Vous êtes sur la page 1sur 31

La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en


RDC ?
Emmanuel Sungani1
Université de Kinshasa

Résumé

L’objectif de l’étude est de démontrer la pertinence de l’opérationnalisation d’une règle


monétaire activiste, du type Taylor, dans conduite de la politique monétaire en République
Démocratique du Congo. Les résultats des estimations, sur la période 2001-2016, montrent
que la fonction de réaction de la Banque Centrale du Congo est en adéquation aux modèles
Contemporain et Forward-looking de la règle de Taylor impliquant que les anticipations
(d’inflation) des agents sont tournées vers l’avenir. L’analyse rétrospective de l’évolution des
ajustements du taux d’intérêt directeur au cours de la période 2001-2016, révèle que la
politique monétaire a été d’essence contra-cyclique et, dans ce cadre, globalement non-
accommodante à l’inflation conformément au Principe de Taylor excepté en 2016 où l’érosion
de la marge de positivité du taux directeur à conduit à un taux d’intérêt réel négatif affectant
négativement l’efficacité des Bons BCC dans la régulation de la liquidité. Les modifications
du taux directeur ont principalement répondu aux variations de l’inflation alors que l’activité
(écart de production) n’exerce pas d‘impact significatif, reflétant le dilemme inflation-
croissance de l’activité pour l’économie congolaise. En outre, l’hypothèse d’adoption d’une
politique d’ajustement partiel du taux d’intérêt par la Banque Centrale du Congo ne s’est pas
vérifiée. L’ampleur, d’une part, des écarts entre le taux directeur et les taux prescrits par les
règles de type Taylor estimés et, d’autre part, leurs implications en matière d’efficacité de
régulation de la liquidité, dans un contexte d’accélération de la dépréciation monétaire et de
fortes tensions inflationnistes ont permis de relever la pertinence d’une règle de taux d’intérêt
tel que la règle de Taylor permettant d’orienter le sens et l’ampleur des ajustements du taux
d’intérêt de référence en réponse aux fluctuations des principaux indicateurs de la
conjoncture. Ainsi, quelques recommandations de politique économique sont proposées dans
le but d’améliorer l’efficacité de la régulation conjoncturelle dans le contexte de l’économie
congolaise.

Mots clés : Règle de Taylor, Politique monétaire, RDC.

Classification JEL: C2, E5

1
Licencié en Sciences Economiques de l’Université de Kinshasa

Page | 1
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Introduction
La conduite de la politique monétaire reste centrée sur l’objectif d’un niveau d’inflation faible
et maitrisé permettant la réalisation d’une croissance de l’activité économique soutenue et
durable. Cette préoccupation est d’autant plus marquée dans le cas de la RDC qui après
plusieurs années de récession couplées d’hyperinflation est parvenu a renoué avec la
croissance de l’activité et modéré l’ampleur des variations du niveau général des prix.

En effet, en se rapportant aux évolutions du taux d’inflation et le taux de croissance de


l’activité depuis 2002, il se dégage les constats suivant : de 2002 à 2009, une inflation
modérée (19,9 % en moyenne annuelle) mais assez volatile avec une reprise de la croissance
économique (5,4 % en moyenne annelle) ; de 2010 à 2015, une croissance remarquable (8 %
en moyenne annuelle) accompagnée par une très faible inflation (5 % en moyenne annuelle) ;
et en 2016, un ralentissement de la croissance (2,5%) et une augmentation de l’inflation mais
qui demeure modérée (11,4%). Ces résultats macroéconomiques contrastes avec ceux de la
décennie 90 qui a vu la plus grande crise économique, dans un contexte d’instabilité politico-
sécuritaire depuis l’accession du pays à l’indépendance. Soit, entre 1991 et 2001, une
profonde destruction des richesses (-5,8% en moyenne annuelle de croissance du PIB) et une
augmentation vertigineuse du niveau général des prix (3147,6% d’inflation en moyenne
annuelle) dégradant sévèrement le bien-être collectif.

La question est alors de savoir si la RDC a prit les mesures nécessaires de politique
économique pour se préserver de revivre la situation des années 1990. Plus particulièrement,
« le pays a t-il fondé une politique monétaire robuste en matière de maintien de la stabilité
des prix et de préservation de l’activité économique ? ».

C’est dans ce contexte que cette étude se propose d’évaluer l’orientation de la politique
monétaire en RDC, sur la période 2001-2016, à l’aide de la règle de Taylor qui est un guide
de référence en matière de conduite de la politique monétaire sensé sous-tendre les évolutions
dans les ajustements de l’instrument de référence pour les interventions des autorités
monétaires.

La règle de Taylor est une fonction d'ajustement du taux directeur de la banque centrale en
réponse aux fluctuations des principaux indicateurs de la conjoncture, notamment l’inflation
et la croissance de l’’activité. Elle a pour ambition de définir une ligne de conduite qui
s’impose aux autorités monétaires et se fonde sur le calcul d’un taux d’intérêt de court terme,
supposé « optimal », compatible avec l’objectif d’inflation de la banque centrale et l’évolution
de l’écart de production. Elle peut être utilisée à la fois pour l’évaluation des politiques
monétaires antérieures et pour la détermination des politiques futures.

Formulation du Problème de recherche

D’après le principe de fonctionnement de la règle de Taylor, la politique monétaire est


expansive, attestée par la baisse du taux directeur en cas d’excès de l’inflation-objectif par
rapport à l’inflation observée, d’une part, et d’excès de la production potentielle sur celle
effective, d’autre part. Elle est restrictive, attestée par l’augmentation du taux directeur, dans
le cas inverse. Cependant, la réalité de l’économie congolaise, par rapport aux principes de
Taylor, donne la perception d’une situation atypique. En effet, au cours de la période 2001-

Page | 2
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

2016, plusieurs observations majeures peuvent être relevées sur base de l’évolution du taux
directeur, taux d’inflation et de la croissance économique :

 En 2001, le taux directeur passe à 140 % face un taux d’inflation de 135 % (supérieur
à l’objectif de l’année fixé à 90 %) et un taux de croissance de l’activité de -2,1
(synonyme de récession) ;

 Entre 2005 et 2006, le taux directeur passe de 28,75% à 40 % alors que l’inflation
baisse de 21,5% à 18,2% et que la croissance ralentie de 7,8% à 5,6% ;

 Entre 2008-2009, dans un contexte de crise financière internationale, le taux directeur


est relevé de 40 à 70 % pour faire face à hausse importante de l’inflation de 27,6 % à
53,4% alors que le taux de croissance de l’activité accusée un ralentissement marquée
de 6,2% à 2,8%.

 Entre 2015-2016, dans un contexte de chute des cours des produits de base, de
ralentissement de la croissance chinoise et de tension sociopolitique, le taux directeur
est passé de 2% à 7% face une monté de l’inflation de 0,9% à 11,4% (le taux d’intérêt
réel devenant ainsi négatif) alors que la croissance de l’activité connaissait de nouveau
un ralentissement marqué de 6,9% à 2,5%.

Ces différentes situations semblent relevées un paradoxe dans la conduite de la politique


monétaire en se référant au principe de la règle de Taylor. La politique monétaire est
expansive, attestée par la baisse du taux directeur en cas d’excès de l’inflation-objectif par
rapport à l’inflation observée mais d’excès de la production effective par rapport à celle
potentielle comme relevé ci-haut. Elle est restrictive, attestée par la hausse du taux directeur
dans le cas inverse d’écart d’inflation mais avec écart de production où le niveau effectif
serait inférieur à celui potentiel. En effet, les ajustements du taux directeur sont, le plus
souvent, corrélés à l’évolution du taux d’inflation et très peu d’attention semble être porté à
l’état de la conjoncture sur base de l’évolution du taux de croissance de l’activité comme
indicateur des changements dans les phases du cycle économique.

Ceci souligne encore le caractère particulier des économies en développement comme


l’économie congolaise où les phases de récession sont marquées par la baisse du produit
global accompagné des hausses du niveau général des prix et les phases d’expansion sont
marquées par la hausse du produit global accompagné par un ralentissement voire
stabilisation des variations du niveau général des prix.

C’est dans ce contexte que se pose la question de la pertinence de la règle de Taylor en tant
que guide dans les ajustements du taux d’intérêt de référence de la Banque Centrale du Congo
face à des fluctuations de l’inflation et de la production allant souvent dans des directions
opposées et relavant ainsi un dilemme à la politique monétaire : « augmenter le taux d'intérêt
pour lutter contre l'inflation ou le baisser pour relancer la production ».

Question de recherche

Sur base du problème soulevé, la question fondamentale de recherche peut se formuler


comme suit : « les différents ajustements du taux directeur opérés par la Banque Centrale
ont-ils été conformes aux prescriptions de la règle de Taylor au cours de la période 2001-
2015 ? »

Page | 3
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

De cette question principale découle deux sous questions :

 Quelle est la forme de fonction de réaction (Contemporaine, Rétrospective,


Prospective) décrit le mieux le comportement des autorités monétaires en RDC ?

 L’écart de production, indicateur du cycle économique, a-t-il une influence (un rôle)
dans les décisions de modifications du taux d’intérêt directeur ?

 Quel rôle la règle de Taylor pourrait jouer dans la conduite de la politique monétaire
en RDC ?

La suite du travail est organisée comme suit : La première section présente le fondement
théorique de la règle de Taylor. La deuxième section passe en revue quelques études
empiriques sur la règle de Taylor. La troisième section fournie un aperçu sur l’orientation de
la politique monétaire, en RDC, ces dernières années. La quatrième section aborde la
démarche méthodologique utilisée pour répondre à la problématique du travail. La cinquième
section se consacre à l’analyse des résultats des estimations des fonctions de réactions pour la
BCC et enfin la sixième section tire les implications de politique monétaire par rapport aux
résultats obtenus.

I. LA REGLE DE TAYLOR

De toutes les règles d’instrument de politique monétaire, la règle de Taylor est la plus usitée.
L’objectif principal de la règle de Taylor est de définir une ligne de conduite qui décrit le
comportement des autorités monétaires. John Taylor a indiqué une règle qui se veut à la fois
une description approximative de la politique réellement suivie par la Réserve Fédérale
Américaine sous la Présidence d’A. Greenspan et une prescription normative sur la base de
simulations stochastiques. Taylor (1993) a présenté une fonction de réaction de la Réserve
Fédérale basée sur une formule simple faisant dépendre l’évolution du taux nominal des fonds
fédéraux en fonction des écarts de l’inflation par rapport à sa cible et aux écarts de la
production de son niveau potentiel.

Selon la « règle de Taylor», le taux d’intérêt à court terme fixé par la Réserve Fédérale est
fonction linéaire du taux d’inflation courant (sur les quatre derniers trimestres) et de l’output
gap, écart entre le produit réel et le produit potentiel (Ngonga, 2015).

La règle de Taylor sous sa forme originelle s'écrit sous la forme suivante :

i= 2 + π + 0,5(π– 2) + 0,5y

Où i est le taux d’intérêt nominal de court terme des fonds fédéraux des Etats-Unis que
manipule la Réserve Fédérale dans ses opérations d’open-market ; π est le taux d'inflation
calculé sur les quatre derniers trimestres ; y l'écart en pourcentage de la production effective
de son niveau potentiel (y– y*)/ y*).

Taylor considère sur la base d'estimation sur la période (1984:1 à 1992:3) une tendance (y*)
pour la production réelle égale à 2,2 %. La cible d'inflation est posée par Taylor égale à 2 %
tout comme le taux d'intérêt réel qui est ainsi proche du taux de croissance de long terme
(premier terme à droite de l'égalité). Les coefficients de réaction du taux d'intérêt aux écarts
de production et d'inflation sont identiques et posés égaux à 0,5 même si la réaction à

Page | 4
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

l'inflation est de l'ordre de 1,5. Taylor montre que la simulation de sa règle sur la période
(1987 à 1992) « colle » assez bien à l'évolution du taux des fonds fédéraux, en dehors de la
période particulière du krach de 1987.

La formulation standard de la règle de Taylor est présentée comme suit :

it= i* + α(πt – π*) +βyt

Où i est le taux d’intérêt nominal de court terme, i* le taux d’intérêt réel neutre ou taux
d’intérêt réel d’équilibre de long terme, π le taux d’inflation courant, π* le taux d’inflation
cible ou objectif, y l’écart de production défini comme la déviation en pourcentage du PIB
réel courant de son niveau potentiel et, α et β sont respectivement les paramètres de
pondérations des écarts d’inflation et de production.

En affirmant cette règle, Taylor n’entendait pas qu’on l’applique aveuglement : bien d’autres
événements, tels qu’une crise de change ou le besoin de restructurer la composition des
dépenses et donc le dosage des politiques monétaire et budgétaire, justifient de changer le
taux d’intérêt nominal pour d’autres raisons que cette règle. Mais Taylor affirme que la règle
est une façon utile de se représenter la politique monétaire : choisir une cible de taux
d’inflation, et tenter ensuite de la respecter en tenant compte non seulement de l’inflation
courante mais aussi du taux de change courant (Blanchard, 2009).

Néanmoins, il reconnaît que sa règle pourra être améliorée notamment par le raffinement des
coefficients de réaction (choisie de manière arbitraire mais comme il l'écrit « reproduisant
convenablement le comportement passé des autorités monétaires américaines»)
(Aubert, 2001).

1. Principe et fonctionnement de la règle de Taylor

Le point critique pour l’analyse de politique monétaire est la valeur des coefficients attachés à
l’inflation (α) et la production (β). En effet, l’évolution cyclique de l’économie dépendra du
poids accordé à ces coefficients. D’une part, si α < 1, la fonction de réaction implique une
politique monétaire accommodante, le taux d’intérêt réel n’augmente pas suffisamment pour
contrebalancer la variation de l’inflation. D’autre part, si α > 1, la politique monétaire agira
de manière contra-cyclique, la variation de l’inflation sera plus que compenser par la variation
du taux d’intérêt réel. Cette réaction plus que proportionnelle des taux d’intérêt à l’inflation
est devenue célèbre, dans, sous le nom de « principe de Taylor » - la proposition selon
laquelle la banques centrale peut stabiliser l’économie en ajustant son taux d’intérêt nominal
plus que l’unité avec la variation dans l’inflation -. D’un autre coté, même quand la banque
centrale augmente son taux d’intérêt en réponse à une hausse de l’inflation, mais moins que
l’unité, cela amplifie l’évolution cyclique et produit des larges fluctuations dans l’économie.
Taylor (1999), explique notamment l’instabilité macroéconomique des années 1970 au non
respect du principe de Taylor par la Federal Reserve. Les résultats de l’économie américaine
auraient été supérieurs à ce qu’ils ont été. L’inflation n’aurait pas échappé progressivement au
contrôle parce que la Fed aurait réagi à chaque augmentation du taux d’inflation (au-dessus de
la cible : 2%) par une augmentation plus que proportionnelle du taux des fonds fédéraux.

Page | 5
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Le même raisonnement peut s’appliquer, plus ou moins, au signe du coefficient β. Si β > 0, la


politique monétaire est stabilisatrice, la banque centrale augmente le taux d’intérêt nominal en
réponse à un écart de production positif et vice versa. Si β < 1, la politique monétaire est
déstabilisatrice.

Le fonctionnement de cette règle peut être résumé de la manière suivante :

Tableau n° 1. Fonctionnement de la règle de Taylor


Scenario Réaction
1 π>π* → y > y* → i < i* Augmenter le taux d’intérêt
2 π<π* → y < y*→ i > i* Baisser le taux d’intérêt
3 π - π* = 0 →y - y* = 0 → i = i* Taux d’intérêt nominal =
Taux d’intérêt réel
Source : Elaboré par l’auteur

Dans le cas n°1, d’une part, l’inflation excède sa cible, il ya des tensions inflationnistes, et/ou
d’autre part, le PIB réel excède son niveau potentiel, il s’agit d’un écart cyclique sous forme
d’expansion pouvant entrainer la surchauffe et partant le risque de récession. Cette situation
nécessite une politique contra-cyclique, l’autorité monétaire augmente l’instrument taux
d’intérêt pour limiter l’emballement. Dans le cas n°2, l’inflation est inférieure à sa cible, il ya
des tensions désinflationnistes, et/ou le PIB réel est inférieur à son niveau potentiel, il s’agit
d’une fluctuation sous forme de récession pouvant le recul de la production et de l’emploi.
L’autorité monétaire devra agir à contre courant en baissant les taux pour encourager
l’investissement et la consommation. Dans le cas n°3, Si les écarts d’activité et d’inflation
sont nuls, il ya équilibre et il n’ya pas de politique monétaire à mettre en place, l’autorité
monétaire devra fixer le taux d’intérêt nominal au niveau du taux d’intérêt réel.

2. Critiques à la règle de Taylor

La règle de Taylor, en dépit de son efficacité à décrire assez fidèlement le comportement de


la Fed et d’autres banques centrales des pays industrialisés, a fait l’objet de critiques relevant
certaines limites, à savoir :

 Les coefficients des variables (α=β=0,5) de l’équation, choisie par Taylor, qui reflètent
les coefficients respectives de l’inflation gap et de l’output gap, sont tenus sans aucune
véritable justification et ont été fixé arbitrairement2. Par ailleurs, il faut tenir compte
du fait qu’implicitement ou explicitement chaque banque centrale accorde au cours du
cycle économique plus de poids à l’une ou l’autre variable. L’évaluation de la
politique monétaire risque ainsi d’aboutir à des conclusions contradictoires.

 Elle a un caractère plus descriptif que normatif (qui résulte du choix des coefficients
des variables de l'équation).

 La règle initiale formulée par Taylor ne prend pas en compte le caractère anticipateur
de la politique monétaire. Or, la banque centrale ne contrôle guère l’inflation actuelle
et ne peut influencer que l’inflation future à un horizon compris généralement entre

2
Ces coefficients reposent sur une justification imprécise, et n’ont aucune raison d’être égaux pour tous les pays
avec des structures économiques différentes. Ils peuvent aussi faire l’objet d’une estimation : ils dépendent alors
non seulement du modèle économique sous-jacent mais aussi de la méthode économétrique utilisée.

Page | 6
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

quatre et huit trimestres. L’inclusion dans la règle de prévisions basées sur toute
l’information disponible permet de mieux tenir compte des délais, longs et variables,
de transmission des impulsions de politique monétaire.

 L'incertitude quant à la détermination des variables de référence de l'équation, le taux


d'intérêt réel neutre, de la production potentielle et l'indice des prix utilisé pour
mesurer l'inflation (en plus de l'incertitude sur la valeur optimale des coefficients de
réaction et sur la nature et l'horizon des variables à intégrer), suppose d'utiliser la règle
de Taylor et ses éventuelles prescriptions avec beaucoup de circonspection.

 La règle de Taylor peut, dans certains cas, envoyer des signaux erronés. Lors d'un
choc d'offre négatif (par exemple sur le prix du pétrole) les cibles d'inflation et de
production évoluent dans des directions opposées : les prix augmentent et l'activité
baisse. La réaction de la Banque Centrale n'est plus univoque : elle peut baisser les
taux pour soutenir l'activité ou les monter pour contenir l'inflation, le taux de Taylor
restant inchangé.

Néanmoins, Taylor reconnait que sa une règle ne doit pas forcément faire l'objet d'une
application rigoureuse ; elle peut être prise comme une sorte de guide ou de référence qui
permet à la Banque centrale de s'expliquer sur des écarts à la règle.

3. Emergences des règles de types Taylor

A la suite de Taylor, différents aménagements ont été apportés à la formulation initiale de sa


règle, menant ainsi au développement des règles « Taylor-type rules » ou règles de Taylor
généralisées. Ces modifications entre dans la construction des fonctions de réaction des
banques centrales, qui définissent la manière dont la politique monétaire réagit à un choc qui
l’éloigne de ses objectifs. Elles se basent d’une part, du fait que les paramètres attribués par
Taylor ne conviennent nécessairement pas pour toutes les économies et d’autre part, la
différence des structures économiques de chaque pays conduit à des spécifications différentes
des règles de politique monétaire.

Les raffinements de la règle concernent essentiellement trois aspects :

4.1. L’intégration d’arguments supplémentaires au nombre des variables explicatives :

Les études théoriques et empiriques récentes sur la fonction de réaction des Banques centrales
ont montré que celles-ci ont recours à d’autres variables comme indicateur avancé de
l’inflation future et/ou objectif secondaire. Les variables le plus souvent utilisé sont
l’évolution des agrégats monétaires, le prix des actifs, les contraintes extérieures, un écart
financier – notamment âpres la crise financière internationale de 2008 –, etc.

Selon L. Ball (1998), en cas d'économie ouverte à l'échange international, deux modifications
doivent intervenir. En premier lieu, il conviendrait de prendre en compte une moyenne
pondérée du taux d'inflation national et du taux de change. En second lieu, l'inflation à
prendre en compte est une « inflation de long terme », une variable qui élimine les effets
transitoires des variations de change.

it= i* + α(πt – π*) +βyt + θ(et – e*)

Page | 7
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Où et est le taux de change nominal observé et e* est le taux de change nominal d’équilibre.

A la suite de la crise financière internationale de 2008, les défenseurs de l’ « approche


intégrée » préconisent dans la recherche de la stabilité financière une « règle de Taylor
augmentée » de l’écart financier.

it= i* + α(πt–π*) +βyt + θ(ƒt– ƒ*)

Le taux d’intérêt nominal de la banque centrale (it) répond à l’écart entre l’inflation (πt) et la
cible d’inflation (π*), à l’écart entre la production (yt) et son potentiel (yt*), et à l’écart entre
la stabilité financière (ft) et une mesure du niveau de stabilité financière optimal, une norme
historique ou sa valeur à l’état stationnaire (f*).

Dans la littérature, la mesure de la cible financière prend des formes variées puisqu’il peut
s’agir d’un credit spread, des prix des actifs, du crédit, de la monnaie), ou enfin d’indicateurs
financiers synthétiques.

4.2. L’intégration du lissage des taux d’intérêt :

Le lissage part de l’hypothèse qu’une banque centrale à tendance à lisser les modifications de
taux d’intérêt afin d’éviter une instabilité des taux pouvant entamer la confiance des agents
économiques. La fonction de réaction est alors décrite en termes d’ajustement partiel du taux
d’intérêt.

Celui-ci s’ajuste, à chaque période, à la moyenne pondérée du taux d’intérêt désiré et du taux
d’intérêt réalisé lors de la période précédente.

It= ρit-1 + (1-ρ) [i* + α(πt – π*) +βyt]

Avec it = ρit-1+ (1−ρ)it*, 0 <ρ< 1

Où ρ représente le degré de lissage

4.3. Prise en compte des délais de transmission de la politique ou de la modification de


l’horizon de décision de la banque centrale :

En raison des mécanismes de transmission de la politique monétaire, de l’indisponibilité des


variables d’inflation et d’output au moment de fixation du taux d’intérêt, et de l’impossibilité
d’une réponse instantanée entre ces trois dernières variables, les recherches menées au cours
des années quatre-vingt-dix ont marqué un désaccord avec la règle de Taylor sur les timings
des variables.

Modèle Backward-looking

Pour résoudre ce problème, les premières réflexions ont exprimé l’instrument de conduite de
la politique monétaire en fonction de valeurs retardées de l’inflation et de l’output. Ce type de
modèle est connu sous le nom de "Backward-Looking model". Son principe est de considérer
implicitement que les anticipations des secteurs privés sont adaptatives. Ce modèle aboutit à
une règle Backward-Looking.

Page | 8
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

it= i* + α (πt-h–π*) +βyt-h

Avec, h l’horizon d’anticipation fixé par la banque centrale

L’évolution de la littérature sur les règles de conduite de la politique monétaire a soulevé des
critiques quant à la version Backward-Looking pour modéliser le comportement d’une banque
centrale. Une de ces critiques principales est celle de Lucas. En effet, il a étudié comment les
agents forment leurs anticipations de l’avenir qui influent sur le comportement réel. Son étude
lui a permis d’identifier une critique qui a marqué des changements profonds au sein de
l’analyse économique. Cette critique repose sur le fait que les agents économiques ne
modifient pas leur comportement en fonction des politiques menées antérieurement.

Modèle Forward-Looking

Lucas suggère d’abandonner l’idée selon laquelle les économistes ou les décideurs de
politique se basent sur les politiques et les statistiques passées pour prédire le comportement
futur des agents. En effet, il recommande de prendre en compte leur réaction aux
changements que les autorités vont décider. En d’autres termes, Lucas suggère qu’il faille se
baser sur des anticipations pour fixer la politique actuelle et non plus de recourir aux
statistiques passées.

En raison de ces limites, les recherches récentes telles que celles de Clarida, Gali et Gertler
(1999), Svensson (1997, 2000, 2002), etc. envisagent que les modèles qui répondent
directement aux prévisions des indicateurs économiques sont plus efficaces et plus
opérationnels que ceux qui répondent aux variables courantes ou passées.

Ces modèles et les règles qui en découlent sont nommés règles sous la version Forward-
Looking. L’avantage de ce type de modèles est qu’il permet d’ancrer les anticipations
d’inflation des agents privés.

it = i* + α[E(πt,h|Ωt) – π* ] + β[E(yt,k|Ωt)]

Où [E(πt,h|Ωt)] et [E(yt,k|Ωt)]sont respectivement l’anticipation d’inflation et de l’output


réalisées à la date (t) selon les informations disponibles à cette date pour un horizon (k). Avec,
h l’horizon d’anticipation fixé par la banque centrale.

II. REVUE DE LITTERATURE EMPIRIQUE

Une littérature abondante existe sur les vérifications empiriques de la règle de Taylor dans le
monde. Des nombreux chercheurs ont tenté de reproduire et/ou adapter les résultats des
travaux de J. Taylor pour le cas de la Fed et d’autres banques centrales grandes des grandes
économies. Le succès de cette règle conduit également au développement des études sur les
fonctions de réaction à la Taylor dans le cas des pays émergents et pays en développement,
notamment pour dans les banques centrales africaines.

Page | 9
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

2.1. Etudes Générales

Quelques études empiriques aux Etats-Unis

Aux Etats-Unis, des nombreuses études sur la fonction de réaction de la Fed s’inspirant du
travail séminal de Taylor ont été menées et ont pour la plupart confirmé les résultats de ce
dernier.

Tableau n° 2. Résultats de quelques estimations de la règle de Taylor aux Etats-Unis


Auteurs Periodes Coeff.infl-gap Coeff.Out-gap
(Taylor, 1996) 1960-1979 0,81 0,25
1987-1997 1,53 0,77
(Judd and Rudebush, 1998) 1979-1987 1,46 1,53
1987-1997 1,54 0,99
(Clarida R., Gertler M., Gali J., 2000) 1960-1979 0,83 0,27
1979-1996 2,15 0,93
(Orphanides,2003) 1966-1979 1,49 0,46
1979-1995 1,89 0,18
Source: Adapté de « Woodford M., Interest and Prices: Foundations of a Theory of Monetary Policy, Princeton
University Press, 2003. »

Quelques études empiriques dans l’Union européenne et la Zone euro

Pour l’union européenne et la Zone euro, des nombreuses études sur les fonctions de réaction
type-Taylor sont également à relever. La plupart se fonde sur des comparaisons des
comportements de différentes banques centrales mais surtout depuis l’avènement de l’euro sur
une analyse comparative relevant les divergences et convergences des réactions de la Fed et
BCE.

Tableau n° 3. Revue de la Littérature de quelques estimations de la règle de Taylor dans


l’Union Européenne et la zone Euro
Auteur(s) Champ d’étude Periode d’étude Paramètres Estimés R2

Cste α Β
(Clarida R., Allemagne 1979-1993 3.14 1.31 0,25 0,91
Gertler M., 1996)
(S.Gerlach,G. UE 1990-1998 2,4 1,58 0,45 0,98
Schnabel, 1999)
(G.Peersman, UE 1980-1997 3.87 1,2 0,76 0,76
F.Smets, 2002)
(J.S.Mesonnier, UE 1973-2003 2,56 1,74 0,83 0,9
J.P.Renne, 2004)
(P. Gerlach- UE 1988-2002 -1,23 2,73 1,44 0,88
Kristen, 2003)
(D.Gerdesmeier, Zone Euro 1999-2002 2,6 0,45 0,3 0,72
B.Roffia, 2003)

Page | 10
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

(K. Ulrich, 2003) Zone Euro 1999-2002 2,96 0,25 0,63 0,19
(B. Sidibe, 2009) Zone Euro 1999-2010 1,63 0,57 0,08 0,32
Source : Adapté de “Huma Christina, Financial instability and inflation targeting in the European Union: An
empirical study on Germany and the EU, Thesis, Msc in Finance and International Business, Aarhus School of
Business, Aarhus University, 2010, pp.9-10.

Une analyse cross-country de la règle de Taylor par Basilio Joselito

Basilio Joselito (2012) mène une étude où il compare à travers pays les modèles de réactions
de la politique monétaires à la croissance et à l’inflation. Cette étude essaie d'évaluer la
performance de la politique monétaire en termes de consistance aux règles de taux d'intérêt en
particulier pendant la crise récente. Après plusieurs spécifications, une équation commune de
la règle de Taylor est obtenue et a estimé pour chaque pays. Cette règle de Taylor commune
consiste à une relation non linéaire entre le taux de la politique et les variables explicatives
suivantes: inflation, croissance de la production et le taux de la politique décalé d’une période.
Les résultats sont les suivants :

 Parmi les 36 pays où la convergence est accomplie dans les régressions NLLS (Non
linear least square) de l'équation de Taylor, seulement 9 pays avaient des
spécifications en adéquation avec le principe Taylor d’un coefficient supérieur à
l’unité pour l’inflation. Ces pays sont : la République Tchèque, l’Islande, Israël, le
Japon, la Pologne, la Turquie et l'Argentine. Etant donné qu'il y a plus d’un cas d'un
coefficient inférieur à l’unité, il peut subsister le doute qu’un poids plus important est
accordé l’inflation dans les autres pays sous étude. En pratique, il est possible que la
modération de l’inflation entre la fin des années 1990 et le début des années 2000 n’ait
pas exigé un grand degré de réponse de la politique monétaire dans la plupart des
pays.

 Les paramètres de l’inflation et la croissance sont tous deux significatifs pour les pays
suivants: Australie, Bulgarie, Chili, Chine, Colombie, Croatie, Islande, Japon,
Pologne, et Suède. Pour la zone Euro, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, la
Corée, la Malaisie, la Suède et la Suisse, seul le paramètre de la croissance du PIB est
significatif. En outre, pour le Brésil, la République Tchèque, la Hongrie, Israël et la
Thaïlande ont des taux de la politique qui sont sensible significativement à inflation
mais pas à la croissance du PIB.

Les résultats ci-haut fournissent quelques indices (mais pas des réponses nettes) que la
politique monétaire suit une règle, comme spécifié dans l’équation de la règle de Taylor. Dans
quelques pays, comme l’Australie, le Chili, l'Islande et la Pologne, il ya l'évidence que les
politiques monétaires adhérent fortement aux règles avec l’inflation et la croissance. Le
comportement de politique monétaire dans ces pays est en adéquation avec l’équation de
Taylor impliquant la croissance, l’inflation ainsi que le taux de la politique de la période
antérieure. Pour les pays comme la zone Euro, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Canada et
la Suisse, il n'est pas clair si une telle règle existe étant donné les données couvert dans
l'étude. Il peut être possible que dans ces pays la croissance soit plus important relativement à
l’inflation dans l’équation de la règle de Taylor. Au contraire, la politique monétaire au Brésil,
en République tchèque, Hongrie, Israël et en Thaïlande donne plutôt plus de poids à inflation
qu'à la croissance, impliquant que seulement l’inflation entre dans leur équation de la règle de
la politique.

Page | 11
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Quelques études empiriques dans les pays africains

La littérature sur les vérifications empiriques de la règle de Taylor dans les pays africains est
moins abondante que dans les pays développés. Néanmoins quelques travaux sur les fonctions
de réaction de type Taylor peuvent être signalés.

Tenou (2002), dans le cas de la zone franc, estime une fonction de réaction de type Taylor
pour la BCEAO. Ses résultats montrent que la règle estimée décrit relativement bien le
comportement des taux du marché monétaire. Le coefficient de l’inflation n’est pas
statistiquement significatif sur la base des données annuelles. Le coefficient de lissage du taux
d’intérêt montre que la BCEAO fixe ses taux en fonction de ses taux passés : le coefficient du
taux d’intérêt retardé est de 0,82. Le coefficient de pondération de l’output Gap est de 0,66. Il
trouve aussi que le taux d’intérêt du marché monétaire est relativement plus sensible à l’écart
de production qu’au différentiel du taux d’intérêt. De façon générale, la BCEAO semble tenir
compte des variables économiques fondamentales que sont l’inflation et l’écart de production
dans la fixation de ses taux d’intérêt.

Nguenang et al. (2009), Ont mené une étude sur la fonction de réaction de la BEAC. Sur la
base des données trimestrielles de 1986 à 2006, ils procèdent à l’estimation d’une règle de
Taylor de type Forward-looking. Les résultats montrent que la Banque des Etats de l’Afrique
Centrale procède par le lissage du taux d’intérêt. En outre, elle accorde un poids plus
important à la stabilité des prix qu’à l’activité économique, ce qui est en conformité avec le
fait que l’inflation soit l’objectif prioritaire de la politique monétaire. Les auteurs concluent
que le modèle Forward-looking prenant en compte la croissance de la masse monétaire et le
différentiel du taux d’intérêt s’avère être le meilleur modèle : il décrit relativement bien le
comportement historique des taux d’intérêt. Il peut donc être considéré comme la fonction de
réaction adaptée au cadre de la BEAC.

Rageh Rania (2010) examine la validité d'utiliser la règle de Taylor comme une règle robuste
pour mener la politique monétaire dans le cas de l'Egypte (pendant la période 1997-2007), en
testant la vérification de deux hypothèses principales : En premier, l’existence d’un effet
significatif de la politique monétaire (exprimé par le taux de la politique) sur l’économie
réelle (représenté par la production et l’inflation). En Second, la déduction d’une règle du
taux d'intérêt pendant la période de l'étude dans le cas de l’Egypte. Les estimations concernent
une règle de taux d’intérêt de Type Taylor augmentée où le taux d’intérêt nominal est
déterminé par l’écart de production, l’inflation et le taux de change. Les conclusions de l'étude
montrent que le régime monétaire discrétionnaire en Egypte pendant la période d'étude était
contradictoire avec les résultats de la règle de politique monétaire. Ce qui peut être attribué à
plusieurs facteurs, dont principalement l'absence d'une réelle politique de taux pendant la
période de l'étude, qui a pu affecter les résultats modèle, en plus d’une faible qualité des
données.

Moumni Nicolas et Dasser Salma (2010) ont examiné l’application par la Banque Centrale du
Maroc d’une règle Type-Taylor dans la conduite de la politique monétaire au cours de la
période 1995-2005. Les estimations menées, par la méthode des moments généralisée
(GMM), d’une version backward-looking et forward-looking de la règle standard et
augmenté de l’agrégat monétaire M1 (avec et sans lissage) ne supportent pas l'usage par la
banque centrale de Maroc d’une telle règle. L'objectif opérationnel de la Banque Al-Maghrib
est réguler la liquidité dans le marché monétaire, en influençant le taux d'intérêt de

Page | 12
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

l'interbancaire. Ce taux est le canal de la transmission principal de politique monétaire. Dans


ce contexte, les auteurs optent pour l'hypothèse d'une politique monétaire discrétionnaire.

Ndahiriwe Kasai (2011) analyse les règles de politique monétaire dans le cas de l’Afrique du
Sud de 2000 à 2010. Il a modélisé une version backward-looking, courante et forward-looking
de la règle de Taylor pour la SARB et a trouvé que la version forward-lookng était plus
performante que les autres. Les résultats d’estimation de cette dernière montre que la SARB
adopte un comportement de lissage du taux d’intérêt (la valeur coefficient de lissage est de
0,91) et que une plus grande pondération est accordé à l’inflation par rapport à l’activité (la
valeur du coefficient attaché à l’inflation est 1,08 et 0,06 pour celle de l’activité). En outre, il
considéré l’inclusion des indices de conditions financières pour vérifier s’ils améliorent la
bonté du modèle. Les conclusions ont révélé que les modèles qui prennent en compte ces
indices décrivent mieux le comportement de la SARB que ceux qui ignorent les variables
financières.

Siri Alain (2012), analyse la politique monétaire des Banques Centrales du Ghana, du Nigeria
et de la CEDEAO en estimant des règles de taux d’intérêt. En dépit de l'usage déclaré de
gestion de la politique monétaire indirecte, l'évidence empirique suggère que la politique
monétaire du Ghana et du Nigeria n'est pas en adéquation avec la règle de la politique
monétaire d'après la formule de Taylor originale ou à ses variantes ajustées. Les taux d'intérêt
réagissent faiblement aux variations d'inflation et l’output gap. Dans le cas de la CEDEAO, la
banque centrale paraît appliquer une règle de type Taylor ajustée par le taux d'intérêt de la
France.

Rima Lajnaf (2013) analyse la règle de Taylor et la conduite de la politique monétaire en


Tunisie. Les résultats obtenus à partir de données trimestrielles s’étalant de 1997 à 2011
montrent que la règle de Taylor originale présente un faible pouvoir explicatif du
comportement des autorités monétaires tunisiennes. La règle prospective proposée décrit
d’une manière plausible la dynamique du taux d’intérêt. Cette règle fait dépendre le niveau du
taux de marché monétaire de sa valeur passée, de l’écart de production à son potentiel, de
l’écart de l’inflation anticipée à la cible implicite, du différentiel des taux du marché
monétaire entre la Tunisie et la zone euro et du différentiel d’inflation entre la Tunisie et la
France. Par conséquent, la politique monétaire tunisienne peut suivre une règle fondée sur
deux grands agrégats pris comme cibles, à savoir l’inflation et la croissance économique.

2.2. Etudes empiriques de la règle de Taylor en RDC

Les études portant sur la fonction de réaction de la politique en la République Démocratique


du Congo sont rares. Néanmoins, il a été possible de recenser quelques travaux d’intérêts
ayant abordés la règle de Taylor pour le cas de la Banque Centrale.

Kayembe et Mule Mule (2012) ont estimé, pour le cas de la RDC, une fonction de réaction en
se référant à la règle de Taylor (1993) pour mettre en place une règle monétaire adaptée aux
spécificités de l’économie de la RDC. Le modèle développé a été estimé sur base des données
trimestrielles entre 2002 et 2012. Les résultats de ces estimations ont indiqué que la fonction
de réaction retenue est celle qui tient compte du phénomène de dollarisation de l’économie de
la RDC. Cette fonction, en sus de l’écart à l’inflation par rapport à sa cible et l’output gap, à
l’instar du modèle original de Taylor, intègre la variable taux de change.

Page | 13
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

L’écart de production a un poids prépondérant, soit 0,69 comparativement à 0,46 pour la


variation du taux de change et 0,30 pour l’écart à la cible d’inflation. Dès lors, l’estimation
correcte du poids de l’objectif de stabilité des prix dans le modèle est donnée par la somme
des coefficients de la variation du taux de change et de l’écart à l’inflation par rapport à sa
cible, soit 0,77 contre 0,69 pour l’écart de production.

Tsasa Vangu (2012), a construit et estimé un modèle d’équilibre général dynamique et


stochastique (DSGE ou MEGIS) pour l’économie congolaise. Son modèle d’équilibre général
dynamique et stochastique a pris en compte l’hypothèse de rigidités nominales sur les prix,
dont la version standard comporte : (i) une courbe IS forward-looking, une courbe de Phillips
forward-looking et (iii) une règle de politique monétaire à la Taylor.

Concernant cette dernière, les résultats de l’analyse des paramètres relatifs à la politique
monétaire – liés aux degrés de réaction du taux d’intérêt nominal aux déviations de l’inflation
et à celles de la production – ont montré que la Banque Centrale du Congo a suivi une
politique monétaire agressive et stabilisatrice étant donné que le taux d’intérêt nominal réagit
plus que proportionnellement aux déviations de l’inflation par rapport à sa cible (0,97) et
fortement aux fluctuations de la production par rapport à son niveau potentiel (0,39). Il s’agit
donc, aux termes de Clarida et al. (2000), d’une politique monétaire active et non
accommodante à l’inflation.

Mavungu Ngoma (2013), dans le cadre de son travail de mémoire, a étudié la « Règle de
Taylor et la mise en œuvre de la politique monétaire ». Ces résultats ont montré que les
ajustements de taux d’intérêt par la BCC répondent à la logique de Taylor et peuvent dès lors
être modélisées par une règle de type Taylor. Par ailleurs, les ajustements des taux d’intérêt
effectués en accordant le poids le plus élevé à l’objectif de stabilité des prix (0,53 pour le
coefficient de l’inflation gap contre 0,32 pour le coefficient de l’output gap), complété par
une attention particulière aux variations de la valeur externe de la monnaie nationale (0,46
pour le coefficient associé aux variations du taux de change).

Ngonga Nzinga (2015), dans le cadre de son travail de thèse portant sur le lissage du cycle et
politique monétaire en longue période dans le cas de la RDC, a procédé à la résolution du
modèle DGSE sur les périodes 1960-2001 et 2001-2013 dans le but de vérifier la cyclicité de
la politique monétaire. Concernant la fonction de réaction de Type-Taylor, les résultats
montrent que :

 Sur la période 1960-2001 : l'analyse de la fonction de réaction de la politique


monétaire en RDC, révèle un coefficient attaché à l’inflation égal 0,14 et 0,53 pour
celui attaché à la production. Le taux d’intérêt, durant cette période, aurait réagi de
façon plus importante aux déviations de la production par rapport à son niveau
potentiel et faiblement aux fluctuations de l'inflation par rapport à sa cible. Il apparait
ainsi que la politique du taux d’intérêt directeur a été, au cours de cette période,
contra-cyclique et plus focalisée sur la production.

 Sur la période 2001-2013 : Il découle de la fonction de réaction de la politique


monétaire en RDC, que la valeur du coefficient attaché à l’inflation est de 0,70 et 1,07
respectivement avec le modèle captant le PIB par l’indice d’activité et celui avec le
PIB généré trimestriellement et la valeur du coefficient attaché à la production est de
0,39 et 0,48 respectivement dans le modèles avec indice d’activité et PIB généré
trimestriellement. Il apparait ainsi que la politique du taux d’intérêt directeur a été

Page | 14
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

contra-cyclique. Elle permet, dès lors, le lissage en continu de la phase cyclique


d’expansion à travers le ciblage monétaire assuré notamment par les appels d’offre sur
titres.

Il ressort aussi au regard des coefficients attachés aux écarts d’inflation et de production que,
pour le cas de la RDC, la politique monétaire a accordé plus d’importance à l’objectif de
l’inflation plutôt qu’à celui de la croissance économique. En effet, il est à noter que le taux
d’intérêt nominal réagit plus que proportionnellement aux déviations de l’inflation par rapport
à sa cible et faiblement aux fluctuations de la production par rapport à son niveau potentiel.

III. TAUX D’INTERET ET ORIENTATION DE LA POLITIQUE MONETAIRE


EN RDC

1. Analyse du comportement du taux d’intérêt directeur de 2001 à 2016

Graphique n°1. Evolution annuelle du taux directeur de 2001 à 2016

Source : L’auteur, élaboré sur base des statistiques de la BCC.

L’analyse de l’évolution du taux d’intérêt directeur au cours de ses seize dernières années
peut être scindée en quatre phases :

 de 2001 à 2007 : de 140 % en 2001 – dans le but de combattre une forte inflation, soit
près de 135,1 % –, le taux directeur a amorcé une tendance baissière jusqu’à se situer à
24 % en 2002. L’obtention des taux d’inflation bas, grâce notamment à l’exécution
du programme économique du Gouvernement, a conduit la BCC à réduire
significativement son taux directeur afin de doper le crédit. En effet, le principal taux
de base de la BCC a alors atteint son niveau le plus bas depuis les années 80, soit 8,0
% en 2003. Cependant, la réapparition des tensions inflationnistes à partir de 2005 ont
entraîné un durcissement de la politique monétaire. Le taux directeur est passé de
28,75 % en 2005 puis à 40,0 % en 2006, avant de redescendre à 22,0 % en 2007.

Page | 15
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

 de 2008 à 2012 : cette tendance baissière a été interrompue par la montée de


l’inflation en 2008 et 2009 – soit 27,6 % et 53,4 % respectivement – due à la volatilité
à la hausse des cours mondiaux des produits pétroliers et de l’expansion des dépenses
publiques liées aux tensions sécuritaires à l’Est du territoire national. Un durcissement
de la politique monétaire a été opéré avec à la clé une hausse marquée du taux
directeur jusqu’à 70 % en 2009 destinée à renforcer la stérilisation de la liquidité via
les BTR notamment à préservant leur rendement réel. A partir de 2010, à la suite de la
chute de l’inflation, l’Institut d’émission a desserré sa politique monétaire. Il a procédé
en deux ans et demi – soit entre mars 2010 et septembre 2012 – à plus de dix
ajustements du taux directeur à l’effet de le ramener de 70 % à moins de 8 %. Ce
niveau, qui était le plus bas observé depuis trois décennies, a davantage connu d’autres
baisses. En effet, suite à la poursuite de la décélération de l’inflation, d’autres
assouplissements ont été opérés amenant ce taux à 4 % à fin 20123.

 de 2013 à 2015 : Durant cette période, le taux directeur est passé à 2 % en 2013 et
depuis, il a été maintenu à ce niveau. Le maintien constant du taux de base pendant
l'année au cours de la période a été justifié l'évolution de la conjoncture sur le plan
national et international. Sur le plan national, la stabilité macroéconomique attestée,
essentiellement, par le faible niveau de l'inflation – soit 1 % en moyenne – très
largement en deçà de sa cible, de la stabilité observée sur le marché de change et des
opinions favorables des chefs d’entreprises sur l’évolution de l’activité économique.
Au niveau mondial, la baisse des cours des produits de base non énergiques et
globalement une inflation faible notamment dans les pays avancés, partenaires
commerciaux de la RDC, est à l’origine de ce comportement.

 En 2016, dans un contexte de chute des cours du pétrole et des produits de base
affectant négativement la croissance de l’activité et accélérant le dépréciation
monétaire dans une économie extravertie et fortement dépendante du secteur
d’extraction minier, la BCC à relever son taux directeur à 7% (taux qui sera de
nouveau relevé à 14% dès janvier 2017).

2. Orientation de la politique monétaire : politique expansive vs politique restrictive

Sur base des évolutions du taux d’intérêt de référence de la BCC depuis 2001, la politique
monétaire à été globalement expansionniste, attesté par la baisse du taux directeur. C’est qui
est en accord avec la phase conjoncturel d’expansion dans laquelle la RDC se trouve depuis
2002 marquée par une croissance de l’activité soutenue sur la durée.

Ces mutations comportementales ont été dictées par les fréquents changements observés dans
l’évolution de l’environnement macroéconomique et financier marqué par des phases de
ralentissement ou d’accélération de la croissance de l’activité économique ; des tensions ou de
l’accalmie sur les marchés des biens et services ; des dérapages budgétaires ou de
l’accumulation des excédents de trésorerie par l’Etat ; de la volatilité du taux de change ; des
chocs sur les cours internationaux des produits pétroliers, des matières premières et
alimentaires ; des effets de la crise financière et économique internationale ;de l’impact des
chocs électoraux, etc.

3
Banque Centrale du Congo, Politique monétaire de la Banque Centrale du Congo - Cadre de référence, ,
Juillet 2013, p.117.

Page | 16
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Graphique n°2. Tendance du Taux directeur entre 2001 et 2016

Nota : Zone rouge : Pondération des durcissements monétaires // Zone bleue : Pondération des
assouplissements monétaires
Source : L’auteur, élaboré sur base des statistiques de la BCC.

Entre 2001 et 2016, la BCC a effectué 51 modifications de son taux d’intérêt de directeur, soit
une moyenne de trois ajustements par an. En outre, 64 % des modifications ont consisté en
des baisses du taux directeur et 36 % des cas en des hausses.

Tableau n°4. Fréquence des ajustements du taux directeur depuis 2001


Année Nombre des révisions Fréquence des hausses Fréquence des baisses
2001 1 1 -
2002 3 1 2
2003 5 1 4
2004 3 2 1
2005 8 3 5
2006 5 3 2
2007 4 1 3
2008 3 3 -
2009 2 2 -
2010 5 - 5
2011 3 1 2
2012 6 - 6
2013 2 - 2
2014 - - -
2015 - - -
2016 1 1 -
Total 51 19 32
Source : L’auteur, élaboré à partir des statistiques de la BCC

3. Principe de positivité du taux d’intérêt réel

Le maintien du principe de flexibilité du taux nominal et de positivité du taux réel – dans le


but d’encourager le développement de l’activité financière – sous-tend l’ensemble des
ajustements du taux directeur depuis 2001. En effet, le contexte de forte inflation qu’avait
connu le pays s’était traduit par des taux d’intérêt réels négatifs – qui ont découragé l’épargne
et le crédit – par le passé. Cette situation a conduit la BCC à consacrer le principe de

Page | 17
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

préservation de la positivité des taux réels comme principe dans tout ajustement de son taux
directeur.

Notons que les modifications du taux directeur de la Banque Centrale du Congo en


maintenant la positivité de sa marge par rapport à l'inflation servent également d’adjuvent à
l’efficacité d’un autre instrument de politique monétaire dans la régulation de la liquidité, il
s’agit du Bon BCC. Un taux d’intérêt réel négatif aurait un impact négatif sur l'efficacité des
Bons BCC les rendant moins attractifs étant donné que le taux directeur correspond au taux
plafond de rémunération de ces Bons. Il serait dès lors difficile de recourir à cet instrument
afin de ponctionner la liquidité lorsqu’apparaissent des tensions inflationnistes.

Cependant, l’année 2016 (et le début d’année 2017) s’est soldée avec un taux d’intérêt réel
négatif, ce qui amène à conclure que la BCC à déroger à principe « sacro-saint », du moins
sur la fin d’année, alors qu’elle l’avait scrupuleusement suivi depuis 2001. En effet, dans un
contexte d’accélération de la dépréciation monétaire et d’inflation ouverte, il parait impérieux
aux autorités monétaires d’utiliser de manière efficace le dispositif instrumental à leur
disposition (taux directeur, Coefficient de réserve et Bon BCC).

Graphique n°3. Evolution annuelle du taux d’intérêt réel de 2000 à 2016

Source : L’auteur, élaboré à partir des données de la BCC.

IV. METHODOLOGIE

1. Données et variables

Les données utilisées pour l’étude sont des séries couvrant la période allant du premier
trimestre 2001 au quatrième au dernier 2016, soit 64 observations. Il s’agit des données
secondaires issues de la base des données de la Banque Centrale du Congo.

Les variables considérées sont : le taux d’intérêt directeur (taux des prêts à court terme)
principal taux de refinancement de la Banque Centrale, l’inflation exprimée comme étant
égale au pourcentage du changement de l’Indice de prix à la consommation sur les quatre
derniers trimestres, l’écart de production calculé comme la variation du logarithme de l’output
observé de sa tendance potentielle par le filtrage à la Hodrick – Prescott (avec un paramètre
de lissage fixé à 1600,valeur standard pour des données trimestrielles).
Page | 18
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Note : Etant donné l’indisponibilité des données trimestrielles sur le PIB, il a été procédé
pour les besoins de l’analyse à la désagrégation la variable PIB réel, mesurée annuellement,
en données trimestrielles à l’aide du logiciel Eviews 9 suivant la méthode de Denton.

Tableau n°5. Statistiques descriptives des principales variables


INT INF PIB PIB_P
Mean 30.32500 38.73873 7101130. 7101130.
Median 22.50000 13.60249 6764694. 6696436.
Maximum 140.0000 572.5715 11049861 11261986
Minimum 2.000000 1.034842 4505971. 4346533.
Std. Dev. 34.15605 105.0092 2049932. 2043729.
Skewness 1.891396 4.375393 0.499629 0.473277
Kurtosis 6.307334 21.49262 2.054982 2.027913
Jarque-Bera 67.32795 1116.142 5.044200 4.909114
Probability 0.000000 0.000000 0.080291 0.085901
Sum 1940.800 2479.279 4.54E+08 4.54E+08
Sum Sq. Dev. 73498.05 694696.3 2.65E+14 2.63E+14
Observations 64 64 64 64
Source : Elaboré par l’auteur.

2. Spécification du modèle

L’approche empirique adoptée dans cette étude débute se subdivise en deux grandes étapes :

1ère étape : Elle débute par l’évaluation de la règle de Taylor, modèle Contemporain, dans le
cas de la Banque Centrale du Congo en tenant compte du comportement de lissage du taux
d’intérêt observé chez des nombreuses banques centrales cherchant à éviter une trop grande
volatilité du taux d’intérêt source d’incertitude pour les marchés et nuisible pour
l’activité économique.

Note : L’inclusion dans le modèle des cibles d’inflation annuelles de la BCC n’ayant pas
conduit à des résultats probants pour le calcul de l’écart d’inflation, la règle a été transformée
en relation entre le taux d’intérêt de court terme, d’une part, face aux variations de l’inflation
et de l’écart de production.

Il sera ainsi question d’estimer les équations suivantes :

INTt= C + α*INFt + β*PIBGAPt + ξt (1)

INTt= ρ*INTt-1 + (1 – ρ) [C + α*INFt + β*PIBGAPt + ξt] (1.1)

L’équation (1.1) peut être réécrite sous la forme :

INTt= ρ*INTt-1 + γ+ Ω*INFt + θ*PIBGAPt + μt (1.2)

Avec γ = (1 – ρ) C, Ω = (1 – ρ) α, θ = (1 – ρ) β et μt= (1 – ρ) ξt

Page | 19
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

2ème étape : Tenant compte des critiques formulées à la règle de Taylor, des estimations des
règles de type Taylor sont menées en vue de déterminer le modèle décrivant le mieux le
comportement des autorités monétaires congolaises. Dans un premier temps, il est estimé une
règle tournée vers le passé "Backward-Looking" et, dans un second temps, une règle tournée
vers le futur "Forward-Looking. Dans les deux cas, il est également pris en compte le lissage
du taux d’intérêt.

Les équations à estimer se présentent de la manière suivante :

Modèle Backward-looking

INTt= C + α*INFt-1 + β*PIBGAPt-1 + ξt (2)

INTt= ρ*INTt-1 + (1 – ρ) [C + α*INFt-1 + β*PIBGAPt-1 + ξt] (2.1)

Modèle Forward-looking

INTt = INTt* + α [E(INFt,h|Ωt) - INFCt ] + β [E(PIBGAPt,k|Ωt)] + μt (3)

[E(INFt,h|Ωt)] et [E(PIBGAPt,k|Ωt)] sont respectivement l’anticipation d’inflation et de l’output


réalisées à la date (t) selon les informations disponibles à cette date pour un horizon (k). Avec,
h l’horizon d’anticipation fixé par la banque centrale. Dans le cadre de cette étude, il est égal à
un trimestre. Il s’agit des anticipations trimestrielles d’inflation compte tenu du contexte
particulier de l’économie congolaise marquée par un passé hyper inflationniste et les faits
stylisés sur la relation inflation et croissance de l’activité dans les pays en développement.

Cependant, la série d’anticipation d’output pour le cas de la RDC n’est pas disponible. Ainsi,
l’étude s’inspire de la méthodologie fournie par Clarida, Gali et Gertler (1999) pour rendre
notre fonction forward-looking estimable.

En éliminant les variables inobservables de prévision, il s’obtient :

INTt= C + α*INFt+h + β*PIBGAPt + ξt (3.1)

Avec ξt= μt - α [INFt+h–Et(INFCt+h)] + β [PIB – Et(PIB_Pt)]

Ainsi, puisque Et[ξt|μt] = 0, où μt inclut toutes les variables composant l’ensemble


d’informations de la banque centrale défini au moment les taux d’intérêts sont fixés, nous
dérivons l’ensemble des conditions d’orthogonalité suivant :

Et[ƒt|μt] = 0 ;

Avec ƒt= INTt – C – α*INFt+h– β*PIBGAPt

Le même principe tel que développé ci-dessus pour obtenir une équation estimable d’une
fonction de réaction Type-Taylor Forward-looking incluant le lissage du taux d’intérêt selon
la méthodologie adopté par Clarida et al. (2000).

Page | 20
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

L’équation à estimer, dans ce cas, se présente comme suit :

INTt = (1 – ρ) {INTt* + α [E(INFt,h|Ωt) - INFCt ] + β [E(PIBGAPt,k|Ωt)] } + ρ*INTt-1 + μt


(3.2)

En éliminant les variables inobservables de prévision, il s’obtient :

INTt= (1-ρ)*C + α(1-ρ)*INFt+h + β(1-ρ)*PIBGAPt +ρ*INTt-1 + ξt (3.3)

Ce qui peut être réécrit sous la forme :

INTt= ρ*INTt-1 + γ+ Ω*INFt+h + θ*PIBGAPt + μt (3.4)

Avec γ = (1 – ρ) C, Ω = (1 – ρ) α, θ = (1 – ρ) β et μt = (1 – ρ) ξt

3. Méthode d’estimation

Selon la littérature économique, ce genre de règles linéaires est estimable par la méthode des
moindres carrés ordinaires (MCO). Cependant, parmi l’une des hypothèses fondamentales à
l’application de cette méthode, il y a l’éxogénéité des variables. L’on se heurte également au
problème de mesure avec erreur des variables explicatives (inflation anticipée mesurée par
l’inflation réalisée ex post et output gap, variable inobservable) et de corrélation d’une partie
des régresseurs avec le terme d’erreur composite. Dès lors, l’estimateur des MCO est biaisé et
non convergent. Dans ce cas, l’estimation peut être réalisée par la méthode des moments
généralisés (MMG). En outre, étant donné que la méthode des moments généralisés, qui
généralise plusieurs autres méthodes dont les MCO et les moindres carrés en deux étapes avec
variables instrumentales, cette méthode est retenue pour l’ensemble des équations à estimées
pour les raisons suivantes :

 Les estimations par les MCO révèlent des problèmes liés aux violations de certaines
hypothèses fondamentales à l’efficacité des estimations. Ces problèmes peuvent être
résolus par d’autres techniques qui corrigeront soit l’hétérosédasticité soit la
corrélation.

 Outre le problème d’endogénéité, la méthode des moments généralisés (MMG) permet


de tenir compte de l’hétérosédasticité et de la corrélation ayant des formes inconnues.
 Il n’est pas nécessaire de spécifier la distribution des résidus car les paramètres
obtenus par la MMG sont convergents et asymptotiquement normalement distribués.

 L’objectif est d’avoir la même méthode d’estimation des différentes spécifications.

Néanmoins, un des principes fondamental à l’application de MMG est le choix des


instruments. Ces derniers doivent satisfaire certaines propriétés. La première est que ces
instruments doivent être détectés par le choix d’un vecteur de variables sur la base
d’informations dont dispose la banque centrale au moment où elle choisit le taux d’intérêt, par
la suite, ils doivent être orthogonaux avec le terme d’erreur. La deuxième est qu’ils doivent
être prédéterminés. La troisième propriété est qu’ils doivent être fortement corrélés avec les

Page | 21
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

variables explicatives. Sous l’hypothèse que ces condition sont réalisées et que les instruments
sont en outre corrélés aux variables explicatives, les estimateurs des paramètres obtenus par la
MMG sont convergents et asymptotiquement normalement distribués.

Le choix des variables instrumentales dans la plupart des travaux économétriques est
déterminé selon la littérature économique. Ces propriétés conduisent à sélectionner les retards
des variables explicatives comme de bons candidats pour constituer le vecteur d’instruments,
sans toutefois utiliser trop d’instruments ou trop de retards sinon nous aurons un risque de sur-
identification. Dans le cadre des travaux étudiant les règles de type Taylor, le vecteur
d’instruments est constitué des retards des variables explicatives ; il s’agit le plus souvent des
retards de un à quatre des variables explicatives dans le cas d’utilisation des données
trimestrielles. C’est ainsi que le vecteur des variables instrumentales retenues pour les
différents estimation est constitué des retards de un à quatre du taux d’intérêt, de l’inflation,
de l’écart de production, de la variation du taux de change et la variation de la masse
monétaire suivant les différentes formes de fonctions réactions à estimer.

IV. RESULTATS

1. Etude de la stationnarité

Deux types de tests sont appliqués pour vérifier la stationnarité des séries. D’abord, il est
employé le test de Dickey-Fuler Augmenté (ADF), puis les résultats sont confirmés par le test
de Phillips et Perron (PP), qui permet de tenir compte de l’hétéroscédasticité et de
l’autocorrélation.

Tableau n°6. Résultats du test Dickey-Fuler Augmenté


T-Statistique
Variables ADF PP Conclusion
INT -2.747563*** -2.786982*** Stationnaire I(0)
INF -1.532068 -9.135104*** Stationnaire I(0)
PIBGAP -3.466005*** -4.065500*** Stationnaire I(0)
MMGAP -7.121216*** -7.190642*** Stationnaire I(0)
TCHGAP -7.248299*** -7.272739*** Stationnaire I(0)
Remarque : *, ** et *** signifient respectivement stationnaire au seuil de 10%, 5% et 1%.
Source : Elaboré par l’auteur sur base des tests à partir du logiciel Eviews 9.

Note : le test ADF et PP ayant donné des résultats contradictoires pour la série de l’inflation,
il a été fait recours au test KPSS. Ce dernier à confirmer le résultat du test de PP sur la
stationnarité de la série de l’inflation à niveau.

2. Synthèse des résultats

La synthèse des résultats obtenus à l’étape 1 et 2 est présentée dans le tableau suivant :

Page | 22
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Tableau n°7. Synthèse des résultats d’estimations des différentes spécifications de la règle Type-Taylor

Règle Contemporaine Règle Backward-looking Règle Forward-looking


Paramètres
Modèle de base Modèle avec lissage Modèle de base Modèle avec lissage Modèle de base Modèle avec lissage
C 3.374894*** 1.886884* 9.497504*** 4.957375** 3.710125* 0.566903
(2.928381) (1.765196) (3.469862) (2.635593) (1.732607) (0.526459)
ρ 0.191467*** 0.814767*** 0.494571***
(2.959037) (6.356279) (11.10311)
α 1.323699*** 1.084400*** 0.781238*** -0.183198 1.342591*** 0.746864***
(30.97862) (10.68057) (6.868608) (-1.379096) (8.144690) (7.764336)
β -0.394787 0.162070 1.790253 1.778283 -1.626926 -0.414414
(-0.461714) (0.205786) (0.966574) 1.519500 (-1.141405) (-0.867288)

R2 0.839870 0.861987 0.557806 0.636279 0.480973 0.783843


2
R -aj. 0.834252 0.854593 0.542291 0.616794 0.462436 0.772053
J 5.648597 9.652898 5.730646 8.747082 4.498506 5.371358
pv 0.463682 0.379309 0.454029 0.460941 0.609539 0.800809

Remarques : - *, ** et *** signifient respectivement significatif au seuil de 10%, 5% et 1%. ; Les valeurs entre () sont les statistiques t-student ; - J représente la statistique de
sur-identification et pv le p-value de la statistique du test de sur-identification.

Source : Elaboré par l’auteur sur base des résultats d’estimations à partir du logiciel Eviews 9.

Page | 23
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Règle Contemporaine :

 Pour le modèle de base, il ressort que la constante et le coefficient attaché à l’inflation


sont significatifs au seuil de 1% et ont les signes attendus. Par contre, le coefficient
attaché à l’écart de production (-0,39) n’est pas significatif et n’a pas le signe attendu.
La spécification du modèle est bonne étant donné le pouvoir explicatif du modèle
(R2-aj.=0.8342). Les résultats identifiés à cette étape traduisent les préférences des
autorités monétaires congolaises au cours de la période. Leurs réactions via le taux
d’intérêt sont exclusivement concernées par la variation de l’inflation sans tenir
compte de la variation de l’output gap. En effet, leur réaction suite à une hausse
d’inflation de 1% consiste en une hausse du taux d’intérêt directeur de 1,32%, soit une
variation plus que l’unité conformément au principe de Taylor.

 Pour le modèle avec lissage, les résultats sont proches de ceux du modèle de base. En
effet, tous les coefficients ont le signe attendu et sont significatifs excepté celui attaché
à l’écart de production. Le coefficient de l’inflation étant supérieur à l’unité (1,08)
permettant une variation du taux d’intérêt réel pour compenser la variation de
l’inflation selon le principe de Taylor. L’ajout de la variable du taux d’intérêt retardé a
amélioré la spécification du modèle (R2-aj.=0.8545). Le coefficient de lissage du taux
d’intérêt (0,19) a le signe attendu et est significatif au seuil de 1%. Néanmoins, sa
valeur, n’est pas suffisamment élevée (0,8 en moyenne) pour conclure formellement
que les autorités monétaires congolaises adoptent une politique d’ajustement partiel
du taux d’intérêt. Ces résultats confortent la préoccupation majeure des autorités
monétaires congolaises quant à l’objectif de stabilité des prix.

Règle Backward-looking :

 Pour le modèle de base, tous les coefficients ont le signe attendu et sont significatifs à
l’exception de l’écart de production. Cela renforce l’idée que la BCC a avant tout un
objectif d’inflation dans les modifications du taux directeur au cours de la période. En
effet, face à hausse de 1 % du taux d’inflation du trimestre dernier, la BCC augmente
son taux directeur de 0,78%. En outre, le pouvoir explicatif du modèle – relativement
acceptable (R2-aj.=0.5423).

 Pour le modèle avec lissage, les résultats sont peu probants et très éloignés de la
théorie de base. Les coefficients de l’inflation et de l’écart de production ne sont pas
significatifs, seuls la constante et le coefficient de lissage le sont. La valeur du
coefficient attaché à l’inflation est négative (-0,18), cela implique que face une
augmentation de l’inflation de 1% au trimestre précédent, la BCC baisse son taux
directeur de -0,18%. En dépit d’un pouvoir explicatif acceptable (R2-aj.=0.6167),
l’ajout de la variable taux d’intérêt retardé dont le coefficient est relativement élevé
(0,81) ne permet pas d’obtenir modèle représentant le mieux possible le comportement
des autorités monétaires congolaises. Il est conclu que le comportement d’ajustement
partiel du taux d’intérêt ne semble pas être conforme à la réalité de la politique
monétaire en RDC dans le cadre d’un modèle Backward-looking.

Page | 24
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Règle Forward-looking :

 Pour le modèle de base, la fonction de réaction tenant compte de la réaction du taux


d’intérêt face aux variations de l’inflation anticipée et de l’écart de production aboutit
à des coefficients qui ont le signe attendu et sont significatifs à l’exception de l’écart
de production (-1,62) dont le coefficient est négatif et non significatif confirmant le
fait que les déviations de la production effective de son niveau potentiel n’ont pas
d’impacts significatifs sur la fonction de réaction des autorités monétaires congolaise.
En effet, si l’inflation anticipée augmente de 1%, la BCC augmente sont taux directeur
de 1,34%, traduisant une politique non-accommodante et conforme au principe de
Taylor (la variation de l’inflation sera plus que compenser par la variation du taux
d’intérêt réel). En outre, e pouvoir explicatif du modèle est relativement acceptable
(R2-aj.=0.4624).

 Pour le modèle avec lissage, l’introduction du taux d’intérêt retardé améliore


sensiblement les résultats de l’estimation. Les coefficients de l’inflation anticipée
(0,74) et de lissage (0,49) ont le signe attendu et sont significatifs au seuil de 1%. Par
contre, le coefficient attaché à l’écart de production (-0,41) est négatif et non
significatif. Ce résultat confirme ainsi la priorisation accordé à la stabilisation de
l’inflation dans la fonction de réaction forward-looking de la BCC. En outre, le
pouvoir explicatif du modèle s’est nettement amélioré (R2-aj.=0.7720).

3. Choix du meilleur modèle

Tableau n°8. R2 des modèles et statistique descriptives du taux directeur, taux de Taylor règle
Contemporaine, taux de Taylor règle Backward-looking et taux de Taylor règle Forward-
looking
Variable Obs Mean Std. Dev. Min Max 2
R
int_dir 60 23.34667 21.17274 2 90
tt_con 60 23.04013 19.72116 4.352631 90.7352 0.839870
tt_con_lis 60 22.80703 20.1599 3.490344 99.99533 0.862328
tt_bac 60 22.18439 16.54341 9.054777 114.0643 0.557860
tt_bac_lis 60 22.47935 17.40436 4.821867 93.98741 0.636279
tt_for 59 22.6607 18.01493 2.700758 82.67301 0.480973
tt_for_lis 59 23.83626 19.50255 1.799743 76.229 0.783843
Source : Elaboré par l’auteur à partir des résultats obtenus du logiciel Stata 13.

Sur base du Coefficient de détermination (ajusté) et de l’analyse graphique, le modèle retenu


comme meilleur description du comportement des autorités monétaires dans les décisions de
modification du taux d’intérêt directeur, au cours de la période 2001:tr1-2016:tr4, est la règle
Contemporaine avec lissage du taux d’intérêt. Néanmoins, tenant compte des résultats
satisfaisants obtenus, la règle forward-looking avec lissage est également retenue. L’atout
majeur de cette spécification de fonction réaction est d’intégrer la théorie des anticipations
rationnelles dans le timing des variables en considérant notamment l’inflation anticipée.

Page | 25
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Graphique n°4. Evolution du taux directeur, taux de Taylor règle Contemporaine et taux de
Taylor modèle Forward-looking

Source : Elaboré par l’auteur à partir du logiciel Eviews 8.

V. IMPLICATIONS DE POLITIQUE MONETAIRE

Les résultats obtenus dans la section précédente permettent de tirer les conclusions ci-après
sur la conduite de la politique monétaire en RDC au cours de la période :

 La règle de Taylor Contemporaine et Forward-looking constituent une très bonne


description, pour la première, et possible prédiction, pour la deuxième, du
comportement de la politique monétaire en RDC impliquant ainsi que les anticipations
des agents ont été prospectives (anticipations rationnelles) et non rétrospectives
(anticipations adaptatives) au cours de la période ;

 Les autorités monétaires ajustent le taux directeur en tenant compte principalement


des variations de l’inflation, l’écart de production n’ayant pas un impact significatif
dans les décisions de modification du taux d’intérêt directeur. Cela s’explique
notamment par les faiblesses du canal du taux d’intérêt dans le mécanisme de
transmission de la politique monétaire en RDC du fait de l’inexistence, d’une part,
d’un marché financier et, d’autre part, de la forte dollarisation de l’économie. En effet,
il se dégage donc que l'instrument le taux d’intérêt directeur influence le taux du
marché interbancaire et le taux sur le Bon BCC, mais qu’il n’a pas d’impact
significatif sur le taux des crédits et des dépôts bancaires dont plus de 80% du volume
est en devises ;
 La pratique de la politique de lissage du taux d’intérêt n’a pas été confirmée pour le
cas de la BCC. En effet, dans une économie dépendante de l’extérieur et donc
vulnérable aux chocs exogènes, la forte fréquence des fluctuations conjoncturelles
nécessitent la flexibilité des politiques économiques dans la régulation de l’activité.

Page | 26
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Cela s’observe notamment par la forte volatilité du taux directeur au cours de période
(écart-type = 34,15) qui a du répondre aux fortes fluctuations de l’inflation (Ecart-
type = 105) ;

 Le principe de Taylor a globalement été respecté permettant une réponse plus que
proportionnelle du taux directeur face à l’inflation grâce au maintien du principe de
flexibilité et de positivité du taux d’intérêt réel. La politique monétaire, au cours de la
période, a été non accommodante à l’inflation, la variation de l’inflation étant plus que
compenser par la variation du taux d’intérêt réel. Cependant, depuis fin 2016, le
maintien de la marge de positivité du taux directeur par rapport à l’inflation n’est plus
respecté, le taux d’intérêt réel étant devenu négatif.

Quel rôle à la règle de Taylor en RDC ?

L’objectif principal de la règle de Taylor est de définir une ligne de conduite qui décrit le
comportement des autorités monétaires. Elle se veut à la fois une description approximative
de la politique réellement suivie et une prescription normative pour les autorités monétaires.
Taylor reconnait que sa une règle ne doit pas forcément faire l'objet d'une application
rigoureuse ; elle peut être prise comme une sorte de guide ou de référence qui permet à la
Banque centrale de s'expliquer sur des écarts à la règle.

Le graphique ci-dessous présente, pour le cas de la BCC, l’évolution de des écarts entre le
taux directeur et le taux obtenu par l’estimation de la règle de Taylor4 :

Graphique n°5. Evolution des écarts à la règle de Taylor estimée

Source : Elaboré par l’auteur.

L’évolution de l’écart montre plusieurs périodes de fortes déviations de la règle marquées


globalement par des écarts négatifs (dont le creux 23,1 points de différence au denier trimestre
2016) impliquant que le taux directeur a le plus souvent réagi moins que proportionnellement
à ce que celui qu’aurait prédit la règle. Le pic des écarts positifs est atteint au premier

4
Il s’agit de la règle Contemporaine avec lissage du taux d’intérêt.

Page | 27
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

trimestre 2005 (36,7 points de différence) impliquant que le taux directeur à réagit plus que
proportionnellement à celui qu’aurait prédit la règle.

Le point critique pour l’analyse de politique monétaire, dont l’objectif ultime est la stabilité
des prix, est la valeur du coefficient attaché à l’inflation. Le principe de Taylor requiert une
variation plus que proportionnelle du taux d’intérêt face à l’inflation dans le but de stabiliser
l’économie et d’éviter ainsi d’amplifier l’évolution cyclique. Dans le cas, de la BCC le
principe de Taylor est reconnu sous le nom de principe de flexibilité et de positivité du taux
d’intérêt réel. En effet, la BCC s’est engagée à préserver une marge de positivité entre le taux
directeur et le taux d’inflation. Cependant, depuis 2016, le taux d’intérêt réel est devenu
négatif impliquant que le taux d’intérêt réel n’a pas augmenté suffisamment pour
contrebalancer la variation de l’inflation. Cela est attesté par l’ampleur important de l’écart à
la règle au dernier trimestre 2016 (-23,1) impliquant que le taux directeur n’a pas augmenter
suffisamment pour compasser la variation de l’inflation contrairement à ce qu’aurait prédit la
règle.

Or, dans un contexte de forte tensions inflationniste et d’accélération de la dépréciation


monétaire, il est impérieux pour la stabilisation de l’économie d’user efficacement de tous les
instruments de politique monétaire dans la régulation de la liquidité. En effet, Le taux
directeur correspond au taux plafond de rémunération des Bons BCC utilisés comme
instrument de régulation de la liquidité en élargissant les fourchettes d’appel d’offre en
période de tensions inflationnistes afin de réduire l’offre de monnaie. Un taux d’intérêt réel
négatif aurait un impact négatif sur l'efficacité des Bons BCC les rendant moins attractifs à
cause de la baisse du rendement rendant ainsi difficile le recours à cet instrument afin de
ponctionner la liquidité. L’effet d’un rendement négatif des Bons BCC impliquerait, toutes
choses égales par ailleurs la baisse des encours de ces titres.

Graphique n°6. Evolution Encours Bons BCC5 (en milliards de CDF) de décembre 2015 à
avril 20176

Source : L’auteur à partir des statistiques de la BCC

5
Fin période.
6
Les données pour 2017 correspondent respectivement au volume des encours BBcc respectivement au 25
janvier, 22 février, 15 mars et 22 avril.

Page | 28
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

Le graphique ci-dessus démontre la chute drastique du volume des encours Bons BCC depuis
début de l’année 2016, 83 milliards en février, jusqu’à atteindre un volume de 3,54 milliards
de CDF le 22 avril 2017. Un résultat paradoxal dans le contexte actuel impliquant que la
Banque Centrale du Congo effectue plus de remboursements (injection de la liquidité) que de
ventes des ces titres (ponction de la liquidité).

Conclusion et Remarques
Au regard de l'objet de l’étude, la question principale consistait à savoir si le comportement de
la Banque Centrale du Congo en matière de conduite de la politique monétaire été favorable à
l’obtention et au maintien de la stabilité des prix et de la préservation de la croissance de
l’activité économique. Pour ce faire, le comportement du taux d’intérêt directeur a été analysé
sur base du guide de référence théorique qu’est la règle de Taylor dans la définition des
fonctions de réaction de la politique monétaire face aux variables réelles. Le but étant, d’une
part, à tracer un cadre rétrospective de l’évolution des ajustements du taux d’intérêt directeur
et, d’autre part, de montrer la pertinence de l’opérationnalisation d’une règle monétaire
activiste, du type Taylor, dans conduite de la politique monétaire.

La démarche suivie a été l’estimation de l’équation de la règle Taylor pour le cas de


l’économie congolaise au cours de la période 2001-2016. Trois types de spécifications de
fonction de réaction de type Taylor ont été testé : Une règle Contemporaine, une règle
Backward-Looking (les anticipations des agents sont adaptives) et une règle Forward-
Looking. (Les anticipations des agents sont tournées vers l’avenir). Toutes les estimations ont
été effectuées par la Méthode des Moments Généralisés dont le choix à été motivé sa
robustesse et son utilisation dans la majorité des études ayant porté sur ce sujet.

Le modèle Contemporain et Forward-looking intégrant le lissage du taux d’intérêt décrivent le


mieux l’évolution du taux d’intérêt directeur au cours de la période, le modèle Backward-
Looking n’ayant pas fourni des résultats satisfaisants dans la modélisation de la fonction de
réaction. Il s’ensuit que les anticipations des agents privés sont tournées vers l’avenir. En
outre, la prise en compte du comportement de lissage du taux d’intérêt améliore très
nettement le pouvoir explicatif des modèles estimés mais l’hypothèse de l’adoption d’une
politique d’ajustement partiel du taux d’intérêt par la Banque Centrale du Congo n’a pas été
vérifiée.

Les résultats montrent que la politique monétaire menée par la Banque Centrale du Congo, au
cours de la période d’étude, a été d’essence contra-cyclique et, dans ce cadre, non
accommodante à l’inflation. En outre, l’activité ne s’est pas avérée joué un rôle significatif
dans les décisions de modification du taux directeur confortant la stabilité des prix comme
objectif ultime de la politique monétaire. Ce fait est également attesté par Ngonga (2015) qui
soulignent que lors de l'épisode de récession au second semestre 2009, la politique monétaire
en RDC a fait face un dilemme : « augmenter le taux d'intérêt pour lutter contre l'inflation ou
le baisser pour relancer la production ». Elle a opté pour la première action. En effet, dans une
économie peu diversifiée et peu industrialisée où la croissance est tirée, pour l'essentiel, par la
demande internationale, cette option s'est justifiée et a permis de favoriser, une année après la
croissance sur fonds de baisse drastique de l'inflation. Ceci souligne le caractère particulier de

Page | 29
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

certaines économies en développement comme la RDC où les phases de récession sont


marquées par la baisse du produit global accompagné des hausses du niveau général et des
prix. D’où la nécessité, de lutter premièrement contre l’inflation, condition nécessaire, pour
que reparte la croissance de l’activité.

Cependant, l’érosion de la positivité du taux d’intérêt réel depuis 2016 constitue une
contrainte supplémentaire à l’efficacité du dispositif instrumental de politique monétaire,
notamment les Bons BCC, dans la régulation de la liquidité. En effet, dans un contexte
d’accélération de la dépréciation monétaire et de forte tension inflationniste, il est impérieux
d’agir de manière efficace sur les facteurs intentionnelles de la liquidité. Or, la baisse du
rendement sur le Bons Bcc impacte négativement le volume des encours et rend difficile la
ponction de la liquidité via la vente de ces titres.

C’est ici que se révèle la pertinence d’une règle de taux d’intérêt tel que la règle de Taylor
permettant d’orienter le sens et l’ampleur des ajustements du taux d’intérêt de référence. Le
but étant d’avoir une réponse de l’instrument de référence en adéquation à l’évolution
conjoncturelle afin de maintenir dans la durée les phases d’expansion et d’accélérer la sortie
des phases de récession. Des mesures de politique économique sont a envisagé à la fois au
niveau de la politique budgétaire dans la gestion du solde budgétaire et de la politique
monétaire, notamment dans la dedollarisation de l’économie.

En guise d'enseignements, il importe de retenir les effets positifs tenant à la contra-cyclicité


de la politique du taux d’intérêt directeur en République Démocratique du Congo dans le
cadre de la conduite de la politique monétaire au cours des seize dernières années. Il s’est
observé une réduction progressive de la variabilité de l’inflation corolairement à celle de la
croissance de l’activité et du système financier. En effet, la prise en compte du principe de
Taylor dans la révision du taux directeur, même si elle est encore non systématisée, a permis
de rationaliser les décisions y relatives dans la réaction aux fluctuations économiques.

Comme propositions, la politique monétaire doit continuer à reposer sur le principe de


positivité et de flexibilité des taux d’intérêts réels de l’institut d’émission afin de maintenir
son action contra-cyclique. Par ailleurs, il est impérieux d’améliorer l’efficacité du canal du
taux d’intérêt dans la transmission des impulsions de la politique monétaire à l’économie dans
le cadre de la régulation conjoncturelle. Cela passe notamment par des mesures de
dedollarisation permettant d’améliorer l’efficacité de la politique monétaire en contribuant à
réduire le spread du taux d’intérêt entre le taux d’intérêt directeur et les taux débiteurs des
banques commerciales.

En outre, l’efficacité dans la régulation conjoncturelle implique la connaissance, en temps


réel, par les autorités monétaires de la phase cyclique dans laquelle se trouve l’économie afin
de formuler et mettre en œuvre des politiques économiques idoines. A cet effet, il est crucial
de systématiser et de rendre disponible la mesure du potentiel de production et le
positionnement de la production effective par rapport à son potentiel, c'est-à-dire l'écart de
production. Cet indicateur du cycle de production permet aussi de séparer, au niveau macro-
économique, les influences transitoires de court terme (l'équilibre des forces entre l'offre et la

Page | 30
La règle de Taylor : quel rôle dans la conduite de la politique monétaire en RDC ?

demande, d‘un coté, et l’apparition des tensions inflationnistes, de l’autre) des situations
structurelles et de mettre en évidence la formation éventuelle de déséquilibres sous-jacents.

En termes de perspectives de recherche, ce travail peut être étendu en étudiant d’autres


spécifications de fonction de réaction de Type-Taylor tenant compte des arguments clés
supplémentaires, comme variables explicatives, sensés avoir une influence sur la prise des
décisions des autorités monétaires congolaises lors de la fixation du taux d’intérêt de
référence. Les variables les plus évidentes sont notamment les agrégats monétaires
(constituant l’objectif intermédiaire de la politique monétaire) et le taux de change (étant
donné l’influence du canal monnaie – change – prix – activité et la forte dollarisation de
l’économe congolaise). Mais aussi, les mutations de la politique monétaire conduisent à
considérer l’objectif de stabilité financière qui peut être saisi par les réactions du taux
d’intérêt de référence face aux fluctuations des indicateurs tels que les taux d’intérêts
bancaires, les prix des actifs financiers, le crédit à l’économie, le cours des matières
premières, etc. Ces améliorations à la règle permettront de rendre opérationnel une règle
monétaire activiste à la Taylor servant de guide aux ajustements du taux d’intérêt de référence
par la Banque Centrale du Congo.

Page | 31

Vous aimerez peut-être aussi