Vous êtes sur la page 1sur 12

Synergies Algérie n° 24 - 2017 p.

213-224

La fonction syntaxique
GERFLINT intraphrastique de la ponctuation :
ISSN 1958-5160
ISSN en ligne 2260-5029
Quel enseignement au collège algérien ?
Hassiba Addou
Université de Sidi-Bel-Abbès, Algérie
addouhassiba@yahoo.fr
Belabbas Missouri
Université de Sidi-Bel-Abbès, Algérie
yacine_missouri22@outlook.fr

Résumé
Par le biais d’une série d’observations de classes que nous avons effectuées dans
différents collèges de la ville de Sidi Bel Abbès (Algérie), nous nous sommes rendu
compte de l’absence d’intérêt porté aux signes de ponctuation alors que l’acqui-
sition de compétences rédactionnelles impliquent évidemment une appropriation
des compétences démarcatives. C’est dans cette logique que nous nous sommes
penchés sur les savoirs dispensés aux apprenants quant à la ponctutation. En
l’absence d’un enseignement explicite des règles de ponctuation, nous avons choisi
de cibler des situations ayant pour objectif l’enseignement/apprentissage de la
grammaire en mettant le point sur le fonctionnement de la virgule.
Mots-clés : ponctuation, fonction syntaxique, compétences rédactionnelles, ensei-
gnement de la grammaire, phrase graphique

‫ أي تعليم في الطور المتوسط بالجزائر؟‬:‫الو ضيفة النحوية لعالمات التنقيطك داخل الجملة‬

‫ مــن خــال سلســلة مــن المالحظــات التــي حققناهــا فــي مــدارس مختلفــة مــن مدينــة ســيدي‬:‫الملخــص‬
‫ أدركنــا عــدم وجــود اهتمــام لعالمــات الترقيــم مــع أن اكتســاب المهــارات الكتابيــة‬،)‫بلعبــاس (الجزائــر‬
‫ قمنــا‬،‫ مــن هــذا المنطلــق‬.‫يتطلــب اكتســاب المهــارات التحديديــة للتنقيــط داخــل الجملــة و بيــن الجمــل‬
،‫ لعــدم وجــود تعليــم صريــح لقواعــد الترقيــم‬.‫بفحــص المعرفــة المقدمــة للمتعلميــن حــول التنقيــط‬
.‫اخترنــا اســتهداف حــاالت هدفهــا تدريــس و تعلــم النحــو مــع التركيــز علــي توظيــف الفاصلــة‬
- ‫ تعليــم النحــو‬- ‫ المهــارات الكتابيــة‬- ‫ الوظيفــة النحويــة‬- ‫ عالمــات الترقيــم‬:‫الكلمــات المفتاحيــة‬
.‫الجملــة البيانيــة‬

The syntactic function of “intraphrase” punctuation:


What kind of teaching at the Algerian school?

Abstract
Through a series of classroom observations we have made in different colleges of
the city of Sidi-Bel-Abbes (Algeria), we realized the lack of interest in punctuation

213
Synergies Algérie n° 24 - 2017 p. 213-224

although the acquisition of writing skills obviously imply ownership of demarcation


skills. It is in this sense that we have examined the knowledge provided to learners
about punctuation. In the absence of a explicit teaching of punctuation rules, we
chose to target situations with the aim of teaching/learning grammar by focusing
on the Functioning of the comma
Keywords: punctuation, syntactic function, writing competences, teaching of
grammar, graphic phrase

Introduction

Au cours des quatre années de collège, les programmes du français langue


étrangère donnent la primauté au fonctionnement de la langue. Durant ces années
d’apprentissage, les apprenants acquièrent le socle de la pratique systématique
de la langue française. Ainsi, une mise en place d’un certain nombre de connais-
sances déclaratives, procédurales et conditionnelles est attendue durant ce cycle
qui constitue une pierre angulaire dans le cursus scolaire des apprenants, allant du
primaire jusqu’au lycée. L’intérêt que nous portons à ce cycle s’explique par la
relation qui peut l’associer avec le thème de notre recherche. Nous envisageons,
à travers cette recherche, d’examiner la place qu’occupe la ponctuation dans les
cours de grammaire dans ce cycle. S’agit-il d’un enseignement explicite ? Comment
est-il perçu alors ? Quelles en seraient ses attentes ? Pour aboutir à l’état de la
question, nous nous sommes rapprochés d’une dizaine d’enseignants du français
langue étrangère appartenant à divers établissements durant une journée pédago-
gique de la matière. Nous avons pu recueillir des informations sur les leçons qui ont
trait à un enseignement explicite de la ponctuation :

- En 1ère AM (année moyenne), une leçon d’orthographe appartenant au 2ème


projet du programme d’enseignement (le prescriptif) où il est demandé une
simple identification des signes avec l’utilisation d’une ponctuation forte.

- En ce qui concerne le niveau de la 2ème A.M, une leçon de grammaire intitulée la
ponctuation dans le dialogue, donnant beaucoup plus d’importance aux verbes
introducteurs de parole.

- Quant au niveau le 3ème A.M, une leçon de grammaire dans la séquence 2 (le
fait divers) a pour objectif l’identification du discours direct par la ponctuation.

- Pour ce qui est de la 4ème A.M, il s’agit de l’étude d’une leçon de grammaire
du second projet dans sa 2ème séquence dont le thème renvoie au style direct/
indirect.

214
La fonction syntaxique intraphrastique de la ponctuation

Bien plus d’une question a été révélée suite à ce constat. Nous nous sommes
donc interrogés sur les compétences à cibler pour la préparation de l’apprenant à
la production de l’écrit. Une autre question s’impose : quel rapport peut avoir la
ponctuation avec la phrase comme une structure graphique ?

« Autrement dit, la phrase « graphique » requiert un scripteur doté de suffi-


samment de recul pour devenir son propre lecteur, d’où les difficultés chez un
apprenti scripteur à mettre en œuvre un découpage fondé sur cette entité»
(Paolacci, 2014 :119).

Apprendre une langue étrangère stipule la capacité de produire des phrases


correctes, intelligibles et donc de mettre en œuvre un certain nombre de règles.
D’après Ph. Perrenoud, il n’y a pas de compétences sans savoirs. Quelles sont donc
les notions, les connaissances, les informations, les procédures, les techniques,
qu’on a pu instaurer à ce niveau pour construire des compétences quant au fonction-
nement des différents signes de ponctuation ? Seules des observations de classes
nous ont paru capables de nous dévoiler des données déterminantes dans notre
recherche. Afin de faire le point sur les savoirs transférés aux apprenants, nous
nous sommes basés sur les pratiques d’enseignement des praticiens (enseignants)
indépendamment des années d’exercice (toutes expériences confondues).

« Un système d’observation permet à un observateur de transformer certaines


données qu’il perçoit de la classe en informations pouvant être traitées et de
caractériser les événements observés » (Dessus, 2007 :107).

Nous nous sommes heurtés à un problème méthodologique, à quelles séances


devons-nous assister ? Nous avons opté finalement pour les cours de grammaire qui
peuvent renvoyer directement ou indirectement à notre thème de recherche. En
premier lieu, nous avouons que la mission d’observateur n’est pas une tâche facile.
Il faut admettre que la visite d’une personne étrangère dans un espace-classe peut
engendrer un état de malaise pour certains enseignants en la simulant à l’acte
d’inspecter. Certaines de nos sollicitations ont abouti à un échec sous différents
prétextes ; d’autres au contraire ont été bien reçues et ont donné naissance à des
contributions sur lesquelles nous allons nous baser dans nos axes de réflexions, nous
en remercions vivement les acteurs.

Fonctionnement du système d’observation

Dans notre recherche, nous avons opté pour le choix d’une grille d’observation
décrite par Philippe Dessus (Dessus, 2007:107), nous pensons que cela convient le
mieux à notre travail. Nous procédons ainsi à une segmentation des données, un
filtrage des données, les unités de codage et une réduction de données.

215
Synergies Algérie n° 24 - 2017 p. 213-224

Segmentation de données
Pour ce faire, nous développerons, dans cette étude deux parties, la première
concernera des observations de classes élaborées dans un contexte dialogique :
discours direct et indirect puisque cette leçon fait, à peu près, l’objet d’un
enseignement dans les quatre années de collège. La seconde partie, nous l’avons
consacrée à des observations de classes en relation avec les constituants de la
phrase (simple ou complexe) sans pour autant informer les enseignants qui ont
accepté de nous recevoir dans leurs classes de l’objet recherché. De là, nous nous
sommes inscrits dans une approche typiquement heuristique. Nous nous sommes
engagés à rester attentif à tout indice d’enseignement que chaque enseignant visité
peut donner à ses apprenants comme savoirs au profit d’un apprentissage des diffé-
rentes fonctions de signes de ponctuation.

Filtrage des données


Après avoir trié les données par critères de pertinence, nous avons mis à l’écart
les observations qui ne répondaient pas vraiment à nos attentes. Les intervenants
sélectionnés parmi d’autres (voir tableau ci-dessous), sont cités par les initiales de
leurs noms et prénoms (nous n’avons pas demandé l’autorisation de découvrir leur
identité). Les séances auxquelles nous avons assistées font parties des leçons de
grammaire. Bien que nous avons essayé de toucher les quatre niveaux du collège
pour tenter de déceler s’il existe une particularité dans l’enseignement donné aux
apprenants pour la même leçon d’un niveau à un autre ; nous avons aussi observé
la même leçon à un même niveau, chez des enseignants différents.Nous pensons
que les pratiques d’enseignement sont tributaires de plusieurs critères, entre
autres, l’expérience professionnelle, les besoins des apprenants et les situations
d’apprentissages.

Tableau1 : descriptif des séances observées

Expérience Niveau de classe Effectif


Enseignant Intitulé de la leçon
professionnelle observé d’élève
Le discours direct /
Melle Kh. N. 28 ans 4èmeAM 32
indirect
L’expression de
Mme B. Kh. 29 ans 4èmeAM 32 l’opposition et la
concession
les constituants de la
M. H. M. 25 ans 4èmeAM 34
phrase complexe
Les constituants de
Melle B. K. 17ans 3èmeAM 27
la phrase simple
La ponctuation dans
Mme M. K. 22 ans 2èmeAM 30
le dialogue
Les constituants de
Mme Gh. S,. 8 ans 1èreAM 28
la phrase simple

216
La fonction syntaxique intraphrastique de la ponctuation

Les unités de codage

Nous avons consigné les événements observés et filtrés en deux parties : la


première partie, nous l’avons réservée aux séances dont le point de langue était :
discours direct/discours indirect ; la seconde, aux cours consacrés aux constituants
de la phrase.

Réduction : faire observer l’usage de la ponctuation

La séance que nous allons analyser, avait comme objectif d’amener l’élève à
identifier et à utiliser le discours direct/indirect. L’enseignante Kh.N, avait présenté
à ses apprenants un texte support intitulé la bonne action (voir annexe, texte 1) pris
de la source  Conte du japon. L’ouverture de la séance était faite par une question
que l’enseignante avait amorcéeafin de tester les prérequisde ses apprenants.

- qu’est-ce qu’un discours direct ?

Les apprenants ont marqué un temps de silence. L’enseignante a reformulé sa


question en posant une seconde question :
- quels sont les indices du dialogue ?

Parmi les réponses données :


- les arguments de parole
- les verbes de parole

L’enseignante a encore une fois reformulé sa question par une autre,

- il s’agit de quel type de texte ?

La plupart des apprenants ont répondu qu’il s’agit d’un dialogue. L’enseignante
leur avait demandé de justifier leurs réponses.Parmi les réponses données :
- il y a des guillemets
- il y a des tirets

L’enseignante a enchaîné son questionnaire :


- pour transposer au style indirect, qu’est-ce qu’il faut faire ?

Quelques apprenants ont donné comme réponse :


- il faut enlever les guillemets.

L’enseignante avait confirmé leur réponse et la complète ainsi :


- oui, il faut enlever la ponctuation.

Voici un épisode de la leçon qui nous a le plus interpellés, auquel nous allons nous
arrêter pour faire ressortir quelques convergences et/ou divergences avec notre
travail de recherche. Pour ce faire, l’enseignante devrait, peut-être, vérifier si ses

217
Synergies Algérie n° 24 - 2017 p. 213-224

apprenants faisaient la différence entre la partie récit, et la partie discours. Celui-ci


se démarque par ailleurs de la narration par une disposition et une ponctuation qui
lui sont propres. De là, l’enseignante, serait confiante que ce que les apprenants
vont transformer concernera uniquement ce qui est inséré entre guillemets. D’où la
nécessité, de faire le point sur le rôle des guillemets.

Dans la phrase : « Donne-moi à manger », supplia le mendiant.

L’enseignante n’a pas abordé le fait que le verbe introducteur supplia qui est,
habituellement, placé avant les paroles rapportées, se trouve cette fois-ci après.
Cette possibilité, lui a été procurée par la présence d’une virgule qui lui a permis
le déplacement.

« […] bien des usages ne sont pas fixés : par exemple la virgule qui démarque un
segment déplacé en tête de la phrase (qui n’est donc pas à sa place canonique)
ne recueille pas un parfait consensus, contrairement à ce que l’on pourrait
croire » (Lemaître, 1995 :172 ).

Nous pensons, par ailleurs, que le texte support choisi pour cette activité
permettrait de donner d’autres savoirs. Nous citons par exemple la phrase
suivante : « As-tu appris à cet homme comment attraper du poisson ? demanda la
femme, tu aurais accompli une bonne action,… ». Il nous semble fondamental que
l’enseignante précise que le point d’interrogation avait pris la place de la virgule
dans l’incise - ? demanda la femme, -

Selon la banque de dépannage linguistique (BDL),

« la proposition incise figure souvent en fin de phrase, après les paroles citées
[…] De même, la première virgule peut être omise si les paroles rapportées se
terminent par un point d’exclamation ou d’interrogation ou encore des points de
suspension ».

Nous tenons à signaler que durant une séance d’une heure, les apprenants
étaient imprégnés dans des tâches qui avaient comme compétences visées, un
savoir-faire particulier, celui de savoir remplacer les guillemets du discours direct
par la conjonction qu’il faut, selon les types de phrases (déclarative- interroga-
tive-injonctive) afin de réussir la transposition au style indirect. Bien sûr, en tenant
compte des changements qui pourraient s’effectuer.

218
La fonction syntaxique intraphrastique de la ponctuation

En vue de construire des compétences rédactionnelles…

La virgule : Quelle place dans l’enseignement de la phrase et de ses constituants

Dans une même perspective, celle de vérifier les enseignements données aux
apprenants afin de les préparer à devenir des scripteurs qui font attention, dans
leurs écrits, aux normes. Nous avons tenté dans cette partie de focaliser, quel
savoir a été prévu pour construire la notion à acquérir par l’apprenant pour rédiger
une phrase correcte au plan syntaxique et graphique.Nous avons hiérarchisé nos
observations en deux niveaux, d’abord un niveau inférieur incluant la 1ère année
et la deuxième année moyenne puis un niveau supérieur, celui de la 4ème année
moyenne.

Les séances de fonctionnement de la langue, lors de nos observations de classe,


avaient comme objectifs l’identification et l’analyse des différents constituants
de la phrase simple.L’enseignante Gh.S, avait proposé à ses apprenants un texte
support composé de quatre phrases. Pour chaque phrase, elle faisait lire un
apprenant pour s’assurer de ses compétences démarcatives. Tous les apprenants
initiés à la lecture ont respecté les pauses au moment de la lecture. Ils se sont
arrêtés à chaque fois qu’il y avait un point.

Mis à part les savoirs syntaxiques qui permettent d’identifier une phrase, l’ensei-
gnante n’a pas abordé l’emploi de la virgule. Cependant, une situation problème
s’est présentée à ses apprenants : Tous les jours, il va avec lui à l’école. En
demandant d’identifier le sujet de cette phrase, certains ont répondu : Tous les
jours. Pour pouvoir répondre ainsi, les apprenants de 11 à 12 ans ont certainement
fait appel à leurs connaissances déclaratives (le sujet se met au début de la phrase).

Nous pensons, qu’il s’agit d’un déficit de compétence, c’est-à-dire que


l’apprenant a encore besoin d’autres compétences pour pouvoir agir correcte-
ment.L’enseignante devrait, peut-être, attirer l’attention de ses apprenants sur
la présence de la virgule et de son rôle dans la phrase. Non loin de cette situation
d‘enseignement / apprentissage, L’enseignante B.K avait beaucoup insisté, durant
son cours, sur la notion groupe prépositionnel déplaçable et non déplaçable. En
aucun cas l’enseignante n’a parlé de la virgule, ni de sa fonction, ni même de son
emplacement dans la phrase.

Construire un savoir sur le rôle de la virgule est plus qu’indispensable, la virgule


a pour fonction de séparer le groupe prépositionnel (GP) de la phrase, et dans ce cas
le GP est déplaçable parce qu’il complète la phrase. Si au contraire, celui-ci n’est
pas séparé par une virgule, il est complément du verbe, nécessaire au sens qu’il
n’est pas, cependant, déplaçable.

219
Synergies Algérie n° 24 - 2017 p. 213-224

La virgule dans la phrase complexe

Il ressort de nos observations de classes, faites avec les enseignants B. Kh et H. M


lors des séances traitant de la phrase complexe, que le rôle de la virgule n’était que
brièvement abordé par l’enseignante B. Kh qui s’était arrêtée, durant son cours,
sur la présence de la virgule qui sépare les deux prépositions subordonnées dans la
phrase suivante :

[En dépit de la beauté de notre pays], certains passent leurs vacances à l’étranger.
Elle avait mentionné que l’expression entre crochets est un groupe prépositionnel
complément circonstanciel d’opposition, qu’on peut déplacer et mettre après. Or,
selon C. Narjoux, l’étude grammaticale de la proposition subordonnée devra obliga-
toirement indiquer :

• les limites de la proposition (entre crochets par exemple)


• la nature et, éventuellement, la fonction du mot subordonnant
• la nature et la fonction de la proposition subordonnée

La pertinence du document déclencheur

Au cours de notre enquête sur la possibilité d’assister à un enseignement en


faveur du rôle syntaxique de la virgule, l’une de nos observations de classe faite sur
les constituants de la phrase complexe nous a paru signifiante pour notre recherche
vu que l’activité présentée entrait dans le cadre d’une évaluation formative. En
guise de rappel, l’enseignant H. M, a fait un tour d’horizon afin de réactiver les
acquis de ses apprenants quant à la phrase simple. En citant cinq cas de ces phrases,
l’enseignant a souligné ce qui suit :

- Le bébé pleure : cette phrase ne contient pas de COD ? Cependant elle a un
sens.
- Sortez ! : cette phrase ne contient pas de sujet ni de COD mais elle est doté
de sens.

Arrivant à la phrase complexe, l’enseignant a énuméré trois types de phrases à


savoir : les propositions indépendantes, les propositions coordonnées, les propo-
sitions subordonnées. Cette dernière regroupe les propositions subordonnées de :
but, cause, conséquence, condition, opposition, relative et en fin complétive
conjonctive. Dans un climat détendu, les apprenants semblaient travailler en
symbiose avec leur enseignant, chaque élément abordé comme révision, faisait
l’objet d’un cours de grammaire à part entière.

Après 20 minutes de rappel, l’enseignant avait distribué à ses élèves des copies
pour réaliser l’activité (voir annexe, texte 2). L’activité remise, présente deux

220
La fonction syntaxique intraphrastique de la ponctuation

consignes, la première, en en-tête lis attentivement le texte, suivi du corps du texte


(une lettre personnelle) et une deuxième consigne complète le tableau suivant,
suivi d’un tableau de cinq colonnes renvoyant aux types de phrases rappelées en
début de séance.La première attitude que nous avons pressentie était sans doute
la pertinence du document déclencheur par rapport à la situation d’enseignement/
apprentissage dans laquelle nous nous retrouvions. La deuxième, était par rapport
au comportement des apprenants. L’activité, semble-t-il, a été perçue comme une
tâche difficile. Bien que l’enseignant ait pris six minutes pour expliquer ce que les
apprenants devaient faire, ces derniers, ont encore posé d’autres questions, ils ont
même demandé de travailler par binôme. L’enseignant a accepté.

Analyse et discussion

Nous avons récupéré les copies des apprenants avant que l’enseignant ne lance
la correction sur le tableau. Notre but était non pas d’évaluer ces copies, mais de
rendre compte de certains comportements observables quant à la réalisation de
l’activité. Nous avons fait le constat suivant :

- Certains élèves n’ont pas fait l’activité


- D’autres ont renseigné uniquement les deux premières colonnes (phrase simple
et phrase complexe)
- Une minorité a rempli les cinq colonnes, sans pour autant cibler toutes les
phrases du texte.
- D’autres réponses raturées étaient à peine lisibles.

En revanche, nous nous sommes arrêtés aux deux phrases du texte, qu’aucun
apprenant n’a pu classer dans n’importe qu’elle colonne.

 hrase 1 : « Ensuite, les activités culturelles sont multiples : on peut aller à la


P
bibliothèque, au cinéma ou au musée avec grand-père ».

 hrase 2 : «  En plus, la ville est agréable : les maisons coquettes sont entourées
P
de jolis jardins fleuris ».

A notre sens, si ces deux phrases n’ont pas été classées dans le tableau de
l’activité, cela est dû probablement à l’emploi des deux points et des virgules qui
pourrait poser problème. Pour la première phrase, il y a lieu d’abord de faire le
point sur le rôle des deux points (annoncer une énumération) et aussi de la virgule
qui a une fonction de détacher le connecteur ensuite au début de la phrase et une
fonction de coordonner le mot bibliothèque avec le reste des éléments énumérés.
Contrairement à la 2ème phrase, les deux points annoncent cette fois-ci une expli-
cation. De par leur fonction, les deux points dans les deux phrases, ont substitué
la virgule.

221
Synergies Algérie n° 24 - 2017 p. 213-224

Une analyse pré-pédagogique du document déclencheur

Une analyse pré-pédagogique détaillée du document pourrait aboutir à optimiser


son exploitation. Définir des objectifs qui permettront d’anticiper les demandes
des apprenants, de percevoir les stratégies à développer et d’envisager les prolon-
gements possible de la séquence enseignée permettrait une mobilité flexible
de l’acquisition vers l’apprentissage. Une telle situation problème a montré la
nécessité de donner d’autres connaissances déclaratives, qui dans ce cas,auraient
pu aboutir à des connaissances transversales.

Conclusion

L’acquisition des compétences langagières aussi bien à l’oral qu’à l’écrit


constitue l’une des finalités des programmes d’enseignement du français langue
étrangère destinés aux apprenants du cycle moyen. A l’écrit, l’apprenant sera
capable de rédiger un récit, d’y insérer un passage descriptif et un passage dialogal.
Par ailleurs, selon les témoignages des enseignants de ce cycle, les erreurs les plus
fréquentes rencontrées dans les productions écrites de leurs apprenants résident
dans l’absence de structures syntaxiques : un emploi peu fréquent et/ou mal régulé
de la virgule.

L’enquête que nous avons pu mener au collège algérien, avait pour objectif
de découvrir une appropriation des fonctions de certains signes de ponctuation
notamment la virgule en contiguïté avec un enseignement de la syntaxe de la phrase.
Les observations de classes que nous avons effectuées, en nous rendant dans des
classes appartenant à différents collèges de la ville de Sidi Bel Abbes (Algérie), nous
ont permis de déceler une défaillance par rapport à un enseignement en faveur de
la fonction syntaxique de la virgule dans la phrase.

Construire des compétences rédactionnelles ne peut guère s’emparer d’un ensei-


gnement au profit du rôle que peut jouer un signe de ponctuation dans la phrase,
notamment celui de la virgule si utile :

« La maîtrise de ce signe, si utile, viendra avec la compréhension du fonction-


nement de la langue écrite, progressivement » (Chartrand, 2010a :12).

« Dans la perspective du développement des compétences rédactionnelles, il


vaut mieux enseigner les règles d’emploi de la virgule en même temps que celles
de la syntaxe […] » (Chartrand, 2010b : 21).

En dépit d’un enseignement explicite de la fonction syntaxique d’un signe de


ponctuation donné, l’enseignant peut procéder à une analyse pré-pédagogique
de son texte support en préparant son cours sur les constituants de la phrase.

222
La fonction syntaxique intraphrastique de la ponctuation

Cependant, il doit jumeler son regard sur le concept « phrase » en associant


l’entité graphique à l’entité syntaxique (Paolacci, Rossi-Gensane, 2014 :124).Tout
en étant une composante linguistique, la grammaire ne peut fonctionner sans une
mise en place d’une situation de communication, d’où la nécessité d’un document
déclencheur, un document de départ qui doit être analysé rigoureusement pour
répondre à la fois aux besoins des apprenants, à leur profil ainsi qu’aux objectifs
visés et aux compétences visées : « L’enseignant doit faire preuve de prudence et
de rigueur dans le choix des outils qu’il sélectionne pour planifier et disposer son
enseignement […] » (Dufour et Chartrand, 2014 :97).

La phase de conceptualisation demeure un moment incontournable dans le


processus d’apprentissage lié à la construction de connaissances grammaticales.
La conceptualisation permet à l’apprenant de découvrir par lui-même le fonction-
nement de la langue selon l’approche par compétences, à condition qu’il soit doté
d’un savoir suffisant en matière de norme, de règle d’emploi et de fonctionnement.
Il n’est pas recommandable de traiter le problème de compétences démarcatives
lors de la phase post-rédactionnelle, quoiqu’il soit possible d’en faire des remédia-
tions. En effet, Il est souhaitable d’entreprendre, éventuellement, une étude
qui a pour but la mise en place d’un dispositif d’enseignement d’une grammaire
pédagogique du français, traitant de la fonction syntaxique de différents signes de
ponctuation, allant de la systématisation jusqu’à la conceptualisation.

Bibliographie

BDL. 2002. Les signes de ponctuation. http://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/bdl/gabarit_bdl.asp


[consulté le 05 juin 2015].
Chartrand, S.-G. 2010a. « À quoi sert la virgule et quand l’enseigner ? ».Vivre le primaire,
n°1, p.12.
Chartrand, S.-G. 2010b. « La virgule, ses emplois, son enseignement ». Correspondances,
n°1, p. 21.
Dessus, P. 2007. « Systèmes d’observation de classes et prise en compte de la complexité des
événements scolaires ». Carrefours de l’éducation, n°23, p. 103-117.
Dufour, M.-P, Chartrand, S.-G. 2014. « Enseigner le système de la ponctuation ». Le français
aujourd’hui, n°187, p. 91-99.
Lemaître, B. 1995. « La ponctuation : Un savoir enseignable ? Enseigné ? ». Spirale - Revue de
recherche en éducation, n°15, p. 161-195.
Narjoux, C. 2003. « La ponctuation. » http://cecile.narjoux.pagesperso orange.fr/
ponctuation.htm [consulté le 20 juin 2015].
Paolacci, V., Rossi-Gensane, N. 2014. « Ponctuation et écrits d’élèves : Une conception
différente de la phrase pour enseigner la ponctuation autrement ». Le français aujourd’hui,
n°187, p. 115-124.
Perrenoud, P. 1998. « Construire des compétences, est-ce tourner le dos aux savoirs ? »
http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1998/1998_34.html,
[consulté le 01 juin 2015].
Riegel, M. et al. 2009. Grammaire méthodique du français. Paris : PUF.

223
Synergies Algérie n° 24 - 2017 p. 213-224

Annexe
Texte 1
La bonne action
Un jour un pêcheur fut abordé par un mendiant :
« Donne-moi de quoi manger mon ami ! » supplia le mendiant.
Le pêcheur qui avait dans son panier d’osier trois gros poissons, lui en donna un. Le mendiant
le remercia et s’en alla heureux.
Le pêcheur était si content d’avoir accompli une bonne action qu’il en parla à sa femme.
Celle-ci hocha la tête et lui déclara
« Non homme, tu ne viens pas d’accomplir une bonne action. »
« Et qu’est-ce qui te fait dire cela femme ? »
« As-tu appris à cet homme comment attraper du poisson ? demanda la femme, tu aurais
accompli une bonne action, il pêcherait et n’aurait plus besoin de personne pour se nourrir,
là tu l’encourage à dépendre des autres. »
« Tu as raison, femme, ma charité était une mauvaise action ! » déclara le pêcheur.

Conte du japon

Texte 2
Consigne : Lis attentivement le texte.

Alger, le 30 juin 2013


Chère Racha,
Je pense que ça serait bien de passer nos vacances chez grand-père et grand-mère à Annaba.
Tu n’es pas de mon avis ?
D’abord, il y a beaucoup d’activités sportives. A la mer, on peut faire du pédalo, de la
planche à voile, de la pêche…Dans la forêt, on peut faire du VTT et des balades. En ville, il
est possible d’aller à la piscine ou aller courir sur le terrain de sports.
Ensuite, les activités culturelles sont multiples : on peut aller à la bibliothèque, au cinéma
ou au musée avec grand-père.
En plus, la ville est agréable : les maisons coquettes sont entourées de jolis jardins fleuris.
Les squares sont nombreux où l’on peut flâner.
Enfin, la cuisine de grand-mère est délicieuse, elle va nous régaler avec ses bons makrouts
parfumés aux clous de girofle et notre venue va lui faire plaisir car elle va préparer pour nous
tous les plats que grand-père refuse de manger à cause de son cholestérol.
Voilà pourquoi j’aimerais que nous passions nos vacances chez nos grands-parents et puis, ils
me manquent énormément.
Réponds-moi vite pour que je prévienne mamie de notre arrivée.
Je t’embrasse de tout mon cœur.
Ta cousine Sonia

© Revue du Gerflint (France) - Éléments sous droits d’auteur -


Modalités de lecture consultables sur le site de l'éditeur www.gerflint.fr

224

Vous aimerez peut-être aussi