Vous êtes sur la page 1sur 82

Emmanuelle MOUSSY

IMPLICATION DE L’IADE FACE A LA


POLLUTION PAR LES AGENTS
ANESTHESIQUES INHALATOIRES

ECOLE D’INFIRMIER ANESTHESISTE DU CHU DE REIMS


PROMOTION 2007/2009
Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont permis
de mener à bien la réalisation de ce travail.

2
PLAN

INTRODUCTION

1. LES ANESTHESIQUES INHALATOIRES


1.1 Généralités
1.1.1 Les agents anesthésiques halogénés
1.1.2 les gaz anesthésiques

1.2 Pharmacocinétique
1.2.1 Absorption et distribution
1.2.2 Métabolisme et élimination
1.2.3 Puissance des anesthésiques inhalatoires

2. CONSEQUENCES DE L’EXPOSITION CHRONIQUE AU PROTOXYDE


D’AZOTE ET AUX HALOGENES
2.1 Conséquences sur la santé
2.1.1 Effets neurologiques et comportementaux
2.1.1.1 Effets neurologiques centraux
2.1.1.2 Effets neurologiques périphériques
2.1.2 Effets sur la reproduction
2.1.2.1 Etudes épidémiologiques
2.1.2.2 Etudes animales
2.1.3 Effets sur la fonction rénale
2.1.4 Effets sur la fonction hépatique
2.1.5 Effets sur l’hématopoïèse
2.1.6 Effets mutagènes et cancérigènes

2.2 Conséquences sur l’environnement

3
3. REPERES REGLEMENTAIRES
3.1 Principes généraux de prévention
3.2 Prévention des risques des professionnels plus spécifique
à la pollution chimique
3.2.1 Valeurs limites d’exposition recommandées
3.2.2 Aération et assainissement des locaux de travail
3.3 Les dispositifs médicaux
3.4 Recommandations de la SFAR
3.5 Loi de renforcement sur le principe de précaution ?

4. SOURCES DE POLLUTION EN PRATIQUE CLINIQUE


4.1 Définition du terme pollution
4.2 Comment mesurer la pollution ?
4.3 Pratiques anesthésiques
4.3.1 Accès aux voies aériennes
4.3.2 Les différents circuits d’anesthésie
4.3.2.1 Le circuit ouvert
4.3.2.2 Le circuit semi-ouvert
4.3.2.3 Le circuit semi-fermé
4.3.2.4 Le circuit fermé
4.3.3 Modes d’induction

5. PREVENTION DE LA POLLUTION
5.1 Rôle participatif de l’infirmier anesthésiste
5.2 Moyens primaires de prévention
5.3 Les systèmes d’évacuation/récupération des gaz
anesthésiques
5.3.1 Les filtres à charbon actif
5.3.2 Les systèmes d’évacuation des gaz anesthésiques
5.4 La ventilation de locaux

4
6. ENQUETE
6.1 Objectifs
6.2 Méthode
6.3 Résultats
6.4 Synthèse
6.4.1 Les habitudes
6.4.2 Le manque d’informations
6.4.3 Le manque de matériel

7. PERSPECTIVES
7.1 Actions à l’échelle individuelle
7.2 Actions à l’échelle du service
7.3 Actions auprès des étudiants

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES

5
INTRODUCTION

Avant même de commencer mon premier stage d’anesthésie, j’ai été mise en garde par
rapport à la somnolence occasionnée par les anesthésiques inhalatoires après une
journée passée au bloc. Ce que j’ai pu constater d’ailleurs par moi-même.

J’ai également souffert de céphalées plus fréquentes que d’habitude. Je ne les ai pas
rapprochées à l’exposition aux anesthésiques inhalatoires, jusqu’à ce qu’une infirmière
anesthésiste me dise qu’elle souffrait de maux de tête avec l’utilisation d’un certain
anesthésique volatile.

Après discussion avec mes collègues de promotion, nombre d’entre eux ont déjà
ressenti une gène liée à l’inhalation d’agents anesthésiques volatiles et de façon plus
intense lors des anesthésies au masque ou encore des anesthésies en pédiatrie.

En effet, les agents anesthésiques inhalatoires s ‘échappent des circuits de ventilation


et des voies aériennes des opérés pour polluer l’atmosphère des blocs opératoires. Les
IADE, postés près de la tête du patient et près du respirateur sont d’autant plus
exposés aux agents halogénés et au protoxyde d’azote.
Des conséquences sur la santé de cette exposition chronique sont à suspecter. Cela
entraîne la nécessité de prévenir cette pollution.

Afin de la maîtriser, il existe des moyens et des dispositifs anti-pollution, cependant le


constat que j’ai pu faire est tout autre.

Mes stages m’ont amené dans différents blocs de notre région et à proximité, et force
est de constater que les pratiques en matière de lutte contre la pollution liée aux agents
anesthésiques inhalatoires sont très diverses. Elles sont même parfois absentes lors de
phases ou de techniques d’administration décrites comme plus polluantes notamment
la phase d’induction, les anesthésies au masque réalisées sur circuit auxiliaire sans
filtre à charbon, l’absence de système SEGA fonctionnel et autre …

6
Au regard des connaissances actuelles, pourquoi les pratiques des IADE en matière de
lutte contre la pollution sont si hétérogènes ?

Afin d’émettre des hypothèses de réponse, j’aborderai tout d’abord le thème des agents
anesthésiques inhalatoires et leur pharmacocinétique, puis les conséquences sur la
santé de l’exposition chronique à ces anesthésiques. Ensuite, je détaillerai les textes
réglementaires relatifs à la pollution de l’air au bloc opératoire. J’identifierai les sources
de pollution en pratique clinique ainsi que les moyens de prévention.

L’analyse d’une enquête auprès des IADE me permettra de mieux comprendre et


connaître leurs pratiques ainsi que les freins à la lutte contre la pollution ;

Tout ceci me permettra d’émettre des propositions quant à l’implication de l’IADE face à
ce problème.

7
1. LES AGENTS ANESTHESIQUES INHALATOIRES

1.1 GENERALITES

Les médicaments dits anesthésiques sont des substances qui agissent au


niveau du système nerveux central et provoquent la narcose ou le sommeil
anesthésique.
Une anesthésie générale peut être conduite avec des anesthésiques volatils et /ou
intraveineux. Fondamentalement, on peut distinguer trois différentes procédures
d'anesthésie générale : l'anesthésie inhalatoire, l'anesthésie intraveineuse et
l'anesthésie balancée.
L'anesthésie inhalatoire pure qui utilise des agents anesthésiques inhalatoires
administrés par voie pulmonaire, est cependant exceptionnelle de nos jours et ne se
rencontre que pour les actes de courte durée chez les nouveau-nés et les petits
enfants.
L'anesthésie intraveineuse est une anesthésie réalisée exclusivement par
administration d'anesthésiques intraveineux.
L'anesthésie balancée est définie comme une procédure combinant
anesthésiques inhalatoires et intraveineux. Elle est la technique la plus répandue
actuellement.
Les anesthésiques inhalatoires sont donc largement utilisés. Ils comprennent les
agents anesthésiques halogénés et les gaz.

1.1.1 Les agents anesthésiques halogénés

Les agents anesthésiques halogénés comprennent trois anesthésiques


actuellement utilisés : l'isoflurane, le desflurane et le sévoflurane. L'halothane n'est plus
utilisé dans les blocs opératoires des pays occidentaux mais reste largement utilisé
dans les pays en voie de développement; je ne l'aborderai donc pas dans ce travail.

L'isoflurane, le desflurane et le sévorane sont des éthers fluorés. L'isoflurane fut


le premier à être commercialisé en 1980, puis le sévorane en 1986 et le desflurane

8
depuis les années 90.
L'isoflurane et le desflurane ont une odeur légèrement âcre qui contre-indique
entre autre leur utilisation lors de l'induction, contrairement au sévoflurane.
Ces anesthésiques sont des liquides volatiles qui sont administrés sous forme de
vapeur.
1.1.2 Les gaz anesthésiques

Ils comprennent le protoxyde d'azote et le xénon.


Le protoxyde d'azote est un gaz incolore et inodore qui a été découvert en 1772.
Ces effets analgésiques et dysphoriques ont été décrits par Davy en 1779. Ceci en fait
donc un vieil agent de l'anesthésie. Mais ces propriétés anti-NMDA et anti-
hyperalgésiques n'ont été identifiées qu'au début du XXIème siècle.

Il a donc des propriétés analgésiques et sédatives mais ne produit pas de perte


de conscience à la concentration clinique utilisée en raison de sa concentration
alvéolaire élevée (cf. puissance des anesthésiques volatiles). Cependant cela permet
de diminuer de près de moitié la concentration des autres anesthésiques administrés,
diminuant d'autant leurs effets secondaires. Il est donc largement utilisé mais compte-
tenu de ses propriétés de diffusion au niveau des cavités closes, il présente quelques
contre-indications.

Le xénon est un gaz rare atmosphérique donc non polluant, non-toxique et


chimiquement inerte. Ces effets anesthésiques sont connus depuis le début des années
50. Il a obtenu l'autorisation de mise sur le marché en Allemagne en 2005. En France il
est en cours de commercialisation. Il présente un inconvénient de taille par son coût qui
est 1000 fois plus élevé que le protoxyde d'azote.

1.2 PHARMACOCINETIQUE

Les anesthésiques inhalatoires sont administrés sous forme de gaz ou de


vapeur. Le terme « vapeur » désigne l'état gazeux d'une substance qui, à température
ambiante habituelle, existe à l'état liquide. Ces vapeurs anesthésiques sont obtenues

9
par une procédure de vaporisation.
Le terme « gaz » désigne une substance qui, à température et à pression ambiante
habituelle, n'existe qu'à l'état gazeux.
L'administration des agents anesthésiques inhalatoires nécessite un vecteur qui
est l'oxygène et/ou l'air. Le mélange ainsi obtenu est appelé « gaz frais ».

1.2.1 Absorption et distribution

L'absorption et la distribution des anesthésiques volatiles consistent en une série


d'étapes permettant le transfert de l'anesthésique du circuit ventilatoire jusqu'au
cerveau.
Avant d'atteindre le système nerveux central, le gaz inhalé doit :
! arriver dans l'alvéole avec le gaz vecteur,
! être diluer dans l'air alvéolaire résiduel, correspondant à la capacité résiduelle
fonctionnelle,
! diffuser au niveau de la paroi alvéolo-capillaire jusqu'à équilibration des
concentrations entre l'air alvéolaire et le sang capillaire pulmonaire,
! être distribué aux différents tissus de l'organisme : des tissus richement
vascularisés à ceux qui le sont moins,
! diffuser vers les tissus jusqu'à équilibration des concentrations entre le sang
capillaire et les différents tissus.

Durant ces différentes phases, l'anesthésique diffuse selon un gradient de


pressions partielles, de la zone de pression partielle la plus élevée vers une zone où la
pression est plus basse.

Plusieurs facteurs influencent la fuite ou le captage tissulaire de l'anesthésique :

! la solubilité dans le sang : elle est déterminée par le coefficient de partage


sang/gaz; plus un agent sera soluble plus il diffusera rapidement de l'alvéole vers
le sang et plus l'équilibre des pressions partielles sera long donc plus l'induction
sera longue. ( tableau 1)

10
! Le débit cardiaque : plus le débit cardiaque est élevé et plus la fuite de
l'anesthésique vers les tissus augmente. Cela ralenti d’autant l'élévation de la
concentration alvéolaire. Le temps d'induction sera alors plus long.

! Le gradient de concentration entre l'alvéole et le sang veineux : ce gradient est


proportionnel au débit sanguin tissulaire et à la solubilité de l'anesthésique dans
les tissus, coefficient de partage cerveau/sang. (tableau 1.)

sang/gaz cerveau/sang
Protoxyde d'azote 0,47 1,06
Isoflurane 1,4 2,6
Sévoflurane 0,63 1,7
Desflurane 0,42 1,3

Tableau 1 : Coefficients de partage des anesthésiques par inhalation

1.2.2 Métabolisme et élimination

Les anesthésiques par inhalation sont essentiellement éliminés, sans


transformation, par voie pulmonaire.

L'isoflurane est peu métabolisé, seulement 0,2 à 0,5 % sont biotransformés au


niveau hépatique. Cette biotransformation par les cytochromes P450 se fait sous forme
de fluorures qui peuvent avoir une toxicité rénale. Mais ils sont produits en quantité
insuffisante pour entraîner une insuffisance rénale.

Ceci est également le cas du sévoflurane, métabolisé par le foie à hauteur de 2


à 4 %. A la concentration de 3 % pendant 1 heure, le taux sanguin de fluorures reste
en dessous du seuil de toxicité rénal.

Le desflurane est le plus stable des anesthésiques inhalatoires. Même en


présence de phénobarbital qui est un inducteur enzymatique, on n'observe pas

11
d'augmentation de la concentration plasmatique en ions fluorures.
Le protoxyde d'azote n'est pas métabolisé. Toutefois, dans certaines
circonstances, une légère biotransformation a été mise en évidence au niveau de
l'intestin.
Leur élimination dépend donc tout d'abord des paramètres ventilatoires. Mais
aussi de leur solubilité dans le sang en effet les substances à haute solubilité sanguine
sont éliminées plus lentement du fait du gradient de pression partielle moins élevé. Il est
aussi important de noter qu'avec l'allongement de la durée d'anesthésie, l'élimination, et
donc le réveil, sont retardés du fait de la mobilisation des anesthésiques accumulés au
niveau des tissus essentiellement graisseux.

1.2.3 Puissance des anesthésiques inhalatoires.

Elle est définie par la concentration alvéolaire minimale soit la CAM (ou MAC en
anglais). Le niveau de l'effet de l'anesthésique peut être estimé à partir de la
concentration alvéolaire de l'anesthésique. En effet, le cerveau étant un organe
richement vascularisé, la concentration cérébrale en agent anesthésique inhalatoire est
rapidement en équilibre avec l'air alvéolaire; la concentration alvéolaire est donc un bon
reflet de l'effet au niveau cérébral.
Par définition, la CAM est la concentration alvéolaire qui provoque l'absence de
réponse à un stimulus nociceptif, l'incision chirurgicale, chez 50 % des patients. Cette
définition s'applique à tous les anesthésiques par inhalation.
Le protoxyde d'azote a des effets additifs à ceux des halogénés. En présence de
60 % de protoxyde d'azote, la CAM des anesthésiques volatiles halogénés est réduite
de moitié.
Certains facteurs modifient cette CAM, notamment l'âge et la température corporelle.
Anesthésiques inhalatoires CAM en %

Protoxyde d'azote 105


Isoflurane 1,2
Sévoflurane 2
Desflurane 6

12
Tableau n°2 : Concentration alvéolaire minimale avec O2 chez l'adulte.

2.CONSEQUENCES DE L'EXPOSITION CHRONIQUE AU


PROTOXYDE D'AZOTE ET AUX HALOGENES

2.1 CONSEQUENCES SUR LA SANTE

Les conséquences pour la santé de l'exposition chronique à de faibles


concentrations d'agents anesthésiques inhalatoires ont été évaluées à partir de
données épidémiologiques et de résultats d'études menées sur l'animal et le volontaire
sain. Les personnels concernés par cette exposition chronique sont les anesthésistes,
les chirurgiens, les infirmiers anesthésistes et de bloc opératoire, les sages-femmes, les
vétérinaires et, dans certains pays anglo-saxons, les chirurgiens dentistes.

L'étude de la toxicité du protoxyde d'azote et des agents halogénés, sur les


personnels est difficilement dissociable car ces composés sont généralement associés
lors de l'anesthésie.

La littérature comporte de nombreux travaux sur les effets de ces produits sur
l'organisme. Ces articles ne sont cependant pas exempts de critiques ( méthodologie,
non-prise en compte des polyexpositions professionnelles...) et sont parfois
contradictoires.

2.1.1 Les effets neurologiques et comportementaux

2.1.1.1 Effets neurologiques centraux

A concentration anesthésique, les agents halogénés et le protoxyde d'azote ont


une action dépressive sur l'ensemble des centres du système nerveux central d'où une
diminution des fonctions de coordination, d'éveil, de vigilance et du tonus musculaire.
Mais qu'en est-il lors d'une exposition chronique ?

13
Certaines études ont montré que l'exposition chronique aux agents
anesthésiques inhalatoires avait des conséquences sur les performances psychiques et
sensorielles : Bruce et Bach en 1976, dont Bruce démentira les résultats en 1991;
Saurel-Cubizolles et coll. en 1992 et Lucchini et coll. en 1996.
Plus récemment une étude exposés-non exposés réalisée en 2000 dans un CHU
français par S.RAVIER-SORGUES, a aussi retrouvé une prévalence significativement
plus élevée de troubles du système nerveux central dans la population d'infirmières de
bloc exposée (IADE) par rapport à une population témoin appariée selon les critères :
âge, sexe et horaires de travail ( tableau 3)

Symptômes IADE (n=79) Témoins ( n=124)


Céphalées 43 15,3
Ralentissement psychomoteur 12,7 1,6
Asthénie 24 12
Perte de mémoire, trouble de concentration 27,8 14,5
Nausées 13,9 1,6
Somnolence 39,2 5,6

Tableau 3 : Répartition des symptômes dans les deux populations.

Cependant d'autres études sont contradictoires et ne retrouvent pas de


conséquences notables sur les performances cognitives : Venables en 1983, Stollery
en 1988.
Ainsi la littérature ne permet pas d'imposer une conclusion, mais permet de
suspecter des effets neurologiques centraux. Elle doit inciter à la prudence et à la
prévention.

2.1.1.2 Effets neurologiques périphériques

Le mode d'action à l'origine des effets médullaires et neurologiques


périphériques du protoxyde d'azote serait son interaction avec la vitamine B12,
cofacteur de la méthionine synthéase. L'inactivation de cette enzyme provoquerait une

14
carence en méthionine et en tétrahydrofolate.
La méthionine participe à la synthèse des gaines de myéline et le tétrafolate intervient
dans la synthèse des bases nécessaires à l'ADN. Ces faits sont rapportés par Koblin en
1982.
Chez le personnel soumis à des expositions professionnelles importantes,
plusieurs auteurs, dont EN.Cohen et Edling en 1980, ont décrit des manifestations
neurologiques périphériques à type de dyesthésies.

2.1.2 Effets sur la reproduction

2.1.2.1 Etudes épidémiologiques

De nombreuses études ont été menées des années 60 aux années 90, en
Russie, au Danemark, au USA, en Finlande, au Canada, en France... (cf. annexe 1:
tableau des différentes études).
En 1985, Tannenbaum a effectué une synthèse de douze études les mieux
menées sur ce sujet. Elles concluaient que le risque d'avortement spontané était de 1,2
à 2 fois plus élevé chez les femmes travaillant au bloc opératoire. Par contre,
l'augmentation des malformations congénitales était fortement remise en question. La
synthèse de Tannenbaum conclut que ces études comprennent des anomalies dans
leur conduite : études rétrospectives, investigation des expositions professionnelles et
issues de grossesse par questionnaires. Ainsi elles ne permettent pas d'affirmer que
l'exposition aux agents anesthésiques inhalatoires en salle d'opération entraîne une
augmentation des avortements spontanés ou des malformations congénitales.

En 1996, une synthèse de 24 études épidémiologiques relatives aux effets de


l'exposition professionnelle aux anesthésiques inhalatoires sur la reproduction entre
1971 et 1995 a été réalisée par le conseil d'évaluation des technologies de la santé au
Québec. Elle concluait à une augmentation du risque d'avortement chez les femmes de
7,5 %. Le risque est plus élevé pour les dentistes et assistantes dentaires, ainsi que
pour les vétérinaires car ils sont soumis à des concentrations élevées de protoxyde
d'azote.

15
Cependant en 1987, Spence, dans une étude prospective sur 11000 médecins
ne trouve aucune relation entre les conditions de travail et la survenue d'avortements
spontanés. Ericson et Kallen, en 1985, avaient abouti aux mêmes conclusions
concernant le personnel de bloc opératoire.
Cependant en France, le groupe d'experts qui a rédigé le guide « anesthésie et
qualité de l'air »* rappelle qu’il est difficile de déterminer si l'exposition aux agents
anesthésiques a ou non des effets sur la reproduction humaine. En effet devant un
accident de reproduction, il est toujours difficile sinon impossible d'établir un lien de
causalité avec l'exposition aux agents chimiques, le personnel de bloc opératoire étant
soumis à une polyexposition : différents types de solvants, rayons « x ». De plus, les
effets à rechercher peuvent, pour une même substance, varier suivant la dose et la
période d'exposition par rapport au développement embryofoetal.
Enfin il faut tenir compte des antécédents génétiques, de l'âge de la mère, de sa
consommation d'alcool, de tabac ....

2.1.2.2 Etudes animales

Les conséquences de l'exposition prolongée au protoxyde d'azote sur la fonction


de reproduction du rat sont quelques fois discordantes. Pour Viera, à des
concentrations inférieures à 500 ppm, il n'y a pas de conséquences mais une baisse de
la fertilité femelle et mâle, des réductions de poids et de taille des embryons ne sont
observées que lors d'expositions à des doses subanesthésiques.
Cependant Holson ne notent aucune répercussions sur la fertilité de la femelle et du
mâle à des concentrations subanesthésiques, ni de conséquences sur leurs
progénitures.

Les tests in vitro ou in vivo chez l'animal n'ont pas montré d'effets sur la fertilité avec les
agents halogénés autre que l'halotane.

*CRAMIF. Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques.
Document réalisé par le groupe disciplinaire : « Anesthésie et qualité de l’air », 1994 .

16
Au total, bien que les études ne soient pas exemptes de critiques, l'ensemble
des données ne peut conduire qu'à suspecter une nocivité des agents anesthésiques
sur la reproduction et doit nous inciter à une maîtrise des expositions professionnelles.

2.1.3 Effets sur la fonction rénale

Aucune toxicité rénale n'est imputable au protoxyde d'azote et aux agents


halogénés récents dans le cadre d'une exposition professionnelle.

2.1.4 Effets sur la fonction hépatique

Les atteintes hépatiques sont essentiellement dues à l'halothane et ont donné


lieu en 1989 à la création du tableau 89 des maladies professionnelles. C'est pour cela
que l'halothane n'est plus utilisé dans notre pays, comme vu précédemment.

2.1.5 Effets sur l’hématopoïèse

En 1989, Ruprech a montré que l'exposition professionnelle au N2O au bloc


opératoire ne semblait pas induire de conséquences hématologiques néfastes.
Néanmoins, Sweeney a rapporté en 1985, trois cas d'anomalies de la synthèse
médullaire de d'ADN chez un échantillon de 21 dentistes. Il faut néanmoins noter que
cet échantillon était exposé à de très fortes concentrations de N2O, entre 1500 et 4600
ppm.

2.1.6 Effets mutagènes et cancérigènes

Un rapport de l'International Agency on Research on Cancer, publié en 1987, a


conclu que les preuves de carcinogenicité du protoxyde d'azote chez l'homme étaient
insuffisantes.
Quant aux halogénés, leurs pouvoirs cancérigènes ont fait l'objet de nombreux travaux
expérimentaux qui ont écarté l'existence du risque.

17
Cependant le protoxyde d'azote est utilisé expérimentalement à fortes doses pour
augmenter les effets des produits anti-cancéreux, et ses propriétés antifolates ont été
utilisées au cours de leucémies.

Quelques études menées chez des salariés fortement exposés ont rapporté des
anomalies : aberrations chromosomiques dans les cellules urinaires ( Lamberti en
1989), augmentation des aberrations chromosomiques et des échanges de chromatides
sœurs dans les cellules périphériques chez des employés travaillant dans des blocs
sans système d'aspiration des gaz (Natarajan en 1990, Karelova en 1992).

Néanmoins en 1999, Hoerauf a mis en évidence un parallélisme entre les altérations


génétiques observées chez des salariés exposés à l'isoflurane (2 ppm) et au N20 (25
ppm), et celles dues à un tabagisme de 11 à 20 cigarettes par jour.

2.2 CONSEQUENCES SUR L'ENVIRONNEMENT

Le protoxyde d'azote contribue à l'augmentation de l'effet de serre qui intervient


dans le réchauffement général du climat.
A l'exception du sévoflurane et du desflurane, la dégradation des halogénés
dans l'atmosphère produit des composés chlorés qui participent à la destruction de la
couche d'ozone. Les halogénés ont également un potentiel d'effet de serre qui est
jusqu'à 1900 fois plus élevé que le dioxyde de carbone.
Cependant la totalité des gaz anesthésiques évacués dans l'atmosphère
représente moins de 0,01% des composés chlorés émis et la quantité d'oxydes nitreux
provenant du protoxyde d'azote ne contribuerait qu’à 0,05% de l'effet de serre.

Compte-tenu des éventuelles conséquences sur la santé notamment au niveau


neurologique, au niveau de la reproduction et au niveau hépatique pour l’halothane;
qu’en est-il de la réglementation ?

18
3. REPERES REGLEMENTAIRES

3.1 PRINCIPES GENERAUX DE PREVENTION

Les principes généraux de prévention des risques professionnels sont définis par
le code du travail dans la loi du 31 décembre 1991.
Dans les articles L 230.1 et suivants, sont développés les principes généraux de
prévention. Ils imposent au chef d'établissement de prendre les mesures nécessaires
afin d'assurer la sécurité du personnel. Le directeur de l'établissement doit évaluer,
prévenir et combattre les risques en prenant en compte l'évolution des progrès
techniques.
La loi impose au responsable d'un centre de santé de planifier la prévention, de
prioriser les mesures de protection et de donner des instructions appropriées aux
agents.

3.2 PREVENTION DES RISQUES PROFESSIONNELS PLUS


SPECIFIQUES A LA POLLUTION CHIMIQUE

Les textes sur les principes généraux de prévention des risques professionnels
ont été complétés par des textes spécifiques relatifs au risque chimique.

3.2.1 Valeurs limites d’exposition recommandées

Elles sont définies par la circulaire DGS/3A/667 bis du ministère de la santé du


10 octobre 1985 complété par la circulaire DH/5D N°307 (annexes n°2 et 3).
Elle préconise que les salles où se font des anesthésies doivent être équipées
de dispositifs assurant l'évacuation des gaz et vapeurs anesthésiques. Elle fixe les
valeurs limites à 25 ppm pour le protoxyde d'azote et à 2 ppm pour les halogénés. Elle
stipule que la commission locale de surveillance des gaz, dont le pharmacien et le chef
de service d'anesthésie font partie, en liaison avec le Comité d'Hygiène et de Sécurité,

19
doit s'assurer de la réalisation des mesures assurant le contrôle de pollution.
Le médecin anesthésiste est directement impliqué dans la vérification des
installations et dans la formation.
Il demeure impossible de fixer un seuil d'exposition ne présentant aucun danger,
compte-tenu des données épidémiologiques actuelles. Il n'existe d'ailleurs aucun
consensus international sur les limites d'exposition. Dans plusieurs pays européens,
ces valeurs limites réglementaires s'établissent sur 8 heures, fixées entre 80 et 100
ppm pour le protoxyde d'azote, et entre 2 et 10 ppm pour les halogénés.

3.2.2 Aération et assainissement des locaux

Le décret n°84-1093 du 7 décembre 1984 du Code du Travail définit les


principes d'assainissement des locaux à pollution spécifique tels les blocs opératoires.
Ils imposent de supprimer les émissions de substances insalubres, de capter les
polluants, de diluer et d'évacuer les polluants résiduels par la ventilation générale.
Le décret précise aussi les obligations du maître d'ouvrage et du chef
d'établissement en matière d'installation et de maintenance du système de ventilation.
Le taux de renouvellement de l'air préconisé au niveau des salles d'opération et
de réveil, doit être au moins de 15 volumes par heure et par salle et un apport minimum
de 50 m3/heure/personne.

3.3 LES DISPOSITIFS MEDICAUX

Les dispositifs médicaux font l'objet d'une définition dans l'article L. 5211-1 du
livre II de la cinquième partie du code de la Santé Publique.

Selon la première exigence essentielle, les dispositifs médicaux doivent être


conçus et fabriqués de telle manière que leurs utilisations ne compromettent pas l'état
clinique et la sécurité des patients, ni la sécurité et la santé des utilisateurs et d'autres
personnes, lorsqu'ils sont utilisés dans les conditions et aux fins prévues.

20
Les risques éventuels liés à leur utilisation doivent être acceptables au regard du
bien-fait apporté au patient et compatibles avec un niveau élevé de protection de la
santé et de la sécurité.
Le système national de matério-vigilance, définit par le décret N°96.32 du 15
janvier 1996, a pour objet la surveillance des incidents ou risques d'incidents. Ce
système s'organise à l'échelon national mais aussi local. Il concerne tous les dispositifs
médicaux notamment ceux mis en oeuvre lors de l'anesthésie. Il permet de mieux tracer
les éventuels incidents et contribue à valider la fiabilité y compris pour les dispositifs
médicaux facilitant l'évacuation des gaz médicaux.
Enfin, les matériels et dispositifs médicaux doivent faire l'objet d'un contrôle lors
de leur première mise en service, d'une maintenance et d'un entretien périodiques et
programmés par un personnel qualifié. Les résultats doivent faire l'objet d'une traçabilité
écrite.

3.4 RECOMMANDATIONS DE LA SFAR

La SFAR, en janvier 1995, sous la direction du Pr. J.C. Otteni, dans le but de
contribuer à une sécurité optimale du patient anesthésié, émet des recommandations
concernant l'équipement d'un site ou d'un ensemble de sites anesthésiques.
Elle recommande l'utilisation, dans les sites d'anesthésie, de systèmes
antipollution évacuant à l'extérieur du bâtiment le protoxyde d'azote et les vapeurs
halogénés sortant de la valve d'échappement du système anesthésique et du
ventilateur.
Elle rappelle dans cette recommandation que les cartouches absorbantes ne
retiennent que les vapeurs halogénées et pas le protoxyde d'azote.
Elle précise que l'évacuation active ne doit pas faire appel à la source de vide
destinée aux aspirateurs et que les systèmes antipollution improvisés peuvent
comporter des risques et ne doivent pas être utilisés.
Compte-tenu de la difficulté d'installer des dispositifs d'évacuation dans certains
sites existants, cette recommandation s'applique essentiellement aux futurs sites et à
ceux devant subir des transformations, à condition que les sites actuels bénéficient

21
d'une ventilation conforme aux normes.
Après l’aspect réglementaire, j’aborde dans la partie suivante, l’aspect pratique
par l’identification des techniques générant le plus de pollution.

4. SOURCES DE POLLUTION EN PRATIQUE CLINIQUE

4.1 DEFINITION DU TERME POLLUTION

D'après le dictionnaire Le Robert, la pollution est l'« action de polluer »; polluer


est défini ainsi « salir en rendant malsain, dangereux ».
La pollution de l'air serait donc l'action de salir l'air en le rendant malsain voire
dangereux, ceci en y introduisant des substances non présentes en temps normal.
Ces substances sont représentées par le protoxyde d'azote et les halogénés.
Les termes « malsain » et « dangereux » indiquent que cela peut avoir des
conséquences sur notre santé et sur notre environnement comme vu précédemment.

4.2 COMMENT MESURER LA POLLUTION ?

Malgré ce que nous pourrions croire notre odorat est un très mauvais indicateur
de pollution. En effet, notre seuil de perception olfactive est compris entre 50 et 100
ppm pour les halogénés et le protoxyde d'azote est un gaz inodore.
Il existe le dosimètre individuel qui est un badge-dosimètre passif. Ce dosimètre
est destiné à la mesure de l 'exposition individuelle.
La mesure peut également être effectuée par analyse d'échantillons d'air
prélevé.
Il y a également les spectrophotomètres et les spectromètres photo acoustiques
qui sont des appareils transportables. Ils permettent soit une mesure ponctuelle, soit
une mesure continue en temps réelle des concentrations en ppm des différents gaz et
vapeurs anesthésiques avec une sensibilité de 0,1 ppm. La localisation de la source de
pollution est également possible avec ces appareils portables qui fournissent des
données en temps réel.

22
4.3 LES MODALITES D'ANESTHESIE

Pour illustrer cette comparaison entre les différentes pratiques anesthésiques, je


me suis appuyée sur l'étude de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-
France*. Cette étude a été réalisée entre 1992 et 1994, ce qui fait près de 15 ans, mais
aucune étude plus récente ne précisait les valeurs que je recherchais. Dans ce travail le
protoxyde d'azote a servi de traceur de la pollution des blocs opératoires.

4.3.1 Accès aux voies aériennes

Les procédures d'anesthésie générale nécessitent un contrôle de la ventilation et


un accès aux voies aériennes plus ou moins invasif.
La prise en charge des voies aériennes peut être réalisée avec un masque facial, avec
un masque laryngé ou par la pose d'une sonde d'intubation notamment.

L'anesthésie au masque est la technique la plus polluante. Dans l'étude de la


CRAMIF*, les concentrations de protoxyde d'azote, relevées lors de la phase d'entretien
sont toutes supérieures au 25 ppm prévus par les textes réglementaires. Les résultats
vont de 36 à 795 ppm soit une moyenne de 388 ppm.
L'anesthésie au masque est donc une pratique très polluante. Le masque
laryngé est quant à lui moins polluant ainsi que l'intubation. Cette dernière est la
pratique qui engendre le moins de pollution.

4.3.2 Les différents circuits d'anesthésie

Les circuits d'anesthésie sont composés des circuits ouverts, semi-ouverts, semi-
fermés, et fermés.

*CRAMIF. Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques.
Document réalisé par le groupe disciplinaire : « Anesthésie et qualité de l’air »

23
4.3.2.1 Le circuit ouvert

C'est un circuit à haut débit de gaz frais sans réinhalation des gaz expirés. Il se
compose d'une valve unidirectionnelle ou de non-réinhalation et se caractérise par un
débit de gaz frais (DGF) supérieur à la ventilation minute du patient. Il ne nécessite pas
d'absorbeur de dioxyde de carbone (CO2) expiré.

4.3.2.2 Le circuit semi-ouvert

C'est un circuit avec réinhalation partielle des gaz expirés. Il se caractérise par
un DGF supérieur à la moitié de la ventilation minute du patient.
Il n'y a pas d'obligation d'épuration de CO2.

4.3.2.3 Le circuit semi-fermé

C 'est un circuit à bas débit de gaz frais avec réinhalation partielle des gaz
expirés. Il se caractérise par un débit de gaz frais compris entre les besoins
métaboliques de base en oxygène du patient additionné aux fuites éventuelles et la
moitié de sa ventilation minute.
! ventilation minute" DGF > apport basal d'oxygène + fuites
L'apport d'oxygène est d'environ de 200 ml pour un adulte, auquel s'ajoute les fuites.
Un absorbeur de CO2 est indispensable.

4.3.2.4 Le circuit fermé

C'est un circuit à bas débit de gaz frais avec réinhalation complète des gaz
expirés. Le DGF correspond aux besoins de base en oxygène du patient additionnés
aux fuites éventuelles, en pratique cela correspond à un dixième de la ventilation
minute du patient. Ce système nécessite obligatoirement un absorbeur de CO2.

24
C'est le système le moins polluant de tous car la quantité de gaz rejetés dans
l'atmosphère de la salle est faible comme le démontre l'étude de la CRAMIF.

N2O (ppm) Halogénés (ppm)


Circuit ouvert 460 3,4
Circuit semi-fermé 135 1,6
Circuit fermé 91 0,5

Tableau n°4 : Comparaison des phases d'entretien en fonction du type de circuit. Source enquête de la
CRAMIF.

Il apparaît donc clairement que le circuit ouvert est un facteur très favorisant de
la pollution de l'air des blocs opératoires.

4.3.3 Les modes d'induction

Comme vu précédemment, il existe trois types d'anesthésie : inhalatoire,


balancée et intra-veineuse totale. Cette dernière n'utilise pas d'agents anesthésiques
inhalatoires et n'est donc pas génératrice de pollution.
Lors des deux autres types d'anesthésie l'induction peut être réalisée avec des
agents halogénés avec ou non adjonction de N20, ou avec un narcotique intra-veineux
sous O2 pur.
Lors d'une induction inhalatoire avec N20 puis un entretien en circuit fermé, les
concentrations de N2O prélevées lors de l'entretien vont de 58 à 170 ppm soit une
moyenne de 117 ppm. Alors que lors d'une induction intra-veineuse en O2 pur puis un
entretien par agents anesthésiques inhalatoires en circuit fermé, les valeurs N2O
mesurées lors de l'entretien vont de 10 à 52 ppm soit une moyenne de 32ppm*.

*
CRAMIF. Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques.
Document réalisé par le groupe disciplinaire : « Anesthésie et qualité de l’air »

25
Ainsi cela montre bien que le type d'induction a une répercussion importante sur
la pollution de l'air au bloc opératoire.
L'anesthésie pédiatrique est une anesthésie qui se fait le plus souvent au
masque et avec une induction inhalatoire avec association de N20. C'est donc une
spécialité qui entraîne un taux de pollution plus élevé qu'en anesthésie adulte.

Face à ces différentes pratiques plus ou moins polluantes, quels sont les moyens
et dispositifs permettant la maîtrise de la pollution ? Je vais les aborder dans la partie
suivante.

26
5. MAITRISE DE LA POLLUTION

La pollution de l'air des blocs est liée aux pratiques anesthésiques à proprement
parler comme vu précédemment mais elle est aussi liée aux systèmes de récupération
et d'évacuation des gaz anesthésiques ainsi qu'au renouvellement de l'air dans les
salles.
Pour ce qui est des moyens de prévention liés aux bonnes pratiques, le rôle de
l'IADE prend toute son importance.

5.1 ROLE PARTICIPATIF DE L'INFIRMIER ANESTHESISTE

D'après le décret du 29/07/2004 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de


la profession infirmière (annexe n°4); dans l’article R.4311-12 :
« L'infirmier ou l'infirmière anesthésiste diplômé d'état, est seul habilité, à
condition qu'un médecin anesthésiste-réanimateur puisse intervenir à tout moment, et
après qu'un médecin anesthésiste-réanimateur a examiné le patient et établi le
protocole, à appliquer les techniques suivantes :
1° Anesthésie générale;
2° Anesthésie loco-régionale et réinjections dans le cas où un dispositif a été mis
en place par un médecin anesthésiste-réanimateur;
3° Réanimation peropératoire..... »

L'IADE travaille donc bien sous protocole établi par le médecin anesthésiste-
réanimateur. Le médecin anesthésiste-réanimateur choisira donc la technique
anesthésique.
Cependant dans le même décret, dans l'article R.4311-1 :
« L'exercice de la profession d'infirmier ou d'infirmière comporte l'analyse,
l'organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la contribution au
recueil de données cliniques et épidémiologiques et la participation à des actions de

27
prévention, de dépistage, de formation et d 'éducation à la santé....... Ils exercent leur
activité en relation avec les autres professionnels du secteur de la santé, du secteur
social et médico-social et du secteur éducatif. »
Compte-tenu de nos connaissances théoriques et pratiques, et de notre capacité
d'analyse nous pouvons proposer une autre technique anesthésique dès lors que cette
proposition est argumentée : utilisation de l'anesthésie intra-veineuse, la non-utilisation
du N20..
Le médecin anesthésiste-réanimateur reste seul prescripteur malgré nos propositions
mais nous pouvons réduire la pollution de l'air en appliquant des mesures de bonnes
pratiques simples énumérez ci-dessous.

5.2 MOYENS PRIMAIRES DE PREVENTION

Ces pratiques permettent de réduire significativement le niveau de pollution des


blocs opératoires.

" Mettre en route et vérifier le respirateur en air/oxygène, sans N2O et ouvrir


le N20 au denier moment.

" Raccorder les ventilateurs aux systèmes d'évacuation des gaz, s’ils sont
présents.

" Eviter les fuites, pour cela :


- utiliser des masques de taille adaptée à la morphologie des patients,
- faire la chasse aux fuites sur les circuits de ventilation (valves, joints,
prises murales...). Pour cela, veillez à la maintenance préventive des
systèmes d'anesthésie comme prévue par l'arrêté du 3 octobre 1995 du
Code de la Santé Publique.
- débrancher les tuyaux des fluides médicaux en fin de programme.

" Utiliser le circuit interne du ventilateur, notamment lors de l'induction et du


réveil.

28
" Si induction sur le circuit auxiliaire, éviter l'introduction de N20, dans le cas
où il n'existe pas de système d'évacuation des gaz anesthésiques.
" N'introduire le N20 et les halogénés dans le circuit de ventilation que
lorsque la position de la sonde d'intubation et le gonflage du ballonnet
sont vérifiés.

" Préférer l'utilisation du circuit fermé.

" Eviter de purger le circuit de ventilation dans l'atmosphère de la salle.

" Arrêter l'administration du N20 en fin d'intervention.

" Remplir les cuves à halogénés avec précaution et ce, en fin de


programme. Bien veiller à refermer les flacons.

" Préférer lors des inductions, l'utilisation d'anesthésiques intraveineux et


l'oxygène pur. Il en est de même pour la phase d’entretien des
anesthésies de courte durée au masque facial. Tout cela doit se faire en
accord avec le médecin anesthésiste-réanimateur.

5.3 LES SYSTEMES DE RECUPERATION ET D’EVACUATION


DES GAZ ANESTHESIQUES
5.3.1 Les filtres à charbon actif

Le filtre à charbon actif de type Cardiff Aldasorbrer*, filtre narcotique Draëger*;


retient les halogénés avec une efficacité qui est fonction du débit de gaz qui la traverse,
de la concentration et de la nature de l'halogéné.
Peu encombrant, il ne nécessite aucune installation particulière et peut se
raccorder aux valves disposant d'un orifice latéral (valve de Waters par exemple).
Il a pour défauts :
! d'être inefficace sur la pollution par le N20,

29
! d'augmenter discrètement les résistances expiratoires,
! de nécessité un stockage après usage dans un local correctement ventilé car il y
a un phénomène de dégazage secondaire des vapeurs d'halogénés,
! de devoir être régulièrement remplacé. L'appréciation de l'état du filtre se fait par
sa pesée, ce qui est peu précis. Seule l'analyse des gaz à son orifice de sortie
permet d'évaluer précisément son degré de saturation.

5.3.2 Les systèmes d'évacuations des gaz anesthésiques

Le système d'évacuation des gaz anesthésiques: SEGA, collecte les gaz expirés
et les évacue de manière passive ou active hors de la salle d'intervention.

Il comporte :
# un dispositif de recueil des gaz anesthésiques
# une canalisation de transfert
# une interface destinée à protéger le circuit patient des variations de pressions
induites par le système.

Le SEGA est dit passif lorsque les gaz sont évacués sous la pression générée
par l'expiration du patient. Il peut alors se raccorder au système d'extraction de l'air de
la salle, sous réserve que celui-ci ne comporte pas de recyclage.

Il est dit actif lorsqu'une pression négative est induite pour éliminer les gaz. C'est
le moyen de captage le plus efficace, il permet de réduire de dix fois le taux de
pollution. Un SEGA actif est raccordé à une canalisation d'évacuation qui lui est
spécifique, dans laquelle de l'air sous pression circule, ce qui induit une dépression par
effet Venturi.
En aucun cas il ne doit être raccordé au vide médical, conformément à la
circulaire DH/5D N°307 du 28 août 1989.

Le rejet des gaz dans l'atmosphère doit se faire à distance d'une entrée d'air et
ne pas constituer une source de pollution pour une autre catégorie de personnel.

30
Le SEGA est considéré comme un dispositif médical et est donc soumis aux
contrôles définis par l'arrêté du 3 octobre 1995 du Code de la Santé Publique.
5.4 LA VENTILATION DES LOCAUX

Selon le décret n°84-1093 du 7 décembre 1984 du Code du Travail le taux de


renouvellement d'air préconisé est d'au moins 15 volumes par heure ou de 50
m3/heure/personne.
Elle ne peut suffire à abaisser les concentrations en agents anesthésiques
inhalatoires à un niveau acceptable. Elle doit être considérée comme un complément
aux autres moyens de dépollution.
Son objectif est de diluer les polluants et de les évacuer par extraction.
De plus ce code du travail fixe également les obligations en matière de contrôle
et de maintenance des installations.

Compte-tenu des conséquences éventuelles de l’exposition professionnelle aux


agents anesthésiques inhalatoires, de la réglementation, de l’état des lieux des
pratiques les plus polluantes et des moyens et dispositifs anti-pollution à notre
disposition, j’ai voulu savoir ce qu’il en était en pratique, en réalisant une enquête
auprès des infirmiers anesthésistes. Ceci afin de déterminer qu’elle pourrait être mon
implication en matière de prévention de la pollution de l’air.

31
6.ENQUETE
6.1 OBJECTIFS

Au regard des connaissances actuelles sur la pollution par les anesthésiques


inhalatoires, je me demande pourquoi les pratiques des infirmiers anesthésistes, en
matière de lutte contre la pollution, sont si hétérogènes ?

J'émets plusieurs hypothèses :


! les mesures de lutte contre la pollution sont inadaptées ou inapplicables à tous
les types d'anesthésie.
! les infirmiers anesthésistes manquent d'information concernant la pollution : les
pratiques la majorant, les dispositifs anti-pollution et leur utilisation.

Afin de confirmer ou non ces hypothèses, j'ai décidé de réaliser une enquête
auprès des infirmiers anesthésistes travaillant au bloc opératoire.

6.2 METHODE

Cette enquête a été réalisée à l'aide d'un questionnaire écrit et anonyme (annexe
N°5), comportant treize questions s'adressant uniquement aux infirmiers anesthésistes
exerçant au bloc opératoire. Ce questionnaire concernait l'anesthésie adulte et
pédiatrique. Tout ceci était mentionné sur la première partie qui servait de préalable.
J'ai diffusé cette enquête auprès de sept centres hospitaliers de la région et ses
alentours. Ceci afin de recueillir des informations venant de personnels formés dans
différentes écoles et venant de centres hospitaliers différents dans leur fonctionnement
et leurs pratiques en terme de lutte contre la pollution de l'air au bloc opératoire.
J'ai également sollicité la participation des infirmiers anesthésistes de l'hôpital
Necker à Paris, spécialisés dans la prise en charge pédiatrique. Cette spécialité étant

32
très concernée par les problèmes de pollution, je désirais savoir comment ils
percevaient et géraient ce problème.
Au total, j'ai diffusé 130 questionnaires. Je les ai laissés dix jours minimum à
disposition pour être remplis.
6.3 RESULTATS

Sur les 130 questionnaires distribués, il y en a eu 75 de remplis. Cela représente


un taux de réponse de 58%. Ce taux de réponse indique que les IADE sont concernés
par le problème de la pollution de l’air du bloc opératoire.

Pour ce qui est de l’ancienneté :


Lors de la rédaction de mon questionnaire un oubli s’est glissé dans cette
question, il manquait la proposition « entre 2 et 5 ans », les interrogés concernés l’ont
ajouté.

Nombre de réponses sur 75 %


Moins de 2 ans 14 18.5
Entre 2 ans et 5 ans 11 14.5
> à 5 ans 18 24
> à 10 ans 15 20
> à 15 ans 17 23

Tableau n°5 : Répartition des IADE en fonction de leur ancienneté.

L’ancienneté est donc assez homogène. Les professionnels les moins


représentés ont entre 2 et 5 ans d’ancienneté.

Pour ce qui est de la population IADE, on retrouve une majorité de femmes à


hauteur de 69 %. Ce qui est représentatif de la population IADE car d’après une
enquête démographique réalisée auprès de 7380 IADE en juillet 2001, la population

33
féminine représentait 69% des IADE*.

La question n°3 portait sur les connaissances des IADE concernant les effets sur
la santé de l’exposition chronique aux agents anesthésiques inhalatoires.

J’ai classé les réponses par réponses correctes, incorrectes et ne sachant pas y
répondre en me basant sur le fait que la majorité des auteurs concluent à l’existence
probable de risques modérés pour le système nerveux, la reproduction et le système
hépatique lié à l’halothane. L’halothane n ‘est plus utilisé à ce jour comme vu
précédemment mais n’ayant pas précisé les agents anesthésiques inhalatoires
auxquels je faisais référence et compte-tenu des réponses, je ne prends pas en compte
les réponses concernant les éventuelles conséquences hépatiques.

Conséquences sur Réponses correctes Réponse incorrecte Ne sachant pas


la santé, au niveau en % en % répondre en %
neurologique 52 12 36
pulmonaire 30.5 16 53.5
cardio-vasculaire 28 17.5 54.5
rénal 18.5 25.5 56
de la reproduction 57.5 9 33.5
hépatique 76 5.5 18.5
hématologique 10.5 36 53.5

Tableau n°7 : Connaissances des IADE sur les effets sur la santé de l’exposition chronique aux
anesthésiques inhalatoires.

Il y a donc 52 % des IADE interrogés qui savent que l’exposition chronique aux
agents anesthésiques inhalatoires a des conséquences au niveau neurologique, et
*
Thierry FAUCON. Mieux connaître les IADE. Oxymag, n°63, avril 2002. pp. 9 à 25.

34
57.5% sont informés d’un éventuel risque sur la reproduction. Donc seule la moitié des
IADE interrogés semblent connaître les conséquences sur la santé des agents
anesthésiques inhalatoires.

Si je fais la moyenne des IADE qui ont répondu ne pas savoir, j’obtiens 48%. En
y ajoutant la moyenne des professionnels ayant donné une réponse incorrecte ( 19%),
j’obtiens donc une moyenne de 67 % des IADE qui manquent d’information sur les
conséquences sur la santé de l’exposition chronique aux agents anesthésiques
inhalatoires.
J’ai voulu savoir s’il y avait une différence en fonction de l’ancienneté des
professionnels, les résultats sont repris dans le tableau suivant.

Ancienneté % d’IADE manquant d’informations


< 2 ans 45
Entre 2 et 5 ans 70
> 5 ans 62
> 10 ans 62
>15 ans 63

Tableau n°8 : répartition des IADE manquant d’informations sur les effets sur la santé de
l’exposition chronique aux agents anesthésiques inhalatoires.

Ces résultats montrent que les IADE qui ne sont pas correctement informés, sont
moins nombreux parmi les professionnels exerçant depuis moins de 2 ans. On peut
donc penser que la formation a peut-être évoluée ou que les professionnels sont mieux
informés en ce qui concerne les conséquences de l’exposition chronique aux agents
anesthésiques inhalatoires sur la santé.

Pour la question n°4, ayant constaté que les agents anesthésiques pouvaient
procurer un certain nombre d’effets gênants, j’ai voulu savoir si cela était également
le cas dans la population IADE des blocs opératoires.

35
Parmi les IADE ayant participé à cette enquête, 62 personnes sur 75, soit
82.5% déclarent avoir déjà ressenti une gène lors de l’utilisation des anesthésiques
inhalatoires ce qui confirme bien mon constat.

Les gènes ressenties sont des céphalées, des vertiges, une baisse de la
vigilance, de la fatigue et une gène liée à l’odeur qui se répartissent de la façon
suivante :

50

40

30

20 Nombre de fois cités

10

0
céphalées vertiges baisse de fatigue gène liée à
la vigilance l'odeur

Graphique n°1 : Gènes ressenties lors de l’utilisation des anesthésiques inhalatoires.

Les troubles neurologiques sont relativement similaires à ceux retrouvés dans


certaines études comme expliqué dans un précédent chapitre (2.1.1.1). La gène liée à
l’odeur indiquerait que l’exposition à un agent halogéné était, à ce moment là,
importante puisque notre niveau de perception olfactive est compris entre 50 et 100
ppm, sachant que la valeur limite d’exposition recommandée par le ministère de la
santé est de 2 ppm. Cependant seuls 2 IADE sur les 62 ayant ressenti une gène ont
mentionné l’odeur.
Ces différentes gènes ont été ressenties lors des situations anesthésiques
suivantes :
Pratiques anesthésiques Nombre de fois cités
Anesthésie pédiatrique 26
Induction inhalatoire 23

36
Anesthésie sur circuit auxiliaire 9
Anesthésie au masque 22
Entretien anesthésique en circuit ouvert 3

Tableau n°6 : Différentes pratiques ayant entraîné des effets gênants.


Ainsi il s’avère que ces techniques anesthésiques sont celles qui génèrent le
plus de pollution de l’air. C’est dans ces situations que les concentrations en agents
anesthésiques inhalatoires sont les plus importantes dans l’atmosphère de l’IADE.

La question n°5 portait sur les connaissances des IADE sur les moyens et
dispositifs de lutte contre la pollution.
J’ai classé ces différents moyens et dispositifs antipollution en plusieurs
catégories : les moyens primaires de prévention (cf. chapitre 5.2), les dispositifs anti-
pollution et les autres moyens cités.

• La répartition des moyens primaires de prévention cités est la suivante :

Nombre de fois cités


Circuit fermé 53
Anesthésie intraveineuse 12
Absence de N2O lors de l’anesthésie 8
Utilisation du circuit interne 11
ALR 2

Tableau n°8 : Moyens primaires de prévention de la pollution mentionnés par les IADE.

Parmi les moyens primaires de prévention, le circuit fermé est un moyen


majoritairement cité donc bien connu, cependant les autres moyens ont été peu cités et
bon nombre n’ont pas été cités du tout.

• Voici ci-dessous la répartition des dispositifs anti-pollution cités :

37
Nombre de fois cités
SEGA 61
Filtre à charbon actif 16

Tableau n°9 : Dispositifs anti-pollution cités.


Parmi les dispositifs anti-pollution, le système d’évacuation des gaz
anesthésiques est largement cité et donc bien identifié en tant que dispositif permettant
de lutter contre la pollution.

• La répartition des autres moyens de lutte contre la pollution cités est la


suivante :

Nombre de fois cités


Renouvellement de l’air de la salle 23
Canister à chaux sodée 8
Port d’un dosimètre 2

Tableau n°10 : Autres moyens de lutte contre la pollution donnés.

Le renouvellement de l’air de la salle semble être un élément que les IADE


associent à la maîtrise de la pollution. Le canister à chaux sodée a été cité à 8 reprises.
Or cet élément ne sert pas à absorber les agents anesthésiques inhalatoires, il sert à
absorber le CO2 lors de l’utilisation des circuits semi-fermés et fermés.

Le port du dosimètre a été cité à 2 reprises cependant il ne sert pas à diminuer la


pollution de l’air mais à évaluer le taux d’exposition aux agents anesthésiques
inhalatoires des professionnels qui le portent.

Si les moyens et dispositifs anti-pollution les plus courants ont bien été cités, les
moyens primaires de prévention que nous pouvons appliquer dans notre pratique
quotidienne, ont pour leur part été peu abordés. Peut-être y-a-t-il un défaut
d’information sur ces moyens ? Cet élément peut donc être un axe de travail pour mon

38
implication en matière de prévention de la pollution.

La question n°6 abordait les connaissances des IADE en matière de pratiques


anesthésiques générant le plus de pollution. Les résultats sont repris dans le tableau
suivant :

Pratiques anesthésiques Nombre de fois citées


Utilisation du circuit ouvert 45
Anesthésie au masque facial 30
induction inhalatoire 27
Anesthésie pédiatrique 13
Utilisation du circuit auxiliaire 13
Utilisation du N20 11
Entretien avec des agents anesthésiques halogénés 5
Purge des circuits en fin d’intervention 4
Fuites sur le circuit de ventilation 1
Défaut d’entretien et de contrôle des équipements 1
Remplissage des cuves 1

Tableau n°11 : Pratiques anesthésiques générant de la pollution citées.

Les pratiques anesthésiques entraînant le plus de pollution sont bien identifiées


par les IADE, cependant sur 75 personnes ayant répondues au questionnaire, des
pratiques sont citées moins de 5 fois. Ce résultat est bien en corrélation avec le fait que
les moyens de prévention primaires recommandés pour limiter la pollution ont été peu
mentionnés dans la question précédente.

39
Au travers de la question n°7, je voulais connaître les moyens et les dispositifs
utilisés afin de réduire la pollution, lors de l’anesthésie au masque, pratique génératrice
de pollution. Je voulais également identifier quelles pouvaient être les limites à leur
utilisation.

Le graphique suivant présente la part de professionnels utilisant


systématiquement le N2O lors de l’anesthésie au masque :

32%

N2O systématique
N2O non systématique

68%

Graphique n°2 : N2O systématique dans l’anesthésie au masque.

Parmi les IADE interrogés, 68 % n’utilisent pas le N2O de façon systématique. Les 32%
l’utilisant de façon systématique le font pour les raisons suivantes :

Nombre de fois cités


Potentialisation des halogénés 18
Effet antihyperalgésiant 2
Habitudes 2
Diminution du coût 2

Tableau N°12 : Différents motifs d’utilisation du N2O lors de l’anesthésie au masque.

Nous remarquons que la raison la plus retrouvée est la potentialisation des


halogénés.
Je m’interroge sur les raisons qui font que 68 % des professionnels ne l’utilisent
pas systématiquement lors de l’anesthésie au masque. Est-ce lié à leur formation, leurs

40
habitudes, les prescriptions des MAR ?

La deuxième partie de la question n°7 traitait de l’utilisation du circuit interne du


respirateur, toujours lors de l’anesthésie au masque. Les résultats sont reportés dans le
graphique suivant :

24%

circuit interne
circuit auxiliaire

76%

Graphique n°3 : utilisation du circuit interne.

Nous remarquons que l’utilisation du circuit interne est majoritaire. Cependant #


des IADE ne l’utilisent pas, pour les motifs suivants :

Nombre de fois cités


Par habitude 8
En pédiatrie 7
Plus pratique 3
Refus du MAR 2

Tableau n° 13 : Motifs d’utilisation du circuit auxiliaire lors d’une anesthésie au masque.

Il apparaît que les IADE utilisent le circuit auxiliaire prioritairement par habitude
dans des secteurs spécifiques tels que la pédiatrie. Les raisons des difficultés sur ce
secteur sont un espace mort trop important et le poids du dispositif trop élevé sur le

41
masque.

Le troisième item de cette question n° 7 concernait l’utilisation du filtre à charbon


lors de l’anesthésie au masque. Le graphique suivant montre la proportion des
professionnels l’utilisant :

20%

utilisation d'un absorbeur à


charbon actif
non utilisation

80%

Graphique n°4 : Utilisation du filtre à charbon actif dans l’anesthésie au masque.

Ainsi 80 % des IADE n’utilisent pas de filtre à charbon actif et ce pour les raisons
suivantes :

Nombre de fois cités


Non disponible 21
Circuit interne + SEGA 13
Peu pratique 3
N’y pense pas 2
Présence d’un canister à chaux sodée 4
Coût élevé 1
Peu efficace 1

Tableau n°14 : Motifs de non utilisation du filtre à charbon actif.

La principale raison évoquée pour la non-utilisation de ce système est son

42
absence dans la structure. Toutefois les professionnels ne précisent pas s’ils souhaitent
en disposer. La présence d’un système SEGA peut justifier l’absence de filtre à
charbon actif, à condition d’utiliser le circuit interne de la machine, sachant que le filtre à
charbon actif n’est efficace que sur les halogénés.

La chaux sodée est à nouveau citée, montrant parfois l’amalgame fait entre ce
dispositif et la lutte contre la pollution.

En conclusion, lors des anesthésies au masque, pratique majorant la pollution,


l’utilisation du circuit interne est une pratique prépondérante . Les principaux freins à la
mise en place de moyens de lutte contre la pollution sont la non-disponibilité du
matériel, les habitudes et la spécificité de l’anesthésie pédiatrique. Le fait que certains
systèmes soient estimés peu pratiques est peut-être le reflet de la difficulté à faire
changer les habitudes ?

La question n°8 traitait de l’anesthésie avec intubation et des moyens et


dispositifs utilisés, dans ce cas, pour prévenir la pollution.

Le graphique suivant montre la répartition entre l’utilisation systématique ou non


du N2O lors des anesthésies avec intubation :

24%
utilisation
systématique du
N2O
pas d'utilisation
systématique

76%

Graphique n°5 : utilisation du N2O systématique lors de l’anesthésie avec intubation.

Nous remarquons que 24 % utilisent systématiquement du N2O lors des

43
anesthésies avec intubation ( pratique peu polluante) alors que selon la graphique n°2,
ils sont 32% à l’utiliser de façon systématique au masque (pratique la plus polluante).
On peut s’interroger sur la réelle nécessité du N20. Son utilisation systématique n’est-
elle pas liée à l’habitude ?

Les raisons invoquées, pour la non-utilisation systématique du N20 lors de


l’anesthésie avec intubation, sont les suivantes :

Nombre de fois cités


Type de chirurgie 27
Antécédents du patient 18
Prévention des NVPO 3
Pollution 7
En fonction du MAR 6

Tableau n°15 : Motifs de non utilisation du N2O lors des anesthésies avec intubation.

La pollution est la première raison non médicale de ce choix. Cependant sur la


totalité des IADE interrogés, une très faible proportion d’entre eux mentionne la
pollution comme critère de choix.

La deuxième partie de la question n°8 concernait l’utilisation systématique du


circuit fermé lors de l ‘anesthésie avec intubation.
Les résultats montrent que sur la totalité des IADE interrogés, 92 % d’entre eux
déclarent utiliser le circuit fermé.
Le graphique suivant nous montre à quel débit ils l’utilisent :

16%

Débit compris entre


un volume courant
et 1L/min
Débit compris entre
1 et 2L/min

84%
44
Graphique n°6 : Débits de gaz frais utilisé en circuit fermé.

Sur les 92 % utilisant le circuit fermé, 84 % l’utilisent réellement (le débit


correspond à la définition). A contrario, 19 % d’entre eux ne l’utilisent pas correctement
et sont en circuit semi-fermé, pratique plus polluante.
Au total, nous pouvons en conclure que 77% des IADE interrogés utilisent le
circuit fermé, performant en matière de lutte contre la pollution.
Le biais de cette question est que nous ne connaissons pas la fréquence
d’utilisation de ce type de circuit.

La question n°9 interrogeait les IADE sur les difficultés qu’ils rencontrent pour
mettre en œuvre des pratiques de lutte contre la pollution.

Ces difficultés se répartissent de la façon suivante :


- parmi les quatre propositions faites :

% d’IADE ayant donné cette réponse *


Difficultés structurelles 41.5
Difficultés matérielles 46.5
Spécificité de l’anesthésie 56
Prescription médicale 37.5
* La somme des résultats de ce tableau est supérieure à 100 % car il s’agissait d’une question à choix
multiples.
Tableau n°16 : Difficultés rencontrées par les IADE en matière de lutte contre la pollution.

- autres propositions données :

% d’IADE ayant donné cette réponse


Habitude 5
Manque d’information 7
Coût 1.5
Difficultés d’échange sur ce sujet en équipe 5

45
Tableau n°17 : Autres difficultés proposées en matière de lutte contre la pollution.
Parmi les difficultés proposées, les résultats nous montrent que la spécificité de
l’anesthésie est majoritairement citée. Cette spécificité est liée à la spécificité de
l’anesthésie pédiatrique notamment. Les difficultés matérielles sont ensuite citées, à
hauteur de 46% puis viennent les problèmes structurels. Ces problèmes structurels sont
en partie liés à l’absence de système SEGA dans les blocs non rénovés depuis les
recommandations de la SFAR de janvier 1995 ( cf. paragraphe 3.4).
Ceci nous montre que les difficultés rencontrées par les IADE en matière de lutte
contre la pollution sont multifactorielles d’où le fait que le problème soit difficile à régler.
Certains IADE nous font remarquer le problème des échanges en équipe sur le
sujet.
D’autres IADE, très minoritaires, soulignent le manque d’information et une
pratique cloisonnée dans les habitudes.

La question n°10 traitait de la prise en compte de la pollution dans le choix de la


technique anesthésique.

Le graphique suivant présente la part des professionnels pour qui la pollution


rentre dans le choix de la technique anesthésique :

29%

oui
non

71%

Graphique n°7 : Pollution en tant que critère de choix de la technique anesthésique.

Ainsi la pollution n’est prise en compte dans le choix de la technique

46
anesthésique que dans 1/3 des cas.
Les IADE justifiant leur réponse n’ont été que 35 sur 53, soit 66 %. Leurs
justifications sont les suivantes :

IADE ayant donné cette réponse


Pollution : critère peu considéré 12
Choix effectué en fonction du patient 12
Choix effectué en fonction de la chirurgie 8
Choix effectué uniquement par le MAR 7
Présence d’un SEGA 2

Tableau n° 18 : Pourquoi la pollution n’est pas un critère de choix de la technique anesthésique.

Seuls deux IADE mentionnent le fait qu’il y ait la présence d’un SEGA, dispositif
anti-pollution efficace. Pour les autres critères les réponses sont assez homogènes, la
priorité est l’état du patient.

La pollution n’est donc pas une priorité. Les professionnels interrogés pensent
qu’elle est soit banalisée, soit sous-estimée ou soit qu’elle ne fait pas partie des
préoccupations au sein de leur bloc opératoire. Certains affirment même ne pas y
penser.

Pour 7 IADE sur 35, la décision est uniquement médicale. Les IADE font pourtant
partie des professionnels les plus exposés à la pollution de l’air par les agents
anesthésiques inhalatoires. Les échanges avec les médecins anesthésistes sur ce point
de vue sont donc importants et peuvent permettre d’orienter le choix thérapeutique vers
des pratiques moins polluantes.

47
La question n°11 concernait la présence de prélèvements d’air dans les blocs
opératoires afin de contrôler le taux de N2O et d’agents halogénés. Les résultats sont
repris dans le graphique suivant :

9%

35%
oui
non
ne sais pas

56%

Graphique n°8 : Présence de prélèvements d’air.

Un peu plus de la moitié des IADE (56%) savent qu’il n’y a pas de prélèvements
d’air en vue d’évaluer le taux de pollution au sein de leur bloc opératoire. Une part de
9% affirme qu’il y en a mais je modulerai cette réponse sachant qu’une confusion a pu
être faite avec le comptage de particules à but bactériologique (cité plusieurs fois).
Nous remarquons donc que l’évaluation de la pollution est relativement rare sur
l’ensemble des centres hospitaliers.
L’absence d’évaluation ne permet aux professionnels d’évaluer leurs pratiques
en matière de lutte contre la pollution.

La question n°12 interrogeait les IADE pour savoir s’ils s’informaient sur
l’évolution des pratiques.

Parmi les IADE interrogés, 98% ont déclaré se tenir informer sur les pratiques
anesthésiques. Les réponses nous montrent que c’est une catégorie de professionnels
qui se forme régulièrement. Ceci passe autant par la formation que par l’information.

48
Le graphique suivant montre les différents modes d’information utilisés :

100

80

60

40 % d'IADE

20

0
congrès revues formation internet échange
continue avec équipe

Graphique n°9 : Différents modes d’information utilisés.

Les congrès et les revues sont les deux principales sources d’information
utilisées puis viennent la formation continue et enfin internet. Il y a 5% des IADE qui
déclarent se former en échangeant avec leurs collègues.
Les IADE sont donc intéressés par la mise à jour de leurs connaissances en
anesthésie et utilisent différentes sources d’information pour cela.

L’ultime question concernait l’existence ou non d’une réflexion d’équipe sur le


problème de la pollution de l’air. A cette question la presque totalité des IADE, soit 92%,
a répondu qu’il n’y avait pas de réflexion au sein de leur équipe sur ce thème.
Le graphique ci-dessous présente la part des professionnels intéressés par la
mise en place d’un tel travail :

25%

intéressés
pas intéressés

75%

49
Graphique n°10 : IADE intéressés par la mise en place d’une réflexion d’équipe sur la pollution.
Sur les 92% des IADE travaillant dans des équipes où il n’y a pas de réflexion
sur la pollution, 75% se disent intéressés par la mise en place de ce type de travail.

Les IADE se sentent donc concernés par le problème de la pollution de l’air au


bloc opératoire et souhaiteraient qu’une réflexion d’équipe sur ce problème se mette en
place dans leur structure. Ceci je pense en vue d’échanger leurs points de vue et leurs
pratiques en vue d’une amélioration de leurs conditions de travail.

50
6.4 SYNTHESE

Cette enquête montre que la gène que j’ai pu ressentir lors de l’utilisation des
agents halogénés et du N2O est un constat qui se vérifie auprès d’une grande majorité
d’IADE. Cette gène est consécutive à des pratiques anesthésiques identifiées comme
polluantes telles que l’anesthésie pédiatrique, l’induction inhalatoire, l’anesthésie au
masque.

Ma problématique de départ reposait sur le fait que les pratiques des IADE
étaient hétérogènes en matière de prévention de la pollution de l’air au sein du bloc
opératoire. L’analyse de mon enquête confirme ma constatation. Quelles en sont les
causes ?
6.4.1 Les habitudes

Ma première hypothèse était que les mesures de lutte contre la pollution sont
inadaptées ou inapplicables à tous les types d’anesthésie. Il n’est pas aisé de savoir si
cette hypothèse se vérifie. L’anesthésie pédiatrique est souvent citée comme un frein à
la mise en œuvre de moyens de prévention de la pollution. Mais les habitudes
influencent également la mise en œuvre des moyens de lutte contre la pollution.

D’un point de vue théorique, les habitudes sont définies comme des conduites
pouvant s’acquérir par des actes répétés et se conservant de manière relativement
stable.* Les gestes et pratiques qui sont habituels ont donc été mis en œuvre à
plusieurs reprises et sont par delà maîtrisés. Cette maîtrise entraîne auprès de
l’individu un sentiment de sécurité lors de la mise en œuvre. Tout changement dans les
habitudes viendra donc remettre en cause ce sentiment de sécurité. De plus un geste
ou une pratique bien maîtrisé par l’IADE assure une sécurité envers le patient. Il est
ainsi compréhensible que la notion d’habitude influence les pratiques des IADE en
matière de lutte contre la pollution.

*
Encyclopédie Universalis.

51
6.4.2 Le manque d’informations

Mon autre hypothèse concernait le manque d’information des professionnels et


notamment au niveau des pratiques majorant la pollution ainsi que sur les dispositifs
anti-pollution et leur utilisation. Il y a effectivement un manque d’information, il ne se
situe pas au niveau des dispositifs anti-pollution mais au niveau des pratiques de
prévention relevant du propre rôle de l’IADE. Les IADE sont également mal informés
sur les conséquences de l’exposition chronique aux agents anesthésiques inhalatoires.
Ce manque de connaissances touche plus les IADE dont l’ancienneté est supérieure à
2 ans. La nouvelle génération d’IADE est donc mieux informée. On peut se demander si
cela est liée à une évolution de la formation de base. Cependant on peut aussi
expliquer cela par le fait que les professionnels nouvellement arrivés dans le monde du
travail font partie d’une génération de la société actuelle qui est de plus en plus
exigeante en terme de qualité de vie, de confort, d’ergonomie et de sécurité. Tout ceci
se répercute sur les exigences en matière de conditions de travail. De plus, il y a une
augmentation de la sensibilisation à la prévention des risques professionnels
notamment au niveau des médias (exemple de l’amiante) ; mais aussi par le
développement de la prévention de ces risques consécutif à la loi de modernisation
sociale du 17 janvier 2002 qui a fait évoluer les services de médecine du travail.*
L’écologie, qui est une préoccupation majeure de notre société, sensibilise également
les professionnels au problème de pollution de l’air au bloc opératoire.

Un manque d’information ressort de mon enquête, pourtant les IADE sont des
professionnels qui continuent à se former et à s’informer sur l’évolution des pratiques
anesthésiques. On peut alors se demander s’ils sont sensibilisés à ce sujet.

De plus les IADE sont une catégorie de professionnels qui est encrée dans la
technicité et la sécurité vis à vis de la prise en charge du patient. La part accordée à la
sécurité du patient étant très importante, les professionnels accordent peu d’intérêt à
leur propre sécurité. Peut-être est-ce pour cela qu’ils sont peu sensibles à ce problème
de pollution.

*
INRS. Prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles.

52
Cependant ils déclarent être gênés par l’exposition aux agents anesthésiques
inhalatoires ; les céphalées, l’asthénie, la baisse de la vigilance n’altèrent-elles pas
leurs capacités à prendre en charge le patient en toute sécurité ? Ainsi la sécurité du
patient ne passerait-elle pas par la sécurité du professionnel qui le prend en charge et
donc par la prévention de la pollution ?

6.4.3 Le manque de matériel

Cette enquête nous montre également que le problème de pollution de l’air au


bloc opératoire est un problème complexe. En effet les difficultés rencontrées par les
professionnels pour mettre en œuvre des pratiques de lutte contre la pollution sont
multifactorielles. Ceci est notamment lié au manque de matériel. Actuellement les IADE
sont-ils consultés lors du choix du matériel ? N’ayant pas exploré ce thème dans mon
enquête, je ne peux y répondre. Cependant je pense que l’implication de l’IADE dans la
prévention de la pollution doit s’appliquer au niveau du choix du matériel. En effet, étant
donné que les IADE font partis des professionnels qui sont exposés à la pollution et qui
doivent mettre en œuvre les dispositifs de lutte contre la pollution, il semblerait
important qu’ils soient impliqués dans ce choix. Cette implication ne pourrait que les
inciter à mettre en place le matériel de lutte contre la pollution.

L’enquête réalisée montre également une absence d’évaluation de la pollution


par le biais de mesures des agents halogénés et du N2O dans l’air. Cette absence ne
permet donc pas aux professionnels d’évaluer leurs pratiques concernant la lutte contre
la pollution.

Afin d’aider les professionnels à lutter contre cette pollution, ne manque-t-il pas
une réflexion d’équipe sur ce thème ? Un référent pollution au sein de service ne
pourrait-il pas dynamiser cette prévention de la pollution ?

Dans la partie suivante, je vais m’attacher à proposer différentes perspectives


concernant mon implication professionnelle face au problème de la pollution de l’air au
bloc opératoire par les agents anesthésiques inhalatoires.

53
7. PERSPECTIVES

La pollution étant un problème multifactoriel, les actions qui pourraient être mises
en œuvre afin de diminuer l’exposition des professionnels aux agents anesthésiques
inhalatoires, se situent à plusieurs niveaux.

Cela passerait par des actions individuelles au niveau des pratiques


quotidiennes ainsi que par des actions à l’échelle du service. La formation des étudiants
devra également être prise en charge. Tout ceci en accord avec le cadre du service.

7.1 ACTIONS A L’ECHELLE INDIVIDUELLE

Comme le montre l’enquête, les difficultés rencontrées par les professionnels


dans la mise en œuvre de pratiques anti-pollution sont en partie externes à leurs
pratiques (structurelles, matérielles …). Cependant il me semble que le respect des
bonnes pratiques anti-pollution (pratiques de prévention primaire, chapitre 5.2)
pourraient être rappelées aux professionnels. En effet la lutte contre la pollution de l’air
au bloc opératoire passe par la prévention dans les actes de pratiques courantes qui
rentrent dans les habitudes. Je pense donc qu’il est important de garder ses bonnes
pratiques en tête.
Notre rôle participatif à l’anesthésie avec le médecin anesthésiste doit nous
permettre d’échanger sur ce thème, comme proposer l’absence de N2O lors des
anesthésies au masque, l’utilisation du circuit interne de la machine, l’anesthésie intra-
veineuse totale, etc… Le médecin est le prescripteur mais ces échanges pourraient
l’amener à considérer le problème de la pollution de façon plus importante si ce n’est
pas le cas.

Pour que les professionnels mettent en place ces principes dans leur pratique
quotidiennes, une réflexion d’équipe ne serait-elle pas nécessaire ? C’est l’objet de la
partie suivante.

54
7.2 ACTIONS A L’ECHELLE DU SERVICE

Afin de lutter de façon efficace contre la pollution, une réflexion d’équipe pourrait
être un moyen d’intégrer l’ensemble des IADE et d’homogénéiser les pratiques. Ceci
serait à réaliser en lien avec les médecins anesthésistes ainsi qu’avec le cadre du
service.
Cette réflexion serait à proposer à l’équipe, l’adhésion des professionnels étant
nécessaire.
Ce travail serait l’occasion de rappeler les conséquences potentielles des
anesthésiques inhalatoires sur notre santé ainsi que les bonnes pratiques à appliquer
au quotidien. Il pourrait permettre d’échanger sur les difficultés que chacun rencontre
afin de trouver d’éventuelles améliorations et d’aider à modifier les habitudes. Un état
des lieux des techniques anesthésiques utilisées dans le service afin d’identifier les
pratiques générant le plus de pollution. Cela permettrait de réfléchir à un autre type de
prise en charge, en concertation avec les médecins anesthésistes, pour diminuer la
pollution et homogénéiser les pratiques.
Cette réflexion pourrait également porter sur le matériel anti-pollution nécessaire,
ceci afin de participer au choix de ce matériel, mais aussi de pouvoir le cas échéant
effectuer des essais et rencontrer les laboratoires concernés.
Elle aurait également pour but d’évaluer les avancées, les nouvelles pratiques
mises en place.

Un professionnel volontaire pourrait avoir la fonction de référent en matière de


pollution dans le service. Ses missions pourraient être :

# Etre la personne ressource en matière de moyens de lutte contre la


pollution pour les membres de l’équipe,
# Animer le travail de réflexion sur ce problème,
# Etre le lien entre l’équipe, le cadre et les médecins anesthésistes en
matière de pollution,
# Veiller à la maintenance préventive et programmée des systèmes
d’anesthésie.

55
7. ACTIONS AUPRES DES ETUDIANTS

Les étudiants, futurs professionnels, doivent être sensibilisés au problème de la


pollution. Cette sensibilisation ne pourrait-elle pas passer par une intervention théorique
au sein de leur école ? Ceci permettrait de les informer sur les sources de pollution
mais aussi sur les pratiques et les moyens à mettre en place afin de réduire la pollution
de l’air des blocs opératoires.
Cette démarche pourrait également être poursuivie sur le terrain lors des stages.
Cela mettrait en pratique les éléments présentés lors de l’intervention théorique, ceci
afin que les pratiques de prévention de la pollution de l’air du bloc opératoire
deviennent leurs propres pratiques en tant que professionnels.

56
CONCLUSION

La pollution de l’air des blocs opératoires par les agents halogénés et le


protoxyde d’azote est liée à de multiples facteurs : structurels, matériels, liées à la
spécificité anesthésique, au médecin anesthésiste… Cela rend ce problème complexe
et difficile à régler.

Néanmoins en l’absence de certitude quant à l’innocuité pour la santé de


l’exposition chronique aux agents anesthésiques inhalatoires, l’IADE a le devoir de
s’impliquer dans la lutte contre cette pollution. Ceci en ayant recours aux dispositifs
anti-pollution comme le système d’évacuation des gaz, le circuit fermé ; dont l’efficacité
est reconnue. Mais aucun moyen n’est suffisant à lui seul.

Les dispositifs anti-pollution ne dispensent pas la mise en œuvre des bonnes


pratiques, simples à appliquer. Cependant cette mise en place nécessite l’implication de
l’IADE et la remise en question de ces pratiques parfois liées aux habitudes. Mais sans
évaluation concrète de l’ampleur de la pollution, celle-ci reste relativement abstraite et
n’entraîne pas de changement dans les pratiques.

Pourtant ne sommes-nous pas dans une dynamique d’évaluation de nos


pratiques professionnelles ?

57
BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages

! FEISS.P. Systèmes et appareils d’anesthésie. Paris : Masson, collection


d’anesthésiologie et de réanimation, 1989.110p.

! BOUDEVILLE.P – MALLEDANT.Y – TREBAUL.L. Les gaz et anesthésiques


volatils. Paris : Arnette, collection Pharmascopie- Soins et thérapies. 1994. 153p

! DALENS Bernard. Traité d'anesthésie. Paris : Arnette, 2002. 2642p.

• ROEWER Norbert – THIEL Holger. Atlas de poche d'anesthésie. Paris :


Flammarion, collection Médecine-sciences, 2003. 374p.

! SAINT-MAURICE Claude. Pharmacologie. Paris : Lamarre, collection cours


IADE, février 2004. 198p.

! ALBRECHT.E. Manuel pratique d'anesthésie. Paris : Elsevier Masson,


septembre 2006. 600p.

Revues

! A.MULOT, M.GONZALES, S.SEPULVEDA, A.TAMZALI. La pollution des blocs


opératoires par les gaz anesthésiques. Dispositifs anti-pollution. Cahiers
d'anesthésiologie, tome 33, n°2, mars 1985. pp 153 à 158.

! J.C.COLAVOLPE, N. FRANCOIS, P. AZAIS, A. GAYTE-SORBIER, G.


FRANCOIS. La pollution des blocs opératoires par les gaz anesthésiques.
Cahiers d’anesthésiologie, tome 45, n°3, juin 1997. pp.171 à 179.

58
! Gilles LE FRAPPER. La pollution des blocs opératoires par les agents
anesthésiques volatils. Oxymag, n°57, avril 2001. pp. 17 à 19.

! Thierry FAUCON. Mieux connaître les IADE. Oxymag, n°63, avril 2002. pp. 9 à
25.

! J.P. HABERER. Le protoxyde d’azote. Cahiers d’anesthésiologie, tome 50, n°3,


juin 2002. pp. 205 à 210.

! J.C.COLAVOLPE, N.FRANCOIS. Exposition professionnelle au protoxyde


d’azote et aux vapeurs anesthésiques. Conséquences pour la santé et
l’environnement. Prévention. E.M.C. 36-402-A610.2006.

! F. MERAT, S. MERAT. Risques professionnels liés à la pratique de l’anesthésie.


Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation (AFAR), volume 27, n°1,
janvier 2008. pp.63 à 67.

Textes législatifs et réglementaires

! MINISTERE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE NATIONALE.


Circulaire DGS/3A/667 bis du 10 octobre 1985 relative à la distribution des gaz à
usage médical et à la création d’une commission locale de surveillance de cette
distribution. Non parue au journal officiel, pp. 159-163.

! MINISTERE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION


SOCIALE. Circulaire DH/5D/307 du 28 août 1989 relative à l’évacuation des gaz
anesthésiques des salles d’opérations complétant la circulaire DGS/3A/66.

! Code du travail. Articles relatifs aux obligations des employeurs.

59
! Code du travail. Articles relatifs aux substances et préparations considérées
comme dangereuses.

! Code de la santé publique. Cinquième partie, livre II, titre Ier, chapitre I et II.
Dispositifs médicaux.

• Code de la santé publique .Décret 2004-802 du 29/07/04 du code de la santé


publique relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession infirmière.
Livre III, titre Ier, chapitre Ier. Journal officiel, n°183 du 08 août 2004

Mémoires

! David SERVAIS. Plaidoyer pour un rôle IADE face à la pollution aux halogénés
et au protoxyde d’azote. Ecole IADE, CHU REIMS, promotion 1995/1997.

! Alexandre PIENTKA. La pollution par les halogénés et le protoxyde d’azote. Ma


participation IADE. Ecole IADE, CHU REIMS, promotion 2000/2002.

Sites Internet

! J.C OTTENI. Recommandations concernant l’appareil d’anesthésie et sa


vérification avant utilisation. SFAR. Janvier 1994. [en ligne]. Disponible sur :
http://www.sfar.org/recomappareil.html (consulté le 10/01/2009).

! CRAMIF. Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz et


vapeurs anesthésiques. Document réalisé par le groupe disciplinaire :
« Anesthésie et qualité de l’air », 1994. [en ligne]. Disponible sur :
http://www.cramif.fr.fr/pdf/th2/pre/dte101.pdf (consulté le 10/01/2009)

60
! J.C OTTENI. Recommandations concernant l’équipement d’un site ou d’un
ensemble de sites d’anesthésie. SFAR, janvier 1995. [en ligne]. Disponible sur :
http://www.sfar.org/recomequipement.html (consulté le 10/01/2009 ).

! J.M.DESMONTS. Maladies professionnelles et anesthésie-réanimation.


Conférences d’actualisation 1999. SFAR [en ligne]. Disponible sur :
http://www.sfar.org/sfar_actu/ca99/html/ca99_14/99_14.htm
( consulté le 15/01/2009).

! NATHAN-DENISOT.N. Toxicité des halogénés. Conférence d'actualisation 1999.


SFAR. [en ligne]. Disponible sur :
http://www.sfar.org/sfar_actu/ca99/html/ca99_04/99_04.htm (consulté le
01/03/2009)

! Gilles LE FRAPPER. La pollution des blocs opératoires par les agents


anesthésiques volatils. Journées d’Anesthésie-Réanimation Chirurgicale
d’Aquitaine, 2004. [en ligne]. Disponible sur :
http://www.reanesth.org/spip/article.php3?id_article=254
(consulté le 05/01/2009).

• P.RICHEBE, R.PFEIFF, G.SIMONNET, G.JANVIER. Faut-il supprimer le


protoxyde d’azote au bloc opératoire ? . Conférences d’actualisation 2006. [en
ligne]. Disponible sur :
http://www.anesthesie-foch.org/s/article.php3?id_article=725
(consulté le 12/01/2009)

• Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des accidents


du travail et des maladies professionnelles. INRS. Prévention des accidents du
travail et des maladies professionnelles. [en ligne]. Disponible sur :
http://www.inrs.fr/securite/sante_au_travail.html (consulté le 05/05/2009)

61
ANNEXES

62
ANNEXE N°1

63
ANNEXE N°2

64
65
66
67
68
ANNEXE N°3

69
ANNEXE N° 4

70
71
72
73
74
75
ANNEXE N°5

Actuellement en 2ème année de formation à l’école


d’infirmiers anesthésistes de Reims, j’ai choisi de réaliser
mon travail d’intérêt professionnel sur la pollution par les
halogénés et le protoxyde d’azote au bloc opératoire.

Afin de mener à bien ce travail, je sollicite votre participation


en remplissant ce questionnaire qui restera anonyme.

Ce questionnaire concerne l’anesthésie pédiatrique et adulte.

Je vous remercie par avance de votre collaboration.

Emmanuelle MOUSSY

76
Questionnaire

1. Depuis combien d’années êtes-vous diplômé infirmier(e) anesthésiste ?

$ < 2 ans $ > 5 ans


$ > 10 ans $ > 15 ans

2. Etes-vous :

$ une femme $ un homme

3. Selon vous, l’exposition chronique aux agents anesthésiques inhalatoires a des


conséquences sur la santé du personnel :

# Au niveau neurologique $ oui $ non $ ne sais pas


# Au niveau pulmonaire $ oui $ non $ ne sais pas
# Au niveau cardio-vasculaire $ oui $ non $ ne sais pas
# Au niveau rénal $ oui $ non $ ne sais pas
# Au niveau de la reproduction $ oui $ non $ ne sais pas
# Au niveau hépatique $ oui $ non $ ne sais pas
# Au niveau hématologique $ oui $ non $ ne sais pas

4. Avez-vous déjà ressenti une gène lors de l’utilisation des anesthésiques


inhalatoires ?

$ oui $ non

Si oui : - quel type de gène ?

$ céphalées $ vertiges $ baisse de la vigilance $ vomissements


$ autre : ………………………………………………………………………..

77
- quelle était la pratique anesthésique utilisée ?
………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………

5. Que connaissez-vous comme moyens et dispositifs de lutte contre la pollution de


l’air au bloc opératoire ?
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….

6. Pour vous, quelles sont les pratiques anesthésiques qui génèrent le plus de
pollution ?
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………

7. Lors des anesthésies au masque :

Utilisez-vous systématiquement le protoxyde d’azote lors de la phase d’entretien ?

$ oui $ non
Si oui, pourquoi ?…………………………………………………………………
……………………………………………………………………………….. …….

Utilisez-vous le circuit interne du respirateur ? $ oui $ non


Si non, pourquoi ?…………………………………………………………………
……………………………………………………………………………….. …….

78
Utilisez-vous un filtre à charbon ? $ oui $ non
Si non, pourquoi ?…………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………

8. Lors des anesthésies avec intubation :

Utilisez-vous systématiquement le protoxyde d’azote lors de la phase d’entretien ?

$ oui $ non
Si non, pourquoi ?…………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………
Utilisez-vous systématiquement le circuit fermé lors de la phase d’entretien ?

$ oui $ non
Si oui, à quel débit ? ……………………………………………………………...

Si non, pourquoi ?…………………………………………………………………


………………………………………………………………………………………

9. A quelles difficultés êtes-vous principalement confronté pour mettre en œuvre


des pratiques de lutte contre la pollution ?

$ difficultés structurelles (conception du bloc)


$ difficultés matérielles
$ spécificité de l’anesthésie

$ prescription médicale
$ autre : ………………………………………………………………..

10. La pollution rentre-elle en compte dans le choix de la technique anesthésique

utilisée ? $ oui $ non


Si non, pourquoi ? ………………………………………………………………...
……………………………………………………………………………………….

79
11. Y-a-t-il des prélèvements d’air effectués au niveau du bloc opératoire où vous
travaillez, afin de contrôler le taux de protoxyde d’azote et d’anesthésiques
halogénés dans l’air ?

$ oui $ non $ ne sais pas


Si oui : en connaissez-vous les résultats ?

$ oui $ non

12. Vous informez-vous sur l’évolution des pratiques anesthésiques ?

$ oui $ non
Si oui : De quelle façon ?

$ congrès $ revues - lectures


$ formation continue $ autre : ………………………..

13. Y-a-t-il une réflexion d ‘équipe sur le problème de la pollution de l’air au bloc

opératoire ? $ oui $ non

Si non, seriez-vous intéressé par la mise en œuvre d’un tel travail ?

$ oui $ non

80
MOUSSY Emmanuelle Juin 2009

INFIRMIER ANESTHESISTE
Promotion 2007-2009

IMPLICATION DE L’IADE FACE A LA POLLUTION PAR


LES AGENTS ANESTHESIQUES INHALATOIRES

Résumé :

Le personnel de bloc opératoire est exposé à la pollution de l’air, dans les salles
d’intervention, par les agents anesthésiques inhalatoires. Malgré les effets gênants
ressentis, la réglementation, les moyens et dispositifs anti-pollution existants, j’ai pu
constater que les pratiques professionnelles en matière de lutte contre la pollution
étaient hétérogènes.

En effet le manque de formation, les habitudes, l’absence de mesures de la


pollution de l’air sont des freins à la maîtrise de ce problème.

Si cette pollution est un problème complexe liée à de multiples facteurs ne


dépendant pas tous des IADE, il est nécessaire que ces professionnels soient
impliqués afin d’agir autant au niveau individuel qu’au niveau collectif.

Mots clés : Pollution, anesthésie, exposition professionnelle, bloc opératoire, prévention.

L'école d'Infirmier Anesthésiste du C.H.U de Reims n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises
dans les mémoires : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

Vous aimerez peut-être aussi