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(PRESENTATION DU TEXTE ET LECTURE : ENVIRON 2 MINUTES)

La relation maître-valet est un thème récurrent en littérature, notamment dans le


théâtre. Dans de nombreux romans, nouvelles et pièces de théâtre, cette relation est
utilisée pour explorer les différences de classe et de pouvoir entre les personnages. Dans la
pièce de théâtre "Le Jeu de l'amour et du hasard" de Marivaux, écrite en 1730, la relation
maître-valet est un élément clé de l'intrigue. La pièce met en scène deux jeunes
aristocrates, Silvia et Dorante, qui doivent vivre un mariage de convenance, Silvia et
Dorante, qui échangent leurs rôles avec leurs valets pour découvrir la véritable
personnalité de l'autre avant leur mariage arrangé. La pièce explore les thèmes de la classe
sociale, de l'amour et de l'identité, en utilisant l'ironie et la comédie pour mettre en
lumière les limites imposées par la hiérarchie sociale. L’extrait à l’étude est la scène 11 de
l’acte ll où on assiste à une conversation entre les personnages Silvia, Mario et Monsieur
Orgon. Silvia est en proie à des émotions fortes et se sent incomprise. Elle s'interroge sur
les raisons de leur attitude et essaie de comprendre ce qui se passe. Cette scène est
représentative de l'un des thèmes principaux de la pièce de Marivaux, à savoir les
malentendus et les quiproquos amoureux qui surgissent lorsqu'on tente de percer à jour
les sentiments des autres.
Lecture du texte
Comment le trouble du personnage sert-il de moteur à l’avancée du drame et que révèle-t-
il ? Pour répondre à cette problématique nous étudierons cela en deux mouvements.
D’abord nous verrons la confusion de Silvia pour ensuite voir Silvia qui accuse Lisette, sa
servante de tous ses maux.

(ANALYSE LINEAIRE : ENVIRON 8 MIINUTES)


Monsieur Orgon et Mario prennent Silvia au piège de ses propres contradictions : la
jeune femme refuse d’avouer ses sentiments pour celui qu’elle prend pour un valet. Le
spectateur observe avec plaisir l’affaiblissement progressif de ses réticences.
L'emploi de l'adjectif « dégoûtée » pousse Silvia à réagir et la contraint à révéler qu’elle
aime Dorante, ce type de technique est nommée locutrice manipulatrice passive.
Comme pour la réplique précédente, celle de Mario rebondit sur le mot de Silvia,
« étrange » ce qui confère de la rapidité à l’échange. Dans la didascalie « avec le feu »
dénote la rage vive qui brûle Silvia. Mario avec ces trois questions, poursuit son jeu : il
prend plaisir à observer les réactions de sa sœur dans une intrigue dont elle ne connait pas
tous les ressorts. Le public n’est pas dupe et prend plaisir lui aussi à observer Mario jouant
avec Silvia. L'indignation de Silvia se voit par des phrases exclamative ainsi que une
répétions à la ligne 2 avec « que vos discours sont désobligeants ! Ma dégoûtée de lui !
Dégoûtée ! » -Les adjectifs « expressions », « étranges » et « inconcevable » qualifient les
propos du frère et soulignent leur incongruité ainsi que l'absurdité des propos désignés
par des périphrases affirmant leur incohérence.
On note l'utilisation de l'ironie dans le texte, ce qui crée un décalage entre ce que pense
Silvia et la réalité de la situation. Par exemple, lorsque Mario dit qu'il ne voit aucun mal à
ce que Silvia défende un domestique, Silvia répond avec une certaine naïveté : "Y a-t-il rien
de plus simple ?". Cette réponse montre que Silvia ne perçoit pas les tensions qui sont à
l'œuvre dans la maison. Cette ironie crée un sentiment d'incertitude et de confusion dans
l'esprit du lecteur. Le langage utilisé par Silvia est caractéristique de sa confusion. Elle
parle de manière incohérente, mélangeant des idées et des mots, ce qui renforce
l'impression de confusion qui émane de la scène. Par exemple, elle dit : "J’essuie des
expressions bien étranges ; je n’entends plus que des choses inouïes, qu’un langage
inconcevable ; j’ai l’air embarrassé, il y a quelque chose ; et puis c’est le galant
Bourguignon qui m’a dégoûtée." Cette confusion est aussi renforcée par l'utilisation de
phrases courtes, qui créent un rythme saccadé et haché. Le jeu observé sur la première
réplique se poursuit, l’intuition d’un complot dont son frère serait l’instigateur est
perceptible au travers de l’emploi des modalisateurs «ne pouvez-vous » ou encore
« voulez-vous » ou du nom « soupçon ». Silvia montre qu’elle se doute qu’une intrigue se
trame, comme si elle faisait partie d’un jeu théâtral sans le savoir comme le montre
l’emploi du terme « fatalité ».
Elle emploie des phrases interrogatives pour montrer qu’elle est sûre que rien en elle-
même n’est à l’origine de son état, mais le nombre important de ces phrases interrogatives
la trahit et souligne sa confusion. La colère de Silvia est perceptible au travers des phrases
exclamatives, son mépris au travers de l’emploi du terme « impertinente » qui souligne
encore que Lisette n’est pas à sa place, ce qui est le cas mais à la demande de Silvia. Elle
est également perceptible au travers de l’adjectif « haïssable » et du groupe nominal avec
l’emploi d’un démonstratif composé péjoratif « cette fille-là », qui fait écho à celui de son
père et qui renvoie Lisette à sa condition. Cette colère montre la rivalité entre les deux
jeunes femmes. À la fin de la réplique, Silvia justifie son emportement par l’argument de
l’équité pour cacher son amour pour le valet Bourguignon-Dorante. Mario l’encourage à
poursuivre dans cette voie de la confidence sur Dorante dans le but de forcer Silvia à se
révéler et à révéler aux autres qu’elle l’aime. Silvia accuse sa servante, Lisette, d'avoir mal
interprété ses propos et de l'avoir injustement accusée. Cette accusation est exprimée par
Silvia avec des procédés littéraires qui mettent en évidence son état d'exaspération et de
confusion. on note l'utilisation de l'exclamation qui traduit l'exaspération de Silvia face à
l'attitude de Lisette. Par exemple, elle s'exclame "L’impertinente ! y a-t-il rien de plus
haïssable que cette fille-là ?", cette exclamation montre son indignation face à l'accusation
de Lisette et sa frustration face à la situation. La répétition utilisée par Silvia insiste sur son
innocence et sa confusion. Par exemple, elle répète "Je ne comprends pas, je ne
comprends plus rien" et "Je ne sais plus à quoi m'en tenir" pour exprimer sa perplexité.
Nous assistons alors à l'état d'incertitude de Silvia. L’utilisation d'interrogations
rhétoriques permet de mettre en avant le désarroi de Silvia. Elle se demande "Me joue-t-
on ? se moque-t-on de moi ?" pour montrer qu'elle est perplexe et qu'elle ne sait plus quoi
penser. Les interrogations rhétoriques soulignent donc le questionnement de Silvia quant
à la situation.

Somme toute, c’est par des échanges vifs et subtils entre le personnage troublé de Silvia
et sa famille qui servent de révélateur aux sentiments de la jeune fille, l’extrait invite à
réfléchir sur le poids des conditions sociales et la difficulté d’exprimer le sentiment
amoureux. Cette scène met en évidence la difficulté de la communication et de la
compréhension mutuelle entre les individus, ainsi que la complexité des relations sociales.
Marivaux souligne également l'importance de la perception subjective dans les
interactions humaines et la nécessité d'une communication claire et transparente pour
éviter les malentendus. Nous retrouvons ce style d’écriture dans d’autres pièces de
Marivaux comme dans « Les Fausses Confidences », dans la 3e scène de l’acte ll, Dorante et
Lisette se retrouvent également dans des situations de malentendus et de quiproquos, où
les mots sont interprétés différemment par les différents personnages et où la
communication est difficile. Les personnages utilisent également l'ironie et la moquerie
pour se répondre, ce qui crée une tension dramatique dans la pièce.

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