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Introduction
Dans sa vocation originelle, l’action de l’Etat était limitée, de façon générale, aux actions de
puissance publique. Toute intervention, de sa part dans l’économie, du moins directement en tant
qu’acteur, était perçue comme une intrusion qui, selon les propos, de Jean CATHELINEAU,
« n’aurait pu, en conséquence, que provoquer des distorsions »1. Cette idée résulte de la croyance
en des mécanismes naturels et harmonieux de l'économie, dans « les lois du marché » que l'Etat et
les collectivités publiques ne devaient pas venir troubler. Toutefois, ce paradigme est, de nos jours,
inversé. L’idée d’une « main invisible » qui régit la vie économique n’a malheureusement pas
résisté aux vicissitudes du temps suite au démenti apporté par la crise économique de 1929. Depuis
lors, l’intervention de l’Etat dans le circuit économique a non seulement été admise, mais encore
elle se fait par l’intermédiaire de plusieurs instruments parmi lesquels les entités du secteur
parapublic.
Le secteur parapublic en question n’est pas défini par la « loi ». Mais il peut être considéré
comme la sphère qui s’intercale entre la sphère publique et celle privée. Autrement dit, le secteur
parapublic est à mi-chemin entre les activités publiques qui sont à la charge des personnes
publiques et les activités privées gérées par les privées. Parce que, d’une part, il regroupe des entités
qui sont des personnes publiques ou appartenant à l’Etat, et, d’autre part, les entités formant le
secteur parapublic sont fondamentalement caractérisées par la nature privée de leur activité
similaire à celle des personnes privées.
Par ailleurs, il faut signaler que le cadre juridique du secteur parapublic sénégalais n’a pas été
statique, il a plutôt été question, pour le législateur national, de se conformer à l’ère du temps avec
plusieurs réformes qui se sont succédées dans le temps. Sentant la nécessité pour l’Etat d’avoir une
1 Jean CATHELINEAU, FINANCES PUBLIQUES, Politique budgétaire et droit financier, Paris, LGDJ, 1976, p.11.
1
double casquette dès le début des indépendances, le Sénégal a aussitôt adopté la loi n° 66-27 du 2
mai 1966 relative aux établissements publics, aux sociétés d’économie mixte et aux personnes
morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique. Par la suite, cinq
(05) lois seront successivement adoptées pour servir le cadre juridique. D’abord, la loi n° 72-48
du 12 juin 1972 ; ensuite la loi n° 77-89 du 10 août 1977 ; en troisième lieu la loi n° 87-19 du 03
août 1987 ; en quatrième lieu, la loi n°90-07 du 26 juin 1990 ; et tout récemment la loi
d’orientation 2022-08 du 19 avril 2022.
La nouvelle architecture du secteur parapublic intègre des personnes publiques mais dont
certaines n’intervenant pas dans le secteur marchand et des personnes privées. Les premières sont
les organismes publics (A) et les secondes, les sociétés publiques (B).
- Les établissements publics sont des personnes publiques investies d’une mission de
service public. Mais ils ne forment pas un bloc monolithique, ils se subdivisent plutôt
en deux catégories selon qu’ils ont vocation à intervenir dans le secteur marchand pour
réaliser des profits ou non. A ce titre, on distingue les établissements publics
administratifs (EPA) des établissements publics à caractère industriel et
commercial (EPIC). Les EPA regroupent tous les types d’établissement public à
2
caractère non marchand comme les établissements publics à caractère scientifique,
culturel et professionnel (Université Cheikh Anta Diop…) les EP hospitaliers (Hôpital
principal de Dakar, Centre Hospitalier National Universitaire de Fann…)2. Ils ont un
rôle purement administratif. A la différence, les EPIC sont investis d’une mission de
service public présentant un caractère marchand. Ils exercent des activités économiques
lucratives et peuvent intervenir notamment en matière commerciale, industrielle,
culturelle. C’est le cas des Manufactures sénégalaises des Arts décoratifs (MSAD) de
Thiès ou du Théâtre national Daniel SORANO (TNDS).
Les sociétés publiques sont les composantes naturelles du secteur parapublic. En effet, le
parapublic est par essence un secteur d’entités créées par des apports et dont les capitaux
appartiennent au secteur public et au secteur privé, c’est-à-dire d’entreprises publiques. Or, ni les
établissements publics ni les agences ne constituent de structures créées par actions.
2
Article 5 de la loi d’orientation 2022-08 du 11 avril 2022 relative au secteur parapublic, au suivi du portefeuille de
l’Etat et au contrôle des personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique.
3
Loi d’orientation n° 2009-20 du 4 mai 2009 sur les agences d’exécution.
3
Les sociétés publiques sont composées de sociétés nationales (SN) et de sociétés à
participation publique majoritaire (SPPM).
Mais les sociétés publiques sont avant tout des sociétés commerciales de capitaux au sens de
l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales de l’OHADA. Il s’agit donc d’entités créées au
moyen d’un contrat par lequel « deux ou plusieurs personnes décident d’affecter à une activité des
biens en numéraire ou en nature, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie
qui pourra en résulter »4.
La société nationale est définie par la loi d’orientation sur le secteur parapublic comme des
« sociétés par actions de droit privé dont le capital est intégralement souscrit par l’Etat, et, le cas
échéant, par d’autres personnes morales de droit public »5. Quant à la SPPM, elle est également
considérée comme une société « par actions de droit privé dans lesquelles une ou plusieurs
personnes morales de droit public possèdent directement ou indirectement plus de 50% du capital
social »6. A la lecture de ces définitions, il ressort des convergences et des divergences entre les
deux sociétés publiques. Dans le premier cas, la SN et la SPPM sont toutes des sociétés anonymes
conformément à l’AUSCGIE puisque les associés reçoivent, en contrepartie de leurs apports lors
de la création des sociétés, des titres sociaux dénommés « actions ». La différence fondamentale à
noter est que la SN est une SA à 100% public, alors que dans la SPPM l’Etat est juste majoritaire.
A titre d’exemple, la Poste, la SN HLM, les Chemins de fer du Sénégal (CFS), la RTS sont des
sociétés nationales ; les sociétés Dakar Dem Dik, les Grands Trains du Sénégal (GTS) sont des
SPPM.
La gouvernance des entités du secteur parapublic se réfère à l'ensemble des mécanismes, des
structures et des processus qui régissent la manière dont ces entités sont dirigées, supervisées et
contrôlées. Elle englobe les principes, les pratiques et les normes qui visent à assurer une gestion
efficace, transparente et responsable de ces organisations. A ce propos, il est question, dans le
4
Article 4 de l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et les groupements d’intérêt économique (AUSCGIE).
5
Article 9 de la loi d’orientation 2022-08.
6
Article 10 de la loi d’orientation 2022-08.
4
secteur parapublic sénégalais, d’une implémentation des principes de la gouvernance tels que la
transparence, la responsabilité, la sincérité par une organisation interne bicéphale (A) et un pilotage
par la performance (B).
L’organe exécutif qui est dirigé par un Directeur général ou un Directeur est responsable,
d’une part, de la mise en œuvre des décisions prises par l'organe délibérant et des autorités de
tutelle, et, d’autre part, de la gestion quotidienne des opérations de l'entité. Il est chargé de prendre
des mesures concrètes pour atteindre les objectifs fixés et assurer le bon fonctionnement de
l'organisation.
L'organe délibérant est chargé de prendre les décisions stratégiques et d'établir les
orientations générales de l'entité. C’est soit un Conseil d’Administration ou un Conseil de
surveillance mais composé dans tous les cas d’un Président et d’Administrateurs représentant l'État,
les travailleurs, ou qui sont des experts techniques et de membres externes. Il est responsable de la
définition des orientations stratégiques, de la supervision des activités de l’entité et de la
nomination des dirigeants en ce qui concerne les sociétés publiques.
Dans le langage approprié, la performance reflète la capacité d’une entité à atteindre des
objectifs avec une utilisation optimale des moyens et ressources sur une période donnée. Elle a, à
cet effet, une double implication : une autonomie de gestion conférée aux gestionnaires et une
responsabilisation par les objectifs.
Conclusion
La gouvernance des entreprises parapubliques est cruciale pour assurer leur fonctionnement
efficace, transparent et responsable. Elle repose sur des principes tels que l'autonomie de gestion,
la responsabilisation, la transparence et la reddition de comptes. Les organes exécutifs et
délibérants jouent un rôle clé dans la prise de décisions stratégiques et la supervision des activités
des entités du secteur parapublic.
Bien que des progrès aient été réalisés en termes de gouvernance, d'autonomie de gestion
et de responsabilisation des entités parapubliques, il reste, toutefois, des opportunités
d'amélioration. C’est même à se demander si la réforme introduite par la loi d’orientation 2022-08
du 19 avril 2022 est une panacée face à la faible rentabilité des entreprises publique.