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Dans ces opérations, comme dans celles soutenues pas d’autres aides régio-
nales, l’aménagement des places publiques et de l’espace public en général
contribue à sa manière à la requalification du milieu urbain, quelque soit son
importance.
J’invite donc les autorités locales à évaluer la situation dans leurs entités res-
pectives et à renforcer, par une politique concertée d’aménagement de l’es-
pace public, l’attractivité et la viabilité de leurs territoires.
La publication qui suit, complétée pour sa réédition, évoque les aspects à
prendre en compte lors de l’aménagement d’un espace public, dans une pers-
pective liée aux préoccupations des gestionnaires et autorités communales.
Centrée sur la problématique particulière des places de ville et de village, elle
contient des recommandations utiles pour bien d’autres aménagements.
André ANTOINE,
Ministre du Logement, des Transports et
du Développement territorial
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L E S P L A C E S P U B L I Q U E S :
Relecture et/ou conseils : Luc MARECHAL, Danielle SARLET, André VERLAINE, Pierre GOSSELAIN
Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, du texte ou
de l’iconographie de cet ouvrage est soumise à l’autorisation écrite de l’éditeur. Toute copie ou reproduction, par
quelque procédé que ce soit, photocopie, microfilm, bande magnétique, disque ou autre, constitue une contrefaçon
passible des peines prévues par la loi.
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en termes de ruptures spatiales que LES PLACES PUBLIQUES, n’est plus à démontrer. La «ville com-
de continuités. Et cette réalité semble UN ENJEU RÉGIONAL... ? pacte» reste par ailleurs une scène pri-
irréversible, même si elle s’accompa- vilégiée pour une affirmation des
gne pour de larges couches de la po- institutions publiques et d’autres
Se pencher, dans un tel contexte, sur
pulation d’acquis incontestables en fonctions à haute charge symbolique.
l’avenir des places publiques peut
matière de mobilité et de conditions La contribution des places publiques
paraître dérisoire au regard de ce qui
de logement. La situation est générale à leur mise en valeur constitue
précède et des grands enjeux d’amé-
en Europe et les causes en sont com- une permanence dans l’histoire des
nagement et de développement
plexes… villes…
d’une région. Et pourtant, trois rai-
Dans ce processus général de sons au moins plaident pour qu’on Enfin, parce que l’attrait d’une région
«désurbanisation» l’espace public s’est s’attarde sur leur sort... se mesure pour partie à la richesse et
dilué, dilaté. Et si la ville et le village à l’agrément de son réseau de villes
Parce qu’il y va tout d’abord du bien-
traditionnels ont pu aménager certains et de villages. La Wallonie possède
être des populations des centres ur-
de leurs espaces, leurs extensions en peut être l’avantage, comparée à
bains, des banlieues, des villages, et
ont vu naître très peu ou même pas d’autres régions d’Europe, de ne pas
qu’il convient de maîtriser les tendan-
du tout. La voirie a progressivement être confrontée aux problèmes des
ces à l’exode vers les périphéries ur-
remplacé la rue, le square, la place grandes concentrations urbaines.
baines et rurales en améliorant les
publique,… dans un envahissement Avec la mobilité accrue des entrepri-
conditions de vie dans les périmètres
quasi généralisé du domaine public ses, les villes moyennes et petites ont
densément urbanisés. L’aménage-
par la voiture. Cette évolution s’est amélioré ces dernières décennies leur
ment de l’espace public peut y con-
accompagnée d’un développement position concurrentielle vis-à-vis des
tribuer dans une certaine mesure.
considérable du réseau de voiries, métropoles et des grandes villes euro-
avec comme conséquence des charges Ensuite parce que la ville «tradition- péennes. Au sein de ce mouvement
croissantes pour les collectivités loca- nelle» a fait ses preuves en matière d’émancipation, les places publi-
les et les autorités de tutelle (extension d’attractivité pour certaines activités ques peuvent être l’expression d’une
et entretien des réseaux, élargisse- économiques. Dans une société qui a urbanité qui s’affirme. Pour se ma-
ments de voirie, aménagements de connu ces cinquante dernières années térialiser localement, cette évolution
sécurité, épuration des eaux usées,…). une forte poussée du secteur tertiaire, devra se traduire au travers de pro-
Les coûts liés à la désurbanisation se- l’attirance exercée par les centres de grammes et d’opérations prenant en
ront au cœur des préoccupations pour ville et leurs espaces sur certaines ac- compte à la fois la réalité du terrain
les décennies à venir. tivités de service et commerciales et les désirs d’une communauté.
❚ Mons (Grand Place). Les places publiques contribuent depuis toujours à l’affirmation de l’architecture civile et religieuse. Photo G. Focant © MRW
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mesure, des loyers. D’où l’inquié-
tude des pouvoirs publics, à tous Nimègues (Pays-Bas). Le piétonnier central de la ville de Nimègues, un des plus importants
niveaux, pour un phénomène dont des Pays-Bas avec celui de la ville d’Arnhem, toute proche, abrite toutes les fonctions dont se
la maîtrise passera par des mesu- compose un centre urbain. Habitat, commerces, services privés et publics, université, lieux
res décrétales – fiscales notam- culturels et de culte, … y cohabitent dans un espace essentiellement ouvert aux piétons,
ment – foncières et partenariales, le cyclistes et transports publics. © Photo J.-M. Gillon.
marché belge du logement étant largement dominé par le ciale et culturelle, espaces propices à la diffusion rapide de
secteur privé. l’information et à l’amélioration du niveau de qualité des
Si le maintien en ville des populations est déterminante, la services urbains.
vitalité des centres urbains se mesure avant tout à la den- Parmi les secteurs d’activité qui animent la vie urbaine, le
sité de leurs activités et services, regroupement qui devient, tourisme urbain a pris, depuis une décennie ou deux, un
à partir d’un certain seuil, attractif pour les entreprises du essor non négligeable. Tourisme culturel, de loisirs, d’af-
secteur productif adaptées au milieu urbain. faires,… l’impact sur une économie locale peut être signifi-
Mais les centres-villes, en tant que lieux d’échanges, ne se catif, du moins pour les entités dont le rayonnement a at-
limitent pas à l’espace «marchand»… Par les conditions teint un certain niveau, et nécessite, pour son développe-
de proximité qu’ils proposent et les populations qu’ils abri- ment, un cadre de vie urbain adapté à ses besoins.
tent, ils deviennent des aires de concentration de la vie so- Dans l’éventail des mesures susceptibles d’assurer la sau-
vegarde des villes, l’aménagement de l’espace public peut
jouer un rôle non négligeable.
Certaines villes européennes en ont même fait un vecteur
important de leur politique de renouvellement urbain au
travers d’opérations dont l’ampleur dépasse largement le
cadre de l’aménagement d’une place publique.
Aménagement de piétonniers centraux et d’équipements
de quartier, rééquilibrage des modes de déplacement ur-
bains, mise en lumière de centres anciens, … autant d’opé-
rations pouvant accroître la viabilité et le rayonnement des
centres urbains… A condition pour ceux-ci de disposer,
pour leur fonctionnement au quotidien, d’un «réservoir»
de population et de logements suffisant dans un périmètre
assez restreint. Ce qui fait dire à certains urbanistes, hol-
❚
landais notamment, que la bataille pour la survie des cen-
Marche-en-Famenne (rue des Brasseurs) tres urbains se jouera dans leurs banlieues toutes proches,
Le centre de Marche-en-Famenne qui regroupe en un ensemble là où une densification de l’habitat est encore possible…
vivant patrimoine monumental, habitat, commerces et services, Le Schéma de développement de l’espace régional ne dit
constitue un repère et un pôle d’attractivité dans la région. rien d’autre quand il prône le recentrage, la densification
© Photo J.-M. Gillon
et la mixité des fonctions dans les territoires urbanisés.
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Reconstruire
la ville
sur la ville…
❚ Mons (Quartier Messine). Fortement diversifiée au niveau des espaces et des loge-
ments qu’elle propose, cette opération d’assainissement et de rénovation urbaine de la
fin des années ’80 s’insère en plein centre ancien, entre une église existante et un ancien
abattoir reconverti en salle d’exposition d’art contemporain. Photo G. Focant © MRW.
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❚ Lyon (Place des terreaux). Hôtel de ville et Musée des Beaux-Arts,... les édifices publics organisent l’espace urbain. © Photo J.-M. Gillon.
LA GESTION DE L’ESPACE t la localisation par rapport à cette nes parties de ville, pourtant den-
PUBLIC COMMUNAL structure spatiale des bâtiments sément bâties, étant dépourvues
publics les plus fréquentés (gares, du moindre équipement.
L’ÉTAT DE LA QUESTION bâtiments administratifs, postes,
théâtres, musées,…), la vie publi- t les déficiences au niveau des prin-
Lieu de toutes les mobilités, des usa- que se limitant de nos jours de cipales liaisons piétonnes, qu’il
ges publics et de la communication moins en moins aux espaces à l’air s’agisse de manquements structu-
informelle, l’espace public constitue libre. Certains inventaires vont rels (largeur, état,…) ou de discon-
le fondement de la ville et du vil- jusqu’à y inclure services et com- tinuités dans les cheminements
lage, l’espace qui matérialise la con- merces privés accessibles à tous. (traversées de voirie, franchisse-
tinuité de vie d’une collectivité et qui ments d’obstacles naturels ou
t pour les localités d’une certaine infrastructurels tels que cours
s’inscrit pour cela, davantage que les taille ou les cas ponctuels comple-
édifices, dans la longue durée… d’eau, voies ferrées, etc…)
xes, une analyse sociologique per-
Pour intervenir en connaissance de mettant de mieux comprendre t le niveau de satisfaction ou d’in-
cause sur l’espace public, même au comment les usagers, visiteurs ou satisfaction des usagers et rési-
travers d’une action ponctuelle, il est résidents, vivent et utilisent l’es- dents face à l’espace public.
utile d’avoir une vue globale de la si- pace public (fréquentation, origine
tuation pour mieux cerner la portée géographique des usagers, per- Il est clair que de telles investiga-
et le sens d’une opération. ception par le citoyen de la sécu- tions sont à moduler en fonction de
rité, de la propreté, des aspects la nature et de l’importance des lo-
Cet inventaire fonctionnel et quali- positifs et dérangeants,…) calités, une communauté rurale ne
tatif devrait comprendre : posant pas les mêmes problèmes
Cet outil doit permettre d’évaluer au qu’une agglomération urbaine de
t un relevé cartographique de l’en- mieux «l’état de santé» de l’espace
semble des espaces marquants taille importante ou moyenne.
public d’une collectivité, du moins
(places publiques, artères haute- dans ses composantes les plus signi-
ment symboliques, squares, parcs ficatives. Il permet en tout cas de dé-
et jardins publics, aires de jeux,…) celer : LE PROJET URBAIN OU VILLAGEOIS
accompagné d’une analyse por-
tant sur leur état physique, leur t les lieux de concentration de la vie EN MATIÈRE D’ESPACE PUBLIC
fonction, leur morphologie et publique, espaces et édifices con-
Il est important tout d’abord de dire,
éventuellement leur histoire. fondus, et d’en tirer éventuelle-
à la suite de l’inventaire, qu’un pro-
ment des enseignements.
t les axes piétonniers structurants jet global d’aménagement de l’espace
reliant ces espaces, c’est-à-dire les t les grands déséquilibres dans la public peut se décliner isolément ou
itinéraires majoritairement em- répartition spatiale et fonction- de concert avec d’autres programmes
pruntés par les piétons. nelle des espaces publics, certai- de développement urbain et rural.
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L’expérience lyonnaise….
❚ Lyon (ligne de tram n° 1 - Boulevard Vivier). © Photo J.-M. Gillon. ❚ Lyon (Place de la République). © J. Leone/GD. Lyon
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❚ Lyon (Montée de la Grande Côte). Aménagement d’un intérieur d’îlot en jardin public dans
un quartier populaire surplombant la ville ancienne. © Photo J.-M. Gillon.
❚ Arlon (Quartier Saint-Donat). Opération de rénovation urbaine ❚Marche-en-Famenne (Place aux foires). Place de quartier
respectueuse du cadre bâti ancien et mise en zone résidentielle de légèrement à l’écart du cœur de la ville, élément d’un important
l’espace public. © Photo J.-M. Gillon. programme piétonnier. © Photo J.-M. Gillon.
L’aménagement
de l’espace public
ne se limite pas
à des opérations ❚ Lavaux-Sainte-Anne (Place communale). Place de village épousant la simplicité d’une
de prestige... localité régie par le règlement général sur les bâtisses en site rural. © Photo J.-P. Van Reybroeck.
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LA LECTURE D’UN LIEU OU de matériaux de sol dont la tona- connaissance du terrain que peuvent
LA REALITE D’UN ESPACE lité ne s’harmoniserait pas avec avoir les gestionnaires communaux
l’environnement bâti, s’avère précieuse à cet égard pour
Les projets de places publiques con- mener à bien un projet.
cernent souvent des lieux existants, t la qualité sensorielle des lieux, la
témoins d’une histoire locale et d’une froideur d’un espace pouvant Mais une bonne procédure de concer-
évolution urbanistique. dans certains cas se corriger par tation ne remplacera jamais totale-
un judicieux programme de plan- ment le savoir-faire d’un auteur de
Pour saisir cette complexité, un tations. projet. La Ville de Lyon, exemplaire
auteur de projet devra s’informer, en matière d’aménagement de ses
questionner et avoir cette disponibi- Mais regarder un espace, c’est aussi
espaces publics, l’a bien compris en
lité du regard qui caractérise les in- essayer de comprendre comment
établissant une claire limite entre con-
telligences sensibles. d’autres personnes peuvent l’appré-
certation du public et élaboration des
hender. Des recherches, menées pour
Il se devra donc d’être attentif à : projets,... et en choisissant des auteurs
l’essentiel aux Etats-Unis et en
de projet confirmés. Cette manière de
t la morphologie générale du lieu Grande-Bretagne, ont montré la com-
procéder, qui limite l’intervention du
et si nécessaire son histoire, un es- plexité de la perception que peuvent
public à l’énoncé d’objectifs com-
pace ordonné du 18ème ou 19ème siè- avoir d’un lieu les usagers de l’espace
muns et d’usages à respecter ou à
cle appelant d’autres réponses public. Etudes portant sur le compor-
générer, permet d’éviter qu’un projet
qu’un lieu dont la géométrie in- tement, les images mentales, les re-
ne s’enlise dans une accumulation de
formelle évoque une lointaine si- pères, les préférences,... le matériel
désirs individuels rendant impossible
tuation médiévale, d’étude accumulé est important et
une vision globale des lieux ou un
éclectique.
apport significatif des professionnels
t la position des rues attenantes et
Il n’est pas courant, dans le cadre d’un de l’espace.
les perspectives qu’elles génèrent,
afin de ne pas contrarier ces der- aménagement, de pouvoir procéder
nières par un aménagement à de telles enquêtes auprès de la po-
pulation. La traditionnelle procédure LA VALEUR D’USAGE OU LA
inapproprié,
de concertation peut y pallier dans DEMANDE DES UTILISATEURS
t l’étendue de l’espace et la hauteur une certaine mesure, surtout si elle
du bâti qui le borde, un espace s’accompagne d’un questionnaire Usage et perception d’un lieu sont des
trop distendu pouvant nécessiter portant sur les points sensibles de notions intimement liées.
une plus forte structuration de l’aménagement et les usages consa-
l’espace ou même un complément En effet, un usager aura d’un endroit
crés. Des méthodes pour appréhen-
de bâti sur la place, une image positive si celui-ci l’aide à
der la participation de la population
«vivre». C’est vrai pour son logement,
existent et certains bureaux d’étude
t la présence d’édifices marquants son lieu de travail, de loisirs, mais
en ont fait une spécialité. De telles
dont le positionnement pourrait aussi dans une certaine mesure pour
initiatives sont à encourager. Si elles
influer sur la composition archi- sa rue, son quartier, sa ville....
rendent les procédures plus longues,
tecturale de l’espace,
et quelques fois conflictuelles, elles La place publique rejoint donc cette
t la dominante chromatique du permettent d’éviter nombre de ma- sphère de «l’habiter» chère au philo-
bâti, pour éviter la mise en oeuvre lentendus et de projets inadaptés. La sophe allemand Heidegger, ensemble
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L E S P L A C E S P U B L I Q U E S :
❚ Namur (Place du Marché aux Légumes). Commerces, cafés et restaurants assurent l’accueil
et le contrôle social de la place. Photo G. Focant © MRW.
❚ Liège (Place St-Paul). Un espace intime et bien connu des Liégeois, en plein cœur de la
ville. Photo G. Focant © MRW.
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❚ Cologne (Place du Dôme). La vaste esplanade devant la ❚ Rome (Piazza della Rotonda). Un espace fort fréquenté et
cathédrale attire jeunes et visiteurs. © Photo J.-M. Gillon. apprécié des Romains et des visiteurs, à l’écart des bruits de la Ville
éternelle. © Photo J.-M. Gillon.
Voitures et places
publiques font
rarement bon ❚ Louvain-la-Neuve (Place des sciences). L’absence de voitures à l’intérieur du centre urbain
ménage... favorise contacts et rencontres. Photo G. Focant © MRW.
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L E S P L A C E S P U B L I Q U E S :
❚ Le Roeulx (Place communale). La mise en «zone 30» de l’ensemble de la place réduit la vitesse de circulation des véhicules et rend pour ainsi
dire inutile les passages pour piétons. Photo F. Dor © MRW.
t une claire répartition de l’espace t une réduction sensible des nui- t la maîtrise de la vitesse de circu-
dévolu au piéton et à la voiture. sances automobiles (bruit, odeur, lation des véhicules. La configu-
Certains aménagements donnent, encombrement...), ce qui suppose ration sinueuse des rues menant
par l’emploi d’un matériau uni- une suppression totale ou partielle à une place peut avoir un effet ré-
que et continu, l’impression que du stationnement en surface. Bien ducteur naturel sur la vitesse des
le piéton y est roi. Or, les places des aménagements échouent sur véhicules, mais ces cas sont rares.
publiques sont parfois longées par ce point, pourtant essentiel, sous La réduction de la largeur de l’es-
des flux de circulation dont l’im- la pression des riverains. Une ré- pace réservé à la voirie reste un
portance dépasse le caractère lo- vision locale du plan de circula- moyen sûr pour y parvenir, la
cal des lieux. Divers dispositifs tion peut apporter une solution, mise en plateau générale du site
adaptés à la nature des projets comme à Philippeville où le sta- également. Un autre moyen,
peuvent clarifier de telles situa- tionnement a été fortement réduit cumulable avec les moyens préci-
tions : mise en œuvre de bordures, place d’Armes grâce à une mise en tés, est la mise en «zone 30» de
éventuellement surbaissées, ou de sens unique des rues attenantes, l’espace tel que le préconisent le
larges bandes de matériaux nobles ce qui a permis d’y loger le station- Ministère de la communication et
disposés à fleur de voirie, usage nement excédentaire. Aménager à l’Institut belge pour la sécurité
d’un revêtement spécifique pour grands frais d’argent public une routière. Cette mesure permet, en
la voirie, disposition en ligne place pour l’affecter exclusive- outre, la suppression des passages
d’éléments physiques séparant le ment ou presque à la voiture a peu pour piétons, peu empruntés sur
piéton du domaine routier (arbres, de sens quand on mesure l’aspi- les places publiques. Les commu-
bancs, poubelles...). Les moyens ration du citoyen à se réap- nes de Mons, Gembloux,
sont nombreux, peuvent se com- proprier une part de l’espace ur- Gerpinnes, Fontaine-l’Evêque,
biner mais doivent s’intégrer dans bain ou villageois. En optant pour Antoing et Le Roeulx ont adopté
une vision claire et sans ambiguïté un franc dégagement de ses espa- ce système.
des lieux. ces les plus significatifs, une Com-
mune fera preuve de civilité et de
précaution face à un parc automo-
bile qui n’a pas achevé son expan-
sion.
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❚ Liège (Place Saint-Lambert). Photo G. Focant © MRW. ❚ Andenne (Place des Tilleuls). © Photo J.-M. Gillon.
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LA COMMODITÉ
D’UN AMÉNAGEMENT
Toute création est censée convenir à
❚
l’usage qui en est attendu, qu’il
s’agisse d’un objet utilitaire, d’un Namur (Place de l’Ange). Le marché hebdomadaire reste une tradition solidement ancrée
ouvrage d’art, d’un édifice ou a for- dans la vie des villes wallonnes. © Photo J.-M. Gillon.
tiori d’une place publique.
L’usage des places publiques s’est
modifié au fil des siècles mais pas for- D’autres facteurs, plus spécifiques, ne nécessitent, sauf contrainte to-
cément simplifié. Marchés, foires, fes- conditionnent le confort des usagers pographique majeure, aucune
tivités culturelles et autres, les activi- d’une place publique : modification de leur relief. Y créer,
tés qui s’y déroulent sont de natures pour le seul plaisir des yeux, des
t la planéité générale des lieux,
diverses et parfois inattendues. différences de niveaux artificielles
dans la mesure où le piéton doit
peut porter atteinte à la libre cir-
Il importe donc, pour être utile à la pouvoir évoluer à sa guise dans
culation des piétons et des per-
collectivité, qu’une place publique ce qui constitue pour lui un des
sonnes à mobilité réduite, deve-
reste un espace largement dégagé, rares espaces de liberté dans la
nir source de chutes ou entraver
malgré les équipements nécessaires à ville. Les places publiques s’ac-
l’organisation d’activités occa-
son usage et son agrément. commodent assez bien de légères
sionnelles.
dénivellations naturelles. Elles
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Dégagement
et planéité des lieux
conditionnent
le confort
des usagers...
❚ Gand (Kouter). Ancienne place d’armes accoutumée aux parades militaires, le Kouter est
actuellement le siège d’un marché aux fleurs quotidien et de concerts dominicaux (kiosque
1868). © Photo J.-M. Gillon.
❚ Bastogne (Place Saint-Pierre). Confort et qualité des revêtements ❚ Lyon (Place des Célestins). Malgré la circulation locale présente
en pierre naturelle caractérisent les aménagements piétonniers de la sur trois de ses côtés, cette place bordée de plantations offre un es-
principale artère commerciale de la ville. © PHoto J.-M. Gillon. pace intime et chaleureux en plein cœur de la ville, face au Théâtre
des Célestins. © Photo J.-M. Gillon.
❚ Thionville (Place du Marché). Calme et planéité générale des lieux font de cette petite place
historique un lieu de «séjour» apprécié de la population. © Photo J.-M. Gillon.
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S’asseoir en ville...
❚
être confortable et répondre
aux règles ergonomiques les Anvers (Place verte). © Photo J.-M. Gillon.
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❚ Avignon (Palais des Papes). L’inclinaison assez contraignante du site n’a donné lieu à aucune modification vraiment significative du relief du
sol. © Photo J.-M. Gillon.
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❚ Charleroi (Place Charles II). L’ordonnancement concentrique de l’espace s’inscrit dans la forme polygonale de la place. © Photo J.-M. Gillon.
dégagement d’une place, sa planéité 1. LE RESPECT DE «L’ESPRIT tions, bancs publics...). Agir à contre-
et un clair arbitrage de l’espace entre 1. DES LIEUX» sens de cette règle de base mène la
le piéton et la voiture induisent déjà plupart du temps à des aberrations...
une première configuration des lieux
1. ET L’ORDONNANCEMENT
1. DES ÉLÉMENTS DANS L’ESPACE Les places de forme irrégulière se ren-
et donc la base d’une «esthétique».
contrent couramment, en particulier
Ceci dit, l’harmonie d’un aménage- La lecture des lieux, évoquée plus dans les villes ou les villages qui ont
ment ne s’obtient pas par simple ob- haut, contribue largement à la formu- gardé des traces de leur organisation
servance de quelques règles de bon lation de projets adaptés aux caracté- médiévale.
usage. Une place publique sécuri- ristiques formelles d’un espace. Une
Introduire dans de tels espaces des
sante et adaptée à un usage diversi- mauvaise compréhension du con-
dispositifs strictement géométriques,
fié n’en devient pas pour autant texte bâti mène inévitablement à des
comme un quadrillage de sol régu-
belle... solutions malheureuses.
lier par exemple, perturbe la nature
Difficile à première vue, vu la diver- Composer un espace public, c’est spontanée des lieux.
sité des situations, de «codifier» de mettre en relation les éléments d’un
manière expéditive les conditions qui programme en les disposant de ma-
mènent à cet état d’harmonie. Ce der- nière mûrement sentie et réfléchie par
nier dépendra largement de la prise rapport au contexte bâti.
en compte conjointe des quatre fac-
Dans cette mise en relation, la forme
teurs suivants :
de la place, c’est-à-dire l’espace déli-
mité par les fronts de bâtisse qui le
bordent, joue un rôle primordial.
C’est elle qui doit guider, dans un
souci de dialogue et de saine hiérar-
chie des choses, les lignes de forces
du projet et la disposition dans l’es-
pace de ses composantes les plus per-
ceptibles (voiries, luminaires, planta-
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2. LA RÉDUCTION VOLONTAIRE
2. DES COMPOSANTES DU PROJET
Au Moyen Age la place publique se
présentait comme un espace utilitaire,
visuellement neutre et dégagé de
toute entrave physique hormis le
point d’eau vital pour la vie de la
communauté, généralement disposé
à un endroit peu encombrant. La Re-
naissance et l’époque classique y in-
troduiront l’architecture à pro-
gramme, la statuaire et l’art des fon-
taines, l’époque industrielle les trot-
toirs et les premiers équipements ur-
bains (réverbères, vespasiennes,
bancs publics, bornes postales,...). ❚ Thionville (Place de l’église). La sobriété et la tonalité générale des matériaux de sol s’har-
Mais la place publique restait malgré monisent avec les enduits de façade de l’architecture domestique de la place.
tout un espace où le dégagement © Photo J.-M. Gillon.
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Ordonnancement
et traitement
chromatique
favorisent
la beauté ❚ Liège (Place Saint-Lambert). Le choix chromatique des matériaux pierreux de la place
des lieux... s’aligne sur la tonalité générale du Palais des Princes-Evêques. Photo G. Focant © MRW.
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3. LE TRAITEMENT CHROMATIQUE
3. DE L’ESPACE
L’architecture qui ceinture les places
publiques est très rarement homo-
gène. La plupart des places actuelles
sont bordées d’édifices dont l’archi-
tecture et la tonalité sont diversifiées.
A cette variété formelle et chromati-
que du bâti s’ajoutent les équipe-
ments de la place, les terrasses de
café, les auvents, les enseignes... le
tout formant un univers visuel quel-
que fois fort chahuté. ❚ Havelange (Place des Tilleuls). Les parements en pierre de grès de plusieurs édifices ont
guidé le choix chromatique du revêtement de sol. Photo F. Dor © MRW.
Il est donc conseillé, lors d’un amé-
nagement de place, d’opter pour des
matériaux de sol peu contrastés et
d’une tonalité neutre, l’ensemble des
éléments précités et la présence hu-
maine suffisant largement à l’anima-
tion visuelle des lieux.
4. LA PRÉSENCE DE FACTEURS
4. SUSCEPTIBLES D’ACCROÎTRE
4. LA QUALITÉ ÉMOTIONNELLE
4. D’UN ESPACE
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Villes et lumières…
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Conclusion nnn
BIBLIOGRAPHIE
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Direction générale de l’aménagement du territoire, du logement et du patrimoine - MRW
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