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Mohamed

Bachir Niang
2015/2016
UNIVERSITE
CHEIKH ANTA DIOP
Faculté des Sciences
Juridiques et
Politiques

DROIT
O CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

MOHAMED BACHIR NIANG


Agrégé des facultés de droit

UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP


FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang
2 Agrégé des facultés de droit
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


SOMMAIRE
TITRE I/ LE DROIT DES PERSONNES
CHAPITRE I – La personnalité juridique
Section I – L’acquisition de la personnalité juridique
Section II – La perte de la personnalité juridique

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CHAPITRE II – L’individualisation de la personne
Section I – Le nom

Agrégé des facultés de droit


Section II – Le domicile

CHAPITRE III – la preuve de l’état des personnes : l’état civil


Section I – Les autorités intervenant dans la constatation de l’état
des personnes.
Section II – Les actes de l’état civil

CHAPITRE IV – Les incapacités


Section I – Les incapables mineurs
Section II – Les incapables majeurs

TITRE II/ LA FAMILLE


CHAPITRE 1 – Le mariage
Section I- Les fiançailles
Section II- La formation du mariage
Section III - Les effets du mariage

CHAPITRE II - La dissolution du lien matrimonial : le divorce


Section I- Le divorce contentieux
Section II –Le divorce par consentement mutuel
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(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

TITRE I/ LE DROIT DES PERSONNES


Le droit des personnes renvoie à une multitude de réalités. Il évoque
d’abord la personnalité juridique dans ses différentes problématiques
(acquisition, perte…) (Chapitre I). Il évoque aussi l’individualisation de la
personne (Chapitre II) et son corollaire, l’état civil (Chapitre III) ainsi que
les incapacités (Chapitre VI).
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CHAPITRE I – LA PERSONNALITE JURIDIQUE


Agrégé des facultés de droit

L’ordre juridique est constitué d’une somme de règles reconnaissant des


droits et imposant des obligations. Ceux à qui sont destinés ces droits et
obligations sont les sujets de droit. La personnalité juridique manifeste
la reconnaissance, par notre droit, de la qualité de sujet de droit. Les
personnes juridiques ou sujets de droit sont donc ceux à qui le droit
reconnaît la personnalité juridique.
L’étude de la personnalité juridique soulève deux interrogations : celle de
son acquisition et celle de sa perte

Section I – L’acquisition de la personnalité juridique


Les modes d’acquisition diffèrent selon que le sujet de droit est une
personne physique (I) ou morale (II).

I – Les personnes physiques

Tout homme acquiert, en naissant, la personnalité juridique. Tout homme


naît « sujet de droit ». L’article 1er du Code sénégalais de la famille traduit
très bien cette réalité en précisant que « la personnalité commence à la
naissance et cesse au décès ». La personnalité juridique s’attache donc à
la personne de façon automatique, elle est indisponible : son existence ne
dépend ni de la volonté de l’individu lui-même encore moins celle de l’Etat
ou des autres individus.

L’affirmation selon laquelle la personnalité juridique commence à la naissance


laisse supposer que le fœtus, scientifiquement dénommé embryon, ne
disposerait pas de la personnalité juridique. Une telle conclusion est vraie
même si l’alinéa 2 du même article 1er ajoute que «l’enfant peut acquérir des
droits du jour de sa conception s’il naît vivant». le fœtus peut donc acquérir
des droits s’il y va de ces intérêts mais n’acquiert la personnalité juridique qu’à
la naissance.

L’alinéa 2 de l’article 1er du Code de la famille ne fait référence qu’à


l’acquisition de droits et non d’obligations.
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Les dispositions de l’alinéa 2 sont d’un grand intérêt en matière successorale
et de donation. On voit donc que lorsque l’enfant né vivant, c’est-à-dire
respire complètement après l’accouchement, le droit sénégalais considère
de façon rétroactive qu’il avait la personnalité juridique dès sa conception.
Ainsi, il peut succéder de son père décédé avant sa naissance ou recevoir
les biens et droits dont d‘autres sujets de droits lui ont fait donation avant
sa naissance. Notre droit situe cette conception entre le 300e jour et le
180e jour de la naissance

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II – Les personnes morales

Agrégé des facultés de droit


Contrairement aux personnes physiques, qui ont une existence matérielle,
les personnes morales sont des sujets de droits qui n’ont point une
matérialité concrète. Il n’est en effet point possible de déjeuner avec l’Etat
du Sénégal, la SENELEC, la SONATEL ou la Société Générale de Banques
du Sénégal (SGBS) ni de leur serrer la main. Les personnes morales sont
des groupements de personnes (à l’exception des sociétés unipersonnelles
composées d’un seul associé) à qui le droit reconnaît la personnalité
juridique.

Certaines d’entre elles sont des personnes morales de droit public. C’est le
cas de l’Etat du Sénégal, des collectivités territoriales (mairies, communes…)
mais aussi de certains démembrements de l’Etat (UCAD, La Poste…).
D’autres personnes morales sont de droit privé. Ce sont principalement les
sociétés et les associations. Leur critère de distinction, selon l’article 764
du Code des Obligations Civiles et Commerciales, réside dans la poursuite
ou non d’un but lucratif.

Selon la loi sénégalaise, « la société civile est le contrat par lequel deux ou
plusieurs personnes mettent en commun des apports et constituent une
personne morale pour les exploiter et se partager les profits ou les pertes
qui résultent de cette activité ».
L’association est définie comme « le contrat par lequel deux ou plusieurs
personnes mettent en commun leur activité et, au besoin, certains biens, dans
un but déterminé autre que le partage de bénéfices » (art. 811 du COCC).

L’article 763 du COCC reconnaît aux sociétés et associations la personnalité


morale qui leur confère la qualité de sujet de droit. Cette reconnaissance
leur donne, à l’image des personnes physiques, l’aptitude à avoir des
droits, acquérir des biens, signer des conventions, être soumises à des
obligations….
L’acquisition de la personnalité juridique pour les personnes morales peut
requérir des formalités particulières comme une autorisation administrative
(syndicats).
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D’autres fois, cette personnalité juridique n’est opposable aux tiers qu’après
l’immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier (sociétés
commerciales) ou dans un journal d’annonces légales.
N’ayant pas une réalité physique, les personnes morales agissent par la voix
de leurs représentants appelées selon le cas « gérants », « administrateurs »,
« dirigeants sociaux »…

Section II – La perte de la personnalité juridique


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Les règles sont encore différentes selon que la personne en présence est
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une personne physique (I) ou morale (II).

I – la perte de la personnalité juridique pour les personnes


physiques
Pour les personnes physiques, la mort, principale manifestation du décès,
constitue le mode courant de perte de la personnalité juridique (A).
Parfois cependant, une incertitude peut exister sur le fait de savoir si
l’individu est mort ou non. C’est la question de l’absence et de la disparition
que notre droit réglemente de façon originale (B).

A – Le décès

La mort constitue, pour les personnes physiques, la manifestation la plus


répandue du décès. Le Code de la famille du Sénégal, contrairement au
droit français, ne donne pas les critères de la mort. La mort suppose une
constatation, sur le cadavre de l’intéressé, de certaines manifestation
notamment l’arrêt des fonctions essentielles (fonctions cognitives,
circulatoire, cardiaque…). Il peut arriver que le cadavre de l’individu n’ait pas
été retrouvé ce qui renvoie à des hypothèses d’absence et de disparition
qui seront étudiées plus loin.
Étant attachée à la vie de l’être humain, chaque individu conserve sa
personnalité juridique jusqu’à sa mort. Parfois, les prérogatives qui
résultent de la personnalité juridique peuvent être atténuées. Pourtant,
la personnalité juridique elle-même ne disparaît jamais du vivant de la
personne.
Les mineurs et les majeurs incapables peuvent voir leur capacité d’exercice
atténué : ils ne peuvent exercer eux-mêmes les droits que la loi reconnaît
aux personnes juridiques (vendre, acheter…).
Pour d’autres personnes, c’est la capacité de jouissance c’est-à-
dire l’aptitude à acquérir des droits qui est atténuée. Par exemple, la
condamnation pour certains crimes s’accompagne d’une perte des droits
civiques et politiques.
Pourtant, dans toutes ces hypothèses, la personnalité juridique subsiste
toujours. Elle ne disparaît qu’avec la mort.
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B – Les incertitudes sur l’existence

Deux hypothèses sont envisagées par le droit sénégalais et qui manifestent


cette incertitude : l’absence (1) et la disparition (2).

1– L’absence

L’absent est défini par l’article 16 du Code de la famille comme la personne

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dont le manque de nouvelles rend l’existence incertaine.
On remarque d’ores et déjà que le Code de la famille évoque un manque

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de nouvelles sans s’intéresser à la cause de celui-ci.

L’absence ne manque pas de poser un certain nombre de difficultés en droit


pour au moins deux raisons : l’individu n’étant plus présent, la question de la
gestion de son patrimoine se pose mais aussi celle de sa famille.
Aussi, l’absence fait planer une incertitude sur le fait de savoir si celui
dont on a plus de nouvelles est toujours vivant ou non. La manière que
le législateur a de régler ces questions manifeste un certain espoir de ce
dernier que l’absent n’est pas encore décédé.

a – Du manque de nouvelles à la déclaration de décès

On constate la multiplication et la longueur des procédures devant conduire


à déclarer l’absent décédé. Cette multiplicité des procédures manifeste
l’espoir qu’a le législateur que l’individu est encore en vie.

Lorsque les dernières nouvelles remontent à plus d’un an, tout intéressé, et le
ministère public, peut former une demande de déclaration de présomption
d’absence devant le Tribunal de première instance du dernier domicile de
l’absent. La loi ordonne que le parquet diligente une enquête sur le sort de
l’absent et une publication par voie de presse écrite, radiodiffusée…

La déclaration de présomption d’absence ne peut être prononcée par le


juge avant un délai d’un an à compter du dépôt de la demande. Il faut alors
attendre un autre délai de deux ans pour pouvoir déposer une demande de
déclaration d’absence. Le juge considère une seconde fois les éléments en
cause pour déclarer ou non l’absence. L’individu n’est plus alors présumé
absent mais déclaré absent et considéré comme tel.

Le manque de nouvelles peut aller plus loin. Dix ans après les dernières
nouvelles, une demande de déclaration de décès peut être déposée par
tout intéressé. Il s’agit du délai au-delà duquel notre droit estime qu’il y
a très peu de chances que l’individu soit encore en vie. Pour autant, le
juge ne peut rendre une ordonnance de déclaration de décès sans une
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enquête complémentaire du parquet. C’est seulement sur le fondement


des résultats pessimistes de celle-ci qu’il peut prononcer une déclaration
de décès. La déclaration de décès est transcrite sur les registres de l’état
civil et ouvre la succession de l’absent.

b – Le sort des biens et de la famille de l’absent.

**Les biens de l’absent


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La personne dont on est resté sans nouvelle, l’absent, a pu laisser des biens,
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des enfants, un conjoint… Dès le dépôt de la demande de déclaration de


présomption d’absence, le juge nomme un administrateur provisoire des
biens de l‘absent (un tiers, son conjoint, un parent ou ami que l’absent
avait désigné…).
L’administrateur provisoire gère les biens de l’absent sous le contrôle du
juge.

Jusqu’au prononcé de la déclaration d’absence, il ne peut accomplir seul


que des actes d’administration c’est-à-dire ceux qui ne font pas sortir des
biens du patrimoine de l’absent. Les actes de disposition étant subordonnés
à l’autorisation du juge. A compter de la déclaration d’absence, il lui est
permis d’accomplir des actes de disposition. La mission de l’administrateur
prend fin par le retour de l’absent ou le prononcé d’un jugement de décès.
Dans les deux cas, l’administrateur provisoire rend compte de sa mission
et les fautes commises dans cette gestion peuvent permettre d’engager
sa responsabilité civile.
La déclaration de décès de l’absent ouvre sa succession et opère la
transmission de son patrimoine à ses héritiers.
Lorsque l’absent réapparaît après la déclaration de décès, il reprend ses
biens mais dans l’état où il les trouve (il y a alors restitution des biens
dévolus par la succession). L’absent qui réapparait après la déclaration de
décès ne peut revendiquer ceux qui ont été aliénés régulièrement.

**Le mariage de l’absent

Jusqu’à la déclaration d’absence, le manque de nouvelles ne produit aucun


effet sur le sort du mariage de l’absent. Par contre, le jugement déclaratif
d’absence donne au conjoint de l’absent le droit de demander le divorce pour
cause d’absence. Lorsque l’absent réapparaît alors que le divorce a déjà été
prononcé et que le conjoint s’est remarié, aussi bien le divorce que le nouveau
mariage lui sont opposables.
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**La famille de l’absent

Le sort des enfants de l’absent est pris en compte par les règles de la
puissance paternelle, de l’administration légale et de la tutelle. La tutelle
renvoie à la désignation, par le juge, d’une personne autre que les parents,
chargée de s’occuper de la personne et des biens de l’enfant. Lorsque
l’absent a laissé un conjoint, la puissance paternelle sur ses enfants est
exercée par ce conjoint à moins qu’il ne soit lui-même incapable.

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Celui qui exerce la puissance paternelle prend en charge la personne et les
biens de l’enfant.

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2 – La disparition

Son régime juridique est moins formaliste, moins procédurale que celui de
l’absence. Le disparu est la personne dont l’absence s’est produite dans
des circonstances mettant sa vie en danger sans que son corps ait pu être
retrouvé.
A la différence de l’absence, la disparition se caractérise donc par la
constatation de circonstances qui laissent peu de chance à la survie
de la personne (incendie, naufrage, crash d’avion, inondation…). De ces
circonstances particulières, la loi fait plus un « pari » sur la mort de l’individu
que sur sa survie. Cette présomption de mort influence tout le régime
juridique de la disparition.
Contrairement à l’absence, il n’y a, pour la disparition, ni déclaration de
présomption de disparition ni déclaration de disparition. La multiplicité des
procédures est évitée car le droit considère l’individu comme certainement
décédé.
L’unique procédure est alors la demande de déclaration de décès. L’affaire est
instruite sans que le juge ne soit tenu de diligenter une enquête administrative
sur le sort du disparu. Rien ne lui interdit cependant de le faire s’il estime ne pas
avoir des éléments d’information suffisants. Comme pour l’absence, le prononcé
du jugement de décès est transcrit sur les registres de l’état civil. Elle ouvre la
succession du disparu.
Le jugement doit nécessairement fixer une date pour le décès. Celle-ci
doit être fixée en tenant compte des éléments du dossier ou, en cas de
difficultés, fixée au jour de la disparition.
Comme l’absent, le disparu peut réapparaître après la déclaration de décès.
Il se trouve dans la même situation que l’absent qui revient : il récupère
ses biens dans l’état où il les trouve. Le divorce ou le remariage de son
conjoint lui sont opposables.
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CHAPITRE II – L’individualisation de la personne


La personnalité juridique, a-t-on vu, confère aux sujets de droit la
capacité juridique. Il s’agit de la capacité d’acquérir des droits (capacité
de jouissance) et celle de les exercer (capacité d’exercice). Certains
attributs de la personnalité juridique ont cependant une fonction plus
précise : permettre l’individualisation du sujet de droit dans la société.
Il suffit de scruter une pièce nationale d’identité pour saisir l’importance
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et la multiplicité des éléments d’identification utilisés : nationalité, sexe,


filiation, date de naissance…les pouvoirs publics, l’administration mais aussi
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les autres sujets de droit ont chacun un intérêt à ce que chaque personne
juridique puisse être individualisée, identifiée de manière précise.

Les objectifs pédagogiques du cours de première année de droit amènent


à n’étudier que deux éléments d’identification de la personne : le nom et
le domicile. Ils feront l’objet d’une étude séparée

Section I – Le nom

Le législateur sénégalais ne donne pas de définition du nom. L’article 2


du Code de la famille se borne à préciser que le nom se compose du
nom patronymique et du ou des prénoms. Le législateur réglemente les
éléments matériels du nom et tente par ailleurs de sauvegarder le droit au
nom et la protection de celui-ci.

I – Les éléments constitutifs du nom.

On cite le nom patronymique et le ou les prénoms

Le nom patronymique : on l’appelle communément nom de famille. Son


principal mode d’acquisition est la filiation. Il y’a un souci très présent de
donner à l’enfant le nom de ceux avec qui il entretient un lien biologique :
il s’agit des parents mais une certaine préférence est donnée au père d’où
l’appellation de nom patronymique. Lorsque l’enfant est légitime c’est-à-
dire conçu d’un père et d’une mère mariés, il porte le nom de son père.
Lorsqu’il est désavoué avec succès par son père, il porte le nom de sa mère.
(En droit français, depuis la loi du 18 juin 2003, entrée en vigueur le janvier
2005, l’enfant peut porter, au choix des parents, le nom du père, celui de
la mère ou les deux accolés dans l’ordre que décident les parents).

L’enfant naturel c’est-à-dire celui conçu alors que les parents n’étaient pas
mariés, porte le nom du père s’il est reconnu par ce dernier. A défaut,
il porte celui de la mère;
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La filiation peut aussi être adoptive. L’adoption crée un lien juridique entre
l’adoptant et l’enfant, permettant au second de porter le nom du premier.
Dans l’adoption plénière, l’enfant ne porte que le nom de l’adoptant alors que
dans l’adoption limitée, il ajoute en principe le nom de l’adoptant à celui de sa
famille d’origine.
Il peut arriver que l’enfant ne puisse revendiquer une filiation à l’égard de
quiconque. Lorsque la filiation de l’enfant est inconnue, il appartient à
l’officier d’état civil de lui attribuer un nom à condition que ce nom donné

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ne puisse pas porter atteinte à ses intérêts.
Enfin, l’acquisition du nom patronymique peut être le fait du mariage, lien

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matrimonial. La femme mariée est en effet légalement autorisée à porter le
nom de son mari même si elle conserve son nom d’origine. Lorsque le mari
décède, elle conserve ce droit pendant tout le temps qu’elle reste veuve. En
cas de rupture du lien matrimonial par divorce, elle est autorisée à continuer
de porter le nom du mari à condition que ce dernier ne s’y oppose pas
expressément.

Le ou les prénoms :

Le prénom accompagne le nom patronymique. Il peut y en avoir


plusieurs.
Le Code de la famille prend le soin de préciser que les pseudonymes (nom
d’emprunt choisi par celui qui le porte afin de dissimuler son véritable
nom) ne font pas partie du nom ni du prénom. Ils sont juridiquement
inexistants : « Le ou les pseudonymes, utilisés pour préciser l’identité d’une
personne, ne font pas partie du nom de cette dernière ».
Par extension, on considère que le surnom aussi ne fait pas partie du nom
(vocable supplémentaire ajouté au nom).

Contrairement au nom patronymique qui s’acquiert par filiation, mariage


ou décision de l’officier d’état civil, les prénoms sont choisis librement à la
naissance par les parents et déclarés à l’officier d’état civil.

II – Le droit au nom et la protection du nom.

** Le droit au nom : Le droit au nom se manifeste par les dispositions


prises par le législateur pour permettre à tous les sujets de droit personnes
physiques d’avoir un nom, que la filiation de l’enfant soit établie ou non.
Cela explique certainement que même lorsque les parents de l’enfant sont
inconnus, l’autorité publique soit tenue de lui donner un nom et un prénom.
Le nom apparait ainsi comme un élément nécessaire d’identification de
l’individu, de dignité humaine et de socialisation.
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Le droit au nom est un droit de la personnalité. Il a un caractère extra


patrimonial. Cette nature soumet celui qui porte le nom à un certain
nombre d’obligations en même temps qu’elle imprime au nom un certain
nombre de caractères.

D’abord, il est interdit à une personne de porter un nom autre que son
nom. Ensuite, il existe un principe d’immutabilité et d’indisponibilité du
nom. L’immutabilité interdit, ou rend exceptionnels, les changements de
nom. De tels changements ne sont pas impossibles mais soumis à des
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procédures précises. L’article 9 du Code de la famille précise que « les


prénoms de l’enfant figurant dans son acte de naissance peuvent être
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modifiés par jugement en cas d’intérêt légitime et, en cas d’adoption, sur le
seule demande de l’adoptant ». La modification du nom patronymique ou
nom de famille est plus complexe. Elle ne peut être autorisée que par décret
et toute personne ayant un intérêt légitime pourra faire opposition à une
telle modification dans un délai d’une année à compter de la publication
de la demande de modification au journal officiel

Le principe d’indisponibilité du nom fait du nom un élément hors du


commerce. L’individu ne peut céder (vendre) son mon. Ce principe connait
une certaine réalité mais aussi des assouplissements chaque fois que le
nom patronymique est utilisé à des fins commerciales par son titulaire
(lorsque le nom est utilisé comme enseigne ou marque par l’intéressé,
il peut être cédé en même temps que le fonds de commerce dont il fait
partie…)

**La protection du nom : Le nom entretient un lien étroit avec


la personnalité juridique, principalement le nom patronymique. Il est celui
d’une famille qui traduit l’appartenance à une lignée, une descendance.
Il fait par conséquent l’objet d’une protection à l’égard des tiers. L’article
11 du Code de la famille précise qu’un « intérêt même purement moral
peut permettre à toute personne d’agir en réclamation de son nom
patronymique et d’interdire à un tiers d’en faire usage ». Cet article vise
certainement l’usurpation du nom patronymique d’autrui c’est-à-dire des
hypothèses dans lesquelles une personne utilise le nom de famille d’autrui
comme nom patronymique (Exp : un Niang qui se fait appeler Mbacké). Les
dispositions légales sont alors très sévères car n’importe quelle personne
ayant le nom usurpé peut agir pour réclamer l’arrêt de cette situation.

La situation d’usurpation de nom patronymique est différente de celle de


l’usage abusif du nom d’autrui. Dans cette dernière hypothèse, un tiers
utilise le nom patronymique d’autrui, non pas comme nom patronymique,
mais pour un autre usage, commercial par exemple (un Fall qui ouvre une
boutique qu’il dénomme « Mbacké Informatique ». Le Code de la famille
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semble viser, à travers les dispositions de l’article 11, aussi bien l’usurpation
de nom patronymique que son usage abusif (Le droit français retient la
même solution. La jurisprudence y précise cependant que lorsque l’usage
du nom patronymique d’autrui est fait à des fins commerciales, les titulaires
de ce nom ne peuvent s’y opposer que si l’usage crée une confusion et
soit fait à des conditions dégradantes).

En droit sénégalais, la protection du nom ne vise pas seulement les tiers.

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Les personnes qui sont titulaires d’un nom patronymique elles-mêmes sont
autorisées à faire usage de leur nom sans toutefois en abuser. La responsabilité

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civile du titulaire du nom patronymique peut être engagée par les autres
titulaires de ce nom s’il en fait un usage abusif (Exp : un Seck qui utiliserait le
nom de famille Seck dans des conditions qui dégradent ce nom et déplaisent
aux autres membres de cette famille).

Section II – Le domicile

Il doit être identifié par référence à la résidence et à l’habitation (I). Aussi, son
importance vient du fait que sa détermination présente certains intérêts en
droit(II).

I – L’identification du domicile

Le domicile est le lieu du principal établissement de l’individu. Il est un pur


instrument du droit et cela explique certainement que l’individu puisse fixer
son domicile là où il le désire. Il apparaît comme le lieu de rattachement
juridique de la personne. Le domicile est juste un instrument de localisation
et n’entretient aucun lien avec la personnalité juridique. Aussi, est-il parfois
permis à une personne d’avoir plusieurs domiciles (domicile matrimonial,
commercial…). L’article 12 du code de la famille précise à cet effet que
«la personne est domiciliée au lieu de son principal établissement et, pour
son activité professionnelle, au lieu où elle exerce celle-ci».

Il n’en reste pas moins que le domicile est parfois fixé par la loi
discrétionnairement (mineurs au domicile de leurs parents, les justiciables
au domicile de leurs conseils, avocats..).

Le domicile doit être distingué d’autres localisations connues du droit.


La résidence est le lieu où la personne vit de façon normale, habituelle.
Par contre, l’habitation est un lieu de séjour bref et occasionnel. Ainsi, un
expert-comptable peut être domicilié à l’adresse de son cabinet et résider
au «point E» où il vit avec sa famille. Lorsqu’il se rend à Saint Louis pour
3 jours, il y habite pendant la durée de son séjour.
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Parfois, les concepts de domicile, résidence et habitation sont confondues


par le droit (par exemple, la violation de domicile s’entend d’une violation
aussi bien du domicile que de la résidence ou de l’habitation, célébration du
mariage au centre d’état civil du domicile ou résidence de l’un des poux…)

II – Les intérêts du domicile

Le domicile n’entretient pas un lien étroit avec les droits de la personnalité


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comme le nom. Il est un simple instrument du droit visant à localiser


juridiquement les sujets de droit dans l’espace. Cette nécessité de
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localisation des individus fait que le domicile est obligatoire. Aussi, défaut
de domicile, la résidence en tient lieu.

Cette localisation géographique de l’individu par le droit permet


d’abord de savoir où les correspondances ayant un caractère
juridique doivent être envoyés (citations à comparaître, convocation
à un examen, mise en demeure, citation interpellative…).
Le domicile, en tant qu’instrument de localisation géographique
de la personne, est imparfait. L’individu peut, en effet, ne
pas se trouver à son domicile alors qu’une correspondance à
caractère juridique y arrive (Exp: personne partie en vacance).
Cela explique certainement que, de plus en plus, le droit ne se satisfait
plus d’une simple localisation théorique. Dans certaines procédures,
le législateur peut rendre obligatoire que l’information (interpellation,
convocation, citation à comparaitre, saisie…) soit portée à la connaissance
directe de l’individu (accusé de réception, acte servi par huissier…)

Un autre intérêt du domicile, en droit de la procédure civile, réside dans


le fait que le domicile sert à déterminer souvent la juridiction compétente
(divorce = tribunal du domicile de la femme, domicile du défendeur,
principe général…).

En droit des obligations, on retient que la dette est quérable et non portable
ce qui signifie que le paiement se fait au domicile du débiteur…

Le nom et le domicile servent donc à identifier le sujet de droit. Avec


d’autres éléments comme la date de naissance, le lieu de naissance, le
statut matrimonial, le sexe, la capacité ou l’incapacité, ils constituent l’état
de la personne.
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CHAPITRE III – la preuve de l’état des personnes : l’état civil
L’état de la personne renvoie au statut personnel de l’individu. Il porte
les éléments d’individualisation et de caractérisation de la personne
dans la société. Les éléments caractéristiques qui permettent cette
individualisation sont le nom, le sexe, l’âge, la filiation, la nationalité, la
situation matrimoniale…

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Ces éléments d’identification de la personne sont constatés dans des
documents particuliers appelés registres de l’état civil. Les actes de

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l’état civil qui traduisent le contenu de ces registres, constituent, en
droit sénégalais, le mode principal de preuve de l’état des personnes.
En effet, aux termes de l’article 29 du Code de la famille, « l’état des
personne n’est établi et ne peut être prouvé que par les actes de l’état
civil ». Les éléments qui caractérisent l’état des personnes proviennent
très souvent de faits juridiques (naissance, décès, mariage...).
En droit de la preuve, la preuve des faits juridiques est libre. Pourtant, les
faits juridiques qui concernent l’état des personnes sont d’une importance
telle dans la société qu’une exception est apportée en ce qui concerne leur
mode de preuve : ils ne peuvent être prouvés que par des écrits, et des
écrits authentiques, c’est-à-dire établis par des représentants de l’Etat.

Un certain nombre d’autorités étatiques intervient dans la constatation


de l’état des personnes et y exerce des prérogatives multiples (Section I).
Aussi, cette constatation aboutit à l’établissement d’actes principaux et
secondaires (Section II).

Section I – Les autorités intervenant dans la constatation de


l’état des personnes.

L’autorité la plus importante est sans doute l’officier d’état civil (I). À côté, le
procureur de la République (II) et le juge (III), chacun en ce qui le concerne,
sont appelés à remplir certaines fonctions dans cette constatation.

I – L’officier de l’état civil.

Il faut l’identifier d’abord (A) et étudier ses prérogatives ensuite (B)

A – L’identification de l’officier de l’état civil

Dans les communes, le Code de la famille désigne comme exerçant les


fonctions d’officier d’état civil : le maire, un adjoint, un conseiller municipal
ou un fonctionnaire spécialement désigné ou les autorités désignées par
la loi en cas de régime municipal spécial (armée par exemple).
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(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

Dans les sous-préfectures, ces fonctions sont dévolues au sous-préfet ou


une personne sachant lire couramment et écrire le français et désignée
par arrêté du préfet.

Hors du Sénégal, les constatations concernant l’état des personnes sont


faites par les autorités diplomatiques ou consulaires lorsqu’elles existent.
Les fonctions d’officier de l’état civil sont exercées dans des centres
principaux d’état civil auxquels sont rattachés des centres secondaires.
16

B – Les prérogatives de l’officier d’état civil.


Agrégé des facultés de droit

Les termes de l’article 32 al. 3 et 4 du Code de la famille précisent que


l’officier de l’état civil reçoit les déclarations de naissance et de décès.
Il constate les mariages dans les conditions prévues par la loi. D’autres
éléments de l’état des personnes sont reçus par l’officier d’état civil telle
l’adoption, la reconnaissance d’un enfant naturel…

L’officier de l’état civil a une fonction générale de tenue de la conservation


des registres, des transcriptions et mentions en marge des actes, de la
délivrance de copies ou des extraits des actes de l’état civil. Les actes
proprement dits sont établis par l’officier lui-même sur la base des
déclarations des parties. Les transcriptions sont la reproduction sur les
registres de l’état civil de certains actes dressés ailleurs ou de certains
jugements (par ex : actes d’état civil concernant les sénégalais vivant
à l’étranger). Les mentions marginales sont les mentions relatives aux
événements affectant l’état civil d’une personne et devant être portées sur
un acte déjà établi (Exp : divorce faisant l’objet d’une mention sur l’acte
de naissance).

Les constatations faites par l’officier de l’état civil sont consignées dans des
registres. Les registres comportent des feuillets reliés composés chacun
de trois volets. Chaque volet donne l’énonciation de toutes les mentions
qui doivent figurer dans l’acte de sorte que l’officier de l’état civil n’ait qu’à
remplir le blanc, signer et faire signer la personne. Le volet n° 1 est remis
immédiatement au déclarant, le volet N° 2 et 3 conservé au centre d’état civil
pendant l’année en cours. A la fin de chaque année, le registre des volets n°
3 est conservé au centre d’état civil alors que le registre des volets n° 2 est
envoyé au greffe du Tribunal régional.

II – Le procureur de la république

C’est un magistrat du parquet. Il représente le ministère public qui est chargé


de la défense de l’intérêt général en mettant en œuvre l’action publique.
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


Le procureur de la république a une mission de vérification des registres
de l’état civil qui sont déposés au greffe du Tribunal de grande instance.
Chaque année en effet, le registre des volets n° 2 est séparé de celui des
volets n° 3 et envoyé au greffe du Tribunal.

Après vérification des registres, le procureur de la république dresse un


rapport au ministre de la justice sur la tenue des registres par l’officier
de l’état civil et sur le contrôle effectué par le juge du tribunal de grande

17
instance. Il peut mettre en œuvre l’action publique lorsqu’il relève des
irrégularités et infractions. Lorsqu’une déclaration lui semble être contraire

Agrégé des facultés de droit


à la loi, le procureur de la république peut agir en rectification ou en action
d’état.

L’action en rectification tend juste à rectifier l’erreur commise devant le juge


du tribunal départemental. L’action d’état est celle qui est portée devant
le juge à l’effet de modifier ou constituer un état (action en divorce), soit
d’établir un état (action en recherche de paternité), soit pour contester un
état (action en désaveu de paternité).

Lorsque l’irrégularité commise constitue en outre une infraction c’est-à-


dire une violation du droit pénal, l’action devant la juridiction répressive
est mise en œuvre par le procureur de la république. Elle peut être dirigée
contre l’officier de l’état civil lui-même ou toute autre personne ayant fait
une fausse déclaration, témoignage concernant l’état d’une personne.

L’intervention du procureur de la République s’étend aussi à la procédure


de reconstitution des registres. Lorsque la destruction ne porte que sur un
seul registre, les exemplaires détruits sont reconstitués à la diligence du
procureur de la république à l’aide de l’exemplaire subsistant.

III – Le juge

Le Tribunal d’instance est la juridiction de droit commun en matière d’état


civil. Le juge intervient par trois sortes en cette matière.

Comme l’officier d’état civil, le juge est lui-même parfois amené à constater
certains éléments de l’état de personnes (déclaration faite par les intéressés
au-delà d’une période d’une année).

Lorsque le délai prévu par la loi pour déclarer une naissance, un décès ou
un mariage à l’officier de l’état civil est expiré, le Code de la famille prévoit
les conditions dans lesquelles le juge du Tribunal de grande instance peut
être saisi. Ce dernier peut rendre un jugement autorisant l’inscription
tardive de l’acte sur les registres de l’état civil.
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

En second lieu, le juge a une mission de contrôle. L’article 35 du Code de la


famille dispose que : « une fois par an, obligatoirement, et chaque fois qu’il
l’estime nécessaire, le juge de paix procède à la vérification des registres de
l’état civil de l’année en cours en se transportant dans les différents centres de
son ressort. ». Le juge apprécie la tenue générale des registres et adresse ses
observations à l’officier de l’état civil.

Le juge intervient en cas de contestation portant sur l’état civil. En cas de


18

rectification contentieuse d’un acte ou d’une mention, le juge est saisi pour
trancher le litige. Aussi, les irrégularités et infractions constatées par le
Agrégé des facultés de droit

procureur de la République peuvent faire l’objet d’une saisine du juge qui


tranche. Le contentieux de l’état civil peut déboucher sur un contentieux
des actions d’état c’est-à-dire celui qui tend à établir, contester ou modifier
l’état des personnes.

Enfin, le juge est appelé à se prononcer sur la responsabilité civile et pénale de


l’officier de l’état civil lui-même mais aussi de toute personne ayant commis
une faute ou négligence dans la déclaration ou l’établissement des actes de
l’état civil.

Section II – Les actes de l’état civil

Aux termes de l’article 30 du code de la famille, « toutes les naissances,


tous les mariages et tous les décès sont inscrits sous forme d’acte sur les
registres de l’état civil ». Nous étudierons successivement ces actes

I – Les actes de naissance

L’officier de l’état civil établit l’acte de naissance à la


suite d’une déclaration de naissance effectuée par une
personne faisant partie de celles désignées par le législateur.
Le régime juridique de cette déclaration montre la volonté du législateur
sénégalais de faire en sorte que le maximum d’enfant soit déclaré du
fait de l’importance de l’état civil dans la preuve de l’état des personnes.
Lorsqu’un enfant nait, le Code de la famille soumet d’abord le père et la
mère à l’obligation de déclaration mais y adjoint les ascendants ou un
proche parent, le médecin, la sage-femme ou toute personne ayant assisté
à la naissance. En second lieu, en cas de non déclaration par ces personnes,
les chefs de village ou délégués de quartier sont tenus d’y procéder. Le
Code de la famille y ajoute le Procureur de la République qui peut, à toute
époque, faire une déclaration de naissance dont il aurait eu connaissance.

Ces personnes disposent d’un délai d’un mois pour pourvoir à une
telle déclaration. Ces dispositions sont pertinentes mais il est possible
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


de se demander si les personnes désignées par la loi ont toujours par
devers elles les informations exactes concernant l’enfant (nom des
père et mère, sexe, date de la naissance, nom donné à l’enfant…).
Les personnes désignées par la loi ont par ailleurs tout intérêt à donner
des informations exactes concernant les naissances qu’elles déclarent cat
toute déclaration mensongère est punie d’une peine de deux mois à deux
ans d’emprisonnement et d’une amende de 20 000 à 100 000 francs.

19
La procédure de déclaration devient plus complexe lorsque la naissance
remonte à plus d’un mois et demi. Les personnes précitées sont alors

Agrégé des facultés de droit


toujours autorisées à faire la déclaration mais nécessairement en produisant
un certificat émanant d’un médecin ou d’une sage-femme ou qu’il fasse
attester la naissance par deux témoins majeurs. Il s’agira d’une déclaration
tardive et la mention « inscription de déclaration tardive » devra figurer en
tête de l’acte dressé par l’officier de l’état civil.

Lorsque la naissance s’est produite au-delà d’une année, une autorisation


du juge de paix (tribunal d’instance) est nécessaire pour que l’officier de
l’état civil puisse dresser l’acte de naissance.

Le contenu de l’acte de naissance illustre la volonté du législateur


de détenir, depuis la naissance, certaines informations susceptibles
d’identifier exactement sur l’état de l’enfant. L’acte de naissance dressé
par l’officier de l’état civil doit énoncer l’année, le mois, le jour, l’heure, le
lieu de naissance, le sexe de l’enfant. Il doit aussi comporter les prénoms,
nom, âge, profession et domicile des père et mère et s’il ya lieu, ceux du
déclarant ou des témoins.

Un problème particulier se pose lorsque l’enfant concerné est un enfant


naturel. Le nom du père ne peut alors être porté à l’acte de naissance que
lorsque c’est l’intéressé lui-même qui procède à la déclaration. Il accomplit
ainsi un acte de reconnaissance de l’enfant. Il arrive par ailleurs que le père
procède à une déclaration tardive, c’est-à-dire reconnait l’enfant alors qu’un
acte de naissance a été établi sans indication du nom d’un père. L’officier de
l’état civil est tenu d’établir un nouvel acte de naissance qui reproduit toutes
les mentions de l’ancien acte de naissance en y ajoutant l’identité de l’auteur
de la reconnaissance. S’agissant d’un enfant naturel simplement conçu et non
encore né, l’officier de l’état civil peut dores et déjà recevoir une reconnaissance
du père et dresse un acte portant « reconnaissance d’un enfant à naitre » et
sans indication des informations concernant l’enfant lui-même.

Les prérogatives de l’officier de l’état civil sont renforcées lorsque les


informations nécessaires à la déclaration sont incertaines car il est alors
autorisé à fixer lui-même le moment de la naissance lorsque les déclarants ne
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

sont pas en mesure de donner une date exacte. Il en va de même lorsque les
parents de l’enfant sont inconnus, ce qui contraint l’officier de l’état civil à lui
donner un nom et un prénom pour sauvegarder ses intérêts.

II – L’acte de décès

Il est établi sur déclaration d’un des parents du défunt ou de toute autre
personne possédant les renseignements nécessaires sur l’état civil du décédé
20

et nécessaire à l’établissement de l’acte. Le code de la famille y adjoint les chefs


de village et délégués de quartier qui sont tenus à une telle déclaration. Les
Agrégé des facultés de droit

personnes chargées de l’administration des hôpitaux, formations sanitaires,


maternités, cliniques, sont tenus de déclarer dans les 24 heures, les décès qui
surviennent dans leur structures à l’officier de l’état civil. La même obligation
pèse sur les directeurs et gardiens d’établissement pénitentiaires ou de
rééducation lorsque le décès survient dans de tels établissements.

Le régime juridique de la déclaration varie selon le moment de la déclaration.


La déclaration instantanée, ou celle faite dans les 45 jours du décès ne semble
pas poser de problème et s’effectue sur simple déclaration des intéressés. Par
contre, lorsqu’un mois et quinze jours se sont écoulés depuis le décès, l’officier
de l’état civil ne peut en recevoir la déclaration qu’avec la production d’un
certificat émanant d’un médecin ou que le déclarant fasse attester le décès
par deux témoins majeurs. Au-delà d’une période d’une année, une décision
du tribunal départemental est obligatoire pour autoriser l’officier de l’état civil
à dresser l’acte de décès.

L’acte de décès doit comporter un certain nombre d’informations dénommées


mentions. Certaines sont relatives à l’identité de la personne décédée (sexe,
nom, prénoms, date et lieu de naissance, profession et domicile). D’autres
concernent sa filiation (nom, prénoms, profession et domicile de ses père et
mère), son statut matrimonial (nom, prénoms du ou des conjoints si la personne
décédée était mariée, veuve ou divorcée) et d’autres encore à l’identité du
déclarant (nom, prénom, âge, profession, degré de parenté avec le défunt...)

III- L’acte de mariage

Contrairement aux naissances et aux décès qui se déroulent hors de la


vue de l’officier de l’état civil, ce dernier est parfois amené à prendre
directement connaissance lui-même, ou son représentant, des événements
constituant un mariage. L’officier de l’état civil, ou son représentant, peut
en effet célébrer le mariage ou le constater.

Dans le mariage constaté, une autorité autre que l’officier de l’état civil célèbre
le mariage mais en la présence de cet officier ou de son représentant. Dans le
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


mariage célébré par l’officier de l’état civil, ce représentant de l’Etat procède
lui même à cette célébration. Dans les deux cas, la comparution des époux est
posée comme condition aussi bien dans la phase antérieure à la célébration
que dans celle de la célébration à proprement parler. Les futurs époux doivent
remettre personnellement à l’officier de l’état civil une copie de leur acte de
naissance datant de moins de trois mois ou, à défaut, un acte de notoriété
délivré par le juge et contenant la déclaration faite par trois témoins.

21
Lorsque les époux n’ont fait ni célébrer ni constater leur union par l’officier de
l’état civil, ils disposent d’un certain délai pour faire une déclaration tardive

Agrégé des facultés de droit


de mariage. Ils auront à produire les mêmes documents que pour le mariage
célébré ou constaté par l’officier de l’état civil en plus d’être accompagné
chacun de deux témoins qui certifient de l’échange des consentements et à la
conclusion du mariage.

L’acte de mariage doit contenir un certain nombre de mentions qui renseignent


sur l’identité des époux (nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile..),
sur l’option matrimoniale (monogamie, limitation de polygamie…), le choix
des époux concernant le paiement d’une dot, le régime matrimonial choisi par
les époux (séparation des biens, communauté…), les prénoms et noms des
précédents conjoints de chacun des époux…
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

CHAPITRE IV – Les incapacités


Notre démarche avait fini de nous convaincre que la personnalité
juridique s’acquiert, pour les personnes physiques, à la naissance, et que
l’enfant pouvait acquérir des droits dès la conception lorsqu’il en allait
ainsi des intérêts de l’enfant. La personnalité juridique a pour principale
conséquence d’octroyer à l’individu des droits et des obligations en a
faisant un sujet de droit. L’exercice de ces droits et obligations trouve
22

pourtant des limites chez certaines personnes que la loi veut protéger du
fait de leur inexpérience ou de la défaillance de leurs facultés mentales
Agrégé des facultés de droit

ou encore comme punition de leur comportement répréhensible.


Notre droit distingue ainsi entre deux types d’incapacité. L’incapacité de
défiance et l’incapacité de protection. L’incapacité de défiance apparait
comme une sanction qui frappe une personne ayant été condamnée pour
certains crimes particulièrement graves. Cette personne peut voir sa
capacité de jouissance ou d’exercice neutralisées comme sanction. Dans
l’incapacité de protection, la mesure est plus une mesure de sauvegarde
à l’égard de certaines personnes qui ne sont pas en mesure de participer
au commerce juridique au même pied d’égalité que les autres. Il s’agit
soit de ceux que la loi désire protéger du fait de leur inexpérience (les
mineurs), soit des majeurs dont les facultés intellectuelles ou physiques
sont atteintes.

Les êtres humains débutent toujours leur vie dans l’incapacité (bébé,
enfance...). Lorsqu’ils vivent longtemps, ils terminent leur vie dans
l’incapacité (vieillesse, sénilité, maladie...). Les incapacités entretiennent
donc un lien avec les cycles de la vie. Le régime juridique des incapacités
témoigne donc de l’importance de la solidarité dans notre société c’est-à-
dire de l’assistance que les membres de la société apportent à ceux qui sont
dans des situations d’incapacité. L’Etat joue un rôle non négligeable dans la
prise en charge des incapables mineurs comme majeurs. Mais surtout, l’Etat
utilise l’institution familiale comme instrument pour protéger les incapables.
La famille apparait ainsi comme le premier lieu de socialisation et de
solidarité.

Il convient d’étudier le régime juridique des incapables mineurs avant celui


des incapables majeurs.

SECTION I – Les incapables mineurs

En droit sénégalais, il existe une certaine harmonisation de l’âge de la


majorité civile et de la majorité électorale. Le mineur est désormais celui
qui n’a pas atteint l’âge de 18 ans révolus. Ceux qui n’ont pas atteint cet
âge sont en état de minorité civile et donc considérés comme incapables
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


de se gouverner eux-mêmes et d’exercer leurs droits. L’émancipation
fait acquérir au mineur la pleine capacité juridique alors même qu’il n’a
pas encore atteint l’âge de dix-huit ans révolus. Elle intervient lorsqu’une
personne de moins de dix-huit ans contracte mariage. Le régime juridique
de protection dont bénéficie le mineur concerne débord ses actes (I),
l’administration de sa personne (II) et celle de ses biens (II)

I – le régime juridique des actes du mineur

23
Le mineur est considéré comme incapable mais peut cependant
accomplir tous les actes de la vie courante (prendre un taxi, acheter

Agrégé des facultés de droit


un billet de concert…). L’incapacité qui le caractérise ne s’étend
qu’aux actes autres que ceux de la vie courante c’est-à-dire ceux
susceptibles d’affecter dangereusement son patrimoine ou ses droits.
Ces actes ne peuvent être accomplis que par son représentant (il ne s’agit
pas à priori d’un consentement qui vient s’ajouter à celui du mineur, le
représentant agit seul sauf cas prévus par la loi : mariage, adoption…).

Lorsque le mineur contracte alors qu’il n’en avait pas la capacité, l’acte
peut être annulé pour défaut de capacité. Cette annulation est cependant
soumise à des règles précises. S’agissant d’une nullité relative, seul le
mineur ou son représentant peuvent la requérir à l’exclusion du majeur
avec qui le mineur a contracté. Aussi, l’action en nullité doit être intentée
dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice qui affecte
l’acte lorsque l’action est mise en œuvre par le représentant du mineur
et dans un délai de deux ans à compter de la cessation de l’incapacité
(majorité) lorsque l’action est intentée par le mineur devenu majeur. Le
mineur ou son représentant ne peuvent par ailleurs exiger l’annulation que
lorsque l’opération a tourné au détriment du mineur, c’est-à-dire lorsque le
mineur a gagné moins qu’il n’a perdu. Lorsque le mineur n’a pas été lésé,
l’acte n’est pas annulable. Enfin le co-contractant du mineur peut échapper
à l’annulation en prouvant sa bonne foi c’est-à-dire sa méconnaissance de
l’incapacité du mineur. Cependant, la simple déclaration de capacité du
mineur n’est pas suffisante pour constituer cette bonne foi. La preuve de la
bonne foi peut cependant être apportée lorsque le mineur, en contractant,
avait présenté de faux document pour prouver sa qualité de majeur

Civilement, les actes dommageables du mineur engagent la responsabilité


des parents. Les parents sont ceux qui réparent les dommages causés
aux tiers par le mineur : « est responsable du dommage causé par l’enfant
mineur habitant avec lui celui de ses pères, mère ou parent qui en a la
garde » (Art. 143 du COCC)
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

II – L’administration de la personne du mineur

Lorsque l’on s’intéresse au gouvernement de la personne du mineur,


le régime juridique de la protection n’a plus pour objectif de protéger
le mineur contre les tiers. Le législateur prend en compte le fait que le
mineur est dans une situation de fragilité économique et intellectuelle.
La personne à qui est confiée la prérogative d’organiser, de gérer et
contrôler la vie du mineur est celle qui détient la puissance paternelle.
24

Il faut identifier les règles d’attribution de la puissance paternelle (A) et


ensuite les prérogatives qu’elle octroie (B)
Agrégé des facultés de droit

A – l’attribution de la puissance paternelle

Dans la famille légitime, la puissance paternelle appartient au père


et mère. Cependant, durant le mariage, elle est exercée par le père
en qualité de chef de famille. Elle peut cependant être exercée
par la mère en cas de déchéance de la puissance paternelle du
père (condamnation pour abandon de famille, crimes et délits sur
mineurs…), en cas d’éloignement du père (voyage de longue durée),
en cas d’incapacité du père (démence, comas…). Le père peut lui-même
déléguer la puissance paternelle à la mère ou à une autre personne.

Dans la famille naturelle, la puissance paternelle est attribuée selon les


mêmes règles que dans la famille légitime lorsque l’enfant a été reconnu
par ses deux parents. Lorsque l’enfant naturel n’a été reconnu que par sa
mère, celle-ci exerce la puissance paternelle. Lorsque le père reconnaît
ultérieurement l’enfant, la mère conserve la puissance paternelle sauf
décision contraire du juge qui l’octroie au père (bonnes mœurs, danger,
insuffisance de moyens…). Enfin, lorsque la filiation de l’enfant naturelle
n’est établie à l’endroit d’aucun de ses parents, la puissance paternelle est
exercée par un tiers désigné par le juge et nommé tuteur.

Dans la famille adoptive, celui qui adopte l’enfant exerce la puissance


paternelle. Dans le cas d’adoption par deux époux, on suit les mêmes
règles que pour les enfants légitimes.

B – L’exercice de la puissance paternelle.

Le mineur ne peut s’autodéterminer du fait de son inexpérience et a besoin


d’être pris en charge et orienté. Celui qui exerce la puissance paternelle se
voit reconnaître des prérogatives et le devoir de fixer chez lui la résidence
de l’enfant, de surveiller ses actes et relations, de régler sa sépulture et de
protéger sa mémoire. L’article 245 du CF lui permet d’infliger à l’enfant
réprimandes et corrections dans la mesure compatible avec son âge et
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


l’amendement de sa conduite. Cette disposition entre certainement en
contradiction avec les prévisions de la Convention de New York ratifiée
par le Sénégal et qui interdisent toute violence sur l’enfant.

Les prérogatives reconnues au détenteur de la puissance paternelle


doivent cependant être exercées dans l’intérêt exclusif de l’enfant. Aussi,
les actes et décisions prises par le détenteur de cette autorité peuvent
faire l’objet d’une contestation devant le juge du Tribunal d’instance par

25
tout parent lorsque ce dernier a des raisons de croire que la décision ou
l’acte ne va pas dans le sens des intérêts de l’enfant.

Agrégé des facultés de droit


La puissance paternelle prend fin par la majorité, le mariage et
l’émancipation. L’émancipation, qui relève le mineur de son incapacité a
lieu de plein droit par le mariage. La puissance paternelle cesse également
lorsque celui qui l’exerçait la transfère à une autre personne jouissant de la
pleine capacité civile sous agrément du Président du tribunal d’instance.
Enfin, la puissance paternelle cesse en cas de déchéance de la personne qui
l’exerçait. Il en va ainsi lorsque le détenteur de la puissance paternelle a été
condamné pour certains crimes et délits graves (incitation à la débauche
de mineurs, délit ou crime sur son enfant ou sur la personne d’un enfant,
mauvais traitements, inconduite notoire…).

III- La gestion du patrimoine du mineur

Il n’est pas rare que le mineur soit propriétaire d’un patrimoine consistant.
La gestion de ce patrimoine est assurée selon deux régimes : celui de
l’administration légale et celui de la tutelle.

A- L’administration légale

L’administration légale est un attribut de la puissance paternelle. Elle est


exercée par celui qui détient la puissance paternelle. La loi lui reconnaît le
pouvoir de représenter «le mineur dans tous les actes de la vie civile qu’il
ne peut ou ne doit effectuer lui-même». Cette gestion est placée sous
le contrôle du juge des tutelles qui a un pouvoir de surveillance sur les
activités de l’administrateur légal.

La loi pose un certain nombre de limites au pouvoir de l’administrateur


légal. Certains actes ne peuvent en effet être accomplis que sur autorisation
du juge des tutelles : vente de gré à gré des biens du mineur, apport en
société d’un immeuble appartenant au mineur, emprunt au nom du mineur,
renonciation à un droit appartenant à un mineur …
D’autres actes lui sont purement et simplement interdits : acheter les biens
du mineur. Aussi, chaque fois que les intérêts de l’administrateur légal sont
en opposition avec ceux du mineur, les prérogatives de l’administrateur
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

légal sont en principe transférées à une autre personne, nommée tuteur


ad hoc pour cet acte.
L’administration légale prend fin à la majorité du mineur, en cas
d’émancipation ou lorsque le juge des tutelles la reconvertit en tutelle.

B- La tutelle

Sont placés sous le régime de la tutelle les enfants pour qui il n’est pas
26

possible de désigner un détenteur de la puissance paternelle : enfants


légitimes dont le père et la mère sont tous deux décédés ou se trouvent
Agrégé des facultés de droit

dans des cas d’incapacité ou de déchéance, enfants naturels dont la filiation


n’est établie à l’égard d’aucun des parents, conversion de l’administration
légale en tutelle par le juge… Un certain nombre d’organes interviennent
dans la tutelle (1). Il faut les identifier avant de voir les prérogatives du
tuteur (2).

1- Les organes de la tutelle

Il y a le tuteur, le conseil de famille, le juge des tutelles et le subrogé


tuteur.
- Le tuteur : il exerce à la fois les pouvoirs de puissance paternelle dont
l’administration légale fait partie. Il peut être désigné par testament
par le dernier détenteur de la puissance paternelle qui est décédé. Il
peut aussi être désigné par le conseil de famille ou le juge des tutelles.
La loi pose des conditions restrictives, sévères pour le choix du tuteur
(exclus : mineurs, majeurs incapables, peines afflictives ou infamantes,
inconduites notoires).

- Le conseil de famille : il est composé de quatre membres dont le


subrogé tuteur. Ils sont choisis par le juge des tutelles parmi les parents
ou alliés du père ou de la mère ou des tiers. Il faut cependant que
les deux lignes de parenté soient respectées. Le conseil de famille
désigne le tuteur si celui-ci n’a pas été désigné par testament.
Il contrôle par ailleurs la gestion faite par le tuteur et saisit le juge des
tutelles lorsque cette gestion lui semble être contraire aux intérêts de
l’enfant.

- Le juge des tutelles : c’est le président du tribunal départemental dans


le ressort duquel se trouve le domicile du mineur. Le juge des tutelles
est chargé du contrôle de toutes les administrations légales et tutelles
de son ressort. Il peut poser des questions aux personnes chargées
des tutelles et administrations légales, leur faire des observations et
trancher les litiges entre ces personnes et les conseils de famille…
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


- Le subrogé tuteur : contrairement au tuteur, c’est un membre du
conseil de famille. Il est chargé de surveiller les activités du tuteur. Il
a la possibilité de saisir le juge des tutelles lorsqu’une anomalie a été
détectée. Il représente par ailleurs le mineur lorsque les intérêts de
celui-ci sont en opposition avec ceux du tuteur.

2- Les prérogatives du tuteur

27
Le tuteur représente le mineur pour tous les actes de la vie civile qu’il ne
peut ou ne doit effectuer lui-même. Le tuteur peut accomplir tout seul les

Agrégé des facultés de droit


actes d’administration et de conservation (donner en location les biens
du mineur, entretenir ces biens, saisir le juge lorsque des tiers portent
atteinte au bien du mineur…). Il existe une autre catégorie d’actes que le
tuteur ne peut accomplir qu’avec le consentement du conseil de famille
ou du juge des tutelles : actes portant sur des biens dont la valeur est
supérieure à un million de frs, renonciation à une succession, acceptation
pure et simple d’une succession, partage de biens en indivision.., bref tous
les actes pouvant faire sortir des biens du patrimoine du mineur ou créer à
sa charge de nouvelles obligations nécessitent l’autorisation expresse du
conseil de famille ou du juge des tutelles. Une troisième catégorie d’actes
est interdite au tuteur : ceux par lequel il acquiert lui-même les biens du
mineur ou l’acceptation de la cession d’un droit contre le mineur.

A la fin de la tutelle (majorité du mineur, émancipation, décès du mineur),


le tuteur établit un compte définitif. Il rend compte au juge des tutelles
de sa gestion. Sa responsabilité peut être engagée pour faute de gestion,
fraudes, légèretés…

Section II – Les incapables majeurs

Deux catégories de majeurs peuvent être frappées d’une incapacité


d’exercice. Les premiers sont les majeurs condamnés à une peine afflictive
ou infamante c’est-à-dire pour certains crimes graves. Cette sanction
s’accompagne d’une incapacité d’exercice de certains droits pendant
un certain temps : om parle alors d’incapacité de défiance. La seconde
catégorie de majeurs incapables est celle de personnes majeures touchées
par une incapacité de protection. Ceux sont ceux présumés hors d’état
d’exprimer leur volonté en raison de la défaillance de leurs facultés mentales
ou physiques. La catégorie des majeurs incapables et que le législateur
tente de protéger n’est pas aussi homogène que celle des mineurs. Trois
régimes de protection sont en effet prévus par le Code de la famille en vue
de la prise en charge des majeurs incapables. Ces régimes sont variables
dans leurs effets en fonction de la gravité de la détérioration de facultés de
l’intéressé : le placement sous la sauvegarde de justice, la tutelle, la curatelle
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)
Mohamed Bachir Niang

I – Le placement sous sauvegarde de justice

Il s’applique aux majeurs interné ou soigné à domicile. Les biens du majeur


sont alors administrés par un curateur qui a pour mission de « faire usage
de ses pouvoirs pour adoucir le sort du malade et accélérer sa guérison »
(Art. 346 CF). En cas d’internement, le curateur est le Directeur ou
responsable de l’établissement d’internement. Lorsque le malade n’est pas
interné, il est nommé un mandataire chargé d’administrer ses biens. La mise
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sous sauvegarde de justice s’adresse à de individus atteint d’incapacité


totale mais très souvent temporaire (personnes dans le coma, accidentés
Agrégé des facultés de droit

de la circulation, étudiant ou travailleurs en dépression…).

Le placement sous sauvegarde de justice produit un certain nombre


d’effets sur les actes accomplis par le majeur. Ces actes sont présumés
conclus avec absence de consentement du majeur et donc susceptibles
d’être annulés. Le placement sous protection de justice cesse lorsque
l’internement ou les soins prennent fin par le retour du majeur à la santé
constatée par le juge ou sa transformation en tutelle

II – La tutelle

Elle concerne des cas d’incapacité plus sévères. Elle est ouverte lorsque
l’altération des facultés mentales et telle que l’individu a besoin d’être
représenté de façon continue dans les actes de la vie civile. L’ouverture
d’une tutelle peut être demandée par l’intéressé lui-même, ses ascendants,
descendants, frères et sœurs, le curateur et le ministère public. Il faut
cependant qu’une enquête soit diligentée par le parquet et que le juge ait
au préalable auditionné l’intéressé dont la mise en tutelle est demandée.

Les règles qui organisent la tutelle des majeurs sont très semblables à
celles de la tutelle des mineurs (représentation complète). Le régime
juridique des actes du majeur en tutelle est pourtant plus sévère : tous les
actes accomplis par l’individu agissant seul, après le jugement de mise en
tutelle, sont nuls de plein droit. Les actes posés antérieurement à cette
ouverture peuvent être annulés si la cause qui a déterminé l’ouverture de la
tutelle existait notoirement (était connue du grand public) à l’époque des
faits. La nullité est une nullité relative qui ne peut être demandée que par
l’incapable et son représentant. Contrairement à la tutelle des mineurs, il
n’existe dans la tutelle des majeurs ni conseil de famille ni subrogé tuteur.

III – La curatelle

Elle est ouverte dans deux cas : d’abord lorsque les facultés mentales d’un
majeur sont altérées de telle sorte que, sans être hors d’état d’agir par lui-
DROIT CIVIL
(Droit des personnes et de la famille)

Mohamed Bachir Niang


même, ce dernier a cependant besoin d’être contrôlé et conseillé dans les
actes de la vie civile. D’autre part, la curatelle est ouverte lorsque le majeur,
« par sa prodigalité, son intempérance ou son oisiveté, s’expose à tomber
dans le besoin ou compromet l’exécution de ses obligations familiales »
(Art. 365 CF).

Le majeur en curatelle est dans une situation moins dramatique que


celui qui est en tutelle. Il est dans une situation de « semi-capacité » qui

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lui impose d’agir avec l’assistance d’un curateur. Cette assistance est
nécessaire pour les actes de disposition d’une certaine importance ; cette

Agrégé des facultés de droit


assistance est aussi nécessaire lorsque le majeur doit recevoir des capitaux
ou en faire usage. Lorsque le curateur refuse son assistance à un acte, le
majeur lui-même peut demander une autorisation supplétive au juge des
tutelles L’acte passé par le majeur en curatelle peut être frappé de nullité
lorsque cette assistance était rendue obligatoire par la loi. Même pour
les actes que le majeur en curatelle peut accomplir seul, une action en
réduction est possible lorsque l’opération a tourné en sa défaveur. Dans
cette hypothèse, le juge ne fait pas disparaitre l’acte mais opère une «
réfaction », modification du contrat, pour restituer par exemple une partie
des biens achetés par l’incapable.

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