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politique
Touraine Alain. Lipset (Seymour Martin), Bendix (Reinhard) - Social mobility in industrial society. In: Revue française de
science politique, 11ᵉ année, n°1, 1961. pp. 195-197;
https://www.persee.fr/doc/rfsp_0035-2950_1961_num_11_1_392615_t1_0195_0000_001
tout bien considéré, par des contrastes démographiques du passé? A vrai dire,
consciemment ou non, quiconque, à la suite d'André Siegfried, a étudié les
problèmes que pose la géographie des élections françaises, a fait par là même
plus ou moins de démographie. Le livre de Pierre George contribuera
utilement à rendre systématiques les relations entre les deux disciplines.
Mais la démographie pose également à la science politique des questions
que celle-ci, livrée à elle-même, risquerait de négliger : je pense à la recherche
des facteurs d'ordre politique par lesquels peuvent s'expliquer certains faits
d'ordre démographique, comme, pour n'en citer qu'un exemple, les variations
géographiques dans les taux de mortalité infantile. Il saute aux yeux que ces
variations sont en rapport avec les disparités des niveaux de vie et de
l'équipement sanitaire, et la science politique se devrait de rechercher les causes
politiques de ces disparités.
La typologie démographique des Etats contemporains fait enfin ressortir
de façon éclatante le contraste entre les puissances à population équilibrée, qui
sont le plus souvent celles qui disposent de la part la plus grande des ressources
matérielles actuellement existantes, et ces puissances à population en expansion
parfois très rapide, dont la plupart sont au contraire économiquement
déshéritées. Il peut y avoir dans ce contraste matière à interprétation des problèmes
de relations internationales en même temps qu'à prévision des difficultés à
venir.
La science politique se doit donc, à tous égards, d'entretenir d'étroites
relations avec la démographie. Elle doit être reconnaissante à Pierre George
de lui faciliter la prise de conscience de cette nécessité en même temps qu'il
lui rend plus aisé d'en tenir compte.
François Goguel
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Revue Française de Science Politique
la réserve que les seuls chiffres disponibles pour l'U.R.S.S. sont ceux qui ont
été calculés par l'Université Harvard à partir de son étude sur les réfugiés).
Mais ce point lui-même était susceptible de recevoir une interprétation
différente. On peut dire que la forte mobilité sociale soviétique est le fait d'un pays
en rapide industrialisation et que le régime social n'a donc d'effets qu'indirects,
en ce qu'il permet cette industrialisation. Cette idée semble corroborée par la
comparaison, qui s'appuie sur des chiffres plus nombreux et plus sûrs, des
Etats-Unis et des pays d'Europe occidentale.
Alors que l'on oppose l'Amérique ouverte à l'Europe fermée, la facilité du
passage « from Rags to Riches >x à l'exclusivisme oxonien ou cantabre, les
chiffres montrent que les taux de mobilité sociale ne sont pas plus élevés aux
Etats-Unis qu'en Grande-Bretagne, en France ou en Allemagne. Si l'on néglige
provisoirement la question de l'origine de l'idéologie égalitaire des Etats-Unis.
le fait essentiel apparaît : dans tous les pays industriels, la « structure of
opportunities » subit une évolution comparable et qui ne peut pas être
considérablement faussée par les différences qui apparaissent d'un pays à l'autre dans le
comportement démographique différentiel des diverses catégories sociales.
Une conséquence importante de ce changement de perspective est qu'il ouvre
la voie à une psycho-sociologie de la mobilité. On admettait implicitement que
les individus cherchaient tous à s'élever, mais étaient freinés ou arrêtés par
les barrières qu'ils rencontraient. Les observations de Lipset et de Bendix, qui
confirment les résultats déjà présentés par D. Glass et ses collaborateurs,
conduisent au contraire à reconnaître une certaine liberté de mouvement, certaines
chances de mobilité définies par la situation économique, et à rechercher les
raisons pour lesquelles un individu les utilise ou non.
Le problème plus général et plus grave encore des conséquences de la
mobilité se trouve ainsi posé d'une manière nouvelle. Dans la perspective
ancienne, il était simple : plus la mobilité est importante, et plus la société est
« intégrée », « harmonisée », « démocratique ».
L'établissement de liens moins chargés de valeur entre la mobilité et la
structure économique permet de considérer la mobilité comme une forme du
changement social, créatrice de tensions autant que solution de problèmes. Plus
la mobilité est grande et plus est ressenti durement l'échec, plus se développent
des comportements de retrait — religieux, familiaux, professionnels — qui
transmutent l'échec en rêve. C'est aussi dans les sociétés en forte mobilité, donc en
industrialisation rapide, que les tensions entre les classes sociales sont les plus
vives et qu'est le plus affaibli l'ordre social traditionnel. Reprenant des
remarques de Galenson, les auteurs rappellent que l'industrialisation de la Norvège
fut plus brutale que celle de la Suède et celle-ci que celle du Danemark, et
que l'importance de l'extrême-gauche fut pour cette raison plus forte en
Norvège qu'en Suède, et en Suède qu'au Danemark.
Ce livre est un de ceux que les sociologues français peuvent lire avec
le plus de profit : il marque un progrès de l'information et un renouvellement
des concepts. Ses insuffisances mêmes augmentent son intérêt ; une voie est
ouverte, mais encore mal décrite.
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Notes Bibliographiques
Alain Touraine
Relations Internationales
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