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1. Conduire un système électrique, c’est d’abord définir le partage des rôles et responsabilités
entre les nombreux acteurs concernés. Ensuite, pour les « gestionnaires du réseau de transport »
qui, dans chaque pays ou chaque grande zone d’exploitation, ont le rôle de chef d’orchestre et la
maîtrise directe des moyens de conduite, il s’agit de préparer les situations à venir, puis, depuis
leurs centres de conduite ou « dispatchings », de surveiller le système et de le maîtriser,
d’anticiper les possibles difficultés. Enfin, il s’agit de rendre à chacun des acteurs l’image de son
rôle dans l’exploitation passée et de procéder aux règlements financiers correspondants.
2. Système électrique
On appelle communément « système électrique » l’ensemble des installations électriquement
interconnectées qui assure la livraison, à tous les utilisateurs d’électricité, des kilowattheures
produits à partir de sources d’énergie primaire telles que l’hydraulique, les combustibles fossiles, la
fission nucléaire, l’énergie éolienne, voire, mais encore marginalement, l’énergie solaire directe.
3. Constitution du système électrique
Il est traditionnel de distinguer, au sein d’un système électrique, trois étages aux fonctions
différentes s’articulant entre elles (figure 1).
Le premier étage est celui de la production de l’électricité qui sera livrée aux
consommateurs. Il est constitué par les usines, souvent appelées « centrales », qui
convertissent en kilowattheures les énergies primaires.
Le deuxième étage est celui du réseau de transport et d’interconnexion auquel sont
raccordées les usines de production. Cet étage assure la mise en commun et la répartition sur
un très vaste territoire de toute l’électricité qui y est produite. Le réseau de transport et
d’interconnexion est le véritable nœud du système électrique.
Le troisième étage est celui des réseaux de distribution. En effet, un réseau de transport et
d’interconnexion peut desservir directement certains très gros utilisateurs d’électricité. Mais
des réseaux intermédiaires sont nécessaires pour desservir les millions et dizaines de
millions de consommateurs, industriels ou domestiques, qui ont besoin de puissances se
chiffrant en kilowatts et mégawatts, et non en dizaines ou centaines de mégawatts.
4.1. Le courant continu (CC ou DC pour direct current) est un courant électrique dans lequel les
électrons circulent continuellement dans la même direction, c’est-à-dire du pôle négatif vers le pôle
6. La constitution du réseau
Le réseau est constitué de lignes aériennes, de câbles souterrains et de postes, à divers niveaux de
tension.
6.1. Postes
Par définition, un poste (une sous-station) est une installation d’organes de liaison et l’organe de
manœuvre où parvient l'énergie des centrales et orientée vers les centres de consommation.
Le schéma (topologie) de ces postes dépend principalement de deux aspects :
1. Niveau de sécurité d’exploitation : On entend par là qu’en cas de défaut sur le jeu de barres ou
sur une ligne, il faut veiller à éliminer ce défaut par des disjoncteurs aussi peu nombreux que
possible en vue de garder en service le plus d’ouvrages sains possible (sécurité élevée) ou un certain
nombre de lignes ou de travées (sécurité moyenne ou faible).
2. Niveau de souplesse désiré : On entend par là la facilité d’exploitation relative aux manœuvres
volontaires et aux changements de la configuration électrique du poste.
Introduction
Pour des raisons économiques (effet de taille...) ou techniques (localisation des réserves
hydrauliques et des sources froides...), les unités de production sont souvent géographiquement très
concentrées. Par contre, la consommation est beaucoup plus dispersée.
Les réseaux de transport et d’interconnexion assurent la liaison entre les grands centres de
production et les grandes zones de consommation ainsi qu’avec les réseaux des gestionnaires de
réseaux voisins.
Le gestionnaire du réseau doit maintenir, en permanence, l’équilibre entre l’offre disponible et la
demande potentielle et assurer le transit de l’énergie depuis les groupes de production jusqu’aux
consommations tout en respectant les plages contractuelles de tension et de fréquence et les limites
constructives des constituants du réseau.
L’Europe contient 5 zones synchrones, c’est-à-dire des zones où la fréquence sur le réseau est la
même, quel que soit l’endroit où elle est mesurée sur le réseau électrique. Ces zones synchrones
comprennent plusieurs pays reliés entre eux par plusieurs interconnexions à courant alternatif.
Les différentes zones synchrones sont reliées entre elles par des liaisons à courant continu qui
fonctionnent comme des robinets que l’on peut fermer. Elles permettent de faire des échanges
d’électricité et d’optimiser la production de chacune.
Nota : interconnexion synchrone signifie que les réseaux ont même fréquence et même tension.
Une telle extension n’était pas sans poser de nombreux problèmes pratiques.
En premier lieu, les perspectives d’interconnexion accrue s’ouvraient paradoxalement à un moment
où il devenait extrêmement difficile de faire accepter la construction de nouvelles lignes de
transport.
Les calculs réseau doivent être effectués en prenant en compte les défaillances ou non-disponibilités
des éléments du réseau. Les différents cas de figure jugés probables ou peu probables mais possible
sont à évaluer en tenant compte des différentes durées de non disponibilité des équipements pour
défaut, maintenance ou remplacement.
Les travaux de maintenance ou de terrassement à proximité des lignes peuvent engendrer la mise
hors tension des éléments pour des raisons de sécurité.
Le cas échéant, des combinaisons de non-disponibilités des différents éléments et/ou d’éléments
similaires sont à prendre en compte.
La consommation annuelle est aussi influencée par des aléas climatiques de longue durée. La
prévision de la consommation annuelle est importante pour la constitution et la gestion des stocks
d’énergie (grands réservoirs hydroélectriques, combustible du cœur des centrales nucléaires, stocks
de charbon et de fioul…). La qualité de la prévision de la consommation de leurs clients à
différentes échelles de temps va jouer sur la performance des producteurs d’électricité, mais la
prévision nationale par le GRT a aussi un impact direct sur la maîtrise de la sûreté du système
électrique, qui exige de disposer à tout moment de réserves en puissance et en énergie.
Les prévisions annuelles nationales sont bâties à partir d’analyses macro-économiques et
d’hypothèses de croissance par secteurs d’activités. Elles tiennent compte en particulier du niveau
de croissance économique général, de l’effet de stockage et déstockage des industries, de
l’évolution démographique et de la part de l’électricité dans la consommation énergétique
domestique, ainsi que de l’essor de nouvelles technologies. En passant de l’échelle annuelle à
l’échelle hebdomadaire, on commence à percevoir nettement la variabilité de la consommation.
Figure 2 – Énergie moyenne consommée par jour ouvrable chaque semaine de l’année 1999.
On observe ainsi un rapport de l’ordre de 9.9/6.3~1,5 entre la semaine la plus chargée 2-3 et la plus
creuse 32-33. En passant à l’observation de l’évolution heure par heure de la puissance appelée (la «
courbe de charge » journalière), on a une idée plus claire du défi que représente l’équilibre
permanent entre production et consommation.
La figure 3 montre sur le même graphique le profil des journées extrêmes de 1998. Le rapport entre
la puissance maximale et la puissance minimale consommées est de l’ordre de 69kMW/28kMW=
2,6. La puissance consommée est particulièrement sensible aux conditions météorologiques
(température, nébulosité, et, dans une moindre mesure, hygrométrie et vent).
Ainsi, en plein hiver, une baisse de 1° C entraîne la consommation supplémentaire d’environ 1 400
MW, soit un groupe nucléaire de forte puissance. L’été, l’effet de la climatisation commence à être
sensible, et, au-delà de 25° C, une hausse de température de 1° C entraîne une consommation
supplémentaire de l’ordre de 300 MW (notons que, au Japon et aux États-Unis, c’est en été que se
produit la pointe de consommation, avec une très forte sensibilité aux hausses de température). La
figure 4 illustre cet effet, avec les courbes de charge de deux journées consécutives différenciées
seulement par un changement de température.
La nébulosité doit aussi être prise en compte pour bien conduire un système production-transport.
En France, toutes choses égales par ailleurs, la différence extrême entre un jour d’hiver avec un ciel
clair et un jour très nuageux peut atteindre 6 000 MW. La figure 5 illustre ce phénomène entre deux
jours successifs à température comparable mais avec une couverture nuageuse différente.
On définit l’énergie réglante primaire d’un réseau comme le rapport entre la pointe de charge du
réseau et la fréquence nominale, divisé par le statisme. On obtient une valeur en MW/Hz. Pour le
réseau UCTE, cette valeur est de 35000 MW/Hz, ce qui veut dire que sans réglage primaire il faut
une perte de 35000 MW pour provoquer un écart permanent de fréquence de 1 Hz.
En cas de perturbation, les pays interconnectés synchrones participent pendant 15 minutes au
sauvetage de la situation, chaque pays agissant au prorata de son « importance ».
Pendant cette période le régime reste perturbé (la fréquence est écartée de sa valeur de consigne),
les flux de puissance entre zone ne sont plus conformes aux flux programmés, il y a risque de
dépasser des charges permanentes admissibles (d’où la durée de 15 minutes qui est grosso modo
une constante de temps thermique d’échauffement des conducteurs aériens).
En cas de chute de la fréquence en deçà de 49.8 Hz une politique de délestage de charge et un
démarrage automatique de turbines à gaz est enclenché, plus bas on commence à délester certains
clients industriels et la clientèle domestique.
Exemple : imaginons un incident qui fait perdre à une zone 1 000 MW de production ; le réglage
primaire fonctionne et « rattrape » cet écart de 1 000 MW en augmentant d’autant la production sur
l’ensemble des centrales réglantes du réseau interconnecté, ce qui peut conduire à ce que, par
exemple, à la fin de l’effet de ce réglage, la production a augmenté effectivement de 200 MW dans
la zone concernée par l’incident, et de 800 MW dans le reste du réseau interconnecté. On a du coup
mis en place une « importation » de 800 MW.
Ce déséquilibre est autorisé s’il ne se prolonge pas trop longtemps, car sinon il conduirait à une
situation où, de façon durable, des producteurs fourniraient pour des consommateurs avec lesquelles
ils n’ont pas de contrat, et où il faudrait alors introduire des systèmes de compensation.
Le réglage secondaire a du coup un deuxième rôle : celui d’absorber cette différence (de 800
MW dans l’exemple), de façon à ramener effectivement chaque zone de réglage à son équilibre
production = demande.
C’est donc au niveau de ce réglage que l’on va pouvoir aussi introduire des déséquilibres qui vont
permettre de mettre en place des échanges entre zones, c’est-à-dire que l’équilibre recherché ne sera
plus production (P) = consommation (C) pour chaque zone, mais bien production = demande,
où la demande est égale à la production augmentée (algébriquement) du solde des exportations et
(importations de cette zone avec les autres qui lui sont interconnectées.
L’équation (1.5) montre que le niveau de tension à un jeu de barres donné dépend de la tension de
source qui l’alimente, de la réactance de ligne qui le sépare de cette source et des puissances active
et réactive à son niveau. Ainsi, si la tension au jeu de barres en question n’est pas dans une limite
acceptable, des modifications sur un ou plusieurs de ces paramètres sont alors nécessaires.
Méthodes et moyens de réglage de la tension
Les méthodes de réglage de la tension peuvent être divisées en deux catégories
Réglage directe : Il consiste à agir directement sur la tension elle même (Figure. 2.6). Dans cette
catégorie, le réglage de la tension de charge V est réalisé soit par la modification de la tension V
elle même, soit par la modification de la tension de source E. Parmi les solutions qu’on peut trouver
dans cette catégorie, il y a :
1. La correction du niveau de la tension V , qui fait appel à un auto-transformateur (Tap-load
changer) aux niveaux des postes de distribution ;
III. Des principes techniques à la forme des transactions pour les utilisateurs
Ces principes techniques ont des conséquences importantes sur la mise en place de transactions
commerciales, et introduisent une différence fondamentale, pas toujours bien comprise, entre les
modalités qui permettent d’être raccordé à un réseau (sous-entendu à l’intérieur d’une zone de
réglage) et ainsi d’effectuer des injections ou des soutirages, et les modalités pour transporter de
l’énergie d’une zone de réglage à une autre.
Dans le premier cas, notamment pour les soutirages, il suffit de convenir avec le gestionnaire de
réseau d’une puissance maximale (puissance de souscription), de s’acquitter bien entendu du péage
lié à ce raccordement, pour être « libre » de soutirer à tout moment tout ou partie de cette puissance,
sans déclaration ou annonce préalable.
En revanche, dans le cas d’un échange entre deux zones, il faut que les deux gestionnaires de réseau
concernés puissent programmer leurs réglages secondaires : ce qui a pour conséquence que les
échanges doivent eux-mêmes être déclaré à l’avance. Une importation ou une exportation a du coup
un caractère plus « virtuel » : c’est une déclaration, non liée à un point d’injection et un point de
soutirage puisqu’il suffit de désigner les zones de réglage d’injection et de soutirage, sur la base de
laquelle les gestionnaires de réseau s’engagent à mettre en place la transaction.
Aujourd’hui, la programmation des échanges se fait par pas horaire avec un incrément minimal de
puissance de 1 MW : ce qui signifie que, en général la veille pour le lendemain, les acteurs qui
souhaitent mettre en place des exports ou des imports doivent déclarer aux gestionnaires de réseau
leur programme, soit une chronique de 24 valeurs exprimées en mégawatts (MW).
L’ensemble des déclarations individuelles faites à chacun des gestionnaires de réseau est sommé
(algébriquement) et le solde est comparé entre les gestionnaires : il faut qu’il soit égal pour que les
deux gestionnaires conviennent du programme global d’échange entre les deux zones pour la
journée du lendemain. Les décalages peuvent provenir d’erreurs, d’oublis, de doubles déclarations,
etc.
Exemple : on a représenté ainsi figure II.2, de façon grossière mais vraisemblable, les flux induits
par la mise en place d’un échange entre la Suisse et l’Allemagne du Nord. On voit ainsi que les
lignes d’interconnexion de la France avec ses voisins sont chargées par par 45 % de la puissance de
cette transaction, qui « s’écoule » par le réseau français en entrant au Sud-Est
Est et en sortant par les
frontières Nord et Est.
Remarque :
Le réseau CENTREL couvrant la République Tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie a été
connecté au réseau UCTE depuis 2004.
Des discussions antre UCTE et la Turquie sont en cours de même que pour une boucle autour de la
méditerranée.
Le réseau européen UCTE est fortement interconnecté, principalement au niveau 400 kV.
Dans l’état « normal », tous les paramètres du système (fréquence, tensions aux différents nœuds
du réseau, courant dans les ouvrages de transport) sont dans la plage autorisée et toutes les règles de
sécurité, telles que le «n-1 » ou le «n-k» sont respectées.
Dans l’état «vulnérable », même si les paramètres du système sont encore dans la plage
admissible, il existe au moins un cas de non-respect d’une règle de sécurité. Si l’incident
correspondant venait à se produire, la sécurité du système serait donc menacée.
26 Cours conduite des réseaux : Prof. M. MELIT
Dans l’état «critique », non seulement les règles de sécurité ne sont pas toutes respectées, mais
certains paramètres du système sont hors de leur plage autorisée (par exemple, un poste à 400 kV
est à une tension inférieure au seuil critique). La sécurité du système doit immédiatement être
restaurée par des actions énergiques (par exemple le délestage) pour éviter un effondrement.
Le dernier état est justement celui de l’incident généralisé, dans lequel une large partie de la
clientèle est hors tension, le réseau peut être morcelé et une partie du parc de production hors
service. Cet état recouvre aussi celui de la reconstitution du réseau après incident généralisé.
Cette typologie des états de conduite a surtout un intérêt pédagogique. Au cours des vingt dernières
années, beaucoup d’efforts ont été mis dans le concept de « conduite par états », qui aurait permis,
comme dans la conduite des centrales nucléaires, de dépasser le stade de la conduite par procédures
et consignes. On sait en effet, depuis l’accident de la centrale nucléaire de Three Miles Island, que
les procédures sont mal adaptées aux situations incidentelles. Malheureusement, la taille des
systèmes électriques, la rapidité de la dynamique et le couplage entre phénomènes, la difficulté
d’isoler des sous-systèmes n’ont pas permis de déboucher sur des conditions pratiques d’utilisation
de la conduite par états sur les grands réseaux.
Surveiller : à partir des masses d’informations qui leur parviennent, les dispatchers suivent
l’évolution du système électrique. Ils vérifient notamment que les principaux paramètres sont
conformes aux consignes d’exploitation et prennent connaissance de tout changement de l’état du
réseau (déclenchement de ligne par exemple).
Analyser : la surveillance directe de l’état du réseau ne suffit pas pour garantir de bonnes
conditions de sécurité, il faut aussi s’assurer que toute nouvelle situation issue d’un incident banal
n’a pas de conséquences excessives ou non maîtrisables. Grâce à des outils d’analyse, les
dispatchers doivent vérifier qu’ils respectent l’ensemble des règles de sécurité.
Anticiper : tout événement nouveau doit être intégré pour prévoir les différentes évolutions
possibles du système. Dès que l’on s’écarte du programme prévisionnel, les dispatchers doivent
apprécier les conséquences éventuelles et préparer les parades associées.
Agir : lorsque les analyses ont permis de déterminer les meilleures mesures correctives, ou plus
simplement pour exécuter le programme prévisionnel, les dispatchers doivent agir directement
(manœuvres sur le réseau par les dispatchers régionaux) ou transmettre téléphoniquement ou
informatiquement des instructions précises et dépourvues d’ambiguïté aux opérateurs des
installations de production et de transport.