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UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP UCAD/SESSION

Cours: SYSTÈME POLITIQUE SÉNÉGALAIS 2020–2021

Prof: Dr. Nfally CAMARA

Cohorte B
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INTRODUCTION AU SYSTÈME POLITIQUE
SÉNÉGALAIS
Le système politique sénégalais permet d’appréhender les éléments spécifiques du droit
constitutionnel sénégalais et de les comparer avec ce que le Professeur Jean Gicquel appelle les
modèles représentatifs du droit constitutionnel.
D’ailleurs, se sont des modèles qui sont étudiés dans le cours de droit constitutionnel.
Cependant, il va plus loin que le droit constitutionnel, car il analyse des aspects et des
paramètres en marge du droit et qui ont forcément des influences sur le droit, sur l’évolution
des institutions constitutionnelles et sur le fonctionnement. Ces aspects peuvent être
politiques, économiques, culturels ou sociaux. Il est alors nécessaire pour une compréhension
aisée de toutes ses considérations de procéder à des précisions terminologiques (I) avant de
préciser les objectifs du cours (II).

I)- Élément de définition

Il s’agira d’essayer d’identifier le système politique par rapport à une notion voisine
qu’est le régime politique.

A)- Le régime politique

Le régime politique peut être défini comme étant le moyen « de rendre compte de la
manière spécifique dont sont organisés les pouvoirs publics, c’est-à-dire leur mode de
désignation, leurs compétences respectives et les règles juridiques et politiques qui
gouvernent leurs rapports », cette définition est de Guy HERMET.
A la lumière de cette définition, il faut relever que le régime politique est déterminé par la
disposition des différents organes politiques de l’État ainsi que par leur interaction. Cette
détermination se fait au moyen de la constitution et chaque État en fonction de ses objectifs et
de ses réalités, détermine son propre régime politique. Ce qui permet de noter une double
différenciation du régime politique.
Une différenciation dans le temps, car le régime politique d’un État à une période donnée
peut être différent du régime politique du même État à une autre période.
Par exemple: En 1960, le Sénégal avait un régime parlementaire, en 1963, il avait opté pour un
régime présidentiel.
Une différenciation dans l’espace, les régimes politiques de deux États différents ne sont
jamais identiques.

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Ainsi, le régime politique du Sénégal est différent de celui des États-Unis, du Mali et de l’Afrique
du Sud. C’est que la constitution support du régime politique n’est pas immuable, elle peut
faire l’objet de révision.
Ensuite, deux (02) États n’ont jamais deux (02) constitutions identiques.
Cependant, tout changement de constitution n’entraîne pas obligatoirement un changement de
régime politique, mais, on ne peut changer de régime politique sans réviser la constitution. Le
régime politique est alors un élément de droit constitutionnel.
Au total, la lettre d’une constitution permet d’identifier la nature du régime politique qu’elle
organise, elle ne renseigne pas sur la nature du système politique.

B)- Le système politique

Guy HERMET définit le système politique comme étant « un mode de représentation


conceptuelle des interactions politiques et des institutions qui, dans un pays donné ou dans
tout autre cadre de pouvoir, déterminent les décisions auxquelles se soumettent la plupart
des personnes ou entités collectives incluses dans ce pays ou cadre. »
Le système politique prend alors en considération des aspects occultés par le régime
politique. Il s’agit de paramètres économiques, sociaux, politiques, culturels, juridiques pris
dans leurs réalités concrètes, mais aussi dans leurs interrelations et leur influence dans le
pouvoir politique.
Le système politique est alors fortement influencé par son environnement avec lequel il
échange par le biais de demande et de décision.
Pour étudier le système politique, il faudra insister à la fois sur des considérations juridiques,
économiques, sociologiques, historiques, politiques ou philosophiques. C’est pourquoi, le
système politique est étudié par la science politique.

II)- Les objectifs du cours

Le système politique est un cours à cheval entre le droit constitutionnel et la science


politique, il doit amener l’étudiant à appréhender les principes d’organisation du pouvoir
politique au Sénégal en s’appuyant sur l’ensemble des facteurs qui ont une quelconque
influence sur cette organisation. Il s’agira alors d’identifier les normes fondamentales
juridiques et non juridiques qui organisent le pouvoir politique sénégalais.
Pour atteindre cet objectif, il faudra étudier les différents régimes politiques qui se sont
succédé au Sénégal en insistant sur l’influence des différentes forces politiques sur chaque
régime.
Dans cette perspective, la démarche historique trouve toute sa pertinence.
Dès lors, après avoir retracé l’évolution historique sénégalaise de la veille des indépendances
à l’alternance de 2000, le régime de la troisième République fera l’objet d’une analyse
spécifique.

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PREMIÈRE PARTIE: L’ÉVOLUTION POLITIQUE SÉNÉGALAISE DE LA VEILLE DES INDÉPENDANCES À
L'ALTERNANCE DE 2000

En 1895, l’ensemble des colonies françaises d’Afrique occidentale était regroupé auprès
de l’AOF.
Après la seconde guerre mondiale, la France était obligée de faire face aux velléités
d’émancipation de plus en plus accrue de la part des colonies. Elle déclencha alors le
processus qui mènera les différentes colonies dont le Sénégal vers l’indépendance. Le
Sénégal a mis en place un régime politique qui connaîtra beaucoup de fluctuations jusqu’en
2000, année qui coïncide avec la première véritable alternance politique de son histoire.
Auparavant, en 1981, est intervenu un événement politique majeur et inédit qui peut servir de
pierre angulaire de l’histoire politique sénégalaise. Une alternance d’homme à la tête de
l’État.

CHAPITRE 1: Le processus vers l’indépendance

Ce processus, au lendemain de la seconde guerre mondiale, a surtout été déclenché par


des facteurs internationaux avec le développement d’un fort couvent anticolonialiste qui s’est
appuyé sur le droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, consacré par les Nations Unies et
soutenues par les États Unis.
La défaite française en 1954 en Indochine, le déclenchement de la guerre d’Algérie en 1955, la
conférence de Bandoeng (Indonésie) en 1955 qui permettra aux États africains et asiatiques
déjà indépendants de réclamer celle des colonies et l’indépendance du Maroc et de la Tunisie
en 1956 seront des facteurs déterminants vers l’indépendance.
En effet, ces événements ont eu comme principal conséquence, la prise de conscience par les
colonies de la possibilité d’accéder à l’indépendance et elles en profitèrent pour mettre la
pression sur la France. Celle-ci se mit alors à poser les jalons allant dans ce sens. Il s’agit de
l’autonomie interne (section 1) et de la communauté franco-africain (section 2).
Le dernier acte qui va consacrer définitivement l’indépendance du Sénégal est l’éclatement
de la fédération du Mali (section 3).

Section 1: L’autonomie interne

La constitution française de 1946, regroupait au sein de l’union française, la France et


ses différentes colonies, le Sénégal avait le statut de Territoire d’Outre Mer (TOM) dans cette
structure. Le 23 Juin 1956, le ministre des affaires d’outre mer Gaston Deferre fut voté la
loi-cadre qui, malgré ses apports, a fait l’objet de controverses.

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Paragraph 1: Les apports de la loi-cadre

La loi-cadre est la première étape concrète vers l’indépendance des colonies, elle
modifie le statut des territoires d’outre-mer en autorisant « le gouvernement à mettre en
œuvre et à prendre les mesures propres, à assurer l’évolution des territoires relevant du
ministère de la France d’outre-mer ». C’est le début effectif de l’autonomie interne.
Le statut des colonies pouvait être modifié par décret. L’application de cette loi permet alors
la mise en place d’une assemblée territoriale dotée de véritables pouvoirs et dont les membres
étaient élus au suffrage universel. L’abandon du double collège distinguant citoyens et sujets
français, ainsi que la création de conseil de gouvernement dans chaque colonies.
Ces innovations correspondent à la reconnaissance d’autorité locale, à un début de transfert
de pouvoirs vers ses autorités et à un renforcement de l’autonomie locale. Elles ont été à la
base de beaucoup de divergences.

Paragraph 2: L’appréciation de la loi-cadre

Dans le processus vers l’indépendance, la loi-cadre s’est révélée insuffisante en raison


des exigences des colonies, malgré son caractère novateur. Celles-ci voulaient des mesures
plus fortes dans le sens d’une autonomie plus poussée. Pour ces raisons, la loi-cadre a fait l'
objet de controverses.
Pour ses détracteurs, dont Léopold Sédar Senghor, la loi-cadre est un acte qui n’aboutirait que la
balkanisation de l’Afrique avec la création de micro-États.
Le renforcement de l’autonomie des colonies est de son point de vue un acte préparant leur
indépendance isolée, or, il fallait essayer de constituer une entité fédérale avec la France.
Pour ses partisans, au contraire, dont le président Houphouët BOIGNY, la loi-cadre est un
instrument essentiel pour l’indépendance, car permettant aux colonies d’avoir une existence
juridique individuelle différenciée de la France. Pour ses partisans comme pour ses
détracteurs, l’unanimité s’était rapidement faite autour du caractère dépassé de la loi-cadre
d’où l’instauration de la communauté franco-africaine par la constitution française de 1958.

Section 2: La communauté franco-africaine

L’aménagement des relations entre la France et les peuples qui lui sont associés était un
des principaux impératifs dont devrait tenir compte le comité consultatif constitutionnel
chargé de préparer la constitution française de 1958.
Dans cette optique, la constitution mis en place la communauté franco-africaine, une
institution à la nature juridique incertaine.

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Paragraph 1: La nature de la communauté franco-africaine

A l’occasion de la présentation du projet de constitution devant le conseil d'État, Michel


Debré soutiendra que la communauté franco-africaine n’est ni un État fédéral ni une
confédération d’État.
Il s’agit en effet, d’une institution hybride a mis chemin entre l’État fédéral et la confédération
d’État. Le fait pour les membres de la communauté de se gérer et de s’organiser librement
sous le contrôle de l’autorité centrale la rapproche de l’État fédéral. Ce rapprochement est
altéré par la possibilité laissée aux États membres de quitter la communauté suite à une
résolution de l’assemblée législative locale et à un référendum d’autodétermination.
Ensuite, la communauté n’avait pas organisé un système de partage de compétences entre «
l’Etat fédéral et les États fédérés ». L'État français, membre de la communauté était chargé de
gérer les affaires communes (politique étrangères, défense, monnaie, politique économique et
financière, matière première stratégique, justice, enseignement supérieur et
télécommunications). Très rapidement, les autres membres de la communauté prirent
conscience du caractère vide de leurs statut d'État, car, néant aucune compétence consistante.
La constitution de 1958 avait doté la communauté franco-africaine de plusieurs organes.

Paragraph 2: Les organes de la communauté franco-africaine

Il s’agissait de la présidence, du conseil exécutif, du sénat et de la cour arbitrale.

A)- La présidence de la communauté franco-africaine

L’article 80 de la constitution française de 1958, faisait du président de la République


française le président de la communauté franco-africaine. Il était élu au suffrage universel
indirect par un collège électoral métropolitain et un collège électoral d’outre-mer composé des
députés, sénateurs, membres des assemblées territoriales et provinciales, représentant des
communes et collectivités rurales.
Le président était chargé de veiller à l’application des accords de la communauté et à la
conformité des lois, aux règles de la communauté.

B)- Le conseil exécutif

C’était un organe essentiel dans la gestion de la communauté. Il était composé des chefs
de gouvernement, des États membres de la communauté et des ministres chargés des affaires
communes. Seuls des français métropolitains, avaient été nommés ministres chargé des

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affaires communes. Le conseil exécutif était compétent pour organiser la coopération
gouvernementale et administrative des membres, déterminés les questions de politique
générale en ce qui concerne les affaires communes délibérées sur les dépenses, des organes et
services de la communauté et la répartition entre les états de ses dépenses et de celles
entraînées par les politiques communes.

C)- Le sénat

La composition du sénat était totalement inégalitaire, déséquilibrée en faveur de la


France. En effet, celle-ci avait 186 sénateurs soit près du double des autres membres de la
communauté réunie (88). Le Sénat était un organe consultatif qui se superposait aux différents
parlements territorial, à propos des affaires relatives aux engagements internationaux
intéressants la communauté à l’autorisation de la déclaration de guerre et aux affaires
communes. Ce titre, il ne pouvait être saisi que par le président de la communauté. Le sénat
avait un véritable pouvoir de décisions concernant le fonctionnement des institutions de la
communauté

B)- La Cour arbitrale

Au terme de l’article 84 de la constitution française de 1958, la Cour arbitrale était


composé de 07 juges tous nommés par le president de la communauté pour un mandat de 06
ans renouvelable. Elle était compétente pour statuer dans les litiges entre les membres de la
communauté et entre un État membre et la communauté, jugeait le contentieux de l’élection
des sénateurs et donnait un avis consultatif aux membres qui le sollicitaient. Seuls les états
pouvaient réunir la cour arbitrale. Au sein de la communauté, les membres étaient quasi-états,
ils avaient alors la possibilité de gérer leurs propres affaires. Ce qui le Sénégal et le Soudan
occidental essayer de faire dans le cadre d’une fédération.

Section 3: La fédération du Mali

S’appuyant sur les dispositions de la constitution de 1958, le Sénégal et le Soudan


occidental ont constitué un état fédéral. En tant qu’état fédéré, le Sénégal disposera side tous
les organes et institutions etatiques. Mais, cette état fédéral ne survivra pas à sa première
crise.

Paragraph 1: La mise en place de la fédération du Mali

Quatre États d’Afrique occidental membre de la communauté franco-africaine avaient


pris l’initiative de mettre en place une fédération. Le Dahomey, Haute Volta capitale de
Ouagadougou, le Sénégal et le Soudan capitale de Bamako.

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Dans cette perspective des sommets successifs se tiennent à Bamako en 1958 et à Dakar en
Janvier 1959 et une assemblée constituante fut mise sur pied. Elle adoptera une constitution
notifiée par le Soudan le 21 janvier 1959, le Sénégal le 22 janvier et la Haute Volta le 28
Janvier. Face à ses velléités d’union, la Côte d’Ivoire va réagir en exerçant des pressions sur
le Dahomey qui va céder en refusant la ratification de la constitution et la haute volta qui
refusera d’intégrer la fédération malgré son acte de notification.
Le 13 Septembre 1959, le Général de Gaulle donna son accord à Saint Louis à la demande de
la fédération d’accéder à l’indépendance.
En conséquence, un accord de transfert de compétences entre la gouvernement de la
république française et les gouvernements du Sénégal et du Soudan fut signé le 04 Avril 1960.
L’indépendance sera accordée à la fédération le 20 Juin 1960. Elle va alors s’aventurer à
s’organiser.

Paragraph 2: Les organes de la fédération du Mali

L’article 07 de la constitution de la fédération du Mali du 17 Janvier 1959 avait prévu


quatre (04) institutions, le président de la fédération, le gouvernement fédéral, l'Assemblée
fédérale et l’autorité judiciaire.

A)- Le président de la République

Il devait être élu au suffrage universel indirect par un collège électoral composé des
membres de l’assemblée fédérale et de ceux des assemblées législatives des États pour un
mandat de 05 ans renouvelables.
Les membres des assemblées législatives des États qui siégeaient à l’assemblée fédérale
avaient deux voix.
Le président de la fédération du Mali devait assurer le respect de la constitution, la continuité
de la constitution et le fonctionnement régulier des institutions. Il devait aussi présider les
conseil supérieur des ministres et conseil supérieur de La Défense. Il était le chef des armées
et exerçait un rôle d’arbitre entre les États fédérés et la fédération.

B)- Le gouvernement fédéral

Le gouvernement fédéral était composé d’un président désigné initialement par le


bureau de l’assemblée législative fédérale, d’un vice-président et de 06 ministres nommés par
le président du gouvernement fédéral sur une base paritaire.
Le 20 juin 1960, une révision constitutionnaliste est intervenue pour faire désigner le
président du gouvernement fédéral par le président de la fédération. Laquelle désignation
devait être entreprise par l’assemblée fédérale. Le gouvernement fédéral définit et conduit la
politique de la fédération. Sa responsabilité pouvait être engagée devant l’assemblée fédérale

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par le biais la question de confiance ou de la motion de censure. L’assemblée fédérale pouvait
par contre être dissoute.

C)- L'Assemblée fédérale

Elle était composée de 40 membres élus au suffrage universel indirect pour 05 ans de
manière paritaire par les assemblées législatives des États fédérés. Elle était compétente pour
voter la loi et le budget investi. Le président du gouvernement fédéral contrôle l’exécutif et
engage la responsabilité du gouvernement au moyen d’une motion de censure ou d’une
question de confiance. Il s’agissait de la seule chambre du parlement ce qui est contraire au
pratique dans l’état fédéral ou le semble être un principe.

D)- La cour fédérale

Elle était composé d’une section constitutionnelle compétente en matière de contrôle de


constitutionnalité d’une section administrative compétente en matière de contrôle
administrative et d’une section des comptes des comptables publics. Ces différentes
institutions étaient prévues pour assurer le fonctionnement de la fédération. Leurs mises en
place n’étant pas encore achevées, une crise éclata entre le Sénégal et le Soudan occidental
mettant fin à la fédération du Mali.

Paragraph 3: L’échec de la fédération du Mali

Les raisons qui ont entraîné l’éclatement de la fédération du Mali sont essentiellement
au nombre de 03.
D’abord, la faiblesse des pouvoirs fédéraux. En effet, les organes prenaient leurs décisions à
l’unanimité.
Ensuite, des divergences par rapport à l’élection du président de la fédération, le Sénégal et la
Soudan occidentale avaient chacun un candidat qu’il voulait imposé.
Enfin, dans sa volonté d’imposer un candidat au poste de président de la fédération, le
Soudan par l’intermédiaire du président du gouvernement fédéral Modibo Keita essayait de
fragiliser le Sénégal en destituant le vice-président du gouvernement Mamadou Dia, le 19 Août
1960. En violation de la constitution, il nomma également un nouveau chef d’état major des
armées et proclama l’état d’urgence.
Le lendemain, le 20 Août, le Sénégal réagit vivement avec l’intermédiaire de l’assemblée
législative qui se réunit en séance extraordinaire à l’occasion de laquelle elle décida du retrait
du Sénégal de la fédération du Mali, proclama l'Indépendance du Sénégal ainsi que l’état
d’urgence et accorda les pleins pouvoirs au gouvernement pour faire face à la crise. Ses actes
consacrés à la fin de la fédération du Mali les autorités soudanaises sont reconduites à
Bamako et l’assemblée législative prit le nom d’assemblée nationale. Au niveau de la
fédération du Mali, le Sénégal avait sa propre constitution.

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Paragraph 4: La constitution sénégalaise du 24 Janvier 1959

Il s’agit de la première constitution du Sénégal. Elle a été adoptée le 24 janvier 1959 alors
le Sénégal était membre de la communauté franco-africaine par une assemblée constituante.
Elle précise les principes sur lesquels repose le Sénégal et met en place un régime
parlementaire.

A)- Les principes de la constitution du 24 janvier 1959

Cette constitution reprend essentiellement des principes dégagées par la constitution


française de 1958. Il en est ainsi de l’attachement du Sénégal aux droits fondamentaux, aux
déclarations des droits de l’homme de 1789 et de 1948, au préambule des constitutions
françaises de 1946 et de 1958, ainsi qu’à la communauté franco-africaine. Son originalité
découle de l’affirmation de la volonté du Sénégal d’œuvrer pour la réalisation de l’unité
africaine

B)- La nature du régime

La constitution de 1959 avait prévu trois institutions, le gouvernement, l’assemblée


législative et les collectivités publiques. Le pouvoir judiciaire était du domaine de la
fédération.
Le Gouvernement était dirigé par le président du Conseil des ministres qui nommait les
ministres, déterminait et conduisait la politique de la République du Sénégal, disposaient de
l’administration, exerçait le pouvoir règlementaire, assurait l’exécution des lois et règlements,
nommait à toutes les fonctions et charges et pouvait dissoudre le parlement en cas
d’intervention de deux crises ministérielles en l’espace de 36 mois.
L’assemblée législative, quant à elle, votait la loi dans des domaines bien précis. Elle pouvait
engager la responsabilité du gouvernement par le biais de la question de confiance ou de la
motion de censure.
Cette constitution ne survivra pas à la fin de la fédération du Mali. Elle sera remplacée par la
constitution sénégalaise du 26 Août 1960.

Chapitre 2: De l’indépendance à l’alternance de 1981 (Première République)

Il s’agit d’analyser les 20 premières années d’indépendance du Sénégal du point de vue


des phénomènes et des acteurs politiques. La constitution de 1960 sera emportée par la crise
de 1962.

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Section 1: De l’indépendance à la crise de 1962

A l’éclatement de la fédération du Mali, le Sénégal se dota d’une nouvelle constitution


(la loi n°60-045 du 26 Août 1960) rédigée par le Gouvernement, elle a été adoptée par
l’Assemblée Nationale sans débat et était le support à un régime parlementaire inédit en
Afrique. Elle sera abrogée en 1962 suite à une crise politique.

Paragraph 1: Les institutions mis en place par la constitution de 1960

L’article 05 de la constitution du 26 Août 1960, prévoyait comme institution de la


République, le président de la République, le gouvernement, l’assemblée nationale et
l’autorité judiciaire. Celle-ci n’avait pas de rang de pouvoir, elle relevait d’un simple service
public.

A)- Le president de la République

Son statut et ses compétences seront déterminées tour à tour.

1)- Le statut du président de la République

Le président de la République était élu au suffrage universel indirect à trois tours pour un
mandat de 07 ans renouvelable indéfiniment au scrutin secret par un collège électoral
composé des membres de l’assemblée nationale, d’un délégué par assemblée régionale et
d’un délégué par conseil municipal. Ne pouvait être élu au deux premiers tours que le
candidat qui avait obtenu la majorité des des membres du collège. Au troisième tour, la
majorité absolue était suffisante pour être élu. Le président du conseil devait le remplacer en
cas de vacances du pouvoir constatée par l’assemblée nationale et organiser des élections
dans les 30 jours.

2)- Les compétences du président de la République

Le président de la République était le gardien de la constitution, garant de


l’indépendance, arbitre entre les institutions. Il veillait aux fonctionnement réguliers des
institutions, à la continuité de la République, présidait le conseil des ministres, nommait aux
hautes fonctions et était le chef des armées. La plupart de ses actes devaient été contresignés
par un membre du Gouvernement.

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B)- Le Gouvernement

Le président du Conseil était le chef du Gouvernement. Le chef du Gouvernement était


présenté par le président de la République et investi par un vote aux scrutins publics à la
majorité absolue des membres composant l’assemblée nationale, après présentation de son
programme politique. Le président de la République devait nommer les autres membres du
Gouvernement sur proposition du Gouvernement du Conseil. Il faut préciser qu’il y avait
d’incompatibilités entre les fonctions de ministres et celles de députés.
Du point de vue de ses compétences, le président du Conseil déterminait et conduisait la
politique de la nation. Il dirigeait l’action du Gouvernement, était responsable de la défense
nationale et disposait de l’administration et des forces armées. Il nommait à tous les emplois
civils et militaires à l’exclusion de ceux réservés au président de la République. Le
Gouvernement pouvait convoquer l’assemblée nationale en session extraordinaire, prendre
des ordonnances suite à une loi d’habilitation et déclencher la procédure législative et celle de
la révision de la constitution.

C)- L'Assemblée nationale

C’était la chambre unique du parlement et exerçait le pouvoir législatif. Elle était


composée de 80 députés élus au suffrage universel direct au scrutin majoritaire de listes
nationales avec comme conséquence l’exclusion de toute possibilité de représentation
politique diversifiée. La totalité des sièges revenait au partis politiques qui avaient remporté
la majorité des voix.
L’assemblée nationale votait la loi, prorogeait l’état d’urgence et l’état de siège et autorisait la
guerre. Elle exerçait un contrôle sur l’exécutif au moins de l’interpellation de la question
écrite, de la question orale avec ou sans débat et de la commission d’enquête. Ce contrôle
pouvait l’amener à renverser le gouvernement, ce qui est un élément essentiel de
détermination de la nature du régime.

Paragraph 2: La nature du régime politique de 1960

L'abrogation de la constitution de 1960 est l'une des conséquences majeures de la crise


de 1962.

A)- Les facteurs à l’origine de la crise

Ils sont de deux ordres:


D’un point de vue institutionnel, certaines dispositions de la constitution de 1960 étaient trop
équivoques et pouvaient créer une confusion dans les compétences.

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Ainsi, l’article 24 de la construction faisait du chef de l'État, le chef des armées et le président
du conseil supérieur de La Défense.
Quant au président du conseil, il était au terme de l’article 26 responsable de La Défense
nationale, en même temps qu’il disposait des forces armées.
En principe, un régime parlementaire repose sur l’équilibre des interactions entre les pouvoirs
exécutifs et les pouvoirs législatifs. Celui sénégalais de 1960, essayait de réaliser un équilibre
entre les deux têtes de l’exécutif.
D’un point de vue politique, les facteurs de la crise peuvent être trouvés, d’abord dans les
méthodes répressives du président Mamadou Dia notamment dans la gestion des crises
sociales. Ce qui va lui faire perdre sa popularité. Ensuite, à partir de 1962, des rapports
conflictuels sont à noter entre les partisans de Senghor et ceux de Mamadou Dia au sein de
l’Union Progressiste Sénégalaise (UPS) parti dominant. Enfin, d’un point de vue idéologique,
un fossé s’était creusé entre les deux hommes. Senghor, pur produit de la quatrième
République française, était un partisan de la sociale démocratie, tandis que Mamadou Dia
était porté vers l’extrême gauche et le socialisme autogestionnaire.
Dès lors, la confrontation était devenue inévitable entre les deux hommes.

B)- La crise de 1962

Le premier acte concret à l’origine de la crise de 1962 est le fait de Mamadou Dia. En
effet, le 12 Décembre 1962, il procéda à un remaniement ministériel à l’occasion duquel il
renforça la présence de ses partisans au Gouvernement au détriment de ceux de Senghor et
s’arrogea le porte feuille du ministre de la défense.
Le 14 Décembre, les partisans de Senghor réagirent en déposant une motion de censure,
signée par 41 députés contre le Gouvernement de Mamadou Dia. La validité du dépôt de la
motion de censure était subordonnée à la signature au moins du quart des députés. Pour éviter
le vote de la motion de censure, le président Mamadou Dia fit évacuer et occupait
l'Assemblée nationale par la gendarmerie. Il estimait en effet, que la motion de censure était
irrecevable pour deux raisons:
D’abord, elle n’a pas été examinée par les instances du parti, ensuite, du fait de l’état
d’urgence alors en vigueur, le parlement ne pouvait engager la responsabilité du
Gouvernement. Aucun de ses arguments n'étaient valables, car aucune disposition de la
constitution de 1960 ne prévoyait la prépondérance d'un parti politique sur les institutions de
la République, ni l’impossibilité pour l'Assemblée Nationale de censurer le Gouvernement en
période d’état d’urgence. Face à l’impossibilité de se réunir au siège de l'Assemblée
Nationale, les députés se retrouvèrent au domicile du président de l'Assemblée Nationale
Lamine Gueye et adoptèrent la motion de censure par 51 voix sur 80. Le lendemain, le 18
Décembre, le président Senghor fit arrêter le président du conseil, le président Mamadou Dia
et certains de ses partisans par les forces armées. Ils seront jugés en mai 1963 par la Haute
Cour de Justice et Mamadou Dia écopera d’une condamnation à perpétuité pour tentative de

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cout d'État. En 1974, il sera gracié, puis, amnistié par la loi du 25 Mars 1976. Au sortir de ce
conflit, Senghor ne voulait plus entendre parler d’exécutif bicéphale. Il fit alors réviser la
constitution le 18 Décembre 1962 pour s’octroyer le pouvoir référendaire ainsi que l’ensemble
des pouvoirs qui était de la compétence du président du conseil. Il entreprit également de
mettre en place une nouvelle constitution.

Section 2: De la crise de 1962 à l’alternance de 1981 (Deuxième République)

Après la crise de 1962, le président Senghor s’est retrouvé seul chef de l’exécutif. Fort
de son succès, il réorganisa la disposition des institutions en faisant adopter par référendum,
le 03 Mars 1963 une nouvelle constitution qui va entrer en vigueur le 07 Mars. Des acteurs
politiques diversifiés vont alors s’affirmer au Sénégal en ayant des influences majeures sur
les fluctuations de la constitution et de la nature du régime que Senghor va essayer d’utiliser
pour conserver le pouvoir. Finalement, il quittera le pouvoir en 1980.

Paragraph 1: Les acteurs politiques

Il faut distinguer entre les institutions politiques et les forces politiques.

A)- Les institutions politiques

Les institutions politiques sont essentiellement, le président de la République, le


gouvernement et le parlement.

1)- Le président de la République

La constitution du 07 Mars 1963 fait du président de la République le seul chef de


l’exécutif. Il est élu au suffrage universel direct pour un mandat de 04 ans indéfiniment
renouvelable. En 1967, la durée du mandat sera portée à 05 ans, le nombre de mandat sera
limité à 02 en 1970, avant de redevenir illimité en 1976. Le président de la République est élu
aux scrutins majoritaires à 02 tours avec instauration du tiers bloquant au premier tour. En cas
de vacances du pouvoir, il est remplacé par le président de l’assemblée nationale et doit
organiser des élections dans les 60 jours. Cette disposition sera modifiée en 1976 par la
révision constitutionnelle qui faisait du premier ministre le successeur désigné du président
de la République en cas de vacance du pouvoir, jusqu’à expiration du mandat en cours. C’est
le dauphinat.

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Du point de vue de ses compétences, le président de la République était l’exécutif, il
déterminait et conduisait la politique de la nation, il était chef des armées, nommait à tous les
emplois civils et militaires, disposait des forces armées et était responsable de La Défense
nationale, il disposait du pouvoir référendaire, du pouvoir de prendre des ordonnances et
d’initiations des révisions constitutionnelles. Le Gouvernement pouvait être la deuxième
composante de l’exécutif.

2)- Le Gouvernement

Avant la révision constitutionnelle de 1970, le gouvernement en tant qu’institution


n’était pas prévu dans la constitution de 1963. C’est cette révision qui l'instaure avec à sa tête
le premier ministre. Tous les membres du gouvernement étaient choisis et nommés par le
président de la République. Ce gouvernement était responsable à la fois devant le président
de la République et devant l’assemblée nationale. L’essentiel des pouvoirs du premier
ministre découlait de la volonté du chef de l'État. En réalité, l’instauration du poste de
premier ministre a était la concrétisation de la volonté du chef de l’état, de décongestionner
ses fonctions et de les renforcer en même tant que celles de mettre en place un exécutif
bicéphale

3)- le parlement

Il est composé de la seule Assemblée nationale, initialement, les députés étaient élus au
suffrage universel direct pour un mandat de 04 ans. La révision constitutionnelle de 1967 va
porter la durée du monastère des députés à 05 ans. L’assemblée nationale détient le pouvoir
législatif et contrôle le gouvernement. Ces institutions politiques ont cohabité avec des forces
politiques.

B)- Les forces politiques

Les principales forces politiques qui se sont affirmées au Sénégal entre 1963 et 1981 sont
les partis politiques et les mouvements religieux.
Les partis politiques sont des associations d’hommes « ayant les mêmes opinions sur la
société et qui cherche à accéder au pouvoir au moyen d’un soutien populaire afin de réaliser
la politique correspondant à leurs idées ». Claude Leclerc
Au Sénégal, les partis politiques consacrés par l’article 03 de la constitution de 1963 ont connu
une évolution. On est passé d’un parti unique de fait à un multipartisme limité.

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1)- Le parti unique de fait

Dès 1963, on remarque un durcissement dans les relations entre l'État et les partis
politiques. L’Union Progressiste Sénégalais (UPS) en essayant de phagocyter l’ensemble des
partis politiques existant tendait à devenir un parti unifié. Les partis qui avaient refusé la
fusion avec l’UPS étaient simplement interdits. C’est le cas du Parti Africain de
l’Indépendance (PAI) de Majmouth Diop, du Bloc des Masses Sénégalaise (BMS) de Cheikh
Anta Diop qui se reconstituera dans la clandestinité sous le nom de Front National Sénégalais
(FNS) en 1964. De 1964 à 1968, aucun parti politique ne recevra de récépissé de déclaration en
violation de la loi sur les partis politiques qui prévoyait un simple régime d’enregistrement.
En 1968, cette loi sera modifiée dans un sens plus restrictif et désormais, le ministre de
l’intérieur a le pouvoir de refuser l’enregistrement d’un parti politique. La conséquence de ce
passage au régime de l’autorisation c’est que de 1964 en 1974 aucun parti politique n’a été
créé même si la loi ne l’interdisait pas. L’opposition est confiné dans la clandestinité au
moment où la violence politique faisait rage au sein de l’UPS (assassinat du député Demba Diop,
tentative d’assassinat contre le president Senghor en 1967).

2)- Le multipartisme limité

En 1974, Abdoulaye WADE suite à une ruse politique va réussir à créer et à faire reconnaître
aux partis politiques le Parti Démocratique Sénégalaise (PDS). Dans sa présentation, il l’avait
constitué non pas comme un parti d’opposition, mais, comme un parti de contribution à l’UPS.
Les partis dans la clandestinité encouragés par ce fait, accentuèrent alors la pression ce qui
eut comme conséquence en 1977 la révision de la constitution et l’adoption du multipartisme
limité.
En effet, la loi mettant en place un multipartisme limité, consistait en la reconnaissance de 03
partis politiques qui devaient obligatoirement s’affilier à un courant politique. Le courant
libéral et démocratique avec le PDS, le courant socialiste et démocratique avec le PS et le
courant Marxist-Leninist avec le PAI. En 1978, ce dispositif sera élargi avec l’instauration du
courant conservateur dont se réclamera le Mouvement Républicain Sénégalais (MRS) de
Boubacar Gueye. Le multipartisme limité persistera sur cette forme jusqu’en 1981.

Paragraph 2: Les fluctuation dans la nature du régime

Le régime présidentiel, initialement mise en place en 1963 connaîtra beaucoup de


fluctuations qui finiront par la dénaturer.

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A)- Le régime présidentiel initial

Avec la constitution de 1963, le Sénégal avait mis en place un régime présidentiel. Ainsi,
l’exécutif était monocéphale et le gouvernement en tant qu’institution n’existait pas. Le
président de la République déterminait et conduisait la politique de la nation, il était le seul
titulaire du pouvoir exécutif et sa responsabilité politique ne pouvait être engagée devant
l’assemblée nationale. Celle-ci ne pouvait être dissoute, elle détenait seule toutes les
compétences législatives. Ce dispositif connaîtra ses premières fissures à partir de 1967.

B)- La dénaturation du régime présidentiel initial

La révision constitutionnelle de 1967 relève de l’irrationnel et de l’incohérence. En effet,


on introduit le droit de dissolution de l’assemblée nationale au profit du président de la
République, critère du régime parlementaire dans un régime présidentiel dont l’un des traits
fondamentaux est le principe de l’irrévocabilité mutuelle. Certes, l’exercice de la dissolution
entraînait la démission du chef de l'État. La dénaturation du régime va se poursuivre avec la
révision constitutionnelle de 1970 qui non seulement place à la tête d’un gouvernement
institutionnel au premier ministre, mais, elle introduit la possibilité d’engagement de la
responsabilité du gouvernement devant l’assemblée nationale par le biais de la motion de
censure. En cas d’adoption d’une motion de censure, le chef de l'État pouvait dissoudre le
parlement en conservant son mandat. Avec ce nouveau dispositif, le régime devient hybride
et sera qualifié de présidentialiste. C’est dans ce contexte qu’est intervenue en 1981 une
alternance douteuse.

Paragraph 3: La succession de 1981


Le 31 Décembre 1980, le président Senghor démissionne et transmet le pouvoir à son
premier ministre Abdou Diouf. Il s’agit certes d’une dévolution pacifique du pouvoir, mais,
qui est intervenue dans des conditions contestables. Initialement, la constitution de 1963
prévoyait en cas de vacances du pouvoir, c’est le président de l’assemblée nationale qui
assurait l’intérim pour 60 jours.
Ce délai devait lui permettre d’organiser des élections présidentielles, mais, cette disposition
a été modifiée en 1976 et le premier ministre est désigné comme successeur du président de la
République en cas de vacances du pouvoir, c’est le dauphinat. C’est cette disposition qui a été
mise en œuvre le 01 Janvier 1981 avec l’investiture du premier ministre Abdou Diouf comme
président de la République. Au lieu d’une alternance politique, il ne s’agissait que d’une
alternance d’hommes qui s’est faite à l’exclusion du peuple détenteur de la souveraineté
nationale.
En effet, Abdou Diouf, premier ministre nommé donc ne bénéficiant pas de la légitimité du
suffrage universel avait réussi à accéder par la seule volonté du président Senghor au poste du

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président de la République. Cette procédure est contestable d’un point de vue démocratique.
D’ailleurs, tout le règne du président Abdou Diouf sera marqué par cette tare congénitale.

Chapitre 3: De l’avènement d’Abdou Diouf à l’alternance de 2000


De 1981 à 2000, le Sénégal sera dirigé par le président Abdou Diouf. Pendant son règne,
autant les acteurs politiques que la nature du régime connaîtront des évolutions. Il sera
finalement battu à l’élection présidentielle de 2000.

Section 1: les acteurs politiques

Il faut distinguer entre les institutions politiques et les forces politiques

Paragraph 1: Les institutions politiques

Il s’agit essentiellement du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif.

A)- Le pouvoir exécutif

La présidence de la République sera le seul organe de l'exécutif à connaître une


continuité dans son existence après l’accession au pouvoir d’Abdou Diouf. Du point de vue
de son statut, la durée du mandat du président de la République qui était de 05 ans est portée à
07 ans en 1992 et le nombre de mandat limité à 02. Cette limitation sera levée en 1998. Le tiers
bloquant est supprimé en 1983 avant d’être réintroduit en 1991 sous la forme du quart
bloquant et supprimé à nouveau 1998. Le dauphinat est quant à lui supprimé en 1983 et
désormais en cas de vacances du pouvoir, le chef de l’état est remplacé par le président de
l’assemblée nationale, qui doit organiser des élections dans les 60 jours. À partir de 1998, si
l’assemblée nationale est dissoute, c’est le président du Sénat qui devait assurer l’intérim du
président de la République.
Le Gouvernement institutionnel dirigé par un premier ministre et responsable devant le
parlement dont avait hérité Abdou Diouf à son accession au pouvoir en 1981 sera à son tour
supprimé par la révision constitutionnelle de 1983. Il sera réintroduit 08 ans plus tard en 1991.

B)- Le pouvoir législatif

En 1981, l’assemblée nationale était la seule chambre du parlement sénégalais. Tous les
120 députés la composant étaient élus au suffrage universel direct pour 05 ans. En 1998, une
révision constitutionnelle introduit pour la première fois au Sénégal le bicaméralisme avec

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l’instauration d’un Sénat composé de 60 membres dont 48 élus au suffrage universel indirect
et 12 nommés par le président de la République.

C)- Le pouvoir judiciaire

Il a connu une évolution majeure en 1992. En effet, la révision constitutionnelle


intervenue cette année va faire éclater la Cour suprême en 03 juridictions: le Conseil
Constitutionnel, compétent en matière de contrôle de constitutionnalité, le Conseil d'État
compétent en matière administrative et la Cour de cassation compétente en matière judiciaire.

Paragraph 2: Les forces politiques

Il faut insister sur les partis politiques, les syndicats et les mouvements religieux.

A)- Les partis politiques

Le premier acte majeur du président Abdou Diouf à son accession au pouvoir a été
l’instauration en Mai 1981 du multipartisme intégral à la place du multipartisme limité et
l’obligation de s’identifier à un courant idéologique. Plusieurs partis politiques sortirent alors
de la clandestinité et d’autres se constituèrent souvent du fait de la scission de partis existants.
Depuis lors, les partis politiques ont connu un accroissement exponentiel ce qui est un indice
de vitalité de la démocratie.

B)- Les syndicats

Si le mouvement syndical sénégalais date de l’époque coloniale et a toujours été


dynamique, il semblait avoir connu une période de léthargie relativement longue. En effet ,
pendant longtemps, la principale centrale syndicale du pays était contrôlée par le parti au
pouvoir. Le renouveau et pluralisme syndical ont accompagné le pluralisme politique et
certains leaders syndicaux sont même allés jusqu’à se présenter à l’élection présidentielle
(Mademba Sock en 2000).

C)- Les mouvements religieux

Ils ont toujours été omniprésent dans la vie politique sénégalaise. Déjà à l’époque
coloniale, l’autorité politique avait des relations particulières avec les chefs religieux dans
son combat contre Mamadou Dia, le président Senghor s’était essentiellement appuyé sur la
confrérie Mouride. L’influence politique des confréries n’a pas diminué sous Abdou Diouf .
En effet, pour être un leader politique crédible, il faut être parrainé par un maximum de chefs
religieux influents. Ce parrainage n’est pas gratuit. Les chefs religieux tirent des avantages en

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termes matériels et de légitimité de leur accointances avec le pouvoir politique. Ils deviennent
de ce fait, une puissance politique, il joue un rôle de régulateur de la vie sociale. Entre 1983 et
2000, ils sont particulièrement actifs voire déterminants à l’occasion d’élections. En 1988
consigne de vote du khalife général des Mouride en faveur d’Abdou Diouf, 1993 soutien
public et massif de Serigne Moustapha Sy et de son mouvement à Abdoulaye WADE. Ce rôle
atteint son paroxysme en 2000 où l’élection présidentielle s’est transformée en une
confrontation entre différents chefs religieux avec des consignes de votes et de prévisions
mystiques donnant la victoire à l’un ou à l’autre candidat.

Section 2: La nature incertaine du régime politique sénégalaise

À l’accession au pouvoir du président Abdou Diouf, la nature du régime politique


sénégalais va continuer à connaître des fluctuations au rythme des révisions
constitutionnelles.

Paragraph 1: Le retour au régime présidentiel de 1963

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