayle qui erat fractum… ».
Jupon, jupu, jupo : pourpoint, gilet (Alibert 1966, 455) ;
Grays : graisse de cuisine, saindoux (Alibert 1966, 435) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423, [f°23 v°2]. « …an P. Rial juponier de
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°102 v°3]. « Item pro quinque car- Tolosa per 6 jupus les cals foron compratz de son obrador… ».
tonibus de grays ad unhendum fusellum turi... ».

Grolier, grolhier : savetier, cordonnier (Cayla 1964, 365) ;


AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°34 r°2]. « …cuidam sabbaterio sive grol- L
hier qui preparavit quoddam croquum del aussapiem balhistarum… ».
Lagulha, agulha, agula, gulha : piquet de bois long et
Guaunilha : végétal indéterminé ? ; AD Aude, 4E76/CC49, pointu (Lévy 1909, 12) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°69
1363-1364, [f°91 r°4]. « …pro faciendo sparones et pro talhando guau- v°8]. « …que am lors bestias avian portadas 20 cledas de lagulha… ».
nilham ».
Landa : anneau de fer ? (Lévy 1909, 221) ; AD Aude,
Guarilha : sens peu clair, synonyme de garilhan ? : égout, 4E76/CC49, 1364, [f°160 v°1]. «…et pro faciendo landas dictorum ca-
puisard (Alibert 1966, 424) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°33 nonorum… » ; Ibid., 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110 r°9]. « Item eidem
v°8]. « …Ana Mengart guarilha per una cantitat de tera preza davant son pro duabus landis de fero positas in dicto guacillo... ».
hostal…».
Lansa, lanssa : 1. lance (Lévy 1909, 221) ; AD Aude,
4E76/CC71, 1423, [f°59 v°5]. « Item fero paguar an P. Seguier per una
lansa… ». 2. chevalier armé de sa lance avec les hommes de
H sa suite (Lévy 1909, 221) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°26
v°5], « …pro sciendo de gentibus armorum qui ibi erant ubi dicebatur qui
Hopalauda, opalauda : houpelande, long vêtement de erant 300 lanssas… ». 3. impôt pour le soutien des lansas
dessus (Lévy 1909, 268) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423, [f°23 (Lévy 1909, 221).
r°3]. « …per una hopalauda la cal foc baylada an Huc Daurel
que costet dos escutz d’aur… ». Lardiera : corde (Lévy 1909, 222) ; AD Aude, 4E76/CC78,
1442, [f°46 v°2]. « …an P. Baronada per 3 lardieras per tocar le sen del
Hostal : voir ostal. gayt…».

Huca, uca : crieur, héraut, proclamation (Lévy 1909, Las : de laça : ouvrage à claire-voie (de vannier) (Mistral
375) ; AD Aude, 4E76/CC64, 1408, [f°41 r°2]. « …per la cavalha del 1878, vol. 2, 175) ou de lacs, las : moyens de striction,
mur de la porta Mondebo la cal prenian affar a pretz fay a la huca… ». d’assujettissement ? (Cayla 1964, 415) ; AD Aude, 4E76/CC62,

242
GLOSSAIRE OCCITAN

1398, [f°25 r°1]. « ...pro operando in ambanamento quod est retro hospi- Logar : location ? loyer ; AD Aude, 4E76/CC3, 1358, [f°26 r°10].
cium de dona Cotarela et pro ponendo lasses… ». « G. Raynier. Pagat en deduxio del logar del sian rossi que loguet a
mastre Johan Niset per las besonhas de la viela ».
Lata : latte, pièce de bois refendue mince (Alibert 1966,
461). À Castelnaudary, il est difficile de savoir s’il existe Lonc : long (Lévy 1909, 228) ; AD Aude, 4E76/CC64, 1408,
une réelle distinction physique ou dimensionnelle entre les [f°36 r°3]. « …an P. Samata de Tonis per 12 postz d’avet de quatre canas
latas et les folias, ou s’il s’agit du même matériau qui chan- de lonc cascuna… ».
ge de nom selon sa destination dans la construction ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°71 r°5]. « …a mastre P. de Vilavielha Lotja, lotga : loge, abri temporaire ordinairement construit
per 6 fayses de lata que foro mezes al pal del Terier ». avec des branches d’arbre (Lévy 1909, 229) ; AC Toulouse,
2MI63, CC1855, 1404-1405, [f°19 r°3]. « …per la lotga de la barbaca-
Latar : latter, garnir de lattes, planchéier un toit (Alibert
na del castel… ».
1966, 461) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°101 r°6]. « …pro sparo-
nando atortissando coperiendo de tegulis latando et bardando tres bra-
Luza : synonyme de lutz ? : lumière (Alibert 1966, 471),
chiatas ambanamentorum parietis nove castri… ».
dans le sens de « jour d’éclairage » ? ; AD Aude, 4E76/CC48,
Laurigua : synonyme de laurica ? armure de maille 1359-1360, [f°15 r°8]. « …pro claudendo quasdam luza que erant in
(Nicolas 2005, 320) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°30 v°13]. clausuris prope domum Fratrum Minorum... ».
« …per una laurigua e per 4 cavilhas grossas de fer…».

Lerna : pièce en fer indéterminée ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-


1361, [f°56 r°1]. « …Germa de Payras favre per 2 lernas de fer que foro
M
mezas a l’obra del dit pont de la barbacana… ».
Machacol : mâchicoulis (Lévy 1909, 230) ; AD Aude,
Levar : lever, faire se lever, élever, hausser, commencer, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 v°9]. « …pro uno poste posito in macha-
construire, monter (Lévy 1909, 226) ; AC Toulouse, EE32, collo porte Mercadalis…».
1354, [f°42 v°1]. « …per 20 pernas de 4 brassas cascuna que fara apun-
Macip, mancip : jeune, garçon, jeune homme, domes-
tiers a levar la paret costa porta Nova…».
tique, serviteur, employé, ouvrier, compagnon (Lévy 1909,
Liar, ligar : lier, relier, attacher, assembler (Alibert 1966, 235) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°22 v°9]. « …fero paguar a 2
466) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°42 r°1]. « …pro quatuor libris macips que portego letras als senhors cossols… ».
cum dimidia ferri pro liando canonem quod est penes G. Torrini… » ;
[f°45 v°3]. Mager : aîné (Alibert 1966, 474) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442,
[f°46 r°5]. « Item fero paguar an Johan Got mager… ».
Lieyt, leyt, leit : lit (Alibert 1966, 463) ; AD Aude,
4E76/CC51, 1366, [f°95 r°3]. « …e per lieyt quan foro vengut per le fayt Maltrayt, maltrach : peine, souffrance, effort, salaire ?
de la bastida… ». (Lévy 1909, 234) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°146 r°4]. « …al
qual fero donar per son maltrayt 2 s. 6 d. th.… ».
Liota : synonyme de fanc (Voir ce mot. Glossaire occitan),
fanh, fanqua, fangua ? fange, bourbier (Lévy 1909, 183) ; Mandament : mandement, ordre (Alibert 1966, 479) ; AD
AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°33 r°3]. « …pro curando et abs- Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°66 v°2]. « …an Johan Dosqua lequal per
trahendo liota seu fanquam de puteo novello de barrio... ». mandament dels senhors anet a Vilamanha… ».

Lisa, liza, lhisa, terra liza : terre argileuse (Vidal 1911, Mandar : mander, donner ordre (Alibert 1966, 478) ; AC
260). Souvent utilisée comme liant pour les moellons ou Toulouse, CC2334, pièce n° 60, 1460. « Es mandat a Johan Murel the-
les briques cuites (synonyme de mortier de terra et de bart) saurier nostre que de los denies de sa recepta pague he delivre a Johan
; Vidal 1906, 1381-1382, 46, [f°75 r°]. « An Phelip Vaysiera per 540 sau- Boys, Sevetre Piron e a Pierres Hunault valladies habitans de Tholosa la
madas de lhisa que ac hom de luy ad obs de far lo dig obratge ; a un bar-
soma de dotze livres tornes… ».
salo la saumada » ; Couderc 1895, 1445, 451. « Item, de adobar de teu-
la, am terra liza, los pazimens et emmurar algus trauxc de las. cambra et Manlevar, malevar : emprunter (Lévy 1909, 236) ; Vidal
sala, et y aver et empleguar III carretadas de terra liza et de la teula de- 1906, 1381-1382, 48, [f°80 v°]. « …que tornero las taulas que aviou ma-
sus extimada… ». levadas del hospital, ad obs de far las dichas paretz ».

Lissa, liça : lice (Alibert 1966, 466) ; AC Toulouse, CC2322, Manobra : 1. travail, corvée manuelle (Lévy 1909, 236).
pièce n° 79, 27 juin 1439. « per far barrieras fora la porta de Matabuou
2. journée de travail (Ibid.). 3. manœuvre, ouvrier (Ibid.) ;
e las lissas dels valatz… ».
AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « …Petro Bartas et Ramundo
Loca, loqua : marche d’escalier (Alibert 1966, 469) ; AD Cunbelli, manobras, qui dicta die steterunt pro cavando...».
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°75 r°2]. « …pro 40 locas scalerii ad opus
Manobrier : 1. manœuvre, ouvrier (Lévy 1909, 236) ; AD
scalerias porte de Barrio ».
Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°47 r°8]. « …per un par de semals que pres
Logar, loguar (v.) : louer, donner ou prendre à louage del senhor Estene Blanh manobrier per portar aygua a far le bart per tor-
(Alibert 1966, 469) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°60 r°4]. « …a tissar les enbans... ». 2. surveillant des ouvriers ? (Lévy 1909,
4 effans que senhor Ramon Bartas avia logatz de Planha… ». 236).

243
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Mantel : manteau (Lévy 1909, 236). À Toulouse, ce terme, clar al mortier que fazian a l’obra de la barbacana de la porta de la
associé au verbe « far », désigne l’action de recouvrir de Plassa… ».
briques cuites une base de paret (solin) sur une hauteur suf-
fisante pour éviter le travail de sape des eaux de ruisselle- Messatgier, mesatgier : messager, domestique, ouvrier
ment, à la manière d’un « manteau » protecteur qui couvri- (Alibert 1966, 492) ; AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°25 r°3].
« …fero donar a 1 mesatgier le qual trames la dona de la Pomareda… ».
rait le mur de terre ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°28 v°2]. « A
mastre Ramon de Pueg Casquier deven per 7 milhers e 5 saumadas de
Voir messagarius, messagerius (Glossaire latin).
teula plana que avia a la sieu teularia que avet preza a obs de far lo man-
Mestier : métier. Far mestier, estre mestier, être utile, né-
tel e de caussar la paret costa Montgalhart… ».
cessaire (en évoquant une action ou des matériaux)
Margua, marga, manega, manga, manja : manche (de (Bernardi 1995, 453) ; AD Aude, 4E76/CC57, 1389, [f°37 r°4].
« …que anego per les embans per vezer e per saber que fera mestiers per
vêtement) (Lévy 1909, 235) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1442, [f°23
reparar e per adobar las clausuras ».
v°3]. « …senhor P. R. an Guinet Roquas per unas marguas de jupo… ».

Marlar : acier (Verna 2001, 106-108) ; AD Aude, 4E76/CC48, Mezalha, mealha : maille, demi denier ; sorte de monnaie
1361-1362, [f°106 r°8] « Item pro quatuor libris minus uno quartone de
d’or, médaille ? mealhas, sorte de redevance (Lévy 1909,
marlar recep[t]as per Johannem Seguini et quos poni fecit in piquis quas
239).
facere fecit Petro de Petris… » ; [f°113 r°6]. « Item ad opus picarum quas
Mejana, miiana : pièce de milieu du fond d’un tonneau ou
fecit Petrus de Petris. 16 l.de marlar ».
d’une cuve (Lévy 1909, 241) ; AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°25
v°4]. « pro 2 miianas de tonel de las quals foc fayta la caysha de la plan-
Martinet : système destiné à tendre l’arbalète (Gay 1887).
qua de la porta de la Plasa… ».
Synonyme d’ausapie ou ausapren (voir ce mot. Glossaire
occitan) ? ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°29 v°6]. « …pro 25 cla- Mieg, mieja : demi, moyen (Alibert 1966, 493).
vellis quos emit Johannis Faure pro faciendo et complendo quosdam mar-
tinets sive aussaprenis balhistarum… ». Miganar : synonyme de mijansar / mejansar ?, partager,
diviser (Raynouard 1842, IV, 177), de mijan / mejan, mi-
Massa : masse de carrier (Bernardi 1995, 453) ; AD Aude,
toyen, cloison, mur mitoyen (Lévy 1909, 240), dans le
4E76/CC49, 1363-1364, [f°135 v°4]. « …pro quadam massa ferrea
sens de « cloisonner » ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°134 r°1].
peyreriorum… ».
« …pro 31 corundis emptis ad opus miganorum guachillorum et coper-
ta retro furnum de barrio et ad opus ambanamenti porte Montis
Massonar, masonar : maçonner (Lévy 1909, 238).
Lebonis... ».
Massonaria : maçonnerie (Bernardi 1995, 453).
Milhier, milier, melier, melhier : millier, mille (Lévy
Massonier, masonier : maçon (Lévy 1909, 239). 1909, 248).

Matinata, matinada : matinée (Alibert 1966, 486). Missola : type de céréale ? ; AD Haute-Garonne, H Malte
Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428, Verlhac. « …may quatre
Matras, matrassier : pièce de bois de chêne ? (Alibert cesties de missola a mesura de Montalba e una pipa de vi tot bo e suffi-
1966, 486) ; AD Aude, H145, Comigne, 1374. « …et ibidem unum ma- cien… ».
trassier longitudinis trium cannarum et unius palmi… » ; Ibid.,
4E76/CC57, 1388, [f°46 r°3]. « …per les matrasses e per le entaulament Modica : pièce de charpente ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360,
del pont de Guot Feran… ». [f°80 v°1]. « Primo 50 coronde et una modica a B. Embrini apreciate per
G. Luens qui eas posuit... ».
Maymos : synonyme de maimons / maymons, masses dont
le poids tombant sur les draps chassait l’eau dont ils étaient Mola : meule, meule à aiguiser, pierre à aiguiser, rocher,
imbibés (les maymons de fer, Carcassonne, 1609) (Cayla moulin, rouelle de cerceau (Lévy 1909, 250) ; AD Aude,
1964, 463). À Castelnaudary, ce terme pourrait désigner les 4E76/CC48, 1361-1362, [f°109 v°7]. « …pro una corda de mola ad opus
contrepoids du pont-levis ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442 [f°49 v°1]. pontis porte Mondebonis… ».
« …an Guiraut Teuli per adobar les maymos del pont levadis de la porta
de Sant Antoni les cals eran decorbatz… ». Moli, molin : moulin (Alibert 1966, 498 ; Gaffiot 2000,
999) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°61 r°5]. « …per tortissar l’am-
Mayzoneta : diminutif de maizon. Maison (Lévy 1909, ban detras le moli del castel…».
232), maisonnette ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°42 v°3]. « …per
autres 200 clavels fulhador per far la mayzoneta en que stan les porties Molinier : meunier (Alibert 1966, 498).
de la porta dels Sens… ».
Molle : modèle, gabarit (Bernardi 1995, 454) ; AD Aude,
Mazel, masel : abattoir, boucherie (Lévy 1909, 239). 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°4]. « …pro quadam poste pro faciendo signa
sive molles quomodo inceperant fundamentum barbecane et pezeguot dic-
Mercadal : marchand, place du Marché (Lévy 1909, 244). te turris… ».

Mesclar : mêler, mélanger (Alibert 1966, 491) ; mélanger, Mont : tas, amas (Alibert 1966, 499) ; AD Aude, 4E76/CC59,
gâcher du mortier (Bernardi 1995, 453) ; AD Aude, 1393, [f°18 v°5]. « …que aparelhava la peyra e la metra en hun
4E76/CC48, 1360, [f°53 v°3]. « …que aquel dia portero arena per mes- mont… ».

244
GLOSSAIRE OCCITAN

Moralha, morralha : gâche de serrure (Vidal 1911, 262) ; Obrage, obratge : ouvrage (Alibert 1966, 513) ; AD Haute-
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°92 r°1]. « …quia reparaverat cla- Garonne, H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428,
vaturam porte Stimbalorum et fecerat moralham in ferollo... ». Verlhac. « …que fara mestres per las dichas aleyhas lo qual obrage des-
sus dit designat e specifficat… ».
Morar : rester, s’attarder (Alibert 1966, 500) ; AD Aude,
4E76/CC56, 1381, [f°53 r°5]. « ...quam recepi fecerunt per Bertrandum Obrar : ouvrer, travailler, opérer (Alibert 1966, 513).
Alberti qui moratur in bada… ».
Obrador : ouvroir, atelier, boutique, étude (d’un notaire)
Morla : monnaie d’une valeur de 2 deniers maille (Vidal (Lévy 1909, 264) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°33 v°5]. « …per
1911, 262) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°76 r°9]. « …cui far las taulas de la paret davant l’obrador del cosolat… ».
dari fecerunt unum morlanum. 4 d. tur. ».
Obrier, hobrier : ouvrier (Alibert 1966, 513).
Mortier de terra : mortier argileux destiné à lier les
pierres ou les briques cuites. Synonyme de lisa, et dans cer- Obrir : ouvrir (Alibert 1966, 513).
tains cas de bart (voir ces mots) ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°27 Obs, ops, ob : ops de, a ops de, a l’obs a, de : pour l’usa-
r°3]. « An Ramond de Cas, massonier. Dem a pres fait per far le mantel ge de, pour le profit de, pour (Lévy 1909, 268) ; AC
al pe a la paret costa la porta de Montgalhart per massonar de teula ab Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°50 v°2]. « …per 18 pernas de 6 brassa
mortier de terra… ». qu’avem prezas a obs de puntiers a las paretz detras le truelh de Sant
Estefe… ».
Mortissar : voir amortir (Glossaire occitan).
Oficialat : Officialité. Un official est un juge ecclésiastique
Mossar : labourer avec la charrue (Alibert 1966, 502).
auquel un évêque déléguait le droit de rendre la justice à sa
Dans le sens de terre « retourneée», « remuée » ? ; AD Aude,
place (Robert 1982, 1303) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361,
4E206, 29 mai 1460, Limoux. « …et pes dicti muri cum sit totum de ter-
[f°57 r°1]. « …que es de costa de la porta de la Plassa davant le logar de
ra que est jam dirupta et mossada taliter quod nihi valet propter putref-
l’oficialat… ».
factionem et propter humiditatem aquarum ».
Ostal, osdal, hostal : maison, domicile, demeure (Alibert
Mostrar : montrer (Lévy 1909, 254).
1966, 518).
Mudar : changer, transporter (Lévy 1909, 255) ; AC
Toulouse, EE32, 1354, [f°37 v°2]. « …per razo de deffar le mur de reure
l’ostal del P. Bosc e per mudar la teula aisinat…». P
Mula, muola : mule (Alibert 1966, 503 ; Lévy 1909, 255). Pagar : payer (Alibert 1966, 519).
Mular : mulet (Lévy 1909, 255) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, Pagelar, pagellar : mesurer (Alibert 1966, 519) ; AD Aude,
[f°99 v°6]. « Item eidem Geraldo pro uno jornale dictarum duarum mu- 4E76/CC64, 1408, [f°41 r°2]. «…la cal cavalha foc pagelada e voyat sino
larum ad caregandum sparonem de Stanh Vivo in dictis clausuris... ». quatre brassas a 11 s. la brassa montan. 2 fr. 12 s. ».

Pairol, pairola, payrola : chaudron (Lévy 1909, 274) ; AD


Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°93 v°2]. « …pro una payrola ponderante
N 10 £. pro faciendo alas als guarrotz canonum… ».
Nauc : auge, baquet (Alibert 1966, 506) ; AD Aude,
Pal : 1. pieu, pal. (Alibert 1966, 520). 2. palissade en bois
4E76/CC78, 1442, [f°44 r°7]. « ...per clavels reforssatz e barados per far
formée de pieux juxtaposés et cloués ; AD Aude, 4E76/CC51,
hun nauc de fusta per tenir le mortier o bart… ».
1366, [f°30 r°5]. « per 6 £. miega de cavilhas que foran mezas a clavelar
le pal que fo mes per tanquar le pas de la paret vielha e la tor redonda
Nausa, nauza : fond marécageux (Lévy 1909, 257) ; AD
dejos la porta de Sant Anthoni… ». 3. à Castelnaudary, palissade
Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°22 r°8]. « ...quibus fuerunt cum eorum
animalibus ad portandum ligna de nausa stangni Vinonis pro cledis fa-
située entre l’enceinte et le fossé principal. Ce pal est com-
ciendis pro clausuris...».
posé de pieux entre lesquels s’intercale un clayonnage en
torchis. Il est également couvert d’un hourd en bois ; AD
Noguier : noyer, bois de noyer (Lévy 1909, 260) ; AD Aude, Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°69 r°3]. « …a 3 homes que fero le bart
4E76/CC48, 1361-1362, [f°121 r°1]. « …pro uno poste de noguerio emp- per tortisar le pal detras dona Feriera… » ; Ibid., [f°51 r°3]. « …per
ta ad inquantum ad opus dicti pontis ». 3 postz de avet que foro mezas al amban del pal…».

Nora : bru, belle-fille (Alibert 1966, 510). Pala : pelle (Alibert 1966, 521) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360,
[f°56 v°4]. «…per 4 palas de fust que foro compradas obs de las obras
dels valatz… ».

O Palenc, palench : palissade (Lévy 1909, 274) ; Vidal 1906,


1381-1382, 48, [f°80 r°]. « …per un jornal que estec per adobar lo pa-
Obra : œuvre, ouvrage, travail, besogne (Alibert 1966, lenc, quant fo casech lo mur de la Teula. ».
513) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°63 v°3]. « …per 2 quintals me-
dia de sparo que fo pres de lu as obs de las ditas obras… ». Paliera : voir espalhiera (Glossaire occitan).

245
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Palissa, palisa, palisada : palissade (Lévy 1909, 275) ; AD Passar : passer, franchir, traverser (Alibert 1966, 529) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°50 r°1]. « per 19 travatels les 12 de Aude, 4E76/CC60, 1394, [f°18 r°6]. « …de far barreias sus les pontz de
28 palms els 7 de 3 canas cascu que lor foro prezes as obs de las palis- la viela de la porta Nova so que las carretas non poguesso passar per la
sas… ». viela… ».

Palm : empan, longueur de la main ouverte (Lévy 1909, Pati, patu : 1. terre inculte, pré, pacage, (Lévy 1909, 282) ;
275) ; (env. 0,224 m). AD Aude, 4E76/CC73, 1430, [f°6 v°2]. « …a samasar la lata e fustalha
que era en torn le pati de las dos portas de Mondebo… ». 2. local en-
Palma : 1. sorte de poutre ? (Lévy 1909, 275). 2. épaule touré ou non de murs, mais sans toiture (Cayla 1964, 543).
(Du Cange 1840-1850, t. 5, 304, col. 2) ; soliveau d’épau-
lement (voir espalhiera. Glossaire occitan) ; AD Aude, Patrar : de patrat, -ada. Fait, fabriqué, achevé (Alibert
4E76/CC48, 1360, [f°18 v°7]. « …pro potii illis fusterius qui nocte dicte 1966, 532) ; AC Montréal, 1D2, 1461, [f°23 r°1]. « …et debent pa-
diey vigilarerunt in reparando palmii clausurarum portus Bordarum...». trasse dictos parietes hinc ad festum Beati Michaelis mensis septembris
inde proxime sequenti bene et debite ad noticiam et cognitionem exeper-
Panier : panier (Lévy 1909, 276) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, torum etiam ».
[f°49 r°2]. « …an Peyre de la Font de Revel per 12 paniers as obs de las
obras dels valatz… ». Pausa : repos, répit, moment (Alibert 1966, 533) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1361-1362, [f°99 r°2]. « …per unam pausa ad claudendum
Pansiera, panciera : partie de l’armure destinée à couvrir passum parietis de portu Bordarum inter embans…».
le ventre (Lévy 1909, 276).
Pavalhon, pavalho : pavillon (Lévy 1909, 273) ; AD Aude,
Par : paire (Alibert 1966, 526). 4E76/CC68, 1415, [f°29 v°2]. « …per tirar le pavalho que estava sobre
le cadafalc… ».
Paredar : construire une paret (Voir ce mot. Glossaire oc-
citan) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°33 v°6]. « …an R. Ytier que Paxia : synonyme de paysseria ? (voir ce mot. Glossaire
ajudeo als parediers que paredo del jorn… ». occitan) ou de pais (paissa ?) : pacage ? (Levy 1909, 274) ;
AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°11 r°7]. « ...P. Danini, Johanni Guini qui
Paredier, paradier, paradeiayre : maestre de las paretz
steterunt pro honerando mulieres qui portabant arenam ad opus muris
(Lévy 1909, 278). Ouvrier spécialisé dans la construction
paxie Montis Lebonis... ».
des parois de maisons ou d’ouvrages défensifs (Cayla
1964, 529). Personne spécialisée dans la construction des Payrolet : diminutif de pairol (Voir ce mot. Glossaire occ-
murs de terre massive (parets) ; AC Toulouse, EE32, 1355, [f°122 itan), dans le sens de « petit chaudron » ; AD Aude,
r°3]. « Dem a pres fait an P. de Lauretgia brassier e paredier que sta a 4E76/CC62, 1399, [f°16 r°1]. « ...pro quodam payroleto recepto per
San Subra a la cariera dels Espanhols per deffar et per far la paret… ». servientos et balisterios superius nominati qui accesserunt versus dictum
locum de Manso Sancti Antonini pro posando aquam eisdem in dicto lo-
Paret : 1. paroi, escarpement rocheux, mur, muraille co necessariam… ».
(Alibert 1966, 527). 2. en Lauragais et Toulousain, et plus
généralement dans les régions de langue d’oc où la terre a Paysseria, paissiera, paisiera, paxeria : 1. barrage de ri-
été utilisée comme matériau de construction, ce terme dé- vière, digue, chaussée d’un moulin (Alibert 1966, 520).
signe systématiquement un mur de terre crue massive quel- 2. batardeau, écluse, réservoir à poissons ; meule de mou-
le que soit sa technique (bauge, bauge coffrée, pisé et déri- lin à huile (Ibid.) ; (du lat. paxillum), barrage de pieux, bar-
vés), qu’il s’agisse d’une construction militaire, civile, ou rière faite de pieux maintenant des fascines afin de créer
religieuse ; cette paret se compose généralement de végé- une retenue d’eau (Cayla 1964, 524) ; AD Aude, 4E76/CC49,
taux (bruyère, plus rarement genêt) et sa construction est 1363, [f°135 v°2]. « …qui stetit ad aplanandum ruppem valli de Barrio
réservée à des spécialistes (parediers), notamment pour les ubi Johannes Maurini assetiaret paysseriam dicti valli… ». 3. palée (Lévy
enceintes ; AD Aude, 4E76/CC58, 1392, [f°52 r°3]. « …que totas las 1909, 274). Voir paxia.
ayguas que cazian del sian hostal danan al pe de la paret de la vila e es-
tava en gran périlh de perdre… » ; Ibid., 4E76/CC2, 1356, [f°10 v°8]. Pazimentar : paver (Lévy 1909, 284) ; AC Toulouse, EE32,
« … Solvit de jornali ad talhandum brucum pro parietibus... ». 1355, [f°70 v°2]. « …e trobem que avian mes per tot a dentelhar e a pa-
zimentar e a far l’ampara entre tot 11 milhiers de teula… ».
Parpalhola : sorte de monnaie (Lévy 1909, 279) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1360-1361, [f°76 v°1]. « …3 parpalholas valent. 5 s. 8 d. Pe : pied (Alibert 1966, 534). L’expression « pied de la pa-
tur. ». ret » désigne le solin de cette dernière (à pierres et chaux à
Castelnaudary ; en parement de briques cuites sur un noyau
Passa, pas : passage étroit (Alibert 1966, 528) ; AD Aude, de terre crue à Toulouse) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°25 r°5].
4E76/CC51, 1366, [f°23 r°2]. « …per tanquar de pal le pas quera entre « …pro quinque sesteriis caucis emptis per Petrum Negues custodi ad
la paret noba e la vielha de la Baffa… » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363, [f°114 opus muri pede parietis de la Strada… ».
v°4]. « … ad reparandum passum peyrerie portus Narbonensis prope
barreriam... ». Peaso, peazon : fondement (Lévy 1909, 284) ; fondation
(Nicolas 2005, 324) ; AD Haute-Garonne, H Malte Toulouse 262,
Passada, pasada, passata : passage, corridor (Alibert liasse 1, n° 9, 22 septembre 1428, Verlhac. « Item devo aver las ditas pa-
1966, 529) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°55 v°1]. « ….per una ret de nautheza de terra en sus tres brassas e de ample a la peaso nau
clau que fo meza a la porta de la passada dels embans… ». palms… ».

246
GLOSSAIRE OCCITAN

Pecia, peça, pecilh, pecilha, pesa : pièce, morceau, poutre Pertrayt, pertrait, pertrach : attirail, matériaux (Lévy
(Lévy 1909, 292) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°72 v°3]. « …pro 1909, 291). AC Toulouse, CC2324, 1405-1406, [f°94 r°5]. « …per def-
14 pecias fustis ab ipso habitis et positis in dicto opere dicti palenchi… ». far los murs vielhs qye eran tras lo collegi de S. Steffe e per portar los dit
pertraytz teula e reblo dels ditz murs a la obra novelament fayta l’an pre-
Pieza : sens indéterminé. Synonyme de pecia ? (Voir ce sent » ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362 [f°114 r°3]. Voir pertractus
mot. Glossaire occitan) ; AD Aude, 4E76/CC68, 1415 (Glossaire latin).
[f°57 v°7]. « …pro peyra de la pieza de reble que foc me-
za sobre la dita porta… ». Pestel : pêne de serrure, verrou (Alibert 1966, 544) ; AD
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°101 v°2]. « …dicto magistro G. pro uno
Pecol : pied d’une table, d’un banc, etc. (Lévy 1909, 285) ;
pestello ad opus hostii guachilli… ».
AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°64 r°1]. « ... pro una coronda pro facien-
do pecollos staudello magne bombarde… ». Peyrar, peirar : empierrer, bâtir en pierre. Voir sospeyrar,
Pegarier, pegairon : marchand de poix (Lévy 1909, 285) ; suspeyrar (Glossaire occitan).
AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°37 r°3]. « …fero pagar al pegarier
Peyrier, peirier : maçon, tailleur de pierre, carrier
d’Isselh…».
(Bernardi 1995, 456) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°62 r°3].
Pel : peau, parchemin (Lévy 1909, 286) ; AD Aude, « …an Paul Huc am sos companhos peyriers de Peyra Fita… ».
4E76/CC55, 1376, [f°21 r°6]. « …pro una pel d’anhel laqual foc meza a
Pezegot : tuyaux d’argile ou de pierre (Cayla 1964, 558).
la perga am que fasian bada sus la gleysa… ».
Gouttières, chéneaux ? AD Aude, 4E76/CC79, 1445 [f°8 r°2]. « …a
Penonssel, penoncel, penuncel : 1. penon, bannière (Lévy mastre Peyre Melot peirier, per un pretz fait que pres a zadobar lo peze-
1909, 288) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 v°2]. « …e per huna got de la tor del Terier… ».
cana media de canevas per far le penonssel a la bada sus le cloquier…».
2. porte-bannière ? ; AD Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°142 r°6]. Pibol : peuplier (Alibert 1966, 545) ; AD Aude, 4E76/CC48,
« …pro quodam glavio quo portabatur penuncellus dicti loci qui fuit 1360-1361, [f°56 r°7]. « …per un post de pibol ad obs del pont de la di-
fractus in scaramussa… ». ta barbacana… ».

Perforar : perforer (Alibert 1966, 541) ; AD Aude, Pic : 1. pic, pioche; pique, outil à pointe acérée et à lame
4E76/CC49, 1363, [f°83 v°3]. « …qui steterunt ad perforandum pari- étroite pour la terre, les cailloux, pour démolir les murailles
etem veterem de la Strada unde exiret aqua… ». (Alibert 1966, 546) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « pro
cavando cum pix et cum rabasseriis pro perquirendo le ferm pede turris
Perforsar, perforçar : s’efforcer (Lévy 1909, 289) ; AD porte Strate...». 2. pic de carrier (Bernardi 1995, 456).
Aude, 4E76/CC57, 1389, [f°35 r°5]. « …que les Engles avian pres
Cauqualièras en Caraman se perforsavan de pendre 4 loxs en Lauragues Pica, piqua : 1. pique, pic de tailleur de pierre (Bernardi
e que hom stes avisatz. ». 1995, 456). 2. pic, pioche (Alibert 1966, 546) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1360, [f°60 r°2]. « …que per 3 dias avian obrat am las pi-
Perga, pertega, partega : 1. perche, mesure agraire (Levy cas per far le dit valat… ».
1909, 289). 2. pièce de bois, perche (Bernardi 1995, 456) ;
AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°21 r°6]. « Item aquel dia metheys fero pa- Pieza : terme non défini. Synonyme de pecia ? Voir ce mot
gar an Ar. Amoros pro una pel d’anhel laqual foc meza a la perga am que (Glossaire occitan) ; AD Aude, 4E76/CC68, 1415 [f°57 v°7].
fasian bada sus la gleysa… ». Voir perdiqua, pertica (Glossaire « …pro peyra de la pieza de reble que foc meza sobre la dita porta… ».
latin).
Pigar, pijar : 1. étayer (Lévy 1909, 294). À Castelnaudary
Pergar : mesurer avec la perche (Lévy 1909, 290) ; AD ce verbe désigne l’action d’installer les étais et le coffrage
Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°114 v°2]. « Pos[t]que die sexta decembris sur un mur de terre crue massive en cours de construction ;
Michael Bartas dixit perticasse parietes porte Mondebonis… » ; Ibid., AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°2 v°4]. « ….qui portaverunt quasdam
4E76/CC57, 1388, [f°54 v°3], « que pergeguo ho pagelego les tortisses fustem Bertholomey Gotnia cum quibus fuerit pigati ille paries qui est in
que fec en Andrieu Alexandre a las clausuras… ». clausura medietate inter domum Fratrum Minorum... ». 2. étançonner

Perna : 1. planche mince ? (Lévy 1909, 290). 2. pièce de (étançon : grosse pièce de bois que l’on place le plus verti-
bois utilisée comme perche (puntier) pour maintenir en calement possible pour soutenir quelque chose. Béquille,
place les banches du coffrage (taulas) lors de la construc- contrefort, étai. Placer des étançons contre un mur qu’on
tion d’un mur de terre massive ; AC Toulouse, EE32, 1354-1355, reprend en sous-œuvre ; Robert 1982, 700).
[f°42 v°1]. « 54 en marz. An Nicalau Cabirol deven per 20 pernas de
Pila : 1. pile de pont, jambe de force, étai ; pilier, pile
4 brassas cascuna que fara apuntiers a levar la paret costa porta Nova ».
(Alibert 1966, 547) ; AD Aude, 4E76/CC59, 1393, [f°14 r°6].
Périlh : péril, danger (Alibert 1966, 541) ; AD Aude, « …per 6 jorns per suspeyrar la paret de la porta Mondebo e per suspey-
4E76/CC51, 1392, [f°52 r°3]. « …que totas las ayguas que cazian del rar les pilas que aqui meteys… ». 2. amas d’objet entassés (Ibid.) ;
sian hostal danan al pe de la paret de la vila e estava en gran périlh de AC Toulouse, EE32, 1354, [f°40 r°3]. « e per pleguar la teula o per mettre
perdre… ». en pila… ».

Pertenensa : dépendance (Lévy 1909, 291) ; AD Aude, Pilar : 1. pilier, pile (Lévy 1909, 294) ; AD Aude, 4E76/CC48,
4E76/CC57, 1388, [f°23 r°11]. « …avian corregut al dit loc de Puegstuira 1361-1362, [f°94 r°7]. « …ad cavandum rupem retro Bertrandum Oliba
ho a las pertenensas del dit loc… ». ubi fuit factus pilarius...». 2. colonne (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC48,

247
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

1359-1360, [f°4 r°4]. « …pro uno pilario lapidis ab ipso recepto pro Polpet, polpre, polpret : bois de peuplier (Cayla 1964,
operibus clausurarum… ». p. 574).
Pilhar : piller, dérober avec violence (Alibert 1966, 548) ; Pomel : boule (Lévy 1909, 301). À Albi, ce terme désigne
AD Aude, 4E76/CC60, 1394, [f°11 v°8]. « …per saber si aquelas gens de petites boules de bart (terre, eau) fabriquées pour le tor-
d’armas que avian raubat e pilhat alscunas personas a la Bastida chis et destinées à enduire une structure-support en bois ;
d’Ango… ». Vidal 1906, 1381-1382, 41, [f°68 r°]. «… ad obs de far lo bart e portar
la ayga e far los pomels… ».
Pipot : 1. petit tonneau, baril (Lévy 1909, 295). 2. mesure
pour le vin (Wolff 1954) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°31 r°6]. Poncha : voir punta, puncta (Glossaire occitan).
« …a mastre P. de Vilavielha per un pipot de vi que foc donat al capitay-
ne desus dit… ». Ponh : point, pas (Lévy 1909, 302) ; AD Aude, 4E76/CC64,
1408, [f°45 v°1]. « …per la hobra del mur de la porta Mondebo la cal an
Planca, planqua : 1. planche, ais (Lévy 1909, 297). 2. preza affar a 4 francs per brassa de 8 palms al pe e de 6 palms a la fy des-
passerelle, petit pont (Ibid.). À Castelnaudary ce terme sus de peyra tant solament fora que no y meta ponh de mortier… ».
désigne une petite passerelle sur pilotis bâtie dans le fos-
sé pour permettre d’évacuer la terre ou de puiser l’eau Pons, pont : 1. pont (Alibert 1966, 558) ; AD Aude,
dans le batardeau (caysha, arca) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, 4E76/CC49, 1363, [f°44 v°4]. « …qui stetit pro portando petram et mor-
[f°102 v°1]. « …ad faciendum plancam in ponte porte de Barrio et terium ad opus ayguerie pontis porte Cimbalorum... ». 2. passerelle
etiam ad faciendum hostium dicte planque… » ; Ibid., 4E76/CC52, en bois, quelquefois amovible ou rétractable, permettant de
1367, [f°22 r°6]. « …pro faciendo plancas in dictis vallatis portus descendre au fond du fossé pour travailler, ou réalisant la
Astrate cum quibus transire possent cum terra qui proiciebant de ipsis liaison entre les tours et les hourds, au sommet de l’encein-
vallatis… ». te ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°26 r°6]. « …B. Farole et P. Guilaberti
qui […] removerunt pontem fuste per ubi abstracta fuit terra vallatorum
Planchon : jeune châtaignier (Alibert 1966, 552). Astrate… » ; Ibid., 4E76/CC48, 1360, [f°64 r°4]. « …an G. Bart per ado-
bar un pont al port de las Bordas per puiar sus las paretz…».
Planconar : de planca (planche) dans le sens de « plan-
chéier » ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°117 v°1]. « …et debuit Pons-levadis, pont-levadis : pont-levis (Alibert 1966,
reddere tortisatis a quolibet latere reddere copertum de supra de tegulis 558).
et bardatum et planconatum supra parietes ».
Portanel, portanela, portel, portela, porteta : 1. petite
Planson : jeune arbre (Lévy 1909, 297), plançon (tronc porte, guichet (Alibert 1966, 560 ; Lévy 1909, 304) ; AD
d’arbre refendu ; Robert 1982, 1451) ; jeune planc d’arbre, Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°92 v°1]. « …pro portando fustam et pe-
tige, poteau, gros bâton (Alibert 1966, 552). tram in dicto portanello... » ; [f°65 v°6]. « …avian obrat per tornar le
pal de l’angle de la portela am 6 homes… ». 2. trappe ? ; Ibid.,
Plan, plana : plan, uni, plat (Alibert 1966, 551) ; AC
4E76/CC62, 1398 [f°35 v°3]. « …Ramundo Johannis, fabro, pro una ca-
Toulouse, EE32, 1354, [f°28 v°2]. « ...e 5 saumadas de teula plana… ».
villa rotunda ferri necessaria in carrella dicte planque et pro 4 cavillas
Plata : plaque, lame de métal (Lévy 1909, 297) ; AD Aude, ferri positis in dicto portanello dicte planque… ».
4E76/CC55, 1376, [f°25 v°1]. « …pro una plata de fer e per 12 clavels
Post : planche (Alibert 1966, 560) ; AD Aude, 4E76/CC48,
que foro mezes al pont de la porta de la Plasa… ».
1360-1361, [f°51 r°3]. « …per 3 postz de avet que foro mezas al am-
Plegar, pleguar : plier, emballer (Lévy 1909, 298) ; AC ban… ».
Toulouse, EE32, 1354, [f°40 r°3]. « e per pleguar la teula o per mettre en
Postat : plancher, cloison (Alibert 1966, 560) ; AD Aude,
pila… ».
4E76/CC48/2, 1360-1361, [f°49 v°1]. « …per clavels que foro mezes a
Pogesal, pogesa, poges : 1. du Puy en Velay. Qualifiait une clavelar le postat que es pres de la porta de port de Bordas… ».
petite monnaie épiscopale de cette ville, plus tard une frac-
Pozar, posar : puiser ; AD Aude, 4E76/CC57, 1388, [f°41 v°1].
tion de denier de compte : un quart de denier tournois ou
« …per un baro as ops de pozar de l’aygua per far del bart… ».
un huitième de denier toulousain (Alibert 1966, 555) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°49 v°1]. « …que valo flori a 12 s. 7 d. Preon : profondeur (Lévy 1909, 306) ; AD Aude, 4E76/CC48,
tol. 4 pogesals. ». 2. gros clou (valant 1 pogesal ?) ; Ibid., 1361- 1360, [f°61 v°4]. « …avia per brassa cavar 10 palms de preon del ample
1362, [f°106 r°5]. « Item pro 85 clavis magnos vocatos pogesals... ». del valat… ».

Poleja, polelha, poliega : poulie (Alibert 1966, 555) ; AC Preparar : préparer (Alibert 1966, 563) ; AD Aude,
Toulouse, EE32, 1354, [f°48 v°3]. « Item pus 3 soguas de 6 brassa a obs 4E76/CC53, 1371, [f°46 r°3]. « …qui dicta die steterat ad preparandum
de las poliegas... ». pontem porte Astrate ut posset levare… ».

Polgadier : de polgada, pouce, mesure de longueur (Lévy Prop : près (Alibert 1966, 566).
1909, 301), dans le sens de « planche d’un pouce d’épais-
seur » ? ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°31 r°3]. « ...pro quadam po- Privatas, privadas : latrines (Bernardi 1995, 457) ; AD
ste cori vocata polgadier recepta per Bertrandum Robberti quam poni fe- Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°25 v°5]. « …qui stetit pro faciendo pri-
cit in arca pontis de porta Cimbalorum... ». vatas in portu Bordarum… ».

248
GLOSSAIRE OCCITAN

Prual : de pua ? pointe, dent de peigne, de râteau (Alibert Razal : de raza : mesure de longueur (inconnue) (Lévy
1966, 567). Dans le sens de « râteau » ? ; AD Aude, 1909, 315). Longueur d’une raza ; AC Toulouse, EE32, 1355,
4E76/CC64, 1408, [f°35 r°2]. «…a tendut lors pruals e autras causas que [f°85 v°5]. « Item per 2 postz razals per far taulas aqui mezeis… ».
avian compradas per far las ditas paretz…».
Razar : combler (un fossé) (Lévy 1909, 315) ; AC Toulouse,
Pugata, pojada, pujada : montée (Lévy 1909, 300) ; AD CC2324, 1405, [f°96 r°19]. « Item an Johan Debolet caretier per portar
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°122 r°5]. « …qui steterunt ad mitendum et 50 tumbarelas de grava per metre sus le pons de la porta de la Font Santa
ponendum scalones in pugata corserie de Strada… ». Maria e per razar prop de las cossieras de S. Subra… ».

Puiar, pujar, poiar : monter, gravir (Lévy 1909, 300) ; AC Reble, reblo : remplage (blocage), pierre jectisses dont on
Toulouse, EE32, 1355, [f°110 r°1]. « …per far una escala a Sant Subra remplit le vide d’un mur (Lévy 1909, 316) ; AD Aude,
per puiar a la paret a la clauzura... ». 4E76/CC69, 1420, [f°47 r°4]. « …per tres brassas e miega de peyra e per
reble per far lo fondament de la dita paret… ».
Punta, puncta, poncha : 1. pointe (Lévy 1909, 302) ; Vidal
1906, 1368-1369, 112. « … per 3 cartayros de fer a far las ponchas al pal Rebolhir, rebolher : 1. rebouillir, s’échauffer (Alibert
que fon plantat al pe de la tor… ». 2. sorte de clou, pioche (Lévy 1966, 585). 2. reforger un outil usé ? ; AD Aude, 4E76/CC48,
1909, 302). Voir punctum (Glossaire latin). 1361, [f°99 r°7]. « Item pro reboliendo unam rebaseriam… ». Voir bol-

Puntier, apuntier, a puntier : synonyme de ponchier : hir (Glossaire occitan).


pointal, étai, étançon, appui, soutien, pilier (Mistral 1878, Rec, riu : ruisseau (Lévy 1909, 316) ; AD Aude, 4E76/CC48,
vol. 2, 618 : pounchié, pounché ). À Toulouse, ce terme dé- 1360, [f°56 r°4]. « …an Ramon Johan e an Johan Mauri que avian fayta
signe les perches (pointaux) verticales maintenant en place trayre la dita arena del riu… ».
les banches du coffrage d’un mur de terre crue massive en
cours de construction ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°42 v°3]. « Item Recebedor, resebedor : receveur (Alibert 1966, 588).
per 30 pernas de caderna brassa que pres en Iahn Degarac paredier de Comptable public chargé d’effectuer les recettes et cer-
Tilh a puntiers a la paret… ». taines dépenses publiques (Robert 1982, 1622) ; AD Aude,
4E76/CC63, 1405, [f°17 r°]. « Siec se la despesa fayta per les senhors de
Pus : plus (Alibert 1966, 568).
cossols o per lor resebedor de l’an 1405…».

Recubreyre, recubreire : couvreur (Vidal 1911, 267) ; AD


Q Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 r°1]. « …an P. de Murat recubreyre, […]
per recubrir les enbans de la porta Mondebon tro le castel… ».
Quarton : voir carto.
Recubrir, recobrir : recouvrir, réparer une toiture (Alibert
1966, 589) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°72 v°2]. « …sparonando
atortisando recobriendo bardando et encaucinando dictum guachil-
R
lum… ».
Rabassieyra, rabasiera : pioche dont on se sert pour dé-
Redon : 1. rond (Alibert 1966, 591). 2. pièce de bois non
terrer les truffes et déchausser les vignes (Lévy 1909, 312).
équarrie (Bernardi 1995, 458) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-
Outil utilisé pour la préparation de la terre employée dans
1361, [f°58 r°5]. « …per 2 cabiros redons de que fo fayta escala per
la construction des murs de terre massive (bauge ?).
puiar sus la porta de la Plassa… ».
Raire, rayre : raser, raboter (Lévy 1909, 313) ; AD Aude,
4E76/CC51, 1366, [f°75 r°5]. « …que aquel dia stet a rayre e talussar els
Regal, real : réal, monnaie d’une valeur variant de 16 à 17
costos de la paret de la Baffa… ». Voir radere (Glossaire latin).
sous (Vidal 1911, 267) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°81
v°1]. « Item quatuor corondas 16 palmorum inter omnis quatuor unum
Ram : rameau, branche, branchage (Alibert 1966, 576) ; regal auri summa florenum pro 12 s. 9 l.10 s. tur. ».
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°155 r°1]. « …per deffar les stagas bon
avian senhatz les rams e per tornar la fusta a la claustra dels Registrar : enregistrer, inscrire (Lévy 1909, 320).
Canorgues... ».
Reire gayt, reyregayt : voir gayt.
Raon : voir araon.
Relha, relhada, relhata, relata : penture de porte (Lévy
Rauba : robe (Alibert 1966, 582). 1909, 321 ; Alibert 1966, 596) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361,
[f°105 r°11]. « Item pro aliis 200 clavibus de relha quos receperat dictus
Raubar : voler, dérober (Alibert 1966, 582) ; AD Aude, Geraldus et posuit in dicto guacillo » ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°53
4E76/CC60, 1394, [f°11 v°8]. « …per saber si aquelas gens d’armas que r°5]. « …magistro Guillelmo Gelati pro relhadis ferri et pro gos-
avian raubat e pilhat alscunas personas a la Bastida d’Ango… ». sonibus… ».

Rayna, rana : 1. grenouille (Lévy 1909, 313). 2. essence Religar, reliar : attacher, lier (Lévy 1909, 321).
de bois ou type de bois que l’on trouve dans un endroit par-
ticulier ? bois vert ? ; AD Aude, 4E76/CC63, 1405, [f°20 v°1]. Reparaciu : réparation (Levy 1909, 323 : reparar : répa-
« …an Ar. de la Tapia per 6 pesas de fusta de rayna de cleda e de lonc rer) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°22 r°]. « e per far las reparaciu
10 palms… ». de las autras clauzuras de la vila… ».

249
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Reparar : réparer (Levy 1909, 323) ; AD Aude, 4E76/CC49, Sarralhier, sarralher : serrurier (Alibert 1966, 626) ; AD
1363, [f°80 r°5]. « …qui steterunt ad reparandum pontes... ». Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°57 v°1]. « …Stephano de Lissac sarralherro
pro reparando ferollum porte Strate… ».
Resclausa, resclauza : 1. écluse, chaussée, batardeau
(Alibert 1966, 602) ; AC Toulouse, BB3, 1418, [f°28 v°3]. « Item Sarcinata : voir carga.
que prestament se curen los valatz per tot la on sera necessi e se fassan
resclausas… ». 2. levée d’un impôt ? ; AD Aude, 4E76/CC64, 1408,
Sartre : tailleur (Alibert 1966, 626) ; AD Aude, 4E76/CC48,
1360-1361, [f°70 v°7]. « …an P. Faure sartre… ».
[f°36 r°2]. « …fero donar per maniera d’estrena a las guardas le jorn que
se fec la resclauza per la talha fayta per las clausuras les cals y vaque- Saulo : synonyme de saulon : sable fin, éboulis de terre ;
ron totz per tota la matinada… ». saula : limon sablonneux déposé par l’eau (Alibert 1966,
627) ; AD Aude, 4E76/CC79, 1445, [f°9 r°3]. « …per un jornal que es-
Resegar, ressegar, rassegar, ressar, razicar, rasigar, resi-
tet an tres rosiis a carejar saulo per la tor del Terier… ».
gar : scier (Alibert 1966, 581) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361,
[f°88 r°5]. « Item P. Folqui, Geraldo Vitali fusteriis pro ressegando fustes Saumada : 1. charge d’une bête de somme (env. 130 kg ?)
qui apperebant in parietibus... » ; Ibid., 1361-1362, [f°96 v°4]. (Alibert 1966, 627) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°63 r°6].
« …Germano Goti, Johanni Guoti qui diebus mercuri jovis veneris et sab- « …una saumada de fe as obs de tortisar le dit gaytil… ». 2. mesure
bati steterunt ad rasiganda fustam... ». de capacité de quatre setiers pour les grains (Alibert 1966,
627). 3. mesure de surface (Ibid.).
Riosta, ruesta : 1. contre-fiche, pièce de bois en écharpe
(Alibert 1966, 610). 2. poteau de cloison (Ibid.). Scala : voir escala (Glossaire occitan).
3. planches réunies par deux traverses qu’on place sur les
roues d’un char pour empêcher le frottement du foin Scalon : voir escalon (Glossaire occitan).
(Ibid.). 4. dans le cadre du colombage, contreventement ;
Sclapar : voir esclapar (Glossaire occitan).
AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°24 v°2]. « …pro fusta ab ipsa recepta pro
faciendo ruestas in ambanamento Astrate… » ; Ibid., 4E76/CC51, 1366, Sclavar : voir clavelar (Glossaire occitan).
[f°100 v°4]. « …per portar 20 riostas corbas de la tor de la Strada als
embans de Frayres Menors… ». Scola : voir escola (Glossaire occitan).

Riu : ruisseau, rivière (Alibert 1966, 611). Voir rec Scombrilha : voir escombre (Glossaire occitan).
(Glossaire occitan).
Scoro, scorro : synonyme de scoron, scorron. Voir escoro,
Rossegar : tirer, traîner, traîner avec des chevaux (Lévy escorro (Glossaire occitan).
1909, 330) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°48 r°2]. « …pro Scorba, scorva : voir escorba, escorva (Glossaire occitan).
abstrahendo hominem mortuum qui erat de latrunculis de vallo castri et
pro rossegando extra muros... ». Sela, selha : seau (Alibert 1966, 631).
Ruesta : voir riosta. Semal : 1. comporte (Alibert 1966, 631) ; AD Aude,
4E76/CC69, 1420, [f°47 v°8]. « …per dos guarbas de serches e vims per
adobar las semals… ». 2. seau (Niermeyer 1984, 955) ; AD
Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°28 r°5]. « …qui traxunt de cava octo semales
S
aque et dictum ignem extinxerunt…». 3. mesure de capacité pour le
Sabata : soulier (Alibert 1966, 619). vin, équivalent à la moitié d’une charge, soit environ
69 litres à Castelnaudary (Abbé 1994, 92).
Sac : sac (Alibert 1966, 620).
Sementen, semeteri, cementeri, cimiteri : cimetière
Sadobar : voir adobar. (Lévy 1909, 74) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°71 r°7]. « …per le
descubrir de la peyriera de la Baffa devant le sementen…» ; Ibid.,
Sagos : synonyme de sagons ? De saga : sorte d’étoffe de 4E76/CC73, 1430, [f°11 r°3]. « ….sus le semeteri de Nostra Dona… ».
laine, de vêtement (jupe ?) (Lévy 1909, 332). Nom d’une
porte à Castelnaudary ; AD Aude, 4E76/CC59, 1394, [f°26 v°2]. Senafil : synonyme de trompeta ? cor, trompe d’appel ? ;
« …per dos relhadas e per dos cofos per metre a la porta de Sagos… ». AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°124 r°2]. « …Petro Salvatge pro aptan-
do et preparando trompetam seu senafillum castri quod erat fractus...».
Salcondut, salconduch, salvconduch : sauf-conduit
(Lévy 1909, 333) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°37 r°6]. Senh, sen, cen : 1. cloche (Alibert 1966, 632). Nom d’une
« …cuidam hominum qui portavit duos salcondutz unum de consulibus porte de Castelnaudary (également, porte Stimbala) ; AD
Fanum… ». Aude, 4E76/CC68, 1415, [f°57 v°1]. « …per far las sindras az ops de la
porta del Sens… ». 2. appel de la cloche (Lévy 1909, 340) ; AD
Salpetra : salpêtre (Lévy 1909, 333) ; AD Aude, 4E76/CC56, Aude, 4E76/CC60, 1394, [f°23 v°1]. « …an P. Fenassa per sonar le cen
1381, [f°84 v°4]. « Item et pro emendo salpetra necessaria in bombardis del guayt per un an…».
et canonibus… ».
Senhatz : bénis ?, de senhar : faire le signe de la croix sur,
Sarralha : serrure (Alibert 1966, 626). indiquer (Alibert 1966, 632) ; AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°155

250
GLOSSAIRE OCCITAN

r°1]. « …per deffar les stagas bon avian senhatz les rams e per tornar la Soga, sogua : grosse corde (de sparte) (Lévy 1909, 349) ;
fusta a la claustra dels Canorgues... ». AC Toulouse, EE32, 1354-1355, [f°48 v°2]. « …a obs de las obras a la
paret al cauta de Sant Estefe a l’ostal del P. Bosc 13 soguas de 10 bras-
Senhor : seigneur, sieur, sire : titre d’honneur que l’on
sa… ».
donnait aux personnes de considération et aussi aux per-
sonnes âgées (Alibert 1966, 632). Sola : sablière, éléments d’une charpente, assises d’un toit
ou d’un plancher sur lesquelles doivent reposer les solives.
Sercar, serquar, cercar : chercher, fouiller (Lévy 1909,
On peut les définir comme des pièces de bois posées à plat
75) ; AD Aude, 4E76CC51, 1366, [f°73 r°2]. « …a serquar le fonda-
comme une semelle pour recevoir les arbalétriers et les
ment del cap de la paret nova ques a la Baffa entre la nova e la vielha… ».
poutres obliques ou verticales d’un colombage (Cayla
Sernic : synonyme de cern, cernelh ? : tamis, crible 1964, 653). Pièce de bois entaillée pour recevoir les che-
(Mistral 1878, I, 518), du verbe cèrner / cernir : tamiser vrons ou creusée d’une rainure pour assujettir les planches
(Alibert 1966, 217) ; AD Aude, 4E76/CC63, 1405, [f°33 v°5]. d’une cloison (Alibert 1966, 638). Elément placé horizon-
« …per un jorn a portar fusta e les sernic ». talement entrant dans la composition d’un colombage ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°98 v°7]. «…pro una sola 24 palmorum posi-
Serche : végétal indéterminé, utilisé pour la réalisation ou ta retro G. Olricii... ».
la réparation de comportes ; AD Aude, 4E76/CC69, 1420, [f°47
v°8]. « …per dos guarbas de serches e vims per adobar las semals…». Solier : plancher, étage d’une maison, plate-forme (Lévy
1909, 350) ; AD Aude, 4E76/CC73, 1430, [f°13 v°]. « Siec se la des-
Serqual : dispositif associé au croc de l’arbalète ; AD Aude, pesa que es esta fayta sus la porta de Goferan que les dos soliers que eran
4E76/CC56, 1381, [f°26 r°1]. « Item pro tribus serquals necessariis pro desus volian tombar e coment tot deffar e far de nou ». Voir solerius
garnimiento croquorum balhistarum ville… ». (Glossaire latin).
Serveliera, cerveliera : cervelière, calotte de fer couvrant Sorda : ruilée (Lévy 1909, 352), chape de mortier posée
le crâne, utilisée par les brigands (Nicolas 2005, 329) ; AD sur un rampant de pignon et sur la rive du versant qui re-
Aude, 4E76/CC71, 1423, [f°23 v°5]. « …per una serveliera que foc bay- couvre partiellement ce rampant (Pérouse de Montclos
lada an Gualhart Alric... ». 1995, 340). Ici dans le sens de « raccord » ? ; AD Aude,
4E76/CC58, 1391, [f°42 v°6]. « …per far la paret de la sorda que es entre
Serviens : 1. serviteur, valet (Niermeyer 1984, 962). 2. ser-
la Bastida el Bari de Dins… ».
gent, guerrier non chevalier, monté ou non (Ibid.) ; AD Aude,
4E76/CC62, 1399, [f°16 r°1]. « …pro quodam payroleto recepto per
Sospeyrar : de sos (sous) et peyrar (bâtir en pierre ?). À
servientos et balisterios superius nominati... ».
Castelnaudary, ce terme désigne l’action de construire le
Sestairada : voir sextarius, sestairus (Glossaire latin). pied de la paret (solin), à pierres et chaux ; AD Aude,
4E76/CC48, 1359, [f°6 v°5]. « …qui per duos dies fuerunt manobricii ad
Seu, ceu : suif (Alibert 1966, 635) ; AD Aude, 4E76/CC77, sospeyrandum illum parietem qui est in clausuris prope portam
1441, [f°29 r°5]. «…per 8 £. candelas de seu per far le reyregayt… ». Mondebonis... ».

Siber : type de bois ou forme particulière du sparo ? ; AD Sostentar, sustentar : soutenir, supporter (Lévy 1909,
Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 v°2]. « …an P. Baronada […] per dos es- 353) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1399, [f°31 v°8]. « …pro ponendo in
paros de siber per tirar peyra e bart sus les enbans... ». cosseria quod est retro Fratrum Minorum pro sustentando et affirmando
cledas ibi necessarias ad finem quod excubiatores possint transsire per
Sil : variété de pierre ?, silex ? ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, dictam cosseriam » ; Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°63 r°3]. « …et quodam
[f°118 v°2]. « …pro tribus cartonibus petre de sil positis in clausura por-
magno staudello ibi necessario pro sustentando dictam aybrerium… ».
tus Strate cum supra dictam clausuram non essent lapides deffentionis
quando gentes armorum erant alotgiatis circum circa Castrum Spalliera : voir espalhiera (Glossaire occitan).
Novum... ».
Sparo, sparro : synonyme de sparon, sparron. Voir espa-
Sin, sint, cint, cench : ceinturon (Lévy 1909, 74) ; AD Aude, ro, esparro (Glossaire occitan).
4E76/CC71, 1423, [f°22 v°4]. « …al senhor P. de Pueyguoy de Tolosa per
tres sins de balesta… ». Sparonar : voir esparonar (Glossaire occitan).

Sindra, cindre : cintre (Bernardi 1995, 460) ; AD Aude, Spasa : voir espasa, espassa, espaza (Glossaire occitan).
4E76/CC68, 1415, [f°57 v°1]. «…e per una coronda de 8 palms per far
las sindras az ops de la porta del Sens… ». Spiar : voir espiar (Glossaire occitan).

Singlo, singla : synonyme de cengla, cingla ? : sangle Sponda : voir esponda, espondiera (Glossaire occitan).
(Lévy 1909, 75) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°26 r°1]. « …Vitali
Sporgar : voir esporgar (Glossaire occitan).
Laygue, mercerio, pro 12 singlos. Item pro 12 singlas. ».
Squela : voir esquela, esquelha (Glossaire occitan).
Sobresol : « sursol », chape ?, pavement ? ; AD Aude,
4E76/CC58, 1391, [f°60 v°2]. « …per far le sobresol del obrador del co- Stagia, statga: voir estatga, estatja (Glossaire occitan).
solat e per tartuguar la fuelha e per far bordos e per far archetz e per
metre las corondas desus ditas e per doblar le sobresol... ». Stagiar : voir estatjar (Glossaire occitan).

251
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Stalsinar, stalcinar : voir estalsinar (Glossaire occitan). Tampar, tancar : fermer, boucher (Alibert 1966, 650) ; AC
Toulouse, CC2326, 1416-1417. « Despessas faytas per far portas e fe-
Stancinar : synonyme d’estancir ? : éteindre (Raynouard, nestras e per tancar los trauhs de las arcs de la tor de Las Crozas ».
1840, III, 201). À noter que Levy ne reprend pas ce mot.
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°6 v°1]. « …et calcem stancinerunt... ». Tap : argile (Lévy 1909, 357), terre argileuse ; AD Aude,
Voir amortir (Glossaire occitan). 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. «…et pro amovendo le tap cum palis et
amovendo lapides...».
Stant, stanc : voir estant, estan (Glossaire occitan).
Tapia : 1. mur de terre crue massive (Lévy 1909, 357) ; AC
Star : voir estar (Glossaire occitan). Toulouse, BB3, [f°16 r°3], 1418. « …et porte claudantur cum tapiis… » ;
2. bâtiment de terre crue massive. 3. technique particulière
Staudel : voir estaudel (Glossaire occitan). de construction en terre massive ?
Stequar : voir estequar (Glossaire occitan). Targa : targe, grand bouclier long (Lévy 1909, 358).
Stot gayt : voir gayt (Glosaire occitan). Tarieyra, taraire : tarière (Cayla 1964, 669) ; AD Aude,
4E76/CC65, 1410, [f°28 r°2]. « …per portar la dita peyra que era dedins
Strenha, strinha : de estrenher : se rétrécir, restreindre l’ort e trasia la a la tarieyra… ».
(Alibert 1966, 386). Dans le sens de « ouverture étroite »,
« étroite », « fissure », « ravinement » ? ; AD Aude, Tartre, tartari : tartre (Lévy 1909, 358).
4E76/CC49, 1363, [f°62 r°7]. « …qui steterunt ad claudendum de terra
quandam strenham retro juponerium… » ; [f°104 r°8]. « …pro clauden-
Tartucar, tartuguar : raboter ?, de tartuga : sorte de rabot
(Lévy 1909, 358) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°60 v°2]. « …per
do quoddam foramen quod erat in pariete strinhe Guillermum Raynardi
far le sobresol del obrador del cosolat e per tartuguar la fuelha…» ; Ibid.,
quod exiebat in vallis… ».
4E76/CC73, 1430, « …per dos jorns e mieg que estet a tartucar la fuel-
Subbarba, subarba : pièce de bois ou pierre verticale sup- ha… ».
portant une charge (Bernardi 1995, 461) ; AD Aude, Tartugua, tartuga, tortuga : sorte de cadenas (Lévy 1909,
4E76/CC56, 1381, [f°40 v°6]. « …B. Johannis […] pro alio fusto de 358) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°40 r°1]. « …preparavit cadena-
5 palms recepti per dictos fusterios pro faciendo una subbarbam dicte tum seu tartugam pontis porte Stimbalorum cum non posse claudere nec
turris… ». aperire cum clave... ».

Sus : sur (Alibert 1966, 645). Taula : 1. table, planche, ais (Lévy 1909, 358) ; AC Toulouse,
CC2327, 1417-1418, pièce n° 22. « …per far dos banx e huna taula a la
Suspeyrar : de sus (dessus) et de peyrar (bâtir en pierre ?). badorca de la dita porta de S. Stephe en que mangen les porties… ».
À Castelnaudary, ce terme désigne l’action de bâtir à 2. banche (composée de planches clouées) formant, par
pierres et chaux sur la paret de terre crue massive (encein- paire, un coffrage destiné à la construction de murs de ter-
te) pour édifier parapet et crénelage ; AD Aude, 4E76/CC48, re crue massive (parets) ; AC Toulouse, EE32, mai 1355, [f°81 r°5].
1359-1360, [f°12 r°5]. « …qui dicta die fuerunt manobreriis cum Johanne « …a obs de clavelar las taulas ab que fazian las paretz... ».
Galigonis ad suspeyrandum quodam parietem in clausuris portus
Bordarum... ». Taulat : 1. table, plancher (Lévy 1909, 358). 2. tablier d’un
pont ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°81 r°6]. « Item tres pecias fus-
Sustentar : voir sostentar (Glossaire occitan). ti 21 palmorum in quibus stat taulatum et pons volvitur sive rotat… ».

Tenh : poutre (Lévy 1909, 361).

T Tener : de tenor ? valeur (Alibert 1966, 361). Dans le sens


de « coûteux » ? ; AD Aude, 4E76/CC49, [f°57 v°6]. « …pro por-
Tacha : sorte de clou (Lévy 1909, 356) ; clou à caboche tando octo pecias fuste de tenerio ad ambanamenta retro juponerium
(Vidal 1911, 270) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°47 r°3]. « …et Ramundo Artigua… ».
pro 25 tachis galochiarum positis in dicto entonamento... ».
Terra liza : voir lisa.
Talh : tranchant d’une lame (Alibert 1966, 648).
Terrar : voir enterrar.
Talha : 1. action de tailler ou de sculpter (Bernardi 1995,
461) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°55 v°5]. « …a far la talha del Terrier, terier : terrasse, terre-plein (Lévy 1909, 361).
amortiment del pilar de la dita barbacana… ». 2. taille, impôt (Lévy
Nom d’une porte de Castelnaudary ; AD Aude, 4E76/CC74,
1432, [f°15 v°3]. « ….per devalar lo teule de la porta del Terier… ».
1909, 357) ; AD Aude, 4E76/CC58, 1391, [f°22 r°]. « Item fero recebre
les ditz senhors cosols per una talha per lor en dita als singulars de la vi- Testola : tuileau, morceau de tuile cassée (Mistral 1878,
la de voler e hordenansa de lor coselh per paguar les carx e deutes de la vol. 2, 984 : testoulo) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°110
dita universitat… ». v°3]. « Item pro una quantitate de testolis sive tegulis fractas… ».

Talhar : tailler, couper (Alibert 1966, 648) ; AD Aude, Teula : brique cuite servant à bâtir (Alibert 1966, 660) ; AC
4E76/CC2, 1356, [f°10 v°8]. « Solvit de jornali ad talhandum brucum Toulouse, EE32, 1355, [f°70 v°2]. « …mes per tot a dentelhar e a pazi-
pro parietibus ». mentar e a far l’ampara entre tot 11 milhiers de teula… ».

252
GLOSSAIRE OCCITAN

Teula plana : voir tegula plana (Glossaire latin). Tortissayre : maçon construisant des murailles avec du
matériau lié au torchis ; ce nom se disait aussi d’un ouvrier
Teularia, teulayria teuliera : 1. tuilerie (Alibert 1966, spécialisé dans le crépissage des parois externes d’un local
660). 2. briqueterie (Ibid.) ; AC Toulouse, EE32, 1354, [f°28 v°2]. (Carcassonne, 1616, etc.) (Cayla 1964, 688 : tortisseur).
« …per 7 milhers e 5 saumadas de teula plana que avia a la sieu teula-
ria… ». Tortorieyra, tortoriera : grosse corde faite de plusieurs
brins de chanvre entortillés (Cayla 1964, 688 : tortière) ;
Teule : tuile (Lévy 1909, 363) ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, AD Aude, 4E76/CC55, 1376, [f°25 r°6]. « …per una tortorieyra laqual
[f°54 r°6]. « …a trayre fusta et teule de la cava del castel dels enbans que fo mesa al pont de la porta de la Plasa… ».
eran casut… ».
Trayre, traire : extraire, tirer (Lévy 1909, 368) ; AD Aude,
Teulier, teuler : tuilier, briquetier (Alibert 1966, 660) ; AD 4E76/CC48, 1360, [f°56 r°4]. « …que avian fayta trayre la dita arena del
Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°22 v°2]. « Item Petro Lamberti et G. Johannis riu… »).
teulerii… ».
Tralha, dralha : grosse corde (Alibert 1966, 670) ; AD
Tezaurier : trésorier (Lévy 1909, 363). Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°88 v°7]. « Item pro una tralha de jonc
Poncio de Lauraco a trahendum aquas de puteis castri ad opus tortitio-
Tezura : piège (Lévy 1909, 364) ; AD Aude, 4E76/CC54, 1373, rum... » ; Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°141 v°3]. « …pro una corda sive
[f°6 r°10]. « …qui fecerunt tezuras circa Castrum Novum pro capiendo
dralha pro ligando panesios et balhistas supra dictum animalum… ».
lupos si possent… ».
Trametre : envoyer (Lévy 1909, 369) ; AD Aude, 4E76/CC55,
Tibia : 1. jambage de porte ou de fenêtre, piédroit (Nicolas 1376, [f°45 r°4]. « …le qual portet una letra clausa als senhors cossols
2005, 331). 2. montant d’escalier ou de passerelle ? ; AD la qual trametran les cossols de Pueg Laurens… ».
Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°52 v°2]. « …pro faciendo cambas seu tibias
in dicto scalerio seu ponte pro ascendendo corserias… ». Trasar, trassar : tirer de la pierre d’une carrière (Mistral
1878, vol. 2, 1019 : traça) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362,
Tinel : 1. grande salle, salle à manger (Alibert 1966, 661). [f°100 v°5]. « …ad trasandum peyreriam seu discoperiendum usque bo-
2. cuvier, cuveau (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°23 v°6]. ne petre... ». Voir trassator, traçator (Glossaire latin).
« …G. Mazerolas, fabro per 12 arpis. Item pro 12 tinellis.».
Trassa, traça : de trasar : percer (Lévy 1909, 369).
Tirar : tirer, amener à soi, extraire (Alibert 1966, 662) ; AD Percement ? ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°13 r°4]. « …qui fece-
Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°46 v°2]. « …an P. Baronada […] per dos es- runt unam trassam per quam aquam transisse de cavis porte
paros de siber per tirar peyra e bart sus les enbans... ». Mondebonis… ».

Tocasenh, toquacens : tocsin (Lévy 1909, 365) ; AD Aude, Trauc, traust, trauh : trou, ouverture (Lévy 1909, 370) ;
4E76/CC57, 1389, [f°43 v°1]. « …tramezo en Bertran Albert et Ramon AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°26 r°5]. « …qui tortissavit fenestram et
Sezero a Yselh et a la Bécéda que fazian toquacens per saber per que les 2 traucos enbani portus Narbonesii... ».
fazian si hi avia gens d’armas… ».
Travatel : sorte de poutre (Lévy 1909, 370) ; poutrelle, so-
Tonel : tonneau (Alibert 1966, 665) ; AD Aude, 4E76/CC55, live (Cayla 1964, 692) ; chevron, entrait (Alibert 1966,
1376, [f°25 v°4]. « …pro 2 miianas de tonel de las quals foc fayta la cay- 673) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°33 r°4]. « …et pro assendendo
sha de la planqua de la porta de la Plasa… ». in dicto opere 10 travatellos... ».

Tonnidel : diminutif de tona ? : tonne (grand récipient), Travatela : solive (Alibert 1966, 673).
cuve, fouloire (Alibert 1966, 665), dans le sens de petite
cuve ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°29 r°6]. « …pro uno ton- Trayle, trailitz, treslitz : treillis, espèce de grosse toile
nidello pro dictis operibus clausurarum ». (Lévy 1909, 372) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°141 v°2]. « ...P.
de Blanno pro una canna cum dimidia de traylis de quo fuit factus unus
Tor : tour (fortification) (Alibert 1966, 666) ; AD Aude, sacus et in eodem positis arnesium dictorum servientum ut melius porta-
4E76/CC51, 1366, [f°100 v°4]. « …de la tor de la Strada als embans de retur supra roncinum predictum… ».
Frayres Menors… ».
Trencada, trencata, trenquata : tranchée, fossé, excava-
Torrela, torella : 1. petite tour (Vidal 1911, 271) ; AC tion (Alibert 1966, 675) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°34 r°2].
Toulouse, CC2334, pièce n° 60, 1460. « …a causa de desroquar una tor- « …in opere trencate facte ante portam Beati Antonii 14 homines...» ;
rella de terra vielha la qualla se tenet am la muralha et tombet dedins lo synonyme de vallum ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°42 v°4].
vallatz…». 2. échauguette (Bernardi, 1995, 462). « …ad faciendum vallum seu trencatam juxta porta Montis Leboni...».
Voir trencator (Glossaire latin).
Tornar : ramener, rapporter, rendre (Alibert 1966, 667) ;
AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°27 v°4]. « …per tornar las semals am Trencar, trincar, tranchar : trancher, couper, casser,
que foc portat le vi a mossenhor Olivier de Manni... ». rompre, abattre (Alibert 1966, 675) ; AD Aude, 4E76/CC48,
1360-1361, [f°68 v°5]. « …an Johan Mauri per trencar las dentz del
Tortisar, tortissar, atortissar : bâtir ou enduire avec du mur… ». Voir trencator (Glossaire latin).
torchis (Alibert 1966, 677) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°63
r°7]. « …per tortisar le dit gaytil e la porta de la Baffa… ». Trompeta : trompette (Alibert 1966, 680).

253
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Trompil, trompilh : petite trompette (Alibert 1966, 680). Vas : vers (Levy 1909, 378), vastug ou vas tug ? : vers
tous ? ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°18 r°3]. « …que las jendarmas
Tropa : troupe, multitude, rassemblement de gens (Alibert de mossenhor de Lomanha eran vastug e menassavan stavila... ».
1966, 680).
Vegada : fois, intervalle de temps (Alibert 1966, 689) ; AD
Tros : tronçon, morceau, pièce, portion, quantité, paquet Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°31 v°4]. « …lequal aquel dia per mandament
(Lévy 1909, 374) ; AD Aude, 4E76/CC78, 1442, [f°45 r°1]. « …per dels senhors cossols anet per 2 vegadas als cossols del Mas am letras
sinc jorns que stet a far hun tros de mur sus la paret… ». clausas per saber novelas de las gens d’armas en qual part tenian… ».
Voir vetz (Glossaire occitan).
Trossa, trosa : tas de paille, paquet, fagot (Alibert 1966,
680 : troça) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 v°8]. « …por- Veire : verre à boire (Alibert 1966, 689).
taverat decem trosas de feno de reperia Fistuli... ».
Venda : vente (Alibert 1966, 690).
Truelh, trolh : pressoir pour la vendange, pressoir à huile,
fosse de tanneur (Alibert 1966, 681) ; AC Toulouse, EE32, Verrolh : voir ferrolh (Glossaire occitan).
1354-1355, [f°50 v°2]. « …a obs de puntiers a las paretz detras le truelh
de Sant Estefe… ». Veruola, veruhola : anneau dans lequel s’engage le verrou
(Vidal 1911, 272) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°57 v°1]. « …pro
Tumbarela, tombarelat : contenu d’un tombereau (Lévy reparando ferollum porte Strate et pro faciendo veruolas ibi necessarias
1909, 365) ; AC Toulouse, CC2324, 1405, [f°96 r°19]. « Item an Johan et pro ponendo dictum ferrollum et dictas veruolas… ».
Debolet caretier per portar 50 tumbarelas de grava per metre sus le pons
de la porta de la Font Santa Maria… ». Veser, vezer : voir (Alibert 1966, 694) ; AD Aude, 4E76/CC64,
1408, [f°34 r°2]. « …que li plagues que volgues venir vezer so que la vi-
la volia pendre de son hostal per far la clausura de la porta Mondebo… ».

U Vesitar : visiter, examiner, inspecter (Alibert 1966, 694) ;


AD Aude, 4E76/CC60, 1394, [f°23 r°6]. « …an G. Guarigua et an
Uniar, unhar : synonyme probable d’unchar / untar, on- G. Sauri fustiers per vesitar las clausuras… ».
char / ontar : oindre, graisser (Alibert 1966, 515, 686) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°102 v°3]. « Item pro quinque car- Vetz : fois (Lévy 1909, 382) ; AC Toulouse, EE32, 1355, [f°78
tonibus de grays ad unhendum fusellum turi… ». r°1]. « …que avian prezas en diverssas vetz… ». Voir vegada
(Glossaire occitan).
Usaga : synonyme de usada, uisada ? ouverture, porte
(Lévy 1909, 375) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°91 v°8]. Vim : osier, brin d’osier (Mistral 1878, vol. 2, 1125,
« …pro una clavatura quam posuerat in quodam hostio soleris porte col. 1) ; AD Aude, 4E76/CC69, [f°47 v°8]. « …per dos guarbas de ser-
Terrerii una usaga quam fecerat in dicto hospicio… ». ches e vims per adobar las semals…».

Viraton : vireton, projectile de l’arablète (Lévy 1909,


385 ; Nicolas 2005, 333) ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°37 v°4].
V « …P. Pinalli qui fecit 150 viratonos pro deffentione ville…. ».

Valadier, valladier, valadaire : 1. celui qui creuse les fos- Vista : ouverture par laquelle on voit (Lévy 1909, 385) ;
sés (Alibert 1966, 688). 2. celui qui est chargé du soin des AD Aude, 4E76/CC51, 1366, [f°159 v°3]. « …per 2 relhadas que foro
fossés, de leur entretien, terrassier (Mistral 1878, vol. 2, mezas a far vista al postat de sus dit… ».
1079 : valladié) ; AC Toulouse, CC2334, pièce n° 60, 1459. « …a
Johan Boys, Sevetre Piron e a Pierres Hunault valladies… ». À Vojar : vider (Alibert 1966, 698).
Toulouse, ces personnes possèdent souvent le titre ou la
compétence de parediers, et sont d’ailleurs sollicitées en Volta : voûte, arc (Bernardi 1995, 463) ; AD Aude, 4E76/CC52,
1367, [f°40 r°1]. « ...Jacobo Caucideriis et eius sociis qui curavunt vol-
tant que telles. Voir valaderius, vallifactor (Glossaire la-
tam de subtus cloquerium ecclesie Beati Michaelis… ».
tin).

Valat : fossé (Lévy 1909, 377) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360,


[f°60 v°1]. « …que aquel dia avian obrat a far le valat de pres la porta Y
de la Baffa…».
Ygua, iga : bas-fond marécageux, fondrière, ravin creusé
Valhonar : sens indéterminé. L’hypothèse d’étayer ou par les eaux (Alibert 1966, 445) ; AD Aude, 4E76/CC64, 1408,
d’armer une paret (Voir ce mot. Glossaire occitan) avec des [f°42 r°4]. « …per huna semal de mortier franc la cal foc meza a la ba-
poutres pourrait être avancée ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, riera de la ygua de Guot Feran la cal era nessesaria affar… ».
[f°25 v°4]. « pro uno fuste ab ipso recepto pro valhonando illum parietem
que erat in clausuris... ». Yssaillier : voir aisselier.

254
GLOSSAIRE LATIN, P. 255-267

Glossaire latin

A Adjuvare : aider, seconder (Gaffiot 2000, 45) ; AD Aude,


4E76/CC49, 1363-1364, [f°180 r°8]. « …ad adjuvandum illis qui opera-
Abies : 1. sapin (Gaffiot 2000, 6). 2. objets faits en sapin bant in operibus ville… ».
(Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC54, 1373, [f°37 v°8]. « pro uno fuste abi-
etis pro faciendo plancam ad portam Mondebonis… ». Adligare : 1. attacher à, lier à (Gaffiot 2000, 46). 2. faire
une ligature (Ibid.).
Abstrahere, strahere : tirer, traîner loin de, séparer de, dé-
tacher de, éloigner ; entraîner (Gaffiot 2000, 12) ; AD Aude, Affirmare : voir firmare (Glossaire latin).
4E76/CC48, 1359-1360, [f°3 v°4]. « …qui abstraxerunt dicta die dictos Aguasserius, aguacerius : espèce de guérite, ouvrage de
lapides a vallo juxta portam Valincii... ». fortification ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°88 r°11]. « …ad
reparando agasserium juxta portam Baffe… ». Voir agasier, agas-
Abundantia, habundantia : abondance (Gaffiot 2000,
sier (Glossaire Occitan)
14) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°46 r°2]. « …pro prohicien-
do et expellendo quandam quantitatem lapidum seu petram de peyreria in Aguerium, aigueria : 1. ruisseau d’évacuation des eaux
qua erat magna habundancia aque… ». usées et des eaux de pluie ; voir tonitum (Glossaire latin).
2. évier, bassin (Bernardi 1995, 437) ; AD Aude, 4E76/CC48,
Accedere : aller vers, s’approcher de (Gaffiot 2000, 15). 1361-1362, [f°118 r°6]. « …ad portandum petram in cavalhis dicte pa-
rietis pro faciendo aguerium...». Voir ayguier, ayguiera
Acuere : aiguiser, rendre aigu (Gaffiot 2000, 28) ; AD Aude, (Glossaire occitan).
4E76/CC48, 7 juin 1359, [f°4 r°3]. « …G. Gelati pro… acuendo et repa-
rando 250 clavos pro porta de Baffa... ». Ala : 1. partie de fortification ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-
1361, [f°80 r°6]. « …pro interrando et coperiendo cadafalcum de retro
Additio : action d’ajouter (Gaffiot 2000, 32). Dans le sens alam… ». 2. aile de bâtiment (cujusvis aedificii latus). (Du
de « extension », « agrandissement » ? ; AD Aude, 4E76/CC48, Cange 1840-1850, t. 1, 158, 3e col). 3. halle (hala, forum,
1360-1361, [f°82 r°1]. « Item per 2 dies fuit operatus in additione barb- macellum tectum). (Ibid., 2e col). 4. ailé (qui habet alas).
acane… ». (Ibid., 162, 1e col). À Castelnaudary, ce terme designe par-
fois les ailes ou ailettes des projectiles d’un canon ; AD
Adequateria [intrata] : entrée pour les chevaux ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°93 v°2]. « …pro una payrola ponderante
Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°28 r°5]. « …ad curandum intratam 10 l. pro faciendo alas als guarrotz canonum… ». Voir ala
adequateria de Got Ferran… ». (Glossaire Occitan).

Adsignare, assignare : 1. assigner, attribuer dans un par- Aloiamenta : logements, habitations ? ; AD Aude, 4E76/CC52,
tage (Gaffiot 2000, 59). 2. attribuer, imputer, mettre sur le 1368, [f°27 v°6]. « …faciendo diruere aloiamenta existentis extra clau-
compte de (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC2, 1356-1357, [f°75 v°1]. suris… ».
« Fuerunt assignati heredes G. Calvine pro lapidibus ab ipsis receptis de
Ameria : voir ripa (Glossaire latin).
suo lignarum ad opus porte que est inter platheam et barrium interius in.
20 l.tur. ». 3. remettre, confier. Amittere : envoyer loin de soi (Gaffiot 2000, 115).

255
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Amovere : éloigner, détourner, écarter (Gaffiot 2000, Aybrerium : de aibre, arbre : arbre, mât, axe d’une ma-
117) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « …steterunt pro ca- chine (Alibert 1966, 112). À Castelnaudary, ce terme paraît
vando cum pix et cum rabasseriis pro perquirendo le ferm pede turris por- désigner l’affût en bois d’une pièce d’artillerie ; AD Aude,
te Strate et pro amovendo le tap cum palis et amovendo lapides...». 4E76/CC56, 1381, [f°63 r°3]. « …G. Saurini et Ramundo Sarraceni fus-

Ampliatio : augmentation, extension (Gaffiot 2000, 119). teriis qui dicta die steterunt pro faciendo aybrerium sive stagiam magne
bombarde et quodam magno staudello ibi necessario pro sustentando dic-
Anellus : petit anneau (Gaffiot 2000, 126). tam aybrerium… ».

Animal : animal, bête (Gaffiot 2000, 130).

Anulus : anneau (Gaffiot 2000, 140). B


Aperire : ouvrir (Gaffiot 2000, 141) ; AD Aude, 4E76/CC48,
Bacinetus : casque muni d’un camail de fer (mailles) per-
1359-1360, [f°5 r°1]. « …qui dicta die aperuit quoddam stillicidium… ».
mettant de relier le casque au reste de l’armure (Nicolas
Appretiare : évaluer (Gaffiot 2000, 149). 2005, 305) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°143 r°9]. « …Gualhardo
Lupati pro deterioratione et reparatione duorum bacinetorum armo-
Aprisionare : de aprisio : appropriation, occupation rum... ».
(Niermeyer 1984, 53). S’approprier ou occuper ; AD Aude,
4E76/CC56, 1381, [f°57 r°5]. « …quod comes Convenarum et alii capi- Balistarius, balisterius : arbalétrier (Niermeyer 1984,
tanei anglicorum cum eorum gentibus armorum erant circa locum de
79) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1399, [f°16 r°1]. « …pro quodam payrole-
Monte Albano et debebant currere et aprisionare versus ripparias
to recepto per servientos et balisterios superius nominati... ».
Tarni… ».
Basterius : bâtier, fabricant de bâts ; AD Aude, 4E76/CC56,
Aptare : preparer, disposer (Gaffiot 2000, 151) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1360-1361, [f°87 r°5]. « …laboravunt ad portandum dictam 1382, [f°141 v°3]. « …Bernardo Basterii, basterio Bastite pro una corda
fustam et aptandum… ». sive dralha pro ligando pavesios et balhistas supra dictum animalum… ».
Voir bastier (Glossaire occitan).
Aquarium, aquerium : canal (Niermeyer 1984, 54).
Baudrerium : courroie, bande de cuir (Du Cange 1840-1850,
Arnesium : équipement militaire en général, armes t. 1, 628) ; « Lit. Remiss. An 1358. In reg. 86 Chartoph reg. Ch. 263 :
(Nicolas 2005, 305) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°151 r°3].
Symon Patrouillardi dixit Johanni ipsius famulo, quod dictam balistam
« …ad opus faciendi unam cameram in porta Montis Lebonis pro tenen-
tenderet cum manibus,… qui nequivit hoc facere, sed baudrerium accepit,
do arnesium… » ; [f°156 v°1]. « … 200 serviens munitos et armatos de
arnesiis condecenter pro faciendo seti Alana… ». et eam tendendit. »

Arqueria, archeria : meurtrière (Niermeyer 1984, 56) ; Brachiata, brachia : brasse, ancienne mesure de longueur
AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°119 r°1]. « ...et debuerunt facere in valant en France 5 pieds soit 1,624 m (Niermeyer 1984,
dicta barbacana quatuor arquerias inferius seu juxta pontem et quatuor 103), (Robert 1982, 215). Cependant, à Castelnaudary, la
arquerias de supra predictas quatuor... ». brasse est quelquefois égale à 10 pans (soit env. 2,23 m) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°31 v°2]. « …eidem pro 12 bra-
Artificium : 1. art, profession, métier, état (Gaffiot 2000,
chiatis et media muri per ipsum facti… » ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363,
169-170) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°16 r°3]. « …pro qua-
[f°24 r°4]. « ...magistro Petro Saurini pro faciendo parietem de la Strada
tuor jornalibus quibus etiam operatus fuit suo artificio fustarie in operi-
bus clausurarum… ». 2. connaissances techniques, science, videlicet pro 126 brachiatis parietis qualibet brachiata 10 palmorum que
théorie (Gaffiot 2000, 169-170). fuerunt mensuratas per Michaelem Bartas... ». Voir brasa (Glossaire
occitan).
Asinus : âne (Gaffiot 2000, 174).
Brugum : voir bruc, brug (Glossaire occitan).
Ascendere, assendere : monter (Gaffiot 2000, 171) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°72 v°9]. « …fecerunt fieri unam scalam Buegus, buegum : synonyme de bugetus, bujetus ? :
pro assendendo in dicta porta... ». 1. bloc de pierre (Bernardi 1995, 439). 2. mur, cloison, gar-
Ausaprenis, voir ansapren, aussapie, ausapie (Glossaire de-corps (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°119 r°2].
occitan). « …et quod computaverant buegum pro pleno et inclusere pilariis factis
in porta dicta barbacane et etiam discobre quod fecerant in peyreria de
Auster : le vent du midi (Gaffiot 2000, 197). quibus pilariis et discobre actento quod conputatur dictum bueg pro pla-
no nichil petere debent...». Voir bueg (Glossaire occitan).
Avantagium : 1. gratification (Niermeyer 1984, 74).
2. avantage, profit (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362,
Bugetus : variété de pierre (Du Cange 1840-1850, t. 1, 799, 2e
[f°116 v°8]. « …et prenominatis Ramundo Tocarelli, Guillermo Johannis
col.). Lapidis genus. Charta ann. 1384 ex. Tabul Massil : Item solvatis
pro avantagio quia regebant operas... ».
Johanni Arnaudi barquerio pro portu mille lapidum in sua barca, vocato-
Avena : 1. avoine (Gaffiot 2000, 201). 2. chaume (Ibid.). rum Buges. Infra : septem albi pro quolibet Bugeto.

256
GLOSSAIRE LATIN

C Cementum, caementum : 1. moellon, pierre brute, éclats


de marbre. 2. mortier (Gaffiot 2000, 242). 3. fixations,
Catafalcus, cadafalcus : échafaud, estrade, échafaud de liants ? (au sens large) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°72 v°1].
bois appliqué sur le rempart (Lévy 1909, 58 : cadafalc). « …ad claudendum dictum passum de palis portando eis fustes et alia ce-
Plateforme élevée en bois servant de bastion. Estrade, pla- menta necessariis… ».
teforme, tribune. Charpente d’une tour où sont accrochées
les cloches. Echafaudage (Niermeyer 1984, 156). À Claudere : fermer, clore, fermer une route, un passage, un
Castelnaudary, ce terme désigne une sorte de hourd défen- pays, finir, clore, couper, barrer, arrêter (Gaffiot 2000,
sif établi au sommet de la paret qui se distingue des am- 327).
bans ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°77 r°3]. « …pro quadam quan-
titate fustalhe que fuit empta ab eodem et posita tam in reparatione Clavus : clou (Gaffiot 2000, 329). À Castelnaudary et à
cadafalcorum quod ambanamentorum et alibi in clausuris… ». Voir Toulouse, on rencontre plusieurs types de clous : clavus
cadafalc (Glossaire occitan). barator ou barador (certains sont dits « fortz ») : clou ser-
vant à barrer. Clou de grande taille. Clavus de folhia : clous
Cadruvium, quadrivium : lieu où quatre chemins abou- pour les voliges. Clavus de moli : clous de meules ? Clavus
tissent, carrefour (Gaffiot 2000, 1305) ; AD Aude, 4E76/CC53, de relha : clous pour les pentures. Clavus latador : clous
1371, [f°29 v°6]. « …pro portando et ponendo foliam veterem et cabiro- pour fixer les lattes ou voliges. Clavis reforsatis (ou refor-
nos qui erant in coperta cadruvii den Maiofi intus domum quae est in satz) : clous renforcés ; AC Toulouse, EE32, 1355, [f°112 v°17].
barbacana porte Montis Lebonis, ne perderetur… ». « Item per 100 clavels baradors fortz a obs de las taulas de las paretz... » ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°8 r°5]. « …pro viginti quinque clavis de
Caedere : abattre, briser, fendre (Gaffiot 2000, 241). Plutôt
folhia, viginti quinque clavis de moli, 25 clavis barratorum…. » ; Ibid.,
employé dans le sens de « tomber » ; AD Aude, 4E76/CC49,
1361, [f°105 r°11]. « Item pro aliis 200 clavibus de relha quos receperat
1364, [f°161 r°2]. « …ambanamenta supra portam domini Bertholomei
Constantini qui ceciderant propter rigorem venti… » ; Ibid., 4E76/CC48, dictus Geraldus et posuit in dicto guacillo. »; Ibid., 1360, [f°80 v°10].
1359-1360, [f°32 r°4]. « …ad strahendum a vallis lapides que cescide- « Item […] fuerunt empti a magistro B. de Podio 300 clavi reforsatis pro
rant a dentillis dirutis… ». latando seu sparonando…». Voir clavel (Glossaire occitan).

Calx : chaux (Gaffiot 2000, 251). Cofia, cofea : coiffe, bonnet (Niermeyer 1984, 195) ; AD
Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°142 r°1]. « ...P. Castelli pro duabus coffis du-
Canabis, canapis : chanvre (Gaffiot 2000, 256) ; AD Aude, orum bacinetorum dictorum servientum…».
4E76/CC48, 1361-1362, [f°87 v°10]. « Item pro una corda canapis de tri-
bus brachiis cum dimidia ad levandum pontem porte Mercadalis… ». Colerius, collarius : porte-faix (Niermeyer 1984, 198) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°72 r°2]. « …et fecerunt portare hostia de
Canicula : petite chienne (Gaffiot 1934, 253). domo Johanni Guisalsiedi et Germani Gauberti per quatuor colerios… ».

Canonicus : prêtre appartenant régulièrement au clergé Collector : collecteur d’impôts ou de dîmes (Niermeyer
d’une église, chanoine (Gaffiot 2000, 257). 1984, 200) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°36 v°3]. « …Ramundo
Guiraudi mercatore Castrinovi de Auri et collectore financie factis cum
Canonus : canon (Nicolas 2005, 308) ; AD Aude, 4E76/CC49,
Migone de Ruppe Forti, Bastardo de Insula et Jacobo Ysalgueri milites
1363, [f°87 r°2]. « …magistro Johanni Pincardi, guallico pro faciendo
pro expellendo gentes armorum…».
duos canones…».

Capitaneus : supérieur muni de pouvoirs de commande- Colligere : recueillir, réunir, ramasser, rassembler (Gaffiot
ment, personne de rang, vassal royal, baron, commandant 2000, 345).
militaire (Niermeyer 1984, 134, 135) ; AD Aude, 4E76/CC48, Comitiva : escorte (Nicolas 2005, 311) ; AD Aude,
1360, [f°74 r°2]. « …cum dominus comes predicti capitaneus facent
4E76/CC62, 1399, [f°22 r°1]. « …cum dictus dominus Philipus de
operare gentium et disruere parietes… ».
Mornay duceret dictos prisonerios in comitati Carcassonensi ac parva
Carbo : charbon (Gaffiot 2000, 267) ; AD Aude, 4E76/CC48, comitiva et dubitaret de embosquata Anglicarum super itinerem, rogavit
1359-1360, [f°12 v°9]. « …pro una sarcinata carbonis ab ipso recepta dominos consules ut visis presentibus haberent balisterios et alios bonos
pro operibus clausurarum que fuit tradita fabris qui faciebant ca- homines et socios armatos pro faciendo sibi comitivam et pro accedendo
villas… ». versus Carcassona...».

Cartellus : charte (Niermeyer 1984, 149) ; AD Aude, Concedere : concéder (Gaffiot 2000, 371) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1359-1360, « Sequitur expense facte per manus Bernardi 4E76/CC48, 1360-1361, [f°89 v°3]. « Item Bernardo Ricaut quia conce-
Guini in operibus clausurarum prout in cartello per ipsum super hoc tra- derat pulveres canonum…».
dito continetur ». Voir cartel (Glossaire occitan).
Concremare : faire brûler entièrement, réduire en cendres
Caseum : fromage (Gaffiot 2000, 272). (Gaffiot 2000, 379) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°27 v°4].
« …quando latrunculi concremare fecerunt molendina Ville Nove… ».
Caucinerius : chaufournier (Lévy 1909, 72 : causinier) ;
AD Aude, 4E76/CC48, [f°33 v°2]. « …Bernardo Englesii caucinerio de Condecens, entis : convenable (Gaffiot 2000, 381) ; AD
Manso pro 65 sestariis calcis ab ispo emptis...». Voir causinier, Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°156 v°1]. « …200 serviens munitos et arma-
caussinier (Glossaire occitan). tos de arnesiis condecenter pro faciendo seti Alana ».

257
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Consitus : part. de consere : attacher ensemble, réunir, Depredatio, depraedatio : déprédation, pillage (Gaffiot
joindre (Gaffiot 2000, 405) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°4 2000, 505).
r°4]. « …qui dicta die misit suum nuncium cum duobus suis roncinis ver-
sus loca de Mazeriis et de Monto Alto consitus les jaques, bacinetos, ca- Descendere : descendre (Gaffiot 2000, 508) ; AD Aude,
nones, pavesios, balhistas et serta alia artilheria quam et quos dicti ser- 4E76/CC49, 1363, [f°122 r°5]. « …ad mitendum et ponendum scalones in
vientes dimiserant in dictis locis quando remearunt de dicto loco de pugata corserie de Strada ad finem ut visitatorum possent melius et secu-
Monto Alto steterunt per tres dies… ». re assendere et descendere per dictas corserias… ».

Conventio : convention, pacte (Gaffiot 2000, 428). Differre : répandre des bruits (Gaffiot 2000, 528). Dans le
sens de « accorder » ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°39
Convertere : tourner entièrement, retourner, faire retour- v°7]. « …qui stetit ad aptandum differandum et clavellandum tintinabu-
ner (Gaffiot 2000, 429). la ecclesie Sancti Petri… ».

Cooperire, cohoperire : couvrir entièrement (Gaffiot Dimittere : envoyer (Gaffiot 2000, 535).
2000, 431).
Diruere, disruere : démolir, détruire, renverser (Gaffiot
Coperta, coberta, : couverture (Niermeyer 1984, 272 : co- 2000, p. 538).
operta), couverture d’une maison, toit ; AD Aude., 4E76/CC2,
1356, [f°4 v°10]. « Item solvit de Andree Vitoci per jornalibus quibus fue- Discipulus : 1. élève, disciple (Gaffiot 2000, 541).
rat in coperta Foy…». 2. garçon, aide, apprenti (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-
1361, [f°25 v°6]. « …G. Bastiti pro 85 jornalibus quibus fuit tam ipse
Copertus, coopertus : part. de cooperire : couvert, cou- quam eius discipulus in operibus clausurarum operando suo officio fus-
verte (Gaffiot 2000, 431) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1362, [f°117 tarie… ».
v°1]. « …et debuit reddere tortisatis a quolibet latere reddere copertum
de supra de tegulis et bardatum et planconatum supra parietes ». Discooperire, discoperire : 1. découvrir, mettre à décou-
vert (Gaffiot 2000, 541) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°69 r°2].
Corega, corrigia, correg, correja : courroie (Gaffiot
« …qui dicta die steterunt ad desterandum ac discoperiendum turi gros-
2000, 437) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°98 r°2]. « Item
sa anguli portus Astrate cum esset in ruina… ». 2. enlever le mort-
Bernardo Carles pro una corega arpe del ausapiem…».
terrain d’une carrière ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°100
Costonere : faire l’escarpe ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, v°5]. « …qui per duos dies fuerunt ad trasandum peyreriam seu discope-
« Item cum in porta Mondebonis et ante seu de juxta hospicium Bertrandi riendum usque bone petre... ». Voir descuebre.
Olibe et circum circa esset necessarium costonere preparare et terram ab
Discursus, discurssus : action de courir ça et là, de se ré-
inde removere dicti domini consules ibidem operari fecerunt… ». Voir
coston, costo (Glossaire occitan). pandre de différents côtés (Gaffiot 2000, 543) ; AD Aude,
4E76/CC56, 1381, [f°22 r°3]. « …pro sciendo et informando discurssum
Crastinum : le lendemain (Gaffiot 2000, 443) ; AD Aude, et depredationem factam per gentes armorum dicti comiti Fuxi… ».
4E76/CC48, 1360-1361, [f°76 v°5]. « Item pro alio jornali quod in cras-
tinum operatus fuit in ambanamento… ».
Dissonare, disonare : 1. rendre des sons discordants
(Gaffiot 2000, 549). 2. différer (Ibid.).
Cubare : dormir (Gaffiot 2000, 452) ; AD Aude, 4E76/CC53,
1371, [f°46 v°2]. « …venit et fuit at nocte dicte diey cubavit in dicto Donec : jusqu’à ce que (Gaffiot 2000, 561).
Castronovo de Arrio...».

Cugnus, cuneus : coin (Niermeyer 1984, 287) ; AD Aude,


E
4E76/CC48, 1359-1360, [f°7 r°6]. « …pro uno cugno ferri quod fecit pro
operibus dicte universitatis…». Ejicere, eiciere : jeter dehors, chasser de (Gaffiot 2000,
583).
Curare : avoir soin de, traiter (Gaffiot 2000, 462).
Emere : acheter (Gaffiot 2000, 591, 592) ; AD Aude,
4E76/CC56, 1381, [f°84 v°4]. « Item et pro emendo salpetra necessaria
D in bombardis et canonibus… ».

Debitum : dette d’argent (Gaffiot 2000, 475). Enterrare, interare, interrare : couvrir de terre, enterrer ;
AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°26 r°3]. « …qui steterunt ad enterran-
Deficere : faire faute, manquer (Gaffiot 2000, 486) ; AD dum solerium turrim de la Strada... ».
Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°115 v°1]. « Item dicto Geraldo Vitalis pro la-
tando, sparonando, ponendo aliquas riostas corondas que difficiebant Exire : sortir de, aller hors de, sortir, aboutir, déboucher
pretio facto… ». (Gaffiot 2000, 628).

Dentillum : merlon ; AD Aude, 4E76CC48, 1361-1362, [f°113 v°2]. Existimare, extimare : juger, considérer, apprécier
« ... que portaverunt per quatuor dies arenam et morterium in dentellis (Gaffiot 2000, 632) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°72 v°2].
Fratrum Minorum seu ad reparandum eosdem… ». Voir dentel «…qui fustes fuerunt extimati per dictos fusterios qui eos posuerunt in
(Glossaire occitan). dicto opere… ».

258
GLOSSAIRE LATIN

Existimatio, extimatio : opinion, jugement (Gaffiot 2000, Forum : place du marché, place publique (Gaffiot 2000,
631) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°120 v°3]. « …pro uno fuste 689).
abietis recepto ad opus dicti pontis 22 palmorum ad extimationem dicti
G. Bastiti. ». Fossatum : fossé (Niermeyer 1984, 449-450) ; AD Aude,
4E76/CC52, 1367, [f°1 r°1]. « …qui raddiderunt costonos et preparavunt
Expellere : pousser hors de, mettre dehors (Gaffiot 2000, fossata vallata et costonos de porta Mondebonis usque ad portam
635) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°46 r°2]. « …pro prohicien- Platee… ».
do et expellendo quandam quantitatem lapidum seu petram de peyreria in
qua erat magna habundancia aque… ». Fovea : voir fobia (Glossaire latin).

Exsolvere : payer intégralement (Gaffiot 2000, 643). Fractus : part. de frangere : brisé, morcelé (Gaffiot 2000,
691) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°35 v°5]. « …qui portaverunt
duos fustes magnos ad opus pontis porte Cimbalorum qui erat frac-
tus… ».
F

Faber : forgeron (Niermeyer 1984, 401) ; AD Aude,


Frangere : briser, rompre, fracasser, mettre en pièces
4E76/CC48, 1360, [f°24 v°5]. « … Petro Coste fabro, pro […] 2 rebas-
(Gaffiot 2000, 691) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°78 r°10].
« Item ibidem pro frangendo rupem… ».
seriis preparandis pro dictis operibus… ».

Famulus : 1. serviteur (Gaffiot 2000, 659) ; AD Aude, Frumentum : blé en grain, grains (Gaffiot 2000, 697).
4E76/CC56, 1381, [f°26 v°5]. « …et de quibus dominus episcopus Sancti
Fundamentum : fondement, fondation, base, support
Papuli misit unum famulum suum dominis consulibus quod fuissent avi-
(Gaffiot 2000, 701) ; AD Aude, 4E76/AA1, [f°67v°-69r°], acte
sati... ». 2. serviteur : compagnon, apprenti ou manœuvre
XXIIII, 26 septembre 1362, « ….dictam clausuram et fortalicium perfici
sous les ordres d’un maître (= manobra, servitor) (Bernardi
et repparari propter inperfecta et insufficiencia fundamenta dictarum
1995, 447) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°30 r°2]. « Item per-
clausurarum que pro maiori parte ruerunt seu minantur ruinam ».
solvit magistro Dominico Guastonis cum suibus famulis qui diruerunt
dentillos illius parietis... ». Furnarius, furnerius : voir fornier (Glossaire occitan).
Fenum : foin : herbe fauchée et séchée (Gaffiot 2000, Furnus : four (Gaffiot 2000, 703).
666) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°3 v°2]. « ...8 quintalia feni et
quindecim quintalia sparonum pro tortisando guacillos portus Astrate...». Fusolus, fusillus, fusellus : de fusus : 1. fuseau, pivot
(Niermeyer 1984, 458). Pivot extrémité amincie (ou pièce
Fimus, fimum : fumier, boue, fange (Gaffiot 2000, 674) ;
rapportée à l’extrémité) d’un arbre tournant vertical. Axe,
AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°32 v°5]. « …qui dicta die extinxerunt et
crapaudine, palier, tourillon (Robert 1982, 1444).
amortarunt ignem appositum per aliquos in fimo…».
2. écrou ? Axe autour duquel pivote le pont-levis ? ; AD
Firmare, affirmare : faire ou rendre ferme, solide (Gaffiot Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°121 r°6]. « …pro uno stant magno
2000, 676) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°76 v°3]. « Item fuerunt quem tradi fecerunt magistro Petro Robberti in restitutionem alterius ma-
empti una libra et media cavillarum a B. Goza pro firmando dictum am- gni stant ab eodem magistro Petro receptis ad opus fuzelli pontis porte
banamentum… ». Narbonesie... ». Voir fusel. Voir scorva (Glossaire occitan).

Florenus : florin, monnaie d’or frappée à Florence à partir


de 1252 (Niermeyer 1984, 437).
G
Fobia, fovia, fovea : excavation, trou, fosse (Gaffiot 2000,
690) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°37 v°6]. « ….qui steterunt Gallicus : français ; gallicus magister : maître français
ad curandum caxam seu foveam pontis porte Cimbalorum… » ; (Mortet, Deschamps 1995, 1034) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-
[f°86 r°2]. « …ad ponendum terram in quadam fobia qui erat retro 1360, [f°5 v°7]. « …Robineto Fabro gallico pro 25 libris cavilharum fer-
juponerium… ». ri ab ipso receptis ad opus guacillorum…». ; Ibid., 4E76/CC49, 1363-
1364, [f°87 r°2]. « …magistro Johanni Pincardi, guallico pro faciendo
Fons : fontaine (Gaffiot 2000, 685). duos canones…».

Foramen : trou, ouverture (Gaffiot 2000, 685) ; AD Aude, Galochia, galocha : synonyme de galucho ? petite levée
4E76/CC53, 1372, [f°72 r°3]. « …ad claudendum foramen dicte parietis de terre élevée dans un pré pour la conduite des eaux
et claudendum de palis… ». (Mistral 1878, vol. 2, 15). Rigole d’évacuation des eaux
pluviales courant dans le sens de la rue ou percée dans la
Forestarius, forasterius : forestier, régisseur d’une forêt
base en pierre de la paret ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°190
royale ou seigneuriale (Niermeyer 1984, 443) ; AD Aude,
r°3]. « …pro curando galochia portus Bordarum qui erant engorguatis
4E76/CC48, 1361-1362, [f°103 r°8]. « …quas solvisse dixit cuidam
occasione undationis aquarum… » ; Ibid., 4E76/CC53, 1372, [f°74 r°3].
forestario pro quatuor fustibus emptis ad opus pontis de Baffa… ».
« …peyreriis, qui dicta die steterunt ad faciendum […] duo galochia
Fortuna : fortune, sort, hasard (Gaffiot 2000, 689) ; AD petre in dicta cavalha fundamenti dicte parietis pro ponendo et asetiando
Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°116 v°1]. « …pro ajustando tegulum circum ibi parietem novum… » . Voir galveg, galueg (Glossaire occi-
circa ambanamenta qui cetiderat propter fortunam ventis altani… ». tan).

259
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Glavius, glavium, glavia, glavea : lance, glaive Insequor : venir immédiatement après, suivre (Gaffiot
(Niermeyer 1984, 469-470) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°142 2000, 837) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°95 v°4]. « Item
r°6]. « …pro quodam glavio quo portabatur penuncellus dicti loci qui fuit quatuor faxeriis qui portavant duodecim trossas de fornelha de borda de
fractus in scaramussa… ». dona Planas intus portam Mondebonis ne insequi posset dampnum…».

Gradarium, graderium : escalier (Bernardi 1995, 449) ; Intimare : 1. mettre ou apporter dans (Gaffiot 2000, 857).
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°75 r°1]. « pro faciendi gradarius sive 2. annoncer, publier, faire connaître (Ibid.).
scalis in dicto cadafalco super hospicium Bertrandi Olibe… ».
Intrudare : forme de introducere ? conduire dans, amener
dans, introduire (Gaffiot 2000, 859) ; AD Aude, 4E76/CC48,
1361-1362, [f°88 r°4]. « Item R. Pelagalli, G. Audiberti fusteriis qui po-
H
suerant seu intruderant octo fustes intus portum de Got Ferran…».
Habitare : habiter (Gaffiot 2000, 737).
Inundatio : inondation (Gaffiot 2000, 860).
Honorare, honerar : salarier, payer pour des services ren-
Inundare : inonder, remplir (Gaffiot 2000, 860) ; AD Aude,
dus (Niermeyer 1984, 498) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°31
4E76/CC48, 1359, [f°9 r°1]. « Item Johanni Martini qui inundavit quod-
r°5]. « Item conduxit ex alia parte ad extrahendum petram et terram a dic-
dam stillicidium juxta portam de Got Feran… ».
to vallo viginti mulieres […] et quinque homines ad honerandum dictas
mulieres… ».

Hospitium, hospicium : logement, gîte (Gaffiot 2000, J


761) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°10 r°1]. « …retro hospicium do-
mini Petri Raynardi… ». Janua : porte d’entrée (Gaffiot 2000, 877) ; AD Aude,
3E5205, Minutes de J. Batalhe, notaire à Fanjeaux, 1410, [f°7 v°1]. « Item
Hostium, ostium : 1. porte (Nicolas 2005, 318). 2. volet quod habeat de amplitudine ante januam dicti hospicii… ».
(Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°2 v°5]. « …fecerunt fieri hos-
tiam in muri qui est supra portam dictam Valincii...». Juponerius : fabriquant de jupons. Qui facit jupones. (Du
Cange 1840-1850, t. 3, 927, col. 1). Le jupo peut être un
pourpoint ou une cotte rembourée ou ferrée pour la guerre ;
I AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°56 v°5]. « …pro portando 16 pecias fus-
te de pariete de la Strada ad ambanamenta retro juponerium… ».
Ignotus : inconnu (Gaffiot 2000, 774) ; AD Aude, 4E76/CC54,
1373, [f°21 v°7]. « …erat occupatus et captus per certas gentes armorum
sibi ignotas… ».
L
Impedire, inpedire : entraver, embarrasser, empêcher
(Gaffiot 2000, 785) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°75 r°2]. « …ad Labare : menacer ruine, être ébranlé (Gaffiot 2000, 888) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°82 r°7]. « …pro una fila sex can-
faciendum palum seu dresandum in dicto foramen dicte parietis et ponen-
narum que fuit posita in palo de retro hospicium magistri B. Servici cum
dum magis longe dicte parietis incepte ut non impediret parederiis... ».
palum labaretur...».
Imperfectus, inperfectus : imparfait, incomplet, inachevé
(Gaffiot 2000, 787) ; AD Aude, 4E76/AA1, [f°67v°-69r°], acte Lamina : mince pièce (métal, bois, laine), feuille, plaque,
XXIIII, 26 septembre 1362, « et fortalicium perfici et repparari propter lame, morceau, lingot (Gaffiot 2000, 894).
inperfecta et insufficiencia fundamenta…».
Lapis : pierre à bâtir (Bernardi 1995, 451) ; AD Aude,
Impositio : imposition (Gaffiot 2000, 791). 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 v°1]. « … ad portandum magno lapides
in dictis agueriis... ».
Infirmitas : faiblesse, maladie, infirmité (Gaffiot 2000,
823) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°156 v°3]. « Item cuidam vocato Lapsus : action de glisser, chute (Gaffiot 2000, 898) ; AD
Ansorgio qui stetit in dicto opere et non potuit perficere opus per totam Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°75 v°5]. « …pro duobus fustibus ab eo-
diem propter infirmitatem quam passus fuit... ». dem emptis qui fuerunt positi in portu Astrate post lapsum parietum… ».

Infirmus : faible, malade (Gaffiot 2000, 823) ; AD Aude, Latrunculus : soldat mercenaire ; brigand, voleur (Gaffiot
4E76/CC49, 1363-1364, [f°165 v°3]. « …G. Amelii et G. Saurini qui ste- 2000, 902) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°27 v°4]. «…quando la-
tit cum eodem que G. Gaytas erat infirmus… ». trunculi concremare fecerunt molendina Ville Nove... ».

Innuor : de innuere : indiquer ? (Gaffiot 2000, 833). Dans Latus : côté (Gaffiot 2000, 902) ; AC Montréal, 1D2, 1461, [f°23
le sens de « indicateur d’itinéraire » ? ; AD Aude, 4E76/CC48, r°1]. « …de bons bardeto et sufficienti ita in medio parietis situti in late-
1361, [f°99 r°8]. « …Petro de Plano Villario innuori de Podio Stuirano ribus et prope… ».
pro 800 tegulis… ».
Ligare : lier, relier, attacher, assembler (Gaffiot 2000,
Inquantus, incantus : vente aux enchères (Niermeyer 920) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381 ; [f°45 v°3]. « ...pro garnimento
1984, 541) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°121 r°1]. « …pro 12 croquorum balhistarum ville quos fecerunt eidem reparare et
uno poste de noguerio empta ad inquantum ad opus dicti pontis ». ligare... ».

260
GLOSSAIRE LATIN

Lignum : bois (Gaffiot 2000, 919) ; AC Montréal, 1D2, 1461, Minare : menacer (Gaffiot 2000, 990) ; AD Aude, 4E76/CC56,
[f°23 r°1]. « …providebunt de lignis necessariis pro faciendo statgum 1382, [f°104 r°2]. « ...quod Britones seu gentium armorum minabant lo-
murorum… ». cum Castri Novi...».

Localis : emplacement occupé par des bâtiments ou desti- Minus : moins, moins que (Gaffiot 2000, 990).
né à être bâti (Niermeyer 1984, 617) ; AD Aude, 4E76/CC49,
1363, [f°92 r°4]. « …pro 19 corondis receptis de locale sui filii…». Modicus : qui est dans la mesure, modéré (Gaffiot 2000,
997) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°120 r°7]. « ...pro 18 l.ca-
Locata : petite parcelle non cultivée (Maguer 2003, 594) ; vilharum modicarum sive clavorum modicorum... ».
AD Aude, 3E5205, Minutes de J. Batalhe, notaire à Fanjeaux, 1410, [f°7
v°1]. « …quandam domum stita infra fortalicium dicti loci Fanujovis cum
Modius : mesure de capacité servant surtout pour les
quadam locata sibi contigua ante constructionem dicti fortalicii… ».
grains équivalente à 16 setiers (Gaffiot 2000, 997).

Locus : lieu, endroit, place (Gaffiot 2000, 927). Moenia : murailles, murs, remparts, fortifications, encein-
te (Gaffiot 2000, 999).
Lupus : loup (Gaffiot 2000, 937).
Monere : avertir, donner des avertissements (Gaffiot 2000,
Lutum : 1. boue, limon, fange, vase (Gaffiot 2000, 938- 1002) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°76 v°2]. « ...ambana-
939) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°78 v°11 bis]. « Item etiam mentum quod est ante forum moneretur et minaretur ruinam dicti domini
cum in vallo circa barbacanam porte Montis Lebonis esset necessarium consules fecerunt firmare dictum ambanamentum… ».
operari lutum removeri et rupem rumpi » ; Ibid., 4E76/CC49, 1363,
Morterium : mortier composé d’un mélange de chaux et
[f°117 v°4]. « …Johannem Fabri et Petro Martini qui abstraxerant tres
de sable gâché avec de l’eau (Bernardi 1995, 454) ; AD
fustes de luto et miserunt eos subtus portam domini Bertholomei
Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°113 v°2]. « …que portaverunt per qua-
Constantini… ». 2. terre de potier, argile (Gaffiot 2000, 938-
tuor dies arenam et morterium in dentellis Fratrum Minorum seu ad re-
939) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°79 r°8]. « …ad portandum
parandum eosdem… ».
tegulas, lutum et morterium pro cohoperiendo cadafalcum…».
Munire : équiper ? garnir ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361,
[f°73 v°3]. « …pro ponendo et muniendo ferrollum in barbacana porte
M Foy… ».

Macellarius : boucher (Gaffiot 2000, 943). Munitus : équipé ? garni ? ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°74
v°1]. « et debuit ibi facere parietem novum bonum et sufficienter suis pro-
Mancipium : esclave (Gaffiot 2000, 954) ; dans certains priis sumptibus et expensis et munita de brugo… » ; Ibid., 4E76/CC49,
cas plutôt « serviteur » ; AD Aude, 4E76/CC54, 1373, [f°18 r°3]. 1364, [f°156 v°1]. « … 200 serviens munitos et armatos de arnesiis
« …cuidam mancipio qui portaverat dominis consulis Castrinovi quas- condecenter pro faciendo seti Alana… ».
dam litteras clausas… ». Voir macip (Glossaire occitan).
Mutare : déplacer ; changer ; échanger, remplacer par
Mandatum : mandat ; commission, charge (Gaffiot 2000, échange ; int. : se changer, changer, différer (Gaffiot 2000,
954) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°59 r°1]. « …Johanni Maurini et 1018) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°75 r°7]. « …cum maxima quan-
Johanni Redorte qui de mandato dictorum dominorum consulum acces- titas lapidum esset in vallo ville ante porta Foy et videretur expediens dic-
serunt ad locum de Villanova et apud Aggassenchis per querendo et pro tos lapides mutari versus magnum cadafalcum ad finem cum eadem ibi
emendo petras dictarum bombardarum… ». operaretur… ».

Mandatus : part. de mando (Gaffiot 2000, 954) ; fondé de


pouvoir (Niermeyer 1984, 635).
N
Mercator : marchand, commerçant (Gaffiot 2000, 979) ;
Nemus : forêt, bois (lieu) (Gaffiot 2000, 1037).
AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°8 v°4]. « …a Petro Robberti et
Petro Carcanerii mercatores foreste de Capra Mortua… ». Nepos : petit fils (Gaffiot 2000, 1038).
Mercerius, mercerus, merciarius : mercier (Niermeyer Nervus : tendon, ligament, nerf ; lien, cordes de boyaux,
1984, 672) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°26 r°1]. « …Vitali lanière de cuir (Gaffiot 2000, 1039) ; AD Aude, 4E76/CC56,
Laygue, mercerio, pro 12 singlos… ». 1381, [f°45 v°4]. « …pro 6 nervis sive virgas bonorum pro ligando et af-
firmando dictos croquos… ».
Meridies : 1. midi (Gaffiot 2000, 981) ; AD Aude, 4E76/CC48,
1360-1361, [f°78 v°9]. « Item et ibidem fuerunt operati abstrahendo et fo- Neudar, nodare : nouer, lier, fixer par un noeud (Gaffiot
re eiciendo arenam usque ad meridiem et pus… ». 2. sud (Gaffiot 2000, 1047) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°91 v°4]. « …pro filan-
2000, 981). 3. moitié (Ibid.). do seu neudo quatuor libras canapis ad opus faciendi cordas balista-
rum… ».
Messagarius, messagerius : 1. messager (Niermeyer
1984, 674) ; AD Aude, 4E76/CC54, 1374, [f°34 v°3]. « …cuidam mes- Nuntius, nuncius : messager, courrier (Gaffiot 2000,
sagerio domini de Salis qui portaverat literas clausas dominis consu- 1061) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°93 r°12]. « Item cuidam
lis… ». Voir messatgier, mesatgier (Glossaire occitan). nuncio qui portavit corondas in corseriis… ».

261
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Nuper : naguère, récemment (Gaffiot 2000, 1061). rosi que menit P. de Scorbiera que portaba le peno… ». 2. garde man-
ger (Gaffiot 2000, 1153).
Nux : noix, pièce de l’arbalète (Nicolas 2005, 323).
Perficere : faire complètement, achever (Gaffiot 2000,
1161).
O Permanere : demeurer jusqu’au bout, rester de façon per-
Obviare : aller au devant, barrer le passage, s’opposer à sistante, rester (Gaffiot 2000, 1167).
(Gaffiot 2000, 1078). Perquire : rechercher avec soin (Gaffiot 2000, 1173) ; AD
Operare : travailler, s’occuper à (Gaffiot 2000, 1096). Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°2]. « pro cavando cum pix et cum ra-
basseriis pro perquirendo le ferm pede turris porte Strate… ».
Operarius, operator : 1. ouvrier (Bernardi 1995, 455) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°72 v°2]. « ...Petrus Danini operarius Pertica, perdiqua : 1. perche (mesure de longueur)
emit 6 paneria pro portando terram… » 2. tierce personne chargée de sur- (Niermeyer 1984, 793). 2. pièce de bois, perche (Bernardi
veiller les travaux (Bernardi 1995, 455). 1995, 456) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°53 r°5]. « …pro una li-
bra cavillarum pro cavillando perdiquam bade castri quam recepi fece-
Operatorium : 1. atelier (Niermeyer 1984, 740). 2. bu- runt per Bertrandum Alberti qui moratur in bada… » . 3. flèche du
reau, étude (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°42 v°2]. « …qui pont-levis ? ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°73 r°2]. « Item
stetit ad recubriendum et encaucinandum operatoria dictorum domino- fuerunt empte duo coronde a B. Embrini quarum una fuit posita in capite
rum consulum… ». dicti pontis et alia in capite perticarum cum quibus levatur… ». Voir
perga (Glossaire occitan).
Ordinare : ordonner (Gaffiot 2000, 1104-1105) ; AD Aude,
4E76/CC53, 1372, [f°72 r°3]. « …dicti domini consules voluerunt et or- Perticare : mesurer avec la perche ; AD Aude, 4E76/CC48,
dinavunt quod ibi clauderetur de palo subito…». 1361, [f°114 v°2]. « Pos[t]que die sexta decembris Michael Bartas dixit
perticasse parietes porte Mondebonis… ». Voir pergar (Glossaire
occitan).
P
Perticator, perdicator : celui qui mesure avec la perche,
Pactum : convention, pacte, traité (Gaffiot 2000, 1116). arpenteur ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°3].
« …Michael Bartas perticator dicti castri dixit perticassere parietes per
Panarium, panerium : corbeille à pain (Gaffiot 2000, prenomintatos homines factas…». À Castelnaudary, ce terme pa-
1123). À Castelnaudary, ce terme a le sens de « panier » ou raît être synonyme de pariator, Michel Bartas étant en ef-
de « hotte » ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°72 v°2]. fet le seul arpenteur connu de la ville : AD Aude, 4E76/CC49,
« …Petrus Danini operarius emit 6 paneria pro portando terram…». 1363, [f°24 r°4]. « …pro 126 brachiatis parietis qualibet brachiata
10 palmorum que fuerunt mensuratas per Michaelem Bartas pariato-
Parare : préparer, apprêter, arranger (Gaffiot 2000, 1132) ;
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°81 r°4]. « …pro cavando et paran- ris...». Voir pertica, perdiqua (Glossaire latin).
do solerii ubi sola pontis poneretur… ».
Pertractus : attirail, matériaux ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362
Pariator : voir perticator. [f°114 r°3]. « Item quatuor hominibus qui juraverunt portare fustam in por-
ta de Got Feran per quam intraretur pertractus in dicto opere inter
Pavesius : pavois, grand bouclier utilisé par les arbalétriers omnes...». Voir pertrayt, pertrait, pertrach (Glossaire occitan).
(Nicolas 2005, 324) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°141 v°3].
« ….pro una corda sive dralha pro ligando pavesios et balhistas supra Petra : pierre (Bernardi 1995, 456) ; AD Aude, 4E76/CC48,
dictum animalum… ». 1361-1362, [f°111 r°7]. « Item Stephano Baravi pro trahendo petram de
vallis ante mercadal… ».
Pes : pied (Gaffiot 2000, 1182). L’expression « pied de la
paret » désigne le solin de cette dernière (à pierres et chaux Peyreria, peireria : carrière de pierres ; AD Aude, 4E76/CC52,
à Castelnaudary ; en parement de briques cuites sur un 1368, [f°16 r°1]. « …qui steterunt ad peyreriam vallatorum Bastite pro
noyau de terre crue à Toulouse) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, faciendo descuebre dicte peyrerie... ».
[f°25 r°5]. « …pro quinque sesteriis caucis emptis per Petrum Negues
custodi ad opus muri pede parietis de la Strada… ». Pignus : 1. gage, nantissement (Gaffiot 2000, 1194-1195).
2. garantie (Ibid.).
Pelegrinus, peregrinus : de l’étranger, étranger, pérégrin
(Gaffiot 2000, 1159) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°3 v°1]. Platea : place, lieu, espace (Niermeyer 1984, 806).
« Item pelegrino flequie pro 30 panibus… ».
Podium : colline, montagne (Niermeyer 1984, 810) ; AD
Penes : prép. avec accusatif : en la possession de, entre les Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°40 r°3]. « …pro faciendo badam in po-
mains de (Gaffiot 2000, 1151) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, dio de Montmer… ».
[f°42 r°1]. « …pro quatuor libris cum dimidia ferri pro liando canonem
quod est penes G. Torrini… ». Plumbata : balle de plomb (Gaffiot 2000, 1206). À
Castelnaudary, il s’agit d’une sorte de mitraille, quelque-
Penus, penum : 1. provisions de bouche (Gaffiot 2000, fois garnie de clous, lancée par les canons ; AD Aude,
1153) ; AD Aude, 4E76/CC71, 1423, [f°24 v°3]. « …per le loguier del 4E76/CC48, 1360-1361, [f°72 r°5]. « …tres cartayrones medius 1 l.plum-

262
GLOSSAIRE LATIN

bi pro faciendis plumbatas pro eiciendo cum canonibus… » ; [f°72 r°6]. Q


« …100 clavi pro ponendo in dictis plumbatas a magistro B. de Podio
quod plumbum et clavi fuerunt traditi Johanni Fabri de Sancto Martino Quadratus : carré (Gaffiot 2000, 1304) ; AD Haute-Garonne,
pro faciendo dictas plumbatas… ». 101H598, 2MI1106, acte 784, 1368, Castelginest. « …exceptis tamen de-
cem brachiatas quadrata ex illis quinquaginta quas dictus dominus abbas
Plumbeus : plomb (Gaffiot 2000, 1206) ; AD Aude, faciat et fieri faciat suis propriis sumptibus et expensis in dicto reduc-
4E76/CC48, 1359-1360, [f°23 r°4]. « Item pro plumbo pro uno guoffone to… ».
posito in porta Mondebonis ».
Quadrigae, cadrigia : attelage à quatre (Gaffiot 2000,
Ponderare : peser (Gaffiot 2000, 1214) ; AD Aude,
1304) ; AD Aude 4E76/CC54, 1373, [f°11 r°4]. « …pro recuperando
4E76/CC48, 1360-1361, [f°81 v°5]. « Item a magistro B. de Podio due
animalia qui fuerant recepta a diversis gentis Castrinovi pro tirando ca-
longe caville ponderaverunt 3 ?... ».
drigias servientorum qui ibant ad guerram pro domino duce
Portus : 1. port (Gaffiot 2000, 1219). À Castelnaudary ce Andegavensis… ».
terme désigne les différents quartiers de la ville (port des
Quaerere, querere : chercher (Gaffiot 2000, 1306) ; AD
Bordes, port de la Baffe, etc.). 2. être receveur (Ibid.).
Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°59 r°1]. « …accesserunt ad locum de
Potare : boire, s’abreuver (Gaffiot 2000, 1225). Villanova et apud Aggassenchis per querendo et pro emendo petras dic-
tarum bombardarum… ».
Potus : boisson, breuvage (Gaffiot 2000, 1225) ; AD Aude,
4E76/CC49, 1363, [f°32 v°5]. « …et dederunt tam in servici potum ho- Quercus, quer : chêne (Gaffiot 2000, 1313).
minibus qui faciebant dictam parietem…».
Questa, quista : quête, taille, sorte de redevance (Gaffiot
Postrare : démolir ? ; AD Aude, 4E206/DD1, 29 mai 1460, Limoux. 2000, 312) ; AD Aude, 4E76/CC54, 1373, [f°19 v°7]. « …magistro
«…et valeant dictum murum ruynosum in terram postrare et demolire ad G. Gilati ac deduci de suis questis pro quadam clavatura per ipsum posi-
fines refficiendi eius caussole et murum de novo… ». ta ad portam camere arnesii porte Montis Lebonis… ».

Prandium : déjeuner, repas (Gaffiot 2000, 1249) ; AD Aude,


4E76/CC48, 1359-1360, [f°14 v°8]. « …17 hominibus qui operati fuerunt
in operibus clausurarum usque prandium… ». R

Profunditas : profondeur, étendue, grandeur (Gaffiot Radere, raddere : raser, raboter (Gaffiot 2000, 1328) ; AD
2000, 1265) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°75 r°2]. « ….et Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°88 r°7]. « …qui per duos dies fuerunt
quadam profunditas que erat a parte circii juxta pilarum lapidum clau- quilibet ad raddendum costones de Baffa… ».
deretur... ».
Ratio : raison (Gaffiot 2000, 1331, 1333).
Proditionaliter : de proditio : dénonciation, trahison
(Gaffiot 2000, 1261). D’une manière traître, par trahison ; Recolligere : rassembler, réunir (Gaffiot 2000, 1339).
AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°47 r°7]. « …quod duo loca judicaturia
Recus, reccus, rechus : ruisseau. béal ? canalisation ? (Du
Lauragesis proditionaliter capi debebant per Anglicos quia sit fuerat
concessum per duos latruncules captis in vicaria Tholose et quod locus
Cange 1840-1850, t. 5, 611, col. 3). Fluvii ramus, alveus, rivus,
canalis. An. 1331 : possent facere alveum seu rechum ad deducendum dic-
Castrinovi fideliter de die et de nocte custodiretur… ».
tam aquam… pro qua quidem aqua sive usu ejusdem ducenda per alveum,
Projicere, prohicere : jeter en avant, projeter, jeter au de- alveos, rechum seu rechos usque ad castrum de Stagello, …ad rigandum
hors, expulser (Gaffiot 2000, 1267) ; AD Aude, 4E76/CC48, suas possessiones, terras… possint reficere meatus, recos, aquaeductus et
1359-1360, [f°32 v°3]. « …Arnaudo Mancipii pro duobus diebus quibus transductus ; AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°36 r°4]. « …Johanni
fuit ad prohiciendum lapides dentilorum dirutorum… ». Maurini et Arnaudo de Payrano, peyreriis, qui dicta die steterunt ad sus-
peyrandum et preparandum barbacanam porte de Astrata cum esset in
Puer : 1. enfant. 2. jeune homme (Gaffiot 2000, 1290). ruina et faciendum cavalem de petra seu recum in saltu aque galochii
Pulvis : poudre composée de soufre, de salpêtre et de char- dicte barbacane… ».
bon de bois (Nicolas 2005, 327) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381,
Refere : restituer, remettre, déposer (Gaffiot 2000, 1347) ;
[f°121 v°1]. « …G. de Podio mercerio pro 7 l. pulverum quas dicti do-
AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°160 v°1]. « Item plus pro quatuor ca-
mini consules fieri fecerunt tam pro bombardas quam pro canonibus… ».
villas ferri arguis ponderantis circa octo libris prout Petrus Dayde retu-
Punctum : fer de pioche ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°99 r°6]. lilt ad opus canonorum… ».
« Item pro ducentis punctis picarum apunctatarum pro extrahendo pe-
tram ». Voir punta, puncta, poncha (Glossaire occitan).
Reficere : refaire, réparer, restaurer (Gaffiot 2000, 1348) ;
AD Aude, 4E76/CC48, [f°32 v°2]. « …pro tribus jornalibus quibus fuit
Puteus, puteum : puits (Gaffiot 2000, 1298). ad reficiendum illos dentillos retro domum Fratrum Minorum...».

Putrefactio : putrefaction (Gaffiot 2000, 1298) ; AD Aude, Regere : diriger, guider, mener, conduire, gouverner
4E206, 29 mai 1460, Limoux. « …et penitus eius caussol sive pes (Gaffiot 2000, 1352, 1353) ; AD Aude, 4E76/CC48, [f°116 v°8].
consumptum et in via cadendi in terram et hoc propter aquas pluviales et « …et prenominatis Ramundo Tocarelli, Guillermo Johannis pro avanta-
putrefactionem… ». gio quia regebant operas... ».

263
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Relatio : relation, narration, récit, rapport sur une affaire Rupes, ruppes : paroi de rocher (Gaffiot 2000, 1392) ; ro-
(Gaffiot 2000, 1354) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°88 v°7]. cher (Bernardi 1995, 459) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362,
« Item pro una tralha de jonc Poncio de Lauraco a trahendum aquas de [f°94 r°7]. « …ad cavandum rupem retro Bertrandum Oliba ubi fuit fac-
puteis castri ad opus tortitiorum ad relationem Johannis Faure…». tus pilarius… ».

Remanere : rester, demeurer (Gaffiot 2000, 1357) ; AD


Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°68 r°3]. « …et positum ubi excubiatores re-
maneant pro faciendo excubias… ». S

Remeare : revenir, retourner (Gaffiot 2000, 1358) ; AD Sabaterius : cordonnier, savetier (Niermeyer 1984, 924).
Aude, 4E76/CC56, 1382, [f°132 r°6]. « …ad recuperandum et ad haben-
dum arnesium a balhisteriis quando remearunt de Curno Barrio… ». Salix : saule ; baguette de saule ou d’osier (Gaffiot 2000,
1402) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°91 r°3]. « …qui steterunt ad
Removere : écarter, éloigner (Gaffiot 2000, 1360) ; ôter, sporguandum salices nause fontis Rosandi pro faciendo sparones ad opus
enlever ; AD Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°26 r°6]. « …removerunt pon- ambanamentorum… ».
tem fuste per ubi abstracta fuit terra vallatorum Astrate… ».
Saltus : passage (Gaffiot 2000, 1404) ; AD Aude, 4E76/CC53,
Renuntiare : renoncer à (Gaffiot 2000, 1361). 1371, [f°36 r°4]. « …et faciendum cavalem de petra seu recum in saltu
aque galochii dicte barbacane… ».
Remedium : remède, expédient (Gaffiot 2000, 1358) ; AD
Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°41 v°3]. « …et quod placeret eidem capita- Sanctus : saint (Gaffiot 2000, 1407) ; AD Aude, 4E76/CC62,
neo quod apponeret remedium… ». 1398, [f°33 v°2]. « …pro perquirendo Bernardum de Lagarda fusterium
et pro sciendo cum ipso si matrasses pontium Cimbolorum et de Bastita
Reperire : retrouver, trouver après recherche (Gaffiot
erant sancti… ».
2000, 1363) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°3].
« …Michael Bartas perticator dicti castri dixit perticassere parietes per Satisfactio : 1. action d’acquitter une dette (Gaffiot 2000,
prenomintatos homines factas et operatas et reperisse in dictis parietibus 1414). 2. satisfaction, réparation (Ibid.) ; AD Aude,
quindecim brachiatas et mediam…». 4E76/CC48, 1360-1361, [f°77 r°10]. « Item Bernardo Vermelh in satis-
factionem fuste ab eodem recepte... ».
Reponere : replacer, mettre de côté, mettre de réserve, dé-
poser (Gaffiot 2000, 1365) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°12 Saumerius : 1. bête de somme (Alibert 1966, 627 : sau-
v°4]. « …tribus bastonibus qui dicta die reposuerunt fustam dicti gaycil-
mier) ; AD Aude, 4E76/EE4, 1400. « … et inter alia indigemus de sau-
li in hospiciio G. Barre... ».
meriis et animalibus dicti loci cotidie pro operando lapides tegules fustes
Ripa, rippa : paroi, côte escarpée (Niermeyer 1984, 920). et alia sementa necessaria ad dictam clausuram… ». 2. poutre. Pièce
Synonyme d’ameria ? ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°107 r°6]. de charpente utilisée dans les plafonds « à la française »
« …pro ampliando et augmentando valla et pro aptando et reparando (Bernardi 1995, 459) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°97 r°2].
amerias seu rippas vallorum de la Baffa… ». « Item pro quodam saumerio longitudinis quatuor cannarum et medie
quod fuit portum anno preterito in turre rotunda de la Strada… ».
Riperia, reperia : rive, bord d’un fleuve (Niermeyer 1984,
920) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, [f°99 v°7]. « …pro duobus jornali- Signum : 1. signal (Gaffiot 2000, 1461) ; AD Aude,
bus dictarum duarum mularum ad caregandum fenum de riperia 4E76/CC56, 1381, [f°77 v°1]. « …quod in casu in quo alias gentes ar-
Paythelatorum… » ; [f°107 v°8]. « Item Johanni Pueg quia portaverat de- morum transiebant de nocte vel de die circa dicta loca quod facerent ali-
cem trosas de feno de reperia Fistuli… ». Peut également avoir le qua signa… ». 2. marque, signe, empreinte (Ibid.) ; AD Aude,
sens de « produit d’une rivière, arbres qui croissent sur ses 4E76/CC62, 1398, [f°110 r°4]. « …pro quadam poste pro faciendo signa
bords, bois qu’on y coupe » (Mistral 1878, vol. 2, 788 : ri- sive molles quomodo inceperant fundamentum barbecane et pezeguot dic-
beirage) et plus généralement celui de « terres adjacentes à te turris… ».
la rivière ».
Sextarius, sesterius : 1. sixième partie, un sixième
Roncinus, ronsinus, ronzinus, rossinus, runcinus : rous- (Gaffiot 2000, 1455). 2. setier. Contenu d’un setier (Ibid.).
sin (Niermeyer 1984, 924) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398, [f°4 Terre que l’on peut ensemencer avec un setier de blé (120
r°4]. « …qui dicta die misit suum nuncium cum duobus suis roncinis ver- litres environ) ou seterée (30 ares environ) (Alibert 1966,
sus loca de Mazeriis et de Monto Alto… ». 634 : sestairada). La seterée est un espace de terre sur le-
quel est semé un setier de blé soit environ 80 livres (Cayla
Rotare : mouvoir circulairement, faire tourner (Gaffiot
1964, 649 : seterée). Ancienne mesure de capacité pour les
2000, 1388) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°81 r°6]. « Item tres pe-
grains (entre 150 et 300 litres environs) ; AD Aude,
cias fusti 21 palmorum in quibus stat taulatum et pons volvitur sive
4E76/CC48, 1361-1362, [f°92 r°6]. « …pro decem sextariis calcis conpu-
rotat… ».
tatis pro 7 sesteriis... ». 3. ancienne mesure pour les liquides va-
Rotundus : rond, arrondi (Gaffiot 2000, 1389) ; AD Aude, lant huit pintes (une pinte = 0,93 litre) (Robert 1982, 1808).
4E76/CC49, 1363, [f°97 r°2]. « …in turre rotunda de la Strada… ».
Scalarius, scalerius : 1. escalier (Bernardi 1995, 459) ; AD
Rumpere : rompre, briser, casser (Gaffiot 2000, 1392) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°75 r°2]. « …pro 40 locas scalerii ad opus
Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°32 r°8]. « …Fabro de Podio, Ramundo scalerias porte de Barrio ». 2. pont volant qui s’abbatait sur un
Argelerii qui steterunt ad rumpendum ruppem castri… ». rempart ; AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°52 r°7]. « …pro viginti qua-

264
GLOSSAIRE LATIN

tuor scalonibus sive loquis ab ipso emptis pro faciendo et preparando Stillicidium : égout, canalisation (Bernardi 1995, 461) ;
pontem sive scalerium quod est juxta portam de Got Feran... ». AD Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 r°3]. « …Petro Bocas, Petro
Bocelli, Bernardo Brezeyti qui fecerunt valla stillicidia juxta clausuris ne
Scindere : tailler, fendre (Bernardi 1995, 459) ; AD Aude, diruerentur propter aquas...».
4E76/CC48, 1359, [f°7 v°6]. « …pro uno jornali ad scindendum
sparonem pro operibus guacillorum...». Stimbalum : de cymbalum ? cymbale (Gaffiot 2000, 466).
Nom d’une porte de Castelnaudary (également, porta del
Scobolanus : campanier (Du Cange 1840-1850, t. 6, 120,
Sens ou des Cloches) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°92
col. 1) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°73 v°3]. « …Germano Olibe
r°1]. « Item dicto Guillermo quia reparaverat clavaturam porte
et P. Remegii scobolano… ».
Stimbalorum... ».
Scutum : écu (monnaie) (Niermeyer 1984, 949, 950) ; AD
Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°118 r°2]. « pro qualibet brachiata duos
Subito : subitement, soudain, improvisé (Gaffiot 2000,
scutos antiquos ».
1515) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°72 r°3]. « …quod ibi claudere-
tur de palo subito… ».
Servitium, servicium : service, corvée (Niermeyer 1984,
964) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°32 v°5]. « …dederunt tam in ser- Succursus : secours, aide, support (Niermeyer, 1984,
vici potum hominibus qui faciebant dictam parietem... ». 1002) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°104 r°2]. « …quod Britones seu
gentium armorum minabant locum Castri Novi et quod se faciebant fortis
Simul : 1. dans le même temps, ensemble (Gaffiot 2000, locum Castrinovi capere et assaltare quarum mitterent sucurssum si ne-
1464) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°77 v°2]. « Item Johanni cesse fuerit… ».
Baronate pro eodem debito quod est simul cum G. Carammanhi… ».
2. en même temps que quelqu’un, que quelque chose Sulphur, sulfur : soufre (Gaffiot 2000, 1534) ; AD Aude,
(Gaffiot 2000, 1464). 4E76/CC48, 1360-1361, [f°73 v°2]. « …a G. de Paulo salpetra et sulphur
unum pro faciendis pulveribus pro canonibus… ».
Societas : bande armée, compagnie ; AD Aude, 4E76/CC49,
1363, [f°46 v°1]. « …super tractatu domini Seguini de Badaffol et alio-
rum societatis quod exirent patriam… ».
T
Socius : 1. compagnon (Gaffiot 2000, 1472) ; AD Aude,
4E76/CC53, 1371, [f°35 v°6]. « …Petro de Bosco alias Labat et eius so-
Tabula : 1. planche, ais (Gaffiot 2000, 1562). 2. table des
cio vocato Justaret servientis regiis Tholose... ». 2. associé (Bernardi
enchères (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°142 r°1]. « …pro
1995, 460) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359, [f°16 v°7]. « …Dominico ponendo tabulas Foy intus fortalicium ad finem ne comburarentur per
Gastonis et eius sociis pro pigando quandam parietem existentis in clau- gentes armorum domini Manandi qui nocte dicte diey se allogiaverunt in
suris retro hospicium Petri Saulonis… ». barrio... ».

Solerius : étage (Bernardi 1995, 460) ; AD Aude, 4E76/CC48, Tam : tant, autant, si, à ce degré (Gaffiot 2000, 1565).
1359, [f°8 r°6]. « …pro alio guaycillo quod fecerunt ibidem cum duobus
Taxatio : 1. estimation, appréciation (Gaffiot 2000, 1572).
soleriis… » ; Ibid., 4E76/CC73, 1430, [f°13 v°]. Voir solier
2. obligation, engagement. 3. cotisation (Niermeryer 1984,
(Glossaire occitan).
1014).
Spallaria : Epaule, épaulement (Bernardi 1995, 460) ; AD
Tectum : toit, toiture de maison (Gaffiot 2000, 1573) ; AD
Aude, 4E76/CC49, 1364, [f°173 v°4]. « …magistro Johannem Galigo,
Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°80 r°4]. « …pro cohoperiendo ac bar-
peyrerio, pro faciendo spallaria porte Mercadalis de petra… ». Voir es-
dam tectum Montis Lebonis…».
palhiera, spalliera, paliera (Glossaire occitan).
Spinquala : espingale, sorte de baliste (Lévy 1909, 172) ; Tegula, tegulum : tuile (Gaffiot 2000, 1574) ; AD Aude,
4E76/CC48, 1361-1362, [f°116 r°9]. « …pro duobus milheriis de tegulis
AD Aude, 4E76/CC48/1, 1359-1360, [f°6 v°2]. « …portaverunt spinqua-
lam supra portam de Got Feran…». Voir espingala, espingola emptis ad opus dictorum embanorum et embanorum porte
(Glossaire occitan). Mondebonis... » ; Ibid., 4E76/CC62, 1398, [f°87 r°4]. « ...pro dessenden-
do tegulum, latam, cabirones de dicta barbacana ad terram cum esset in
Stabilitas : 1. stabilité, solidité (Gaffiot 2000, 1494). 2. ca- magno periculo cadendi… ».
ractère de ce qui est sûr (Ibid.) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381,
[f°29 r°6]. « …et si multum opportebat timere de gentibus armorum cum Tegula plana : brique cuite ; (Wolff 1954, 98, note 238)
dicebatur quod dominus comes Fuxi volebat ponere stabilitas in locis ju- « de tegulis planis et terras lisa ».
dicature Lauragensis… ».
Telonium, teloneum : 1. bureau de péage (Niermeyer
Statgum : échafaudage ; AC Montréal, 1D2, 1461, [f°23 r°1]. 1984, 1015). 2. taxe sur le transport et la vente des mar-
« Item proprii consules providebunt de lignis necessariis pro faciendo chandises (Ibid.). 3. terme général pour désigner l’en-
statgum murorum… ». Voir statga, stagia, estatga, estatja semble des redevances pesant sur le commerce et le trafic
(Glossaire occitan). (Ibid.).

Stagnum, stangnum : étang (Gaffiot 2000, 1494) ; AD Testeria : élément d’une charpente. Pièce de bois placée
Aude, 4E76/CC48, 1359-1360, [f°22 r°8]. « ...de nausa stangni Vinonis entre deux arcs-boutants pour soutenir les conduits d’éva-
pro cledis faciendis pro clausuris ». cuation des eaux de pluie (Cayla 1964, 678 : testière) ; AD

265
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Aude, 4E76/CC52, 1367, [f°39 v°6]. « …pro una sola, una testeria, et Trassator, traçator : carrier, personne qui extrait de la
una coronda… ». pierre ? de trassar, traçar : tirer de la pierre d’une carriè-
re ? (Mistral 1878, vol. 2, 1019 : traça) ; AD Aude, 4E76/CC48,
Textana : tête, sommet, extrémité ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361, 1360-1361, [f°79 v°4]. « …pro frangendo rupem a parte austri porte
[f°115 v°4]. « …pro quinque fustibus quemlibet viginti quatuor palmorum
Montis Lebonis de juxta pontem Johannes Elie Ramundus Redorte tras-
ad opus textanarum dictorum embanorum… ».
satores… ». Voir trasar, trassar (Glossaire occitan).
Tilia, tillium, : tilleul (Gaffiot 2000, 1600) ; AD Aude,
Trencator : personne creusant une tranchée, un fossé ? ;
4E76/CC49, 1363, [f°88 r°1]. « …pro quatuor barris de tillio et pro una
AD Aude, 4E76/CC48, 1360-1361, [f°78 r°11]. « …fuerunt in dicto ope-
barra ferri ad opus canonorum » ; Ibid., 4E76/CC56, 1381, [f°55 r°5].
re 6 homines tres trencatores… ». Voir trencar, trincar et trenca-
« …Johanni de Blanno pro quadam barra de tilhio pro barrando por-
da, trencata (Glossaire occitan).
tanellum dicte porte, pro dicta barra... ».
Trigus ?, trignus ? : sens peu clair ; objet en fer indéter-
Timor : crainte (Gaffiot 2000, 1601) ; AD Aude, 4E76/CC53,
miné ; AD Aude, 4E76/CC48, 1361-1362, [f°107 bis r°5]. « Item
1371, [f°28 r°3]. « …qui dicta die steterunt in turri castri faciendo badam
Johanni Faure a quo emerunt duos triguos fereos ».
propter timorem Anglicorum qui transiverant Garonam et veniebant ut
dicebatur in Lauragesio… ». Turnus, tornus : treuil, tourniquet (Niermeyer 1984,
1033) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1398-1399, [f°47 v°4]. « ...et pro as-
Tina : vas grande ligneum tam levationibus quam conden- sendendo fustam cum quodam turno de pede muris super dictum am-
dis vinis paratum (Du Cange 1840-1850, t. 6, 589, col. 2). banamentum… ».
Tonneau ? ; cuve (Lévy 1909, 364) ; AD Aude, 4E76/CC54,
1373-1374 ; [f°31 v°5]. « …qui portarunt unam tinam ad envanos Baffe
pro faciendo machacollos... ».
U
Tintinabulum : cloche, carillon (Alibert 1966, 661 : tin-
dar, tindonar, tndinar : tinter, produire un son clair, ca- Ulmus : orme, ormeau (Gaffiot 2000, 1649) ; AD Aude,
rillonner) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°39 v°7]. « …ad aptandum 4E76/CC48, 1361-1362, [f°120 v°8]. « Item Johanni Pueg pro uno fuste
differandum et clavellandum tintinabula ecclesie Sancti Petri… ». Nom ulmi ad opus dicti pontis… ».
d’une porte de Castelnaudary, également dénommée « del
Undatio : écume (Gaffiot 2000, 1653) ; AD Aude, 4E76/CC49,
Sen » ou « Stimbala » ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°41 r°3].
1364, [f°190 r°3].. « …pro curando galochia portus Bordarum qui erant
« …Petro Madrieras qui stetit ad operandum in caxa pontis porte
engorguatis occasione undationis aquarum… ».
Tintinabulorum ».
Unde : à l’endroit d’où, d’où (Gaffiot 2000, 1653).
Tonitum, toninum ( ?) : synonyme d’aygueria ? : ruis-
seau d’évacuation des eaux usées et des eaux de pluies ; AD Undecim : onze (Gaffiot 2000, 1653).
Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°44 r°3]. « …qui curavunt ayguerias seu to-
nita parietis retro hospicium juponerii... » ; Ibid., 4E76/CC48, 1360-
1361, [f°75 r°2]. « …cum inundatione aquarum parietes qui sunt de retro
alam essent in periculo ruinandi ordinavunt quod ibi fierent tria forami- V
na pro faciendo tonitz... » ; [f°73 v°6]. « …et fecit toninum sive fora-
Valaderius, vallifactor : 1. celui qui creuse les fossés.
men de novo pro tonino de retro hospicium Bernardi Maurini... ». Voir
2. celui qui est chargé du soin des fossés, de leur entretien,
aguerium, aygueria (Glossaire latin), ayguier, ayguiera
terrassier ; AC Toulouse, CC2334, pièce n° 60, 1459, « Anno retro et
(Glossaire occitan).
die XXIIII mensis martii Petrus Hoyet valaderius patrie Britanie… » ; AC
Trabs : poutre (Gaffiot 2000, 1611). Montréal, 1D2, [f°23 r°1]. « Petro Durandelli valliffactori… ». À
Toulouse, ces personnes possèdent souvent le titre ou la
Tractatus : action de traiter un sujet ; discussion, délibéra- compétence de parediers, et sont d’ailleurs sollicitées en
tion (Gaffiot 2000, 1612) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363, [f°46 tant que telles. Voir valadier, valladier, valadaire
v°1]. « …quandam literam dominorum capitoulorum Tholose su- (Glossaire occitan).
per tractatu domini Seguini de Badaffol et aliorum societatis
quod exirent patriam… ». Vallare : entourer de palissades, de retranchements, forti-
fier, retrancher ; fortifier, défendre, protéger, armer (Gaffiot
Traditus : part. de tradere : « transmettre » oralement ou 2000, 1673).
par écrit (Gaffiot 2000, 1613) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1359-
1360, « Sequitur expense facte per manus Bernardi Guini in operibus Vallifactor : voir valadier.
clausurarum prout in cartello per ipsum super hoc tradito continetur ».
Vallum, vallus : 1. palissade couronnant l’agger. Etablir
Trahere : 1. tirer (Gaffiot 2000, 1615). 2. extraire (Ibid.). une levée de terre et une palissade ; retranchement ; rem-
3. rassembler (Ibid.). part, défense (Gaffiot 2000, 1673). 2. fossés entourant une
maison, un village, une ville (Mortet, Deschamps 1995,
Transire, trancire : traverser, passer (Gaffiot 2000, 1042) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°25 r°6]. « …pro 17 brachiatis
1618) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1371, [f°27 v°3]. « …quod Anglici in et media valli per ipsum facti in clausuris retro domum Fratrum
maxime numero cum armis transiverant Garonam… ». Minorum…» ; [f°31 r°5]. « …ad extrahendum petram et terram a dicto

266
GLOSSAIRE LATIN

vallo… ».3. à Castelnaudary, petite tranchée réalisée pour Vironus : foret, vrille (Bernardi 1995, 463) ; AD Aude,
établir un égout ou une canalisation, creusée près de la ba- 4E76/CC48, 1361-1362, [f°113 v°1]. « Item pro reparando
se de l’enceinte dans le but d’éviter que les eaux de ruis- seu reficiendo unum vironem fractum… ».
sellement n’endommagent la muraille ? ; AD Aude,
Vinum : vin (Gaffiot 2000, 1708).
4E76/CC48, 1359-1360, [f°11 r°3]. « …qui fecerunt valla stillicidia jux-
ta clausuris ne diruerentur propter aquas... ». Vigere : être en vigueur, avoir la force de (Gaffiot 2000,
1703) ; AD Aude, 4E76/CC49, 1363-1364, [f°152 v°3]. « …que non
Ventreria : panne, élément d’une charpente. La dénomi- steterunt per totam diem que viguit temporis pluviosum… ».
nation de cette pièce peut être expliquée par la situation
de cette portion placée parallèlement à la poutre de faîte Vigilare : veiller, être éveillé ; être sur ses gardes (Gaffiot
sur les flancs du comble, sur les versants de la charpente 2000, 1704) ; AD Aude, 4E76/CC62, 1399, [f°12 r°7]. « ...qua nocte
vigilavit G. Raynerii consul cum custodes servientos et aliis sertis homi-
(Cayla 1964, 706 : ventrière) ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372,
nibus armatis circa numerum 30 a vigilarunt circa mediam noctem… ».
[f°70 r°5]. « …qui dicta die steterunt ad preparandum quandam ven-
treriam Platee super operatorum ville de versus altani existentis que Viridarium : verger (Gaffiot 2000, 1710) ; AD Aude,
fracta erat et posuerunt duas corondas pro sustinendo dictam ventreria 4E76/CC62, 1398, [f°113 r°3]. « ….pro abstrahendo aquam tam de pu-
fracta... ». theo Sancti Antonini et de putheo viridarii magistri Petri de Senossa… ».

Verberare : battre (Gaffiot 2000, 1686). Dans le sens de Virga : petite branche mince, verge, baguette (Gaffiot
« compacter » ? ; AD Aude, 4E76/CC53, 1372, [f°74 v°3]. « Item 2000, 1709) ; AD Aude, 4E76/CC56, 1381, [f°45 v°4]. « …pro 6 ner-
vis sive virgas bonorum pro ligando et affirmando dictos croquos… ».
dicta die cum palum factum in dicto foramine dicte parietis impediret ad
faciendum parietem cum esset multum prope amoveri fecerunt dictum Volvere : rouler, faire rouler, faire aller et venir (Gaffiot 2000,
palum seu dirui per maiorem parte ad finem ut operariis dicte parietis 1721, 1722) ; AD Aude, 4E76/CC48, 1360, [f°81 r°6]. « Item tres pecias
operare possent et parietem verberare et facere, perficere… ». fusti 21 palmorum in quibus stat taulatum et pons volvitur sive rotat… ».

267
SOURCES, P. 269-273

Sources

ARCHIVES DEPARTEMENTALES CC5. 1384-1387. Registre, [147 f°]. Occitan/français/latin.


DE L’AUDE CC6. 1431. Cahier de restes à lever des impositions, [8 f°].
Occitan.
Archives municipales de Castelnaudary (sous-série
4E76) CC7. 1492. Lo libre de la talha de la villa, [34 f°]. Occitan.
CC8. 1431. Tenet des gens d’église. Compoix. Cahier,
Série AA. [8 f°]. Occitan.
AA1. Cartulaire-coutumier, 1275-1587. CC9. 1492. Compoix, [78 f°]. Occitan.
AA2. 1324-1680. Privilèges et franchises de la commu- CC10. 1495. Compoix 1495, [228 f°]. Occitan. Quelques
nauté. Cahiers (copies) et parchemins. feuillets d’un compoix du XVIe siècle.
AA3. 1353. Lettres du roi Jean adressées au sénéchal de CC48 à CC84. Comptes trésoraires 1359-1683.
Toulouse pour maintenir les consuls de Castelnaudary CC85. 1738-1766, Registre des mandements de la commu-
juges dans les causes criminelles et aucune civiles dans
nauté de Castelnaudary, [139 f°]. Ancien français.
leurs privilèges. Parchemin.
CC86. 1389-1507. Quittances de dépenses. Plusieurs
AA4. Privilèges de la sénéchaussée, de la province 1298-
parchemins ou papiers.
1498. 12 actes (parchemins).
CC87. 1770-1785. Quittances de dépenses pour les habits
AA5. 1418-1777. Correspondance politique relative aux
événements politiques intéressant la communauté, la des gardes. Plusieurs papiers.
Province, le royaume. CC88. 1734, Règlement des dépenses ordinaires arrêtées
par la communauté de Castelnaudary [16 f°].

Série BB CC89. 1445-1446. Deux parchemins. n° 1 : Instrument de


bail de la taille à lever en 1446. Latin. ; n° 2 : Bail de la
Délibérations et actes du conseil de ville levée de la taille, 1445. Latin.
BB1 à BB28 (28 registres) 1515-1791. CC90. 1363-1437. Liasse.
CC91. 1333-XVIIIe siècle. Liasse. Réglementations rela-
Série CC : impôts et comptabilité. tives au poids public.
CC2. 1356. Registre des aides et subsides extraordinaires CC92, CC93. 1356-1788. Revenus municipaux, aides,
[76 f°]. Latin. poids public, fours, boucheries.
CC3. 1357. Registre des aides et subsides extraordinaires, CC101. 1359-1386. Créances : titres et réclamations.
[111 f°]. Occitan.
CC102. 1384-1436. Reconnaissances de dettes par les
CC4. Talhe de l’an 1369. Registre, [79 f°]. Occitan. consuls au nom de la communauté.

269
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

CC103. 1624-1669. Etat des dettes de la ville contractées Montaigu (B. de) (1438-1466) : 3E15420.
depuis 1624 avec additions jusqu’en 1669 et vérifiées par
Riparie (J.) (1404-1428): 3E9444-3E9449.
les Etats de Province, [125 f°].
Salomon (M.) (1413-1418) : 3E9450.
CC104. 1619-1687. Liasse. Dettes de la communauté,
contrats d’emprunts, liquidations, contentieux en matière
de remboursement, poursuites, etc.
Fanjeaux
CC105. 1687-1779. Liasse. Dettes de la communauté :
Batalha G. (1466-1469) : 3E15423.
contrats d’emprunts, liquidations, contentieux en matière
de remboursement, poursuites, etc. Batalhe J. (1410-1412) : 3E5205.
Dozonis R. (1393-1406) : 3E15443.
Sous-série 36C
36C5. Castelnaudary. Plan d’adaptation. Brevettes. Laurac
36C6. 1786. Castelnaudary. Plan d’adaptation. Brevettes. Bannières (1444-1451) : 3E10814. (1444-1449) ;
3E10815. (1450-1451).

Série DD
Mas Saintes Puelles
DD22-28. 1333-1790, 7 liasses. Voirie : règlements,
travaux d’aménagements et d’entretien des ouvrages, rues Guilabert Etienne (1456-1516) : 3E6418 (1456-1467).
et places.
DD23. 1440-1790. Règlements, procès verbaux sur divers
Série FF
immeubles de la ville.
FF20-23. 1369-1789. Police consulaire, ordonnance et
DD25. 1671-1789. Château et portes de la ville (XVIIe-
règlements ; registres d’amendes.
XVIIIe siècle).
FF20. 1399-1423. Justice consulaire. Registre des déci-
sions et sentences en matière de menus litiges. Registre,
Série EE : Affaires militaires [122 f°]. Occitan.
EE4, 1400. Troupes à la solde de la ville : appel par les FF21. 1445-1789. Liasse. Police consulaire.
consuls d’un ordre prescrivant la levée par la communauté
FF22. 1369-1622. Liasse. Etats des amendes infligées pour
d’un corps de police de 30 hommes et 15 chevaux pour
contravention diverses et des indemnités accordées pour
aller châtier les gens de Pamiers. Une pièce, parchemin,
dommages sur évaluation d’expert (1369-1380). Etat des
latin.
amendes des années 1601-1602, 1621-1622.
EE5, 21 août 1400. Lettre du sénéchal de Toulouse, Colard
FF23. 1697-1770. Police consulaire. Ordonnances géné-
d’Estouteville faisant défense aux consuls de détruire l’en-
rales de police.
ceinte entre la ville et la bastide. Une pièce, parchemin,
latin. FF24. 1367-1408. Liasse. 6 pièces, parchemin. Lettres de
grâce et de rémission accordées aux consuls de
EE5, 1438. Assignation pour faire donner l’ordre aux
Castelnaudary et aux gens de Lauragais.
consuls de faire bonne garde et de réparer les fortifications
de la ville. Une pièce, parchemin, latin. FF25. 1344-1640. Liasse. Accords et transactions de la
communauté.

Sous-série 3E : Notaires
Série HH
HH15. 1557-1790. Corporations : aubergistes, charpen-
Castelnaudary
tiers, menuisiers et maçons ; chirurgiens. 1560-1784.
Aliet (1453-1482) : 3E17858 (1453-1456) ; 3E9467 Charpentiers, menuisiers, maçons.
(1454-1482).
Amiel (J.) : 3E9443 (1390-1408).
Archives municipales de Limoux (sous-série 4E206)
Barra (J. de) : 3E9456 (1441-1449).
Bréjoni (A.) (1435-1453) : 3E9452-3E9455, 3E15419.
Série AA
Caussidières (P.-G. de) (1441-1481) : 3E957, 3E9458,
AA2. 1272-1562. Cartulaire des règlements et ordon-
3E9459.
nances consulaires pour la ville de Limoux, notes et
Embry ou Embriny (1427-1429) : 3E9451. mentions diverses

270
SOURCES

AA28. avril 1350, Choisy sur Auxonne. Lettres patentes 3J1585. 13 janvier 1399. Lettre de Charles VI. Institution
de Philippe, roi de France, accordant aux consuls de la ville d’imposition pour la réparation des remparts de
de Limoux, située sur les frontières et limites du royaume, Castelnaudary. Une pièce, parchemin. Français/latin.
l’abolition d’un cens de 10 livres tournois qu’il percevait
sur divers jardins et édifices situés à l’emplacement des 3J1598. 1456. Charte relative à l’imposition sur les
tours et remparts dont il était nécessaire d’entreprendre la viandes vendues et achetées dans la ville de Castelnaudary
construction. Parchemin, une pièce, latin. (Traduit dans levée par les consuls pour les réparations des remparts.
Devic, Vaissète 1872-1885, t. X. pr. 415, col. 1048-1051. Français.
1350, avril. Philippe VI approuve les projets des consuls de
3J1608. 1574. Castelnaudary. Document relatif à la répa-
Limoux pour la fortification de leur ville).
ration des murailles. Français.
AA30. 25 nov. 136?, Limoux. Vidimus par Jean de Cryllo,
bachelier en droit et juge de Limoux, de lettres du comte 58J10. Fonds R. Hyvert, Inventaire des Monuments
d’Armagnac, lieutenant du roi en Languedoc, données à Historiques de l’Aude. Limoux.
Toulouse le 5 février 1356, concédant aux consuls et aux
habitants de Limoux divers privilèges pour leur permettre
de reconstruire leur ville incendiée et dévastée par le Prince
de Galles. Parchemin, une pièce, latin. ARCHIVES DEPARTEMENTALES
DE L’HERAULT
AA37. 4 décembre 1392, Paris. Mandement de Charles V
au sénéchal de Carcassonne, lui enjoignant de faire
respecter par les commissaires sur le fait des acquêts et
Série A.
amortissements des privilèges accordés par Philippe VI, au
mois d’avril 1350, portant abolition d’un cens de 10 livres A1. Juin à novembre 1368. Lettres patentes de la séné-
tournois perçu sur divers jardins et édifices situées à l’em- chaussée de Toulouse (copie du XVIIIe siècle). Lettres
placement des tours et fortifications construites depuis lors. concernant la closture, murailles, fortifications, garde et
augmentation de la bastide de Castelnaudary. Art. 42,
[f°122-127], 10 p. lat.
Série BB
BB8. 1737-1744. Registre des élections consulaires et des
délibérations du conseil de la ville.
ARCHIVES DEPARTEMENTALES
DE LA HAUTE-GARONNE
Série DD
DD1. 1362-1460. Liasse.
Série C.
DD2 à DD4. 1581-1784. Enceinte de la ville. Délibérations
consulaires au sujet de la réfection des murailles. C338. 1689. Devis et adjudication des réparations à faire
aux murs d’enceinte de la ville au faubourg Saint-Cyprien.
DD5. 1768-1785. Portes : devis, estimation d’ouvrages,
toisés et baux sur les travaux entrepris aux portes.
Série E.
Archives départementales de l’Aude E555. 1469. Copie XVIIIe siècle. Clermont-le-fort.
Feuillets n°11-15. Acte pour la création du fort.

Série J.
2J58. Alauzier (L. d’), Analyse d’un registre du XIVe siècle Sous-série 3E : notaires
de la sénéchaussée de Carcassonne (1394-1398), Archives 3E6761. Ripperia, Guillaume, notaire de Toulouse. 1416-
du château de Bruniquel (Tarn-et-Garonne), ms dactyl, X- 1438.
136 p.
3E10154. Minutes du notaire Esquirol, de Montgiscard.
2J82. Serres de Gauzy (J.), Essai historique sur la ville de
1380-1386.
Castelnaudary, capitale du comté de Lauragais, 1780,
17 cahiers et compléments (copie dactylographiée).
3J217. Septembre 1363. Mandement d’Arnaud Série MI.
d’Audenham, maréchal de France et lieutenant du roi en
Languedoc, à Etienne de Montemigano, trésorier général 4MI21. Lasserre. Monographie villageoise de Clermont-
de la sénéchaussée de Toulouse, par lequel il ordonne de le-fort., ms., 1885.
reverser aux consuls de Castelnaudary 25 florins d’or que 4MI27. Sn. Monographie de Caignac, 1886.
ceux-ci avaient dépensés pour équiper sept sergents et
arbalétriers envoyés au service du roi. Latin, une pièce. 4MI21. Hortal, Monographie de Clermont le Fort, 1885.

271
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

4MI15. Pelata, Monographie de Donneville. 1885. lain du château comtal de L’Isle, baille à fief à Pierre des
4MI23. Ginabat, Monographie de Fronton, s. d. Ardes, habitant de Léguevin, une place de maison conte-
nant dix pans de largeur située dans le fort de Léguevin
4MI24. Ginabet, Monographie de Léguevin, 1886. confrontant avec l’honneur de Dominique Cotench… ;
4MI32. Saves, Monographie de Renneville, s.d. n° 14. 16 mai 1364, Léguevin. Dominique Cotench vend à
Jeanne… cinq pans de large d’une maison confrontant avec
la maison de l’acheteur… et les murailles dudit lieu.
Sous-série 3P
2MI52/2 [f°422 et s.], H Malte Toulouse 194, liasse 3,
3P1365. 1834. Caignac, cadastre napoléonien. 1/1250e. n° 15. Septembre 1371, Fronton. Accord entre les habitants
3P1551. s. d. Castelginest, cadastre napoléonien. 1/2500e. et le prieur pour l’agrandissement du fort ; (p. 472 v°), H
Malte Toulouse 241, liasse 1 n° 13. 6 mai 1399, Orgueil.
3P1862. 1808. Clermont-le-Fort, cadastre napoléonien. Accord entre le commandeur et les habitants pour la
1/2500e. construction du fort.
3P1956. 1808. Donneville, cadastre napoléonien. 1/2500e. 2MI52/3, [f°729 v°]. H Malte Toulouse 393, liasse 1,
3P2271. 1818, Fronton, cadastre napoléonien. 1/1250e. n°41, 4 juillet 1367, Poucharramet. Le duc d’Anjou
3P2937. 1834, Léguevin, cadastre napoléonien. 1/1250e. demande au prieur de fortifier l’église de Poucharramet en
faisant faire des fossés, embans et autres fortifications et
3P4130. s. d., Renneville, cadastre napoléonien. 1/1250e. d’y faire le guet jour et nuit.
2MI523 [f°115], H Malte Le Burgaud 15, liasse 2, n° 1.
Série G. 7 décembre 1399, Fajolles. Bail à cens. Inféodation des
emplacements à l’intérieur du fort à construire.
1G803. 2 mai 1487, Donneville, pièce 4. Reconnaissance
féodale faite à Pierre Delfau, châtelain de Montbrun pour H Malte Toulouse 262, liasse 1, n° 9. 22 septembre 1428.
l’archevêque de Toulouse Pierre de Léon, d’une maison Verlhac (auj. Verlhaguet, commune de Lacourt-Saint-
dans le fort et d’une pièce de terre et vigne à Aygas Mortas Pierre), Réfection des murailles.
à Donneville, et d’une pièce de terre à Montbrun.
H Malte Registre 418. 1694, Fronton, Orgueil.
H Malte Registre 2702. 1739. Arpentement de Verliaguet.
Série H Plans des fiefs de la terre de Verlhaguet.
2MI1106, 101H598, acte 784. 5 août 1368, Castelginest.
Accord entre les habitants et le chapitre de Saint-Sernin
pour la construction d’un fort à Castelginest. Série W
WMS414, Théophile Despis, Notes sur l’histoire de
Série H Malte Castelginest, s.d. (XIXe ou début XXe siècle), cahier écrit
à la plume.
2MI183, H Malte Renneville 1, liasse 1, n° 3. 1227. Acte
d’acquisition d’une maison à Renneville.
H Malte Renneville 3, liasse 3, n° 47. 31 mai 1366,
Renneville. Sentence arbitrale sur l’augmentation du fort et
ARCHIVES COMMUNALES
garde d’icelluy. Parchemin, une pièce. Copie fin XVIe- DE MONTREAL (AUDE)
début XVIIe siècle sur papier, même côte.
H Malte Renneville 3, liasse 3, n° 46. 28 août 1368, Série D
Renneville. Sentence arbitrale sur l’édifice d’un tiers de
muraille du fort de Renneville et du gage et garde d’icelluy 1D1. Fin XIVe siècle, début XVe siècle. Registre des déli-
en temps de guerre. Parchemin, une pièce. bérations de ville.
H Malte Renneville 3, liasse 3, n° 79. 11 avril 1545, 1D2. Fin XVe siècle. Registre des délibérations de ville.
Renneville. Echange entre noble frère Philippe Dubroc
commandeur de Canhac et Renneville et Pierre Jean et
Barthélémy Ribairols dudit Renneville.
ARCHIVES COMMUNALES DE TOULOUSE
2MI531, H Malte Caignac, liasse 20, n° 1. s.d. (d’après la
graphie, seconde moitié du XIVe siècle). Caignac.
Transaction entre les consuls et le seigneur pour les moda- Série BB.
lités de la construction d’un fort.
Délibérations de ville.
2MI52/1 [f°264], H Malte Toulouse 143, liasse 1, n° 13.
8 octobre 1363, Léguevin. Noble Pierre de Garac, chaste- BB1 à BB8. 1374-1440.

272
SOURCES

Série CC Série EE
Pièces à l’appui des comptes. EE32. 1354-1355. Comptes des travaux pour les fortifica-
tions de la ville exécutés pendant toute l’année. Registre
CC2322 à CC2340. 1379-1489.
papier, [133 f°]. Occitan. Monnaie tournois.
CC2376. 1523-1525. 539 pièces, [648 f°].

Comptes divers.
CC2284. 1372-1373, [60 f°]. Recettes et dépenses.
Occitan.
2MI52 à 2MI68. 1330-1439.

273
BIBLIOGRAPHIE, P. 275-284

Bibliographie

INSTRUMENTS DE TRAVAIL Quicherat, Daveluy s. d. : QUICHERAT (L.), DAVELUY (A.),


Dictionnaire latin-français, révisé, corrigé et augmenté par Emile
Alibert 1966 : ALIBERT (L.), Dictionnaire occitan/français
Châtelain, 53e édition, Paris, Hachette, s.d.
selon les parlers languedociens, Toulouse, IEO, 1966, rééd. 1997.
Raynouard 1838-1844 : RAYNOUARD (F.), Lexique ro-
Algirdas Greimas 2004 : ALGIRDAS GREIMAS (J.),
man ou dictionnaire de la langue des troubadours, 6 tomes. Paris,
Dictionnaire de l’ancien français, Paris, Larousse, 2004, rééd.
Silvestre, 1838-1844.
Cayla 1964 : CAYLA (P.), Dictionnaire des institutions, des
coutumes et de la langue en usage dans quelques pays de Robert 1982 : ROBERT (P.), Le Petit Robert, dictionnaire
Languedoc de 1535 à 1648, Montpellier, Paul Déhan, 1964. alphabétique et analogique de la langue française, nouvelle édi-
tion corrigée et mise à jour, Paris, Le Robert, 1982.
Du Cange 1840-1850 : DU CANGE, Glossarium mediae et
infimae latinitatis, Paris, Firmin-Didot, 1840-1850, 7 vol. Sabarthès 1912 : SABARTHES (abbé A.), Dictionnaire to-
pographique du département de l’Aude, Paris, Imprimerie natio-
Gaffiot 1934 : GAFFIOT (F.), Dictionnaire illustré latin- nale, 1912.
français, Paris, Hachette, 1934.
Gaffiot 2000 : GAFFIOT (F.), Dictionnaire latin-français, SOURCES IMPRIMEES
nouvelle édition revue et augmentée sous la direction de Pierre
Flobert, Paris, Hachette, 2000. Devic, Vaissète 1872-1885 : DEVIC (Cl.), VAISSETE (J.),
Histoire générale de Languedoc, Toulouse, réédition Privat,
Gauvard, De Libera, Zink 2002 : GAUVARD (Cl.), DE LI- 1872-1885, 15 vol.
BERA (A.), ZINK (M.) (dir.), Dictionnaire du Moyen Âge, Paris,
PUF, 2002. Froissart 1992 : FROISSART (J. de), Chroniques, le manus-
crit d’Amiens, DILLER (G. T.) (éd.), (coll. Textes littéraires fran-
Gay 1887 : GAY (V.), Glossaire archéologique du Moyen
çais), Livre I, t. III, Genève, Droz, 1992.
Âge et de la Renaissance, t. 1, Paris, 1887.
Mortet, Deschamps 1995 : MORTET (V.), DESCHAMPS (P.),
Lévy 1909 : LEVY (E.), Petit dictionnaire provençal-fran-
Recueil de textes relatifs à l’histoire de l’architecture et à la
çais, Heidelberg, C. Winter, 1909. Raphèle-lès-Arles, Culture
provençale et méridionale Marcel Petit, rééd., 1991. condition des architectes en France, au Moyen Âge, XIe-
XIIIe siècles, Format 15, Paris, CTHS, 1995, rééd.
Mistral 1878 : MISTRAL (F.), Lou trésor dou Félibrige ou
dictionnaire provençal-français, 2 vol., Aix-en-Provence, Puylaurens 1996 : PUYLAURENS (G. de), Chronique,
Remondet-Aubin / Avignon, Roumanille / Paris, Champion, 1145-1275, texte traduit, présenté et annoté par Jean Duvernoy,
1878. Raphèle-lès-Arles, Culture Provençale et méridionale Toulouse, Le Pérégrinateur, 1996.
Marcel Petit, rééd., 1979. Tudèle, l’Anonyme 1960 : TUDELE (G. de), L’ANONYME,
Niermeyer 1984 : NIERMEYER (J.-F.), Mediae latinitatis Chanson de la Croisade albigeoise, traduction de MARTIN-
lexicon minus, Leiden, 1984, rééd. CHABOT (E.), Paris, Les Belles Lettres, 1960, 3 vol.
Pérouse de Montclos 1995 : PEROUSE DE MONT- Vaux-de-Cernay 1951 : VAUX-DE-CERNAY (P.), Historia
CLOS (J.-M.), Architecture, vocabulaire. Principes d’analyse Albigensis, traduction de GUEBIN (P.) et MAISONNEUVE (H.),
scientifique, Paris, Imprimerie nationale, 1995, rééd. Paris, Vrin, 1951.

275
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

OUVRAGES ET ARTICLES CHAZELLES (Cl.-A. de), KLEIN (A.) (dir), Echanges transdis-
ciplinaires sur les constructions en terre crue, 1. terre modelée,
Abbé 1994 : ABBE (J.-L.), Les anciennes mesures de l’Aude, découpée ou coffrée, matériaux et modes de mise en œuvre, Actes
CHARBONNIER (P.) (dir.), Les anciennes mesures locales du
de la table ronde de Montpellier, 17 et 18 novembre 2001,
Midi méditerranéen d’après les tables de conversion, Clermont-
Montpellier, L’Espérou, 2003, p. 359-375.
Ferrand, Institut d’étude du Massif Central, Université Blaise
Pascal, 1994, p. 72-101. Baudreu 2007 : BAUDREU (D.), Essai d’approche lexico-
graphique des constructions en terre massive (domaines occitan et
Alexandre-Bidon 2003 : ALEXANDRE-BIDON (D.), Le
franco-provençal), GUILLAUD (H.), CHAZELLES (Cl.-A. de),
bois dans le château de pierre. L’apport de l’iconographie,
KLEIN (A.) (dir.), Echanges transdisciplinaires sur les construc-
POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le
tions en terre crue, 2, Les constructions en terre massive, pisé et
château de pierre au Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le-
bauge, Actes de la table-ronde de Villefontaine, 28-29 mai 2005,
Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, Presses Universitaires
Montpellier, L’Espérou, 2007, p. 39-52.
Franc-Comtoises, 2003, p. 19-37.
Baudreu, Loppe 2004 : BAUDREU (D.), LOPPE (F.), Types
Ameglio 1999 : AMEGLIO (H.), Le site médiéval fossoyé de
de forts villageois dans le bassin moyen de l’Aude durant la
« La Tourasse » à Lamasquère, Revue de Comminges et des
guerre de Cent Ans, Archéologie du Midi Médiéval, 22, 2004,
Pyrénées centrales, CXV, 1999-4, p. 515-537.
p. 103-140.
Angers 2006 : ANGERS (D.), Une ville à la recherche d’elle-
Bayrou 1988 : BAYROU (L.), Essai sur les techniques de
même : Caen (1450-1500), BOUET (P.), NEVEUX (F.) (éd.), Les
construction des forteresses royales des Corbières, XIIIe et
villes normandes au Moyen Âge, renaissance, essor, crise, Actes
du colloque international de Cerisy-la-Salle (8-12 octobre 2003), XIVe siècles, Etudes roussillonnaises, t. VIII, nouvelle série, 1988.
Office universitaire d’études normandes, Caen, Presses Bayrou 2000 : BAYROU (L.) (dir.), Peyrepertuse, forteresse
Universitaires de Caen, 2006, p. 305-315. royale, Archéologie du Midi médiéval, supplément n° 3, 2000.
Aubert 1960 : AUBERT (M.), La construction au Moyen Bazzana 1992 : BAZZANA (A.), Maisons d’Al-Andalus.
Âge, Bulletin monumental, CXVIII, 4, 1960, p. 241-259. Habitat médiéval et structures du peuplement dans l’Espagne
Aubert 1961 : AUBERT (M.), La construction au Moyen orientale, Coll. de la Casa de Velázquez, 37, Archéologie XVII,
Âge, Bulletin monumental, CXIX, 1-4, 1961, p. 7-42 ; 81-120 ; Madrid, 1992.
181-209 ; 297-323. Bernardi 1993 : BERNARDI (Ph.), Pour une étude du rôle
Bardel, Maillard 2002 : BARDEL (Ph.), MAILLARD (J.- des femmes dans le bâtiment au Moyen Âge, Provence
L.), Architecture de terre en Ille-et-Vilaine, Rennes, Ecomusée de Historique, n° 173, 1993, p. 267-278.
Rennes, 2002. Bernardi 1995 : BERNARDI (Ph.), Métiers du bâtiment et
Battle 1985 : BATTLE (C.), La maison barcelonaise au techniques de construction à Aix-en-Provence à la fin de l’époque
XIIIe siècle : caractéristiques, techniques et matériaux, Cahiers de gothique (1400-1550), Aix-en-Provence, Publications de
la Méditerranée, n° 31, 1985 (La construction dans la péninsule l’Université de Provence, 1995.
ibérique (XIe-XVIe), approche économique et sociale), Université Bernardi 1998a : BERNARDI (Ph.), Les contrats de
de Nice, p. 35-53. constructions ou prix-faits, ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.),
Baud et al. 1996 : BAUD (A.), BERNARDI (Ph.), HART- Cent maisons médiévales en France (du XIIe au milieu du
MANN-VIRNICH (A.), HUSSON (E.), LE BARRIER (C.), XVIe siècle). Un corpus et une esquisse, Monographie du CRA, n°
PARRON (I.), REVEYRON (N.), TARDIEU (J.) (ouv. coll.), 20, Paris, CNRS, 1998, p. 31-32.
L’échafaudage dans le chantier médiéval, Documents d’archéo- Bernardi 1998b : BERNARDI (Ph.), La construction en
logie en Rhône-Alpes n° 13, Lyon, 1996. pierre, ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.), Cent maisons médié-
Baudoux-Jung 1998 : BAUDOUX-JUNG (N.), La construc- vales en France (du XIIe au milieu du XVIe siècle). Un corpus et
tion des tours de la ville d’Amiens d’après les marchés à tasque une esquisse, Monographie du CRA, n° 20, Paris, CNRS, 1998,
(fin XIVe-début XVe siècle), COULET (N.), GUYOTJEANNIN (O.) p. 55-66.
(dir.), La ville au Moyen Âge, Actes du 120e congrès national des Bernardi 1998c : BERNARDI (Ph.), Construction et poli-
sociétés historiques et scientifiques, Aix-en-Provence, 23- tique en Provence : l’approvisionnement en matériaux, une affaire
29 octobre 1995, section histoire médiévale et philologie, Paris, publique ?, COULET (N.), GUYOTJEANNIN (O.) (dir.), La ville
CTHS, 1998, p. 181-194. au Moyen Âge, Actes du 120e congrès national des sociétés histo-
Baudoux-Jung 1999 : BAUDOUX-JUNG (N.), La porte de riques et scientifiques, Aix-en-Provence, 23-29 octobre 1995,
Montrescu, un point de passage stratégique de l’enceinte urbaine section histoire médiévale et philologie, Paris, CTHS, 1998,
d’Amiens (fin XIVe-XVesiècle) ?, BLIECK (G.), CONTAMINE p. 317-328.
(Ph.), FAUCHERRE (N.), MESQUI (J.) (textes réunis par), Les
Bernardi 2001 : BERNARDI (Ph.), Les fortifications de
enceintes urbaines (XIIIe-XVIe siècle), 121e congrès national des
Marseille en 1374, Marseille. Trames et paysages urbains de
sociétés historiques et scientifiques, section archéologie et
Gyptis au Roi René. Actes du colloque de Marseille 1999, Aix-en-
histoire de l’art, Nice, 1996, Paris, CTHS, 1999, p. 289-296.
Provence, 2001, Etudes Massaliètes 7, p. 93-98.
Baudreu 2002 : BAUDREU (D.), Observations sur les
Bernardi, Dautrey, Mignon 2001 : BERNARDI (Ph.),
constructions en terre crue dans l’Aude (Moyen Âge et Epoque
DAUTREY (Ph.), MIGNON (J.-M.), Jean de Louvres : un maître
moderne), Bulletin de la Société d’études scientifiques de l’Aude,
des œuvres du palais des Papes d’Avignon (1342-1358),
CII, 2002, p. 57-64.
CHAPELOT (O.) (dir.), Du projet au chantier, maîtres d’ouvrage
Baudreu 2003 : BAUDREU (D.), Habitats et fortifications en et maîtres d’œuvre aux XIVe-XVIe siècles, Paris, Ecole des Hautes
terre crue d’époque médiévale dans le Midi de la France, Etudes en Sciences Sociales, 2001, p. 37-58.

276
BIBLIOGRAPHIE

Bernardi, Mignon 2002 : BERNARDI (Ph.), MIGNON (J.- Bourin, Chareille 1992 : BOURIN (M.), CHAREILLE (P.)
M.), Evaluation et mesure des bâtiments. L’exemple de la (dir.), Genèse médiévale de l’anthroponymie moderne. Etudes
Provence médiévale, Histoire et Mesure, XVI-3/4, 2002, p. 309- d’anthroponymie médiévale ; IIIe et IVe Rencontres –Azay-le-
343. Féron, 1989-1990, tome II-1 : Persistances du nom unique ; tome
II-2 : Persistance du nom unique. Désignation et anthroponymie
Berthe 2005 : BERTHE (M.), Dans le sud-Albigeois et le des femmes. Méthodes statistiques pour l’anthroponymie, Tours,
Lauragais des XIIe et XIIIe siècles. Les bourgs castraux : hauts 1992.
lieux cathares, Midi-Pyrénées patrimoine, 3, juillet-septembre
2005, p. 30-35. Bourin, Matin, Menant 1996 : BOURIN (M.), MARTIN (J.-
M.), MENANT (F.) (textes recueillis par), L’anthroponymie,
Bessac 1985 : BESSAC (J.-C.), Outils et techniques spéci- document de l’histoire sociale des mondes méditerranéens médié-
fiques du travail de la pierre dans l’iconographie médiévale, vaux, Actes du colloque international organisé par l’Ecole fran-
CHAPELOT (O.), BENOÎT (P.) (études réunies par), Pierre et çaise de Rome avec le concours du GDR 955 du CNRS « Genèse
métal dans le bâtiment au Moyen Âge, Actes du colloque Mines, médiévale de l’anthropologie moderne » (Rome, 6-8 octobre
carrières et métallurgie dans la France médiévale 9-4 juin 1982, 1994), Ecole française de Rome, Palais Farnèse, 1996.
Paris, Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, 1985,
p. 169-184. Bousquet 1926 : BOUSQUET (H.), Comptes consulaires de
la cité et du bourg de Rodez, première partie : Cité, vol. 1 (1350-
Blieck 1998 : BLIECK (G.), La mise en défense de Lille en 1358), Rodez, P. Carrère, 1926.
1452-1453, COULET (N.), GUYOTJEANNIN (O.) (dir.), La
ville au Moyen Âge, Actes du 120e congrès national des sociétés Bousquet 1943 : BOUSQUET (H.), Comptes consulaires de
historiques et scientifiques, Aix-en-Provence, 23-29 octobre la cité et du bourg de Rodez, première partie : Cité, vol. 2 (1358-
1995, section histoire médiévale et philologie, Paris, CTHS, 1388), Rodez, P. Carrère, 1943.
1998, p. 195-209. Butaud 2002 : (G.), Mesure et évaluations de l’enceinte de
Blieck 1999 : BLIECK (G.), Une ville close face à l’éminent Carpentras pendant sa construction (1357-1392), Histoire et
péril : Lille en Flandre en 1411 et 1414, BLIECK (G.), CONTA- Mesure, XVI-3/4, 2002, p. 345-351.
MINE (Ph.), FAUCHERRE (N.), MESQUI (J.) (textes réunis Cailleaux 1985 : CAILLEAUX (D.), Les comptes de
par), Les enceintes urbaines (XIIIe-XVIe siècle), 121e congrès construction des Célestins de Sens, 1477-1482 : édition et
national des sociétés historiques et scientifiques, section archéo- commentaire, CHAPELOT (O.), BENOÎT (P.) (études réunies
logie et histoire de l’art, Nice, 1996, Paris, CTHS, 1999, p. 297- par), Pierre et métal dans le bâtiment au Moyen Âge, Actes du
311. colloque Mines, carrières et métallurgie dans la France médiévale
9-4 juin 1982, Paris, Ecole des Hautes Etudes en Sciences
Blieck 2003 : BLIECK (G.), Le bois et sa mise en œuvre
sociales, 1985, p. 117-156.
d’après les sources comptables. L’exemple du château dit de
Courtrai à Lille de 1390 à 1500, POISSON (J.-M.), SCHWIEN Carcy, Scellès 2002 : CARCY (P.), SCELLES (M.),
(J.-J.) (dir.), Le bois dans le château de pierre au Moyen Âge, Couvertures et charpentes dans le Midi de la France au Moyen-
Actes du colloque de Lons-le-Saunier, 23-25 octobre 1997, Âge, La maison au Moyen Âge dans le Midi de la France, Actes
Besançon, Presses Universitaires Franc-Comtoises, 2003, p. 63- des journées d’étude de Toulouse 19-20 mai 2001, Mémoires de
78. la Société archéologique du Midi de la France, Hors série 2002,
p. 203-228.
Bompaire, Dumas 2000 : BOMPAIRE (M.), DUMAS (F.),
Numismatique médiévale, L’atelier du médiéviste n° 7, Turnhout, Casel, Colzani et al. 2000 : CASEL (Th.), COLZANI (J.),
Brepols, 2000. GARDERE (J.-F.), MARFAING (J.-L.), Maisons d’argile en
Midi-Pyrénées, Toulouse, Union Régionale C.A.U.E. Midi-
Bonnin 1998 : BONNIN (M.), Tours (Indre-et-Loire). Fin du Pyrénées, Toulouse, Privat, 2000.
XVe siècle. Maison en pan-de-bois à trois corps de logis sur
boutique. À l’enseigne du Pélican, 48 rue Colbert (parcelle Catel 1663 : CATEL (G. de), Mémoires de l’Histoire du
DY33). Conservée en élévation, ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) Languedoc, Toulouse, 1663.
(dir.), Cent maisons médiévales en France (du XIIe au milieu du Cayla 1959 : CAYLA (P.), Aspects de Castelnaudary à la fin
XVIe siècle). Un corpus et une esquisse, Monographie du CRA, du Moyen Âge, Mémoires de la Société des arts et sciences de
20, Paris, CNRS, 1998, p. 297-303. Carcassonne, II, 4e série, 1955-1956, 1959, p. 137-159.
Boüard 1965 : BOÜARD (M. de), Note sur les matériaux de Chalande 1914 : CHALANDE (J.), Fortifications romaines
couverture utilisés en Normandie au Moyen Âge, Annales de et du Moyen Âge entre la porte Saint-Michel et la porte
Normandie, 15e année, n° 3, oct. 1965, p. 415-436. Montgaillard, Bulletin de la Société archéologique du Midi de la
Bourin 1990 : BOURIN (M.) (dir.), Genèse médiévale de France, nouvelle série, n° 43, 1914, p. 217-229.
l’anthroponymie moderne. Etudes d’anthroponymie médiévale ; Challet 2006 : CHALLET (V.), Compoix et tensions sociales :
Ier et IIe Rencontres –Azay-le-Féron, 1986 et 1987, Tours, 1990. l’exemple de Pont-Saint-Esprit (1390) RIGAUDIERE (A.)
Bourin 1996 : BOURIN (M.), France du Midi et France du (dir.), De l’estime au cadastre en Europe, Le Moyen Âge, Actes
Nord : deux systèmes anthroponymiques ?, BOURIN (M.), du colloque tenu à Bercy les 11, 12 et 13 juin 2003, Comité pour
l’histoire économique et financière de la France, Paris, Ministère
MARTIN (J.-M.), MENANT (F.) (textes recueillis par),
de l’économie, des finances, et de l’industrie, collection
L’anthroponymie, document de l’histoire sociale des mondes
Animation de la recherche, 2006, p. 289-305.
méditerranéens médiévaux, Actes du colloque international orga-
nisé par l’Ecole française de Rome avec le concours du GDR 955 Chalmin-Sirot, Poisson 2003 : CHALMIN-SIROT (E.),
du CNRS « Genèse médiévale de l’anthropologie moderne » POISSON (J.-M.), Le bois dans les châteaux et maisons nobles de
(Rome, 6-8 octobre 1994), Ecole française de Rome, Palais Savoie et de Bresse d’après les comptes de châtellenies,
Farnèse, 1996, p. 179-202. POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le

277
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

château de pierre au Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le- riaux et modes de mise en œuvre, Actes de la table ronde de
Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, Presses Universitaires Montpellier, 17 et 18 novembre 2001, Montpellier, L’Espérou,
Franc-Comtoises, 2003, p. 171-185. 2003.
Chapelot 1985 : CHAPELOT (O.), Les ouvriers du métal en Chazelles, Guyonnet 2007 : CHAZELLES (Cl.-A. de),
Bourgogne à la fin du Moyen Âge : l’exemple du Châtillonnais, GUYONNET (F.), La construction en pisé du Languedoc-
CHAPELOT (O.), BENOIT (P.) (études réunies par.), Pierre et Roussillon et de la Provence, du Moyen Âge à l’époque moderne
métal dans le bâtiment au Moyen Âge, Actes du colloque Mines, (XIIIe-XIXe s.), GUILLAUD (H.), CHAZELLES (Cl.-A. de),
carrières et métallurgie dans la France médiévale 9-4 juin 1982, KLEIN (A.) (dir.), Echanges transdisciplinaires sur les construc-
Paris, Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, 1985, tions en terre crue, 2, Les constructions en terre massive, pisé et
p. 305-318. bauge, Actes de la table-ronde de Villefontaine, 28-29 mai 2005,
Montpellier, L’Espérou, 2007, p. 109-139.
Chapelot 2001a : CHAPELOT (O.), Maîtrise d’ouvrage et
maîtrise d’œuvre dans le bâtiment médiéval, CHAPELOT (O.) Clauzel 1996 : CLAUZEL (D.), Lille et ses remparts à la fin
(dir.), Du projet au chantier, maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre du Moyen Âge (1320-1480), CONTAMINE (Ph.), GUYOT-
aux XIVe-XVIe siècles, Paris, éditions de l’Ecole des Hautes JEANNIN (O.) (dir.), La guerre, la violence, et les gens au Moyen
Etudes en Sciences sociales, 2001, p. 11-33. Âge, I. Guerre et violence, Actes du 119e congrès des Sociétés
historiques et scientifiques d’Amiens, 26-30 octobre 1994, Paris,
Chapelot 2001b : CHAPELOT (J.), Charles V maître d’ou- CTHS, 1996, p. 273-294.
vrage : à propos de la construction du donjon de Vincennes et de
quelques chantiers contemporains, CHAPELOT (O.) (dir.), Du Cointereaux 1790 : COINTEREAUX (F.), Ecole d’architec-
projet au chantier, maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre aux ture rurale, ou leçons par lesquelles on apprendra soi-même à
XIVe-XVIe siècles, Paris, éditions de l’Ecole des Hautes Etudes en bâtir solidement les maisons de plusieurs étages avec la terre
Sciences Sociales, 2001, p. 339-403. seule. Ouvrage dédié aux Français, Paris, 1790.

Chapelot 2003 : CHAPELOT (O.), Bois sec, bois vert. Vraie Collet 2001 : COLLET (B.), Projet architectural et fortifica-
ou fausse question ?, POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), tion à Troyes à la fin du Moyen Âge, CHAPELOT (O.) (dir.), Du
Le bois dans le château de pierre au Moyen Âge, Actes du projet au chantier, maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre aux
colloque de Lons-le-Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, XIVe-XVIe siècles, Paris, éditions de l’Ecole des Hautes Etudes en
Presses Universitaires Franc-Comtoises, 2003, p. 79-89. Sciences sociales, 2001, p. 239-252.

Châtelain 1981 : CHÂTELAIN (A.), L’évolution des Contamine 1978 : CONTAMINE (Ph.), Les fortifications
urbaines en France à la fin du Moyen Âge : aspects financiers et
châteaux forts dans la France au Moyen Âge, Italie, Publitotal,
économiques, Revue historique, 102e année, CCLX, 1978, p. 23-
1981.
47.
Chauliac 1960 : CHAULIAC (P.-A.), Les anciens forts des
Contamine 1994 : CONTAMINE (Ph.), La guerre au Moyen
villages, L’Auta, Nouvelle série, n° 287, janvier 1960, p. 5-9.
Âge, Paris, Presses Universitaires de France, 1994.
Chausserie-Laprée, Chazelles 2003 : CHAUSSERIE-
Contamine 2002a : CONTAMINE (Ph.), En guise de conclu-
LAPREE (J.), CHAZELLES (Cl.-A. de), La terre massive
sion : les villes de Languedoc et la chevauchée d’Edouard, prince
façonnée, un mode de construction indigène en Gaule du sud, et
de Galles (12 octobre-28 novembre 1355), LE BLEVEC (D.)
la question du pisé dans l’Antiquité, CHAZELLES (Cl.-A. de),
(actes réunis par), Défendre la ville dans les pays de la
KLEIN (A.) (dir.), Echanges transdisciplinaires sur les construc- Méditerranée occidentale au Moyen Âge, actes de la journée
tions en terre crue, 1. terre modelée, découpée ou coffrée, maté- d’étude du 6 mars 1999, Monspeliensia Medievala, Centre histo-
riaux et modes de mise en œuvre, Actes de la table ronde de rique de recherches et d’études sur la Méditerranée médiévale
Montpellier, 17 et 18 novembre 2001, Montpellier, L’Espérou, occidentale, Université Paul Valéry, Montpellier III, 2002, p. 195-
2003, p. 299-314. 210.
Chazelles, Poupet 1985 : CHAZELLES (Cl.-A. de), Contamine 2002b : CONTAMINE (Ph.), Ville et château au
POUPET (P.), La fouille des structures de terre crue : définitions Moyen Âge, introduction historique, BLIECK (G.), CONTA-
et difficultés, Revue Aquitania, 3, 1985, p. 149-160. MINE (Ph.), FAUCHERRE (N.), MESQUI (J.) (textes réunis
Chazelles 1999 : CHAZELLES (Cl.-A. de), À propos des par), Le château et la ville, conjonction, opposition, juxtaposition,
murs en bauge de Lattes. Problématique des murs de terre 125e congrès national des sociétés historiques et scientifiques,
massive dans l’Antiquité, Lattara, 12, 1999, p. 229-254. section archéologie et histoire de l’art, Lille, 2000, Paris, Ed. du
CTHS, 2002, p. 9-19.
Chazelles 2003 : CHAZELLES (Cl.-A. de), Témoignages
croisés sur les constructions antiques en terre crue : textes latins Corraze 1934 : CORRAZE (R.), La baronnie épiscopale de
et données archéologiques, Techniques et culture n° 41, janvier- Montbrun-Lauragais, Toulouse, Berthoumieu, 1934.
juin 2003, p. 1-28. Couderc 1895 : COUDERC (C.), Le château Narbonnais en
Chazelles, Léal 2003 : CHAZELLES (Cl.-A. de), LEAL (E.), 1445, Annales du Midi, septième année, 1895, p. 447-452.
Les murs en terre crue d’un faubourg médiéval de Narbonne CRAterre 1995 : CRATERRE, Traité de construction en
(XIIIe XIVe siècles), CHAZELLES (Cl.-A. de), KLEIN (A.) terre, Marseille, Parenthèses, 1995.
(dir.), Echanges transdisciplinaires sur les constructions en terre
crue, 1. terre modelée, découpée ou coffrée, matériaux et modes Cursente 1996 : CURSENTE (B.), Aspects de la « révolution
de mise en œuvre, Actes de la table ronde de Montpellier, 17 et anthroponymique » dans le Midi de la France (début XIe-début
18 novembre 2001, Montpellier, L’Espérou, 2003, p. 247-261. XIIe siècle), BOURIN (M.), MARTIN (J.-M.), MENANT (F.)
(textes recueillis par), L’anthroponymie, document de l’histoire
Chazelles, Klein 2003 : CHAZELLES (Cl.-A. de), sociale des mondes méditerranéens médiévaux, Actes du colloque
KLEIN (A.) (dir.), Echanges transdisciplinaires sur les construc- international organisé par l’Ecole française de Rome avec le
tions en terre crue, 1. terre modelée, découpée ou coffrée, maté- concours du GDR 955 du CNRS « Genèse médiévale de l’an-

278
BIBLIOGRAPHIE

thropologie moderne » (Rome, 6-8 octobre 1994), Ecole française constructions en terre crue, 2, Les constructions en terre massive,
de Rome, Palais Farnèse, 1996, p. 41-62. pisé et bauge, Actes de la table-ronde de Villefontaine, 28-29 mai
2005, Montpellier, L’Espérou, 2007, p. 53-69.
Dauzat 1984a : DAUZAT (M.), La motte du Mourrel à
Molleville et la motte de Puy-Redon à Laurac (Aude), Forestié 1908 : FORESTIE (E.), Montbéqui, notes monogra-
Archéologie du Midi médiéval, 2, 1984, p. 27-45. phiques et Charte de reconstruction, 1er mars 1382, Bulletin de la
Société archéologique du Tarn-et-Garonne, 1908, p. 197-211.
Dauzat 1984b : DAUZAT (M.), Villeneuve-la-Comptal
(Aude). Laval-Basse, Archéologie médiévale, XIV, (Chronique Fournier 1966 : FOURNIER (G.), La défense des popula-
des fouilles médiévales), 1984, p. 372-373. tions rurales pendant la Guerre de Cent Ans en Basse-Auvergne,
Actes du 90e Congrès national des Sociétés savantes, Nice, 1965
Dauzat 1988 : DAUZAT (M.), Villeneuve-la-Comptal
(Section Archéologie), Paris, 1966, p. 157-199.
(Aude). Laval-Basse, Archéologie médiévale, XVIII, (Chronique
des fouilles médiévales), 1988, p. 372-373. Fournier 1972 : FOURNIER (G.), Les fortifications de la
Debord 1990 : DEBORD (A.), Remarques sur la notion de Basse-Auvergne au milieu du XVe siècle, d’après l’Armorial de
bourg castral, Annales du Midi, 102, n°189-190, janvier-juin Revel, Château Gaillard, V, Actes du colloque international tenu
1990, (Cadres de vie et société dans le Midi Médiéval. Hommage à Hindsgavl (Danemark), 1970, Université de Caen, 1972, p. 55-
à Charles Higounet), p. 55-61. 59.

Delmas 1968a : DELMAS (J.-L), Les termes techniques de Galabert 1901 : GALABERT (F.), Villages fortifiés durant le
la construction en langue d’oc en usage dans l’Albigeois, Position XIVe siècle dans l’étendue du Tarn-et-Garonne, Bulletin archéo-
des thèses, Paris, Ecole des Chartes, 1968, p. 49-54. logique et Historique de la Société archéologique de Tarn-et-
Garonne, 29, 1901, 4e trimestre, p. 333-344.
Demaille 2002 : DEMAILLE (E.), La défense de Lodève à
travers le compoix de 1401, LE BLEVEC (D.) (actes réunis par), Gardel 1994 : GARDEL (M.-E.), Notre-Dame de la Santé,
Défendre la ville dans les pays de la Méditerranée occidentale au fouilles de sauvetage 1992-1993, Bulletin de la Société d’études
Moyen Âge, Actes de la journée d’étude du 6 mars 1999, scientifiques de l’Aude, XCIV, 1994, p. 59-72.
Monspeliensia Medievala, Centre historique de recherches et Gimpel 1980 : GIMPEL (J.), Les bâtisseurs de cathédrales,
d’études sur la Méditerranée médiévale occidentale, Université Paris, Seuil, 1958, rééd. 1980.
Paul Valéry, Montpellier III, 2002, p. 39-62.
Ginouvez 1993 : GINOUVEZ (O.), Des maisons excavées à
Dethier 1986 : DETHIER (J.) (dir.), Architectures de terre ou Narbonne autour de l’an Mil, Archéologie du Midi médiéval, 11,
l’avenir d’une tradition millénaire, Europe, Tiers-Monde, Etats- 1993, p. 53-68.
Unis, Paris, Centre Georges Pompidou, 1986, rééd.
Gonon 1973 : GONON (M.), Comptes de construction en
Du Bourg 1872-1873a : DU BOURG (A.), Etude sur la ville Forez au XIVe siècle, La construction au Moyen-Âge, Histoire et
et la commanderie de Fonsorbes, Mémoires de la société du Midi archéologie, Actes du congrès de la Société des Historiens médié-
de la France, 2e série, X, 1872-1873, p. 333-355. vistes de l’Enseignement supérieur public (Besançon, 2-4 juin
Du Bourg 1872-1873b : DU BOURG (A.), Petites villes 1972), Annales Littéraires de l’Université de Besançon, Les
fortifiées du Moyen Âge dans le Toulousain, Mémoires de la Belles Lettres, Paris, 1973, p. 15-36.
société du Midi de la France, 2e série, X, 1872-1873, p. 297-315. Gonon 1975 : GONON (M.), Construction en Forez au
Durand 1996 : DURAND (R.), Surnoms et structures de la Moyen Âge, techniques, matériaux, outils et instruments, les arti-
famille, BOURIN (M.), MARTIN (J.-M.), MENANT (F.) (textes sans, Actes du 98e Congrès national des Sociétés Savantes (Saint-
recueillis par), L’anthroponymie, document de l’histoire sociale Etienne, 1973), Section d’Archéologie et d’Histoire de l’Art :
des mondes méditerranéens médiévaux, Actes du colloque inter- archéologie minière, Forez et Massif Central, Paris, Bibliothèque
national organisé par l’Ecole française de Rome avec le concours Nationale, 1975, p. 349-361.
du GDR 955 du CNRS « Genèse médiévale de l’anthropologie Gresser 2003 : GRESSER (P.), L’approvisionnement en bois
moderne » (Rome, 6-8 octobre 1994), Ecole française de Rome, de construction du château d’Orgelet (Jura) à la fin du Moyen
Palais Farnèse, 1996, p. 413-420. Âge, POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le
Esquieu 2001 : ESQUIEU (Y.), La ville au Moyen Âge, château de pierre au Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le-
l’exemple français, Joué-les-Tours, Alan Sutton, 2001. Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, Presses Universitaires
Franc-Comtoises, 2003, p. 91-107.
Esquieu, Pesez 1998 : ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.),
Cent maisons médiévales en France (du XIIe au milieu du Grimal 1935 : GRIMAL (A.), Les fortifications d’Albi et
XVIe siècle). Un corpus et une esquisse, Monographie du CRA, leur démolition au XVIIIe siècle, Revue du Tarn, 1935, p. 16-34.
20, Paris, CNRS, 1998.
Grimal 1936 : GRIMAL (A.), Les fortifications d’Albi et
Faucherre 1991 : FAUCHERRE (N.), Places Fortes, bastion leur démolition au XVIIIe siècle, Revue du Tarn, 1936, p. 143-
du pouvoir, Patrimoine vivant, Notre Histoire, Paris, 152.
Rempart/Desclée de Brouwer, 1991, 4e éd.
Grimbert 2002 : GRIMBERT (L.), Les fortifications médié-
Favier 1980 : FAVIER (J.), La Guerre de Cent Ans 1337- vales de la place du Vigan à Albi (Tarn), Archéologie du Midi
1453, Coll. Marabout Université, Paris, Fayard, 1980. médiéval, 20, 2002, p. 127-148.
Finó 1970 : FINO (J.-F.), Forteresses de la France médiévale, Guillaud 1996 : GUILLAUD (H.), Architectures de terre de
construction, attaque, défense, Paris, Picard, 1970. France : repères de l’histoire, patrimoine traditionnel et moder-
nité, Mediterrâneo, n° 8/9, janvier-décembre 1996, p. 193-236.
Font-Arellano 2007 : FONT ARELLANO (J.), La tapia dans
les textes hispaniques, GUILLAUD (H.), CHAZELLES (Cl.-A. Guillaud, de Chazelles, Klein 2007 : GUILLAUD (H.),
de), KLEIN (A.) (dir.), Echanges transdisciplinaires sur les CHAZELLES (Cl.-A. de), KLEIN (A.) (dir.), Echanges transdis-

279
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

ciplinaires sur les constructions en terre crue, 2, Les construc- A. de), KLEIN (A.) (dir), Echanges transdisciplinaires sur les
tions en terre massive, pisé et bauge, Actes de la table-ronde de constructions en terre crue, 1. terre modelée, découpée ou
Villefontaine, 28-29 mai 2005, Montpellier, Ed. de l’Espérou, coffrée, matériaux et modes de mise en œuvre, Actes de la table
2007. ronde de Montpellier, 17 et 18 novembre 2001, Montpellier, Ed.
de l’Espérou, 2003, p. 417-437.
Hallé 1983 : HALLÉ (G. le), Précis de la fortification, Paris,
PCV Editions, 1983. Klein 2007 : KLEIN (A.), La construction en pisé procédant
par banchées appareillées, en Midi-Pyrénées. Fin XVIIIe-début
Hammam 1999 : HAMMAM (M.) (dir.), L’architecture de
XXe s. Contribution à la connaissance des différentes techniques,
terre en Méditerranée, Série : colloques et séminaires, n°80,
GUILLAUD (H.), CHAZELLES (Cl.-A. de), KLEIN (A.) (dir.),
Publications de la Faculté de Lettres et des Sciences Humaines,
Echanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue,
Rabat, 1999.
2, Les constructions en terre massive, pisé et bauge, Actes de la
Hoffsummer 1999 : HOFFSUMMER (P.), Les charpentes de table-ronde de Villefontaine, 28-29 mai 2005, Montpellier,
toiture en Wallonie, typologie et dendrochronologie (XIe- L’Espérou, 2007, p. 157-179.
XIXe siècle), Etudes et documents, Monuments et sites, 1 (2e éd.),
La Faille 1701 : LA FAILLE (M.-G. de), Annales de la ville
Namur, Division du Patrimoine, 1999.
de Toulouse depuis la réunion de la Comté de Toulouse à la
Hyvert 1941 : HYVERT (R.), Les anciennes mesures couronne avec un abrégé de l’ancienne histoire de cette ville et
audoises, 1ère partie : mesures de longueur et mesures agraires, un recueil de divers titres et actes, seconde partie, Toulouse,
Bulletin de la Société d’études scientifiques de l’Aude, XLIV, Colomyes, 1701.
1941, p. 130-154.
Laborie 2006 : LABORIE (Y.), Le château des Albret à
Hyvert 1941-1943 : HYVERT (R.), Les anciennes mesures Labrit (Landes), BARRAUD (D.), HAUTEFEUILLE (F.),
audoises pour les longueurs, les grains, et les surfaces, 2e partie, REMY (Ch.) (travaux réunis par), Résidences aristocratiques,
Mémoires de la Société des Arts et Sciences de Carcassonne, VI, résidences du pouvoir entre Loire et Pyrénées Xe-XVe siècles,
3e série, années 1941-1943, p. 197-204. recherches archéologiques récentes 1987-2002, Actes du colloque
de Pau 3-5 octobre 2002, Archéologie du Midi Médiéval, supplé-
Hyvert 1961 : HYVERT (R.), Métrologie monumentale en ment n° 4, 2006, p. 337-363.
Languedoc, Les Monuments historiques du Midi de la France,
Bulletin Trimestriel, 1961, p. 111-122. Lamazou-Duplan 1994 : LAMAZOU-DUPLAN (V.), Les
élites toulousaines et leurs demeures à la fin du Moyen-Âge
Jacquier 2001 : JACQUIER (E.), La politique castrale des d’après les registres notariés : entre maison possédée et maison
Valois de Bourgogne dans les baillages méridionaux de leur habitée, La maison au Moyen Âge dans le Midi de la France,
duché, CHAPELOT (O.) (dir.), Du projet au chantier, maîtres
Actes des journées d’étude de Toulouse 19-20 mai 2001,
d’ouvrage et maîtres d’œuvre aux XIVe-XVIe siècles, Paris, Ecole
Mémoires de la Société archéologique du Midi de la France, Hors
des Hautes Etudes en Sciences sociales, 2001, p. 143-175.
série 2002, p. 41-61.
Jacquier 2003 : JACQUIER (E.), Echiffe et fenêtre
Lardin 1999 : LARDIN (Ph.), La place du bois dans les forti-
flamande, deux éléments prépondérants de la défense dans les
fications à la fin du Moyen Âge en Normandie orientale,
châteaux bourguignons au XVe siècle, POISSON (J.-M.),
BLIECK (G.), CONTAMINE (Ph.), FAUCHERRE (N.),
SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le château de pierre au
MESQUI (J.) (textes réunis par), Les enceintes urbaines (XIIIe-
Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le-Saunier, 23-25 octobre
XVIe siècle), 121e congrès national des sociétés historiques et
1997, Besançon, Presses Universitaires Franc-Comtoises, 2003,
scientifiques, section archéologie et histoire de l’art, Nice, 1996,
p. 109-128.
Paris, CTHS, 1999, p. 181-195.
Jansen 2006 : JANSEN (Ph.), In catasto ponere et scribere :
Lardin 2001 : LARDIN (Ph.), Les entreprises du bâtiment en
formation intellectuelle et méthodes des rédacteurs du cadastre en
Normandie orientale à la fin du Moyen Âge, CHAPELOT (O.)
Italie centrale du milieu du XIIIe siècle au XVe siècle, RIGAU-
(dir.), Du projet au chantier, maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre
DIERE (A.) (dir.), De l’estime au cadastre en Europe, Le Moyen
aux XIVe-XVIe siècles, Paris, Ecole des Hautes Etudes en Sciences
Âge, Actes du colloque tenu à Bercy les 11, 12 et 13 juin 2003,
sociales, 2001, p. 177-195.
Comité pour l’histoire économique et financière de la France,
Paris, Ministère de l’économie, des finances, et de l’industrie, Lardin 2006 : LARDIN (Ph.), Les transformations de la ville
collection Animation de la recherche, 2006, p. 107-133. de Dieppe pendant la guerre de Cent Ans, BOUET (P.),
NEVEUX (F.) (éd.), Les villes normandes au Moyen Âge, renais-
Kerhervé 2002 : KERHERVE (J.), Impôt, guerre et politique
sance, essor, crise, actes du colloque international de Cerisy-la-
en Bretagne au XVe siècle, l’exemple du diocèse de Saint-Brieuc,
Salle (8-12 octobre 2003), Office universitaire d’études
CONTAMINE (Ph.), KERHERVE (J.), RIGAUDIERE (A.),
normandes, Caen, Presses Universitaires de Caen, 2006, p. 75-107.
L’impôt au Moyen-Âge, l’impôt public et le prélèvement seigneu-
rial fin XIIe-début XVIe siècle, II, les espaces fiscaux, colloque Larguier 2004 : LARGUIER (G.), Perception et gestion de
tenu à Bercy les 14, 15 et 16 juin 2000, Paris, Comité pour l’impôt à Narbonne aux XIVe et XVe siècles, MENJOT (D.),
l’Histoire économique et financière, Ministère de l’Economie, SANCHEZ MARTINEZ (M.) (dir.), La fiscalité des villes au
des Finances et de l’industrie, 2002, p. 369-443. Moyen Âge (Occident Méditerranéen), 4, La gestion de l’impôt
(méthodes, moyens, résultats), Toulouse, Privat, 2004, p. 145-
Kersuzan 2005 : KERSUZAN (A.), Défendre la Bresse et le
160.
Bugey, les châteaux savoyards dans la guerre contre le Dauphiné
(1282-1355), collection d’histoire et d’archéologie médiévales, Latouche 1923 : LATOUCHE (R.), La vie en bas Quercy du
Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 2005. quatorzième au dix-huitième siècle, Thèse pour le doctorat ès
lettres, Toulouse, Privat, 1923.
Klein 2003 : KLEIN (A.), La construction en terre crue par
couches continues en Midi-Pyrenées. XVIe-XXe siècles. Le Pogam 2001 : LE POGAM (P.-Y.), Les « œuvres royaux »
Contribution à l’identification des techniques, CHAZELLES (Cl.- sous Charles VII, CHAPELOT (O.) (dir.), Du projet au chantier,

280
BIBLIOGRAPHIE

maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre aux XIVe-XVIe siècles, Paris, économique et financière de la France, Paris, Ministère de l’éco-
Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, 2001, p. 265-277. nomie, des finances, et de l’industrie, collection Animation de la
recherche, 2006, p. 459-500.
Le Pogam 2003 : LE POGAM (P.-Y.), L’utilisation du bois
dans les châteaux normands du XVe siècle. L’apport des textes Marandet 2006b : MARANDET (M.-C.), Les campagnes du
à propos des aspects résidentiels, POISSON (J.-M.), Lauragais à la fin du Moyen Âge : 1380-début du XVIe siècle,
SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le château de pierre au Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, collection Etudes,
Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le-Saunier, 23-25 octobre 2006.
1997, Besançon, Presses Universitaires Franc-Comtoises, 2003,
Menant 1996a : MENANT (F.), L’anthroponymie du monde
p. 151-160.
rural, BOURIN (M.), MARTIN (J.-M.), MENANT (F.) (textes
Leblanc 1983-1984 : LEBLANC (G.), Toulouse, les recueillis par), L’anthroponymie, document de l’histoire sociale
faubourgs du rempart Saint-Cyprien, Mémoires de la Société des mondes méditerranéens médiévaux, Actes du colloque inter-
archéologique du Midi de la France, XLV, 1983-1984, p. 19-137. national organisé par l’Ecole française de Rome avec le concours
du GDR 955 du CNRS « Genèse médiévale de l’anthropologie
Lebrun 1753 : LEBRUN (M.), Les us et coutumes de la ville moderne » (Rome, 6-8 octobre 1994), Ecole française de Rome,
de Toulouse avec des instructions pour connoitre les matériaux et Palais Farnèse, 1996, p. 349-363.
généralement tout ce qui concerne la bâtisse, Toulouse, Pijon,
1753. Menant 1996b : MENANT (F.), L’Italie centro-septentrio-
nale, BOURIN (M.), MARTIN (J.-M.), MENANT (F.) (textes
Leguay 1984 : LEGUAY (J.-P.), La rue au Moyen Âge, recueillis par), L’anthroponymie, document de l’histoire sociale
Rennes, Ouest France, 1984. des mondes méditerranéens médiévaux, Actes du colloque inter-
Leguay 1985 : LEGUAY (J.-P.), L’approvisionnement des national organisé par l’Ecole française de Rome avec le concours
chantiers bretons en matériaux de construction aux XIVe et XVe du GDR 955 du CNRS « Genèse médiévale de l’anthropologie
siècles, CHAPELOT (O.), BENOÎT (P.) (études réunies par), moderne » (Rome, 6-8 octobre 1994), Ecole française de Rome,
Pierre et métal dans le bâtiment au Moyen Âge, Actes du colloque Palais Farnèse, 1996, p. 19-28.
Mines, carrières et métallurgie dans la France médiévale 9-4 juin Mesqui 1991 : MESQUI (J.), Châteaux et enceintes de la
1982, Paris, Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, 1985, France médiévale, de la défense à la résidence, 1, les organes de
p. 27-79. la défense, Paris, Picard, 1991.
Leguay 2002 : LEGUAY (J.-P.), L’eau dans la ville au Molénat, Passini, 1999 : MOLENAT (J.-P.), PASSINI (J.),
Moyen Âge, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2002. L’emploi de la terre dans la construction en Nouvelle Castille à la
Lestrade 1899 : LESTRADE (J.), Fragment de la coutume fin du Moyen Âge, sources textuelles et apports du bâti,
de Frouzins et prise de possession de cette seigneurie en 1472, HAMMAM (M.), L’architecture de terre en Méditerranée, Série :
Revue de Comminges, XIV, 1899, p. 271-279. colloques et séminaires, n°80, Publications de la Faculté de
Lettres et des Sciences Humaines, Rabat, 1999, p. 121-134.
Loppe, Allabert 2002 : LOPPE (F.) (dir.), ALLABERT (B.),
ALLABERT (S.), Mise en défense et fortification dans la seconde Monsembernard 1992 : MONSEMBERNARD (G. de), Les
moitié du XIVe siècle : le village de Comigne (Aude), coutumes de Troncens de 1318, Bulletin de la société archéolo-
Archéologie du Midi médiéval, 20, 2002, p. 107-126. gique, historique littéraire et scientifique du Gers, XCIIIe année,
2e trimestre 1992, juillet 1992, p. 266-280.
Loppe 2003 : LOPPE (F.), Lagrasse et ses possessions
(Aude) : quelques exemples de mise en défense dans la seconde Nègre 2003 : NEGRE (V.), La « théorie-pratique » du pisé.
moitié du XIVe siècle, Archéologie médiévale, XXXIII, 2003, Mise en discours et en images d’une technique et sa réception
p. 139-194. dans le Sud-Ouest de la France aux XVIIIe et XIXe siècles,
Techniques et culture n° 41, janvier-juin 2003, p. 47-64.
Lucas 1996 : LUCAS (P.), Lézat-sur-Lèze et son abbaye. Dix
siècles d’histoire, Lézat, 1996. Nicolas 2005 : NICOLAS (N.), La guerre et les fortifications
du Haut-Dauphiné, étude archéologique des travaux des
Maguer 2003 : MAGUER (R.), De la cocagne au blé, châteaux et des villes à la fin du Moyen Âge, Aix-en-Provence,
pouvoir et espace autour de Castelnaudary de la Réforme à la Publications de l’Université de Provence, 2005.
Révolution, Estadens, Pyrégraph, 2003.
Parfouru, Carsalade du Pont 1886 : PARFOURU (P.),
Marandet 2001 : MARANDET (M.-C.), Un exemple de CARSALADE DU PONT (J. de) Comptes consulaires de la ville
ville policée en Midi toulousain à la fin du Moyen Âge : de Riscle de 1441 à 1507, Société Historique de Gascogne, tome
Castelnaudary, ASSIER ANDRIEU (L.), SALA (R.) (dir.), La premier : 1441-1484, Paris, 1886.
ville et les pouvoirs, Actes du colloque du huitième centenaire de
la charte de Perpignan, 23-25 octobre 1997, 2001, p. 201-226. Parfouru, Carsalade du Pont 1892 : PARFOURU (P.),
CARSALADE DU PONT (J. de) Comptes consulaires de la ville
Marandet 2005 : MARANDET (M.-C.), L’habitat rural en de Riscle de 1441 à 1507, Société Historique de Gascogne, tome
Lauragais, XVe-XVIIe siècles, ANTOINE (A.), COCAUD (M.), deuxième : 1485-1507, Paris, 1892.
PICHOT (D.) (dir.), La maison rurale en pays d’habitat dispersé
Pesez 1985 : PESEZ (J.-M.), La terre et le bois dans la
de l’Antiquité au XXe siècle, actes du colloque de Rennes, 29-30-
construction médiévale, LASFARGUES (J.), (dir.), Architectures
31 mai 2002, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2005,
de terre et de bois. L’habitat privé des provinces occidentales du
p. 163-174.
monde romain. Antécédents et prolongements : Protohistoire,
Marandet 2006a : MARANDET (M.-C.), Les registres d’es- Moyen Âge et quelques expériences contemporaines, Actes du
time du Lauragais (XVe siècle), RIGAUDIERE (A.) (dir.), De 2e congrès archéologique de Gaule méridionale, Lyon, 2-
l’estime au cadastre en Europe, Le Moyen Âge, Actes du colloque 6 novembre 1983, Documents d’archéologie française n° 2, Paris,
tenu à Bercy les 11, 12 et 13 juin 2003, Comité pour l’histoire Maison des sciences et de l’homme, 1985, p. 159-168.

281
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Pesez 1992 : PESEZ (J.-M.), Archéologie de la maison Pottier 1865 : POTTIER (abbé), Notes sur l’architecture
paysanne, Villages et villageois au Moyen Âge, Société des histo- militaire de Tarn-et-Garonne, Congrès archéologique de France,
riens médiévistes de l’enseignement public, Paris, Publications de Montauban, 1865, p. 488-498.
la Sorbonne, 1992, p. 181-192.
Prouzet 1975 : PROUZET (J.), Les Guerres de religion dans
Pesez 1998a : PESEZ (J.-M.), La référence ethnographique, les pays d’Aude, 1560-1596, Toulouse, 1975.
ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.), Cent maisons médiévales
Radzihovska 1998 : RADZIHOVSKA (O.), À propos du
en France (du XIIe au milieu du XVIe siècle). Un corpus et une
coût du travail à Aix-en-Provence au XVe siècle : apprentissage et
esquisse, Monographie du Centre de recherches archéologiques, salariat à travers les actes notariés, COULET (N.), GUYOT-
n° 20, Paris, CNRS, 1998, p. 49-51. JEANNIN (O.) (dir.), La ville au Moyen Âge, Actes du 120e
Pesez 1998b : PESEZ (J.-M.), La construction rustique en congrès national des sociétés historiques et scientifiques, Aix-en-
pierre, ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.), Cent maisons médié- Provence, 23-29 octobre 1995, section histoire médiévale et
vales en France (du XIIe au milieu du XVIe siècle). Un corpus et philologie, Paris, CTHS, 1998, p. 329-338.
une esquisse, Monographie du CRA, n° 20, Paris, CNRS, 1998, Raemy 2003 : RAEMY (D. de), Les toitures défensives du
p. 63-66. château d’Yverdon (vers 1275, reconstruites en 1380-1382),
Pesez 1998c : PESEZ (J.-M.), La construction en terre crue, POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le
ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.), Cent maisons médiévales château de pierre au Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le-
en France (du XIIe au milieu du XVIe siècle). Un corpus et une Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, Presses Universitaires
esquisse, Monographie du CRA, n° 20, Paris, CNRS, 1998, p. 67- Franc-Comtoises, 2003, p. 227-236.
68. Ramière de Fortanier 1939 : RAMIERE DE FORTANIER
Petitjean 2003 : PETITJEAN (M.), Constructions de terre en (J.), Chartes de franchises du Lauragais, Recueil de documents
Ille-et-Vilaine, au XIXe siècle, CHAZELLES (Cl.-A. de), relatifs à l’histoire du droit municipal en France des origines à la
KLEIN (A.) (dir), Echanges transdisciplinaires sur les construc- Révolution, Paris, Société d’histoire du droit, 1939.
tions en terre crue, 1. terre modelée, découpée ou coffrée, maté- Ramière de Fortanier 1970 : RAMIERE DE FORTANIER
riaux et modes de mise en œuvre, Actes de la table ronde de (A.), Enquête sur les péages du Lauragais jusqu’à la première
Montpellier, 17 et 18 novembre 2001, Montpellier, L’Espérou, moitié du XIVe siècle, Carcassonne et sa région, Actes des XLIe
2003, p. 331-338. et XXIVe congrès d’études régionales tenus par la Fédération
historique du Languedoc méditerranéen et du Roussillon et par la
Pignal 2005 : PIGNAL (B.), Terre crue, techniques de
Fédération des Sociétés académiques et savantes de Languedoc-
construction et de restauration, Coll. Au pied du mur, Paris,
Pyrénées-Gascogne, Carcassonne, 17-19 mai 1968, CNRS, 1970,
Eyrolles, 2005.
p. 207-222.
Pitte 2006 : PITTE (D.), Apports récents de l’archéologie à la
Ravier 1986 : RAVIER (X.), Atlas linguistique du
connaissance des villes de Haute-Normandie au Moyen Âge
Languedoc occidental, 3, Paris, CNRS, 1986.
(1975-2000), BOUET (P.), NEVEUX (F.) (éd.), Les villes
normandes au Moyen Âge, renaissance, essor, crise, Actes du Reigniez 2002 : REIGNEZ (P.), L’outil agricole en France au
colloque international de Cerisy-la-Salle (8-12 octobre 2003), Moyen Âge, Paris, Errance, 2002.
Office universitaire d’études normandes, Caen, Presses
Renaud 1914-1919 : RENAUD (C.), Carcassonne et le pays
Universitaires de Caen, 2006, p. 141-157.
carcassonnais pendant la Guerre de Cent Ans (1336-1391),
Poisson 2001 : POISSON (J.-M.), La maîtrise d’œuvre dans Discours historique, Mémoires de la Société des arts et sciences
les chantiers de construction des châteaux du comté de Savoie au de Carcassonne, X, 2e série, 1914-1919, p. 33-79.
XIVe siècle, CHAPELOT (O.) (dir.), Du projet au chantier, Reveyron, Tardieu 2003 : REVEYRON (N.), TARDIEU (J.),
maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre aux XIVe-XVIe siècles, Paris, Echafaudage et donjon. Méthodologie, problématique et spécifi-
éditions de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, 2001, cité, POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le
p. 161-175. château de pierre au Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le-
Poisson 2003 : POISSON (J.-M.), Glossaire technique de la Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, Presses Universitaires
construction du bois d’après les opera castri des comptes de Franc-Comtoises, 2003, p. 329-342.
châtellenies des XIVe et XVe siècles (Savoie-Dauphiné), Rigaudière 1982 : RIGAUDIERE (A.), Saint-Flour, ville
POISSON (J.-M.), SCHWIEN (J.-J.) (dir.), Le bois dans le d’Auvergne au bas Moyen Âge, étude d’histoire administrative et
château de pierre au Moyen Âge, Actes du colloque de Lons-le- financière, Paris, PUF, 1982, 2 vol.
Saunier, 23-25 octobre 1997, Besançon, Presses Universitaires
Franc-Comtoises, 2003, p. 437-445. Rigaudière 1996 : RIGAUDIERE (A.), Comptabilité muni-
cipale et fiscalité : l’exemple du livre de comptes des consuls de
Portet 2004 : PORTET (P.), Bertrand Boysset, la vie et les Saint-Flour pour l’année 1437-1438, MENJOT (D.), SANCHEZ
œuvres techniques d’un arpenteur médiéval (v. 1355-v. 1416). MARTINEZ (M.) (dir.), La fiscalité des villes au Moyen Âge
Edition et commentaire du texte provençal de La siensa de destrar (Occident Méditerranéen), 1, Etude des sources, Toulouse, Privat,
et de La siensa d’atermenar, Paris, Ed. Le Manuscrit, 2004, 2 vol. 1996, p. 101-133.
Portet 2006 : PORTET (P.), Recherches sur la notion de Rigaudière 2006 : RIGAUDIERE (A.), De l’estime au
précision dans la mesure médiévale, RIGAUDIERE (A.) (dir.), cadastre dans l’occident médiéval : réflexions et pistes de
De l’estime au cadastre en Europe, Le Moyen Âge, Actes du recherches, RIGAUDIERE (A.) (dir.), De l’estime au cadastre en
colloque tenu à Bercy les 11, 12 et 13 juin 2003, Comité pour Europe, Le Moyen Âge, Actes du colloque tenu à Bercy les 11, 12
l’histoire économique et financière de la France, Paris, Ministère et 13 juin 2003, Comité pour l’Histoire économique et financière
de l’économie, des finances, et de l’industrie, collection de la France, Paris, Ministère de l’économie, des finances, et de
Animation de la recherche, 2006, p. 151-160. l’industrie, collection Animation de la recherche, 2006, p. 3-22.

282
BIBLIOGRAPHIE

Riu 1985 : RIU (M.), Contribution à l’étude des techniques de Teyssot 1996 : TEYSSOT (J.), Les villes d’Auvergne pendant
construction au Moyen Âge. Parements, modules et outils, la guerre de Cent Ans, CONTAMINE (Ph.), GUYOTJEANNIN (O.)
Histoire des techniques et des sources documentaires. Méthodes (dir.), La guerre, la violence, et les gens au Moyen Âge, II.
d’approche et expérimentation en région méditerranéenne, Actes Guerres et Gens, Actes du 119e congrès des Sociétés historiques
du colloque du GIS, Aix en Provence (21-23 octobre 1982), Cahier et scientifiques d’Amiens, 26-30 octobre 1994, Paris, Ed. du
n° 7, Université de Provence, Aix-en-Provence, 1985, p. 53-70. CTHS, 1996, p. 49-57.
Rivals 1979 : RIVALS (Cl.), Midi toulousain et pyrénéen, Van Staevel 1999 : VAN STAEVEL (J.-P.), Réflexions à
L’architecture rurale française, corpus des genres, des types et propos de la nomenclature médiévale de l’architecture de terre en
des variantes, Musée national des Arts et Traditions populaires, occident musulman : l’exemple du tabyia, HAMMAM (M.),
Paris, Berger-Levrault, 1979. L’architecture de terre en Méditerranée, Série : colloques et sémi-
naires, n° 80, Publications de la Faculté de Lettres et des Sciences
Roquebert 1971-1989 : ROQUEBERT (M.), L’épopée
Humaines, Rabat, 1999, p. 95-109.
cathare, Toulouse, Privat, 1971-1989, 4 vol.
Vaucluse 1981 : Vaucluse, Pays d’Aigues, cantons Cadenet et
Saint Jean Vitus, Seiller et al. 1998 : SAINT JEAN
Pertuis, Ministère de la Culture et de la Communication,
VITUS (B.), SEILLER (M.), FRAY (F.), LETTERON (I.), La
Inventaire général des richesses artistiques de la France,
construction de bois, ESQUIEU (Y.), PESEZ (J.-M.) (dir.), Cent
Commission régionale de Provence-Alpes-Côte d’Azur, Paris,
maisons médiévales en France (du XIIe au milieu du XVIe siècle).
Imprimerie nationale, 1981, p. 106-111.
Un corpus et une esquisse, Monographie du CRA, n° 20, Paris,
CNRS, 1998, p. 69-85. Verna 2001 : VERNA (C.), Le temps des moulines. Fer, tech-
nique et société dans les Pyrénées centrales (XIVe-XVIe siècles),
Salamagne 2001a : SALAMAGNE (A.), Construire au
Moyen Âge, les chantiers de fortification de Douai, Lille, Presses Paris, Publications de la Sorbonne, 2001.
Universitaires du Septentrion, 2001. Vidal 1900 : VIDAL (A.), Comptes consulaires d’Albi (1359-
Salamagne 2001b : SALAMAGNE (A.), Les projets archi- 1360), Toulouse, Privat, 1900.
tecturaux dans les villes du nord de la France à l’époque médié- Vidal 1906 : VIDAL (A.), Douze comptes consulaires d’Albi
vale et au début de la Renaissance : des maîtres d’ouvrage aux du XIVe siècle, I, Toulouse, Privat, 1906.
maîtres d’œuvre, CHAPELOT (O.) (dir.), Du projet au chantier,
maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre aux XIVe-XVIe siècles, Paris, Vidal 1911 : VIDAL (A.), Douze comptes consulaires d’Albi
éditions de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, 2001, du XIVe siècle, II, Toulouse, Privat, 1911.
p. 219-238. Viollet-le-Duc s.d. : VIOLLET-LE-DUC (E.), Dictionnaire
Sanchez, Dellong et al. 1999 : SANCHEZ (C.), raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, Paris,
DELLONG (E.), GUERRE (J.), LOPPE (F.), MOULIS (D.), Un Librairies-Imprimeries réunies, sd. 10 vol.
établissement littoral antique, l’île Saint-Martin à Gruissan Waha 1999 : WAHA (M. de), Les enceintes sur arcs des
(Aude), Revue archéologique de Narbonnaise n° 33, 2000, anciennes principautés belges, BLIECK (G.), CONTAMINE (Ph.),
p. 309-349. FAUCHERRE (N.), MESQUI (J.) (textes réunis par), Les
Schnerb 1999 : SCHNERB (B.), La politique des ducs de enceintes urbaines (XIIIe-XVIe siècle), 121e congrès national des
Bourgogne Philippe le Hardi et Jean Sans Peur en matière de sociétés historiques et scientifiques, section archéologie et
fortifications urbaines, BLIECK (G.), CONTAMINE (Ph.), histoire de l’art, Nice, 1996, Paris, CTHS, 1999, p. 197-210.
FAUCHERRE (N.), MESQUI (J.) (textes réunis par), Les Wilsdorf-Colin 1998 : WILSDORF-COLIN (O.), La mise en
enceintes urbaines (XIIIe-XVIe siècle), 121e congrès national des défense de Langres au lendemain de la bataille de Poitiers (1356),
sociétés historiques et scientifiques, section archéologie et COULET (N.), GUYOTJEANNIN (O.) (dir.), La ville au Moyen
histoire de l’art, Nice, 1996, Paris Ed. du CTHS, 1999, p. 345- Âge, Actes du 120e congrès national des sociétés historiques et
352. scientifiques, Aix-en-Provence, 23-29 octobre 1995, section
Sévegnes 2002 : SEVEGNES (L.), Quelques éléments pour histoire médiévale et philologie, Paris ; CTHS, 1998, p. 167-180.
une typologie des villages de Lomagne, Les cahiers de la Wolff 1954 : WOLFF (Ph.), Commerces et marchands de
Lomagne, Villes, bourgs, et villages de Lomagne, 1ère série, Actes Toulouse (vers 1350-vers 1450), Paris, Plon, 1954.
du colloque de Lavit « Mieux connaître la Lomagne », 14 et
15 septembre 2002, n°spécial 4, p. 9-23. Wolff 1956 : WOLFF (Ph.), Les estimes toulousaines des
XIVe et XVe siècles, Toulouse, CNRS, Association Marc Bloch,
Sosson 1985 : SOSSON (J.-P.), À propos des « travaux 1956.
publics » de Bruges, Bruxelles, Damme, Gand, Mons et Ypres
aux XIVe et XVe siècles, CHAPELOT (O.), BENOÎT (P.) (études Wolff 1978a : WOLFF (Ph.), Toulouse vers 1400 : répartition
réunies par), Pierre et métal dans le bâtiment au Moyen Âge, topographique des fortunes et des professions, WOLFF (Ph.),
Actes du colloque Mines, carrières et métallurgie dans la France Regards sur le Midi médiéval, Toulouse, Privat, 1978, p. 267-278.
médiévale 9-4 juin 1982, Paris, Ecole des Hautes Etudes en
Wolff 1978b : WOLFF (Ph.), Trois études de démographie
Sciences sociales, 1985, p. 103-115.
médiévale en France méridionale, WOLFF (Ph.), Regards sur le
Streiff, Lahure 2003 : STREIFF (F.), LAHURE (F.), Le patri- Midi médiéval, Toulouse, Privat, 1978, p. 353-361.
moine en bauge de Haute et Basse-Normandie. Caractéristiques et
développement actuel des savoir-faire en Normandie, TRAVAUX UNIVERSITAIRES ET
CHAZELLES (Cl.-A. de), KLEIN (A.) (dir), Echanges transdis-
TRAVAUX NON PUBLIES
ciplinaires sur les constructions en terre crue, 1. terre modelée,
découpée ou coffrée, matériaux et modes de mise en œuvre, Actes Bertrand ; Briançon 1989 : BERTRAND (S.),
de la table ronde de Montpellier, 17 et 18 novembre 2001, BRIANÇON (A.), L’habitat en Lauragais du XIIe au XIVe siècle.
Montpellier, Ed. de l’Espérou, 2003, p. 315-330. Etude sur dix-sept villages des coteaux de la rive gauche de

283
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

l’Hers ; du « castrum » au « fort », Mémoire de maîtrise d’his- Duvernoy s.d : DUVERNOY (J.), Le Registre de Bernard de
toire, Université de Toulouse-Le-Mirail, 1989. Caux, Ms 609, bibliothèque municipale de Toulouse.
Briançon 1991 : BRIANÇON (A.), Les forts villageois en Du Puy des Grais 1713 : DU PUY DES GRAIS (B.),
Lauragais et Toulousain au Bas Moyen Âge : projet d’étude et de Recherches sur l’histoire de Toulouse, manuscrit de la
recherche, Mémoire de DEA, Université de Toulouse-Le-Mirail, Bibliothèque municipale de Toulouse, n°1254, 1713.
1991.
Eclache 1974 : ECLACHE (M.), Histoire politique et fiscale
Butaud 2001 : BUTAUD (G.), Guerre et vie publique en de Toulouse (1415-1440), Thèse pour le doctorat de troisième
Comtat Venaissin et à Avignon (vers 1350-vers 1450), Thèse de cycle, Université de Toulouse-le-Mirail, 1974.
doctorat, Université de Nice, 2001, 3 vol.
Ginouvez 2003 : GINOUVEZ (O.), Limoux (11). Premiers
Cazes 1998 : CAZES (J.-P.), Habitat et occupation du sol en sondages sur le site fortifié des Pontils (XIIe-XIIIe siècles),
Lauragais audois au Moyen Âge, Thèse de doctorat, Université Document final de synthèse de diagnostic archéologique, SRA
Toulouse-le-Mirail, 1998, 3 vol. Languedoc-Roussillon, INRAP Méditerranée, 2003.
Chaumet 1973 : CHAUMET (J.-M.), Le droit coutumier du Loppe 2000-2001 : LOPPE (F.), Mise en défense et fortifica-
rempart en Languedoc, Diplôme d’études supérieures de droit tion en pays audois nord-occidental durant la guerre de Cent Ans
romain et histoire du Droit, Université de Droit et Sciences : approche des sources (1337-1453), Mémoire de DEA sous la
économiques, Université de Montpellier I, 1973 ; A. D. Hérault, direction de M. Fixot, Université d’Aix-Marseille, 2000-2001.
TAR 466.
Loppe 2007 : LOPPE (F.), La terre crue dans la fortification
Delmas 1968b : DELMAS (J.-L.), Les termes techniques de en Lauragais : l’exemple de Castelnaudary (Aude), vers 1355-
la construction en langue d’oc en usage dans l’Albigeois, Thèse vers 1450, Thèse de doctorat sous la direction de M. Fixot,
de l’Ecole nationale des chartes, Paris, 1968. Université d’Aix-Marseille, 2007, 3 vol., 904 p.

284
INDEX, P. 285-294

Index

Noms de lieux
AFRIQUE : 148.
AIX, AIX-EN-PROVENCE (Bouches-du-Rhône) : 81, 167, 179, 180, 200, 209.
ALAIGNE (Aude) : 45, 49, 50, 51, 52, 85, 88, 218.
ALBI (Tarn) : 33, 35, 40, 42, 62, 63, 64, 66, 72, 73, 79, 81, 82, 109, 111, 112, 113, 115, 117, 120, 125, 126, 135, 145,
147, 155, 173, 178, 199, 201, 218, 220.
ALBIGEOIS : 30, 35, 59, 64, 109, 111, 114, 133, 138, 146, 219.
ANGLAIS Richard (Montréal, Aude, maison de) : 61.
ARZENS (Aude) : 74.
AUDE : 11, 15, 22, 45, 49, 52, 55, 59, 73, 74, 82, 87, 109, 114, 132, 136, 145, 218, 221.
AURENTE ferme d’Huc d’(Castelnaudary, Aude) : 206.
AURENTE pré de Bernard d’(Castelnaudary, Aude) : 206.
AUTERIVE (Haute-Garonne) : 59.
AUVERGNE : 16, 60.
AYGUESVIVES (Haute-Garonne) : 52.
BAFFE (Castelnaudary, Aude ; port) : 28, 31, 32, 89, 97, 126, 129, 141, 143, 153, 167, 168.
BAFFE (Castelnaudary, Aude ; porte-vieille) : 28, 31.
BAFFE (Castelnaudary, Aude ; porte de la) : 28, 30, 31, 60, 89, 96, 98, 117, 141, 168, 194, 213.
BARRIUM (Castelnaudary, Aude ; porte du) : 32, 33, 96, 101, 103, 128, 141.
BARRIUM (Castelnaudary, Aude ; tour du) : 118.
BARRIUM DE FORA : voir BARRIUM EXTRA.
BARRIUM, BARRIUM EXTRA (Castelnaudary, Aude ; futur barrium Sainte-Croix) : 28, 30, 32, 131, 156, 158, 164, 165,
171, 175, 176.
BARRIUM INFRA (Castelnaudary, Aude ; futur port de Dins) : 28, 30, 32, 166, 171, 174, 175.
BAS-RAZÈS : 45, 48, 63, 72, 73, 76.
BAS-QUERCY : 76.
BASTIDE/ BASTIDA (Castelnaudary, Aude ; pont) : 32.
BASTIDE/ BASTIDA (Castelnaudary, Aude ; porte de la) : 28, 32, 97, 98, 117.
BASTIDE/ BASTIDA (Castelnaudary, Aude ; quartier, secteur) : 28, 32, 33, 71, 85, 156.
BÉARN : 158, 173.

285
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

BEAUMONT-DE-LOMAGNE (Tarn-et-Garonne) : 46.


BIGORRE : 158.
BORDES (Castelnaudary, Aude, port) : 22, 28, 30, 31, 32, 68, 73, 89, 123, 129, 131, 153, 155, 156, 157, 158, 165, 166,
171, 172, 173, 176, 207, 215.
BOSC P. (Toulouse, Haute-Garonne, maison de) : 67.
BOURGOGNE : 60, 132.
BOURRET (Tarn-et-Garonne) : 82.
BRAM (Aude) : 59.
BRETAGNE : 159, 160, 161, 167, 215.
BRIQUE (Albi, Tarn ; mur de la) : 82.
BUADE (Castelnaudary, Aude ; porte de la) : 28, 32, 117.
BUGEY (Ain, pays) : 67, 68, 69, 72, 222.
CAIGNAC (Haute-Garonne) : 64, 85.
CALVAYRAC (Cazalrenoux, Aude ; bois de/bois de Jean de) : 64, 200.
CARCASSONNAIS (Aude, pays) : 46.
CARCASSONNE (Aude ; ville basse) : 46.
CARMES (Castelnaudary, Aude ; couvent des) : 32, 126.
CARMES (Montréal, Aude ; porte des) : 186, 187.
CARPENTRAS (Vaucluse) : 60.
CASTANET (Haute-Garonne) : 16.
CASTELGINEST (Haute-Garonne) : 87, 90, 185.
CASTELNAUDARY (Aude) : 11, 15, 17, 22, 25, 28, 31, 32, 33, 34, 35, 39, 40, 43, 44, 51, 52, 59, 61, 62, 63, 64, 65,
66, 69, 72, 73, 74, 76, 77, 79, 80, 81, 82, 85, 88, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 109, 111, 112, 113, 114, 117, 119,
120, 121, 122, 123, 125, 126, 128, 129, 132, 133, 134, 142, 143, 146, 147, 148, 152, 153, 156, 158, 159, 160, 161, 164,
165, 166, 167, 169, 171, 173, 176, 177, 178, 179, 182, 185, 189, 194, 197, 201, 202, 203, 204, 205, 206, 209, 210, 212,
215, 216, 217, 218, 219, 220, 225.
CATALOGNE (Espagne) : 77.
CAZILHAC (Aude) : 46.
CENS : voir CLOCHES.
CÉPIE (Aude) : 48.
CHÂTEAU NARBONNAIS (Toulouse, Haute-Garonne) : 145.
CABRA MORTUA forêt de (Les Cammazes, Tarn/Saissac, Aude) : 98, 127.
CLOCHES (Castelnaudary, Aude ; porte des) : 28, 31, 32, 35, 93, 96, 98, 100, 101, 103, 117, 120.
COMIGNE (Aude) : 132, 136.
CONTRESTY (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 31.
CORDELIERS (Castelnaudary, Aude ; couvent, cloître des) : 28, 31, 42, 60, 62, 72, 74, 113, 130, 133, 135, 194, 201, 213.
CÔTES D’ARMOR : 159.
DEL RYU (Castelnaudary, Aude ; consul ; maison de Guiraut) : 154, 182, 189.
DIGNE D’AVAL (Aude) : 45, 49, 51, 52, 85, 88, 218.
DINS (Castelnaudary, Aude ; port de) : 28, 30, 31, 32, 166.
DINS (Castelnaudary, Aude ; barrium de) : 28, 30, 32, 71.
ESPAGNE : 11, 16, 59, 65, 147, 148.
ESPARSAC (Tarn-et-Garonne) : 46, 49, 50, 51, 52, 61, 80, 88.
ESQUIVE (Montréal, Aude ; porte) : 87, 186, 187.
ESTAMBIGOU (Castelnaudary, Aude ; quartier de l’) : 112, 114, 121, 207.
ESTRADE (Castelnaudary, Aude ; barbacane de l’) : 117, 118, 119, 120.
ESTRADE (Castelnaudary, Aude ; port de l’) : 28, 30, 31, 32, 33, 80, 89, 98, 115, 123, 124, 127, 155, 158, 163, 164,
169, 171, 174, 175, 189, 207, 212, 215.
ESTRADE (Castelnaudary, Aude ; porte Neuve de l’) : 30, 95.
ESTRADE (Castelnaudary, Aude ; porte de l’) : 30, 31, 32, 57, 94, 95, 98, 100, 101, 117, 118, 119, 120.

286
INDEX

ESTRADE (Castelnaudary, Aude ; tour de l’) : 89, 92, 98, 141, 194.
FANJEAUX (Aude) : 57, 58, 75, 88, 182, 186, 189.
FERIERA/FERRERIA (Castelnaudary, Aude ; derrière chez dona) : 122, 123, 124.
FERRALS (Saint-Papoul, Aude ; auj. ferme et château) : 122.
FOIX/FOY (Castelnaudary, Aude ; barbacane de) : 118.
FOIX/FOY (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 31, 117.
FONSORBES (Haute-Garonne) : 59.
FONT ROSAND (Castelnaudary, Aude ; auj. ferme de Font-Rouzaud) : 112, 202.
FONTAINE SAINTE-MARIE (Toulouse, Haute-Garonne ; porte de la) : 85, 211.
FRANCE (pays, royaume de) : 15, 16, 17, 28, 42, 57, 70, 72, 75, 78, 82, 142, 148, 159, 196, 215, 216, 217, 219, 220,
221, 222.
FRÈRES MINEURS (Castelnaudary, Aude) : voir CORDELIERS.
FRESQUEL ruisseau du (Aude) : 25, 113, 114, 206.
FRONTON (Haute-Garonne) : 36, 77, 88, 107.
FROUZINS (Haute-Garonne) : 59.
GARONNE (fleuve) : 82.
GASCOGNE : 59, 70, 164.
GOUFFERAN (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 30, 60, 73, 89, 91, 95, 96, 98, 117, 141, 165, 190,
HAUT-DAUPHINÉ : 33, 132.
ILLE-ET-VILAINE : 50.
ISSEL (Aude) : 96, 97, 142.
JUILLES (Gers ; maison forte de) : 127, 142.
LA BRUYÈRE NOIRE (Villeneuve-la-Comptal, Aude) : 64.
LABÉCÈDE-LAURAGAIS (Aude) : 134.
LANGUEDOC (pays, province de) : 16, 28, 64, 70, 77, 115.
LAROQUE D’OLMES (Ariège) : 137.
LAS BRUGUES (Saint-Papoul, Aude ; auj. ferme) : 64.
LASCROSSES (Toulouse, Haute-Garonne ; tour de) : 96.
LATTES (Hérault) : 16, 295.
LAURAGAIS (pays, comté de) : 11, 15, 16, 17, 22, 25, 32, 39, 55, 58, 60, 62, 64, 72, 73, 75, 76, 79, 81, 97, 104, 111,
112, 115, 117, 132, 137, 138, 146, 147, 148, 160.
LAURAGAIS (judicature de ; jugerie de) : 20.
LAVALETTE (Aude) : 87, 161.
LÉGUEVIN (Haute-Garonne) : 135.
LEUC (Aude) : 48.
LÉZAT-SUR-LEZE (Ariège) : 74, 75.
LIMOUX (Aude) : 59, 61, 75, 76, 77, 80, 87, 88.
LYON (Rhône) : 70, 295.
MARCHÉ (Castelnaudary, Aude ; porte du) : 28, 30, 31, 33, 85, 94, 95, 96, 98, 100, 117.
MARCHÉ (Castelnaudary, Aude ; tour du) : 202.
MAS SAINTES-PUELLES (Aude) : 95, 120, 121, 146, 147.
MATABIAU porte de (Toulouse, Haute-Garonne) : 35.
MATABIAU quartier de (Toulouse, Haute-Garonne) : 204.
MEDITERRANÉE : 115, 217.
MIDI-PYRENÉES : 48, 50, 72, 87.
MIREVAL-LAURAGAIS (Aude) : 58.
MONTAUBAN (Tarn-et-Garonne) : 87, 185.
MONTBÉQUI (Tarn-et-Garonne) : 59.
MONTDEBO (Castelnaudary, Aude ; barbacane de) : 95.

287
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

MONTDEBO (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 30, 31, 32, 33, 65, 73, 95, 96, 97, 98, 100, 102, 103.
MONTFERRAND (Aude) : 122, 201.
MONTGAILLARD (Toulouse, Haute-Garonne ; porte de) : 81, 82.
MONTGISCARD (Haute-Garonne) : 59.
MONTPELLIER (Hérault) : 17, 59, 295.
MONTRÉAL (Aude) : 52, 55, 58, 60, 61, 73, 82, 87, 90, 154, 155, 156, 161, 185, 187, 212, 216.
MONTSAUNÈS (Haute-Garonne) : 136.
NARBONNAIS (Castelnaudary, Aude ; port) : 28, 30, 33, 128.
NARBONNAISE (Castelnaudary, Aude ; porte) : 28, 30, 31, 101, 103, 206.
NOLET/NONET (bois de ; Saint-Papoul, Aude ; auj. ferme Raynaud) : 121.
NORMANDIE : 72, 74, 215.
OLIVE Bertrand (Castelnaudary, Aude ; derrière chez) : 43.
OLRIC Guillaume (Castelnaudary, Aude ; maison de) : 126, 131.
ORGUEIL (Tarn-et-Garonne) : 77, 135.
PALAIS (Castelnaudary, bois du seigneur du) : 64, 205.
PALAIS (Castelnaudary, maison du seigneur du) : 60.
PANQUÈRE (Castelnau-Magnoac, Hautes-Pyrénées ; ferme de) : 142.
PAYTHALIÈRES LES (Fonters-du-Razès, Aude ; lieu-dit disparu) : 114, 206.
PECHBUSQUE (Ricaud, Aude ; auj. ferme) : 43.
PERPIGNAN (Pyrénées-Orientales) : 57, 74.
PEXIORA (Aude) : 137.
PI (Toulouse, Haute-Garonne ; château de) : 96.
PEYRALBE (Castelnaudary, Aude ; auj. St Bénazeth ; port de) : 28, 30, 156, 164, 166, 169.
PEYRALBE (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 30, 117.
PLACE (Castelnaudary, Aude, port de la) : 28, 30, 32, 133.
PLACE (Castelnaudary, Aude, barbacane de la) : 42, 117, 118, 119, 143, 144.
PLACE (Castelnaudary, Aude, porte de la) : 28, 42, 85, 96, 97, 101, 102, 103, 117, 119, 143, 144.
PLAIGNE (Aude) : 44.
PLANCAPRES (Mas Saintes-Puelles, Aude ; auj. ferme de La Planque ?) : 121, 122.
PORTE-NEUVE (Toulouse, Haute-Garonne ; tour de, porte de) : 203.
RAZÈS (Aude, pays) : 75.
RAZÈS (Montréal, Aude ; porte de) : 87, 186.
RENNEVILLE (Haute-Garonne) : 59, 73, 76, 85.
REVEL (Haute-Garonne) : 43.
RISCLE (Gers) : 64.
RODEZ (Aveyron) : 35, 120, 124, 133, 135.
RODIER Guillaume-Jacques (Montréal, Aude ; maison de) : 61.
RONDE (Castelnaudary, Aude ; tour) : 93.
ROSILHAC (Issel, Aude ; bois de ; auj. ferme de Rouzilhac) : 64, 205.
SAGOS (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 32.
SAINT-ANTOINE (Castelnaudary, Aude ; faubourg, secteur) : 31, 89.
SAINT-ANTOINE (Castelnaudary, Aude ; porte) : 28, 30, 31, 87, 92, 95, 97, 117, 145, 166, 190, 210.
SAINT-ANTOINE (Castelnaudary, Aude ; tour) : 92, 93, 97, 126.
SAINT-BENOIT/SAINT-BENAZETH (Castelnaudary, Aude ; prieuré) : voir PEYRALBE.
SAINT-BRIEUC (Côtes d’Armor) : 159, 212.
SAINT-CYPRIEN (Toulouse, Haute-Garonne ; faubourg) : 16, 125, 204.
SAINTE-CROIX (Castelnaudary, Aude ; port) : 28.
SAINTE-CROIX (Castelnaudary, Aude ; porte) : 28.
SAINTE-CROIX (Castelnaudary, Aude ; barrium de) : 28, 32, 85, 117, 131, 154, 156, 165.

288
INDEX

SAINTE-MARIE (Castelnaudary, Aude ; cimetière) : 42.


SAINTE-MARIE (Toulouse, Haute-Garonne ; fontaine) : 85, 211.
SAINTE-CHRISTIE- D’ARMAGNAC (Gers) : 142.
SAINT-ETIENNE (Toulouse, Haute-Garonne ; porte de) : 93, 96.
SAINT-ETIENNE (Toulouse, Haute-Garonne ; quartier de) : 67, 85, 203, 204.
SAINT-FÉLIX-LAURAGAIS (Haute-Garonne) : 59.
SAINT-FLOUR (Cantal) : 188, 189, 191, 194.
SAINT-JACQUES (Castelnaudary, Aude ; carrière) : 158, 191.
SAINT-JULIEN-DE-BRIOULE (Aude) : 154, 158.
SAINT-MARTIN-LALANDE (Aude) : 200.
SAINT-MICHEL (Castelnaudary, Aude ; église) : 28, 100, 109, 142.
SAINT-NAZAIRE (Carcassonne, Aude ; cathédrale) : 36.
SAINT-PAPOUL (Aude) : 64, 121, 122.
SENS : voir CLOCHES.
SERVICE/SERVIT (Castelnaudary, Aude ; porte de maître B.) : 119, 123, 131, 215.
SORÈZE (Tarn) : 43.
TARN-ET-GARONNE : 46, 52, 59, 185.
TERRIER/TERIER (Castelnaudary, Aude ; quartier du, secteur du) : 31, 32, 123, 164.
TERRIER/TERIER (Castelnaudary, Aude ; porte du) : 28, 30, 96, 98, 117, 212.
THIL (Haute-Garonne) : 46, 50, 51, 52, 61, 80, 88, 160, 218.
TOULOUSAIN (pays) : 11, 15, 16, 17, 32, 39, 55, 58, 60, 62, 64, 66, 72, 75, 76, 77, 79, 104, 111, 112, 115, 117, 132,
138, 146, 147, 148, 155.
TOULOUSE (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28.
TOULOUSE (Haute-Garonne) : 11, 16, 22, 25, 32, 33, 35, 42, 46, 59, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 70, 71, 73, 76, 77, 79, 81,
82, 85, 91, 92, 93, 94, 96, 97, 100, 122, 125, 128, 129, 134, 135, 145, 146, 147, 152, 154, 155, 156, 159, 161, 176, 178,
184, 200, 201, 203, 209, 211, 212, 215, 216, 218, 219, 220.
TOULOUSE (sénéchaussée de) : 160.
TRÉBOUL (Aude, ruisseau du) : 25, 114.
VALENCE (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 28, 96, 176.
VAUCLUSE : 16, 60, 76, 142.
VERLHAC (Tarn-et-Garonne ; auj. Verlhaguet, commune de Lacourt-Saint-Pierre) : 52, 87, 90, 135, 155, 160, 185, 186.
VILLEMAGNE (Aude) : 43.
VILLENEUVE-LA-COMTAL (Aude) : 64.
VILLEVIEILLE maître P. (Castelnaudary, Aude ; porte de) : 126.

Noms de personnes
AMIEL Bernard (Castelnaudary, Aude) : 173.
AMIEL Raymond (Castelnaudary, Aude) : 173.
AMIEL Roger (Toulouse, Haute-Garonne ; cordier, rue Payrolières) : 70.
AMOUROUX Pierre (Castelnaudary, Aude) : 205.
ANGLAIS Bernard (Mas-Saintes-Puelles, Aude ; chaufournier) : 95, 120.
ANGLAIS Jean (Castelnaudary, Aude) : 120.
ANGLAIS Richard (Montréal, Aude ; héritiers de maître) : 61.
ANHANT Bernard (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 95, 120.
ANJOU (duc d’) : 31.
ARMAGNAC (comte d’ ; Jean d’) : 28, 32.
ARTIGUE Raymond de (Castelnaudary, Aude ; charpentier ?) : 176.
ASSALIT Arnaud (Limoux, Aude ; consul) : 75.
ASTAT Guillaume (Montréal, Aude ; délégué aux oeuvres de la ville) : 61.

289
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

AUDENHAM Arnoul d’ (maréchal de France, capitaine général du Languedoc) : 80.


AUGIER Guillaume (Castelnaudary, Aude ; magister ; charpentier ?) : 171.
AURENTE seigneur Huc d’ (Castelnaudary, Aude) : 122, 123, 206.
AURIOL Jean (Castelnaudary, Aude) : 171.
AYBRAND Raymond (Castelnaudary, Aude) : 172.
AYCART B. (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 183.
BARRAU Arnaud (Castelnaudary, Aude) : 171.
BARRAU Bernard (Castelnaudary, Aude) : 171.
BARRAU G. (Castelnaudary, Aude) : 171.
BARRAU Stéphane (Castelnaudary, Aude; brassier) : 143, 171.
BARTAS Michel (Castelnaudary, Aude ; arpenteur) : 180, 207.
BARTAS Raymond (Castelnaudary, Aude ; consul) : 44.
BASSER Jean de (Montréal, Aude ; paredier) : 161.
BASTON Pierre (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 119.
BATAILLE Jean (Fanjeaux, Aude ; notaire) : 75.
BÉARN Guillaume de (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 158, 159.
BÉARNAIS Bernard (Toulouse, Haute-Garonne ; charpentier) : 35.
BÉARNAIS G. le (Castelnaudary, Aude) : 153, 173.
BÉDARIEUX Pierre de (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre ») : 163, 164, 166, 169, 190, 212, 213.
BÉLENGIER P. (Castelnaudary, Aude) : 141.
BELLEGARDE G. (Castelnaudary, Aude) : 172.
BERTRAND Pierre (Castelnaudary, Aude) : 169, 173.
BIGOURDIN G. le (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 153, 158, 159.
BLANC Antoine (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186.
BLANH Jacques de (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186.
BLANQUIER Raymond (Castelnaudary, Aude) : 175.
BOCENHAC Bernard (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 153, 158, 159.
BONET Pierre (Villemagne, Aude ; fabriquant de paniers) : 43.
BORDES Favre (Castelnaudary, Aude) : 171, 175.
BORNIANERHI Bertrand (Castelnaudary, Aude) : 172.
BOSC/DE BOSC/DU BOSC Pierre (alias LABAT ; consul de Castelnaudary, puis sergent royal de Toulouse) : 21, 206.
BOYOT R. (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 183.
BOYS Jean (Toulouse, Haute-Garonne ; valladie) : 154, 159, 160.
BRETON Alen (Castelnaudary, Aude) : 157.
BRETON Aliet (Castelnaudary, Aude) : 157.
BRETON Jean le (Castelnaudary, Aude ; paredier) : 157, 184.
BRETON Olivier le (Castelnaudary, Aude ; maçon ?) : 157, 184.
BRETON Raulin le (Castelnaudary, Aude) : 157.
BRETON Yvonet le (Castelnaudary, Aude) : 157.
BREZEYT/BRESEYT Bernard (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 153, 156.
BRIANT Jean (Castelnaudary, Aude) : 157.
BURD Guillaume (Castelnaudary, Aude; charpentier) : 165, 166, 190, 212.
BURD Pons (Castelnaudary, Aude; charpentier ?) : 165, 166, 190.
CALVAT Guilhem (commandeur de l’Ordre de Malte, seigneur de Verlhac, Tarn-et-Garonne) : 135, 185.
CARDONE Bernard (Castelnaudary, Aude) : 172.
CARRIÈRE Jean (Castelnaudary, Aude) : 174, 194.
CARRIÈRE maître Jean (Castelnaudary, Aude) : 174.
CAS/COSS Raymond de (Toulouse, Haute-Garonne ; maçon) : 81, 145.
CASER/CASSER Jean (Castelnaudary, Aude) : 205, 206.

290
INDEX

CAUSSIDIÈRES Jacques de (Castelnaudary, Aude) : 205.


CLERC-PRUNIER Guillaume (Montréal, Aude ; paredier) : 161.
COLON/COLOM Jean (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 182, 183.
COMPTE Jean (Castelnaudary, Aude) : 169.
CONSTANTIN Pierre (Castelnaudary, Aude) : 201.
COSTE/COSTA Pierre (Castelnaudary, Aude ; forgeron) : 138.
DANDANT Pierre (Castelnaudary, Aude) : 175.
DANDANT Raymond (Castelnaudary, Aude) : 174, 175, 194.
DARENTON Jean, (Toulouse, Haute-Garonne ; paredier/valadier) : 42, 154, 160.
DEGUARAG/DEGARAC/DE GARAC Jean (Toulouse, Haute-Garonne ; paredier) : 159, 160.
DENAT Arnaud (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 153, 159, 173.
DENNIER Pons (Castelnaudary, Aude) : 175.
DOSTE Jean (Castelnaudary, Aude) : 102, 205.
DUN Pierre de (Ariège ; fabriquant de cabas) : 43.
DUPONT Arnaud (Castelnaudary, Aude) : 169.
DUPUY Favre (Castelnaudary, Aude ; maçon-carrier) : 171, 172.
DUPUY Guillaume (Castelnaudary, Aude) : 201.
DUPUY maître Bernard (Castelnaudary, Aude ; forgeron) : 138, 172.
DURANDEL Pierre (Montréal, Aude ; vallifactor, paredier ?) : 154, 161, 185, 187, 212.
EMBRI/EMBRUN Bernard (Castelnaudary, Aude ; charpentier, meunier) : 128.
EN DOAYH (Castelnaudary, Aude ; forestier) : 202.
ENSALBERT/ENGELBERT (Renneville, Haute-Garonne, habitant) : 73, 76.
ESPANAL Pierre l’ (Castelnaudary, Aude) : 169.
ESPELIT/SPELIC G. (Castelnaudary, Aude ; paredier/valadier ?) : 153, 154, 156, 159, 172.
FABRE/FAVRE Jean (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 119.
FABRE Raymond (Sorèze, Tarn) : 43.
FARGUES Elie (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre ») : 164, 166, 169, 190, 212, 213.
FAROLE Bernard (Castelnaudary, Aude ; charpentier) : 166.
FAVRE maître Bernard (Montréal, Aude) : 60, 61.
FERRAN/OT Pierre (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre » ?) : 164, 169, 215.
FOIX (comte de) : 32, 100, 128.
FONT Pierre de la (Revel, Haute-Garonne, fabricant de paniers) : 43.
FONTAINE Bertrand-Raymond de (milites, seigneur de Belflou, Aude) : 75.
GAMACHE Jean (Montréal, Aude ; paredier) : 161, 186.
GARRET/GUARET maître Arnaud (Castelnaudary, Aude ; consul) : 153.
GASTANT Jean (Castelnaudary, Aude) : 171.
GASTON Dominique (Castelnaudary, Aude ; maçon-carrier) : 21, 184, 210.
GAUSI/GAUZI Jean (Castelnaudary, Aude) : 169.
GAUTIER Pierre (Castelnaudary, Aude) : 205.
GELAT/GILAT Guillaume (Castelnaudary, Aude ; forgeron) : 96, 100, 138.
GELAT Pierre (Castelnaudary, Aude) : 209.
GIBEL (Castelnaudary, Aude) : 189.
GIMELE demoiselle (Castelnaudary, Aude) : 61.
GONTIER Pierre (Castelnaudary, Aude) : 172.
GONTIER Raymond (Castelnaudary, Aude) : 172.
GRAS B. (Castelnaudary, Aude) : 175, 194.
GRAS Jean (Castelnaudary, Aude) : 175.
GRAS Pierre (Castelnaudary, Aude ; boucher) : 175.
GREULE/GRELE Jean (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161.

291
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

GREULE/GRELE Raymond (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161.


GUI Bernard (Castelnaudary, Aude) : 21.
GUILABERT G. (Castelnaudary, Aude) : 168.
GUILHEM G. (Castelnaudary, Aude) : 176.
GUILHEM Jean (Castelnaudary, Aude) : 176.
GUILHEM Pierre (Castelnaudary, Aude) : 171, 176.
GUIRAUD Antoine (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186.
GUIRAUD Jean (alias LE BESSO ; Montréal, Aude) : 161.
HEBREARN P. (Castelnaudary, Aude ; paredier) : 154, 159, 167, 182, 189.
HÔPITAL Jean de l’ (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre » ?) : 164, 213.
HOYET Pierre (Toulouse, Haute-Garonne ; paredier/valadier) : 73, 154, 159, 160.
HUC Paul (Peyrefitte, Aude ; maçon-carrier) : 41, 42.
HUC Raymond (Castelnaudary, Aude) : 153, 154.
HUGO Guillaume (Castelnaudary, Aude) : 102, 202.
HUNAULT Pierre (Toulouse, Haute-Garonne ; valladie) : 154, 160.
JACQUES Raymond (Castelnaudary, Aude ; charpentier) : 21, 171, 175, 192.
JEAN Bernard (Castelnaudary, Aude) : 103.
JEAN Guillaume (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre » ; paredier ?) : 153, 156, 165, 166, 168, 173, 190, 213.
JEAN Guillaume (Castelnaudary, Aude ; tuilier/briquetier) : 131.
JEAN Pierre (Castelnaudary, Aude) : 176.
JEAN Raymond (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 102, 119.
JENLE Jean maior (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186.
JENLE Jean minor (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186.
JULIEN Bartholomé (Castelnaudary, Aude) : 172.
JULIEN Bernard (Castelnaudary, Aude) : 206.
JULIEN Raymond (Castelnaudary, Aude) : 172.
LA BAYSE Guillaume (Castelnaudary, Aude) : 61.
LA BROA Pierre (Castelnaudary, Aude) : 102.
LA SALLE/LASSALE Jean (Montréal, Aude ; paredier) : 161, 186.
LAGUARDE B. (Castelnaudary, Aude) : 65.
LAMBERT Pierre (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre » ?) : 164, 165, 171, 213.
LAMET P. (Castelnaudary, Aude) : 167, 182, 189.
LAROQUE Pierre de (Castelnaudary, Aude) : 66, 203.
LAURETGIA Pierre de (Toulouse, Haute-Garonne ; brassier/paredier) : 154, 160, 176, 185, 211.
LAVALH G. (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 153, 156.
LE GASCON Pierrot, Peyrot (Castelnaudary, Aude) : 164.
LOBINHAT G. (Castelnaudary, Aude) : 169.
LOM Raymond de (Castelnaudary, Aude) : 199.
MADRERIAS Jacques (Castelnaudary, Aude) : 153, 172, 173, 194.
MAISONNEUVE Bernard de (Limoux, Aude ; consul) : 75.
MALAMOSTA G. (Castelnaudary, Aude) : 169, 190, 213.
MARNELA G. (Castelnaudary, Aude) : 113, 201.
MARTI Jean junior (Montréal, Aude ; paredier) : 161, 186.
MARTIN Jean (Castelnaudary, Aude ; charpentier) : 60, 201.
MASIP/MANCIP/MASSIP Arnaud (Castelnaudary, Aude ; « tortissayre » ? paredier/valadier) : 41, 42, 81, 156.
MAURAND Pierre (Castelnaudary, Aude) : 205.
MAUREL Pierre senior (Montréal, Aude ; operarius pro reparando muralhas) : 155.
MAURIN Jean (Castelnaudary, Aude ; maçon-carrier) : 119, 191.
MELOT Pierre (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 72.

292
INDEX

MENGART Ana (Castelnaudary, Aude) : 199.


MONTDEBO Raymond (Castelnaudary, Aude) : 60, 169.
MONTFORT Simon de : 59, 76.
MORAT Arnaud de (Castelnaudary, Aude) : 176.
NOGUIER Raymond (Castelnaudary, Aude) : 144.
OLIER Jean (Toulouse, Haute-Garonne ; paredier) : 66, 71, 159.
OT Pierre : voir FERRAN.
PASTRE Raymond (Montréal, Aude ; délégué aux oeuvres de la ville) : 61.
PI Raymond (Castelnaudary, Aude) : 157.
PIRON Sevetre (Toulouse, Haute-Garonne ; valladié) : 154, 160.
PLAS Guillaume des (Ferrals, comm. de Saint-Papoul, Aude) : 122.
PRINCE DE GALLES : 28, 41, 59.
PRINCE NOIR : voir PRINCE DE GALLES.
PUJOLS Pierre (Montréal, Aude; paredier ?) : 161.
RABOT Jean (régent de la viguerie de Limoux, Aude) : 75.
RAMNO/RANNO Stéphane (Castelnaudary, Aude : « tortissayre » ?) : 123, 164, 176.
RAO Alain (Toulouse ; Haute-Garonne ; paredier) : 159, 160.
RASTOS G. de (Castelnaudary, Aude) : 176.
RAYNARD/RAYNART Pierre (lieutenant du juge du Lauragais) : 201.
RAYSH/RAYSHAC Jean (Castelnaudary, Aude) : 21, 22.
RENNEG Arnaud (Castelnaudary, Aude) : 171.
RIAT Guillaume (Toulouse ; Haute-Garonne ; paredier) : 159, 160.
RIBAYRENX Jean (Castelnaudary, Aude) : 102.
RICART Bartholomé (Castelnaudary, Aude ) : 145.
RIVIÈRE Jean (Castelnaudary, Aude ; notaire) : 183.
ROBERT Bertrand (Castelnaudary, Aude ; consul) : 21.
ROGER/ROGIER Guillaume (Castelnaudary, Aude; charpentier) : 131, 137, 166.
ROGIER André (Montréal, Aude ; paredier) : 161.
ROGIER Bartholomé (Castelnaudary, Aude ; forgeron) : 58.
SABATIER Pons (Saint-Martin-Lalande, Aude ; paredier ?) : 184.
SACROT Raymond (Castelnaudary, Aude) : 203.
SADORNI G. (Castelnaudary, Aude) : 182.
SAINT-ANTOINE commandeur de (Montréal, Aude) : 123.
SAINT-SAUVEUR Bomacip (Toulouse ; Haute-Garonne ; paredier) : 159, 160.
SAINT-SERNIN (Toulouse, Haute-Garonne, abbé, chapitre) : 185.
SALT/SANT Pons de (Castelnaudary, Aude ; paredier ?) : 153, 158.
SARRASIN/SARRAZIN/SARRAZI Raymond (Castelnaudary, Aude ; charpentier) : 165, 166, 192, 215.
SAURA Ysarn (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186, 188.
SAURAT (Castelnaudary, Aude ; forestier) : 202.
SAURIN Pierre (Castelnaudary, Aude ; charpentier) : 62, 79, 80, 123, 128, 155, 158, 168, 188, 207.
SAVAL G. (Castelnaudary, Aude) : 171.
SEGUIN Jean (Castelnaudary, Aude) : 21.
SERRAILLER Pons de (Issel, Aude) : 96.
SERRAS maître Bernard (Albi, Tarn ; charpentier ?) : 155.
SPERT/ESPERT Jacques (Montréal, Aude ; paredier ?) : 161, 186.
SQUIROL P. (Montferrand, Aude) : 201.
STEPHANE Raymond (Castelnaudary, Aude) : 205, 206.
TINEL Bernard maître (Grisolles, Haute-Garonne ; fustier cabirador) : 135, 155, 160, 185.
TOCABUEN/TOCABON Jean (Castelnaudary, Aude ; consul, maçon ?) : 93.

293
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

TOCAREL Raymond (Castelnaudary, Aude; « tortissayre » ? ; paredier ?) : 153, 156, 159, 165, 166, 173, 175, 184,
190, 192.
TOLOS Guillaume (Castelnaudary, Aude ; maçon) : 182, 183.
TOULOUSE Raymond de (Toulouse, Haute-Garonne ; mastre paredier) : 91, 159, 160.
TRIALH G. (Castelnaudary, Aude ; paredier) : 154, 158, 159, 182.
VALENCE Gérald (Castelnaudary, Aude) : 206, 207.
VAQUIER G. (Castelnaudary, Aude) : 207.
VERGUAS Guillaume de (Castelnaudary, Aude ; paredier) : 154, 158, 159, 182.
VIDAL Pierre (Castelnaudary, Aude) : 61.
VIDAL Raymond (Castelnaudary, Aude) : 202, 213.
YTIER B. (Castelnaudary, Aude) : 168.
YTIER Jacques (Castelnaudary, Aude) : 168.
YTIER Raymond (Castelnaudary, Aude) : 159, 168, 173, 189.

294
REMERCIEMENTS, P. 295-296

Remerciements

Cet ouvrage, tiré de ma thèse de doctorat soutenue en Chargée de recherche, CNRS, UMR 5140 Lattes-
2007 à l’Université d’Aix-Marseille, n’aurait pu voir le Montpellier) et Alain Klein (Architecte DPLG, atelier d’ar-
jour sans l’aide d’un grand nombre de personnes qui, chitecture Architerre), qui ont également relu mon travail
chacune à leur manière, m’ont aidé dans cette tâche ardue, de thèse afin de me faire part de leurs avis de spécialistes.
que ce soit par leur apport scientifique, technique, ou leur Quant à Jean-Loup Abbé (Professeur d’Histoire médié-
soutien moral. vale, Université de Toulouse-Le-Mirail), Marc Bompaire
En 2000, alors titulaire d’une Maîtrise en archéologie à (Directeur de recherches au CNRS, Iramat, Centre Ernest
l’Université de Toulouse-le-Mirail, et sur le conseil de Babelon, Orléans ; Directeur d’études, Ecole Pratique des
Marie-Christine Bailly-Maître (Directeur de recherche au Hautes études, Paris), Vincent Challet (Maître de
CNRS, LAMM UMR 6572.), je suis allé solliciter pour Conférences en Histoire médiévale, Université de
mon inscription en DEA mon futur directeur de thèse, Montpellier), Florence Guillot (Docteur en Histoire médié-
Michel Fixot (Professeur d’Archéologie médiévale, vale, archéologue-spéléologue), Jean Kugler (Docteur en
Université de Provence ). Tout au long de ces sept années, Economie régionale et aménagement du territoire
ce dernier a patiemment accepté de diriger et suivre mon (Université de Paris I, Panthéon Sorbonne) ; Ingénieur en
travail, en l’orientant dès l’origine vers les sources chef territorial honoraire. Diplômé de l’Institut d’Etudes
textuelles, aidé en cela par Philippe Bernardi (Chargé de économiques et juridiques appliquées à la construction et
recherche CNRS, LAMM UMR 6572), dont les conseils l’habitation), Elie Pellaquier (Historien, CNRS, UMR
éclairés m’ont permis de tirer le meilleur parti de ces docu- 5609, Université Paul Valéry, Montpellier), Jean-Michel
ments. Poisson (Maître de Conférences, Ecole des Hautes Etudes
Les autres membres du jury de thèse, Nicolas Faucherre en Sciences Sociales, Université Lumière Lyon 2, UMR
(Professeur d’Archéologie médiévale, Université de 5648/CIHAM) et Catherine Verna (Professeur d’Histoire
Nantes), Andreas Hartmann-Virnich (Professeur d’Histoire médiévale, Université Paris VIII), ils m’ont également
Médiévale, Université de Provence), Marie-Claude apporté, chacun dans leurs domaines respectifs, aide et
Marandet (Professeur d’Histoire médiévale, Université de informations utiles à la compréhension des documents.
Perpignan), Alain Salamagne (Professeur d’Histoire Je souhaite également remercier le personnel des
Médiévale, Université de Tours), m’ont également tous Archives Départementales de l’Aude, en particulier Jean
apporté, le jour de la soutenance, remarques et critiques Blanc (Assistant de conservation, Archives
constructives qui ont contribué à améliorer mon travail en Départementales de l’Aude), Sylvie Caucanas (Directrice
vue de cette publication. des Archives Départementales de l’Aude), Georges Delmas
D’autres personnes, directement impliquées dans (Président de Salle, Archives Départementales de l’Aude)
l’étude de la construction de terre crue, ont été des aides et Claude-Marie Robion (Chargé d’Etudes Documentaires,
indispensables : Dominique Baudreu (Historien, Directeur Archives Départementales de l’Aude) ; mais aussi celui
du Centre d’Archéologie Médiévale du Languedoc), dont des Archives Départementales de la Haute-Garonne,
les connaissances historiques, bibliographiques et linguis- notamment Geneviève Douillard (Conservatrice adjointe,
tiques ont constitué un apport décisif à ce travail, Claire- Archives Départementales de la Haute-Garonne),
Anne de Chazelles (Archéologue protohistorienne, Catherine Saint-Martin et des Archives Municipales de

295
CONSTRUIRE EN TERRE PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS : LES FORTIFICATIONS DE CASTELNAUDARY (AUDE) vers 1355 - vers 1450

Toulouse. Leur aide (en particulier pour la palélographie) Je remercie également vivement mon employeur,
et leur disponibilité ont facilité mon accès aux documents l’Amicale Laïque de Carcassonne et sa directrice,
et par là-même l’accomplissement de mes recherches. Mme Marie-Elise Gardel (Historienne et Archéologue,
responsable des fouilles du castrum de Cabaret, Lastours,
Je n’oublierai pas non plus Michel Barrère
Aude), qui ont accepté, tout au long de ces années, de me
(Conservateur du patrimoine, S.R.A. Midi-Pyrénées),
laisser beaucoup de temps libre afin de poursuivre mes
Jean-Paul Cazes (Archéologue, CCS Patrimoine,
recherches. Rien n’aurait pu être accompli sans leur bien-
Castelnaudary), Christian Douillet (Archéologue amateur),
veillance.
Bruno Jaudon (Professeur d’Histoire), Ghislaine Loubès
(Animatrice, Amicale Laïque de Carcassonne), Nicolas Enfin, l’affection et le soutien moral indéfectibles de
Mengus (Docteur en Histoire médiévale), Benjamin Moya ma compagne, Alexandra Kugler (Maître en Histoire,
(Commercial en informatique), Nathalie Nicolas (Docteur Attaché territorial, Responsable du Pôle de Gestion des
en Archéologie médiévale, Université de Provence) et René sites Historiques, Conseil Général des Pyrénées-
Viala (Centre d’Etudes Archéologiques et Historiques du Orientales), m’ont permis de réaliser ce travail de longue
Lauragais) qui tous ont prêté, à divers titres, leur concours haleine en toute sérénité.
dans cette entreprise. J’ai une pensée particulière pour ce Que tous trouvent dans cet ouvrage l’expression de ma
dernier, qui nous a quitté avant la publication de ce travail. profonde gratitude.

296

Vous aimerez peut-être aussi