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Mansour GHAKI1

LE LIBYQUE

On parle de « Libyque » pour ce qui concerne l’écriture


remontant à la période antique ; le terme libyque vient de Libye,
nom que donnaient les grecs à la région située entre l’Égypte et
l’Atlantique ; Libye a été mis en relation avec l’ethnonyme Rebu/
Libu*, attesté dans les sources égyptiennes2. Pour toute la période
historique, qui s’étale depuis l’apparition de l’écriture libyque
jusqu’à nos jours, on utilisera l’expression « libyco-berbère » - c’est
avec l’arrivée des arabes en Afrique du nord qu’apparaît la forme
« barbar » qui donnera « Berbèrie » et « Berbères » en français -
L’expression « libyco-berbère » englobe donc en plus de l’écriture
libyque « ancienne », l’écriture tiinagh3 utilisée par les touaregs de
nos jours et ce qu’il est convenu d’appeler le néo-tiinagh4.

1. Università degli studi di Napoli, L’Orientale.


2. Colin (F.), Les libyens en Egypte XVe s. a.C – IIe s. p.C, onomastique et
histoire, Université libre de Bruxelles, Faculté de philosophie et lettres,

Revue Tunisienne d’Archéologie n° 01 / 2013


année académique 1995-1996. (Dissertation pour le titre de docteur en
philosophie et lettres). Vol. I, 14.
3. Aghali-Zakara (M.) : « Vous avez dit « touareg » et « tiinagh » ? », Bulletin
des études africaines de l’Inalco, 7, 1984, 13-20 (16-19). Claudot-Hawad
(H.) : « Ecriture tiinagh » Encyclopédie Berbère XVII, 2573-2580. L’idée
de voir dans « tiinagh » le terme « punique » ne me semble pas bonne ; les
cananéens, c’est ainsi que se qualiiaient ceux que les Grecs désignaient
par « phéniciens », ne peuvent pas avoir transmis aux autochtones un terme
qu’ils n’utilisaient pas. Ce terme a-t-il été introduit chez les touareg par
l’intermédiaire du grec ? rien n’est moins sûr car on ne voit quand et surtout
comment.
4. Les néo-tiinagh ont été mises en place par « l’académie berbère » à Paris et
à partir de 1970. L’IRCAM : Institut royal de la culture amazighe (Maroc)
utilise les néo - tiinagh aussi bien pour l’enseignement de parlers amazighs
marocains que pour les publications, supports de cet enseignement. Les
néo - tiinagh sont utilisées pour les enseignes de magasins, les panneaux
indicateurs, certaines publications, etc., essentiellement chez les Kabyles.

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Caractéristiques de l’écriture libyque

Il s’agit :
• D’une écriture consonantique. Il n’y a pas, à l’origine, de
voyelles comme on en rencontre dans d’autres écritures ;
• D’une écriture verticale essentiellement et à l’origine, du
moins pour ce qui concerne les inscriptions libyques gravées
sur des stèles ; elle se présente de bas en haut et de gauche à
droite ;
• Les lettres sont de forme géométrique ; essentiellement, les
signes libyques sont faits de barre simple ou démultipliée, de
cercle, de carré fermé, parfois ouvert sur un côté, etc. il s’agit
donc d’une écriture monumentale, gravée ou peinte ; il n’y a
pas de cursive libyque.
• La diversité des alphabets, déjà durant l’antiquité, est aussi
une caractéristique ; il est donc plus juste de parler d’alphabets
libyques - au pluriel - ; cette diversité trouvant son explication
dans la convergence de plusieurs facteurs : le temps, l’espace et
très probablement l’absence d’une pouvoir central –politique
ou idéologique, sinon les deux - capable d’opter pour des
règles, de les imposer et de les généraliser5.
• Quand il s’agit d’épigraphie, c’est-à-dire de textes gravés
sur de la pierre, les textes sont, dans leur écrasante majorité,
funéraires et courts, renfermant trois à quatre mots ; le plus
souvent le nom du défunt et celui de son père - X ils de Y –
suivis, parfois, de termes dont le sens précis nous échappe.
Cette donnée semble générale ; elle se rencontre dans la
majorité des régions que couvre le libyque.

De ces caractéristiques découlent des conclusions susceptibles


d’aider à répondre à certaines questions relatives à l’origine du
libyque, à son évolution, à la multiplication des alphabets, etc.
• le caractère « purement consonantique » milite en faveur de
l’ancienneté du libyque ; s’il y a un lien à établir, celui-ci doit
donc se faire avec le phénicien. Une partie du punique – celui
5. Chaker (S.) : « Variétés des usages libyques, variations chronologiques,
géographiques et sociales », Antiquités Africaines 38-39, 2002-2003, 267-
274.

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du second siècle av. J.-C. - et surtout le néopunique – après la


disparition de Carthage et la généralisation de la cursive - se
caractérisent par les « matres lectionis », consonnes utilisées
comme voyelles : aleph, ayin, yod et waw ; Ce phénomène
de vocalisation s’expliquerait par le besoin d’écrire des
mots « étrangers » à l’univers sémitique. Le néopunique
épigraphique a surtout été utilisé par les autochtones.
• L’orientation spéciique – de bas en haut et de gauche à droite
- est un argument de poids pour ne pas établir un lien directe
– une origine phénicienne – entre le libyque et le phénicien :
l’horizontalité est la caractéristique commune aux alphabets
dérivants du phénicien.
• L’unique manifestation d’un « pouvoir central » se retrouve
dans les inscriptions en libyque horizontal de Dougga :
mise en page, première ligne donnant l’objet commémoré,
hiérarchie des titres et fonctions évoquées, orientation –
horizontale et de droite à gauche, bilinguisme dans deux cas,
sont autant d’arguments qui militent en faveur d’une situation
« exceptionnelle » c’est pourquoi elle est, jusque-là, unique.
Le nombre même des signes de l’alphabet libyque semble
« calqué » et surtout réduit aux besoins de la correspondance
presque totale au punique ; les rédacteurs des inscriptions
« oficielles » de Dougga n’ont pas pour autant résolu tous les
problèmes ;
- Sur 24 signes avérés dans la partie libyque, deux n’ont pas
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de lettres correspondantes en punique ; ils n’ont donc pas été
« transcrits » ; le fait qu’ils ne soient attestés qu’une seule fois
affaiblit considérablement le problème que pourrait poser leur
présence ;
- Dans l’autre sens, le libyque semble « incapable » de transcrire
tout le punique, dans certains cas, présence d’une gutturale
par exemple, la forme libyque du mot est raccourcie ; ainsi
`bd’rš, `bdštrt, `bd’šmn et b`lhn’ deviennent en libyque :
DRŠ, WDŠTR, ŠMN et BHNH 6 ; les libyens semblent avoir
du mal à transcrire le ayin, peut être parce qu’ils avaient du
6. Ghaki (M.) : « Epigraphie libyque et punique à Dougga (TBGG) »,
Khanoussi (M.) – Maurin (L.), Dougga (Thugga), Etudes épigraphiques,
Ausonius 1997, 27-43 (40).

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mal à le prononcer. La cohérence de l’alphabet libyque de


Dougga s’explique donc par les facteurs temps, espace et
« politique » : nous sommes à Dougga, la ville qui reçoit « le
MQDŠ » en souvenir de Massinissa, sous le règne de Micipsa
et dans un contexte « punique ». L’alphabet de Dougga est un
aboutissement de l’évolution du libyque7.

« Une écriture, des alphabets »

Il y a en fait, et pour simpliier


car le problème est beaucoup plus
complexe, plusieurs alphabets
appartenant tous au même « libyque
» ; la différence s’expliquant
par deux facteurs essentiels: la
géographie et la chronologie ;
l’écriture libyque a donc évolué
et différemment ; ce phénomène
est déjà visible durant l’antiquité
préromaine ; Chabot, mettant à part
les inscriptions rupestres, classe
les stèles épigraphiques en deux
ensembles : le libyque oriental
(l’alphabet de Dougga et l’écriture
de la Numidie orientale) et le libyque
occidental (Numidie centrale et
occidentale et Maroc actuel). Camps
divisera le libyco-berbère en trois :
libyque oriental, libyque occidental Alphabet libyque de Dougga
et libyque saharien qui donnera les (Basé sur les bilingues RIL 1 et 2)
tiinagh.
En fait, le découpage « géographique » s’affaiblit au il
du temps et avec l’avancement de la recherche grâce surtout aux
nouvelles découvertes : le libyque dit saharien couvre aussi les
inscriptions attestées aussi bien en Kabylie que dans l’Atlas ; tandis

7. Galand (L.) : « Les alphabets libyques », Antiquités Africaines 25, 1989,


69-81.

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que l’occidental se rencontre non seulement dans la partie occidentale


de l’Afrique berbère mais aussi dans le nord ouest et le sud de la
Tunisie actuelle. « L’alphabet à chevron » quant à lui couvre une
région qui s’étend du Kef en Tunisie à Volubilis au Maroc.
Les appellations utilisées pour « classer » les différentes
formes « libyque oriental », « libyque occidental » et « libyque
saharien » ne relètent pas la réalité, elles peuvent même induire en
erreur car il est clair qu’il y a :
- Un libyque qui se concentre en Numidie orientale et qui est
représenté par l’alphabet de Dougga ; il est dit « libyque
oriental ».
- Des points communs rapprochent le libyque dit occidental à
ce qu’il est convenu de qualiier de « libyque saharien » ; la
différence se situant dans le fait que « le libyque saharien »
s’est maintenu et a évolué pour donner « les tiinagh », tandis
que le « libyque occidental » disparaît avec l’installation et la
généralisation du latin. Ce libyque semble plus ancien et a
sûrement eu une plus longue longévité que le libyque oriental ;
il est attesté aussi bien dans le sud tunisien que dans l’atlas
marocain ; le qualiier de « libyque occidental » est donc
réducteur. Ce libyque se présente sous la forme de plusieurs
alphabets ; le plus « représentatif » semble être « l’alphabet à
chevron », allusion à un signe en forme de V.

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Lettre en tiinagh
(Pichler : Origin and development of the Libyco-
Berber Script)

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Y avait-il, à l’origine, un seul libyque ? Très probablement ;


où et quand a-t-il vu le jour? C’est tout le problème ne serait-ce que
parce que les données à la disposition des spécialistes sont limitées
et ne permettent pas de trancher. Le problème est rendu encore plus
complexe à partir du moment où l’on va « ignorer » des données
aussi capitales que l’espace ou le temps ; Il a été découvert plus de
1200 inscriptions libyques ; le chiffre ne peut pas être plus précis car
il est clair que de nombreux textes « découverts » attendent d’être
publiés ; la « part » de la forme évoluée, celle dite « libyque oriental »
est de loin plus importante ; à côté de cet ensemble épigraphique, il
y a des dizaines de milliers d’inscriptions rupestres en libyque dit
« saharien »et en tiinagh8.

L’évolution de la rélexion et une meilleure connaissance du


libyque en général permettent d’avancer même si les certitudes ne
l’emportent toujours pas sur les questions sans réponse :
1. Les liens « libyque dit occidental » et « libyque dit
saharien » semblent clairs et il devient possible d’en faire un seul
« libyque » à la fois ancien et d’une longévité certaine, il est aussi le
plus « étalé » géographiquement ;
2. Ce libyque se différencie du « libyque oriental » qui se
« distingue » par plusieurs caractéristiques :
- Il est circonscrit géographiquement
- Il est situable dans le temps
- Il est caractérisé par les bilingues RIL 1 et RIL 2 qui
ont permis de le ixer en un alphabet, celui de Dougga
- Il a été utilisé pour les textes dits oficiels et qui sont
en libyque horizontal et de droite à gauche.
- Il est freiné par le punique et disparaît avec
l’installation du latin.
3. On réservera le qualiicatif de tiinagh à l’écriture
« saharienne » lisible car elle exprime les parlers touareg actuels. Il
y a plusieurs alphabets tiinagh.

8. Aghali-Zakara (M.) : « Les lettres et les chiffres, Ecrire en Berbère » À la


croisée des études libyco-berbères. Mélanges offerts à P. Galand-Pernet et
L. Galand éd. J. Drouin et A. Roth, Geuthner 1993, 141-157.

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Comparaison entre le libyque (occidental et oriental)


Le tiinagh saharien, six variations du système touarègue et le néo-tiinagh développé
par l’Académie berbère.

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La répartition des inscriptions libyques

Etablir des cartes, plates par déinition, ou des tableaux


alignant des signes en apparence « identiques » ou « proches »
donne certes des résultats mais ceux-ci peuvent être trompeurs ; les
textes libyques ne sont pas datés, une carte des inscriptions libyques
ne tient pas compte de la chronologie à moins de situer la dite carte
dans une fourchette chronologique très large ; Les cartes permettent,
malgré tout de saisir :
- la place « prise » par le punique et surtout le néopunique :
littoral et territoire punique d’un côté et la partie punicisée de
l’autre.
- L’avancée territoriale du latin parallèlement à la romanisation.
- Les zones où le libyque a côtoyé aussi bien le punique que le
latin.
- Celles où il semble s’être « réfugié » et maintenu cédant le reste
du pays au phénicien-punique, au latin et dans une moindre
mesure au grec, écritures utilisées aussi par les pouvoirs maure,
masaessyle et massyle.

Ce volet a retenu l’attention des nombreux spécialistes de


l’antiquité africaine parmi lesquels M. Benabou9, G. Camps10, P. A.
Février11. Nous avons, nous-mêmes, établi des cartes sur la répartition
des inscriptions libyques12 ; L. Galand est revenu récemment sur la
question13.

- En Numidie orientale : La carte,qui ne présente que la partie


nord du pays et qui date quand même d’il y a quelques années,
depuis des inscriptions libyques ont été découvertes et la

9. Benabou (M.) : La résistance africaine à la romanisation, Maspero, Paris.


10. Camps (G.) : « Punica lingua et épigraphie libyque dans la Numidie
d’Hippone », BCTH, Af. du nord, n.s. 22, 1987-1989, 1992, 291-295.
11. Février (P. A.) : Approches du Maghreb romain, Edisud, Aix 1990, 2 vol.
(volume II, 113-118).
12. Ghaki (M.) : « la répartition des inscriptions libyques », Reppal IX, 1995,
93-108.
13. Galand (L.) : « Le libyque en Algérie » Identités et Cultures dans l’Algérie
antique sous la direction. de Claude Briand-Ponsard, , publications des
universités de Rouan - Le Havre, 2005, 59-68 (61).

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liste s’est prolongée; la seule inscription qui pourrait changer


les conclusion auxquelles je suis arrivé quand j’ai publié
mon article sur la répartition des inscriptions libyques c’est
l’inscription mise au jour sur les rives de la sebkhat halq el
mijjel, elle est pratiquement au bord du littoral et en territoire
phénico-punique. Des inscriptions libyques ont été mises au
jour dans le sud tunisien; dans le sud ouest ; la concentration
caractérise, malgré tout le nord ouest et le centre ouest du pays;
les textes les plus importants provenant de Dougga.

- En Numidie occidentale et au Maroc : La Numidie


occidentale s’étend de l’ouest du Constantinois jusqu’à Oujda,
la région frontalière entre l’Algérie et le Maroc actuels ; il faut
savoir que déjà durant l’antiquité, le leuve moulouya servait
de frontière entre le royaume maure et le royaume numide ;
cette partie de l’Afrique berbère renferme aussi des inscriptions
rupestres. Il y a eu un petit nombre d’inscriptions libyques
découvertes au Maroc, une trentaine ; elles se concentrent
dans le nord; mais le Maroc renferme un nombre important
d’inscriptions rupestres surtout dans le centre et dans le sud;

Les textes rupestres sont gravés ou peints dans des abris


sous roche, sur les parois des grottes et sur des rochers à l’air
libre ; ils se rencontrent un peu partout, essentiellement dans
l’Aïr, le Hoggar, le Jbel Naffoussa et l’Atlas ; ils ne sont pas
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un phénomène saharien comme pourrait le laisser croire la
richesse de cette région dans ce domaine. Ces inscriptions
rupestres se comptent par milliers; l’inventaire, très dificile ne
serait-ce que parce qu’il concerne, aujourd’hui, plusieurs états
nations, n’est pas encore fait14 ; il arrive que ces inscriptions
côtoient des peintures rupestres – ces représentations ne sont
pas toujours contemporaines des inscriptions libyco-berbères.
Certaines représentations remontent au second millénaire
avant J.-C. ce qui ne peut être le cas de l’écriture.
14. Skontini (A.) – Lemjidi (A.) – Nami (E.) : Tirra, aux origines de l’écriture
au Maroc, IRCAM, Rabat 2003. Aghali-Zakara (M.) – Drouin (J.) :
Inscriptions rupestres libyco-berbères, Sahel nigéro-malien, Droz, Genève
2007.

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L’origine de l’écriture libyque

Il faudrait distinguer :
- l’écriture comme acte d’expression pour « traduire » en signes
une langue. Dans notre cas la langue écrite est l’ancêtre des
parlers berbères actuels ; Augustin écrivait : « le nombre de
nations s’est accru beaucoup plus que celui des langues. En
effet nous connaissons en Afrique de nombreuses nations
barbares qui n’ont qu’une seule langue »15 ; le fait que nous
ayons plusieurs alphabets pourrait s’expliquer par la présence
déjà à l’époque antique de plusieurs parlers.
- l’origine des signes utilisés ; les caractères sont très anciens,
certains remontent à la préhistoire, on les retrouve dans le
décor de certaines poteries, dans les peintures rupestres, dans
les tatouages.
- et l’alphabet16 qui se présente dans le domaine libyque sous
plusieurs formes à la fois proches et différentes d’où l’aisance
à parler de plusieurs alphabets.

Si les signes ou certains d’entre eux sont très anciens et


pourraient remonter à la préhistoire, l’écriture qui est attestée sous
forme d’alphabets est historique.
L’acte d’écrire, et d’une façon « cohérente », est aussi le fruit
d’une évolution ; l’Afrique berbère dans sa totalité a toujours été en
contact avec les civilisations voisines où l’écriture s’est développée
: l’Egypte d’abord, la Phénicie et la Grèce ensuite ; le passage vers
un alphabet – le cas de celui de Dougga – est à mettre à l’actif des
liens qui se sont tissés avec le phénicien – punique aussi bien en tant
qu’alphabet que comme civilisation.
Faute de données précises et iables, les multiples hypothèses
concernant l’origine du libyque demeurent des conjectures ; elles ne
tiennent pas sufisamment compte du facteur chronologique et elles
15. Augustin, La cité de dieu XVI, 6, 2, CCL 48, 507 : Lepelley (Cl.)
« Témoignages de St. Augustin sur l’ampleur et les limites de l’usage de
la langue punique dans l’Afrique de son temps » in Cl. Briand-Ponsart,
Identités et cultures dans l’Algérie antique, publications des Universités de
Rouen et du Havre, 2005, 126-153 (152).
16. Galand (L.) : « Interrogations sur le libyque », Antiquités Africaines 38-39,
2002-2003, 259-266 (262 note 17).

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Le Libyque

ne font pas la différence entre écriture et alphabet ; elles sont parfois


entachées de partis pris qui les affaiblissent.

- Le « libyque » viendrait du phénicien-punique « selon


toute vraisemblance l’alphabet libyque dérive de l’écriture
sud-sémitique »17, « l’écriture libyque est probablement
un dérivé aberrant du sémitique occidental »18, « l’écriture
libyque a été élaborée artiiciellement au III ou au IIème s.
par imitation de l’écriture punique… »19. la notion d’alphabet,
l’aspect consonantique, l’orientation horizontale des certaines
inscriptions sont à mettre à l’actif des phéniciens puniques,
certaines formes de lettres sont aussi à rapprocher du
phénicien ; mais il est clair que ces aspects rapprochant ne sont
pas sufisants pour établir un lien direct entre le phénicien-
punique et le libyque ; les différences : forme des caractères,
orientation de l’écriture, présence du libyque dans des zones
où le phénicien-punique n’est jamais arrivé ; ces différences
font qu’il nous semble que nous avons affaire à deux écritures
différentes.

- Le libyque a une origine locale, autochtone : les hypothèses


les plus récentes font remonter les formes des lettres libyques
à un fond symbolique autochtone, propre à l’Afrique berbère
même si cette symbolique n’est attestée que dans certaines
régions de l’Afrique berbère qui ont conservé des peintures
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rupestres associées à l’écriture libyque. Cet aspect, origine
locale des signes, semble acquis.

L’idée d’écrire n’est pas fortuite ; elle est le fruit d’une


évolution sociale, la vie en groupe dans un espace, un centre de
production et de consommation et le code qui s’installe à la fois
dans le groupe et à l’extérieur avec les autres centres importateurs et
exportateurs ; elle répond au besoin de « pérenniser » la nature et la
quantité de marchandise échangée ; cet acte comptable et d’échange
17. Littman (M.-E.) : « L’origine de l’alphabet libyque », Journal Asiatique
1904, 423-441.
18. Cohen (M.) : Les langues du monde, 160.
19. Février (J.-G.) : Histoire de l’écriture, 325.

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va s’enrichir de données relatives à la nature de la marchandise,


à l’identiication du destinataire et de l’expéditeur. Cette étape
devient claire durant la deuxième moitié du IVe millénaire avant
J.-C. ; l’écriture connaîtra une « étape » pictographique avant de
« passer » à l’alphabétisation qui devient une réalité à la in du IIème
millénaire ; le libyque est un alphabet ; il n’ a pas connu, du moins
dans l’état actuel de nos connaissances, de phase pré alphabétique ;
la mise en place d’un système alphabétique consonantique nous
semble être la conséquence des liens que l’Afrique berbère a eu avec
la civilisation phénicienne car les caractéristiques des cunéiformes
égyptiens (pictogrammes) et de l’écriture grecque ( vocalisée),
ne se retrouvent pas dans le libyque. Rappelons une partie de la
dernière phrase de l’article de Chaker/Hachi « les recherches…
devront s’attacher à établir la chronologie relative et absolue des
premières attestations libyques liées à l’art rupestre. La datation des
témoignages épigraphiques rupestres pourrait apporter des éléments
de réponses décisifs à la question des origines ».20

La question de la datation du libyque

Camps21 a daté les plus anciennes inscriptions libyques des


VII-Ve siècles avant en sa basant sur l’iconographie ; cette datation a
été contestée aussi bien par ceux qui pensent que cette iconographique
est plus récente (P. A. Février par exemple) que par ceux qui pensent
que le fait que les inscriptions rupestres accompagnant des fresques
plus anciennes permet de remonter beaucoup plus haut la naissance
du libyque ; certaines hypothèses « autochtones » situent le début
de l’écriture autour de la in du second – début du premier millénaire
avant J.-C.22

20. Chaker (S.) – Hachi (S.) : « À propos de l’origine et de l’âge de l’écriture


libyco-berbère », Etudes berbères et chamito-sémitiques, Mélanges offerts
à Karl G. Prasse (S.Chaker, ed.) Paris-Louvain, Ed. Peeters 2000, 95-111
(108).
21. Camps (G.) « Recherches sur les plus anciennes inscriptions libyques de
l’Afrique du nord et du Sahara », Bulletin archéologique du Comité des
Travaux historiques et scientiiques (n.s.) - B : Afrique, t. 10-11, 1974-1975
(1977), p. 143-166.
22. Hachid (M.) : “Le contexte archéologique et historique de l’apparition
de l’alphabet libyque… », Actes du colloque international « Le libyco-

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Le Libyque

Ce qui me parait clair c’est que ni les uns ni les autres


n’ont apporté, à ce jour, l’argument décisif; la seule inscription
libyque datée avec certitude est RIL 2 – l’inscription bilingue de
Massinissa – qui date de « L’an dix du règne de Micipsa » c’est-à-
dire de 138-137 avant J.-C. ceci ne date en aucune façon le libyque,
encore moins ses origines Le facteur « temps » est donc le facteur
déterminant : on aurait un libyque pan berbère qui se présente sous
différents alphabets et une forme évoluée (résultat d’une évolution
suite à un contact profond avec le phénicien-punique et dont les
textes représentatifs sont les inscriptions dites « oficielles » ; celles-
ci datent du second siècle avant J.-C. Ce libyque pan berbère et le
libyque « oriental » sont antiques ; si la partie nord de l’Afrique
berbère abandonne le libyque en adoptant d’abord le punique puis
le latin ; la partie « saharienne » continue à l’utiliser ; il évoluera et
donnera les tiinagh23 donc modernes et contemporaines.
Que faut-il entendre par « antique » ? De quand datent
les textes les plus anciens ? Certes les propositions de datation ne
manquent pas ; la date la plus reprise étant celle de Camps qui situe
la stèle de Azib n ikiss entre – au moins - le VIIe et le Ve avant J.-C. ;
M.Hachid propose de situer la naissance du libyque à la in du second
millénaire ou au tout début du premier avant J.-C. ; elle établit un
lien entre les inscriptions et les représentations rupestres et se basant
sur le fait les signes libyques dérivent d’une symbolique locale , elle
défend l’idée que l’écriture libyque est d’origine autochtone.
Il nous parait clair que la question reste posée car si, dans
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un cas, la datation repose sur l’iconographie qui « accompagne »
l’écriture, dans l’autre un lien est établi entre l’écriture et les
représentations rupestres sans que ce lien soit vériié ; la proximité
des représentations et de l’écriture est réelle, sont-elles pour autant
contemporaines ? 24
berbère ou le tiinagh : de l’authenticité à l’usage pratique, HCA, Alger
2007, 17-124.
23. Pichler (W.) : « time table » p.116 , Origin and development of the Libyco-
Berber Script, Berber Studies volume 15, Koln 2007: Pichler distingue
quatre phases : « Archaic », « Classic », « Transition » et Tiinagh; il y a
à notre avis une étape de trop « transition » les étapes présentées de cette
façon ne tiennent pas compte d’une donnée importante : les trois premières
phases ont coexisté ; toutes, tiinagh y compris, ont évolué.
24. M. Hachid est à la tête d’un groupe de recherches algéro-français pour

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Contrairement à ce qui se répète souvent « les inscriptions


libyques ne sont pas datables » il nous semblerait plus clair de dire
les inscriptions libyques, dans leur écrasante majorité ne sont pas
datées ; beaucoup sont situables dans le temps donc datables même
si la fourchette est parfois trop large :
- Les bilingues libyco-puniques (au plus tard IIe siècle avant J.-
C.), libyco-néopuniques (période charnière : Ier siècle av. et Ier
siècle après J.-C.) et
- Les bilingues libyco-latines ( à partir du IIe s. après J.-C. et
durant les III et IVème s. essentiellement) ; certains textes
latins permettent de « ignoler » encore plus et de resserrer
la fourchette RIL 193 porte la formule « dis manibus sac. »,
l’abréviation de cette formule en DMS devient effective
au IIIe s. après J.-C. Ces bilingues dans leur ensemble et
presque toutes portent le libyque dit « oriental » même quand
elles appartiennent, géographiquement parlant, à la partie
« occidentale » du domaine libyque.
- Les inscriptions libyques en écriture horizontale que ce soit de
droite à gauche (inluence du punique) ou de gauche à droite
(inluence du latin).
- Les épigraphes portant une iconographie datable (décor
architectonique, autels, palmes, objets identiiables, etc. (RIL
554 par exemple) ; ce type de symbolique est hellénistique et
se situerait donc entre le IIe s. avant J.-C. et le premier siècle
après.
- La représentation de certains défunts ; leurs vêtements, leur
représentation en couple permettent parfois de la situer (RIL
141 est d’époque romaine)
- Un certain type de graphie rappelant l’écriture monumentale
latine (les deux textes de borj Hellal : RIL 72 et RIL 72 B) qui
justement essayer d’avoir des datations de l’art rupestre saharien ; il est
évident que cette recherche aidera beaucoup à répondre à de nombreuses
interrogations même si, nous dit M. Hachid « la date directe… à laquelle
nous nous attelons, même si les physiciens du « projet franco-algérien des
datations directes de l’art rupestre saharien » attirent notre attention sur
toutes les dificultés que celle-ci présente », Hachid (M.) : « Le contexte
archéologique et historique de l’apparition de l’alphabet libyque… »,
Actes du colloque international « Le libyco-berbère ou le tiinagh : de
l’authenticité à l’usage pratique, HCA, Alger 2007, 17-124 (19).

22
Le Libyque

se situerait vers la in du premier siècle avant J.-C.).


- Les inscriptions dont le support est daté ou datable ( Bu Njem :
IIIe s. après J.-C. ; Tin-Hinan : in du Ve s. après J.-C. ?).
- Les séries peuvent aussi aider à cerner et à avancer dans la
question de la datation ; ainsi est-ce le cas de :
1. Les stèles libyques igurées de Grande Kabylie25.
2. Les stèles dont le texte renferme des ethnonymes26.
3. Certaines formules - BNS, RCH -, certains signes – V-,
certains décors, permettraient d’établir des séries mais ils
n’aident pas automatiquement à la datation.
4. Enin dater les associations rupestres fresques/inscriptions
aiderait à y voir plus clair : s’agit-il d’une association (la
même date) ou d’une proximité (deux dates différentes).27

Les textes libyques « importants »

1. Les bilingues de Dougga


RIL 1 inscription du mausolée datable du milieu du second
siècle av. elle donne le nom du propriétaire du Mausolée Atban, les
noms des commanditaires et ceux des constructeurs.
RIL 2 inscription dite de Massinissa car elle pérennise la
construction d’un MQDS en mémoire du roi Massinissa l’an dix du
règne de son ils Micipsa ; l’inscription donne les noms du roi Gaia –
père de Massinissa et du « suffète » Zilalsan, son grand père.
Revue Tunisienne d’Archéologie n° 01 / 2013
Ces deux textes permirent de ixer l’alphabet de Dougga.28

25. Laporte (J.-P.) : « Datation des stèles libyques igurées de Grande Kabylie
», L’Africa romana 9, 1992, 389-423.
26. Camps (G.) : « À la recherche des Misiciri, cartographie et inscriptions
libyques », À la croisée des études libyco-berbères, Mélanges P. Galand-
Pernet et L. Galand, J. Drouin, Geuthner, Paris 1993, 113-126.
27. Le Quellec (J. L.) : « À propos d’un site de Tadrart : récurrence d’une
association image-inscription », Cahiers de l’AARS, 11, 2007, 123-136
(134).
28. Galand (L.) : « L’alphabet libyque de Dougga », ROMM 13-14, Mélanges
Le Tourneau 1973, 361-368.

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24 Revue Tunisienne d'Archéologie n° 01 / 2013

Mansour GHAKI
La bilingue de Masinissa (Chabot, RIL 2)
Le Libyque

2. Les inscriptions dites oficielles


Elles sont aujourd’hui plusieurs29, les plus longues atteignent
8 lignes; il s’agirait de textes «commémoratifs » qui pérenniseraient
un évènement et qui donneraint la liste des « magistrats » en exercice
au moment de l’évènement en question; les titres et fonctions
évoqués par ces documents sont soit punique – suffètes – soit
libyques : MWSN, GLD, GZB, etc. Certains titres sont traduits
dans la bilingue de Massinissa, d’autres sont transcrits parce qu’ils
n’ont pas de correspondant en punique; il s’agit donc de titre et de
fonctions propres à la civilisation numide.

Revue Tunisienne d’Archéologie n° 01 / 2013

Inscription en libyque horizontale de la tour ouest (Dougga)30

29. RIL 2, 3, 4, 5, 10 et 11; auxquelles s’ajoutent trois inscriptions : l’inscription


de la tour ouest ( Ghaki (M.), Stèles libyques et néopuniques de Tunisie,
Africa Romana 14, 2000 (2002), 1661-1678 (1661-1668) ; un fragment
(Ghaki (M.), Epigraphie libyque et punique à Dougga (TBGG), Khanoussi
(M.) – Maurin (L.) : Dougga (Thugga) Etudes épigraphiques, Ausonius
1997, 27-46 (31) et l’inscription du monument à absides (sous presse).
30. Ghaki (M.), « Textes libyques et néopuniques de Tunisie » L’Africa romana
XIV, 2000 (2002), volume terzo, 1661-1678 (1661-1668)

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Mansour GHAKI
Revue Tunisienne d'Archéologie n° 01 / 2013

L’apport du Libyque

C’est l’épigraphie libyque qui renferme le peu de données


dont nous disposons sur la langue libyque, la langue mère des parlers
berbères encore usités de nos jours.
Les inscriptions de Dougga dites « oficielles » nous ont livré
l’organisation administrative et municipale de la ville et peut être du
milieu citadin aux temps des rois numides
L’épigraphie libyque a vécu en Afrique du nord en même temps
que le Punique, le Latin, le Grec, l’étrusque et l’Hébreu, elle illustre
parfaitement une société multilingue ( les bilingues sont aussi bien de
simples funéraires donc des actes privés que des inscriptions « oficielles »
afichées sur décision politique à la gloire du roi et des siens.
Toutes les questions autour du Libyque en tant que Langue,
Ecritures et Alphabets ne trouvent pas de réponse ; cela n’enlève rien
à l’importance d’une écriture attestée dès le Ve siècle avant J.-C.,
selon certaines thèses. Cette écriture a traversé les temps puisqu’elle
est encore utilisée de nos jours : les Tiinagh. Le fait même que
cette écriture a existé depuis au moins le milieu du Ier millénaire
avant J.-C. est déjà un apport. L’apport onomastique ; la liste des
noms libyens est très longue; le libyque permet aussi de saisir « les
déformations » connues par l’onomastique libyque ainsi MSNSN «
Massinissa », MKWSN «Micipsa»; le même phénomène se retrouve
dans les toponymes: TBGG «Tukka» (Dougga).
L’apport des inscriptions dites oficielles: ces textes auraient
été écrits pour « commémorer » un événement d’où la liste des
« responsables » de la ville – une sorte de conseil municipal- cités
en même temps que le titre qu’ils portent: magistrats éponymes,
responsables des cent, chef des 50, etc. ces titres et fonctions ne
sont pas toujours traduits ou traduisibles : GLDT «prince», MWSN
« chef des cent», MSSKW « chef des cinquante», etc.
L’intérêt des bilingues - libyque/punique, libyque/néopunique
et libyque/latin - réside dans le fait qu’il s’agit de documents datables
même si la fourchette est large; elles sont la preuve que le libyque a
côtoyé les écritures introduites en Afrique berbère durant l’antiquité;
il est évident que le libyque a reculé devant le punique ; il sera envahi
par le latin et coniné dans des régions périphériques par rapport à

26
Le Libyque

« l’Afrique romaine » ; la carte des bilingues libyques-latines le


montre bien.
Aujourd’hui, l’écriture libyco-berbère est utilisée :
- sous la formes des tiinagh chez les Touareg
- et des néo-tiinagh utilisées par l’IRCAM (institut royal de la
culture amazigh) et deviennent ainsi l’écriture oficielle pour
les parlers berbères marocains ;

Les néo-tiinagh se retrouvent aussi utilisées dans certaines


régions berbères ou berbèrophones, essentiellement en Kabylie et au
sein de certains milieux intellectuels, universitaires et militants de la
cause amazighe surtout en France et en Espagne.
Ce choix, écrire en néo-tiinagh, ne fait pas l’unanimité ;
l’écriture arabe a servi et sert encore à transcrire certains parlers
berbères et les milieux arabophones défendent le recours à l’alphabet
arabe ; le recours aux caractères latins est un phénomène du siècle
dernier ; il est solidement installé dans les institutions universitaires
et de recherche, à l’INALCO, à Naples et à Leiden pour ne citer que
les institutions qui enseignent les parlers berbères ; l’utilisation des
caractères latins est même devenu une évidence pour beaucoup ne
serait-ce qu’à cause de l’acquis engrangé – les nombreuses études de
nombreux parlers, les multiples publications, etc. - ; il s’agit pour
d’autres d’un choix culturel et politique.
Renoncer aux caractères libyco-berbères n’en pose pas moins

Revue Tunisienne d’Archéologie n° 01 / 2013


des problèmes : comment accepter la renonciation par les berbères
eux-mêmes à une partie de leur patrimoine : leur écriture ? Cette
écriture, dans ses différentes formes, s’est maintenue à travers les
siècles ; elle exprime des parlers libyco-bebrères qui semblent
aussi anciens ; l’acculturation des libyens, ancêtres des berbères ou
amazigh, est déjà attestée au cours du Ier siècle avant J.-C. suite aux
contacts avec les civilisations « expansionnistes » de l’époque ; elle
se consolide avec l’arrivée de l’islam et de sa langue véhiculaire,
l’arabe. Ces inluences durant presque trois millénaires n’ont pas
empêché aussi bien la langue libyque que les alphabets libyco-
berbères qui l’expriment d’arriver jusqu’à nous et de se maintenir
comme des éléments identiicateurs d’une partie importante des
habitants du nord de l’Afrique.

27
Mansour GHAKI
Revue Tunisienne d'Archéologie n° 01 / 2013

Bibliographie
Actes du colloque international « Le Février (J. G.) : « Que savons-nous du
libyco-berbère ou le tiinagh : de libyque ? », Revue Africaine, 100,
l’authenticité à l’usage pratique, 1956, 263-274.
HCA, Alger 2007. Galand (L.) « Les alphabets libyques »
Aït Kaci (A.) : « Recherches sur Antiquités Africaines 25, 1989,
l’ancêtre des alphabets libyco- 69-81.
berbères », Libyan Studies 38, Galand (L.) : « Le libyque en Algérie »
2007, 13-36. in Identités et Cultures dans
Aghali-Zakara (M.) & Drouin (J.): l’Algérie antique s.d.de Claude
« Ecritures libyco-berbères. Briand-Ponsart, publications des
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L’aventure des écritures, Paris, 2005, 59-68.
BNF, 1997, p. 98-111. Lettres du RILB ( EPHE-Paris 4ème
Aghali-Zakkara (M.) et section. Directeur de la publication
Drouin (J.): Inscriptions rupestres L. Galand)..
libyco-berbères (Sahel nigéro- Ghaki (M.) : “ La répartition des
malien, EPHE, Hautes Etudes inscriptions libyques», Reppal IX,
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Chabot (J. B.) : Recueil des Hachid (M.) : “Le contexte
inscriptions libyques, Paris 1940 archéologique et historique
Chaker (S.) : Textes en linguistique de l’apparition de l’alphabet
berbère, cnrs 1984. libyque… », Actes du colloque
Chaker (S.) – Hachi (S.) : « A international « Le libyco-berbère
propos de l’origine et de l’âge de ou le tiinagh : de l’authenticité
l’écriture libyco-berbère », Etudes à l’usage pratique, HCA, Alger
berbères et chamito-sémitiques, 2007, 17-124.
Mélanges offerts à Karl G. Prasse Laporte (J.-P.) : « Datation des stèles
(S. Chaker, ed.) Paris-Louvain, libyques igurées de Grande
Ed. Peeters 2000, 95-111. Kabylie », L’Africa romana 9,
Chaker (S.) : L’écriture libyco- 1992, 389-423.
berbère, états des lieux et Pichler (W.), “Origin and
perspectives » Actes du colloque Development of the Libyco-
international « Le libyco-berbère berber Script”, Berber Studies 15,
ou le tiinagh : de l’authenticité Koln 2007.
à l’usage pratique, HCA, Alger Rebuffat (R.) : Grafiti en « libyque de
2007, 275-292. Bu Njem », Libya antiqua vol. XI-
Claudot-Hawad (H.) : « Ecriture XII, 1974-75, 165-187.
tiinagh » EB XVII, 2573-2580. Skounti (A.) – Lemjidi (A.) – Nami
Encyclopédie berbère volume (E.) : Tirra, Aux origines de
XXVIII/XXIX, 2008 – lettres l’écriture au Maroc, IRCAM, Rabat
K/ L – « langue » 4348-4360 et 2003. (Ghaki (M.), compte rendu
« libyque » 4395-4409. dans Reppal XIV, 2008, 199-204).

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