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Année académique 2019 - 2 20

Economie des Transports


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Introduction générale

Les transports sont un moyen incontournable pour faciliter aussi bien la mobilité que les échanges
commerciaux. La théorie économique a trouvé de nombreuses applications dans le domaine spécifique
des transports en raison de nombreuses situations qu’elle est amenée à résoudre en tant que science
d’aide à la décision :
- La diversité de situation de concurrence (monopole et oligopole)
- La coexistence des biens marchands et non marchands (l’air, le bruit, le temps, la vie
humaine…)
- La coexistence des biens publics ou collectifs et biens privés
- La coexistence d’opérateurs privés et publiques sur le même marché

Le transport se définit comme le déplacement d’un bien ou d'une personne d'un point à un autre. Le
transport est davantage un service qu'un bien, parce qu'il est plus immatériel que matériel.

Le transport contribue à faciliter la circulation des personnes et le trafic des marchandises et joue de
ce fait un rôle de soutien à la production et au développement économique et social. Son
importance est d’autant plus grande qu’il améliore, dans le cadre de la mondialisation des
économies, la compétitivité et l’efficacité économique des pays.

Le degré de développement des transports et de leurs infrastructures ainsi que le niveau des prestations
des moyens de transport, constituent de nos jours le facteur décisif d’un fonctionnement
efficace de tout système économique. Cela concerne notamment le ravitaillement en matières
premières et la distribution des produits finis jusqu’aux lieux de consommation.

Dans ce contexte, il est devenu essentiel pour les décideurs, les investisseurs et les
gestionnaires (du secteur public ou du secteur privé) d’appréhender au mieux, le potentiel et
l’évolution des différents modes de transport, en s’appuyant sur une vision stratégique et intégrée
à long terme. Ainsi, le développement et la gestion des infrastructures et des services de transport,
nécessite des compétences spécifiques pour appréhender de manière efficace et équitable, les défis de
ce secteur clé de l’économie.

L’économie des transports, discipline qui traite de l’application au secteur des transports, des
méthodes scientifiques et de calcul économique participe à cette compréhension. L’analyse
économique des transports vise aussi à orienter l’intervention des pouvoirs publics afin d’éviter
la sclérose des marchés des transports insuffisamment ouverts sur les objectifs fondamentaux de la
collectivité.

Le cours d’Economie des Transports poursuit les objectifs suivants :


− Doter les apprenants, des connaissances utiles à une compréhension adéquate des systèmes
de transports
− Faire connaitre aux étudiants, les dimensions économiques, sociales et
environnementales liées au fonctionnement de ces systèmes de transports
− Et de leur proposer quelques outils leur permettant d’appréhender au mieux les
spécificités du domaine des transports.

Le cours est articulé autour des chapitres ci-après :

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- Chapitre I : Présentation générale du
système de Transport ;
- Chapitre II : Les spécificités du transport et sa place dans l’économie
- Chapitre III : Demande de Transport routier ;
- Chapitre IV : Investissements d’Infrastructures de Transport ;
- Chapitre V : Tarification des Usagers des Transports ;
- Chapitre VI : Modèles de prévision de trafics.

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Chapitre I : Présentation générale du système de Transport

Le transport est un élément fondamental de toute activité humaine, qu'il s'agisse d'activité
économique, de loisirs, de sport, de secours ou d'action Militaire. Les moyens de transports ont
considérablement évolué au cours de l'histoire de l'humanité. Cette évolution s'est fortement
accélérée au cours des XIXe et XXe siècles. Le présent chapitre traite des définitions du transport ainsi
que de ses différents modes et leurs interactions.

I. Définitions et caractéristiques du transport

1. Définitions du transport

Selon le sens étymologique, le transport vient du latin trans, au-delà, et portare, porter qui est le fait de
porter quelque chose, ou quelqu'un, d'un lieu à un autre.

Le transport peut être défini comme le « déplacement des hommes et des produits avec des
moyens de locomotion : transport par camion, transport par train, transport par avion…, par
opposition aux déplacements des piétons. » (E. Mérenne, 2007).

L’opération de transport est le déplacement d’hommes (voyage) ou de biens (expédition) sur un


itinéraire équipé à cet effet. Elle est caractérisée par trois facteurs à savoir :
- la quantité (ou nombre) transportée ;
- la distance parcourue ;
- le délai d’acheminement.

Selon Rodière, « les transports sont les actions par lesquelles se trouvent organisés les
déplacements des hommes et des choses ». Il ajoute : « Il n’y a vraiment transport que s’il y a quelque
organisation préalable ; le transport est l’affaire des professionnels ».

De cette définition, ressortent trois éléments spécifiques qui caractérisent le transport. Il y a le


déplacement d’une personne ou d’une chose. Il y a aussi la maîtrise de l’opération. En tant
qu’entrepreneur, le transporteur doit maîtriser la gestion technique et commerciale de
l’opération, c’est-à-dire exécuter le déplacement sous ses seules initiative et autorité et pour son
compte, à ses risques et périls.

Enfin, il y a le caractère professionnel du transport. Le transport est classé comme activité de


service. Il est considéré comme une activité neutre dans la mesure où il est sensé ne pas modifier les
propriétés des biens auxquels il s’applique. Le transport se réalise par la circulation de véhicules
mobiles, généralement motorisés, sur une installation fixe, l'infrastructure. La vitesse de circulation,
très variable, est en soi un facteur de risque, qui fait de la sécurité des transports un enjeu important.

2. Définitions de termes liés au transport

➢ Moyens de transports
C’est l’engin ou le véhicule motorisé ou non, utilisé pour effectuer une opération de transport.
➢ Mode de transport

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Mode d’acheminement des personnes ou des biens par l’utilisation de moyens de transport et
d’infrastructures associées. C’est une technique spéciale et uniforme de propulsion de l’engin par
rapport à l’infrastructure.
➢ Réseaux de Transports

Ensemble des infrastructures utilisées par un mode de transport sur un territoire donné. On distingue
:
- le réseau routier : routes, autoroutes, réseaux de bus, gares routières, parcs de
stationnement... Il est généralement partagé par tous les véhicules, mais il existe des voies
spécialisées : sites propres aux transports en commun, voies cyclistes, voies piétonnes... Au
Burkina Faso, le réseau routier est constitué de routes classées (nationale, régionales et
départementales) et de pistes rurales ;
- le réseau ferroviaire : lignes de chemins de fer, de métro, de tramway, gares, chantiers de
transport combiné ou de transbordement... Le Burkina Faso dispose d’une seule ligne de
chemin de fer reliant Abidjan à Kaya, via Bobo-Dioulasso et Ouagadougou ;
- le réseau aérien : lignes aériennes, aéroports, héliports... Le Burkina Faso dispose de deux
aéroports de classe internationales (Ouagadougou et Bobo-Dioulasso) et d’une cinquantaine
d’aérodromes secondaires à travers le pays ;
- le réseau des voies d’eau : mers et cours d’eau navigables, les ports maritimes, ports fluviaux,
les grands canaux de franchissement d'isthmes (Panama, Suez), canaux, écluses,...

➢ Infrastructure de transport
Elle est constituée par des réseaux propres à chaque mode qui comprennent des lignes ou voies de
communication reliant des nœuds. Ces infrastructures ou ensemble des voies de communication et
des installations terminales (aéroports, gares, ports, …) contribuent à l’organisation de l’espace ;

➢ Système de transport
Ensemble constitué par les moyens de transport, les infrastructures, et les techniques
d’exploitations. Le système de transport se définit également comme l’ensemble des modes de
transport fonctionnant sur un territoire donné ;

➢ Circulation (ensemble des déplacements)


Elle est caractérisée par les déplacements de personnes et de biens, à travers l’espace. Son intensité
dans le temps et dans l’espace détermine le trafic et les flux. Ces déplacements font appel à des
moyens de transport qui s’inscrivent dans les territoires grâce aux réseaux de transport ;

➢ Mobilité
Elle désigne le déplacement d’une personne ou d’un bien d’un endroit à un autre par un moyen de
transport quelconque ;

➢ Economie des transports


C’est l’application au secteur des transports des méthodes scientifiques et de calcul
économique.

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II. Les modes de transport et les principaux acteurs
1. Les modes de transport et leurs caractéristiques

Les modes de transports sont généralement nombreux mais, ils peuvent être regroupés en deux
grands ensembles :
- les modes à vocation continentale : la route, la voie ferrée, la voie fluviale ou navigable.
Ce sont les transports de surface. On parle respectivement de transport routier, transport
ferroviaire et de transport fluvial ;
- les modes à vocation intercontinentale : la mer et l’air, c’est à dire le transport maritime
et le transport aérien.

Ces différents modes se présentent comme suit :


- le transport routier : il résulte de la combinaison route et véhicule de transport routier.
Il est une activité réglementée de transports terrestres, qui s'exerce sur la route. Elle englobe
à la fois le transport routier de personnes, le transport routier de marchandises, le
déménagement. Ces activités commerciales sont exercées par les transporteurs routiers. Une
route est au sens littéral une voie terrestre (au niveau du sol ou sur viaduc) aménagée pour
permettre la circulation de véhicules à roues ;

- le transport ferroviaire ou par chemin de fer qui peut se définir comme un système de
transport guidé servant au transport de personnes et de marchandises. Il se compose
d'une infrastructure spécialisée, de matériel roulant et de procédures d'exploitation
faisant le plus souvent intervenir l'humain même si dans le cas des métros
automatiques cette intervention se limite en temps normal à la surveillance ;

L’ensemble des modes routiers et ferroviaires constituent le mode terrestre.


- le transport aérien indissociable des aéroports : il est défini dans le Code de l'Aviation Civile
comme un mode consistant à acheminer par aéronef, d'un point d'origine à un point de
destination, des passagers, du fret ou du courrier, à titre onéreux ;

- le transport maritime indissociable des ports maritimes : le transport maritime


consiste à déplacer des marchandises ou des hommes pour l'essentiel par voie maritime.
Le moyen de transport maritime est le navire qui se définit comme un
bâtiment de mer d’au moins 25 tonneaux de jauge, qui fait ou est habituellement destiné
à faire du transport de personnes ou de marchandises en mer, la pêche, le remorquage ou
tout autre opération lucrative de navigation. Il est susceptible d’impulsion personnelle ;

- le transport fluvial qui est un mode de transport sur les voies navigables, qu'elles soient
des cours d'eau navigables, éventuellement aménagés ou
des canaux artificiels. Le transport fluvial se fait par bateau. Le bateau est un bâtiment qui fait
ou est destiné à faire habituellement dans les eaux territoriales, le transport de personnes ou de
choses, la pêche, le remorquage, le dragage ou toute autre opération lucrative de navigation ;

- les pipelines : Il s’agit d’un mode de transport par canalisation de matières gazeuses, liquides
ou solides réalisé au moyen de conduites constituant généralement un réseau.

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Les principaux systèmes de transport par canalisation concernent le gaz naturel, transporté
par gazoduc et les hydrocarbures liquides, dont surtout le pétrole, transportés par
oléoduc ;

Au-delà de ces modes, il existe plusieurs autres modes non moins importants comme le transport
par câbles et cabine, spécialement utilisés dans les régions montagneuses ; les transports à très
courte distance dite parfois transport hectométriques tel que les tapis roulant, escaliers
mécaniques qui sont généralement utilisés dans les aéroports et les villes ;

Caractéristiques :
- Transport routier : souplesse ; maillage plus important ; capacité de charge réduite ;
vitesse importante (variable selon les régions ; etc.)
- Transport ferroviaire : conteneurisation ; rigide ; lignes de rail moins denses ; adapté aux
longues distances ; capacité de charge importante ; vitesse élevée avec les TGV ;
- Transport fluvial : capacité de charge importante ; mode plus lent ; rigide car ne favorise pas
le porte-à-porte ; conteneurisation ; peut être fortement limité par des
caractéristiques physiques du cours d’eau, ne nécessite pas d’infrastructures linéaires ; coût de
transport réduit ;

- Transport maritime : ne nécessite pas d’infrastructures linéaires ; massification


importante ; lenteur ; porte-à-porte impossible ; coût de transport réduit ;
- Transport Aérien : ne nécessite pas d’infrastructures linéaires ; adapté aux grandes distances
; coût de transport élevé ; massification surtout pour le transport de voyageurs ;
- Pipeline : réalisable partout et à tout moment ; transport sans rupture de charge.

Dans la pratique, pour aller d’un point un autre, il est souvent nécessaire de combiner différents modes
de transport. On parle alors de transport multimodal, intermodal, plurimodal ou combiné.

2. Les principaux acteurs du système de transport

Les transports ont la particularité d’être composés d’infrastructures et de mobiles. Cela peut justifier
la présence de deux acteurs clés que sont les pouvoirs publics et le secteur privé. En effet, alors que
les mobiles sont généralement contrôlés par le privé, la planification et les investissements en
infrastructures restent de la compétence de l’Etat.

a) L’Etat et les collectivités publiques


L’Etat par ses administrations, ses collectivités territoriales et locales est un agent essentiel du
système de transport. L’Etat peut déléguer à ces entités publiques territoriales tout ou partie de ses
fonctions dans certains secteurs des transports. C’est le cas du transport urbain en général.

De façon générale, l’Etat a une longue tradition d’intervention dans le secteur des transports
pour raisons diverses :
- raisons politiques : défense et continuité territoriale
- raisons techniques : réservation d’emprise, sécurité des matériels, règlementation de l’usage
(code de la route)
- raisons sociales : temps de travail

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- raisons d’ordre économiques : les abus de positions dominantes, les entraves à la
concurrence
- raisons de redistribution : aménagement du territoire, service public

Un consensus relatif sur l’incapacité du marché à prendre en compte les effets externes (nuisance,
pollution, effet de serre, …) légitime l’Etat dans sa fonction d’internalisation des externalités par
prélèvement des taxes ou édiction de normes.

b) Les entreprises de transport ou transporteurs


Les entreprises de transport ont pour fonction essentielle d’assurer l’exécution des transports.
Du point de vue juridique, les entreprises de transport peuvent être :
- publiques, lorsque l’Etat est propriétaire de la majorité voire la totalité du capital de
l’entreprise ;
- privées, lorsque des agents privés contrôlent totalement l’entreprise ;
- mixtes, lorsque le capital est partagé entre plusieurs agents dont l’Etat, aucun actionnaire
n’étant majoritaire.

c) Les groupements professionnels d’entreprises de transport


Les entreprises de transport peuvent s’unir en organisation professionnelle pour défendre
naturellement les intérêts de la profession. Ces organisations les représentent auprès des pouvoirs
publics et jouent ainsi le rôle de relais entre les transporteurs et l’Etat et peuvent également
contribuer à des actions d’intérêt général tel que le développement du niveau professionnel de leur
membre ou l’élaboration et la publication de certaines statistiques de transport.

d) Les syndicats de salariés des transporteurs


En général, les salariés de toutes les entreprises de transport ont droit de se syndiquer selon les formes
légales en vigueur dans les différents pays. Mais, l’expérience montre que c’est surtout dans le
transport ferroviaire, le transport aérien et le transport maritime que les syndicats de salariés sont
les plus implantés et les plus puissants.

e) Les chargeurs et conseil de chargeurs


On donne généralement le nom de chargeur à une entreprise consommant un volume important
de service de transport. Certains pays ont donc suscité des conseils de chargeur pour que les intérêts
de leurs chargeurs soient mieux défendus au niveau international (CBC au BF & OIC en CI).

f) Les ménages et associations d’usagers


Les ménages sont naturellement comme des entreprises consommatrices de service de transport,
ou usagers des transports. La demande de transport des ménages est essentiellement une
demande de transport de voyageurs. Quand elle existe, les associations d’usager s’érigent en groupe
de pression auprès des transporteurs et des pouvoirs publics pour obtenir de meilleures conditions de
transport.

g) Les auxiliaires de transport

On regroupe sous le nom d’auxiliaires de transport, certaines entreprises spécialisées rendant des
services aux usagers des transports et/ou aux transporteurs. A titre d’exemple, on peut citer les
entreprises de groupage, de dégroupage de marchandises, du commissionnaire de transport, du
consignataire (celui qui aide le transporteur dans ces tâches) etc.

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Chapitre II : Les spécificités du transport et sa place dans l’économie

I. Spécificités économiques des transports


1. Quelques éléments chiffrés du transport au Burkina Faso

En 2010, la branche transport représentait 3% du PIB au Burkina Faso. C’est une part
relativement stable dans le temps. On note en outre, une baisse des prix de transports dans le long
terme consécutive à la baisse des coûts issus des gains de productivités et des progrès techniques.

En ce qui concerne le taux d’équipement compris comme la proportion des ménages ayant au
moins une voiture particulière, il est moins de 1% contre 80,7% en France.

Les activités de transport génèrent plus de 20 000 emplois directs. Aussi, compte tenu du lien
commerce-transport, on peut estimer à 30% des emplois directs du commerce occupés par les
transports. Ce qui représente près de 76 000 emplois et 15% de la population active.

En termes monétaires, la production des transports représente 100 milliards de FCFA.


Toutefois, ces valeurs du transport ne représentent que le transport pour compte d’autrui. Les
entreprises et les ménages produisent et consomment pour eux-mêmes du transport (transport
pour compte propre).

Cependant, les transports ont un impact important sur les nuisances et l’insécurité. En effet, les
transports constituent le premier pollueur local. Les polluants qui se dégagent des activités de
transports sont entre autres, le dioxyde de soufre (SO2), de l’oxyde d’azote, de composés organiques
volatils, du mono et dioxyde de carbone, etc.

En matière d’insécurité, le Burkina Faso a enregistré, entre 2010 et 2015, 84 117 cas
d’accidents de la circulation qui ont fait 5 046 morts et 73 536 blessés (Ministère des
Transports, de la Mobilité urbaine et de la Sécurité routière). Ces accidents ont des coûts très
importants sur l’économie. En effet, dans l’évaluation des coûts il faut distinguer les coûts
administratifs et les coûts divers :

Pour ce qui concerne les coûts administratifs, on peut retenir :


− Les frais généraux des assurances de personnes
− Les frais liés au processus juridique (avocats, tribunaux)
− Les frais de service de police, de gendarmerie et de sapeurs-pompiers
− Les frais d’expertise automobile
− Les frais de commission d’enquête administrative

Au-delà des coûts administratifs, il existe d’autres coûts qui sont en fait des coûts économiques liés
aux victimes et aux accidents et non comptabilisés dans les coûts ci-dessus. Il s’agit entre autres, des
coûts de visite aux accidentés, des coûts des funérailles, etc.

2. Les principales caractéristiques économiques des transports

L’activité du transport incarne des spécificités qui la distingue des autres biens et services :

- le transport est un bien de consommation intermédiaire. Il est rarement demandé en soi et


pour soi. Il constitue un auxiliaire de l'activité professionnelle, des loisirs ou

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de la production. La demande de transport ne peut donc se comprendre qu'en relation avec le mode
de vie et l'activité de production ;

- c'est une activité à forte intensité capitalistique. La production de transport, ou plus


exactement le transport motorisé, met en jeu du capital (des routes, des chemins de fer, des
camions, des locomotives, des avions, etc.), des inputs (carburants, électricité), du
travail (des camionneurs, des cheminots, des pilotes) et du temps1. Même si cela est vrai
de tous les biens, La part du capital (infrastructures et moyens de transport) est plus
importante pour le transport que pour la plupart des biens, en particulier des services ;

- la longue durée de vie de ses infrastructures. Les décisions en la matière vont porter
leurs fruits pendant des décennies, voire des siècles. La période de construction de ces
infrastructures est également très longue. Pour des raisons techniques (il faut plusieurs années
pour construire un ouvrage complexe) et surtout socio-politiques (il faut encore plus
longtemps pour faire accepter le principe et le tracé d'une voie routière ou ferroviaire), quinze
ans peuvent s'écouler entre la décision de création d'une infrastructure ;

- le transport est un coût lié à l’éclatement des activités. De ce fait, sa minimisation implique
souvent une concentration des activités (polarisation). On constate empiriquement que
l’amélioration du système génère à la fois de l’étalement urbain et de la polarisation
interurbaine ;
- les rendements croissants du fait de l’importance des coûts fixes (la partie fixe étant plus
chère que la partie mobile), d’où tendance au monopole naturel et plus généralement
tendance à la concentration (on parle de monopole naturel quand il est préférable de réaliser
une activité économique par une seule entreprise plutôt que par plusieurs) ;

- le transport est un bien public impur du fait de l’importance de la congestion qui


dégrade la qualité des services de transport. Un bien public est un bien dont l’utilisation est
non rivale et non exclusive. La non rivalité implique que la consommation du bien par un
individu n’empêche pas l’utilisation d’un autre. La non exclusivité implique qu’on ne puisse
empêcher une personne d’avoir accès à ce bien.

- la connexion des réseaux accroît l’efficacité du système de transport et génère des


baisses de coût importantes ;

- les externalités positives ou négatives importantes: le transport est le premier


pollueur local, mais également un contributeur important à la croissance économique ;

- des activités peu concurrentielles : la notion de marché des transports est


fallacieuse : les services de transport sont peu substituables. La distance joue un rôle important
dans le choix du mode d’une part et d’autre part, l’existence de coûts fixes
importants favorise les phénomènes de concentrations industrielles.

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Le temps est incontournable dans les transports dont la vitesse est un attribut essentiel. Les gains de temps
constituent un des principaux éléments du choix du moyen de transport 10

Economie des Transports


- L’intervention de l’Etat, notamment dans le transport voyageur, a toujours été
historiquement forte, et le reste encore. De plus, la décentralisation renforce le rôle des
administrations publiques locales.

II. Transport et croissance économique

Les transports étant nés de l’éclatement de l’activité économique, il existe une relation évidente entre
croissance économique et croissance des activités de transports. Par exemple en 2002, l’INSEE
(Institut National de la Statistique et des études) à travers une régression simple a mis en évidence le
lien entre PIB et Valeur Ajoutée (VA) branche transport pour la France. Ainsi, lorsque la croissance
du PIB est supérieure à 1,52% par an, la VA transport augmente plus vite que celle de l’économie
et inversement, lorsque la croissance du PIB est inférieure à
1,52%, la VA transport varie plus faiblement que le reste de l’économie.

Mais quel est l’impact des transports sur l’activité économique ? Pour mener une telle analyse, on peut
adopter plusieurs approches :

− qu’elle est l’influence des coûts de transports sur la localisation des activités
économiques ?

− quel est le rôle des infrastructures de transport dans l’Aménagement du territoire ?

− quelle est l’influence des dépenses de transport sur la redistribution des revenus des
ménages ?

1. Coûts de transport et localisation des activités

Lorsqu’on étudie la localisation des activités économiques (agriculture, industrie,


commerce, …), on observe une certaine spécialisation de l’espace. A partir de ce constat, on peut
s’interroger sur les facteurs déterminants de la localisation des activités économique.

2. Rôle des infrastructures de transports dans la croissance économique

Les infrastructures de transports exercent une influence sur la croissance économique. Cette influence
peut être directe et indirecte.

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a) Investissement de transport et l’effet de construction

La construction d’une nouvelle infrastructure est à l’origine d’un accroissement de la


production. Cet effet, multiplicateur s’appuie sur le schéma keynésien. En effet, l’impact de
l’investissement de transport sur la production est important car la construction d’une
infrastructure implique le recours à la branche BTP qui se caractérise par l’emploi d’un volume
important de main d’œuvre. Pour ces raisons la mise en service d’une nouvelle infrastructure de
transport constitue un outil privilégié pour exercer des effets sur l’activité économique à court et
moyen terme.

b) Infrastructure de transport source d’économies externes

Cette approche a été développée par Barro. Pour lui, la production des entreprises est réalisée à partir
d’un stock de capital K, incluant le capital productif physique et le capital humain. Ce facteur de
production qui se particularise par une productivité marginale décroissante, ce qui se traduit par une
progression de la production de chaque entreprise tendant vers zéro (rendements d’échelle
décroissante).

L’introduction des dépenses publiques est à l’origine d’économies externes. En particulier, les
investissements de transports permettent d’assurer une meilleure circulation des produits et des
facteurs de production. La réalisation d’économies externes permet de contrecarrer l’évolution de
la productivité du capital. Cette situation se traduit par un processus de croissance.

Une étude de Ashauer pour les USA, révèle qu’une augmentation de 1% de l’investissement
public accroit la productivité totale des facteurs de 0,34%.

c) Transports et transferts sociaux

Le secteur des transports bénéficie de subventions versées par l’Etat et les collectivités locales.
Ces allocations permettent de réduire les prix de transports acquittés par certaines catégories sociales
d’usagers (prix du ticket ou de l’abonnement à la Sotraco pour les étudiants et les élèves). On
retrouve également dans le secteur des transports une politique de redistribution des revenus à
travers les prélèvements effectués auprès des ménages :
✓ taxe sur le carburant,
✓ TVA sur les véhicules,
✓ Taxes diverses (taxe d’atterrissage, vignette, …)

Les transports constituent un instrument privilégié pour exercer des effets sur l’activité
économique. Cependant, l’analyse des faits révèle une influence limitée en ce qui concerne la
localisation des entreprises en fonction des coûts de transport, l’effet structurant des
infrastructures de transports sur l’activité économique de même que l’effet redistributif des
dépenses de transport au profit des ménages pauvres.

III. Problèmes et enjeux principaux des transports


1. La congestion

La congestion en transport est un problème universel que connaissance particulièrement toutes les
grandes agglomérations. La congestion désigne la dégradation de la qualité de

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service quand le nombre d’usagers augmente. Autrement, la congestion est un évènement qui survient
lorsque la capacité d’un réseau est dépassée par la demande. Elle résulte de ce fait des lois
d’écoulement du trafic. En se limitant aux aspects macroscopiques, on peut distinguer : (i) la
Congestion routière : (ii) la congestion arienne et (iii) la congestion ferroviaire

• La Congestion routière

Pour l’usager l’encombrement commence quand les camions et les voitures doivent réduire leur
vitesse à cause de la présence d’autres utilisateurs de la route. Cela se produit lorsque les niveaux
atteints de la densité du trafic, empêchent l’écoulement libre. Il est important de noter qu’il existe
deux types de congestion : La congestion récurrente qui est répétitive le long de la journée, et la
congestion non récurrente due à un phénomène aléatoire causé par un accident, panne, chantier de
construction etc.

Il faut distinguer les causes structurelles des causes instantanées. Les causes structurelles sont entre
autres (i) l’augmentation du nombre de véhicules, (ii) le phénomène d’urbanisation et (iii) la
croissance démographique. Ces causes structurelles sont constatées lorsque les réalisations en
termes d’infrastructures ne suivent pas. Par contre, les causes instantanées peuvent être liées aux
accidents, à des feux anormaux ou tout simplement à un flux lent des véhicules.

Pour agir sur la congestion, il est nécessaire de chercher à bien comprendre le phénomène. En effet,
la congestion représente un déséquilibre entre l’offre et la demande de circulation dans le temps et
dans l’espace. Elle entraine une consommation accrue de carburant, une perte de temps et un stress
pour les usagers. Les solutions préconisées sont (i) Agir sur la fiscalité pour faire payer des
véhicules qui restent au centre-ville, aux heures de pointe ou encore (ii) d’accroitre la production de
la route en faisant rouler deux véhicules cote à cote.

Des initiatives sont également développées pour accroitre la productivité des véhicules par une
meilleure allocation des moyens (car polling dans l’espace) ou par son usage en un maximum de
temps (car sharing). Un taxi par exemple est un véhicule de partage avec chauffeur.

Covoiturage

C’est l’utilisation conjointe et organiser (à la différence de l’auto stop) d’un véhicule par un conducteur non
professionnel et un ou plusieurs passagers ; dans le but d’effectuer un trajet commun. Cette pratique permet aux
passagers d’économiser des dépenses de carburant et à la collectivité de diminuer les embouteillages, la
pollution et les accidents de la route. Le covoiturage est de ce fait fortement encouragé par des autorités dans les
pays développés surtout lors des pics de pollution et est d’autant pratiqué lorsque le prix du carburant augmente.
Mais quels sont ses principes ?

A la différence du taxi ou le passager choisit la destination ; en covoiturage c’est le conducteur qui fixe le trajet.
Un conducteur propose aux passagers de les transporter dans sa voiture pour un trajet qu’il doit lui-même
effectuer et donc à la date qu’il a décidée. Le partage des frais est laissé à l’appréciation du conducteur. La
formule la plus classique consiste à diviser le coût du carburant et des péages par le nombre de personnes. Les
frais généraux tels que ceux de l’entretien ou d’assurance peuvent être inclus dans le calcul du coût du trajet. Le
conducteur est tenu par contre, de ne pas faire du bénéfice pour ne pas feindre la loi.

• La Congestion Arienne et ferroviaire

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La congestion arienne se déclenche lorsque la demande dépasse l’offre notamment par rapport
aux infrastructures (pour atterrissage ou décollage par exemple), le contrôle arien ou encore les
routes ariennes (l’espace). Les causes de la congestion aérienne sont principalement
l’insuffisance de la capacité du contrôle arien, la mauvaise organisation du contrôle aérien,
l’insuffisante des capacités aéroportuaires.

La congestion ferroviaire quant à elle se traduit principalement par des décalages horaires dus aux
conflits dans l’affectation horaires ou encore les suppléments du temps de trajet. qui sont souvent dus
aux différences de vitesses des trains et de la longueur des arrêts.

2. Transports et environnement

Malgré l'apport incontestable des transports dans l'économie en général, ils ont aussi un coût social : la
pollution de l'environnement. Ils nuisent donc à la santé de la terre mais aussi aux êtres vivants. Les
transports sont à l’origine d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre, elles-mêmes responsables
du réchauffement climatique.

a) Les effets des transports sur l'environnement

Parler des impacts des transports sur l'environnement, c'est avoir implicitement adopté des critères
d'appréciation de ce qui est supportable ou intolérable pour l'homme, bon ou mauvais, beau ou laid. La
description des impacts environnementaux n'est donc pas purement factuelle, elle est bien souvent
sujette de subjectivités.

▪ La pollution atmosphérique et ses effets

Les émissions atmosphériques de polluants provenant de la combustion des moteurs, ont un effet sur
l'air et le réchauffement du globe. En milieu urbain, 50% de la pollution de l'air est due à la
circulation. Les infrastructures routières sont à l'origine de nombreux polluants, en particulier
des particules et du NOx (oxydes d’azote) dans les zones urbaines. En 2011, le projet Aphekom a
conclu qu'habiter à proximité du trafic routier augmente sensiblement la morbidité attribuable à la
pollution atmosphérique.

En octobre 2013, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé la pollution de l'air extérieur
et les particules de l'air extérieur comme cancérogènes pour l’homme. Les polluants atmosphériques
représentent de ce fait, un enjeu sanitaire majeur. En France par exemple, l’OMS a estimé que la
pollution par les particules PM10 est à l’origine de 6 % des décès prématurés, dont la moitié est
attribuée aux émissions du trafic routier. Les dernières données scientifiques renforcent également le
lien entre la pollution de l’air extérieur et des pathologies respiratoires et cardiovasculaires et mettent
en évidence des effets sur la reproduction, le développement fœtal ou neurologique.

• Les modifications du milieu aquatique

Les grandes infrastructures routières entraînent des modifications du milieu aquatique, aussi bien des
eaux de surface, que des eaux souterraines à travers les déversements accidentels ou non de polluants
et de déchets. Par exemple, l’eau de pluie qui lessive les surfaces asphaltées (bitume) en zones
urbaines, entraîne dans les réseaux d’assainissement de forts débits d’eau chargée d’une pollution
diffuse (métaux, hydrocarbures) qui peut en zone rurale, polluer les sols, les nappes phréatiques et les
cours d’eau. Le rôle du transport au niveau de la pollution de l'eau est de 4%.

Economie des Transports 14


• La consommation d’espace

La consommation et le morcellement de l’espace associés au développement des


infrastructures de transport ont d’importants impacts sur le milieu physique et naturel
(végétation, faune), le patrimoine, l’agriculture ou encore sur la qualité de la vie. Ces impacts sont
entre autres, les écarts de mobilité entre les différentes couches de la population, la perte de la rue,
l'isolement, le stress et l'anxiété créés par la rue et par la circulation qui s'y trouve.

La consommation d’espace par les transports entraîne des effets de coupures et donc des problèmes
de franchissement pour les individus et la faune. Ainsi, en ville, on note un allongement des
parcours pour les piétons ou cyclistes et un accroissement de l’insécurité. En zone extra-urbaine, les
infrastructures et les remembrements associés peuvent couper des chemins et morceler les domaines
de vie des espèces. On considère ainsi qu’un territoire
« morcelé » en dix parties voit sa diversité biologique divisée par deux.

La rue appartient à la société et aux citoyens. Avec la hausse des débits de circulation, l'impact sur les
activités est aussi important. Les activités qu'on retrouvait avant dans les rues comme les marchés, les
jeux d'enfants, l'esprit de communauté et de voisinage disparaissent au profit du trafic et de
l'automobile.

• Les nuisances sonores

Les transports sont également responsables de nombreuses nuisances sonores. On considère


que le niveau de bruit correspondant à une journée calme en campagne est de
40 dBA et celui qui correspond à un seuil acoustique de confort (c’est un objectif de qualité de
l’environnement en milieu urbain dans certains pays) est de 55 dBA. Pour atteindre l’isophone de 40
dBA, en s’éloignant d’une autoroute par exemple, il faut parcourir entre 1 et 3 km.

Le bruit occasionné par les transports routiers est la principale source de nuisances sonores. Il peut se
manifester à trois niveaux selon l'intensité des émissions ; gêne psychologique (perturbation,
mécontentement), gêne fonctionnelle (trouble les activités comme le sommeil, le travail, la parole) ou
gêne physiologique (problèmes de santé comme la fatigue, impact sur l'audition).

Les nuisances sonores dues à la circulation proviennent principalement du :

• bruit de roulement pneu-chaussée. C'est une préoccupation forte dès lors que la vitesse du véhicule
dépasse la limite des 50 km/h. Elle concerne l'ensemble des véhicules routiers et met en jeu à la fois la
technologie de fabrication des pneumatiques qui doivent trouver un compromis entre sécurité, confort,
résistance au roulement et faible niveau d'émission sonore, et les revêtements routiers qui doivent, eux
aussi, trouver un compromis entre qualité d'usage, durabilité et performance acoustique ;

• bruit du groupe moto-propulseur. Il s’agit du bruit de l'admission, du moteur, de la chaîne de


transmission, de la ligne d'échappement. Ce bruit est prépondérant à basse vitesse donc en ville ;

• du bruit aérodynamique. Bien que pour un véhicule automobile les principales sources de bruit à 50
km/h soient dues au moteur et à l'interaction pneu-chaussée, au-delà de 100 km/h, la contribution
aérodynamique ne doit pas être totalement négligée, en particulier dans les secteurs où les axes routiers
à grandes vitesses sont proches des habitations.

Economie des Transports 15


2. Remède contre les effets néfastes du transport sur l’environnement

Pour remédier aux effets néfastes que le transport peut causer sur l’environnement, il serait important
pour chaque Etat, de mettre aux points des mesures de précautions ainsi qu’une bonne politique de
développement durable à travers une tarification efficace.

Parmi les GES, le CO2 produit par les transports tient une place importante. En 2000 par exemple,
les émissions totales de CO2 s’élevaient à 20 milliards de tonnes. Sur ce total, les transports en
représentaient 27% devant l’industrie (20%). Les 27% du secteur des transports sont essentiellement le
fait de la route qui représente à elle seule 20 % des émissions, dont
12 % pour les véhicules particuliers. Pour remédier à ce phénomène il serait important de mettre
sur le marché des véhicules à faible consommation de carburant ou encore de privilégier
l’utilisation des biocarburants qui sont moins polluants que les dérivées pétrolières. D’autres
initiatives peuvent également encouragées. Il s’agit des voitures électriques ou hybrides et la pile
à combustible.

Plus importants encore que les solutions technologiques, certains changements de comportements
permettent de réduire les émissions de CO2. En favorisant l’utilisation des transports en commun
(bus, tramway, métro…), le covoiturage, la circulation alternée, en donnant la priorité à des modes
de transport écologiques (vélo, piétons…), des choix politiques locaux et individuelles permettent
d’agir sur les émissions de gaz à effet de serre.

En ce qui concerne la destruction des paysages ou disparation des rues, il serait important pour les
autorités d’avoir une bonne planification dans la construction des nouvelles villes et cités. A cet effet,
des espaces devraient être réservés pour l’agrandissement des voies futures.

Outre les mesures règlementaires et de précaution, les Etats doivent également développer des
principes de tarification afin de réguler la demande. En théorie, il s’agit de faire payer aux
automobilistes un prix à l’entrée des zones encombrées. Ce qui devrait les dissuader
d’effectuer des déplacements superflus, ou bien les inciter à choisir un autre moment pour circuler,
ou à se déplacer par les transports publics, à pied ou à bicyclette. Dans la mesure où cette solution est
correctement appliquée, les automobilistes qui acquittent des tarifs plus élevés aux heures
d’affluence profiteront d’une circulation plus fluide et d’un gain de temps de trajet. Parallèlement, les
déplacements non essentiels seront supprimés ou effectués à des moments de plus grande fluidité et à
moindre coût.

Dans la pratique, les usagers de l’infrastructure routière ne sont pas en situation de vérité des prix. Les
automobilistes considèrent plutôt cette infrastructure comme un bien public, financé au moyen des
recettes fiscales. Ainsi, avec les encombrements, les autorités sont obligées de construire d’autres
routes. Cependant, lorsque de nouvelles routes sont construites ou les routes existantes élargies, la
capacité supplémentaire ne fait qu’attirer de nouveaux usagers et stimuler la demande. Certes, ce
système favorise les ventes de voitures, mais nuit à l’environnement et au contribuable.

Néanmoins, il existe une différence fondamentale entre les coûts incompressibles d’une route et le
surcoût imposé à la collectivité, par chaque usager de la route supplémentaire. Aussi, la tarification
routière a-t-elle pour but de répercuter ce surcoût, appelé coût marginal de l’utilisation de
l’espace routier. Autrement dit, à un prix déterminé, seuls les usagers qui estiment indispensable
de se déplacer le feront.

Economie des Transports 16


Chapitre III : La demande de transport routier

Le transport routier rassemble les moyens de transport suivants : les véhicules particuliers, les
véhicules utilitaires (véhicules utilitaires légers, poids lourds) et les deux roues.

Un véhicule utilitaire est un véhicule capable d'assurer des fonctions très différentes,
généralement à des fins professionnelles. Il peut s'agir d'un fourgon, d'un pick-up, d'un camion, d'une
camionnette, d'un véhicule frigorifique, benne. Il peut être utilisé pour le transport de matériel, le
transport de personnes, les évacuations sanitaires, les missions de combat, etc.

Le transport routier est une activité réglementée de transports terrestres, qui s'exerce sur la
route. Cette activité englobe à la fois le transport routier de personnes, le transport routier de
marchandises, le déménagement. Ces activités commerciales sont exercées par les transporteurs
routiers.

I. Définition du déplacement ou service élémentaire de transport

Le transport est un service au niveau élémentaire d’un déplacement. Ce service consiste à déplacer
d’un point (origine) à un autre (destination), des personnes ou une certaine quantité de marchandises.
Ce qui intéresse le demandeur du transport, c’est l’origine et la destination du déplacement.

En pratique, dès que le transport recours à des infrastructures liées au sol, le transport se fait selon un
itinéraire imposé par les infrastructures. La définition complète d’un déplacement élémentaire
comporte donc les données suivantes :

- l’origine du déplacement ;
- la destination du déplacement ;
- l’itinéraire suivi ;
- la longueur du déplacement ;
- la date de départ ;
- la date d’arrivée (des dates de départ et d’arrivée découlent la durée du déplacement
et la vitesse du déplacement).

II. Demande de transport

1. Définition du concept

La demande de transport est un concept qui recouvre des notions généralement différentes. La
demande de transport est l’ensemble des besoins (exprimé ou non) de déplacements de personnes
et de marchandises.
Comme pour tous autres biens ou services, la demande de transport d’un agent, est la
quantité de service que cet agent utilise au cours d’une unité de temps. Le service de transport
peut être acheté à une entreprise de transport mais il peut être produit directement par l’agent (cas de
l’utilisation d’un véhicule individuel), ou encore par un autre agent à titre bénévole (le transport
gratuit).

La demande de transport d’un agent inclus la totalité de service de transport utilisé par l’agent
quel que soit la modalité de production du service de transport. Elle est donc la somme des

Economie des Transports 17


déplacements que l’agent effectue au cours d’une unité de temps ou qu’il fait effectuer
à des marchandises.

La demande d’un groupe d’agents est la somme des demandes de transport de chaque agent. On peut
également considérer la demande de transport sur un territoire donné, une ville, une région ou un
pays. Mais, on notera que la demande associée à un territoire n’est pas forcement, la somme des
demandes des agents résidant dans le territoire. En effet des agents du territoire peuvent exprimer une
demande à l’extérieur du territoire, tandis que des agents résidant à l’extérieur d’un territoire peuvent
exprimer une demande à l’intérieur de celui-ci.

Quand on parle de demande globalement sans autre précision, on entend la demande qui
s’exprime sur le territoire considéré quel que soit les agents exprimant cette demande. On
distingue deux grandes catégories de demande de transport :

- la demande de transport de personnes (on parle indifféremment de passagers ou de


voyageurs) ;
- la demande de transport de marchandises.

La demande de transport de voyageurs peut correspondre au nombre de trajets que les voyageurs
désirent effectuer de manière globale au cours d’une période donnée et à l’intérieur d’une zone
géographique précise.
Elle peut aussi correspondre à la demande de déplacements entre un point (origine) et un autre
(destination) au cours d’une période donnée.

La demande de transport peut aussi se préoccuper du choix que les individus effectuent entre les
divers modes de transport qu’ils ont à leur disposition. Dans ce cas, on parle de choix modal.
La demande de transport peut en outre concerner le choix du meilleur itinéraire entre un point
d’origine donné et une destination précise. Cette demande peut être envisagée sous l’aspect
particulier de la demande d’acquisition de véhicules de transport.

Selon les notions particulières considérées, l’unité de mesure de la demande de transport sera
évidemment fort différente :
- nombre de trajets ;
- nombre de véhicules ;
- nombre de voyageurs à la fréquence d’utilisation d’un moyen de transport particulier ;
- souvent le nombre de voyageurs.km. Il s’agit du nombre total de km effectué par
l’ensemble de voyageurs. S’il s’agit des marchandises, on considèrera le nombre de
tonnes.km.

2. Les caractéristiques de la demande de transport

Une des caractéristiques de la demande de transport est qu’elle peut être envisagée comme le résultat
d’une séquence de décisions. Ainsi, on peut envisager la séquence suivante :
- l’individu choisit sa localisation, tant au niveau de sa résidence qu’au niveau de son
emploi ;
- l’individu choisit de posséder ou non un véhicule ;
- l’individu choisit le mode de transport qu’il utilisera pour réaliser ses différents
déplacements ;

Economie des Transports 18


- l’individu choisit le nombre, la fréquence et l’importance de ses déplacements.

Cette séquence n’est qu’une des séquences envisageables. Il est possible d’en considérer d’autres.

Par ailleurs, comme nous examinons la demande de transport et non les décisions de
localisation des individus et des activités économiques, nous considérons la localisation de ceux-ci
comme des données déterminant les besoins de déplacement. Si nous envisageons les décisions en
matière de localisation, il conviendrait de tenir compte des possibilités en matière de transport
(infrastructure, possession ou non d’un véhicule automobile, etc.). Nous sommes en quelque sorte
confrontés au problème de « l’œuf et de la poule » : la localisation influence la demande de
transport et les choix en matière de transport influencent la localisation.

En matière de transport de marchandises, on rencontre le même type de problèmes. La demande


de marchandises peut être exprimée en termes de nombre de trajets, choix du mode de transport,
demande d’acquisition de véhicules de transport, etc. En outre, la demande de transport de
marchandises peut être exprimées sur la base d’unités diverses : tonne-km, nombre de déplacements,
fréquence d’utilisation d’un mode de transport, nombre de véhicules demandés, etc.

III. Les facteurs explicatifs de la demande de transport

Un acteur économique opère ses choix avec un certain comportement économique. En effet, celui-ci
étant soumis à certaines contraintes matérielles ou relationnelles, il cherche à optimiser son
profit net. Cette recherche d’optimisation constitue la rationalité économique du
comportement de tout individu.

La demande de transport quelle que soit la notion adoptée et sa mesure dépend de nombreux facteurs
explicatifs dont notamment :

1. le prix du service de transport

Comme la demande de n’importe quel bien, la demande de transport est en principe en relation
décroissante du prix de transport. Dans les faits, l’élasticité-prix de la demande de transport comme
l’élasticité prix de la demande de n’importe quel autre bien est très variable et dépend de nombreux
autres facteurs. Parmi ceux-ci on peut citer :

❖ le but du voyage : il y a une différence selon que le voyage est réalisé à des fins
professionnelles ou à des fins privées. L’élasticité prix sera beaucoup plus faible pour des
voyages à des fins professionnelles. Elle sera plus élevée pour les voyages à des
fins privées ;
❖ la période de temps considérée : l’importance de la réaction de la demande à une
modification du prix peut être très différente à très court terme, à court terme et à long terme.
La réaction immédiate, c’est-à-dire la réaction à très court terme, peut être
extrêmement importante. Ainsi, si on augmente le prix du carburant, les
consommateurs réduiront considérablement à très court terme leur demande. Mais après
une petite période de temps, c’est-à-dire à moyen terme, ils reviendront pratiquement à
leur niveau de consommation antérieure. Par contre, à long terme, les

Economie des Transports 19


consommateurs pourront modifier leurs comportements. Cela implique donc que
l’élasticité à long terme sera supérieure en valeur absolue à l’élasticité de court terme mais
que l’élasticité de très court terme sera souvent élevée en valeur absolue.

2. Le revenu

En matière de transport de voyageurs, il y a une relation directe entre la demande de transport et le


revenu des voyageurs. De manière générale, le transport est un bien normal ou supérieur, c’est-à-dire
que sa demande augmente avec le revenu. L’élasticité de la demande de transport par rapport au
revenu est positive. Toutefois, quand on considère différents modes de transport la situation est
différente.

L’élasticité-revenu de la demande de transport public, en particulier de transport en commun, est


généralement négative. Par ailleurs, la demande de véhicules automobiles privés constitue
généralement des biens de luxe dont l’élasticité-revenu est supérieure à l’unité. Un bien de luxe est
caractérisé par le fait que la part consacrée à ce bien dans l’ensemble du budget augmente à mesure
que le revenu s’accroit.

En fait, on observe généralement qu’à mesure que le revenu du consommateur augmente, celui-ci
renonce à l’utilisation de certains moyens de transport (marche à pied, vélo, transport public urbain)
pour se tourner vers d’autre moyen en particulier, le véhicule automobile privé.

3. Le prix des autres modes ou moyens de transport

La demande d’un type particulier de transport dépend du prix des modes substituts ou
concurrents. L’élasticité de la demande d’un mode particulier de transport par rapport au prix d’un
mode concurrent sera positive. Ce qui signifie que quand le prix d’un mode (ou moyen) concurrent
augmente, le consommateur réduit la demande de ce mode (ou moyen) de transport et se tourne
vers d’autres moyens de transport pour se déplacer.

Quand certains modes de transport sont complémentaires, comme dans le cas de transport de
marchandises utilisant plusieurs modes de transport pour aller d’une origine précise à une destination
particulière, l’élasticité-prix croisée entre les modes sera évidemment négative.

4. Le prix des biens complémentaires

La demande de transport notamment routier peut dépendre aussi du prix de biens qui lui sont
complémentaires. L’exemple classique est évidemment celui de la demande d’acquisition de
véhicules automobiles privés qui dépend non seulement du prix d’acquisition des véhicules mais
aussi du prix du carburant et du montant de la taxe de circulation. Comme dans le cas de tous les
biens complémentaires, l’élasticité prix croisée sera négative.

5. Le temps

Le temps de transport joue un rôle capital pour expliquer la demande de transport tant au
niveau des voyageurs qu’au niveau des marchandises.
En ce qui concerne la demande de transport de voyageurs, on constate une sensibilité très différente
par rapport au temps selon qu’il s’agit du temps de transport, du temps d’attente, du temps nécessaire
pour prendre le mode particulier. De manière générale, on constate que

Economie des Transports 20


l’individu est beaucoup plus sensible au temps d’attente, au temps d’arrêt et au temps pour prendre
un mode de transport qu’au temps de transport proprement dit. En outre, l’individu est très sensible à
la rupture de charge c’est-à-dire l’obligation de changer de mode de transport ou de véhicule ainsi
qu’au temps d’attente dans cette circonstance.

La demande de transport est en relation inverse avec le temps nécessaire au transport.


L’élasticité-temps sera donc négative. De nouveau cette élasticité dépendra d’un certain nombre
d’autres facteurs comme par exemple l’objet de déplacement. On observe généralement une
plus forte élasticité par rapport au temps (en valeur absolue) pour les déplacements à des fins
professionnelles qu’à des fins privées. Il y a par contre une très faible sensibilité de transport par
rapport au temps pour des déplacements à des fins privées pendant la période de loisirs en particulier
pendant les vacances.

6. La liberté de disposition

Les utilisateurs sont aussi très sensibles à la liberté de disposition du moyen de transport. Il s’agit là
évidemment d’une caractéristique qui favorise l’automobile au détriment des transports publics
qui sont soumis à des contraintes d’horaires importantes. La régularité et la liberté (régularités dans
les horaires, possibilité de trouver un moyen de transport sans réservation trop longue,
disponibilité d’un moyen de transport).

7. La capacité

Il s’agit là d’une caractéristique importante pour le transport de marchandises. L’adéquation entre les
différentes caractéristiques des marchandises à transporter (volume, poids) et celle du mode de
transport détermine souvent le choix du mode (ou du moyen).

8. La sécurité

Voyageurs et transporteurs de marchandises sont sensibles aux risques encourus. Ils préfèrent
évidemment un mode de transport sûr à un mode risqué.

9. Le confort

Il est une caractéristique importante aux yeux de voyageurs. Cela correspond à la fois au nombre
de places assises, à la qualité des installations, la qualité des services offerts.

En ce qui concerne le transport des marchandises pour certains moyens de transport, en particulier
les désagréments liés aux ruptures de charge et aux coûts de transbordement constituent
évidemment des caractéristiques qui déterminent l’attractivité relative des différents moyens de
transport.

IV. Unités de mesure de la demande de transport

Dans un premier temps, on peut faire référence au mode de transport, en exprimant la demande
qui s’adresse à chaque mode avec des unités appropriées pour les personnes et les marchandises.

Economie des Transports 21


Dans un deuxième temps on peut exprimer la demande en utilisant le nombre de véhicules utilisés
pour la satisfaire.

Enfin, on peut considérer la demande : d’un point à un autre (origine et destination) ou sur les
itinéraires des modes de transport.

1. Demande de transport de passagers

La demande de transport de passagers peut s’exprimer entre deux points ou sur un itinéraire.

Notion de demande de transport captif

On dit qu’une demande de transport est captive d’un mode de transport quand l’agent
demandeur du transport n’a à sa disposition que ce seul mode de transport. Par exemple, pour des
distances de quelques Km dans la zone où il n’existe aucun transport collectif, un demandeur de
transport motorisé est captif de la marche à pied.

Au-delà de la distance de marche à pied, toujours dépourvu de transport collectif, le possesseur


d’une voiture particulière est captif de sa voiture. En ville, les particuliers non motorisés sont
captifs des autobus ou des taxis s’ils ne veulent ou ne peuvent pas marcher.

2. Demande de transport de marchandises

Les unités de mesure de la demande de transport de marchandises sont tout à fait analogues à celle
utilisée pour les voyageurs à ceux-ci prêt qu’on substitue au nombre de voyageurs, le poids (parfois le
volume) de marchandise. On parlera de tonnes (ou de m3).

Les unités de mesure sont :


- le nombre de tonne (ou de m3) ;
- le nombre de tonne kilomètre (TKM) ;
- le nombre de véhicule d’un type donné ;
- la capacité des véhicules d’un type donne ;
- le nombre de véhicule kilomètre d’un type donné ;
- la dépense de transport.

Il existe des correspondances évidentes entre certaines unités de mesure de la demande de transport
de passagers et de marchandises, quitte à introduire des paramètres
complémentaires tels que le chargement moyen des véhicules (C. H. M.).

On peut citer les principales relations :


- tonnage ou nombre de passagers ;
- tonnage kilomètre TKM ou passager kilomètre PKM.

La demande de transport ainsi exprimée dépend de la tarification en vigueur.

Economie des Transports 22


Chapitre IV : Investissements en infrastructures de transport

L'investissement constitue probablement l'une des décisions financières les plus délicates. En effet,
l'évaluation de la rentabilité économique d'un investissement est souvent difficile du fait des
nombreuses variables utilisées. Les pouvoirs publics sont souvent confrontés à des problèmes
concrets en matière d’investissement de transport entrainant les questionnements suivants :
- quels travaux d’amélioration des routes nationales faut-il envisager dans les 5 années voire les
10 années à venir ?
- quels types d’infrastructures faut-il mettre en place pour relier deux villes dans un même
pays ?

En analysant ces exemples de problèmes on s’aperçoit qu’ils impliquent :


- soit l’élaboration d’un programme,
- soit une décision particulière sur un problème géographique isolé ;
- soit des choix entre variances incompatibles ;
- soit l’échelonnement des dates de réalisation d’opérations indépendantes ;
- enfin, ces problèmes peuvent différer selon le terme de mise en œuvre de la décision
portée dans le court, long et moyen terme.
La solution de ces problèmes passe par l’élaboration de critères et leur mise en œuvre dans
le cadre d’un processus de décision.

I. Spécificité des investissements d’infrastructures de transports

La spécificité des critères de choix résulte en elle-même de la spécificité du secteur des transports
présentée aux chapitres précédents.

1. Effets externes
En économie, on désigne sous le terme d’externalités les effets d’un agent économique sur un autre
agent sans qu’il y ait transaction monétaire ou convention d’échange entre ces deux agents. Ces effets
ne sont pas directement sanctionnés par les mécanismes du marché et le système de prix : ce sont des
services rendus non rémunérés et des dommages causés non compensés.

Selon la théorie économique, les externalités sont définies comme des variations du bien-être collectif
générées par une activité donnée lorsque la transmission ne passe pas par des mécanismes de
marché et de prix. Les externalités peuvent être négatives (coûts externes) ou positives (bénéfices
externes) et correspondent à des coûts ou bénéfices qui ne sont ni payés ni perçus par ceux qui en
sont la source.

Il y a présence d’effets externes, au sens large, lorsqu’un acteur économique, par sa


consommation ou sa production modifie la situation d’un autre acteur économique, par exemple
en dégradant son environnement. Ainsi, l’automobiliste génère des effets externes négatifs supportés
par les populations exposées à la pollution. Comme la relation entre l’émetteur de la nuisance et
les récepteurs s’établit en dehors d’un marché, les victimes supportent la nuisance sans contrepartie,
l’effet externe conduit alors à un coût externe.

Economie des Transports 23


A partir de ces définitions on peut retenir trois points fondamentaux :

- on parle d’externalité lorsque le bien-être d’un individu varie suite à l’activité d’autres
individus ;
- les effets externes sont la conséquence d’une activité qui ne donne pas lieu à une
contrepartie monétaire ;
- le coût social de transport comprend non seulement les coûts privés directement supportés
par l’usager mais également les coûts externes (coûts environnementaux, coût
d’encombrement et coût d’accident).
Lorsqu'il est possible de « monétariser » les effets externes, de les évaluer selon une unité
monétaire, les externalités négatives des transports se traduisent en "coûts externes ».

L’internalisation des coûts externes consiste à assurer la prise en compte d'une externalité dans le
processus décisionnel du marché en faisant acquitter tout ou partie de ces coûts aux agents qui en sont
supposés responsables, par le biais de politiques ad hoc (pollueur-payeur). D’ores et déjà, certains
effets externes sont partiellement internalisés comme par exemple les accidents de la circulation dont
une partie du coût (dommages matériels et frais médicaux) est supportée par les automobilistes par
l’intermédiaire de leur assurance automobile.

a. Effets externes positifs


Nous avons les effets sur le développement économique et les conséquences esthétiques positives
pour les villes et agglomérations traversées, l’accès à des activités commerciales ou de loisirs.

b. Effets externes négatifs

Les effets externes négatifs concernent les bruits, les pollutions pour les riverains, les
conséquences esthétiques négatives, les perturbations de l’environnement, la gêne des usagers.
Plus précisément on peut citer :
- les accidents entrainant les pertes de capital humain, soins médicaux, coûts
administratifs, etc. ;
- impacts sur la santé ;
- impacts sur les bâtiments ;
- impacts sur les cultures ;
- pollution atmosphérique hors effet de serre Gaz considérés: NOx, SO2, PM2,5, VOCs ;
- changement climatique ;
- nuisances sonores ;
- consommation d’espace ;
- congestion ;
- contrainte de rareté du pétrole.

2. Caractéristiques de la gestion des infrastructures

Outre la règlementation des activités privées, les pouvoirs publics interviennent dans la gestion des
infrastructures de transport par la tutelle d’organismes de statuts divers comme la Direction
Générale des Transports Terrestre et Maritimes (DGTTM) et d’autres
démembrements du Ministère des Transports (ONASER) et le Ministère de la sécurité. Ces organes
peuvent être des structures privées chargés d’une concession du service publique à l’établissement
public.

Economie des Transports 24


La tutelle de l’Etat régit par les textes constitutifs de ces organes s’exercent à la fois sur le plan
technique que sur le plan financier.

II. Les critères de choix des investissements d’infrastructures de transport

Une évaluation est un outil qui permet d’identifier et de mesurer les résultats des projets et
programmes en vue de déterminer leur pertinence et leurs cohérences.

1. Gestion privée et publique

Si on se place dans une optique de gestion publique, les investissements sont déterminés en fonction
de leurs rentabilités économiques. Dans cette approche on essaie d’apprécier les conséquences de
l’investissement sur l’ensemble de la collectivité (exemple : réduction du nombre d’accidents,
aménagement du territoire.)

En revanche si on adopte une optique de gestion privée, les investissements sont décidés en
fonction de la rentabilité financière de l’entreprise ou des profits qu’ils engendrent.

L’utilisation des deux critères peut aboutir à des résultats fondamentalement différents. Ainsi, un
même projet peut présenter une rentabilité publique élevée et une rentabilité financière faible ou
inversement.

La rentabilité économique fait intervenir les avantages et les coûts de l’investissement de transport
pour la collectivité. Les coûts comprennent le montant de l’investissement auquel on ajoute les charges
d’exploitation ou frais généraux. Les avantages peuvent être directs (gains de temps, de sécurité, de
confort…) ou indirects (trafic réduit, aménagement du territoire…).

La rentabilité financière a pour objectif d’estimer le rendement de l’investissement. Il est calculé en


tenant compte des éléments suivants :
- le tarif appliqué sur l’infrastructure ;
- les trafics supportés par l’infrastructure ;
- les coûts d’obtention du capital ;
- les autres dépenses entrainées par ce nouvel investissement.

2. Calcul de rentabilité des investissements de transport

Cette approche consiste à retenir plusieurs critères pour guider le choix des investissements de
transport. Après avoir estimé chaque critère on peut réaliser un choix entre les variantes d’un même
projet ou entre des opérations indépendantes sur la base d’une comparaison multicritère.

Tableau de critères d’évaluation d’investissement


Critères Résultats

- développement économique - les effets externes, impact direct et indirects


- aménagement du territoire - effets de structuration
- sécurité - nombre d’accidents
- avantages pour les usagers - gain de temps, confort
- environnement - bilan énergétique (taux de pollution…)
- emploi - nombre d’emplois créés

Economie des Transports 25


a) Bénéfice actualisé socio-économique ou VAN

• Le concept de la VAN

Dans le domaine des investissements publics et en particulier les investissements des transports,
le critère de choix sur lequel se fonde la décision d’investissement est le bénéfice actualisé socio-
économique. Ce critère permet d’apprécier l’intérêt intrinsèque du projet pour la collectivité en ne
tenant compte que, les projets dont le bénéfice actualisé est positif.

La valeur actuelle nette (VAN) est utilisée pour déterminer si un investissement est rentable ou non.
Un investissement rentable est un investissement qui accroît la valeur de l'actif économique, c'est
à dire qui crée de la richesse. En d'autres termes, il faut que les recettes générées par l'investissement
soient supérieures à son coût.

Pour calculer la valeur actuelle nette (VAN), deux types de flux sont donc nécessaires. Le premier
est le montant de l'investissement initial, qui inclut toutes les charges relatives à la réalisation du
projet. C'est le coût de l'investissement. Ensuite, il faut évaluer les cash-flows générés par ce même
investissement pour toutes les périodes futures. Ce sont les recettes. Cette phase est très importante
et souvent difficile. En effet, la conjoncture économique évoluant sans cesse, les cash-flows
peuvent varier de manière importante. Ces cash-flows doivent être actualisés en date 0, permettant
ainsi de connaître la valeur actuelle des flux futurs. Cette actualisation est indispensable car un
FCFA aujourd'hui n’a pas la même valeur qu’un FCFA demain.

Ainsi, la VAN est la différence entre les dépenses d’investissement actualisées et la somme
actualisées des avantages nets générés par le projet durant son exploitation. On parle également
de Valeur Actualisée Nette économique ou VAN économique.

• L’actualisation

L’actualisation constitue l’un des éléments de tout calcul économique inter temporel en
permettant de répondre aux deux questions fondamentales : comment mesurer la rentabilité d’un
investissement et comment choisir entre plusieurs investissements rentables ? Le calcul

Economie des Transports 26


économique est de ce fait un outil privilégié d’aide à la décision pour tous les décideurs, qu’ils
soient privés ou publics.

Le décideur public, qu’il soit national ou régional, ne peut, comme le fait l’investisseur privé, se
limiter à l’examen de la rentabilité purement financière, laquelle exprime l’intérêt d’un projet par la
seule prise en compte des flux financiers en termes de dépenses et recettes. Le décideur public doit
s’attacher à la rentabilité socio-économique qui traduit l’intérêt d’un projet pour la collectivité dans
son ensemble (usagers, puissance publique, contribuables, entreprises concessionnaires,
collectivités territoriales, riverains, …) en faisant intervenir d’autres éléments que les seuls flux
financiers : sécurité, pollutions et nuisances, raréfaction de certains biens naturels tels que ressources
énergétiques ou matières premières, progrès scientifique et technologique escomptés, effet de serre
et changement climatique, comportements des consommateurs et usagers, risques économiques et
sociaux,…

• La notion du taux d'actualisation


Le taux d'actualisation est le coût d'opportunité du capital investi c'est à dire le rendement qu'il serait
possible d'obtenir en investissant ailleurs le même capital.

En d'autres termes, le taux d'actualisation d'un projet est un taux minimal de rentabilité en dessous
duquel un investisseur considère qu'il n'a pas d'intérêt à investir ses capitaux.

Le choix du taux d'actualisation est fonction de plusieurs facteurs au nombre desquels on peut citer :
- le taux du marché (marché financier) ;
- le poids accordé par le promoteur ou les dirigeants de l'entreprise ou les actionnaires aux
revenus futurs du projet ;
- le risque lié au projet : comme le risque traduit la probabilité d'échec d'un projet, il doit être
considérer dans le calcul du taux d'actualisation ;
- la prise en compte du temps : plus le temps de remboursement des capitaux est long, plus ces
capitaux à rembourser sont dépréciés ;
- la nature de l'activité : le taux est élevé pour le projet à rendement rapide.
Ce taux varie d'un pays à l'autre et dans le temps, en fonction des conditions économiques, c'est à
dire des politiques suivies dans les différents pays pour stimuler ou ralentir leurs économies et de
l'appréciation par les marchés financiers, des perspectives d'évolution de ces conditions économiques.

Le tableau ci-après montre par exemple les taux de certains pays en 1992.

France Allemagne USA Japon


Taux du marché 8.5% 8.0% 7.0% 5.0%
Estimation risque inflation 2.5% 4.0% 1.8% 1.7%
Taux minimum en termes réels 6.0% 4.0% 5.2% 3.3%

• Le calcul de la VAN
La mesure de la VAN pour un projet ayant une durée n années de vie, est la suivante :

Economie des Transports 27


𝒏 𝑨𝒕
𝑽𝑨𝑵 = −𝑰 + ∑ 𝒕=𝟏 (𝟏+)𝒕

𝑨𝒕= recette nette annuelle

= taux d’actualisation annuelle

𝐼= coût de l’investissement initial

Exemple : soit les données (en milliards) concernant un investissement de 4 400 FCFA au
taux d’actualisation de 10% :
Années Cash-flows Cash-flows actualisés
1 1 400 1 273
2 1 600 1 322
3 2 000 1 502
4 2 200 1 502

VAN= (1 273+1 322+1 502+1502) - 4 400= 1 199 milliards de FCFA.

Exercice 1 : compléter le tableau ci-dessous

Projet Année Année Année Année Année Année Total


0 1 2 3 4 5
R 15%
Sorties de fonds 700000

Rentrées de 225000 225000 225000 225000 225000 1125000


fonds
Montants
actualisés

Exercice 2 : Soient deux projets d'investissement

 Projet 𝐼1 () : 30 000 € générant une CAF d'exploitation annuelle de 10 000 € pendant


5 ans.
 Projet 𝐼2 (): 40 000 € générant une CAF d'exploitation annuelle de 13 000 € pendant
5 ans.
 Le taux d'actualisation est de 15 %.

1°) Etudier la rentabilité respective de chaque investissement (VAN et TIR).


2°) Examiner la rentabilité d'un 3ème projet théorique 𝐼3 dont le montant C est égal au montant
de B moins l’investissement A. (les CAF valeurs suivent la même logique)
3°) Conclusion (quel projet doit-on choisir) ?

b) Taux de rentabilité interne économique ou TRI économique

• Définition
La valeur plus ou moins obtenue lors du calcul du bénéfice actualisé est une valeur absolue, qui
permettra au décideur public d’obtenir entre plusieurs projets un arbitrage cohérant. Aussi
une autre façon d’aborder l’évaluation économique d’un projet est de considérer la valeur du taux
Economie des Transports 28
d’actualisation pour laquelle BNA est nul. On parle alors du taux de rentabilité interne ou TRI
économique.

Le taux de rentabilité interne (TRI) est le taux d'actualisation i%, tel que la valeur actuelle nette
de la série des revenus annuels dégagés par le projet, est égale à l'investissement initial. C’est le
taux d’actualisation pour lequel la VAN est égale à 0.

La représentation graphique du TRI se présente comme suit :

Le TRI représente la rémunération maximale qui peut être accordée aux ressources engagées dans le
projet. En d’autres termes, c’est le taux maximal auquel il est possible d’emprunter pour financer le
projet. Le TRI a le mérite de présenter la rentabilité d’un investissement en pourcentage et non en
valeur absolue. Ce critère permet non seulement d’apprécier l’intérêt du projet pour la collectivité en
ne retenant que les projets dont le TRI est supérieur au taux d’actualisation mais aussi permet
d’arbitrer plusieurs projets ou variantes en ne retenant que celui dont le TRI est plus élevé.

• Mode de calcul

Le calcul du TRI consiste à rechercher le taux d’actualisation qui annule la VAN. En l’absence de
calculatrice scientifique ou financière, le calcul est laborieux et s’effectue de façon itérative, en
essayant plusieurs taux jusqu’à trouver celui qui annule la VAN.

Dans un premier temps, on prend un taux quelconque et on calcul la VAN qui correspond à ce taux.

Dans un deuxième, on prend un deuxième taux en tenant compte de la VAN obtenue avec le premier
taux :

- si cette VAN est positive, on prend un deuxième taux supérieur au premier de façon à avoir
une VAN négative ;
- si cette VAN est négative, on prend le deuxième taux inférieur au premier de façon à avoir
une VAN positive.

L’objectif est d’arriver à choisir deux taux d’actualisation quelconque dont l’un aura une VAN
positive et l’autre une VAN négative. A partir de ces taux, on estimera la valeur du TRI par
interpolation linéaire.

Exemple : soit le projet d’investissement routier aux caractéristiques suivantes :

Capital investi CF1 CF2 CF3 CF4


Economie des Transports 29
1 000 300 400 400 500

Calculer le TRI du projet.

Nous allons d’abord considérer un taux de 15% et calculer la VAN du projet à ce taux.

VAN (15%) = ([300(1,15)-1+400(1,15)-2+400(1,15)-3+500(1,15)-4] – 1000


= 1 112,2-1000= 112,2 F

VAN (17%) = [300(1,17)-1+400(1,17)-2+400(1,17)-3+500(1,17)-4] – 1000


= 1 065,2-1000= 65,2 1F
La VAN a baissé mais reste toujours positive. Nous allons encore considérer un
troisième taux plus élevé c’est-à-dire 21%.

VAN (21%) = [300(1,21)-1+400(1,21)-2+400(1,21)-3+500(1,17)-4] – 1000

= 980,2-1000= -19,8 F

Taux VAN
15% 112,2
17% 65,2
21% -19,8
Le taux qui annule la VAN est compris au mieux entre 17% et 21%. A partir de là on peut
calculer le TRI par la formule d’interpolation.

( − 0,17) / (0,21 − 0,17) = 65,2 / (19,8 + 65,2)

Economie des Transports 30


= 0,17 + 0,04 𝑥 0,76705882
= 0,20068 = 20,068%

Le résultat du calcul du TRI fait directement par une calculatrice financière donne
= 20,0188%.

• Règle de décision
- Cas d’un seul projet
La décision de retenir ou pas un projet, selon le critère du TRI, découle de la comparaison entre le
TRI en question et un taux de référence qui est en général le taux d’actualisation ou le taux moyen de
rémunération des capitaux investis dans le projet.

Si le TRI ≥ taux d’actualisation, le projet peut être accepté car sa rentabilité moyenne est au moins
égale au coût des ressources qui le financent.

Si le TRI < taux d’actualisation, le projet est à rejeter car non rentable.

- Cas de deux ou plusieurs projets mutuellement exclusifs


Entre deux ou plusieurs projets mutuellement exclusifs, il convient de retenir celui dont le TRI
est le plus élevé.

Exercice

Soient deux projets d’investissement suivants, A et B :

Projet Capital investi CF1 CF2 CF3 CF4


A 200 000 100 000 100 000 100 000 100 000
B 200 000 10 000 50 000 100 000 300 000

Selon le critère du TRI lequel des projets est le plus rentable ?

✓ Le rapport « avantage/coût »

Il est défini comme le quotient des avantages nets après mis en service et le cout des
investissements, avantages et couts étant actualisés à la même date.

∑ +𝑛 𝑡
𝑡=1 (1 + )𝑡
=

(1 + )𝑡

3. Analyse multicritère

La rentabilité économique d’un projet mesurée par un critère unique, relativement à une situation
de référence par son bilan net actualisé coûts-avantages, est un indicateur qui serait à même
d’incorporer en termes quantitatifs et monétaires, tous les effets du projet, internes ou externes au
secteur des transports.

Economie des Transports 31


Toutefois, il pourra apparaître souhaitable, chaque fois que possible, d’évaluer de manière
quantitative (critère cardinal / ou qualitatif), les effets du projet qui n’auront pu être jusque-là pris en
compte dans l’indicateur de rentabilité.
Ainsi, au critère d’évaluation unique, on fait substituer l’analyse multicritère. Cette méthode
d’analyse des projets reprend le principe de la notation traditionnelle des examens sur plusieurs
matières, affectés de coefficient de pondération.

La comparaison comporte trois étapes essentielles :

1ère étape
Définition d’une liste de points de vue ou critères selon lesquels on va comparer les projets. Il faut
sélectionner un nombre limité de critères qui matérialisent tout le système de valeurs retenu pour
apprécier les effets possibles de l’investissement routier. On peut établir la liste des critères, soit
pragmatiquement, soit par une démarche analytique.
2ème étape
Evaluation des performances des projets vis-à-vis de chaque critère. Cette évaluation se fait en deux
étapes :
- d’abord on exprime la performance du projet vis-à-vis du critère. Si c’est un critère
quantitatif, on l’estime directement en unités spécifiques (par exemple le bénéfice
actualisé du projet est exprimé en monnaie). Si c’est un critère qualitatif, on utilise si
possible des indicateurs associés (par exemple le nombre de blessés et de tués est un
indicateurs pour la sécurité), ou des échelons de qualité (très bon, bon,…... très
mauvais).
- ensuite, on classe les projets pour le critère considéré. Cela peut être un classement cardinal :
le meilleur projet aura la note 10 et les autres projets seront notés par rapport à celui-ci, les
notes allant de 1 à 10. Le classement ordinal, plus simple mais moins riche, consiste à
classer les projets de 1 (meilleur projet) à N (derniers des N projets).

3ème étape – notation globale et synthétique des projets


Sur la base d’affectation de coefficient des critères, les projets seront notés et comparés. Notons
que le choix de la pondération est difficile et sujet à controverses. Ce choix doit être approuvé par les
Service de l’Etat responsable de la Planification.

La méthode est intéressante lorsqu’on est en présence :


- des effets des investissements envisagés qui sont surtout non économiques ;
- il y’a une grande incertitude sur l’ampleur des effets des investissements ;
- il y’a un grand nombre de solutions à comparer.

Au-delà de ces méthodes, les investissements en transports passent également par une analyse de
sensibilité, du fait des incertitudes sur les estimations des avantages et coûts. Il s’agit d’étudier les
variations des paramètres (taux d’intérêt, coût de l’investissement diminution des avantages) sur
les différents indicateurs.

Economie des Transports 32


Chapitre V : Tarification des Usagers des Transports

Comparativement aux autres secteurs de l’économie, une des particularités du secteur des transports
est le degré élevé d’intervention et d’implication de l’Etat dans la délivrance des services de
transport. L’intervention de l’Etat peut prendre plusieurs formes à travers notamment :
- la prestation de services de transport (possession de compagnies de transport aérien,
compagnies de chemin de fer, de transport urbain) ;
- la régulation de l’entrée de producteurs de services de transport dans l’industrie des
transports (compagnies aériennes, taxis, etc.) ;
- le contrôle des prix ;
- la subvention des coûts des services de transport ou des infrastructures.

En raison de l’intervention et de l’implication de l’Etat, les prix payés par les consommateurs de
services de transport ne sont pas les prix qu’ils paieraient en cas de libre fonctionnement du marché.

Ainsi, les infrastructures de transports étant pour la plupart gérée par la puissance publique, le prix de
leur usage ne peut pas résulter du jeu d’un marché. C’est un prix administré, qui constitue un
paramètre important de l’égalisation des conditions de la concurrence entre modes de transports.

I. Objectifs de la tarification
D’une manière générale, la taxation poursuit trois types d’objectifs :

1. Fourniture de moyens financiers

La taxe peut être mise en place avec comme objectif premier d’alimenter les budgets publics. Elle vise
ainsi l’efficacité économique ou budgétaire au sens de la maximisation des recettes pour la
collectivité.

2. Redistribution des ressources

Le système des taxations peut poursuivre des objectifs de redistribution des ressources au sein de la
collectivité dans les soucis de justice sociale. Il vise dans ce cas l’amélioration de l’équité distributive
via la mise en place de système de taxes régressives.

3. Orientation du choix des usagers

Enfin, le système de taxation peut avoir comme but d’orienter le choix des usagers de manière à
préserver certaines ressources rares (ressources environnementales par exemple). La taxe est a l o r s
i n c i t a t i v e puisqu’elle vise à donner un signal de long terme sur les coûts
environnementaux (l’objectif n’est plus le rendement fiscal) en faisant payer au pollueur les
nuisances qu’il engendre pour la collectivité. Puisque les sommes payées par l’émetteur des
externalités reflètent les coûts économiques de l’activité (coût privé et coût social), on peut dire que le
système poursuit un objectif d’équité économique (au sens de l’équité allocative où le prix reflète les
coûts).

Economie des Transports 33


II. Les difficultés pratiques de la tarification des infrastructures

Non seulement la tarification des infrastructures donne lieu à toutes sortes de difficultés
pratiques, mais elle est parfois contestée dans son principe même.
Ainsi, dans le secteur routier, la construction des infrastructures est financée principalement par des
fonds publics provenant du budget de l’Etat et des collectivités locales. Or, un des principes de base
de la fiscalité est celui de l’unicité du budget c’est-à-dire que les dépenses constituent un tout qui est
équilibré par l’ensemble des recettes, sans qu’il y ait affectation de recettes spécifiques pour la
couverture de charges particulières.
Pour parler de tarification des infrastructures et d’équilibre des comptes, l’économiste devra
interpréter certaines taxes payées par les usagers (taxe intérieure sur les produits pétroliers, par
exemple) comme des redevances d’infrastructure. Il en résulte des conventions toujours critiquables.
La seule façon de trancher le problème et de donner des bases plus claires aux débats des économistes
serait de créer, pour tous les modes, des comptes d’infrastructure avec des recettes et des dépenses
spécifiques et un budget annexe des routes qui retracerait toutes les dépenses d’infrastructure. Nous
sommes malheureusement encore loin d’une telle pratique, dont la mise en œuvre nécessiterait de
bouleverser bien des habitudes comptables.
Enfin, il ne sert à rien de poser des principes clairs et incontestables de tarification si l’on ne sait pas,
dans la pratique, calculer avec une approximation satisfaisante les différents postes des coûts d’usage
des infrastructures. Par exemple, le coût de congestion routière, c’est-à- dire le coût des pertes
de temps qu’un véhicule impose aux autres utilisateurs de l’infrastructure par son introduction
dans la circulation fait partie du coût social d’utilisation de la route. Il peut être calculé grâce à
l’estimation, à partir d’observations de la circulation, d’une courbe débit-vitesse.
Malheureusement, de faibles variations dans la formule d’estimation choisie peuvent conduire à des
variations importantes du coût de congestion calculé. Il est difficile de construire sur des bases aussi
incertaines une tarification des infrastructures et les transporteurs routiers, au moment de payer leur
redevance, auront beau jeu de contester les bases de leur imposition. Les incertitudes qui existent pour
le coût de congestion routière sont bien plus grandes encore en ce qui concerne les pollutions et les
nuisances, dont on ne sait pas évaluer le coût en termes monétaires.
Toutes les études sur la tarification négligent donc cette catégorie de coûts. Les détracteurs de la
tarification pourront à juste titre faire remarquer qu’il n’y a pas grand sens à équilibrer des comptes
financiers laissant de côté les nuisances et la pollution, qui constituent un coût collectif d’importance
majeure en transport urbain, et non négligeable en transport interurbain.
Ces premières difficultés supposées résolues, il restera à mettre en œuvre pratiquement le système
de tarification, c’est-à-dire à percevoir une redevance sur les utilisateurs de l’infrastructure
tarifiée. Il faut concevoir un système de perception relativement simple pour l’usager, c’est-à-dire
ne multipliant pas à l’extrême les barèmes et ne créant pas de perte de temps dans les files d’attente
aux postes de perception de péage.
Le système doit cependant être suffisamment sophistiqué pour être incitatif. Il doit permettre en
particulier une modulation des tarifs dans le temps et dans l’espace, car la pratique montre que le coût
marginal social, qui inclut les coûts de congestion, varie très rapidement suivant

Economie des Transports 34


l’heure et le lieu. Il faut de plus s’assurer que ce système limite le plus possible les possibilités
de fraude.
Le problème de la mise en place d’un système de tarification de l’infrastructure routière est bien
plus délicat. Le réseau routier étant fortement maillé, il est difficile d’en faire une partition en sections
sur lesquelles un péage serait perçu. Le coût économique d’une telle opération et la gêne procurée aux
usagers seraient sans commune mesure avec l’avantage retiré.
La solution alternative qui est retenue dans nombre de pays consiste à taxer le carburant
consommé par les véhicules routiers. Dans la mesure où la taxation pratiquée à la source n’admet
aucune exception, ce système, d’une grande simplicité pour l’usager, interdit la possibilité de
frauder. Néanmoins, un tel type de tarification de l’infrastructure routière revient à pratiquer la
péréquation totale des tarifs sur le territoire national à la fois dans l’espace et dans le temps, ce qui
limite son caractère incitatif.
Les débats théoriques sur la tarification des infrastructures ne doivent donc pas prétendre définir
un système idéal qui aurait toutes les chances d’être inapplicable dans la pratique. Ils éclaireront plus
utilement les gestionnaires du secteur des transports s’ils sont conçus comme une réflexion d’ensemble
visant seulement à apporter des résultats partiels, à éviter certaines erreurs, à préciser et clarifier
certains débats.

III. Les différents systèmes de tarification envisageables

Parmi tous les systèmes de tarification que l’on peut envisager seuls cinq ont été retenus. L’ordre
dans lequel ils seront examinés correspond à une prise en charge croissante par les usagers de
l’ensemble des charges qu’ils occasionnent au gérant de l’infrastructure.
1- Tarification au péage économique

Le point de vue adopté est celui d’une allocation optimale des ressources sans prise en compte des
effets externes en deçà d’un certain seuil. Rappelons que la notion d’effets externes recouvre des
gains ou des coûts que certains acteurs économiques font supporter à d’autres sans qu’il soit
procédé à des transferts monétaires automatiques, puisque ces effets échappent à une
valorisation par le marché. Ainsi, les automobilistes ne supportent pas généralement la
contrepartie financière des nuisances sonores qu’ils font subir aux riverains des infrastructures. Dans
le domaine des transports, les effets externes retenus sont essentiellement des coûts : coûts de
congestion, d’insécurité, de pollution, de bruit, etc.
Dans certains cas de figures comme le TGV, il existe un péage économique pur (le
supplément) qui, aux heures d’affluence vient s’ajouter au prix du billet. Il s’agit purement et
simplement d’une technique de dissuasion afin de proportionner la demande à une offre saturée.
Dans ce cas, on peut considérer qu’il s’agit aussi d’un mode d’internalisation des externalités du
transport, c’est-à-dire une tarification au coût marginal social, sous la pression de
considérations écologiques.
L’avantage du système de tarification au péage économique tient à ce qu’il permet par
construction de gérer les infrastructures de manière optimale. Prix et quantités sont à
l’optimum pour les usagers et pour le gérant de l’infrastructure.

Malheureusement la mise en application du système est rendue difficile en pratique par la trop
grande modulation spatiale et temporelle des tarifs qu’elle exige. En outre, les recettes

Economie des Transports 35


tarifaires ne couvrent pas toutes les dépenses d’investissement, de gestion, d’entretien et
d’exploitation des infrastructures. Le recours à l’argent du contribuable devient alors une nécessité
pour combler le défi.
2- Tarification au coût marginal social

Le point de vue adopté est celui d’une allocation optimale des ressources avec prise en compte des
effets externes.
Les coûts de congestion et les coûts d’insécurité au niveau de la route étant importants, il est
indispensable d’internaliser les effets externes et donc d’abandonner la tarification au péage
économique pour passer à une tarification au coût marginal social, celui-ci étant défini comme la
somme des coûts marginaux d’usage de l’infrastructure, des coûts de congestion et des coûts
d’insécurité. Pour être tout à fait exact, il faudrait tenir compte également des coûts des nuisances
comme le bruit et la pollution. Mais il est malheureusement encore très difficile dans le pratique de les
valoriser.
Gérer de manière optimale l’infrastructure consiste à faire supporter à chaque usager
l’ensemble des coûts marginaux qu’il occasionne, c’est-à-dire son coût marginal social. Or du seul
point de vue de l’utilisation de l’infrastructure, l’usager ne ressent que le coût moyen de congestion
et d’insécurité (coût monétaire du temps et prime d’assurance contre les accidents). Par
contre, il est à l’origine d’autres coûts, supportés par la collectivité : bruit, pollution, supportés par
les riverains, accidents et congestion supportés par les autres usagers de l’infrastructure. Dans ces
conditions il est nécessaire de prélever sur l’usager d’infrastructure un péage égal à la
différence entre le coût marginal social occasionné et le coût moyen supporté par l’usager. Si la
tarification au coût marginal social demeure conforme à la théorie de l’allocation optimale des
ressources, elle n’assure pas nécessairement l’équilibre budgétaire.
Considérons une entreprise qui produit un bien selon les coûts de production ci-dessous :
Quantité produite Coût total pour Coût moyen Coût marginal (coût
produire cette de la dernière unité
quantité produite)
0 0 - -
1 100 100 100
2 150 75 50
3 180 60 30
4 200 50 20
5 210 42 10
6 216 36 6
Cette entreprise est confrontée à une demande qui, en fonction des quantités échangées,
s’exprime par le tableau suivant :
Quantité 0 1 2 3 4 5 6
échangée
Prix 0 150 60 40 20 5 2

La plus grande satisfaction est d’obtenir par la production et l’échange quatre unités de bien, ce qui
correspond au niveau de production pour lequel le prix de vente est égal au coût marginal.
Supposons en effet que la production est située à un niveau inférieur, par exemple de deux unités, le
coût de production, donc la dépense de la collectivité augmente de trente.

Economie des Transports 36


Quant à la satisfaction des usagers, elle augmente de quarante, puisqu’un consommateur est prêt à
acheter une unité supplémentaire à ce prix. Au total le bilan collectif est positif : la collectivité
perd trente, mais gagne quarante, le gain net est de dix.

De même si la quantité produite est de cinq, on verrait facilement que la collectivité gagne
globalement à une diminution de production ; et finalement le niveau optimal de production est bien
celui pour lequel le coût marginal est égal au prix de vente.

On tire de cet exemple numérique deux enseignements : le premier est que la tarification au coût
marginal a pour objet essentiel d’orienter la demande ; c’est un moyen de guider les
consommateurs vers les choix les meilleurs pour la collectivité. Le deuxième, c’est qu’elle n’assure
pas forcement l’équilibre des recettes et des dépenses ; ainsi pour le niveau d’équilibre trouvé,
les recettes de la firme s’élèvent à 4x20=80 alors que la dépense totale pour produire 4 unités est de
200. Il y’a donc un déficit de gestion. On pourrait bien sûr trouver des situations où il y’a équilibre
entre les recettes et les dépenses, et d’autres où les recettes dépassent les dépenses.

Le principe de la tarification au coût marginal s’applique au cas des transports, mais il doit être adapté
pour tenir compte des spécificités de ce secteur, et en particulier l’existence de biens non marchands,
comme le temps ou la sécurité. Ce résultat est issu directement de la théorie du surplus et il souffre
donc des insuffisances qui lui ont été reconnues. En particulier, la formule ignore les effets
externes de bruit, pollution et conséquences esthétiques, pour lesquelles il est difficile de
présenter de valeurs monétaires. Elle ignore également bien d’autres effets externes comme
l’aménagement du territoire ou les effets macroéconomiques en cas de déséquilibre.

De manière pratique pour déterminer le coût marginal social, il faut calculer la dérivée du coût global
de transport, c’est-à-dire l’augmentation du coût global de transport lorsqu’un usager additionnel
utilise l’infrastructure.

c. Exemple d’application : cas d’un pont à péage

Soit le cas d’un pont à péage pour voitures, d’une longueur négligeable, ce qui, en temps normal
lorsque la circulation est fluide, le coût généralisé de transport pour l’usager est quasiment nul.
Lorsqu’au contraire le pont est saturé, l’attente est longue et le coût généralisé de transport pour
l’usager croit très vite au voisinage de la saturation. Par ailleurs, on suppose que les dépenses de
l’entreprise gestionnaire du pont sont indépendantes du trafic. Comment le péage doit être fixé ?

Pour le savoir, il faut déterminer le coût marginal social. C’est la dérivée du coût global de
transport, c'est-à-dire l’augmentation du coût global de transport lorsque la quantité
transportée augmente d’une unité. Or, le cout global de transport varie avec le trafic ; il est d’abord
à peu près constant et égal aux dépenses du gestionnaire tant qu’on est assez loin de la saturation, puis
il se met à croitre rapidement ; le cout marginal social (CMS) dérivé de la fonction précédente, sera
d’abord presque nul, puis au voisinage de la saturation se mettra à croitre de plus en plus vite. Quel
tarif appliquer alors ?

Cela dépendra du niveau de la demande. Avec une demande faible, le péage sera nul ou presque ;
si la demande est suffisamment forte, le péage devra être tel que le trafic soit pratiquement égal à
la capacité du pont.

Economie des Transports 37


d. Les difficultés de mise en œuvre de la tarification au coût marginal social

La tarification au coût marginal social présente un certain nombre de difficultés de mise en œuvre ;
elle doit être extrêmement variable : elle se modifie dès lors que le coût de production change, surtout,
dès que le temps de transport change.

En ville où les encombrements changent d’heure en heure, le tarif devrait lui aussi se modifier dans les
mêmes conditions pour influer sur le choix des consommateurs. Sa constance en diminuerait
l’efficacité.

De même le tarif devrait différer d’un axe à l’autre : le prix du billet de chemin devrait ne pas être le
même selon le trajet.

Il est évident qu’une telle différenciation n’est pas possible en pratique. On est obligé
d’appliquer des tarifs plus uniformes car, sinon, la dépense nécessaire pour les percevoir serait
prohibitive.

La tarification au coût marginal social peut présenter aussi souvent des aspects qui peuvent être jugés
indésirable sur le plan de l’équité sociale. En effet, les périodes d’encombrement sont celles où
circule une majorité d’usagers moins favorisés. En ville, le matin et soir, ce sont les actifs qui se
rendent à leur travail et ne peuvent évidemment pas modifier leurs horaires : la fonction d’orientation
de la demande dévolue à la taxation ne peut donc être remplie. En effet, l’usager ne répondra pas
aux sollicitations de la tarification parce que la décision de se déplacer ne dépend pas en fait de lui.

Cependant, on peut songer aussi à d’autres moyens que la tarification pour orienter les choix des
usagers. Par exemple, une réglementation restrictive du stationnement en ville est un moyen pour y
restreindre l’usage de l’automobile.

De même, on peut informer, en matière de choix d’itinéraires routiers ; par une signalisation qui peut
être fort efficace comme le montre l’exemple des itinéraires de délestage mis en service à certaines
occasions.

La tarification au cout marginal fournit-elle au gestionnaire les ressources financières qui lui sont
nécessaires ?

A priori, on peut montrer que l’égalité des recettes et des dépenses n’est obtenue que lorsque le coût
de l’infrastructure est proportionnel à sa capacité, ce qui constitue l’expression des rendements
constants pour les infrastructures de transport.

3- Tarification au coût de développement

Ce système de tarification est un premier pas vers une prise en charge complète des dépenses
d’infrastructure par les usagers. Il s’agit en effet d’affecter le péage pur qui est une rente à la
construction de nouvelles infrastructures permettant d’abaisser le niveau de congestion qui est à
l’origine de cette rente. La seconde idée sous-jacente à ce système est la stabilisation des prix dans le
temps. Ceci évite les difficultés pratiques posées par le système des péages économiques qui
fluctuent considérablement dans le temps, car ils doivent s’adapter à une demande variable. La
notion de coût de développement permet donc de prendre en compte en partie les dépenses
d’investissement et d’orienter sur une base stable les choix à long terme des usagers. Le coût de
développement est défini comme étant le rapport de la somme

Economie des Transports 38


actualisée des dépenses totales supplémentaires engendrées par des variations de trafic à la somme
actualisée des variations de trafic. Soit mathématiquement,

∞ ∂Dt
∑t=1 (1 + a)t
𝑃=
∞ ∂Qt
∑ t=1 (1 + a)t

∂Dt représente l’accroissement
l’accroissement du trafic ∂Qt des dépenses totale à l’année t qu’impose
∂Qt représente l’accroissement du trafic prévu pour l’année t

a = représente le taux d’actualisation

Exemple : Soit le tableau suivant donnant l’évolution des dépenses et des trafics :
Calculer l’indicateur de la tarification au cout du développement. Taux d’actualisation : 9%.

Dépenses 15 18 25 33
Trafic 2 5 10 13

La notion de coût de développement peut être rattachée à celle des péages économiques s’il existe
effectivement un péage pur, c’est-à-dire si les périodes pendant lesquelles l’infrastructure
n’est pas saturée sont courtes. Il faut de plus qu’il soit possible d’adapter constamment l’offre à la
demande et donc de créer des unités supplémentaires de production de l’ensemble. Si cette clause est
approximativement remplie dans les cas de production de services de transport ou de production
d’énergie dans les centrales thermiques, elle ne l’est malheureusement pas dans le cas de la
production d’infrastructure de transport.
Le système de tarification au coût de développement possède quelques avantages. Il est facile à mettre
en pratique du fait de la stabilité des prix dans le temps. Il respecte le principe de la théorie de
l’allocation optimale des ressources selon lequel seul l’avenir compte. Le coût de développement est
en effet calculé à partir des seules dépenses futures ainsi que le précise la formule mathématique
précédente. Cependant, ce système n’assure toujours pas l’équilibre budgétaire. D’autre part
l’optimalité tarifaire à chaque instant n’est pas respectée, car la stabilité des tarifs dans le temps
s’oppose à tout équilibre de court terme entre l’offre et la demande d’infrastructure.

De plus la notion de coût de développement est une notion intuitive dont la justification
théorique reste très délicate. Enfin, cette notion est difficile à appliquer dans le cas des
infrastructures de transport du fait de l’existence de très forts coûts fixes et donc d’une absence de
possibilité d’adaptation continue de l’offre à la demande.
4- Tarification à l’équilibre budgétaire

On parlera de tarification à l’équilibre budgétaire si les recettes doivent couvrir l’ensemble des
dépenses engagées pour la construction et l’entretien des infrastructures.

Une tarification de l’usage des infrastructures conforme à la théorie de l’allocation optimale des
ressources fait généralement apparaître un déficit qui reste à la charge du contribuable. Pour éviter
une pression excessive en faveur de la construction de nouvelles infrastructures,

Economie des Transports 39


il est plus satisfaisant de faire payer aux usagers l’ensemble des coûts qu’ils occasionnent. Les
systèmes de tarification à l’équilibre budgétaire constituent des réponses à cette difficulté puisqu’ils
consistent à imputer aux usagers l’ensemble des dépenses d’investissement et des charges courantes
de gestion, d’entretien et d’exploitation. Deux options existent dans la tarification à l’équilibre
budgétaire selon qu’il est fait ou non appel à l’emprunt pour financer l’investissement.

a. Tarification à l’équilibre budgétaire avec possibilité d’emprunter

De façon à exiger du gérant d’infrastructure une gestion stricte, le rôle de l’emprunt est limité au
financement des investissements et donc ne peut servir à combler un déficit de trésorerie. Dans ces
conditions les dépenses d’investissements sont introduites sous la forme des charges d’intérêt sur
le capital emprunté et de l’amortissement financier de l’infrastructure.

b. Tarification à l’équilibre budgétaire sans emprunt

Le montant total des investissements de la période en cours est pris en considération et couvert
par les recettes tarifaires de la même période. Ce système ne convient bien sûr que pour un réseau où
une moyenne s’établit dans le temps entre les dépenses sur les différents axes.
Chacune de ces options possède ses avantages et ses inconvénients. Le système avec possibilité
d’emprunt est plus souple que celui sans emprunt. Il autorise le financement d’investissements très
lourds tout en répartissant sur plusieurs années les charges occasionnées. Les usagers de demain
financent en partie les infrastructures construites à ce jour. Cependant, l’inconvénient majeur de ce
système tient au fait que les dépenses d’investissement sont introduites sur la base du coût
historique qui ne prend pas en compte les variations de coût des infrastructures dues au progrès
technique ou aux changements de prix. Il faudrait introduire un correctif de façon à calculer les
dépenses d’investissement sur la base de la valeur de remplacement. Cela éviterait les
distorsions des conditions de concurrence entre modes. Un tel calcul est malheureusement très
difficile à effectuer.
Quant au système de tarification à l’équilibre budgétaire sans emprunt, il offre l’avantage de
proposer à l’usager des prix très bas lorsque le réseau est sous utilisé, il est alors en effet inutile
d’investir et les seules dépenses à couvrir sont celles de gestion, d’entretien et d’exploitation.
Inversement dans le cas d’une forte expansion du réseau, le système sans emprunt exige de
l’usager des prix très élevés.

Il existe certes un moyen technique pour une tarification routière parfaite, et ce moyen, mis en place à
titre expérimental dans un passé récent à Hongkong, est envisagé aux Pays Bas : des émetteurs placés
dans la chaussée lancent des impulsions qui repèrent le véhicule, et lui appliquent un tarif
déterminé en fonction des caractéristiques du trafic et du principe de tarification choisi. Mais,
outre les atteintes à la liberté individuelle qu’implique ce système, il suppose de lourds équipements
à la fois sur les véhicules et sur les infrastructures ; il est nécessaire que les véhicules extérieurs au
pays soient peu nombreux. Les pays cités sont un lieu privilégié pour ce moyen de tarification, dont
il est difficile de penser qu’il pourra être généralisé.

Economie des Transports 40


Chapitre VI : Les modèles de prévisions de trafic

Les systèmes de transport sont complexes et leurs performances dépendent des décisions prises à
différents niveaux de la société. Les processus d’évaluation, de conception et de gestion de ce
système peuvent être effectués grâce à des modèles.

La modélisation doit permettre d’élaborer et d’évaluer des stratégies qui améliorent le système de
transport. La modélisation du transport est d’autant plus importante que chacun d’entre nous fait
face régulièrement à des problèmes de transport dus notamment aux congestions aux heures de
pointe, aux perturbations occasionnelles des systèmes de transport en commun ou aux nuisances dues
aux trafics.

Selon Paul Dominique, « Un modèle est la représentation formelle, symbolique, d’un objet du monde
réel ou de certains de leurs aspects grâce au développement de divers systèmes symboliques
(langage mathématique, représentation géométrique ou schématique, courbes ou surface, …).

Pourquoi les prévisions de trafic ?

La prévision de trafics sont nécessaires pour :


 Définir les caractéristiques techniques (structures géométriques et structure de la
chaussée) des différents tronçons de route qui doivent être adaptés au volume et à la nature
des circulations attendues et pour déterminer en conséquence le cout des investissements ;
 Estimer le cout individuel de fonctionnement des véhicules dans le cas où ces coûts sont
fonction du trafic, c’est-à-dire en circulation gênée lorsqu’on s’approche de la saturation ;
 Estimer le cout d’entretien et d’exploitation qui sont fonction du volume du trafic
(essentiellement du trafic lourd) ;
 Apprécier la valeur économique des projets routiers et en particulier, effectuer les calculs
économiques.

1. Définition et notion fondamentales

Lorsqu’on étudie l’évolution des trafics, on est amené à définir trois types de trafic :
accroissement du trafic normal, le trafic dérivé et le trafic induit ou généré.

Accroissement du trafic normal : Il se produit même sans aménagement de l’infrastructure.


Autrement c’est l’évolution du trafic potentiel normal, compte tenu de l’évolution de
l’environnement économique et social.

Trafic dérivé : C’est le trafic attiré vers la nouvelle infrastructure aménagée et qui, sans cet
investissement emprunterait d’autres infrastructures ayant la même destination ou d’autres modes
de transports sur le même itinéraire ou encore d’autres moyens de transport sur la même
infrastructure (déplacements de personnes qui se faisaient antérieurement en autocars et qui
s’effectuent maintenant en automobile particulière). Le trafic dérivé se caractérise donc par le fait qu’il
existe indépendamment de l’aménagement envisagé.

Economie des Transports 41


Trafic induit ou généré : il s’agit de trafic de marchandises ou déplacement de personnes qui
s’effectuent grâce aux facilités offertes par l’aménagement nouveau alors qu’il ne s’effectuait pas
auparavant en raison de la mauvaise qualité ou du coût élevé du transport.

Exemple : trafic de produit qui se vendaient localement et transportés maintenant vers des lieux où
ils se vendront à un meilleur prix.

Les trafics dérivé et induit apparaissent dans un délai relativement court après réalisation de
l’aménagement. Le trafic induit est un peu plus long à s’établir.

Trafic national, international

Lors de l’exploitation des données sur les trafics actuels et passés à partir du parc de véhicule et de la
consommation de carburant, il convient de distinguer le trafic intérieur au pays, du trafic
international. Ce dernier ne peut être appréhendé à partir du parc de véhicules. De plus, une différence
du prix du carburant entre pays voisins peut entrainer une distorsion entre la consommation de
carburant d’un pays et le trafic effectif sur son réseau routier.

Spectre d’essieu

Dans chaque pays, il existe une charge maximum autorisée par essieu qui varie de 8 à 13 tonnes.
On remarque cependant dans la plupart des pays en développement, qu’il existe un pourcentage non
négligeable d’essieu en surcharge. Or, les véhicules en surcharges ont pour un effet particulièrement
destructeur sur les chaussées. Il est donc important de procéder à des pesées d’essieu lors des
comptages ou enquête en bord de route.

2. Les problèmes liés au temps

En matière de demande de transport, comme pour toute analyse de demande, les méthodes de
prévision temporelle sont différentes selon le terme de la prévision. On distingue en général trois (3)
termes :

- le court terme (pour fixer les idées : moins de 1 an) ;


- le moyen terme (de 2 à 5 ans environ) ;
- le long terme (au-delà de 5 à 10 ans).
✓ Le court terme

A court terme, le facteur saisonnier est important (on tient compte par exemple des variations de trafic
de voyageurs entre le mois de juillet et le mois de novembre). En revanche, les variables
extérieurs ne se modifient pas beaucoup. Même si elles varient, leurs effets n’ont pas toujours le
temps de se produire complètement.

Les modèles de ce type sont de différentes classes. Les plus importantes sont connues dans la
littérature sous les noms de modèles autorégressifs, moyenne mobile et ARIMA.

Ils permettent d’élaborer les prévisions à court terme concernant les trafics de marchandises exprimés
en tonnes x kilomètres sur l’ensemble du territoire, les trafics de personnes exprimés en voyageurs x
kilomètres et la consommation de carburant automobile à l’échelle nationale.
✓ Le moyen terme

Economie des Transports 42


C’est le domaine d’élection des modèles économétriques. Un modèle est une représentation approchée
d’un aspect de la réalité par un ensemble d’équation mathématique.

On distingue dans un modèle des variables d’entrée, ou indépendantes, ou explicatives, ou


exogènes, et des variables de sortie, ou dépendantes, ou à expliquer, ou endogènes.

Le modèle est la structure de relations mathématiques qui déterminent les variables à expliquer
à partir de variables explicatives.
✓ Le long terme

Il est caractérisé par l’incertitude des relations quantitatives, les coefficients des relations ne sont
plus stables. D’autres variables interviennent ; les interdépendances sont plus nombreuses.
Aussi, la prévision à long terme abandonne les relations mathématiques entre variables à expliquer et
variables explicatives pour utiliser des procédures plus qualitatives, avec l’analyse de système et la
méthode des scénarii.

3. La mise en œuvre des modèles

La mise en œuvre des modèles passe par les étapes suivantes :


✓ La définition des modes

On note que selon les besoins de l’étude, un même type de transport pourra être considéré comme
un seul ou deux modes : par exemple dans le domaine routier, on devra ou non distinguer entre
route ordinaire et voie rapide.
✓ La caractérisation de l’offre

Définition des nœuds et arcs du réseau, des caractéristiques des arcs : coût de transport, de temps, de
capacité, de chaque mode. Eventuellement, lorsque le temps de transport dépend du trafic (cas
routier), forme des relations entre les deux.
✓ La caractérisation de la demande

Cette caractérisation passe par la connaissance des usagers :


- leurs caractéristiques générales : revenu, taille du ménage, localisation ;
- leur position vis-à-vis du transport : possession ou non d’une voiture, réduction ou
tarifications spéciales des transports en commun ;
- les caractéristiques de leurs déplacements : motif (on distingue en général domicile- travail,
affaires, loisirs) ; tranches horaires.

Selon la nature du problème et le cout d’obtention des informations, on ira plus ou moins loin dans
ces distinctions. Les sources d’informations statistiques sur la demande sont les suivantes :

a. Comptage

On peut citer par exemple le comptage de véhicules sur routes, ou le comptage de billets en transport
en commun. Il faut noter que cette source ne fournit pas les trafics origine- destination, qui est
la donnée utile dans les modèles, mais soit le trafic qui passe en un point

Economie des Transports 43


(cas des comptages routiers), soit le trafic sur une partie du trajet emprunté, en ignorant ce qui se
passe avant et après.

b. Enquête sur le terrain

Par exemples enquêtes aux postes de péages autoroutiers, enquêtes cordon autour des villes. Ces
enquêtes sont forcément très rapides et très légères sur la route, elles peuvent être plus approfondies
dans les transports en commun.

c. Enquêtes ménages

En allant enquêter des ménages chez eux sur leurs déplacements, on peut les interroger plus longtemps
et obtenir des renseignements plus complets sur les caractéristiques du ménage (ou de l’individu) et
sur ses déplacements (on pratique souvent le système des carnets de déplacements : l’enquête note
tous ses déplacements dans un carnet qu’il rend à l’enquêteur la semaine suivante). Les enquêtes
conviennent particulièrement à l’analyse des transports urbains. Les renseignements sur les transports
interurbains plus rares, sont moins sûrs.

4. Projection des trafics

Dans une étude des projections de trafic la première tache va consister à définir un certain nombre
de lux de trafic (voyageur, marchandises, origine et destination du trafic).
✓ Prolongation de tendance simple ou corrigé

Ici la méthode consiste, lorsqu’on a de bonnes séries statistiques à extrapoler globalement au


cours des années à venir, l’évolution de trafics observés dans le passé. Si on prend un modèle
de croissance linéaire, le trafic 𝑇𝑛 à l’année est donc : 𝑇𝑛 = 𝑇0 (1 + 𝑉)

L’avantage de la méthode est qu’elle est très simple. L’inconvénient est que les résultats sont
bons à court terme mais ne conviennent pas si des mutations se produisent. Par ailleurs, les prévisions
à long terme risquent d’être faussées par des modifications lentes de condition économique
générale.
✓ Méthode de génération de trafic : le modèle gravitaire

Les principaux modèles sont les modèles de type gravitaires. Le modèle de type gravitaire doit son
nom au fait que sa formule se rapproche de celle du modèle de gravité de Newton. Selon ce modèle,
l’attraction entre 2 corps est égale au produit de la masse des deux corps, divisé
par le carré de la distance qui les sépare.

Economie des Transports 44


Les modèles gravitaires sont particulièrement intéressants pour résoudre des problèmes
concernant les trafics actuels ou de futur proche. Par exemple, évaluer les trafics actuels sur certaines
sections de la route à partir des trafics observés sur d’autres sections ou encore évaluer le trafic de
véhicules légers qu’empruntera une route nouvelle ou encore évaluer le trafic induit par
l’amélioration d’une route existante.

5. Les limites
✓ La structure des modèles : ceux-ci ne sont qu’une schématisation de la réalité et
cette schématisation peut être erronée.
✓ La prévision des variables exogènes : telles que la population et sa localisation, les
revenus, le prix du pétrole, des mesures de politique de transports.
✓ Les incertitudes dans la mesure du trafic : liées à l’imprécision des comptages et
des enquêtes.
✓ Les effets de long terme : l’existence du projet conduit à modifier les conditions
d’environnement prises pour calculer son trafic : l’urbanisation est infléchie, les
implantations industrielles sont modifiées.

Ce qui précède s’explique aux transports de voyageurs. Pour le cas particulier des transports de
marchandises, la modélisation du trafic est beaucoup moins développée et les raisons en sont
multiples :
- manque de données pertinentes ;
- insuffisance de précision des données existantes,
- difficulté de modéliser le comportement de l’entrepreneur en matière de transport de
marchandises.

6. Les autres méthodes

Les modèles de trafic ne sont pas totalement satisfaisants :

Economie des Transports 45


- leur précision n’est pas excellente ;
- ils laissent de côté les conséquences qu’on pourrait appeler de long terme, qui
correspondent aux effets en retour du niveau de trafic sur les modes de vie, la
localisation des activités ;
- ils ne prennent en compte qu’un petit nombre des paramètres parmi ceux auxquels
l’usager fait référence dans ses décisions de transport ;
- ils analysent le transport en soi, sans référence aux activités qu’il sert.

Aussi, de nombreuses autres méthodes se développent pour suppléer à certaines de ces lacunes. On
en citera quelques-unes.
✓ Les programmes d’activités

Ils replacent le transport dans la séquence des activités quotidiennes et étudient les liens entre les
décisions de transport et ces activités.

Dans les études les plus avancées, les individus sont classés en catégorie (relativement) homogène,
ayant chacune un programme d’activité type, avec ses contraintes conduisant à une homogénéité de
comportement en matière de décision de transport. Dans la version la plus élaborée, des
programmes sur un ordinateur permettent d’apprécier les effets d’une modification des conditions
de transport sur l’usage des modes et sur l’organisation des activités quotidiennes.
✓ Les enquêtes d’intention

Elles sont surtout mises en œuvre pour l’étude des choix modaux. Elle consiste à présenter à chaque
enquêté plusieurs possibilités, caractérisées par exemple par les couts, les délais, les conditions de
confort, et à lui demander quel serait son choix. On peut, à partir de là, mettre au point des modèles
comme on le fait à partir des choix constatés réellement à posteriori. La méthode, qui nécessite des
précautions d’emplois particulières pour que les résultats soient fiables, présente l’avantage d’être
moins couteuse et permet de faire des prévisions pour des modes qui n’existent pas encore.
✓ Les modèles d’attitude

Les modèles visent à exploiter l’intérieur du mécanisme de décision que les modèles de trafic traitent
comme une boite noire. Ils se rapprochent des méthodes utilisées en marketing et sont bien adaptés
pour évaluer des actions commerciales ou publicitaires.

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